et a Dee Nr SANS pos re SAUT TU, 47 dire) D er ares à LS RE HAE PAUL DA en à M a! & ie SRE % DAT Sara? mes ve à ee ape à Ar a Ve nr. D à vs " S ÉstraaT am som = 54 22 SEeTe HEVIAII 1268 PÉASÉ TEA ’à SIL ie REX pie lt de Les PRES Ù SES = PR EN ER ÿ SRE RE RS ES Es D D EE opens Æx Libres SIR WILLIAM CROOKES, D.Sc. FRS. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES TOME TROISIÈME REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES PAR AISSANAMER 15 ET LE 3801:DF CHAQUE MOIS Direcreur : Louis OLIVIER, Docrevr às Scaexces TOME TROISIÈME 1892 AVEC 277 FIGURES ORIGINALES DANS LE TEXTE Æ TT RE ——— Ù nn Ù << PARIS Georges CARRÉ, Éditeur 58, RUE SAINT-ANDRÉ-DES-ARTS. 58 1892 3° ANNÉE N° 1 15 JANVIER 1892 REVUE GÉNÉRALE DE: SCIENCE PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER a LE SUPPLÉMENT DE ZA REVUE Au moment où lu Revue entre dans. sa troisième année, qu'il lui soit permis d'exprimer sa profonde recon- naissance à ses éminents collaborateurs, en particulier aux membres de V Académie des Sciences qui l'ont hono- rée de leur concours et de leur appui. Grâce à eux, elle a traversé sans encombre cette pé- riode critique du début, contre laquelle ses meilleurs amis avaient eu soin de la metlre en garde. Elle essaïera de leur témoigner sagratilude en donnant, dès aujourd'hui, à tous ses numéros un surcroît d'inté- rêt. Chacun d'eux sera accompagné d'un Supplément de huit colonnes. ; Les savants se plaignent de ne point trouver facile- ment les indications bibliographiques relatives aux re- cherches qui les occupent : La Revue espère leur venir en aide en publiant, d'une fagon régulière et systé- malique, immédiatement apres l'apparition des princi- pauxz journaux scientifiques du monde entier, la liste complète des Mémoires qu'ils. contiennent. Cing ou six colonnes du Supplément, imprimées en tout petit texte, seront consacrées à cette indication. Pour la commodité des recherches, nous avons provi= soirement adopté la classification suivante : 1° Mathématiques pures et appliquées Dans ce groupe seront d’abord cités les recueils traitant de mathématiques pures, puis ceux qui se rapportent aux applications, à la physique mathé- matique et à l'astronomie : ACTA MATHEMATICA. ANNALES DE L'ÉCOLE NORMALE SUPÉRIEURE. JOURNAL DE L'ÉCOLE POLYTEGLNIQUE. REVUE GÉNÉRALE, 1892, BULLETIN DES SCIENCES MATHEMATIQUES. NOUVELLES ANNALES DE MATHÉMATIQUES. JOURNAL DES MATHÉMATIQUES PURES ET APPLIQUÉES. MATuESIs, AMERICAN JOURNAL OF MATHEMATICS. Renpiconpr DEL CIRCOLO MATEMATICO DI1 PALERMO. MATHEMATISCHE ANNALEN. JOURNAL FÜR DIE REINE UND ANGEWANDTE MATu&- MATIK, MONAYSHEFTE FüR MATHEMATIK UND PuysiK. BULLETIN ASTRONOMIQUE. CIEL ET TERRE. THE OBSERVATORY. Monruzy NoïTicEs OF SOCIETY. THE ASTRONOMICAL JOURNAL. Tune SIbERAL MESSENGER. SCIENCE OBSERVER. PUBLICATIONS OF THE ASTRONOMICAL SOCIETY OF TUE TUE ROYAL ASTRONOMICAL PaAcrric, HimmMez uND ERpe. ASTRONOMISCUE NACHRICHTEN. ASTRONOMISCHE MITTHEILUNGEN. VIERTEL JAHRSCHRIFT DER ASTRONOMISCHE GESELLS- CHAFT, 2 Art de l’Ingénieur Ce groupe comprend la mécanique appliquée, les industries mécaniques, la construction, le génie civil, militaire et naval, les travaux publics, l'art des mines et l’industrie minière. Le GÉNIE CIVIL. ANNALES DES TRAVAUX PUBLICS. 2) LE SUPPLÉMENT DE ZA REVUE ANNALES INDUSTRIELLES. L'INDUSTRIE FRANÇAISE. REVUE GÉNÉRALE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE. ANNALES DES SCIENCES INDUSTRIELLES DE LYON. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ INDUSTRIELLE DE Mur- HOUSE. BULLETIN DE L'ASSOCIATION DES INGÉNIEURS SORTIS DE L'ÉCOLE DE LIÈGE. REVUE DU GÉNIE MILITAIRE. ENGINEERING. CIviL INGINEER. REVUE PRATIQUE DES TRAVAUX PUBLICS. Revue Des Ponts eT CHAUSSÉES ET DES Mines. JourNAL DES MINES. NOUVELLES ANNALES DE LA CONSTRUCTION. REVUE UNIVERSELLE DES MINES ET DE LA MÉTAL- LURGIE. ANNALES DES MINES. REVUE MÉTALLURGIQUE. TRANSACTIONS OF THE AMERICAN SOCIETY OF CIVIL ENGINEERS. 3° Physique et Chimie Sous cette rubrique seront successivement cités les recueils : 4° de Physique ; 2 de Physique et de Chimie; 3° de Chimie. JOURNAL DE PHYSIQUE. LA LUMIÈRE ÉLECTRIQUE. L'ÉLECTRICITÉ. L'ÉLECTRICIEN. L’INDUSTRIE ÉLECTRIQUE. Tue PuicosopnicAaz MAGAZINE AND JOURNAL OF SCIENCE. JOURNAL DE LA SOCIÉTÉ DES SPECTROSCOPISTES ITA- LIENS. ZELTSCHRIFT FUR ELEKTROTECHNICK. ANNALES DE CHIMIE ET DE PHYSIQUE. ZEITSCHRIFT FÜR INSTRUMENTENKUNDE. ANNALEN DER Puysix UND CHEMIE (Wiedemann). JOURNAL DE LA SOCIÉTÉ PHYSICO-CHIMIQUE RUSSE. JOURNAL DE PRARMACIE ET DE CHIMIE. REVUE DE CHIMIE INDUSTRIELLE. RECUEIL DES TRAVAUX CHIMIQUES DES Pays-Bas. Taxe CnemicAL NEWS. THE ANALYSE. GAZETTA CHIMICA ÎTALIANA. MONATSHEFTE FÜR CHEMIE. ZE1TSCHRIFT FüR PHYSIKALISCHE CHEMIE. ZEITSCHRIFT FüR PHYSIOLOGISCHE CHEMIE. BERICHTE DER DEUTSCHEN CHEMISCHEN GESELLS- CHAFT. LieB1G'S ANNALEN DER CHEMIE UND PHARMACIE. ARCHIV DER PHARMACIE. PHARMACEUTISCHE ZEITSCHRIFT FüR RUSSLAND. ZEITSCHRIFT FÜR ANALYTISCHE CHEMIE. JOURNAL FüR PRAKTISCHE CHEMIE. ZETSCHRIFT Für KRISTALLOGRAPHIE UND MINERA- LOGIE. 4° Botanique, Zoologie et Anthropologie. On trouvera dans cette section d’abord les pério- diques généraux d'histoire naturelle, puis les jour- naux spécialement consacrés à chacune des sciences suivantes : botanique, zoologie anthro- pologie ethnographie : THE ANNALS AND MAGAZINE OF NATURAL HISTORY. THE AMERICAN NATURALIST. ARCHIV FüR NATURGESCHICHTE. BULLETIN SCIENTIFIQUE DU NORD DE LA FRANCE ET DE LA BELGIQUE. ANNALES DES SCIENCES NATURELLES (Botanique). JOURNAL DE BOTANIQUE. ANNALES AGRONOMIQUES. ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ANNALES DU JARDIN BOTANIQUE DE BUITENZORG. Tue JOURNAL OF BOTANY. ANNALS OF BOTANY. NuUovo GIORNALE BOTANICO ITALIANO. MALPIGHIA. BOTANISCHE ZELTUNG. BOTANISCHES CENTRALBLATT. FLORA. JAHRBUCHER FUR WISSENSCHAFTLICHE BOTANIK. ANNALES DES SCIENCES NATURELLES (Zoologie). ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE ET GÉNÉ- RALE, JOURNAL DE CONCHYLIOLOGIE. Te Z00L0G18T. MEMOIRS OF THE MUSEUM OF COMPARATIVE ZO0OLOGY AT HARWARD COLLEGE. UNITED STATES COMMISSION OF Fist AN FIsne- RIES. PROCEEDINGS OF JOURNAL OF THE ASIATIC SOCIETY OF BENGAL. LinneAN Socrery or New SourH-WALLES, MONITORE ZO0LOGICO ITALIANO. ZOOLOGISCHER ANZEIGER. ZLEITSCHRIFT FUR WISSENSCHAFTLISCHE ZOOLOGIE. ANNALEN DER K. K. NATURHISTORISCHEN Hor-Mu- SEUMS. ARBEITEN AUS DEM ZOOLOGISCHEN INSTITUTE DER UN1- VERSITAT VIEN UND DER ZOOLOGISCHEN STATION IN TRIEST. REVUE MENSUELLE DE L'ÉCOLE D’ANTROPOLOGIE. L’ANTHROPOLOGIE. THE JOURNAL OF ANTHROPOLOGICAL INTITUTE OF GR. BRITAIN AND ÎRELAND. ARCHIVIO PER L'ANTROPOLOGIA E LA ETHNOLOGIA. INTERNATIONALES ARCHIV FUR ETHNOGRAPHIE. ARCHIV FUR ANTHROPOLOGIE. ZEITSCHRIFT FUR ETHNOLOGIE. LE SUPPLÉMENT DE ZA REVUE 3 5° Paléontologie et Géologie. Ce groupe renferme la paléontologie (humaine, animale et végétale), la géologie générale et stra- tigraphique, l'hydrologie et la pétrologie : PALAEONTOGRAPHICA. PALAEONTOLOGISCHE ABHANDLUNGEN KAYSER). BEITRAGE ZUR PALAEONTOLOGIE OESTERREICH, UN- GARMS UND DES ORIENTS. (Moysisovics unn NeEu- MAYR). ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES. BULLETIN DES SERVICES DE LA CARTE GÉOLOGIQUE DE FRANCE ET DES TOPOGRAPHIES SOUTERRAINES. BULLETIN DU COMITÉ GÉOLOGIQUE DE SAINT-PÉTERS- BOURG. TnE GEOLOGICAL MAGAZINE. TnE AMERICAN (GEOLOGIST. GEOLOGICAL AND NATURAL HISTORY, SURVEY OF CANADA. THE QUARTERLY JOURNAL OF THE GEOLOGICAL S0- CIETY OF LONDON. NEUES JAHRBUCH FUR MINERALOGIE, GEOLOGIE UND PALAEONTOLOGIE. ZEITSCHRIFT DER DEUTSCHEN SELLSCHAFT. (DAMES UND GEOLOGISCHEN GE- G° Anatomie et Physiologie Une place ayant été faite ci-dessus à la Zoo- logie, l'Anatomie dont il sera question ici concer- nera surtout l'espèce humaine. Après quoi seront cités les recueils relatifs à la fois à l’Anatomie et à la Physiologie, enfin les journaux spécialement consacrés à la Physiologie expérimentale ou com- parée des Animaux et de l'Homme : JOURNAL-0F MORPHOLOGY. ANATOMISCHER ANZEIGER. MORPHOLOGISCHES JAHRBUCH. JOURNAL DE L'ANATOMIE ET DE LA PHYSIOLOGIE. JOURNAL INTERNATIONAL MENSUEL D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE. Tue JOURNAL OF ANATOMY AND PHYSIOLOGIE. ARCHIV FüR ANATOMIE UND PHYSIOLOGY. ARCHIV FÜR PATHOLOGISCHE ANATOMIE UND PHYSI0- LOGIE. ARCHIVES DE PHYSIOLOGIE. ARCHIVES DE BIOLOGIE. ARCHIVES ITALIENNES DE BIOLOGIE. THE JOURNAL OF PHYsioLOGy. BIOLOGISCHES CENTRALBLATT, SKANDINAVISCHES ARCHIV FÜR PHYSIOLOGIE. CENTRALBLATT FÜR PHYSIOLOGIE. ARCHIV FÜR GESAMMTE PHYSIOLOGIE. ZEITSCHRIFT FÜR BIOLOGIE. 7° Micrographie et Bactériologie Ces sciences sont l’objet de travaux publiés dans des recueils de sciences diverses (Voir ci- dessus et ci-dessous.) Seuls, les journaux traitant exclusivement de Micrographie et de Bactériologie seront cités en cette section : ANNALES DE MICROGRAPHIE. JOURNAL DE MICROGRAPHIE. LA CELLULE. ANNALES DE LA SOCIÉTÉ BELGE DE MICROSCOPIE. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ BELGE DE MICROSCOPIE. THE QUARTERLY JOURNAL OF MICROSCOPICAL SCIENCE. JOURNAL OF THE ROYAL MICROSCOPICAL SOCIETY. JOURNAL OF MICROSCOPY AND NATURAL SCIENCE. THE AMERICAN MONTHLY MICROSCOPICAL JOURNAL. ZEITSCHRIFT FÜR WISSENSCHAFTLICHE MIKROSKOPIE UND FüR MIKROSKOPISCHE TECHNIK. ARCHIV FüR MIKROSKOPISCHE ANATOMIE. ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR. COMPTE RENDU DES TRAVAUX DU LABORATOIRE DE CARLSBERG. CENTRALBLATT FüR BACTERIOLOGIE UND PARASITEN- KUNDE. S° Sciences médicales À ces sciences sont affectés une multitude de périodiques. Ne pouvant songer à les citer tous, nous choisissons ceux qui nous paraissent le plus intéresser nos lecteurs. L'Hygiène sera mentionnée à la fin : ARCHIVES DE MÉDECINE EXPERIMENTALE ET D ANA- TOMIE PATHOLOGIQUE. ARCHIVES DE NEUROLOGIE. REVUE DE MEDECINE. REVUE DE CHIRURGIE. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES MÉDICALES. ARCHIVES GÉNÉRALES DE MÉDECINE. JOURNAL DE MÉDECINE ET DE CHIRURGIE PRATI- QUES. LA MÉDECINE MODERNE. LA GAZETTE MÉDICALE. BULLETIN MÉDICAL DE L'ALGÉRIE. THE LANCET. THE AMERICAN JOURNAL OF MEDICAL SCIENCES. Lo SPERIMENTALE. ARCHIVIO PER LE SCIENZE MEDICHE. BEITRAGE ZUR PATHOLOGISCHEN ANATOMIE UND ZUR ALLGEMEINE PATHOLOGIE. CENTRALBLATT FüR ALLGEMEINE PATHOLOGIE UND ANTHROPOLOGISCHE ANATOMIE. DEUTSCHE MEDICINISCHE WOCHENSCHRIFT. BERLINER KLINISCHE WOCHENSCHRIFT. ARCHIV FÜR EXPERIM. PHATOLOGIE UND PHARMAKO- LOGIE. 4 LE SUPPLÉMENT DE LA REVUE MüNCHENER MEDICINISCHE WOCHENSCHRIFT. ForTSCHRITTE DER MEDIGIN. CENTRALBLATT FÜR KLINISCHE MEDICIN. NEUROLOGISCHES CENTRALBLATT. ANNALES D'HYGIÈNE PUBLIQUE. REVUE D'HYGIÈNE ET DE POLICE SANITAIRE. Revurs D'HYGIÈNE ET DE MÉDECINE LÉGALE. RIVISTA INTERNATIONALE D'IGIENE. INGIGNERIA SANIFARIA. HyGreniscue RUNDSCHAU. ARCHIV FüR HYGIENE. ZEITSCHRIFT FÜR HYGIENE UND INFECTIONS KRANK- HEITEN. GESUNDTHEITE INGENIER. ARBEITEN AUS DEM KAISERLICHEN GESUNDHEITSAMTE. 9° Recueils de Sciences diverses. Sous cette rubrique prendront place plusieurs journaux tels que les suivants qui, traitant de diverses sciences, ne rentrent dans aucune des sections précédentes : JOURNAL DES SAVANTS. REVUE PHILOSOPHIQUE. ANNALES DE LA FACULTÉ SEILLE. ANNALES DE LA FACULTÉ DES SCIENCES DE GRE- NOBLE. ARCHIVES DES SCIENCES PHYSIQUES ET .NATURELLES. ANNALES DE L'ÉCOLE POLYTECHNIQUE DE DELFT. ARCHIVES NÉERLANDAISES DES SCIENCES EXACTES ET NATURELLES. LA NATURE. Cosmos. TRANSACTIONS OF THE LABORATORY CLUB. THE AMERICAN JOURNAL OF SCIENCES. JOURNAL AND PROCEEDINGS OF THE ROYAL SOCIETY or NEwW-SOUTH- WALLES. JOURNAL OF THE COLLEGE OF SCIENCE IMPER. UNI- VERSITY OF Tokro (JAPON). NATURE (de Londres). CRONICA SCIENTIFICA. DES SCIENCES DE MaR- En chacune de ces sections et dans chaque sub- division de chacune d'elles seront cités en pre- mier lieu les recueils de science française, en second lieu les périodiques publiés dans les lan- gues étrangères. Pour se servirde cette longue liste de sommaires, il importe de remarquer qu'un même sujet est quelquefois traité dans des recueils classés, d’a- près leurs titres et leurs articles habituels, sous des rubriques différentes. C’est ainsi que le physi- cien devra consulter les sommaires non seulement dans la section de physique et chimie, mais aussi dans celle des mathématiques pures et appliquées où place est faile à la physique mathématique. De même, le bactériologiste trouvera dans les sections intitulées Anatomie et Physiologie, Microscopie et Bac- tériologie, Sciences médicales les indications qui lui sont utiles, elc., etc. Nous avons confiance que ces sommaires ren- dront service aux savants, et nous nous applique- rons continuellement à améliorer cette importante partie de notre Supplément. Les journaux qui viennent d’être énumérés sont de périodicilés diverses : bi-hebdomaires, hebdo- madaires, bi-mensuels, mensuels, paraissant tous les deux mois, tous les trois mois, ou bien une ou deux fois par an. Le lecteur ne sera donc pas sur- pris de ne trouver cités en chacun de nos numéros que le liers des périodiques ci-dessus mentionnés. Appelons aussi, pour prévenir toute critique injus- tifiée, l'attention sur ce fait que beaucoup de jour- naux portent une date notablement antérieure à celle de leur publication réelle. La Revue se fera un devoir de citer les sommaires dès que les journaux au- ront paru. Elle s’est attaché dans ce but des colla- borateurs chargés de traduire, chacun dans sa spécialité, les titres des mémoires immédiatement après réception. Une autre partie, moins développée,comprendra: 1° Les Nouvelles de la Science et de l'Enseignement; 2 Un service de renseignements destinés à ceux de nos abonnés qui recourent à la Revue pour obtenir de nos divers collaborateurs des ré- ponses à des questions d’ordre scientifique ; 3° La description des inventions nouvelles qui intéressent le savant : appareils et procédés techniques de laboratoire, modes de préparation des corps nouveaux, etc.; 4° L'indication des questions scientifiques dont nos grands établissements publics ou notre industrie nationale demandent la solution. Nous espérons que ces innovations seront appré- ciées des lecteurs. Louis Olivier. M. BERTRAND. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE NOS CONNAISSANCES OROGÉNIQUES p) LES RÉCENTS PROGRÈS DE NOS CONNAISSANCES OROGÉNIQUES Le problème de la formation des montagnes, parmi tous ceux que soulève la géologie, est un de ceux qui par leur nature même sont le plus propres à éveiller la curiosité ; c'est même, après ceux qui se rapportent à l’étude des êlres vivants et à l'évo- lution des faunes, le problème capital de la géo- logie. La connaissance des chaines de montagnes et de leur élévation successive permet seule, en effet, de coordonner les traits complexes de l'his- toire de la Terre dans ses différentes périodes, de grouper les phénomènes et de reconstituer les grandes lignes des géographies anciennes. Les trois grandes œuvres qui, dans ce siècle, marquent en quelque sorte les étapes des progrès réalisés par la série incessante des observations, sont des essais sur les systèmes de montagnes, auxquels resteront associés les noms de L. de Buch, d'Elie de Beaumontet de M. Suess. Le problème est double en réalité ; il comprend d’une part la distribution des chaines aux diffé- rentes périodes et la structure de ces chaines. Cette dernière est-elle Loujours la mème ou laisse- t-elle du moins reconnaitre des lois générales el uniformes ? Et ces lois permettent-elles de se faire une idée des forces mises en jeu, de leur puissance et de leur direction? Ces deux côtés du problème, le côté géographique et le côté mécanique, ne peuvent se séparer sur le terrain et doivent s'étu- dier ensemble; mais on peut les traiter successi- vement, et essayer de montrer quels sont les pro- grès réalisés à ce double point de vue dans ces dernières années. Î. — DISTRIBUTION DES CHAÎNES DE MONTAGNES La distribution et le goupement des chaines de montagnes peuvent sembler d’abord une question bien simple, que les atlas suflisent à résoudre, Mais la question ne prend de sens précis et de véritable portée que si la chaine de montagnes peut être définie avec quelque rigueur. Le topo- graphe cherchera cette définition dans les carac- tères du relief; le géologue est nécessairement amené à la chercher dans les caractères plus pro- fonds de la structure interne. Les montagnes son des zones plissées de l'écorce terrestre ; comme ce sont ces plissements que l’on veut étudier, ce sont eux qu'on prendra pour élément de définition. La chaine peut être pius ou moins dénudée, elle peut mème être rasée au niveau de la plaine ; le noyau restant présente les mêmes caractères de structure; il permet de retrouver la trace des plissements qui ont créé les reliefs disparus, et par conséquent, en REVLE GÉNERALE DES SCIENCES, 1S92. dépit de la contradiction des termes avec le lan- gage usuel, le géologue continue à parler de chaine de montagnes quand, en réalité, il n'existe plus qu’une chaîne de plissements. Quant aux caractères qui constituent l'unité d'une chaine de plissements, un seul, à priori, doit d’abord entrer en ligne de compte : c’est la conti- nuité. Une chaine est composée d'une série de plis parallèles, au moins dans leur allure générale : aucun de ces plis n’a une extension indéfinie, mais à mesure que l’un d'eux s’abaisse et se termine, d'autres prennent naissance dans le voisinage, et de même que l’ensemble des chainons constitue la chaine au sens topographique, l’ensemble de ces plis constitue la chaine au sens géologique. Tant que ces plis suivent une même direction, ou du moins se coordonnent autour d’une même ligne directrice, il n'y a pas de difficulté ; il en est ainsi pour les Alpes, considérées des Alpes-Mari- times jusqu'au Tyrol, Mais à partir du Tyrol, la chaîne jusque-là compacte et massive, s'ouvre en un large éventail, el se divise en deux branches, dont l’une se dirige vers les Carpathes et dont l’autre descend le long de l'Adriatique. Ces deux branches se rattachent l’une et l'autre à la même chaine ; comme elles sont devenues pourtant bien distinctes, avec des lignes directrices en apparence tout à fait indépendantes, ce sera affaire de défi- nition d’en faire deux nouvelles chaines, ou au contraire, en se fondant sur la continuité, de les considérer toutes deux comme appartenant au premier système, au système des Alpes. On pour- rait mème partir de là pour considérer les Alpes bavaroises et suisses comme formées par la juxta- position momentanée de deux chaïnes différentes. Au fond, d’ailleurs, ce ne seraient là que des que- relles de mots ; il faut en tout cas chercher à suivre la continuité de chacune des deux zones au delà des Carpathes et des Alpes illyriennes, savoir si elles cessent ou comment elles se prolongent. Grâce à M. Suess, nous savons aujourd'hui qu'elles se continuent jusqu'à l'extrémité de l'Asie, qu'elles ne divergent pas indéfiniment, mais viennent de nouveau se réunir une première fois au pied du Caucase et une seconde fois dans l'Himalaya; nous pouvons même aller plus loin, et, quoique avec une part un peu plus grande d’hypothèse, les suivre le long de la côte birmane et des iles de la Sonde, presque sur les bords de l’océan Pacifique. Cette continuité d'un système de plissements d'une extrémité à l’autre du vieux continent, depuis l’ouest de l’Europe jusqu'à l'est de l'Asie, est en 6 M. BERTRAND. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE NOS CONNAISSANCES OROGÉNIQUES elle-même un fait remarquable; mais il faut encore chercher si la continuité n'est pas seulement dans les lignes et dans les directions, si elle n’est pas seulement superficielle ; il quelle mesure la chaîne continue est due à un mème phénomène, à un même événement géolo- gique. Or, dans cette zone, tous les terrains sont plissés jusqu'aux terrains terliaires inclusivement; en dehors de cette zone, les terrains secondaires et terliaires n’ont subi de plissements qu’exception- nellement et sans importance. C’est donc dans cette zone que se sont concentrés les mouvements orogéniques des deux dernières grandes périodes de l’histoire de la terre, de la période secondaire et de la période tertiaire. Si l’on veut aller plus loin, si l’on veut fixer une date plus précise à ces mouvements, on trouve qu'il n’y a pas eu un mouvement unique, mais une série de mouvements à des époques différentes. Séparer tous ces mouvements est un des problèmes les plus ardus réservés à l'avenir, et il n'est même pas certain qu'il puisse se résoudre: il est loin d'être prouvé, en effet, que les mouvements aient élé réellement distincts et que l'effort n'ait pas élé continu. En toul cas, nous savons déjà qu’au débul de l’ère secondaire, si tout l'emplacement de la chaine n'’élait pas recouvert par les eaux, quelques parties centrales étaient certainement émergées; nous savons qu'à la fin de l’ère secondaire, autour de ce noyau central considérablement agrandi, existait déjà une vérilable chaine, peut-être dis- continue, mais avec des plissements bien accen- tués; nous savons que les dislocations les plus énergiques se sont produites dans la première moitié de l'ère tertiaire, et que les chainons exté- rieurs, au moins du Dauphiné jusqu'à la Bavière et à Vienne, se sont, en y comprenant le Jura, ajoutés à la charpente centrale seulement à la fin de la période miocène, c'est-à-dire dans la seconde moitié de l'ère tertiaire. L'ensemble des faits connus pourrait presque se traduire par celte formule simple : une grande ondulation se pro- pageant lentement du centre de la chaine vers ses bords extérieurs. Ainsi la chaine que nous avions reconstituée nous apparaît comme un ensemble très complexe, comme une œuvre de très longue haleine, pour laquelle la notion d'âge n’a plus de sens nettement déterminé, Le premier pas de la science orogé- nique a été de montrer que les montagnes n'avaient pas toutes le même âge, et que l’âge de chacune d'elles peut être connu; le mémoire d’Elie de Beaumont, qui, en 1833, proclamaitl ces nouveautés, a paru une véritable révolution. Le second pas peut sembler un pas en arrière; ce qu'on avait pris pour l’âge d’une chaine n'est que l’âge de ses faut chercher dans derniers chaïinons; en réalité, une chaine n’a pas d’àge précis, parce que la formation de ces diverses parties s'est échelonnée sur l’espace de longues périodes. Mais, en même Lemps, nous rencontrons ce résultat d’un intérêt si profond el si général: pendant ces longues périodes, les efforts orogé- niques n'ont pas cessé de s'exercer sur la même zone, et l'ont fait toujours avec la même direction. Le résultat en a été l'écrasement d'un fuseau de la sphère terrestre. C'est bien là le postulatum sur lequel E. de Beaumont a fondé sa théorie, et c’est une éclatante confirmation des premières vues qui l'ont guidé. Partant de ce postulatum, il a cherché le premier à déterminer pour chaque période les fuseaux d’écrasement; mais les données étant alors trop peu nombreuses pour suivre pas à pas les phéno- mènes, E. de Beaumont crut pouvoir admettre avec une rigueur géométrique les conséquences de son postulatum, et, pour grouper les faits, au prin- cipe de continuité il substitua celui de direction. A chaque période devait, suivant lui, correspondre un fuseau d'écrasement, à chaque fuseau une direction déterminée sur la sphère, celle de son grand cercle médian. H suffit alors d'avoir observé quelques accidents d’âge connu pour déterminer par tàtonnement la direction correspondante; il suflit de quelques vérifications pour l’accepter sans réserve. La belle ordonnance de l'édifice ainsi construit par un génie puissant en dissimula long- temps la base trop fragile ; des coïncidences dont on n'a jamais essayé, dont il eût été difficile d’ail- leurs de calculer la probabilité, ont, pour le maitre comme pour les élèves, entrainé la certi- ture, jusqu'au jour où le progrès des observations a ouvert les yeux les plus prévenus et montré sans appel possible le désaccord des faits avec la théorie. Il fallait alors reprendre l’œuvre d’'Elie de Beau- mont au point où elle se trouvait menée avant l'introduction du principe de direction, en ne se fiant plus qu'à la continuité, seul guide possible et certain : c'est ce qu'a fait M. Suess, dont la syn- thèse forme la base de nos connaissances actuelles. C’est ainsi que vient de prendre droit de cité dans la géologie cette notion nouvelle d'une chaîne alpine, résultant d'efforts convergents, mais prolongés pendant des périodes entières, et s'étendant sans interruption de nos Alpes d'Europe jusqu'aux bords de l'océan Pacifique. On peut même aller plus loin dans cette voie, quoique la part d’hypothèse devienne alors assez forte pour que M. Suess se soit refusé à formuler lui-même explicitement, en partie, des résultats qu'il laisse entrevoir à ses lecteurs : en Europe d’abord, les Pyrénées se rattachent aux Alpes par M. BERTRAND. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE NOS CONNAISSANCES OROGÉNIQUES 7 la Provence, où j'ai pu montrer la continuité de plissements restés longtemps inapereus; d'un autre côté, les Apennins, l'Atlas et la chaine bétique forment la seconde branche d'un éventail analoguc à celui des Alpes illyriennes, et les deux branches de cet éventail vont toutes deux s'arrêter au bord de l’océan Atlantique, sans qu'aucun indice en montre plus loin une prolongation, même affaiblie. Mais par une coïncidence remarquable, de l’autre côté de l'Atlantique, les Antilles font face au détroit de Gilbraltar, en dessinant une courbe analogue el opposée à celle des hauteurs qui bor- dent l'extrémité de la dépression méditerranéenne, et à partir des Antilles, fout autour de l'océan Pacifique, sur les rivages des deux Amériques comme sur ceux des iles qui bordent l'Asie el l'Australie, la chaîne des plissements récents re- prend, courbée en un vaste cercle et se raccordant, aux antipodes des Antilles, avec les îles de la Sonde. Il faut ajouter pourtant que si le cercle se ferme manifestement au nord avec les iles Aléou- tiennes, le rattachement de la Nouvelle-Zélande à l'extrémité des Andes est purement virtuel, sans nulle preuve à l'appui. Tout en faisant la part de ces deux interruptions, celle de l'Atlantique et celle du sud du Pacifique, on voit qu’on peut formuler ainsi les résultats pré- cédents : la zone des derniers plissements de l’é- corce terrestre n'occupe pas seulement un fuseau de la sphère, mais forme au globe une ceinture complète. On a depuis longtemps remarqué que la prolongation de la Méditerranée dessine autour de la terre une sorte de dépression équatoriale, en partie noyée dans les grands océans, mais dont le parcours reste marqué par les isthmes et détroils qui séparent les continents; c’est celle ceinture de dépressions que suit fidèlement notre ceinture de plissements ; seulement elle s’ouvre et se bifurque pour entourer l'océan Pacifique. Au nord et au sud de cette ceinture, les mêmes plissements ne se sont pas fait sentir, ou du moins n’ont fait sentir que localement un écho très af- faibli. Pour trouver dans ces régions des plisse- ments comparables à ceux des Alpes, il faut, lais- sant de côté les terrains secondaires et tertiaires, tourner son étude vers les terrains primaires ou paléozoïques. Mais là, immédiatement, la tâche devient plus ardue ; il n’y a plus continuité dans les affleurements ; ces terrains qu'il faut étudier ont été recouverts d’un manteau discordant de couches plus récentes ; quelques massifs isolés émergent de ce manteau; el c’est par eux seule- ment qu’on peut essayer de reconstituer l’ensemble. La difficulté est à peu près la même que si, dans la chaine alpine, on ne pouvait étudier que les som- mets qui dépassent deux milliers de mètres. Si dans ces conditions on à pu arriver à un résultat, c'est en admettant qu'il y a eu continuité des plis- sements dans la zone ancienne comme on l’a cons- talé dans la zone plus récente. F Bornons-nous d’abord à l'Europe. Une première remarque est importante : il y a deux régions dis- tinctes, l’une où tous les terrains paléozoïques sont en général également plissés, l’autre où Les plis sements n'ont affecté que les plus anciens de ce. terrains, ceux du système silurien. La première de ces régions occupe l'Europe centrale ; la seconde, l'Europe septentrionale; la ligne qui sépare ces deux régions offre un intérêt tout spécial,c'est celle des terrains houillers qui s’échelonnent du pays de Galles à la Belgique et à la Westphalie. Au sud de cette ligne, les plis des différents massifs paléo- zoïques en suivent la direction ; les plus méridio- naux s'ouvrent seulement en éventail pour entamer le plateau central de la France. Il y a done là une nouvelle zone de plissements, une nouvelle chaîne. qui a été produite comme la chaine alpine par une longue succession d'efforts convergents, et dont les sommets, peut être aussi élevés que ceux des Alpes, ont dominé l'ancienne Europe, l’Europe de la fin des temps primaires. L’étendue, bornée à ce premier lambeau, en est sans doute bien restreinte mais les dislocations peu accentuées du Sud de la Prusse, et plus à l’est, le Thian-Chan, semblent en former la prolongation ; et de l’autre côté de l'At- lantique, les Appalaches font face aux promon- toires de la Bretagne et de l'Irlande, également séparés par un grand bassin houiller des zones plus anciennement plissées. Ici, comme nous l’a- vions prévu, il faut que l'imagination ou, si l’on veut, l'hypothèse comble plus largement les la- cunes inévitables de l'observation ; il n'en est pas moins vrai que ces témoins qu'on retrouve à {ra- vers l'Amérique du Nord et l'Asie, aussi bien qu'à travers l’Europe, affectent les mêmes terrains, se rapportent aux mêmes périodes de l’histoire géo- logique, et que réunis sur une carte du globe, ils x dessinent une nouvelle zone parallèle à la zone alpine, une nouvelle chaine, grossièrement paral- lèle, plus ancienne et plus rapprochée du pôle. La dernière zone de plissements n’est connue que dans le pays de Galles, l'Irlande, lEcosse et la Scandinavie ; si elle a des analogues en Amérique et en Asie, ils sont encore obscurs el incertains. Dans son parcours limité, elle offre une direction assez fortement divergente, vers le nord-est ; mais, comme du côté de l’ouest ses plissements vont se raccorder avec ceux de la zone plus ré- cente, il est permis de ne voir dans cetle divers gence qu'une déviation locale et de ne pas y accorder plus d'importance qu'aux directions momentanément aberrantes des Apennins, des 8 M. BERTRAND. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE NOS CONNAISSANCES OROGÉNIQUES Alpes illyriennes où des bords du plateau cen- tral. Le fait capital reste en Lout cas incontestable ; la zone la plus ancienne est celle qui se rapproche le plus du pôle, et dans les régions plus septen- trionales, les discordances qu'on observe dans la série des terrains les plus anciens, de ceux qui ont précédé l'apparition de la vie sur le globe ou qui du moins ne nous en ont conservé aucune (race, montrent que c'est dans ces régions polaires qu'ont ‘eu lieu les premières dislocations de l'é- corce. On voit que les résultats de cetle analyse, faite sans idée préconeue, ne le cedent ni en simplicité ni en grandeur à ceux que l'imagination aurait pu prévoir : l'effort de plissement s'est exercé pen- dant de longues périodes sur les mêmes zones el s’est déplacé progressivement du pôle vers l’équa- teur ; la chaine de plissement la plus récente forme au globe une ceinture presque continue, et les chaines plus anciennes, dans ce que l’on connail, semblent dessiner une série de ceintures grossiè- rement concentriques et de plus en plus rappro- chées du pôle. L'intérêt de cette formule et ses conséquences théoriques grandiraient singulièrement si l'on pouvait trouver dans l’autre hémisphère la trace d'un arrangement plus ou moins symétrique ; mal- heureusement la prédominance des mers fait craindre que de ce côté nos connaissances restent toujours bien imparfaites. Les régions équalo- riales (plaine des Amazones, Sahara el Soudan, Hindoustan et est de l'Australie) paraissent avoir formé dès les époques les plus reculées, au moins depuis la fin de la périvde silurienne, un plateau stable et solide, respecté par les actions de plisse- ment. Au sud de ce plateau, les côtes sont bordées au sud du Brésil, au Cap et à Pest de l'Australie, par des lambeaux de chaines très anciennes, mais qui ne semblent pas toutes du même âge; au Bré- sil le Dévonien, en Australie le Carbonifère seraient postérieurs aux derniers plissements : au Cap au contraire, toute la série paléozoïque est également plissée. Il n'y a pas de raisons sérieuses pour es- sayer de relier ces lambeaux en une même zone ; iln'y en a pas non plus de définitive pour nier une ancienne liaison. Il faut sur ce point avouer notre ignorance. Mais, si imparfaile qu'elle soit, la coordination des plissements autour des régions polaires éveille dans l'esprit l’idée d'un lien théorique avec l’apla- tissement ou avec la rotation de la terre. De quelle nature peut-être ce lien ? C'est ce qu'il semble bien difficile de prévoir. Peut-être, en admettant que le progrès des observations arrive à préciser da- vantage les éléments du problème, sera-t-il de ceux que l'avenir pourra aborder, mais il semble évident que la question n'est pas mûre encore !. Il. — DiISSYMÉTRIE DES VERSANTS ET ROLE DES FAILLES. Dans ce qui précède nous n'avons parlé que de la distribution des chaines de montagnes ou pour mieux dire, des zones de plissements. Il reste à examiner ce qu'on sait sur la formation même d’une chaine et sur les mouvements mécaniques dont elle est le résultat. On sait depuis longtemps que dans leur ensemble ces mouvements peuvent se résumer par un plissement de l'écorce, tel qu'il résulterait d'une compression horizontale, et de- puis longtemps on a reproduit en petit des appa- rences analogues dans des séries de lits d'argile, placés horizontalement sous un poids qui les main- lient el pressés latéralement entre deux étaux. Comme je l'ai dit, le parallélisme des plis est le caractère le plus frappant, celui qui depuis long- temps à permis de rattacher leur formation à une action d'ensemble el, par conséquent, à une com- pression latérale. En dehors du parallélisme, un élément impor- tant de l'étude des plis est la manière dont ils s’inclinent ou se couchent dans un sens déterminé. En général, d'un mème côté de l'axe de la chaine, les plis se couchent tous dans un même sens, vers le bord extérieur de la chaine, c’est-à-dire vers les plaines qu’elle domine. Ainsi en Savoie, les plis sont couchés à l’ouest vers la plaine du Rhône et à l’est vers la plaine lombarde ; en Suisse et en Tyrol, les plis se déversent d’un côté vers le nord el de l’autre vers le sud; c’est ordinairement le massif cristallin central qui forme la zone de dé- marcation. Il en résulte que la chaîne dans son en- semble présente une structure en éventail et que les sommets pourraient s'en comparer aux épis d'une gerbe fortement serrée en son milieu. 11 y a pourtant presque toujours une dissymétrie mar- quée des deux versants ; les plis sont bien plus fortement et plus constamment déversés dans un sens que dans l’autre ; ainsi en Europe, la plupart des grands plis couchés sont couchés vers le nord; si bien que M. Suess a cru pouvoir en déduire qu'il y avait un sens déterminé pour l'effort orogénique, qui aurait élé dirigé versle nord en Europe el vers le sud en Asie. Les exceptions à celte règlese sont depuis lors révélées de plus en plus nombreuses, et il est bien difficile de l’admettre : les exceptions à la règle de la constance de l'inelinaison sur un mème versant sont au contraire beaucoup plus rares, surtout pour les plis fortement inclinés, et la structure en éventail semble de plus en plus la ————— 1 Voir pourtant un essai ingénieux de M. Romieux, C. R. Ac. des Sc. 1889. M. BERTRAND. -- LES RÉCENTS PROGRÈS DE NOS CONNAISSANCES OROGÉNIQUES ÿ structure normale des grandes chaines. Il en est autrement quand la chaine est scindée,comme j'en ai donné plus haut des exemples,en deux rameaux divergents ; ou pour mieux dire, c'est alors l’en- semble de ces deux rameaux qu'il faut considérer pour y retrouver les deux moitiés de l'éventail ; chacun d'eux n'est qu'une moitié de chaine. Les deux versants intérieurs, ceux qui se font face souvent à grande distance, sont ordinairement les plus abrupts et brusquement coupés par des lignes de fractures; leur contraste naturel avec le versant extérieur est une des causes ordinaires, et bien explicable alors, de ce qu'on a appelé la dissy- métrie des chaines ; mais cette dissymétrie semble subsister, quoique moins fortement marquée, dans les chaînes complètes, dans celles où les deux branches séparées viennent se réunir; la raison. dans ce cas, en est moins facile à concevoir. Après ces généralités sur la structure d'en- semble, sur lesquelles je n'insiste pas à cause de la difficulté d'en lirer pour le moment quelque conclusion certaine, il faut, pour aller plus loin, étudier de plus près la structure même d'un pli, et surtout les accidents qui peuvent la compliquer localement. Parmi ces accidents, il faut d’abord mentionner les fractures qui ont mis en contact deux parties dénivelées, deux compartiments dif- férents de l'écorce terrestre. Ces fractures, d'une manière générale, ont reçu le nom de failles, ou surfaces suivant lesquelles a eu lieu une chute de terrains, et le mot en France s'applique à tous les accidents qui mettent en contact deux couches d'âge différent, en supprimant l’affleurement des couches intermédiaires. Le rôle des failles dans les pays de montagnes a élé longtemps très diver- sement apprécié, et un des plus grands progrès réalisés dans ces dernières années a certainement été d'arriver à une plus juste appréciation de ce rôle. Dans les plaines ou dans les grands plateaux, aux couches faiblement ondulées, les failles sont fréquentes : toute partie insuffisamment maintenue par le bas s'enfonce sous l’action de la pesanteur, et le mouvement centripète général, que, dans l'hypothèse du refroidissement séculaire de notre planète, il faut attribuer à l’ensemble de l'écorce, favorise ce jeu relatif de différentes parties et cette chute plus profonde de certaines d’entre elles. Mais dans les zones où s’exercent les efforts de plissement, il ne doit plus en être ainsi : tout com- partiment, insuflisamment maintenu par le bas, l'est par la pression latérale qui, suffisant à plisser même les roches dures, suflit à plus forte raison à empêcher toule descente sous l’action de la pe- santeur. Il ne résulte pas de là qu'il ne puisse y avoir des failles dans les pays plissés ; l'observa- tion montre le contraire. Mais ces failles ne seront pas dues à la pesanteur, elles le seront à l'effort même de plissement. S'il y a quelque part un plan de fracture, c’est-à-dire un plan suivant lequel la cohésion des masses soit rompue, la composante de la pression pourra déterminer un glissement suivant ce plan, toujours de bas en haut ; car c'est seulement vers le haut que l’espace est libre el que les masses ont faculté de se mouvoir, [l y aura bien également faille en ce cas; mais ces failles diffèrent de celles que produit directement la pe- santeur, parce qu'elles amènent le plus souvent les couches les plus anciennes à chevaucher sur sur les plus récentes ; ce sont des failles inverses. La distinction est facile à faire et ne s’efface que quand le plan de fracture est vertical. Ces sortes de failles inverses ne sont pas rares dans les mon- tagnes, mais elles se rencontrent presque unique- ment dans les zones extérieures, dans les zones subalpines par exemple. Leurs affleurements sont toujours parallèles à la direction des plis, c’est- à-dire aussi à celle des couches ; ce sont des failles longitudinales, el quand on les suit sur le terrain, on arrive invariablement à les voir prendre, à plus ou moins grande distance, la même inclinaison que les bancs, puis faire” place à une zone de cou- ches amincies et élirées, dont la série arrive peu à peu à se compléter. La faille passe latéralement au pli ; ce n’est qu'un accident produit par les glisse- ments sur le flane de ce pli (ordinairement sur un flanc renversé); quand les glissements, amorcés suivant la direction des couches, arrivent à se pro- longer suivant un plan net de fracture, oblique à la stralification, le lien des deux phénomènes peut être un instant dissimulé, mais il renaraît nette- ment dans l’ensemble. Le pli est l'élément et le phénomène principal ; la faille n’est qu'un détail de sa formation. Si l'on pénètre dans les parties plus centrales des chaines, ces sortes de failles disparaissent elles- mêmes complètement ; il y a bien encore, el plus souvent même, des assises supprimées; mais les surfaces de glissement sont presque invariablement parallèles à la stratification. La compression latérale était sans doute trop forte, elle donnait aux bancs une cohésion trop grande pour permettre à une cassure de s’y propager en ligne droite; les jeux et mouvements relatifs n'ont pu se faire que sui- vant les surfaces de moindre résistance, c'est-à- dire suivant les joints de stratification. Il semble. ilest vrai, que si de pareils mouvements ont eu lieu, il est impossible de les constater; un glisse- mentsuivant un plan destratification doit conserver aux masses toute l'apparence de l’ordre primitif. Mais, en réalité, dans les mouvements, les assises plus tendres s’écrasent successivement en biseau ; la masse charriée échelonne sur son parcours ses 10 banes inférieurs plus ou moins laminés, et en défi- nitive le résultat est le même que si le glissement avait eu lieu sur une surface légèrement oblique à la stratification. Il y a à la fois suppression d’as- sisesetparallélisme des assises conservées. Comme, de plus, tous les joints de stratification sont des surfaces de glissement facile, on conçoit que le même phénomène puisse se répéter un grand nombre de fois, el que l'épaisseur des couches supprimées puisse être considérable. Elle sera d'ailleurs nécessairement irrégulière, et de place en place on verra reparaître des lambeaux des | assises intermédiaires ; on pourra même retrouver toute la série des élages successifs, mais avec des épaisseurs réduites. Il doit donc exister, en dehors même des appa- rences immédiates créées par la formation des plis, une différence essentielle de structure entre les régions ordinaires et celles qui ont été soumises à de fortes compressions : dans aucun cas, on ne conçoit que le déplacement de grandes masses puisse avoir lieu sans entrainer des jeux relatifs entre les différentes parties de l’ensemble. Dans les pays de plaines ou dans les chainons extérieurs, ces jeux relatifs ont pu produire des cassures nettes el tranchées ; dans les hautes montagnes, ils ne se traduisent que par des glissements des bancs les uns sur les autres et par des amincissements irré- guliers dans l’épaisseur des couches. Cette analyse des mouvements et de leurs con- séquences peut paraitre trop empreinte d'un es- prit théorique ; dans des problèmes aussi complexes il est difficile de tenir compte de toutes les don- nées ; les raisonnements sont toujours suspects de pécher par la base, et on peut craindre que la na- ture ne se conforme pas à leurs conclusions. Mais ici on peut se rassurer, les raisonnements ont été faits après coup. Ce n’est pas une idée préconçue dont on a cherché et cru trouver les preuves sur le Lerrain; c'est l'observation qui a imposé les con- elusions, et l’on peut s'étonner qu’elle ne l’ait pas fait plus tôt. Les exemples sont si nombreux et si clairs, dans les Alpes de Savoie particulièrement, qu'on peut affirmer qu'il ne restera pas d’incré- dules parmi ceux qui consacreront quelque temps à leur étude. Pour les autres, la conviction se fera plus lentement; la force de l'habitude, dès qu'ilne s’agit plus de mathématiques, a une telle part dans nos raisonnements que longtemps encore, en France, on continuera à accepter volontiers, et presque sans contrôle, l'existence d’une faille ver- ticale, tandis qu'on restera disposé au scepticisme pour les failles horizontales ou peu inclinées: cependant, si l'on admet les efforts horizontaux, on vient de voir que ces dernières failles en sont une conséquence naturelle ef presque nécessaire: M. BERTRAND. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE NOS CONNAISSANCES OROGEÉNIQUES l'explication des failles verticales, quand ce ne sont pas des failles de tassement, soulève au contraire une grosse difficulté: il faut supposer que la faille traverse loute l'écorce solide, ou admettre la préexistence d’un vide comblé par l'affaissement. La manière dont un pareil vide peut se former est bien obscure, et on s'en préoccupe bien rarement. Il y a d’ailleurs aux méfiances de beaucoup d’es- prits une autre cause, qu'il est utile d'indiquer : la plupart de nos connaissances sur les Alpes fran- caises sont dues aux travaux de Lory, qui a été pendant près de vingt ans le maitre incontesté de notre géologie alpine. Or Lory n’a jamais appelé l'attention sur ces phénomènes de glissement ou d’étirement; sans les nier, il n’y voyait qu'un fait secondaire et accessoire; il a toujours insisté au contraire sur le rôle de grandes failles verticales, qui auraient joué aux différentes époques dans les régions alpines, et il en a fait la base de toutes ses explications. Cette divergence s'explique parce que Lory a surtout étudié en détail les chaines subal- pines; dans les grandes Alpes, où il a fait pourtant ses plus grandes découvertes, il s’est surtout in- quiété des traits d'ensemble, laissant à ses succes- seurs le soin de fixer les détails. S'il avait eu le temps de compléter pour la Savoie ce qu'il a fait pour le Dauphiné, il aurait reconnu lui-même que ses grandes failles ne sont que des surfaces de glis- sement, toujours parallèles aux couches, et qu’elles ne sont qu’un cas particulier d’un phénomène qui se rencontre presque à chaque pas. La théorie de Lory faisait d’ailleurs des Alpes françaises une véritable exception; les études de ces dernières années ne font que les ramener à la règle com- mune. DÉPLACEMENTS PLIS COUCHÉS,. TT. HORIZONTAUX. RÔLE DES En partant des considérations précédentes, on voit qu'il y a un cas où ces glissements, suivant le plan des couches, doivent avoir pris encore plus d'importance, c’est le cas où un pli est couché horizontalement. La force devient alors parallèle à La direction des glissements faciles ; théoriquement la différence n'est pas grande; mais tous les effets prévus d’amincissements, d’étirements et de sup- pressions de couches seront naturellement exa- gérés; les déplacements horizontaux seront à la fois plus considérables et mieux mis en évidence. Ilen résulte au point de vue pratique, des appa- rences très particulières et des complications imprévues sur lesquelles l’attention s'était peu portée avant ces dernières années, et qui font des plis couchés un chapitre important de l'histoire des montagnes. Essayons d’abord d'analyser le phénomène M. BERTRAND. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE NOS CONNAISSANCES OROGÉNIQUES 41 une fois qu'un pli horizontal s’est produit et qu'il a amené en saillie une sorte de bourrelet super- ficiel, si les forces horizontales continuent leur action, elles ne peuvent avoir d’autre effet sur ce bourrelet que de le pousser en avant. Si le mou- vement est assez lent et le bourrelet assez épais pour que les couches qui le forment ne se dislo- quent ninese fragmentent,le résultat sera naturel- lement un allongement du pli couché. Le bourrelet se compose de deux parties : l’'inférieure, formée de couches renversées, et la supérieure, formée par les mêmes couches en ordre normal de super- position; dans l'inférieure, aucun afflux de ma- lière n’est possible, et par conséquent, à mesure que le pli s'allongera, l’ensemble des couches renversées, dont le volume reste constant, devra s'élaler sur un plus large espace; l'épaisseur en sera donc diminuée d'autant plus que le déplace- ment aura élé plus considérable. En fait l’obser- vation montre que cet étirement, ce lwminage des couches renversées dépasse toutes les prévisions ; des épaisseurs de plusieurs centaines de mètres se trouvent réduiles à quelques mètres et même à quelques centimètres; dans ces quelques mètres, pouvant passer à des lambeaux intermittents, pou- vant complètement disparaître, on trouve des représentants de tous les étages successifs. Quant à l’étendue des déplacements horizontaux, elle paraît presque sans limites; on en connait beau- coup de à et 6 kilomètres; on en connait avec certitude qui ont dépassé 15 kilomètres. Il est certain que l'imagination recule devant ces immenses coulées de terrains sédimentaires, se déroulant lentement à la surface du sol comme de véritables coulées de basalte ; la nature et le mécanisme des mouvements se conçoivent bien, mais leur grandeur inattendue provoque l’incré- dulité. Toutes les objections doivent cependant céder devant l'évidence des faits observés. Cette évidence a mis longtemps à s'imposer, el il ne faut pas s’en étonner : pour constater un fail simple et précis, il suffit du témoignage des yeux ; mais quand il s’agit d’une série de faits qu’il faut interpréter et coordonner, on ne se fie à ce témoi- gnage que s’il est d'accord avec le raisonnement ; pour voir les choses, il faut les croire possibles. L'histoire de nos connaissances sur les plis couchés en est une preuve bien marquée : pendant long- temps les deux premiers exemples connus, celui du terrain houiller franco-belge et celui des Alpes de Glaris, n’ont semblé que de grandioses ano- malies, et ils sont restés isolés; mais à partir du jour où M. Gosselet, pour le premier, et M. Heim, pour le second, en ont proposé une explication rationnelle, à partir surtout du jour où M. Heim a en quelque sorte démonté le mécanisme du phéno- mène, et qu'en l’accompagnant de coupes admi- rables de sa région, il y a fait voir une conséquence directe de l’ensemble des phénomènes orogéniques, les conditions se sont trouvées changées : on n'a pas cherché de parti pris à retrouver autre part des faits qu'on croyait encore exceptionnels, mais les observations se sont faites avec une nouvelle lumière dans l'esprit, et l’on a osé voir, quand les faits parlaient. Presque chaque année alors d’au- tres exemples sont venus s'ajouter aux anciens : en Ecosse d’abord, puis en Provence, dans une région où l’on avait à peine soupçonné l'existence de plissements, dans les Montagnes Rocheuses, qu'on avait cru construites sur un plan spécial el tout différent de nos chaines européennes ; dans les Appalaches, en un mot dans presque toutes les grandes régions de plissements. Dans loutes ces régions, quelle que soit celle des grandes zones de plissements à laquelle elles appartiennent, quel que soit par conséquent l’âge des mouvements qui les ont affectées, les mêmes . phénomènes se sont produits et ont créé des appa- rences qui ne sont guère variables qu'avec le degré de dénudation. De grandes nappes de ter- rains sédimentaires ont été poussées en avant el charriées à la surface, sur des longueurs de plu- sieurs kilomètres, en conservant les principaux traits de leur ordonnance primitive. Ces nappes charriées reposent sur des terrains plus récents, soit directement, soil par l'intermédiaire de quel- ques couches renversées. Quand la dénudation les a morcelées et les a découpées en lambeaux isolés, on voit des ilots de terrains plus anciens faire saillie au milieu des couches plus récentes, quel- quefois à plusieurs kilomètres de tous terrains semblables ; ainsi, en Provence, on trouve des îlots triasiques au milieu du crétacé; en Suisse des îlots permiens au milieu de l'Eocène; en Belgique des ilots dévoniens et carbonifères au milieu du ter- rain houiller; en Écosse, des îlots même de gneiss au milieu du silurien. Beaucoup d’entre eux étaient connus depuis longtemps, mais on y voyait en général des saillies des anciens fonds de mer; on sait maintenant que ce sont de véritables paquets amenés de loin et simplement posés à la sur- face du sol. Ces faits ne constituent pas seulement une grande curiosité stratigraphique ; les conséquences théoriques en sont importantes. Ils apportent un argument définitif en faveur de l’idée des refoule- ments latéraux, qui depuis Elie de Beaumont était généralement admise, mais qui, en l'absence de preuves absolues, rencontrait encore des contra- dicteurs. On ne saurait plus contester que pour former les Alpes, l'Afrique ne se soit rapprochée du nord de l'Europe ; les déplacements horizontaux 12 CH.-ED. GUILLAUME. — L'ÉNERGIE DANS LE SPECTRE constatés entre les màchoires de ce gigantesque étau ne sont évidemment qu’une fraction de leur rapprochement total. En Provence, par exemple, on connait quatre grands plis couchés qui s’éche- lonnent du sud vers le nord, et le moindre a pro- duit encore des charriages de près de 3 kilo- mètres. Les tentatives faites pour mesurer plus exactement ce rapprochement ne donnent que des nombres bien contestables; mais l'étude seule de la Provence permet de lui assigner plus de 20 ki- lomètres. En se souvenant que la zone plissée embrasse tout un grand cercle de la sphère, on peut en conclure que pendant la période de plisse- ment, c'est-à-dire pendant une période de temps qui ne comprend pas toute la durée des époques secondaire et tertiaire, le rayon terrestre a diminué d'au moins 4 kilomètres. Par un autre procédé, qui donne certainement un maximum, M. Heim a trouvé 19 kilomètres. La vérilé doit être comprise entre ces deux nombres, sans qu'on puisse dire celui qui s'en rapproche le plus. Les évaluations tirées des formules du refroidissement el fondées sur la valeur actuelle du degré géothermique con- tiennent également bien des éléments arbitraires ; elles ont donné de 350 à 550 mètres par million d'années. Ce n’est pas d’ailleurs dans cette voie incertaine qu'il faut diriger les efforts ; c'est sans doute beau- coup de savoir qu’il se développe dans les parties superficielles de l'écorce terrestre d'énormes com- pressions horizontales, et de pouvoir rattacher ce phénomène au refroidissement terrestre ; mais traduire la théorie en formules applicables aux faits observés, et surtout traduire les formules en nombres précis, serait une ambition prémalurée. C'est de l'étude lente et minutieuse des faits, c’est de l'accumulation de nouvelles observations et de leur prudente interprétation qu'on peut attendre de nouveaux progrès. Sans doute les développements précédents mon- trent de quelles difficultés s’entoure la stratigra- phie des pays de montagnes. Les glissements élé- mentaires bancs par bancs peuvent amener dans toutes les proportions l’amincissement ou la sup- pression de plusieurs étages, sans que rien trahisse à l'observation les mouvements subis ; la compa- raison avec les coupes voisines peut seule montrer s'il y a des lacunes, et l’irrégularité de ces lacunes peut seule montrer qu’elles ont une origine méca- nique et qu'elles ne proviennent pas des phéno- mènes de sédimentation. On ne peut jamais affir- mer à priori que deux bancs régulièrement super- posés se sont réellement déposés l'un sur l’autre. Ce réarrangement des couches, assez complet pour produire l'illusion d’une série normale non déran- gée, est certainement un des détails les plus re- marquables de cette partie de la mécanique ter- restre, mais on ne peut nier qu'il n’augmente beaucoup les difficultés de la tâche à poursuivre. Ces difficultés cependant peuvent être sur- montées, maintenant qu'on en est averti; même quand les fossiles sont rares, la continuité des plis, si l’on arrive à la suivre, peut donner de vé- rilables éléments de certitude, et la comparaison des coupes successives d’un même pli arrive à lais- ser bien peu de points dans le doute ou dans l’om- bre. C’est une autre stratigraphie que celle des pays de plaines, où la constatation des superposi- lions suffit à résoudre tous les problèmes; c'est une staligraphie qui a ses lois cependant, assez bien connues maintenant el assez précises pour averlir d'une erreur et pour ne pas laisser persister dans une fausse voie. Les conquêtes faites dans ces dernières années sont pour nous un sûr garant de celles qui sont réservées à un prochain avenir, el sans prévoir encore le temps où nous pourrons livrer aux analystes toutes les données d’un pro- blème mathématique, nous pouvons avoir la con- fiance que les chaines de montagnes nous laisse- ront pénétrer plus profondément dans le secret de leur formation. Marcel Bertrand. Professeur de Géologie à l'Ecole des Mines. L'ÉNERGIE DANS LE SPECTRE L'histoire de la physique, celle de toutes les sciences exactes peut-être, nous montre une conti- nuelle évolution dans le classement des phéno- mèêènes. Ceux-ci sont, au début, groupés d’après leurs caractères extérieurs, d’après ceux, en par- ticulier, qui correspondent à l’action de l’un de nos sens. C’est ainsi que se sont formées l'optique, l'acoustique, l'étude de la chaleur. Puis les hypo- thèses sont venues; leur ensemble a constitué des théories, les unes solidement assises, les autres encore chancelantes; à cette éclatante lumière, la physique a reconnu la bizarrerie de son accoutrement : elle avait ganlé des sabots, s’élail chaussée d’un chapeau; elle n'a pas tardé alors à remettre toutes choses en place, et si, aujour- d'hui, son costume n’est point encore de la bonne faiseuse, au moins peut-elle décemment se mon- trer, en attendant une toilette tout à fait digne d'elle. Peu à peu les phénomènes viennent se ranger CH.-ED. GUILLAUME. — L'ÉNERGIE DANS LE SPECTRE 13 suivant leurs causes, et l’ensemble présente déjà une harmonie salisfaisante. L'étude du spectre nous offre un exemple de cette évolution, le plus simple peut-être et le plus frappant. Sa partie visible fut la première connue, puis la partie calorifique, enfin la partie chimi- que; pendant longtemps on s'en tint là. La pre- mière découverte plaça naturellement le spectre dans l'optique ; il eût pu séjourner quelque temps dans la chimie. Depuis quelques années, un immense progrès dans nos conceptions a été réalisé, progrès dû à une manière simple et entièrement objective d’en- visager les choses; le véritable caractère intrin- sèque d’un spectre réside dans la répartition de l'énergie suivant la longueur d’onde des radiations qui le composent. En d’autres termes un spectre est caractérisé par une courbe dont les abscisses sont les longueurs d’onde, les ordonnées, la quan- tité d'énergie (ou plutôt de puissance) par unité de longueur d'onde qui leur correspond. Cela connu, tous les phénomènes observables s'en dédui- sent grâce à la connaissance des pouvoirs absor- bants des corps pour diverses radiations, et de la sensibilité de nos réactifs les plus ordinaires, l'œil, ou divers composés chimiques. Lascience des radiations créée d'hier subsistera- t-elle? Les électriciens modernes la menacent, et se proposent d’en faire hommage à leur favorite. La théorie de Maxwell, si brillamment illustrée par les expériences déjà classiques de MM. Hertz, Lodge, et d'une cohorte de physiciens, nous mon- tre des ondes électrodynamiques identiques par leur nature aux radiations émanées des molé- cules, seules étudiées jusqu'ici, et n'en différant que par leur grandeur. Le spectre peut, semble-t- il être prolongé dans l’infra-rouge, où les radia- tions calorifiques iront bientôt rejoindre celles que seuls les résonnateurs électriques nous décè- lent. Toutes les autres nous sont de même révélées par des résonnateurs appropriés, deux d’entre eux étant limités, et en quelque sorte surérogatoires, le résonnateur calorifique étant le seul universel. Les radiations électriques viendront-elles se ran- ger modestement à côté de leurs sœurs plus pe- tiles? Les emporteront-elles avec toute l’optique dans la science universelle de l’éther, l'électricité ? Voilà la question que l’on peut espérer voir réso- lue d'ici quelque vingt ans; mais avant que l'électricité puisse élever des prétentions, il est nécessaire qu’elle possède une théorie d'ensemble absolument satisfaisante. Rien n’est moins expli- qué que le courant électrique, si ce n’est l’action d'une charge statique. Il est aventureux, mais non point absurde de supposer que les études futures peuvent aussi bien aboutir à la désagrégation de REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. la science électrique qu’à l’union de toule la physi- que de l’éther dans ses cadres actuels. L'identité des ondulations calorifiques et des on- dulations électriques une fois démontrée, celles-ci auront l'immense avantage d’atteindre des dimen- sions qui permettent l'étude des détails, c’est-à- dire la dissection de l'onde elle-même. Jusqu'ici, personne n’a vu d’ondulations électriques dans aucun spectre. Quelque jour sans doute, un phy- sicien, muni d’une immense lentille diélectrique, consfatera, à son foyer, l'existence d'ondes élec- triques émanées d’un corps incandescent. Laissons pour l’avenir cette expérience complémentaire des découvertes récentes, et revenons à la portion du spectre seule étudiée jusqu'ici. Ï. — LES INSTRUMENTS DE MESURE. Le cadre restreint de cet article nous oblige à nous limiter entièrement aux études très récentes, et nous force à passer sous silence les travaux si remarquables qui ont préparé la voie aux re- cherches de ces dernières années !. La plupart, du reste, sont déjà consignées dans les traités mo- dernes; nous décrirons le bolomètre, cet instru- ment qui, aux mains du professeur Langley, a donné de si merveilleux résultats, et un autre ap- pareil de création plus récente, qui a déjà provo- qué de remarquables études et promet beaucoup dans l’avenir. Le bolomètre. — L'une des branches d’un pont de Wheatstone constitue le récepteur des radiations ; elle est formée d’un fil de fer ou de platine très fin ?, et recouverte de noir de fumée. La branche d’équi- libre, faite d’un fil semblable, est bifurquée de part et d'autre du premier, et reste masquée par un écran. Toute variation de la température du récepteur, à laquelle la branche d'équilibre ne par- ticipe pas, modifie sa résistance et se traduit par une déviation du galvanomètre. La sensibilité de la méthode dépend de la capa- cité calorifique du récepteur, du courant que l’on peut faire passer dans le circuit sans l’échauffer sensiblement, et de la perfection avec laquelle le galvanomètre a été construit. Le succès des expé- riences de M. Langley dépend, en dehors de l’ha- 1 Nous tenons à insister sur ce fait que ce n’est ni par igno- rance, ni par un parti pris quelconque que nous appuyons si peu sur les recherches de Ed. Becquerel (Voir la Revue), de Desains, de M. Mouton et d’autres physiciens, qui bien qu'avec un peu de vague dans les conceptions, ont posé les bases de la notion moderne du spectre. Nous avons parlé à une autre occasion des expériences de M. Knut Angstrüm. (Voyez laRevue du 30 décembre 1890.) 2 Les fils employés par M. Langley ont 0m01 à 0m02 de longueur, Ommÿ à {mm de largeur, et lu à 104 d’épais- seur ; les dimensions minima correspondent à un vo: jume de Ommë005 ou pour le platine Omé{ environ; la capacité calorifique peut donc n’ètre que de te. lis 14 CH.-ED. GUILLAUME. — L'ÉNERGIE DANS LE SPECTRE bileté et du labeur acharné de l'observateur, du fait qu'il possède le galvanomètre le plus parfait qui ait jamais élé construit. L'absence de ces condi- tions réunies explique suflisamment les échecs répétés qui ont fait douter quelques physiciens de l’excellence de la méthode. Le bolomètre est naturellement complété par un spectroscope à prisme et lentilles de sel gemme, et par un réseau Rowland pour la production des spectres de diffraction et la mesure des longueurs d'onde. Le fil récepteur et la branche d'équilibre occupent le fond d’un cylindre en carton ou en ébonite noirei et diaphragmé. Le radio-micromèlre de M. Boys. — Cet instrument, imaginé par le D° d’Arson- val, réinventé peu après par M. Boys, et considéra- blement perfectionné par lui, se compose d'un cou- ple thermo-électrique Bi- Sb, de très petites dimen- sions, fermé sur un cadre de fil de cuivre, suspendu (fig. 4). Vient-il à tomber une radiation sur la sou- dure noircie, un courant traverse le cadre, qui est dévié. Les dispositions ori- ginales de cet instrument, sont d’abord la position du couple, légèrement ma- gnétique, hors du champ, et la suspension de l'équipage faile avec une de ces merveilleuses fibres de quartz, dont M. Boys a déjà tiré un si grand parti. Le radio-micromèlre, ainsi que le bolomètre, révèle une variation de la tempéralure du récep- teur de wn millionième de degré. En supposant pour les cas extrèmes, une capacité calorifique de 0,000003, on voit que l'instrument pourra déceler une quantité de chaleur inférieure à un cent millio- nième de petite calorie, tombant sur le récepteur pen- dant la demi-oscillation de l’aiguille du galvano- mètre, c'est-à-dire moins d’un dix-millième d’erg par seconde. Remarque. — Nous avons dit que, dans le bolo- mètre ou le micro-radiomètre, le récepteur est recouvert d’une mince couche de noir de fumée. Cette substance est, comme notre œil nous en avertit, presque absolument absorbante pour les radiations visibles ; cet effet peut être dû à deux causes distinctes : la première est la résonnance moléculaire du carbone pour certaines radiations ; la seconde réside dans l'état pulvérulent de la entre les branches d'un D ZA aimant en fer à cheval 27 CZ substance. La résonnance est une propriété de la matière, dont l’expérience peut seule démontrer la généralité. L’absorption par une poudre dépend de la grandeur des particules par rapport à la longueur d'onde de la lumière incidente. Lorsque la longueur d'onde est sensiblement plus grande que les dimensions moyennes de la poudre, cette dernière ne peut plus agir par son état pulvérulent, et, si elle ne possède pas l'absorption moléculaire, la poudre est transparente. Cette propriété, abso- lument générale, nous explique pourquoi une foule de corps constitués par des particules séparées, et qui sont opaques pour la fumière, sont transpa- rents pour les ondes électriques. Rien ne nous dit que les propriétés absorbantes du noir de fumée subsistent aux grandes longueurs d'onde. La preuve qui reste à fournir, c’est que, lors- qu’une radiation quelconque est tombée sur une couche suffisamment épaisse de noir de fumée, aucun moyen ne permet de conslater des radia- tions sur le chemin du faisceau. Cette preuve n’a point encore élé donnée, el les résultats que nous allons exposer doivent être accueillis avec cette restriction. II. — LE SPECTRE D'INCANDESCENCE DES SOLIDES. Les spectres émis par les solides se diyisent en deux catégories : dans la première se rangent les spectres émis indifféremment par un grand nombre de corps ; ils commencent dans l’infra-rouge, et se développent avec une parfaite régularité. Ces spectres sont dus à l’incandescence de la matière, ce mot étant pris dans le sens très élargi de mou- vements moléculaires. Les autres spectres, plus ca- pricieux, formés de bandes souvent lumineuses sans chaleur appréciable, spectres des matières phosphorescentes ou fluorescentes, ne peuvent pas être attribués à des oscillations des molécules en- lières, qui, d’après les théories cinéliques de la malière, correspondent à des températures déter- minées, généralement beaucoup plus élevées que les températures indiquées au voisinage des corps phosphorescents par un thermomètre de n’importe quelle sorte. Ces spectres sont dits luminescents, et sont attribuables, selon M. Wiedemann, à des mou- vements #tra-moléculaires. Nous nous occuperons essentiellement des premiers, dont l'étude est presque entièrement due à M. Langley !. 1 La direction des recherches modernes avait été claire- ment indiquée en 1880 par MM. Desains et P. Curie, qui, dans un beau travail passé malheureusement presque ina- percu, avaient mesuré la répartition de l'énergie dans le spectre du platine incandescent et du cuivre noirci chauffé à 300° et à 1800. Les longueurs d’onde mesurées atteignent Tu. Les résultats de ce travail sont parfaitement d'accord avec ceux qu'a trouvés plus tard M. Langley. CH.-ED. GUILLAUME. — L'ÉNERGIE DANS LE SPECTRE L'origine des travaux de M. spectres vées dans ses premières recherches l’engagèrent à reprendre le phénomène 4b ovo, et à commen- cer par le cas infiniment plus simple du spectre des corps terrestres, qui peuvent être étudiés sans que l'absorption intervienne. La surface d'émission était, dans ces expériences, l’une des faces d’un cube de Leslie noirci, et por- té à diverses températures !. Le spectre Lype est, naturellement, celui dans lequel les longueurs 156 Langley sur les d’incandescence mérite d’être relatée. Son but était de déterminer la constante de la radiation solaire; mais les singularités obser- que l'extrême sensibilité du bolomètre n’est que bien juste suflisante pour permettre d'attaquer de tels problèmes. Quelques-uns des résultats obtenus par M. Lan- gley sont consignés dans les trois diagrammes suivants (fig. 2, 3 et 4). Le premier représente le spectre de dispersion par le sel gemme ; les abscisses sont les indices, les ordonnées représentent l'énergie correspondante. Le second n'en diffère que par les abscisses qui sont données en longueurs d'onde. La super- ficie des courbes représente l'énergie totale. On a ajouté aux deux diagrammes le spectre solaire, / (e] / , / 1 a 1 0 i ) / ï d w oe © {l [NI G) \ 11 @: - 11 , / on o 11 S. € | | f QUI Q ë / Li CNT >. / DRE Do Energie Solaire l de L l | 178° 2/2 D 100° À a] nl = a ——— A 1,53 1,52 1,51 1,50 1,49 a ——— Spectre Visible Fig. d'ondes sont connues et peuvent être portées en } abscisses ; on le nomme spectre normal. Cependant le spectre de dispersion (spectre prismatique) peut être très utile à former, parce qu'il est beaucoup moins étalé dans l’infra-rouge, et permet des me- sures dans une région lointaine où l'on ne cons- tate plus rien dans le spectre normal. Les radiations mesurables sont généralement considérées comme posilives, c'est-à-dire que l’on observe le plus souvent un apport d'énergie au ré- cepteur; l'inverse peut avoir lieu ; dans certaines expériences, le cube de Leslie était à — 20° C. tan- dis que le fil du bolomètre était maintenu à Os; c’est après avoir réduit la surface visible du cube à une petite fente, après avoir étalé celle-ci en un spectre, qu’il s'agissait de constater une radiation. On voit ! Soit dans ces expériences, soit dans les mesures des ra- diations des flammes ou des foyers électriques, le corps rayonnant n’est autre que le charbon ; la radiation est donc entièrement absorbée par le récepteur. 25 à une échelle arbitraire. Ce spectre se termine à 2, 1 non seulement pour une raison d'échelle ; au delà de cette longueur d'onde, M. Langley n’a- vait trouvé dans ses premières recherches aucune radiation ; cette constatation fut le point de départ des expériences ; il parait évident que toutes les radiations de plus grandes longueurs d'onde sont presque totalement absorbées par l'atmosphère. Une autre absorption sélective est exercée sur divers points du spectre solaire. Le spectre hors de notre atmosphère doit être repré- senté à peu près par la ligne pointillée réunis- sant les sommets. Le troisième diagramme, obtenu beaucoup plus tard, complète les précédents. On y voit réunies les courbes de même superficie correspondant à la radiation d’une lampe à gaz, et d’un arc élec- trique, puis la radiation solaire sans absorption, enfin le spectre uniquement lumineux et à basse température d’un insecte vésicant, le Pyrophorus 16 CH.-ED. GUILLAUME. — L'ÉNERGIE DANS LE SPECTRE noctilucus. Nous avons ajouté la courbe de radia- tion à 178, déduite du second diagramme, el ramenée aussi à la même superficie. Pour celte dernière, le maximum est à à p. Ces trois diagrammes nous révèlent pour les spectres d’incandescence des caractères communs. Ces spectres paraissent se prolonger très loin dans l'infra-rouge, tandis qu'ils diminuent beaucoup plus rapidement du côté des oscillations de faible longueur d'onde. À mesure que la température s'élève, les radiations s’avancent de plus en plus vers le spectre visible; mais, fait digne de re- marque, et sur lequel nous reviendrons, même au delà de 525° le bolomètre ne révèle aucune énergie rayonnante dans les longueurs d'onde qui ra Solar | re | | Le second diagramme montre que le spectre solaire, et celui qui correspond à 100° empiètent fort peu l’un sur l’autre. Ce fait est de la plus haute importance ; en effet, si les radiations de plus grande longueur d'onde s’arrètent dans notre al- mosphère avant d'arriver au sol, on peut conclure de même que les ondulalions engendrées par un corps dont la température ne dépasse pas 100°, sont presque totalement dissipées avant d'arriver aux limites de notre atmosphère ; elles ne relour- nent que pour une très faible partie dans l’espace et ne sont pas perdues pour nous; cela est donc vrai a fortiori, de toutes les radiations émises par la surface de la terre ‘. Le rayonnement nocturne a cependant une influence énorme sur les climats ; Fig. affectent notre organe visuel. On voit enfin que le maximum des courbes se déplace vers les ondes courtes, lorsque s'élève la température de la source. Ajoutons que le point extrême où M. Langley a pu constater des traces de chaleur correspond à des ondes d'une longueur de 30 p. Avant lui, on n'avait guère réussi à dépasser 7 p.. Les ondulations les plus courtes que l’on ait mesurées sont au voi- sinage de 0,185 p; or nous avons la relation ap- proximative 0,185 275 — 30,0n possède donc,pour employer l’analogie musicale, plus dé sept octaves de radiations lumineuses, dont deux sont dues à M. Langley. En ce qui concerne la chaleur solaire, les con- clusions sont faciles à tirer; il est infiniment pro- bable que notre astre central émet des radiations de grande longueur d'onde ; mais au delà de 2,1 p. la presque totalité de l'énergie est absorbée par notre atmosphère. 2. que deviendrait-il si l'atmosphère élait absolu- ment transparente ? Un mot encore sur le troisième diagramme. Le spectre entièrement lumineux du Pyrophorus dé- passe de beaucoup les limites du dessin ; son maximum se trouve 0,57 p.; il est représenté, en ordonnées, par 87 unités. III. — LES EFFETS DE L'ÉNERGIE RAYONNANTE. L'énergie et la vision. — Les problèmes relatifs à la vision dépendent de la réponse à une question que l’on peut poser dans les termes suivants: Quelle est, pour chaque longueur d’onde, le mini- mum d'énergie ou de puissance susceptible de nous donner l'impression de la lumière? Cette question une fois résolue (dans la supposition que, pendant loute la durée des expériences l’œil son maximum de sensibilité) on en ait conservé ! J1 n'est pas question ici, bien entendu, des rayons direc- tement réfléchis. CH.-ED. GUILLAUME. — L'ÉNERGIE DANS LE SPECTRE 17 CR déduira, par la loi logarithmique, l'intensité des impressions relatives de diverses régions d'un même spectre, la couleur subjective, la clarté, ete. M. Kœnig, MM. Macé de Lépinay et Nicati ont déterminé les courbes de sensibilité relative; M. Langley a mesuré en plus la sensibilité absolue. Pour la première de ces études, M. Langley dé- terminait l'éclairement de diverses teintes néces- saire pour lire une table de logarithmes !. Ce pro- cédé, qui parait primitif au premier abord, est bien, en effet, celui qui donne les résultats immé- diatement utilisables, et les photomètres ordi- naires, d'un emploi presque impossible lorsque les lumières à comparer sont diversement colorées, ne sont en réalité pas plus rigoureux. Cette étude faite, il suflisait de déterminer l’unité, en mesu- rant la quantité d'énergie de n'importe quelle comme grossièrement approchés, car ils diffèrent beaucoup d’un observateur à l’autre, comme le montrent les trois courbes de sensibilité du dia- gramme (fig. 5), qui ont été tracées par trois obser- vateurs différents, et se rapportent à la même quantité d'énergie. Quant à la puissance minima nécessaire à la vi- sion, elle est de 2,8.10° ergs par seconde dans le vert; on en déduit l'échelle du tableau ci- dessus !. Reportons-nous aux chiffres donnés par la sensibilité du bolomètre et du radio-micro- mètre de M. Boys. Nous voyons que dans la région qui lui convient, notre œil est incompa- rablement plus délicat. Une constatation analogue peut être faite pour la sensibilité de notre oreille à l'énergie des vibrations matérielles, de notre de C6 : 08 Spectre! Viaibla Fig. teinte susceptible de donner une impression lumi- neuse; la difficulté de cette dernière recherche con- | sistait surtout à élaler assez un spectre lumineux | connu, pour atteindre la limite de la visibilité. Le tableau suivant indique la sensibilité ? de l'œil pour des radiations de diverses longueurs d'onde; les résultats sont une moyenne obtenue par trois observateurs : Longueur d'onde Sensibilité p. 0,34 0,003 0,38 0,020 0,40 (violet) 0,128 0,45 (bleu) 2,10 0,50 (vert) 1,58 0,55 (jaune verdâtre) 5,38 0,60 0,95 0,65 (rouge) 0,07 0,10 0,012 0,75 0,000 06 0,168 (rouge très sombre) 0,000 O1 Ces nombres ne doivent être considérés que ! C’est aussi la méthode qu’ayaient employée MM. Macé de Lépinay et Nicati. ? C'est-à-dire le nombre réciproque (relatif) de l'énergie nécessaire pour produire un effet constant. L’intensité de la sensation pour une même quantité d'énergie est proportion- « nelle au logarithme de ces nombres. ES organe olfactif pour des quantités prodigieusement faibles de matière. Au point de vue de la sensibilité maxima, nous sommes donc admirablement armés. Malheureusement, pour {ous nos organes, cette sensibilité est sélective ou limitée à un tout petit espace. Nous ne quitterons point ce chapitre sans men- tionner les recherches faites il y à quelques années par le professeur H.-F. Weber et ses élèves, sur le commencement de l’émission lumineuse dans les corps incandescents. On pensait, depuis Draper, que les corps chauffés commencent à émettre de la lumière vers 525°; que cette lumière débute dans le rouge, et s’avance peu à peu dans le spectre. En examinant plus attentivement le phé- 1 D'après M. Tumlirz, une bougie envoie à un mètre de distance, sur une pupille de 3 mm. d'ouverture, une quantité d’énergie lumineuse qui atteindrait une petite calorie en 450 jours, ou environ un erg par seconde. A 12 kilomètres cette bougie aurait l'éclat d’une étoile de 6e grandeur, et, serait encore visible; elle enverrait dans la pupille par seconde 7.10 ergs. Ce chiffre est bien d’ac- cord avec celui de M. Langley, étant donnée surtout la diversité des foyers. En résumé, la puissance nécessaire au minimum de perception lumineuse fournirait une petite calorie en 180 millions d’années. 18 CH.-ED. GUILLAUME. — L'ÉNERGIE DANS LE SPECTRE nomène, M. Weber a trouvé que la première sen- sation est celle d'une lumière grisàtre, émise au- dessous de 400°; peu à peu, la teinte s'affirme ; elle correspond à peu près à la raie D; puis la lumière rougit franchement, et l’on arrive à la première émission observée par Draper. Ce fait s'explique aisément; en effet, bien que le bolomètre n'indique aucune énergie radiante dans la partie moyenne du spectre visible, lorsque la température n’est pas très élevée, notre œil, dont la sensibilité y est beaucoup plus grande, perçoit les premières traces 040 045 0,60 0,65 070 fa Fig. 5. des radiations, tandis que l'énergie dans le rouge, ne peut pas encore nous impressionner quoiqu'elle soit sensiblement plus forte; la sensation du rouge ne se produit que lorsque l'énergie est devenue, en cet endroit, cent mille fois environ plus considé- rable qu'au moment de la première perception dans le jaune verdâtre. L'énergie el la radiochimie. — On sait que la photo- graphie nous révèle des étoiles que nous ne pouvons voir avec les mêmes objectifs; on en infère par- fois que la pellicule photographique est encore plus sensible que notre œil; il ne faudrait cepen- dant pas se laisser tromper par les apparences ; en effet, les méthodes photographiques permettent d’accumuler l’action en un même point, etde déter- miner après un temps prolongé la décomposition des sels d’argent. Les poses de 5 et même de 10 heures ne sont pas rares ; or il suffit d’une demi- seconde pour nous donner l'impression d’une lu- mière à la limite de visibilité ; la photographie dis- pose de durées qui sont plus de cinquante mille fois plus considérables. D’autre part, l'énergie radiante qui provoque les impressions photogra- phiques se trouve dans une partie du spectre quiest, dans tous les cas, dans larégion rapidement descen- dante de la courbe qui en représente la répartition, tandis que, pour les astres, notre œil bénéficie du fait que le maximum de la courbe coïncide à peu près avec sa plus grande sensibilité. Sans vouloir fixer un chiffre exact, pour lequel les données font défaut, nous pouvons donc dire que la sensibilité des réactions photographiques parait être du même ordre de grandeur que celle de notre œil. La raison en est simple : les réactions photogra- phiques, ainsi que le faisait remarquer dernière- ment M. Berthelot, sont exothermiques, et les radia- tions n’agissent sur elles que comme un excitant. Revenons au bolomètre; ses indications, pour les radiations des plus belles étoiles fixes sont douteuses, et il parait être, ainsi que le radio- micromèlre, sur le point de donner un résultat. Or l'échelle de grandeur des étoiles est caracté- risée par le rapport (minimum) 2,5 des temps de pose nécessaires pour gagner une unité. La 14° grandeur, que l'on photographie couramment avec une pose d'une heure et un objectif de 33 centimètres, correspond donc à une intensité il {l 2,5% 400.0(0 de première grandeur !. Ceci nous donne une mesure du rendement relatif des appareils radio- thermiques et radiochimiques. maxima de de celle d’une étoile IV. — RELATIONS MATHÉMATIQUES ; RADIATION TOTALE; UNITÉ DE RADIATION. Nous venons de voir comment, pour chaque température, la radialion d’un solide dépend de la longueur d'onde (À). Nous pouvons mainte- nant considérer la température (r) comme variable, et chercher à tracer la courbe d'émission pour une longueur d’onde déterminée; ou bien aussi estimer, pour chaque température, la radiation totale, c'est-à-dire l'aire des courbes (exprimée par En faisant cette quadrature, on re- : 1 FO) a) Se à / marque que l’aire en question augmente rapidement avec la température, et ne peut pas être exprimée simplement en fonction de la diffé- rence de température du corps émissif et du corps absorbant. Les anciennes formules de Newton et de Lambert ne rendent aucunement compte du phénomène. Dans ces dernières années, de nou- velles formules empiriques ont été données, for- mules dont plusieurs représentent assez fidèlement les résultats de l'observation. C’est ainsi qu'après Dulong et Petit, E. Becquerel, M. Violle, M. Garbe, M. H.-F. Weber ont donné des formules exponen- üelles en T seul ou enT et À; que M. Stefan a exprimé la radiation totale émise par un corps et absorbée par un autre, en fonction de la différence des quatrièmes puissances des températures ab- solues des deux corps; qu'enfin M. Michelson, discutant le phénomène au point de vue des mou- vements moléculaires les plus probables, donne 1 Voir dans la Revue des 30 août et 15 septembre l'article i de M. Trériep sur la carte du Ciel. 2 de CH.-ED. GUILLAUME. — L'ÉNERGIE DANS LE SPECTRE 19 une fonction déterminée en À, mais qui contient encore un terme arbitraire en T. La seule dis- cussion de ces formules prendrait, dans cet article, une place exagérée. Nous dirons seulement que la formule de M. Stefan, la plus simple et la plus mnémonique de toutes, ne convient pas à un inter- valle étendu : elle donne, aux températures très élevées, des résultats un peu bas. La pierre de touche de ces diverses formules, en ce qui concerne la relation avec la température, réside en grande partie dans les belles mesures de M. Violle sur l'émission du platine pour diverses longueurs d'onde entre 175°et 1775°, et de l’argent à sa température de fusion (954°). Le coefficient d'émission du platine est environ trois fois plus grand que celui de l'argent; les radiations totales aux températures de fusion respectives sont dans le rapport de 54 à 4 !. Les progrès de l'éclairage électrique ont fait désirer de posséder un étalon de radiation facile à reproduire, et dont la qualité ou la coloration ne fût pas trop différente de celles des foyers mo- dernes; on a choisi, comme unité pour chaque ra- diation l'énergie émise par un centimèlre carré de platine au moment de sa solidification. Le tableau suivant résume les données obtenues par M. Violle sur l'effet lumineux de la radiation du platine en fonction de T et À, rapportées aux intensités à A5 v ET Ho 1150 0,000 % 0,000 07 0,000 03 » 93% 0,002 0 0,001 2 0,000 07 : 1045 0,006 4 0,004 5 0,002 7 0,001 3 1500 0,303 0,271 0,225 0,156 1775 1, 1, 1, 4, L'étalon de M. Violle, fort utile en pratique, a reçu le nom d’étalon absolu de lumière ?. NV. — L'ÉCLAIRAGE. Depuis que la notion de l’énergie dans le spectre a été entrevue avec une netteté suffisante, de- puis surtout que nous connaissons la répartition de cette énergie, les physiciens se sont aperçus, avec stupéfaction, que les meilleurs éclairages sont positivement désastreux. Deux mauvais rendements se multiplient l’un par l’autre : dans toute lampe à combustion, le refroidissement s’opère bien plus par le courant d’air que par le rayonnement, et toute la chaleur communiquée à l'azote et aux produits de la com- bustion est perdue pour le but que nous nous 1! La radiation lumineuse du platine fondu est près de 1000 fois plus grande que celle de l’argent à sa température de fusion. (Voir plus loin.) 2 Nous reviendrons prochainement sur ce point. proposons. Dans la meilleure installation de lu- mière électrique, on n’amène, aux bornes de la lampe, qu'une quantité d'énergie inférieure à10°/, de l'énergie disponible du charbon'. Mais les pertes de ce chef sont minimes à côté de celles qui proviennent du phénomène lui-même de l'incan- descence. Reprenons la question de plus haut. On a cou- tume de désigner comme rendement lumineux d’un foyer le rapport de l'énergie lumineuse à l'énergie totale qu'il rayonne; ce rapport est celui des superficies comprises, d’une part entre l'axe des abscisses, la courbe d'énergie et les ordonnées extrèmes du spectre visible, d'autre part entre la courbe entière et l’axe des abscisses. Cette définition laisse évidemment un peu de prise à l'arbitraire, puisque la limite du spectre visible dans le rouge est assez mal définie, tandis que, dans cette région, les ordonnées croissent très rapidement; on peut modifier beaucoup la valeur donnée pour un rendement, sans allérer sensible- ment l’éclairement total ou la couleurde la source. La valeur de ce rendement serait encore des cen- taines de fois plus pelite, si, au lieu de considérer tout le spectre visible comme nécessaire à la vi- sion, on se contentait d’une petite portion des radia- tions situées dans la région de sensibilité maxima de l'œil, c’est-à-dire dans le jaune verdätre. Ce groupe de radiations suffirait à la rigueur pour nous donner une connaissance exacte de la forme des objets, et des degrés d’éclairement ; mais la notion de coloration disparaîtrait pour nous. Cette lumière, industrielle au plus haut point, nous con- damnerait au plus complet daltonisme. Le rendement lumineux, multiplié par l’équi- valent mécanique de la chaleur,nous donne ce que l’on nomme depuis quelques années l’éguivalent mécanique de la lumière. Cette notion est encore plus vague que celle du rendement ; sa désignation est, de plus, fort impropre, puisque la lumière est en réalité une sensation, dont il est impossible de déterminer l'équivalent. Mais quelque mal choisis que soient les termes, quelque mal définie que soit la chose elle-même, il n’en est pas moins fort utile de connaître l’ordre de grandeur du rende- ment d’une source ef de l’équivalent mécanique considéré. En mesurant dans la fig. 4 les superficies dont le rapport donne le rendement photogénique d'une lampe à are, nous avons trouvé ce rende- ment égal à 2,5°/, environ. En multipliant ce nombre par le rendement des machines, on trouve que l’on n'utilise comme lumière au maximum que ‘ Les moteurs à gaz donnent un peu plus, il est vrai; mais il faut ajouter à l’énergie potentielle du gaz la chaleur em- ployée dans l’usine pour distiller la houille. 20 CH.-ED. GUILLAUME. — L'ÉNERGIE DANS LE SPECTRE 0,25 °/, de l'énergie du charbon brûlé dans la ma- chine à vapeur qui alimente la lampe à arc. Comme nous ne possédons aucune donnée précise sur les pertes diverses des lampes à combustion, les me- sures de M. Langley ne peuvent nous renseigner sur le rendement des lampes à gaz; mais des expé- riences récentes dont M. Aimé Witz a rendu compte dans cette Revue (n° du 30 octobre 1891) four- nissent des données sur ce point. On se souvient que, en mesurant simultanément le pouvoir éclai- rant de divers foyers et leur consommalion, ou les watts aux bornes des lampes électriques, M. Witz a déterminé la relation entre les calories dépensées et les carcelheures fournis par ces foyers. Si l’on pose le rendement total de lalampe à arc égal à 0,25 °/,, on trouve celui des foyers en multipliant ce nombre par le rapport inverse des calories dépensées ; le tableau suivant contient les résul- tats de ces mesures : Calories Rendement par Rendement photogénique carcel-heure ! total (Langley) Bougie de l’étoile..... 716 0,000 14 Bec de gaz Bengel.... 567 0,000 18 0,012 Bec à récupération... 189 0,000 53 Lampeäincandescence 20 0,000 50 Hamperalarc. ee 4 0,002 50 0,025 Le rendement photogénique du soleil est d’en- viron 14 °/,; c’est le plus élevé que donne un foyer incandescent. Le maximum de la radiation corres- pond à la plus grande sensibilité de notre œil ; de telle sorte que l'énergie solaire est utilisée le mieux possible pour la vision. L’adaplation dans le sens darwinien nous parait manifeste. Le rendement photogénique d’un foyer incan- descent augmente avec la température; or, il est * Le rendement photogénique d’une lampe à gaz serait, d’après les courbes de M. Langley, de 1,2 0/, environ, soit la moitié de celle de l'arc, tandis que le rendement, d’après M. Witz serait dans le rapport de 4 à 140 ou 1 à 47, suivant le bec considéré; mais ces rapports doivent être réduits au dixième (c’est-à-dire à 4:14 et 1: 4,1) parce que, pour les brüleurs, M. Witz mesure le rendement total, tandis que pour les lampes électriques, la consommation se rapporte au rendement photogénique. Pour calculer les nombres de la deuxième colonne, nous avons ramené les divers foyers aux mêmes circonstances, c’est-à-dire que nous sommes parti d’abord d'un rendement de 2,5 °/, pour la lampe à are, puis nous avons divisé par 10 le rendement des deux foyers élec- triques. Les rapports trouvés respectivement par M. Witz et M. Langley entre la lampe à arc et les foyers à gaz montrent que le rendement organique de ces derniers est beaucoup plus faible que celui de la machine à vapeur. Les nombres des tableaux ne peuvent être considérés que comme une grossière indication; car, d’une part le rende- ment des foyers électriques dépend des conditions dans les- quelles ils fonctionnent; d'autre part, il convient de spécifier la direction des rayons avec l’axe du foyer. Par exemple, le rapport 5 du rendement des lampes à arc et à incandescence est sans doute trop élevé si ces dernières sont suffisamment poussées, et si l'on tient compte de l'intensité sphérique. Il n’en est pas moins intéressant de noter que la combus- tion d'une bougie donnerait des milliers d'heures d'un bon éclairage, si tout était employé à produire de la lumière. peu probable que les moyens artificiels nous per- mettent jamais de dépasser beaucoup celle de l’are électrique ; il est donc à peu près certain que l’in- candescence ne nous donnera jamais un rendement photogénique supérieur à 5 ?/,; la production éco- nomique de lalumière doit donc recourir à d’autres procédés !. La question n’est pas oiseuse, puisqu'il existe des foyers de lumière infiniment mieux appropriés à notre œil, celui du ?yrophorus noctilucus, par exemple, dont le rendement, même considéré dans le sens le plus restreint possible, est égal à l'unité ?. D'un autre côté, la lumière du magnésium pos- sède une coloration bien différente de celle qui correspondrait à la température de combustion du mélal; il n'ya pas là une simple incandescence, mais bien le phénomène plus compliqué, dontnous avons parlé au début; la qualité des radiations de la magnésie chauffée dépend sans doute de la conslilution de sa molécule et des mouvements de ses atomes. On sait que la phosphorescence est profondément modifiée par la température; en gé- réral, elle augmente beaucoup lorsque la tempéra- ture s'élève. La magnésie nous offrirait un cas de l Les rendements que nous calculons ici sont les plus faibles qui aient été donnés ; le lecteur pourrait croire à une méprise, et il convient de justifier la méthode adoptée dans ce travail. Nous sommes parti de la définition généralement recue, et nous y avons ajouté la seule hypothèse de l’absorp- tion totale de toutes les radiations par le noir de fumée. Si cette absorption est incomplète pour les grandes longueurs d’onde, le dénominateur est diminué, et le rendement est au contraire donné par un nombre trop fort; donc, en théorie, la méthode suivie ici fournit une limite supérieure de ren- dement. Le seul doute que l’on puisse élever concerne les nombres dont nous avons fait usage; or les données four- nies par M. Langley sont corroborées par d’autres, en particu- lier celles de M. Knut Angstrüm. Les mesures faites par M. Blattner, Nakanao et d’autres physiciens conduisaient à des rendements photogéniques at- teignant 20 0/, pour la lampe à arc; or la méthode générale- ment suivie Jusqu'ici consisteà mesurer, dans une expérience, la radiation totale du foyer ; dans une seconde expérience, la radiation qui a traversé une certaine épaisseur d’eau ; on ad- met alors, ce qui serait un véritable miracle, que l'absorption totale commence à l'endroit précis où la vision cesse, et qu'aucune radiation obscure ne traverse l'eau, ou, du moins, que les radiations invisibles non absorbées sont une quantité négligeable. Or, d'après les expériences de M. Knut Ang- strüm (Revue, 30 décembre 1890), la portion de la radiation obscure d’une lampe d’Argand traversant une épaisse couche d’eau est environ 10 0/, de la radiation totale. Si la radia- tion visible constitue 20/,, la mesure porte le résultat à 12 0/,; on saisit le défaut d'interprétation : la quantité qui traverse l’eau peut passer pour négligeable vis-à-vis de la to- talité, tandis qu’elle est beaucoup plus grande que la partie lumineuse. Nous verrons, dans un prochain article, que la valeur du rendement doit encore être abaiïssée. 2 On sait que la femelle du ver luisant possède seule le pouvoir éclairant; c’est le moyen qui lui a été donné de ré- véler sa présence aux insectes mâles. Si l’on admet que, pour ce coléoptère, l'adaptation selon Darwin est complète, on en conclura que l'œil du ver luisant possède un maximum de sensibilité à peu près au même endroit du spectre que notre œil. CH.-ED. GUILLAUME. — L'ÉNERGIE DANS LE SPECTRE 21 phosphorescence énergique, qui ne se produit qu'à haute température. On entrevoit aussi la possibilité d’avoir recours à des phénomènes de tout autre ordre, qui, jus- qu'ici, sont restés dans le domaine des re- cherches du laboratoire ou de la spéculation mathématique. On sait produire des oscillations électriques d’une longueur d’ordre parfaitement déterminée, ou comprises entre certaines limites !; jusqu'ici on n’est pas descendu au-dessous de quelques centimètres. Mais, que l'on apprenne à construire des excitateurs d’une grandeur et d’une forme convenables ; que l’on parvienne surtout à entretenir dans leur masse des oscil- lations électriques, et l’on pourra produire des spectres d'émission limités à la partie visible. Le problème de l'éclairage artificiel économique sera, dès ce jour, complètement résolu ?. Ge sera la plus belle confirmation industrielle des idées émises par les électriciens modernes. Les diflicultés sont grandes assurément; si grandes même qu'aucun physicien, croyons-nous, ne se figure comment le le problème peut être abordé; mais rien ne nous fait croire qu’elles soient insurmontables. Dans cette étude, trop longue sans doute au gré de nos lecteurs, bien courte cependant relativement à l'étendue du sujet, nous n'avons pu qu'effleurer un grand nombre de points délicats de la question. Nous avons cherché à résumer les travaux mo- dernes sur les radiations ;nous avons montré aussi combien il reste à faire dans ce domaine. Nous voudrions seulement insister sur le côté purement administratif de la question, celui des définitions ; bien qu'il soit d’un ordre inférieur, nous n’hésite- rons pas à dire que bon nombre de progrès en dé- pendent; on ne travaillera avec ensemble que lorsque l’on se comprendra. Ch.-Ed. Guillaume, docteur ès sciences, adjoint au Bureau international des Poids et Mesures. La question qui vient d'être traitée, ayant été l'objet 1 Les expériences de MM. Sarasin et de la Rive peuvent faire croire que ces limites sont très étendues pour un réson- nateur donné; mais, ainsi que M. Poincaré l’a fait observer, le flou incontestable de ces spectres d’émission est beaucoup augmenté en apparence par l’indétermination due à l’amor- tissement dans le résonnateur. 2 Voir, à ce sujet, Lodge : les Théories modernes de lélec- tricité, traduit par M. Meylan. (Gauthier-Villars.) de recherches disséminées de tous côtés, il nous parait ulile de rassembler ici les plus importantes : INDEX BIBLIOGRAPHIQUE Mouwrox : Sur la détermination des longueurs d'onde calo- rifiques. (Comptes rendus, t. LXXXVIIL, p. 1018 ; 1879. Desans et Curie : Recherches sur la détermination des lon- gueurs d'onde des rayons calorifiques à basse tempéra- ture. (Comptes rendus, t. XC, p. 1506; 1880.) LanGcey (S. P.) Researches on solar heat. (Professionnal papers of the signal service, XV, 1884). — On the selective absorption of solar energy.(Phil. Mag, t. XV, p. 153, 1883.) — On the determination of wave-lengths in the invi- sible prismatic spectrum. (1b., t. XVII, p. 194; 1884.) — On invisible heat spectra. (1b.,t. XXI, p. 394 ; 1886.) — Onthe hitherto unrocoquited wave-lengths. (1b.,t. XXIT, p. 149 ; 1886.) — On the invisible solar and lunar spectrum. (Jb., t. XXVI, p. 505; 1888.) — On energy and vision. (1b., t. XXVII, p. 1 ; 1889.) — and Very, On the cheapest form of light. (1b., t. XXX, p. 260; 1890.) ViozLe : Sur les radiations du platine incandescent (Comptes rendus, t. LXXVII, p. 171 ; 1879.) — Intensité lumineuse des radiations émises par le pla- tine incandescent., (Comptes rendus, t. XCIT p. 866; 1881.) — Sur la loi du rayonnement. (/b., p. 1204.) — Sur l'étalon absolu de lumière. (1b., t. XCVIIT, p. 1032 ; 188%.) — Comparaison des énergies rayonnées pour le platine et l'argent fondants. (1b., t. CV, p. 163, 1881) Weger (H. F.). Untersuchungen über die Strahlung fester Kürper. (Académie de Berlin, 1888, p. 565.) — Die Entwickelung der Lichtemission glühender fester Kürper. (1b., 1887, p. 229.) Graerz : Ueber das von Herrn EF. Weber aufgestellte Strah- lungs Gesetz. (Wied. Ann., t. XXXVWI, p. 87, 1889.) Tumurz et Ruen : Die Energie der Wärmestrahlung bei der Weissgluth. (Académie de Vienne, 1888, p. 1523.) — Berechnung des mechanischen Lichtäquivalents aus den Versuchen des Herrn J. Thom sen. (/b., p. 1621.) TumLrz : Das mechanische Aequivalent des Lichtes. (1b., 1889.) (Les mémoires ci-dessus ont été reproduits dans les Annales de Wiedemann.) MicneLson : Essai théorique sur la distribution de l'énergie dans les spectres des solides. (Journal de Physique, t. NI, p. 407, 1887.) Wiepemanx E. : Zur Mechanik des Leuchtens. (Wied. Ann., t. XXXVII, p.177, 1889.) _—— Sur les mouvements à l’intérieur des corps qui pro- duisent la luminosité (4rch. de Genève, t. XXV, p. 261, 1891.) BerraeLor : À propos de la communication de M. Poincaré sur l'expérience de M. Wiener. (Comptes rendus, t. CXII, p- 329, 1891.) >éunion du Comité international permanent pour l’exécu- tion de la Carte du ciel. (Publication de l’Académie des sciences.) Voir aussi les articles récents de M. Trépied et de M. Witz dans la Revue. Axcsrrôn K. : Beiträge zür Kenntniss der Absorption der Sonnenstrablen durch die verschiedenen Bestandtheile der Atmosphäre. (Wied. Ann., & XXXIX, p. 2617, 1599, et Revue générale des Sciences du 30 décembre 1890.) Cu -Eo. G. 19 19 P. VUILLEMIN. — LES CHALAZOGAMES DE M. TREUB LES CHALAZOGAMES DE M. TREUB ET L'ÉVOLUTION DES PHANÉROGAMES La découverte d’une nouvelle classe de Phané- rogames est un événement dans les fastes de la botanique. Sans doute les transformistes supposent volontiers l'existence de classes éleintes et deman- dent à la Paléontologie des types intermédiaires capables de raccourcir la distance qui sépare les Gymnospermes des Angiospermes. M. Treub vient d'avoir la bonne fortune de trou- ver mieux que cela!, non pas dans une plante fossile, mais dans un genre dont les représentants ornent les boulevards de certaines villes du midi de la France. Les Cusuarina, ces arbres océaniens dont le port est un bizarre compromis entre les Prêles et les Conifères, sont en effet, de par l’orga- nisation de leur fleur femelle, aussi déplacés parmi les Angiospermes, — Monocolylédones ou Dicotylédones, — que parmi les Gymnospermes, groupe considéré, en raison de son infério- rité, comme intermédiaire entre les Angio- spermes et les Cryptogames. Mais ils déjouent toutes les prévisions théoriques, car ils sont à la fois plus Angiospermes que les Monocotylédones et les Dicotylédones, plus Cryptogames que les Gymnospermes. L’angiospermie consiste dans l'inclusion de l’ovule (qui deviendra la graine) dans un ovaire clos, qui donnera le fruit. L’ovaire est surmonté d’une colonne pleine (style) organisée aux dépens de la feuille ou des feuilles (carpelles) qui l'ont formé lui-même. Le tube pollinique, chez les Angio- spermes, doit s'insinuer au travers des tissus du style pour pénétrer dans la cavité ovarienne et aborder l’ovule. Ce premier pas franchi, il trouve le micropyle, porte ouverte dans les téguments de l’ovule, et lui livrant passage jusqu’au nucelle et à l’oosphère qu’il doit féconder. Chez les Casuarinées, la cavité ovarienne, à peine ébauchée, se comble; le micropyle se ferme à son tour, et c’est par effrac- tion que le tube pollinique doit franchir le tégu- ment ovulaire, comme il franchit l'enveloppe carpellaire seule chez les Angiospermes typiques. Le tube pollinique continue son trajet interstitiel dans le tégument jusqu’à la chalaze, c'est-à-dire jusqu’au fond de l’ovule, pour aborder à rebours le nucelle, le sac embryonnaire et l’oosphère. Le caractère des Gymnospermes se retrouve 1 Treus. — Sur les Casuarinées et leur place dans le système naturel (Annales du Jardin botanique de Buitenzorg). — Vol. X. 2e partie, 1891; p. 145-231; pl. xrr-xxxIr. chez les Casuarina, dans la formation de nombreux noyaux endospermiques, à un stade qui parait être antérieur à la fécondation. Mais pour les phéno- mènes qui préparent la formation du sac embryon- naire, il faut décidément chercher des termes de comparaison parmi les Cryptogames; car les Casuarinées s’éloignent des Phanérogames con- nues : de par le grand massif de tissu sporogène (archéspore), composé de centaines de cellules; 2° par la division des cellules sporogènes en quatre articles superposés (macrospores), qui acquièrent conjointement un certain développement, tandis que, chez les Phanérogames, un refoulement pré- coce de trois de ces cellules laisse d'emblée le champ libre à la macrospore privilégiée; 3° enfin par le grand nombre (une vingtaine ou davantage) de macrospores qui se développent. Ce complexus de caractères ultra-angiosper- miques et infra-gymnospermiques justifie ample- ment la création d'une classe nouvelle. M. Treub lui donne le nom de Chalazoyames. Gette classe, rangée dans le sous-embranchement des Angios- permes et comprenant le genre unique Casuarina, constituerait à elle seule une subdivision équiva- lente aux deux classes antérieurement connues. Les Monocotylédones et les Dicotylédones forme- raient la subdivision des Porogumes. On se demandera même si l’angiospermie, mal- gré la valeur qu’elle a acquise chez les Monocotylé- dones et les Dicotylédones, est à elle seule. un caractère suffisant pour contrebalancer les indices d’infériorité révélés par les étonnantes découvertes de M. Treub, et si l’on est autorisé à placer les Chalazogames dans le même sous-embranchement que les Monocotylédones et les Dicotylédones. Les conditions spéciales dans lesquelles se pré- sente l’angiospermie chez les Casuarinées, son exagération même nous mettent en défiance contre sa valeur taxinomique. Il est, en effet, fort pos- sible que l’angiospermie se soit réalisée à plusieurs périodes indépendantes de la phylogénie. Les particularités qui accompagnent l’angiospermie des Chalazogames semblent indiquer que le type pistillaire de ce groupe ne fait pas partie de la série progressive qui a pour couronnement l’an- giospermie des Porogames. Cette dernière est le terme ullime d’une série de modifications du sporophore, qui assure une protection de plus en plus parfaite à la jeune plante, en enveloppant les spores dans un sac de cellules stériles (paroi P. VUILLEMIN. — LES CHALAZOGAMES DE M. TREUB 23 du sporange) chez les Cryptogames supérieures, — en relevant le tégument autour du nucelle (équi- valent du sporange) chez les Gymnospermes de façon à constituer ainsi la graine, — en fermant le fruit autour de la graine chez les Angiospermes. Par le progrès naturel de l'évolution, il était logique que l’occlusion du micropyle devançàt dans Ja phylogénie et dans l’ontogénie, l’occlusion de l'orifice stigmatique. Mais, si la première de ces modifications a dû se produire plus facilement que la seconde, en revanche, la sélection naturelle a dû empêcher le maintien de celle-là autant qu'elle a dû faciliter et accélérer la fixation de celle-ci, car l'occlusion du micropyle compromet- tait les fonctions de l’ovule autant que la protection réalisée par un ovaire clos favorisait les premiers développements de l'embryon. Chez les Casuarinées la fermeture de l'ovaire a été sans doute provoquée par le même accident que la fermeture de l’ovule. L'avantage résultant de l’angiospermie a seul assuré la survivance de ce groupe, en compensant les difficultés de la fécon- dation et les complications de la chalazogamie, que l’on ne saurait considérer comme un progrès. Toutefois une telle compensation n’a pas sufli pour assurer la prépondérance de ce groupe en présence de ceux où l’angiospermie ne s’est pas accom- pagnée de l’occlusion du micropyle. Le type angiospermique des Porogames n’a pu être acquis que progressivement. L’occlusion des carpelles s’est d’abord produite dans la période de maturation, comme nous en voyons encore un exemple chez les Genévriers, dont la graine, d’a- bord nue, s’entoure secondairement d’une enve- loppe qui a toute l’apparence d’un fruit charnu. Ce phénomène, compatible avec l’ouverture de la graine et du fruit à l’époque de la fécondation, s’est accéléré au point de devancer la pénétration du tube pollinique, tandis que l’ovule gardait ses caractères primitifs et que le style organisait un tissu conducteur favorable à la fécondation. Telle est la genèse la plus vraisemblable du type ovarien de nos Angiospermes. Elle suppose une série de transformations, dont le temps est un facteur nécessaire. L’angiospermie, telle que les Chalazogames nous la présentent, a pu, au contraire, survenir très brusquement, l’évolution du fruit ayant marché du même pas que l’évolution des téguments ovu- laires. Les Chalazogames peuvent donc s'être or- ganisées à une époque très ancienne, indépendam- ment de la série qui s’est différenciée en Gymnos- permes, comme de la série qui a donné les An- giospermes ordinaires. Ce point admis, tout devient clair dans les affi- nités des Chalazogames et dans leur phylogénie. Nous ne connaissons pas de type plus primilif de Phanérogames. Déjà les feuilles dénotent le plus bas degré de l'évolution de l’appareil végélatif, ainsi que je l’observais en 1886. Les caractères suivants de l’organe femelle trahissent une infé- riorité incontestable. Le jeune ovaire contient une excroissance ovulo- placentaire, dans laquelle le développement du placenta n’a pas pris les devants, par accélération ontogénique, sur l'apparition de l’ovule. L'appareil sexué, issu d'une seule cellule, pré- sente dans le nombre de ses éléments une incons- tance que l’on ne trouve même pas chez les Gymnospermes. Les cellules voisines, qui ac- compagnent l’oosphère, ne sont pas identiques aux synergides, selon la juste remarque de M. Treub; leur rapprochement des « cellules de canal » soulève quelques objections; elles ne peu- vent être mieux comparées qu'aux cellules stériles (globules polaires) du pollen des Conifères. Le prothalle femelle a donc subi une réduction paral- lèle à celle du prothalle mâle, au lieu de décroitre lentement comme dans la série qui comprend les Cryplogames vasculaires et les Gymnos- permes. Le développement de l’archéspore ne trouve pas d'équivalent direct parmi les Phanérogames ni les Cryptogames vasculaires, mais plutôt parmi les Bryophytes (Mousses). Le nucelle des Casuarina offre de singulières ressemblances avec le sporo- gone de cet embranchement. Les sacs embryon- naires (spores) sont entremêlés de trachéides que M. Treub compare aux élatères des Hépatiques. L'archéspore rappelle plus directement la colonre axile des Mousses par son prolongement rétréci au-dessous de la région des spores. À côté des spores qui forment un appareil sexuel, plusieurs autres s’allongent en tubes tournés vers la chalaze et assez longs pour s’insinuer entre les éléments de cette région, les miner et frayer une voie plus facile au tube pollinique. Cette sorte de germina- tion des spores n’est pas sans analogie avec la naissance des protonémas de Mousses : en sorte que l’on pourrait voir, dans cette particularité, un autre vestige bryophytique, à côté des sacs em- bryonnaires imparfaits, précurseurs du type an- giospermique. Je considère depuis longtemps comme homologues la colonne axile des sporo- gones de Mousses et le plérome des Phanérogames. Chez les premières plantes où la région stérile du sporogone s’est différenciée en membres munis de faisceaux, l’organisalion vasculaire n’a pas dû se localiser aussi étroitement que dans la suite de l'évolution phylogénique. Il est assez naturel de rapporter à un vestige de cel état primitif les tra- chéides éparses parmi les spores et d'y reconnaitre 24 IL. AUTONNE. — TRAVAUX RÉCENTS SUR L'ÉQUATION DIFFÉRENTIELLE DU I* ORDRE un bois rudimentaire et encore diffus, mais déjà limité au plérome. Les Chalazogames sont donc, à mon sens, un groupe plus voisin des Bryophvtes que des Cryp- logames vasculaires. Bien loin d’amoindrir la dis- tance qui sépare les Angiospermes des Gymno- spermes, elles feraient supposer que les Gymno- spermes et les Angiospermes ont eu des origines cryptogamiques distinctes; car si les premières dé- rivent clairement des Cryptogames vasculaires, la souche des secondes se confondrait avec celle des Bryophytes, s’il était élabli que les Porogames ont, avec les Chalazogames, plus qu'une ressem- blance superficielle. Ces rapides considérations donnent une faible idée des conséquences immenses qui découlent de la grande découverte des Chalazogames. Je n'ai même pas résumé {tous les faits contenus dans le mémoire substantiel de M. Treub, persuadé que tout botaniste trouvera plaisir à étudier l'original, dont la lecture est facilitée par l’adjonction au texte de vingt planches d’une exécution irrépro- chable. Paul Vuillemin. Chef des travaux d'Histoire naturelle à la Faculté de Médecine de Nancy. A PROPOS DE QUELQUES TRAVAUX RÉCENTS SUR L'ÉQUATION DIFFÉRENTIELLE DU PREMIER ORDRE Les progrès de l'analyse mathématique sont de nos jours extrêmement rapides : les faits nouveaux s'accumulent, des théories entières surgissent ou se transfigurent presque de mois en mois, Malheu- sement toutes ces découvertes sont disséminées dans d'innombrables mémoires insérés aux re- cueils spéciaux et dont la lecture est souvent diffi- cile, même pour des mathématiciens de profes- sion : tant une préparation particulière est indis- pensable pour chaque théorie. Il importe cependant que les algébristes (ne füt- ce que pour l'honneur de leur science) ne laissent pas ignorer au public que les mathématiques pures marchent aussi vile que les autres sciences dans le merveilleux essor qui les entraine toutes aujourd'hui. Pour faire juger de l’activité qui règne dans les recherches analytiques, je voudrais donner aux lecteurs de la Revue une idée des nombreux et récents lravaux qui se rapportent à wne seule Lhéorie particulière. Je choisis à cet effet celle de l’équa- tion différentielle du premier ordre dont j'ai person- nellement eu occasion de m'occuper. Dès la constitution du calcul infinitésimal, on a eu besoin (notamment lorsqu'on cherchait une courbe plane définie par une propriété de la tan- gente) de trouver une fonction y de la variable x, fonction inconnue, mais liée à sa dérivée y'etàx par une relalion connue : Î (æ, y, y) = 0 (H) Le problème de l'intégration de l'équation difré- rentielle H du premier ordre était ainsi posé. La question n’a jamais cessé depuis lors de préoccuper les géomètres ; mais pendant longtemps on à, pour ainsi dire, tourné autour. On se bornait à étudier des équations très particulières, dont l'intégration élait presque immédiate. Beaucoup de sagacité a été dépensé e durant cette période, à la- quelle se rattachent les noms de Bernoulli, Clai- raut, Euler, Riceati et de presque tous les algé- bristes des xvn°, xvui el de la première moitié du xix° siècle. C'est seulement grâce au mouvement de « re- naissance » mathématique inauguré par Cauchy et à l'emploi des imaginaires que le problème fut réellement abordé de front et dans sa généralité. Les Mémoires classiques de Briot et Bouquet (.Jour- nal de l'Ecole polytechnique, 1856) et les nombreux travaux plus récents qui s’y rattachent ont posé les véritables fondements de la doctrine. Il fallait prouver d’abord que le problème a un sens toujours, autrement dit que l'intégrale in- connue 7 existe. Briot et Bouquet achevèrent cette démonstration commercée par Cauchy. Ils montrèrent ensuite comment se comporte 7 pour des valeurs de +, très peu différentes d’une valeur donnée #,; ils construisirent ainsi des fragments d'intégrale. Mais il s'agissait de jeter un pont entre ces fragments el de suivre comment variait y pour une variation quelconque de z. A la vérité, cela réussit assez à Briot et Bouquet dans le cas où æ ne figure pas dans l'équation H, devenue f(y, y) —0, mais seulement dans ce cas-là. Empressons-nous d'ajouter que cette grosse difficulté n’est pas encore vaincue : dans les tout derniers lemps seulement, on semble entrevoir quelques linéaments de la solution. À Clebsch appartient le mérite d'avoir rajeuni L. AUTONNE. — TRAVAUX RÉCENTS SUR L'ÉQUATION DIFFÉRENTIELLE DU I ORDRE 95 la conception ancienne de la courbe intégrale, c'est- à-dire de la courbe pour laquelle zet y sont les coordonnés du point courant, y’ le coellicient an- gulaïre de la tangente. Clebsch a montré qu'une pareille courbe ne devail pas être considérée seu- lement comme le ‘ieu géomélrique de ses points successifs, mais aussi comme l'enveloppe de ses langentes successives. Chacune de ces deux con- ceptions isolée laisse échapper certaines courbes qui néanmoins réapparaissent en fin de calcul d'une façon inattendue; ces solutions singulières avaient très longtemps intrigué les géomètres. En ce qui concerne l'équation différentielle H du premier ordre et du premier degré (celle où la dérivée y’ figure au premier degré), un résultat très important est dû à M. Darboux !. Ce géomètre a montré que pour avoir {outes les solutions en nombre infini, il suflisait de connaitre un nombre fini d'équations algébriques entre y etæ, teHes que l’y qu'on en tire soit une solution de H. Il Cet historique était indispensable pour exposer quel était l’état de la question avant les récentes recherches qui sont venues transfigurer la théorie et mürir la solution. C'est M. Fuchs qui en 1884 est entré dans un nouvel ordre d'idées, où lui-même et ensuite MM. Poincaré et Painlevé ont obtenu les plus im- portants résultats. Il n’est pas facile de donner une idée succincte de recherches aussi abstrailes et aussi profondes. Je vais néanmoins l'essayer. Il y à un nombre infini de fonctions éntégrales y de æ satisfaisant à l'équation H. Chacune de ces intégrales pour chaque valeur de + possède plu- sieurs valeurs (et même un nombre infini) que l’on peut distinguer de façon à suivre comment la va- leur choisie de y varie avec z. Mais la distinction n’est plus possible pour certains couples de va- leurs de z etde y, au, comme on dit aussi, pour certains points critiques (de coordonnées z et y). Il résulte de là que, quoi qu'on fasse, une certaine ambiguité s’introduil pour l'intégrale considé- rée 7. Parmi les points criliques, les uns sont fires, c’est-à-dire les mêmes pour toutes les intégrales ; les autres sont mobiles, c'est-à-dire changent d’une intégrale à une autre. Ces derniers sont les plus embarrassants, car l'influence des points critiques fixes peut être appréciée par les procédés de Briot et Bouquet. | Bullelin des sciences mathématiques 1878. Cela étant, MM. Fuchs ! et Poincaré ? ont eu l'i- dée de rechercher ce qui se passe lorsqu'il n'existe pas de points critiques mobiles. En ce cas, de trois choses l’une : 1° y est lié à z par une équation algébrique et H est intégrée algébriquement ; 2° On peut exprimer y! à l’aide d’x seulement et remonter à 7 par l'opération relativement facile de la quadrature ; 3° On est ramené à l’équation bien connue de Riccati, dont toutes les intégrales s’obliennent par quadrature dès qu’on en connaît une. Les choses en étaient là lorsque l’Académie des Sciences de Paris mit au concours pour le grand prix des sciences mathématiques de 1890 précisé- ment le problème qui est l’objet du présent article. Le mémoire de M. Painlevé obtint le prix, le mien la mention honorable. Le premier parut dans les Axnales scientifiques de L'Ecole normaleA8M : le second moitié dans le Journal de l'Ecole polytech- nique, moitié dans les Annales de l'Université de Lyon pour cette même année 3. Le travail de M. Painlevé est la généralisation de ceux de MM. Fuchs et Poincaré. L'influence des points critiques mobiles, dont il vient d’être question, force à attribuer à une intégrale parti- culière 7 pour un z donné un nombre de valeurs en général infini. M. Painlevé s’est proposé d'exa- miner le cas où ce nombre est fini. Il existe alors une cerlaine courbe algébrique plane 4, dans laquelle se reflètent les propriétés de l'équation différentielle H, Le genre * de » a surtout de l’in- fluence sur la nature des intégrales; ainsi, par exemple, si ce genre est supérieur à 1, y est lié à z par une équalion algébrique. Je regrette vivement que la profondeur des matières traitées par M. Painlevé ne me permette pas de donner ici une idée, même rapide, des autres importants résultats qui remplissent son travail. Ajoutons qu'il a abordé aussi le pro- blème suivant : reconnaitre si les courbes inté- grales de H sont des courbes algébriques de genre donné. l Comptes rendus de l'Académie des sciences de Berlin, 26 juin 1884. 2 Acta mathemalica 1885 « sur un théorème de M. Fuchs ». 3 M. Picard, le rapporteur de la commission de l'Insti- tut, a rendu compte du concours à la séance publique de 1890. ‘ On appelle degré dune courbe plane (ou gauche) le nombre de points où la courbe rencontre une droite (ou un plan). Le degré d’une courbe plane étant désigné par » et la courbe ayant d points doubles, Riemann a appelé genre le nombre $ (n — 1) (n — 2) — d. Le genre d’une courbe gauche est celui de sa projec- tion. La nature intime d’une courbe dépend bien plus étroite- ment du genre que du degré. 26 L. AUTONNE. — TRAVAUX RÉCENTS SUR L'ÉQUATION DIFFÉRENTIELLE DU I1* ORDRE III Ce même problème, lorsqu'on ne fixe pas a priori le genre, devient encore plus difficile. On a, en somme, à chercher si y est une fonction algé- brique de x. C'est ce que!se sont proposé dans ces tout derniers mois MM. Poincaré ! el Pain- levé: Tout se réduit à trouver un maximum pour le degré de l’équation algébrique qui lie y à #, c’est- à-dire pour le plus haut exposant dans cette équa- tion. Le reste n’est plus qu'une affaire de täton- nements et de calculs élémentaires. Seulement ce maximum el fort malaisé à découvrir. Quelques résultats partiels ont cependant été trouvés par MM. Poincaré el Painlevé, et la solution complète ne semble plus bien éloignée. Ces recherches ont surtout mis en lumière l'importance d'un nombre «exposant » attaché à chaque point critique fixe. Lorsque l'intégrale est algébrique, l’'exposant est réel et commensurable; sinon il peut être incom- mensurable et même imaginaire. Dans mon mémoire de concours et des Notes récentes ?, j'ai abordé le problème de l'intégration de l’équation H à un autre point de vue, me bor- nant d’ailleurs au cas où dans H (+, y, y) —=0 l'expression f désigne un polynôme. Généralisant quelques indications de M. Darboux, j'ai fait une étude détaillée des points critiques fixes quand y figure dans le polynôme au premier degré. Ensuite j'ai représenté H par une surface el les intégrales par certaines courbes « intégrantes » tracées sur la surface et dont la connaissance assure celle des intégrales. Mettant à profit les travaux d’Halphen sur la classification des courbes gauches algé- briques et de M. Picard sur les courbes dont les tangentes appartiennent à un complexe linéaire, je suis parvenu à édifier une théorie des inté- grantes (c’est-à-dire des intégrales) algébriques. J'ai notamment donné un maximum du degré de l'intégrante pour une surface et un genre don- nés. 1 C. R. 13 avril 1891 et Rendiconti du Cercle mathématique de Palerme 1891. 2 Comptes rendus, Académie des Sciences 25 mai 1891. 5 Comptes rendus, Académie des Sciences 16 mars et 9n o- vembre 1891. Il semble qu'en ce moment les recherches de M. Poincaré, de M. Painlevé et les miennes mar- chent au-devant les unes des autres et ne tarde- ront pas à se rencontrer. IV Un tout autre problème a également été traité relativement à H dans ces dernières années. Lors- qu’on effectue sur z et y une certaine transforma- tion, l'équation H devient une autre H'; mais cer- taines propriétés restent communes à H et H', ne changent pas par l'effet de la transformation, vis- à-vis de laquelle ces propriétés sont des « inva- riants ». Une théorie des invariants a été édifiée par MM. Liouville (Roger), Elliot (Annales scienti- fiques de l'Ecole normale supérieure 1890) et Appell (Journal des mathématiques ; 1889). Les résultats de ce dernier géomètre ont été généralisés par M. Pain- levé dans son mémoire couronné. La théorie des invarianlts permet souvent de simplifier l'équation différentielle H. Enfin M. Picard a consacré à H plusieurs pas- sages de son mémoire couronné de 1888 sur les fonctions algébriqnes de deux variables indépen- dantes. Je pourrais allonger encore l’énumération des travaux récents auxquels H a donné lieu. Je nai pas parlé, par exemple, des recherches de MM. Klein et Lie !; les groupes continus de tranformation de M. Lie trouvent là une de leurs plus importantes applications. Mais je m'arrète, caril semble que le but de cet article est déjà atteint; on a pu apprécier quelle activité régne sur un point pris au hasard dans l'immense domaine de l'Analyse, avec quelle rapi- dité marche notre science. Il est permis notamment d'exprimer l'espoir qu'atlaquée de différents côtés par des efforts tenaces et convergents l'équation différentielle du premier ordre ne lardera pas àlivrer ses derniers secrels. Léon Autonne, Ingénieur des ponts et chaussées, Maitre de conférences à la Faculté des Sciences de Lyon. 1 Mathematische Annalen, passim. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 27 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Ocagne (M. d’), Ingénieur des ponts et chaussées, — Nomographie. Les calculs usuels effectués au moyen des abaques. Essai d’une théorie générale. Règles pratiques. Exemples d'application. 4 vol. in-8° de 96 p, avec fig. et 8 pl. (Prix : 3 fr. 50.). Gauthier-Villars, 55, quai des Gr'ands-Augustins. Paris, 1891, Dans les applications pratiques de la théorie on rencontre fréquemment des problèmes qui, pouvant se résoudre par des méthodes analytiques, conduisent à des équations ou des formules algébriques plus ou moins compliquées. Pour faire de ces formules un emploi judicieux, il est bon de les comprendre et de pouvoir au besoin les vérifier, ce qui exige chez les spécialistes des connaissances mathématiques éten- dues, dépassant souvent le degré d'instruction tech- nique auquel ils sont parvenus. D'autre part, les cal- culs numériques qu'entraine l’usage de ces formules peuvent être longs et pénibles, surtout si l’on prétend arriver à des résultats d’une grande précision. C’est pourquoi l’on a cherché depuis longtemps à substituer, pour la résolution de ces problèmes tech- niques, les méthodes graphiques, plus aisées à com- prendre et plus faciles à appliquer, aux méthodes analytiques, qui ne sont pas à la portée de tout le monde. Tel est le but des sciences graphiques : géo- métrie descriptive, stéréotomie, statique graphique, ete., où interviennent des constructions basées sur des considérations purement géométriques. Mais ces sciences graphiques présentent, au point de vue des applications industrielles, trois inconvénients sérieux : elles n’embrassent pas un champ aussi vaste que les sciences analytiques, et sont souvent impuis- santes à résoudre le problème posé; elles exigent chez le dessinateur, chargé de préparer les épures, des con- naissances assez étendues, et parfois une grande habi- leté professionnelle; enfin, chaque épure nécessite pour sa préparation une somme assez importante de travail, et doit être refaite entièrement dès qu'on change de données, parce qu’elle ne fournit, en général, de renseignements que dans Je cas numérique qui lui a servi de point de départ. Il arrive souvent qu'en traitant par une méthode analytique et sous sa forme générale un problème tech- nique, la solution soit donnée par une équation entre plusieurs variables, dont les valeurs numériques, résultent des données de la question, à l'exception d’une seule de ces variables, constituant l’inconnue, dont la valeur doit être tirée de la formule. Pour peu que, dans l’exercice d’une profession, un pareil problème se présente fréquemment dans des conditions identiques, abstraction faite des valeurs numériques des données, il devient désirable qu’on en puisse confier la résolution à une personne douée seu- lement d’une instruction primaire, en réduisant l’opé- ration à faire à une simple lecture, de manière que la vérification de son travail puisse être faite sans peine par un seul agent pourvu d’une instruction tout aussi élémentaire. Il s'agirait donc de supprimer, dans l’em- ploi de la formule algébrique, l’obligation d’un calcul numérique, qui ne saurait être entrepris par le premier venu, On a essayé d'y arriver de diverses manières !. Mais le moyen incontestablement le plus simple consiste à traduire la formule algébrique par une 1 Voir, à ce sujet, l’article publié dans la Revue (n° du 30 sept. 1891, p. 604), par M. d'Ocagne. ET INDEX image, dite abaque, permettant à l'opérateur de recon- naître par une simple lecture la valeur de l’inconnue répondant aux données numériques qui lui ont été fournies. C’est là évidemment la seule solution véri- tablement complète, à tous les points de vue, du pro- blème général que nous avons énoncé précédemment. Quiconque saura lire etécrire pourra se servir de l'abaque sans aucune peine et sans risque d'erreur. Seulement, il faut savoir préparer l’abaque nécessaire ; or jusqu'à présent, en dépit de quelques tentatives isolées, faites sur des cas particuliers et restreints, on se trouvait dans l'ignorance des méthodes générales à suivre pour établir la représentation graphique d’une équation entre plusieurs variables, M. Maurice d'Ocagne s’est proposé de combler cette lacune de la science en créant un corps de doctrine qu'il a baptisé du nom de Nomographie et qu'il définit : « la représentation graphique des lois à un nombre quelconque de variables »., On peut substituer à cette définition philosophique lénoncé pratique suivant : représentation graphique d’une équation à plusieurs variables, permettant d'obtenir par une simple lecture la valeur numérique de l’une d’entre elles, considérée comme l’inconnue du problème, quand on connaît celles des autres variables, qui sont les données de la question. Nous mentionnerons très sommairement les divi- sions générales du livre de M. d'Ocagne. Le chapitre premier contient l'exposition très concise et très claire des principes fondamentaux relatifs aux équations à trois variables, dont les applications forment l’objet des trois chapitres suivants. Les exemples très inté- ressants traités au chapitre IT présentent une grande variété. Les chapitres HE et IV sont consacrés respec- tivement à des méthodes applicables à des classes très étendues d'équations ; l’une d’elles est celle des abaques heæagonaux, imaginée par M. Lallemand, et mise en pratique dans le service du nivellement général de la France; l’autre est celle des abaques à points isoplèthes, due à M. d'Ocagne luimême, qui- parait susceplible d'applications nombreuses et éten- dues. Ces deux applications se déduisent très simple- mentde la théorie générale exposée au chapitre premier. Les chapitres V et VI contiennent l’extension de ces deux dernières méthodes, extension qui présente cet intérêt particulier d’être applicable aux équations à plus de trois variables, pour lesquelles l'emploi de tables numériques à plus de deux entrées ne serait pas pratiquement admissible, Nous avons déjà fait ressortir l'importance des ser- vices que peut rendre la Nomographie, en permettant de généraliser l'emploi des abaques dont il n’a jusqu'à présent été fait qu'un usage restreint, alors que ces instruments de recherche devraient être entre les mains de tous ceux qui, dans l'exercice de leur pro- fession, ont fréquemment besoin de revenir à l'emploi des formules algébriques. Il nous semble qu'en par- ticulier les ingénieurs auront grand intérêt à faire usage de procédés les dispensant pour l'avenir de faire ou de vérifier eux-mêmes des calculs longs et fas- tidieux, en vue d'obtenir des renseignements qui leur seront fournis sans travail ni perte de temps par des tables graphiques. Il serait donc désirable que leur instruction scienti- fique et technique comportàt une connaissance appro- fondie des doctrines et des méthodes de M. d'Ocagne, et ce résultat nous paraît devoir être atteint sans peine pour eux par la lecture du livre clair et complet que nous venons d'analyser sommairemeut. J. Résan. 28 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques. Armand Gautier, — Cours de Chimie, t. III. Chimie biologique, 1 vol, gr.in-8° de 827 p. et 122 fig. (Prix : 18 fr.)F. Savy, TT, bd Saint-Germain, Paris, 1892. Cet ouvrage constitue la troisième et dernière partie du Cours de Chimie dont le P" A. Gautier a commencé la publication il y a quelques années; le premier vo- lume était consacré à la chimie minérale et le second à la chimie organique. On retrouve dans ce nouveau volume les qualités maitresses des ouvrages de M, Gautier : une vue origi- nale et très personnelle des choses, une rare pénétra- tion d'idées, la largeur des conceptions, un raisonne- ment ingénieux, une imagination féconde et, tenant à ces qualités mêmes, le particulier agrément de la forme, une exposition à la fois ferme et alerte, Cette originalité qui frappe dès l’abord et dont l’œuvre tout entière porte la marque profonde, dépend de deux choses : d’un ensemble de notions générales, très pré- cises et fortement systématisées, sur les phénomènes de la vie, qui manifestement pénètrent et pour ainsi dire vivilient tout l'ouvrage; et, d'autre part, du nombre considérable d'expériences personnelles, de recherches de premier ordre dans presque toutes les parties de la chimie biologique, qui permettent à l’auteur de prendre dans toutes les grandes questions une position bien spéciale. C’est ainsi que dès le début de l'ouvrage on trouve un essai d'explication des phénomènes propres à la substance organisée et de la notion même d'organisa- tion. Il y a là un ensemble d'idées importantes, sur lesquelles d'ailleurs l’auteur a eu l’occasion de revenir en d’autres points de son œuvre, qui méritent d'attirer et de retenir l'attention de quiconque s'intéresse à la biologie. « Nous sommes donc amenés, écrit M. Gautier, à conclure que c’est dans les mécanismes élémentaires qui donnent lieu à ces derniers phénomènes (les réac- tions physico-chimiques de l'organisme), c’est-à-dire dans la structure et l’organisation des molécules chi- miques dernières qui composent le protoplasma, ainsi que dans le mode physique d'association de ces molé- cules, qu'il faut chercher l’origine et la cause de la succession des phénomènes élémentaires de la vie. Ainsi éclairée, l’organisation du protoplasma et de la cellule se présente à nous comme un état plus compli- qué que la structure, déjà très complexe, d’une molé- cule organique de sucre, de lécithine ou d’albumine: mais cette organisation est de même ordre, car elle ne produit que des phénomènes de même espèce et ne met en Jeu que les mêmes énergies d'ordre physico- chimique » (p. 1). « Si de nouvelles propriétés, ajoute-til un peu plus loin (p. 8), sont introduites, il est vrai, par l'association des molécules intégrantes en tissus, les propriétés vitales élémentaires dérivent primitivement de leurs fonctions chimiques, lesquelles ne dépendent que de l’arrangement des atomes dans les principes immédiats dont sont construits nos organes. Le fonc- tionnement vital n’est que la conséquence lointaine des fonctions chimiques de la molécule, et la vie se pré- sente à nous comme résultant de l’ensemble des réac- tions physiques, chimiques et mécaniques des molé- cules constitutives, réactions régularisées et dirigées grâce à l’organisation spécifique de quelques-uns de ces agrégats. « On entrevoit ici le but le plus élevé de la chimie biologique, savoir la détermination des relations qui existent entre la structure et le mécanisme fonctionnel des molécules primitives ou principes immédiats qui forment les cellules, les Üssus, les organes des êtres vivants, et cette résultante générale de leur commun fonctionnement qu'on appelle la vie. » Qu'il n'y ait rien de spécifique dans l’organisation, c’est une idée sou- vent émise déjà; mais où le point de vue devient nou- veau, c’est dans cette conceplion, à laquelle s'attache fortement M. Gautier, que la cause du fonctionnement vital apparaît dans les propriétés chimiques des mo- lécules constitutives des divers protoplasmas cellulaires, propriétés chimiques qui dépendent elles-mêmes, on le sait, de la structure si complexe de ces molécules ; par suite de celte complexité même, le nombre des réactions physico-chimiques possibles devient considé- rable : c’est le jeu des phénomènes vitaux dans toute sa variété. J'avais été moi-même amené à présenter essentiellement celte conception dans une étude géné- rale sur l'Irritabilité, écrite il y a quelques années pour le Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales. Mais ce que je n'avais pu qu'indiquer d’une facon som- maire, le développement naturel de ses réflexions per- sonnelles sur l’origine et le sens des phénomènes élé- mentaires qui se passent dans les organismes vivants a conduit M. Gautier à le penser de son côté : une fois arrivé à ces idées par une voie qui lui est propre, il les a fermement saisies et il les expose d’une facon péné- trante non moins que complète. Telle est mème sar ce point la hardiesse de sa pensée qu'il considère comme possible de modilier l'organisme et le plan général de l'être présent ou à venir en modifiant la nature des matériaux chimiques, « véritables rouages primitifs qui le composent » (p. 5). Et qu'on ne dise pas qu'il n'apercoit pas toute l'importance, au point de vue de la philosophie scientifique, de ces déductions, puisqu'il écrit aussitôt : « Dernière et grave conséquence qui semble établir que la cause vitale, que l’on appellerait à tort force vitale, car elle est directrice et non agissante, dépend elle-même des propriétés physico chimiques et du plan structural de ces agrégations moléculaires qui lui servent d'instruments élémentaires. » Combien nous voilà loin de la doctrine encore embarrassée de Claude Bernard sur l’idée directrice du plan vital! La même idée se retrouve dans les conclusions générales du livre (p. 811); toute la page serait à citer : « La structure et le fonctionnement de l'être vivant résultent de la struc- ture et des fonctions de nos organes, et ceux-ci sont modifiés. dès qu'on fait varier la nature des principes dont ils sont composés... » (p. 812). Cette pensée pro- fonde, si neuve, si grosse de conséquences de toutes sortes, se trouve déjà clairement exprimée, il convient de le rappeler ici, dans un important travail de M. Gautier qui fait partie d’un Hommage ou recueil de travaux originaux publié en 1886 à l’occasion du cen- tenaire de Chevreul. Par une série de longues et déli- cates recherches sur les variations de l’espèce Vitis vinifera, M. Gautier a pu montrer que chaque variation de race est accompagnée d’une variation dans la nature des principes immédiats qui entrent dans la structure de la nouvelle variété ; chacun des changements morpho- logiques est corrélatif d'une modification profonde des molécules chimiques qui constituent les éléments de l'être. On saisit toute la portée de ces notions. Il semble bien que par elles la chimie sera un jour entrainée à aborder expérimentalement les questions relatives à la reproduction des êtres vivants. On s’est déjà demandé pourquoi les physiologistes ne s'appliquaient pas à l'étude des problèmes soulevés par la doctrine transfor- miste, et l’on a fait observer que seule la physiologie paraît être à même de résoudre certains de ces pro- blèmes. 11 serait assurément curieux et du plus haut intérêt que ces difficiles questions fussent d’abord altaquées par leur côté chimique, c’est-à-dire dans leur fond le plus intime, ce côté apparaissant comme le plus accessible à l’expérimentation, L'idée qui présiderait à des recherches de ce genre serait sans doute qu'en modifiant par une intervention expérimentale la nature des principes immédiats d’une plante, on arriverait à modifier très rapidement l'espèce. Il est incontestable qu'une telle pensée provient directement des travaux déjà réalisés dans cette voie par M. Gautier et de la profonde conception générale qu'il en a tirée. Ce n’est pas seulement par les considérations doc- trinales que cette Chimie biologique est originale, Son caractère particulier tient aussi à l’apport considérable des expériences propres de l’auteur. Si ce dernier, tout en établissant avec soin l’historique, devenu si touffu, BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 2() = de chaque question, a su se préserver de la juxtaposi- tion fastidieuse des résultats et des théories, c’est que dans la plupart des grandes questions il a pu, grâce à ses recherches personnelles, prendre une position bien spéciale ; aussi les innombrables observations, souvent contradictoires, qu'il faut classer et coordonner pour nrésenter un exposé clair et complet de chacune des parties de la science, viennent-elles se grouper aisé- ment autour de l’idée maitresse qui appartient en propre à l’auteur. Quelques exemples montreront qu’il en est ainsi. Au début de l'ouvrage, M. Gautier trace un large ta- bleau des phénomènes chimiques généraux et de l’ori- gine des principes immédiats dans les plantes, exposé dans lequel prennent place les résultats de ses re- cherches sur les chlorophylles, sur la synthèse des ma- tières organiques dans les végétaux, sur la fixation de l'azote par le sol et les végétaux. Dans l'étude des matières albuminoïdes et de leur constitution, l’auteur ajoute, à l’exposé des belles re- cherches de M. Schützenberger, la relation de ses propres expériences sur le dédoublement, par hydra- lation, des matières albuminoïdes. Une courte, mais substantielle notice est consacrée, en appendice, aux matières protéiques, aux foæalbumines produites par les êtres vivants et dont l'étude est aujourd'hui si impor- tante pour la physiologie et la pathologie générales. Une série de remarquables chapitres est consacrée à la description des substances azotées qui résultent de la décomposition des matières albuminoïdes. Ici encore l’auteur se trouvait sur un terrain qui depuis longtemps lui est familier et où il a réalisé ses plus belles décou- vertes peut-être de chimie biologique, j'entends ses travaux sur les corps xanthiques et surtout l’ensemble de ses recherches sur les bases animales, ptomaines et leucomaines ; on a pu penser et dire de ces recherches qu’elles ont marqué une phase nouvelle dans l’histoire des doctrines de physiologie pathologique. Dans cette série de chapitres sont étudiées successivement les uréides, les leucomaïnes, les bases du groupe de la choline et les ptomaines, et enfin les amines-acides. A propos de l'acide urique, l’auteur expose ses idées sur la structure de ce corps pour lequel il aboutit à un schéma différent de la formule de Medicus et de E, Fischer, généralement adoptée en Allemagne. Quant aux bases animales ou leucomaines, M. Gautier les divise en deux groupes : le premier, comprenant la xanthine, la sarcine, l’adénine, la carnine, ete., doit être mani- festement rapproché des uréides ; le second renferme les leucomaines ceréatiniques (créatine, créatinine, sarcosine, etc.), plus éloignées du groupe urique, et que l’auteur a rattachées au type créatine. Un certain nombre de ces substances étaient déjà décrites avant les travaux de M. Gautier ; mais leurs relations avec les uréides, leur constitution, leur origine, leur rôle phy- siologique étaient fort mal connus. Il importe d'ajouter que les relations naturelles de ces corps ne se sont clairement révélées qu'après la découverte de plusieurs termes nouveaux qui complètent cette double série, composés isolés des tissus animaux par l’auteur, (erusocréatinine, xanthocréalinine, amphicréatine, etc.) ou qu'il a préparés synthétiquement (méthylxanthine). Viennent ensuite les bases du groupe de la choline, (choline,névrine, muscarine, ete.), la protamine, la sper- mine, et les leucomaines des venins, des urines, et des divers organes ou produits de sécrétion. Toutes ces bases, qui sont plus ou moins (oxiques, se produisent durant la vie normale et aérobie, Les ptomaines, au contraire, ou alcaloïdes putréfactifs, découverts par M. Gautier en 1872, résultent de toute fermentation anaérobie ou se forment, chez les ani- maux supérieurs, dans les tissus qui fonctionnent sans air où avec une quantité d'oxygène insuffisante. On comprend, sans qu'il soit nécessaire d’insister, l’im- portance de cette dernière notion au point de vue de la physiologie générale et aussi de la physiologie pa- thologique : le lien apparaît immédiatement, par exemple, entre cette conception de chimie pathologique et les idées qui résultent des travaux de M. Bouchard sur les maladies causées par le ralentissement de la nutrition, — M. Gautier consacre un très intéressant chapitre à l'historique de cette question des ptomaiïnes, à la préparation de ces corps, leur classification et l'étude particulière des bases putréfactives isolées jusqu'à ce jour. Beaucoup d’autres parties de l’ouvrage mériteraientun examen détaillé; pour ne pas trop allonger ce compte- rendu, je ne puis que les signaler à l'attention, C'est ainsi qu'il faut noter une remarquable étude des re- lations qui existent entre l’action chimique, la chaleur et le travail produit dans le muscle (p. 315), que tous les physiologistes liront avec une curiosité intéressée; — un chapitre très suggestif sur les phénomènes psychiques corrélatifs de l’activité cérébrale (p. 345 dont beaucoup de points seraient dignes d’une dis cussion approfondie, d'autant plus que l’auteur revient à plusieurs reprises sur cette question (voy. en particulier p. 803), qui a soulevé d’ailleurs, il y a quel- ques années, une polémique intéressante entre lui et MM. Georges Pouchet et Ch. Richet (Revue scientifique, 1886); — une étude très complète du sang, avec une théorie de l’auteur sur la coagulation, la relation des travaux nouveaux sur l’hémato-alcalimétrie (travaux sortis du laboratoire de M. Gautier et dont la continua- tion promet à coup sûr des résultats d'un grand inté- rêt), un exposé sans doute un peu schématique, mais très clair et suggestif, des modifications du sang dans les maladies; — enfin un magistral exposé des méca- nismes de la nutrition générale, des phénomènes chi- miques généraux de l'organisme, et par suite, — des sources et de la transformation de l'énergie chez les ètres vivants; sur ce dernier point les plus récentes acquisitions de la thermo-chimie animale sont utili sées et présentées sous une forme parfaitement acces- sible. Je ne voudrais pas finir sans avoir donné quelques indications sommaires sur le plan général de l'ou- vrage qui s'écarte par quelques points de celui qui est habituellement suivi, L'auteur étudie d'abord les phé- nomènes chimiques généraux de la vie et l’ensemble du mouvement d'assimilation et de désassimilation ; puis il déerit les principes immédiats qui constituent les êtres vivants et les produits de leur destruction progressive; l'étude des tissus, des humeurs et des sé- crétions vient ensuite, puis celle des fonctions géné- rales (respiration, digestion, desassimilation et urina- tion, reproduction); la description des mécanismes de la nutrition générale termine cette partie du livre; la dernière partie est consacrée à l'étude des sources de l'énergie et de l'équilibre entre l'alimentation et la production de chaleur et de travail. Deux pages de conclusions générales terminent cette œuvre considérable, fruit de longues et patientes recherches de laboratoire et d’un pénétrant travail de méditation sur les faits d'expérience ; ces deux pages sont comme le résumé des doctrines de l’auteur sur les phénomènes de la vie, et portent bien la marque du haut esprit dans lequel fout l'ouvrage a été concu. E. GLEY. 75 3° Sciences naturelles. Laguesse (E.). Recherches sur le développement de la rate chez les poissons. Thèse pour le doctorat présentée à la Faculté des Sciences. F. Alcan, 108, bou- levard Saint-Germain, Paris, 1891. La rate était jusque dans ces dernières années un organe plein de mystère. Le lissu spléniqueétait en effet considéré comme une sorte d'éponge imbibée de sang, Les procédés les plus perfectionnés de l'anatomie et de l’histologie ne donnent que des résultats incom- plets lorsqu'on les applique à l'étude de la rate adulte. Quelle est la structure du tissu splénique? Dans la rate, le sang circule-t-il dans un système de vaisseaux 30 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX clos ou bien les parois vasculaires, sont-elles incom- plètes, et le sang se répand-il librement dans l'inter- valle des éléments spléniques? Pour résoudre ces questions, M. Laguesse a suivi le mode de développement de l'organe. Il a observe l'ensemble des phases parcourues par la rate et ses éléments. 11 les a vus naître, pour ainsi dire, et a nott les modifications qu'ils subissent avec l’âge. De plus il a choisi, en s'adressant à la truite et à l’aiguillat, une rate simplifiée, c'est-à-dire réduite à ses parties essentielles, Voici les résultats principaux auxquels est arrivé l'auteur; faute de place, je ne puis en donner qu'un résumé succinct, bien que ce travail, remarquable à bien des égards, mérite une analyse détaillée. La rate apparaît sous la forme d’une simple bosselure de la paroi intestinale. Le tissu qui la constitue à l’ori- gine est un amas de cellules qui dérivent d’une portion du feuillet mésodermique de l'intestin (mésenchyme). Les éléments embryonnaires du renflement splénique sont des cellules arrondies et serrées, Ils ne tardenl pas à se différencier : les uns restent arrondis et ser- rés, les autres prennent la forme de cellules étoilées, unies par leurs prolongements. Ces dernières se dis posent, comme je l’ai observé, décrit et figuré depuis plusieurs années dans la bourse de Fabricius et les amygdales, et forment un réseau contenant dans ses mailles des traînées d'éléments arrondis, Dès son apparition, la rate est en rapport immédiat avec la veine sous-intestinale (future veine-porte). Une des parties les plus intéressantes du travail est celle où M. Laguesse montre : 1° le développement des veines spléniques, branches de la veine-porte; 2° les con- nexions du tissu splénique avec le courant sanguin qui le traverse. Le réseau splénique contient, je le répète, dans ses mailles, des amas de cellules arrondies formant des cordons cellulaires pleins. Sur les points voisins des veines, ces cellules, d'abord serrées, deviennent libres par la fonte ou la liquéfaction d’une partie du corps cellulaire. Cette transformation s'étend de proche en proche jusqu’à la veine, dont la paroi subit le même sort, Il en résulte une série de logeltes ou de cavités tortueuses, irrégulières, communiquant les unes avec les autres et s’ouvrant dans la veine-porte. Ces cavités sanguines de la rate ne sont limitées que par les cel- lules anastomosées du réseau jouant le rôle d’endo- thélium. Dès que les artères se seront développées dans la rate, le sang passe des artères dans les cavités tor- tueuses et de là dans les veines. La circulation se fait donc dans la rate comme dans les autres organes, dans un système de canaux parfaitement circonserits, puisque les cavités tortueuses servent d’intermédiaires entre les artères et les veines. Les parties de la rate qui ne sont pas le siège de cette transformation constitueront la pulpe splénique. Celle-ci représente pendant toute la vie une réserve de cellules pouvant se modifier comme plus haut et s'échapper dans le sang, Quel est le sort de ces cellules devenues libres? Les unes évoluent en globules blancs, les autres tendent à s’allonger, se chargent d’hémoglobine, et se transfor- ment en globules rouges. A l’état jeune, les unes et les autres sont capables de se reproduire par division; mais elles perdent peu à peu ce pouvoir en vieillis- sant. Ces faits de développement viennent à l'appui de nombreuses observations qui avaient rendu probable le rôle sanguiformateur de la rate. M. Laguesse est allé plus loin; il a soumis les résultats embryologiques au contrôle de l'expérience en provoquant par des saignées la régénération du sang sur les Truites jeunes venant à peine d’éclore. Dans chaque expérience, il a compté avec soin les trois phases que traversent les ulobules rouges du sang : les formes jeunes, intermé- diaires et adultes. Après la saignée, le premier phénomène qui frappe est l'augmentation considérable dans le nombre pro portionnel des globules blancs. Cette proportion s’ac- centue et se maintient pendant les quatre premiers jours, Dans le sang de la veine-porte, les globules blancs représentent à peu près la moitié des globules contenus; dans les cavités de la rate, on les trouve presque seuls, C’est donc sous cette forme que les premières cellules libres s’échappent de la rate em- bryonnaire, À partir du cinquième jour, les formes jeunes des globules rouges augmentent notablement dans le sang, surtout dans celui de la veine-porte, Du quatorzième au dix-huitième jour, ces formes cons- tituent à elles seules la moitié ou à peu près du nombre total des éléments figurés dans le sang. Du dix-huitième au vingt-huitième jour, ces formes attei- gnent l’état adulte. La rate est donc un organe d’origine mésodermique (mésenchyme); les éléments embryonnaires qui la for- ment se différencient : 1° en cellules étoilées devenant le réseau splénique; 2 en cellules contenues dans les mailles de ce dernier et évoluant, au fur et à mesure des besoins de l’organisme, en globules blancs et en globules rouges. Ed. RETTERER. 4° Sciences médicales. Æissié (D' Ph.) Les Rêves, physiologie et pathologie. 1 vol. in-12, xrr-214 pages, avec une préface de M. le Professeur Azam. F. Alcan, 108, boulevard Saint-Ger- main, Paris, 1891. M. le D' Tissié avait consacré sa thèse inaugurale à l'étude d’un malade singulier, Albert D., qui présen- tait de curieux accès de somnanbulisme diurne pendant lesquels il accomplissait de véritables voyages. L'idée obsédante qui déterminait ces fugues, analogues par certains côtés aux fugues des délirants épileptiques, se développait ainsi dans son esprit pendant la nuit, et le lendemain, presque toujours le matin, il partait pour cette ville ou pour ce pays. Il arrivait aussi que des rèves analogues apparussent en lui sans qu'aucune conversation les eût provoqués, C'est ainsi que M. Tissié a été amené à étudier l’action des rêves sur les actes de l’homme éveillé et sur ses pensées; c’est au reste Ja suite de l’histoire d'Albert D.. qui constitue la partie principale et la plus intéressante peut-être du livre, M, Tissié a recherché à quelles lois était soumise la formation des rêves: d’après lui, tous les rêves sont d’origine sensorielle, c’est-à-dire qu'ils résultent tous d’une impression périphérique actuelle, 11 semble que ce soit là une règle qui admette des exceptions, et qu'il y ait des rêves qui ne font que continuer pendant le sommeil la pensée commencée pendant la veille; les images et les idées se déterminent alors les unes et les autres sans qu'aucune sensation intervienne, Il aurait fallu surtout mettre en lumière la différence profonde qui existe entre les sensations de l’homme endormi et celles de l’homme éveillé; la sensation elle-même n'est presque jamais percue dans le sommeil; elle reste sub- consciente et son rôle se borne à faire apparaître telle ou telle série d'images; les faits que M. Tissié rapporte en très grand nombre mettent bien en évidence cette fonction des impressions sensorielles pendant le sommeil : la sensation se confond en un même état de conscience avec l’image qu'elle évoque. M. Tissié fait au reste une classe spéciale des rêves qu'il appelle « psychiques »; l'expression n’est pas très bonne; il faut entendre par là, autant qu'il semble, les rêves d’origine centrale ; et les observations qu'il cite mon- trent que dans certains cas ce n’est pas une sensation qui sert de point de départ à la série d'images qui cons- titue le rêve. M. Tissié semble mettre plus particulière- ment en rapport les rêves de cette classe avec les sensa- tions viscérales, ce qu'il appelle le moi splanchnique; c’est à l'opposition du moi splanchnique et du moi sensoriel que sont dus, d’après lui, les dédoublements de per- sonnalité pendant le sommeil et pendant la veille. Il règne quelque confusion dans cette théorie qui repose BIBLIOGRAPHIE, — ANALYSES ET INDEX ol au reste sur une conceplion dont rien n'est encore venu démontrer l'exactitude, M. Tissié a établi une comparaison entre les rêves qui apparaissent dans les trois formes les plus habituelles de sommeil : normal, somnambulique, hypnotique; il a montré qu'ils sont soumis aux mêmes lois, et qu’un sujet peut passer d’une de ces formes de sommeil à une autre en res- tant dans la même série d'images et d'idées. Le livre de M. Tissié est un livre utile, malgré les théories hasardées et parfois inexactes qu'il renferme ; c’est un recueil de faits bien choisis et bien classés; on le consultera avec fruit, surtout en ce qui concerne l’action des rêves sur les actes accomplis à l’état de veille. M. Tissié a donné une grande place aux rêves qui ont leur origine dans une sensation pathologique, un trouble du cœur par exemple ou de la digestion; il a fait un bon choix parmi les observations de ses devan- ciers ; à ce point de vue encore son livre, où il a su faire tenir beaucoup de faits et d'idées en peu de pages, rendra service à tous ceux qui s'intéressent à la psy- chologie expérimentale. Il serait à désirer que M. Tis- sié publiât une seconde édition de son ouvrage et qu’il en fit disparaître les théories souvent obscures et mal appuyées de preuves, qui en rendent parfois la lecture difficile, L. MARILLIER. Charrin (D' A.) Médecin des Hôpilaur. -— Patholo- gie générale infectieuse : 1°" mémoire du t. T1 du Traité de Médecine publié sous la direction de MM. Charcot, Bouchard et Brissaud. (Prix du tome I. vol, grand in-8° de 957 pages, 22 francs.) G. Masson. 120, boulevard Saint-Germain, Paris, 1891. Le Traité de Médecine publié sous la haute direction des Professeurs Charcot et Bouchard et du D'Brissaud, cons- titue un gros événement médical, L'œuvre colossale de Dechambre, bien qu'à peine terminée, est déjà, au moins quant à ses premiers volumes, passablement vieillie. Il y a quelque quinze ans on disait, non sans raison : « La chirurgie fait des progrès, mais la méde- cine demeure stationnaire, » Il serait injuste de le ré- péter aujourd'hui :les doctrines microbiennes ont bou- leversé les conceptions d'autrefois et déjà conduit en matière non seulement de prophylaxie, mais même de thérapeutique, à des innovations heureuses. Le Traité dont nous rendons comple consacre celte révolution. Les directeurs ont voulu mettre au premier plan les théories pastoriennes, d’abord parce qu’elles éclairent aujourd'hui presque tout le champ de la pa- thologie, ensuite parce qu'elles n’ont pu être ensei- gnées dans leur ensemble aux praticiens qui ont ter- miné leurs études médicales il y a cinq ou six ans, Ceux-ci trouveront une bonne partie de cette synthèse dans le premier volume de la publication. L'importance des mémoires que ce volume renferme commande de les analyser séparément. Nous ne nous occuperons donc dans cette notice que de l’introduc- tion : elle est due à notre éminent collaborateur, le D' Charrin, et relative à la pathologie générale des ma- ladies infectieuses, ' En lisant cette étude si soigneusement documentée, pénétrée de fine critique et riche en conceptions de haute envergure, on se convainc que le brillant chef du laboratoire de M. Bouchard a été à la hauteur de sa tâche : il lui fallait exposer en quelque sorte une philosophie, celle qui se dégage de toutes les recherches poursuivies sur les diverses affections virulentes, Ces études sont tributaires de la botanique, de la chimie, de la physiologie. M. Charrin est trop instruit en ces sciences, auxiliaires de sa spécialité, pour avoir négligé de s’adjoindre en chacune d'elles un collaborateur du métier : au Professeur Guignard il a demandé aide et conseil pour décrire la morphologie des micro-orga- nismes; au Professeur Arnaud, l'appui de ses qualités si précieuses d’analyste, quand il s’est agi d’étudier au point de vue chimique les excrétions des microbes, les transformations que ces agents font subir à la matière ; au D'Gley, pour introduire dans les recherches de hac- tériologie les notions, méthodes et pratiques expéri- mentales familières aux physiologistes, Malgré la diver- sité de ces apports, l'œuvre du D° Charrin offre une remarquable unité : il a su en grouper les matériaux, en coordonner les diverses parties avec l’art supérieur du savant parvenu à la pleine maitrise de son sujet. Son mémoire emprunte à cette circonstance une très srande valeur, Qu'il nous permette toutefois de discuter quelques- unes de ses assertions, IL examine le reproche adressé à la génération actuelle de ne plus considérer que le microbe, d'oublier le malade, le terrain où s’accom- plira l'évolution du parasite; et, à ce sujet, insistant avec raison sur cette dernière face de la question, il se demande dans quelle mesure il peut y avoir en cette étude un retour à l'ancienne médecine, Le mérite de la nouvelle serait surtout de remplacer les idées hypo- thétiques d'autrefois par des données positives, tirées des faits et obtenues par l'expérience. N'y eùt-il que cette substitution, elle établiraità elleseule, —commele montre d'ailleurs l’ensemble du mémoire de M. Charrin, — un abîme entre hier et aujourd’hui, Cet abîme, on affecte quelquefois de ne pas le voir, sous prétexte que la découverte du microbe actif en certaines maladies humaines n’a pas conduit à modifier le traitement. Dès que la spécificité pathogénique du bacille de Koch fut admise par les cliniciens, beaucoup se figurèrent que du jour au lendemain elle allait les mettre en me- sure de guérir la tuberculose. Ils ignoraient que, pour décisif qu'il fût, ce pas n’était que le premier dans la longue série des recherches que réclame l'étude d'une maladie, Aussi parlent-ils aujourd’hui de désillusion. Mais, il faut le dire, cette désillusion vient, — non de ce que l’on a oublié le malade pour s'occuper du mi- crobe, — mais tout simplement de ce que l’étude expé- rimentale n’est point encore terminée. La méthode n’en saurait être rendue responsable : toutes les espé- rances que les savants avaient fondées sur elle sont restées debout, Du jour où elle fut instituée, les hommes de laboratoire comprirent que le labeur serait de longue haleine, qu'il serait nécessaire d'étudier lévo- lution des virus animés en eux-mêmes et dans leurs rapports avec l'organisme plus ou moins réceptif, plus ou moins réfractaire des animaux et de l’homme. Pas- teur fout le premier attira l'attention de ce côté : il fit voir notamment que la germination de certaines spores, par exemple celles de son vibrion seplique, exige de la part des humeurs un état particulier que ne réalisent pas normalement les liquides de lintestin humain; de sorte qu'un microbe peut être, chez une même espèce animale, inoffensif ou redoutable suivant le lieu d'introduction dans l’économie, la présence ou l'absence d’une excoriation de la muqueuse, l’état phy- siologique ou pathologique de l'individu, Ainsi fut indi- quée, dès le début de la bactériologie, cette participa- tion de l'hôte au développement de l'infection qui n’a cessé depuis d'attirer l'attention des microbiologistes, On l’a signalée notamment au sujet des pneumonies dont nous portons souvent les germes sans leur per- mettre d’éclore, et il est probable qu'elle se trouve à l’origine de toutes les maladies virulentes. Cette étude des états de l'organisme qui s'opposent à l'infection ou la favorisent n'est que la continuation nécessaire et fatale des recherches microbiennes. Loin donc d’y apercevoir un retour aux idées d'autrefois, nous recon- naissons en elle un chapitre important de la science bactériologique. Ce chapitre a recu des remarquables travaux de MM. Charrin et Roger un développement considérable, Grâce à eux, on commence à bien comprendre le genre d'influence que peuvent exercer sur l'aptitude à len- vahissement microbien, ces facteurs multiples, froid, chaleur, fatigue, etc... dont le rôle étiologique, cons- taté de tout temps par les cliniciens, était demeuré inexpliqué, L'étude sur le surmenage, entièrement due aux auteurs que nous venons de citer, est particulière- ment intéressante : elle montre à quel point la fatigue 32 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX peut prédisposer à l'infection, la provoquer même, celle-ci pouvant apparaître en quelque sorte spontané- ment à la suite d’un exercice violent. A ce sujet il y a lieu, pensons-nous, de se demander si l'animal devient vulnérable parce qu'il cesse d’opposer une résistance suffisante aux agents infectieux, ou simplement parce que ses humeurs, normalement impropres à la culture du microbe, sont assez modifiées par le surmenage pour permettre aux spores de germer. En d’autres termes, les virus animés que nous portons en nous- mêmes dans le nez, la bouche, le tube digestif, nous livrent-ils, pendant notre vie physiologique, de conti- nuels assauts, alors victorieusement repoussés, — ou bien demeurent-ils inactifs, à l’état inerte de spores. ne germant, n'évoluant qu'à la faveur d'une modifica- tion pathologique de notre organisme? Il est possible aussi que les deux modes co-existent, La science esl encore pauvre en documents sur ce point, M. Charrin n'avait pas à entrer dans la description spéciale des différentes affections renfermées dans le cadre des maladies infectieuses ; mais il lui apparte- nait de définir le domaine pathologique de la microbie et de préciser le sens général des derniers travaux en- trepris en chacun de ses districts : à cet effet, il a ra- pidement passé en revue les enseignements que nous apportent les récentes recherches sur la morve, la diphtérie, même la rage et les fièvres éruptives, telles que rougeole et scarlatine, dont les contages, peut- ètre différents des bactéries, ont jusqu’à présent échappé à nos procédés d'investigation. Le chapitre relatif aux symptômes généraux de ces affections doit être particulièrement signalé : les phé- nomènes y sont analysés avec toutes les ressources de la physiologie contemporaine, qui commence à y dis- cerner les effets des excrétions microbiennes. Rappe- lons à ce sujet les élégantes et suggestives expériences dans lesquelles M. Charrin est arrivé à provoquer à la fois symptômes et lésions en inoculant exclusivement des produits bactériens. Ces substances sont proba- blement très diverses ; il semble que chacune exerce sur l’organisme une action spécifique. C’est ainsi que, d’après les recherches de MM, Charrin et Gley, les toxines du bacille pyocyanique influencent d'une facon particulière le système nerveux vaso-moteur; elles entrainent l’inhibition des centres vaso-dilatateurs, bulbaires et médullaires. Il y a là un facteur impor- tant, dont il faut tenir compte dans la lutte engagée entre l’organisme qui se défend et le microbe virulent qui l'attaque. Malgré sa nouveauté, ce principe paraît bien établi, Il vient d’être confirmé à Lyon par le P' Arloing, en Allemagne par le Pr Heidenhaim. Ni les substances dites bactéricides, ni les leuco- cytes n'interviennent seuls dans les phénomènes d'immunité : le système nerveux y joue un rôle quine peut plus être négligé et que ne sauraient faire oublier les propriétés chimiotactiques des virus. Lorsque ceux- ci suppriment la vaso-dilatation, les leucocytes se trouvent arrèlés dans les vaisseaux, Cet obstacle à leur émigration prive l’organisme de leur concours défensif (phagocytose) sur le lieu même de la lutte, au point où s'introduisent, avant de pulluler, les agents infectieux. C’est là une conséquence de l’action exercée par les virus chimiques sur les centres régulateurs. M. Charrin à eu raison d'insister sur celte notion : elle est de grande portée non seulement pour la théorie, mais aussi au point de vue clinique. Une récente commu- nication du P' Bouchard permet déjà de pressentir les applications que la thérapeutique est appelée à en tirer : dès à présent elle est en mesure d'arrêter les hémorrhagies, grâce à l’inhibition vaso-motrice que produisent les toxines du bacille pyocyanique. C’est là le premier exemple d’une thérapeutique positive et efficace fondée sur la bactériologie. Quant à distinguer les différentes substances, — toxiques, vaccinantes ou autres, — qu’excrètent les agents virulents, le problème n'est que posé : la chimie s’est montrée impuissante à isoler la plupart de ces matières. Quelques résultats néanmoins ont été obtenus ; il suffira de signaler ceux qui se rapportent à la tétanine, la télanotoxine, la spasmotoxine, la typhotoxine de Brieger, ete... En attendant qu'on ait obtenu tous ces produits à l’état de pureté, M. Charrin étudie, suivant la méthode de M. Bouchard, l'influence que leur mélange inégal exerce sur les microbes eux-mêmes, puis sur l'organisme intoxiqué. Il se trouve ainsi conduit à une théorie de l'infection qui, peut-être, eût gagné à être exposée après l’étnde de la phagocytose et de l'état bactéricide. Sur l’importante question de l’immunité acquise, l'auteur rapporte et discute les explications proposées, depuis la théorie de la soustraction, vers laquelle Pasteur inclina d'abord, jusqu'à celles des substances ajoutées, de l’accoutumance, de la chimiotaxie, de la phagocytose, de la destruction des poisons et de l'état bactéricide des humeurs, M. Charrin expose les faits avec impartialité; tout en avouant ses préférences pour les doctrines humorales, il sait demeurer éclec- tique, prendre à chaque théorie la part de vérité qu’elle contient. Ce qu'il refuse à chacune, c’est de suffire à tout expliquer. « Quelle que soit, du reste, remar- que-t-il, la théorie que l'on adopte, l'immunité paraît se réduire à une propriété que les cellules ont, dans un cas, recue de leurs ascendants, dans un second acquise par voie d'éducation. » Cette éducation résul- terait de l'action modificatrice des poisons solubles sur les cellules de l'économie, M. Charrin admet la phagocytose, mais ne lui concède qu'un rôle secon- daire, attribuant l'initiative de la lutte contre les microbes, — non aux leuvocytes, — mais aux réactions qui les libèrent. Peut-être cependant rabaisse-t-il trop leurs services : à ses yeux la phagocytose n'intervien- drait utilement que « dans les infections de minime virulence, chez des animaux suffisamment résis- tants, ou bien lorsque la lésion reste locale », Il nous semble que la phagocytose constitue une réaction très générale : on la trouve, croyons-nous, dans tous les cas où l'organisme se défend contre l'infection. Qu'elle soit soumise à la condition, découverte par MM. Charrin et Gley, d'une régulation nerveuse, ce fait n'en diminue aucunement l'importance. Depuis quelques mois, surtout à la suite des expériences de MM. Metchnikoff et Roux sur le charbon des rats blancs, la phagocytose paraît être sortie victorieuse des attaques qui avaient été dirigées contre elle, Ce rapide compte rendu ne saurait donner une idée de toutes les questions dont M. Charrin s’est occupé. Nous avons dû passer sous silence bien des pages importantes telles que celles qu'il à consacrées aux associations microbiennes, aux infections secondaires, aux vaccins, à l’action thérapeutique des virus. Le lec- teur trouvera dans son mémoire, outre la relation de tous les travaux sur ces sujets, des vues personnelles d’un haut intérêt. Bien que cette longue étude concerne surtout la doc- trine, elle ne laisse pas que d’entrainer certaines con- : séquences pratiques. « S'il est bon, dit l’auteur, de viser le microbe, on doit, en outre, s'occuper du patient. Il à sa part dans l’étiologie, dans les symptômes, dans l'évolution et la terminaison de la maladie »; aussi faut-il «agir sur le rein, qui élimine germes el toxines », sur le foie, qui détruit une partie des poisons, et com- battre son hyperthermie qui tend à annuler ses fone- tions ; alimenter, au besoin suralimenter le malade; ete. — On voit par là que M. Charrin est resté fidèle à la devise du Traité de Médecine : « Partir d’où l’on peut, le plus souvent de la Clinique, mais revenir toujours à ja Clinique. » LAC ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 33 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance publique annuelle du 21 décembre 1891 M. Duchartre fait l'éloge de Cahours et celui d'Ed- mond Becquerel. Préx décernés. — 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — Prix Franeæur : M. Mouchot. — Prix Poncelet : M, Humbert. — Prix extraordinaire de six mille francs partagé entre MM. Pollard et Dudebout, Guyou, Chabaud-Arnaud. — Prix Montyon (mécanique) : M. Caméré. — Prix Plumey : M. de Maupeou. — Prix Dalmont : M. Consi- dère; mention (très honorable à M. Autonne; mention honorable à M. d'Ocagne. — Prix Fowrneyron : M. Le- loutre. — Prix Lalande : M. G. Bigourdan., — Prix Damoiseau (perfectionner la théorie des inégalités à longues périodes causées par les planètes dans le mou- vement de la Lune, Voir s'il en existe de sensibles en dehors de celles déjà bien connues). Le prix n'est pas décerné, il est reporté en 1892. Néanmoins, il est ac- cordé trois prix à MM. Gaillot, Callandreau et Schulhof, — Prix Valz : M. Vogel. — Prix Janssen : M. G. Rayet. 20 SCIENCES PHYSIQUES, — Prix La Caze (physique) : M. J. Violle. — Prix Montyon (statistique) : MM. Cheys- son ct Toqué. — Prix Jecker partagé entre MM, Béhal M. Meunier. — Prix La Cuze (chimie) : M. A. Joly. 39 SCIENCES NATURELLES. — (Géologie. — Prix Delesse : M. Barroïis. — Botanique. — Prix Bordin : M, L. Gui- gnard, — Prix Desmazières : M. À. N. Berlese. — Prix Montagne : M. H. Jumelle. —- Prix Thore : MM. J. Cos- tantin et L. Dufour. — Analomie et zoologie, — Grand prix des sciences physiques : M. Jourdan. — Prix Bordin (étude comparative de l'appareil auditif chez les Vertébrés à sang chaud — Mammifères et Oiseaux) : M. Beauregard. — Prix Savigny : M. L. Faurot. — Prix Da Gama Machado : le prix n’est pas décerné, Un encouragement est accordé à M. R. Blanchard et à M. L, Joubin. — Médecine et Chirurgie. — Prix Mon- lyon : trois prix sont décernés à M. Dastre, à M. Du- roziez. à M. Lannelongue. Trois mentions sont accor- dées à MM. Sanchez-Toledo et Veillon, à M. Soulier, à M.Zambaco. Des citations sont accordées à MM. Ar- thaud et Butte, à M. Batemann, à MM. Bloch et Londe, à M. Catsaras, à M. Debierre, à M. Garnier, à M.Gautrelet el à M.Netter. —Prix Barbier : M. Tscher- ning; deux mentions sont accordées à M, Delthil et à M. Dupuy. — Prix Bréant : Le prix n’est pas décerné. Un encouragement est accordé à M. le Dr Nepveu. — Prix Godard : M. Poirier ; une mention honorable est accordée à M. Wallich. — Prix Chaussier : M. Brouar- del. Une mention très honorable est accordée à feu E. Duponchel. — Prix Bellion partagé entre M. Carlier et M. Mireur. — Prix Meége : M. K. Courmont. — Prix Lallemand, partagé entre MM. Gilles de la Tourette el H. Cethelineau et M. F. Raymond. Des mentions honorables sont accordées à MM. Legrain, Debierre, Le Fort, Bruhl, Sollier et Colin. Physiologie. — Prix Montyon : MM. Bloch et Carpen- tier. Deux mentions sont accordées à M. Hédon et à M. Lesage. — Prix La Caze : M. S. Arloing. — Prix Pourat : M. Gley. — Prix Martin Damourette : M, Gley. Géographie physique. — Prix Gay : le prix n’est pas décerné, la question : Des lacs de nouvelle formation et de Jeur mode de peuplement, est prorogée à l’année 1892, Prix GÉNÉRAUX. — Prix Montyon (arts insalubres), La partie principale du prix est accordée à M. Gréhant, une portion à M. Bay et une portion égale à M. Brous- sais, Il cst accordé une mention honorable à M, Bé- doin et à M. Lechien. — Prix Cuvier : le prix est dé- cerné au Geological Survey des Etats-Unis. — Prix Trémont : M. E. Rivière. — Prix Gegner : M. P. Serret. — Prix Jean Reynaud : feu G. H. Halphen., — Prix Petit d'Ormoy (Sciences mathématiques) : M. E.Goursat. — Prix Petit d'Ormoy (Sciences naturelles) : M. L, Vail- lant. — Prix de la fondation Leconte : une subvention est accordée à M. Douliot. — Prix Laplace : M, L. Champy. Séance du 28 décembre 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Kronecker : Sur le nombre des racines communes à plusieurs équations simultanées. — M. E. Picard : Du nombre des racines communes à plusieurs équations simultanées — M. G. Kœnigs : Sur les systèmes conjugués à invariants égaux. — M. A. Markoff : Sur la théorie des équations différentielles linéaires. — M. Bougaieff : Complé- ment à un problème d’Abel., —Le Comité international pour l'exécution de la carte du ciel a proposé d’ob- tenir des étoiles types de la grandeur 11 en réduisant l'éclat d'étoiles connues de la grandeur 9 au moyen d’un écran à mailles métalliques placé devant l’ob- jectif photographique. En étudiant l'emploi de ces écrans, M. Pritchard a constaté que pour un même écran, la diminution des grandeurs produites est plus considérable avec une lunette photographique qu'avec une lunette astronomique; il explique ce fait, en apparence paraxodal, par les lois de la diffraction. — M. Faye présente l'annuaire du Bureau des longi- tudes pour 1892, il signale les notices de M. Mouchez sur la troisième réunion du Comité de la carte photo- graphique du ciel, de M. Tisserand, sur laccélération séculaire de la Lune, de M. Bouquet de la Grye sur la session de l'Association géodésique internationale à Florence, de M. Janssen sur les travaux de l’observa- toire du Mont-Blanc, enfin de M, Cornu, sur un sys- tème nouveau de mires lointaines que ce savant a installé pour l'Observatoire de Nice. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — En faisant des observations astronomiques dans certaines conditions, M. Mascart avait aperçu autour du point lumineux, et séparé de oelui-ci par un espace noir, un anneau irisé, avec le rouge en dehors. À la suite d'une série d'observations et de raisonnements, il a été amené à attribuer la for- mation de ce spectre aux fibres du cristallin, — M. C. Féry à imaginé un réfractomètre desliné spécia- lement aux liquides, qui ramène la détermination de l'indice à la mesure d’une longueur. Le principe consiste à annuler la déviation, produite par le liquide ii mesurer, au moyen d’un prisme solide d'angle variable; celui-ci est constitué par une bande de verre découpée dans une lentille sphérique ; l’angle formé par les plans tangents à la surface sphérique étant sen- siblement proportionnel à la distance séparant le point considéré du centre optique de la lentille, on peut toujours annuler la déviation du prisme liquide par un glissement du prisme sphérique, et relier très simplement la grandeur de ce glissement à l'indice à mesurer, — M, D. Gernez a déterminé pour la sorbite, au moyen des variations du pouvoir rotatoire, comme il Pavait fait pour la mannite, les états variables de combinaison que ce composé forme en solution aqueuse avec les molybdates acides de soude et d’am- moniaque. — M. H. Le Chatellier a repris l’étude de la composition des borates métalliques ; ilareconnu que l'aspect parfaitement cristallisé d’un culot, que l’on obtient en fondant ensemble des proportions diverses d'oxyde métallique et d'acide borique, n’est pas une 34 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES garantie de la pureté du composé obtenu ; dans bien des cas, il a pu, en effet, soit dissoudre une couche d'acide borique moulant les cristaux du sel, soit séparer par l’iodure de méthylène deux espèces de cristaux, Il en résulte que beaucoup de formules données par les auteurs sont inexactes; en particulier, il n’existe pas de borates renfermant plus de 1 équi- valent d'acide pour 1 équivalent de base, — M. À. Re- coura a recherché quelle est la constitution du sulfate vert du sesquioxyde de chrome signalé par lui dans une communication récente; il conclut que ce composé. qui a la même composition que le sulfate violet, doit avoir une constitution complètement différente. —M A. Besson, qui avait obtenu précédemment, par l’action du chlorure de soufre sur le silicium cristallisé, du chlorure de silicium, a obtenu, en faisant réagir les mêmes corps dans des conditions différentes, un chloro- sulfure de silicium. —- M. Granger, préparant le phos- phure de cuivre d’Abel Cuf Ph par l’action des vapeurs du phosphore sur du cuivre chauffé au rouge, a remar- qué que la proportion du phosphore du composé augmentait avec la durée de la chauffe ; en prolongeant suffisamment l’expérience, il a obtenu le composé Cuÿ Ph, qui est cristallisé. — M. H. Causse a etudié l'influence qu'exerce un excès d'acide chlorhydrique sur la décomposition du chlorure d’antimoine par Peau; cet acide s'oppose à la dissociation; il peut être à ce point de vue remplacé, pour une part, par du chlorure de sodium. — M. E. Fleurant a préparé un cyanure double de cuivre et d’ammmonium en chauflant en tube scellé du chlorure euivrique, du chlorure d’am- monium et du cyanure de potassium dissous dans l'eau en proportions déterminées. — M. G. Mas- sol, en comparant les chiffres obtenus par lui, ainsi que par d’autres savants, pour les chaleurs de neu- tralisation des acides organiques bibasiques, a reconnu que la chaleur dégagée par la neutralisation d’une fouc- tion acide augmente par l'introduction de la fonction alcool dans un carbone voisin. — M. de Forcrand à préparé le glycol disodé (tout le métal à l’état d’al- coolate) en faisant réagir au sein de Palcool éthylique deux équivalents d’éthylate de sodium sur le glycol; il a déterminé la chaleur de dissolution de ce composé, puis les chaleurs dégagées par l’addition à une solu- tion de glycol d’un premier et d’un second équivalents de soude. Les chiffres tirés de ces expériences véri- fient pour le glycol la loi posée par l’auteur pour la glycérine et l’érythrite, à savoir que, dans les alcools polyatomiques, la première substitution sodique dé- vase plus de chaleur que la seconde. — M. Kono- * valoff a étudié l’action de l'acide nitrique dilué sur le nononaphtène; cet hydrocarbure, chauffé avec l'acide nitrique en tube scellé, donne un dérivé nitré qui est transformé par l'hydrogène naissant en une amine el une kétone; l’auteur étudie quelques propriétés de ces composés. — M. P. Cazeneuve avait signalé la forma- tion d’acétylène par la réaction à froid de l'argent sur l’iodoforme ; il a reconnu que le bromoforme donne encore plus facilement de l’acétylène sous l’action de divers métaux, — M. J.-A. Leroy a préparé les naph- tylacétylènes & et 8 en faisant réagir le perchlorure de phosphore sur les méthylnaphtylcétones & et 6 ,il a étudié les propriétés de ces naphtylacétylènes. 3° Sciences naturelles. MM. Th. Schlæsing fils et Em. Laurent font remarquer en quoi leurs recherches sur la fixation de l'azote par le sol diffèrent de celles de MM. Arm, Gautier et R. Drouin sur la même question; lesrecherches de MM. Schlæsinget Laurent démontrent la fixation d'azote libre par le sol recouvert de plantes vertes inférieures, — MM R. Lépine et Barral ont constaté que : 4° dans l’hyperglycémie asphyxique, le pouvoir glycolytique du sang est diminué ; 2° dans -le diabète phloridzique, le pouvoir glycolytique et le pou- voir saccharifiant sont tous deux augmentés ; 3° chez une dizaine de malades diabétiques le pouvoir saccha- rifiant de l'urine était diminué ; 4° dans le sang centri- fugé, le pouvoir sacchariliant reste (out entier dans le sérum, — MM.Ch. Brongniart el Gaubert ont étudie les terminaisons nerveuses de l’organe pectiniformé des Scorpions ; de leurs observations anatomiques ils concluent que ces organes, qui entrent en jeu dans la copulation, y jouent le rôle d’organes excilateurs ; ils ont de plus observé directement des fonctions tactiles. — M. G. Pouchet signale les particularités qu'a pré- sentées eu 1890 le régime de la sardine océanique. — M. J. Chatin a reconnu, dans un parasite qui dévaste les cultures d’œillets à Nice, l'Heterodera Schachtii. M. Trouessart a observé chez un enfant de cinq mois le Phtirius inguinalis sur le cuir chevelu; il explique cette localisation exceptionnelle par l’absence de poils sur les autres parties du corps. — M, L. Mangin indi- que une méthode générale pour caractériser micro- chimiquement la cellulose des tissus végétaux; l’action à froid d’une solution alcoolique saturée de potasse caustique la transforme sûrement en hydro-cellulose, qui se colore en bleu par l'iode. La cellulose peut encore être décelée par des -colorants azoïques convenable- ment choisis ; certaines colorations proposées sont, au contraire, des réactifs des composés pectiques, — M. E. Prillieux, en étudiant la Rhizoctone violette du safran, de la betterave et de la luzerne, a reconnu que les corps miliaires, considérés par Tulasne comme des périthèces, sont en réalité des organes de pénétration du parasite, — M, G. Bonnier a reconnu que les pa- rasites à feuilles vertes, d’après les recherches qu'il à faites sur l'intensité de leur assimilation chlorophyl- lienne, tantôt se nourrissent presque exclusivement des substances qu'ils empruntent à leurhôte, tantôt,comme le gui du pommier, assimilent pour leurcompteet font avec leur hôte des échanges de substances nutritives. — M.A. Lacroix a repris l'étude des grès et schistes houillers de Commentry (Allier) ayant subi des phé- nomènes métamorphiques par la chaleur d’une mince en feu ; le type minéral le plus abondant est la{Cordié- rite. — M. Wada envoie des détails sur le grand trem- blement de terre du 28 octobre 1891 dans le Japon central, ï Mémuires présentés. — M. Foveau de Courmelles : L'état naissant des corps sortant de combinaison, sous l’action des courants électriques, au point de vue physiologique ; actions électives. — M. A. Himbert adresse un mémoire sur un indicateur de grisou, — M. A. Rillet adresse une note sur les explosions de grisou. — M. Merlateau adresse la description et le croquis d’un aspirateur pour mines. — M. Prosper Humblot adresse un mémoire sur un nouveau système universel d'astronomie, — M, Bachelard adresse une note sur une poche d’eau salée d’un volume de 32,400 litres rencontrée dans les marnes aptiennes du Moriez (Basses-Alpes). — M. Guy adresse un travail sur le Sahara et les causes des variations que subit son cli- mat depuis les temps historiques. L. LAPICQUE. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 12 décembre. M. Gley a reconnu, contrairement aux assertions de tous les expérimentateurs qui s'étaient occupés de la question, que la thyroïdectomie totale est mortelle pour le lapin comme pour le chien ; mais il faut enlever, en même temps que les deux lobes du corps thyroïde, deux lobules passés jusqu'ici inaperçcus, dont la struc- ture est celle d’une glande thyroïde embryonnaire. M. Gley a cherché aussi chez le lapin si la glande pi- tuitaire pouvait suppléer en quelque proportion la glande thyroïde. En effet, chez un sujet qui avait sur- vécu à thyroïdectonnie, la destruction de la glande pi- tuitaire, par piqûre à travers l’encéphale, a donné lieu à quelques accidents convulsifs, puis à une série de troubles trophiques, Enfin M. Gley présente une chienne qui a survécu à la thyroïdectomie et qui présente éga- lement des troubles trophiques. — MM. Raïllet et Lu- cet ont étudié le développement de la Coccidie perfo- rante qu'ils ont pu faire évoluer simplement dans Peau. ACADEMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 39 — A propos de la communication de M. Gilis sur les scalènes, chez l'homme, M. Sibileau expose ses re- cherches sur le même sujet ; il démontre qu'il n’y a,en réalité qu'un seul scalène, perforé pour donner passage à des vaisseaux et à des nerfs. M. Sibileau décrit en outre un muscle suspenseur de la plèvre. — M Würtz présente des plaques où s’accuse nettement la distinc- tion du bacille typhique et du bacille d'Escherich. Met- tant à profit le fait connu que ce dernier seul fait fer- menter la lactose avec formation d'acide lactique, il à ajouté du tournesol bleu et de la lactose au milieu gé- latiné ; les cultures de bacille d’Eberth restent bleues, celles du bacille d'Escherich rougissent. — MM. Achard et J. Renault ont trouvé dans un cas de néphrite le B. coli commune comme agent morbifique ; ils ont cher- ché alors en quoi différait de ce microbe la bactérie pyogène de MM. Hallé et Albarran. Tant de lexamen des caractères morphologique, que de l'étude de l'ac- tion pathogène, MM. Achard et Renaud concluent à l’identité des deux espèces. — M. Strauss annonce que M. Krogius (d’Helsingfors) vient d'arriver aux mêmes conclusions, — M. Peyron étudie les variations de la capacité respiratoire du sang dans le saturnisme. — MM. Bouveret etDevic attribuent à un produit soluble contenu dans le suc gastrique les accidents de la ma- ladie de Reichmann (tétanie d’origine gastrique.) — M. Gimbert : Sur l’antisepsie de la phtisie pulmonaire par l'injection lente d'huile créosotée au quinzième. — M. Heim : Sur la matière colorante d'une astérie. M. Langlois est élu membre titulaire. Séance du 19 décembre, M. A.Max. Rodet, dans un cas de lithiase rénale sup- purée, a trouvé le Bacillus Coli communis ; comparant la descriplion que MM. Hallé et Albaran ont donnée de leur bactérie pyogène avec les caractères du B.Coli communis, il pense qu'il s’agit d’un seul et mème microorga- nisme, —M. Réblaud, qui étudiait systématiquement la pathogénie des infections urinaires, est arrivé à peu près à la même conclusion, mais il note quelques lé- gères différences entre l’agent habituel des infections urinaires et le B. Coli communis. —MM. Bourquelot et Graziani ont cultivé le Penicillium Duclauxi sur le li- quide de Raulin etont recherché les ferments solubles ; ils n’ont pas trouvé d’amylase mais un peu d’invertine qui ne passe pas dans leliquide de culture. Ils décrivent les modifications que subit la culture suivant que l’on remplace la saccharose du liquide de Raulin par d’autres sucres. — MM. Abelous et P. Langlois, analy- sant les phénomènes auxquels succombent les gre- nouilles après la destruction des capsules surrénales, ont constaté l'apparition dans le sang d’une substance qui agit comme le curare. — M. Onanoff examine les causes qui peuvent produire l’asymétrie faciale fonc- tionnelle, caractérisée par l'impossibilité de fermer isolément l'œil droit comme l'œil gauche ou inverse- ment. — M. Kalt a observé un œdème des paupières avec chémosis conjonctival double, causé par une hy- pertrophie des amygdales comprimant les jugulaires. — M.E. Laguesse décrit le développement du mé- senchyme et du pronéphros chez l'Acanthias. — M. Œchsner de Coninck : Sur quelques unes des con- séquences qui découlent de l'existence de plomaines antiputrides ou antifermentescibles. — M. Vaquez : Période préoblitérante de la phlébite des cachectiques. Séance du 26 décembre. M. Gilis maintient contre M. Sibileau ses assertions sur l'anatomie des muscles scalènes chez l'homme ; il en trouve trois, distincts surtout par leurs insertions supérieures.—M. Retterer a étudié l’origine etle déve- loppement des plaques de Peyerchezle lapinetle cobaye ; il a trouvé que, de même que l’amygdale, ces organes se forment par des bourgeons endodermiques pénétrant dans le mésoderme, puis leséléments des deux feuillets se mêlent. — M.P. Mégnin en faisant l’autopsie de deux chiens de chasse morts dans un état d'anémie et de mai- greur extrême, atrouvé le gros intestin entièrement ta- pissé, du cæcum à l’anus,par des Trichocephalus depressius- culus ; il n’y avait pas d'autre lésion pouvant expliquer la mort. --- M. V. Fayod : De l'absorption des bouillies de poudres insolubres par les tissus végétaux et ani- maux comme unique moyen propre à démontrer que le protoplasme est un tissu géliforme dont les fibrilles ont une structure canaliculée et spiralée, — M. Dastre cite les expériences récentes par lesquelles M. Langen- dorff et MM. Langley et Dickinson ont démontré que les filets nerveux du cordon sympathique cervical ne tra- versent pas simplement les ganglions interposés sur leur trajet, mais que les uns s’y terminent et que d’autres en partent; il rappelle qu'il a, avec M. Morat, donné cette démonstration il y a dix ans, et que, même à cette époque, il est allé plus loin dans l'analyse du phénomène que ne le font ces recherches récentes, L. Laricoue. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE MINÉRALOGIE Séance du 10 décembre M. Mallard montre que le grenat pyrénéite n’est pas un mélanite, mais un grossulaire. Il ne contient pas de fer en quantité notable, Ce minéral pseudocubique pré- sente le même type d'anomalies optiques que l’ouwa- rowite; les propriétés optiques sont faciles à étudier, srâce à l'absence d’interpénétration des individus cons- tüituant le groupement. M. Mallard a déterminé avec grands détails les constantes optiques du minéral, — M. A. Lacroix fait une communication sur des filons de quartz qui métamorphisent les calcaires paléo- zoïques d’un gisement de l’Ariège et y déterminent en grande quantité de la trémolite, postérieurement pseu- domorphosée en tale. Les cristaux de quartz du gise- ment examiné présentent des phénomènes de torsion des plus remarquables, se traduisant par d’intéressantes modifications dans la structure intérieure de la subs- tance. — M, Wyrouboff admet deux sortes d’isomor- phisme. Dans le véritable, le réseau cristallin et l’el- lipsoide optique se juxtaposent sans se déformer, et les propriétés des mélanges sont une fonction continue. Dans le pseudo-isomorphisme, au contraire, les deux réseaux qui se mélangent se déforment et la fonction devient discontinue. À l’appui de cette thèse, il cite le cas de la cristallisation simultanée du sulfate de po- tasse et du sulfate de soude, du sulfate de potasse et du carbonate de potasse. Il étudie en détail les pro- priétés remarquables des corps que l’on obtient par ce procédé. A. Lacroix, SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 6 janvier 1892. M. Vicaire est élu président pour l’année 1892, — M. Raffy fait une communication sur les systèmes con- jJugués qui se conservent dans les déformations des sur- faces. Il montre que, si une surface È est applicable surune surface S et si une seule des coordonnées de > satisfait à l'équation qui est vérifiée par les trois coordonnées de S exprimées en fonction des para- mètres d’un réseau conjugué, ce système est aussi un système conjugué de la surface 3. Il indique comme exemple les surfaces de MM. Mlodzieiowski et Goursat. — M. Fouret montre comment on déduit du théorème de Budan Fourier une règle très simple pour trouver une limite inférieure des racines d’une équation algé- brique entière f (x) — 0 ; elle consiste à déterminer un nombre qui, substitué à æ dans f(x) et ses dérivées successives, donne des résultats alternativement posi- tifs et négatifs. M. »'Ocacne SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Seance du 17 décembre 1891. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — F, Hebroun et G. F. Yeo : Sur l’audibilité des ondes sonores isolées et sur le nombre de vibrations nécessaires pour produire un son. 36 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Les physiciens ont admis que, pour donner la sensation du son, il faut nécessairement une série de vibrations: mais un certain nombre d'expériences faites sur des tuyaux sonores, les diapasons et les sirènes ont con- duit les auteurs aux conclusions suivantes : 1° Quand un son est produit par un corps en vibration, chacune des ondes de la série de vibrations qui causent le son excite individuellement les terminaisons du nerf acous- tique. Si les vibrations simples sont de telle nature qu'elles ne puissent être entendues, aucun son ne peut être perceu. 2 Les vibrations individuelles peuvent être percues lorsque la rapidité des vibrations n’est pas assez grande pour qu'elle donne naissance à un son distinct, Quand deux ondes sonores se succèdent im- médiatement à un intervalle de 1/50 de seconde ou un intervalle plus petit, elles donnent naissance à une sensation de son, et ce son a la même hauteur que ce- lui qui serait produit par une série prolongée de vibra- tions se succédant avec la même vitesse que les deux premières; en d’autres termes, on peut distinguer le son qui a été produit, pourvu que deux vibrations consé- cutives d’une série agissent sur les terminaisons du nerf acoustique. Les auteurs ont constaté qu'ils ne pou- vaient distinguer les petites variations de hauteur quand la rapidité de la vibration tombe au-dessous de 50 vibra- tions par seconde. ! 2° SCIENCES NATURELLES. —- M. Marshall Ward : Sur la plante de la bière de gingembre « Ginger-beer » et les organismes qui la composent. Cest une contribu- tion à l'étude des levüres et des bactéries, L'auteur fait porter depuis quelque temps ses recherches sur un remarquable organisme composite que l’on trouve pen- dant la fermentation dans la bière du gingembre de ménage. Il se présente sous la forme de masses gélali- neuses semi-transparentes d’un blanc jaunâtre agrégées en amas qui ressemblent à des cervelles en formant des dépôts au fond des vases ; il présente des ressem- blances avec les grains de Képhir du Caucase, aux- quels cependant il n'est en aucune manière identique. Il se compose essentiellement d’un Saccharomycètespé- cifique et d’un Schizomycète qui vivent en symbiose; mais on rencontre invariablement associées à ces deux ferments d’autres espèces de levüres, de bactéries et de moisissures. L'auteur a réussi à isoler les uns des autres ces divers éléments et il les classe comme suit : 4° Les deux organismes essentiels sont une levüre qui consti- tue une nouvelle espèce alliée au Saccharomyces ellip- soideus (Reess et Hansen) et que M. Ward propose d’ap- peler S. pyriformis, et une bactérie également nouvelle et d’un type nouveau à laquelle il donne le nom de Bacterium vermiforme; 2° deux autres organismes se rencontrent dans tous les spécimens qu'il a examinés et qui proviennent de diverses parties de l'Angleterre et d'Amérique : ce sont le Mycoderma cerevisiæ (Desm) et le Bacterium aceti. (Kützing et Zopf). On trouve en outre à côté de ces espèces quine font Jamais défaut un grand nombre d’autres organismes dont la présence n’est pas constante. M. Ward les a également étudiés avec le plus grand soin. Les amas gélatineux, désignés sous le nom de plantes de la bière de gingembre, sont constitués par des membranes et des filaments de Schizomycètes quientourent et réunissent les cellules du Saccharomyces pyriformis. L'auteur a réussi à reconsti- tuer cet organisme complexe en mélangeant des cul- tures pures des deux organismes simples dont il est formé ; le schvzomycète à emprisonné les cellules de levûre dans ses filaments gélatineux, et cet organisme composé, reconstitué par synthèse, s’est comporté comme les spécimens qui n'avaient point été décom- posés en leurs éléments constituants, — M. EF. O. Bower fait une communication sur la morphologie des organes producteurs de spores; il s'occupe spé- cialement dans cette note des Lycopodinæ et des Ophio- glossacege. L'auteur à étudié la structure et le déve- loppement du sporange de plusieurs espèces de Lyco- podinæ et celte étude lui à procuré une connaissance claire de la forme et de la composition de Parchespo- rium; elle leur a montré que cette forme varie suivant l’espèce considérée. M. Bower a comparé les résultats, obtenus au cours de ses recherches, avec ceux que lui a fournis l'étude des Ophioglossaceæ et cette compa- raison l’a conduit à se représenter d'une manière nou- velle la nature véritable de la fronde fertile, C’est d’a- près lui un sporange développé et sectionné homologue des sporanges plus petits et non divisés des Lycopodinæ. M. Bower fait aussi lhypothèse que si une évolution, semblable à celle que subissent les organes porteurs de spores des Lycopodinæ et des Ophioglossaceæ de lé- poque actuelle, se produisait dans un sporange comme celui, par exemple, de l’Anthoceros, le résultat de cette évolution pourrait être un strobile analogue à ceux de l'Equisetum et du Lycopodium. Richard A. GREGORY. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 3 décembre MM.Smithells et Ingle : Laconstitution chimique des flammes. Les auteurs étudient au moyen d’un dispositif ingénieux les différentes parties des flammes formées par des mélanges d'air et de différents hydrocarbures. Voici les principaux résultats obtenus : 1° Le carbone, même en présence d’un excès d'oxygène, forme de préférence de l’oxyde de carbone et non de l'acide car- bonique. 2° La chaleur de formation de l’oxyde de car- bone est probablement supérieure à la chaleur de for- mation de l'eau. 3° Le formène, mêlé à son propre volume d'oxygène, donne les produits représentés par l'équation. CHA + 02 — CO + H20 + H2 Mais CO et H°0 réagissent l’un sur l’autre pour former CO? et H?, et la condition d'équilibre correspond approximativement à la relation : COX H20 —— = 4 CO X 2 MM. Thorpe et Tutton : Oxyde phosphoreux., — MM. Thorpe et Miller : Sur la franguline.. — M. Dy- mond : L'existence dela hyoscyamine dans la laitue, — M. Rainy Brown et Perkin junior : Cryptopine. Les auteurs étudient cet alcaloïde retiré de lopium par Smith en 1867. Leurs analyses, d'accord avec celles de Hesse, conduisent à la formule C21H23A7 05. — M. Hog- dkinson : Action du sodium sur les éthers sels. Troi- sième partie. Orthotoluate benzylique. — M. Addy- man : Action de l'acide sulfurique surles bromures d'hydrogène, de potassium et de sodium. — M. Mac Gowan : Dosage des chlorates. L'auteur appelle l’at- tention sur ce fait que, dans le procédé de Bunsen pour le dosage des chlorates, on a souvent une trop faible proportion de chlore mise en liberté, et insiste sur les précautions à prendre, SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 15 décembre 1891. 1° SCIENCES PHYSIQUES, — M. Crum Brown lit une communication préliminaire du D° Dawson Turner sur la résistance électrique des urines. La résistance varie notablement avec la proportion de matière solide contenue en solution, et il peut y avoir là une appli- cation médicale. On emploie la méthode de Kohlrausch pour mesurer la résistance par les courants alternatifs à l’aide des téléphones, 2° SCIENCES NATURELLES, — M. Malcolm Laurie lit une note sur quelques débris d’Euriptérides des dé- pôts siluriens supérieurs des collines de Pentland. Cette collection de fossiles est nouvelle au musée des sciences et arts d'Edimbourg, et elle contient un nombre considérable de formes usuelles dont une à été prise pour le type d’un genre nouveau : Drepanop- terus. Cette forme est caractérisée par une grande largeur de la carapace et par la forme du membre unique qui est conservé dans le fossile. Le membre ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 37 est long et mince et se termine en un segment légère- ment épanoui en forme de faucille. Ce genre paraît occuper une position intermédiaire entre l’Eurypterus et le Stylonurus. Parmi les autres débris, on trouve deux nouvelles espèces de Stylonurus (8tylonurus ornatus et Stylonurus macrophthalmus). Deux nouvelles espèces d’Eurypterus y sont aussi représentées (Eurypterus cenicus et Eurypterus cyclophtalmus). La seconde espèce de Stylonurus et les deux espèces d’Eurypterus sont caractérisées par des yeux exceptionnellement grands. M. Cossar Ewart lit la seconde partie d'une note écrite par lui-même, et M. J.-C. Mitchell sur les or- ganes des sens latéraux des Elasmobranches. Dans cette partie du travail, les auteurs s'occupent des canaux sensitifs dans le Raia Batis. On a supposé que ces canaux servent à la production du mucus. Les auteurs considèrent que cette idée doit être aban donnée. Ils ont observé un nombre de glandes mu- queuses dans la peau, qui suffisent à produire tout le mucus que l’on trouve à la surface, Ils inclinent à penser que ces canaux jouent un rôle dans la respi- ration. W,. PEDDIE, Docteur de l'Université. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES (SECTION DE MANCHESTER) Séance du 4 décembre M. J. Barrow présente un mémoire sur la « Cla- rine » (dissolution de perchlorure de fer, saturée par de l’oxyde ferrique), destinée à précipiter les eaux d'égout. La clarine, additionnée aux eaux d’égout dans la proportion de 220 kilos par chaque million de litres, réduit l’'ammoniaque dite « albuminoïde » dans la pro- portion de 83 °/,, tandis que le protosulfate de fer, la chaux et le précipité « aluminoferrique » combiné avec Ja chaux ne la réduisent respectivement que de 62 et 75 0,. — M. H. Grünshaw lit un mémoire sur les dépenses occasionnées par les cinq principaux pro- cédés dont on se sert pour la purification des eaux d’'égout. Ses chiffres reposent sur les expériences non encore terminées de la municipalité de Salford, Voici la dépense journalière par million de gallons (4 mil- lions 540.000 litres) : 4° Procédé à la chaux, avec filtra- tion, 36 schellings (44 fr. 65); 2° Procédé à la clarine, sans filtration, 40 sch. (49 fr. 60); 3° Le même, avec filtration, 54 sch, (66 fr. 95); 4° Procédé international, avec filtration, tel qu'il est préconisé par la Compa- gnie, 4 sch. (66 fr. 93); 5° Le même, avec la quantité de précipitant que l’auteur croit nécessaire, 90 sch. (111 fr. 40); 6° Procédé électrique, avec filtration, 70 sch. (86 fr. 80); 7° Procédé alumino-ferrique, sans filtration, 67 sch, (83 fr. 19); 8° Le même, avec filtration, 81 sch. (100 fr. 45); 9° Procédé Barry, 116 sch, (143 fr. 85.) L'auteur a fait une série d'expériences sur les divers précipitants, et il a trouvé que des quantités conte- nant des proportions équivalentes des métaux ont le même pouvoir précipitant, Il considère cependant que les seuls précipitants qui conviennent sous tous les rapports sont les sels de peroxyde de fer, M. Ri- chards nie cette conclusion : il croit que les protosels de fer sont aussi efficaces, et de plus, sont moins chers. Il est arrivé à la même conclusion que M. Grünshaw, quant à l'équivalence des divers métaux au point de vue de la précipitation des eaux d’égout; il a fait, dans un but purement théorique, pour la confirmer, des expériences avec le perchlorure de mercure. M. Cor- bett croit que le procédé à la chaux, condamné par les auteurs précédents, peut encore se défendre, Il cite le cas de certaines eaux d’égout à Salford, qui, traitées par la chaux, se sont conservées dans des réservoirs pendant plusieurs semaines, au milieu de l'été, sans donner lieu à aucune odeur nauséabonde. P.-J, Harroc. ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE Séance du 10 octobre. Lecture du discours prononcé aux funérailles de M. Mailly, membre de l’Académie, par M. Plateau, di- recteur, Ce savant modeste, ancien aide de Quetelet à l'Observatoire de Bruxelles, a laissé quelques ouvrages qui seront consultés avec fruit pour l’histoire de l’as- tronomie, aux Etats-Unis, dans l'hémisphère austral, en Espagne et en Angleterre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — Une note très ingé- nieuse de M. Osaro, qui est chargé du cours de miné- ralogie à l'Université de Liège, démontre la possibilité, dans les cristaux, d’un genre d’hémiédrie donnant des formes conjuguées superposables, quoiqu'elles ne pos- sèdent ni centre ni plan de symétrie. M. Osaro applique sa démonstration purement géométrique à l’existence d'un groupe tétartoédrique non signalé dans le sys- tème quadratique. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. P. Van Beneden fait une lecture sur une bande d’hyperodons échoués en partie dans la Tunisie, en partie sur les côtes de Nor- mandie, où elle a été signalée par M. le capitaine de vaisseau H. Jouan (mémoire de la Société des sciences naturelles de Cherbourg). Séance du 7 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Terby, au sujet de l'apparition de nouvelles taches rouges et noires à la surface de Jupiter, fait une lecture qui intéressera les astronomes qui s'occupent spécialement de lPaspect physique de cette planète, Nous n’extrairons de cette lecture, qu'il est impossible de résumer, que cette seule remarque très intéressante : M. Terby a vu ombre d'un satellite projetée parfaitement en noir sur une tache rouge, ce qui exclut l'hypothèse d’une lumière propre dans celle-ci. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — L'Académie émet un avis favorable sur une proposition qui lui est faite par le Gouvernement d'établir à l'Observatoire royal un ser- vice de statistiqne des coups de foudre, —M. Vincent, météorologiste à l'Observatoire, communique une note sur l'existence, bien caractérisée, d’après lui, de trois couches de nuages dans les dépressions barométriques, tandis qu’on n’en admettait que deux jusqu’à présent, les cirrhus et les nuages que M. Hildebrandson appelle cirrho-stratus dans les altitudes les plus élevées, alto- stratus dans les moindres, Pour M. Vincent, qui est un observateur très habile, il faut admettre : 1° une couche supérieure formée decirrhus et de cirrho-stra- tus; 2° une couche moyenne formée de cirrho-cumulus plus ou moins bien définis, quelquefois d’alto-stratus; 3° une couche inférieure composée des nuages à pluie proprement dits. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. L. Fredericq fait une analyse d’un travail, dont il est l’auteur, et inti- tulé : Nouvelles recherches sur l'anatomie du Crabe. — M. G. Van Beneden: Sur un argule nouveau des côtes d'Afrique, qui lui a été envoyé du Sénégal par M. Chevreux, et pour lequel il propose le nom spéci- fique de Melita, qui est celui du yacht de ce navigateur. novembre. de l’Académie royale. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 28 novembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. D. Bierens de Haan présente le cinquième rapport de la Commission de rédaction de la correspondance et des œuvres com- plètes de Christiaan Huygens (tables des matières des tomes LIT et IV de la correspondance, dont le dernier paraîtra sous peu). 2° SciENCES PHYSIQUES. — M. P. H. Schoute présente le travail de M. J. L. Sirks intitulé : Sur l'influence de la diffraction par un réseau à mailles carrées, place devant l'objectif d’une lunette, sur la clarté de l’image 38 principale d’une étoile, Il en fait connaître le résultat principal très simple que voici : ’affaiblissement de la lumière est exprimé par le carré du nombre qui in- dique combien de fois la surface transparente du ré- seau est comprise dans la surface totale du réseau. Sont nommés rapporteurs : MM. H. A. Lorentz et H. G. van de Sande Bakhuyzen. — M, H. A. Lorentz lit le rapport sur le mémoire : le Soleil, de M. A. Brester (rapporteurs : MM. J. C. Kapteyn, H. A. Lorentz et H. W. Bakhuis Rozeboom). Le mémoire sera inséré dans les publications de l’Académie, à condition que l’auteur y apporte qnelques modifications. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Mayer : Sur l'in- tensité de la respiration des plantes qui croissent dans l'ombre. Sont nommés rapporteurs : MM. M. W. Beyc- rinck et W. F.R. Suringar. — Sur l’avis des rapporteurs, M. N. W. P. Rauwenhoff et J. W. Moll, le mémoire : Sur la lamelle de liège et la subérine de M. C. van Wisselingh (voir Revue générale, t. 11, page 734) sera imprimé dans les publications de l’Académie. 4° SCIENCES MÉDICALES. — M. C. A. Pekelharing offre, pour la bibliothèque de l’Académie, les Recherches faites au laboratoire de physiologie de l’Université d'Utrecht, sous la direction de MM. Th. W. Engelmann et C. A. Pekelharing. (Quatrième série, tome I, fascicule 2.) Séance du 19 décembre 1° SGIENCES MATHÉMATIQUES. — M.J. A. C. Oudemans : Sur l’examen des niveaux à bulle, 2° ScENcEs PHYSIQUES. — M. H, A. Lorentz présente un mémoire de M. A. C. van Ryn van Alkemade inti- tulé : Application de la théorie de M. Gibbs aux phases d'équilibre de solutions de sels et de mélanges de li- quides, Sont nommés rapporteurs MM. H. A. Lorentz et J. D. van der Waals. — M. H. W. Bakhuis Rooze- boom fait une communication sur l'influence de l’iso- morphisme sur le rapport entre un sel double et la solution aqueuse de ses composants. Il a étudié les sys- tèmes formés des deux sels FeCl3, et Az Hi CI à une température de 15°, En partant d’une solution saturée de FeCl,6H°0 et en ajoutant du chlorure d’'ammonium, on voit d'abord la solution s'enrichir aussi en chlorure ferrique. La composition de la solution (courbe AB de la fig. 1) peut varier entre les limites 9,30 à 10,08 mol. Fe CB et 0 à 1,52 mol. AzHiCI sur 100 mol. H20. Aussitôt que la teneur en chlorure d’ammonium sur- passe 1,52 le sel double 2AzH4 CI, Fe CISH?,0 appa- rait et existe pendant que la solution (courbe BC) varie entre 10,08 à 6,74 mol. Fe Cl et 1,52 à 7,81 mol. Az HiC]. Si l’on sur- passe encore les derniè- res limites, le sel double sera remplacé par des cristaux mixtes ne renfer- mant que 8 °/, de chlo- rure ferrique environ et dont le pourcentage diminue jusqu'à zéro pen- dant que la composition de la dissolution varie de 6,74 à 0 mol. FeCl et 7,81 à 11,88 mol. AzH4Cl (courbe CD). L'isotherme de 45° se compose donc des trois branches AB, BC, CD. Dans les points de transition coexitent, en B sel double et chlorure fer- rique hydraté, en C sel double et cristaux mixtes à +8°/ FeCl. La partie pointillée forme une conti- nuation labile de la branche BC observée par l’auteur. Les résultats mentionnés sont en pleine concordance avec la règle des phases coexistantes de M. Gibbs ap- pliquée antérieurement par l’auteur à l’équilibre des sels doubles et leurs dissolutions, et récemment à l’é- quilibre des cristaux mixtes. — M, E. Mulder présente la thèse de M. L. E. ©. de Visser : Expérimentation avec le manocryomètre. 3° SCIENCES NATURELLES, — Est décidée l'insertion dans les œuvres de l’Académie du mémoire de M, A, Mayer : Fecr 10,08 9,30 6,74! 0 152 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Sur l'intensité de la respiration des plantes qui croissent dans l’ombre. — M. C. A. J. A. Oudemans présente son « Apercu renouvelé des fungi des Pays-Bas », — M. J. M. van Bemmelen présente le mémoire de M. H, van Cappelle intitulé : Le dilivium de West-Drente, SCHOUTE, Membre de l’Académie. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE BERLIN Séance du 20 novembre. M. Alard du Bois-Raymond présente à la Société deux modèles de moteurs à courants tournants, cons- truits aux ateliers de Siemens et Halske Ces moteurs, qui paraissent avoir une importance particulière pourla solution du problème de la translation de la force, sont basés sur le principe connu et découvert par Ferraris, à savoir que deux courants perpendiculaires l’un sur l’autre, dont l’un est en retard d’un quart de longueur d’onde,donnentun champ tournant.Ce principe estd’au- tant plus rigoureux et en même temps la vitesseest d’au- tant plus constante qu’on emploie un plus grand nombre de bobines. L'un des moteurs est composé de 12 bo- bines, dont les courants ont une différence de phase d’un douzième de période. Le moteur est alimenté par une simple machine à courants alternatifs, et on profite de tous les courants tant positifs que négatifs. L'autre moteur est composé d’un anneau de Gramme qui est entouré d’un second champ. Dès que les deux champs ne coincident pas, il y a rotation. D' Hans Jan. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE. Séance du 19 novembre. SCIENCES PHYSIQUES. — M, Lieben: « Sur l'acide a-méthyl-o-phthalique. » — M, Czeczetka « Sur la tuberculine pure, » Séance du 3 décembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Pick : Sur la re- présentation conforme d’un demi-plan sur un polygone formé d’arcs de cercle et infiniment voisin. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Jaumann : Communica- tion « sur une méthode de défermination de la vitesse de la lumière ». — M. Laïiner : « Détermination quan- titative de l’argent et de l’or au moyen du chlorhydrate d'hydroxylamine. » L'auteur recommande ce sel pour le dosage de l'or et de l’argent, parce qu’il a une action très énergique en présence des alcalis, et donne des résultats plus précis pour un temps relativement plus court, — M. Schindler : Notice sur l’aldoxime croto- nique et le cyanure d'allyle, — M. Tumlirz : Sur le re- froidissement des liquides. — M. Jager : Nouvelle mé- thode pour trouver la grandeur des molécules, — M. Sonnenthal : « Sur la dissociation dans les solu- tions de tartrates étendues. » C’est la suite de la com- munication du 12 novembre, 3° SGIENCES NATURELLES. — M. Krasser : Sur la flore fossile des couches rhétiques de Perse, — MM. Chris- temanos et Strôssner : Contribution à la connaissance du noyau musculaire. — M. Schaffer : « Contribution à l’histologie des organes de l’homme : I. Duodénum; II. Intestin grêle ; III. Gros intestin, » Séance du 10 décembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Holetschek : « Sur la comète de 1689, » Cette comète, remarquable par sa longue queue, fut observée en décembre 1689 vis à vis l’« du Centaure, au moment où, se dirigeant vers le sud, elle traversait la constellation du Loup. Elle présenta, d’après les observateurs de Malacca, son maximum de vitesse, environ 3°, du 14 au 45 décembre; les jours suivants cette vitesse diminua constamment, Ces observations de lieu et de vitesse ne s'accordent avec aucune des trajectoires calculées jusqu'ici. On arrive à concilier grossièrement ces données en ad- mettant que la position de la comète, au matin du CORRESPONDANCE 39 14 décembre, n’était pas l'étoile w du Loup (Uronome- tria Argentina), mais bien l’étoile d de la même cons- tellation, On déduit ainsi trois positions de la comète: T.m.deParis Longit.1690,0 Latit.1690,0 1689 déc. 9.# 2IBATIE20E 16°.01x9" alignement 13.4 238.22.25 24.50.12 d du Loup. 22.4 235,35. 8 42.29, 4 a du Centaure Parmi les trajectoires examinées par l’auteur, la sui- vante, qui passe par les deux dernières positions el assez près de la première (alignement), a été le sujel de recherches plus avancées pour déterminer, par exemple, l'angle de position et la longueur de la queue : T=— 1689 novembre 30.1654 temps moyen de Paris xm— = 180.10'.39" z ÿ 9% © 9 =, ee équateur moyen 1690,0. logq — 8.80909 Toutefois cette dernière elle-même ne rend compte qu’assez imparfaitement des observations. Si l’on tient à représenter la marche par une trajectoire connue, c’est à celle de Pingre qu'il faut donner la préférence, 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Joseph Grossmann : « Forme des ondes et leur longueur. » — M. Jacob Burgaritzki : « Principes d’un moteur à pression d'air et d’un moteur à vide. » — M. J. Hann, présente « quelques résultats sur les observations météorolo- giques faites au pic du Fugi (3.700 mètres) dans le Japon ». De la comparaison des observations poursui- vies pendant un mois à son sommet et à son pied (Yamanaka 990 mètres), ainsi qu'aux stations de Nu- mazu et Tokio (0 mètre), l’auteur a tiré une série de conclusions intéressantes. Les temps de phase de l'oscillation double diurne du baromètre sont exacte- ment les mêmes depuis le niveau de la mer jusqu’au delà de 3.700 mètres, les amplitudes varient dans le rapport de la pression. L'oscillation simple se comporte différemment; on peut l’envisager comme la résultante de deux oscillations de même durée, mais d'amplitude et de phase différentes. La pression de la vapeur d’eau en tous les postes peut être calculée exactement en connaissant celle du niveau de la mer, d’après une formule donnée autrefois par l’auteur. L’intensité du vent présente son maximum à {1 heure du matin, son minimum dans laprès-midi. — M. J. Liznar : « Sur une nouvelle carte magnétique de Autriche. » La carte magnétique, commencée eu 1889 fut poursuivie, dans l'été de 91 en Galicie, où l’on mesura 108 déclinaisons, 220 intensités et 217 inclinaisons. L'auteur donne un tableau d'ensemble des résultats et les compare à ceux de Kreil obtenus en 1850. Les nouvelles mesures remet- tent en évidence une anomalie remarquable dans le distribution de la force magnétique dans l’est de la Galicie, anomalie signalée déjà par Kreil. Les isoclines et les isodynamiques forment maintenant avec les pa- rallèles des angles plus petits qu’en 1850, — MM. G. Neumann et F. Streintz : « Action de l'hydrogène sur le plomb et sur d’autres métaux. » — MM. Lipmann et Fleissner : « Sur l’action de l'acide iodhydrique sur la cinchonine, » 3° SGIENGES NATURELLES. — M. Th.von Truszkowski : « Description d'un bacille trouvé dans un abcès du foie ». — M. Ritter von Hauer : « Recherches sur la connaissance des céphalopodes du Trias de Bosnie, Nouvelle découverte du Muschelkalk de Han Bulog, près de Sérajevo. » Grâce aux libéralités de M. J. Kellner, on à pu continuer les fouilles commencées par Han Bulog et en entreprendre de nouvelles, par exemple, dans la vallée de Moliache, près de Halilaci, où existent des calcaires rouges très riches en fossiles, et à Dra- gulac, où l’on trouve la faune du calcaire de Hallstatt, Dans ce mémoire, l’auteur donne d’abord la description et le dessin des nouvelles fouilles de Han Bulog, se réservant de revenir plus tard sur les autres. Aux 66 espèces de Han Bulog viennent s’en ajouter 54 autres dont 43 au moins appartiennent à des classes nou- velles, Ces céphalopodes présentent avec ceux de Hallstat, découverts par Mojsisovics, une grande res- semblance déjà mise en évidence dans un travail pré- cédent. Parmi les plus intéressants se trouvent un Au- lacoceras qui n’avait pas été trouvé jusqu'ici dans le Trias inférieur, de nombreux Nautiles et Cératites dont certaines formes se rapprochent de Ceratites decres- cens, plusieurs espèces d’Arcestes, proches parents de l'Arc. carinatus H. des Procladiscites, un Gymnites regardé comme (. acutus. Emil WEyr, Membre de l'Académie. CORRESPONDANCE SUR LES GÉOMÉTRIES NON EUCLIDIENNES Me sera-t-il permis d'enregistrer, d’ailleurs très briè- vement, le demi-aveu que vient de laisser échapper M. Poincaré, en faveur des doctrines dites empiriques, dans son article si clair et si lucide sur les géométries non Euclidiennes? (Revue du 15 décembre 1891.) On a, depuis longtemps, passionnément agité, dans certaines sphères, la question de savoir si les lois fon- damentales ou axiomes, que l’on rencontre au début de la géométrie, ne sont que des inductions basées sur des faits extérieurs, ou si elles représentent des nécessités inéluctables de l'esprit, si par conséquent la certitude de ces axiomes n'est que relative ou si elle est absolue. L'école de Stuart Mill soutient la première de ces doctrines; la seconde est vivement défendue par les métaphysiciens et par les mathématiciens. Un certain point a cependant toujours gêné ceux-ci, du jour où Euclide qualifia de postulat lun des axiomes de la géométrie !, et cette gène s’est singulièrement accrue quand des géomètres ont montré que la néga- ‘Je ne puis m'empêcher de noter, à ce propos, qu’une bonne partie des difficultés soulevées au sujet du postulatum d’Euclide tiendrait à ce que les définitions données par le géomètre grec pour la ligne droite et pour le parallélisme ne sont pas concues, comme cela devrait être, au même point de vue. Euclide a eu raison de définir la ligne droite toute ligne superposable à elle-même (j'interprète sa définition); tion du postulatum n'implique pas la négation du rai- sonnement géométrique, et ont prouvé que l’on peut écrire des ouvrages très cohérents sur un point de départ arbitraire, Aussi, M. Poincaré, dont l'esprit logique et pénétrant ne pouvait rester soumis à une sorte d’antinomie mathématique, vient-il de se décider à jeter par-dessus bord la doctrine métaphysique de la nécessité men- tale, au moins en ce qui est du domaine de la géo- métrie. Les axiomes géométriques ne sont, pour lui, ni des jugements synthétiques à priori, ni des faits expérimentaux : ce sont des conventions ou des définitions. Mais comme le savant géomètre, auquel sont dues de si belles lecons sur la physique mathé- matique, sait bien que les lois de la forme des corps réels ne sont pas affaire de convention, il est obligé de corriger ou de compléter sa doctrine en admettant que, parmi toutes les conventions possibles, notre choix est guidé par des faits expérimentaux. Tel est l'aveu que je veux retenir, parce qu'il entraîne tout le reste et qu'il conduit droit à l’empi- RER in PNR PRE RS PRE mais il aurait dû aussi définir les parallèles: «tout groupe de droite superposable à lui-même » Quant à la question du point de rencontre des parallèles, elle appartient à un autre ordre d'idées, qui est celui des positions limites et des tangentes. 40 NOTICE NÉCROLOGIQUE risme géométrique. En effet, suivant que notre choix, qui est libre, se porte ou non sur les faits d'expérience, nous construisons ou la vieille et bonne géométrie de nos pères, ou la brillante, mais factice géométrie de Lobatchewski et de Riemann, l’une fondée sur des don- nées de la nature, l’autre sur des données construites arbitrairement par l'esprit. Maintenant, comment qua- lifier toute spéculation reposant sur des données en partie fictives; quel nom donnerait-on à une thermo- dynamique où l’on admettrait la notion des tempéra- tures négatives, ou celle de la proportionalité des pressions aux carrés inverses des volumes? Quel nom donne-t-on à la représentation, sur la scène, de faits fictifs tirés de la vie réelle? Quel nom donne-t-on à l'expression rythmée de sentiments qui n’ont jamais eu d'existence particulière ? Jeu de l'esprit, drame, poésie et, d’une manière générale, l’Art, voilà ce qui a toujours servi à qualifier nos représentations des fictions. La géométrie non Euclidienne n’est donc pas autre chose, si ses bases sont en partie conventionnelles, ce que M. Poincaré affirme et ce dont on ne saurait dou- ter, qu’un art, qu’une sorte de poésie géométrique ou de jeu intellectuel. C’est une partie de cartes ou d'échecs dont on aurait compliqué les règles de position etuni- formisé la valeur des cartes ou des pions. Il ne faut, par conséquent, attribuer aux essais de géométrie non Euclidienne d'autre intérêt que celui qui s'attache à toute action susceptible de devenir une source de distractions et de plaisirs, et en particulier à tout moyen d'exercer à peu près innocemment, et très agréablement pour certains, un surcroit d'activité intel- lectuelle. En dehors de ce domaine purement esthétique, il n’y à qu’une science géométrique : c’est la géométrie d’'Euclide, parce que seule elle repose sur des données objectives réelles, et qu’elle reste ainsi subordonnée aux progrès de nos connaissances expérimentales. Une véritable science, exacte ou empirique, est une étude de la nature, et non pas un exercice de logique sur un sujet conventionnel et fictif, Les axiomes des sciences déductives comme les lois de la Physique, ont une origine indépendante de notre volonté et de nos fantaisies; si, comme le postulatum d’Euclide, ils ne sont certainement pas des nécessités de l’esprit, ils ne peuvent ètre que l'expression des faits. George Mourer, Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées. NOTICE NÉCROLOGIQUE S: Le 13 décembre 1891 est mort à Bruxelles un savant qui depuis de longues années déjà occupait une des premières places parmi les chimistes contemporains. Jean Servais Stas a publié des recherches sur des questions de chimie très diverses : nous citerons entre autres les mémoires sur la phloridzine (1838), sur la recherche des alcaloïdes dans le cas d’empoisonnement (1851), sur les spectres des différentes sources lumi- neuses (1890). Mais les travaux qui ont contribué sur- tout à faire connaître son nom sont ces admirables recherches qu’il effectua de 1840 à 1870 sur les poids atomiques et la loi des proportions définies. Stas débuta dans ce genre de travaux en collabo- rant avec Dumas à la détermination du poids atomique du carbone, dont Berzélius avait donné une valeur inexacte. Le résultat de ces expériences fut que le rapport de combinaison du carbone à l’oxygène est de 75 à 100, Ce résultat semblait une confirmation de l'hypothèse de Prout, d’après laquelle les poids atomiques des différents corps devaient être des multiples simples de celui de l'hydrogène. Devant des objections soule- vées par Berzélius, Stas reprit par une nouvelle mé- thode (combustion de l’oxyde de carbone dans l'oxygène) la mesure du poids atomique du carbone. A la suite de ces recherches qui l’occupèrent de 1842 à 1845, il conclut que le poids atomique cherché est sûrement compris entre To et 75,06. Ce résultat le conduisit à de nouvelles investigations sur la valeur de l'hypothèse de Prout. Il reprit avec le plus grand soin et par plusieurs méthodes différentes la détermination des nombres proportionnels des corps que Dumas regardait comme rentrant dans l'hypothèse de Prout; l'azote, le chlore, le soufre, le potassium, le sodium, le plomb et l'argent. A la suite de ces travaux, publiés en 1560 dans le Bulletin de l’Aca- démie de Belgique sous le titre de Recherches sur les rapports réciproques des poids atomiques, Stas énonca le résultat suivant : « Il n'existe pas de commun diviseur entre les poids des corps simples qui s'unissent pour former toutes les combinaisons définies. Aussi longtemps que, pour l'établissement des lois qui régissent la matière, on veut s’en tenir à l’expérience, on doit considérer la loi de Prout comme une pure illusion, » Ce résultat ne fut pourtant pas accepté par les défen- STAS. seurs de l'hypothèse de Prout : entre autres, Dumas et Marignac, admettant les nombres fournis par les expé- riences de Stas, cherchèrent à attribuer les diffé- rences à des circonstances secondaires ou acciden- telles. Marignac en vint même à mettre en question la loi des proportions définies, et à émettre l’idée que les formules que nous obtenons pour les composés sont des formules moyennes, susceptibles de varier sous l'influence des conditions extérieures. Stas reprit alors dans ses Nouvelles rechercnes sur les lois des proportions chimiques, sur les poids atomiques et les rapports mutuels, la détermination du rapport de com- binaison entre le soufre et l'argent d’une part, l’ar- gent et le chlorure d'ammonium d'autre part; il s’at- tacha dans ces expériences à faire varier autant que possible les conditions extérieures ; il arriva à la con- clusion suivante : La temperature et la pression se sont montrées sans influence sensible sur la composition des corps en expérience. L'ensemble des recherches de Stas est surtout remar- quable par la précision qu’il introduisit dans les opé- rations chimiques, précision inconnue jusqu'alors et qui souvent même n'est pas atteinte dans les mesures de physique. Stas possédait une très grande habileté manuelle, et, de plus, il ne reculait devant aucune fatigue pour obtenir un résultat satisfaisant ; c’est ainsi, pourn'’en citer qu’un exemple, que, dansses expériences sur le poids atomique duchlore et de l'argent, il n’hé- sita pas à passer plusieurs nuits pour surveiller le lavage de son précipité de chlorure d'argent, Aussi ces tra- vaux l’ont-ils occupé pendant plus de trente ans; mais il laisse un ensemble imposant de résultats incon- testés et que l’on peut considérer comme définitivement acquis à la science. G. CHarPy. Nos lecteurs ont appris la mort du Erofesseur Richet, survenue après la publication de notre der- nier numéro, La Revue consacrera tout prochainement à l’éminent chirurgien un article nécrologique. Au moment où nous mettons sous presse, nous ayons le regret d'apprendre la mort de M. de Quatrefages, membre de l’Académie des Sciences et Professeur au Muséum. Nous publierons dans un de nos prochains numéros une notice sur l’illustre zoologiste. Le Directeur- Gérant : Louis OLivier Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 3° ANNÉE N° 2 30 JANVIER 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PÉIRES NET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LA PHOTOGRAPHIE DES COULEURS SON PRINCIPE; SES PROGRÈS LES PLUS RÉCENTS On sait que l’image des objets éclairés, projetée par une lentille convergente sur un écran blanc, est la reproduction exacte de la forme et des cou- leurs de ces objets. L'image est toujours jolie alors même que l’ob- jet nous est indifférent. Le plaisir qu'on éprouve à la regarder a peut-être ses raisons en dehors de la physique; mais, à coup sûr, il a inspiré les phy- siciens créateurs de la photographie, en leur don- nant le désir de rendre permanente l’image fugi- tive de la chambre noire avec son coloris et son modelé. Une partie du problème a été, en effet, résolue par la photographie actuelle : le modelé de l’image est resté sur le cliché, mais la couleur a disparu. 1l Les premières obsvervations relatives à l’obten- tion des couleurs remontent au début du siècle. Seebeck, en 1810 et Herschel vers 1840, firent des recherches relatives à la coloration que prennent les sels d'argent, le chlorure d'argent, particuliè- rement, sous l'influence de la lumière colorée. On savait depuis longtemps que le chlorure d'ar- gent noircissait à la lumière blanche. Seebeck dé- couvrit que, sous l'influence suffisamment prolon- gée des rayons colorés du spectre, le chorure d'ar- gent prend des colorations qui rappellent celles des rayons qui ont agi. En 1840, Herschel refit les expériences de Seebeck et confirma ses observa- tions. REVUE GÉNÉRALE, 1892. Comme lui, il opérait en projetant le spectre sur le chlorure d'argent. Toutes les fois que les physi- ciens veulent étudier les propriétés de la lumière colorée dans des conditions simples et bien défi- nies, c'est au spectre qu'ils s'adressent, parce que le spectre est formé de rayons simples. Toutes les autres lumières sont des mélanges de ces cou- leurs simples. Vers 1848, M. Edmond Becquerel obtint, pour la première fois, une image fidèle du spectre so- laire. Il eut l’idée d'opérer sur une lame de plaqué d'argent préparée d’une manière spéciale. Au lieu de la sensibiliser par l’iode, comme Daguerre, il em- ploya le chlore ; la surface convertie en chlorure violet d'argent, exposée auxrayons du spectre pen- dant un temps suffisant, prend la couleur de ces rayons. Ce résultat si intéressant ne résout point le problème de la photographie des couleurs : l’image obtenue n'est point fixée, c’est-à-dire qu’elle ne peut être conservée que dans l'obscurité ; exposée à la lumière blanche, l'épreuve devient blanche ensonentier; carle sous-chlorure d'argent, ayant conservé toute sa sensibilité, devient blanc à la lumière blanche, comme il était devenu rouge à la lumière rouge. Toutes les tentatives faites par E. Becquerel pour fixer l'épreuve colorée sont restées infruc- tueuses. Après Becquerel, Poitevin a repris le même procédé, c’est-à-dire l'emploi du sous-chlo- rure violet d'argent avec des modifications secon- daires : au lieu de déposer le sous-chlorure sur une 3 42 G. LIPPMANN. — LA PHOTOGRAPHIE DES COULEURS plaque d'argent, il l'employait sur papier; de plus, il l’imbibait de bichromate de potasse qui augmente la sensibilité. Mais, pas plus que E. Becquerel, Poitevin n’est parvenu à fixer les images colorées. A la suite de ces expériences, on parait avoir re- noncé, pendant plus de vingtans, à chercher le pro- blème de la fixation directe des couleurs. En 1869, Charles Cros et M. Ducos de Hauron imaginèrent une méthode indirecte pourobtenir, à laide de la photographie, des images polychromes. En principe, l’un et l’autre inventeur procèdent de la même manière. Ils tirent d'abord de l’objet à reproduire trois clichés incolores; ensuite, à l’aide de procédés connus, ils obtiennent de ces trois clichés trois images qui sont teintées de trois cou- leurs différentes, ces covleurs étant dues par exemple à l'emploi de trois encres grasses colorées. En superposant ces trois images, qui séparément sont monochromes, on obtient une image poly- chrome. C’est ainsi que l’on procède d’ailleurs pour faire une chromo-lithographie, avec cette diffé- rence que l'ingénieux procédé de Charles Cros et de M. Ducos de Hauron supprime l'intervention des dessinateurs et la remplace par la photogra- phie. Par contre, il faut bien remarquer que ce procédé ne résout pas le problème de la fixation directe des couleurs. Les clichés obtenus sont incolores. La couleur est apportée après coup et par des rouleaux chargés d’encres colorées, et le choix des pigments ainsi employés reste à l'appréciation de l’ouvrier, Ce choix est donc plus ou moins arbi- traire. IT La méthode au moyen de laquelle j'ai réussi à fixer définitivement sur un même cliché toutes les couleurs du spectre fidèlement reproduites, est en- tièrement différente de celles que j'ai exposées plus haut. Au lieu de m'adresser aux effets chimiques si mal connus de la lumière, j'ai pensé à utiliser ses propriétés physiques qui sont définies avec précision. La théorie de la lumière est exacte- ment calquée sur la théorie du son; on compte le nombre des vibrations lumineuses aussi sûrement que celui des vibrations sonores. De même qu'on sait, en acoustique, combien il faut de vibrations pour obtenir le {4 normal (870 par seconde), de même on sait combien il faut de vibrations pour obtenir du rouge, du jaune, du violet, etc. Cette théorie de la lumière m'a permis de dé- finir à priori les conditions où il fallait se mettre pour obtenir des clichés colorés. Ces conditions sont au nombre de deux; elles ne modifient que très peu les dispositifs usuels de la photographie. Il faut, premièrement, que la couche sensible soit continue et non pas formée de petits grains dispersés dans de la gélatine; il faut, deuxième- ment, que cette couche sensible soit adossée à une surface réfléchissante formant miroir. Le développement et le fixage se font, d’ailleurs, à l’aide des réactifs ordinaires. On obtient une couche con- tinue en sensibilisant,dans un bain d’azotate d'argent, une couche de collodion, d'albu- mine oubien de gélatine conte- nant du bromure,du chlorure, ou de l’iodure de potassium. On obtient une surface mi- roilante adossée à la couche en versant derrière celle-ci une certaine quantité de mer- cure en contact avec elle. A cet effet la plaque de verre qui porte la couche est retournée (c'est-à-dire la face du verre du côté de l'objectif); la plaque se trouve serrée contre une petite auge garnie de caoul- chouc où l’on verse le mer- cure, La figure 1 représente cette auge ; on voit qu'elle est for- mée d’une contre-lame de verre V munie le long de ses bords d’un cordon de caout- chouc collé, produisant une fermeture étanche. La petite auge plate ainsi constituée et remplie de mercure, est exposée dans la chambre noire comme le montre en coupe la figure 2. Lorsque la pose est terminée , on vide le mercure, on enlève la plaque sensible qui n’é- tait maintenue que par pression contre le ca- outchouc, on la déve- loppe dans un bain (d'acide pyrogallique et de carbonate d’am- moniaque, par exem- Fig à, Disposer de l'ayse ple); on fixe à l’'hy- noire. — O, lentille. — E, chas- posulfte de soude. io, fhoiographique constitué Les couleurs appa- figure 1. raissent au fur et à mesure que la plaque devient sèche. On les voit par réflexion, en mettant le cliché sur fond noir et en-les regardant à la lumière diffuse. Fig. 1.— Chassis pho- tographique. — V, lame de verre portant sur ses bords un cor- don de caoutchouc. — M, plaque sensi- ble; la face de cette plaque qui porte la couche sensible est à l'intérieur; sa face nue est à l’extérieur. — G, pièce mainte- nant la plaque appli- quée par ses bords sur les deux cordons de caoutchouc laté- raux de la lame V. — P, crochets pour maintenir la plaque. G. LIPPMANN. — LA PHOTOGRAPHIE DES COULEURS 43 Je me suis assuré d’ailleurs qu’elles sont parfai- tement fixées, c'est-à-dire inaltérables à la lu- mière. Il Les couleurs ainsi obtenues sur la plaque sont très brillantes. De quelle nature sont-elles ? Le dépôt formé par l’action photographique se compose d'argent réduit,comme sur le cliché ordi- naire; car il a été produit à l’aide des réactifs usuels. Il n’est donc pas coloré par lui-même. La couleur est due à une raison purement physique : elle tient à la structure lamellaire que le dépôt d'argent a prise sous l’action de la lumière et qui produit par interférence le phénomène de coloration dit « des lames minces ». On sait, en effet que des substances incolores réduites en lames suffisamment minces se teintent de vives couleurs; c'est le cas des bulles de savon qui sont pourtant formées par un liquide incolore. De même une couche d'huile très mince étalée à la surface de l’eau, présente des irisations très vives. De même encore une lame d’acier polie échauffée se recouvre d'une couche mince d'oxyde dont la couleur varie du rouge au bleu suivant l'épaisseur de cette couche. Dans l’industrie on se sert de cette propriété pour arrêter le recuit au degré voulu. La couleur que prend une lame mince dépend de son épaisseur : au fur et à mesure que celle-ci diminue, on observe suc- cessivement par réflexion du rouge, puis du vert, du bleu et enfin du violet. Chaque épaisseur cor- respond à une couleur bien déterminée, et, comme disent les physiciens, la couleur réfléchie est celle dont la demi-longueur d'ondulation est égale à l'épaisseur de la lame mince. Or, dans la couche sen- sible, il s'est produit une série de lames minces; le dépôt d'argent réduit est stratifié; il se compose d'une série de lames min- ces d'argent équidistantes et qui partagent la gélatine ou l’albumine , qui leur sert de support, en lames minces superposées.Là où nous voyons, par exem- ple, du rouge, la distance entre deux dépôts d’ar- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES 1892, Fig. 3. — Schéma pour re- présenter Îles stratilica- tions du dépôt d'argent dans l'épaisseur de la cou- che sensibilisée en contact avec le mercure. On sup- pose le cliché partagé en trois régions impression- nées chacune par une seule couleur. Dans la région supérieure où l’ou a fait agir le rouge isolément, on voit que les bandes d’interférence sont plus espacées que dans la ré- gion où le jaune seul a agi; dans cette région les bandes sont plus espacées que dans le violet ; etc. gent, ou, en d'autres termes, l'épaisseur de la con- che de gélatine qui les sépare est égale à une demi-longueur d’ondulation de la lumière rouge. Chacune de ces lames minces agit done comme une bulle de savon capable de réfléchir du rouge, et dont le système tout entier renvoie, par consé- quent, à l’œil des rayons rouges. De même, si plus loin on aperçoit du vert, c’est qu'en cetendroit la stratification est plus serrée, et que les lames minces n’ont plus pour épaisseur que la demi-longueur d’ondulation de la lumière verte. Et de même pour les autres parties du spectre. La figure 3 représente d'une facon sché- matique le dépôt photographique partagé en lames minces, d'épaisseur décroissante du rouge au violet. Il faut remarquer qu'il est impossible de repré- senter par une figure l'épaisseur vraie de ces dé- pôts. En effet, l'épaisseur de chaque lame, ou, ce qui revient au même, l'épaisseur de la demi- longueur d’ondulation est : Pouréleérouser- tre L 33 Pourlemiauner RE ET » = : 4000 Pour -leÆviolet- "#52" Ets » 5000 En d'autres termes, supposons que la couche de gélatine sensible ait l'épaisseur d’une feuille de papier ordinaire ou de £ de millimètre. Cette couche, après l’action photographique, se trouve parlagée : Dans le rouge en 330 lames minces jaune en 400 » violet en 500 » L'éclat de la couleur observée tient au nombre considérable des lames minces superposées, car leurs effets s'ajoutent. IV Ici se présentent deux questions : Par quel mé- canisme se sont formées ces lames minces avec une épaisseur déterminée pour chaque couleur? Et ensuite, une fois formées, comment agissent- elles pour reproduire la lumière colorée qui leur a donné naissance ? Le dépôt est stratifié parce que la lumière, qui a impressionné la couche, était elle-même stratifiée pendant la durée de la pose dans la chambre noire. Et cette stratification, à son tour, est due à la pré- sence du miroir de mercure. Chaque rayon lumi- neux, qui traverse la couche sensible, est renvoyé sur lui-même par ce miroir de mercure; il en ré- sulte, entre le rayon incident et le rayon réfléchi, cette sorte de conflit auquel on a donné le nom d'interférence. Le résultat de cette interférence est que les deux rayons ajoutent leurs actions en certains points où il y a, dès lors, un maximum lumineux. C'est là que se formeront les couches d'argent réduit. En d’autres points intermédiaires, 3+ 44 G. LIPPMANN. — LA PHOTOGRAPHIE DES COULEURS les actions des deux rayons lumineux se retran- chent au contraire et s’annulent. En ces points, l’action photographique étant nulle, il ne restera, après développement et fixage, que de la gélatine pure. En définitive, on voit que l’action photogra- phique n’a fait que fixer, en la remplaçant par un dépôt d'argent, la posilion de chaque maximum d’action lumineuse. Or ces maxima d'action lumineuse sont séparés par des distances égales à une demi-longueur d’ondulation de la lumière employée; c'est pour- quoi les lames minces obtenues ont précisément cette épaisseur. La vibration lumineuse s’est, en quelque sorte, moulée par voie photographique dans l'épaisseur de la lame impressionnée. Quant à l'explication des interférences, elle forme un long chapitre de la haute optique, et nous ne pou- vons ici qu'en rappeler le principe. La lumière, comme le son, est une vibration qui se propage; lorsqu'on superpose deux rayons lu- mineux, lorsque, notamment, on renvoie le rayon par réflexion sur lui-même, on se trouve donc avoir superposé deux vibrations, celle du rayon incident et celle du rayon réfléchi. Or deux vibrations su- perposées peuvent ajouter leurs effets; dans ce cas, la résultante est un maximum. En d’autres points, les deux mouvements vibratoires se contra- rient et s’annulent réciproquement;-en ces points la résultante est nulle ; il y a minimum, repos, ou absence de lumière. C'est ce que l’on appelle #nter- férence. Le mot lui-même nous vient de la patrie de Newton et de Young. Il y. fait partie de la langue courante et signifie intervention. « N’interférez pas avec moi », voilà ce que disent les Anglais. On conçoit d’ailleurs facilement que la distance entre deux maxima d’interférence, ou la demi- longueur d’ondulation, varie suivant la vitesse de vibration de lalumière employée; et que par suite, elle soit différente et déterminée suivant que l’on s'adresse à de la lumière rouge, à de la lumière jaune, etc., etc. C’est également la théorie des interférences qui permet d'expliquer la coloration des lames minces. Les deux faces qui limitent une lame mince réflé- chissent la lumière incidente et renvoient ainsi vers l'œil deux rayons qui peuvent interférer. Si l'épaisseur de la lame mince, c’est-à-dire, si la distance entre ces deux miroirs est précisément égale à une demi-longueur d'ondulation de la lumière rouge, c'est cette lumière qu’on percevra, parce que, alors, les vibrations dues à la lumière rouge sont concordantes, landis que, pour les autres lumières, elles ne le sont plus et se détruisent par interférence. Pour cette raison, si l'on éclaire la lame mince en question avec de la lumière blanche, elle ne renvoie vers l’œil que le rouge,qui seul est visible. En faisant varier l'épaisseur de la lame, on fait varier la nature du rayon coloré. renvoyé. Chaque lame mince choisit, en quelque sorte, parmi tous les rayons qui composent la lu- mière blanche, celui dont la demi-longueur d’on- dulation est égale à l’épaisseur de la lame. Tous les autres sont détruits -par interférence. On peut rapprocher la théorie de nos photogra- phies colorées de celle du phonographe. Le son est constitué par des vibrations qui se moulent dans la couche phonographique en laissant une trace permanente capable de les reproduire après coup. De même, dans notre procédé, les vibrations lumi- neuses se moulent dans la couche sensibleen y lais- sant un dépôt photographique permanent, capable, après coup, de réfléchir les vibrations lumineuses. à La théorie qui précède est celle qui m'a guidé, et on peut la considérer comme vérifiée par le succès même de l'expérience. On peut ajouter encore d’autres vérifications expérimentales faites après coup sur l'épreuve colorée. Lorsqu'on regarde une bulle de savon d’abord normalement, puis de plus en plus obliquement, on voit la couleur chan- ger; il en estde même, du reste, de tousles phéno- mènes de coloration dus aux interférences : cou- leurs des lames minces, de la nacre de perle, des plumes de colibris. La coloration, n'étant pas due à la couleur d’une substance, mais au jeu des vibrations lumineuses et aux épaisseurs qu'elles traversent, change avec l’obliquité, parce que le chemin parcouru dans une lame d’épaisseur cons- tante varie selon cette obliquité. De fait, si l’on regarde une épreuve colorée du spectre sous une incidence de plus en plus rasante, on voit les cou- leurs changer : le vert prend la place du rouge, le bleu celle du vert, le violet celle du bleu, et l’ultra- violet, qui est invisible, celle du violet. C’est préci- sément ce que voulait la théorie. Une seconde vérification est la suivante : Regar- dons une épreuve colorée du spectre normalement et humectons-la. La couche de gélaline ou d’albu- mine qui forme le cliché se gonfle, l'épaisseur des lames minces augmente considérablement, et, én un instant, toutes les couleurs disparaissent. C'est que l'épaisseur des lames minces gonflées correspond à la demi-longueur d'ondulation de l’infra-rouge, lequel est invisible pour l'œil; inversement, pen- dant la dessiccation, l'épaisseur redevient ce qu’elle élail primitivement,et les couleurs réapparaissent. Si la dessiccation se fait uniformément, on voit les couleurs réapparaitre ; le rouge rentre en tête par l’extrémilé qui élaitprimitivement violette, traver- sant toute la longueur du cliché pour aller re- D' A.-J. MARTIN. — L'HYGIÈNE SOCIALE 45 prendre sa place; le jaune marche derrière lui, suivi du vert, et ainsi de suite jusqu’au violet. Toutes les couleurs se trouvent ainsi revenues à leur place. VI Pour que la photographie des couleurs devienne “un jour pratique par le procédé que j'ai indiqué, il sera nécessaire d'opérer sur des plaques à la fois sensibles et isochromatiques. Il faut qu'ellessoient sensibles afin que la pose soit aussi courte que pos- sible; il faut qu'elles soient isochromatiques, c’est-à-dire que loutes les couleurs viennent en même temps. Au début de mes recherches les plaques que j’employais étaient loin de satisfaire à ces deux conditions ; elles exigeaient quelques mi- nutes de pose pour le violet, une ou plusieurs heures pour le rouge et des durées de poses intermé- diaires pour les autres couleurs. Aujourd’hui les plaques que j'emploie sont impressionnées par toutes les couleurs simultanément, en moins d’une demi-minute. Le progrès, au double point de vue de l’isochro- matisme et de la sensibilité, a donc été sensible en moins d’un an. Il reste néanmoins de nouveaux progrès à faire. Cette durée de pose d’une demi- minute, pour un objet aussi brillant que le spectre, représente une pose beaucoup plus longue pour les images que donne la chambre claire dans les con- ditions ordinaires. De plus l’isochromatisme ac- tuellement obtenu n’est pas encore parfait; car c’est maintenant le rouge qui vient le mieux, c'est-à- dire que le but a été dépassé. L’isochromatisme des plaques actuelles, parfaitement suffisant pour obte- nir des spectres complets, n’est pas encore sufli- sant pour l'obtention des images des objets naturels qui émettent, comme on le sait, de la lumière com- posée. C’est là le principal obstacle qui reste à sur- monter pour obtenir la photographie colorée d’un paysage ou d’un tableau. Quant aux difficultés théo- riques, elles n'existent pas : le principe qui sert à obtenir l’image des couleurs simples permettra de reproduire aussi bien les couleurs compo- sées. VII Il me resie à ajouter quelques remarques sur la finesse des plaques employées pour la photogra- phie des couleurs. Ces plaques sont sans grains ; la matière sensible y est répartie d'une manière continue. Dans les plaques au gélatinobromure communément employées, le bromure d’argent est distribué d’une manière discontinue sous forme de grains disséminés dans la gélatine et ayant chacun environ un ou deux millièmes de millimètre de diamètre. C'esi pour celle raison que les plaques ordinaires au gélatinobromure ne peuvent conve- nir pour la reproduction des couleurs, car, l'inter- valle entre deux maxima lumineux n'étant que d’un cinq millième de millimètre, il est éviden qu'on ne peut en reproduire le dessin au moyen de grains qui sont relativement aussi grossiers. Pour obtenir des plaques continues, il suflit de couler'sur verre une couche d’albumine, de géla- tine, elc., contenant une pelite quantité d’un sel haloïde alcalin. Puis, quand la couche est sèche, de la tremper, comme dans les anciens procédés à l'albumine et au collodion. On remarquera que les couches sensibles conti- nues ainsi obtenues peuvent avoir des applications utiles en dehors mème de la photographie des cou- leurs, et cela en raison de leur finesse ou pour mieux dire de leur continuité. Il est certain en effet qu’elles sont capables de reproduire exactement les détails d’une image, quand même ces détails auraient une dimension inférieure à un cinq mil- lième de millimètre; car l'intervalle entre deux maxima lumineux de la lumière violette à préci- sément cette dimension. On peut done espérer que la micrographie photographique saura quelque jour tirer parti de la propriété que je viens de si- gnaler. Gabriel Lippmann, de l'Académie des Sciences. L'HYGIÈNE SOCIALE SON BUT; SES PRINCIPES; SES MÉTHODES En inaugurant tout récemment le Cours d'Hygiène créé à l'Hôtel de Ville par le Conseil municipal de Puris, D. le D' A. J. Martin à prononcé un important dis- cours dont voici la partie principale : Messieurs, L'hygiène sociale, c’est-à-dire lhygiène des hommes en société doit comprendre l'étude des moyens propres à conserver et à préserver leur santé dans les groupes que la civilisation les con- duit à former, dans les milieux où ils vivent. Tel est l’objet de l’enseignement que nous inau- gurons ce soir. Permettez-moi d’en définir d’abord le but, en esquissant, dans un exposé aussi rapide que possible, les principes et les procédés de l’hy- giène sociale. D' A.-J. MARTIN. — L'HYGIÈNE SOCIALE I Diminuer la mortalité, augmenter la durée de la vie moyenne, tel est le but que l'hygiène cherche à obtenir; pour y parvenir, il faut, d’une part ac- croitre le degré de résistance de l'organisme humain aux causes d’affaiblissement el de dépérisement qui agissent constamment sur lui; d'autre part, il faut chercher à diminuer, à annihiler ces causes; en d’autres termes, fortifier l'individu, supprimer autant que possible les maladies, retarder la mort. Il faut vivre et vivre en bonne santé. C’est un droit que toute créature humaine acquiert en nais- sant. C’est alors que cet organisme si faible, auquel tant de sollicitude et d'amour sont nécessaires, est surtout exposé aux périls du milieu qui l'entoure. L'air qu'il commence à respirer, lanourriture natu- relle qu'on doit lui donner, l'alimentation artiti- cielle qui s'impose quelquefois, la forme de ses vêtements, la propreté de sa surface cutanée, tout déjà doit ètre combiné pour lui permettre le libre développement de ses forces sans cesse grandis- santes et éloigner de lui toute cause de faiblesse, de fatigue et de maladie. Plus tard, dans son enfance, dans son adoles- cence même, il faut encore guider ses pas, songer à maintenir en parfait équilibre ses forces physi- queset intellectuelles, lui épargner les dangers dont il n’est pas encore à même d'apprécier toute la gravité ni d'appliquer les remèdes. Vienne ensuite l'âge d'homme; plus de liberté peut lui être laissé, ou du moins toute liberté doit lui être accordée de donner à la conservation et à la préservation de sa santé tous les soins qu’elle exige ; pourvu toutefois qu'on l'ait mis à même de n'avoir pas à souffrir des dangers qu'il pourrait ignorer et que ceux auxquels il a confié la puissance publique doivent incessamment éloigner de lui. Mais que de situations, que de circonstances, dans lesquelles l’homme ne saurait ainsi agir isolément! La soli- darité, qui est heureusement devenue une des nécessités de notre état social et qui unit entre eux les divers citoyens par des liens de plus en plus étroits, n’a jamais plus de raison d’être que lorsqu'il s’agit d'accroitre, puis de maintenir, la vigueur et la vitalité des divers éléments de la nation. Cette œuvre, particulière et collective à la fois, par laquelle nous demandons à l’hygiène ses con- seils et ses procédés, peutse résumer dans la for- mule suivante : assurer la pureté, la propreté, aussi absolue que possible, de tout ce qui nous environne et nous touche. Respirer de l'air pur, débarrassé immédiatement de tousles produits usés qui peuvent s'y rencontrer, avoir une alimentation dégagée de toute matière impropre à notre puissance digestive, adapter à notre organisme les conditions bienfaisantes qu'ont sur notre santé l'atmosphère, le calorique, la lu- mière, le sol et l’eau, c’est-à-dire les cinq facteurs naturels de la santé, suivant l'expression élégante et imagée de M. Emile Trélat, n’est-ce pas en effet, avec l’exercice régulier et normal de nos facultés physiques et intellectuelles, le programme que tout homme doit s'efforcer de remplir pour donnerà son existence une durée suffisante, pour corriger les rigueurs de la vie contre lesquelles il est tenu de lutter? N'est-ce pas aussi le programme dontses concitoyens ne doivent pas entraver, dont ils doivent faciliter l'exécution dans l'intérêt com- mun ? Et cependant nous connaissons tous quantité d'exemples témoignant que ce programme, idéal en quelque sorte, est loin d’être toujours suivi! En sommes-nous arrivés à faire que la société soit suffisamment prémunie contre l'insalubrité des milieux où ses membres sont tenus de vivre, et assez garantie contre la propagation des maladies évitables dans ces milieux ? La réponse, négative, à ces questions, vous l'avez déjà faite. Mais si nous sommes immédiatement d'accord pour dé- plorer cet état de choses, permettez-moi d'espérer que nous allons l’être aussi, dans un instant, pour reconnaitre que de grands progrès ont été déjà fails dans cet ordre d'idées, que les moyens propres à exécuter, au moins dans ses parties essentielles, le programme que nous venons de (racer, sontaujour- d'hui nettement connus et définis, et qu’en unissant nos efforts, nous pouvons avoir la bonne fortune d'en obtenir la réalisation. L'élevage de la première enfance, au sens phy- siologique du mot, n’a jamais été mieux étudié que de nos jours ; pourquoi cet àge est-il encore exposé à tant de désastres, si ce n’est par l’incurie et le dé- faut d'éducation des mères et des nourrices? Mais déjà on n’a pas craint de favoriser les pratiques rationnelles de l'alimentation infantile par des encouragements spéciaux, dont l'importance ne cesse de s'accroitre, el mieux encore par des no- tions précises, abondamment données dans tous les milieux et à tous les âges où il peut être utile de le faire. Viennent ensuite les œuvres d'assis- tance, si nombreuses, spéciales à l’enfance et dont l'efficacité ne peut en pareil cas être contesté. Dès que l'enfant à franchi les écueils si redou- tables des premières années de la vie, les pratiques de l'hygiène individuelle doivent devenir la princi- pale préoccupation de ceux qui l’élèvent et de ceux qui sont chargés de son instruction. Il convient qu'il prenne dès les premiers âges des habitudes de propreté et d'exercice méthodique dont il ap- préciera les avantages pendant tout le cours de D' A.-J. MARTIN. — L'HYGIÈNE SOCIALE 47 son existence ; car il leur devra la force, la vigueur, la résistance, utile et souvent victorieuse, aux in- fluences déprimantes et morbides qui l’assaillent de toutes parts. Arrive l’âge scolaire; c'est alors que commence, en quelque sorte, pour lui l’action bienfaisante de l'hygiène sociale. Ce milieu nouveau où il vit, il ne lui appartient pas à lui seul de l'adapter à ses be- soins ; il y est soumis à une règle, à une discipline ; il y suit des préceptes et il y recueille des ensei- gnements dont l’organisation et les dispositions lui échappent. Plus tard encore, les exigences de la vie le conduiront à rechercher ses moyens de subsistance et ceux de sa famille dans des métiers où il se trouvera également subir des conditions qui lui seront trop souvent imposées; il lui faudra vivre dans des habitations, au milieu de eilés où ilne sera pas absolument le maître de remplir le programme sanilaire que nous indiquions tout à l'heure. Dès les premiers temps de son existence, vous le voyez, l'homme éprouve combien il im- porte que l'hygiène sociale lui permette de dé- ployer à l’aise ses éléments vitaux de conservation et de défense personnelles, et de trouver aide et protection auprès des représentants des intérêts collectifs de la société. Nous trouverons partout ce double caractère dans toutes les périodes de l'existence humaine. L'alimentation nous en fournit un nouvel exemple; vous savez combien l’homme doit aujourd’hui lut- ter contre les altérations innombrables qu’on fait subir aux matières alimentaires, par esprit de lucre, et combien la fraude se fait chaque jour plus ingénieuse et plus savante. Le Musée d'hy- giène de la Faculté de Médecine de Paris a pu réunir plus de cinq cents échantillons de produits servant à la falsification des aliments, pour les- quels plus de cent sont spécialement utilisés pour les vins. Comment l’homme pourrait-il se prému- nir de lui-même, si l'Administration, si des services, si la loi, ne lui permettaient de dépister la fraude, de la poursuivre et de la faire condamner ? Nous vivons tous, ou presque tous heureusement, de notre travail. Convient-il que nous soyions tou- jours obligés d'accomplir des besognes qui dé- passent nos forces, pendant un temps exagéré et dans des conditions manifestement insalubres ? Sans intervenir outre mesure dans l'établissement de contrats qui doivent être librement débattus, l'hygiène n'est-elle pas encore autorisée à dire combien il y a de danger à demander à l'homme une production exagérée, quel intérêt l'on trouve, sans aucun doute, à répartir équitablement les efforts, et comment il est aisé et indispensable d'exiger tout au moins les mesures de salubrité et de protection, qui doivent être réalisées dans le milieu du travailet en précéder l'exploitation in- dustrielle ou commerciale? Iei les heures de travail seront courtes ou séparées par des intervalles assez grands, consacrés au repos; là, les moteurs mé- caniques auront des revêtements protecteurs, les poussières dangereuses seront immédiatement et complètement évacuées ; ailleurs, la ventilation, le chauffage, l'éclairage, seront régulièrement assu- rés, les locaux seront maintenus en état de pro- prelé, tous dangers de transmission de maladies seront écartés. Tout cela ne commence-t-il pas à être déterminé avec précision, et vous savez avec quelle légitime ardeur les intéressés le discutent et passent au crible de leur critique pratique les indicalions, les procédés que les hygiénistes étu- dient à leur intention. C'est peut-être lorsque l’homme cesse d’être isolé et qu'il habite une agglomération, que l’hy- giène sociale peut lui rendre le plus de services. En effet, l'habitation, cette enveloppe qu'il s'est formée à lui-même contre les variations et.les intempéries du milieu extérieur, demême quelesagglomérations d'habitations, qui constituent les villes, sont autant de milieux artificiels où, soit à Lire privé soit à titre collectif, l'art de conserver et de préserver la santé intervient, pour ainsi dire, à tout instant. C'est alors que nous ne lardons pas à comprendre combien l'hygiène est loin d’être une science à pro- prement parler : elle ne constitue pas en effet un système de règles ou de principes ayant la rigueur d'un théorème ou la fixité d’une solution algé- brique ; elle forme bien plutôt un ensemble d'ap- plications des diverses sciences dans un but déter- miné. Aussi toutes les sciences sont-elles appelées à lui être utiles ; elle emprunte à toutes et elle forme ainsi comme une vaste synthèse où chaque groupe de connaissances est appelé à tenir une place plus ou moins grande, suivant les circonstances. L'habitation, par exemple, ne peut constituer pour l'homme et sa famille un milieu qui l’attire et le retienne, pour le plus grand profit de leur santé physique et morale, qu'autant qu’elle est salubre, c’est-à-dire qu’elle contribue à maintenir la santé de ceux qui l’occupent en assurant par ses dispositions l'intégrité de l’air qu'on y respire. « Le constructeur, a dit mon éminent maitre M. Emile Trélat, qui a si nettement et avec tant de vaillance précisé cette partie de l'hygiène, doit savoir renouveler l’atmosphère abritée en aérant les intérieurs, restituer aux matériaux de l’habi- talion le calorique dispersé pendant la saison froide, expulser le calorique accumulé dans les matériaux de l'habitation pendant la saison chaude, donner accès à la lumière dans les inté- rieurs abrités, établir et entretenir la salubrité du sol sous-jacent et environnant, aménager l’appro- 48 D' A.-J. MARTIN. — L'HYGIÈNE SOCIALE visionnement des eaux et l’ablation des déjections gazeuses, liquides et solides. » À quoi servirait, en effet, d'élever une habita- tion d’une belle ordonnance, d’un cachet artis- tique qui plaise à l'œil, d'en rendre même les dispositions intérieures commodes et agréables, si l’on n‘y a pas ménagé une abondante aération na- turelle, un éclairage adapté aux fonctions normales de nos yeux, une évacuation immédiate el com- plète de toutes les matières usées, un chauffage et une ventilation qui ne puissent diminuer en au- cune manière les qualités respiratoires de l’atmos- phère ? Cette intégrité aussi constante que possible de l'air respiré dans l'habitation, intégrité que peu- vent menacer les dispositions de la construction elle-même, mais que menacent bien plus encore nos habitudes, nos installations intérieures et nous- mêmes, n’existe-t-il pas de moyen de l'obtenir ? Les principes sont connus, les applications sont défi- nies, et les applications, si elles ne sont pas assez généralisées, ont cependant fait leurs preuves. Ce sera peut-être l’un des mérites de l’enseignement que nous inaugurons ce soir d'augmenter quelque peu encore le nombre des applications. Parmi les condilions inhérentes à l’assainisse- ment, il en est une qui domine en quelque sorte la plupart des autres, car elle est de tous les instants et exige une surveillance incessante : je veux par- ler de l'évacuation prompte etimmédiate de toutes les matières usées par la vie journalière, c’est-à- dire de tout ce qui peut être cause de putréfaction dans l'habitation. «Non pas que ces phénomènes soient nuisibles par le fait seul qu’ils s’accomplissent ni qu'ils le deviennent par leurs résuitats définilifs, puisque ceux-ci aboutissent à la destruction de la matière organique comme telle et à sa résolution en acide carbonique, eau et sel azotés; mais parce que les phases et les produits intermédiaires sont de na- ture offensive et, surtout, parce que les agents animés de la fermentation putride comptent parmi eux des corpuscules d'une étrange puissance de nocivité, véhicules du poison putride ou poisons eux-mêmes » (Arnould). « Dans la maison, adit Durand-Claye, dès qu’une matière usée est produite, il faut l’expulser sans la laisser séjourner. Pour les ordures ménagères, si les particuliers n’ont pas pris l'excellente habi- tude de les brûler eux-mêmes dans leurs foyers, le service d'enlèvement peut se faire actuellement d'une manière relativement salisfaisante dans les grandes villes, grâce à des récipients mobiles et à l'enlèvement méthodique. Il n’en est pas de même pour les eaux pluviales et ménagères, pour les ma- tières de vidanges, dont l'éloignement est d’ordi- naire si mal aménagé. Ce qu'il faut, c’est à chaque orifice d'évacuation l’eau en quantité suffisante, puis un appareil d’occlusion simple et efficace, le siphon hydraulique, c'est-à-dire l’inflexion suffi- samment accusée des tuyaux d'évacuation. Ensuite la canalisation générale de la maison doit être simple en tracé eten élévation, communiquant lar- gement à la partie supérieure avec l'atmosphère, de manière àremplacer, à chaque évacuation, la fer- mentalion par l'oxydation». D'autre part, ilimporte que les appareils, comme les locaux où on les place, soient accessibles sur toutes leurs parties, de facon que le nettoyage en soit facile; et, de plus, tout ce qui les entoure doit être imper- méable, étanche ct lisse; aucune impureté d’au- eune sorte ne doit y être retenue. Est-il nécessaire d'ajouter que de tels principes sont applicables et doivent êlre appliqués dans toutes les parties de l'habitation sans exception? Or, l’industrie sani- taire et, en particulier, l’industrie sanitaire fran- caise, mettent aujourd'hui à notre disposition un grand nombre d'appareils qui répondent à tous ces desiderata. Depuis quelques années surtout, grâce à l'éducation de l'opinion publique et peut- ètre un peu aussi gràce aux efforts des hygiénistes, nos constructeurs ont en effet créé un matériel sanitaire excellent. Ces principes sont également applicables dans toutes les habitations collectives où, soit mo- mentanément, soit à titre permanent, séjournent des individus en plus ou moins grand nombre. La pureté de l'air respiré, l’innocuité et la valeur des procédés de chauffage et de ventilation, les procé- dés d'évacuation des matières usées y sont soumis aux mêmes règles ; ils exigent seulement des dispo- sitions un peu plus complexes qui, nous en avons d'heureux exemples, ne sauraient embarrasser nos constructeurs, ni surprendre leur habileté. L'école, l'atelier, les salles de réunions, le théâtre, la ca- serne, la prison, l'hôpital, nous savons les cons- truire hygiéniquement ; el si, à côté de quelques édifices vraiment modèles, nous avons à déplorer encore l'existence de tant d'établissements collec- tifs qui, malgré l’art de leurs constructeurs et sou- vent leur valeur esthétique, constituent de véri- tables dangers pour la santé de leurs occupants, nous devons sans doute en accuser plutôt les conséquences de cette longue période de notre his- toire dans laquelle les soins du corps et de la santé ont été considérés comme accessoires, et l'homme comme une quantité négligeable! Mais si nous ne voulons plus que nos habitations, privées ou collectives, recèlent en elles-mêmes des germes de maladie et de mort, avec quel soin de- vons-nous apprécier les avantages d'une ville sa- lubre ! Les craintes salutaires que nous éprouvons D' A.-J, MARTIN. — L'HYGIÈNE SOCIALE 49 à l'égard de notre santé augmentent avec le nombre de ceux qui participent à notre existence commune, à moins que le milieu artificiel qu'ils se sont créé soil prémuni contre toutes les causes d’insalubrité qui peuvent ainsi s'y multiplier si aisément. Dans les villes heureusement nous retrouvons en- core les mêmes principes, et nous pouvons à peu près répéter ici ce que nous disions pour l'hygiène des maisons. Moins l'atmosphère de l’agglomé- ration sera salie, plus elle sera saine; plus les habitants y auront en abondance de l'air pur, plus on leur aura ménagé des moyens faciles de net- toyage et plus ils vivront en bonne santé. Aussi, en dehors de ces conditions d'aération, d'insolation et de désencombrement des rues, d'aménagement d'espaces libres, artistiquement ornés et plantés d'arbres, de gazon et de fleurs, dont la ville de Paris compte un si grand nombre de merveilleuses réalisations, «deux conditions sont surtout néces- saires pour l’assainissement d’une ville : elle doit recevoir en quantité suffisante une eau potable et elle doit écouler sans stagnation possible el rejeter au loin, avant toute fermentation, les matières im- pures et les eaux usées de la vie et de l’industrie ». (Proust.) C'est-à-dire qu’il faut aux villes des ame- nées d’eau irréprochables au moins pour l’eau du service privé, un réseau d'égouts élanches, en pente et suffisamment lavés ; il faut aussi que leur atmosphère soit mise à l'abri de toute cause d'al- tération. Sans doute, un tel programme n’est pas loujours aisé à remplir, d'autant qu'il a ses diflicultés pra- tiques nombreuses et qu'il exige des solutions va- riables suivant les dipositions particulières de l'agglomération elle-même, de son sol, de son sous-sol et des territoires qui l’environnent; mais, pour peu qu'on veuille bien ne jamais perdre de vue le principe même qu'il importe d'appliquer, la solution sera toujours compatible avec les justes exigences de la santé publique. Toutes les indications que nous venons de résu- mer dans cetexposé rapide ont surtout pour but d'assurer à l'homme la pleine disposition de son activité physique et intellectuelle, et dele mettre à l’abri de toutes ces causes de misère physiologique qui ont une si grande influence sur le fonctionne- ment normal des diverses parties de son organisme. Mais vienne malgré tout la maladie, que peut l'hy- giène pour lui et pour ceux qui vivent auprès de lui, dans sa maison, dans sa ville? Tout d'abord, en assurant la salubrité et le bon aménagement de sa demeure, elle lui à certaine- ment donné des moyens de résistance plus ou moins puissants contre la maladie elle-même. Les précautions qu'elle permettra de prendre pour empècher la propagation de cette affection, s'il s’agit d’une maladie transmissible, sont assu- rément profitables au malade; elles le sont sur- tout à ses proches, ses voisins et à la populalion tout entière. Or, les maladies transmissibles, quelle que soit leur étiologie et de quelque na- ture que soient leurs agents de propagation, sont évitables dans le sens que l'hygiène a heureuse- ment donné à ce mot. Si donc, par impossible, tous les germes abandonnés parles malades étaient détruits immédiatement sans qu'il ait pu y avoir contamination, les maladies {transmissibles cesse- raient leurs ravages, Cela est-il au-dessus des réalités pratiques? La prophylaxie des maladies transmissibles, c’est-à- dire l’ensemble des mesures propres à entraver et même à en empêcher tout à fait la propagation, procède de temps immémorial de règles précises, puisque son but est lui-même, nous le voyons, simple et précis; de plus, elle est en possession d’un outillage chaque jour plus perfectionné, si bien que ses applications peuvent se multiplier avec confiance dans le succès et que déjà elle en au- rait fourni des preuves plus nombreuses si elle ne trouvait pas encore dans les populations des dis- positions d'esprit, que les progrès de l’éducalion générale pourront surtout modifier heureusement. La déclaration immédiate de tous les cas de mala- dies transmissibles constatées, la vaccination pra- tiquée à profusion en cas de variole, l'isolement obtenu dans les limites du possible avec transport des contagieux, s’il est nécessaire, dans des locaux bien appropriés, la désinfection enfin et surtout appliquée à tout ce qui a pu être contaminé ou souillé par le malade, telles sont les mesures que la prophylaxie commande de prendre pour toute maladie transmissible, de quelque côté qu’elle vienne, qu'elle vienne de l'Élranger ou qu'elle se produise sur notre sol. Ai-je besoin de vous rappeler, Messieurs, combien toutes ces mesures se simplifient de plus en plus, comment les procédés que l’industrie met à notre disposi- tion sont devenus plus sûrs et plus pratiques et à quel degré de certitude l'hygiène est parvenue dans l’application de ses moyens de défense? Or, ces moyens, elle ne les utilisera pas seulement lorsque la mort aura rendu urgent l'éloignement du cadavre et urgente sa destruction par les pro- cédés efficaces d’inhumation ou de crémation que la science a imaginés dans l'intérêt des vivants et sans troubler l'expression de leurs sentiments d'affection. C’est aussi pendant la maladie que l'hygiène pourra intervenir à tout instant en ap- prenant à l'entourage combien l’exécution de ces moyens prophylactiques est aisée, en lui en facili- tant l'application et en assurant à tous les avan- tages incontestables qu'ils procurent. D' A.-J. MARTIN. — L'HYGIÈNE SOCIALE Il Les temps sont heureusement loin où l'hygiène de la maison, de la rue, de la ville, où la salubrité de la maison de commerce, des logements col- lectifs, où l'élevage et l'instruction de l'enfance, où la prophylaxie des épidémies, ne semblaient présenter qu'un médiocre intérêt dans la vie des peuples. Que d’heureuses transformations, depuis un demi-siècle surtout! Mais il faut reconnaitre qu'il reste encore beaucoup à faire : sous la belle ordonnance des habitations de nos nouvelles rues, du haut en bas de nos facades élevées, trop de causes d’insalubrité se cachent encore. Si notre voie publique a été améliorée jusqu'à être assuré- ment parmi les plus propres de l'Europe, nos loge- ments insalubres sont encore innombrables et notre sous-sol est encore trop fréquemment souillé ; nos milieux industriels protègent insuffisamment la vie de nos travailleurs. Si les applications systé- matiques de l’antisepsie et de l’asepsie ont enlevé de quelques-unes des salles de nos hôpitaux les redoutables dangers qu'elles présentaient autrefois. si notre mortalité chirurgicale et la mortalité de nos femmes en couches sont heureusement des- cendues à des chiffres que les promoteurs eux- mêmes de cette grande réforme n'osaient espé- rer, la pratique de l’antisepsie, la pratique de la désinfection dans les domiciles privés est encore peu développée, malgré les progrès si énergique- ment accomplis et l'infatigable dévouement du per- sonnel des services publics de désinfection. Enfin, notre mortalité infantile reste assez élevée: la diminution de nos maladies du tube digestif n’est pas encore en rapport avec la science, les décou- vertes et le zèle de ceux qui recherchent etsignalent les falsifications alimentaires qui en sont la cause principale. Et cependant que de moyens sont mis à notre disposition en faveur de l'hygiène! Dans le labo- ratoire de Montsouris, on poursuit l'étude régulière, méthodique et savante des variations météorolo- giques de notre atmosphère, de la composition chimique et bactériologique de notre air et de nos eaux d'alimentation. Au laboratoire municipal de chimie, on continue sans relâche la lutte en faveur | de la pureté de nos produits alimentaires, lutte | soutenue également avec grand soin dans les labo- ratoires des halles et des abattoirs. Nos services des eaux, des égouts et de l’assai- nissement font une œuvre active de propagande ; ils accomplissent des travaux d’art où l'esthétique le dispute à l'utilité; le réseau de nos égouts ne cesse de s'accroitre, de s'améliorer, et bientôt nous pourrons avoir assez d'eau de source irréprochable pour n’en plus manquer en aucune saison; déjà, la quantité des eaux distribuées est largement suffisante à Paris pour permettre l’exécution du plan dressé par la Commission d'assainissement de la Seine, à l'appel éloquent de Durand-Claye. Dans quelques jours, le Conseil municipal, nous n’en saurions douter, aura voté l'évacuation obli- gatoire des matières de vidange par les égouts pour toutes les maisons et l'abonnement obligatoire aux eaux, et il obtiendra l'établissement d'une taxe qui lui permettra d'assurer ces avantages à la salubrité de Paris sans augmenter sensiblement les charges actuelles que les propriétaires doivent actuellement payer pour n’obtenir qu'une partie très faible et insuffisante de l’assainissement de leurs maisons. Ainsi Paris pourra suivre l'exemple que vient de lui donner Marseille avec tant de déci- sion et d'heureuse audace: Notre matériel sanitaire est aujourd'hui assez perfectionné et assez com- plet pour rendre facile dans un délai très rapproché de tels travaux. Les services sanitaires, d'autre part, sont en partie constitués et seraient plus appréciés si certaines formalités n’en modéraient encore singulièrement l'usage. Les desiderata, que nous avons dû signaler, nous les trouvons indiqués avec une grande évidence, lorsque nous étudions le nombre des décès que l’on constate actuellement à Paris et que relève avec tant de soin le service si heureuse- ment dirigé par M. Bertillon. Demandons à chacun de nous de diminuer le plus possible le nombre de ces décès, qui caractérisent l'état sanitaire de notre capitale. Les ingénieurs et les architectes, s'inspirant de plus en plus de l'étude de hygiène, yapporteront tous leurs soins; les chimistes, les physiciens et les vétérinaires continueront leurs investigations, et les médecins ne manqueront pas, non plus seulement de pres- crire à leurs malades des moyens de guérison, mais de recommander à leur entourage tous les procédés prophylactiques qui empêcheront la propagation des maladies transmissibles. Il n'est douteux pour personne que ces efforts ne peuvent être aidés que par une administration autonome et compétente, et si les lois et règlements n'y font pas obstacle. Or, il est de notoriété que nos administrations sanitaires manquent d'unité, et il est ainsi facile de concevoir que la prophy- laxie et la salubrité manquent ainsi d'éléments d’information et d'action immédiats, partant effi- caces. Quant à notre législation, faire son procès me parait superflu et nous entrainerait plus loin que votre bienveillante attention ne m'y auto- rise. Qu'il me suffise de vous rappeler les len- teurs qu’elle favorise quand il s’agit d'obtenir l’as- sainissement d'une habitation, qu’elle ne saurail permettre de détruire l’insalubrité manifeste créée D' A.-J. MARTIN. — L'HYGIÈNE SOCIALE o1 chez lui par un propriétaire, et qu'une telle liberté du suicide, comme on l’a dit, est laissée à celui-ci souvent au grand détriment du voisinage. Ajoutons que notre législation sanitaire, à quelque partie de l'hygiène qu’elle s'adresse, laisse aux tribunaux une latitude sans contrôle ni compétence obligée, et qui n’est pas sans avoir fréquemment produit de curieuses inconséquences el de graves dangers. Souhailons que le Parlement veuille bien s’en préoccuper quelque jour, tout en demandant dès maintenant dans l'application de la législation actuelle quelques améliorations pratiques qui per- mettent d’en obtenir plus de services et moins d'en- traves. Ces pouvoirs publics sont armés, en France, pour assurer, dans une certaine mesure, l'exé- cution des prescriptions hygiéniques recomman- dées par les Conseils compétents et suggérées par les progrès de la science; ils ne le sont pas dans une mesure suffisante assurément, et surtout les parti- culiers ne s’y prêtent pas assez eux-mêmes. On confond, il est vrai, beaucoup trop l'hygiène avec la médecine; or, ce que les pouvoirs publics voudraient bien accorder à la première, ils le refu- sent trop souvent à la seconde. Cependant, quoi qu’on en dise, les moyens de défense et de protec- tion que l'hygiène met en œuvre reposent sur des bases immuables depuis des siècles. L’hygiène de Moïse, d’Hippocrate est celle même dont nous sui- vons les préceptes. Ce qui se modifie en elle, ce sont les moyens d'application, suivant que les découvertes de la science et les progrès de l’indus- trie permettent de réaliser plus aisément les règles elles pratiques de la prophylaxie ou de la salubrité contre les influences dangereuses de l'air, des eaux et des lieux. III Ne vous est-il pas apparu, au cours de cette énu- mération des procédés de l’hygiène, que nous pouvons tous, chacun dans notre sphère, coopérer à leur application. Ce n’est pas en effet l’un des moindres bénéfices de l'hygiène, mais ce n’est pas non plus l’une de ses moindres difficultés, que la nécessité, pour qu'elle puisse faire apprécier la toute-puissance de son action bienfaisante, d'asso- cier à son œuvre toutes les compositions sociales. Connais-toi toi-même, disaient les anciens. Plus l'humanité avance en àge et plus la vérité de cet adage est digne d’être appréciée ; car le sentiment de la responsabilité et de la dignité humaine ne cesse de croitre avec les progrès de la civilisa- tion, et c’est assurément sur ce sentiment que re- pose l'hygiène, qu’elle soit le fait de la volonté per- sonnelle de l'individu où qu'elle soit exercée par des groupes collectifs ou même par les pouvoirs publics. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, On conçoit facilement que les difficultés appa- raissent tout d’abord d'autant plus considérables que la puissance publique dépend d’un nombre plus grand de citoyens; elles seront plus graves encore s’il s’agit d'appliquer les mesures de l'hy- giène à un peuple où chacun possède enlui-même sa part de souveraineté. Cest pourquoi l'hygiène pu- blique pourrait paraître difficile à développer chez un tel peuple si l’on ne s’appuyait pas à la fois, pour son administralion, sur un pouvoir compétent etautorisé, sur une réglementation précise et limi- tée sur tout et sur les développements donnés à l'éducation spéciale des diverses parties de la société. Telle est la triple condition qui me parait indis- pensable, si l’on veut réellement appliquer en France les principes et les méthodes de l'hygiène sociale que nous exposions tout à l'heure. Ce pouvoir compétent et autorisé, celte régle- mentation précise et limitée, loin de nous la pen- sée de vouloir les rendre uniformes sur tous les points du territoire, hätons-nous de le dire; car nous ne concevons le rôle d’un pouvoir central en pareille matière que comme ayant la charge de susciter, d'encourager et de récompenser les ini- tiatives locales et les bonnes volontés. Il ne nous parait devoir intervenir qu'en cas d’incurie et de négligence coupables où de mauvaise volonté dangereuse pour les intérêts collectifs dont il a la garde. Mais moins il aura à s'immiscer dans les affaires privées, dans l'administration locale, etplus il y aura chance queson action soit acceptée dans le cas où elle serait devenue indispensable. I im- porte surtout que les pratiques administratives soient aussi simplifiées que possible; car nombre de lois protectrices de la santé publique n'ont pu avoir jusqu'ici d'effet utile en raison du nombre considérable de formalités qui viennent contre- carrer leurs applications. Il semble aujourd'hui qu'il y ait quelque audace à le dire dans certains milieux, mais la meilleure sauvegarde de l'hygiène publique est encore le développement progressif de l'hygiène privée; il est indispensable de développer à la fois l’une et l'autre. L'étude de la législation et de l’administra- tion sanitaires dans les divers pays le démontre surabondamment. Quoi qu'il en soit, celle charge qu'ont les pou- voirs publics de veiller aux intérêts sanitaires de leurs concitoyens et de leur venir en aide à cet égard dans toutes les mesures de leurs forces et de leur énergie, ils la tiennent, dans une démocratie comme la nôtre, de la confiance que la nation met en eux;ils lui en doivent compte et, comme ils agissent ici dans l'intérêt général, il est indispen- sable que, d’un côté comme de l’autre, l’on soit bien 9'* 22 G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D'ASTRONOMIE pénétré de son importance et de la grandeur du but à atteindre. De tous côtés, on jette des cris d'alarme en pré- sence de la faiblesse de l'accroissement total de notre population. Pour y porter remède, il y a heu d'obtenir : 1° que notre natalité soit plus élevée; 2 que le nombre de nos décès soit encore abaissé; 3 que l'élément étranger, devenu de plus en plus nombreux, fasse le plus tôt possible partie de la population française, puisque la France ne maintient son chiffre de population que par l’im- migration étrangère. Pourquoi ne pas donner aux nombreux Espa- gnols, Italiens, Suisses, Belges, Allemands qui émigrent chez nous, les mêmes charges et les mêmes avantages qu'à nos nationaux? Pourquoi ne pas leur permettre de s'adapter à notre milieu, et pourquoi ne continueraient-ils pas, comme l'ont fait leurs ancêtres, à s’assimiler, en devenant Français, la pénétrante puissance de notre génie national ? Plus difficile est la tâche qu'on s'imposerait en cherchant à augmenter notre natalité. On prétend que l’état social que nous ont fait le Code civil et la constitution de notre société moderne, gràce à la dispersion des richesses, aux exigences de la vie en rapport avec la généralisation du bien-être, tendent à rendre extrêmement fréquente la res- triction volontaire matrimoniale. Cela est vrai el les preuves en abondent. Mais nous ne voyons pas qu'on y puisse aisément remédier ; car cette situa- lion tient pour une part au développement même du sentiment de la responsabilité humaine, et, quoi qu’on en ait dit,elle n’est pas spéciale à la France. La diminution de la mortalité est, au contraire, du ressort de l'hygiène. Il est inutile de rappeler les succès que l’on peut obtenir dans cet ordre d'i- dées en s’efforcant de donner à l'hygiène une place suffisante dans l'instruction et dans l'éducation, en développant la recherche des moyens propres à accroitre la salubrité età empêcher la propagation des maladies transmissibles, en généralisant en un mot la pratique de l'hygiène et de la salubrité. Si les pouvoirs publics le veulent bien, s'ils montrent dans leur œuvre de l’autorilé, de la dé- cision, de l'esprit de suite, s'ils veulent convaincre les particuliers par leur modération et leur compé- tence et se les associer peu à peu, ils ne tarderont pas à voir les chiffres de notre mortalité générale diminuer encore. Peu de pays sont, en effet, plus favorisés que le nôtre à cet égard par les conditions climatériques et même par le caractère et les mœurs de la popu- lation; il n°y a jusqu'ici manqué que cette éduca- tion sanitaire et cette discipline qui ont produit de si heureux résultats chez des peuples moins heu- reusement favorisés. Est-il possible d’abaisser d’un dixième le nombre de nos décès? Il ne vous paraitra pas difficile d'en douter lorsque nous aurons étudié le mouvement démographique comparé de la France et des autres pays; c’est donc de ce côté que nous devons por- ter tous nos efforts. Je vous ai indiqué les principes et les procédés de l'hygiène, j'ai cherché à vous montrer quelle tion. C’est cette étude, entrevue seulement aujour- d’hui dans ses grandes lignes, que le Conseil mu- périlleux honneur de me demander de poursuivre devant vous. J’ai accepté cet honneur avec recon- naissance, avec joie, avec fierté même, je ne puis le cacher; car; la tâche qui m’incombe a en partie pour but de faire connaitre et apprécier les amélio- rationsetles progrèsréalisés dansl'hygiène denotre admirable Capitale par son Conseil principal, ses administrateurs, ses ingénieurs et sa population. Ces améliorations et ces progrès sanitaires ont tou- jours, et malgré bien des obstacles, trouvé un con- cours éclairé dans cette active et patriotique assem- blée, où il est juste de dire que le drapeau de l’hy- giène a toujours flotté sans être jamais abaissé. Ce drapeau est de ceux qui ont la rare fortune de pouvoir, sans conflits et sans mécompies, abri- ter sous ses plis toutes les intelligences, toutes les bonnes volontés et tous les dévouements. Les com- bats qu'il guide n’apportent à l'humanité que des joies; ils épargnent de cruelles douleurs, les désas- tres et la ruine. D' A.-J. Martin. REVUE ANNUELLE D’ASTRONOMIE En astronomie, l’année 1891 n’a pas amené de découverte très importante; mais nos connais- sances ont été notablement augmentées dans les diverses branches. Pour exposer ce qui a été fait, nous commencerons par les corps du sys- tème solaire, el nous passerons ensuile aux | systèmes formés par les étoiles el par les nébu- leuses. I. — LA TERRE La Terre tourne sur elle-même en 24 heures: mais cette rotation est-elle parfaitement uniforme ? Plusieurs causes peuvent altérer la régularité de part nous pouvons tous prendre à leur applica- nicipal de la Ville de Paris m'a fait le grand et sn tn G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D'ASTRONOMIE D3 son mouvement. Par exemple, le frottement pro- duit par les marées est une cause de ralentisse- ment; d’un autre côté, la Terre se contracte gra- duellement par suite de son refroidissement, bien léger sans doute, mais continuel; par cette cause, sa vitesse de rotation doit au contraire aller en augmentant. Quelle est la résultante de toutes les causes, connues ou inconnues, d'accélération et de retard ? Comme nous mesuronsles grands intervalles de temps par le nombre des rotations de la Terre, c'est-à-dire par le nombre de jours, si cette rota- tion se ralentit, par exemple, il doit en résulter une accélération apparente dans les mouvements des autres corps célestes, et cette accélération ap- parente sera d'autant plus grande que ces autres corps auront un mouvement plus rapide. Le mouvement le plus rapide du système solaire est celui du premier satellite de Mars, qui tourne autour de sa planète en 739"; mais, comme il est connu depuis trop peu de temps (1871), son mou- vement n'est pas déterminé avec assez de préci- sion. Viennent ensuite les rotations des diverses planètes sur elles-mêmes (Jupiter, 956%; Sa- turne, 10!14%, etc.); mais ce sont là des éléments qui ne s'observent pas avec assez d’exactitude. La Lune, qui tourne autour de La Terre en 27 jours, présente entre l'observation et le calcul] une différence (accélération séculaire de son moyen mouvement) qui s’expliquerait par un très faible ralentissement du mouvement de rotation de la Terre, par un très léger accroissement graduel de la durée du jour. Après la Lune, c’est Mercure qui a le mouve- ment le plus rapide : il tourne autour du Soleil en 88 jours, et ses passages sur le Soleil, observés depuis plus de deux siècles, en donnent des posi- tions précises qui remontent tout aussi loin. M. Tisserand a examiné! ce qui arrive pour Mercure, si l’on admet que la durée du jour va en augmentant, et il trouve que les passages extrèmes de cette planète sont alors moins bien représentés par le calcul que lorsqu'on suppose à la durée du jour une valeur rigoureusement constante. Ainsi il parait y avoir compensation entre les causes qui tendent à accélérer la rotation de la Terre et celles qui tendent à la retarder; de sorte que cette rotation doit être considérée comme uni- forme ; en d’autres termes, Za durée du jour sidéral est invariable. La dernière Revue annuelle d’Astronomie? a ex- 1 Comptes Rendus, CXIII, p. 667; voir aussi dans l’An- nuaire du Bureau des Longitudes pour 1892, son intéressante « Notice sur la Lune et sur son accélération séculaire »: 2 Revue générale des Sciences, t: Il, p. 110. posé l'état de la question de Za varialion annuelle des lalitudes. Les observations ont été continuées en 1891, et la variation, réelle ou apparente, con- tinue de présenter des marches parallèles dans les observatoires qui se sont concertés pour l'étude de cette question. Voici en effet le tableau des écarts observés : BERLIN PRAGUE POTSDAM 1880 Ars RE EE —0/03 + 0/05 —+-0//02 AOUTINO Tr +0.25 —+-0.23 0.25 MOV AD: te +-0.02 0.00 —0.08 1890kfévr,24...... —0.24 —0.29 —0.2% MANSADE ce —0.06 +0.05 » sept. 12... 40.24 40.25 » décide —0.02 0.00 » LMP mar SEA CR —0.26 —0.17 » Une mission allemande est partie au mois d'avril dernier pour Honolulu, afin d’y faire des observations correspondantes; on ne connait pas encore les résultats obtenus. IT, — LA Luxe Les observations physiques de la Lune sont géné- ralement négligées dans les grands observatoires et abandonnées principalement aux astronomes amateurs. De temps à autre, on a signalé de petits détails superficiels qui n'avaient pas encore été notés; d’autres fois, on a cru saisir des modifica- tions récentes, mais dont la réalité est bien diffi- cile à établir d'une façon certaine, à cause des grands changements d'aspect que produit très rapidement l'incidence variable de la lumière s0- laire. Là, d’ailleurs, la lumière étant abondante, la photographie tend de plus en plus à remplacer l'observation oculaire, et déjà l'Znstitution smith- sonienne de Washington a formé le projet de publier une immense photographie de la Lune 1%9 de diamètre, c’est-à-dire à raison de 4" pour 1": à cette échelle, la Terre serait représentée par un globe d'environ 7 mètres de diamètre. Au contraire, les observations de position sont poursuivies activement dans les observatoires munis de bons instruments méridiens. C’est que, au point de vue pratique, la connaissance précise du mouvement de la Lune est très importante pour la détermination des longitudes terrestres. La chronologie est aussi intéressée directement à la connaissance de ces mouvements : c’est, en effet, par la contemporanéité de certains faits histo- riques et de phénomènes célestes qu’on a pu fixer avec certitude les dates correspondantes. Or, parmi les phénomènes célestes, les éclipses de Soleil et de Lune sont à peu près les seuls qui aient été rapportés par les chroniqueurs. Malheureusement les Tables actuelles de la Lune ne peuvent donner, quand on remonte très haut, que des positions incertaines, parce que cet astre o4 G. BIGOURDAN. —— REVUE ANNUELLE D’ASTRONOMIE reste encore aujourd'hui rebelle aux formules de la Mécanique céleste; Hansen était parvenu à représenter les observations pendant cent ans; mais aujourd'hui ses Tables s’écartent très nota- blement de l’état du Ciel. Les causes principales de cet écart sont deux inégalités dont la cause n’a pu encore ètre assi- gnée par la théorie de l'attraction universelle. Ce sont : 4° l’accélération séculaire de sa longitude, qui fait que le moyen mouvement, au lieu d’être constant comme pour les planètes, va en aug- mentant; 2 une autre inégalité dont la période est d'environ trois cents ans. L'accélération séculaire de la longitude pourrait s'expliquer par une lente diminution du jour si- déral; mais on a vu, tout à l'heure, que d’autres raisons paraissent rendre cette diminution inad- missible. L'autre inégalité ne peut être attibuée à l’action du Soleil, dont les perturbations ont été calculées indépendamment par Hansen et par Delaunay de deux façons différentes, et qui ont donné des résultats concordants. Le travail de Delaunay, qui a exigé plus de quinze années d'un labeur opiniätre, servira de base à de nouvelles Tables dela Lune que le Bureau des Longitudes va publier prochainement, quand on aura déterminé empiriquement, par les obser- valions, une valeur aussi exacte que possible de la deuxième inégalité dont on vient de parler. On voit quelles puissantes raisons doivent por- ter les astronomes à déterminer avec soin la posi- tion de la Lune, et à perfectionner sa théorie. M. Tisserand les résume ainsi, dans la Nolice que nous avons déjà citée : 4° La Lune, qui a joué un rôle capital dans l’éta- blissement de la loi d'attraction, la soumet à un contrôle incessant, en la forçant à expliquer, dans leurs moindres détails, toutes les irrégularités de sa route. Cet examen approfondi conduit à des conséquences inattendues : ainsi, en déterminant par l'observation deux des irrégularités pério- diques de la Lune, on. en peut conclure l’aplalis- sement de la Terre et la parallaxe du Soleil, et les valeurs ainsi obtenues ne le cèdent en rien, quant à la précision, aux mesures directes qui ont né- cessité tant d’expéditions lointaines. 9e Le mouvement de la Lune, en raison de sa ra- pidité, nous montre d'avance un développement de perturbations que les planètes n'atteindront que dans des milliers de siècles; de sorte que tous les progrès apportés aujourd'hui à la théorie de la Lune serviront assurément pour celles des planètes dans un avenir éloigné. 3° L'étude attentive du mouvement de la Lune, suivie pendant des siècles, nous fournira des ren: seignements précieux sur la rotation de la Terre, et nous montrera si sa durée est soumise à quel- ques petits changements progressifs, question de la plus haute importance au point de vue de la mesure du temps. 4° Enfin la connaissance exacte du mouvement de notre satellite est indispensable aux marins el aux voyageurs, qui y trouvent encore, en l'absence du télégraphe, le moyen le plus précis pour déter- miner les longitudes. IT. — LE SOLKIL On sait que les taches du Soleil ne sont pas tou- jours également nombreuses, mais que leurnombre comme leur importance croissent et décroissent alternativement. La durée de la période est d'en- viron 11 ans #. Le dernier minimum a eu lieu en 1889; actuellementles taches sont déja nombreuses el vont le devenir de plus en plus jusqu’en 1894, pour diminuer de nouveau jusqu'en 1900, époque où aura lieu le prochain minimum. Les récentes éclipses totales ont montré que la couronne solaire subit des modifications dont la la période concorde avec celle des taches; mais on ne sait presque rien sur l'origine même de cette sorte d’auréole. M. Huggins l’assimile, quant à ses causes, aux queues des comètes : elle serait due en majeure partie à des apports de matière venant du Soleil sous l'influence d'une force peut-être élec- trique, variable comme la surface; cette force pourrait, par suile, atteindre une intensité suflisante pour compenser aisément la gravitation, même près du Soleil; beaucoup de particules de la couronne retourneraient au Soleil, mais la malière qui forme les longs rayons n'y retournerait pas : ellese disséminerait de plus en plus pour contri- buer peut-être à former la lumière zodiacale, dont lacause n’est pas connue davantage. La spectroscopie solaire a donné lieu récemment à des travaux importants, parmi lesquels on re- marque le magnifique spectre photographique du Professeur Rowland et le dessin du spectre solaire de L. Thollon. Ce dernier s'était principalement attaché à distinguer les raies dues à l’absorption produite par l'atmosphère terrestre (raies tellu- riques). Comme, toutes choses égales d’ailleurs, ces raies telluriques sont d'autant plus intenses que les rayons solaires ont fait un plus long trajet à travers notre atmosphère, il dessinait le spectre quand le Soleil était très haut, puis quand il était voisin de l’horizon : les raies qui sont plus fortes dans le second cas sont des raies telluriques. Ce travail, simple en apparence, est au contraire extrêmement laborieux, et la mort a empêché Thollon de le terminer : fort heureusement il a eu le temps de compléter la partie la plus importante, au point de vue des raies telluriques, car son G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D'ASTRONOMIE 55 dessin comprend tout l'intervalle des raies A eo: IV. — MERCURE, VÉNUS, MARS Nous sommes ici, pour ainsi dire, dans le do- maine particulier de M. Schiaparelli qui, en 1877, a découvert les canaux de Mars, puis leur dédou- blement; en 1889, il a montré que Mercure tourne sur lui-même non en quelques heures, comme on l’a cru longtemps, mais en 88 jours; enfin ses ob- servations ont ébranlé fortement la confiance presque aveugle accordée pendant 150 ans à la durée de rotation de Vénus déduite d'anciennes observations et confirmée plus récemment. L'année 1891 n'a apporté ici aucun changement notable. Cependant le dernier travail de M. Schia- parelli, relatif à Vénus, n'a pas dissipé tous les doutes, et de sérieux observateurs croient encore que la durée de rotation de cette planète est voi- sine de 24 heures. NV. — JUPITER La grande tache rouge aperçue d'abord sur Ju- piter en 1878, et qui a quelque temps perdu de son éclat, a été en 1891 aussi brillante qu'en 1879, époque où elle attira l'attention générale; il est à noter que ces deux maxima d’éclal se sont pro- duits à un intervalle de 12 ans, durée de la révolu- tion de la planète autour du Soleil. On a observé qu'en arrivant près d'elle les autres taches se dis- sipent ou sont déviées comme par un obstacle. Les éclipses des satellites de Jupiter sont très faciles à observer, même avec de faibles instru- ments. Elles offraient autrefois une ressource des plus précieuses pour la détermination des longi- tudes terrestres et pour le calcul de la vitesse de la lumière. Celles du premier satellite, qui s’obser- vent à 4 ou 5 secondes près, pourraient être en- core utilisées; pour les autres satellites, l'incerti- tude est trop grande, à moins d'employer une méthode photométrique, telle que celle de M.Cornu. que nous avons indiquée autrefois!, Quand ils passent entre Jupiter el nous, ces sa- tellites traversent le disque de la planète et pré- sentent alors des phénomènes variés. Voici le cas ordinaire : quand le satellite vient d’entrer sur le disque de Jupiter, on l’aperçcoit encore comme un point ou un petit disque brillant se projetant sur un fond un peu moins clair; on le perd ensuite graduellement de vue, parce que le centre de Ju- piter est plus brillant que les bords; et à la sortie les mêmes apparences se reproduisent en sens in- verse. Mais parfois ces satellites se projettent en noir sur le disque de la planète, produisant ainsi ce qu'on appelle les passages sombres, que l’on 1 Voyez cette Revue, t.1, page 178. s'explique aisément si l'éclat du satellite vient à être notablement inférieur à celui de la planète. Un des phénomènes les plus curieux présentés par ces satellites est celui qui a été observé par M. Barnard le 8 septembre 1890 : cet habile obser- vateur à vu alors nettement double le premier sa- tellite qui se projetait à ce moment sur Jupiter; la direction des deux parties était perpendiculaire aux bandes de la planèle, et l'ombre du satellite était d’ailleurs parfaitement ronde. Cette remar- quable apparence tenait sans doute à la présence accidentelle d'une bande obscure sur l'équateur du satellite. VI. — SATURNE, Uranus, NEPTUNE. En 1891 à eu lieu la disparition de l’anneau de Saturne : d’abord Le 22 septembre la Terre a passé par le plan de l’anneau, qui alors, ne nous présen- tant que la tranche, est devenu invisible. Quelques jours plus tard, le 30 octobre, le plan de l’anneau a passé par le Soleil : alors, ses faces n’élant plus éclairées, l'anneau ne pouvait non plus être aperçu. Quand ces disparitions se produisent dans des conditions favorables, leur observation attentive peut dévoiler la structure des anneaux; mais il n'en à pas été ainsi en 4891. À diverses reprises on a signalé des dentelures sur les anses de ces anneaux, de petites taches blanches vers l'équateur de la planète; mais ces détails, indiqués par des observateurs munis de petits instruments, n’ont pas été aperçus avec des instruments plus puissants : sans doute les obser- valions de la prochaine opposition (1892) nous apprendront si leur existence est réelle. Pour Uranus on aperçoit de temps à autre sur son disque de faibles bandes qui indiquent sans doute la position de l'équateur de la planète, mais qui ne nous ont encore rien appris sur la durée de de sa rotation. Quant à Neptune on n’a jamais aperçu de détail sur son pelit disque de 2" de diamètre. VIT. — PETITES PLANÈTES COMPRISES ENTRE Mars ET JUPITER. Le nombre de ces astéroïdes s’accroit très rapi- dement, grâce surtout aux recherches infatigables de M. Charlois et de M. J. Palisa. Voici la liste de celles qui ont été découvertes en 1891 : N° NOM AUTEUR, LIEU ET DATE DE LA DÉCOUVERTE (303 Josephina MillosewichäRome le 12 février (304) Olga Palisa Vienne 14 février (Gui) Charlois Nice 16 février (08) Unitas Millosewich Rome { mars 56 G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D’ASTRONOMIE Charlois Nice 5 mars 308 Borrelly Marseille 31 mars (309) Fraternitas Palisa Vienne 6 avril (Gr) Charlois Nice 16 mai (su) Charlois Nice 11 juin Charlois Nice 28 août (613) Chaldea Palisa Vienne 30 août Charlois Nice 4 septembre Constantia Palisa Vienne 4 septembre 316 Charlois Nice 8 septembre Gr) Charlois Nice 11 septembre (615) Charlois Nice 24 septembre Charlois Nice 8 octobre Palisa Vienne 11 octobro 321 Palisa Vienne 15 octobre Borrelly Marseille 27 novembre Wolf-Berberich Heidelberg 22 décembre La découverte de cette dernière planète mar- quera une date mémorable dans l’histoire de ces astéroïdes, en ce que, la première, elle est due àla photographie. Jusqu'ici les petites planètes ont été trouvées, soit accidentellement, soit au moyen de cartes cé- lestes que l’on compare directement au Ciel : si l’on aperçoit dans la lunette un astre qui ne se trouve pas sur la carte, on est en présence d'une étoile omise par l’auteur de la carte, ou d’une petite planète, soit nouvelle, soit ancienne, et que l’on reconnait en une heure ou deux à son mouve- ment propre. Mais il n’en a pas été ainsi pour la planète (923) qui a été trouvée de la manière suivante : le 22 dé- cembre 1891 M. Max Wolf, habile astronome ama- teur de Heidelberg, avait pris, avec sa lunette pho- tographique d'environ 0"15 d'ouverture, un cliché d'une partie de la constellalion des Gémeaux; le lendemain 23 décembre il photographia de nou- veau la même région et il confia ses deux clichés à M. Berberich. En les comparant, celui-ci reconnu la présence de deux astres qui s’élaient déplacés dans l'intervalle du 22 au 93 : l’un élait une pla- nète nouvelle qui a reçu le n° (2); l’autre parait être la planète Sapientia, déjà découverte par M. J. Palisa en 1888. Si l’on songe que beaucoup d'amateurs peuvent aisément se procurer des instruments aussi puis- sants que celui de M. Max Wolf, il est à prévoir que le nombre des astéroïdes connus va s’ac- croitre rapidement et que la question des petites planètes va entrer dans une phase nouvelle. Lescalculs qu'exigentlesastéroïdes déjà connus et leur observation sont un travail énorme, mais qu’on ne saurait abandonner sans tomber aussitôt dans le plus grand désordre. Déjà même à plusieurs re- prises on a tantôt considéré comme nouvelles des planètes découvertes antérieurement et tantôt pris de nouvelles planètes pour des anciennes : c’est que les calculateurs qui se dévouent à ces travaux ne suffisent plus et il est bien désirable que les astronomes amateurs apportent leur concours. Ils auraient là un champ tout à fait propre pour exercer leur activité, et ils trouveraient tous les renseignements désirables dans l'excellent Traité de la détermination des orbites des comètes el des pla- nètes d'Oppolzer, dont M. E. Pasquier, professeur d'astronomie à l'Université de Louvain, a donné récemment une traduction française, plus correcte encore que l’ouvrage original. La recherche des méthodes expéditives de calcul s'impose aussi, et pour attirer l'attention de ce côté l'Académie des Sciences de Paris à mis au con- cours pour 1894 (prix Damoiseau) la question sui- vante : «Perfectionner les méthodes de caleul des perturbations des petites planètes en se bornant à représenter leur position à quelques minutes d'arc près, dans un intervalle de cinquante ans; cons- truire ensuite des tables numériques permettant de délerminer rapidement les parties principales des perturbalions. » VIIT, — ComèTEs En 1891, on a vu les cinq comètes suivantes : Comète [a 11891 — 1891 1. Découverte par M. Barnard, à l'Ob- servatoire Lick, près de San Francisco, le 29 mars et trouvée indépendamment le lendemain par M. Denning à Bristol. Comète b 1891 — 1891 II. C’est la seconde apparition de la comète périodique découverte en 188% par M. Max Wolf (1884 III) dont le retour avait été calculé par M. Thraen, ainsi que par M. L. Siruve. Elle a été retrouvée, très près de la place indiquée, par M. Spitaler à Vienne le 1°r mai; et deux jours après à l’observatoire Lick par M. Barnard. Comète c 1891 — 1891 III : c’est la célèbre comète d’Encke, calculée par M. O. Backlund et retrouvée, très près aussi de la place indiquée, par M. Barnard le {tr août. Comète d 1891 — 1891 V : c’est le second retour de la comète Tempel; — Swift (1869 III — 1888 IV) calculée par M. Bos- sert et retrouvée par M. Barnard le 21 septembre. Comète e 1891 — 1891 IV découv. par M. Barnard le 2 octobre. 1 Sur la notation employée pour désigner les comètes, voir le tome I (p, 66) de la Revue générale des Sciences. Le eue G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D’ASTRONOMIE by Les comètes « et d sont toujours restées très faibles, et la comète e était très australe, de sorte qu’en 1881 il y a eu dans nos régions deux comètes seulement (« el b) visibles dans les instruments de moyenne puissance. Il est remarquable aussi que sur les cinq comètes de cette année il y en ait trois périodiques et dont le retour avait été annoncé. La comète Wolf (b 1891) avait d’abord, d'après M. Lehman Filhès, une orbite presque circulaire et restait alors constamment éloignée de la Terre, de sorte qu'elle était invisible pour nous. Une per- turbation produite par Jupiter en 1875 a allongé son orbite et diminué sa distance au périhélie, ce qui nous permet de l’apercevoir quand elle repasse près du Soleil. Des diverses comèles vues en 1891, la plus cé- lèbre comme la plus intéressante est la comète d'Encke, remarquable en ce que sa durée de révo- lution diminue continuellement. Pour expliquer cette accélération, on a longtemps admis, avec Encke, l'existence d’un milieu répandu dans l’es- pace et qui produirait une résistance variant en raison inverse du carré de la distance au Soleil. Mais sous cette forme, l’existence d’un milieu ré- sistant n’est plus admise aujourd’hui que par un bien petit nombre d’astronomes. Il est certain, cependant, que la comète d'Encke est troublée dans sa marche par une cause inconnue, qui pourrait être la rencontre d’un essaim de mé- téorites. M. Seeliger a montré en effet que la ren- contre d'un tel essaim produirait un effe{ analogue à celui du milieu résistant d’Encke. Il est vrai qu'alors l'accélération du moyen mouvement de- vrait présenter d'assez fréquentes variations ; mais certains astronomes pensent que tel est précisé- ment le cas de la comète d'Encke. La théorie de la capture des comèêtes périodiques par les grosses planètes est à l’ordre du jour et vient de faire de notables progrès; les travaux de M. Tisserand, mentionnés ailleurs (Voyez cette Re- vue, I, p. 68) ont suscité ceux de M. Callandreau et de M. Schulhof; ce qu'il y avait de vague et de peu satisfaisant dans la théorie de la capture a été éclairci et elle présente maintenant un haut degré de probabilité ; une des raisons les plus puissantes en sa faveur, c'est que toutes les comètes périodi- ques se rapprochent de l’une ou de l’autre des srosses planètes, dont l’action suffit pour les avoir détournées de leur orbite primitive. Relativement à la matière des comètes, le spec- troscope nous y montre ordinairement le carbone, probablement en combinaison avec l'hydrogène et aussi parfois avec l’azote. Quand les comètes se rapprochent beaucoup du Soleil, il apparaît dans leur spectre les lignes du sodium ainsi que d’autres lignes qui pourraient être celles du fer. La lumière des comètes est en partie de la lumière solaire réfléchie, en partie une lumière propre, que M. Lockyer attribue à l’action d’une haute température, produite par un entrechoquement de pierres météoriques lancées contre le noyau par la force perturbatrice du Soleil. Mais cetle manière de voir a peu de partisans et assez souvent cette lumière est attribuée à une action électrique, à des décharges disruptives produites probablement par l’'évaporalion, qui devient de plus en plus active à mesure que la comète s'approche du Soleil. Dans le vide de l’espace, la matière peut se trouver dans un état analogue à la matière radiante de M. Crookes; enfin il intervient peut-être cette curieuse action électrique, récemment découverte, qu'exerce la lumière ultra violette du spectre : on sait aujour- d’hui en effet que cette lumière peut produire la décharge d'un morceau de métal électrisé négati- vement et qu’elle peut aussi charger positivement un morceau de métal neutre. Pour l’année 1892 on attend le retour des comètes périodiques suivantes : 1° La comète de Winnecke, dont le retour a été calculé par M. de Haerdil.' 2° La comète de Tempel (1867, IT), qui n’a pas été vue à son dernier retour en 1885. Ainsi que le remarque M.Schulhof (Bulletin astronomique, NU, p. 194), cette comète doit être le membre le plus jeune du système solaire, où elle parait avoir été fixée il y a trois siècles environ par l’action de Jupiter. Et comme elle passe encore très près de cette planète, eile peut servir à en calculer la masse avec précision. 3° La comète de Brooks (1886, IV), dont l’époque du retour est moins certaine, cetle comète ayant été très peu observée lors de sa découverte en 1886. 4° Enfin cette année, vers le 27 novembre, la Terre pourrait rencontrer d'importants débris de la comète de Biéla, ce qui donnerait naissance à une abondante pluie d'étoiles filantes. IX. — LES ÉTOILES. Nous venons de passer en revue les corps qui peuplent le système solaire, agglomération relati- vement pelite, séparée par des intervalles im- menses des autres systèmes formés par les étoiles et les nébuleuses. Tandis, par exemple, que la lumière avec sa vitesse de 300000 kilomètres (ou 7 fois {le tour de la Terre) par secoñde mel 8 minutes à nous venir du Soleil et 8"16" à tra- verser l'orbite de Neptune (qui limite pour nous le système solaire), ellemet 4 ans ? à venir de l'étoile la plus voisine que nous connaissions, 46 ans pour ( 38 G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D'ASTRONOMIE venir de l'étoile polaire, et sans doute plusieurs siècles à nous venir des nébuleuses. A ces distances, dont notre esprit se fait si diffi- cilement une idée, que peuvent nous apprendre les instruments dont nous disposons? On serait tenté de répondre : rieñ ou presque rien. Cependant l'étude attentive des étoiles doubles a montré, presque avec certitude, que la même loi d’attrac- tion qui lie les planètes au Soleil, régit aussi la matière de ces systèmes; le spectroscope nous montre que la matière terrestre n’est pas spéciale au système solaire, mais se retrouve dans toutes les étoiles que nous pouvons voir; en outre, il nous permet de mesurer un élément qui semblait devoir nous échapper à jamais, la vitesse des corps célestes suivant la direction même du rayon visuel. Malgré ces merveilleux résultats nous pouvons dire, comme un ancien, que ce que nous connais- sons n’est rien auprès de ce qui reste à découvrir. La science présente même parfois ce que l’on pourrait appeler des reculs apparents, si le ren- versement d'une hypothèse erronée n'était pas un grand progrès. Ainsi, on avait pensé Jusqu'à ces derniers temps que les belles étoiles paraissent plus brillantes que les autres, parce qu'elles sont plus voisines de nous, et on avait basé de nom- breuses recherches sur cette hypothèse, aujour- d'hui chancelante; elle est assez difficile à soute- nir, en effet, car parmi les étoiles dont on connait maintenant les parallaxes, par suite les distances, les étoiles faibles dominent beaucoup : l'hypothèse de la distribution uniforme des étoiles dans l’es- pace devient done de moins en moins probable, et d’ailleurs la considération des mouvements propres conduit aux mêmes résultats que la considération des parallaxes connues. Cette question capitale de la distribution des étoiles dans l’espace serait résolue si l’on connais- sait les parallaxes d'un grand nombre d'étoiles: mais jusqu'ici il n’y en a pas cinquante qui soient dans ce cas. Peut-être la photographie permettra d'avancer plus rapidement; quoi qu'il en soit, la détermination des parallaxes stellaires est une des questions qui doivent solliciter le plus vivement les observateurs. A défaut de déterminations directes de paral- laxes, l'étude des mouvements propres peut éclai- rer la question des distances et de la distribution des étoiles. Il est naturel de supposer, en effet, qu'en moyenne les étoiles qui ont les plus grands déplacements apparents sur la sphère céleste sont les plus rapprochées de nous; même on n'entre- prend ordinairement les longues observations qu’exige une détermination de parallaxe que pour des étoiles à grand mouvement propre. Quant à ces mouvements propres, on les déduit des positions actuelles comparées aux positions anciennes, qui sont consignées dans ce qu'on ap- pelle les Culaloques d'étoiles. Et c’est là un des principaux usages de ces immenses inventaires qui coûtent tant de travail. En ce moment, l'Observatoire de Paris publie un Catalogue de ce genre basé sur plus de cinq cent mille observations relatives à près de cinquante mille étoiles qui avaient été observées il y a un siècle, par l’astronome français Lalande. Parmi les étoiles, une classe des plus remar- quables est celle des étoiles doubles ou multiples. Quand deux étoiles paraissent dans le Ciel très voisines l’une de l’autre, elles forment ce qu'on appelle en général une éfoile double. Maïs ce rap- prochement peut n’être qu'apparent et dû aux ha- sards de la perspective, les deux étoiles étant à des distances très inégales sur la ligne qui les joint à l'observateur : alors elles forment ce qu’on appelle une éloile double optique, un couple optique. D’autres fois les deux étoiles sont réellement voisines l’une de l’autre et forment un couple physique. Alors les deux étoiles se déplacent l’une par rapport à l’autre, en tournant autour de leur centre commun de gra- vilé, et l’étude des mouvements de ces couples physiques a enrichi l'astronomie des conséquences les plus importantes, en montrant que la loi de Newton est presque certainement une loi d'attraction véritablement universelle, régissant les mouve- ments des étoiles comme ceux des planètes du système solaire. Les réserves qu'il y a encore à faire à l’extension absolue de la loi de Newton tiennent principalement à l’imperfection des me- sures d'étoiles doubles ; et elles diminueront avec le temps et avec le nombre des couples mesurés. Aussi ces observations sont-elles poursuivies avec ardeur dans les observatoires munis de puissants instruments; parmi les séries de mesures pu- bliées récemment, on remarque principalement celles qui ontété faites par MM. Burnham, Doberck, Hough, Tarrant, etc. Celles de M. Burnham ont été faites à l'Observatoire de Lick, qui possède la plus grande lunette du monde. On sail! que la spectroscopie, centuplant de ce côté la puissance des lunettes, vient de révéler des couples appelés quelquefois étoiles doubles invi- sibles et dont les composantes tournent l’une autour de l’autre dans l’espace de quelques heures. X. — LES NÉBULEUSES. Sur les nébuleuses nous avons beaucoup moins de connaissances certaines que sur les étoiles ; car il n’en est aucune dont on ait pu jusqu'à ce jour déterminer la parallaxe. Pour beaucoup d’entre elles cette détermination paraît même à peù près 1 Voyez cette Revue, t. Il, page 114. G. BIGOURDAN. — REVUE ANNUELLE D’ASTRONOMIE 59 impossible, à cause de leur aspect diffus qui ne comporte pas des mesures d’une très haute préci- sion. Aussi on se rejette, comme pour les étoiles, surles mouvements propres. On ne connait encore aucune nébuleuse qui présente un déplacement certain, parce que ces astres ne sont observés avec précision que depuis quarante ans à peu près; mais de divers côtés on les mesure avec soin, et sans doute ce siècle ne finira pas avant que l'on connaisse les positions assez précises de la plu- part de celles qui ont été découvertes jusqu'ici. Le nombre de celles que l’on connaît augmente d'ail- leurs assez rapidement, et dans les huit dernières années un astronome américain, M. Swift, en a découvert à lui seul près de 1.000. Le nombre Lotal de celles que l’on connait est d'environ 8.000. L'étude decesastres présente un haut intérêt, car on sait que, d’après la théorie cosmogonique de La- place, c’est un de ces astres qui a donné naissance au système solaire tout entier ; les nébuleuses se- raient donc des mondes en formation nous présen- tant les divers états par lesquels a dû passer notre propre système. Dans ces derniers temps, ces vues imposantes ont reçu des confirmations remarquables : des photo- graphies des Pléiades obtenues à l'Observatoire de Paris par M. M. Henry ont montré des filets de matière nébuleuse, se recourbant parfois pour aller d'une étoile à l’autre et réunissant plusieurs étoiles en une sorte de chapelet ; depuis on a trouvé d’au- tres exemples de pareilles agrégations, dans les- quelles la relation physique entre les étoiles et la nébuleuse est presque certaine. Plus récemment, une photographie obtenue par M. Roberts, habile amateur anglais, a dévoilé la véritable constitution de la nébuleuse d’Andromède, et nous l’a montrée formée de plusieurs anneaux de matière nébuleuse, séparés par des espaces moins lumineux, et entou- rant une masse centrale énorme et mal définie. De son côté, M. Huggins a vu dans le spectre de certaines étoiles d’Orion des raies s'étendant plus oumoins dans la nébulosité qui entoure cesétoiles : là encore la liaison physique de ces éloiles et de la nébuleuse paraît bien probable, presque certaine. Si l’on songe que ces étoiles n’ont pas de paral- laxe sensible, de sorte que leur lumière met au moins cent ans à venir jusqu'à nous, le diamètre réel de la nébuleuse d’Orion est tel que la lumière met une année entière pour le parcourir, car son diamètre apparent est d'environ un demi-degré. En calculant ainsi nous supposons que la vitesse de la lumière est partout la même, et égale à celle que nous observons à la surface de la terre. C’est probablement ce qui a lieu, mais on ne saurait l’af- firmer avec certitude, el cela nous amène à dire un mot de l’aberration de la lumière. A cause du déplacement de la Terre et de la transmission successive de la lumière, nous ne voyons pas les éloiles exactement à leur vraie place; le petit écart de la posilion apparente et de la position vraie dépend des vitesses relatives de la Terre et de la lumière et constitue le phénomène de l'aberration. Pour pouvoir calculer à chaque instant la position des étoiles, il est nécessaire de connaitre la constante de l’aberration. Au moyen de plusieurs étoiles différentes, qui ont donné des valeurs concordantes, W. Struve a obtenu pour ce nombre la valeur 20", 445. M. Læwy a proposé une méthode nouvelle pour déterminer cette constante et, avec M. Puiseux, il l'a appliquée en 1890-91 : le nombre définitif n’a pas encore été donné, mais il différera très peu de celui de W. Struve. 11 semble d'après cela que la lumière doit se propager avec la même vitesse dans toutes les directions, ou du moins dans les directions des diverses étoiles employées. La conclusion ne serait cependant pas absolument rigoureuse : c’est que, ainsi que l’a faitremarquer M. Mascart, aberration dépend de la vitesse de la Terre et de celle de la lumière dans la région occupée par l'observateur, sans qu'il y ait a faire intervenir les modifications que pourrait éprouver la propagation des ondes lumineuses entre les étoiles et la terre. Par consé- quent, la concordance des valeurs obtenues au moven de diverses étoiles pour la constante de l'aberration prouve seulement que la vitesse de la lumière est constante dans la partie de l’espace où se meutla Terre; ailleurs on ne saurait rien affirmer définitivement. Parmi les résultats que nous venons de men- toinner, de très importants ont été révélés par la spestroscopie qui est devenue l’une des branches les plus étendues et les plus fécondes de l'astro- nomie physique, la plus importante peut-être : il suffit, pour s’en assurer, de lire le beau discours par lequel M. Huggins a ouvert le Congrès de la British Association en août 1489, et dans lequel il expose « les nouvelles méthodes d'observation en astronomie ». La spectroscopie a trouvé un puissant auxiliaire dans la photographie qui, de son côté, ne se limite plus à l'astronomie physique: par la carte du Ciel, qu’elle a permis d'entreprendre, elle a envahi l'astronomie de position. Mais les lecteurs de la Revue connaissent l'état de cette grande entreprise internationale par les articles que lui a consacrés M. Trépied !. Je ne saurais mieux faire que de les y renvoyer, G. Bigourdan, Astronome-adjoint à l'Observatoire de Paris. ! Revue générale, des Sciences, t. 11, page 530. 60 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. Picard (Emile) de l'Institut. — Traité d'Analyse. — Tome I : Intégrales simples et multiples. L'équation de Laplace et ses applications. Développement en séries du calcul infinitésimal. Un vol, gr. ün-8° (15 fr.). Gauthier- Villars et fils, 55, quaides Grands-Augustins, Paris, 1891. Ce livre est la première partie d’un ouvrage considé- rable où sera exposée, avec tous les développements qu'elle comporte, la théorie des équations différentielles à une ou plusieurs variables, L'auteur nous avertit dans sa préface qu'il s’est décidé à consacrer un vo- lume préliminaire aux éléments du calcul intégral pour n'exiger de ses lecteurs aucune connaissance qui dépasse le programme des mathématiques spéciales. Mais que les lecteurs plus érudits n’aillent pas trop se fier à la modestie de ces indications et négliger d’ou- vrir le premier volume en attendant le second! Si ce livre en effet, grâce à son extrème lucidité, est à la portée de tous, il n’en constitue pas moins une introduction complète aux théories les plus savantes de l'Analyse. On ne saurait nier qu’il existât dans notre enseigne- ment mathématique une véritable lacune que le nou- veau livre de M. Picard vient heureusement combler. Tous ceux qui sont au courant des études scientifiques en France savent les difficultés que rencontre un dé- butant quand il aborde, au sortir d’un cours de calcul intégral, la théorie des fonctions ou les théories de Ja physique mathématique. Si sa mémoire est riche en artifices d'intégration, des notions fondamentales lui sont inconnues ou peu familières (notions d’inté- grales curvilignes ou de surface, de différentielle totale, etc.). Il semble qu'une vieille tradition ait rangé les principes du calcul intégral en deux caté- gories, l’une à l’usage des étudiants, l’autre à l’usage des savants : la première, tout élémentaire, est seule l’objet d’un enseignement, d’ailleurs largement déve- loppé; la seconde, où l'Analyse puise ses meilleures ressources, est passée sous silence, Il arrive ainsi que des théories rencontrées dans une science d'application dépassent sur bien des points le niveau des études de pures mathématiques. — Exposer systématiquement les méthodes qui se rattachent à la notion fondamen- tale d'intégration et auxquelles a recours l'Analyse, illustrer leur utilité et leur emploi en développant, à titre d'exemples, quelques-unes de leurs applications les plus importantes, tel est le but et telle est la marche du livre de M. Picard, . C’est par la définition de l'intégrale simple que s’ouvre le volume, Dès ce premier chapitre se manifeste la tendance constante de l’auteur, qui est de laisser aux idées générales et vraiment fécondes leur importance naturelle, de ne les sacrilier jamais aux minuties, aux singularités de détail. Sans doute, ilest difficile, dans ces débuts, d’accorderla concisionaveclarigueur, den’énon- cer que des vérités nettes et précises sans hérisser les rai- sonnements de précautions épineuses. La chose en tout casest possible :pours’en convaincre, il suffit delire, par exemple, les paragraphes où se trouvent traitées la diffé- » rentiation sous le signe | et l'intégration d'une fonc- b tion qui devient infinie. — Le même souci de mettre en évidence les idées générales n'apparaît pas moins nettement dans le second chapitre : l'intégration des fonctions rationnelles en æ ou en sin æ et cos æ, la ré- duction des différentielles algébriques y sont effectuées à l’aide de procédés uniformes, sans l'intervention d’au- cun artifice. Peut-être s'apercoit-on alors que les métho des les plus naturelles ne sont pas les moins simples. Ces éléments acquis, l'auteur aborde immédiate- ment la théorie des intégrales curvilignes. Tous les points importants de cette théorie sont mis en pleine lumière : conditions pour qu’une intégrale curviligne Je dx + Q dy ne dépende que de ses limites, pro- priétés d'une telle intégrale considérée comme fonc- tion de sa limite supérieure, etc. Des exemples d’inté- grales curvilignes calculées Le long d’un contour fermé terminent celte étude, Le chapitre suivant est consacré aux intégrales doubles (définition, changement de 1 variables sous le signe ff, applications élémen- taires, etc.) et aux intégrales de surfaces ; les propriétés de ces intégrales, analogues aux propriétés des inté- grales curvilignes, sont élucidées avec le même soin : conditions pour qu'une intégrale de surface ne dépende que de la courbe limite, expression d'une telle inté- grale en fonction d'une intégrale simple par la formule de Stokes, etc. Les applications traitées à la fin de ces deux chapitres conduisent à la démonstration du théo- rème de M, Kroneker sur le nombre de points com- muns à deux courbes planes (ou à trois surfaces) que renferme un contour (ou une surface) fermé. Le théo- rème de Kroneker ne suffit pas d’ailleurs à déterminer ce nombre en général, et M. Picard appelait sur ce sujet de nouvelles recherches; mais il a lui-même, dans une Note récente, résolu complètement la question. Une rapide étude des intégrales multiples termine cette première partie du livre, et renferme, en outre des propositions fondamentales de cette théorie, une dis- cussion détaillée du. cas où la fonction devient infinie et indéterminée et les formules usuelles relatives aux intégrales triples, telles que la formule de Green, dont on connait l'importance. Au lieu d'appliquer ces généralités à des exemples sans intérèt, l’auteur a cru plus rationnel de dévelop- perune des plus importantes théories auxquelles le secours de ces généralités est indispensable, je veux dire la théorie de l’équation de Laplace et du poten- tiel. En 80 pages d’une merveilleuse simplicité, l’auteur a su rassembler tout ce qu'il y a d’essentiel dans cette théorie si vaste, sans négliger les découvertes les plus récentes, telles que le théorème de M. Bertrand sur l'attraction d’une couche superficielle, la méthode de M. Robin pour la recherche d’une couche sans action sur un point intérieur, Nous signalerons notamment le lumineux exposé de la méthode de Carl Neumann pour résoudre le problème de Dirichlet quand la surface est convexe et sans points singuliers, — On peut dire que les cinq chapitres relatifs aux intégrales curvilignes etmul- tiples, à l'équation de Laplace et à l'attraction forment un chef-d'œuvre d’introducfion à la physique mathé- mathique. Par l'intégrale de Laplace (et l'intégrale analogue de Poisson), les théories qui précèdent se relient naturel- lement à l'étude des développements en séries, L'auteur commence par établir lesrègles d'intégra- tion d’une série, en introduisant la notion de conyer- gence uniforme, et envisage ensuite à titre d'applications les séries ordonnées suivant les puissances d’une varia- ble, puis les séries trigonomét{riques, dont la théorie remplit un des chapitres les plus remarquables du livre. La possibilité de développer une fonction en série de Fourier, la convergence uniforme du développement sont établies d'après la méthode de Dirichlet; mais il convient d'attirer surtout l'attention sur la démonstra- BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 6l tion du théorème de M. Cantor : une série trigonomé- trique convergente et égale a zéro a ses coefficients nuls, Ge théorème, comme le théorème signalé plus haut de Kroneker, comme la méthode de Carl Neumann, n’était accessible jusqu'ici qu’à quelques privilégiés ; les voici maintenant à la portée de tous les lecteurs qui n’ont que des connaissances élémentaires, En rattachant la série de Fourier à l'intégrale de Pois- son, l’auteur se trouve conduit à une démonstration du théorème de Weierstrass sur le développement d'une fonction d’une variable réelle en série de polynômes. D'autre part, la comparaison de l'intégrale de Poisson et de l'intégrale de Laplace permet de démontrer la possi- bilité de développerune fonction de deux variables réelles ensérie de fonctions de Laplaceeten séries de polynômes. La théorie complète des principaux développements des fonctions se trouve ainsi résumée en un seul chapitre. Un court chapitre est consacré aux séries multiples qui interviennent dans bien des questions d'Analyse, Après avoir démontré quelques règles assez générales de convergence, l’auteur les applique à la formation d'expressions (à une ou deux variables) doublement ou quadruplement périodiques, et termine par de curieux exemples de séries multiples où les indices entiers ne sont pas arbitraires. La dernière partie du livre est remplie par les appli- cations géométriques du calcul intégral. C’est, avec quelques additions, la reproduction du cours lithogra- phié du même auteur. Le dernier chapitre toutefois est presque entièrement nouveau; il traite de la représen- tation conforme de deux surfaces l’une sur l’autre, no- tamment d’un plan sur un plan. Cette dernière étude fournit l’occasion d'introduire, avec les substitutions linéaires, la notion de groupes discontinus, de forrner le plus simple des groupes fuchsiens, enfin d'indiquer l'existence de groupes analogues pour l’espace. — L'ouvrage que nous vencns d’analyser remplitdonce pleinement son but; il met ses lecteurs en possession des méthodes qui seront, dans la suite, d’un usage cons- tant, en même temps qu'il leur ouvre des apercus sur bien des choses nouvelles qu'ils verront plus tard en détail. Mais ce n’est pas seulement par l'importance et la variété de ses matières que ce livre est appelé à de- venir dès maintenant classique, c'est aussi par le carac- tère lumineux, la simplicité etl’élégance de ses démons- trations, Cette simplicité, cette élégance, elles provien- nent de la faculté qu'a l'auteur de débarrasser les raison- nements de tous les éléments parasites pour ne laisser subsister que les raisons de fond qui lient une vérité à une autre, À ce point de vue, on ne saurait trop recom- mander l'étude du livre de M. Picard à ceux qui veulent non seulement apprendre des choses qu’ils ignorent, mais encore apprendre à chercher. : La lecture de ce premier volume fait vivement dési- rer l'apparition des,volumes suivants qui, en ouvrant lar- gement des domaines jusqu'ici presque fermés, ne sau- raient manquer de rendre plus actives et plus fécondes encore les recherches d'Analyse. Après la Géométrie supérieure de M. Darboux, la Mécanique céleste de M. Tisserand, l’œuvre de M. Picard s'annonce comme devant être un nouveau monument élevé à l’honneur de la science francaise, P, PAINLEvÉ. 2° Sciences physiques. Lucas (Félix), Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, — Traité d'Electricité à l'usage des ingénieurs et des constructeurs. — Un volume in-4°; Baudry et Cie, éditeurs, 15, rue des Saints-Pères, Paris. Le traité d'électricité de M. Félix Lucas est surtout destiné, comme son titre l'indique, aux ingénieurs et aux constructeurs; l’auteur a pu condenser d’une fa- con méthodique et claire, dans un volume de 600 pages, toutes les notions théoriques et pratiques nécessaires, dans l’état actuel de la science, pour réaliser les appli- cations industrielles de l'électricité. L'ouvrage est divisé en six parties : théorie méca- nique du magnétisme et de l'électricité; mesures élec- triques ; piles, accumulateurs et machines électrosta- tiques; machines dynamo-électriques génératrices; transport et distribution de l'énergie électrique, Les exposés sont clairs et précis ; l'intelligence du texte est facilitée par de nombreux schémas, surtout en ce qui concerne le fonctionnement des dynamos géné- ratrices ou réceptrices. Dans le chapitre relatif à la lumière électrique M. F. Lucas décrit ses intéressantes expériences sur l’incandescence du charbon dans le vide à des tempé- ratures fort élevées et indique les lois empiriques du phénomène, Pour le fonctionnement des machines à courants al- ternatifs, il transforme en formules purement numé- riques, par des changements de variables basés sur cer- tains groupements des éléments concrets de ces ma- chines, deux formules relatives, l’une à la puissance électrique, l’autre à l'intensité du courant. Ce genre de transformalion qui doit trouver sa raison d’être dans l’homogénéité des formules relativement aux trois grandeurs fondamentales, longueur, masse et temps, est important pour l'étude de la similitude des machi- nes; on en connait déjà quelques exemples remar- quables en Mécanique. Le traité de M. Félix Lucas a exigé un travail consi- dérable ; il était difficile d’être à la fois sobre et com- plet; de ne rien omettre d’important sans accumuler les détails; de faire un livre d’un ordre scientifique élevé qui fût cependant clair et pratique. M. Lucas y a réussi. Son ouvrage sera éminemment utile pour les hommes techniques auxquels il s'adresse. H. LÉAUTÉ, de l'Institut. Callendar (H-L): On the Construction of Plati- num Thermometers (Sur la construction des thermo- mètres de platine). Phil. Mag., t. 32, p. 104, 1891. Pour la mesure des températures basses où très élevées où le thermomètre à mercure refuse son ser- vice, et où le thermomètre à air offre des difficultés de manipulation, les procédés électriques (thermo-électri- ques ou par variation de la résistance) rendent de grands services, Le pyromètre Le Chàtelier est employé indus- triellement ; quant au pyromètre à résistance, il avait subi, dans ces dernières années, un temps d'arrêt. M. Callendar, qui a publié précédemment d'importants travaux sur la question, précise les points à considérer dans la construction d’un pareil instrument, pour être à l'abri des variations avec le temps ou sous l'influence de températures élevées. Un mince fil de platine pur est soudé à des conduc- teurs qui peuvent être en argent ou en cuivre pour les mesures au-dessous de 700°, en fer jusqu’à 1000° pour des mesures grossières ; à des températures plus élevées, l’évaporation du métal et son absorption par le platine détruit promptement l'instrument, et il est nécessaire d'employer de gros conducteurs en platine enfermés dans une enveloppe de porcelaine. Le fil fin est supporté par des plaques de mica qu'il traverse. L'effet des gros conducteurs est éliminé en mettant dans la branche d'équilibre du pont des conducteurs identiques sem- blablement placés dans le four dont on mesure la tem- pérature. L'échelle du thermomètre à résistance de platine peut être réduite à celle du thermomètre à gaz au moyen d’une formule du second degré 1. La précision de l’instrument, en connexion avec un pont bien cons- truit, est de quelques centièmes de degré à 500°, Après un premier recuit à 1500°, on n’observe plus aucune nouvelle variation du zéro. « J'admets, dit l’auteur, qu'il faille une certaine expé- rience pour faire un bon thermomètre; mais le reste de 1 Voir la Revue du 15 février 1891, p. 75. 62 BIBLIOGRAPHIE. l'appareil peut être obtenu dans tout laboratoire, et il est aisé de faire les lectures rapidement avec un peu de pratique. La grande supériorité du thermomètre en platine surles autres instruments, comme étendue des indications, précision, durée, épargnera bien au delà du temps nécessaire à l’apprentissage de son em- ploi. » Ch. Ed, GUILLAUME, G. Espitallier (Commandant), — Les ballons et leur emploi à la guerre, — L'hydrogène et ses applications en Pronenpass Deux petits volumes in-18 (1 fr, 50 le volume), G. Masson, éditeur, 120, boulevard Saint-Germain. Pr 1891. Les deux petits volumes que vient de publier M. le Commandant Espitallier sur l’aéronautique sont d’une lecture facile et d'un réel intérêt; ils ne donnent, surtout en ce qui concerne les ballons et les aéroplanes, qu'une idée générale du problème posé et des solutions vers lesquelles on tend; ilsn’entrent pas dans le détail de ces questions fort complexes et fort difficiles : M. le Commandant Espitallier, qui est très compétent sur ce sujet, aussi bien au point de vue théorique qu’au point de vue pratique, l’a voulu ainsi. Il a pensé avec raison qu'en ce moment où de tous côtés l’on travaille à réa- liser « l'aviation », où de toutes parts l’on commence à obtenir des résultats, il y avait un grand nombre de personnes qui, sans avoir les connaissances théoriques et pratiques nécessaires pour suivre les recherches dans le détail, s’y intéressaient cependant et désiraient les connaître. C’est pour elles qu'il a écrit ces deux petits volumes qui seront lus beaucoup et avec plai- sir. L: O: Amat (L.). — Sur les phosphites et les pyrophos- phites. — Thèse présentée à la Faculté des Sciences de Paris, Gauthier-Villars et fils. 55, quai des Grands-Au- gustins. Paris, 1891. Dans ce travail, M, Amat établit d’une manière défi- nitive la non-existence des phosphites trimétalliques. Le phosphite trisodique de Zimmermann n'est qu'un mélange de phosphite disodique et de soude que l’on peut éliminer au moyen de l'alcool. Ainsi que Wurtz l’écrivait en 1846 dans son beau mémoire sur l'acide phosphoreux, cet acide ne renferme que deux atomes d'hydrogène basique. Des différents phosphites métalliques, les mieux étudiés étaient les phosphites neutres HPO*M? et lon ne connaissait qu'un petit nombre de phosphites acides parmi lesquels deux seulement, ceux de baryum et de calcium, appartenaient au groupe des phosphites aci- des normaux HPOSMH. M. Amat a réussi à obtenir les phosphites acides alcalins en saturant une dissolution d'acide phosphoreux jusqu'à neutralité au méthylo- range; ila pu préparer également les phosphites acides des métaux du groupe du baryum. Tous ces D nonDhite nee soumis à l’action ménagée de la chaleur perdent de l’eau et se transforment en un sel d’un acide particulier, acide pyrophosphoreux. La transformation du phosphite acide de sodium en pyrophosphite s'effectue à 150°.460°. Ce sel répond à la formule P2OÿNa?H?; sa dissolution possède des pro- priélés qui le distinguent nettement des sels formés par les autres acides du phosphore : elle ne précipite pas le nitrate d'argent. L’hydrogène du pyrophosphite de sodium n’est pas remplacable par les métaux; par suite la molécule de ce sel résulte de l’élimination de l’eau aux dépens de l'hydrogène basique de deux molécules de phosphite acide. Enfin M. Amat a retiré l’acide pyrophosphoreux de son sel de baryum : la dissolution de cet acide se transforme très rapidement en acide phosphoreux. En résumé, les recherches de M, Amat nous donnent une nouvelle preuve de la tendance que possèdent ANALYSES ET INDEX S les acides du phosphore à former des produits de condensation moléculaire avec élimination d’eau, H, GAUTIER. Meunier (Stanislas). — Les méthodes de synthèse en minéralogie. Cours professé au Muséum. 1 vol. grand. in-8° de 360 pages avec 6 figures dans le texte, (Broché 12,50.) Baudry et Cie, 15, rue des Saints-Péres. Paris, 1891, Il y a quelques mois, nous faisions connaitre dans cette Revue (p. 192) un traité de Minéralogie chimique générale, par M. le P* Doelter, dont une importante partie était consacrée à l’exposition des méthodes de synthèse dans cette branche de la science, Nous sommes heureux aujourd’hui de présenter au lecteur un ouvrage francais sur ce même sujet, émanant d’une plume autorisée et qui constitue la substance d’une série de lecons récemment faites au Muséum. M. Stanislas Meunier, après une introduction desti- née à montrer la haute portée théorique et pratique de la synthèse minéralogique, laquelle emprunte ses mé- thodes les plus parfaites à une double source, la chi- mie ef la AE divise son ouvrage en trois livres, chacun d'eux étant lui-même subdivisé en trois parties, suivant qu’il s'agit de minéraux formés par voie sèche, par voie mixte (c'est-à-dire sous l'influence simultanée de la chaleur et de l’eau), enfin par voie humide, Le premier livre traite des productions spontanées de minéraux contemporains ; il passe successivement en revue ceux qui, sous nos yeux, prennent naissance dans les laves actuelles, les fumerolles, les geysers, les sources thermales ou froides, enfin aux dépens des roches sous l'influence des agents atmosphéri- ques, Le deuxième livre est consacré à l’examen des syn- thèses accidentelles, autrement dit des minéraux trou- vés dans les laitiers cristallisés, les produits sublimés des usines, les houillères embrasées, les scories pro- venant d'incendies, les forts vitrifiés, les verres dévi- trifiés, les incrustations des chaudières à vapeur, celles des sources captées, les galeries de mines, les sols remaniés; une part est même faite aux productions minérales d’or igine biologique. Le livre lroisième, de beaucoup le plus important comme étendue (224 pages), débute par un avant-pro- pos historique où Ton remarque la mention des essais informes et incohérents faits en vue de reproduire les pierres par les alchimistes et chimistes antérieurs à notre siècle, Vient ensuite l’exposé méthodique des divers genres de synthèse rationnelle : ce livre est, comme les deux premiers, coupé en trois divisions re- latives à la voie sèche, à la voie mixte et à la voie humide; mais ici, vu la complexité du sujet, chaque division à fourni de nombreux chapitres, suivant que la réaction consiste en une combinaison, une décom- position ou une double décomposition, qu'il y a ou non intervention d’un agent minéralisateur, Nous ne pou- vons ici, bien entendu, entrer dans les détails, sans craindre d'aboutir à une fastidieuse énumération. Di- sons seulement que, grâce au style de l’auteur, à l’em- ploi de nombreuses et étendues citations des mémoires originaux, l'ouvrage peut être lu sans faligue, même par des personnes qui n’ont pas vécu de la vie de labora- toire. Chacun pourra ainsi s'initier à ces procédés de synthèses, souvent hardis, toujours ingénieux et dé- licats, accrus d’un jour à l’autre par l'incessant tra- vail des chercheurs, de nos compatriotes particulière- ment, ainsi que nous nous plaisons à le constater. Deux index alphabétiques, l’un par noms d'auteurs, l’autre par ordre de matières, facilitent la tâche du lecteur, qui voudrait, soit apprécier lPœuvre d’un sa- vant au point de vue qui nous occupe, soit pour une espèce minérale donnée, passer en revue et comparer les modes de synthèses, souvent très différents, dont elle a été l'objet. L. BourGrois,. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 63 83° Sciences naturelles. Nicklès (René), — Recherches géologiques sur les terrains secondaires et tertiaires de la pro- vince d’Alicante et du sud de la province de Valence (Espagne). Thése de la Faculté des Sciences de Paris. Imprimerie L. Danel, à Lille, 1891, Depuis quelques années, la péninsule ibérique est un des champs d’études de prédilection des géologues français. En outre des premiers explorateurs, de Ver- neuil et Colomb,qui en ont dressé la carte géologique ; en outre de Coquand, de MM. Jacquot, Barrois,etc., qui ont étudié diverses régions de l'Espagne et en outre de cette pléiade de savants éminents qui sont allés ré- cemment en Andalousie pour y étudier la constitution géologique du sol et rechercher les causes des tremble- ments de terre qui ont si violemment ébranlé cette ré- gion, nous avons vu dans ces dernières années plusieurs jeunes savants aller chercher en Espagne des sujets de thèses et des sujets d'études nouveaux et intéressants. La thèse de M. René Nicklès, que nous avons au- jourd’hui sous les yeux, est une nouvelle et impor- lante contribution de la science française à la con- naissance géologique de l'Espagne. Elle a pour but de faire connaître la conslilution de cette région peu connue située entre Valence, les environs d’Alicante et le cap de la Nao, c'est-à-dire cette région désignée quelquefois sous le nom de Cordillère Bét ique. Huit mois de recherches ont été nécessaires à M. Ni- cklès pour parvenir à une connaissance suffisamment approfondie de cette contrée très tourmentée, pour la- quelle les documents et mème les cartes topogra- phiques suffisantes font défaut. Les terrains antérieurs à la période secondaire sem- blent manquer dans la région. Le Trias y est large- ment représenté, mais les terraires Jurassiques y sont rares. Dans la province d’Alicante, en particulier, ces derniers terrains présentent le facies alpin. Ce facies se poursuit pendant les périodes suivantes et l'étude des faunes secondaires et tertiaires montre que, depuis le Trias jusqu’à la fin du Crétacé, les cou- rants alpins orientaux ont pénétré jusqu'en Espagne. C’est le terrain crétacé qui est l’objet principal du travail de M. Nicklès, Ce terrain, surtout dans ses étages inférieurs, est remarquablement développé dans la province d° Alicante. Certaines de ses assises, équi- valentes aux couches de Barrème, dans les Alpes fran - caises, contiennent une faune des plus riches en Céphalopodes et l’on y retrouve des formes communes avec le Tyrol, avec le midi de la France, l'Algérie et même l'Amérique méridionale, Quelques-uns des ma- tériaux recueillis dans les marnes néocomiennes de la Querola ont permis de faire figurer les cloisons encore inconnues d’un certain nombres d’Ammonites. Le Gault se montre avec un facies vaseux et à ru- distes analogue à celui que nous lui connaissons dans les Pyrénées. Le Cénomanien existe, également bien ca- ractérisé, mais le Turonien et le Sénonien inférieur ne semblent représentés que par des dépôts sans fossiles, Avecle Sénonien supérieur, le Maëstrichtien et le Garumnien nous voyons apparaitre des sédiments variés dont quelques-uns, composés d'éléments gros- siers el poudinguiformes s, indiquent le voisinage d’un rivage, tandis que d’autres témoignent de l'existence d'anciennes lagunes, comme en Catalogne et en Pro- vence. Ces faits, combinés avec l'absence du terrain tertiaire éocène entre la Catalogne et Ja province d'Alicante rendent probable P hypothè se de l’émersion complète, vers la fin du Crétacé, de tout le territoire compris entre ces deux régions. Les terrains tertiaires, parmi lesquels M. Nicklès a reconnu des lambeaux des étages éocène et miocène, sont relativement peu développés dans le territoire exploré par l’auteur. On y remarque cependant une riche faune d’Echinides que nous connaissons déjà, en grande partie, par les beaux travaux de M. Cotteau. L'important travail stratigraphique de M. Nicklès est complété par une partie paléontologique où sont dé- crits un certain nombre de fossiles intéressants et DOUVEAUX, Il estillustré en outre par plusieurs cartes géolo- giques, par de très jolies vues en héliotypie repré- sentant des coupes naturelles et des accidents géolo- giques, et enfin par des planches de fossiles où sont ligurées les espèces décrites par l’auteur. A. PERON. Sir Daniel Wilson —Therighthand:Left-handness. (La question de la main gauche), in-12 vin, 215 pages, Macmillan and C°, London, 1891. Sir Daniel Wilson est gaucher, et c’est peut-être là ce qui l’a amené à s'occuper d’une question que depuis un certain temps les physiologistes et les psychologues avaient un peu délaissée. Nous nous servons presque exclusivement de notre main droite; les ambidextres sont rares, plus rares encore que les gauchers ; mais l'éducation seule nous a-t-elle donné celte habitude, ou bien existe-t-il chez la majorité des hommes une tendance instinctive à ne se servir que de la main droite pour tous les actes qui demandent de la force ou de l’adresse, tendance à laquelle correspondrait chez les gauchers ia propension inverse? Si c'est une habi- tude acquise, il semble, d’après les recherches de M. Wilson, qu'elle soit acquise depuis bien longtemps, puisque l'examen des outils de silex et des dessins sur corne et sur ivoire de la période paléolithique lui a révélé qu'ils étaient en grande majorité l’œuvre d'hommes accoutumés à se servir de préférence de la main droite ; quelques-uns cependant sont dùs à des gauchers; ces deux catégories d'hommes existaient donc alors comme aujourd'hui. L'étude des langues des peuples non civilisés montre que partout se fait cette distinction très nette entre les deux mains; l’exa- men des procédés de calcul de l'antiquité hébraïque et de l'antiquité classique conduit aux mêmes résultats. Les textes hébraïques, grecs et latins, relatifs aux points cardinaux, l'étude des monuments égy ptiens permettent d'établir que non seulement les Anciens se servaient de préférence d’une de leurs mains, mais que cette main était la main droite. Il semble qu’en présence d’un usage aussi universel et aussi ancien, et auquel cepen- dant il y a eu toujours quelques dérogations, dont l’é- ducation et la coutume n’ont pu triompher, malgré leur tyrannique puissance, il faille renoncer à faire “de l'u- sage prédominant de la main droite une habitude acci- dentellementcontractée par quelquesindividus, habitude qui se serait généralisée par limitation et qu’une tradi- tion,une sorte de dise ipline socialeetpeut-être religieuse, aurait graduellement imposée à tous. Cette théorie ne rend pas compte de l'existence des gauchers et suppose en outre, semble-t-il, que dans les premiers mois de leur vie les enfants se servent indifféremment des deux mains, sans qu'aucune tendance instinctive les pousse à user de l’une plutôt que de l’autre. Il serait très dif- ficile de comprendre comment, si aucune condition or- ganique ne déterminait l’usage prédominant de l’une ou l’autre main, il resterait des gauchers dans une so- ciété où l'éducation tout entière tend à ce que l’enfant, pour tous les actes de sa vie journalière, se serve de sa main droite d’une manière presque exclusive; on sait, par l'étude des coutumes sociales, l'impossibilité pra- Hess qu'il y a pour un non-civilisé à se soustraire à un usage général, et il en est del’enfant comme du sauvage. Des observations systématiques faites sur de très jeunes enfants ont montré que bon nombre d’entre eux, anté- rieurement à toute éducation, se servent instinctive- ment de la main droite, que quelques-uns, malgré les efforts de leurs parents, sont irrésistiblement poussés à se servir de la main gauche, que la très grande majo- rité enfin se sert indifféremment des deux mains, ou n’a du moins qu’une très légère tendance à se servir de préférence de la main droite. Il semble donc bien qu'il existe réellement, chez certaines personnes tout au moins, une prédisposition à se servir surtout de la 64 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX main droite: mais comment peul-on s'expliquer qu’elle existe? La plupart des théories qui ont été soutenues, celle du D' Buchanan, par exemple, qui fait de notre tendance à employer de préférence notre main droite une conséquence des lois mécaniques, qui découlent de la disposition des organes, ont ce grave défaut de ne pas rendre compte de l'existence des cas exceptionnels, mais assez fréquents cependant, où c’est la main gauche qui remplit les fonctions habituellement dévo- lues à la main droite. Les deux côtés du corps ne sont pas symétriques ; la position du foie et le plus grand développement du poumon droit reportent le centre de gravité du corps humain à droite de la ligne médiane ; c’est là, d’après Buchanan, la vraie cause qui détermine l'emploi de la main droite et d’une manière plus géné- rale des membres droits de préférence à celui des membres gauches. Mais il faudrait alors que chez les auchers, il y ait une disposition inverse des viscères, et c’est ce que ne confirment pas les observations. Le D' Buchanan a été ainsi amené à tenir compte d’un autre élément, la hauteur du centre de gravité. Une série de diagrammes qu'il a construits, lui sert à mon- trer que lorsque le centre de gravité est au-dessus de l'axe transversal du corps, il doit y avoir tendance à se servir de la main droite; lorsqu'il est au-dessous, ten- dance à se servir de la main gauche, que, chez les am- bidextres, le centre de gravité doit se trouver sur l’axe. La tendance à se servir d’une main plutôt que de l’autre ne serait pas alors congénitale et se développerait gra- duellement à mesure que l'enfant ferait un plus fré- quent usage de ses membres. Mais les observations re- cueillies par Sir Daniel Wilson vont à l'encontre de celte opinion, ainsi qu'il a déjà été dit. Il faut ajouter que le nombre des gens qui se servent de préférence du pied gauche (pour sauter par exemple), ou de lépaule gauche, est beaucoup plus considérable que celui des vrais gauchers, c’est-à-dire de ceux qui emploient de préférence la main gauche, et que si lusage prédomi- nant du côté droit du corps était dù à des raisons mé- caniques, on ne pourrait s'expliquer ces déviations de la règle formulée par M. Buchanan. Mais l’objection Ja plus forte à cette (héorie, c'est que les viscères peuvent étre transposés ; chez des gens qui ne sont ce- pendant pas gauchers, il existe au moins trois observa- tions relatives à des cas de cette espèce. Il semble donc qu’il faille s'arrêter à lathéorie que Sir D. Wilson a lui- même adoptée, et qu'il faille faire dépendre l'usage pré- dominant de la main droite, du plus grand développe- ment de l'hémisphère gauche. Il faut donc s'attendre à ce que, chez les gauchers, l'hémisphère droit soit au contraire le plus développé des deux, et c’est ce que confirme une autopsie très démonstrative que rapporte Sir D. Wilson. Dans la plupart des cas, la différence de poids entre les deux hémisphères est très faible, aussi n'y a-t-il qu'une très légère tendance chez la majorité des enfants à se servir de préférence de la main droite; et serait-il possible d'apprendre à beaucoup d’entre eux à employer indifféremment les deux mains. Le livre de Sir D. Wilson est, malgré des répétitions et des longueurs, clairement et logiquement composé; c’est une utile contribution à la psychologie physiolo- gique, et la meilleure monographie, à coup sûr, qui ait été faite des gauchers. L. MARILLIER. Héger (D' Paul), — Le Programme de l’Institut Solvay. Conférence donnée à l'Université de Bruxelles. Brochure in-8° de 33 pages. H. Lamertin, éditeur, 33, rue du Marché-au-Bois, Bruxelles, 1891. Bruxelles possède depuis deux ans un grand Institut consacré à la bio-physique et dù à la libéralité de M. Solvay, l'inventeur du procédé industriel qui porte son nom et l’a rendu populaire dans le monde entier. Cet Institut, installé provisoirement dans les locaux de l'Université de Bruxelles, comprend un personnel d’in- génieurs et de médecins placé sous la direction de M. le D° Héger, professeur de physiologie à l’Université de Bruxelles. Dans une brochure pleine d’apercus originaux, M. Héger expose le programme de l'Institut Solvay, tel que le généreux fondateur a voulu le tracer, M. Solvay a imaginé, par voie déductive, une théorie complète du rôle de l'électricité dans les phénomènes de la vie. On peut la résumer dans les propositions suivantes, ex- traites de la brochure de M. Héger : L'homme et les animaux sont des moteurs. Le mo- teur vivant est capable de transformer en travail méca- nique 50, 60 et jusqu'à 90 0/, du calorique de com- bustion des aliments, Une proportion aussi favorable entre l'énergie consommée par le moteur ef le travail extérieur n’est réalisée dans l’industrie que par les moteurs électriques : done, l'homme ne peut être qu’un moteur électrique. D'ailleurs, la science positive ne connaît que les moteurs hydrauliques, les moteurs ther- miques proprement dits et les moteurs électriques. L'homme n'étant assimilable ni au moulin à eau, ni à la machine à feu, ne peutêtre qu'un moteur électrique. Cette déduction a la certitude la plus absolue que puisse donner la science positive actuelle. L’électricité animale doit avoir sa source principale dans les phénomènes d’oxydation qui s’accomplissent dans les museles, Les muscles constituent donc le foyer le plus important de la production de l'électricité ani- male. Dans la pile vivante, le muscle oxydé, le tissu doit représenter l'élément négatif, tandis que le liquide ozydant (lymphe ou plasma dans lequel est baigné le tissu) corres- pond à l'élément positif. Dans tout moteur électrique, il y a des fils qui transportent l'électricité de la pile ou de la dynamo aux lieux de consommation de l'énergie électrique : dans l'organisme, les nerfs jouent ce rôle de conducteurs et servent à transporter l’élec- tricité produite dans les muscles et à la distribuer à tous les organes, et notamment au système nerveux. Le muscle n’est pas seulement un organe mécanique ou moteur capable de transformer l'énergie électrique en travail : il est en même temps PRODUGTEUR D'ÉNERGIE, ef c'est lui qui la fournit aux nerfs. Le système nerveux, au contraire, n'est pas ou presque pas générateur d'énergie ; il est formé de conducteurs et de répartiteurs de l'électricité produite dans les muscles. Telle est, esquissée à grands traits et en laissant de côté les développements secondaires, la conception nouvelle de l’organisme animal à laquelle M. Solvay a été conduit de déduction en déduction, et que M. Héger et les autres collaborateurs de M. Solvay ont acceptée comme canevas et comme programme de leurs travaux. On peut contester le point de départ de tout le rai- sonnement, notamment l’idée que l'animal doit néces- sairement être construit sur le type de l’un des mo- teurs réalisés jusqu'à présent par l’industrie humaine, notamment aussi l'affirmation que l’animal transforme en travail 50,60 ou 90 ‘/, de l'énergie provenant de la combustion organique. On critiquera peut-être aussi l'introduction en cette matière de la méthode déduc- tive, pour laquelle les physiologistes n'ont plus une grande vénération. Mais, quelle que soit l'opinion que l'on professe à l'égard du programme de lInstitut Solvay, on ne peut qu'applaudir à l'initiative généreuse de son fondateur. De tels exemples sont trop rares et trop méritoires pour qu’on ne les encourage pas de toutes facons. Au reste, l’Institut Solvay possède un outillage scien- tifique de premier ordre, mis libéralement à la dispo- sition des chercheurs. Ceux-ci, n’en doutons pas, sau- ront s’en servir en toute liberté. LÉON FREDERICQ. Locard (Arnould). — Les Coquilles marines des côtes de France. Grand in-8° de 400 pages avec 348 fig. J.-B. Baillière et fils, Paris, 1892. Caractères des familles et des genres; description, suffisamment détaillée, de toutes les espèces. Les principales sont représentées à petite échelle, — La disposition typographique du volume permet de le consulter rapidement. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 65 4° Sciences médicales. Trabut (L.), Professeur à l'Ecole de pharmacie d’Al- ger. — Précis de Botanique médicale. 1 vol. in-8° (Prix, 8 francs). Masson, Paris, 1891, Le livre de M. Trabut est un volume de 700 pages, renfermant plus de 800 figures; le texte est clair, pré- cis, bref, les figures sont (rès soignées; il rendra de réels services aux étudiants en médecine et en phar- macie, il est assuré du SU Dans la première parte, la plus importante, l’auteur traite de la Botanique spéciale, en suivant constam- ment le même ordre : en étudiant un grand groupe, il donne un tableau des caractères distinctifs des familles qui le composent; en étudiant une famille, il établit une clef des genres, et pour certains genres, une clef des espèces; puis, chaque espèce est “décrite plus ou moins longuement suivant son importance médicale, Les Phanérogames occupent naturellement une grande place dans ce livre, comme lexige leur emploi en ma- tière médicale. Mais les deux chapitres qui, à notre avis, sont les plus remarquables, se rapportent aux Champignons et aux Bactéries; M. Trabut les à écrits avec un soin teut particulier en tenant compte des Mé- moires les plus récents. C’est ainsi que le lecteur est mis au courant des travaux de Linossier et Roux sur le champignon du Muguet, de Hansen sur les Levüres, de Winogradsky sur la fermentation nitrique et les Sulfo- bactéries, des résultats des nombreux auteurs qui ont étudié les bactéries pathogènes, et de la théorie de Metchnikoff sur l’action des phagocytes. II y à joint comme annexe l'étude des Protistes dont la connais- sance est intéressante pour le médecin et le pharma cien, tels que les Grégarines, les Coccidies, les Micro- sporidies, etc., d’après Schneider, Balbiani, Laveran, Danilewsky, etc. * La deuxième partie, ou Botanique générale, dont une bonne partie doit être connue du lecteur pour com- prendre la première, est fort bien exposée. L'auteur, comme dans la partie précédente, a soigneusement mentionné les meilleurs travaux récents ; on y trouve, par exemple, résumé ce que nous ont appris dernière- ment : Guignard, sur les localisations des principes ac- tifs chez le “Laurier- -cerise etchez les Crucifères ; Stras- burger et Guignard sur la division cellulaire et les phénomènes de la fécondation, etc. En résumé, le livre de M. Trabut est bien fait, bien au courant de la science, et fait honneur à son auteur. C. SAUVAGEAU. Lagrange (D' Fernand). — De l'exercice chez les adultes. — in-12, 367 p. (3 fr. 50). F. Alcan, 108, bou- levard Saint-Germain. Paris, 1891. Comme Hygiène de l'exercice chez les enfants et les jeunes gens, dont la Revue a précédemment rendu compte !, ce nouveau livre du D' Lagrange est une ap- plication des théories et des observations contenues dans sa Physiologie des exercices du corps. Comme ses deux aînés, c’est aux observations et non aux théories qu'il contient que ce livre doit sa valeur, valeur réelle, car M. Lagrange est un observateur consciencieux, qui a le mérite d’avoir pratiqué à peu près tous les genres de sport: il a noté avec soin les effets objectifs des di- vers exercices, et les modifications de l'organisme di- rectement saisissables, Aussi quand il passe à la pra- tique, on peut avoir confiance en lui pour déterminer quel est l'exercice qui essouffle le plus ou pour choisir les meilleures méthodes d'entrainement, Comme il est médecin en même temps que sportman, il a su aussi fixer les indications et les contre-indications de chaque exercice suivant les tempéraments et les diathéses. Cest là la partie la plus intéressante de son nouveau livre, à cause de cette double compétence. Mais il a tenu à toujours expliquer ses faits; souvent cette explication est une vulgarisation agréable des 1 Voyez la Revue du 15 avril 1890, t. I, page 216. données classiques de l'anatomie et de la physiologie; malheureusement, d’autres fois, M. Lagrange fournit des théories personnelles contestables. Il croit, par exemple, que le tireur dont le poids diminue de 1500 grammes en une séance d'escrime a brülé ce poids énorme de ses tissus par son travail; il ne songe point à tenir compte de l’eau évaporée, Nous avons déjà fait à cette place quelques objec- tions à la théorie ee réserves azolées dont la destruc- tion constituerait l’acte essentiel de l’entrainement, théorie créée pour expliquer l’intéressante observation de Pauteur sur la relation entre la courbature et les sédiments uratiques de lurine. M. Lagrange fait au- jourd'hui cette tromphante réponse : « Ne sait- on pas que l’homme, après plusieurs jours d’abstinence com- plète, continue à éliminer un produit azoté qui s’ap- pelle l’urée? Où prend-il Pazote nécessaire à faire de l’'urée, sinon dans la substance même de son corps? Il y a donc bien dans l’économie humaine des matériaux azotés qui se brülent en dehors de tout apport alimen- faire, Et ce sont ces matériaux — qu'ils proviennent ou nom des muscles — que nous persistons à appeler des réserves azotées, » En dernière analyse, ce serait donc la destruction des muscles qui constituerait l’entraine- ment? Nous ne pensons pas que M. Lagrange aille jus- qu'à cette conséquence paradoxale, mais logique, de ses idées. En tout cas, il annonce des expériences sur ce sujet, avec analyse s des urines. Nous serons heureux de voir apporter de nouveaux faits pour l’étude de cette question, où les matériaux sont pratiquement très dif- ficiles à réunir, L. Lapicour. -J. Gorgon. — Les traitements de la tuberculose d'après l’état actuel de la science. Un vol. in-12, (3 fr. 50) G. Masson éditeur, Paris, 1891, Hermann WWeber — Des climats et des sta- tions climatiques. Traduit de l'anglais par le D, P, Rodet. Un vol. in-8. Societé d'éditions scientifi ques, k, rue Antoine Dubois, Paris, 1891, Depuis la découverte de Koch, annoncée avec tant de fracas, les traitements préconisés contre la tuberculose ne se comptent plus. Dans le livre de M. Gorgon nous ne trouvons pas l’exposé de ces traitements nouveaux ; tout au contraire ses premières pages sont consacrées presque exclusivement aux méthodes anciennes, el surtout, Si nous pouvons nous exprimer ainsi, au trai- tement géographique. L'auteur s'attache en effet à étu- dier les conditions climatériques qui sont soupconnées exercer une influence sur la marche de l’affection, On a beaucoup écrit sur l’action de la température am- biante, de l’altitude, des vents; les médecins qui ont publié des mémoires sur ce sujet, trop souvent inté- ressés par leur situation dans des stations thermales ou hivernales, ont encore invoqué des considérations phy- siologiques parfois étranges, On est surpris de voir M. Gorgon nn une vive lumière, un ciel bleu et limpide, parce que la lumière solaire exerce une ac- tion destructive sur le bacille de la tuberculose ! De ce que le nombre des globules rouges est plus considé- rable sur les hauts plateaux qu'au bord de la mer, l’auteur déduit que les altitudes élevées agissent heu- reusement sur l'organisme des phtisiques en détermi- nant une suractivité de la fonction hématopoïétique. Avant d'admettre cette hypothèse, il conviendrait ce- pendant d’ examiner comment se fait cette mulliplica- lion des hématies chez les phtisiques et si elle peut réellement contribuer à améliorer leur état. Le livre de M. Hermann Weber est écrit dans le mème esprit. L'auteur préconise, pour les phtisiques, les stations élevées, la plus grande mobilité des atomes de l’air raréfié suppléant par la promptitude de leur action à la réduction de leur nombre !! N'insistons pas. On trouvera dans ces deux ouvrages une nomen- clature complète de toutes les stations du globe où les médecins envoient les tuberculeux, avec quelques renseignements sur les indications et contre-indications pour chacune d'elles. A0! 66 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 4 ganvier 1892. 4° SGIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Poincaré : Sur un mode anormal de propagation des ondes. — M, Her- mite lit une notice sur M. L. Kronecker, correspon- dant pour la section de géométrie, décédé à Berlin le 29 décembre 1891. 20 SCIENCES PHYSIQUES. M. Gouy a repris la ques- tion des différences de potentiel au contact des mé- taux ; il compare entre elles et avec celle du mercure les tensions superficielles de divers amalgames li- quides, plus ou moins polarisés, par la méthode suivante : ces amalgames, à 41/1000 en général, sont disposés dans un électromètre capillaire dont l'acide sulfurique communique par un siphon avec un autre vase contenant également de l’eau aci- dulée et du mercure ; ce mercure et la colonne de Pé- lectromètre capillaire sont d'autre part reliés à un élec- tromètre à quadrants ; le ménisque de la pointe effilée est amené toujours au même point, en faisant varier la hauteur de la colonne. On note cette hauteur et la différence apparente du potentiel à, indiquée par l'électromètre à quadrants. Les expériences ont montré que pour une même valeur de à, les hauteurs des co- lonnes, c’est-à-dire les tensions superficielles, du mer- cure et des amalgames sont sensiblement les mêmes, M. Gouy déduit les conséquences de cette constatation. — M. Th. Moureaux calcule la nature absolue des élé- ments magnétiques au 1° janvier 1892 pour le parc Saint-Maur et Perpignan. — M. Moureaux, ayant signalé récemment la coïncidence de quelques coups de foudre au voisinage de l'Observatoire avec certains pe- tits mouvements des barreaux des magnétomètres, M. Em.Marchand a recherché, dans les tracés de POb- servatoire de Lyon, la marque de tels mouvements coïncidantavec des coups de foudre notés dans le jour- nal de l'Observatoire ; il a obtenu un relevé assez nom- breux de faits de ce genre. M.Maquenne, en chauf- fant quelques instants au rouge vif dans une atmos- phère d’azote pur et sec des amalgames riches de ba- ryum, de strontium et de calcium, à obtenu les azo- tures de ces métaux. — M. Konovaloff a reconnu que l'on peut nitrer directement l’hexane et l’octane nor- maux par l'acide azotique faible, comme il l'avait montré dans une précédente communication pour le nononaphtène. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Gautier et R. Drouin, continuant la discussion avec MM. Th. Schlæsing fils et Laurent, maintiennent leur réclama- tion de priorité relativement au rôle actif des algues sur l'enrichissement des terres en azote ; ils maintien- nent aussi leurs réserves sur le point de Ja fixation d'azote libre. — M. S. Jourdain, reprenant l'étude du développement des Sugitta, a reconnu inexacte la con- ception de Kowalewski et de Bütschli, à savoir que la cavité archentérique, apparue au stade gastrula, donne naissance à la fois à la cavité générale et autube diges- tif. Chez les sagitta, comme partout, celte cavité donne naissance au tube digestif seul, etla cavité mésoblas- tique se forme par délamination entre lépiblaste et l'hypoblaste. — M. A. Delebecque a exploré le lac du Bourget et les lacs les plus importants des Alpes etdu Jura ; il donne les résultats des sondages. Il à étudié aussi la marche des températures dans la profondeur, et il a reconnu que la forme et l'orientation des lacs exercent une influence considérable sur cet ordre de phénomènes, Mémoires présentés, — M. C. Canovetti adresse un mémoire intitulé : Evaluation du débit d'un déversoir sans contraction latérale au moyen de lasurface supé- rieure et inférieure de la nappe. — M. F. Fromholt adresse une note intitulée : De la perforation des roches, du sciage, du moulurage et du tournage des pierres dures à l’aide du diamant. Seance du 11 janvier 1891. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. À. Markoff : Sur la série hypergéométrique. — M. G. Kœænigs : Sur les réseaux plans à invariants égaux et sur les lignes asymptotiques. — M. V. Jamet : Sur les séries à termes positifs. — M. H. Resal: Sur les résistances et les faibles déformations des ressorts en hélice. — M. Bou- quet de la Grye en présentant son ouvrage intitulé : Paris port de mer, expose brièvement le plan de cet ouvrage où la question est traitée tant au point de vue technique qu’au point de vue économique. — MM. C. Fabre et Andoyer ont essayé comparativement, sur la lune, pendant son éclipse du 15 novembre dernier, diverses espèces de plaques photographiques ortho- chromatiques, Les plaques Lumière, ainsi que des plaques au collodiobromure préparées par les auteurs mêmes, se sont montrées peu sensibles aux radiations rouges et jaunes émises par là partie éclipsée ; le collo- diobromure additionné d’éosine ou de cyanine a donné de meilleurs résultats. 2 SCIENCES PHYSIQUES. — M, H. Le Chatelier reprend la théorie du regel au point de vue suivant: dans une masse pulvérulente, comme la neige, comprimée par le poids des couches supérieures, les parties solides et les parties liquides, la glace et l’eau, ne supportent pas la même pression. M. Le Chatelier montre com- ment on peut appliquer à un tel système le principe de Carnot et tirer de ce principe une théorie rendant suffisamment compte des faits. La théorie s'applique à des corps quelconques et peut expliquer le durcisse- ment, dans le sol et à l'abri de toute évaporation, des bancs de sel gemme, de gypse, de carbonate de chaux, ete, Expérimentalement, l’auteur a obtenu des blocs compacts de divers sels très solubles maintenus plusieurs jours sous pression au contact de leur solu- tion saturée, — M. V. Chabaud présente un nouveau modèle de thermomètre à renversement destiné à l'exploration des températures sous-marines ; le dis- positif nouveau à pour but d'éviter une rupture inté- rieure qui se produisait très fréquemment dans l’ancien modèle au moment du renversement et faussait les indications de l'instrument. — M. H. Gilbault a cher- ché à déterminer avec précision, dans l’hygromètre à condensation, la température de la surface sur laquelle se produit le dépôt de rosée ; dans les appareils connus, cette température n'est mesurée que médiatement. M. Gilbault détermine la température de la couche de platine où se fait la condensation dans son appareil, au moyen de la variation de la résistance électrique de cette lame de platine. — M. E. Branly avait montré antérieurement que la déperdition de l'électricité posi- tive d’un plateau métallique, illuminé par des rayons très réfrangibles.est très sensible et peut même devenir presque égale à la déperdition de l’électricité négative. Dans ces expériences, l’éclairage était donné par la décharge d'une bouteille de Leyde reliée aux deux pôles d’une bobine de Ruhmkorff à interrupteur rapide. Il à repris ces expériences avec l’arc voltaique comme source lumineuse ; dans ces conditions, la déperdition positive est petite, mais nullement négligeable par rapport à la déperlition négative. M. Branly s’est servi pour ces recherches d'un électroscope particulier qu'il ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 67 décrit; il signale, à propos de la construction de cet appareil, que le soufre et la paraffine sont de bons isolants, tandis que la gomme laque ne convient pas pour l'étude de la déperdition par l'air, — A propos de la note récente de M. Le Châtelier sur les borates métalliques, M. Ditte rappelle que dans des recherches communiquées à l'Académie en 1873 et 1875, il avait préparé le borate neutre pur par un procédé peu difré- rent de celui de M. Le Châtelier ; il maintient que les cristaux qu'il à analysés étaient parfaitement purs. — M. G. Rousseau, calcinant du manganate de potasse au contact d'un fondant alcalin, a obtenu une série de manganites hydratés analogues aux manganites de soude qu'il a fait récemment connaître. — M, J. Meu- nier, réduisant par le zinc et l’acide acétique l’&«-hexa- chlorure de benzène, a obtenu comme produit unique de réduction du benzène pur, — M. P. Petit a étudié la marche de transformation de l’amidon en dextrine par le procédé de Payen, c’est-à-dire le chauffage en présence d’une petite quantité d'acide nitrique ; on obtient une proportion de glucose d'autant plus faible qu'on met moins d'acide et qu'on chauffe plus long- temps. — M. A. Arnaud a extrait de la graine du Tariri, Simarubée du Guatémala, une matière grasse nouvelle ; c’est le triglycéride d’un acide gras parti- culier, répondant à la formule CIS H#? 02, appartenant par conséquent à la série non saturée C* H?-10? ; M. Arnaud a pu obtenir le dérivé bromé d’addition CISH#Br'02, Il propose pour cet acide gras le nom d'acide taririque. — MM. Berthelot et G. André ont remarqué que l'acide humique, préparé par l’action de l'acide chlorhydrique sur le sucre ou l’amidon, s’oxyde spontanément à la lumière; cette oxydation dégage de l'acide carbonique ; l'acide brun extrait de la terre végétale par la potasse à froid s’oxyde de même. Les microbes ne jouent aucun rôle dans le phé- nomène. — MM. Berthelot et André, qui avaient anté- rieurement signalé dans la terre végétale l'existence d’une quantité notable de soufre à l’état de combinai- sons organiques, ont fait de nouvelles recherches sur ce soufre organique ; le rapport avec le soufre à l’état e ; de sulfate est très variable d’une terre à l’autre ; ces composés sulfurés sont très stables et ne sont oxydés qu'en partie par le chlore gazeux, même à chaud, La détermination du rapport entre le carbone, l'azote et le soufre organiques, tant dans la terre que dans les végétaux, donne lieu à des considérations intéres- santes, — M. P, Pichard a étudié l'influence, dans les terres nues, des proportions d'argile et d'azote orga- nique sur la fixation d'azote atmosphérique, sur la conservation de l'azote et sur la nitrification, 3° SCIENCES NATURELLES. — M. G. Pouchet, en prali- quant des pêches au filet fin dans un détroit des îles Féroë balayé par des courants rapides, a trouvé cons- tamment en abondance des algues jaunätres, qui don- nent aux eaux de la mer leur couleur verte. Parmi ces algues, il s’en trouve une jusqu'ici non décrite, que M. Pouchet avait déjà signalée en 1882 sur la côte de Laponie. M. Hariot lui a donné le nom de Tetraspora Poucheti. — M. A. Chatin a fait l'étude chimique des Terfäs ou Kamés d'Afrique et d'Asie, ainsi que du sol dans lequel poussent ces champignons; la terre des terfazières, bien que d'aspect très différent de la terre des truffières, contient à peu près autant de chaux, d'azote et d'acide phosphorique, mais moins de polasse que celle-ci. La comparaison des Terfàs et des truffes montre que la proportion d'azote est sensiblement la même, mais que les premiers renferment moins d'acide phosphorique et de potasse., — M. A. Pomel a observé dans le sud oranais le Sciurus getulus où Ecureuil de Barbarie ; il a pu vérifier l’exactitude de la description de Gervais, faite sur des exemplaires provenant du Maroc. — M. J. Lajard a reconnu que la langue sifflée employée aux Canaries, principalement à l'ile de la Gomère, n’est autre chose que l'espagnol, à l’articula- tion duquel on superpose un sifflement. — M. J. Seunes à pu déterminer l’âge, très mal connu jusqu'ici, des calcaires qui dominent la vallée d’Aspe (Pyrénées) c’est du Turonien, avec Hippurites, etc., reposant en discordance sur du terrain primaire. Mémoires présentés. — M. Duponchel adresse une nouvelle lettre relative à la circulation des vents à la surface du globe, — MM. L. Brune et L. Benet adres- sent la description et le dessin d’un appareil destiné à prévenir les collisions sur les voies ferrées. «L. LAPICQUE, ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 22 décembre 1891, L'Académie procède au renouvellement de son bureau pour l’année 1892. — M. Villemin est proclamé vice- président pour 1892. — M Cadet de Gassicourt est élu secrétaire annuel. — MM. Lancereaux et Leblanc sont élus membres du Conseil pour 1892. — Panas : Rapport sur un mémoire de M, le D' Dransart concer- nant le traitement des granulations par les injections sous-conjonctivales de sublimé. Séance du 29 décembre 1891. M. le Président annonce à l’Académie la mort de M. Moutard-Martin, ancien président. Selon l’usage, la séance est levée en signe de deuil. Séance du 5 janvier 1892, M. le Président annonce à l’Académie le nouveau malheur qui vient de l’atteindre en la personne de M. Richet, ancien président (voir à la page To la no- tice nécrologique sur ce chirurgien). Après l'installa- tion du Bureau pour 1892, M. Regnault, président pour 1892. lève la séance en signe de deuil. Séance du 12 janvier 1892. M.F. Arnould (de Lille): Epidémie de fièvre typhoide, en 1891, sur les troupes de Landrecies, Maubeuge et Avesnes. De l’étude à laquelle s’est livré l’auteur, il résulte que, dans cette épidémie englobant les trois places dont il s’agit, le rôle de l’eau, comme véhicule du contage, a été incertain, mais qu'en revanche, le rôle de l’homme dans la diffusion épidémique, par contagion directe ou indirecte, a été capital. La pro- phylaxie, qui s’est adressée aux locaux et aux objets à l'usage des groupes infectés, a été seule suivie de l'extinction de l'épidémie, —M. À. Robin: De la calci- fication gypseuse des ganglions lymphatiques (Adéno- gypsose où maladie des stucateurs), L'analyse chimique des calcifications ganglionnaires du malade donna les résultats suivants pour 100 grammes de matière : 35 gr, 25 de matières organiques, ## gr. 78 de phos- phate de chaux et 19 gr. 98 de sulfate de chaux. Il s'agissait donc d’une pneumoconiose spéciale non encore décrite, qui frapperait les stucateurs, et due à l'absorption respiratoire et digestive du plâtre réduit en fine poussière. Cette communication donne lieu à une discussion entre l’auteuretM. Ollivier. — M.Char- pentier : Recherches expérimentales sur un cas de néphrite infectieuse puerpérale. L'auteur rappelle sa communication antérieure concernant une malade qui avait présenté une néphriteinfectieuse, comme accident puerpéral tardif. De l'étude de l’auteur il résulte qu’il yaeu néphrite, puis urémie due à la rétention des produits toxiques de l'urine. Les phénomènes clini- ques présentés par la malade ont été reproduits expérimentalement chez les animaux, fait prouvant la toxicité des urines. — M. Gayet (de Lyon): Un essai de restauration osseuse de la face. Ce cas se rapporte à un enfoncement de l’os malaire. Des trous, pratiqués le long des bords latéraux de l'os et réunis ensuite, permirent de soulever le fragment osseux qui fut main- tenu dans cette position à l’aide de clous de platine bicoudés. La guérison fut obtenue facilement, 68 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 9 janvier 1892. M. Guignard fait les plus expresses réserves sur les conclusions de la communication de M. Fayod à la séance précédente (pénétration des poudres insolubles à travers les membranes cellulaires, démonstration d’une structure spiralée du protoplasma), — M. A. Giard fait remarquer que le champignon"‘parasite des acridiens signalé-récemment par M. Brongmiart ne peut être un Botrytis, comme le croit cet auteur, ni même une Isariée; c’est probablement le Lachnidium accri- diorum (Giard). M. Brongniart donne comme nouvelles des observations sur la couleur des criquets; ces faits sont connus depuis longtemps. — M. Pilliet a fait l’é- tude histologique des érosions hémorragiques de la muqueuse de l'estomac, principalement des premières phases de cette lésion, et des diverses évolutions qw’elle peut subir. — MM. Rudet et Pourrat ontfait des pneu- mothorax expérimentaux ; ils ont d’abord constaté que l'introduction dans la cavité pleurale d’air privé de germes ne donne lieu à aucune réaction inflamma- toire ; cet air est résorbé lentement, une partie de loxy- sène est remplacée par de l'acide carbonique ; les au- teurs étudient ensuite les troubles respiratoires et cir- culatoires qui sont la conséquence d’une communica- tion plus ou moins large de la cavité pleurale avec Pex- térieur, — M. Thélohan a observé plusieurs Coccidies nouvelles parasites de poissons; il décrit chezces para- sites des formations de spores particulières. — M. Ret- terer répond à l’ensemble des attaques dirigées par M. Stôhr contre ses travaux sur l’origine et l’évolution des amygdales chez les mammifères, Après avoir montré que ses procédéselsa méthode ne méritent pas les reproches formulés par M. Stôhr, il fait remarquer que les conclusions de cet auteur, appuyées d’ailleurs sur des recherches insuffisantes, ont pour point de dé- part une erreur générale, aujourd’huireconnue, à sa- voir la confusion entre des leucocytes émigrés et des cellules épithéliales de forme particulière. Enfin il in- dique une méthode simple pour vérifier sur le cobaye les différents stades de l’évolution du tissu angiothélial reconnu par lui sur des embryons de divers mammi- fères. — M. À. Borrel décrit un mode de formation cellulaire intranueléaire pouvant éveiller à tort l’idée de parasites dans l’épithélioma. Séance du 16 janvier. M. Féré à délerminé la dose toxique des bromures de cobalt, de chrome, et d'aluminium. — M. Féré rap- porte avoir observé plusieurs fois chez des épileptiques des plaques de pelade apparaissant très rapidement, et guérissant spontanément assez vite. — M. Dewevre a constaté que chez la grenouille en hibernation, le glyco- gène du foie disparaît rapidement; au début de l’hi- bernation, les muscles renferment deux fois plus de glycogène qu’en été; ce glycogène disparait peu à peu. — MM. Achard et Hartmann, dans un cas de fièvre uréthrale type, ont trouvé dans l'urine du malade, puisée asepliquement dans la vessie, le Bacillus Coli communis à l’étatde pureté, — M. H. Surmont aétudié la toxicité urinaire dans les maladies du foie ; ila re- connu que celte toxicité est notablement augmentée toutes fois que le parenchyme hépatique est altéré; il n'ya pas de rapport entre l’ictère et la toxicité uri- naire., — M, Et. Jourdan a observédans la cavité péri- tonéale des Sipunculus nudlus des cellules endothéliales portant des cils vibratils ; à propos de ce fait, il exa- mine les rapports des endothéliums et des épithéliums au point de vue de l'anatomie générale, — M. A. Giard, à propos d'un turbot pêché à Wimereux, qui avait conservé partiellement la symétrie bilatérale, examine au point de vue évolutionniste la déformation des Pleu- ronectes et les anomalies de cette déformation, — M. G. Pouchet : Sur une algue pélagique nouvelle. (Voir C. R. 11 janv. 1892). — M. G. Pouchet rapporte que dans le voisinage d’une pêcherie de baleines, en Islande, à l'endroit du rivage où sont reléguées les carcasses des cétacés dépecés, les asticots sont si nom- breux, qu’ils rongent la côte voisine en allant s’y en- fouir pour la métamorphose etqu'ils ont formé comme une moraine en faisant rouler les galets, — M, M. Fren- kel décrit le tissu conjonctif du lobule hépatique de divers mammifères, tel qu’il l’a obtenu en enlevant sur les coupes les cellules hépatiques soit par l'agitation dans l’eau, soit par le pinceau, L. LAPICQUE. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 15 janviér 1892 M. Friedel, président sortant, résume les travaux de l’année 1891. Il rappelle que la Société de physique a failli prendre naissance autrefois au sein de la Société chimique. Würtz était d'avis qu'on püt (raiter devant la Société des sujets de physique ; une faible majorité re- poussa sa proposition, Peut-être vaut-il mieux, ajoute M. Friedel, que la Société de physique ait été organisée par une initiative tout à fait indépendante, pour bien marquer qu'il faut voir dans les deux sciences voisines plutôt des voies marchant vers un même but que des branches divergentes issues d’un même tronc. — M. Violle, vice-président, devient président, — M. Lipp- mann est élu vice-président. M.Carvallo développe la démonstration du théorème relatif aux fonctions de machines, qu'il a communiqué précédemment à la Société mathématique !. Le théo- rème, dont on trouvera l'énoncé, dansla Revue, à l’en- droit cité, s'applique à deux machines de même type, c'est-à-dire dans lesquelles les équations ont même forme et ne diffèrent que parlesvaleurs des coefficients caractéristiques, supposés au nombre de trois au plus. On suppose les machines sans fer : pour que le fhéo- rème fût applicable à des machines à induit en fer, il faudrait supposer la perméabilité constante. Pour deux pareilles machines, on pourra rendre les équatio ns identiques par de simples changements des trois unités fondamentales qui rendent les valeurs numériques des trois coefficients de l’une identiques aux valeurs numé- riques des coefficients de l’autre; et le changement d’u- nités qui amènera ce résultat est toujours possible, à moins qu'il n'yait entre lestrois coefficients, considérés comme fonctions des unités fondamentales (ces fone- lions étantreprésentées par les formules de dimension), une relation identique. — M. Hospitalier rend compte des principalesnouveautés qu'il avues à l'exposition de Francfort, La grande innovation est emploi des champs tournants, et spécialement des courants {riphasés. Ces courants, décalés comme leur nom Pindique de £ de période l’un par rapport à l’autre, ont la propriété d’a- voir constamment unesomme algébrique nulle ; de sorte qu'on peut les conduire avec trois fils seulement, chaque fil servant de fil de retour au système des deux autres. On peut grouper ces (rois fils en friangle ou en étoile. Dans le premier cas, ils aboutissent aux trois sommets d’un triangle de fil conducteur, et les trois côtés de ce triangle sont successivement parcourus par le courant. Si la fréquence est faible, on peut voir la lueur rouge produite par le passage du courant dans le fil se déplacer et faire le tour du triangle : c’est l'expérience d’Ayrton ?, En étoile, les trois fils abou- tissent à un même point; on peut les terminer partrois filaments de charbon concourant en un point, on a ainsi une lampe Edison à trois brins, M. Hospitalier fait l'expérience avec trois lampes ordinaires placées sur le trajet de trois fils, qui vont ensuite se réunir en ce point. Il décrit une machine qui a été exposée à Franc- lort et qui peut servir à volonté aux trois transforma- tions de travail mécanique en courant continu ou bien en courants triphasés, el aux trois transformations inverses. 1 Voir le compte rendu des séances des 2 et 16 dé- cembre 1891 dans la Revue du 30 décembre, t. Il, p. 835. ? Revue générale des Sciences, t. II, p. 837. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 69 11 suffit d'adapter à un anneau Gramme trois bagues col- lectrices reliées à trois points de l’anneau à 120°, Des ma- chines analogues produisent les mêmes transformations avec des courants à deux phases seulement, Sur les expé- riences de force, la commission ne s’est pas encore pro- noncée : on ne peut donc porter encore un jugement définitif. A Lauffen, on produit directement les courants triphasés à grand débit et à basse tension : 50 volts. On les transforme au moyen de trois transformateurs plongés dans du pétrole pour assurer un bon isole- ment, et dont le coefficient de transformation est 160, ce qui donne 8,000 volts; trois fils amènent les trois courants à Francfort, où on les retransforme pour les utiliser à volonté, Le grand avantage des moteurs à courants polyphasés est qu'ils n'ont pas de balais, pas de collecteurs ; par suite pas d’étincelle et pas de dan- ger, M. Hospitalier a vu encore l’arc voltaique éclatant entre deux charbons à une tension de 20.000 volts. L'arc peut atteindre 120 de longueur; il est courbe, arce que l'air chaud qui l’entoure tend à monter et ’infléchit vers le haut. À Francfort, on n'a pas encore pris de décision définitive relativement à ia nomencla- ture électro-technique proposée par M. Hospitalier ; mais il en a été sérieusement question, et l’on peut es- pérer que le Congrès des électriciens, qui se réunira à l'exposition de Chicago, sanctionnera l’adoption de cette nomenclature qui introduira dans le langage une importante simplification. — M. Guillaume donne communication d’une lettre que lui a adressée M. Zi- loff, de Varsovie; dans son laboratoire, M. Ber- nacki a répété avec succès les expériences de M. Le cher; il les a modifiées en bifurquant chacun des deux fils rectilignes parallèles; le double fil dérivé pouvant rejoindre plus loin le système des deux fils principaux ; il a étudié l'effet produit sur un tube de Geissler placé au bout des deux fils parallèles, lorsqu'on déplace un ou plusieurs ponts conducteurs sur les fils principaux ou sur les fils dérivés, — M, Guillaume parle ensuite du rendement photogénique des foyers lumineux. Une faible partie de l'énergie calorifique dépensée est trans- formée en énergie vibratoire de l’éther : le rapport de cette énergie vibratoire totale à l'énergie dépensée pour- rait s'appeler le rendement organique de la source; mais ensuite il y a encore un déchet considérable, car de cette énergie vibraloire de l’éther, une partie seulement produit un effet appréciable à notre œil : la fraction utilisée est le rendement photogénique. On à souvent donné des évaluations grossièrement inexactes de ce rendement photogénique, parce qu'on l'a évalué en se fondant sur labsorplion des radiations invisibles par l’eau : or il est bien vrai que la majeure partie de l’é- nergie invisible est absorbée par l’eau; mais il reste encore une fraction de cette énergie invisible qui est environ le + de l’énergie totale et qui est de l'ordre de diæ fois l'énergie lumineuse visible; aussi au lieu de trou- ver des nombres de l’ordre de +, on à trouvé des nombres de l’ordre de £. On obtient la valeur exacte en considérant les courbes donnant l'énergie des radia- tions en fonction de la longueur d'onde et comparant l'aire limitée par la courbe entre les ordonnées cor- respondant aux rayons visibles extrèmes, à l'aire totale. MM. Desains et Curie avaient tracé ces courbes pour quelques sources jusqu'à des radiations voisines des sept microns. M. Langley a reculé de beau- coup cette limite et a porté cette étude à une grande perfection. Encore ce rendement photogénique, défini comme précédemment, n’a-t-il pas une signification correspondant bien à une réalité. Il faudrait multiplier l'intensité de chaque radiation par un coefficient repré- sentant la sensibilité de l'œil pour cette radiation, et alors le produit dépendrait de l'œil particulier choisi. M. Witz a fait récemment des déterminations intéres- santes d'énergie dépensée pour donner de la lumière : il a trouvé que pour donner avec un are voltaique un carcel-heure, il faut dépenser aux bornes de l'arc une quantité d'énergie qui vaut quatre calories, ce qui fait une quarantaine de calories de dépense totale; avec une bougie ordinaire, on dépense 726 calories par carcel- - heure, C’est un gaspillage d'énergie énorme. Les tra- vaux de Langley sur le pyrophorus noctilucus montrent au contraire que toutes les radiations produites par cet insecte sont des radiations lumineuses et des radiations auxquelles notre œil est le plus sensible, ce qui semble montrer que l'œil humain et l'œil du pyrophorus ont leur maximum de sensibilité pour les mêmes rayons. Bernard BRUNHES. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 22 janvier 1891. M. Lapicque a eu l’occasion de se servir de la mé- thode colorimétrique pour le dosage du fer en très petites quantités, par exemple dans les organes des animaux nouveau-nés. Les résultats qu'il a obtenus par cette méthode ont été confirmés depuis par des chimistes qui ont employé une autre méthode. M. La- picque ne se sert pas d’une solution type de sulfocya nate, mais bien d’un verre rouge, étalon, choisi spécia- lement, La proportion de sulfocyanate reste invariable et on reste toujours avec la même nuance. M. Riban dit que les critiques qu'il avait formulées récemment sur le dosage colorimétrique du fer lui paraissent d'une application générale ; il ne voit pas l'avantage de l'emploi d'un verre rouge plutôt que d’une solution > type de sulfocyanate. Le rapport —, que donne le do- sage, n’est pas exact, même avec un excès de sulfocya- nate;avec de petits chiffres les erreurs absolues sont fai- bles, mais les erreurs relatives fortes. M. Lapicque ré- pond que la coloration est proportionnelle au volume et non pas au fer, si le sulfocyanate reste constant, Le mor- ceau de verre est nécessaire parce qu'il est choisi pour la teinte la plus sensible et que la solution de sulfocya- nate s'altère spontanément. — M. Genvresse a obtenu par l’action du chlorure de sulfuryle sur l'acide pyru- vique les acides mono et bichlorés ; le second de ces acides cristallise facilement, — M, Maquenne à con- tinué l'étude des azotures qui se forment quand on fait passer l'azote sur l'amalgame de baryum chauffé au rouge cerise. Les azotures ainsi obtenus ne sont pas francs, cependant on peut en faire lanalyse au moyen de l’action de l’eau; il se dégage d’abord de lhydro- gène, et par la distillation on obtient de l'ammoniaque. On arrive ainsi à la formule Baë A7?, Avec le strontium, dont l’auteur a pu préparer des amalgames contenant jusqu'à 20 %, le mercure s'échappe facilement, et on obtient l’azoture exempt de mercure ; il n’est pas eris- tallisé; mais quand on le traite par l’eau, il ne dégage pas d'hydrogène, mais seulement de ’ammoniaque. La formule que donne son analyse est Sr Az°, L'action de l'alcool ne donne pas d’amines ; l’auteur continue cette étude. — MM. J.-A. Le Bel et A. Combes rappellent leur précédente communication sur l’alcool benzylique dérivé de la mannite et celui obtenu de synthèse au moyen de l’acétylacétone. Ils avaient conclu de leurs expériences que l'alcool dérivé de la mannite a pour formule C2H5-CH 0 H-C3H7. Ils ont fait la synthèee de cet alcool en distillant un mélange de propionate et de butyrate de chaux et hydro- sénant l’acétone obtenue, ils ont obtenu un alcool qui, conformément à leur prévision, devient dextrogyre, comme celui de la mannite après dédoublement, A. COMBES. SOCIETE FRANÇAISE DE MINERALOGIE Séance du 14 janvier. Une partie de la séance est consacrée aux élections. Le burean pour 14892 est ainsi constitué : président, M. Mallard; vice-présidents, MM. Bourgeois et Offret; secrétaires, MM. Lavenir et Lacroix; trésorier, M. Jan- netlaz; archiviste, M, Michel, M. Wyrouboff, président 70 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sortant, prononce une allocution et transmet la présidence à M. Mallard. | MM. Bourgeois et Traube communiquent une note sur la synthèse de la dolomie par action (en tube scellé) du cyanate de potasse sur les chklorures de calcium et de magnésium. C’est une modification d'un procédé qui à permis à M. Bourgeois d'obtenir de nombreux carbonates, — M. A. Lacroix décrit des cristaux de magnésioferrite provenant du rocde Cu- zeau (Mt Dore). Ils présentent, comme ceux du Vésurve, des pénétrations de cristaux d’oligiste. Ces derniers forment le squelette des octraèdres de magnésioferrite, leur axe ternaire coïncidant avec un des axes ternaires de l’octaèdre. —- M. Morel envoie une étude cristallo- graphique d'un hydrate de carbonate de potassium et .de l’hydrate d'oxyde de zinc. — M. Mallard continuant ses études cristallographiques et optiques sur les borates, passe en revue quelques borates de calcium, de strontium, etc. obtenus par M. Le Chatelier. Le corps le plus curieux de cette série estun borate de zinc cristallisant en dodécaëdres réguliers. A. Lacroix, SOCIÈTE MATHEMATIQUE DE FRANCE Séance du 20 janvier 1892. M. Hermann fait une communication sur l’ap- plication de sa méthode de cryptographie aux change- ments de clef et aux dictionnaires chiffrés, On peut puiser toutes les clefs dans un livre, changer 30 fois de clef en retenant seulement une phrase de 100 lettres; une personne étrangère à la convention aurait besoin chaque fois, pour retrouver la clef dont on s'est servi, de faire un nombre d'opérations égal à 26%4255, si le livre où on puise les clefs a 400 pages. — M. Antomari démontre les propriétés fondamentales des tangentes aux coniques en considérant celles-ci comme des anti- podaires de cercles. — M, F. Lucas indique une mé- thode d'intégration élémentaire pour l'équation diffé- dentielle des courants alternatifs induits lorsque la force électromotrice est une fonction périodique quel- conque du temps. — M. Fouret donne une démons- tration directe, fondée sur l'emploi de la formule de Taylor, de la règle qu'il a fait connnaître dans la séance précédente pour la détermination d’une limite infé- rieure des racines d’une équation algébrique entière, M. D'OcAGne. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 21 janvier 1892. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — Le major Cardew fait une communication sur une méthode électrostatique diffé- rentielle pour mesurer les hautes résistances électri- ques. Cette méthode consiste à réunir les quadrants d'un électromètre ordinaire à quadrants aux deux pôles d’une source de force électromotrice d’une assez grande intensité et à mettre en communicalion avec la terre l'aiguille ou index d'aluminium. L'objet dont on veut déterminer la résistance est mis en communication avec l’un des pôles de l'appareil, et l’autre pôle avec un objet présentant une résistance variable, appartenant au même ordre de grandeur, les extrémités libres sont réunies à la terre, Le centre de la batterie ou de telle autre source de force électromotrice employéeest alors, pendant un instant mis en communication avec la terre, de manière à mettre l'aiguille au 0° ; lorsque la commu nication avec la terreserarompue l'aiguille déviera d’un côté ou de l’autre, à moins que la résistance au pas- sage de l'électricité ne soit exactement égale aux deux pôles; dans ce dernier cas, l’aiguille restera toujours à 0°, On arrive à cet équilibre en observant les mou- vements de l'aiguille et en faisant varier, d’après leur sens, la résistanee qui sert de terme de comparaison. Le principe sur lequel repose la méthode est que des quantités égales de ce que l’on appelle communément les deux espèces d'électricité sont toujours produites en même temps. Aussi, dans une batterie voltaïque parfaitement isolée, la différence de potentiel entre chacun des deux pôles et la terre pourrait-elle être déterminée en mettant momentanément en commu- nication avec la terre l’une quelconque des lames métalliques. Dans de telles conditions, la plus impar- faite communication entre l’un des pôles et la terre, dût-elle opposer une résistance de plusieurs millions de mégohms, si son action n’est point contrebalancée par la mise en communication de l’autre pôle avec la terre, doit rapidement réduire à 0° le potentiel du pôle parfaitement isolé. On a arrangé en série sur un sup- port d’ébonite 400 couples zinc-cuivre, La force électro-motrice obtenue, en humectant ces couples avec de l’eau acidulée était d'environ 350 volts. On s’est servi comme résistances comparalives de fils de soie blanche, de coton, de chanvre ou de lin, de ficelle, de rubans, de fil rouges. Voici lesvaleurs approximatives qui ont été obtenues: Soie blanche à broder 2.505.000 mégohms par pouce Fil vert soie et coton 10.000 » » » Ruban à mesurer ordinaire. 1.409 » » » — MM. Arthur Schuster et A. W. Crossley présen- tent une note sur l’électrolyse du nitrate d'argent dans le vide. Il se produit quelques petites irrégularités, lorsqu'on se sert, pour mesurer l'intensité d’un courant électrique, du voltamètre à argent, ce sont ces irrégu- larités qu'ont étudiées MM. Schuster et Crossley. Lord Rayleigh avait fait remarquer l’une d’entre elles : à savoir que le dépôt d'argent laissé par une solution chaude était environ & plus lourd que celui d’une so- lution froide, Il existe toujours aussi une différence de poids entre deux dépôts qui se produisent en même temps dans des vases de platine de taille différente, D'après MM. Schuster et Crossley, cette différence est due à la densité du courant à l’anode. Ils ont constaté aussi que les dépôts sont un peu plus considérables, lorsque l’électrolyse a lieu dans le vide que lorsque les voltamètres sont exposés à l'air libre à la pression or- dinaire. Cette différence doit être rapportée à l’action de l'oxygène dissous; lorsqu'en effet, on opère l’élec- trolyse dans une atmosphère d'oxygène, les dépôts obtenus sont moins considérables que dans l'air, Ces anomalies cependant n’empêchent pas de se servir uti- lement comme instrument de mesure du voltamètre à argent. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. Anderson Stuart fait une communication sur le mécanisme de la fermeture du larynx. On croit généralement que l’ocelusion du larynx pendant la déglutition, ocelusion qui empêche les parcelles alimentaires de pénétrer dans les voies aériennes, est due à un mouvement de l’épiglotte, ana- logue à celui des paupières quise ferment. MM. A. Stuart et A, Mac Camick ont récemment montré que c’est là une opinion insoutenable (Journal of Anatomy and Phy- siology. Janv. 1892). Mais il fallait déterminer alors par quel mécanisme se produit cette occlusion, Le profes- seur Stuart, a fait pour élucider cette question, une longue série d'observations dans des conditions excep- tionnellement favorables. Un de ses malades était atteint d'un carcinome qui lui avait enlevé une partie consi- dérable de la paroi latérale du pharynx, sans intéresser en rien le larynx. Cet homme portait d'ordinaire sur cette plaie une sorte de coussinet de caoutchouc, mais lorsque ce coussin était enlevé on pouvait aisément observer les phénomènes de locclusion volontaire du larynx, de la déglutition, de la toux, du chant etc. Des expériences faites sur ce sujet, sur un grand nombre de personnes en bonne santé, sur les grenouilles, les oiseaux, l’oppossum, le chat, le chien et la chèvre ont conduit M. À. Stuart à la conclusion générale que la fermeture du larynx est due invariablement au rappro- chement jusqu'au contact des deux cartilages aryté- noïdes et à leur application contre certaines parties de la paroi antérieure de la cavité laryngée. Ce dernier mécanisme présente des variations qui résultent de l’arrangement anatomique des parties intéressées, — ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 71 M. T. J. Earker F. R. S. communique à la Société quelques observations complémentaires sur le dévelop- pement de l’aptéryx. Elles résultent de l'étude qu'il a faite depuis sa dernière communication de trois em- bryons d’Apterix australis. Richard A. GREGoRY. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 18 décembre 1891. M. Kilgour communique une note « sur l'interfé- rence des courants alternatifs ». En étudiant le mé- moire de M. Fleming « sur quelques effets d’un courant alternatif dans des circuits doués de capacité et de selfinduction », l’auteur a construit quelques courbes additionnelles, Il à été conduit à chercher si l'élévation considérable de la pression (du potentiel), produite par l'addition d’une capacité, a lieu dans des limites éten- dues, ou si elle n'a lieu que pour une capacité très voisine d'une valeur particulière. En prenant le cas d'un condensateur d’une capacité de C farads, en série avec un circuit de résistance R ohms et de sel- finduction L henrys, il montre que le maximum de à (rapport de la pression aux bornes du condensateur à la pression aux extrémités du fil comprenant le con- densateur et la résistance à selfinduction) est obtenu quand on à IE pr où, p = 2 x X le nombre de tours, est la fréquence. Le maximum de } obtenu pour cette capacité C, a pour expression : N ME VR:+ p: 1: R si R— 10 et p — 27. 1000, les courbes représentant les équations (1) et (2) entre G et L, et entre À et L, ont été tracées. La courbe (G, L) monte à un sommet très abrupt, obtenu pour L = 0,001 et s’abaisse brusque- ment. La courbe (/\, L) part horizontalement, puis s’in- cline vers le haut, et s'approche d'une droite inclinée pour des valeurs de L supérieures à 0,002; quand L—0;,1, À —’63. Si l’on étudie la question de la grandeur de la capacité pour laquelle on a un accrois- sement donné de pression, on arrive à ce résultat que si les valeurs de L, R et p ont les valeurs qui conviennent pour obtenir l'accroissement maximum, on ne peut obtenir un accroissement dépassant une valeur modérée que pour des valeurs de CG différant peu de la valeur donnée par l'équation (1). D'un autre côté, quand le circuit est tel que le plus grand accrois- sement de pression possible ne soit pas considérable, alors une valeur de cet accroissement, dépassant une valeur modérée donnée, peut s'obtenir pour des capacités variant dans des limites beaucoup plus éten - dues. L’auteur conclut ainsi que plus est grand l'ac- croissement possible de pression, plus faible est la probabilité d'obtenir réellement un accroissement sé- rieux. L'effet obtenu en shuntant le condensateur par un circuit de résistance r et de selfinduction l est traité ensuite dans le mémoire; on cherche les valeurs de G qui donnent pour x un maximum déterminé, ainsi que les valeurs mêmes que peut prendre ce maximum. L'au- teur se demande ensuite si le cas pratique d’un alter- nateur, qui alimente un transformateur à travers un càble concentrique, peut être simplifié sans introduire d'erreur grave, en admettant que la capacité est con- centrée à l’une des extrémités du cable, et il conclut que dans les cas usuels on ne commet qu'une faible erreur. Dans une expérience faite avec un alternateur de 100 kilowatts,.% de mille de cäble circulaire de #7, et un transformateur de 18 kilowatts, un accroisse- ment de + pour 100 est produit aux bornes de l’alter- nateur quand on établit la connexion avec le càble. En reliant au transformateur chargé ou non chargé, on aune petite variation dans l'accroissement de pression, qui est dans tous les cas comprise entre 0,2 et 0,3 pour 100. Le D' Sumpner demande si les conclusions, sur la grandeur de la capacité pour laquelle on peut obtenir un accroissement de pression donné, sont exactes pour des accroissements petits tels que ceux qu'on rencontre dans la pratique. Les cas, où le maxi- mum possible de l'accroissement est de l’ordre de 63, ne peuvent se présenter pour des fréquences ordinaires. La plus haute valeur de l'accroissement, obtenue à sa connaissance, est 11. Il estime que la constante de temps x évaluée pour la bobine à induction, à + de seconde, est très grande; avec les circuits renfermant du fer il est pratiquement impossible d’atteindre pour la constante de temps une valeur aussi élevée, car la puissance dépensée dans le fer accroît la résistance effective. À propos des limites étroites dans lesquelles doit varier la capacité susceptible de fournir de grands accroissements de pression, il montre que ce cas se présente pour le résonateur de Hertz, où l'accroissement est énorme, mais ne peut être obtenu que par un ré- glage fait avec un soin extrême. M.S. P-. Thompson regrette l'absence du P' Fleming, qui a récemment fait des recherches sur les expériences de Hertz et obtenu des courbes tout à fait semblables à celles obtenues pour les câbles de Deptford. M. Kilgour explique que le premier objet était de montrer que le produit de la latitude de variation de réglage de la capacité qui donne un grand accroissement, par le maximum possible d’accroissement, est approximative- ment constant pour des circuits différents. En second lieu, il a cherché à prouver que la capacilé des câbles concentriques peut être supposée localisée à l’un ou l’autre bout sans introduire d’erreur notable dans le calcul de l'augmentation de pression. Au sujet de la nomenclature, M. Thompson regrette que le mot « inductance » soit employé tantôt pour désigner la quantité L, tantôt pour la quantité Lp, et voudrait restreindre ce nom à la dernière de ces quantités. M. Heaviside, qui a introduit le mot « inductance », l’employait pour L.; M. Sumpner aurait préféré le ré- server pour Lp. Une discussion s’élève sur la question, Sur le mot « impédance », on discute aussi; et M. Perry rappelle que « l’impédance » a été définie par le comité de l'Association britannique comme le rapport du vol- . tage effectif au courant effectif. M. Thompson re- marque que cette définition n'est applicable qu'à des courants périodiques, non à des courants intermittents ou instantanés. Le président, M. Ayrton conclut du mémoire de M. Kilgour que les chances d’obtenir une très haute tension avec les câbles concentriques, par suite les dangers que présente un pareil câble, sont faibles lorsqu'une très haute tension est possible. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES G. Lunge: Le gazovolumètre et le gravivolumètre. — Miss Williams : La composition des végétaux cuits. — $, Linder et Harold Picton : Sulfhydrates mé- talliques. Les auteurs ont étudié les sulfures de cuivre, mercure, antimoine, cadmium, zinc, bismuth, argent, indium et or, À part le bismuth, tous ces métaux for- ment des sulfhydrates plus ou moins complexes qui, dans beaucoup, se polymérisent avec dégagement d'hydrogène sulfuré sous l'influence des acides. Les auteurs regardent leurs résultats comme des preuves à l'appui de ce que les sulfures métalliques sont sou- vent des polymères, de poids moléculaire très élevé, — Harold Picton : Constitution physique de quelques solutions de sulfures. Les solutions de sulfures de mer- cure, d’antimoine, d’arsenic, présentent une série dans lesquelles on peut apercevoir des particules solides de dimensions décroissantes. — MM. Harold Picton et S. Linder : Solution et pseudo-solution, — M. Colefax : Changements produits dans les solutions acidifiées d'hyposulfite de soude, maintenu en présence des pro- duits de Ja réaction. — M. Colefax : Action de l'acide sulfureux sur la fleur de soufre. Il se forme de l'acide hyposulfureux et de l'acide trithionique. — M. Mat- thews: Les modifications & el $ de l’hexachlorure de chlorobenzine. SOCIETE ROYALE D’EDIMBOURG Séance du 4 janvier 1892, 10 ScIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Thomas Muir : Sur un théorème concernant une série qui converge vers la racine d'un nombre. Ces recherches lui ont été suggé- rées par certains travaux du feu D' Sans. Lasérie, ne convergera pas rapidement et ne peut être ainsi d'un srand usage pratique. _ 20 ScENCES PHYSIQUES.— M. Aitken litla seconde partie d’une note où il décrit les résultats d’une série d’expé- riences sur le nombre de particules de poussière con- tenues dans l'atmosphère en différents points et pré- sente quelques remarques sur la relation entre la quantité de poussières et les phénomènes météorolo- giques. M. Aîtken a étudié l'air en en plusieurs points du continent et de la Grande Bretagne en 1889, etila communiqué les résultats à la Société royale, En 1890, il a institué des expériences de comparaison avec les premières observations. À Hyères, il avait trouvé en 1889 un minimum de 1.000 particules par centimètre cube d’air : dans sa seconde visite le minimum a été 725 et le maximum 15.000, À Cannes, en 1890, par un vent du nord, le nombre des particules à varié de 1.275 à 2.580; à Menton, par le vent du nord, dans une région montagneuse, on avait 800; mais quand le vent a soufflé de la ville, on en a obtenu 26.000, Au Righi, par une atmosphère remarquablement claire en 1889, le nombre a varié de 210 à 2,350. En mai 90 l’atmos- phère était épaisse. A Vizuan, au pied de la montagne, il contenait 11.000 particules au centimètre cube, el au sommet, le même jour, #.000, et l’air a repris son apparence claire. La cause de ce changement est un orage qui a eu lieu le 48 mai. L'auteur a fait ce jour-là plusieurs observations pour voir ce qu'il y a de vrai dans l'opinion populaire que le tonnerre éclairait lat- mosphère. Dans Paprès-midi il y avait 38.000 particules de poussière au centimètre, Quand l'orage approchait, le nombre tomba à 3.000, Au milieu de l’orage il a atteint 725, et le jour suivant il n’en contenait plus que 400. L'auteur, néanmoins, incline à différer de l'opinion que le tonnerre éclaireit l'air. Une grêle vio- lente accompagnait le lonnerre, et peut avoir fait tomber la poussière, et on a observé qu'après une pluie d’orage, sur la tour Eiffel, le nombre des parti- cules s’est abaissé à 226. En discultant la grande diffé- rence entre le nombre des particules tracées au Righi en 89 et en 90, M. Aitken montre, en serapportant à la circulation générale des vents sur la Suisse durant la période d'observation, que, quand le nombre des par- ticules de poussière était faible durant la première visite, la direction générale de l’air venait des Alpes, tandis que, dans la seconde, Pair venait de régions habitées, et la diminution qui a eu lieu le 18 mai avait pour cause un changement de direction dans la circu- lation. Une série d’autres observations ont été faites au Ben Nevis et à Kingairloch. Au Ben Nevis, durant une période de vents du nord-ouest, le nombre des particules s’est abaissé jusqu'à 19 par centimètre cube, le nombre le plus faible qui ait été trouvé à une station de faible altitude. Les conclusions générales des obser- vations de ces deux années est que l'air qui vient de régions habitées est toujours impur, que la poussière est entrainée par le vent à des distances énormes, que la poussière monte jusqu'au sommet des montagnes. Qu'avec beaucoup de poussière on a beaucoup de brouillard, qu'une grande humidité donne une grande densité à l'atmosphère quand elle est accompagnée d'une grande quantité de poussière, mais qu'il n'y a rien qui prouve que l'humidité seule ait pour effet de rendre l’air dense, qu'il y a une grande quantité de poussière à haute tempéralure, et une faible quantité à basse température; et qu’une grande quantité de poussière réduit la transparence de l'air. 12 ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Noël Paton : Sur l’ac- tion des valves auriculo-ventriculaires. On à admis jusqu'ici que quand ces valves se ferment, les deux feuillets sont submergés par le liquide et empêchent le passage du liquide en étant pressés l’un contre l’autre, de sorte que la surface supérieure de l’un presse contre la surface inférieure de l’autre. Le D' Paton a trouvé par des expériences directes que les deux feuillets res- tent constamment dans une position pendante, les sur- faces supérieures des deux étant comprimées ensemble. — M. Malcolm Laurie : Sur le développement des poumons chez le Scorpion et la relation des poumons avec les branchies dans les formes aquatiques. Il a été conduit à l'étude de ce sujet par des observations faites sur les formes fossiles voisines décrites dans son mé- moire lu à la précédente réunion de la Société. Il con- clut que les poumons ne se sont pas perforés par invagi- nation comme on le suppose généralement, mais que les cavités ontété produites par la croissance d’une plaque protectrice qui finit par adhérer au corps. W. PEDDIE, Docteur de l'Université. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE BERLIN Séance du 4 décembre. M.Assmann expose ses observations faites avec des thermomètres à aspiration pendant des ascensions en ballon, Les thermomètres à aspiration employés déjà par Glaisher étaient tombés en désuétude parce que les avantages qu'ils offraient n’élaient pas suffisants, La dé- fectuosité principale des expériences de Glaisher était la présence de l’aspirateur dans la nacelle du ballon, où il était exposé au rayonnement des parois de la nacelle et de l'observateur. M. Assmann fixe son thermomètre à une distance d'un mètre et demi de la nacelle et, dans ses ascensions en ballon captif, il a obtenu des résultats très satisfaisants. Pendantune pluie très fine, il a observé une diminution de température d’un degré pour 100 mètres d’élévation, Pendant une ascension, le soir, le thermomètre montrait des températures décrois- santes, puis, pendant la descente des températures d’abord constantes, qui décroissaient ensuite, preuve des changements de température survenus par suite du rayonnement de la terre. En traversant les confins su- périeurs d'une couche de nuages, le thermomètre ac- cusa un changement brusque de température (29,5 à peu près), fait prédit par la théorie de Helmholtz sur la formation des nuages. Du reste, ces nuages avaient des formes onduleuses, la hauteur des ondes était d’en- viron 10 mètres. D' Hans JAnN. SOCIÉTÉ DE PHYSIOLOGIE DE BERLIN Séance du 15 janvier. M. le Dr Max Lewy : La sudation a été d’abord con- sidérée comme une filtration mécanique, dépendant seulement de l’hyperhémie cutanée; plus tard on à donné la prépondérance à l’action des nerfs et consi- déré le sang uniquement comme destiné à fournir les éléments de la sueur. M. Leroy a étudié par une mé- thode particulière les rapports entre l'irrigation san- guine de la peau et la sueur sur la patte des chats non narcotisés, Il a trouvé que les substances qui jouissent du pouvoir sudorifique le moins douteux, la Pilocar- pine et la Muscarine, agissent sans produire l’hy- perhémie et s’en tiennent aux nerfs périphériques. Si la circulation est totalement arrêtée par un lien élas- tique, il apparaît d’abord une sudation spontanée, et plus tard on peut encore obtenir une sécrétion de sueur par la dyspnée : 35 minutes après l'arrêt de la circulation, les glandes sudoripares sont paralysées, leurs fonctions cessent. Si on rétablit alors la circula- tion, les glandes se rétablissent, même quand l’anémie a été maintenue pendant 5 heures. Le rétablissement a lieu déjà au bout de quelques minutes ; il est encore plus rapide, si les nerfs ont été coupés et s’il y a une hyperhémie paralytique. — M. le D Th. Weyl a étudié ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 13 l'immunité contre le charbon de la facon suivante : un fil de soie imprégné de spores charbonneuses est inséré sous la peau d’un animal réfractaire au charbon, comme le pigeon ou la poule ; lorsque ce fil est resté là plus ou moins longtemps, il est inoculé à la souris blanche, terrain si propice du charbon. Voici quels ont été les résultats. Quand le fil imprégné de spores n’est resté qu’un jour dans le corps du pigeon ou de la poule, les souris inoculées meurent en un ou deux jours, comme c’est la règle après l’inoculation des spores charbon- neuses ; si le fil est resté plus longtemps sous la peau des animaux réfractaires, la mort arrive au bout d’un délai plus long; enfin, si le fil est resté au moins six jours sous la peau du pigeon, trois jours sous la peau de la poule, les souris inoculées ne meurent plus. Si le fil de soie est alors transporté sur l'agar ou le bouillon, ou tout autre substratum nutrilif approprié, il n’y a pas de culture ; les spores sont mortes, L'hypothèse que les fils, se seraient dans le corps des animaux réfractaires, chargés d’une substance empêchant le développement est contredite par le fait que ces mêmes milieux de culture où les spores du fil desoie ne se sont pas déve- loppées laissent très bien se développer des spores fraiches. Les souris inoculées avec le fil qui avait sé- journé longtemps dans le corps des animaux réfrac- taires n'ont acquis non plus aucune immunité, car elles meurent si on les inocule avec du charbon frais. Il faut donc conclure de ces expériences que les spores des charbons sont tuées par un contact de plusieurs jours avec le corps des animaux réfractaires. Cette preuve directe que les humeurs d’un animal réfractaire au charbon tuent les spores de ce virus n’est pas sans importance pour la théorie de l’immunité. D' W. SKLARERK, ACADEMIE DES SCIENCES DE SAINT-PETERSBOURG Séance du 16 décembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. S. Markoff : « Sur les nombres entiers dépendants d’une racine cubique d’un nombre entier ordinaire, » 20 ScrENCES PHYSIQUES. — M. Wild entretient l’Aca- démie d’un ouvrage de M. Chwolson, qui fait suite au mémoire du même auteur « sur la distribution de la chaleur dans une boule noire éclairée d’un côté », présenté à l’Académie le 13 mars 1891. Le nou- veau travail de M. Chwolson contient l'analyse de toutes les méthodes existantes d'observations actinomé- triques, analyse à la fois critique et expérimentale, Il est intitulé : « L'objet de l’actinométrie moderne ; étude critiquee» et sera publié in extenso dans le Reper- torium für Metorologie. Après avoir esquissé dans le premier chapitre de son ouvrage les problèmes de l’actinométrie, l’auteur passe à l'historique de la ques- tion de la constante solaire pour arriver dans le >ha- pitre suivant à l'étude détaillée des lois physiques, et à la détermination des constantes sur lesquelles sont basées les {théories de diverses méthodes actinométri- ques. Quatre chapitres du mémoire sont consacrés à l'examen critique des mensurations actinométriques absolues, et surtout à la description du pyrhéliomètre de Pouillé et de l’actinomètre de Violle et K. Angstrem. Les chapitres suivants sont consacrés à l'analyse cri- tique des méthodes de mensurations actinométriques relatives, ainsi qu’à la description des actinomètres de Crova et d’Arago-Devy. Voici les conclusions de l’auteur énoncées dans le dernier chapitre de l’ouvrage : Jus- qu'à présent les observations actinométriques ne ren- traient pas dans la série des observations régulières quotidiennes sur aucun réseau de stations météorolo- giques ; cela tient probablement à ce que les chefs des stations devait s'apercevoir que toutes les méthodes ainsi quetous lesinstruments proposés sont imparfaits. Cest en s'inspirant de cet état de choses que la confé- rence météorologique internationale réunie cette année à Munich a voté la résolution d’après laquelle les mé- thodes actinométriques ne sont pas encore suffisamment établies pour qu'on puisse recommander l'introduction d'une de ces méthodes dans la série des observations quotidiennes. Cependant, certains observatoires, par exemple celui de Montsouris (près Paris), ainsi que certains savants, comme le professeur Crova de Montpellier, et surtout de nombreux amateurs en météorologie, font des obser- rations actinométriques ininterrompues d’après l’une ou l’autre de ces méthodes. Souvent même les per- sonnes qui font ces observalions reprochent aux autres chefs de stations de négliger un élément météorolo- gique aussi important dans leurs observations. La cri- tique des différentes méthodes faite pour la première fois (si l’'onexclut les observations critiques de M. Lan- glé sur l'appareil de Violle) par M. Chwolson permettra dorénavant de s'orienter dans cette question. D’aprèsson étude approfondie, on peut conclure qu'aucune des mé- thodes proposées jusqu’à présent ne résoutle problème de la détermination absolue ou relative de la radiation. Ce résultat négatif n’a pas cependant découragé le jeune savant qui a täché de tirer de son analyse cri- tique les indications utiles pour lamélioration possible de la méthode la plus rationnelle, celle de K. Angstrem. Il indique aussi la marche à suivre pour arriver à une méthode nouvelle que l’on ne peut, quant à présent, qu’esquisser dans ses traits généraux, L'auteur se propose de poursuivre ses recherches pendant lété prochain et ne doute pas d'arriver à une méthode ra- tinuelle et exacte. — M. E. Leist : « Surle calcul des moyennes de latempérature déduites des observations faites à 8 heures du matin, à 2 heures et à 8 heures de l'après-midi ». Cette note est destinée au Repertorium für Meteorologie. On a proposé dans ces derniers temps de remplacer les heures habituelles des observations actuellement adoptées dans la plupart des stations européennes (7 heures du matin, 1 heure et 2 heures de l'après-midi, 9 heures du soir) par une autre série lus commode : 8 heures du ratin, 2 heures de la- près-midi et 8 heures du soir. Les heures de cette série sont, comme on le sait, beaucoup moins utiles que les précédentes pour la détermination des moyennes réelles des observations pendant les vingt-quatreheures, surtout en ce qui concerne la température. Plusieurs savants ont proposé des omyens pour calculer d’après ces observations les températures moyennes réelles pendant les vingt-quatre heures, prenant en considé- ration la température minima de cette période. Ces moyens paraissaient très sûrs au prime abord. Cepen- dant M. Leist, en faisant des expériences spéciales dans le but de vérifier lesdits moyens, est arrivé à la conclusion que tous sont illusoires, et ne corri- sent nullement les erreurs qui peuvent découler des observations prises à des heures autres que celles de sept heures du matin, etc, — M. Abels, directeur de l'observatoire magnétique et météorologique d’'Ekate- rinbourg, intitulée : « Les déterminations de la densité de la neige pendant 1890-91 à Ekaterinbourg. » La note sera publiée dans le Repertorium fin Meteorologie. M. Abels s’est donné pour tâche de déterminer les va- riations dans la densité de Ja neige suivant les condi- tions extérieures, IL prenait, à l’aide d’un instrument spécial, un volume exactement déterminé de neige, dans un endroit donné, et en comparant celui-ci avec le volume d’eau obtenu par la fusion de la neige, il déterminait la densité de celle-ci. La densité variait de 0,435 à 0,022, suivant les conditions dans lesquelles étaient prises les échantillons; la neige avait donc les volumes de deux, à quatre ou cinq fois plus grands que le volume d’eau d’un poids égal. On n’a encore jamais trouvé un degré aussi élevé de porosité de la neige (le chiffre maximum connu étant de trois). Comme il fallait s'y attendre, la densité de la neige augmente avec la profondeur, à condition que la neige soit exposée à l’action des rayons du soleil; elle diminue, toutes choses égales d’ailleurs, avec l’a- baissement de la température, de la force du vent et de la quantité de l'humidité dans l'air, Dans les amas CORRESPONDANCE de neiges, formés pendant les tourmentes, la densité est plus grande relativement; elle augmente dans une couche donnée avec le temps. La densité moyenne de la neige, près de l'observatoire d'Ekaterinbourg au com- mencement de novembre 1890, était de 0,14 ; elle aug- mentait ensuite pour arriver à son maximum, chiffre double du précédent, vers la fin du mois de mars 1891, 3° SCIENCES NATURELLES. — E. Bichner : Rapport sur le deuxième Congrès ornithologique, tenu à Budapest. L'auteur dans ce rapport attire surtout lattention sur la nomenclature zoologique agitée au Congrès. Les rè- gles de nomenclature, dont il donne la traduction,seront discutées au Congrès international de Moscou en 1892. O. BACKLUND, Membre de l'Académie. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de novembre et décembre 1891, 1° Screces PRYSIQUES. — M. Boggio Lera établit par le calcul et par une série d'expériences, la force élec- trique développée par la décharge entre deux sphères, — MM. Bruchietti et Umani ont exéculé de nouvelles expériences qui viennent confirmer ce qu'ils avaient déjà énoncé, à savoir que, lorsqu'on veut étudier les courants telluriques à l’aide de lames en feuilles d’étain plantées dans le sol, la différence du potentiel entre les lames est si grande, qu'il devient impossible de faire des mesures sur des lignes qui ont seulement un kilomètre de lon- gueur.—M.Alvisi : Recherches sur le groupe du cam- phre.— M. Giustiniani : Action de la chaleur sur les composés de l'acide malique avec la méthylamine et la benzylamine. — M. Soldaini : Sur les alcaloïdes du Lupinus albus. — M. Andreocci : Synthèse de quelques acides du pyrrodiazol, et du pyrrodiazol libre, — M. Helbig présente la photographie d’un miroir retrouvé à Corinthe, en faisant observer que l'éclat particulier du métal dont le miroir est formé, fait naître l'idée qu'on se trouve en présence du fameux bronze de Corinthe. — M. Magnanini a cherché de résoudre la question de savoir si, dans les solutions de sels colorés, il est possible d'attribuer la coloration à la partie du sel qui, suivant les théories modernes sur la dissociation élec- trolytique, se trouve en solution aqueuse dissociée dans les ions, positif et négatif. Les observations de M. Ma- gnanini, faites avec le spectrophotomètre de Hüfner, et déterminant l'absorption lumineuse de plusieurs solu- tions, montrent que le pouvoir d'absorption des sels colorés, c’est-à-dire, la coloration est indépendante de la dissociation électrolytique. 29 SCIENCES NATURELLES. M. Todaro entretient l'Académie de la structure, de la maturation et de la fécondation de l’œuf d’un reptile, Seps chalcides, assez commun dans la campagne romaine, — M. Mingazzini donne la description de quelques nouveaux genres et de quelques nouvelles espèces de Grégarines mono- cystidées, parasites des Tuniciers et de la Capitella; il étudie leur évolution dans l'intestin des hôtes. Les in- dividus d’un de ces genres, nommé Plewrozyya, pré- sentent la particularité de s’accoupler par une partie latérale, tandis que dans les autres monocystidées l'accouplement se fait par l'extrémité céphalique. La monocystidée parasite de la Capitella, décrite par M. Mingazzini, est remarquable par la forme de l'individu adulte qui ressemble à une ancre. — M. Crety a observé les cellules nerveuses qui se trouvent distribuées radialement entre les fibres mus- culaires des ventouses dans quelques animaux marins (Distomum megastomum et D. Richiardi). Les prolonge- ments de ces cellules nerveuses forment un treillis tout autour des fibres musculaires de la ventouse, et de plus s’anastamosent entre-elles. M. Crety décrit un autre système ganglionnaire qui se trouve en dehors de la ventouse, dans le parenchyme qui entoure cette dernière; il est formé par une série de cellules mono ou bipolaires, Dans le D. Richiardi, la cuticule des ven- touses présente des protubérances mobiles, pourvues de muscles spéciaux; M. Crety ayant reconnu qu’elles recevaient les terminaisons des petites branches ner- veuses du système ganglionnaire et des cellules ner- veuses du parenchyme, considère ces protubérances comme des organes tactiles. — Le phénomène signalé par Lahousse, à savoir que dans les animaux peptonisés la quantité de CO? dans le sang artériel éprouve une forte diminution, a fourni l’occasion à M. Grandis d'accomplir des recherches sur les modifications qui se manifestent dans les produits de la respiration d’un animal après des injections de peptone. En soumettant des lapins et des chiens à ces injections, on trouve que, sous l'influence de la peptone, l'intensité des échanges respiratoires diminue légèrement; la quan- tité d'oxygène consommé s’affaiblit, tandis que la pro- duction de CO? augmente sans qu'il y ait une relation entre ces phénomènes et les profondes modifications des gas du sang. Dans une deuxième note, M. Grandis s'occupe de la nature du procédé respiratoire dans les tissus et dans les poumons des animaux peptonisés. Enfin, l’auteur décrit ses recherches sur la tension de CO? dans le sang de ces animaux; il annonce avoir re- connu que la tension de CO? du sang et du sérum est plus forte dans les animaux peptonisés, et que les pep- tones se comportent comme des acides en déplacant le CO? de ses combinaisons. — M. Salvioli a étudié les modifications que subit le sang par l'effet de la pep- tone et des ferments solubles, À cause de ces modifica- tions, le sérum du sang de chien arrive à conserver ses hématies, malgré l'affaiblissement de leur résis: tance; les hématies du lapin, qui se dissolvent rapide- ment dans le sérum du sang de chien, résistent égale- ment, Il en résulte qu'il est possible de transfuser à un lapin de grandes quantités de sang, de plasma ou de sérum peptonisés de chien, sans qu'elles donnent lieu à aucun désordre; tandis que la transfusion d’une pe- tite quantité de sang normal est mortelle pour les la- pins. Le dosage alcalimétrique et celui du CO? exis- tant dans le sang du chien, prouvent que sous l’action de la peptone et de la diastase l’alcalinité du sang di- minue. Ernesto Maxcinr. CORRESPONDANCE SUR LES GÉOMÉETRIES NON EUCLIDIENNES Monsieur le Directeur, Permettez-moi de répondre à la lettre si intéressante de M. Mouret!; non que je désire avoir le dernier mot, car je n'ai pas la prétention de cloredéfinitivement une diseussion qui dure depuis plus de deux mille ans, mais parce que ce m'est une occasion de présenter quelques observations nouvelles. Jai cherché à faire ressortir le rôle important de l'expérience dans la genèse des notions mathématiques ; mais j'ai voulu en même temps montrer que ce rôle est 1 Voyez la Revue du 1892, t. II page 39. ! [l h i limité, Pour atteindre ce double but, les fictions de Riemann et de Beltrami, dont j'ai entretenu vos lec- teurs, peuvent rendre quelques services ; elles aident en effet l'imagination à rompre des habitudes créées par l'expérience journalière et qui sont tellement invétérées qu'elles semblent s'imposer à l'esprit avec nécessité. Voici une de ces fictions qui me paraît assez amu- sante, Imaginons une sphère S et à l’intérieur de cette sphère un milieu dont l'indice de réfraction et la tem- pérature soient variables. Dans ce milieu se déplace- ront des objets mobiles; mais les mouvements de ces objets seront assez lents et leur chaleur spécifique NOTICE NÉCROLOGIQUE 1 assez faible pour qu'ils se mettent immédiatement en équilibre de température avec le milieu. De plus Lous ces objets auront même coefficient de dilatation, de sorte que nous pourons définir la température absolue par la longueur de lun quelconque d'entre eux. Soit R le rayon de la sphère, p la distance d’un point du milieu au centre de la sphère. Je supposerai qu'en ce point la température absolue soit R? — et l'indice 1 . RATS Que penseraient alors des êtres intelligents qui ne seraient jamais sortis d’un pareil monde? 1° Comme les dimensions de deuxpelits objets trans- portés d'un point à un autre varieraient dans le méme rapport, puisque le coefficient de dilatation serait le même, ces êtres croiraient que ces dimensions n'ont pas changé; ils n'auraient aucune idée de ce que nous appelons différence de température; aucun thermo- mètre ne pourrait le leur révéler, puisque la dilatation de l'enveloppe serait la même que celle du liquide thermométrique, 29 Ils croiraient que cette sphère S est infinie ; ils ne pourraient jamais en effet atteindre la surface; car à mesure qu'ils en approcheraient, ils entreraient dans des régions de plus en plus froides, ils deviendraient de plus en plus petits, sans s’en douter, et ils feraient de plus en plus petits pas. 3° Ce qu'ils appelleraient lignes droiles, ce seraient des circonférences orthogonales à la sphère S, et cela pour trois raisons : 41° Ce seraient les trajectoires des rayons lumineux ; 2° En mesurant diverses courbes avec un mètre, nos êtres imagiñaires reconnailraient que ces circonfé- rences sont le plus court chemin d’un point à autre; en effet leur mètre se contracterait ou se dilaterait quand on passerait d’une région à une autre et ils ne se douteraient pas de cette circonstance ; 3° Si un corps solide tournait de telle facon qu'une de ses lignes demeurût fixe, cette ligne ne pourrait être qu'une de ces circonférences, C’est ainsi que si un cylindre tournait lentement autour de deux tourillon: et était chauflé d’un côté, le lieu de ses points qui ne bougeraient pas serait une courbe convexe du côté chauffé et non pas une droite. Il en résulterait que ces êtres adopteraient la géo- métrie de Lowatchevski. Mais je m'égare bien loin de l'objet de ma lettre; ces considérations sont de nature à montrer l'importance de réfraction de l'expérience, et par conséquent à faire ressortir ce qui me rapproche de M. Mouret. Je dois insister un peu sur les différences. L'expérience peut-elle à elle seule engendrer les no- {ions mathématiques et, (sans pousser comme M. Mou- ret jusqu'à la notion fondamentale d'égalité), peut-elle à elle seule nous donner la notion de la continuité ma- thématique? I suffit, pour avoir le droit d'en douter, de réfléchir à la différence profonde qui sépare la conti- nuité physique de la continuité mathématique. Voici une sensation qui va en croissant graduellement; il semble’ qu'il y ait quelque chose de tout à fait pareil au continu des géomètres. Fechner a même cherché une relation mathématique entre la sensation et l'excitation ; mais sur quelles expériences a-til établi sa célèbre loi ? Nous ne pouvons distinguer un poids A de 10 grammes d’un poids B de 11 grammes, ni celui-ci d’un poids C de 12 grammes; mais nous distinguons le poids À du poids C. Les expériences (raduites en:équations sans coup de pouce s’écrivent : NS RME eON Nec Voilà la formule du continu physique, tandis que celle du continu mathématique serait : ARE Mais M. Mourel va beaucoup plus loin dans son re- marquable article de la Rerue philosophique !; ils’attaque à la notion primordiale de légalité qu'il veut faire dé- river de l'expérience, J'ai beaucoup à approuver dans cet article, surtout cette pensée que l’idée d'espace n'est pas une idée simple, et que loutes les idées ma- thématiques se résolvent dans les catégories de relation, de ressemblance, de différence et d’individu, J'ai pris beaucoup d'intérêt à la lecture de ses arguments, dont J'aiadmiré la variété, mais je ne puis m'empêcher de rappeler que les plus caractéristiques sont déjà dans «€ Zählen und Messen » de Helmholtz; les conclusions seules différent. avoue que je ne puis me décider à croire que cette proposition : Deux quantités égales à une même treisième sont égales entre elles, soit un fait expérimental que des expériences plus pr intir- meront peut-être un jour, J'aime mieux conclure avec Helmhollz que nous donnons le nom d’égalité à tout ce qui dans le monde extérieur est conforme à l'idée préconcue que nous avons de légalité mathématique. ses H. Poincaré. de l'Institut. NOTICE NÉCROLOGIQUE A. Le Professeur À. Richet, dont nous déplorons la mort si imprévue, était l’un des plus marquants parmi les chirurgiens de notre époque. — Dans cette courte no- tice, nous essaierons de montrer ce qu'il fut, la grande place qu’il a occupée dans la chirurgie contemporaine, Né le 16 mars 1816, Richet vint de bonne heure à Paris continuer ses études médicales, qu'il avait com- mencées à Dijon, et fut bientôt après nommé externe, puis interne des hôpitaux, placé le premier sur la liste. Un an après avoir été recu docteur en médecine, il était, phénomène très rare, surtout à notre époque, nommé au concours chirurgien des hôpitaux; un an après, à 31 ans, il était nommé agrégé. Toujours sur la brèche, on le voit concourir, en 1850, pour la chaire de médecine opératoire à laquelle fut nommé Malgaigne, et en 1851 pour la chaire de cli- nique chirurgicale à laquelle fut nommé Nélaton. Ce n’est qu'en 1865 qu'il fut nommé professeur à la Faculté; il professa la pathologie chirurgicale pendant cinqans et, en 1871, il prit la chaire de clinique chirur- gicale qu'il a gardée jusqu'en 1889, année de sa retraite. Nommé membre de l’Académie de Médecine en 1866, il fut élu président en 1878, et enfin en 1883 l’Académie RICHET des Sciences l’élut membre de la section de Médecine et Chirurgie. Les travaux qui ont valu au Professeur Richet les grades et les titres que nous venons d’énumérer sont nombreux, Tous les médecins connaissent le livre qui les résume en quelque sorte : nous voulons parler du Traité d'anatomie médico-chirurgicale, qui eut einq édi- tions, et dont on peut dire qu'il a servi à l'instruction de plusieurs générations de médecins et chirurgiens, La clarté, la netteté des descriptions, la hauteur de vues, le côté pratique des applications chirurgicales, les échappées vers la physiologie et la tératologie, tout contribue à en faire un livre éminemment scientifique et instructif, d’une lecture agréable et, dirions-nous aujourd’hui, essentiellement suggestive, Parmi ses mémoires, qui sont nombreux, il convient de citer surtout les suivants : Mémoire sur l’anatomie chirurgicale du périnée. — Du trajet de l’anneau ombilical, — Recherches sur l'utérus et ses annexes, au point de vue de sa situation, ! Voyez à ce sujet le numéro de la Revue générale des Scien- ces du 30 décembre 1891, t. Il, page 826 (N. de la Réd.) 6 NOUVELLES de ses rapports, de sa direclion, de son volume, de sa structure. — Nouvelle théorie des mouvements du cerveau dans Ja cavité erânienne et l'usage du liquide céphalo-rachidien, — De la sensibilité récurrente péri- phérique dans les nerfs de la main, — De l'emploi du froid et de la chaleur dans le traitement des affections chirurgicales. — Des opérations applicables aux anky- loses. — Des luxations traumaliques du rachis, — De la possibtlité de réduire les résections de lextrémité supérieure de l’humérus et du fémur compliquées de fractures de cetos.— Mémoire sur les {tumeurs blanches, — Note surles fistules de l’espace pelvi-rectal supérieur. — Des anévrismes spontanés et traumatiques, et de leur traitement. — Mémoire sur l’intoxication putride aiguë qui complique certaines fractures dites simples du maxillaire inférieur. — De lignipuncture. Plusieurs de ces Mémoires, notamment lesRecherches sur l'utérus, l'usage du liquide céphalo-rachidien, la sensibilité récurrente, les luxalions traumatiques du rachis, les anévrismes spontanés, l’infoxication putride dans les fractures du maxillaire inférieur et Pignipunc- {ture marquent un réel progrès el assurent au PT A. Ri- chet une place indiscutable et élevée parmi nos auteurs classiques ; ce sont ces travaux qui, joints à sa grande habileté chirurgicale, firent de lui l'un des chirurgiens les plus suivis, les plus écoutés par les élèves et les plus recherchés par la clientèle. Comme professeur, A. Richet a eu toujours un grand succès. Sa parole simple, exempte de toute re- cherche inutile, mais aussi de trivialité, la précision et la clarté de ses descriptions, la sobriélé des détails lui assuraient l'attention de ses auditeurs; de même, au lit du malade il savait exciter notre intérêt par l'ingé- niosité de ses aperçus, par les remarques que lui sug- gérait sa longue expérience : mais là où il triomphait suriout, c'était quand, le bistouri ou le couteau à la main, il s'allaquait aux difficiles et émouvantes opé- rations de la chirurgie: d'un sang-froid à toute épreuve, d'une prudence et d’une hardiesse opératoire remar- quables, il trouvait le moyen de faire l'admiration de tous ceux qui le regardaient. Ilexcellait dans les auloplasties, dans la restauration. Elevé à bonne école, il avait emprunté à ses maîtres celte délicatesse opératoire, celle sûreté de main qu'on ne rencontre plus, semble-t-il, aussi facilement. Jus- qu'aux derniers jours de sa carrière chirurgicale, il conserva cette habileté, cette assurance qu'on avait toujours admirées en lui, Il mettaitune certaine coquet- terie à dire qu'il savait mieux enfiler une aiguille que ses internes ; et de fait sa main n'avait aucune hésita- tion, C'était en quelque sorte la démonstration qu'il n'avait rien perdu de ces qualités du jeune chirurgien. Quand, sous l’influence des doctrines Pastoriennes, la chirurgie se renouvela, le Professeur Richet était à un âge où l’on accepte difficilement le changement. Cependant, — bien loin de faire et de dire comme tel autre chirurgien plus jeune que lui et mort depuis longtemps, qui avait baplisé la méthode Pastorienne du nom derite écossais, — le Professeur Richet accepta cette doctrine et s’efforca d’y conformer sa pratique. Mais, à l'inverse de quelques chirurgiens, qui croient que la chirurgie se résume dans l’antisepsie et l’asepsie, il continua à penser et à enseigner que la bonne chirurgie a toujours besoin de s'appuyer sur de solides diagnos- ücs, de prendre pour base de ses délerminations des indicalions bien raisonnées et de s’aider de bonnes méthodes et de parfaits procédés opératoires, Il s’ef- forcait d’inculquer à ses élèves et de leur conserver ces bonnes fraditions de la chirurgie française. Que dirai-je maintenant du maître ? Son abord froid, sa haute stalure, sa figure austère embarrassaient d’a- bord le débutant; mais, dès qu'il souriait, le tableau changeait : on reconnaissait immédiatement en Jui un homme bon et désireux d’être ulile à ses élèves. Le Professeur Richet ne se livrait pas tout d’abord: il avait besoin d'observer, d'étudier ceux qui l’approchaient. Dès que ce travail était fait, la glace était rompue et défini- üvement rompue : il devenait paternellement familier et savait prouver la sympathie que l’on avait su lui inspirer. Quoi qu'il eût abandonné la chirurgie pour se reposer dans le travail et se livrer à une autre science d'obser- vation, je veux dire l’agriculture, on peut dire que sa mort à été un deuil pour la chirurgie; sa silhouette se profilait encore sur les murs des salles de l'hôpital ; son esprit nous guidait encore, et nous évoquions sou- vent le souvenir de ses lecons et de sa pralique, comme nous l'évoquerons encore longtemps. D' Bazy. Chirurgien des Hôpitaux NOUVELLES SUR LA TUBERCULOSE ET LA DOURINE Dans l'œuvre d'un homme de génie, tout jusque dans le détail est à imiter. En 1850, M. Pasteur fit voir que les vers de terre interviennent dans l'éliologie du sang de rate en ramenant à la surface du sol les spores char- bonneuses profondément enfouies dans la terre avec les cadavres, Il était naturel de se demander si les lom- brics se comportent de lamème facon à l'égard des ba- cilles de la tuberculose, Sur ce sujet, MM. Lortet et Despeignes ont communiqué lundi dernier à l'Académie les résullats que voici: De la terre végétale fut tassée dans des pots à fleurs. Cinq ou six lombrics y furent introduits, puis on y en- fouit des crachats tuberculeux, des fragments de pou- mons riches en bacilles de Koch. Six mois après, le mi- croscope décela dans presque tousles lissus des vers quantité de petits groupes de bacilles tuberculeux; ces bactéries semblaient n'avoir provoqué aucune altéra- tion spéciale ; elles avaient conservé leur vitalité ; quand on inoculait à des cobayes les tissus qui lescontenaient, ces cobayes ne tardaient pas à mourir de tuberculose généralisée. _ Ces faits intéressent à un double litre la biologie gé- nérale : ils établissent qu'un parasite virulent de l’homme peut se multiplier d’une façon presqu’inof- fensive dans les tissus d’un animal extrèmement éloigné des Vertébrés; ils montrent aussi qu’un tel animal peut jouer un rôle actif dans la dissémination d’une maladie le plus souvent mortelle pour notre espèce, M. Chauveau, qui a présenté ce travail à l’Académie, lui a soumis, dans la même séance, une observation importante de M. Nocard, directeur de l'Ecole vétéri- naire d'Alfort, sur les moelles des chevaux atteints de dourine, Cette affection, transmise par la saillie, se traduit par un amaigrissement considérable, suivi de diverses paralysies, et se termine presque toujours par la mort, Elle a son siège anatomique dans la moelle où elle produit des foyers de ramollissement. Dès 1888, M. Nocard avait constaté la virulence de la matière ramollie : en l’inoculant dans la chambre antérieure de l'œil du Cheval et du Chien, il avait déterminé la dourine chez ces animaux. Mais l'étude de la maladie s'était trouvée arrètée par la difficulté de se procurer en France des moëlles virulentes. Or, M. Nocard vient de reconnaitre que les moelles conservent très long- temps leur virulence dans la glycérine pure et neutre, à la manière des moelles rabiques. On pourra donc les recevoir des pays où règne la dourine et les employer aux recherches, Il semble que ce procédé, — dont nous ayons maintenant deux exemples (rage et dourine), — soit susceptible d’extension et par conséquent appelé à rendre service à la pathologie expérimentale. 130. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F, Levé, rue Cassette, 17. PRINT ET 4È 3° ANNÉE 15 FÉVRIER 1862 REVUE GÉNÉRALE ES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES CONDITIONS D'EXISTENCE DES ORGANISMES PÉLAGIQUES J'appelle « pélagiques » tous les êtres qui habilent les eaux de l'Océan, à l'exception de ceux qui sont limités au fond et au rivage, cé qui nagent passive- ment ow activement soit à la surface, soit dans le sein même des eaux, à quelque profondeur que ce soit. Cette définition n’est pas conforme à celle qu’on donne d'habitude, car ordinairement on appelle « péla- giques » les êtres qui flotlent à la surface de l'Océan. Mais les découvertes remarquables faites au cours des explorations sous-marines récentes, ont montré que les eaux profondes de l'Océan sont habitées par une foule d'êtres voisins de ceux qui en peu- plent les couches superficielles, et pour lesquels le mot « pélagique » fut autrefois créé ; aussi le terme « pélagique » doit-il être pris maintenant dans une acception beaucoup plus large. Il y a des pélagiques superficiels et des pélagiques profonds; il ÿ en à enfin qui oscillent continuellement et périodique- ment entre les profondeurs et la surface, et tous offrent un certain nombre de caractères communs, sont spécialement adapiés à ce genre de vie. Ils constituent un ensemble fort remarquable qu'on peut opposer aux êtres qui habitent les rivages et le fond de la mer. Je me propose d'étudier ici les conditions d’exis- tence, les habitudes des êtres pélagiques ainsi définis, les facteurs qui déterminent leur exten- sion géographique et bathymétrique, les oscilla- tions, régulières ou non, qu'ils subissent, enfin les relations que présentent entre eux les animaux et les végétaux pélagiques. L'étude de la vie péla- gique soulève de nombreuses questions et offre un intérêt tout particulier, car il est incontestable que REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. la source de la vie animale et végétale se trouve dans la mer; les premières formes vivantes qui apparurent sur le globe ont été pélagiques, et les végétaux pélagiques actuels, les Chromacées, les Calcocytes, les Murracytes, ete., sont des formes très inférieures el voisines des types primitifs. Pendant une longue période, les seuls animaux existant élaient pélagiques, el ces formes anciennes sont les ancêtres, non pas seulement de la plupart des formes pélagiques actuelles, mais encore de nom- breuses formes littorales qui, à l'état de larves, sont pélagiques dans la haute mer. I Les organismes pélagiques sont ou des végétaux ou des animaux ; logiquement nous devons d’abord nous occuper des premiers, qui précèdent et ont toujours précédé les animaux. Car de même que les premiers êtres organisés que notre globe a produits ont été des végétaux qui ont permis le développement ultérieur de la vie animale, de même les animaux pélagiques ne sauraient exister, s'ils ne trouvaient, au sein de la mer, la nour- riture végétale qui leur est indispensable. Il n’est pas d'organisme animal, si inférieur qu'il soit, qui puisse fabriquer son protoplasma de toutes pièces. Les végétaux pélagiques sont, en dernière ana- lyse, la source primitive de la nourriture des animaux pélagiques. Les Protozoaires, les petits Crustacés Copépodes et Ostracodes, les Tuni- ciers, elc., absorbent directement cette nourriture végétale, el servent à leur tour de nourriture aux Méduses, aux Vers, aux gros Crustacés, qui 3 18 B. KŒHLER. — LES CONDITIONS D'EXISTENCE DES ORGANISMES PÉLAGIQUES eux-mêmes sont ensuite dévorés par les Poissons. Parmi les végétaux inférieurs il y a d'abord les Chromacées (Procytella primordialis), dont l'infério- rité est attestée par l'absence de noyau; les Calcocytes, (fig. 1) algues calcaires unicellulaires qui se trouvent surtout dans les mers tropicales et subtropicales; les Murracytes, dont l'espèce la plus TYPES DE FORMES VÉGÉTALES INFÉRIEURES PÉLAGIQUES Fig. 1. noctiluca. — Fig. 3. P. fusiformis (d'après Murray). Calcocytes (Rhabdosphères). — Fig. 2, Pyrocystlis connue, Pyrocystis noctiluca (fig. 2), remplace, dans les mers chaudes, la noctiluque des régions tem- pérées. Les Diatomées, qui sont répandues partout en masses énormes, mais dont certaines formes, les Synedra dans les mers froides, les Chætoceros dans les mers chaudes, peuvent se trouver au nombre de plusieurs centaines de milliers par cen- timèlre cube d’eau; enfin les Péridiniens, dont quelques espèces, telles que le Ceratium tripos, pos- sèdent une aire de répartilion immense, offrent une organisation plus élevée. Les formes végétales pluricellulaires sont sur- tout des Halosphères, des Oscillaires et des Sar- gasses. Les Oscillaires, en particulier, jouent un rôle très important, et, dans les mers chaudes où elles sont surtout représentées par des 7richo- desmium, elles remplacent les Diatomées. Je n'ai pas à insister ici sur l'abondance dans toutes les mers de ces organismes végétaux; les mensurations que Hensen a effectuées récemment indiquent parfoi: un nombre formidable de Dia- tomées, de Péridiniens ou d’Oscillaires vivant dans un centimètre cube d’eau : les chiffres donnés dépassent toute imagination. Aussi les animaux pélagiques trouvent-ils facilement leur nourrilure dans ces milliards d'organismes végétaux qui, à chaque instant, sont avalés par eux et remplacés par d’autres qui viennent prendre la place des pre- miers. En fait,lamerfabrique une quantité de nourriture végétale largement suffisante pour subvenir média- tement ou immédiatement aux besoins de sapopu- lation animale flottante ; mais nous devons nous demander comment cette nourriture se trouve ré- partie dans sa masse. Il est admis actuellement que la lumière ne pénètre pas dans les profondeurs de l'Océan au-delà de 400 à 500 mètres, et qu'à 200 mètres elle est déjà très affaiblie.Je ne veux pas m'étendre ici sur ce sujet, ni essayer de fixer une limite à celte zone éclairée, dont l'étendue,évidem- ment très variable, est délerminée par des facteurs très complexes. On admet habituellement que la zone habitable pour les végétaux est très étroile ; qu'au-dessous de 80 mètres les algues se font rares et qu'au delà de 300 à 400 mètres les végétaux, quels qu'ils soient, sont incapables d’assimiler, faute de lumière. Toutefois l'Expédition du Plankton a rencontré, entre 1.000 et 2.000 mètres de pro- fondeur, de nombreux exemplaires vivants d'une algue verte unicellulaire, l'Aalosphæra viridis. La présence de cet organisme à une profondeur où les rayons solaires ne pénètrent jamais est fort surprenante, mais elle montre d’une manière pé- remptoire qu'il ne faut pas conclure à l'absence complète de végétaux vivants dans les grandes profondeurs. Il est probable que les jeunes Halos- phères habitent dans des régions éclairées pendant leur période de plus grande activité vitale, puis tombent dans les profondeurs où elles peuvent bien continuer à vivre pendant un certain temps, mais sontincapables d’assimiler. Le cas de l’ÆAalos- phera n’est sans doute pas isolé, bien qu'il soit le seul exemple connu actuellement. Malgré cette exception, il n’en reste pas moins certain que les organismes végétaux ont une extension verticale très restreinte, qui contraste singulièrement avec la faculté que les animaux pélagiques possèdent de descendre jusqu'aux plus grandes profondeurs, el d’y vivre. Or comment ces animaux trouvent-ils leur nour- riture ? Ceux qui habitent d’une manière constante les régions éclairées, ou ceux, en bien plus grand nombre, que leurs migrations diurnes ramènent périodiquement à la surface, trouvent dans les végétaux unicellulaires et les algues une nourri- ture abondante et assurée. Tous ces organismes superficiels, végétaux et animaux, ont,en général, une vie très courte, et, lorsqu'ils ont cessé de vivre, ils tombent dans les régions profondes des mers où ils servent de nourriture aux habitants de ces régions. Des milliards de cadavres tombent ainsi continuellement dans les profondeurs, el tant qu'ils ne sont point entrés en décomposition, phénomène que la salure de l’eau, l’abaissement de la température, la richesse en acide carbonique R. KŒHLER. — LES CONDITIONS D'EXISTENCE DES ORGANISMES PÉLAGIQUES 19 et l'augmentation de la pression ! contribuent sin- gulièrement à retarder, ils constituent pour les pélagiques profonds une nourriture très suffisante. C'est ainsi qu'on retrouve dans le corps des Phæo- dariés, qui habitent jusqu'à 5.000 ou 6.000 mètres de profondeur, les débris des Radiolaires de la sur- face. La plupart des pélagiques quisont canlonnés dans les profondeurs moyennes sont d'ailleurs carnassiers et, en plus des organismes qui leur tombent d'en haut, ils trouvent dans les formes pélagiques qui émigrent de la surface une proie vivante; cette proie leur revient régulièrement après être allé chercher dans les zones éclairées la nourriture végétale qui fait défaut dans les régions obscures. J'appelle l'attention sur le rôle économique important joué par les pélagiques soumis à ces oscillations périodiques, qui servent d’intermédiaires entre les organismes végétaux de la surface et les animaux des profondeurs, et sont en quelque sorte les pourvoyeurs de ces derniers. Si enfin nous tenons comple de la présence pos- sible de végétaux vivants, tels que l’Æalosphæra viri- dis, à de grandes profondeurs, nous conclurons que la nourriture végétale ou animale est suffisamment assurée aux animaux pélagiques, au moins Jusqu'à une certaine limite. Il est incontestable qu'à me- sure que la profondeur augmente la nourriture qui tombe d’en haut devient moins abondante, el la recherche des aliments plus diflicile. Aussi les animaux capables de supporter la famine pendant un cerlain temps, ou mieux armés pour la capture de leur proie, ou encore ceux qui se contentent de débris morts, sont les seuls qui résistent. Cette dif- ficulté dans la recherche de la nourriture est in- contestablement le facteur principal qui détermine la disparition progressive de la vie animale dans les profondeurs, facteur beaucoup plus important que l'augmentation de pression et l'abaissement de température. IT Bien qu'ils appartiennent aux ordres les plus variés ?, les animaux pélagiques présentent un certain nombre de caractères communs résultant de l'adaptation à un même genre de vie. Le plus saillant est la transparence de leurs tissus, si par- faite chez beaucoup d’entre eux qu'ils sont presque invisibles dans l’eau et que leur corps paraît être de cristal. Les Siphonophores, les Cténophores, les 1 Les expériences de M. Certes, confirmées par celles de M. Regnard, ont montré que les fermentations étaient forte- ment ralenties par une pression de 300 atmosphères et s’arré- taient complètement à 600 atmosphères. 2 Je renvoie, pour tout ce qui concerne la description des animaux pélagiques, à l'excellent article de M. Viguier sur /« faune pélagique (Revue générale des Sciences, t. I, pages 433 et 482). Méduses, les Tuniciers pélagiques, un. grand nombre de larves, ont le corps constitué par des tissus opalins, et c'est à peine si certaines régions du tube digestif et le foie offrent une coloration brune qui tranche nettement sur tous les autres organes si parfaitement transparents. Cette trans- parence qui est ineontestablement un résultat de la sélection naturelle, a pour effet de permettre aux animaux pélagiques d'échapper plus facile- ment à leurs ennemis : c’est un véritable mimé- tisme. Un grand nombre d’animaux pélagiques qui flottent à la surface de l’eau, et dont une partie du corps émerge constamment, offrent un autre exemple de mimétisme dans leur coloration bleue brillante, qui, à une certaine distance, se confond avec celle de l’eau. Ce phénomène s'observe chez les Velella, Porpita, Physalia, Minias cyanea, Jan- thina, Glaucus. I est à remarquer que la plupart de ces formes voyagent toujours en grandes bandes; les animaux pélagiques en effet sont souvent des animaux sociaux, ou tout au moins la plupart d’entre eux se rencontrent en quantités colossales dans la même région océanique, et il est fort rare de capturer dans une pêche un échantillon unique d'une espèce donnée. Parmi les nombreuses espèces qui forment de grandes agglomérations, je n'en citerai que quelques-unes. On sait combien sont abondantes les Noctiluques; les Pyrocystis noc- tiluca et fusiformis (fig. 2 et 3) qui les remplacent dans les mers chaudes, s’y montrent tout aussi nombreux. Les Orbinulines et les Globigérines, dont les coquilles forment de puissants dépôts au fond des mers, vivent en troupes considérables, et dans certaines régions du Pacifique, le Challenger en a rencontré (Pulvinulina, Pullenia) qui formaient de véritables bancs. Parmi les Radiolaires, certains Polycyttaires dans les mers chaudes, les Acantho- metron dans les mers froides, les Phæodariés dans les grandes profondeurs, sont toujours représentés par d'innombrables individus. Les Collodariés (et particulièrement les Sphéro- zoidés) couvrent parfois la surface de la mer par centaines de millions, et brillent la nuit comme des Noctiluques. En ce qui concerne les Cœlentérés, groupe pélagique par excellence, on sait combien, par certaines journées calmes, ou pendant les nuits d'été, les Méduses, les Siphonophores et les Cté- nophores abondent dans nos mers. Les Rhizos- tomes dans les mers froides, les Sémostomes dans les mers chaudes (Awrelia, Cyanea) sont celles qui se rencontrent le plus ordinairement en grandes bandes, mais de préférence au voisinage des côtes, tandis que les grandes agglomérations de Pélagies préfèrent la haute mer. Parmi les Siphonophores, les Diphyides dans toutes les mers, les ?ysalides, 80 R. KŒHLER. — LES CONDITIONS D'EXISTENCE DES ORGANISMES PÉLAGIQUES les Porpitides, les Velellides dans les mers chaudes, s’observent loujours en troupes serrées. Les Bolina, les Æucharis et les Beroëés sont parmi les Cléno- phores sociaux, ceux qu'on observe le plus fré- quemment; mais il est à remarquer que les trois ordres de Gælentérés sont ordinairement associés. Parmi les animaux plus élevés en organisation, ceux que l’on rencontre le plus souvent réunis en grand nombre sont les Ptéropodes et les Tuniciers. Les Clio borealis et Limacinaæ arctiea forment, dans les mers seplentrionales, des troupes compactes qui constituent la nourriture habituelle des grands Cétacés ; Les Creseis et ÆHyalea sont si nombreux dans les mers tempérées ou chaudes que leurs rescence, propriété qu'ils partagent avec quelques formes abyssales, Crustacés, Polypes, etc. Cette phosphorescence suflitpour entretenir une certaine clarté dans cette zone immense qui s'étend entre les couches superficielles que le soleil éclaire et le fond de la mer. Lorsqu'on songe au nombre incal- culable d'animaux qui, Loutes les nuits, répandent à la surface de l'Océan une lueur dont l'étendue et l'éclat sont décrits avec enthousiasme par ceux qui l’ont observée dans les mers chaudes, on est conduit à admettre que la zone profonde habituel- lement habitée par ces êtres est loin d’être plongée dans une obscurité absolue. On peut remarquer que certains animaux pélagiques possèdent des CRUSTAGÉS PÉLAGIQUES PROFONDS DE LA MÉDITERRANÉE Slylocheiron mastigophorum. — Fig. 5 et 6. Arachnomysis Leukartii. — Fig. T et 8. Sergestes magnificus. — Fig. 9. Miersia clavigera (d'après Chun). Fig. 4. coquilles forment, dans certains fonds, des agglo- méralions comparables aux dépôts dus aux Fora- minifères. Chez les Tuniciers, les troupes de Salpes se rencontrent aussi bien dans les mers tempérées que dans les mers chaudes, et la phosphorescence des océans tropicaux est en grande partie due à des essaims de Pyrosomes. Les Sugitla sont aussi des animaux sociaux : ilen est de même de beaucoup de Copépodes et d'Ostras codes. Le Calanus fnmarchius forme dans les mers froides des agglomérations immenses, analogues à celles que les Corycœus pellucidus, Undinia Darwin, ÆEuchæœta prestandreæ, forment dans les mers chau- des. Les troupes de Calanus propinquus sont parfois si serres qu'elles font, à la surface de l'Océan, de grandes taches rouges. On sait enfin que la phos= phorescence de la mer est souvent due à une quan- tité colossale de Copépodes et d'Ostracodes. Il est encore un caractère commun à un grand nombre d'animaux pélagiques : c’est la phospho- yeux beaucoup plus gros que leur taille ne semble - le comporter (Alciopides, beaucoup de Crustacés), tandis qu’en revanche beaucoup d’autres ont des yeux rudimentaires ou nuls. Il est certain que les animaux pélagiques utilisent dans la recherche de leur nourriture la lumière qu’eux-mêmes ou leurs voisins fabriquent; mais néanmoins le nombre des espèces aveugles dépasse de beaucoup celui des formes pourvues d'yeux, et cela tient à ce que les animaux pélagiques habitent presque tous des régions, en somme, peu éclairées. L'absence d’yeux est quelquefois compensée chez eux par un déve- loppement considérable des organes du tact et de l’odorat ; ainsi les Décapodes et les Schizopodes des zones profondes offrent des antennes extraor- dinairement longues. (fig. 4-9.) IT La flore et la faune pélagique n’offrent pas dans toutes les mers une composition identique. Tandis R. KŒHLER. — LES CONDITIONS D'EXISTENCE DES ORGANISMES PÉLAGIQUES 81 que les Océans Arctiques sont caractérisés par d'énormes quantités de Diatomées, de Beroés, de Copépodes, de Ptéropodes; dans les zones tem- pérées dominent les Fucoïdes, les Noctiluques, les Méduses, les Cténophores, les Salpes, les Schizo- podes, qui, sous les tropiques, font place aux Murracytes, aux Oscillaires, aux Physalies, aux Pyrosomes, aux Ostracodes. Les Radiolaires sont représentés dans les mers froides par des espèces peu variées, mais par de nombreux individus, qui appartiennent presque tous au genre Acantho- metron, tandis que les mers chaudes renferment des formes très variées dont les plus abondantes sont des Polycyttaires. On peut dire, d’une manière générale, que les organismes pélagiques devien- nent plus abondants et plus variés à mesure que l’on se rapproche de l'équateur. La richesse de la faune et de la flore pélagiques dans les régions tropicales a été constatée par les naturalistes du Challenger et du Vettor Pisani qui, dans l'Atlantique comme dans le Pacifique et l'Océan Indien, ont observé des quantités étonnantes d'animaux péla- giques, rares pendant le jour à la surface, très abondants au contraire à partir d’une certaine profondeur, mais qui, la nuit, montaient à la sur- face en bandes immenses. Cette richesse des mers tropicales en organismes pélagiques tient incon- testablement à l’action des rayons solaires qui se font sentir plus énergiquement que dans les régions polaires, et qui pénètrent plus profondément dans la masse des eaux. Il en résulte que les végétaux prennent un développement el une vigueur qu'ils ne possèdent nulle part ailleurs : aussi la vie animale s'y manifeste-t-elle avec une intensité et une ampleur extraordinaires. Il y a done parmi les animaux pélagiques cer- taines familles ou certaines espèces qui se trouvent plus fréquemment dans les mers tropicales, ou même qui sont parquées assez étroitement dans telle mer chaude, tempérée ou froide. Les animaux pélagiques sont en effet très sensibles aux varia- tions de température, et cette sensibilité fait que quelques-uns se cantonnent dans une région où ils trouvent la température qui leur convient le mieux. Peut-être les modifications dans la salure de l’eau déterminent-elles aussi certains groupe- ments d'animaux pélagiques, car ceux-ci se res- sentent du moindre changement dans la composi- tion de l’eau, et ils sont rares dans les mers peu salées comme la Baltique !. Mais à côté de quelques formes limilées à une région déterminée, on en trouve beaucoup d’autres, — la majorité des animaux pélagiques —, dont ‘ Les Aurelia et Cyanea créent, à cet égard, une remar- quable exception. l'extension géographique est très vaste. Ce fait tient à ce qu'ils peuvent être transportés au loin par les courants ou les vents, et à ce que beaucoup sont bons nageurs, mais aussi à ce que la plupart d'entre eux sont très anciens et existaient déjà à une époque où les continents actuels, n'étant pas encore formés, ne créaient pas entre les mers les barrières qui existent aujourd’hui. Enfin les oscil- lations en profondeur qu’elles subissent régulière- ment permettent aux mêmes formes d'habiler des régions différentes, où elles choisissent la zone bathymétrique qui leur convient le mieux. Le transport des animaux pélagiques à grande distance, qui s'effectue parles courants, est d’autant plus important que, d'après les observations faites dans les grands courants océaniques,le Gulf-Stream, les courants de Falkland, de Guinée, partieulière- ment, ainsi que dans ceux de l'Océan Indien et du Pacifique, les eaux qu'ils charrient sont beaucoup plus riches en organismes pélagiques que les ré- gions calmes avoisinantes. Le contraste est quel- quefois très marqué, surtout quand le courant est étroit, et il s'accompagne de différences dans la température et la couleur de l’eau; non seulement la faune est plus riche dans le courant que dans la région calme, mais elle présente parfois une com- position toute différente !. IA Nous avons maintenant une question fort impor- tante à examiner : c’est la répartition en profon- deur des animaux pélagiques. On a cru autrefois que les fonds des mers cessaient d'être habités lorsque la profondeur dépassait une certaine li- mite; or les dragages exécutés méthodiquement ont montré que dans les fonds de plusieurs milliers de mètres, vivait une faune spéciale et parfois très riche. Pareille erreur a régné dans la science au sujet des animaux pélagiques, avec cette différence que cette erreur est à peine dissipée actuellement. Il n’y a pas bien longtemps que des naturalistes éminents, comme Agassiz, écrivaient qu'au delà de cent brasses la vie pélagique était impossible, et qu'entre la zone superficielle, habitée par les formes 1 Ces différences ont été remarquées dans plusicurs régions. Au voisinage des côtes de Chili, les naturalistes du Challen- ger ont observé un contraste marqué entre le courant littoral froid, dont les eaux offraient une couleur verte, et les eaux calmes et bleues de l'Océan; ils ont remarqué de plus que les Globigérines, les seuls organismes observés dans Ja région calme, furent brusquement remplacés par des Diatomées, des Infusoires et des Hydroméduses dès que le courant fut at- teint. Devant la côte du Japon,le Challenger rencontra deux courants très voisins et possédant des faunes complètement différentes : un courant froid, riche en Diatomées, en Nocti- luques et en Hydroméduses, et un courant chaud où domi- naient les Radiolaires et les Globigérines. Des observations analogues ont été faites en d’autres régions par le Challenger ainsi que par le Vetlor Pisani et le National. es 82 R. KŒHLER. — LES CONDITIONS D'EXISTENCE DES ORGANISMES PÉLAGIQUES pélagiques, et les abimes de la mer habités par les animaux de fond, régnait une solitude absolue. Les premiers résultats importants concernant la présence d'animaux pélagiques dans les profon- deurs furent obtenus par le Challenger grâce à l'em- ploi de filets profonds, ou {ow-nets, que l’on descen- dait isolément dans de grandes profondeurs, ou que l’on attachait au filet des dragues, et qui ba- layaient l’eau en direction horizontale. Les échan- tillons qui furent capturés étonnèrent les natura- Fig. 13. Fig. 14. trefois la faune pélagique, et qui habitent les vagues de la mer ou descendent à une faible pro- fondeur, il existait toute une série de formes qu'on pouvait capturer à différentes profondeurs, jusqu’à 3.000 et4.000 mètres. Parmi les êtres recueillis dans les profondeurs, la plupart sont susceptibles de monter périodiquement dans les régions superfi- cielles et partagent ainsi leur vie entre la surface et les profondeurs. Mais il en est d’autres qui pa- raissent n’abandonner jamais les plus grandes pro- Fig. 15. TYPES DE RADIOLAIRES PHŒODARIÉS Fig. 10. Aulaclinium aelinastrum. — Fig. 11. Gazeletta melusina. — Fig. 12. Challengeria Murrayi. — Fig. 13. Ch. Mose- leyi. — Fig. 14, Ch. Wywillei. — Fig. 15. Polypetta tabulata. — Fig. 16. Aulosphæra dendrophora(d’après Hæckel). listes par leur nombre et leur variété. Mais, comme ces filets restaient ouverts pendant la descente et pendant la montée, il était difficile de rapporter exactement les animaux à une profondeur déter- minée. D’autres filets, la trappe de Sigsbee, les fi- lets de Palumbo et de Petersen, permettant l’ou- verture et la fermeture automatiqne du filet à un niveau donné, furent utilisés, soit par les natura- listes du Vettor Pisani dans leur voyage autour du monde, soit par Chun, qui a institué tout récem- ment une série d'expériences fort importantes commencées dans la Méditerranée et continuées aux iles Canaries. Ces recherches ont montré qu'à côté des espèces dont l’ensemble constitue ce que l’on appelait au- fondeurs; ce sont les vrais animaux pélagiques profonds, et ils constituent une faune remarquable dont la richesse et l'importance sont vérilable- ment étonnantes. Je veux d'abord m'occuper de ces derniers, en examinant rapidement les formes les plus intéressantes qui ont élé capturées, soit dans la Méditerranée, soit dans les océans ouverts. Les Radiolaires sont de tous les animaux péla- giques ceux qui paraissent susceptibles de des- cendre jusqu'aux plus grandes profondeurs : ce sont les seuls qu’on rencontre à partir de 3.500 mètres jusqu’à 4.000 et 5.000 mètres !. Les formes ! Le Challenger a capturé certaines espèces de Radiolaires (Tympanidium binoctonum, Cycladophora favosa, Theocapra Aldrovandi etc.) à des profondeurs dépassant 7.000 mètres. és des à» … 1 sf 2 R. KŒHLER. — LES CONDITIONS D'EXISTENCE DES ORGANISMES PÉLAGIQUES 83 profondes (fig. 10-16) appartiennent aux deux | duses (Pectis, Pectyllis), des Narcoméduses (Œgi- nura), des Stauroméduses (Tesserantha, fig. 17), des Péroméduses (Periphylla, fig. 18), des Discoméduses (Atolla, Leonura, fig. 19). Dans la Méditerranée, les Trachynema euryqaster, Aglaura hemistoma, Œginopsis mediterranea, ele., ont été capturés par Chun à 1.300 mètres. classes des Nesselariés et des Phœæodariés (Osculosa) qui deviennent de plus en plus abondantes à me- sure que les autres Radiolaires (Porulosa) disparais- sent. Il est à remarquer que les Radiolaires des profondeurs ont des formes moins délicates, plus robustes, que les types superficiels; leur squelette = hate Enter ae Fig. 17. TYPES DE MÉDUSES VIVANT À DE GRANDES PROFONDEUKS Fig. 17. Tesserantha connectens (3500 mètres). — = est toujours siliceux, et non calcaire, et il se trouve ainsi inattaquable par l'acide carbonique dissous dans l’eau, acide dont la proportion est considérable à une profondeur de 5.000 mètres. L'étude très complète de la collection du Challenger a montré à M. Hæckel que les Radiolaires n'étaient pas répartis uniformément dans les profondeurs de l'Océan. Une très riche faune comprenant surtout des Porulosa, s'épanouit à la surface des mers et jusqu’à une profondeur de 500 mètres, tandis que les formes profondes se développent à partir de 2.000 mètres. La zone comprise entre 500 et 2.000 mètres qui renferme à la fois des Porulosa et des Osculosa, est beaucoup plus pauvre en Radio- laires, D'ailleurs la plupart des Radiolaires, aussi bien les formes profondes que les formes superti- cielles, se cantonnent habituellement dans une zone déterminée et se rencontrent toujours au même niveau; ils ont par conséquent une extension bathymétrique très limitée. Toute une série de Méduses ont été caplurées par le Challenger dans des profondeurs variant entre 900 et 3.500 mètres (fig. 17-19). Plusieurs de ces formes paraissent spéciales aux profondeurs et ne fréquentent point les zones superficielles. Ce sont des Leptoméduses (P#ygochena), des Trachomé- Fig. 18. Periphylla mirabilis (1180 mètres). — Fig. 19. Leonura lerminalis (3500 métres). Une classe toute nouvelle de Siphonophores, les Auronectés (fig. 20), a été trouvée par le Challenger dans des profondeurs variant entre 350 et Fig. 20. Sfephalia Corona. Type du Siphonophore Auronecté capturé à 900 mètres de profondeur : 4, pneumatocyste ; n, couronne de cloches natatoires; au, aurophore (d’après Hæckel). 1.000 mètres. Ces Siphonophores, qui n’ont jamais été capturés dans les eaux superficielles, ont un 84 R. KŒHLER. — LES CONDITIONS D'EXISTENCE DES ORGANISMES PÉLAGIQUES aspect particulier, et présentent un développe- ment inusité des appareils hydrostatiques (4.n.au) qui provient incontestablement d’une adaptation à la vie profonde. D'autres Siphonophores apparte- nant surtout aux Rhysophysides (Aurophysa, Lino- physa) ont été capturés par la Gazelle à 2.600 mètres ; lors de l'expédition du Villor Pisani, les lignes servant aux sondages profonds, dans l'Atlantique comme dans le Pacifique, revenaient fréquemment garnies de tentacules arrachés et de fragments de grands Siphonophores, ce qui indiquait une popu- lation très riche de ces animaux, et aussi la pré- sence d’une quantité énorme de petits animaux dont ils font leur nourriture. Les Annélides pélagiques habitent généralement près des côtes les zones superficielles; quelques espèces cependant, les Tomopteris elegans el eucheta (fig. 2) de la Méditerranée, ainsi qu'une très cu- rieuse Phyllodocide découverte par le Challenger, la Genetyllis oculatu, caractérisent les grandes pro- Pig. 21. Fig. 21. Tomopteris euchæla, annélide pél Fig. 22. rique de la Médi- terranée vivant entre 600 et 1300 mètres de profondeur (d'après Chun). — Fig. 22. Pontrostratiotes abyssicola, Co- pépode capturé par le Challenger à 3506 mètres (d’après Murray). fondeurs. Les Sugitta et les Spadella se rencontrent jusqu'à 1.000 mètres, et les espèces des profondeurs diffèrent des formes superficielles. Au contraire, les Crustacés fournissent à la faune pélagique profonde de nombreuses espèces. Les Copépodes habitent de préférence les zones su- perficielles ou moyennes, et ne dépassent guère 1.500 mètres. Toutefois, une espèce, Pontostratioles abyssicola (fig. 22), qui vit à 3.500 mètres, est tout à fait caractéristique des profondeurs. Les Ostra- codes sont répartis plus uniformément dans les Océans, et le Challenger n'a pas trouvé moins de huit espèces différentes à des profondeurs de 3.200 mètres. Plusieurs Schizopodes habitent le mème niveau el appartiennent aux genres #Sfilo- cheiron (fig. 4), Arachnomysis (fig. 5 et 6; et Me- maloscelis ; ils offrent parfois des organes lumineux d'une organisation très compliquée. Les Amphi- podes hypérines, surtout les Phronimides et les Oxycéphalides (PA. elongata et sedentaria, Ox.latiros- tris) vivent de préférence entre 4.000 et 4.500 mè- tres, et sont associés, dans celle région, à certains Décapades appartenant aux Sergestides et aux Ephyrines (Sergestes magnificus (fig. T et 8) et Miersia clavigera (fig. 9) de la Méditerranée, S. San- guineus de l'Atlantique). Enfin certaines espèces de Ptéropodes (Spirialis), d'Appendiculaires (Sfegosoma et Megalocereus) et de Céphalopodes (Cirroteuthis magna) paraissent n’a- bandonner jamais les profondeurs. Il en est de même d'une forme très intéressante, l’Octacnemus, étudiée par Moseley, qu'on doit rattacher aux Salpes, mais qui représente un type très modifié adapté aux profondeurs. On voit, par cette énumération, quelle richesse et quelle variété présente cette faune pélagique profonde dont l'existence a été contestée. Mais que de choses nous resteraient à connaitre au sujet de ces animaux pélagiques sur lesquels nous ne sa- vons guère qu'une seule chose, c’est qu'ils exis- tent. Ils ont été capturés le plus souvent dans des conditions qui ne permettent pas de les rapporter à une profondeur déterminée, au cours de longues expéditions où l’on disposait d’un temps trop li- mité pour que l’on püt s’attarder à des observa- tions minulieuses et répéler dans une même ré- gion les mêmes observations à différentes pro- fondeurs. Aussi nous connaissons fort mal la distribution verticale des animaux pélagiques pro- fonds. On sait cependant, et ce résultat est impor- tant, que les Radiolaires vivent à des profondeurs déterminées etil doit en être ainsi d’autres formes. Ainsi les Siphonophores paraissent s'épanouir de préférence à des profondeurs de 1.000 mètres. Il est probable que la pression, qui devient con- sidérable à de grandes profondeurs, joue un cer- tain rôle dans cette répartition en zones bathymé- triques distinctes des animaux pélagiques !. On ! On sait que les animaux soumis expérimentalement à des pressions de 400 à 500 atmosphères s’engourdissent ettombent en l’état de vie latente; ils reprennent leur vivacité si l’on diminue la pression, mais si on la maintient pendant un certain temps, ils deviennent risides et gonflés, puis ils meu- rent. Ces animaux ont augmenté de poids et leurs tissus sont imbibés d’eau. M. Regnard admet que cette eau agit #méca- niquement en s’interposant entre le protoplasma des élé- ments et leur enveloppe, tandis que M. Dubois explique les accidents par une Aydralation, une véritable combinaison moléculaire de l’eau avec le protoplasma. Des pressions in- féricures à 200 ou 300 atmosphéères (les chiffres varient suivant les espèces) ne paraissent pas avoir d'effets sensibles sur les animaux; mais, sila pression est augmentée, les accidents apparaissent et sont d'autant plus graves que la pression est plus forte. Cette observation tendrait à prouver que la pres- R. KŒHLER. — LES CONDITIONS D'EXISTENCE DES ORGANISMES PÉLAGIQUES 85 sait encore que la faune pélagique profonde atteint son plus grand développement entre 1.000 et 2.000 mètres de profondeur, région où dominent les Sagitta, les Siphonophores, les Méduses Cras- pédotes, les Ostracodes, les Schizopodes, les Co- pépodes, les Amphipodes, les Décapodes, les Pté- ropodes, les Salpes, les Doliolum, les larves de Poissons, ete., qu'entre 2.000 et 3.000 mètres les formes précédentes sont rares et disparaissent complèlement, sauf les Ostracodes, tandis que les Radiolaires, surtout les Phæodariés, prennent un développement considérable. Ces derniers finis- sent aussi par diminuer rapidement à partir de 4.000 mètres et ils disparaissent à leur tour. Mais ces données sont encore bien vagues. y Les animaux pélagiques qui vivent entre la sur- face et une profondeur de 4.000 à 1.200 mètres sont sion n’exerce aucune influence sur les animaux qui vivent à des profondeurs moindres que 2.000 à 3.000 mètres. Les phénomènes observés expérimentalement doivent se produire dans la na- ture chez les animaux qui habitent à 4.000 et 5.000 mètres de profondeur, avec cette différence que la pénétration de Peau dans les tissus est normale chez eux; ils s’y sont adaptés d’une manière si parfaite qu'ils meurent lorsqu'on les sous- trait à ces pressions : ils sont alors ramollis comme s’ils avaient subi un commencement de coction (on sait que l’eau des pro- toplasmas a une tendance à quitter les éléments des tissus quand on soumet ceux-ci à la coction). Aussi, par le fait de la pression, les animaux, pélagiques ou non, se trouvent-ils cantonnés dans certaines zônes qu'ils ne peuvent franchir sous peine de mourir par excès ou par perte d’eau dans leurs tissus, mais à partir d’une certaine profondeur seulement : la pression n'a aucune influence sur les oscillalions pério- diques des animaux pélagiques. Toutefois il existe une certaine catégorie d'animaux péla- giques sur lesquels la pression agit plus directement que sur les autres : ce sont ceux qui, comme les Siphonophores, pos- sèdent des flotteurs, des cloches à air, etc., organes renfer- mant des gaz, et qui, par suite de cette circonstance, se trouvent plus étroitement parqués entre certaines limites qu'ils ne sauraient dépasser sans exposer à une rupture ces appareils délicats. Ces organes ont pour eux les mêmes avantages, mais aussi les mêmes inconvénients que la vessie natatoire des Poissons. Somme toute, l’action directe de la pression sur les ani- maux pélagiques ne devient importante qu'à partir d’une certaine profondeur seulement. On peut se demander si elle ne pourrait agir indirectement en modifiant la quantité absolue et les proportions relatives des gaz dissous dans l'eau. Cette action ne parait pas non plus être bien impor- tante. On sait que les eaux profondes renferment plus de gaz que les eaux superficielles : cette augmentation tient en partie à l’abaissement de température. Or cette augmentation de la tension compense la diminution d'oxygène dans les abysses. On sait que l'azote restant en proportion constante, la quan- tité d'oxygène diminue lentement, mais graduellement, avec la profondeur, tandis qu’au contraire la richesse de l’eau en acide carbonique augmente en sens inverse. Néanmoins, la quantité d’oxygène est encore suflisante dans les grandes profondeurs pour permettre de respirer aux animaux qui y vivent. La tension plus élevée des gaz dissous ne peut pro- xoquer de modifications dans les organcs respiratoires qui manquent aux animaux pélagiques. L’acide carbonique seul exerce une action sur certains d’entre eux en supposant au développement d'un squelette calcaire : aussi les pélagiques profonds qui ont un squelette, comme les Radiolaires, l’ont- ils toujours siliceux. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES 1892. en revanche beaucoup mieux connus. Tandis que les pélagiques profonds ne paraissent jamais quit- ter les régions des ténèbres et sont parqués dans des zones déterminées, ceux-ci se trouvent tantôt à la surface, lantôt à des profondeurs variables : ils habitent alternativemeni les régions chaudes et et éclairées, et les régions froides et obscures. Les oscillations que subissent ces animaux, leurs mi- gralions, ne s'effectuent pas d’une manière irrégu- lière : elles dépendent de certaines conditions et sont soumises à des lois fixes que nous allons examiner. Il est un fait d'observation assez ancienne dans la Méditerranée : c'est que le plus grand nombre des animaux pélagiques qui habitent la surface de la mer pendant l'hiver el le printemps, disparais- sent brusquement au commencement de mai pour faire de nouveau leur apparition à la fin de l’au- tomne, C'est en hiver et au commencement du printemps que la faune est la plus riche ; à cette époque les régions superficielles sont peuplées d'une foule nombreuse d'animaux élégants et dé- licats, transparents comme le cristal ou offrant de vives couleurs : Radiolaires, Méduses, Siphono- phores, Cténophores, Salpes, Crustacés, etc. Puis, tout d’un coup cette foule disparait aussi brusque- ment qu'elle s'était montrée, et pendant l'été il ne reste plus que quelques rares habitants dans les couches éclairées. Que sont devenus les autres? Sont-ils morts après l’époque de la reproduction ? ont-ils été emportés plus loin par des courants ou se sont-ils réfugiés dans les profondeurs ? Les pêches au filet profond permettent de résoudre cette question et montrent que ces animaux ne subissent pas de notables déplacements en direction horizontale, mais qu'ils s’enfoncent dans les profondeurs où l’on peut alors les capturer en grand nombre. En pêchant au large de Naples, à des profondeurs comprises entre 500 et 1200 mètres, et pendant l'été, à une époque où la surface de l’eau était très pauvre en animaux pélagiques, Chun a pu ramener dans son filet la plupart des formes qu'il capturait à la surface de la mer l'hiver précédent : Méduses Craspédotes, Cestidés, Diphyides, Tomoptérides, Sagitta, Alciopides, Copépodes, larves de Déca- podes, Appendiculaires, Ptéropodes, Céphalopodes. Le nombre et la variété des échantillons qui rem- plissaient les filets indiquaient la présence, dans ces profondeurs, d’une faune dont on n'avait jamais soupeonné la richesse. Orilestincontestable qu’én arrivant à ces grandes profondeurs, les animaux pélagiques se trouvent dans des condilions très différentes de celles du milieu qu'ils viennent de quitter. Les oscillations ne sont pas assez étendues pour que l’augmen- 3° 86 R. KŒHLER. — LES CONDITIONS D'EXISTENCE DES ORGANISMES PÉLAGIQUES tation de pression ait sur eux une influence quel- conque ; d’ailleurs ces migrations s'effectuent très lentement; mais il est un autre agent dont l'effet est très sensible : c’est la température qui devient plus basse. On sait, en effet, que dans la Méditerra- née latempérature décroit assez rapidement avec la profondeur, qu’elle tombe, en été, à 18° vers 50 mè- tres, à 14° vers 200 mètres et qu’elle conserve, à par- tir de 500 mètres jusqu'aux plus grandes profon- deurs,une température uniforme de 13°5 à 13°. Cette température constante de 13° est celle que présen- tent pendant l'hiver les couches superficielles !. L'uniformité de la température à partir d’une cer- taine profondeur explique pourquoi les animaux pélagiques, dansleurs migrations saisonnières, peu- vent descendre jusqu’à 1400 mètres (et sans doute au delà), puisqu’à cette profondeur la température est la même, et que l'obscurité n’est pas plus pro- fonde qu’à 500 mètres. Des observations sur les migrations saisonnières des animaux pélagiques dans les océans ouverts nous font actuellement défaut, el il est possible que les oscillations y soient beaucoup moins éten- dués que dans la Méditerranée, puisque la tempé- rature décroit continuellement à mesure que la pro- fondeur augmente. Dans les régions tempérées, la température est de 4° à 5° à 1.000 mètres, et dans les plus grandes profondeur, à 5.000 mètres, elle oscille généralement entre 0° et + 2°. Les eaux de l'Océan se trouvent ainsi partagées en zones dont les Lem- pératures, de même que les pressions qu'elles supportent, sont différentes, et ces deux circons- tances nous expliquent pourquoi les pélagiques profonds vivent à des profondeurs déterminées. Nous avons quelques exemples de ces cantonne ments dans les océans ouverts, tandis qu'on n'en connait pas dans la Méditerranée. Mais il est un autre ordre d’oscillations que subissent les animaux pélagiques dans l'Océan comme dans la Méditerranée, et qui sont plus faciles à étudier que les précédentes. Quelle que soit l’époque de l’année, dans quelques régions qu'ils vivent, les animaux pélagiques quiltent la surface des eaux dès que le soleil se lève pour s'abriter dans les régions moins chaudes et moins éclairées, etils remontent ensuite dès que le soleil a disparu. La plupart d'entre eux ne se montrent que la nuit à la surface des eaux; quelques-uns même n'y passent pas la nuit entière et n'y font qu'un séjour de quelques heures. Ces oscillations diurnes sont moins étendues que les oscillations 1 La température élevée qui règne dans les profondeurs de la Méditerranée est la cause pour laquelle la faune abys- sale y est si pauvre. Ce phénomène n'est pas spécial à la mer Méditerranée et s'observe dans d’autres mers fermées telles que la mer Rouge, la mer de Mindanao, etc. annuelles : les animaux descendent à une pro- fondeur qui varie entre 50 et 200 mètres. Les oscillations diurnes et les migrations saison- nières constituent, dans la vie des animaux péla- giques, un trait caractéristique, si constant que nous les retrouvons chez les pélagiques d’eau douce. À quelle influence devons-nous les attribuer? Il est évident que si les animaux pélagiques aban- donnent une région pour émigrer dans une autre, c’est qu'ils doivent trouver dans cette dernière des conditions d’exislence plus favorables ou une nourriture plus abondante et mieux à leur portée. Or, ce que nous avons dit plus haut sur l’exten- sion en profondeur de la vie végétale, montre que les pélagiques, à mesure qu'ils s’enfoncent, ren- contrent des régions où les végétaux deviennent de plus en plus rares. De plus, en descendant dans ces régions, ils ont plus de chances d’être dévorés par les pélagiques profonds dont ils forment la nourriture. La recherche de la nourriture n’a donc rien à voir avec ces migrations que nous ne pou- vons rapporter qu’à l'influence de la lumière et de la chaleur. Or il est assez difficile de faire la part de ce qui revient à chacun de ces agents, qui sans doute interviennent tous deux dans une certaine mesure. On a remarqué que certaines espèces, pour- vues ou non d'yeux, étaient très sensibles à l’ac- tion de la lumière. Chun a observé, d'autre part, que d’autresanimaux pélagiquesne paraissaient pas gênés par un éclairage intense et étaient au con- traire très sensibles à une élévation de tempéra- ture. Comme d’ailleurs la plupart des animaux pélagiques sont aveugles, il semble que c’est beaucoup moins l’éclairement des couches super- ficielles que leur échauffement par les rayons du soleil, qui détermine les migrations périodiques dans les grandes profondeurs. Un autre fait vient confirmer cette manière de voir. Dans les mers arctiques certaines espèces se montrent à la sur- face à une époque où elles sont confinées à de grandes profondeurs dans les mers chaudes. Aïnsi l'expédition du Plankton a rencontré en été, dans les mers arctiques, des masses énormes de Béroés, alors que dans la Méditerranée on ne les rencon- trait que dans la profondeur. Tous les animaux pélagiques ne subissent pas les oscillations que nous venons de décrire. Un certain nombre d’entre eux constituent une sorte de faune pélagique superficielle constante qui n'abandonne jamais la surface, pas plus le jour que la nuit, pas plus l'hiver que l'été. Aïnsi font de nombreux Radiolaires polyeyttaires (la plupart des Sphærozoïdés), des Méduses (Eucopides), les Cténophores lobés (Zucharis, Bolina), quelques Sagilta (S. bipunctata), certains Copépodes (Pon- tellina). Ces animaux sont adaptés aux variations R. KŒHLER. — LES CONDITIONS D'EXISTENCE DES ORGANISMES PÉLAGIQUES 81 que subit la surface des eaux et sont indifférents à la lumière et à l'échauffement dû aux rayons solaires. Quelques espèces, les Vélelles, les Por- pites, présentent même certaines modificalions par- ticulières, grâce auxquelleselles peuventèêtre trans- portées à de grandes distances par les vents. Cette faune superticielle, soumise à toutes les variations atmosphériques, ne se montre que lorsque les circonstances extérieures le permettent; au moindre coup de vent, à la moindre pluie qui abaisse la salure des couches superficielles, toute celte population disparait et se cache à quelques mètres de profondeur. Certaines espèces sont tout aussi indifférentes aux variations de lumière et de température et peuvent être capturées à la même époque, à la surface et dans les profondeurs, les Diphyes Siboldi, Euphausia pellucida, Salpa demo- eratica et les petits Doliolum, par exemple. D'autres espèces enfin sont susceptibles de vivre, tantôt à la surface, Lantôt dans les profondeurs, suivant leur âge. Ainsi les Cténophores lobés de la Médi- terranée, qui ne renferment guère de formes pro- fondes, habitent, à l’état de larves, la surface de l’eau; au commencement de l'été ces s’enfoncent jusqu'à une profondeur de 1.000 mètres où elles subissent une métamorphose postem- bryonnaire, et remontent à la surface au commen- cement de l'hiver. Ii existe certaines formes qui, au lieu d’habiter la surface pendant toule une saison, n'y font qu'un très court séjour de quelques semaines ou même de quelques jours. Telles sont les Afhorÿbia et Physophora parmi les Siphonophores, et les Chu- rybdea et Periphylla parmi les Méduses. Encore ces espèces se montrent-elles régulièrement tous les ans ; mais on en connait d’aulres quir'apparaissent que très irrégulièrement et à des époques très éloignées : ainsi | Umbrosa lobata, la Cotylorhyza tu- bereulatu et d'autres Méduses sont parfois {très com- munes dans la Méditerranée de juin à septembre, puis elles disparaissent pendant plusieurs années pour reparaitre ensuile. Parmi les Clénophores du golfe de Trieste, un seul, l'£Zvcharis mullicornis, s'y montre chaque année à la surface, tandis que les autres n'y paraissent que de temps en temps. Hæ- ckel, en 1873, avait observé dans le golfe de Smyrne des troupes énormes d’une Pélagide, la Chrysaora hyoscella; en 1887 il n'a plus relrouvé un seul échantillon de cette méduse, mais, à sa place, vi- vait une Cyanide, la Drymonema cordelia. Ces apparitions irrégulières et ces disparilions soudaines sont difficiles à expliquer. Sont-elles en rapport avec la reproduction, tiennent-elles à une disette qui force ces animaux des ténèbres à cher- cher, dans les régions éclairées, la nourriture qui leur fait défaut, ou à une éclosion simultanée dans larves une même région d'un grand nombre d'œufs? Dans d’autres circonstances, des quantités énormes d'animaux pélagiques sont amenées passivement à la surface par des courants profonds; ces tourbil- lons s’observent fréquemment, quoique très irré- gulièrement, sur nos côles; mais ce phénomène se produit régulièrement dans certaines régions où l’on a remarqué qu'aux époques de pleine lune les courants marins devenaient beaucoup plus vio- lents et produisaient des mouvements tourbillon- nants qui amenaient à la surface de nombreux pé- lagiques profonds. C'est ainsi que Chun, aux Canaries, a pu recueillir à la surface de l’eau les échantillons de Sergestes sanguineus, Rhabdocera armatum, Stylocheïon mastigophorum, Oxycephalus typhoïdes et plusieurs Ostracodes, toutes formes ca- racléristiques des profondeurs. Les animaux pélagiques qui vivent dans les pro- fondeurs moyennes et qui sont soumis aux oscilla- lions diurnes et saisonnières que nous venons de décrire, sont incontestablement les mieux favorisés sous le rapport des conditions d'existence, puis- qu'ils partagent leur vie entre les régions calmes et obscures des profondeurs etles régionséclairées, animées et surtout riches en nourriture végélale de la surface. Remarquons que ces êtres sont infiniment plus nombreux, comme espèces et comme individus, que les pélagiques cantonnés dans les régions superficielles, et peut être aussi que les pélagiques des grandes profondeurs, sur le développement desquels nous n'avons pas encore de données précises, mais dont nous savons cepen- dant qu'ils diminuent rapidement au dessous de 9.000 mètres. Il résulle de tout ce que nous venons de voir que la plupart des pélagiques sont surtout des animaux des ténèbres et qu’un certain nombre d’entre eux seulement passent une partie de leur --et ce n’est pas la plus longue, — dans les régions océaniques éclairées. Dès lors, au lieu de vie, parler des migrations en profondeur des animaux pélagiques, et de dire que pendant l'été ou pendant le jour ils fuient la lumière et la chaleur et se réfugient dans les profondeurs, ne vaudrait-il pas mieux renverser la phrase et dire que les animaux habitant habituellement une zone comprise entre 100 et 1000 mètres de profon- deur, remontent périodiquement, soit la nuit, soit l'hiver, pour trouver dans les régions un peu plus chaudes, mais surtout mieux éclairées, la nourri- ture végélale vivante qui leur fait défaut ou qui leur est si parcimonieusement distribuée par la nature dans les régions profondes qu'ils habitent? Ce ne sont pas les vagues, mais bien ces régions de profondeur moyenne qui sont le berceau des animaux pélagiques, berceau duquel partent, à pélagiques, 88 J.-A. LE BEL. — LES LABORATOIRES D'ENSEIGNEMENT CHIMIQUE PRIMAIRE À PARIS certains moments, soit régulièrement et à des | époques très rapprochées, soit irrégulièrement et à de longs intervalles, des essaims qui se dirigent vers la surface et y font un séjour plus ou moins long. C'est dans ces régions que la vie pélagique s'épanouit avec une intensité et une richesse de formes que les pêches en eau profonde nous font à peine entrevoir, mais dont nous pouvons nous faire une idée lorsque, par une nuit calme, alors qu'ils trouvent dans les eaux superficielles la même tranquillité absolue et les mêmes conditions de température et de lumière que dans les profondeurs où ils vivent d'habitude, d'innombrables essaims d'animaux pélagiques montent à la surface de l'Océan, et, la transformant, jusqu'aux limites de l'horizon, en une immense plaine lumineuse, nous font alors assister au sublime spectacle de la mer phosphorescente, inoubliable pour celui qui put l’observer une fois dans toute sa splendeur. R. Kœhler, f Docteur ès sciences et en médecine, Chargé d'un cours complémentaire de Zoologie à la Faculté des Sciences de Lyon. LES LABORATOIRES D'ENSEIGNEMENT CHIMIQUE PRIMAIRE À PARIS À propos de la suppression dont était menacé le laboratoire de chimie organisé par M. Frémy au Jardin des Plantes, le monde chimique s'est ému de voir disparaitre le seul établissement ac- cessible aux élèves hors cadre, c’est-à-dire n'ap- partenant à aucune école du Gouvernement et où il y eût un enseignement primaire régulièrement organisé. La Société chimique a résolu de présenter au Ministre de l'Instruction publique un rapport dans lequel elle signalerait cette lacune si grave dans notre enseignement universitaire, et une démarche analogue a déjà été faite par plusieurs membres de la section de Chimie de l'Académie des Sciences. Le Ministre a bien voulu ordonner la réouverture du laboratoire ! ; mais si, par là, on évite de retirer aux jeunes gens les moyens d'instruction sur les- quels ils avaient compté, l'institution n’en reste pas moins dans une siluation précaire et son organi- salion demeure insuffisante, puisque la chimie minérale seule y est enseignée. Ce n’est pas la première fois que les lacunes de l'enseignement chimique sont signalées; déjà sous l’Empire, à la suite d’un remarquable rap- port de Würtz, on avait fondé l’École des Hautes Études. Le titre même de cette institution indique déjà que, dans l'esprit de ses fondateurs, elle ten dait à créer des laboratoires de recherches et non d'enseignement élémentaire; du reste, celte École a rendu des services incontestables, mais qui auraient été bien plus grands si l’on avait créé en même temps un enseignement régulier pour les commençarts. En un mot, on voulait apprendre la 1 C’est surtout une question budgétaire qui avait motivé la suppression de la chaire et du laboratoire de M, Frémy; mais le Ministre a pensé avec raison que les intérêts géné- raux de l'Enseignement devaient être sauvegardés, malgré les embarras budgétaires particuliers au Jardin des Plantes, et quelle qu’en soit la cause. syntaxe à des gens qui ne savaient pas conjuguer les verbes, et il pouvait arriver à des jeunes gens mal préparés de se lancer dans des recherches diffi- ciles aboutissant à des insuecès; ils se dégoûtaient alors de la chimie, après avoir inutilement en- combré les laboratoires. Ainsi done, nous possédons une organisation à peu près suffisante des laboratoires de recherches, mais une organisation presque nulle de l’ensei- gnement pratique élémentaire. ; Pour nous faire une idée de l'importance de cette lacune, il suffit de jeter un coup d’œil sur l’organisation d’un laboratoire allemand. Tout le monde sait, en effet, que l’Allemagne n'a joué qu'un rôle minime dans la création de la science chimique, mais que, par des efforts soutenus, elle est arrivée à occuper un des premiers rangs dans l'industrie et dans la science. Les méthodes d'en- seignement qui ont amené ce résultat sont as- surément dignes d’atlirer notre attention : à ses fruits, on à pu juger l’arbre. L'enseignement à donner au jeune homme sortant du lycée est calculé sur six semestres (considérés comme insuf- fisants dans la pratique), dont trois sont consacrés à la chimie minérale, qualitative et quantitalive, un à la préparation organique et deux à une re- cherche originale. Aucun élève n'entre au laboratoire de chimie organique, s'il n'a fait trois semestres de chimie minérale à la satisfaction de ses maitres ; aucun n'est admis à faire des recherches, S'il n’a fait quatre se- mestres de préparation dans lesquels le professeur lui impose des exercices. Ces exercices sont, non pas communs à tout le laboratoire, mais appliqués à de petits groupes d'élèves jugés de même force. Dans une des grandes Universités d'Allemagne, un pro- fesseur titulaire, un préparateur particulier, un professeur adjoint qui a le litre de préparateur en chef (fonction qui est un grade intermédiaire entre celui de préparateur et de professeur), enfin quatre V. DWELSHAUVERS-DERY. — LE PERFECTIONNEMENT DE LA MACHINE À VAPEUR 89 préparateurs composent le personnel enseignant et dirigent en moyenne 80 élèves dont 50 font de la chimie minérale et 30 de la chimie organique; sur ces derniers, 20 seulement font des recherches simi- laires à celles de notre École des Hautes Études. 1 faut dire que parmi cette foule de 50 commençants figurent des pharmaciens, des agronomes el d’autres élèves qui, chez nous, trouvent dans lés écoles spéciales une excellente préparation ; mais tout le monde ne peut appartenir à une école spé- ciale et la différence en faveur de l'Allemagne réside dans ce fait que ceux qui font de hautes études sont . mieux préparés. Quant aux locaux, il suflit de les regarder pour voir quelle importance on attache aux études pratiques, tandis que, chez nous, la Sor- bonne brille surtout par une facade architeclurale et qu'il n'y a presque pas de place pour les élèves. Les Universités de Munich, de Bonn, Heidelberg, Berlin, Strasbourg ne sont pas moins bien dotées, et Zurich, en Suisse, a réussi à faire encore mieux tout récemment; je crois donc qu'il est inutile d'insister là-dessus, les faits parlant assez d'eux- mêmes. Il y à pourtant entre l’organisalion scientifique des deux pays une autre différence qui mérite d'être signalée : en Allemagne, les professeurs ne sont élus qu'après de longues années consacrées à la science; mais alors les Universités, presque toutes autonomes, offrent à ceux qui sont célèbres et capables d'attirer les élèves des positions qui dépassent 30.000 francs de traitement annuel, sans compter le logement à côté du laboratoire, les droits d'examen etles contributions des élèves. En France, au contraire, il n’est pas rare de voir un élève à peine sorli d'une école devenir professeur titulaire bien avant qu'il ait pu donner des preuves de sa ca- pacité ; mais aussi, si la carrière scientifique est plus facile chez nous, les appointements de professeur s'élèvent rarement au-dessus de 12.000 francs, somme dont linsuflisance (à Paris surtout) l’o- blige à chercher dans le cumul un supplément de revenu. Ce cumul inévitable n’est, du reste, nui- sible que dans le cas où le laboratoire devrait donner un enseignement pratique. Il serait donc nécessaire, lorsqu'on constituera cet enseignement, de donner au professeur un supplément de traite- ment en échange duquel on aura le droit de lui demander de consacrer tout son temps au labora- toire. Il ÿ a donc lieu de féliciter les savants qui ont fait la démarche à laquelle on doit la conservation du laboratoire de M. Frémy, etle Ministre qui a bien voulu promettre d'étudier les moyens de donner à notre pays une organisation d'enseignement digne du grand rôle qu'il a joué et qu'il joue encore au- jourd’hui dans la chimie, mais faute de laquelle il est menacé de passer au second rang. J.-A. Le Bel. Docteur ès sciences. LE PERFECTIONNEMENT « DERNIER ET FINAL » DE LA MACHINE A VAPEUR C'est le Professeur Thurston qui donne ce nom audacieux au procédé consistant à revêlir d'une couche isolante, non pas l’extérieur des cylindres, comme c'est la coutume, mais l’intérieur, la surface métallique qui se trouve en contact direcl avec la vapeur. La fonte, telle que nous l’employons, emprunte avec une remarquable facilité de la chaleur à la vapeur et la transporte rapidement au dehors pour la disperser en pure perle par rayonnement. Mais, la détente refroidissant la vapeur évoluante, il ar- rive un instant où le métal lui rend à l’intérieur une partie de la chaleur qu'il lui avait prise pendant l'admission. Ce phénomène se présente ordinaire- ment en partie pendant la détente, et utilement quoique avec une certaine perte pendant l’émis- sion au condenseur; pour le reste c’est une perte totale. Le phénomène d'absorption de chaleur par la fonte el de restitution partielle subsé- quente est favorisé et considérablement activé par la présence d’une couche d'eau saturée répandue en rosée sur la surface métallique encaissant la vapeur. L’échange de chaleur, sans la présence de cetle rosée, serail à peu près nul, tout au moins négligeable ; c'est pourquoi il serait impossible de réaliser un procédé plus économique que celui qui ferait restituer par les parois pendant la détente, et alors utilement, toute la chaleur que ces parois ont recue de la vapeur pendant l’admission. En d’autres termes, les rapports d'admission et de dé- tente doivent, pour le maximum d'économie, être établis de manière que toute la vapeur condensée pendant l'admission soit reformée utilement pen- dant la détente; et que l’ouverture à l'émission trouve à l’état sec le métal en contact avec la va- peur qui va se rendre au condenseur, Tel est l'idéal 90 V. DWELSHAUVERS-DERY. — LE PERFECTIONNEMENT DE LA MACHINE À VAPEUR de la machine réelle, qui ne peut être atteint qu'à la condition de venir en aide à la vapeur pendant la détente, de favoriser la vaporisation de la rosée par le secours d’un peu de chaleur supplémentaire, qu'elle vienne du dehors, d’une enveloppe exlé- rieure ou du dedans, de la surchauffe de la va- peur, par exemple : car il y a toujours une partie de la chaleur fournie au mélal par la vapeur qui passe au dehors et n’est pas restituée au dedans. On diminue cette dernière par une couche isolante extérieure, de manière à la réduire à un minimum fort pelit : 10 à 15 °/, de la chaleur équivalente au travail utilisable. Pour simplifier, nous négligerons tout d'abord ce refroidissement extérieur. Le prin- cipe économique de la machine à vapeur pourra done s’énoncer comme suit : La condition du maximum de rendement d'une ma- chine à vapeur est que toute la chaleur cédée par la va peur aux parois métalliques pendant l'admission lui soit restituée par les parois pendant la détente. En d'autres termes, que toute l'eau provenant de la conden- sation de la vapeur pendant l'admission soit revaporisée pendant la détente, de manière que le métal soit sec à l'intérieur dès le commencement de l'émission . Ce principe, que nous croyons avoir été le pre- mier à éconcer, parait au premier abord exclure tout perfectionnement autre que celui qui le réalise. Il semble ne laisser en discussion que le moyen le plus avantageux d’oblenir le résultat désiré : en- veloppe, surchauffe, division de la détente en plu- sieurs cylindres, ele. Mais si l’on y regarde de plus près, on arrive à la conclusion qu'il resterait en- core à chercher le moyen de supprimer l’action des parois; ou, comme supprimer est contraire aux lois naturelles, de réduire autant que possible la condensation pendant l'admission, c'est-à-dire la quantilé de chaleur perdue par la vapeur pendant l'admission et qui a pénétré dans le métal durant cette période pour en sortir ensuite. A cet effet, il faudrait employer dans la composition du cylindre un métal mauvais conducleur et d'une faible capa- cité calorifique ; ou bien, puisqu'il n’est guère pos- sible de détrôner la fonte, l'enduire, sur toute la surface en contact avec la vapeur, d'une couche superficielle possédant ces qualités et présentant des chances de durée. Cela revient à boucher au moyen d'un enduit les interstices par où la cha- leur s'insinue dans le métal. Celle qui n’y sera pas entrée n’aura pas à en sorlir, et par suite ne risquera pas d'en sortir intempestivement pendant l'émission. Cet enduit trouvé, la théorie pourra prononcer le nec plus ultra. En effet, les moyens d'approcher du rendement de la machine idéale sont connus aussi bien que leurs limites pratiques; le moyen d'approcher de l'idéal de la machine réelle avec son corps métallique, doué de propriétés phy- siques inéluctables, a été récemment mis au grand jour; il ne peut rester qu’une seule chose à faire : employer pour métal encaissant celui dont les propriétés physiques sont le moins défavo- rables. Ce sera là le dernier et suprème perfection- nement, comme M. Thurston l’a fort bien nommé suivant nous, car on trouvera peut-être un enduit supérieur à celui de M. Thursion, mais pas un moyen d'économie meilleur que celui de rendre le métal à l’intérieur du cylindre autant que possible impérméable à la chaleur. Désireux de faire partager notre conviction, nous renvoyonsle lecteur au travail de M.Thurston qu vient d'être publié dans les Proceedings of the United States Naval Institute ; il est intéressant d’en rapprocher les considérations développées par M. Lissignol, ingénieur belge, dans une brochure rare dans le commerce, fort remarquable pour l'époque de sa publication, parue sans nom d’au- teur, à Bruxelles, en 1876, et intitulée : Note som- maire sur l'application de la théorie mécanique de la chaleur au perfectionnement des machines à vapeur. M. Lissignol avait judicieusement deviné ce que M. Donkin a plus tard démontré expérimentale- ment : le vrai mode d'action du métal dans les cylindres à vapeur. Il décrit ainsi le régime des échanges de chaleur : « Une zone cylindrique pla- cée à l’intérieur du métal, plus ou moins loin de la surface intérieure, acquiert une température fixe maximum qui reste constante; les zones concen- triques à l’extérieur de la précédente ont chacune une température aussi constante, mais graduelle- ment décroissante jusqu'à la surface extérieure du cylindre. Les zones concentriques placées intérieu- rement au cylindre par rapport à la zone de tem- pérature fixe maximum ont des températures va- riables entre des limites d'autant plus écartées qu'elles sont plus rapprochées de l'intérieur du cylindre. L'ensemble de ces dernières zones, suc- cessivement refroidies et réchauflées, constitue l’épiderme métallique intérieur, allernalivement réchaufté et refroidi dans chaque révolution, sous l'influence respective de la condensation et de l'é- vaporalion décrites ci-dessus. L’épaisseur de cette couche mince, qu'on peut appeler couche active, dé- pend naturellement du {mps pendant lequel agis- sent les deux influences opposées de refroidisse- ment et de réchauffement et de l'intensité de ces influences... » La quantité de chaleur absorbée, puis reslituée par une couche active pendant une révolution, sera proportionnelle à la densité à du métal et à sa capacité calorifique €, ainsi qu’à la racine carrée du coefficient de conduectibilité inté- rieure #; M. Lissignol appelle coefücient d'absorption le produit à € V#. Appliquant le caleul aux faits V. DWELSHAUVERS-DERY. — LE PERFECTIONNEMENT DE LA MACHINE À VAPEUR 91 d'expérience, il trouve que «... dans les cylindres en fonte, la couche active atteint tout au plus quelques dixièmes de millimètre et que cette épaisseur suffit pour produire la totalité des con- densations intérieures les plus considérables qui aient été constalées ». La couche d’enduit employé par M. Thurston n’est pas non plus bien épaisse et l'on voit qu’elle n’en a pas besoin. M. Lissignol en propose une autre, une garniture en plomb de 0"003 d'épaisseur, fixée aux deux faces du piston et aux faces intérieures des couvercles et des con- duits de vapeur, dont l'aire représente à peu près les deux tiers de la surface active totale. L’essai en a été fait sur la machine du bateau Baron-Lamber- mont et a élé couronné de succès. L économie réa- lisée a été considérable... Et pourquoi cette tenta- tative est-elle restée obscure et stérile ? Sans doute parce que le succès n’a pas été durable, que la gar- niture intérieure isolante n'a pas bien tenu, n’a pas résisté. Celle de M. Thurston tiendra-t-elle mieux ? L'expérience seule, dans l'avenir, répondra à cette question. Voici en quoi consiste celte garniture : Les surfaces à revêtir sont d’abord, pendant un temps assez long (plusieurs jours), livrées à l’at- taque de l’acide nitrique dilué ; on obtient ainsi une matière spongieuse, formée probablement d’un mélange de carbone et de silicate, el se prè- tant à être imprégnée d’un vernis isolant. Les couches d'huile de lin qu’on y étale ensuite, pour compléter l'isolement, y adhèrent solidement, en remplissant les pores. L'expérience a démontré qu'on réalise ainsi une économie très considérable, même avec un enduit encore éloigné de l'idéal. C'est que la chaleur supplémentaire dévoyée dans le mélal par la condensation iniliale a été dimi- nuée; la restitution utile pendant la détente a done été plus efficace; partant la restitution qui se fait en pure perle pendant l'émission a été réduite en valeur absolue. Déjà Smeaton, au siècle dernier, avait tenté de combattre la condensation initiale par l'emploi d’une garniture en bois, matière mal choisie évi- demment. En 1866, M. Emery proposait la por- celaine, comme M. Lissignol aussi dix ans après. M. Babcock, plus tard, à essayé le bismuth et d’autres métaux. M. Thurston a été mis sur la voie de son procédé, auquel le succès semble as- suré, par l’examen des corrosions qu'on remarque aux environs des condenseurs et des pompes à air et qui sont dues en bonne partie à l’action des acides gras. Il en a fait faire l'analvse par M.Hill, a cherché à en tirer parti pour convertir la masse spongieuse en substance isolante; il a réussi, aidé par M. Chamberlain, qui a appliqué au procédé les ressources de l'analyse expérimentale, afin de lui donner une base solide. Le champ des recherches est ouvert; peut-être trouvera-t-on un enduit plus efficace et plus du- rable que celui-là; mais nous disons que c'est là la seule voie non battue où l’on puisse espérer des économies nouvelles. Pour appuyer notre opinion, nous aurons recours à une comparaison des phé- nomènes thermiques dont les machines à vapeur sont le siège, avec les phénomènes gravifiques ob- servés dans les roues hydrauliques, notamment dans les roues de côté où l’eau, agissant unique- ment par son poids, est, pendant tout son parcours dans la roue, maintenue entre les parois encais- santes du coursier et des bajoyers (murs), lesquelles sont autant que possible imperméables à l’eau. L'eau qui passerait à travers ces parois constitue-. rait une perte de poids(de pesanteur) pour la roue, comme la chaleur qui traverse les parois métal- liques des cylindres est perdue également pour l'effet cherché par l'usage de la machine à vapeur. Considérons une roue de côté (non figurée) en- caissée entre les deux murs MM (fig. 1) et le cour- sier NN recevant l’eau au niveau AB et la rendant à I mètres plus bas, en CD. À part les pertes A B Fig. 1° d’effet connues, qui sont étrangères au sujet, chaque kilogramme d’eau qui travaille dans la roue y donne lieu à Hi", s'il ne s'en perd rien. Mais suppo- sons ici, au contraire, que le mur M ait été mal construit et qu'il présente des fissures disposées d’une façon spéciale. La première part du point A et aboutit à une sorte de réservoir R d'où en partent trois autres, l'une RE vers l'extérieur ; la seconde RI, vers l’intérieur, où fonctionne la roue et débouchant à la hauteur 4" au-dessus du niveau du bief de décharge CD; la troisième RI' débou- chant à la hauteur de ce niveau. Il s'établit un ré- gime périodique tel que, dans un temps donné, RK d’eau affluent dans le réservoir R par la fis- sure À, et toute cette eau est évacuée, une par- tie EX à l'extérieur, une deuxième [* à l’intérieur et dans la roue à une hauteur 4" au-dessus du ca- nal de fuite, la troisième et dernière l'* à l'inté- 92 V. DWELSHAUVERS-DERY. — LE PERFECTIONNEMENT DE LA MACHINE A VAPEUR rieur également, mais à un niveau assez bas pour qu’elle n’y soit plus d'aucune utilité, celui où la roue rejette elle-même l’eau dont elle a subi l’ac- tion. On a donc R=E + 1 + I'. Nous supposons que, dans ia durée de cette période considérée, le coup d'eau débite P*, mais qu'il s'en échappe R*, disons 40 ?/, de P* par la fissure À ; il n’en par- viendra donc directement que 60 °/, à la roue. La perte de travail qui en résulterait serait égale à RH où (E HIHI Hs, il ne rentrait de l’eau dans la roue à un moment où elle peut encore fonctionner utilement, soit I* à la hauteur 2", ca- pables du travail (12)%, En vue de donner une ré- présentalion conerèle du phénomène, admettons les chiffres suivants : R—0,40P; E—0,05P; I—0,10P; l—025P; = w| Ex En ce cas la perte par la fissure ne serait pas représentée par R >< H ou 40 ‘},, mais par EX H LI >XH+E I(H — hjou 5 + 25 + 5 — 35 ‘/,,etil y aurait un travail égal à (14)*" de » 1/, effectué dans la roue et utilement par l’eau rentrée à temps. Il est évident que si l'on bouchait la fissure l', et qu'on püût faire rentrer l’eau déviée par exemple au niveau À au-dessus du canal de fuite, on utili- serait (l'h}*® en plus, soit la moitié de 250/, en plus, ou 42 1/2 ‘/,. La perte par les fissures des parois tombant de 17 1/2 ?/,, serait réduite à 26 1/2 °/, au lieu de 40 °/;. C'est le résultat que l’on obtiendrait en divisant la chule d’eau en deux parties égales par un compartiment absolument imperméable et si l’on y adaptait deux roues su- perposées se rendant l’eau l’une à l’autre etformant un système Compound. Un tel genre de roues Compound a déjà éte employé pour utiliser de fortes chutes d'eau. Mais le dernier perfeclionnement consisterait à supprimer la fuite d'eau primitive, à boucher la fente par où les R kil. d’eau arrivent dans le réser- voir du mur encaissant. Que si l’on ne peut pas la boucher complètement, du moins doit-on le faire le mieux possible. En fait un tel résultat s'oblient aisé- ment avec les roues hydrauliques quand il ne s’agit que d'empêcher les fuites d'eau, et les pertes par parois ne méritent pas d'y être prises en considé- ration. Mais s'il s’agit d'empêcher des fuites de chaleur, homme est impuissant à composer une malière absolument imperméable ; il est condamné à subir une perte. Pour les machines à vapeur, la perle extérieure E est fort atténuée par les enve- loppes isolantes appliquées à l'extérieur. Mais la fuite primitive de chaleur dans le réservoir R des parois, el les rentrées à une plus basse tempéra- ture pendant la détente et l'émission, sont inévi- tables ; la couche protectrice extérieure n’y cor- rige pas grand'chose ; dy faudrail une couche protec- trice intérieure et c’est l'application d’une telle couche que M. Thurston proclame comme le suprême et dernier pecfectionnement que l’on apportera aux ‘machines à vapeur. La fonte de nos cylindres, froide à l’intérieur avant l'admission, soustrait à la vapeur affluente une certaine quantité de chaleur qni se loge dans unréservoir R peu éloigné de la surface interne, etil en résulte une précipitation de la vapeur en contact immédiat, la formation d’une rosée sur le métal, à laquelle on a donné le nom de condensation initiale. Le réservoir reçoit ainsi R calories qui sont restiluées à l’intérieur, I calories d'une part pen- dant la détente et utilement, I' calories d'autre part pendant l’émission et en pure perte. La pre- mière partie | fonctionne utilement, mais laisse cependant un déchet parce que la chaleur travaille à température plus basse que celle de la vapeur affluente pendant l’admission, comme le poids de l'eau, à un niveau À plus bas que H. La perte qui provient de ce fait est fatale. On regagne encore quelque chose en annulant l', en forçant la cha- leur à rentrer pendant la détente, c'est-à-dire en vaporisant pendant cette période toute l’eau due à la condensation iniliale. La nature des moyens appliqués dans ce but est telle que, par ce fait même, la condensation initiale (R cal.) est elle- même diminuée souvent très considérablement. L'enveloppe de vapeur diminue la chaleur R cédée aux parois pendant l’admission et augmente le rapport de la quantité de chaleur I restituée ulile- ment pendant la détente, à celle l' perdue pen- dant l'émission. Le procédé naturel par lequel la surchauffe procure une économie a le mème effet. Et l’économie due à la détente dans plusieurs cy- lindres successifs s'explique par la comparaison que nous avons faite ci-dessus avecles roues Com- pound. Que l’on combine ces moyens connus avec celui qui, par lui-mème, et indépendamment du mode de restitution ultérieure, réduira au minimum la fuite de chaleur R pendant l'admission, et l’on aura clos l’ère des perfectionnements : la théorie alors pour- ra dire quelle est la limite de consommation d’une machine à vapeur réelle, faite de matériaux con- nus. Une machine à vapeur suffisamment surchauf- fée, avec degré de détente tel que le métal soit sec à la fin, pourvue d’une enveloppe protectrice exté- rieure et de la couche isolante intérieure préconi- sée par M. Thurston, réalisera le type de la per- fection possible. V. Dwelshauvers-Dery, Professeur de Mécanique appliquée à l'Université de Liège, CH.-ED. GUILLAUME. — LES CONSTANTES RADIOMÉTRIQUES 93 LES CONSTANTES Dans un article déjà trop long ‘ j'ai dû me con-. tenter d’une rapide allusion au côté tout adminis- tratif de cette partie de la physique qui traite de l'énergie rayonnante; je désirerais reprendre au- jourd'hui celte question et discuter ici certaines définitions que l’usage commence à consacrer. La première concerne le rendement photogénique d'un foyer. Qui dit rendement dit rapport de deux quantités de même espèce et, en particulier, rap- port de la quantité utilisée au total dont on dis- pose. À première vue, le rendement d’une source de lumière se définit rationnellement par le rap- port de l’énergie lumineuse à l'énergie totale rayonnée par la source; mais regardons-y de plus près. Ce que nous voulons connaitre d’une source de lumière, c’est l’usage que nous pouvons en faire, c’est-à-dire la luminosité qu’elle possède et l'é- clairement qu'elle procure; or il n’est pas indiffé- rent que l'énergie rayonnée se trouve dans l'une ou l’autre partie du spectre visible. Sans vouloir recourir à des lumières composées artificiellement et colorées par des glaces diversement teintées, nous pouvons envisager le cas d’une lumière rou- geätre comme celle du gaz, ou blanche (par défini- tion) comme celle du Soleil, ou encore verdätre comme celle du ver luisant ; la même luminosité dans les trois cas nous sera donnée par une quan- tité d'énergie rayonnante très différente, située dans les limites du spectre visible, car nous uti- lisons beaucoup mieux l’énergie dans le voisinage de la raie D que dans le rouge ou le violet. De plus, comme je l’ai fait remarquer, un pelit déplacement de l’ordonnée de première visibilité (dont la position ne peut pas être bien détermi- née) occasionne une forle varialion du rendement considéré, puisque, pour la plupart des lumières artificielles, ce point se trouve dans la partie ra- pidement ascendante de la courbe d'énergie. Donc, en résumé, le rendement photogénique, tel qu'on le considère habituellement, est:1° une quan- tité mal définie; 2° un critérium qui n'indique pas la vraie valeur d’une lumière au point de vue des services qu'elle peut nous rendre. Il est aisé de serrer de plus près la vérité. Si toute l’énergie rayonnante élait concentrée dans la région du maximum de sensibilité de notre œil, l'utilisation d’un foyer lumineux serait 2 aussi bonne que possible ?, et, si nous voulons en- 1 Revue générale des Sciences du 15 janvier 1892, t. I, Tnt? 2 Cela même n’est pas absolument exact; la relation logarithmique entre l’excitation et la sensation peut, en effet, rendre une certaine répartition de l’énergie dans le spectre RADIOMÉTRIQUES core parier de rendement, bien que le mot soit impropre, il serait égal à l’unilé. Mais, si l'énergie est répartie sur des régions de sensibilités dif- férentes, chaque radiation simple devra être mul- tipliée par un coefficient qui représente la sen- sibilité de notre œil, par rapport à ce qu’elle est à son maximum. En conservant la fiction du rendement, qui ne peut jamais dépasser l'unité, nous donnerons au maximum de sensibilité la valeur 1 ; d'où l’on dé- duit immédiatement le coefficient de réduction pour toutes les radialions. Appliquons ce procédé au calcul du rende- ment pour la lumière solaire, et pour celle d'un bec de gaz. Il nous suflira à cet effet d'utiliser les données #elatives aux radiations et les facteurs de réduction que nous avons indiqués dans notre premier article !, Ramenons d’abord la partie visible des spectres du Soleil & et du gaz b (fi- gure ci-contre) à la mème superficie, et portons Fig. 1. dans le mème diagramme la courbe de sensibi- lité s: réduisons les courbes « et à au moyen de cette dernière aux courbes a! et b'; nous voyons que à! est presque entièrement à l’intérieur de 4"; du reste, en adoptant comme unité l’aire des cour- bes « et à, nous trouverons les valeurs suivantes : Aire de a' » » b! — 05) — 1026 Par conséquent, la valeur admise pour Je ren- dement des deux lumières étudiées ici doit être beaucoup diminuée; elle doit l’être plus pour la lu- plus avantageuse que la concentration dans la région de sen- sibilité maxima. 1 Pour les données relatives aux radiations, consultez la figure #(page 17, loc. cit.); pour les facteurs de réduction, la figure 5 (page 18, loc. cil.). 94 CH.-ED. GUILLAUME. — LES CONSTANTES RADIOMÉTRIQUES mière du gaz que pour celle du Soleil, et nous trou- vons finalement les nombres suivants ‘ : Rendement photogénique réduit de la lumière solaire » » du gaz ordinaire... 0,049 0,003 Le rendement total d'un bec de gaz ordinaire ar- rive à 0,00005, et celui d’une bougie est encore plus petit. Le Pyrophorus noctilucus, étudié de la même façon, donnerait encore un rendement voisin de 1. Bien que je considère celte manière de calculer les rendements comme plus rationnelle que le procédé ordinaire, je ne me dissimule pas ce qu'il a de défectueux; la lumière monochromatique du sodium occuperait, dans la classification, un rang élevé, qu'elle ne mérile pas dans la vie pratique; et, quelles que soient les considérations industrielles qui puissent entrer en ligne de compte, nous ne nous résoudrons jamais à réduire une galerie de tableaux à une exposition de blanc et noir. Le principe du rendement lumineux d'une source est déjà grandement affaibli par ce qui a été dit ci- dessus; la considération des lumières monochro- matiques achève de lui enlever sa valeur comme critérium absolu. Mais on ne détruit que ce qu'on remplace, et si l’on veut abandonner cette notion du rendement, il faut lui susbtituer un coefficient de mérite, comme on l’a fait pour les dynamos ou les galvanomètres ; le rendement réduit serait l’un des facteurs de ce coefficient; un autre serait fourni, par exemple, par le degré de blancheur de la lumière, quantité qu'il serait aisé de définir rigoureuse- ment. Passons à l'unité de radiation. Les importantes études de M. Violle ont montré que le platine, au moment de sa solidification, émet une radiation parfaitement constante, donnant un spectre bien régulier, qui s'étend jusque dans l’ultra-violet; on ne pouvait choisir une meilleure source-unité, et l’époque à laquelle elle fut adoptée imposait la fixation de la surface d'émission à 1°%1, Les ap- pareils (rès praliques qu'a construits M. Violle assuraient, du reste, à l’unitéen question une. ra- pide extension, et aujourd’hui, si même pour des raisons de convenances on opère avec une fraction de cette unité, ce n’en est pas moins l'unité Violle qui sert de mesure. Je me garderai de critiquer l'adoption de cette unité, qui a mis enfin un peu d'ordre.dans les questions de pholométrie ; mais je voudrais faire observer que l’on a commis une imprudence en l'élendant à toutes les radiations : on connait, en effet, des sources de lumière qui fournissent dans l'ul- tra-violet des radiations, faibles assurément, mais * Ces nombres ne doivent être considérés que comme une grossière approximation. parfaitement perceptibles bien au delà de l’en- droit où le platine incandescent cesse de rien don- ner. L'unité en ces endroits étant nulle, la radia- tion est exprimée par l'infini. L'étalon Viollea été qualifié d'absolu; le mot est impropre. En effet, malgré une supposition cachée sous un raisonnement par à peu près, les unités électriques ont été rattachées aux trois uni- tés fondamentales C. G. S.; l'unité de radiation, n'étant autre qu'une unité d'énergie, $ y relie sans aucun sous-entendu; dans ce domaine. Ja seule unité qui puisse mériter le nom d’absoluwe doit être exprimée par une certaine quantité d'énergie . rayonnée par seconde. Quelle devrait être cette unité ? Il est facile de le voir. Nous recevons du Soleil une quantité d'énergie qui est exprimée par 0,06 calorie-gramme par se- conde et par centimèlre carré; connaissant le rayon du Soleil et celui de l'orbite terrestre, on en conclut que chaque centimètre carré de la sur- face du Soleil rayonne 2.740 petites calories par seconde ou 4.500 watts. Le spectre visible en con- tient 44 °/, soit 1.610, à répartir sur 0,3 en- viron ; chaque bande du spectre visible de 04,1 de longueur rayonne donc en moyenne de 500 à 600 watts. C'est la plus forte radiation connue. La radiation totale du plaline incandescent est mal connue; mais on sait qu'elle est de l’ordre de 20 walts. La bougie décimale donnerait 4 watt. On voit qu’en exprimant la radiation par la puissance en watts, contenue dans chaque bande du spectre de un dixième de micron de largeur, on aurait pour les foyers artificiels ordinaires des nombres oscillant autour de {. L'unité ainsi définie aurait donc une grandeur convenable. Je reconnais volontiers, du reste, que l'adoption d'une pareille unité, dans l’état actuel de nos con- naissances, est prématurée ; mais il serait temps, je crois, de prendre l'habitude de réserver à l'unité Violle le nom d'unité pratique. Il est bon de re- marquer, du reste, qu'il est dans la force des choses de conserver parallèlement deux systèmes d'unités : les premières qui sont absolues et d’un accès généralement difficile (la dyne ou l’erg); les autres, qui sont bien définies pratiquement comme les poids-forces et la calorie. Je lerminerai en relevant la singulière ano- malie à laquelle l'unité de radiation solaire à jus qu'ici été soumise ; cette radiation est exprimée en calories par centimètre carré et par minute ; c'est la seule quantité d'énergie pour laquelle l'unité esl autre que la seconde; il serait grand temps de la faire rentrer dans la règle générale. Ch. Ed. Guillaume. Docteur ès sciences Adjoint au Bureau international des Poids et Mesures BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Dubhem(P.), Chargé du cours de Physique mathématique à la Faculté des Sciences de Lille. — Leçons sur l’E- lectricité et le Magnétisme, t. I. LES CONDUCTEURS À L'ÉTAT PERMANENT. Un beau volume grand in 8°, VII et 560 p., (16 fr.) Gauthier- Villars ct fils, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1891, Le jeune et infatigable professeur de Lille ouvre par ce bel ouvrage une trilogie, dont les deux der- niers volumes Aimants diélectriques et Courants linéaires, nous sont annoncés pour un avenir prochain. Le but que s’est proposé l’auteur est d’'ébaucher une synthèse des immenses travaux qu'ont entrepris les analystes à la suite des théories inaugurées par Poisson en 1811. Il serait fort présomptueux de notre part de chercher à dire jusqu'à quel point il y a réussi. La quantité énorme de matériaux rassemblés dans ce premier vo- lume ne sera que peu à peu passée au crible, lors- qu'on l'aura suffisamment étudié et pratiqué ; on con- viendra que la virtuosité avec laquelle l’auteur aborde les problèmes de physique mathématique, l'érudition dont il fait preuve à chaque page, nous sont une ga- rantie bien plus sûre que le rapide coup d’œil jeté sur un ouvrage à peine sorti de l'imprimerie, Essayons cependant d'en caractériser l'esprit et la distribution. Le premier paragraphe est une profession de foi : . « Ces hypothèses étaient, dans leur origine, intimement liées à des suppositions sur la nature de l’élec ricité; mais il est aisé aujourd'hui de briser ce lien, de laisser de côté ces suppositions sur la nature de l'électricité, supposilions si étrangères au véritable objet de la physique, que cette science n’a même pas le droit d'en montrer la vanité ; de ne laisser enfin aux hypothèses fondamentales que le caractère de défini- tions de paramètres analytiques qui est essentiellement le leur. » Cette phrase est nette et en dit long; le lec- teur n'aura plus de surprises : il verra dans la physique une branche fort intéressante de lAnalyse, qui, de temps à autre, conduira à une conclusion que l'expé- rience pourra vérifier. La question, prise sous celte face, revêt aussitôt une extrême élégance; tout s'enchaine lo- giquement, les phénomènes sont prévus, et l’ensemble est merveilleusement encadré, Comme méthode de re- cherche, le procédé est sans doute inadmissible, et con- duirait à chaque pas aux plus grossières erreurs; la théorie des phénomènes magnétiques de Poisson, en- tièrement fondée sur l'hypothèse d'une constante d’aiman- tation, en est un célèbre exemple. Mais, lorsque les vé- rifications nécessaires ont été faites, lorsqu'on ne peut plus faire fausse route, cette méthode déductive a l’a- vantage de donner à toute la physique un support so- lide et harmonieux ; elle met de l’ordre dans l'esprit; autant un enseignement de ce genre est dangereux pour l'élève, autant il peut être profitable à celui qui sait déjà. On ne s’élonnera pas qu'il ne pouvait entrer dans le plan de l’ouvrage de trailer des questions compliquées et encore mal connues, dans lesquelles le jalonnage est à peine fait, où l'esprit, livré à lui-même et ne pou- vant consulter la Nature, risquerait à chaque pas de s'égarer. Vingt-huit pages seulement sont consacrées aux électrolytes. Dans le premier livre, l’auteur traite des forces élec- trostatiques et de la fonction potentielle; puis vient, au deuxième livre, l’exposé des beaux théorèmes de Pois- son sur la distribution de l'électricité dans les conduc- teurs, et les conditions de l’équilibre ; plusieurs cha- pitres sont consacrés au problème de Lejeune-Dirichlet. ET INDEX Au troisième livre, sont abordés certains cas suscep- tibles d'une vérification expérimentale, Dans le quatrième livre, l'auteur expose les principes de thermodynamique nécessaires pour expliquer les phénomènes thermo-électriques et les actions électro- chimiques; ses travaux dans ce domaine en font un chapitre très personnel. L'équilibre électrique’et les courants permanents dans les conducteurs métalliques font l’objet du sixième livre; les déductions procèdent ici du potentiel thermo- dynamique d’un système électrisé, Après avoir étudié, surtout au point de vue des effets thermiques, la dé- charge d’un condensateur, l’auteur aborde les courants permanents. Le livre sixième et dernier {raite des électrolytes. Et maintenant, terminons par une citation bonne à méditer (p. 408) : « En 1849, G. Kirchhoff remarqua que, dans la théorie de Ohm, la condition de lPéqui- libre électrique à l’intérieur d’un conducteur homogène est exprimée par la constance de la force électrosco- pique; tandis que, dans la théorie de Poisson, la même condition est exprimée par la constance de la fonction potentielle, Cette remarque le conduisit à admettre la proportionnalité de la force électroscopique avec la fonction potentielle, et à énoncer l'hypothèse suivante, qui a conservé le nom de loi de Ohun... » Encore une illusion qui s'en va! Ch.-Ed, GUILLAUME. Boys (P. du). Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées. — Essai théorique sur les Seiches. (Archives (le Genève, t. XXN, p. 628, 1894). Les seiches, oscillations des lacs, de période déter- minée, d'amplitude souvent considérable, ont m depuis longtemps à l'épreuve la sagacité des observa- teurs riverains. On possède, en particulier sur le Léman, un ensemble considérable d'observations simul- tanées des seiches et des éléments météorologiques dues à MM. Forel, Plantamour, Ed. Sarasin, J.-L. Soret, Les seiches du Léman sont uninodales ou binodales, avec des périodes respectives de 74 et 35 minutes, Leur amplitude, à Genève, où le mouvement produit un coup de bélier, peut être {rès considérable; les deux plus fortes de notre siècle sont de 12,43 et 1,87. L'auteur étudie d’abord le mouvement de balancement périodique dans un bassin rectangulaire, et trouve, pour la durée d’une oscillation complète : 21 T=—, Van Let k élant respectivement la longueur et la hauteur du bassin, Le mouvement de balancement peut, du reste, être identifié au mouvement de translation d’une onde courant dans le bassin, et dont la vitesse est: w — \ Gh, ce qui permet de trouver de nouvelles rela- tions. L'auteur montre ensuite comment la forme même du Léman agit pour modifier les résultats obtenus sur un bassin rectangulaire, et faire en parli- culier que les uninodales ont une période supérieure au double de celle d’une binodale. Une variation brusque de la pression atmosphérique de { millimètre de mer- cure, à un bout du lac, peut produire une dénivellation totale de 0,10 dans les meilleures conditions pos- sibles; dans des conditions ordinaires, une telle cause peut fort bien produire une dénivellation de 4 à 5 à Genève. Ch.-Ed. GUILLAUME. 96 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques. Chappuis(J.) et Berget(A.). Leçons de Physique générale, tome III (Acoustique, Optique et Electro-opti- que.)Un vol. in-8° de 396 pages avec 173 fig. dans le texte (13 francs). Gauthier-Villars et fils, éditeurs, 55, quai des Grands Augustins Paris, 1892. - Le tome troisième des excellentes Lecons de physique générale de MM. Chappuis et Berget, vient de paraitre. Comme ses aînés, ce volume est tout à fait élémentaire, et c'est là, à mon sens, un très grand éloge qu’on lui doit adresser, Si les auteurs ont partout été très clairs et très sobres de longs calculs, s’ils ont soigneusement évité les théories compliquées et un peu obscures, ils n'en ont pas moins écrit une œuvre très utile, très sérieuse et très au courant des récents progrès de la physique ; ils sont souvent restés au seuil des questions ardues; mais nulle part ils n’ont sacrifié la rigueur d’un raisonnement ou cherché par quelque artifice à tourner la difficulté d’une théorie. Les chapitres consacrés à l’acoustique sont très courts, mais suffisamment com- plets; l'optique comprend un bref et substantiel résumé de l’optique géométrique et d'excellentes lecons d’op- tique physique; pour cette dernière partie, les auteurs reconnaissent avoir grandement profité du cours que professait, il y à quelques années, le savant et regretté Berlin à l’Ecole normale ; on y retrouve la trace du précieux enseignement que donnait à ses élèves l’émi- nent professeur, ses hautes qualités de précision et d'élégance, sa critique sévère, la simplicité et la rigueur deses démonstrations. Au milieu de ces pages, MM. Chap- puis et Berget ont très habilement introduit les idées récentes et des découvertes nouvelles, On trouvera là les méthodes de M. Cornu pour l'étude de la diffraction, un très net exposé de l'admirable travail de M. Lipp- mann sur la photographie du spectre, la discussion de la fameuse expérience de M. Otto Wiener, Le livre se termine par quelques chapitres consacrés à l’élec tro-optique où sont avec simplicité et clarté présentées les théories de Maxwell et discutées les célèbres et récentes expériences de MM. Hertz et O, Lodge. Signa- lons aussi une excellente idée des auteurs : à la fin de chacun des trois votumes, ils ont placé de précieuses indications biblographiques ; à coup sûr ils n’ont pas pensé être complets, mais j'imagine qu'ils ont désiré indiquer aux lecteurs les mémoires les plus importants, les plus instructifs à connaître, et aussi, il me semble, les plus aisés à lire, et les plus faciles à trouver dans la plupart des bibliothèques. Le traité de physique ainsi complété sera bientôt entre les mains non seule- ment des candidats à la licence et des élèves des grandes écoles pour lesquels il a été écrit, mais encore de tous ceux qui désirent avoir une idée exacte de la physique moderne et qui attendent un guide sùr et solide. Lucien Poixcaré. Dittmar (\\ )et Henderson (J.B.) —-Sur la com- position de l'eau. — Proc. of the Philos. Soc. of Glas- cow. 1890, p. 91. Les lecteurs de la Revue ont été tenus au courant des recherches récentes ! exécutées en vue de déterminer la composition exacte de l’eau. Ces recherches étaient toutes inspirées par un principe énoncé par Dumas dans son mémoire classique sur celte question : pesée de l'hydrogène et de l’eau résultant de sa combustion. Dans le travail dont nous rendons compte aujour- d'hui, MM. Dittmar et Henderson se sont proposé de répéter simplement l'expérience bien connue de Du- mas, en tenant compte des causes d'erreurs signalées par illustre savant. Il importait en effet de s'assurer que dans ces conditions on trouve les mêmes résultats que ceux qu'on déduit des expériences récentes. l Revue générale des Sciences (1891), t. II, p. 1. En évitant l'emploi de l'acide sulfurique comme ma- tière desséchante et en lui substituant la potasse cal- cinée et l’anhydride phosphorique, on évite l'introduc- tion de vapeurs sulfureuses dans les appareils. D'autre part, en faisant passer successivement sur du cuivre chauffé au rouge, puis dans des appareils desséchants, l'hydrogène qui doit servir à la synthèse de l'eau, on élimine la cause d’erreur due à la présence inévitable d’une petite quantité d'oxygène dans l'hydrogène, tel qu'on le prépare et le purifie par les procédés ordi- naires de laboratoire. Telles sont les deux modifications fondamentales que MM. Dittmar et Henderson ont apportées au mode opé- ratoire de Dumas. Dans ces conditions, ils trouvent comme valeur du poids atomique de l’oxygène un nombre qui concorde relativement bien avec les va- leurs trouvées récemment, soit O0 — 15,87 pour H — 1, La moyenne des expériences de Dumas était O0 — 15,96, tandis que les travaux les plus récents indiquent : O — 15,87 (MM. Cooke et Richards). O — 15,89 (M. Noyes),. O — 15,91 (Lord Rayleigh). O — 15,95 (Keiser). O — 15,94 (Crafts). Dans un compte rendu bibliographique antérieur, nous signalions les raisons pour lesquelles la valeur 15,95 semblait alors plus probable. Il faut reconnaitre aujourd'hui que les résultats de MM. Dittmar et Hen- derson donnent un grand poids à ceux obtenus d’une facon tout à fait indépendante par MM. Cooke et Ri- chards et par M. Noyes, sans cependant permettre en- core de regarder la question comme définitivement tranchée. Ph. A. GUYE. EÉrlenmeyver junior, — Sur les acides phényl- bromolactique et phénoxy-acryliques actifs. — Ber. d. D, chem. Gesell. t. xx1Iv, p. 2830 (1891). M. Erlenmeyer a démontré antérieurement que l'acide phénoxyacrylique et lacide phénylbromolac- tique qui en dérive devaient être représentés par les formules suivantes : CSH5.CH—CH—COOH Nue 0 Acide phénoxyacrylique C5 H°.CHOH.CH Br.COOH Acide phénylbromolactique Ces deux formules sont caractérisées par deux car- bones asymétriques. Théoriquement chacun de ces composés devrait donc exister sous six formes isomé- riques, soit : deux inactives, dédoublables chacune en deux actives, M. Erlenmeyer, qui avait entre les mains une des modifications inactives de ces deux corps, en a tenté le dédoublement par la méthode des sels de cinchonine imaginée par M. Pasteur. Avec l’acide phénoxyacry- lique, il y à eu insuccès ; avec l’acide phénylbromo- lactique, au contraire, la séparation des deux acides actifs s’est effectuée très facilement. Ce fait est intéressant, car il prouve une fois de plus que ces méthodes de dédoublement des racémiques ne réussissent pas toujours. Mais, ce qui rend l'expérience de M. Erlenmeyer plus frappante encore, c'est que l’insuecès dans la tentative de dédoublement de l'acide phénoxyacrylique ne peut être attribué à la non exis- tence de ses deux modifications actives. En effet, il suffit de traiter par la soude les deux acides phényl- bromolactiques actifs pour les transformer lun et l'autre en deux acides phénoxyacryliques eux-mêmes actifs, et — chose digne de remarque — les acides phénoxyacryliques ainsi obtenus ont un pouvoir rota- toire de sens inverse de celui des acides bromés dont ils dérivent, Ph. A. Guye. nibin ads "3 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 97 3° Sciences naturelles. 5. Mac Leod. — De Pyrenecënbloemen en hare Bevruchting door Insecten. (Les fleurs des Pyré- nées et leur fécondation par les insectes), avec résumé en français. (Extr. du Botaniseh Jaarboek), Gand, 1891. On sait qu'à la suile des célèbres recherches de Darwin sur le rôle des insectes dans la fécondation des végétaux, un grand nombre d'auteurs, parmi les- quels Hermann Müller, Fritz Müller, Delpino, Hilde- brandt, Axell.., etc., ont entrepris des observations et des expériences qui ont confirmé ses conclusions, Le mémoire de M. Mac Leod a pour but d'apporter une contribution à un point spécial de ce sujet: la connais- sance des rapports qui existent entre la dispersion géographique des plantes et les conditions dans les- quelles s'opère la fécondatlon de leurs fleurs, L'au- teur a fait ses observations en août {889 et en juin 1890 dans la vallée de Luz, les villages de Gèdre et de Ga- varnie ef les montagnes voisines; il compare les résul- tats qu'il à oblenus à ceux qui ont été publiés par Herm. Müller sur les Alpes. Conformément à l'opinion d'Herm. Müller, suivant laquelle les fleurs des montagnes ne sont nullement privées de l’aide des insectes pour leur fécondation, M. Mac Leod a trouvé dans toutes les localités visitées, jusqu'à 2.200 mètres d'altitude, des insectes floricoles en grand nombre toutes les fois que le temps était beau. L'auteur conclut aussi que l'influence de l'altitude sur l'abondance relative des divers groupes d'insectes est la même dans les Pyrénées que dans les Alpes, au- trement dit que les mêmes groupes d'insectes devien- nent plus nombreux où moins nombreux dans ces deux régions suivant les variations d'altitude. Toute- fois, les mêmes groupes d'insectes n'y sont pas égale- ment représentés : ainsi, tandis que les insectes à pièces buccales courtes ou de longueur moyenne sont plus nombreux dans les Pyrénées que dans les Alpes, la proportion est inverse pour les Lépidopières. En correspondance avec cette distribution, l’auteur a constaté que les fleurs à structure simple (allotropes), qui sont visitées par les insectes à trompe courte, sont plus nombreuses dans les Pyrénées que dans les Alpes, tandis que les fleurs Lépidoptérophiles sont plus nom- breuses dans les Alpes que dans les Pyrénées; cepen- dant, la distribution des fleurs hémilropes serait plus indépendante des insectes que celle des précédentes, Sans considérer ce résultat comme entièrement défi- nilif, mais comme nécessitant encore de nombreuses observations, l’auteur conclut avec Hermann Müller : « Le nombre relatif des espèces, appartenant aux di- vers groupes de fleurs, dans les Alpes et les Pyrénées, correspond donc, dans une certaine mesure, à la richesse relative des groupes d'insectes correspon- dants, dans les mêmes régions. » C. SAUVAGEAU. Hertwig (0.). — Comparaison de l’ovogénèse et de la spermatogénèse chez les Nématodes. Ver- gleich der Ei-und Samenbildung bei Nematoden. Arch. für. mikr. Anat., Bd. XXXVI, 138 p, 4 pl. Cette fois encore il semble — nous pouvons dire il est certain —— qu'avec le très important travail d’'O, Hertwig sur la comparaison de l’ovogénèse et de la spermato- génèse chez les Nématodes, la clef de l'énigme des pro- cessus de fécondation est trouvée. Le mémoire de Hertwig comprend deux parties l’une descriptive, l’autre théorique. Dans la première, l’auteur décrit le développement des produits sexuels de lAscaris megalocephala : il étu- die d’abord la spermatogénèse, puis l’ovogénèse, et compare ensuite les deux phénomènes. Nous résumons seulement sa comparaison. Dans le testicule, comme dans l'ovaire, il y a lieu de distinguer trois zones : une zone germinative, une zone d’accroissement et une zone de division. Dans la zone germinative existent de petites cellules en voie de division fréquente; les « corps rési- duels », décrits par E. Van Beneden et Julin dans le tes- ticule, ne sont que certaines de ces cellules atrophiées, La zone d’accroissement se caractérise au contraire par l'absence de divisions cinétiques; le noyau est absolu- ment au repos dans tous les éléments cellulaires; ces éléments grossissent beaucoup dans cette zone. Dans la zone de division les cellules-mères séminales et les cel- lules-mères ovulaires formées précédemment subissent deux divisions successives sans interruption d’un stade de repos pour le noyau en division; 0. Hertwig retrouve ici l’importantphénomène observé par Flemming chez la Salamandre, par Platner chez les Lépidoptères et les Gastéropodes et aussi par Carnoy chez les Arthropodes, Il en résulte cette conséquence remarquable que, comme la chromaltine n’a pas le temps, entre ces deux divisions qui se succèdent immédiatement, de se régé- nérer par voie de nutrition, et que les éléments chro- matiques ne se fissurent pas longitudinalement dans le cours de ces cinèses, nécessairement les produits terminaux de celte double division conliendront, à la suite du partage deux fois opéré de la masse chro- matique, la moitié seulement de la chromaline que possède lout noyau après une division simple, et le quart de ce que confenaient les noyaux de la cellule- mère séminale et de la cellule-mère ovulaire. Ce phéno- mène de réduction des éléments chromatiques était pré- paré d’ailleurs dès les premières phases de la division, En effet, chez l’Ascaride nombre des éléments chroma- tiques constitués dans le noyau séminal mère et dans la vésicule germinative, est aussi grand que dans un noyau ordinaire au milieu de la division, c’est-à-dire qu'il est le double de ce que contient un noyau ordi: naire dans la prophase de la division. Tandis que, normalement, huit segments chromatiques prendraient naissance par fissuration longitudinale de quatre élé- ments primitifs, ici les huit segments sont dus à une double division longitudinale de deux filaments seulement. Comme maintenant, la cellule-mère ovu- laire et la cellule mère séminale éprouvent les mêmes phénomènes de division avec Iles mêmes particula- rités anomales, les produits de division doivent avoir la même valeur : 1° aux deux cellules séminales- filles répondent l'œuf et le premier globule polaire; 2° aux quatre cellules séminales-petites-filles, aux sper- matozoides, correspondent l'œufmur, le deuxième glo- bule polaire et les deux sphérules issues de la division du premier globule polaire; les globules polaires ont, par conséquent, la valeur de cellules-œufs rudimen- taires. Dans la partie théorique, 0. Hertwig examine d’abord plusieurs'problèmes cellulaires : I rejette les «théories du remplacement » défendues parS, Minot etE, Van Bene- den, qui admettent, comme on le sait, l'existence dans toutes les cellules de principe: mâles et femelles, Pex- pulsion nécessaire du principe mâle de l'œuf et du principe femelle du spermatozoïide réalisée dans le processus de la maturation, le remplacement de l’un et de l’autre, effectué dans l'acte de la fécondation. où l'œuf récupère son principe mäle en se conjuguant avec le spermatozoïde son principe femelle en s'unis sant à l'œuf. - 0. Hertwig rejette également la «théorie du plasma germinatif », dont les conséquences sont, selon Weis- mann, le rejet par l'œuf d'un plasma histogène et par- ticulièrement ovogène dont est formé le premier glo- bule polaire, et l'expulsion de la moitié du plasma ger- minalif employée à la formation du deuxième globule polaire, En effet, la distinction du plasma histosène et du plasma germinatif n'a aucune réalité objective; de plus, comme Ja formation des spermatozoïdes est exac- tement calquée sur celle des globules polaires et de l'œuf, et que les quatre spermatozoïdes, produits des deux dernières divisions d’une cellule-mère séminale, sont ou du moins paraissent parfaitement équivalents, cette équivalence est une difficulté insurmontable pour la distinction des deux plasmas, qui devrait être subie par les spermatozoïdes. 98 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Hertwig s'occupe ensuite du processus même de la fécondation. IL examine d’abord la question de l’indi- vidualité des chromosomes, question que se sont posée E. Van Beneden, C. Rabl, Boveri : il s’agit de savoir si les demi-anses chromatiques léguées à tout noyau-fille demeurent distinctes, ou si elles se confondent bout à bout; si, par exemple, il persiste des anses paternelles et des anses maternelles séparées, ou s’il n’y a que des segments à la fois paternels et maternels. Il expose ensuite : la théorie des plasmas ancestraux soutenue par Weismann; Pexplication proposée par cet auteur pour la formation du deuxième globule polaire, qu'il a considérée comme ayant pour but l’élimination de la moitié des plasmas ancestraux contenus dans l’œuf; la place enfin que prennent ces vues dans l'interprétation des phénomènes de parthénogénèse. Il définit la sexua- lité et la fécondation : tous les caractères sexuels dont est faite la distinction du mâle el de la femelle sont secondaires ; la sexualité réside essentiellement dans la fécondation, c’est-à-dire dans la copulation de deux noyaux semblables et équivalents. Hertwig enfin, à la suite d’un historique sur les glo- bules polaires, résume comme il suit sa théorie au sujet de ces formations: Les globules polaires sont des œufs abortifs, qui se forment par un dernier processus de division aux dépens des cellules mères ovulaires, de la même facon que les cellules séminales aux dépens des cellules- mères séminales, Tandis que chez ces dernières les produits de division sont tous employés comme sper- matozoides fécondants, un seul des produits de divi- sion de la cellule mère ovulaire devient l’œuf, en s'en- richissant de toute la masse vitelline aux dépens des autres, qui persistent sous forme rudimentaire et sont les globules polaires. Si ces cellules rudimentaires ne s’atrophient pas complètement, mais s’observent avec une si remar- quable constance dans toutes les classes du règne animal, c’est que le dernier processus de division qui leur donne naissance a pris une grande importance. Il se distingue de tous les autres phénomènes de divi- sion, en ce que deux divisions s’y suivent immédiate- ment, sans interruption d’un stade de repos du noyau, C’est là le moyen le plus simple pour empêcher que la fusion de deux noyaux, telle qu’elle s'opère dans l’acte de la fécondation, produise une addition de la substance chromatique et des éléments chromatiques, qui porte- rait cette substance et ces éléments au double de la masse normale existant chez chaque espèce animale. De ce qu’en effet la masse nucléaire de la cellule-mère séminale et de la cellule-mère ovulaire dès après la première division se partage encore une fois, avaat d’avoir eu le temps de se recompléter par voie de nutri- lion dans un stade de repos intermédiaire à denx mitoses, elle se trouve de la sorte partagée en quatru, et ainsi chacune des quatre cellules petites-filles, par cette division véritablement réductrice, ne contient plus que la moitié des éléments et de la substance chroma- tiques que renferme un noyau ordinaire, Dans les œufs qui sont destinés à subir un développement parthéno- génétique, la réduction de la masse nucléaire, qui sup- pose une fécondation subséquente, n’a plus sa raison d'être et disparait; ilne se forme donc plus de deuxième globule polaire, ou bien s'il apparaît un deuxième fuseau cinétique, la formation de cette figure n’est pas suivie de l’expulsion du globule; mais les deux noyaux issus de Ja cinèse se refusionnent: il s’est fait ainsi une régression du processus qui prépare la fécondation, une préparation à l’élat parthénogénétique. A. PRENANT. 4° Sciences médicales. Nicaise. Physiologie de la voix. Dilatation de la trachée chez les chanteurs. — Revue de Chirurgie. tom, XI, p. 613, Paris, 1891, Continuant ses études sur la physiologie de la trachée et des bronches, M. Nicaise nous montre que, contrai- rement à l'opinion courante, la trachée n'est pas un simple tuyau vecteur de l’air, Elle se dilate et s’allonge pendant l'expiration. Cette dilatation, due à la pression mécanique de l'air intra-trachéal refoulé par les forces expiratrices, met en jeu la contractilité de la trachée et lui permet de jouer un rôle dans la production des sons par la compression qu’elle exerce sur l'air con- tenu. L'air est chassé vers la glolte par deux forces, par la contraction des muscles expirateurs et par celle de la trachée et des bronches, qui s'ajoute à la rétraction du poumon, Grâce à son élasticité et à sa contractilité, la trachée augmente et maintient la tension de Pair. Aussi ses altérations entrainent une diminution dans l'intensité du son et des troubles dans son timbre. C'est ce qu’on observe par les progrès de l’âge (élargis- sement et amincissement de la portion membraneuse, diminution de l’élasticité des anneaux cartilagineux, sclérose, etc.) et par certaines altéralions spéciales par abus de fonction chez les chanteurs, les crieurs (anévrysme trachéal, trachéocèle). Dans ce dernier cas, la trachée, élargie et atrophiée, agil moins sur l’air contenu, le son a moins d'intensité, moins de perfection, la voix est affaiblie, le chant parfait est impossible ; on se trouve en présence d’une série de troubles que l’on a souvent attribués à tort à des lésions des cordes vocales. . D' Henri HArTMANN. Bertin-Sans. — Guide des travaux pratiques de physique à la Faculté de Médecine de Montpel- lier. 2° édition (6 fr.). G. Masson, 120, boulevard Saint- Germain, Paris, 1891. Le guide de M. Bertin-Sans comprend deux parties, — Dans la première l’auteur étudie la balance, les pompes, compte-goultes, transfuseurs, aspirateurs etc. et donne une idée de la méthode graphique. On trou- vera dans ces trois premières manipulations bien des renseignements utiles sur quelques appareils employés en médecine et qu'il est bon de faire éludier aux élèves. A quoi bon par exemple l'étude des corrections à faire aux pesées, il eùt mieux valu à notre avis s'étendre davantage sur la méthode graphique, si importante en physiologie et à laquelle l’auteur n’accorde mème pas une séance, La seconde partie est particulièrement bien traitée, Elle comprend l'étude de l'œil et de quelques instru- ments d'optique tels que le microscope, le spectros- cope et le saccharimètre, La manipulation comprenant ces deux derniers instruments me paraît un peu char- gée, mais il est facile de la scinder. Une seule question est traitée trop rapidement, c'est la méthode de M. Cuignet, M. Bertin-Sans dit qu'il faut un long ap- prentissage pour en tirer de bons résultats; ce n'est pas notre avis. Le procédé est des plus précis, et il n'est pas un élève sur vingt qui ne puisse s’en servir convenablement après une heure d'exercice. D° G. Weiss, Jean de Tarchanoff (Prince), Professeur de Phy- siologie à l'Université de Saint-Pétersbourg. — Hypno- tisme, suggestion et lecture des pensées, fraduit du russe par E. Jaubert, in-16, vu-163 pages (3 fr.). G. Masson, 120, boulevard Saint-Germain Paris, 1591. La plus grande partie du livre est consacrée à l’ex- plicalion des phénomènes connus sous le nom de phénomènes de cumberlandisme ou de lecture de pen- sées. Les chapitres qui traitent de l'hypnose et de la suggestion constituent une sorte d'introduction. Voici en quelques mots la théorie qu’expose M. de Tar- chanoff, Les excitations faibles qui viennent incessam- ment des organes des sens exercent une action inhibi- trice sur les centres cérébraux etréduisent sans £esse à l’état d'images internes les représentations qui ten- dent à s’objectiver, Si l’on réussit à faire prédominer dans l'esprit d’un sujet une sensation unique, mono- BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 99 tone et intense, elle arrivera peu à peu à faire dispa- raître toutes les autres sensations, et, lorsqu'elle les aura toutes effacées, elle cessera à son tour d’être per- que, puisqu'il n'existera plus aucun élat de conscience auquel elle puisse s'opposer. Le sommeil ne tardera pas à apparaitre et dans cette conscience vide chaque image suggérée se transformera en sensation, puis- qu'aucune représentation ne viendra la réduire. Cette sensation hallucinaloire entraînera naturellement à sa suite des mouvements et des actes; ce sont les mou- vements idéo-moteurs de Carpenter. Dans l’état normal, lorsque l'attention est très concentrée, ces mouvements se produisent comme dans l'hypnose, bien qu'avec une moindre intensité. Ce sont ces mouyements idéo-mo- teurs que percoit et qu'interprètele liseur de pensées. M. de Tarchanoff a imaginé pour les mettre en évidence plusieurs appareils inseripteurs fort ingénieux dont 1l donne la description. Dans les cas de lecture à dis- tance, l’expérimentateur se guide sur les mouvements des lèvres dusujet, sur les mouvements de ses yeux, sur la direction de son corps, etc. L’ouie peut parfois sup- pléer à la vue; l’odorat peut aussi dans certains cas aider à découvrir des objets cachés, M. de Tarchanoff paraît n'avoir pas connu les expériences faites par les membres de la Society for psychical Researches de Lon- dres, expériences pour lesquelles il faudrait d’autres explications. Il considère la pratique de l’hypnotisme comme dangereuse pour les sujets et voudrait qu'elle fût réservée aux médecins et aux physiologistes. L. MARILLIER, card (D'S). La femme pendant la période mens- truelle, Etude de psychologie morbide et de médecine lé- gale. in-8°, x1v-283 pages (Prix : 6 francs.) F. Alcan, 108 boulevard Saint-Germain. Paris, 1890. La thèse que M. Icard cherche à démontrer, c’est que les troubles de la menstruation, et même dans certains cas la simple apparition des règles, peuvent suffire a eux seuls pour engendrer chez la femme de véritables maladies mentales. Il n’est pas de meilleure réfuta- tion de sa théorie que les observations mêmes qu'il a réunies et qui constituent la partie la plus intéres- sante desonlivre. C’estchez les prédisposées seules que les fonctions menstruelles s’accompagnent de troubles psychiques graves; il en est de la folie menstruelle comme de la folie puerpérale : elle n'apparaît que chez les femmes quisont marquées d’une tare héré- ditaire; l’état puerpuéral n'est jamais qu'une cause occasionnelle de folie; il en est de même selon toute apparence de la mensirualion. Il semble au reste que M. Icard ait souvent pris l'effet pour la cause; les troubles menstruels qu'on observe fréquem- ment chez les aliénées sont d'ordinaire une con- séquence du mauvais état où se trouve leur système nerveux. Dans un grand nombre des observations que rapporte l’auteur, les antécédents héréditaires des ma- lades sont nettement indiqués, et les cas ouils ne le sont point sont presque toujours des cas où les ren- seignements font défaut ou bien sont incomplets. I] faut remarquer en outre que les troubles psychignes dont parle M. Icard sonten somme très rares relativement à l’ensemble de la population etqu'il est par conséquent d’une très mauvaise méthode de les mettre en relation de cause à effet avec un phénomène physiologique qui se retrouve chez toutes les femmes. Le livre est composé d'une facon étrange; l'auteur s'attache à démontrer dans un chapitre que la « sym- pathie menstruelle » est probable, puis dans le chapitre suivant qu'elle est certaine ; il classe ses preuves en preuves d'autorité et preuves cliniques ; on se demande un instant ce que peuvent bien être les premières: il cite à l’appui de son dire le Zend-Avesla, livre sacré des Babyloniens (sic), et la Bible, où reviennent sans cesse, dit-il, les mots menses, menstruatn, ete. Il abuse des citations, et du raisonnement à priori; malgré ses habitudes de clinicien, il quitte souvent le terrain des faits. On trouve parfois dans ce livre des rapprochements bizarres. M. [card compare, par exemple, l’action des périodes menstruelles à celle des agents toxiques. Sou- vent aussi M. Icard se contente d’explications verbales : il écrit, par exemple, cette phrase : « La prédisposition congénitale n’est autre que l’idiosyncrasie. » Malgré ses vices de composition et le style déclama- toire et solennel où il est écrit, en dépit de l’inexacti- tude de la théorie qu'il est destiné à défendre, le livre de M. Icard est intéressant, en raison surtout du grand nombre d'observations qu'il renferme. Mais on éprouve une déception en le lisant, parce qu'il ne tient pas les promesses de son titre; il eüt été très utile de pos- séder une bonne descriplion de l’état mental de la femme normale pendant la période menstruelle; cette description, M. Icard semblait nous la promettre, il ne nous l’a pas donnée. Son livre, c’est essentiellement l’étude de la menstruation chez les aliénées. L, MARILLIER. Straus et Gamaleia, — Contribution à l'étude du poison tuberculeux. — Aych. de méd. expériment., t. IT, p. 705. Paris, 1891. D’expériences fort intéressantes, MM. Straus et Gama- leia concluent que, contrairement à ce qu'on observe pour beaucoup d’autres microbes pathogènes,ce n’est pas dans le milieu de culture, liquide ou solide, où ce bacille a végété, que l’on trouve les principaux pro- duits toxiques qu'il élabore. Ces substances sont fixées et retenues dans le corps même du bacille; elles résis- tent à des traitements très énergiques qui ne par- viennent ni à les détruire, ni à les extraire du corps bacillaire, De même, elles résistent très longtemps au séjour dans le corps des animaux. Il ne suffit pas de tuer le bacille pour guérir le ma- lade; les bacilles morts conservent une action délétère énergique. Le but à atteindre est l'élimination des foyers tuberculeux ou la neutralisation du poison. D' Henri HARTMANN. L£étienne, — Recherches bactériologiques sur la bile humaïne.— Arch. de méd. expérim., t. IL, p. 161, Paris, 1891, Sur 42 biles examinées, 24 renfermaient des micro- organismes ;les unes n’en contenaient qu'une seule es- pèce, les autres plusieurs. Les deux microbes le plus fréquemment rencontrés ont été le Staphylococcus albus (13 cas), et Le Bacterium Coli commune (11 cas). Quelques espèces de micro-organismes sont particulières à la maladie dans laquelle elles ont été observées; exemples: Le pneumocoque chez un pneumonique; le staphylo- coque doré chez un malade suppurant, etc. Ces observations montrent que, si la bile physiolo- gique est dépourvue de microbes, la bile de l’homme malade peut,comme beaucoup d’autres sécrétions, con- tenir des agents pathogènes, même en l'absence de toute infection biliaire, dans le sens clinique du mot, Ce microbisme biliaire latent entraîne des modifica- tions dans la composition de la bile et contribue peut- être, pour peu que son action soit favorisée par la sta- gnation, à précipiter les matériaux qu'elle renferme et à déterminer la production de calculs biliaires. D: Henri HARTMANN. XWurtz (R.) et Herman, — De la présence fré- quente du Bacterium Coli commune dans les ca- davres. — Arch. de méd. experim., t. I, p. 743. Pa- ris, 1891. Dans la moitié de leurs autopsies, faites de 24 à 36 heures après la mort, Wurtz et Hermann ont trouvé, dans le foie, la rate et les reins, souvent dans les trois organes ensemble, le Bacterium Coli commune. Leurs re- pote ont porté sur 32 cadavres dont 24 de tubercu- eux. D' Henri HARTMANN. 100 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 18 janvier 1892 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Painlevé : Sur les intégrales des équations différentielles du premier ordre, possédant un nombre limité de valeurs. — M. V. Stanievitch : Sur un théorème arithmétique de M. Poincaré. — M. Mascart : Sur la masse de l’atmos- phère, — M. H. Resal: Nouvelle note sur la résistance et les faibles déformations des ressorts en hélice, — M. &. Rayet : Observations de la comète périodique de Wolf, faites en 1892 au grand équatorial de l’observa- toire de Bordeaux, par MM. G. Rayet, L. Picart et Cowrty. — M. Rod. Wolf: Sur la statistique solaire de l’année 1891. — M. Faye : Notice sur sir Georges Biddel Aùy, associé étranger.de l’Académie —M. Cha- pel donne la description d’une couronne lunaire qu'il a observée le 14 janvier 1892. 2 SCIENCES PHYSIQUES. — M À Etard a entrepris l’é- tude des solubilités dans les dissolvants organiques. Les bichlorures anhydres de mercure et de cuivre qui sont solubles dans plusieurs liquides lui ont permis d'observer des relations intéressantes entre la courbe de solubilité et la constitution chimique du dissolvant, Pour le bichlorure de mereure, la solubilité dans les premiers termes de la série des alcools normaux affecte une marche analogue à celle de la solubilité dans l’eau ; mais à mesure qu'on s'élève dans la série, l'influence du groupe OH diminue par rapport à celle du radical carburé, Diverses courbes de solubilité de l’un et de l’autre corps soluble sont des droites de so/ubilité cons- tante: dans ce cas, le nombre des molécules du dissol- vant est dans un rapport simple avec le nombre des molécules du corps dissous. — M. Guntz, étudiant l’ac- tion de l’oxyde du carbone sur le fer et le manganèse obtenus à un état d'activité chimique considérable par la distillation de leur amalgame à basse température, a observé le fait suivant : vers 4009 ou 500°, le métal brûle dans l’oxyde de carbone et met le carbone en liberté; la réaction est plus nette avec le manganèse qu'avec le fer. — On admet généralement que les réac- ions qui s’opèrent entre les sulfates alcalins, le char- bon et la silice, dans la fabrication du verre ou des silicates solubles sont représentées par l'équation 2R S0' + C 2S0? + C0? + 2RO. M. Scheurer- Kestner ayant remarqué que la quantité de charbon nécessaire pour une opération est au moins le double de celle exigée par cette équation a voulu vérifier celte réaction, en analysant les gaz qu’elle dégage. Il à vu que tout ie soufre des sulfates est dégagé à l’état de soufre libre en vapeur. — A l'occasion de la note de M. Maquenne sur les azotures des métaux alcalino-ter- reux, M.E£. Ouvrard publie des expériences dans les- quelles il avait vu le lithium se combiner directement à l'azote au rouge sombre, — M. Ad. Fauconnier, en faisant réagir le perchlorure de phosphore sur l’oxalate d’éthyle dans des conditions particulières, a obtenu le chlorure doxalyle. — La formation de lalcoolate de soude des alcools monoatomiques primaires dégage une quantité de chaleur constante voisine de 32 calo- ries. —M,. de Forcrand trouve que le glycol traité par 1 puis 2 équivalents de sodium dégage 36, puis 27 ca- lories, c’est-à-dire que la première substitution dégage plus de chaleur que pour un alcool monoatomique, la seconde moins. La demi-somme de ces deux valeurs est très voisine de 32. Comparant ce fait avec ce qui se passe dans le cas où l’on ajoute à deux molécules d’al- cool méthylique un seul, puis deux équivalents de sodium, M, de Forcrand pense que la seconde fonction alcool du glycol s’est combinée avec la première, lorsque celle -ci a subi la substitution métallique. Cette combinaison intra-moléculaire est détruite au moment de la seconde substitution; elle absorbe alors la même quantité de chaleur qu’elle avait dégagée en se formant. La substitution du sodium à l’hydrogène dégagerait donc en réalité la même quantité de chaleur, que l’al- cool soit diafomique ou monoatomique. — M. Ph. Bar- bier a isolé de l'essence de menthe pouliot un corps liquide bouillant à 222°-225° et répondant à la formule (C10H160 ; il étudie cet'isomère du camphre, auquel il donne le nom de puléone, — M. E. Rouvier, étudiant la réaction de l’iode sur l’amidon, a trouvé qu'il se forme avec un excès d’iode un composé différent de celui qui prend naissance lorsque l’amidon est en excès, — M. L. Vignon, qui avait mesuré le pouvoir rotatoire des éléments de la soie sur un échantillon provenant du Bombyx Mori (race du Var), compare à ce point de vue des échantillons de provenances di- verses. Les pouvoirs rotatoires sont tous de même signe, et ont en général des valeurs peu différentes. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Morel a déterminé la quantité d'acide borique et le temps de contact néces- saires pour empècher la germination des haricots et des grains de blé, — M. L.}F. Henneguy décrit, d’après ses observations sur le Smicra clasipes, parasite des larves du Stratiomys strigosa, les particularités qui distinguent le développement des hyménoptères ento- mophages. La segmentation de l'œuf est totale ; une membrane embryonnaire unique apparaît avant la for- malion de l'embryon, par un processus très différent de celui qui donne naissance à l’amnios des autres insectes; l’œuf subit un accroissement de volume con- sidérable pendant son développement; la membrane embryonnaire suit l'accroissement de l'embryon par l'agrandissement et non la multiplication de ses cel- lules, puis subit la dégénérescence graisseuse. L’œuf emprunte par endosmose au sang de l'hôte les maté- riaux nutritifs nécessaires à son développement, — M. P. Thélohan décrit deux nouvelles EE para- sites des poissons, qui accomplissent leur évolution tout entière dans les tissus de lPhôle, — M, Leloir signale qu'on peut arrèter les hoquets incoercibles en comprimant le nerf phrénique avec le doigt entre les deux atlaches sterno-claviculaires du muscle sterno- cléido-mastoïdien, — M. L. Guignard à étudié les canaux qui sécrètent le mucus chez les Laminaires: il a reconnu que ces canaux muciferes forment un appa- reil sécréteur tout particulier qui n'existe dans aucun autre groupe de plantes, Chez la Laminaria Cloustoni, ce système se forme par des méats qui naissent dans l'assise superficielle du parenchyme cortical, s’enfon- cent dans ce parenchyme, puis se mettent en commu- nicalion les uns avec les autres de facon à former un réseau; les cellules sécrétrices restent localisées en amas aux points de Jonction des branches du réseau. Ce système se retrouve chez presque toutes les Lami- naires ; la forme et la dimension des mailles du réseau sont essentiellement variables. — M. G. Chauveaud a reconnu que chez certaines Asclépiadées, comme le Vinceloxicum officinale, les ovules naissent en réalité sur la face dorsale de la feuille carpellaire; les deux bords de celle-ci se sont repliés complètement sur eux-mêmes vers l'intérieur de la fleur et, après s'être soudés l’un à l’autre, divergent de nouveau dans l’intérieur de l'ovaire formé par leur involulion: la face dorsale de cette partie libre regarde ainsi de nouveau vers l'extérieur de la fleur; c’est elle qui porte les ovules. — M, P. Le- sage s’est assuré que les plantes (radis et cresson) qui ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 101 ont été arrosées d’eau salée contiennent plus de chlore et plus de sodium que celles qui ont été arrosées d'eau douce. Mémotres présentés. — La Compagnie continentale d'exploitation des chaudières sans foyer adresse divers documents relatifs à un nouveau type de ma- chine à foyer. — M, L. Hugo adresse une note relative à l'extinction de l'étoile de Cassiopée (1572) étudiée par Tycho-Brahé, — M. V, Ducla adresse une note relalive à une méthode de détermination du nombre x, — M. Ch. Morel adresse une note relative à un nouvel hygromètre, — M, le D’ Pigeon adresse une note rela- tive aux causes provocatrices des épidémies, Séance du 25 janvier 1892. 1° SGIENCES MATHÉMATIQUES. — M, E. Fabry : Sur une courbe algébrique réelle à torsion constante. M. H. Resal : Sur les propriétés de la loxodromie d’un cône de révolution et leur application au ressort conique. — M. P. Tacchini: Résumé des observations solaires faites à l'Observatoire royal du collège romain pendant le quatrième trimestre de 1891, — MM. Ch. André et F. Gonnessiat ont disposé un appareil à passages ar- tificiels de facon à isoler l’un des éléments de l’équa- tion personnelle dans la méthode de l'œil et de l’o reille, l'équation décimale. Is étudient au moyen de cet appareil l'influence de ce facteur. 29 SGIENCES PHYSIQUES. — M. Ch. Antoine élablit l'équation caractéristique de la vapeur d’eau en partant des résultats des expériences de Hirn. — M. H. Pellat fait des objections à la conclusion que M. Gouy a tirée de ses expériences sur les différences de potentiel au contact, présentées à l’Académie le 4 janvier. M. Gouy admet que les amalgames à 1/1000 se comportent dans une pile comme le métal solide lui-même. M. Pellat pense que dans la couche superficielle en contact avec l'acide sulfurique, le métal allié disparaît, transformé en sulfate; il ne reste donc que le mercure, et parsuite on ne peut rien conclure de ce que tous les amalgames se comportent dans ces conditions comme le mercure. — M. A. Perot a repris expérimentalement la question de la loi desoscillations hertziennes, en opérant sur un dispositif particulier; la formule qui traduit ses résul- tats correspond à une force pendulaire simple amortie. — M. À. Broca indique une méthode pour construire un abaque au moyen duquel on peut résoudre les deux questions suivantes : 41° trouver les données d’une len- lle ayant un point aplanétique déterminé; 2°retrouver les points aplanétiques d’une lentille donnée. — M.E. Pé- chard montre que l’on peut facilement doser le mo- lybdène dans les molybdates à l'état d'acide molyb- dique par la méthode suivante : en faisant passer sur un molybdate alcalin chauffé à #40° un courant de gaz acide chlorhydrique, la réaction obtenue par Debrayet aboutissant à la sublimation du composé Mo03, 2HCI. est totale : la solution aqueuse de ce composé, évaporée à 1009, laisse comme résidu l'acide molybdique pur. Cette réaction n'ayant pas lieu avec les tungstates, la méthode s'applique à un mélange de molybdates et de tungstates. — M. A. Colson croit que la notation sté- réochimique de MM. Le Bel et Van ’Hoff ne répond qu'en apparence aux principes de la dyssimétrie mo- léculaire posés par M. Pasteur. La loi de M. Guye, d’un autre côté, ne rend pas compte de tous les faits; ainsi Vacidediacétyltartrique et le diacétyltartrate de potasse, répondant à l'acide tartrique droit, sont lévogyres:; la théorie Létraédrique exigerait qu'ils füssent dextrogyres. 30 SCIENCES NATURELLES, — M. L, Viron avait, dans un travail précédent, montré que la coloration présentée parfois par les eaux distillées médicinales est due tan- tôt à des masses zoogleques en suspension dans le li- quide, tantôt à une matière colorante soluble traversant le filtre Chamberland. Il a pu isoler quelques-uns de ces pigments solubles et les caractériser chimiquement; il a aussi cultivé les micro-organismes générateurs de ces principes colorants. — M.E. Chuard a constaté que le terreau de tourbe est le siège d’une fermentation nitrique assez active, bien que ce milieu présente les conditions considérées comme les plus impropres à ce phénomène, à savoir : une réaction neltement acide, l'absence presque totale de carbonates et la présence abondante de matières organiques. L'agent de nitrifi- cation est sans doute différent de celui étudié par M, Winogradsky. — M.Muntz, en présentant les résul- tats des recherches qu'il avait faites ayee M. Mar- cano sur l’ammoniaque des eaux de pluie dans les ré- gions tropicales, avait fait remarquer que cette ammo- niaque y est plus abondante que dans les régions tempé- rées. M. Albert Lévy avait contesté cette conclusion, M. Muntz montre que les chiffres admis par M. Albert Lévy pour les régions tempérées sont manifestement trop élevés, ayant été recueillis dans des villes, et qu'ils ne représentent nullement la constitution géné- rale de l'atmosphère. — MM. Lortet et Despeignes ont constaté que les Lombries vivant dans un ‘milieu souillé par des matières turberculeuses se farcissent de bacilles qui gardent longtemps toute leur virulence. M. E. Nocard a réussi à inoculer la dourine des Equi- dés soit au cheval, soit au chien, en employant comme matière virulente la bouillie rougeûtre qu'on trouve dans les foyers de ramollissement de la moelle ; cette matière conserve longtemps sa virulence dans la gly- cérine, ce qui permettra de faire venir du virus pour les études des pays où règne la dourine. — MM.F. Jolyet et H. Viallanes ont éludié l’innervation du cœur chez le crabe >ommun (Carcinus mœænas); ils ont pu distin- guer dans le système nerveux central un centre d'arrêt, situé dans la partie la plus antérieure de la masse sous-æsophagienne et un centre accélérateur’ situé dans le ganglion de la première palte et de la dernière patte-mâchoire. — M. G. Pouchet donne le résultat de ses recherches sur la faune pélagique du Dyrefjord (Islande), qu'il a explorée systématiquement pendant les mois de juillet et août 1891. — M. M. Hamy décrit un halo elliptique circonscrit, qu'il a observé autour de la Lune le 14 janvier 4892. —M. A. Cornu, en pré- sentant cette note, fait remarquer que le phénomène, conformément à la loi posée par lui, a été l’avant-cou- reur d'une bourrasque. Rapport : M. Duclaux, rapporteur de la commission sur le déplâtrage des vins par la strontiane, propose de blâmer cette pratique, moins pour le danger que pré- sente l'emploi de la strontiane, difficile pourtant à obtenir pure de baryte, que pour le principe : il ne faut sanctionner aucune sophistication du vin.Les con- clusions de ce rapport sont adoptées par l'Académie. Mémoires présentés. M. F, Mirinny : Sur le calendrier national à propos de la question de lheure universelle. — M. A. Clercy adresse un mémoire relatif à son procédé pour vérifier la pureté des boissons alcooli- ques. — M. Delaurier : Mémoire sur un moteur à feu, inexplosible, applicable à la navigation aérienne sans ballon. — M. J. A. Parcharides adresse un mémoire relatif à un «aérostat sur des roues à voile ». — M. A. Hermann adresse une note relative à une méthode cryptographique pour les dépêches chiffrées, — M. V. Candotti adresse une note sur la Théorie du téléphone, L. Laricour. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 16 janvier 1892. M. P. Sérieux donne l'observation d’un cas de cécité verbale avec agraphie, dans lequel l’autopsie fit cons- later une seule lésion, à savoir un foyer de ramollis- sement siégeant au niveau du lobule pariétal inférieur de l'hémisphère gauche. — MM. de Christmas et Res- paut proposent quelques formules d’antiseptiques com- posés, qui ont l'avantage surleurs composants, employés isolément, d'être plus antiseptiques relativement à leur toxicité. — M, À, Giard signale un cas de mimiéisme entre insectes observé par lui en France : il s’agtt d’un diptère Stratyomide (Beris vallata) s’écartant de la li- vrée ordinaire des Stratyomides pour imiter une Ten- thrède (Athalia annulata). — MM. Fèré et Herbert ont ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES recherché sur des lapins qui avaient absorbé, pendant un certain temps, { gramme de bromure de strontium par jour, en quelle proportion ce sel s’accumule dans lé- conomie ; ils en ont retrouvé en moyenne 2 grammes par kilogramme d'animal, résultat comparable à celui donné par le bromure de potassium. — MM. A. Rodet J. Courmont ont fait l'analyse physiologique de la toxicité des produits solubles du staphylocoque pyo- gène. Ils ont étudié séparément les cultures complètes, stérilisées soit par le filtre, soit par la chaleur, et le précipité ainsi que l'extrait alcooliques ; les substances précipitant par l'alcool produisent chez le chien des phénomènes de strychnisme, les substances solubles dans l'alcool sont au contraire stupéfrantes. —M. Raïl- liet a étudié un ténia du pigeon domestique, qui avait été déposé au musée de l’école d’Alfort par Delafond; M. Railliet estime que ces échantillons appartiennent à la même espèce que ceux identifiés récemment par M. Mégnin au Tænir sphenocephala de Rudophi; en réa- lité, il s'agirait d’une espèce nouvelle pour laquelle l’auteur propose le nom de T, Delafondi. — MM. Sébi- leau et Arrou font une première communication sur la circulation du testicule chez l’homme et les animaux. — M. Kunckel d'Herculais a pu suivre la série des changements de coloration du criquet pèlerin; ilya un cycle de nuances qui recommence à chaque mue ; ces modifications du pigment semblent être en relation avec les phénomènes intimes de la nutrition. — MM. Héricourt et Cl. Richet apportent de nouveaux faits pour montrer que chez le chien et le singe, qui sont réfractaires à la tuberculose aviaire, l’inoculation de cette tuberculose leur confère sinon l’immunité, du moins une grande résistance contre la tuberculose humaine. — M. Fayod maintient mordicus contre les objections de M. Guignard tout ce qu'il a avancé sur la pénétration des poudres fines à travers les membranes des cellules et sur la structure spiralée du protoplasma. Séance du 30 janvier. M. Galezowski rapporte la diplopie monoculaire de lamblyopie hystérique à un spasme du muscle accom- modateur, — MM. Lesage et Macaigne ont étudié la virulence pour le cobaye du Bacterium Coli commune recueilli dans diverses conditions. Le bacille de l’in- testin sain est extrêmement peu virulent ; dans tous les cas de diarrhée, cette virulence augmente; elle aug- mente proportionnellement au degré de gravité de l’entérite, Recueilli dans des suppurations causées par lui, le bacille présente des propriétés pyogènes du- rables, MM. Hanot et Gilbert ont obtenu dans divers cas des cirrhoses du foie chez les animaux à la suite de tuberculoses expérimentales, — M. Enriquez a répété les expériences d’'Heidenhain sur le passage de particules solides à travers l’épithélium rénal, mais en remplacant l’indigo injecté dans la veine par une cul- ture de microbes. Sur le chat, après section de la moelle cervicale, l'expérience a donné les mêmes résultats, c’est-à-dire passage des microbes spécialement par les cellules troubles à bâtonnets des tubuli, indépendam- ment de la sécrétion rénale qui est suspendue, Dans le rein d’un sujet ayant succombé à l'infection pneumo- coccique, les microbes retrouvés dans le rein ne pré- sentaient pas celte localisation, — M, A. Giard signale un hémiptère hétéroptère (Halticus minutus Reuter) qui ravage les arachides en Cochinchine. — M. Thé- lohan, en traitant par l’eau iodée les spores du spo- rozoaire, découvert par Gluge, qui détermine de petites tumeurs sur la peau de l’Epinoche, a pu y reconnaître l'existence d'un filament et d’une capsule polaire. Ce fait démontre bien que ce parasite est une Myxosporidie et justifie la création du genre Glugea (Thélohan). — M. J. Passy a étudié le minimum perceptible de quel- ques odeurs, en déterminant le nombre de gouttes d’une dilution alcoolique de la substance nécessaire pour parfumer l'air contenu dans un flacon d’un litre. Les chiffres qu’il a obtenus se rapprochent de ceux de Valentin, mais sont énormément plus faibles que ceux de M. Ch. Henry (jusqu'à plusieurs millions de fois), Il fait remarquer que le chiffre donné par M. Henry pour l’éther est supérieur à la quantité de vapeur du corps pouvant exister dans l’air.—M. Laveran a expéri- menté le bleu de méthylène préconisé par Guttmann et Ebrlich contre l'hématozoaire du paludisme, Les résul- tats ont été négatifs, tant sur les hématozoaires des oiseaux que sur ceux des paludéens. — M. J. de Guerne signale qu'il à trouvé sur le corps d’un canard sauvage tué au vol dans la Marne une petite sangsue (Glussi- phonia tesselleta) jusque-là inconnue en France, — M. Pouchet a examiné sur des coupes faites par lui une préparation de M. Fayod; il a constaté que les particules d’indigo n'avaient pénétré que dans des cel- lules endommagées de quelque manière, M. Gui- gnard, de son côté, a fait des expériences de contrôle qui ont toutes été négatives. Il fait remarquer, en outre, combien est bizarre, pour étudier le protoplasma, le procédé qui consiste à porter les tissus à la tempéra- ture de fusion du borax, ou à les dissoudre dans le permanganate de potasse, procédé décrit par M. Fayod dans Ja Revue générale de Botanique. L. LAPiQuE, SOCIETE FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 5 février 1892. MM. Lagrange et Hoho, de Bruxelles, envoient à la Société une étude sur les effets du passage de courants de haute tension à travers un électrolyte au moyen d’électrodes de surface limitée. M. Curie, secrétaire, en signalant les conclusions de ce travail, rappelle que la question a déjà été étudiée par MM. Violle et Chas- sagny. — M. Berget expose les recherches de M. C. Miculeseu sur la détermination de l'équivalent méca- nique de la calorie. En principe, la méthode est celle de Joule, mais le travail mis en jeu dans le calorimètre est beaucoup plus considérable,ce qui permet d’abaisser à quelques minutes seulement la durée d’une expé- rience, D'autre part, toute correction due au refroidis- sement est éliminée dans la mesure des quantités de chaleur par l'emploi d’une méthode calorimétrique à température constante. Le travail est fourni par une dynamo et mesuré par la méthode de M. Marcel Deprez. Le bâti qui supporte la dynamo est suspendu sur deux couteaux, et l’un de ceux-ci porte un levier sur lequel peuvent se déplacer des poids. On peut ainsi mesurer le moment de la force qui fait équilibre à la réaction de l'induit, Cette notion, jointe à la con- naissance du nombre de tours de l'anneau (nombre qui se mesure avec l’inscripteur Marey), suffit pour cal- culer le travail. D'autre part la quantité de chaleur produite est enlevée à chaque instant par un courant d’eau qui circule autour du calorimètre. Du poids de l’eau écouiée et de son élévation de température, on déduit immédiatement la quantité de chaleur. Les expériences de l’auteur, conduites avec le plus grand soin, donnent des résultats très concordants, dont la moyenne est J —426,7!. — M. Ch. E. Guillaume fait connaître à ce propos que les papiers de Joule, ainsi que deux de ses thermomètres, existent encore. On a ainsi les éléments nécessaires pour ramener l’échelle de Joule à celle du thermomètre normal. En apportant cette correction au nombre de Joule, on trouve une valeur supérieure à 426, — M. A. Broca fait une pre- mière communication sur l'aplanétisme des systèmes centrés. IL démontre d’abord un théorème général, duquel il résulte que, dans le cas des systèmes sphé- riques, il existe des points réels ou imaginaires, où l’aberration n’est plus que du quatrième ordre, et en ces points l’aberration change de signe. D'où cette conséquence importante : il est possible de combiner les éléments de deux lentilles de telle sorte que leurs 1, Nous nous bornons à cet exposé sommaire, Car ce tra- vail, ayant été présenté et soutenu comme Thèse devant la Faculté des Sciences de Paris, sera analysé prochainemant en détail dans une autre partie de la Revue. si 6 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 103 aberrations soient de signe contraire, et par suite se compensent. L'auteur expose ensuite les calculs qui fournissent les éléments nécessaires pour la construc- tion de lentilles à points aplanétiques déterminés. Déjà le cas de la lentille crown-flint est trop compliqué pour être abordé directement. Il se traite par approxi- mations successives en partant de la lentille homogène. Ce dernier cas est encore assez pénible, mais du moins il se prête à la construction d’un abaque au moyen duquel on pourra, soit trouver les données d'une len- tille ayant un point aplanétique déterminé, soit trouver les points aplanétiques d’une lentille donnée, et enfin reconnaître le signe de l’aberration focale d'une len- tille, Ces considérations conduisent à l’emploi de len- tilles d’une très grande épaisseur. L'auteur se propose d'appliquer ces résultats à la construction d’un nou- veau type de microscope. Edgard Haupré SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 3 février 1892. M. Aubin a fait plusieurs analyses de galènes ar- gentifères contenant une forte quantité de zinc, et pro- pose pour des dosages de ce genre de déterminer le Plomb à l’état de sulfate, l'argent à l’état de chlorure, et enfin le zinc à l’état de sulfure; pour séparer le sul- fate de plomb de la gangue on le redissout dans le tar- trate de soude alcalin, d'où ilestreprécipité par l'acide sulfurique. — M. Trillat a préparé les dérivés, méthylés étaylés, ete, de la diamidophénylacridine et obtenu ainsi des matières colorantes teignant le coton mor- dancé et la soie en rouge orangé. Il a également pré- paré un certain nombre d’azoïques; ces couleurs ne présentent pas d'avantages particuliers. —- M. Trillat rappelle le procédé de préparation de l’aldéhyde for- mique, qu'il a indiqué et qui permet d'obtenir des solutions à 40 0/0 ne contenant d'autre impureté que de lalcool méthylique; il a étudié les propriétés anti- septiques de cette aldéhyde sur le Bacillus anthracis et trouvé que la stérilisation des bouillons ensemencés avec ce microbe est assurée par une dose de 1/50000°; l’auteur continue ses recherches. — M. Zune fait hom- mage à la Société de son traité de l'analyse des beurres; il montre ensuite que les points de fusion et de solifidi- cation des corps gras pris avec les précautions conve- nables sont bien identiques. Il présente un appareil permettant de prendre la densité et le coefficient de dilatation des corps gras. M. Zune signale enfin l’em- ploi du réfractomètre pour rechercher l'huile de résine dans l’essence de térébenthine. On peut facilement au moyen de cet instrument déceler quelques centièmes d'huile de résine mélangée à l'essence. A. COMBES. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 3 février 1892. M. d’Ocagne fait une communication sur la détermi- nation du point le plus probable donné par des recou- pements qui, reportés sur un plan, ne convergent pas. Lorsqu'on définit ce point comme étant celui dont la somme des carrés des distances aux droites données est un minimum, on voit qu'il est tel que la résul- tante géométrique de ces distances est nulle, En par- tant de cette propriété, M. d’Ocagne établit une cons- truction géométrique simple de ce point. — M. Laïsant en fait connaître une autre construction, également simple, obtenue par application de la méthode des équipollences. — M. Lucas émet l’idée d’une autre solution qui consisterait à prendre par rapport à un cercle arbitraire de rayon suffisamment grand les pôles des droites données. Ces droites étant sensiblement convergentes, leurs pôles seront sensiblement en ligne droite. Il est facile de tracer la droite dont ils s’écar- tent le moins. On n’a plus ensuite qu'à prendre le pôle de celle-ci par rapport au cercle qu'on à choisi. — M. Laisant fait une communication sur l'identification du polynône. (TX) = 45 FAT EL +... + an avec le suivant : by+bz+bor(r—1)+....+ bnæ(x—1)....(0—n+1). Il arrive à la formule symbolique : 1 p où chaque puissance 91 doit être remplacée, dans le développement, par ® (q). Il rappelle que M. d'Ocagne a donné de b, l'expression suivante! où interviennent les nombres 4%? bp= kb ap + hot @pyitlhye Gpyote.+lr On M. Laisant fait ressortir de la comparaison de ces deux résultats un nouveau moyen d'obtenir l'expression explicite du nombre #?, en fonction de ses indices m et p. — M. Humbert fait une communication sur la surface de Kummer. Il fait voir, en particulier, qu'il y a une infinité triple de surfaces cubiques inscrites ayant quatre points doubles situés sur la surface. Ces points sont les sommets d’un tétraèdre dont les arêtes touchent la surface, Propriétés diverses de ces tétraèdres, — M. Kœnigs démontre que la condition nécessaire et suffisante pour qu’un réseau de courbes planes soit la perspective des lignes asymptotiques d’une surface est que les invariants de l'équation de Laplace attachée à ce réseau soient égaux. M. d'OcAcne. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 28 janvier 1892 SCIENCES PHYSIQUES. — M. W. C. Roberts Austen fait une communication sur les points de fusion dans la série des alliages d'aluminium et d’or. Il a déter- miné les points de fusion d’une remarquable série d’alliages d'or et d'aluminium à l’aide du thermo-couple de Le Châtelier qu'il a employé de la manière qui est décrite dans les Proceedings de la Société royale, vo- lume 49, p. 347, a. 4891. Bien que l’alliage blanc qui contient 10 0/0 d'aluminium ait un point de fusion qui est à 417 au-dessous de celui de l'or, l’alliage pourpre a un point de fusion qui està 35° au-dessus de celui de l’or lui-même ; c’est semble-t-il, le seul cas connu d’un alliage fondant à une température plus élevée que le moins fusible de ses composants. M. Austen pense que ce fait constitue un argument puissant en faveur de l'opinion qui considère cet alliage comme une véritable combinaison d’or et d'aluminium. A l'exception des deux alliages mentionnés plus haut, tous ceux qui ap- partiennent à cette série présentent des points de fu- sion qui décroissent régulièrement jusqu'à 660°, un peu au-dessous du point de fusion de l'aluminium 66%, — MM. le capitaine Abney F. R. S. et le major géné- ral Festing F. R. S.font une troisième communication sur la photométrie des couleurs; ils avaient indiqué dans la Bakerian Lecture de 1886 une méthode pour cons- truire la courbe de luminosité d’un spectre continu fourni par une lampe à arc. Ils n'avaient pas cherché à déterminer quelle partie de la rétine l’on employait pour faire les observations qui servaient de données pour la construction de la courbe. Maisleurs recherches ultérieures leur ont montré l’importance de cette ques- tion, et ils décrivent dans cette note les modifications de leur modus, operandi qui leur ont permis d'employer à leur gré soit la tache jaune, soit les autres parties de la rétine; ilsindiquent les résultats obtenus en chacun des cas. Il est bien connu que lorsqu'une lumière colo- rée s’affaiblit jusqu'à un certain degré, Pœil cesse de voir la couleur, bien qu'il éprouve encore une sensation lu- mineuse, Les auteurs ont fait des observations pour déterminer le point auquel la sensation de couleur dis- 1 American Journal of Mathematics, 1890. 2 Ibid, 1881. 104 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES paraît dans chacune des parties du spectre. C'est dans la partie du spectre comprise entre à 500 etx615 que l’on peut percevoir la couleur avec les plus faibles intensités lumineuses, Cela explique pourquoi dans une faible lumière comme celle dela luneles objets semblent avoir un teinte verdälre, Les auteurs ont recherché aussi de quelle quantité il fallait diminuer léclat de chacune des portions du spectre pour qu’elle cessàl d'être perçue. C’est à ? 5.300 que la lumière peut être réduite, sans cesser d’être perçue, auminimum d’inten- sité; pour l’éteindre il faut la réduire au 65/10 de lé- clat du rayon primitif, Les auteurs ont déterminé les courbes de luminosité de plusieurs personnes achro- matopsiques, ainsi que la courbe de luminosité d’un spectre de faible intensité observé par un œil normal, — M. C.R. A. Wright, F. R.S. fait une cinquième communication sur les alliages ternaires: elle consiste dans la détermination de diverses courbes critiques de leurs lignes de liaison et de leurs points de séparation. Cette note renferme les résultats de recherches faites sur des mélanges de chloroforme, d’eau et d'acide acé- tique, de plomb, d’étain et de zinc, de bismuth, d'argent et de zinc. Le but de ces expériences était de détermi- ner les positions exactes des courbes critiques ex- priment la saturation du dissolvant C par un mélange en proportions variables des deux autres composants A et B. Ces variations sont telles que sur ces courbes tout point donné est relié à quelque autre point, appelé le point conjugué, par une relation qui découle de ce fait que tous les mélanges des trois composants À, Bet C, représentés par des points situés sur la ligne de liaison qui joint les deux points conjugués, se sépare- ront en deux mélanges ternaires différents, correspon- dant aux deux points respectivement, tandis que tout mélange des mêmes composants, représenté par un point situé en dehors de la courbe critique, formera un alliage véritable, c’est-à-dire un mélange qui ne se sépa- rera pas spontanément en deux fluides différents, mais qui constituera un tout homogène stable. Les courbes critiques ont élé déterminées, pour certaines tempéra- tures définies, avec les systèmes de lignes de liaison et leurs points de séparation pour chaque courbe res- pectivement; mais il est impossible de donner dans un court résumé un apercu exact des résultats obtenus. — M. J. Q. Bonney F. R. S. présente une note sur quel- ques échantillons de roches qui ontété exposés à une haute température. L'examen de quelques échantillons de quartz-felsite qui ont été soumis à une température d'environ 2000° F. a montré que d'une manière géné- rale, l'effet de la chaleur a été de fondre les éléments feldspathiques et micacés, sans que le quartz ait subi aucune action bien nette, et de rendre la masse vési- culeuse, Il y à environ 40 ans, MM. Chance, de Bir- mingham, ont essayé d'utiliser le basalte pour divers usages en le fondant, puis en lecoulant dans desmoules ou en l’étendant en feuilles. La structure de quelques- unes des masses ainsi obtenues a été examinée. La comparaison de ces produits arliliciels et des roches qui se sont solidifiées après fusion conduit M. Bonney aux remarques suivantes : 4° dans les roches ignées acides, les cristaux de quartz et de feldspath ont sou- vent été partiellement fondus, mais les cristaux de quartz, en règle générale ne sont pas fendillés, et la partie interne des cristaux de feldspath n’est pas vitrifiée. La partie extérieure seule, lorsqu'elle a été allaquée par une substance en dissolution dans un fluide, semble avoir subi des modifications ; 2° dans le cas des roches basiques artificiellement fondues, la partie vitrifiée est une véritable tachylite;: mais la structure des échantillons dévitrifiés, avec leurs squelettes caractéristiques de cristaux de feldspath et de magnésile et leur absence d’angles bien définis, est inhabituelle dans les roches naturelles, La structure est plutôt celle des verres etdes scories, Ces faits confirment l’opinion communément admise que la liquéfaction des roches ignées n’est pas due à l’action de la chaleur seule, mais aussi à celle de l’eau,toujours présente dans le magna; la formation du verre pendant le refroidisse- ment est facilitée par la « fuite » de l’eau, ce qui peut expliquer la rareté comparative des fachylites dans la nature, et le fait que là où elles apparaissent elles sont rarement autre chose que les « lisières » de masses de balsate, Richard À. GREGORY. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 22 janvier 1892. M. Fitzgerald : « Sur la production des vibrations électromagnétiques par des machines électromagné- tiques et électrostatiques. » L'auteur remarque que les vibrations électromagnétiques excitées par la décharge d’un condensateur ou d’une bouteille de Leyde s'amor- tissant très vite, il serait très désirable d’avoir des procédés pour maintenir les vibrations continues, En comparant ces vibrations aux vibrations sonores, on trouve que la décharge d’une bouteille est analogue au son instantané produit en débouchant brusquement une bouteille; ce qu'il faudrait, c’est obtenir des wvi- brations électromagnétiques continues analogues au son produit en insufflant de l’air à l'ouverture du gou- lot d'une bouteille, En d’autres termes on cherche une sorte de sifflet ou de tuyau d'orgue électrique. Ces con- sidérations ont conduit l’auteur a essayer si des vibra- tions électromagnétliques peuvent être rendues perma- nentes en employant un circuit se déchargeant, dont une partie est divisée en deux branches, et plaçant entre ces branches un circuit secondaire accordé pour répondre à la décharge primaire. Cela n’a pas réussi, parce qu'il n’y à là rien d’analogue aux remous pro- duits au voisinage du bizeau du tuyau d'orgue. L’ana- logie deviendrait complète si on utilisait la force magnétique du secondaire à détourner le premier courant, d’abord dans l’une, puis dans la seconde des deux branches. Si l’étincelle éclatait entre les deux extrémités adjacentes des branches et le fil principal, alors l'effet magnétique du courant secondaire amènerait l’étincelle à suivre alternativement les deux chemins possibles. Les diapasons et les spirales vibrantes entre- tenus électriquement offriraient des exemples où les forces magnétiques produisent des vibrations, maïs ici la fréquence dépendrait des propriétés de la matière et non de la résonance électrique. La fréquence du. mouvement des anches délicates doit être régularisée par la cavité de résonance avec laquelle ellessont en com- munication, et il n'y a pas de raison pour qu'on n’imite pas cette régulation en électricité, l’étincelle électrique jouant le rôle de l’anche. D'autres méthodes pour entretenir des vibrations électromagnétiques ont été sngsérées par l'étude des séries-dynamos ou des al- ternateurs, La polarité d'une série-dynamo entre- tenant un moteur magnéto pourrait, dans certaines circonstances se renverser périodiquement, et cela donnerait un courant oscillatoire dans le circuit, Des effets analogues s’obtiendraient avec des séries- dynamos changeant des piles ou des condensateurs. Dans une expérience faite, il y a quinze jours, avec des éléments Planté et une dynamo Gramme, on a eu des renversements toutes les cinquante secondes. On peut attendre de plus hautes fréquences de l'emploi des condensateurs. Ce dernier cas a été étudié théorique- ment; les expériences faites avec des bouteilles de Leyde et une dynamo n'ont donné aucun résultat, On pouvait s’y attendre, car la fréquence calculée était telle qu’elle empêchaitle courant et le magnétisme de pénétrer pro- fondément, au delà d’une couche superficielle. L'auteur donne un caleul qui prouve que si dans un circuit comprenant une dynamo d'induectance L el de résis- tance r, et un condensateur de capacité y, si Lest y, la quantité d'électricité mise en jeu va en croissant constamment et n’est limitée que par la saturation du fer et l'accroissement de résistance qui résulte de léchauffement, Une dynamo sans fer, pouvant lancer un courant à travers elle-même, serait propre à donner l'effet désiré. Eu faisant une telle dynamo assez grande ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 105 et son armature très longue on pourrait atteindre une fréquence d'environ un million. Les machines élec- trostatiques semblent promettre davantage comme agents entretenant des vibrations, Comme les dynamos en séries, leur polarité dépend de la charge initiale, et peut aisément ètre renversée. Jusqu'ici de telles ma- chines n’ont pas été eflicaces, surtout à cause des étincelles auxquelles elles donnent lieu, mais Mawell a donné le moyen de les éviter. Il y a le même genre de différence entre les machines électrostatiques et les machines électromagnétiques, qu'entre la machine de Héron et les machines modernes. Comme les ma- chines modernes, les machines électrostatiques sont actionnées par une capacité variable, mais l'effet de cette variation dans les machines électrostatiques est seulement de faire varier la fréquence et non la vi- tesse du décroissement., Du fait que les multiplicateurs électrostatiques peuvent être entretenus par des cou- rants alternatifs, il s'ensuit qu'ils pourront servir à entretenir des courants alternatifs. Si des courants magnétiques pouvaient être obtenus, les machines électrostatiques seraient faciles à faire. Comme con- clusion, l’auteur décrit un multiplicateur électrosta- tique modifié qui lui semble offrir une solution prati- que du problème. Dans cette machine, les collecteurs sont supposés joints aux extrémités d’un circuit en vibration et, par suite, sont alternativement chargés + et —, Les inducteurs et les balais sont disposés de telle sorte qu'un cylindre isolant tournant entre eux doit toujours avoir des charges + et — distribuées alter- nativement sur sa surface. Par un ajustement conve- nable, ces charges sont recueillies à des moments appropriés de manière à produire la vibration. M. Logde trouve cette communication très suggestive et pleine d'idées intéressantes. Le sujet des vibrations électromagnétiques excite une grande attention en Amérique, à cause de sa connexion avec la question de la fabrication de la lumière. Les oscillations de Hertz s'éteignent trop vite pour être satisfaisantes, puisque leur durée dépasse rarement la millième partie de l'intervalle entre deux décharges consécutives, La théorie des dynamos chargeant des condensateurs est extrèmement intéressante, et le fait que le facteur d'amortissement peut changer de signe peut avoir des conséquences incalculables, M. Sumpner pose une question sur la méthode pour doubler la fréquence des alternances récemment décrite par M. Trouton, mé- thode par laquelle l’'armature d’un alternateur excite le champ d’une machine semblable, M. Fitzgerald répond que laddition d’une autre machine accroît la fréquence d’une quantité donnée, et ne double pas la fréquence. Pour multiplier la fréquence par 1,000, il faudrait 1.000 machines, ce que M. Trouton considère comme impraticable, M. $S. P. Thompson insiste sur les analogies acoustiques. L'appareil de Melde est un exemple du moyen de doubler ou de rendre moitié moindre la fréquence. M. Boys suggère l’idée d’em- ployer une étincelle électrique à marche alternative pour entretenir une vibration, et dit qu'il a essayé de voir si une étincelle oscillatoire était déplacée par un champ magnétique, mais le déplacement même pho- tographié dans un miroir tournant était à peine appré- ciable, M. Perry demande une explication sur le terme de magnétisme de la couche superficielle, L'auteur ré- pond que dans les vibrations électromagnétiques la force magnétique alterne trop rapidement pour pénétrer loin à l'intérieur de l’aimant d’une dynamo avant le ren- versement du champ; par suite le magnétisme n’est que dans la couche superficielle, ACADEMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 30 janvier 1892. 1° Sciences Puysiques. — M. H. A. Lorentz lit le rap- port sur le mémoire de M. J. L. Sirks intitulé : « Sur l'influence que la diffraction par un réseau à mailles carrées, placé devant l’ojeclif d’une lunette, exerce sur la clarté de l’image principale d’une étoile. » D’après les lois de la diffraction et en tenant compte des aberrations chromatiques et sphériques, M. Sirks par- vient au résultat simple, mentionné dans la séance du 28 novembre 1891 (voir la Revue, €. IT, p. 38). Ensuite il applique au réseau distribué par l'Observatoire de Postdam.A cette fin il détermine dans les deuxdirections la distance des axes des fils et l'épaisseur des fils, la première par mesurage direct d’un grand multiple, la seconde en observant l'influence d’une position oblique de l'écran (résultat en millimètres 0,4360 et 0,1624 pour les fils de chaîne; 0,3380 et 0,1456 pour les duites.) D’après ces dimensions la présence de l'écran réduit l’intensité de la lumière de 7,84 à 1, ce qui, suivant les conventions, correspond à une multiplication du nombre de grandeur de l'étoile par 2,24, au lieu de 2, selon l'équation 2,5 log 7,84 — 2,24. — M. A.C. van Rijn van Alkemade : Application de la théorie de M. Gibbs aux phases de l'équilibre de so- lutions de sel et de mélanges de liquides. 29 SCIENCES NATURELLES, — M. H. van Capelle : Le diluvium de West-Drente. — M. M. Weber commu- nique que dans un petit ruisseau de l'ile de Sumatra il a retrouvé une espèce de cloporte parasite que J. A. Herklots croyait avoir trouvée dans l'abdomen d'un poisson d’eau doüce (Comptes rendus d'Amsterdam, 2e série, t. IV, p. 163). IL s’est convaincu que ce parasite, lchthyoxenos jellinghausii, au lieu de vivre dans l’abdo- men du poisson, habite chez cet animal une invagina- tion de la peau qui communique avec l'extérieur parun petit orifice. Là on trouve presque toujours deux habi- tants, un mäle tout petit et une femelle frès grosse. Après avoir parcouru quatre élats larvaires, l'insecte parfait est hérmaphrodite; par le développement iné- gal de ses organes, il peut fonctionner d’abord en mâle, ensuite en femelle. Ainsi, dans cette demeure, le pre- mier venu s’est déjà développé à l’état femelle quand le second arrive. En attendant, le premier apparu s’est installé à son aise et continue à s'assurer la meilleure partie des avantages de sa position; c’est ce qui ex- plique les dimensions énormes de la femelle comparée au mâle qui habite avec elle, A cette découverte lau- teur joint quelques remarques générales sur les théo- ries de l’origine des animaux marins dans les eaux douces, D’après M.S. Loyen, ces animaux prouvent que les lacs qui les contiennent ont été en communication avec la mer; ils ont survécu aux changements de con- ditions vitales. D’après M. H. Credner, ces animaux sont déménagés. Les recherches de l’auteur appuient la dernière hypothèse. Au lieu de retrouver dans les lacs des Indes Orientales une faune comparable à celle des lacs de l'Europe, ce qui exige l’idée de la faune au- tochtone des eaux douces, mhérente à la première hy- pothèse, il trouva là-bas une faune toute différente. Parmi les Isopodes, plus de traces des Azellidæ qui abondent dans nos lacs, mais bien trois genres de nos Isopodes marins. Parmi les Amphipodes il rencontra non pas nos Gammaridæ, mais nos Orchestiæ marins. Les Décapodes représentés par quatre espèces en Eu- rope comptent 69 espèces, divisées en 19 genres aux Indes, dont 33 espèces habitent aussi la mer, ete. — M. C. A. Pekelharing s'occupe de la constitution du fibrine-ferment. Récemment (voir Revue, L. IL, p. 46%) l’auteur à démontré que le fibrine-ferment se com- pose de chaux et d’une matière qu’on précipite com- plètement duplasma sanguin enle saturant avec Mg SO et partiellement par saturation avec NaCIl et par dialyse. À présent, il remarque que la matière en ques- tion est précipitée du plasma dilué par un ou deux vo- lumes d'eau en y joignant de l'acide acétique jusqu'à réaction acide évidente. Elle est soluble en milieu al- calin, et dans le cas d’une solution neutre, quand il y a addition de NaCI. Traitée par l'acide hydrochlorique et la pepsine, elle donne de la nucléine, Done, elle est une nucléo-albumine, Traitée par l’eau de chaux, elle donne un librine-ferment nettement caractérisé. Si du même plasma dilué et oxalaté on neutralise lune des 106 ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES moitiés par de l’acide acélique, tandis qu'on acidule l’autre, le traitement avec de l’eau de chaux de la pre- mière moitié donne plus de fibrine que celui de la se- conde. Cela prouve que la matière-mère du ferment est la nucléo-albumine elle-même, et que celle-ci n’est pas entraînée mécaniquement. Car le précipité—et avec lui la tendance à entrainer des matières, — est plus con- sidérable pour le plasma neutralisé. L'auteur suppose que la nucléo-albumine dérive des éléments formés du sang. Cette supposition est confirmée par l'observation que le sang traité avec de l'extrait de sangsues, qui ne se coagule pas quand il est exempt de cellules, ni par l'addition d’eau ni par l'addition de sels de chaux, re- prend cette faculté par l'addition d’une nucléo-albu- mine dégagée de plasma, et de même par l'addition de globules du sang traités par l’eau. Si, pendant leurdes- truction, les globules du sang cèdent au plasma la nu- cléo-albumine, une matière possédant les propriétés d’un acide, Je décroissement de la réaction alcaline pendant la coagulation du sang qui découle est expli- qué. L'auteur répond ensuite à quelques questions po- sées par MM. T. Place, M. W. Beyerinck et W. Koster. — M.Th. W. Engelmann présente un mémoire de M. H.J. Hamburger intitulé : « Sur l'influence des acides et des alcalis sur du sang défibriné, » SCHOUTE, Membre de l'Académie ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 17 décembre 1891. Le président annonce le décès, survenu le 10 dé- cembre, d’un membre de l'Académie, M. le professeur Albert Jæger d'Innsbruck. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. —— M. J. A. Gmeiner : « Corollaire à la loi de réciprocité des bicubiques ». M. Heinrich Drasch : « Recherches sur une théorie des surfaces réglées. » 20 SaENcEs PHYSIQUES. — M. Pascheles : « Influence de la résistance de la peau au passage du courant dans le corps humain. » Conformément au travail fondamen- tal de Gärtner et Martius, Pascheles montre que la résistance de la peau diminue du 1/20° au 1/50° de sa valeur par le passage d’un courant continu. Cette dimi- pution a lieu dans les mêmes proportions quand on opère avec un cadavre, de sorte qu'il parait inexact d’en fournir une explication par l’existence d’un état pathologique correspondant; les faits suivants pa- raissent éclairer cette anomalie. Quand le courant passe eutre deux électrodes A et B, la distribution des lignes de courant entre ces deux points est la même dans toutes les directions au début, mais lorsque la résis- tance de la peau diminue, on constate (la force électro- motrice entre À et B restant la même) que la densité du courant augmente dans les parties profondes tandis que pour les courants superficiels elle reste la même. On observe ceux-ci à l’aide d’électrodes secondaires a, bréunies à un multiplicateur non polarisable de Dubois M; si l’on fait varier l’intensité totale après s'être assuré qu'il n'y à pas courant entre &, M, b, on trouve que les déviations fournies par M sont propor- tionnelles à l'intensité du courant A, B. A l’aide du procédé Nobili-Guebhard, Pascheles à cherché aussi à mettre en évidence les transformations successives des surfaces équipotentielles et des lignes de courant. Une série de phénomènes connus depuis longtemps tirent de là une explication, par exemple : les courants d'induction d’après Helmholtz sont surtout superficiels, les nerfs situés à une certaine profondeur sont plus excités par les courants continus que par les courants alternatifs; enfin l'irritabilité augmente arec la durée du courant. — MM. A. Schubert et Zd. H. Skraup: « Action de l'acide iodhydrique sur la quinine et la quinidine, » — Observatoire central : « Observations météréologiques et magnétiques du mois de no- vembre. » — M. Ed. Mazelle : « Recherches sur les variations diurnes et annuelles de la vitesse du vent à Trieste. » L'auteur tire une série de conclusions, d'observations personnelles poursuivies de 1882 à 1891, Le maximum de la vitesse a lieu en moyenne vers midi; il se présente un maximum secondaire, la nuit, entre 9 heures du soir et { heure du matin, notamment pendant l'hiver. L’oscillation diurne persiste avee les plus grandes comme avec les plus faibles vitesses; en hiver, où la vitesse moyenne atteint sa plus grande valeur l’oscillation est plus faible : la formule de Bessel permet d’en calculer exactement la période. Le maxi- num moyen a lieu à midi 17, en hiver, à 44 h. 56, en été à midi 58’, Par un temps couvert le maximum a lieu plus tôt que par un ciel serein. On peut représenter la marche annuelle par une fonction périodique. Le ma- ximum annuel a lieu le 22-23 janvier, le minimum du Il au 30 juin. Le vent N.-E. donne la plus grande vitesse, elle atteint alors 11 kilomètres à l'heure. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Rud. Hoernes : « Sur la connaissance de la dentition chez l’Entelodon Aym. » — M. F. Steindachner présente « les résultats obte- nus cette année dans l’est de la Méditerranée par l'expédition chargée de l'étude de la profondeur de la meren ce qui concerne la faune pélagique ichtyolo- gique », On fit à des profondeurs variant de 381 à 2,525 mètres 26 opérations avec le filet traïnant, 43 à la surface de la mer avec le filet pélagique et 7 à 200- 2.300 mètres avec lefilet à trappes. Malgré les vents vio- lents qui contrarièrent les dragages, on trouva au moins 110 espèces représentées par des quantités va- riables d'individus en poissons, crustacés, éponges, cœælentérés, échinodernes, brachiopodes, lamelli- branches, céphalopodes, hydropolypes et vers, M. Wilhelm Roux : « Sur la polarisation morpholo- gique de l’œuf et de l'embryon par le passage d’un courant, et de l'influence de ce courant sur la direc- tion de la première segmentation de l'œuf, » — H. Fritz von Kerner : « Le déplacement de la ligne de partage des eaux dans la vallée de Wippe pendant la période glaciaire. » Un examen approfondi de la nature pétrographique des blocs erratiques ainsi que de leur position à différentes hauteurs a amené l’auteur à reconnaitre que la ligne du partage des eaux à l’époque du développement maximum du glacier se trouvait à l'entrée de la vallée de Gschnitze, et qu'alors la glace existait au point de départ de la vallée de Stubaie 2,150 mètres, au Brenner 2.200 mètres, et au Sterzin- gerbeck 2.100 mètres. — M. Anton Handlirsch pré- sente la « Monographie d'un hyménoptère terricole parent du Nysson et du Bombex ». Ce travail contient une étude critique eb systématique du genre Séizus Latreille. Séance du T janvier 1892 M. le Président annonce le décès de M. le P' Ernst Ritter von Brücke de Vienne, membre de l'Académie. 1° SGIENCES PHYSIQUES, — M. C. Schierholz : « Sur la séparation de l’iode, du brome et du chlore. » 29 SCIENCES NATURELLES. — M. Alfred Justus Dut- ezynski : « Abrégé d'un nouveau système philoso+ phique et biologique et d’une nouvelle théorie physio- logique ». — M. Friedrich Brauer montre des dessins de l’œstride (25), bien connue en Afrique, et décrit les larves de deux nouvelles espèces (Dermatoestrus Shr'ep- sicerontis et Strobiloestrus antilopinus); la première a l'organisation des larves hypodermes quoique ayant cer- tains points communs ayec les larves cephénomyes ; toutes deux vivent dans la peau d’une antilope. Emil Weyr, Membre de l'Académie. CHRONIQUE 107 CHRONIQUE LA RÉGION DE PORTO-NOVO De récents événements venant d'attirer l'attention publique sur le Dahomey et la région voisine, il nous parait intéres- sant de publier la notice suivante, due à notre courageux l'exploration du pays. Porto-Novo est, sinon la plus grande, du moins une des plus importantes villes du golfe de Benin, Elle est située par 6°2740" de latitude nord et 022 de longitude est du méridien de Paris. Capitale du royaume du même nom qui, autrefois, faisait partie de celui de Dahomey, puis en fut tributaire et enfin s’affranchit de cette tyrannie, Porto-Novo est à environ 7 milles de la mer. Le protectorat de la France, inauguré d’abord en 1863, puis suspendn de 1864 à 1875, fut définitivement rétabli en 1883 et prend, tous les jours, plus d’impor- tance, Ce royaume, dont les limites nord ne sont pas déterminées, est borné à l’est, depuis la dernière con- vention franco-anglaise (janvier 1890), par une ligne que détermine le méridien passant par la crique d’Ad- jara, par 02719" de longitude est du méridien de Paris; à l’ouest, par le fleuve Whémé, dont la rive op- posée est au Dahomey; au sud, d’abord coupé par une large lagune, il est baigné par l’Atlantique. TA LEE mets omey Calavy La population (otale du royaume, en temps de paix, peut être estimée à environ 150.000 habitants, dont 50.000 pour la capitale seule; la race indigène n’a rien de particulier; c’est un mélange de Nagos où Yoroubas et de Dahomiens appelé Géjis dans le pays; leur teint est noir rougeûtre et ils sont plutôt laids que beaux. On trouve également, dans la population de Porto-Novo, beaucoup de Dahomiens, de Yoroubas et de sujets Bré- siliens qui s’y sont établis depuis de longues années. Les Européens, sans compter les troupes, sont au nombre d’environ 40, La ville est très mouvementée : le commerce, en temps de paix, bien entendu, y est assez important : une statistique, que j'avais établie en 1889, permettait d'estimer les exportations de 1888 à 10.515.000 kilos d'amandes et 1.231.200 gallons d'huile de palme, ce quL fait environ fr. 5.193.750 pour une année, Le palmier à huile (Eleas quineensis) est jusqu’à pré- sent la seule source de l'exportation. Le roi de Porto-Novo, Tofa, est très dévoué à notre cause : c’est un homme très intelligent, qui nous rend de grands services; donner son pays à la France, et voir celle-ci le protéger et le faire prospérer d’une compatriote, M. Edouard Foa, qui continne en ce moment facon sérieuse, a toujours été le rêve de Tofa : ce rêve est près de se réaliser complètement, Les habitations, dans tout le pays, à l'exception de celles des villages lacustres, sont construites en terre du pays. Cette matière est très argileuse et prend, lors- qu'elle est bien pétrie, beaucoup de consistance en sé- chant. L'autre genre de cases est en branches ou en bambous; toutes sont couvertes en feuilles de palmier. Le fétichisme des gens du pays est combattu forte- ment par la religion musulmane qui y fait beaucoup d’adeptes : le culte catholique, malgré les efforts in- cessants de nos missionnaires, y à beaucoup moins de succès, Pour se rendre en pirogue à Kotonou, situé à environ 15 milles, on parcourt pendant une demi-heure la la- gune de Porto-Novo, puis on s'engage dans le chenal du Toché, devenu francais depuis la convention franco- anslaise dont je viens de parler; on pourrait suivre également, s'ils n'étaient beaucoup plus longs, les che- naux d'Aguégué-Quinji et d'Aguégué français : ce der- nier passe devant l'embouchure du Whémé gardé par un poste de tirailleurs sénégalais. La longueur du Toché est d'environ 3 milles ; on dé- bouche, après avoir passé devant l’ancien poste anglais, dans le grand lac de Denham, Ce lac s'étend à perte de vue, Son nom à dû lui être donné par le major Denham, qui, en 1822 et 1823, a traversé ces régions en venant du Niger pour se rendre plus tard au Soudan et au lac Tchad. Au loin, on aperçoit, en divers endroits, de petits villages sur pilotis ; ces villages se sont formés, à lori- gine, il y a quelque 60 ans, de fugitifs du Dahomey qui, sachant qu'une tradition défendait aux tyrans de faire la guerre en traversant l’eau, ont mis entre eux et leurs ennemis un obstacle infranchissable à cette époque; cette tradition est considérablement négligée dans la guerre actuelle. Ces villages sur pilotis se nom- ment Afotonou, Aouansouri, Ganvi, Sd. On arrive à Kotonou après 6 heures environ de tra- versée; ce village est situé sur le bord de l'Océan à 4 milles au sud et 18 milles ouest de Porto-Novo, L'origine de ce nom vient de «Okou {ù nou », qui si- gnifie, en dahomien, Lagune des Morts. Il justifie sur- tout cette appellation, depuis que plusieurs centaines de guerriers dahomiens, trouvés sur le champ de ba- taille les 23 février et # mars 1890, ont été ensevelis dans les plaines avoisinantes. Kotonou est un tout petit village qui pouvait avoir, avant l’expédition, de 800 à 1.000 habitants : il est baigné, du côté Est, par le chenal auquel il donne son nom et sur les bords duquel il se prolonge; ce chenal vient du lac Denham : à l’époque des hautes eaux, il s’est déjà deux fois confondu avec la mer, entraînant l’étroite langue de sable qui l’en sépare : cette dernière se reforme dès que les eaux baissent; la chaloupe- canonnière l« Emeraude » a profité, en novembre 1887, de cette ouverture pour rentrer dans les eaux de Porto Novo, où elle est actuellement. Du large, on n’apercoit, sur la plage de Kotonou, que trois constructions, qui sont les deux factoreries fran- caises, et le télégraphe : le village était situé derrière. Il est aujourd'hui complèlement rasé et remplacé par des ouvrages de fortification passagère, On connaît l’histoire de Kotonou, qui, donné à la France par le roi de Dahomey en toute propriété en 1878, a été, par la mauvaise foi qu’il a mise à nier cette donation, une des causes de l’expédition récente. L'importance de Kotonou provient de ce que ce point 108 NOUVELLES est le port de Porto-Novo. D'après la convention signée en 1878, c’est seulement à # kilomètres ouest et nord du village que commencerait la limite du Dahomey. En suivant la plage ou une route intérieure, on se rend à Godomé, situé à environ 16 kilom. de Kotonou. Le village proprement dit est dans l’intérieur, à 8 kilomètres; sur la plage, il n’y a que quelques cases et les mèmes factoreries qu'à Kotonou, Godomé n'offre rien de saillant ; c’est un petit village dahomien, d’en- viron 3 où 4,000 habitants; mêmes cases qu'à Kotonou, en bambous et feuilles, Il était gouverné avant la guerre par un chef dahomien nommé Nobimé, ayant le titre d'Agorigan ou chef de la Gore, ce qui équivaut à peu près à juge de paix ou maire dans nos régions civi- lisées. Le commerce y est très modeste, comme dans tout le Dahomey, d’ailleurs, à cause du peu de liberté dont jouissent les habitants. Ce que je viens de dire pour Godomé s'applique, à peu de chose près, à Abomey-Calavy. Ce nom vient, par dérivation, de Aghomey-Kpavi (petit Abomey), parce qu'il est peu éloigné de la capitale du Dahomey, rela- tivement aux autres points. L’agorigan se nommait Ajaghoni. Abomey-Calayy est au nord-est de Godomé, à 20 ki- lomètres environ, Ils ont tous deux un débouché sur le lac Denham par des chenaux tortueux qui portent leur nom et qui ont une longueur d'environ 2 à 3 milles. Les gens de Porto-Novo, contrairement à leurs voi- sins, sont peu industrieux. Quelques ouvrages srossiè- rement faits, en fer, en bois, en terre et en paille, sont les seuls produits de leur manufacture. Les Dahomiens et les Yoroubas joignent à ces industries, beaucoup plus perfectionnées, la fabrication, avec des cotons indi- sènes et importés, ou de la paille, des tissus solides et curieux, Leur orfévrerie, bien que moins avancée que celle de la Côte d'Or, a cependant atteint une certaine habileté. Les Yoroubas seuls pratiquent, à peu près, la teinture en toutes couleurs. La climatologie de ces régions subit les influences directes du voisinage de l'équateur. Les jours sont uniformes, comme durée, ou ne diffèrent entre eux que de quelques minutes; la moyenne de Ia tempé- rature est de 299 à 35° C. à l'ombre, pendant le jour. Une chose curieuse à étudier et qui m'a rendu son- vent perplexe est l’irrégularité de divers instruments qui servent dans nos régions à indiquer les variations atmosphériques. Le baromètre anéroïde ou holostérique, même réglé selon l'altitude du lieu, ne quitte pas Pindication va- riable, ce qui indiquerait comme à peu près uni- forme une pression atmosphérique qui varie indubi- tablement, L'hygromètre de Saussure marque également, presque toujours, le maximum d'humidité d’un bout à l’autre del’année; comme on sent fort bien, à certains moments, que cette humidité est plus ou moins intense, nous avons déduit que le cadran indiquant cet état de la température n'avait pas assez de degrés de variation pour ce pays. Les thermomètres à minima de Rutherford et à maxima de Negrelti et Zambra qui, en tous lieux, servent à donner par leur comparaison les variations de la tem- pérature, au moins douze heures d’avance, n’ont plus aucune exactitude de prédiction et ne peuvent servir qu'à obtenir le degré d’élévation ou d’abaissement de la température du moment. Je cite ces instruments comme exemples; quels que soient leur nom ou leur genre, ils varient tous dans leurs indications; il faut donc se borner à observer la météorologie sans chercher à la prédire, et enregistrer des observations. Voici comment on peut classer les saisons : Printemps ou petite saison des pluies, août, septembre ct octobre. Eté ou saison sèche où Armatan, novembre, décembre et janvier. Automne ou petite saison des pluies, février, mars et avril. Hiver, grande saison des pluies, mai, juin, juillet, La température reste la même, modiliée accidentel- lement par ces pluies ou par les vents alizès du sud- ouest qui soufilent avec peu d'intensité toute l’année, dans l'après-midi seulement. Le vent du nord se fait sentir la puit, pendant l’Armatan. Le climat, par son caractère variable, chaud et hu- mide, est très malsain pour l'Européen. Il n'y a pas d'exemple qu'un blanc n'ait pas la fièvre, après un ou deux mois de séjour, Ces fièvres, d’un caractère bi- lieux, sont toujours compliquées d’embarras gastrique ; elles sont peu douloureuses, peu prolongées, mais elles minent lentement la constitution la plus robuste, et plusieurs années passées dans ces pays équivalent à un empoisonnement, à une intoxicalion complète. Les insolations, accès pernicieux, accès bilieux hématu- riques, sont le lot des imprudents. Il faut une grande sobriété, une vie très active et rendue la plus gaie possible, pour supporter l'existence dans ces pays. La moyenne de la mortalité peut atteindre 30 0/0 chez les Européens. L'anémie est le grand mal à combattre, et deux ans de séjour ne doivent pas être dépassés par ceux qui tiennent à recouvrer la santé et à oublier les fièvres du pays. : Nous avons dû renoncer à la chasse, après avoir été longtemps entrainé par cette passion: on est sûr, à défaut de gibier, d'en rapporter régulièrement la fièvre, et c’est un suicide que de persister. En somme, la côte occidentale d'Afrique est un pays nouveau, qu'il importe de connaître plus profon- dément, Le gol‘e de Bénin pourra donner plus tard une riche colonie à la France : il faut donc létudier de près et faire ressortir ses bons comme ses mauvais côtés. C’est dans le but de nous consacrer à cette œuvre qu'après y ayoir passé quatre ans, nous ÿ sommes retourné. Edouard Foi. NOUVELLES LE MAGNÉTISME DE L’OXYGÈNE On sait, depuis Faraday, que l'oxygène est un gaz magnétique, Ed, Becquerel à établi que dans notre atmosphère il est 2.660 fois moins magnétique que le fer. D'où cette induction que si le refroidissement, la pression, le changement d'état ne modifient pas son magnétisme, l'oxygène liquide doit, à masse égale, se montrer moitié plus magnétique que le fer, M. Dewar a faitrécemment à ce sujet une expérience aussi simple que remarquable : il a placé entre les pôles du grand électro-aimant de Faraday une capsule de sel gemme contenant de l'oxygène liquide ; ce li- quide, exposé à la pression ordinaire de l'atmosphère, se trouvait donc à — 181° G. Ne mouillant pas la paroi de sel gemme, il était à l’état sphéroïdal. Dès que le courant traversa le solénoïde, l'oxygène se souleya brusquement et se porta aux pôles ; il y resta suspendu jusqu'à complète évaporation. V0 Ce résultat est gros de conséquences : il fait bien plus que d’accuser sous une forme extrèmement sensible la propriété magnétique déjà reconnue à l’oxygène : il nous montre pour la première fois la continuation de _cette propriété depuis l’état gazeux jusqu'à l’état li- quide, — ce qui porte à la considérer comme atomique. Il y a là sinon une idée entièrement nouvelle, au moins le premier pas vers la solution du problème. L. O. Lous Onvier Paris.— Imprimerie K. Le Directeur-(rcrant : Levé, rue Casselio, 17 3° ANNÉE N° 4% 29 FÉVRIER 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LE PROGRÈS DE L’ARTILLERIE ‘ Dans une brochure récente, analysée dans cette Revue ?, j'ai examiné en détail les résultats obte- nus en 41889, 1890 et 1891, par l'emploi de la poudre sans fumée dans les canons variant de 0"05 à 021 de calibre, et j'ai attiré l'attention sur l’im- mense importance qu'entrainerait, pour la science de la balistique future et de Partillerie, emploi de ces nouvelles poudres substitué aux anciennes en usage. Cette brochure est toutefois d’un caractère trop technique pour offrir un intérêt suffisant à la généralité des lecteurs ; cependant les ‘con- clusions auxquelles je suis arrivé sont d’une telle importance, qu'il me semble intéressant de les présenter sous une forme plus facilement acces- sible ; je vais tàcher de le faire dans cet ar- ticle. J’examinerai successivement les points sui- vants : 4° Les nouvelles poudres sous leurs différentes formes ; les poudres noires et brunes actuellement en usage ; l’état comparatif de leurs propriétés ba- listiques. 2 Les modifications nécessaires à apporter dans les armes, afin d'utiliser le maximum des proprié- tés qui distinguent la nouvelle poudre. 1 En raison du profond désaccord qui existe entre les théories de M. Longridge et celles de nos comités d'artille- rie, il nous a paru extrémement important d'obtenir de l'il- lustre savant anglais une étude sur le progrès de l'artillerie, tel qu’il le concoit. Nous le remercions vivement d’avoir bien voulu accéder à cette demande en écrivant le présent article à l'intention de nos lecteurs (Note de la Direction). 2 L'Artillerie de l'avenir, analysée dans la Revue du 15 oc- tobre 1891, t. II page 648. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. 3° Quelques conclusions découlant des observa- tions précitées. I La distinction fondamentale entre les poudres anciennes et les poudres récentes consiste en ceci : en raison de leur composition chimique, les rési- dus de la combustion des nouvelles sont, pour la majeure partie, entièrement gazeux ; tandis que ceux des poudres anciennes présentent une pro- portion de 43 °/, (en poids) de gaz, le reste étant sous la forme d’un liquide qui se répand dans les différentes parties de l'arme. Une des conséquences de cette différence est que le volume des gaz en- gendrés par la combustion d’un poids donné de poudre nouvelle est beaucoup plus considérable que pour le même poids de poudre ancienne, et par conséquent le poids de poudre nécessaire pour remplir un espace donné, à une température et à une pression données, est nécessairement moindre avec la nouvelle poudre qu'avec l’ancienne, La formule des pressions en fonction du volume de la matière explosible est donc différente. Cette VAE formule étant p — y, (5) É !, la valeur de y pour la nouvellle poudreestenviron 1,2 à 1,3, tandis que, pour les poudres anciennes, elle est de 4,074. Comme conséquence de ce qui précède, il res- sort que non seulement la pression initiale au mo- ment de l’inflammation d’une charge donnée, dans un espace déterminé, est plus considérable avec la 1 po = pression initiale; Vs — volume initial; p — pres sion finale; V = volume final; y — coefficient variable. il 110 J. ATKINSON LONGRIDGE. — LE PROGRÈS DE L'ARTILLERIE nouvelle poudre qu'avec l’ancienne, mais aussi que la pression, pendant toute la période d'expansion des gaz est encore supérieure à la pression déve- loppée par une même charge de poudre ancienne. La valeur de exprimée en fonction des tempé- ratures spécifiques à volume constant et à pres- sion constante, varie suivant la nature des produits de la combustion; mais on peut considérer la va- leur 1,2 comme à peu près juste pour la poudre Nobel qui, dans les expériences de Krupp en 1889 et en 4890, furent publiées dans la Revue d'artillerie (numéro de septembre 1890). Il existe beaucoup de variétés de la nouvelle poudre, dont la composition est tenue secrète. Celle de la poudre Nobel est : Nitro-cellulose= "2e. recette -te-e A 23.10 % Nitro-glycérine....... PARTIS ADN EPA TOO 23.10 » Perchlorure d’ammoniaque.................. 50.33 » Camphre cEnenr ePecr EC certe cree 3.41 » 100.00 Il y a quelque incertitude quant à la composition des gaz résultant dela combustion de ce mélange ; mais probablement il se rapproche beaucoup de ce qui suit : Acide carbonique... 41.26,parties (en poids) INA DIET 6 Pa 02000 ir 7 13.86 » Vapeurideaueer ee Lecce 25.28 » Ghiore ee Ce Eeeecceeee-cee 16.64% » OPA ina 566 0 dat0 des con co 2.96 » 100.00 Le volume des gaz à 0° C. et à 0"76 de pression barométrique, est : AcidelcarbOmAUe ere certe 20.87 décimètres cubes rent es OP PAR AE RE 11.04% » Vapeur dieant rer eee 31.31 » OCDE CPS ee r er. ECE 2:08 » CORTE TO RE Me arrete ee A Gant | » 10.51 soit 703,1 centimètres cubes par gramme de poudre. La chaleur engendrée par la combustion de À gramme de poudre est environ 1750 petites ca- lories. Le tableau suivant montre le volume des gaz et les petites calories engendrés par la combustion de 1 gramme des différentes poudres : Désignation Petites calories Volume des gaz en des engendrées par centim. cubes poudres gramme depoudre pour 4 gramme Poudre Nobel........ 1750 705 Cocon Br Pr 227--- 837 198 Pellet Espagnole..... 767.3 234.2 Curtis et Harvey N° 6. 164.4 241.0 Waltham Abbey F.G. 738.3 263.1 » RG 125.1 214.2 » Pebble. 121.4 218.3 Poudre de mine...... 516.8 360.3 L'immense supériorité de force explosive que la nouvelle poudre a sur n'importe laquelle des pou- dres anciennes ressort avec évidence de ce tableau. M. Sarrau désigne sous le nom de « Force » d'une poudre la pression des gaz engendrés par la combustion d'une unilé de poids de la poudre occupant une unité de volume et à la température de la combustion. Ne connaissant pas le degré de température de la combustion de la nouvelle poudre, il m'est impossible de calculer la valeur de cette « Force »; j'ai taché d’en obtenir une approximation, et, dans ma brochure L’Artillerie de l'Avenir, jai essayé de déduire des expériences récentes, ce que j'appelle la « Force maximum » de cette poudre, c’est-à- dire, la pression des gaz engendrés par la combus- tion d’un poids donné de la poudre brûlant dans un espace clos, d’un volume égal au volume dudit poids de poudre avant son inflammation, volume calculé d’après le poids spécifique ou densité ab- solue de ladite poudre! En supposant que le poids spécifique de la pou- dre Nobel soit de 1,56, l’espace occupé par 1 kilo- 4 gramme de cette poudre serait de 36 s0it de 0,641 décimètre cube. ; Les résultats auxquels je suis arrivé donnent les valeurs suivantes pour la « Force maximum » de quelques poudres nouvelles : Noise cdot en epaonc 26,650 kilos par cm? Cordite 5. OUPS AN ESC nO Se c 24,472 » B.N. lot No 4 dans des canons de 10CentimETEs RC ee 16,495 » B.N. lot N° 3 dans des canons de LOS CENTIMEITES ET Ce rntee B.N. dans des canons de 1 centim. P.B.N. dans des canons de 27 centim. Je crois que les valeurs obtenues pour la poudre Nobel sont approximativement correctes; mais, pour la poudre Cordite, qui est une poudre anglaise, et pour les poudres B. N. et P.B. N., qui sont françaises, il ne faut accepter ces valeurs que sous toutes réserves, car les expériences dont j'ai connaissance ne sont pas assez nombreuses pour me permettre d’en tirer une conclusion positive. En ce qui concerne la poudre Cordite, il faut remarquer qu'elle ne se présente pas sous forme de grains, mais bien sous forme cylindrique comme des bouts de ficelle d’une longueur appropriée à celle de la cartouche. Il s’en fait de plusieurs dia- mètres; celle qui est destinée aux canons de 3 pouces (7,5 centimètres) a un diamètre de 1,6 millimètre à 2 millimètres, et celle destinée aux canons de 15 centimètres, environ 7,5 milli- mètres de diamètre. Je n’ai aucune connaissance de sa composition chimique; mais je crois que le volume. des gaz engendrés à 0° centigrade et 16 millimètres de mercure, est d'environ 4100 cen- timètres cubes et la chaleur 1200 petites calories par gramme de poudre. Je n’ai également aucun renseignement sur les poudres françaises B. N. et P.B.N.; muis je ne crois pas qu'aucune d'elles soit la nouvelle poudre J. ATKINSON LONGRIDGE. — LE PROGRÈS DE L’ARTILLERIE 111 “sans fumée dont la composition est tenue secrète. | Probablement toutes ces poudres, excepté la … poudre cordite, sont sous forme de grains, plus ou - moins semblables à la poudre ancienne; par con- _ séquent la pression maximum dans le canon va- —riera suivant le diamètre des grains. J'ai trouvé “que c'était le cas pour la poudre Nobel, et il doit en être de même pour les autres. —… Les effets balistiques de la nouvelle poudre sont ; beaucoup plus considérables que ceux de l’an- cienne. La quantité d'énergie fournie et emmaga- «sinée dans le projectile par kilogramme de poudre “prismatique brune est : Canon de 110 tonnes de 41.27 cent. 46.38 tonnes métriques 67 » 34.29 » 39.18 » 29 » 25.40 Oo» 41.62 » 1% » 20.36 » 39.51 » soit une moyenne, par kilogramme de poudre, de 41 tonnes métriques (41,67) et pour la poudre E. X. E., (considérée en Angleterre comme la meil- leure des poudres anciennes) l'énergie dans les canons de 15 centimètres estd’environ 40,88 tonnes métriques par kilog. de poudre. … J'ai démontré dans « L’Artillerie de l’avenir » que la quantité d'énergie emmagasinée dans un pro- jectile de 45,36 kilos par une charge de 8,85 kilos de la nouvelle poudre est, pour un canon de 15 centimètres : Avec poudre Cordite.......... Æwyec poudre Nobel........... Avec la poudre B.N.......... 173.13 tonnes métriques 143.00 » ï 103.40 » » D'ou il ressort que la puissance balistique de ces poudres est de 2 1/2 à 4 fois supérieure à celle des meilleures poudres anciennes. Il peut paraître Surprenant de prime abord que, dans ce dernier tableau, la poudre cordite occupe le premier rang, tandis que dans un tableau précédent montrant les « forces maxima », la poudre Nobel tenait la tèle; mais cette contradiction est purement appa- ente. La raison pour laquelle l'effet utile de la poudre cordite, brulée dans un canon de 45 centi- mètres, est supérieure à celui de la poudre Nobel, est que, quoique les poids respectifs de la charge et du projectile soient les mêmes, la pression dé- veloppée est d'environ 3,975 atmosphères avec la poudre cordite, tandis qu’elle n’est que 1,980 at- mosphères avec la poudre Nobel. Cette différence provient sans doute du coefficient de combustion des deux poudres, soit en raison de la composition “chimique, soit en raison de la différence de forme : la poudre Nobel étant en grains, tandis que la poudre cordite est en baguettes cylindriques de petit diamètre. - Il » Étant démontré que les nouvelles poudres sont de beaucoup supérieures aux anciennes, quant à la puissance balistique, il s'ensuit que, pour uli- liser cette supériorité, il faut faire subir d'impor- tantes modifications aux armes à feu. En premier lieu, il faudra augmenter la résis- tance du canon, non seulement dans la chambre d'inflammation, mais encore dans toute l'étendue de la pièce. À cela on répondra sans doute, qu'il suffit simplement, pour employer les nouvelles poudres dans les pièces anciennes, de réduire la charge de manière à obtenir la même pression qu'avec la charge normale de poudre ancienne, ou bien de s'arranger de facon à diminuer la pression iniliale, comme, par exemple, en augmentant la grosseur des grains, ou bien la capacité de la chambre. J'ai examiné ces propositions et leurs consé- quences dans ma brochure sur « l'Artillerie de l’Avenir », et je crois avoir prouvé qu'il est dan- gereux d'essayer d'obtenir des effets balistiques supérieurs par l'emploi des nouvelles poudres dans les canons actuels, quoique l'absence de fumée et la réduction du poids de la cartouche soient de notables avantages. Ma contestation est, qu'en augmentant la pression initiale, on peut obtenir, avec lanouvelle poudre dans des canons d'une lon- gueur et d’un calibre considérablement réduits, des effets balistiques plus puissants que ceux dont on dispose actuellement. Je ne suis pas partisan de diminuerle poids d’une pièce, sans en changer le calibre, c’est-à-dire qu'à mon sens une pièce de 20 centimètres du nouveau type ne doit pas être plus légère que la pièce actuelle de 20 centimètres. Si elle était construite ainsi, on se heurterait à la question du recul ; car si on allège le poids du ca- non, il faut absolument renforcer l'affût. Acluelle- ment le perfectionnement de la puissance balis- tique des canons $e trouve subordonnée à Ja puis- sance de résistance des affûts; par conséquent, on ne ferait qu'augmenter les difficultés en allégeant le canon lui-même. Le nouveau canon pourra être cependant beau- coup plus fort et considérablement plus court que le canon de même calibre du type actuel. Tout ar- üilleur expérimenté admettra, je crois, qu'on au- rail avantage à le construire ainsi, tout en aug- mentant de beaucoup la puissance balistique. Cette augmentation, on l’obtiendra surtout d'une haute pression initiale, telle que 4.700 kilos au lieu de 2.750 kilos par centimètre carré, Il est vrai que de très brillants effets balistiques ont été ob- tenus avec les pressions actuelles, qui sont relati- vement basses; mais, pour cela, on a été obligé d'augmenter extraordinairement la longueur du canon : on l’a portée à 40 et même à 50 calibres. Il est possible que, dans le service sur terre, de pareilles pièces n'offrent pas de trop grands in- 142 J. ATKINSON LONGRIDGE. — LE PROGRÈS DE L’ARTILLERIE convénients ; mais ces inconvénients deviennent énormes dans la marine, sans parler de la destruc- tion presque certaine des longues et minces armes par les canons de pelit calibre à tir rapide. J'ai depuis de longues années préconisé el con- seillé aux artilleurs et aux fabricants de canons l'adoption des hautes pressions. Celte question est la plus importante de toutes en ce qui concerne le progrès de la balistique, ou, pour mieux dire, la portée et la justesse du tir. Pour cette raison il me parait utile de m'étendre quelque peu sur ce cha- pitre. Le canon pouvant être considéré comme une machine thermodynamique absolument au même titre qu'une machine à vapeur, l'avantage des hautes pressions au point de vue du rendement théorique et pratique peut être facilement dé- montré. Ilest vrai que l’adoption du principe de l'expansion a fait faire des progrès importants aux machines à vapeur; mais il est aussi parfai- tement reconnu qu’au delà d’une certaine limite les résultats cessent d’avoir une valeur pratique : les immenses perfectionnements dans le rende- ment des machines à vapeur modernes, sont dus plutôt à l'emploi des hautes pressions qu'à une expansion exagérée. Je me souviens parfaitement de l’époque où la limite extrême autorisée pour machines à haute pression était d'environ quatre atmosphères pour les machines empoyées sur terre, et d'environ 1,33 atmosphère pour les machines marines. Actuellement, les machines de cette dernière catégorie marchent fréquemment à 42 ou 13 atmosphères : le résultat s'est traduit par une économie dans la consommation du char- bon, économie qui est descendue de à kilos à 1 kilo par heure et par cheval indiqué. En 1836 le docteur Lardner, qui faisaitautorité en son temps, estimait la marche des grands vapeurs océaniques à 160 milles par jour et à 1 cheval- vapeur par 4 tonnes de tonnage. À l'heure actuelle, des vapeurs de 8.000 à 10.000 tonneaux traversent l'Atlantique à raison de 530 milles par jour, el 1 cheval-vapeur par chaque 1/2 tonneau de ton- nage, consommant environ le 1/5 de combustible par cheval indiqué. Ces brillants résultats sont dus, dans une certaine mesure, à l'adoption de l'expan- sion multiple; mais, pour la plus grande part, ils doivent être attribués à l'emploi des hautes pressions. Pourquoi ne pourrait-on pas appliquer ce qui précède aux canons, qui ne sont, après tout, que des machines thermodynamiques absolument comme les machines à vapeur, pour augmenter le rendement de la puissance balistique? La ques- tion, présentée sous celle forme, ne peut pas ad- mettre de réponse négative. La vérité est que l’action de la poudre dans un canon et la succession exacte des phénomènes développés par la com- bustion de ce mélange sont restés jusqu'à ce jour entourés d’un nuage de mystère et d’hypothèses, qui paraissait devoir placer la solution de la ques- tion hors de la portée de l'intelligence humaine. De nombreuses hypothèses sur la marche et les évolutions des gaz pendant la combustion des poudres, et sur les pressions résultantes dans les canons, ont été émises comme des faits avérés, alors que les auteurs mêmes de ces hypothèses ne leur accordaient que peu de confiance. Des dia- grammes ayant la prétention de représenter les pressions successives développées dans l'âme d’une bouche à feu pendant que le projectile se déplace dans le canon sous la poussée des gaz, ont été présentés ; or, j'ai irréfutablement démontré, dans « l'Artillerie de l'Avenir», combien ces diagrammes sont en désaccord avec toute loi rationnelle du développement de force dynamique. Le directeur de la fabrique royale de canons à Woolwich émit l'opinion, il y a quelques années, que la poudre idéale serait celle qui se consume- rait d’une façon complète dans un temps rigoureu- sement égal à celui que met le projectile pour sortir de l’arme, de manière à ce que la pression soit uniforme jusqu’à la sortie! C'est nier absolu- ment les avantages des hautes pressions el de l'expansion. Cette idée de pressions lentes est jus- qu'à ce jour l'erreur fatale à laquelle les fabricants de canons et les artilleurs de profession ont ad- héré. La vérité est que c'est la faiblesse des canons actuels qui rend nécessaire l'emploi d’une pression initiale faible, et, comme conséquence de ce qui précède, l'emploi de canons de longueurs déme- surées. Si, dès l’origine des machines à vapeur, il avait, été admis et professé qu'il était impossible de faire des chaudières qui pussent résister à une pression excédant 4 atmosphères, les puissantes machines marines actuelles n’existeraient pas; de même,tant que l’on n'aura pas construit des canons assez forls pour résister aux pressions que les nouvelles poudres sont capables de fournir, il sera impossible d'atteindre le maximun des effets ba- listiques que ces nouvelles poudres peuvent don- ner. Actuellement, il n’est pas plus difficile de faire des canons présentant plus de garanties de solidité sous des pressions de 4.700 atmosphères par cen- timètre carré, que des canons actuels sous des pressions de 2.750 kilos. Il y à 35 ans que j'en ai donné en Angleterre la démonstration théorique et pratique. Cette démonstration à élé renouvelée plus récemment en France par le capitaine Schultz et, après lui, par G. Moch, capitaine de l'artillerie J. ATKINSON LONGRIDGE. — LE PROGRÈS DE L’ARTILLERIE 115 française. Plus récemment en 1888, à Aboukoff, l’a- miral Kolokoltzoff fit construire un canon suivant les principes que j'avais préconisés et sur mes plans Ce canon donna les plus brillants résultats ; mais ce n’estque depuis quelques mois seulement que le système a été accepté parle Gouvernement anglais à Woolwich. Je fais allusion à ce qu’on appelle le système de « canons à fils d'acier ». Je dois dire quelques mots de ce système car, malgré tout ce que le capitaine Moch et moi avons écrit sur ce sujet, il parait y avoir encore quelque malentendu. Il est maintenant universellement reconnu que le système dit « canon à fils d'acier » est celui qui présente la plus grande résistance à l'explosion ; mais la principale des objections soulevées est qu'il y à dans ce mode de construction une grande dif- ficulté à obtenir une résistance longitudinale entre le tourillons et la culasse de la pièce. Cette objec- tion dénote une profonde ignorance des principes fondamentaux de la construction des canons, c’est-à-dire la séparation de la force d’éclatement de la force longitudinale, et des dispositions qui ont été prises pour parer à ces inconvénients. Dans un canon «à fils d'acier » conve- nablement construit, la force d’éclatement est supportée par les spires auxquelles elle est transmise par le tube intérieur, tan: dis que toute la pous- sée longitudinale , sans aucune inter- vention de Ja force d'éclatement,estsup- portée par la jaquet- te. Cest l'ignorance et la négation sys- tématique de ces vé- rilés fondamentales qui ont conduit à douter de la tance longitudinale des canons à fils d’a- cier et c’est d'autant plus étonnant que le principe en a été dé- montré et rendu tan- gible pratiquement depuis l’époque où ce système fil sa pre- mière apparition. Il parait qu'il n’y a que quelques semaines, Lord George Hamilton, de l’A- mirauté, en aurait parlé comme d’une difficulté qui r'ésis- Fig. 1 pourrait probablement être surmontée. La vérité est qu'aucune difficulté ne se présente, et que, au con- traire, les canons à fils d'acier, s’ils sont convena- blement étudiés, sont ceux qui offrent le plus de force longitudinale. On peut donc admettre comme principe irréfutable qu’en employant le système à fils d'acier pour la construction d’un canon, #! pré- sente une sécurité beaucoup plus grande, sous des pres- sions de 4.500 atmosphères, que les canons actuels sous des pressions moilié plus faibles. C’est ce qui fait que ce système convient particulièrement pour l'emploi des nouvelles poudres : il permet d’ob- tenir, avec des canons relativement courts, des effets plus puissants qu'avec les pièces actuelles d’une longueur de 40, et même de 50 calibres. Pour préciser les faits, je vais comparer les effets balisliques du nouveau canon Canet de 15 centimètres et de 45 calibres, tels que les a décrits la Revue d’'Artillerie en novembre 1891, page 166, avec ceux d'un canon construit pour résister à une pression de 4.725 atmosphères. Les croquis ci-dessus (fig. 1) représentent les deux canons dessinésàla même échelle. Le premier est le canon Canet à Lir rapide, de 45 calibres; le second, le canon de 15 centimètres construit pour résister à des pressions de 4.500 atmosphères et lancer un projectile de 40,330 kilos, avec une charge de 10 kilos de poudre Nobel, épaisse de 1 centimètre. Le tableau suivant établit la comparaison entre les deux canons, et est assez explicite par lui- même pourfse passer de commentaires ! : Canon Canon à enveloppe Canet spiralée Calibre, centimétnes- 15.00 15.00 om Longueur totale, mètres 6.150 4.725 Poids du canon, kilos............. 5580.000 5500.000 Poids du projectile, kilos......... 40.330 40.330 Poids de la charge, kilos.......... 10.000 10.000 Vitesse à la bouche, mètres...... 131.000 909.000 Energie à la bouche, tonnes métr. 1101.000 1703.000 Energie par kilo de poudre » 110.100 170.300 Pression maximum par cent.car.kil. 2155.000 4725 .000 Cette table, ainsi que les croquis ci-dessus, se passent de tout commentaire. Tout artilleur pra- tique se rendra compte, d’un coup d’æil, des avan- tages incontestables de ce canon plus puissant, quoique plus court, partant, non-seulement d’une manœuvre plus facile, mais encore moins exposé au feu de l'ennemi. III De ce qui précède, on peut tirer les conclusions suivantes : 1 Les renseignements sur le canon Canet sont puisés dans la Revue d'Arlillerie dè novembre 18M, page 166. 14 Ronde Poudre B. N. 10 kilos; Pression = 2.155 kilos par cen- timètre carré. Les résultats sur le canon à fils d'acier sont calculés par les formules de la poudre Nobel publiés dans l’Artillerie de l'Avenir avec la charge de 10 kilos de poudre Nobel à grains de 10 millimètres de diamètre. 4114 Y. DELAGE. — MÉRIDIENS DE L'OEIL, JUGEMENTS SUR LA DIRECTION DES OBJETS ILest impossible d'espérer tirer des poudres nou- velles aucune augmentation dans la puissance balistique, dans les canons du type actuel, sans augmenter leur longueur, ce qui les rend d’un maniement moins commode, et les expose beau- coup plus au feu de l'ennemi. Ce n’est qu'en augmentant la pression, que des effets balistiques plus puissants peuvent être ob- tenus avec des canons de longueur modérée, et ce n’est que le système de construction à fils d'acier qui permet aux canons de supporter sans danger des pressions de 4700 à 5000 kilos par centimètre carré. On peut donc dire que l'emploi des nouvelles poudres sans fumée, et des canons construits sui- vant le système à fils d'acier, sont destinés à marcher de pair dans l'artillerie future. Il y a certainement des corollaires qui deman- dent laplus grande attention, telles queles qualités de conservation des nouvelles poudres et leur sta- bilité sous les différentes conditions climatolo- giques. Il y a aussi la question de l’usure des armes, sur laquelle les opinions sont extrêmement par- tagées. L'expérience seule et l’'observalion peuvent trancher ces questions, mais, quelles que puissent être les conditions présentes, il n’y a pas de doute que les procédés perfectionnés de la mécanique et de la chimie ne trouvent le remède aux défectuo- sités qui pourraient actuellement exister. La grande question controversée est de savoir si les arguments employés pour défendre le prin- cipe des hautes pressions sont vrais ou non. Est-il vrai qu'un canon de 30 centimètres, de 6 mètres de longueur pesant environ 50 tonnes puisse traverser 78 centimètres de fer à bout portant, ou 10 centimètres de fer à 910 mètres? Est il vrai qu'un canon de 21 centimètres, pe- sant environ 16 tonnes puissent imprimer à un pro- jectile de 140 kilos une vitesse initiale de 875 mè- tres par seconde, et percer 63 centimètres de fer à 910 mètres? Si l’on peut répondre affirmativement à ces questions, quelle nécessité y a-t-il d'employer des canons plus grands pour la marine ? Un navire portant 12 canons de 16 tonnes serait d'un tonnage inférieur à celui qui porterait seule- ment deux canons de 110 tonnes, et ce navire dis- poserait d'une puissance au moins double; les canons susceptibles d’être montés sur des affûüts mobiles, pourraient fournir 4 ou à décharges ou même plus pendant le temps que l’autre ne lirerait qu'un seul eoup; le navire ainsi armé pourrait employer ses pièces sans le secours d’aucun engin hydraulique. Peut-il exister le moindre doute qu'un navire ainsi armé serait d’une puissance offensive sous tous les rapports de beaucoup supérieure à celle d’un navire n'ayant comme principal armement que 2 canons monstres de 110 {onnes chacun? Dans « l’Artillerie de l'Avenir » j'ai irréfutable- ment démontré que les immenses avantages des canons à haute pression ne sont point imaginaires et hypothétiques. Il ne reste plus qu’à confirmer les déductions précitées par des expériences pra- tiques, qui ne seraient pas très coûteuses, car, en raison du principe de la «similitude des canons, » l'expérience pourrait être faite tout aussi bien avec des canons de 10 centimètres, qu'avec des canons de 30 centimètres; mais de pareilles expériences ne sont pas du ressort d’un simple particulier comme moi. Si toutefois quelque fabricant de canons désirait faire des expériences à ce sujet, je me mettrais à son entière disposition pour lui fournir les plans et calculs nécessaires à la cons- truction d’un pareil canon. James Atkinson Longridge. LES MÉRIDIENS DE L’ŒIL ET LES JUGEMENTS SUR LA DIRECTION DES OBJETS L'œil connaïît-il ses méridiens ou ne les connait- il pas ? En d’autres termes, jugeons-nous de la di- rection des objets d’après le parallélisme ou l’obli- quité de leurs images par rapport aux méridiens de la rétine, ou le sentiment de leur direction nous vient-il d’ailleurs? C’est là une question souvent débattue entre gens s’occupant d'optique physiolo- gique, et non encore résolue. Au premier abord, la réponse semble évidente: l'œil connaît ses méridiens. Lorsque nous jetons les yeux autour de nous, les arbres, les hommes, les murs nous sembleñt verti- caux ; l'horizon, les arètes des toits nous paraïssent horizontaux et, comme leurs images sont paral- lèles aux grands cercles verlical et horizontal de l'œil, ilsemble naturel de voir dans ce parallélisme la cause de notre jugement. Mais, d'autre part, inclinons la tête sur l’une ou l’autre épaule, et regardons de nouveau les pro- meneurs, les toits, les arbres, l'horizon : rien ne nous paraît changé ; nous ne les voyons point obli- ques. Et cependant l’œil a tourné, ses méridiens Y. DELAGE. — MÉRIDIENS DE L'OEIL, JUGEMENTS SUR LA DIRECTION DES OBJETS 115 vertical et horizontal sont devenus obliques ; les objets verticaux et horizontaux se peignant verti- calement et horizontalement sur la rétine font un angle avec les méridiens de l'œil. Ils devraient nous paraitre obliques. Il n’en est rien ; donc l’æ ne connaîl pas ses méridiens. Mais il y a lieu de faire ici une distinction. Appelons méridiens morphologiques ceux qui pas- sent l’un par les muscles droit supérieur et droit inférieur, l’autre par les muscles droit interne et droit externe et qui se croisent à peu près à lu tache jaune; etméridiens astronomiques ousimplement méridiens actuels ceux qui sont véritablement horizontal ou vertical dans la situation actuelle de la tête, qu'elle soit droite ou inclinée comme on voudra. Ceux-là sont liés à l’œil, tournent avec lui et peuvent prendre une direction quelconque dans l'espace; ceux-ci sont fixes dans l’espaceet peuvent prendre une direction variable par rapport aux axes de l'œil. Peut-étre l’œil, s'il ne connait pas ses méridiens morphologiques, connait-il ses méridiens actuels. Dans le premier cas, la tête étant droite, les deux sortes de méridiens coïncident et l'expérience a la même signification pour les uns que pour les autres. Fig, 4. — Œil dans sa position normale. Les méridiens morphologiques et astronomiques coïncident, Dans le second l'œil juge conformément aux méri- diens actuels et contre les méridiens morpholo- giques ; nous pouvons done conclure provisoire ment : l'œil ignore ses méridiens morphologiques et con- naît ses méridiens astronomiques. Pour vérifier cette conclusion, répétons l’expé- rience d’Aubert. Disposons une chambre entière- ment obseure où l’on ne distingue rien autre chose qu'une fente lumineuse verticale percée dans une paroi. Il est nécessaire que cette fente soit étroite 1 Nous ne parlons que des méridiens rectangulaires verti- cal et horizontal, négligeant les méridiens intermédiaires qui dépendent des premiers. etpe rcée en paroi épaisse, sans quoi elle laisse- rait entrer les rayons lumineux sous un angle assez ouvert pour rencontrer les parois latérales de la chambre et éclairer faiblement les objets, ce qu'il faut absolument éviter. Une bonne précau- tion est de garnir la fente d'une feuille de papier Fiw, 2, — (il, la tête étant inclinée sur l’épaule gauche. Les méridiens morpholosiques ont tourné, les méridiens astrono- miques sont restés à la même place. — AB, méridien mor- phologique vertical. — CD, méridien morphologique horizontal. — MN, méridien astronomique vertical. — PQ, méridien astronomique horizontal, — ds, muscle droit supérieur, — db, muscle droit inférieur. — d.1, muscle droit intérieur, — d.ce, muscle droit externe. transparent qui ne {laisse entrer qu'un peu de lu- mière diffuse, Cela fait, plaçons-nous au fond de la chambre, en face de la fente, la porte étant ou- verte pour laisser entrer le jour. La fente nous parait verticale, comme il est bien naturel ; si nous inclinons fortement la tête sur l’une ou l’autre épaule, elle nous parait encore verticale; si alors, sans changer l'attitude de la tête, nous faisons fermer la porte pour produire l'obscurité, la fente semble s'ineliner en sens inverse de la tête, et cette illusion dure tant que la tête reste penchée. Si nous redressons la tête, la fente se redresse; si nous l’inclinons du côté opposé, la fente semble s'incliner en sens inverse et cela aussi souvent que nous le voulons. Mais si on ouvre la porte, la salle n'étant plus obscure, toute illusion disparait. Sur quoi se règle notre jugement dans cette expérience ? La réponse est contradictoire. Quand la porte est ouverte, nous jugeons d’après les méridiens actuels, puisque la fente, donnant son image sur le méridien vertical actuel de l'œil, est jugée ver- ticale, quelles que soient l'attitude de la tête et par suite la direction des méridiens morphologi- ques. Quand la porte est fermée, nous jugeons d'après les méridiens morphologiques, puisque la fente nous paraît oblique lorsqu'elle se peint sur la rétine obliquement par rapport aux méridiens morphologiques, bien qu’elle soit en réalité verti- cale et se peigne parallèlement au méridien verti- 116 Y. DELAGE. — MÉRIDIENS DE L'OEIL, JUGEMENTS SUR LA DIRECTION DES OBJETS cal actuel. Ainsi, dans cette expérience, nous prenons pour guides de notrejugement tantôt les méridiens actuels, tantôt les méridiens morphologiques, selon qu'il fait jour ou qu'il fait nuit. Voilà qui parait singulier. Mais nous ne sommes pas au bout de nos peines et de nos contradictions. Lorsque l’on vient de regarder fixement un objet vivement éclairé et que l’on ferme les yeux, on voit de nouveau son image sur fond noir; au bout de quelque temps, celle-ci s’efface et reparail bientôt, mais en noir sur un fond plus clair. On admet que la première image est due à la persistance de l’é- branlement rétinien et la seconde à une fatigue des éléments impressionnés ; les éléments voisins qui n’ont pas été fatigués fournissent, par l’effort de leur activité sourde et continue, une vague lumière (lueur entoptrique) qui forme le fond plus clair sur lequel l’image se dessine en noir. Au bout de quelque temps les éléments fatigués reprennent leur activité, fournissent eux aussi leur lueur en- toptrique et toute image s’efface. Ces images qui persistent après l’occlusion des yeux sont appelées imayes accidentelles. Elles jouissent de cette propriété remarquable qu'étant invariablement liées à l'œil, elles le suivent dans lous ses mouvements et peuvent ser- vir à les déceler et à les mesurer. Voyons ce qu'elles peuvent nous apprendre dans le cas ac- tuel. Si, la tête étant droite, nous nous procurons une image accidentelle d’un objet vertical (le châssis d'une fenêtre vivement éclairée par exemple) cette image parait verticale; si, les yeux restant fermés, naus inelinons la tête de 30 degrés, je suppose, à droite ou à gauche, l’image s'incline dans le même sens d’une quantité presque égale !. Dans ce cas nous jugeons neltement d'après les méridiens ac- tuels, car l’image est et reste parallèle au méri- dien morphologique vertical, et elle est cependant jugée oblique, parce qu’elle est oblique par rapport au méridien vertical actuel. Si, la tête étant penchée sur l'épaule, nous re- gardons le même chässis de fenêtre, il nous parait vertical; et si nous fermons brusquement les yeux, l'image accidentelle paraît rester verticale. Ce der- nier résultat, qui est d'expérience banale et que tout le monde a constaté, est vraiment tout à fait extraordinaire, car nous n’avons fait en somme que répéter avec des images accidentelles l'expérience d'Aubert dans laquelle la ligne verticale paraissait oblique. Dans l’un et l’autre cas, en effet, la tête est inclinée latéralement et, sur la rétine plongée dans l'obscurité est peinte une ligne brillante verticale. 1 Il y une légère différence due à ce que, dans ce mouve- ment, les yeux tournent un peu moins que la tête. Comment cette ligne peut-elle être jugée oblique dans un cas, verticale dans l’autre ? Ce n’est pas le fait de l’occlusion des yeux qui cause la difré- rence, car le résultat est le même si, gardant les yeux ouverts, on fait l’obscurilé dans la chambre aussitôt après s'être procuré l’image accidentelle. Il n’y a d'autre différence que celle d'image réelle dans un cas, accidentelle dans l'autre, et on ne peut concevoir comment celte différence peut mo- difier notre jugement sur sa direction. J'ai cru un moment avoir trouvé l'explication dans la remarque suivante. La seule différence fondamentale entre une image réelle et une image accidentelle est que le regard peut parcourir la première, chose qu’il ne peut faire pour la seconde puisqu'il l’entraine dans ses mouvements. En par- courant l'image réelle, l’œil fait intervenir un nou- vel élément de jugement, la notion des museles qui se contractent pour suivre la direction princi- pale de l’image. Si ces muscles sont les droits su- périeur et inférieur, il y aura une raison de plus de juger l’image verticale; si ce sont ces muscles con- curremment avec les droits interne et externe, il y aura une raison de la juger oblique. Or c’est ce qui arrive dans l'expérience d’Aubert. Mais voici une expérience qui ruine celle tentative d’explicalion. Si, dans l’expérience d'Aubert on s’astreint à re- garder un point fixe de la ligne claire, sans dépla- cer l'œil, la ligne n'en parait pas moins oblique ; d'autre part si, dans mon expérience, on déplace l’image accidentelle dans le prolongement de sa propre direction, elle n’en parait pas moins rester verticale, bien que l'élément musculaire ait été supprimé dans le premier cas et introduit dans le second. La difficulté reste entière. Or rien n’est irritant comme cette constatation de deux conclusions éga- lement certaines et contradictoires. Pour rendre la contradiction plus flagrante, j'eus l’idée de combiner les deux expériences en faisant peindre simultanément sur ma rétine l'image accidentelle et l’image réelle. Pour cela, tout étant préparé comme pour l'expérience d’Au- bert, je place à 2 ou 3 centimètres de la fente une longue flamme très brillante de gaz, car- buré. Un robinet placé à portée de ma main me permet de l’éteindre presque entièrement en ne laissant qu’une pelite flamme bleuâtre, invisible derrière un écran et suflisante pour rallumer la première. Les choses élant ainsi disposées, j'incline la tête sur l'épaule, je me procure une image accidentelle pas tout à fait centrale de la flamme de gaz, je ferme le robinet et regarde la fente lumineuse. D’après ce qui précède, les deux images parallèles peintes simultanément sur ma rétine devraient me Y. DELAGE. — MÉRIDIENS DE L'OEIL, JUGEMENTS SUR LA DIRECTION DES OBJETS 117 paraître l’une verticale et l’autre oblique. Quelle n’est pas ma salisfaction en voyant que les deux images paraissent également obliques et rigou- reusement parallèles. Ainsi la contradiction n’existe pas. Pour l’une et l'autre image mon jugement se règle sur les méridiens morphologiques de l'œil. Mais alors pourquoi, dans l’expérience vul- gaire, l'image accidenteile du chässis de fenêtre paraissait-elle verticale ? Cela tient à plusieurs causes qu'il faut maintenant examiner. 1° L'obliquité est faible et nullement comparable à celle que prennent les images accidentelles ver- ticales lorsque l’on incline la tête après se les être procurées. Dans ce dernier cas l’obliquité de l'image est presque égale à celle de la tête; elle saute aux yeux. Dans le premier elle est à peine sensible ; et, comme on s'atlend par comparaison à la trouver forte si elle existe, ou la méconnait par suite de sa faiblesse. 2 Lorsque l’on fait l'expérience d'Aubert, on constate que l'illusion ne se produit pas immédia- tement dès que l'on a fait l'obscurité dans la chambre. Il y a comme un souvenir de l'impres- sion précédente, qui met quelque temps à s’effacer. Il en est de même pour les images accidentelles ; il faut les observer un certain temps pour cons- tater leur obliquité,et comme elles sont très éphé- mères, il n’est pas toujours facile d’y arriver. 3 L'apprécialion de cette faible obliquité est contrariée par la fausse notion que l’on a dela ver- ticale lorsque la tête est inclinée, comme je lai démontré dans un autre travail ‘. Dans cette position, on juge la verticale inelinée de quelques degrés en sens inverse de la tête. Aussi, si l'image estinclinée seulement de quelques degrés en sens inverse de la tête, on la jugera parallèle à la verticale et par conséquent verticale. L’inclinai- son doit être plus forte pour être percue. Or en gé- néral on néglige d’incliner fortement la tête, en sorte qu’elle n’a pas une valeur suflisante pour être perçue. Mais on peut vaincre aisément celte difliculté. Pour cela il suffit d'incliner très fortement la tête, de l’abaisser jusqu'au dessous de l'horizontale (en faisant, bien entendu, participer le tronc à ce mou- vement). Aussitôt l'obliquité de l’image se montre assez forte pour être reconnue sans hésitation. Il est à remarquer que cette obliquité s’accroil rapidement à mesure que l'on ineline davantage la tête au-dessous de l’horizontale, La raison de ce fait apparaitra clairement tout à l'heure, Si nouus résumons ce qui précède, nous voyons { Etudes expérimentales sur les illusions statiques et dyna- miques de direction pour servir à déterminer les fonctions des canaux demi-circulaires de l’oreille interne, in Arch. de z0ol. exp. et gén. 1886, 2' série, {. IV. RavuE GÉNÉRALE DES Sorences 1892. que toujours les jugements portés sur la direction des images peuvent s'expliquer en admettant que l’œil connaît ses méridiens actuels ou astrono- niques et ignore ses méridiens morphologiques, à l'exception d'un seul cas, celui des images claires, réelles ou accidentelles vues au milieu d’une obscu- rité absolue, et c’est cette exception qu'il s’agit d'expliquer. Avant d'aborder cette question, remarquons qu'il serait exagéré de dire que dans l'expérience d’Au- bert ou dans la mienne, nous Jugeons entièrement d’après les méridiens morphologiques de l'œil, ear l'obliquité attribuée aux images est toujours beau- coup moindre que celle des méridiens morpholo- giques. Quand la tête est horizontale, la ligne d’Aubert parail inclinée de moins de 45°, Il faut donc dire pour être exact que notre jugement tient compte de la position des méridiens morphologiques, sans se régler entièrement sur eux. Arrivons maintenant à l'explication psycholo- gique de nos jugements el de nos illusions. Dans l'attitude normale de la tête, qui est de beaucoup la plus habituelle, les objets verticaux, horizontaux, obliques se peignent suivant les mé- ridiens vertical, horizontal, obliques de l'œil. De là celte première notion confirmée par l’expérience de tous les jours que les objets sont horizontaux, obliques ou verticaux lorsque leurs images réti- niennes sont parallèles aux méridiens morpholo- giques de même nom. Inelinons la tête à gauche ou à droite; aussitôt les objets verticaux se traduisent par la même sen- sation que s'ils étaient obliques, et nous sommes tentés de les juger tels. Il est fort vraisemblable qu'au début de l'éducation de notre œil nous avons jugé ainsi; mais ce jugement a été chaque fois infirmé par l'expérience qui nous montrait ces mêmes objets verticaux par le toucher et par le redressement de la tête, et nous avons acquis l'ha- bitude instinctive, lorsque notre tète est penchée, de faire subir à l'impression sensitive une correc- lion qui nous fait juger les objets tels qu'ils sont en réalité et non tels que les voit notre œil. Pour les inclinaisons modérées de la tête, celles qui ne dépassent pas 25° à 30°et qui nous sont habitueïles, la correction est parfaite ; mais pour des inclinaisons très fortes, atteignant ou dépas- sant l'horizontale, elle n’a plus lieu que partielle- ment. Placez-vous devant une fenêtre et inclinez la tête : jusqu'à 30 ou 40° les montants vous pa- paraitront verticaux : en approchant de l'horizon- tale, leur inclinaison se montrera très accentuée. N'étant pas habitués à cette attitude, nous faisons subir à l'impression visuelle la plus forte correc- tion dont nous soyons capables, mais cetle correc- tion reste néanmoins insuffisante. 118 Y. DELAGE. — MÉRIDIENS DE L'OEIL, JUGEMENTS SUR LA DIRECTION DES OBJETS Dès lors l'expérience d’Aubert semble beaucoup moins extraordinaire, puisque, même en pleine lumière, une inclinaison suffisante de la tête nous montre obliques les objets verticaux. Elle n’est re- marquable que par le degré. Dans les conditions où se place le physiologiste de Rostock, l'illusion nait beaucoup plus vite et se montre plus accen- tuée. Cette différence peut être facilement expli- quée : elle provient uniquement de la disparition des termes de comparaison. Tant que la porte ou- verte laisse entrer la lumière, la ligne claire est jugée verticale parce qu’elle est vue parallèle aux arêtes des murs et des meubles, perpendiculaire au plafond et au plancher, objets qui ne sauraient être tous à la fois obliques dans le même sens sans que nous en soyons averlis par un trouble dans notre équilibre. Dès que l'obscurité est produite, les termes de comparaison disparaissent et rien ne s'oppose à ce que la ligne soit jugée oblique comme elle est perçue. Elle subit cependant une cerlaine correction dictée par le sentiment de l'inclinaison forte de la tête ; aussi est-elle jugée moins oblique qu'elle n’est vue . La comparaison de l'expérience d’Aubert avec celles faites au jour nous permet de distinguer deux parties dans la correction totale qui se ma- nifeste dans ce dernier cas. Dans l’obscurité, jus- qu’à 30 degrés environ (tantôt plus, lantôt moins, la chose étant assez variable suivant les circons- tances et les individus) l'illusion est nulle. Donc. jusqu'à cette limite, nous corrigeons en quelque sorte par le seul réglage de l'organe sans avoir be- soin de termes de comparaison. Vers 60 degrés, l'il- lusion se montre dans l’obseurité, tandis qu'au jour elle est encore insensible. Donc, dans ce der- nier cas il y a correction organique (si l'on peut ainsi dire) pour les 30 premiers degrés et cor- rection intellectuelle (bien que inconsciente) pour les 30 autres. J'ai mème observé dans l'expérience d'Aubert une gradation intéressante du phénomène : l’obli- quité parait moindre lorsqu'une très faible lueur permet d’entrevoir vaguement la direction des murs que lorsque l'obscurité est tout à fait com- plète. Voici d'ailleurs une expérience qui montre bien le rôle que joue dans ces illusions la présence des termes de comparaison. Sur un cercleen carton blane, tracons de 10 en 10 ‘ L’explication de l'expérience d'Aubert proposée par Hel- moltz n’est pas du tout exacte, Cet auteur admet que nous RO Et oblique parce que nous attribuons à notre ète une inclinaison plus faible que la vraie. Or cela n’est pas, car dans linclinaison en avant ou en arrière, l'obli- quité de la tête est jugée au contraire plus forte qu’elle n'estet cependant l'illusion d'Aubert se produit de la même manière dans ces attitudes: degrés des rayons semblables et fixons ce carton sur un mur uniforme où rien ne nous rappelle la direction de l'horizontale et de la verticale. Enca- drons-nous la figure dans un manchon de papier pour nous enleverla vue du sol, du plafond et des objets voisins, plaçons-nous devant le carton, in- clinons la tète à 35 ou 40° degrés sur l’une ou l’autre épauleet cherchons à trouver lequel des rayons est vertical. Invariablement nous faisons erreur et constatons après le redressement de la tête que le rayon désigné est nettement incliné dans le même sens que la tête. Cela devrait être ainsi : la verti- cale nous aurait paru penchée en sens inverse de la tête ; donc pour nous paraitre verticale une ligne doit être penchée dans le même sens qu’elle #. Helmo!tz avait déjà indiqué ce résultat dans une expérience semblable. Placons-nous, au contraire, en face de l’arête du mur el refaisons l’expérience avec la même incli- naison dela tête : l'illusion ne se produit plus: nous désignons comme vertical le rayon parallèle à l’arête du mur. Rien n’a élé changé cependant, sauf qu'un point de comparaison a été introduit et a facilité la correction. Tout est expliqué maintenant. En somme, l'œil juge des directions en les com- parant à ses méridiens morphologiques, mais il fait subir à ces indications primitives une correction toutes les fois que l’inclinaison de la tête vient modifier la direclion de ces méridiens dans l’es- pace. Pour les inclinaisons modérées qui nous sont habituelles, la correction est complète même en ‘absence de termes de comparaison : elle se fait organiquement, sans intervention d'un jugement. Pour des inclinaisons un peu plus fortes, elle n’est complète que si elle est facilitée par des termes de comparaison connus et gràce à l'intervention d’un jugement inconscient. Enfin lorsque l’inclinaison de la tête atteint un degré tout à fait étranger à nos habitudes, la correction se produit, mais insuf- fisante, et les objets sont perçus avecune direction qu'ils n’ont pas. L'illusion apparait. Voici une expérience (ou plutôtune observalion, car il ne dépend pas de nous de la reproduire à volonté) qui semble bien prouver que la notion de l’inclinaison de notre tète est bien la fooi qui fait naïtre la correction. ‘ L'illusion est d’autant plus remarquable qu’elle se ma- nifeste bien qu’elle soit contrariée par une autre illusion de sens inverse sur la direction de la verticale. J'ai montré en effet (loc. cit.) que si, dans la même attitude de la téte et les yeux fermés, nous cherchons à indiquer avec une baguette la direction de la verticale, nous constatons que, pour nous paraître verticale, une ligne doit ëtre inclinée de 10 degrès environ en sens inverse de la téle. Cette illusion persiste quand les yeux sont ouverts, et l'illusion visuelle, pour se manifester, doit d’abord la compenser et ne révèle que son excédent sur l'illusion précédente, Y DELAGE. — MÉRIDIENS DE L'OEIL, JUGEMENTS SUR LA DIRECTION DES OBJETS 119 Un matin, élant encore mal éveillé, j'ouvre les yeux, les referme et obtiens, sans l'avoir cherchée, une image accidentelle de la fenêtre. Cette image est nettement penchée à droite. Cette direction in- solite me frappe et m’éveille tout à fait. Je me dis que ma tête doit être inclinée à gauche. J'ouvre les yeux et, sans faire un mouvement, je constate que telle est en effet l’attitude de ma tête. Je provoque alors une nouvelle image accidentelle de la fenêtre; mais celte fois elle est droite. L’explica- tion de ces faits est évidente. Il arrive parfois qu’au réveil la sensation du contact de quelque membre longtemps immobile avec le lit estabolie et qu'on ne se rend pas compte de sa situation jusqu'à ce qu'un mouvement nous ait renseigné. J'étais ainsi dans l'ignorance de l'attitude penchée de ma tête et dans l'impossibilité de faire la correction nécessaire. Tout cela semble clair et la question parait résolue. Cependant Aubert de Rostock, dans sa traduc- tion annotée de mon travail sur les illusions de direction, complique son expérience et obtient une combinaison d'illusions qui lui paraît inexplicable. Voici ce qu'il dit, non dans son texte imprimé, mais dans une lettre qu'il m'écrivait à la même époque (1888) et que je cite de préférence parce qu’elle est plus explicite: « Si la tête est horizon- tale (le corps étant étendu, par exemple, sur voire planche à tourillons), le méridien vertical de l'œil est aussi presque horizontal ou à dix degrés au- dessus de l’horizon. Dans cette position, en com- parant la direction de la ligne claire à la sensation de l’inclinaison du corps, on trouve des sentiments complètement contradictoires de l'orientation. Ainsi, si je ferme les yeux, étant dans la position horizontale, je me sens incliné d'environ 30 degrés au-dessous de l'horizontale; si alors j'ouvre les paupières dans la chambre complètement obs- cure où je ne vois rien que la ligne claire verti- cale, celle-ci me parait renversée en sens inverse d'environ 50 degrés. C’est done seulement l'index physiologique qui a changé. Dans le premier cas, l'index est le sentiment du corps ; dans le second, c’est le sentiment de l’œil. Dans cette expérience, si je me suis procuré, étant vertical, une image accidentelle verticale, lorsque la tête est devenue horizontale, cette image parait horizontale aussi, et en même temps la ligne claire me semble ren- versée de 50 degrés au delà de la verticale, tandis que mon corps me semble incliné à 30 degrés au- dessous de l’horizontale. J'avoue qu'il m'est impos- sible d'expliquer cette énigme...» Pour moi au con- traire l'énigme n’existe pas. Ce qui fait l'embarras d’Aubert, c’est qu'il pense à tort que nous ré- glons les uns sur les autres nos jugements sur la direction de notre corps, de la ligne claire et de l’image accidentelle, quand ce sont au contraire trois sensations indépendantes qui peuvent don- ner des illusions dans n'importe quel sens sans se gèner mutuellement. Quand le corps est renversé à l'horizontale, nous jugeons de son inclinaison uniquement par des sensations, les unes cutanées de pression sur telle ou telle région, les autres de congestion cépha- mp \, A 50° N NE "M 90° VISU ST 2 4 E ES : A Fig. 3. — AB, l'observateur en position verticale. — MN, ligne claire dans la chambre obscure et ligne brillante verticale qui fournit l’image accidentelle, — BA’, l'observateur ren- versé horizontalement en arrière. — BA", inclinaison que croit avoir l'observateur. — MN, position dans laquelle il croit voir la ligne claire MN. — N/M'', position que prend l'image accidentelle fournie par MN après que le corps a pris la position BA’. lique, d’autres encore internes el viscérales de traction des organes sur leurs ligaments, elc., ele. Ces sensations vagues, sans organe spécial, sont fort peu précises et provoquent des jugements fa- cilement fautifs. La congestion céphalique en par- ticulier nous laisse toujours croire que nous sommes plus incliné qu'il n’est vrai; dès que nous dépassons si peu que ce soit l'horizontale, la crainte d’un glissement imminent augmente très rapidement l'illusion. En tout cas, c’est sur cela seul et nullement sur les sensations visuelles que nous réglons notre jugement. L'image accidentelle au contraire paraît horizontale parce que l'œil ap- précie la quantité dont il a tourné d’après ses propres sensations musculaires et non d’après les sensations cutanés du dos ou d’après la conges- tion céphalique. Enfin la ligne claire se peint dans l’'œil,comme si elle avait été renversée en sens op- posé jusqu’à l'horizontale, et elle parait relevée de 40 degrés parce qu'elle subit une correction dans le sens vrai, mais insuffisante en raison de l’atti- tude exagérée de la tête. Aucune de ces sensations n’entrave les autres. En quoi le fait d'être renversé de 30 degrés au delà de l'horizontale nous em- pêche-t-il de concevoir une ligne faisant un angle de 170° avec notre corps quand rien n'empêche cette ligne d’avoir vraiment cette inclinaison et qu'aucun repère ne montre. qu'elle ne l'a pas? De même pour l'image accidentelle. Cette image, formée perpendiculairement à la direction du regard, conserve cette situation relative, quelle 120 G. LUNGE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE que soit la direction nouvelle que prend le regard, puisqu'elle suit l'œil dans tous ses mouvements. Or l'œil juge de sa position nouvelle d’après les mouvements qu'il a effectués dans l'orbite et non d'après les mouvements du corps. On sait en effet que lorsque la tête se déplace autour de ses axes, l’œil ne suit pas passivement comme ferait un organe fixe. Il reste d'abord immobile comme s’il fixait un point invariable et l'orbite se déplace par rapport à lui, puis il reprend par un petit mouve- ment saccadé sa posilion normale par rapport à l'orbite et continue ainsi par petits sauts brusques jusqu'à ce que le mouvement soit terminé. Quand la tête a fait un mouvement autour de ses axes, la position de l'œil par rapport à l'orbite est donc la même avant et après le mouvement; mais dans l'intervalle se sont produits dans l'appareil muscu- laire de l’œil des mouvements dont l'œil a connais- sance et qui servent à le renseigner sursa position nouvelle. Dans l'expérience d’Aubert, le corps croit avoir tourné de 90 Æ 30 — 120 degrés; mais l'œil par ses propres sensations musculaires sait qu'il a tourné de 90° seulement, et c’est pour cela qu'il voit précisément horizontale l'image qui était verticale au départ. On objectera que l'œil ne peut avoir ses Juge- ments à lui et savoir de combien il a tourné sans que l’expérimentateur le sache aussi. Cela est vrai cependant, bien que fortement paradoxal,et une expérience bien connue en fournit la démonstra- lion. Si, après s'être procuré une image acciden- telle d’une ligne verticale, on porte le regard en haut ou à droite, l'image reste verticale; mais si on regarde en haut et à droite, l’image devient oblique montrant que l'œil a tourné autour de son axe antéro-postérieur. Or ce mouvement de rota- tion est absolument inconscient et reste ignoré de l’expérimentateur. Si, comme le voudrait Aubert, l'expérimentateur attribuait à l’image les seuls dé- placements qu'il eroit avoir imprimés à son œil, il ne devrait pas reconnaitre cette obliquité. Assuré- ment ce n’est pas l'œil qui juge, c’est le cerveau, mais ce jugement reste insconscient en tant qw’o- pération intellectuelle et ne se révèle que par ses effets. IL y a là un fait psychique fort intéressant et qui ne me parait pas avoir suffisamment atliré l'attention. Concluons donc qu'il n’y a contradiction qu'en apparence dans la nouvelle expérience d’Aubert et que ces illusions sont justiciables de la même explication qui d’ailleurs est celle des illusions de toute nature. On peut la résumer ainsi : Tout organe des sens impressionné dans les con- ditions normales de son fonctionnement provoque des jugements exacts. Dès que les conditions de- viennent anormales, l’impression se modifie et le jugement tend à devenir fautif en se rapprochant de celui qui aurait été porté si l'organe avait reçu la même impression dans les conditions normales. Helmoltz a lepremier bien reconnu cela, mais il n’a pas été plus loin. Or l’analyse complète des phé- nomènes nous montre queique chose de plus. L'expérience et la vérification par les autres sens ou par le même sens agissant dans ses conditions normales nous permet de reconnaitre l'erreur et de la corriger. Aussi quand ces conditions anor- males se reproduisent fréquemment, la correction finit par devenir automatique et insconsciente, et l'illusion ne se produit plus. C’est seulement quand la condition anormale est exceptionnelle par sa na- Lure ou par son degré que la correction devient nulle ou insuffisante et que l'illusion se produit. Il n'y a guère à douter qu'en se soumettant assez fréquemment aux mêmes illusions on finirait par ne plus les éprouver. La chose m'est arrivée dans quelques cas pendant mes expériences sur la fonc- tion non audilive de l'oreille interne. Yves Delage. Professeur à la Sorbonne, REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE LA GRANDE INDUSTRIE CHIMIQUE L'année qui vient de s’écouler ne fera pas épo- que dans l’histoire de la grande industrie chimique. Il n'y à à mentionner aucun procédé nouveau pré- sentant assez d'intérêt pour qu'on puisse au moins espérer le voir se perfectionner dans l'avenir. D'autre part, parmi les méthodes nouvelles quiont été mentionnées dans cette Revue, il y a un an, c’est à peine si l’une d'entre elles a été suffisam- ment expérimentée pour que l’on puisse prononcer un jugement définitif à son sujet. Il En ce qui concerne la fabrication de l'acide sul- furique,on a repris l’étude de plusieurs dispositifs proposés en vue de réduire l’espace des chambres de plomb; la plupart de ces dispositifs sont du reste antérieurs à 1891, sinon comme applications, du moins comme inventions. G. LUNGE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE 121 L'un deux, que l’on doit à Deplace, consiste à construire une chambre de plomb de section annu- laire, ce qui contribuerait à un mélange plus intime des gaz que celui obtenu par la circulation recti- ligne des installations habituelles. D'ailleurs, cette méthode ne prend pas suffisamment en considéra- tion les théories qui ont été émises ces dernières années sur les réactions des chambres de plomb soit par l’auteur de celte Revue, soit par M. Sorel et d’autres savants qui se sont occupés de la ques- tion. Bien que le nouveau système présente certains avantages, il est encore diflicile de dire si ces avantages sont en rapport avec les frais d’établis- sement ; il faudrait pour cela une expérience d'une plus longue durée, Il convient en outre de faire remarquer que le système de Deplace ne peut être employé que pour de nouvelles installations et qu'il n'est nullement question de l'adapter aux chambres de plomb actuelles. Les propositions faites à peu près à la même époque par M. Sorel et par l’auteur de cette Revue reposent sur une tout autre base. Elles ont pour point. de départ une observation faite autrefois par ce dernier et confirmée depuis par plusieurs ob- servations, à savoir que la production d’acide sul- furique diminue à mesure que les gaz avancent dans les chambres de plomb ordinaires, pour rede- venir plus intense lorsqu'ils pénètrent dans une nouvelle chambre. Nous avons cherché à favoriser celte surproduction, — et jusqu’à un certain point par les mêmes moyens, — en abandonnant le simple tube de communication entre deux chambres consécutives et en faisant pénétrer les gaz par un grand nombre d'ouvertures, ce qui produit un mé- lange plus intime. Ce dispositif à lui seul, ne cons- titue pas une nouveauté; en effet, il y a déjà plu- sieurs années, M. Thyss avait installé dans ce bul des colonnes en plomb qui étaient du reste peu so- _lides et n’ont pas donné les résultats qu’on en at- tendait. Il n'y avait là rien d’étonnant,car M. Thyss avait méconnu qu'un mélange plus intime des gaz ne suffit pas pour activer la réaction qui donne naissance à l’acide sulfurique. L'intervention de l’eau est indispensable pour faire marcher convenablement la production d’a- cide,.en même temps qu'elle permet un refroidis- sement suffisant. J'ai cherché à réaliser cette con- dition en intercalant entre les chambres de plomb de petites tours ou colonnes remplies de plateaux d’une forme particulière et percés d'un grand nom- bre de trous. Ces plateaux sont construits avec une pâte d'argile qui résiste aux acides et à l’action de la chaleur. Ils sont arrosés continuellement par un filet d’eau ou d’acide sulfurique étendu, de sorte qu'il se forme, dans ces colonnes, une grande quan- lité d’acide sulfurique. L'expérience a montré qu'avec un même système de chambres de plomb on peut ainsi augmenter considérablement la pro- duction. Et pourtant, jusqu'à présent, ces colonnes à plateaux ont été seulement intercalées entre des chambres construites antérieurement, tandis que pour en tirer le meilleur parti, il faudrait réduire de moitié la longueur des chambres et mettre celles-ci en communication au moyen de ces co- lonnes à plateaux. M. Sorel emploie une autre construction. En outre, au lieu d'un filet d’eau, il adopte l’acide sul- furique, qu'il prend à peu près à la même concen- tration que l'acide des tours de Glover. De fait, d’après ce que j'en sais, ses appareils ressemblent à une sorte de continuation de la tour de Glover. J'ignore si l'expérience a déjà donné une sanction pratique à ce dispositif. Du reste, ce n’est pas ici le lieu de discuter à un point de vue théorique les avantages et lesinconvénients de deux méthodes. Seule,une expérience prolongée peut fournir des résultats définitifs sur cette question. Après avoirsubi une hausse considérable, le prix du platine semble retombé à un niveau raisonna- ble, quoique supérieur à ce qu'il était il y a quel- ques années. Il en est résulté qu'on a cherché à le remplacer par d'autres matières dans la construc- tion des appareils servant à concentrer l'acide sul- furique. M. W. C. Heraeus, à Hanan, a tiré un parti excellent de l'emploi simultané de l'or et du platine. Ces deux métaux sont laminés ensemble, de façon à produire leur union intime. On oblient ainsi des feuilles métalliques dont l'épaisseur est formée pour les 3/4 ou les 7/8 par du platinerecouvert sur une de ses faces par de l'or représentant le 1/4 ou le 1/8 de l'épaisseur totale. Dans la construction des appareils, l'or est placé à l’intérieur. Des expé- riences menées sur un pied industriel et prolon- gées pendant longtemps ont montré que l’acide sul- furique bouillant attaque beaucoup moins l’or que le platine. Malgré le prix relativement élevé de pa- reils alambics, les fabriques trouvent quand même leur avantage à lesemployer, surtout quandil s’agit de concentrer les acides forts à 948 % de SO‘H?,. — Il importe de remarquer qu'il ne s’agit pas ici d’un simple placage d’or sur platine, — système qui s’est montré lout-à-fait insuffisant, — mais d'un laminage à chaud de feuilles d’or minces placées sur des feuilles de platine plus épaisses cel destinées à donner à l'or la résistance nécessaire. On a constaté, durant ces dernières années, que malgré les progrès du procédé à l’ammoniaque, la production d'acide sulfurique non seulement n’avail pas baissé, mais était restée constamment crois- sante. C’est à la fabrication des engrais artificiels qu'il faut attribuer ce fail. Indépendamment des 122 phosphates de la Somme, c'esten Belgique et sur- tout en Floride (où de nouveaux dépôts d'une étendue considérable ont été découverts), que le fabricant trouve la matière première nécessaire à l’industrie des superphosphates. Du reste, bien qu’on fasse un emploi considérable de la poudre de scories provenant du procédé basique, matière qui ne demande aucun traitement par l'acide sul- furique et qui parait être constituée par un phos- phate de chaux tétrabasique, la production des superphosphatesn'a pas cessé jusqu'à présent de prendre une extension considérable. Il Dans le domaine de l’industrie de la soude, la lutte est toujours intense entre le procédé Leblanc et le procédé à l’ammoniaque. Aucune des deux méthodes n’a subi en 1891 de modifications dignes d’être notées. Les grandes espérances que l’on fon- dait sur le système Chance pour la désulfuration des résidus de soude ne se sont pas complètement réalisées. Il faut l’attribuer à une circonstance tout à fait imprévue, à savoir que le prix des pyrites esttombé si bas, qu'iln'y amaintenant plus d'avantage à utiliser pour la fabrication de l’acide sulfurique l'hydrogène sulfuré qu'on régénère par la méthode Chance. On se trouve ainsi obligé de transformer l'hydrogène sulfuré en soufre par le procédé de Claus, opération peu rémunératrice, étant donnée la baisse considérable qui s’est pro- duite sur le marché du soufre. Mais il y a deux inconvénients plus graves à si- gnaler : 1° la complication des appareils Chance donne lieu fréquemment à des fuites, ce qui en- traine des pertes de grandes quantités de gaz sul- fhydrique ; 2° le fonctionnement des fours de Claus laisse à désirer, de sorte que des quantités très ap- préciables d'hydrogène sulfuré et d'acide sulfureux s’'échappent dans l’atmosphère. Il en est résulté des plaintes dans les localités habitées qui avoi- sinent les fabriques. Dans certains endroits, les au- torités sanitaires se sont émues et sont sur le point d'imposer des mesures onéreuses. On ne peut ce- pendant pas douter qu'on ne vienne à bout de toutes ces difficultés, qui accompagnent fréquem- ment les débuts de toute méthode nouvelle. Plusieurs procédés ont été proposés en 1891 pour la fabrication de la soude. Je me bornerai à men- tionner celui de Haddock et Leilh, et celui de Ellershausen. Il serait prématuré de porter un ju- gement sur leur valeur avant qu’ils soient sortis de la période d’essais. Il en est à peu près de même de l’emploi de l'é- lectricilé dans la fabrication de la soude; on se demande encore s’il présente un avantage sérieux. Cependant, il est de fait que depuis plusieurs | G. LUNGE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE années on décompose ainsi, à Griesheim près de Francfort, le chlorure de potassium en potasse et en chlore; mais on n’a pas de données sur la valeur économique de ce traitement. On'sait aussi que la préparation du chlorate de potasse par la méthode de Gall et du comte de Montlaur est pratiquée en grand depuis un certain temps déjà; mais cela ne paraît possible qu'à la condition de pouvoir pro- duire l’énergie électrique à bon compte à l’aide de force hydraulique. Quant à la soude, elle n’est pas, à ma connaissance, fabriquée par électrolyse montée sur un pied vraiment industriel; on ne sail pas encore si l’emploi de forces motrices hy- drauliques peu coûteuses permettrait même de ré- soudre le problème. Quoi qu’il en soit de cette ques- tion, la découverte de Kellner, connue sous le nom de méthode Kellner-Partington, semble appelée à un certain succès. On sait qu'elle consiste à faire passer un courant électrique dans les cuves con- tenant une solution de sel marin ainsi que les ma- tières végétales servant à la fabrication du papier. La soude et le chlore qui prennent naissance dans ces conditions se trouvent ainsi utilisés sur place, de sorte que l’on supprime les frais de fabrication relatifs à la soude et au chlorure de chaux. Si l’é- lectrolyse est appelée à quelque succès, ce sera évidemment dans cette voie. Mais, pour le mo- ment, nous n'avons encore aucune donnée précise sur cette question. Le procédé à l’'ammoniaque semble être arrivé à son maximum de rendement. Dans les fabriques bien installées, les pertes sont si faibles qu'il n’y a plus à faire de ce côté aucun progrès marquant. Cependant le système est encore incomplet, il y a une lacune à combler, ainsi que c'était le cas pour le procédé Leblanc avant la découverte de Chance pour la récupération du soufre. Actuelle- ment les fabriques qui travaillent à l’ammoniaque perdent tout le chlore contenu dans la matière pre- mière. Il est vrai que ce chlore ne se trouve pas sous forme de résidus encombrants, nuisibles à la santé, mais simplement sous forme de solutions de chlorure de calcium. Des nombreux essais tentés jusqu’à présent pour en retirer de l'acide chlo- rhydrique ou du chlore, aucun n’a donné des résultats économiques satisfaisants, et l’on ne doit pas s'attendre à ce qu'il en soit ainsi dans un avenir rapproché. On a proposé en effet plusieurs méthodes nouvelles qui permettent d'utiliser d’une facon plus complète que les anciennes le chlore contenu dans le sel marin, de telle sorte que le prix des produits chlorés se maintient à un niveau relativement bas. Il est vrai que toutes ces nou- velles méthodes, — parmi lesquelles celle de de Wilde et Reichler a particulièrement attiré l’at- tention, — en sont encore à la période d'essais. PH.-A. GUYE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE 193 Mais il ne faut pas oublier que le système de Dea- con, de date moins récente, est arrivé aujourd'hui à un haut degré de perfection, grâce à la décou- verte de Hasenclever, relative à l’ulilisation de l’a- cide des fours à calciner (acide de calcine). C'était, pour ainsi dire, le dernier pas à faire pour donner à la méthode Deacon toute la perfection désirable. En outre, après avoir été fréquemment annoncée, la préparation industrielle de l'acide chlorhydriqne au moyen du chlorure de magnésium de Stassfurt est entrée aujourd’hui dans le domaine des faits. Elle ne marche cependant pas encore dans des con- ditions telles que le marché des produits chlorés en soit influencé. Le chlore liquide, comprimé dans des cylindres d'acier, n’est plus aujourd'hui une curiosité, mais bien un produit courant de l'industrie, en Alle- magne du moins. L’acide carbonique liquide était devenu d'un emploi général depuis longtemps déjà. Il en était de même de l'ammoniaque liquide. Enfin l'oxygène comprimé à 100 atmosphères prend une extension toujours croissante. Il est fa- briqué exclusivement jusqu’à présent par la mé- thode des frères Brin. Celle de Kassner, au sujet de laquelle on avait fait une réclame considérable, n’a pas encore été montée en grand. G. Lunge, Professeur de chimie appliquée à l'Ecole polytechnique de Zurich. MATIÈRES COLORANTES ET PRODUITS ORGANIQUES Les lecteurs de la Revue ont été déjà mis au cou- rant de l'esprit dans lequel estconçue cette analyse rapide des progrès réalisés dans l'industrie des matières colorantes et des produits organiques. Nous ne reviendrons donc pas sur ce point, si ce n'est pour rappeler que ce travail n’a nullement la prélention d’être complet; le cadre qu’il comporte ne permettrait même pas de publier en entier la liste des brevets pris depuis une année sur la matière. Comme précédemment, nous n'avons donc cherché qu’à signaler les principales direc- tions dans lesquelles sont dirigées les recherches exécutées dans les laboratoires des grandes usines. I Les matières colorantes azoïques nouvelles sont toujours de beaucoup les plus importantes, sinon par leurs qualités, du moins par le nombre consi- dérable de brevets dont elles sont l'objet. En prin- cipe, il n’y a pas d'innovation remarquable à signaler : ce sont toujours les mêmes tendances qui s’accusent., On continue à préparer de nombreux dérivés de la benzidine, soit des dis-azoïques, toujours recherchés à cause de leur propriété de — > se fixer sur la fibre non mordancée. Plusieurs procédés ont été aussi brevetés pour obtenir des azoïques dérivés du triphénylméthane, de la primuline, de la thio-urée diamidodiphénylée CS (CSH*.AzH°}?, ete., qui paraissent doués de propriétés semblables. Mais, parmi les travaux récents tentés en vue de développer cette branche de l'industrie des ma- tières colorantes, les plus intéressants sont, en ce moment, des travaux de détail, qui permettent de juger avec quel soin et avec quelle persévérance ces recherches sont conduites. On s’acharne depuis quelque temps, par exemple, à préparer tous les dérivés substitués de la naphtaline susceptibles d'être employés dans la fabrication des azoïques, à tel point que la chimie de la naphtaline sera certainement l’œuvre de l’industrie des matières colorantes. Nous n’entrerons pas dans le détail de ces recherches, évidemment fort intéressantes pour le spécialiste, mais que nous ne pourrions résumer ici que sous forme d'inventaire aussi aride que peu instructif. Nous nous bornerons à faire remarquer que ce champ d'études est encore bien vaste à explorer. Si l'on veut bien se rappeler que la naphtaline C'°H$ est susceptible de donner déjà dix isomères de la formule générale C'°H6X?, on se fera une idée de la besogne considérable qui reste à faire lorsqu'on s’est donné la tâche, — et tel semble aujourd’hui le cas des grandes fabriques de matières colo- rantes, — de préparer les divers substitués qui dé- rivent de la naphtaline par remplacement de plu- sieurs atomes d'hydrogène, par des groupes AzH?, OH, SO#H, CO°H, etc. Dans un tout autre ordre d'idées, il importe de signaler un travail de M. C. Lauth sur l'oxydation des azoïques. Il s’agit là d’une réaction nouvelle permettant dans bien des cas de déterminer la constitution de ces colorants. La méthode la plus employée jusqu'à présent consistait à soumettre les azoïques à l’action des réducteurs (étain et acide chlorhydrique, poudre de zinc en présence d’un acide ou d’un alcali, etc.). Dans ces conditions, les corps azoïques se décolorent, la double liaison entre les deux atomes Az est rompue, en même temps qu'il se forme des combinaisons amidées. Exemple : l’azobenzène para-amidé se dédouble en aniline et en paraphénylène-diamine : C5 H$.Az=— Az. C6H®.AzH?+L4H = C6H5. AzH? H? A7. C6H4. Az H2. Cette réaction, certainement très intéressante, ne permet cependant pas de retrouver le sel dia- zoïque qui a servi à la préparation de la matière azoïque soumise à l'expérience de réduction. Le procédé indiqué par M. Lauth fournit préci- sément cette indication importante. Il vient donc 124 PH.-A. ŒUVE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE combler une grosse lacune. Ce procédé consiste à traiter les azoïques par un oxydant faible (bioxyde de plomb et acide sulfurique). Dans ces condi- tions, la molécule est bien dédoublée; mais la double liaison entre les deux atomes d'azote se trouve maintenue, de telle sorte que l’on ob- tient en définitive, comme produits de décom- position : 1° le sel diazoïque qui a servi à la pré- paration du dérivé azoïque oxydé, et 2° un dérivé à fonction quinonique du phénol ou de l’amine que l’on avait fait réagir sur le susdit sel diazoïque. Exemple : le benzène-azonaphtalène oxhydrylé se dédouble dans ces conditions en sulfate dia- zoïque d’aniline et en naphtoquinone : C5 H®.Az?.C10H5.0H + 3H2SO0$ + 2PbO? — C6 H5.Az — Az.SO# + CI0H6 O2 + 2PbSO4 + 3H20 Sulfate diazoïque d’aniline Naphtoquinone l L 1 Il Dans le groupe des dérivés du triphénylméthane, il y a à mentionner celte année un procédé nou- veau pour la préparation de la fuchsine. Les opi- nions sont encore parlagées sur sa valeur indus- trielle et sur son avenir. Il convient néanmoins de donner quelques détails à son sujet ; on sait, en effet, que l’ancien procédé de préparation de la fuchsine, —le seul qui soit encore généralement employé, — ne donne qu'un rendement de 30 à 33 ‘/,, de ce qu'indique la théorie, et que d'autre part la méthode de M. O. Fischer (condensation des dérivés paranitrés et para-amidés de la ben- zaldéhyde) n’est pas entrée dans la pratique. La nouvelle méthode — imaginée dans les labo- ratoires de la fabrique Meister Lucius et Brüning à Hôchst — consiste à faire réagir l’aldéhyde for- mique sur l’aniline. Par simple déshydratation, il se forme d’abord un corps auquel on a donné le nom d’anhydroformaldéhydaniline : CH? 0 + CH. Az H?=— C6 H5.Az— CH° + HO Anhydroformaldéhydaniline Si l'on traite ensuite à chaud le produit de cette réaction par du chlorhydrate d’aniline, il ÿ a addi- tion d’une seconde molécule d'aniline en mème temps qu'une transposition moléculaire conduisant à la formation de diphénylméthane diamidé : CH. Az — CH? + C6 HS. Az H2.H CI — É, VAT EE nr NC5 Hi. Az H? Chlorhydrate de diamidodiphénylméthane. Pour passer maintenant à un dérivé du triphé- nylméthane, on traite enfin le diphénylméthane diamidé par une nouvelle molécule d’aniline, en présence d'un oxydant; il se forme ainsi du tri- phényl-carbinol-triamidé, qui — on le sait — se convertit en pararosaniline, par simple addition d'un acide : CH[CSH4. Az H2?[? 2 C5 H5.AzH? + 20 = — C(OH) [CSHe. Az H2}9 + H20 Triphénylcarbinol triamidé Le produit préparé par cette méthode est livré à l’industrie sous le nom de nouvelle fuchsine. Ce n'est vraisemblablement pas le chlorhydrate pur de pararosaniline, mais plutôt le sel de la base obtenue en appliquant aux toluidines les réactions que nous venons de relater. On voit d'emblée que dans la dernière de ces réactions on peut remplacer l’aniline par d’autres dérivés de cette base. De mème, on peut opérer non pas seulement sur le diphénylméthane dia- midé, mais aussi sur ses substitués. De là résulte que la méthode de Hôchst permet de préparer de très nombreux dérivés nouveaux des rosanilines. C’est ce que l’on a fait de divers côtés, et plusieurs brevets ont déjà été pris dans ce sens. Les développements qui précèdent sont de na- ture à faire comprendre toute l'importance que prend dès lors la fabrication industrielle de l’aldé- hyde formique. Il convient donc de mentionner à ce propos un dispositif fort ingénieux breveté par M. Trillat, à Paris, qui permet de préparer facile- ment cet intéressant produit. Parmi les travaux les plus importants exécu- tés ces derniers temps sur les colorants du groupe des rhodamines, il faut mentionner celui de M. P. Monnet, relatif aux anisolines. Ces composés sont obtenus en condensant les éthers de l’amido- phénol diéthylé, — par exemple, l’éther éthylique C2H5. 0. C6H*, Az (C2H5®, — avec l’anhydride phta- lique. Ces corps se rapprochent de la rhodamine par leur constitution : & DA: CE Az(C2H+)2 ; >0 o 7” NCGHS.Az(C2He}2 Rhodamine Az(C2Hv)? Az(C2H5)? Anisoline éthylique Comme les rhodamines, les anisolines donnent de superbes tons d’un rouge cramoisi. Mais elles en diffèrent par une propriété importante, celle de se fixer sur le colon sans mordant. C'est la pre- mière fois, croyons-nous, qu’on obtient un ‘sem- blable résultat avec un colorant du groupe des rhodamines, C'est à ce titre qu'il nous a paru inté- ressant de le signaler. A mentionner enfin un brevel de la maison F. Baeyer et C° pour préparer des dérivés intermé- diaires entre la fluorescéine et la rhodamine. Le procédé consiste à condenser l'acide dioxybenzoyl- benzoïque COOH. CSHi. CO. CSH (OH}? avec les amidophénols. Si l’on tient compte de ce fait que l'acide dioxybenzoyl-benzoïque est obtenu par PH.-A. GUYE. —- REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE 125 fusion de la fluorescéine avec de la soude, et que la fluorescéine elle-même résulte de la condensa- tion de deux produits relativement chers, la résor- cine et l’anhydride phtalique, on peut se deman- der avec raison quelle peut être la vitalité de pa- reils procédés. [1] Nous analysions, l’année dernière, les travaux sur lesquels on fondait quelques espérances en vue de la fabrication de l’indigo de synthèse. Jusqu'à présent ces méthodes ne semblent pas encore être entrées dans la pratique. Mais elles sont évidemment l’objet de recherches dans les laboratoires des grandes usines, à en juger, du moins, par les brevets pris de divers côtés sur les questions qui touchent de près à la solu- tion de ce problème. Tel est, par exemple, le cas de la fabrication de l'acide anthranilique, qui est appelé à jouer un certain rôle, si les procédés de M. Heumann doivent marcher un jour sur un pied industriel. Il faut done signaler dans cet ordre d'idées le procédé qui consiste à appliquer à la phtalimide, — avec de légères modifications, il est vrai, — la méthode par laquelle M. Hofmann remplace dans les amides de la série grasse le groupe CO.AzH? par le groupe AzH?. La phtalimide est chauffée en milieu alcalin avec un hypochlorile alcalin. Dans ces conditions il se forme de l’anthranilale de sodium, facile à isoler : CO TS ENS se Pets 5 Hi AZ J NE L = C Nr AzH + 3NaOH Æ NaOCI Phtalimide AzH? CHA COONa Authranilate de Na — COS Na + NaCI + H2C Les recherches faites par les procédés de M. Heumann n’ont cependant pas fait abandonner toute idée d'arriver à l’indigo de synthèse par les ingénieuses méthodes que lon doit à M. Baeyer. En effet, les fabriques de Hôüchst ont fait breveter un procédé de préparation de l’éther éthylique de l'acide cinnamique. Comme on sait que cet éther joue un rôle important dans une des méthodes proposées par M. Baeyer, puisqu'il sert à préparer l'acide phénylpropiolique orthonitré, il y a donc bien là l'indice qu'on n’a pas encore perdu tout espoir de réaliser en grand la synthèse de l'in- digo par les dérivés orthonitrés. Actuellement, le cinnamate d’éthyle est obtenu en éthérifiant l'acide cinnamique par les procédés habituels. L’acide cinnamique est lui-même un produit de condensation de l’aldéhyde benzoïque et de l'acide acétique (ou, ce qui vaut mieux, de son anhydride), qui se forme lorsque ces deux corps sont chauffés en présence d’un tant, tel que l’acétate de sodium : CiH°.CH0 + CH3.COOH = H°0 Aldéhyde benzoïque + C6 H5.CH = CH.COOH. Acide cinnamique déshydra- L'acide cinnamique formé danscette réaction est isolé et purifié avant d'être soumis à l'éthérifica- lion, de telle sorte que la production du cinnamate d'éthyle comporte trois opérations : une conden- sation, une purification de l'acide cinnamique, et une éthérification. La nouvelle méthode étudiée à Hôchst permet de supprimer la seconde de ces opérations. Elle consiste à faire réagir l’aldéhyde benzoïque sur l’acétate d’éthyle tenant du sodium en suspension : CSH5.CHO + CH3.COOC2H5 — H20 + Aldéhyde benzoïque Acétate d'éthyle + CSHr.CH = CH.COOC?H5 Cinnamate d'éthyle De cette manière, la préparation du cinnamate d’éthyle se réduit à une condensation et à une éthé- rification préalable de l'acide acétique. IV Il y aurait aussi à signaler un très grand nombre de brevets pris pour des matières colorantes appartenant au groupe des azines et des indulines. Ces procédés ne sont pas empreints d’une grande originalité, et leur exposition nous obligerait à faire usage de formules assez complexes, parfois un peu hypothétiques. Nous préférons donc revenir sur ces questions lorsqu'un travail marquant se sera produit dans cette branche, évidemment fort intéressante, de l'industrie des matières colo- rantes. Nous serons également très bref au sujet des nombreux dérivés de l’alizarine qui sont actuelle- ment à l'étude. Les produits qui paraissent avoir le plus d'intérêt en ce moment sont les composés doubles formés par les acides sulfoniques de l’ali- soude. La structure chi- n'est peut être pas encore bien établie. Mais, au point de vue industriel, ils paraissent avoir une grande importance et se distinguent surtout par la solidité remarquable des tons qu'ils donnent en teinture ; jusqu'à présent, les deux dérivés les plus employés sont le vert d'a- lizarine s et le bleu indigo d'ahizarines. A mentionner aussi, comme se rattachant à l'ali- zarine, les études fort intéressantes publiées par M. P. Julliard et M. Scheurer-Kestner sur les huiles zarine et le bisulfite de mique de ces composés travaux de donnent pour ture utilisées dans les teinture Ces une solution rationnelle et définitive à la question si longtemps débattue du rôle de l'acide ricino- rouge avec l’alizarine. éludes léique dans ces opérations. 126 Il nous reste enfin à dire quelques mots de plu- sieurs produits organiques fabriqués pour la plupart dans les grandes usines de matières colo- rantes. Nous voulons parler surtout des composés, étudiés spécialement en vue des applications médi- cales, qui deviennent de plus en plus nombreux. Le jour n’est peut être pas éloigné où ces usines adjoindront des laboratoires de physiologie à leurs somptueux laboratoires de chimie. Dans cet ordre d'idées, les principaux travaux portent sur les corps appartenant au groupe des cétones, des sulfones, des dérivés des bases aro- matiques (aniline et phénylhydrazine) et des pro- duits iodés. Pour fixer les idées sur ce genre de recherches, et principalement sur leur caractère chimique, le seul qui doive être pris en considéra- tion dans cette Revue, nous donnerons quelques détails concernant deux groupes de corps assez différents. La méthylphénacétine, de F. Bayer et C°, s'ob- tient en faisant réagir l'iodure de méthyle sur le dérivé sodé de la phénacétine : 20? H° 790? H°5 ceHi Ne HICHS—Nal+C‘Hi CH3 NA Na NCO CHS Ncocrs Phénacétine sodique Méthylphénacétine Cette réaction est en apparence fort simple. En pratique, elle présente, paraît-il, de réelles diffi- cultés. En outre, il ne faut pas oublier qu'elle est pré- cédée de la préparation du dérivé sodique, qui com- porte la série d'opérations suivantes : 1° Préparation de l’éther éthylique du phénol CSH5.0.CH° en chauffant le sulfovinate d’éthyle avec une solution alcaline concentrée de phénol; 2° Préparation du dérivé nitré de cet éther par les procédés ordinaires de nitration; on obtient ainsi plusieurs isomères dont on isole celui appar- tenant à la série para : Far H? 1.4); NO.C2H5 Ge 3° Transformation de ce corps nitré en corps amidé par réduction au moyen de l'étain et de l'acide chlorhydrique : / Az H? CS H14 s No.cHs 4° Préparation du dérivé acétylé, qui se fait en soumettant le corps amidé à l’action de l'acide acétique ou du chlorure d’acétyle : 2 _H3 172 00CE À C6H No.cHs PH.-A. GUYE. — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE APPLIQUÉE c’est à ce produit qu'on a donné le nom de phéna- céline. 5° Transformation de la phénacétine en dérivé sodé, résultat que l’on obtient en faisant réagir le sodium métallique sur la dissolution xylénique de la phénacétine : / AzNa.CO CHS CSH:4 NO.C2H5 C'est seulement après avoir effectué cet en- semble de réactions que l’on peut faire réagir l’iodure de méthyle pour obtenir la phénacétine méthylée dont nous avons parlé plus haut. Ce produit est employé comme antipyrétique, surtout à l'étranger. Les travaux sur les corps iodés ont conduit à une réaction nouvelle et intéressante. On sait que lorsqu'on fait réagir l’iode sur les solutions alca- lines des phénols, on obtient des dérivés iodés substitués dans lesquels les atomes d’iode rem- placent des atomes d'hydrogène du noyau benzé- I nique (par exemple CHŸ.0H donnera c:H4/ ): NoH Une étude plus approfondie de la réaction, et tout particulièrement de certaines conditions de température, a montré qu'on pouvait obtenir des produits de substitution auxquels on attribue la formule CSH$.OI qui, par parenthèse, ne semble pas encore bien démontrée. Quoi qu’il en soit de ce point de théorie, le fait est que ces composés abandonnent leur iode avec une extrême facilité, qu'ils sont inodores, et qu'on espère ainsi pouvoir les employer en thérapeutique avec le même succès que l’iodoforme. Enfin, nous mentionnerons une étude de M. Tril- lat qui a reconnu à la formaldéhyde CH°0 des propriétés antiseptiques tout à fait remarquables. Dans plusieurs cas, ses solutions étendues se se- raient montrées aussi actives, et même plus ac- tivesque les solutions de sublimé à concentration égale. En opérant, par exemple, sur le jus de viande crue, M. Trillat a constaté que le pouvoir antiseptique de l’aldéhyde formique était environ deux fois plus fort que celui du bichlorure de mer- cure. De plus, les solutions étendues d’aldéhyde formique ne seraient pas toxiques, contrairement à l'opinion généralement admise jusqu’à présent. Ce serait là un avantage marqué sur le ‘sublimé, particulièrement dans les applications relatives à la conservation des produits alimentaires. Philippe-A. Guye, Professeur de Chimie à l'Université de Genève, BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 127 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Emtage. — An Introduction to the mathematica- Theory of Electricity and Magnetism. (In/roduc- tion à la théorie mathématique de l'électricité et du magnétisme.) 1 vol. in-8. de 223 pages; Clarendon Press Warehouse, Oxford, 1891. Il est incontestable que les notions d’Electricité ac- quises dans les Traités élémentaires de physique sont insuffisantes pour aborder l’étude des Traités spéciaux d’Electricité, comme ceux de Maxwell et de MM, Mas- cart ét Joubert, et pour tirer de cette étude un profit en rapport avec l’effort dépensé, Un livre servant d'in- troduction à ces derniers traités a donc sa place mar- quée dans l'Enseignement. En France nous possédons depuis plusieurs années quelques ouvrages remplissant ce but; entre autres le Traité élémentaire d'électricité de M. Joubert, dont le succès, affirmé par le tirage récent d'une seconde édi- tion, est une preuve de son utilité. L'ouvrage de M. Emtage est écrit dans le même but. Toutefois il se distingue du précédent par l’absence presque complète des descriptions d'appareils et par la concision des parties qui n’exigent pas l'introduction des mathéma- tiques. Il s'adresse donc principalement à ceux qui veulent aborder l'étude des belles théories de Maxwell, tout en restant élémentaire puisqu'il n’exige pour être compris que la connaissance des premières notions du calcul différentiel et intégral. Dans la première partie, consacrée à l'étude de l'Electrostatique, l’auteur fait un fréquent usage des propriétés du flux de force et du flux d’induction; nous ne pouvons que l’en féliciter puisqu'il est reconnu par de nombreux essais que l'introduction de ces quantités permet de simplifier beaucoup de démonstrations. Signalons, dans cette partie, lechapitre VI où se trouvent nettement exposées la théorie des images électriques et celle de l’inversion. La seconde partie ne comprend que trois chapitres. Le premier s'occupe des aimants, du potentiel dù à un élément d’aimant et des propriétés des solénoïdes et feuillets magnétiques ; le second est consacré à l'exposé des principes de l'induction magnétique; le troisième traite du magnétisme terrestre, Cette partie ne présente rien de saillant; bornons-nous à dire qu'il serait diffi- cile d'exposer aussi clairement en moins de pages ce qu’il y a d’essentiel dans le magnétisme. Dans la troisième et dernière partie, qui occupe les trois quarts de l'ouvrage et où sont exposées, l’Elec- trocinétique l'Electrodynamique et l’Induction, l’auteur s'écarte des sentiers battus. Dès le premier chapitre il donne la définition de l'unité électromagnétique d’élec- tricité. Il se trouve ainsi amené à indiquer en quelques pages les lois électrolyliques de Faraday, l’expérience d'Oerstedt et la loi d'Ampère, la démonstration de l’équivalence d’un feuillet magnétique et d’un circuit fermé, les expériences de Weber, le principe des galva- nomètres, etc. Aussi doultons-nous que, malgré la netteté de l’exposition, un débutant puisse suivre aisé- ment ce chapitre, Notons également l'absence d’une théorie de la pile; il nous semble cependant que la théorie fondée sur l'existence des différences de poten- tiel au contact de deux corps est suffisamment bien établie pour qu'on puisse l’exposer dans un ouvrage élémentaire. — Dans le chapitre IV, consacré à l’étude de l’électrolyse nous trouvons un exposé très net de la polarisation des électrodes; mais nous y trouvons ET INDEX aussi une erreur que nous ne complions pas rencontrer dans un ouvrage récent : le calcul de la force électro- motrice d’une pile au moyen des quantités de chaleur mises en jeu dans les combinaisons et décompositions chimiques qui ont lieu dans la pile. — Signalons éga- lement le chapitre VII où est exposée, d’après la mé- thode de Helmholtz et Thomson, la théorie de l’Induc- tion des courants et des aimants et le chapitre IX où sontindiqués très nettement les principes des méthodes ayant servi à la détermination de l'Ohm. Malgré quelques réserves, l'ouvrage de M, Emtage nous paraît avoir atteint le but dans lequel il a été écrit. Nous croyons qu'il rendra de grands services aux étu- diants d’Outre-Manche et nous sommes persuadés que la clarté de l’exposition, indispensable dans ce genre d'ouvrages, lui assurera un légitime succès. x J. BLONDIN, Bulletin du Comité International permanent pour l'exécution de la Carte photographique du Ciel. Gauthier-Villars et fils, éditeurs, 55, quai des Grands- Augqustins, Paris, 1891. Le Comité international permanent pour l'exécution de la Carte photographique du Ciel a tenu sa troisième et dernière réunion préparatoire à l'Observatoire de Paris, du 31 mars au 3 avril; les quelques questions non encore résolues ont été discutées, les décisions définitives ont été prises et l’on s’est séparé pour se mettre à l’œuvre, pour commencer dans les divers ob- servaloires cet énorme travail du lever de la carte du Ciel. Le bulletin de cette réunion, qui continuera de paraître régulièrement chaque année, vient d’être pu- blié; il contient le programme des questions à étudier, les procès verbaux des quatre séances, l’énumération des résolutions prises et un certain nombre de notes, dont nous donnons ci-dessous les titres : Rapport fait au nom de la Commission chargée d'examiner les résultats photographiques obtenus dans les différents observatoires, par M. Paul Henry. Rapport fait au nom de la Commission chargée du règlement des questions se rapportant au mode de reproduction des clichés de la carte, par M. Wolf, La carte photographique internationale, par M. le Prof. Pritchard, Sur la relation qui, pour un objectif donné et pour une grandeur d'étoiles donnée, existe entre le diamètre de l’image et la durée de l'exposition, par M, Ch. Tré- pied. Recherches photométriques surles clichés stellaires, par M. le Dr G. Scheiner, Notes de M. H.-C. Russell, directeur de l’Observa- toire de Sydney. Lettres de M. E.-C. Pickering sur l’état actuel des travaux de photométrie stellaire à l'Observatoire d'Har- ward College. Remarques sur le travail préliminaire, fait à l'Ob servatoire royal de Greenwich, en vue de la construc- tion de la carte astrophotographique, par M. W.-H.-M, Christie, Remarques relatives à la préparation des plaques sensibles, par M. W. de W. Abney. Examen de deux réseaux construits par M. Gautier pour la carte photographique du Ciel, par MM, Henry et Trépied, Liste des 18 Observatoires participant à la carte photographique du Ciel. var BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX! 2° Sciences physiques. E. Drincourt. — Traité de Physique à l'usage des élèves de la classe de mathématiques élé- mentaires. Un vol. in-8° de 780 pages (8 fr.). — Armand Colin et Cie, 15, rue de Mézivres, Paris, 1891, Le livre de M. Drincourt est l’exposé des matières comprises dans le programme de mathématiques élé- mentaires, mis au courant des progrès de la science, Il manquait un ouvrage de ce genre conçu et réalisé sur un plan bien uniforme, L'auteur emploie constam- ment les unités C. G.S., et en fait bien comprendre l'usage par de nombreux exemples ; la notion d'énergie introduite dès le début est nettement précisée dans les différentes parties de l’ouvrage. C’est surtout au point de vue de l’exposition des phénomènes électri- ques qu'il y avait lieu de perfectionner les méthodes adoptées dans l’enseignement, M. Drincourt donne un exposé très précis des principales lois en évitant l'abus de l'hypothèse des fluides, et en définissant d’une facon rigoureuse les grandeurs électriques. Je ferai une seule critique à cet excellent ouvrage et elle n’est relative qu'à la forme ; les questions sont souvent traitées avec plus de développement qu'il n’est nécessaire pour les élèves d’élémentaires; il serait peut-être bon de séparer. par un mode d'impression différent, les passages indis- pensables des détails que l’on peut passer à une pre- mière lecture, G. CHarPY. Pionchon (J.) : Introduction à l'étude des sys- tèmes de mesure usités en physique. — Un vol. in-8° 252 p. (3 fr. 50), Gauthier- Villars et fils, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1891, On se méprendrait singulièrement sur le but qu'a poursuivi l’auteur, si l’on prenait trop à la lettre le titre de cet ouvrage; il s’est attaqué à cette question délicate des grandeurs et des unités, qui touche, d’une part, à la philosophie de la science et embrasse le do- maine entier de la physique, d'autre part, aussitôt que l’on spécifie, rentre dans la partie la plus arbitraire et la plus administrative de nos connaissances. Ces deux faces de la question sont, du reste, inséparables dans un enseignement supérieur; la seule notion des gran- deurs et des dimensions resterait extrêmement vague si les exemples pratiques ne venaient pas la fixer dans l'esprit, tandis que le but et l'essence même des unités seraient fort mal comprissi l’on n'avait exactement saisi le point de vue général et supérieur des grandeurs, La plupart des ouvrages qui abordent ces questions les considèrent de l’un ou de l’autre de ces points de vue. L'auteur les a réunis dans son « Introduction », et les a traités avec tous les détails que comporte ce sujet; il ne laisse subsister aucune obscurité dans l'esprit du lecteur. Les premiers chapitres sont consacrés à l’analyse des grandeurs géométriques et mécaniques, c’est-à-dire à la recherche de leurs dimensions, et à leur comparai- son; les grandeurs dynamiques sont toutes ramenées aux grandeurs fondamentales : longueur, force, temps, qui sont conservées dans la suite du premier livre. Re- marquons en passant que, dans ce système, la densité prend la dimension FL—i T?, bien compliquée pour une notion aussi immédiate. Le principe si fécond de l’ho- mogénéité et de la similitude en mécanique est traité dans un chapitre spécial; l'exemple célèbre des poutres semblables, emprunté à Galilée, la formule du pendule et celle de la corde vibrante, déduites par M. Bertrand des mêmes principes, en montrent toute l'utilité, Les systèmes pratiques. métrique et C. G. S., leur comparaison entre eux et avec d’autres systèmes font l’objet du deuxième livre, Relevons ici deux erreurs, sur des principes qui étaient vrais il y à quelques années seulement, mais ne le sont plus aujourd'hui, L'un con- siste à prendre pour unités métriques les étalons des Archives, l’autre attribue au kilogramme le nom d'unité de force, tandis que, dans le système métrique inter- national, qui part des nouveaux étalons, copies exactes des premiers, le kilogramme est désigné comme unité de masse. Les problèmes plus complexes de la physique, et en particulier de l'électricité et du magnétisme, sont abor- dés dans le troisième livre, La méthode exposée au premier livre, et appuyée sur une notation rationnelle et partout suivie, le rend clair et instructif; les nom- breux exemples dont il est parsemé en font un chapitre fort attrayant, Ch.-Ed. GUILLAUME, Soret (A). Agrégé de l'Université, Professe ww au Lycé du Havre. Optique photographique. Notions néces- saires aux photographes amateurs. Etude de l’ob- jectif, applications. — in-8° de 132 pages avec nom- breuses figures (Prix 3 francs), Gauthie»- Villars et fils, 50 quai des Grands-Augustins. Paris 1891. Ce livre s'adresse tout aussi bien aux photographes qu'aux amateurs de photographie: il contient ce qu'il est utile aux uns comme aux autres de savoir en fait d'optique photographique. L'auteur débute par un exposé aussi simple que clair et précis des notions d'optique relatives à la na- ture de la lumière et à la marche des rayons lumi- neux dans les diverses espèces de lentilles. Il étudie la formation des images,expose les calculs simples relatifs à leur position et à leur grossissement eten fait un certain nombre d'applications usuelles. Un chapitre spécial est consacré à l'étude des aberrations de sphéricité et de réfrangibilité (aberrations de sphéri- cipté courbure du champ, distorsion, astigmatisme, etc.) à l'examen de leurs causes et aux moyens em- ployés pour les corriger, Le lecteur ainsi préparé peut lire avec fruit le chapitre très intéressant qui renferme la description et le classement des différents types d'objectifs crées jusqu'ici par les principaux construc- teurs francais et étrangers ; l’auteur discute les qua- lités et les défauts de ces divers instruments,montre le parti qu’on peut tirer de chacun d’eux ou de leurs combinaisons, et par suite, le choix qu'il convient d’en faire dans les divers travaux photographiques; ces con- sidérations sont naturellement suivies d'instructions pratiques relatives à l’essai des objectifs. Les derniers chapitres, enfin, sont consacrés à l’orthochromatisme des plaques à l'usage des verres compensateurs et à la photographie sans objectif. L'ouvrage, quoique écrit sous une forme élémentaire, n'en est pas moins très instructif et très substantiel; la clarté de l'exposition, le choix des documents (notamment ceux groupés dans le chapitre relatif à l'examen des divers systèmes d'objectifs), la compé- tence de l’auteur auquel on doit d’intéressantes appli- cations de la photographie, lui assurent un succès à tous égards bien mérité, E. AMAGAT, Juppont (P.). — Aide-Mémoire de l’Ingénieur- Electricien. — Recueil de tables, formules et renseigne ments pratiques à l'usage des électriciens, par G. Duck, B. MarinowiTen, E. MEYLan et G. Szarvapy. Troisième édition augmentée par M. P. Juppont, Ingénieur des Arts et Manufactures, Ingénieur de la Société Toulou- saine. Un fort volume in-18 de 476 pages. (6 fr.) — Ber- nard Tignol, éditeur, 53 bis, quai des Grands-Augustins, Paris, 1891. La troisième édition de l’Aide-Mémoire bien connu publié sur l'électricité par M. Jupporft, diffère assez notablement des précédentes; certains sujets fort im- portants que l’on pouvait s'étonner de ne pas voir traités dans les deux premières éditions y sont exposés d’une facon complète; de nombreuses additions ont été faites, pour la plupart très heureuses ; sous sa nouvelle forme, c'est vraiment un livre utile à consulter pour les praticiens, et qui rendra service à tous ceux qui s'occupent d'électricité, ô L, O. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 129 3° Sciences naturelles. Boîtel (A). — Agriculture générale. 1 volume in-8° de 607 pages (prix : 6 fr.). Librairie Firmin-Didot et Cie, 56, rue Jacob, Paris, 1891, La bibliothèque de l'Enseignement agricole, publiée sous la direction de M. Müntz, le savant professeur à l’Institut agronomique, vient de faire paraître une œuvre posthume d’un de nos agronomes les plus re- grettés, l'Agriculture générale, d'Amédée Boitel. à Comme le fait remarquer l’auteur, « l'étude de J’agri- culture, basée sur les besoins des plantes, se divise en trois parties, savoir : 4° la climatologie agricole, qui est l’élude des besoins des plantes au point de vue du climat; 2° l’agrologie ou l’éfude des exigences des plantes au point de vue du sol; 3° la science des en- grais ou l’étude des substances à incorporer au sol en vue de la bonne alimentation des cultures ». Se con- formant à ce programme, M. Boitel commence donc sion ouvrage par l'examen des conditions climatolo- gques et météorologiques des cultures ; il étudie l'effet que produisent sur elles les diverses températures, le degré d’éclairement, les pluies, les grèles, les vents, les rosées. Viennent ensuite les descriptions des cli- mats généraux de la France, des climats de la Corse, de l'Algérie et de la Tunisie, des climats insalubres que l’auteur a si bien étudiés, Les limites glimaté- riques et la répartition des cultures, et un chapitre de topographie agricole terminent cette première partie. L'agrologie occupe les deux parties suivantes. Après avoir fait remarquer l'importance de la composition minéralogique des terrains au point de vue des cul- tures, M. Boitel décrit les propriétés physiques et chi- miques des minéraux et roches constitutives du sol: quartz, feldspath, mica, granit, gneiss, porphyre, ba- salte, calcite, argiles, marnes, phosphates, gypse, tourbe, sous toutes leurs formes. La troisième partie, de beaucoup la plus importante, est consacrée à l'examen des propriétés physiques du sol favorables ou défavorables aux cultures, et surtout à la classification des terres que l’auteur divise en terres plutoniennes, d'origine ignée, où domine le granit, le porphyre, la labradorite, le trachyte,ou le ba- salte, et en terres sédimentaires, d'origine aqueuse, résultant de la décomposition et de la désagrégation des roches plutoniennes el comprenant, par ordre d'ancienneté les terres schisteuses, permiennes, tria- siques, Jurassiques, crétacées. Les régions tertiaires (bassin parisien, sables des Landes, bassin du Rhône, plateau central, Bretagne), les terres quaternaires, les alluvions anciennes et modernes font l’objet de plu- sieurs chapitres. L'auteur ne manque pas d'indiquer, dans l'étude de ces divers terrains, les cultures qu'on y peut faire avantageusement. Enfin M. Boitel classe dans une troisième catégorie les terres humifères, d’origine organique, L'agrologie de l'Algérie et de la Tunisie est également traitée d’une manière foute spéciale. Dans la quatrième partie, alimentation des plantes cultivées, sont décrits Les divers moyens de restituer au sol les éléments enlevés par les récoltes: l'emploi des fumiers, des engrais chimiques, des vidanges, des mar- nes, du plâtre et des engrais marins est discuté succes- Sigement. Enfin dans la einquièmé partie, l’auteur examine sommairement les défrichements, les facons aratoires, l’ensemencement, les soins d'entretien, la conservation des produits. MAÉ L'agriculture générale est un livre qui intéressera vivement toutes les personnes qui s’occupent de cultu- res; il pourra rendre de grands services aux élèves des écoles d'agriculture et aux cultivateurs instruits qui sortent des errements de la routine et qui sont heu- reusement de plus en plus nombreux, L'ouvrage de M. Boitel leur montrera une fois de plus que la prati- que doit toujours s'inspirer de la théorie, et que l'a- griculture doit marcher avec la science et tenir compte de ses conseils, A. HéBerr Beperrière.— Culture du Chanvre. Emploi de semences sélectionnées et d’engrais complémen- taires, Une brochure de 29 pages, avec magnifiques plan- ches photographiques.— Lachèse et Dolbeau, A ngers, 1892. M. Richard (Jules). — Recherches sur le système glandulaire et ,sur le système nerveux des Copé- podes libres d’eau douce, suivies d’une révision des espèces de ce groupe qui vivent en France. — Thése de doctorat de la Faculté des sciences de Paris. An- nales des sciences naturelles (7) T* XII, p. 113-270, pl. 5-8, 1891, L'étude des organes glandulaires excréteurs des ani- maux articulés est restée pendant très longtemps fort incomplète, et il ne faut pas remonter bien loin pour ren- contrer les premiers travaux où cette étude a été envi- sagée d'une facon méthodique et comparative, Mais les résultats obtenus dans ce coin de la zoologie, s'ils sont d'une date toute récente, sont aujourd’hui de la plus grande importance en ce sens qu'ils permettent de relier entre eux les articulés des différents groupes et de trouver des homologies inattendues là où la physio- logie ne montrait que des différences, Pour que cette étude soit fructueuse il faut qu’elle soit poussée très loin, qu'elle embrasse la structure anatomique et les connexions complétes de l'organe, enfin qu'elle s'applique à des types aussi nombreux que variés, C’est ce qu'a fait excellemment M, Richard dans la partie anatomique la plus importante deson travail, celle qui est relative à la glande du test des Copépodes d'eau douce, Chezaucun animal du groupe on n'avait suivi complètement cette glande, son orilice extérieur n'était pas bien connu, d'aucuns lui attribuaient un orifice intérieur dans la cavité du corps, enfin Hartog la considérait comme faisant primitivement partie de la glande antennaire. En fait, d'après une étude qui repose sur de très nombreux genres, cet appareil est partout le même etse compose d’une glande suivie d’un canal chitineux qui débouche au dehors à la base du premier maxillipède ; elle est homologue dès lors de la glande du test des Phyllopodes, des Cladocères, des Argules, des Leptostracés et joue un rôle excréteur important. La disposition du canal varie d’un genre à l’autre mais est toujours la même dans les espèces d'un même genre. Le canal de la glande du test, comme celui de la glande antennale d'après Grobben, est d'autant plus long et compliqué qu’on l’observe dans des genres plus confinés dans les eaux douces. M. Richard décrit en outre les glandes salivaires, qui débouchent par un orifice sur la lèvre supérieure, et les glandes unicellulaires qui existent en de nombreux points du corps chez les Copépodes., Puis il consacre un long et intéressant chapitre à la structure, jusqu'ici peu connue, du systèmenerveux.Cesystème présenteune très grande uniformité dans toute l'étendue du groupe et rentre d’ailleurs dans le schéma bien connu (com- missure post-æsophagienne, ganglions sous-æsophagiens concentrés) du système nerveux des Crustacés, Les connectifs du collier sont chargés de cellules gan- glionnaires. ; _ On ne saurait (rop louer M. Richard du soin qu'il a mis dans ces très délicates recherches et de la précision tout à faitremarquable qu’il a apportée dans la descrip- tion et dans les figures, Tout cela, on le sent, a été vu et bien vu. Mais ce que nous tenons à bien mettre en relief, c’est l'étude fort remarquable, qui termine l’ou- vrage sur les Copépodes d'eau douce de France. L'étude des faunes reparaît dans les thèses, c’est d'un bon augure, car cette branche de la zoologie était vraiment trop négligée depuis vingt-cinq ans. M. Richard mérite les plus vifs éloges et il suffira de lire son travail pour être persuadé que l’étude des formes, comme celle des organes, est susceptible de conduire à des résultats intéressants, quand elle est abordée par des esprits vraiment scientifiques. E.-L. Bocvier. 130 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 4° Sciences médicales. Pozzi et Baudron, Quelques faits pour servir à la discussion sur le traitement des inflamma- tions des annexes par la laparotomie ou l'hysté- rectomie. — Revue de chirurgie. Paris, 1891, tom. XI, p. 622. La laparatomie a sur l'hystérectomie l'immense avantage de commencer par être exploratrice ; on trouve des cas où, le ventre ouvert, il n'existe que quelques adhérences qu'il suffit de libérer, conservant à la femme ses organes, ce qu’on ne peut faire lorsqu'on débute par une hystérectomie. Bien plus, on est exposé à des erreurs qui seraient des plus préjudiciables, si l’on adoptait l’hystérectomie préliminaire et qui n'ont aucune importance lorsqu'on fait la Japarotomie, Au cas d’entérocèle adhésive, publié par Doléris, Pozzi et Baudron ajoutent une deuxième observation où la tumeur pseudosalpingienne était constituée par des anses de gros intestin surchargées de graisse et tombées dans le cul-de-sac de Douglas. Dans plusieurs cas d’ovarite scléro-kystique, la laparotomie a permis de conserver tout ou partie d’un ovaire. Il est donc évident qu’au point de vue du diagnostic et de l'indication exacte de l'intervention opératoire la laparotomie est supérieure à l’hystérectomie. Reste la question d'efficacité contestée dans quelques variétés de lésions. Les observations de M. Pozzi mon- trent, contrairement à l'opinion avancée par les parti- sans de l’hystérectomie, que la laparotomie assure la guérison définitive des salpingo-ovarites parenchyma- teuses, des pyosalpinx et des abcès pelviens. L'hysté- rectomie, toutefois, serait, au dire de MM. Pozzi et Baudron, soutenable dans les suppurations diffuses, chroniques du bassin et peut-être supérieure à l’opé- ration de Battey pour combattre et guérir les désordres nerveux liés à la dysménorrhée et coïncidant avec les manifestations de l’hystérie, de l’épilepsie et de la manie. D: Henri HARTMANN, Mergier.— Technique instrumentale concernant les sciences médicales, avec 4710 figures dans le texte (8 francs). O. Doin, 8, place de l’Odéon, Paris, 1891. Ecrit avec la collaboration des D's Mosny, Audain et de Grandmaison, cet ouvrage, qui rappelle un grand rombre des produits et appareils exposés en 1889 au Champ-de-Mars, nous donne une description succincte, mais néanmoins suffisante, des divers appareils dont on se sert en anatomie, en physiologie, en microgra- phie, en chirurgie, en médecine. L’orthopédie, l'op- tique et l'hygiène, envisagées dans leur arsenal instru- mental, complètent ce livre, qui contient, par suite, un exposé complet de tous les appareils ou instru- ments pouvant intéresser le médecin, le chirurgien, l’accoucheur, l'hygiéniste et le physiologiste. D' Henri HARTMANN. Krogins (Ali). — Note sur le rôle du Bacterium Coli commune dans l'infection urinaire ; Arch. de médec. expérim., 4892, t. IV, p. 66. On sait que l'étude de linfection urineuse à fait depuis quelques années l’objet de travaux importants. M. Bouchard signala dans les urines septiques l’exis- tence d’une bactérie spéciale. M. Clado l'étudia, l’isola, en montra expérimentalement les propriétés septiques et la dénomma bactérie septique de la vessie. Puis vinrent les travaux de MM. Albarran et Hallé qui, con- statant que cette bactérie pouvait produire du pus, ne virent plus que son rôle pyogénique, en changèrent le nom et l’'appelèrent bactérie pyogène. M. Krogins, exa- minant dix-sept urines pathologiques, y trouve douze fois cette bactérie; dans six de ces cas, il y avait cystite avec pyélo-néphrite ascendante, trois fois cystite simple; trois fois les malades, bien que ne présentant qu'une très petite quantité de leucocytes dans l'urine, étaient en proie à des accès urineux. Dans tous les cas, le bacille constaté présentait toutes les réactions du Bacterium Coli commune, tant au point de vue de l’examen des cultures qu'à celui des réactions expérimentales. Il en était du reste de même d'un échantillon de culture de la bactérie pyogène remis à M. Krogins par M. Hallé. De ces constatations M. Krogins se croit en droit de conclure à l'identité du Bacterium Coli commune et de la bactérie pyogène. Chemin faisant, il signale un caractère peu connu des cultures de cette bactérie, la formation de bulles de gaz. Disons toutefois que ce caractère vient d’être con- staté par MM. Charrin et Bouchard et que l'identité de la bactérie pyogène urinaire et du Bacterium Coli commune a été récemment soutenue par MM. Achard et Renaut. Dr Henri HARTMANN. Malvoz, Le Bacillus. Coli communis, comme agent habituel des péritonites d'origine intestinale. Arch, de médecine expérimentale. T. II, $ 5, page 595. 1891. L'auteur, dans une série d’autopsies faites sur des sujets morts de péritonite d’origine intestinale, a tou- jours trouvé le Bacillus Coli communis, même quand il n’y avait pas eu perforation des parois de l'intestin. Déjà Laruelle avait indiqué cette bactérie comme la cause des péritonites par perforation; mais la solution de continuité serait inutile, d’après les recherches de M. Malÿoz. Cet auteur n'hésite pas à atiribuer la péri- tonite à ce micro-organisme, surtout en s'appuyant sur les résultats expérimentaux obtenus par Frankel, Charrin et Roger etc., avec des cultures pures de B. Coli conununis. Les conclusions de M. Malvoz peuvent se résumer ainsi : le bacille est l'agent le plus habituel des péritonites d'origine intestinale ; sa présence dans un exsudat péritonéal doit faire rechercher la cause primitive dans une lésion du tube digestif. L'auteur ne pouvait étudier ce bacille sans aborder la question, actuellement si discutée, de l'identité ou de la non-identité du Bacille d’Eberth, et du B. Col comununis. IL penche vers l’opinion de Rodet et Roux, qui ne voient dans le bacille typhique qu'une variété du Coli communis, dont la virulence est modifiée, exagérée par des conditions de milieu encore ignorées. L, O. Raymond (D' P.). Notes sur le traitement de la syphilis en Allemagne et en Autriche. — Une brochure ‘ïin-8° (3 fr.). Société d'éditions scientifiques, 4 rue Antoine Dubois. Paris, 1891. Dans les pays de langue allemande, les études sur la syphilis, sur la syphilisthérapie, comme disent les mé- decins allemands, sont très développées. Elles portent la marque de recherches originales, individuelles, chaque médecin ayant ses idées personnelles, son traitement particulier. C’est précisément le contraire de ce qui se passe en France, où tout médecin se rat- tache soit à l'Ecole de Lyon avec Diday, soit à l'Ecole de Paris sous l'autorité de M. le P* Fournier. Les notes que M, Raymond a prises pendant un voyage d'étude en Allemagne nous montrent tous les systèmes de traitement préconisés. Quand nous disons tous les systèmes, il faut bien se rappeler que ce ne sont que des variétés, et que la base du traite- ment est toujours lé mercure et l'iode, Les deux points les plus discutés encore ont trait au traitement pré- ventif primitif, c’est-à-dire à l’excision de la première lésion, et au traitement préventif consécutif, emploi du mercure avant l'apparition de l’exanthème et des papules. Sur ces deux points, il y a désaccord complet entre les différents praticiens allemands, Toutefois, on peut dire que la tendance prédominante est en faveur de l’excision rapide : un très grand nombre de médecins ne font du traitement mercuriel qu'un traitement symptomatique, attendant l'apparition des accidents pour agir. Sur ce point, comme sur un certain nombre d’autres, les idées allemandes se rapprochent plus de l'Ecole lyonnaise que de l'Ecole de Paris. L 0: ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 131 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADEMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 1°* février 1892. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Phragmen : Sur une extension du théorème de Sturm. — M. E. Picard : Observations relatives à la communication de M. Phray- men, — M. Em. Marchand : Observations des taches et des facules solaires faites à l’équatorial Brunner (016) de l'observatoire de Lyon pendant le deuxième semestre de 1891. — M. M. Brillouin traite par le cul- cul,en se limitant aux régions tempérées, les questions suivantes : conditions locales de persistance des cou- rants atmosphériques; courants dérivés; origine et translation de certains mouvements cycloniques, — M, J.Janssen annonce que M. Dunod à fait l’ascension du mont Blanc le 21 janvier pour aller vérifier l’état de l’édicule provisoire élevé au sommet ; il ne semble pas que cette construction ait subi le moindre déplacement, ni la moindre déformation. Le niveau de la neige alen- tour n’a pas sensiblement varié. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Gilbaut a étudié la compressibilité des solutions salines par la méthode de M. Cailletet légèrement modifiée. Il a constaté que pour des solutions de faible concentration la différence entre la compressibilité de l’eau et celle de la solution est proportionnelle à la concentration, quelle que soit la nature du sel dissous; il appelle cette différence compressibilité saline. Il énonce diverses lois auxquelles l’ont conduit ses expériences. — M.Gouy, qui a comparé dans une précédente communication les amalgames et le mercure au point de vue des phénomènes électro- capillaires, a étudié ensuite au même point de vueet avec la même méthode le mercure avec des solutions aqueuses diverses. Les solutions de sels (iodures, chlo- rures, bromures, etc.) se comportent à peu près comme les solutions de l’acide correspondant. En por- tant en abscisses les polarisations et les hauteurs en or- données, on obtient des courbes qui diffèrent de celle de l’acide sulfurique par une ascension plus rapide avec maximum moins élevé ; toutes les courbes peu- vent être amenées à coincider dans la partie corres- pondant aux fortes polarisations. — M, H. Le Chatelier rappelle que l’on a proposé de mesurer les tempéra- tures élevées, telles que celles usités en métallurgie,par la détermination de l'intensité d’une longueur d’onde déterminée dans les radiations du corps incandescent, Il a réalisé cette méthode théorique en établissant au moyen de ses couples thermo-électriques la relation entre la température et le pouvoir émissif de divers corps; il s’est occupé particulièrement de l'oxyde ma- gnétique de fer, qui forme la surface des masses de fer chaufées ; il remarque que le rapport du pouvoir émis- sif de l’oxyde magnétique à celui du platine varie peu avec la température. — M. A. Broca applique à la construction des lentilles achromatiques les résultats obtenus par lui relativement aux points aplanétiques et exposés dans la dernière séance, — M. Maquenne n'a pu, pour diverses raisons qu'il explique, obtenir purs les azotures de baryum et de strontium. Mais en tenant compte des causes d'erreur, on voit, par les chiffres d’ammoniaque et de base terreuse obtenus en décomposant l’azoture par l’eau, que les formules Az? Ba et Az? Sr sont très vraisemblables, — La théorie prévoit trois chlorobromures de carbone, MM. Frie- del et Silva en avaient ohtenu un par l’action du brome sur le chloroforme en tube scellé à 170°. M. A, Bes- son à obtenu les trois chlorobromures par la même réaction, mais en élevant la température successivement jusqu'à 2759. — M. R. Varet a comparé pour un certain nombre de cas l’action des métaux sur les sels dissous dans l’eau et dans divers liquides organiques, afin de déterminer le rôle de l’eau dans ces réactions. Ainsi l'aluminium, qui en présence de l’eau décompose le le cyanure de mercure, forme avec ce sel un cyanure double lorsqu'il agit sur lui au sein de l’acool absolu ammoniacal. — M. de Forcrand a préparé la mannite monosodée en ajoutant un équivalent de mannite à un équivalent de sodium dissous dans l'alcool éthylique absolu ; il a déterminé sa chaleur de formation ; comme tous les alcoolates sodiques précédemment étudiés par l’auteur, la mannite monosodée peut se combiner avec un excès d'alcool. La réaction qui donne la mannite monosodée, effectuée avec deux équivalents de sodium, donne une combinaison moléculaire de mannite mo- nosodée et d’éthylate de soude, Cette combinaison rentre dans une catégorie déjà rencontrée par l’auteur avec l’érythrite et la glycérine; elle montre que la fonc- tion alcool des alcools monoatomiques primaires est plus forte que la seconde fonction alcool des alcools polyato- miques. — M. A. Etard a trouvé dans l'extrait par le sullure de carbone du marc de vin blanc un corps gras particulier, résultant de l'union de l'acide palmiti- que à un alcool polyatomique nouveau. M. Etard pro- pose pour cette dernière substance, à laquelle il assigne la formule C?6 H5° (0H) H°-0, le nom d’œnocarpol, En exa- minant sous le miscroscope l’action du sulfure de car- bone sur des coupes minces du péricarpe du raisin, l’auteur a reconnu que ce sont les corpuscules chloro- phylliens qui se dissolvent; le palmitate d’œnocarpol constituerait donc pour une grande part le substratum des grains de chlorophylle. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Ville a reconnu, en administrant de Pacide sulfanilique à des chiens, que celte substance est éliminée à l’état d'acide sulfanilo- carbamique ; cette réaction est analogue à celle constatée par Salkowski pour la taurine. — M. A. Girard a com- paré, en soumettant les plantes traitées à des pluies artificielles d'intensité calculée, la facilité plus ou moins grande avec laquelle les composés cuivriques antiparasitaires abandonnent les pommes de terre sur lesquelles on les a injectés. La résistance à l’entrai- nement par la pluie est très variable suivant la recette employée ; c’est la bouillie cupro-sodique et la bouillie cupro-calcaire sucrée qui résistent le mieux, — M. A. Pizon a étudié le développement de l'organe vibratile chez les Ascidies composées, organe dont le rôle et la nature sont fort obscurs; ses recherches ont porté sur des genres de diverses familles ; leur conclusion, e’est que l’organe vibratile est formé par une invagination de la vésicule endodermique prhnitive; il constitue vraisemblablement un organe ancestral en voie de dis- parition, —M. Kunkel d'Herculais : Le criquet pèlerin et ses changements de coloration (voir Soc. de Biol., séance du 23 janvier). — M. E. Mer a étudié la mar- che du réveil et de l'extinction de l’activité cambiale dans les arbres. Pour les jeunes arbres de moins de 25 ans, de toute espèce, isolés ou en massifs, l’activité cambiale commence dans les pousses les plus jeunes des rameaux et gagne peu à peu les parties plus âgées des branches, puis le tronc ; elle débute dans les racines dix à quinze jours plus tard, apparaissant d'abord dans les plus grosses, puis dans les moyennes, et enfin dans les radicelles, Dans les arbres plus âgés, l’activité cam- biale débute à la fois dans la région basilaire du tronc, à l'extrémité des branches supérieures et dans le ren- flement d'insertion de celles-ci. A la fin de l'été, l'activité cambiale s'éteint aussi progressivement, mais dans un autre ordre; c’est au niveau du renflement basilaire du 132 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tronc qu'elle persiste le plus longtemps. — M. Ch. De cagny à retrouvé dans le nucléole des cellules de len- dosperme du Phaseolus les vacuoles plasmogénes qw'il | avait signalées antérieurement chez les Spirogyra; il conclut de ses observations que c’est du nucléole que prennent naissance la membrane nucléaire et les fils achromatiques. — M. A. de Tillo, après avoir réuni tous les documents publiés sur la question, étudie la répartition à la surface du globe des principaux ter- rains géologiques. — M. L. Duparc a analysé les eaux et les vases du lac d'Annecy et, comparativement, les eaux des affluents de ce lac. La comparaison montre pour les eaux du lac un appauvrissement eu substances dissoutes qui ne peut être rapporté à la dilution par les pluies; l'auteur pense que c’est un résultat de la vie organique. Nomination : M. Considère est élu correspondant pour la section de mécanique. Mémoires présentés : M. C. J. A. Leroy fait ouvrir un pli cacheté contenant une méthode pour construire des objectifs aplanéliques, d'ouverture aussi grande que l’on veut, en employant exclusivement des surfaces sphériques. — M. Genevée fait ouvrir un pli cacheté contenant un « Mémoire sur les lois de la formation et des mouvements des corps et sur leur application à la formation du système solaire ». — M. Sandras : « Sur les altérations de la voix produites par les inha- lations d’eau de laurier-cerise, le cyanure de polas- sium, ete. » — M. Ivison y O'Neale adresse une note relative à la conservation et au platräge des vins. — M. Pellerin adresse une note relative à une modili- cation à apporter aux dispositions usitées pour les | électro-aimants. Séance du 8 février. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, Sophus Lie : Sur une interprétation nouvelle du théorème d’Abel.— M. Pa'n- levé: Sur les intégrales des équations du premier ordre qui n'’admettent qu'un nombre fini de valeurs. —M.H. Deslandres, continuant ses recherches photo- graphiques sur le rayonnement de l’atmosphère solaire dans la partie la plus réfrangible du spectre, a exploré la région comprise entre x 380 et x 350; les appareils ont dù être modifiés pour cette recherche. Huitdes dix raies ultra-violettes de l'hydrogène ont été retrouvées dans les protubérances. Ainsi le Soleil, qui est une | étoile jaune, offre dans certaines parties de son atmos- phère le rayonnement caractéristique des étoiles blan- ches, — M. G. Darboux, en présentant à l’Académie le jeune Inaudi, appelle l'attention sur les facultés | exceptionnelles pour le calcul mental dont il faitpreuve. (Voir le numéro précédent de la Revue, supplément). — M. Derrecagaix présente les résultats de la nou- velle mesure de la base de Perpignan, qui à été exé- cutée dans le courant de l’été dernier par le service géographique de l’année. Cette mesure était nécessaire, à cause du désaccord entre la longueur obtenue direc- tement par Delambre pour cette base, et sa longueur calculée soit par Delanbre à partir de l’ancienne base de Melun, soit par le nouvel enchaïnement à partir de la base de Paris. La mesure moderne a donné une longueur supérieure de 0w29 à celle de Delambre, et | inférieure de 005 seulement à celle calculée en par- tant de la base de Paris. 20 SciENCES PHYSIQUES. — À l’occasion d’une note pré- sentée dans la dernière séance par M. H. Le Châtelier sur la mesure optique des températures élevées, M. H. Becquerel rappelle qu’en 1862 son père Edmond Becquerel a publié sur cette même question un mé- moire très étendu. M. R. Blondlot décrit un nouveau procédé pour transmettre des ondulations électriques le long de fils métalliques, procédé qui présente divers avantages sur celui de M. Hertz: il emploie aussi une disposition particulière de réson- nateur qui est fixe et encadré en rectangle par les conducteurs. les lonsueurs d'onde étant déterminées par les déplacements d'un pont mobile, Cet appareil fonctionne avec une grande intensité. — M. J. Chap- puis a imaginé une nouvelle méthode pour l’étude de la réfraction des gaz liquifiés ; elle repose sur l'emploi de la relation n, sin A,—n, sin A,, qui lie entre eux les angles (A, et A.) etles indices (n,et n,) de deux prismes de sens contraire accolés par une de leurs faces et tels qu'un rayon tombant sur le système, normalement à la face d'entrée, en resort normalement à la face de sortie, Dans l'appareil, l’un des prismes est constitué par le gaz liquéfié, contenu dans une cuve cubique, et dans lequel est immergé un prisme de crown de 45° soudé à l’une des faces de la cuve; l’autre, d’angle variable, est constitué par ce prisme de crown et un diasporamètre de Govi, dont la demi-sphère mobile, construite avec le même crown, tourne autour d'un axe parallèle à l’arête du prisme solide fixe. L'auteur a déterminé avec cette méthode les indices à 0° de l'acide sulfureux et du chlorure de méthyle, qui sont respec- tivement 1,3510 ef 0,3523 pour la raie D. — M. E. Car- vallo à élé amené, par un examen plus complet des expériences de Soret et Sarazin, à modifier légèrement les constantes de la formule de dispersion qu'il avait obtenue relativement à la polarisation rotatoire des quartz à partir des équations de Helmholtz (Voir C.R. 14 déc. 1891). Les valeurs calculées avec cette formule s’écartent très peu des nombres de Soret et Sarazin. M. Carvallo a voulu voir si la loi s’appliquait dans l'infra-rouge, et il a repris à ce point de vue les résul- tats de ses recherches sur les indices calorifiques du spath. La différence : observation moins calcul, faible d’abord, va croissant avec la longueur d'onde. Maïs il est possible qu’elle soit due à l’absorption, dont il n’a pas été tenu compte. — M. Raoult a modifié son appareil cryoscopique de facon à augmenter sa précision et à le porter jusqu'à de degré. Ce résultat a été obtenu au moyen d'un bain réfrigérant facile à régler, et d'un agitateur d’un nouveau système, assurant dans le liquide en expérience une homogénéité parfaite. L'appa- reil ainsi perfectionné est susceptible d’être appliqué à la détermination du point de congélation des disso- lutions très étendues et de donner par suite des ren- seignements sur l'état des corps dans de telles solu- tions. M. Raoult en donne une première application relative au sucre de canne. — M. A. Joly, en chauffant du ruthénium dans un courant de chlore, a reconnu qu’il se forme non pas Ru CP, comme l'avait dit Claus, mais RuCl, par une réaction incomplète, avec du ruthénium inattaqué, Si le courant de chlore est mêlé d'oxyde de carbone, dans les mêmes conditions, la réaclion est à peu près totale. Ce sesquichlorure de ruthénium est soluble dans l'alcool absolu: si l’eau a accès au sein de cette dissolution, il s'y transforme en oxychlorure. —- MM. Rousseau et G. Tite, en chauffant en tube scellé au delà de 200° un mélange d’azotate d'argent et de marbre avec une petite quantité d’eau, ont obtenu des cristaux rouges, contenant de l’argent, de l'acide azolique‘et de la silice, celle-ci provenant du verre du tube. Ce composé doit être considéré comme le sel d'argent d’un acide azoto-silicique. — M. Scheurer-Kestner, qui avait vu le soufre des sul- fates alcalins se dégager, dans la préparation du verre, à l'état libre, à repris l'étude de la décomposition de l'acide sulfureux par le carbone. Si on fait passende l'acide sulfureux gazeux à travers une couche de char- bon calciné et chauffé rouge blanc, on obtient la réac- tion suivante, qui est quantitative pourvu que le courant ne soit pas trop rapide : 2S0? +3 C—2 CO + CO? +2$, — M. F. Parmentier, en faisant réagir avec précaution l'acide sulfhydrique sur le chlorure de plomb dissous dans l’acide chlorhydrique, a obtenu un précipité fran- chement rouge; c’est le composé PbS, PbCI] ; il a obtenu de même le bromosulfure de plomb et reconnu lexis- tence d’un iodo-sulfure. — M, de Forcrand, en faisant réagir le sodium sur l'acide isopropylique, a obtenu l'isopropylate de sodium triisopropylique; on obtient aussi une combinaison triisopropylique avec le glycol ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 133 monosodé. L'isopropylate de sodium est difficile à produire, Pourtant, en opérant à chaud au sein de la benzine, M. de Forcrand a obtenu l’isopropylate ne contenant que de la combinaison triisopropylique, — M. E. Jandrier a préparé les dérivés nitré et nitrosé de lantipyrine par l’action de l'acide nitrique en pré- sence de l'acide sulfurique. — A propos de la note de M. Colson sur le pouvoir rotatoire des dérivés diacé- tyltartriques, M. J. A. Le Bel reprend l’exposition de sa théorie stéréochimique et montre que la représen- tation des dérivés du méthane ne peut être ramenée au tétraèdre régulier, comme il l’a souvent dit antérieure- ment, que par une simplification quelquefois illégitime. En réalité, il y a entre les atomes d'hydrogène ou les les groupements substitués des conditions complexes d'équilibre. On n'est donc pas en droit de raisonner exclusivement sur le schéma tétraédrique pour juger la stéréochimie. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Passy : Sur les minimums perceplibles de quelques odeurs. (Voir Soc. de Biol. 30 janv.). — M. N. Gréhant a constaté que lorsqu'on fait respirer à des chiens, pendant un temps constant, des mélanges d’air et d’oxyde de carbone à moins de 7%, l'abaissement de la capacité respiratoire et la teneur en oxyde de carbone du sang de chaque animal sont proportionnels au titre du mélange respiré. Cette remarque permet de doser physiologiquement de petites quantités d'oxyde de carbone, — M. G. Chau- veaud a étudié la structure de l’ovule et le développe- ment du sac embryonnaire chez le Vincetoxicum offici- nale ; ce développement présente diverses particularités. — MM. Berthelot etG. André ont déterminé la propor- tion de silice, tant soluble qu'insoluble, contenue dans les diverses parties et aux diverses phases de la végé- tation d’une culture de blé faite sur un sol dont la si- lice avait été dosée préalablement. Le grain semé renfermait très peu de silice presque toute soluble, Dès le début de la végétation, on trouve dans la tige une proportion notable de silice insoluble, Au début de la floraison, la plus forte proportion de silice totale s’observe dans les feuilles ; lateneur relative est encore plus élevée pour l’état insoluble; la silice soluble est abondante dans les racines, Pendant la maturation du grain, la silice s’accumule de plus en plus dans les feuilles ; les tiges et les racines ne contiennent que de la silice soluble, Au moment de la dessiccation, au con- traire, les racines contiennent peu de silice, la tige en renferme davantage, partiellement à l’état insoluble, L'épiest toujours pauvre en silice. — MM. J. de Guerne et J. Richard ont étudié la faune des eaux douces de l'Islande sur des échantillons rapportés par M. Ch. Ra- bot. Cette faune présente des caractères mixtes rappe- lant à la fois les faunes analogues de l’Europe et celles de l'Amérique septentrionale dans les zones tempérée etarctique.—Le Prince A. de Monaco présenteune carte qui résume l’ensemble de ses expériences sur les cou- rants de Atlantique, explorés par des lancements de flotteurs pendant trois années successives. L'existence d’un tourbillon dans le sud-ouest et non loin des Acores est définitivement démontrée. La vitesse de certains courants, aboutissant à des côtes très peuplées où les flotteurs sont relevés dès leur arrivée, a pu être établie avec précision. Le demi-cercle occidental du tourbillon présente une circulation plus active que celle de l’autre demi-cercle. Nomination. — M.Manen est élu correspondant pour Ja section de géographie et navigalion. L. LAPICQUE. ACADEMIE DE MEDECINE Séance du 19 janvier. M. Marrotte : Sur l'emploi thérapeutique fdu chlor- hydrate d’ammoniaque. — MM. J. V. Laborde el Gréhant : Note sur les dangers du chauffage des voi- tures par des briquettes de charbon de Paris. Les auteurs, après étude expérimentale, signalent le danger de ce mode de chauffage des voitures. — Discussion à propos des recherches de M. Charpentier sur un cas de néphrite infectieuse puerpérale présenté dans la dernière séance, et à laquelle prennent part MM. Her- vieux, Tarnier et l’auteur de la communication, Séance du 26 janvier. M. Javal : Sur la pente de l'écriture. — M. Béran- ger-Féraud : Sur l'augmentation et la fréquence du tænia en France depuis un demi-siècle. De l'étude approfondie à laquelle s'est livré l’auteur il résulte que depuis un demi-siècle la fréquence du tænia s’est notablement accrue en France ; en même temps, letænia inerme provenant du bœuf s’est substitué autænia armé d'origine porcine ; le tænia inerme semble pénétrer en France par les frontières de Belgique, de Suisse et les côtes de la Méditerranée. Nos moyens de défense contre cet envahissement sont : {4° l'usage de la viande bien cuite; 2° l'augmentation de l'élevage indigène des bœufs de boucherie; 3° la destruction des œufs du tænia excrétés par les hommes atteints du parasite, M. La- borde à propos de cette communication, signale l’action remarquable des sels de strontium (laclate, tartrate, phosphate) sur les parasites intestinaux, en particulier sur letænia; leschiens soumis à l'expérience en ont été débarrassés et n’en ont plus présenté de trace. Séance du 2 février. A. Ollivier : Note sur la prophylaxie de la grippe. L'auteur signale les heureux effets qu’il a obtenus avec l'huile de foie de morue. Pendant l'épidémie de 1890, trente enfants ont été mis systématiquement à l’huile de foie de morue; il n’y a eu qu'un cas de grippe par- mi les malades suivant ce régime. L'auteur fait prendre l'huile par cuillerées à café aux enfants une, deux, trois ou même quatre fois par jour; par cuillerées à soupe aux personnes plus àägées; il recommande de plus, de la prendre pendant le premier déjeuner. MM. L. Colin, Le Roy de Méricourt, Vallin et l’au- teur se livrent ensuite à une discussion au sujet de cette communication, — M. Hervieux : À quelles épo- ques de la vie faut-il pratiquer la revaccination obliga- toire? L'auteur pense que la future loi sur la vaccine obligatoire, étant admis que la première vaccination aura été pratiquée chez tous les enfants dans les six premiers mois qui suivaient la naissance, devra pres- crire la première revaceination à dix ans, la seconde à 20 ans, et, ultérieurement, les revaccinalions en masse dans les régions placées sous le coup d’une épidémie variolique grave. A la question de revaccination est liée celle des cicatrices vaccinales. La plupart des hommes qui se sont occupés de cette question sont d'avis qu'il ne devra être tenu aucun compte de l’exis- tence des cicatrices vaccinales antérieures pour sous- traire un sujet à la loi future. Il devra en être de même pour les cicatrices varioliques : la variole pas plus que la vaccine, ne confère l’immunité pour toute la vie, SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du 6 février 1892. M. Bonnier décline toute responsabilité au sujet des opinions émises par M. Fayod dans la Revue générale de Botanique dont il est directeur. — En réponse à la note de M, J. Passy (séance précédente, sur les minima perceptibles des odeurs), M.Ch. Henry aflirme que la dilution du parfum dans l’alcoo!l est une faute, et que, d’autre part, ilse condense près du col du flacon des gouttelettes qui portent en cet endroit la tension de vapeur à son maximum. Pour son olfactomètre, il reconnait que cet appareil donne des résultats inexacts, parce qu'il à dù négliger dans le calcul deux fac- teurs importants, mais ces résultats se rapprocheront de la vérité à mesure que se perfectionnera la physique mathématique. Quant au chiffre donné pour l’éther, par centimètre cube, chiffre double de la tension de vapeur, du corps à la température de l'expérience, il 134 ACADEMIES ET SOCIÉTES SAVANTES s'explique très bien, d’après M. Ch. Henry, par ce fait que le sujet, qui était éthéromane, s’est anesthésié pendant l’expérience, — M, Feré signale le fait sui- vant: sur un épileptique qui avait été récemment reyac- ciné sans succès, une nouvelle revaccination, faite à la suite de cinq accès qui avaient laissé le sujet dans la stupeur, donna lieu à une éruption vaccinale régulière des deux côtés, — MM. Raiïlliet et Cadiot ont observé chez le chat deux cas d’acariase auriculaire, dus au Symbiotes auricularum ; un des deux animaux est mort dans des convulsions épileptiformes. Transportés sur un autre chat, les parasites l'ont fait mourir de la même manière, Ce parasite existant fréquemment chez le chien et chez le furet, les auteurs ont examiné si la transmission est possible d’une espèce à l’autre, En fait, il y a pour chaque espèce une variété d'acarien; la variété du furet s’écarte de celle du chien, celle du chat est intermédiaire, et qui explique que le Symbiotes est transmissible du chat au chien, et non du furet au chien. — M. L. Lapicque, qui avait étudié antérieure- ment l’action des iodures alcalins sur la pression, à repris au même point de vue les iodates et l’iode libre. La décomposition des iodates dans le sang est presque instantanée; d'autre part, on sait que l’iode libre se combine pour une partie à l’état d'iodure avec les alcalis du sang, L'action de ces substances sur la pression est en gros la même, mais elle se produit bien plus rapi- dement sous l'influence de l’iodate et de l’iode libre que sous l'influence de l’iodure, et avec des doses moindres pour le premier corps que pour le second, pour le second que pour le troisième, L'activité phy- siologique de ces combinaisons de l’iode étant de même sens et inversement proportionnelle à la stabi- lité de chacun, ces expériences confirment la théorie d’après laquelle les iodures alcalins seraient décom- posés dans l’organisme animal. — M. Laulanié a étudié corrélativement les varialions de lathermogénèse et des échanges respiratoires produits chez le lapin par la tonte; la thermogénèse augmente en même temps que la consommation d'oxygène et l’exhalaison d’acide carbonique, mais les échanges s’accroissent relative- ment plus, et le quotient respiratoire s'abaisse. — M. G. Bonnier a étudié comparativement la chaleur dégagée par des plantes ou portions de plantes, placées dans le thermocalorimètre de Regnault, avec leurs échanges respiratoires; il a constaté que la quantité de chaleur dégagée est plus grande que celle calculée, d’après le phénomène respiratoire, lorsqu'il y a des- truction de réserves; elle est plus petite au contraire lorsqu'il y a formation de réserves. — M. J. Girode présente des préparations microscopiques provenant d’un utérus, et dans lesquelles il y a des fibres mus- culaires striées très visibles, Séance du 13 février. M. Mégnin réclame la priorité de la plupart des faits signalés par MM. Railliet et Cadiot sur les aca- riens des oreilles chez le chat, le furet et le chien, acariens qu'il avait dénommés Symbiotes ecaudatus. — M. Railliet répond que, dans sa note, il n'avait fait aucun historique; c’est pourquoi il n’avait pas men- tionné les recherches de M. Mégnin. Quant au nom spécifique de l’acarien, celui d’auricularum est anté- rieur à celui d’ecaudatus. — MM. A. Gilbert et G. Lion ont vu dans leurs expériences que les lapins inoculés avec le Bacillus Coli communis ne meurent pas toujours avec les accidents aigus décrits par Escherich. Dans un assez grand nombre de cas, ils succombent à des paralysies tardives. Les auteurs supposent que les paralysies urinaires que l’on observe quelquefois chez l’homme pourraient bien relever de cette infection. — M. Dupuy pose la question de savoir si la plupart des paralysies urinaires ne sont pas réflexes. — MM. Feré et Herbert, chez deux épileptiques qui, après avoir été soumis à une bromuration prolongée, ont succombé à une affection intercurrente, ont dosé le brome que con- tenaient les divers organes. — M. Ch. Finot expose les conclusions de ses recherches sur l’albuminurie tran- sitoire chez l’homme sain, recherches qui ont porté sur dix-sept sujets observés pendant trente-cinq jours con- sécutifs. IL y à des dispositions individuelles qui ren- dent plus ou moins facile le passage de l’albumine dans les urines à la suite de la fatigue ; lorsque celle-ci est poussée assez loin, peu des sujets échappant à l’al- buminurie, Diverses causes peuvent produire le même effet, — M. J. Chatin, en étudiant le tégument de cer- tains Nématodes à l’état jeune, a pu reconnaitre, par- ticulièrement chez l’Heterodera Schachtii, une structure initiale nettement cellulaire, — MM. Chambrelent et Demont ont repris les recherches faites par l’un d’eux sur la toxicité de l’urine des femmes enceintes; ces expériences de contrôle ont donné le même résultat, à savoir que celte toxicité est constamment diminuée, L. LAPICQUE. SOCIÈTE MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 17 février. M. Lemoine indique l'application de ses recherches antérieures à la mesure de la simplicité des construc- tions en géométrie. Il y a là un art véritable dont on ne semble pas jusqu'ici s'être préoccupé. Il s’en faut que les constructions qui donnent lieu à l'énoncé le plus élégant soient celles qui conduisent au tracé effectivement le plus simple; c’est le contraire qui a généralement lieu. M. Lemoine en cite divers exemples puisés dans le domaine classique. En particulier, la solution si élégante donnée par Gergonne pour la dé- termination du cercle tangent à trois cercles donnés n'est pas celle qui comporte la construction la plus simple. — M. d'Ocagne indique les simplifications que M. Laisant et lui-même ont respectivement introduites dans les constructions qu'ils ont fait connaître dans la séance précédente pour le point dont la somme des carrés des distances à des droites données est un mini- mum, — M,FK. Lucas rappelle qu'il a appelé points centraux d'un système de x points ceux dont le pro- duit des distances aux points donnés est un minimum. Si on appelle F (2) le polynôme qui, égaléäzéro,a pour racines les affixes (& +7 V —1) des points donnés, les points centraux du système seront ceux qui auront pour affixes les racines de K°(2) = 0. Leur système aura, à son tour, n — 2 points centraux qui seront dits points centraux du deuxième ordre pour le système initial, et ainsi de suite, Ces systèmes successifs de points ont le mème centre de gravité. Il y a deux points centraux du n — 2° ordre. La droite qui les joint est un axe d'inertie du système proposé, M. Lucas dé- duit de l'analyse par laquelle il établit ce théorème la condition pour que l’ellipse d'inertie du système se réduise à un cercle. Cette condition est que, pour un choix d’axes quelconque passant par le centre de gravité du système, la somme des carrés des affixes des points donnés soit nulle. — M. Laisant présente quelques observations sur l’expression pi, pet q étant deux quantités imaginaires. Il montre que cette expression prend une infinité de valeurs si p est sim- plement donné, sans qu'on précise son argument, En particulier i' représente tous les termes de la progres- 1 po sion géométrique... —, y, Y°,...,Y étantégaläe 2 — M. Lucien Lévy fait connaitre les surfaces enveloppes de sphères qui, par une translation, engendrent une famille de Lamé (système triplement orthogonal). M. d’Ocacxe. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 4 février 1892. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, J, Norman Lockyer : La nouvelle étoile découverte dans la constellation Au- riga, La première photographie du spectre de la nouvelle étoile a été prise sous la direction de M. Lockyer le 3 fé- vrier;ce spectre présente trois raies qui correspondent ACADEMIES ET SOCIETÉS SAVANTES 135 aux longueurs d'ondes : 3933, 3968 (H), 4101 (h), 4128, 172, 4926, 4268, 4319, 4340, 4516,4552, 4587, 4618. Outre ces raies,on à pu en observer un grand nombre d’autres dans le spectre visible et en identifier quelques-unes, La raie C est la plus brillante du spectre, la raie F et plusieurs autres raies à son yoisinage étaient égale- ment très nettes. Il ya une raie au voisinage de * 500 et une autre au voisinage de x 495. Il y a aussi une raie assez brillante près de x 547 et une raie peu marquée dans le jaune qui semble coincider avec la raie D. La raie G de l'hydrogène apparaît nettement ainsi qu'une bande ou groupe de raies situées entre Get F. 2e SGIENCES PHYSIQUES. — M. le capitaine Noble pré- sente une note sur l'énergie absorbée par le frottement des projectiles dans l’âme des canons rayés, L'objet de ces expériences est de déterminer aussi exactement que possible la perte d'énergie due au frottement de l'anneau qui fait forcer le projectile contre les parois du canon. On sait que dans les canons modernes qui se chargent par la culasse, la rotation est imprimée au projectile au moyen d’une bande ou anneau de cuivre qui y est adaptée et dont le diamètre est un peu supé- rieur au calibre du canon et même au diamètre du cercle dont la circonférence passerait par le fond des rayures. La pression des gaz formés par la combustion de Ja poudre force l'anneau dans les rayures du canon el imprime ainsi au projectile sa rotation, Il est évi- dent que diverses circonstances peuvent augmenter ou diminuer le frottement du projectile. La qualité de la oudre exerce, par exemple, une grande influence; le frottement sera augmenté si on à à faire à une poudre qui encrasse beaucoup. Il faut tenir compte aussi de la forme et du diamètre de l’anneau, des méthodes em- ployées pour imprimer sa rotation au projectile, et de la quantité même de cette rotation. Le capitaine Noble, pour déterminer l'influence de ces diverses conditions s’est servi de diverses espèces de poudre et de divers types de canons et de projectiles. La discussion de quelques-uns des résultats obtenus montre que la perte totale d'énergie provenant à la fois de l’encrassement par la poudre à gros grains de Partillerie anglaise et du frottement dû aux rayures paraboliques du canon se monte à 7 0/0 de l'énergie développée. Il résulte de cinq séries d'expériences que la perte moyenne d'énergie due au frottement est de 1,52 dans les canons à rayures uniformes et de 3,78 dans les canons à rayures paraboliques; déduction faite du coefficient de frottement :0,203. —M. C. H. Lees : Conductibilité ther- mique descristaux et des autres mauvais corps conduc- teurs, La méthode consiste à placer un disque de la substance dont on veut déterminer la conductibilité entre les extrémités de deux barres de métal placées coaxialement, à chauffer une des extrémités du sys- tème et à observer, au moyen de thermo-couples appliqués aux barres, la distribution de la température dans ces barres : 1° ‘Lorsqu’ elles sont séparées par le disque; 2 lorsqu'elles sont directement en contact. Quand on connaît la conductibilité des barres, ces observations suffisent à déterminer celles du disque ; voici les résultats obtenus : Unités C. G.S. 0,002% Verre ordinaire......:........ ane ae HR race CR START AIT Eee mea s mer raeiere se ee ce SA BE sc noccerten Edo roro ce bob Quartz selon l'axe ARE. À Quartz perpendiculairement à l'axe................ Spahidisiande selon l'axe. "re Spath d'Islande perpendiculairement à l' Mica perpendiculairement au plan de clivage MALDTEMDIONC MEET PEAU Tee. 2 Ut Ar AOISE Er rh ee see 0,005 Gomme laque... 0,0006 Para inerte 0,0006 Caoutchouc pur SOLE Doc Ebonite GAS DELCHAETREP ARE ET ES ee Pere Neo MO Mb 0 cad e ou Pod ORAN AA OU EURO OUEE 0,000 0,000 Unités C. G. S. 0,000% Papier d’asbeste.. 0 0005 AGADIR Cr rE CE Châtaignier Liège..........2,,.....4m00r 0,0002 0,0006 0,0002 — M, À. M. Worthington : Extension mécanique des liquides. Ses recherches ont porté sur la détermination expérimentale de l’extensibilité en volume de l'alcool éthylique, Les divers expérimentateurs ont imaginé trois méthodesdifférentes poursoumettre un liquide à la tension, mais aucune d'elles ne donne le moyen de mesurer en mème temps l'extension du liquide et la pression qu'il exerce. M. Worthington a trouvé le moyen de mesurer simultanément ces grandeurs et à utilisé pour cela une série d’ observations sur l'alcool éthylique qu'il a conduites jusqu’à une tension de plus de i7 atmosphères, soit 258 livres par pouce carré. Grâce à l’obli- seance de l’auteur, nous pouvons donner (fig. 1) une reproduction de l'appareil dont il s’est servi et indiquer la ner expé- rimentale qu'il a appliquée. Le liquide privé d'air par une ébul- A lition prolongée est scellé dans un vase de verre solide qu'il rem- plit presque en entier à une tem- pérature donnée, le reste de l’espace est alors occupé par de la vapeur. En élevant la tempé- rature, le liquide s'étend et rem- plit tout l'espace. Si on abaisse la température, le liquide, en rai- son de son adhérence aux parois du vase, ne peut se contracter; il reste distendu remplissant toute la capacité du vase et exercantsur ces parois une pres- sion intérieure. La tension exercée est mesurée au moyen des changements de capacité du bulbe ellipsoide d’un thermomètre (A) scellé dans le vase et auquel M, Wor- thington donne le nom de {onomètre. Ge bulbe devient lé- gèrement plus sphérique et présente par conséquent une capacité un peu plus grande sous la pression du liquide, Le mercure descend done dans le tube du tonomètre; la tension qui corrrespond à cette chute a été préa- blement déterminée par l'observation de lélévation produite par une pression égale appliquée à la même surface, On peut à chaque instant ramener le liquide au volume qui correspond normalement à la tempéra- ture et à la pression de sa vapeur saturée en chauffant un momentau moyen d'un courant électrique un fil fin de platine B qui traverse le tube capillaire qui forme une partie du vase. L'espace laissé vide dans le tube représente les extensions apparentes. Il faudrait pour avoir les extensions vraies les corrigeren calculant la quantité dont ont cédé à la pression les parois du vase de verre, Richard A. GRÉGoRY, SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 17 décembre MM. Henry Armstrong et E. Rossiter : I. Les sulfo- chlorures des dibromonaphtalines isomériques. II. Ac- tion des alcools sur les sulfochlorures comme moyen de préparer les éthers sels des acides sulfonés. IL. Action du brome sur les « et 8 bromonaphtalines. IV. Action du brome sur un mélange d’ortho et de paranitro — &« — acénaphtalide. — MM. Henry Armstrong et E. Kip- ping : La camphrone, produit obtenu par l’action des agents déshydratants sur le camphre. L'étude de ce produit, non terminée, conduit à lui attribuer la formule CH20.— M. G.T. Moody : Acides métaxylène sul- foniques.— MM. Perkin Junior et James Stenhouse : Action du bromure de propylène sur les dérivés sodi- Fig. 1 136 ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ques de l’acétoacétate d’éthyle et du benzoylacétate d’éthyle. — MM. Perkin Junior et Sinclair : Dérivés du tétraméthylène, Séance du 21 janvier 1892. M.Matthew A.Adlams : Détermination de l'oxygène dissous dans l’eau. L'auteur décrit un appareil permet- tant d'opérer avec précision le dosage de l'oxygène dis- sous, d'après la méthode proposée par Schutzenberger, — M. Vivian B. Lewes : Eclat lumineux des flammes de gaz d'éclairage. D’après M. Lewes, les diverses ac- tions qui tendent à diminuer l'éclat de la flamme dans un brûleur Bunsen peuvent être résumées de la facon suivante : 10 l’activité chimique de l'oxygène atmos- phérique diminue l’éclat de la flamme en brûlant les hydrocarbures avant qu'ils n'aient pu former de l’acé- tylène; 2° la dilution causée par l’azote atmosphé- rique en élevant la température à laquelle se produit la décomposition partielle des hydrocarbures, s'oppose à la formation d’acétylène et diminue ainsi l'éclat; dans la flamme normale du Bunsen, l'azote agit en retardant cette décomposilion jusqu'à ce que les carbures soient détruits par oxydation; 3 l’action refroidissante de l'air atmosphérique introduit vient s'ajouter aux autres causes, quoique le refroidissement produit soit infé- rieur à l’élévation de température produite par l’intro- duction de l'oxygène de l’air;4° dans la flamme nor- male du Bunsen, l’azote et l’oxygène ont des actions également importantes pour diminuer l'éclat de la flamme ; mais, si la quantité d’air vient à augmenter, l'oxydation devient l'agent principal, et l'azote cesse pratiquement d’exercer une influence. — M. A. Smi- thells : Origine de la coloration de la flamme. Note pré- liminaire. L'auteur émet l’idée que les colorations ob- servées dans les flammespar l'introduction de certains corps sont dues à la formation de composés chimiques, et non à des effets purement physiques. Il annonce une série de recherches sur ce sujet. — M. J.Friswell: Note sur l’action de l'acide azotique dilué sur le charbon, — MM. Percy Frankland et William Frew : Fer- mentation du mannitol et du dulcitol. Les auteurs ont obtenu un microorganisme qui décompose par fermen- tation non seulement le mannitol, mais aussi le dulci- tol qui a résisté jusqu'ici à l’action de toutes les bacté- ries que l’on a fait agir sur lui. La décomposition du dulcitol et du mannitol peut être regardée comme ré- pondant aux deux réactions suivantes, qui se produi- sent d’une facon indépendante : CSH'106 — 2C2H60 + CO2 + CH202 CGH406 — C1H6O1 + C2H402 + 2H2 — MM. Mackensie et Perkin Junior: Synthèse de l’a- cide hexahydrotéréphtalique. —M. W. Ostwald : Sur la rotation magnétique des sels dissous, Remarques rela- tives aux résultats obtenus par Perkin. — M. W. Ost- wald : La dissociation du peroxyde d'azote. L'auteur compare la dissociation que subit ce composé, soit par vaporisation, soit par dissolution dans le chloroforme. Les résultats se trouvent en accord avec les idées de Van't-Hoff relativement aux analogies des états gazeux et dissous. — MM. James Dobbie et Alexandre Lau- der : Corydaline. Etude de l’alcaloïde décrit par Her- mann Wicke. — M. Emmerson Reynolds : Composés argentiques de la thio-urée. SOCIETE ROYALE D'EDIMBOURG Séance du 18 janvier 1892. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Western : Note sur la tactique suivie par certains oiseaux quand ils vo- lent dans le sens du vent, C’est un essai d'explication de l’avance que prennent certains oiseaux par rapport au vent sans mouvement de leurs ailes. — Le pro- fesseur Tait lit la seconde partie d’un mémoire sur le choc. Dans la série d’expériences décrites dans cette partie de son mémoire, on a opéré sur des blocs de substances variées, semblables de forme à ceux qui ont _— servi à la première série d'expériences, mais de dimen- sions plus grandes, La masse du corps heurtant est aussi plus grande que précédemment, et dans quelques cas on lui a donné la forme de V au lieu de la forme de corps plat. Le mémoire contient une comparaison des résultats actuels avec les précédents. 29 ScENcEs PHYSIQUES. — M. G. Knott lit une note sur l’aimantation du fer par un courant qui le traverse. Ses expériences sont destinées à étudier la nature de l'ai- mantation transversale ! telle qu’elle existe dans un fil de fer qui conduit un courant, On se sert de tubes, dans lesquels l’aimantation transversale était mesurée par un courant induit produit dans une bobine enroulée lon- gitudinalement autour de l'appareil du tube. L’aimanta- tion transversale serait produite ou par un courant axial conduit par un fil de cuivre traversant le tube, ou par un courant traversant la section annulaire du tube de fer lui-même d’un bout à l’autre. Plusieurs tubes de différents calibres sont employés par paires ; l’induction, axiale ou annulaire, dans l’un des tubes étant garantie par un réglage des résistances dans les circuits secondaires contre l'induction axiale ou annu- laire sous l'influence du même courant dans l’autre tube. La force magnétique agissant autour du tube était calculée conformément aux hypothèses habi- tuelles et en la comparant ainsi à l'induction observée on ala perméabilité véritable, Le résultat général a été que l'induction annulaire qui accompagne un cou- rant élevé est supérieure d'environ 7 0/0 à celle qu’il devrait y avoir d’après la théorie usuelle, si la relation entre ce courant etle courant axial était exacte. Des expériences directes montrent qu'un courant traver- sant le fer n'’augmente pas la perméabilité pour des forces inductives agissant normalement au courant, de telle sorte que le désaccord mentionné doit tenir plutôt à une erreur de la théorie. Avec de plus grandes den- sités de courant, telles qu’il y en a dans le fer aimanté transversalement, le désaccord peut même être plus prononcé, — Le professeur Tait lit une note sur l'iso- thermique critique de l'acide carbonique, telle qu'elle résulte des expériences d'Amagat, Dans un intervalle considérable du volume, l’isothermique est pratique- ment rectiligne. 3° SctENCES NATURELLES, — M. Griffiths communique une note sur les ptomaines extraites de l'urine dans certaines maladies infectieuses. W. PEDDIE, Docteur de l’Université. SOCIÉTÉ PHILOSOPHIQUE DE MANCHESTER Séance du 15 décembre 1891 1° Sciences PaysiQues : M. Hodgkinson fait observer qu'il n'existe aujourd’hui aucun moyen de décrire d’une facon uniforme les couleurs des objets naturels irides- cents, tels que les papillons et certains minéraux. Toute difficulté disparait si on les regarde au moyen d’une lumière qui revient à l'œil après avoir frappé l’objet normalement. A ceteffet, on les illumine au moyen d’une lampe placée à une certaine distance et avec un miroir plan percé-d'un trou par lequel l’observa- teur regarde l’objet dont on veut décrire la couleur. L'instrument est en somme un ophtalmoscope. 20 ScrENCES NATURELLES : M.Melvill décrit une nouvelle espèce de Latirus venant de Tile Maurice, s’ajoutant à la liste complète de ce genre qu'il a récemment dressée. Séance du 12 janvier 1892 ENCES PHYSIQUES : M. Schuster annonce que les thermomètres de Joule sont actuellement en sa posses- sion et qu'il en fait une étude exacte, Deux de ces ins- D 1. Le physicien écossais se sert de l'expression cu'cular ma- gnetisalion. Nous employons de préférence en français le nom d’aimantation transversale que M. Paul Janet a donné à ce phénomène. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 137 truments ont servi dans les expériences classiques du célèbre physicien. Séance du 26 janvier SCIENCES MATHÉMATIQUES : M.R. F.Gwyther décrit une méthode pour faire dériver les invariants ordinaires d'une conique de l'expression due à Monge que Hal- phen a appelé l’invariant différentiel. Les calculs se simplifient si l’on part de l'équation intrinsèque de la courbe, Séance du 9 février SCIENCES PHYSIQUES : M. C. O’Neill à constaté que la solubilité du formiate de plomb est considérablement augmentée par la présence d’une petite quantité de nitrate de plomb. P.-J. Hanroc. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE MANCHESTER Séance du 8 janvier 1892. M.Levinstein appelle l'attention de la section sur les nouveaux règlements du Conseil municipal de Man- chester qui défendent aux fabricants de faire de nou- velles constructions, même des hangars, sans les sou- mettre au « Building-Committee » du Conseil. — Suite de la discussion sur la purification des eaux d’égout. M. Davis pense qu'il faut non pas 7 tonnes et demi de chaux pour précipiter 4.500.000 litres (un million de gal- lons), mais bien de 15 à 20 tonnes. M. Grimshaw résume la discussion, Il faudra à l’avenir employer un sel fer- rique avec addition d’une certaine quantité de chaux; il conviendra aussi de réduire le plus possible la quantité de matières déposées, car il faut abandonner lPespoir d'en tirer un profit. —M. W. Thomson décrit un nouvel appareil enregistrant automatiquement la présence et la densité de la fumée noire qui sort des cheminées. Une feuille de papier blanc est enroulée sur un cy- lindre double en laiton; dans l’espaceannulaire du cy- lindre on fait circuler un courant d’eau froide pour empêcher le papier d’être brûlé. Celui-ci se déroule automatiquement au moyen d'un ressort et passe devant une fente exposée à la fumée, IL se produit alors sur le papier une tache noire dont l'intensité varie avec la densité de la fumée. P.-J. Harroc. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE. Séance du 14 janvier 1892. 10 SGIENCES PHYSIQUES. — M, Ludwig Mach : « Sur un réfractomètre interférentiel, » 20 SCIENCES NATURELLES. — M. Franz Mares : « Théo- rie de la formation de l'acide urique dans l'organisme des Mammifères, »— M, C. Grobben : « Sur la con naissance de l'arbre phylogénique et la classification des Crustacés. » La différence frappante entre les der- niers représentants du type Euphyllopodes, Branchipus, Apus et Estheria, ainsi que certaines ressemblances de ce type avec les crustacés restants, amenèrent l’auteur à ces recherches dont les résultats furent les suivants : les Ostracodes et les Cladocères dérivent du type Estheria des Euphyllopodes, les Copépodes et les Cirripèdes du type Apus, les Malacostracés du type Branchipus ; il en résulte la suppression du groupe systématique des Entomostracés et la séparation des Malacostracés en Leptostracés et Eumalacostracés, ainsi que l'addition des Stomatopodes comme ordre particulier. La res- semblance qui existe entre les trois types Euphyllo- podes, Branchipus, Estheria et Apus, tant dans les palpes mandibulaires, que dans la réduction des deux paires de maxillaires, trouve ainsi son explication dans la dé- rivation de ces trois types d’une forme primitive com- mune. Séance du 21 janvier. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Emil Wælsch, à Prague : «Sur les lignes de même intensité d’une surface pour un éclairement central. » —M.G. von Niessl:«Dé- termination de la trajectoire du météore du2avril 1891,» L'auteur étudie la trajectoire du météore observé le 2 avril 4891 à 8 h.55 m, temps moyen, de Vienne, en se fondant sur les données recueillies par M. Weiss, direc- teur de l’observatoire de Vienne. Il arrive à cette con- clusion que ce météore détonant doit être classé à côté de la grosse boule de feu observée le 9 mars 1875. 20 SCIENCES PHYSIQUES, — M.G-. Jaumann, à Prague : « Electromètre absolu à suspension bifilaire. » — M. G. Neumann à Gratz : « Action de quelques gaz et vapeurs sur le cuivre et les métaux précieux. » Dans la première partie de son travail, l’auteur communique une série de faits intéressant l'analyse organique élé- mentaire; ainsi, du cuivre réduit par l'hydrogène et chauffé dans un courant d'acide carbonique, non seu- lementne perd jamais tout son hydrogène, mais absorbe même du carbone. Réduit par les alcools méthylique etéthylique, il retient aussi du carbone et de l’hydro- gène, Ces hydrocarbures sont tellement fixés au métal qu'ils ne se volatilisent pas à la température de 2200, En second lieu, M. Neumann a constaté l’oxydation des métaux précieux, argent, or, platine et palladium, en les chauffant dans l'oxygène à 4509, On met en évidence cette oxydation par la réduction des oxydes avec l’hy- drogène. Séance du 4 février. 1°SCIENCES MATHÉMATIQUES. —M. Adalbert Breuer pré- sente deux travaux : «Sections coniques imaginaires » et « Les fonctions goniométriques d’un angle com- plexe ». — M. Alois Hermann à Gospic : «Théorie de la construction des ballons dirigeables ». — M. Jan de Vries : « Images isodynamiques et métaharmoni- ques ». — M. Konrad Zindler : « Recherche des mul- tiplicités linéaires de dimension quelconque dans notre espace, complexes linéaires et système de rayons dans le même espace. » 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. L. Weineck envoie une photographie de la vallée Petavius de la Lune, qui est la reproduction avec une échelle vingt fois plus grande d’une photographie prise le 31 août 1890 par M. Lick. — M. E. Murmann : « Sur quelques dérivés de l’a phénylquinoline. » L'auteur montre que l'acide sulfurique donne avec la-phénylquinoline deux sul- foacides représentés tous deux par la formule CISHI0AZ.SOSH ; on les sépare en passant par les sels de baryum qui possèdent des solubilités très différentes, En décomposant le sel peu soluble, on obtient un acide qu'on doit regarder comme l'acide quinoline-«-phényl- parasulfonique; car, traité par la potasse caustique, il fournit la paraoxy-zphénylquinoline connue. L’acide correspondant au sel soluble est l’acide quino- line-æphénymétasulfonique, on y remplace facilement le reste SO* par l’oxhydrile OH. Ce corps est un produit d’oxydation, l’&-phénylquinoline, qui prend facilement 4H. L’oxytétrahydro--phénylquinoline préparée par le zinc etl'acide chlorhydrique donne paroxydation à laide de la potasse fondante, l’acide métaoxybenzoïque. Ces résultats fournissent la preuve que le produit d’oxyda- tion mentionné est bien identique avec la métaoxy-+- phénylquinoline préparée autrement par Miller et justifient la constitution des deux acides. L'auteur dé- crit en outre une série de sels des deux nouveaux acides et un certain nombre de combinaisons résultant de leurs transformations. — MM. G. Goldschmiedt et et R.Jahoda : « Sur l'acide ellagique. » — M. A. Grün- wald : «Sur le spectre de l'hydrogène, nommé second ou complexe de B. Hasselberg, et sur la structure de l'hydrogène, » De l'étude minutieuse du spectre de l'hydrogène par sa méthode empirique-inductive, lau- teur tire des conséquences sur la structure intime des atomes de l'hydrogène liés entre eux pour constituer la molécule: 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Haberlandt : « Re- A. botaniques faites à Buitenzorg à Java. » La Se sécheresse inaccoutumée qui a eu lieu à Buiten- 138 ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES zorg a permis à l’auteur de faire une série d’études sur les Epiphyses, très nombreux en cet endroit, On à opéré sur deux formes les Drymoglossum nummularifo- lium et piloselloïdes dont les feuilles présentent bien les caractères de l'espèce. Le développement des feuilles est normal; il n’en est pas de même de celui des radi- celles, Quand on examine au microscope une vieille racine après l'avoir arrosée on voit à côté des anciennes radicelles des nouvelles très nombreuses et dans toutes les phases de développement, Celte production de nou- velles radicelles ne tient pas à l'accroissement normal des cellules sous-épithéliales, mais à un procédé de rajeunissement tout à fait remarquable des vieilles ra- dicelles, Au moment de la dessiccation, le plasma se retire à la base de la radicelle et s’y confine en se sé- parant du reste de la radicelle par une nouvelle mem- brane, puis les résidus des cellules disparaissent. Dès que la pluie revient, le plasma reprend son activité et les radicelles sa reproduisent avec une rapidité éton- nante. — M. Hugo Zukal : « Sur le contenu de la cel- Jule chez les Schizophytes ». — M. Gejza von Bu- kowski : «Etat géologique des environs de Balia-Maden dans le nord-ouest de l'Asie. » — M. A. Adamkiewicz présente sa sixième communication sur ses «Recherches sur les cancers ». L'auteur a trouvé le moyen à l’aide de procédés dynamiques ef non pas mécaniques (c’est- à-dire en arrachant ou en détruisant) d'éliminer par une réaction particulière les nouvelles formations can- céreuses avec tendance à la guérison, mode de (raite- ment appelé par lui cancroïne. On y arrive en tuant les cellules du cancer, ce qui peut se produire de trois fa- cons : 4° Les éléments cancéreux disparaissent de l’en- droit où ils ont vécu jusque-là, éliminés par le courant vital; les glandes lymphatiques peuvent ainsi dispa- raître en partie ou en{otalité: dans le premier cas, la glande se divise en présentant des baies. 2° Les cellules mourantes se détachent à leur base et tombent simple- ment:il se produit un vide correspondant, 3° Elles se transforment en pus. Le cas suivant présenta une excep- tion à la règle. Un homme de 65 ans avait une petite infiltration de 0® 05 à la lèvre supérieure, eten mème temps deux glandes de la grosseur d’un poids à la mà- choire inférieure; soumis au traitement précédent, les glandes ne disparurent point, il en vint au contraire de nouvelles; le troisième. jour on en avait déjà huit au lieu de deux. On suspendit le traitement et l’on fit disparaître l’induration; cette dernière avait une tex- ture fibreuse, ne contenait pas de cellules cancéreuses, et la réaction de l’auteur, si caractéristique pour les cancers, ne donna que des résultats négatifs. On s’aper- cut alors que le malade était syphylitique. Si ces obser- vations viennent à être confirmées, on pourra de ces faits tirer des conséquences importantes au point de vue du diagnostic. — M. Alfred Nalepa : « Nouveaux microbes du foie. » Emil Weyr, Membre de l'Académie, ACADEMIE DES SCIENCES DE SAINT-PETERSBOURG Séance du 27 janvier 1892. 1° ScrexcEs rHYsiQuEes. — M. P. Muller : Evaporation de la couche de neige. Les observations sur la neige ont été entreprises en 1890-91 par le directeur de l'Observatoire d’'Ekaterinbourg ; elles ont été coor- données par M. Muller pour pouvoir répondre à cette question posée par plusieurs météorologistes : La couche de neige perd-elle plus d’eau par évapora- tion qu’elle n’en recoit par suite de la condensation de l'air humide qui s’opère dans son épaisseur, M. Muller compare la température de la neige pendant une cer- taine période avec celle du point de rosée, calculée d’après les observations faites pendant cette période sur l'humidité de l'air, Si la température de la couche de neige est plus élevée que celle à laquelle l'air est saturé de vapeurs d’eau, la neige s'évapore : par contre, si la gempérature de la neige est au-dessous de la tempéra- ture du point de rosée, la neige condense les vapeurs d’eau contenues dans l'air, Le résultat important des recherches de M. Muller est que, pendant l'hiver passé, à l'Observatoire d’Ekaterinbouryg, l’évaporation de la couche de neige qui couvrait la terre était beaucoup plus considérable que la condensation de la vapeur d’eau qui s'opérait dans son épaisseur; dans soixante- treize observations sur cent, la température de la sur- face de la neige était au-dessus de la température du point de rosée de l'air humide qui se trouvait au-dessus de cette surface. 29 SCIENCES NATURELLES, — M. A, Kovalevsky : Con- tributions à la connaissance de la formation du man- teau des Ascidies, D’après ce que l’on connaissait sur cette question jusqu’à présent, le manteau des As- cidies correspondrait, au point de vue morphologique, à l’épiderme des Vertébrés, avec cette différence tou- tefois qu'entre ses cellules isolées il se trouve dis- posée une grande quantité de matière gélatineuse qui écarte ces cellules l’une de l’auire. On supposait éga- lement que les cellules épidémoïdes perdaient leur caractère épitélial et finissaient par ressembler aux cellules du tissus conjonctif. Les recherches de M. Ko- valevski donnent une tout autre explication de la struc- ture du manteau. Ce savant a pu observer que les cellules du manteau ne proviennent nullement des cellules de l’épiderme, mais sont des cellules mésoder- miques, issues de la partie inférieure de l’épiderme et ayant pénétré dans la masse gélatineuse et amorphe formée préalablementet qui entoure la larve. Ainsi, d’a- près l’auteur,le manteau des Ascidies est formé au point de vue embryologique, d’un tissu conjonctif, malgré sa situation en dehors de l’épiderme. Le travail original sera accompagné de deux planches. — M. Famintsin présentela traduction allemande du rapport sur les pro- grès de la Botanique en Russie pendant l’année 1890. — M. Schmidt rappelle à l’Académie que M. le baron de Toll. chargé de coordonner les résultats scientifiques de l'expédition dans les iles de la Nouvelle-Sibérie, a déjà publié deux travaux dans les « Mémoires » : Sur les fossiles paléozoïques de Pile de Chaudron (Kotel- nyi) et sur la faune tertiaire de l'ile de la Nouvelle- Sibérie. Aujourd’hui le baron Toll vient d'achever un autre travail, sur les anciennes formations glaciaires dans l'archipel de la Nouvelle-Sibérie et de la partie du continent située en face, ainsi que sur les rapports que présente celte formation avec les gisements des ca- davres des Mammouths. Ce travail porte le titre : « La couche de glace fossile dans ses rapports avec les gi- sements des cadavres du Mammouth. » Il est connu depuis longtemps que dans la Sibérie septentrionale, ainsi que dans certaines régions de l'Amérique du Nord, on rencontre laglace dans la terre sous forme d’une ro- che. A.Middendroff appelle cette espèce de glace la glace du sol (Bodeneis) pour la distinguer de la simple terre gelée (Eisboden), si commune dans toute la région arctique. Les deux termes sont entrés dans le langage scientifique, mais malheureusement ils sont souvent confondus entre eux. M. de Toll propose un nouveau nom, celui de la roche de glace (Steineis) ou de glace fossile. Cette glace présente dans le nord-est de la Sibérie trois types distincts : le premier, très répandu, est la glace des fentes ou-fissures dans la terre, Leu second type est celui des formations glaciaires flu- viatiles de l'ancien temps, des couches de glaces dans les vallées, recouvertes ensuite d'une couche de terre, comme cela s’observe dans le bassin du fleuve Yana. Enfin le troisième type est celui des couches glaciales horizontales continues; il est très fréquent dans les iles de la Nouvelle-Sibérie et sur la terre ferme, située en face, Cette glace est recouverte par des couches de nouvelles formations argileuses, dans lesquelles on rencontre les ossements des animaux quaternaires et même leurs cadavres entiers. Au printemps, les eaux lavent en partie ces couches supérieures d'argile, et les os ainsi que les cadavres tombent au fond ; c’est ainsi qu'on les trouve alors, tout à fait au bas de la série des NOTICE NECROLOGIQUE 139 couches, tout près de la glace, dans laquelle ces fossiles n'ont jamais été renfermés. Les formations que M.de Toll avait découvertes dans les îles Néo-Sibériennessontcom- parables aux glaciers de l'Alaska, couverts de leurs moraines et si bien décrits par les géologues améri- cains. La conclusion est, que les couches horizontales de glace des îles Néo-Sibériennes ne sont que le reste d’un ancien el puissant glacier qui ne bougeait pas ou se serait arrêté,à un moment donné, dans sa marche. Il considère aussi comme des restes des anciennes mo- raines les arêtes de graviers roulés qu'il a rencontrées dans la plaine basse et sablonneuse entre l'ile de Thad- dée (Fadiéevski) et celle de Chaudron (Kotelnyi). Il y a une cerlaine corrélation entre les trois types de glace et les gisements des ossements et des cadavres de mammouths. Les restes d'un de ces animaux trouvés par l'auteur dans la vallée du Bar-Ourikh, à l’est de la ville d'Oust-Yansk, se trouvaient dans les formations argileuses qui recouvraient de puissantes couches de glace de la vallée ; c'était par conséquent le deuxième type de roche de glace. Dans la grande île de Liakhof, on à montré à M. de Toll l'endroit où a été trouvé le ca- davre du mammouth dans une grande fente qui avait in- téressé l'étage supérieur de l'argile aussi bien que lé- tage supérieur de glace; le cadavre était tombé au fond et fut conservé dans la glace; c’est un gisement dans une roche de glace du type intermédiaire entre le pre- mier et le troisième. Analysant en détail tous les ren- seignements qui concernent le gisement du fameux cadavre de mammouth rapporté parM.Adams de l’em- bouchure du Lena (cap Bykof), M,de Toll arrive à cette conclusion que ce cadavre est également descendu d'en haut au fond d’une fente, dans la glace, et s’est trouvé par conséquent «au milieu des glacons », sui- vant l'expression d’Adams, expression qui à donné lieu à un grand nombre de commentaires et de discus- sions savantes. Le travail de M. de Toll (160 pages in-#°) comprend cinq chapitres. Lepremier contient lhis- torique des connaissances anciennes sur la glace fossile, surtout d’après les données fournies par MM. Midden- dorf, Maidel et Lopatin; le deuxième renferme les observations de l’auteur sur la glace fossile dans les vallées du pays de Yana; le troisième chapitre est consacré à la description détaillée des formations gla- ciales dans les îles de la Nouvelle-Sibérie; le quatrième à la comparaison avec les roches de glace de l'Alaska ; enfin les conclusions générales tirées de toutes les données etobservations forment le cinquième chapitre. Le travail du baron de Toll, si intéressant et si original, soulève une des plus graves questions de géologie et renverse toutes les idées anciennes sur les formations glaciaires de l’extrème Nord. —M. Ivanovsky : Sur la « maladie mosaïque du tabac ». Contrairement à l’opi- nion de A. Meyer que la « rouille » et la « mosaïque » sont les diverses manifestations d’une seule et même maladie, Ivanovsky et Polovtsef ont constaté dans un ouvrage déjà publié dans les Mémoires de l’Académie (1890) que ce sont deux malaladies parfaitement dis- tinctes. La note actuelle d’Ivanovsky contient de nou- elles observations, faites en 1890, en Crimée, sur la maladie mosaique. O. BackLunn Membre de l'Académie. NOTICE NÉCROLOGIQUE A. DE QUATREFAGES Avec Quatrefages, mort le 12 janvier 1892, disparait une de ces personnalités marquantes de notre siècle que le grand public connaissait et estimait autant que le cercle, toujours restreint, des hommes de science. Pour apprécier dignement la part qu'il a prise dans le mouvement scientifique en France 1l faudrait dé- passer de beaucoup les limites d’une notice; aussi nous bornerons-nous à une simple et rapide esquisse de la longue et noble carrière parcourue par l’illustre savant, Jean-Louis-Armand de Quatrefages de Bréau était né à Berthezene, près de Valleraugue (Gard), le 10 fé- vrier 1810, d’une ancienne famille protestante, au mi- lieu de laquelle il reçut sa première éducation, Il fit ses études au collège de Tournon, puis à l'Univer- sité de Strasbourg où il fut recu docteur ès sciences mathématiques, après avoir soutenu deux thèses, l’une, le 19 novembre 1829, sur la Théorie du coup de canon, et une autre, le 23 décembre 1830, sur le Mouvement des aérolithes considérés comme des masses disséminces dans l'espace par l'action des volcans lunaires; en 1832, il fut recu docteur en médecine avec une thèse sur l'extroversion de la vessie. Tout en s'occupant de mé- canique, d'astronomie et de médecine, le jeune de Quatrefages ne négligeait pas les autres sciences ; il était, depuis 1830, aide-préparateur, puis préparateur, nommé au concours, de chimie, à la Faculté de méde- cine de Strasbourg. Il résigna cependant bientôt (1833) ces fonctions pour aller se fixer à Toulouse, où il com- menca à exercer la médecine, Mais il n'abandonnait pas pour cela ses études scientifiques; au contraire, nous le voyons s’adonner avec ardeur aux recherches zoologiques. Nous le voyons aussi participer au mouve- ment scientifique local, comme secrétaire du Congrès scientifique qui se tint à Toulouse en 1835, comme un des fondateurs du Journal de Médecine, ete. Après avoir professé, depuis 1838, les sciences naturelles à la Fa- culté des sciences de Toulouse, il vint à Paris où il con- quit son troisième doctorat, celui des sciences natu- relles (1840), avec deux thèses intitulées : Considérations sur les caractères zoologiques des rongeurs et sur leur denti- tion en particulier,et Observations sur les rongeurs fossiles. Ayant trouvé en H. Milne-Edwards un ami qui le dirigea dans ses débuts à Paris, il y reste et travaille au Muséum, tout en étant obligé, pour gagner sa vie, d'exercer la médecine et de faire des dessins d'histoire naturelle, Il consacre ses vacances aux voyages scien- üfiques sur nos côtes de l'Océan ou de la Méditerranée où 1l étudie sur le vif la faune marine. C’est de cette époque que datent ses premiers grands travaux de zoologie : De l'Organisme des animaux sans vertèbres des côles de la Mancnae (Annales des sciences natu- relles, 1844); Recherches sur le système nerveux, l'em- bryologie, les organes des sens et la circulation des anné- lides, terminées en 1850; les notes sur la Phosphorescence des Annélides et des Ophiures (1843), ainsi qu'une série de « Monographies » sur les animaux marins, sur la Synapte (1841), sur l'Edwardsia (1842), sur l'Eleuthérie (1842), l’Eolidine (1843), la Synhydre parasite (1844), publiées dans les « Comptes rendus de l’Académie » et dans les « Annales des sciences naturelles ». En 1844, il fait, en compagnie de H. Milne-Edwards et E. Blanchard, le voyage en Sicile, voyage resté célèbre dans l'histoire de la zoologie autant par ses ré- sultats que par la nouveauté de Pentreprise fort hardie pour l’époque. De Quatrefages nous en a laissé un récit charmant dans ses Souvenirs d'un naturaliste (Paris, 1854, 2 vol. in-12), Les observations qu'il avait faites pendant ce voyage ont été consignées dans le volume intitulé : Recherches anatomiques et zoologiques faites pendant un voyage en Sicile (Paris, 1846, in-4° avec 30 planches). Son grand travail, dont la plupart des matériaux ont été recueillis au cours de ce voyage : l'Histoire naturelle des Annélides et des Géphyriens, (2 vol. in-8° avec un atlas de 20 planches) faisant partie des Suites à Buffon, n’a paru que beaucoup plus tard, en 18 Dans l'intervalle, il a publié plusieurs monographies sur différents animaux marins vus et étudiés au cours de ses pérégrinations : sur les Tarets (1844-49), les Pla- naires (1845), l'Echiure (1847), les Némertiens (1846), les Hermeiles (1848). sur l’organisation et l’embryologie 140 NOTICE NECROLOGIQUE de Annélides (1844-50), sur les Noctiluques (1850), sur l'Amphioæus, (18*5), Dans plusieurs autres mémoires sur les Pygnogonides, sur certains Gastropodes (1842), etc. il a développé sa Théorie du phlébenterisme (Voir Ann. des se. nat, 2 série, t.1,1Vet X), c'est-à-dire d’une disposition anatomique du tube digestif qui permet aux produits de la digestion de se porter jusqu'aux organes respira- toires sans passer par un système circulatoire, Ces nombreux travaux ouvrirent à de Quatrefages les portes de l'Institut: il fut nommé, le 26 avril 185?, dans la section d'anatomie et de zoologie, à la place de Savigny. Mais, plus préoccupé des recherches scienti- phiques que des questions de la vie pratique, il n’était encore à ce moment que professeur au lycée Napoléon (aujourd'hui Henri IV). Ce n’est que 3 ans plus tard (le 13 août 1855), qu'il a pu obtenir une situation plus en rapport avec sa notoriété ; il fut nommé professeur au Museum à la chaire « d'anatomie et d'histoire naturelle de l’homme » transformée alors en celle d° « anthropo- logie ». Il aimait souvent à dire lui-même qu'il n’était point préparé pour cette chaire et que se voyant pressé par les nécessités de la vie,il a pris la première situa- tion scientifique qui se rapprochait le plus de ses études. Mais telle était la puissance d’assimilation et la force intellectuelle de cet homme qu'en quelques mois il s’est mis au courant de tout ce qui constituait alors la science, bien neuve encore de l’anthropologie. En 1856, il publia son premier travail d'anthropologie sur les angles faciaux et le goniomètre de Jacquart {C.-R. Acad.),suivi bientôt par la note sur l'angle pariétal (1858). D'ailleurs son esprit encyclopédique, ses études pélimi- naires des sicences mathématiques, physiques, médi- cales et naturelles, enfin sa culture littéraire lui don- naient un tel avantage, une telle assurance dans les méthodes de travail que bientôt il se trouva en tête du mouvement rapide créé par Broca qui amena depuis la constitution définitive de l'anthropologie comme science exacte, Il continuait encore quelque temps après sa nomination ses recherches zoologiques. Ainsi, il a par- couru Je Midi en 1858, chargé par l’Académie des sciences d'étudier les maladies des vers à soie; les ré- sultats de ces voyages sont consignés dans ses Eturles sur les maladies actuelles des vers à soie (Comptes ren- dus ete., 1859, avec 1 planche) et ses Nouvelles Recherches sur les maladies des vers à soie, Paris, 1860, in-4°, Mais à partir de l’année 1861, époque de l'apparition de son Unité de l'espèce humaine (traduit depuis en Russe), il s'adonna entièrement à l'anthropologie. En 1862, il pu- blia ses Métamorphoses de l’homme et des animaux; en 4866, les Polynésiens et leurs migrations (in-4°, avec cartes), enfin, en 1867, il fit à propos de l'Exposition universelle un Rapport sur les progrès de l'anthropologie où il résumait avec une clarté remarquable Pétat de la science à cette époque. Pendant cette période, plusieurs notes consacrées au préhistorique (sur 4 müächoire du Moulin-Quignon, sur les les amas coquilliers, ete.), ou à l'anthropologie physique (le Prognathisme, chez les Fran- cais, les maces Blanches (1861), Formation des races hu- maines mivtes (1867), etc.) ont paru dans les Comptes rendus de l’Académie, dans les Bulletins de la Société d'anthropologie ou dans la Revue scientifique. Plus tard, les travaux anthropologiques se succèdent rapides et féconds: Sur les microcéphales et sur l'origine de l'homme (1869), sur l’Acclimatement des races humai- nes (1870), enfin sur la Race prussienne (Paris, 1871, in-8°). Ce dernier ouvrage a provoqué de l’autre côté du Rhin,en même temps que des critiques acerbes, un grand nombre de recherches de la part des anthropolo- gistes allemands sur les populations anciennes et mo- dernes de leur pays. Notons aussi les études sur les Négritos et les Pygmées en général (Revue d'Antropologie et Comptes rendus de l'Académie, 872, etc.,) puis dans la Revue d'Etlmographie, 1882, et dans un volume à part, le Pygmées, 1887). Enlin tous ces travaux ont été digne- ment couronnés par la publication, en collaboration avec M. Hamy, de ce monument de l'anthropologie fran- çaise, les Crania ethica (Paris, 1873-82, 1 vol. de texte et 1 atlas in-4°), ouvrage qui restera longtemps une mine inépuisable de renseignements exacts et variés, coordonnés d’après des idées précises et nettement formulées. L’illustre savant à résumé d’une facon pour ainsi dire définitive et dogmatique ses idées générales sur l'anthropologie en même temps que sur beaucoup de questions connexes dans son volume l’Espèce hu- muine (Bibliothèque scientifique internationale), qui a eu de 1877 à 1890 huit éditions et a été traduit en anglais, en allemand, en italien. D'autre part, il a réuni en un seul faisceau tout ce qui concerne plus spécia- lement les races humaines, dans un autre ouvrage im- portant, l’Histoire générale des races humaines,) Paris, 1887-90, in-8°, avec cartes et figures. Cet ouvrage forme le premier volume de la « Bibliothèque ethno- logique », éditée par Hennuyer, que de Quatrefages a fondée avec M. Hamy et qui devra embrasser dans une série de volumes d'ensemble et de monographies la description de toutes les races humaines, Il a donné également un volume de vulgarisation sur ce sujet: « Hommes fossiles et hommes sauvages, Paris, 1884, in-8°,» L'étude de l'homme avait entraîné de Quatrefages plus loin, vers la recherche des problèmes généraux de la biologie. Dès que parut (en 1859) le célèbre ou- vrage de Darwin sur l’origine des espèces, des discus- sions mémorables se sont produites à la Société d’an- thropologie de Paris, alors nouvellement créée par Broca, discussions auxquelles Quatrefages prit une part active. Dès le débutils’est montré méfiant pour la nouvelle doctrine, et jusqu’à sa mort il est resté son adversaire loyal, courtois, mais résolu, Il résuma tout d’abord ses idées générales dans son Histoire de l’homme; Conférences faites à l'asile de Vincennes (1868), puis avec beaucoup plus d’ampleur dans son livre Charles Darwin et ses précurseurs francais (1870). Plus tard, dans une série d'articles publiés dans le Journal des savants, il a donné des études critiques sur un grand nombre d’ou- vrages de Darwin et de Wallace concernant la théorie transformiste, Enfin, toujours attentif, malgré son grand âge, aux moindres changements dans la direction des idées scientifiques, il s’est vivement occupé dans ces derniers temps des questions du néo-Lamarkisme et d’autres théories provoquées par les modifications successives qu'a subies, comme tout autre, la théorie de Darwin. Le volume où il donnait le résultat de ses études sur les « successeurs de Darwin » était déjà à moitié imprimé quand la mort vint frapper l’infati- gable travailleur, M. Hamy s’est chargé de corriger les épreuves de ce volume qui ne va pas tarder de paraître. M. de Quatrefages était commandeur de la Légion d'honneur, dignitaire de plusieurs ordres étrangers, membre de nombreuses académies et sociétés savantes de France et de l'étranger, président des différents congrès internationaux, etc. Il était comblé d’honneurs, mais il restait aussi simple et abordable que du temps où il commencait sa carrière. Tous ceux qui l'ont connu, jusqu'à ses adversaires scientifiques, étaient unanimes pour reconnaître son naturel bon et affable et son caractère essentiellement droit et honnète. J. DENIKER, Docteur ès sciences. Erratum. — Dans l’article de notre éminent colla- borateur, M. V. Dwelshauvers-Dery, publié en notre dernier numéro (page 89) : Page 89, 1'e colonne, 9e ligne : au lieu de : « Ce phé- nomène se présente ordinairement en partie pendant la détente, et utilement quoique avec une certaine perte pendant l'émission au condenseur; pour le reste, c’est une perte totale, » Lisez : « Cette restitution s’opère ordinairement, pour une part, pendant la détente et utilement quoique avec une certaine perte; et, pour le reste, pendant l'émission au condenseur, el ici c’est une perte totale, » Page 92, 2 col., au lieu de : « Le réservoir reçoit ainsi R calories qui sont restituées à l’intérieur. » Lisez : « Le réservoir recoit ainsi R cal. qui sont restituées en majeure partie à l’intérieur : I calories... » Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER —_—_—_—_—_—_————————_—_——— —————————…—.——.—.——…—…—…—…— —_———.—.—.——…—…—"—…—…————…—_—…————————_— Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 3° ANNÉE N° b) 15 MARS 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCE PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES PROGRÈS RÉCENTS DE L'ENDOSCOPIE VISCÉRALE L'œil étant le plus précis de nos organes des sens, il n’est pas étonnant que la médecine ail cherché à étendre le plus possible le champ de son intervention dans le diagnostic des différentes ma- ladies et à rendre accessibles à la vue les cavités les plus profondes du corps humain. Ces tenta- tives ne donnèrent tout d’abord que des résultats bien imparfaits; mais, grâce aux récents progrès de l'instrumentation optique et de l'éclairage électrique, les procédés d'exploration interne ont pris depuis quelques années une importance con- sidérable et sont enfin devenus pratiques. L’endoscopie, destinée à rendre lumineux et accessibles à la vue les canaux et les cavités obs- cures de l’organisme, étant prête à entrer parmi les moyens de diagnostie courants dont doit se servir le médecin, il nous a semblé utile d'exposer l'état actuel de la science à cel égard ; nous compléterons cette étude par l'appréciation des deux autres pro- cédés qui en dérivent : la photographie des images endoscopiques et la diaphanoscopie. L'endoscopie présente deux variétés dites en- doscopie à lumière externe etendoscopie à lumière interne, suivant que l'éclairage est obtenu par les rayons réfléchis d’une lumière extérieure ou par l'introduction d’un foyer lumineux même de l’organe à examiner. au centre I. — ENDOSCOPIE À LUMIÈRE EXTERNE Les premières tentatives d’endoscopie à lumière externe remontent au commencement de ce siècle (1807), et l'honneur en revient à Bozzini de Franc- fort qui eut le premier l’idée de faire construire un appareil pour l'éclairage des canaux et des ca- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, vités du corps humain. Après lui, bien des auteurs suivirent la même voie : Ségalas (1826), J. Fischer (1827), Avery (1840), Malherbe (1842), Espezel (1843), Hoffman (1845); mais leurs appareils étaient imparfaits, etils ne surent pas en obtenir de résul- tals pratiques ; il n’en fut pas de même des tenta- tives de Désormeaux (1855) qui eurent un grand retentissement et qui furent le point de départ de nombreux perfeclionnements que nous allons avoir à signaler dans l'histoire récente de l'endoscopie. Les variétés d'endoscopie à lumière externe, qui avaient l'avantage de s'adresser à des organes pro- fonds et largement accessibles, firent des progrès rapides et arrivèrent promptement à une véritable perfection : nous voulons parler de l’opthalmosco- pie, de la laryngoscopie, de l’otoscopie et de l’ex- ploration oculaire du vagin et du rectum. Ces pro- cédés sont tellement connus que nous les passerons sous silence pour étudier seulement les varétiés d'endoscopie qui s'adressent à des cavités plus profondes et moins facilement accessibles, telles que l'urèthre, la vessie, lœsophage et lutérus. Les appareils destinés à l'examen de ces diverses cavités étant, à peu de choses près, semblables, nous les réunirons dans une seule description. L'appareil de Désormeaux (fig. 1, page 142) était spécialement construit pour l'examen de l’u- rèthre et de la vessie. Il se composait d’une lampe dont les rayons étaient renvoyés par un jeu de mi- roirs dans un long tube destiné à pénétrer dans le canal uréthral. Cet appareil lourd et d’un pouvoir éclairant minime est aujourd’hui complètement abandonné. Grunfeld, de Vienne, eût le grand mérite de mon- 5 142 D' J. JANET. — LES PROGRÈS RÉCENTS DE L'ENDOSCOPIE VISCÉRALE trer que le principal défaut de l’endoscope de Désormeaux était de réunir la source lumineuse au tube endoscopique, ce qui constiluait un en- semble difficile à manier par la répercussion qu'éprouvait ce tube de tous les mouvements im- primés volontairement ou involontairement à la lampe; il eut l'idée de séparer complètement ces deux parties de l'appareil et de réduire l'outillage compliqué de Désormeaux à un simple tube libre et à un miroir frontal pour y refléter la lumière. Les sources lumineuses employées par lui sont multiples : la lumière solaire, la flamme d'une lampe à huile, à pétrole ou d'un bec de gaz; les rayons lumineux qui en partent sont recueillis sur le miroir frontal, percé d'un trou central pour le passage du rayon visuel et reflétés en un faisceau sage des rayons visuels. Une pelite lampe Edi- son de huit volts est fixée à une tige métallique, reliée elle-même par une charnière au bord su- périeur du miroir ; celle petite lampe peut ainsi osciller autour du foyer du miroir; suivant la position qu’elle occupe, ses rayons sont reflétés en un cône lumineux plus ou moins allongé, dont le sommet vient former une petite surface très vivement éclairée qu'il est facile de faire coïncider avec l'extrémité du tube endoscopique. 2° Le photophore de Stein. Cet appareil est for- mé d’un petit cylindre métallique maintenu entre les deux yeux de l'observateur par un ressort fron- tal. Au centre de ce cylindre se trouve une petite lampe Edison dont les rayons sont réunis par une lentille plan-convexe placée à l'extrémité du ey- Fig. 1. — Endoscope de Désormeaux. lumineux qui est projeté à l’intérieur du tube en- doscopique. Ce procédé très simple est encore employé au- jourd'hui par Grunfeld ; il est surtout pratique pour la démonstration. De grands perfectionnements ont été récemment apportés à cette méthode: ils ont surtout consisté dans la substitution de la lumière électrique aux sources lumineu- ses précédemment employées : les principaux photo- phores électriques utilisés aujour - d'hui sont les sui- vants : 1° Le photo- phore de Clar (fig. 2). Cet appa- reil se compose d'un miroir frontal forlement concave fixé à la tête de ou par un ressort trous pour le pas- Fig. 2. — Photophore de Clar. l'observateur par un bandeau métallique, et percé de deux lindre, en un faisceau convergeant que l’on utilise comme celui de l'appareil de Clar. 3° Le panélectroscope de Leiter et l'électroscope de Casper. Ces appareils ont le tort de revenir à l’ancien procédé de Désormeaux, en réunissant la source lumineuse au tube endoscopique ; ils com- prennent un photophore électrique, sur lequel vient se greffer le spéculum. Le photophore lui- même se compose d’une petite lampe verticale, fixée à l'extrémité d’un manche d'ébèneet dont les rayons sont renvoyés dans le spéculum par un miroir incliné dans l'appareil de Leiter ou par un prisme dans l'appareil de Casper. Les tubes endoscopiques eux-mêmes varient sui- vant le but que l’on se propose : pour l’urêthre et pour l'utérus, on utilise les tubes de Grunfeld : ce sont de simples tubes ouverts aux deux bouts, en métal ou en ébonite, dont l’oculaire s’élargiten en- tonnoir ; un mandrin cylindrique et arrondi à son extrémité facilite l'introduction de ces tubes: il est retiré naturellement pendant l'examen. Pour l’æsophage, on se sert d’un long tube rectiligne construit par Leiter de Vienne. Pour la vessie, les tubes endoscopiques doivent être garnis d’une petite glace à leur extrémité, D' J. JANET. — LES PROGRÈS RÉCENTS DE L'ENDOSCOPIE VISCÉRALE afin d'éviter l’'épanchement des liquides contenus dans cette cavité. Nous avons fait construire par M. Reiner, de Vienne, un endoscope vésical dou- ble (fig. 3) qui présente l'avantage de pouvoir être utilisé comme endoscope fermé ou comme endos- cope ouvert ; il est en effet formé d’un tube interne A garni d'une glace et d’un tube extérieur ouvert B. Nous verrons plus loin quels sont les cas où cet appareil peut rendre des services. Pour compléter l'étude du matériel instrumental de l’endoscopie à lumière externe, il nous suffira de nommer rapidement les stylets, pinces, ciseaux, 143 copie à lumière externe, quelquefois utile pour l'examen de la vessie, n’est même plus applicable à l'estomac. Nous verrons que, dans ce cas, elle est avantageusement suppléée par l’endoscopie à lu- mière interne. Cette restriction étant faite, examinons les résul- tats diagnostiques et thérapeutiques que peut nous fournir l’endoscopie à lumière externe dans les maladies de l’urèthre, de l’œsophage et de la vessie : 1° Urèthre. — Le tube endoscopique, garni de son mandrin, aseptique et soigneusement huilé, estin- Fig. 3, — Endoscope double de Janet. porte-tampons, porte-caustiques, galvanocautères, que nous devons à Grunfeld. La description précédente permettra de com- prendre facilement les résultats que l’on obtient des appareils endoscopiques à lumière externe. Ce procédé a le grand avantage d'éclairer un point donné d'un canal ou d’une cavité profonde et de permettre le traitement local, direct, de ce point, sous le contrôle de l’œil ; il nous donne la possibilité d’avoir recours à une véritable thérapeutique de précision des cavités internes du corps humain ; mais 1l présente un grand inconvénient : c’est de ne laisser voir qu'un champ très restreint dela sur- face à observer : il ne montre que la petite portion de muqueuse qui vient se placer au devant de l’ori- fice du tube endoscopique. Ce champ peut suflire pour l'examen des canaux tels que lurèthre ou l'æsophage, ou des cavités étroites telles que la cavité utérine; mais il peut devenir insuffisant pour l'examen des larges cavités; en effet, l’endos- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES 1892, troduit dans l’urèthre d'après les procédés du cathétérisme rectiligne; pour l’examen complet de toute la muqueuse uréthale, il doit être conduit jusqu’au col de la vessie, mais sans le dépasser, afin d'éviter la pénétration de l'urine à l’intérieur de l'instrument. Cela fait, on retire le mandrin, et on projette le faisceau lumineux du photophore dans le tube endoscopique. La surface de muqueuse encadrée par lPextrémilté de ce tube se présente aussitôt à l'œil de l'observateur qui peut en discer- nerles moindres détails. La figure ainsiobtenue offre des caractères variables suivant les points de l’urè- thre observés. Le col vésical apparait sous la forme dite en cul de poule; au centre, un point noir indique l'orifice de ce col; etde ce point noir partent des plis radiés produits parle froncement de la muqueuse. Un reflet circulaire disposé en anneau autour du point central (figure centrale de Grunfeld) est pro- duit par la réflexion du rayon lumineux sur le som- met du bourrelet que vient former la muqueuse à se J 144 D’ J. JANET. —- LES PROGRÈS RÉCENTS DE L'ENDOSCOPIE VISCÉRALE l'extrémité de l'instrument. Cette position, dans laquelle la figure centrale occupe l'axe de l’endos- cope, estdite position centrale ; on nomme positions excentriques celles danslesquellesla figure centrale se rapproche d’un des bords de l'endoscope, et po- sitions pariétales celles dans lesquelles la figure centrale disparait complètement et dans lesquelles l'extrémité du tube endoscopique n'encadre plus qu'une seule des parois uréthrales. Enfin on ap- pelle entonnoir le petit infundibulum que forme la muqueuse à l'extrémité de l'instrument dans les positions centrales. Si l’on retire progressivement l’endoscope, en le braquant à chaque mouvement de recul sur tous les points de la surface encadrée, on obtient une notion très exacte de toutes les régions de la mu- queuse uréthrale; parmi toutes les images ainsi obtenues, nous ne signalerons que les principales. En partant du col vésical et en retirant lente- ment l’endoscope, on ne tarde pas à voir surgir de la paroi inférieure une petite saillie conique ro= sée, lisse, encadrée à sa partie supérieure par un croissant de muqueuse plissée, plus foncée : c’estle veru-montanum; à son sommet, il présente une petite fente verticale qui n'est autre que l'orifice du sinus prostatique; dans des cas exceptionnels on peut voir un peu au-dessous deux petits orifices, que l’on peut rendre plus manifestes en badigeon- nant le veru montanum avec une solution colorée : ce sont les orifices des canaux éjaculateurs (fig. 4, UE En retirant un peu plus l’endoscope, on arrive dans la portion membraneuse de l’urèthre, qui n’est autre que le véritable sphincter de la vessie; elle — linages endoscopiques de lurèthre, Fig. 4. se présente comme le col vésical sous la forme dite en cul de poule à figure centrale ponctiforme d’où partent des plis radiés. Iei se termine l’urèthre postérieur. Plus loin encore on arrive au bulbe uréthral, partie la plus profonde de l’urêthre antérieur ; il apparail sous une forme bien caractéristique : la figure centrale est verticale: c’est une longue ligne noire qui traverse presque tout le champ de l’ins- trument et d’où partent des plis radiés latéraux. Le reflet, par suite de cette disposition, affecte une forme ovalaire (fig. 4, n°2). La lumière de l’u- rèthre est donc aplatie transversalement dans la région bulbeuse. Cet aplatissement résulte de la compression latérale des muscles ischio-caver- neux et bulbo-caverneux. Plus loin encore nous arrivons dans l’urêthre pénien qui présente un aspect à peu près uniforme depuis le bulbe jusqu’à la fosse naviculaire. Ici la figure centrale affecte la forme d’une fente trans- versale d’où partent les plis radiés (fig. 4, n° 3); la teinte de la muqueuse est plus pâle que dans les parties précédentes, l’entonnoir est plus profond ; de loin en loin on aperçoit, de préférence sur la paroi supérieure, de petiles cavités en forme de boutonnières qui ne sont autres que les orifices des lacunes de Morgagni, cavités glandulaires de l'urèthre antérieur (fig. 4, n° 5). En retirant encore l’endoscope, on arrive à la fosse naviculaire dont la figure centrale prend une disposition triangulaire et dont la muqueuse est très pâle (fig. 4,n° 4); enfin, au méat, qui affecte la forme d'un petit entonnoir aplati à grand axe ver- tical. Chez la femme l'urèthre est bien plus court el présente d’un bout à l’autre un aspect assez sem- blable à celui qu'offre la portion membraneuse de l’homme. La figure 6, n° 3, représente le col vésical de la femme un peu entrouvert et examiné avec un endoscope fenétré, ce qui permet d'apercevoir la couleur jaune de l'urine à travers la figure centrale. Avecun bon éclairage et une vessie propre on peut voir par cel orifice les vaisseaux de la paroi posté- rieure de la vessie. Quand on a une connaissance exacte de l’as- pect que présente la muqueuse uréthrale à l'état normal, il est facile de se rendre compte de ses modificalions pathologiques. Les principales sont les suivantes : les varices et les ufcérations (rha- gades) du col vésical qui se manifestent sous la forme de petites ampoules bleuàtres et de petites érosions. Ces dernières occupent de préférence le fond des plis de la muqueuse. L’endoscope permet decaulériserces lésionssous le regard el de ne faire porter lacautérisation que sur les parties malades. L'hypertrophie du veru montanum, lésion très fré- quente chez les malades qui ont longtemps souf- lert d’une uréthrite postérieure, esttrès comparable à l'hypertrophie amygdalienne qui accompagne si souvent les pharyngites anciennes. Cette affection à pour conséquence de distendre les pelits sphine- ters des canaux éjaculateurs qui deviennent béants et laissent échapper la liqueur séminale à la moindre poussée pendant la défécation ou même pendant la miction ; c’est une des causes les plus fréquentes de la spermatorrhée ; elle est très heu- reusementmodifiée parle traitementendoscopique, D' J. JANET. — LES PROGRÈS RÉCENTS DE L'ENDOSCOPIE VISCÉRALE Lio qui permet de caulériser énergiquement le veru montanum à la teinture d’iode pure, au nitrate d'argent en crayon, ou même au galvanocautère, ce qui ne tarde pas àle ramener à son volume pri- mitif en rendant aux sphinctiers éjaculateurs toute leur puissance. L'hypertrophie de la prostate elle-même se ma- nifeste par les saillies latérales ou médianes de la muqueuse; l’endoscope, dans ce cas, permet de constater directement l'obstacle qui s'oppose à la sortie de l’urine ou au passage des sondes ; il peul conduire l'opérateur à s'attaquer directement à cet obstacle, soit par des injections interstitielles de teinture d'iode, pratiquées à l’aide d’une longue ai- guille, soit par des ponctions galvanocaustiques ou électrolytiques. Ce genre de traitement estencore à l'étude. L'uréthrile chro- nique postérieure est caractérisée par l'aspect rouge fon- cé, par l’élat sai- gnant de la mu- queuse, par le gon- flement catarrhal et les inégalités du ve- ru montanum; elle peut bénéficier de cautérisalions en- doscopiques éten- dues à toutes les parties malades à l'aide de solutions plus faibles que les précé- dentes. L'uréthrite chronique antérieure présente des lésions très variées qui ont été très bien éludiées par Grunfeld et Oberländer : gontlement simple, hyperémie, granulations, fissures, inflammation des lacunes de Morgagni, épaisissement épithé- lial, ete. L’endoscope permet de constater exac- tement la situation de ces lésions, leur étendue, leur gravité ; il permet de les cautériser avec pré- cision, à la condition qu’elles soient bien localisées. mais il ne faut y recourir que si les moyens théra- peutiques courants n’ont pu amener leur guérison. Enfin l'endoscope montre certaines lésions uré- thrales qu'aucun autre moyen ne pouvait déceler, comme les polypes de lurèthre (fig. 4, n°°6 et 7), les calculs des lacunes de Morgagni (nous croyons être le premier à avoir constaté un cas de ce genre), l’orifice interne des fistules urétrales (fig. 4, n°8), les brides urétrales signalées par Grunfeld, et il met entre nos mains, grâce aux instruments inventés par ce dernier auteur, un moyen sûr d’extirper ces polypes el ces calculs, de Fig. 5. — (Œsophagoscopie. reséquer ces brides et de cautériser ces orifices fistuleux. Les rétrécissements de l’urèthre présentent une muqueuse pâle, résistante au toucher, une figure centrale irrégulière et béante, un effacement com- plet de l’entonnoir ; il faut naturellement pour les examiner employer des endoscopes très étroits. Antal a fait construire un aéro-uréthroscope qui permetde dilater par une injection d'air le vestibule du rétrécissement, et rend ainsi accessible à la vue la partie étroite de ce rétrécissement, où le tube endoscopique ne pouvail pénétrer, Grâce aux procédés endoscopiques, on peut pra- tiquer sous le regard le cathétérisme de rétrécis- sements difficiles à franchir, à condition que l’en- doscope puisse ar- river jusqu'à l’obs- lacle lui-même; il est malheureuse- ment souvent arrè- té par d’autres ré- trécissements plus larges situés en a- vaut de la région infranchissable. Grunfeld recom - mande même, dans le cas où l’urèthro- tomie interne est jugée nécessaire de la pratiquer sous le regard, à l'aide d’un petit bistouri conduit dans le tube endoscopique. Les corps étrangers de l’urèthre sont facilement constatés el extraits, grâce à l’endoscope ; ce mode d'extraction est très précieux, car le corps étran- ger, S'il est rugueux, est entrainé à travers le tube endoscopique el ne risque pas de blesser la mu- queuse uréthrale. 2 Œsophage. — L'examen endoscopique de l’œ- sophage se pratique exactement de la même façon que celui de l'urèthre ; mais le tube endoscopique, tout en restant rectiligne, est plus gros et plus long. La manœuvre de cet appareil (æsophagos- cope de Leiter) estreprésentée par la figure 5. Ses indications sont néanmoins beaucoup plus res- treintes que celle de luréthroscope; elles se rédui- sent à la constatation et à l’ablation des corps étrangers, à l'examen et au traitement local des rétrécissements cicatriciels et des tumeurs de ce conduit. Dans le cancer de l'æsophage il peut per- mettre de voir la tumeur et d’en détacher un frag- ment pour les besoins de l’examen histologique, ce qui donne des notions très utiles pour le trai- tement ultérieur. 146 D' J. JANET. — LES PROGRÈS RÉCE! S EE L'ENDOSCOPIE VISCÉRALE 30 Vessie. — Pour faire un bon examen endosco- pique de la vessie, il est très utile que cette cavité soit bien lavée et remplie d’un liquide très trans- parent. Ces précautions élant prises, on introduit dans la vessie l’endoscope fenêtré de Grunfeld, droit ou courbe, de 016 de longueur pour l'homme, droit, de 010 de long pour la femme. On peut ainsi voir la petite portion de la muqueuse vésicale qui se trouve située immédiatement en face de l'instrument. Par quelques mouvements de latéra- lité et de va-et-vient, on peut voir une étendue assez considérable de la surface vésicale ; la région qui avoisine le col ne peut être vue avec les endos- copes ordinaires; mais Grunfeld a fait construire un tube garni à son intérieur d'un prisme (Fen- sterspiegelendoscope) qui permet à la vue de s'é- tendre sur la moitié antérieure de la vessie qui était restée inaccessible à l'appareil précédent. Malheureusement ce dernier instrument perd beau- coup de lumière et ne peut rendre de services qu'à la condition d’être très court ; aussi n’est-il employé que chez la femme. La surface de muqueuse observée est d’un blanc rosé, parcourue par un fin lacis de vaisseaux san- guins (fig. 6, n° 1), -parmi lesquels il est possible de distinguer les artères êt les veines et même de compter les battements artériels. La région urété- rale présente un intérêt tout particulier : l’orifice Fig. 6.—Images endoscopiques de la vessie, d'après Grunfeld. de l’uretère forme une petite boutonnière d’où l’on voit jaillir par saccade le jet de l'urine qui pénètre dans la vessie; de pelits vaisseaux sanguins ram- pent autour de cet orifice (fig 6, n° 2). Si l’on veut examiner de plus près la muqueuse vésicale, ce qui devient nécessaire quand le milieu vésical est trouble, il suffit de coller directement contre elle la glace de l’endoscope; en employant notre en- doscope double (fig. 3), on peut dans cette position retirer le tube fenètré central et voir au fond du tube ouvert extérieur une pelite portion de mu- queuse à intermédiaire. Si l’on répète la même manœuvre, après avoir accolé nu, Sans aucun l'extrémité de l’endoscope sur la région urétérale, on peut encadrer l’orifice de l’uretère avec le tube externe et regard. avoir cet orifice directement sous le Nous éludierons plus loin les diverses lésions vé- sicales et leur examen endoscopique ; il nous suf- fira de rappeler ici que l’endoscope vésical à lu- mière externe est surtout utile chez la femme, qui admet des tubes gros et courts, mais qu'il est aussi utilisable chez l’homme, bien que dans ce cas il donne renseignements beaucoup moins précis. Son principal avantage est de permettre l'examen d’une vessie vide et même sale, avantage que ne présente pasl’endoscopie àlumière interne. L'examen de la paroi vésicale atteinte de cystite n'est guère possible qu'avec les endoscopes à lu- mière externe à cause de la grande sensibilité de la vessie, de sa faible capacité et du trouble de son contenu. Dans ce cas, la muqueuse vésicale apparait d’un rouge violacé,les vaisseaux sanguins ne sont plus visibles ; de loin en loin on voit des ecchymoses,des ulcérations superficielles, de petits foyers hémorragiques, d'où s'élèvent de légers nuages sanglants, enfin de nombreux flocons pu- rulents fixés à la paroi. Les tumeurs vésicales seront examinées avec beaucoup plus de profit avec les cystoscopes à lu- mièreinterne ; néanmoins leur examen à la lumière externe, à côté de gros inconvénients (surtout chez l’homme), présente de réels avantages. Grâce à ce dernier procédé, on peut constater leur présence même dans une vessie très saignante, même quand elles remplissent une grande partie de la cavité vésicale; si l’on utilise notre endoscope, on peut en outre accoler l'appareil contre la surface de la tumeur, retirer le tube interne, détacher un fragment de celte tumeur pour l'examen histo- logique, et mème l’extirper ainsi en totalité par les voies naturelles, comme est arrivé à le faire des Grunfeld avec son endoscope vésical ouvert. La figure 7 représente une tumeur vésicale que nous ayons constatée el dessinée sur le vivant. Elle occupait la partie latérale droite de la d’un homme. La représentation que nous en donnons a été obtenue par la réu- nion de plusieurs champs endoscopi - ques donnés par les déplacements de l'ins- vessie trument. Cette tu- meur a été apérée par notre excellent collègue Albarran, et nous avons pu COons- tater, une fois la ves- sie ouverte, l'exactitude des données de l’endos- cope. Fig. 1. — Tumeur vésicale vue à l'endoscope de Grunfeld. L’endoscopie à lumière externe peut également servir pour la constatation et l'ablation des corps D' J. JANET. — LES PROGRÈS RÉCENTS DE L'ENDOSCOPIE VISCÉRALE 147 ‘étrangers de la vessie et enfin, comme nous l’a- vons fait pressentir plus haut,pour le cathétérisme direct des uretères chez la femme. Elle a donc une réelle utilité, et il ne faut pas chercher à lui subs- tituer entièrement la cystoscopie à lumière in- la vessie, clarté du milieu vésical, petitesse rela- tive de la tumeur. Loin de nous la pensée de dénigrer la eystoscopie à lumière interne, qui est un procédé excellent; nous dirons même de choix, pour l'examen com- mm” nd st" Fig. 8. — Cystoscope n° 1 de Nitze. terne dont nous parlerons plus loin. Cette der- nière est évidemment bien plus avantageuse ; mais elle est plus complexe,et dans bien des cas elle ne donne rien où l’endoscope à lumière externe aurait donné un renseignement utile. En effel, nous le répétons, la cystoscopie à lumière externe peut plet d'une vessie; mais nous ne voudrions pas que l’on abandonnät complètement, surtout chez les femmes, la cystoscopie à lumière externe qui, bien que plus modeste, peut souvent donner d’excel- lents renseignements. Nous ne disons rien de, l’utéroscopie, bien que Fig. 9, — Cystoscope à pince de être employée dans une vessie vide ou presque vide, irritable et saignante, même si le milieu vé- Sical est trouble, car il est toujours possible d'appliquer la glace de l'instrument directement contre la muqueuse ou la tumeur. Ces avantages ne se rencontrent pas dans la cystoscopie à lu- mière interne, qui, comme nous le verrons plus loin, demande tout un ensemble de circonstances favorables, souvent difficiles à réunir: tolérance de Nitze. l'examen direct de la cavité utérine relève de l'endoscopie à lumière externe, parce que cette variété d'endoscopie n'a pas encore donné résultats suffisamment précis ; elle mérite d’être mieux étudiée qu'elle ne l’a été jusqu'à présent. de II. — ENDOSCOPIE À LUMIÈRE INTERNE L'endoscopie à lumière interne a pour principe de porter une petite lampe électrique dans le canal 148 D' J. JANET. — LES PROGRÈS RÉCENTS DE L'ENDOSCOPIE VISCÉRALE ou la cavité que l’on veut examiner. Pour l’explo- ralion des canaux, ellene présente aucun avantage sérieux sur l’endoscopie à lumière externe; elle lui est même très inférieure à cerlains points de vue ; au contraire, pour l'examen des cavités viscérales, elle lui est infiniment supérieure, parce qu'elle permet d'adapter au tube endoscopique un jeu de lentilles, gràce auquel l'œil peut embrasser un champ infiniment plus vaste que celui des endos- copes à lumière externe. Nous n'’insisterons donc pas sur son application à l'examen de l’urèthre et de l'æœsophage; mais nous nous étendrons davantage sur son rôle dans l’ex- ploration de la vessie et de l'estomac. 1° Urèthre. — Oberländer, de Dresde, a fait cons- truire un tube endoscopique uréthral qui porte à son extrémilé terminale une pelile lampe à incan- descence destinée à projeter directement ses rayons sur la surface à examiner. Cet appareil donne peut- être plus de lumière que les endoscopes à lumière Rocher ; mais, comme ils ressemblent beaucoup aux appareils de Nitze et qu'ils présentent plusieurs inconvénients,sans présenter tous leurs avantages, nous les passerons sous silence pour nous borner à décrire la méthode endoscopique de Nitze !. Le eystoscope de Nitze, que représente la figure 8, se compose d’un long tube coudé à son extrémité; son oculaire forme un entonnoir au-dessous du- quel une double rainure reçoit une pince quiamèêne à l’appareil les deux fils d’une batterie électrique. Le bec de l'instrument porte une petite lampe Edison (e;, en (b) se trouve une petite fenêtre occupée par un prisme. Ce prisme recoit les images d’un large champ circulaire éclairé par la lampe eetles renvoie à angle droit dans le tube principal où elles sont recueillies et conduites à l'œil de l'observateur par un système de trois loupes plan-convexes. Cet appareil est le cystoscope n° 4 de Nitze ; son cystoscope n° 2 présente sa fenêtre au niveau du coude de l'instrument, la lampe occu- lis, 10. — Cystoscope de Leiter modifié par Brenner pour le cathétérisme des uretères. externe; mais il présente un double inconvénient : 1° la petite lampe occupe un certain espace qui obstrue évidemment en partie le champ déjà mi- nime du tube endoscopique ; 2 cette lampe déve- loppe une quantité de chaleur suffisante pour né- cessiter sa réfrigération par une circulation d'eau ; ce dernier desideratum épaissit encore la paroi de l'instrument et entraine tout un attirail incom- mode. Pourquoi tant decomplications pour arriver à un résultat à peine égal à celui que nous donne l'appareil si simple de Grunfeld? 2° Œsophage. — Leiter a construit autrefois (ca- logue de 1880) des æsophagoscopes d’une compli- cation inouïe qui ulilisaient comme l’uréthroscope d'Oberländer la lumière interne avec cireulation d’eau ; il a depuis longtemps renoncé à ce procédé qu'il remplace aujourd'hui très avantageusement par son œ@sophagoscope à lumière externe (fig. 5). 3° Vessie. — Les reproches que nous venons d'a- dresser aux deux appareils précédents ne s’ap- pliquent plus à la cystoscopie qui constitue le vérilable triomphe de l’endoscopie à lumière in- terne. L'honneur de cette belle découverte revient à Nitze, de Berlin, qui publia en 1879 ses premières recherches sur ce sujet, et qui depuis est arrivé à donner à ses appareils une perfection véritable- ment remarquable. D'autres instruments du même genre ont élé construits par Leiter et Boisseau du pant une position diamétralement opposée à celle qu'elle occupait dans le cystoscope n° 1. Son cys- toscope n° 3 porte sa lampe dans le même point que le cysloscope n° 1, mais sa fenêtre se trouve siluée sur la face postérieure du bec au point d. Nilze a apporté à cet appareil de nombreux per- fectionnements : il lui a annexé tout d’abord une circulation d’eau qui permet de laver la surface du prisme et de changer le liquide contenu dans la vessie, quand celui-ci devient trouble. Tout récem- ment, il lui a adapté une pince coupante des- linée à sectionner les tumeurs que l'instrument à permis de constater dans la vessie (fig. 9). Il nous promet de plus des cystoscopes qui permettent de porter des caustiques ou des caulères galvaniques sur les points malades de la paroi vésicale et d’en- layer d’une anse de fil de fer ou d'une anse galva- nique le pédicule des tumeurs. Citons enfin un dernier perfectionnement de cet appareil que Brenner a fait réaliser par Leiter, de Vienne: ce perfectionnement consiste à annexer au cystoscope (fig. 9,type n° 2 de Nitze) un canal H qui vient s'ouvrir au-dessous de l'objectif; par ce canal peut s’introduire une fine sonde K que l'on peut conduire sous le regard dans les uretères (fig. 10). La manœuvre de ces instruments exige évidem- 1 Nitze, Lehrbuch der Kystocopie. Wiesbaden, 1889, D' J. JANET. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE L'ENDOSCOPIE VISCÉRALE 149 ment un peu d'expérience; mais elle est, somme toute, assez simple ; la vessie est soigneusement lavée à l’eau boriquée, puis on y introduit 150 cen- timètres cubes d’eau boriquée ou phéniquée tiède bien claire, et une petite bulle d’air qui viendra marquer le sommet de la vessie et fournir un ex- cellent point de repère. Cela fait, le cystoscope, en- duit de glycérine, est introduit dans la vessie et, le courant établi, si l'image observée n'est pas claire on peut en conclure que la glace s’est ternie pen- dant la traversée de l’urèthre:; il suffit alors de la nettoyer en injectant à sa surface une pe- lite quantité d'eau par le canal destiné à cet usage. La figure 11 repré- sente le cystoscope n° 1 en place dans une position qui lui permet de montrer les détails du vésical el en parti- culier la bulle d’air qui en marque le som- met. La figure 12 repré- sente le cystoscope dôme n° 1 éclairant la paroi antérieure de la ves- sie, et la figure 43 le eystoscope n° 2 éclairant le bas-fond vésical. Ces figures, ainsi que celles des cystoscopes précé- demment décrits, sont empruntées à l'excellent livre de Nitze et au catalogue de Leiter (1887). Elles rendent facilement compte des mouvements que l’on peut imprimer au bec du eystoscope à l'intérieur de la vessie, de manière à éclairer et à de la vessie, voir successivement les différents points de sa sur- face. L'emploi méthodique des eystoscopes permet de voir très nettement la muqueuse vésicale avec ses Fig. 11. — Cystoscope n° 1 en place. vaisseaux artérielset veineux, les cellules vésicales, l’orifice des uretères (on peut voir un de ces orifices dans la fig. 15). Cetexamendes orifices uretéraux est de la plus grande importance, parce que l'on peut voir s’en échapper lejet de l’urine qui pénètre dans la vessie et constater ainsi de visu le caractère de celte urine. Si elle est trouble ou sanglante, on peut en conclure que le rein correspondant estma- lade, diagnostie très important pour l’apprécia- tion de l’état des reins avant toute intervention avant de faire l’a- blation d’un rein, il est bon de s'assurer par ce procédé que son chirurgicale sur ces organes : est bien portant et pour- ra suflire au malade. On peut en outre, gràce à l’appareil de Brenner , pratiquer le cathéterisme de orifices et re- cueillir ainsi séparé- ment l'urine des deux reins. L'examen de la vessie malade n’est pas moins intéres- sant; les figures sui- vantes (14 à 17) don- nent une excellente idée des images que l’on obtient dans ces cas. La figure 14, empruntée à Nitze, représente un calcul siégeant dans le bas-fond de la vessie. La figure 15 représente différentes variétés de tu- meurs vésicales: elle nous a été obligeamment offerte par notre collègue Albarran *. Enfin les figures 16 et 17 représentent une épingle à cheveux que nous avons eu l'occasion congénère ces Fig. 13. — Cystoscope n°2 éclairant le bas-fond vésical, de trouver et de dessiner, d’après nature, dans la vessie d’une jeune fille. Ses pointes sont fixées dans . Albarran, Les Tumeurs de la vessie. Paris, 1892, chez G. Steinheil. 150 D' J. JANET. — LES PROGRÈS RÉCENTS DE L'ENDOSCOPIE VISCÉRALE la paroi vésicale ; ses branches sont recouvertes d’inerustations phosphatiques; elles projettent leur ombre sur la paroi opposée de la vessie. Cette épingle a été extraite par notre excellent Fig. 14. — Calcul de la vessie vu au cystoscope de Nitze. maitre M. le D'Tuffier qui put la saisir sous le re- gard avec un crochet mousse et l’attirer au dehors. (fig. 11). Les figures précédentes, mieux que toute descrip- tion, rendent compte de l'importance diagnostique énorme du eystoscope ; au point de vue opératoire, 3° Estomac. — La gastroscopie à lumière interne est encore dans l’enfance : elle a à lutter contre de grandes difficultés, dont la principale est de main- tenir l’estomac dilaté par l’air ou par l’eau, à cause de la tendance qu’il a à se vider par le pylore. Le docteur du fait actuellement construire un gasiroscope que nous ne pouvons apprécier, puisqu'il n’a pas encore été expérimenté ; il serait utile que cette tentative aboutit, car il est certain qu'un tel appareil rendrait de grands ser- vices à la thérapeutique stomacale. Boisseau Rocher Il était naturel de chercher à reproduire par la photographie les images que nous donnent les différents endoscopes; deux procédés s'offraient pour obtenir ce résultat : le premier, le plussimple, consistait à adapter à l’oculaire de l’endoscope un appareil photographique pour recueillir l’image; le second, plus hardi, consistait à faire pénétrer un petit appareil photographique au centre du viscère à examiner. Ces deux procédés sont actuellement à l'étude et promettent de donner de bons résul- lats. Kollmann a obtenu de bonnes photographies des images uréthrales parle premier procédé, et Kutner, de Berlin, a utilisé le second pour obtenir des épreuves photographiques de la cavité stomacale. Fix. 15. — Différentes formes de tumeurs!vésicales. son rôle est beaucoup plus restreint: sauf le cathé- thérisme des uretères, l'extraction des corps étran- gers chez les femmes et l’ablation de petites tu- meurs à l’aide du cystoscope à pince de Nitze, on ne peut guère demander à cet appareil des services thérapeutiques : il ne faut pas oublier que les cys- tocopes à lumière externe lui sont supérieurs à faut reconnaitre que depuis les derniers perfectionnements que Nitze a cet égard. Néanmoins il apportés à son appareil, la cystoscopie à lumière interne semble entrer dans une voie nouvelle et que bientôt elle mettra entre nos mains les moyens de traiter chirurgicalement certains cas d’affections vésicales par les voies naturelles et sous le regard. Ses appareils, composés de grosses sondes courbes à leurextrémité, rappellent les dispositions optiques de ceux de Nitze. Une de ses sondes photographi- ques présente exactement la même combinaison que celle qui est représentée figure 9, avec celte différence qu'un petit tambour fixé à une tige flexible vient porter une feuille impressionnable à une faible distance des deux petites lentilles plan- convexes situées devant le prisme à. Cette feuille recoit l'image minuscule que ce système optique vient concentrer en ce point; il suffit de développer cette image pour obtenir une épreuve d’une por- tion relativement vaste de la muqueuse stomacale. D’autres sondes, présentant des combinaisons A. LÉVY. — LES EAUX POTABLES ET LA MÉTHODE HYDROTIMÉTRIQUE 51 optiques différentes, permettent d'obtenir les pho- lographies d’autres régions de l'estomac inacces- sibles à ce premier appareil. III. — DrapnaANoscoPIE. Ce procédé sur lequel on avait autrefois fondé de grandes espérances est aujourd’hui bien discré- dité. M. Trouvé, introduisant une lampe électrique dans le corps d’un poisson, avait démontré que cel animal devenait aussilôt transparent. On avait cru tout d’abord pouvoir appliquer ce procédé à l’homme et reconnaitre par ce moyen la forme et les lésions de ses orga- nes; malheureuse- ment la transparence ainsi obtenue est très vague el ne donne qu'une teinte rosée uniforme, à peine nuancée de quelques ombres par les orga- ee ] Fig. 16. — Epingle à cheveux vuc nes les plus com- au cystoscope dans la vessie. pacls. On ne peut done pas compter sur ce procédé pour apprécier les lésions des viscères; mais, dans cerlains cas particuliers, on peut l'utiliser pour se rendre compte du degré d’opacilé de quelques organes ou même pour les éclairer par transparence. Si l’on introduit dans la bouche d’un individu une lampe électrique, on constate aussitôt que les parties latérales de la face deviennent lumineuses; dans l’état normal, on doit observer à droite et à gauche une lueur d’égale intensité; si au contraire un des sinus maxillaires est rempli de sang ou de pus, la joue correspondante paraitra plus sombre que sa congénère. Ce procédé est aujourd’hui adopté par les spécialistes pour le diagnostic des épanchemonts et des tumeurs du sinus maxillaire ; l'instrument dont ils se servent est le diaphanos- cope de Vohsen. Cet appareil se compose d’une petite lampe électrique entourée d’un manchon de verre où circule un courant d'eau pour éviter une élévalion trop considérable de la température. Si l’on applique deux lampes d’égale intensilé sur les régions scapulaires droileel gauche d’un en- fant, le thorax devient lumineux; à l’état normal il doit l'être également des deux côtés: en cas d’infil- tration tuberculeuse ou de pneumonie d'un som- met, le côté correspondant parait plus sombre. Si l’on introduit dans l’urèthre une pelite lampe entourée d’une sonde de verre, la paroi uréthrale devient de même lumineuse, d’une manière uni- forme si elle est saine, entrecoupée par des an- neaux sombres en cas d'infiltration de cette paroi, comme il arrive dans les rétrécissements. Enfin J. Bruck introduisait dans le rectum, chez l’homme, dans le va- gin, chez la femme, une lampe électrique et, d'autre part, il introduisait dans Ja vessie un endoscope fenêtré ; la cavité vé- sicale ainsi éclairée par transparence per- met d’entrevoir quel- ques-uns de ses dé- tails. Ce procédé ne peut donner que des résultats bien vagues ; aussi a-t-il été abandonné. En résumé, la diaphanoscopie ne présente que quelques applications très restreintes, et elle ne semble pas être appelée à faire de grands progrès. Fig. 11. — La même saisie avec un crochet sous le regard. Nous ne terminerons pas ce travail sans décrire en quelques mots le service endoscopique de la clinique des voies urinaires de l'hôpital Necker, que M. le P' Guyon nous a fait le grand honneur de nous confier. Ce service comprend une pile de seize grands éléments Leclanché, qui nous fournit presque sans entretien une excellente lumière, un lit élevé pour l'examen des malades (ce lit peut ètre entouré au besoin de rideaux pour obtenir l'obscurité que nécessitent les examens délicats), enfin une vitrine contenant tous les instruments en- doscopiques que nous venons de décrire. Un grand nombre de malades sont examinés d’après les pro- cédés que nous avons rapportés, et le résultat de cet examen vient compléter utilement les rensei- gnements déjà fournis par la clinique, le micros- cope et l'analyse chimique. D: J. Janet. LES EAUX POTABLES ET LA MÉTHODE HYDROTIMÉTRIQUE L'analyse hydrotimélrique des eaux, imaginée par le D' Clarke et perfectionnée par Boutron el Boudet, est loin de présenter le degré d'exactitude qu'offrent les méthodes de lanalyse chimique. Dans un grand nombre de cas, cependant, elle REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. fournit des renseignements précieux et relative- ment rapides qui permettent à l'ingénieur, à l'hy- drologue, voire même au chimiste, de reconnaitre si une eau est ou n’est pas potable. Le procédé hydrotimétrique, quia le très grand 2e J A. LÉVY. — LES EAUX POTABLES 152 avantage de pouvoir être appliqué en dehors du laboratoire et avec un matériel des plus sommaires, est même susceptible de quelque rigueur, si l'on opère avec soin. Je me propose d'indiquer les causes d'erreur contre lesquelles il faut se mettre en garde et les modifications qu’il m'a paru néces- saire de faire subir à la méthode de Boutronet Boudet. Il Le principe de la méthode est le suivant : « On verse dans un volume déterminé d’eau une dissolution alcoolique de savon jusqu'au moment où les sels de chaux et de magnésie contenus dans l'eau sont complètement décomposés el neutra- lisés. La fin de l’opération est indiquée par la pré- sence d’une mousse persistante qui surnage après agitation du liquide. » Une eau sera d'autant moins calcaire qu'elle exigera une moins grande quantité de savon pour produire la mousse caractéristique. On peut donc avec une même liqueur de savon, quelconque d’ail- leurs, comparer les eaux entre elles; mais, pour que les observations des divers opérateurs puissent être utilement comparées, il a fallu choisir une liqueur type. Boutron et Boudet! préparent leur liqueur de la manière suivante : Savon blanc de Marscille ou mieux savon amygdalin Diéentdec ete meetereCee eee Ce = OID0Er Alcool ADD PER t eee decercLeeceriree 1600 On dissout le savon dans l'alcool en chauffant jusqu’à l'ébullition; on filtre pour séparer les sels et les matières étrangères insolubles dans l'alcool, que le savon peut contenir, et l’on ajoute à la dissolution filtrée : Eau distillée pure........................ 1001 7100 Cette liqueur, préparée par l'opérateur, ou sim- plement achetée chez le fabricant de produits chimiques, ne sera utilisée qu'après avoir élé litrée comme je l’indiquerai plus loin. Boutron et Boudet se servaient d'un flacon spé- cial de 100°%° environ, divisé de 10% en 10°" jus- qu'à 40%, et dans lequel ils versaient le liquide à analyser. Je préfère verser le liquide à l'aide d'une pipelte jaugée, ce qui me donne une bien 1 Un chimiste, M. Courtonne, propose de remplacer la for- mule de Boutron et Boudet par la suivante : dans un ballon de 1 litre de capacité on verse : Huile d'olives ou huile d'amandes douces, 28 grammes exactement Pesés OU.................s............e aûcme SOU A O0 eee Len Drasre-rebel Re ETC CECILE 10 Alconl 1490-95-20 20. RCE RER ee Cr 10 Avrès quelques minutes de chauffage au bain-maxie bouil- lant, le savon est formé. On ajoute alors 800 ou 900°me d'al- coolà 609, on agite quelques instants pour dissoudre le savon, puis on filtre dans un ballon jaugé d'un litre dont on com- plète le volume après refroidissement avec de l'alcool à 60°. On obtient dans ces conditions, dit M. Courtonne, une liqueur hydrotimétrique normale qui, dans la suite ne donne qu'un dépôt insignifiant et par conséquent sans influence sur le titre. ET LA MÉTHODE HYDROTIMÉTRIQUE plus grande exactitude et me permet de prendre un flacon quelconque. Boutron et Boudel enfermaient la liqueur de savon dans une burette Gay-Lussac, difficile à manier, et qui exigeait une assez grande habileté de l’opérateur, dont les deux mains étaient tou- jours occupées. Je me sers d’une burette de Mohr, qu'il n’est plus nécessaire de tenir à la main, el qu'on manœuvre facilement; je la choisis de dia- mètre intérieur très pelit, afin que les lectures soient obtenues avec une grande précision. Cette modification a en outre l’avantage d'éviter Péchauf- fement de la burette par la chaleur de la main et par conséquent la dilatation de la liqueur alcoo- lique de savon. M. Péligot avait proposé de tenir la burette avec une pince en bois : la fatigue est telle qu'un opérateur ne tarde pas à s'affranchir de cette utile précaution. Ceci posé, la liqueur de savon afifleurant au zéro de la burette, on la verse dans le liquide à analyser jusqu'à formation d'une mousse persis- tante. Quand l’eau est trop chargée en sels calcaires, la liqueur de savon produit des grumeaux qui ne permettent pas d'obtenir une mousse carac- téristique. Dans ce cas, si l’on a primitivement opéré sur 40% d’eau, il faut n'opérer que sur la moitié, étendue à 40°" avec de l’eau distillée. Il peut même arriver qu'on soit obligé de réduire encore le volume du liquide à analyser à 10 ou 5°, Pour certains puits parisiens, je ne puis opérer que sur 2°%° d'eau, Dans ce cas, il est nécessaire de tenir compte du volume d’eau dislillée employé pour compléter les 40°": de liquide. A" cause d'erreur. — L'eau distillée n’a jamais un titre hydrotimétrique nul. C’est en vain que les chimistes conseillent de se servir d'eau distillée récemment bouillie et qu'ils recommandent même de faire cette ébullition non dans des vases de verre, mais dans des vases métalliques de platine ou de nickel. Qu'on ait pris ou non ces précautions, il ne faut pas manquer de titrer hydrotimétriquement et aussi souvent que possible l’eau distillée que l'on emploie. On déterminera directement la cor- rection qu'il faut faire subir aux lectures, suivant le volume d’eau distillée ajouté au liquide à ana- lyser. Je donnerai plus loin celte correction. 2e cause d'erreur. — Il n'est pas indifférent de verser la liqueur de savon avec plus ou moins de rapidité. Voici quelques résultats d'analyse. Dans une même eau, je verse la liqueur de savon par > gouttes; je recommence sur de nouveaux échan- tillons en versant par 10 gouttes, par centimètres cubes, enfin en versant d’un seul coup la quantité de liqueur de savon qui doit saturer les sels cal- caires et magnésiens. A. LÉVY. — LES EAUX POTABLES ET LA MÉTHODE HYDROTIMÉTRIQUE 153 5 gouttes 10 gouttes cent. cubes 2 cent. 40 2 cent. 53 Lect. 23.4 23.4 21.0 25.3 25.3 Soit une différence de deux divisions, c'est-à- dire de plus de deux degrés, suivant que l’on verse avec plus ou moins de rapidité. Dans le cas où l'on n'aurait opéré que sur 5°” de liqueur, la diffé- rence s’élèverail à plus de seize degrés! Il con- viendrait donc de faire une correction variable dans chaque cas. Je verse loujours la liqueur de savon par 10 gouttes au début, puis par à gouttes quand la saturation est presque complète, par 2 gouttes enfin au moment où l'opération va être terminée. 3e cause derreur. — La fin de l'opéralion est caractérisée par la formalion d'une mousse persis- tante. Il arrive fréquemment que cette mousse, épaisse el en apparence persistante, n’est qu'une fausse mousse et l’on obtiendrait des résultats abso- lument erronés si l’on considérait à ce moment l'opération comme terminée. Ilarrive en effet qu'au bout d'un temps quelquefois assez long, quelques minutes, la mousse disparait brusquement. Ce phé- nomène s'observe toujours avec l'eau de l'Ourcq, presque toujours avec l’eau de la Dhuis. Avec quelque habitude on parvient à distinguer la fausse mousse de la vraie; en tout cas, il convient d’at- tendre quelques minutes en imprimant au liquide un léger mouvement de rolation autour de l'axe du flacon. Quelquefois la fausse mousse disparait rapidement en versant une goutte d’ammoniaque au demi. A° cause d'erreur. — Au moment où apparait la mousse persistante, on a certainement dépassé la saluration des sels calcaires et magnésiens; il faut retrancher de la lecture les quelques gouttes ver: sées en trop. Boutron et Boudel aflirmaient que cette correction était constante et toujours égale à une division de leur burette. Il n’en est rien, puis- qu'elle dépend de lépaisseur de la mousse à laquelle s'arrête un opérateur et qu'elle dépend aussi du titre de la liqueur de savon. Chaque opérateur déterminera donc sa correction de mousse en faisant une lecture avec 40°° puis une seconde lecture avec 20% d’une eau : Exemple : 40eme liqueur chlorure calcium donne.... 26&iv2 EE OP ten Pme de à 132,6 La différence 12,6 correspond exactement, sans correction, à 20°" d'eau. La correction de mousse est donc ici de 140. Ce que j'appelle division, c'est le dixième de centimètre cube. On fera la correction de l’eau distillée et la véri- ficalion des corrections adoptées en opérant comme il suit : 40cme d’une eau quelconque... lecture 23div4 A0cme d’eau distillée Sn 0 20cme de l’eau précédente + 20emc d’eau CG Boss so0c adopte Teens 1902 J'en conclus que : 40cmt de l'eau corresp. à..... £0emce d’eau distillée......... 3.0—1.0—= 2.0 el, comme vérification : 20cmc de l’eau corresp. à 13.2—1.0—1.0—1142 114.2 est bien la moitié de 221,4. Ainsi, quand j'opérerai sur 40% d’une eau, je retrancherai 11% 0 de la lecture ; quand j'opérerai sur 20% et 20% d’eau distillée, je retrancherai 1,0-41,0, soit 290, quand j'opérerai sur 40% et 30°" d’eau, je retrancherai 1,041,5 soit 245, el ains; de suite. Voici un exemple, au hasard : Eau de Seine Lecture Lecture corrigée Pour 400me d'eau pce 22.2 0092 27 MA "01—12 T9 21.3 20enc 125 12.6 — 2.0 = 10.6 21172 {0eme 7.8 1.8 — = 241"2 pemc D.4 D,4 2 75— 2/65 212 Il est entendu que ces corrections changeront chaque fois qu'on aura une nouvelle liqueur de savon ou qu'on prendra une nouvelle eau distillée. Il conviendra d’avoir un flacon d’eau distillée exclusivement réservé aux lectures hydrotimé- triques. Les résultats précédents montrent avec quelle précision on peut opérer quand on prend loutes les précautions que j'ai indiquées. >° cause d'erreur. — J'ai constaté qu'un grand nombre d'opérateurs se servaient sans examen des liqueurs hydrotimétriques achetées loutes faites ou même préparées par eux. C’est une faute grave. Il faut Litrer la liqueur dont on se sert. On opère de la manière suivante : On prépare une liqueur normale de chlorure de calcium, en dissolvant 250 milligrammes de chlo- rure de calcium pur fondu et absolument sec dans un litre d’eau dislillée. On admet, avec MM. Boutron et Boudet, que cette dissolution normale correspond à 229 hydrotimétriques, et, comme l’on opère sur 40°"° de liqueur,contenant par conséquent 10"£ de chlo- rure de calcium, on en conclut que un degré hydroti- métrique correspond à jomer = Ouer,455 de chlorure de calcium, soil à 10mgr X 25 92 — 2h de chlorure de calcium, quand on traduit pour À litre les résultats obtenus avec 40°%° de liquide. Celle convention, absolument arbitraire d'ail- leurs, doit être adoptée par tous les observateurs, afin que leurs résultats exprimés en degrés, soient comparables. Par un calcul très simple, connaissant les équi-- ralents des différents sels, on trouve que un degré 15% A. LÉVY. — LES EAUX POTABLES ET LA MÉTHODE HYDROTIMÉTRIQUE hydrotimétrique équivaut pour un litre d’eau à !: Chibrnretdelcalciumeee-tn 0 PU ET PE LAN 6,4 ÉTAGE NS EL ROME DO re 5,1 Carbonate sde Cha Aer en nee 10,3 SUIAtE de CHAUS.. 2. rm res cresameere 14,0 Magnésie........ PSbovedoeenncennar oo meude bee 4,2 Garbonatelde EMAapNESIO reel Re ED Lee 8,8 Sulfate de magnési 42,5 ACIdo SUlEUTIQUE >. eee er Ce 8,2 CHIOPE rte te ne Pl ET ET TA RRE 7,5 AGE Garou 2 cree Ce LC CC 9,9 Il suflirait donc de faire la lecture correspon- dante à 40% de cette liqueur normale et d’expri- mer que le nombre des divisions lues correspond à 22°, d'où l’on conclut la valeur d’une division. . Müis la liqueur de chlorure de calcium peut n'avoir pas élé exactement préparée. Le chlorure pris chez le marchand peut être impur. Même si on Va purifié au laboratoire, il faut s'assurer qu'il est pur et sec en vérifiant la liqueur normale qu'on à préparée. Dans ce but, nous traitons 50° de la li- queur par un excès d'oxalate d’ammoniaque. L'oxatate de chaux obtenu est filtré, lavé, calciné. La chaux est pesée à l’état de carbonate. Une liqueur exacte doit fournir 126 milligrammes de chaux par litre. Si la solution de chlorure est exacte, on fera la lecture hydrotimétrique correspondant à 400% de liqueur, puis on précipitera la chaux par un excès d'oxalate d'ammoniaque et l’on fera une seconde lecture après cette précipitalion : Exemple : DecHMeNMMENMAD EE PER ee LE 26 div. 2 Lecture après oxalate................ 1 div. 8 DiHOTENCe re memes 24 div. 4 Cette différence correspond, par convention, à 22° hydrotimétriques : done 2.4 — 00 902 DJ0 1 division correspond à Les liqueurs de savon fournies par les fabricants de produits chimiques peuvent faire varier la valeur d’une division de 0° à 1°, soit d’un tiers 2!!! 1 MM. Wanklyn, Chapmann et Courtonne ont trouvé qu'un équivalent de chlorure de calcium ou de nitrate de baryte ne correspondait pas à un équivalent de sels magnésiens mais 87 1 100 d'équivalent. Ces messieurs proposent de remplacer dans le tableau qui précède le poids des sels de magnésie par les suivants : E MaSnésie CEA een Ur ue 3,6 au lieu de 4,2 Carbonate de magnésie....... 7,6 8,8 U J É Sulfate de —F RCE 10,8 12,5 2 ? Si la liqueur normale de chlorure de calcium n’était pas absolument exacte, elle servirait néanmoins au tütrage de la liqueur de savon, à la condition qu’on ait dosé avec soin sa teneur en chaux. Supposons qu’elle ne contienne que 121mer de chaux par litre, la différence des lectures, avant et après l’action de l’oxalate d’ammoniaque, correspondrait, non plus ë AE. 121 ‘ 9290 y . à ” 1Q A1 à = n ls à 22° hydrotimétriques, mais à 57 ou 219,9, Dans ce cas, le Il Ce dosage hydrotimétrique permet assez rapi- dement de se rendre compte de la potabilité des eaux. Le Comité consultatif d'hygiène propose de répartir les eaux, au point de vue hydrotimé- trique, dans les quatre catégories suivantes : de 5° à 150 POotablest re Re en nee de 159 à 300 SUSDECIP FE EC ee-rr ce au-dessus de 30° MAUVAISE Em PR ee ne au-dessus de 1400° L'Observatoire de Montsouris prélève au moins une fois par quinzaine, et le plus souvent chaque semaine, des échantillons des différentes eaux utilisées pour l'alimentation parisienne : eaux de sources puisées soit dans les réservoirs, soil au robinet des particuliers ; eaux de rivières : Seine, Marne, Ourcq. Ce travail, poursuivi sans interrup- lion depuis cinq années, nous a donné des moyennes qui permettent non seulement de dis- üinguer les eaux de sources et de rivières, mais de caractériser chacune des différentes eaux. La prise faite sur la canalisation permet de constater si le consommateur reçoit bien l’eau à laquelle il a droit. Le Bulletin Officiel de la Ville de Paris et l'An- nuaire de Montsouris publient régulièrement les moyennes de quinzaine. Nous ne donnerons ici que les moyennes annuelles qui fournissent des com- paraisons intéressantes : VANNE DHUIS A D réservoir canalisat. réservoir canalisat Année 1887... 2007 20°5 2292 2204 1888... 20,5 20,4 22,1 22 3 1889... 20,6 20.9 23,2 29,1 1890... 20,8 21,0 93,8 23,9 Moyenne... 20,7 20,7 23,0 22,1 SEINE RE Te pont Ivry Austerlitz Chaillot Ourcq Marne Année 1887... ago 1904 1998 34°8 2104 1888... 18,8 19,2 20,2 34,k 22,5 1889... 19,1 19,7 20,6 34,9 23,2 1890... 19,2 19.5 21,7 361 94,5 Moyenne... 19,0 19,5 20,6 35,1 23,1 Les eaux de la Vanne ont un degré très sensible- ment constant, que ces eaux aient été prises au réservoir de Montsouris ou qu'elles aient été prises sur la canalisation. Les eaux de la Dhuis ont un degré hydrotimétrique plus élevé que celles de la Vanne; les variations de ce degré sont sen- sibles ; ces eaux se rapprochent des eaux de la Marne et varient dans le même sens. Le degré dixième de centimètre cube de la liqueur hydrotimétrique _ — 09,87 BAUER Ten Et Dans l'opération précédente, nous n'avons pas eu à tenir compte de la correction de mousse, parce que nous n'avions esoin que de la différence de deux lectures, ne vaudrait que A. LÉVY. — LES EAUX POTABLES ET LA MÉTHODE HYDROTIMÉTRIQUE hydrotimétrique de la Seine s'élève à mesure qu'on descend le fleuve depuis le pont d'Ivry jus- qu’à Chaillot; les variations annuelles sont presque nulles en amont de Paris; elles sont beaucoup plus sensibles au sortir de la Ville, à Chaillot. Si l’on s’en tenait à ces indications, on en conclu- rait que toutes les eaux d'alimentation de Paris, y compris surtout les eaux de la Seine, qui ont le plus faible titre hydrotimétrique, doivent être con- sidérées comme potables. L'eau de l'Ourcq est suspecte. Aucune eau ne devrait être considérée comme très pure. Si le degré hydrotimétrique devait servir d’uni- que critérium, il faudrait reconnaitre la supériorité des eaux de la Seine sur les eaux des sources. Cette conclusion seraitévidemmentinexacte. Nous avons analysé des échantillons d'eau de Seine prélevés à Saint-Ouen et à Épinay, là où le fleuve est visible- ment souillé par les eaux d’égout déversées en Seine au pont de Clichy et qui contenaient des ma- lières organisées vivantes les rendant certaine- ment impropres à l'alimentation ;leur degré hydro- timétrique était néanmoins {rès faible. C’est qu'en effet la présence en plus ou en moinsgrande quan- üté du sulfate ou du carbonate de chaux dans les eaux ne suffit pas seule et exclusivement à indi- quer la valeur d’une eau; elle apprend seulement si cette eau se prête facilement au blanchissage du linge ou à la cuisson des légumes. La méthode hydrotimétrique n’a pas la préten- tion de se substituer à l’analyse chimique ; elle peut cependant fournir d’autres indications qui, s’ajou- tant au degré hydrotimétrique total que nous avons appris à mesurer, permeltront de mieux connaître le liquide qu'on examine. C’est ainsi que, suivant Boutron et Boudet, il serait possible, par unesuite d'opérations assez sim- ples, d'obtenir : 1° Le poids de la chaux totale provenant des sels de chaux en dissolution; 20 Le poids de chaux à l’état de carbonate; 3° Le poids de chaux à l'état de sulfate; 1° Le poids de magnésie correspondant aux sels de magnésie ; 5° Le poids d’acide carbonique dissous. Il fault examiner la question en signalant les causes d'erreur qu'on rencontre dans la pratique. On fait quatre titrages hydrotimétriques : À, titrage de l’eau à l’état naturel; B, titrage de l’eau après précipitation de la chaux au moyen de l’oxalate d'ammoniaque ; Da C, titrage de l’eau, après avoir éliminé, par Pébullition, l'acide carbonique et le carbonate de chaux ; D, titrage de l’eau ayant bouilli et dans laquelle on à, en outre, précipité la chaux restante avec l’oxalate d'ammoniaque ; On aura de cette façon, exprimés en degré hydro- timétriques : Les sels de chaux A — B; Les seis de magnésic D; Le sulfate de chaux C — D; Le carbonate de chaux À — B — (C L'acide carbonique dissous B — D: — D); Je renvoie aux mémoires spéciaux ! le lecteur qui voudrait connaitre les détails de ces différentes opérations. Ce qu'il faut dire ici, c’est quela seconde et la quatrième lecture sont difficiles et que, par conséquent, la différence B-D entre deux nombres généralement très faibles et grossièrement déter- minés, n’a aucune précision. {n’y a pas moyen de compter sur la détermination de l'acide carbonique dis- sous. La seconde lecture B présente des difficultés et des causes d'erreur : on n’est jamais sûr de ne pas avoir précipilé un peu de magnésie en même temps que la chaux; mais avec quelque habitude et en procédant avec soin, on parvient à oblenir des nombres exacts. Le poids de chaux totale peut donc êlre assez bien délerminé. Noici quelques exemples suffisamment concluants. Nous comparons dans le tableau suivant les poids de chaux calculés par l’hydrotimétrie et les poids obtenus par l'analyse chimique ; la différence des lectures hydrotimé- triques est mullipliée par 5" 7 valeur d’un degré en chaux. DEGRÉ HYGROMÉTRIQUE CHAUX EE, EE après total oxalate calculée analysée Manne rentrer 1908 0°0 113mer 112m8r DhHiS Arc 24,6 5,0 123 125 SEINE ere AD A4 0,6 97 99 (CRETE 50080 34,1 8,1 148 149 Marneter-trerece 22,5 2] 113 111 Puits (rue de Flan- dre) re 50,0 8,2 238 238 Drain Saint-Maur. 26,8 4,# 127 127 Les résullats, on le voit, peuvent être considérés comme très exacts. La troisième lecture C ne présente pas de diffi- culté ; elle correspond aux sels de magnésie, aux sels de chaux autres que les carbonates et à la petite quantité de carbonate de chaux, redissous après l’ébullilion. Boutron et Boudet supposent que cette quantité de carbonate de chaux redissous est constante pour toutes les eaux et ils l’évaluent à 17 milligrammes de chaux par litre ; en consé- quence ils retranchent 3 degrés de celte troisième lecture. Or, suivant nous, cette quantité ne serait pas constante. De plus, il peut arriver après refroi- dissement de l'eau bouillie, que le carbonate de magnésie ne se redissolve pas entièrement ; enfin il peut se produire pendant l'ébullition des doubles décomposilions qui précipitent de petites quan- tités de sulfate de chaux à l’état de carbonate Pour toutes ces raisons, nous pensons que la lecture C peut être inexacte. Nous avons dit déjà que la qua- trième lecture était difficile. Voici ua exemple qui montrera combien il est facile d'obtenir des résultats variables. Jai pris 1 Voir Annuaire de l'Observatoire de Montsouris peur l'année 1891. 156 C. SAUVAGEAU. — LE POURRIDIÉ DE LA VIGNE ET DÉS ARBRES FRUITIERS une eau de Marne (Drain de Saint-Maur) et j'ai dé- terminé deux fois la lecture C, puis j'ai dosé la chaux dans le précipité obtenu par l’ébullition : {re lecture 1000 ; chaux dans le précipité 926 correspondant à1624: 192; chaux dans le précipité 10558 correspon- dant à 18°6; 2 lecture Les deux sommes sont presque égales : 26°, dans le premier cas et 25°,8 dans le second et cependant la répartition des sels dans le dépôt et dans le liquide filtré est bien différente dans les deux cas. En résumé, la méthode hydrotimétrique fournit un degré total qui permet de classer rapidementune eau au point de vue de sa potabilité ; elle permet de doser assez exactement la chaux totale que celte eau contient ; mais elle ne donne qu'une assez grossière approximation quand on veut distinguer les différents sels de chaux ou déterminer les sels de magnésie. Les résultats obtenus pour l'acide carbonique doivent être tenus pour inexacts. Albert-Lévy, Directeur du Service chimique à l'Observatoire de Montsouris. LE POURRIDIÉ DE LA VIGNE D'APRÈS M. On donne le nom de Pourridié à une maladie de la vigne et des arbres fruiliers, qui est le résultat de l’action de plusieurs espèces de champignons sur les racines et les tiges de ces plantes. Cette ma- ladie, très répandue et depuis longtemps observée, a reçu plusieurs autres noms, dont les plus usités sont ceux de Blanc, Blanc des racines et Champignon blane. Le Pourridié a été signalé en France, dans la plupart des départements viticoles, en Italie, en Espagne, en Allemagne, en Suisse, en Autriche, en Palestine, au Japon, aux États-Unis, etc. Le Pourridié ne se développe rapidement que dans les terrains humides, particulièrement dans les terres argileuses et marneuses, où l’eau est sla- gnante, et dans celles à sous-sol imperméable. Il attaque toutes les espèces et variétés de vigne, particulièrement le Wifis rupeslris el les cépages appelés Grenache et Teinturier du Cher; les cé- pages Carignan et Pinot sont au contraire plus ré- sistants. Onlaobservéaussisurla plupartdesarbres fruitiers : Cerisiers, Pommiers, Abricoliers, Pé- chers, Poiriers, Amandiers, Oliviers. ele. et, de même que pour la vigne, les différentes variétés de ces arbres ne sont pas également sensibles à la maladie : ainsi, parmi les Poiriers, les variétés Louise-Bonne d'Avranches, William, Beurré d’A- manlis, Beurré de Paris, Duchesse... ete... sont les plus fréquemment altaquées. Le Pourridié est non seulement très répandu. mais aussi très meurtrier; il peut faire périr les vignes au bout de 15 à 18 mois, et les arbres frui- tiers en deux ou trois ans. Bien que son extension soit lente, sa présence dans les plantations est jus- tement redoutée, car, dans la plupart des cas, on 1 Pierre Viala, Les Maladies de la vigne, troisième édition sous presse. Coulet, Montpellier; Masson, Paris et Monogra- phie du Pourridié des vignes el des arbres fruitiers A891. Coulet, Montpellier; Masson, Paris, ET DES ARBRES FRUITIERS PeVTA A est contraint de renoncer à cultiver les terrains envahis en vignes et en pépinières, et cela pendant plusieurs années. L'arrachage des plantesattaquées ne suffit pas, car le sol est comme empoisonné pour quelque temps, et l’on a vu le Pourridié reparaitre même sur des pépinières laissées sans culture de plantes arbustives pendant un ou deux ans. La première année de la maladie, les plantes at- taquées sont chargées de fruits d’une façon vrai- ment exceptionnelle. Les vignobles sont d’abord atteints par points isolés et, d'année en année, aux places primitives s'en ajoutent de nouvelles qui vont s’agrandissant concentriquement ; ce proces- sus d’envahissement est donc identique à celui que le Phylloxéra détermine et a été comparé à des taches d'huile s'étendant sur du papier. Getle fé- condité exceptionnelle de la première année de maladie est le signe d'une mort certaine; les branches se rabougrissent et des ramifications souvent nombreuses s'élèvent à leur base; ces ra- meaux courts, cassants, grèles, donnentaux plantes une forme en tête de chou. Les plantes se laissent arracher sans résistance, car, sous l'effet de la ma- ladie, les racines deviennent noires, décomposées, spongieuses, el leur bois prend définitivement une teinte d’un brun jaunètre clair, zonée par le mycé- lium du Champignon. Plusieurs Champignons, loin d'être lous égale- ment dangereux, sont confondus sous le nom de Pourridié : ce sont l’Agaricus melleus L., le Vibrissea hypogea Ch. Richon et Le Monnier, certaines formes mycéliennes appartenant au groupe des Fibrillaria, le Dematophora necatrir R. Hartig, el le 2. glome- rata P. Viala, ces deux dernières espèces étant de beaucoup les plus importantes, d'après M. Viala. De nombreux auteurs, et des plus distingués, se sont occupés de la maladie du Pourridié au point de vue botanique el au point de vue prophylac- C. SAUVAGEAU. — LE POURRIDIÉ DE LA VIGNE ET DES ARBRES FRUITIERS 157 tique; parmi les noms les plus connus, nous cite- rons ceux de MM. Planchon, Millardet, Foëx, Viala, Le Monnier, Richon, Prillieux, etc... en France; de MM. R. Hartig, Brefeld, von Thümen, Pen- zig, etc... à l'Étranger. Malgré les remarquables travaux de R. Hartig, il restait encore beaucoup à faire pour arriver à connaitre le cycle complet des transformations des Champignons du Pourridié, étude difficile par sa complexité, mais indispen- sable pour lutter avec efficacité contre le parasite et pour le surprendre et le détruire dans tous ses états de propagation et dans ses moyens de pro- teclion naturelle. C'est à M. Viala, dont les travaux antérieurs sont si appréciés des viticulteurs et des agriculteurs, que l’on doit la connaissance de faits morphologiques du plus haut intérèt concernant le Pourridié, et dont la découverte place leur auteur au premier rang parmi les savants qui s'occupent des maladies des plantes. Nous étudierons, avec M. Viala, les divers Cham- pignons auxquels est dû le Pourridié, en nous at- tachant spécialement au Pourridié de la vigne. J. — AGARICUS MELLEUS, VIBRISSEA HYPOGEA ET FIBRILLARTA L’Agaricus melleus produit la maladie si fré- quente et si nuisible des Müriers, des Marron- niers et de la plupart des essences forestières ; son mycélium, qui devient phosphorescent quand il rampe sous l'écorce des racines, a été souvent étudié, et surtout par Brefeld. Pendant longtemps il fut connu seulement sous forme de cordons mycéliens continus, ramifiés, noirs et luisants, et Tulasne, qui ignorait ses organes de reproduction, en avait fait le genre provisoire Rhizomorpha ; plus lard on en fit une espèce avec deux variétés : l’une, rampant dans le sol d'une plante à l’autre, en gros cordons extérieurs aux racines, le AA. fragilis var. subterranea, l'autre, en plaques larges, sous-corti- cales, phosphorescentes, le A. fragilis var subcorti- calis. R. Hartig, le premier, détermina la vraie na- ture de ces Rhizomorphes en les raltachant au my- célium de l'Agaricus melleus, qui est un champignon à chapeau, non sans analogie avec notre champi- gnon de couche. Les observations de R. Hartig furent confirmées expérimentalementpar plusieurs auteurs. C'est encore R. Hartig qui a montré que les rhi- zomorphes, souvent rencontrés par les horticul- teurs et les mycologues sur les racines d'arbres fo- restiers morts où mourants, élaient en réalité la cause de la maladie et de la mort de leur hôte. M. Millardet consigna en 1879, dans ses études sur le Pourridié, la mort des vignes sous l’action des rhizomorphes del’A. melleus ; d’autres auteurs firent de semblables constatations au sujet d’arbres fores- üers, et il fut communément admis que le Pourri- dié avait toujours pour cause l'A. melleus et ses formes mycéliennes. Cependant, d'après les études de R. Hartig, de MM. Foëx et Viala, puis de M. Viala, si le Pourridié des Müriers, des Mar- roniers et de diverses essences forestières est bien réellement dû à ce Champignon, celui de la vigne et des Arbres fruitiers a pour cause infiniment plus fréquente un autre parasite, le Dematophora necatrix, dont les formes mycéliennes présentent les plus grandes ressemblances extérieures avec celles de l'A. melleus. Le Vibrissea hynogea, souvent désigné, bien qu'à tort, sous le nom de Reæsleria, occupe dans la clas- sification botanique une place assez éloignée du précédent par la nature de ses organes reproduc- teurs. De plus, il ne présente jamais de rhizomor- phes, mais seulement un mycélium interne aux tis- FES Fig. 1. — Fibrillaria (Psalh. ampelina). A, racine de vigne saine portant sur l’écorce des plaques « et des cordons rhi- zoïdes. — B, racine de vigne avec fruits (4, a’, b) et mycé- lium (c. d.) (en culture expérimentale. (Grand. nat.). sus des plantes dans lesquelles il vit. Ayant été trouvé fréquemment sur des racines de vignes 158 ‘€. SAUVAGEAU. — LE POURRIDIÉ DE LA VIGNE ET DES ARBRES FRUITIERS mortes, plusieurs auteurs ont conclu qu'il était la cause de leur dépérissement. Mais, d’après R. Hartig et M. Viala, il ne se rencontre sur les racines mortes que parce qu'il y trouve un milieu favorable à sa végétation ; M. Viala, l'a observé surtout sur les racines de vignes détruites par le Phylloxéra ou sur les cerisiers tués par le D. necatrir. C'est done un saprophyte et non un parasite; son nom est à retrancher de la liste des champignons qui causent le Pourridié. On a donné le nom de Aibrillaria (fig. 1)à des fila- ments mycéliens de couleur blanche, très fréquents sur les racines des vignes et de beaucoup d'autres plantes; MM. Foëx et Viala, qui, par la culture ex- périmentale en ont obtenu l'appareil reproducteur, le rangent parmi les champignons à chapeau, en le rapportant au genre Psathyrellu. Depuis, d'autres auteurs ont pu en distinguer plusieurs espèces. Von Thümen a affirmé (1882) que les Fibrillaria ont une action parasilaire etproduisentle Pourridié; d’après M. Viala, il n'en est rien, et ce champignon, dont il a décrit tous les caractères dans son livre sur les maladies de la vigne, ne doit causer aucune in- quiétude aux viticulteurs el aux horticulteurs quand ils le rencontrent sur les racines de leurs plantations. C'est un saprophyte inoffensif qu'ils doivent connaitre, mais uniquement pour se ras- surer sur l’état de leurs cultures. Voici donc trois espèces de champignons consi- dérés par les auteurs comme les causes de la ma- ladie du Pourridié et qui, d’après M. Viala, sont nuls ouinsignifiants quand il s’agit de la vigne et des arbres fruitiers. IL n’en estpas de même des deux espèces de Dematophora, dont M. Viala asuivi le développement presque complet, et qu'il ac- cuse des dégâts causés par le Pourridié. II. — DEMATOPIHORA NECATRIX A. Appareil végélatif. — Les formes mycéliennes sont nombreuses ; nous aurons à citer successive- ment : aycélium blanc floconneux intérieur, #yré- lium brun floconneux extérieur, cordons rhizoïdes, Rhizomorpha fragilis var. subterranea et var. subcor- ticalis, mycélium interne, sclérotes et chlumydospores. Toutes ces formes appartiennent bien à l’espêce D. necatrir, car M. Viala a pu, par la culture, passer de l’une à l’autre dans des expériences variées. C'est sous forme de flocons d’un blanc passant au gris souris clair que le Pourridié est le plus sou- vent observé, et c’est l’état sous lequel on connait surtout le Blanc des arbres fruitiers. Ce mycélium blane, qui peut provenir non seulement de la lrans- formation des rhizomorphes, mais aussi de la germi- nation des conidies, forme au début, sur les Liges ou lesracines qu'ilenvahit, un léger duvet d’un blancde neige, délicat comme une toile d'araignée, qui s'é- paissitpeu àpeu,s'élendetles recouvre d’un feutrage cotonneux. Ce feutrage n’est jamais continu, mais formé d’ilots plus larges reliés entre eux par des cordons plus étroits, plus denses, qui deviendront par la suite les cordons rhizoïdes, origine des rhi- zomorphes. Les ilots floconneux, dont l'épaisseur alteint généralement 2 à 3 centimètres, ne forment jamais un tissu résistant, et, si l'humidité fait brus- quement défaut, ils s'affaissent complètement. Ce mycélium blanc change peu à peu de couleur, d’abord superficiellement, puis profondément; il reste quelque temps gris, puis devient d'un brun de plus en plus foncé, c’est alors le #ycélium brun ; le premier n’est donc que l’état jeune du second. En changeant de couleur, il à pris des caractères histologiques qui permettent de faire le diagnostic de la maladie par un simple examen microscopique. Le mycélium blanc est composé de filaments trans- parents, de diamètre variables, cylindriques, droits ou flexueux et cloisonnés; cependant quelques: uns d’entre eux sont légèrement renflés au dessous des cloisons transversales. Sur le mycélium brun, cette tendance à la formation de renflements s'ac- centue etse généralise ; la plupart des cellules mycé- liennes sont renflées en poire à l’une de leurs extré- mités; la figure 2 montre quelques-uns de ces Fig. 2. — Demalophora necatrix. Fragments de mycélium brun; a, représente la forme la plus commune; b, €, d, e [. 9, divers types de filaments avec renflemenis (gr. 500). renflements qui alteignent plusieurs fois le dia- mètre du filament. Ces renflements en poire, très caractéristiques du 2. necatrix, se retrouvent dans €. SAUVAGEAU. — LE POURRIDIÉ DE LA VIGNE ET DES ARBRES FRUITIERS 159 le tissu des rhizomophes, des sclérotes, des pycni- des et des périthèces ; Is couleur brune du mycé- lium qui les porte les rend très faciles à observer au microscope, et remplace avantageusement les réactifs colorants. Les cordons rhizoïdes réunissent les masses flocon- neuses de mycélium qui rampent à la surface de l'é- corce et sont plus condensés qu'elles (fig. 3, A). Quelques-uns grossissent, atteignent 4 millim. de diamètre et sont adhérents à l'écorce, bien qu'on C B À Fig. 2. — Dematophora necalrix. À, tige et base de racines de vigne envahies par le mycelium blanc en flocons « réu- nis par les cordons rhizoïdes b: B, tige de jeune vigne avec sclérotes et conidiophores a; C, jeune tige de vigne avec conidiophores obtenus en culture (gr. nat.). les détache facilement; ils sont alors transformés en rhizomorphes de la variété souterraine, qui pré- sentent d’ailleurs les plus grandes analogies de formeavee ceux de l'A. melleus, et peuvent comme eux porter lentement la maladie, à travers le sol, d’une plante à l’autre. Leur partie médullaire est formée par de petits filaments blancs, et leur partie corticale possède des filaments bruns, läches, dont le nombre diminue avec l’âge, mais qui sont tou- jours assez abondants pour laisser reconnaitre les renflements en poire si caractéristiques du D. neca- trir. Les rhizomorphes de la variété sous-corticale ne sont pas phosphorescents comme ceux de l'A. mel- leus ; ils forment, sous l’écorce des vignes ou des arbres envahis, des cordons ou des plaques, dont l'épaisseur peutatteindre 1 à 2 millim. d'épaisseur; de là, ils peuvent soit pénétrer dans l’intérieur des tissus de la plante hospitalière pour y produire un mycélium interne, soit au contraire traverser l'é- corce et venir former à l'extérieur des houppes blanches, origine des filaments blancs floconneux ou des sclérotes qui produiront les conidiophores et les pvenides. Les selérotes, organes de résistance destinés à passer à l’état de vie latente et formés par l’agglo- méralion de filaments mycéliens en un tissu dense et serré, prennent naissance en quantité considéra- ble(fig.3,B), soit à l'intérieurdes tissus pourridiés, soit à la surface des liges ou des racines. Ce sont de petits nodules très durs, plus où moins sphéri- ques ou irréguliers, ayant le plus souvent O0 millim. de diamètre. Ilssont formés parle mycéliuminterne au tissu hospitalier ; aussi les trouve-t-on le plus souvent en séries, correspondant assez régulière- ment aux rayons médullaires (fig. 3, B et C). Nous verrons plus loin leur importance dans la forma- tion des organes de reproduction. Lorsque le mycélium, blanc ou brun, est im- mergé dans des liquides non aérés, lesrenflements en poire exagèrent leurs dimensions, le proto- plasme s’y accumule, devient très granuleux, el se sépare du reste de la cellule par une cloison transversale (fig. 4). Ces cellules plus ou moins sphériques ou pyriformes peuvent ensuite deve- nir libres. Bien que M. Viala n'ait pas réussi à suivre leur développement ultérieur, il les assi- mile, par leur origine et leur constitution, aux chlamydospores des Mucorinées, c'est-à-dire. à des masses protoplasmiques qui s’isolentdans un tube mycélien, quand la plante souffre, s’entourent d'une membrane épaisse qui leur permet de tra- verser les périodes défavorables, et plus tard, en germant, reproduisent la plante. Les organes végélalifs du Pourridié étant ses moyens de propagation les plus répandus dans la nature, nous allons, avant d'aborder l’étude des organes reproducteurs, voir quelles sont leurs conditions d'existence, de multiplication ou de destruction. Certains champignons de la vigne, tels que Île Mildiou, YOidium eic., exclusivement parasites, ne peuvent vivre qu'aux dépens d’un hôte vivant, sur lequel ils forment une partie de leurs or- ganes de reproduclion ; puis, après avoir détruit 160 C. SAUVAGEAU. — LE POURRIDIÉ DE LA VIGNE ET DES ARBRES FRUITIERS la partie del’hôte qu'ils ont attaquée, ils produisent des organes reproducteurs d'une autre sorte qui passent à l’état de vie latente. Le 2. necatrix forme aussi ses organes de reproduction lorsque les con- ditions de vie lui sont défavorables, mais unique- ment sur les plantes hospitalières qu’il a tuées, et jamais sur le vivant; ses organes végétalifs peu- vent représenter et même perpétuer l'espèce à eux seuls, sans produire d’organes reproducteurs. De plus, ces derniers ne se développent que si le milieu extérieur leur présente des conditions toutes spé- ciales et rarement réalisées dans la nature. C'est Fig. 4. — Demalophora necatrir. Chlamydospores à diffé rents états de développement (gr. 400). ainsi que des fragments de vignes et de cerisiers, appartenant à des individus tués au bout d’un an par le Pourridié, soit par envahissement naturel, soit à la suite d’inoculation expérimentale, ont été con- servés par M. Viala pendant huitannéessuccessives, etont présenté les différents états mycéliens énumé- rés precédemmentàl'exelusion de toute formerepro- ductrice. Sur d’autres exemplaires, par une dessic- calion brusque !, il a amenéla mort des mycéliums 1 Les expériences de M. Viala ont exigé beaucoup de temps et d'espace ; elles ont été faites dans des conditions très favo- rables, grâce à l'excellente organisation des salles de culture du laboratoire de viticulture de l'Ecole d'agriculture de Montpellier. M. Tisserand, en appelant M. Viala à l'Institut agronomique de Paris, a tenu à lui conserver son labora- toire de Montpellier pour lui permettre de continuer des recherches qui intéressent à un si haut point les agriculteurs et les viticulteurs, extérieurs sans que les rhizomorphes sous-corti- caux ni le mycélium interne fussent tués, et il les a même conservés dans ces conditions pendant un an ; replacées dans des milieux favorables, ces cultures lui ont donné une production nouvelle et directe de filaments floconneux blancs et bruns et de cordons rhizoïdes blancs. Si, de la température de 25° C. qui paraît être la température la plus fa- vorable au développement du mycélium, les cultu- res sont exposées brusquementà —4° C, onobtient le résultat quivient d'être signalé pour la dessicca- tion ; une température supérieure à l’optimum produit un effet idenlique; et enfin, vers 65 C., les mycéliums internes et externes sont tués. Ces tem- pératures extrêmes auxquelles a élé soumis le champignon ont naturellement élé choisies en con- sidération des minima et des maxima qui peuvent se produire dans le sol où vit le parasite. La con- clusion de ces expériences est donc que des plantes pourridiées peuvent, quoique en apparence dessé- chées, reproduire la maladie si les conditions exté- rieures redeviennent favorables. Les souches tuées par la maladie ne sont mal- heureusement pas les seuls abris de protection pour le mycélium du Pourridié. Le champignon est en effet saprophyte, et les débris de bois, de fumier, le terreau, peuvent transporter et propager la maladie. M. Viala a fait des ensemencements sur divers sols, en ayant soin de stériliser préala- blement les vases d'expériences, les sols employés, les cloches recouvrant les cultures, l’eau d'arro- sage, etil a obtenu, dans une atmosphère main- tenue humide,des masses mycéliennes atteignantà à 8 centim, d'épaisseur, des flocons blancs et des cordons rhizoïdes s’élevant le long des parois des cloches sur une longueur de 25 à 40 centim. Mais dans la nature, il ne se forme pas d'épaisseur aussi considérable de mycélium; d’ailleurs, si l'on soulève les cloches, le mycélium s'affaisse considérablement. L’excès d’eau, l’eau stagnante, ne tue pas le mycélium du 2, necatrix ; des organes mycéliens, maintenus immergés pen- dant plus de trois mois dans l’eau stérilisée, ont poussé quand ils ont été remis dans des conditions favorables de végétation ; c’est pourquoi les vigno- bles submergés naturellement en hiver, ou artifi- ciellement comme traitement du phylloxéra, ne sont nullement protégés contre le Pourridié. Des portions du sol des cultures, desséchées el conser- vées pendant un an, ont donné des formations mycéliennes dans des conditions de température et d'humidité voulues. Ces faits nous expliquent comment la maladie se conserve si longtemps dans les sols envahis, et pourquoi, récemment, dans le Languedoc et la Gironde, il a fallu complètement abandonner des terrains exploités comme pépi- C. SAUVAGEAU. -- LE POURRIDIÉ DE LA VIGNE ET DES ARBRES FRUITIERS 164 nières de grefles-boulures, qui avaient été envahis par le Pourridié. Beaucoup d'horticulteurs admettent que le Pour- ridié n’est pas une maladie parasitaire directe, mais bien une maladie résultante. D’après eux, les arbres ne seraient pourridiés que parce qu'ils sont affaiblis cu surexcilés dans leur végétation, par un sol trop riche ou trop fumé, ou encore parce que les racines ne peuvent vivre dans un sol trop hu- mide. Après les expériences d'inoculation réalisées par M. Viala, la nature parasitaire du Pourridié n'est plus à démontrer; ses cultures lui ont aussi prouvé que le purin stérilisé, ou de petites doses des substances qui entrent dans la composition des engrais chimiques, azotates et phosphates, favo- risent le développement du mycélium et des cor- dons rhizoïdes. [ei se place une observation impor- tante de M. Viala. Si des fragments de vignes pourridiées sont mis en cullure sans précautions, le Pourridié se développe mélangé à de nom- breuses moisissures ; mais si l’on plonge ces frag- ments envahis pendant un quart d'heure dans une solution de sulfo-carbonate de potassium variant de 4 °/, à 1 ©/,,, puis, si on les remet en culture, même en les laissant plonger dans ce liquide par leur base, toutes les moisissures sont tuées, tandis que le mycélium du Dematophora se dé- veloppe enabondants flocons blanes. Le sulfocarbo- nale de potassium employé dans les vignobles pour combaltre le Phylloxéra, a done un effet tout différent sur le Pourridié; au lieu de le tuer, il favorise son développement. B. Organes reproducteurs. — Les organes repro- ducteurs sont de plusieurs sortes; ce sont des coni- diophores, des pycnides el des péritlièces. Les conidies du D, necatrix ont été observées pour Fig. 5. — Demalophora necatrix, à, périthéce isolé (gr. nat.) ; b, coupe longitudinale d'un périthèce ; 0, 0, hampes conidi- fères insérées à la base des périthèces € (gr. 9). la première fois par R.Hartig. Les conidiophores qui les portent s'observent très rarement dans la na- Lure, et seulement sur les plantes mortes. M. Viala dit ne les avoir constatés que deux fois sur des cerisiers, une fois sur un abricotier et trois fois sur des vignes, pendant les neuf années qu'ont duré ses observations. Leur production en culture arti- ficielle est plus facile. En renfermant des souches pourridiées dans la {erre maintenue humide et sous cloche à une température variant de 15 à 20°, M. Viala oblient une abondante production de mycélium blanc, puis brun, dont les filaments s’agglomèrent en petits sclérotes et, quelques mois après la mise en train de l'expérience, les conidiophores apparaissent sur le mycélium flo- coneux ou à la surface des sclérotes. Sil’expérience se fait sous cloche, les conidiophores, comme dans la nature, se forment au niveau du sol; si elle est faite dans des flacons bouchés, les houppes coni- difères apparaissent sur toute la surface de la plante. Si l'atmosphère se dessèche, si la tempé- ralure s’abaisse vers 5° à 6° C., leur production cesse; si les conditions redeviennent favorables, c’est-à-dire air humide et température d'environ 15° C., il en naît de nouveaux. On peut donc à vo- lonté les faire apparaitre ou disparaitre. Les conidiophores, souvent réunis en groupes, sont visibles à l'œil nu; ce sont de petits bâtons noirs, dressés, atteignant souvent 1 millim. de hauteur, surmontés d’une petite houppe blanche (fig. 5, 0). Chaque hampe est formée de filaments La Fiy. 6. — Conidiophore du Demalophora necalrir ; 4, hampe b, branches conidiféres et conidies (gr. 300). dressés, plus ou moins parallèles, agglomérés | (ig- 6); chaque filament se termine à son sommel 162 C. SAUVAGEAU. — LE POURRIDIÉ DE LA VIGNE ET DES ARBRES FRUITIERS par un renflement sur lequel poussent des bran- ches qui s'étaient en panache, et constituent par leur ensemble les petites houppes blanches. Ces branches ultimes forment, à droite et à gauche, chacune de 15 à 20 conidies produites par bour- geonnement; ces conidies, très petites, ovoïdes, longues de 2 à 3 p, donnent en germant un fila- ment qui sera l’origine d'un flocon de mycélium blanc. Les branches conidigènes étant elles-mêmes très nombreuses (fig.6),les conidies sont produites avec une abondance extrème. Celles qui sont si- tuées au niveau du sol sont facilement entrainées par le vent, et leur grande résistance à la séche- resse leur permet de répandre la maladie à une grande distance; celles qui se forment en terre sont entrainées par les eaux pluviales, arrivent au contact des racines, et propagent ainsi la maladie. Bien que les conidiophores se produisent facile- ment et fréquemment, relalivement aux autres organes de reproduction, on peut cependant les considérer comme accidentels dans la nature, el leur rôle physiologique est très limité. Si l’on maintient les scléroles dans un milieu humide, ils produisent des conidiophores ; mais si on les dessèche lentement au moment où ceux-ci commencent à se former, en maintenant la tem- pérature entre 8° et15°, la masse pseudoparenchy- mateuse s'organise en pycnides closes. Les pyenides sont des organes producteurs de conidies internes ou stylospores. Dans le cas du 2. neratrir, elles se forment aux dépens de la masse médullaire du sclérole. Ces pycenides, d'un noir foncé, sont complètement closes, à l'inverse des autres cham- pignons pyrénomycètes, chez lesquels un osltiole permet la sortie des spores. Les stylospores, presque brunes, se produisent sur tout le pourtour de la pyenide au nombre d'une seule par baside ; mais elles peuvent être cloisonnées en deux ou trois cellules. Par la germination, elles donnent un tube mycélien blane. La découverte des pycnides par M. Viala n’est pas seulement importante par l'intérêt que pré- sente la connaissance complète du cycle de li vé- gétation d’un parasite meurtrier que Île Pourridié, mais aussi par son intérêt botanique pur. En effet, l'absence totale d'ostiole pour la dis- séminalion des spores, la présence d’une enve- aussi loppe générale, interne à la membrane primitive du selérote etqui recouvre les groupes depyenides, de même aussi que le petit nombre des spores dans les pycnides, constituent un ensemble de ca- ractères tout particuliers, très importants au point de vue des affinités morphologiques. Les périthèces (fig. 5 et 7) sont les organes de re- production les plus parfaits des champignons as- comycèles, ceux qui permettent de déterminer la place qu'un genre doit occuper dans ce grand groupe ; ils renferment des tubes clos ou asques, à l'intérieur desquels les spores sont disposées en série, M, Viala a reconnu le premier leur présence Fig. 1. — Tige de cerisier avec périthéces a du Dematophora necalrix, produits au collet et entremélés à des hampes conidifères (Réd. 1/2). sur le 2. necatrix. Ge sont de petites sphères, d’un brun plus ou moins foncé, que l’on rencontre sur les souches au niveau du sol, portées par des selé- roles ou des amas mycéliens bruns, el entourées de hampes conidifères; leur diamètre est d'environ 2 millim. Leur enveloppe, très épaisse, compacte, est parfaitement close ; de la paroi de la cavité interne se détachent un grand nombre de fila- ments mycéliens parallèles, hyalins, grêles (fig. 8), ou paraphyses. Les asques (f) sont réguliers, à membrane mince hyaline et renferment chacune 8 spores en forme de navette. Les périthèces se produisent encore plus lente- ment et plus difficilement que les pyenides, et c'est seulement après six années d'essais infruc- tueux que M. Viala esl arrivé à provoquer leur formation dans des cullures sur des cerisiers et des C. SAUVAGEAU. — LE POURRIDIÉ DE LA VIGNE ET DES ARBRES FRUITIERS 163 vignes. Ils se forment au milieu des conidiophores et seulement sur les plantes pourridiées tuées depuis longtemps et décomposées, et, fait remar- quable, ils prennent naissance seulement lorsque la production des conidiophores cesse. Lorsque des plantes pourridiées en culture artificielle,dans le sol et sous cloche, ont donné des conidiophores pendant plusieurs mois, on les découvre peu à peu pour amener une dessiccalion graduelle du sol, et on les abandonne à l'air libre, à l'abri des germes fl ie 1 1 ÿ Fig. 8.— Portion de la coupe d'une périthèce de Demalophora necatrix; d,enveloppe interne produisant les paraphyses e et les asques f (gr. 300). étrangers; six mois après, les périthèces se for- ment et constituent une couronne de petites sphères mêlées aux conidiophores restants. Ces expériences, répélées sur un cerlain nombre d'é- chantillons, ont toujours donné le même résul- lat. Si M. Viala est arrivé à produire à volonté dans ses cullures des pycnides et des périthèces, il ne les a cependant jamais rencontrés dans la nature. Faut-il en conclure qu'à l’état naturel, le champi- gnon du Pourridié se propage et se perpétue uni- quement par sesformesmycélienneset conidiennes, comme de Bary l’a admis pour cerlains champi- gnons ? Ce serait probablement exagéré. La raison en est plutôt due à ce que les plantes tuées par le pas assez longtemps sur le sol pour les former ; mais maintenant que leur forme, leurs caractères, le lieu et les conditions de leur apparition sont connues, et que l'attention est éveillée à leur sujet, peut-être parviendra-l-on à les retrouver dans la nature. [IT — DEMATOPHORA GLOMERATA Les vignes plantées dans les sables peu fertiles sont atteintes par un Pourridié causé par une autre espèce, le D. glomerata, que M. Viala a ren- contrée dans les vignobles des sables du Vaucluse, d'Aigues-Mortes, des environs de Montpellier, des Landes et des Pyrénées-Orientales. Ce second Pourridié, comme le premier, est saprophyte et parasite, et cause la mort des vignes plantées dans les sables humides; mais il se déve- loppe moins rapidement.Il ne forme point de rhi- zomorphes vrais, et on le rencontre sous l'aspect de mycélium externe ou interne, de conidiophores, de sclérotes et de pycnides. Les filaments mycé- liens, d'un brun acajou, recouvrent les tiges et Les racines, au voisinage du niveau du sol d'une couche assez uniforme de teinte et d'épaisseur; ils ne pré- sentent jamais les renflements en poires du 2. necatrir. Les pyenides, produites par la transformation des selérotes, sont assez fréquentes; comme celles du D. necalrix, elles sont complètement closes, et les stylospores très nombreuses qu’elles renfer- ment sont émises au dehors par la déchirure du conceptacle. Les basides y font défaut,et les spores sont dues à la différenciation directe des cellules du centre du sclérote. Ce mode de formation des spores est fort intéressant, et n'a jamais été si- gnalé chez les champignons. Peut-être cependant pourrail-on le comparer, quoique d'une facon assez lointaine, à ce qui se passe dans le développement des endospores des Mucorinées. Par leur germi- nation, ces spores donnent des filaments analo- gues à ceux du mycélium blanc. Le développement que nous avons donné à la description du Ÿ. necatrix nous ampêche de nous étendre plus longuement sur le 2. glomerata, dont les effets sur les vignes sont les mêmes, et que M. Viala décrit avec détails dans ses Maladies de la vigne. Il n’exisle pas d'autre espèce du genre Demato- phora. IV.— AFFINITÉS ET PLAGE DANS LA CLASSIFICATION Les périthèces du D. necatrir, souterrains, com- plètement fermés el entourés d’une enveloppe | épaisse ,ont une grande importance morphologique , Pourridié sont arrachées et détruites, el ne restent iracé et placent ce champignon tout près des Tub 16% €, SAUVAGEAU. — LE POURRIDIÉ DE LA VIGNE ET DES ARBRES FRUITIERS ou truffes, dont il se rapproche par l'intermédiaire des Æydnocystis et Geneu. La comparaison et la discussion des caractères ont déterminé M. Viala à créer pour ce genre la nouvelle famille des Déma- tophorées, dont nous résumons les aflinités dans le diagramme ci-dessous : La connaissance des caractères el des affinités du Dematophora, grâce aux organes reproducteurs, pyenides et périthèces, aura peut-être une impor- Lance considérable au point de vue pratique, en dehors de la maladie du Pourridié. On sait en effet que l'obscurité la plus complète règne sur le développement et la vie des truffes. On n’a jamais vu leur mycélium, on n'a jamais réussi à faire ger- mer leurs spores! Aussi, une très grande part appartient-elle au hasard ou à des conditions peu lium floconneux extérieur qu'à des doses auxquel- les les radicelles sont altérées. L'emploi du sulfure de carbone est préférable; à la dose de 30 grammes par mêtre carré, il n’endom- mage pas les vignes et il tue le mycélium externe, mais sans agir sur les rhizomorphes; au bout de peu de temps, ceux-ci poussent de nouveaux fila- ments mycéliens externes et le traitement est à recommencer. Ce traitement sera donc efficace, à condition qu'il soit fréquemment répété, et la dépense qui en résultera deviendra considé- rable. Les moyens curalifs les plus énergiques seront les meilleurs. Cependant, comme l'observation et l'expérience ont montré à M. Viala que les milieux sees sont très défavorables à la végétation du ÉLAPHOMYCÉTACÉES — CENOCOCCACEÉES de LE 7 k Ke CA \ Ve c£ PYRENOMYCETES NV 27 Hydnocystis > TUBERACÉES DEMATOPHOREES À A Ÿ, ŸS Ne. SA 2 \E ES 2, \Z à € LACS S & Ve Ÿ 2, \®, / FANS DNA PE ; SNS TREE ; ! HYMENOGAS S MUCORINEES connues dans la réussite de la culture des truffes. | Pourridié, il conseille de drainer fortement les Les recherches de M. Viala, en faisant connaître le cycle de la végélation d'un champignon voisin des truffes, nous paraissent destinées à éclairer la biologie de ces dernières, et seront peut-être le point de départ de la réussite de leur culture rai- sonnée. V. — TRAITEMENTS DU POURRIDIÉ. Les traitements curatifs du Pourridié par les procédés chimiques sont presque illusoires ; nous avons vu combien le mycélium interne et les rhizo- morphes sous-corlicaux présentent de résistance aux agents extérieurs;-le mycélium qui se déve- loppe à l’intérieur des tissus ne peut guère être dé- Lruit qu'à la condition de sacrifier les organes envahis. Quant au sulfocarbonale de potassium, employé contre le Phylloxéra, nous avons indiqué que, loin de détruire le Pourridié, il favorise sa végétation; M. Viala a essayé l'emploi du soufre, du sulfate de cuivre, du sulfate de fer, de l'acide chlorhydrique, de l'acide sulfurique; mais, malheu- reusement, ces substances ne détruisent le mycé- terres où la maladie existe ou qui, par leur humi- dité, seraient favorables à son invasion. Lorsque des vignobles ou des vergers montreront des taches isolées du Pourridié, lespropriétaires devront avoir le courage d’arracher immédiatement toutes les plantes malades où soupçonnées, avant d'attendre, pouréviter le développement des fruclifications, que ces plantes soient mortes. On brülera le tout sur place. Les endroits où ces arrachements auront été faits, seront laissés sans culture de plantes arbus- lives pendant deux à lrois ans; on n’y cultivera pas non plus de pommes de terre, de betteraves, de légumineuses, car elles peuvent être envahies par la maladie; seules, les céréales permettent d'utiliser le terrain; il sera bon aussi d'employer le sulfure de carbone par précaution. C’est à ce prix seulement que les viliculteurs et les horti- culteurs lutteront avec succès contre la maladie du Pourridié. C. Sauvageau, Docteur ès sciences, Professeur agr de sciences naturelles au Lycée de Bordeaux. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 165 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Bigourdan (G.), Astronome-adjoint à l'Observatoire de Paris. — Observations de nébuleuses et d’amas stellaires. — (Extrait des Annales de l'Observatoire de Paris. Observations, 1884-1892). En 1884, M. Bigourdan a entrepris d'obtenir les positions précises de toutes les nébuleuses, au nombre de 6.000 environ, observables à Paris. Ce grand travail est en cours d'exécution, et plus de 3.000 nébuleuses ont été déjà mesurées. William Herschel, à qui l’on doit l'analyse la plus complète des objets très variés que l'on comprend sous la dénomination commune de nébuleuses, les a rangés en deux grandes classes : les nébuleuses résolubles formées d'une agglomération d'étoiles plus ou moins faciles à distinguer, et les nébuleuses proprement dites, La voie lactée, à laquelle le Soleil peut être rat- taché, appartient à la première classe. Les nébuleuses proprement dites offrent une grande variété d’aspects, et aussi des différences bien tranchées avec les autres. Herschel distinguait les nébuleuses stellaires, consis tant en petites masses ou flocons nébuleux paraissant adhérer vers leurs bords à une foule de petites étoiles; les étoiles nébuleuses, à figure ronde ou ovale et dont la densité croît rapidement vers le point central, de sorte que laspect est celui d'une étoile voilée ; les étoiles nébuleuses montrant une étoile nette et bril- lante entourées d’un disque circulaire ou d’une atmos- phère faiblement lumineuse; enfin les nébuleuses planétaires, à figure ronde ou ovale et d'un éclat uni- forme, comme les disques des planètes. « Sous quelque point de vue qu’on envisage les nébu- leuses, dit John Herschel, elles offrent un champ inépuisable de spéculations et de conjectures... La matière qui les forme est-elle absorbée par les étoiles dans le voisinage desquelles elle se trouve, et leur fournit-elle en se condensant un supplément de cha- leur et de lumière? Se ramasse-t-elle par une concen- tration progressive due à la gravitation, de manière à fonder de nouveaux systèmes stellaires... Faisons appel aux faits, continue John Herschel, à une observation constanteet soigneuse...» Depuis, le spectroscope, entre les mains de M. Huggins, a montré, en 1864, qu'on avait affaire dans les nébuleuses à un gaz incandescent. Plus récemment, le même savant a vu dans le spectre de quelques étoiles d’Orion des raies s'étendant plus ou moins dans la matière adjacente de la nébuleuse : il parait donc fort probable que ces étoiles sont asso- ciées physiquement avec la matière nébuleuse, Les belles photographies des Pléiades, obtenues par MM. Henry à l'observatoire de Paris, ont révélé d'autre part l'existence de filaments nébuleux établissant des communications entre les étoiles. Les nouvelles mé- thodes mises au service de l'astronomie ont un avenir immense devant elles; les brillants résultats obtenus les ont rendues populaires. Peut-être cependant a-t-on été porté à laisser dans l'ombre d’autres recherches qui ne le cèdent pas en importance à l'étude physique des nébuleuses. Laugier, qui a publié, on peut le dire, le premier catalogue de positions précises, avait en vue d'obtenir le vrai mouvement de translation du système solaire et non pas seulement son mouvement relatif dans la nébuleuse (la voie lactée) à laquelle il appartient, lequel résulte de l'observation des mouvements propres des étoiles de la voix lactée, Il va sans dire que la description précise des nébuleuses est nécessaire pour l'étude de leurs modifications, de leur variabilité..…, questions encore bien neuves, mais dont à compris ET INDEX tout l'intérêt à la suite de l'apparition d'une étoile nouvelle dans la nébuleuse d’Andromède, en 1885. Les travaux accumulés de Messier, Laugier, lord Rosse, d'Arrest, Schünfeld, G. Rümker, Vogel, Stephan, d'Engelhardt..…., ont fait connaître les positions d’'en- viron 1.500 nébuleuses. M. Bigourdan à pu beaucoup accroître le nombre des observations en employant une méthode de mesure plus rapide. Au lieu de rap- porter, comme on le fait habituellement, la nébuleuse à une étoile voisine, par des différences de passages en ascension droite et par la vis micrométrique, M Bigourdan mesure, la lunette étant entrainée, la distance et l'angle de position de la nébuleuse et de l'étoile de comparaison. Cette méthode, qui a donné de très bons résultats pour les comètes, car les obser- vations de M, Bigourdan ont figuré toujours avec honneur dans les tableaux comparatifs publiés par différents astronomes, a l'avantage d’être assez expé- ditive; elle l'emporte aussi à d’autres égards sur la méthode ordinaire : au lieu d'obliger l'observateur à saisir chaque passage au vol en quelque sorte, elle lui permet de faire à loisir chaque pointé et d'éviter les erreurs systématiques que la présence d'étoiles voisines apporte souvent dans l'estimation des passages. Le travail de préparation a exigé plus de deux années de travail assidu. Des cartes ont été préparées, sur lesquelles on a placé d’abord les nébuleuses ; puis les étoiles de différents catalogues, autant que possible sur le même parallèle que la nébuleuse et en avant. Au moment de lobservation, il suffit de diriger la lunette sur l'étoile de comparaison et, laissant la lu- nette fixe, de compter après le passage de l'étoile un nombre de secondes égal à la différence des ascensions droites de l'étoile et la nébuleuse, Les mesures sont faites dans une obscurité complète. M. Bigourdan s'est arrangé pour observer exclusivement avec l'œil droit; l'observation achevée, pendant les lec- tures des cercles avec l'œil gauche, il à soin de main- tenir l'œil droit fermé pour lui conserver sa sensibilité, Après l’exposé des corrections à faire subir aux observations, M. Bigourdan se livre à une comparaison intéressante entre la méthode photographique et les mesures directes, et il conclut que si, pour les nébu- teuses étendues et brillantes, la photographie est avantageuse, elle ne saurait, en ce qui concerne les déterminations précises des nébuleuses faibles et petites, être substituée aux mesures directes que pour un très petit nombre de régions extrêmement riches. Le tableau des observations est élabli sur deux pages en regard, et tout ce qui se rapporte à une nébuleuse est réuni en quelques lignes : les résultats immédiats des mesures (avec de petites figures indiquant le mode du pointé), les diverses corrections, la position de l'étoile de comparaison, ete, Parmi les 48 colones du tableau, on remarquera la quatrième, relative à la srandeur de la nébuleuse, à la facilité des mesures et à la transparence du Ciel, M. Bigourdan à jugé que l'indication de grandeur pouvait remplacer utilement les termes vagues faible, excessivement faible... Dans la colone finale, Descriptions et Remarques, se trouvent groupés d'une maniére claire el concise à la fois tous les renseignements uliles. : Pour témoigner, dès maintenant, de l'intérèt qu'elle porte au grand travail entrepris par M. Bisourdan, l'Académie des Sciences vient de lui décerner le prix Lalande, On peut avoir la confiance que l'énergie de M. Bigourdan saura conduire à bonne fin une entre- prise qui fera grand honneur à l'Observatoire de Paris, O, CALLANDREAU, 166 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques. Miculescu (M.C.). Sur la détermination de l'équi- valent mécanique de la calorie. -— These présentée à la Faculté des Sciences de Paris. — Gauthier- Villars et fils, éditeurs. Paris, 1892. M. Miculescu est l'un de ces jeunes savants étrangers qui viennent demander à la France une solide ins- truction scientifique; ils savent, qu'en ce temps de travaux hâtifs et souvent peu approfondis, on à con- servé dans les laboratoires de nos maïîlres la tradition des recherches expérimentales soignées et conscien- cieusement finies. Dans la thèse qu'il vient de soutenir devant la Fa- culté de Paris, l’auteur s’est proposé de donner une nouvelle détermination de l'équivalent mécanique de la calorie. Bien souvent déjà la question a été abor- dée; mais les divergences qui existent encore dans les résultats donnent à cette recherche un véritable intérêt. M. Miculescu ne s’est pas appliqué à em- ployer une méthode nouvelle; il a pensé avec raison que la métbode la plus simple et la plus directe était la meilleure, et il a repris la méthode classique de Joule; mais il a apporté dans l’exécution de son travail des précautions toutes particulières : il a profité très habilement des progrès faits en ces dernières années dans la mesure du travail et dans les détermi- nations calorimétriques. Dans la méthode de Joule le {ravail mis jeu était fort petit, et par suite aussi fort petite la chaleur dégagée; ilfallait,pour arriver à quelque précision, faire durer l'expérience pendant un temps assez long et répéter vingt fois la chute du corps moteur; de là la nécessité de corrections assez incertaines; dans le travail de M. Miculescu ce grave inconvénient est évité : l’auteur opère en effet avec une force motrice considérable, et avec des appareils thermométriques très sensibles (un couple thermo-électrique) ; il mesure le travail dépensé par un procédé de réduction au zéro, imaginé par M. Marcel Deprez et où le moteur est à lui-même son propre dynanomètre ; il évalue la chaleur produite par une méthode calorimétrique à tempéra- ture constante inventée par Hirn et appliquée par M. d’Arsonval, et tout récemment encore utilisée dans le travail de M. Mathias sur la chaleur de vaporisation des gaz liquéliés. Une trentaine de déterminations très concordantes ont été faites; en variant la durée de l'expérience entre 11 et 3 minutes 5, elles con- duisent à la valeur suivante pour l'équivalent méca- nique : E— 426, 7; l’auteur croit pouvoir répondre, —el le soin qu'il a apporté à ses expériences autorise cette confiance, du chiffre desunités.Ilest toutefois à remar- quer que les recherches les plus consciencieuses faites en ces dernières années n'ont pas conduit à des résultats en parfait accord : Joule a trouvé 424, Ro- land 427, M. Pérot, par un très ingénieux procédé, 424, 6; il est permis de supposer que de légères erreurs systé- matiques peuvent s’introduire dans une détermination aussi délicate, et qu'on ne les peut exactement éva- luer. La valeur la plus probable de cette importante constante est done celle que l’on obtient en faisant la moyenne des nombres trouvés par les meilleurs expé- rimentateurs, et le nombre donné par M. Miculesceu restera parmi ceux auquels on doit attribuer le plus grand poids. Lucien Poincaré. Georges Dary.—L'Electricité dans la Nature. Un vol. in-8° de 430 pages (Prix + 6 fr.), G. Carré, éditeur, 38, rue Saint-André-des-Arts, Paris, 1892. Ce livre est dédié à la mémoire de Gaston Planté. Comme Je dit l’auteur dans sa préface, il a pour but d'exposer toutes les expériences à l'aide desquelles l'inventeur des accumulateurs et de la machine rhéos- tatique essayait de confirmer ses vues nouvelles relali- vement aux phénomènes électriques naturels, A ce litre-là, ce petit volume est intéressant :il con- tient le détail des si curieux essais de Planté, sa repro- duction de l'éclair en boule entre autres, et des compa- raisons originales sur les expériences du regretté élec- tricien et les manifestations électriques de l'atmosphère. Il complète donc les pages dans lesquelles Planté lui- même consignait ses recherches, et il ne pouvait être écrit avec plus d'autorité que par un ami du savant modeste et illustre à qui l’industrie élecrique doit une de ses plus belles conquêtes. A. BERGET, Anney (J.P.), Ingénieur électricien, — Manuel pra- tique de l'installation de la lumière électrique : Stations centrales. { vol.in-18 de 244 pages avec 99 fi- gures dans le texte et 10 planches. (Prix : 7 fr) Bernard Tignol, éditeur, Paris, 1891. Le premier volume de cet ouvrage relatif aux instal- lations privées de lumière électrique a déjà été pu- blié; le second volume, récemmment paru, est consacré aux stations centrales, Il est divisé en deux parties; la première traite de la distribution du courant et des divers systèmes qui ont été employés; elle contient de nombreux renseignements sur les divers dispositifs, sur les manières de grouper et d'installer les matières, sur les accumulateurs, les transformateurs à courants continus où alternatifs, sur l’établissement des ré- seaux, etc. ; la seconde, consacrée aux projets de distri- butions électriques, indique les meilleures conditions d'installations des stations centrales, des canalisations et des appareils placés chez les abonnés; le tout cons- titue un ensemble très complet et clairement exposé. L. O. N.Zelinsky.— Sur les formes steréo-isomériques de l'acide diméthyldioxyglutarique. — Ber, d. D. Chem. Gesell t. XXIV.p.#006. (1891). Si l’on compare les formules de l'acide tartrique et de l'acide diméthyloxyglutarique €CH.OH.CO?H | C(CH).0H.CO2H CH.O0H.CO2H CH2 | C(CH3).0H.CO2H Acide tartrique Acide diméthyldioxyglutarique on remarque que ce dernier composé peut être regardé comme de l'acide lartique dont 2 atomes H sont rem- placés par des groupes CH#, et dont les deux carbones asymétriques (imprimés en lettres grasses) sont sépa- rés par un groupe méthylène. De là résulte que cet acide diméthyldioxyglutarique doit exister sous quatre formes isomériques, de même que l'acide tartrique. D'après les théories de MM. Le Bel et Van’t Hoff on doit pouvoir isoler :unacide dextrogyre, un acide lévogyre, un racémique inactif dédoublable (c'est-à-dire la combinaison moléculaire des deux acides actifs) et un acide inactif non dédoublable, Ces deux derniers composés ont été obtenus par M. Zelinsky, en effectuant la synthèse de l'acide di- méthyldioxyglutarique à partir de lacétylacétone. Les deux acides qui prennent naissance dans cette réaclion sont tous deux inactifs. L'un est un corps relalivement peu stable, qui perd facilement les élé- ments de l’eau en se transformant en laclone; il cor- réspond à l'acide tartrique inactif non dédoublable de M. Pasteur. L'autre, beaucoup plus stable doit repré- senter le racémique correspondant : en effet, par éva- poration lente d'une solution étendue dans léther, M. Zelinsky a obtenu des cristaux qui sont respecti- vement l’image l’un de l’autre et doivent par consé- quent représenter les deux modifications actives. Cette opéralion du triage à la pince ne lui a pas encore donné des quantités suffisantes des deux acides pour que leur pouvoir rotatoire puisse être déterminé. Mais, en présence de ce premier résultat, on peut dès main- tenant admeltre,sans aucun doute, que l’acide dimé- thyldioxyglularique existe bien sous les quatre formes isomériques que font prévoir les (ravaux de M. Pasteur et les conceptions de MM. Le Bel et Van'’t Hoff. DIN SAr GUYE. ah BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 167 3° Sciences naturelles. Haug (Emile). Les chaînes subalpines entre Digne et Gap. Contribution à l'histoire géologique des Alpes françaises. Thèse de la Faculté des sciences de Paris, — Un vol. in-8° de 197 p. avec une carte géol, coloriée et 3 pl. de profils (10 fr.). Baudry et Cie. Paris, 1892. Depuis une vingtaine d'années, la Géologie a accompli bien des progrès; sa méthode et ses moyens d’investi- gation se sont à la fois perfectionnés ; la fantaisie des interprétations et le luxe inutile des détails descriptifs ont fait place à des déductions plus rationnelles et à un mode d'observation plus fécond et plus raisonné. On se rendra compte en lisant la thèse de M. Haug de ces tendances de la Géologie moderne et de tout le parti que l’on peut tirer au point de vue théorique de l'étude d'une région limitée, entreprise avec la méthode et les procédés dont dispose aujourd'hui la science, Ce beau livre fait honneur à son auteur en même temps qu’au Laboratoire de Géologie de la Sor- bonne, d’où il est sorti. Entre les vallées du Verdon, de l'Ubayeet de la Durance est comprise, de Barrème à Gap (par Digne et Seyne), une contrée nue et ravinée, dont la portion principale fait partie du département des Basses-Alpes et dont le reste appartient aux Hautes-Alpes. C’est ce coin des chaînes extérieures de nos Alpes, sauvage et reculé,qu'à étudié, avec une patience et un courage dignes d’éloges, l’au- teur du travail que nous avons sous les yeux. L’histo- rique, dont M. Haug fait précéder son étude, nous montre que fort incomplètes étaient les nombreuses descriptions dont avaient jusqu’à présent fait l’objet les chaines subalpines entre Digne et Gap. Quoique assez difficile à délimiter d'une façon natu- relle, cette région, véritable chaos de chaïnons monta- sneux disposés sans aucun ordre apparent, possède cependant une certaine individualité, ainsi qu'il ressort de la description de M. Haug ; et l’on ne pourrait guère en trouver l’analogue dans le reste des Alpes françaises. Les assises qui en constituent le sol sont les suivantes : Les schistes à séricite, forment, à Remollon, un petit bombement au milieu du Lias (le Trias fait ici défaut), que l’auteur considère comme une dépendance du massif de Pelvoux. Le terrain houiller, riche en végé- faux, est recouvert directement à Barles (sans inter- position de dépôts permiens) par le Trias à faciès occidental, différant notablement par sa nature des dépôts de même âge du Brianconnais et de la Savoie, sauf en ce qui concerne les quartzites de la base. La partie la plus importante du travail est consacrée à l'étude des assises jurassiques. M. Haug en décrit suc - cessivement toutes les zones; il analyse minutieuse- ment les faunes et se livre à des comparaisons sugges- lives avec les dépôts équivalents d’autres régions, L'ixrrazras est divisé comme d'habitude en trois zones, quoique M. Haug se déclare, avec beaucoup de raison, partisan de la réunion de l’Hettangien au Lias inférieur. Le Rhétien qui seul est assez individualisé pour former un étage distinct, est développéici sous le faciès souabe ; il appartient, ainsi que le Lias, au type occidental de ce terrain et ne rappelle en aucune facon le Rhétien ni le Lias des Alpes crientales. Dans le Las M. Haug a distingué très judicieusement trois faciès dans la région qui l’occupe: le faciès pro- vencal à l'ouest et au sud, caractérisé par des Bivalves et des Brachiopodes associés aux Céphalopodes, le faciès dauphinois (aux environs de Gap et de la Savoie), exclusivement composé de couches à Céphalopodes, puissante succession de marnes et de calcaires non zoogènes, enfin Le faciès brianconnais plus littoral, géné- ralement bréchoïde, à Gryphées, Polypiers, Gastropodes, qui occupe le nord-est de la région. Les limites de ces faciès sont parallèles aux grandes lignes orographiques et tectoniques de la chaîne alpine, ainsi que l’auteur le met parfaitement en lumière par une suite de com- paraisons bien choisies, Pour les trois faciès on dis- tingue dans le Lias, deux grandes subdivisions l'une inférieure calcaire, correspondant au Siné- murien et à la base du Liasien; l’autre supérieure, éminemment schisteuse et jouant un rôle orographique tout différent. M. Häug a reconnu dans ces deux groupes d'assises la série habituelle des zones liasiques dont il nous donne le détail. LE JURASSIQUE MOYEN comprend le Bajocien (avec ses cinq zones : zone à Harpoceras Murchisonæ, zone à Harp. concavum, zone à Sphæroceras Sauxzei, zone à Sonninia Romani et zone à Cosmoceras subfurcatum) et le Bathonien; (zone à Oppelia fusca, et zone à Oppelia aspidoides). Les chapitres consacrés à ces étages sont très instrugtifs : car M. Haug y établit une classification rationnelle des zones du jurassique moyen. Puis viennent successivement les dépôts du Callo- vien, de l’'Oxfordien, et les calcaires kimméridgiens et portlandiens constituant le JURASSIQUE SUPÉRIEUR, dont le rôle orographique est si important dans les chaines subalpines et au sujet desquels l’auteur a recueilli quelques observations inédites, Ces sédi- ments, comme ceux du jurassique moyen et contraire- ment à ceux du Lias, présentent par leur faune le type méditerranéen et diffèrent notablement des dépôts de même âge du nord et du nord-est de la France. Le sysrème créÉracé, représenté par tous ses étages, est moins longuement décrit; M. Haug signale notam- ment existence du Twronien à Inoceramus labiatus aux environs de Digne (près de Thoard). Comme on voit, la série des dépôts mésozoïques est ici complète; les dépôts calcaréo-vaseux à Céphalopodes, Posidonomyes, Inocérames sont pré- dominants: on ne constate que peu de banes-limites et la continuité est remarquable dans ces 2,500 mètres de sédiments ; à certains moments cependant (Callovien) se sont établies des lagunes locales où se sont déposés des gypses. Un très intéressant chapitre est consacré à la distribution des faciès des dépôts secondaires dans le bassin du Rhône et en particulier dans la région subal- pine. Les faciès briançonnais et provençal y sont considérés comme indiquant la zone littorale qui entourait les anciens massifs émergés de l'axe alpin et des Maures, au large desquels se formaient, dans une zone profonde parallèle à la direction des Alpes, dans le géosynelinal subalpin, des dépôts uniformes et calca- réo-vaseux (faciès dauphinois). M. Haug arrive ainsi à rapporter aux déplacements lents de ce géosynelinal subalpin le mode de développement des diverses assises sédimentaires et met en lumière d’une facon saisis- sante l'influence qu'ont exercée, sur la nature et le faciès des dépôts, les manifestations successives de l'activité orogénique, depuis les reliefs hercyniens jusqu'aux plissements du système alpin. — Une carle, qui mérite de devenir classique, représente l'extension des facies jurassiques et crélacés dans le bassin du Rhône, en résumant l’ingénieuse synthèse, En ce qui concerne la SÉRIE TERTIAIRE, les recherches de M. Haug ont porté sur le Nummulitique et surtout sur la Mollasse rouge aquitanienne, qui rappelle beaucoup les couches de même nom et les grès de Rallisen de la Suisse et qui représente les accumula- tions détritiques formées dans les bassins oligocènes par les torrents de l’époque. C’est à l'auteur que revient l'honneur d’avoir reconnu l’âge de ces grès, considérés comme triasiques par ses prédécesseurs. — La mollasse helvétienne et les cailloutis tortoniens sont également représentés dans le champ d’études de notre confrère, Les dépôts quaternaires sont à leur tour analysés; les renseignements sur les traces de l’ancienne extension des glaciers, méritent d’être signalés; M. Haug les date de l'époque quaternaire, quoique nombre de vallées, notamment celle de la Durance, aient subi depuis l'existence de ces glaciers d'importantes modifications. L'âge différent des vallées dont quelques-unes sont nel- tement postglaciaires, tandis que d’autres sont anté- rieures à l'extension des glaciers,! a du reste été peu étudié dans les Alpes. A cause de l'intérêt qui sy rat- tache cette question appelle de nouveaux travaux, 168 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Rappelons aussi un paragraphe consacré aux roches éruptives (Mélaphyres) qui ont pénétré dans le Lias de Remollon, et dont la venue aurait occasionné la trans- formation de ses bancs calcaires en gypse. A côté de ces gypses métamorphiques, M. Haug décrit du reste, dans le Bathonien et le Callovien, des dépôts de même nature, mais probablement d’origine lagunaire. L'analyse des piscocarions que l’auteur classe en dislocations résultant de mouvements horizontaux et en dislocations résultant de mouvements verticaux est suivie d'un essai de coordination de ces accidents et d’un exposé de la succession des divers mouvements orogé- niques dont a été le théâtre la région étudiée. La première catégorie estreprésentée par des plis an- ticlinaux et synclinaux droits ((normaux), déjetés ou renversés, par un pli renversé et éliré comme ceux de de la Provence (pli de l’Infernet près d'Auzet) et par un grand nombre de plis-failles souvent plus ou moins démantelées par l'érosion. A ces derniers il faut rat- tacher un mode de dislocations qui atteint, dans la région étudiée par M. Haug, un développement consi- dérable; ce sont les chevauchements horizontaux ou plis- failles inverses très inclinés qui ontpour résultat l’exis- tence de vastes lambeaux de recouvrement présentant la série normale (non renversée) des assises reposant sur des terrains plus récents. Les dislocations dues à des mouvements verticaux sont représentées par des failles de tassement ou de torsion et par les failles périphériques de bassins d’af- faissement qui constituent, d’après l’auteur, un des traits caractéristiques de la région (champs d’affais- sement de Turriers-Faucon, d'Esclangon et du bassin tertiaire de Thoard-Champtercier) ayant parfois déter- miné l'existence de lambeaux surélevés (Horst) com- pris entre ces cassures. Les plis sont groupés, dans la région qui fait l'objet du mémoire de M. Haug, autour des deux directions fondamentales N, S et E O, à l'intersection des- quelles les couches se montrent non seulement plis- sées dans des directions intermédiaires, mais encore refoulées les unes sur les autres de manière à compen- ser la diminution d'espace horizontal que, d’après l’auteur, elles ont dû subir. Des morceaux de la partie superficielle de l'écorce terrestre, au lieu de se trouver en juxtaposition, ont été obligés de se superposer sur leurs bords, de s’imbriquer. — Cette disposition a été masquée et modifiée depuis parles effets d’affaisse- ments locaux et par l’action puissante des phénomènes d’érosion, ce qui rend l'étude des chaînes alpines entre Digne et Gap fort difficile et même incompréhensible aux personnes qui ne sont pas familiarisées avec les complications de la tectonique alpine. Quant à l’âge des principales dislocations, l’auteur établit la succession suivante (en faisant abstraction des dislocalions antétriasiques qui ont pu se produire) : Dislocations posterétac — anteaquitaniennes, —— antéhelvétiennes, — antétortoniennes, = posttortoniennes. On doit à l’auteur d’avoir établi et précisé l’époque où se sont produits plusieurs de ces mouvements, notamment les plissements antérieurs à lAquita- nien. Dans un dernier et remarquable chapitre, M. Haug ré- sume l'histoire géologique de la contrée en la rattachant à celle de l’ensemble des Alpes occidentales, Il nous fait assister avec beaucoup de talent à la formation succes- sive des plissements alpins de l’est à l’ouest et au dé- placement corrélatif des zones profondes et des for- mations littorales, du « géosynelinal subalpin »; à la production des gigantesques dislocations mentionnées plus haut, au développement des phénomènes torrentiels manifestes dès l’époque oligocène, mais surtout accen- tués à partir du Pliocène, puis tellement favorisés par le déboisement de la période historique que, « géologi- quement parlant, l’époque n’est pas éloignée où nos chaines subalpines seront presque entièrement nive- lées, » Une carte géologique coloriée, au 200 millième et trois planches de profils permettent de se faire une une idée très exacte de la constitution du pays exploré par notre confrère, Nous terminerons par un regret: celui que l’auteur n'ait pas approfondi certaines questions dont il nous promet du reste la solution pour un avenir prochain et qu'en obéissant au désir très légitime de mettre le plus tôt possible en lumière les principaux résultats de ses recherches, il nous ait privé de nombre de développe- ments de détails. Aussi bien son mémoire aurait-il gagné, tant en ce qui concerne la forme que pour le fond, à être publié quelques mois plus tard et appelle-t-il une suite que nous attendonsavec une impa- tience que justifie pleinement le grand intérêt du volume que vient de faire paraître M. Haug. Tous ceux qui consulteront ce travail, dont nous n’aurions pu sans dépasser de beaucoup le cadre habituel de ces analyses, donner un résumé quelque peu satisfaisant, y ver- ront sans doute, comme nous, une des plus substan- tielles et des plus utiles monographies dont les Alpes francaises aient fait l’objet depuis longtemps. W.KILIAN, Viala (Pierre), — Monographie du Pourridié des vignes et des arbres fruitiers. Thèse de la Faculté des Sciences de Paris. G. Masson. Paris, 1891. Nous mentionnons ici ce travail. pour le relever au chapitre des thèses dans notre fable des matières de fin d'année, Voir ci-dessus (page 156). 4° Sciences médicales. Lwoff (S.) — Etude sur les troubles intellectuels liés aux lésions circonscrites du cerveau. In-8° de 176 pages. J.-B. Baïllière et fils. Paris, 1891. M. Lwoff présente dans ce travail un tableau d’en- semble des troubles moteurs, intellectuels et senso- riels, qui accompagnent les lésions circonserites du cerveau. Les malades atteints de ces lésions lui semblent constituer un groupe clinique naturel, voisin et cepen- dant nettement distinct de celui que forment les para- lytiques généraux. Ils peuvent présenter, comme les paralytiques, les syndromes les plus divers : idées de persécution ou de grandeur, idées hypocondriaques, hallucinations; mais, tandis que chez les paralytiques, l'intelligence tout entière s’affaiblit à la fois, chez eux, au contraire, ce sont des lacunes qui se produisent, de véritables trous, qui laissent subsister intactes à côté d'eux certaines parties de l'intelligence ou de la mé- moire. Un malade peut, par exemple, oublier tout ce qu'il a lu et garder le souvenir très net de tout ce qu'on lui a raconté; il peut ne plus se rappeler les évènements récents et se souvenir de telle ou telle période de son passé. Quelques-uns d'entre eux sont encore capables d'attention, bien qu'il leur faille un très grand effort pour s'appliquer; ils ont souvent une assez claire conscience de leur état et une certaine suite dans les idées; ils ne présentent pas cette insta- bilité d'humeur, caractéristique des paralytiques, Il semble que les symptômes différentiels soient assez nets pour permettre de faire, dans la plupart des cas, le diagnostic entre ces affections et la paralysie géné- rale; mais elles ne constituent pas, à tout prendre, un groupe aussi cohérent que la paralysie générale, parce que la marche et l'aspect de la maladie varient néces- sairement quelque peu avec le siège de la lésion. M. Lwoff insiste particulièrement sur un trouble de la motilité qui permet, dans certains cas douteux, de faire le diagnostic : l’hémi-tremblement des lèvres. Ce travail renferme trente observations originales; elles ont été prises dans le service de M. Magnan, dont M. Lwoff a été l’interne. Dix d’entre elles ont été sui- vies d’autopsies. L. MARILLIER, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 169 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 15 février. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Sophus Lie : Sur une application de la théorie des groupes continus à la théorie des fonctions, — M. Phragmen : Sur la distri- bution des nombres premiers, — M. P. Appel : Exten- sion des équations de Lagrange au cas du frottement de glissement. — M. G. Rayet a observé deux fois à l'Observatoire de Bordeaux l'étoile temporaire signalée récemment dans le Cocher ; il en a examiné le spectre, qui est continu avec diverses lignes brillantes. 20 SCIENCES PHYSIQUES, — M. H. Le Chatelier répond à la réclamation de priorité formulée par M, H. Becque- rel en faveur de E. Becquerel, relativement à la mesure des hautes températures. — En réponse à la note de M. Pellat sur la tension superficielle des métaux, M. Gouy se défend d’avoir assimilé aux métaux solides les amalgames à :4,; il démontre que le métal allié au mercure n’est pas détruit, comme le supposait M. Pel- lat, au contact de l’eau acidulée, car la pile formée par la colonne d'amalgame et le large mercure de l’é- lectomètre capillaire possède une force électro-motrice très voisine de celle d’une pile zince-mercure, — M. D. Negreano a étudié la variation de la constante diélec- trique des liquides au moyen d’un dispositif très simple, Pour la benzine, le toluène et le xylène, de 0° à 50°, la constante diélectrique décroit quand la température monte, — MM.R. Blondlot et M.Dufour ont étudié l'influence exercée sur les phénomènes de résonance électro-magnétique par la dissymétrie du circuit le long duquel se propagent les ondes. Pour cela, ils ont coupé l’un des fils conducteurs du dispo- sitif employé par M. Blondlot dans ses expériences pré- cédentes, et comblé cette solution de continuité par une boucle métallique de dimensions variables. La longueur d'onde est toujours demeurée indépendante de la longueur de la boucle; cette constatation con- firme et étend le principe posé par MM. Sarasin et de la Rive, à savoir que la longueur d'onde est déterminée par le résonnateur seulement. — M. R. Colson à recherché, au moyen d'un téléphone déplacé le long du conducteur, la facon dont décroit l'intensité du flux électrique envoyé par une bobine de Ruhmkorff dans un conducteur de grande résistance (fil mouillé) assez long pour qu'à l'extrémité le téléphone ne rende plus aucun son, La décroissance de l'intensité du son télé- phonique a lieu suivant une courbe en cascade, M. Col- son pense que des deux flux de même période envoyés par la bobine, le flux direct, à potentiel plus élevé, va plus vite que l’autre et interfère avec lui. — M. Mou- reaux signale une perturbation magnétique d'une intensité extraordinaire observée au pare Saint-Maur les 13 et 14 février. Le phénomène a présenté les mêmes phases aux mêmesinstants à Perpignan, à Lyon et à Nantes, — M. E. Semmola à fait à Naples des observations sur l'électricité atmosphérique au moyen d'un ballon captif portant un électroscope à feuillles d'or et relié par un conducteur à un autre électroscope placé près du sol. — M. G. Charpy montre que pour étudier la variation d'une propriété physique d'une solution en fonction de la concentration, il est néces- saire de prendre pour variable le nombre de molécules du sel par rapport au nombre total du mélange. Il a déterminé expérimentalement, pour un grand nombre de sels, le coefficient de contraction, tel qu’il l’a défini antérieurement ; les résultats de ses expériences tra- duits en courbe, en prenant la variable indiquée, ne présentent aucune partie véritablement rectiligne, — M. G. André a continué l'étude de l’acide bismuthique ; mis en présence de la potasse, cel acide s’y combine avec une extrême lenteur ; il existe diverses combinai- sons de l'acide bismuthique avec son anhydride, — M. Maquenne, distillant dans un courant d'hydrogène pur et sec l’amalgame de baryum en présence du char- bon en poudre, a obtenu un carbure de baryum qui, décomposé par l’eau, donne de l'acétylène. Il s’agi donc d'un acétylure C? Ba.—M. H. Moissan montre que toutes les préparations données comme bore amorphe sont des mélanges contenant au plus moitié de leur poids de bore libre; en particulier dans l’action d'un métal alcalin sur l'acide borique, la majeure partie du bore mis en liberté d'abord se combine à l'excès du métal alcalin et au métal du vase dans lequel on fait la réaction. — M. Berthelot indique que la combustion dans la bombe par l'oxygène comprimé à 25 atmos- phères constitue un procédé d'analyse organique commode en bien des cas : le carbone est obtenu très facilement, le soufre et le phosphore plus facilement que par aucune autre méthode. M. Berthelot ajoute des remarques pratiques sur l'intervention de la vapeur d’eau dans les expériences au moyen de l’oxygène comprimé, suivant le mode d'emploi de cet oxygène. — MM. Prud’homme et C. Rabaud, en faisant réagir le chlorure cuivreux sur le nitrate d’aniline en présence d'acide chlorhydrique, ont obtenu du paradichloro- benzène ; l'expérence leur a démontré que cette trans- formation à ben par formation intermédiaire de chlo- rure de diazobenzène. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Etard à continué ses recherches sur les principes immédiats qui accom- pagnent la chlorophylle dans les végétaux et qu'on peut en extraire par le sulfure de carbone; des feuilles de vigne, il a retiré un glycol (vitoglycol) répondant à la formule C 2311402; de la luzerne, un alcool mono- atomique(medicagol) C2 H#1 OH, de labryone, unhydro- carbure saturé (bryonane) C2?! H#?; ces corps sont très stables, et, comme l’expérience l’a montré pour le mé- dicagol, résistent aux fermentations et à la digestion. — M. À. Girard expose les rendements élevés qu'a fournis en 1891 la culture en grand de la pomme de terre, effectuée suivant les procédés indiqués par lui. M. H. Quantin signale l'emploi, pour déplâtrer les vins, de divers sels de baryte : il indique une méthode propre à reconnaître quel est le sel de baryte quiaété employé. — M. Berthelot fait remarquer combien est grave, au point de vue de l'hygiène publique, la falsi- fication du vin signalée dans cette communication. — M. Hanriot, qui avait observé quelquefois, dans ses recherches faites antérieurement avec M. Richet sur la respiration, chez l’homme, un quotient respiratoire su- périeur à 1, a reconnu que l’on obtient le fait à coup sûr en faisant absorber au sujet à jeun une quantité assez faible d'hydrates de carbone avec beaucoup d’eau. L'asepsie intestinale par le naphtol ne modifie pas Île phénomène. Le fait ne peut s'expliquer que par un dé- doublement du glucose dans l’organisme., Si l’on cal- cule la quantité de CO? que doit dégager le glucose in- géré pour se transformer en graisse (oléostéaropal- mitine), on retrouve exactement cette quantité en retranchant de l'acide carbonique éliminé dans les quatre heures qui suivent l'absorption du glucose la quantité correspondant à l'oxygène absorbé suivant le quotient respiratoire évalué à jeun. Les choses se pas- sent done comme si le glucose absorbé était trans- formé quantitativement et immédiatement en graisse.— M. A .Gautier rappelle à ce propos ses théories sur la vie anaérobie chez les animaux supérieurs, — M,$, Du- 170 ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES play a fait de nombreuses tentatives d’inoculalions de cancer, soit de l’homme à divers animaux, soit de chien à chien. Les résultats ont toujours été négatifs.— M. L. Cayeux a reconnu que les gaizes crélacées du bassin de Paris sont constituées pour une part notable par des tests de diatomées; ilaurait signalé le même fait pour les tuffeaux tertiaires du nord de la France, — M. A. Lacroix signale l'existence de nombreuses z60- lites dans les calcaires jurassiques de l’Ariège. Mémoires présentés : M. Amat rappelle les résultats obtenus par lui en octobre 1878 sur les mensurations du crâne de J. Inaudi. — M, L, Hugo adresse une note sur les procédés employés par divers calculateurs pour effectuer rapidement des calculs plus ou moins com- pliqués. — M, Skromnof adresse un mémoire sur divers perfectionnements des machines à vapeur à haute pression, — M, C. Ventre adresse un mémoire sur un nouveau système d'éclairage par la bougie-pé- trole. — M. G. de Almeida annonce qu'un gisement d’ossements fossiles vient d’être découvert au Brésil dans la province du Rio Grande do Sul. Nominations : M. de Tillo est élu correspondant pour la section de géographie et navigation. Séance du 22 février. 2° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L, Autonne : Sur les intégrales algébriques de l'équation différentielle du premier ordre, — M. H. Resal : Sur une interpré- lation géométrique de l'expression de l'angle de deux normales infiniment voisines d’une surface, et sur son usage dans les théories du roulement des surfaces et des engrenages sans frottement, — M. H. Poincaré : Sur la théorie de l’élasticité. — M. Bertrand de Font- violand : Surles déformations élastiques maximums des ares métalliques, — M. A. de Caligny : Sur une amélioration de l'appareil automatique à élever l’eau à de grandes hauteurs, employé aux irrigations, — M. Mascart signale que les enregistreurs des obser- vatoires de Nice, Toulouse, Clermont et Besancon ont reproduit la perturbation magnétique des 13 et 14 f6- vrier avec toutes les circonstances constatées par les stations de Perpignan, Lyon, Nantes et Parc-Saint- Maur ; il rapporte plusieurs témoignages montrant que l'aurore boréale correspondante, signalée d'abord aux Etats-Unis, a été également observée en Europe. — M, J. Janssen met sous les yeux de l’Académie les photographies du Soleil, obtenues à Meudon les 5, 9, 12 et17 février, et sur lesquelles on remarque une des taches les plus considérables observées pendant les dernières périodes solaires. A l'égard de la question des rapports entre les phénomènes des taches solaires et les perturbations magnétiques terrestres, M. Janssen ne voit dans les faits constatés jusqu'ici rien qui auto- rise encore à admettre cette corrélation. — M, E. Mar- chand, en signalant cette même tache solaire,voit dans la concordance entre le passage de cette tache au mé- ridien central et la perturbation magnétique, une véri- fication remarquable de la loi qu’il a posée à ce sujet. — M. F. Denza a observé et photographié le 7 à l'Ob- servatoire du Vatican la nouvelle étoile du Cocher. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Becquerel : Sur la me- sure des hautes températures; réponse à des observa- tions de M. H. Le Châtelier. -- M. A. Witza cherché si en réalité la théorie de Boutigny sur létat sphé- roidal était applicable à des masses d’eau considérables, comme celles des chaudières, et si cette théorie expli- quait les explosions de celles-ci. Après avoir fait re- marquer que dans la marche des vitesses d'évapora- tion surun mélalchauffé à destempératures croissantes, l’état sphéroïdal est caractérisé par une chute brusque de la courbe, il a fait des expériences sur une chau- dière d’un dispositif particulier donnant la vitesse d’évaporation avec niveau constant, Or cette vitesse croît constamment avec l’élévation de la température ; si l’on fait rougir le fond de la chaudière avant d’a- limenter, on a des évaporations extrêmement rapides. Rien dans ce cas ne ressemble donc à l’état sphéroïdal, — M. H. Moissan, qui avait montré dans la séance précédente que l'action des métaux alcalins sur l’acide borique ne peut pas donner de bore pur, a repris lac- tion du magnésium sur l’acide borique, déjà essayée par divers chimistes. En employant un grand excès d’anhydride borique, on obtient un mélange de bore, de borate de magnésie et de borure de magnésium; les deux sels sont faciles à éliminer, et M. Moissan est arrivé à un produit contenant 99 °/, de bore.— M. H. Causse a étudié la solubilité du phosphate calcique en présence d'un excès d'acide phosphorique. — M. A. Colson, ré- pendant à la note de M. Le Bel sur la stéréochimie de l’acide diacétyltartrique, voit dans cette note la preuve qu'il y à autant de stéréochimies que de stéréochi- mistes, Pour ce qui regarde la représentation du car- bone asymétrique par un tétraèdre, s’il ne s’agit pas d’un tétraèdre régulier, cette notation ne permet plus de rien prévoir. — MM. A. Haller et A. Held : Nou- velles recherches sur les éthers acétoacétiques mono- chlorés, monobromés et monocyanés, — M, de For- erand a déterminé les chaleurs de formation de l’iso- propylate de soudeetdescombinaisons triisopropyliques qu'il a décrites récemment, — M. G. Massol a déter- miné la chaleur de neutralisation de l'acide tartronique par la soude et la potasse, — M. L. Vignon emploie, pour déterminer le poids spécifique des fibres textiles, la méthode de la balance hydrostatique, mais en rem- placantl’eau, qui mouille mal ces fibres, par la benzine:; les gaz condensés sont éliminés par le vide. 3° SCIENCES NATURELLES, — M. A. Certes a examiné un grand nombre de sédiments d’eau douce et d’eau salée, de provenances très diverses, au point de vue des organismes qui peuyent s’y conserver vivants. Tous ont donné des microbes en abondance. Les sédi- ments marins ne donnent pas en général d'organismes plus élevés, tandis que les sédiments d’eau douce ou saumâtre, et également ceux des chotts et lacs salés de l'intérieur des terres donnent des Infusoires, flagellés et ciliés, des Rotifères et des Annélides. En somme, les faunes des eaux exposées à la dessiccation sont adaptées pour y résister, et non les faunes marines, qui n'y sont pas exposées normalement, — M. S.Jour- dain a étudié le développement de l’'Oniseus murarius et du Porcellio scaber, en s'attachant spécialement à la formation des appendices, Il interprète l'organe dorsal signalé chez ces embryons comme un ombilic du sas amniotique. — MM. F. Henneguy et A. Binet ont observé dans la chaîne ganglionnaire ventrale de quelques larves de Diptères la disposition suivante: au point où chaque connectif, en pénétrant dans un gan- ghion, s'y épanouit, se trouve une cellule à noyau très apparent et très volumineux, entourée d’une auréole de fibrilles ramifiées, entre lesquelles passent les fibres nerveuses du connectif, La facon dont cette cellule se comporte vis-à-vis des réactifs colorants doit la faire considérer comme de nature conjonctive. — M, Han- riot a reconnu que, chez les diabétiques, un repas d'hydrate de carbone ne produit pas l'élévation du quo- tient respiratoire qu'il a signalée chez les sujets nor- maux (Voir C. R., séance précédente). L’antipyrine, qui fait baisser l’excrétion du sucre par le rein, n’a aucune influence sur le quotient respiratoire, La ven- tilation qui, chez le sujet normal, s’accroit considé- rablement après le repas corrélativement à l’élimi- nation de CO?, est à peine modifiée chez le dia- bétique. — M. Ch. Henry : Remarques sur une communication récente de M. J. Passy, concernant les minimums perceptibles de quelques odeurs, — M. A. Müntz a examiné quelle était, en réalité, sur les raisins, l’action de l’effeuillage de la vigne, pra- tiqué dans le but d’en hâter la maturation. La richesse en sucre est diminuée notablement dans les raisins par lPexposition aux rayons directs du Soleil, ce qui s'explique par l'augmentation des combustions respi- ratoires corrélatives à lélévation de température; l'acidité est un peu diminuée. — M. M. Bertrand, en déterminant les plissements subis par divers bassins, ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 171 tels que le bassin de Paris, entre deux incursions suc- cessives de la mer tertiaire, a reconnu que les plisse- ments récents se font toujours exactement dans le prolongement d’un plissement ancien. Il a déterminé deux directions des ridements, à angle droit lune sur l'autre, l’une parallèle à l'équateur, l’autre conv ergeant vers les pôles, mais plutôt vers les pôles magnétiques. Les chaines de montagne sont, en général, formées suivant une ligne brisée, composée alternativement de segments de l'une et de l’autre direction. Mémoires présentés. — M. J. Mazzarella : Sur la cons- titution des fonctions de variables réelles, — M. A. Ba- zin : Sur la traversée du détroit du Pas-de-Calais en tunnel dans la mer et sur diverses questions de mé- canique appliquée, Séance du 29 février 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Sophus Lie : Sur les fondements de la géométrie; l’auteur s'attache à démontrer que M. Helmholtz a commis des fautes de raisonnement dans ses mémoires sur ce sujet. M. F. Tisserand : Sur une équation différentielle rela- tive au calcul des perturbations. — M. Faye présente, au nom de M. Ch. Garnier, une monographie de lOb- servatoire de Nice. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Faye communique di- vers renseignements sur la trombe qui a eu lieu le 9 juin dernier dans le département de Lot-et-Garonne ; renseignements extraits d’une relation de M. L. Phi- lippe. — M. H. Pellat, répondant à la dernière com- munication de M. Gouy sur la tension supertlicielle des métaux liquides, conclut que, puisque M. Gouy reconnait que les amalgames à = ne se comportent pas comme les métaux eux-mêmes, ces expériences n'infirment pas les siennes, faites avec des amalgames riches, — M. Hurmuzeseu à éludié la diffraction éloignée, en lumière parallèle, avec le dispositif dont s’est servi M. Gouy pour des expériences de ce genre ; le biseau de la lame servant d’écran était parfaitement dressé au moyen de précautions particulières, Il à vu que la bande lumineuse située dans lombre géomé- trique au delà du champ de la diffraction ordinaire est sillonnée de lignes noires extrêmement fines, pa- rallèles au bord de l'écran. Avec des écrans conduc- teurs, la lumière de cette bande est partiellement polarisée, et la polarisation va en augmentant avec la déviation; avec des écrans diélectriques (ébonite), la polarisation est beaucoup plus faible, — M. N. Pilts- chikoff a observé avec le photo-polarimètre de M, Cornu la polarisation atmosphérique pendant la nuit; la pro- portion de lumière polarisée est fonction de la quan- tité de lumière envoyée par la Lune.— M. H. Le Châte- lier a déterminé, par la méthode qu'il a précédem- ment exposée, les températures développées dans di- vers foyers industriels; les chiffres qu'il a obtenus sont beaucoup plus faibles que ceux qui étaient admis jus- qu'ici. — En réponse aux notes de M. Colson, M. Ph.- A. Guye démontre 1° que les conceptions de M. Le Bel et de M. Van't Hoff ne sont pas contradictoires ; on ne peut donc pas dire qu'il y a plusieurs stéréo- chimies ; 2° qu'on ne peut appliquer aux composés cycliques actifs (comme lPanhydride diacétyltartrique), les règles qu'il a données pour fixer la position du centre des schémas stéréochimiques; 3° que la disso- ciation des diacétyltartrates en milieu aqueux rend aisément compte de l’anomalie apparente que pré- sentent les sels. — M. A. Recoura à reconnu que l’isomère vert du sulfate de sesquioxyde de chrome antérieurement décrit par lui (c. r., 28 décembre 1891) peut se combiner avec l'acide sulfurique; cet acide chromosulfurique ne précipite pas par le chlorure de baryum. Il a pu isoler cet acide et quelques-uns de ses sels. — M. D. Gernez a reconnu que la per- séile, qui est à peine lévogyre donne avec l'acide molybdique des solutions aqueuses fortement dex- trogyres ; il a réalisé sur ces solutions des expé- riences analogues à celles qu'il a publiées sur la mannite ef la sorbite. — MM. A. Haller et A, Held : Nouvelles recherches sur les éthers acéto-acétiques monohalogénés et monocyanés. — M. A. Berg : Le dérivé chloré de la diamylamine, additionné molécule à molécule de soude en solution alcoolique, se trans- forme partiellement en une autre base qui se dédouble par les acides en valéral et amylamine; c’est l’'amyla- mylidénamine : le cyanure de potassium réagissant sur le même dérivé chloré donne le diamylcyanamide. — M. G. Perrier a préparé la métaphényltoluëne en chauf- fant longtemps dans un appareil à reflux un mélange à molécules égales de métabromotoluène et de bro- mure de phényle dissous dans l’éther anhydre et addi- tionné d’un excès de sodium, — M. G. Massol a déter- miné la chaleur de formation des carballylates mono, bi et tripotassiques. Ces déterminations permettent de constater que : 1° les quantités de chaleur dégagées par la combinaison successive de trois molécules de potasse avec une molécule d'acide carballylique dé- croissent progressivement; 2 la chaleur de combi- naison moyenne est supérieure à celle des acides mo- nobasiques. — M, de Chardonnet mesure la densité des textiles en cherchant la solution plus ou moins étendue de borotungstate de cadmium, dans laquelle les fibres, coupées en très fins tronçons, restent indé- finiment suspendues, après que tout l'air en a été chassé au moyen de plusieurs traitements par le vide prolongés ; la densité de la matière est alors égale à celle du liquide, qui est déterminée par la méthode du flacon. Les chiffres obtenus sont plus forts que ceux de M. L. Vignon. M. de Chardonnet pense que l'air wavait pas été complètement chassé dans les expé- riences de M. Vignon. — M. Zune propose, pour dé- couvrir de petiles quantités dhuile de résine dans l'essence de térébenthine, d'examiner au réfractomètre les diverses portions obtenues dans la distillation de cette essence ; une variation notable de l'indice de la première à la dernière portion révèle la falsification. 39 SCIENCES NATURELLES. — MM, C. Vincent et Dela- chanal ont {rouvé dans les fruits du laurier-cerise la mannite et la sorbite en proportions sensiblement égales. — M. A. B. Griffiths a précipité le sang de di- vers crustacés et celui de la sèche par le sulfate de magnésium ; redissous dans leau et reprécipité par l'ale ool, le précipité a offert une composition sensible- ment identique ; l’auteur en donne la composition pour celle de l’hé imocyanine ; le cuivre y est contenu dans la proportion de 0,33 pour 100. — Le même auteur a extrait des urines des malades atteints de rougeole une ptomaïne toxique en CHÿAz#O, et des urines des co- quelucheux une ptomaïne en CÿH?Az02?; cette der- nière a été trouvée également dans les cultures du ba- cille d’Afanassieff, — M. P. Pichard : Nitrification comparée de l’humus et de la matière organique non altérée, et influence des proportions d’ azote de l’hu- mus sur la nitrification, — M. F. Guyon à étudié la marche de la pression dans un uretère ligaturé chez le chien; il a vu cette pression monter en une heure à 70 millimètres de mercure, rester quelque temps sta- ones puis redese endre peu à peu; plusieurs jours après la ligature, il n’y a plus que quelques millimètres de pression. L'urine secrélée dans ces conditions est très appauvrie en principes fixes. Le rein opposé semble exercer jusqu’à un certain point une action vicariante, Un rétrécissement de l’uretère est plus propre qu’une obluration complète à produire une hydronéphrose volumineuse. — MM. G. Gautier et J. Larat décrivent divers dispositifs destinés à permettre l'utilisation mé- dicale des courants alternatifs à haut potentiel, tels qu'ils sont furnis industriellement; ils ont aussi em- ployé un transformateur à ozoniser l'air atmosphé- rique ; il se produit toujours en abondance des pro- duits nitreux qui rendent l'ozone toxique; aucun résultat thérapeutique n’a pu être obtenu par l'emploi de cet ozone, — MM. Costantin et Dufour ont trouvé sur les champignons de couche attaqués par la maladie appelée Molle un parasite présentant deux fructifica- 172 tions dont l’une le ferait ranger parmi les Mycogones et l’autre parmi les Verticillium, —M. E. Mer a étudié sur le Sapin et sur le Chêne la formation des deux zones des couches annuelles du bois, zônes désignées sous les noms de bois de printemps et bois d'automne ; il à reconnu que celui-ci se forme en réalité en été, Ila déterminé sous l'influence de quelles conditions cha- cune de ces zones prend les caractères qui lui sont propres. — M. A. Trécul : De l’ordre d'apparition des vaisseaux dans les fleurs du Taraxacum dens leonis. — M. G. Chazveaud a recherché, chezle Vincetozicum où la polyembryonie est de règle, comment s'opère la fé- condation. Il a reconnu que souvent les graines de pollen contiennent trois noyaux au lieu de deux, un végétatif et deux générateurs; de plus, ila pu constater dans des portions de tube pollinique engagées dans le canal micropylaire jusqu’à quatre et cinq corps pre- nant vivement les colorations et qu'il considère comme autant de noyaux générateurs ; mais il n'a pas pu suivre la formation de ces noyaux. — M. Ch. Decagny: De l’action du nucléole sur la turgescence de la cellule. — M. G. Rolland examine la région des eaux souter- raiues dans le haut Sahara de la province d'Alger, entre Laghouat etEl Goléa, pour déterminer en quels points on pourrait tenter avec quelque chance de succès des forages artésiens. Les condilions sont généralement assez défavorables dans cette région. — M. E. Rivière annonce la découverte dans les cavernes des Blazi-Rossi, en Italie, de trois squelettes humains quaternaires, avec parures de coquillages et armes en silex. Mémoires présentés : M. À. Normand : Des vibrations des navires et des moyens capables de les atténuer, — M. Ivison y O’Neale adresse une note relative à un procédé pour la conservation des vins etpour remplacer le plâtrage. — M. Ch. V. Zenger adresse une note sur les perturbations atmosphériques, magnétiques et sis- miques du mois de février 1892. L. LAPICQUE, ACADEMIE DE MEDECINE Séance du 9 février MM. Cornil et Chantemesse : Sur le microbe de l’in- fluenza. Les auteurs ayant inoculé, dans une veine ap- parente de l'oreille d’un lapin, quelques gouttes de sang d’une enfant atteinte d'influenza fébrile, trouvè- rent quelques jours après dans le sang de ce lapin des microbes répondant à la description Babes-Pfeiffer ; leur longueur est environ au % du diamètre d’un glo- bule rouge de sang. Les auteurs ont inoculé le sang du lapin sur de la gélose sucrée, ce qui y a fait naître un étroit nuage contenant detrès fins bacilles. Une cul- ture a été inoculée à un second lapin qui a présenté dans le sang les mêmes bacilles, Le sang du lapin à été laissé 24 heures dans du bouillon sucré; en en ver- sant quelques gouttes dans les fosses nasales d’un singe, l'animal a présenté le lendemain une élévation de température, une diarrhée très abondante, puis af- faissement et accès fébrile durant quelques jours. Les auteurs n’ont pas encore réussi à obtenir les cultures en série. — M.Guéniot présente une malade guérie ra- pidement d’ostéomalacie à la suite d’un accouchement césarien. —M. G. Colin : Sur la fréquence relative des diverses espèces de tænia. L'auteur, présentant quelques observations au sujet de la communication faite précé- demment par M. Béranger-Féraud, dit qu'il ne lui paraît pas prouvé que le {ænia solium soit plus rare aujourd'hui qu'autrefois, ni que le tænia inerme ail pour unique point de départ la cysticercose ladrique des bêtes bovines, Le ftænia inerme nous arriverait par la viande du veau et non par celle du bœuf, L’accrois- sement de proportion des cas de tænia iuerme ne doit pas être rapporté à l'introduction du bétail exotique. M.Béranger-Féraud répond aux principales objections de M. Colin et maintient ses affirmations touchant l’aug- mentation de fréquence du tænia inerme en France de- puis un demi-siècle, MM. Leblanc et Nocard combat- tent également quelques-unes des opinions de M, Colin. ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du 20 février A propos de la note présentée dans la séance précé- dente par M. Finot sur l’albuminurie transitoire, M. Ca- pitan fait remarquer que ces recherches confirment purement et simplement les siennes propres et celles, de M. de Chateaubourg sur cette question. — M. Ch. Ri- chet présente un chien atteint de cécité psychique à la suite de lésions expérimentales dans la région du pli courbe sur l’un et l’autre hémisphère; il fait l’ana- lyse physiologique des troubles présentés parce chien et de leur mécanisme. — M. Moynier de Villepoix a recherché si le test des mollusques pouvait se former par une simple réaction chimique dans le mucus exhalé par le manteau; des expériences faites sur une disso- lution de bicarbonate de chaux dans de l’eau albumineuse sont favorables à cette manière de voir, carils’y produit des Calcosphérites analogues à celles du test, — M, I. Strauss à reconnu que, contrairement à l'opinion ad- mise, l’inoculation du Bacillus Anthracis sur la cornée du lapin peut produire l'infection, mais il faut avoir soin de faire réellement pénétrer le virus dans l'épaisseur du tissu serré de la cornée. — M. N. Gamaleia a fait réagir divers ferments solubles sur le poison diphtéri- tique, dans le but de s’éclairer sur la nature chimique de ce poison. La pepsine et la trypsine détruisent dans les cultures filtrées la toxicité caractéristique, mais laissent subsister la propriété de produire la cachexie chez les sujets inoculés, comme dans les cultures chauffées à 60°; les choses se passent donc comme si le poison était unenucléo-albumine, la nucléine, résis- tant aux actions diastasiques, étant le poison qui produit la cachexie., — M. A. Giard décrit une Laboulbéniacée de grande taille (Thaxteria Kunkeli, n.g.,n.sp.), parasite du Mormodyce phyllodes. — M. Fabre-Domergue a repris l’étude la cytodiérèse dans les cancers épithé- liaux; le seul caractère qui distingue la prolifération cellulaire de ces tumeurs de celle d’un épithélium normal, c’est la désorientation du plan de segmenta- tation; cette désorientation explique les caractères histologiques des tumeurs, — M. Gréhant présenteun support destiné à immobiliser le bras et à annihiler l’action des muscles autres que le biceps dans les ex- périences faites avec son myographe dynamométrique. Il expose quelques-uns des résultats auxquels sont ar- rivés MM. Peyrou el Turchini en étudiant avec cet appareil la force musculaire d'un grand nombre de jeunes gens. — M. Gréhant : Loi de l’absorplion de l'oxyde de carbone par le sang d’un mammifère vivant (Voir C. R., 8 février). — MM. Abélous et P. Langlois ont obtenu sur le cobaye, par la destruction des deux capsules surrénales, des accidents analogues à ceux observés par eux dans les mêmes conditions sur la gre- nouille. L'action eurarisante du poison qui s’'accumule dans le sang du cobaye après l’extirpation de ces or- ganes peut être mise en évidence, soit sur le sujet lui- même, par l’exploration simultanée de lexcitabilité du nerf moteur et du muscle, soit par injection à la grenouille du sang de l’animal acapsulé, — M.H. Binet décrit la structure d’un glanglion nerveux abdominal de Mélolonthien ; cette structure est notablement plus simple que celle d’un ganglion thoracique. Séance du 27 février M. A, Laveran signale le fait suivant pour le rap- procher de l’otocariase produisant l'épilepsie chez le chien; un lapin est mort paraplégique dans son labo- raloire ; on n'a pas trouvé d'autre cause pathologique que des acariens nombreux dans les oreilles, — M. C. Chabrié a déterminé la nature des cristaux qui se forment dans les cultures sur agar de la bactérie uri- naire, appelée par M. Bouchard Urobacillus septicus non liquefaciens ; c’est du phosphate ammoniaco-magné- sien ; les cultures du mème microbe sur gélatine déga- gent de petites quantités d’un gaz qui est de l’azote. — M. A. Prenant a étudié dans les cellules séminales ACADEMIES ET SOCIETÉS SAVANTES 173 du Scolopendre et de la Lithobie l'élément chroma- tique désigné par Flemming chez les Vertébrés sous le nom de corps intermédiaire et considéré par cet histolo- giste comme une représentalion rudimentaire de la plaque cellulaire des vérétaux. Les observations de M. Prenant le conduisent à admettre que ce corps est bien rudimentaire à l’état où on l’apercoit le plus sou- vent, mais que cet état n’est qu'une phase de son évo- lution, — M. Remy Saint-Loup, en étudiant l'organe copulateur mâle chez Testudo radiata, Varanus arenarius et Triton cristatus, a observé une série de dispositions anatomiques intermédiaires à celles des Plagiotrèmes, d’une part, des Crocodiliens, de l’autre, qui étaient consi- dérées comme établissant une différenciation nette entre les deux groupes.— Dans deux cas d’éclampsie puerpé- rale, MM. Tarnier et Chambrelent ont examiné la toxicité du sérum sanguin des malades, en l’injectant dans les veines des lapins : ce sérum s’est montré mor- tellement toxique et convulsivant à la dose de 3 à ce. par kilogramme ; la toxicité urinaire des malades était en même temps très diminuée. — M. A. Besson à élu- dié expérimentalement l'action des excitations cutanées sur la circulation, tant générale que locale, dans le but d’éclaireir le mode d’action des révulsifs, Sur le chien, une excitation cutanée forte donne une légère élévation de pression passagère suivie d’un abaissement durable; une révulsion faible produit une élévation de pression. La théorie du balansement entre la circulation cutanée d'une région ef la circulation des viscères sous-jacents n’est pas vérifiée par l’expérience. L'action sur la nu- trition, étudiée par les variations de l’acide carbonique exhalé, des gaz du sang et du sucre du sang, se tra- duit par une augmentation des combustions. L. LAPICQUE. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE La séance du 19 février a été consacrée aux expé- riences de M.Tesla, que la Revue décrira prochainement, Séance du x mars Les couples thermo-électriques de M, Le Châtelier fournissent un moyen simple et précis pour mesurer les températures élevées. L'industrie métallurgique, dont les progrès sont dus à une perfection de plus en plus grande apportée aux diverses opérations, a songé à utiliser ces couples, en particulier pour les opéra- tions relatives à la trempe des canons et des blindages. Mais le platine s’altère très rapidement et, d'autre part, les galvanomètres sont des appareils trop délicats pour êlre mis entre les mains des ouvriers. Aussi M. Le Châtelier a-t-il cherché à réaliser un pyromètre véritablement industriel. La méthode optique est la seule pratique. Elle consiste, soit à comparer les varia- tions d’intensités relatives des radiations inégalement réfrangibles, soit à mesurer les intensités absolues d’une longueur d'onde déterminée. Cette dernière mé- thode est beaucoup plus sensible que la précédente : entre 4045° et 17759, l'intensité varie de 1 à 1000. An- térieurement, Pouillet, Ed. Becquerel, M. Violle, avaient signalé la possibilité de son emploi, mais elle n'avait encore jusqu'ici jamais pu être mise en pratique, car, avant les couples thermoélectriques de l’auteur, on n'avait pas de procédé précis pour mesurer les hautes températures, et il élait dès lors impossible de faire aucune graduation. D'autre part, il se présente une autre difficulté. On sait en effet que, contrairement à ce qui à été admis pendant longtemps, l’intensité des radiations émises par un corps incandescent ne dé- pend pas uniquement de sa température : elle est en- core fonction de sa nature chimique, de l’état physique de sa surface, et enfin de l'écart entre la température du corps et celle de l’enceinte. Fort heureusement, le problème se simplifie dans les conditions particu- lières réalisées le plus souvent dans l’industrie, Le corps incandescent se trouvant dans un four à ré- verbère est à la même température que l'enceinte ; de plus, ce corps est presque toujours le charbon ou l'oxyde de fer magnétique, corps qui, tous deux, ont un pouvoir diffusant nul, c’est-à-dire qui ne ren- voient aucune partie de la lumière qu'ils recoivent des parois du four. Dans ces conditions, l'éclat dépend exclusivement de la température propre du corps. Pour les corps dont le pouvoir diffusant n’est plus nul, il faut une graduation spéciale, valable seulement lors- qu'on se place dans les mèmes conditions que celles pour lesquelles on a opéré. M. Le Châtelier à étudié à ce point de vue le palladium, le platine mat, le platine recouvert de kaolin et la magnésie. Dans la mesure photométrique destinée à comparer l'intensité d’une radiation monochromatique fournie par le corps incan- descent avec celle de la mème radiation émise par la lampe étalon (lampe à essence de pétrole), la radiation choisie est celle que laissent passer les verres rouges employés en photographie. Quant au photomètre lui- même, il doit permettre des mesures très rapides, afin de pouvoir étudier la coulée du métal qui sort d’un haut fourneau ou d’un bessemer, par exemple; les spectrophotomètres sont dès lors inutilisables. M, Le Châtelier a fait choix du photomètre de M. Cornu. Les verres absorbants que l’on interpose en nombre va- riable sur le trajet du faisceau le plus intense, afin d'en rendre l'intensité comparable avec celle de la source étalon, ont nécessité des recherches spéciales : après de nombreux essais, M. Appert à pu fournir à M. Le Châtelier des verres fumés d’une composition nouvelle et n’altérant nullement la nuance du faisceau lumineux qui les traverse. — M, R. Colson a étudié la propagation de l’onde électrique dans les corps médio- crement conducteurs, tels qu'une ficelle mouillée, imbibée de divers liquides. 11 à choisi de pareils corps afin d’avoir une vitesse de propagation électrique assez faible pour que les à soient d’un ordre de grandeur facilement mesurable, tout en employant des nombres de vibrations assez petits. Ces vibrations, fournies par une petite bobine de Ruhmkorff, ont été d'environ 130 à la seconde, La ficelle mouillée est tendue horizon- lalement et accrochée à l’une des bornes du circuit secondaire, l’autre étant en relation avec une capacité convenable. L'appareil explorateur est un téléphone, On s’en sert de deux facons : 1° l’un des fils est posé en divers points de la ficelle, tandis que l’autre pend à l’air libre ; 2 on laisse pendre librement les deux fils du téléphone et on l'approche plus ou moins du corps médiocrement conducteur, de manière à déter- miner la distance pour laquelle le téléphone com- mence à être influencé. Un dispositif spécial permet de fixer avec précision le point de la ficelle pour lequel on fait la détermination. On trouve ainsi, pour des ficelles assez longues, que le flux varie, le son du télé- phone présentant des chutes situées à des distances inégales et croissantes à partir de l’origine, L'auteur montre que cette inégalité peut s'expliquer en admet- tant que les deux flux, direct et inverse, de la bobine se propagent dans le même sens avec des vitesses inégales, le flux direct au potentiel plus élevé, chemi- nant plus vite que l’autre. Il trouve uue confirmation de cette hypothèse dans la modification apportée par un affaiblissement du flux inverse. Il opère enfin sur des fils courts en repliant le fil sur lui-même, et il met en évidence des longueurs d'onde déterminées pour un même fil, mais variables avec le nombre de brins du fil. Edgard Haunié, SOCIÈTE CHIMIQUE DE PARIS Séance du 12 février MM. G. Rousseau et G. Tite ont obtenu en chauf- fant en tubes scellés un mélange d’ane molécule de nitrate d'argent et une à deux molécules d’eau, en pré- sence de fragments de marbre, à des températures va- riant de 180 à 200° des cristaux d’un rouge rubis, dont la composition répond à la formule : 3 (2Ag?0. Si0?) 2AgAz03, Ils ont réussi à reproduire la même substance ACADEMIES ET SOCIÉTES SAVANTES en chauffant l’azotate d'argent sec et la silice dessé- chée à 100°, pendant plusieurs heures à des tempéra- tures comprises entre 350 et 440°, Les auteurs consi- dèrent ce composé comme le sel argentique d’un acide azoté silicique 7Ag20. 3Si0?, AZ205; chauffés au rouge sombre, les cristaux se dédoublent d’après l'équation : 7Ag?0. 38102, Az205 — 3Ag?20Si0? + 4Ag + 2A70ÿ +- 0; il y a formation du silicate acide d’argent Ag°0,Si0?. Par double échange avec l’iodure de potassium on ob- tient l’azotosilicate de potassium. — M. Causse a étu- dié les solubilités du phosphate tricalcique et du phos- phate acide de calcium dans l'acide phosphorique; il trouve que le premier de ces deux sels est beaucoup moins soluble que le second, — M. M. Hanriot pro- pose d'utiliser pour la séparation du fer et de l'alumine la grande solubilité du chlorure ferrique dans l’éther, Les deux métaux préalablement séparés des autres sont amenés en solution aqueuse à l’état de chlorures, et la solution est ensuite épuisée à l’éther. A. Comnss. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 2? mars M. Félix Lucas fait les deux communications sui- vantes : 4° il démontre que si la loi d’un mode de fonctionnement d’une machine dynamo peut s'exprimer au moyen d'une équation algébrique concrète à trois termes entre deux variables, on peut toujours, en remplacant les variables concrètes par des variables abstraites qui leur sont proportionnelles, transformer cette équation concrèle en une équation purement nu- mérique absolument indépendante des éléments con- crets de la machine considérée; 2° il complète le théo- rème qu'il a énoncé dans la séance précédente par la remarque suivante : La direction principale d'inertie d’un système plan de n points, que lon obtient en tracant la droite de jonction des deux points centraux d'ordre (n — 2) est toujours celle du grand axe de lel- lipse d'inertie. — M, Laisant signale l'intérêt que pré- senterait l'extension des considérations précédentes à l'espace à trois dimensions. — M. Raffy expose une nouvelle solution du problème qu'il a antérieurement traité et qui consiste à trouver l'élément linéaire des surfaces spirales à lignes d’égale courbure parallèles. M. D'OcAGNE. SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 11 février. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, J. Norman Lockyer présente une note sur l'étoile nouvelle d’Auriga. Le dimanche 7 février, on a obtenu deux photographies de plus du spectre de la nouvelle étoile à l'Observatoire d'astronomie physique de Londres; et le lendemain M. Lockyer a envoyé une courte note à la Société royale pour annoncer que les raies brillantes situées en K, H, x et G sont accompagnées par des raies sombres de leur côté le plus réfrangible ; on a déterminé sur les photo- graphies sept raies brillantes qu'il faut ajouter aux treize raies précédemment observées, ce qui fait vingt en tout, Les longueurs d'ondes de ces nouvelles raies sont 4202, 4291, 4383, 4412, 4434, 4469, 4860 (EF). La raie G est toujours très brillante et il y a dans le vert quatre raies très visibles. Quant aux raies brillantes et sombres il faut remarquer qu'un phénomène analogue a été rapporté par le professeur Pickering pour l'étoile 8 de la Lyre. Dans le spectre de cette étoile les raies brillantes sont alternativement plus ou moins réfran- ibles que les raies sombres, avec une période qui cor- respond probablement à la période connue de variation de la lumière de l’étoile. Dans le cas de la Nova Awrigæ les raies sombres, plus réfrangibles que les raies bril- lantes, apparaissent seules. La vitesse relativeindiquée par le déplacement est d'environ 500 milles par seconde. D’aprèsl’hypothèse météorique de M. Lockyer, la nouvelle étoile a été produite par le choc de deux essaims de météores, Le spectre de Nova Awrigæ amè- nerait à penser dans cette hypothèse qu’un essaim mo- dérément dense se meut maintenant vers la terre avec une grande rapidité et se heurte à un essaim plus rare qui s'en éloigne. Les grandes agitations qui se pro- duisent dans l’essaim dense causeraient alors les raies sombres du spectre, tandis que les raies brillantes seraient dues à l’essaim plus rare, 29 SCIENCES NATURELLES.—MM. C.S.Roy et J.G.Adams : Physiologie et pathologie du cœur chez les mammifères. En raison du très grand nombre d’observations faites par les auteurs et qui seront publiées en un mémoire plus étendu, il est impossible de donner de leur travail un résumé qui permette de le juger équitablement. On peut dire seulement qu'ils ont cherché à étudier le fonctionnement du cœur des mammifères dans des con- ditions aussi voisines des conditions normales que le permettait l'emploi des méthodes exactes de recherches. Pour apprécier toute la valeur de leur travail, il faut étudier en détail les résultats qu’ils ont obtenus. — M. Vaughan Harley : Sur le rôle joué par le sucre dans l’économie animale. L'auteur présente une note préliminaire sur l’action du sang sur le sucre; quand on a ajouté du sucre au sang on ne peut retrouver qu'une certaine quantité de ce sucre. M. Harley a fait un grand nombre d'analyses pour éclairer ce point et pour essayer de découvrir pourquoi on ne pouvait re- trouver la totalité du sucre. Les résultats obtenus semblent indiquer que la quantité de sucre perdue n'est pas proportionnelle à la quantité présente dans le sang et quelle est nettement en relation avec l’action des albumines pendant la coagulation du sang. La pro- portion dé sucre retrouvée par Rühmann et Seegen os- cille entre 80 et 96 °/,, tandis que Schenk a réussi à retrouver de 20 à 35 °/, de la inatière sucrée que l’on savait exister dans le sang. M. Harley a constaté une perte de sucre moins considérable qu'aucun de ces ob- servaleurs. Ses observations montrent que quelque agent destructeur du sucre doit exister dans le sang lui-même. Richard A, GREGORY. SOCIETE DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 12 février M. S. P. Thompson communique une note « sur les couleurs supplémentaires » et montre des expériences sur ce sujet. De même que la lumière blanche peut être partagée par paires de « couleurs complémentaires, » de même une lumière colorée, non monochromatique, peut être divisée en paires de nuances, que l’auteur, pour donner un nom mieux choisi, a appelées « cou- leurs supplémentaires ». Pour produire de telles cou- leurs, on emploie deux procédés. Le premier consiste à former un spectre de la lumière colorée par un spectroscope à vision directe et à recombiner sur un écran, En interposant une prisme étroit entre le spec- troscope et l'écran, une portion du spectre était sé- parée du reste, et on obtenait ainsi des systèmes variés de deux couleurs supplémentaires. Dans l’autre mé- thode, de la lumière polarisée, une lame de quartz et un analyseur biréfringent sont employés pour former deux faisceaux de couleurs complémentaires. En inter- posant un milieu coloré les faisceaux deviennent sup plémentaires, et leur teinte varie quand on tourne l'analyseur, La particularité principale des cou- leurs supplémentaires est la grande variété de teintes qu'on peut obtenir avec un milieu unique: le per- manganate de potasse en solution diluée est remar- quable à ce point de vue. L'auteur a aussi observé que l'œil n'était pas très sensible aux rayons de couleur orangé. En expérimentant par la seconde méthode, il à observé avec une lumière composée : un des faisceaux supplémentaires pouvait avoir une teinte grise, et l'autre une couleur spectrale à peu près pure, Il a ainsi vérifié d'une facon inattendue la loi d’'Abney que toute couleur peut être produite en diluant une teinte du spectre dans de la lumière blanche, Le capitaine Abney dit qu'il est très intéres- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 175 sant de voir la couleur grise et les couleurs supplé- mentaires montrées par Tauteur, M. Festing et lui ont expérimenté sur les phénomènes de coloration par des méthodes entièrement différentes de celles du profes- seur Thompson, car ils ont assorti des couleurs en ajoutant de la lumière blanche à des teintes du spectre pur, jusqu'à ce que la couleur fût pareille à une cou- leur donnée et dont la pureté était grande. SOCIETE DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 4 février M. William Ramsay : Le mouvement brownien et les solutions colloïdales, L'auteur arrive à conclure que la solution doit être considérée comme une désagréga- tion et un mélange dû aux attractions entre le solvant et la substance dissoute, et en outre au mouvement brownien ; que, de plus, il existe une transition conti- nue entre les particules solides en suspension dans un liquide et la matière dissoute, — M. W. W. Hartley : L'action acide des papiers à dessin de différentes pro- venances. — MM.G. Stokes et Henry Armstrong : Les réactions produites dans les flammes. Discussion des résultats obtenus par MM. Smithkells, Ingle et Lewes. (Voir les comptes rendus des séances précédentes.) — M. S. Skinner : Propriétés des solutions alcooliques de divers chlorures, — M. G. Kuhemann : Les acides a bromocinnamiques isomériques. SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 1% février 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Brodie : Note sur l'équilibre et la pression des voùtes, avec une méthode pratique de déterminer leur forme vraie. La méthode repose sur l'emploi d'une construction géométrique très simple et facile à appliquer. 20 SCIENCES PHYSIQUES, — M, Tait lit une note sur les isothermiques des mélanges gazeux. Il s'appuie sur les expériences d’Andrews sur la compression d’un mélange de deux gaz. Les résultats sont étudiés au point de vue d’une explication possible de ce fait que l'isothermique critique de l'acide carbonique est rec- tiligne, au voisinage du point critique (d'après les récentes expériences d'Amagat), par la présence d’une petite quantité d’air, W. PEDDIE. ACADEMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 27 février ° SCIENCES PHYSIQUES. — M. J.-D. van der Waals s'occupe d’une application de la loi des phases corres- pondantes aux dissolutions dans les cas où « la tempé- rature critique de mixtion complète » est plus basse que les températures critiques du milieu dissolvant et de la matière dissoute, Expérimentalement, M. Natanson a trouvé que le rapport des volumes extérieurs des deux liquides coexistant à une température qui est une fraction donnée de la température critique, est égal au rapport des volumes d’une matière simple à l’état de vapeur et de liquide à la température qui forme la même fraction de la température critique. Dans cet énoncé, l'expression « volume extérieur » signifie le volume du mélange qui contient l'unité de poids de l’un des deux liquides, L'auteur a cherché à vérifier ce théorème de M. Natanson par sa théorie des actions moléculaires. À l’aide de quelques hypothèses simpli- fiantes, il trouve que la marche du potentiel thermo- dynamique est donnée par l'expression 2 41.2 AA W—V: MRT log, TETE où V,, V,, W représentent le volume de l'unité molé- culaire du milieu dissolvant, de la matière dissoute et du mélange. Si l’on fait figurer W comme abscisse et l'expression donnée — prise avec le signe contraire — comme ordonnée, on obtient une courbe qui rappelle la marche de la pression en fonction du volume pour une matière simple. Pour des valeurs T de la tempé- rature, inférieures à une température critique Te, on trouve une valeur maximum et une valeur minimum. La limite de l'expression Te (: M | Va eV W=V EM pour V, —0 étant égale à a la marche de la 2 courbe en question correspond d'autant plus à celle de la courbe qui représente la pression que V, est plus petit par rapport à V,. Pour des liquides coexis- tants, le potentiel thermodynamique doit avoir la même valeur; comme pour une matière simple, la pression est la même pour deux phases coexistantes de liquide et de vapeur. La droite qui joint les points de la courbe de pression qui correspondent à ces deux phases, coupe la courbe, de telle sorte que le principe des aires égales est de rigueur. Ce même principe s’'ap- plique à la courbe du potentiel, ce qu'on montre à l’aide de la condition de l'égalité du potentiel pour les phases coexistantes. Ainsi, par rapport à une matière dissoute, on est conduit à parler d’une phase de liquide et d’une phase de vapeur, en indiquant par la première le cas d’une solution très forte, et par la seconde le cas d’une solution très faible. Et, dans cet ordre d'idées, les lois qui régissent une matière simple s'appliquent de même aux solutions et avec une approximation d'autant plus grande que V, est grand par rapport à V,. Pour trouver les valeurs critiques We et Te de W et T, on n’a qu'à suivre le procédé usuel par rapport à une matière simple, après avoir remplacé la courbe de pression par la courbe du potentiel. En annulant le premier et le second quotient différentiel par rapport à W, on trouve les équations (W. = Va) (W, 2 Vo Vi) We V2 V2, VIN 2%), MRT, (2 —2V5 Vi) 6V?, / (We VCW, VV Wii o 2 1.2) D). ) 8) l'élimination de T. donne alors : DNVe = 2iVe NA Cu ARE ANT ES ESA € On trouve done W, = 3 V, si V, est négligeable et 2 We—3(2V,—V,) si V, est très petit. La substitution de cette valeur en « ou $ donne T.. Même si V, est négligeable, T. dépend non seulement des propriétés de la matière dissoute, qui entrent dans V, et 4,, mais aussi des propriétés du milieu dissolvant, indiquées a : ] POLAR par va de l’attraction mutuelle indiquée par 4. Comme l'on peut échanger entre eux le milieu du dis- solvant et la matière dissolvante, les lois indiquées s'appliquent aux deux matières à la fois. Mais il va sans dire que l’écart pour l’une des deux matières sera d'autant plus grand que celui pour l’autre sera plus petit.—M. J.-M. van Bemmelen traite de la différence entre les oxydes dans l’état colloïdal et amorphe; il traite aussi des hydrates cristallins, spécialement quant à leurs tensions de vapeur en rapport avec leurs compositions et à propos de l’hydrate d'oxyde de fer. IL démontre que l’hydrate soi-disant cristallin et de composition définie (Fe203,3H°?0) de M. Wittstein, ob- tenu par exposition du colloïde à une basse tempé- rature, est amorphe’et de composition indéfinie, — que celui de M. Roussin, obtenu par l'action de la potasse sur un nitroprussiate ou sur un nitrosulfure de fer est également amorphe, — que l'hydrate cristallin du M. Rousseau, obtenu par l’action de la potasse ou de carbonate de potasse sur l’oxyde amorphe à environ deux molécules d'eau, est pseudo-cristallin et de com- 176 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES position indéfinie, Ce dernier corps est le produit amorphe de l’action de l’eau sur le ferrite de potasse, dont il a conservé la forme cristalline extérieure ; inté- rieurement, il est décidément amorphe, Le véritable hydrate cristallin a été trouvé dans les dépôts des marmiles en fer servant à la préparation des alcalis caustiques., — M. A.-P.-N. Franchimont montre une variété solide de l’éthylaldoxime, décrite par M. Victor Meyer comme un liquide, elle fond à 48°, Il présume que ces deux substances sont des stéréo-isomères el qu’elles sont représentées par CH35— C—H H — C — CH° (l el (l Az — OH Az — OH 20 SCIENCES NATURELLES. — M. C.-K. Hoffmann s'oc- cupe du développement de laorte et du cœur dans l'embryon de l’Acanthias vulgaris, — M. J.-W. Moll traite de la division du noyau des Spirogyra. À l’aide du microtome, il a pu retracer les stades principaux de l’évolution découverts par MM. Flemming, Stras- burger, Tangl, Meunier, ete. Il complète leurs obser- vations sur les segments chromatiques, l'hétéropolie et le boyau connectif, Le nucléole, d’abord sphérique, devient pyriforme, et le point aigu se termine en un fil très long à plusieurs détours, qui occupe le plasma entier du noyau, Un peu plus tard, le nucléole pyri- forme est disparu et le fil s'est décomposé en douze parties distinctes, finalement situées les unes auprès des autres, dans un même plan. Ensuite, chacun de ces douze segments se fend dans la direction de ce plan. Par des mouvements opposés, suivant la direc- tion normale à ce plan, les deux parties constituantes de chaque segment chromatique se rendent aux deux noyaux-filles. À chaque instant, une coupe transversale montre que les douze segments situés à l’un des deux côtés du plan se rendent au même noyau-fille; l’hété- ropolie est donc évidente, Au moment où chaque groupe de douze segments s'est réuni en un noyau- fille, on trouve un nombre varié de petites vacuoles entre les deux noyaux. Une de ces vacuoles prend le dessus sur toutes les autres. Enfin, entre les deux noyaux nouveaux, il ny à qu'une vacuole, le boyau connectif. — Rapport de MM. C.-A. Pekelharing et Th. W. Engelmann sur le mémoire de M. H.-J, Ham- burgér intitulé : « Sur l'influence des acides et des al- calis sur le sang défibriné ». L'auteur démontre que l'acide carbonique, l'acide hydrochlorique et lacide sulfurique changent les globules rouges du sang, de manière qu'ils cèdent facilement leur couleur à des solutions de sel. Les alcalis ontune influence contraire. Sous l'influence des acides, les globules du sang sous- traient au sérum des chlorides et des phosphates. Les alcalis exercent une influence opposée. L'échange de substances entre globules et sérum se fait suivant des proportions isotomiques. Les alealis diminuent l’action nuisible de certains sels, de la bile et du chlorammo- um sur les globules rouges du sang, SCHOUTE, s Membre de l'Académie. ACADEMIE ROYALE DES LINCET Séances de janvier 1892 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, Capelli : Une dé- monstration du théorème du développementpar polaires des formes algébriques à plusieurs séries de variables. 2e Sciences PHYSIQUES. — M. Ascoli : Elasticité et ré- sistance électrique du cuivre; relation entre les varia- tions de ces deux propriétés. On portait le cuivre à des températures différentes jusqu'à 250° environ, A partir du recuit, le module d’élasticité de torsion s'accroît, tandis que la résistance électrique diminue jusqu’à un minimum, pour se relever ensuite; à des températures plus élevées encore, l’élasticité arriverait probablement à un maximum, comme M. Ascoli eut à le vérifier pour l'argent. Les phénomènes observés confirment les résultats déja obtenus avec l'argent, le platine, le fer ; l'influence de l’élasticité de seconde espèce semble modifier la résistance électrique en sens opposé à celle produite par l’élasticité de première espèce. — M. An- dreocei décrit ses recherches sur le pirrodiazol. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. Grassi et Sandias: Sur les mœurs des Termites (Calotermes flavicollis el. Termes lucifugus). M. Grassi donne des détails sur l’essaimage, sur l’accouplement des insectes et sur la manière de fonder de nouvelles colonies. M. Grassi est de cette opinion que les Termites peuvent communiquer entre eux au moyen de soubresauts et de bruits que les insectes produisent en frottant la tête contre la collerette. L'auteur parle en outre de la nour- rilure des insectes, et des modifications qu’elle subit pour obtenir les ouvrières et les soldats; il ajoute que la sécrétion salivaire que les larves et les nymphes donnent aux petits, jouit de la propriété de faire dis- paraître les protozoaires qui vivent en parasites sur les Termites et dont M. Grassi donne une description détaillée. — M. Tolomei a exécuté plusieurs expé- riences pour élablir si l’action bactéricide du courant, lorsqu'on fait agir ce dernier sur le vin, est due au courant mème ou à la production de l’oxygène nais- sant qui se forme par électrolyse de l’eau, et à celle de l'ozone. Il a soumis des cultures pures de bactéries qui produisent l’aigrissement du vin à l’action d’un courant continu, à celle d’un courantalternatifet à celle de l'ozone. M. Tolomei est arrivé aux conclusions sui- vantes. L'action antiseptique du courant continu doit être attribuée à la production, au pôle positif, de loxy- sène naissant et de l’ozone; le courant alternatif peut détruire les mêmes microbes, mais seulement après un très long passage du courant dans le liquide; lozone, enfin, tue rapidement les microbes et il fournit le moyen le plus sûr pour modifier les vins qui ont éprouvé quelque altération. M. Tolomei pense que, en raison de l’analogie qui existe entre Les divers microor- ganismes qui produisent les maladies du vin, les résul- tats précédents seront confirmés pour tous les microbes. — M. Mingazzini a eludié l’oolise dans la Seps chalcides. Il a reconnu que dans ce reptile pla centaire se produit en tout temps dans l'ovaire une srande destruction d'œufs par un processus physiolo- gique particulier. Celui-ci consiste principalement dans l'absorption directe par le follicule du vitellus li- quéfié, Cette destruction donne origine à la formation d’un amas de connectif, ou à un amas de cellules fol- liculaires renfermées dans une poche lenticulaire de conneclif, Pendantla destruction du vitellus, il se forme de la lutéime. Cette dégénérescence peut se produire dans les œufs de grosseur quelconque. De même que les spermatozoaires dégénèrent lorsqu'ils restent long- temps dans les canaux spermatiques, ainsi les œufs qui n'ont pas été fécondés à temps sont absorbés par l'organisme, comme par une autophagie de ses éléments- Les embrions qui se développent dans l’oviducte peu- vent dégénérer; et alors ils sontabsorbés par les pa- rois de l’oviducte même. — M. Re a trouvé en srande quantité des sphérites spéciaux dans cer- taines parties de l’Agave mexicana (Lamk). Ces parties sont les bractées, les pédoncules fructifères, les fruits développés mais non encore mûrs, le périgone et l’o- vaire, Les sphérites ressemblent à de petites gouttes, très réfringentes qui, de couleur jaunâtre d’abord, de- viennent ensuite jaune foncé; ils sont solubles dans l'eau froide, mieux encore dans les acides dilués. Trai- tés par de l'acide sulfurique ils disparaissent, et à leur . place restent de beaux cristaux de gypse. On peut dé- duire des réactions exécutées par M. Re que ces sphé- rites sont formés par une combinaison de la chaux avec un acide du phosphore, et par une substance or: ganique. Les plantes qui présentent des sphérites sont peu nombreuses, et dans aucune d’elles on n’en trouve une aussi grande quantité que dans l’Agave meæicana ; M. Re se propose de déterminer le lieu d'origine, la dis- tribution et la composition chimique des sphérites dans la familles des agaves) dans le tissu des planteset à diffé- rentes époques de leur développement. Eresro Mancnt. Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. Si 3° ANNÉE N°NG 30 MARS 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENC PURES ET -APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES ANCIENNES ET LA NOUVELLE MESURES DE LA MÉRIDIENNE DE FRANCE Les premières recherches connues sur la figure et les dimensions de la Terre remontent à l'antiquité grecque. On trouve, développées dans Aristote, diverses preuves de la rondeur de la Terre, tirées de la forme courbe de l'ombre portée par elle sur la Lune pendant les éclipses de cet astre, et de la variation de la hauteur méridienne des étoiles fixes, quand on se déplace à la surface du globe en marchant vers le midi ou vers le nord. Une fois la forme sphérique admise et la Terre supposée, suivant la croyance des anciens, isolée et immobile dans l'espace, il devait venir à l’idée d'un géomètre d’en déterminer le rayon. Il suffi- sait, pour cela, de copnaitre la longueur et l’ampli- tude angulaire d'un arc de méridien. Deux lieux étant choisis sur le même méridien, l'observation, faite le même jour, dans deux stations, de la hau- teur méridienne du Soleil à l'aide du gnomon, donnait l'amplitude ; la dislance des deux lieux, ou la longueur de l'arc, élait évaluée aussi exactement que possible d’après les dires des voyageurs ou l'estime des navigateurs. Un simple calcul de géo- métrie donnait alors la longueur du degré, celle de la circonférence entière et par conséquent le rayon terrestre. C'est la méthode suivie par Archimède, par Eralosthènes, par Posidonius et par Ptolémée. C'est ainsi qu'opérèrent au 1x° siècle de notre ère les astronomes arabes qui mesurèrent la longueur du degré, par les ordres du calife Almamoun, dans la plaine de Singar en Mésopotamie. Le succès ne répondit pas à ces premières ten- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, | talives. Par suite de l’imperfection, tant des instru- | ments employés que des procédés de mesure, la discordance des divers résultats obtenus par les géomètres grecs est énorme. Aristote évalue en effet la circonférence du globe terrestre à 400.000 sta- des, tandis qu'Eratosthènes la fixe à 250.000, et Posidonius à 180.000 stades. Encore faut-il ajouter qu'ils ne sont pas d'accord sur la longueur du stade. Mais, si leurs chiffres sont erronés, la méthode qu'ils ont proposée subsiste tout entière, et c’est encore aujourd’hui à la mesure de la longueur d'ares soit de méridiens, soit de parallèles, com- binée avec la déterminalion précise de leur ampli- tude astronomique, que la géodésie moderne demande la solution de tous ies problèmes qu’elle se propose de résoudre sur la figure et les dimen- sions de la Terre. La difficullé principale, dans une recherche de celte nature, est d'obtenir exactement la longueur de l’arc choisi, Laissant de côté les évaluations grossières basées sur l'estime, si l’on cherche à la l'ont fait Fernel, Norwood, Mason et Dixon, par le procédé habituel usité dans les arts mécaniques et dans l’arpentage, en portant sur la ligne à mesurer une règle étalon autant de fois qu'elle y est contenue, on est bien vite arrêté par des difficultés à peu près insurmontables. Le sol est en effet couvert d'obstacles qui s'opposent à un alignement rigoureux sur de grandes distan- ces, et de dénivellations incessantes qui vicient les 6 mesurer, comme 178 DEFFORGES. — ANCIENNES ET NOUVELLE MESURES DE LA MÉRIDIENNE DE FRANCE résultats et, dont il faut tenir soigneusement compte. En outre, l'application répétée un aussi grand nombre de fois, de l’étalon sur le terrain, mème débarrassé d'obstacles, esttellementlente et fastidieuse qu'il est presque impossible, pour de grandes longueurs, qu'une ou plusieurs erreurs graves n'échappent pas à la fatigue où à un moment d'inattention de l'observateur. Aussi de telles opérations n’ont-elles jamais donné de résul- tats présentant une réelle valeur. Le géomètre hollandais Snellius réalisa donc un énorme progrès en imaginant,"en 1617, de substi- tuer à la mesure directe des distances la méthode dite de la triangulation, universellement employée aujourd'hui dans les travaux géodésiques. Cette méthode, comme chacun sait, consiste à former le long de l'arc à mesurer, avec des points convena- blement choisis et signalés, une chaine ou un réseau de triangles réunissant d’une façon ininter- rompue les deux extrémités de l’are. L'un des côtés de ces triangles, choisi sur un terrain uni et favo- rable, est mesuré avec tout Le soin possible à l’aide d'un étalon et constitue la base. Tous les angles des triangles sont ensuite déterminés au gonio- mètre, etle caleul, par les formules rigoureuses de la géométrie, fournit à partir de la base les lon- gueurs de tous les côtés des triangles et la distance des deux extrémités de l’are. La mesure des angles, substituée dans la méthode de Snellius à la mesure des longueurs, est plus expédilive, moins sujette aux erreurs grossières; elle devint susceptible d’une très haute précision par l'invention des lu- nettes et l'application qu’en fit l'abbé Picard aux goniomètres. Grâce aux découvertes de Snellius et de Picard, la géodésie était donc, au milieu du xvirt siècle, créée comme science positive. Elle al- lait, en trois siècles, couvrir successivement l'Eu- rope, les Indes, l'Amérique du Nord, le nord et le midi du continent africain de ses réseaux de trian- gles, serrant toujours la Terre de plus près. Elle al- lait, en outre, singulièrement élargir le problème primilif en étendant les investigations de la science non seulement à la figure générale et aux dimen- sions de la courbe méridienne, mais encore aux petites déformations de la surface de niveau. I La part de notre pays dans ce grand mouvement de recherches est considérable : « Après le hollandais Snellius, ies Français ont « jeté la plus grande lumière sur le problème de « la mesure des degrés, si toutefois l’on considère les travaux qui ont précédé ceux des Anglais el ceux plus récents des Allemands et des Russes. « La concentration des forces scientifiques dans « l'Académie française (des Sciences) donna une « « « nouvelle impulsion aux opérations et amena « des améliorations dans les méthodes d’observa- « tion et de calcul, tandis qu’en même temps les « subventions accordées par le Gouvernement pro- « curèrent des moyens matériels plus considérables € qui permirent les plus grandes entreprises. » Ainsi s'exprime le célèbre géodésien belge, Co- lonel Adan, en exposant l'ensemble grandiose des opérations exécutées par les savants français de la fin du xvir° siècle au commencement du xx’, pour fixer la longueur moyenne du degré du mé- ridien, en étudier la variation avec la latitude, as- surer une base certaine à une carte précise du territoire et, par une idée dont la hardiesse ne saurait être trop admirée, rattacher aux dimen- sions de notre globe l’unité fondamentale du sys- tème décimal de poids et mesures qui se substitue aujourd’hui peu à peu aux anciens systèmes et qui semble devoir, dans un assez court espace de temps, être adopté el rendu légal par toutes les nations civilisées. Ce sont les mesures exécutées sur l’are de mé- ridien compris entre Dunkerque et Barcelone qui constituent la meilleure part de la contribution de la France à l'étude de la Terre. Ces diverses entre- prises sont d’ailleurs tellement liées entre elles el à la nouvelle mesure de la méridienne que nous devons, pour la clarté même de ce court exposé, en retracer succinctement l’histoire. En 1669, par ordre de l'Académie des Sciences, Picard mesura, entre Amiens et Malvoisine, le pre- mier arc français. Sa triangulation fut appuyée sur deux bases : l’une fondamentale, de 5 663 toises, élait située entre Villejuif et Juvisy; les deux termes en sont encore marqués par deux pyra= mides parfaitement conservées qui sont la pro- priélé de l’Académie des Sciences; la deuxième, simple base de vérification, choisie près de Mont- didier, avait une longueur de 3 650 toises. Par une heureuse compensation d'erreurs, Picard trouva une longueur du degré très voisine de la véritable, 57 060 toises. C’est la valeur dont s’est servi New- ton dans ses immortelles recherches sur la loi de la gravitation universelle. Par ordre de l’Académie, [a mesure de Picard fut étendue par La Hire jusqu'à Dunkerque où l’on mesura une nouvelle base de vérification. En même temps, Dominique et Jacques Cassini pro- longèrent l'arc de Picard jusqu'au Canigou, avec base de vérification près de Perpignan. Ces nou- velles opérations durèrent de 1683 à 1718. Le degré moyen fut trouvé, entre Paris et Dun- kerque, de 55 960 toises; entre Paris et Perpignan, de 57 097 toises. La longueur du degré n'étant pas constante et la courbe méridienne n'était pas par conséquent une circonférence de cercle. Les théo- ies de Newton et d’'Huygens, les observations de icher à Cayenne avaient bien déjà, à la vérité, ontré que la courbe méridienne devait présenter ne courbure progressive, et que tous les points de a surface du globe terrestre n'étaient pas à la mème distance du centre ; mais, d’après la théorie des illustres savants anglais et hollandais, d'après Ja variation de la longueur du pendule à secondes observée entre Paris et la Guyane française, la Lerre devait être aplatie aux pôles et renflée à l’é- quateur. Par conséquent la longueur du degré devait croitre de l'équateur au pôle. Le résultat des mesures combinées de Picard, de La Hire et des Cassini sur la méridienne de France était dia- métralement contraire. Jacques Cassini et Cassini de Thury, son fils, en prirent texte pour combaltre les idées newtoniennes et soutenir que la Terre est “allongée suivant l'axe polaire. Un vif débat s’en- - gagea sur les conclusions des Cassini entre les sa- “vants anglais et français. C’est pour le terminer que l’Académie des Sciences fit exécuter, en 1734, les deux mémorables triangulations qui fixèrent la valeur du degré à l'équateur et sous le cercle po- laire. Bouguer, La Condamine et Godin mesu- rèrent au Pérou un are de méridien. Maupertuis et Clairaut en mesurèrent un autre en Laponie. Les résultats de ces expédilions célèbres appor- lèrent à la théorie de l'attraction universelle une éclatante confirmation. Il fut établi d'une manière irréfragable que la Terre est aplatie suivant l'axe polaire et que la longueur du degré va croissant - de l'équateur au pôle. Avant même que les résultats des mesures du Pérou et de Laponie fussent connus, La Caille (1739) avait été chargé de reviser l’œuvre de La Hire et des Cassini. Cette nouvelle mesure, appuyée, comme la première, sur la base de Picard, prit le nom de méridienne vérifiée et fut exécutée en deux ans. Elle prouva que les degrés allaient tous en s’allon- geant du midi vers le nord. L'œuvre des Cassini et de La Caille, quel que fût son mérite, était trop imparfaite encore pour ins- pirer une confiance entière. La base de Picard, par exemple, avait été mesurée avec une toise insuffi- samment comparée à celle de l’Académie. Aussi, quand l’Assemblée Constituante eût décidé en 1790 l'établissement d'un système décimal de poids et mesures dont l'unité, le mètre, devait être une fraction délerminée de la longueur du méridien terrestre, l'Académie des Sciences, chargée de fixer le rapport à la toise légale de la nouvelle unité, ne pensa pas pouvoir uliliser la méridienne véri- fiée. Elle chargea les académiciens Delambre et Méchain de recommencer entièrement la mesure de la méridienne, avec les moyens beaucoup plus parfaits que créa dans ce but le génie de Borda. der out din DEFFORGES. — ANCIENNES ET NOUVELLE MESURES DE LA MÉRIDIENNE DE FRANCE 179 Deux bases nouvelles furent mesurées près de Me- lun el de Perpignan avec l'appareil bimétallique qui porte san nom, et le cercle répétiteur fut em- ployé pour la première fois à l'observation des angles. Un arc de 8° 1/2, s'étendant de Dunkerque à Barcelone, fut achevé en six ans (1792-1798). Les résultats de cette vasle opération, qui sur- passa en précision {out ce qui avait élé fait jus- qu'alors, furent combinés par la Commission des poids et mesures avec les résultats fournis par l'arc du Pérou, dont l’étalon de base, une toise de fer, connue dans la science sous le nom de toise du Pérou, avait élé soigneusement conservé, et au- quel on compara les règles de l'appareil de Borda. L'arc du Pérou et l'arc de Delambre et Méchain, ainsi exprimés en fonction de la même unité, four- nirent, par le calcul, en supposant le méridien elliptique, la valeur de l’aplatissement terrestre et la longueur du quart du méridien en toises du Pé- rou. La nouvelle unité, le mètre, fut fixée au dix- millionième de cette longueur. Le rapport du mètre à la Lloise, adopté par la Commission des poids et mesures, est donné par la fraction : 5.130.740 10.000.000 Il Le degré de perfection réalisé dans tous les dé- tails de l’œuvre, aussi bien dans les instruments et les observations que dans les méthodes de cal- cul, le haut palronage du Gouvernement et de l’Académie, la science profonde des hommes il- lustres qui furent chargés de l'opération donnèrent à la méridienne de Delambre et Méchain une auto- rité considérable, et en firent un modèle proposé à l'admiration et à l’imitation des géodésiens du monde entier. Elle fut l’are fondamental de la grande carte dite de l'état-major et servit de base et de point de départ à toutes les autres chaines du réseau français, mesurées de 1818 à 1850 par les ingénieurs géographes. Elle excita entre toutes les nations de l'Europe une noble émulation et l’on vit partout, dès le début du xix'sièele, les mesures d'arc se multiplier : Anglais, Allemands, Russes, Espa- gnols, Italiens entrèrent successivement dans la voie ouverte par les savants français du xvu° et du xvi® siècle. Comme il arrive fatalement dans toutes les branches de la science, les élèves éga- lèrent bien vile et dépassèrent ensuite leurs maitres. À mesure que le nombre des arcs crois- sait, leur longueur augmentait. On conçoit aisé- ment que plus un arc est étendu, plus il permet une étude intéressante de la courbure de la surface, plus il a d'importance scientifique. Il ne s’agit plus seulement, pour le géodésien contemporain, de 180 DEFFORGES. — ANCIENNES ET NOUVELLE MESURES DE LA MÉRIDIENNE DE FRANCE savoir si la Terre est aplatie ou allongée suivant son axe polaire; il s’agit d'étudier sur toute la sur- face du globe la forme de la courbe méridienne. Il se demande si toutes les courbes méridiennes sont identiques, si elles peuvent être considérées comme appartenant réellement à une surface de révolution, ou si au contraire le globe terrestre est une masse irrégulière se rapprochant plus ou moins d'un ellipsoïde à trois axes. Il sait que la verticale géodésique et la verticale astronomique ne coïncident pas dans tous les lieux de la Terre, que des anomalies, déjà aperçues par Delambre, mais attribuées dans sa discussion à des erreurs d'observation, existent réellement ; il les poursuit avec curiosité et patience pour dévoiler par leur moyen les moindres irrégularités de la surface de niveau. L’are de Picard avait une amplilude de 4°23' environ; celui de Maupertuis et Clairaut, moins de 157. L'amplitude de l'arc du Pérou atteignait 3°7!, la méridienne de Delambre et Méchain s’é- tendait sur un arc de 8°30!, l'arc anglais des Indes va embrasser 23°49', l'arc russe de Struve et Ten- ner, du Danube à la mer Glaciale, comptera 25°20'. Aussi la préoccupation constante des géodésiens français, pendant le xix° siècle, sera-t-elle avant tout d'étendre la méridienne de Delambre aussi bien vers le nord que vers le midi. Dès 1806, Biot et Arago, envoyés parle Bureau des longitudes, prolongent la méridienne à travers la péninsule hispanique jusqu'à Formentera, la plus pelile des Baléares, et portent son amplitude à 19°22!, En 1860, le colonel Levret, assisté des ca- pitaines Beaux et Perrier, rattache par dessus la Manche, de concert avec les officiers anglais, la chaine de Delambre au réseau britannique. L'am- plitude des deux arcs réunis, de Saxaword à For- mentera, atteint 22°10". A leur retour d'Espagne, Biot et Arago avaient entrevu la possibilité de prolonger jusqu'aux cimes algériennes la triangulation de Méchain qu'ils avaient poussée jusqu'aux Baléares. En 1863, le colonel Levret montrait, par le caleul, que la liaï- son des deux continents se ferait facilement par la sierra de Grenade et les montagnes d'Oran à Ne- mours. En 1868, le capitaine Perrier vérifiait, sur le Lerrain, la visibilité réciproque des sommets es- pagnols et africains. Le rêve de Biot et Arago de- venait un projet pratique : la méridienne de De- lambre, déjà étendue jusqu’à la plus septentrionale des Shetland, pouvait atteindre le continent afri- cain et sy développer librement. Cette idée gran- diose fut. comme tout le monde le sait, heureu- sement réalisée en 1879 par les deux nations inté- ressées, l'Espagne et la France. Les détails de cétte mémorable entreprise sont encore dans toutes les mémoires; nous n'avons pas à nous y arrêter. Mais pour que la iméridienne de Delambre put figurer dignement dans l’arc nouveau qui comprend aujourd'hui, de Saxaword à Laghouat, plus de 30°, il fallait la débarrasser de quelques imperfections, de quelques erreurs, qui, insignifiantes peut-être, ou tolérables au temps de la Commission des poids et mesures, ne pouvaient plus être acceptées au- jourd’hui. La mesure des diverses chaînes du ré- seau français par les ingénieurs géographes, les jonctions aux frontières du canevas français avec les triangulations des pays voisins, avaient révélé dans notre arc fondamental des lacunes, des inco- hérences que la mesure de la méridienne dite de Fontainebleau avait bien fait disparaitre en partie, mais dont quelques-unes subsistaient encore. Une nouvelle mesure de la méridienne s’impo- sait donc pour lever tous les doutes et mettre la géodésie française à la hauteur de la science con- temporaine. A la requête du Bureau des longitudes, en 1869, le maréchal Niel, ministre de la guerre, chargea le capitaine Perrier d'entreprendre ce grand tra- vail, qui fut commencé en 1870, interrompu par la guerre franco-allemande, repris en 1871 et qui sera achevé dans le cours même de cette année 1892. Les opérations sur le terrain ont été entièrement exécutées, entre Paris et Bourges, par MM. Perrier et Bassot, entre Bourges et Dunkerque par MM. Bassot et Defforges, sous la haute direction de M. le général Perrier et, après sa mort, de M. le gé- néral Derrécagaix, son successeur. La nouvelle méridienne, des Pyrénées à Dun- kerque, comprend 88 stations, avec 475 directions. Le nombre total des triangles possibles est de 186. Il existe 25 polygones ou quadrilatères ayant des directions supplémentaires. Ces figures une fois compensées, le nombre des triangles nécessaires au caleul de la chaine est seulement de 61. La triangulalion proprement dite, commencée en 1870, a été terminée en 1888. La planche ci- jointe en donne une esquisse fidèle. Les deux pre- mières stations ont été faites aux deux extrémités de la base de Delambre, près de Perpignan. Dans la région comprise entre les Pyrénées et Rodez, l'ancienne méridienne a pu être presque entière- ment reconstituée. La plupart des repères de Mé- chain ont été retrouvés et identifiés. On s’est relié, au départ, à la triangulation espagnole par le côté Canigou-Forceral et, chemin faisant, à la chaine du littoral méditerranéen et au parallèle de Rodez. Au delà de Rodez, jusqu’à Dunkerque, les repères laissés par Delambre aux sommets de la triangu- lation avaient presque tous disparu. Il a fallu re- consliluer l’enchainement. On a évité tous les | clochers et monuments peu stables qui ne sont pas favorables aux observations de haute précision. Les nouvelles stations ont été choisies en vue d'ob- . tenir les meilleures formes de triangles, ce que Delambre n’était pas toujours parvenu à réaliser, M ‘Pagnot e paris L Câtilon 2 BASE DE PARIS* Malvorsme (7 catwnettqu Der Les SN S d TS. # 31 gr) Blandy Arbelle M ET ange fe NC Lal Charite | Bourge A | | | Beaux! Vents € À 52 S' Amara K { |. Cu EN Le Viliain | Te /1 entravé comimne il l’élait dans ses mouvements par l'état politique troublé de la France. Entre Gien et Paris, ainsi qu'au passage de la Somme, les difficultés du terrain ont rendu la formation du canevas particulièrement laborieuse. DEFFORGES. — ANCIENNES ET NOUVELLE MESURES DE LA MÉRIDIENNE DE FRANCE 181 Il à fallu, pour obtenir des vues, s'élever au-dessus du sol, à des hauteurs variant de 12 à 30 mètres. Les signaux en charpente élevés pour dominer les obstacles et dégager l'horizon des stations étaient ee & o° G 1° o° eo nn \ Ê hS'Pete 2 e U’ eters ne GS BAS3 D£ ! 22 CASSEL Ve £ ee, DER Toul SE Croix Jr. + E—» eau séérilèseo nr Il mn dl i > cac à séerélser oi, FERRIQUE Pa Se Dr H. Tnoinor : Le typhus cxanthématique de l'ile de Tudy (Annales d'hygiène publique et de médecine légale, no» vembre 1891.) 202 L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE faut sans doute, suivant Thoinot, chercher l'agent de contage; mais il resterait encore à savoir quelle est sa porte d'entrée. Quant au micro-organisme spécifique, Thoinot el Calmette, en étudiant le sang pris dans le cœur et dans la rate deux heures après le décès et même par ponction de la rate pendant l’évolution de la maladie, ont trouvé, dans les sept cas qu’ils ont étudiés, un (organisme in- téressant », suivant leur expression, mais qu'ils n'ont pu jusqu'ici ni cultiver, ni inoculer aux ani- maux. Ils poursuivent actuellement leurs recher- ches de ce côté. Quant aux mesures prophylactiques, qui ont réussi à enrayer l'épidémie, elles ont été énergique- ment conduites. Thoinot, muni de pleins pouvoirs, a rapidement circonscrit le foyer de l'infection : aucun malade n’a été laissé à domicile; tous ont été immédiatement, après le diagnostic fait, isolés dans desambulances temporaires; toutesles hardes, passées au sublimé à 1 pour 1000, les maisons trai- tées par des pulvérisations de la même solution. Le résultat très heureux montre l’efticacité des moyens employés. $ 3. — Tuberculose Ageñts microbiens des tuberculoses humaine, aviaire et bovine. — Sur la nature même de la tuberculose, nos connaissances ont peu progressé. Quelque lumière cependant à été apportée à la question, débattue depuis trois ans, de l'identité du bacille de Koch et du microbe qui produit la tuberculose chez les poules. En présence des résultats discordants ob- tenus par des savants d’une égale compétence au sujet des effets de l’inoculation des deux bacilles, Rivolta, dès 1889, puis Malfuci en 1890 s'étaient demandé si la cause n’en élait pas en ce que les uns opéraient avec de la tuberculose aviaire, les autres avec de la tuberculose humaine. Cette idée avait été appuyée par Straus et Wurtz, qui ne réussissaient pas à tuberculiser des poules au moyen des expectorations des phtisiques. Koch avait ensuite déposé dans ce sens au Congrès de Berlin (1890), insistant sur les différences présen- tées par la culture du bacille humain et du bacille aviaire. Mais c'est seulement l’année dernière, en juillet 1891, que furent exactement déterminés par Slraus et Gamaleia ! les caractères qui distin- guent les deux bacilles. L'un et l’autre affectent le même aspect, réagissent de même à l'égard des substances colorantes; mais leur biologie est toute différente : le bacille humain ne se développe pas à 45 degrés, température presque oplimum pour l’aviaire; ie chien est réfractaire à la tuberculose aviaire, mais il prend la tuberculose humaine ; par !SrraUs ET GAMALEIA, Arch, de inéd, expér., 1er juillet1891, | contre, la poule, qui est infectée par l’aviaire, reste indemne après l’inoculation de bacilles provenant de l'homme. Chez les rongeurs, les deux microbes agissent, mais d’une façon différente : avec le ba- cille humain on détermine la formation de tuber- cules, tandis que l’aviaire tue par seplisémie; aussi Straus et Gamaleia concluent-ils que « semblables pour la forme et la réaction à l’égard des matières colorantes, le bacille de la tuberculose humaine et celui de la tuberculose des oiseaux sont néanmoins deux espèces absolument différentes ». Cadiot, Gilbert et Roger, Courmont et Dor ‘ont exprimé quelques réserves à ce sujet, soutenant qu'en certains cas on observerait la transition du bacille aviaire au bacille de l’homme et des mam- mifères. Quoi qu'il en soit, il semble que clinique- ment le bacille (aviaire) de Roux et Nocard est très différent du bacille (humain) de Koch. Remarquons que la non-réceptivité de la poule à l'égard du bacille de Koch n'implique aucune- ment la non-réceptivité de l’homme à l'égard du bacille tuberculeux de la poule. Les gaveurs de pigeons seraient susceptibles de contracter une forme parliculière de la tuberculose qu'ils tien- draient de ces oiseaux (P' Diculafoy). Un petit nombre d’autopsies récentes, relatées par Roger ?, où ont été décrits des tubercules renfermant des microbes autres que le baville de Koch, militent, du reste, en faveur de l'hypothèse de la pluralité des maladies tuberculeuses, qu'avait suscitée, il y a quelques années, le travail, bien connu, de Ma- lassez el Vignal sur la & tuberculose zoogléique ». D'autre part l'identité de la tuberculose humaine et de la tuberculose des mammifères (bovidés, ete.) est hors de doute, ainsi qu'il ressort d'un grand nombre d'expériences, relatées l'été dernier par Chauveau et Nocard au Congrès de la Tuberculose. Hygiène des tulerculeux. — Tuberculose chez les pri- sonniers. — Quant aux conditions hygiéniques à recommander aux tuberculeux, nous n'avons cette année aucune nouveauté à signaler. Notons seule- ment l'importance croissante des stations où les phtisiques vivent au grand air (D' Moritz). L’aéra- tion constante et, si possible, l'insolation de leurs appartements, le séjour à la campagne ou en mon- tagne, loin des villes et des atmosphères confinées, attirent de plus en plus l'attention des hygiénistes. À ce propos il est intéressant de consulter la statistique de la mortalité tuberculeuse dans les prisons. Le D'G. Cornet, de Berlin, auquel nous ! Congrès de la Tuberculose, août 1891. ? D' Roger, Revue des pseudo-tuberculoses (Gazetle hebdo- madaire, 1891). $ Rapport sur le Sanatoria, Leipzig, 4802, L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 203 devons une étude récente sur ce sujet !, montre que, parmi les 7.900 décès observés sur une popu- lalion pénitentiaire de 235.600 individus pendant la période quinquennale 1876-1880, 3.600, soit 35,82 % , sont dus à la tuberculose. Dans la popu- lation civile d'âge correspondant la proportion n'était que de 23,78. Chez les religieux cloitrés elle était de 63 %. Enfin la statistique relevée par le D' Cornet fait voir aussi que l’évolution de la maladie est beaucoup plus rapide chez les détenus que dans la population libre. Les prisonniers sont généralement emportés par la tuberculose en dix- huit mois ou deux ans, tandis que, dans la vie civile, l'évolution moyenne est de six à sept ans. Tuberculose du premier âge. — Contagion el hérédite. — C'est une idée très répandue que la tuberculose, fréquente dans le jeune âge au-dessus de deux ans, est rare dans la première et la seconde année de l'enfance. Landouzy s'est récemment élevé contre cette opinion; il a établi, par l'examen nécrosco- pique, que, spécialement dans le prolétariat, la tu- berculose « apparait fréquente dès le premier âge et semble représenter la principale cause dela mor- talité dansles deux premières années de la vie ? ». Dans son service elle a causé le quart des décès chez les bébés âgés de moins de deux ans. Si elle a souvent passé inaperçue, c'est qu'on avait négligé de rechercher la tuberculose à l’autopsie, et peut-être aussi parce que l'infection bacillaire semble pouvoir se produire sans déterminer chez l'enfant une tuberculisalion prononcée : en ce cas la mort résulterait d'une intoxication très rapide. S'appuyant, d'autre part, sur la statistique mor- tuaire de Paris, Landouzy estime que «la tuber- culose doit, pour la Capitale tout entière, reven- diquer des chiffres absolument alarmants de léthalité infantile tuberculeuse. C’est par 2.000, au bas mot, que se comptent annuellement à Paris, par tuberculose, les décès de bébés de quelques jours à deux ans!» Ces chiffres se rapprochent de ceux que Boltz, assigne à la mortalité tuberculeuse de Ja toute petite enfance à Kiel où, d’après lui, elle atteint 33,95 %/, ?. « Le remède à ce déplorable état de choses, écrit Landouzy, est tout entier et uniquement dans la prophylaxie : c’est qu’en effet, étant données d'une part la généralisation, la diffusion habituelle et rapide de la bacillose chez les bébés, étant données, d'autre part, les difficultés du diagnostic, 1 Dr G. Corxer. Die Tuberculose in den Strafsanhalten, Zeïtschrift für Hygiene, p. 455, 4891. = L. Lanpouzy. Nouveaux faits relatifs à l’histoire de Ja tuberculose infantile; Revue de Médecine, 10 septembre 1891. 3 R. Bozrz, Thèse inaugurale, Kiel, 1890, | on peut dire que, de toutes les tuberculoses, la bacillose du premier âge parait la moins traitable et celle contre laquelle les entreprises thérapeu- tiques semblent les plus vaines. » Il faut donc veiller à soustraire le nouveau-né aux causes con- nues de contamination et l’isoler absolument du voi- sinage des phtisiques. Dans les milieux pauvres, la chose est bien difficile, car c'est précisément aux malades, à ceux qui ne peuvent pas travailler au dehors, que la garde des enfants à la maison se trouve forcément confiée. Indépendamment de ces causes de contagion, l'enfance semble aussi menacée de tuberculose par voie d'hérédité. Les observations sur cet important chapitre de la science, sont encore fort incom- plètes. En plusieurs occasions et l’année dernière encore, Landouzy a cité des cas de fœtus tuber- culisés. Il admet qu'ils avaient été ensemencés de bacilles soit par le sang placentaire de la mère, soit par le sperme du père ‘. A l'appui de cette hypothèse on doit citer les expériences récemment faites en Allemagne par Schmorld et Birch- Hirschfeld ? : une jeune femme tuberculeuse et enceinte étant morte avant l'accouchement, l’opé- ralion césarienne fut pratiquée et le fœtus extrait. Dans le foie et la rate de ce fœtus, recueillis avec, les précautions requises, les auteurs trouvèrent des bacilles de Koch; ils inoculèrent des fragments du foie et de la rate à des cobayes et à des lapins et ces animaux devinrent tuberculeux. A l’occasion de ce fait, Cornil a fait remarquer qu'il n'avait jamais trouvé de bacilles dans le placenta des phtisiques en couches, ni réussi à contaminer des cobayes en leur inoculant des fragments du placenta. Le résultat négatif de cette recherche ne saurait cependant infirmer les obser- vations positives : celles qui viennent d’être citées paraissent rendre au moins très probable l'héré- dité de l'infection tuberculeuse. - Contre ce mode de transmission de la maladie le seul remède préventif possible est l'interdiction du mariage aux tuberculeux. Opérations prophylactiques. — Dans l’état actuel de nos connaissances sur l'étiologie de la tu- berculose, l'un des procédés prophylactiques les plus eflicaces consiste assurément à désinfecter les expectorations des phtisiques. On a préco- nisé dans ce but l’ébullition à 400°.Schill et Fischer en 1884, Væœlsch en 1888 avaient reconnu que cette 1 L. Laxpouzx. L’hérédité tuberculeuse, Revue de Médecine, 10 mai 1891. ? Senmorcp ct Bircn-Hirscnrerp : Wiener medical Blaté, 1891. 3 Cornir. Analyse du mémoire de Schmold et Birch- Hirschfeld, Journal des connaissances médicales, 30 mai 1891. température pouvait, en certain cas, ne pas tuer les bacilles. Mais Yersin avait montré en 1890 qu'elle détruit la virulence en moins de dix mi- nutes!. Ce résultat, tenu d’abord pour rassurant, demandait cependant à être mieux établi, Yersin ayant opéré sur les microbes de la tuberculose, non humaine, mais aviaire. Grancher et Ledoux- Lebard ? ont récemment repris cette étude. Ils ont opéré et sur le bacille humain et sur l'aviaire; et ils ont trouvé que le premier résiste moins que L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE près ce principe, des appareils pour désinfecter les crachoirs dans les hôpilaux et maisons de santé. Le mocèle que représentent les figures 8 et 9 devrait se trouver dans tous nos hôpilaux. Il fonctionne à l’'Hôtel-Dieu depuis le mois de janvier 1891. La les- sive à2°/,est renfermée dans un récipient (A, fig. 9), d’où elle ne peut s'échapper que sous l'influence de sa propre pression, pour monter dans un bac (B, fig. 9), où sont disposés les crachoirs à désin- fecter ; comme la pression nécessaire ne peut se 1 — - JOEL 000900 | ï WU sg, Met LU RL LE TN NT [Il A DNTLLUIN is —— sr =, LÉ T AS : A 7 Fig. 8. — Appareil pour désinfecter les crachoirs dans les hôpitaux. — Les crachoirs sont déposés dans le bac, monté sur colonne, que l’en voit au premier plan. Derrière lui est située la chaudière qui contient la lessive. Sur la droite du dessin se trouve le foyer ct sur la gauche la cheminée de la chaudiere (Voir les détails, fig. 9). le second à la chaleur. A l’état humide une tempé- ralure de 70°est suffisante pour le tuer. Mais,quand il s’agit de crachats desséchés, la température de 100°, maintenue pendant une heure, atténue sim- plement la virulence sans la détruire. L’addition d'une pelile quantité de lessive de soude l'eau à 4100° un effet rapidement destructeur sur le bacille, Les ingénieurs Gencete el Ilerscher ont construit, d’a- exerce au contraire dans * Yersin : Etude sur la tuberculose expérimentale, Ann. de l'Inst. Pasteur, 1890. = GRancner et Lenoux-Lesarp : Tuberculose expérimentale, Société de Biologie, 14 février 1891, produire au-dessous de 100°, le bac ne peut se remplir que si la lessive a alteint le degré voulu. Une double circulation de vapeur et de liquide maintient celte température dans toutes les parties du bain pendant la durée de l’opéralion : celle-ci présente par suile toutes les garanties requises de complète désinfection. Chez les particuliers la désinfection des crachoirs affectés aux phtisiques peut se faire dans l’eau addi- tionnée de soude caustique et maintenue à l'ébulli- lion pendant dix minules. Néanmoins, quelque soin que prenne le malade de ne point disséminer ses expecloralions ef de désinfecter son linge, il lui + + D dt L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 20 ©e est impossible de ne point contaminer les objets qui l'entourent. Quand on s'installe dans un appar- tement précédemment occupé par un phtisique, il est donc prudent de le désinfecter. La chambre qu'habitail le tuberculeux demande un soin parti- Fig, 9. — Appareil précédent vu en coupe. — A, chaudière contenant la solution alcaline; D, foyer de la chaudièré; B, bac destiné au traitement des crachoirs: deux tubes) et n réunissent la chaudière À au bac B. L'un d'eux », qui débouche à la partie inférieure du bac de désinfeetiôn, donne passage d’abord au liquide de la chaudière poussé par sa propre vapeur, ensuite à la vapeur, au fur et à me= sure de sa production. Cette derniére traverse le bain stôri- lisateur dans toute sa hauteur, et contribue à en maintenir la température au degré nécessaire. L'autre tube x a tou jours son extrémité inférieure immergée; il pénètre dans le bac à la partie supérieure et y amène, par le fait même de l'ébullition, une partie du liquide bouillant de la chaudière, qui redescend par le premier tube #7. Cette circulation à pour résultat de porter le liquide du bac à une température supérieure à 1009, — Le tuyau de communication # porte une valve # qui permet d’intercepter ia communication du bac B avec la chaudière A. L'appareil comporte en outre un réservoir C d'eau pure chauffée par les flammes perdues du foyer. Ce réservoir supplémentaire sert à rincer les cra- choirs une fois la désinfection terminée, à l’aide du tuyau q et du robinet r et est également commode pour le remplis- sage de la chaudière (à l’aide du tuyau £ et du robinet w). — Les autres éléments de l'appareil sont : une valve d’échap- pement de vapeur s qui permet, selon qu'elle est fermée ou ouverte, de faire monter le liquide bouillant de la chaudière dans le bac B ou de l'en faire redescendre; une crépine e qui empêche les résidus solides de pénétrer dans la chau- dière A; enfin un robinet de vidange » permettant de vider cette dernière, quand on le juge nécessaire. eulier. Tout ce qu'elle contient sera enlevé; parquet, plafond et murailles seront aspergés d’eau ; puis, les fenêtres étant fermées, on versera dans une as- sict'e, au milieu de la pièce, du sulfure de carbone, que lon enflammera. La chambre, parfaitement close,sera ensuite abandonnée à elle-même pendant quarante-huit heures, puis acrée et lavée. Si l’on ne peut faire passer aux étuves de désinfection les tentures et tapis, on les exposera au soleil, à l'air et à l'humidité le plus de temps possible (au minimum une semaine) et on les aspergera de so- lutions antiseptiques (par exemple : bichlorure de mercure au !/,59 avec addition d'acide (artrique). À la vérité celle désinfection, si souhaitable, n’est pas loujours possible. On ne peut d’ailleurs songer à la réaliser dans toutes les pièces d’un appartement où ont vécu des phtisiques. Il importe cependant de détruire la plupart des germes tuber- Fig. 10.— Pulvérisateur pour la désinfection des appartements contaminés par les phtisiques (Détails fig. 11). culeux; on y parvient en lavant le parquet avec des essences, en projetant sur les murs, les ten- tures et les meubles recouverts d’éloffes, des es- sences ou des solutions antiseptiques. (Geneste et Herscher construisent dans ce but des pulvéri- sateurs (fig. 10 et 11) d'un usage très efficace. Un appareil analogue (fig. 12) a été réalisé par les mêmes pour désinfecter les wagons, que ceux-ci soient contaminés par l'homme ou par les ani- maux. Ce stérilisaleur projelte l’eau bouillante additionnée d’antiseptique. La solution antisep- tique ne le détériore pas, car elle ne se trouve mélée à l'eau qu'au moment de l'émission du jet, étant renfermée dans un réservoir parlicu- lier. L'expérience a montré que, à quelques cenli- 206 L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE mètres de l'extrémité de la lance, la température du jet est supérieur à 100 degrés. \ Fig. 11. — Coupe de l'appareil précédent. — La solution anti- septique est versée, au moyen de l’entonnoir latéral (repré- senté à droite), dans la partie inférieure de l'appareil, Cette partie est séparée de la partie supérieure, où se trouve le corps de pompe, par une cloison que traversent deux tubes cylindriques disposés comme l'indique le dessin. Dès que le levier extérieur agit sur le piston du corps de pompe, un jet pulvérisé sort des deux tuyaux de caoutchouc qui ter- minent l'appareil. Cette désinfection des wagons est plus souvent utile qu'on serait tenté de le croire au premier abord. Prausnitz ! - a étudié, au point de vue de l’étiologie de la tuberculose, les wagons qui font le trajet de Berlin à Méran, station du Tyrol où se rendent un grand nombre de phtisiques, sur- tout pendant Île mois de novembre. d'être souvent nettoyées: la tuberculose est en effet assez répandue chezles bovidés, et ceux-ci, par une émission constante de salive, risquent de conta- miner souvent les écuries où ils voyagent. C’est pour les assainir, qu'est employée, depuis 1889 au marché de la Villette, et depuis septembre 1890 à la gare de Batignolles, le stérilisateur de la figure 12. Utilité, pour la prophylaxie umaine, du diagnostie de la tuberculose chez les bovidés. — Viandes tubercu- lsuses. — La tuberculose des bovidés est d'autant plus dangereuse pour l’homme qu’elle peut le con- tagioner sans se manifester chez l’animal par aucun signe extérieur. Des vaches n'offrant au pis aucune lésion peuvent être tuberculeuses et donner du lait susceptible, d'après les expériences de Bang et de H. Martin, de déterminer la tuber- culose chez les consommateurs. Il y a donc grand intérêt à diagnostiquer leur état. Gutmann, de Dorpat !, avait eu en 1891 l'idée d'utiliser, dans ce but, la tuberculine de Koch : il avait constaté qu'à l'égard de ce réactif, les bovidés se com- portent de la même facon que l'homme: après l'injection, leur température ne s'élève que s'ils sont déjà en puissance de mal. Cette observa- lion a provoqué l’année dernière des expériences confirmatives de Johne et Siedam- grotzki à l'Ecole vétérinaire de Dres- de ?, et un grand nombre de recher- ches éparses, sur lesquelles un ré- cent travail de No- card vient d'appeler l'attention *. Sur 11 bovidés inoculés Les poussières re- par ce savant, puis cueillies dans ces wagons furent in jectées à des co- bayes et en tuber- culisèrent cinq sur vingt. montre bien à quel point peuvent se trouver polluées les voitures qui sont fréquemment affectées à des phtisiques. Celles qui transportent le bétail réclament aussi terminé par une lance. # Prausnrrz. Ueber die Verbreitung der Tuberculose durch den Personenverkehr auf Eisenbahnen. — Arch. fur Hygiene, XII, p. 192, 1894. autopsiés, 23 pré- sentèrent une réac- tion fébrile, et fu- rent ensuite recon- nus (uberculeux, à Ce résullat Fig 12. — Appareil pour désinfecter les wagons. — Cet appareil comprend, l'exception d’un comme le montre la figure : 10 une chaudière à vapeur, légère, à vapori- | D EE sation rapide, servant à l'alimentation des jets d’eau bouillante; 2° un seul, qui n'avait eu réservoir pour la solution antiseptique, laquelle est projetée en mélange qu'une faible élé- continu avec le jet d’eau bouillante; 39 un long tuyau de caoutchouc vation thermique de 8 dixièmes de degré et qui, d'autre part, offrait de la cirrhose 1 Ballische Wochenschrifl, 2 janvier 1891. 2? Jouxe Er Sixpameronzxr, Berichle über das Velerinürve- rein Kænigreich Sachsen, für das Jahr 1891. % Nocarp, Académie de Médecine, 13 octobre et 24 novem- bre 1891.— Annales de l'Institut Pasteur, 25 janvier 1892. 2 apr … L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 207 A biliaire. Parmi les 48 animaux qui ne manifes- tèrent aucune réaction, on trouva 3 tuberculeux ; mais ces derniers élaient à un étal avancé et le diagnostic avait pu être porté avant l'injection. Ce fait parait confirmer l'observation de Bang sur l’atténualion de la réaction dans les vieilles tuber- culoses chez les phlisiques proprement dits. Nocard signale également les résultats que lui a transmis Lydtin, chef du Service vélérinaire du grand-duché de Bade : 19 vaches laitières d'une vacherie modèle de Karlsruhe, dont le lail était vendu surtout pour les enfants et les malades et qui étaient de magnifique apparence, furent ino- culées dans une première séance ; 9 réagirent avec 5 décigrammes de luberculine; l’autopsie révéla des lésions tuberculeuses ; # mois plus tard, nou- velles injections aux 6 vaches qui n'avaient rien présenté à la première épreuve : 3 ont eu une réac- tion fébrile, et l’autopsie montra que ces trois va- ches avaient une tuberculose récente, sans doute postérieure à la première épreuve. En présence de ces faits il a été décidé à Karls- ruhe que nulle vache ne serail admise dans les élables modèles avant l'injection d'épreuve et que, tous les six mois, il serait procédé à un nouveau contrôle. La généralisation de cette méthode con- duirait vraisemblablement à ce résultat de sup- primer la transmission de la tuberculose par le lait. Quant à la viande même des animaux tubereu- leux, il semble possible d’en diminuer énormément les dangers en organisant une sévère inspection de la boucherie. Il est curieux de remarquer à ce propos l’absence d’un tel service dans le pays le plus avancé en matière d'hygiène : en Angleterre les abattoirs publics sont extrêmement rares; dans les petites villes chaque boucher abat encore derrière sa boutique. En France, au contraire, les abattoirs publics se sont multipliés. Ils devien- draient encore plus nombreux, si l’on accordait aux communes voisines le droit de se syndiquer pour en construire !. Il ne faut pourtant pas exagérer la fréquence des dangers qu'en l'état actuel des choses les viandes tuberculeuses font courir aux consommateurs. Sur ce sujet une importante discussion à eu lieu lPété dernier au Congrès d'hygiène de Londres. Arloing demandait qu'aucune partie d’un animal reconnu tuberculeux né füt vendue à l’état frais; il accep- tait que la viande servit à la préparation du jus, que l’on peut stériliser, où à la salaison, qui par 1 Récemment les communes de Clichy et de Levallois-Per- vet, près de Paris, ayant voulu organiser un abattoir à frais communs, ont rencontré, au point de vue du droit adminis- tratif, des diflicultés, dont le Dr Hellet, maire de Clichy, est enfin parvenu à triompher, mais qui eussent pu arrêter une volonté moins énergique. elle-même stérilise. Burdon Landerson, d'Oxford, - a combattu cette mesure, la déclarant excessive ou impraticable. Bang, de Copenhague, a soutenu que la saisie totale était chose impossible en Allema- gne où un dixième des bovidés sont tuberculeux. À ses yeux, d'ailleurs, le danger n’est réel que dans le cas de tuberculose généralisée, le sue musculaire etle sang constituant des milieux peu favorables au développement du bacille de Koch. Nocard est venu appuyer celle opinion : il a relaté l'expérience suivante faite par lui à Alfort sur 21 vaches tuber- culeuses : le sang et les humeurs de chacune d'elles furent inoculés à des animaux réceptifs : une seule vache conféra ainsi la tuberculose. Il s'agissait ce- pendant d’injeclions intra-péritonéales, beaucoup plus aptes que la simple ingestion à déterminer l'infection tuberculeuse. De jeunes chats nourris de viande de vache riche en bacilles de Koch n’ont pas contracté la maladie, résultat conforme aux observations, bien connues, de Galtier, de Lyon, et de Perroncito, de Turin. Lister a fait observer, à ce propos, que de tous les animaux servant à l’alimentalion, c'est le mouton seul qui parail présenter un certain élat réfrac- laire à la tuberculose ; ilexiste dont au moins une espèce de viande dont nous pouvons manger sans courir le risque de devenir tuberculeux. $ 4. — Influenza L'épidémie de 1890-1891 en France et à l'Etranger. — L'influenza, après avoir sévi si violemment sur la France pendant l’hiver 1889-1890, s'y est mon- trée ensuite assez bénigne jusque vers la fin de décembre 1891. Mais, à partir de cette date, le nombre des décès s'est rapidement accru et, pen- dant tout le mois de janvier 1892, il est devenu considérable. Beaucoup moins de personnes ont été alteintes qu'en 1889-1890 ; mais, parmielles, un plus grand nombre ont succombé.Le maximum de la mortalité à Paris s'est produit en janvier. Le tableau ci-dessous ! permet de comparer aux décès survenus alors ceux des quatre plus mauvaises se- maines de l'épidémie de 1889-1890. Ces semaines sont celles de décembre 1889 : DÉCEMBRE JANVIER 1889 1892 PrennéreNseMane,.. de 1091 1164 Deuxième semaine... ="... 1188 1370 Hroïsièemesemaine ere ee 1306 1560 Quatrième semaine: ©... 2334 1615 5969 5706 En Angleterre l’influenza n’a cessé depuis un an d'exercer de nombreux ravages ?. Au début de l'hi- ! Bulletin de la slalistique municipale de la Ville de Pa- ris, 1889 et 1892. 2 Voyez à ce sujet : Dr Brodie : L'épidémie d'influenza à 208 L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE ver 1891-1892, ils étaient tels à Douvres que, dans un but prophylactique, l'autorité a menacé d’une amende de cinq livres tout individu qui, alteint d'influenza, se promènerait dans la ville. En Iialie, notamment à Milan !, les services pu: blics ont élé presque arrêtés, les hôpitaux regor- geant de malades. Le 25 décembre 1891 la morta- lité aatteintle chiffre de 66 décès ; le 12 janvier, elle arriva à 105.11 y a deux ans, et même l’année der- nière, la grippe avait pris dans le nord de lIla- lie une forme nerveuse toute spéciale, rappelant la maladie du sommeil des populations africaines. Dans les deux derniers mois ce sont les complica- tions gastriques qui ont prédominé (una specie de gastritle infectiva.) Nature de l’'Influenza. Découverle de son agent micro- bien.— En raison de la complexité de ses aspects, il était dificile de différencier l’influenza de la grippe ordinaire, endémique en nos pays. On a relevé, parmi les caractères de la première, son origine asiatique, la quasi-périodicité de son invasion en Europe (1762, 1782, 1803, 1833, 1860, 1889), et ce fait qu'après y avoir marqué son passage par de nombreuses atleintes, elle peut y demeurer pen- dant de longues années en quelque sorte à l’état sporadique. Ces derniers cas constilueraient-ils la grippe ordinaire ? Il se peut que le contage de l'in- fluenza s’alténue après avoir déterminé une formi- dable épidémie et ne manifeste alors qu’en de rares occasions sa virulence amoindrie. Celle hypothèse conduit à rechercher un agent microbien danstoutes les formes connues de l'influenza et de la grippe. Bien que les microbiologistes se soient livrés à cette invesligation dès le début de l'épidémie de 1889, et aient décrit, chez les malades, une assez grande variété de bactéries pathogènes, c'est seu- lement en ces derniers temps qu'on semble être arrivé à discerner parmi elles celle qui cause réel- lement l’influenza. En 1890, Babès, et, après lui, Kovalsky, avaient signalé chez des influenzés un diplocoque nouveau, auquel ils attribuaient la maladie. Des communications récentes de Pfeiffer, de Canon et de Kilasato ? paraissent établir la jus- tesse de celte supposition. Pfeiffer a trouvé dans les crachats des malades,—dans le cas de la forme laryngée, — un bacille fort petit, de la largeur des bacilles de la septicémie de la souris, mais d'une Londres, in Revue générale dés Sciences du 30 octobre 1894, t. II, p. 661. ‘ Lettres d'Italie in Medical and circular Press, 8 jan- vier 1892. 2 Preterer. Communications préléminaires sur les causes de l'influenza. — CANON. Sur un micro-organisme dans le sang des malades alleints d'influenza. — Kirasiro. Sur le bacille de l'influenza el son mode de culture. (Deutche medi- cinische Wochenschrift n.2, 1892. Trad. in extenso in Bulletin medical, 11 jan. 1892. longueur moindre, formant souvent des chainettes de trois ou quatre, que l’on peut colorer avec le bleu de méthylène à chaud; Canon a décelé dans le sang des influenzés un microbe qu'il identifie au précé- dent; Kilasalo a réussi à le cultiver sur l’agar gly- cériné. La culture est difficile à obtenir, et l'auteur garde sur le procédé qu'il emploie à cet effet un si- lence à la mode de Koch Quoi qu'il en soit, Pfeiffer annonce avoir conféré l’influenza au singe et au lapin en leur inoculant le diplocoque isolé par la culture. Les inoculations au chat, au rat et à la souris n’ont pas reproduit la maladie. Tout récemment, Cornil et Chantemesse ? ont confirmé les résultats de Pfeiffer et Canon. Ils ont inoculé à un lapin une goutte du sang d'un enfant influenzé : le lapin est devenu malade; vingt- qualre heures après l’inoculalion, le microbe in- jecté avait pullulé dans le sang en quantité telle qu'on pouvait l’y retrouver. Il peut demeurer trois semaines dans le sang du lapin. Le microbe fut cullivé dans du bouillon sucré, puis inoculé à un singe, qui bientôt présenta des troubles intesli- naux avec fièvre el somnolence. Assurément ces fails ne suflisent pas pour per- meltre d'affirmer que la maladie conférée est bien l'influenza. Mais ils constituent, en faveur de cette thèse, un argument très sérieux. Ils permettent d'espérer avec Pfeiffer qu'en isolant les influenzés alteints aux voies respiratoires, el en stérilisant leurs crachats, on parviendra à éteindre l'épidémie qu'ils ont jusqu’à présent disséminée autour d'eux. D'autre part il sera très important de cultiver en abondance, dans des milieux stérilisés, le microbe incriminé, et d'obtenir ainsi ses excrétionssolubles. Si ce microbe est bien l'agent spécifique de l’in- fluenza, certaines de ses excrétions devront pro- duire sur l'organisme une action déprimante sem- blable à celle que les cliniciens ont remarquée dans toutes les formes de la maladie. Il est naturel de supposer que l’influenza doit sa gravité à des infections secondaires. Peut-être les agents de ces infections font-ils partie des hôtes habituels de la bouche, du nez et du tube digestif. Ces parasites, — inoffensifs quand l'organisme est sain, — pénè- treraient dans le muülieu intérieur, la lymphe et le sang, chez les sujets que le virus influenzique ren- 1 11 écrit simplement : « Pour éviter les obstacles qui s’op- posent à la réussite des cultures, M. Koch a trouvé un pro- cédé spécial, qui n'a pas encore été publié et grâce auquel il a réussi depuis de longues années à obtenir des cultures pures de bacilles tuberculeux pris directement dans les cra- chats. Je me suis servi de ce procédé pour obtenir les cul- tures pures du bacille de l'influenza, que je vous présente. Cette méthode sera prochainement décrite en détail. » Kitasato a réussi à obtenir des cultures pures de dixième génération. 2 ConniL ET CHANTEMESSE, Académie de médecine, séance du 3 février 1892. TT L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 209 drait incapables de réaction phagocylaire en para- lysant leurs centres vaso-dilatateurs. Si cette hypothèse,—que nous suggèrentles faits d'ordre expérimental découverts par Charrin et Roger, Charrin et Gley dans le cas de certaines septicémies et de la maladie pyocyanique !, — se trouvait confirmée, on serait conduit à essayer de prévenir les complications de l'influenza au moyen d'excitateurs du système nerveux, des sels de strychnine, par exemple. En nous laissant aller à celle conjecture, nous ne nous dissimulons pas qu'elle risque de paraitre très aventurée et sera peut être même condamnée par les découvertes de demain. Du moins,les travaux qu'elle pourrait sus- citer ne seraient pas inutiles. _ $S 5. — Ophtalmie des nouveau-nés Étiologie. — En France seulement on trouve 38.000 aveugles, soit un pour mille habitants. Or on estime que, sur ce nombre, 13.000, soit près d’un liers,ont perdu la vue à la suite de l’'ophtalmie pu- rulente. Cette affection, qui frappe encore plus cruellement certaines contrées, notamment l'Italie, est peut être une de celles dont il serait le plus fa: cile de triompher. C'est surtout, en effet, au mo- ment de la naissance,souvent même pendant l'acte de l'accouchement, que la contagion a lieu.Le D'Va- lude ? admet encore que l’ophtalmie du nouveau- né peut être déterminée par une simple leucorrhée, sans calarrhe vaginal virulent, blennorrhagique. Le nombre des micro-organismes susceptibles de se rencontrer dans toute sécrétion vaginale rend cette supposition très admissible. Le fait serait toutefois en contradiction avec les recherches de Zweifel*, d’après lesquelles l’auteur affirme que les lochies des femmes non malades sont incapables de contaminer les yeux des enfants. La Société de médecine publique d'hygiène pro- fessionnelle a repris cette question à l’instigation du D' Dehenne. Ainsi que le faisait remarquer le Secrétaire général de la Société, le D' Napias #, la prophylaxie de l’ophtalmie des nouveaux-nés n’est pas seulement une œuvre de charité; c’est aussi une œuvre d'économie bien comprise ; il en est du reste ainsi de toutes les mesures d'hygiène. Après avoir établi que la France dépensait 1 mil- lion 400.000 francs pour ses aveugles, le Secré- taire général montrait que toute diminution du ! Voyez à ce sujet le Mémoire de Charrin, dont nous avons rendu compte dans la Revue du 15 janvier 1892, t. III, p. 31. ? Valude, Clinique sur l'ophtalmie des nouveau-nés, Bul- letin médical, 25 mars 1891. 3 Zwexrez, Arch. fur Gynæœhkologie, 1891. 4 Dr Napras : Sur l'Ophthalmie des nouveaux-nés, Société de Médecine publique et d'Hygiène professionnelle; séances du 25 février et du 25 mars 1891; et Revue d'Hygiène des 20 mars ct 20 avril 1891. nombre des aveugles nouveau-nés est une réduc- tion sérieuse sur ce budget, réduction qui pourrait atteindre le liers ou la moitié de la dépense totale: le D' Deheñne soutient, en effet, que la moitié des aveugles hospitalisés sont des victimes de l’oph- talmie purulente. Proplylavie. —En ce qui concerne la nécessité de prévenir cette maladie, tous les oculistes sont d’ac- cord; à peu près tous admettent l'utilité, la néces- sité même du lavage antiseptique des organes fé- minins avant l’accouchement. Gibson en 1807 en avait déjà vu l'importance sans songer, bien en- tendu, à l’antisepsie; celle-ci n'a été mise en pra- tique avec méthode que par Bischoff, de Bâle, vers 1875; il serait superflu d’insister sur les avantages unanimement reconnus de ce procédé. Grandes sont au contraire les divergences des praticiens quand il s'agit du traitement prophylactif a faire subir à l'enfant. Le D' Dehenne demandait que l’on remit aux parents, à la mairie, une notice indiquant les moyens prophylactiques à employer contre l’'ophtalmie purulente. La méthode défendue par lui comporte l'emploi de solution de sublimé et de nitrate d'argent, voire même de collyre d'ésérine; elle risque de ne point être fort utile entre les mains du public. Quant à l'opinion du D' Gale- zowski,elle a paru théoriquement excellente : con- fier aux médecins de l’état civil le soin d'examiner l’état des yeux de l'enfant. Leur visite a lieu vers le troisième ou quatrième jour après la naissance ; or c'est précisément là la date de l'apparition des premiers symptômes de l’ophthalmie. Malheureu- sement la mesure ne saurait être appliquée dans nombre de communes, privées de médecin de l’état civil. C’est peut-être dans les instructions données aux sages-femmes, qu'il convient surtout de chercher le remède. Suffisamment instruites, elles n'hésiteraient pas à appeler le médecin, si les pre- mières mesures employées par elles (lavage au bichlorure ou au biiodure de mercure, instillation d'une solulion faible de nitrate d'argent) restaient inefficaces. $ 6. — Syphilis Influence du service militaire sur la diffusion de la syphilis. — Parmiles maladies contre la propagation desquelles lesmesuresprophylactiques de l'hygiène sembleraient devoir exercer une aclion efficace, on serait tenter de ranger en première ligne les affections vénériennes, notamment la syphilis. Celle-ci cependant continue de faire des progrès chez tous les peuples, offrant un caractère peut- être plus marqué de gravité chez les plus récem- ment ouverts à la civilisation. On dirait que chez les nations contaminées depuis longtemps il s’est 210 produit une cerlaine accoutumance au mal. Les désordres épouvantables décrits par Frascator sont aujourd'hui très rares en Europe. Néanmoins la maladie joue encore un rôle néfaste, ét, dans la question du dépeuplement de la France, il faut, évidemment, lui accorder une grande importance. Ce ne sont pas seulement les restrictions légitimes au mariage ou à la procréalion qu'il convient de lui attribuer, mais aussi le plus grand nombre des avorlements involontaires. Les statistiques dres- sées par le P' Fournier, ne laissent aucun doute sur ce point : les faits constatés par tous les syphi- ligraphes el notamment par l'éminent pralicien que nous venons de citer, établissent sans conteste l’extrème fréquence des avortements successifs même après la disparition ancienne des accidents syphilitiques visibles chez les procréateurs. L'une des causes de la dissémination de la mala- die dans les milieux ruraux consiste dans le ser- vice militaire. Il y a quelques mois un médecin militaire autrichien, le D' Tôply a publié à ce sujet des observations fort intéressantes !. Selon lui, en Autriche-Hongrie, les maladies vénériennes (sy- phylis, chancre simple et blennorrhagie) frappent 78 soldats sur 1.000 ; sur 1000 malades traités dans les hôpitaux, 116 sont des vénériens. L'armée alle- mande présente un chiffre plus faible : 69; la sy- philis y est moins fréquente; on constate toutefois un chiffre plus élevé dans les garnisons des fron- tières. L’auleur n'hésite pas à déclarer « que l’ar- mée allemande est un terrain peu favorable à la syphilis, qui n'y pénètre que par suite de l'influence polono-russe et de l'influence francaise ». Notons qu'il néglige l'effet fatal de l'accumulation des troupes sur ces points. Il y a lieu en effet de remar- quer qu'en France, ce sont également les garni- sons à effectifs considérables de la région de l'Est qui sont les plus atteintes; serait-ce donc l'in- fluence de la chaste Allemagne ! En Angleterre, où l’armée présente une toute autre organisation, la syphilis est néanmoins très fréquente. Le Cniaes Diseases Act de 1869, qui, dans certaines villes, avait permis la surveil- lance sanilaire des prostituées, avait amené une diminution notable dansles maladies vénériennes. Mais, en 1882, par suite de la campagne bruyante menée pour {he abolilion of state-regqulated and licensed vice,ces affections ontrepris leur intensité primitive. Contre cette recrudescence nous n’oserions con- seiller à nos voisins le moyen prophylactique en usage dans l’armée coloniale néerlandaise *. Au commencement du siècle les vénériens y étaient 1 Dr Tôpzy. Die vencrischen Krankheiten in den Armeen, n Der Mililärarzt, 15 novembre 1891. ? Bullelin médical, décerabre 1891, L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE fort nombreux : 211 sur 4000 en 1826. On décida alors que chaque soldat aurait à la caserne une femme indigène. Ces femmes, soumises à la disci- pline mililaire, trailées dans les hôpitaux de l’ar- mée, devaient en cas de mobilisation être réunies par compagnie. En 1880, l'effectif féminin de l'armée était de 10,130 femmes en regard de 30.173 soldats. Cette mesure a fait tomber le chiffre des vénériens à 75 pour 1000. Prophylaxie des nourrices el des nourrissons. — En ce qui concerne la syphilis dans la popula- tion civile! , nous ne voyons rien de saillant à signaler, si ce n'est la discussion soulevée à l’Aca- démie de Médecine sur la prophylaxie des nour- des nourrissons contre la syphilis. On a pris en effet, depuis la loi Roussel, quelques pré- cautions pour protéger les nourrissons contre les dangers d’une contagion par les nourrices ins- crites dans les bureaux; mais, comme Fa fait remarquer le P' Fournier, la nourrice, elle, n’est nullement protégée contre l'enfant qu’on lui con- fie, et il ne s’agit pas là d’un danger illusoire ou rare ; sur cent enfants placés en nourrice avant l'âge de trois mois dans le département de la Seine, deux sont des syphilitiques héréditaires. Fournier demandait que toute personne prenant une nour- rice fut obligée de s'engager à lui fournir au dé- part un certificat médical, attestant que l’enfant allaité par elle n’était atteint d'aucune maladie contagieuse. Bien que cette disposition visät sur- tout la protection d’un second nourrisson que la femme pourrait entreprendre à sa sortie de la pre- mière nourriture, elle constituait une garantie sérieuse pour la nourrice, les parents étant avertis de cette obligation au moment où ils arrêlaient la nourrice, et le certificat pouvant autoriser la nourrice à demander des réparations dans le cas où la contagion serait établie. rices el IV. — ? 4. — Les nouveaux antiseptiques ANTISEPSIE La listes des antiseptiques se multiplie chaque année; quelques composés jouissent pendant un l Sauf une remarque intéressante de Pospielov, de Moscou, relative aux modes de contagion, les organes génitaux et les voies buccales servant de portes d’entrée au virus. Tout en constatant la prédominance du dernier mode chez la femme (446 cas chez elle contre 52 chez l'homme en Russie), P2s- pielov n’admet pas, du moins en son pays, la fréquence des causes signalées par les syphiligraphes francais. Il croit que les couturières, les modistes portent à la bouche les divers objets de leur métier, fils, aiguilles appartenant à leurs voi- sines en possession de la syphilis ; en outre, il signale comme cause probable cette coutume des femmes russes d'échanger les cigarettes qu’elles fument et de les faire passer de bouche en bouche. (PospieLov, De la contagion extragénitale de la syphilis en Russie, analysé dans le Bulletin médical du 3 juin 1891. L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE 21 certain temps d'une grande vogue, puis tombent dans l'oubli, et sont remplacés par d’autres plus jeunes dans la famille chimique, mais dont beau- coup ne résisteront sans doute pas à l'épreuve de l'expérience prolongée. Pour être véritablement pratique, {out antisep- tique doit offrir plusieurs qualités réunies : s'oppo- ser au développement des microbes, n'être pas ou peu dangereux pour l'homme, peu coûteux, enfin soluble dans l’eau. Quelques unes de ces qualités manquant aux antiseptiques le plus employés, — au phénol qui est caustique, aux sels de mer- cure, qui sont éminemment toxiques, — on à cherché de nouveaux produits. C’est la série aro- matique qui les a fournis. On a proposé le crésol ou méthylphénol, ou plu- tôt ses composés sulfurés, solubles dans l'eau. Mais ces corps sont encore trop caustiques; on a, pour celle raison, cherché à les saponifier, et ainsi se sont trouvés conslilués ces mélanges impurs qu'on appelle la eréoline de Pearson, émulsion de crésol et de xénol, et la créoline d'Artmann où les phénols dominent. Henle et Frankelavaient déjàsignaléla différence de pouvoir bactéricidedes trois crésols (ortho, méla, para) et ils avaient établi un ordre d'intensité, le méla étant le plus actif, puis le para et enfin l'or- thocrésol. Hammer ! a repris cette étude en opé- rant sur le Staphylococus prodigiosus. D'après lui, les trois crésols pris séparément n’ont pas une action différente mais le mélange des trois est bien supé- rieur à chacun d’eux isolés. On peut dissoudre le crésol brut, qui est cons- titué par la réunion des trois crésols, dans une les- sive de soude, qui forme en partie du crésolate de soude, grace auquel il est facile d'obtenir ensuite des solulions aqueuses élendues, très économi- ques et non caustiques. Le lysol, qui est également un phénol supérieur rendu soluble par des alcalis, est également en vogue ; il a été surtout étudié par Gerlach et Scho- tellius ?. D’après Gerlach, une solution à 1 % sufti- rait pour désinfecter les mains. Cetauteur conseille de s’en servir en solulion à3 % pour désinfecter les murs. Remouchamps et Sugg *, qui ont repris celte question au laboratoire d'hygiène de Gand, insistent surtout sur l'accroissement d'action anti- septique par l'élévation de la tempéralure. Les morceaux de linge et les couvertures souillés par des matières fécales cholériques el Lyphiques sont 1 Havuer. Ueber die desinficirende Wirkung der Kresolen und die Herslellung neulraler wassriger Kresollüsungen. Arch. für Hygiene 1891. Annales Inslilut Pasteur 25 septem- bre 1891. 2 SenoreLLius. Munchener med. Wochenschrift 1890. 3 RemoucHamPs Er Suac. L’acide phénique, la créoline, le lysol. Mouvement hygiénique, Bruxelles, 1890. totalement stérilisés par la créoline et le lysol en solution à 4 % en 2 heures à froid; à 50° il suflit de 30 minutes. $ 2. — Les antiseptiques associés MM. Christmas et Respaut ! ont (out récemment cherché à augmenter la puissance des antisep- tiques en les associant. Depuis plusieurs années déjà, le professeur Bouchard avait constaté que par l’intelligente association des substances em- ployées, on peut « doubler le pouvoir antiseptique, et n’'augmenter que d’un tiers l’activité toxique ? », el cela parce que « les aclions antiseptiques de chacun des composants s’addilionnent, tandis que leurs actions toxiques ne s'additionnent pas nécessairement * ». MM. Christmas et Respaut ont cherché, d'après ce principe, à constiluer des mélanges doués du maximum de pouvoir micro- bicide, ou, du moins, antiseptique, et sont arrivés ainsi à recommander d’une façon assez générale le mélange suivant : nes pepe 8 grammes. Acide salicylique........ 1 gramme. Essence de menthe........ 10 gouttes. Un gramme de ce mélange, dissous dans un demi-litre d’eau, stérilise en un quart d'heure les expectorations tuberculeuses et tue le Bacillus An- thracis, en quoi elle se montre cinq fois plus active que la solution de phénol au centième. Assurément, il est très diflicile de préconiser d'une facon générale ces divers antiseptiques, le coefficient d'action de chacun d’eux variant sui- vant le microbe qu'il est destiné à tuer ou à em- pécher d'évoluer; mais, comme, dans la pratique, on est obligé de ne recommander au publie qu'un tout peut nombre de formules, il nous a paru utile de faire connaitre les précédentes. NV. — ALIMENTATION Vins. — Aliments solides Déplätrage des vins. — La question du plätrage des vins est une de celles qui passionnent les pro- ducteurs de vins, pour ne pas dire les fabricants. Éclairé par la discussion qui a eu lieu l’année précédente à l’Académie de Médecine, et surtout par le remarquable rapport de M. Marty, le Gou- vernement a réussi à faire voter le 41 juillet 1891 une loi interdisant plus de deux grammes de sul- fate de polasse ou de soude par litre. Cest le chiffre maximum qu'avait déjà adopté FAdminis- tration de la Guerre pour ses achats. 1 CunisrMas ct REsPpaurT Du pouvoir microbicide des antiseptiques associés, in-89, 1892, 2 BoucrarD : Lecons sur les auto-inloxications, 1889. Boucuarp : Thérapeutique des maladies infectieuses 1839. L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE Il s'agissait donc pour les industriels vinicoles de ramener le vin au chiffre de plâtre toléré; on peut ÿ arriver en traitant le vin sulfaté par un mélange de tartrale de stronliane et d’acide tar- trique : il se précipite du sulfate de strontiane et le bitartrate de potasse formé reste en dissolution. La Chambre syndicale du commerce en gros des vins de Paris ayant demandé à l’Académie des Sciences de vouloir bien donner son avis sur l’em- ploi des sels de strontiane, une Commission fut nommée, dont Duclaux fut rapporteur. Il a fait re- marquer qu'ilexiste, après les manipulations, 0,20 environ de bitartratre de strontiane par litre; ce sel n'existe pas naturellement dans le vin; l'addi- tion d’un sel de strontiane constitue donc, au sens strict du mot, une falsification. Cette addition est-elle dangereuse pour le con- sommaleur? Les recherches récentes de Laborde, confirmées par une série d'observations cliniques, tendent à démontrer que les sels de strontiane chimiquement purs ne sont pas toxiques. Cepen- dant le fait que la strontiane n’est pas un cons- lituant de nos tissus et exerce même une ac- lion thérapeutique réelle, doit déjà nous mettre en garde contre son usage prolongé. Mais Laborde et les auteurs, qui l'ont suivi dans ces recherches. ont fait observer que les sels de strontiane com- merciaux sont toujours mélangés à des sels de baryte, lesquels sont très toxiques. Il est impos- sible d'espérer que les sels employés dans l’indus- trie auront la pureté réclamée; aussi Duclaux conelut-il que l’Académie doit blämer l’emploi des sels de strontiane pour le déplätrage des vins. L'Académie a adopté ces conclusions. Morue rouge. — La question de la morue roug a préoccupé depuis longtempsles hygiénistes et les bactériologistes. L'origine microbienne est incon- testable : aussi à la suite de divers rapports, la morue rouge a-t-elle été prohibée par les commis- sions de réception. Le Dantec ! qui a étudié ce sujet l’an dernier, s'élève contre cette défense. Il allègue qu'il existe deux variétés ou plutôt deux degrés de morue rouge. Dans l’une, on constate simplement un en- duit visqueux superficiel, constitué par des algues banales et le bacille rouge de Terre-Neuve. Cet enduit s’enlève par un simple brossage. Celte morue n’au- rait jamais donné lieu à des accidents, bien que la population nègre de Cayenne la consomme jour- nellement. D'autre part les injections des cultures du bacille rouge n'auraient jamais donné lieu à aucun symptôme toxique chez les animaux. Quantau deuxième degréavecodeurnauséabonde, 1 Le panrec. Annales de l'Institut Pasteur 1801, l'aspect de la chair serait telle que la consomma- tion en serait impossible. Comme le fait remar- quer Vallin !, il doit exister des phases intermé- diaires pendant lesquelles l’altération, sans être sensible à l'odorat, peut être suffisante pour amener des intoxications. Le Dantec admet que le bacille érythrogène se trouve dans l’atmosphère de Terre-Neuve; il con- seille de mélanger au sel 10 à 145 % d’hyposulfite ou de bisulfite de soude. Viandes congelées. — Avant les nouveaux tarifs douaniers les viandes congelées, surtout celles des moutons, arrivaient en grande quantité sur les marchés français et surtout sur celui de Paris. Nous ne savons ce qu'il résullera des nouveaux droits de douane mis sur ces produits. Au point de vuc de l'hygiène, les viandes con- gelées n'offrent aucun inconvénient ; il est utile néanmoins de pouvoir reconnaitre facilement quand elles ont été soumises à cette opération. Maljean donne à cet effet un procédé fort rapide et très pratique. Au moment de la décongelation, les viandes laissent suinter un liquide séreux, rou- geàtre, qui, examiné au miscroscope, montre des globules de sang décolorés, déformés, tandis que le sérum présente une teinte verdâtre. Il n'existe plus de globules normaux. Sous l'influence du froid les globules seraient atteints fortement, leur ma- lière colorante diffuserait dans le sérum, ou elle cristalliserait en petits cristaux miscroscopiques faciles à reconnaitre au microscope. VI. — HYGIÈNE MILITAIRE L'évacuatiôn des blessés et des malades En matière d'hygiène militaire une grosse ques- tion a élé agitée en ces derniers temps. Elle est relalive à l'évacuation des blessés et des malades en temps de guerre. Les transformations accom- plies depuis la campagne de 1870-1871, et même depuis la campagne russo-turque de 1876, tant sur la masse des effectifs que dans l'armement, sugeèrent aux « Services de santé militaires » la crainte de ne plus être à la hauteur des lourdes charges qui menacent de peser sur eux à l’ave- nir. Ces inquiétudes ont été exposées récemment aux délégations austro-hongroises par le grand chirurgien autrichien Billroth ?; elles ont en outre soulevé une vive discussion au Reichstag allemand *. Le Professeur Billroth a jeté une note 1 VaLLiN. Revue d'Iygiène, AS91. 2 Briirorn. Die Schrecken d, nächsten Krieges, Mili- tärsanilal, Wien med. Bl. XIV, 51 et Der Militürarzt, 18 dé- cembre 1891. 3 Discussion du Reichstag en janvier 1892, L. OLIVIER. — REVUE ANNUELLE D'HYGIÈNE pessimiste. Les balles à petits calibres qui aujour- d'hui peuvent mettre hors de combat un homme à 5.000 mètres, l'absence de la fumée, qui autre- fois masquait les combattants et enlevait une grande précision au lir,sont autant de raisons pour faire supposer que le nombre des hommes blessés pendant un court intervalle de temps, sera consi- dérablement augmenté. Il y a toutefois un cor- reclif : le faible calibre des balles, leurs vitesse de translation rendront un grand nombre de blessures peu importantes, les os pouvant être traversés même sans donner lieu à des esquilles; c’est du reste ce que l’on a pu constater dans la dernière guerre civile du Chili. Pendant la guerre de 1870-1871 l’armée allemande a eu en moyenne 2,2 °/, de tués et 12,6 °/, de blessés sur. les effectifs enga- gés. D’après les estimations de Billroth, il faudrait élever cetle proportion à 20 °/, dans la prochaine guerre. Un corps d'armée de 32.000 à 35.000 hom- mes, engagé dans une bataille, serait exposé à perdre 7.000 hommes, dont 1.200 tués et >.800 bles- sés; parmi ces derniers un tiers seulement seraient gravement atteints. Un exemple cité par le major Gand au Reichs- tag allemand esttopique. Lors de la terrible ba- taille de Gravelotte, il y eut 19.000 blessés. D’après les chiffres de Billroth, le même nombre d'hommes engagés donnerait un chiffre de 44.000 blessés. Ces données sont certainement hypothétiques: néanmoins elles méritent d’être prises en considé- ration, et dès aujourd’hui toutes les dispositions doivent être prévues pour assurer la promptitude des secours et de l'évacution. Le service de santé allemand ne partage pas les appréhensions du chirurgien autrichien sur l'insuffisance des moyens de secours. Chaque corps d'armée possède douze hôpitaux de campagne; chacun deux pouvant fournir 200 lits, et l'emploi des tentes permeltant de doubler le nombre des places, il y a en réalité 4.800 lits dans chaque corps. Le service de santé comprend 150 médecins, 300 -infirmiers et 100 brancardiers spéciaux. En acceptant les chiffres de Büllroth, — 7.000 hommes hors de combat, — on voit que chaque major aurail à s'occuper de 12 à 15 grands blessés et de 26 bles- sés moins frappés. L'administration française a pris, au sujet des secours immédiats, une excellente mesure en dis- tribuant aux hommes un pansement antiseptique, qu'ils doivent porter, non dans leur sac, mais cousu dans le vêtement. Quant à l'évacuation, les trains constitués par des wagons ordinaires, que l’on transforme immé- diatement en wagons d’ambulance à l’aide des appareils d’une grande simplicité de Bry, d'Amelin 213 ou de Bréchot, paraissent devoir répondre sufli samment aux besoins prévus. Les expériences- toutes récentes faites à ce sujet sur la ligne de Dieppe et sur celle de Saint Germain en présence d'un grand nombre d'officiers du corps de santé de réserve et de la territoriale sont concluantes. Quant aux fameux trains sanitaires que l’on voit à toutes les expositions, pouvant emporter une trentaine de blessés, ils sont, nous l’espérons, défi- nitivement abandonnés ; les sociélés particulières qui poursuivent le noble but de préparer dès aujourd'hui des secours pour les combattants de demain ont d’autres emplois plus utiles à faire de leurs ressources , toujours très insuflisantes el vile épuisées, quand l'heure de la lutte est venue. Enfin le matériel ne suffit pas : il faut aussi un personnel à la hauteur de la tâche. Malheureuse- ment l'Administration de la Guerre n’a peut-être pas assez fait, chez nous, en ces derniers temps, pour relever la situation sanitaire : le conflit entre les officiers combattants et ceux dits non combattants persiste toujours. Certains regrettent, dit-on, le temps peu reculé où le médecin-major élait com plètement sous la tutelle de l'Intendance, où, quand il s'agissait de prendre une mesure d'hy- giène, de faire une modification dans une salle d'hôpital, l'officier commandant la subdivision réunissait l’intendant, le chef du génie, quelques officiers des autres armes pour prendre une dé- cision; le médecin n'avait que voix consultative et ne signait pas le procès-verbal de la délibéra- tion. Il faudrait aussi en temps de paix utiliser, tout autrement qu’on ne l'a fait jusqu'à présent, le ser- vice militaire des étudiants en médecine : au lieu de leur apprendre à manœuvrer le Lebel ou la pompe à incendie, comme on le faisait encore récemment, on devrait leur enseigner ce qu'ils auront besoin de savoir, comme médecins mili- taires, pendant la guerre. Qu'ils sachent monter à cheval, manier le sabre et le revolver pour se défendre personnement ou réprimer le maraudage sur le champ de bataille, c’est là le seul exercice auquel il est utile de les habituer. Mais, ce qu'il importeîle plus de leur faire con- naître, c’est l'aménagement des voitures de secours, l'installation des ambulances, la nature des bles- sures les plus fréquentes, les traitements d'urgence que réclament les divers genres de blessures par les armes à feu, ete., etc. Aujourd’hui en effet que l'armée est la nation même, tous les éléments qui la composent devraient être utilisés conformément aux aptitudes acquises par chacun de nous dans la vie civile. Nous nous permettons d'appeler sur ce point la patriotique attention de nos législateurs. Louis Olivier. 21% BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Duhem (P.) Chargé de cours à la Faculté des Sciences de Lille. — Cours de Physique mathématique et de Cristallographie, Lecons professées en 1890-91 sur l'Hydrodynamique, V'Elasticité, l'Acoustique — 2? partie : les Fils et les Membranes, les Corps élastiques, l'Acoustique. Un vol. grand in-4, lithog. (prix 1% fr.) Librairie scientifique A. Hermann, 8, rue de la Sorbonne, Paris 1891. Nous avons dit, dans le n°de la Revue du 30 août 1891, tout le bien que nous pensions du premier volume de Physique mathématique que venait de faire paraître M. Duhem; le second a été récemment publié et il est digne du précédent, Ce sont foujours les méthodes de Lagrange qui, d'une facon absolue, sont adoptées; M. Duhem ne s’en sé- pare jamais, sur aucun point; c’est évidemment pour lui une question de principe, au sujet de laquelle il n’admet pas de concessions. Peut-être est-ce aller un peu loin. Et cependant il faut bien reconnaître que la tendance actuelle de la Physique mathématique est de revenir à Lagrange, que les essais qu’elle a tentés pour s’en écarter n’ont pas été heureux, que Jesefforts pourtant si intéressants qui ont été faits, comme ceux de Poisson, pour s'affranchir de cettetutelle, ont donné prise à la critique et que l'avenir semble acquis aux méthodes de la Mécanique analytique. Le volume débute par l'étude de l’équilibre des fils flexibles et des théorèmes généraux qui y correspondent; puis l’auteur aborde l’équilibre d’un fil tendu sur une surface, et termine ce sujet par l’indication rapide des recherches de Gauss sur ce point. Il arrive alors au mouvement des fils : la plus grande partie du chapitre est naturellement occupée par la question des cordes vibrantes, Nous signalons tout spé- cialement l'historique où M. Duhem expose la longue suite des recherches qui, depuis d’Alembert, Euler et D. Bernouilli, jusqu'à Lagrange, Fourier et Poisson, ont constitué cette branche capitale de la Physique mathé- matique. L'équilibre des membres flexibles est, peut-être, le chapitre de l’ouvrage qui appartient le plus en propre à l’auteur; il est ainsi conduit à l'étude des surfaces à courbure moyenne nulle et aux surfaces d’aire mi- nima ; puis il examine successivement l'équilibre d’une membrane en contact avec un fluide, et insiste sur les relations qui unissent cette théorie à celle de la capil- larité ; nous ne saurions trop recommander au lecteur de lire les pages si vraies et d’un ordre philosophique si élevé que M. Duhem a consacrées sur ce point aux tendances de beaucoup de physiciens modernes. La capillarité a donné lieu, au point de vue théorique, à des erreurs graves, à des erreurs de méthode; la ten: sion superficielle des liquides, qui n'est qu'une image, a été admise comme un principe et l’on à assi- milé la surface d’un liquide placé dans un tube capil- laire à une membrane flexible, sans se rendre compte que c’est là une traduction des résultats et non une hypothèse à faire pour les obtenir. M. Duhem termine l’étude des membranes par la théorie de leurs petits mouvements; il consacre un chapitre aux vibrations (transversales et à l'équation de M. Schwartz ; puis il applique les résultats obtenus par ce géomètre à l'étude des sons propres, à celle des signes nodales et examine enfin le cas d’une membrane vendue sur un cadre quelconque. On voit bien le plan luivi. Après les fluides qui formaient le premier tolume, sont venus les fils et les membranes; il reste à ET INDEX traiter les solides élastiques, c’est ce que fait M. Duhem dans le quatrième livre de son ouvrage. Nous ne pouvons entrer dans le détail de cette por- tion de l’Elasticité, qui, d'ailleurs, dans ses parties prin- cipales, est devenue tout à fait classique; l’établisse- mentet la discussion des équations fondamentales, puis l'équilibre des corps isotropes sont tout d’abord exposés ; en ce qui concerne l'étude des déformations qui, à elle seule, pourrait remplir un volume, l’auteur s'est montré très sobre, il n'a traité que les deux cas sui- vants : celui où la surface extérieure est soumise à une pression normale et uniformeet celui de l'allongement d’un prisme par traction. Mais ila cru devoir consacrer tout un chapitre à l’his- torique de la théorie de l'Elasticité. Il a eu raison. Aucune théorie peut-être n’a eu dans les sciences phy- siques un développement plus régulier et plus com- plet; aucune, à coup sûr, n’a joué un rôle plus impor: tant, Le volume se termine par l’Acoustique. Toute cette partie de l’ouvrage peut ètre considérée comme ins- pirée directement par le célèbre traité d’'Helhmoltz inti- tulé « Théorie physiologique de la musique ». On voit par ce résumé, forcément aride et incom- plet, à quel niveau élevé se maintiennent les lecons de M. Duhem; elles ne constituent pas seulement un exposé de l’état de la science sur les points qu’elles traitent; les méthodes sont discutées et comparées, les critiques nécessaires sont faites, les erreurs sont re- levées; ce livre de Physique mathématique est d’une hauteur de vues incontestable ; il fait le plus grand hon- neur au savant professeur de Lille, L. O 2° Sciences physiques. XWWitkowski (A.-W.). — Sur la dilatation et la compressibilité de l'air atmosphérique. Bull. Acad. Se. de Cracovie, 1891, p. 181. L'auteur a entrepris des expériences détaillées sur cette question au moyen d’un dispositif que nous ne pouvons décrire ici, mais qu'il importe de signaler à l'attention des spécialistes. : Les expériences de M. Witkowski sont comprises entre -E 4009 et — 1459, et dans cet intervalle de tem=- pératures, ce savant a opéré avec des pressions variant entre 10 et 130 atmosphères. De très nombreuses ob- servations lui ont ainsi permis de tracer dix lignes iso- thermiques pour les températures suivantes : + 100, 4 46, 0°, — 350, — 7805, — 40305, — 1309, — 1350, — 4400, — 44e. A part la température de — 35°, réalisée au moyen d’un mélange réfrigérant de glace et de chlorure de calcium, les autres températures ont été obtenues au moyen de bains de vapeurs (eau, acide carbonique, éthylène). M. Witkowski a résumé ses expériences sous forme de deux tableaux donnant les coefficients de compres- sibilité et de dilatation de l'air dans les limites des expériences. HE En outre, M. Witkowski a constaté que le minimum du produit pv a lieu pour différentes températures aux pressions suivantes : l p É p + 1000 < Atatm — 780.ù 123am 0460 79 » — 1030.5 106 » 0° 95 » — 1300 66 » — 350 115 » — 1350 57 » La courbe des pressions sous lesquelles se produit “>, BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 215 ce minimum de pression passe donc elle-même par un maximum situé entre 115 et 123 afmosphères. Si l’on construit, ainsi que l’a fait Wotkowski, une courbe en prenant pour ordonnées les valeurs des pres- sion ci-dessus, divisées par la pression critique de l'air (39 atmosphères environ), et pour abscisses les tempé- ratures ci-dessus, comptées depuis le zéro absolus et divisées par la température critique absolue de l'air (132 — — 141° C), le tracé obtenu se contond (rès sen- siblement avec le tracé unique que Wroblewski avait trouvé pour les gaz homogènes. C’est là une confir- mation très importante de cette loi de Wroblewski dont M. Natanson à donné récemment une démonstration basée sur les théories de M. Van des Waals. Ph: A. GUYE, Fischer (Emil)et Piloty (Oscar).—Sur un nouvel acide pentonique et sur les deux acides trioxy- glutariques inactifs. — Ber. d, D. chem. Gesell., t. XXIV , p. 4214 (1891). En adoptant la notation de l’auteur, Pacide trioxy- glutarique doit être représenté par la formule sui- vante : CH.O0H.CO°H | CH.0H CH.OH.CO2H Acide trioxyglutarique On peut donc l’envisager comme de l'acide tartrique dont les deux carbones asymétriques seraient reliés par un groupe CH.OH. Comme ce dernier, il doit donc exister sous quatre modifications stéréo-isomériques : deux actives, deux inactives. Ce sont ces deux dernières que MM. Fischer et Pi- loty sont parvenus à préparer en oxydant l'acide ara- bonique et l’acide xylonique. Nous n'insisterons pas sur les détails de cet intéres- sant travail, car nous serions obligés de faire usage d’une terminologie par trop spéciale. Nous nous borne- rons seulement à faire remarquer que les deux acides trioxyglutariques inactifs se distinguent par des pro- priétés chimiques caractéristiques. Ainsi que nous l’a- vons signalé à propos du travail de M. Zelinsky, l’une des deux modifications paraît peu stable, est suscep- tible de donner une lactone, tandis que l’autre, dans les mêmes conditions, échappe à cette tranformation et reste inaltérée. On peut donc conclure de ces faits que les différences de propriétés entre les deux isomères stéréo-chimiques inactifs dédoublables et non dédoublables peuvent être, dans certains cas, beaucoup plus accusés qu’on ne Pa- vait cru jusqu'à présent. Ph. À. GUYE. 8° Sciences naturelles. Patten (William). — On the origine of Vertebrate from Arachnids. (Les Vertébrés ont-ils eu pour an- cêtres des Arachnides ?) Quarterty Journal of microscop. Science, vol, XXXI, 1891. Après avoir mis en évidence le peu de fondement et la stérilité de la théorie annélidienne des Vertébrés, l’auteur s'appuie sur les caractères embryogéniques et anatomiques du Scorpion et de la Limule, pour établir l’origine arachnidienne des Vertébrés. Par de nom- breux arguments lirés des organes sensoriels et des nerfs, il s'efforce de démontrer que l’encéphale des Vertébrés se compose de treize neuromères el cor- respond au cerveau dela Limule et du Scorpion, qui est formé par l’ensemble des ganglions cérébroides et sous- æsophagiens, Le cerveau antérieur, formé de trois neu- romères,etle cerveau moyen,qui n'en comprend qu’un seul, auraient leurs homologues dans les ganglions céré- broïdes du Scorpion; par rapport au reste de l’encé- phale, ils présentent une flexion crânienne quise retrou- verait aussi dans les Arachnides. Le cerveau postérieur (comme le cerveau moyen) appartiendrait au thorax au FA LR même titre que celui du Scorpion et serait constitué par cinqneuromères; enfin quatre neuromères abdominaux, rattachés à l’encéphale, formeraient un cerveau acces- soire dans les deux groupes et, dans les deux groupes aussi, donneraient naissance aux nerfs vagues. Les homo- logies se poursuivraient jusque dans la chaîne ventrale (deux racines distinctes aux nerfs spinaux, l’inférieure avec un noyau ganglionnaire) et dans les organes des sens (l'œil médian de la Limule serait l'homologue de l'œil pinéal et sa fossette sensorielle prébuccale cor- respondrait aux yeux latéraux du Scorpion; les yeux latéraux de la Limule, qui appartiennent au troisième segment thoracique, correspondraient aux yeux laté- raux des Vertébrés, mais non à ceux du Scorpion; enfin les deux grands organes transitoires auriformes des larves de Limule persisteraient chez les Vertébrés, dont ils représenteraient l'oreille, qui appartient au qua trième segment thoracique). L'auteur admet forcément, pour passer au Vertébré, l'hypothèse de Geoffroy Saint-Hilaire sur le renverse- ment de Parthropode; il reconnait dans lPinfundibulum de l'hypophyse l’œsophage des Arachnides, et il admet que la bouche définitive des Vertébrés a pu se déve- lopper aux dépens d’un organe de succion ou de fixa- tion analogue à l'organe dorsal qui joue le même rôle chezcertains Crustacés. Ce renversement une fois admis, on retrouverait la notochorde (dont l’auteur conteste l'origine endodermique) dans l’artère spinale et la tige subchordale dans le cordon botryoïdal qui s'applique sur l'artère spinale où il donne probablement nais- sance aux globules sanguins ; quant au crâne primor- dial, il est représenté par le squelette interne, ou ster- num cartilagineux mésodermique des Arachnides, qui forme un anneau autour de la partie postérieure du cerveau et qui envoie en avant deux trabécules. Les Poissons paléozoïques fossiles du genre Pterich- thys sont considérés comme des formes intermédiaires entre les Mérostomes et les Trilobites d’une part, et les Poissons proprement dits de l’autre. Le squelette cé- phalique externe du Pterichthys ressemble à s'y mé- prendre à celui d’un Trilobite et les yeux sont situés du côté hémal, comme ceux des Arachnides, mais non comme ceux des Vertébrés. L'auteur établit ensuite les homologies du métastome des Ptérygotus, du peigne des Scorpions et des nageoires pectorales des Pterich- thys et des Poissons, puis il admet que les Mérostomes et les Trilobites nagaïent sur le dos comme les larves de Limules, ef que ce mode de natation a conduit peu à peu à celui qu'on observe chez les Poissons et par suite au renversement définitif qui caractérise le Ver- tébré. E.-L. Bouvier. Sicard (D' Henri), doyen de la Faculté des sciences de Lyon. — L'évolution sexuelle dans l'espèce hu- maine. Un vol. de 320 p. avec 94 fig. dans le texte (3 fr, 50), J.-B. Baillière et fils, 19, rue Hautefeuille Paris, 4892. Le livre que M. Sicard vient de publier dans la biblio- thèque scientifique est un des meilleurs de cette col- lection, Le sujet en est fort intéressant en lui-même, et le savant professeur de Lyon, tout en restant dans le domaine scientifique, a su rendre la lecture de son ouvrage fort attrayante. Envisageant d’abord l’origine des êtres vivants, il étudie les principaux modes de reproduction et montre comment s’est fait le passage dela génération asexuée à la génération sexuée. Après avoir exposé les phéno- mènes intimes de la fécondation et le développement embryonnaire de l'être vivant, il recherche comment s'effectue, au cours de ce développement, la différen- ciation des sexes, Cette différenciation consiste dans la transtormation de la glande génitale en ovaire ou en testicule, et chez les formes inférieures elle ne s'accompagne pas d’autreschangements ; mais, àmesure que l’organisation se perfectionne, apparaissent des caractères sexuels secondaires dont il est fort intéres- sant de suivre l’évolution en remontant l’échelle des 216 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX êtres vivants. M. Sicard éludie l'importance et le dévé- loppement de ces carac tères sexuels chez les animaux, puis il étend cette étude à l'espèce humaine, chez la- quelle les sexes se distinguent par des caractères beaucoup plus nombreux et “plus importants, puisqu'ils comportent à la fois des différences dans l’organisation physique et dans les facultés intellectuelles. Nous recommandons particulièrement la lecture des chapitres Ru aux caractères sexuels secondaires en général, et dans l’espèce humaine, aux modifications et ano- ue de la sexualité, et à la sélection sexuelle chez l’homme. « L'évolution sexuelle chez l’homme, envisagée soit dans l'espèce, soit dans Ris dit M. Sicard en terminant son livre, montre que la ‘différenciation des sexes est en rapportavec le degré de supériorité auquel il est parvenu. Cette différence iation va croissant par un procédé de sélection sexuelle qui a pour effet de déve- lopper de plus en plus les caractères sexuels secon- daires; il y a progrès quand il y a entre les sexes plus de dissemblances ». Aux dissemblances qui, chez les animaux, ne portent que sur des caractères purement physiques, s'ajoutent chez l’homme des différences psychiques et morales que chacun des sexes apprécie d'autant plus chez l’autre que son niveau intellectuel est plus élevé. L'étude anatomique et physiologique des lois qui déterminent les différences entre les deux sexes montre «qu'il est conforme à la loi naturelle que l’homme et la femme, n'ayant pas la même orga- nisation, aient chacun, dans la vie sociale comme dans l'association formée en vue de la reproduction, un rôle différent ». Je signale cette conclusion aux méditations des utopistes qui prétendent faire jouer à la femme le même rôle qu'à l’homme dans la société; en lisant l'ouvrage de M. Sicard, les personnes d'opinion moins avancée seront heureuses de reconnaitre que les études biologiques viennent confirmer un fait que la raison et le bon sens avaient découvert depuis fort longtemps. R. KOEHLER. Huxley (Th. H.). — La Place de l'homme dans la Nature, un vol. in-S° (3 fr. 50). Bailliére et fils, Paris, 1891. Nous ne faisons que signaler ce livre, malgré le grand nom de l’auteur, car il ne s’agit ici que de la réédilion d'une traduction bien connue, augmentée seulement de trois chapitres. Ces derniers sont consa- crés aux progrès de la science qui ont paru à M. Huxley confirmatifs de ses idées d'autrefois. Pour lui, il y a, au point de vue anatomique, plus de différence entre le Ouistili et le Chimpanzé, qu'entre le Chimpanzé et l'Homme; la parenté ancestrale de ces deux anthro- poides, bien qu'encore indéterminée, est certaine :les recherches ethnologiques et paléontologiques de ces vingt dernières années n’ont cessé de l’accuser. L. 0. 4° Sciences médicales. Didsbury (H.), médecin à la Fondation Isaac Peretre. Modifications à la technique des réimplantations dentaires. Dair frères, Clermont (Oise). Les modifications que le D' Didsbury à apportées au manuel opératoire des réimplantations dentaires repo- sent sur 150 cas opérés à la Fondation Péreire, de Le- vallois, depuis 1887. Partant de ce principe que plus la remise en place suit de près l’extraction, moins l'opération est doulou- reuse et plus les chances de succès sont grandes, l'au- teur décrit son procédé permettant d’e se préparer et remettre une dent en dix à douze minutes. Grâce à cette rapidité el aux soins antiseptiques SHSolES le Dr Didsbury n’a pas éprouvé un seul échec, l’âge de ses opérés variant de 6 à 57 ans, L'auteur s'élève contre lhabitude généralement adoptée de maintenir la dent opérée par des plaques, fils, capuchons et appareils en gutta-percha. Il se con- tente de la simple réimplantation sans recourir à aucun mode de contention, Une semaine après la remise en place la consolidation est suffisante pour supprimer tout soin. D' Henri HARTMANN, Max-Simon (D'P.), — Les Maladies de l'esprit. In-18 de 319 pages. Bibliothèque scientifique contem - poraine (3 fr. 50). J.-B. Baillière. Paris, 1892, M. Max-Simon a tenté de tracer un tableau d’en- semble de la pathologie mentale. Il à essayé de subs- tituer dans son exposition des cadres psychologiques aux cadres cliniques usités d'ordinaire ; il étudie suc- cessivement, en les isolant des autres ‘éléments mor- bides auxquels ils sont unis dans la réalité les troubles sensoriels, les troubles intellectuels et les troubles moteurs, Au lieu de décrire successivement la para- lysie générale, la folie des dégénérés, etc., il passe en revue les diverses formes de dé ilires, les diverses classes d’hallucinations et d’impulsions,. Il sépare ainsi, par exemple, les hallucinations du délirant chronique des autres phénomènes morbides qu'il présente, pour les rapprocher des hallucinations que l’on rencontre dans d'autr :s formes d’aliénation mentale. Il est cer- fain que c’est seulement par cette méthode d'analyse psy chologique et physiologique à la fois que la patho- logie mentale peut se transformer en une véritable science, susceptible de se formuler en lois définies, Mais c’est peut-être encore une tentative prématurée que cette substitution de la psychologie pathologique à là clinique mentale; il faudrait, en tous cas, pour la mener à bien, en même temps qu'une longue pratique des maladies mentales, une connaissance exacte et précise des résultats et des méthodes de la psycho- logie normale. (où est là, peut-être, ce qui fait, à quelques irds, défaut à M. Max-Simon. Aussi son livre con- siste-t-il EC Cu en des fragments de descrip- tions cliniques disposés suivant un plan nouveau, Les cadres mêmes qu'il a adoptés ne sont pas à l’abri de toute critique; on ne voil pas trop comment les actes « délirants » peuvent s’isoler à la fois äes instincts « délirants » et des idées délirantes, et l'expression d’« esprit délirant » est une expression vague el beau- coup trop générale; c’est une rubrique sous laquelle on pourrait classer aussi bien les hallucinations que les idées délirantes. Il faut dire que cette opposition entre le sens délirant et l'esprit délirant provient de la conception particulière que M. Max-Simon s’est formée de l'halluecination; c’est pour lui une modification de l'organe sensoriel lui-même, identique ou analogue du moins à celle qui détermine la sensation; mais dans le cas de l’hallucination, le centre cortical deviendrait le point de départ de l'excitation sensitive, et la rétine ou la peau son point d'arrivée; on ne sait {rop où elle pourrait être percue, à moins quil ne faille admettre une sorte de choc en retour de la vibration nerveuse dont il n’est point question dans le texte de l’auteur. Cette théorie n'a rien de commun, on le voit, avec la théorie soutenue par MM. Binet et Féré sur le siège des hallucinations visuelles, et M. Max-Simon nous semble commettre une erreur en les rapprochant l’une de l’autre et élever inutilement une question de prio- rité. Soutenir que c’est le même centre cortical qui entre en action pour la perception vraie et la percep- tion hallucinatoire correspondante, ce m’est pas af- firmer, tant s’en fault, l'existence d’excitations sensi- tives éfférentes. Le livre de M. Max-Simon se termine par deux chapitres consacrés aux causes el au trai- tement de la folie. Le chapitre relatif aux causes de la folie est très complet, mais un peu confus et d’allures assez peu scientifiques. L'auteur s’en lient, en ce qui concerne le traitement, à des conseils très généraux ; il considère encore la camisole de force comme une pro- tection pour le malade. Les psychologues auront, malgré les défauts de ce livre, quelque profil à le consulter ; ils y trouveront réunis, sous une forme commode, un cerlain nombre de faits intéressants. L, MARILLIER. ét ho I 5 ce Bu ACADEMIES ET SOCIETÉS SAVANTES 217 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du T mars 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — MM. À. de Saint-Ger- main et L. Lecornu : Sur l'impossibilité de certains mouvements — M. de Sparre : Sur le mouvement du pendule conique à tige. — M. P. Tacchini : Distribu- tion en latitude des phénomènes solaires observés à l'Observatoire royal du Collège romain pendant Île second semestre de 14891. — M. J, Fényi décrit divers phénomènes extraordinaires qu'il a observés sur le grand groupe de taches solaires de février 1892 20 SGENcEs PHYSIQUES. — M. Th. Moureaux signale qu’une nouvelle perturbation magnétique, moins intense toutefois que celle du 13-14 février, à été constatée à l'Observatoire du pare Saint-Maur dans la nuit du 6 au 7 mars; elle a été accompagnée d’une aurore boréale. — M. H. Wild compare la perturbation magnétique du 13-14 février, telle qu'elle a été enregistrée à l’'Obser- vatoire de Pawlowsk, aux phénomènes notés au parc Saint-Maur; la perturbation a commencé au mème moment dans les deux stations, mais elle se manifes- tait en sens contraire pour tous ies éléments, — M. Ch. V. Zenger voit, dans les perturbations atmos- phériques, magnétiques et sismiques de février 1892, une nouvelle vérification de la loi posée par lui, à savoir que tous ces phénomènes ont leur origine com- mune dans l’activité solaire et que leur période est tou- jours un multiple d'une demi-rotation solaire. — M. Gouy a trouvé, dans des expériences faites avec cer- taines dissolutions, que la loi des phénomènes électro- capillaires de M. Lippmann ne se vérifie que pour les grandes forces électro-motrices de polarisation (C. R. 1er février 1892). M. À. Berget a voulu vérifier ce fait pour les deux liquides qui s’écartent le plus de la loi, d’après M. Gouy, l’iodure de potassium à + et la potasse a £, etil a trouvé soit par la méthode même de l'électromètre capillaire, mais en évitant certaine cause d'erreur, soit par deux autres méthodes de contrôle, que la loi énoncée par M. Lippmann s'applique exacte- ment à ces liquides comme aux autres. — M. E.Bouty a pu, en la modifiant légèrement, appliquer aux diélec- triques doués d’une faible conductibilité électrolytique la méthode qui lui avait servi à mesurer les constantes diélectriques du mica à haute température. Il à déter- miné ainsi la constante diélectrique de la benzine et de l’essence de térébenthine. Pour l’eau distillée, sa con- ductibililé est trop grande eu égard à la sensibilité de l'appareil; M. Bouty a tourné la difficulté en opérant sur la glace à — 23°; si on laisse remonter la tempéra- ture, la conductibilité augmente beaucoup sans que la constante diélectrique varie sensiblement; celle ei est très considérable, comme les recherches antérieures le faisaient prévoir. — M. Ch. Soret examine théorique- ment les diverses facons dont on peut représenter la conductibilité thermique dans les corps cristallisés, — M. P. Lefebvre formule une règle pour trouver le nombre et la nature des accidents de la gamme dans un ton et un mode donnés, — M. G. Charpy : La den- sité d’une solution aqueuse dépend à la fois de deux facteurs complètement indépendants lun de l’autre, la densité du corps dissous et la contraction produite lors de la dissolution; la contraction est d'autant plus grande que le poids moléculaire du corps dissous est plus considérable, mais il n'existe pas de relation géné- rale entre la densité d’un corps solide ou liquide et son poids moléculaire. On trouvera donc, suivant les cas, des variations très différentes pour les densilés des solutions, et ces variations ne peuvent pas être uti- lisées, comme on a voulu le faire, dans l'étude de l'état des corps dissous, La contraction est un phénomène propre à l'eau : des mélanges d'alcool méthylique et amylique, de benzine et d’éther acétique ne présentent aucune contraction. —M. A. Besson, en faisant agir le gaz ammoniac sur le bromure de bore dissous dans le tétrachlorure de carbone et maintenu à 0°, a obtenu un corps solide blanc amorphe répondant à la formule B Br3, 4 Az H3; dans les mêmes conditions, l’iodure de bore donne B 15,5 AzH3, — M. C. Luedeking a obtenu la synthèse des minéraux Crocoite et Phornicochroîte, en exposant pendant plusieurs mois à l'air une solution de chromate de plomb dans la potasse dans un vase à fond plat. — M. de Forcrand examine si l’on peut étendre aux alcools d’atomicité supérieure, possédant une ou plusieurs fonctions secondaires, la théorie qu'il a donnée pour le glycol, à savoir que la valeur réelle de la fonction alcool primaire, mesurée par la chaleur dégagée par la substitution du sodium est constante et égale à 32 calories (C. R., 18 janvier). Les mesures qu'il a faites sur l'alcool isopropylique permettent cette extension, par exemple à la glycérine et à l’érythrite; l’auteur démontre que les inégalités observées ne sont qu'apparentes et s'expliquent par des combinaisons intra-moléculaires, — M. Hesse a avancé que MM. Gri- maux et Arnaud s'étaient servis dans leurs expériences sur la synthèse de la quinine d’une cupréine impure ; il se fonde sur ce fait qu'il a obtenu par la réaction de ces auteurs la transformation en diiodométhylate de quinine d'une partie seulement de la cupréine employée, MM Grimaux et Arnaud rappellent d’abord les précau- tions qu'ils ont prises pour avoir la cupréine pure; celle-ci donne environ 80 % de la quantité théorique de diiodométhylate; la quinine pure en donne la même proportion; le rendement est donc presque total, — MM. P. Th. Muller et J. Hausser ont éludié la vitesse de décomposition par l’eau du diazoïque de l'acide sul- fanilique en mesurant la quantité d'azote dégagée; ils ont trouvé que cette décomposition obéit simplement à la loi des masses actives; la constante est indépen- dante de la concentration entre certaines limites, — MM. H.et A. Malbot ont fait réagir l’iodure de capryle sur la triméthylamine en solution aqueuse, en propor- tion équimoléculaire; ils ont observé la formation de diméthyleaprylamine à chaud et la production de caprylène à froid, — M. P. Genvresse a obtenu l'acide tartrique en traitant par l'hydrogène naissant l'acide glyoxylique ; l’auteur pense que cette synthèse est plus conforme à ce qui se passe dans la nature que la syn- thèse de MM. Perkin et Duppa au moyen de l'acide bibromosuccinique. 3° SGrENCES NATURELLES. — MM. Berthelot el G. An- dré ont étudié les produits de la putréfaction du sang de bœuf conservé 130 jours à l’étuve. Voici les prinei- paux résultats de cette étude, L’unique gaz dégagé est de l’acide carbonique — les deux tiers de l'azote ontété transformés en ammoniaque —l’ammoniaque et l'acide carbonique produits sont dans le même rapport que leurs équivalents comme dans la décomposition des uréides ; — la comparaison de la composition initiale à l'ensemble des corps formés pendant la fermentation indique une augmentation de l'oxygène et de l'hydrogène, les quan- tités fixées de ces deux corps étant entre elles dans le méme rapport que les éléments de l'eau. La fermen- talion a donc été exclusivement une hydratation. — M. Ch. Contejean a constaté chez le chien, contraire- ment aux asserlions de Klemensiewiez et Heidenhain, que les glandes à pepsine de la région pylorique de l'estomac sécrètent en même temps l'acide chlorhydri- A8 ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES que.—M.B.Ségall, en faisant agir en même temps le ni- trate d'argent et l’acide osmique sur les fibres nerveu- ses du sciatique de la grenouille, a observé, entre les étranglements annulaires, des anneaux sombres inter- calaires qui semblent situés sous la gaine de Schvann. — MM. C. Sauvageau et M. Radaiïs examinent les rap- ports réciproques et la place dans la classification des genres Cladothrir et Streptothrix (Cohn) et Actinomyces (Harz); le premier est une bactériacée ; les deux autres sont des champignons hyphomycètes; ils doivent dispa raître l’un et l’autre comme genres distincts et rentrer dans le genre Oospora (Wallroth). Les auteurs ont fait cette étude à propos de deux espèces nouvelles de Streptothrie = Uospora qu'ils dédient l’une à M. Metchni- koff, l’autre à M. Guignard, — M, J. Vesque distribue, suivant ses principes de classification évolutionniste, les espèces du genre Garcinia sous genre Xanthochymus : les trois groupes formés en partant des caractères ana- tomiques concordent d'une facon remarquable avec la distribution géographique des espèces. — M. E. Ri- vière donne quelques détails sur les trois squelettes humains fossiles, découverts dans les grottes des Baoussé Roussé, près de Menton; ces squelettes appar- tiennent à la race de Cro-Magnon. Mémoires présentés : M. V. Servais adresse une note relative à la navigation aérienne, — M. Junius in- forme l’Académie qu'il fait usage depuis plus d’un an, de vases poreux en porcelaine d'amiante pour la cons- truction de ses piles Nécrologie : M, d'Abbadie, président annonce à l’Aca- démie la perte qu’elle vient de faire dans la personne de M. Jurien de la Graviere. Séance du 14 mars. 49 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Deslandres dé- crit une extraordinaire protubérance solaire qu'il a observée sur le bord oriental du soleil le 3 mars, au moment où revenait en ce point le grand groupe de taches de février; il a étudié cette protubérance avec la méthode spectrophotographique et obtenu des spectres très complets, à cause de la grande intensité du phé- nomène, et présentant des déformations curieuses en vertu du principe de M. Fizeau, —- M. A. Rateau, à propos de la communication de M, H. Resal du 22 fé- vrier, remarque que la construction d’engrenages sans frottement est impossible, : 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Aymonnet a continué ses recherches sur les maxima périodiques des spectres calorifiques (Voir C. R., 28 septembre 1891); il étudie à ce point de vue les spectres du flint, du crown et du sel gemme, S'attachant principalement à cette dernière substance, dont on connait bien le poids moléculaire à l’état cristallisé, il détermine en millièmes de y l’inter- valle de deux maxima consécutifs. Ce chiffre s'accorde bien avec l'hypothèse que les maxima du spectre ré- pondent aux vibrations fondamentales de 1, 2, 3,n rangées de molécules cubiques du sel, molécules con- sidérées comme des verges dont les extrémités sont libres, — M. Th. Moureaux signale de nouvelles per- turbations magnétiques enregistrées au parc Saint-Maur du 11 au 13 mars, — M. Lecoq de Boisbaudran à sou- mis au fractionnement par l’ammoniaque un échantil- lon de samarine préparée par M. Clève dans les meil- leures conditions; il n’a pas obtenu les séparations nettes qu'il avait espérées, mais le spectre électrique des divers produits du fractionnement a donné des ré- sultats intéressants; les raies électriques signalées an- térieurement par l’auteur ne semblent pas appartenir à la masse principale de la terre, mais la bande fluores- cente 611-622 obtenue également par lui pour beaucoup de produits samarifères par renversement de l’étincelle se retrouve dans toutes les fractions et s’accentue à me- sure qu'on s’avance vers la tête du fractionnement (terres les moins basiques); les éléments donnant res- pectivement naissance à ces deux espèces de spectres doivent donc porter des désignations distinctes. — M. Joannis décrit quelques alliages bien définis du croissant sodium, obtenus en partant du sodammonium, Pb Na BiNaë, SbNañet aussi Pb?K, obtenu en partant du potas- sammonium. —£En présence de l’inexactitude des essais par la voie sèche du minerai d’antimoine, M. Ad. Car- not a cherché une méthode par voie humide, qui con- siste en principe à dissoudre l’antimoine par l'acide chlorhydrique, à le précipiter par l’étain et à le peser à l’état métallique. — M. G. Massol a déterminé les constantes thermiques des citrates de potasse et de soude afin de comparer l'acide citrique à l'acide car- ballylique; la chaleur de formation à l’état solide des citrates de potasse et de soude est supérieure à celle des carballylates correspondants; l'augmentation ob- servée est analogue à celle que l’auteur a signalée en comparant les acides malonique et succinique avec les acides alcools correspondants (ftartronique, malique, tartrique) et doit être attribuée à l'influence de l’oxhy- drile alcoolique. —— M. Oechsner de Coninck étudie quelques réactions des trois acides amido-benzoïques isomériques, — M, G. Hinrichs montre comment la loi théorique qu'il a posée pour les températures d’é- bullition des composés organiques à formule prisma- tique s'applique aux dérivés des paraffines par substi- tution terminale, — M. A. Brochet a étudié les carbures que constituent des huiles légères obtenues par la pyrogénation prolongée du boghead et des huiles de schiste dans l'industrie du gaz comprimé; il a obtenu d'assez grandes quantités d’amylène et d'hexylène., — M. L. Vignon répond aux objections faites par M. de Chardonnet à sa méthode pour déterminer le poids spécifique de la soie; il montre que, dans ses expé- riences, l’action du vide était suffisante, puisque cette action prolongée ne faisait plus varier la densité; la méthode proposée par M. de Chardonnet comporte au contraire des causes d'erreur. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. Ranvier décrit sous le nom de branches vascula'es coniques de petits vaisseaux de communication entre les artérioles et les veinules qu'il a observées dans la membrane périæsophagienne de la grenouille; la petite base du cône est tournée du. côté de l'artère, On sait que chez les Batraciens les ca- pillaires n’ont pas leur origine dans des cellules vaso- formatrices distinctes des veines et des artères, et qu'ils se forment aux dépens de ces deux systèmes ou de l’un des deux; l'étude des branches vasculaires coniques, qui sont des pointes d’accroissement émanées des veines vers les artères, tendent à faire admettre que c’est à partir des veines que se forment les capillaires, — M. M. Arthus a repris en détail l'étude de la glycolyse dans le sang, Voici les conclusions de son travail : la glycolyse dans le sang est un phénomène de fermenta- tion chimique: le ferment glycolytique ne préexiste pas dans le sang circulant; il se forme hors de l’orga- nisme aux dépens des éléments qui se déposent dans la couche des globules blancs et semble être en rela- tion avec la vie extra-vasculaire de ces éléments; la glycolyse se produit exclusivement hors des vaisseaux comme la cogulation, avec laquelle elle présente d’im- portantes analogies. — M.J. P. Morat examine à pro- pos des travaux récents de M. Wedensky sur l’inhibition la théorie qui consiste à rapporter ce phénomène à une variation d'intensité de l’excitant, l'effet produit d’abord avec l’excitation, passant par un maximum et devenant nul pour une intensité suffisante. Ainsi il n'y aurait pas de nerfs inhibiteurs. M. Morat montre que cette théorie exige que tout effet inhibiteur soit précédé d'un effet moteur; or, en fait, il n’en est pas ainsi, — M. Buffet-Delmas décrit une anomalie du nerf grand hypoglosse observée par lui chez l’homme; ce nerf paraissait naître du pneumogastrique au cou, — M.F, Guitel étudie la formation de l’œuf chez le Gobius minutus. — MM. L. Roos et E. Thomas ont étudié les variations des matières sucrées et de l’aci- dité dans la vigre (cépage aramon) suivant les époques de la végétation. Il existe, dans les trois premiers mois de la végétation, une saccharose qui est remplacée en- suite par un mélange de sucres où domine la dextrose; | Re ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 219 l'augmentation du sucre ne correspond pas à une dimi- nution de l'acidité en valeur absolue; cette diminution s’observe plus tard, au moment où la lévulose est en progression notable dans le fruit. C’est alors que la dé- viation polarimétrique passe à gauche et augmente pro- gressivement jusqu'à la maturité, où elle est sensible- ment égale à celle du sucre interverti, — M, Bleicher a repris l'étude de la structure microscopique du mi- nerai de fer oolithique de Lorraine ; il a obtenu le sque- lette des oolithes en les traitant par les acides étendus; ces formations se sont montrées alors, examinées à de forts grossissements, avec la structure suivante : un corps central minéral ou organique, unique ou mul- tiple, entouré de couches concentriques régulières d’une substance à la fois riche en silice et en matière organique dans lesquelles on peut reconnaître des grains de sable hyalins microscopiques, des formes de bâtonnets réguliers (plus semblables à des bactéries qu'à tout autre chose). C’est dans l'épaisseur des cou- ches de cette substance que parait s'être condensé le fer. Mémoires présentés. — M. Escary : Forme sous la- quelle on peut écrire les équations différentielles du mouvement du système planétaire. — M. L. Hugo adresse une note relative à une jeune calculatrice et aux questions qu'il lui a posées. —M.F, Coudray adresse une note relative à un insecte qui attaque la vigne. Nécrologie. — M, le secrétaire perpétuel annonce à PAcadémie la perte qu’elle vient de faire dans la per- sonne de M. Léon Lalanne. L. LAPpicouE SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE MM. Klippel et Boëteau ! ont étudié par la mé- thode graphique les troubles de la respiration dans les maladies mentales et en particulier dans la paralysie générale ; leur conclusion est que les tracés respira- toires dans les principales formes d'aliénation mentale sont très différents les uns des autres ettrès différents également de ceux que l’on obtient dans la paralysie générale; une étude complète en fera sans doute un signe diagnostique important. Séance du 5 mars A propos de la note présentée le 20 février par M. Fabre-Domergue, note dans laquelle cet auteur reje- tait absolument l’idée de la présence de psorosper- mies dans les tumeurs épithéliales, M. Malassez montre que l’on ne peut légitimement être aussi caté- gorique. — M. Bataillon discute le travail récemment paru de M. Metschnikoff sur l’atrophie musculaire dans la queue des têtards ; la question est de savoir si les phagocytes qui dissocient les fibres musculaires proviennent des leucocytes comme lesoutient M. Batail- lon, ou bien dérivent du sarcoplasma avec les noyaux musculaires mis en suractivité considérable, comme l'a dit M. Metschnikoff, — M. J. Girode rapporte l’obser- vation d’un cas d'infection biliaire, pancréatique et pé- ritonéale consécutive à une cholécystite calculeuse et due au Bacterium Coli commune. — M, E. Mosny a étu- dié comparativement l’action sur le pneumocoque du sérum de lapin normal et de lapin vacciné contre l’in- fection pneumonique; dans le sérum normal, la cul- ture est abondante et rapide, mais le microorganisme perd en quelques jours sa végétabilité et sa virulence ; dans le sérum des vaccinés la culture est peu appa- rente, mais la virulence et la végétabilité se maintien- nent plus longtemps que dans aucun milieu de culture. — J. Costantin décrit la goutte, maladie du champi- gnon de couche; c’est une affection bactérienne toute superficielle, — À propos de deux turbots à face nadi- rale pigmentée, dont il présente les photographies, M. Pouchet examine les théories qui peuvent expliquer cette anomalie, — M. Beauregard signale deux échouements récents du Balænoptera musculus. — M. Th. Guilloz indique un procédé permettant de faire 4, Mémoire présenté à la séance du 27 février. l'examen binoculaire de l’image renversée du fond de l'œil avec un ophtalmoscope ordinaire, — M. D. Fré- mont présenté un dispositif d’azotimètre destiné au dosage de l’urée, la fixité de la température est assurée par un manchon plein d’eau entourant le tube gradué où se dégage le gaz. — M. V. Pachon est amené par la communication de MM. Boëteau et Kleppel sur les mo- difications de la respiration dans les maladies mentales à publier les résultats de ses recherches en cours d'exécution sur la même question, Sa conclusion est que ces modifications n’affectent pas un type fixé pour chacune des espèces pathologiques actuellement admises, mais qu'au contraire elles présentent des caractères distincts pour chacun des deux syndromes, dépression et excitation, que l’on peut rencontrer dans toutes les maladies mentales, — M, E. Laguesse a observé chez certains poissons (Labrus, Crenilabrus) une disposition vasculaire particulière, Il s’agit d'une sorte de valvule entourant le point de départ des petites artères dans les grandes, et constituée par un bourrelet cartilagineux, Séance du 12 mars. M. A. Jacquet a cherché à préciser le mécanisme des oxydations organiques par une méthode ana- logue à celles dont MM. Bunge et Schmideberg se sont servis pour déterminer les conditions de la syn- thèse de l'acide hippurique. Il a fait circuler dans des organes détachés frais, principalement dans des pou- mons, du sang contenant de l'alcool benzylique et de l'aldéhyde salicylique, substances choisies parce qu’elles ne s’oxydent pas à l'air, que leur oxydation est bien connue au point de vue chimique, et enfin que les pro- duits de cette oxydation, acide benzoïque et acide sali- cylique ne se rencontrent jamais dans l'organisme, Le sang seul n’exerce pas d'action appréciable, Si on fait circuler ces substances dans le sang au contact des tis- sus frais et de l'air, il y a oxydation intense ; on obtient le même résultat en remplacant le sang par du sérum, La viéalité des tissus, contrairement à ce que l’on pen- sait, n’est pas nécessaire, car l'oxydation se fait encore après que l’on a tué les cellules par la quinine ou le phénol ; de même, les tissus congelés conservent leurs propriétés oxydantes. Ces propriétés ne tiennent pas non plus à la structure microscopique, car les tissus hachés, coagulés par l'alcool et repris par l’eau com- muniquent à cette eau le pouvoir oxydant. La cha- leur supprime ce pouvoir. Tout se passe donc comme si l'oxydation était sous la dépendance éxclusive d’un ferment soluble. — MM. Lépine et Barral ont répété l'expérience par laquelle M. Arthus avait vu que le sang renfermé dans un troncon de la jugulaire ne détruit pas son sucre ; ils ont vu au contraire une des- truction notable, à la condition d’agiter le liquide pour maintenir les globules en contact avec le plasma. — M. Frémont reclifie sa communication de la séance précédente, en disant que l’azotimètre présenté par lui est celui de M. A, Robin, et que le manchon d'eau constitue seul une disposition nouvelle. — M, A. Pre- nant communique les observations qu'il a pu faire dans les cellules séminales de la Scolopendre relative- ment au corpuseule central de Van Beneden.— M. P. Bazy voulant vérifier expérimentalement si la vessie pouvait s’infecter par la présence de microbes en un point éloigné du corps, a fait des injections intra-veineuses des cultures du coli-bacille à des lapins et à des chiens . dont il avait lié la verge ; au bout de quelques heures, on trouve le bacille dans l'urine, et au bout de quel- que temps on obtient des lésions de la vessie, avec des reins et des uretères restés sains. — M. P. Trolard remarque que la rate, horizontale chez le fœtus humain, devient verticale chez l'adulte; il examine théoriquement le mécanisme de ce changement de po- sition. — Le même anatomiste a trouvé dans un grand nombre de cas un petit arc osseux supplémentaire du ligament atloïdo-occipital postérieur. k L. LAPIcQue. 220 ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 11 mars M. Langley a publié récemment un travail considé- rable sur la résistance de l’air. Il a fait un nombre énorme d'expériences, et les tableaux des résultats constituent une mine précieuse de renseignements. De l'ensemble de ses recherches, l’auteur croit pouvoir conclure que le problème de la navigation aérienne par un corps plus lourd que l'air est actuellement réalisable, c’est-à-dire que, avec des moteurs du poids de ceux qu'on construit actuellement, on possède dès à présent la force nécessaire pour soutenir dans l'air. lorsqu'on leur imprime des vitesses horizontales assez grandes, des corps lourds, tels que des plans inclinés plus de mille fois plus denses que l'air. C’est cette affir- mation qui a frappé M. Lauriol et l’a amené à étudier de près le mémoire de M. Langley. Il décrit l'appareil du physicien américain : le manège à enregistrement électrique de la vitesse, le fléau de balance porté par ce manège et à l’une des extrémités duquel estinstallé le plan rectangulaire sur lequel s'exerce la résistance de l’air, le dispositif employé pour mesurer les dépla- cements verticaux ethorizontaux de ce plan, Si & repré- sente l’inclinaison du plan sur l'horizon, les pressions d’après M. Langley sont régies par la loi œ 2 sin œ P Pa mi + sin? œ Ÿ mais M. Lauriol montre que, si cette formule repré- sente assez bien la moyenne de l’ensemble des expé- riences, néanmoins les écarts des expériences indivi- duelles sont assez considérables. D'autres expériences, ont eu pour but d'étudier les retards de chute de plans pesants en fonction des vitesses de rotation horizontales imprimées par le manège, ainsi que l'influence de la forme des plans, à égalité de surface et de poids. Puis M. Langley mesura les vitesses de planement pour les différentes inclinaisons, c'est-à-dire les vitesses hori- zontales à imprimer à un plan d’une obliquité donnée pour neutraliser rigoureusement son poids. Telles sont les expériences dont M. Langley a indiqué les ré- sultats sommaires dans les comptes rendus de l’Aca- démie des sciences, et d’où il se croit en droit de con- clure que le travail développé par nos moteurs actuels estsuffisantpour soutenirleur propre poids ainsi que ce- lui de tous les accessoires. Il admet pour cela qu'il suffit de produire une force d’un cheval par poids d’environ 90 kilogrammes. M. Lauriol demeure très sceptique de- vant ce résultat et en donne les raisons. D'abord, dans le problème de l'aviation, il s’agit de faire tourner non pas un manège présentant un point d'appui fixe, mais une hélice dans l’air libre, ce qui amène déjà une cer- taine perte. En second lieu, toutesles expériences de M. Langley présentent entre elles des différences trop considérables, puis certaines de ses assertions sont trop peu prouvées. Il néglige parfois des termes qu’il appelle parasites, et qui au contraire peuvent parlois devenir les termes principaux. Finalement M. Lauriol considère le résultat de M. Langley comme infiniment trop op- timiste, et il pense que la discussion des expériences de l’auteur doit plutôt conduire à un poids huit fois plus faible par cheval, — A propos de la communica- tion précédente, M. le commandant Renard signale l'ignorance absolue et à peine concevable dans laquelle se trouve M. Langley pour tout ce qui a été fait au su- jet de l'aviation en France et en Angleterre depuis un siècle, Bon nombre des résultats signalés comme nou- veaux dans la mémoire de M, Langley sont en effet connus depuis longtemps. De ce nombre est la formule citée plus haut. Quant à la conclusion générale, l’opi- nion de M. Renard est la même que celle de M. Lau- riol. Il estime nécessaire, pour résoudre le problème, de posséder des moteurs produisant un cheval par 8 ou 9 kilogrammes. — M. le D' Paquelin présente un cer- tain nombre d'appareils qu'il a perfectionnés, Tels sont d’abord l’éolipyle à régulateur étanche, l’éolipyle à ré- gulateur indépendant et le thermocautère. Son nou- veau thermocautère a l'avantage de présenter une in- candescence variable au gré de l'opérateur, de pouvoir être tenu très près du foyer, et de se rallumer après après avoir été plongé dans l’eau. M. Paquelin présente aussi des chalumeaux à essence avec flammes de différentes formes, un fer à souder maintenu à la tem- pérature voulue parun de ceschalumeaux, un autre cha- lumeau dont le foyer lumineux est constitué par un réseau de fils de platine et qui demeure incandescent au milieu de l’eau. Enfin il montre l'application de ces différents instruments au dessin sur bois, ainsi que des spécimens assez réussis obtenus par divers ama- teurs, Edgard Haunié, SOCIETE CHIMIQUE DE PARIS Séance du 26 février. M. P. Genvresse a réalisé une nouvelle synthèse de l’acide tartrique en hydrogénant l'acide glyoxilique ; CHO — COOH par la poudre de zinc et l’acide acétique, en même temps qu'il y a formation d'acide glycolique, on obtient par doublement de la molécule de l’acide CHOH — CO?H tartrique | CHOH — CO?H à celui qui donne naissance à la pinacone en par- tant de l’acétone. C'est l’acide racémique qui se forme, et non l'acide inactif, ainsi que l’a montré la détermination cristallographique de l'acide libre. — M. Haller présente un travail de M. P.Th. Müller sur l'action du carbonate de sodium, et des alcoolates alca- lins sur l'acide phtalo-cyanacétique ; CAz C—=C—C.0?C2H;; AAA CH So e avec le carbonate de sodium on obtient le sel de so- dium de l’éther monoéthylique de l'acide phtalo- cyanacétique, avec les alcoolates alcalins on obtient les éthers diéthyliques ou mixtes de ce même acide, M. Garros, en broyantde l’amiante avec de l’eau et fai- sant cuire la pâte ainsi obtenue à 1200° a obtenu une porcelaine très poreuse et laissant filtrer de grandes quantités d’eau sous de petites pressions, tout en arrê- tant facilement les micro-organismes. Il propose l’em- ploi de cette pâte pour la fabrication des filtres et des vases poreux pour les piles. — M. Friedel, présente une note de M. Istrati sur une substance cristallisée, fusible à 2489, extraite par le chloroforme du liège com- mun; la formule de cettesubstance est [C!? H17 Oi]n, — M. De Saporta adresse un mémoire sur les relations qui paraissent exister entre la densité des solutions sa- lines etle poids moléculaire du sel dissous, — MM. Hal- ler et Minguin ont obtenu en traitant le dérivé sodé du camphre cyané, par les chlorures diazoïques, les azoïques correspondants. L’acide campho-carbonique donne lieu à des réactions analogues. — M. J. A. Le Bel expose les premiers résultats de ses recherches sur l’action des moisissures sur les acides mésaconique et citraconiques. On sait que M. Van’T Hoff admet que dans l’éthylène et ses dérivés substitués, il existe une place de symétrie contenant, les deux atomes de car- bone de l’éthylène, et les quatre atomes ou groupes d’atomes reliés à ces deux carbones, S'il en est ainsi, les dérivés substitués de l’éthylène ne peuvent jamais donner lieu à des corps actifs sur la lumière polarisée, Dans le cas contraire, c’est-à-dire si le plan n'existe pas il peut y avoir un symétrique non superposable et par conséquent activité optique, — M. Le Bel a fait agir les micro-organismes sur les acides mésaconique et citraconique ; le premier n'a donné naissance qu'à des substances inactives; les produits de la fermenta- lion du second ont au contraire présenté un pouvoir rotatoire considérable; mais il n’est pas encore certain qu'il soit dù au dédoublement de l’acide citraconique. ; par un mécanisme analogue ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 224 Séance du 2 M. Osmond résume devant la Société la suite de ses recherches sur les points de récalescence des fontes et des aciers, ef montre comment varie la position de ces points avec la composition des aciers ; il fait voir que l’on peut par ce moyen étudier les transformations moléculaires et les états du carbone dans les aciers et fontes., On peut également déduire de ces indications des conséquences importantes applicables à la trempe et au recuit. Les déductions théoriques de M. Osmond ont du reste recu la consécration d’une application dans la pratique. — M. Scheurer-Kestner à étudié l'action du charbon sur le sulfate de soude à la tempé- rature des fours où se prépare le verre ; et il a reconnu que dans ces conditions il ne se produit pas d'acide sulfureux mélangé à de lPacide carbonique, mais du soufre, de l’oxyde de carbone et de l'acide carbonique ; ce résultat est tout à fait d'accord avec la quantité de charbon qu'emploient les verriers pour amener la dé- composition du sulfate de soude. — M. Scheurer- Kestner à fait de nombreuses tentatives pour rem- placer par d’autres récipients les appareils en platine, dans lesquels s’opère la dernière concentration de l'acide sulfurique. Il a remarqué que le platine n’est attaqué que par l'acide très concentré ; qu'au contraire la fonte facilement attaquée par l'acide des chambres de plomb ne l’est plus par l'acide concentré, L'auteur propose donc de faire une première concentration dans des appareils en platine, et de l’achever dans des cu- vettes en fonte. — MM. Adrian et Bougarel propo- sent un nouveau procédé industriel pour séparer directement le baryum d’un sel de strontium quelconque : ce procédé consiste à précipiter la baryte au moyen du sulfate de calcium qui ne précipite le strontium qu'après élimination complète du baryum, On se débarrasse facilement du sulfate de chaux ajouté par cristallisation fractionnée. — M. Zune montre l’usage que l’on peut faire du réfractomètre pour j’analyse des beurres et décrit les précautions à prendre pour recon- naître avec certitude par ce procédé l'addition de graisses animales ou végétales, — M. Friedel présente un appareil séparateur pour les distillations fraction- nées continues ; cet appareil a été imaginé par M. Duvillier et construit par M. Chabaud. A. ComBEs SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 18 février 1° SCIENCES PHYSIQUES. — Lord Rayleigh: Densités rela- tives de l’hydrogène et de l’oxygène. Un grand nombre d’expérimentateurs ont fait de nouvelles déterminations des densités relativesde l'hydrogène et de l'oxygène de- puis que Lord Rayleigh a trouvé, en 1888, la propor- tion 15,884, tandis que, de 1845 jusqu'en 1888, on n'a- vait publié sur ce sujet aucune observation précise, alors que le chiffre admis était 15,96, Il résulte de nombreuses expériences, faites avec ce soin qui carac- térise toutes les recherches de Lord Rayleigh, que les poids d'hydrogène et d'oxygène contenus dans un globe d’une capacité donnée ont été trouvés respectivement égaux à 0,158531 et 2,51777, le rapport des densités est donc de 15,882. Ce chiffre correspond à une pres- sion et à une température moyennes; en les rappro- chant de celui UE donne le P° Morley pour le rapport des volumes 2,0002, on obtient, pour le rapport des poids atomiques, 15,889, le résultat est probablement exact à + près. 2° SGIENCES NATURELLES. — M. communication sur la nature de la ceinture sca- pulaire et de l'arc claviculaire chez les Sauroptérygiens. Les Sauroptérygiens et les Ichthyosauriens ont été autrefois réunis dans le groupe des Nexipodes ou Ena- liosauriens; aussi a-t-on ‘admis plutôt qu'on n’a prouvé que les os qui forment la ceinture scapulaire dans ces deux ordres sont homologues. M.Seeley a repris la ques- tion en détail; il traite de la nomenclature des os de la mars Seeley, fait une ceinture scapulaire et de ceux qui composent l'arc ela- viculaire chez les Plésiosauridés et les Elasmosauridés, Il utilise ces faits pour constituer un schéma de classi- fication qui montre les stades du développement che- les Sauropté rygiens ; on ne peut juger de l'importance de ce schéma, qu'après avoir étudié le long mémoire de M. Seeley. — M.9J.-N. Langley fait une commu- nicalion sur les origines médullaires des fibres cervicales et thoraciques supérieures du sympathique. Il y ajoute quelques observations sur les ami commu- nicantes blancs et gris. Les expériences ont été faites sur des chats, des chiens et des lapins anesthésiés. On lie les nerfs cervicaux inférieurs et thoraciques supé- rieurs, on les coupe. on les excite dans le canal verté- bral et on observe les effets de l’excitation; il faut noter d’abord qu'aucun des nerfs cervicaux inférieurs ne produit les effets qu’on peut produire en excitant le thoracique supérieur ou le sympathique cervical. La pupille recoit des fibres dilatatrices des premier, deuxième et troisième thoraciques. Les fibres qui dé- terminent la rétraction de la membrane nyctitante et l'ouverture des paupières ont, chez le chien et Le lapin, la même origine que les fibres dilatatrices de la pu- pille ; mais, chez le chat, elles proviennent d’un terri loire plus étendu. Les fibres vaso-motrices de la tête naissent, chez le chat, des cinq premiers thoraciques ; chez le chien, des quatre premiers thoraciques, et pro- bablement aussi un peu du cinquième. Chez le lapin, les vaso-moteurs de l'oreille naissent des 2°, 3e, 4e, 5e, 6°, 7e et S° thoraciques. Les fibres sécrétoires de la glande sous-maxillaire, chez le chat et chez le chien, ont la même origine que les fibres vaso-motrices de la tête, Les fibres accélératrices du cœur naïssent, chez le chat, des quatre ou cinq premiers thoraciques. Il ré- sulte de la comparaison entre le chat, le chien et le lapin, que les fibres sympathiques qu’on retrouve chez tous naissent plus haut chez le chat et le chien, et en certain cas appartiennent à un plus petit nombre de nerfs rachidiens que chez le lapin. Séance du 25 février 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Norman Loc- kyer, présente une note sur la nouvelle étoile d’Au- riga. Une photographie de la région qui avoisine Nova Aurigæ, prise au laboratoire d'astronomie phy- sique de South Kensington le 23 février, a montré que l'éclat de l’étoile était inférieur à celui des étoiles de 6° grandeur, tandis qu'une photographie analogue prise le 3 février semblait indiquer qu'elle avait un éclat supérieur à celui des étoiles de 5° grandeur. Plu- sieurs photographies du spectre ont été prises et elles montrent toutes que les raies sombres sont plus ré- frangibles que les raies brillantes qui les accompa- gnent. La rapidité relative dans la Le de pe dé- duite des photographies prises les 3, 7, 13 et 22 février est d'environ 600 milles à la “none Les observations télescopiques de MM. A.Fowler et W.J.Lockyer montrent que le spectre continu deNova Aurigæ a diminué d'éclat depuis le 3 février. Les raies brillantes observées entre F et C ont les longueurs d’onde suivantes : 490,500, 6, 517,7, 531, 5, 556,3, 666, 570, 579, 589, 635, Les change- ments qui se sont produits dans la nouvelle étoile sont exactementceux qu'on aurait pu prévoir dans l'hypothèse du professeur Lockyer que les étoiles sont produites par la collision d’essaims de météores. — M. W. Hug- gins et M"° Huggins, présentent une note prélimi- naire sur Nova Aurigæ, Is ont commencé leurs obser- vations le 2 février, Ils ont noté que les raies de l’hy- drogène en C,FetG sont très brillantes. Ils ont constaté aussi le fait, observé pour la première fois par le professeur L ocky er,que les raies brillantes sont accom- pagnées par des raies sombres de leur côté le plus ré- lrangible. Une photographie du spectre de l'étoile, prise depuis le 2 février, s’étend environ jusqu'à 13200 et montre les raies de l’hydrog ène en h, H et d’autres membres de la série de l'hydrogène ultraviolet. Des raies appara issent an côté rouge de F, l’une d’entre ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES elles semble être presque dans la même position qne la raie principale du spectre de la nébuleuse. Les au- teurs disent que la photographie est couverte de raies brillantes et sombres, mais ils ne donnent pas leur position. 20 SGIENCES NATURELLES. — M. C. Williamson fait une communication sur l’organisation des plantes fossiles des couches carbonifères. (XIX® partie.) Il appelle l'attention sur la découverte qu'a faite feu le Rév. W. Vernon Harcourt d’un fragment d’une branche de Lé- pidodendron, dont la structure interne était bien conservée. Ce spécimen a été décrit et figuré pour la première fois par Witham, qui lui a donné le nom bien connu de Lepidodendron Harcourtii. Brongniart en a donné une description dans ses « Végétaux fossiles » et il a conclu qu'il provenait d’un Lycopode crypto- game. La conclusion générale à laquelle est arrivé l’auteur, relativement au L. Harcourtii, qui a été si souvent le sujet de discussions pendant ces vingt dernières années, c’est qu'il n'occupe pas une position exceptionnelle parmi les autres Lepidodendra, mais que les paléontologistes des diverses parties du monde en parlent comme si son organisation leur était fami- lière, tandis que, pour la plupart, ils se sont trompés dans leurs déterminalions, Jusqu'à présent aucun spé- cimen de cette plante, moins imparfait que celui qu'a décrit Brongniart, n'a été en la possession d'aucun observateur; aussi, bien que dansles auteurs on trouve de nombreux échantillons d’écorce, de feuilles et de fruits rapportés au Lepidodendron Harcourtü, n'y a-t:l aucune preuve que ces identifications soient justes. — M. C. B. Clarke présente une note sur les régions biologiques et les aires de tabulation. Une tentative faite pour construire une carte sur laquelle on puisse inscrire et disposer 2000 espèces de plantes a conduit l’auteur à la conclusion que les régions biologiques, qui représentent la distribution natu- relle des mammifères ou de la vie ne peuvent servir d'aires de tabulation. Il propose en conséquence un nouveau type de carte et un nouveau système de tabulation. — M.9J.C. Ewart : L'organe électrique de la raie, Séance du 3 mars SCIENCES NATURELLES. — M. J. R. S. Weldon pré- sente une note sur certaines variations corrélatives qu'il a observées chez les Crangon vulgaris. La pre- mière tentative heureuse faite pour déterminer une relation constante entre les variations de dimension présentées par un organe el celles que présentent les autres organes a été faite il y a environ trois ans par M. Galton, M. Weldon à essayé d'appliquer sa mé- thode à la mensuration comparative de quatre organes de la crevette commune. Les organes qu'il a mesurés sont : 4° la longueur totale de la carapace, mesurée suivant une ligne droite; 2° la longueur de la portion de la carapace située en arrière de l’épine gastrique ; 3° la longueur du sixième anneau abdominal, 4° la lon- sueur du telson. Les rapports que M. Weldon a trou- vés entre ces diverses longueurs semblent confirmer pleinement les conclusions de M. Galton. — M.J. S. Risien-Russell : Recherches expérimentales re- latives aux racines des nerfs qui entrent dans la for- mation du plexus brachial chez le chien. —M. J.R. Bradford fait une communication sur l'influence du rein sur le métabolisme. L'objet des recherches ex- périmentales ent reprises par l'auteur était de déter- miner plus précisément les fonctions des reins et de rechercher les troubles produits dans l’économie par les maladies de ces organes, Les expériences ont été faites sur des chiens. L'animal était placé dans une cage appropriée et nourri avec un poids connu d’ali- ments contenant une quantité d'azote également connue. On déterminait les quantités d'urine et d’urée qu'il excrétait dans ces conditions, puis on enlevait une partie considérable de lun des reins; c'est sur le milieu de l'organe que portait l'incision. Lorsque le chien était rétabli des suites de celte opération on le placait de nouveau dans la cage et on mesurait de nouveau les quantités d'urine et d’urée excrélées. On enlevait alors le second rein et l’on pesait de nouveau la nourriture et les excreta, pendant une période d’une semaine ou davantage, Au bout d’un temps variable on tue l’animal en le saignant et on dose la quantité de matières extractives azotées présente dans les tissus. Les dosages montrent queles résultats de la première opération sont insignifiants. Les effets sur l’urine sont si légers que les variations peuvent être considérées comme restant dans la limite des erreurs expérimentales, La proportion d’urine ex- crélée après la seconde opération est très considérable. Lorsqu'il ne reste plus à un chien que le quart du poids total de ses reins, il se produit invariablement une extrême hydrurie. Cette hydrurie est accompagnée, à la condition que l'appétit du chien ne s’affaiblisse pas, par une augmentation considérable de l’urée excrétée, Séance du 10 mars. SCIENCES PHYSIQUES. — M. James Thomson fait une communication sur les grands courants de cir- culation atmosphérique (Bakerian Lecture). L’au- teur a développé et complété une théorie de la circu- lation atmosphérique qui a été communiquée en 1735 par Hadley à la Société royale. Voici brièvement la théorie de M. Thomson : A l’'Equateur ou à son voisi- nage, il existe une couronne d’air qui monte en raison de sa température élevée etde la raréfaction qui enest la conséquence. Des deux côtésily a un appel d’air vers la zone de moindre pression quise trouve à sa base. De la partie supérieure de cette couronne partent dans les deux sens des courants, les uns vers le nord,lesautres vers le sud. Ils continuent d'avancer dans les régions supérieures de l'atmosphère vers les latitudes plus élevées jusqu’à ce que l’air qui les constitue, devenant plus dense par le refroidissement, ils descendent gra- duellement à des latitudes variées et constituent ainsi un courant de retour vers l’équateur dans les régions inférieures de l'atmosphère, L'air de cette vaste région de l'atmosphère, qui correspond aux latitudes élevées et moyennes et où sont comprises des portions des courants que l’on vient de décrire, arrive des régions équatoriales dont le mouvement absolu de louest à l'est pendant la rotation diurne de la terre offre une vi- tesse d'environ mille milles à l'heure. Il doit, en arri- vant dans ces nouvelles régions beaucoup plus rappro- chées de l’axe de la terre, avoir une plus grande vitesse de l’ouest à l’est que celle de la terre elle-même, située au-dessous de lui, Dans la partie centrale ou polaire de ce vaste dôme en mouvement la pression barométrique doit s’abaisser en raison de la tendance centrifuge due à la vitesse supérieure des couches atmosphériques en mouvement, Les plus basses de ces couches ont leur vilesse vers l’est retardée par leur frottement à la sur- face de la terre et en conséquence leur tendance cen- trifuge doit être moindre que celle des couches situées au-dessus d'elles dont le déplacement est plus rapide; aussi doivent-elles tendre et tendent-elles en effet à s’écouler vers la région centrale où la pression baro- métrique s’est abaissée, Il y a ainsi dans les latitudes moyennes et élevées trois courants: {°un courant prin- cipal supérieur vers le pôle; 2° un courant dérivé infé- rieur vers le pôle; 3° un courant principal situé entre les deux, qui part du pôle et qui constitue leur cou- rant de retour commun, Ces trois courants se meu- vent plus rapidement que la terre de l’ouest à l’est; le grand courant de retour qui se dirige du pôle vers l’é- quateur cesse à un certain moment de sa course de se mouvoir vers l’est plus rapidement que la terre, et pendant le reste de son trajet, jusqu’au pied de la cou- ronne équatoriale ascendante, il règne à la surface même de la terre et constitue le vent alisé del'hémis- phère dans lequel il est situé. Richard A, GréGonY, ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 923 SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 45 février 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — L’astronome royal pour l'Ecosse lit une note sur une nouvelle étoile décou- verte récemment dans la constellation du Cocher par le D' Anderson, d'Edimbourg. M. Anderson croit l'avoir vue pour la première fois le 24 janvier; ilne l’a pas re- connue comme nouvelle jusqu’à ces derniers jours, où il s'est assuré que son ascension droite ne coïncide pas avec celle de l'étoile 26 du cocher pour laquelle il lPavait prise. Quant l’astronome royal examina le spectre au commencement de ce mois, son apparence générale était celle que présentent les nouvelles étoiles après leur première apparition. Depuis, ce spectre est graduellement devenu plus continu. Il n’y a qu’une des lignes nébulaires caractéristiques, deux autres lignes coincident à peu près avec des lignes nébulaires ca- ractéristiques, mais l’une à une trop grande et l’autre une trop faible réfrangibilité de sorte que leur déplace- ment ne pourrait pas être attribué au mouvement de l'étoile, lors même que ce déplacement ne serait pas trop grand, — comme c’est le cas —, pour permettre de chercher une explication probable de ce côté. L’é- clat de l'étoile a augmenté graduellement après la pre- mière observation, puis diminué plus rapidement, et finalement il est devenu à peu près stationnaire, L'é- clat des étoiles nouvelles augmente d'ordinaire rapi- dement au début, et finalement décroit graduellement jusqu’à zéro. Le phénomène général présente dans le cas présent l’analogie avec celui d’une étoile variable comme R d'Andromède ou R du Cygne, plutôt qu'avec celui d’une nouvelle étoile qui disparaît rapidement. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Tait : Sur la relation entre l'énergie cinétique et la température dans les li- quides. Il montre comment, en considérant un cycle de Carnot (avec le diagramme ordinaire de Clapeyron) formé par la partie horizontale d’une isothermique au-dessous de la température critique, les lignes de volume constant passant par ses extrémités, et la por- tion de l’isothermique critique interceptée entre ces lignes, nous pouvons calculer la différence entre la chaleur spécifique moyenne du liquide et de la vapeur à volume constant dans l'intervalle de température donné, la vapeur partant naturellement de l'état de sa- turation à la plus basse température. Dans ce cycle, la substance — sauf dans l’état qui correspond à la partie horizontale de l'isothermique inférieure — est ou entièrement liquide ou entièrement à l’état de vapeur. Dans le cas de l'acide carbonique, il semble que la chaleur spécifique moyenne à volume constant dans les intervalles donnés de température soit plus grand à l’état liquide qu’à l’état de vapeur. A l'état li- quide (à en juger par les résultats d’Amagat) la chaleur spécifique moyenne à volume constant semble être à peu près égale à la chaleur spécifique de la vapeur à pression constante, Le Pr Tait donne aussi quelques données thermiques relatives à CO?, déduites pour la plupart des expériences d'Amagat. Elles renferment la chaleur latente de la vapeur qui tombe de 51 unités à 00, à 47,7 à 30° c(en prenant pour volume d’une livre de CO? à 0°, à une atmosphère de pression, 8 pieds cubes), 3° SCIENCES NATURELLES. — Sir W.Turner lit une note sur la petite baleine (Balaenoptera rostrata) caractérisée par une nageoire dorsale, par une large tache blanche sur la face antérieure de chaque nageoire et par une grande dilatation apparente antérieure sur la face ven- trale, laquelle se prolonge jusqu’au bout de l'extrémité antérieure. Les fanons aussi sont caractéristiques, les ex- trémités des lames sont divisées en fibres minces. L’au- teur établit une distinction entre les baleines qui se rap- prochent de la classe des dauphins etles autres baleines, relativement à l'estomac. Dans le premier groupe le pre- mier compartiment de l'estomac ne remplit pas une fonc- tion digestive; dans l’autre groupe les compartiments ont un rôle dans la digestion, Le nombre des comparti- ments varie de quatre à quatorze (baleine de Sowerby). L'estomac de la petite baleine a 5 compartiments, le premier n'a pas de fonction digestive et ressemble sous ce rapport à celui du dauphin. Le troisième comparti- ment est très petit, son existence ne se révèle extérieu- rement que par une ligne faiblement indiquée. La lar- geur des ouvertures qui font communiquer les divers compartiments diminue rapidement de l'extrémité an- térieure à l'extrémité postérieure, W. PEDDIE, Docteur de l'Université ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE. Séance du 11 février 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Adalbert Brener : « Les logarithmes des nombres complexes dans la re- présentation géométrique. » — M. Edouard Grohmam : «Sur la divisibilité des nombres.» —M,Eugen Gelcich: « Détermination de la posilion géographique d'un navire dans les cas criliques connus. » — M, Ebner : « Rela- tion entre les tourbillons et leurs causes. » 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Karl Exner : « Sur la polarisation de la lumière diffractée » (2° communica- tion). L'auteur communique une série de mesures effec- tuées sur un spectre de diffraction de seconde classe obtenu à l’aide d’un réseau de verre; tous ses nombres montrent l'exactitude de la loi du cosinus de Stockes. — M. C. Claus envoie la suite de son ouvrage : « Re- cherches faites à l’Institut zoologique de l'Université de Vienne et à la station zoologique de Trieste, » — M. O. Tumlirz à Czernowitz : « Loi simple sur la cha- leur de vaporisation des liquides, » — M.J, Lizuar : «Sur la détermination de la force pertubatrice mise en évidence par les variations du magnétisme terrestre et recherches sur la variation dont la période est de onze ans. » Beaucoup de recherches ont été faites jusqu'ici sans résultat pour expliquer les variations périodiques du magnétisme terrestre. L'auteur indique dans ce tra- vail une voie qui permet d'atteindre ce but. Les varia- tions magnétiques observées ne proviennent pas d’un changement dans l’état magnétique de la terre, mais sont la conséquence de l’action d’une force pertuba- trice; il est donc de la plus grande importance d’ap- prendre à connaître tout d’abord cette force et d’en rechercher ensuite les causes. L'auteur montre comment on pourrait déterminer l'intensité en valeur absolue ct la direction de la force, à supposer qu'on connût les positions de laiguille aimantée sous la seule influence du magnétisme terrestre. En se fondant sur ce fait que l'aiguille dans ces conditions ne doit plus présenter ni les variations. annuelles, ni les variations de onze ans, l’auteur espère réussir à trouver la force. Des quelques calculs qu'il a pu déjà faire, il résulte que cette force pertubatrice ne peut être due au ma- gnétisme du soleil, conclusion à laquelle avait été con- duits Lloyd ct Hansteen par une voie toute différente, Si l’auteur venait à pouvoir déterminer exactement cette force perturbatrice, l'étude de ses variations serait une précieuse indication pour en reconnaître les causes. Séance du 18 février. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, A. Puchta : Re- cherches sur la géométrie à plusieurs dimensions. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M, I. Klemencic : Méthode pour la détermination des radiations électromagné- tiques. La méthode de l’auteur consiste à placer un élément thermo-électrique dans le voisinage d’un fil de platine fin chauffé par les oscillations électriques et à mesurer l'élévation de température à la place de la soudure. Le fil de platine est ensuite échauffé par un courant constant et on mesure de même l'élévation de température afin de pouvoir établir une comparaison, On fit deux séries de recherches. Dans la première, l’auteur se servit des inducteurs secondaires déjà employés par lui (deux plateaux minces de laiton de 30 centimètres de long et 5 centimètres de large), et étudia l'échauffement d’un fil de platine de 2 centi- métres fixé à la moitié des inducteurs. Les observa- 224 CORRESPONDANCE tions donnèrent un dégagement de chaleur de 0,000.155 calorie par seconde, Dans le second cas, on produisit les radiations dans un seul fil de platine de 26,3 centimètres; on trouva ainsi 0,000.088 calorie par seconde, Les deux séries de recherches furent faites avec le miroir de Hertz et pour un éloignement des lignes focales de 1®44; les inducteurs primaires cor- respondent à une longueur d'onde de 66 centimètres, le Ruhmkorff était entretenu par trois accumulateurs, et l'interrupteur donnait vingt-trois ruptures à la seconde, Broys, Briscæ et Watson (Phil. Mag. 1891, n° 188, p. 1#4) ont récemment déterminé l'intensité des radiations électro- magnétiques à l’aide du thermomètre à air ils ont donné 0,000.685 calorie par seconde : leur fil avait 2 X 103 centimètres, En rapportant à l'unité de longueur la valeur trouvée par les physiciens anglais et faisant le même calcul pour la seconde série d'expériences de l’auteur, on trouve dans les deux cas un dégagement de 00, 000.033 calorie par seconde. Tou- tefois “cette concordance, eu égard à la grande diffé- rence des moyens d'observation, doit être purement accidentelle, — M. F. Emich de Gratz : 1° Préparation du bioxyde d'azote. L'auteur propose de préparer ce gaz à l’aide du mélange mercure, nitrite de sodium et acide sulfurique ; des éludes analytiques lui ont montré que le gaz ainsi préparé était rigoureusement pur. 2° Facon de se comporter du bioxy de d'azote aux températures élevées. On ne réussit à décomposer complètement le gaz en ses éléments qu'à une tempé- rature voisine du point de fusion du platine. L'appareil dontil se sert consiste en un tube scellé traversé par une spirale de platine chauffée au rouge à l’aide d'un courant. Si on fait passer le gaz dans un tube de pla- tine chauffé à blanc ou de porcelaine chauffé jusqu'à la teinte jaune, on arrive au même résultat qu'en em- ployant l'argent porté à l’incandescence (méthode de Calberla pour décomposer cet oxyde d'azote). 3° Réac- tion entre l'oxygène et le bioxyde d’azote. L'auteur arrive à cette conclusion très importante que le bioxyde d'azote rigoureusement pur et l'oxygène réagissent l'un sur l’autre, lors même qu'ils ont été desséchés dans de longs tubes d’ anhydride phosphorique. 4° Remarques sur l’action de la potasse caustique sur le bioxyde d'azote. Cette réaction, étudiée d’abord par Gay-Lus$sae, ct reprise ensuite par Russell et Lapraik, s'effectue d'autant plus rapidement que la potasse caustique con- tient moins d’eau; elle commence vers 113° et est terminée au hout de quelques heures. L'expérience de Gay-Lussac avait duré quatre mois, celle de Russell et Lapraik un peu moins d’une semaine, Le produit de la réaction était un mélange d'azote et de protoxyde d'azote, ce dernier avec la proportion d'environ 83-92 %. — M. O. Prelinger : L’acide picrique réactif des guani- dines. L'auteur décrit les picrates d’x-triphényl et de phénylguanidine ; ce sont des précipités insolubles qui peuvent êlre employés avantageusement pour re- connaitre et doser ces bases, La guanidine et la mé- thylguanidine donnent également des picrates inso- lubles, ce qui fait regarder comme très vraisemblable que l'acide picrique “soit un réactif commun à toutes les guanidines. 39 SCIENCES NATURELLES. — M, À. Obrzul : Recherches histologiques expérimentales sur l’origine des subs- tances chromogènes des leucocytes et des autres élé- ments cellulaires. — M. August von Mojsisovics : Sur une nouvelle variété de l’Acipenser ruthenus L. Emil WExR, Membre de l'Académie. CORRESPONDANCE SUR LES MINIMA D'ODEUR PERCEPTIBLES Monsieur le directeur, Permettez-moi de vous adresser une petite rectifica- ton sur un passage de l'analyse que vous avez publiée (page 133 de votre excellente Revue) d'une note à la Société de biologie concernant les minima perceptibles d'odeurs. Votre collaborateur écrit : « Quant au chiffre donné pour l'éther par centimètre cube, chiffre double de la tension de vapeur du corps à la température de l'expé- rience, il s'explique très bien, d'après M, Ch. Henri, par le fait que le sujet, qui était éthéromane, «est anes- thésié pendant l'expérience ». Le chiffre en question, (2m6r49) ne représente pas la quantité par centimètre cube, mais la quantité qui a passé successivement par un centimètre cube dans mon olfactomètre, lors de la sensation minima, Le chiffre par centimètre cube qui se déduit de celui-ci est 0697, nombre très éloigné du poids de vapeur saturant un centimètre cube, C'est à ce nombre que s'applique l'explication rapportée par votre collaborateur. Il est clair qu'aucune théorie ne pourrait justifier le premier nombre entendu dans le sens que supposait mon contradicteur et qui est contraire à ma définition, comme cela ressort sur- abondamment de la lecture de mes mémoires. (Comptes rendus, 20 avril 18M ; 22 février 1892.) Agréez….. etc. Charles HExRr. M. L. Lapicque, auquel nous avons communiqué la lettre ci-dessus, nous a adressé la réponse que voici : Mon cher directeur, La rectification que nous adresse M, Ch. Henri ne me surprend pas trop. Elle est conforme, en effet, à l'expli- cation que donne maintenant ce mathématicien du résultat contesté de ses expériences. Mais je maintiens que celle que j'ai reproduite dans le compte rendu de la Société de biologie, séance du 6 février, est bien celle donnée par M. Ch. Henri à cette séance. Je précise. Après avoir passé sous silence l'objection de M. J. Passy relative à ce chiffre d’éther, c'est sur une question de M. Regnard, qui me permettra, je pense, d'avoir ici recours à son lémoignage, que M. Ch. Henri a fait la réponse incriminée, Cette’ réponse, maintenant, il ne la trouve pas suflisante : je suis assez de cet avis, mais voici pourquoi J'avais reproduit cet argument de pré- férence à celui que M. Ch. Henri veut y substituer. Ce second argument, dont il n’a pas été question à la séance, se trouve dans le compte rendu imprimé ue le 12, en note. Voici comment il est formulé : « S'il avait lu les premières lignes de ma note du «9 février : « Le but de l'olfactomètre est de déterminer «le poids d’odeur passant SUCCESSIVEMENT (sic) par centi- « mètre cube d'air qui correspond au minimum percep- «tible.. » mon critique se serait épargné le double «ridicule de prélendre m'apprendre la densité de « vapeur de l’éther et de reprocher à un travailleur « persé sn une faute que ne commettrail pas un « collégien. En géné ir ,je préfère chercher la pensée de Pauteur dans ce qu ‘il a écrit plutôt que dans son exposition orale. Je m'en serais donc tenu à cette réfutation nou- velle ; mais comme je ne comprenais pas bien ce « pas- sant successivement » et que je ne me souvenais pas d'avoir vu cette nolion dans le mémoire cité de M. Ch. Henry, j'ai voulu, pour ma satisfaction person- nelle, chercher dans ce mémoire une explication. O stupeur ! La première phrase de la note du 9 fé- vrier 1891... c’est bien celle citée, 1] n’y a pas de doute : «Le but de lolfactomètre est de déterminer le poids d'odeur par centimètre cube d'air qui correspond au minimum perceptible. » Mais... les deux mots qui sont le fond même de l argument ne s'y trouvent pas ! J'avais cru pouvoir rendre à M. Ch. Henri le service de passer sous silence celte facon de défendre ses recherches; mais puisqu'il proteste, je suis obligé, pour ma justification, de mettre les pièces du procès sous yos yeux et sous ceux des lecteurs de la Revue, si vous croyez devoir insérer la rectification de M. Ch. Henry. L. La PICQUE. Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F, Levé, rue Cassette, 17. dés 3° ANNÉE No 15 AVRIL 1892 REVUE GÉNÉRALE ES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LA PÉNÉTRATION ET LA RÉPARTITION DU FER DANS L'ORGANISME ANIMAL Nos connaissances sur les migrations du fer à travers l'organisme animal subissent en ce moment une lransformalion profonde. Comme il arrive souvent dans les sciences expérimentales, cette question était restée pendant longtemps comme protégée par une sorte de prescripl am contre la curiosité des chercheurs. En particulier, l'action des ferrugineux et leur participation directe à la reconstitution des globules sanguins étaient, sinon pour les physiologisies, du moins pour les méde- cins, un article de foi que l’on ne songeait pas à mettre en discussion. C’est pourtant par ce côté que la question à été reprise d’abord. Puis le débat s’est élargi, et de proche en proche le pro- blème tout entier des destinées et de la répartition du fer dans l'organisme a été remis à l'étude. Ramené à ses termes les plus simples, ce pro- blème se présentait à nos prédécesseurs de la manière suivante : Les cendres de tous nos ali- ments, y compris le lait, nourriture exclusive du nouveau-né, contiennent du fer, el c'est aux dépens de ces sels de fer, d'une part, et d’une matière albu- minoïde d'autre part, que l’économie opère la synthèse de l'hémoglobine, matière colorante des globules rouges et agent essentiel du phénomène de la respiration. Lorsque, dans les cas d’anémie ou de chlorose, la richesse du sang en hémoglobine est diminuée, l'administration des préparations marliales a pour effet d'activer ce phénoméne de synthèse, par suite de l’absorption, par voie diges- tive, d’une plus grande quantité de fer. — En ce REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. qui concerne la circulation de ce métal dans l’or- ganisme, on connaissait la forte leneur en fer de la rate, à laquelle on attribuait d’ailleurs un rôle considérable dans la production des globules rouges, et qui apparaissait dès lors comme un lieu de réserve pour le fer de l'organisme. D’autre part, on savait que dans le foie la bilirubine ou matière colorante de la bile se forme aux dépens de l’hémo- globine du sang, et l’on admettait que le fer, devenu libre dans cette transformation !, est entrainé par la bile, qui contient en effet ce métal d’une manière constante, et éliminé finalement avec les excréments sous la forme de sulfure. Enfin, la présence constante de petites quantités de fer dans l'urine avail été constatée aussi, et le cycle parcouru par ce métal dans l'organisme, malgré de sérieuses lacunes, semblail donc établi au moins dans ses grandes lignes. | Voyons maintenant de quelle manière la question s’est transformée dans ces dernières années. Il L'hémoglobine des globules rougesse forme-t-elle réellement par un processus de synthèse dans lequel le fer interviendrait à l’état de sel minéral, ou, pour poser d’abord le problème sous une forme qui le rende abordable à l'expérience, peut-on saisir une relation directe entre l’ingestion des sels de fer et l'accroissement de la quantité d'hémoglobine con- ! La bilirubine ne contient pas de fer. 226 D' E. LAMBLING. — PÉNÉTRATION ET RÉPARTITION DU FER DANS L'ORGANISME ANIMAL tenue dans le sang ? De prime abord il semble que les bons effets obtenus dans le traitement de l’ané- mie par l'administration de préparations marliales de toute nature apportent à cette hypothèse l'appui d'une démonstration expérimentale aussi large et aussi multipliée qu'il est possible de la sou- haiter. Mais cette action des ferrugineux, qu'il est difficile de nier, bien qu'elle ne soit pas absolu- ment constante, nefournit pas, cela est évident, la preuve d'une participation directe du fer ingéré à la formation de l'hémoglobine et à la reconstilu- tion du globule rouge. Il se pourrait en effet que celle action ne füt qu'indirecte, et qu'il exislàl entre ces deux phénomènes une relation d'une: autre nature. Ainsi posé, le problème cesse d’être abordable par la voie de lobservation clinique. Des expériences précises sur la pénétration du fer dans l'organisme et sur ses destinées ultérieures pouvaient seules trancher le débat. La première question qui se pose ici est évidem- ment celle-ci : Les préparations ferrugineuses intro- duites dans l'estomac sont-elles absorbées ? Examinons ce premier point. Il est à remarquer tout d’abord que le choix du ferrugineux importe peu ici. En présence du suc gastrique, tous les sels de fer se transforment en chlorures, et dans l'intestin, où la réaction devient alcaline, l'oxyde de fer, qui pourrait tre précipité, se redissout à la faveur des matières organiques. Les a'buminates et peptonates de fer subissent la même série de transformations. Toutes les combinaisons de cet ordre sont caractérisées par ce fait que, traitées par l'alcool additionné d'acide chlorhy- drique, elles cèdent très rapidement à ce dissol- vant leur fer sous la forme de chlorure. Nous les comprendrons sous la rubrique générale de fer mi- néral. On a d’abord cherché à démontrer l'absorption des sels de fer introduits dans leslomac en suivant l'élimination du métal par les urines. Mais on s'est heurté ici à une difficullé grave. L’urine normale contient, en effet, d’une manière constante, de petites quantités de fer. Ce fer normal, que l’on caractérise aisément dans les cendres de Furine, ne peut être décelé dans l'urine en nature à l’aide des réactifs ordinaires et, en particulier, à l'aide du sulfure d'ammonium, bien qu'avec ce réactif on puisse encore caractériser nettement 000018 de fer d’un sel de fer ajouté à 100 d'urine et que l'urine normale en contienne parfois une quantité beaucoup plus considérable. C’est que ce fer normal est engagé ici dans une combinaison organique, analogue à l'hémaline et, par suite, indifférente à l’action des réactifs ordinaires des sels de fer. Au contraire, A. Mayer, lehmann, Quincke et d’autres observateurs indiquentqu'après l'administration de préparations martiales (lactate, cilrate, tartrate de fer, etc.), l'urine donne les réactions des sels de fer avec le sulfure d’ammo- nium, le sulfocyanate de potassium, elc., ce qui indiquerait que le sel de fer s’élimine en nature, ou plus exactement sous une forme non organique. Cette différence si remarquable entre le fer normal de l'urine et le fer provenant des ferrugineux ingérés semblait donc fournir un moyen très com- mode, permettant de constater et de suivre, à l’aide du sulfure d’ammonium, par exemple, l'éli- mination du fer médicamenteux par les urines. Malheureusement ces indications ne donnent pas une certitude suffisante. On peut, en effet, d'une part, opposer aux résullals positifs obtenus par A. Mayer, Lehmann, un grand nombre de cons- latations absolument négatives. Cest ainsi que Adolphe Becquerel, Ihring, Hamburger, n’ont pu obtenir aucune des réactions du fer dans l'urine fraiche, chez des individus bien portants ou chlo- rotiques traités par des ferrugineux divers (voy. plus loin, p. 228, la cause probable de ces diver- gences). D'autre part, il n’est pas cerlain que le fer ingéré, en admettant qu’il soit absorbé, ne puisse pas s'éliminer sous la même forme que le fer normal et par suite échapper à l’action du sulfure d’am- monium !. Des essais guantitalifs pouvaient seuls trancher la question. De tels essais ont été faits par Woro- nichin, Dietl et, plus récemment, dans de meil- leures conditions, par Hamburger ? qui se servit du sulfate ferreux. Voici le détail d’une de ses expé- riences : elle peut servir de type pour montrer la marche suivie dans ce genre de recherches. Dans une première période préparatoire de douze jours, un chien de 8 kilogrammes reçut quo- _lidiennement 300 grammes de viande contenant 15 milligrammes de fer, soit en tout 180 milli- grammes. On en retrouva par l'analyse les quan- tités suivantes : DANS AUOT) REPARER CREER CC ET Dans leMeCES EMTEC AA CARTE RER 136,3 Dans Adatbilé RE A CNE RE CAT 1,8 Enstont.- at mme tee eee 176,5 Pendant ces douze jours, l’éliminalion par les urines se maintint sensiblement au laux de 3,6 milligrammes par jour. L'animal se trouvait donc, en ce qui concerne l'absorption et l’élimina- tion du fer, en état d'équilibre physiologique. Immédiatement après, et durant une période de 1, La bibliographie relative à cette premitre partie de la question se trouve dans : Hamburger, Zeit. physiol. Chem., t. II, p. 191, 1879. — Socin, ébid., t. XV, p. 97, 1891. 2. HAMBURGER, loc. cit. 3, L'urine de deux journées ne fut pas analysée. neuf jours, on ajouta chaque jour aux 300 gram- mes de viande, 49 milligrammes de fer, sous la - forme d’une solution de sulfate ferreux. Puis, - durant quatre jours encore, l'animal continua de - recevoir ses 300 grammes de viande par jour, mais “sans addition de sel ferreux. Pendant ces treize | jours, le chien recut donc : Rer contenu dans la viande................. 195,0 milligr Fer ajouté sous la forme de sulfate ferreux... 411,0 PE OU ET Re ee nl 636,0 L'analyse en fit retrouver : PRE PRE EME ER ER ER 58,4 milligr. NIET CBS ee tes rame ser ee nel res 549,2 Ds RSR See 0,8 BIAATOUL,: S-nrme est eeeseses 608,4 Durant ces treize jours, les urines renfermèrent en moyenne par jour : 1° Pendant l'administration du sel de fer : Par jour Durant les six premiers jours... + 3,6 milligr. Durant les trois jours suivants......... Se 5,6 2 Après cessation de l’administration du sel de fer : Durant les trois premiers jours... “ 5,6 millicr. Dürantile quatrième JOUr.----.-... 3,2 On voit donc que, pendant l'administration du sulfate ferreux, l'élimination du fer par les urines est restée, durant les six premiers jours, au même taux qu'auparavant, soit à 3,6 milligrammes par jour, qu'ensuile elle s’est élevée, durant six jours, de 2 milligrammes seulement, pour retomber à peu près au chiffre normal, trois jours après la cessa- tion de l'administration du sel de fer. À aucun moment, les urines ne donnèrent la réaction du fer avec le sulfure d’ammonium. Les AM milligrammes de fer ajoutés à l'alimentation pendant une période de neuf jours ont donc amené, du côté des urines, une élimination, en plus, de 2 milli- grammes seulement par jour, pendant six jours, soit en tout de A2 milligrammes seulement. Dans une deuxième expérience, conduite de la même manière, Hamburger obtint des résultats analogues, et il crut pouvoir admettre finalement qu'il y avait eu absorption d’une portion, à la vérité très minime, du sel de fer ingéré. Ces résultats justifient-ils la conclusion de Ham- burger? Il est permis d'en douter. Si l'on réfléchit aux difficultés du dosage de très petites quantités de fer dans des liquides organiques, le surplus de fer éliminé par les urines parait bien minime, et, à ne considérer que ce côté du phénomène, la conclusion inverse, — à savoir la non-absorption du sel de fer, — semble tout aussi légitime. En réa- lité, le problème ainsi posé ne correspond qu’à un côté du phénomène. Le rein n’est, en effet, que D' E. LAMBLING. — PÉNÉTRATION ET RÉPARTITION DU FER DANS L'ORGANISME ANIMAL 227 l’une des voies — et précisément la plus médiocre — par lesquelles s’élimine le fer introduit dans l'organisme. C’est ce que l’on observe nettement lorsque, avec les précautions convenables, on intro- duit des sels de fer dans l'organisme par la voie des injections sous-cutanées ou directement dans le sang. Dans ces conditions, Jakobj a retrouvé dans les urines de 4 à 4,6 p. 100 seulement du fer injecté. C'est que les voies d'élimination de ce mé- tal sont ailleurs; elles sont du côté de la surface intestinale mème, ce qui complique singulièrement le problème; mais on va voir que, du même coup, la question des migrations du fer dans l'organisme s’est offerte à l'observation par un côté tout nou- veau. IT L'élimination du fer par le tube digestif ou par les produits de sécrélion qui s'y déversent n’a été signalée d’abord que pour la bile mais l’ex- crétion de fer par ce liquide, souvent très irré- gulière, parait être en général de médiocre im- porlance, ainsi qu'il ressort des déterminations de Bunge et Hamburger et de Dastre. D'autre part, les expériences de Buchheim et Mayer, de Novi, de Jakobj démontrent qu'après injection intra-vei- neuse de sels de fer, la proportion de fer contenue dans la bile dépasse à peine les limites physiolo- giques. L’élimination semble plus facile du côté du suc gastrique, que Bunge considère comme élant de tous les liquides digestifs le plus riche en fer. Cette élimination est d’ailleurs confirmée par la classique expérience de Claude Bernard avec le lactate de fer et le ferro-cyanure de potassium, et, dans une certaine mesure, par une observation de Gottlieb qui, après injection intra-veineuse de 145 milligrammes de fer chez un chien maintenu à jeun, retrouva dans 3ëe de liquide vomi deux et trois jours après l'injection 15 milligrammes du métal injecté. Enfin, en ce qui concerne l'intestin, un grand nombre d’observateurs, et notamment Buchheim et Mayer, Gottlieb, Jakobj, ont constaté que la muqueuse intestinale se recouvre rapide- ment d'un produit de sécrétion riche en fer, lors- qu'on injecte dans les veines une solution de ce métal. D'ailleurs, le même phénomène a été observé pour le manganèse par J. Cahn, pour le bismuth par Dalché et Villejean et par Meyer et Steinfeld. Lorsqu'on suit par l'analyse quantitative cette élimination du fer par l'intestin, on observe un phénomène des plus curieux. Très rapidement, (20 minutes) après l'injection du métal dans les veines, les urines contiennent du fer el se colorent en brun ou en noir par le sulfure d’ammonium. Mais cette réaction cesse de se produire au bout d’une ou de deux heures. À ce moment les urines ont à peine éliminé de 4-4 °/, du fer injecté. Du 298 D'E. LAMBLING. — PÉNÉTRATION ET RÉPARTITION DU FER DANS L'ORGANISME ANIMAL côté de l'intestin, l'élimination du fer commence aussi tout de suite après l'injection, et ici l’ex- crélion peut porter, dès la première heure, sur les 3-15 centièmes de fer injecté, puis elle se ralentit visiblement, et ce n'est qu'au boul d’un temps assez long (20 à 30 jours) que le surplus du métal achève de s’éliminer peu à peu par les excréments. C'est ainsi que sur 100 milligrammes de fer in- jectés sous la peau d’un chien, Gottlieb en re- trouva, au cours des 98 jours qui suivirent l'in- jection, 96,9 milligrammes dans les fèces. Ces résultats démontrent nettement que le fer intro- duit dans le sang est retenu pendant quelque temps dans l’organisme, et il est facile de démontrer que c'est surtout dans le foie que le métal s'accumule. En effet, en poussant une injection d'un sel de fer dans la jugulaire d'un chien, Jakob}; a vu, pen- dant plus de deux heures, les urines se colorer en noir sous l’action du sulfure d’ammonium. Au con- traire, quand l'injection élait poussée dans la veine mésenlérique, l'élimination du fer par les urines était terminée au bout de minules. D'autre part, l'accumulation du métal est démon- trée par l'analyse directe du tissu hépatique, rendu complètement exsangue par un lavage prolongé des vaisseaux. Dans ces conditions, Gottlieb, Jakobj, Zalesky ont constaté qu'après injection de fer dans les veines, la quantité de ce métal qui est fixée par le foie, est augmentée dans des pro- portions considérables. D’après Gottlieb, on re- trouverait dans le foie environ 56 et même 70°}, de la quantité injectée. Du reste, cetle fixation des métaux lourds par le foie semble être un fait géné- ral, puisqu'on l’a observée également pour le plomb, le cuivre, le manganèse, elc. Il est pro- bable que le fer, une fois fixé par le foie, n'est plus restitué que très lentement et à petites doses au courant sanguin, qui l'élimine surtout par la sur- face intestinale et peut-être en très minimes quan-* 45 tilés par les urines. Revenons maintenant à l'expérience de Ham- burger. Tout d'abord la faible excrétion de fer par les urines n'a plus rien qui nous surprenne, puisque ce métal, aussitôt qu'il est introduit dans le sang, est recueilli en majeure partie par le foie etqu'une pelite fraction seulement échappe à cette fixation et s'élimine aussitôt par le rein. Le départ d'un surplus de fer par les urines peu après l'in- gestion d’un ferrugineux, constitue donc un signe précieux pour la démonstration d’une absorption, à la condition, bien enlendu, que ce surplus soil sensible et qu'il dépasse les variations physiolo- giques et l'amplitude des erreurs possibles. Or, dans l'expérience de Hamburger, ce surplus a été bien faible, étant donné surtout ce fait que la mé- | | thode analytique employée n’est pas à l’abri de tout reproche. Il faut remarquer en outre que lé- liminalion de ce surplus — si l’on veut en ad- meltre la réalité — ne s’est produite qu’au sixiéme jour de l'administration du ferrugineux. L'absorp- tion n'aurait donc commencé qu'à ce moment. Ce point est important. Kobert rapporte en effet que l'administration de doses massives de fer provoque une inflammalion des muqueuses sto= macale et intestinale et qu'à ce moment le fer passe en quantité notable dans les urines. Dans des expériences sur l’absorption du manganèse, qui seront signalées plus loin, Cahn et Kobert ont surpris le même mécanisme, avec la plus grande nellelé. Ze manganèse n'apparait dans les urines que lorsque le sel «administré à commencé à irriler et à désorganiser la muqueuse. On voit que ces faits conduisent à une interprétation très naturelle des résultats de Hamburger, qui n’a noté d’ab- sorplion sensible qu'au sixième jour. Du reste, comme on l’a fait observer plus haut, cette absorp- tion reste douteuse. Dans une série d'expériences remarquablement bien conduites, Gottlieb, en suivant les effets de l'administration du carbonate ferreux chez des sujets bien portants ou malades, soumis à une alimentation constante, a constalé que dès les premiers jours la proportion de fer des urines diminuait et s’annulait même presque tota- lement, puisqu'elle revenail à son taux primitif vers le dixième jour, mais sans le dépasser jamais, méme lorsque l’adminisiralion du médicament était prolongée jusqu'au trentième jour. Cette di- minulion du fer urinaire au début a été observée d’une manière constante. Ce fait est encore inex- pliqué. Si l’on passe maintenant à l’excrétion intesli- nale, dans l'expérience de Hamburger, on peut se demander, il est vrai, si le surplus de for éliminé par les excréments n'est pas du métal absorbé, puis éliminé aussitôt par la surface intestinale. Mais celte hypo- thèse se concilie difficilement avec ce fait que le foie ne restitue que très lentement le fer qu'il a accumulé dans son tissu. Remarquons, en effet, que l'ingestion du sel ferreux a élé répartie sur neuf jours et que, dès le treizième jour, les excréments avaient reslitué plus de 80 0/0 du fer ingéré. Est-il admissible que celte masse de fer ait par- couru en si peu de temps le cycle : anlestin, foie, intestin, alors qu'après une injeclion sous-culanée de 100 milligrammes de fer, Gottlieb n’a vu se ter- miner l’excrélion intestinale du métal injecté qu'au bout du vingt-huitième jour. La majeure partie du fer retrouvé dans les excréments par Hamburger provient done bien du sulfate ferreux non absorbé, et si, réellement, il y a eu absorplion, elle n’a pu porter que sur des quantités tellement faibles de p' E. LAMBLING. — PÉNÉTRATION ET RÉPARTITION DU FER DANS L'ORGANISME ANIMAL 229 métal que l'excrélion de fer urinaire n'a pu être augmentée sensiblement. Mais sur ce point l'expé- * mence ne permet aucune conclusion certaine. + Ainsi limitée à l'absorption de traces de fer, la » question reste done ouverte; mais, s’ilest permis de k conclure, par analogie, du manganèse au fer, peut- | être pourrait-on répondre plutôt par la SERRE à » Ja question que nous nous sommes posée au début de celte étude. Le manganèse n’est pas , comme le fer, un élément normal de nos tissus, etla recherche de ce métal dans les cendres se fait avec une {rès grande précision. Or, après injection d’un sel de manganèse dans les veines, chez es lapins, J. Cahn put retrouver des quanlilés considérables de ce métal dans les urines, dans le contenu et les parois intestinales. Lorsqu'il administrait, au con- traire, le métal par le tube digestif, il ne pouvait retrouver de manganèse ni dans les urines, ni dans la muqueuse intestinale lavée. Ces expériences dé- montrent netlement la non-absorption des prépara- tions de manganèse introduites dans le tube digestif. D'après Bunge, il est très vraisemblable que les résultats de Hamburger pour les sels de fer sont à interpréter dans le mème sens que ceux de Cahn relalivement au manganèse. Ajoutons encore que l'injection de sels de fer dans les veines, si elle n’est pas conduite très len- tement, produit des accidents graves, parmi les- quels Kobert signale un abaissement considérable de la pression sanguine, des troubles dans les mouvements volontaires et divers accidents (hé- morragies, ete.) du côté du tube digestif. Or, de tels effets n’ont été obsérvés à aucun degré à la suite de l’administralion de sels de fer. Ce fait plaide done encore en faveur de la non-absorption. Pourtant Bunge fait observer judicieusement que, s’il est vrai que le foie a un pouvoir de sélection et de fixation à l'égard du fer, on pourrait s’expli- quer cette absence d'accidents toxiques en ad- mettant que le fer minéral, absorbé par l'intestin, est aussitôt recueilli par le foie et transformé par cet organe en quelque combinaison organique inoffensive. Ce serait un exemple de plus du rôle antiloxique joué par le foie. Il faudrait ici recher- cher si, après ingestion d’un sel de fer, la richesse en fer du foie est nettement augmentée. Kunkel rapporte à ce sujet que si l’on donne à une souris une alimentation riche en fer minéral, on observe que le foie, plongé dans du sulfure d’ammonium étendu, se colore en noir au bout de deux ou trois heures, tandis que le foie d'un animal témoin se colore à peine dans ces conditions. Malheureu- sement, l'essai n’est pas quantitatif, et par consé- quent sa valeurest médiocre. D'autre part, Zaleski a démontré que le foie contient des combinaisons organiques du fer d'ordre très divers, et se com- | | portant d'une manière différente avec les réactifs de ce métal, si bien que, pour une même teneur en fer, les réactions qualitatives peuvent fournir des indications très différentes. Ajoutons que dans ces expériences il faudrait tenir grandcompte de l'état physiologique des animaux mis en traitement ". Finalement, dans l'état actuel de nes connais- sances, l'absorption des sels de fer par le lube digestif intact semble peu vraisemblable ?. : Nous allons voir que peut-être ces sels favorisent indirectement l'absorption de combinaisons ferru- gineuses d’un autre ordre. IT S'il est vrai que le fer minéral n’est pas absorbé par l’inteslin, la question se pose immédiatement de déterminer la nature des matériaux auxquels l’éco- nomie emprunte, en dehors de toute médication, le fer nécessaire à l'entretien de ses globules. Bunge 3, qui, à ma connaissance, s’est préoccupé le premier de ce côté de la question, a examiné avec beaucoup de soin les combinaisons du fer dans le lait et Le jaune d'œuf. L'un et l'autre doivent con-, tenir les éléments nécessaires à la formation de l'hémoglobine, le lait comme unique aliment du nouveau-né, le jaune d'œuf comme molière pre- mière d’un animal à sang rouge. Voici quels sont les principaux résultats de cet intéressant travail : Si l'on traite des jaunes d'œufs par de l'alcool et de l'éther, on constate qu'il ne passe pas de fer dans l'extrait. Tout le fer reste dans le résidu, d’où l’on peutle retirer sous la forme d’une nucléine ferrugi- neuse, renfermant 0,29 % de fer. Cette proportion de fer paraîtra considérable, si l’on songe que l’hé- moglobine de chien ou de cheval ne contient, d’a- près de récentes analyses, que 0,23 % de ce métal et celle du poulet 0,34 %. Cette substance ne sau- rait être considérée encore comme un individu chimique bien défini; Bunge lui a donné provisoire- ment le nom d’hématonène. 1 Ces conditions physiologiques pourraient faire varier non seulement la quantité de métal absorbée, mais encore la quantité /ivée par les tissus, et spécialement par le foie. Cette fixation dépendra évidemment de l’état dans lequel se trouve cet organes de la quantité de métal qu'il a déjà emmagasi- née, etc. L'influence de ces conditions s’observe nettement pour la chaux. Chez les jeunes animaux la chaux alimentaire absorbée est fixée avec avidité par l’organisme; chez l'adulte, au contraire, elle s'élimine de nouveau très rapidement par la surface intestinale. Le même phénomène se produit probablement chez le rachitique dont l'organisme a perdu le pouvoir, #on d'absorber la chaux, mais de la fixer dans le lissu osseux. 2 Pour la bibliographie de cette partie de la question, voir: Buxar, Cours de chimie biologique, trad. par Jacquet, Paris, 1891, p. 89. — Jarkozr, Maly's Jahresb., t. XVIII, p. 145 et Arch. f. exp. Path., t. XXNIIT, p.256. — Gorrcres, Zeit. phy siol. Chem. t. XV, p. 376. Arch. exp. Path., t. XVI, p. 139. — Zaveski, Zeit. physiol. Chem., t. X, p. 453, et t. XIV, p. 274. — KowkeL, Pflügers Arch., t. L, p. 1, 1891. 3 Buxce, loc. cit., p. 92. 230 D'E. LAMBLING. — PÉNÉTRATION ET RÉPARTITION DU FER DANS L'ORGANISME ANIMAL Ilimporte de faire remarquer que, dans l’héma- togène, le fer n’est pas aussi fortement combiné que dans l’hématine, par exemple. Ainsi l'acide chlorhydrique aqueux dissout l'hématogène, puis en sépare du fer au bout d'un certain temps, et d'autant plus vite que l’acide est plus concentré. Si l'on traile une dissolution ammoniacale d'hémato- gène par une goutte de sulfure ammonique, il ne se produit tout d’abord aucun changement de cou- leur. Mais bientôt la solution verdit pour devenir, au bout de 24% heures, complètement noire et opaque. Cette décomposition est d'autant plus ra- pide que la proportion de sulfure est plus forte. Les sulfures alcalins décomposent donc peu à peu l'hé- matogène et en séparent le fer sous ta forme de sulfure de fer. Ce point est fort important. Nous y revien- drons tout à l'heure. Bunge n'a pas encore réussi à isoler l'hémato- gène du lait. Mais dès à présent ses essais lui per- mettent d’aflirmer que le lait, comme aussi la plupart de nos aliments d’origine végétale (cé- réales, légumineuses), contientle fer, non à l’état minéral, mais sous la forme de combinaisons orga- niques analogues à l’hématogène. Restait à démontrer que l’hématogène et les corps analogues sont réellement absorbés. C’est là un fait qui, à la vérité, n’est point encore établi par un nombre suffisant d'expériences, mais qui se présente avec un très grand degré de vraisem- blance. Socin, sous la direction de Bunge, a pu provoquer chez des chiens, par l’ingestion d'une grande quantité de jaunes d'œufs, l'élimination parles urines d’un surplus de fer de 7 à 12 milli- grammes. En outre, dans une expérience, la quan- tité de fer introduite avec les jaunes d'œufs étant de 180,7 milligrammes, les excréments n’en con- tenaient que 153,4 milligrammes, soit une difté- rence de 27 miliigrammes. Les urines fournirent d'autre part un surplus de 12 milligrammes de fer. Il y avait donc eu évidemment absorption d'une partie du fer apporté par les jaunes d'œufs, c’est- à-dire par l'hématogène. Un lot de souris put de même être conservé en très bon état pendant en- viron cent jours avec une nourriture constituée par du jaune d'œuf cuit mêlé d'un peu d'amidon et de cellulose exempts de fer *. L’absorption du fer organique de l'hématogène appa- rail donc comme très vraisemblable. Comment peut-on maintenant concilier les don- nées qui précèdent avec l’action thérapeutique ! Cette expérience fait partie d’une série de recherches très curieuses au point de vue des conditions générales de la nu- trition. Le lecteur francais en trouvera un exposé complet dans l'Encyclopédie chimique de M. Frémy, (T. IX, Chimie des liquides el des tissus de l'organisme, par Garnier, Lam- bling et Schlagdenhauffen. Paris, 1892, p. 142.) généralement attribuée aux ferrugineux? Le pro- blème se résume dans les trois propositions sui- vantes, qui se présentent avec un égal degré de vraisemblance et qu'il s’agit de concilier : 1° L'observation clinique semble démontrer que l'administration des sels de fer active parfois la formation de l'hémoglobine chez les chlorotiques ; 2° Les sels de fer (fer minéral) ne sont pas absor- bés par le tube digestif; 3° Nos aliments ordinaires contiennent le fer sous la forme de combinaisons organiques com- plexes. Ce fer organique est absorbable. Voici comment on peut, d’après Bunge, concilier ces trois propositions : l'hypothèse la plus plau- sible consiste à admettre que les préparations de fer protègent le fer organique de nos aliments contre certaines actions décomposantes et lui per- mettent ainsi d’être absorbé. On a dit plus haut que les sulfures alcalins sé- parent peu & peu, sous la forme de sulfure, le fer organique de l'hématogène et des combinaisons analogues. Or, de tels sulfures peuvent prendre naissance dans le tube digestif; mais leur action nuisible sera en grande partie annibhilée, si ces sulfures rencontrent une quantité suffisante de fer minéral avec lequel ils entrent aussitôt en réaction pour former du sulfure de fer. On sait d'autre part que la production de sulfures alcalins, faible à l'état normal, s'exagère dans le cas de troubles di- gestifs et que ce dernier symptôme est constant chez les chlorotiques. Chez ces malades, la sécré- tion gastrique est notablement ralentie, et le sue gastrique est devenu impuissant à détruire par son acide libre les micro-organismes qui pullulent dans nos aliments. Ceux-ci peuvent ainsi gagner l'intestin où s’établissent alors, à la faveur de la réaction neutre ou alcaline, des fermentations anormales. Une des plus fréquentes est la fermentation bu- tyrique qui s’accomplit avec production d’hydro- gène naissant, c'est-à-dire s'accompagne de phé- nomènes de réduction très puissants, capables de séparer sous la forme d'hydrogène sulfuré, et par conséquent de sulfures, le soufre contenu dans nos aliments. On peut citer à l’appui de cette manière de voir ce fait signalé par Zander,à savoir que l'acide chlorhy- drique étendu semble être parfois, dans les cas de chlorose, un agent thérapeutique plus efficace que le fer. On restitue ainsi au suc gastrique son pou- voir antiseptique normal. Il est facile enfin de se rendre compte que des quantités bien minimes de fer doivent suflire pour couvrir les pertes en fer qu'a pu subir l'économie, et cependant, d'après la plupart des médecins, les ferrugineux n'agi- raient bien qu’à doses massives. C’est qu'il faut D: E. LAMBLING. — PÉNÉTRATION ET RÉPARTITION DU FER DANS L'ORGANISME ANIMAL 9231 des quantités considérables de fer pour rendre inoffensifs tous les sulfures alcalins de l'intestin et garantir contre leur action le fer organique de nos aliments. Il est possible aussi que les préparalions mar- tiales favorisent l'absorption des aliments orga- niques, et conséquemment du fer organique, par l'action excitante qu’elles exercent sur la muqueuse intestinale, et qu’elles interviennent donc à peu près comme la bile dans l'absorption des corps gras. Enfin, P. Marfori ! a récemment émis l’hypo- thèse, un peu risquée, que le fer minéral pourrait bien être transformé dans l'intestin, au contact des matières albuminoïdes, en une combinaison orga- nique analogue à l’hématogène. Partant de cette hypothèse, cet auteur s’est appliqué à préparer par l’action d’un sel de fer sur une alcali-albumine en solution ammoniacale une combinaison « orga- nique » du fer. Le corps qu’il a obtenu ainsi con- tient une quantité de fer très sensiblement cons- tante (0, 70 °/,)et se comporte vis-à-vis du liquide de Bunge (solution alcoolique aqueuse d'acide chlorhydrique) et du sulfure d’ammonium, de la mème manière que l’hémalogène. Lorsqu'on la fait ingérer à des chiens dont le tube digestif a élé au préalable vidé autant que possible, on constate que 55 ?/, environ du fer ingéré (en valeur absolue de 37 à 96 milligr.) ne se retrouvent plus dans les excréments. Enfin, après injection de cette combi- naison dans les veines, les urines ne donnent au- cune réaction avec le sulfure d'’ammonium. La tentative est intéressante et mérite d’être poursuivie. IV La facilité relative avec laquelle lessulfures alca- lins de l'intestin décomposent au bout d’un cer- tain temps l’hématogène et les combinaisons ana- logues, avec production de sulfure de fer non absorbable, conduit à cette conclusion que, même à l’état normal, la résorplion des combinaisons organiques ferrugineuses contenues dans nos ali- ments doit être soumise à certaines pertes, à un certain aléa. En se plaçant à un point de vue téléo- logique, on pouvait donc s'attendre à trouver le lait, cet unique aliment du nouveau-né — c’est-à- dire d’un organisme en train d'augmenter rapide- ment la masse de son sang — largement pourvu en fer. Bunge a montré qu’il n’en est rien, et cette constatation l’a conduit, lui et d’autres observa- teurs à sa suile, à des résultats du volus haut intérêt. En faisant l'analyse des cendres du lait de chienne et des cendres fournies par l'incinération ? Manxrori, Zeit. exp. Path., t. XXII, p. 212, 1891. totale de l’un des petits, sacrifié aussitôt après sa naissance, Bunge a constaté à plusieurs reprises la concordance remarquable des deux ordres de ré- sultats, en ce qui concerne les éléments habituels des cendres (potasse, soude, chaux, acide phos- phorique, etc.). Dans les cendres du lait, la rela- tion en poids des divers matériaux est très sensi- blement celle que l’on observe pour les cendres de l'organisme qui va se développer aux dépens de ce lait. Le fer seul fait exception : {a teneur en fer des cendres du lait est six fois plus faible que celle des cendres du nouveau-né. Comme il semble que le nouveau-né ne peut trouver que dans le lait tout le fer qui lui est nécessaire, il faudrait done conclure que tous les autres éléments minéraux, potasse, soude, chaux, ete., lui sont fournis en quantité six fois trop forte par rapport à la quantité de fer offerle en même temps. On aboutit donc à celte conclusion déconcertante qu'un sixième seule- ment des éléments autres que le fer serait utilisé ; les cinq autres sixièmes seraient sécrélés en pure perte. Évidemment une telle contradiction ne peut être qu'apparente. Quelle que soit la valeur de ce raisonnement téléologique, et bien qu'il faille en biologie se méfier beaucoup de ce genre de déductions, il faut convenir que les faits à la découverte desquels Bunge a été ainsi conduit sont du plus haut intérêt. Il a montré en effet, avec Zaleski, que lenouveau-né possède au moment de la naissance une provision de fer qu'il utilise au fur et à mesure qu'il se développe. Les analyses suivantes démontrent en effet clai- ment que l’organisme est relativement d'autant plus riche en fer qu’on se rapproche davantage du moment de la naissance. Voici les données que Bunge ‘a réunies à cesujet pour le lapin etle cochon d'Inde. La comparaison des deux séries de résul- tats est des plus instructives : LAPINS COBAYES Poids de fer FRS ETS Poids de fer pour l00gr. pour 100 gr. Age de poids vif Age de poids vif l'heure 18,2 milligr. 6 heures 6,0 milligr. jour. -..15:9 1 jour 1/2 5, 4 jours. (20) 3 jours DT 3 T,S CPE Ur an 8,5 Ge A,4 T — 6,9 15 — 4,% Tres L 29 4,4 13 — 4,5 25, — 4,5 17 4,3 53— 02 22 — 4,3 24 — 3,2 24 — 3,4 30 — 4,5 4l — 4,2 46 - 4,1 74 — 4,6 1 Buxcc. Zeit. physiol. Chem., t. XVI, p. 117, 1892 232 D' E. LAMBLING. — PÉNÉTRATION ET RÉPARTITION DU FER DANS L'ORGANISME ANIMAL Ainsi que Bunge s'en est assuré par des examens réitérés du contenu stomacal, les jeunes de lapin se nourissent exclusivement du lait de la mère pendant les deux premières semaines. Au milieu de la troisième semaine, ilscommencent à ingérer, avec le lait, quelquesaliments végétaux, et, à partir de la quatrième semaine, on constate que l’esto- mac ne renferme plus guère que des substances végétales, Or, la quatrième semaine marque pré- cisément l’époque où la réserve de fer que possé- dait l'organisme est descendue à son minimum (chiffres gras du tableau). À mesure que l’animal absorbe des aliments végétaux riches en fer !, la teneur en fer de l'organisme remonte de nouveau. Les cobayes au contraire consomment dès le | premier jour, avec le lait de la mère, une certaine quantité d'aliments végétaux, et les jours suivants le lait ne tient plus dans leur alimentation qu’une place secondaire. Corrélativement on constate que ces animaux ne possèdent au moment de la nais- sance qu'une réserve en fer médiocre, comme le montre clairement le tableau qui précède. Si l’on étudie chez le lapin les variations, non plus de la quantité relative, mais du poids absolu de fer que renferme l'organisme, on constate que ce poids ne varie que très peu jusqu’au vingt-qua- trième jour environ, c'est-à-dire pendant tout le temps que dure l'alimentation lactée. Or, pendant cette période, le poids de l'animal est à peu près sextuplé. Aussi voyons-nous la quantité relative de fer, c’est-à-dire le poids de fer pour 100 grammes de poids vif tomber au sixième de sa valeur primitive. C’est à ce moment que la réserve de fer apportée par l’animal est épuisée.,ou pour mieux dire ulilisée tout entière, et que l'on voit eommencer l’ingestion d'aliments végélaux, riches en fer. En même temps l'analyse montre que la teneur en fer de l’organisme et le poids du corps augmentent maintenant parallèlement; d’où il résulte que la richesse relative en fer reste constante,comme le montrent les derniers chiffres du tableau ?. ! Le lait est, en eflet, bien moins riche en fer que la plupart des autres aliments. Voici quelques chiffres extraits du tableau que donne Bunge à ce sujet (Zeif. physiol. Chem., t. XVI, p. 174, 1892). On trouve pour 100 gr. de substance sèche : Dansiletirese ce Meter 1,8 milligr. de fer — le lait de vache. ....... 2,3 — Je lait de femme...... . 2,3—3, MIE TOMENt ee eee 5,9 — Jes lentilles........ ce LEE) — Je jaune d'œuf.......... 40,4 —23,0 —lestépinard serrer. 92,1 — 39,1 2 Il convient de signaler ici la conclusion pratique qui ressort des travaux si intéressants de Bunge. Sitôt que la période de l'allaitement est terminée, le lait doit cesser de pré- dominer dans l'alimentation du nouveau-né, caril esthbeaucoup trop pauvre en fer. D’autres éléments plus riches en fer, et en particulier le jaune d’œuf, doivent faire le fond de son Cette accumulation de fer chez le no wveau-né se fait, au moins en partie, dans le foie, ainsi que l'ont démontré nettement Zalesky, Lapicque, Krüger 1. Voici quelques-uns des chiffres de Lapicque. Ils sont relatifs au foie du lapin, l'organe élant com- plètement débarrassé de sang par lavage des vais- sCaux. Are Fer dans 100 gr. de foie lavé 1MMours 776 0,2 gr: DIRES 0,14 SUNDISE AL 0,0%5 Vers 0,035 RUPE 0,040 Ces résultats sont entièrement confirmés par les recherches de Krüger, qui a déterminé la richesse en fer du foie chez l'embryon de veau, chez le jeune veau jusqu'à la huitième et dixième semaine, chez le bœuf et la vache. Ainsi, pendant les quatre pre- mières semaines, la quantité de fer pour 100 gram- mes de foie à l’élat sec tombe de 180 à 32 mili- grammes, el n’est plus que de 2% milligrammes pour le bœuf. Il est possible que d’autres organes encore soient ainsi pourvus au moment de la naissance d’une réserve de fer. Quoi qu'il en soil, on comprend que, grace à celte réserve qui lui est ainsi assurée par la voie placentaire, et par conséquent sans aucun aléa, le nouveau-né se trouve en mesure de parer à l’accroissement très rapide de la masse de ses globules, sans qu’il soit exposé à souffrir à cet égard de l'insuffisance ou de l’irrégularité possible de l'apport du fer par la voie digestive. La question se pose encore de déterminer à quel moment l'organisme maternel prépare celte réserve de fer que le nouveau-né doit emporter avec lui. Test douteux, d’après Bunge, qu’une quantité aussi considérable de fer soit assimilée en surplus par la mère pendant le temps relativement court de la grossesse. Il est plus vraisemblable, ajoute le même auteur, que longtemps déjà avant la conception cetle réserve de fer se prépare lentement dans un organe quel- conque. On s’expliquerait ainsi pourquoi la chlorose est plus fréquente chez la femme, et pourquoi elle apparait plus souvent à l'époque de la puberté. Il est probable que c'est dans la rate qu'a lieu cette accu- mulation. Déjà Lapicque avait signalé ce fait, que chez le chien nouveau-né la rate est extrèmement pauvre en fer, qu'elle est plus riche au contraire chez l'animal plus àgé. Krüger rapporte d'autre part que la rate contient environ cinq fois plus de alimeutation. La même remarque s'applique à l’alimentation des adultes anémiques. (Bunge, loc. cit. p. 179.) 1 Lapicque, Comples rendus de la Soc. de biologie, 1889, p. 510, — Krücer Zeil. f. Biol. nouv. sér. t. XI, p. 439, 1890. A. DELEBECQUE. — L'ÉTUDE DES LACS DANS LES ALPES ET LE JURA FRANCAIS 933 fer chez la vache que chez le bœuf. Voici quelques- uns de ses résultats ; Fer pour 100 gr. de tissu splénique Ave lavé et sec Veaux d’une semaine (20 analyses)........ 0,0567 gr. Veaux de 8-10 semaines (1 analyses)...... 0,0460 BIS SManalyses) Eee eee 0,4679 Vaches pleines (41 analyses).............. 0,436% Vaches non pleines (6 analyses).......... 2,1765 Vache ayant vélé 3 semaines avant (1 anal.). 0,8161 Ces résultats remarquables sont une confirma- tion brillante des prévisions théoriques de Bunge. Tel est l’état actuel de nos connaissances sur la L'ÉTUDE DES LACS DANS LES Les lacs français étaient, il y a quelques années, très mal connus. Les cartes d'état-major ne les représentaient que comme des taches blanches; leur relief et leur profondeur étaient, à peu d'ex- | ceptions près, totalement ignorés. M. Thoulet, le savant océanographe, a, le pre- mier en France, commencé d’une façon sérieuse l'étude des lacs. Il a sondé ceux des Vosges, et les premiers résultats de ses recherchesont paru dans les Comptes rendus de l’Académie des Sciences !. En même temps, M. Emile Belloc explorait les lacs des Pyrénées ?. J'ai fait des études analogues sur les grands lacs de Savoie et, gràce à une mission du Ministère des Travaux publics, gràce aussi à l’excellent concours de deux de mes agents, MM. Garcin et Magnin, j'ai sondé d’une facon complète les lacs Léman (par- tie francaise) *, du Bourget et d'Annecy (ce dernier lac a été sondé en collaboration avec M. Legay, in- génieur des Ponts et Chaussées). J'ai continué ces recherches sur d’autres lacs plus petits, mais très intéressants, le lac d'Aiguebelelte (Savoie), le lac de Paladru (Isère), les lacs de Saint-Point, de Re- moray, des Brenels (Doubs), les lacs üe Nantua, de Sylans, Genin (Ain). Je parlerai d'abord des procédés employés pour exécuter ces sondages, je décrirai ensuite sommai- rement les caractères généraux des lacs, je m'é- tendrai un peu plus en détail sur la forme et le re- | lief des plus importants d’entre eux ;je terminerai en disant quelques mots des principales recherches scientifiques que la connaissance topographique des lacs permet d'entreprendre. 1 J. Trourer, Comples rendus, CX, p. 56 et suiv. (1891). 2 Becoc, Le lac d’O6, 1890. Ernest Leroux, éditeur. 3 La partie suisse a été sondée par M. Hœrnlimann et par M. Pictet,. REVUE GÉNERALE DES SCIENCES, 1592, pénétration du fer dans l’organisme et sa réparti- tion dans les tissus. Sans doute, le cycle parcouru par ce métal est encore loin d’être connu dans toutes ses parties. Mais combien nos connaissances à ce sujet se sont transformées et étendues! Posée d'abord sur le terrain de la pharmacologie pure, puis subitement agrandie et renouvelée par les travaux de physiologie qu’elle a suscités, cette question des mutations du fer se trouve aujourd’hui intimement associée au problème de la nulrition générale, dont elle constitue l’un des chapitres les plus intéressants et les plus suggestifs. D' E. Lambling, Professeur à la Faculté de Médecine de Lille. ALPES ET LE JURA FRANÇAIS I. — PROCÉDÉS DE SONDAGES. Le problème revient à déterminer à la fois la position exacte, par rapport à des repères connus, d'un certain nombre de points du lac et la profon- deur en ces points. Détermination de la position des points. — On fait une petite triangulation autour du lac, en s’aidant aulant que possible des points lrigonométriques de l'état-major, après avoir vérifié leur exactitude. On reporte sur une planchette les sommets de celle triangulation à l'échelle à laquelle on dé- sire opérer, el lon à ainsi un canevas dans lequel on intercale, par les procédés topographiques or- dinaires, autant de points nouveaux que l’on veut. On détermine, sur la planchetie, un certain nombre de profils suivant lesquels le bateau son- deur doit se déplacer. Ce bateau est muni d'un mat vertical de 5 à 7 mètres de hauteur, divisé en décimètires. Un opérateur installe la planchette sur la rive, à l’origine de l’un des profils, et l’oriente, à l’aide d’une alidade à lunette, en se recoupant sur les points déjà déterminés. L’alidade est ensuite pla- cée le long du profil, de sorte que l'opérateur peut, à l’aide de signaux, diriger constamment le bateau suivant ce profil; de plus, comme la lunette est munie de fils stadimétriques, il peut lire, à chaque coup de sonde, en visant le mât, la distance du bateau au rivage et inscrire immédiatement sur la planchette le point où le sondage a été fait. Quand le bateau est trop loin du rivage, à 1.000 ou 1.200 mètres, la lecture à la stadia devient difficile et même impossible; alors l'opérateur qui est sur le bateau détermine sa position au moyen du sextant. Mais le premier procédé est plus ra- pide et surtout plus exact que le second. Détermination de la profondeur. — La profondeur à" 234 A. DELEBECQUE. — L'ÉTUDE DES LACS DANS LES ALPES ET LE JURA FRANÇAIS —————————___ "TT TT se détermine au moyen d’un appareil consistant En voici le dessin (fig. 1 et 2), que l’auteur a bien essentiellement en un tambour sur lequel s’en- | voulu me permettre de reproduire ici. roule un fil d'acier de quelques dixièmes de milli- Une très grande précision est nécessaire pour ce mètre de diamètre et d’une poulie, dite métrique, | travail; car, à l'inverse du topographe, l’hydro- munie d'un compteur de tours, sur laquelle passe | graphe ne voit pas le terrain qu'il doit relever. le fil, dont l'extrémité est munie d’un poids ou | Pour cette raison aussi, il faut sonder en un grand plomb de sonde. Si, comme cela doit avoir lieu | nombre de points, surtout près du rivage et prin- dans les appareils bien construits, le mouvement | cipalement sur les petits lacs dont le relief est plus relatif de la poulie et du fil est un mouvement de | tourmenté que celui des grands. Ainsi, pour le Lé- roulement, sans glissement, la quantité de fil dé- | man, le nombre des coups de sonde a été de 20 par roulé, dans la chute verticale du poids, est propor- | kilomètre carré; pour le lac du Bourget, de 75; tionnelle au nombre de tours de la poulie, nombre | pour le lac d'Annecy, de 123; pour le lac d’Aigue- qui est donné par le compteur. Il faut absolument | belette, de 212. AS Seal A EBE, Fig. 1 et 2. — Sondeur Belloc. — A, tambour sur lequel le fil est enroulé. — B, poulie sur laquelle passe le fil, pouvant se dé- placer latéralement, suivant la position occupée par le fil sur le tambour, — C, poulie Axée au levier L ct tendant à le soulever par suite de la tension du fil. — D, poulie munie d’un compteur, ou poulie métrique. — E, cylindres entre lesquels passe le fil. — F, poulie de renvoi. — GH, flèche supportant la poulie F et pouvant tourner autour de G. — L, levier tournant autour de O et agissant sur un frein qui arrète le tambour au moment où, le poids touchant le fond, le fil cesse d’être tendu et de tirer en haut la poulie C. — MN, autre levier à main agissant sur le même frein et permettant de modérer la vitesse de chute. — P, écrou réunissant le levier L au frein. — R, ressort tendant à faire descendre le le- vicr L. se garder d'employer des cordes en chanvre ou en | Ce travail fait, il est facile, si le nombre des soie pour la mesure des profondeurs, car la lon- | coups de sonde est suffisant, de tracer sur la carte, gueur de ces cordes varie énormément, suivant | où sont reportés les points, des courbes de niveau, qu'elles sont dans l’eau ou hors de l’eau et suivant | dont l’équidistance varie suivant l'échelle de la qu'elles sont plus ou moins tendues. Ainsi, les pro- | carte. Cette échelle est de 15 pour le Léman, de fondeurs trouvées autrefois pour le Léman étaient, | 5 pour les lacs du Bourget et d'Annecy et de 20.000 Le] Ni à cause de l'emploi d'une corde de soie, entachées | 5x pour les autres lacs. Les cartes des trois pre- 1 10.000 P d’une erreur de 8°/,. Je me suis servi, pour les | miers lacs, avec celle du lac d’Aiguebelette, sont on! ; 5 ) petils lacs, d'un excellent appareil imaginé par | représentées sur les planches ci-jointes à une M. Belloc ‘ et construit avec beaucoup d’habileté | échelle beaucoup plus petite. Les cartes à grande | PI par M. Eude, de la maison Le Blanc, de Paris. Get | échelle seront publiées prochainement. appareil est très léger, car il ne pèse que 20 kilos; . . . . x . . | il fonctionne d'une manière très satisfaisante et est : appelé à rendre de grands services, principalement Je crois utile de rappeler ici en quelques mots aux explorateurs de lacs de montagnes. les caractères généraux du fond des lacs !. 1 Bezcoc, Comptes rendus, CXIT, p.1204 (1891),et Bulletin 1 Voir pour plus de détails Forel, le Lac Léman, 1886, de la Société de géographie, troisième trimestre, 1891. Georg, éditeur à Genève. A. DELEBECQUE. — L'ÉTUDE DES LACS DANS LES ALPES ET LE JURA FRANÇAIS Quand le rocher ne plonge pas dans l’eau, on trouve en général, pour la section transversale d’un lac, à peu près la forme suivante (fig. 3) : A B est uneterrasse presque horizontale appelée beine sur laquelle la profondeur ne dépasse guère 5 à6 mètres ; après la beine se trouve un talus BC très incliné (40° et plus quelquefois), dit le Mont. Au pied du mont commence un grand talus C2 d'inclinaison très variable et qui va s’adoucissant jusqu’à une plaine centrale, à peu près horizontale, qui représente le fond proprement dit du lac. La beine et le mont sont des produits d’érosion et de dépôt par le jeu des vagues, C F# G représen- tant la côte primitive. Le sol de la beine est formé de vase, de sable, de galets, de blocs quelquefois. Les talus et la plaine centrale sont recouverts, en général, d’une couche plus ou moins épaisse de vase. Le rocher ou les cailloux’ ne se rencontrent que tout à fait exceptionnellement hors de la région lit- torale : dans le cas,par exemple, d'une source sous- 235 glissent sur le talus immergé et que, au contact du courant ainsi produit avec les eaux dormantes du lac, il y a ralentissement de la vitesse et formation de digues latérales par suite du dépôt de l’alluvion. Cette hypothèse est combattue par M. Duparc, pro- fesseur à l'Université de Genève !, qui voit au con- traire dans le ravin le reste de l’ancienne vallée du Rhône submergée par les eaux du lac et en grande partie comblée par les alluvions. Le Rhône, à son entrée dans le lac, s’écoulerait dans celte vallée et formerait des digues latérales suivant la manière expliquée plus haut. Je suis tenté de me rallier à l'hypothèse de M. Duparc; car, ainsi que le dit très bien celui-ci, si les eaux du Rhône ne sont point, à leur entrée dans le lac, dirigées dans un lit préexistant, comment admettre que ces eaux suivent une direction déterminée sur un talus ré- gulier, au lieu de s'épanouir de tous les côtés par suite de la résistance qu’elles rencontrent? Com- ment expliquer encore les sinuosités de ce ravin? Enfin un argument trés sérieux contre l'hypothèse Fig. 3. — Profil transversal théorique d'un lac. lacustre (lac d'Annecy) ou d’un émissaire souter- rain (lac des Brenets). Passons maintenant à l'étude de chaque lac en particulier. IT. — Lac LÉMAN Le Léman (fig. 4), le plus grand des lacs alpins, le plus profond après le lac de Côme et le lac Ma- jeur, se décompose en deux parties bien distinctes, le grand lac, de Nernier à Villeneuve, et le petit lac, de Nernier à Genève. Le grand Lac forme dans son ensemble un bassin à fond plat, hori- zonlal, dont la profondeur extrème est de 30974, A l'extrémité orientale de ce bassin, nous ren- controns un accident des plus intéressants. Le lit du Rhône, l’affluent principal du lac, se con- tinue sous le lac par un ravin sinueux, large en certains points de 800 mètres et bordé de deux digues latérales dont la hauteur atteint 50 mètres au-dessus du fond du ravin. Le ravin est visible jusqu’à une distance de 9 kilomètres de l'embou- chure du Rhône. Pour expliquer sa formation, M. Forel !, le savant professeur de Lausanne, sup- pose que les eaux du Rhône, plus denses que celles du lac en raison de leur grande charge d’alluvion, 1 Forel. Comptes rendus, 19 octobre 1885, et Bulletin de la Société vaudoise des sciences naturelles, t. XXIIT, 1887. de la formation actuelle duravin par le fleuve sous- lacustre consiste dans ce fait que le Rhône et le Rhin sont, dans tous les lacs suisses, les deux seuls fleuves qui présentent ce phénomène à teur embou- chure; on ne trouve rien de semblable à l’entrée de la Reuss dans le lac des Quatre-Cantons, ni à l’entrée de l’Aar dans le lac de Brienz, ni à celle du Tessin dans le lac Majeur, et pourtant ces trois ri- vières charrient, comme le Rhône et le Rhin, d’é- normes quantités d’alluvions. On ne s'explique pas bien pourquoi, si le Rhône et le Rhin pouvaient former d'eux-mêmes un ravin sous-lacustre dans la vase des lacs où ils se jettent, la Reuss, l’Aar et le Tessin ne seraient pas capables d’en faire autant. D’autre part, la présence du même phénomène dans le Léman et le lac de Constance, el seulement dans ces deux lacs, s’expliquerait par ce fait que chacun d'eux se trouve vraisemblablement dans l’axe d’une cassure. La Suisse parait être en effet sillonnée par deux grands systèmes de cassures perpendiculaires entreeux,auxquels appartiennent le Rhône, le Rhin et les deux lacs en ques- tion. On remarque, d’ailleurs, que la Drance, le plus important des affluents du Léman après le Rhône, ne forme pasnon plus de ravin sous-lacustre, 1 Duparc. Archives de Genève 1892. 236 A. DELEBECQUE. — L'ÉTUDE DES LACS DANS LES ALPES ET LE JURA FRANÇAIS rs Nord OP v / D à = Sir 14 J 4 £ S rt Es 4 [4 ) CIF à NUREN G 5 MX sl < ote eÀ NT *| | ra ZX à a) le a CE mil 1 6 £ / < NN L à se A î L &- ES = S à 8 re S Sen A JE @col Ë R, [D [a à Fr “ a à Eu 2 à” = as Ne Es Q F à AAC 2 D = [S dr nm a * Ô1 è RUMEUR è * w M » ke w | > 3 à a SUP ERRS è & 5 oo Si j D : 2 Ds x » SOADOUT C 218ANNT 2] À A VERTE.) (A A. DELEBECQUE. — L'ÉTUDE DES LACS DANS LES ALPES ET LE JURA FRANÇAIS 237 mais un delta torrentiel, analogue à ceux qui ont constilué les terrasses de Genève, de Thonon, de » Vevey, au temps où le niveau du lac était plus élevé qu'aujourd'hui. Quelques monticules immergés s'élèvent sur les talus du lac; le plus important, près de Cully, est représenté sur la carte (fig. 4). Le petit lac se compose de cinq cuvettes sépa- rées par des barres très peu saillantes, probable- ment d'origine morainique. Ces cuvettes et ces barres sont visibles sur la carte au moyen des cotes de profondeur inscrites. Sur l’unes d'elles, sur celle dite de Nernier, qui sépare le grand lac du petitlac, cette origine est mise en évidence parles nombreux cailloux erratiques que M.Forel et moi, nous avons recueillis à 60 mètres de profondeur. En face de Bellerive, on rencontre un montieule important, dit les Hauts-Monts, sur lequel la profondeur n’est que de 7 mètres. Le monticule est d’origine molas- sique, d’après Pictel et Alphonse Favre. La surface du Léman est de 582“35"; le cube, de 88.920.600.000 mètres cubes. IV. — LAG DU BOURGET Le lac du Bourget ! (fig. 5) est, dans son relief général, plus simple que le Léman. Il forme un bas- sin à fond plat de 18 kilomètres de longueur et de 445 m. 40 de profondeur. Cest, après le Léman, le plus profond des lacs français. On ne rencontre, comme accidents, qu'un pelit bassin secondaire, au fond de la baie de Grésine, séparé du reste du lac par une barre probablement d’origine morai- nique, et, du côté de Tresserves, un petit monticule immergé. Mais, en regardant la carte de plus près, on s'aperçoit que le Sierroz, affluent du lac, tend à le couper en deux par son delta torrentiel. Ses apports ont même déjà formé une barre rudimen- taire qui partage le lac en deux bassins, celui du Nord ayant 145"49, de profondeur, celui du Sud ayant 10989. Sur la barre, la profondeur est de 109 mètres, à peine inférieure à celle du second bassin. Il faut remarquer la belle paroi rocheuse qui, sur une longueur de à kilomètres, prolonge la montagne du Chat jusqu'à une profondeur de 100 mètres. Notons encore une particularité inté- ressante du lac du Bourget, et queje n'ai retrouvée nulle part ailleurs. Le canal de Savières, qui lui sert d’émissaire et qui conduit ses eaux dans le Rhône, joue, pendant environ 60 jours par an, le rôle d’affluent. Il lui apporte ïes eaux du Rhône, chargées d'une grande quantité d’alluvion, qui troublent le lac sur la moitié de sa longueur. Le lac du Bourget se trouve dans un pli syneli- 1 Comptes rendus t. CXIV, p. 32 (1892). nal et le barrage des apports du Rhône a, sans doute, contribué à sa formation. La surface du lac du Bourget est de 44162", son cube de 3.620.300.000 mètres cubes. N. — LAG D'ANNECY Nous retrouvons au lac d’Annecy(fig. 5)! lescarac- tères généraux des lacs Léman et duBourget : deux bassins de 64"70 et de 55"20 de profondeur sé- parés par une barre extrêmement aplalie sur la- quelle la profondeur est de 4960. En face de cette barre, le roc de Chère plonge verticalement dans le lac jusqu'à une profondeur de 40 mètres. Le bassin du Sud est très régulier el sans acci- dents; dans le bassin du Nord nous rencontrons deux monticules considérables, d’origine morai- nique (crêt de Châtillon et crêt d’Anfon). Mais j'appellerai surtout l’attention de mes lecteurs sur un accident extrêmement curieux et qu'on n’a jamais, à ma connaissance, rencontré dans aucun autre lac; c'est un entonnoir qui, à 200 mètres de la côte, s'ouvre sur le talus du lac par des profon- deurs de 25 à 30 mètres, suivant une ellipse ayant pour longueurs d’axes 200 et 250 mètres ; ses parois, vaseuses.ont une inclinaison de 20° à 40°; le fond, rocheux, se trouve à 8060 au-dessous du niveau de l’eau, soit 16 mètres plus bas quele plafond du lac. En travaillant avec M. Legay sur le lac gelé, en février 4891, j'ai pu démontrer ? que la formation de cet entonnoir est due à une source sous-lacustre. Car, en descendant au fond du trou le thermo- mètre à renversement de Negretti et Zambra, nous avons trouvé une température de 11°,8, tandis que sur le plafond du lac, à 64 mètres de profondeur nous ne trouvions que 3°8. De plus, l’eau que nous avons recueillie au fond du trou a élé analysée par M. Dupare, et elle renfermait 0#",173 de résidu fixe par litre, tandis que l’eau prise au milieu du lac n’en renferme que 0,151. Ces différences ne peuvent provenir que de l'existence d'une source sous-lacustre ; cette source, jaillissant sur le talus rocheux du lac, fait obstacle au dépôt de la vase qui, tout autour, tapisse les parois du lac; il se forme, dans cette vase, un cône renversé ayant pour sommetle point d’émer- gence de la source. L'existence de cet entonnoir était vaguement connue des riverains qui savaient que, dans cette région, le lac étail plus profond qu'ailleurs. On l'appelle Boubior dans le pays. Le lever exact que j'en ai fait donne la solution d’un problème fort important; il permet de connaître l'épaisseur de la * Comptes rendus CXI, p. 1000 (1890). 2 Comptes rendus CXII, p. 897 (1891), et Archives de Genève, 1891, XXV, p. 467. 238 A. DELEBECQUE. — L'ÉTUDE DES LACS DANS LES ALPES ET LE JURA FRANÇAIS LAC DU BOURGET | K US zPillon ” A ENT | 7 Ve= LAC D'ANNECY Altitude : 44658. | : JAN - | \ Veyrier FE À \ | \ | À \OREN \ \ Een NN (A \ Sevrier| || , |} \ i à | | fee aus ( CH RE CE Le de À \T Menton \ Nr) À | cb Ÿ X \\ EN | (ol \1 Y : \ LR Cure. dXafe) ENS ACTE Y ù NV ge) \ 7 Ra è AE ] Poe L RE < J, vs NES ee Roc de (here Dire; À À Ke Talloires HN SMS) ; N ; À LS 1! Ja NS SANS ee 7 UE LAC V7” a) nr NE il Angon S'AIGUERE LETTL œ | LTlituæe: S 78377 y \Q ee ik Da A iguebelette Doussard LACS DU BOURGET, D'ANNECY, ET D'AIGUEBELETTE 40.000 1 s0 1000 on. 5000 u 50, MUEX — - = — RS D RES ms —— _— j Ch e AE 5 Ps mladier cel (x nice feour des trois lacd. S = Se n«<é Bourget es courbes lune et de 8 reñet >) , d DCR NE LS dunill A. DELEBECQUE. — L'ÉTUDE DES LACS DANS LES ALPES ET LE JURA FRANCAIS 239 vase qui recouvre le talus primitif du lac. En supposant, par analogie avec ce que nous voyons sur les flancs des montagnes voisines, que la source ne produit pas d’effondrement sensible dans le talus primitif rocheux du lac et que l’en- tonnoir est formé tout entier dans la vase, l’épais- seur de cette vase est égale à la différence de ni- veau entre l'ouverture supérieure et le fond de l’entonnoir, soit 50 mètres environ. Le lac d'Annecy paraît avoir été formé de la fa- çon suivante !, Pour une raison encore mal connue, les montagnes de la région ont subi une disloca- tion le long d’une ligne horizontale et un rejet de part et d'autre de cette ligne, rejet très apparent sur les cartes topographiques et surtout sur les cartes géologiques. Cette ligne est devenue une ligne de moindre résistance, et l'érosion a agrandi la coupure primitive, où les eaux ont pu s’amas- ser. Le barrage des apports du Fier, qui reçoit l’émissaire du lac, a certainement contribué à la formation de celui-ci. La surface du lac est de 27“104 ; son cube, de 1.123.500.000 mètres cubes. VI. — LACS SECONDAIRES. Les autres lacs sont beaucoup plus petits; le plus important, le lac d’Aiguebelette, représenté ci- contre (fig. 5), a une superficie de 5143. Sa pro- fondeur, relalivement grande, atteint 71"1. Son relief est beaucoup plus compliqué que celui des lacs que nous venons de décrire; ainsi, il renferme six bassins, deux monticules et deux iles, proba- blement d'origine erratique. Gelte complication se retrouve d’ailleurs dans plusieurs autres petits lacs. Aïnsi le lac de Paladru (profondeur 35",9) renferme quatre bassins et six montieules; le lac de Saint-Point (40",3) ne compte pas moins de huit bassins. Celui de Sylans (22",2) n’a que deux bassins. Les lacs de Nantua (42",9), de Remoray (217,6), Genin (16,6) sont formés d'un bassin unique. Le lac des Brenets ou de Chaiïllexon est un élargissement du Doubs, dont la profondenr augmente très régulièrement jus- qu'à l’aval, où se trouve, à la profondeur de 31"50, la plus grande que l’on rencontre, un écoulement souterrain. Il n’est pas facile, pour le moment, d'expliquer cette complication de certains petits lacs. Leur bassin primitif est-il plus accidenté que celui des grands lacs? Ou bien la quantité d’alluvion appor- tée par les affluents est-elle moindre par rapport à la surface du lac et les dépôts ne peuvent-ils niveler aussi parfaitement les inégalités du sol? 1 D’après les idées de M. Duparc et de Maillard. Voir Maillard, Bulletin des Services de la carte géologique de la France, n° 6, novembre 1889. Je n’ai point encore trouvé d'explication satisfai- sante : peut-être l’étude d’autres lacs donnera-t- elle la solution du problème. VIT. — RECRERCHES DIVERSES ENTREPRISES SUR CES LACS. Le relevé topographique très exact des lacs est le travail préliminaire, fondamental, sans lequel aucune autre étude ne peut être entreprise sérieu- sement. Mais il est de toute évidence que ce tra- vail n'offrirait qu'un intérêt restreint si, après l'avoir exécuté, on n'allait pas plus loin. Le géologue, le physicien, le chimiste, le naturaliste doivent compléter l’œuvre du topographe. Je dirai seulement quelques mots des principales recherches entreprises sur les lacs français. J'ai étudié, dans chaque lac, lacouleur, la trans- parence de l’eau et de la distribution verticale des températures, de la surface au fond. J'ai trouvé d’un lac à l’autre des différences considérables, notamment pour la température. La forme et l'o- rientation des lacs paraissent avoir une influence considérable sur l'état thermique des couches profondes !. Les lacs longs, dirigés dans le sens des vents régnants,emmagasinent dans ces couches, pendant la saison d’élé, beaucoup plus de chaleur que les autres ; la raison en est due à ce que les courants, tant de fond que de surface, peuvent, en vertu de la forme du lac, acquérir une intensité considé- rable et mélanger les eaux chaudes de la surface avec les eaux froides du fond. Ainsi, au lac de Saint-Point, lac de 6 kilomètres de long, étroit et dirigé du S. W au N. E, M. Garcin, un de mes col- laborateurs, a mesuré le 20 septembre 1891, à 10 mètres de profondeur, une température de 12°; au lac de Remoray, beaucoup plus petit et de forme ovale, il a trouvé, à la même profondeur, seule- ment 8°. Au fond du premier lac, à 40 mètres, la température était de 6°, 4; au fond du second, à 27 mêtres, elle était de 4° 8. Les deux lacs sont d’ailleurs très voisins, à la même altitude; ils ont des affluents dont les températures sont à peu près identiques et qui, dans chaque lac, apportent la même quantité d’eau par rapport au volume du lac. De plus, la profondeur moyenne du lac de Remoray, c'est-à-dire le rapport de son volume à sa surface est de 12"65, tandis que celle du lac de Saint-Point est de 20"50. Dans le premier lac la masse d’eau à réchauffer est donc notablement plus petite par rapport à la surface qui reçoit la chaleur. Mais, les vents ayant peu de prise sur le lac et n'y engendrant pas de courants considé- 1 Comptes Rendus CXIV. p. 32 (1892) et Archives de Genève XXVII, p.133, 1892. 240 rables, cette chaleur reste tout entière à la sur- face, tandis qu'au lac de Saint-Point elle peut pé- nélrer dans les couches profondes. Le lac d'Annecy est aussi notablement plus chaud que le lac d'Aiguebelette dont l'altitude et la profondeur moyenne sont pourtant inférieures. J'ai recueilli, dans chaque lac, un grand nombre d'échantillons de la vase du fond que M. Dupare a bien voulu analyser avec moi. Il en à fait, pour le lac d'Annecy, une étude très complète '. La composition de la vase varie énormément d'un point à l’autre du même lac. Ainsi, pour le lac d'Annecy, la quantité de résidu insoluble (silice et silicates) varie de 45 °/,; à 55 °/,; ces différences sont causées principalement par les affluents qui créent des perturbations considérables dans la sé- dimentalion. Il ne s’agit ici, bien entendu, que de la vase des grandes profondeurs, de celle qui tapisse les talus ou le plafond des lacs et non pas du mé- lange de sable et de vase qui constitue la beine, cette plate-forme littorale dont il a été question. Les eaux des lacs que j'ai recueillies ont élé également étudiées par M. Dupare et comparées à celles de leurs affluents ?. 11 a trouvé une loi im- portante et qui parait être générale. Les eaux des |! lacs sont toujours sensiblement moins riches en matières dissoutes que celles de leurs affluents A. WITZ. — DE LA PUISSANCE DE VAPORISATION DANS LES CHAUDIÈRES ni ER prises dans leur composition moyenne. Cette diffé- rence est de 004 à 0f05 par litre. Un calcul très simple montre que la pluie qui torobe el la vapeur d’eau atmosphérique qui se condense sur les lacs ne peuvent suffire à expliquer cet appauvrissement de l’eau des affluents, une fois arrivée dans les lacs. Il est probable qu'il est dû à une absorption de carbonate de chaux par la vie organique, très intense dans les lacs. Enfin j'ai fait, dans chacun de ces lacs, des pêches d'animaux microscopiques à différentes profondeurs. Ces pêches sont très faciles et en général très fructueuses. J'ai remis ma récolle au baron J. de Guerne, le naluraliste bien connu. Per- sonne n'est mieux qualifié que lui pour l’étudier. Il reste encore quelques lacs intéressants à son- der dans l'Est de la France. Ce sera l’objet de ma prochaine campagne. Pour le moment, je dois me déclarer satisfait si j'ai pu montrer l'intérêt qui s'attache à l’étude de nos lacs français, si connus à la surface et si peu connus au fond. Des milliers de tourisles qui se promènent sur le Léman ou sur le lac du Bourget, combien savent ce qu'il y a sous la nappe d'eau qu'ils admirent ? A. Delebecque, Ingénieur des Ponts et Chaussées. DE LA PUISSANCE DE VAPORISATION DANS LES CHAUDIÈRES Il serait téméraire de prétendre que les lois de la transmission de la chaleur d'un foyer au liquide d'une chaudière à lravers la paroi qui le renferme soient parfaitement connues, car les phénomènes qui accompagnent cette transmission sont extrè- mement complexes : néanmoins l'étude de cette grave question, qui jouit du privilège assez rare d’intéresser également les théoriciens et les prati- ciens, est assez avancée pour qu'on sache faire nettement la part de ce qui est acquis à la science et de ce qui reste douteux. Fourier à posé les théorèmes fondamentaux : ainsi, nous savons que la quantité de chaleur qui passe d’une face à l’autre de la paroi métallique est proportionnelle à leur différence de tempéra- ture et en raison inverse de leur épaisseur; elle varie du reste proportionnellement à la conducti- bilité du métal*. Le coeflicient de conductibilité est assez bien 1 Comptes rendus, CX1v, p. 248 (1892). 2 Comptes rendus, cx1v, p. 248 (1892). 30naQ—C , Si l’on pose Q — quantité de cha- leur; C = coefficient de conductibilité du métal; e épaisseur du métal; T — T/— différence des températures absolues. connu depuis les derniers travaux de Neustadt et d'Angstrom : pour le fer, on prend 58,82, en rap- porlant cette unité au mètre carré, au mètre d'é- paisseur et à l'heure #. La transmission du calorique du foyer à la face extérieure de la paroi se fait par radiation, par conductibilité el par convection : en tenant compte des études de Dulong et Petit, de Péclet et de Ser, on pourrait établir des formules relativement assez exactes *, mais dont on ne pourrait gnère se servir dans la pralique.Pour les applications, Péclet et Rankine ont eu recours à des formules empi- riques *, dont le plus grand défaut est de renfermer des cofficients variables notamment avec la tem- péralure, la forme et les dimensions des parois: il faut reconnaître que ces coefficients sont mal connus ; du reste, peut-on même seflaiter de con- naître Üet T, les températures du foyer et de la 1. Ce nombre est trois fois plus grand que celui de Péclet : cette différence donne une idée des difficultés que présente la mesure exacte du coefficient de corductibilité. MN EVE ee AU es Les formules de Péclet sont de la forme générale Q = A (0 — T) 4 +B (9 — T) et celles de Rankine de la forme Q — "ANR NT) qu cils) matt) A. WITZ. — DE LA PUISSANCE DE VAPORISATION DANS LES CHAUDIÈRES 241 paroi extérieure? Mêmes difficultés pour le pas- sage de la chaleur de la paroi intérieure à l’eau où la conductibilité et la convection interviennent pour compliquer étrangement la chose; il suffit d’une mince couche de graisse pour modifier com- plètement ia puissance de transmission de la paroi. Si maintenant nous considérons le phénomène dans sa totalité, des gaz du foyer à l'eau de la chau- dière, nous conslatons qu'il peut assurément être soumis au caleul, car sa théorie est connue ; mais, si les physiciens considèrent la question comme résolue, leur opinion optimiste n'est pointpartagée par les ingénieurs qui ontà faire des calculs exacts. Pour aboutir à des formules utilisables, il faut se ses recherches sur les coups de feu des chaudières à vapeur ‘, dans lesquelles il étudia la vaporisation de l’eau sur les tôles, la température de ces tôles, l'influence des corps gras, etc. Des circonstances spéciales m'ont amené à en- treprendre à mon tour une série d'essais, dans le but particulier de déterminer le maximum de va- peur pouvant être produit par mètre carré de tôle, en plein coup de feu, et l'influence de l’état sphé- roïdal. A cet effet, j'ai construit une petite chaudière cylindrique, à fond plat, renfermant plusieurs litres d’eau, et devant être disposée aussi bien sur un feu de coke que sur des brûleurs à gaz. Cette forme QUANTITÉ à ÉTAT PRESSION [TEMPÉRATURE] LITRES , D'EAU ee SOURCES DE CHALEUR EN DE DE GAZ ÉVAPORÉE SE OBSERVATIONS DE LA TOLE MILLIM. L'EAU BRULE PAR MC 2 LE LS ET HEURE IF AUBE ——— | ————— ————— ————— | ——— Epaisseur de 4um Never 6 bruleurs Pérot, jet oblique 161mm 14° G3olit 59K7 43423eal [Rendement : 0,39. Neuve re. 1 bruleurs Bunsen, jet normal 172 1 639 73.9 46062 Rendement : (,42. Neuve... ..|Feu clair de charbon de bois 112 1 14.3 46299 Grasse .....16 bruleurs Pérot, jet oblique 171 14.5 681 60.4 37606 Décapée....[7 bruleurs Bunsen.... 172 l 995 96.5 60132 Id. Id. une toile d’amiante 169 1 998 92: 57327 Id. Chalumeau oxhydrique..... La tôle rougit sous l’eau au point frappé par ledard et se troue rapidement. Epaisseur de 12nmm Décapée ....|1 brûleurs Bunsen.......... 745 15 590 23.3 39362 Dans aucune de ces ex Id. ICONE INTER 15% 19 1000 102.4 63276 périences, il n’a été Id. Id. + 1 chalumeau \ 153 19 152.1 93582 possible de faire rou- Id. Id,+ 1 chalumeau à air soufflé 158 16 179.4 111403 gir la tôle sous l'eau, Id. Id.—+ 1 chal.oxh +1 ch.air sou. 158 15 200.9 124353 même aux points Id. Id.+3 chal.oxh +1 chair sou- 153 19 263.2 163953 frappés par les dards Id. Feu de coke intense........ 160 19 433.5 261903 de chalumeau. La tôle est|7 brulcurs Bunsen + 3 chal. La tôle est restée rouge d'abordame-| oxh. + 1 chal. air soufflé. 754 L 662.8 112858 sous l’eau et la puis- née aurouge|Feu de coke intense........ 360 90 994.3 543882 sance de vaporisation sans eau. est devenue de plus en plus grande. contenter d’approximations obtenues en négligeant des facteurs importants, le rayonnement, par exemple, ou les courants internes : les formules perdent alors toule valeur théorique en gagnant, il est vrai, une certaine valeur pratique. Cet exposé explique l’atlention qu'on accorde toujours aux recherches expérimentales ayant pour objet la vaporisation de l’eau dans les chaudières chauffées à feu nu; ilest peu de problèmes qui aient une importance aussi grande, el, pour s’en convaincre, il suffit de se rappeler qu'il y a en France plus de 70.000 chaudières à vapeur ! Au double point de vue de la sécurité et de l’écono- mie, la science trouve peu d'occasions de rendre plus de services à l'industrie qu'en cette question. Les expériences failes dans celle direction sont trop peu nombreuses et nous en étions encore aux anciens essais de Christian, de Clément, de Graham et de Geoffroy, quand, en 1889, M. Hirsch publia de chaudière avait un double avantage : la surface de chauffe pouvait être mesurée très exactement etle fond était amovible, de manière à ce qu'on pût faire des essais sur des tôles d'épaisseur et de nature variable : j'ai employé successivement des tôles de 4 et de 12 millimètres. La hauleur du liqui‘le dans la chaudière élait de 80 millimètres ; un appareil alimentateur continu assurait très exactement la constance du niveau, tout en per- mettant de mesurer, à À ou 2 centimètres cubes près, le volume d'eau débité; un thermomètre en- tièrement immergé dans l’alimentateur donnait la température de l’eau. La chaudière étant ouverte, la température de l’ébullition dépendait de la pres- | sion atmosphérique; mais elle différait peu de 100 degrés, l'altitude de mon laboratoire étant d'au plus 22 mètres au-dessus du niveau de la mer. 1 Annales du Consernatoire des arts el méliers, 2 série, t. 1, page 51, 1889. Mémoire analysé dans la Revue t. I, p.180 249 A. WITZ. — DE LA PUISSANCE DE VAPORISATION DANS LES CHAUDIÈRES Je ne me suis point occupé de la température de de la tôle dans les différentes expériences, attendu que M. Hirsch a déjà fait cette détermination et qu'il a épuisé la question; mais j'ai concentré toute mon attention surla marche des feux et sur les effets produits, au double point de vue de la nature et de la rapidité de la vaporisation; il était surtout important de constater si l’état sphéroïdal pouvait se produire quand l'eau était en grande masse, car on attribue à ce phénomène une impor- tance capitale dans les explosions de chaudières par manque d'eau. Cette étude était facile à faire, par la seule observation des puissances de vapo- risation par unité de surface sur un foyer d’intensilé croissante : s'il y à état sphéroïdal, cette puissance passera par un maximum et elle deviendra quatre fois moindre au moment où l’état sera pleinement réalisé; au contraire, il n‘y aura pas d'état sphéroïdal si la puissance croit contint- ment, sans arrêt, jusqu'aux températures élevées, auxquelles les tôles rougissent. Pour faire croître la température, j'ai employé successivement des brûleurs Pérot à jet oblique, des Bunsen à jet nor- mal, des chalumeaux à air soufflé et àalimentation d'oxygène, et enfin un feu de coke et d’escarbilles, poussé le plus vivement qu’il a été possible par un énorme soufflet de forge. Le tableau ci-dessus résume les résultats. Il ressort de ces chiffres d'importantes conclu- sions que nous allons examiner par le détail. 1° Pour ce qui est du foyer : La part énorme qui revient au rayonnement direct du combustible in- candescent sur les tôles du coup de feu peut être appréciée par la différence des effets obtenus par les brûleurs ou chalumeaux et par le feu de coke. L'influence du jet normal est grande aussi, car nous voyons la puissance de vaporisation passer de 69,7 à 73,9, suivant que nous employons les brûleurs Pérot ou Bunsen, et le rendement aug- menter de 3 ‘/;. Les chalumeaux apportent une grande quantité de chaleur au point qu'ils attei- gnent directement; mais la somme de calorique rapportée à l'unité de surface est moindre qu'on n'aurait pu le croire. 2° Pour ce qui est des tôles : Une tôle neuve ou dé- capée transmet plus facilement la chaleur au li- quide qui la mouille, que ne le fait une tôle grasse pour un liquide qui ne la mouille pas : la décrois- sance est dans le rapport de 37 à 45 environ, en tenant compte des différences de gaz dépen- sées. À égalité de gaz consommé, toutes choses égales d’ailleurs, la tôle de 12 millimètres a le même pouvoir vaporisant que la tôle mince : ce résultat est connu depuis longtemps. Il nous a été impossible de faire rougir, sous une couche d’eau qui la mouille, une tôle de n'importe quelle épaisseur, quelle que fût l'intensité du foyer : tou- tefois, comme ce résultat s'obtient assez aisément avec une tôle grasse (voir le travail de M. Hirsch), notre insuccès pourrait être dû à ce que nous ne disposions pas encore d’un foyer assez puissant, L'effet obtenu par des chalumeaux sur la tôle mince parait le prouver; le dard extrèmement ar- dent du chalumeau oxyhydrique rougit la tôle et la troue, alors même qu'elle est recouverte d’une couche d’eau de 8 centimètres d'épaisseur. Nous n'avons rien obtenu de semblable avec la tôle épaisse, et l’on pourrait s'en étonner de prime abord : mais on se rend compte de cette différence d'action en remarquant que, par conduction laté- rale, le calorique concentré en un point parle dard de flamme se distribue en tous sens, grâce à la grande conductibilité du métal. Ce dernier fait n’a- vait pas encore été constaté, à notre connaissance. Une tôle, rougie à sec, peut rester rouge sous l'eau, si le foyer est assez intense : son pouvoir vaporisant peut alors devenir énorme. 3° Pour cequiestdu liquide : Ilestmanifeste que l’état sphéroïdal ne se produit pas en pleine masse d’eau, comme cela a lieu dans l'expérience classique de Boutigny:au lieu d'atteindre un maximum et de di- minuerensuile,la puissance vaporisatrice croitavec continuité,etelle est devenue égale, dans notre der- nier essai, à 994 kilos par mètre carré et par heure; ce chiffre doit attirer l'attention, car il dépasse de beaucoup ceux qui avaient été relevés jusqu'ici. En disant qu'il n’y a pas production d’état sphé- roïdal dans les grandes masses d’eau, nous enten- dons aflirmer que, malgré l'absence de contact in- time entre le métal et l’eau qui ne Le mouille plus, il y à néanmoins transmission abondante de cha- leur du métal à l’eau; cela s'explique en tenant compte de l'énorme différence de température qui s'établit alors entre le métal et l’eau. De plus, il y a une convection rapide entre les masses d’eau qui viennent tour à tour s’exposer au rayonnement de latôle rougie :cemouvementcontribue certainement à augmenter la vaporisation. Enfin, on peut se de- manders'iln’intervient pas, dans le phénomène étu- dié par Boutigny, des forces spéciales qui n’entrent plus en jeu lorsque le liquide constitue une grande masse qui l'empêche d’affecter la forme globulaire. Quelle que soit l'explication à donner du fait que nous avons observé, il n’en reste pas moins dé- montré qu'il faut renoncer à l’ancienne légende, si généralement accréditée, par laquelle on croyait pouvoir expliquer certaines explosions tonnantes de chaudières à vapeur; la cause en réside plutôt dans laffaiblissement des parois que dans la brusque exagération de la pression. Aimé Witz, Professeur de Physique à la Faculté libre des Sciences de Lille < : SE : x 4 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 243 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Bouquet de la Grye, Membre de l'Institut. — Paris port de mer. Un volume grand in-8° de 290 pages avec cartes et plans (3 francs). Gauthier- Villars et fils, éditeurs, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1892. Comme le titre l'indique, ce livre traite une ques- tion de première importance pour les intérêts non seu- lement de la ville de Paris, mais aussi de toute la France. Il s’agit de créer à Paris un port accessible à la grande navigation. Ce rêve de tous nos hommes poli- tiques à partir de Coligny, Richelieu, Vauban, serait, d’après M. Bouquet de la Grye, à la veille de devenir une réalité. Le savant membre de l’Institut qui, pendant toute sa carrière, s’est occupé des choses de la mer, a étudié longuement en ingénieur les conditions techniques de la solution de ce problème; il a cherché, au point de vue commercial, dans quelles limites la dépense de chaque partie de l’œuvre devait être maintenue, et le volume qu'il vient d'écrire contient, non seu- lement tous les éléments de son projet, mais aussi les antécédents de l'œuvre et l'historique des difficultés qui ont été soulevées avant qu'il arrivät à convaincre le public et le Ministère de la nécessité de réaliser un canal maritime de pénétration allant jusqu’à Paris, Il est difficile de donner ici même un aperçu de la solu- tion présentée, Disons toutefois que le canal projeté laisserait arriver à 500 mètres des fortifications de Paris des navires de 3.000 tonnes, du type des an- ciennes frégates. Tous les bâtiments qui peuvent au- jourd'hui remonter régulièrement à Rouen pourraient venir faire des opérations commerciales à Paris. En vue des améliorations qui pourraient être réali- sées, en ce qui concerne la profondeur du fleuve en aval de Rouen, les ouvrages d’art construits en amont de cette ville auraient leur plafond situé à 1",50 en contre-bas des profondeurs données en premier lieu au canal maritime, ce qui réserverait absolument l’ave- nir. Dans l’historique de tous les précédents de la ques- tion, l’auteur fait remarquer que le but de tous les promoteurs de projets a toujours été le même, et que ceux qui avaient étudié le plus la question ont formulé des conclusions presque identiques. M. Bou- quet de la Grye à notamment trouvé, l'an dernier, dans les archives du Ministère des Travaux publics l'analyse d’un projet dû au regretté Belgrand, dont les vues ont avec les siennes une curieuse conformité. Le tracé du canal, notamment, est identique, et cela, par suite des mêmes raisons. Ce qui établit toutefois une différence entre la conception de M. Bouquet de la Grye et celle des ingénieurs des ponts et chaussées qui l'ont précédé, c’est qu'il parle plus qu'aucun d'eux des besoins, des manières de faire de la marine, des nécessités de son commerce ; comme l'opération doit être faite sans subvention du Gouvernement, il introduit dans chaque partie du problème l'élément de la dé- pense et celui du profit. On a suscité bien des entraves à ce projet; M. Bou- quet de la Grye n’a cessé de lufter contre les obstacles soulevés sur son chemin. Il l’a fait avec une grande modération, redressant les énonciations erronées, accumulant les preuves de l’exactitude des faits et des chiffres cités dans ses mémoires. La lutte pour arriver à connaître le prix réel des transports des marchan- ET INDEX dises entre Paris et Rouen et le taux des commissions percues par les intermédiaires mérite, à ce point de vue, d'être signalée, Les négociants de la capitale de la Normandie se sont constitués en syndicat pour la défense de leurs intérêts, qui sont d'empêcher les Parisiens de faire eux-mêmes leurs affaires. C’est contre les assertions émises ou répétées par ces réunions que proteste l’auteur : il montre que la lutte soutenue par Rouen et Le Havre associés contre l'émancipation de Paris est la répétition de celle que livraient contre Rouen les Havrais qui déniaient l’uti- lité d’un port ouvert aux navires dans la Seine même. Le résultat de la querelle a été le triomphe de Rouen, qui recoit aujourd'hui un ensemble de navires repré- sentant deux millions de tonnes de jauge ; il en est de même de la lutte entreprise avec les mêmes arguments contre la pénétration des navires le plus loin possible dans l’intérieur du pays. A la fin de l’année 1890, le Gouvernement a prescrit une grande enquête sur la question de Paris port de mer; le projet a rencontré à Paris 345.000 adhésions et une minorité opposante de 176 personnes. La majo- rité des Chambres de commerce s’est également pro- noncée en faveur du projet. M. Bouquet de la Grye argue de tels appuis pour conjurer le Ministère de ne point retarder davantage une création destinée à compter parmi les plus glo- rieuses de notre temps. L. O. Castelnau (F.) Ingénieur civil des Mines. — La Ma- chine à vapeur, son origine et ses progrès. — Recherches sur la distribution de la vapeur dans les machines, — 1 vol. in-8° de 34 pages (6 francs). Librairie centrale des Sciences, J. Michelet, quai des Grands-Augustins. Paris, 1892, A notre époque où les progrès sont si nombreux, il est intéressant de jeter un coup d'œil en arrière ef d'observer combien a été lent et pénible l’enfantement de la machine à vapeur, Dans son ouvrage historique, M. Castelnau prend la machine aux premiers essais d'Héron d'Alexandrie, 120 ans avant notre ère, Ces essais prouvaient que la vapeur d’eau peut être un agent de transmission de mouvement; mais ils étaient sans applicalion. Ce n’est qu’en 1543 que Blasco de Garay fit fonctionner par la vapeur un bateau dans le port de Barcelone. Vint ensuite Salomon de Caus qui construisit une machine élévatoire en 1605-1624, En 1647 Denis Papin, le premier, mit en mouvement un piston qui recevait, dans un cylindre, la pression de la vapeur. À partir de ce moment, la machine à vapeur était créée; mais elle était loin d’être maniable et économique ; les premiers services qu'elle rendit ne purent être utilisés que dans les mines. C’est James Watt qui fit de la machine à vapeur l’ou- til universel que nous connaissons. James Watt a été le plus heureux de tous les inventeurs ; il a poussé son œuvre à un haut degré de perfection et en a vu le suc- cès., Depuis, les besoins croissants de l’industrie ont développé l'esprit d'invention et la machine à vapeur paraît, pour beaucoup, avoir rendu déjà tous les ser- vices qu’elle peut rendre. M. Castelnau donne avec quelques détails la série des progrès réalisés jusqu'à aujourd’hui. Il termine par une étude très complète de la distribution de la vapeur par tiroir. La lecture de son travail est instruc- tive et intéressante, A. GouILLY. 244 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques. Violle. Professeur à l'École Normale et au Conservatoire des Arts et Métiers. — Cours de Physique. — Tome II, deuvième partie : Optique géométrique, 1 vol. in- folio de 354 pages, et 276 figures dans le texte (40 francs). Gr. Masson, éditeur. Paris, 1892. L'ouvrage de M. Violle sera, quand il sera complet, et si toutes les parties à paraître correspondent, en importance, aux parties déjà parues, le traité le plus complet qu'il y ait en physique, la véritable encyclo- pédie de cette science. Un tome premier consacré à la physique moléculaire, et un fascicule d’acoustique avaient déjà donné une idée de ce que serait le reste de l’ouvrage. Le fascicule qui paraît aujourd’hui traite de l'optique géométrique indépendamment de toute théorie de la lumière. C’est une idée très saine que celle d'exposer la théorie des instruments fondamentaux de l'optique en s’inquiétant seulement du comment des phènomènes lumineux sans encore être curieux du powrquoi, et en réservant pour une étude spéciale la recherche de la cause première des manifestations optiques. L'ouvrage, qui comprend en tout 350 pages, débute par l’étude de la réflexion et des miroirs, les conditions d’aplanétisme des réflecteurs paraboliques ; puis vien- nent les lois de la réfraction et la théorie des lentilles épaisses, suivie des énoncés de Gergonne sur les pro- priétes générales des faisceaux lumineux. La dispersion et la spectroscopie occupent ensuite une place assez considérable dans l'ouvrage, qui se ter- mine par la détermination des indices et l’étude des instruments d'optique. Ce sont surtout ces derniers qui constituent les applications de l'optique géométrique, sur lesquelles on ne saurait trop insister : elles sont si nombreuses et si continuellement utilisées, Aussi au- rais-je aimé voir figurer dans un ouvrage aussi com- plet que celuide M. Violle, l'application si élégante que l’on a fait des propriétés du point nodal d’émargeur dans les appareils panoramiques d’une rare perfection que l’on emploie aujourd’hui. Ceci, d’ailleurs, est une critique de simple détail, et n’enlève rien au mérite de l'ouvrage qui contient une foule d’autres renseigne- ments utiles, La partie bibliographique est fortsoignée, etce n’est pas un mince service rendu aux physiciens que de leur fournir une quantité d'indications précises sur les sources auxquelles ils ont continuellement à puiser. Alphonse BERGET. Heïlborn (E.).— A propos du coefficient critique!. (Archives de Genève, t. XXVNI, p. 9, 1891.) .M. Ph.-A. Guye a démontré que le coefficient cri- tique x doit être proportionnel à la réfraction molécu- laire MR, et que le quotient (MR : x) est égal en moyenne à 1,8. M. Heilborn calcule 4 priori la valeur de ce coefficient, en posant, d'après O.-E, Meyer, le covolume b de l'équation de M. Van der Waais égal à 4 V2 fois le volume rempli par les molécules sup- posées sphériques (M, Van der Waals avait adopté le coefficient 4 au lieu de #4 2). On a ainsi : n? —1 b n? +2 NE) Introduisant cette expression dans l'équation : M n?—1 MR _— d n'+2 \ Remplacant par sa valeur = numérique 28,87.773 1 Voir A. Erarp, Revue annuelle de chimie pure (Revue, t. II, p. 476), et Guxe, L’équation fondamentale des fluides, Revue, t, 1°", p. 368. tetdivisant par l'équation _ 213 40 MT % (F = pression critique), on trouve MR : x = 1,806, ce qui confirme les vues de M. Guye. Ch.-Ed, GuILLAUME, 3° Sciences naturelles. HDaniel|Lucien). Recherches anatomiquesetphysio- logiques sur les bractées de l'involucre des Composées. Thèse de la Faculté des Sciences de Paris. G. Masson, 120 boulevard Saint-Germain, Paris, 1891. La famille des Composées est l’une des plus vastes du règne végétal, c’est aussi l’une des plus naturelles; ses caractères extérieurs varient peu, c'est ce qui rend si diflicile la disposition systématique des espèces. Faute de caractères suffisamment précis, beaucoup de genres sont restés flottants, tels que les Crepis et les Barkhausia, les Prénanthes et les Lactuca, ete. Les caractères internes, peu variés eux-mêmes, n'avaient pu jusqu'ici être appliqués à la classification ; cependant M. Daniel à trouvé dans l'anatomie des bractées de linvoluere des varialions qu'on avait à peine soupconnées, et que l’on avait en vain cherchées dans les autres organes. Ces caractères, minutieusement décrits par l’auteur, sont fournis par la nature et la disposition des tissus de soutien, dont les variations permettent non seule- ment de mieux délimiter les tribus, mais encore de fixer Ja place des espèces indécises dont on avait fait des genres spéciaux, Les Chicoracées sont caractérisées par leur paren- chyme aqueux hypodermique ; les Gynarocéphales, par leur selérenchyme hypodermique et la présence cons- tante de l'inuline; les Corymbifères n’ont pas de carac- tère anatomique bien marqué. La deuxième partie est beaucoup plus générale; elle a trait à lastructure des bractées et desfeuilles par rapport à leur orientation. Trois tableaux ingénieux montrent que les variations de structure sont au nombre de 24, et rentrent dans les types classiques, homogène et hétérogène normal ou renversé. Presque tous les types de structure se rencontrent dans les bractées dont l'orientation est bien plus variée que celle des feuilles végétatives; les gaines foliaires présentent toujours le type hétérogène renversé. Nous sommes obligé de passer rapidement sur les chapitres physiologiques relatifs; 1° à la répartition el au rôle de linuline dans les capitules des Composées; 20 à la transparence du sclérenchyme pour l'asssimi- lation; 3° aux variations de l'assimilation et de la res- piration des capitules sous l'influence des variations de température. d È M. Daniel montre que, pour un même capitule, à une température peu élevée, l'assimilation emporte ; puis, la température s'élevant, ces deux fonctions s'équili- brent, et finalement la respiration prend le dessus. Il est très intéressant d'arriver ainsi, dans un cas par- ticulier, à la vérification d’une loi absolument géné- rale, et ce n’est certes pas la partie la moins curieuse de l'important travail que nous venons d’analyser brièvement, GC. HouLBErT. Demoor (Jean). — Contribution à l'étude dela fibre nerveuse cérébro-spinale. — Travail fait à l'Institut Solvay. (Univ. de Bruxelles). H. Lamertin, éditeur, 20, rue du Marché-aux-Bois, Bruxelles, 1891. L'auteur de ce travail décrit une série de faits anato- miques nouveaux, dont il envisage rapidement les con- séquences physiologiques dans la deuxième partie de son étude. D'après M. Demoor, l'étranglement de Ranvier est susceptible de modifications de forme et de volume très BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 9243 importantes. Cette région est le lieu d'élection des changements linéaires de la fibre nerveuse ; à son ni- veau, la gaine de Schwann est parfaitement continue et elle donne attache à des expansions membraneuses: transversales qui, fixées à la gaine de la fibre, vont s’ac- coler par leur. bord central au cylindre-axe. Ces pro- ductions doivent être assimilées aux plaques cellulaires de M. Gedoelst. La zône claire qui entoure le cylindre-axe dans les coupes longitudinales ou transversales des nerfs est-elle réelle ou est-elle le résultat de la rétraction de la myé- line et du cylindre-axe? L'auteur admet l'existence nor- male de cette région, sur la matière de laquelle il ne se prononce d’ailleurs pas catégoriquement ; il y décrit des filaments radiaires (très ténus se fixant d’un côté sur le cylindre-axe et se perdant, par leur autre extré- mité, dans la gaine à myéline. Dans le chapitre concernant la structure du cylindre- axe nous pouvons discuter les points suivants : Sur des coupes longitudinales et colorées des nerfs le volume et la coloration du cylindre-axe sont diffé- rents au niveau de l’étranglement dans la partie inter- annulaire. Le cylindre est morphologiquement con- tinu dans toute la longueur de la fibre nerveuse, mais il a une structure (rès spéciale au niveau de l’étrangle- ment, où il forme ce que l’auteur nomme {a région in- termédinire. Cette région possède, en effet, un pouvoir réducteur vis-à-vis du nitrate d'argent beaucoup plus faible que les régions interannulaires, En traitant le nerf par l’éther ou par le chloroforme, et en le soumettant ensuite à l’action du nitrate d’ar- gent, on voit le sel se réduire dans toute la longueur du cylindre-axe, sauf au niveau de la région intermé- diaire. La striation transversale de Fromann, que l’on observe éventuellement dans le cylindre-axe, correspond à une structure déterminée de cet organe, La structure fibrillaire du cylindre-axe n’existe pas. La disposition fibreuse que l’on peut souvent remar- quer est due, en grande partie, au mode de pénétra- tion du réactif dans l'organe. Le cylindre-axe est formé par une région périphé- rique anatomiquement différenciée et par une partie centrale différant de propriétés dans la région inter- annulaire et dans la région intermédiaire. Après avoir examiné ces diverses questions, l’auteur rappelle la théorie de M. Dubois-Reymond et celle de M. Engelmann sur le mode de propagation de la force nerveuse. Il discute ces hypothèses, en se placant au point de vue anatomique, et il fait voir ainsi ce qu'elles ont d'incomplet et de non fondé. Il analyse ensuite la structure du eylindre axe qu'il vient de décrire : il montre combien elle concorde avec les dernières don: nées que l’on a acquises sur la valeur cellulaire du segment interannulaire ; il la met en présence des expé- riences physiologiques, et il se demande alors si cette structure ne pourrait aider à l'explication de la phy- siologie complexe du nerf. Charles Borpgr. (de Bruxelles.) Smithsonian Institution Annual reports. (Rapports annuels), Part, I et II. Washington. Governement prin- ting Office 1889, parues en 1891. Les rapports de la Smithsonian Institution ne parais- sent qu'au bout de deux ans. Ceux de 1889 forment deux beaux volumes qui renferment, en dehors des rapports d'ordre administratif et des exposés des pro- grès des diverses branches de la science, un très beau mémoire de M. T. Hornaday sur l’extermination du Bison en Amérique. Plusieurs de ces mémoires ren- ferment de belles planches. La bibliographie, si impor- tante pour les recherches, y tient une grande place. Il est curieux d'observer combien sont lus en Amérique ces volumineux rapports, dont l'étendue contraste sin- gulièrement avec celle de nos ouvrages francais. C Naun. | 4° Sciences médicales. Kkerrier (F.) et Baudouin (M.) — De l'hydroné- phrose intermittente. Revue de Chirurgie. — N° de septembre, octobre et décembre 1891. Dans l'important mémoire qu'ils viennent de publier, MM. Terrier et Baudouin, tout en n'ayant pour but que la description d’une variété spéciale d’hydronéphrose, l’hydronéphrose intermittente, sont arrivés, par l'étude complète de cette variété, à élucider en même temps, dans une large mesure, la pathogénie de l’hydronéphrose vulgaire.Cette hydronéphrose vulgaire,qui mérite lenom d’Aydronéplrose fermée, n'est quelquefois à ses débuts qu'une poche ouvertesusceptible de se vider plus ou moins complètement, Elle n'est, par conséquent, dans un cer- tain nombre de cas, qu'une hydronéphrose intermit- tente pendant ses premières périodes. Les hydronéphroses intermittentes elles-mêmes pré- sentent, comme l’ont montré MM, Terrier et Baudouin, deux variétés très différentes : dans l’une, la tumeur liquide, souvent prise pour un kyste de l'ovaire, dis- parait spontanément, puis reparait, le tout sans douleur, sans symptômes bien marqués: c’est l’hydronéphrose a évacuation brusque, spontanée, qui forme en quelque sorte une transition entre les hydronéphroses défi- nilives, fermées et l'hydronéphrose intermittente ty- pique. Celle-ci débute, en général, à un âge peu avancé par des malaises passagers, des douleurs vagues et fugaces, des phénomènes névralgiques, parfois des nausées et des vomissements. Ces symptômes reviennent de temps à autre. Plus tard les crises sont plus intenses : l'accès débute sans cause connue ou à l'occasion de l’ingestion de certains aliments, Tout le complexus symptomatique du péritonisme (altération du faciès, fréquence du pouls, vomissements, ele.), éclate,en même temps que dans la région lombaire apparaît une douleur vive, accompagnée du développement, au niveau du rein, d’une tumeur quelquefois fluctuante, plus souvent élas- tique et même dure, tant elle est tendue. En général, au bout de 12 à 24 heures, sans cause appréciable ou sous l'influence d’un changement de position, de ma- nœuvyres exercées sur la tumeur, les accidents dispa- raissent. Subitement, le malade a une sensation de bien-être indicible, les douleurs cèdent et la tumeur se vide progressivement, par pelits coups, en plusieurs heures ou en quelques jours. Ces crises sont bien dues à la distension du rein par l'urine retenue ; le fait a été démontré expérimentale- ment par Sinifzine (de Moscou), qui les à reproduites à volonté par l’oblitération d’un uretère chez un enfant de 12 ans porteur d’une exstrophie vésicale. D'après MM. Terrier et Baudouin, cette oblitération de l’uretère serait cliniquement déterminée par la coudure, avec ou sans torsion, de l’uretère dans des cas de rein mo- bile déplacé. Le traitement consistera évidemment en une néphro- pexie lombaire s’il s’agit d’un rein sain et mobile, en une néphrectomie si le rein est malade, à moins que le rein opposé ne soit aussi atteint, auquel cas on en serait réduit à la fistulisation du bassinet. Dr Henri HARTMANN. Guyon (A.-F). Influence de la dessiccation sur le bacille du choléra, Arch. de méd. expérim. t. V. p.92/4802; D'une série de recherches, M. A.-F. Guyon conclut que la dessiccation en milieu see du bacille du choléra, bien loin d'être, comme on le pense, un agent de des- truction, est un moyen de conservation et sembleaug- meunter Ja vitalité ou la résistance de ce bacille. Le fait est du reste conforme à la loi générale, posée par CI. Bernard, qui veut que la sécheresse soit une des principales conditions de la vie latente. D' Henri HARTMANN, 246 ACADEMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 21 mars. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Bigourdan : Observations de lacomète « 1892 (Swift) et observations de la comète ec 1892, faites à l'Observatoire de Paris. — M. G. Rayet : Observations de la comète Swift (1892, mars 6) faites au grand équatorial de l'Observatoire de Bordeaux. — M. Terby revendique la priorité de la notion d’une périodicité commune aux taches solaires et aux aurores boréales, 20 Sciences PHYSIQUES. — M. E. Colot formule la loi suivante : « Entre les tempéralures £ et 0 des vapeurs saturées de deux liquides quelconques qui corres- pondent à une même pression (températures corres- pondantes ou isobares) il existe une relation linéaire t— A5 + B, où A et B sont deux constantes dont les va- leurs dépendent de Ia nature des liquides considérés ». Il donne les valeurs de ces constantes pour vingt couples de liquides. — M. H. Abraham décrit un con- densateur étalon à plateaux qu’il a fait construire, et dont la capacité, voisine de 500 unités C.G.S. élec- trostatiques, peut être calculée avec une précision at- teignant le dix-millième, — En réponse à la note de M. Berget (T mars) sur les phénomènes électro-capil- laires, M. Gouy donne quelques détails complémen- taires sur ses expériences; en s’en tenant aux re- cherches faites pour divers électrolytes avec lélectro- mètre capillaire, qui seules ont une valeur décisive : M. Gouy montre que les écarts, entre l'expérience et la loi de M. Lippmann, vérifiés chacun un grand nombre de fois, sont énormément au-dessus des erreurs pos- sibles. — M. Ch. André a observé trois fois dans ces dernières années, à l'Observatoire de Lyon, l'apparition de l'électricité négative dans l'atmosphère par beau temps; la courbe donnée par les enregistreurs affecte toutes les trois fois la même forme; après avoir exa- miné les conditions de production de ce phénomène rare, l’auteur conclut qu'il s’agit là d’une exagération d’un mode de variation diurne de l'électricité atmos- phérique. — M. E. Carvallo a été amené, par la suite de ses recherches sur la polarisation rotatoire du quartz, à reprendre la question de l’absorption cristal- line. Il remarque que la loi donnée par M. H. Becque- rel emporte cette conséquence : l’état de polarisation d’un rayon qui traverse un cristal absorbant change à mesure que ce rayon pénètre dans le cristal. Pour sa- voir ce que devient à la sortie du cristal ce changement de polarisation, M. Carvallo a mesuré absorption d’un rayon calorifique traversant un cristal de tourmaline entier, puis les deux moitiés de ce cristal coupé réap- pliquées l’une sur l’autre; les résultats expérimentaux comparés aux formules, qui dans le cas de la tourma- line, sont simplifiées par l'extinction rapide du rayon ordinaire, font voir que le rayon reprend brusquement à la sortie du cristal son état de polarisation primitif. Cette expérience à en même temps vérifié la loi de M. Becquerel pour les rayons calorifiques. L'auteur in- dique la conséquence de ce fait pour la théorie de la lumière. — M. H. Becquerel à propos de cette com- munication, examine brièvement les hypothèses qui peuvent rendre compte de la transmission de la lu- mière à travers les corps cristallisés, — M. G. Charpy a recherché comment varie la densité des solutions mixtes de sels en fonction de la concentration; il a observé en particulier pour les chlorures de potassium et de sodium, que la densité de la solution mixte peut se représenter par une fonction linéaire de la concen- tration moléculaire de l’un de ces sels, la concentration de l'autre sel restant constante. M. Charpy montre comment cette loi peut servir à la détermination des équilibres chimiques dans les systèmes de corps dis- sous. — M. H. Moissan décrit les principales proprié- tés physiques et chimiques du bore amorphe pur, dont il a indiqué la préparation dans une précédente séance ; ce corps à une grande affinité pour le fluor, le chlore, l'oxygène et le soufre; c’est un réducteur plus éner- gique que le carbone et le silicium, car il déplace au rouge l’oxygène de la silice et celui de l’oxyde de car- bone. Par l’ensemble de ses propriétés le bore se rap- proche nettement du carbone. — A propos d’une phrase de la communication de M. À. Besson (séance du 7 mars) relative à la préparation de l’iodure de bore, M. Moissan expose que l'acide iodhydrique réagis- sant sur le bore amorphe de Deville et Wæhler attaque les borures de cette préparation, et non le bore libre. — M.E. Brun a délerminé quelles sont les combinai- sons de l'iodure cuivreux avec l’hyposulfite d’ammo- nium qui prennent naissance suivant les conditions de la réaction, — MM. J. Hausser et P. Th. Müller qui avaient étudié dans une communication précédente la vitesse de décomposition par l’eau du dérivé diazoique de l’acide parasulfanilique, étudient la décomposition de son isomère en méta : la loi n’a pas une forme aussi simple. — MM. £. Grimaux et A. Arnaud continuent l'étude des quinines ou éthers alcooliques de la cupréine: ils ont préparé le dérivé propylique, le dérivé isopro- pylique et le dérivé amylique. — M. Ph. Barbier a cherché à déterminer la fonction chimique et la consti- tution du corps en C0 H!8 O extrait par M. Morin en 1881 de l'essence de Licari Kanali; les divers dérivés qu'il a obtenus montrent que c’est un alcool secon- daire renfermant une liaison éthylénique. — MM. Bé- hal et Desgrez ont obtenu la fixation d'acides gras sur des carbures.éthyléniques : ils ont préparé l’acé- tate de caprylène, l’acétate d’heptylène, et la diacétine du propylglycol. — Dans un travail antérieur, M. Ma- quenne avait transformé la perséite par l’action de l’a= cide iodhydrique bouillant, en un carbure de formule CT H2, Cet heptine est identique à celui que M. Renard a extrait des huiles de colophane. M. Maquenne en à repris l'étude pour bien établir sa parenté avec les ter- pènes; il a en particulier reconnu que l'heptine donne avec le chlorure de nitrosyle un produit d'addition caractéristique. La synthèse de ce corps à partir d'un sucre explique l’origine possible des terpènes et des résines chez les végétaux. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. À. Gautier a recherché où el comment se produit dans la vigne la matière colorante qui apparait rapidement dans le raisin au moment de la véraison; diverses expériences lui ont montré que le ou les pigments en question se forment dans la feuille; si on lie le péliole, ces substances s'ac- cumulent dans le limbe qui rougit fortement. L'extrait aqueux de ces feuilles rouges, précipité par portions successives au moyen de l'acétate de plomb, a donné trois malières colorantes cristallisées, que l’auteur désigne sous le nom d’acides ampelochroïiques «, & et y;ce sont des tanins, — M. E. Bréal a reconnu l’exis- tence, dans la paille, d’un ferment aérobie qui réduit les nitrates et dégage leur azote à l’état de liberté; cette fermentation n'a lieu qu’en présence d'un grand excès d'eau, — On sait que le bacille du charbon, cul- tivé à la température de 42°, ne donne pas de spores et que sa virulence diminue ; réensemencé à 309, il reste atténué, mais il recouvre la propriété de donner des spores. M. C. Phisalix a reconnu que si on le réense- mence à 42°, un certain nombre de fois, les cultures La. ab: smisimteatmentmss. ACADEMIES ET SOCIETÉS SAVANTES 241 filles perdent la propriété de donner des spores à 30°; si l’on fait alors passer le virus par la souris, la pro- priété sporogène reparait; mais, si le nombre de géné- rations à 42° est plus grand encore, ce passage n'est plus efficace, et le virus est définitivement asporogène. — Les expériences de MM. Jolyet el Sigalas leur ont montré que le coefficient d'absorption du sang pour l'azote varie comme le nombre des globules contenus dans ce sang. — M. Lannegrace décrit, en vue d’une étude physiologiqueultérieure, l'anatomie de l'appareil nerveux hypogastrique chez les Mammifères employés pour les recherches physiologiques du laboratoire, — M. L. Ranvier a fait l’expérience suivante : les nerfs qui accompagnent l'artère médiane dans l'oreille du lapin étant comprimés à mi-hauteur de l'organe, on observe : 4° une vaso-dilatation paralytique au-dessus du point comprimé; 2° une vaso-constriction réflexe dans l'oreille opposée ; 3° la circulation n'est pas in- fluencée dans l'oreille pincée au-dessous du point comprimé. — M. Verneuil, examinant l'influence qu'exercent sur la gravité de la rétention stercorale l'existence de lésions chimiques antérieures, a reconnu que ce sont ces propalhies qui déterminent un pro- nostic sévère : en particulier, la rétention stercorale survenant chez des sujets atteints d'anciennes affec- tions rénales, offre une extrême gravité; la mort sur- vient en général très vite, sans grands désordres du côté de l'intestin ni du péritoine, mais par suite de laggravation soudaine de la néphropathie et avec le cortège des symptômes et accidents qui caractérisent les différentes formes de l’urémie. — M. Ch. Déperet a réuni, avec la collaboration de M. Donnezan, une collection d’ossements d'oiseaux pliocènes, recueillis dans les limons des environs de Perpignan. Certaines espèces offrent des affinités avec la faune de la région indo-malaise. —M. E. Cartailhac pense que certaines formes de silex travaillés, considérés parles uns comme des scies, par d’autres comme des dents de herse, sont en réalité des éléments d’une faucille; en effet, M. Flin- ders Petrie a trouvé, dans une ville égyptienne aban- donnée au xxx siècle avant notre ère, une faucille de bois dont le tranchant est formé par une file de lames de silex dentées, qui sont identiques au type en question. — M. G. Rolland expose le régime des eaux artésiennes de la région d'El-Goléa, — M.E.-A. Martel signale les inconvénients qu'il y a, au point de vue de l'hygiène, à jeter comme on le fait dans diverses ré- gions calcaires de la France, les bêtes mortes et d’autres immondices dans les puits naturels que pré- sentent ces régions; souvent, en effet, ces puits com- muniquent avec des rivières souterraines qui repa- raissent sous forme de sources dans les régions en contre-bas. — M. K. Levasseur donne les chiffres qui lui paraissent les plus probables pour la superficie et la population des divers Etats d'Europe. Mémoires présentés. — M. Escary adresse une note faisant suite à sa communicalion sur les équations dif- férentielles du mouvement du système planétaire et intitulée : Intégrales des aires et des forces vives. — M. M. Meunier : Sur un projet de moteur électrique et son application dans la construction d’un chemin de fer hydro-électrique. — M. P. Ribard : Essai d’ex- plication d'une des causes du magnétisme terrestre. — M. Jové adresse un résumé de ses observations sur les courants telluriques au Poste central des télégraphes. — M. F. Garros adresse le résultat des expériences faites sur la conductibilité de la porcelaine d'amiante, — M. Robin adresse une lettre relative à un liquide antiseptique obtenu ex faisant agir l'ozone sur l’iode. Nomination : M. Hellriegel est élu correspondant pour la Section d'économie rurale, Séance du 28 mars. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Riquier : De l’exis- tence des intégrales dans un système différentiel quel- conque. — M. C. Guichard : Sur les congruences dont la surface moyenne est un plan. — M. G. Kœnigs : Sur les réseaux plans à invariants égaux. — M. J. Ber- trand : Note sur un théorème du calcul des probabi- liés. — M. J. Boussinesq : Sur le calcul théorique approché du débit d’un orifice en mince paroi. — Mlle D. Klumpke : Observations de la comète Swift, (Rochester, 6 mars 1892) et de la planète Wolf (Vienne, 18 mars 1892) faites à l'Observatoire de Paris. — M. B. Baiïllaud : Observations de la comète Swift faites à lObservatoire de Toulouse. — MM. E. Cos- serat el F. Rossard : Observations de la comète pé- riodique de Wolf faites au grand télescope de l'Obser- toire de Toulouse, — M. Faye communique le rensei- gnement suivant, extrait d’une lettre de M. Helmert aux membres de la Commission permanente de l’Associa- tion géodésique internationale ; les observations que l'Association géodésique a fait faire récemment à Honolulu ont montré une variation de latitude qui a élé précisément inverse de celle que l’on observait à Berlin, Prague et Strasbourg; quoique les calculs ne soient pas encore achevés, il est à peu près certain dès aujourd’hui que la question de savoir si un mouvement de l’axe terrestre engendre une variation de latitude doit être résolue aflirmativement. — M. W. Schmidt décrit un chronographe destiné à mesurer des temps très courts en particulier la vitesse des projectiles ; c'est un balancier de chronomètre qui est bandé dans la situation extrême de l’oscillation ; le déclenchement etl’arrêt sont effectués par la rupture successive de deux circuits électriques; la graduation est empi- rique. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Le Goarant de Tro- melin présente un mémoire relatif aux lois mécaniques de la circulation de l’atmosphère. Ces lois reposent sur la considération des surfaces isodenses de l’atmosphère ; lorsque ces surfaces sont inclinées, l'air s’écoule selon les lignes de plus grande perte des surfaces isodenses sous-Jacentes. — M. Violle rappelle pour les comparer à ceux donnés récemment par M. Le Chatelier les chiffres qu'il à obtenus autrefois pour l’intensité du rayonnement du platine à diverses températures. Les deux séries de chiffres marchent d'accord jusqu'à 15009, mais à 1775°, M. Le Chatelier a trouvé un chiffre beaucoup plus fort. M, Violle pense que l'écart tient non pas à ce que ses enceintes étaient à {rop basse température mais à ce que le verre rouge employé par M. Le Chatelier n’était plus monochromatique pour le rayonnement de cette température. — M. Le Cha- telier montre que les diverses estimations données de la température du soleil, qui diffèrent énormément entre elles, sont peu dignes de confiance, car elles ont été obtenues par extrapolation d’une loi, reliant le rayonnement à la température, vérifiée dans un inter- valle trop court. Les recherches sur cette relation em- brassent un intervalle de 1100°, c'est-à-dire quatre fois plus étendu qu'aucune des précédentes. L’extrapolation sera donc plus légitime; elle donne pour la tempéra- ture effective du soleil 7600. — M. L. de la Rive: Application de la théorie des lignes de force à la dé- monstraltion d’un théorème d’électrostatique. — M, A. Berget répond à la dernière note de M. Gouy sur les phénomènes électro-capillaires (séance précédente); il relève quelques causes d’erreur possible dans les expériences de M. Gouy; l'expérience faite par lui sur les larges gouttes et qui à vérifié constamment la loi de M. Lippmann lui parait tout à fait décisive pour la question des tensions superficielles, puisqu'elle cons- titue une méthode de vérification directe. —M, F. Par- mentier a précisé les conditions dans lesquelles on obtient à coup süùr l’expérience de Sainte-Claire De- ville et Debray sur le creuset de platine qui, chauffé au rouge par un brüleur Bunsen, puis refroidi au-dessous du rouge, rougit de nouveau et rallume la colonne de gaz el d'air lorsqu'on rouvre le bec. La condition essen- tielle consiste à avoir un rayonnement aussi faible que possible, par exemple avec un creuset petit et bien poli. — M. C. Poulenc a obtenu par l'action du fluorure de potassium sur les chlorures anhydres une 248 ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES série de nouveaux composés, tous bien cristallisés el répondant à la formule du fluorhydrate de fluorure de potassium dans lequel l'hydrogène est remplacé par un métal quelconque. Il décrit aujourd’hui le fluorure double de nickel et de potassium NiF?, 2KF et le fluorure double de cobalt et de potassium CoF?, 2KF. — M. G. Rouvier: Il n'est pas exact que l’amidon ne puisse fixer l’iode qu'à la condilion de prendre pour 4 atomes d'iode { molécule d'acide iodhydrique ou d’un iodure, comme l'avait dit Mylius. — M. Ad. Carnot propose pour doser le fluor, dans les composés atta- quables par l’acide sulfurique concentré, de dégager ce corps à. l'état de fluorure de silicium gazeux, comme dans diverses méthodes connues : l'innovation consiste à recevoir le fluorure de silicium dans une solution assez concentrée de fluorure de potassium pur, avec lequel il forme un précipité de fluosilicate de potassium que l’on pèse. — M. A. Etard a repris l’étude systé- matique de l’action mal connue du brome sur les alcools de la série grasse; il a obtenu des aldéhydes et des acétones bromées dont beaucoup sont nouvelles. — M. F. Chancel à préparé divers dérivés des propyla- mines, l'acide propyloramique qui se forme à côté de la dipropyloxamide dans l’action de l’éther oxalique sur un mélange à peu près à volumes égaux de mono- propylamine et d'eau, et l'acide propylamidoacétique par l’action de la monopropylamine sur le bromacétate d’éthyle. — M. Œchsner de Coninck décrit quelques réactions différentielles des trois acides amido-benzoïi- ques isomériques. — Continuant leurs recherches sur la vitesse de décomyosition des diazoïques, MM. J. Haus- ser et P. Th. Müller ont éludié à ce point de vue le méthylsulfodiazobenzène et le sulfate de paradiazoto- luène dans le but de déterminer l'influence qu’exerce sur la stabilité de la molécule soit la forme para, soit la fonction du radical voisin de Az?, — MM. Meslans : Le gaz fluorure d'allyle agit avec facilité sur le brome pour donner naissance à une dibromhydrofluorhydrine CSHSEI, Br?, Il fournit dans les mêmes condilions avec le chlore une dichlorhydrofluorhydrine C*HSFICR, Ces composés sont liquides, doués d’une grande stabilité et w'attaquent pas le verre, même à une température notablement snpérieure à leur point d’ébullition. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. G. Carlet a recherché par quel mécanisme la membrane qui unit les anneaux de l'abdomen, membrane inextensible, permet les mou- vements d'extension et de rétraction de l'abdomen ; il a reconnu que cette membrane se plisse en accordéon. — M. E.-L. Bouvier a étudié les particularités qui distinguent, au point de vue du développement, les espèces abyssales du genre Diptychus (Galathéidés) des formes côtières et subcôtières de la même famille; une différence caractéristique consiste en ce que les œufs sont plus gros et moins nombreux que dans les formes côlières, et corrélativement, l’éclosion est plus tar- dive. — M. F. Heim a repris l’étude de la matière colorante bleue du sang des Crustacés ; il contredit les recherches de Frédéricq sur ce sujet : l’aémocyanine existe bien sous deux états, oxygénée et réduite, mais elle ne contient pas de sucre, car ce métal manque dans le sang de la plupart des Crustacés; elle n’est peut-être pas de nature albuminoïde, mais on ren- contre toujours avec elle de la sérine et de la paraglo- buline, auxquelles le cuivre serait combiné sous forme d’albuminate, lorsqu'il existe dans le sang. — M. E Topsent a examiné la nalure des taches Jaunes mo- biles que l’on observe fréquemment à Banyuls sur les Microcosmus Suabatieri; il a reconnu qu'il s’agit d'un Rhizopode nouveau, caractérisé en particulier par l'abondance de ses noyaux, et pour lequel il propose le nom de Pantomixa flava. — M, P. Pelseneéer a re- pris l'étude du système nerveux des Hétéropodes, décrit contradictoirement par divers auteurs; chez toutes les formes de ce groupe, il a vu : 1°les ganglions pleuraux fusionnés avec les cérébraux; 2° la com- missure viscérale croisée. — M. A. Laboulbène a cherché à déterminer la pathogénie des diverses galles que présentent les végétaux, galles produites par di- vers insectes comme aussi par des bactéries; de l’en- semble de ses observations comme de ses expériences, il résulte que c’est non point à des actions mécaniques, mais dans tous les cas à des produits de sécrétion qu'il faut rapporter la cause de la formation de la galle, — M. L. Mangin a étudié l’anthracnose maculée que produit chez la vigne le Sphaceloma ampelinum ; il dé- crit l’envahissement des tissus par le parasite et la formation progressive de la lésion. — M, P. Miquel a réussi à cultiver les Diatomées, soit d’eau douce, soit marines, dans divers milieux de culture très simples; il indique la facon dont diverses conditions réagissent sur la vitalité de ces algues. — M. J. Passy, conti- nuant ses recherches sur les minimum perceptibles des odeurs, a été amené à distinguer les odeurs puis- santes, c’est-à-dire celles dont des quantités très petites donnent lieu à une perception, par exemple la vanil- line, et les odeurs intenses, comme le camphre ou le citral, dont il faut une quantité beaucoup plus consi- dérable pour qu’elles soient percues, — M. Lanne- grace à observé comparativement les effets sur la vessie de la section des deux espèces de racines affé- rentes des plexus hypogastriques. La section des nerfs hypogastriques, sympathiques ou lombaires, n'est suivie d'aucun effet; celle des nerfs hypogastriques médullaires ou sacrés, est suivie d’une paralysie de la vessie durant deux ou trois jours, puis de troubles trophiques chroniques; si des microbes sont introduits par un sondage, il se produit une cystile suraiguë, tandis que les chiens normaux ou même ceux dont les hypogastriques lombaires sont sectionnés, sont réfrac- taires à la cystite. — M.de Lacaze-Duthiers résume une brochure de langue grecque de M, N. Apostolides sur les poissons d’eau douce de la Thessalie. — M. Michel Lévy a éludié la série de pointements des roches cristallines récemment signalées dans le Cha- blais, au milieu des schistes et des grès du flyseh; il s’agit de diverses roches plus anciennes que le trias; ces pointements paraissent constituer la erèle d’un ancien pli anticlinal postérieurement noyé dans les dépôts discordants du flysch. — M.Caralp, en relevant la coupe de la vallée de la Neste (Hautes-Pyrénées), a pu fixer l’âge controversé du marbre de Saint-Béat; là, en effet, ces couches recouvrent en adossement un épais système de poudingues et de grès rouges (étage vosgien et base du trias) et une couche d'ophite avec argilolites multicolores représentant le keuper; elles sont donc bien à la base du lias, comme M. Caralp l'avait avancé antérieurement. — M. G. Landes a ex- ploré la Montagne Pelée (Martinique) pour observer, d’après les ravages exercés dans les forèls qui couvrent cetle montagne, les variations du cyclone suivant la verticale ; il expose les différents effets produits qui diffèrent de la base au sommet. — M. E. Rivière si- snale, en relation avec la perturbalion magnétique du 11 au 13 mars, une petile secousse de tremblement de terre qui a été ressentie à Menton, le 11 mars au ma- üin.— M. Faye présente un ouvrage de M. Cruls sur le climat de Rio-de-Janeiro; il signale dans ce livre la comparaison entre la variation de la température an- nuelle et les Tables solaires relevées depuis 1851, — M. E. Levavasseur donne les chiffres les plus probables pour la superficie et la population de chacune des parties du monde. Nécrologie. — M. le Secrétaire perpétuel informe l’Académie de la perte qu’elle a faite dans la personne de M. A. de Caligny, correspondant pour la Section de Mécanique. Mémoires présentés. — M. Escary adresse une note de Mécanique céleste faisant suite à une communica- tion précédente, — M. Zenger adresse le résumé de ses observations photographiques solaires, du 5 au 15 mars, — M, Aignan adresse une note sur la den- sité des dissolulions, — M. P. Campanakis adresse une note relative à une étude sur la communication entre l’ancien et le nouveau conlinent, par la voie de PPS ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 249 l'île Atlantis. — M. L. Hugo adresse une note sur la philosophie des solides régulier rs. — M. Delord adresse la description d’un système de lampe de sûreté à ap- pliquer aux mines. L. Laroque. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 23 février M. A. d’Arsonval : De l'injection des extraits liquides provenant des différents tissus de l’organisme, comme méthode thérapeutique; technique de la préparalion de ces extraits. M. d’Arsonval, à la suite des premières communications de M. Brown-Séquard, avait étudié avec lui Paction des extraits glycérinés de divers tissus injectés aux animaux. Ces auteurs ont conclu de leurs recherches que les tissus, glandulaires ou non, donnent quelque chose de spécial au sang, que tout acte de nu- trilion s'accompagne d'une sécrétion interne, Iy a donc li une nouvelle méthode thérapeutique à créer. Depuis lors M. d’Arsonval a perfectionné sa méthode, etil se borneaujourd'huiàindiquerlatechnique qu’il a instituée pour la préparation de sesextraits. La méthodesimplitiée qu'il emploie consiste à faire infuser le tissu, divisé grossièrement, pendant 24 heures dans trois fois son poids de glycérine à 289. Il est ensuite étendu d’eau, bouillie récemment, àraison de trois fois le volume de la glycérine employée et filtré au papier, Le liquide qui à passé est stérilisé dans l’autoclave à acide car- bonique, à 50 atmosphères de pression, pendant deux heures. L’autoclave étant plongé ensuite dans un bain d’eau à 42° C., on à une pression de 98 atmosphères, détruisant tous les germes vivants. Celle communica- tion donne lieu à une discussion à laquelle prennent part MM. Nocard, A. Gautier, Laborde et d’Arson- val. Séance du 1% mars. M. Guéniot Du méphilisme de l'air, comme cause de seplicémie puerpérale. Après l’exposé des faits et considérations, l’auteur émet les conclusions suivantes : Les émanalions méphitiques, quelle qu’en soit la source, en viciant l'air des appartements, deviennent une cause active de fièvre et d'accidents puerpéraux. Les intoxications peuvent se faire soit par absorption génilale, soit par absorption pulmonaire, l'air vicié qui a pénétré dans lorganisme favorisant le développement des microbes septiques. Pour réaliser, à cet égard, une bonne hygiène préventive, on doit s’efforcer de maintenir toujours pure l'atmosphère des appartements, Les moyens de traitement sont : sup- pression des sources du méphitisme: purification de tout l'appartement; emploi de la quinine, des alcoo- liques à haute dose et des antiseptiques sous toutes les formes, et spécialement des solutions phéniquées en injections intra-utérines. Suit une discussion à laquelle prennent part MM. Guérin, Charpentier et l’auteur. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du vendredi 1% avril Le travail qu’expose M. Blondel est le complément de l’importante étude qu'il a entreprise sur l'arc à courants alternatifs. La première partie, traitée dans une précédente communication, avait pour objet l'étude photographique des variations d'éclat de l’arc élec- trique aux divers instants de la période, Les nouvelles recherches dont il rend compte aujourd’hui ont eu pour but la détermination des courbes périodiques qui représentent les variations de la force électromolrice et de l'intensité dans les courants alternatifs, La mé- thode mise en œuvre, fondée sur l'application de la stroboscopie, est une variante de la méthode des contacts instantanés créée par M. Joubert dans son étude sur les alterrateurs. Deux contacts, {rès rappro- chés, sont portés par un tambour fixé à l'arbre de la dynamo. Le premier charge à chaque lour, et en un point donné de la période, un condensateur que le second décharge aussitôt dans un galvanomètre, Celui- ci prend une déviation permanente proportionnelle à la fréquence, à la capacité du condensateur et à la différence du potentiel qu'il s’agit de mesurer, prise au moment très précis de la rupture. On enregistre photographiquement la déviation du galvanomètre, Un dispositif semblable, installé sur un second tambour, permet de mesurer l'intensité au même instant. Le bras mobile qui porte les ressorts producteurs des contacts est animé d'un mouvement lent de rotation, et l'inscription se fait sur un papier sensible animé d’un mouvement synchrone. ‘M. Blondel applique ensuite celte méthode à la détermination des courbes périodiques de l'arc alternatif, Ges courbes se partagent en trois groupes distinets, correspondant à trois sortes d'ares qu'on peut appeler l'arc silencieux, Parc sifflant et l'arc criard, Le premier s'obtient avec des crayons à mèche tendre, le second avec des crayons homogènes el sous de faibles écarts, le troisième est dù à l'insta- bilité de l'arc avec des crayons sans mèche, L'auteur s’est d'abord placé aussi près que possible des condi- tions théoriques en choisissant une machine de force électromotrice bien sinusoïdale, et un circuit sans résistance ni self-induction; puis il à étudié, pour les différents ares, les effets produits par l'introduction d'une self-induction. Il a également mis en relief la variation de la résistance de l’are pendant chaque ul- ternance, et en a montré la loi. Enfin, l’ensemble de celte étude lui permet de résoudre la question contro- versée de la force contrélectromotrice de l'arc. Toutes les courbes montrent nettement qu'il n’y a aucun déca- lage entre les courbes de tension et d'intensité et, par suite, permettent d'affirmer que cette force contré- lectromotrice n'existe certainement pas, L'auteur se propose d'achever ce travail en complétant l'étude de la résistance au passage dans l'arc. — M, Duclaux pré- sente un mécanisme imaginé par M. Isarn, pour mon- trer d’une manière palpable la production de l’onde stationnaire provenant de la superposition d’une onde directe et d’une onde réfléchie. La direction de propa- gation étant horizontale, une série de boules peuvent prendre de petits déplacements verticaux. Les boules de la rangée supérieure figurent Ja sinusoïde d'aller et en reproduisent le déplacement, la rangée inférieure opère de même pour la sinusoide de retour; enfin, la rangée intermédiaire donne le mouvement résultant et réalise bien des nœuds et des ventres fixes. — M. Carvallo à abordé à un point de vue entièrement nouveau l'absorption cristalline, et est arrivé à des résullats d’une importance capitale. La loi de labsorp- tion cristalline a été découverte par M, H. Becquerel en se basant sur certaines idées théoriques qu'il exposées à l'Académie, dans sa séance du 21 mars 1892, M. Carvallo signale la conséquence singulière qui en découle. Suivant qu'on ca!cule directement l'absorption relative à une épaisseur 27, ou qu'on calcule l’absorp- tion provenant d’une première épaisseur z, puis d’une deuxième épaisseur z, on obtient des valeurs diffé- rentes. Or, ce second mode de calcul suppose impliei- tement que l'absorption modifie seulement l'intensité du rayon lumineux, mais qu’elle n’en altère pas l’état de polarisation, Puisqu’il conduit à un résultat différent du calcul direct, c’est que nécessairement l’état de polarisation doit changer à mesure que le rayon lumi- neux pénètre dans le cristal. En outre, que se passe-t-il à la sortie”? le changement de polarisation subsiste-t-il ? Pour élucider cette nouvelle question, M. Carvallo s’est adressé à la tourmaline, qui, absorbant le rayon ordi- naire, permet d'opérer sur le rayon extraordinaire seul et dans des conditions particulièrement simples. Il à d’abord étudié l'absorption à travers une lame unique d'épaisseur 2z, puis à travers deux lames super- posées d'épaisseur 3. En prenant un rayon tel que la vibration de Kresnel soit à 45° de l'axe du cristal, les résultats des deux modes de calcul sont entre eux comme 1 et 4, Il est donc facile de décider. L'expé- rience montre de la facon la plus nette que pour la 250 ACADENIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES lame unique 2z, c'est le premier calcul qui convient, tandis que pour les deux lames z superposées, le second seul est admissible, Ces résultats conduisent forcément à admettre qu'il se produit une variation progressive dans l’état de polarisation du rayon extraordinaire jus- qu'à l'épaisseur qui produit l'extinction du rayon or- dinaire, qu'au delà l’état de polarisation reste ensuite invariable jusqu'à la sortie, et qu'enfin à la sortie, le rayon reprend brusquement son état de polarisation primitif. Ces résultats démontrent que la vibration ne peut pas être fixée invariablement dans le plan de Ponde comme le supposent certaines théories, D’autre part, ils s'expliquent de la façon suivante. La vibration étant décomposée en deux, l’une parallèle, l’autre nor- male à l’axe du cristal, la composante normale s’affaiblit progressivement jusqu'à s’annuler ; à partir de ce mo- ment, la vibration demeure dans tout le reste du cristal parallèle à l'axe, età la sortie elle revient brusque- ment dans le plan de l'onde, M. Cornu signale une cause possible d'erreur, tenant à ce qu'il peut y avoir perte par réflexion à l’entrée du cristal. Mais M. Car- vallo à eu soin de l’éviter en placant la tourmaline dans une cuve de sulfure de carbone qui a sensible- ment le même indice, et d'ailleurs il s’est assuré que cette perle ne pourrait apporter qu'une erreur de 0,004, alors que la précision de ces expériences est de <+environ. Edgard Haunié. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 11 mars M. Gasselin a continué l'étude des produits qui se forment dans la réaction du fluorure de bore sur l'alcool méthylique, et, outre les composés qu'il a déjà décrits, a obtenu une combinaison de fluorure de bore d'oxyde de méthyle Bo FI3 + (CH#)}0 bouillant à 1270, Cette combinaison se reproduit facilement par l'action du fluorure de bore sur l’oxyde de méthyle. L'auteur a également préparé la combinaison éthylique correspondante Bo FE + (C2H5}? O0, et obtenu enfin un acide fluoxyborique dont il continue l'étude, — M. Ch. Lauth présente une note de MM. Prudhomme et Rabaut sur l’action du chlorure cuivreux sur les nitrates des aminés aromatiques; le groupe amidé est remplacé par du chlore, — M. Genvresse indique, comme moyen commode de préparer les acides orga- niques monobromés, etc., l’action directe du brome en présence d’un peu de soufre ; l’opération marche rapi- dement au réfrigérant ascendant. — M. Gorgeu rap- pelle qu’il a montré que le permanganate d'argent se décompose spontanément à l’air libre et dans Peau, et que cette décomposition est aclivée par la chaleur. Lorsqu'on opère dans l’eau chaude, le résidu est formé de bioxyde de manganèse et d'un oxyde d'argent dont la composition serait très voisine de celle d’un bioxyde Ag? 02, mais dans laquelle l'oxygène ajouté au protoxyde Ag? O est complètement inactif au contact des corps réducteurs. Cette association particulière ne parait pas être due à une occlusion et n'offre pas non plus les caractères d'une combinaison ; elle est carac- térisée par ce fait particulier que, lors de sa rupture, l'oxygène supplémentaire se sépare avec des propriétés que le gaz présente à l’état de liberté et sans aucune de celles qu'il possède à l’état naissant. — M. Hanriot présente une note de M. A. Carnot sur le dosage de l’antimoine. Le procédé consiste à précipiter à chaud la solution chlorhydrique d’antimoine par une lame d’étain, Le plomb et l’arsenic sont précipités en même temps. — M. Béchamp annonce que le produit de l’action du gaz ammoniac sec sur loxychlorure de car- bone sec n’est pas de l’urée, et s'occupe de déterminer les corps qui prennent naissance, — M. Friedel pré- sente une note à M. Nœlting sur l'action de l'acide azotique sur les dérivés sulfurés du toluène, du butyl- toluëne, et du butylæylène. — M. Friedel présente une note de M, Riza sur les produits résultant de la dis- tillation sèche du sel de caleium du succinate mono- éthylique; on obtient du succinate diéthylique, de ’anhydride succinique et de l'alcool éthylique, Séance du 25 mars. M. Béhal a étudié l’action des acides organiques sur les carbures éthyléniques et acétyléniques. Quand on chauffe, à une température d'environ 300, de l'acide acétique en excès et de l’amylène ou du caprylène, on obtient un acétate par fixation d’une molécule d'acide; en même temps une partie du carbure est polymérisée. L’acélate d’allyle, dans les mêmes conditions, a donné lacétine de l’isopropylglycol. Les carbures acétylé- niques chauffés avec de l’acide acétique et de l'eau à 300° se convertissent en acétones, mais la majeure partie du carbure est prolymérisée, — M. Brochet à étudié les carbures en C5 et C6 contenus dans les huiles légères de gaz comprimé, Il a pu caractériser le pro- pyléthylène, le bulyléthylène et le piperylène. Le bu- tyléthylène paraît être le seul hexylène se trouvant dans ce milieu. — M. Friedel présente une note de M. Causse sur l’action du trichlorure d’antimoine sur la pyrocatéchine. On oblient un corps cristallisé inso- luble dans les dissolvants neutres et répondant à la formule : C6 Hi 02Sb OH, Ce composéne possède plus de fonction phénolique, — M.Ch. Combes a étudié l’'anhydridesiliciformique et signale sa grande stabilité ; à l’état sec, il ne se décompose qu'au rouge en donnant de l'hydrogène silicié et de l'hydrogène; si la tempéra- ture s'élève, la quantité d'hydrogène libre va en aug- mentant rapidement, et il se dépose du silicium. L’a- cide azotique, non plus que les mélanges oxydants, n’attaque pas l’anydride siliciformique. Le silicichlo- roforme Si HCB, traité en solution dans Péther anhydre par l’aniline bien sèche donne lieu à la pro- duction de chlorhydrate d’aniline, et d'un composé si- licié, soluble dans l’éther, cristallisant bien dans ce dissolvant, et que l’on peut fondre et même sublimer sans décomposition. La formule de cette substance est HSiCI(AzH, C6'H5}?; l’action de l'acide chlorhydrique sec sur ce composé régénère le silicichloroforme et l’aniline, ce qui justifie la constitution admise dans la formule précédente, — M. Balfis, en chauffant en tubes scellés du tétrachlorure de carbone et de l'acide iodhy- drique, a obtenu surtout de liodoforme, Séance du 6 avril. M. Béhal présente un mémoire de M. Vaudin sur la composition du lait et sur la réaction acide qu'il présente après filtration; la lecture de ce mémoire donne lieu à une discussion à laquelle prennent part MM. Béchamp, Béhal, Engel et A. Combes. A. COMBEs. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 16 mars. M. Félix Lucas fait une nouvelle communication au sujet de l'ellipse centrale d'inertie d’un système plan de n points matériels ayant tous une même masse prise pour unité. En désignant par R la distance des deux points centraux d'ordre (n — 2), par A lerayon de gyration principal relatif à la droite qui joint ces deux points et par B le rayon de gyration relatif à la perpen- diculaire élevée sur le milieu de cette droite, M. Lucas établit la formule n—1 Il fait voir, en outre, que si M est la somme des affixes des points considérés, N la somme des carrés de ces affixes, la condition pour que l’ellipse d'inertie se ré- duise à un cercle est M = nN. — M. Carvallo, reve- nant sur la similitude des fonctions des machines dont il a entretenu la Société à lasuite de M. F. Lucas !,rap- 1 Voir les comptes rendus des séances des 2et 16 dé- cembre 1891 et 2 mars 4892. (Revue, deuxième année, p. 855, et troisième année, p. 114). PRES matetriesanUL /… d mt ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 251 pelle qu'il a donné récemment ce théorème : Si l'équa- tion caractéristique d’une fonction d'un type de machines dynamo ne contient pas plus de 3 constantes caractéris- tiques, les courbes de fonctionnement des diverses machines de ce type se déduisent les unes des autres par un simple changement des deux échelles de coordonnées. Le théorème suppose encore que les mesures des 3 constantes sont des fonctions, indépendantes entre elles, des 3 unités fondamentales de longueur, de masse et de temps. L'hypothèse restant la même, peut-on ramener, par un changement de variables, l'équation caractéristique à la forme abstraite, c'est-à-dire purement numérique, indépendante des données de la machine? A celte question posée précédemment par M. Lucas, M. Car- vallo répond par l'affirmation. La nouvelle démons- tration repose encore sur le principe de l’homogénéité des formules de la physique par rapport aux trois gran- deurs fondamentales. — M.F. Lucas fait remarquer qu'il résulte de la démonstration de M. Carvallo que l'équation ne renferme, en somme, que deux fonctions des 3 constantes de l'énoncé précédent, — M. Carvallo in- siste sur l’importance de ces considérations en faisant observer qu'elles s'appliquent non seulement au fonc- tionnement des machines dynamo, mais à tous lesphé- nomènes physiques. Il résume ce qui vient d’être dit dans l’énoncé suivant : Pour que l'on puisse ramener l'é- quation caractéristique à la forme abstraile en multipliant les coordonnées respectivement par des fonctions des cons- tantes de la machine, il faut et il suffit que léqualion ne dépende que de ces deux fonctions. — M. Carvallo fait une communication sur la loi d'absorption cristalline des rayons lumineux et la théorie mathématique de la lumière. Il rappelle que M. Henri Becquerel à décou- vert la loi expérimentale que voici : si un rayon lumi- neux uniradial d'intensité à traverse un cristal, son intensité à à la sortie est donnée par la formule Vi—Ni (e—m cos? a + en? cos” f + e—?=cos? v) où z représente l'épaisseur de cristal traversée par le rayon, 6 la base des logarithmes népériens, m, n, p, les trois coefficients principaux d'absorption, &, B,y les angles de la vibration de Fresnel avec les trois direc- tions principales. M. Carvallo en déduit cette consé- quence très grave pour lathéorie de la lumière, à savoir que l'absorption change non seulement l'intensité, mais encore la nature, c’est-à-dire l’état de polarisation du rayon lumineux. Ce changement persiste-t-il à la sortie du cristal, ou bien le rayon revient-il à l’état où il se trouvait à son entrée ? C’est une question que n'avait pas résolue M. H. Becquerel. M. Carvallo fait connaître à la Société les résullats suivants obtenus par lui au laboratoire de M. Bouty : 1° la loi de M. H. Becquerel est vérifiée dans le cas limite de la tourmaline (très important à cause de sa netteté) où, pour une épaisseur convenable, la formule se réduit à NE me ro e2 VI=Ni es" cos, en raison de l’ordre de grandeur de n et de p par rap- port à m. 2° Elle est également vraie pour les rayons calorifiques (longueur d'onde x = 14,84), 3° L'état de polarisation du rayon redevient brusquement àla sortie ce qu'il était à l'entrée. M. Carvallo indique comment il a pu établir cette nouvelle loi et présente, d’après cesré- sultats, l'analyse du phénomène.ll fait observer que cette loi, comme celle de M. H. Becquerel, estincompatible avec la théorie de Neumann et l'hypothèse de Fresnel qui fixe invariablement la vibration dans le plan de l’onde. Ces deux lois confirment au contraire les résul- tats antérieurement obtenus par M. Carvallo à la suite de ses recherches sur la dispersion dans les cristaux. — M. Fouret donne une démonstration élémentaire d’un théorème remarquable, dû à Kummer, sur la généra- tion des congruences de droites du premier ordre, et consistant en ce que si on excepte La congruence du pre- mier ordre et de la troisième classe composée des eordes d'une cubique gauche, toute congruence du premier ordre et de la nième classe est formée des droites qui s'appuient à la fois sur une méme droite et sur une même courbe gauche du nième ordre rencontrant cette droite en n — 1 points. — M. Laisant présente de la part de M. Guimaraes une note sur {rois normales remarquables de l’ellipse. — M. Laisant, au nom de la commission chargée du dépouillement des manuscrits d'Edouard Lucas, fait connaître que le manuscrit d’un troisième volume des Récréations mathématiques a été remis, il y aquelques jours, à lPimprimerie Gauthier-Villars. Le classement des autres travaux d'Edouard Lucas se poursuit. M. D'OCAGNE, SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 17 mars. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — MM. Hopkinson et E. Wilson : Sur les machines dynamo-électriques. Dans un mémoire antérieur (Phil, trans. 1886, p. 331), ces auteurs avaient indiqué certains résultats théo- riques auxquels ils étaient arrivés relativement à l’ac- tion exercée par les courants qui se produisent dans l’armature des machines dynamo-électriques sur les dimensions et la distribution du champ magnétique, Ils avaient constaté que les courants qui se produwsent dans les circuits fixes enroulés autour des aimants ne sont pas les seules forces magnétiques qui agissent dans une machine dynamo-électrique, mais que les courants développés dans les circuits mobiles de lar- mature ont aussi leur effet surle champ résultant. Il y a en général deux variables indépendantes dans une machine dynamo-électrique, le courant autour des ai- mants et le courant dans lParmalure; aussi la relation de la force électro-motrice au courant n'est-elle com- plètement représentée que par une surface. Dans les machines bien construites l'effet du courant de l’arma- ture est réduit au minimum, mais il ne peut jamais ètre négligé. Quand le courant change de sens dans une section de l’armature, le circuit doit inévitable- ment être momentanément interrompu, et si au mo- ment de la commutation le champ dans lequel la see- tion se meut n’est pas un champ faible, un courant intense se développera dans cette seclion, ce qui en- traînera une perte de forceset la production d’étincelles dangereuses, La disposition idéale des brosses collec- trices, c'est qu'elles soient ainsi arrangées que, pendant le temps où elles interrompent le circuit dans les diverses sections de l’armature, les forces magnéliques soient Juste suffisantes pour arrêter le courant dans cette section et pour le renverser en sens opposé. Si l’on connait la direction des brosses et le courant qui existe dans l’armature, on peut calculer l’action qui est exercée sur la force électro-motrice de la machine, Dans une série d'expériences récentes les auteurs ont vérifié ces résultats théoriques. — MM. R. T. Glaze- brooh et $S. Shinner présentent une note sur l'emploi de la pile de Clark comme étalon de force électro-motrice. Ils ont fait un grand nombre d'expé- riences sur la force électro-motrice absolue d’une pile de Clark. Ils ont obtenu les résultats suivants à 15° C. 14,342 volts ou à 62° f, 14,324 volts. Ces nombres sont exprimées en unités du Board of tread. Ils ont aussi recherché quelques-unes des causes d'erreurs que l’on pourrait rencontrer dans la mesure de la force électro- motrice de cette pile et les eflets produits par de légères variations des substances employées et de la méthode employée pour les préparer, 29 SCIENCES NATURELLES, — M. C. S. Sherrinhton: Sur la disposition des fibres éfférentes dans les racines nerveuses du plexus lombo-sacré. Les expériences ont porté sur les racines lombo-sacrées du Macacus rhésus. L'auteur a fait aussi des expériences comparatives sur la grenouille, le rat, le lapin, le chat et le chien. Ces ant- maux ont été anesthésiés profondément par le chloro- forme ou l’éther, et on a excité les racines dans le ca- nal vertébral, Il résulte de ces observations que la fré- quence des variations individuelles est assez grande 252 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES pour que l’on soit amené à reconnaitre l'existence pour chaque musele et chaque mouvement de deux {ypes d’innervation : l’un préaxial, l’autre postaxial, — M. Sidney Martin : Sur les causes de la paralysie diphtérique. L'auteur a examiné le sang et la rate, dé huit malades morts de la diphtérie et il en a extrait deux classes de substances qui ne sont point normale- ment présentes dans les tissus de l'organisme, à savoir deux albumoses et un acide organique, IL a étudié l’action physiologique de ces substances etil est arrivé à la conclusion que le Bacillus diphtericus qui se déve- loppe dans les fausses membranes exerète un ferment qui, une fois absborbé, digère les matières protéiques de l'organisme ; il se forme ainsi un acide organique et des albumoses qui déterminent de la fièvre et des paralysies par dégénérescence nerveuse. Richard A. GRÉGORY, SOCIÈTE DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 26 février. M. $. P. Thompson: Sur les modes de représentation des forces électromotrices et des courants dans les dia- grammes. L'auteur a trouvé avantageux dans quel- ques cas d'abandonner les méthodes usuelles de repré- sentation, et il porte la question devant la Société afin de la soumettre à la discussion. Pour indiquer la direc- tion des courants dans des fils vus par l’extrémité, M. Swinburne a employé des cereles avec ou sans croix, mais on n’a proposé aucun symbole pour les fils ne trans- portant pas de courant, M. Thompson pense qu'on pourrait employer le cercle simple pour des fils inactifs. Un cercle avec un point au milieu indiquerait que le courant marche vers l'observateur, et un cercle avec une croix représenterait un fil emportant le courant; on peut retenir la signification de ces symboles en consi- dérant la direction du courant comme représentée par une flèche. Le point indique la pointe et la croix les coches, Pour distinguer entre la force électromotrice et le courant, il propose de les représenter par des flèches, en traits fins et avec des coches pour la force électro- motrice, en gros traits et sans queue pour le courant. Dans le cas de la transmission électrique de l'énergie, la convention a l'avantage important que quand les deux flèches ont la même direction le système recoit de l'énergie, et quand elles sont en sens opposés, de l’é- nergie lui est enlevée. M. Maycock a récemment publié une règle simple pour trouver la direction de la force magnétique due à un courant de direction connue dans un fil. On saisit le fil avec la main droite, le pouce allongé dans la direction du courant; les doigts entourent le fil dans la direction de la force magnétique. La règle bien connue du D' Fleming pour les courants induits estaussi une règle de main droite, mais elle se rapporte à la direction des cowr'ants, et une autre règle était nécessaire pour les moteurs. En établissant la règle pour les forces électromotrices, on n’a besoin que d’une seule règle pour les générateurs et les moteurs. Pour les courants alternaüfs, l'auteur trouve qu'il convient de tracer des courbes polaires analogues aux dia- grammes du tiroir de Zeuner. Soit une ligne OP (fig. 1) représentant la valeur maxi- mum d’une force électromotrice ou d’uncourantdontla grandeur est une fonction sinusoidale du temps, et faisons-la tourner avec une vilesse uniforme autour de 0; les segments 0Q, OQ in- terceptés par les cercles OQB, OQ D représentent les grandeurs aux temps qui correspondent aux positions OP et OP’. L'effet de retard peut donc être repré- senté dans de pareils diagram- mes. Dans le cas où les varia- bles ne sont pas des fonctions sinusoïdales, les courbes OQB, OQ'D ne sont plus des cercles. On fait voir des dia- Fig. 1. grammes polaires, représentant les courbes de force électromotrice et de courant obtenues par le Prof. Ryan dans ses expériences sur les (ransformateurs, et un dia- gramme illustrant les renversements dans les courants triphasés. Pour montrer les directions des forces élec- tromotrices induites dans les diagrammes de dynamos et de moteurs, il peut être convenable d’ombrer par des hachures diagonales les forces polaires; les lignes sur le pôle nord étant dirigées de gauche à droite vers le bas, dans le sens de la barre moyenne de la lettre N, etsur le pôle sud de gauche à droite vers le haut. Un conducteur passant au-dessus d’un pôle nord de gauche à droite aurait une force électromotrice induite, dirigée vers le bas, comme l'indique la pente des hachures diagonales. Cette méthode de représentation à été employée pour montrer les modes de connexion des armateurs à tam- bour multipolaires, l’enroulement étant supposé coupé le long d’une ligne génératrice, détaché du noyau et couché à plat à la manière adoptée par Fritsche. Re- lativement aux armatures, l’auteur dit qu’on a pu- blié une formule qui permet de déterminer à l'avance la nature d’un enroulement consistant en un nombre donné de tours de fil et qui doit être employé avec un nombre donné de pôles. Elle serait, à son avis, très utile dans la pratique. — M. Blakesley dit que la vieille méthode de représentation des courants alternatifs par les pro- jections de lignes qui tournent semble préférable, car elle ne laisse pas d’ambiguité sur la direction de ces quantités. La méthode qui consiste à ombrer les pôles exige aussi que la direction dans laquelle le diagramme doit être regardé soit connue avant qu'on puisse déter- miner la direction de la force électromotrice. — M. Swinburne émet l’idée que l’auteur pourrait em- ployer un arc pour représenter la force électromotrice et une flèche pourle courant. Il pense avec M. Thomson qu'à cause des différences entre les dynamos et les moteurs, il faut rapporter les règles mnémoniques aux forces électromotrices et non aux courants. — M. Perry considère qu'il n’est pas désirable d'employer des courbes polaires, sauf pour le cas des cercles, Selon lui, on ne remarque pas assez qu'une courbe .peut être séparée en une série de courbes sinusoïdales, et chaque composante traitée séparément, les résultats séparés étant à la fin ajoutés ensemble, — M. Swinburne remarque qu'avant de pouvoir analyser une courbe de la sorte, il faut la connaître, et qu'il faudrait probable- ment l'avoir déterminée expérimentalement, Si les moyens pour trouver une courbe sont avantageux, une autre courbe cherchée pourrait probablement être trouvée par le même appareil; cependant, cela n’est pas nécessaire pour l'analyse, — M. Perry remarque qu'on pourrait faire des expériences sur une machine avant que la machine ne fût construite; quelle qu’elle soit, la courbe de la force électromotrice pouvait être déter- minée à lavance d’après le projet et par l'analyse, La courbe de courant, quand la machine marche dans des conditions variées, pouvait se calculer, — M. Ayrton, relativement au caractère mnémonique des modes de représentation décrits par M. Thompson, pense que les symboles adoptés dans le livre de l’auteur seraient F plus mnémoniques. Lui- même a l'habitude d’em- ployer de grandes lettres pour les courants, de pe- tites pour les résistances. A et a pour l’armature, S et 0 — M s pour la série, Z et z pour le shunt, et « et & pour les tours de fils de la série et du shunt, Il trouve ainsi ; pour la force électromotrice E” la règle suivante. Tracez Fig. 2. trois axes rectangulaires £ OM, OF, OE, (fig. 2). Si OF représente la direction de la force magnétique, OM celle du mouvement, OE est la direction de la force électromotrice induite. Ésett ts ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES — M. Thompson répond qu'il croit que M. Blakesley a mal compris ce qu'il a dit, car il n’y a aucune ambi- guité, En décrivant les enroulements d'armatures, une difficulté provient de la nécessité d'attribuer des noms particuliers aux éléments variés; dans son ouvrage prêt à paraître, des noms convenables ont été donnés. Pour M. Ayrton, il a montré que dans son livre il emploie des caractères mnémoniques; 7, ls €@t Ym représen- tent respectivement les résis- E, lances des bobines de l’ar- mature, et des électros en F dérivation et en série. Le ci symbole I pour le courant a été aussi recommandé par le comité de Francfort, Il n'admet pas les lettres grec- 0 ques, sauf pour des quantités M spécifiques, telles que des angles, des pouvoirs induc- teurs spéciliques, des indices de réfraclion, etc. Il apprécie la simplicité de la règle de M. Ayrton pour la force électromotrice, mais il pense qu’il vaudrait mieux tourner OE et OF d’un angle droit autour de OM, et avoir la figure 3. — Une note sur ja « flexion des longs piliers sous leur propre poids », par M. Fitzgerald est lue par M. Blakesley. Le sujet des piliers droits fixés à la base et libres au sommet est Fig. 3. ge Le] Le tableau ci-dessous permet de comprendre la règle énoncée. On voit que lorsque l’hydrure du radical (colonne C) contenu dans le monodérivé (colonne A) est marqué d’un astérisque, la colonne E indique la formation d’un mélange de dérivés ortho et para; quand l’hydrate du radical (colonne D) est marqué d'un astérisque, on obtient un méta-dérivé. Les substances marquées d’un astérisque dans la colonne C sont des hydrures qui ne peuvent être convertis en hydrates (colonne D) par oxydation directe, Les corps marqués d’un astérisque dans la colonne D sont des hydrates susceptibles d’être formés par oxydation directe des hydrures correspon- dants. La règle est basée sur cette distinction. — Henry Armstrong et J. F. Briggs : I. L'effet d'orientation relative produit par le chlore et le brome. Il. Constitu- tion des acides para-bromo et para-chloro-aniline-sul- foniques.— Henry Armstrong : Notesur les anhydrides et les acides sulfonés. -— Prof. Dunstan et John Umney : Contribution à la connaissance des alcaloïdes de l’aconit, 2° partie. Les alcaloïdes du vrai Aconitum Napellus. Les racines de l’Aconitum Napellus contien- nent trois alcaloïdes ; l’un d’eux, l’aconitine, est cris- tallisé ; les deux autres, la napelline et l’aconine, sont amorphes., — Prof. Dunstan et W. Passmore. Con- tribulion à la connaissance des alcaloïdes de l’aconit. 3° partie. Formation et propriétés de l’aconine ; sa trans- traité mathématiquement, l'équation différentielle est | formation en aconitine, — W. M. Foster : Note sur le intégrée en deux séries, procédant suivantles puissances ! charbon déposé par les flammes de gaz. — Chapman A B D E C6HECI - CL HCI' HOCI 0-p. CSH°Br Br HBr* HOBr 0-p. CSHE CHE .CH HCS* HOCHS 0-p. CSHENH2 .NH2 HNH?* HONH? o-p. CéH°0H .OH HOH* HO.0H 0-p. CSH2NO?2 NO HNO° HO:N0:* m . CH? CCI “CCIE HCCI5* HO.CCI 0-p. CéH5CO.H >COH HCO.H HO.CO.H* mn. CiHiCO.OH .CO.OH H.CO.OH HO.C0.0H* m. CiHESO2.0H :SO2.0H HSO2.0H HO.S02.0H* mn. CSH5CO.CH® CO-CHS HCO .H* H.CO.CH® mr. CSH°CH?.CO.0H .CH?.C0.0H croissantes de la variable. En appelant L le rapport de la longueur au diamètre, le résultat, appliqué aux tubes et aux baguettes d'acier, pour lesquels le mo- dule d’Young est pris égal à 12.000 tonnes par pouce carré, montre que la hauteur limite (en pieds) des piliers qui peuvent se tenir sans fléchir est donnée par 15 105 Ho LOS = __—- pour les tubes et H — = baguettes, Si L = 100, la hauteur maximum d’un tube est 1.500 pieds, le diamètre étant 15 pieds. Pour les fils, L peut avoir de plus grandes valeurs et la longueur li- mite du fil d'acier B. W. A. n° 28 est d’environ 10 pieds. SOCIETE DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 18 février. Horace T, Brown : Recherche d’un ferment dissol- vant la cellulose dans les liquides digestifs de certains herbivores. M. Brown conclut que l'attaque de la cellu- lose se fait par un ferment, distinct de la diastase, el sans action sur l’amidon. — Adrian Brown : Influence de l'oxygène et de la concentration sur la fermentation. L'action de la levüre sur les solutions sucrées est plus rapide en présence de l’oxygène qu’en présence de ce gaz. La concentration peut varier de 20 à 5 0/0 sans produire de variation ; au delà de 30 0/0 on observe un ralentissement, — Wiliam Tilden : Limeltine. Etude d’une substance cristalline retirée de l'huile es- sentielle de limon. — Beadle : i'action acide des papiers à dessin. pour les Séance du 3 mars. Prof. Crum Brown et Gibson : Règle pour détérmi- ner si une benzine monosubstituée doit donner des bi- dérivés méla, ou un mélange de para et ortho-bi-dérivés. H.CH2.C0.0H* HO.CH?.C0.0H 0-p. Jones : Dosage volumétrique du mercure, L'auteur pro- pose une modification à la méthode de Hannay. — Eleonor Field : Acide chromique. En refroidissant avec de la glace une solution d’acide chromique satu- rée à 90°, l’auteur obtient des cristaux de CrO$, — Prof. Lewes : L'origine de l'acétylène dans les flammes. L'auteur à cherché à déterminer si l’acétylène est pro- duit par l'élévation de la température ou par une oxy- dation. Il conclut en faveur de la première hypothèse, SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du T mars 2ES NATURELLES.— M.Cossar Eward : Sur les nerfs cräniens de l’homme et des Sélaciens. IL compare les nerfs cräniens du genre requin et du genre raie avec ceux de l’homme, et discute leur identité probable. Le nerf facial des poissons est beaucoup plus développé que celui d'aucun autre vertébré, mais il est exclusivement sensitif, tandis que chez l'homme c’est un nerf moteur. Chez quelques mammifères, mais non chez l’homme, il y a des vestiges d'organes sensitifs latéraux. Dans le tètard apparaissent ces organes, tandis que dans la grenouille adulte ils disparaissent, L'auteur conclut que les mammifères possèdent à l’origine des rudi- ments de ces organes, mais que ces rudiments dispa- raissent à mesure que se fait le développement, W. PEppiE, Docteur de l'Université. SOCIÉTÉ DE PHYSIOLOGIE DE BERLIN Séance du 5 février M. R. du Bois-Raymond a fait des expériences sur des lapins et sur des grenouilles avec le chloroforme 254 ACADEMIES ET SOCIÉTES SAVANTES purifié du professeur Pictet. Après avoir expliqué la préparation du chloroforme purifié par la cristallisation à —- 100° du chloroforme ordinaire, et décrit les pro- priétés de ce corps ainsi que celles du résidu, l’auteur expose ses expériences ; celles-ci ont montré que le chloroforme purifié a la même action physiologique que le chloroforme ordinaire; le résidu agit également sur la respiration comme le chloroforme ; mais l’arrêt de la respiralion se produit plus vite sous l’action du résidu que sous celle du chloroforme, et cela dans le rapport de 7 à 14. — M. le professeur Munk rapporte que M. le professeur Exner, avec lequel il avait eu une discussion au sujet de l’action du laryngé supérieur sur les cordes vocales, a fait des expériences qui ont donné les résultats annoncés par lui, Munk. — Ensuite M. Munk expose deux travaux parus récemment sur l’extirpation du corps thyroïde, travaux qu'il a pu dé- montrer erronés par de nombreuses expériences de contrôle; il en est ainsi, en particulier, des expériences dans lesquelles l'injection du suc de la glande empê- cherait les conséquences de lextirpation. — Enfin M. Munk rapporte qu'il avait recu, quelques semaines auparavant, un singe totalement aveugle, qui ne pré- sentait aucune lésion oculaire, et sur lequel on pou- vait observer une réaction pupillaire faible, mais nette. L'animal étant mort récemment, l’autopsie a fait voir que les deux lobes cérébraux postérieurs élaient ma- lades : ils étaient couverts de pus sous la pie-mère et contenaient de nombreux kystes. Séance du 19 février M. le D' Katzenstein élablit, par une élude anato- mique précise des nerfs laryngés chez le chien et chez le singe, qu’il n'y a pas de laryngé moyen. L'anasto- mose entre le pharyngé et le laryngé supérieur ne va pas aux muscles du larynx, mais s’épuise dans le cons- tricteur inférieur du pharynx. Quant à la notion qu'a- près la section du laryngé inférieur, on observe la po- sition moyenne des cordes vocales et que celles-ci ne prennent la position cadavérique qu'après la section du laryngé supérieur, M. Katzenstein ne peut la con- firmer. Il a observé aussitôt après la section du récur- rent la position cadavérique des cordes vocales par suite de la paralysie totale du muscle crico-thyroïdien, — M. le professeur Zuntz, a de son côté, étudié briève- ment l'innervation des muscles du larynx, et il a trouvé, comme M. Katzenstein, que sur un animal nar- cotisé les cordes vocales prennent la position cadavé- rique après la section du laryngé inférieur; mais, dans la plupart des cas, le jour suivant, elles sont revenues à la position moyenne. Si alors on insensibilise la mu- queuse du larynx par la cocaïne, elles passent de nou- veau à la position cadavérique. M. Zuntz en conclut qu'après la section du laryngé inférieur, il y a paralysie du crico-thyroïdien et position cadavérique des cordes vocales; si la muqueuse est sensible, son excitation produit la posilion moyenne par voie réflexe. La dé- monstration de telle ou telle innervation des muscles du larynx, au moyen de l’atrophie consécutive aux sections nerveuses, n'est pas possible, ainsi que l’éta- blit la discussion où divers physiologistes prennent la parole, car ce réactif est très infidèle, Séance du 4 mars M. le professeur Zuntz examine les expériences que l’on a faites de nouveau dans le but de démontrer le rôle de l’oxygène au point de vue de l’éliminalion de l'acide carbonique par les poumons; il s’arrête princi- palement au travail, de tous le plus récemment paru, de M. Werigo; cet expérimentaleur, à l'inverse de ceux qui, dans ces derniers temps, ont voulu résoudre] la ques- tion par des recherches sur le sang in vitro a opéré sur l'animal vivant. Au moyen d'une sonde introduite her- métiquement dans la bronche, il faisait respirer à l’un des poumons de l’animal de l'hydrogène, tandis que lPautre poumon respirait de l’oxygène pur par la canule trachéale, Le résultat fut que Fair du poumon respi- rant de l'hydrogène contenait moins d'acide carbo- nique que l'air du poumon respirant de l'oxygène, M. Werigo a conclu de ces expériences que l'oxygène favorise dans les alvéoles pulmonaires le départ de l'a- cide carbonique du sang; et en cela il est d'accord avec les résultats de Holmgren et de Bohr. S'appuyant sur ses propres recherches, expériences de respira- tion et analyses de gaz nombreuses, l’auteur démontre que, dans le travail de M. Werigo, il y a une cause d’er- reur qui ôte toute certitude à ses résultats, Entre les deux gazomètres qui contiennent les ge à respirer, hy- drogène et oxygène, et les bronches d’autre part, ilya des tuyaux dont la capacité est très grande par rapport au volume d'air contenu dans les poumons ; ces tuyaux étaient remplis l'un d'oxygène pur, l’autre d’hydro- gène, qui entraient en diffusion avec l'air des alvéoles ; dans ces conditions, l’acide carbonique diffuse dans l'hydrogène plus vite que dans l’oxygène, et la diffé- rence est assez considérable pour rendre compte de la moindre quantité d'acide carbonique contenu dans les alvéoles du côté hydrogène par rapport au côté oxy- gène. La méthode de M. Werigo ne pourrait donner une réponse précise à la question posée, que si l’un des poumons respirait de l'oxygène, l’autre respirant de l'azote ou de l'air. La possibilité d’un résultat positif n'est pas incompatible avec les recherches antérieures de M. Zuntz; il s'est convaincu que l’hémoglobine du sang se combine aux bases du sang à la facon d'un acide faible et entre ainsi en lutte avec l'acide carbo- nique; celui-ci enlève la base de la combinaison avec l’hémoglobine et la rend diffusible; il n°y a rien d’im- possible à ce que l’oxyhémoglobine possède une affi- nité plus forte, qu’elle déplace l’acide carbonique et le mette en liberté. Mais cette question importante de- mande à être tranchée par des expériences plus con- cluantes. Dr W. SkLAREK. CADEMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 15 mars. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. J. Popp: Nom- bre de tours de la terre autour de son axe pendant une année, — M. Edouard Mahler : Le calendrier des Babyloniens. Après avoir découvert la marche des an- nées bissextiles dans le calendrier babylonien, l’auteur appuie sa découverte sur des calculs astronomiques précis. Ses résultats sont certainement les matériaux les plus importants de la science chronologique. Nous savons maintenant que les Babyloniens avaient un cycle de 19 années dans lequel les années Ill, VI, VII, XI, XIV, XVI, XIX, étaient bissextiles, et nous Connais- sons la durée de chacune d’elles. Du fait que le calen- drier juif contenait aussi un cycle de 19 années, l’au- teur tire une série de conséquences historique du pius haut intérêt. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Guster Jæger : Sur la constante capillaire des solutions aqueuses.— M. Hein- rich Aufschlæger : Sur la formation de cyanures par échauffement des corps organiques azolés avec la pou- dre de zinc. L'acide cyanique, conduit sur de la poudre de zinc chauffée, se laisse réduire facilement d’après l'équation; 2 CO AzH + Zn3—Zn(C Az)?+27Zn 0 + H? D’autres corps comme Purée, lathionurée, la guanidine l'acide urique, la caféine, etc., éprouvent la même ré- duction dans les mêmes condilions. — M. Rudolph Wegscheider : Sur un éther de structure anormale. Par l’action de l’iodure de méthyle sur l'opianiate d'argent et de l'alcool méthylique sur l'acide libre, on obtient deux éthers différents comme le montrent leurs points de fusion et leurs formes cristallines, Leur composition et leur poids moléculaire correspon- dent tous deux à C!!OÿH!?,. Celui qui dérive du sel d'argent doit être considéré comme l’éther normal; il est à peine saponifié par l’eau chaude. Son isomère est un éther oxylactonique auquel l’auteur donne le nom CHRONIQUE 259 d’éther pseudométhylopianique ; il est saponifié rapi- dement par l'eau chaude. On doit regarder l’éther éthylo- pianique comme un pseudoéther. — M. Ad. Lieben : Sur l'oxydation de la pentaéthylphloroglucine bisecon- daire par l’oxygène de l’air.— MM. J. Elster et H. Gei- tel : Observations sur les chutes du potentiel atmos- phérique et les radiations ultraviolettes. La communi- cationse divise en quatre parties; les auteurs donnent d’abord la marche annuelle et diurne de l'électricité de l'air; ensuite ilsprésentent la méthode photoélectrique dont ils se servent pour déterminer l'intensité des radia- tions ultraviolettes; des tableaux et des graphiques donnent les variations diurnes et annuelles, Dans la troisième partie, les résultats précédents sont repré- sentés par des formules empiriques et ces formules discutées ; enfin dans la quatrième partie est traitée l'absorption des radiations solaires ultraviolettes par l'atmosphère terrestre. 3° SCIENCE“ NATURELLES. — M. A. Bittner : Sur les échinides du tertiaire d'Australie, — MM. Ph. Knoll et A. Hauer : Sur la facon de se comporter des muscles striés pauvres et riches en protoplasma dans certains cas pathologiques. Séance du 17 mars. SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. Blau : «Sur la déter- imination de l'azote dans les susbtances organiques, » L'auteur montre que la cause principale de la perte d’a- zote réside dans le mélange de la substance avecl'oxyde de cuivre, Il arrive à de meilleurs résultats en brûlant dans un courant d'acide carbonique, puis d'oxygène le composé placé dans la nacelle, L'oxygène et l'acide curbonique se dégagent dans un appareil convenable qui permet de les séparer de l'azote. L'avantage principal de ce procédé consiste dans sa facile appli- cation aux composés volatilss — M. Carl Puschl: « Sur la dilatation de l’eau ». — M. Theodor Gross à Berlin : « Courte communication sur la décomposition des sulfures par électrolyse. » —M. Richard Godefroy : «Sur la constitution des hydrates de carbone. » — M. Ri- chard Mayer : « Surla connaissance del’acide pyridin- carbonique, produit de la berbérine. » L'acide berbéro- nique, quise forme par oxydation delaberbérine, fournit un acide pyridincarbonique de formule CT H5 Az O'qu'on ne peut identifier avec aucun des six acides connus et indiqués par la théorie. L'auteur montre que le produit de décomposition de l'acide berbéronique est identique avec l’acide cinchoméronique et le prouve par la com- paraison des deux substances ef l'étude cristallogra- phique de leurs chlorhydrates. Il se forme aussi de l'acide cinchoméronique à côté de l’acide berbéronique dans loxydation de la berbérine. Les résultats précé- dents conduisent à regarder la berbérine comme un dérivé de l’isoquinoline, fait en complet accord avec les observations de W. H. Perkin. — M. Ad. Lieben : « Sur une cause de perte dans les dosages analytiques effectués au-dessus d’une flamme de gaz d'éclairage. » L'auteur montre que l’évaporation effectueé à feu nu comme au bain-marie donne toujours des vapeurs sulfuriques qui sont absorbées par la solution; la quantité d'acide sulfurique ne dépend pas seulement de la grandeur de la flamme et de la durée de léchauf- fement, mais aussi très visiblement de la nature de la liqueur évaporée. La chaux caleinée modérément dans un vase de platine couvert prend aussi de l’acide sulfu- rique, tandis qu'avec la soufflerie cette absorption n'a plus lieu. L'auteur donne en outre un résuué de toutes les expériences faites jusqu'ici par différents auteurs dans la même direclion. Emil Weyr, Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PETERSBOURG Séance du 10 février SCIENCES NATURELLES. — M. le D' Rogon : Sur les poissons du Silurien supérieur de l'ile d'Oesel; première partie : Cephalaspides. Les premiers restes des pois- sons siluriens ont été trouvés dans l'ile d’'Oesel par Eichwald, Schrenck et Schmidt lui-même. M. Ro- son à entrepris d'étudier tous ces matériaux ef, après avoir fait une excursion dans l'ile, il vient de publier les résultats de ses recherches. Son mémoire, d’environ six feuilles imprimées avec deux planches, contient, après l'historique de la question, une descrip- tion détaillée physiosraphique ethistologique des deux senres Thyestes et Tremataspis. On ne connaît qu’une seule espèce du premier genre : Th. Verrucosus, tandis que le genre Tremataspis compte quatre espèces, Les céphalaspides d'Oesel sont plus anciens que ceux des autres pays où on les trouve surtout dans le dévonien supérieur; les deux genres présentent deux types à part dans le groupe des céphalaspides; M. Rogon discute dans un lravail leurs affinilés avec les autres poissons au point de vue systémalique, O. BAckLUND. Membre de l'Académie. CHRONIQUE AÉROPLANES ET AÉROCAVES L'aviation est entrée dans une voie pralique : de tous côtés on refait des expériences sur la résistance de l'air contre des plans eu mouvement, Leur application immédiate est la construction d’un aéroplane, c’est-à- dire d’une surface plane, inclinée sur l’horizon d’un angle très petit, et poussée en avant par des hélices, Skyle, Chanute, Maxime, Langley, Drzewiecki comptent parmi les plus remarquables promoteurs de ce sys- tème, soit par leurs expériences, soit par leurs calculs, Certains, après avoir fait des tables de rendement pour des surfaces planes, recommandent d'employer une surface analogue à celle d’un grand voilier.Il ya là quelque contradiction et confusion ; une telle surface est bien différente d’un plan. Le mot aéroplane, dans la définition primitive de Wenham, signifie un plan; l'aé- roplane de Stringfellow(1868) était formé par des plans superposés et inclinés d’un très petit angle sur la di- rection du mouvement. En étendant ce mot à des sur- faces courbes, on fausse les idées; la surface de soutien et de vol d’un animal est un aérocave tordu et non un aéroplane. M. Drzewiecki est allé plus loin dans cette voie. In- fluencé sans doute par la théorie du plan du Profes- seur Marey, il a appliqué au vol la théorie de l’aéro- plane, en ramenant tous les mouvements de l'aile à ceux d’un plan incliné d’un angle très petit sur la di- rechon du vol. Une telle assimilation est bien difficile à concilier avec la myologie, lostéologie et l’aérodynamique. Un des facteurs les plus négligés par la majorité des aviateurs est la forme de l'aile; c’est cependant un fac- teur de premier ordre, sans lequel on ne quittera pas le sol ou on le regagnera trop vite, malgré les moteurs les plus perfectionnés. La plupart des aviateurs ont une tendance à remplacer l'aile par une planche; de là ces expressions obscures : «le plan de Paile... l'incli- naison de l'aile. l'axe de rotation de l'aile... » Ces expressions n'ont aucun sens tant que vous ne spéci- fierez pas quel estle ds ou élément de surface dont il s'agit. Il peut en outre y avoir plusieurs axes si- multanés de rotation et non un seul. Qu'on remplace une portion infinitésimale de courbe passant par deux points par la droite sécante, c’est là un procédé fort usité, et nullement nocif; mais c’est en abuser que de remplacer toute une surface ondulée et concave par le plan de trois de ses points. Certaines ailes ont des creux fort respectables, qu’il y a inconvénient à combler. Il ne faut pas comparer aux mouvements dune aile naturelle ceux d’une palette tératologique et arguer de son faible rendement pour battre en brèche la théorie orthoptère; il n’y à de battue en brèche que la théorie basée sur les mouvements de haut en bas d’une sur- face plane. M. Drzewiecki peut s’appuyer sur une grande autorité, celle du professeur Marey: ce dernier est tou- jours d'avis que l’aile se conduit à la facon d'une go- dille dans l’eau, c’est-à-dire qu’elle agit comme un plan incliné à chaque phase de son mouvement de va-et- vient (Voir Nature 30 janvier 92). Mais les photogra- phies du vol d’abeilles et de tipules ne nous paraissent pas confirmer cette manière de voir; elles prouvent seulement que dans l’abaissement : 4° l’aile se porte en bas et en avant :2le bord postéro-distal seul subit une torsion. Ce sont là deux faits consignés depuis long- temps ! dans l'anatomie du vol des insecles, et basés sur la forme des articulations et de l’aile, la résistance de l’air,et sur le jeu des muscles.La chronophotographie n'autorise nullement à négliger l’action musculaire, en laissant exclusivement à l'air le pouvoir de modifier la surface alaire. Jerappellerai que l'aile estun solide élastique, aplati, mais non plan, dont l'épaisseur va en diminuant de l'avant à l'arrière, et du proximum au distum. Sa face inférieure est concave avec, toutefois, une zone d'in- flexion plns ou moins accusée vers le milieu ou le tiers proximal de l'aile ; elle est en outre gauchie ou tordue, La concavité diminue en allant de la base au distum. Le degré de concavité et la torsion suivent une marche ondulée. La plus large projection plane de l'aile a un contour trapézoidal, à pointe centrifuge. Une sinusoide à branches inégales est la ligne ca- ractéristique de ce solide, et non la droite (Marey) ni la spire cylindrique (Petityrew). La torsion et le degré de courbure en un point sont variables d’après la résistance de l'air, le degré d’élas- ticité et l'action des muscles spéciaux, ce dernier fac- teur réagissant d'autant plus efficacement que le point est plus rapproché de la base *?. , : Sous sa forme la plus schématique, l'aile est rédue- tible à deux surfaces accolées suivant le squelette os- seux (Vertébrés) ou la nervure médiane (Insectes); le versant antérieur est plus ou moins développé, mais il est constant: le versant postérieur est le plus large, le seul dont on se préoccupe habituellement, L'angle des deux versants est variable; il va en diminuant du proximum au distum. Les variations de cet angle sont sous la dépendance : 1° de la résistance de l'airetde l’élasticité de l'aile; 2° de museles spéciaux, C’est là le schéma du dièdre, en opposition à la théorie du plan. Après une telle définition de l'aile, il n'est pas pos- sible de l'assimiler à un plan incliné, même quand on compose son mouvement avec celui de translation. L’inclinaison de l'aile varie en chacun de ses points, puisqu'elle est courbe, En se bornant même à lincli- naison de cordes allant du bord antérieur de Paile au bord postérieur sur un plan suspenseur idéal, on peut avoir des 15°, 20°, ef plus de divergence, si bien qu'on ne peut définir l’inclinaison de l'aile par un seul angle. Il y aurait cependant une part de vérité dans la théo- rie de l’aéroplane. Il est possible que le plan sustenseur de Paile (un plan instantané passant par exemple par 1 Voir Amans, Comparaisons des organes du vol, 1885, et particulièrement pages 45, 48, 210. , 2 Je publierai prochainement la topographie comparée de l'aile dans toute la série animale. Je montrerai en outre quel peut bien être le rôle de cette zone d’inflexion, Jusqu'ici né- gligée par tous les aéroplaneurs. Le célèbre Smeaton est peut-être le seul qui ait essayé un tel facteur ; son expérience est des plus curieuses, et des plus méconnues. CHRONIQUE l'articulation scapulo-humérale, et deux points du bord postérieur de l'aile, lun vers le distum ou au distum même, l’autre vers la base)fasse un angle très petit avec la direction du mouvement, Mais, au lieu de faire des expériences avec des surfaces planes, il vaudrait mieux employer des surfaces concaves, sinusoïdales, des aérocaves en un mot, et non des aéroplanes. Les expériences seraient plus difficiles, plus longues, mais plus instructives et en rapport plus étroit avec le vol. La comparaison avec les photographies instantanées donnerait la clef de certaines particularités du vol ra- pide de translation. Quant au vol sur place, il faudrait, pour l'expliquer, chercher une autre méthode que celle des aéroplanes. Lorsqu'un oiseau ou un insecte reste en panne, en air calme, on est bien forcé d'admettre que la sustension est produite uniquement par les battements. En réa- lité l'animal vibre de haut en bas, et d'avant en ar- rière, mais avec des amplitudes assez petites, souvent inappréciables à l'œil nu (cas de la Mouche). En ce cas, que vient faire la vitesse de translation? J'admets que l'équilibre soit plus difficile à garder et le travail dé- pensé plus considérable ; mais de là à nier la distinc- tion entre le vol ramé et le vol à voile, ou plutôt les en- slober tous deux dans le système aéroplane, il y a loin. M. Drzewiecki a expliqué d’une facon très ingénieuse l'équilibre des aéroplanes par la loi de Jæssel; mais, pour les surfaces concaves analogues à celle de l’oi- seau, on ignore les positions du centre de poussée, et les directions de la poussée aérienne, On a fait très peu d'expériences dans cette voie. Parmi les avantages des surfaces concaves dissymétriques d'avant en arrière, il y en a une connue des marins dès la plus haute antiquité : c'est la facilité de cingler au plus prèstou à la bouline. Goupil ! a profité de celte observalion pour expliquer la supériorité des ailes naturelles sur les artificielles planes, Lilienthal a repris la même idée et démontré : 1° qu’une palette concave donne une plus grande force de sustension qu'une plane; 2 que la résultante des pressions aériennes est située en avant de la normale à la palette, si bien qu'il y a des cas où la palette n’est pas entraînée par le vent : il peut même y avoir une composante propulsive, ce qui expliquerait la facilité de marche des cigognes contre le vent. Je suis moi- même ? arrivé à des résultats analogues avec une pa- lette rotatoire, et j’ai pu mettre en évidence cette bien- faisante composante propulsive avec une palette animale. J'ai aussi insisté sur l'importance du principe de l’ovoïde appliqué à laile, comme au véhicule tout entier. Les auteurs précités ne l’ont pas négligé, tan- dis qu'il ne figure pas dans la théorie de laéroplane. On recommande bien d'essayer un aéroplane semblable aux ailes d’un grand planeur; mais alors ce n’est plus un aéroplane, mais un aérocave tordu, et, après tout ce qui précède, on ne m'accusera pas d’avoir cherché une simple querelle de mots. D' Amans {de Montpellier.) Erratum. — Quelques lettres tombées pendant l’im- posilion du dernier numéro de la Revue ont été incor- rectement remplacées par l’imprimeur : Page 191, au lieu de « $ 3 », lisez : K 1. — 493, (le taux de la mortalité à Marseille dé- passe. ) Au lieu de « 3 0), », lisez : 33 02/0. — 214, au lieu de « membres», lisez : membranes. = = « signes » — lignes. — —- « vendue » — tendue. — — « luivi » — suivi. _— — « tolume » — volume. 1 La locomotion aérienne, Goupil 1884. 2 Der Vogelflüg, von Lilienthal 1889. x 3 Congrès de Zoologie et d'Aéronautique 1889. — Congrès de Marseille pour l’avancement des sciences 1889. Le Directeur-Gérant : Louis OLivier Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. LE ET 3° ANNÉE N° 8 30 AVRIL 1892 REVUE GÉNÉRALE % DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE NOMENCLATURE CHIMIQUE TENU A GENÈVE DU C'est une œuvre considérable que celle entre- prise par les savants réunis la semaine dernière à Genève, toute d'iniliative privée, que les gouver- nementsn'ont point subventionnée et qu'ils conli- nueront probablement à ignorer; — grande pour- lant et par les résultats déjà acquis et par le but vers lequel elle tend. On se fera facilement une idée de l'intérêt qui s'attache aux questions agitées au Congrès de Ge- nève si l’on considère que les savants — et les plus illustres de tous les pays — ont tenu à y assister. Nous ne pouvons énumérer ici les noms de tous ceux qui sont venus : il suffit d'indiquer, parmi les représentan(s des diverses nationalités, les noms de Von Baeyer, Emile Fischer, Nœlting, Tiemann (Allemagne), Cannizaro (Italie), Gladstone, Ramsay (Angleterre), Lieben, Skraup (Autriche), Græbe. Guye. Hantzch, Nietzki (Suisse), Friedel, Le Bel (France), Franchimont (Hollande), Istrali (Rou- manie), Delacre (Belgique). MM. Beilstein et Mende- lejeff (Russie), Ira Remsen (Etats-Unis), Armand Gautier (Paris), qui n’ont pu venir, ont envoyé leur adhésion !. ! Voici la liste des savants qui ont pris part aux travaux du Congrès : MM. H. ARMSTRONG, professeur à la Central Institu- tion, Londres, secrétaire de la Chemical Society; A. Ar- NAUD, professeur au Muséum, à Paris; Adolphe von BAEYERr, professeur à l’Université de Munich; BarmtER, professseur à la Faculté des sciences de Lyon; Aug. BÉHaL, prof l'École supérieure de pharmacie de Paris; Louis Bor qe docteur és sciences, Paris; Stanislas CANNIZARO, professeur à l’Université de Rome; Paul CAzENEUVE, professeur à la REVUE GÉNERALE DES SCIENCES, 1892. 18 AU 24 AVRIL 1892 La ville de Genève a fait au congressistes un accueil des plus chaleureux ; M. le conseiller d'Etat, Richard leur a souhaité la bienvenue dans la pre- nmière séance, qu'il a présidée; et un comilé local, formé des principaux hommes de science de Ge- nêève, a veillé avec un zèle el une sollicitude toute particulière à l'organisation matérielle. De l’hos- Faculté de médecine de Lyon; Alphonse Comes, docteur ès sciences, Paris; Alphonse Cossa, directeur de la Station expérimentale d'agriculture, à Turin; Maurice DE LaAcrE, professeur à l’Université de Gand; Michel Ficeri, professeur à l’Université de Turin; Emile Fiscner, protesseur à l’Uni- versité de Würzbourg; A.-P.-N. FRaNCuIMONT, professeur à l'Université de Leide ; Charles FrrepEL, membre de l’Institut, professeur à la Sorbonne, Paris; Dr J.-H. GLADSTONE, F. R. S., Londres; Carl GRAEBr, professeur à l'Université de Genève; Philippe-Auguste Guye, professeur à l’Université de Genève; Isrrati, professeur à l’Université de Bucarest; Albert HazLrer, professeur à la Faculté des sciences de Nancy; Maurice Haxrior, professeur agrégé à la Faculté de médecine, Paris; A.-R. Haxrsen, professeur à l’Ecole poly- technique de Zurich; Achille Le Bec, docteur ès sciences, à Paris; A. LieBex, professeur à l’Universté de Vienne; Léon MaQuEexxe, docteur ès sciences, aide-naturaliste au Muséum, Paris; von Meyer, professeur à l'Université de Leipzig; Denis Monnier, professeur à l'Université de Genève; R. Nrerzkt, professeur à l'Université de Bàle; Emilio Nozt- rING, directeur de l’École de chimie de Mulhouse ; Emmanuel PAarerxo, professeur à l'Université de Palerme; Amé Picrer, privat-docent à l’Université de Genève; William Ramsay, F. R. S., professeur à l’Université de Londres; Zdenko-H. Skraur, professeur à l'Université de Graz; Ferdinand Tix- MANN, professeur à l’Université de Berlin. Le Comité local d'organisation se composait de : MM. Emile Avor, H.-W. pe BLoxay, Alex. CLaparëpe, Professeur C. GrAEBE, Professeur Fh.-A. Guxe, Alex. Le Rover, Profes- seur Denis Monnier, Amé Prcrer, Fréd. Reverpix, Profes- seur Albert Rizcier, Edouard SARAsix. 8 258 A. COMBES. — LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE NOMENCLATURE CHIMIQUE pitalité reçue tous garderont un souvenir char- mant, etsi les résultats obtenus par cette réunion sont nombreux etintéressants, on le doiten grande partie à l'excellente organisation qu’ils ont im- provisée; nous devons tous une vive reconnais- sance à MM. E. Ador, de Blonay, A. Claparède, C. Græbe, Ph. A. Guye, A Le Rover, Denis Mon- nier, À. Pictet, F. Reverdin, A. Rilliet et E. Sa- rasin. I Je voudrais essayer de donner aux lecteurs de la Revue une idée générale de l’œuvre commencée, de son utilité, de la grande part qui revient à la France dans le travail commun. Tout le monde sait quel développement a pris la chimie organique dans ces dernières années, quel nombre immense de composés nouveaux, à fonc- tions parfois très complexes, ont été découverts, combien des principes immédiats fournis par la Nature ont été obtenus par synthèse; je devrais presque dire construits, tant les procédés de la chimie moderne semblent constituer une sorte d'architecture atomique aux combinaisons infini- ment variées. Mais cette richesse a eu pour consé- quence que les principes admis à l’origine pour nommer les composés organiques, n’ont pas tardé à devenir complètement insuflisants. A mesure que les théories se simplifiaient, que les analogies entrevues s’aflirmaient davantage el créaient des liens étroits entre des corps divers, le langage chimique se compliquait de jour en jour et se chargeait de conventions nouvelles, souvent contradictoires, impuissantes pourtant à traduire à l'oreille ou aux yeux l’ensemble des propriétés et des analogies représentées par les formules ato- miques. Cependant, il ne parait pas possible de donner un nom simple à chacun des corps connus, impossible également de construire des tables ou des dictionnaires avec des formules; et, d'autre part, le grand nombre des composés connus, la multiplicité des noms attribués à un même corps introduisent dans les bibliographies une confusion des plus fâcheuses. De là la nécessité absolue de créer un langage nouveau. Pressentie par tout le monde, cette nécessité a élé mise en évidence pour la première fois, d’une manière précise, au Congrès de chimie qui eut lieu à l’occasion de l'Exposition universelle de 1889. Il fallait trouver un équivalent au langage absolu- ment universel des formules chimiques. Une Com mission internationale, formée de savants de lous les pays, fut nommée : tous acceptèrent de com- mencer l'étude préalable des propositions qui pourraient être soumises à l'acceptation des chimistes. Des membres francais résidant à Paris, on forma une sous-commission, à qui revint en définitive la tâche diflicile de préparer le terrain et de rédiger un rapport qui pût servir de base aux discussions de la Commission internationale. Ils se sont mis résolument à l'œuvre; c’est bien réel- lement à eux, et particulièrement à leur illustre président, M. Friedel que revient, comme l'ont pro- clamé MM. Græbe et Von Bæyer, l'honneur d'avoir mené à bien cette tâche délicate, et permis par conséquent aux chimistes assemblés la discus- sion de résolutions précises, appuyées sur une ètude approfondie #!. Les membres du Congrès ont applaudi aux pa- roles de MM. Græbe et Bæyer et manifesté leurs sentiments en désignant à l’unanimité M. Friedel comme président du Congrès, MM. Cannizaro, Glad- stone. Lieben et von Bæyer ont été élus vice- présidents. Il Deux systèmes se trouvaient en présence : 1° Décider qu'à l'avenir un composé quelconque ue porterait plus qu'un seul nom formé suivant des règles précises, et que ce nom-là figurerait seul dans les recueils de bibliographie. Le très grave inconvénient de ce procédé est que les noms ainsi formés constituent une nomencla- ture écrite, mais non parlée; ce qui oblige à avoir deux nomenclatures : une pour les dictionnaires, une seconde pour l'exposition orale. 2° Adopter un procédé de nomenclature per- mettant de nommer un corps quelconque en indi- quant sa constitution, sans s’astreindre à n'avoir qu'un seul nom possible. Ce second moyen laisse encore place à des confusions nombreuses, conduit à des noms d’une longueur inacceptable dans le langage courant et à introduire dans les mots des changements qui ne répondent pas exactement à ceux que subit le squelette du composé. Après une discussion, à laquelle ont pris surtout part M. Lieben, M. Von Baeyer et les membres de la Commission française, le Congrès a tranché la difficullé en admettant les principes très simples que voici : L'ensemble des atomes de carbone reliés directe- ment les uns aux autres forme une sorte de sque- lette invariable, qui se retrouve dans tous les corps dérivés par substitution de l'hydrocarbure qui le contient; le nom de cet hydrocarbure représentera donc ce squelette et devra par conséquent se re- trouver dans tous les dérivés. La question est ramenée par ce procédé, pour les composés à fonctions simples, à la nomencla- ! Voici les noms des membres français à qui est due la rédaction du Rapport : MM. Friedel (président), A. Gautier, Grimaux, Béhal, Bouveault, A. Fauconnier et A. Combes, A. COMBES. — LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE NOMENCLATURE CHIMIQUE 259 ture des hydrocarbures; or celle-là est extrèe- mement simple : les hydrocarbures à chaine nor- male portent des noms dérivés des nombres grecs qui expriment le nombre des atomes de carbone qui forment le squelette. La fonction que remplissent ces hydrocarbures estexprimée au moyen d’une désinence très courte; Pour les hydrocarbures saturés, on emploiera la désinence ane : Ex. CH3 — CH? — CH? — CH? — CH Pentane. Pour les hydrocarbures éthyléniques ène : Ex. CH3 — CH? — CH? — CH = CH® Si la fonction éthylénique est double, triple etc., on dira diène, triène, etc.: Ex. CH? = CH — CH? — CH = CH? Pentène. Pentadiène. Pour les hydrocarbures acétyléniques, on em- ploiera la désinence ne : Ex. CHS — CH? — CH? — C—CH CH = C— CH2 — C = CH Pentine. Pentadiine. Les hydrocarbures à chaine arborescente sont regardés comme dérivés, par substitution, des hy- drocarbures normaux, el on rapporte leur nom à la chaine normale la plus longue qu'on puisse établir dans leur formule : 1 2 3 4 5 Ex. CH3 — CH? — CH — CH? — CHÈ 3 Méthyl Pentane. CH La désignation des divers atomes de carbure se fait en les affectant de numéros placés d'une ma- nière invariable, déterminée d’une manière très simple; on désigne par 1 l’atome de carbone le plus voisin de la première substitulion dans la chaine normale : 9 1 2 CH — CH — Ex. CH: — CH — CH 2 Méthul Pentane. Vus Ce numérotage est conservé pour tous les déri- vés des hydrocarbures. Il sudit maintenant, pour désigner les composés à fonction simple, d'adopter des désinences carac- térisant les fonctions : les alcools prennent tous la désinence 0! : Ex. CH3— CH? — CH? — CH? — CH OH Pentanol Si la fonction alcool est multiple, on dira diol, briol, etc. : Ex. CH CHOH CH CHOH_— CH: 2,4, Pentane diol Les aldéhydes se désignent par al : Ex. CHO — CHO Elhane dial (glyoxal) Les acétones par one : Ex. CH3 — CH? — CO — CHS Butanone. Les acides se désignent en faisant suivre le nom de l’hydrocarbure de la désinence oîque : 1 2 3 4 5 Ex. CH5—CH— CH3 — CH? — CO? H acide 2 Méthyl- | penlanoique ; *TT> 3 CO2H — CH? CH?— CH? — CO?H III On voit combien sont simples el logiques les procédés adoptés par le Congrès; il ne nous est pas possible de les indiquer tous ici : ils permettent de fixer un nom et un seul pour un composé quel- conque ; ce nom sera le nom officiel qui figurera dans tous les ouvrages de bibliographie : tables, diction- naires, — {out en permettant dans le langage cou- rant d'employer des noms moins explicites, formés d’après les mêmes règles générales. La plupart des décisions qui ont été prises sont conformes aux propositions de la Commission française ; le premier principe adopté est dû à M. von Bæyer et à M. Lieben. Quelques questions ont été définitivement tran- chées, comme, par exemple, la nomenclature offi- cielle des dérivés du benzène, sur laquelle les pro- positions françaises ont été entièrement adoptées ; sur d’autres, très délicates, comme la nomenclature des composés à fonction complexe, l'accord com- plet n’a pu être obtenu, et de nouvelles études auxquelles participeront les rédacteurs de la Æevue générale des Sciences et des journaux chimiques du monde entier, ont été décidées. Dans un futur et sans doute prochain congrès, la nomenclature dont les bases viennent d’être posées, dans l’importante réunion de Genève, sera définitivement faite. En résumé, beaucoup de résultats sont dès maintenant acquis ; mais ce qui est bien plus im- portant encore, les savants de toutes les nations européennes se sont réunis, ont échangé leurs manières de voir, remué en commun un grand nombre d'idées, et cependant la plus parfaite en- tente et la plus grande cordialité n’ont cessé de acide Penlane dioique. régner parmi eux : il n'y avait là que chercheurs avides de progrès. Dans une éloquente improvisa- tion, prononcée au banquet offert par les savants de Genève aux membres du Congrès, M. von Bæyer, rappelait qu'au commencement du siècle, la chimie expérimentale a élé transportée de France en Allemagne par Liebig, qui l'avait apprise de Gay-Lussac. C'est en France que l'Allemagne a trouvé les premiers éléments de son développe- ment scientifique. Maintenant la chimie a pris dans la patrie de Liebig un essor admirable, tel que l'Allemagne ne peut redouter aucune compa- raison. Demain peut-être une autre nation viendra, France, Russie, Italie ou Angleterre, qui prendra le premier rang. Il ne faut pas, a dit l'illustre sa- vant, s'en plaindre, ni le redouter; car, dans cette lutte pacifique, la science ne peut s'amoindrir : elle vole toujours plus haut. 260 CH. FRIEDEL. — LA CONSTITUTION DE L’ACIDE CAMPHORIQUE On ne peut que s'associer à ces belles paroles; c'est pourquoi tous, en quittant Genève, nous pensions qu’on venait de travailler utilement, non seulement à une œuvre de science, plus encore à une œuvre de paix et de fraternité. A. Combes, Membre de la Commission internationale. La Socièté de Physique et d'Histoire naturelle de Genève, présidée par A1. E. Surasin, a eu l'amabilité d'inviter, à la suite du Congrès, les savants étrangers à assister à l’une de ses séances. Priès par elle de dire quelques mots relatifs à leurs récents travaux personnels, MA. Friedel, de l'Institut de France, Haller, Nœlting et Maquenne ont fai les conférences suivantes : Conférence de M. Ch. Friedel | Résumé) LA CONSTITUTION DE L'ACIDE CAMPHORIQUE. La formule qu'on admettait généralement jus- qu'ici pour exprimerla conslitutionde l'acide cam- phorique contient deux carboxyleset peut s’écrire : LE SOE NCO2H Cependant, si l’on étudie attentivement les réac- tions de cet acide, on s'aperçoit qu'elles ne sont pas semblables à celles des acides bibasiques propre- ment dits : vis-à-vis de l’acide sulfurique, par exemple, l'acide camphorique se comporte comme un acide-alcool, comme l'acide cilrique ou l'acide lactique : il se dégage de l'oxyde de carbone. et l'on obtient un acide bibasique renfermant les éléments de l'acide sulfurique C’HO?2SO*H. Sur les réactifs colorés, comme l’orangé III, l’action rappelle aussi celle des acides-alcools, comme l'acide glycolique, les deux basicités de l’acide camphorique ne jouent certainement pas le même rôle : elles ne peuvent pas se représenter loutes les deux par des car- boxyles. On peut expliquer cela en admettant que l’acide camphorique conlienne un seul carboxyle, et un groupe hydroxyle OH, auquel le voisinage du car- boxyle et du groupement cétonique du camphre donne des propriétés fortement acides. On est amené alors à formuler l'acide camphorique de la manière suivante : CO2H lo H2C co H°C CH? CH CH? qui dérive du camphre par oxydation et hydra- tation simultanés : CH° CO?H | | C COH HC CO 2C co HO H?C CH? H?C CH? CH CH | | C3 H7 C:H7 il devient alors un dérivé de l'hexaméthylène. Sicette formule à priori de l’acide camphorique est vraie, elle doit pouvoir se vérifier expérimen- talement par quelque réaclion. En particulier, les éthers monoéthyliques de l'acide camphorique doivent être différents et jouir de propriétés très diverses, suivant que le goupement éthylique est rattaché au groupe carboxyle CO?H ou au groupe- ( ment alcool tertiaire —COH En effet, si l’on soumet | à l’action de l'acide chlorhydrique un mélange d'alcool et d’acide camphorique, on oblient un éther monoéthylique, liquide visqueux, jusqu'à présent incristallisable, qui se saponifie très faci- lement par l'action de la potasse alcoolique en ré- générant l’acide camphorique; et on ne peut par l’action de l'acide chlorhydrique pousser l’éthéri- fication jusqu'à l’éther diéthylique; il en résulte évidemment pour formule de l’éther monoéthy- lique : COC?H* | COH H°C co H2C\ CH? CH CH Si, au contraire, on fait agir sur le camphorate neutre d'argent l’iodure d'éthyle, on obtient faci- lement un éther diéthylique CO2C2H5 | CO C2H5 H°C/ \co HC\ )CH: H 5H? c—o Soumis à l’action de la potasse alcoolique bouil- lante, il ne se saponifie que parliellement si on ne prolonge pas l'opération très longtemps, et le pro- duit obtenu est alors un éther monoéthylique qui crislallise parfaitement et est Lout à fait différent du précédent. La difficulté avec laquelle on sa- ponifie ce nouvel éther pour remonter à l'acide camphorique lui assigne sans aucun doute la for- mule : A. HALLER. — FORMULE ET FONCTION DE L'ACIDE CAMPHORIQUE 261 CO2H | COC2H° H?C Co H?C CH Il y a là une vérification expérimentale extrème- ment nette de la formule admise plus haut pour l’acide camphorique. Les mêmes phénomènes se retrouvent dans Îles éthers de l'acide isocamphorique, découvert par M. Friedel par l’action de la chaleur sur l'acide camphorique ordinaire en présence d’eau. Seule- ment, dans le cas de l'acide isocamphorique, c'est l'éther facilement saponifiable qui est cristallisé, et l’autre qui est liquide. La formule admise pour l'acide camphorique permet également de comprendre parfaitemenl la transformalion réversible d'acide camphorique en acide isocamphorique, et par conséquent l’exis- Lence de quatre acides camphoriques : Traduite en nolation stéréochimique, cette for. mule s'écrit, en effet, (en se bornant à figurer les tétraèdres des deux carbones reliés aux groupes CO°H et CH) : OH CO2H “fe CH? H2c CH2 ca Acide camphorique Acide camphorique droit gauche Quand on soumet l'acide camphorique droit à l’action de la chaleur, il y a permutlation des groupes CO OH et OH, et on arrive alors aux acides isocamphoriques : OH CO2H COHf 70H H2C à LA TÉREES co oc CH? HCE— CH? CE JC HE HZ /c°# c°# Acide isocamphorique Acide isocamphorique gauche droit De même, si l’on chauffe dans les mêmes condi- tions l’acide isocamphorique, il se transforme en acide camphorique ordinaire, ce qui explique que le produit de l’action de la chaleur sur l’un ou l’autre de ces acides conduit toujours à l'acide mésocamphorique, qui est un mélange à parties égales d'un acide camphorique et d’un acide iso- camphorique ; les pouvoirs rotatoires des acides formant le mélange sont toujours de signes con- traires. Conférence de M. A, Haller LA FORMULE ET LA FONCTION DE L’ACIDE CAMPHORIQUE La fonction des acides hydroxycamphocarbo- nique et cyanocampholique C'H1#0'etC!°H17CAzO? paraissant intimement liée à celle de l’acide cam- phorique, j'ai entrepris de rechercher si ce der- nier acide possède réellement la triple fonction carboxylique, alcoolique et célonique, telle que l'indique la formule préconisée par M. Friedel. COOH Lou H2C/ \CO H2C| Jcu2 CH de J'ai commencé par préparer les deux éthers méthyliques acides isomères qui crislallisent ma- gnifiquement et qui se distinguent nettement l’un de l’autre par leurs propriétés physiques. Ces deux éthers se comportent à l'égard de la potasse comme leurs homologues supérieurs préparés par M. Friedel. Si l'acide camphorique possède une fonction cétonique en position f par rapport à la fonction carboxylique, il doit pouvoir fournir avec la phé- nylhydrazine une sorte de pyrazolone hydroxylée soluble dans les alcalis : CO — Az | HOC is H°C\ CH? CH | CH? Il se forme, en effet, une combinaison répondant à cette formule; mais elle est insoluble dans les alcalis et ne possède point les réactions des pyraz- olones. Ce même composé a d'ailleurs été obtenu par MM. Friedel et Combes en traitant l’anhydride camphorique par la phénylhydrazine. Ces recherches n'ayant pas conduit à un résultat décisif, j'ai traité le camphorate acide de méthyle par de la phénylcarbonimide, dans le but d’en pré- parer une espèce d'uréthane phénylée. Dans ces conditions, il se forme de l’acide carbonique, de la diphénylurée symétrique, un produit sirupeux et un corps cristallin, résultant de l’union de deux molécules de camphorate acide de méthyle avec élimination d’une molécule d’eau : 2CU HS O1 — H20 + C2? H3107 Le phlalate acide de méthyle fournit dans 262 E. NOELTING. — LA TRIAZINE les mêmes conditions de la phénylphtalimide. Ayant trouvé que la diphénylurée donne avec les anhydrides succinique et phtalique, à une tem- pérature de 150° environ, les phényl suecin et phtalimide suivant l'équation. COX É / AzHCSES Ko À OK HR — me NACRE + CO? + Az H? C5 H5 \co” j'ai soumis l’anhydride camphorique à la même réaction. J'ai obtenu dans ces conditions un corps se rapprochant d'une dianilide camphorique : : ARE HC5H° N CO Az HCSH5 Dans tous ces essais, l’acide camphorique ne se comporte done pas de la même manière que les acides succinique et phtalique. Toutefois, ces faits, tout en étant en faveur de la formule de M. Friedel, ne me paraissent pas encore suffisamment décisifs pour trancher la question de la fonction de cet acide. Conférence de M. E. Noelting SUR LA TRIAZINE Vous connaissez tous, Messieurs, les admirables travaux de M. Curtius sur la triazine AZH, ce corps composé, comme l’ammomiaque, seulement d'azote et d'hydrogène, mais qui, à l'encontre de l’ammoniaque, montre des propriétés acides très prononcées. Il fournit des sels dont quelques-uns sont doués de propriétés explosives, et tout son caractère chimique est en rapport avec la déno- mination d'acide azothydrique sous lequel on le désigne même plus généralement. M. Curtius a décrit plusieurs procédés pour obtenir l'azoimide, identiques en principe et ne variant que par le dé- tail de l'expérience. Ils consistent à préparer d'a- bord la combinaison triazinique d’un radical acide, tel que le benzoyle ou l'hyppuryle, et à scinder celle-ci par la potasse ou les sels de l'acide corres- pondant et de l’azoimide. par exemple : C5 Hi CO — Az — Az + 2 KOH — N / Az = Ci H° COOK + KAz— A7 LH20 \ AZ Ces acidyle-triazines s'obliennent par l’action de la diamide sur les éthers des acides, etle traite- ment ultérieur de ces hydrazides par l'acide azo- teux. comme le montrent les équations suivantes : 1) C5 H°COO C2 H5 + Az H? — Az H?2 — — CH CO AzH.AzH? + C’H*OH: 2) CSH° CO Az — Az H? + H Az O0? — | H — CS H°CO Az — AzH? + H?20 AzO 3) CSH® CO.Az — AzH?=— Ci H5 CO. Az — Az + H?0 | NCA Az0 Az Comme on le voit, la préparation de l’acide azo- thydrique était une opération un peu compliquée, car il fallait, avant tout, posséder de la diamide, qui, l'année dernière, était encore un corps assez diflicilement accessible. Animé du désir de voir par moi-même l'acide azothydrique et ses combi- naisons, je me suis posé la question de savoir si l’on ne pourrait pastrouver un procédé plus simple pour l’obtenir, et j'y ai réussi en me basant sur les considérations suivantes. D’après les travaux de M. Curtius, la phényiltria- CSHSAz — Az zine ou diazobenzolimide de M. Griess, NZ devait être considérée comme l’éther phénylique de l'acide azothydrique, tout comme le chloroben- zène CSHCI est l’éther phénylique de l'acide chlo- rhydrique. Il n’y avait guère d'espoir d'obtenir l'acide azothydrique par saponification de la phé- nyltriazine, qui, tout comme le chlorobenzène, oppose à l’action des alcalis une grande stabilité. D'autre part, quand, dans le chlorobenzène, on introduit un ou plusieurs groupes Az O?, il devient de plus en plus facilement saponifiable. Par ana- logie, il devenait probable que les phényltriazines nitrées se laisseraient également scinder en nitro- phénols et triazine. J’instituai en conséquence, en collaboration avec M. Eugène Grandmougin, une série d'expériences dans cet ordre d'idées. Nous entreprimes en premier lieu l'étude de la dinitro- phényltriazine. Cette substance se laisse préparer sans difficulté, en transformant la dinitraniline en dérivé diazoïque, préparant le perbromure, et traitant celui-ci par l'’ammoniaque. Les équations suivantes rendent compte de cette suite de réac- tions : 1) C5 H3 (Az 02}? Az H? + H2S04 + H Az O2 — — C5H: (Az 02)? Az — Az — SOiH + 2H20 ) C6H® (Az O2)? Az — Az — SO! H +KBr + Br? — — CS H5 (Az 02)? Az— Az — Br + K H SO | Br Br 3) CS HE (Az02)2 Az — Az — Br + 4 AzH$ — | | Br Br — C6 H3(Az 02)? Az — Az + 3 AzH{Br. N 7 Az La dinitrophényltriazine ainsi obtenue se scinde sans difficulté sous l'influence de la potasse al- stat L. MAQUENNE. — AZOTURES ALCALINO-TERREUX 263 EEE EEE —_] ——"— "a coolique, en fournissant les sels de potassium de dinitrophénol et de triazine : C5 HS (Az 02}? Az — Az + 2KOH — NN Az — CiHS (Az02) OK + K Az — Az + H20; / Az les mononitrophényltriazines ortho et para ’ Az Der Az Az | (I i Î Az O0? Az0? se saponifient de la même manière, quoique moins facilement, tandis que le dérivé méta reste inattaqué. Ici encore l’analogie avee les ben- zènes chloronitrés est complète. La tribromophényltriazine montre également une grande résistance vis-à-vis des alcalis, tandis que la dibromonitrophényltria- zine s’attaque facilement. Comme elle est d’une prépa- ration très simple, c'est la matière première la plus pratique pour l'obtention de l’acide azothy- drique d’après notre procédé. Conférence de M. L, Maquenne SUR QUELQUES PROPRIÉTÉS DES MÉTAUX ALCALINO-TERREUX On sait que l’amalgame de baryum se laisse ai- sément préparer par électrolyse d’une solution concentrée de chlorure de baryum, mais aussi qu'il est impossible d'en séparer entièrement le mer- cure par distillation dans l'hydrogène. Me trou- vant, il y à quelques mois, en possession d'une assez grande quantité d’amalgame de baryum so- lide à 3 pour 100, j'ai essayé de le soumettre à la distillation, d'abord dans le vide, puis dans un courant d'azote, à latempérature rouge. Ces deux opérations m'ont conduit, comme on va le voir, à des résultats nouveaux et inattendus. Dans le vide de la trompe à mercure, l’amalgame de baryum eristallisé s'enrichit rapidement si bien que dans un simple tube de verre vert, main- tenu à 350°, on peut ainsi l’amener à contenir 20 et même 25 pour 100 de métal alcalino-terreux : sous cette forme il est encore brillant, mais caverneux et tellement oxydable qu'au contact de l’air il s'é- chauffe instantanément, Si maintenant on enferme cet amalgame riche dans une nacelle de fer ou de nickel (le platine serait immédiatement attaqué et fondu) et qu’on le chauffe de nouveau sous vide, à la plus haute température que puisse soutenir un tube de por- celaine, on le voit encore perdre du mercure, mais malheureusement avec projection du contenu de la nacelle, en sorte qu'à la fin de l'expérience celle-ci se trouve à peu près complètement vidée. Je n'ai pu ainsi obtenir qu’une très petite quan- tilé d’une poudre noire, qui prenait feu au con- tact de l’eau, sans laisser de résidu apparent. Il résulte de là néanmoins qu'il est possible dans ces conditions de séparer le baryum du mercure, ce qui n'avait pu être réalisé jusqu'iei. Dans l'azote, le résultat est tout différent : dès le rouge sombre le mercure distille, presque en totalité, puis le gaz s'absorbe, le contenu de la nacelle entre en fusion et, après refroidissement, se présente sous la forme d'une masse quelquefois cristalline, à éclat semi-métallique et qui, à l'air humide, exhale une forte odeur d’ammoniaque. Le corps qui se produit dans ces circonstances est un azoture défini qui, d'après l'analyse, répond à la formule Az?Ba3, L'eau le décomvose rapidement, avec élévation de température, en hydrate de ba- ryum et gaz ammoniac. L'affinité toute particulière que cette expérience nous dévoile entre le baryum et l'azote permet de concevoir aisément la production des cyanures dans l'expérience classique de MM: Marguerite et Sourdeval : il suffit, en effet, de traiter l’azoture de baryum par le charbon au rouge pour le voir se transformer pour la plus grande partie en cya- nure. La réaction reste toujours incomplète, mème en présence d'azote en excès, et lorsqu'on traite ie résidu par l'eau, on voit se dégager quelques bulles d’un gaz qui présente tous les caractères de l’acétylène : le cyanure de baryum est donc mé- langé avec un carbure du même métal. Cette ob- servation m'a conduit à chauffer l’'amalgame de baryum avec du charbon. en labsence d'azote : 264 A. MOSSO. — TEMPÉRATURE DU CERVEAU EN RELATION AVEC L'ACTIVITÉ PSYCHIQUE dans ces condilions, il se produit encore un départ rapide du mercure, el, après l'expérience, on trouve la nacelle remplie d’une masse grise, frit- tée, qui, dans l’eau, dégage immédiatement un volume considérable d’acétylène évidem- ment un carbure C?Ba, correspondant au produil que Wôühler a obtenu autrefois en distillant l'al- liage de zinc et de calcium dans un creuset de charbon. c’est L'amalgame de strontium ne peut être obtenu qu'à l'état liquide par voie d'électrolyse, à cause de sa facile réaction sur l’eau; mais, dans le vide, on arrive encore à l’enrichir jusqu'à une limite de 25 °/, environ. Traité alors par l'azote, il se trans- forme immédiatement en azoture de strontium Az°Sr, en tout semblable à l’azoture de baryum et qui, comme le précédent, se change en cyanure au contact du charbon. Donc, en résumé, les mélaux alcalino-terreux sont susceptibles de fixer directement l'azote ou le carbone et de donner ainsi naissance à des azo- tures ou à des carbures parfaitement définis, que l'eau décompose en dégageant de l'’ammoniaque ou de l’acétylène. La facilité avec laquelle on peut obtenir en grand l’amalgame de baryum et, par suite, le carbure du même métal, pourrait servir de base à un mode de préparation de l’acétylène qui serail au moins aussi pratique que tous ceux qui ont été proposés jusqu'à ce Jour. LA TEMPÉRATURE DU CERVEAU EN RELATION AVEC L'ACTIVITÉ PSYCHIQUE HER LE supérieure (légère) représente la température du rectum, celle du — Chien rendu insensible par le milieu légère), la line laudanum. — La ligne de température du sang dans l'artère sarotide, la troisième (épaisse), hgne de la température du cer- Dans mes recherches sur la température du cerveau, j'ai employé, de préférence à la pile thermoélectrique, des thermomètres à mer- cure extrêmement sensibles et construits spé- cialement pour ces expériences. Chaque ther- momètre contient seulement 4 grammes de mercure; les instruments indiquent très rapi- dement les variations de température, et on peut facilement reconnaitre une variation de 0,002 de degré centigrade. J'ai étudié la température du cerveau en la comparant au sang artériel des muscles, du rectum et de l'utérus; mes observations ont porté d’abord sur des animaux soumis à l’in- fluence de la morphine et d'autres nom- breux anesthésiques, enfin sur l’homme lui- même. Les courbes (figures 4 et 2) des observa- tions recueillies sur des chiens insensibilisés par le laudanum (figure 1) et par le chloro- forme et le laudanum (figure 2), puis soumis à des excilations de divers ordres, indiquent que, dans un profond sommeil, le bruit ou n'imporle quel autre stimulant des sens esl suffisant pour produire un léger développe- ment de chaleur dans le cerveau, sans cepen- dant éveiller l'animal. Dans un sommeil profond, la température du cerveau peut tomber au-dessous de celle du sang artériel du reste du corps. Ceci est dû de DEV à la gr: > radiation de chaleur qui a lieu veau. — À, injection de 3 cmc. de laudanum. — B, bruit d’une 4 la grande radialion de chaleur q L trompette. — C, D, E, excitation électrique du cerveau. — à |a surface de la tête. L’ordonnée est divisée en dixièmes de degrés centigrades. L’ab- scisse est divisée en intervalles de dix minutes. Lorsque le cerveau est soumis à l’action — TEMPÉRATURE DU A. MOSSO. CERVEAU EN RELATION AVEC L'ACTIVITÉ PSYCHIQUE 263 ordinaire du courant interrompu, sa température augmente. plus tôt dans le cerveau que dans le sang du corps, et l'augmentation est plus grande dans le cerveau que dans le courant sanguin général ou dans le rectum. Pendant une crise épileptique provoquée par l’excitation électrique sur l'écorce cérébrale, La hausse de la température s’observe j'ai sang du corps. La différence de température ainsi provoquée est grande. Dans un cas la température était de 1°,6 au-dessus de celle du sang artériel de l’aorte. De pareilles observations nous indiquent de ne pas regarder les du cerveau muscles comme formant, par ercellence, le tissu thermogé- nique du corps. Pour mettre en évidence l'activité des processus 2 ‘30 40 50 Fig. 2. — Chienne insensibilisée par le ligne inférieure, tation électrique du cerveau. — D, excitation électrique du cerveau. injection constaté en 12 minutes une hausse de 1° C. dans la température du cerveau. En règle générale la température du cerveau est plus basse que celle du rectum ; mais des proces- sus psychiques intenses, ou l’action excitante de substances chimiques, peuvent amener une (rès grande chaleur dans le cerveau, et sa température peut rester pendant quelque temps de 0,2 ou 0,3 de degré centigrade au-dessus de celle du rectum. Quand on soumet un chien à l'influence du cu- rare, la température du cerveau se maintient assez élevée, tandis que baisse celle des muscles et du REVUE GÉNERALE DES SCIENCES, 1892. chloroforme et supérieure représente la température du vagin, celle celle du sang dans l’artère carotide. 20 30 40 50 ensuite par le laudanum. — La ligne du milieu (épaisse) celle du cerveau; la — À,et B. émotion psychique. — C, exci- intraveineuse de 14 €. ce, de laudanum. — E et I, chimiques dans le cerveau, il suffit d’enfermer l'animal dans un milieu dont la température soit exactement celle du effets de la température du cerveau est toujours plus haute que celle du rectum ; sang. Quand on à ainsi obvié aux radiation à travers le crâne, la la différence s'élève à 0,5 et 0,6 de degré centigrade Les observations faites sur un animal éveillé tendent à montrer que le développement de cha- leur dû au métabolisme cérébral peut être consi- dérable, même en l’absence de toute activité psy- chique. Le maintien de la conscience appartenant g* 266 A. MOSSO, — TEMPÉRATURE DU CERVEAU EN RELATION AVEC L'ACTIVITÉ PSYCHIQUE à l’état de veille entraine une action chimique considérable. Les variations de température observées dans le cerveau comme résultant de l’attention ou de la douleur ou d’autres sensations, sont excessivement peu de chose. La plus haute température observée chez le chien.sous l’action d’une grande activité psy- chique,fn’a pas été supérieure à 0,01 de degré centi- grade. Quand un a- nimal estconscient, un changement de connaissance ou d'activité que, provoqué ex- psychi- périmentalement ne produit qu'un très léger effet sur la température du cerveau. Sous l'influence de l’opium, le cer- veau est le premier organe dont la tem- pérature baisse; la baisse peut conti- nuer pendant dix- huit minutes, tan- dis que la tempé- rature du sang el du vagin augmente. En analysant l’ac- tion élective des narcotiques el des anesthésiques , on voit que ces dro- gues suspendent les chimi - cellules fonctions ques des nerveuses. Chez un tombe lJ'excibation, et redevient normale. Cela cependant n’est pas le cas d’un cerveau excité par un courant électrique. Là, le stimulant provoque une plus grande production de chaleur; la tempé- rature peut augmenter pendant plusieurs minutes, | alors même que l'excitation a cessé, souvent pen- dant une demi-heure. Cela explique peut-être pour- | quoi les convulsions épileptiformes ne se dévelop- pent pas immédia- tement sous l’ac- lion d’une stimula- tion électrique sur l'écorce cérébrale, mais n'apparais - sent quelquefois qu'après une pério- de de plusieurs mi- nues. Cette expérience peut montrer l’ac- tion élective exer- cée sur le cerveau par remèdes stimulants. Une in- jection de 10 centi- grammes de chlo- rhydrate de cocaïne produit sur le cer- veau une hausse de température de 0,36 de degré centigra- de, sans qu'on ob- serve aucun chan- gement dans latem- pérature des mus- cles ou du rectum. Chez le chien cu- rarisé, l'interven- tion des muscles est les chien complète - exclue, de sorte que ment insensibilisé Fig, 3. Chien insensibilisé par le chloral. — La ligne Supérieure l’action de la cocaï- _— AR Te représente la température du rectum, la ligne du milieu (épaisse) rl Cet par URBAN sthési celle du cerveau, ligne inférieure celle des muscles de la cuisse. + ne sul Le GE rveau que, on n'obtient A et B, excitation électrique des muscles. — C, injection de 10 centi- peut produire une ; erammes de cocaïne dans la veine saphène. — D, E, variations spon- : Me plus d’augmenta- que 1 RPC LE D TES à augmentation de à ; - Nes " tion de tempéra- 4°C: j'ai,en effet,ob- ture, même en stimulant l'enveloppe cérébrale par un courant électrique. Ces résultats ne peuvent pas s'expliquer par le fait des changements de lacireula- tion du sang. La base physique du procédé psychique estprobablementdelanature d'une action chimique. Dans une autre expérience, où un animal était de la température indiquent que lorsque l’on contraete insensibilisé par le chloral, les courbes (fig. 3) les muscles d’un membre, la température des mus- cles augmente, mais baisse rapidement aussitôt que servé une augmentation de 37° à 41°C. Cela montre que dans la topographie calorifique de l'organisme, une grande place doit être assignée au cerveau. Il semble permis d'espérer que cette méthode de l'examen thermométrique des différents organes du corps contribuera puissamment à éclairer les phénomènes de la vie, Cet article résume la Crow- nian Lecture que vient de | faire devant la Société Royale |. de Londres le Professeur Angelo Mosso, Professeur de Physiologie à l’Université de Turin. TH. MOUREAUX. — LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE La propriété directrice de l'aiguille aimantée paraît avoir élé connue des Chinois dès la plus haute antiquité; en Europe, l'emploi de la bous- c’est seulement près d’un siècle plus lard qu'on a commencé à tenir registre des indications de la boussole. a Fig. 1. — Théodolite-boussole de voyage. — B, B', barreaux aimantés. — T, treuil de suspension du fil. — I, index pour les pointés de la position du barreau. — M, M', microscope pour la mise au point. — E, plan d’arrèt des oscillations du barreau. — L, lunette pour l’observation du soleil. — V, vis de manœuvre du plan d’arrèt. — C, pièce de fermeture de la cage de lappareil. — N, niveau. — R, tige munie de deux étriers, pour supporter le barreau déviant, dans la mesure de la composante horizontale. sole, comme moyen de se diriger en mer, remonte à la fin du xxr° siècle, et, d’après nos anciens chro- niqueurs, les navigateurs français s’en servaient du temps de Saint Louis. Au xv° siècle, l'usage de la boussole était déjà très répandu; Christophe Colomb, dans son premier voyage, en 1492, obser- vait régulièrement la direction de l’aiguille aiman- tée; ce fut même lui qui, le premier, découvrit que cette direction, que l’on supposait constante, varie avec les positions géographiques. Toutefois, Les plus anciennes séries d'observations magné- tiques sont celles de Paris et de Londres. En 1580, la déclinaison était orientale de 11°30! à Paris; elle a diminué peu à peu et était nulle en 1666; elle devint ensuite occidentale et atteignit sa plus grande valeur à l’ouest en 1814 (22° 34'). La dé- clinaison, diminuant depuis lors, n’est plus ac- tuellement que de 15° 30". Les observations de l’inclinaison ne remontent pas au delà de 1671. A cette époque, l'inclinaison 268 TH. MOUREAUX. — LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE était de 75° à Paris; elle diminue régulièrement depuis; sa valeur actuelle est de 65° 10". L'inclinai- son atteindra vraisemblablement son minimum lorsque la déclinaison redeviendra nulle, e’est-à- dire vers 1960. Un siècle plus tard, les observateurs se préoccu- pêrent de déterminer l'intensité magnétique, à laquelle on n'avait pas prêté grande attention jusque-là. Le mérite d’avoir provoqué des re- cherches sur cette queslion revient à l’Académie des Sciences. qui rédigea, pour les officiers de l'expédition dirigée par La Pérouse, des instruc- — î à ÿ nn tance de celte constatation, il ne publia ses résultats qu'après en avoir appris la confirmation par les expériences ultérieures de Humboldt .dans l’Amé- rique équatoriale, de 1798 à 1804. Au Pérou, par 1° 2' de latitude sud, et 81° 8' de longitude ouest, Humboldt observa que l'aiguille d'inclinaison os- cillait plus lentement qu'au nord et au sud; il en conclut qu'il se trouvait sur la ligne de moindre intensité, et adopta comme unité l'intensité ob- servée en ce point. C'est à cette unité que, pendant longtemps, les observations ont été rapportées. Ainsi, une aiguille d'inclinaison exécutait, dans le L Fig. 2.— Boussole d'inclinaison de voyage. — TI, aiguille d’inclinaison. — MM, miroirs concaves pour les pointés de la position de l’aiguille. — L, levier pour soulever laiguille. — N, niveau, — B, couvercle de la cage. tions détaillées, dans lesquelles il leur élait pres- crit « d'estimer la force magnétique par la durée des oscillations d’une bonne aiguille d'inelinai- son. » Les observalions ont malheureusement été perdues dans le naufrage de lAs#rolabe el de la Boussole; mais, en cours de route, lun des membres de l'expédition, Paul de Lamanon, avait écrit à Condorcet une lettre dans laquelle il annonçait que, d’après ses observations, la force attractive de l’aimant est moindre sous les tropiques que vers les pôles, et que l'intensité augmente avec la lali- tude. De Rossel, qui accompagnait d'Entrecas- teaux dans son voyage à la recherche de La Pé- rouse, eut l'occasion de vérifier cette découverte; mais il faut croire que ses observations ne lui ins- piraient pas toute confiance, car, malgré l’impor- même temps, 245 oscillations à Paris, et 211 seule- ment au Pérou. Si l’on représente par/ elf les in- tensités respectives en ces deux points, on a : etsif — 1, nombre qui représente l'intensité à Paris, compa- rée à celle du Pérou, prise comme unité. On conçoit que cette méthode, qui ne donne d’ailleurs que des valeurs relatives, ne soit pas sus: ceptible d'une grande précision, pour différentes causes, dont la principale est la variation de la force magnétique de l'aiguille avec le temps et surtout avec la température. TH. MOUREAUX. — LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE 269 Enfin, Gauss, reprenant une idée de Poisson, proposa une méthode et fit construire un appareil permettant la mesure absolue de l'intensité : cette méthode est employée exelusivement aujourd'hui. Il Avant de montrer comment les obser- vations , présentées sous une forme gra- phique, ont pu ser- vir à larecherche des lois qui régissent les phénomènes magné- tiques, nous indique- rons brièvement les moyens employés pour recueillir les force magnétique : la déclinaison est l'angle que fait ce plan avec celui du méridien géographique ; 2 une seconde aiguille, suspendue par son centre de gravité et oscillant dans le plan du méridien magnétique, prend la direction de la force magnétique dans ce plan; l’angle de cette direction avecle plan horizontal est l'ineli- naison. L'intensité de la force terrestre est habituellement obte- nue par l'observation de l’une de ses deux hori- composantes, zontale ou verticale. matériaux. On sait que les élé- ments magnétiques, indépendamment des variations qu'ils su- bissentavec les lieux. sont encore soumis à des variations pério- diques et à des varia- tions accidentelles ou perturbations. L’é- tude complète de ces variations ne peut être poursuivie que dans des observa- toires permanents , pourvus d’appareils spéciaux capables de suivre à tout instant les moindres mouve- (LL ments de l'aiguille aimantée. Imaginons un ai- mant constitué par Les recherches ma- — Er gnétiques portent donc sur cinq élé- ments : déclinaison, inclinaison, compo- horizontale , composante verti- cale, force totale. La déclinaison ne peut ètre connue que par l'observation directe, tandis que les quatre autres éléments ont sante entre des rela- lions telles qu'il suf- fit d'en déterminer deux pour en duire les deux autres eux dé- par le calcul. Les appareils ma- de gnétiques sont deux sortes, selon qu'ils doivent servir à la mesure absolue AS . Fig. 3. — Déclinomètre. — A, colonne métallique. — V, treuil de RO ER AE à un tube d’acier fermé suspension du fil. — M, barreau aimanté. — R. miroir mobile avec des divers éléments, à ses extrémités, et le barreau. — R', miroir fixe. — e, vis de réglage du miroir fixe. — ou en donner seule- à L, lentille. — C, cercle horizontal inférieur. — C', cercle horizontal NE dont les dimensions supérieur. — P, P', vis de réglage des cercles. ment les variations. soient telles qu'il se tienne en équilibre, par exemple, dans un bain d'huile à une température constante : cet aimant prendrait de lui-même la direction de la force ma- gnétique. Mais cette disposition délicate ne per- mettrait guère de suivre rigoureusement les mouvements de l’aimant, et, dans la pratique, la direction du champ terrestre est déduite de deux opérations : 4° une aiguille aimantée hori- zontale, suspendue à un fil sans torsion, se tient en équilibre dans le plan vertical qui contient la Les mesures absolues comprennent habituellement la déclinaison, la composante horizontale de l'intensité, et l'incli- naison: elles sont effectuées avec deux appareils seulement, un fhéodolile-boussole, servant à la déter- minalion des deux premiers de ces éléments, et une boussole d'inclinaison. Les figures À et 2 représentent les derniers instruments construits par MM. Brunner. Une description appareils nous entrainerait trop modèles de ces nos habiles artistes, détaillée de ces 270 loin ; nous dirons seulement que, sans sacrifier en rien la précision, on a cherché à les rendre réelle- ment portatifs par la réduction de tous les organes. Comme dans tous les appareils de ce genre, le théodolite - boussole permet de détermi- ner le méridien géo- graphique par l’ob- servation d’un astre au moyen de la lu- nette L, et le méri- dien magnétique par la position d’équili- bre d'un barreau ai- manté B suspendu à un fil de soie sans torsion dans la cage de l'instrument. Pour mesurer la composante horizon - tale en valeur absolue par la méthode de Gauss, on fait oscil- ler un ai- manté horizontal, et on la durée d’une oscillation; cette première expé- rience donne le pro- duit H M de la com- posante horizontale H par le moment ma- gnétique M du bar- r'eau ; barreau note on étudie en- suite l’action de ce barreau sur un autre, ce qui donne le rap- Me? —; c'est à cette TH. MOUREAUX. — LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE La construction de la boussole d’inclinaison ne diffère que par des perfeclionnements de détail du modèle créé par Gambey. Les boussoles représentées dans les figures 1 et 2 donnent la valeu des éléments au mo- ment même de l’opé:- ralion, et servent à élablir et à vérifier les repères des appa- reils de variations, qui sont les véritables instruments d’obser- vations courantes. Les boussoles de variations, construi- tes par M. Carpen- lier, sont au nom- bre de trois : le dé- clinomètre, le bifilaire et la balance magnéti- que. Dans le déclino- mètre (fig 3), le bar- reau aimanté est sus- pendu à un fil sans torsion et s'oriente de lui-même dans le méridien magnéti- que. Le bifilaire sert à mesurer les varia- tions de la compo- sante horizontale ; sa forme extérieure est sensiblement celle du déclinomètre; seule- ment, ici, le barreau est suspendu à deux fils parallèles, et est port ; H Fig. 4. — Balance magnétique. — M, aiguille de la boussole. amené, par une tor- expérience spéciale arrêt pour immobiliser l'aiguille. — 4, index de r sion du treuil de sus- ER guille. — e, écrou pour règler le centre de gravité, par suite la Ë s 3 que sert la tige R sensibilité de l'aiguille. — R, miroir mobile, solidaire avec l'aiguille. pension , à se tenir de la fig. 4. Connais- —R miroir fixe e, écrou pour amener l'aiguille dans un plan &n 6quili “1h20 3 L horizontal, — C, cercle horizontal. — P, vis de réglage du cercle a équilibre dans Le sant le produit et le horizontal. — V, vis de manœuvre du plan d'arrêt G. — T, thermo- plan perpendiculaire raDDor Le ES mètre. — S, prisme à réflexion totale, pour renvoyer les images dans : A: s. QBE us des deux un plan horizontal. — B, couteau reposant sur un plan d’agate. au méridien magné quanlilés , on peul tique; son pôle nord les calculer l’une et l’autre t. | tend à se rapprocher ou à s'éloigner du nord ma- ! Gauss avait adopté comme unités de mètre, la masse du millisramme et la seconde; les Anglais, tout en employant sa méthode, ont introduit dans leurs observations leurs unités de mesure, savoir : le pied et la masse du grain. Paris (1881), on emploie généralement dans les mesures actuelles le centimètre, la masse du gramme et la seconde Ces différents systèmes sont entre eux dans les rapports suivants : (système C. G. S.). 1 unité C. G. S. — anglaise. D’après l k Tù unité de Gauss — 0,46108 unité | gnétique, selon que la composante horizontale | augmente ou diminue. Enfin la balance magnétique fig.) donne les variations de la composante ver- licale. Le barreau, suspendu par son centre de gravité, prendrait de lui-même la direction d'une aiguille d’inclinaison, mais on le ramène dans un plan horizontal au moyen d’un contre poids e', Les écarts de la position moyenne de ce barreau sont dans un sens ou dans l’autre, selon que la composante verticale augmente ou diminue. mesure le milli- une décision du Congrès de …oistitiihdienmen enc<0 tes iaitinnSr-U Moniians. à \ TH. MOUREAUX. — LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE 2 —1 = On observe par la méthode du miroir. Chaque appareil est muni de deux miroirs, dont l'un R’ est fixe, l'autre R est solidaire avec la monture du barreau, dont il suit tous les mouvements; comme dans toutes les expériences de ce genre, une lunette et une échelle divisée complètent l’ins- tallation. En observant ces appareils au moins une fois par heure, on pourrait se former une idée de l'étendue des variations des divers éléments; mais cette méthode assujettissante a été plus ou mions délaissée depuis l'emploi des magnélographes, et les lectures des appareils à lecture directe ne servent plus que de contrôle aux indications fournies pa les instruments à inscription automatique. L'enregistreur magnétique le plus répandu midi L'enregistrement continu des variations magné- tiques est basé sur la propriété du gélatino-bro- mure d'argent d’être vivement impressionné par la lumière. Dans le magnétographe de M. Mascart, construit par M. Pellin, le foyer lumineux est constitué par une petile lampe à essence, placée au milieu d'une lanterne munie de trois mon- tures métalliques portant, avec une lentille, une fente verticale étroite. L’une des fentes envoie un rayon sur le déclinomètre, la deuxième sur le bi- filaire et la troisième sur la balance. Les images lumineuses des fentes, après s'être réfléchies sur les miroirs, sont renvoyées sur le papier sensible, qu'un mouvement d’horlogerie déplace régulière- ment. On obtient ainsi, sur chaque magnétogramme, 3hm. minutt _ CL | Est Déclidaison Ouest * | Rise | | -----5-6 Mars | Aurore boréale | | AIS 6-7 Mars du6Mars Fig. 5. -- Courbes fournies par le magnétograhe de M. Mascart, à l'Observatoire du Parc Saint-Maur, du à au 7 mars 1892, jusqu’en 1881 est celui qui est connu sous le nom de magnétographe de Keuw:; à cette époque, M. Mascart imagina et fit construire un nouvel enregistreur, qui fonctionne maintenant non seulement en France, mais dans les diverses stalions magnétiques de l’Étranger créées dans ces dernières années. Les principales améliorations réalisées par l’appareil de M. Mascart sont les suivantes : plus grande sen- sibilité obtenue par l'emploi de barreaux courts, réduction du prix du magnétographe, diminution des dimensions de la salle d'installation, emploi d’une source lumineuse unique pour les trois bous- soles, enregistrement des trois éléments sur la même feuille de papier sensible, et, comme consé- quence, réduction des frais d'entretien. C'est seu- lement depuis l'emploi des barreaux courts qu'on a pu constater les troubles particuliers produits sur les aimants par les tremblements de terre, ou par les chutes de foudre qui surviennent dans leur voisinage. six traces, dont trois droites qui sont les lignes de repère de chaque élément, et trois courbes qui en donnent les variations. L'heure est enregistrée directement courbes par un courant électrique fourni par une faible pile ; un régulateur à contacts est disposé de facon que le cireuit soit fermé toutes les trois heures pendant quelques secondes, au moment précis de l’heure pleine. Le courant passe dans des bobines sans fer placées à côté de chaque appa- reil, provoque des oscillations des barreaux et un trouble passager dans la partie correspondante des courbes. Des expériences spéciales permettent de déterminer avec précision la valeur du milli- mètre sur l’ordonnée de chaque courbe. Nous donnons ici (fig. 5) un spécimen réduit des courbes obtenues; les lignes ponctuées se rappor- tent au 5-6 mars 1892 et donneront une idée de la marche habituelle des phénomènes ; les lignes pleines sont celles du lendemain, jour de pertur- sur les 212 bation magnétique accompagnée d'une aurore boréale à Paris même. On relève ainsi, chaque jour, des courbes qui donnent la variation diurne des divers éléments. La moyenne des courbes d’une année donne la va- riation diurne moyenne, et la variation diurne normale résulte de la moyenne des courbes an- nuelles. La figure 6 montre la marche diurne des divers éléments à Paris pour une période de six années consécutives, de 1883 à 1888. On voit que la déclinaison, par exemple, passe par une double Min, 2P ah 6h 8h +4 + TH. MOUREAUX. — LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE Midi 2h ah eh EL 10h ment, les magnétographes sont beaucoup trop clairsemés, et si la France arrive au premier rang avec 8 slalions pourvues de cet appareil *, on n’en compte que 14 dans tout le reste de l’Europe ?, et 11 dans l’ensemble des autres parties du monde #. Sur ces 33 enregistreurs, 4 seulement se trouvent dans l'hémisphère sud : il n’en existe pas encore dans l’Amérique méridionale. Il est vrai que, dans un assez grand nombre d’observaloires, on note plus ou moins fréquemment les valeurs ou les va- rialions des éléments magnétiques; néanmoins Min. = Déclinaison | ‘ | +2! [ L ee 0’ | ES ES EE 1 | | | | Inclineïson JE | Composante horizon Ets | | 0 = = JE _5 Co | re, D +5 ” | 2 1e / Force totâle Fig. 6. — Variation diurne des éléments magnétiques à l'observatoire du Parc Saint-Maur (1893-1888). oscillation; dans l’oscillation principale, quise pro- duit pendant que le Soleil est sur l'horizon, le mi- nimum a lieu, en moyenne, vers 8 h. 20 du matin, plus tôt en été, plus tard en hiver, et le maximum vers À h. 20 du soir; l’oscillation secondaire de nuit a son minimum vers 11 heures du soir, et son maximum vers 3 heures du matin. Les autres élé- ments magnétiques ont également une période diurne bien caractérisée, dont la cause ne peut être attribuée qu'à l'influence, directe ou indirecte, du Soleil. Si les observatoires magnétiques étaient plus nombreux, et surtout plus convenablement répar- tis, ils pourraient suflire à donner, au moins dans ses grands traits,une idée de la représentation des phénomènes à la surface du globe. Malheureuse- l’ensemble des stations permanentes est encore bien insuffisant. IT La recherche des lois qui gouvernent les phé- nomênes de la physique du globe, est subor- donnée à la coordination et à la comparaison des résultats fournis par des observations nom- breuses recueillies dans les diverses régions. La 1 Besancon, Clermont-Ferrand, Lyon, Nantes, Nice, Paris (Parc Saint-Maur), Perpignan, Toulouse. — Des observations directes sont recueillies à Bordeaux et à Marseille. 2 Kew, Greenwich, Stonyhurst, Pawlowsk (Saint-Péters- bourg), Wilhelmshaven, Lisbonne, San Fernando, Utrecht, Berlin, Vienne, Pola, Bruxelles, Copenhague, Rome (en ins- tallation). 3 Bombay, Zi-Ka- Wei (près Sanghaï), Toronto (Canada), Melbourne, Batavia, ile Maurice, Manille, Los Angeles (Cali- forme), Washington, Tokio, Tananarive (en installation). A De TH. MOUREAUX. — LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE 213 théorie des phénomènes magnétiques, si impar- faile encore, et d’ailleurs si complexe, doit, comme toutes les théories, rendre compte de tous les faits mis en évidence par l'observation ; l'étude de ces phénomènes est facilitée par les carles magnétiques. Vers la fin du xvr° siècle, les observations de la déclinaison étaient déjà assez nombreuses, au moins dans les régions fréquentées par les navigateurs, pour montrer une certaine régu- larité dans les différences observées, suivant les lieux. La première carte des lignes d’égale décli- naison, des #sogones, a été construite par Halley, L COme00 meet magnétiques de M. Neumayer, qui sont les plus récentes ; elles ont élé dressées pour le 1% jan- vier 1885 en utilisant {toiles les observations mo- dernes, dont le réseau s'est enrichi des résultats oblenus dans les expéditions polaires organisées en 1882 par les différentes nations maritimes du globe. La carte (fig. 7) représente la distribution des isogones. On voit que la déclinaison est occidentale dans la partie est de Amérique du Nord, dans le nord-est du Brésil, sur l’Atlantique, l'océan In- dien, en Afrique et en Europe; au contraire, elle 40 60 140 120 100 80 5, CR ACE n [0] N Lee | 15 +35 + + | À +40! 22 | 44 5 ko) 251 A‘ \ PSù f | \ 5 1 k IE: l Sp $o A Ÿ N [ 180° 160 I EX) 100 80 60 40 20 Ô 20 40 G6Ù 80 100 120 ÉCRERLI Fiy. 1. — Lignes d'égale déclinaison au {er janvier 1885; d'après M. Neumayer. Les déclinaisons occidentales sont précédées du signe +, et les déclinaisons orientales, du signe —. d’après des déterminations faites en 1700. D’autres savants, parmi lesquels nous cilerons Hansteen en 1819, Duperrey en 1826, Barlow en 1833, Sabine en 1838, et plus récemment Evans et M. Neumayer, ont également publié des cartes des isogones, dont l'exactitude augmentail à mesure de l'accroisse- ment du nombre des points d’observalion, de la précision des méthodes, du perfectionnement des boussoles. L'inclinaison fut soumise pour la première fois à une représentation graphique par un savant sué- dois, Wilcke, en 1768. La plupart des auteurs que nous venons de citer pour la déclinaison ont égale- ment publié des cartes de la distribution de l'incli- naison, puis de l’intensité. Nous reproduisons ici une réduction des cartes REvuE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892 est orientale sur la presque totalité de lAmé- rique, sur l'océan Pacifique et en Asie ‘. Le cercle plus ou moins régulier qui limite ces zones, ou ligne sans déclinaison, partage le globe en deux hé- misphères inégaux ; il part du pôle magnétique nord, se dirige vers le pôle géographique, passe à l'est du Spitzhberg, au cap Nord, à Saint-Péters- bourg, à Astrakan, au golfe d'Oman, entame la partie occidentale de l'Australie et gagne le pôle magnélique sud. Il remonte ensuite par la Géorgie du Sud, passe à l'ouest de Rio-Janeiro, traverse la Guyane, l’est des Antilles, et rejoint le pôle nord par la région des lacs des États-Unis. Ce cercle 1! Dans la partie orientale de la Chine et au Japon, la dé- clinaison est occidentale. gr* t£ 1 EST sans déclinaison coupe l’équateur terrestre par 51° de longitude ouest et par 78° de longilude est; il s’ensuil qu'à l'équateur, la déclinaison est occi- dentale sur 4135° seulement, et orientale sur 225". La figure 8 représente les ésoclines. La ligne sans inclinaison ne se confond pas avec la ligne équi- noxiale, qu'elle coupe une première fois au nord des iles de la Polynésie. En la suivant vers l’ouest, on voit qu'elle s'éloigne peu à peu au nord de l'é- quateur jusqu'au centre de l'Afrique ; elle s’en rap- proche ensuite rapidement, le coupe de nouveau au sud de la Guinée et atteint la côte du Brésil au TH. MOUREAUX. — LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE ment, el M. Neumayer s’est conformé à cet usage en publiant la carte (fig. 9). Dans les régions équa- toriales, où l'inclinaison est faible, l'aiguille ai- mantée est soumise surtout à l’action de la com- posante horizontale, qui atteint sa valeur maxi- mum, 0,38 unités C. G. S, dans l’île de Bornéo ; un maximum secondaire, 0,36, se montre à l’ouest de l'isthme de Panama. La ligne de plus grande com- posante horizontale se tient presque tout entière dans l'hémisphère nord, et, par suite, ne se confond pas avec la ligne sans inclinaison. Cet élément di- minue de part et d'autre de la zone équatoriale, et NS NN net Fig. 8. — Lignes d'égale inélinaison au 1tr janvier 1885; d’après M. Neumayer. sud de Bahia. par 15° de latitude sud, pour reve- nir enfin jusqu’au premier nœud. L'inclinaison augmente d’abord rapidement de part et d'autre de cette ligne, qu'on appelle quel- quelois éqgualeur magnétique; à mesure qu'elle croît en valeur absolue, sa variation avec la latitude di- minue ; on sait qu'aux pôles magnétiques.l’aiguille se tient verticale; l'inclinaison y est de 90°. On remarquera que les isoclines sont à peu près pa- rallèles aux lignes de latitude le long du cerele sans déclinaison, et qu’elles présentent une double courbure très prononcée vers les régions polaires. Nous avons dit que l'intensité magnétique totale n'est pas observée directement; on la déduit de la mesure de la composante horizontale. Aussi on dresse généralement la carte de ce dernier élé- devient nul vers les pôles magnéliques; à Paris. sa! valeur actuelle est de 0,195. La composante ‘verticale, comme l'inclinaison. décroit au contraire despôles vers l'équateur, etsa représentation graphique conduirait à un système de courbes à peu près semblable à celui des iso- clines. L'intensité magnétique lotale croit des régions équatoriales vers les pôles, ainsi que l'avaient constalé les premiers observateurs vers la fin du siècle dernier, par la durée des oscillations de l’ai- guille d'inclinaison. Le minimum absolu se ren- contre au milieu de l'Atlantique, sur le tropique du Capricorne, où la valeur de l'intensité totale est inférieure à 0,8, celle du Pérou étant prise comme unité. L'intensilé est de 4,9 aers le pôle TH. MOUREAUX. — LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE 215 \ magnétique nord, et de 2,1 vers le pôle magnétique sud, en sorte que la plus faible valeur est à la plus grande dans le rapport de 1 à 2,8. Les courbes de l'intensité totale, comme celles de ses deux composantes et de l’inclinaison, ont une double courbure dont les inflexions s'accentuent avec la latitude. Les pôles magnétiques, points de convergence des différentes directions de l’aiguille aimantée, ou des méridiens magnétiques, ne coïncident pas avec les Joyers d'intensité, et même la double en 1840, Sabine a montré que l'existence de deux foyers d'intensité dans l’hémisphère sud résulte également des observations faites par James Ross, dans son expédition antarctique de 1840-1843. La variation séculaire des éléments magnétiques sur le globe ressort de la comparaison des cartes actuelles avec les cartes anciennes. La ligne sans déclinaison, par exemple, qui passait à Paris en 1666, a progressé vers l’ouest avec le système entier des isogones, et se trouve maintenant de l’autre côté de l'Atlantique. La ligne sans inclinai- 60 80 100 120 102 men 160 veu] 40 sement 2 0 me 00 me 9 À men GO 40 20 Ô 20 40 2 PS 36 NS 1 mc KR es : = Le = | (a : N [10468 É 2290 | le SÉ (To 160 10": 160 190 170 100. Bonn 60 A0 100 120 EOBERLIN Fig. 9. — Lignes d’égale composante horizontale au {er janvier 1885; d'après M. Neumayer. inflexion des courbes d'intensité indiquerait qu'il existe dans chaque hémisphère deux foyers de force inégale, Dans l'hémisphère nord, le foyer principal est à une latitude moindre que le pôle magnétique; on le rencontre au sud de la baie d'Hudson, tandis que le foyer secondaire couvre le nord de la Sibérie, L'idée d’un double foyer d'intensité dans chaque hémisphère a été émise par Halley à une époque où l’on ne possédait aucune donnée de cet élé- ment, et au seul aspect des isogones, qui pourtant étaient alors bien imparfaites. Reprise par Hans- teen, cette hypothèse semble vérifiée par l'ob- servalion ; le foyer d'intensité sibérien a été re- connu en 1828-30 par les observations d'Hansteen, Erman et Duc, et celui de l'Amérique, par Lefroy son se déplace vers le nord; en même temps, les nœuds, c'est-à-dire les points où celte ligne coupe l'équateur, progressent vers l’ouest, ce qui indique un mouvement général dans la direction du pôle magnétique. Les positions actuelles des pôles magnétiques sont les suivantes : Pôle Nord... Pôle Sud... Latitude, 70°30'; longitude ouest, 100°. Latitude, 73°39'; longitude est, 143055, Les pôles magnétiques semblent exécuter au- tour des pôles géographiques un mouvement de rotation dontle cycle serait d’environ 600 ans, au- tant qu'on en peut juger par une période d’obser- vation encore bien insuffisante. On ignore la cause de ce mouvement. L'hypothèse d’un aimant cen- tral, de Gilbert, ou celle de deux aimants animés TH. MOUREAUX. 276 de mouvements différents, émise par Halley, ne sont que des conceplions ingénieuses destinées à rendre compte des faits observés. Il est bien diffi- cile d'admettre que l’aimantation puisse subsister à la haute température probable du centre de la Terre. III Outre la varialion diurne et la variation sécu- laire, les éléments magnéliques éprouvent parfois des variations accidentelles plus ou moins accen- tuées; nous en avons donné un exemple remar- quable dans la figure 5. Une grande perturba- tion magnétique s’est produite en novembre 1882; la comparaison des résultats recueillis dans les observatoires et par les expéditions polaires, dans l'un et l’autre hémisphères, a montré que ces mo- difications profondes de l’état magnétique sont simultanées sur toute la surface du globe (disons, en passant, que cette simultanéité est une grave objection contre l'hypothèse d'une relalion entre les perturbations magnéliques et les vicissitudes atmosphériques). Mais si les perturbations de l’ai- guille aimantée sont rarement aussi intenses, elles n'en sont pas moins très fréquentes et les jour- nées de calme magnétique parfait sont excessive- ment rares. Dans le but de rechercher la cause de ces perturbations, Sabine a discuté les observations horaires faites en différentes stations et a montré : 1° que les perturbations magnétiques sont sou- mises à une loi de périodicité, la durée de la pé- riode élant d'un jour solaire; 2 que les écarts ont des lois particulières, selon qu'ils sont dans un sens ou dans l'autre; 3 que ces lois sont d'un caractère différent de celle qui gouverne le mouve- ment diurne régulier de l'aiguille. En étudiant à ce point de vue les perturbations observées au Parc Saint-Maur de 1883 à 1887,nous sommes arrivé résuitats. Il semble donc, comme dans les variations régulières, que la cause des perturbations doive être rapportée à l'action du Soleil. D'ailleurs, en rapprochant les phénomènes magnétiques de la période undé- cennale des taches solaires, on a conslaté que l'amplitude des mouvements réguliers de l'aiguille, aussi bien que l'amplitude et la fréquence des per- turbations magnétiques, passe par un maximum à l’époque du maximum des taches solaires et par un minimum lorsque l’activité solaire passe elle-même par un minimum. Il existe aussi une relation bien établie entre les perturbations magnétiques et les aux mêmes aurores polaires. Ainsi donc, landis que la variation séculaire est due au déplacement des pôles magnétiques, la variation diurne et les variations accidentelles pa- raissent se rallacher à une influence solaire, dont la nature n'est pas encore déterminée. Quant au — LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE fait lui-même du magnétisme du globe, il ne semble pas douteux qu'il ne doive être attribué à une cause intérieure, conformément à la théorie de Gauss. IV Si l’on se reporte aux cartes magnétiques du globe, on verra que, dans chacune d'elles, le réseau des courbes affecte une grande régularité d'allure ; il n'en peut être autrement, à cause de l'échelle réduite adoptée pour les construire. Mais si l'on étudie une certaine étendue de pays dans ses détails, on est amené à constater des anomalies plus ou moins accentuées. On a remarqué depuis longtemps que dans certains milieux, dans les ter- rains primaires et les régions volcaniques, par exemple, l'aiguille aimantée est soumise à des irrégularités attribuées à l'influence de roches qui, par leurcomposition chimique, seraient de nature à exercer une action sur Ja boussole. Mais on a observé également des anomalies bien caractéri- sées dans des régions considérées comme sous- traites à l'influence des causes minéralogiques. Nous n’en rapporlerons qu'un exemple frappant choisi dans nos propres observations : Lille! * è 20° TS de | + 1 | ——|-- Isogones héoriques À jus Rochelle Re Isogones raies 2 1 Fix. 10, — Anomalie magnétique du bassin de Paris (déclinaison). Le bassin de Paris, au point de vue géologique, est constitué par des lerrains stratifiés, tertiaires et secondaires, et, dans les différents sondages qui y ont été effectués, on n’a rencontré aucune roche IT ‘QT TH. MOUREAUX. — LES PHÉNOMÈNES DU MAGNÉTISME TERRESTRE de nature à agir sur l'aiguille aimantée, bien qu’à Paris même on ail creusé des puils arlésiens à plus de 500 mètres de profondeur. Pourtant, nous avons constaté, par des mesures directes effec- tuées en deux cents stalions environ, que les éléments magnétiques y sont profondément trou- blés, ainsi que le montre la figure 10, représen- tant à la fois les isogones théoriques (lignes poncluées) et les isogones vraies (lignes pleines). Les isogones observées se confondent avec les isogones théoriques sur une ligne qui, partant de Fécamp, se dirigerait un peu à l'est de Bourges. Cette ligne parait se continuer sur l'An- gleterre, depuis l'ile de Wight jusqu'au voisinage d'Oxford, ainsi que l'ont constaté MM. Rücker el Thorpe dans leur Magnetic Survey des iles Britan- niques. La déclinaison est trop grande à l'est et trop faible à l’ouest de cette ligne; l’écart est de —+ 15° à Mantes, + 20' à Chevreuse, + 26' à Gien, —. 42! à Sancerre; de — 12! à Lisieux, Evreux, Orléans, — 15'à Lamotte-Beuvron, — 21" à Auneau. Les choses se passent done comme si le pôle nord de l’aiguille aimantée élait attiré de part et d'autre par une force assimilable à l’action d'un pôle sud. Comme conséquence, on doit rencontrer, le long de la ligne centrale d'anomalie, un excès de l'inclinaison et un défaut de la composante hori- zontale : c’est, en effet, ce que montre l’observa- tion. La régularité si longtemps admise dans les phé- nomènes magnétiques n’est plus aussi netle depuis que les observateurs s’attachent, en multipliant les points d'observation, à en donner une représenla- tion plus fidèle. Mais l'extension si nécessaire des réseaux ne date que de ces dernières années dans quelques pays et est bien loin d'être généralisée; ainsi l’anomalie si remarquable du bassin de Paris n'avait jamais été soupçonnée, bien qu'elle affecte les différents éléments à Paris mème. Des irrégu- larités de même nature ont élé constatées récem- ment en Angleterre, en Autriche, dans l'Allemagne du Nord, en Russie, au Japon, etc. Il est extrêmement probable que ces irrégula- rilés dans l’état magnétique de certaines régions sont dues nor plus à une influence cosmique, mais à une action intérieure à la Terre, confirmant ainsi les vues théoriques de Gauss. EL ici se présentent deux hypothèses. La première, qui a longtemps régné sans partage, a pour base l'influence des roches magnéliques; d’après cette théorie, les ano- malies observées seraient expliquées par la pré- sence, dans le sol, de masses magnétiques plus ou moins considérables, douées de polarité et pou- vant se trouver à de grandes profondeurs. La seconde, à laquelle les physiciens commencent à se rallier, est une consequence de la théorie d’Am- 2741 père sur les actions mutuelles des courants et des aimants. Ampère avait émis l'opinion que les phénomènes du magnétisme terrestre pourraient bien se rallta- cher à l'action de courants électriques circulant dans les couches superficielles du globe, et dirigés perpendiculairement à l'aiguille aimantée.Bien que la cause de ces courants soit encore inexpliquée, leur existence a élé mise hors de cause par les expériences de M. Blavier en France, de M. Airy en Angleterre, de M: Wild en Russie, etc. M. Blavier a montré, par un enregistrement con- tinu, que les courants terrestres subissent de grandes variations d'intensité pendant les pertur- bations magnétiques; on sait d’ailleurs que dans certaines circonstances, comme lors de la grande perturbation magnétique du 13 février dernier, ces courants se manifestent par les troubles qu'ils apportent dans les transmissions télégra- phiques. Les courants terrestres emploient les terrains de surface comme conducteurs; or, de grandes cas- sures où failles peuvent mettre en présence des terrains de conduclibilité très inégale ; des diffé- rences de compression ou d'humidité d'un même terrain produiraient également le même effel. D’après les travaux de M. de Lapparent, il existe des dislocations de grande étendue dans le bassin de Paris; on sait aussi que les couches crétacées y ont subi, à certaines époques géologiques, des plissements auxquels doivent correspondre des différences de compression se traduisant par des différences de résistance pour les courants ter- restres. M. Naumann est d'avis que les déformations des lignes magnéliques sont intimement liées aux modifications que les accidents géologiques impri- ment aux courants terrestres, et que l'influence propre des roches magnétiques ne serait pas de nature à produire les anomalies observées. D'un autre côté, MM. Rücker et Thorpe, tout en conve- nant que nos connaissances sur ce point sont encore bien imparfaites, pensent, au contraire. qu'il est bien dificile d'imaginer une hypothèse qui rende mieux compte des phénomènes que celle de l'influence des roches. Il ne semble pas que les deux causes principales invoquées pour expliquer les anomalies magnétiques soient exclusives l'une de l’autre. En effet, les résullats obtenus récem- ment par M. Gyllenskiôld dans la Suède méridio- nale, où le fer oxydulé est très abondant, sont Lelle- ment discordants que l’auteur n'a pas pu les uli- liser au tracé des lignes magnétiques vraies, ce qui impliquerait l'influence de roches situées dans le voisinage immédiat des boussoles; landis que les déformalions de ces lignes dans le bassin de Paris, 278 D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE par la régularité de leur allure, paraissent se ralta- cher à une cause plus générale. Les observateurs doivent maintenant porter toute leur altention sur ces irrégularités, et consi- gner les écarts entre les résultats attendus et les résultats observés. L'étude des perturbations des phénomènes généraux, qui a élé si féconde en astronomie el à laquelle on doit notamment la découverte de Neptune. pourrail être appliquée avec succès aux anomalies magnétiques; il faudrait pour cela multiplier les points d'observations, afin d'opérer dans les circonstances géologiques les plus variées. Il est permis d'espérer que les docu- ments recueillis apporteraient quelque lumière sur cette question, encore si obscure, de la cause du magnétisme terrestre. Th. Moureaux. Chargé du Service magnétique à l'Observatoire du Parc Saint-Maur. ainsi REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE On publie trop actuellement; je ne dis pas cela pour me plaindre des nombreuses lectures qu’il faut faire pour produire un artiele de Revue ; mon observation va plus loin : je regrette qu'on publie en si grande abondance, parce qu'il n’est pas pos- sible que tant d’élucubrations aient une valeur réelle. Et de fait, à côté de bons travaux inspirés par des recherches patientes et un esprit cri- tique exercé, il s’en produit une foule mal di- gérés, dont la venue hâtive apporte parfois un trouble sérieux dans certaines questions déjà sufli- samment obscures par elles-mêmes. Ainsi, parmi les publications de l’année 1891, il en est, comme on le verra par la suite, qui, traitant des mèmes sujets, conduisent leurs auteurs aux conclusions les plus divergentes. Je n’ignore pas qu'il faut faire la part du tour d'esprit et du tempérament de chacun : mais, celte part faite, il me semble que les conelu- sions de recherches opérées avec une égale cons- cience sur lamême matière devraient avoir quelque ressemblance et ne point être absolument contra- dictoires. C’est parce qu'on a cette manie de pu- blier, qu'on en arrive à voir aujourd'hui plus du tiers des mémoires consacrés à relever les erreurs des autres observateurs. Que de temps et de forces perdus! Le pis est que ceux qui se sont trompés versent à leur tour beaucoup d'encre pour tenter de démontrer qu'ils sont dans le vrai. Mon rôle est de tracer à grands traits les progrès qui ont été accomplis depuis un an dans Ja solu- tion des problèmes fondamentaux de la zoologie; ce n’est pas chose facile, en raison même des cir- constances que je viens d'indiquer. Je m'y em- ploierai, en me bornant d'ailleurs à l'exposé des faits les plus importants. Nos connaissances en biologie cellulaire se sont sensiblement accrues dans ces dernières années, particulièrement en ce qui concerne les phéno- mènes qui précèdent ou accompagnent la féconda- tion. On sait que chez les animaux le noyau des cellules non sexuelles (cellules somatiques) ren- ferme un nombre déterminé de segments chroma- tiques ou chromosomes variable d'ailleurs avec les espèces. Il résulte des recherches les plus récentes que dans le noyau des cellules sexuelles le nombre des chromosomes subit une réduction de moitié. D’après O. Hertwig !, chez l’Ascaris megalocephala celle réduction du nombre des chromosomes coïn- cide avec la seconde division nucléaire. Quand se fait la première bipartition, la plaque nucléaire montre quatre chromosomes résultant probable- ment de la division longitudinale des deux chromo- somes qui se trouvent dans le noyau au repos; deux de ces quatre chromosomes se portent ensuite dans chacun des nouveaux noyaux. Mais, immé- diatement el sans passer à l’état de repos, ces nou- veaux noyaux entrent eux-mêmes en division; il s'ensuit que chacun de ceux qu'ils forment ne re- çoil qu'un seul chromosomeAïnsi la cellule sexuelle a subi une réduction du nombre des chromosomes de son noyau. Hertwig établit en outre que l'ho- mologie est complète entre la cellule-mère ovulaire el la cellule-mère séminale. Tandis que cette der- nière donne naissance à 4 spermatozoïdes, la cel- lule-mère ovulaire forme % cellules-œufs, dont 3 sont représentées par les globules polaires, la quatrième seule se développant en œuf. De ce qui précède Hertwig conclut enfin que la réduction du nombre des chromosomes dans le noyau des cellules sexuelles résulte de ce que les deux pre- mières bipartilions du noyau s’opèrent sans stade de repos intermédiaire qui permellrait aux élé- ments chromatiques de s’'accroitre ; la substance de ceux-ci n’a pas le temps d'augmenter jusqu'à en permeltre la division. Les recherches de M. Henking? sur le Pyrrochoris 10. Hertwig, Wergleiche der Ei- und Samenbildung bein Nematoden, in Arch. f. mikr. Anat., 1890. 2 HexkiNG. Zeitschr, für Wissensch. Zool. 1891. D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOULOGIE 219 apterus, insecte hémiptère, établissent que les phénomènes qui se produisent at cours du déve- loppement des cellules sexuelles sont essentielle- ment les mêmes que chez Ascaris megalocephala. Il y a une différence toutefois, en ce que la réduc- tion du nombre des chromosomes (on en compte 24 dans les cellules somatiques et 12 seulement dans les cellules sexuelles) se produit non point à la deuxième bipartition du noyau, mais dès la première division. Est-ce là une différence réelle entre les deux espèces étudiées? ou bien y a-t-il défaut d'interprétation de la part de l’un des obser- valeurs ? M. Guignard, qui continue avec succès ses re- cherches sur les végétaux !, pense que de nou- velles études devront conduire à identifier les phé- nomènes dans les deux cas. Suivant M. Guignard la manière de voir de M. Henking scrait plus pro- bablement la bonne, parce que les phénomènes observés chez le Pyrrochoris concordent, sur le point essentiel, avee ceux qu'il a constatés lui- même chez toutes les plantes qu'il a observées, où la réduction des chromosomes se fait également dès la première bipartilion de la cellule-mère, La comparaison du phénomène dans lous ses détails, entre le Pyrrochoris elle Listera ovata (orchidée), par exemple, démontre en outre que l’analogie se pour- suit jusque dans la façon dont s'effectue la réduction numérique des chromosomes. « La constance des phénomènes observés (au double point de sue du stade où se fait la réduction et du mode suivant lequel elle s'opère) chez les végétaux vient four- nir, dit M. Guignard, un argument puissant en faveur de la généralisation des résultats énoncés par M. Henkin. » Tous ces faits concordants lendent à ren- verser la théorie de M. E. Van Beneden sur la fécondation. Ils démontrent que l'émission des globules polaires est le résultat de la division indirecte du noyau de la cellule-mère et qu'elle n'est point accompagnée d'une élimination de chromosomes entiers, alors que, d'après E. Van Beneden, «le noyau ovulaire après le rejet des glo- bules polaires n’est plus qu'un demi noyau. » Ils montrent encore, et ce point est très imporlant, que la division du noyau de la cellule séminale donne lieu à 4 cellules spermatiques qui répondent aux deux bipartitions du noyau ovulaire, avec cette différence, que les 4 cellules spermatiques se déve- loppent, tandis que les globules polaires s’atro- phient, un seul des produits de la division de la cellule ovulaire se développant en œuf. La manière ! GuiGxarv. Nouvelles éludes sur la fécondation, compa- raison des phénomènes morphologiques observés chez les | de voir de M. Giard qui, dès 1786, considérait les globules polaires comme le résultat d’une division indirecte du noyau ovulaire est, par contre, com- plètement confirmée. Ces nouvelles recherches ont des conséquences qu'on ne saurail négliger de signaler. Puisque le spermatozoïde et l’œuf sont produits sans éli- mination d'aucun segment chromatique entier, ils possèdent chacun des propriétés héréditaires mâles et femelles. Il s'ensuit que la théorie de l’'hermaphrodisme cellulaire adoptée par Minot, E. Van Beneden et plus récemment par Weis- mann ne lient pas debout. Pour ces auteurs l’œuf primitivement hermaphrodite devient femelle en expulsant les globules polaires qui représentent ses éléments màles. La cellule hermaphrodite sé- minale, de son côté, se débarrasse de ses éléments femelles par un procédé analogue à l'émission des globules polaires, le rejet de corpuscules résiduels. La fécondation ne peut alors s’opérer que par le mélangé du pronucléus mäle avec le pronucléus femelle, et la parthénogenèse s'explique par une diminulion du nombre des globules polaires émis. Or nombre de faits contredisent cette dernière ‘assertion. La célèbre théorie de Weis- mann, s'appuyant en divers points sur les ré- sultats consignés par E. Van Beneden, et au- jourd'hui controuvés, recoit donc une sensible atteinte. Ce qu'il faut particulièrement retenir de ces nouvelles recherches, c'est que les phénomènes intimes de fécondation, en ce qui regarde les noyaux des cellules sexuelles, sont les mêmes chez les animaux et chez les végétaux: les observations de M. Guignard (/0c. cit.) ne laissent aucun doute à cet égard. L'an dernier, nous avions déjà signalé que ce savant avait démontré également l'identité des phénomènes chez les animaux et chez les plantes, en ce qui touche à l'existence des « sphères attractives » !, M. Henneguy a démontré, d'autre part, que ce qui était vrai pour les Invertébrés l’est aussi pour les Vertébrés (Truite) de telle sortequ'on peut considérer maintenant le phénomène comme absolument général. À ce sujet, M. Guignard pose une conclusion très importante et qu'il me parait juste de relever. « Au total, dit-il, la partie fonda- mentale dans l’étude morphologique de la fécon- dalion parait résolue; le phénomène n'est pas, comme on avail cru pouvoir l’admettre jusqu'ici, de nature purement nucléaire; il ne consiste pas simplement dans l'union de deux noyaux d'origine sexuelle différente, mais aussi dans la fusion de deux corps protoplasmatiques. dont les éléments * Hexxecuy, Nouvelles recherches sur la division cellulaire plantes el chez les animaux, in Ann. des Se. nat, Bot. 1891. | indirecte, in Jourr. de l'Analom. el de la Phys., 1891. 280 D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE essentiels sont les sphères directrices de la cel- lule mâle et de la cellule femelle. « Si les noyaux n’en ont pas moins une grande importance dans la transmission des propriétés héréditaires, la présence permanente de sphères directrices dans les cellules sexuelles etsomatiques el surtout leur fusion au moment dela fécondation, nous obligent à restituer au protoplasma le rôle primordial dans l’accomplissement du phénomène. Cette fusion appartient à l’essence même de la fécondation; elle est nécessaire pour la formation et l’évolution ultérieure de l'œuf. » C'est un point qui mérite d’être étudié avec soin que celui de savoir qui, en réalité, a la prépondé- rance du noyau où du protoplasma dans les phé- nomènes de la vie des cellules. M. Balbiani vient, en effet, dans une élude sur les régénérations succes- sives du péristome comme caraclère d'âge chez les Stentor et sur le rôle du noyau dans ce phénomène !, d'attirer l'attention sur une aclion inattendue du noyau dans les modifications du protoplasma. M. Balbiani a constaté que chez le Sfentor cœruleus, il s'opère une ou plusieurs fois, dans le cours de l'existence. une atrophie, suivie de régénération complèle, du péristome, de la bouche et de l’œsophag?. « Gelte régénération débute par la formalion d'un péris- tome nouveau et d’une bouche qui se produisent comme chez les individus qui vont se diviser, c’est-à-dire latéralement, avant de venir occuper leur position normale au pôle antérieur du corps. Il y a cette seule différence avec la division, que le nouveau périsiome se forme au contact du péris- tome ancien, au lieu d’en êlre séparé par un inter- valle servant au passage du plan de division. » Or, au stade où le ‘nouveau péristome quitte sa posi- tion latérale pour gagner le pôle antérieur, le noyau moniliforme se contracte et devient sphé- rique. Puis le péristome élant parvenu à sa place, le noyau reprend sa forme primitive. Toutes ces phases, par lesquelles passe le noyau, sont celles qu'il subit dans le cas de division, sauf qu'il con- serve son nombre de segments, Landis que, dans la division, il se partage en un nombre d'articles double, afin que chaque noyau-rejeton ait un noyau semblable à celui de la mère. « C’est au stade où le péristome régénéré quille sa position primitive à la face ventrale du corps pour devenir terminal. que le noyau moniliforme se concentre en une seule masse par la fusion de ses arlieles: et.comme ce déplacement ne peut s'effectuer sans qu'il se produise des mouvements intérieurs du plasma. il n’est pas improbable que la concentration du noyau ait un rapport direct avec ces mouvements ; ? BazuraNt, Zoo!; Anzeiger, 21 septembre 1891, n° 273, on peut la concevoir comme un état du noyau des- tiné à lui faire produire son maximum d'effet dy- namique. Je la comparerais volontiers, ajoute l'au- teur, au stade spirème de la division des noyaux cellulaires ordinaires, stade caractérisé aussi par une condensation de la substance chromatique du noyau, au moment de son passage de l’élat de ré- seau à celui de peloton läche. » On peut aussi se demander qui a commencé, en réalité, du noyau ou du protoplasma, car, jusqu’au stade où le nou- veau péristome, avec sa zone adorale, est déjà bien formé à la face ventrale du corps, on n’observe au- cun changement dans le noyau, En fait, il y a lieu de pour suivre les recherches dans le but de dé- terminer exactement ce qui revient au noyau et au protoplasma dans la direction des phénomènes bialogiques qui se manifestent dans la cellule, Il Nous avons, l'an dernier, fait connaitre les tra- vaux des embryologistes qui poursuivent le dur labeur de retrouver les tranches ou métamères, en Jesquelles la tète et le reste du corps du Vertébré peut être considéré comme primilivement divisé, au grand avantage de la comparaison d’une telle chaine de segments avec celle qui compose le corps des Arthropodes ou des Vers. Ces re- cherches sont continuées et nous trouvons, dans les Archives de Zoologie expérimentale ({891) sur le point particulier de la signification métamérique des organes latéraux chez les Vertébrés, l'analyse et la critique, par M. Houssay, d'un récent travail de M. Milrophanov, publié à propos du Congrès des naturalistes et médecins russes (section de zoologie). M. Mitrophanov s’est plus spécialement occupé des organes latéraux des Poissons et des Amphibiens. On sait que Eisig. après avoir décrit en 1878 chez les Capitellidés (Annélides tubicoles des organes sensoriels distribués métamérique- ment, les compara aux organes latéraux des Ver- tébrés, en se basant pour cela sur les observations de divers auteurs tels que Malbranc pour les Am- phibiens, Solger pour l’épinoche et sur les siennes propres. Il y avait bien quelques faits contradic- loires; chez les Elasmobranches, d’après Balfour, aussi bien que chez les Amphibiens adultes, les mêmes organes ne montraient pas une disposition métamérique. Mais rien n’était plus facile que de se débarrasser de ces faits gènants; il suffisait de les considérer comme secondaires el d'interpréter les irrégularités que présentaient des organes laté- raux trop nombreux pour le nombre de mélamères, comme le résultat d'une multiplicatiof ültérieure, dans chaque segment, de l'organe primilif dé ce segrioht, Eisig n’y manqua pas, êt il admil . 2 D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 281 «comme typique la distribution métamérique, à la limite des musculatures neurale et hémale, et l'homologie avec les Annélides se faisait d’elle- même ». La possibilité de ce trouble affecté dans la mé- tamérie originelle par la multiplication, dans chaque segment, de l'organe primitif du segment, qui se trouvait ainsi remplacé par un groupe plus ou moins régulier, fut admise successivement par Emery,Merkel, Bodenstein, Beard; tous se pronon- cèrent pour la distribution mélamérique des or- ganes latéraux chez les Poissons osseux et chez les Sélaciens. Toutefois, Emery signalait chez de tout jeunes Pierasfer (malacoptérygien ophidiide) une disposition irrégulière des organes latéraux, et une disposilion plus irrégulière encore était signalée chez la lamproie par Ransom et Thomp- son. Eisig ne s’arréla pas à ces détails. Toutefois, pour ce qui regarde l'homologie avec les Annélides tubicoles, il y avait une difliculté assez sérieuse. Chez les Capitellidés, les organes latéraux sont innervés par des branches de nerfs segmentaires, tandis que chez les Vertébrés l’in- nervation se fait par un unique nerf longitudinal, le rameau latéral du vague, qui prend naissance dans la région céphalique. Eisig s'était tiré de la difficulté par un moyen semblable à celui qu'il avait employé contre les organes latéraux trop nombreux. Le rameau latéral du vague, suivant lui, doit être considéré comme une formation secon- daire survenue en même temps que se réduisaient les branches nerveuses segmentaires primitives. Mitrophanov, après avoir exposé cet historique, critique la théorie d'Eisig en s'appuyant sur ses propres recherches : 1° Pour les amphibiens, il démontre que tous les organes latéraux proviennent d'une ébauche con- tinue, de telle sorle que si, dans certains stades, on observe des apparences de mélamérie, celle-ci est absolument secondaire etentrainée par la méta- mérie des autres systèmes. 2° Pour les poissons osseux, il résulte des travaux plus récents de Beard et de Bodenstein que la pre- mière ébauche du système latéral est continue (nous avons signalé ces recherches dans notre revue zoologique l'an dernier). Ce n'est donc aussi que secondairement que la mélamérie apparait. Encore n'apparait-elle pas toujours. Nous avons rappelé plus haut les observations de divers auteurs sur le Pierasfer et sur la lamproie; chez le Mugil, d’après Merkel, les organes latéraux sont disposés sans ordre apparent sur toutes les écailles du corps. Nous pouvons ajouter que dans le volume 1891 des Archives de Zoologie expérimentale, M. Guitel! ! K, Guitel. Recherches sur la ligne latérale de la Bau- droie. Arch. de Zool. expérim, 1891, p, 143: arrive, au cours de ses études sur la Baudroïe, aux conclusions suivantes sur ce point particulier : « Depuis quelques années les auteurs qui ont écrit sur la ligne iatérale se sont appliqués à mettre en relief la disposilion mélamérique des organes ou des groupes d'organes terminaux de la ligne laté- vale. Dans un grand nombre de poissons, cette disposition métamérique est absolument incontes- table; dans d’autres ont est forcé de convenir qu’elle n'existe pas. (Pour la Baudroie), les or- ganes de la série latérale sont dans toute son étendue régulièrement disposés les uns à la suite des autres sans qu’on puisse découvrir aucune sépa- ration entre eux qui corresponde à deux myo- mères consécutifs. » Tout ce qu’on peut observer c’est que leur écartement va en diminuant réguliè- rement d'avant en arrière puis redevient toul d'un coup considérable vers la fin de la série latérale. En un mot, chez la Baudroie, comme chez beaucoup d’autres Poissons, la signification métamérique des organes latéraux ne se vérifie pas. Je reviens au travail de Mitrophanov. Après avoir démontré que chez les Amphibiens et les Poissons osseux les organes latéraux dérivent d'une ébauche continue, il arrive au même résultat pour les Plagiostomes, et il fait remarquer que si parfois une disposition métamérique se présente elle n'apparait nettement que par places. Chez les Cyclostomes enfin la disposition des organes laté- raux estirrégulière. Quant à l’innervalion, Mitrophanov n'admet pas l'explication d’Eisig pcur lequel le nerf latéral serait une formation secondaire. Suivant lui, le système latéral tout entier, nerfs el organes sen- soriels, dérive d’une seule ébauche continue qui s’élend depuis la région du groupe acoustico-facial jusqu'à l'extrémité postérieure du corps. Cest secondairement qu'une fragmentation survient; la disposilion métamérique, quand elle existe, n’est done, conclut Mitrophanov, qu'une adaptation se- condaire entrainée par celle des autres organes. Il repousse l’homologie avecles Capitellidés proposée par Eisig. M. Houssay critique la conclusion de Mitropha- nov. Il est d'accord avec cet auteur pour ce qui concerne l'apparition des organes laléraux en une ébauche continue, mais cela ne prouve pas, dit-il, que la métamérie est un phénomène secondaire. « Mais, s’écrie ingénument M. Houssay, c’est le procès de toute mélamérie fait ainsi en deux lignes! car le raisonnement est également bon pour tout l'organisme. » Nous en doutions depuis quelque temps; il n’est pas mauvais de l'entendre dire par un des champions de la théorie. Il est vrai que Mitrophanov n'a pas voulu aller aussi loin. II ne s'en prend pas à la métamérie du mésoderme, nous 282 | D' H, BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE du système nerveux central, des racines spinales qui proviennent également toutes d’une ébauche continue. Il fait remarquer seulement que ces mé- taméries précèdent celles du système latéral et que par suite cette dernière entrainée par les autres n’est que secondaire. À mon sens, c'est manquer de logique. M. Houssay admet que le temps d’ap- parition de la métamérie n'a qu'un intérêt médiocre. Il croit avoir démontré, dans la tête, la simultanéité de segmentation entre le système latéral et tous les autres systèmes et se croit auto- risé à penser que si, dans le tronc, la métamérie du système latéral survient après les autres ce n’est pas qu'elle soil déterminée par les autres. C’est là un point évidemment contestable. Mais ce qui me parait appeler surtout l’altention, c’est ce fait que toutes ces métaméries ne sont pas primitives. Quelle valeur ont-elles par suite, surtout lorsqu'on veut s’en servir pour élablir une relation d'origine entre le Vertébré et tel autre groupe d'êtres méta- mériques, Annélides ou Arthropodes? II Il faut bien dire d’ailleurs que l’année 1891 est particulièrement fatale à la théorie d’après la- quelle les Vertébrés seraient des descendants des Annélides. Je vais essayer de montrer où en est cette question : On sait que l’un des points en litige, parmi les observateurs qui se consacrent à l’étude de la mé- tamérie des Vertébrés, estrelatif à l’ordre dans le- quel apparaissent les fentes branchiales. Avec Gegenbaur on les regarde, en général, comme se formant en arrière, dans un ordre chronologique régulier, et l’on admet en avant de l’hyoïde une région préorale qui ne se segmente pas. « C’est, dit M. Houssay ‘, une sorte de prostomium, compa- rable à celui des Annélides. En arrière de ce pros- tomium exisle une région bien définie qui donne des métamères nouveaux... Ce fait semblant très net pour la tête, il pouvait paraitre légitime de l’élendre au tronc, où les phénomènes sont moins apparents, et d’admettre que là aussi existaient en petit nombre des places où étaient produits les mé- lamères nouveaux. Le corps du Vertébré était ainsi comme une chaine de zoonites produits par l’activité de quelques zoonites bourgeonnant. « De telle sorte que,nonseulementunsegment de Vertébré était comparable à un segment d’Annélide, mais encore le Vertébré, somme de segments, de- venait comparable à l'Annélide, somme de seg- ments, parce que dans les deux cas la même méca- ! Houssayx, Etudes d'embryologie sur les Vertébrés, in Bull. sc. de la France et de la Belgique. 4891. T. XXII. nique avait présidé à la formation des parties constituantes de l'individu. » La question se trouve ainsi nettement posée. Dans la suite de son mémoire, M. Houssay montre que, contrairement à l'opinion générale- ment admise par les embryologistes, il faut distin- guer dans la tête au moins deux zones formatrises de métamères. « L'une déjà connue, en arrière de la région branchiale ; l’autre, qui se trouve au ni- veau de la bouche. Et dans ce dernier point les mélamères se forment aussi bien vers l'avant que vers l'arrière, La propriété d’une région, ajoute l’auteur, de donner des métamères nouveaux dans deux directions opposées est d'autant moins ex- traordinaire chez les Vertébrés qu'elle se rencontre aussi chez les Annélides, par exemple chez le Dero oltusa, pour ne citer qu'un seul cas. » M. Houssay conelut encore de ses recherches qu'il y a, dans la formation des métamères, hétérochronie évidente. « Cette hétérochronie, ajoute-t il, est d'autant moins surprenante chez les Vertébrés que l'on trouve chez beaucoup d’Annélides des régions où plusieurs centres procucteurs fonctionnent ainsi sans alternance régulière entre eux. et produisent des segments tantôt dans un sens, tantôt dans l’autre. » Cependant il parait à l’auteur que, si la compa- raison entre les Vertébrés et les Annélides peut se soutenir dans ses grandes lignes, elle devient de plus en plus obscure si l'on pénètre dans les dé- tails. En parliculier, puisqu'il a démontré l'exis- tence d’une segmentation dans la région frontale de la tête des Vertébrés, cette région ne peut plus être homologuée avec le prostomium des Anné- lides. On a dû renoncer d'autre part, et nous y re- viendrons tout à l'heure, à retrouver la trace de l’ancien tube digestif dans l'épiphyse et l'hypo- physe, et dès lors à voir des ganglions cérébroïdes dans le cerveau antérieur du Vertébré. «On peut d'ailleurs, dit M. Houssay, dans la tête du Verté- bré, renoncer assez facilement à retrouver les gan- glions cérébroïdes, car chez les Annélides ils se développent, comme on sait, indépendamment de la chaine nerveuse ; leur présence parait relative- ment accessoire par rapport à cette longue chaine métamérique; ils ont par suite fort bien pu dispa- railre chez les Vertébrés sans laisser de traces, et cela n'a point de conséquence grave. » Mais il n’en est plus de même, parait-il, du collier œsophagien qui entoure le tube digestif. « Il est produit par le premier segment métamérique et a une impor- lance morphologique plus considérable que les ganglions cérébroïdes auxquels il se rend. » Il semble donc urgent de le retrouver chez les Verté- brés. « Sa disparition pourrait se concevoir comme | corollaire de celle des ganglions cérébroïdes ; mais D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 283 sa perte serait un fait plus considérable que la perte de ceux-ci.» Beard !, à ce propos, a imaginé une assez ingénieuse hypothèse : la région ventrale de l'hypophyse serait le reste de l'ancienne bouche, et sa partie nerveuse le reste de l'ancien collier œsophagien. M. Houssay n’est pas salisfait de cette hypothèse. « En vérité, dit-il, je ne vois qu'un seul point dans {out le corps du Vertébré où le système nerveux entoure le tube digestif: c'est le blastopore, et là il l'entoure bien nettement pour constituer un canal mésentérique qui me parait le reste du collier æsophagien... Je voudrais donc comparer le Vertébré et l'Annélide, région blastoporique à région blastoporique, c'est-à-dire tête à anus. » Telle est la conclusion de ce débat. On peut voir que si l’homologie entre le Verlébré et lAnnélide est encore admise, ce n’est pas sans tiraillements d'assez mauvais augure pour l'avenir. Nous allons voir d’ailleurs dans un instant qu’elle est franche- ment reniée par un certain nombre d'anatomistes. Si j'ai traité un peu longuement ce premier point, en empruntant largement au texte de l’au- teur, c’est que j'ai voulu montrer avec quelle ai- sance les embryologistes d'une certaine école évo- luent au milieu des hypothèses et des difficultés que celles-ci sèment autour d’elles. Comme le dit. fort bien M. Houssay, quand on s’en tient aux grandes lignes tout va bien, la bâtisse parait so- lide; mais pour peu qu'on regarde les choses de plus près, l'édifice parait d’une dangereuse fragi- lité. N'est-ce pas la meilleure critique qu'on puisse faire de ce système, qui consiste à élever des théo- ries générales sur quelques faits particuliers et à s’efforcer ensuite de faire rentrer les autres faits dans le moule adopté. Il n’est pas moins étrange de voir avec quelle aisance ces intrépides théori- ciens escamotent, qu'on me passe l'expression, les difficultés qui les gènent. Ainsi, on ne retrouve pas chez les Vertébrés la trace des ganglions céré- broïdes des Annélides; qu'à cela ne tienne, on déclare qu'ils n’ont pas morphologiquement une grande importance, ce qui veut dire que ces gan- glions sont récalcitrants et qu'on préfère ne pas s'en préoccuper. C’est l'histoire du pisiforme au carpe; comme il ne rentre pas aisément dans la théorie généralement admise aujourd’hui, on le considère, sans plus s'en gêner, Comme un os acces- soire et de peu d'importance. J'avoue que le rôle physiologique des ganglions cérébroïdes me parait cependant bien important; et je suis fâché pour l’hypothèse ci-dessus qu’elle n’ait pas besoin d’en retrouver Îles restes. J'aimerais mieux, pour elle, que cette absence la gènàt davantage. ! Bear». The old moulh and thenew. Anat.Anzeiger. 1888, Si l’idée de M. Houssay de comparer la tête des Annélides à l'anus des Vertébrés ne manque pas d'originalité, elle est peut-être la dernière lueur de cette vive lumière que certains zoologisles à imagination facile avaient jetée sur la question de l’Archétype vertébré considéré dans l'Annélide, IN Voici en effet un travail de M. Patten ! qui va détruire bien des illusions. Je serai très bref sur ce mémoire, qui à élé analysé par M. Bouvier pour les lecteurs de cette Æevue dans le n° 6 de cette année. Ce sont d’ailleurs toujours les mêmes arguments qui sont mis en avant; mais les Vers, trop rétifs décidément, sont remplacés par les Arachnides et ce sont le Scorpion et la Limule qui nous sont présentés comme les ancêtres des Ver- tébrés. L’hypophyse, encore une fois, est la trace de l’æsophage des Arachnides, que l’on considère comme marchant sur le dos, suivant l'hypothèse de Geoffroy Saint-Hilaire. Pour expliquer comment s'est fait le retournement chez les Vertébrés, l’auteur admet que les P?{erichthys (Ganoïdes paléozoïques) sont des formes intermédiaires entre les Mérostomes et les Trilobites d’une part et les poissons d'autre part. Or le squelette céphalique externe des P{erichthys ressemble à s’y méprendre à celui d’un trilobite et les yeux sont situés du côlé hémal comme ceux des Vertébrés. M. Patten homologue le métastome de Pterygolus (fossiles siluriens voisins des trilobites), le peigne des scor- pions et les nageoires pectorales des Péerichthys et des poissons, puis il admet que les mérostomes et les trilobites nageaient sur le dos comme les larves de limules et que ce mode de natation a conduit peu à peu à celui qu'on observe chez les poissons. Il y a longlemps que Gegenbaur ? s’est élevé contre les tentatives des anatomistes en quête de découvrir des rapports entre le système nerveux central des Articulés et celui des Vertébrés. « la moelle épinière des Vertébrés, éerit-il, ne pouvant pas être provenue de la chaine ganglion- naire d'un Arthropode, une portion de moelle épi- nière peut d'autant moins dériver d’un ganglion abdominal.. Il est encore plus étrange, ajoute-t-il, de voir comparer des parties du cerveau des Arthro- podes avec celles du cerveau des Vertébrés qni lui est complètement étranger et d'entendre parler (chez les Arthropodes) d'un cervelet et de lobes optiques et quadrijumeaux. » 1 W. Patten. On the origine of Verlebrale from Arachnids. Quarterly Journ. of Microsc. Se. vol. XXXI. 1891. 2 Gegenbaur, Anal, comparée. p. 346. D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE Si l’on en croit M. Patten, les choses ont bien changé, car il s'efforce de démontrer que le cer- veau des Vertébrés, composé de treize neuromè- res, correspond au cerveau de la Limule et du Scorpion formé par l’ensemble des ganglions cérébroïdes et sous-æsophagiens. Le cerveau anté- rieur formé de trois neuromères et le cerveau moyen qui n’en comprend qu'un seul auraient leurs homologues dans les ganglions cérébroïdes du Scorpion; le cerveau postérieur, avec cinq neu- romères, appartiendrait au thorax comme celui du Scorpion. Enfin quatre neuromères abdominaux rattachés à l'encéphale formeraient un cerveau accessoire dans les deux groupes, et dans les deux groupes donneraient naissance aux nerfs vagues. Or, pendant qu'on nous démontre que le cerveau du Scorpion et de la Limule cadre parfaitement avec celui des Vertébrés, voici qu'un autre anato- miste vient prouver qu'on ne peut même pas homologuer le cerveau de la Limule avec celui du Scorpion. En effel, M. Packard !, qui, dans de pré- cédentes recherches, avait établi que le cerveau de la Limule diffère de celui des Arachnides, revient à la charge. Le cerveau de la Limule est homologue avec la portion du cerveau des Araignées et du Scorpion située en avant de l’origine du nerf mandibulaire, c'est-à-dire avec le « cerveau anté- rieur » défini par M. Patten. Contrairement au cerveau des Araignées el des Scorpions, celui de la Limule ne donne pas de nerfs à la première paire d’appendices et il ne possède ni deuto ni trito-cerebrum. Cette absence d’homologie entre le cerveau de la Limule et celui des Arachnides s'ajoute, dit M. Packard, aux autres caractères cérébraux différentiels déjà décrits, en même temps qu'au mode distinct de groupement des appen- dices; en outre l'absence de tubes urinaires, de trachée et la présence de branchies empêchent de réunir la Limule et autres Podoslomates (Mérostomes el Triiobites) avec les Arachnides. Ils doivent former un groupe à part. Tout cela, on en conviendra, n’est pas fait pour donner beaucoup de confiance dans la solidité de la théorie arachnidienne de l’origine des Ver- tébrés. Heureusement les ressources ne manquent pas. En efict, pour M. Lameere ?, les Chordozoaires, qui comprennent les Verlébrés, l’'Amphioxus et les Tuniciers, « proviennent, sans doute, d’un acti- nozoaire flottant la bouche en haul comme le ‘ Packarn. Further studies on the brain of Limulus polyphemus, Zool. Anzeiser. 1891. 2 A. LAMEERE, Prolégomènes de zoogénie, in Bullet. se. de la France et de la Belgique, 4891, t. XXII, p_ 399, et l'Origine des Vertébrés Bullet, sc. belge de microsce., t, XVII, 1891: font certaines larves de ces cnidozoaires. Cette hypothèse, ajoute l’auteur, rend compte de l’ori- gine de la corde dorsale, tuteur d’un corps primi- tivement mou et sans appui, et du myocæle, appa- reil de locomotion ». a On est, dit Bridoison, toujours fils de quel- qu'un. » V Il ne faut pas s’élonner de voir lant d'opinions variées se faire jour à propos d’une question aussi difficile et obscure que celle de l'origine des Ver- tébrés, quand on constate, pour un fait aussi sim- ple en apparence que l’est celui de variations de couleur observées chez cerlains Pleuronec- tes, des explications absolument différentes don- nées par chacun des naturalistes qui aborde le sujel. : On sail que la face nadirale (inférieure et non éclairée) des Pleuronectes présente une coloration blanche ou notablement moins foncée que la face zénithale ou supérieure. M. Cunningham a institué des expériences pour établir quelle est la raison de cette particularité anatomique. « L'école de Weis- mann, dit-il, plus darwinienne que Darwin lui- même, altribue ce fait à la sélection naturelle et l'École, qui va toujours grandissant, d’après la- quelle le milieu agit sur les êtres, doit l’attribuer à une influence physique, au fait que la face ven- trale reçoit naturellement moins de lumière que la dorsale. » C’est à cette dernière interprétation que M. Cunningham accorde ses sympathies. En tous cas il a fait quelques expériences sur le flétan (Pleuronectes flesus). Obscurcissant le couverele et les parois d’un vase où il avait placé un de ces poissons, il disposa un miroir qui envoyait la lu- mière à travers le fond, de telle sorte que la sur- face dorsale de l'animal en expérience était dans l'obscurité et la face ventrale éclairée. Les résultats furent les suivants : sur 13 poissons ainsi éclairés trois seulement demeurèrent pareils aux témoins ; les autres présentèrent une plus ou moins grande quantité de cellules pigmentaires. Ces expériences semblent donc démontrer que l’action de la lumière joue un rôle dans la diffé- rence de coloration des deux faces. Toutefois M. Giard ? fait observer qu'il est possible d’ad- mettre que les flétans ordinaires comptent des individus reverses parmi leurs ancêtres; dès lors l'hérédité expliquerait l'apparition des taches pig- mentlaires observées sur la face aveugle. « On 1 CuxxiNGnaM. An Experiment concerning the Absence of Color from the lower Sides of Flat-fishes, in Zool. Anzeiger 1891, n° 354 p. 27. 2 Grarn, Comptes-Rendus de la Soc. de Riologie. janv, 1892, > ee. Pi D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 19 QC Qt pourrait le faire avec d'autant plus de raison que des individus pe ou marbrés sur la face aveugle et aussi des individus ordinaires doubles, c'est-à-dire colorés surles deux faces, ne sont pas rares parmi les flets pêchés en liberté. Et, comme d’ailleurs on ob- serve de semblables anomalies mêmechez des pleu- ronecles où les individus reverses sont rares (soles, tuibots, elc.), on pourrrait encore faire intervenir un alavisme plus éloigné et attribuer ces restes de pigmentalion au souvenir de l’état bilatéral pri- milif. » M. Giard ne conteste pas d’ailleurs que l'action de la lumière puisse intervenir. Chez un turbot présentant une double anomalie, l'œil droit s'élant arrêtée sur la crête dorsale dans son mou- vement de migration et les deux faces étant co- lorées avec une intensité sensiblement égale, il lui semble que l’action de la lumière est évidente, le poisson devant, dans ce cas, nager verticalement. M. Pouchet !, au sujet de deux turbots, pêchés à Concarneau et qui présentaient une pigmentation presque tolale de la face nadirale, conteste que l'action de la lumière puisse être invoquée, car « on ne saurail, dit-il, dans l’état actuel de la science, admettre que la simple action de la lumière dans la durée de la vie d’un individu puisse avoir d’autre effet que d'augmenter la production du pigment à l’intérieur de certaines cellules aptes à produire ce pigment. Mais il y a loin de là à la formation d’un lissu nouveau avec sa complexité spéciale, les pig- ments variés que j'ai décrits il y a longtemps dans la peau du turbot, des iridocyles, enfin des bou- cles osseuses, lesquelles n'existent point d'ordi- naire dans la peau du côté nadiral et se montrent quand celle-ci est modifiée, de facon à devenir identique à la peau du côté zénithal, » Il semble, ajoute M. Pouchet, que la meilleure explication qu'on puisse donner de l'extension du pigment à la face nadirale soit purement embryogénique. «Si l’on se reporle aux premiers temps de la vie de l'embryon du Pleuroncete et qu’on considère son plan médian, celui-ci doit idéalement partager toutes les cellules de l’ectoderme qui plus Lard apparliendront les unes au côté zénilhal, les au- tres au côté nadiral, avec leur potentiel diffé- rent, puisqu'elles donneront naissance en quel- que sorle à deux téguments différents; il suffit d'admettre en somme qu'une seule de ces cel- lules de l'ectoderme primitif ait franchi la ligne médiane, pour donner naissance à une porlion plus ou moins étendue de peau ayaut les ca- ractères ancestraux que celle cellule porte en elle. » On voit que les avis sont partagés. Biologie, l Poucner. Comptes-Rendus de la Soc. de janv. 1892. VI Beaucoup de zoologistes avaient manifesté le désir de connaître les méthodes employées à la station zoologique de Naples pour la conservation des animaux marins. M. Lo Bianco qui, depuis plusieurs années, est chargé spécialement de ces études au laboratoire vient de publier une sorte d'instruclion détaillée dans le Zulletin scientifique de la France et de la Belgique (1891. T. XXII, p. 100). L'auteur fait remarquer que les publications faites à ce sujet dans diverses circonstances n'ont point été autorisées et qu'il n'en assume point la res- ponsabilité. Dans son travail, il indique les formules des principaux mélanges employés et consacre ensuite une série de chapitres à leur application aux divers groupes d'animaux que l’on peut re- cueillir à la station de Naples. Il fait remarquer que ces mélhodes sont destinées surtout à con- server l’aspect général des animaux qui doivent figurer dans les musées ou servir à des démons- tralions dans les cours et que, par suite, elles n’ont pas en vue les études histologiques. Toutefois, dans beaucoup de cas, la conservation des éléments se trouve réalisée en même temps que celle de la forme du corps. Il ne nous est pas possible de donner même un résumé de ces méthodes. Qu'il nous suflise d’avoir fail connaitre la source où pourront puiser les zoologistes désireux de se renseigner. Puisque je parle de la station zoologique de Naples le moment me parait opportun de signaler les publications relatives à quelques-uns des labo- ratoires marilimes de France. Les Archives de Zoologie expérimentale (1891, p. 225) renferment un historique des progrès réalisés depuis dix ans par les laboratoires de Roscoff et de Banyuls. « A certains égards, dit M. de Lacaze-Duthiers, l'ins- tallalion à été tellement modifiée (depuis le der- nier compte rendu de 1881) par des améliorations successives que l’on peut, d’après l’état actuel des choses, considérer ces élablissements comme élant terminés. » Le rapport renferme des vues et des plans détaillés des deux laboratoires. À propos du laboratoire de Roscoff, M. de Lacaze-Duthiers fait connaitre les beaux résultats qu'il a obtenus dans ses premiers essais d'ostréiculture : 8.500 pe- tiles huîtres (naissain) placées dans le vivier en avril 1890 et entourées de soins assidus n'ont donné lieu qu'à une mortalité insignifiante (210 seulement), tandis que plus de 3.000 ont gagné dans l’espace d’une année de 4 à 6 centi- mètres de diamètre, c'est-à-dire que, dans ce laps de temps très court, elles ont alleint la laille marchande. Ce sont là, on en conviendra, des 286 D' H. BEAUREGARD. — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE résultats précieux, qui sont bien faits pour encou- rager le savant et actif directeur du laboratoire de Roscoff à continuer son intéressante tentative. A Concarneau ! M. G. Pouchet a obtenu la con- cession définilive du fort Cigogne, situé sur l’une des îles de l'archipel de Glénans. « Les vastes salles voûtées où règne une température toujours égale constituent pour les naturalistes autant de chambres de réserve où ils peuvent laisser reposer et conserver provisoirement les animaux recueillis pendant les dragages et lors des grandes marées. » Comme les années précédentes le Professeur Pouchet s’est préoccupé de l'étude de la Sardine. Le «régime » de la Sardine a présenté en 1890 une physionomie anormale. Les bancs de poissons de même taille qui marquent ordinairement le début de la saison ont fait défaut dans toute la région sud; les Sardines se sont montrées avec des tailles très différentes, indice d'une différence d’äge, qu'on n’observe en général qu'à la fin de la saison. Dans une annexe à son rapport, M. Pouchet traite de l'importante question de l'œuf de la Sardine. « Pas plus au cours de l’année 1890, dit- il, qu'au cours de la présente année 1891 les pêches au filet fin pratiquées dans la baie de Con- carneau ne nous ont mis en présence de l'œuf de la Sardine. Nous persistons donc dans l'opinion déjà depuis longtemps soutenue par nous : 1° que la Sardine océanique ne pond pas à la côte: 2° que son œuf n'est pas flottant. » Cette affirmation est contredite par M. Marion ? qui décrit comme œufs de Sardine des œufs flot- lants, considérés comme douteux par Raffaele qui les observa le premier en 1888, mais rapportés à la sardine par Cunningham de Plymouth dans ses Studies of the Reproduction, etc. *. M. Pouchet conteste que les caractères de ces œufs puissent être rapportés à l'œuf de la sardine 1 G. Poucner. Rapport sur le fonclionnement du labora- loire de Concarneau en 1890 et sur la Sardine. Journ. de l'Anat. ct de la Physiol. 1891, n° 6, p. 622. 2 Marion. Nouvelles observalions sur la sardine de Mar- seille. C. R. Académie des scienees, 31 mars 1891, et Asso- ciation française pour l’avancement des sciences. Session de Marseille 1891. 3 CexxixGHAM. Journal of the Marine Biological Association Mars 1889. qu'il a étudié à maturilé dans l'ovaire de la sar- dine « de dérive ». « Les seules présomptions, dit M. Pouchet, qui se dégagent jusqu'ici des faits observés, sont que la ponte de la sardine océa- nique et la plus grande partie de son existence se passent dans des régions soustraites à l'influence solaire directe, c'est-à-dire où la température des eaux est sensiblement invariable, régions absolu- ment en dehors de l’action de l’homme. Ces pré- somplions acquièrent encore une force nouvelle de ce fait que jusqu'à ce jour la plus petite sardine que nous ayons pu observer sur la côte océanique mesurait 98 millimètres el pesait 7 grammes, c’esl- à-dire qu'elle devait être âgée de six mois au moins. » M. Marion est d’un avis tout opposé, 1l pense « que la sardine, bien loin d’aller au large et dans les grands fonds pour déposer ses œufs, se rapproche au contraire de la côle au moment du frai et abandonne ses œufs à la surface, dans des golfes abrités, au voisinage des embouchures des rivières qui s’y déversent. » Il est évident qu'en présence d'opinions aussi divergentes, il n’est qu'un moyen de résoudre la question. Il faut faire éclore les œufs considérés comme œufs de sardine et en suivre le développe- ment. Si l'opération est dificile elle ne doit pas être impossible. Nous ne pouvons demander au professeur Pouchet de tenter cette expérience puisqu'il ne trouve pas d'œufs dans ses pèches au filet fin, mais le professeur Marion nous donnera un jour celte preuve définitive de la nature des œufs qu'il recueille à la surface des eaux de la Méditerranée. C’est le seul moyen de vider la ques- tion, et jusqu'à ce qu'on y soit parvenu la discus- sion ne roulera que sur des affirmations qui ne peuvent servir à établir une conviction. L'intérêt qui s'attache à la solution que nous désirons voir apporter est très grand, car il s’agit de savoir si les pêcheurs qui usent de filets à mailles fines au voisinage de la côte sont susceptibles de détruire des stations de frai. Pour M. Marion, le fait est incontestable; pour M. Pouchet, il n’en estrien, car c'est en haute mer que se fait la ponte. D' H. Beauregard, . Professeur agrégé à l'École supérieure de pharmacie, Assistant d'anatomie comparée au Muséum. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 287 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Rouché@ (E.), Professeur au Conservatoire des Arts et Métiers, Examinateuwr de sortie à. l'Ecole Polytechnique el Comberousse (Ch. de), Professeur au Conserva- toùre des Arts et Métiers et al’ Ecole centrale. Traité de géométrie, conforme aux programmes officiels, ren- fermant un très grand nombre d'exercices et plusieurs appendices consacrés à l'exposition des principales mé- thodes de la Géométrie moderne, 6° édition revue et augmentée, un très fort volume in-8° de 1136 pages (Prix : 16 fr. 50). Gauthier-Villars et fils, imprimeurs- libraires, 55 quai des Grands-Augustins, Paris, 1892. MM. Rouché et de Comberousse viennent de publier une sixième édition de leur Traité de Géométrie; nous n'avons pas à rendre compte de cetouvrage qui, depuis longtemps, est devenu classique, que tous les élèves ont entre les mains et qui, par chacune de ses éditions successives se tient au niveau de la science. Nous nous contenterons de sigaaler les améliorations apportées à la sixième édition en ce qui concerne l'exposé des diverses méthodes de résolution des problemes, l'étude des faisceaux de cercles, et surtout la nouvelle géomé- trie du triangle, L: 0: Leray (P. À). — Complèment à l'essai sur la syn- thèse des forces physiques. — In-8° avec fiqures, 162 pages. (Prix : & fr. 90), Gauthier-Villars 55, quai des Grands-Auqustins. Paris, 1892. Ce volume fait suite à l'essai sur la synthèse des forces physiques publié en 1885 et dans lequel l’auteur, adversaire déclaré de l’action à distance, rend compte des phénomènes au moyen des chocs d'éléments cons- lituant un fluide extrêmement subtil ; cette conception, qui rappelle celle de Lesage, en diffère cependant es- sentiellement, non seulement par la nature du fluide mis en œuvre, mais encore par le mécanisme au moyen duquel elle conduit à l’ explication des faits. Le premier volume était principalement consacré à la mécanique des atomes et à l'étude analytique de élasticité de l’éther ; l’auteur y montre que si l’on rejette les actions à distance, l’éther, concu comme on le fait souvent, ne satisfait pas aux conditions d’un milieu élastique alors même que ses atomes seraient eux-mêmes parfaitement élastiques ; il est conduit à imaginer un second fluide, l'Eon, dont les atomes im- pénétrables, déformables dans le choc et 6 lastiques sont beaucoup plus petits que ceux de l’éther ; l’'Eon en tant que fluide est dépourvu d’élasticité ; ; dépositaire de l'énergie primordiale, il communique cette énergie à l'éther par voie de chocs, etle mécanisme de ces chocs est tel que l’éther acquiert les propriétés d’un milieu parfaitement élastique; partant de là, l'analyse con- duit à ce résultat, dont il est inutile de faire ressortir l'importance, que : dans le milieu ainsi constitué les vibrations transversales seules peuvent être trans- mises, les vibrations longitudinales y étant presque im- médiatement éteintes. Dans le volume qui vient de paraitre l’auteur traite d’abord de la chaleur et de la pesanteur. Imaginons, avec le P. Leray, l’atome matériel des corps simples commme formé parle groupement d’un certain nombre d'atomes d’ étien assez rapprochés pour former un édi- lice impermeable aux atomes d’éther restés libres, mais non aux atomes d’Eon ; ces atomes d’Eon qui sont animés de mouvements de translation extrème- ment rapides, en se frayant un chemin à travers l’a- tome matériel, choquent les atômes d’éther qui lecons- ET INDEX tituent et leur communiquent des mouvements vibra- toires qui, régularisés par la monade qui préside au groupement, constituent la chaleur ; ces vibrations calorifiques peuvent ensuite transmettre à l’éther libre une fraction de leur énergie qui sera également de la chaleur ; mais elles ne peuvent prendre naissance que dans la molécule matérielle, de telle sorte que si l’éther et l’'Eon existaient seuls, ils constitueraient un milieu totalement dépourvu de chaleur. Quand un courant Eonien a ainsi traversé un atome matériel, il en sort modifié : au premier instant, il y laisse d’abord une partie de son énergie sons forme de chaleur ; quand l'équilibre calorifique est établi, il con- serve en sortant toute son énergie; mais sa quantité de mouvement a diminué ; par suite il est facile de voirque si au voisinage de l'atome matériel et dans la direction du flux d’ Éon se trouve un atome d’éther, celui-ci rece- vra de la part du flux unèé impulsion moindre que celle que lui communique l'Eon en sens contraire et que par suite, il sera poussé vers l'élément matériel ; quelque chose d’ analogue à lieu entre deux molécules maté- rielles et, dans les deux cas, l'analyse conduit aux lois ordinaires de la proportionnalité aux masses et à l’in- verse du carré de la distance, avec cette restriction, toutefois, que l’action, au lieu de s'étendre à l'infini, est limitée à un rayon d'activité dépendant des masses; ainsi se trouvent expliquées la cause et les lois de la pesanteur. Le chapitre consacré à la cohésion et à laffinité est des plus intéressants ; l’auteur y montre comment les molécules matérielles sont entourées d’atmosphères spéciales d’éther et. comment la pression de ce fluide peut engendrer la cohésion et l’affinité : il y développe des idées ingénieuses sur la formation des molécules polyatomiques, la valeur des atomes, etc. etc. Si l'on considère deux atomes matériels vibrant l'unisson, chacun d’eux, absorbant une partie de la radiation éthérée de Pautre, dans l'intervalle qui les sépare l'énergie de l'éther tend à passer en grande partie à l'état vibratoire ; il reste par suite dans l espace en- vironnant un excès d'énergie dans les mouvements de translation qui opère le rapprochement des atomes. L'aflinité dépendant ainsi de la concordance des mou- vements vibratoires, on entrevoit de suite les prévi- sions qui pourront résulter des données fournies par l'analyse spectrale. A propos de la cohésion l’auteur est conduit naturel- lement à examiner certains points relatifs à l’élasticité des solides, par exemple les limites entre lesquelles peut varier la valeur du coefficient de Poisson, Le volume est terminé par un mémoire relatif à la théorie cinétique des gaz. L'auteur est conduit à définir un gaz parfait : celui dans lequel le nombre des molé- cules reste invariable et dont les énergies de transla- tion de vibration en rotation sont dans un rapport constant. Partant de là et d'une définition spéciale de la température, il retrouve les lois générales des gaz parfaits, étend le principe de Carnot à ces corps en tenant compte du volume de leurs molécules, et arrive pour les gaz réels à retrouver les formules de Clausius, de Van- der- Waals et de M. Sarrau comme cas particu- liers. Il établit enfin une théorie nouvelle des chaleurs spécifiques des gaz, dans laquelle, sans recourir à au- cune mesure calorimétrique directe, il arrive à des ré- sultats numériques remarquablement d'accord avec l'expérience. En résumé, par l'ingéniosité des idées qui y sont exposées el la logique ‘de leur enchaîinement, par le nombre considérable de questions importantes qui y 288 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX sont traitées avec succès et même par des développe- pements analytiques dont ces questions ont été l'objet, le travail du P. Leray est une œuvreoriginale etremar- quable qui mérite d’être lue avec attention par toutes les personnes qui s'intéressent aux progrès de la Phy- sique mathématique et que les questions relatives à la philosophie générale des sciences ne laissent pas in- différentes. E. H. AmaGar. 2° Sciences physiques. Evvans (Thomas). — Sur le spectre d'absorption de quelques sels de cuivre en solution aqueuse. Philosophical Magazine. Avril 1892. L'étude des propriétés physiques des solutions occupe actuellement un grand nombre de physiciens qui cherchent à avoir des indications sur la structure molé- culaire des sels à l’état dissous, Les propriétés optiques, assez souvent éludiées cependant, n'ont pas conduit jusqu'ici à des résultats bien nets et bien indiscutables, En particulier, l'absorption de la lumière par les solu- tions colorées a conduit les divers savants qui se sont occupés de cette question à des résultats contradic- toires. Beer, dès 1852, parvint à la conclusion qu'un changement de concentration produit le mème effet qu’une variation d'épaisseur. Cette loi, vérifiée par des mesures de Bunsen et de Roscoe, de Zôllner, etc., a été mise en doute par les recherches les plus récentes. M. Ewans a repris à ce point de vue l’étude des sels de cuivre; pour odienir des résultats certains, il ne s’est pas borné à une étude qualitative et a effectué un grand nombre de mesures spectrophotométriques. Voici les conclusions qui résultent de cet important travail : Le spectre d'absorption des sulfate, azotate et chlorure de cuivre (seuls sels étudiés), se modifie quand on fait varier la concentration. Les changements produits sont tels que les spectres tendent à devenir identiques pour les différentes solu- tions, quand elles sont très diluées, La marche du phénomène conduit à admettre que, dans les solutions étendues, l'acide et la base agissent indépendamment, en ce qui concerne l'absorption de la lumière. Ces résultats, en infirmant la loi de Beer, viennent montrer une fois de plus que l’état d’un sel dissous subit des modifications très marquées sous l’influence des varialions de dilution, En ce qui concerne l’état du sel dissous, l’auteur voit, dans ses conclusions, un appui en faveur de l'hypothèse de la dissociation élec- trolytique. Je ne crois pas que cela permette encore de choisir entre la dissociation électrolytique, la disso- ciation moléculaire, défendue surtout par Armstrong et Traube, et la théorie de l’hydratation de MendelejelT et Pickering. Ces recherches ont néanmoins le mérite de montrer que l'absorption de la lumière suit les mêmes lois générales que les autres propriétés phy- siques des solutions, l G. CHarPy. Knoblauch. Spectres d'absorption des solutions très étendues. -— Wiedemanns Annalen, 1891. L'auteur étudie le spectre d'absorption de solutions excessivement étendues ; il a été jusqu'à employer des épaisseurs de liquides de 8 mètres, épaisseur au delà de laquelle l'absorption propre de l’eau prend une in- fluence très notable, Parmi ces corps étudiés, l'acide picrique, le ferro- cyanure de potassium, les sels d’urane, les sels d'éo- sine, le sulfate de cuivre présentent le même spectre en solutions étendues ou concentrées. Pour le sulfate de cuivre cependant, l’auteur note que l'absorption propre de l’eau empêche toute conclusion certaine. Le chromate et le bichromate de potassium au con- traire présentent des spectres diflérents correspon- | dant aux différentes concentrations. | M. Knoblauch à fait ces recherches eu vue de les comparer à la théorie de la dissociation électrolytique. Le spectre d'absorption en solutions concentrées est formé par la superposition de deux spectres, celui des ions et celui des molécules. En solutions très étendues au contraire, on à un seul spectre s'il ya un seul ion coloré, M. Knoblauch voit dans ses résullats une confirma- tion de l'hypothèse d'Arrhenius. G. CHarpy. Nichols (Edwards) et Snow (Benjamin). — In- fluence de la température sur la couleur des pi- gments. — Philosophical Magazine, novembre 18941,— Sur le caractère de la lumière émise par l’oxyde de zinc incandescent. — Philosophical Magazine, Janvier 1892. On ne possède qu’une connaissance très incomplète des lois qui régissent les variations de couleur des pigments sousl'influence de la chaleur. En 1871, Hous- ton et Elihu Thomson, après avoir étudié un grand nombre de corps, arrivèrent à conclure que « une élé- vation de température modifie la couleur des corps de telle facon qu'elle correspond à un nombre de vi- brations d'autant plus petit que la température est plus élevée ». En 1876 Ackroyd confirma ce déplace- ment vers le rouge de la couleur des corps chauffés et montra que ce phénomène est dû à ce que l’absorp- tion de la lumière devient d'autant plus considérable que la température est plus élevée, la variation étant plus rapide pour les radiations plus réfrangibles, Depuis, la réflexion de la lumière à donné lieu à des travaux de Gladstone, Barkley et Couroy. MM. Nichols et Snow ont étudié systématiquement Pinfluence de la température sur la lumière réfléchie par divers pig- ments. Le corps en expérience était placé sur un fil de platine chauffé par le passage d’un courant; la tem- pérature était déduite de l'allongement de ce fil de platine; enfin la lumière était recue dans un spectro- photomètre. Voici les conclusions auxquelles ils ar- rivent. I. Aucune substance ne réfléchit également les dif- férentes radiations, même dans la partie du spectre ou le pouvoir réflecteur est maximum, Il, Quand la température s'élève, le pouvoir réflec- teur diminue toujours, et d'autant plus que les radia- tions sont plus réfrangibles, IT. Les changements de couleur observées quand on chauffe un pigment sont dus aux variations inégales du pouvoie réflecteur pour les différentes radiations, et le phénomène décrit comme un déplacement vers le rouge provient de ce que la perte d'éclat est minimum dans le rouge et augmente rapidement quand on se déplace vers le violet, Dans certains cas cependant, (oxyde chromique et oxyde de zinc, on observe une région présentant un maximum de pouvoir réflecteur. Le cas de l’oxyde de zinc a été spécialement étudié par MM. Nicholset Snow. Ils ont comparé à diverses températures la lumière émise par ce corps à celle émise par le platine. Ce dernier corps, soigneusement étudié par M. Violle peut servir de terme de comparaison, Il ressort de ces expériences que l’oxyde de zinc, outre l’incandescence due à latempérature, devient for- tement lumineux aux environs de 880°, Le phénomène peut se rapprocher de ceux que Becquerel à étudiés sous le nom de « phosphorescence par la chaleur ». Il ya lieu de supposer que d’autres oxydes métal- liques présentent le même phénomène; des cylindres de chaux, par exemple, présentent, quand on commence à les chauffer dans la flamme oxhydrique, un éclatqu'ils ne conservent pas dans la suite de l'expérience. L'éclat extraordinaire de la flamme du magnésium est dù aussi sans doute à un état d’incandescence initial com- parable à celui de l’oxyde de zinc. Pickering trouvait que l'éclat de la flamme du magnésium correspondait à une température de 30009, alors que la température de combustion est en réalité d’environ 1#00°. G. CHarpy. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 289 3° Sciences naturelles. Foëx (G.), Directeur de l'Ecole nationale d'agriculture de Montpellier. Cours complet de Viticulture. — Un vol. de 918 pages avec 6 cartes en chromo et 575 gra- vures dans le texte. 3° édition (18 fr.) C. Coulet, à Montpellier, et G. Masson, 120, boulevard Saint-Ger- main, Paris, 1892, La viticulture francaise, après plus de vingt ans de tätonnements et de recherches, se relève enfin de l’agonie où l'avait plongée le phylloxéra. Non seule- ment le phylloxéra, mais encore toute une série de maladies parasitaires désastreuses s'étaient abattues sur elle et avaient donné aux viticulteurs les craintes les plus justifiées. Insectes et champignons paraissaient jaloux de la prospérité de nos vignobles, et leur génie de destruction était si grand que la lutte paraissait impossible. Mais, heureusement, la science a réclamé ses droits. La vigne américaine et le cuivre ont triomphé de tous ces fléaux, et tout fait prévoir que, dans un avenir prochain, le vignoble francais sera aussi pros- père qu'aux plus beaux jours. Si le vin des nouvelles plantations est le même que celui d'autrefois, les moyens de le produire sont fort différents. De la cul- ture moderne se dégagent des devoirs nouveaux, M. Foëx a eu l’heureuse idée de réunir ces connais- sances nouvelles et d’en faire profiter les viticulteurs. Le cours complet de viticulture de M. Foëx est une œuvre considérable qui comprend dans son ensemble tout ce qui est relatif à la viticulture actuelle, La situa- tion exceptionnelle de l’auteur lui a permis de traiter les questions pratiques aussi bien que la partie théo- rique. Viticulteur, directeur et professeur de viticul- ture à l'Ecole nationale d'agriculture de Montpellier, M. Foëx est depuis longtemps admirablement placé pour étudier les nombreuses questions viticoles qui ont surgi pendant ces vingt dernières années. Dans ces conditions, M. Foëx a été amené à grouper au- tour de ses travaux ceux des viticulteurs éminents qui l'entourent et qui rivalisent de zèle et d’ardeur pour la reconstitution de leurs vignobles, Grâce à ce concours heureux de circonstances, cel ouvrage est une véritable encyclopédie de la viticulture moderne. Les vignobles actuels sont l’objet de soins nouveaux et de préoccupations constantes. Il mest pas de culture qui ait été aussi profondément modifiée que la culture de la vigne. Si les pratiques nouvelles sont, depuis quelques années, très bien connues dans le Bas-Languedoc. il n'en est pas ainsi encore dans tous les pays à vignobles de la France, L'ouvrage de M. Foëx permettra aux viticulteurs des régions moins avancées dans la reconstitution de profiter des appli- cations de la science et des faits pratiques qui se dé- gagent clairement des premiers vignobles rétablis à grand peine depuis le phylloxéra.Ces premiers vignobles sont aujourd’hui les témoins irrécusables de la valeur des vignes américaines et de l'efficacité des traitements contre les maladies cryptogamiques. Le cours complet de viticulture s'ouvre par des considérations économiques suivies d’un résumé de l’histoire de la viticulture en Europe et d’une étude comparative des principaux vignobles du monde. L'ampélographie prend chaque jour une importance de plus en plus grande, Cette partie du cours com- prend la description botanique des Ampélidées et plus spécialement du genre Vitis, dans la multiplicité in- finie de ses formes. Elle s'occupe aussi des questions capitales de l'adaptation, de la valeur de chaque cé- page et de la résistance relative des producteurs et porte-greffes américains aux attaques du phylloxéra, La physiologie de la vigne, les opérations culturales des diverses contrées viticoles, la multiplication par le semis et par le greffage ont été l’objet de développe- ments très étendus; les parasites végétaux occupent une place importante. Le phylloxera est étudié de la manière la plus complète, et les moyens de détruire cet insecte ou de lutter contre lui sont passés en revue successivement, Enfin, le cours de viticulture se ter- mine par une étude comparée des principaux vignobles du monde et par un résumé des lois et règlements édictés en France ou dans les pays limitrophes pour se préserver de l'invasion de l’insecte ou pour en arrêter l'extension. Cet ouvrage est remarquable par son ordre; le style est net et précis et la lecture en est très facile. Le succès qu’il méritait ne s’est pas fait attendre, Les deux premières éditions ont été épuisées avec une rapidité extraordinaire. La troisième édition vient de paraitre ; elle a été complétée et mise au courant des découvertes les plus récentes. En somme, le cours de M. Foëx constitue une œuvre d’une très grande importance pour l’enseignement agricole. M. Mazanr, WWoodhead (German Lins), — Directeur dulaboratoire de bactériologie du Collège royal des médecins de Londres. — Bacteria and their products. (Les Bactéries el leurs produits), un vol in-8. de 460 pages, avec 20 micropho- tographies (4 fr. 50). Walter Scott, 24, Warwick Lane, Paternoster Row. Londres, 1891. Ce livre expose, uniquement en vue de la vulgarisa- tion, les idées actuelles sur les bactéries pathogènes. Les premiers chapitres traitent de la structure de ces micro-organismes et des fermentations qu'ils provo- quent. La généalogie des découvertes qui s’y rappor- tent y est décrite, mais avec de très grosses lacunes, et sans que l’auteur ait pris soin d'indiquer quelles sont, parmi ces découvertes, celles qui ont exercé l'in- fluence la plus décisive sur la bonne orientation des recherches. L'œuvre de Pasteur n’y parait pas au pre- mier plan. Après ces préliminaires, M. Woodhead passe succes- sivement en revue les travaux bactériologiques récents qui se rapportent à diverses maladies : choléra, fièvre typhoïde, tuberculose, lèpre, actinomycose, charbon, tétanos, diphtérie et rage. Ces chapitres font très bien connaître l’état actuel de la science. Vient ensuite la description des bactéries chromo- gènes et phosphorescentes, l’étude des ptomaïnes, albu- minoides, toxalbumines, en général des excrétions microbiennes, rencontrées au cours de la putréfaction ou de certaines maladies, comme le tétanos et la dipthérie. — Un chapitre consacré aux Bactéries de l'Air, de la Terre et de l'Eau termine l'ouvrage. L. 0. Courmont (Frédéric). — Le cervelet et ses fonc- tions. — Un vol. in-8° (12 fr). F, Alcan, éditeur, 108, boulevard Saint-Germain, 1891. Dans ce volume d’une lecture facile, M. Courmont, s'appuyant sur de nombreuses observations antérieu- rement publiées à d’autres points de vue, en tire cette conclusion que le cervelet possède des fonctions ana- logues à celles du cerveau, que c’est un organe d’in- telligence, Depuis les travaux de Flourens, on avait re- connu une relation étroite entre ses fonctions et celles de la locomotion, et l’on attribuait au cerveau seul les fonctions intellectuelles. Il faudrait abandonner cette croyance passée à l’état de dogme et admettre un cer- velet psychique; mais, pour bien comprendre son rôle, il faut se rappeler que l'intelligence est double, qu'il y a la raison et le sentiment, la tête et le cœur, comme on dit vulgairement. Le cerveau serait l'organe du rai- sonnement, le cervelet celui des facultés affectives et aimantes. L'homme qui aime et l’homme qui raisonne seraient deux êtres différents; chez l’un le cervelet fonc- tionnerait, chez l’autre le cerveau. La question, dit l’auteur, ne pourrait être tranchée par des expériences sur des animaux ; ce serait à l’anatomie pathologique, rapprochée des renseignements fournis par la manière dont ont vécu les gens, qu’il faudrait demander la solu- tion du problème, Telles sont, succinctement résumées, les idées de M. Courmont sur une question que son ouvrage, inté- ressant à lire, n’a, croyons-nous, pas encore tranchée, Dr Henri HARTMANN, 19 © (=) BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 4° Sciences médicales. Labadie-Lagrave (D'), — Traité des maladies du foie. Un volume in-8°, avec 40 figures. (Prix : 18 fr.). Veuve Babé et Cie, place de l'Ecole-de-Médecine. Paris, 1892. Le Traité des maladies du foie, par M. Labadie- Lagrave, est le sixième volume de la Médecine clinique publiée par l’auteur, en collaboration avec le Profes- seur Germain Sée. Ce volume est par lui-même et isolément une œuvre considérable, par la masse des documents qui y sont accumulés et par la clarté d'exposition qui per- met d’en tirer tout le profit qu’on peut désirer. Ce n’est pas une petite affaire, aujourd’hui, d’entre- prendre d'écrire un traité des maladies du foie : nous sommes loin des classifications nettes et tranchées qui permettaient de ranger naguère les affections hépatiques en un petit nombre de maladies bien distinctes les unes des autres, Depuis les beaux travaux de CI. Bernard, les recherches se sont multipliées, et le rôle du foie dans l'élaboration des substances absorbées s’est révélé de plus en plus complexe. La pathologie générale tend de jour en jour à démon- trer que les lésions viscérales, regardées pendant long- temps comme des maladies locales, sont, pour la plu- part, des résultats plus où moins éloignés d'infections microbiennes, ou d’intoxications, celles-ci tantôt pri- mitives, tantôt secondaires aux infections. Dès lors, le rôle du foie devient d'une importance capitale dans la genèse de ces lésions disséminées. Placé sur la route des substances absorbées dans l'intestin, il ne les laisse passer dans le sang qu'après leur avoir fait subir des modifications profondes. L'école de M. Bouchard s'est attachée, dans ces dernières années, à bien démontrer cette fonction essentielle de la cellule hépatique, et son élève, M. Roger, en parli- eulier, à étudié l’arrêt des poisons par la glande hépa- tique, que ces poisons, comme l'alcool, soient intro- duits du dehors dans l’organisme, ou qu'ils résultent des déchets de la vie cellulaire (auto-intoxication). Mais cette action tutélaire du foie ne saurait s'exercer au delà de cerlaines limites, sans danger pour ses propres éléments : recevant les principes infectieux et toxiques de première main, il est aussi le premier à en ressentir les effets, ef la cellule ne peut remplir sa fonction protectrice qu'autant qu’elle reste elle-même intacte. Parfois, la substance nocive agit directement sur la cellule hépatique, la frappe de mort, comme dans l'ic- tère grave, et l'organisme entier succombe à l’intoxi- cation, dès que le rein manque à l'élimination ur- gente des poisons. Parfois, c’est antérieurement que le foie a subi des altérations, sclérose, dégénérescence, qui diminuent l'énergie de ses fonctions d'arrêt, et la moindre infec- tion survenant, les accidents graves se produisent hors de proportion, semble-t-il, avec la virulence d’origine. On concoit dès lors combien les maladies du foie peuvent être nombreuses, et combien il importe de savoir comment cet organe essentiel se comporte dans les affections des différents systèmes. C'est à élucider cette pathologie complexe que s’est attaché M. Labadie-Lagrave. Dans une première partie, riche de faits et pleine d’érudition, on trouve un exposé clair de l'anatomie, et surtout de la physiologie hépatique, où les chapitres concernant la glycogénie hépatique, le rôle du foie à l'égard des poisons, à l'égard de la graisse, présentent un intérêt tout particulier. La deuxième partie est consacrée à la Pathologie générale du foie où se trouve une étude magistrale du grand symptôme hépatique, l’Ictère. La troisième partie, la plus fournie, contient la Pathologie spéciale : en tête, les Infections en forment les chapitres les plus nouveaux; on connaît les tra- vaux nombreux publiés dans ces dernières années sur ce qu'on a appelé la maladie de Weil : M. Labadie- Lagrave est d'avis qu'il n’y a pas lieu d’en faire un type clinique spécial, comme on l’a voulu en Alle- magne, mais qu'il ne s’agit là que d’une forme pseudo- grave d’ictère infectieux. Viennent ensuite les ictères graves, les hépatites et les lésions du foie dans les différentes maladies infec- tieuses, fièvre typhoïde, syphilis, tuberculose, impalu- disme. ; Les intoxications renferment un chapitre d’une im- portance énorme, celui des cirrhoses hépatiques. Il y a peu d'années encore, l’étude des cirrhoses du foie pou- vait se. faire d’après leurs caractères anatomiques, schématisés en des types nettement distincts les uns des autres : aujourd’hui, des travaux multipliés sont venus montrer tout ce que ces divisions avaient d’ar- bitraire, et que, sous l'influence d'un agent irritant, les éléments anatomiques du foie réagissaient de facon variable, sans qu'il soit possible d’assigner à l’évolu- tion des lésions une physionomie toujours la même. Au lieu d'une maladie cirrhose atrophique, opposable à une autre maladie, cirrhose hypertrophique, à laquelle semblent la relier certaines lésions mal définies,cühoses mixtes, l'auteur décrit une intoxication alcoolique, pro- voquant dans le foie des réactions cellulaires qui sont bien de même ordre, mais évoluent anatomiquement, sous des influences qui nous échappent, de facon à aboutir soità l’atrophiesoit à l’hypertrophie de la glande. La distribution des bandes scléreuses, les lésions cel- lulaires, la formation des néo-canalicules biliaires n'ont plus la signification spéciale que leur avaient attribuée les premiers travaux microscopiques. Nous ne pouvons insister sur les intéressants cha” pitres traitant du foie cardiaque et des dégénérescences du foie, où sont exposés les beaux travaux de MM. Ha- not et Gilbert sur le cancer hépatique, non plus que sur les parasites où la question des kystes hyda- tiques est traitée avec de grands développements pra- tiques. La quatrième partie comprend les maladies des voies biliaires; ici, en dehors de la lithiase dont la patho- logie ne s’est pas modifiée sensiblement dans ces der- nières années, nous trouvons un chapitre qui emprunte aux recherches les plus récentes un intérêt particulier; les Infections biliaires ont été étudiées au point de vue microbiologique dans une thèse récente, par M. Dupré, qui a réuni les résultats obtenus par divers expérimen- tateurs ; il résulte de ces travaux que les voies biliaires peuvent être envahies, primitivement ou secondaire- ment, par des micro-organismes pénétrant soit par la voie sanguine, soit par les conduits évacuateurs de la bile, et venant alors de l'intestin. On a trouvé, dans les voies biliaires, à l'état normal ou pathologique, dix espèces microbiennes différentes, dont les principales sont : le Bacterium Coli commune, le bacille typhique, des streptocoques et des staphylocoques aureus et albus : ces infections biliaires peuvent être mono ou poly-bactériennes. La forme mème et l'étendue du Traité rendent im- possible une analyse détaillée : nous avons seulement voulu montrer, par quelques exemples, dans quel esprit scientifique cet ouvrage est concu, et quelle somme énorme de connaissances il renferme. Peu d'hommes sont en état de mener à bien une semblable entreprise. M. Labadie-Lagrave avait déjà publié, en 1888, un Trailé des maladies des reins, où il avait donné la me- sure de sa profonde érudition et d’une netteté d’expo- sition peu commune : le Traité des maladies du foie présente les mêmes qualités : c'est un beau et bon livre, et de plus, un livre utile. Ray. Duranp-FArpez. Monin (Dr E.). — Formulaire de médecine prati- que. Nouvelle édition. Un vol, in-12 de 650 pages (5 fr.) Sociélé d'éditions scientifiques, 4, rue Antoine Dubois, Paris, 1892. Cette nouvelle édition est très augmentée. OT NT TU ee IR. ACADEMIES ET SOCIETÉS SAVANTES 291 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 4 avril. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Picard : Sur cer- tains systèmes d'équations aux dérivées partielles, — M. J. Boussinesq : Débit des orifices circulaires et sa répartition entre leurs divers éléments superticiels, — M. S. Drzewiecki propose pour la détermination des éléments mécaniques des propulseurs hélicoïdaux une méthode basée sur la considération du rapport qui re- lie les valeurs des composantes (tangentielle et nor- male à la trajectoire) de la résistance éprouvée par un plan qui se meut dans un milieu fluide au repos, en fai- sant avec la direction du mouvement l’angle d’inci- dence pour lequel le rapport des composantes est mi- nimum,—M.G.Bigourdan : Observations de la comète de 1892 (Swift, mars 6) faites à l'Observatoire de Paris, — Mlle D. Klumpke : Observations des nouvelles pla- nètes (Wolf, 28 mars 1892), (Charlois, 1°" avril 1892) faites à l'Observatoire de Paris. — M. G. Le Cadet : Observations de la comète Swift (1892, mars 6) faites à l'Observatoire de Lyon. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. P. Bary a recherché comment varie, avec la concentration, l'indice de ré- fraction des solutions salines, dans le but de détermi- ner l’état du sel dissous au sein de sa dissolution. D'une facon générale, les résultats peuvent se représenter par une ligne brisée, ce qui correspond à l'hypothèse d’une série d'hydrates liquides se présentant successivement à partir de concentrations données, — La conductibilité électrique d'un gaz chauffé entre deux surfaces de pla- tine porlées au rouge a été démontrée par Edm. Bec- querel et confirmée par M. Blondlot. M. E. Branly a obseryé ce qui se passe dans le cas d’un gaz compris entre un métal porté au rouge et un métal maintenu à la température ordinaire; il a reconnu que le gaz est encore conducteur, mais que sa conductibilité est beau- coup plus forte quand le métal froid est négatif, — M. J. Lefèvre a mesuré l'attraction de deux plateaux électrisés, séparés par un diélectrique non en contact intime avec eux; il s’est servi d’une balance de préci- sion dont le fléau portait à l’une de ses extrémités le plateau mobile ; il formule la loi des phénomènes; cette méthode simple peut servir à mesurer les constantes électriques. — M. Lecoq de Boisbaudran à comparé les spectres qui s'’observent lorsqu'on fait éclater à la surface d'une solution de chlorure de gallium des étin- celles électriques de diverses natures; il attire l’atten- tion sur les différences que présentent ces spectres, où pourtant l’on retrouve toujours bien marquées les deux raies violettes caractéristiques. — M. P. Klobb signale que l’on peut obtenir à l’état cristallisé divers sulfates anhydres (sulfate de cobalt, de cuivre, de nickel, de zinc) par la voie sèche; si l’on jette dans du sulfate d’ammoniaque en fusion une petite quantité du sulfate métallique déshydraté, celui-ci se dissout; si l’on chauffe ensuite de facon à volatiliser lentement le sel ammoniacal, le sulfate métallique reste à l’état cristal- lisé. — M. P. Cazeneuve, en traitant par l'acide azo- tique étendu, deux campho-sulfophénols isomères qu'il avait décrits FR en a transformé ces corps en une cétone nitrée ; le soufre est dégagé à l’état d'a- cide sulfurique ; cette cétone jouit de propriétés acides bien marquées. M. Cazeneuve en a formé divers sels. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. B. Griffiths a observé dans le sang de la Pinna squamosa l'existence d’une substance qui se réduit et s’oxyde à la facon de l’hé- moglobine ; le précipité alcoolique de ce sang, purifié par divers traitements, a donné à l’analyse la composi- tion d’une substance albuminoïde avec 0,35 °/, de ma- ganèse. l’auteur donne à cette préparation le nom de pünaglobine, — M. Horvath signale l'existence de sé- ries parallèles dans le cycle biologique des Pemphi- giens, analogues à celles étudiées par M. Dreyfus chez divers Aphidiens. — M. J, Vesque examine comment le sous-genre Rheediopsis du genre Garcinia,'caractérisé par la forme des stomates, se rattache aux autres Gar- cinia. — M. G. Curtel a déterminé par une méthode simple les variations de la transpiration de la fleur suivant les phases de son développement; de trois séries d'expériences ayant porté sur des plantes différentes, il tire la conclusion suivante : la transpiration, intense dans le bouton très jeune, diminue d’abord, puis rede- vient active au moment où le bouton a acquis sa taille maximum et est près de s'épanouir; à partir de ce moment la transpiration reste très intense jusqu’à la mort de la fleur, — M. J. Costantin étudie quelques maladies parasitaires qui attaquent le blanc du cham- pignon de couche ; il décrit sommairement deux cham- pignons inférieurs nouveaux qui sont la cause de deux de ces maladies. — MM. J. Héricourt et Ch. Richet ont obtenu sur le chien, par l’inoculation de la tubercu- lose aviaire, à laquelle cet animal est réfractaire, une vaccination nette contre la tuberculose humaine à la- quelle il est très sensible. — MM. Teissier, G. Roux et Pittion, continuant leurs recherches sur le micro-orga- nisme trouvé par eux il y a un an dans le sang et l’u- rine des malades affectés de grippe, ont reconnu que cet organisme est extrêmement polymorphe, suivant la phase de la maladie où on le recueille ou suivant les milieux de culture; en particulier, les cultures sur pommes de terre deviennent sporifères. — Le prince Roland Bonaparte communique les premiers résul- tats acquis par ses recherches sur les variations de longueur des glaciers du Dauphiné (massif du Pelvoux); sur seize glaciers étudiés en 1890, six avancçaient, huit reculaient, deux étaient stationnaires; en 1894, trois des glaci iers qui reculaient sont devenus stationnaires ; d'autre part, divers signes tendent à montrer que nous sommes à la fin de la période de recul général com- mencée il y a environ trente-cinq ans. M. Munier- Chalmas, comparant les faunes crétacées contempo- raines suivant les diverses zones terrestres, relève dans le bassin de! Paris des incursions d’une zone à l’autre sur divers points; il en tire des conclusions relatives à . la direction et à la distribution des courants marins sur l'emplacement de la France à cette époque. — M. Mallard présente un échantillon du fer natif du Cañon Diablo (Arizona) envoyé à l'Ecole des mines par M. Eckley Coxe; ce fer contient de petits diamants noirs ; il est peut-être d’origine météorique ; cependant on signale au voisinage du gisement, et relié par une trainée de petits fragments “de la même matière, une sorte de petit cratère. — M. Daubrée fait remarquer l'intérêt qu'il y aurait à étudier de très près ce gise- ment. Histoire des sciences. — M. Bertrand présente au nom de Mme Dulong, ving-cinq lettres écrites par Ber- zélius de 1817 à 1737; la première de ces lettres, rela- tive à un voyage de l'illustre chimiste en Auvergne, à Lyon et à Genève, est publiée dans les c CRPIES rendus. — M. J. Boussinesq lit une notice sur les travaux du marquis de Caligny. Mémoires présentés. — M. Escary adresse une note ayant pous titre : Nouvelle forme des intégrales des aires M. A. Cantaloube soumet au jugement de l Acadén mie un mémoire ayant pour titre : Influence du Soleil et de la Lune sur les dépressions ‘et les som- 299 ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES mets atmosphériques de l'Atlantique nord. — M, le Directeur des services de la Compagnie des Messa- geries maritimes adresse un rapport de M. Trocmé, commandant du paquebot le Peiho sur un cyclone essuyé par ce navire les 12 et 13 février dernier dans les parages de l’île Maurice. — M, Zenger adresse une réclamation de priorité relativement aux correspon- dances entre les variations solaires etles perturbations atmosphériques ou magnétiques. Séance du 11 avril 1° SCIENCES MATHÉMATHIQUES. — M. P. Painlevé : Sur les transformations en mécanique. — M. E, Ja- blonski : Sur l’analyse combinatoire circulaire, — M. J. Boussinesq : Ecoulement par les orifices rec- tangulaires sans contraction latérale; calcul théorique de leur débit et de sa répartition, — M. G. Rayet : Observations de la comète Swift (1892, mars 6) et de la comète Denning (1892, mars 18) faites au grand équatorial de l'Observatoire de Bordeaux. — M. Mou- chez présente les résultats de deux séries de recher- ches nouvelles pour la détermination de la latitude de Paris, effectuées, l’une par M. Périgaud, au moyen du bain de mercure nouveau système l’autre par M. F.Bo- quet; les deux séries concordent à £ de seconde près et donnent la valeur de 389, 50° 11”,01;les observations de M. Boquet, disséminées sur sept mois consécutifs n’ont pas révélé la variation annuelle de l’axe des pôles indi- quée par divers observateurs. M.Mouchez profite de cette occasion pour se plaindre des conditions déplorables où l’on est à l'Observatoire de Paris pour observer la polaire. — M. Mouchez présente une photographie ob- tenue par M. Gill au cap de Bonne-Espérance dans les conditions générales de la carte du ciel, mais avec 3 h. 12 de pose au lieu de 1 heure; on peut estimer à 30.000 ou 40.000 le nombre des étoiles visibles sur ce cliché. — MM. Ch. And.ëé et F, Gonnessiat décrivent un dispositif qui leur donne des passages artificiels d’un disque lumineux de dimensions notables: ils s’en servent pour l’étude de l’équation décimale dans les observations du soleil et des planètes; ils signalent parmi les résultats de leurs expériences ce fait que l'équation personnelle peut différer notablement d’un bord à l’autre. — M. J. J. Landerer a soumis au con- trôle de l’observation la théorie des satellites de Ju- piter, donnée par M. Souillard; l'accord est satisfai- sant. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Le Verrier a étudié la chaleur spécifique des métaux à diverses températures, par la méthode du calorimètre, les températures étant prises au pyromètre de M. Le Chatelier; il a reconnu que la chaleur spécifique (2) reste sensiblement At constante pendant des périodes que n’excèdent pas en : général un intervalle de 200 à 300°; de plus, la courbe ainsi obtenue en forme de ligne brisée diffère suivant que l’on à amené le métal à la température de l’expé- rience par échauffement ou par refroidissement. — M. A. Potier a voulu vérifier l'expérience paradoxale de M. Carvallo (séance du 12 mars 1892) sur l’absorp- tion de la tourmaline; il a trouvé, contrairement à l’assertion de cet auteur, que l'absorption par une lame cristalline d'épaisseur e + e' est égale à l'absorp- tion par une lame d’épaisseur e et une lame d'épais- seur e’ superposées, quel que soit l’angle d'incidence, — M. A. Hurion, pour contrôler l'hypothèse de L, So- ret sur la polarisation atmosphérique par les parti- cules diffusantes, a observé avec le photopolarimètre de M. Cornu un faisceau de lumière homogène ayant traversé une certaine épaisseur d’eau troublée par l'essence de citron; la proportion de lumière polari- sée observée et celle calculée d’après une conséquence de l'hypothèse de M. Soret concordent à & près. — M. Berthelot a préparé des persulfates en quantité notable en utilisant les procédés électrolytiques de M. H. Marshall ; il a fait l'étude thermochimique de lacide persulfurique; la chaleur de dissolution des persulfates a été mesurée directement; la chaleur de neutralisation à été obtenue en précipitant la baryte du persulfate au moyen de l'acide sulfurique étendu ; la chaleur de formation a été obtenue en mesurant la chaleur dégagée par la transformation de l'acide per- sulfurique en acide sulfurique et oxygène; mais comme il nécessaire pour obtenir la transformation complète, dans les conditions des mesures calorimétriques, d’ab- sorber par un corps oxydable l'oxygène dissocié et qu'une telle réaction est très complexe, la chaleur dégagée a été comparée à celle que dégage dans des conditions identiques bien déterminées l'eau oxygé- née. Les conséquences de cette étude sont les sui- vantes : la décomposition de l’acide persulfurique et des persulfates est exothermique, ce qui explique que ces corps en dissolution se décomposent spontané- ment, leur formation est endothermique, et elle néces- site l'intervention d’une énergie étrangère, soit l’élec- tricité, dans les conditions de la préparation usitée, soit la chaleur dégagée par une réaction exother- mique concomitante; on peut en effet obtenir de l'acide persulfurique en petite quantité dans diverses réactions. — M. À. Gorgeu a reconnu que la décom- position du permanganate d'argent dans diverses con- ditions met en liberté de 1 à 3 centièmes d’oxygène qui n'oxyde pas les corps réducteurs en présence; les re- cherches auxquelles s’est livré l’auteur sur la nature de cet oxygène inactif l’amènent à conclure qu'il n’est ni combiné ni occlus, et qu'il doit être dans un état d'association encore non défini avec l’oxyde d'argent, MM. Lachaud et C. Lepierre en chauflant plus ou moins un mélange de sulfate acide d’'ammoniaque et de sulfate ferreux ont obtenu une série de composés dans lesquels disparaissent successivement du pre- mier au dernier { molécule de sulfate d’ammonium, puis 3 molécules d’anhydride sulfurique; fous ces composés sont cristallisés dans la même forme. — M. Maquenne a repris l’étude d’une réaction de lheptine que M. Renard avait signalée sans y insister: il s’agit d’une hydrogénation de ce carbure sous lin- fluence de l'acide sulfurique; en opérant dans de bonnes conditions, sur de l’heptine tout à fait pure obtenue par saponification du nitrosochlorure, on peut obtenir jusqu'à 30 0/0 du composé C?H!4; on peut obtenir de même sur les carbures incomplets dérivés de l’acide camphorique cette réaction hydrogénante très particulière de l’acide sulfurique ; c’est encore un caractère qui rapproche l'heptine des terpines. — M. J. Fogh a poursuivi sur les corps sucrés nouveaux de M. E. Fischer les recherches de MM. Berthelot et Matignon sur la chaleur de combustion des alcools; la loi posée par ces auteurs, à savoir que la chaleur de combustion augmente suivant une progression régu- lière avec l'accroissement de l’atomicité dans l'alcool, se vérifie pour ces composés supérieurs. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Dehérain, en présen- tant son Traité de chimie agricole, insiste sur le caractère essentiellement pratique de cetouvrage. — MM. H. Ber- tin-Sans et J. Moitessier, après avoir dédoublé dans des conditions particulières lhémoglobine du sang de bœuf en hématine et matière albuminoïde, ont vu, en traitant avec précaution le mélange acide des deux élé- ments réunis par la soude étendue, apparaîtrele spectre de la méthémoglobine; l'addition d’un peu de sulfure ammonique a fait apparaître le spectre de l’hémoglo- bine avec toutes ses réactions optiques. —M.G. Phi- lippon décrit un appareil destiné à des recherches physiologiques sur l'air et l'oxygène comprimés ; un dispositif spécial de soupape permet d'obtenir une dé- compression immédiate, — M. A. Julien généralise de la façon suivante la loi d'apparition du point épiphy- saire posé par M. Picqué pour les os longs monoépi- physaires (Soc. de Biologie, 19 mars). Le premier point épiphysaire d’un os long apparaît sur l'extrémité atte- nante à l'articulation où se produisent les mouvements les plus importants. — MM. Cornevin et Lesbre ont PO ET SE ER ETS ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES cherché s’il existe des caractères anatomiques différen- ciant nettement les espèces ovines des espèces ca- prines; ils ont trouvé plusieurs de ces caractères ; le groupe des Mouflons, examiné à ce point de vue, doit ètre divisé en deux, les uns se rattachant aux Chèvres et les autres aux Moutons. — M. Chambrelent signale le danger que ferait courir à la stabilité des dunes du golfe de Gascogne et à l’assainissement du pays le pro- jet qui vient d’être soumis au Parlement, projet auto- risant la culture de la vigne et de la pomme de terre dans les dunes domaniales; la dune peut, il est vrai, être déboisée sur des espaces assez larges, mais à la condition de conserver dans ces espaces la végétation basse des sous-bois; toute culture sarclée rendrait au sable sa mobilité; d’ailleurs toutes les tentatives faites jusqu'ici pour la culture de la vigne sur la dune ont abouti à des désastres, — M, de Rocquigny Adanson décrit un halo qu’il a observé le 6 avril 1892 au pare de Baleine (Allier). — M. de Montessus de Ballore se propose de rechercher les conditions géographiques et géologiques caractérisant les régions à tremblement de terre ; il commence par établir au moyen des statis- tiques la sismicité des diverses régions de la France, qu'il définit l'inverse de la surface pour laquelle se pré- sente moyennement un jour de séisme par an. — M. G. Cotteau étudie le genre nouveau d’Echinide crétacé créé par M. Arnaud pour l'espèce Dipneustes asturicus, découverte par lui dans le danien de Rivières, près Ter- cis (Landes). Mémoires présentés. — M. Zenger adresse un relevé comparatif des perturbations atmosphériques et so- laires de la fin de mars et du commencement d’a- vril 1892, — M. Chapel adresse une note: Sur le nombre des nombres premiers compris entre deux nombres donnés. — M. C. D. Caron adresse la des- cription d'une horloge à laquelle il donne le nom d’hor- loge géographique. — M. E. Delaurier adresse un mémoire ayant pour titre : Remarques sur les applica- tions scientifiques et industrielles de la thermo- électricité. L. LAPICQUE. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 8 mars. M. Germain Sée : Des nouveaux sels de calcium en thérapeutique. Traitement physiologique et régime des maladies de l’estomac. De l'étude approfondie de l’auteur, il résulte que, pour introduire de la chaux d’une manière sûre dans l'organisme, il faut prescrire les sels de calcium, le bromure et surtout le chlorure de calcium. L'iodure et le bromure de calcium con- viennent particulièrement pour faire agir l'iode et le brome sur l'organisme. Le bromure et le chlorure de calcium s'appliquent à un grand nombre de dyspepsies et de lésions stomacales. L'iodure de calcium agit favo- rablement sur l'estomac, sur la respiration, sur le cœur; de plus il est parfaitement supporté par les organes digestifs Une discussion a lieu ensuite entre MM. Dujardin-Beaumetz, C. Paul, Laborde et G. Sée. — M. Hervieux : Discussion relative à la com- munication de M. Guéniot à la séance précédente, Séance du 15 mars 1892 MM. Constantin Paul décrit le cas d’un malade présentant tous les signes de la sépticémie gangreneuse, Illesoumitaux inhalations d'air chargé d'acide phénique. Mais après plusieurs rechutes, il pria M. Périer d’inter- venir. Celui-ci fit une incision dans le deuxième espace intercostal; arrivé au poumon il le saisit avec la plèvre au moyen d'une pince de Museux, y fit une incision, dans laquelle il introduisit une pince de Lister fermée. En écartant ensuite les branches, il ouvritle foyer qui laissa échapper un pus fétide. Lavages au chloral, pan- sement au salol et ultérieurement instillation de quel. ques gouttes de naphtol camphré dans les drains qui avaient été laissées dans la plaie, La guérison suivit en 25 jours. — M. Périer communique aussi le cas d’une 293 petite fille de six ans qui, à la suite d’une rougeole, présentait des troubles de la respiration. La dyspnée étant devenue excessive, on dut lui faire l'opération de la trachéotomie, Puis M. Perrier pratiqua la thyroto- mie, et il enleva de nombreux papillomes. Au bout d’un mois, les accidents se reproduisirent et l’auteur dut procéder à une nouvelle thyrotomie. Après plusieurs curetages de la surface interne du larynx, avec du coton imbibé de salol puis de naphtol camphrés, il excisa quelques papillomes, La reproduction cessa; on put fermer la canule, la retirer, et aujourd’hui la plaie tra- chéale est cicatrisée; de plus la phonation est rétablie. — M. Charpentier : De la symphyséotomie. L'auteur fait l'historique de cette opération d'origine francaise, Elle agrandit les diamètres du bassin. Les accoucheurs italiens considèrent que c'est une opération fort sim- ple et sans dangers. Les résultats sont les suivants : les mortalités maternelle et infantile étaient de 22 à 27 % au début du siècle; plus tard elles sont de18 %. La dernière statistique récente du D' Spinelli indique pour les mères, sur 24 cas, 24 guérisons; pour les en- fants, sur 24 cas, 23 guérisons. C’est donc une opération que l’auteur voudrait voir appliquée en France, au grand bénéfice des malades.— Suite de la discussion sur le méphitisme et la septicémie puerpérale entre MM. A.Guérin,Guéniot, Hervieux, Peter et Tarnier. Séance du 22 mars. M. G. Colin (d’Alfort) : Sur les ténias et les cysti- cercoses. — M. A. d’Arsonval : Sur les effets physio- logiques comparés des divers procédés d’électrisation ; nouveaux modes d'application de l'énergie électrique : la voltaïsation sinusoidale ; les grandes fréquences et les hauts potentiels. En électrothérapie comme en physio- logie, on peut distinguer au point de vue des effets de l'électricité Pétat variable de l’état permanent. Pour doser l’état permanent, il suffit de mesurer l'intensité du courant avec un galvanomètre ; quant aux effets locaux du courant permanent, ils dépendent uniquement de la densité du courant, ou intensité par unité de surface. Pour définir l'action physiologique et thérapentique produite par l’état variable, il faut connaître en fonction du temps la loi de variation de la force électromotrice aux points d'application des électrodes sur le sujet. L’au- teur présente l'appareil qu'il a imaginé dans ce but, Le courant sinusoïdal obtenu à l’avantage de ne donner aucun choc brusque et d’amener graduellement et sans électrolyse le télanos du muscle. L'auteur compare ensuite les effets sur la nutrition (effets trophiques) : 1° du bain statique ; 2 de la faradisation générale ; 3° du courant continu ; # du courant alternatif sinus- oidal. Sous l'influence de ce dernier on peut augmenter instantanément de plus d’un quart les échanges gazeux respiratoires, et cela en dehors de toute contraction mus- culaire et en l'absence de phénomènes douloureux. Eufin des courants alternatifs donnant de 400.000 à 10 millions et plus d’oscillations par seconde peuvent traverser impunément le corps vivant sous forme d’étincelles ayant jusqu'à 10 centimètres de longueur et près d’une ampère d'intensité, Séance du 29 mars. M. Duguet est proclamé membre titulaire dans la Il° section (Pathologie médicale) en remplacement de M. Roger, décédé, — M. Verneuil : Rapport sur la note de M. Le D. Quenu : nouveau procédé de thoraco- plastie. Séance du 5 avril. M. Béchamp : Discussion sur la septicémie puerpé- rale et le méphitisme. — Sir West, MM. Léon Collin, Dieulafoy, Verneuil, Dujardin-Beaumetz, Laborde, Constantin Paul : Discussion sur le traitement de la pleurésie, Séance du 12 avril. M. A. Robin : Rapports sur les travaux des stagiaires de l’Académie aux eaux minérales en 1891 et sur des demandes en autorisation pour des sources d'eaux mi- nérales. — M. Proust : Sur l'enquête concernant l’épi- démie de grippe de 1889-90 en France. — MM. Dieu- lafoy, Verneuil, Hardy, Peter, C. Paul, Proust : Discussion sur le traitement de la pleurésie. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 19 mars. M. Déjerine, après avoir remarqué qu'il faut dis- tinguer cliniquement deux formes de cécité verbale : 4° cécité verbale avec agraphie ou troubles très mar- qués de l'écriture, 2° cécité verbale pure avec intégrité de l'écriture spontanée et sous dictée, apporte l’obser- vation très complète d’un cas type de cette seconde catégorie ; l’autopsie du sujet a fourni le premier docu- ment pour fixer la localisation anatomique de cette lésion, Chez ce malade, dont l’état est resté station- naire pendant quatre ans, et qui ne présentait aucun trouble en dehors de cette cécité verbale pure, on a trouvé des lésions anciennes (plaques jaunes atro- phiques) comprenant l'écorce et la substance blanche sous-jacente jusqu’au ventricule dans le lobule lingual, le lobule fusiforme, le cunéus et la pointe du lobe oc- cipital, à gauche ; c'est-à-dire que le centre des percep- tion optiques était détruit de ce côté, ce qui entraînait directement l’hémianopsie homonyme latérale droite constatée pendant la vie; quant à la cécité verbale, elle s’explique par Pinterruption des communications entre le centre visuel droit subsistant et le centre des images optiques des lettres, pli courbe gauche ; celui- ci étant intact permettait l’écriture spontanée; on sait que c’est la lésion de ce dernier point qui constitue l’autre forme de cécité verbale, accompagnée d’agra- phie. Cette forme a été réalisée chez le sujet à la suite d'une attaque survenue dans les derniers jours de son existence; à l’autopsie, le pli courbe s'est montré affecté d’une lésion récente, ramollissement rouge. — MM. G. Gautier et J. Larat : Utilisation médicale des courants à haut potentiel (Voir GC. R., séance du 29 fé- vrier), — M. Taft a étudié le développement du grand sympathique chez les mammifères spécialement dans le but d’élucider la nature des fibres de Remak et des noyaux y attenant; le grand sympathique est formé d’abord de cellules ayant un grand noyau sphérique et très peu de protoplasma; de ces cellules, les unes constituent les ganglions, les autres se transforment graduellement jusqu’à devenir des fibres de Remak, telles qu'on les connaît chez l'adulte, — M. Dewevre a constaté par l'observation clinique et l’expérimenta- tion que les pediculi sont les agents habituels de la transmission de l'impeligo. — M. E. Metschnikoff discute contre M. Bataillon le mécanisme de l’atrophie musculaire, en particulier dans la régression de la queue des têtards; il maintient, comme il lavait dit dans son travail des Annales de l'Institut Pasteur, que l’'atrophie est effectuée par les phagocytes musculaires dérivés des noyaux musculaires et du sarcoplasma; il attribue l'interprétation différente de M. Bataillon (Voir cette Revue, 1891, p. 554) à une technique insuf- fisante, — M. Ch. Richet indique les lésions que l’au- topsie a révélées chez le chien atteint de cécité psy- chique expérimentale qu'il a présenté à une séance précédente. — Il signale que les singes sont réfrac- taires à l’action toxique de l’atropine; ils se compor- tent donc vis-à-vis de ce poison comme la plupart des mammifères et non comme l’homme. — M. J. Passy : Sur la perception des odeurs (Voir CG. R., 28 mars). — M. M. Lambert a examiné un grand nombre d’humé- rus humains au point de vue de la torsion, et il a cons- taté que cette torsion est d'autant plus accusée que los est moins épais, — MM. Combemale et Bué ont ense- mencé des tubes d’agar avec du sang pris sur le vivant dans quatre cas d’éclampsie puerpérale; dans les quatre cas, ils ont obtenu des cultures du staphylo- coque pyogène. — M. Wertheimer établit, par des expériences sur le chien, que la plus grande partie de ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES PE la bile résorbée dans l'intestin est aussitôt secrétée de nouveau par le foie, sans passer par la grande cireu- lation. — M. Picqué pose la loi suivante : lorsqu'un os long n’a qu'un seul point d’ossification complémen- taire, ce point apparaît sur l'extrémité la plus mobile de cet os. Séance du 26 mars. MM. Chenot et Picq ont recherché si le sérum des bovidés, qui sont réfractaires à la morve, peut conférer au cobaye une immunité contre ce virus ; ils ont cons- taté que des sujets infectés avec du virus équin et traités au sérum avant et après l’inoculation morveuse guérissent sept fois sur dix; et que des sujets inoculés avec un virus exalté par le passage de cobaye à cobaye et traités par le sérum survivent bien plus longtemps que les témoins. — M. E. Retterer a étudié chez divers mammifères l’évolution de l’épithélium du vagin, spécialement au point de vue de la transforma- tion muqueuse que subiraient les cellules de cet épi- thélium après la fécondation; il a reconnu que, chez les cobayes, l’épithélium vaginal est toujours, dans sa por- tion proximale, constitué superliciellement par des cellules muqueuses ; chez les femelles des autres mam- mifères, l’épithélium vaginal ne subit la transforma- tion muqueuse que dans les derniers temps de Ja ges- tation et au moment de la parturition., — M. A. Vianna propose de traiter la diphtérie par l’antipyrine en applications locales; il à reconnu que cette subs- tance exerce une action bactéricide active sur le virus diphtéritique. — M. A. Prenant expose les observa- tions nouvelles qu'il a faites sur l’origine du fuseau achromatique nucléaire dans les cellules séminales de la Scolopendre; il conclut pour ce cas que le fuseau a une origine tout à la fois nucléaire et cytoplasmique. — M. E. Retterer a étudié l’origine et le développe- ment des plaques de Peyer chez les Ruminants et les Solipèdes; il a vu chez ces animaux, comme chez les Rongeurs, que la partie glandulaire des plaques de Peyer se forme par des bourgeons épithéliaux mul- tiples qui sont circonscrits par du tissu conjonctif, — M. H. Vincent a recherché dans divers types de fièvre paludéenne les formes de l’hématozoaire corres- pondantes à chaque type, signalées par Golgi et divers auteurs italiens; il n’a pu constater aucune concor- dance entre les diverses formes du parasite et le type de la fièvre, — M. A. Binet a constaté des modifica- tions importantes dans la structure du nerf alaire, étudié par lui chez les Coléoptères, lorsqu'on passe aux espèces qui ne volent pas; la racine dorsale infé- rieure fait défaut, ce qui confirme la nature motrice de cette racine, — M. C. Phisalix : Transmission hé- réditaire de caractères acquis par le Bacillus Anthracis sous l'influence d'une température dysgénésique. (Voir C. R., 21 mars.) — MM. Feré et Herbert ont trouvé dans deux cas, à la suite de manifestations non con- vulsives de l’épilepsie, l’inversion de la formule des phosphates donnée comme caractéristique de l'attaque hystérique. — M. F. Regnault a constaté que la vagi- nalite chronique simple adhésive entraîne la sclérose du testicule. M. Chauveau est élu président pour cinq ans. L, LAPICQUE. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE MINÉRALOGIE Séance du 11 février. M. Mallard étudie la forme cristalline et les pro- priétés optiques du carbonate de lithine. Les calcaires argileux de Condorcet(Drôme) ont fourni à M. L. Michel de très jolis cristaux de quartz offrant la face rare af, ainsi que d’intéressants cristaux de célestine, — M. Gonnar& signale plusieurs gisements de zéolites dans la Haute-Loire, décrit les formes de la galène de Pontgibaud et donne des renseignements sur plusieurs autres gisements du plateau central de la France, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Séance du 10 mars. M. Gonnard envoie la monographie des cristaux de deux gisements de cérusite, celui de la Pacaudière, près Roanne (Loire), et celui de Roure (près Pontgi- baud.) — M. Pisani donne l'analyse de l’idocrase de Settimo, de la pyroméline (sulfate hydraté de nickel et de magnésie) et d’un silicate de nickel et de fer ma- gnésien de la Nouvelle-Calédonie., — M. Georges Frie- del répond aux critiques formulées par M. Bombicci sur l'intéressant travail qu’il a publié sur la mélano- phlogite. — M. Frossard entretient la Société de la bibliographie de la Pyrénéite, dont les propriétés op- tiques ont été étudiées récemment par M. Mallard. — M. Jannettaz donne une note préliminaire sur les calcaires noirs des Pyrénées. Séance du 1% avril. M. Jannettaz étudie la matière colorante des cal- caires noirs des Pyrénées renfermant le grenat-pyré- néite ; elle est, d'après lui, constituée par de lanthra- cite dans la proportion de 0,7 0/0. — M. Wyrouboff montre à la Société de très beaux cristaux de divers métatungstates qu’il a préparés au cours de recherches sur le métatungstate de cérium. Ces sels sont remar- quables par leur extrême solubilité; ils seront étudiés dans un travail ultérieur. — M. Friedel décrit des pseudomorphoses de pyrite en oligiste, renfermant de nombreuses cavités tapissées de cristaux de soufre, Ce fait intéressant est à rapprocher de celui qu'a décrit le même savant sur des échantillons de Meymac (Cor- rèze). — M. Lacroix signale divers minéraux cristal- lisés (apatite, feldspath, quartz, fluorine, etc.) dans les druses des granulites des environs d’Alencon. . A. Lacroix, SOCIETE MATHEMATIQUE DE FRANCE . Séance du 6 avril M. Demoulin étudie les relations qui existent entre les éléments infinitésimaux de deux surfaces polaires réciproques par rapport à une sphère. Les courbures totales en deux points correspondants sont liées par la relation Ri Ro: 775 cosio = af, R,, R, étant les rayons de courbure principaux pour l’un des deux points, »,, r, les mêmes éléments pour le second. Aucune autre relation ne saurait exister entre R,, R,, ”,, 7, ; en particulier, il n’y en a point qui lie l’une à l’autre les courbures moyennes aux points cor- respondants, M. Demoulin établit en outre les relations qui ont lieu entre la torsion d’une courbe gauche et celle de l’arête de rebroussement de la développable polaire réciproque de cette courbe, entre les divers élé- ments des lignes de courbure en deux points corres- pondants. 1l en déduit une définition des surfaces réci- proques des surfaces minima. Il signale enfin la rela- tion qui lie les courbures des sections planes aux points correspondants de deux surfaces inverses. — M, d'Oca- gne présente quelques remarques sur les normales à la parabole : Soit P un point quelconque pris sur la nor- male en A à une parabole, qui rencontre encore cette courbe au point B. Du point P on peut mener à la parabole deux autres normales dont les pieds seront désignés par A'et A", La droite A'A" passe par les points de rencontre du cercle décrit sur PB comme diamètre respectivement avec la tangente et avec le diamètre au point B. — M. d'Ocagne signale en outre quelques applications récentes de la Nomographie. — M. Fouret fait connai- tre un mode simple de génération des lignes asymp- totiques de la surface de Steiner et de sa réciproque. — M. Bioche fait une communication sur les trans- formations homographiques des surfaces réglées en elles-mêmes : Si les génératrices appartiennent à une congruence linéaire les projections des courbes cor- respondantes sur un plan passant par une directrice sont homologiques, Si la congruence est singulière, 295 on obtient sur certains plans des courbes égales, — M. Raffiy montre comment il est parvenu à ramener Ja solution du problème de la déformation des surfaces à l'intégration d'une équation aux dérivées partielles, linéaires par rapport à celles du second ordre.Il donne des exemples de déformations réelles dépendant d’une seule fonction arbitraire. Séance du 20 avril. M. le comte Léopold Hugo adresse une note sur les vingt premières décimales du nombre +. — M. Bioche démontre le théorème suivant : Si un plan perpendi- culaire à une corde à d'une cubique gauche ayant trois asymptotes rectangulaires, coupe cette courbe aux points A,B, C,le point de rencontre des hauteurs du triangle A BCSse trouve sur la corde à. — M, Fouret présente quelques remarques sur la détermination des limites des racines d’une équation algébrique. — M. d'Ocagne fait connaître une construction de la parabole suroscu- latrice en un point d'une courbe donnée, M. D'OcAGNE. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 31 mars. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Oliver Lodge : Sur les phénomènes d’aberration; l’auteur traite des rela- tions entre l’éther et la matière et du mouvement de l’éther au voisinage de la Terre. Il commence par rap- peler la distinction qui existe entre léther en espace libre et l’éther modifié par la matière transparente, et il fait remarquer que l’éther modifié ou du moins la modification chemine nécessairement avec la matière. Fizeau a montré qu’à l’intérieur d’une matière transpa- rente la vitesse de la lumière est modifiée par le mou- vement de cette matière. M. Lodge a recherché si cet effet se produit en dehors de la matière en mouve- ment à son contact immédiat. Les phénomènes qui peuvent résulter du mouvement sont au nombre de quatre : 1° changements de direction, observés avec le télescope et appelés aberrations ; 2° changements de fréquence, observés avec le spectroscope et appelés effets Doppler; 3° changements dans le temps du par- cours décelés parle ralentissement de la phase ou lef- facement de la bande d’interférence; 4° changements d'intensité observés à l’aide de la pile thermo-élec- trique. Après avoir discuté les effets du mouvement en général qui diffèrent suivant que l’on considère des projectiles ou des ondes, M. Lodge examine les divers cas suivants : 1° le cas d’une source fixe dans un mi- lieu en mouvement; 2 le cas d’une source en mouve- ment dans un milieu fixe; 3° le cas d'un milieu se mou- vant seul en dehors de la source et de l’observateur ; 4° enfin le cas où l’observateur se meut seul. Lorsque le milieu se meut seuliln’y à pas de changement de direction, pas de changement de fréquence, pas de ra- lentissement de phase perceptible, et il n’y a probable- ment pas de changement d'intensité; de là vient la dif- ficuté quil y a à déterminer si l’éther dans son en- semble se meut ou non par rapport à la terre. Un des résultats obtenus, c’est de démontrer que si un rayon traverse l’espace ou des substances transparentes il gar- dera sa forme, quel que soit le mouvement du milieu, pourvu que ce mouyement ne soit pas un mouvement de rotation. La direction apparente des objets dépend alors simplement du mouvement de l’observateur ; mais d'autre part, si la terre entraîne avec elle dans son mouvement une partie de l’éther situé dans son voisi- nage, les rayons stellaires devront subir une déviation et l’aberration astronomique sera fonction de la lati- tude et du moment du jour. M. Lodge à soumis au con- trôle de l’expérimentation directe les conclusions ri- vales que l’on peut déduire des expériences de Fizeau sur la polarisation (Ann.de Chim. et de Phys. 1859) et des expériences récentes de Michelson (Phil, Mag.1889). Le résultat de ces recherches montre que l’éther n’a pas de viscosité appréciable, mais la question demande 296 ACADEMIES ET SOCIÉTES SAVANTES à être encore étudiée avant qu'on puisse la considérer comme définitivement résolue. Un grand nombre d’autres points sont discutés en détail dans ce mémoire où sont formulées des conclusions de la plus haute im- portance. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. Clowes présente une note sur un appareil perfectionné destiné à mesurer la sensibilité des lampes de sûreté dont on se sert pour essayer un milieu gazeux. IL a apporté des perfection- nements nouveaux à l'appareil qui a été décrit dans la Revue du 15 juillet 1891, page 461. Puisque la vapeur de benzoline et d'essence de pétrole, lorsqu'elle est mêlée à l’air, devient aisément inflammable et peut donner lieu à des explosions dangereuses, il est néces- saire de se servir de lampes de sûreté au lieu de lampes à feu nu pour éclairer les espaces qui peuvent renfer- mer un pareil mélange. Il faudra donc ne se servir que de lampes de sûreté au voisinage des réservoirs d'huile sur les navires chargés de pétrole, dans les ma- gasins à pétrole et dans les pièces où l’on accomplit des opérations qui nécessitent l’emploi d'huile légère de pétrole. M. Clowes a fait des expériences pour dé- terminer si la présence de vapeurs de benzoline ferait apparaître un chapeau au-dessus de la flamme d’une lampe de sureté; elles devaient aussi montrer quelle était la quantité minima de vapeur nécessaire à la production de ce chapeau au cas où il apparaîtrait, On s’est servi pour ces expériences de la lampe d’Ashworth modifiée et du nouveau type de chambre d'essai dé- crit dans la Revue du 15 juillet 1891. Elles ont fait voir qu'avec une flamme d'hydrogène de 10 millimètres, la lampe de sûreté d'Ashworth permettait de déceler dans l’air une quantité de vapeur de benzoline égale à æ de la quantité proportionnelle nécessaire à une explosion, à Æ de la quantité qui, mêlée à l'air, devient inflammable. La flamme de benzoline fait ap- paraître un très petit chapeau, mais très net; lorsqu'il est mélangé à l'air une proportion de vapeur de ben- zoline égale à 4 de celle qui est nécessaire à un mé- lange explosif, à : de celle qu'il faut pour rendre le mé- lange inflammable. 3° SCIENCES NATURELLES. — M.Risien Russell : Sur les fibres abductrices et adductrices du nerf laryngé récur- rent, Voici les résultats de ses recherches expérimen- tales : 1° les fibres abductrices et adductrices sont groupées en plusieurs faisceaux distincts qui se pro- longent en restant indépendants les uns des autres jus- qu'à l'extrémité du tronc nerveux, jusqu’à sa terminai- son dans le muscle ou les muscles qu'il innerve au point de vue moteur; il y a plus de dix ans, le Dr Se- mon, se basant sur les faits pathologiques, avait fait envisager la possibilité d’une pareille structure ; 2°tan- dis que chez l'animal adulte l'excitation simultanée de toutes les fibres du nerf laryngé récurrent détermine l’adduction de la corde vocale du même côté, l’effet in- verse se produit chez le jeune animal; 3° lorsque les fibres adductrices et abductrices sont exposées, dans des conditions identiques, à l’action desséchante de Pair,les fibres abductrices perdent beaucoup plus rapidement que les fibres adductrices le pouvoir de conduire les excilations électriques, c’est-à-dire en d’autres termes, qu'elles meurent plus vite que les fibres adductrices ; c'est encore un fait qui a été depuis longtemps cons- taté chez l’homme par le D' Semon; il avait insisté sur son importance et avait présenté pour en établir la réalité, un grand nombre d'arguments très puissants ; 4° même chez le jeune chien, les fibres nerveuses ab- ductrices, bien qu'elles conservent leur vitalité beau- coup plus longtemps que dans le cas de animal adulte, meurent cependant enfin avant les fibres adductrices; 5° la mort commence au point où le nerf est coupé et se propage graduellement jusqu’à son extrémité pé- riphérique ; elle n’atteint pas d’un seul coup le nerf entier dans toute sa longueur; 6° il est possible de dé- terminer anatomiquement le trajet des fibres adduc- trices et abductrices dans toute la longueur du nerf laryngé récurrent jusqu'à leur terminaison dans les divers groupes de muscles du larynx ; ces fibres sem- blent conserver durant tout leur trajet une même posi- tion relativement les unes aux autres; les fibres abduc- trices sont situées au côté interne du nerf, les fibres ad- ductrices sur le côté externe ; T° il est possible de sépa- rer assez exactement ces deux systèmes de fibres l’un de l’autre dans le tronc nerveux, pour que l'excitation de l’un des deux détermine la contraction des muscles abducteurs seuls, sans faire entrer en jeu les muscles antagonistes : 8° le faisceau de fibres nerveuses qui pré- side à l’une des fonctions peut être sectionné sans que le faisceau qui préside à la fonction antagoniste soit in- téressé dans la section; cette section est suivie de l’a- trophie et de la dégénérescence des muscles qu'innerve le faisceau, mais cette atrophie et cette dégénérescence n’atteisnent pas les muscles antagonistes, — M. Vau- ghan Harley : Sur l'intervention dans l’ictère par l’oc- clusion du canal cholédoque. Voici les conclusions aux- quelles l’ont conduit ses expériences : 49° la bile qui existe dans les canaux biliaires ne peut arriver dans le sang que par les lymphatiques; 2° comme les lympha- tiques entourent les vaisseaux sanguins du foie,on est contraint d'admettre que le pigment biliaire et les acides biliaires ne peuvent traverser l’endothélium des capillaires du foie et peut-être du corps entier. Le fait que la bile arrive dans le sang lorsqu'elle peut péné- trer dans la cavité péritonéale ne constitue pas un ar- gument contre cette manière de voir; elle peut en effet arriver dans le sang par les lymphatiques du dia- phragme; 3 lorsque le canal thoracique gauche a été lié pendant quelque temps, des lymphatiques collaté- raux se développent qui conduisent aussi dans la veine innominée droite, — M. A. B.Griffiths : Sur la compo- sition de l’hémocyanine. L'auteur a déterminé la com- position approximative de l’hémocyanine extraite du sang du homard, de la sépia et du crabe, et il a constaté qu'on pouvait la représenterpar la formule empirique : CS67 H1368 A 7223 Cu Si 0258. Richard A, GRÉGORY. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 11 mars M. Elber : « Une idée thermodynamique de l’action de la lumière sur le chlorure d'argent. » Dans la dé- composition du chlorure d'argent par la lumière, du chlore est dégagé et il se forme un corps solide coloré de composition inconnue (appelé parfois : photochlo- rure) et la réaction est donnée par la formule : 1 nAgGCl= Ag Ch Cls. L'expérience est conduite dans un espace vide exposé au soleil, le chlorure est noirci jusqu'à un certain point, mais il redevient blanc quand il est abandonné dans l'obscurité, Ces faits ont conduit l’auteur à ad- mettre que la pression du chlore mis en liberté est une fonction de l'éclairement (illumination) ou de l'inten- sité de la lumière qui tombe sur le chlore, de même que la pression de Ja vapeur saturée est fonction de la température seule. Puisque léclairement est une quantité, à bien des égards, analogue à la température, il considère comme n'étant pas déraisonnable d'appli- quer des méthodes de raisonnement thermodyna- miques, et de regarder le chlore, en présence du chlorure d'argent et du photochlorure, comme la subs- tance active dans cette « machine à lumière ». Il sup- pose done que la substance décrit, à température cons- tante, un cycle de Carnot, les variables étant la pression, le volume et l'éclairement; le cyele étant tout à fait analogue à celui de Carnot sauf la substitution du mot éclairement au mot température, il en conclut que le rendement est une fonction des deux éclairements. Il suit donc de là que, de même qu’un cycle de Carnot peut servir à déterminer une échelle absolue de tempéra- ture, de même ce cycle peut être appliqué à la déter- mination d’une échelle absolue d’éclairement. Il reste seulement à déterminer une échelle empirique ana- ares tante n° ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 297 logue au thermomètre à air, et à la comparer avec l'é- chelle photodynamique, pourvu qu'on pût imaginer une méthode pour faire la comparaison. En admettant que lPaxiome appliqué au cycle de Carnot soit vrai quand on parle d’éclairement au lieu de température, l’auteur montre mathémaliquement que p = 1€ où p est Ja pression, I l’éclairement, T la température absolue et p la chaleur de combinaison par gramme molécule de chlore dégagé. Si P est la chaleur de for- mation du chlorure d’argent, la fraction : peut être con- sidérée comme exprimant la fraction du chlorure total qui peut être décomposée par l'action de la lumière sur lui, en supposant le gaz retiré de manière à exer- cer une pression inférieure à celle qui correspond à l’éclairement, L'équation chimique peut alors s’é- crire P 1 — Ag = Agp CIP +5 Ch p = Lie pp ainsi la formule du photochlorure serait Agp Clp p — M. Rücker lit une lettre du président M. Étrser rald sur le sujet de la note. Il demande quel est l’axiome correspondant à la seconde loi de la thermo- dynamique qui a été employé. Il n’est pas sûr que la machine soit parfaitement réversible et émet un doute au suiet de la phosphorescence mentionnée dans la dernière opération du cycle. Néanmoins le mémoire est des plus ntéressants et très suggestif, M. Hersche remarque que le phospboroscope de Becquerel montre que toute espèce de lumière produit une phosphores- cence, et pense qu'en considérant le sujet, le carac- tère non thermique de la lumière photogénique devrait ètre prise en considération, M. Backer dit qu'il à travaillé sur le chlorure d'argent depuis plusieurs an- nées, et il trouve que le sel ne décroit pas quand il est mis sec dans le vide, Il considère que l'oxygène est nécessaire à l’action. M. Burton, relalivement à la « motivité » du système, dit qu'il n’y a qu'une petite fraction de l'énergie de l’éclairement qui est actuelle- ment mise en œuvre. Il pense donc qu'il est nécessaire de considérer jusqu'à quel point la seconde loi de Ja thermodynamique peut êlre regardée comme un axiome. Il a été lui-même conduit à admettre que la loi est en défaut dans le cas de mélanges de substances différant d'un degré fini l'une de l’autre. Quelque temps après il a expérimenté sur une solution de sul- fate de soude placée dans un dialyseur et maintenue à température constante. La portion la plus acide passe à travers la membrane et, en mélangeant, on observe une élévation de température. Le dialyseur agit donc comme les démons de Maxwell, et le mé- lange accroît la « motivité » du système. M. Rücker exprime ses doutes sur la question de savoir si le cycle décrit dans le mémoire est strictement analogue à celui du problème de Carnot. Dans le dernier cas les parties de la substance agissante ne diffèrent qu'infiniment peu l’une de l'autre, tandis que, dans le premier, le corps actif élait un mélange de deux so- lides et d'un gaz. Quant au fait que l'accroissement de l’éclairement n’altérerait pas la température, de la chaleur doit toujours être apportée par les rayons. La première partie du cycle serait. d'après le mémoire, formée de deux adiabatiques et d’une isothermique, Il est hasardé de regarder cela comme possible, Si le chlorure était considéré seul, cela ne serait pas vrai, el ilfaut seulement savoir si le chlore absorbe toute la chaleur dégagée par la compression du chlorure, Cela semble peu probable, mais si cela était vrai ce serail un résultat très important. M. Abney voit une autre difficulté dans ce fait qu'aux basses températures le chlorure d'argent n’est pas attaqué, même par la lumiére violette, landis que l’échauffement augmente beaucoup l’action de la lumière. Selon lui, les conclu- sions ont recu les confirmations nécessaires, mais le mémoire donnerait un point de départ pour de nou- elles expériences. M Elber, répondant à M. Fitzge- rald, dit que laxiome correspondant à la seconde loi, telle qu'elle a été formulée par Clausius, peut être formulé ainsi : l'énergie ne peut d’elle-même passer d'un corps moins éclairé à un corps plus éclairé, Dans le mémoire, il a supposé que l’é- nergie développée durant la compression au plus faible éclairement était de la même qualité que l'énergie absorbée sous le plus haut éclairement, Toute la question dépend des comparaisons d’inten- sités des éclairements de diverses longuéurs d'ondes, P Dans l'expression p — 1,7, çest probablement une fonc- tion de T et l’objection de M. Abney n'est pas néces- sairement fatale. Parlant de la présence, prétendue essentielle, de l'oxygène pour la décomposition, il dit que quelques corps sensibles seraient nécessaires, mais en jugeant d'après les expériences, il à vu qu'une quantité infinitésimale suffirait probablement; il semble donc que leur action soit d’une nature cata- lytique. Il attache du prix aux objections de M. Rücker, mais ne croit pasqu'elles puissent porter, — M. Perry lit un mémoire sur les bobines de réaction. Re- gardant ure bobine de réaction comme un (rans- formateur avec un primaire et plusieurs secon- daires, représentés par les masses conductrices, il montre que tout les secondaires peuvent être rempla- cés par une bobine unique de n tours. de résistance ohms, mise en court-circuit sur elle-même. En ne supposant aucune perte magnétique, les équations pour les deux circuits à un moment donné sont V = RC + Nol et O0 = » ce + n61, où Net n sont les nombres de tours, R et» les résistances, I Pinduction lotale X L0f lignes C.G.S, et Getc les courants pri- maire et secondaire respectivement. Puisque le cou- rant excilateur GC est tout ce qu'il y a d'important dans les bobines de réaction et que sa valeur dépend de la loi d’aimantation, les équations sont traitées d’une facon qui diffère de celle qui est adoptée dans les cal- culs ordinaires de transformateur. Exprimant la loi 7 FE = : \ et magnétique en série de Fourier | — A; gi sintiæ on tire la valeur de A (c’est-à-dire NG + nc) et quand V ou I sont donnés comme fonctions périodiques du temps, on peut calculer C. En supposant V = V, sin ät, l’auteur trouve C= Vo Vi+2esinf + e? né 90 Piang N°64 { 3 MA we f 1 (inst ) À — b cos 3 kt— m cos5 kt \ cos / \ mo k , PRE où e — ——, j'est le terme d’hystérésis et b elm des constantes dépendant de la loi d’aimantation. Pour un transformateur ordinaire, on à b = 0,2 et m— 0,05. De l'expression donnée plus haut il semble résulter que s’il n'y a pas d'hystérésis (f = 0), l'effet des cou- rants tourbillonnaires (courants de Foucault) est d’ac- croître l'amplitude du terme important et de produire une avance de 90° — cot-! e, landis que l'effet de l’'hystérésis sans courants tourbillonnaires est de lais- ser l'amplitude inaltérée et de produire l'avance f. Il montre donc que les harmoniques supérieurs peuvent exister et rend probable qu'une bobine de réaction avec du fer finement divisé fournirait une méthode d'accroître la fréquence par des moyens purement ma- gnétiques, En prenant le cas d’un transformateur de 1500 watts (2.000 volts) non chargé, dans lequel la perle en courants tourbillonnaires est de 40 walts, on 1 fang—l est la même chose que arc tang a. 298 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES montre qu’un secondaire de 2 tours et d’une résistance de 10,9 remplacerait les circuits des courants tour- billonnaires. En supposant la perméahitité constante et pas de courants tourbillonnaires, la valeur de C devient 0,07398 sin (kt — 90°), tandis qu'avec des cou- rants tourbillonnaires et à peu près à saturation C — 0,07911 sin (kt — 690,2) — 0, 014796 cos 3 At — 0,003695 cos 5 kt. M. Fleming dit qu'il a travaillé ce sujet des bobines de réaction et qu'il a trouvé que dans les transformateurs à circuit fermé, non chargés, les watts réels sont environ les 7 dixièmes des watts apparents. Dans l'hypothèse des fonctions sinussoïdales, cela indiquerait un retard de 45°, Une règle semblable pour les transformateurs à circuit ouvert serait très nécessaire. Il est important de savoir quelles dimen- sions de l'âme et de la bobine sont nécessaires pour la réaction d’un courant donné. M. Sumpner pense qu'il vaut mieux traiter le sujet graphiquement que par l'analyse et décrit une construction qui permet d’inté- grer facilement les équations fondamentales. M. Perry dit qu'il a raison de dire que les courbes ordinaires d’hystérésis ne sont pas applicables aux transforma- teurs. Par l'analyse des courbes expérimentales de force électromotrices et de courants, on pourrait ar- river à trouver les véritables courbes d’hystérésis, SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 14 mars. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M, Tait lit une note addi- tionnelle sur les isothermiques de l'acide carbonique. — MM. Robert Irvine et John Murray : Sur les chan- gements dans la composition chimique de l’eau de mer associée avec les vases bleues de la mer. Les observa- tions ont été faites avec de la vase extraite du port de Granton et de la vieille carrière de Granton, — MM. John Murray et Irvine : Sur les nodules de manganèse trouvés dans les dépôts marins de la mer de Clyde. Le manganèse se trouve dans ces régions en grandes quantités, et sa formation est une exception remarquable à la distribution usuelle du manganèse relativement à la profondeur de l’eau. M. Murray De suite, dans une note préalable sur ce sujet, émet ‘idée que la grande abondante de manganèse dans la mer de Clyde a son origine dans les produits abondants déchargés dans le fleuve.par les manufactures de Glas- gow. Durant la dernière année, ona fait une grande quantité de draguages sur la côte occidentale de l'Ecosse et dans les bassins au nord de Cantyre, d'où il résulte qu’on y trouve très peu de. manganèse, tandis que, commejon l’adit, on en obtient de grandes quantités dans la mer de Clyde, à tel point qu'on trouverait presque du bénéfice à pratiquer le draguage sur le banc Skelmorlie. L’explication de M. Murray est ainsi abso lument confirmée. — M. Murray présente un spécimen de craie extrêmement pure des îles Christmas (environ deux cent milles de la côté de Java). 2° SCIENCES NATURELLES. — M. Noël Paten lit une note sur la présence des globules cristallins dans Purine. W. PEpDiE, Docteur de l'Université, A PTÉTÉ N 4 IQ SOCIETE ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE MANCHESTER Séance du 15 février M. Lowe lit une série de notes sur l'analyse. Il croit que le dosage du zinc dans la blende, au moyen du sulfure de sodium, comporte une erreur de 0,5 Coll est préférable de précipiter la presque totalité du zinc en dissolution acétique par l'hydrogène sulfuré; on filtre, on précipite le fer avec de l’ammoniaque, puis le restant du zinc avec du sulfhydrate d’ammoniaque. M. Lowe à souvent trouvé du plomb comme impureté dans l’amoniaque de commerce. — M. E. Knecht a fait faire au Manchester technical School une série d’expé- riences sur les quantités d’acide tannique absorbées par le coton dans différentes conditions, en faisant va- rier la température du bain, sa concentration et sa durée. Au moyen du titrage avec le permanganate (procédé Læwenthal) on peut maintenant doser exacte- ment le tanin en dissolution. Le meilleur résultat s'obtient quand on plonge le coton dans le bain en ébullition et qu'on l’y laisse trois heures, pendant que celui-ci se refroidit, La quantité de tanin absorbée est proportionnelle au temps; elle ne varie pas suivant un rapport fixe avec la concentration du bain. Les corps, tels que le sulfate de soude, qui sont supposés aug- menter la proportion de tanin absorbée, sont sans action ; et celte proportion est bien plus petite qu’on ne l’a supposé jusqu'ici. De la cellulose précipitée et pure à absorbé trois fois plus de tanin que le coton. — M. Knecht, dans une seconde série d'expériences, a étudié l’action du chlore sur la laine. La chloruration de la laine, qu’on pratique souvent avant l’impression, avec différentes matières colorantes, devient nécessaire lorsque l’on se sert des indulines. L'auteur a voulu dé- terminer si le chlore exerce une action oxydante ou réductrice, ou s’il s'ajoute à la laine. Le chlore sec n’a- git pas; mais en présence de l’eau, le gaz chlorhydrique se dépose et la laine perd 60 °/ de son poids après un lavage. La substance perdue, consiste en une matière brune capable de former avec les matières colorantes des produits insolubles, M. Caro a suggéré que le corps formé a la même constitution que celui qui se produit lorsqu'on agit sur la laine avec le chloranil. Séance du 11 mars. Résumé de la discussion sur les eaux d’'égout. — M. Sisson défend le procédé dit « alumino-ferrique ». Il croit que le seul moyen de mettre à l’épreuve les procédés de purification des eaux, c’est lemploi du dosage de l’azote d’origine organique, Dans les eaux qui viennent de maisons particulières, les ? de l'azote total s’y trouvent sous la forme d’urée, soit 146,25 par gallon (1.000.000 de litres). Contrairement aux assertions du Dr Tidy, l’auteur affirme que le corps ne se trans- forme pas en carbonate d’ammoniaque, mais existe bien comme urée dans les eaux effluentes, D'après Wanklyn, l'urée n’est pas convertie en ammoniaque par le per- manganate de potasse alcalin, mais l’auteur a trouvé le contraire. M. Richards préfère l’essai au sulfate de fer au dosage avec le permanganate. M. Bell croit que ce dernier procédé donne des résultats comparables et qu'ilestle meilleur que l’on ait pour essayer les eaux. Si elles contiennent seulement 0,05 parties d’azote albu- minoïde par 100.000 les eaux sont bonnes; si elles con- tiennent de 0,3 à 0,4 par 100.000 elles deviendront putres- centes si on les laisse en repos, P, J. Harroc. ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE Une circonstance indépendante de notre volonté nous a empêché depuis quelque temps de rendre compte d'une facon régulière des travaux présentés à lAca- démie royale de Belgique. Voici l'analyse des mé- moires présentés depuis la publication de notre der- nier compte-rendu, 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Catalan énonce, pour prendre date, quelques théorèmes nouveaux sur les intégrales eulériennes. — M. Folie lit une note sur les formules correctes du mouvement de rotation de la Terre, Il rappelle qu'Oppolzer, le premier, a voulu rap- porter ces formules à l'axe instantané de rotation, et non à l’axe géographique, et que cette nouvelle manière de voir, correcte à certains égards, a le tort grave d’être en contradiction avec la définition de l'heure. Celle-ci, en effet, ne peut se définir qu'au moyen du méridien géographique, qui est fixe à la surface de la terre, tandis que le méridien instantané est variable, On doit done revenir, et c’est ce que tous les géomètres, à l'exception d’Oppolzer seul, ont fait, du reste, à la mé- thode suivie par Euler et Laplace, et reconnaître avec o ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 9 299 celui-ci le caractère diurne de la nutation initiale, caractère qui disparaissait dans la manière de voir de l'astronome viennois, et que plusieurs ont nié à sa suite, Peut-on éviter, dans cette méthode, les incorrec- tions que cet astronome a reprochées à l'intégration de Poisson ? M. Folie l’affirme et donne les intégrales dont on pourra vérifier l’exactitude par la différentia- tion, intégrales qui ne diffèrent, au surplus, de celles de Laplace, qu'en ce qu'il y est tenu compte de petites quantités que le grand géomètre pouvait négliger, eu égard à la précision des observations astronomiques de son époque, mais qu'on ne peut plus laisser de côté aujourd? hui, — M. de Ruydts, complétant des travaux d'analyse antérieurs, donne d’une manière explicite le développement de loute fonction invariante comme somme de covariants identiques multipliés par des polaires de covariants primaires. 2° SGiENCES PHYSIQUES, — M. Cesaro présente une note de cristallographie mathématique. Elle a pour objet la recherche de certains plans réfringents, qui, dans les cristaux à deux axes, peuvent donner pour une onde plane incidente,outre un cône creux de rayons, un rayon lumineux distinct. M. Cesaro à indiqué la marche à suivre pour vérifier expérimentalement sa théorie, il ne dit pas qu'il lait vérifiée lui-même, — M. Delacre communique un travail sur la synthèse de la benzine par l’action du zinc éthyle sur l'acétophénone. Il avait précédemment fait connaître la dypnone, le premier des produits de condensation de l’acétophé- none ; il en décrit un grand nombre d’autres dans son travail pour arriver enfin à la triphénylbenzine, 3° SCIENCES NATURELLES. — À l’occasion d’une note de MM. G. Vincent et Couturieaux sur les dépôts de l'éocène moyen et de l’éocène supérieur de la région comprise entre la Dyle etle chemin de fer de Bruxelles à Nivelles, M. Dewalque fait connaître son opinion sur les classements nouveaux des assises comprises entre le tonquien et le bruxellien. Cetle opinion est peu fa- vorable aux innovations proposées; elle est partagée par MM. de la Vallée, Poussin et Briart, — M. John Barber Smith : Nouvelle communication sur la mé- thode de détermination quantative de la valeur du DER de la farine, de l’albumine, du lait, de la crème, etc. M. P. Van Beneden : Sur une nouvelle famille de crus- tacées, l’auteur a recu des Acores une lettre de M. Chaves, qui à capturé des Coryphena equisetis faisant la chasse, ‘et a trouvé dans leur estomac des crustacés qu'il a envoyés à l’éminent zoologiste. Celui-ci, après en avoir fait une étude complète, y reconnait le er ypto- pus Defrancii de Latreille (Cerataspis de Cray), mais il pense que ce crustacé forme le type d’une famille nou- velle et propose de la nommer les Cryptopodidés, — La classe des sciences a adopté le vœu émis par les amis de Stas, de voir le gouvernement acquérir et con- server les collections scientifiques de ce savant. Le ministre de l’intérieur et de l'instruction publique sol- licitera des Chambres législatives un crédit spécial dans le but de satisfaire au désir exprimé par l'Acadé- mie. Le directeur de la classe, M. Folie, après avoir rappelé la grande perte qu'elle vient de faire, annonce la prochaine célébration du cinquantenaire de M, P. Van Beneden comme membre de l'Académie, et la réunion à Bruxelles de l'Association géodésique inter- nationale au mois de septembre prochain. Séance du 1% février. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — MM. Lagrange et de Tilly présentent leurs rapports sur une réponse de M. Folie à M. Tisserand, qui avait été lue dans la séance du mois de décembre 1890. Cette ré ponse, qu'on trou- vera dans le Bulletin de février, est identique, pour le fond, à la note du mème auteur qui a été résumée dans le compte rendu de la séance de décembre dernier: nous n'y reviendrons donc pas. — M. E. Catalan communique des vérifications assez simples de difré- rentes séries trigonométriques démontrées par M. Bas- chwitz. — Le Bulletin renferme une note de M, J. De Ruydts sur les formes algébriques à particularité essentielle, Nous ne pouvons que signaler aux spécia- listes cette note d'analyse transe endante. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. de Heen à étudié l’an der- nier les lois de l’évaporation. Partant des analogies trouvées par M. Van t’Hoff entre les gaz et les dissolu- tions, il à recherché si ces dernières n’obéissent pas aux mêmes lois que l’'évaporation. Ainsi à la loi qu'il à énoncée antérieurement : la quantité de liquide vapori- sée varie comme le produit de la tension de la vapeur par le poids moléculaire, il a trouvé, comme analogue, la suivante : la vitesse de dissolution est proportion- nelle au produit de la solubilité maxima par le poids moléculaire. De même à cette seconde loi : les vitesses de vaporisation dans un gaz sont sensiblement en rai- son inverse du frottement intérieur de ce gaz ou en raison directe de sa vitesse d'écoulement par “des tubes capillaires, correspond Ja suivante : la vitesse de dis- solution est proportionnelle à la vitesse d'écoulement du liquide par un tube capillaire. A cette troisième : la vitesse d’évaporation est proportionnelle à la diffé- rence qui existe entre la tension maxima de la vapeur et la tension de la vapeur qui occupe le milieu am- biant, correspond pour la dissolution : la vitesse de dissolution est proportionnelle à la différence qui existe entre la quantité de sel nécessaire pour saturer le liquide et celle qui s’y trouve renfermée, — M. Louis Henry traite de la différenciation expérimentale des éthers nitreux et de leurs isomères, les dérivés nitrés. Les dérivés nitrés résistent à l’action des hydracides halogénés, — du moins à la température ordinaire — et à celle des chlorures acides. Les éthers nitreux sont au contraire attaqués violemment par eux. Le chlorure etle bromure d'acétyle donnent avec le nitrite d’amyle de l’acétate d’amyle et les chlorures et bromures de nitro- syle, NOCI et NOBa. Selon M. Henry, cette réaction peut être avantageusement employée pour obtenir ces derniers composés. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. Plateau lit une étude fort soignée et très bien écrite, qu'il avait destinée à la séance publique de la classe des science es, du 15 dé- cembre dernier, Les amis de l’histoire naturelle liront avec le plus grand plaisir, au Bulletin, cette étude de près de 50 pages in-8°, qui renferme une multitude de faits très intéressants, dénotant un savant très versé dans l’histoire naturelle, un observateur perspicace et un esprit philosophique. — M. le D' Van der Stricht à fait une étude micrographique intitulée : Contributions à l'étude de la sphère attractive, sur les éléments de ce nom découverts en 1887 dans les ovules d’Ascaris megu- locephala, par MM. Ed. Van Beneden et Neyt. HAE Membre de l’Académie. ACADEMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 2 avril. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. J.-C. Kapteyn fait une communication sur les différences systématiques entre les grandeurs photographiques et visuelles des étoiles dans Les différentes régions du ciel, La compa- raison des diamètres que présentent les étoiles de grandeur visuelle égale (d’après les évaluations des MM. Gould et Schônfeld) sur les 370 clichés discutés du ciel austral montre que Peffet actinique a été con- sidérablement plus grand pour les étoiles situées dans la voie lactée ou dans son voisinage que pour celles dont la latitude galactique est élevée, L'auteur exa- mine les différentes causes qui peuvent avoir contribué à produire cet effet: {°influences météorologiques et de la sensibilité des plaques, 2 erreurs systématiques des catalogues des MM. Gould et Schônfeld, 3° particularités de la lumière des étoiles. Par Ja discussion des séries de clichés, malheureusement très restreintes, propres à ce but et obtenues dans la même nuit ou suscep- tibles d’être réduites aux mêmes circonstances, l’au- teur a trouvé que le phénomène se montre encore avec une pleine évidence après l’élimination de la première 5 © 300 2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES des causes énumérées, De plus, des données tant soit peu contradictoires que l’on possède sur les erreurs systématiques des évaluations visuelles, il déduit que, selon toutes probabilités, ces erreurs ne surpassent pas la valeur de 0,3 de l’unité de grandeur, de sorte que la seconde cause ne suffit pas à rendre compte de la tota- lité du phénomène observé. Il semble donc que l’on soit forcé d'admettre qu'il reste des différences systé- matiques d’une demi-grandeur ou un peu davantage. attribuables à des particularités de la lumière même des étoiles. La découverte de M. Pickering que la voie lactée doit être considérée comme une aggrégation d'étoiles du premier type spectral ne suffit qu'à rendre compte d’une petite fraction {un peu moins que 0,1 de srandeur) des différences observées. En définitive on est donc amené à penser que la lumière des étoiles si- tuées dans la voie lactée ou dans sa proximité, même celles d’un seul et même type spectral, soit plus riche en rayons violets que la lumière des autres étoiles. Cependant l’auteur hésite à énoncer ce résultat sous forme d'une loi, qui soit à l’abri de {oute objection, avant que les expériences directes entreprises dans ce but à l’observatoire de Cape-Town aient été terminées. 20 ScIENGES NATURELLES. — M. A. A. W. Hubrecht s'occupe de la placentation de certains Lémuriens et Insectivores pour laquelle il a rassemblé des matériaux pendant un voyage dans l’Archipel indien. Le placenta du Tarsius spectrum est discoïde et diffère des Lému- riens, qui ont été étudiés jusqu'ici et qui possèdent tous une distribution de villosités sur toute la surface de l'œuf (placenta du type diffus). Chez le Nycticebus tardigradus cette enveloppe perd ses villosités aux pôles dans les stades de gestation avancée. Ensuite l’auteur décrit plusieurs stades de développement du placenta discoïde de Galeopithecus ainsi que le placenta double de Jupaja dorsalis. Chacun des deux placentas de cette dernière espèce est plus ou moins réniforme ; ils se trouvent de part et d’autre de l'embryon, qui tourne toujours la face ventrale vers le mesométrium, — M,7J. M. van Bemmelen présente les résultats ob- tenus par M. H. van Cappelle en examinant les cou- ches de terre à l’occasion du percage d’un puits de 40 mètres de profondeur à Oosterlittens en Frise, — M. C. A. Pekelharing a repris l'étude de la nucléo- albumine précipitée du plasma de sang (voir Revue, t. I, p. 105). II remarque que cette matière se dissout à un montant de 6 par mille dans une solution de Na CI sous l'addition d'acide acétique ef à la température du corps et qu’elle se reprécipite à la température de ©, Alors elle se présente sous la forme de groupes de petites sphères cohérentes de différentes grandeurs, tout comme se présente la matière précipitée du plasma peptonisé à 0, que M. Wooldridge à nommée afibrino- gène, Probablement cet afibrinogène de M. Wooldridge n’est autre chose que le fibrinogène de M. Hammarsten souillé par de la nucléo-albumine. La nucléo-albu- mine issue des éléments formés du sang s’altère facile- ment, Elle se décompose à 60° par l'addition de lessive alcaline et l’on obtient de l’albumose. Se comportent de la même manière la nucléo-albumine des cellules de la « glandula thymus » ou du testicule, le « fibri- nosène textile » de M. Wooldridge, une matière qui forme du fibrine-ferment sous l'addition de sels de chaux tout aussi bien que la nueléo-albumine du plasma. Entre certaines limites le corps animal jouit de la faculté d'effectuer cette décomposition, quand on introduit la nucléo-albumine dans les vaisseaux san- guins. Chez le chien cette faculté est plus grande que chez le lapin. Quand on introduit une solution de « fibrinogène textile », préparée d’après les préceptes de M. Wooldridge, dans la « vena jugularis » d’un chien et si l’on prévient la coagulation intravasculaire du sang par une respiration artificielle vigoureuse, tous es phénomènes d’empoisonnement peptoné se pré- sentent et d'après la méthode de M. Devoto, l’albumose est démontrée dans le sang. De même le lapin montre un abaissement de la pression du sang et un ralentisse- ment de la coagulation après l'injection de nucléo-albu- mine du sang ou de tissu à un degré de concentration, qui prévient la coagulation intravasculaire, Donc l’or- ganisme vivant a la faculté de prévenir l’action de la composition de chaux et de nucléo-albumine ou du fibrine-ferment, par la décomposition de la nucléo- albumine avec formation d’albumose., ScHoutE Membre de l'Académie. SOCIÉTÉ DE PHYSIOLOGIE DE BERLIN Séance du 18 mars. M. le D'Gumlich a réussi a évaluer séparément dans l'urine, par une modification du procédé à l'acide phos- photungstique, l'azote de l’urée, l'azote extractif et l'azote ammoniacal. Il a institué des expériences sur lui-même en se soumettant d’abord à un régime exclusif de viande, ensuite pendant huit jours à un régime purement végétal, et enfin au régime mixte pendant plusieurs jours: il a observé que, avec le régime de viande, l'azote de l’urée augmentait consi- dérablement, l'azote extractif et l'azote ammoniacal augmentaient aussi un peu ; pendant le régime végétal, l'azote de l’urée diminua très notablement ; lazote extractif et l'azote ammoniacal diminuèrent à peine ou même pas du tout; leur rapport à l'azote de l’urée aug- menta donc beaucoup; cet accroissement fut parlicu- lièrement marqué au commencement du régime végé- tal, c'est à-dire à la fin du régime exclusif de viande, qui avait été mal supporté par l'expérimentateur ; celui-ci avait eu un malaise général et avait perdu du poids ; pendant le régime végétal, son poids augmenta au contraire. M, le D' Gumlich a refait les mêmes dosages de l'azote des éléments urinaires sur une série de malades aigus et chroniques et sur un urémique ; ces recherches, quand elles seront plus avancées, don- neront lieu à des conclusions thérapeutiques. Séance du 1° avril, M. le D' Lilienfeld a examiné microscopiquement et chimiquement le rôle des leucocytes dans la coa- oulation de la fibrine, Dans ce but, il s’est servi des leucocytes du thymus, qu'il a pu préparer à l’état pur et sec sous forme d’une poudre blanche. Sous le mi- croscope, il a établi que c'est seulement dans le noyau des leucocytes qu'est contenu le ferment coagulant ; au point de vue chimique, il à réussi à isoler cette substance et à en étudier les propriétés caractéris- tiques : il lui donne le nom de Leuconucléine, — M, le D' Rosenberg a repris expérimentament sur le chien la question de linfluence du travail corporel sur lutili- sation des aliments ; il y avait Jusqu'ici deux opinions extrêmes en présence, les uns recommandant après le repas un violent exercice, les autres, un long repos; il n’y avait pas d'expériences pouvant trancher la ques- tion. M, le D' Rosenberg a évalué l’utilisation d’une nourriture déterminée, composée de viande, de graisse el de riz, chez une chienne qui restait en repos ou bien effectuait un travail déterminé dans une roue. Bien que le travail fût assez considérable pour équi- valoir à l'ascension d'une montagne de 3,000 mètres et que l'animal l’effectuàt à grand’peine au début, l’utilisation de la nourriture fut la même dans les deux cas; Pauteur pense que ces résultats peuvent être étendus à l’homme. — M. le D' Schweizer à examiné au microscope l’action de lélectricité sur les sperma- tozoides ; il les vit d'abord s'orienter parallèlement au courant, la tête vers la cathode, puis il reconnut que ce mouvement n'était pas une manifestation vitale ; pourtant il put dans quelques cas, avec des éléments séminaux très actifs, les voir nager contre le courant. D' W, SRLARER. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Stance du 24 mars. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Franz Müller : « Procédé simplifié pour l'enseignement du calcul », ACADÉMIES ET SOCIËTÉS SAVANTES 301 — M. Friedrisch Bidschof : « Eléments et éphémé- rides de la comète découverte le 18 mars 1892 à Bris- tol par Denning. » 2 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Friedrich Becke : « Re- cherches sur la structure des ardoises du mont Altva- ter, » — M. Ign. Klemencic à Gratz: «Sur la facon de se comporter du fer soumis aux oscillations élec- triques. » L'auteur décrit quelques recherches sur les oscillations produites dans des fils de nature et de longueur différentes et dans quelques cas donne l’ab- sorption correspondante d'énergie. Cette absorption est plus grande dans le fer que dans des fils de cuivre, de platine ou de nickel placés dans les mêmes condi- tions ; il résulte de là que le magnétisme du fer doit intervenir dans ces phénomènes. — M. Wiesner : «Caractères microscopiques des différents charbons et similitude du pigment des poumons et du noir de fumée.» Les principaux résultats de ce travail sont les suivants : 4° la partie principale des lignites est une substance qui est transparente sous le microscope et apparaît sous forme de petits morceaux bruns qui sont décolorés par l'acide chromique en laissant un résidu de cellu- lose. 2 Tous les autres charbons étudiés, l’anthracite, la houille, le charbon de bois, le noir de fumée, le graphite lui-même ne contiennent ordinairement qu'une petite quantité d’une substance facilement oxydable par l'acide chromique. Le résidu se comporte comme le charbon amorphe, l'acide chromique ne lattaque presque pas à la température ordinaire, car abandonné pendant des mois dans ce réactif sous le microscope, il reste identique à lui-même. 3° L'anthracile est com- posé d’une substance noire (charbon amorphe) et d'un corps transparent de couleur brun foncé qui s'oxyde lentement dans l'acide chromique, mais sans laisser de cellulose. 4° La houille secomportecomme un mélange d’anthracite et de lignite après l’action de l'acide chro- nique, il reste une petite quantité de cellulose, 5° Le charbon rouge (bois incomplètement carbonisé) peut être décomposé complètement par l'acide chromique. 6° Le pigment noir qui s'accumule dans le poumon pendant la viese comporte avec l'acide chromique comme le noir de fumée; tous les deux laissent des rési- dus que l'examen microscopique montre être iden- tiques. — MM. F. Laschober, capitaine de frégale, et W. Kesslitz, lieutenant de vaisseau : &« Observations magnétiques faites sur les côtes de l’Adriatique en 1889 et 90 par ordre du ministre de la guerre. » — M. H. Strache : « Perfectionnement du procédé de détermination de l'oxygène du carbonyle. » Par l’em- ploi d’une solution bouillante de la liqueur de Fehling et par la considération de la tension de vapeur de la benzine, l’auteur obtient des résullals beaucoup plus précis que par la méthode appliquée sous sa forme primitive. Il en fait l'application à la phénylhydrazine, à son chlorhydrate pur et à une série d'aldéhydes et de cétones. La benzophénone ne donne que la moitié de la quantité calculée, Des recherches effectuées sur un grand nombre de cétones montrent que le procédé est excellent pour les déterminer quantitalivement., — MM. H. Strache et M. Kitt : « Oxydation de la phényl- hydrazine par la liqueur de Fehling. » Les auteurs montrent que l'oxydation avec la liqueur de Febling bouillante ne fournit pas d’aniline, mais seulement de la benzine et du phénol. L'oxyde de cuivre nécessaire pour l'oxydation et le phénol formé furent déterminés quantitativement, — Observatoire de Vienne: Ensemble des observations météréologiques et magnéliques effec- tuées pendant le mois de février, Eunil Weyr Membre de l’Académie, ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PETERSBOURG Séance du 24 février. SCIENCES NATURELLES. — M, Herzenstein : Observa- tions ichthyologiques faites au Musée de zoologie de l’Académie impériale des sciences, 3° partie. Cette note qui fait suite aux travaux analogues de ce zoolo- giste, déjà présentés à l’Académie, contient la descrip- tion de six espèces de poissons de la collection de l’A- cadémie, nouvelles ou intéressantes à titres divers ;elle est accompagnée d'une planche, — M. Ivanovsky : Sur la maladie mosaïque du tabac. Séance du 14 mars 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Lebedeff : Observation faite Le 12 mars à l'Observatoire de Poulkova sur une aurore boréale d'une intensité et d’une beauté rares. Vers 2 heures et demie du matin cet astronome a re- marqué que les bords des nuages situés très près de l'horizon septentrional commencaient a émettre une faible lumière, D'après ce signe on pouvait déjà prédire une aurore boréale ; cependant le phénomène lui-même ne se développait point jusqu'à 3 heures. À ce mo- ment, tournant brusquement son regard du côté du nord, l'observateur fut frappé du spectacle qui se pré- sentait à ses yeux. Dans toute l’étendue de la partie septentrionale de lhorizon, une multitude de rayons lumineux s’élevaient de tous les côtés; ces rayons étaient très minces et convergeaient tous vers le zénith: l'étoile : qui se trouve à l'extrémité de la queue de la Grande Ourse, paraissait être Leur foyer commun. Cer- taines gerbes lumineuses dépassaient même le zénith se dirigeant vers le sud, La portion nord-est des rayons, qui traversait les constellations de la Lyre et du Cygne, était colorié en rouge pâle, tandis que la portion nord- ouest, passant par la constellation du Cocher, avait une teinte bleuätre. Ces rayons colorés ne changeaient point de place comme il arrive ordinairement dans les aurores boréales, mais ne faisaient que vibrer tout le temps; on voyait comme une sorte de fluide couler tantôt en augmentant, tantôt en diminuant de vitesse dans les couches supérieures de l'atmosphère, A 3 h. 5 temps moyen) le phénomène avait atteint le maximum de son intensité; puis il commenca rapidement à dé- croître, et à 3 h. 13 il n’en restait plus aucune (race. Tout ceci se passat en plein clair de lune, douze heures avant la pleine lune C'était done une des plus fortes aurores parmi celles qui se sont produites avec une fréquence de plus en plus grande dans ces derniers temps. En effet, dans l’espace des deux ou trois der- nières semaines, on en compte à ou 6. Sur les photo- graphies de soleil faites par M. Wielopolsky vers cette époque (le 12 mars) on ne constate que deux petits groupes de taches dans l'hémisphère nord. — M. Bou- gaïet : Conditions générales de l'intégration sous forme définitive d'un différentiel elliptique. Les résultats de ce travail ont été déjà présentés par l’auteur à l'Académie des sciences de Paris dans sa communication intitulée : Complément à un problème d’Abel.! Dans le mémoire en question l’auteur développe ses idées: il y fait res- sortir surtout la part qui lui revient dans la solution du du problème; cela est d'autant plus nécessaire que ce problème a été traité avec beaucoup de soin, outre Abel, encore par Tchebycheff et ses élèves Zolatoreff et Pla- chitsky. « La méthode que je propose, dit M. Bou- gaieff, pour oblenir les conditions de l'intégration est en méme Lemps une méthode spéciale de dérivation pour la solulion du problème d'Abel. En donnant quelques équations analogues à celles d’Abel (Œuvres complètes Abel, 1839, L. II, p. 141-146), cette méthode permet de déduire avec facilité les autres équations. Tout en étant très simple et {rès exacte, elle ne conduit cepen- dant pas aux malentendus que provoque la méthode d'Abel. D'après M. Imchenetsky, le trait principal de la ressemblance citée plus haut entre les équations de l’auteur et celles qui se trouvent à l'endroit cité dans l’œuvre d'Abel consiste en ce qu'on peut déduire des équations d’Abel les mêmes conditions de l'intégration qu'avait obtenu, par une autre voie, M. Bougaïeff, Ce- pendant la clarté et la simplicité de la méthode de 1 Comptes rendus de l’Académie, t. CXII, décembre 1891, n° 26. 302 ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES l’auteur sont discutables ainsi que les malentendus qu'il a rencontrés dans le travail d’Abel. SCtENcEs PHYSIQUES. — M. Godmann : Sur les pré- cipités atmosphériques et sur les grandes averses observés à Pavlovsk, M. Godmann a mis à profit les observations faites pendant 14 ans à l'Observatoire de Pulkova sur les précipités. Il en a déduit la marche journalière et annuelle de ces précipités en ce qui con- cerne leur quantité, leur fréquence et leur force. Le tableau des courbes joint à l'ouvrage démontre que malgré la brièveté de la période des observations, les résultats sont assez satisfaisants pour les moyennes. Il résulte de tous les calculs que le maximum des préci- pités pendant les 24 heures, pour la période de 14 ans, est de 55 millimètres, le maximum pendant une heure 38 millimètres et le minimum pendant 10 minutes 21 millimètres. Ces trois nombres tombent à la date de 14 août 1890, jour où l’averse a pris des porportions grandioses. 3° SCIENCES NATURELLES. — M, Semenoff : Chrysidi- darum Species novæ. Cette note contient la description de 15 espèces nouvelles de cette famille des névroptères:; 8 de ces espèces sont spéciales à la faune de la Russie. O. BAGkLUND, Membre de l’Académie. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de janvier-mars 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Beltrami : Sur l’ex- pression analytique du principe de Huygens. — M. Mo- rera : Solution générale des équations indéfinies de l'équilibre d’un corps continu, — M. Trattini : Deux propositions de la théorie des nombres et leur inter- prétation géométrique. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Grimaldi examine la mé- thode proposée par MM. Cailletet et Colardeau pour la détermination du point critique des cocps, et il dé- montre que cette méthode rigoureusement appliquée conduit à des résultats très peu exacts. —M. Guglielmo donne la description d'un appareil qui sert à la déter- mination de la compressibilité isentropique et isother- mique des liquides et des solides.—M.Vicentini trans- met une description des phénomènes lumineux que l’on observe dans l’air raréfié de récipients en verre, dans lesquels se trouvent des fils métalliques en com- municalion avec des conducteurs, lorsqu'on fait passer dans ces derniers les décharges d’une machine de Holtz, L'auteur a exécuté ses expériences sur des fils recti- lignes et sur des fils recourbés en hélice. Il est de l'opi- nion que, pour de faibles raréfactions, la luminosité est due à des décharges latérales du fil des hélices; mais, lorsque la pression dans le récipient est moindre qu'un millimètre, la décharge doit se faire d’une manière différente, En effet, dans le cas d’hélices métalliques recouvertes de verre ou de mastic isolant, dans les- quelles la transmission directe du fil à Pair ne pouvait plus s'effectuer, on voyait encore un fuseau lumineux à l’intérieur de l'hélice, M. Vicentini s’occupe de plu- sieurs autres phénomènes secondaires qui accompa- unent les décharges et en présente des photographies. — M, Salvioni : sur les conditions qui déterminent la position du premier nœud des ondes électriques étu diées par M. Lecher., — MM. Ciamician et Silber ont étudié la constitution chimique des substances qui se trouvent dans l'écorce du Coto, — M. Mauro : Nouvelle note sur les fluosels de molybdène et sur la non-exis- tence du fluorure rameux.— M. Marchetti : Sur la ma- nière de se comporter cryoscopiquement des solutions aqueuses du chlorure chromique vert. — M. Antony décrit une méthode pour obtenir l'iridium sans traces de platine. — M. Angeli : Sur la conductibilité de quelques acides pyrrolcarboniques et indolcarboniques. — M. Montemartini établit, comme il l'avait déjà an- noncé, que dans la réaction entre le zinc et l'acide ni- trique, la production d’ammoniaque n’est pas indépen- dante de la concentration de l’acide, comme le croyait Sainte-Claire Deville, M. Montemartini arrive expéri- mentalement à la conclusion que la rapidité de décom- position de l’acide nitreux dans des solutions acidifiées par l'acide nitrique, s'accroît proportionnellement à la concentration de ce dernier. Cette loi subsiste pour des solutions de 5 à 30 pour 100; elle change pour des concentrations plus élevées. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. Marino-Zuco ont exécuté plusieurs expériences qui démontrent que la symptomatologie de la maladie d'Addison est due à une auto-intoxication par la neurine. — M. Crety donne la description des observations qu'il a faites sur le nucléus du vitellus du Distomum Richiardii, nucléus qu'il considère analogue par sa nature à la tache ger- minative. — M, Mingazzinirappelle les classifications des Coccidiens et des Grégarines proposées par Kül- liker, Stein, Diesing, Schneider, Gabriel et Bütschli; et après en avoir fait une critique, il présente la classi- fication suivante pour les Sporozoaires : Corps formé Coccidiidea Corps formé \ Polycystidea 2 ar deux par un seul par es ont : ou plusieurs ) : ! Fe Monocystidea segments ( Didymophyidea — M. Albanese à soumis à la fatigue des grenouilles et des lapins auxquels il enlevait préalablement les capsules surrénales. Il a reconnu que tandis que les grenouilles normales reviennent en peu d'heures de la paralysie causée par des excitations électriques, sur celles qui n’ont plus de capsules surrénales les effets de la fatigue sont toujours plus graves, et l’animal meurt complètement paralysé. Les phénomènes sont plus marqués sur les lapins qui, lorsqu'ils n’ont plus des capsules surrénales, se fatiguent bien vite ; la mort du cœur arrive en dermier lieu, et la paralysie pro- gressive aboutit à la paralysie des muscles de la respi- ration, M. Albanese ajoute, en rappelant les récentes recherches de MM. Abelous et Langlois, que les cap- sules surrénales semblent chargées de détruire ou du moins de transformer ces substances toxiques qui, par l'effet du travail des muscles et du système nerveux, se forment dans l'organisme. L'auteur se propose d’étu- dier la toxicité du sang des animaux dont les capsules surrénales ont été détruites, et la composition des substances qui se forment par le travail du cerveau et des muscles, — M. Salvioli a fait des recherches sur l'influence exercée par la fatigue sur la digestion ; in- fluence que les anciens considéraient comme absolu- ment nuisible à la fonction normale de l'estomac. M. Salvioli faisait courir des chiens dans une roue ver- ticale et mobile; il examinait les sécrétions de la muqueuse gastrique à l’aide d'une fistule ou en pro- voquant le vomissement par des injections d'apomor- phine. On a reconnu que la fatigue diminue fortement la quantité du suc gastrique, de manière qu'un chien qui donne, en irritant sa muqueuse, 30° de suc en un quart d'heure n’en donne plus que 10, lorsqu'il est fa- tigué, De même l'acidité du sue gastrique s’affaiblit par la fatigue, et chez les animaux qui ont marché, on voit diminuer la quantité du chlore contenu dans le sue. Le suc gastrique d'un animal fatigué perd beaucoup de son pouvoir digestif; mais ces altérations de la fonc- tion gastrique sont passagères, et le suc redevient normal après un repos de deux heures. M. Salvioli à vu encore que les substances alimentaires passent plus vite de l'estomac dans l'intestin chez les chiens qui courent, mais sans être digérées. Cela arrive probable- ment par l'effet d’une exagération des mouvements musculaires de l'estomac: phénomène que Niridetus avait déjà décrit au xvne siècle. Ernesto Mancini. Le L : 4 nb ts à 6 La CORRESPONDANCE ET NOTICE NECROLOGIQUE - 303 CORRESPONDANCE SUR LES MINIMA D'ODEUR PERCEPTIBLES 1 «Il est exact que, dans ma note insérée dans les Comptes rendus du 9 février 1891, j'ai omis d'écrire entre les mots « le poids d’odeur » et les mots « par cen- timètre cube » les mots : « passant successivement ». C’est là une négligence de rédaction dont je dois faire mea culpa. Mais ces mots, je me suis empressé de les réta- blir dans le tirage à part, paru la même semaine, tirage à part dont j'ai fait remettre un exemplaire à mon con- tradicteur. Ma citation à la Société de biologie était donc rigoureusement exacte, et il est hors de doute que je n'ai pas attendu le mois de février 1892 et de savantes critiques pour poser cette définition. J'aurais pu immé- diatement après ma note du 9 février 4891 faire insérer l'addition en question dans les Comptes rendus. Je lai jugée inutile pour les lecteurs attentifs. Je le regrette puisque cette omission a égaré la bonne foi de M. La- picque. Je me suis contenté de débuter ainsi dans ma seconde communication à l'Académie sur le même sujet (20 avril 1891) : « Dans une précédente communication (Comptes rendus, 9 février), j'ai considéré le minimum perceptible de l’odeur comme le poids de vapeur odorante qui a passé SUCCESSIVEMENT du réservoir dans le tube de l’olfactométre divisé par le volume total parfumé. » «En ce qui concerne ma réponse à une question de M. Régnard, la mémoire de votre collaborateur n’est pas rigouréusement fidèle. Il est très juste que j’ai dit: « Ce nombre de 2,49 pour l’éther chez un de mes sujets est trop fort, parce que le sujet en question qui est éthéromane s'est anesthésié par l’expérience.» Mais j'ai insisté auparavant sur la différence des deux défi- nitions, celle de Valentin et celle adoptée provisotre- ment par moi dans ma communication du 9 février, J'ai dit: « Le point de vue de Valentin est statique ; mon point de vue est dynamique. Valentin considère ; une vapeur à l'état stationnaire; moi, je considère un fluæ. » M. Lapicque se souviendra certainement de ces termes qui, à ce qu'il m'a semblé, ont paru un peu bizarres dans un milieu qui n’est pas composé en ma- jorité de mathématiciens. «Au reste, la rectification que j'ai sollicitée de vous est bien inutile pour les savants qui ont pris connaissance de mes méthodes; je ne l’ai désirée que pour ceux de vos lecteurs (et c'est la grande majorité) qui les ignorent, « Agréez, etc. Charles Henry, » Nous nous sommes fait un devoir de nous tenir en de- hors de la discussion survenue entre M. Ch. Henry et M. L. Lapicque. Avec notre collaborateur, nous estimons que le débat doit se terminer. En insérant la lettre ci-dessus, qu'il nous soit permis de nous étonner que M. Ch. Henry ait soumis ses travaux à une Société dont il discute ensuite la compétence. L. O. NOTICE NÉCROLOGIQUE LE VICE-AMIRAL JURIEN DE LA GRAVIÈRE En présence du développement prodigieux qu'ont pris toutes les sciences, la carrière maritime est peut- être celle où il est le plus nécessaire de se tenir au courant de leurs progrès, car elle touche a plus grand nombre de leurs applications pratiques. S'il en étail ainsi déjà au siècle dernier, au temps de Borda et de Fleurieu, combien cela est-il encore plus vrai de nos jours! La science du marin ne peut sans doute pas se spécialiser autant que les autres : elle doit offrir un caractère à la fois plus encyclopédique et moins abstrait que d’autres branches d'activité intellectuelle, et illui reste moins de loisir à consacrer aux études de détail, Le bon marin doit être avant tout pénétré de l'esprit scientifique et bien armé des résultats acquis. I] faut qu'il sache tout ce que savaient ses devanciers, à commencer par la manœuvre et le gréement. Moins encore qu'autrefois il lui est permis d'ignorer ou de négliger les progrès de l'astronomie, de l'hydrogra- phie, “de l'art des constructions; mais s’il ne veut pas être à la merci des spécialités, s’il veut conserver la faculté de contrôle sans laquelle de responsabilités du commandement sont illusoires, il devra, de nos jours, posséder à fond la mécanique, la balistique, les diverses branches de la physique, notamment l’électri- cité et la physique du globe. Il doit en un mot être savant, mais il aura généraleme nt plus d'occasions de le montrer par ses actes et sa vie que par ses écrits. L’amiral Jurien de la Gravière a été l’un des représen- tants les plus brillants de cette marine moderne qui, aux traditions morales et scientifiques de ses devan- ciers, à su ajouter l'usage judicieux de tous les progrès récents. Il y a joint cette fortune, qu’ après être arrivé aux plus hautes dignités et avoir pris une part impor- tante aux grands événements historiques de son époque, il a pu développer sa pensée dans de nom- breux écrits justement estimés et admirés. Jean-Pierre-Edmond Jurien de la Gravière naquit en 1 Voir la Revue du 30 mars 1892, p. 224 1812 à Brest. Son père était un marin distingué qui mourut vice-amiral ef pair de France. Cette origine lui traçait sa vocation : il entra à l'Ecole navale et fut nommé aspirant en 1828. Nous ne saurions énumérer ici toutes les étapes de sa carrière, ni le suivre dans les nombreux voyages qui embrassèrent tout le globe : contentons-nous d'en marquer quelques traits. En 1840, il commandait la Comète : c’est en cette qualité qu'il dirigea les levés de la côte de Sardaigne, exé- cutés par les ingénieurs hydrographes Darondeau et de la Roche-Poncié, avec lesquels il se lia dès lors d'amitié. En 1847, il recut le commandement de la corvette la Bayonnaise avec laquelle il fit un voyage de cireumnavigation de quatre ans. Les résultats poli- tiques et pittoresques de cette croisière ontété FRRRES par lui dans son Voyage en Chine; mais à côté de cela il ne négligea aucune occasion de perfectionner l’hy- drographie de ces régions de l'extrême Orient, alors encore si peu connues, de rectifier les s positions géo- graphiques et de recueillir des documents relatifs à la RAysqUe du globe. Il signala notamment, dans le sud du Japon, une ile nouvelle qui figure encore sur les cartes sous le nom d’ile de la Bayonnaise. C’est en lisant le rapport qu'il rédigea sur cette campagne qu’on surprend le secret du bonheur qu'il eut dans toutes ses navigations, bonheur qui n'arrive qu'à ceux qui savent le mériter. On y voit le soin avec lequel il étudiait longtemps à l'avance tous les documents rela- tifs aux régions qu ’il devait visiter, les discutant et les combinant pour s'assurer les chances les plus favo- rables. Il attachait une grande importance à recourir toujours aux relations originales, cherchant l’homme dans l'écrivain et tenant en médiocre estime les tra- vaux de compilation de seconde main, On y voit éclater le soin constant de la santé des hommes de l'équipage, etle souci de mettre en pleine lumière la part qui revenait à chacun de ses subordonnés dans le succès de la mission. Il s’y montre comme le type de l'officier moderne, peu curieux de se faire une réputation de 304 NOUVELLES loup de mer, mais joignant l’urbanilé et la bienveil- lance aux qualités de décision, et obtenant d'autant plus de respect et d'obéissance, qu'il savait lui-même mieux respecter et faire valoir ses collaborateurs. Nous ne le suivrons pas en Crimée, ni au Mexique. Cette dernière campagne est dans toutes les mémoires : il s’y honora autant par la clairvoyance dont il eut le courage de donner la marque, que par la patriotique abnégation avec laquelle, après avoir commandé en chef, il accepta d'obéir, L'Académie des Sciences l’appela dans son sein en 1866. Puis il occupa le poste éminent de commandant en chef de l’escadre d’évolulions. C’était le moment où il fallait introduire dans les méthodes de navigation les perfectionnements qu'exigeait le progrès continu des constructions navales : il apporta à cette élude, notamment à celle des instruments de navigation, un vif amour du progrès el un jugement ferme et droit, Après les événements de 1870-71, il sentit qu'il fal- lait renoncer aux vastes ambitions militaires que sa grande position dans la marine lui eût permis de con- cevoir : mais, désireux de loujours servir fidèlement son pays, bien que sur un théâtre plus modeste, il accepta avec joie de diriger le dépôt des cartes et plans de la marine. Il retrouvait là quelques-uns de ses anciens collaborateurs ; il y trouvait aussi une activité paisible et sans bruit, d'ordre surtout scientifique : aussi se dévoua-t-il sans réserve à ses nouvelles fonctions qui lui permettaient de se consacrer entièrement à ses chères études, L'heure présente élait triste et sombre : il reporta sa pensée sur les glorieux souvenirs du passé, avec le but bien arrêté d'en faire jaillir des enseignements pour l'avenir. Avait-il le secret espoir de pouvoir lui-même encore appliquer un jour les lecons de l’histoire? On eût pu le croire parfois en l'entendant parler avec enthousiasme des marins du passé, et chercher dans leur exemple la manière de conduire les grandes entreprises. C’est en tous cas dans ces idées qu’on trouve la pensée maitresse de ses travaux littéraires, si nombreux et si bien accueillis en decà comme au delà de nos frontières. Il s'agissait de se faire une image nelte de la vie des marins illustres, guerriers, découvreurs de mondes, parfois simples aventuriers, partis pour le négoce et se révé- lant tout à coup hommes d'Etat et fondateurs d'empires coloniaux. Il fallait pour cela se familiariser avec leur psychologie, et en même temps restituer fidèlement le milieu dans lequel ils agissaient. C’est ici que, sans faire étalage de science, l'amiral Jurien sut condenser, sous une forme agréable, le résullat de patientes études et de recherches approfondies sur les problèmes de la géographie et de la physique, aussi bien que de l'histoire. En parcourant ces pages, écrites d’un style si alerte qu'on pourrait quelquefois les croire impro- visées, on s'étonne de voir le grand fonds de faits posi- tifs qui y sout condensés et comme diss mulés, Le but s’apercoit facilement : l'auteur voulait vivre avec les gens du passé et se mettre dans leur intimité pour leur demander les conseils de leur expérience. De là toute cette série d'études sur la marine actuelle et future, dont se dégage l'impression que le sort des guerres de l'avenir ne dépendra plus autant des gros navires pesants, colosses difficiles à manier et à nour- rir, mais surtout des bäliments nombreux et rapides du second rang; des croiseurs qui inquièteront l’en- nemi dans son commerce, menaceront ses ports et forceront les blocus; des torpilleurs qui paralyseront l'attaque des éléphants etles rédniront souvent à J'im- puissance. C’est surtout dans l'étude des guerres de l'indépendance hellénique qu’il avait remarqué les avantages qu’une flotte très mobile, accompagnée de brùlots et montée par des hommes énergiques, peut remporter sur les vaisseaux de ligne lourds et lents à la manœuvre, et c’est ainsi qu'il rattachait la tactique de l'avenir à l'expérience du passé. Quelque jugement que les hommes techniques puissent porter sur ses conclusions, la méthode de recherche est nettement scientifique. Au moment où se consommait dans la marine une évolution d'immense portée, il était néces- saire qu'un marin aulorisé,ayant manœæuvré les navires du passé et su conduire ceux du présent, vint résumer pour ses successeurs les enseignements de leurs ainés et clore définitivement l'histoire d’une période longue et glorieuse. Nul n'était mieux désigné pour ce travail que amiral Jurien de la Gravière. Nous ne saurions {terminer celle nolice sans rappeler qu'aux qualités de commandant e£ à celles du savant, l'amiral joignait une bonté et une bienveillance rares. < Il faut être doux aux inventeurs, » lui avons-nous souvent entendu dire, et ce n'est jamais en vain que les chercheurs s’adressaient à lui. Ils élaient assurés de trouver. non seulement un accueil cordial, une oreille attentive et de bonnes paroles, mais un jugement sûr, des conseils éclairés et un appui efficace. M. d’Abbadie, président de l’Académie des Sciences, annonçant à cette savante compagnie le deuil qui venait de la frapper, terminait ainsi son discours : «Les «temps de ces manœuvres difficiles sont passés et ne « reviendront plus : mais leur histoire inspirera à nos « jeunes gens de nouvelles audaces. Elle classa son « auteur parmi nos meilleurs écrivains et l’Académie « francaise ne tarda pas à l’élire. Quand j'appris au « plus compétent de nos confrères la perte que nous « venions d'éprouver, il s’écria : «Jurien était l'honneur « de notre marine. » E, CasPArt, NOUVELLES PERFECTIONNEMENT DE LA MÉTHODE POUR PHOTOGRAPHIER LES COULEURS ! Dans la première communication que j'ai eu l’hon- neur de faire à l’Académie sur ce sujet, je disais que la couche sensible que j'employais alors manquait de sensibilité et d'isochromatisme, et que ces défauts étaient Le principal obstacle à l'application de la mé- thode que j'avais imaginée. Depuis lors j'ai réussi à améliorer la couche sensible; et, bien qu'il reste encore beaucoup à faire, les nouveaux résultats sont assez en- courageants pour que je me permette d'en faire part à l'Académie : Sur des couches d’albumino-bromure d'argent ren- dues orthochromatiques par l’azaline et la cyanine, j'obtiens des photographies très brillantes du spectre. Toutes les couleurs viennent à la fois, même le rouge, sans interposilion d'écrans colorés, et après une pose comprise entre 5 et 30 secondes. ‘ Note présentée lundi dernier à l’Académie par M. Lipp- mann,. Sur deux de ces clichés on remarque que les cou- leurs vues par transparence sont très nettement com- plémentaires de celles qu’on apercoit par réflexion. La théorie indique que les couleurs composées que revêtent les objets naturels devaient venir en pho- tographie au même titre que les lumières simples du spectre. Il n’en était pas moins nécessaire de vérifier le fait expérimentalement. Les quatre chchés que j'ai l'honneur de soumettre à l'Académie représentent fidè- lement des objets assez divers : un vitrail à quatre cou- leurs, un groupe de drapeaux, un plat d’oranges sur- montées d’un pavot rouge, un perroquet multicolore. Ilsmontrent que le modelé est rendu en même temps que les couleurs, — Les drapeaux et l'oiseau ont exigé de 5 à 10 minutes de pose à la lumière électrique ou au soleil, Les autres objets ont été faits après de nom- breuses heures de pose à la lumière diffuse. IL reste donc encore beaucoup à faire avant de rendre le pro- cédé pratique. G. LIPPMANN de l'Académie des Sciences. Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 3° ANNÉE N°0 15 MAI 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES As DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER E LE DUALISME EN SYPHILIOGRAPHIE. — RICORD ET BASSEREAU. CONFÉRENCE FAITE A L'HOPITAL SAINT-LOUIS Le 6 mai 1892 Messieurs, Le plus naturel hommage rendu à une vérité, c'est l'oubli dans lequel tombe rapidement l'erreur qui l’a combattue. De cela nous avons, dans le champ de nos éludes spéciales, un exemple des plus frappants. Voyez ce qu'est devenue, en face de la doctrine qui a disjoint le chancre simple et le chancre syphiliti- que, la vieille hérésie qui longtemps, qui pendant des siècles avait assimilé et confondu ces deux espèces morbides. Son nom même est presque oublié. Qui parle aujourd'hui de l’identisme, de l'unicisme? De même, le nom de la doctrine adverse et victorieuse tend à s’effacer du langage courant. Puisqu’il n’est plus question d’unicisme, il n’est pas de raison de conserver le mot de dualisme et l’on ne discute pas plus aujourd'hui — chez nous du moins — sur la dualité des virus chancreux que sur la dualité des virus servant, je suppose, d’'ori- gine, l’un à la scarlatine et l’autre à la rougeole. De part et d'autre, pour continuer la comparaison, on admet deux maladies absolument distinctes : le chancre simple et le chancre syphilitique, la rougeole et la scarlatine, sans spécifier leur indé- pendance réciproque par le mot devenu superflu de dualisme. C'est cependant le dualisme dont je me propose de vous entretenir aujourd’hui. Je voudrais vous montrer comment est née, s’est développée, s’est REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. confirmée celte grande doctrine, cette véritable découverte qui est d’origine toute française et qui constitue un honneur pour la science francaise. Il ya là une page curieuse d'histoire médicale à faire revivre, Pour avoir assisté comme témoin oculaire aux débats, aux controverses, aux lultes passionnées que suscita la nouvelle doctrine, pour y avoir pris part, comme simple soldat, derrière les grandes autorités d'alors, j’ai l'espérance de pouvoir vous retracer avecexactitude les péripéties de cet événement scientifique. Ge labeur me tente, d'autant qu'il me fournira l’occasion de vous pré- senter une figure médicale trop peu connue, trop peu populaire parmi nous, celle d’un savant aussi distingué, aussi éminent que modeste, qui prit une part décisive à la constitulion scientifique du dua- lisme, et de payer à sa mémoire un juste tribut d'honneur. Ce savant, vous l’avez nommé : c’est le Docteur Léon Bassereau. I Sans remonter bien haut, il fut un temps, vous le savez, où tous les accidents vénériens étaient confondus pêle-mêle et considérés au titre de manifestations diverses d’un seul et même germe pathogène, qu’on appelait vaguement le « 2rus vénérien ». Tous les « maux vénériens », comme on disait alors, étaient susceptibles de dériver d’une même source, et non moins susceptibles 9 306 Pr A. FOURNIER. — LE DUALISME EN SYPHILIOGRAPHIE d'aboutir aux mêmes conséquences d'infection générale. De la sorte, toutes les affections véné- riennes — Ou même non vénériennes — des orga- nes génitaux se trouvaient englobées dans le cadre de la syphilis; ulcérations inflammatoires ou au- tres, blennorrhagies, balano-posthites, bubons, végétations, voire flueurs blanches, etc., tout cela était assimilé à la syphilis. Ce fut là le chaos ini- lial de notre science, chaos de longue survie, puisque du xvr° siècle il se perpétua jusqu’au pre- mier tiers du nôtre. Ce n’est pas cependant que de temps à autre cette fusion monstrueuse de toutes les affections vénériennes en une seule unité morbide n'ait donné lieu à quelques protestations de la part d’esprits indépendants et clairvoyants, tels que Balfour, Tode, Hunter, Nisbet, Bell, Bosquillon, Hernandez, etc. Mais ces révolles partielles trou- vèrent peu d'écho. Et l’on était tellement entiché du dogme sacro-saint qui proclamait l'identité de tous les maux vénériens, que c’eût été une rare audace d'y porter alteinte. Pour avoir mis en doute l'identité de la blennorrhagie et de la syphilis, Tode fut traité d'Erostrateet de Cartouche par deux de ses confrères. On ne badinait pas avec les prin- cipes, comme vous le voyez. Aussi, fut-ce une révolution véritable, au sens strict du mot, lorsque, dans le second tiers de notre siècle, Ricord vint briser cette unité factice des maux vénériens, et dire : Non, la vérole n’est pas ce qu'on l'a supposé jusqu'ici, c’est-à-dire un composé d'éléments différents, une sorte d'hybride constituée mi-partie par la vérole même et mi-par- tie par la blennorrhagie, la balano-posthite, les végétations, les bubons, ete. La vérole, c'est la vé- role, à savoir une affection constituée par un acci- dent spécial comme exorde, le chancre induré, et, plus tard, par des accidents spéciaux ; c'est une maladie qui constitue à elle seuleuneentilé patholo- giquen’ayantrien de commun avec les autres affec- tions vénériennes. Et de même, d'autre part, la blennorrhagie, c'est la blennorrhagie, qui n’a au- cune affinilé avec la vérole, qui n’en comporte en rien les conséquences d'infection générale; — de même, également, la balano-posthite, les végéta- tions, les bubons, etc., sont autant d’affections qui, toutes, ontleurindividualilé propre. En un mot, et très succinctement : démembre- ment de la vieille unilé vénérienne; — constitu- lion de types vénériens distincts; — autonomie de la syphilis, du cadre de laquelle se trouvaient re- jetées toutes les autres affections vénériennes ; — tel fut l'esprit de la révolution (je répète à dessein le mot) qui sortit de l'enseignement du Midi, révo- lution que je vous ai exposée en détail dans une précédente conférence et qui, d’ailleurs, est trop connue de tous pour que j'aie à la spécifier davan- lage, Toutefois — et avec ce qui va suivre nous en- trons de plain-pied dans notre sujet actuel — Ri- cord n’avait pas accompli du premier coup toute son œuvre. A ses débuts, il était encore ce que nous appelle- rions aujourd'hui un uniciste, c’est-à-dire il n’avait pas encore distingué et exclu de la vérole ce qui, pour nous, est actuellement le chancre simple. La preuve même en est assez piquante à fournir. Savez-vous, par exemple, quel fut à l’origine un des arguments de Ricord pour différencier nosolo- giquement la blennorrhagie de la syphilis? C'est que la blennorrhagie répondait négalivement à l'inoculation (l’auto-inoculalion, bien entendu, la seule que ce grand maitre se soit jamais permis de pratiquer), tandis que « le chancre » (il disait le chancre et non pas tel chancre) répondait à l’ino- culalion par un chancre. Singulier argument, nous parait-il aujourd'hui, à nous qui savons et tenons pour une vérité banale que le chancre syphilitique n’est pas plus que la blennorrhagie, susceptible de produire un chancre par auto-inoculation. Mais les choses n’en restèrent pas là. Avec son rare talent d'observation clinique, Ricord saisit bien vite les différences profondes qui séparent le chancre syphilitique du chancre simple. Il constata d’abord ceci : que certains chancres sont constamment suivis de phénomènes d'infec- tion générale, landis que certains autres en restent constamment exempts, c’est-à-dire ne semblent constiluer que des accidents purement locaux. C'était là la base même et la base clinique de la doctrine qui, quelques années plus tard, devait prendre le nom de dualisme. Puis, cette constatation faite, il s’appliqua à re- chercher quels caractères propres signalaient ces deux espèces de chancres, si différentes par leurs conséquences d'avenir, et il vit que la première s’accompagnait toujours d’un signe spécial, à sa- voir l’induration de base, tandis que la seconde ne s'indurait pas. Et il dit alors : « Il est un chancre qui infecte, c’est le chancre induré ; «€ Ilest un chancre qui n'infecte pas, c’est le chancre mou ». Et continuant toujours à étudier comparative- ment ces deux chancres, il en analysa, il en dé- tailla les moindres caractères avec une rigueur, une précision, un bonheur de termes et de compa- raisons descriptives qui n'ont jamais élé surpas- sés. Lisez, par exemple, dans un livre que j'ai eu le grand honneur de rédiger pour lui et qui est le résumé de ce long labeur d'observations, le paral- PR OU CEST VTT P' A. FOURNIER. — LE DUALISME EN SYPHILIOGRAPHIE 307 lèle qu'il a tracé des deux chancres, et dites si ce n’est pas là un véritable chef d'œuvre patholo- gique. Sans doute, on a pu ajouter quelques traits à ce tableau qui, ne l’oubliez pas, date de trente-six ans; mais tous les grandscaractères distinctifs des deux chancres s’y trouvent énoncés déjà, et peints de main d’artiste et de maitre, si bien que les suc- cesseurs de Ricord n'ont guère fait que le repro- duire et le commenter, Somme toute, en 1856, et longtemps même avant cette époque, Ricord avait posé ce qu'on pour- rait appeler les assises du dualisme dans ce paral- lèle mémorable dont voici le très court sommaire : Il existe deux chancres, et ces deux chancres sont différents à tous égards. Ainsi : 4° L'un est habiluellement multiple; l’autre est habituellement solilaire. 2 L’un est constitué par une ulcération à ten- dance extensive et destructive; l’autre a pour caraclère et de rester superficiel et de se limiter rapidement. 3° Comme physionomie objective, l'un est taillé à l’'emporle-pièce, présente un fond inégal et ver- moulu; l’autre est fait à l’évidoir et a un fond lisse. 4° L'un est une lésion à base souple; l’autre est une lésion à base indurée. 5° L'un peut évoluer sans retentir sur le système ganglionnaire ; ou bien, quand il retentit sur les ganglions, il détermine une adénile aiguë, mono- ganglionnaire, qui, tantôt suppure à la façon d’une adénite vulgaire, simple, tantôt produit un pus spécifique, un pus chancreux, susceptible de reproduire à son tour par auto-inoculation le chancre simple. l’autre affecte les ganglions d’une façon cons- lante, fatale. Pas de chancre syphilitique sans bubon satellite. Le bubon suit le chancre syphi- litique comme l'ombre suit le corps. De plus, ce bubon est absolument spécial. Il est triplement spécial : et par son caractère de bubon polygan- glionnaire (pléiade), et par sa dureté, et surtout par l’absence habituelle de toute réaction inflam- matoire. Il est à la fois multiple, dur et indolent. Enfin, comme conséquence de sa qualilé de bubon aphlegmasique, il ne suppure presque jamais; et, lorsque par exceplion très rare, il suppure, il ne sécrète jamais qu'un pus simple, non susceptible de reproduire le chancre par auto-inoculation. 6° L’un est auto-inoculable; l’autre est réfrac- taire à l’aulo-inoculation. 7° L'un est susceptible d’être reproduit maintes fois sur le même sujet, voire reproduit d'une facon pour ainsi dire indélinie. À preuve les expériences des syphilisateurs; à preuve celle, en particulier, du célèbre Lindmann qui s’ino- cula avec succès 2.200 fois le chancre simple. L'autre ne se produit jamais qu’une seule fois; on n’a droit qu'une fois dans sa vie au chancre syphilitique. 8° L’un est un chancre sans infection consécu- tive, un chancre sans vérole; l’autre n’est que l'accident primitif, l’exorde même de la vérole. Aussi bien, après un tel exposé où les grands caractères constitutifs des deux chancres, les caractères qui font espèce, élaient mis si puissam- ment en lumière et ressortaient dans un contraste si saisissant, une déduction s’imposait-elle. On l’attendait véritablement. Il semblait que Ricord n'avait plus qu'à conclure en disant : « Done, les deux chancres que je viens de différencier par tant el tant de caractères absolus relèvent de deux virus différents ; ce sont deux maladies indépen- dantes, au même litre, par exemple, que la rou- geole et la scarlaline, n'ayant l’une avec l'autre aucune parenté. » Et le dualisme se trouvait fondé. Eh bien! cetle conclusion, Ricord, au moment de la formuler, ne la formula pas. Et ce ne fut pas sans étonnement que ses auditeurs de 1856 l’en- tendirent terminer le magistral exposé qui pré- cède, de lafaçon suivante, que je reproduis textuel- lement : « La dualité des virus chancreux n’est encore qu'une hypothèse, que l'avenir jugera. » C’est là le dernier mot qu'il ait écrit (officiellement du moins) sur la question. I Cette réserve inattendue, qui nous semble au- jourd’hui extraordinaire, incompréhensible même au premier moment, celte sorte de recul devant une conclusion qui apparaissait comme naturelle, comme forcée, quels sentiments l’imposèrent à Ricord? La chose est curieuse à examiner pour nous, non pas tant en ce qui est relatif à l’homme qu’en ce qui concerne l’histoire de l’époque. Trois raisons, à mon sens, ont conduit Ricord à ne pas conclure, el ces trois raisons, les voici : 1° C’est, d'abord, que Ricord était un adepte fervent de cette grande et irréfutable idée médi- cale que les maladies peuvent subir des modifica- tions profondes du terrain sur lequel elles sont appelées à évoluer : « Chacun, répétait-il souvent, fait ses maladies suivant sa nature, son individua- lité personnelle. Voyez done, pour ne citer qu'un exemple entre cent, la fièvre typhoïde qui accable les uns des symptômes les plus graves et qui laisse les autres se promener presque à la façon de gens en bonne santé. Eh bien, qui nous dit que le virus syphilitique, lui aussi, n'est pas susceptible d’é- prouver de modifications analogues de la part des constitutions, des tempéraments, des prédisposi- 308 P' A. FOURNIER. — LE DUALISME EN SYPHILIOGRAPHIÉ ———_————————————_—_—————_—_—_—_—_—_—_—_—_—_———. . —————————————— —————— — —"—"— " — "—" — ——_—…—"—”…"”—"—"—"—————— tions naturelles ou acquises, des conditions mys- térieuses qui créent ou non l'état de réceptivilé chez l'être humain, etc ..? » %œæ C'est, en second lieu, qu'il eùt été peut-être prématuré de conclure en l'espèce à l’époque dont nous parlons. Nous ne le savons que trop par expérience, toutes les causes, en médecine, les mauvaises comme les bonnes, trouvent des observations à leur appui, parce que, s’il est de bonnes observa- tions, il en est également de mauvaises. Le temps seul fait justice de celles-ci. Or, vers 1856, les observations défavorables au dualisme ne faisaient pas défaut. Les médecins même de l'entourage, de l’école de Ricord en publiaient. À n’en citer qu’un exemple, Melchior Robert, élève du Midi, et syphi- liographe estimé de ce temps là, relatait une série de faits tendant à établir que « la propriété infec- tante n’est pas interdite au virus du chancre sim- ple », que « le chancre simple peut dériver d’un chancre induré et engendrer à son tour un chancre induré », que « le chancre induré et le chancre simple sont des manifestations pathologiques d'un même principe, dont les effets variés tiennent à des conditions étrangères au virus », et qu’au total « il n’y à qu'un seul virus chancreux ». D'autre part, c'était l'époque où un autre élève de l’École du Midi, le D' Clerc, venait de formuler sa théorie, un instant célèbre, du chancroïde. Pour lui : L'ilexistait deux variétés du chancre syphili- tique, à savoir le chancre induré et le chancre simple; — et 2° le chancre simple, bien que ne se transmeltant qu’au titre de chancre simple, c'est-à- dire ne déterminant par contagion qu’un chancre identique à lui-même, n’en était pas moins un dé- rivé du chancre syphilitique, à savoir le résultat de l’inoculation d’un chancre syphilitique à un su- jet en puissance de syphilis. IL y avait donc, on le voit, pour Ricord, motif des plus légitimes à hésitation devant toutes ces doctrines émanées d'hommes du métier, compé- tents et justement estimés. 3° Une troisième raison, enfin — et celle-ci que vous allez à coup sûr juger très extraordinaire — une troisième raison, dis-je, servait en quelque sorte de pierre d’achoppement à toute conclusion ferme en faveur du dualisme. Cette raison, c'était ce qu'on appelait gravement à cette époque (souvenez-vous toujours que les choses se passent il y a près de quarante ans) la «question du chancre céphalique ». Le chancre céphalique, ce fut là un des derniers arguments que les unicisies opposèrent triomphalement, mais pour un temps d’ailleurs assez court, à leurs adversaires du dualisme. Qu'était-ce donc que cette question du chan- cre céphalique ? : On n’avait jamais observé sur les téguments du crâne, sur les téguments et les muqueuses de la face, c’est-à-dire sur la région céphalique, qu'une seule espèce de chancre, à savoir l'espèce infec- tieuse, le chancre induré. Cela, Ricord en con- venait : « En vingt-cinq ans de pratique, disait-il, il ne m'a pas été donné de rencontrer un seul cas bien authentique de chancre mou développé sur la face ou le cràne.. C’est par centaines que j'ai vu des chancres céphaliques ; eh bien, tous ces chan- cres appartenaient toujours et comme fatalement à une seule et même espèce, à l'espèce indurée. Ils s’'accompagnaient tous des symptômes propres à la vérole.…, etc.» Cullerier, Puche, Diday, Rollet, Rodet témoignaient tous dans le même sens. Une longue enquête que, sur l'invitation de M. Ricord, j'instituai et publiai sur ce sujet, n’aboutit qu'à des résultats de même ordre. Si bien que, pour les médecins qui, comme Ri- cord, ne croyaient encore à ce moment qu'à la contagion du chancre par le chancre (à l'exclusion de la contagion par les accidents secondaires), cette qualité du chancre céphalique d'être toujours un chancre infectant était un phénomène absolument inexplicable. Il n'était pas à admettre que les sujets qui s’ex- posaient à la contagion par la voie céphalique n’eus- sent jamais rencontré sur leur chemin que des chancres syphilitiques. Forcément ils avaient dû s'exposer au contact de chancres simples. Pour- En deux mots, le voici : quoi donc, dans ce dernier cas, avaient-ils con-. tracté cependant des chancres syphilitiques ? Serait-ce donc qu'une influence régionale pour- rait transformer le chancre simple en chancere induré ? N'y aurait-il pas là une « modification de la graine par le lerrain » ? Sans qu'il me soit besoin d'insister davantage, vous concevez quel coup droit cet argument du chancere céphalique portait au dualisme. Que deve- nait la théorie dualiste, s’il était vrai, comme tout semblait l'indiquer alors, que la contagion d’un chancre simple pût déterminer un chancre syphi- litique sur les régions de la face et du crâne ? Ainsi done, pour les trois raisons que je viens de dire; et sans doute aussi en raison de sa qualité de chef d'École qui ne lui permettait pas de con- clure prématurément et d’entrainer à sa suite dans une voie fausse toute une génération de médecins, Ricord ne voulut pas trancher la question du dua- lisme. Avec une prudence qui nous semble exagérée aujourd’hui, mais qui peut-être n’était que légi- time, il laissa le problème en suspens et préféra «attendre ».1l perdit de la sorte l'occasion d'ajouter un titre de gloire à ceux qu'il avait acquis déjà. Il avait, disons-le bien, préparé, élaboré le dualisme. P' A. FOURNIER. — LE DUALISME EN SYPHILIOGRAPHIE Mais il laissa à un autre l'honneur de compléter l'œuvre, de fournir la démonstration décisive, péremploire, de la doctrine nouvelle. Quel fut cet autre ? Un de ses élèves, Léon Bassereau. II Ici, vous me permettrez d'ouvrir une parenthèse pour vous tracer à grands traits la figure trop peu connue, même parmi nous, d'un médecin, d’un savant, d’un homme de bien, qui est une des gloires de la syphiliographie française. Bassereau est un médecin français, qui naquit à Anduze (Gard) en 1810 et mourut à Paris en 1887. Après avoir fait de bonnes éludes littéraires, Bassereau, que sa famille destinail au notarialt, s'inscrivit à l'École de Droit. Mais bientôt il déserta le droit pour la médecine, verslaquelleil se sentait attiré par un goût particulier. Laborieux, il con- quit rapidement le titre d’interne en 1835, et obtint le doctorat en 1840, avec une thèse inté- ressante sur les névralgies intercostales. Il s'essaya alors aux luttes du concours pour les hôpitaux ; mais, trop prématurément, sans aucun doute : il y renonça. Il n'avait pas d’ailleurs les aptitudes né- cessaires au concours, celle institution tout à la fois excellente et détestable, dont, avec une égale justice, on peut dire tout le bien et tout le mal possible. Esprit original, il était voué de nature aux recherches personnelles, et c’est dans cette voie qu'il dirigea son activité scientifique. Ce fut sur les affections vénériennes que se con- centrèrent ses labeurs. Il en avait inauguré l'étude pendant son internat sous deux grands maitres, Biett et Ricord. Il la poursuivit plus tard, tout à la fois en clinicien et en érudit. D'une part, il devint l'hôte assidu des cliniques spéciales ; d'autre part, en vue d’élucider les origines mystérieuses de la syphilis,il se mit à compulser les vieux textes, non pas seulement ceux des premiers historiens du mal français, mais, par Comparaison, ceux des siècles antérieurs, voire de l'antiquité grecque et latine. Il eut la patience de traduire, la plume en main, tous les écrits des médecins contemporains de la grande épidémie du xv'siècle; cela, je puis l’affirmer et pour cause, car j'ai eu entre les mains le manus- crit de cette traduction qu'avec sa bienveillance ha- bituelle il avait bien voulu mettre à ma disposition. De ce double labeur est sorti le livre mémorable qui à fait la fortune scientifique de Bassereau, à savoir son « Zraité des affections de la peau symp- tomatiques de la syphilis » qui parut en 1852. Non seulement cet ouvrage est un exposé merveilleux pour l'époque des déterminations cutanées de la syphilis, mais, en outre, il contenait, dans l’un de ses chapitres, comme je vous le dirai dans un ins- tant, le manifeste d'une doctrine nouvelle, élayée RRVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892 309 sur une méthode d'investigation nouvelle, la mé- thode des Confrontations. Ainsi, c'était dans un simple chapitre d’un traité général que ce savant, fondateur de toute une doc- trine, en reléguait l'exposé, à la facon d’un appen- dice secondaire, au lieu de chercher à la mettre en vedette, de lui consacrer une monographie spé- ciale, au lieu de tirer un légitime honneur du résultat de ses travaux, de ce qu'il pouvait à juste litre appeler sa découverte! Et, comme, à l'instar de tant d’autres, je m'éton- nais de cela un jour devant lui : «Que voulez-vous, me répondit-il, ce que j'avais fait était bon ou mau- vais; si C'était bon, il fallait bien que, tôt ou tard, on allât le dénicher là oùje l'avais mis: et. si c'était mauvais, ce n'était pas la peine de lui faire plus d'honneur. » Tout l’homme est dans cette ré- ponse. Avec une modestie semblable, il n’est pas élon- nant que Bassereau n’ail pas eu d'histoire. Sa vie, peut-on dire, s’est simplement partagée entre sa famille, ses livres el ses malades. Il vécut toujours isolé. Il ne fut rien parce qu'il voulut ne rien être. Je ne sais si l’Académie lui à manqué; mais j'af- firmerai avec lout le monde qu'il a manqué à l’A- cadémie. IV Bassereau, vous disais-je, était à la fois un savant et un clinicien. Rien d'étonnant, done, à ce qu’il ait tenté un double effort pour établir la démons- tration du dualisme sur deux bases absolument distinctes, à savoir : 1° de par des preuves histo- riques; 2° de par des preuves d'ordre clinique. Sa démonstralion historique du dualisme {ou du moins la thèse qu'il fournissait comme telle) était aussi simple que séduisante au premier abord. Elle se résumail en ceci : Le chancre simple a existé de loute antiquité ; le chancre syphilitique n’a commencé à apparaitre que vers la fin du xv° siècle. Donc, ce sont là, de par le témoignage de l’histoire, deux affections in- dépendantes, et dont l'indépendance chronologique alteste bien formellement la différence de nature. Trois points, disait-il en substance, ressortent de la lecture des vieux auteurs : 1° L'un, c’est que longtemps avant l’appari- lion de la syphilis en Europe, on connaissait l'existence d'wlcères des organes génitaux, ulcères contagieux, dérivant du commerce vénérien, ul- cères parfois accompagnés de bubons et de bubons suppurés de laine, ulcères même signalés déjà par Celse comme susceptibles de prendre la forme gan- gréneuse où serpigineuse, ulcères enfin restant à l'état d’affeclions locales sans Jamais déterminer à leur suite d'infection générale. — Nul doute, he 310 P' A. FOURNIER. — LE DUALISME EN SYPHILIOGRAPHIE pour Bassereau, que ces «ulcères antiques », comme il les appelle, ne répondent à notre chancre simple actuel. 20 En second lieu, il est non moins certain que, vers les dernières années du xv° siècle, apparut une maladie nouvelle qui, elle aussi, commençait par des ulcères des organes génitaux, mais qui bientôt se traduisail en plus par des symptômes multiples, des éruptions de tout ordre et de tout siège, des douleurs, des lésions de la bouche, de la gorge, etc. Au-dessus de toute contestation possi- ble, cette maladie, c’est la syphilis. 3° Enfin, — et c’est sur ce troisième point qu’insis- tait le plus Bassereau, — il est tout aussi démontré « que les médecins célèbres, qui furent témoins de l'apparition de la maladie nouvelle et qui connais- saient les affections contagieuses des organes géni- taux antérieures à 1495 et décrites parles médecins anciens, ne cherchèrent à établir aucun rapport entre ces deux ordres d’ulcères génitaux, n'ayant ni les mêmes caractères objectifs, ni la même in- fluence sur l’économie, puisque les uns restaient des affections locales avec ou sans bubons suppu- rés, tandis que les ulcères primitifs de la nouvelle maladie, ne déterminant presque jamais d’abcès inguinaux, élaient constamment suivis à courte échéance d’éruptions cutanées graves et caracté- ristiques.. » En effet, tous les médecins contem- porains de l'invasion de la syphilis décrivirent cette maladie comme une maladie spéciale qu'ils appelaient Q morbus novus, morbus incognitus et nunquam & doctoribus visus, morbus monstruosus, morbus yallicus, ete. » Et ce fut plus tard seule- ment, ce fut au xvi° siècle, que la maladie nou- velle commença à être confondue avec les affec- tions vénériennes anciennes. Mais cette confusion «ne fut que l’œuvre de médecins qui, n'ayant pas assisté à la naissance du mal français, ne pouvaient faire une comparaison entre la pathologie véné- rienne antérieure ou postérieure aux dernières an- nées du siècle précédent. » Donc, concluait Bassereau, l’histoire démontre l'indépendance absolue du chancre simple et du chancre syphilitique, l’un antérieur, bien antérieur au xv° siècle, l’autre n'ayant apparu que vers les dernières années de ce siècle. Assurément les preuves d'ordre historique sont intéressantes et dignes de lout respect. Mais elles n'inspirent jamais qu'une demi-confiance, et l’on se tient sur la défensive vis-à-vis d'elles, parce que l'expérience a appris qu'elles sont parfois sujettes à caution. Il est si difficile, en effet, d'interpréter un vieux texte incomplet, incertain, obscur ; il est si facile de lui faire dire plus qu'il ne dit, par exem- ple. De cela nous avons, en l'espèce même, la preuve la plus démonstralive, voire la plus piquante. Car, auteur d’une théorie précisément contraire à celle de Bassereau, le D Clere, lui aussi, à trouvé ou cru trouver, dans l'hisloire, des témoignages à l'appui de ses idées. Il avait besoin pour sa doctrine qu’à l'inverse de ce que disait Bassereau la syphilisait précédé le chancre simple. Ilinvoqua de vieux textes pour le prouver. Si bien qu'un moment on assisla au spectacle curieux de deux théories opposées faisant l’une et l'autre appel à l'histoire pour justifier leurs prétentions contradictoires. \ Aussi bien, s’il s’en fût tenu à ce seul ordre de témoignages, Bassereau n'eût-il guère avancé la fortune du dualisme. Mais le clinicien fut plus heureux que l’érudil, comme vous allez le voir. Que fallait-il, logiquement, pour démontrer l’in- dépendance des deux chancres? Il fallait établir que le chancre simple naît par contagion du chan- cre simple exclusivement et reproduit exclusi- vement, par contagion, le chancre simple. Il fallait de même établir que le chancre syphilitique dérive exclusivement par contagion du chancre syphili- tique (ou de quelque autre manifestation syphili- tique, peu importe) et reproduit exclusivement le chancre syphilitique. Il fallait établir en un mot qu'un croisement d'espèce est impossible du chan- cre syphililique au chancre simple, etréciproque- ment. Cela établi, le dualisme était fondé. Eh bien, c’est là ce qu'avec un grand sens cli- nique, ce qu'avec une rare perspicacité Bassereau eut le mérite de comprendre le premier. C’est dans cetle voie qu'il dirigea ses recherches. Il se mit à étudier ce qu'il appela la « filiation », la généa- logie de l'un et l’autre chancre, et à l’étudier par la méthode féconde qui, depuis lui, a rendu {ant et tant de services à la syphiliographie, par la méthode dite des Confrontations; c’est-à-dire qu'il s'imposa la (âche suivante : Etant donné un sujet affecté d'un chancre, bien déterminer, d’abord, la nature de ce chancre; — examiner ensuite le sujet d'où provenail la conta- gion de ce chancre et noter avec non moins de soin sur ce second sujet la qualité de la lésion trou- vée sur lui et ayant servi d'origine à la maladie du premier; — puis, comparer l'accident transmis avec l'accident originel. Or, écoutons Bassereau résumer lui-même les résultats de ses observalions faites ainsi : «Si l’on confronte les sujets qui ont été atteints de chancres suivis d'accidents constitutionnels avec les sujets qui leur ont transmis la contagion ou avec ceux auxquels ils l’ont transmise, on trouve que tous ces sujets sans exception ont été atteints de chancres et ensuite d'accidents consli- P' A. FOURNIER. — LE DUALISME EN SYPHILIOGRAPHIE 11 tutionnels. Jamais, chez eux, le chancre ne s'est borné à une action purement locale. « D'autre part, si l’on confronte les sujets atteints de chancres qui n’ont déterminé aucun symptôme de syphilis générale avec les sujets qui les ont infectés, ou avec ceux qu'ils ont infectés, on voit ceux-ci sans exception être également atteints de chancres qui bornent leur aclion au point primiti- vement contaminé. Ainsi, jamais un chancre suivi d’accidents constitutionnels ne donne naissance à un chancre purement local; — ni un chancre local ne peut communiquer par contagion un chancre qui sera suivi des symptômes universels de la syphilis ». C'est-à-dire, d’une façon plus abrégée : Le chancre simple dérive du chancre simple et ne dérive jamais du chancre syphilitique. Le chancre syphilitique dérive du chanere syphi- litique et ne dérive jamais du chancre simple. Grâce à ce critérium par excellence de la spéci- ficité morbide, la transmissibilité en l'espèce, le chancre simple et le chancre syphilitique deve- naient ainsi, sans contestalion possible, deux es- pèces morbides nettement tranchées, et le dua- lisme était fondé. EC de fait, à dater de ce moment, la doctrine dualiste fut démontrée pour tous les esprits im- partiaux. Et c’est pourquoi l'histoire dira. je crois, ceci : Deux hommes se partagent l'honneur d’avoir cons- titué la doctrine dualiste : Ricord et Bassereau. Ricord à concu, préparé, presque créé le dua- lisme par la méthode clinique, par la différencia- tion clinique des deux chancres, qui est son œuvre propre et une de ses grandes œuvres; Bassereau, continuant les travaux de son maitre, a établi par la méthode des confrontations la dif- férenciation des deux chancres au point de vue de leur transmissibilité, et démontré de la sorte leur indépendance nosologique ; Et, de ces deux ordres de preuves réunis. asso- ciés, est sortie, triomphante, la doctrine de la dua- lité chancreuse, ou dualisme. J'estime que discuter davantage sur la part qu'il convient d'attribuer à Ricord et à Bassereau dans l’œuvre collective qu'ils ont réalisée serait un ingrat el mesquin labeur. J'ai entendu Basse- reau juger ainsi la question : « Mon maitre Ricord, disait-il, est le père du dualisme, et moi je n’en suis que le parrain. » Si cette preuve dernière de modestie, de désintéressement scientifique n’a pas lieu de nous surprendre de l’homme qu'était Bas- sereau, donnant ainsi un touchant exemple de l’ef- facement volontaire de l’élève devant le maitre. je crois, quant à moi, que la postérité reconnaissante rectifiera ce jugement et qu'elle accordera à ce savant si sympathique plus et beaucoup plus que la petite part d'honneur qu'il consentait à s’attri- buer lui-même. MI Si, dès l’époque dont nous venons de parler, le triomphe définitif du dualisme était assuré, il s'en fallait toutefois, et de beaucoup, que cette doctrine eût conquis la faveur publique. Elle ne comptait encore qu'une petite phalange d’adeptes. Elle ne réussit guère à faire sa trouée dans le publie mé- dical qu'au cours des dix ou quinze années sui- vantes, et, cela, grâce à toute une série de mé- moires, d'articles de journaux, de polémiques qui aboutirent à la vulgariser. Je n'ai pas à vous parler de cette partie de son histoire. Cependant, ce se- rait un grave oubli — dont je ne veux pas être coupable — que de ne pas signaler ici, à la place qui leur est due, les noms de deux médecins émi- nents qui, par leurs ouvrages, par leur enseigne- ment, par les polémiques qu'ils ont ou provoquées ou soutenues, par les travaux qu'ils ont inspirés, ont le plus utilement servi la cause du dualisme, à savoir : deux chefs de l’École lyonnaise, MM. Di- day et Rollet. Done, la doctrine dualiste avait encore à faire justice pour s'affirmer, pour forcer les convic- lions, de certaines objections qu'on lui opposait et que d’habiles adversaires exploitaient contre elle. 1° C’est ainsi, tout d’abord, qu'on essayait de la battre en brèche avec la fameuse question du chancre céphalique, qui allait enfin recevoir sa solution. Cette question préoccupait à ce point les esprits que plusieurs de nos confrères (Rollet, Bassereau. Hübbenet, Puche, Melchior Robert, etc.) se crurent autorisés (je ne juge pas, je raconte) à porter la lancette sur l'homme pour chercher à lui inoculer le chancre simple sur les téguments de la région céphalique. On se mit à inoculer le chancre simple sur la région mastoïdienne, au menton, sur les lèvres, ete... La thèse de Nadau des Islets, qui ne contenait pas moins de quatorze expériences de cel ordre, devint presque un événement à cette époque. Que résulta-t-il de ces hardies expériences ? Deux notions formelles et précises. C'est, d'abord, que le chanere simple est susceptible de se laisser inoculer sur la face, c’est qu'il «y prend », comme on dit en langage technique; — mais c’est ensuite qu'il «y prend mal», qu'il y végèle misérablement pour se limiter et s'éteindre à brève échéance. Ne relevons que le premier de ces résultats, qui seul iei nous intéresse. Vous en avez deviné déjà la portée considérable. Il faisait complète justice, en effet, de l’hérésie singulière d'après laquelle le 312 chancre simple, transporté sur les téguments de la face et du cràne, se fransformait là en chancere sy- philitique sous la seule et inexplicable influence d’une « réaction de terrain ». Du coup, la grosse objection du chancre céphalique opposée à la doc- trine dualiste avait vécu. 2 Mais. d’autres objections s’élevaient encore contre cette doctrine. C'est ainsi qu'on était loin d'accepter les résultats énoncés par Bassereau re- lativement à la transmission de chacun des chancres en son espèce. Des observations contradictoires avaient paru en certain nombre. Or, comme l'esprit médical ne pouvait s’y tromper, comme chacun sentait bien que la bataille décisive devait se livrer sur cette question du mode suivant lequel se transmettaien les deux chancres, c’est en ce sens que le problèmet fut poursuivi, et alors commença ce qu'on pourrait appeler l'ère des confrontations. De tous côtés on s’occupa de comparer les accidents de contagion chancreuse avec ceux qui leur avaient servi d'ori- gine. Ricord, Diday, Clerc, Cullerier, Puche, Rodet, Rollet, Musset, Dron et tant d'autres se lancèrent sur cette piste. On me permettra de rappeler qu'a- vec le concours de mon ami le D'Caby j'apportai, à cette époque, mon contingent de recherches per- sonnelles sur la question. Or, quel fut le résultat de ce contrôle multiple imposé aux lois de Bassereau ? D'un mot je puis le spécifier en disant que c'en fut la consécration éclatante. Ainsi, à n’en citer que deux exemples, j'eus, pour ma seule part, l'heureuse chance de pouvoir ren- contrer des faits comme ceux-ci: Quatre hommes s’exposent à la contagion avec la même femme; tous les quatre contractent des chancres simples. Six hommes s’exposent à la contagion avec une même femme; — ious les six contractent des chancres indurés. D'autre part, M. Rollet, profitant de la réhabili- tation d’une vérité longtemps méconnue, à savoir la contagiosité des accidents secondaires, établis- sait un système plus compréhensif de confronta- tions s’exerçant non plus seulement de chancre à chancre, mais de maladie à maladie et aboutissait à cette conclusion : Que toujours de la syphilis dérive la syphilis, quelle que soit la forme d'accidents (chancre ou manifestations secondaires) d’où provienne la con- tagion; — que toujours du chancre simple dérive le chancre simple. La cause du dualisme semblait bien, cette fois, définilivement victorieuse. Et cependant un point spécial retenait encore et devait retenir encore longtemps les esprits Pr A. FOURNIER. — LE DUALISME EN SYPHILIOGRAPHIE impartiaux, voire les mieux disposés en faveur de la doctrine nouvelle. Voici quel était ce point : On avait vu plusieurs fois (des observations mérilant toute confiance en témoignaient) des chancres syphilitiques dériver d'ulcérations à base molle, développées sur des sujets syphilitiques, ul- cérations qu'on avait considérées comme des chancres simples. EL cette constatation avait con- duit à poser la question suivante : Est-ce que le chancre simple qui vient à se dé- velopper sur un sujet syphilitique reprend, par ce fait, sa qualité de chancre syphilitique, puisqu'il est susceptible de transmettre un chancre syphilitique? Eh bien, cette dernière exception aux lois de Bassereau finit, elle aussi, par recevoir son expli- cation naturelle. = On crut d’abord en trouver la raison dans une sorle de suraddition de contages, et, pour un temps. la Chéorie du chancre mixte, ingénieuse- ment élaborée par Rollet, fut accueillie avec une pleine faveur. On disait ceci : « Il n'est rien d'étonnant à ce que le hasard, qui peut tout, réunisse les deux contages de la syphilis et du chancre simple à un mème moment, sur un même individu et sur une même région. L’authenticité du fait a d’ailleurs été démontrée cliniquement et expérimentalement. D'autre part, il est logique que la lésion mixte ainsi constituée, qui contient le virus syphilitique et le virus du chancre simple, puisse transmetire, suivant le hasard des conta- gions et suivant des conditions variables ou igno- rées, soit les deux virus à la fois, soit tel ou tel de ces deux virus isolément. Donc, il peut se faire que, d'une telle lésion, ayant toutes les appa- rences du chancre simple, dérive une contamina- tion syphilitique. » Cette interprétation des faits [pouvait au besoin se défendre. Il n’était pas à nier que tout cela füt possible. Il n’est d'ailleurs pas à le nier davantage aujourd'hui, bien qu'il s’agisse là, comme on le sait, de rarelés pathologiques. Mais une explication autrement satisfaisante put être donnée de ces faits le jour où l’on sut enfin reconnaitreune lésion jusqu'alors méconnue comme nature : la syphilide ulcéreuse chancriforme. Ce serait, certes, excéder les limites demon sujet que de vous décrire ici ce curieux type morbide. Laissez-moi cependant vous rappeler en quelques mots ce en quoi il consiste, pour l'intelligence de ce qui va suivre. La syphilis, dans son élape secondaire ou même tertiaire, détermine quelquefois des manifesta- tions, dont la caractéristique est de se localiser sur les organes génitaux, à la façon d'accidents de con- lamination vénérienne, et dont la différenciation diagnostique est éminemment sujette à erreur P' A. FOURNIER. — LE DUALISME EN SYPHILIOGRAPHIE 313 en raison mème de celle localisation génitale. Ces manifestations se présentent sous deux formes : tantôt ce sont des ulcérations, des enta- mures du derme cutané ou muqueux, doublées d’une base dure; et, dans cette forme, elles rap- pellent d'aspect le chancre syphilitique; elles le si- mulent même parfois d’une facon tout à fait sur- prenante. C'est là ce que, de vieille date déjà, j'ai déerit sous le nom de pseudo-chancre de réci- dive des sujets syphilitiques. Ce lype, qui a fait croire quelquefois à des réinfections syphiliti- ques, à des véroles doublées, n’est pas en cause pour l'instant; je ne fais que le signaler au pas- sage. Tantôt — et c’est là le point qui nous intéresse — plus étendues de surface et molles de base, creuses, à bords entaillés, voire découpés à pic, à fond jaunâtre et chancriforme, ces ulcérations prennent la physionomie du chancre simple, d'au- tant qu'assez souvent elles sont plus ou moins multiples. Et elles revêtent, de par l’ensemble de leurs caractères objectifs, l’aspect du chancre simple, à ce point qu'en bon nombre de cas il est impossible de les différencier du chancre simple autrement que par les données expérimentales de l’auto-inoculation. Eh bien, il n’est pas douteux aujourd'hui que cette syphilide ulcéreuse chancriforme, confondue jadis avec le chancere simple, n’ait été l’origine des exceplions opposées aux lois de Bassereau. On avait vu, disait-on, le chancre simple transmettre la syphilis, mais alors seulement qu'il était déve- loppé sur des sujets syphilitiques. Oui, sans doute, on avait vu cela, parce qu’on avail pris pour des chancres simples des lésions de syphilide ulcé- reuse chancriforme, lesquelles, en leur qualité de lésions syphilitiques, ne pouvaient que transmettre la syphilis. Et on avait pris ces syphilides ulcé- reuses pour des chancres simples parce qu’on ne connaissait pas encore la syphilide ulcéreuse chan- criforme, parce qu’on ne savait pas la distinguer du chancre simple. Ainsi tombait la dernière objection qui tenait en échec la doctrine de Bassereau. Au lotal, done, la doctrine dualisle, après avoir réfuté tous les arguments qu'on lui avait opposés, après avoir produit Loutes les preuves qu'on exi- geait d'elle, est restée difinitivement maîtresse du terrain. On peut dire que, parmi nous, dans le public parisien et même français, elle est agréée de tous. J'en atteste tous vos livres classiques con- temporains ; — j'en atteste tous mes collègues de cet hôpital et des hôpitaux spéciaux ; — j'enatteste mes confrères de la ville. Quel médecin aujourd'hui oserait prescrire le mercure contre le chancre simple ? Quel médecin pronostiquerait la vérole à Ja suite du chancre simple? Le dualisme a donc été une véritable révolution dans le domaine de la vénéréologie. Et n’allez pas vous méprendre sur l'importance scientifique et pratique de ce grand événement. Scientifiquement, d’abord, le dualisme a été la substitution d’une vérité à une erreur qui s’'abri- tait derrière la consécration de plus de trois siècles et demi. Pratiquement, et au point de vue des malades, le dualisme a abouti à ceci : Épargner le traitement mercuriel à toute une nombreuse catégorie de patients qui n’en avaient nul besoin ; Épargner au même nombre de malades les affres, la terreur de la vérole. Est-il, je vous le demande, beaucoup de décou- vertes scientifiques qui aient réalisé d'aussi bien- faisants résultats ? Terminerai-je en vous disant que le dualisme a fait partout sa trouée et s'est accrédité en tous pays comme dans le nôtre? Malheureusement non. Certes, dans tous les milieux scientifiques de l’un et l’autre continent il compte de très nombreux partisans ; certes, il constitue partout la doctrine dominante ; mais la vérité m'oblige à convenir qu'il lui reste encore un certain nombre d’adversaires. A ne ciler qu'un exemple, n'avons-nous pas vu récemment un éminent collègue d'Allemagne pro- fesser que «le chancre mou, s’il reste générale- ment une maladie locale, n'en aboutit pas moins assez souvent à la syphilis constitutionnelle ; — que le chancre mou se transforme parfois en pa- pule syphilitique; — que, dans certaines condi- tions, le chancre syphilitique produit par inocu- lation des chancres inoculables en série, corres- pondant à des chancres mous, etc. »; — toutes erreurs qui, cent fois réfutées, ne sont même plus agitées parmi nous? Oui, quelques médecins étrangers en sont encore là ! Eh bien, qu'est-ce que cela prouve? C'est que le progrès a marché plus vite parmi nous que sous d'autres cieux ; c’est que les pays où l’on discute encore sur de telles questions n’ont pas eu le bon. heur qu’a eu le nôtre de donner le jour à deux hommes d’élite, tels que Ricord et Bassereau, qui ont su discerner une grande vérité scientifique et qui, de plus, ont eu le mérite de l’enseigner, de la prêcher, de lutter pour elle et de l’imposer à leurs concitoyens. Honneur donc et trois fois honneur à ces deux hommes à qui nous devons cette grande conquête de l’art ! D’ Alfred Fournier, Professeur de clinique des maladies syphilitiques et cutantes à l'hôpital Saint-Louis, 314 A. ÉTARD. — ÉTUDE EXPÉRIMENTALE DES SOLUTIONS SATURÉES ÉTUDE EXPÉRIMENTALE DES SOLUTIONS SATURÉES Les corps solides, mis en présence d'un liquide, ont la propriété de perdre leur forme, de dispa- raître en quelque sorte dans le liquide pour faire un tout parfaitement homogène,qui estune so/ution. Tel est le cas du sucre dans l’eau. Tout d’abord on n’a prêté aucune attention à ce phénomène, qui paraît très simple, très monotone, et ne donnelieu à aucune manifestation visible pouvant servir de point d'appui à une théorie. Tous les corps chan- sans cesser d’être étendues. Sur la gamme arbi- traire des solutions qu’on peut ainsi préparer il a été fait d'importants travaux au point de vue de la tension de vapeur (Raoult), du point de congé- lation (Raoult) et de la pression osmotique qu’elles peuvent développer dans des appareils convena- bles (Pfeffer, Van'tHoff). Les lecteurs de la Revue connaissant déjà les travaux dont ont été l'objet depuis quelques années, ces solutions étendues !. Fig. 1. — Comparaison des deux systèmes de représentation des solutions. gent d'état, se dissolvent ostensiblement de la même facon. Mais la science actuelle cherche à saisir les plus minutieux détails de ces actions très banales qui, par cela même, traduisent une manière d’être générale de la matière. L'observa- tion visuelle ne révélant aucune particularité pen- dant l'acte de la dissolution d'innombrables couples solide-liquide, on est amené à faire des mesures de solubilité aussi exactes que possible. Quand dans une grande masse d’eau on ne met qu'une quantité de sel très inférieure à la quantité que le liquide pouvait dissoudre, la solution est dite étendue; ces solutions peuvent ne contenir que 05,001 de substance par litre de dissolvant ; elles peuvent contenir, selon les cas, 10 grammes, 100 grammes, 500 grammes. etc. de sel par litre, Nous éludierons aujourd’hui d’une facon exclusive les solutions saturées. I Pour chaque couple solide-liquide et pour une température déterminée, on arrive toujours à trouver un poids de solide — petit ou grand — qu'on ne saurait dépasser; la liqueur, contenant aussi bien 1 gramme que 500 grammes par litre,est alors dite saturée. Toute quantité supplémentaire de 1 Voyez à ce sujet A. Etard : La constitution des solutions étendues et la pression osmotique, Revue générale des Sciences du 15 avril 1890, t. I. p. 193; — et G. Cnarpx : Les théories régnantes sur la constitution des solutions sa- lines, Revue générale des Sciences du 15 octobre 1894, t. II, p. 642, Le | 42 4 4 + A2 - RÉ RE. 0 Neo 2 Le1 L=2 L=2 L=2 e L=2 o o 35 de sbl contenues de(s 100 p.de Solution ” o 6 A. ÉTARD. — ÉTUDE EXPÉRIMENTALE DES SOLUTIONS SATURÉES 315 matière refusera de se dissoudre et restera inerle au fond du vase. Cette quantité d'un sel, par exemple, qui, pour une température donnée et un dissolvant donné, amène la saturation, est une des valeurs les mieux définies. que comportent les solutions. Ce n’est pas, comme pour la solution étendue, un mélange qu'on fait arbitrairement : c'est un équilibre stable qui s'établit de lui-même. Depuis Gay-Lussac, on détermine avec soin les coefficients de saturation des sels pour les expri- mer graphiquement, puis de la comparaison des courbes de solubilité ainsi obtenues on s'efforce de tirer des conclusions générales sur la nature intime du phénomène, sur l’état des sels dans les solu- tions, ete... Les courbes de solubilité publiées dans leslivres & . D & et les mémoires expriment le rapport L du poids T p de sel au poids x du dissolvant : elles donnent la quantité de sel dissoute par cent parties d’eau. Les représentations graphiques ont dans ce cas l'inconvénient de se rapporter à une quantité arbi- irairement choisie, — cent parties d'eau —, et de donner lieu à des branches courbes infinies, par conséquent impossibles à comparer graphique- ment. Dès le début des recherches que j'ai entreprises en 1883 sur la solubilité, je me suis préoccupé de trouver une représentation plus simple, et je pense y être arrivé en portant en abscisses les tempéra- tures,et en ordonnées la quantité p de sel qui existe dans l’unité de poids de la solution saturée p +7. L'expérience montre que ce choix de variables amène une grande simplification des courbes : la droite de solubililé peut être contenue dans le cadre du graphique. La figure (héorique ci-jointe (fig. 1) permet de voir comment, alors qu'on ne déterminait les solubilités que dans un intervalle très restreint de température, une portion AA, de la courbe limite à l'infini pouvait paraitre droite. Les expériences poussées jusqu'en A, révèlent déjà une courbure, tandis que dans le système pP DEPT restent en ligne droite et sont contenus tout en- tiers dans le dessin. En même temps qu’une simplification rendant les lignes de solubilité comparables, il était indis- pensable d'obtenir pour un grand nombre de cou- ples sel-dissolvant une série de coefficients de s0- les points B, B,, B, et le point limite B; Fig. 2.— Tube à deux branches pour l'étude des solutions saturées à température élevée. lubilité dans des intervalles de température aussi grands que possible. Dès le mois d'avril 4884, j'ai publié les résullats généraux d’un travail entre- pris sur les solubilités à températures élevées et portant sur trente sels halogènes !. Cette même année Tilden et Shenstone firent des expériences celles-ci se trouvent transformées en des oies | analogues pour quelques sels et montrèrent que 0® __ Axe des points de fusion — 100? 2009 300%. 1/02 ail RE REP || nr 0 N& À ® Bat je B L 4 S DA k RE ÿ Le {4% | | = + + L | 1 JE 34 a | | = L 1 L | L Fig. 3.— Solubilité limite au point de fusion de quelques azotates et chlorates. de solubilité. De plus, comme on représente la quantité de sel contenue dans cent parties de solu- tion saturée, à mesure que la quantité de sel croit, celle de l’eau diminue; à la limite il n'ya plus que du sel insoluble ou fondu, de sorte que toute la solubilité de l’acide benzoïque peut être infinie, c’est-à-dire atteindre le point de fusion ?. 1 A. Erarp, Comptes rendus, t. XOVII, p. 12763 t. XCVINH, p. 1432. 2 2 TiznEN et SHENSTONE, Philosophical Magazine, 1884. 0 - —20 —10 O° 19 20 30 40 50 60 70 80 90 100 10 20 30 4O 50 69 70 80 90 200? 10 20 30 HO 50 60 70 80 90 300° 10 20 30 40 50 C9 316 Il est commode de faire les solutions à haute température dans une sorle de tube de Faraday étranglé par le milieu (fig 2) et chauffé au bain d'huile. Quand l'équilibre est atteint, on décante de la branche AB, où était le mélange, dansla branche vide ab dont le contenu sera ultérieurement analysé. Ces détails connus, il convient de résumer les faits intéressants qui sont relatifs aux droites de solubilité. Il Un cas très simple parmi ceux que les sels pré- sentent est fourni par la solubilité de l’azotate de baryum dans l'eau. Le mélange de sel et d'eau, pris à partir du point de congélation des mélanges, situé dans ce cas à céro, constilue le point d'origine. À partir de là, la solubilité croit sans interruption proportionnelle- ment à la lempérature : il se produit une droite ME ee Te Are | tt ==, = | me dés S So els| dissous Donner 1 : 77 $oiubilité dek js si A. ÉTARD. — ÉTUDE EXPÉRIMENTALE DES SOLUTIONS SATURÉES nuité avec le point de fusion, qui représente la m0- lécule même, il parait inadmissible que, dans le tra- jet de cette droite, le sel en solution soit disso- cié en tons, comme on le suppose pour les solutions étendues. à Il m'a été possible de signaler un autre cas de solubilité très simple : c’est celui d’une droite parallèle à l'axe des températures ou droite de solubilité constante, qu'on observe particulière- ment bien sur le bichlorure de mercure dissous dans l’acétate d’éthyle (fig. 8). 11 semble douteux que de telles droites se prolongent indéfiniment : il est probable qu'au delà d’un certain point elles changent de direction pour rentrer, par exemple, dans le cas précédent. Ce phénomène d'équilibre solutif stable, qui s’observe sur quelques couples solide-liguide, ne semble pouvoir s'expliquer autre- ment que par un acte de combinaison : en fait, on 1009 2Le eu Fig. 4. — Solution saturée simultanément par rapport à deux sels, KCI + NaCl. de solubilité, Cette droite, par suite de difficultés matérielles, n’a été déterminée que jusqu'à 220°. Mais si on la prolonge, sa direction est telle qu’elle atteindrait l'ordonnée limite 1% de sel à 506°. Or j'ai pu établir, — au moyen d’une détermination spéciale, faite par voie physique et indépendam- ment de la solubilité, — que 506° est le point de fusion de l’azotate barytique. La portion de la ligne de solubilité comprise entre la limite des es- sais à 220° et le point de fusion, n’est donc pas, dans ces conditions, une ligne incertaine, obtenue par simple extrapolalion. Il y a une relation entre la droite de solubilité el le point de fusion, et cette relation subsisle alors même qu'il est physique- ment impossible d'atteindre ce point. On peut ap- peler droite de solubilité limite le dernier segment d'une ligne de solubilité, celui qui se rend au point de fusion ignée (fig. 3.) IL serait désirable que la coutume s'établit de compter les coefficients de solubililé saturée à partir du point de fusion ignée, qui est une valeur physique précise. Si l'on prenait cette origine, la droite de solubilité pourrait être considérée, ainsi que je l’ai proposé, comme le lieu géomé- trique des points de fusion décroissants de mé- langes de sel et d'eau de plus en plus riches en eau. Une dr ite de solubilité mite étant en conti- trouve dans ces circonstances des rapporls moléeu- laires simples entre le solvant et le corps dissous. Les lignes de solubilité ne sont pas toujours aussi simples que celles qui viennent d’être décrites ; elles peuvent présenter des points anguleux ou des raccords courbes plus ou moins étendus.(Fig.3, CIO®K, Az30 Ag.) Lorsqu'il s'agit de sels hydratés incolores, il n'est pas possible, dans l’état actuel de nos connais- sances, de savoir ce qui est contenu dans la dissolu- tion saturée. À compter du point de congélation, une partie du sel serait-elle dissociée en tons, comme bien des savants le pensent pour les solutions étendues ? Ou, en admettant les ins, en solution étendue, la saluration ne marquerait-elle pas une limite au delà de laquelle ils ne se séparent plus? Sans al- ler jusqu’à celle dissociation profonde en tons, qui laisse hésitants ou incrédules bien des esprits, on peut rester sur un terrain expérimental plus ferme, et penser, avec M. Berthelot, que les solutions sont semblables à des combinaisons dissociées en don- nant des sels acides ou des hydrates divers. Dans cet ordre d'idées, il me parait possible d'expliquer le mécanisme de la solubilité à saturation et les perturbations des courbes quila représentent, sans s'écarter des faits d'observation, 2 jai tte sionlie-di ss Cotimumests.… A. ETARD. — ÉTUDE EXPÉRIMENTALE DES SOLUTIONS SATURÉES 317 Je choisirai, commeexemple,ce qui se passe dans le cas des sels de cobalt et de strontium et dans celui des sulfates. Le chlorure de cobalt Co CI?,6 H°0 estrose ; sa solution saturée la plus voisine du point de congélation à — 22°, est rose également. Le plus simple est d'admettre que cette solution rose con- tient uniquement les molécules roses Co Cl, 6H°0, qu'on ya mises. Mais il se peut qu'au sein du dissol- vant il existe plusieurs hydrates plus hydratés que ceux connus dans l’air:leur mélange pourrait donner lieu cependant à une droite de solubililé tout aussi régulière que celle que j'ai observée dans le cas d’un mélange évident : celui qui est saluré en pré- sence d’un excès des sels KCI Æ NaCl! (fig. 4.) De ce fait qu’une ligne de solubilité, calculée arbi- 100 [ I | 90 TE +— - Col dk | 60 E it SA = « — 70 NEIL MER = 60 & LL 42) 2 # el : Æ | 50 | T- CS cé 8 TT D EEE 40 -— Fr dE 2 Ÿ + — + s0 = 3 LES + 20 — + + + ne) 10 Fi | EE Li | ; dl lee ] _2010- O 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 10 20 30 40 50 60 70 EOBERUIN Fig. 5. — Solutions saturées d’hydrates salins de Cobalt. trairementen sel anhydre, est parfaitement régulière, on ne saurait conclure, d'après cet exemple, que le milieu est simple: il peut s'y faire des dissociations continues d’hydrates, apportant ou n'apportant pas de trouble dans la régularité du phénomène. Revenons pour plus de clarté à la solution de Co CPE, 6H? 0 saturée à — 22°. Si la température s’é- lève, le système se déshydrate : il s'enrichit en sel tionnellement à la température. Elle est représen- tée par une droite (fig. 5, rose). Mais il arrive un moment où la chaleur dissocie non seulement le système solutif, mais un certain nombre des molécules CoGl?6H°0 elles-mêmes : il se fait ainsi un hydrate bleu CoCP, H°0, connu dans l'air. Admettons mème que ce soit une solu- tion bleue d'ordre quelconque. À partir de cet ins- lant la solubilité de l’hydrate rose se poursuit selon sa loi propre, mais la malière bleue se dis- sout pareillement; les deux quantités, par super- position, causent une perturbation rapide. Les deux couleurs, le rose et le bleu, se superposent aussi et le liquide devient de plus en plus violet; en même temps la courbe de perturbation s'accentue. Mais, pour une certaine température atteinte, au- cune molécule rose ne pourra subsister : la ma- lière bleue donnera seule sa couleur au liquide, qui passera alors de la gamme des violets de plus en plus bleus au bleu pur. Les mêmes actions se reproduisent pour le nou- veau système bleu qu'une droite ascendante repré- sente. L'iodure de cobalt, lui aussi, est rouge à froid ; il devient d’une teinte olive Lournant au vert pendant la perturbation que subit sadroite primitive (fig.5}, puis,c'est encore une droite qui caractérise la solu- tion du sel vert Col? AH°0 susceptible d’être isolé sur place et analysé. Le chlorure de strontium permet de faire des observations analogues : à la température qui correspond au point anguleux de sa ligne de solu- bilité on voit, coexistant dans le liquide, des aiguilles (Sr CP 6H?20), et des lamelles (Sr CP 2H?0). (fig. 6). Dans loules ces actions, lorsque la dissociation — = _— PE : Patea Eole Un en) perl + | + Eee 2 Le | Pal = = c L—. el | PS mELAr EE 1 | Je mL + Ù JE IE || | Je ++ RSR E el RAS -— É | = Il LT | 10° 0° 19° 20° 30° | il 40° 50° 50° 70° 80° 90° 100110 120 130 140 150 160 170 —: 180 190 20020, 220 230240 250 260 271 Fig. 6. — Eau saturée de sulfate de soude et de chlorure de strontium. par perte d'eau; mais l’eau mise en liberté peut être réemployée pour former avec le sel placé en excès dans le vase une solution au titre qui correspond au nouvel équilibre. La même fraction d’eau est libérée pour chaque degré, et par ce mé- canisme la solubilité du sel rose croit propor- L'Etard C. R. t. 109p. 741. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, est lente, on a des courbes de raccordement de formes diverses. Lorsqu'elle est à peu près instan- tanée ou qu'elle correspond à la fusion d’un hydrate, on observe un point anguleux. Cette même hypothèse de la dissociation, de la mise en liberté d’eau aux dépens du système dis- sous, peut s'appliquer au solubilités décroissantes. cas des 318 A. ÉTARD. — ÉTUDE EXPÉRIMENTALE DES SOLUTIONS SATURÉES Lesulfate de soude SO Na?, 10H02 (fig. 6) possède une branche courbe de solubilité ascendante bien connue, et l’on sail que ce sel ne contracte avec l’eau qu'une combinaison précaire, facile à effleurir. Malgré cela, dans cette partie de la courbe, l’eau libérée est réemployée, la solubilité croit jusqu'à 33°. Après cette période, la combinaison solide SOÂNa?, 10H20 cesse d'exister; on ne peut séparer du vase aux solutions que du sulfate anhydre SO'Na?. Au delà de 33° l’eau lient-elle en réalité du sel ankydre en solution ou bien des hydrates? Ce qui est certain, c'est que de l’eau et du sulfate de soude se trouvent dans une sorte d'équilibre indifférent en présence d'une quantité quelconque de sulfate anhydre sous-jacent. Au sein dela dissolution l’eau et le sel sontentre eux comme SO'Na? est à 16H?0. Entre 70° et 240° l’action de la chaleur ne rompt pas l’équilibre : l'eau libérée ne pourrait, sans doute, reprendre plus de sel qu’elle n’en a abandonné. Au-dessus de 240° la chaleur dissocie le système sans que l’eau puisse se recombiner; on pourrait dire que le Au delà de la température de 240° la droite de ce sulfate cesse d’être sensiblement constante ; mais elle ne se relève pas, comme semblaient l'indiquer les travaux de Tilden et Shenstone. C'est à partir de ce point au contraire que s'établit la véritable chute de solubilité du sulfate de soude. La décrois- sance de solubilité qui se fait autour de 33° est sans doute un acte de perturbation passagère entre deux états de régime (fig.6). A partir de 20°, la solubilité du sulfate de soude, comme celle des autres sulfates, tend donc rapidement vers le point nul. III J'ai cru pouvoir expliquer plus haut par un même mécanisme toutes les particularités des droites de solubilité saturée : croissance, décrois- sance, constance, point infini, point nul et pertur- bations. Mais au delà de cette explication, en allant plus loin dans la recherche des causes, on peut se demander pourquoilessulfateslibèrentainsià chaud l’eau qu'ils pouvaient retenir à froid. M. Le Chàtel- lier a publié le premier une formule relative aux pese SA men 1 Russe sulfate de soude s’effleurit dans l'eau comme dans l’air (fig. 6). A chaque température la quantité d’eau libérée s’accroit et demeure libre; le sulfate se dépose pour ne se redissoudre que si la température diminue quelque peu. À la limite il y aurait dans le tube à expérience du sulfate de sodium anhydre devenu insoluble dans l'eau pure. Il n’est pas possible, pour le sulfate de soude, de - pousser les choses jusqu’à obtenir en fait de l’eau pure, par suite de la pression développée et de l’altération des tubes en verre ; mais j'ai nettement démontré que,pour d’autres sulfates très solubles, tels que SO‘Mn il existe un point de solubilité nulle. Dans ce cas en peut séparer, par décantation de l'eau, du sel non alléré dans sa composition chi- mique. Tous les sulfates sur lesquels il m’a été pos- sible d'expérimenter présentent le phénomène de la solubilité décroissante et tous atteindraient sans doute le point nul, si les mesures pouvaient être poussées assez loin. Seules les solubilités des sul- fates de potassium et de sodium paraissent, à pre- mière vue, contredire celte dernière assertion. Cela m'a engagé à pousser aussi loin que possible l’étude du sulfate sodique. 50 — 300 — Solubilité des sulfates. Points de solubilité nulle. courbes de solubililé saturée, dans laquelle figure la chaleur de dissolution des sels. Selon que cette chaleur latente est positive ou négative, la solubi- lité pourrait croitre ou devrait diminuer. Depuis, M. Roozeboom, par une formule un peu diffé- rente déduite des principes de M. Van der Waals, est arrivé aux mêmes conclusions, de sorte que la relation parait bien acquise, malgré le petit nombre des vérifications expérimentales. Il n’y a aucune contradiction entre l’interpréta- tion proposée ci-dessus et les formules thermi- ques ; aussi y a-t-il lieu de continuer à chercher, dans la nature des sels déposés des solutions qui décroissent à chaud, quelques renseignements nou- veaux. Dans cette voie, on remarque d'abord qu’en dehors des sulfates les autres acides bibasiques ou polybasiques donnent des résultats analogues : tel est le cas des sultites, succinates, carbonates, ma- lonales, pyrophosphates, etc. de divers métaux. Les bases diacides, comme la chaux, sont moins solubles à chaud qu'à froid, et elles paraissent transporter cette propriété dans les sels qu’elles forment avec des acides monobasiques faibles tels que l'acide butyrique. La diminution de l’affinité pour l’eau, aussi bien que le changement de signe de la chaleur de dis- é £ RE OMniOH HO même anhydre, est rapidement soluble à froid; ECRIRE DANS : EME : A : . ; SO: SO? = précipité de ses solutions à 150°, il a l'aspect ÿ E — EOm A É LE \Mn— d'une porcelaine rose; sa composition est alors | SO%Mn 2H°0, et mème pulvérisé il reste pendant molécules de sulfate simple Li à L, Ë oo éesttarhycre. Axe des points de fusion ignée - A=oëT1 HjCl* CT? TE lAz09 Ba. Cd Br? Nal AT Br Na Br AC. RUES RLE-EFTE ï 14 t Es] f+ ie TT = - - 4 = k , PSS: [ f LA | Lisp BAIE 30% FT LEFT LEE 40% 6 e ET 40 sie it | | 70% + —— 60% 2 = À l LAdE Ï 4% 5 50% PE Las | so AE - [I | 30%) | 1 91 47! | +1 | : til TA Ba 17 | 2m EEE : DEEE D nn LIT ! | | 10% e etre FO EI LL Î | Î ef 0% |] À À | li | jajateil LE 0 LL | LE | IL | E.pæalr -20-10 Or 2030 40 50 6070 80 90 00° 50 200° 50 300° 5o 400° 50 500° 50 600° 50 700° So Fig. 8. — Concours des droites de solubilité au point de fusion. 100% Fusion, Eb: tag 80 À : EE 70 ++ — 601 | 1 | so ! = 40 + L + | 20 —+ | 10: Où SO EE —— —— A. ETARD. — ÉTUDE EXPÉRIMENTALE DES SOLUTIONS SATURÉES solution, peut s'expliquer, dans ces cas d’associa- tions polyatomiques, par des saturations internes. Ce n’est pas là une simple hypothèse, car l'examen des sels déposés leur assigne des propriétés parti- culières, On sait combien le sulfate de manganèse, sium, n’en forme pas un avec lui-même. On aurait ainsi dans la notation d’Erlenmeyer un bisulfate donnant lieu à la réaction de condensation sui- ante : 319 ( IE 59 = F AE | | T T EE Î 20) — ARE a Tant + —— | | 14 mien EE actes eut Et el jee fo | | FLORERMINE) -60 -50-40-30 -20 -10 0 10 20 30 #0 50 60 70 40 801000 150 200° 250 300° Fig, 9. — Solution des bichlorures de mercure et de cuivre dans les liquides autres que l’eau. des heures insoluble dans l’eau; il en est de même 0 —Mn—0 ? — S024 NS02 + 2H20 pour le sulfate zincique. Par dissolution et éva- poration sulfurique on peut préparer un sulfate de cobalt cristallisé anhydre, dont la poussière met plusieurs jours à se dissoudre. De telles matières sont complètement insolubles ; ce n'est qu'en s'hy- dratant par leur surface externe qu’elles repren- nent leur forme première et redeviennent dès lors solubles. Une pareille transformation exige sou- vent un temps fort long. Pour les sulfates dela série magnésienne, Erlen- meyer a proposé jadis une formule de saturation qui explique aisément la formation des sels doubles de cette série et des bisulfates. Il n’y a pas de rai- son particulière pour que le sulfate manganeux, qui forme un sel double avec le sulfate de potas- NO = Mn 04 Er A LT Une molécule de sulfate double D'autres modes de polymérisation ou de déshy- dratation peuvent également bien être invoqués; mais, dans une même série de sels, ce mode restera semblable, et il est aisé de prévoir qu'il y aura une grande analogie entre les lignes de solubilité de corps appartenant à une même série. On peut s’en assurer à l'inspection des figures 3, 5, 7 et de la figure 8 ci-dessus. L'eau, par la faculté qu’elle à de former des hydrates avec les sels, est un dissolvant assez mal choisi pour étudier les faits de solubilité : il les complique. Mais en réalitéles autres dissolvants ne 320 A. ETARD — ÉTUDE EXPÉRIMENTALE DES SOLUTIONS SATURÉES dissolvent cerlains corps que parce qu'ils out aussi une action sur eux et peuvent même s'y combiner. Ainsi, les alcools dissoudront les acides orga- niques divers ; mais la ligne de solubilité ne sera | pas très simple, car la dissolution s'accompagne de plus où moins d’éthérification. Le triphénylmé- thane se dissout dans la benzine, mais il forme avec elle une combinaison qui complique le fait élémentaire. Il ne faut donc s'attendre que très exceplionnellement à obtenir, avec les couples or- ganiques, des lignes de solubilité plus simples ture, les figures graphiques obtenues sont souvent compliquées et on n'arrive pas à en prévoir la dis- posilion. Les expériences déjà anciennes de Rudorf, dans lesquelles la distribution de deux sels dans un dis- solvant, n'est donnée que pour un point de tempé- rature, ne permettent pas de prendre la moindre idée du phénomène. D'après la solubilité parti- culière de deux sels dans l’eau en fonction de la température, on se croit souvent autorisé à prévoir la solubilité du mélange; c’est là ce qui a lieu Î SOLUBILITÉ 0'UN MELANGE | | | | | LA] J + | | | Lait rv KBr'K1) TT | aan = Portit-d 08 do 1 : : L 504) KBr EVA KI Has Le mi 2 666%K1 4% Pr 2 CS 21 | sie 20 LS n 1 fa 5 2 CP) do 100 2 6e 200 2 4 300 & 4 6b sb 400 500 2b 4b 6b 6ÿo L 40 60 (AE HE He sé LA7-/LTUZ, Fig. 10, — Solubilité d'un mélange de bromure et d'iodure de potassium. SOLUBILITÉ D'UN MÉLANGE (ei a As Tan 10% . ee 1 | | = = = Ronnit ea et % | ef F |_ ls me Di TD | os ne SE AB 60%) | pi nt? a — melange | CEE En Le Putdrectilige de K Br dents AU ee Re TE | Le (en ae D UT CO D 52 z0 2 —l Partie rec pr Droite the ae gel. —— = —— 4 6o Fo 500 20 40 6p 4 27 eosreun Fig. 11. — Solubilité d’un mélange de bromure et de chlorure de potassium : JE =) rt SOLUBILITÉ DUN MÉLANÉE | | | | | Lerrése", — = 100 “© jé re Fate) he dir a Kat ar ps 60% Lt AI _ coinaner 7 IE 2 LL ENIS | 12 4 = —— D 7 Z L L nee ne KO gb lets LE | 1 - ne ASE = SE | ! di 20 2 Je D o% Æ _—__ [E | fo 1 1 4 6b 8b 20 à 4 0 #00 do bo 400 sb 4b 6 80 502 fo 0 20 do Fig. 12. — Solubilité d’un mélange d'iodure ct de chlorure de potassium. qu'avec l'eau. En général, ce qui a été observé pour l’eau dissolvant les sels reste vrai pour d’autres couples solutifs. On a encore des droites et des perturbations courbes, des limites à la fusion, etc. et les cas cilés pour fe se reproduisent (fig. 9). [V Nous venons de voir qu'un système de deux corps — dissolvant et corps dissous — conduit à des graphiques simples, toujours de même aspect dans une même série chimique. Lorsqu'en pré- sence d’un seul dissolvant, l’eau, par exemple, on met en grand excès deux sels dépourvus d'action l’un sur l’autre, tels que deux azotates ou deux chlorures alcalins, el qu'on fait varier la tempéra- notamment dans l'exposition classique de la pré- paration du salpêtre par conversion. L'expérimen- lation directe montre que cette manière de faire conduit aux conséquences les plus erronées. En éludiant l’aclion des courants sur les cou- rants, on à pu faire, en électricité, des découvertes remarquables : c’est en opposant la lumière à la lumière que les interférences ont été découvertes, la polarisalion analysée et la théorie générale de l'Optique, élablie. De même, la solubilité seule peut voir et agir dans les questions de solubilité. Notre savoir, en ce qui concerne les corps dissous, ne pourra s’accroitre que par un examen attentif de l’action des solutions sur les solutions, c'est-à-dire des solutions mixtes. A. ETARD. — ÉTUDE EXPÉRIMENTALE DES SOLUTIONS SATURÉES La détermination des droites de solubilité simple est d'un intérêt relativement moindre, car, en chimie, l'étude des cas très simples, des équi- libres très stables, nous apprend peu : un travail acharné sur l’action réciproque du chlore et du potassium resterait sans doute toujours stérile; la chloruration de la benzine, par sacomplexité même, nous a beaucoup appris. L'étude de l’action des solutions sur les solu- tions est toute à faire. C’est là une voie nouvelle où il y a beaucoup à découvrir, car il existe cerlai- nement une physico-chimie des solutions, dont les réactions se développent entre les hydrates et l’eau. Il se fait ainsi, sans aucune intervention des sels eux-mêmes, des doubles décomposilions entre solutions, n'ayant d'autre objet que des échanges d'eau. C’est ainsi que les solutions de sulfate double de nickel et d’ammonium sont précipilées analyti- quement par une solution saturée de sulfate ammo- 321 analysant exactement les solutions ainsi préparées on obtient, en portant les résultats sur un gra- phique, les lignes que représente la figure 4. Le dessin met immédiatement en évidence ce fait que les deux sels se substituent dans la solution. Ils permutent leurs solubilités ordinaires à l’état isolé, de telle sorte que la somme des sels dissous K CI+ Na CI soit une droite. Cette somme (KCI + NaCl) agit comme un sel simple dont la solubilité serait proporlionnelle à la température. Cest là le phéno- mène principal, nécessaire, auquel se plie la conve- nance parliculière des éléments composants. La somme des métaux K + Na, présenls dans la solu- tion, et le chlore total sont aussi représentés par des droites, el alors que nous serions tentés d'ad- mettre « priori que la solubilité propre des molé- cules combinées KCI, Na Cl régirait la distribution des sels, elle ne fait que se plier à des conditions nouvelles. Dans cet acte de solution saturée, on ST herte Point de Fusion AzÜK PE n E creme Fig. 13. — Solubilité d'un mélange Na C1 HE AzOSK. — 1. Somme des sels. — 2. AzO®K supposé seul. — 3. Na CI contenu dans le mélange. — 4. AzOSK supposé seul. — 5. Na CI supposé seul dans l'eau. — 6. Solubilité à fusion ignée de Na CI dans AzO®K. — Azotate de potassium complémentaire de Na CI dans la ligne 6. nique. Le chlorure de baryum, BaCP 2H2?0, dissous dans l’eau, est précipité quantitativement, sous ce même état, par un excès de solution saturée de Ca CE, 6H20, qui ne peut avoir d'action chimique et agit visiblement en s'étendant aux dépens de l’autre solution, jusqu'à laisser sans eau l’hydrate BaCEË,2H20. Tel est encore, entre beaucoup d’autres. le cas du chlorure de magnésium en excès, dont la solution déshydrale les sels de cobalt au point de les rendre bleus ‘, alors que le chlorure de zine reste sans aclion. Ce dernier sel, bien que considéré comme déshydratant, se trans- forme sans difficullé en Zn Cl anhydre, et perd son eau sans décomposilion, ce que ne fait pas le chlo- rure magnésien, dès lors plus avide d’eau. Quelques cas simples permettront de se faire une idée des relations que les solulions mixles laissent entrevoir : Le chlorure de sodium se dissout selon des segments droils, ainsi que celui de potassium (fig. 8). Lorsqu'en présence d’un peu d’eau on met une grande masse de sels KCI et NaCI, les deux se dissolvent pour une part; en faisant cette 1 A, Erarp. Comples rendus, t. XCVIII, p. 1432. expérience pour une série de lempératures et en croirait assister à la solution desions libres dégagés de toute entrave de combinaison chimique. Cet exemple fort simple montre bien lintérêt de l'étude de la solubilité saturée mixte : il permet de remarquer aussi que la distribution des sels dans le liquide, pour un seul point de température, conduit à des résultats quelconques : à zéro, on trouve que KCI est beaucoup moins soluble que Na Cl; à 1809, c’est, dans les mêmes proportions, exactement le contraire. À 100°, on serait amené à raisonner sur l'égalité des solubilités (fig. 4). D'autres couples simples tels que KCI+KBr; KBr—+ KI; KCI + KI, donnent lieu à des remarques analogues, qu'il est inutile de développer, car l’ins- peclion des figures 10, 41 et 12 suffit. On voit là encore que des substitutions se font, qui sont subordonnées à la solubilité de la somme fonction- nant comme un sel unique et possédant à ce titre une droite de solubililé limite au point de fusion ignée de l’un des composants, le plus soluble, dans la solution duquel tout semble se passer. Il convient, pour terminer, de revenir sur la solution mixte AzOSK + NaCI, à laquelle il a été fait allusion plus haut. 322 R. HENRY. — TRAVAIL MÉCANIQUE DE S OISEAUX DANS LA SUSTENSION SIMPLE Dans la préparation du salpètre, le chlorure de potassium réagit sur l’azotate de sodium et la réaction chimique se représente par l’équa- lion K C1 +4- Az OSNa = Na CI + AzOK Les deux sels qui figurent dans le second membre sont solubles; mais la pratique nous apprend qu'à la température de lébullition on peut les séparer en enlevant. avec une écumoire, le sel marin qui se dépose. Voici lexplication bien connue de ce fait: la solubilité de Na CI est grande, mais sensiblement invariable avec la température ; celle d'AzO'K est faible mais croissante, bientôt elle l'emporte sur la précédente; en enlevant sans cesse NaCI on trouble l’équilibre, et bientôt il n°y a plus d’eau que pour dissoudre AzO®K. Cette théorie est fondée sur la connaissance des solubi- lités à l’état isolé, et ce n’est que par hasard qu'elle s'accorde approximativement avec la réalité. Lorsqu'on fait un mélange en excès de AzO'K el NacCl, la distrioution des sels, donnée par l’analyse (fig. 13), indique que, si la séparation du sel marin, toute imparfaite qu’elle est, se fait à 105, c’est parce que dans ce nouveau milieu, — qui n'est pas ; : oi) Fons de l’eau pure — il a perdu les - de sa solubilité (0 normale. Sous pression vers 200° la séparation scrail encore plus complète. Ces courbes ont été établies en admettant que tout le chlore dosé est combiné au sodium; elles n’ont ainsi qu'une va- leur expérimentale, car il est probable que l’équa- lion d'équilibre A7 ONa + KCI © 2 Na CI Az OK. régit le partage des quatre groupes hétérogènes possibles. Ici encore, la marche générale des droites, déterminées expérimentalement jusqu’à 1709, indique que la somme des sels AzO®K + NaCl tend vers le point de fusion de l’azotate, ce qui semble assez naiurel, puisque l'élimination gra- duelle du chlore tend à laisser ce sel pur. Ainsi, au delà de la limite connue (170°), on pourrait admettre, en suivant la figure 13, que le point de fusion serait atteint. Cela peut être vrai en théorie; mais il ne serait pas possible cependant d'obtenir du salpêtre en fondant les deux sels anhydres, car une perturbation interviendrait cer- tainement : la solubilité de NaCI dans AzOK. J'ai d'ailleurs déterminé cette solubililé entre 240° et 160°; elle est représentée, comme foujours, par une droite. A. Etard, Répétiteur de Chimie à l'École Polytechnique, LE TRAVAIL MÉCANIQUE DES OISEAUX DANS LA SUSTENSION SIMPLE EN AIR CALME Dans un très intéressant article publié par la Revue générale des Sciences ,au mois de décembre 1891, M. l'ingénieur Drzewiecki a exposé, avec beaucoup de netteté, l'historique et les principaux résultats des travaux poursuivis depuis une vingtaine d’an- nées, par des savants distingués et notamment par MM. les docteurs Marey el Hureau de Villeneuve, sur le vol des oiseaux et sur les mouvements des aéroplanes. Nous devons constater que les études personnelles et les calculs de M. Drzewiecki ont apporté à la science de l’aérodynamique de pré- cieux documents pour la solution du problème des aéroplanes. * Depuis quelques années la navigation aérienne, longtemps délaissée par la science officielle, est revenue en faveur. Elle fait aujourd’hui l'objet des recherches des mathématiciens et des naturalistes les plus éminents, et l’on peut dire que nous assis- tons, dans tous les pays, à de véritables tournois scientifiques, pour arriver à la conquête de l'air. Notre Académie des Sciences elle-même, jadis si réservée sur ces difficiles questions, a été entrai- | née dans cette impulsion vers les régions supé- rieures de l'air; elle a constitué une Commission permanente de navigation aérienne, pour exécuter et discuter les propositions nouvelles. Il ne faut pas oublier que c’est aux modestes inventeurs français que l’on doit l'initiative de ces progrès, et, comme l’a très bien dit le Commandant Renard, c'est la patrie des Montgolfier qui créera un jour la première flotte aérienne. Jusqu'à présent, la plupart des auteurs ont fourni d'utiles renseignements sur la force de susten- tion aérienne qui supporte les plans minces lancés préalablement à une grande vitesse horizontale sous une faible incidence ; mais très peu de savants ont abordé le problème de mécanique que les oi- seaux résolvent chaque jour sous nos yeux dans le vol ascensionnel vertical en air calme, sans dépla- cement horizontal. | semble cependant que la solu- tion de ce problème, de la sustention simple des volateurs dans l'air, soit la plus importante de toutes les ques'ions relatives à la navigation aé- rienne, puisqu'elle seule peut conduire à détermi- After - > rs R. HENRY. — TRAVAIL MÉCANIQUE DES OISEAUX DANS LA SUSTENSION SIMPLE 323 ner les conditions auxquelles les appareils méca- niques pourront utiliser les réactions atmosphé- riques. M. Drzewiecki reconnait lui-même que les académiciens Poisson, Navier et Babinet se sont complètement trompés lorsqu'ils ont cherché à formuler une valeur numérique du travail dépensé par l'oiseau pour se maintenir en équilibre ; mais il ne donne pas l'explication de ces erreurs et se contente de dire : « Lorsqu'on soumet au calcul la « résistance éprouvée par un plan de la dimension « de l’aile d’un oiseau s’ébattant dans l'air, on ar- « rive à un chiffre de beaucoup inférieur au poids « de l'oiseau en question. » C'est ce que M. Joseph Bertrand a spirituellement exprimé en disant que, jusqu'à présent, l'application du calcul à l'aviation n'avait abouti qu'à démontrer que les oiseaux ne doivent pas pouvoir voler. M. le P° Marey constate avec regret la même impuissance des calculateurs, dans son très remarquable ouvrage sur le « Vo/ des oiseaux ». l Si Navier n'a pas craint d'affirmer que l'oiseau dépense pour se soutenir, par seconde, un travail égal à huit fois son propre poids, soit environ un cheval-vapeur pour un grand vautour, d'autre part, un professeur, M. Delprat, énonce avec confiance ce principe nouveau : L'oiseau ne dépense de tra- vail que pour s'élever ou se diriger etil n’a besoin d'aucun effort pour se soutenir dans l'air. Nous présumons que Navier et M. Delprat sont éga- lement dans l’erreur, quoique placés aux deux pôles opposés. La vraie solution est entre les deux : Zn medio stat veritas. Ne pouvant donner une explication suffisante du phénomène de l’ascension verticale de l'oiseau, certains auteurs ont cru tourner la difficulté en niant l’existence de ce phénomène. Ils ont posé en principe qu'aucun oiseau ne pouvait s'élever verti- calement dans une atmosphère calme et qu'il ne se soutenait qu'à l’état d’aéruplane animé, c’est-à- dire à la condition de posséder une vitesse de trans- lation horizontale assez considérable. Cette théorie commode simplifierait beaucoup le travail de loi- seau et celui des savants; malheureusement, elle est complètement inexacte et démentie par les faits. Nous voyons en effet des oiseaux tels que l'A- louette, le Martinet, le Pigeon, le Faucon, s'élever verticalement dans un air calme, sans aucun dé- placement horizontal. Seulement il convient de re- marquer (et c’est là une circonstance très intéres- sante au point de vue mécanique), que les oiseaux n’exécutent l’ascension verticale qu'en faisant appel à toutes leurs ressources et à l’aide de bat- tements d’ailes rapides et énergiques. Malgré ce déploiement considérable de travail, le volateur monte assez lentement et atteint rarement une très grande hauteur. Nous devons conclure que c'est dans le vol vertical ascensionnel, que l'oiseau dé- pense par seconde le maximum de travail méca- nique dont il est susceptible. C’est donc en étu- diant le vol vertical et en calculant le travail dé- veloppé par l'oiseau dans cette phase particulière de ses mouvements, que nous trouverons, avec la plus grande approximation possible, la solution du problème de la sustention et la détermination des conditions d'existence et de stabilité des vola- teurs en général. Nous pensons que l’insuccès des études relatives au travail de sustention de l'oiseau doit être attri- buée à ce que ceux qui ont voulu calculer ce tra- vail sont partis de données inexactes à l’aide desquelles ils ont cherché à faire l'intégration des travaux différentiels dus aux battements rapides et très variables des ailes, dont les lois sont mal connues. Les mémoires écrits sur cette question renferment des calculs compliqués aboutissant aux résultats les plus opposés. Certains auteurs n’ont pas hésité à déclarer qu'un oiseau de grande taille tel qu’un vautour du poids de 8 à 10 kil., dépense, pour se soutenir, le travail d’une machine à vapeur de 12 à15 chevaux, ce qui est absurde; tandis que d’autres affirment, au contraire, que tant que le centre de gravité de l’oiseau ne s’élève pas verti- calement, il n’y a aucune dépense de travail, con- clusion non moins erronée. Il Afin d'éliminer les difficultés et les erreurs pro- venant de l'évaluation peu exacte des mouvements différentiels des ailes, nous avons cherché à subs- tituer au travail mécanique de l'oiseau la force vive de la masse d’air dont la réaction soutient à chaque instant le volateur. En effet, en vertu du principe de l’égalité de l’action etde la réaction, la force vive dépensée par l'oiseau pour se soutenir en une seconde est intégralement transmise par les ailes au fluide ambiant qui doit la restituer partiellement au volateur en réalisant ainsi le phé- nomène de la sustention simple. D’autre part nous avons démontré, par l'expérience, que la somme des battements d'ailes, donnés par l’oiseau en une seconde de sustension directe, a pour effet de mo- difier complètement la pression manométrique de la masse d’air ambiant, de telle sorte que le volateur,au moment précis où ses ailes passent par la position horizontale , se trouve suspendu entre 1 Nous avons démontré, en effet, qu’au point de vue aéro- dynamique, l’oiseau fonctionne comme un ventilateur à force centrifuge, dont les aïilettes seraient animées d’un mouvement alternatif. Il détermine ainsi un courant descendant extérieur auquel la réaction de l’air oppose un contre-courant ascen- dant intérieur ou cyclone qui soutient le volateur. 324 R. HENRY. — TRAVAIL MÉCANIQUE DES OISEAUX DANS LA SUSTENSION SIMPLE deux couches d’air de densité et de pression diffé- rentes. Si H désigne la pression de l’air dans la ré- gion occupée par le volateur, celui-ci se trouve soumis de la part de l'air ambiant : 1° à une pres- sion H + &x qui agit de bas en haut sur la face inférieure des ailes, et 2° à une dépression H — &' qui s'exerce sur la face supérieure. Il en résulle que la poussée totales que recoil l'oiseau de l'air ambiant est égale àm — —)5!) c'est-à-dire,5 + w'. De plus, comme ilest facile de le prouver pour des valeurs des inférieures à une certaine limite, on peut admettre que 5! est sensi- L à DRE 1 blement égale à , c'est-à-dire que :9 = 25 — T si P représente le poids, et A la surface de l'oiseau. Cette force, que nous avons appelée force aviatrice, est donc le double au moinsde l'excès de pressions de la couche d'air inférieure. Si nous appelons * | la vitesse moyenne du courant d'air ascendant capable de produire cettesous-pression, nous expri- merons la sustension par l'équation Am —/# A1, k Fe étant, comme on sait, un coeflicient égal à -,soil ÿ environ —- 8 En remplaçant dans celte équation m par sa B valeur ga? POUS obtenons la formule : u° A Nous arrivons donc à cette conclusion que : un oiseau de poids P doit êlre considéré, au moment de la sustention dans un air calme, comme étant supporté par un courant aérien ou cyclone vertical dirigé de bas en haut el animé d’une vitesse d’é- Dee . coulement constante égale à 2 V . Mais, puisque à A ce cyclone, ou courant de suslension, est entretenu à chaque instant par l’action du volateur, nous pouvons admettre que le travail aérodynamique @ ! (ai (AUdD\U …, pou rexpression : 0 — »m < —— ee x» © étant la densité de l’air et y l'accélération de la pesan- [r = P P = . L i peu prese Il el l 0 eur Le coefficien 2g e sa da G n Au O0 —-— ; eul écrire : P 16 par suile, le travail de l'oiseau par heure sera G — 0 — MATE 116 un coeflicient plus grand que l'unité. Ainsi, le lravail de sustension d’un oiseau est proportionnel au cube de la vitesse de son cyclone aviateur. 4P En remplaçant dans la formule «? par 7 nous Pr trouvons : G — LA d’où nous avons conclu ce théo- rème fort simple : « Le travail mécanique de sustension dépensé « à chaque seconde pas un oiseau est égal au tra- « vail qu’il faudrait produire pour élever le quart « du poids de ce volalile à une hauteur égale à « l’espace parcouru en une seconde par le cyclone « de sustension. » Une fois la sustention réalisée, l’oiseau n’a plus qu'un travail supplémentaire relativement peu considérable à produire pour s’élever à une hau- teur quelconque avec une vitesse ascension- nelle v. Getle vitesse d’ascension, qui est nécessai- rement assez faible, afin de réduire le plus possible la résistance de l’air, atteint rarement un mètre à la seconde dans le vol vertical. Dans ce cas la vi- tesse du cyclone élévateur devient égale à uw + vet le travail élévateur a pour expression : p=Ys#@wsev) AVS 16 8 En appliquant ces formules du travail élévateur à divers oiseaux en supposant y — 1 et v —0"50, nous avons (rouvé les résullats suivants : NOMS POIDS VITESSE DU CYCLONE ES OISEAUX IN KILOS FN ENSAILOS DE SUSTENSION HAUCOn- Res eecus 0k620 400 MOMPAUM ER EC 0.027 2.85 PIPEUREEE eee eLE 0.260 5.00 Goëland x 0.625 4.60 Vautour fauve 7.500 5:95 Grand=pelican........ 7.000 6.00 Grue d’Australie...... 9.500 6.70 a eue eee cm RC ces | r _. 1 VALEUR Y PORER DU TRAVAIL ÉLEVATOIRE TRAVAIL ASCENSIONNEL PROPREMENT DIT PENDANT 200mw | | DU TRAVAIL POUR MONTER A 100m.où 200" DE SUSTENSION Okst620 51Kk00 0.021 1.30 0.325 22 0.719 240.00 96. 11.175 2840.00 610. 10.500 2802.00 702: 16.090 59%0.00 740. de ce courant d’air est équivalent au travail & dépensé par l'oiseau pendant le même temps. Orle travail d’une masse d’air en mouvement, de vitesse “, agissant sur une surface normale À immobile, a [I Appliquée à l’homme, considérécomme volateur, notre théorie met neltement en évidence l’impos- ET «+ nn. 7 R. HENRY. — TRAVAIL MÉCANIQUE DES OISEAUX DANS LA SUSTENSION SIMPLE 325 sibilité absolue pour lui de s'élever dans l'air par le seul effet de son travail musculaire. Considérons en effet un homme pesant 10 kilos et celculons la surface alaire qui lui serait néces- saire pour le soutenir avec le travail mécanique dontilest capable qui est évalué, comme on sait, à 12 kilogrammètres au plus par seconde. En supposant que le poids additionnel des deux ailes ne dépasse pas 50 kilos, ce qui est le maxi- mum de ce qu’un homme vigoureux pourrait porter à terre, le poids ? du volateur est égal à 70 + 50 soit 120 kilogrammes. Le travail 7 de l’homme est au moins égal à ce- lui de son cyclone de sustension, qui a pour expres- > T — se — 95e à 4 étant la vitesse du cyclone, on déduit de cette rela- tion pour w: sion, d’après notre théorie : valeur maxima. Ainsi, quel que soit le mécanisme employé, l’homme ne pourra jamais obtenir, enem- ployant sa force musculaire, un courant de susten- sion d’une vitesse supérieure à 040, ce qui,d’après nos tableaux, l’exclut de la catégorie des volateurs à action directe. En effet avec une vitesse de cyclone égale à0®40, la formule qui lie les variables #, P et A nous donne : P F= u® 16 4 4 300 100 d’où l’on déduit pour la valeur de la surface totale J > des ailes : À — es etcomme ici P— 120%, nous trouvons facilement pour À: 12000 À : à = pe — 3000 métres carrés, Ainsi, nous arrivons à celte conséquence que, pour que l'homme puisse s'élever dans l'air avec sa force musculaire, il faudrait que la nature lui eût donné deux ailes mesurant chacune 1500 mè- tres carrés de superficie et ne pesant pas plus de 27 kilogrammes, soit 18 grammes par mètre carré. L’absurdité de ce résultat montre mieux que tous les raisonnements combien sont vaines et chimé- riques les tentalives des inventeurs qui se propo- sent la création d'un appareil élévatoire aérien mû par la seule force musculaire de l'homme. Mais, s'il est insensé de chercher à transformer l'homme contemporain en un oiseau en lui adap- tant des ailes immenses qu'il serail impuissant à porter et à faire fonctionner avec sa force natu- relle, il peut être intéressant de rechercher la quantité minima de travail mécanique que devra fournir un moteur d’un poids donné pour soutenir un homme pesant 70 kilog. dans un appareil lé- ger pourvu d'ailes de dimensions convenables. Si nous voulons nous rapprocher du dispositif alaire des grands oiseaux pour lesquels le rap- P À port ns alteint ou dépasse 10, nous prendrons pour la surface des ailes le dixième du poids du volateur 9 soit De 12 mètres carrés. Dans cette hypopthèse parfaitement admissible, nousaurons pour, calculer la vitesse du cyclone de sustension, l'équation suivante : r —= moi —= ill) d'où EL V10 — 60,324 et par conséquent le travail du courant aérien de sustension aura pour expression : u _ 120 T = 120 X 7 = —— X 6.32% — 890k + ou T — 190 kilogrammètres, c’est-à-dire 2 che- vaux-vapeur et demi environ. Ainsi, pour soutenir un homme à l’aide d'un mé- canisme léger ne dépassant pas 50 kiloset muni de deux ailes de 6 mètres carrés de surface cha- cune, il faudra employer un moteur fournissant un travail d'au moins trois chevaux. IV En résumé,nous pensons avoir clairement établi que la sustention des volateurs dans l'air est le résultat de l'existence d’un courant ou eyclone aérien animé d’un mouvement relatif dont la force vive varie en raison inverse de l'étendue dela sur- face d'appui. Chez les oiseaux cette surface d'appui, constituée par la projection horizontale des ailes,de la queue et du corps, peut être à la fois active et pas- sive.c’est-à-dire jouer le rôle de propulseur et de ré- cepteur du courant, comme cela a lieu dansle volen air calme sans par le volateur : elle peut êlre aussi simplement passive avec une orientalion variable, comme cela vilesse acquise antérieurement a lieu dans le vol à voile ou dans le vol plané. Dans le vol plané, la vitesse relalive du cyclone de sustension résulte d’une vilesse d'entrainement acquise antérieurement par le volateur descen- dant d'une grande hauteur sous l'action de son potentiel. Dans le vol à voile au contraire, l'oiseau, profitant d'un courant d'air suffisamment rapide, l'utilise comme cyclone de sustension en lui offrant les inférieures de convenablement orientées sous une faible inclinaison. Enfin dans le vol ascensionel vertical, en air calme, le volaleur. utilisant, comme nous l'avons expliqué, faces ses ailes 326 L. CUÉNOT. — LES ANCÊTRES ET LE DÉVELOPPEMENT DE L'INDIVIDU toute sa force motrice, déplace à chaque ballement d'aile une masse d'air d'autant plus grande que son poids et sa voilure sont plus considérables ; il crée ainsi de toutes pièces au milieu de l'air calme un tourbillon aérodynamique dont le travail ascencion- nel neutralise à chaque instant le travail de la gra- vité en produisant le phénomème de la sustension. Ainsi, la conception rationnelle de cyclone uvia- teur, qui concorde avec les expériences que nous avons faites sur le vol des oiseaux et sur la résis- tance de l’air, nous donne la synthèse mécanique des différentes phases du vol et permet de déter- miner les relalions mathématiques qui lient entre eux les éléments variables, tels que la surface d'ap- pui, le poids et le travail mécanique dépensé, qui caractérisent les différents volateurs. Dans un prochain article nous montrerons com- ment nous avons appliqué notre théorie du cyclone aviateur à la détermination des conditions d’équi- libre et du travail aérodynamique deshélicoptères, des spirifères, des parachutes et en général des volateurs artificiels pourvus d’un moteur intérieur quelconque. R. Henry. Lieutenant-Colonel à l’État-Major de l'Armée. LES ANCÊTRES ET LE DÉVELOPPEMENT DE L'INDIVIDU La théorie de l’évolution des êtres vivants a eu une fortune singulièrement rapide et complète: elle a été longtemps dans les esprits à l'état latent, elle a même été produite au jour par de grands esprits : Lamarck, Gœthe, Geoffroy-Saint-Hilaire ; mais son heure n’était pas encore venue; ce n’est qu'à partir de 1859, sous la grande poussée d’opi- nion due au génie de Darwin, que la doctrine a renversé les obstacles vermoulus qu’on lui opposait et a été acceptée par l'immense majorité des natu- ralistes. Toutes les démonstrations qu’on en peut donner se résument en ceci : en l’adoptant, on explique très clairement et très simplement les relations des espèces entre elles, les divers plans d’organi- sation, la présence des organes rudimentaires ou transitoires, les formes larvaires, le principe des connexions, etc.; tandis que, dans l'hypothèse de la création séparée de chaque espèce (ce qui est l’autre terme du dilemme),on ne peut rien expliquer du tout, et l’on se heurte à chaque instant à des impossibilités et à des absurdités. D'ailleurs la doctrine s'impose avec une telle évidence à tout naturaliste, qu'il est au moins superflu de plaider pour elle. La doctrine de l’évolution une fois établie, on a cherché à expliquer comment se faisait cette évo- lution et quelles en étaient les causes principales ; là on est moins d'accord; mais si en apparence les théories sont fort variées, il n’y a en somme que deux ou trois écoles différentes : la première, celle des darwinistes, qui admettent, à l'exemple de Darwin, Wallace, Hæckel, que les facteurs prin- paux de l'évolution sont la lutte pour l'existence el la sélection du plus apte; la seconde, celle des néo-lamarckistes, qui attribuent un effet pré- pondérant à l’action directe du milieu et à l'in- fluence de l'usage et du non-usage (Lamarck, Spencer, Cope, Semper, elc...). Il y a encore une troisième manière de voir, celle de M. Gaudry, qui, tout en repoussant les explications mécaniques précédentes, attribue le développement sérié des espèces à une tendance modificatrice interne, effet direct de la volonté divine. Que ce soit exclusive- ment l’une de ces théories qui ait raison, ou toutes les trois ensemble, ou ni l'une ni les autres, cela n’alteint en aucune manière la doctrine de l’évo- lution, qui en est absolument indépendante; on ne fait pas toujours cette distinction, qui est pour- tant bien évidente, et certains esprits, non des moins éminents, s'imaginent avoir réfuté la doc- trine évolutionniste, lorsqu'ils ont démontré que l’une des théories précitées est inapplicable à tel ou tel cas particulier. Parmi les nombreuses voies nouvelles ouvertes dans les sciences biologiques, l'une des plus inté- ressantes est certes la reconstitution de l'arbre généalogique des êtres, qui permettra seule de donner une base solide aux classifications et aux comparaisons morphologiques. C'est une œuvre gigantesque, qui restera probablement toujours inachevée par quelque côté, mais qu'il est permis d'entreprendre; bien qu'il n’y ait guère que trente ans qu'on y travaille, en utilisant, il est vrai, les observations des siècles précédents, déjà bien des choses ont été découvertes; malgré les contradic- tions el les hésitations inévitables au début d’une œuvre aussi complexe, l’on entrevoit vaguement le tracé touffu de l'arbre généalogique, dont quelques branches sont par places nettement définies; certes il faudra encore bien des travaux et des théories pour en préciser les contours, mais enfin il est démontré dès maintenant que l’entre- prise est possible, + À ci ge RÉ L. CUÉNOT. — LES ANCÊTRES ET LE DÉVELOPPEMENT DE L'INDIVIDU 327 On se rend en général un très mauvais compte des procédés employés par les naturalistes pour reconstruire avec quelque probabilité {a généalo- gie d’un groupe, et le plus souvent, au moins dans le publie qui ne s'occupe pas spécialement de ces questions, ces tentatives sont considérées comme des jeux de l'esprit, de pures hypothèses sans fon- dement. Il en est tout autrement, et dans cet article je vais tàcher d'exposer les lois sur les- quelles on s'appuie, en les considérant d'une manière plus critique qu'on ne le fait d'habitude, et en les débarrassant de tout le falras gréco-latin dont on les a affublées. Je vais prendre comme exemple un groupe bien défini et connu de tout le monde: les Batraciens. Le jeune Triton ou la jeune Grenouille, peu après la sortie de l'œuf, porte sur les côtés du cou trois paires de houppes dentelées dans lesquelles cir- cule le sang, qui constituent les branchies externes. L'animal avale constamment l’eau ambiante qui passe dans l’arrière-bouche, et s'échappe au de- hors par des trous pratiqués entre les branchies, en leur abandonnant son oxygène : c’est le premier slade, à branchies externes. Un peu après se développent deux poumons, destinés celte fois à respirer l'air en nature; à ce moment il y a donc coexistence de deux appareils respiratoires (au point de vue physiologique, il est juste de noter que l'importance des poumons est encore très faible) : c'est le deuxième stade, à branchies, externes et à poumons, qui dure très peu de temps chez les Grenouilles, beaucoup plus longtemps chez les Tribons et les Salamandres. Le troisième stade sera marqué par la disparition des branchies externes ; à cet effet, un repli de la peau se développe peu à peu, passe au-dessus des branchies, les enfermant ainsi dans une sorte de chambre interne, ne communiquant avec l’exté- rieur que par un trou, placé de chaque côté de la tête. Dans le quatrième stade, les branchies ont disparu, le trou branchial est complètement fermé et les poumons prennent la prédominance. L’ap- pareil respiratoire est alors arrivé à son plus haut état de développement. Or, on a constaté depuis longtemps que tous ces stades transitoires du développement des Tritons ou des Grenouilles sont firés chez d’autres espèces de Batraciens adultes (il n’y a que le premier stade qui ne se retrouve pas ; mais chez certains Pois- sons, les jeunes Sélaciens par exemple, il est par- failement net); ainsi chez les Ménobranches, les Protées et les Sirénides, il y a à la fois deux pou- mons bien développés el trois paires de houppes branchiales externes :c’est le deuxième stade. Chez les Cryptobranches et les Amphiuma, les branchies ont disparu, mais de chaque côté du cou se trouve une fente (ancien trou branchial) qui commu- nique avec l'arrière-bouche : c'est le troisième stade. Enfin chez les autres Batraciens, Tritons, Salamandres, Grenouilles, etc., il n'existe plus chez l'adulte que les deux poumons. En résumé, dans un groupe bien défini, les stades transiloires parcourus par un appareil donné se retrouvent plus ou moins reconnaissables chez d'autresespèces adultes,où ils sont alors fixés. Est-ce un fait général ? D'après tout ce que l'on sait en organogénie el en paléontologie, on peut hardiment répondre oui, d'une façon absolue ; il serait facile d'en citer des exemples à l'infini. L'œil des Céphalopodes supérieurs (Seiche) est d'abord une simple invagination ectodermique, débouchant largement à l'extérieur: ce stade est fixé chez le Nautile; puis les appareils réfracteurs se déve- loppent, mais les deux bourgeons de la cornée restent séparés, de sorte que l’eau de mer peut entrer librement dans la chambre antérieure de l'œil et baigner le cristallin : c'est le stade fixé chez les Oigopsides (Ommastrephes, ete.); enfin la cornée se ferme, et l’œil atteint son plus haut degré de développement connu chez les Céphalopodes. L'évolution de la coquille (fig. 1) de certains Gasté- CE — 4, 2 du trou branchial 0, par lequel s'échappe l’eau qui a servi et 3, jeunes Fissurelles montrant l'évolution à la respiration : 1, jeune Fissurella gibherula Lam., le trou branchial n'étant qu’à l'état d'échancrure ; 2, jeune Fissu- rella græca Linné, au stade émarginuliforme; 3, F. græca au stade rimuliforme (d'après Boutan). QU 4, 5, 6 et 7, coquilles adultes de la même famille : 4, Scu- tum australe Lam. (le trou branchial o n’est qu'une échan- crure comme au stade 1); 5, Emarginula cancellata Phil. (correspond au stade 2); 6, Rimula exquisila A. Adams (correspond au stade 3); 7, Fissurella græca Linné (stade ultime de l'évolution du trou branchial). ropodes diotocardes (Emarginule, Rimule, Fissu- relle, Haliotis, ete.), le développement de la bran- chie des Lamellibranches, etc..sont aussi de bons exemples à citer. Je répèle qu'on n’a que l’em- barras du choix dans la masse des faits connus pour vérifier la proposition émise plus haut. Enfin il n’y a pas jusqu'aux formes extérieures transiloires des jeunes qui ne puissentse retrouver fixées chez des espèces adultes : parmi les Batra- 328 L. CUÉNOT. — LES ANCÊTRES ET LE DÉVELOPPEMENT DE L'INDIVIDU ciens, on sait que tous ceux qui sont privés de queue à l'état adulte, les Anoures, ont dans le jeune âge, à l’état de tétards (fig.3, &), une queue parfai- tement développée, tout à fait semblable au membre définitif des Batraciens à queue, les Urodèles ; et cela, non seulement chez les télards aquatiques, qui ont besoin d’un appareil de nalation, mais même chez ceux qui poursuivent tout leur déve- loppement dans l'œuf, comme l'Hylodes martini- censis, qui vit dans un pays où l’on ne rencontre pas d'eaux stagnantes. Parmi les Échinodermes, tous les jeunes Ophiures et Asléries ont d'abord une forme pentagonale régulière, stade fixé dans divers genres, Culrita, Asterina, Palmipes, Astrophiura, ete.; ce n’est que plus tard que les bras proéminent de plus en plus à la surface du disque et donnent à l'animal son apparence rayonnée caractérislique ; la Comatule (fig. 2) a d'abord une tige qui la fixe au sol, ce qui rappelle tout à fait les Crinoïdes D S RÉ ee ca ÿ RT S LS A RS Fig. 2. — A, Rhizocrinus lofotensis Sars, adulte, espèce de Crinoïde fixé à cinq bras (d'après H. Carpenter); B et C, deux stades du développement d'Antedon rosacea Linck ; B, forme très jeune à cinq rayons rudimentaires ; C, forme plus âgée, à dix bras, munie de cirres. et correspondant à peu près au genre fossile Thiolliericrinus. fixés, fossiles et actuels: plus tard son squelette se modifie (stade représenté par le genre Tiellie- ricrinus fossile) ; enfin elle se sépare de sa tige el devient libre. Comment interpréter dences, si ces singulières coïnci- frappantes et si entre les divers stades du développement d'une es- pèce ou d’un organe el les formes fixées chez d'autres espèces adultes du même groupe? Dans la doctrine des créalions séparées, c’est tout à fait impossible générales, : dira-t-on, en effet, pour les Ba- traciens, que le jeune à des branchies etune queue pour assurer sa vie aqualique ? C’est facile à ré- futer, car la même évolution des organes respira- loires, l'existence de la forme têlard se présente exactement de même chez des Balraciens dont les jeunes se développent dans l'utérus de la mère sans mener de vie libre; c'est le cas notamment de la Sulamandra atra. D'ailleurs à propos de l'œil de la Seiche, de la tige des Comatules, elc., il se- rait bien impossible d'invoquer une raison ana- logue. Dans la doctrineévolutionniste, ce sera très simple et très clair : en vertu du principe de l’hé- rédité, l'organe considéré repasse dans son déve- loppement (ontogénie) par les stades qu'il a par- courus chez les ancêtres de l'espèce (phylogénie), ce qu’on peut exprimer autrement en disant que l'ontogénie d'un organe estun court résumé de sa phylo- génie. C'est ainsi que l'ont compris la grande ma- jorité des biologistes, qui, à l'exemple d'Hæckel, désignent le principe en question sous le nom un peu pompeux de loi biogénétique fondamentale. Naturellement il est impossible de démontrer celte loi d’une façon indiscutable, palpable; elle n’a que la valeur d'une hypothèse, mais d’une hypothèse qui permet seule de comprendre les faits, qui les relie admirablement entre eux, et qui cadre très bien avec ce que nous savons sur la puissance de l'hérédité. Le seul moyen de vé- rification directe serait une vérification paléonto- logique : si l’on trouvait dans des couches géolo- giques successives les différents états d’un organe donné, états prévus auparavant par l’étude des stades du développement des animaux actuels, ee serait une preuve convaincante de la vérité du principe biogénétique ; mais il ne faut pas trop demander à la paléontologie : on oublie trop, en face de ses innombrables découvertes, qu'on ne connail pas la millième partie de ce qui a vécu autrefois sur le globe ; les documents qu’elle four- nit présentent des lacunes considérables, surtout à mesure que l’on recule dans la série des âges; de plus, ilest un pointsur lequelilimporte d'appuyer, c’est que la dale d'apparition d'une espèce quel- conque, paléontologiquement parlant, peut très bien ne pas correspondre du tout à son apparilion réelle sur le globe ; elle signilie simplement, dans la très grande majorilé des cas, que c’est le mo- ment où celle espèce a trouvé des conditions pro- pices à sa mulliplication, où la lutte pour l'exis- tence lui est devenue favorable; alors on peut avoir la chance de retrouver ses débris qui sem- blent ainsi apparaitre tout d'un coup sur le globe ; mais elle pouvait très bien exister auparavant, à l'état plus ou moins sporadique, ou dans un point très localisé, ce qui rend sadécouverte tout à fait im- probable : la meilleure preuve, c’est que les dates d'apparition sont constamment modifiées par les nouvelles découvertes; on a cru pendant long- temps que les Mammifères dalaient seulement des ce te te at nie L. CUÉNOT, — LES ANCÊTRES ET LE DÉVELOPPEMENT DE L'INDIVIDU 329 temps tertiaires; puis on en a trouvé dans le jurassi- que inférieur, et maintenant on en connait dans le trias ; il n’y aurait rien d'étonnant àce qu’on en dé- couvrit dans le silurien, Ilen ressort qu'on neserail pasautorisé à conclure contre le principe émis pré- cédemment parce que l’ordre prévu théoriquement ne serail pas observé : supposons en effet qu'un animal ait eu des ancêtres À, B, G, D, etc; théori- quement on devrait trouver d'abord D, puis C, puis B, puis A; maisil se peut très bien que D soil très rare au début, et qu'ilne puisse prendre une grande extension qu'après la venue de ses descen- dants C et B; de sorle que les paléontologistes trouveront d’abord G, puis B, puis D, puis À et que l'ordre théorique paraitra tout à fail renversé, lan- dis qu'en réalité il aura élé parfaitement suivi. Ces considérations me paraissent assez évidentes pour qu'il soit inutile d'y insister plus longtemps ; cependant on les perd presque toujours de vue lorsqu'on discute la doctrine évolulionniste en s'appuyant sur la paléontologie. Ces réserves une fois faites, voyons les arguments que l’on en peut tirer ; je ne puis pas entrer dansle détail des faits, mais je puis dire qu’on a trouvé dans des couches successives des développements sériés d'organes qui correspondent tout à fait à ce que l’on peut prévoir d'après l’ontogénie des espèces actuelles; je cilerai la complexité d'ornementalion des Palu- dines fossiles, dans les bassins lacustres hongrois (Neumayr et Paul), complexité qui va en gran- dissant à mesure que l’on s'éloigne de la Paludina achatinoïdes, non ornée, des couches les plus infé- rieures ; l’évolution si curieuse et si graduelle des pieds et des molaires des chevaux américains, de- puis le minuscule Zo/ippus de l'Eocène inférieur jusqu'à l’£quus vérilable du Pliocène supérieur (Marsh), évolution parfaitement parallèle à l’onto- génie des pieds chez nos chevaux actuels; l’aug- mentation graduelle des bois des Cerfs, qui com- mence au Miocène pour se poursuivre jusqu'à nos jours (Dawkins), etc. Le principe biogénétique fondamental nous apparaît done comme l'hypothèse la plus simple et la plus vraisemblable que l’on puisse imaginer; malgré leur imperfection, les annales paléontolo- giques militent fortement en sa faveur. Il n’y a donc aucune raison plausible pour ne pas l'accep- ter avec toutes ses conséquences. Avant de mon- trer le parti qu'on en peut tirer pour reconstruire l'arbre généalogique d’un groupe, il me reste à le défendre contre une erreur inconcevable, qui est malheureusement très répandue. Les premiers auteurs qui ont étudié l’embryo- génie des Verlébrés, von Baer, Agassiz, Serres, ont parfaitement énoncé la loi en question pour les organes considérés isolément; mais d'autres, Fritz Müller et surtout Hæckel, en partant des Invertébrés, l'ont imprudemment étendue à l’es- pêce et ont conclu que l'animal repasse dans son développement par les stades qu'ont parcourus ses ancêtres dans le temps : la formule a séduit par sa simplicité, et aujourd'hui, à la suite d’Hæckel, on la reproduit journellement comme une vérité dé- montrée; naturellement, pour expliquer toutes les contradictions rencontrées, on a imaginé nombre de théories et force mots grecs. Il est juste de dire que divers auteurs, Lang et surtout Carl Vogt, ont tenté de réagir contre cette exagéralion. Mais, dira-t-on, si l’on peut soutenir que tous les organes d’un individu repassent séparément par les stades parcourus par les ancêtres de celui-ci, cela revient à dire que l'individu passe lui même par les stades ancestraux? Pas du toul ; supposons que notre individu ail eu des ancêtres A, B, C, D; chaque organe séparément doit repasser par les formes qu'il revêlait chez A, B, CG, D; mais, tandis que les uns vont très vite dans leur développement, les autres vont plus lentement, si bien que l’em- bryon à un certain moment peut avoir l'extérieur au stadeD, le tube digestifau stade C, l'appareil circula-. toire au stade À, etc, etles organes génitaux à l’état de zéro; les organes nécessaires très tôt, commele cœur par exemple, évoluant très vite, ceux qui ne serviront que plus tard ou qui n’ont pas beaucoup de transformations à effectuer, comme le tube digestif, allant d’un train beaucoup plus lent. Sans doute, cela serait plus commode si les formes larvaires ou de jeunesse reproduisaient absolument l’organisation des ancêtres; mais il n’en est jamais ainsi; jamais on ne peut arriver à reconstituer un ancêtre possible, viable, d’après l'examen d'une forme larvaire unique ; cela est si évident qu'il est bien inutile d’insister plus longtemps; Carl Vogt, Hérésies darwiniennes, est très juste- ment parti en guerre contre cette extension abu- sive du principe. Quand on dit qu'une Comatule est au stade Pentacrinoïde, qu'une Limule est au stade Trilobite, qu'un Cruslacé est au stade Mysis, qu'un Mammifère est au stade Poisson, qu'une Grenouille est au stade Salamandre, c’est un abus de langage manifeste qui sous-entend une erreur : car à ce moment l’animal considéré n'a pas du tout l’organisation d’un Crinoïde à lige, d’un Trilobite, d’une Mysis, d’un Poisson ou d’une Salamandre, mais simplement sa forme extérieure où quelques organes très visibles sont à des stades qui rappellent ceux fixés chez les animaux pré- cilés, qui peuvent très bien ne pas du tout compter parmi les ancêtres de la forme qu’on examine. En résumé, il faut restreindre absolument le principe biogénétique aux organes considérés iso- lément, et nous verrons tout à l'heure qu'il y a en- dans 5es 330 L. CUÉNOT. — LES ANCÊTRES ET LE DÉVELOPPEMENT DE L’'INDIVIDU core des restrictions à faire; mais c’est une grosse erreur, causée par un manque absolu de critique, que de l'appliquer à l'espèce complète; c'est cette extension fautive du principe qui a entravé jus- qu'ici les recherches phylogéniques pour nombre de groupes. Le terrain une fois déblayé, voyons comment l'on peut procéder pour retrouver l'arbre généalogique d’un groupe donné. - Nous allons reprendre comme exemple la classe des Batraciens, en simplifiant le plus possible pour être clair; a priori il est évident que nous n’avons aucune idée de la manière dontses divers membres se sont succédé; d'autre part les renseignements paléontologiques, fort peu nombreux, ne peuvent nous être d'aucune utilité. Il nous faut donc cons- truire notre arbre généalogique de toutes pièces ; mais on ne peut le faire qu’en connaissant parfai- tement : 1° l’anatomie comparée des espèces, c’est- à-dire les formes diverses revêtues parles organes; 2° Je développement ontogénique de chaque or- gane suivi avec soin, chaque fois qu'il change de forme, pour au moins une espèce de chaque ordre. Nous supposerons ces conditions remplies; d’ail- leurs, moins ellesle sont, plus l’approximation à la. quelle on arrive est grossière. On m'’accordera que lorsqu'un certain nombre d’espèces évidemment alliées entre elles ont des carac- tères communs, par exemple des branchies externes ou des vertèbres à corps biconcave, c’est que la forme ancestrale dontelles descendent avait aussi des branchies el des vertèbres biconcaves; sans cela, il serait incompréhensible que ces ca- ractères se répèlent identiquement dans toutes les espèces. C'est de cette hypothèse tout à fait vrai- semblable qu'on part pour définir l'ancêtre d’un groupe donné, en entrant dans le détail aussi pro- fondément que possible. Je laisse de côté les Apodes dont l'organogénie est mal connue el je passe tout de suite aux Pérennibranches, Pro- tées, Sirénides et Ménobranches. Tous les Pérennibranches adultes ont deux pou- mons et trois paires de branchies externes, des vertèbres biconcaves (amphicéliques), les os vo- mer el palatins garnis d’une rangée de dents, etc; leur ancêtre commun hypothélique, que nous ap- pellerons Prosiren pour fixer les idées, avail forcé- ment une organisation semblable. En prenant ainsi les caractères strictement communs à ces formes adultes et à leurs jeunes, on arrivera ainsi à définir le Prosiren presque aussi rigoureusement que si on le connaissait effectivement. Ce Prosiren ne sera identique à aucun des Pérennibranches actuels, mais en possédera tous les caractères com- muns. Passons maintenant aux Salamandrines, qui à l’état adulte n’ont ni branchies, ni trou branchial, et dont les vertèbres ont souvent la face postérieure concave (opisthocéliques); par le même procédé nous définirons la forme souche Prosalamandra. Ce second ancêtre diffère du premier par plusieurs ca- ractères, notamment la disparilion des branchies externes et la modification corrélative de la cireu- lation; nous pouvons affirmer qu'il descend du premier en ligne directe, car tous les organes des Salamandrines connues passent dans leur jeune âge (ontogénie) par un stade Prosiren ; en effet, les larves ont d'abord branchies externes au nombre de trois paires (fig. 3), et leurs vertèbres, avant d’être opisthocéliques, passent par une forme des Fig. 5. — A, jeune Zrilon, muni de branchies externes; B, Menobranchus lateralis Say., adulte (correspondant au stade transitoire À du Triton); C, Rana esculenta L., à l'état de Tétard (correspondant au stade fixé chez les Tri- tons adultes). amphicélique bien caractérisée, qui persiste d'ail- leurs chez plusieurs genres (Amblystoma, etc.) Nous définirons de même la forme souche des Anoures, que nous appellerons Prorana; ce Pro- rana diffère de la souche des Salamandrines par l'absence de queue, et le nombre réduit des ver- tèbres de forme variable; nous pouvons affirmer que le Prorana descend directement du Prosala- mandra, parce que les organes de tous les jeunes Anoures connus passent dans leur développement par les stades Prosiren et Prosalamandra ; la queue et les branchies externes existent chez le têtard (stade Prosiren), puis ces dernières s’atrophient (stade Prosalamandra); le nombre de vertèbres est d’abord assez élevé, puis il diminue par la suite, et de même pour les autres organes. Nous pourrons alors dresser l'arbre généalo- gique ci-contre ; il est à peine besoin de dire que j'ai simplifié et schématisé d’une façon excessive, dans le but de montrer clairement la méthode à suivre ; tout le long des traits obliques et verti- caux il se détache une foule de rameaux, les uns restant presque indivis et constituant ce qu'on ap- pelle les types aberrants ou de passage, les autres prospérant et donnant naissance à des groupes nombreux eteompliqués, qui constituent des ordres ou des familles, L. CUÉNOT. — LES ANCÊTRES ET LE DÉVELOPPEMENT DE L'INDIVIDU 331 On pourrait dire que cette reconstitution des formes ancestrales est vraiment par trop hypothé- tique ; sans doute, c’est une hypothèse, mais basée rigoureusement sur une loiaussi certaine que peut Anoures Prorana Salamandrines Prosalamandra Pérennibranches x Prosiren l'être une loi non expérimentale, et à laquelle on arrive en partant de faits précis d’organogénie el d'anatomie comparée. D'ailleurs la vérité de la méthode se prouve d'elle-même quand on la met en œuvre; j'ai étudié les Échinodermes exacte- ment par le même procédé, et l’arbre généalogique obtenu est si naturel et si harmonieux, l’évolution effective des organes s'accorde si bien avec ce que fait prévoir la théorie, qu'il faut que les principes sur lesquels on s'appuie soient vrais pour donner de tels résultats; si l’on se trompait de beaucoup, on arriverait fatalement à des données contradic- toires, à un gàchis complet. Jeffrey Bell, indépen- damment de moi, mais appliquant des principes analogues, est arrivé à un arbre généalogique presque identique au mien. Jusqu'ici j'ai supposé de parti pris, pour simpli- fier les choses, que le principe biogénétique était vrai à la lettre; mais il n’en est pas loujours ainsi; il y a toute une série de causes modificatrices qui empêchent souvent que l’ontogénie d’un organe soit exactement la même pour toutes les espèces d’un même genre. L'une des plus importantes est l’abréviation du développement ou organogénie condensée : on accordera, je pense, comme certain que tous les Batraciens supérieurs doivent avoir dans le jeune àge des branchies externes, rappe- lant le stade ancestral Prosiren; mais elles sont loin d'exister durant le même temps chez les di- verses espèces ; ainsi, c'est à peine si elles durent deux ou trois jours chez les tètards de Grenouilles et de Crapauds, tandis qu’elles persistent jusqu’à cinq et six mois chez les jeunes Salamandra macu- losa; cette abréviation considérable peut devenir encore plus grande, et chez l’Aylodes martinicensis, Anoure dont le développement s'effectue en entier dans l’œuf, on ne voit plus de branchies externes perceptibles sur le têtard, bien que probablement le stade Prosiren soil encore représenté. Cette abré- viation des stades n'arrive que très rarement, peut- êlre même jamais, à les faire disparaitre complète- ment; mais enfin elle peut compliquer singulière- ment les recherches phylogéniques; elle est d’au- tant plus intense que le genre de vie des jeunes s'éloigne plus de celui des ancètres, surtout chez les-espèces vivipares à développement intra-ma- ternel. Une autre cause modificatrice encore plus puis- sante est l'adaptation au milieu, qui amène au mi- lieu des stades ancestraux l'intercalation de stades nouveaux. Je suppose qu'un animal ait des an- cètres À, B, C, D; théoriquement ses appendices doivent repasser par les stades D, GC, B, A; mais, si au moment où il est au stade CG, par suite de la lutte pour l'existence, il est devenu indispensable à la larve d'acquérir de nouveaux appendices dé- fensifs, des piquants, elc., ceux-ci se développe- ront en constituant ainsi un nouveau stade C', qui n’a jamais existé dans la série des ancêtres, et qui se reproduira constamment dans les descendants de la larve considérée. Ces stades d'intercalation ou stades cœnogénétiques sont extrèmement fré- quents chez les larves à vie libre, et c’est presque toujours à leur influence que sont dues les formes larvaires parfois si variées dans un même groupe (notamment chez les Échinodermes, les Mollus- ques, les Polychètes, elc.); on comprend qu’iln’est pas toujours facile de décider si un stade donné est véritablement ancestral ou s'il a été acquis après coup pour assurer la vie de la larve ; on ar- rive généralement à le reconnaitre parce que ces stades varient beaucoup dans un même groupe d'espèces, ce qui serait inadmissible s'ils rappe- laient un caractère de l’ancêtre commun. Je ne fais qu'indiquer ces deux causes modifica- trices ; il y a encore bien d’autres sources d'erreur à considérer, mais je ne pourrais le faire sans sor- ür des bornes de cet article. On voit que ce n'est pas chose facile de reconstituer l'arbre généalo- gique des espèces actuelles, et qu’il faut au préa- lable des recherches suivies et poussées à fond sur l’'organogénie et l’anatomie comparées; je serais heureux si j'avais pu démontrer que c’est malgré tout une entreprise possible, qui ne laisse en somme qu'une place restreinte à la pure hypo- thèse. L. Cuénot, Docteur ès-sciences : Chargé d'un Cours de Zoologie à la Faculté des Sciences de Nancçy. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Halphen, — Traité des fonctions elliptiques et de leurs applications. Troisième partie. Fragments. 4 vol. in-8°; xvi-272 p. (8 fr. 50). Gauthier- Villars et fils, Paris, 1891. On sait que la mort a empêché Halphen de mettre la dernière main au grand Traité des fonctions elliptiques qu'il avait entrepris. Deux volumes sont complets : le premier contient un exposé de la théorie de ces fonc- tions, avec les notations de M. Weierstrass : le second volume contient d’admirables applications à la méca- nique et à la géométrie, dues en grande partie à Hal- phen lui-même, ou renouvelées par lui. Le troisième volume où se « serait déployé dans tout son éclat le talent d’Halphen, rompu aux problèmes les plus abs- traits de l'algèbre ! », était en quelque sorte attendu avec un désir particulier. Il devait contenir les belles et difficiles applications à l’algèbre et à la théorie des nombres. Depuis longtemps, Halphen avait dirigé ses efforts de ce côté et l’effrayant travail auquel il s'était obligé pour mener sa tâche à bien n'a peut-être pas été étranger au dénouement fatal de la maladie qui Va enlevé dans tout l'éclat de son talent. Il avait accu- mulé, pour ce troisième volume, une foule de notes, dont quelques-unes étaient entièrement rédigées, C’est de là d’où est sorti ce volume, incomplet sans doute, mais dont la richesse élonnera assurément ceux qui le liront. Ils s’y rendront compte de la manière de tra- vailler d'Halphen, de son goût pour les choses précises et terminées, de sa facon de pénétrer dans les ques- tions jusqu’au roc, de son talent pour voir et montrer le général dans les problèmes particuliers qu'il traitait, La section de géométrie de l’Académie des Sciences à laquelle Mme Halphen avait confié les manuscrits de son mari, chargea M. Slieltjes de trier, de classer les notes relatives aux fonctions elliptiques et d’en rendre la publication intelligible. Le savant professeur à la Faculté de Toulouse s’est acquitté de sa tâche avec un soin et un dévouement admirables : il aurait certai- nement été en mesure de reconstituer l’œuvre d’'Hal- phen, et quelques-uns regretteront qu'il ne l'ait pas fait. C’est une œuvre impersonnelle qu'il a accomplie, une de ces tâches que l’on qualifie d’ingrates, mais qui n’effraient pas les esprits généreux, Celle-là, d’ailleurs, lui vaudra la reconnaissance de tous les géomètres. Deux chapitres placés en tête du volume auraient sans doute figuré sans grandes modifications dans la rédaction définitive, Le premier se rapporte à la di- vision d’une période par cinq, pour la fonction p (u, w, wl); en posant GA — 0) ), b=p Li Halphen parvient, par un calcul très simple, aux équations du sixième degré, qui ont pour racines res- pectivement a + b, ab, (a b)? Les relations entre les racines de chacune de ces équations sont étudiées avec délail : ces relations ma- nifestent l'existence d'une résolvante du cinquième degré, et l'étude des racines de cette résolvante mène à la résolution de l’équation générale du cinquième degré. Le chapitre suivant contient une étude détaillée de la division par sept de l’une des périodes et les pro- positions générales relatives à la division des périodes 1 Picarp (E.): Notice sur Halphen. ET INDEX par un nombre premier n. Les belles propriétés algé- briques de l'équation du (n + 1)ème degré, dont le pro- blème dépend, sont exposées d’une facon lumineuse. L'auteur revient ensuite au cas particulier de n—7 pour former explicitement une des résolvantes du sep- tième degré; c’est l'étude de cette résolvante qui ter- mine le second chapitre, et c’est là qu'apparaissent dans la rédaction les premières lacunes. Le reste de l'ouvrage contient des « Fragments divers ». Le plus important et le plus complet se rap- porte à ce problème de la multiplication complexe daus les fonctions elliptiques, qu'Abel a posé, auquel MM. Hermite et Kronecker ont apporté une si riche contribution, et qui, plus que tous autres peut-être, montre les liens intimes de l’arithmétique et de la théorie des fonctions elliptiques. Le travail d'Halphen qui d’ailleurs a paru dans le Journal de Mathématiques pures et appliquées (4° série, T. V; 1889) concerne la multiplication par Ÿ—23; il comprend d'ailleurs un exposé général du problème et des méthodes qui per- mettent de le traiter : celle sur laquelle Halphen attire particulièrement l'attention est directe et ramène à une élimination algébrique la recherche du module des fonctions elliptiques à multiplicateur complexe : elle est appliquée au cas de la multiplication par V —23 de facon à pousser le problème jusqu’au bout, Le second fragment intitulé « Parties aliquotes des périodes », complète ce qui a été dit dans les cha- pitres Ier et II sur la division des périodes. Halphen y expose la décomposition en groupes des arguments 9r0 + 27'w! 2 Mn —= et étudie la décomposition correspondante de l'équa- tion algébrique dont dépendent les quantités p (W,). Enfin, le volume se termine par des fragments très précieux sur la théorie de la transformation. Si lisibles que soient ces fragments, grâce sans doute aux soins qu'a pris M. Stieltjes, ils échappent, par leur nature, à une analyse succincte. « Ces quelques pages, où l’illustre géomètre a laissé ses dernières pensées, seront accueillies par les amis d'Halphen et les admirateurs de son talent avec les sentiments de tristesse et de regrets que nous laisse à jamais sa mort prématurée. » Nous ne pouvons mieux terminer qu'en citant ces lignes où les éditeurs ont laissé voir la profondeur de leur émotion. Tous ceux qui aiment la science seront reconnaissants à MM. Gauthier-Villars de nous avoir donné ce volume, tel qu'il est, et rendront hommage au dévouement de M. Stieltjes, à la piété de Mme Hal- phen. J. TANNERY. WWVeber (H.). — Elliptische Functionen und alge- braische Zahlen. 1 vol. in-8°, xi1-504 p. Vieweg und Sohn. Braunschweig, 1891. Dans sa Préface, l'auteur a mis quelques lignes tou- chantes sur l’émulation qu'il ressentait, alors quil composait son livre, en pensant qu'il travaillait la même matière qu'Halphen et sur la surprise doulou- reuse qu'il éprouva en apprenant la mort de ce der- nier. Tout le monde saura gré à M. Weber de la facon dont il a parlé d’un homme qui occupait dans la science francaise une place si haute et si particulière. C’est en effet les applications à l'algèbre et à l’arith- métique, auxquelles devrait être consacré le troisième volume d'Halphen, que M. Weber avait en vue quand BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 333 il a écrit ces Fonctions elliptiques, et l’on sent celte préoccupation, même dans la partie où il expose les propriétés élémentaires de ces fonctions. La manière d'écrire de M. Weber est très remar- quable par sa concision : fout est extrêmement con- densé : on en donnera quelque idée en disant que les notions de pure algèbre qu'il a cru, avec grande rai- son, devoir mettre en tète de la partie algébrique, sont contenues dans vingt-cinq pages, et qu'elles com- prennent les propositions élémentaires de la théorie des substitutions, la notion du groupe abélien, le con- cept de corps algébrique, celui de groupe et de résol- vante de Galois,les propriétés fondamentales des équa- tions abéliennes,enfin lesnotions indispensables sur les nombres algébriques entiers et les fonctions algébriques entières d'une variable, La savante concision de l’au- teur ne nuit d’ailleurs pas à la clarté, mais elle exige chez celui qui l’étudie une forte tension d’esprit. Dans la première partie (Analytischer Theil), qui contient la théorie proprement dite des fonctions ellip- tiques, M. Weber prend, comme point de départ, les intégrales elliptiques et les formes normales de Le- gendre et de M. Weierstrass; il expose dès le début le principe de la transformation dans le sens de Jacobi, Le théorème d’addition est déduit du théorème d’Abel. Il passe ensuite aux fonctions 6 qu'il introduit par un procédé analogue à celui que M. Hermite a rendu familier; il emploie la notation à deux indices. La théorie de la transformation des fonctions 5 est traitée avec détail, et c'est à propos de la transformation que les fonctions 5 de M. Weierstrass sont introduites. L'étude des propriétés élémentaires des fonctions el- liptiques et des fonctions modulaires, suivie de deux eourtes applications, complètent cette première partie. La seconde partie (Algebraischer Theil) débute par un chapitre d'introduction dont il a été question plus haut. Elle contient ensuite la théorie de la multipli- cation et de la division, des équations de {ransforma- tion et en particulier des équations modulaires, de la résolution de l'équation du cinquième degré. La troisième partie (Zahlenthcoretischer Theil) se rap- porte aux applications arithmétiques de la théorie. C’est la multiplication complexe qui en fait la substance : l’auteur montre les relations intimes de ce problème avec l'étude, dans le sens de Gauss, des formes quadra- siques binaires, définies et positives. Il introduit la notion des invariants de classe; il apprend à former les équations algébriques dont ils dépendent (équa- tions de classe), et à décomposer ces équations d’après la distinction en espèces des formes quadratiques. Le livre de M. Weber est la première exposition d’en- semble sur un sujet aussi difficile qu'intéressant, et qui ne sera pas épuisé d'ici longtemps. Cette expo- sition se suffit à elle-même, l’auteur ayant eu soin d’ex- traire des théories d’arithmétique et d’algèbre qui touchent à son sujet tout ce dont il avait strictement besoin, en renvoyant aux ouvrages spéciaux ceux de ses lecteurs qui voudraient approfondir ces théories. Rien n’est plus utile, pour l'organisation des connais- sances dans l'esprit, que la lecture d’un livre comme celui de M. Weber, où viennent se réunir des théories de nature très diverse, dont chacune, prise en elle- même, émerveille sans doute celui qui s'y enferme pour l’étudier par l'étendue de ses développements, mais en lui laissant comme une inquiétude sur la va- leur de ces développements, valeur qui fait ressortir la comparaison avec une autre théorie. Tous ceux qui aiment l'algèbre seront reconnaissants envers M. Weber du livre qu'il vient de publier. J. TANNERY. Charvet, Répétiteur de génie rural à l'Ecole d'agricul- ture de Montpellier. — Essais âdynamométriques sur le tirage des houes, grappins et bineuses. Brochure de 35 pages avec figures dans le texte. Aux bureaux du Progrès agricole et viticole à Montpellier. 1892, 2° Sciences physiques. Tumlirz (D O.). Professeur à l'Université allemande de Prague. — Théorie électromagnétique de la lumière, traduit de lallemand par G. Van der Mens- brugghe, membre de l’Académie royale de Belgique (8 fr.). À. Hermann. 8, rue de la Sorbonne, Paris 1892. L'ouvrage dont M. Van der Mensbrugghe nous donne la traduction est un exposé de la théorie électromagné- tique de la Lumière d’après les idées de Maxwell. Ilest divisé en deux parties: l’une, préliminaire, intitulée Propositions générales sur le mouvement de l'électricité dans les corps en repos, occupe une cinquantaine de pages ; les cent pages qui suivent sont consacrées à la théorie électromagnétique de la Lumière : Lois de la propa- gation de la lumière, — corps isotropes; cristaux; expé- riences de Bolzmann sur le pouvoir inducteur spéci- fique des gaz, du soufre, — Réflexion et réfraction de la lumière à la surface de contact de deux milieux isotopes. Développement complet des formules, d’abord pour les corps isolants, et parfaitement transparents. — Réflexion totale, — développement des formules pour les corps conducteurs, absorbants. — Réflexion métal- lique, — absorption. — Enfin : Réflexion et réfraction de la lumière à la surface des mauvais conducteurs aniso- tropes, et quatre notes supplémentaires ajoutées par M. Tumlirz à l'édition francaise. L'un des chapitres les plus intéressants est celuiqui serapporte à la réflexion métallique, Pourquoi faut-il qu'un léger oubli le dé- pare ?A la page T4 et aux pages 96 et suivantes jusqu'à 116, l’auteur oublie dans l'expression de la vibration le 2 facteur —, qui dépend de la-période; il en résulte que l'influence de la couleur sur l'absorption et sur la vitesse de propagation n'apparait pas dansles résultats du calcul, tandis qu’elle est certaine dans les équations différentielles; origine de la contradiction purement apparente que l’auteur signale p., 76. Malgré cet oubli, d’ailleurs facile à réparer avec un peu d'attention, l'ouvrage du D' Tumlirz rendra des services aux lec- teurs français en les familiarisant avec les consé- quences de l'hypothèse de Maxwell, et les engagera à en diseuter le bien-fondé, à en examiner les principes dans les lecons plus approfondies mais d’une lecture plus difficile de M. Poincaré, L'impression de ouvrage est correcte et agréable, M. BRILLOUIN, Buguet (Abel) 455 p. in-A12 (4 fr). Niewenglowski (Gaston-Henri) : L'objectif photo- graphique; fabrication, essai, emploi, in-12 de 59 p. (2fr.). Heptworth (T.-C.) : Manuel pratique des pro- jections lumineuses, traduit de l'anglais par Klary. In-12 de 348 p. (5 fr.). Trois volumes de la bibliothe- que générale de photographie. Société d'éditions scien- tifiques, 4, rue Antoine-Dubois, Paris, 1892. L'année photographique 1891. L’'Année photographique 4891 est le premier numéro d’un périodique annuel destiné à préciser les progrès de la photographie. Cette publication pourra rendre des services sérieux non seulement aux amateurs pho- tographes, mais aux physiciens qu’elle tiendra au cou- rant des recherches faites à l'occasion de la photo- graphie, des décisions prises dans les congrès de photographie; et quelques-unes pourront à l’occasion ètre intéressantes. C’est ainsi que les décisions relatives aux unités lumineuses, adoptées au Congrès de 1891, méritent notre attention, Quelques nouveautés sur la photographie des objets très éloignés, sur la fixation et la mesure du temps de pose; — sur ce dernier point, il y a encore bien des progrès à faire, — l’expo- sition de la découverte de la photographie des cou- leurs, des renseignements sur le laboratoire d'essai des objectifs à Kew, rendent l'ouvrage de M. Buguet intéressant pour les personnes qui sont adonnées à la photographie. 334 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX L’Objectif photographique est un petit ouvrage rempli de détails instructifs. M. G.-H. Niewenglowski a voulu voir lui-même comment se fabrique le verre d'optique, comment se laillent et s’assemblent les lentilles, et il donne des renseignements pratiques d'autant plus utiles à tout le monde qu'ils se trouvent difficilement en dehors des ouvrages industriels. La manière d’essayer soi-même un objectif, d’en apprécier la valeur et d'en assurer la conservation, est brièvement et clairement indiquée. Le Manuel pratique des projections lumineuses est un livre beaucoup trop long pour ce qu’il renferme. Il n'est pas mauvais de savoir avec détails comment est faite une lanterne magique et la manière de s’en servir, mais on peut trouver que 348 pages, c’est beaucoup, surtout pour un ouvrage où il n'est pas question des projections à la lumière électrique. Les procédés, pour obtenir de la photographie des tableaux pour projec- tions sont décrits avec détails, et l’on trouvera, somme toute, bien des renseignements pratiques qui ne sont pas sans intérêt. Etait-il bien utile de traduire l’ou- vrage en français? En lisant quelques phrases comme celle-ci : « Si le tableau est entouré par une cache cir- culaire de 3 inch un condensateur de 3 inch 1/2 sera suffisant pour l’éclairer complètement », on se deman- derait peut-être plutôt si c’est bien en francais qu'on l’a traduit. Bernard BRUNHES. Gautier (Henri) et Charpy (Georges). — Leçons de chimie à l'usage des élèves demathémathiques spéciales. — Un volume grand in-8° de 468 pages avec 83 figures dans le texte (Prix 9 fr.\. — Gauthiers- Villars et fils, éditeurs, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1892. = Le traité de MM. Gautier etCharpy, par le but même qu'il vise, est limité à l'étude des métalloïdes. Les au- teurs ont relié les monographies de ces corps en fai- sant précéder leur étude de quelques chapitres de chimie générale, On remarque dans cette première partie le soin mis à préciser les définitions et autant que possible les hypothèses, à faire avec net- teté le départ de ce qui est certain de ec qui n’est vrai que dans de certaines limites. On peut espérer que cette netteté pourra faire pénétrer la notion spéciale de la certitude expérimentale dans desesprits disposés plutôt par une teinture de mathématiques à une rigueur toute métaphysique. Les auteurs exposent assez au long ce qui est relatif aux nombres proportionnels des corps simples (à leur nature, leur détermination expérimentale) et traitent avec sûreté la démarcation de ce qui constitue Ja nota- tion dite atomique et de la théorie atomique, Peut-être ont-ils été un peu brefs en ce qui concerne cette der- nière proprement dite. Quoi qu’on puisse penser eneffet de la valeur philosophique de l'hypothèse des atomes (pour notre part elle nous semble bien minime) et bien qu'autrefois en chimie elle ait pu sembler inutile, puisqu'elle n’expliquait que le fait pour lequel elle avait été imaginée, les travaux de MM. Lebel, Van t’Hoff Guye, etc, surle pouvoir rotatoire, de MM. Van t’'Hoff, Arrhenius, Raoult, Ostwald, Van der Waals, ete..., sur les solutions étendues, les conductibilités électriques, l'osmose, etc, ne permettent plus de la considérer comme sans importance. Certes les formules stéréo- chimiques semblent trop souvent aussi inutiles qu'in- certaines ; mais les travaux que nous venons de citer enlèvent cette théorie à l'usage exclusifdes imaginations romantiques, Ces questions il est vrai ne peuvent être abordées dans le traité de MM. Gautier et Charpy, et c’est là sans doute ce qui motive leur sobriété. Ce n’est pas d'autre part sans une sorte d’humilia- tion que j'ai vureparaître, bien que précédée partout de la notation courante, cette antique et peu vénérable notation équivalente. On se demande vraiment jusqu’à quand l’enseignement secondaire en France persistera dans des doctrines universellement abandonnées et dont les Etrangers vous demandent avec un air scandalisé ou railleur si on les apprend toujours en France, Mieux vaudrait pour beaucoup, ce me semble, supprimer l’enseignement chimique que le donner de telle facon que plus fard ils ne puissent rien comprendre aux livres qui traitent de cette science. Quel incroyable spectacle nous offre cette espèce d’orthodoxie chimique retranchée contre le progrès dans un ridicule non possu- nus et imposée à toute une nation par la routine! La partie relative aux équilibres chimiques est bien développée, très claire et donne bien l’idée des phéno- mènes, Je regrette cependant que les auteurs n'aient pas cru devoir donner la théorie qui relie les divers cas par la considération des vitesses de réaction et des masses en présence. C’est à mon sens une petite lacune, Elle est facile à combler dans une autre édition. Les monographies des différents corps simples com- mencent après cette introduction générale aux phéno- mènes principaux de la chimie et à sesloisnumériques, Elles sont disposées dans l’ordre des familles deDumas,et décrivent successivement les éléments monovalents, divalents, etc. Il faut louer les auteurs d’avoir dans cette partie vérifié les faits transmis de génération en génération et détruit parfois des légendes consacrées par les compilateurs. Il faut enfin constater la forme de l’ouvrage, son arrangement méthodique et son extrême clarté. Il est mis au courant des principaux progrès industriels et garde avecsa destination spéciale un esprit scientifique excellent, L. DEMARÇAY. 3° Sciences naturelles. H Wagner,— Geographisches Jahrbuch — XIV, Band, 1890/91.1 vol.in-8, de VILI-490 p. et 28 feuilles d'assemblage 1891 Idem XV. Band, 1891. 1 vol, in-8 de VI11-475 p. Justus Perthes, Gotha, 1892, Les deux nouveaux volumes du précieux Annuaire géographique que la maison Perthes publie sous la di- rection de M. le professeur H. Wagner sont redigés sur le même plan que le douzième et le treizième,dont nous avons rendu compte en 1890 (voir le n° 19 du t. I de la Revue, p. 615); le tome XIV, dont l'impression n’a pu être achevée que cette année, est consacré plus spé- cialement à la géographie proprement dite; nous y re- trouvons donc les collaborateurs de 1889, sauf quelques modifications dans le chapitre Voyages et explorations : l'Afrique (1888-89) est traitée par M. Hahn, remplacant M. Wichmann qui s'occupe désormais des Régions po- laires (4885-91) ; M. Hahn analyse également les travaux relatifs à l'Australie (1885-89). De plus, le rapport de M. le major Heinrich sur l'Etat de la cartographie offi- cielle embrasse cette fois, non plus seulement l'Europe, mais tout l'ensemble du globe, en y comprenant les cartes géologiques; l'examen des tableaux d'assemblage annexés à cet important document montre combien le progrès des levés topographiques est partout rapide. A signaler encore, dans le rapport de M. Wagner sur l'Enseignement et les Méthodes, la liste des chaires de géographie qui existent dans les Universités des divers pays de l'Europe, avec le nom des titulaires et lindi- cation des matières ayant formé l’objet des cours en 1890-91 (p. 412-420), et une intéressante série de no- tices sur le matériel et les collections géographiques existant dans vingt des principaux établissements sco- laires de l'Allemagne et de lAutriche (p. 420-462) : à cet égard, un retour sur nous-mêmes amènerait plus d’une amère réflexion. D’après le tableau dressé par M. Wichmann (p. 406), il existait dans les cinq parties du monde, en 1891, cent treize Sociétés de géographie, ne comptant pas moins de 52,000 membres, Que de besogne utile pourrait faire tout ce monde là. s'il était toujours bien dirigé! Le tome XV, comme le treizième, est entièrement affecté aux Sciences auxiliaires. En fait de changements survenus dans la rédaction, il n’y a à relever que la retraite de M. Schmarda (la géographie zoologique n’est pas représentée dans le volume) et celle de M. J. Hann, qui a heureusement trouvé un continuateur dans la 9 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX pérenne de M. le professeur Ed. Brückner (de Berne), ont chacun connaît la compétence en météorologie. Le rapport de MM. Hergesell et Rudolph sur la Physique terrestre est remarquablement complet; celui de M. Toula sur la Géologie géographique (1888-90) em- brasse un sujet tellement vaste qu'une analyse, même sommaire, de toutes les publications afférentes était impossible; pour une raison analogue M. Gerland, en passant en revue les progrès de l’Ethnologie, a dù lais- ser de ‘côté les travaux concernant les races euro- péennes. Quant aux rapports de MM. Schering sur le Magnétisme terrestre. Krümmel sur l’Océanographie, Drude sur la Géographie Botanique, ils se meuvent dans les sentiers ordinaires. Nous avons relevé dans la transcription des noms propres un certain nombre d'erreurs, qui ne sont pas sans importance lorsqu'il s’agit, comme ici, d'un ré- pertoire bibliographique : ainsi, XIV, p. 211, Emile de Beaumont au lieu de Elie de Beaumont; XV, p. 178, Gerland pour Gerlach ; p. 192, Bruckman pour Buckman ; . 231, Curier pour Curie, Flausand pour Flamand ; p. 233, Mayer pour Meyer ; p. 249, Davidson pour Davi- son, Le Hyades pour Hyades, etc. — Quelques lapsus se sont également glissés dans l'orthographe des noms de lieux : ainsi XIV, p. 225, Bronde pour Brioude: XV, p. 196, Boucou pour Boucau ; p.197, Breton pour Bre- tagne, d'Erbray pour Erbray ; p. 239, Belli pour Belly; p. 243, Dessert pour Desert; p. 244, Nantacket pour Nantucket.Gesont là si l'on veut, des vétilles, mais nous tenions à montrer quel'érudition allemande elle-même n’est pas toujours à l'abri du reproche d’incorrection qu'elle a si souvent adressé aux travaux publiés en France. Ajoutons que, p. 246 (XV), une confusion, qu’on a lieu d’être surpris de rencontrer en pareil lieu, s’est produite entre le Mexique et la Californie. Emm. DE MARGERIE. Marès (H.), Correspondant de l'Institut, membre de la Société nationale d'agriculture de France. — Descrip- tion des cépages principaux de la région médi- terranéenne de la France. Un volume grand in-folio carré avec 30 planches en chromolithographie et 120 p. de texte (publié en 3 livraisons) (prix 75 fr.). G. Masson, éditeur, Paris. 1891. Depuis l’invasion du Phylloxera, l’attention des viti- culteurs s'était portée avec juste raison vers les cépages américains résistants. Pendant les premières années de la reconstitution, on s’occupait fort peu des vignes francaises. On avait l'espérance de trouver des cépages américains suffisamment productifs pour pouvoir réta- blir, sans avoir recours au greffage, les vignobles détruits. Cette illusion fut de courte durée. Les viticulteurs ne tardèrent pas à s’apercevoir que les espèces du Nouveau- Monde ne pourraient pas remplacer nos anciennes vignes, et qu'il fallait absolument maintenir les cépages qui avaient rendu célèbre dans le monde entier la viticulture francaise. Cette question, de la plus haute importance, était résolue par le greffage et désormais, on s’habituait à considérer la vigne américaine comme l’alliée de la vigne européenne. Au début des plantations de vignes greffées, le vin était rare, de sorte que jusqu’à ces dernières années on recherchait avant tout une très grande production, Les vignobles reconstitués se composaient d’un nombre fort restreint de nos anciennes vignes et l’aramon for- mait la base des nouvelles plantations. Par suite de l’abondance des produits, on est amené aujourd’hui à modifier cette tendance. Le vin doit pos- séder certaines qualités, sans quoi il est difficile de le vendre à un prix rémunérateur, aussi cherche-t-on à obtenir des vins meilleurs, et cette tendance s’accusera de plus en plus, puisque l'étendue du vignoble francais s’accroit sans cesse. Il faudra donc, à l'avenir, dans le midi de la France, choisir des cépages qui, par leur ensemble, permettent d’allier une. bonne production à une qualité suffisante, Pour arriver à ce résultat, il 339 est nécessaire de connaître les nombreuses variétés de vignes propres à une région déterminée, la diversité de leurs propriétés et les ressources qu’elles peuvent fournir. M. H. Marès a réuni ses observations failes à ce sujet pendant une longue série d'années, et il vient de faire paraître un ouvrage intitulé : Les Cépages principaux de la région méditerranéenne de la France. M. Marès est un de ceux qui connaissent le mieux la viticulture méri- dionale, et il a beaucoup contribué à son rapide per- fectionnement. Ses travaux sur l’oidium sont restés célèbres, et les règles qu'il a données en viticulture sont suivies avec soin. L'ouvrage de M. Marès donnera aux viticulteurs les indications les plus sûres. C’est une étude appro- fondie, aussi complète que précise de tous les cépages du midi de la France. Une chromolithographie de gran- deur naturelle accompagne la description de chaque cépage et forme un complément d’une très grande uti- lité. L'introduction de cette œuvre remarquable est réservée à l’étude des moyens de lutter contre le Phyl- loxera, M. Marès s'occupe ensuite de la description des espèces américaines, de leur adaptation et de leur ré- sistance, du choix des cépages francais, suivant les eonditions de milieu et de toutes les opérations viti- coles pratiquées depuis l'invasion phylloxérique. En somme, cet ouvrage est une monographie des cépages et des procédés viticoles actuellement en usage dans toute la région méridionale de la France. MA7ADE. Korotneff (A. de) — La Dolchinia mirabilis (nouveau Tunicier). — Mittheilungen aus den Zoologis- chen Station zu Neapel, vol. X, 2° part., 2 planches. 1891. La Méditerranée, sans contredit, est de toutes les mers celle dont la faune pélagique a été le mieux étudiée. Sans parler des recherches longtemps pour- suivies par les anciens naturalistes, on sait avec quelle ardeur le personnel de la Station zoologique de Naples et les pêcheurs du pays, stimulés par lappât d’une récompense, surveillent depuis tantôt vingt ans les eaux du Golfe, C’est là cependant qu'a été découvert, en février 4891, le remarquable Tunicier nageur dont le Dr A. de Korotneff, professeur à l’Université de Kiew et directeur du Laboratoire russe de Villefranche, près de Nice, vient de publier une intéressante étude. « Ce spécimen inconnu se présente, dit l'auteur, comme un corps cylindrique, mesurant 2 centimètres de diamètre sur une longueur de 35 centimètres en- viron, » Ce n’est, du reste, qu'un troncon et la longueur totale de la forme entière doit dépasser beaucoup la dimension indiquée, Cette sorte de cylindre « est géla- tineux, transparent et jaunâtre. A travers la trans- parence, près d’un côté, on distingue nettement l'existence d’un axe, tube colonial. Une secousse imprimée à l’ensemble en fait détacher des êtres salpi- formes. L’axe se dénude ainsi rapidement, tout en restant couvert de petits bourgeons. » Qu'est-ce en réalité que ce type nouveau appelé Dolchinia? Ce nom évoque le souvenir de l’Anchinia et du Doliolum, Tuniciers fort intéressants tous deux et qui ont, l’un comme l’autre, certaines affinités avec la Dolchinia. M. de Korotneff se livre à une discussion approfondie des rapports et des différences qui existent entre ces trois genres, lesquels doivent constituer parmi les Cyclomyaria d'Uljanin, une famille spéciale. De nombreux détails anatomiques et histologiques sont donnés par l’auteur qui termine son travail par diverses considérations générales sur la philogénie des Tuni- ciers nageurs. Il est à regretter que la forme agame de la Dolchinia soit encore inconnue. Souhaitons qu'un heureux hasard la mette-entre les mains du professeur de Korotneff et lui fournisse l’occasion de compléter l’histoire, si bien commencée, de ce Tunicier remarquable. Jules de GUERNE. 336 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Henry (Ch.) Loi générale des réactions psycho- motrices, in-8°, 37 p. (2 fr.). F. Alcan, Paris 1891. M. Ch. Henry a réuni et résumé dans ce mémoire trois communications qu'il avait faites à l'Association française pour l'avancement des Sciences : 4° sur le principe et la graduation d’un thermomètre physiolo- gique et le coefficient de dilatation des gaz parfaits: 2° sur l'éducation du sens des formes et du sens de Ja couleur; 3° sur la dynamogénie et l’inhibition, Ces tra- vaux, si différents en apparence, sont le développement des mêmes principes. Ils tendent tous à démontrer par l'expérience l'existence d’une loi générale des ré- actions psycho-motrices, qui revêt quatre formes bien distinctes dans les quatre groupes de sensations, en- visagés par l’auteur : A. sensations de son, de lumière, de pression, de travail. B. sensations de pigment, d’odeur et de saveur. C. sensations de forme, D. sensa- tions de température. Chez les sujets normaux, il ya, d’après cette loi, anesthésie relative ou hyperesthésie, dynamogénie ou inhibition motrice, suivant que les ya- riations d'excitation sont caractérisées où non, par des nombres que l’auteur appelle rythmiques et qui affectent la forme 22,2 + 4 ou sont le produit de 2° par un ou plusieurs nombres de cette forme, Toutes les sensations peuvent donc se distribuer rationnelle- ment en deux classes : les sensations à type d’expres- sion dynamogène (son, lumière, pigment, odeur, forme, etc.,) et les sensations à type d'expression in- hibitoire (température). Ce qui se traduit dans la cons- cience objectivement sous forme de dynamogénie ou dinhibition se traduit subjectivement sous forme de plaisir ou de peine. Inhibition et dynamogénie sont en rapport avec des mouvements d'expression qui tous peuvent se ramener à des cycles de rayon variable, et qui expriment les excitalions d'une part, et d'autre part le travail physiologique correspondant par des changements de direction dans un plan. « Le problème était de constituer la mathématique symbolique spé- ciale qui fait attribuer par l'individu normal à tel excitant tel point dirigé (théorie du contraste) et de déterminer les conditions de continuité et de disconti- nuité d'action de son mécanisme dans l'appréciation de l'écart de deux ou plusieurs points dirigés, suggérés par des variations d’excitation (théorie du rythme et de la mesure), » La méthode à consisté ensuite à véri- fier expérimentalement les résultats du calcul, Nous avons essayé d'indiquer le contenu de ce mémoire en nous servant autant que possible des expressions même employées par l’auteur; nous ne pouvons songer à en discuter les conclusions qui sont liées à toute la théorie, si originale, de M. Henry sur la sensibilité et l'expression, dans les étroites limites d’un compte rendu. L. MAniILLIER, 4° Sciences médicales. Terrier (F.), et Hartmann (H.). — De l'extirpa- tion de l'utérus par la voie sacrée. — Annales de Cynécologie, août et septembre 1891, p. 80 et 178. Deux observations personnelles, rapprochées de 21 autres, permettent aux auleurs de tracer l’histoire de cette nouvelle opération, L'intervention est délicate. expose à des accidents nombreux : Hémorrhagies, dif ficulté dans l'ouverture du périloine que l’on ne re- connaît qu'avec peine, lésion du rectum, de Ja vessie, de l'uretère ; cellulite pelvienne, pelvi-péritonite, phlegmatia, nécrose d’un fragment osseux réappli- qué, etc. Sur 23 cas on relève 7 morts, Aussi cette opé- ration ne peut-elle subir le parallèle avec l’hystérec- tomie vaginale, Elle mérite cependant d’être conser- vée pour les cas où cette dernière n’est pas applicable, et est indiquée dans les cancers volumineux et adhé- rents, surtout lorsque le vagin est rélréci et scléreux. Passant en revue les divers procédés opératoires em- ployés, incision parasacrée, résection oblique du sa- crum et ablation du coccyx, opérations ostéoplastiques, les auteurs insistent sur la nécessité dé créer une brèche large, de se donner du jour; c’est le seul moyen d'opérer facilement et d'assurer par là même la gué- rison de la malade, D' Henri HARTMANN. Netter, — Étude bactériologique de la broncho- pneumonie; Arch.de médec. expérim., 1892, t. I, p. 28. La bronchopneumonie, dans l'immense majorité des cas, chez l'enfant comme chez l'adulte, est toujours due à l’une des quatre espèces pathogènes suivantes : pneumocoque, streptocoque pyogène, bacille encapsulé de Friedlander, staphylocoques de la suppuration. Le plus souvent, le foyer bronchopneumonique ne renferme qu'une seule de ces espèces microbiennes ; mais on peut en rencontrer plusieurs dans le même foyer : c’est surtout le cas chez l’enfant,. Dans la bronchopneumonie de l’adulte, le pneumo- coque est notablement plus fréquent que le strepto- coque. Chez l'enfant, la fréquence des deux microbes est sensiblement la même, Les bronchopneumonies à pneumocoques et à strep- tocoques peuvent être, les unes comme les autres, à noyaux confluents ou disséminés, et la forme pseudo- lobaire n’est certainement pas spéciale ni exelusivement propre au pneumocoque. D'une manière générale, les streptocoques se ren- contrent dans les bronchopneumonies de la diphtérie, de l’érysipèle, de l'infection puerpérale, les pneumo- coques dans les bronchopneumonies au cours des ma- ladies rénales, Les agents pathogènes de la bronchopneumonie pro- viennent de la cavité bucco-pharyngée, qui peut les héberger tous chez des sujets sains. D'H. HaRTMANN. WWurtz (D'R). Note sur deux caractères différen- tiels entre le bacille d'Eberthet le Bacterium Coli commune.— Arch.de Méd. expérim, 1892, t. IV,p. 84. En semant dans des milieux légèrement alcalins addi- tionnés de sucre de lait et de teinture de tournesol le bacille d’Eberth et le Bucterium Coli, on a au bout de vingt-quatre heures une différenciation des plus nettes entre ces deux micro-organismes. Le Bacterium Coli rougit énergiquement le tournesol et développe des bulles de gaz. Le bacille d'Eberth lui laisse sa colora- tion bleu violet, Si, sur des tubes de gélose, on sème le bacille d’'Eberth et qu'au bout d’un temps suffisant de séjour à l’étuve, on racle la surface de culture, le bacille d’'Eberth ne se développe plus sur la surface ainsi dé- nudée; le Bacterium Coli s'y développe. D'autre part, le bacille d’Eberth ne se développe pas non plus sur les cultures du Bacterium Coli dénudées de la même facon. D° Henri HARTMANN. Balland (A.), pharmacien principal. — Recherches sur les cuirs employés aux chaussures de l’armée. Une brochure in-8° de 90 pages. Veuve Rozier, 20, rue Saint-Guillaume. Paris, 1892. Un commandant de corps d'armée, recevant récem- ment les médecins de réserve et de territoriale, leur disait que le premier soin d'un médecin militaire est de veiller à la chaussure des hommes. On comprend l'importance que les officiers et par suite le Ministre de la Guerre attachent à l’état des chaussures des troupes ; aussi l'Administration de la Guerre avait- elle chargé M. Balland d'étudier les cuirs employés aux chaussures de l’armée. Nous ne pouvons analyser son travail, qui est très spécial, On y trouve cependant des renseignemeuts intéressants, celui-ci entre autres : les cuirs sont souvent traités par l'acide sulfurique dilué (1/1500 dans le procédé Seguin), L’em- ploi de cet acide n'offre pas d’inconvénient si les chaussures sont immédiatement utilisées, l'acide étant entraîné par les pluies et la boue; mais il n’en est plus de même pour les chaussures de réserve des approvi- sionnements de la guerre. L'acide agit lentement sur les coutures et l’on voit celles-ei céder dèsla première étape, alors qu’au moment de l’examen d'entrée aux magasins elles pouvaient être considérées comme bonnes, L, O, ACADEMIES ET SOCIETÉS SAVANTES 337 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADEMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 19 avril. 1° SCIENGES MATHÉMATIQUES. — M. A. Tresse : Sur les invariants différentiels d'une surface par rapport aux transformations conformes de l’espace. — M, J. Bous- sinesq : Calcul de la diminution qu'éprouve la pression moyenne, sur un plan horizontal fixe, à l’intérieur du liquide remplissant un bassin et que viennent agiter des mouvements quelconques de houle ou de elapotis. — M. Bosscharevient sur la question de la comparai- son entre le mètre des archives etle nouveau prototype international du Mètre, qu’il juge trop court d'environ 2u, 5. M. Fœrster avait répondu (C. R., 20 septem- bre 1891) que la comparaison d’un mètre à bouts, comme celui des archives, avec un mètre à traits comme le prototype international, ne peut être fait à une approximation aussi petite que cette valeur ; M. Bosscha maintient que la précision d’une tellecom- paraison peut atteindre le demi-micron, et quel’erreur du mètre international provient de ce que l’on a admis un coefficient de dilatation trop fort pour le métal du mètre des archives. — M. G. Le Cadet : Observations de la comète Swift(1892, mars 6) faites à l’équatorial Brunner de l'observatoire de Lyon. — M. E. Roger, dans une précédente communication, avait cherché à exprimer les rapports des distances des planètes au soleil, au moyen d'une exponentielle modifiée par une inégalité périodique ; il indique que l’on obtient une approximation beaucoup plus satisfaisante en introdui- sant une seconde inégalité périodique, qui d’ailleurs n'influe sensiblement que sur deux planètes, Uranus et Jupiter ; les distances qui séparent chaque planète de ses satellites sont régies par une loi analogue, — M. Faye présente d’intéressantes photographies célestes obtenues par M. Max Wolf à Heidelberg. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — À propos des communica- tions récentes de M. Le Châtelier, M. Crova rappelle ses méthodes optiques de mesure des hautes tempéra- tures,”"qu'il exprimait simplement en degrés optiques ; la sensibilité de cette méthode ne laissait rien à dési- rer ; quant à la traduction des degrés optiques en degrés centigrades effectuée par M. Le Châtelier, à partir de 1600°, elle est d’une exactitude douteuse, 3° SCIENCES NATURELLES, — M. C. Houlbert a entre- pris l'étude du bois secondaire des tiges dans la série végétale au point de vue des caractères anatomiques pouvant servir à la classification ; ii donne les résul- tats de ses premières recherches, relatives aux apétales à ovaire infère. — M. A. Lacroix a comparé les cris- taux d’'Andalousite des divers gisements de l'Ariège, et il a reconnu que l’on peut fixer pour ce minéral des formes différentes et caractéristiques suivant la roche qui constitue le gisement, — M. G. Capus résume les observations qu'il a pu faire en un grand nombre de. points de l’Asie centrale sur le /œss si important de cette région ; sa conclusion sur l’origine de ce terrain, c'est que c’est un dépôt aquatique, et non éolien , il est quelquefois nettement stratifié, en alternance avec des couches argileuses ou sablonneuses ; la genèse du læss par alluvionnement pluvial se poursuit encore à l’époque actuelle. MÉvoIREs PRÉSENTÉSs— MM, Manuel Lévy et E. Tarin communiquent divers résultats relalifs à des perfection- nements qu'ils ontapportésaux procédés de travail de l’a- luminium.— M. F.de Mély signale un passage de Stra- bon relatif à un insecte qui attaque la vigne, et décrit les expériences qu’il a entreprises pour appliquer à des vignes phylloxérées le traitement indiqué par Strabon. . NÉCROLOGIE , — M. Abriu, correspondant pour la sec- tion de physique. Séance du 25 avril. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, R. Liouville : Sur un problème d'analyse qui se rattache aux équations de la dynamique. — M. Charlois : Observations de deux nouvelles planètes, découvertes à l'observatoire de Nice les 22 mars et 1°° avril 1892, — Le P. F. Denza présente une photographie de la nébuleuse de la Lyre avec { h. 50 de pose; l'étude microscopique du cliché révèle des détails qui avaient échappé à l'observation directe; l’objet situé au centre du fond obscur et con- sidéré comme une étoile se révèle comme un amas, ainsi qu'un objet voisin signalé comme douteux par le P. Secchi. — M. Tacchini : Observations solaires du 17 trimestre de 1892, 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. C. Maltezos propose pour exprimer l'angle de raccordement d'un liquide qui ne mouille pas le verre une nouvelle équation approximative; il indique en outre une méthode simple pour mesurer directement cet angle, — M. H. Bagard à étudié, au moyen d’un dispositif particulier qu'il décrit, les phénomènes thermo-électriques au contact de deux électrolytes. — M, G. Lippmann : Sur la photographie des couleurs (Voir le numéro pré- cédent de la Revue), — M. Fayëe expose l'historique des théories et des tentatives américaines visant à pro- voquer un orage, un cyclone, et par suite la chute des pluies, au moyen d'une colonne ascendante d'air chaud; il montre que de telles expériences ne réali- sent aucune des conditions nécessaires à la formation d’un cyclone, 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Julien, qui avait formulé antérieurement une loi relative à la position des centres nerveux dans la série animale a légèrement modifié sa formule et l’exprime ainsi : il y a un rap- port constant et direct entre la position des principaux centres nerveux et celle des principaux organes sen- soriels et locomoteurs. — M. A. Terreil donne l’ana- lyse d’un argile chromifère du Brésil, C’est une argile smectique contenant près de 2 °/, d'oxyde vert de chrome. — MM. L. Duparc et A. Delehecque ont ana- lysé les vases et les matières solides des eaux des lacs d’Aiguebelette, de Paladru, de Nantua et de Sylans. Il est probable que pour ces lacs comme pour celui d'Annecy, étudié antérieurement par les mêmes au- teurs, les eaux apportées par les affluents s’appauvris- sent en matières fixes sous l’influence des organismes vivant dans le lac. — M. A. de Tillo expose en un tableau la répartition des terrains occupés par les groupes géologiques suivant les latitudes terrestres ; celte répartition semble complètement irrégulière; il en est de mème de la répartition suivant les longi- tudes. Mémoires présentés. — M. Ribard adresse une note sur un essai d'explication du magnétisme terrestre, — M. J. E. Estienne adresse une note relative au nombre des nombres premiers inférieurs à une limite donnée; sa formule suppose connus tous les nombres premiers inférieurs à une limite P, ; il en déduit le nombre des nombres premiers inférieurs à P° re AR , désignant les nombres premiers supérieurs à P,. Séance du 2 mai 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. M. Hamy : Sur l’ap- proximation de fonctions de très grands nombres, — M. P. Appell traite le problème suivant: soit un sys- 398 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tème à liaisons indépendantes du temps, sollicité pa des forces connues, sa position étant définie par K para- mètres géométriquement indépendants ; quelles nou- velles liaisons, au nombre de K — 1, faut-il imposer au système pour que le système a liaisons complètes ainsi obtenu soit tautochrone, c’est-à-dire mette le même temps à revenir à une position déterminée, quelle que soit la position initiale dans laquelle on l’abandonne à lui-même sans vitesse. —MM. Rambaudet Sy : Obser- vations des comètes Swift (mars 6), Denning (mars 15) et Winecke faites à l'observatoire d'Alger à l'équatorial coudé. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. À Chassy propose une loi générale pour rendre compte de lélectrolyse ; si dans une substance à formule complexe Mr R1 on rem- place par la pensée M? par une quantité d'hydrogène Hx telle qu’on obtienne un composé hydrogéné connu et nettement défini, M» est dit quantité correspondante de Hx* ; la loi s'énonce alors : lorsqu'on electrolyse une substance quelconque, il se dégage toujours 1 équi- valent d'hydrogène ou la quantité correspondante du radical electropositif (pendant que dans le même circuit il se dégage 1 équivalent d'hydrogène d’un voltamètre à eau). — M. F. Parmentier avait signalé antérieure- ment l'existence de dissolutions anormales telles que, la dissolution du solide étant totale, on ne peut pas obtenir un mélange homogène par addition d'une quantité quelconque de dissolvant; un excès de celui- ci se sépare. M. Parmentier a trouvé un nouvel exem- ple de ce fait dans la dissolution de l'éther bromuré de M. Schützenberger dans l’éther. Ilexamine la saturation à un point de vue général et propose la définition sui- vante: lorsque des corps peuvent sans combinaison conner un liquide homogène, la solution est dite saturée, quand l’un des corps ajouté en excès à la so- lution se sépare de cette solution, — M. Ad. Carnot à utilisé la m_thode de dosage du fluor qu'il à exposée précédemment (C. R., 28 mars) pour doser cet élément dans les différentes variétés de phosphates naturels. — M. L. de Saint-Martin ayant noté que la solution chlorhydrique de protochlorure de cuivre n'absorbe pas dans les conditions ordinaires tout l’oxyde de carbone de l'atmosphère avec laquelle on l’agite a été amené à imaginer un procédé permettant néanmoins de doser par ce réactif de petites quantités (de un à dix mil- lièmes) d'oxyde de carbone dans l'air, — M. de For- crand a repris l'étude thermique de la fonction phénol ; la chaleur de formation du phénate de sodium, phénol solide -- Na sol. — phénate sol. + H gaz, = 39 cal. ; cette valeur est intermédiaire entre celle donnée par les alcools et celle donnée par les acides ; en particu- lier, elle est exactement la moyenne entre la valeur fournie par un alcool tertiaire (le triméthylcarbinol) et l'acide acétique. — M. P. Cazeneuve : Sur une éthylni- trocétone et une acétylnitrocétone dérivées des cam- phosulfophénols, — M. G. Hinrichs : Détermination de la surface d’ébullition des paraffines normales, — M. G. Denigès a cherché à obtenir des combinaisons des sulfites métalliques avec les bases pyridiques comme il en avait obtenu avec les amines aromatiques primaires : seuls les sulfites neutres de zine et de cad- mium se sont combinés à la pyridine pour donner les composés de formule SO3, M”, C5 HS Az ; les autres bases pyridiques, dans les mêmes conditions de réaction, ne donnent pas de combinaison et mettent en liberté du sulfite métallique pur, probablement par dissociation instantanée d’une combinaison instable. — M. M. Mes- lans a obtenu le fluorure d’acétyle en faisant réagir divers fluorures métalliques sur le chlorure d’acétyle, il décrit quelques propriétés de ce composé. — M. Ch. Lauth a préparé la diamidosulfobenzide; ce corps donne facilement des dérivés diazoïiques qui fournissent de belles matières colorantes. — MM. A. Trillat el de Raczkowski ont préparé diverses matières colorantes dérivées de la tétrazochrysaniline ; les propriétés colo- rantes de ces matières sont inférieures à celles de la cbrysaniline ; ils ont préparé aussi divers dérivés alkylés de la chrysaniline, qui ne présentent non plus qu'un intérêt secondaire au point de vue de la teinture, 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Marey présente des chronophotographies microscopiques, obtenues au moyen du dispositif qu'il a décrit dans la Revue géné- rale des Sciences, 15 novembre 1891. — M. Stackler a déterminé la toxicité pour les animaux supérieurs et le pouvoir antiseptique de l’asaprol (sel calcique du 8 naphtol monosulfoné en «) — M. L. Vaïllant a étu- dié quelques poissons des rivières du haut Tonkin, rap- portés par M. Pavie ; il y a plusieurs espèces nouvelles M. Vaillant remarque que, malgré le petit nombre de documents dont on dispose, cette faune ichthyologique accuse nettement un caractère mixte, elle est en partie orientale, en partie mantchourienne, — MM, A. Gard etJ. Bonnier, en partant de l’étude d’un échantillon de Cerat aspis Petiti conservé au laboratoire de Wime- reux, examinent les caractères et la position systéma- tique de ce curieux genre de crustacés. — M. P.Hallez expose la loi générale du développement des Rhabdo- cœælides et des Triclades (Turbellariés). — M. M.Causard a examiné la circulation chez de jeunes araignées, sur quinze genres de Dipneumones ; il expose les résultats de cette étude. — MM. Bleicher et P. Fliche ont re- trouvé dans le trias de Meurthe-et-Moselle les Bactryl- lium signalés par Heer dans le keuper des Alpes. Ces organismes, que l’on a comparés à des Diatomées gigan- tesques (0001 et plus) constituent un fossile caracté- ristique du trias supérieur. — M. Ch. A. François- Franck s’est servi de l’action locale de la cocaïne pour diverses recherches de physiologie générale; injectéee en très petite quantité sous la gaine d’un nerf, la cocaïne en effectue temporairement la section physiologique, la restitutio ad integrum du conducteur se produit au bout de quelques minutes. La cocaïnisation locale permet également de supprimer l’excitatibilité directe des dif- férentes parties du cœur, ainsi que l’excitabilité réflexe de l’endocarde et de l'aorte, — M. L. Simon décrit un bolide qu’il a observé à Paris le 24 avril dernier. Mémoires présentés. — M. A. Lissenco soumet au ju- gement de l’Académie plusieurs mémoires relatifs à diverses questions de mathématiques. — MM. Berrus et Berthot adressent une note sur une nouvelle roue hydraulique horizontale. — M. Merlateau adresse une note sur la théorie de l’injecteur Giffard. L. LAPICQUE. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 19 avril M. Proust : Rapport sur l'enquête concernant l’épi- démie de grippe de 1889-1890 en France ; discussion : MM. Léon Colin, Larrey, Proust et Lancereaux. — M. G. Sée : discussion sur le traitement de la pleurésie, Séance du 26 avril M. Ch. Perier : Rapport sur un travail de M. Dubar (de Lille) intitulé : Contribution à l'étude des variétés exceptionnelles de hernies inguinales ; hernie ingui- nale droite à sac diverticulaire latéral rétro-funiculaire ; étranglement produit par lorifice de communication des deux sacs ; kétotomie ; guérison. — M. Panas: Rapport sur un mémoire de M. E. Landolt, intitulé : De l'abus du mercure dans le traitement des maladies des yeux. — Discussion sur le traitement de la pleu- résie : MM. A. Guérin, Peter, Verneuil, Hardy et G. Sée. Séance du 3 mai M. Nivet (de Clermont-Ferrand) est proclamé asso- cié national. — Suite de la discussion sur le traitement de la pleurésie : MM. Dujardin-Beaumetz, Peter, L. Colin, Dieulafoy. — M. Lancereaux : Sur la fièvre pleurétique. De la communication de Pauteur il résulte qu'il existe une maladie de la plèvre qui, à cause de sa lésion constante et de son évolution, mérite le nom de fièvre pleurétique. La thoracentèse doit être appliquée ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 339 — dans les diverses périodes de la maladie. Le moment le plus opportun est celui où la fièvre vient à tomber. SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du 2 avril. MM. Alezais et d'Astros décrivent la circulation artérielle du pédoncule cérébral. — M, Petrini a cons- taté dans le pancréas du chat la présence de nombreux corpuscules de Paccini et de ganglions nerveux. — MM. Athanasescu et Grigoreseu ont expérimenté Paction physiologique du butylchloral; comme le chlo- ral ordinaire, ce corps exerce une action soporifique chez tous les animaux, mais il est plus actif, plus toxique et aussi plus irritant que son homologue, — M. E. Bataillon répondant à M. Metehnikoff, relativement à la phagocytose musculaire, insiste sur ce point que toutes les figures publiées par M. Metchnikoff sont sus- ceptibles d'une interprétation autre que celle donnée par cet auteur, — M. Pilliet a étudié l’état de la rate chez les vieillards : cet organe présente les signes d’une dégénérescence, dont les traits constants sont la sclérose de la capsule et des travées fibreuses ; la dila- tation des mailles de la pulpe rouge, enfin la dispari- tion plus ou moins totale des éléments de la pulpe blanche, — M, Charrin présente un cœur atteint d’une hypertrophie considérable, qui provient d’un singe mort d'une tuberculose rapide. — M, P. Regnard rapporte des expériences faites dans le but de déter- miner l’action de la dynamite à distance sur les ani- maux aquatiques ; ceux-ci sont plongés par l'explosion dans un état de choc qui disparaît à la moindre excita- tion. — De nombreux examens pratiqués en Tunisie sur le sang des paludéens par M. Arnaud, il résulte que : 4° l’hématozoaire décrit par M. Laveran existe constamment; il est pathognomonique; 2° les diverses formes observées sont des états successifs d’un même parasite polymorphe et non des espèces différentes. — M. Henneguy a étudié le développement de l’endo- derme chez l'embryon du lapin pendant les premiers stades ; cette étude l’a amené à décrire un endoderme ombilical comparables à l'endoderme vitellin des oiseaux, tant au point de vue de sa fonction physiolo- gique qu'au point de vue de sa constilution histo- logique, — M. Brivois : De l’électrolyse médicamenteuse cutanée (passage à travers la peau sous l'influence d'un courant voltaique de chloroforme se retrouvant dans les urines), Séance du 9 avril. M. Galezowski rapporte un cas d’astigmalisme va- riable, chez une hystérique, astigmatisme qu’il rapporte à la contracture partielle du musele accommodateur. — M. A. Robin à propos du travail de M. Vianna (séance du 26 mars) rappelle qu’il a signalé en 1887 les pro- priétés antiseptiques de l’antipyrine. — M. Ch. Richet présente, au nom de M. Triboulet, un chien atteint de chorée expérimentale; cet animal avait reçu, il y a quatre mois, deux cent. cubes de la culture d’un mi- ero-organisme recueilli dans le sang d’un chien cho- réique. — M. Gley a constaté que chez les chiens privés de pancréas, l'élimination de l'acide salicy- lique par les urines à la suite de l'ingestion de salol, suit la même marche que chez les chiens normaux, M. Gley donne la relation des expériences qui lui ont montré que le bromure de potassium s'oppose chez le chien thyroïdectomisé à l'apparition des acci- dents convulsifs. — M Gréhant présente un mano- métre métallique inscripteur destiné aux recherches sur la pression du sang. — MM. Gilles de la Tourette et Cathelineau discutent les expériences de M. Féré relatives à l’inversion de la formule des phosphates dans l’épilepsie ; la caractéristique de l'attaque hysté- rique consiste d'ailleurs dans une modification de la composition totale de l'urine et non exclusivement dans les variations relatives aux phosphates. — M, E. Hédon décrit un manuel opératoire par lequel il a réussi à greffer chez des chiens une partie du pancréas sous la peau du ventre, la glande conservant tous ses carac- tères. — MM. Hédon et J. Ville ont recherché si la graisse alimentaire est modifiée par son passage dans l'intestin des chiens après fistule biliaire et extirpation du pancréas; aprés l’ingestion de graisse neutre, on retrouve dans les feces une proportion notable d'acides gras libres. — MM. Achard et J. Renault ont fait de nouvelles recherches sur le micro-organisme de l’infec- tion urinaire; voici leurs conclusions : sous le nom de bactérie pyogène, on a décrit plusieurs types de microbes très voisins les uns des autres. Le Bacterium Coli est un de ces types, le B. Lactis aerogenes (Escherich) en est un autre; la distinction entre ces types est démontrée par le fait que chacun d'eux pousse sur les milieux épuisés par la culture de l’autre. — M. A. Raïlliet : Recherches sur la transmissibilité de la gale du chat et du lapin due au Sarcoptes minor (Furst). — M. Azoulay indique une position du sujet qui réalise les meilleures condi- tions pour la constatation du pouls capillaire sous- unguéal. — M. L. Blanc à étudié sur un veau cheloni- some les rapports de la paroi abdominale avec l’amnios chez cettte espèce de monstres; ses conclusions dif- fèrent de celles de M. Dareste sur ce sujet. — M. Pil- liet a observé la structure suivante sur le muscle de l'aile du Cybister Ræselii, fixé au liquide de Flemming ; les fibrilles dissociées se montrent homogènes ; dans leurs intervalles sont de petits grains rangés réguliè- rement qui donnent à la fibre son aspect transversale- ment strié. — M. Laulanié a étudié la marche de la température, du rayonnement et des échanges respira- toires chez les animaux soumis à une asphyxie incom- plète; les animaux adultes se relèvent rapidement du refroidissement causé par l’asphyxie, grâce à des com- bustions respiratoires énergiques; chez les animaux jeunes, cette suractivité réparatrice des combustions fait défaut et la température ne remonte que lentement, Séance du 23 avril. M. Clado : Appendice cœcal, anatomie, embryologie, anatomie comparée, bactériologie normale et patholo- gique (mémoire lu à la séance du 30 janvier). — M. Grigorescu décrit la facon dont il opère dans les ex- perlises médico-légales, pour reconnaitre au micros- cope les hématies humaines des taches de sang dessé- ché. — M. Férérépond à M. Gilles de la Tourette rela- tivement à l’inversion de la formule des phosphates dans l'hystérie et l’épilepsie. —M.J. Voisin a fait faire le dosage des phosphates alcalins et des phosphates terreux sur quarante urines d’hystériques et soixante d’épileptiques; les premières ont donné deux fois lin- version de la formule des phosphates, les secondes, trois fois, dont deux fois à la suite d'accès, et une dans une période tranquille du malade. — M. Oliviero re- lève les nombreuses causes d’erreur qui entachent les procédés employés pourle dosage de ces éléments dans l'urine. — M. Fabre-Domergue critique le travail de M. Soudakewitch paru récemment dans les Annales de l'institut Pasteur et dont M. Metchnikoff a accepté les conclusions; les formes décrites et figurées comme des coccidies parasites des cancers épithéliaux, semblent à M. Fabre-Domergue être de simples formes de dégéné- rescence des cellules épithéliales ; car on peut observer toutes les figures intermédiaires entre celles décrites comme coccidies et les cellules cancéreuses typiques. — M. F. Tourneux étudiela structure et le développe- ment du fil terminal de la moelle chez l’homme. — M. P. Regnard a examiné dans des tubes verticaux maintenus à l'abri de variations de température, la facon dont l’oxygène diffuse dans l’eau; l’eau soumise aux expériences était additionnée d'indigo blanc dont le bleuissement progressif permettait de suivre la marche de la diffusion ; l’auteur tire de ces expériences des conclusions relatives à la facon dont l’oxygène parvient et se renouvelle dans les grands fonds océaniques, c’est-à-dire à la respiration de la mer. — M. Azoulay ‘ conseille, pour entendre plus nettement le double 340 TT ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES souffle crural de l'insuffisance aortique, de coucher pendant l’auscultation le malade sur le dos, les mem- bres relevés. L. LAPiCQue. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 6 mai La séance a été remplie entièrement par la commu- nication de M. Lippmann, relative aux nouveaux résul- tats, d'importance capitale, obtenus par l’auteur dans la question de la photographie des couleurs, En premier lieu, il a considérablement accru la sensibilité des plaques et il a pu les rendre suffisamment isochroma- tiques, de telle sorte qu'il obtient maintenant, en quel- ques secondes, 20 ou 30, la photographie du spectre, simultanément dans toutes ses parties, sans être oblige de recourir à des poses successives au travers de diffé- rents verres colorés. D'autre part, il a abordé le pro- blème de la photographie des couleurs composées, c’est-à-dire des couleurs réelles des objets qui nous en- tourent. Les épreuves si brillantes, projetées devant la Société, montrent que ces couleurs se reproduisent aussi fidèlement et avec autant d'éclat que les couleurs simples du spectre. C’est d’abord la photographie d’un disque formé de quatre secteurs de couleurs différentes : rouge, vert, bleu, jaune. — Puis un groupe de drapeaux franco-russes. L'écusson rouge se détache nettement au centre de l’aigle impériale. La couleur complexe par excellence, le blanc, est parfaitement visible dans le drapeau francais. — C’est ensuite un plat d’oranges finement modelées avec un pavot au-dessus ; — une per- ruche aux couleurs les plus vives ; —- enfin deux épreuves parfaites d’une branche de houx garnie de ses petits fruits rouges. Dans ces dernières épreuves, on perçoit les moindres détails, ainsi que les différences de nuances dans les diverses parties des feuilles. Ces deux photogra- phies sont en outre particulièrement instructives en ce qu’elles ont été obtenues, non plus avec un éclairage in- tense, comme le plein soleil ou la lumière électrique, mais à la lumière diffuse, simplement en prolongeant la pose. Après avoir montré ces merveilleux résultats, M. Lippmann aborde la théorie du phénomène. Il montre que la théorie si féconde qui l'avait conduit à prévoir la possibilité de photographier les couleurs simples, per- met aussi de rendre compte de la formation des cou- leurs complexes. Tout d’abord il confirme la théorie relative à la photographie du spectre par deux expé- riences qu'il a lui-même récemment décrites dans cette Revue ! l’une relative aux changements de couleur, des photographies lorsqu'on les regarde sous des inci- dences de plus en plus rasantes, l’autre qui corisiste à dilater l'épaisseur des diverses lames minces formées dans la couche en mouillant la plaque. Les couleurs ont alors disparu. Après quelques instants, on voit, à mesure que la plaque sèche, les couleurs réapparaître successivement : le rouge rentre par l'extrémité qui était primitivement violette, puis vient progressive- ment reprendre sa place, et les diverses couleurs arri- vent de même à sa suite. M. Lippmann développe en- suite les considérations théoriques qui permettent d'expliquer la reproduction des couleurs complexes. Il montre qu'il y a là un simple phénomène de superpo- sition de vibrations simples de périodes diverses don- nant naissance, par leur résultante, à une onde com- plexe, mais encore périodique, analogue à ces ondes qu'on rencontre en acoustique dans l’étude du timbre. Enfin il montre comment ces plans, ces lames minces d'argent réduit, superposées dans l'épaisseur de la plaque, doivent redonner, sous un éclairage de lumière blanche, les couleurs mêmes qui leur ont donné nais- sance. La démonstration analytique est assez longue, mais le point de départ est facile à saisir, car les lames minces d'argent forment un réseau en profondeur; on | Revue générale des Sciences, n° du 30 janvier 1892, p. 44, ÿ V. peut alors appliquer à ce problème la méthode de la courbe de M. Cornu, relative à la diffraction. Edgard Haupié. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 4 mai M. Hermann montre qu’on peut, avec une sécurilé absolue, chiffrer un document en se servant d’une elef indéfinie prise dans un livre qui n’est pas tenu secret. Ilemploie pour cela la méthode cryptographique sui- vante : les lettres de l'alphabet élant disposées dans leur ordre normal de a à z sur un cerele, on chiffre une lettre quelconque en avançant sur le cercle d’un rang si la clef de cette lettre est a ou b, de deux rangs si elle est ce, d'ou e, de trois rangs si elle est f, g ou h,........... ., de neuf rangs, sielle est x, y ouz. — M. Raffy fait une communication sur la déformation des surfaces, Il montre qu'on peut obtenir par de simples quadratures des surfaces réelles applicables sur certaines surfaces de révolution et dépendant d’une fonction arbitraire. — M. Demoulin complète certaines propriétés infinitési- males des courbes tétraédrales obtenues par M. Jamet dans sa thèse de doctorat, en faisant voir que, si une cubique gauche passant par les sommets du tétraèdre fondamental est tangente à une courbe tétraédrale, non seulement les deux courbes ont même plan oscula- teur au point de contact, comme l’a démontré M, Ja- met, mais elles ont encore même torsion. — M.Fouret rappelle la propriété mécanique classique de la lem- niscate, d’être la courbe telle qu'un de ses arcs et la corde de celui-ci soient parcourus dans le même temps par un mobile soumis à la seule action de la pesanteur. Cette propriété fut d’abord attribuée à Füss qui la donna en 1815 à l'Académie de Saint-Pétersbourg, puis à Saladini qui l'avait présentée en 180% à l’Institut nationald'Italie, M. Fouret vient de la retrouver dans le traité de mécanique qu'Euler publia en 1736, Il paraît donc incontestable que la priorité en appartient à ce grand géomètre, M. Fouret rappelle à ce propos que M. Ossian Bonnet a démontré que la propriété subsis- tait pour la lemniscate dans le cas d’une force centrale proportionnelle à la distance et que lui-même a établi qu'aucune autre loi de force centrale ne pouvait don- ner lieu à la même propriété, nou seulement pour cette courbe mais pour une courbe quelconque. M. D'OcaGxe. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 25 mars M. Herroun : Remarque sur les forces électromo- trices des éléments à or et platine. Les manuels ré- cents placent l’or avant le platine dans la série électro- positive de Volta, et l’on est ainsi conduit à attendre un plus grand dégagement de chaleur quand l’or se combine au chlore, par exemple, que lorsque c'est du platine, Ce n’est pourtant pas ce qui a lieu : Julius Thomsen donne, pour la chaleur de formation du chlo- rure platinique une valeur beaucoup plus grande que pour celle du chlorure aurique. L’or serait donc électro- négatif vis-à-vis du platine. Les quelques expériences qui ont porté sur des éléments de ce genre conduisent à des conclusions différentes : l'auteur a done repris le sujet et recherché expérimentatement les forces élec- tromotrices de zinc-platine et zinc-or, les métaux étant plongés dans des solutions de leurs chlorures d'égale concentration moléculaire. Au lieu de chlorure platinique, on a employé une solution de chloropla- tinate de sodium. D’après les données thermochimiques de Thomsen, le f. é, m. d’une pareille pile zinc-platine serait 1,548 volts : l'expérience donne des nombres variant entre 1,70 et 1,473, suivant les conditions dans lesquelles a été placé préalablement l'élément, La f. é. m. moyenne était d'environ 1,525. En faisant pro- duire à l'élément un courant, on réduit notablement ! la f. é. m., mais on la rétablit en partie par le repos. ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES En renouvelant le chloroplatinate de sodium, on re- trouve la valeur initiale de 1,7 volts. L'auteur attribue cette valeur élevée et l'incertitude de la f. é. m. après le passage d’un courant, à l’oxygène dissous. Les élé- ments zinc-or, les métaux étant plongés dans des solu- tions de leurs chlorures, donnent des résultats plus constants, le maximum étant 1,855 et le minimum 1,844 volts; les données thermochimiques conduiraient à une f. é. m. de 2,044. En remplacant une lame d’or par une de platine, la f. é. m, tombe à 1,782. D'autres expériences montrent que l'or est nettement électro- positif vis-à-vis du platine dans l’eau ou l'acide chlor- hydrique dilué, mais dans l’eau régale les pôles sont intervertis, M. Ayrton dit que le f. é. m. moyennes sont très voisines des valeurs théoriques, et pense que les différences peuvent être attribuées à l’occlusion de gaz, et ce phénomène, qui n'intervient pas dans les expériences de thermochimie, peut avoir une influence considérable sur la valeur des quantités électriques. Le platine a des propriétés remarquables au point de vue de l’occlusion. M. Enright observe que si un gaz se dégage dans les réactions de la pile, sa valeur thermique doit être déduite, M. Thompson estime qu'une partie du désaccord entre les valeurs calculées et observées pour les f. é, m. peut être due à ce que les calculs n’ont été poussés que jusqu’au premier degré d’approximation. L'expression complète contient, entre autres choses, un terme dépendant du coefficient de variation de la f. é mn. avec la concentration des dis- solutions, il dit qu'il a observé des effets semblables avec des solutions de cyanures. M. Herroun répond qu'il a pris soin d’expulser autant que possible les gaz occlus avant de se servir de lames, et qu'il n'ya pas eu de gaz formés dans les réactions, Il répond à M. Thomson que la pile de Clarke a une f. é. m. plus grande que celle qu’on déduit par le calcul des données thermochimiques ; le coefficient de température sem- blerait donc devoir être positif : en fait, il est négatif. La divergence entre les f. é, m., calculée et observée, peut être attribuée à l'incertittde que présentent les déterminations des constantes thermochimi- ques des sels de mercure. — M. Stuart Bruce pré- sente et décrit « un nouvel instrument pour montrer les effets de la persistance de la vision », L'instrument que l’auteur appelle un graphoscope aérien consiste en une baxuette de bois étroite montée sur une machine tournante qui lui imprime un mouvement de rotation rapide dans son plan. La baguette est peinte en gris au centre, et la teinte va en se dégradant jusqu'au blanc ; les extrémités sont blanches. En tournant, elle présente l'apparence d'un écran ou d’un disque à peu près uniformément éclairé, à cause de la persistance de limpression. On peut projeter des vues de lanterne ordinaire sur cet écran aérien et avoir des effets re- marquables, car la peinture paraît suspendue en l’air. L'auteur explique que l’on donne à la baguette une teinte plus sombre dans le voisinage du milieu pour donner au disque ou au dessin un éclairement uni- forme. En couvrant l'ensemble de la baguette avec du PARIS blanc, le milieu du dessin qu'on projette est eaucoup plus vivement illuminé que les coins. M. Blackesley remarque que l'effet produit en obscur- cissant le centre de la baguette peut être obtenu aussi en peignant des secteurs blancs sur une baguette noire. — M. R-W. Paul lit une note sur « quelques instruments électriques » et montre les appareils. Il décrit d’abord une nouvelle forme d’ohm-étalon, dont la qualité distinctive est que le fil est enroulé en spi- rale plate et est renfermé entre deux minces plateaux de laiton. La totalité du fil est ainsi pratiquement au même niveau dans le bain d’eau, et par suite peut-être plus commodément amené à une température uni- forme que les bobines qui ont une étendue verticale considérable. Un thermomètre passant à travers le tube central a son réservoir au même niveau que le fil et un autre thermomètre placé dans le bain d’eau au même niveau sert à s'assurer de l’uniformité de la 341 température, Une nouvelle forme du pont de Wheat- stone présente tous les avantages du modèle à cadran, combinés avec de plus grandes facilités pour le net- toyage. IL y a quatre résistances dans chacune des branches de proportion, et les branches de réglage ont quatre groupes de bobines: unités, dizaines, centaines et milles, chaque groupe se composant de dix bobines égales. Les extrémités de chaque bobine sont réunies à des douilles de laiton fixées à côté à environ un pouce de distance, sur de l'ébonite. Les bobines successives sont mises dans le circuit en plaçant dans la douille voulue une cheville reliée par un fil flexible, On a fait des pièces de contact spéciales pour mettre en déri- vation deux ou plusieurs bobines de chaque groupe de dix, de manière à avoir de l’exactitude dans la mesure des faibles résistances ou des résistances ayant une capacité, Entre autres avantages, il faut signaler un meilleur isolement, le fait qu'on évite des pertes par les surfaces en facilitant le nettoyage, une faible er- reur totale qui est constante et facile à mesurer, sans avoir besoin de détacher les chevilles. Au moyen de deux chevilles mobiles, on peut employer la boite comme potentiomètre, les lectures peuvent être faites de 1 à 10.000, — L'auteur décrit encore un galvanomètre à réflexion avec divers perfectionnements. La bobine est supportée par un pilier d’ébonite fixé sur un tré- pied au-dessous duquel, au centre, est fixé un aimant régulateur fondé sur le principe de Siemens, et qui peut pivoter. Le pilier donne un bon isolement d’avec la terre, et ‘ajustement du régulateur peut se faire sans faire osciller l'aiguille. Les deux moitiés de la bobine sont enroulées d’après la loi de Sir W. Thomson, et fixées dans des boîtes d’ébonite tournées pour s’y adapter. On peut échanger les boîtes d’ébonite, de ma- nière à employer dans le même état des bobines de grande ou de faible résistance, Les bobines ont des extrémités séparées et peuvent être employées en sé- rie ou en dérivation, en différentiel. Le miroir est placé dans une boîte de métal au-dessous de la bobine. M. Crawley pose une question sur la grandeur de l'erreur totale dans la forme du pont de Wheatstone qui est présentée, car il croit que les fils flexibles peuvent la rendre considérable, M. Swinburne ré- pond qu'il a trouvé des variations plus grandes dans les ponts à commutateur que dans les chevilles. M. Thompson pense qu'on ne sait pas généralement que la meilleure forme de bobine galvanométrique dé- pend, suivant que l'instrument doit servir comme am- peremètre ou comme voltmètre. La forme déterminée par Sir W. Thompson est une bobine voltmètre; pour un ampèremètre, elle serait beaucoup plus courte dans le sens de l’axe. M. Paul répond qu'il a employé l'une et l’autre forme de bobines, selon l'usage auquel le salvanomètre était destiné. L'erreur totale dans le pont de Wheatstone était très petite et complètement négligeable pour la plupart des cas. Quand on a besoin d'une grande exactitude, l'erreur qui est constante est facile à mesurer et à corriger. SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 21 mars. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — L’astronome royal pour l’Ecosse fait une nouvelle communication sur létoile Nova Aurigæ. Les condilions atmosphériques étaient remarquablement favorables pour l'observation jusqu’au 11 février, quand l'étoile était de cinquième grandeur; mais depuis ce temps jusqu’au 18 du même mois, l'ob- servation n’était possible que dans des occasions isolées. Entre le 8 et le 18 l'étoile est tombée de la 6° à la 9° grandeur. Au commencement de mars elle était 130 fois plus brillante qu’à présent. Son spectre est maintenaut à peu près continu avec des traces de raies brillantes. Ainsi Nova Aurigæ présente de plus étroites analogies avec Nova Coronæ qu'avec Nova Cygni où un spectre d’abord continu, avec des lignes brillantes s'était changé en un spectre discontinu, présentant seulement ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ER une ligne brillante près d’une des grandes lignes nébu- laires. Une des lignes de Nova Aurigæ est très près d’une ligne nébulaire; mais il y a lieu de croire qu’elle est due à une substance autre que celle qui donne la ligne nébulaire. 2 Sciences PHYSIQUES. — Le prix Keith pour 1889-91 est décerné à M. Omond directeur en chef de l'Obser- vatoire météorologique de Ben-Nevis, pour ses contri- butions à la science météorologique et Le prix Makdou- gall-Brisbane pour 1888-90 à M. Ludwig Becker pour son mémoire sur le spectre solaire aux moyennes et aux basses altitudes. 39 SCIENCES NATURELLES, — M. Traquair lit une note sur les Selachü fossiles qui renferment 5 espèces nou- velles, Séance du 4 avril. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Thomas Muir lit une note sur un problème de Sylvester relatif à l’élimi- nation et aussi une note sur une démonstration du pro- fesseur Cayley, de ce fait qu'un triangle et son réci- proque sont en perspective. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. Berry Haycraft com- munique une contribution à l'anatomie de la Sutroa, par M. Beddard. W. PEDDiE. Docteur de l'Université. SOCIETE PHILOSOPHIQUE DE MANCHESTER Séance du 23 février 1° SCIENCES PHYSIQUES. — Une discussion a eu lieu au sujet de la nouvelle théorie du magnétisme terrestre de M. Henry Wilde, au cours de laquelle M. Faraday annonce que M. C. A. Schott du United States Geodetic Survey, a trouvé dans l’histoire des variations magné- tiques des nouvelles confirmations de la théorie de M. Wilde, 2° SCIENCES NATURELLES. — M. W. Brockbanklitune note sur la coloration artificielle des fleurs. L'auteur a fait, en collaboration avec M. W. Dorrington, un grand nombre d’expériences sur la coloration des fleurs au moyen des matières colorantes dérivées de l’aniline. Ils se sont servis surtout d'une matière écarlate et d'une « indigo-carmine », qu'ils ont reconnue être les couleurs les plus avantageuses, L'indigo, la cochenille, et le sulfate de cuivre ne donnent pas d'aussi bons résultats, Au bout de quelques heures (6 à 12), des fleurs coupées placées dans une dissolution étendue de Ja matière colorante, ayant à peu près la teinte du vin de Bordeaux, se colorent, soit d’une manière uniforme, soit en bandes, etc. L'auteur croit que cette manière de teindre les plantes aura une importance considérable, pour la physiologie végétale, Il montre que ces résul- tats démontrent que la circulation de la sève de cel- lule en cellule est inexacte et qu'il y a un système complet de veines dans les plantes. On voit sous le microscope le mouvement de la matière colorante dans ces veines. Il à constaté que les veines débouchent dans les racines en plaçant les fibres de la racine d'une jacinthe dans une dissolution de la matière colorante. En douze heures les pétales des fleurs commencèrent à se teinter et finalement la plante entière, Les veines paraissent sous le microscope comme des tubes à parois unies qui seramifient de plus en plus à mesure qu’elles s’approchent des bords des feuilles; c'est pour cela que ceux-ci sont en général colorés d'une manière plus intense que les autres parties de la feuille, Ce phéno- mène a été observé avec les pétales des narcisses et du leucojum, et avec les feuilles de lierre et d’aucuba détachées de leur tige Les pistils des fleurs se colorent toujours, On a prétendu que les vignes traitées par le sulfate de cuivre donnent du vin contenant du cuivre ; les expériences de l’auteur expliqueraient ce fait, Séance du 8 mars. 19 ScxENcEs PHYSIQUES, — M. Schunck lit quelques notes sur des teintures des fragments de tissus de laine trouvés dans des tombes de la basse-Egypte et datant du 5° siècle de notre ère, Séance du 22 mars 1° ScENCES PHYSIQUES. — M, H. B. Dixon lit un mémoire sur lexplosion d’un mélange d'oxyde de carbone et d'oxygène en présence d'autres gaz. M. Beké- tow de Saint-Pétersbourg, a confirmée la découverte de M. Dixon d’après laquelle un mélange d'oxygène et d'oxyde de carbone ne détone pas, mais il a trouvé que l’on peut faire détoner le mélange si l’on y ajoute un mélange de cyanogène et d'oxygène, C'est un résul- tat que M. Dixon avait trouvé lui-même (sans l'avoir pubiié). L'auteur a trouvé, de plus, que l’on peut faire détoner ce même mélange en y ajoutant du sulfure de carbone et de l'oxygène, mais ce n’est que 40 c}, du premier mélange qui brûle dans ce cas. 2° SCIENCES NATURELLES, — M. C. Bailey rappelle à pro- pos des recherches de M. Brockbank les expériences de M. Maxime Cornu sur l'absorption des malières colo- rantes par les plantes. P.-J. Hartoc. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 29 avril. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. H. Schoute s’oc- cupe du déplacement général dans l’espace E* à n dimensions. Il démontre les trois lhéorèmes suivants : 1° le déplacement le plus général en E* se compose, : n : pour x pair, de = rotations dans des plans absolument - : n— 1 normaux les uns aux autres et, pour n impair, de de ces rotations et d’une translation dans la direction normale aux plans de rolation; 2 pour deux figures symétriques X et Y en E”,il y a toujours un espace E*— 1 qui coupe X et Y suivant des figures homolo- gues congruentes. Les points x et y de X et Y, qui ne se trouvent pas dans cet espace E* — 1, en sont à des distances égales de part et d'autre; 3° la figure X de E* peut être tran ‘formée dans la position symétrique Y par un déplacement à travers un espace E* +‘ dont E* fait partie, Ce déplacement ne représente pas le dé- placement le plus général en E* + 1, une des rotations mesurant un angle égal à x. — M. J. C. Kapteyn fait connaitre le résultat de ses recherches sur la distribu- tion des étoiles dans l’espace. D'abord l'examen des différents types spectraux, par rapport au mouvement propre, lui a montré que les régions de l'univers les plus proches de notre système solaire contiennent presque exclusivement des étoiles du second type (classes E — L de M. Pickering), tandis que les étoiles du premier type (classes À — D de M. Pickering) se montrent en nombre relativement plus grand à mesure que la distance s’accroit. A une distance correspon- dant à un mouvement propre d'environ (08, les nom- bres des étoiles des deux types sont égaux. Pour des distances encore plus grandes, le nombre relatif des étoiles du premier type croît toujours, de manière qu'à la distance moyenne des étoiles de Bradley, dont le mouvement propre devient insensible, le nombre des étoiles du premier type surpasse le double de celui des étoiles du second. L'étude de la différence entre l'éclat visuel et photographique des étoiles à mouve- ment propre considérable l'amène ensuite à croire que, pour l'hémisphère austral, la même loi est de rigueur. Au-delà du parallèle de 25° de déclinaison, les données spectrales font presque absolument défaut. Enfin ül énonce trois remarques. D’après la première, le centre de concentration des étoiles du second type se trouve à une certaine distance du soleil dans la direction de 23 heures d’ascension droite, résultat cependant en- core bien incertain, Suivant la seconde, les étoiles du premier type ne montrent pas la moindre condensa- tion vers le plan de la voie lactée pour les étoiles à mouvement propre compris entre 016 et 0"30, résultat ACADÉMIES £T SOCIÉTÉS SAVANTES 343 analogue à celui de la distribution uniforme des étoiles du second type, d’après M. Pickering. Et d’après la troisième, les observations s'accordent avec celles qu'on ferait en supposant que l’univers ait la forme d’un globe entouré d'un anneëu, formé presque exclu- sivement d'étoiles du premier type.— M.P. H. Schoute présente un mémoire de M. A. W. Speckmann inti- tulé : Sur les équations différentielles partielles du se- second ordre. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. P. Kuenen : Mensu- rations se rapportant à la surface de M. Van der Waals pour mélanges d'acide carbonique et de chlorure de méthyle, — M. H. W. Bakhuis Roozeboom commu- nique les résultats de ses recherches sur les hydrates du perchlorure de fer et leur solubilité comme l’in- dique le tableau annexé à la figure ci-jointe : Ü ree Fe?ClS en mol. sur 100 mol H20O dans la solution satu Rs ue Fe? CIS +. 12 H2 O ET ENTREE Fe CL 71H20 TR den ts Fe? CI5 + 5 H2 0 1 HO NES DATA Fe? CI + 4H20 ÉOA SS RURES Fe? C5 Celui qui contient la plus grande quantité d'eau, c’est l’hydrate du commerce. Sa solubilité augmente jusqu’à 3605; cette température où la solution saturée et l’hydrate présentent la même composition est celle du point de fusion f. A travers ce point f, la courbe de solubilité ef se continue par une branche fg qui a été réalisée jusqu'à une température de 8°. Cette branche correspond à une autre solution salurée, résultat qui s'accorde avec ceux des recherches de l’auteur par rap port à Ca CE, 6 H? 0. Ainsi, sans aucun doute, il ya une analogie parfaite entre la solubilité des hydrates des sels et des hydrates des gaz pour lesquels l’auteur a trouvé antérieurement l'existence de deux solutions sa- turées à même température. Il est arrivé au même résultat pour Fe?Cl5, 7 H°0 (cristaux monosymétriques, d’une couleur un peu plus foncée que celle du soufra monosymétrique, point de fusion 32%), Fe? CW, 5 H2 0 cristaux rhombiques d’une couleur rouge-brune, point de fusion 56°), Fe? C6, 4 H2 O0 (cristaux hexagonaux, d’une couleur rougedtre, point de fusion 74). De ces trois substances, la première et la troisième étaient inconnues, tandis que les avis différaient sur la com- position de la seconde. Les points d'intersection a, b, c, d des couples I et II, IT et IT, etc., de courbes de solubi- lité qui correspondent à des températures de 27, 30°, 54°, 65°, font connaître des températures minima pour toute la série des liquides dont la composition est comprise entre celles des deux hydrates correspon- dantes. — M. A. P. N. Franchimont communique une expérience dont il se sert, depuis quelques années, dans ses cours, pour démontrer la nécessité de la pré- sence de l'acide iodhydrique dans la formation de l’io- dure d’amidon, Elle consiste dans l'emploi d’une solu- tion chloroformique d'iode dans Jaquelle l'amidon bien séché reste intact, tandis que, par quelques bulles d'acide iodhydrique, un iodure d'amidon brun se préci- pite, lequel par l’eau se colore en bleu. L’acide chlo- rhydrique n’a pas le même effet. Cette expérience est analogue à celle faite avec le brome et publiée il y a deux ans. — M. H Behrens parle des alliages et de leur cristallisation. Quelques métaux purs seulement (Al, Cu, Ni) s’approchent de l’état amorphe. La condi- tion principale, c’est une température basse de fusion; le refroidissement soudain ne fait que diminuer les dimensions des cristaux. L'argent pur montre toujours des figures de corrosion, ce qui fait présumer l’exis- tence d’autres substances entre les cristaux. D’ordi- naire, les alliages cristallisent plus facilement et plus distinctement. La cristallisation des alliages est ac- compagnée de décomposition en plusieurs alliages, Pour les alliages de Ag et Au, cette décomposition se montre même dans des quantités très insignifiantes ; ainsi l’on peut démontrer 2/1000 de Ag dans du Cu, même quantitavement. On retrouve tous les types de structure des roches cristallines chez les alliages, Le type du réseau rectangulaire (alliages à grande quan- üité de cristaux à haut point de fusion) est le plus fré- quent. Les cristaux isolés (alliages à peu de cristaux à haut point de fusion, comme Zn + 10 % Pt, Cu + 10 % Co) sont plus rares. Les actions mécaniques, ni même la forge ou le laminage au feu ne détruisent les cristaux. Dans ces opérations, les-métaux et les alliages cristal- lins se comportent comme des corps hétérogènes, ce qui conduit encore à la supposition de la substance intercristalline. Par l’incandescence prolongée, le bronze et l'argent de monnaie ne changent pas. La même résistance s’accuse par le Ni et l'Ag purs. Au contraire, l’incandescence des alliages de Cu et Ni, et de Fe et carbone, fait croître les cristaux, alors qu'en même temps le métal devient de plus en plus fragile. 3° SCIENCES NATURELLES. — M, C. K. Hoffmann pré- sente un mémoire sur « les systèmes urogénitaux des oiseaux. » SCHOUTE, Membre de l'Académie. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE. Séance du T avril 1° SCIENGES MATHÉMATIQUES. — M. L, Gegenbauer : Sur quelques déterminants arithmétiques de rang élevé. — M. Victor Woloki : Recherches sur l'intégra- tion de la différentielle x‘? V(a + br + ex)! dr. — M. Sophus Tromholt : «Aurore boréale norvégienne, » Rapport sur le phénomène lumineux observé dans la Norvège en 1878 — M. Margules : « Mouvement de l'air dans un espace sphérique tournant, » 2° Scrences PHysiQues. — M. Emmanuel Forma- neck : « Elimination de l'azote et en particulier de l'acide urique chez l’homme sous l'influence des bains chauds, » — M. Angelo Simonini : Sur la structure des acides gras dérivés des alcools peu riches en car- bone. — M. Br. Lachowiez : « Dissociation du phos- phate de fer sous l’influence de l’eau et des solutions salines — MM. Ed. Lippmann et F. Fleissner : « Sur les combinaisons formées par l'acide iodhydrique avec quelques alcaloïdes du quinquina. — M. Gustav Jager : « Sur les solutions, » — M Fritz Blau : « Sur l'as dipipéridyle.» L'auteur a préparé l’&8 dipypéridyle en réduisant par le Na et l'alcool le8 dipyridyle obtenu en partant de la phénantroline de Skraup. C’est un corps solide, fondant à 69°, bouillant à 2690, il donne des sels bien caractérisés, une combinaison nitrosée et réagit sur les chlorures d’acides comme les bases secondaires. L'a$ dipipéridyle n'est pas iden- tique avec le dipipéridyle de Liebrecht (hexahydroni- cotine). Ce fait est en faveur de l’opinion que la nico- tine ne peut être considérée comme un dérivé du dipyridyle. — M. J, Herzig : « Notice sur la fluores- céine, la galléine et l’aurine. » En partant de l’idée que les acétylpthaléine et acétylphtaline devaient être identiques, l’auteur a fait une étude très soignée de la 344 fluorescine et de l’acétylfluorescine, La fluorescine décrite par Bæyer comme un corps sirupeux fut obtenue cristallisée, Les acétylfluorescine et acétylfluo- rescéine ont le même point d2 fusion 200-201°; cepen- dant ces deux corps ne sont pas identiques, car le second est insoluble dans une lessive alcaline étendue, tandis que le premier s’y dissout facilement et peut être précipité sans avoir éprouvé la saponification. Les produits acétylés de la galléine et de la galline se différencient aussi de la même facon.— M. J. Herzig : « Sur l’acide euxanthonique et l’euxanthone. » Pour- suivant ses recherches sur ces composés, l’auteur montre que l’analouwie qu'il espérait trouver entre l'acide euxanthonique et la quercitine n'existe pas; par oxydation en liqueur alcaline, la quercitine fournit un phénol et de l'acide protocatéchusique ; dans Les mêmes conditions l'acide euxanthonique ne donne aucun produit caractéristique. Ce dernier acide traité par l'iodure d'éthyle donne naissance à une substance incolore cristallisable qui présente les caractères de l'acide tétréthyleuxanthonique, L’hydroxylamine pro- NOUVELLES duit l’oxime de l’euxanthone composé qu’on n'avait pu obtenir jusqu'ici. — M. Carl Mangold : « Stéréochimie des acides trioxystéariques dérivés des acides ricinu- solique et ricinelaïdique. » Ce travail est une commu- nication provisoire sur deux nouveaux acides obtenus par oxydation de l’acide ricinelaidique à l’aide de permanganate de potasse en solution alcaline. L'auteur montre que ces corps et ceux dérivés de lacide ricinusolique sont des isomères stéréochimiques. — M. Albert von Obermayer : « Sur les étincelles glis- santes », 3° SCIENCES NATURELLES. — M.E. Henricher à Inns- bruck : « Etude biologique de l'espèce Lathraæ » (1*e communication.) Ce travail contient les points sui- vants : 1° sur la formation du fruit et la dispersion de la graine chez les Lathraæ squamaria et L. clan- destina. 2% une étude de la floraison du Lathraæ squamaria; 3° la mise en évidence de corps cristal- loïdes à l'extérieur du noyau cellulaire des Lathraæ squamaria. Emil Weyr, Membre de l’Académie, CHRONIQUE A PROPOS DES INCIDENTS DE L'HOPITAL SAINT-LOUIS Nos lecteurs sont assurément au courant de la polé- mique soulevée par la presse politique, au sujet des soins donnés, à l'hôpital Saint-Louis, aux victimes de l'explosion de dynamite, Dans Le Jour, du 7 mai, M. Charles Laurent a publié sous le titre : « l'Hôpital où l’on tue », un article dans le- quel il n’a pas craint d'avancer « qu'on a achevé, dans le service du docteur Péan, les victimes de l'explosion du bou- levard Magenta ». Celte accusation, exprimée en des termes d’une violence que nous préférons ne pas qua- lifier, ne pouvait manquer de susciter dans la presse de retentissantes controverses. Nous n’avons pas qualité pour juger les questions administratives qui ont été agitées dans Le débat. Mais ce contre quoi nous tenons à protester ici, c’est l’im- mixtion de la presse politique dans un ordre de faits qui échappe à sa compétence et à celle de ses lecteurs. On ne peut s'empêcher de hausser les épaules à la lec- ture des arguments qui leur sont présentés, — avec quelque prétention scientifique —, par des écrivains médiocrement autorisés. Nous sommes indigné de voir qu'on s’appuie sur de semblables arguments pour tenter de livrer, en quelque sorte, à la vindicte pu- blique des hommes qui n’en sont plus à prouver leur valeur scientifique. Aujourd’hui, c’est M. Péan qu’on attaque ; demain ce sera tel autre de ses confrères. Les savants ne peuvent et ne doivent être jugés que par leurs pairs, et, dans l’espèce, il est ridicule et odieux de vouloir les traîner devant un tribunal d’incompé- tents. Nous avons la conviction de traduire ici le sentiment de tous les hommes soucieux de la dignité de la science francaise en protestant avec énergie contre des ten- dances qu'il serait humiliant devant l'Etranger et pé- nible pour nous-mêmes de voir pénétrer dans nos mœurs. Louis OLIVIER, NOUVELLES L'ENCYCLOPÉDIE SCIENTIFIQUE DES AIDE-MÉMOIRE M.H.Léauté, dans la séance de l'Académie des Sciences du 9 mai, a présenté les douze premiers volumes de l'Encyclopédie scientifique des Aide-Mémoire qui, de- puis le mois de février, se publie chaque mois avec régularité; il a accompagné cette présentation de la note suivante : « J'ai l’honneur de déposer sur le bureau les pre- miers ouvrages d’une grande publication qui vient d’être entreprise, sous ma direction, par les éditeurs bien connus, MM. Gauthier-Villars et G. Masson. Cette publication, qui porte le titre d’Encyclopédie scientifique des Aide-Mémoire, aura un caractère pratique très net, mais conservera en même temps un niveau scientifique élevé ; elle comprendra environ trois cents volumes de petit format embrassant toutes les sciences appliquées, depuis la Mécanique, l'Electricité, la Physique et la Chimie industrielles .….., jusqu'à l’Agro- nomie, la Biologie et la Médecine. « J'espère que ces ouvrages, très sobres de discus- sions et de détails, rendront service, sous leur forme condensée, à tous ceux qui, dans le laboratoire ou la vie pratique, s'occupent de recherches ou d’applica- tions. « C'est dans cette pensée qu'avec le concours de plusieurs de nos confrères de l'Académie et d’un grand nombre de savants français ou étrangers, j'ai arrêté le plan de ces petits livres, qui contiennent, d’une part, un exposé théorique très bref et, d'autre part, les indications techniques de toute nature, « Afin d’accentuer le côté scientifique de l’œuvre, chaque volume se termine par une bibliographie où se trouve mentionné, non tout ce qui a été écrit sur le sujet, mais ce qu'il est utile de lire. « La publication comprend deux sortes d'ouvrages : les uns, relevant des sciences mathématiques et physiques, constituent la Série de l'Ingénieur ; les autres, portant sur les sciences naturelles et médicales, com- posent la Série du Biologiste. « Bien que ces livres soient destinés à des lecteurs de spécialités très diverses et que chacun d'eux traite un sujet particulier, leur ensemble formera une véri- table encyclopédie des sciences appliquées à la vie sociale. Les liens qui rattachent la prauque à la théorie seront, grâce au plan adopté, mis en lumière, et l’on est dès lors en droit d'espérer que cette œuvre, destinée aux praticiens, ne sera pas inutile à la science pure Elle aura ainsi un double but : elle contribuera À introduire dans l'Industrie ces progrès d’ordre scien- tifique qui seuls peuvent lui permettre de soutenir la lutte, mais, en mème temps, elle montrera aux esprits occupés d'applications l'intérêt des recherches spécu- latives et fortifiera en eux le respect dû aux travaux désintéressés des sayants; à ce double titre, elle mérite, je le crois, les sympathies de l’Académie, » Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 11. 3° ANNÉE N° 10 30 MAI 1892 REVUE GENERALE ES SCIENCE PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LA PHOTOGRAPHIE CÉLESTE CONFÉRENCE AU CONSERVATOIRE DES ARTS ET MÉTIERS MESSIEURS, Il y a quelques semaines, mon savant confrère, M. Janssen, vous faisait le tableau éloquent des services que la photographie a rendus et doit rendre encore à la science astronomique, « la science des sriences », sion suivant l’heureuse expres- par laquelle il commencait son discours. Dans ce brillant exposé, l'habile directeur de l'Ob- servaloire de Meudon a eu surtout en vue l'astro- nomie physique, c’est-à-dire la description des objets célestes, leur structure, leurs variations d'aspect . Les magnifiques épreuves qu'il à fait passer sous vos yeux vous ont apporté, sous des formes saisissantes, les grands résultats dont il décrivait l'importance et l'inlérèt. Aujourd’hui, je vais aborder devant vous l'ex- posé d'un autre genre de services rendus à la même science par la photographie. Sous le Ulre de Photographie Céleste, nous comprendrons le concours que la photographie apporte aux me sures astronomiques de haute précision. Vous savez, en effet, que l'astronomie ne se borne plus, comme au temps des pasteurs de la Chaldée, à la contemplalion des astres. Depuis longtemps, son rôle est devenu plus difficile : elle détermine les trajectoires de ces astres, elle recher- che les lois de leurs mouvements, de leurs trans- formations, pour déduire des observations du passé les mouvements et les transformations de l'avenir. C’est du résultat de ces calculs, exécutés plusieurs années d'avance, que le voyageur, dans REVUE GENERALE DES SCIENCES, 1892. les déserts, que le marin, sur les océans, attendent la direction de leur route. Pour ces admirables prévisions, il faut des mesures d'une délicatesse incomparable. Jusqu'à ces derniers temps, on fai- sait ces observalions sur les images visibles au fover des télescopes et des lunettes. La photographie à ouvert une ère nouvelle : c'est sur l'image des astres fixée à la surface de la plaque sensible que l’on cherche maintenant à effectuer tout ce travail de haute précision. Il n'est donc pas nécessaire d'insister plus lon- guement sur l'importance de cette nouvelle mé- thode. Les développements que je vais vousexposer à ce sujet seront peut-être un peu arides, un peu sévères; mais j'espère qu'ils vous feront com- prendre d'une manière bien nette les grands ser- vices que la photographie est appelée à rendre à l'Astronomie de précision et, par suite, à la Méca- nique céleste. Dans cet exposé, je me bornerai à choisir, dans l'ordre historique, les principales étapes des pro- grès successivement accomplis. I. PROCÉDÉS ET APPAREILS Ces progrès ont toujours été corrélatifs de ceux de la sensibilité des substances impressionnables à la lumière. Ainsi, on a commencé par la photo- graphie du Soleil, dont l'éclat considérable n’exige qu'une sensibilité médiocre. Quand les procédés se sont perfectionnés, avec les collodions, on à passé aux observations de la Lune et des planètes, 10 346 A. CORNU. — LA PHOTOGRAPHIE CÉLESTE en un mot des astres errants donnant le plus de lumière par unité de surface. Enfin, les décou- vertes des plaques extrêmement sensibles, au gé- latino-bromure d'argent, ont permis d'attaquer les grands problèmes de la carte céleste, c'est-à- dire l'obtention directe et en quelque sorte auto- matique de l’image des étoiles fixes. Lacarte photographique du cieloffre en effet à peu près tous les genres de difficultés que la photogra- phieaélé appelée successivement à vaincre: finesse desimages, perfection de la similitude géométrique, compensation du mouvement de l’objet, etc. Le succès de cette grande entreprise est done le cou- ronnement de tous les progrès accomplis par la photographie. D'après ces nouveaux perfection- nements, vous devez comprendre que la photogra- phie se prête à l'emploi des méthodes les plus délicates de l’astronomie. Si, sous quelques rap- ports, la photographie est inférieure à l’observa- tion directe, sous beaucoup d’autres, elle lui est supérieure. L'infériorité générale de la méthode photogra- phique, c’est la substitution à l’image, en quelque sorte immatérielle, qui se produit au foyer des lu- nettes et des télescopes, d'une image matérielle, composée de petits grains plus ou moins gros- siers. De plus, on utilise, pour la photograhie, non pas les radiations que notre œil perçoit, mais d'au- tres, peu différentes, il est vrai, mais qui cepen- dant ne sont pas les mêmes; de sorte que la pho- tographie ne représente pas exactement l’image que notre œil est accoutumé à observer. Si cette dernière altération de la nature de l’image est par- foisun inconvénient, ilest juste de dire que, le plus souvent, elle constitue un grand avantage, puisque la photographie permet de fixer des détails que l'œil n'apercevait pas. D'ailleurs, cel inconvé- nient, comme beaucoup d’autres, a été considé- rablement atténué par les progrès successive- ment réalisés. Ces réserves faites, les avantages de l'observation photographique sur l'observation de l’image directe sont considérables : en premier lieu. la simultanéité d'impressions de tous les ob- jets du champ visuel permet d'éliminer, au point de vue des mesures, les petites erreurs d’appré- ciation qui entachent des observations optiques inévitablement successives. En second lieu, on doit considérer comme un avantage inappréciable l'obtention simultanée, sur une même épreuve, d'un nombre considérable d'objets ou de phénomènes que l'œil aurait été obligé d'examiner successive- ment. Les cartes d'étoiles que je vous soumettrai tout à l'heure vous montreront combien, en quel- ques minules, on peut obtenir d'étoiles sur la même plaque. Au point de vue des études stellaires, la photo- graphie rend sous ce rapport un service incalcu- lable à l’astronome : elle lui économise un temps précieux; elle lui permet de mieux utiliser les heures si rares où les observations peuvent être faites favorablement ou encore de conserver l’image fidèle de phénomènes trop rapides pour pouvoir être étudiés au moment où ils ont lieu. Passons maintenant rapidement en revue les conditions essentielles que doit remplir une épreuve pholographique pour se prêter aux me- sures de haute précision. Ces conditions se résument à trois : l’épreuve doit être fidèle, détaillée et rapide. L'épreuve doit être fidèle, c'est-à-dire qu’elle doit présenter les formes générales, sans aucune altération ni distorsion. L’épreuve doit être remplie de détails : une image grossière, fût-elle correcte dans l’en- semble, n'aurait, pour l'astronome, qu’une valeur insignifiante. Enfin la rapidité est une condition, en quelque sorle, essentielle : c'est celle qui a guidé le progrès. Tant qu'on n’a eu que des substances peu rapides, l'astronomie n’a tiré qu’un profit médiocre de la photographie; au contraire, les applications se sont mullipliées à l'infini depuis l'invention des émulsions très sensibles. Voyons comment les appareils d'optique peuvent donner des images fidèles etidétaillées. D'abord, je vous ferai remarquer que ce sont toujours des lentilles, des miroirs, ou des com- binaisons plus ou moins simples de ces éléments qui sont chargés de produire, à leur foyer réel, les images photographiques. Chaque point de ces images est constitué par la réunion des radiations émanées de l’objet lumineux. Or, les radiations utiliséesen photographie ne sont pas, nous l'avons déjà dit, les mêmes radiations que celles qui im- pressionnent notre œil. Vous savez, en effet, que les rayons de la lumière blanche ne sont pas simples, et que la partie qui fournit le plus grand éclat visible, c’est la lumière jaune. En photogra- phie, c'est la partie située entre bleu et violet, au voisinage de la raie G de Frauenhofer, qui cor- respondau maximum d'impression photochimique. D'où résulte ce fait bien connu de ceux qui ma- nientles appareils photographiques : àsavoir, quela plus grande netteté des épreuves ne se produit pas exactement dans le même plan focal que la plus grande netteté des images visibles. Avec des lentilles simples le foyer chimique est no- tablement en avant du foyer visible, parce que tous les verres réfractent plus les rayons violets que les rayons jaunes ; le point de convergence des rayons verts est donc plus rapproché de la lentille que le point de convergence des rayons jaunes. Lorsqu'on cherche méthodiquement à obtenir ce foyer chimique, on reconnait qu'une lentille A. CORNU. — LA PHOTOGRAPHIE CÉLESTE 347 simple ne donne jamais, sauf dans des cas très particuliers, une très grande finesse d'i- mage !. Cela lient à ce que, si le maximum d'im- pression photochimique a lieu pour les radiations indigo, voisines de G, laradiation bleue, moins ré- frangible, et surtout la série des radiations vio- lettes et ullra-violettes, plus réfrangibles, ont une action très appréciable. Or. ces diverses radiations formant leur foyer en avant et en arrière du plan focal de la radiation de couleur indigo superposent une série d'images im- parfaites à l’image principale. Chacuneindividuelle- ment n'aurait pas grandeinfluence; mais leur su- perposition, fournissant une somme d'impressions, cause un trouble très appréciable sur les contours. De là, la nécessité de rendre les lentilles achro- matiques pour les rayons chimiques, comme on est obligé de les rendre achromaliques pour les rayons visibles lorsqu'on les destine aux observa- tions de pure optique. Vous savez comment on y parvient : on accole à la lentille simple convergente (en crown glass) une lentille divergente d’un verre particulier (fint glass) plus dispersif, c'est-à-dire qui, toutes choses égales, offre une différence plus considérable dans la réfraction des couleurs extrèmes, rouge et violet. Cette lentille additionnelle allonge considérable- ment le foyer moyen de la lentille convergente, mais elle agit inégalement sur les diverses radia- tions :elle allonge le foyer du violet plus que celui du rouge, de sorte qu’on arrive à établir la coïn- cidence entre les foyers des couleurs extrèmes, De là un achromatisme très approché. La compa- raison des figures (1) et(2\, qui montrent la répar- Fig. 1. — Lentille simple. 1e Re VIBVJÔR lition des foyers des 7 couleurs principales du spectre, vous donnera une idée exacte de ce que produit l’adjonclion de la lentille divergente. L VBIV . JOR Fig. 2. — Système de 2 lentilles. Avec la lentille simple (fig. 1), la série des distances focales croitrait du violet au rouge (NIBVIJOR;. Avec le système de deux lentilles (fig. 2) calcu- 1 On doit citerle procédé que M. Janssen a utilisé très ingé- nieusement pour la photographie solaire : un temps de pose de plus en plus rapide affaiblit l’action de toutes les radia- tions; à la limite il ne reste plus que celle de la plus intense ; de sorte que, dans ces conditions, la lentille simple fonctionne comme une lentille achromatique. lées pour donner le meilleur achromatisme visible, la série des distances focales est en quelque sorte repliée sur elle-même, comme le serait un ruban qu'on replierait de manière à mettre en coïnci- dence deux de ses points; le meilleur effet s'obtient en faisant coïncider le foyer des rayons bleus avec celui des rayons rouge orangé (fig. 2). On voit, d’après cela, que l’achromatisme ob- tenu n'est pas rigoureux, puisque toutes les cou- leurs ne forment pas leur foyer au même point ; mais cependant l'effet est pratiquement très satis- faisant, car les radiations comprises entre le vertet l'orangé, les plus efficaces pour la vue, sont réunies dans un espaceextrèmement restreint qui se trouve définir le minimum de distance focale du système. Cette analyse de l’achromatisme pour les rayons visibles, montre immédiatement comment on doit répartir les foyers pour obtenir le meilleur achromatisme du rayon photographique. Il faut repher le spectre de manière que les foyers des ra- diations les plus efficaces au point de vue photo- chimique soient resserrés dans la région du mi- nimum de distance focale. La figure 3 montre la répartition des foyers des ï e (} < On BVJOR Fig. 3. — Objectif achromatique pour les rayons chimiques. diverses couleurs d’un objetif achromatique pour les rayons chimiques ; le foyer de l'indigo occupela place correspondant au jaune dans les objectifs achromatisés pour les rayons visibles, On voit ainsi que, pour uhliser le mieux possible la plus grande partie, sinon la totalilé, des radiations effi- caces d’une source donnée, la photographie exige des objectifs spéciaux, calculés en vue de la ré- gion spectrale où la couche impressionnable offre le maximum de sensibilité. Actuellement les émul- sions les plus sensibles, dites au gélatino-bromure, offrent un maximum très marqué vers l’indigo ; mais si, par le progrès des préparations photo- chimiques, la position du maximum était modifiée soit du côté de l’ultra-violet, soit de préférence du côté du jaune (ce qu’on recherche avec les plaques isochromatiques), il faudrait changer le calcul des objectifs afin de donner la distance focale mini- mum à la radiation d'action maximum. Telle est la condition correcte pour obtenir la meilleure utilisation de la totalité des radiations photochimiques efficaces ; mais, le plus souvent il n’est pas nécessaire d'utiliser toutesles radiations ; la plus intense suffit généralement pour obtenir des images sinon parfaites, du moins très sufli- santes : alors la rigueur de l’achromatisme chi- mique devient secondaire, et l’on veut très bien se 348 contenter de l’achromatisme optique, que les opti- ciens réussissent en général d'une manière remar- quable. La figure 2, qui représente dans ce cas la réparlilion des foyers des diverses radiations, montre que le foyer des rayons indigo est un peu en arrière du foyer des rayons jaunes: c’est, on le voit, la disposition inverse que présente la len- tille simple (fig 1). On est donc assuré de trouver le foyer chimique en le cherchant méthodiquement en arrière du foyer visible, qu’on détermine avec une grande précision ! : il se trouve généralement à une dis- tance voisine de + de la distance focale princi- pale. On comprend, en voyant combien les foyers sont déjà rapprochés, comment on peut obtenir des images relativement bonnes avec des objeclifs achromatisés pour les rayons visibles. Si, en outre, l'ouverture angulaire de l'objectif est faible (3% — &), on arrive alors à des résultats très satis- faisants, à cause de la tolérance subsislant pour la mise au point. C'est ce qui a permis, dans un certain nombre d'observations, d'utiliser les objectifs des grands équatoriaux (qui remplissent toujours ces con- ditions de faible ouverture), d'obtenir de très belles épreuves d’astres brillants comme le Soleil ou la Lune, et même d’astres faibles comme les éloiles : nous aurons d’ailleurs l'occasion de reve- nir plus loin sur ce point. L'idée si naturelle d’uliliser pour la photogra- phie les grands objectifs astronomiques, dont les qualités optiques sont reconnues, a conduit à re- chercher un moyen d'obtenir l’achromalisme chi- mique sans altérer les courbures des verres de manière à se servir alternativement du même ins- trument pour les observations optiques ou photo- graphiques. Rutherfurd, en Amérique, imagina d'ajouter un troisième verre compensateur qui transformait l’achromalisme optique en achromatisme chi- mique, et c'est grâce à cette adjonction qu'il ob- tint ces belles épreuves de la Lune, remarquables par la finesse des délails. Ce procédé a malheureusement le défaut non seulement d’être très coûteux, mais de nécessiter un verre aussi parfait comme malière et comme surfaces que les deux verres de l'objectif em- ployé. On peul arriver au même résullat à l'aide d'un arlitice infiniment plus simple et quia l’avantage de n'exiger aucun verre addilionnel: l’artifice consiste à écarter d'une petite quantité les deux * I suflit de placer dans le chässis porte-plaque une glace présentant des rayures sur la face qui remplace la couche sensible ; avec une forte loupe on met les traits en coïnci- dence avec l’image focale, A. CORNU. — LA PHOTOGRAPHIE CÉLESTE verres qui composent l'objectif; on voit en effet, en comparantsur les figures 1, 2et 3, la répartition du foyer des diverses couleurs, que l’achromatisme optique est un achromatisme chimique dépasse, en ce sens que la lentille divergente a allongé la distance focale des rayons indigo plus qu'il ne faudrait pour en maintenir le foyer au voisinage du minimum ; la lentille agit donc d’une ma- nière trop énergique. On concçoitalorsque.pouren diminuerl’influence, il suffise de l’interposer moins près de l'origine des faisceaux convergents à leur sortie du flint: c’est précisément ce qu’on réalise par l’écartement pro- gressif de deux verres, qu'on poursuit jusqu'à ce que la distance focale de l'indigo soit minimum. On constate, à mesure que l’écartement augmente, une amélioration progressive de la finesse des images; on s'arrête lorsque le maximum de per- fection est atteint, car au delà d’un certain écarte- ment (voisin de 1°/, de la distance focale princi- pale), la perfection des images s’altère de nouveau. Dans ces essais méthodiques on se guide sur la différence de position de l’image optique et de l’i- mage photographique, on reconnait, conformé- ment aux figures ci-dessus, qu'on approche du maximum de perfection lorsque le foyer chimique, d’abord en arrière du foyer optique, l’atteint peu à peu, et finit par passer en avant. Cette transformation de l’achromatisme des rayons visibles en achromatisme chimique a été employée dans diverses occasions que nous cite- rons bientôt : elle n'offre que des avantages au point de vue de la facilité des observations des deux genres; elle a toutes fois un petit inconvé- nient qui empêche de l'appliquer aussi souvent qu'il serait utile de le faire dans les observatoires : l'écartement utile du verre entraine une diminu- tion notable de ladistance focale (environ 7 à8 °/,) que la construction antérieure des corps de lu- nette n'a pas toujours prévu. J'ai insisté un peu longuement, Messieurs, sur cette question si intéressante de l’achromatisme des objectifs, bien qu'il existe un autre type d’ins- trument qui donne des images focales rigoureuse- ment achromaliques : ce sont les miroirs concaves ou miroirs de télescope; mais celte perfection théo- rique est contrebalancée par un inconvénient pra- tique qui rend très difficile l'emploi des miroirs pour les images photographiques, particulièrement dans le cas des longues durées d’exposilion : cet inconvénient est la déformation accidentelle du miroir qui, allérant la forme de la surface réflé- chissante, modifie la distance focale ct la per- fection des images. Aussi, bien que des observa- teurs habiles aient obtenu des épreuves admi- rables au moyen de miroirs, la grande majorilé A. CORNU. — LA PHOTOGRAPHIE CÉLESTE ——— des astronomes s’est déclarée en faveur des objec- tifs pour les études courantes de photographie astronomique, en particulier pour la carte du ciel. J’ajouterai encore quelques mots pour terminer ces préliminaires un peupénibles, mais nécessaires pour bien comprendre les conditions à remplir. On démontre, en Optique, que l'intensité d’une image, au foyer d’un objectif, est proportion- nelle à la surface libre de l'objectif, et en raison inverse du carré de la distance focale, en un mot, au carré de l'angle sous lequel un point de la plaque sensible voit le diamètre de l'objectif. Donc, quand nous aurons un objet très lumineux, nous pourrons réduire cet angle à être très petit. Par exemple, on peut photographier le Soleil avec un très petit objectif à très long foyer. Si, au con- traire, on veut photographier un astre extrème- ment petit, il faut prendre une ouverture d'objec- tif considérable : on est vite arrèté dans cette voie, car, lorsqu'on emploie des lentilles de grande ouverture angulaire trop grandes, on arrive à des aberrations de sphéricilé ou à des distorsions, en un mot, à des altérations de l’image focale : on est donc forcé de rester dans des limites assez étroites : on ne peut guère dépasser une ouverture égale à &, c'est-à-dire «le pied pour poure » suivant la règle des opticiens, aulant de pieds de distance focale que de pouces de diamètre de l'objectif. Il. -— PnoToGRAPuIE DU SOLEIL, DE LA LUNE ET DES PLANÈTES Passons maintenant rapidement en revue les progrès successifs de l'application de la photogra- phie aux.mesures astronomiques de précision. C’est par le Soleil, à cause de son énorme inten- silé, qu'on a commencé. La première couche im- pressionnable appliquée aux observations solaires est la couche d’iodure d'argent, de Daguerre. Vous connaissez Lous ce procédé : aussi ne vous le dé- crirai-je pas. La plaque iodée, peu sensible pour le portrait, était au contraire {rop facilement im- pressionnable quand il s'agissait d'une épreuve solaire ; il y avait donc une véritable méthode d'observalion à imaginer pour utiliser cet agent nouveau. C'est dès 1843, c'est-à-dire trois ans après la | divulgation de la découverte de Daguerre par Arago, que MM. Fizeau et Foucault, sur les conseils d'Arago (qui, dans un lumineux rapport, avait déjà fait pressentir les services que la photogra- phie élait appelée à rendre à l'astronomie), ont ob- tenu la première image du Soleil: non pas une em- preinle vague que tout le monde pouvait produire et sans aucune valeur, mais une véritable image astronomique présentant loutes particularilés in- 349 téressantes de la surface solaire : taches, facules, apparence sphérique bien marquée, etc... Voici une de ces plaques, que m'a gracieuse- ment prêté M. Fizeau; c'est la seule peut-être qui existe remontant à une date aussi éloignée. Elle à été obtenue de manière à donner une image de 8 centimètres au Soleil avec unobjectifde 10 mètres de foyer, et recevant le faisceau d'un héliostat, avec un écran mobile interrupteur. Après Daguerre, c’est à M. Fizeau que l'on doit les plus grands perfectionnements dans les procé- dés photographiques; car c’est lui qui a découvert la première substance accélératrice, à savoir la va- peur de brome. De plus, il a trouvé la manière de rendre absolument fixe cette imague daguerrienne si fugitive, que le moindre attouchement pouvait détruire, en dorant l'épreuve par l’action d’un sel d’or, l’hyposulfite double d’or et soude, composé isolé depuis lors par Fordos et Gelis. Ces études sont restées à l'état d'essai pendant un certain nombre d'années, et il faut aller jus- qu'au delà de 1850 pour trouver une observation régulière du Soleil, non plus par des dessins sur pa- pier blanc, d’après une projection, comme le fai- saient Carrington et le P. Secchi, mais par la pho- tographie. C'est à Warren de la Rue que l’on doitla créalion de l’héliographe pour l'étude méthodique des taches solaires, vers 1851. Le photo-hélio- graphe est un appareil assez simple, qui a l’avan- tage, non pas d'être le plus correct (la précision n'ayant pas besoin d’être extrème, vu le caractère nébuleux et irrégulier des taches), mais d’être le plus commode des instruments à employer pour les observations courantes de physique solaire. L'appareilde MM. Fizeau et Foucault était un ins- trument très précis, se composant d'un objeclif el d’une plaque sensible siluée au foyer même de l'objectif. Mais cette distance focale de 10 mètres était un obstacle pour avoir un appareil pratique. Cet appareil présentait encore un inconvénient : il lui fallait un héliostat, c'est-à-dire un miroir di- rigeant le faisceau solaire dans l’axe de la lunette. L'héliographe de Warren de la Rue à l'avantage, avec une petite longueur, et sans héliostat, de donner une grande image. Le principe de l'instrument remonte à Galilée. L'illutre physicien avait remarqué que, si l'on diri- geait une lunette vers le Soleil, il suffisait de retirer très légèrement l’oculaire pour obtenir, en arrière, sur un papier blanc, l’image du Soleil avec une très grande dimension et unetrès grande netteté. Voici d'anciennes gravures du xvir° siècle montrant des observateurs prenant des mesures avec un compas et l'ombre d'un fil à plomb sur l'image amplifiée d’une lunette de Galilée. L'héliographe est done composé d'un objectif 350 A. CORNU. — LA PHOTOGRAPHIE CÉLESTE d'environ un mètre de distance focale : l’image réelle produile au foyer est reçue sur une sorte d'oculaire à deux verres, lequel reprend les rayons divergents de cette image et les fait converger à nouveau de manière à donner une image ampli- fiée qu'on reçoit sur la plaque sensible. Pour ob- tenir une durée d'exposition suffisamment courte, une lame métallique percée d'une fente, mue par un ressort, se déclenche dans le plan de la première image à la volonté de l'observateur. Ces grandes images offrent de grands avantages et de graves inconvénients ; je vous demanderai la permission de m'arrèter quelques instants à les décrire ; les avantages résident dans la grandeur et la perfection apparentes de l'image amplifiée : la mise au point, en effet, présente une grande tolé- rance à cause de la faible ouverture des faisceaux ESRI ES dE au ee 5 RE > sl b | — L \ |A | Fig. 4. — Comparaison de l’image directe et de l’image amplifiée. angulaires, laquelle esten raison même du gros- sissement ; l'achromatisme rigoureux n’est donc pas nécessaire : aussi les images photographiques sont-elles faciles à obtenir, et les imperfections dues à la mise au point ne dépassentjamais celles dues au grain de la couche sensible. l'inconvénient grave de ces amplifications par l’oculaire est la distorsion inévitable des images amplifiées : un coup d’œiljeté sur la figure 4 montre la grande différence qui existe entre l'image di- recte a b, formée directement au foyer d’un objec- tif et celle qui a été reprise et amplifiée en AB par un sysième oculaire réduit ici à un seul verre »% n. Chaque point a de l’image directe est formé par le concours de toute la surface de l'objectif LL": ilen résulte que tous les points de cette image sont produits dans des conditions identiques : dès lors, même avec un objectif imparfait, si les images manquent de finesse, du moins ne présentent-elles aucune altération systématique tant qu'on reste au voisinage de l’axe principal. Au contraire chaque point À de l’image ampli- liée est produit par un pinceau particulier « mn A. On n'utilise done pour chaque point qu'une petite portion »n de l’oculaire amplificateur, va- riable avec le point considéré. D'où il résulte que chaque inégalité dans la taille du verre mn en- traine une erreur systématique dans la position du point focal correspondant, bien que la finesse du détail puisse ne pas être altérée. L'amplification des images convient donc très bien lorsqu'on veut une peinture à grande échelle d’un phénomène brillant; mais elle est à rejeter dans le cas où l’on doit exécuter des mesures de haute précision sur des images qui doivent, avant tout, être affranchies de toute altération systéma- tique. J'ai l'honneur de faire passer sous vos yeux une série de magnifiques épreuves de la surface 50- laire, obtenues avec deshéliographes à Greenwich, à Meudon; elles m'ontété confiées les unes par M. Christie, astronome royal, les autres par M.Janssen ; je prie ces savants ethabiles Directeurs d’agréer ici l'expression de mes remerciements. L'un des phénomènes les plus importants que présente le Soleil, c’est celui des éclipses, non seu- lement au point de vue du phénomène physique. mais aussi et surtout au point de vue de la Mé- canique céleste pour le perfectionnement destables de la Lune. La Lune, vous le savez, permet aux marins et aux voyageurs de déterminer la longitude du lieu où ils se trouvent : les observations lu- naires cessent évidemment au moment de la nou- velle lune, sauf dansles cas très rares des éclipses, où l’on peut alors déterminer avec une grande pré- cision la position de notre satellite. L'observation photographique des éclipses de Soleil s’imposait donc aussi bien au point de vue de la Physique solaire que de la Mécanique céleste ; les astronomes n’ont pas manqué de faire appel à ce nouveau mode d'observation dès qu'il est de- venu praticable pour eux. La première expédition qui aitété faite pour ob- server une éclipse de Soleil fut celle du 18 juil- let 1860. C'était l'époque du grand progrès de la photographie par la découverte du collodion sen- sible. Les plus illustres physiciens et astronomes prirent part à celte expédition. En Espagne, s’é- taient donné rendez-vous : pour la France, Le Ver- rier et Foucault; pour l'Angleterre, Warren de la Rue, qui s'était spécialement installé pour photo- graphier les phases du phénomène, surtout en ce qui touchait l'élude des protubérances. Le P. Sec- chi s'était placé à la station du Desierto de Las Pal- mas, où Arago et Biot avaient fait naguère leurs observations géodésiques. Enfin, à Batna, en Algérie, le ministre de la guerre avait envoyé une expédition composée de plusieurs membres du corps enseignant de l'École Polytechnique, el commandé par le capilaine Laussedat, aujour- d'hui colonel et directeur du Conservatoire des arts et métiers. Au point de vue de la Physique solaire les résultats furent des plus intéressants; les fameuses protubérances, dont l'existence avait été contestée ou attribuée à des volcans lunaires, | furent photographiées et la belle épreuve de | Warren de la Rue, dont j'ai l'honneur de _.—— A. CORNU. — LA PHOTOGRAPHIE CÉLESTE 351 projeter devant vous une copie, en est une preuve devenue classique. Au point de vue des observations astronomiques de précision, le colonel Laussédat, qui avait disposé ses appareils de manière à obtenir des mesures absolues par la photographie, montra d'une ma- nière décisive que la photographie était capable de donner toute l'exactitude requise pour la correc- tion des tables de la Lune. Voici d’ailleurs en pro- jection la série des phases du phénomène observé à Batna, obtenue avec le concours de M. Aimé Girard, aujourd'hui professeur au Conservatoire des arts et métiers, et connu dejà à cette époque par ses belles recherches de chimie photogra- phique. Voici d’ailleurs l'appareil mème ducolonel Laus- sedat : c'est un héliographe horizontal qui reçoil les rayons solaires par réflexion sur le miroir d’un héliostat ; mais (et c’est le point capital au point de vue de la précision des mesures) la lunette de l'héliographe peut, lorsque lhéliostat est enlevé, pointer sur une lunette méridienne qui fournit les coordonnées absolues de l’axe optique de la lunette photographique, et permet de corriger l'influence des petites déviations du miroir de l’héliostat. Les expéditions les plus importantes qui aient été faites, tant pour l'intérêt astronomique que pour le rôle considérable qu'y joua la photographie, furent celles relalives aux passages de Vénus sur le Soleil le 9 décembre 1874 et le 6 décembre 1882. Ilest juste de dire que, dès 1849, M. Faye, le doyen des astronomes français, avait proposé d'employer la photographie pour la plupart des observations de précision du Soleilet, particulière- ment, pour les observations du passage de Vénus, afin de les débarasser de loule intervention de l'observateur : les essais qu'il avait faits, dès 1858, avec Porro, avaient confirmé les prévisions du savant astronome. Quelques mots, d’abord, sur les passages de Vénus : vous savez qu'ils sont extrêmement rares : ils n’arrivent que deux fois par siècle, et encore pas dans tous lessiècles. C’est ainsi que le xx° siècle pe verra pas de passage de Vénus sur le Soleil. Cette observation si rare est très importante, parce qu’elle fournit la distance du Soleil à la Terre par une méthode entièrement géométrique et in- dépendante de la construction et de la prévision des lables astronomiques de ces deux astres. Dans tous lespays, on a organisé des expéditions permettant de faire ces observations où la photo- graphie a joué un très grand rôle. Je n’ai besoin de vous donner que l'appareil photographique de l’expédition française de 1874, les autres nations ayant adopté l'héliographe anglais. Voici d'abord l’un des appareils originaux, que nous | avons reconstitué : c’est celui de la station de Nou- méa ; il rappelle, comme disposition générale, l'ap- pareil du colonel Laussédat avec un miroir et une lunette azimutale, dirigeable sur l’axe de la lu- nette photographique; il en diffère par des perfec- lionnements importants : il s'agissait, en effet, d’ob- tenir avec les images des mesures de la plus haute précision ; on y est parvenu de la manière sui- vante : Pour éviter la distorsion, on a supprimé l'ocu- laire amplificateur : la longueur de la distance focale (voisine de 4 mètres) fournissait une image solaire suffisante (38 millim. de diamètre). On a obtenu la perfection optique des images, en employant le procédé d'achromatisme par sé- paration des verres de l'objectif, reconnu préala- blement très parfait pour les images visibles. Un troisième perfectionnement a consisté à mettre l’écran obturateur au foyer même, à une très petite distance en avant de la plaque impres- sionnable. Celte disposition permet de conserver toute la puissance optique de l’objectif et d'élimi- ner l'influence du mouvement diurne par une orientation convenable de la fente de l’obtura- teur. Enfin, pour éviter les ondulations des images causées par l’air chaud enfermé dans le tube de la lunette, un ventilateur énergique fonctionnail avant chaque observation et donnait à l’air intérieur une homogénéité très complète de température sur le trajet du rayon lumineux. J’ajouterai que l'un des perfectionnements, et non le moins important, était l'emploi, par M. Fi- zeau, du procédé de Daguerre pour l'obtention des images : au point de vue de la précision, rien ne vaut, en effet, la surface d'un métal comme réceptacle de l’image; il n’y a à craindre ni le boursouflement, ni le retrait de la couche sensible lors du développement par voie humide ou de la dessiccation; de plus la finesse du daguerréotype, procédé un peu dédaigné parce qu'on ne le pra- tique plus, est merveilleuse lorsqu'on prend les précautions nécessaires. Or, de ce côté, l'expé- dition française avait un maître incomparable, M. Fizeau, qui avait apporté à la Commission le concours de sa haute expérience tant pour le con- trôle de l'appareil optique que pour le perfection- nement du procédé daguerrien. Voici, du reste, la projection des diverses phases du passage de Vénus sur le Soleil : ce sont des épreuves originales choisies parmi les plus inté- ressantes. Vous pouvez juger dela netteté des con- tours du petit disque circulaire de la planète ; cette belle projection est particulièrement difficile à oblenir avec l’épreuve daguerrienne, opaque et miroitante. Vous voyez avec quel succès M. Gus- 352 A. CORNU. — LA PHOTOGRAPHIE CÉLESTE tave Tresca, qui a bien voulu aider M. Molteni, a réussi à vaincre les difficultés. Voici d’autres clichés originaux obtenus au col- lodion sec et qu'on peut projeter comme les épreuves ordinaires de démonstratien. Ce passage du 8 décembre 1864 a été observé par cinq stations formant autant de missions dis- tincles, mais munies d'appareils identiques, étu- diés longuement avant le départ. La mission de l’ile Saint-Paul était dirigée par M. l'amiral Mouchez; celle de Pékin. par le lieute- nant Fleuriais ; celle de l’ile Campbell, dirigée par M. Bouquet de la Grye; celle du Japon par MM. Jans- sen et Rismaud, et enfin celle de la Nouvelle-Calé- donie par MM. André et Angot. (Le conférencier décrit en particulier la mission de l'ile Saint-Paul et projette successivement des épreuves relatives aux diverses installations, en particulier la lunette photo- graphique, le miroù et la lunette méridienne conjuguée.) Sauf à l'ile Campbell où le ciel a été nuageux, l'observation du passage de Vénus a été accomplie dans des conditions favorables; les épreuves da- guerriennes ont été mesurées avec des machines micrométriques spéciales et ont fourni une valeur de la parallaxe solaire égale de 8'',79; on peut même remarquer qu'au lieu des résultats discor- dants donnés par d'autres expéditions, le résullat photographique de la mission francaise a été l’un des premiers à montrer que la valeur 8,85, consi- dérée jusque-là comme la plus probable, était au contraire trop forte. Je ne dirai rien des expéditions françaises de 1882; le chiffre plus faible que celui qu'on atten- dait, obtenu en 1874 pour la parallaxe solaire, avait, dans l'esprit de certains savants, jeté du dis- crédit sur la photographie. On décida d’abord de ne plus faire d'observation photographique au pro- chain passage; mais on se ravisa au dernier mo- ment et, abandonnant la de perfection- nements suivie jusque-là, on adopta le vieil héliographe employé partout. C’élail un progrès à rebours, car l'appareil offre à peu près tous les défauts opliques qu'il eût fallut éviter : non-achro- malisme, amplification, distorsion, etc., et l’on fil des épreuves sur gélaline. Il est vrai qu’on ajouta au foyer un réseau tracé sur verre pour corriger la distorsion optique et celle de la gélatine ; mais la complication du procédé n’a rien de rassurant et n'est pas comparable à l’élégance de l'emploi des images directes sur plaque métallique. voie Je passe rapidement sur les épreuves obtenues par la pholographie de la Lune. En 1856, l’astro- nome américain Bond essayait l'expérience sur plaque daguerrienne, mais sans résullat appré- ciable ; depuis, à mesure que les préparations sen- sibles ont élé perfectionnées, les progrès ont été croissants : les premières épreuves qui ont excité une véritable admiration, sont celles de Warren de la Rue, puis de Rutherfurd. Voici quelques épreuves plus récentes : d’abord une épreuve lunaire obtenue à l'Observatoire de Paris, en 1876, avec l’équatorial de la tour de l’est rendu achromatique par l’écartement des verres; puis une épreuve de la lumière cendrée, exécutée par M. Janssen à Meudon et une épreuve compa- rative de la pleine lune obtenue en une seconde pour la mesure relative des intensités. C'est, comme vous le voyez, une nouvelle application de la photographie : la photométrie astronomique. A côté de lélude photographique de la Lune se place celle des planètes, beaucoup plus difficile, à cause du peude lumière ou de la délicatesse des détails. Comme curiosité, voici une épreuve de la planète Vénus obtenue au collodion humide, de jour, à 3 heures de l’après-midi, avec l’équatorial de la tour de l’est de l'Observatoire de Paris. Vous voyez la forme en croissant, mais les détails manquent. Vous connaissez, en effet, ce dicton as- tronomique : (Il n'y a pas de mauvaise lunette pour la lune, mais il n’y en a pas de bonne pour Vénus. » Avec le gélatino-bromure on a pu aller beaucoup plus loin, témoin ces beaux clichés de Jupiter et de Saturne, obtenus par MM. Henry à l'Observatoire de Paris. Enfin, on a pu même pho- tographier les pàles lueurs des comètes : celle que je vous présente a élé obtenue au cap de Bonne- Espérance par M. Gill, astronome royal à l'Obser- vatoire du Cap. III. —— PHOTOGRAPHIE DES ÉTOILES Nous arrivons, maintenant, à la photographie la plus difficile, celle des étoiles. Le ciel stellaire a le privilège d’atlirer la curiosité humaine; on espère toujours découvrir quelque chose de nouveau dans ce monde mystérieux ; on veut toujours péné- trer plus loin dans ce monde qui ne nous apparait, à première vue, que comme un amas de petits points lumineux, mais qui nous a révélé et doil nous révéler encore lant de secrets! Dans ce domaine, on n’a pu réussir à obtenir des résultats utiles que par les nouveaux procédés photographiques. Dès 1850, pourtant, Bond était arrivé, aux États-Unis, à obtenir une épreuve da- guerrienne de à de la Lyre et à des Gémeaux. Mais le manque de sensibilité des plaques et surtout l'insuffisance du mouvement d'horlogerie destiné à diriger la lunette sur le même point du ciel avait fait abandonner ces essais. En 1857. le même astronome américain, avec le collodion, est parvenu à oblenir le cliché d'une éloile double, £ de la Grande Ourse, el à mesurer 4 A. CORNU. — LA PHOTOGRAPHIE CÉLESTE la distance et l’angle de position des deux compo- santes de cette étoile avec une précision égale à celle des meilleures observations visuelles. On vit, dès lors, tout l’intérèt de la question. En 1879, M. Common, un astronome amateur anglais, qui a construit lui-même dans son obser- vatoire à Ealin, près de Londres, de très beaux télescopes, réussit à photographier les étoiles de la constellation d'Orion jusqu’à la neuvième gran- deur. Mais les progrès décisifs ont été accomplis, en 1885, par MM. Henry à l'Observatoire de Paris. Ils étaient occupés, depuis un grand nombre d'années, à continuer la construction des cartes elliptiques de Chacornac jusqu'à la treizième grandeur : ce travail consiste, comme vous savez, à mesurer l'ascension droite, la déclinaison de chaque étoile, à en apprécier la grandeur, puis à reporter les ob- servations sur un papier quadrillé que le graveur ensuite reproduit sur une planche de cuivre. Mais, arrivé au voisinage de la voie lactée, le travail était devenu presque impossible. Ils résolurent d'essayer la photographie, et alors, perfection- nant les procédés de leurs devanciers, ils sont arrivés à des résultats qui ont excité un véritable enthousiasme. Les étoiles sont relativement faciles à pholo- graphier, et voici pourquoi. Leur diamètre appa- rent est insensible; il en résulte que leur éclat intrinsèque est énorme. C’est parce que notre pu- pille est extrêmement petite que nous altribuons aux éloiles un éclat faible; pourtant cel éclat est au moins du même ordre que celui du Soleil. On démontre, en physique, que l'éclat intrinsèque de l'image focale d’une étoile est proportionnel au carré de la surface de l'objectif, parce que le diamètre réel est insensible; cette loi est beau- coup plus favorable que celle à laquelle nous sommes accoutumés dans la pratique des observa- tions ordinaires avec des objets de diamètre appa- rent fixe. Dans ce cas, vous savez tous que les images focales ont une inlensilé proportionnelle surtout à la surface de l'objectif employé. De sorle qu'avec un objet visible, si nous voulons avoir quatre fois plus de lumière, nous prenons une ouverture deux fois plus grande. Avec une lunetie astronomique ayant un objectif double, nous aurons pour les étoiles une concentration seize fois plus grande, Par conséquent, le pro- blème de la photographie des étoiles est facilité beaucoup par cette condition tirée de la constitu- tion de ces astres et de la nature de la lumière : on peut donc atteindre des grandeurs d'ordre extré- mement élevé. L'instrument propre à photographier le ciel est composé d'un simple objectif achromatique REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, ou achromalisé pour les rayons chimiques. MM. Henry, qui sont, en même temps que de savants astronomes, des opticiens fort habiles, sont arrivés à construire couramment des verres dont le foyer chimique réunit au même point le maximum de lumière. Le reste n'est plus qu'une question en quelque sorte géométrique. Il faut faire en sorte que ce pelit point lumineux reste immobile, sur la plaque sensible, malgré le mouvement diurne de la voûte céleste. Il y a, pour cela, deux moyens: l'un purement mécanique qui consiste à produire le mouvement parallactique de la lunette en liant automatiquement le mouvement d’horloge- rie à une horloge astronomique. L’instrument em- ployé à Greenwich, notamment, construit par M. Grubb, de Dublin, est dans ce cas : les trans- missions sont faites par le moyen de l'électricité. Le second système est mixte : on ne cherche pas à obtenir un mécanisme d'horlogerie absolument parfait, on surveille le mouvement et on le rectifie : la lunette photographique est en effet liée à un poin- teur. C’est une lunette jumelle de la première, fixée au même corps et qui offre à peu près la même puis- sance optique ; il suflit alors de maintenir, sous le fil du réticule, par un moyen de rectification très délicat, l’image de l’une des étoiles qu'on photo- graphie. Voici l'appareil de MM. Henry à l’'Observa- toire de Paris; vous remarquerez la simplicité de l'appareil, surtout si on le compare à la multipli- cité des pièces que présentent certains grands équatoriaux, comme celui de l'Observatoire de Lick (Californie). La principale difficulté, pour oblenir des clichés utilisables, c'est de se mettre au point. Voici la méthode employée : on cherche méthodiquement (à l'aide d'une graduation faite sur le tube de ti- rage du porte-plaque) quelle est l'image rectiligne la plus fine que laisse la trace d'une étoile brillante (4'° à 4° grandeur) lorsqu'on arrête le mouvement d'horlogerie. On arrive ainsi à resserrer entre quelques dixièmes de millimètre la position exacte du plan de plus grande nettelé. Je ne dirai qu'un mot du mode de développement du cliché : tous les procédés indiqués réussissent ; cependant l’oxalate de fer parait donner la plus grande vi- gueur. Voici quelques exemples de clichés stel- laires. (Projection des Pleiades ; l'amas de la Crèche; de l'amas de Præsépé; de l’amas d'Hercule). de Lanas des Gémeaux: de Voici un autre type de cliché avec un quadril- lage particulier. Ce quadriilage, provenant d’un réseau tracé sur glace argentée, sert à éliminer les distorsions que la gélaline pourrait subir. J'appellerai également votre attention sur les clichés multiples où chaque étoile est reproduite 10* 304 deux ou trois fois à une très petite distance, de manière à former un groupe d'aspectreconnaissable par la forme. Ces groupements permettent de re- connaître les fausses images des vraies; elles per- mettraient aussi de signaler de petites planètes, parce que l'aspect du groupe serait tout à fait altéré. Les beaux résultats obtenus par MM. Henry ont montré que l'étude méthodique du ciel au moyen de la photographie, en un mot la carte photogra- phique du ciel, devenait possible et avantageuse. L'initiative de ce grand travail a été prise par M. l'amiral Mouchez, qui a convoqué, sous le pa- tronage de l’Académie des Sciences en 1887, un congrès international, pour décider qu'on entre- prendrait de concert, dans tous les pays, la carte du ciel. Les astronomes les plus illustres ont répondu à l'appel et ont étudié le programme de cette œuvre d’un si grand intérêt pour les progrès ultérieurs de l'astronomie stellaire ; après discussion, on s’est mis d'accord sur la nature et les dimensions de l'instrument à adopter. Cest la lunette photogra- phique de MM. Henry. achromatisée pour les rayons chimiques de 32 centimètres d'ouverture et de 3 m. 40 de distance focale, qui a réuni tous les suffrages. Actuellement près de vingt observa- toires répartis sur toute la surface du globe, possè- dent leurs appareils et commencent à photogra- phier les zones qui leur ont été attribuées. Dans l’accomplissement de ces grands travaux, il est juste de mentionner les collaborateurs de MM. Henry : en effet, il fallait, pour construire ces grands objectifs photographiques,obtenirdes verres d’une pureté irréprochable : c'est la maison Feils, dirigée par son habile successeur, M. Mantois, qui s’est chargée de cette tâche difficile : elle réussit si bien qu'elle a, en quelque sorte, acquis pour le monde entier le monopole des verres d'optique astronomique. La construction de ces lunettes photographiques offrait d’autre part des problèmes difliciles : il s’agit en effet de réunir sur le même instrument, d'abord une stabilité parfaite et ensuite les moyens délicats de rectification nécessaires pour suivre dans le pointeur l'étoile de repère avec la plus grande précision. C’est à M. Gautier, dont l’habi- leté estbien connue dans les genresles plus variés, qu'on doit d’avoir réussi à remplir toutes ces con- ditions : il a été chargé de construire près de la moitié des appareils employés actuellement à la confection de la carte du ciel. Une émulation féconde a d’ailleurs permis à d’autres constructeurs de mettre en évidence leur ingéniosité et leur intelligence. Je mets sous vos yeux la lunette photographique de Greenwich avec sa rectification automatique au moyen de l’électri- A. CORNU. — LA PHOTOGRAPHIE CÉLESTE cité, et celle de l'Observatoire du Cap, construites par M. Grubb, de Dublin. Je vous ai dit que les télescopes à miroir avaient été écartés pour la construction de la carte du ciel: je crois utile de vous montrer par quelques clichés quels beaux résultats ils donnent entre des mains habiles : les précieux clichés que j'ai l'honneur de vous proposer m'ont été donnés par M. Common, à qui j'offre ici le témoignage d’une admiralion que vous allez partager. Voici d'abord une magnifique épreuve des Pléiades ; puis une succession instructive des pro- grès faits dans l'observation de la nébuleuse d'O- rion ; d'abord la reproduction d'un dessin exéculé en 1840 par Bond; il a passé longtemps pour une image parfaite de cette nébuleuse. Voyez mainte- nant combien l'épreuve photographique obtenue avec un miroir de trois pieds de diamètre lui est supérieure ; quant à celle obtenue récemment par M. Common avecsonnouveau miroir de cinq pieds, c'est une véritable merveille ! Nos lunettes photographiques de la carte du ciel ne sont d’ailleurs pas siinférieures,comme vous pouvez en juger par cette épreuve de la même nébuleuse et celle de la nébuleuse de la Lyre obte- nues à Toulouse par MM. Audoyer et Montau- geron. A propos de la photographie des nébuleuses, je mentionnerai rapidement un effet secondaire qui certainement trouble les images dans les lon- gues durées de pose: c’est le phénomène bien connu du Æalo, qui se produit quand on photographie un rayon lumineux très intense : on le voit aisé- ment sur ces clichésde l’image d’une lampe, d’une lumière électrique, d’un coucher de soleil, etc. Mais vous savez qu'en prenant la précaution d’en- duire le revers de la plaque d’un vernis noir de mème indice que le verre, le halo disparait com- plètement. Tous les phénomènes que je viens de décrire ont, au point de vue de l’astronomie physique, un intérêt considérable; mais, au point de vue de l'astronomie de précision, on attend, de la carie du ciel, des résultats importants. D'abord, nous pourrons désormais laisser à nos succes- seurs une image complète et fidèle du ciel à notre époque, ce qui facilitera singulièrement les recherches ultérieures. Vous savez qu’on a vu des étoiles paraître et disparaitre sans laisser de trace, comme celle de Tycho-Brahé, qui a apparu subi- tement en 1572 dans Gassiopée, et qui s’est éteinte peu à peu. Si l’on en avait conservé une image fidèle au milieu de cette constellation, on aurait pu la rechercher dans le ciel et reconnaitre si elle est réellement perdue. Depuis, le même phéno- mène s’est représenté plusieurs fois. D’ A. TROUSSEAU. — L'OEIL CONSIDÉRÉ COMME ÉLÉMENT DE DIAGNOSTIC 3 Qt QC Certaines étoiles offrent des variations d'éclat à grandes périodes, comme Argo, dont la période est voisine de 10 ans.Des clichés donnerontles ren- seignements les plus précis sur ces variations de grandeur, La recherche et l'étude des petites planètes (dont le nombre dépasse aujourd'hui 300) seront singulièrement facilitées par la photographie. En voici un exemple : MM. Henry ont montré qu'on avait tout avantage à faire, sur le même cliché, “deux ou trois épreuves contiguës des mêmes éloiles (particulièrement en triangle équilatéral), de façon à éliminer toutes les fausses images. Si Von avait le bonheur de tomber sur une planète d'éclat suffisant, les trois impressions successives n'auraient ni la forme, ni la disposition en triangle équilatéral : ainsi on pourra reconnaitre immé- diatement la présence d'une planète transneptu- mienne, car Neptune, sur les clichés stellaires, donne déjà naissance à une déformation très no- table du petit triangle ci-dessus, condition tout à fait caractéristique du mouvement planétaire. Enfin, en étudiant avec soin les clichés, on pourra, dans le courant de l’année, mettre en évi- dence les déplacements relatifs d'étoiles, et alors, non seulement mesurerle mouvement propre des étoiles, mais même déterminer leur parallaxe annuelle, c’est-à-dire le déplacement apparent que le mouvement orbital de l'observateur terrestre produit sur l'étoile (perspective de l'orbite ter- restre sur le ciel). Vous savez que ces observations fournissent la distance des étoiles au système solaire. Tout à l’heure je vous parlais de la déter- mination de la distance de la Terre au Soleil comme d'un problème admirable : les études stellaires conduisent à des problèmes autrement grandioses, car ici la distance du Soleil à la Terre se multiplie par le chiffre de 200.000..., un mil= lion.., et bien davantage encore! Enfin, on arrivera à préciser cet admirable dé- couverte de W. Herschel, à savoir que ces petils mouvements propres, observés depuis de longues années, ne sont pas distribués au hasard ; que beaucoup d’entre eux offrent des directions conver- gentes vers un même point du ciel: c’est la preuve que notre système solaire se déplace lui-même dans l’espace, en se dirigeant, avec une vitesse de 2 ou 3 fois le rayon de l'orbite terrestre par an, vers un point situé dans la constellation d'Her- cule. Vous voyez, messieurs, les immenses progrès promis ou déjà réalisés dans la science à l’aide de la photographie; il suffira de rappeler en termi- nant ce qu'elle a apporté dans la méthode de mesure des grandeurs. Elle a d'abord, à la surface de la Terre, perfectionné les mesures topographiques, comme vous le prouvent les travaux des officiers de génie et de M. le colonel Laussédat à leur tête. On lui a demandé ensuite la distance de la Terre au Soleil, par l'observation du passage de Vénus : elle l’a donnée avec autant de précision que les anciennes méthodes ; voilà que, maintenant, on attend d’elle la mesure de la distance du système solaire aux étoiles. Vous jugez, par cet aperçu rapide, combien est vaste et grandiose le champ ouvert aux progrès de la photographie, simplement dans le domaine de l'astronomie de précision, sans parler de ceux dont nos illustres collègues vous ont déjà entre- tenus. En réclamant, devant l'opinion publique, la créa- tion d'une chaire de photographie au Conserva- toire des Arts et Métiers, l’éminent directeur de cet Établissement, M. le colonnel Laussédat, est done bien dans la voie des innovations fécondes. Mieux que personne il connait le grand rôle de la photographie dans la science, car il en a donné des preuves personnelles dans des directions bien diverses. J’ai tout lieu de croire, à en juger par la bienveillante attention avec laquelle vous m'avez écouté, que vous vous joindrez à lui et à nous pour applaudir à ses efforts et appuyer ses instances. A. Cornu, de l’Académie des Sciences Professeur à l'École Polytechnique. L'ŒIL CONSIDÉRÉ COMME ÉLÉMENT DE DIAGNOSTIC EN PATHOLOGIE IL est aujourdhui de notion commune que l'examen de l'œil peut offrir un sérieux apport au diagnostic du plus grand nombre des affections générales; mais celui-là s’exposerait à de réelles désillusions qui voudrait chercher dans ce seul exa- men la solution du problème, Certes, le concours de l’ophtalmoscope est précieux en clinique, sou- vent même indispensable; mais, dans la majorité des cas, les renseignements fournis par le miroir veulent être complétés par ceux que donne l'étude complète du patient. Il ne faut donc ni exalter ni rabaisser la valeur 356 de l'examen des yeux au point de vue de la séméio- logie. Évidemment le fait qu'un syphilitique a de liri- tis importe assez peu au diagnostic de la syphilis, qui s'accuse par d'autres signes évidents; mais, combien grande devient la valeur de la kératite interstitielle dans la recherche de la syphilis héré- ditaire, souvent si difficile à dépister ! Un diabétique a de la polydipsie, de la polyurie, de la glycosurie ; il se plaint de troubles oculaires, on constate la présence d’une rétinite diabétique, le diagnostic n’en tire certainement aucun béné- fice. Voici un exemple contraire : un individu, à peine indisposé d’ailleurs, s'aperçoit d’un abais- sement progressif de sa vue, consulte lophtalmolo- giste. Celui-ci constate une rétinite offrant tous les caractères de la rétinite brightique, conseille l'analyse des urines trouvées albumineuses et dépiste ainsi une des plus graves maladies, aussi une des plus insidieuses. lei le service rendu est considérable. Citerai-je la valeur de l'examen du fond, d'œil dans le tabès, dont le diagnostic est confirmé si souvent par la constatation d’une atrophie de la papille, dans l'hystérie différenciée des maladies qu’elle peut simuler par l'étude du champ visuel et de la dyschromatopsie. Je préfère ne pas insister sur ces exemples el aborder en détail l'étude de la question. Je cher- cherai à bien déterminer la valeur diagnostique des symptômes oculaires dans chacune des affec- lions que je vais indiquer; je n'ai pas la prétention, vu le cadre de cet article, d'apporter une élude complèts de la question, qui nécessiterait la rédac- tion d'un gros volume. Je ne toucherai qu'aux points principaux, laissant à dessein dans l'ombre ceux qui ne sont pas suffisamment établis ou né- cessitent, pour être mis en lumière, des dévelop- pements trop considérables. Ainsi compris, ce travail peut être considéré comme un guide pour ceux qui veulent approfondir. Il satisfera, j'espère, ceux qui désirent une vue d'ensemble On ne s'étonnera pas queje laisse de côté l’étude de l'exophtalmie dans le goitre exophtalmique, des amblyopies dans les intoxications alcooliques et nicotiniques, des irilis et des choroïdites dans les troubles menstruels et utérins, elc., ces alléra- tions offrant une valeur diagnostique insuffisante et étant dignes seulement de figurer dans une revue concernant le rapport des maladies des yeux et des maladies générales. Je vais mettre en valeur les signes oculaires d’abord dans les maladies nerveuses où ils ont une énorme importance, telles que le tabes, la sclérose en plaques, la paralysie générale, l'hystérie, les D' A. TROUSSEAU. — L'OEIL CONSIDÉRÉ COMME ÉLÉMENT DE DIAGNOSTIC ——_——…—…—……"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"—"…"—… …. .….…………………………"… …"…"…"… _"_…_…"…"… ……"…—…—.…—…——_._———— lésions cérébrales, la méningite, les tumeurs cé- rébrales, les traumatismes du crâne ou du cerveau ; ensuite je les étudierai dans les autres affections générales, telles que le rhumatisme, la goutte, le diabète, le brightisme, l’artério-sclérose, enfin dans la syphilis acquise et surtout dans la syphilis héré- ditaire. [. — TABES Les symptômes oculaires du tabes servent très. souvent à dépister le mal : ils précèdent de long- temps l’éclosion des phénomènes ataxiques; par- fois même ils constituent à eux seuls toute la ma=" ladie pendant une très longue période. Certains de ces troubles étaient mis sur le compte de la syphilis, alors que les travaux modernes de Charcot, de Fournier n'avaient pas encore établis leur rattachement à la période préataxique. La migraine ophtalmique, avec son scotome,son hémiopie est parfois un indice de tabes naissant ; mais elle s’efface devant la valeur des troubles moteurs et des signes ophtalmoscopiques. Les muscles de l'œil sont souvent paralysés. A l'époque où elles peuvent être étudiées au point de vue du diagnostic, c’est-à-dire au début, les paralysies sont plutôt de simples parésies, diplo- pies sans strabisme, se développant et disparais- sant facilement, quelquefois cessant presque tout d'un coup sans traitement, récidivant avec facilité, affectant un ou plusieurs muscles ensemble ou sé- parément ; plus la maladie se prononce, plus les paralysies montrent une tendance à la fixité, plus le strabisme est disposé à s'établir. Tous les muscles moteurs du globe peuvent être pris, et aussi les museles palpébraux : d’où ce léger rélrécissement de l'ouverture palpébrale signalé par Berger chez les ataxiques, d’où la paralysie des releveurs des deux côtés, vue par Déjerine. Quelques paralysies ont un caractère un peu. spécial : c'est ainsi que de Watteville, Hubscher ont signalé une paralysie éphémère de la conver-« gence, associée à d’autres paralysies. La pupille d’un tabétique non encore évident est une source précieuse de renseignements; elle doit êlre interrogée avec soin pour éclaircir tous les cas douteux. Tantôt il existe un myosis simple ou double, les pupilles sont punctiformes etl'examen du fond de l'œilrendu ainsi très difficile ; tantôL il y a mydriase, le plus souvent d’un seul côté. L'inégalité pupillaire peut donc être observée, comme dans la paralysie générale. D'autres fois il y a paralysie de l’accommo- dation sans mydriase, mais avec anesthésie périor- bilaire. Ici, la pupille reste immobile devant un jet de lumière, mais réagit bien à l'accommodation, c’est le signe d'Argyll Robertson, qui peut à lui seul +4 ; D' A. TROUSSEAU. — L'OEIL CONSIDÉRÉ COMME ÉLÉMENT DE DIAGNOSTIC 397 mettre sur la voie de l’ataxie. Là, c'est le contraire. Berger a indiqué la déformation elliptique dela pu- pille. Du côté du fond d'œil on n'observe que trop souvent la terrible atrophie de la papille, dont la fréquence est considérable, puisqu'elle atteint 12.0/; des ataxiques d’après Erb, 13, 5 °/, d’a- près Mali, 40 °}, d’après Schmeichler. Son principal caractère est d'être régulièrement pro- gressive et d'aboutir à cet aspect ophtalmosco- pique bien connu : une papille blanc grisàtre tran- chant nettement sur le fond rouge de l'œil, On a voulu faire de la coloration grise de la papille un signe pathognonomique de l’atrophie tabélique ; cliniquement, on ne peut admettre cette précision. Le rétrécissement du champ visuel précédé d'une diminution du champ de perception des couleurs dans l’ordre suivant: vert, rouge, bleu; la pré- sence des lacunes et scotomes dans le champ de la vision sont de meilleurs signes. Le P' Charcot a montré que la sclérose du nerf optique pouvait précéder la venue des phéno- mènes typiques des tabes et même les faire pré- voir longtemps à l'avance, d’où importance consi- dérable de l'examen du fond d'œil. Déjerine a prouvé la possibilité de l’ataxie en dehors des lésions médullaires. Kruche a rapporté 17 cas de pseudo-tabes chez les alcooliques. J'ai montré qu'il pouvait, de par l'œil, y avoir grande difficulté à distinguer les ataxies fausses des véri- tables, quand, à des troubles très voisins deceux du tabes, vient s'ajouter une ambiyopie à forme spé- ciale qui n’est autre qu'une amblyopie alcoolique simulant, à s'y méprendre, l’atrophie papillaire au début. Cependant, la recherche des antécédents du ma- lade, la constatation de ses habitudes d’intempé- rance et surtout la curabilité presque simultanée des troubles ataxiques et des troubles oculaires permet au médecin de ne pas rester longtemps dans l'erreur. La simple constatation des signes oculaires ne suffit pas toujours au chercheur pour se prononcer en faveur de l’une des trois maladies que voici : syphilis cérébrale, tabes, paralysie générale. En effet, toutes trois peuvent s'accompagner de para- lysies musculaires, de troubles pupillaires et d’a- trophie de la papille ; c’est, sans contredit, dans le tabes que toutes ces altérations se rencontrent le plus souvent; quand elles coexistent, on ne peut s'empêcher de songer au tabes. Tout dernièrement Liebrecht à publié un travail dans lequel il montre la fréquence relative des paralysies musculaires. D’après cet auteur, les paralysies du tabes consti- tuent 29°/, de la totalité des paralysies muscu- laires, celles dela syphilis cérébrale 14 °/, et enfin celles de la paralysie générale à peine 3, 5 °/,. Ce dernier chiffre est certainement beaucoup trop faible et est dù aux condilions dans lesquelles Liebrecht a observé, soit dans une clinique d’ocu- listique où les paralytiques généraux se rendent peu. IT. — SCLÉROSE EN PLAQUES Le P' Charcot a très bien différencié les troubles oculaires de la sclérose en plaques de ceux de Fataxie. Les troubles moteurs de la sclérose en plaque consistent non plus en paralysies, comme dans le tabes, mais en un défaut de coordination dans les meuvements nécessités par l'acte du regard; c'est la paralysie des mouvements associés. Il résulte de ceci que les malades qui sont alleints ainsi ne re< gardent jamais avec précision; on observe par là même souvent les déplacements oscillatoires du nystagmus,. L'iris conserve tous ses mouvements dans la ma- ladie scléreuse. Dans la sclérose en plaques l’ophtaltmoscope ne révèle souvent que peu de chose, à peine une simple décoloration papillaire. Pourtant, dans cette maladie on observe des amblyopies qui vont jus- qu’à la cécité complète. Celle-ci n’est ordinaire- ment que transitoire et disparait au bout de quel- que temps, mais on l’a vue demeurer définitive. On voit qu'ici les phénomènes oculaires ne res- semblent en rien à ceux du labes. Paralysies fré- quentes des muscles de lœil dans l’ataxie, pas de paralysie dans la sclérose en plaques. Signes ophtalmoscopiques précis dans la première affec- tion, peu ou pas de signes du côté du fond d'œil dans la seconde. Cécité fatale par atrophie papil- laire tabétique à opposer à l’amblyopie transi- toire de la sclérose en plaques. Il est aussi aisé de distinguer par l'examen ocu- laire une sclérose en plaques de la paralysie géné- rale, mais on avouera que l'analogie est grande entre les yeux des hystériques et ceux des sclé- reux. J'indiquerai plus loin tous les caractères de l'œil hystérique. III. — PARALYSIE GÉNÉRALE Les troubles oculaires sont très intéressants à étudier, parce que le plus souvent ils précèdent, même de plusieurs années, les premiers symp- tômes d’aliénalion mentale, Il y a donc intérêt ma- jeur à apprécier leur nature, puisque, si les signes oculaires sont réunis en nombre suffisant et ont une allure bien caractérisée, le médecin pourra porter à l'avance un diagnostic dont l'importance n'échappera à personne, qu'il s'agisse de protéger le malade contre lui-même ou de l'empêcher de 398 is D' A. TROUSSEAU. — L'OEIL CONSIDÉRÉ COMME ÉLÉMENT DE DIAGNOSTIC nuire aux siens, ou de déterminer son degré de responsabilité morale. Dans la paralysie générale l’œil est donc fré- quemment un précieux révélateur de l’état céré- bral. Examinons quels sont les troubles qu’on obser- vera du côté de l'appareil moteur, de l'iris et du fond d'œil. Le muscle orbiculaire des paupières peut être le siège de tremblements fibrillaires ou même d'un véritable blépharospasme, parfois d'une ptosis associée presque constamment à des paralysies de la troisième paire. Les ophtalmoplégies sont fréquentes ; il est peu commun qu'un sujet atteigne la période paraly- tique sans avoir eu de la diplopie passagère, par- fois très fugace. Tous les nerfs de l’œil sont sus- ceptibles d’être paralysés; pourtant, très rares sont les paralysies de la sixième et de la quatrième paire. Il faut encore remarquer que la mydriase est exceptionnelle dans les ophtalmoplégies internes. L'inégalité pupillaire est constante au début de la paralysie générale. Elle s'établit souvent avec les diplopies fugaces, dont, après un certain temps, elle est la seule trace subsistante. Dès que le délire éclate, aussitôt, ou peu de temps après, les pupilles tendent à s’égaliser tantôt en myosis dans les formes congestives, tantôt en my- driase dans les formes dépressives ou torpides. Les réflexes lumineux et accommodatif peuvent êlre dissociés, le second subsistant seul (signe d'Argyll Robertson). Du côté du fond d’æil, on ne peut noter que l’a- trophie papillaire, qui conduit rapidement les ma- lades à la cécilé. Les paralytiques généraux sont souvent troublés pardesaccès de migraine ophtalmique avec scotome scintillant, qui débutent bien des années avant que la paralysie générale puisse même être présumée. Les troubles oculaires dans la paralysie géné- rale ont été fort bien étudiés dans la thèse du D' Marie (1890), un de mes anciens élèves; je ne puis que renvoyer à ce travail les lecteurs curieux de détails. On ne peut s'empêcher de remarquer quelle grande analogie existe entre les phénomènes ocu- laires qui précèdent le Labes et ceux qui devan- cent la paralysie générale, si bien que je ne crois pas que, par le seul examen de l'œil, l’ophtalmologiste le plus expérimenté puisse se prononcer sur l’exis- tence de l’une ou de l’autre affection. Il ne pourra qu'établir des probabilités. Cette ressemblance des signes oculaires est un argument de plus en faveur de la théorie qui assimile les deux maladies (Raymond). Des traces d'iritis, de chorio-réliniles profondes pourraient démontrer l’origine syphilitique de cerlaines paralysies générales, par suite en préci- ser la nature. IV. — nYSTÉRIE Les troubles que l’hystérie concentre du côté de la vision sont si caractérisliques qu'à eux seuls, et n’y aurait-il pas d’autres phénomènes concomitants, ils sudisent à affirmer le diagnostic. On voit de quelle aide ils peuvent devenir pour le médecin embarrassé devant une affection dont la nature se détermine mal. L’hystérie peut jouer certaines maladies graves du système nerveux cen- tral ; c’est alors que l'examen oculaire devient in- dispensable; on peul dire que, grâce à lui, de colos- sales erreurs seront évitées. L'œil hystérique n’est jamais un œil effective=" ment malade, ce n’est pas un œil à lésions, comme l'œil du tabétique si souvent atteint d’atrophie du nerf optique, comme l’œil des malheureux chez lesquels une tumeur cérébrale crée et développe la névrite optique. Les méfaits de l'hystérie dans l’œil ont été soi- gneusement étudiés (1891) par Gilles de la Tou- rette; la névrose est génératrice de troubles sen- silifs et de troubles moteurs. Les troubles sensitifs sont l’anesthésie de la conjonctive et de la cornée, le rétrécissement con- centrique du champ visuel pouvant aller jusqu'à la cécité, la dyschromatopsie, les couleurs dispa- raissant dans l’ordre suivant : violet, vert, bleu, rouge, cette dernière couleur persistant toujours. Dans l’amblyopie hystérique l'acuité visuelle n'est pas modifiée. Les hystériques ne sont pas incommodés de l’étroitesse de leur champ visuel, qu'ils ne soupçonnent même pas. Les troubles moteurs nous intéressent particu- lièrement, car, mal interprétés, ils peuvent devenir source d’un diagnostic erroné. -Parinaud a bien étudié la diplopie mono-ocu- laire, qui est plutôt une polyopie et qu'il attribue à un spasme du muscle accommodateur. Voici com- ment se révèle celte polyopie : Un crayon placé près de l'œil, puis éloigné lente- ment est d’abord vu simple ; à la distance de 10 à 15 centimètres une seconde image apparait généralement du côté temporal. À mesure que l’on s'éloigne, les deux images s’écartent et il n'est pas rare qu'une troisième moins intense ap- paraisse du côté opposé. Cette diplopie s'accompagne habiluellement de micropsie et de mégalopsie, c’est-à-dire que l’ob- jet parait se rapetisser ou grossir quand on l’éloigne ou qu'on le rapproche de l'œil. Le blépharospasme est clonique ou tonique. Ce dernier est le plus intéressant. Douloureux il est a D' A. TROUSSEAU. — L'OEIL CONSIDÉRÉ COMME ÉLÉMENT DE DIAGNOSTIC bilatéral et accompagné de photophobie, lar- moiement, douleurs périorbilaires. Non douloureux, il est souvent monolatéral. La forme la plus digne d'attention de blépharos- pasme est celle que Parinaud a décrite sous le nom de ptosis pseudo-paralytique. Les phéno- mènes spasmodiques sont si peu marqués que la chute de la paupière supérieure simule une para- lysie du releveur. Le plissement de la peau n'existe pas et, si l’on ordonne au malade d'ouvrir l’œil, il rejette la tête en arrière et on voit le frontal se contracter, comme dans la vraie ptosis paralytique. Il est done indispensable de pouvoir distinguer celte fausse ptosis de la vraie, sans quoi, en pré- sence de cette chute de la paupière, on serait exposé à croire à une véritable paralysie et par suite à porter le diagnostic de tabes ou de tumeur céré- brale au lieu de celui d’hystérie. Étudions done les signes différentiels : dans la ptosis faussement paralytique, la paupière supé- rieure recouvre exactement l'inférieure, elle re- tombe énergiquement quand on la relève avec le doigt ; on constate de petits frémissements convul- sifs dans la paupière, qui s’accentuent quand le malade essaie d'ouvrir l'œil; enfin, signe capital, indiqué par Charcot, il y a abaissement du sourcil du côté où siège le spasme, tandis que dans le vrai ptosis paralytique le sourcil est plus élevé que du côté sain. Le strabisme hystérique peut être aussi trompeur que la ptosis : il est généralement dû à une vraie contracture qui peut se produire isolément ou s’associer à d’autres phénomènes hystériques. Il me semble à peu près impossible, pour l’ocu- liste, de distinguer ce strabisme spasmodique du strabisme paralytique, et je crois que, en l'absence d’autres phénomènes, l'erreur de diagnostic sera commise 90 fois sur 100. Les troubles oculaires hystériques peuvent appa- raitre après un traumatisme, un accident dé che- min de fer (hystéro-traumatisme); ce n’est guère que par une longue observation du malade, par des examens répétés qu'on les distinguera des troubles tenant à une commolion ou à une alléra- tion des centres nerveux. En semblable occurrence Pexpert peut être appelé à se prononcer devant les tribunaux sur la gravité et le pronostic de certaines situations pathologiques : il n'oubliera pas quel précieux concours peut lui donner l'œil (étude de l’amblyopie hystérique, etc.). Ve Les lésions cérébrales (hémorragie, ramollisse- ment, ete.) peuvent déterminer des troubles fonc- tionnels caractérisés par la perte d’une portion du champ visuel, Il y à hémiopie quand chaque — LÉSIONS CÉRÉBRALES. 359 réline a perdu la moitié de son champ visuel. L'hémiopie est dite homonyme lorsque la moitié du champ visuel est'abolie du même côté dans les deux yeux, c’est la plus fréquente; elle est dite croi- sée lorsque la moitié du champ visuel est perdue à droite pour un œil, à gauche pour l’autre œil; cette forme est très rare. La constatation de l’inté- grité du fond d'œil à l'ophtalmoscope et le tracé du champ visuel, fournissant le graphiaue des scoto- mes, peuvent permettre d'affirmer que les troubles dont se plaint le malade ont une origine intra-crà- nienne. Il y a donc là une notion intéressante à conquérir, simplifiant les recherches. Bien souvent, l'étude de l'hémiopie fournira des renseignements sur le siège même de la lésion qui l’a déterminée, avec cette réserve que, pour en préciser la nature et parfois même la localisation, le médecin devra toujours étudier les symptômes concomitants (para- lysie, anesthésie, aphasie). Je ne puis émettre ici la prétention d'indiquer, même rapidement, les mé- thodes d'étude des localisations cérébrales. Je me bornerai à l'énoncé des faits les plus simples : 1° Une lésion de la bandelette optique gauche dé- termine une hémiopie homonyme droite, tandis qu'une hémiopie homonyme gauche révèle une lésion de la bandelette gauche. % L’hémiopie croisée indique une lésion de la partie antérieure du chiasma. 3° Les lésions de la partie postérieure de la cap- sule interne (région lenticulo-optique) amènent non seulement de l’hémiplégie, mais encore une hémi- anesthésie semblable à l'hémi-anesthésie hysté- rique ; il est bon de ne pas oublier que, dans cette hémi-anesthésie d’origine cérébrale, il existe une amblyopie eroisée dont les symptômes sont les mêmes que ceux qui ont été signalés pour l’am- blyopie hystérique. Je suis au regret d'être obligé d’écourter ce cha- pitre; mais, pour être suggestif, il devrait à lui seul occuper une étendue bien plus considérable que celle qui m'est accordée pour l’ensemble de cet article. VI. — MÉNINGITE, D'après Bouchut, quelles que soient les formes de la méningite, elle produit habituellement, sinon toujours, dans le fond de l’œil, des lésions variables de circulation, de sécrétion, de nutrition, qui faci- litent grandement le diagnostic de la maladie et peuvent même parfois en faire prévoir l’éclosion. Le D' Bouchut a rapporté des cas dans lesquels l'emploi de l’ophtalmoscope a permis de fixer un diagnostic hésitant entre la méningite et quelque autre maladie, la fièvre typhoïde, par exemple, et des cas dans lesquels il a permis de faire la dia- gnose avant l'apparition des symptômes caracté- 360 ristiques de la méningite, alors qu'il n'existait qu'un élat fébrile indéterminé. Je crois avec Bouchut que l'examen du fond d'œil peut rendre de signalés services dans des cas embarassants; mais J'hésite à lui accorder toute la valeur que lui octroyait cet auteur. J'ai été à même d'examiner le fond d'œil d’un grand nombre d’en- fants atteints de méningite confirmée, et je dois avouer que je n'ai pas rencontré souvent des lésions parfaitement nettes. Néanmoins, ce procédé d'exploration ne doit jamais être négligé, el n'aurait-il que rarement l’occasion de se révéler efficace, qu'il faudrait y avoir recours, étant données sa simplicité et son innocuité. Ces réserves faites, j'indiquerailes désordres les plus caractéristiques que peut produire dans l'œil la méningite, qui, je le répète, laisse celui-ci indemne assez souvent pour qu’on ne puisse Con- clure de l'intégrité des membranes profondes à l’absence de l'affection méningée. D’après Bouchut, la congestion et l’ædème papil- laires seraient les lésions les plus fréquentes. Il est très difficile de dire où commencent l’hyperémie, la congestion pathologique du nerf optique; il faut, pour les bien apprécier, une grande habitude du maniement de l’ophtalmoscope et on ne saurait trop répéter qu'il existe d'infinies variétés d'aspect de la papille. On n'affirmera donc la congestion et l’ædème qu'après mûr examen et formelle évi- dence. Bouchut les aurait observés dans plus de la moitié des cas; cette proportion me parait beau- coup trop forte. Pour moi, elles n’acquièrent de réelle valeur que quand elles coexistent avec de la dilatation et de la flexuosité des vaisseaux veineux, avec ou sans thromboses réliniennes. Les hémorragies de la rétine se voient parfois dans la méningite, mais aussi dans d’autres affec- tions cérébrales. Elles n'ont done de signification précise que lorsqu'elles apparaissent chez un enfant soupçonné ou atteint de phlegmasie des menimgses. La concordance el la simullanéité de ces deux phénomènes leur donne une importance séméio- tique considérable, et, dans ce cas, elles indiquent une violente gène de circulation intra-crânienne. Elles coexistent très souvent avec des plaques blanchätres, de dégénérescence graisseuse, ou avec des dépôts noirâtres de pigment qui n'en consti- tuent qu'un stade plus avancé. Bouchut a signalé les tubercules de la choroïde. Si leur présence était évidente, il n'y aurait pas de doute sur l'existence d’une méningite tuberculeuse. Malgré des recherches longtemps continuées, Je n'en ai pas vu un seul cas bien démonstralif. Je pense que ces tubercules sont très difficiles à voir D' A. TROUSSEAU. — L'OEIL CONSIDÉRÉ COMME ÉLÉMENT DE DIAGNOSTIC à l'ophtalmoscope el qu’à leur sujet ont dû être commises bien des erreurs. Certains enfants ont le fond de l’œil très pâle, ce qui lient à une atrophie choroïdienne ou plutôt à une disparition du pigment choroïdien. Il ne faut pas voir là un signe d'affection cérébrale; cette dis- position s’observe chez des sujets à développe- ment incomplet, parliellement amblyopes ou émi- nemment astigmates el hypermétropes, des dégé- nérés héréditaires le plus souvent. L'atrophie du nerf optique est rare dans la méningite aiguë et s’observe surtout dans la méningite chronique. Elle peut survenir d'emblée ou être précédée d'une neuro-rétinite hémorra- gique, analogue à celle qu'on rencontre dans les tumeurs cérébrales. Les lésions oculaires de la méningite n’amènent pas toujours des troubles visuels très marqués; elles veulent donc être recherchées. Pour les mieux constaler, l'observateur aura soin, après avoir instillé la cocaïne, de faire fixer la tête de l'enfant et de lui faire écarter les paupières par un aide exercé. Ces précautions sont indispensables pour un examen valable d’un petit être déjà souf- frant, agité, et, par cela même, par son âge aussi, peu enclin à la docililé, si nécessaire à une com- plète exploration du fond d'œil. En résumé, l'ophtalmoscopie est infidèle pour le diagnostic de la méningite; mais, parfois, elle lui prèle un concours des plus utiles. On devra donc la pratiquer dans tous les cas douteux. Ce sont des symptômes de névrile optique qu'on constatera dans la pluralité des examens con- cluants. VIÏI. — TUMEURS CÉRÉBRALES. C'est à de Graette (1810) que nous devons la con- naissance précise des lésions oculaires dans leurs rapports avec les tumeurs cérébrales. Celles-ci se caractérisent par la production de névrites optiques typiques. La papille est rouge, boursouflée, saillante. Les veines rétiniennes, gorgées de sang, présentent des dilatations variqueuses, tandis que les artères sont fines et amincies; des hémorragies rétiniennes, des exsudations blanchàtres parsèment la papille ou les régions voisines; la périphérie du fond d'œil demeure intacte. Les troubles visuels sont plus ou moins accentués, quelquefois peu marqués, malgré une violente hyperémie du fond d'œil. La névrite optique aboulil parfois, si le malade survit, à l’atrophie de la papille, et cette atrophie présente alors des caractères assez nets pour qu'il soit possible de retrouver la cause qui l’a déter- minée. En effet, les bords du disque optique res- tent diffus, ne tranchent pas nettement sur les D' A. TROUSSEAU. — L'OEIL CONSIDÉRÉ COMME ÉLÉMENT DE DIAGNOSTIC | 361 parties voisines, les veines demeurent tortueuses et dilatées pendant que les artères s’amincissent à l'extrême. La névrite optique constitue un symplôme très important dans le diagnostic des tumeurs céré- brales, mais malheureusement elle ne peut nous renseigner ni sur le siège, ni sur la nalure de la tumeur. Il est hors de doute que les tumeurs céré- brales puissent exister sans amener de névrite, mais des troubles cérébraux accompagnés de né- vrite ont de grandes chances pour être dus à une tumeur. Les caractères indiqués de l’atrophie papillaire suite de névrite peuvent être d’un concours utile, alors que le médecin hésile entre des phénomènes dus à une ancienne tumeur ou à l’ataxie. On a re- marqué les différences tranchées qui séparent cette atrophie de l’atrophie tabélique. Lésions traumatiques du cerveau. — Comme l’a fort bien indiqué Panas, la stase de la papille se montre souvent à la suite de diverses lésions traumatiques de l'encéphale, telles que commotions, contusions, blessures ou fractures du crâne, sans qu'elle s'accompagne forcément de troubles visuels. Elle doit donc être recherchée. Sa présence et l'atro- phie consécutive qu'elle pourrait déterminer ont une importance réelle au point de vue médico- légal. NIIT. — RHUMATISME. GOUTTE, Le rhumatisme et la goutte conslilués de toutes pièces réagissent facilement sur l'œil et peuvent y déterminer des selérites, des iritis, des irido-cho- roroïdites, parfois des kératites ou des conjoncti- vites à forme spéciale; mais l'apparition de ces dif- férents désordres, alors que les antécédents arthritiques sont manifestes, n’a que peu de valeur au point de vue du diagnostic; elle ne peut être que confirmative dans un cas un peu délicat ou prétant à confusion. Les rhumatisants peuvent souffrir de maladies inflammatoires de l'œil, mais celles-ci ne pré- sentent pas chez eux les caractères absolument pathognomoniques qu'elles affectent chez quel- ques goutlleux. En effet, si les goutteux sont sus- ceptibles de contracter des sclériles, des iritis, des kératites banales, deux types leur sont propres, à savoir l'iritis à hypohéma, c'est-à-dire accompagnée d’un épanchement sanguin dans la chambre antérieure.etla kératite calcaire. Ces deux maladies donnent une grande somme de probabi- lités à l'existence d'une diathèse goutteuse. Dans un autre ordre d'idées, et ceci se lie plus intimement au sujet que j'ai à traiter, je vais montrer que les diathèses goutteuse et rhumatis- male peuvent avoir des accidents oculaires pour REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. premières manifestations ; en d’autres termes que la maladie de l’œil peut révéler la diathèse encore latente et non soupçonnée. J'ai signalé ces fails, en y insistant, dans un tra- vail spécial (7ravaux d'ophtalmologie). Pour les mieux faire comprendre, je prends un exemple : Un individu a toujours été bien portant jusqu'à l’âge de vingt-cinq à trente ans; il est pris subite- ment d’uneirilis ou d'une sclérite. Interrogé sur ses antécédents goutieux ou rhumalismaux, il ne peut répondre que par des négations qui font hésiter le médecin sur la nature de la maladie oculaire jus- qu’au jour où la cause s'en précise par l'apparition postérieure d'autres manifestations franches de la goutte ou du rhumatisme. Ce sont des faits de cet ordre qui ont fait nier l'origine goutteuse ou rhumalismale d'affections de l'œil ordinairement attribuables à ces diathèses, Ils sont utiles à connaitre, car les accidents locaux peuvent faire prévoir des accidents généraux ou disséminés; ainsi, le globe oculaire joue le rôle d'un précieux indicaleur. On n'oubliera donc pas que la goutte et le rhu- matisme peuvent d'emblée frapper l'œil avant toute autre manifestation viscérale, cutanée ou même articulaire, qu'ainsi la constatalion d'une affection oculaire isolée, mais qui coexiste souvent avec les manifestalions franches des deux diathèses, doit, à elle seule, éveiller l'attention sur l'existence encore cachée de ces diathèses. Il m'a semblé que les accidents oculaires pri- milifs étaient presque toujours suivis, à brève échéance, d'accidents articulaires qu’ils peuvent faire prévoir. Dans la plupart de ces cas, le traitement général modifie peu l'affection locale; il ne peut done ser- vir de pierre de touche et ne permet pas de juger la nature de la maladie. IX. — DIABÈTE. Le diabète est une des maladies générales qui restent le plus longtemps et le plus souvent igno- rées de l'intéressé et du médecin. C’est presque toujours à l’occasion d’une de ses manifestations dont le caractère n’est jamais palhognomonique qu'il est reconnu, ou bien encore à l'occasion d’une affection surajoutée. Je n'hésite pas à dire que l'examen des yeux révèle très fréquemment le dia- bète, qu'il s'agisse d’une diplopie, d'une cataracte ou d’une rétinile, qui a poussé le malade à réclamer l'avis d’un ophtalmologiste. Les diabétiques peuvent être atteints de paraly- sies musculaires variées, parmi lesquelles la para- lysie du muscle droit externe est la plus fréquente. Lorsqu'on est appelé à constater une paralysie musculaire qui ne pourra, avec quelque vraisem- 10** 362 \ D' A. TROUSSEAU. — L'OEIL CONSIDÉRÉ COMME ÉLÉMENT DE DIAGNOSTIC blance être rattachée soil à la syphilis, soit à une maladie nerveuse, on devra songer au diabète et praliquer l’examen des urines. La cataracte a été longtemps considérée comme un signe presque certain de glycosurie. Elle est, il est vrai, très souvent liée au diabète; mais on n'oubliera pas que la cataracte survient à un âge où le diabète est fréquent et que même un diabétique âgé peut avoir une cataracte par le fait de son âge plutôt que de son diabète. La constatation de la cataracte provoquera utilement l'examen des urines dans la majorité des cas; mais elle indiquera la nécessité absolue de cel examen toutes les fois qu'elle aura lieu chez un sujet relativement jeune et dont l'opacité cristallinienne aura évolué rapi- dement. La rétinite diabétique est assez rare, et je dois avouer que la seule inspection du fond d'œil ne peut suflire pour faire diagnostiquer le diabète, la lésion n'étant pas suffisamment caractéristique; pourtant elle suflira à inciter à l'examen des urines, ce qui est le fait capital au point de vue particulier qui nous intéresse. La rétinite diabétique est longtemps ignorée du patient, dont la vue baïsse lentement et progressi- vement sans aucune douleur. Au début elle veut être cherchée, plus tard elle s'impose forcément. Dans cette rétinite le fond d'œil est parsemé d’hé- morragies artérielles ou veineuses sans siège précis, entremélées de taches blanchätres dues à la dégénérescence graisseuse; la rétine et la papille ne sont jamais infiltrées comme dans la rélinite brightique. Des iritis, des amblyopies, voire même des atro- phies papillaires peuvent être causées par la gly- cosurie; mais la constatation de ces différentes lé- sions n’a pas grande valeur pour le diagnostic, car celles-ci sont le plus souvent en rapport avec d'autres maladies que le diabète. Pourtant, en lab- sence de causes précises à elles attribuables, l’exa- men des urines sera souvent fait avec fruil. Chez des sujets dont les urines sont très peu chargées de sucre ou le sont d'une façon intermit- tente, une lésion oculaire bien nette, analogue à celle que je viens d'indiquer, fortifiera le diagnostic de diabète confirmé en assombrissant un peu le pronostie, les lésions oculaires accompagnant sur- tout les formes graves. X. — BRIGUTISME. C'est à Bright et à Landouzy que nous devons la connaissance des rapports qui existent entre les troubles de la vue et les affections rénales. lei un examen oculaire concluant permet de por- ter le diagnostic de brightisme presque à coup sùr, mème en l'absence du signe le plus caractéristique, à savoir l’albuminurie. C’est donc un des points les plus importants de l'étude que j'ai entreprise; aussi m'y appesantirai-je. Les brightiques, d’après mes recherches person- nelles, sont affectés de troubles oculaires dans la proportion de 16 pour 100 environ; c’est, on le voit, un chiffre assez élevé. Si certaines maladies, telles que le tabès, la sy- philis, s’attaquent à plusieurs parties du globe ocu- laire, il n’en est pas ainsi pour les lésions rénales qui retentissent presque exclusivement sur le sys- tème neuro-rétinien. Il faut accueilliravec réserve les cataractes dites albuminuriques, d'autant plus que la glycosurie accompagne souvent l'albumi- nurie. C'est donc la rétine qui est frappée. Voiei li- mage ophtalmoscopique habituelle : Le nerf optique estinfiltré, gonflé, parfois tur- gescent; autour de lui la rétine est le siège d’un œædème abondant quilui donne une couleur grisàtre ; en cercle, autour de la papille, se trouvent des flammèches rouges (hémorragies accolées aux vaisseaux), entremélées de points ou taches blan- chätres. La macula reste indemne, mais autour d'elle sont des points blancs disposés en étoiles ou des stries blanchâtres arrangées en éventail. A côté de celte rétinite caractéristique, il existe des variétés incomplètes. Tantôt les lésions sem- blent limitées à la papille et à la portion contiguë de la rétine; tantôt, au contraire, elles sont surtout périmaculaires; parfois on ne rencontre qu’une simple rétinile hémorragique sans points blancs. L'affection est presque toujours binoculaire; e’est là un excellent caractère. = Les réliniles néphréliques ne se montrent pas seulement dans le mal de Brighl franc, dans les néphrites typiques, mais encore dans la plupart des élals congestifs, même passagers, du rein. On les observe chez les femmes enceintes, dans les albuminuries de la scarlatine et de la variole. Ces rélinites peuvent exister alors qu’on neren- contre pas d’albumine dans les urines; quand on les a bien constatées, il faut répéter de mois en. mois les analyses d'urine avec persistance; même si elles restent muetles, on ne lardera pas à vorr l'albumine faire son apparition. Il faut se rappeler que les arlério-scléreux peu- vent être affectés d’hémorragies réliniennes, s'ac- compagnant rarement-des points blancs de dégé- rescence graisseuse ; c'est un caractère qui différen- cierait les rélinites artério-scléreuses pures des rélinites brightiques, mais souventartério-sclérose et brighlisme se touchent de bien près, et il n'ya guère lieu à diagnostic différentiel, Les lésions rétiniennes de la glycosomie se dis- linguent de celles de lalbuminurie par l'absence V. DWELSHAUVERS-DERY. — ESSAI DE DYNAMIQUE GRAPHIQUE 363 d'œdème papillaire et de suffusion rétinienne. Quandles signes sont surtout marqués du côté du nerfoptique.il est difficile de différencier une névro- rélinite brightique d’une névro-rétinite d’origine cérébrale. Cette dernière est toujours plus intense, s'accompagne d’un plus grand nombre d'hémor- ragies papillaires plus étendues et d'un moins grand nombre d’hémorragies réliniennes en dehors de la région du nerf optique. On n’oubliera pas les symptômes concomitants et on répétera les examens d'urine. L'apparition des troubles oculaires chez les brigh- tiques doit être considérée comme un signe de mauvais augure. XI. — SYPHYLIS Dans la syphilis acquise, l'ophtalmoscopie est peu mise à contribution au point de vue du diagnostic, parce que le diagnostic même de la syphilis est généralement facile ; mais je ne saurais trop dire de quel secours peuvent être la constatation d'an- ciennes irilis, de chorio-rétinites dans les cas em- barrassants ; il y a là une ressource à ne pas né- gliger. Je necrains pas d'affirmer que l'examen complet de l'œil est indispensable loutes les fois qu'il y a doute sur l’existence de la syphilis héréditaire, bien moins facile à dépister que la syphilis ac- quise. d’ai rapporté nombre de cas qui seraient resiés insoupconnés sans le secours de l’ophtal- moscope. Cest surtout alors qu'il s'agit d’un dia- gnostic rétrospectif que cet appareil est d’un con- cours précieux. Presque toutes les membranes de l'œil peuvent être atteintes par la diathèse. La cornée est affectée d'une kératile spéciale, dite kératite d'Hutchinson, torpide ou aiguë, non vasculaire ou vasculaire, de très longue durée, de guérison lente et irrégulière, qui laisse après elle, dans nombre de cas, des opacités diffuses grisätres, utilisables pour le diagnostic rétrospectif. La syphilis héréditaire est génératrice de quatre variétés d'iritis : aiguë, franche, chronique, gom- meuse, séreuse, qui peuvent toutes laisser après elles des synéchies ou adhérences iriennes, des déformations ou obstructions papillaires qui ont la valeur de vraies cicatrices. Les chorio-rétinites sont très fréquentes dans la syphilis héréditaire et ne guérissent guère sans laisser de traces, car elles sont le plus souvent méconnues. Je n'ai pu, dans l'étude qui précède, que jeter à la hâte quelques notes sur le papier, j'étais con- traint de rester incomplet; j'ai surtout cherché à fournir au lecteur, curieux d’approfondir,de sérieux points de repère, et à donner une idée du concours que l'ophtalmologie peut apporter à la médecine, au point de vue de la découverte des maladies. D' A. Trousseau, Médecin de la Clinique Nationale des Quinze-Vingts. ESSAI DE DYNAMIQUE GRAPHIQUE LA NOUVELLE MÉTHODE DE M. H. LÉAUTÉ POUR L'ÉTUDE DU MOUVEMENT TROUBLÉ DES MOTEURS M. Léauté, de l’Institut, vient de faire con- naître dans le Journal de l'École polytechnique (61° cahier) une nouvelle méthode graphique pour l'étude du mouvement troublé des moteurs. Cette nouvelle méthode, dont M. Léaulé avait posé les bases dans ses recherches sur les oscillations à longues périodes, nous a paru, après une étude approfondie, d’une telle importance, que nous croyons rendre service à tous les mécaniciens en l'exposant ici sous sa forme pratique, dégagée de tous les savants calculs qui ont servi à l’établir. Les nouvelles recherches de M. Léauté complé- tent et terminent la série de beaux travaux que depuis plusieurs années il a publiés sur la régula- risation du mouvement dans les machines. On voit bien d’ailleurs la marche qu'il a suivie : Après avoir étudié le régulateur en lui-méme, il a abordé l'examen de son action sur le mou- vement du moteur, puis les oscillations à longues périodes, les écarts de vitesse, la caractéristique cinématique qui définit chaque ensemble méca- nique. Enfin il s’est posé ct a résolu le problème pratique qui embrasse et résume toute cette théo- rie, c'est-à-dire la détermination du mouvement troublé ; nous indiquerons tout d’abord quel est le principe de la méthode. Î M. Léauté suppose qu'un moteur est brusque- ment interrompu dans son régime par la suppres- sion ou par l’addition d’une partie considérable de la résistance, et se demande ce que la vitesse va 364 V. DWELSHAUVERS-DERY. — ESSAI DE DYNAMIQUE GRAPHIQUE devenir à partir de ce moment jusqu'à celui où le régime sera de nouveau rélabli avec la nouvelle résistance, par suite de l'intervention d'un régu- lateur à action indirecte. Il pose les bases de la solution en montrant qu'au moyen de quelques courbes, qu'il définit, on peut représenter, pour cette période de trouble, tous les éléments qui ca- ractérisent l'allure du moteur, et en faire un ta- bleau sur une seule épure. Puis, au moyen de ce tableau, il exécule graphiquement sa recherche. ixposée dans toute sa généralité, la méthode pa- rail ardue et laborieuse au premier abord; mais M. Léauté en donne une application qui rassure- rait les plus timides et qui en met nettement en évidence les qualités et l'importance pratique : à 15 pour la résistance moitié. Cela signifie que, si la tur- bine marche à raison de 40 {ours par minute avec la résistance Lotale, el si, on supprime instantané- nément toute venue d’eau, toule action motrice, la roue fait 4,2 tour avant de s'arrêter et en vertu de sa seule inertie. Elle en fait 1,6 dans le cas où la résistance est réduite de moitié. Le régulateur fonctionne dans les conditions fi- gurées au diagramme de la fig. 4, où les ordonnées représentent des nombres de tours par minute. Ainsi l'horizontale à la hauteur 10 correspond à Ja vilesse normale de la machine. Les horizontales à 10,75 de hauteur et à 9,25 représentent les vi- tesses entre lesquelles on veut que le régulateur maintienne le régime, c'est-à-dire que l’on ne tolère N 14 | 18 12 < = 10! 85 © + ® ol (0 65 | 7 gt 35 Jos n_ 8 o 7 6 p 5 D | T4 AM 3 | 2 | ; | 0 4 RE LS NT | 13 15 17 19 21 23 25 27 29 31 33 35 37 39 41 43 45 47 48 Nombre d'augete ouverts Fivure 1. cet effet, il étudie spécialement une turbine. Cette turbine est munie d'un appareil de régu- lation à fermeture rapide. Le distributeur a 48 ori- fices; quand la lurbine est dénoyée (nous n'exa- minerons ici que ce seul cas, bien que M. Léauté ait étudié aussi celui ou elle est noyée), il faut ou- vrir 40 orifices si l'on veut réaliser la marche nor- male de 10 tours par minute avec la résistance utile maxima, et, par conséquent aussi, la résis- tance tolale minima ; pour que la vitesse ne dépasse pas 10 tours par minute avec la résistance réduite à la moitié, le nombre des orifices démasqués doit tomber à 22. La masse de la turbine est définie par ce que M. Léauté a appelé sa caractéristique cinématique !; elle est de 1,2 pour la résistance totale et de 1,6 l Journal de Mathématiques pures et appliquées, dirigé par M. C. Jordan, p. 465; 1887. pas pour la vitesse de régime une irrégularité 10,75 — 9,25 10 sort de ces limites, le régulateur doit entrer en fonction et manœuvrer le mécanisme de com- mande; mais, dès le moment où ce mécanisme est sollicité par le régulateur, des résistances prennent naissance et un certain effort est nécessaire pour les surmonter; cet effort supplémentaire est fourni par un sureroit de vilesse de la machine, soit en plus, soit en moins; le mécanisme de commande des vannes n'entre en action pour les fermer ou les ouvrir que lorsque la vitesse de la machine a alteint 40,85 (ours par minule, ou est tombée à 9,15. Ce sont les données spéciales au cas parti- culier considéré. el, dans ce cas aussi, le méca- nisme ne revient au repos que lorsque la vitesse estrevenue à 10,65 ou 9,35 tours par minute. Cescon- ditions sont représentées au diagramme dela fig. 1. de plus de —151/,. Quand la vitesse V. DWELSHAUVERS-DERY. — ESSAI DE DYNAMIQUE GRAPHIQUE 365 Dans ce diagramme, les abscisses sont propor- tionnelles au nombre d'orifices ouverts et par con- séquent à peu près proportionnelles à la dépense d'eau par minule ou au #ravail moleur fourni à la turbine par minute. Si ce travail moteur par mi- nute À est égal à N fois le travail résistant par tour, la machine marche en régime quand elle fait N tours par minute. Avec un même travail résistant par tour R, la machine peut donc marcher en régime à des vitesses N différentes, pourvu que l’on ouvre un plus où moins grand nombre d’ori- fices, c'est-à-dire pourvu que l’on fasse varier A. La turbine étant donnée et sa performance connue dans tous les détails, il est facile, pour toute valeur donnée du travail résistant par tour R, de calculer le nombre de tours N que la machine effectuerait par minule avec une ouverture de vanne À, el de figurer le résultat par une courbe telle que les courbes A,B, et AB, correspondant respective- ment à la résistance totale maxima, soit R = 1, ou à la moilié de cette résistance, soit R — 1/2. M. Léauté a appelé ces courbes des lignes de régime. Il y a une de ces lignes pour loute valeur du tra- vail résistant par tour, de telle sorte que les con- ditions du régime peuvent être figurées par un nombre de lignes de régime convenablement éta- gées. Pour le cas qui nous occupe, il n'est pas né- cessaire d'en tracer d’autres que celles qui corres- pondent à R—1età R — 1/2, parce que le pro- blème résolu par M. Léauté consiste à rechercher les variations de la vilesse pendant la période de trouble qui suit la suppression subite de la moilié de la résistance et précède le rétablissement du nouveau régime, avec une vitesse comprise entre 10,65 et 9,35 ours par minute. Supposons que la turbine marche à raison de 10 tours par minute avec la résistance totale com- plèle et représentée par l'unité, le nombre d'ori- fices ouverts est de 40, ce qui définit le travail moteur par minule. Gel élat de la machine est figuré par le point M, dont l’abscisse est 40 (A) et l'ordonnée 10 (N), point qui se trouve sur la ligne de régime R—1.En conservant la même résistance R=— 1, on peut modifier le nombre des orifices ou- verts el faire varier A entre les limites À, et B, sans provoquer les sollicitations du régulateur, puisque la vitesse ne varie alors qu'entre 9,35 et 10,65 Lours et que ces écarts tombent dans la tolérance. De même, l'état de la machine élant représenté par M,, et le travail moteur par minute (A) restant fixe, on peut faire varier le travail résistant par tour sans que le régulateur entre en action, pourvu qu’on v’aille pas jusqu’à faire sortir la vitesse des limites Lolérées de 9,35 et 10,65 Lours. Les mêmes remarques sont applicables à la ligne de régime AB correspondant à la résistance moitié. Cela posé, il est aisé de figurer au diagramme les péripéties du mouvement troublé. Partons de l'état M, : la machine avec la résistance totale R—1 et 40 orifices ouverts fait 10 {ours par mi- nute. On supprime subitement la moitié de la résis- Lance, et le nouvel état correspond à la ligne de ré- gime R—1/2, représentée dans la figure par A B. La marche est alors lroublée, et le nouveau régime n'est définitivement établi que lorsque le nombre des orifices ouverts arrive à se trouver compris entre les abscisses des points À et B, la vitesse étant elle-même comprise entre 9,35 et 40,65 tours par minute. Dès l'instant de la suppression de la moitié de la résistance, le mouvement s’est accé- léré; mais le régulateur n’a changé l'ouverture des orifices que quand la vitesse a dépassé cerlaines li- miles. Ainsi l’élat de mouvement de la machine à ce premier moment est représenté par la portion de verticale M,M,; après quoi les orifices vont se fer- mant successivement et, malgré cela, la vitesse aug- mente encore jusqu'au moment où À et N s'accom- modent avec la résistance nouvelle 1/2, c'est-à-dire jusqu’au point M,. À partir de cet instant, la vitesse va en diminuant à mesure que les orifices se fer- ment, et finit par tomber à 10,65 au point M,. Le régulateur est alors mis hors de fonction et le nombre d’orifices tombé à M, ne change plus. Mais il est insuffisant pour maintenir, avec la résis- tance moitié, la vitesse normale de 10 tours; il faut donc que la vitesse diminue jusqu'à mettre le régulateur en mouvement pour ouvrir des oritices, ce qui arrive à 9,15 tours par minute. Cette nou- velle phase commence en M,; seulement, tandis que les orifices se démasquent successivement, la vitesse continue à diminuer jusqu’à l'état M, ap- partenant à la ligne de régime R—17/2; après quoi elle augmente jusqu’en M,, tandis que des orifices nouveaux vont s’ouvrant jusqu'au nombre de 26 et au rétablissement de la vitesse tolérée, soit 9,35 tours par minute. Le nombre d’orifices ou- verts est alors trop grand pour la résistance 1/2. La vitesse recommence done à croitre jusqu'à Pétat M, où elle est de 10,85 tours, et où le régulateur entre en action et ferme des vannes. Un cycle semblable d'opérations se fait à nouveau jusqu’à l’état M,,, où le nombre d'orifices ouverts est en- core {rop grand pour la vitesse de 9,35 tours el la résistance 1/2, Le mouvement s'accélère par conséquent et l'on atteint l'état indiqué par l’or- donnée du point M,,, soit environ 10,5 tours. Or, cette dernière vitesse, qui tombe entre les limites d'inactivité du régulateur est celle qui établit l'é- galité entre le travail moteur par minute avec l'ou- verture de vanne AÀ,,, et le travail résistant par tour R—1/2, multiplié parle nombre de tours effectués par minute, — c'est la vitesse du régime. 366 V. DWELSHAUVERS-DERY. — ESSAI DE DYNAMIQUE GRAPHIQUE Le diagramme des M peint done bien aux yeux les diverses péripéties de la période de trouble. Mais, pour arriver à ce résullat si simple, à ce pro- cédé graphique si facile à appliquer, quelles diffi- cultés n'a-t-il pas fallu vaincre, en raison même du nombre d'éléments à déterminer! Il fallait con- naitre le nombre de tours effectués par la machine pendant que la vitesse passait de M; à M4, par exemple, dans la zone de régime, ou de M, à M..etc.; et, problème plus ardu, pendant que la vitesse va- riait de M, à M, et à M, en dehors de la zone de ré- gime, alors que les orifices, en se démasquant ou se fermant petit à petit, influaient sur la vitesse même. I] fallait aussi déterminer les écarts maxima de vitesse auxquelles on est exposé lorsque le régime détruit n’est pas encore rétabli, reconnaitre com- bien de temps le moteur mettra à atteindre son élat définitif, savoir si des oscillations à longues o — | indirecte, c’est-à-dire n’agit pas directement sur l'admission du fluide moteur; or, en général, dans nos machines à vapeur, le régulateur fixe directe- ment la dépense de travail moteur par tour ou par coup de piston; et ce régulateur, dit à action directe, échappe à la nouvelle méthode d'étude. Souhai- tons que M. Léauté fasse les additions nécessaires pour l'étendre à ce cas. M. Léauté a appliqué sa méthode à la même turbine novée, et de plus a résolu le problème de la variation brusque de la résistance du simple au double aussi bien que du double au simple. Les épures correspondant aux quatre cas montrent la simplicité d'éxécution du procédé. Elles prouvent aussi que l'emploi des tracés graphiques n'est pas limité à la résolution des équations ordinaires etau calcul des quadratures, mais qu'il peut s'appliquer aux problèmes qui dépendent de l'intégration 21qie| 2p eSsSsalA PB 1 OO 1 © © Nombre de tours effectues par l'arbre depuis l'origine de la perturbation Figure 2, périodes pourront se produire, ete. Le problème était des plus difficiles et des plus compliqués. M. Léauté est parvenu cependant à constituer une méthode simple, qui donne à la fois tous ces résul- tats et les met sous les yeux dans une seule épure. La représentation directe des variations de la vi- tesse pendant la période de trouble s'ensuit natu- rellement. Dans la figure 2, les abscisses représen- tent les nombres de tours effectués par la machine depuis l’origine de la perturbation; les ordonnées sont les vitesses reprises aux différents points M du diagramme de la figure 4. IT Tel est le problème résolu par M. Léauté, au grand bénéfice de la pratique et par des moyens mis à la portée de tous. L'importance du pro- grès ainsi réalisé ne peut échapper à personne. Toutefois, nous émettrons un vœu que nous es- pérons bien voir se réaliser sous peu. La mé- thode de M. Léauté, sous sa forme actuelle, ne s'applique qu'au cas où le régulateur est à action d'une équation différentielle quelconque du pre- mier ordre. Le but que M. Léauté a poursuivi dans ses longues recherches a été de donner aux mécani- ciens le moyen de calculer d'avance les diverses circonstances du mouvement de leurs machines par des moyens analogues à ceux que possèdent les constructeurs pour prévoir les efforts détermi- nés dans leurs constructions par les charges acci- dentelles qu’elles sont appelées à subir. Cest, croyons-nous, le premier essai qui ait élé fait en- core de dynamique graphique. Dans ses travaux précédents. dont le premier date de 1879, M. Léauté avait donné des formules qui permettaient de se rendre compte d'une facon approximative, mais ordinairement suflisante, des effets d’une perturbation. Ces formules ne consti- tuaient toutefois qu'une première approximalion. C'étuient des règles générales établies en vue des cas usuels de la pratique et qui ne pouvaient pas s'appliquer aux circonstances exceptionnelles. Elles supposaient essentiellement que le moteur L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 367 fonctionnait dans des conditions voisines de son maximum de rendementet queles écarts de vitesse de la machine n'étaient pas trop grands. Elles n’é- aient pas applicables au cas de perturbations brusques considérables. La solution restait done incomplète, si celles-ci n'élaient étudiées. Une telle entreprise offrait les plus grandes difficultés, car, prise dans sa généralité, la question présente une complexité extrême; elle dépend de tous les élé- ments qui caractérisent le mode d'action du mo- teur, éléments qui ne sont connus que sous une forme empirique. Dans de telles circonstances une solulion analytique est impossible et les procédés graphiques s'imposent. M. Léauté a eu recours à un certain nombre de lignes de sa création, qui mettent en évidence, d'une facon lumineuse, tous les éléments caractéristiques du mode d'action du moteur.Le problème de la recherche des variations de vitesse dans la période troublée, consécutive à un brusque changement de la résistance, revient ainsi à l'intégration d'une équation différentielle du premier ordre sous sa forme générale, et se ramène au tracé d'une courbe qui coupe une série de lignes données sous des angles également don- nés. Tel est, en principe, ce procédé fort remarquable qui couronne les travaux si appréciés de M. Léauté sur la régularisation du mouvement dans les ma- chines, et constitue, selon nous, l’un des grands progrès réalisés pendant ces dernières années dans la Mécanique appliquée. V. Dwelshauvers-Dery. Professeur de Mécanique appliquée à l'Université de Liège, REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE [. — FÉCONDATION ET DIVISION CELLULAIRE. L'événement le plus important de celte année est la découverte, dans les tissus des végétaux, des sphères directrices où sphères attractives issues du protoplasme et présidant aux phénomènes de la fécondation et de la division cellulaire. Les observations relatives à la constance des éléments chromatiques dans les noyaux mâle et femelle et au mode de fusion de ces derniers len- daient à attribuer au noyau seul un rôle effectif dans l’acte de la fécondation. Les nouvelles obser- vations de M. Guignard! chez les végétaux, de M. H. Fol sur les Oursins?, permettent de restituer au protoplasme des cellules femelles un rôle im- portant et initial dans la fécondation. Par ses éléments figurés, déSignés sous le nom de sphères directrices, c'est lui qui prend l'initiative des phénomènes de division et de copulation, qui détermine le plan suivant lequel la substance nucléaire doit se fragmenter pour former de nou- velles cellules. L'existence de sphères directrices avait été si- gnalée depuis longtemps chez les animaux par de nombreux histologistes ; par MM. Van Beneden, Boveri, Vialleton, Garnault, etc., dans les cellules reproductrices de diverses espèces ; par M. Solger dans les cellules pigmentaires des Poissons, par M. H. Fol dans les cellules pigmentaires des larves de la Salamandre. Les sphères, occupant le centre 1 L. Guinarp. Nouvelles éludes sur la fecondalion. Ann. Sc. nat. bot:, 1e série, t. XIV. * H. For. Le quadrille des centres. Arch, des Se. phys. et Nat. Genève. Avril 1891. des asters, étaient considérées comme des centres d'attraction indépendants duno yau etapparaissant seulement au moment de la division. On n'en con- naissait pas l'existence chez les végétaux. Cette exception paraissait bizarre, puisque, à (ous les autres points de vue, les phénomènes de la divi- sion nucléaire et de la fécondation offrent chez les êtres vivants la plus complète ressemblance. M. Guignard est parvenu, par des observations minulieuses et délicates, à faire disparaitre cette anomalie : il a réussi à observer les sphères direc- Fix. 4. — Cellule-mère définitive. Les deux sphères direc- trices sont situées côte à côte, au contact du noyau. trices dans les cellules au repos ou en activité, dans les tissus les plus variés : dans les cellules mères primordiales et définitives du pollen (Lis, Listera, Najas, ete.), dans la cellule mère du sac embryonnaire, dans l’albumen de diverses plantes, dans le macrosporange des Zsoetes, le sporange des Fougères (Polypodium, Asplenium), dans les poils staminaux des Tradescantia, etc. Dans les noyaux au repos (fig. 1). on aperçoit deux 368 L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE petites masses sphériques accolées l'une à l’autre ou très rapprochées et appliquées contre ceux-ci ; chacune d’elles est constituée par une petite masse centrale, le centrosome, qui se colore seul par les réactifs ; le centrosome est entouré d’une zone claire hyaline limitée par un cercle de petites gra- nules, pour laquelle l'élection de la matière colo- rante est très faible, souvent nulle. Quand le noyau va se diviser, les sphères se sé- parent l’une de l'autre et se placent aux extrémi- tés d’un même diamètre, à une distance un peu plus grande que l'épaisseur du noyau, puis les stries radiaires caractéristiques des asters com- mencent à se former et se dirigent en tous sens, les plus longues élant celles qui viennent aboutir à la surface du noyau encore pourvu de son enve- loppe. Le fuseau nucléaire est ainsi ébauché dans le protoplasme de la cellule et la direction de la division ou du cloisonnement est désormais fixée par le plan perpendiculaire à la ligne des sphères altractives. C’est alors que les filaments chromatiques se ras- semblent pour former la plaque nucléaire (fig. 2), Fig. 2. — Plaque nu- cléaire vue de côté. Le contour des sphé- res est granuleux. Fig. 3. — Transport des segments secondaires aux pôles, puis au moment où chacun d'eux se dédouble, le centrosome se'dédouble également (fig. 3), formant à chaque pôle du fuseau deux centrosomes qui se- ront l’origine des sphères attractives appartenant à chacun des nouveaux noyaux formés. Les fila- ments chromatiques, ayant cheminé en sens in- Fig. 4. — Aspect des deux cellules-filles après la bipartition. verse le long des slries du fuseau, viennent se grouper à chaque pôle (fig. 4) : ils forment souvent en ce point une légère dépression qui recoit les sphères attractives. M. Guignard a désigné ces sphères sous le nom de sphères directrices pour marquer le rôle important qu'elles remplissent dans la division cellulaire, Le nombre des sphères directrices, ordinaire- ment égal à deux, n’est pas rigoureusement inva= riable et, dans certains tissus, on peul en compter un plus grand nombre qui provoquent la for- mation de figures mullipolaires ; chaque noyau se fragmente alors en aulant de noyaux frères qu'il existe de sphères directrices. C'est dans l’al- bumen des végétaux que l’on rencontre ces for- mations anormales, M. Strasburger avait signalé depuis quelques années les figures multipolaires dans l’albumen du Zeucoium vernum, et M. Gui- gnard a retrouvé récemment dans les mêmes figures les sphères directrices. M. Henneguy en a aussi observé des exemples très nets dans le para- blaste de la Truite qui, comme on le sait, repré- sente un tissu nutritif analogue à l’albumen. Le rôle des sphères directrices dans le phéno- mène de la fécondation n’est pas moindre que celui qui vient d'être exposé pour la division cellulaire. Nous avons signalé, il y a deux ans, dans cette Revue, le fait important de la parité des éléments nu- cléaires mâle et femelle, dans la formation de l'œuf; les nouvelles observalions publiées depuis cette époque ont généralisé et étendu ce fait de ma- nière à constituer une loi qui s'applique à tous les êtres vivants, sauf quelques variations secondaires dans les modes destinés à réaliser légalité de l’ap- port des éléments mäle et femelle destinés à former l’œuf. L'existence générale des sphères directrices dans les tissus des êtres vivants permettait de penser qu'elles doivent intervenir dans l’acte si important de la fécondation. En effet, dans les diverses plantes que M. Guignard a étudiées, les sphères directrices, aunombre de deux,accompagnent toujours le noyau femelle de l’oosphère etles noyaux générateurs du tube pollinique. Au moment où l’un des noyaux males générateurs traverse la membrane du tube pollinique, on aperçoit les deux sphères directrices accolées l’une à l’autre et noyées dans une masse protoplasmique appartenant sans doute à la cellule génératrice, quoiqu'il soit difficile d'en démontrer l’origine au moyen des réactifs (fig. 5). Les sphères directrices qui précèdent le noyau mâle viennent très rapidement s’unir à celles du noyau femelle, de manière à former deux couples constitués par deux éléments différents. On peut constater en effetque les sphères directrices femelles sont souvent un peu plus grosses que les sphères directrices mäles et, dans quelques préparations, il est facile de reconnaitre dans chacun des couples renfermés dans l’oosphère deux éléments de gros- seur différente : le plus petit appartenant à la cellule mäle, le plus gros appartenant à la cellule femelle. C'est après l'accouplement des sphères directrices mâles el femelles que les noyaux Fig. 5. — L’extrémité du tube pollinique présente le noyau iäle précédé par ses deux sphères. Le noyau de l’oosphère est surmonté par les deux sphères de la cellule femelle, A droite du tube, synergide se désorganisant. sexuels se placent au contact l’un de l’autre. Au moment où leurs éléments chromatiques vont se diviser pour former une plaque nucléaire unique, on constate que les centrosomes des sphères directrices se fusionnent: les deux sphères résultant de cette conjugaison se séparent l’une de l'autre et viennent occuper les extrémités d'un diamètre parallèle au grand axe de l'oosphère. Fiy.6. — Début de la contraction des filaments chromatiques dans les deux noyaux. Fusion presque complète des sphères. indiquant ainsi que le cloisonnement de l’œuf aura lieu perpendiculairement à cet axe (fig. 6). L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 369 Ainsi la fécondation ne résulte pas de la simple fusion des noyaux : elle est précédée de la fusion des sphères directrices, de manière que l'œuf soit le résultat d'un apport égal des éléments nucléaires male et femelle et des éléments protoplasmiques représentés par les sphères directrices mâles et femelles, — la fusion des éléments denature proto- plasmique précédant toujours la fusion des élé- ments nucléaires. Les observations de M. Fol sur quelques Oursins tendent à montrer que les phénomènes sont de mème ordre chez les animaux. Le spermatozoïde, à son entrée dans l'œuf, est accompagné d’un cor- puseule que M. Fol désigne sous le nom de spermo- centre; au contact du noyau femelle il existe un autre corpuseule, l’ovocentre, déjà signalé par l'au- teur en 1879. Au moment où les noyaux mâle et fe- melle s'accolent, le spermocentre et l'ovocentre se placent l'un en face de l'autre aux extrémités d’un même diamètre, puis ils se divisent chacun en deux moitiés réunies par une barre de manière à simuler une haltère. Les extrémités de ces hal- lères, se séparant ensuite l’une de l’autre, parcou- rent le quart du méridien qui les contient, de manière que chaque moitié du spermocentre se conjugue avec chaque moitié de l’ovocentre, pour former deux nouveaux corpuscules, les astrocentres, situés sur un diamètre perpendiculaire à la direc- tion du diamètre primitivement occupé par le spermocentre et l’ovocentre. Ainsi, chez les animaux comme chez les végé- taux, la fécondation résulte de l’accouplement d'éléments égaux d'origine nucléaire et proto- plasmique, mais il existe jusqu’à présent une diffé- rence importante entre ces deux séries d'êtres, car chez les végétaux les éléments protoplasmiques qui prennent part à la fécondalion sont représentés par deur sphères directrices; tandis que chez les animaux il n'y en a qu'une seule. Il semble cepen- dant que cette différence ne soit pas absolue, car M. Flemming a trouvé deux sphères directrices dans cerlaines cellules embryonnaires au repos chez les animaux. En ce qui concerne la copulation des noyaux, la loi déjà énoncée il y a quelques années sur la cons- tance et la parité des éléments chromatiques mâles et femelles n'a pas été modifiée; elle a seulement recu des recherches nouvelles une confirmation plus grande. Nous avons déjà eu occasion de rappeler que le nombre des segments chromaliques, qui est assez considérable et variable dans végélatives, subit à un moment donné dans les les cellules cellules sexuelles une réduction plus ou moins con- sidérable. C’est ainsi que le nombre des segments chromatiques dans les éléments sexuels est de 8 370 L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE dans l’Allium,l' Abstræmère, le Ceratozamia mericana; de 12 dans le Lis, la Fritillaire, le ?radescantia,V'Hel- lébore; de 16 dans l'Orchis mascula, le Loroylassum hircinum, le Cypripedium barbatum, le Muguet; de 24 dans le Juscari neglectum, ete. Chezles animaux, quoique les résultats soient moins nombreux, la même loi a été retrouvée, et l’on compte 30 seg- ments chromatiques chezles Lépidoptères ; 12 dans les organes mâles de la Salamandre, du Forficula auricularis; 8 dans le Æilaria mustelarium; G dans le Spiroptera strumosa; 4 dans la Coronilla robusta, etc. On n’a pas trouvé d'autre exception à cette loi que celle de l’Arion empiricorum depuis longtemps cité par M. Platner. L'un des exemples les plus curieux est celui que M. Henking a trouvé chez un insecte hémiptère, le Pyrrochoris apterus, car les transfor- mations des éléments chromatiques dans les cel- lules somatiques et sexuelles rappellent exacte- ment celles que M. Guignard a signalées pour le Lis et la Fritillaire. En effet, les segments chroma- tiques des cellules somatiques sont au nombre de 24 chez cet insecte, et ils subissent dans la formation des cellules sexuelles une réduction brusque qui les réduit à 12, tout comme cela a lieu chez le Lis. L’accolement des noyaux mäle et femelle, qui succède, comme nous l’avons vu, à l'accouplement des sphères directrices, ne tarde pas à être suivi de la fusion de la substance hyaline interstitielle ou suc nucléaire et des nucléoles, par suite de la disso- lution de la membrane de chaque noyau. Les seg- ments chromatiques restent distincts beaucoup plus longtemps, et dans le noyau unique de l'œuf on compte désormais un nombre de segments chromatiques égal au double de celui des noyaux mâle et femelle, mais on n’y peut distinguer ceux qui proviennent du noyau mâle ou du noyau femelle. Il est donc impossible de dire comment se partagent ces segments dans la première division de l’œuf et dans les divisions suivantes, ni de discuter la question de leur individualité. Toul ce qu'on peut affirmer, c'est que la fusion des élé- ments chromatiques n'est pas nécessaire à la fé- condation, puisqu'elle n'a pas lieu au moment du premier cloisonnement de l'œuf, de sorte que l'opi- nion de M. Strasburger concorde mieux avec les faits que celle de MM. Hertwig relative à la né- cessité de la fusion intime des substances du noyau dans l’acte de la fécondation. La signification et le rôle des cellules qui com- posent le grain de Pollen des Angiospermes est aujourd'hui bien établie, mais il n’en est pas de même pour les cellules multiples du pollen des Gymnospermes. La germination de ces cellules est en effet très lente et diflicile à réaliser, en outre les tubes polli- niques se remplissent de grains d’amidon dont la présence masque les transformations des noyaux et des masses protoplastiques. On s'explique ainsi que l’équivalence des diverses parties des grains de pollen des Gymnospermes et des Angiospermes n'ait pu encore êlre établie. M. Belajeff ! vient de combler cette lacune en étudiant les tubes polli- niques del'If sur lesovules mêmes pendant le temps qui s'écoule entre la pollinisation et la fécon- dation. Le grain de pollen de cette Conifère offre deux cellules, l’une grande, l'autre petite. La grande cellule se développe en un tube pollinique plus ou moins long, etle noyau qu'elle renferme émigre tout d’abord dans ce tube où il parait présider à son accroissement et à sa nutrition. La petite cellule, qui reste un peu plus long- temps incluse dans le grain de pollen, grossit peu à peu et bientôt se divise en deux cellules, dont l’une deviendra la cellule génératrice. Cette dernière émigre, après la division, dans le tube pollinique et reste toujours reconnaissable à son noyau entouré d’une masse protoplasmique plus ou moins grande. Pendant ce temps, la cellule contempo- raine dissocie peu à peu le protoplasme qui la formait et son noyau, devenu libre, émigre aussi dans le tube pollinique. Au bout d'un certain temps, on aperçoit dans l'extrémité dilatée de celui-ci une masse proto- plasmique creusée de nombreuses vacuoles et ren- fermant la cellule génératrice à laquelle se trou- vent accolés deux noyaux en voie de résorption : le noyau végétalif el le noyau de la cellule contem- poraine. Au moment où la fécondation va avoir lieu, la cellule génératrice se divise et forme deux noyaux ; c’estle plus grand, accompagné d’une cer- laine quantité de protoplasme, qui réalise la fécon- dation. On voit done que chez l’If, d'après M. Belajeff, la grande cellule est végétative; la petite cellule subit une bipartition et, tandis que l’une des cellules filles se résorbe, l’autre constitue la cellule géné- ratrice : elle émigre dans le tube pollinique pour former à son extrémité ce que l’on appelle la cel- lule primordiale. L’analogie devient alors complète, au point de vue de la constitution des organes mâles, entre toutes les Phanérogames. Chaque grain est cons- titué par une cellule spéciale à ce groupe de végé- taux, la cellule végétative stérile, destinée à former un tube plus ou moins long, servant au transport de l'élément mâle; cette cellule, qui méri- terait bien mieux le nom de cellule conductrice, n’est 1 W.C. Becaserr. Zur Lehre von dem Pollenschlauche der Gymnospermen. Bericht der deut. Bot. Gesellschaft, Bd. IX, 1892, p. 280. JE Stat pl GAMES EE RS D SE LS. L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 371 pas représentée dans la microspore des Crypto- games en raison de la mobilité des anthérozoïdes. La cellule fertile, véritable équivalent de la mi- crospore, s’isole au sein de cette cellule « conduc- trice » et, par une bipartition, fournit un couple de cellules génératrices qui émigrent dans le tube pollinique, lantôt en conservant la même impor- tance jusqu'au moment de la fécondatien, comme cela a lieu chez les Angiospermes ; tantôt chez lIf, par exemple, l’une des cellules du couple se résorbe de bonne heure et bien avant la fécondation; il ne reste alors qu'une cellule génératrice. La seconde partition tardive de cette dernière cellule ne serail pas un fait nouveau, puisque l'on à observé aussi, chez les Angiospermes, une seconde partition des noyaux générateurs. Le travail de M. Belajeff a donc rétabli la conti- nuilé qui manquait dans les phénomènes de réduc- tion et d'adaptation progressive des organes males. M. Treub ! vient de publier sur les Casuarinées un mémoire important sur l'existence des formes aberrantes de leur appareil femelle, comparé à celui des Phanérogames. Les Casuarinées, qui font l’objet du travail de M. Treub, ont une place à part, assez mal définie, dans le groupe des Dicotylédones apétales : si M. Eichler les range dans la série des Amentacées, les affinités qu'elles présentent avec les apétales sont douteuses, et, sauf celles qu’on a signalées avec les Myricacées, les botanistes descripteurs sont très réservés sur celle question. L'uniformité de structure et de développement des appareils reproducteurs dans les Angiospermes, que les tra- vaux les plus récents ont mise en évidence, ne pouvait faire soupconner que les Casuarinées cons- ütueraient une exception; cependant M. Treub a signalé des divergences telles qu'il n'a pas hésité à faire des Casuarinées un type spécial, distingué des Angiospermes et à la base de ce groupe, sous le nom de Chalazogames. Je me bornerai à résumer brièvement le mémoire très intéressant de M. Treub, car l'attention des lecteurs de cette Revue a été déjà attirée sur le groupe des Casuarinées?, à tous égards si anormal. Le développement de l'ovaire, étudié avec beau- coup de soin par M. Treub, nous apprend l’exis- tence, dans la cavité ovarienne, d’un tissu formé par croissance intercalaire de la base du placenta commun aux ovules et s’élevant jusqu'au sommet de la cavité où il devient adhérent au tissu con- 1 M Treus. Sur les Casuarinées et leur place dans le sys- tème naturel. Ann. du jard. bot de Buitenzorg, Java, vol. X. p. 145-231, 1891. ? VuiLrEMIN. Rev. gén. des Sciences, 15 janvier 1892. ducteur du style. Ce tissu, que M. Treub appelle «pont» et déjà décrit par M. Bornet, sépare la ca- vité ovarienne en deux parties, l’une contenant les ovules, l’autre désignée sous le nom de chambre à air. Les phénomènes dont le nucelle des Casuarinées est le siège sont entièrement différents de ceux qu'on observe chez les autres Angiospermes. Ordinairement, en effet, on voit, chez ces plantes, une cellule sous-épidermique donner naissance, après un premier cloisonnement, à deux cellules dont la plus interne devient la cellule-mère du sac embryonnaire; elle subit une série de cloison- nements perpendiculuirement à l’axe du nucelle, et la cellule la plus interne de la file ainsi cons- lituée grandit en refoulant en dehors d'elle les cellules sœurs, pour devenir le sac embryonnaire. Dans les diverses espèces de Casuarina, il se constitue au milieu du nucelle un tissu massif, que l’auteur désigne sous le nom de tissu sporogène ; ce tissu forme d'abord une masse ovoïde; mais, par suite d’une croissance intercalaire de la base du nucelle, le tissu sporogène s'étrangle et forme un pédicelle à cellules allongées quis’étend, d’une part, jusqu’à la chalaze et, d'autre part, jusqu'au massif ovoiïde de la région supérieure. Bientôt la différen- ciation se produit au sein du parenchyme homogène de ce tissu; de grandes cellules allongées appa- raissent et déterminent la résorption graduelle des petites cellules stériles ; il se forme, en outre, des trachéides dont le rôle est problématique. Chacune des grandes cellules se cloisonne un certain nombre de fois el constitue une cellule mère de macrospore, c'est-à-dire l'équivalent de la cellule mère du sac embryonnaire des Angio- spermes. L'une des cellules grandit beaucoup et devient ovoïde ou pyriforme, constituant une ma- crospore; en raison du grand nombre de cellules mères, il peut se former vingt macrospores et quel- quefois davantage. L'appareil sexuel ne prend ordinairement son développement complet que dans l’une d'elles, seule fertile; les autres, stériles, paraissent pré- senter des arrêts de développement à des stades divers; mais elles ne sont pas inuliles à l’aecom- plissement de la fécondation, car un grand nombre d'entre elles s’accroissent démesurément et en- voient un prolongement tubulaire dans la base du nucelle, qui dissocie les tissus et pénètre jus- qu'à la chalaze au milieu des éléments vascu- laires ; elles préparent ainsi la voie d'introduction du tube pollinique. C’est, en effet, un phénomène bien digne d’atten- lion, unique dans le règne végétal, que le mode de pénétralion de ce dernier. Au lieu de parvenir au nucelle par le micropyle après son entrée dans la cavité ovarienne, le tube pollinique, descendu le 3172 L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE long du massif formé par le style, pénètre dans le pont qui unit la base de ce dernier à l'insertion des ovules, arrive ainsi jusqu'à la chalaze et, em- pruntant la voie frayée par les prolongements tubulaires des macropores stériles, pénètre rapi- dement jusqu'au sac embryonnaire. Il vient s’ac- coler à celui-ci en un point quelconque de sa sur- face, généralement au-dessous et assez loin de l’oosphère, de sorte que le noyau mâle est obligé d'effectuer un long trajet dansle sac embryonnaire pour se joindre à la cellule femelle. L'étude des modifications qui s'accomplissent dans la cellule destinée à devenir le sac embryon- naire, les phénomènes préparatoires et consécutifs à la fécondation, présentent de grandes difficultés puisque, quel que soillenombre des ovules contenus dans l'ovaire, il y en a un seul, souvent difficile à distinguer, destiné à être fécondé; aussi les recherches de M. Treub présentent-elles quelques lacunes sur la constitution du sac embryonnaire et le mécanisme de la fécondation. L'auteur n’a pu observer qu'un certain nombre de stades, et il a été souvent réduit à invoquer des considérations hypothétiques pour les grouper en série chronologique. C’est ainsi qu'il admet, sans l'avoir suflisamment démontré, que l'appareil sexuel dérive d'une seule cellule, qui, à la suite d'une ou de deux partitions successives, forme avec l'œuf une ou deux cellules voisines. Ces cellules voisines rappelleraient exactement les cellules de canal des Cryptogames vasculaires, ou l'unique cellule du canal des Gymnospermes. M. Treub à constaté aussi que la cellule sexuelle parait enve- loppée d’une membrane cellulosique et que le sac embryonnaire est peut-être capable de développer un endosperme avant la fécondation. En somme, par le développement du tissu spo- rogène, par le grand nombre de macrospores dont quelques-unes ont un appareil sexuel, par la péné- tration du tube pollinique à travers la chalaze, les Casuarinées s’éloignent non seulement des An- giospermes, mais aussi des Phanérogames. Aussi M. Treub s'est-il cru autorisé à créer pour celte famille, si différente à tant d’égards des autres Phanérogames, un nouveau groupe d’Angiosper- mes. Pour rappeler le caractère le plus saillant, sinon le plus important : la pénétralion du tube pollinique par la chalaze, l'auteur a proposé le nom de Chalazogames par opposition au terme de Porogames, qui désignerail l’ensemble des Dicoty- lédones et des Monocotylédones. Le caractère différentiel, invoqué dans ces con- ditions par M. Treub,n’acquiert une valeur impor- tante que par l’ensemble des modificalions de structure des Casuarinées ; considéré en lui-même, il a une importance secondaire, car le tube polli- nique, ne pouvant pénétrer par le micropyle, suit, pour arriver à l'appareil femelle, la voie la plus commode et, dans ce cas, c'estle chemin de la cha- laze qui est le plus facile à suivre, à cause de la communication établie par le pont entre la base des ovules et la partie inférieure du style. Nous avons trop d'exemples, dans les Algues et les Champignons, des modalités diverses du transport de l'élément mâle, pour attribuer au fait intéressant découvert par M. Treub une valeur considérable et pour le regarder, dès à présent, comme un ves- tige des «modes d'apprentissage du tube pollini- que ». Il n’y a sans doute là qu'une nécessité physiologique qui peut se concevoir en dehors de toute considération phylogénétique. Malgré des lacunes inhérentes à la difficulté extrème des observations, lacunes que M. Treub a signalées lui-même de fort bonne gràce, ce travail aura eu le mérite de fixer définitivement le dé- veloppement de l'ovaire et les premiers états de l'ovule des Casuarinées, en révélantaux anatomistes un groupe aussi anormal par la constitution de son appareil reproducteur que par son appareil végé- tatif. Nous espérons que l’auteur ne tardera pas à publier l’histoire définitive et complète de ces plantes singulières. IT. — COMMUNICATIONS PROTOPLASMIQUES. L'étude des communications proloplasmiques qui mettent en relation les diverses cellules d’un végétal a été, depuis quelques années, l’objet de nombreux travaux de la part de MM. Gardiner, Tangl, Russow, L. Olivier, ete., et a suscité déjà d'importantes discussions. Dès 1885, M. L. Olivier avait soutenu que, loin d'être spéciales à un petit nombre d'espèces végé- tales et localisées en certaines régions peu éten- dues de ces dernières (albumen, base du pé- tiole, ete..), les communications protoplasmiques constituent un phénomène général, susceptible d'être mis en évidence même chez les Dicotylé- dones, le protoplasme s’y poursuivant sans inter- ruption à travers les parois des cellules « depuis l'extrémité des racines jusqu'à l'extrémité des feuilles ‘. » Apportant depuis un nouveau contin- gent d'observations à ce sujet, le même auteur a fait connaitre une méthode? qui permet de déceler les fines commissures du protoplasme dans des organes en vie active où les procédés ustels de l'histologie ne montrent ordinairement que cellules closes et protoplasmes isolés de leurs voisins. Ces 1 L. Orivier. Sur la canalisation des cellules et la conti- nuité du protoplasme chez les végétaux, Comples rendus de l'Académie des Sciences, 4 mai 1885,t. C., pages 1168 etsuiv. 2 L. Orrvier. Sur les connectifs intercellulaires du proto- plasme chez les Végétaux, Sociélé de Biologie, 18 oc- tobre 1890, neuvième série, t. Il, page 547. NX CS SR TT L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE ‘373 procédés consistent, comme on sait, à durcir le protoplasme, à le couper et à le colorer. Mais « le protoplasme étant, par nature, irritable et contrac- tile, on conçoit qu'au contact du rasoir qui le coupe ou de l’aicool dans lequel on l’immerge pour le durcir, il se rétracte brusquement à la façon d’un infusoire ou d’une amibe. S'il possède des sortes de pseudopodes l’unissant à ses voisins, il est possible qu'au moindre attouchement il les rétracte dans sa masse. La brutalité avec laquelle les histologistes ont coutume de trailer les plantes semble plus que suffisante pour expliquer la rup- ture et le retrait de ces filaments. Dans bien des cas, l’aspect observé après la mort serait donc loin de correspondre à l’état réel des tissus pendant la vie ‘ ». M. L. Olivier a tenté de supprimer cette cause d'erreur en anesthésiant le protoplasme avant de le durcir ou de le colorer : lorsque la plante a élé, au moyen d’éther en mélange avec Pair humide, « lentement endormie », son proto- toplasme peut être coagulé, durci, coupé et coloré, sans que ses connexions se trouvent modifiées. Sur les préparations où, en outre, les membranes cellulaires ont été soit amincies, soit détruites par l’acide sélénique étendu, on voit très bien la distribution des commissures qui relient chaque masse protoplasmique intracellulaire à ses congé- nères des cellules conliguës. Cette disposition figure, à peu de chose près, l'image de ce qui existe pendant la vie. D'un bout à lPautre de la plante il n’ya alors qu’un seul protoplasme, lequel peut être différencié suivant les régions et les cel- lules, sans toutefois perdre son unilé analomique. Il était intéressant de rendre ces faits sensibles sur les microphotographies elles-mêmes. La mé- thode imaginée par MM. A.etL. Lumière, de Lyon, pour reproduire sur les clichés les doubles ou triples coloralions des préparations, apermis d'ob- tenir ce résultat de la façon la plus démonstraltive. Le sépreuves au charbon et sur verre, que M. L.Oli- vier à présentées à la Société de Biologie, en même temps queses planches, montrent, comme celles-ci, les commissures intercellulaires du pro- toplasme colorées en bleu dans l'épaisseur des membranes colorées en rouge ?. Ces recherches datant de plus d’un an et ayant d’ailleurs été très remarquées, nous nous bornons à les rappeler ici, nous proposant de nous étendre davantage sur un travail important que M.Kienitz- Gerloff vient de consacrer à la même question. Son mémoire, récemment publié ?, nous permet 1 Ibidem. 2 Orrvier. Application d’un procédé de photographie en coulears pour étudier la continuité intercellulairé du proto- plasme chez les Plantes. Société de Biologie, 14 février 1891, neuvième série, t. III, page 124. F, Kienirz- GErLorr, Die Proloplasmaverbindungen d'indiquer les vues générales émises sur ce sujet. L'auteur a constaté l'existence des connexions plasmiques dans un grand nombre de tissus ap- partenant aux plantes les plus différentes. Plus de 60 espèces Phanérogames, Équisétacées, Fougères, Mousses, Hépaliques, ont été étudiées. Les diverses sortes de parenchyme de l'écorce el de la moelle, le collenchyme, le sclérenchyme, les mé- ristèmes, etc., offrent toujours ces communica- tions. On les observe aussi dans les vaisseaux li- gneux et dans le liège en voie de développement. Elles manquent dans les vaisseaux et le liège adultes, dans les cellules stomaliques qui sont complètement indépendantes de leurs voisines ; elles manquent aussi entre les tissus de l'embryon et l’albumen, entre les suçoirs des parasites et leur hôte, etc. La question la plus intéressante du mémoire est la relation qui existe entre les fila- ments plasmiques et les ponctuations que M. Ba- rane{zki à décrites avec tant de soin dans les lissus, car elle soulève la question de savoir si la membrane est uniforme ou si elle est perforée pour le passage des cordons plasmiques. Le travail de M. Baranetzki laissait la question indécise ; la membrane externe, lamelle muqueuse ou subs- lance intercellulaire, dépourvue de cellulose, ainsi que je l'ai démontré, ne se colorait pas par les réactifs iodés employés par cet anatomiste. M. Kienitz-Gerloff a utilisé le bleu de méthylène additionné de 1,5 % d'acide acétique, et il a re- connu les ponctuations décrites par M. Baranetzki, car elles se détachent en blanc sur le fond bleu de la membrane; c’est à travers ces poncluations que passeraient les filaments plasmiques. M. Kienitz- Gerloff admet l'existence de véritables pores for- més dans la membrane dès les plus jeunes états: ce n'est pas par une déchirure de la membrane qu'ils ont pris naissance, mais aux points où ils existent, la substance formant les membranes ne s'est jamais déposée. L'auteur est aussi amené à considérer les fila- ments plasmiques comme les restes des filaments observés à la fin de la division, au moment de la formation de la plaque cellulaire. L'objection de M. Krabbe à cetle manière de voir, fondée sur la destruction des connexions plasmiques par lac- croissement intercalaire, n’est pas fondée, car, non seulement de nouvelles communications protoplas- miques peuvent se former ; mais, en retournant l’objection de M. Krabbe, on peut dire que, si les connexions plasmiques sont déjà développées au moment de la division cellulaire, l'accroissement intercalaire ne peut avoir lieu ou demeure faible dans les régions de la membrane qu’elles traver- zwischen benachbarlten Gewebselementen in der Pflanze. Bot. Zeit. Année 49. N°s 1 ct suiv., 1891. 37% L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE sent. Ces deux opinions sont trop absolues, car elles ne tiennent pas compte de la propriété que possède le protoplasme de modifier à chaque ins- tant la membrane qu'il imprègne. On peut d’ail- leurs s'assurer que les membranes pourvues de perforalions présentent un accroissement notable, el que l'arrangement des pores est sans cesse modifié, ainsi que cela résulte des observations déjà anciennes de M. Baranetzki. Quoi qu'il en soit de l'origine des connexions plasmiques, elles se rencontrent dans tous les tissus et chez les plantes les plus diverses. M. Kie- nitz-Gerloff n'avait pas compris les Algues parmi les nombreuses espèces qu'il a étudiées, et M. Koh] ! a complété ses recherches par l'examen d'espèces nombreuses et différentes (C/adophora, Me- socarpus, Ulothrix, etc.), qui toutes présentent les communications protoplasmiques, dont l'existence avail déjà été signalée par quelques auteurs. Les conséquences qu'on a tirées de l’existence générale des communications intercellulaires, limi- lées, jusqu'à cesdernières années, aux tubesceriblés, offrent un certain intérêt. Signalons d’abord, pour en montrer l’exagéra- lion, la déchéance de la cellule de son titre d'unité anatomique. Celle-ci, considérée qu’alors comme une individualité distincte, est réduite maintenant au rôle de simple fragment de la masse protoplasmique Lotale, isolé par un cloisonnement purement mécanique nécessaire à la stabilité et au soutien de la masse générale, de sorte que M. Kienitz-Gerloff a pu comparer une plante supérieure au plasmode d'un myxomycète. A-t-on jamais songé à dépouiller les cellules nerveuses de leur individualité à cause des nom- breuses connexions qu'elles présentententre elles ? La signification physiologique des communica- lions intercellulaires offre un intérêt bien plus jus- considérable que les discussions métaphysiques sur la structure cloisonnée ou continue. Le rôle attribué à ces formations est double : d'une part, elles représentent les cordons de trans- mission des excilations produites en un point quel- conque de la plante; d'autre part, elles constituent les voies par lesquelles s'effectuent les échanges nutritifs. L'hypothèse de la transmission des excilations par les communications protoplasmiques, assimi- lées ainsi à une sorte de système nerveux, a élé émise d’abord par Hanstein pour les tubes criblés et étendue à tousles tissus. MM. Russow, Schmitz et en partie M. Gardiner l'ont acceptée. L’excitabilité bien connue du protoplasme est favorable à cel hypothèse, d'autant mieux que les anesthésiques, 1 Kour, Proloplasmaverbindungen bei Algen, Berichte d. d. Bot. Gesellschaft. Bd. IX, Février 1891. sans enrayer complètement les phénomènes de nutrition, suppriment pour un cerlain temps, chez la Sensitive, les mouvements provoqués. M. Haber- landt ? a récemment décrit, dans cette dernière plante, un (issu particulier, le « Reizleiten Gewebe », qui parait spécialement différencié en vue de la transmission rapide des excitations pro- duites par les chocs ou les frottements. Ce tissu est formé par des cellules très longues, tubuleuses, qui courent dans la partie libérienne des faisceaux ; elles sont plus grosses que les Lubes criblés, pos- sèdent toujours un noyau et présentent des cloi- sons plus ou moins obliques avec un seul pore assez grand. La membrane de celui-ci est tra- versée par de fins canaux renfermant les filaments plasmiques qui établissent la communication de cellule à cellule. Le tissu conducteur est remar- quable par son indépendance complète vis-à-vis des tissus enveloppants : le parenchyme ou le collenchyme; il a pu ètre suivi dans la feuille, le pétiole, le coussinet et la tige avec ses caractères propres. Nous n'insisterons pas sur le contrôle expérimental que l’auteur a semblé invoquer pour vérifier le rôle du tissu conducteur, car, en faisant agir l’eau chaude sur un pétiole, on tue les cellules et l'on aboïit en même temps l’irritabilité du pro- toplasme et ses propriétés osmoliques; il n'y a donc pas lieu de s'étonner qu'un semblable traite- ment abolisse la transmission. Mais, quoique l'expérience ne puisse pas encore démontrer cette propriété, son existence est très vraisemblable, étant données les propriétés du protoplasme. Le second rôle attribué aux communications protoplasmiques, tout aussi hypothétique, a sus- cilé des opinions diverses et souvent contradic- toires. M. Pfurtscheller admet que, dans tous les tissus, les substances nutritives circulent de cellule en cellule au moyen de ces cordons; M. Gardiner restreint ce rôle aux tubes criblés et aux cellules de l’endosperme; par contre, MM. Schmitz el Russow ne l’acceptent pour aucun üssu; enfin M.Tangl, en étudiant ces formations dans les fruits des Graminées, leur accorde seulement la propriété de transmettre les diastases. Entre ces opinions contradictoires, les moins justifiables sont celles qui limitent le rôle conducteur des com- municalions protoplasmiques à cerlains tissus ou à certaines substances (MM. Gardiner, Tangl, etc.), car on ne conçoit pas que ce qui est possible pour un tissu ou pour une substance délerminée soit impossible pour les autres. L’objection présentée par M. Noll, que les dimensions des poncluations sont bien plus faibles que celles des tubes criblés, est sans valeur d’après M. Kienitz-Gerloff, car les ‘ Hagerranpr. Das reizleilen Gewebe der Leipzig. VW. Engelmann, 1590, Sinnpflanze, Ë * TT CR IT NT © SRE TR ns sn à ni DUT IN L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 315 pores du Laurier-Rose, de certaines Fougères, des Mousses, sont très larges et même plus larges que les pores des tubes criblés du Pin. Remarquons que la comparaison avec les tubes criblés est une pétition de principe, puisqu'elle suppose que le transport par cette voie est rigoureusement établi, ce qui n’est pas. Le faitle plus favorable à hypothèse du trans- port des substances nutritives par les filaments plasmiques est la lenteur avec laquelle s'opère la diffusion. D'après M. Hugo de Vries, la vitesse de diffusion des substances considérées comme les plus dialysables, le sucre et le sel marin, est trop faible pour expliquer les rapides changements qui s'accomplissent dans les plantes. Ainsi un milligramme de sel marin exigerait 319 jours pour diffuser dans une colonne d’eau d’un mètre et la diffusion de la même quantité de matière organique exigerait 14 ans! Aussi M. de Vries a-t-il accepté depuis longtemps la coopéra- lion des courants protoplasmiques dans le trans- port des substances nutritives. Dans quelle mesure ces courants favorisent-ils ces échanges”? Quel en est le mécanisme? Est-ce un transport mécanique où un phénomène de diffu- sion ? Ce sont là autant de questions actuellement insolubles que l’auteur ne s’est mème pas posées. M. Kienitz-Gerloff a dù se borner à signaler les faits anatomiques qui plaident en faveur de ce rôle de transport. Nous en retiendrons quelques- uns. Les tissus qui avoisinent les canaux ou les cellules sécrétrices sont pourvus d’un système très riche de communications proloplasmiques, qui paraissent destinées à transporter les matériaux des sécrétions. Les jeunes éléments ligneux et les jeunes cellules de liège, siège d’une activité em- ployée tout entière à l'épaississement et aux trans- formations chimiques de la membrane, offrent pendant cette période d'évolution des liaisons plasmiques qui disparaissent à l’état adulte de ces éléments. Enfin les cellules stomatiques qui, seules parmi les cellules épidermiques. conservent chez les Phanérogames les grains de chlorophylle et les grains d'amidon, sont entièrement dépourvues de ces communications. Je ne puis malheureusement discuter la signili- calion de ces exemples; le résumé que je viens de faire du travail très intéressant de M. Kienitz- Gerloff montre que la question des relations pro- Loplasmiques intercellulaires nous réserve encore bien des surprises. IIT. — L’ÉTIOLEMENT ET LA CROISSANCE. La culture comparée des plantes étiolées et des plantes vertes, souventréalisée dans les recherches physiologiques, produit des modifications bien con- nues dans l'aspect ou le port d’une même espèce; ces modifications se retrouvent, quoique à un moindre degré, dans les plantes des régions ombreuses et humides, comparées à celles des régions sèches et ensoleillées. L’allongement considérable des entre-nœuds, la réduction plus ou moins grande des feuilles suivant les espèces, peuvent être rapportés à plusieurs causes, parmi lesquelles la transpiration et l’assi- milation paraissent jouer un rôle important, puisque ce sont les fonctions que l’étiolement modifie le plus profondément. M. Palladin ! attribue aux variations de la trans- piralion l'influence prédominante déjà indiquée par les recherches de M. Kohl. La transpiration est bien plus forte à la lumière qu'à l'obscurité et, en conséquence, les substances minérales sont introduites en quantités d'autant moindres que la transpiration est plus faible. C’est ce qui résulte des recherches de M. Schlæsing sur la végélation comparée des plants de tabac dans les conditions naturelles et dans un espace saturé. Les variations de la richesse en eau des tissus verts et des Lissus étiolés offrent à ce point de vue un certain intérêt; les seuls documents que nous possédons sont les résultats de M. Karsten pour le Phaseolus el de M. Godlewski pour les cotylédons du Radis. D’après les observations de M. Palladin, chez les plantes à tiges courtes, sans entre-nœuds, les feuilles éliolées sont plus riches en eau que les feuilles vertes (Blé); l'inverse a lieu chez celles qui ont de longs entre-nœuds (Vicia Faba). Le cas de la Fève est intéressant à signaler. Dans la plante verte, les feuilles, très riches en chlorophylle, transpirent beaucoup plus que les tiges el accumulent dans leurs tissus la quantité de malières minérales nécessaire à leur cerois- dans les plantes éliolées, en raison de l'absence de chlorophylle, la transpiration est seulement fonetion de la surface évaporante, et comme les entre-nœuds sont très longs, c’est la üige qui transpire le plus, accumulant dans sa masse des substances minérales qui, faisant défaut dans les feuilles, laissent celles-ci à l'état rudi- mentaire. Si dans ces plantes étiolées on empèche la transpiration de la lige en entourant celle-ci d’une bandelette de caoutchouc, comme l’a fait M. Palladin, le courant d’eau se dirige désormais vers les feuilles, et celles-ci ne Lardent pas à ac- quérir les mêmes dimensions que les feuilles des plantes vertes. L'examen du contenu azoté des feuilles vertes et des feuilles étiolées amène encore M. Palladin sance ; 1 W. ParcaniN. Transpiration als Ursache der Formän- derung eticlirler Pflanzen. Bericht. d. d. Bot. Gesellsch., Bd. VIII, 1890, p. 364. 316 L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE aux mêmes conclusions. Dans les plantes dépour- vues d’entre-nœuds comme le Blé, les feuilles éliolées sont plus pauvres en matières azotées que les feuilles vertes ; au contraire, dans les plantes à entre-nœuds développés, les feuilles étiolées sont plus riches en malières azotées que les feuilles vertes, elles tiges sont très pauvres (Fève). Ainsi ce n'est pas à cause du déficit de matières pro- téiques que les feuilles de la Fève demeurent rudi- mentaires, c'est à cause de l'insuflisance de matières minérales résullant de l’amoindrissement de la transpiration. L'avorlement des feuilles de la Fève dans un milieu obscur peut ètre comparé à l'impossibilité d'obtenir une plante normale au moyen de graines riches en substances azolées semées dans l’eau distillée. Les feuilles étiolées du Blé et les tiges étiolées de la Fève s’accroissent malgré leur faible contenu en matières azolées, parce que le courant d’eau provoqué par la transpiration amène dans leurs lissus une quantité suffisante de matières minérales. Dans une communication récente sur le même sujet, M. Palladin ! a étudié le verdissement et la croissance des feuilles étiolées placées dans des solutions différentes. Dans l’eau distillée Les feuilles restent jaunes ou verdissent très peu, elles ne manifestent aucun ac- croissement; au bout de trois joursellessontmortes. Dans une solution de sucre à 40 °/;, les feuiiles verdissent au bout de deux jours et montrent une très faible croissance ; au bout de trois Jours elles sont mortes. Enfin, dans un mélange de nitrate de chaux et de sucre, le verdissement a lieu après vingt-quatre heures et, au bout de trois jours, les feuilles sont encoresaines et montrentun accroissement notable. Ces résultats vérilient des observations déjà an- ciennes de M. Bœhm. On voit que l'absence de la chaux est une des causes qui empêchent l’accroissement des feuilles éliolées de la Fève, et l’on conçoit ainsi comment l'arrêt de la transpiration déterminé dans ces feuilles par l'obscurité est en relation étroite avec leur état rudimentaire. Les recherches de M. Palladin ? montrent encore que le verdissement exige la présence du sucre. soit qu’on le fournisse directement aux feuilles dé- ltachées, soit que dans les plantes en germination cette substance soit formée au moyen des aliments de réserve. M. Palladin a vérifié en effet, après M. Karsten, que les feuilles étiolées ne contiennent pas trace de glucose. Ce fait vient confirmer les 1 W. Pazzanix. Etwessgehall der grünen und etiolirten Blütler Bericht. d. d. Bot. Gesellsch., Bd. IX, 1891, p. 194. 2 W. PALLADIN. ÆErgrünen und Wachsthum der etiolirten Blätler. Bericht. d. d. Bot. Gesellsch. Bd. IX,1891, p. 229. observations que M. Belzung ! a publiées sur le rôle de l'amidon dans la formation des grains de chlorophylle. On peut formuler les résultats de l’auteur de Ja manière suivante : si pour une plante donnée, l’éliolement modifie les rapports des quantités d’eau transpirées par ses diverses parties, la plante entière sera déformée et ses déformations seront d’aulant plus grandes que les quantités d’eau transpirées seront plusmodifiées, — l’accroissement le plus grand correspondant aux régions qui trans- pirent le plus. Si ces rapports ne sont pas modifiés, la plante conservera sa forme typique. Les résultats des recherches que M. Wiesner ? à entreprises sur le même sujet concordent en grande partie avec ceux de M. Palladin, mais ils montrent des différences très grandesentre les espèces, même lorsqu'elles appartiennent à la même famille. L'auteur a choisi les plantes qui dans les condi- tions normales ontune rosette de feuilles radicales, el il les a cullivées dans des milieux humides ou secs, obscurs ou éclairés. Les modifications survenues dans le port de ces plantes, sous l'influence de ces conditions variées, se ramènent à quatre types : 1° La roselte foliaire se dissocie par suite de la formation de longs entre-nœuds aussi bien dans l'air humide que dans l'obscurité (Sempervivum tectorum). 2° Les plantes ne présentent aucune modifica- tion soit dans l’air humide, soit dans l'obscurité (Oxalis floribunda, Plantago media). 3° Les plantes sont modifiées par l’étiolement, mais non par le séjour dans l’air humide |Tarara- cum officinale), %° Enfin les plantes sont transformées par le séjour dans l'air humide, mais l’éliolement reste sans action (Capsella Bursa pastoris). Les types 1 et 4, Sempervivum el Capsella, contir- ment parleur manière d'être les résultats de M. Pal- ladin. Le Sempervivum est si profondément modifié que les entre-nœuds atleignent 0",12 el mème 0%,17. Cetle espèce esttrès intéressante à cause de sa sensibilité aux différences d'état hygrométrique de l'air, car des individus transportés successive- ment dans des espaces dont l’état Hygrométrique estdifférent forment des entre-nœudstrès inégaux. Le type 2 renferme des plantes indépendantes de ces deux facteurs : étiolement et humidité. Faut-il admettre avec M. Wiesner que ces deux facteurs ont produit au cours du développement de l’espèce un mode de croissance qu'ils sont im- 1 M. Bezzuxc. Sur le développement de l'arndon, Journ. de Bot. 1891. Nouvellesrecherches sur l’origine des grains d’ami- don el des grains de chlorophylle. Ann. Se.nat., 7e s., t. XIII. 2 J. WzesnNer Formänderungen von Pflanzen bei Cullur im absolul feuchten Raume und im Dunkeln. Ber. d. d. Bot. Gesellsch. Bd. IX, 1891, p. 42. c < 2, née L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 371 puissants à modifier, ou vaut-il mieux supposer que l'accroissement dépend d'autres causes que nous ne COnnaissOns pas EnCOre ? Le type 3 n'est pas en contradiclion avee la théorie émise par M. Palladin; c'est un exemple dans lequel les rapports des quantités d’eau trans- pirées par les divers organes deviennent cons- tants, de sorte que, dans le cas particulier du Taraxacum, l'influence exercée par la suppression de l'assimilation est prépondérante, M.H. Vœchting ‘ a fourni d’ailleurs une démons- tration directe de cette influence en étudiant le développement des rameaux de la Pommede terre, du Tabac, etc., placés dans une atmosphère privée d'acide carbonique ; au bout de quelque temps ces rameaux dépérissent et meurent. La formation de la feuille présente, comme on le sait, deux phases distinctes : la première, pendant laquelle lé- bauche de la feuille se dégage du point végélatif el différencie les régions qui la composent, est indépendante de l'assimilation; au contraire la deuxième phase, qui comprend l'épanouissement des feuilles et leur extension définilive, est suppri- mée quand la plante est privée d'acide carbonique. On voit done en somme que la cireulalion et la transpiration modifient profondément la croissance intercalaire qui amène les organes à leurs dimen- sions définitives. Les observalions que nous venons de rapporter, jointes aux résultats déjà plus anciens obtenus par MM. Askenasy et Godlewski, montrent bien que la croissance définitive des organes reste, dans un grand nombre de cas, indépendante de la turges- cence des tissus, que M. Nortmann considérait comme le facteur le plus essentiel. On voit par là que les théories souvent ingénieuses proposées pour expliquer la croissance risquent trop souvent d’être démenties par les faits aussitôt leur appa- rilion, et l’on peut aflirmer que nous serons réduits longtemps encore à cataloguer les résultats avant de pouvoir tenter l'explication d'un phénomène qui, comme la croissance, tient à l'essence même de la vie. Nous sommes amené ainsi à signaler les résultats oblenus dans les études de physiologie cellulaire. IV. — EXPÉRIENCES SUR LA NUTRITION Par l'absence de mécanismes compliqués, par la simplicité et l’unilormité de leur structure, les végétaux paraissent être, mieux que les animaux, d'excellents sujets pour l'examen des phénomènes intimes de la nutrition; cette simplicité n’est qu'ap- parente et le cercle des investigations est bientôt seiner Assümilationsthæligkeit, Bot. Zeit., 49€ année 1891, pe129: limité, car on se heurte dès les premiers pas à l'étude de la matière vivante qui est à la fois le subtratum, la cause et le but des phénomènes nutritifs. Les travaux entrepris dans cette direc- tion sont nécessairement restreints à un petit nom- bre de sujets, parmi lesquels la distribution et la migration des matériaux nutritifs ont été le plus étudiées. S'il n’est pas encore possible d'exprimer les résultats obtenus par une formule précise, la théorie de Sachs est encore celle qui s'accorde le mieux avec ceux-ci, et l’on ne conçoit pas que l'expression de sève élaborée soit encore employée pour désigner le courant imaginaire conduisant les matières nutritives des feuilles vers les organes en voie de croissance. L'un des corps les plus répandus dans les végé- taux, l’oxalate de chaux, a été récemment l’objet de recherches nombreuses. On admet ordinaire- ment que l'acide oxalique est un produit de déchet, résultat d’une oxydation incomplète, formé pendant la synthèse des matières albuminoïdes: comme il est vénéneux pour la plupart des plantes, il est ra- pidement immobilisé à l’état de corps inerte par sa combinaison avec la chaux. L’objection élevée contre cette hypothèse et lirée de l'absence d'acide oxalique ou d’oxalate de chaux dans certaines plantes, n'aurait pas d'importance si, comme le croit M. Schimper ‘, d’autres acides, tels que la- cide tartrique, remplacent l'acide oxalique. La localisation de l’oxalate de chaux dans des tissus ou des cellules qui ne contiennent pas de chlorophylle ne pourrait être expliquée, d'après M. Schimper, que par la facilité avec laquelle ce sel peut émigrer, semblable en cela aux hydrates de carbone, — la cristallisation et la dissolution de l'oxalate de chaux étant réalisées au moyen d’a- cides que le tissu cellulaire renferme en propor- tion variable, comme le croit aussi M. Kohl *. La répartition de l’oxalale de chaux a été étudiée par MM. Wehmer #, Schimper, Monteverde { avec beaucoup de soin. Ces auteurs ädmettent trois origines pour Poxalate de chaux : 4° l'oxalute pri- maire formé au voisinage des tissus en voie de développement, tels que les bourgeons, les fleurs, elc.; 2°l'oxalule secondaire, dont on voit fréquemment les cristaux disposés en files régulières dans Île parenchyme qui borde les nervures des feuilles épanouies el en pleine activité : la formation de 1 Souimper, Zur Frage der Assimilalion der Mineralsalze durch die grüne Pflanse. Flora 1890. 2 KouL, Ueber die physiologische Bedeulung des Kalkoxa- lats in den Pflanzsen. Bot. Centralblatt, t. XLIV. : C. Weumer, Die Oxalatabscheidung im Verlauf der Sprossentwickelung von Symphoricarpus racemosa. Bot. Zeit. 1891. 4 MoxTEvERDE, L'Oxalate de chaux et l'oxalale de magnésie dans la plante, Sünt-Pétersbourg. Bot. Centralblatt, t. XLIIT, 318 ces cristaux exigerait le concours de la lumière ; 3° enfin l’ovalate tertiaire qui s’accumule dans les feuilles arrivées au terme de leur évolution et des- linées à se flétrir. Mais les divergences se produi- sent quand on veut expliquer la formation de ces cristaux. MM.Monteverde et Wehmer n’admettent pas l'existence de la migration et démontrent, par des expériences intéressantes, que l’éclairement ne favorise pas, comme le croit M. Schimper, l’accu- mulation de l'oxalate de chaux. Les recherches de M. Wehmer établissent une relation entre l'ami- don, les nitrates et l’oxalate de chaux; les nitrates manquent dans les jeunes pousses au début de la croissance, ils apparaissent au moment où se for- ment les premiers cristaux d’oxalate; l’amidon, au contraire très abondant au début, diminue graduel- lementpour disparaitre au terme du développement. En somme, ces recherches nous renseignent sur la topographie des cellules contenant de l’oxalate de chaux, mais laissent encore incertains le méca- nisme de sa formation et les relations que ce com- posé présente avec les phénomènes de nutrition. La répartition de l’amidon et du glucose vient d’être étudiée par M. Fischer ! dans les plantes ligneuses. L’amidon accumulé dans les tissus pré- sente,dans le cours d’une année, deux maxima: l'un au printemps, au moment de l’éclosion des bour- geons ; l’autre en automne à la chute des feuilles, et deux minima : l’un en hiver, l’autre à la fin de mai. Le glucose apparait au contraire en plus grande quantité en hiver et au commencement !de l'été il est surtout localisé dans les vaisseaux du bois. En été, l'Aune, le Bouleau, le Noisetier, le Pin, le Mélèze sont très riches en glucose; les tissus du Chêne, de l’'Orme n’en présentent que des traces, et ceux du Frêne, du Noyer, n’en contiennent pas. Les plantes herbacées se distinguent des plantes ligneuses parce que leurs vaisseaux ne renferment ordinairement pas de glucose. L'amidon peut être régénéré dans les tissus aux dépens du glucose qu'ils renferment, soit acciden- tellement sous l'influence d’une élévation subite de la température, soit normalement à la fin de jan- vier quand la température dépasse Æ 5° et quand l’accès de l'air est toujours facile. IL n’est guère possible de tirer de ce travail minutieux des con- clusions imporlantes, sauf celles qui sont relatives à la migration des hydrates de carbone destinées à former l’amidon. D’après M. Fischer, ces com- posés ne circulent pas dans l'écorce, le parenchyme ligneux ou la moelle; ils sont transportés au prin- temps parles vaisseaux etles trachéides en suivant le courant transpiratoire. Au contraire les hydrates ! Fiscuer. Beilrage zur Physiologie der Holzgewebe, Pringsheim’s Jahrb., 1890, t. XXII. L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE de carbone produits dans les feuilles chemine- raient en descendant dans les tissus de l'écorce. M. Saponischnikoff! complète les indications fournies par M. Fischer. Les recherches compara- tives entreprises sur des feuilles encore attachées à la plante et sur des feuilles coupées démontrent que la diminution des hydrates de carbone est cinq fois moindre dans les dernières que dans les pre- mières, La rapidité avec laquelle se vident les feuilles est d'autant plus grande que le nombre de feuilles est moindre ; cela se conçoit, car dans les végétaux en pleine activité, l'assimilation accumule sans cesse dans les issus verts de l’amidon que la plante consomme plus ou moins rapidement. L'ablalion de quelques feuilles diminue la pro- duction de l’amidon sans diminuer notablement la consommation, et l’on comprend que l’amidon renfermé dans les feuilles épargnées doive dispa- raitre plus rapidement. Après avoir montré ensuite que l’activité de la croissance augmente la vitesse de la migration, M. Saponischnikoff éludie le mécanisme de la mi- gration qui s'opère, suivant lui, à l’état de glucose formé sous l’action d'une diastase dont l’activité est enrayée par l'accumulation des produits de dissolution. Si le sucre formé diffuse au fur et à mesure de sa dissolution, celle-ci s'opère très vite; mais, si la diffusion est lente, le sucre s'accumule dans les tissus et, à partir d’une certaine limite, que M. Saponischnikoff a essayé de mesurer pour le Poirier, les Ronces, la diminution n’a plus lieu. La formation des hydrates de carbone a été l'objet de nombreux travaux; en dehors des sources naturelles de ces corps, les recherches de MM. Bæœhm, Mayer, Laurent, ont démontré qu’un certain nombre de substances solubles peuvent provoquer la formation d’amidon : telles sont le saccharose, le glucose, la mannite, l'inuline, la gly- cérine, etc. MM. Acton? et Nadson* ont expérimenté avec un très grand nombre de substances orga- niques, et d’après M, Acton, toutes celles qui four- nissent de l’amidon, en proportion variable sui- vant les espèces étudiées, contiennent le radical CH?0, c’est-à-dire l’aldéhyde formique. M.Bokorny vient de publier une série d’observa- tions sur l'influence de ce composé dans la forma- tion normale des hydrates de carbone par le proces- 1 W. Saponiscnnikore. Bildung und Wanderung Kohlen- hydratein den Laubblättern. B.d.d. Bot. Gesells.,T. VIIT, 1890. p. 233. 2 H. Acron. The assimilation of carbon by green plants front certan organic compounds. Proced. of Ch. Roy. Soc, 46. 1890. 3 Napson. La formation d’amidon aux dépens des subs- lances organiques dans les cellules vertes des plantes. Ann. des Trav. des Nat. de Saint-Pétersbourg, 1889. Lu L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE 319 sus de l'assimilation chlorophyllienne. M.Bokorny ! emploie le sel de soude de l'acide oxyméthylsulfu- OH rique CH 7 SOS Na sous l'influence de l’eau chaude, en aldéhyde for- mique et en sulfale acide de soude. ASE SSO3Na Ce sel est soluble dans l’eau froide et, pour éviter l’action nocive du sulfate acide de soude résultant de son dédoubiement, l’auteur ajoute à la dissolu- tion du phosphate bibasique de potasse et de soude. M. Bokorny a constitué une solution nutritive renfermant différents sels : azotate de chaux, chlorures de potassium et de fer, sulfate de magné- sie, etc. Cette solution est partagée en deux moitiés, dont l’une est additionnée de l’oxyméthylsulfate de soude et de phosphate bibasique de potasse. On place dans chaque liquide des Spirogyres, et on les expose à la lumière, sous une cloche dépouillée de CO? par un vase renfermant de la potasse caustique. Au bout de quelques jours, les plantes placées dans le milieu renfermant l’oxyméthylsulfate de soude, étaient saines et renfermaient une quantité considérable d’amidon, tandis que celles dont la solution nutritive était privée de ce sel, étaient affamées, en partie mortes et ne présentaient aucun accroissement, Dans une solution nutritive privée de sels de potassium, le Spirogyra majuseula cesse en peu de temps d’assimiler l'acide carbonique, car, en pré- sence de ce gaz et en pleine lumière, les fila- ments ne s’accroissent pas et manifestent, par les modifications des corps chlorophylliens, les phé- nomènes du jeûne; si l’on ajoute de l’oxyméthyl- sulfate de soude, la plante renferme au bout de trois jours une quantité considérable d’amidon et présente des signes certains d’accroissement. Ces résultats confirment l'hypothèse de la for- mation de l’aldéhyde formique comme l’un des premiers termes de la synthèse des hydrates de carbone dans les organes verts exposés aux radia- tions; ils montrent, en outre, que les sels de potas- sium, dont l'influence sur la formation de l’amidon a été depuis longtemps mise en évidence par les recherches de M. Nobbe, paraissent nécessaires à la synthèse de l’aldéhyde formique, mais ne sont pas utiles à la formation des hydrates de carbone par la condensation de ce corps. M. Saponischnikoff, dans le travail cité plus haut, s'est proposé de résoudre, au sujet de l’assi- milation du carbone, une question déjà annoncée par Boussingault. On sait que, d’après ce savant, qui se dédouble facilement —= CH20 + HSO:Na. 1 Bokorny Ueber Slärkebildung aus Formaldehyd Ber. d. d. Bôt. Gesells. Bd. IX, 1891, p. 103, la décomposition de l'acide carbonique dans une feuille coupée, ne dépasse pas une certaine limite ; dès que cette limiteest atteinte l'assimilation cesse. On peut se demander si l'arrêt de la fonction chlorophyllienne est dû à l’accumulation des hy- drates de carbone ou à une autre cause? Pour élucider ce fait, M. Saponischnikoff com- pare l’assimilation de deux feuilles aussi iden- tiques que possible, l’une renfermant de l’amidon, l’autre privée de cette substance par une exposi- tion à l'obscurité, et il constate que la seconde assi- mile, dans les mêmes conditions, beaucoup plus d'acide carbonique que la première. On voit ainsi que la rapidité avec laquelle les hydrates de car- bone émigrent est un facteur imporlant dans l’é- nergie de l'assimilation d'une plante donnée et l’on constate que la mesure de l'énergie spécifique de cette fonction ne peut êlre connue, comme on le fait d'habitude, en opérant avec des fragments de tige ou de feuille. L’amidon est-il l'unique produit de la décompo- sition de l’acide carbonique ? M. Saponischnikoff résout cette question en cal- culant la quantité d’amidon que devrait fournir l'acide décomposé par une feuille donnée d’après l'équation 6 CO? Æ 6 H?0 — CH? OS HE 60? et la quantité d’amidon qui s’accumule dans les mêmes conditions au sein des tissus d’une feuille semblable et il constate un déficit variant de 12 à 36 1/, dans la quantité d’amidon qui aurait dû se former en supposant que tout le carbone fût en- gagé dans le processus de synthèse des hydrates de carbone. Aussi M. Saponischnikoff conclut-il à la forma- tion d’une autre substance, qui serait sans doute une substance azotée, si, comme l’auteur le fait remarquer, on tient compte du fait de l’assimila- tion des nitrates dans le parenchyme des feuilles mis en évidence par MM. Emmerling, Monteverde, Schimper. Il est vrai que M. Lœw ! n’admet pas l'influence des radiations sur la formation des matières azotées; cette conclusion, que l’auteur formule à la suite de ses observations sur la nutri- tion azolée des champignons, est en contradiction avec les résultats de MM. Frank et Otto ?. On sait depuis longtemps que l’amidon s’accumule dans les tissus verts à la suite d’un éclairage intense et la quantité d’amidon formée, est considérée comme le résultat de lassimilation du carbone opérée dans les corps chlorophylliens avec l’aide des radiations. Celles-ci peuvent-elles modifier aussi dene anorganische Stickstoffverbindungen. Biolog. Centr. BI. Bd. X. 1890, n° 19 et 20. 2 B. Frank et R.Orro. Untersuchungen über Stickstoff- assimilation in der Pflanze. Berichte d. d. Bot. Gesellsch, Bd. VIII 1890, p. 331. 380 L. MANGIN. — REVUE ANNUELLE DE BOTANIQUE la teneur en matière azotée? MM. Frank et Otto ont cherché à élucider ce fait en comparant la quantité de matières azotées renfermées dans les feuilles de diverses espèces : Trèfle, Luzerne, Chou, Chanvre, Vigne, etc., recueillies le matin et le soir, c’est-à-dire avant et après la période d’éclaire- ment diurne. Il résulte de ces recherches, que les feuilles sont plus riches en matières azotées le soir après un éclairement plus ou moins intense que chaque malin après le séjour à l’obsecurité. La différence surtout sensible avec la luzerne, le trèfle, le Lathyrus, se manifeste aussi, mais à un degré moindre, avec les espèces n’appartenant pas aux Légumineuses. Le contenu en asparagine varie de lamême facon, comme cela résulte d'expériences entreprises avec le 7rifolium pralense. Les résultats sont identiques soit qu'on s'adresse à des feuilles encore attachées à la plante, soit à des feuilles coupées, ce qui exclut l’idée de migra- tions effectuées de la tige vers les feuilles, à la faveur de l’éclairement. Le phénomène de l'assimilation chlorophyllienne a donc, comme on le voit, une signification plus large que l’acceplion admise par Boussingault fondée sur la prétendue égalité des volumes d'acide carbonique absorbé et d'oxygène dégagé par des organes verls soumis à l'insolation. Les recherches dans lesquelles nous nous sommes efforcés, M. Bonnier et moi, de séparer l'action chlorophyllienne de la respiralion et qui nous ont permis d’élablir que le volume d'oxygène dégagé surpasse toujours le volume d’acide carbonique décomposé, reçoivent, par les résultats que je viens de résumer, une nouvelle confirmation. L’oxygène exhalé provient de la réduction de l'acide carbo- nique et de celle d’un autre ou d’autres corps dont la nalure est encore à déterminer; le résultal de ces réductions multiples est la formation de com- posés ternaires et quaternaires. Il y a là un beau sujet de recherches. Les matières minérales que la plante absorbe en dissolution dans l’eau ne peuvent pas être décelées par les réactifs colorants employés en microchimie ; pour étudier leur distribution et reconstituer le chemin qu'elles parcourent, on méthode nouvelle qui consiste à srécipiter, dans les cellules, les composés solubles à l’état de cris- taux dont la forme, l’arrangement etla solubilité permettent de caraclériser certains genres ou cer- taines espèces minérales. En opérant ainsi, M. Schimper a pu montrer que les sels minéraux ne circulent pas par les conduits qui amènent la sève ascendante, comme on le croyait autrefois, mais se déplacentàä travers les cel- lules du parenchyme. Ce fait, déjà établi pour les nitrates, a élé mis en évidence par l’auteur pour | emploie une les sulfates, chlorures et surtout les phosphates. Après avoir localisé les divers genres salins dans les tissus de réserve et cherché à connaitre les combinaisons dans lesquellesles acides ou les bases sont engagées, M. Schimper étudie la migration de ces composés pendant la germination des graines, où pendant le développement des tiges annuelles constituées aux dépens des rhizomes. Les phosphates, qui ont été surtout étudiés, cir- culent à travers le parenchyme de l'écorce ou de la moelle dans la Lige ou dans la racine, et dans le parenchyme entourant les nervures des feuilles. En général, c’est le parenchyme pauvre en chloro- phylle qui sert de voie de transport aux matières minérales ; le mésophylle, le bois des faisceaux li- gneux ne renferment pas de phosphates, de ni- trates, ni de sulfates, Je ne veux retenir ici du mémoire, si riche en do- euments, de M. Schimper que la circulation des malières minérales à travers les parenchymes, car elle soulève des objections d'ordre différent. La dilution des matières minérales dans les tissus où circule le courant d’eau transpirée est si faible qu'il n’est pas étonnant que l'examen mi- croscopique de ces tissus ait donné des résultats négatifs. Dans les parenchymes, au contraire, l'eau ne circule pas ou circule lentement ; elle y af- flue des vaisseaux et d'autant plus rapidement que l’'évaporation est plus active,de sorte que l’accumu- lation plus grande des matières minérales dans les cellules où M. Schimper les arencontrées serait due seulement à l’activité de la transpiration. Nous ne savons rien, il est vrai, de l'énergie de la transpiration dans les différents Lissus, mais nous pouvons affirmer qu’elle est, toutes choses égales d’ailleurs, plus grande dans les paren- chymes que dans les faisceaux. La distribution des matières minérales pourrait donc, dans les organes en pleine végétation, s'expliquer par un tout autre mécanisme que par la migration à travers les cellules du parenchyme et celte explication concorde avec les résultats des recherches sur la végétation du Tabac, faites par M. Schlæsing, ainsi qu'avec ceux de M. Palladin, que j'ai signalés plus haut. Le défaut de place m'oblige à signaler seule- ment bien des travaux intéressants que je n’ai pu grouper dans les paragraphes précédents : les curieux exemples de déformation étudiés par M. Hugo de Vries sur la torsion par étreinte, l'ingé- nieuse méthode imaginée par M. Bokorny pour étudier les voies de l’ascension de l’eau ; le mé- moire de M. Pfeffer sur l'énergie des plantes, qui fera l'objet d'un article bibliographique spécial. L. Mangin, Docteur ès sciences, Professeur au Lycée Louis-le-Grand BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 881 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Padé (H.), Ancien élève de l'Ecole Normale supérieure, Professeur agrégé de l'Université : Sur la représen- tation approchée d’une fonction par des frac- tions rationnelles. — Thèse de doctorat soutenue devant la Faculté des Sciences de Paris, le 8 avril 1892, Gauthier-Villars et fils, éditeurs, 55, quai des Grands- Augustins, Paris, 1892. M. Padé se propose de représenter une fonction y d’& par une fraction continue illimitée Q, à termes ra- tionnels en #, ou, ce qui revient au même, par des fractions rationnelles en +, réduites successives de Q. Le problème ne manque pas d'intérêt : pour chaque manière nouvelle de représeuter y, on peut espérer mettre en évidence des propriétés nouvelles de la fonc- tion. Par exemple, le développement en série permet l'étude des points singuliers... Une première difficulté se présente, c'est l'extrême variété des fractions continues Q. M. Padé considère d’abord les fractions Q simples, 9, ; ce sont celles où les numérateurs partiels sont de la forme «&x®, les déno- minateurs partiels de la forme 1 + br... + bia, a,b,,.. étant des constantes, »m etn des nombres entiers et positifs. La fraction simple Q, devient régulière si m est le même pour les numérateurs, n le même pour les dénominateurs successifs. M. Padé estime que la simplification consistant à étudier Q, au lieu de Q est analogue à celle qu'on obtient en développant la fonction y non pas en série, dont les termes sont sim- plement rationnels en x, mais en série S, procédant sui- vant les puissances entières, positives, croissantes d’æ&. Quoi qu'il en soit, voici la marche suivie par l’auteur: il suppose la fonction y développée en sérieS et cherche les fractions rationnelles W,,, qui, avec des maxima donnés p et q pour les degrés du numérateur et du dénominateur respectivement, approchent le plus de la fonction y, aux abords d’une valeur donnée pour #. Il signale plusieurs propriétés des fractions W,,, indique la mesure de lapproximation obtenue et le moyen d'accroître cette approximation, quand p et q aug- mentent, Ensuite, l’auteur construit la fraction continue simple @,, dont les fractions W,, sont, pour p et q croissan(s, les réduites successives. Enfin sont traitées par la méthode la fonction expo- nentielle, pour laquelle on généralise quelques déve- loppements d'Euler, et la fonction représentée par la série hvpergéométrique ; quelques formules de Gauss se présentent dans les cas particuliers. Sans doute, la thèse de M. Padé n’est pas bien riche en résullats, malgré la grande sagacité dépensée dans des discussions algébriques serrées ; l’auteur a plutôt indiqué que parcouru la voie à suivre. Mais il ne faut pas oublier l’extrème difficulté de la théorie des frac- tions continues, devant laquelle ont reculé tant de géomètres. Sachons gré à M. Padé de s'être attaqué, pour ses débuts, à un problème aussi ardu, au lieu de chercher sur un champ plus facile des résultats plus abondants. Léon AUTONNE, Madamet (A.). — Tiroirs et distributeurs de va- peur. — Un volume petit in-8° (2 fr. 50) de l'Ency- clopédie scientifique des Aide-mémoire. Librairie Gau- thier- Villars et fils et G. Masson, Paris, 1892. Les distributeurs sont, dans la machine à vapeur, les organes essentiels; ceux qui contesteraient l’impor- tance de leur fonction feront bien de relire la fable intitulée : &« Les membres et l'estomac. » En consacrant spécialement un aide-mémoire de son Encyclopédie à ET INDEX ces appareils, M. Léauté a sans doute voulu marquer la prépondérance de leur rôle : M. Madamet l’a fait ressortir en les étudiant d’une facon complète et en discutant à fond leur fonctionnement. Il décrit d'abord les tiroirs, les robinets et les soupapes; des figures très bien dessinées éclairent ces descriptions et met- tent en lumière le point saillant de chaque dispositif. L'auteur aborde ensuite les mécanismes de conduite avec et sans changement de marche : de nombreux exemples sont empruntés aux machines marines. Un dernier chapitre traite de la résistance opposée par les tiroirs à leur mouvement; les mises en train sont l’objet d’une attention particulière. Ce pelit.volume de 150 pages, illustré de 58 belles figures, est un chef- d'œuvre de précision, de méthode et de clarté, que nous avons lu avec un grand intérêt el qui nous à ins- truit beaucoup. A. Wrrz. Gouilly (A). — Transmission de la force motrice par l'air comprimé ou raréfié. — Un volume petit in-8° (2 fr. 50) de l'Encyclopédie scientifique. des Aide- Mémoire. Librairie Gauthier-Villars et fils et G. Masson, Paris, 1892. L'air comprimé est un agent dont les ingénieurs ne sauraient plus se passer; sans parler des cloches à plongeur et des scaphandriers, dont l'invention est ancienne, nous pouvons dire que l'air comprimé est un concurrent de la vapeur et de l'électricité, car il transmet l'énergie, porte les dépêches, distribue l'heure, actionne les locomotives et serre les freins. La théorie de son emploi est du ressort de la thermo- dynamique; la pratique de ses applications est très variée et toujours assez délicate; pour traiter ce sujet à ce double point de vue, il fallait donc un ensemble de qualités, dont M. Gouilly a donné la preuve indis- cutable dans cet excellent petit Aide-mémoire, C’est, à vrai dire, un traité complet de la question. Après avoir établi les formules fondamentales, l’auteur étudie les compresseurs et les réceptrices, employant de l'air sec ou de l'air saturé, et il pose les formules des rende- ments : nous ne ferons qu'une légère critique, relative à l'emploi de la parenthèse (273 + {) pour représenter les températures absolues, qu'on indique mieux par la lettre T. La partie pratique renferme les données el coefficients nécessaires pour l'application des formules avec des descriptions très intéressantes des principaux organes ; on y trouve aussi une étude des distributions Petit et Boudenoot par l'air raréfié et Pcpp par lair comprimé, Ces dernières questions sont pleines d’ac- tualité. A. Wirz. Verny. (Et.) — Graissage des machines et du ma- tériel roulant des chemins de fer. Un-vol. in-8° de 187 pages et 317 figures dans le texte (3.50). — (Gr. Carré, éditeur, 58, rue Suint-André-des-Arts, Paris, 4892, La théorie du frottement que donne M. Verny n’est pas à l'abri de toute critique ; mais, comme c’est, en défi- nitive, l'expérimentation qui le guide, son traité sur le graissage des machines a tout l’intérèt qui s'attache à l'œuvre d'un praticien. C'est avec raison qu'il distingue les conditions sui- vantes d’un bon graissage : alimentation surabondante des tourillons, — circulation et interposition surabon- dantes de l'huile entre les surfaces du tourillon et du coussinet, — évacuation de l'huile sans perte hors des tourillons, et sa récupération, — purification de l'huile dans le palier lui-même ou hors du palier, — préser- vation des surfaces frottantes de tout contact des pous- sières extérieures, — automalicité du graissage. 382 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Il fait remarquer que les huiles seules ont les qua- lités d'adhérence et de viscosité nécessaires pour un bon graissage et que les graisses ne peuvent donner qu'une lubrifaction imparfaite, parce qu’elles forment avec les poussières un cambouis qui ne peut être éli- miné que grâce à l’échauffement des tourillons. Cet échauffement est l'équivalent d'une perte de travail et, de plus, il facilite l'usure des surfaces, L'auteur donne la description détaillée des appareils de graissage propres aux arbres verticaux, aux arbres horizontaux, aux têtes de bielles. Il préconise l'emploi de grenailles de plombagine ou de plomb pour régu- lariser l’écoulement de l'huile et la purifier après son passage entre les surfaces frottantes. L'essai des huiles est une partie parfaitement traitée par M. Verny. Il décrit le dynamomètre Leneyeu et son application à la mesure de l’onctuosité et de la capa- cité onctueuse des huiles. Il n'y a pas de machine qui ne nécessite un graissage et il n'y a pas de bonnes machines sans bon graissage. L'importance du sujet est donc grande, et un traité clair sur cette matière ne peut être que d'une réelle utilité. A. GouILLy. 2° Sciences physiques. Duhem (P.). Leçons sur l'Electricité et le Magné- tisme, {. IL. Les aimants et les corps diélectri- ques, 1 vol. gr. in-8° de 480 pages (16 fr.). Gauthier- Villars et fils, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1892. Dans ce deuxième volume, M. Duhem poursuit le programme exposé au début du premier : la synthèse de la science électrique. La réunion dans un même volume de phénomènes hétérogènes en principe est motivée par la méthode mathématique, à laquelle l’ou- vrage est subordonné; les résultats laborieusement ac- quis pour les aimants se reportent immédiatement sur les diélectriques, pour lesquels on peut se contenter de quelques additions, La méthode mathématique, très élégante, présente cependant de réels dangers; trop souvent la méthode naturelle d'investigation se trouve ou sacrifiée ou renversée, comme dans le cas, par exemple, où, partant d’une certaine définition d'un corps parfaitement doux, on arrive à démontrer que ce corps ne reste pas aimanté lorsque le champ extérieur disparait, Ce second volume contient plusieurs chapitres très modernes; la thermodynamique appliquée aux phéno- mènes magnétiques, une étude approfondie de l'ai mantation des cristaux et de la déformation des corps polarisés; puis, caché au milieu du volume, un petit chapitre de sept pages, intitulé : Impossibilité des corps diamagnétiques, qui se résume en ceci : « Les prin- cipes de la Thermodynamique ne permettent pas qu'il existe des corps diamagnétiques, c'est-à-dire des corps dont Ja fonction magnétisante soit négative. » Que sera la réponse définitive à cette question, chaudement dé- battue aujourd'hui? L'exposition de M, Duhem, comme celle de M. Parker, paraît convaincante, à première vue, mais elle est encore entourée de bien des restric- tions. Dans les derniers chapitres, M. Duhem pense dé- montrer l'inexactitude de la théorie de Maxwell rela- tive à la déformation des corps polarisés, puis il re- cherche les causes de cette inexactitude; M. Brillouin M. Beltrami, E. Mathieu, et tout récemment M. Poin- caré, avaient été plus réservés, et, tout en reconnais- sant les difficultés de cette théorie, avaient donné à ses apparentes contradictions le nom de paradoxes. Un des principaux motifs que M. Duhem invoque pour re- Jeter cette théorie réside dans une expérience de M. Quincke (dilatalion uniforme d’un diélectrique po- larisé), bien que cette expérience ne soit pas à l'abri de la critique. N'est-ce point aller un peu vite en be- sogne ? S'il est impossible, dans une courte bibliographie, de donner une idée exacte d’un ouvrage tel que celui de M. Duhem, les quelques citations qui précèdent peuvent du moins en faire ressortir un caractère dis- tinctif : beaucoup de hardiesse et d'indépendance, Ch. Ed. GUILLAUME. Dehéraüin (P.-P.), Membre de l'Institut, Professeur au Muséum et à l'Ecole de Grignon : Traité de chimie agricole : développement des végétaux; terre arable ; amendements et engrais. — Un volume in-8° de 904 pages, avec figures (16 fr.). Librairie G. Masson, 120, boulevard Saint-Germain, Paris 1892. Aujourd’hui plus que jamais, le besoin de connais- sances positives se fait sentir dans le domaine de Pa- griculture ; tant de progrès ont été réalisés dans ces dernières années, tant d’usages séculaires ont été modi- fiés ou condamnés par les récentes conquêtes de la science, que les agriculteurs se trouvent quelque peu déroutés et demandent un guide sûr, qui mette à leur portée les faits acquis sur lesquels est basée l’interven- tion de la science dans la pratique agricole, Mais ce n'est pas une tâche facile d’exposer dans leur ensem- ble les données scientifiques abstraites et de les ratta- cher aux phénomènes naturels qui interviennent dans la production végétale et animale, but essentiel de l'a- griculture. Nous devons féliciter M. Dehérain d’avoir entrepris cette œuvre ; nul plus que lui n’était à même de la mener à bonne fin. Toute la carrière de l'éminent savant a été consacrée à l'étude des questions ayant trait à l’agronomie. Fami- liarisé avec les recherches les plus délicates du labora- toire, autant qu'avec les conditions des exploitations agricoles, M. Dehérain a pu faire une adaptation qui n'était pas à la portée de tous. Se pénétrant des néces- sités de l’agriculture moderne, qui doit à des rende- ments élevés de nouvelles conditions de vitalité, M. Dehérain a exposé avec clarté, avec méthode, avec une grande sûreté de jugement les phénomènes chi- miques et physiques qui interviennent dans la produc- tion de nos récoltes. J Prenant le végétal à son début, l’auteur étudie les graines au point de vue du choix qu’on doit en faire, de leur valeur germinative, des impuretés qui peuvent s'y trouver mélangées ; il fait connaitre les préparations qu'on doit leur faire subir pour la bonne venue des plantes. Les conditions de germination sont décrites avec beaucoup de détails, ainsi que les méthodes mises en œuvre pour l'étude des phénomènes si intéressants et si complexes qui interviennent au premier âge de la plante. Les procédés d'analyse sont décrits avec une grande minutie et nous y trouvons beaucoup de données nouvelles dont les laboratoires de recherches sauront tirer profit. Passant ensuite au développement du végétal, M. Dehérain expose et analyse les travaux qui ont trait à l'assimilation du carbone ; cette fonction si impor- tante des végétaux a fait dans ces dernières années l’ob- jet de travaux nombreux ; M. Dehérain lui-même a apporté son contingent à l'étude de cette question délicate. Le problème de l’assimilation de l'azote par les plan- tes, qui aété pendant de longues années une des ques- tions les plus obscures et les plus controversées, a recu dans ces derniers temps une solution éclatante, Les travaux de MM. Hellriegel et Wilfarth, de M. Bréal, de MM. Schlæsing fils et Laurent ont montré que les Légu- mineuses portent sur leurs racines de petites nodosités remplies de nombreuses bactéries qui sont les agents essentiels de Ja fixation de l'azote libre par ces plantes. Cette partie si intéressante de la fonction des végétaux est exposée d’une facon magistrale et contient toutes les données fournies par les tra- vaux les plus récents. Le chapitre ayant trait à l’as- similation de l'azote, dans lequel est résumé l’en- semble des connaissances actuelles sur cette impor- tante question, est un de ceux qui intéresseront le plus | Me. diet de. cat ne, Le à 0 als, sr i à BIBLIOGRAPHIE. les lecteurs par les notions nouvelles qu'il renferme, ainsi que par la lucidité avec laquelle il est développé. On sait quel rôle important jouent les éléments miné- raux qui forment les cendres des végétaux; aussi M. Dehérain a-t-il consacré trois chapitres à l'étude de leur rôle dans la nutrition végétale et des conditions de leur assimilation par les plantes, en y joignant les méthodes d'analyses employées pour leur détermina- tion, Cest là la partie de la physiologie végétale qui touche de plus près à l’agronomie, puisque la connais- sance de la nutrition des plantes sert de base al’ emploi des engrais. Dans un chapitre très complet sur les principes im- médiats contenus dans les végétaux, M. Dehérain énu- mère et étudie les diverses substances élaborées par les cellules végétales ; ces principes immédiats, formés principalement dans les feuilles, se concentrent dans les graines et dans le bois pour être ensuite utilisées à la producti on d'organes nouveaux, au commencementde la bonne saison. L'accroissement et la maturation sont intimement liés à ces migrations, dont le facteur le plus important est le mouvement de l’eau dans la plante. L'étude de la terre arable, au point de vue deses pro- priétés physiques, de sa constitution chimique, de ses facultés absorbantes, forme une partie importante de cet ouvrage. M. Dehérain insiste surtout sur les micro-or- ganismes du sol ; ceux-ci, on le sait, jouent un rôle d’une grande importance, surtout en ce qui concerne les modifications des matières azotées. Si, d’un côté, on a puconstater la présence des ferments qui tendent à la transformation générale des matières azotées en nitrates, de l’autre, M. Dehérain a démontré l’exis- tence des agents dénitriticateurs, dont le rôle est inverse. Les travaux de M. Berthelot, relatifs à l’inter- vention des êtres vivants dans la fixation de l’azote libre par le sol, sont exposés avec beaucoup de clarté. Le sol étant la malière première sur laquelle doit s'exercer l’action du cultivateur, on ne saurait trop insister sur les faits relatifs à sa composition , aux phénomènes dont il est lesiège, aux gains et aux déper- ditions de principes fertilisants qui s’y produisent par l'intervention de l’homme ou sous l'influence des phé- nomènes naturels. La troisième partie de cet ouvrage est consacrée aux amendements et aux engrais et, sous ce titre, M. Dehé- rain ne comprend pas seulementles diverses substances d’origine minérale ou organique qu'on ajoute au sol pour en accroître la fertilité, mais encore les pratiques usitées pour améliorer le sol et augmenter les récoltes; la jachère, l’écobuage, les irrigations, auxquelles de vastes régions doivent une fertilité exceptionnelle, sont décrites avec un soin minutieux. L'étude des divers engrais et amendements, engrais verts, engrais ani- maux, malières excrémentielles, fumier de ferme, est du plus grand intérêt, M. Dehérain expose, plus complètement qu'on ne Pavait fait jusqu'à présent, la série de fermentations et de réactions qui amènent les pailles à l’élat de matières ulmiques. IL montre que l'emploi judicieux des engrais conduit à la prospérité des entreprises agricoles, tandis que, appliqués sans discernement, ils donnent des résultats désastreux. Il est important de savoir à quels sols, à quelles récoltes il faut appliquer ces engrais ef de connaître les méthodes simples permettant de calculer les doses qu'il convient de répandre pour assurer leur efficacité, Ces divers questions, d'une si haute importance pour la pratique agricole, sont traitées avec toute la compé- tence qu'on devait attendre du savant professeur, L'important Traité de chimie agricole que vient de nous donner M. Dehérain et qui est édité par M. Masson rendra de grands services, non seulement aux agricul- teurs intelligents qui y trouveront un guide sùr pour l'application des méthodes les plus rationnelles desti- nées à augmenter les récoltes, mais encore aux cher- cheurs qui veulent entreprendre des travaux dans cette voie féconde et qui trouveront dans cet ouvrage l’en- semble des connaissances que nous possédons aujour- — ANALYSES ET INDEX 383 d’hui sur les conditions du développement des végé- taux. Un ouvrage de cette nature faisait défaut ; en publiant son traité de chimie agricole, M, Dehérain ‘a acquis un nouveau titre à la reconnaissance de ceux qui s’intéres- sent à la prospérité agricole. À. Munrz. 3° Sciences naturelles. Viala (P.) et Ravaz (L.). — Les vignes améri- caines ; Adaptation, Culture ,Greffage, Pépinières Un vol in-8° 320 pages, 53 fig. (prix: 4 francs) Coulet Montpellier, Masson Paris 1892, Ce livre est rédigé dans un but essentiellement pra- tique; les auteurs y ont résumé la ‘question si impor- tante de la culture des vignes américaines et les résul- tats de leurs recherches et de leurs observations per- sonnelles. Son titre indique les quatre grandes divi- sions du sujet; les trois dernières sont tout à fait techniques, elles s'adressent aux viticulteurs et se- raient difficiles à résumer ici, La première, l’adapta- tion, a un caractère plus général, un intérêt plein d'actualité ; les auteurs l'ont traitée avec une grande compétence ; ils ont exposé l’état actuel de cette ques- tion complexe et ont montré les progrès qu’elle à réa- lisés dans ces dernières années. Avant l'invasion du Phylloxéra, on cultivait en France une seule espèce de vigne, le Vitis vinifera, dont les variétés ou cépages sont extrèmement nombreux, et qu’une longue expérience avait appris à choisir sui- vant les terrains et le climat. Lo orsque nos vignes fran- caises furent attaquées et détruites par le Phylloxéra, on chercha à les remplacer par des vignes américaines, car on savait que celles-ci sont beaucoup plus résis- tantes à l’action du parasite; suivant leurs qualités connues ou supposées, on voulut en faire soit des pro- ducteurs directs, soit des porte-greffes de vignes fran- caises. Mais les cépages américains appartiennent à plusieurs espèces non seulement différentes du Vitis vinifera, mais encore très différentes entre elles ; elles présentent en outre des variétés et des hybrides en grand nombre, La maladie envahissait les vignobles, le temps pressait, etles cépages nouvellement importés furent plantés au début un peu au hasard, avant que l’on sût si les conditions nouvelles auxquelles on les soumettait leur conviendraient. Aussi eut-on d’abord desinsuccès aussi désastreux que retentissants ;on com- prit alors qu'il était nécessaire, avant d’ entreprendre la reconstitution des vignobles, d'étudier chaque cépage américain, de connaître ses qualités et ses défauts, ‘et surtout ses facultés d'adaptation aux différents ter- rains. Beaucoup de ces insuccès furent attribués à une résistance insuflisante au Phylloxéra, les cépages soupconnés de faiblir devant la maladie furent éli- minés. On saitaujourd’hui que, dans beaucoup de cas, la résistance au parasite est primée par une bonne adaptation au sol; que la vigne la plus vigoureuse et la plus rustique n’est pas la meilleure pour tous les sols ; que le Vitis Berlandieri, par exemple, qui est le meilleur porte-greffe pour les terrains très cale aires, se développe cependant mieux dans d’autres terrains où il se montre toutefois inférieur à d’autres cépages. De plus, les belles études de M. Millardet sur les hybrides ont montré dans quel sens on devait agir pour com- biner les qualités des différents cépages avec la résis- tance au Phylloxéra. Enfin, des maladies organiques, comme la Chlorose, ou parasitaires, comme le Mildiou, le Pourridié, l'An- thracnose, etc. roue aux différents cépages avec une vigueur inégale ; la résistance à ces maladies est un facteur important à considérer dans le choix des variétés de vigne. Toutes ces questions, d’une actua- lité malheureusement trop grande, sont traitées avec détail et étudiés méthodiquement dans le livre de MM. Viala et Ravaz, qui devient ainsi un guide indis- pensable à consulter pour la reconstitution et l’entre- tien d'un vignoble. C. SAUVAGEAU, 384 Roché (D' Georges), — Des procédés d'étude employés par les missions d'exploration sous- océanique et de la technique des pêcheries marines représentées à l'Exposition universelle de 1889. Revue technique de l'Exposition universelle de 1889, 1892, Voici un travail que consulteront avec fruit arma- teurs, techniciens et naturalistes, tous ceux qu’inté- ressent les explorations sous-océaniques et les condi- tions biologiques dans lesquelles se trouvent placés les habitants des mers. D'une lecture facile, et, quand il convient, fort attrayante, il renferme l'exposé précis des perfectionnements apportés de nos jours aux pro- cédés de recherches océanographiques, résume avec clarté le côté scientifique de la question des pêcheries et, abordant un terrain plus pratique, établit dans un parallèle instructif les progrès que doit encore réaliser notre marine pour tirer de la mer les mêmes profits que l'Etranger. Le travail est divisé en trois parties : la première est consacrée à l'outillage de nos missions francaises, la seconde au matériel mis en œuvre dans ses recherches scientifiques par le Prince Albert de Monaco, la troi- sième aux procédés employés par les pêcheurs dont les engins et les produits étaient représentés au Champ- de-Mars il y a deux ans. S’'adressant surtout au public spécial des techniciens, l’auteur a cru devoir tracer une esquisse de nos connais- sances les plus récentes sur la vie dans les abîmes et à la surface des eaux. Nous le félicitons doublement; sans perdre un instant la rigueur qui convient à une œuvre scientifique, l’esquisse renferme des pages char- mantes, surtout quand elle relève les beautés et la poésie du monde de la mer. Les naturalistes sau- ront gré aux techniciens de leur avoir valu cette au- baine ! Après avoir exposé, en traits généraux, l'historique des missions françaises, l’auteur entreprend la descrip- tion des instruments de sondage, de dragage, d’océa- nographie qu'elles ont employés, et il compare ce matériel à celui mis en œuvre par les missions étran- gères : sondeurs, dragues, bouteilles à eau, thermo- mètres, ete. Au lieu d'entrer dans le détail des résultats, peu en rapport avec le caractère de la Revue technique, que nous ont fourni le Travailleur et le Talisman, il s’est efforcé de faire ressortir l'importance de ces re- cherches, au point de vue philosophique comme au point de vue pratique. Le prince A. de Monaco ayant installé au Champ- de-Mars une exposilion spéciale des produits des re- cherches de l’Hirondelle, ainsi que des instruments employés, M. Georges Roché a consacré une étude particulière à ces derniers et les a comparés à ceux employés avant et depuis dans les récherches de même nature, Enfin, il à abordé lexposé général des pêcheries francaises, résumé nos connaissances sur la pêche du hareng, de la morue, de la sardine et insisté sur l’ab- solue nécessité où nous sommes d'étudier scientifi- quement les conditions physiques et organiques de la vie des poissons comestibles, Il à rappelé notamment les beaux résultats acquis déjà dans cette voie par le savant directeur de la station aquicole de Boulogne, M. Sauvage. À L'auteur ayant élé chargé d’une mission scientifique dans le golfe de Gascogne à pu étudier de près les pêcheries d'Arcachon, qui passent pour les mieux installées de France : les lignes qu'il a consacrées à ces pêcheries et au chalutage à vapeur, dans le golfe de Gascogne, en comparant cette industrie aux industries similaires de l'Etranger, sont intéressantes et particu- lièrement instructives. Elles donnent au travail que nous analysons un cachet d'originalité qui s'ajoute aux qualités nombreuses que les lecteurs sauront lui reconnaitre. De nombreuses données fechniques, pour la plu- BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX part bien exécutées, des cartes, des reproductions ori- ginales de photographies sont réunies en grand nombre dans l’ouvrage ; la typographie ne laisse rien à désirer, E.-L. Bouvier, 4° Sciences médicales. Lannelongue et Achard,-— Sur la présence du Staphylococcus citreus dans un ancien foyer d'ostéomyélite ; Arch. de médec. expérim., Paris 1892, t. IV, p. 127. MM. Lannelongue et Achard, continuant leurs inté- ressantes recherches sur la bactériologie des ostéo- myélites, ont trouvé chez une fillette de 9 ans, atteinte d’ostéomyélite du radius, le Staphylococcus citreus à l’état pur; c’est la première fois qu'ils en constatent la présence. Dans 28 cas, ils s'étaient trouvés en présence du Staphylococcus aureus, dans sept de l’albus, dans un de l'aureus et de l'albus à la fois, dans quatre de strepto- coques, dans deux de pneumocoques. D:' Henri HAarTMANx. Eomec (Th.). — Contribution à l'étude de la mor- phologie de l'Actimomyces (Arch. de méd. expérim., Paris 1892, €. IV, p.104). L'aspect ‘extérieur des cultures de PActimomyces notamment sur certains milieux, tels que lapomme de terre, le pain, l’orge, rappelle d’une manière frap- pante l’aspect d’une moississure, Le fait que ce végétal se cultive sur des milieux assez fortement acides ainsi que sur les milieux fortement sucrés est un autre caractère qui le différencie de la plupart des bactéries. Enfin la structure du thalle, si richement ramifié, le mode de formation et le mode de germination des spores permeltentd'aflirmer que l’Actimomyces doit être retiré définitivement de la classe des bactéries et placé parmi les mucédinées. D' HENRI HARTMANN. Hbixon (Pr.). —Tuberculosis. Trois extraits du Medical and Surgical Reporter of Philadelphia. Bacteriological Laboratory. Academy of Natural Science, opuscule in-12 de 30 pages. Philadelphie, 1892. Ce petit opuscule, édilé sous les auspices du labora- toire de bactériologie de l'Académie des sciences natu- relles de Philadelphie, a pour objet d'établir la priorité du Professeur Dixon au sujet de la découverte d’une substance curatrice produite par le bacille de la tuber- culose, Les questions de priorité sont {oujours d’un faible intérêt pour le public savant; il est néanmoins curieux d'exposer la défense de Dixon contre Koch. Le 19 octobre 1889, Dixon signale, dans le Médical News de Philadelphie, lexistence de formes nouvelles du bacille de Koch et il émet cette hypothèse que ces for- mes anormales pourraient être ulilisées pour atténuer la virulence du bacille normal. La communication, {rès obseure d’ailleurs, de Koch au Congrès do Berlin, est du 4 août 4890 ; sa première inoculalion sur l’homme, du 22 septembre de la même année ; mais l'origine de la Kochine reste mystérieuse. Le 18 novembre, Dixon, de- vant l’Académie des sciences naturelles, émet encore cette idée que dans les cultures il peut exister un pro- duit du bacille qui combattrait la tuberculose dans l'animal vivant, soit en stimulant les cellules, soit en déterminant dans les tissus des réactions chimiques. Les cobayes traités par des cultures maintenues pen- dant longtemps à des températures diverses, après avoir été malades, paraissent résister aux injections des cul- tures virulentes, et des expériences faites sur les ani- maux tuberculeux ont donné des résultats satisfaisants. Et c'est le 45 janvier 1891 seulement que Koch annon- cait le procédé employé par lui, et qui consistait essen- üiellement dans l'emploi de cultures pures de bacilles stérilisées par des températures prolongées. LA0; ACADEMIES ET SOCIETÉS SAVANTES 385 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 9 mui 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Hadamard : Sur les fonctions entières de la forme e6@, — M.G. D. d’Arone: Un théorème sur les fonctions harmoniques, — M. Mouchez expose brièvement les méthodes du ser- vice de spectroscopie installé depuis deux ans à l'Obser- vatoire de Paris et placé sous la direction de M. Des- landres, ainsi que les résullats déjà obtenus, tant pour l’étude du soleil que pour celle des étoiles, Les protu- bérances avaient élé jusqu'ici étudiées par l'observation oculaire avec leur radiation rouge du à l'hydrogène, mais M. Deslandres a reconnu que les radiations H etK du calcium dans ces protubérances sont au moins aussi intenses que celles de l'hydrogène, elles sont violettes et se prêtent aisément à un relevé photogra- phique supérieur au relevé fait jusqu'ici par l’obser- vation oculaire, M. Mouchez présente quelques-unes des épreuves oblenues. 20 ScrENCEs PuysiQues. — M, C. Limb indique une méthode pour déterminer le moment des couples de torsion d’une suspension unililaire ; le procédé le plus simple consiste à suspendre au fil une masse de mo- ment d'inertie connu et à mesurer la durée de l'oscil- lation; on réalise les meilleures conditions en sus- pendant au fil suivant son axe un cylindre de métal bien homogène, M. Limb indique les précautions à prendre dans la confection et l'installation de ces cylindres, — Depuis que l’on sait avec quelle rapidité s’amortissent les oscillations hertziennes, la théorie proposée par Hertz pourla propagation de ces oscilla- tions le long d’un fil n’est plus suffisante ; M. H. Poin- caré propose, pour la remplacer, une théorie plus approchée, obtenue par une application de la méthode qu'il a exposée dans une communication récente, — M. E. Fleurent indique quelques composés nouveaux qu’il a obtenus par la réaction du cyanure de polas- sium sur le chlorure de cuivre ammoniacal ; il a per- fectionnéle procédé classique du dosage descyanogènes, — M. de Forcrand à déterminé la chaleur de forma- tion du triméthylcarbinol sodé solide pour obtenir la valeur de la fonction alcool tertiaire: il a obtenu 27 cal. 89: si l’on compare avec les valeurs trouvées par lui pour les fonctions alcool primaire et alcool secondaire, on a respectivement 32 Cal, 00, 29 Cal. 75 et 27 Cal. 89, soit en chiffre rond une diminution de 2 Calories lorsqu'on passe d'un alcool à un autre, — M. G. Hinrichs traite, d’après les principes exposés par lui dans ses communications précédentes, de l’éla- blissement des formules fondamentales pour le calcul des moments d'inertie maximum: il cherche d’abord l'expression générale de ce moment pour la série des paraffines, — M. L. Maquenne à entrepris de fixer la constitution du carbure en C'H!? désigné jusqu'ici sous le nom d'heptine; M. Renard l'avait considéré sans preuve suffisante comme un tétrahydrure de toluène. M. Maquenne a cherché deséclaircissements dans l'étude des divers hydrocarbures CTH'# qu'il avait obtenus; ce composé a conservé :e noyau particulier de l'hepline, comme le montrent diverses réactions caractéristiques. Or, il se comporte en tout comme un carbure saturé; de plus, ses constantes physiques permettent de l'identifier à l’héxahydrure de toluène de MM. Wreden et Lossen. — M. M. Meslans décrit les propriétés chimiques du fluorure d’acétyle, dont il avait annoncé la découverte dans une communication récente ; il indique la mé- thode suivant laquelle il à analysé ce composé, — M. H. Causse, en faisant réagir du chlorure neutre d'antimoine sur la pyrocatéchine au sein d'une solution saturée de sel marin, a obtenu une combinaison cris- tallisée C6HSOSSb, qu'il détermine comme un antimonite acide de pyrocatéchine. La réaction indiquée n’a lieu qu'avec les phénols ayant deux OH en position ortho. — MM. A. Behal et A. Desgrez ont fait réagir l’acide acétique sur divers carbures acétyléniques en tubes scellés à haute température; ils ont reconnu qu’il se forme des combinaisons instables, qui, sous l'influence de l'eau, se transforment en acétones, 3° SGIENCES NATURELI MM. A. Gautier et L, Landi ont cherché à savoir ce qui se passe au point de vue chimique dans un fragment de muscle frais que l’on abandonne pendant longtemps, à l’abri des mi- crobes, soit à la température ordinaire, soit à la tem- pérature d’une étuve. Leurs expériences ont porté sur des lanieres de viande de bœuf, d'abord congelée, sté- rilisée à la surface par l'acide cyanhydrique étendu et réparties en trois lots : le premier fut analysé immédia- tement ; le second passa 24 jours à la température ordinaire et 11 jours à l’étuve; le troisième resla 93 jours à la température ordinaire ; ceux-ci laissèrent écouler une liqueur rougeàtre épaisse, qui n'offrit, à l'ouverture des récipients, aucune odeur de putréfac- tion ; les essais de culture furent tous négatifs. Les di- vers éléments furent dosés comparativement dans les trois lots, et les résullats sont donnés sous forme de tableau, — M. G. Pouchet signale, d’après un passage d’Arrien, que Néarque a observé une Megaptera boops dans le golfe Persique; la description offre des détails caractéristiques. M. Pouchet avait signalé l’échoue- ment d’une mégaptère à peu près au même endroit en 1883, et il avait cru que c'était le premier fait relatif à la présence d’un de ces animaux dans les merschaudes. — On sait que dans la pomme de terre, les bourgeons voisins du sommet des tubercules s’accroissent davan- tage, se développent plus tôt et plus rapidement que les baurgeons voisins de la base; M. A. Brunet à recherché si ce fait élait en relation avec une réparti- tion particulière des divers matériaux nutritifs du tu- bereule, et il a reconnu qu’en effet l’azote albumi- noïde et autre, les hydrates de carbone et les sels mi- néraux sont plus abondants dans la partie antérieure du tubercule ; cette différenciation n'existe pas dans les tubercules jeunes n'ayant pas encore terminé leur croissance ; elle s'exagère au début de la germination, et inversement elle change de sens lorsqu'on supprime les bourgeons antérieurs, La répartilion des principes immédiats et des substances minérales est donc dans une relation étroite avec le développement des bour- geons. — M. A. E. Noguës à reconnu dans la Cordil- lère de Chillan (Chili), où l'on trouve des volcans en- tourés de glaciers, deux espèces de moraines : les unes récentes, comprenant des débris volcaniques, d'autres anciennes, supjosant un système montagneux très dif- férent, et ne comprenant jamais de ces débris ; il en conelut qu'il existait dans celte région des glaciers tertiaires antérieurs à l'apparilion des volcans, — M. L. Vaillant, ayant examiné avec soin les exem- plaires du poisson permien que M. Gaudry a décrit sous le nom de Megapleuron Rochei, a retrouvé des écailles très semblables à celles des Ceratodus acluels ; il ne pense donc pas que la distinction faite entre ce genre fossile et le Ceratodus, distinction qui reposait uni- quement sur les caractères des écailles, doive ètre maintenue, — M. P. Fliche décrit une feuille de Dicolylédone qui a été recueillie dans la Gaize, aux environs de Sainte-Menehould; c'est une Laurinée, pour laquelle il propose le nom de Laurus Colleti: 3, 386 c’est la plus ancienne dicotylédone signalée jusqu'ici. Mémoires présentés. — M. Lavocat adresse une note ayant pour titre : Considérations sur l'origine des es- pèces. Séance du 16 mai 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Schlesinger : Sur la théorie des fonctions fuchsiennes, — M. A. De- moulin : Sur les relations qui existent entre les élé- ments infinitésimaux de deux surfaces polaires réci- proques. — M. P. Painlevé : Sur les transformations en mécanique. — MM. Codde, Guérin, Nègre, Zielke, Valette et Léotard : Observations de l'éclipse par- tielle de lune des 11, 12 mai 1892. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. E.-H. Amagat a fait de nouvelles recherches sur la densité de l'acide car- boniqueliquéfié et sa vapeur saturée à diverses tempé- ratures ; il a effectué des déterminations au moyen d’une méthode nouvelle; il laisse au contact quelque temps le liquide et la vapeur, l’un et l'autre en quan- tités suffisantes, fait la lecture des deux volumes, puis il pousse la liquéfaction de manière à doubler ou tri- pler le volume des liquides et fait une nouvelle lec- ture ; les densités respectives sont liées aux variations de Faire par une relation simple. M. Amagat signale quelques phénomènes curieux qui s S'observent dans le ménisque au voisinage du point critique : ces phéno- mènes troublant la régularité des déterminations, on doit s'arrêter à quelque distance du point critique. Mais, si l’on exprime graphiquement les résultats ob- tenus jusqu’au voisinage de ce point, on a des courbes, pour la densité du liquide et celle de la vapeur, qui tendent nettement à se rejoindre. En opérant graphi- quement le raccordement, on obtient avec une assez grande précision les éléments du point critique. Pour l'acide carbonique, M. Amagat obtient ainsi T = 31925, H—72,9, D — 0,464. Ces valeurs sont un peu plus faibles que celles déduites par M. Sarrau des expé- riences antérieures de M. Amagat; celui-ci estime que les valeurs données par la série de détermination ac- tuelle offrent de meilleures garanties de précision, — M. P. Schützenberger, en aisant réagir l’oxyde de carbone sur le silicium dans des conditions particu- lières, dans un creuset de charbon de cornue entourée d’une double brasque de noir de fumée et chauffé seu- lement au rouge vif, a obtenu des composés carbosili- ciques différents de ceux obtenus par lui antérieure- ment avec M, Colson; le produit principal de la réac- tion est le composé SiC, qui est extrêmement stable, — M. G. Hinrichs détermine par le calcul, en s'appuyant sur les considérations de mécanique fhéorique expo- sées par lui antérieurement, le point d’ébullition des composés à substitution terminale simple. — M.J. M. Crafts décrit une nouvelle méthode de séparation des xylènes par sulfonation, qui donne le métaxylène très pur presque quantitativement; on obtient aussi le pa. raxylène pur, mais on ne peut pas le séparer complè- tement de l’ortho. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Etard expose une méthode de séparation des principes immédiats végé- taux, qui donne rapidement une répartition de ces principes en groupes de fonctions définies. Le traite- ment par le sulfure de carbone avant tout autre est la base de cette méthode, les extraits alcooliques des plantes entières étant trop complexes pour être dé- brouillés, — M. Etard a obtenu souvent au cours de ses recherches des corps cristallisés verts pouvant être identifiés avec certitude à la chlorophyllane d’Hoppe- Seyler ; il s’agit en réalité de corps blancs, carbures ou alcools solides, teintés par de la chlorophylle qui les imprègne fortement, mais dont ils peuvent être débarrassés par le noir animal. — M. J. Raulin a fait des cultures comparatives de pommes de terre dans des terres tourbeuse, calcaire, argileuse, soit isolées, soit mélangées en proportions données et additionnées ou non d'engrais chimiques, L'influence favorable de la complexité du sol s’accuse nettement dans les résul- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tats :; l'auteur indique provisoirement la composition la plus favorable, — M. J.-A. Battandier a trouvé de la fumarine dans une Papavéracée, le Glaucium corni- culatum. I insiste à ce propos sur le caractère spéci- fique des alcaloïdes végétaux, qui sont très générale- ment confinés dans un seul genre ; aussi, le ait qu’il signale lui paraît plaider pour la réunion des Papavé- racées aux Fumariacées, — M, W. Nicati propose de définir l’acuité visuelle, non plus comme on le fait, à la suite de Snellen, par l'inverse de l’angle visuel limite, mais par le log garithme de cet angle, l’acuité 1 correspondant à un angle de l'et l’acuité 0,1 à un angle de 10°. De plus, l’acuité visuelle étant fonction de éclairage dans chaque cas donné, cette fonction doit ég ralement être donnée par la loi de Fechner ; M. Nic ati a constaté en effet que l'acuité visuelle aug- mente ou diminue suivant la progression arithmétique de raison 0,1, alors que l'éclairage augmente ou dre nue suivant la progression éométrique de raison 2. Il propose comme unité d'éclairage la lumière qui, placée à 4 mètre du test-objet permet juste à un œil normal l’acuité 1; pratiquement, cette unité qu'il appelle le photo est donnée sensiblement par la lampe Carcel. M. Nicati a enfin cherché à déterminer la plus petite quantité de lumière perceptible. terminé, suivant la méthode antérieurement décrite par lui, les plus petites quantités de divers alcools de la série grasse perceptibles pour l'odorat; pour la série des alcools primaires, la puissance odorante croît très rapidement à mesure qu'on s'élève dans la série; il n'y à pas de relation fixe entre les puissances odo- rantes Fe isomères, — M. F. Hous3ay expose les conclusions générales qui résultent de ses études sur la formation du système circulatoire de laxolotl rela- tivement à la théorie des feuillets, principalement à l’origine et à la valeur du mésoblaste, ainsi qu'à la métamérie, — M. P. Hallez : Sur l’origine vraisem- blablement tératologique de deux espèces s de Triclades. — M. F. Delisle décrit quelques anomalies muscu- laires qu'il a observées sur un des Caraïbes morts à Paris, — M. A. Binet résume ses recherches sur les racines du nerfalairechez les Coléoptères.Il areconnu, en étudiant sur des coupes la structure interne des glanglions thoraciques qui donnent naissance aux nerfs des ailes, que ces nerfs se divisent dans l’intérieur des ganglions en deux racines, lune ventrale, l’autre dor- sale, Chez les Coléoptères qui ont des élytres immo- biles (Coléoptères aptésiques), la racine dorsale dis- paraît. Cette observation anatomique confirme les recherches physiologiques de Favre, et permet d’affir- mer la différenciation de la chaîne ganglionnaire dans le sens dorso-ventralenune moitié sensitive etune moitié motrice, — M, L. Boutan a repris l’étude du système nerveux de la Nerita polita;il a reconnu, contrairement à l’opinion de M. Bouvier, que ce système est bien chiastoneure comme dans tout le groupe des aspido- branches, mais l’une des commissures croisées est ex- trèmement grêle, évidemment en voie de régression, et le type tend ainsi vers une fausse orthoneurie ; ‘on trouve le même fait chez la Navicella, — M. J. Chatin a étudié l’évolution de l’épiderme chez les larves de Libellule ; en employant de forts grossissements, il à pu reconnaître que les cellules épidermiques produi- sent le revêtement chilineux, non par voie de sécrétion, mais par une transformation de leur protoplasma en strates chitinifiés. — M. J. Bleicher a examiné au microscope, sur des coupes et sur des préparations traitées par les acides, les oolithes du Bathonien et du Bajocien de Lorraine; il a reconnu qu’autour d’un noyau central formé d’un débris quelconque se trouve un feutrage de tubes ou de cylindres, certains d’entre eux régulièrement cloisonnés comme des filaments d'algues M. Bleicher admet qu'il s’agit là d'organismes encore indéterminés., — M. J. Thoulet signale, à l'appui de son assertion sur l’immobilité des eaux océaniques profondes, un fragment dragué par le Challenger a plus de 4 .000 mètres de profondeur dans ACADÉMIES ET SOCIÊTÉS SAVANTES 387 le Pacifique ; on y reconnait une couche de cendres volcaniques où les matériaux sont rangés régulière- ment par ordre de grosseur décroissante de bas en haut. Nominations. — M. Guyon est élu membre pour la section de médecine et de chirurgie. Mémoires présentés. — M. J. Buffard adresse un nou- vel appareil pour l'essai des alcools, auquel il donne le nom de « Microalcoomètre », — M. A. Coret : Mémoire descriptif d’un instrument appelé héliorascope, pouvant l'heure moyenne et l'heure L. LapicQuE. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 10 mai, Suile de la discussion sur le traitement de la pleu- résie, à laquelle prennent part MM. Hardy, Dujardin- Beaumetz, Dieulafoy et G. Sée. , indiquer l'heure vraie, légale. Séance du 17 mai. L'Académie procède à l'élection de deux correspon- dants nationaux dans la deuxième division (chirurgie) : MM. Demons (Bordeaux) et Dubar (Lille) sont élus. — M. Ch. Perier : Rapport sur un mémoire de M. Paul Berger concernant un cas de cure radicale d’un sprint bifida chez une petite fille de sept semaines, guéri par la transplantation d’un fragment osseux empr unté à un lapin. — Suite de la discussion sur le traitement de la pleurésie : MM. Cadet de Gassicourt, Laborde, Potain. SOCIETE DE BIOLOGIE 30 avril M. Ch. Feré avait signalé antérieurement un cas de zona de Ja face, dans lequel des hallucinations vi- suelles unilatérales ont coincidé avec les douleurs ocu- laires et périorbitaires ; dans un autre cas, il a vu des hallucinations auditives se produire du côté envahi par le zona en même temps qu'une salivation exa- gérée de ce côté. IL faut noter que les deux malades sont des épileptiques. — MM. A. Giardet J. Bouvier: Sur le Cerataspis Petiti (Guérin) et sur les Pénéides du genre Cerataspis (Gray) Cryplopus (Latreille). — M. H. Viallanes expose les résultats de ses recherches comparatives sur l’organisation du cerveau dans les principaux groupes d’arthropodes. — M. A. Binet a étudié le nerf du balancier chez quelques diptères pour le comparer au nerf de l'aile chez les mêmes in- sectes ; il a reconnu que ce nerf n’est en relation avec le ganglion correspondant que par un petit nombre de ses fibres, la plus grosse partie de celles-ci se rendant directement aux ganglions céphaliques. Ce fait con- firme l'hypothèse que le balancier est un organe de Séance du sensibilité spéciale. — M. B. Segall: Sur des anneaux intercalaires des tubes nerveux produits par impré- gnation d'argent, — A propos d’une note d’un natura- liste suisse s’étonnant d’avoir trouvé un Némertien dans le lac de Genève, M. J. de Guerne montre qu'on a observé depuis 1828 un assez grand nombre de Némertiens d’eau douce. Il examine la facon dont quelques espèces de ce groupe essentiellement marin ont pu s’habituer aux eaux douces, Séance du T mai M. Solles : Sur une nouvelle méthode de coloration générale pour la recherche des micro-organismes. — M. Bédart : Ectrodactylie quadruple des pieds et des mains se transmettant pendant quatre générations. — M. P. Richer indique les services que peut rendre à la physiologie musculaire, l'inspection méthodique du nu, qui permet d'affirmer l’état de relâchement ou de contraction d’un muscle donné; il étudie, à titre d'exemples, la station debout, la pronation, etc. — M. Bose donne le résultat de ses recherches sur la modification de la sécrétion urinaire par l'attaque hystérique ; il conclut, comme M, Gilles de la Tourette le disait récemment, qu'il y a un ensemble de modifica- tions de l'urine qui est caractéristique. — A propos de la note de M. Olivier sur le dosage comparatif de deux espèces de phosphates dans l'urine, M. Mairet présente la défense du procédé classique; comme preuve, il rapporte des expériences dans lesquelles ce procédé a donné des chiffres constants tant que le régime res- tait constant et dans lesquelles se traduisaient les variations du régime. — M. Brumauld de Montgazon présente une iconographie des Protistes (Hæckel) dans laquelle il a reproduit les figures importantes pour l’histoire de ce groupe qui é laient disséminées dans les recueils spéciaux. — M. H. Vaquez présente un malade qui est atteint de cyanose avec hyperglobulie considérable et persistante, sans que l’on sache à quelie cause rattacher ces troubles. — MM. Abelous et P. Langlois ont continué leurs recherches sur la fonc- tion des capsules surrénales; ils présentent les faits nouveaux qu'ils ont obtenus sur le cobaye relativement à la destruction graduée de ces organes. IL ont vu que l'injection d'extrait aqueux des capsules prolonge la survie des animaux décapsulés. — M. Tuffier, a eu l’occasion d’observer un cas de suppuration périrénle consécutive à une bronc ice -pneumonie. L’examen bac- tériologique a montré dans cet abcès périnéphrétique le pneumocoque pur. La propagation de l'infection se fait par une voie de communication préexistante, un hiatus du diaphragme au niveau de l’arcade du psoas en ce point la plèvre esten communication directe avec l’atmosphère celluleuse du rein (Tuffier et Lejars).] — M. Azoulay présente des tracés] sphygmographiques qui montrent que tous les caractères du pouls s’exa- sèrent lorsqu'on dispose le sujetsur le dos, les membres relevés. — M. E. Gérard rapporte un cas dans lequel l’albumine des urines d’un brightique soumis au régime lacté disparut pour faire place à des propeptones. — M. J. Gaube décrit une albuminurie carbonatée analogue à l’albuminurie phosphatée qu'il a décrite antérieure- ment. — M. Charrin présente des anguilles chez les- quelles est apparu du purpura à la suite d’inoculations pyocyaniques ; ce fait complète la série des hémorragies qu’il a obtenues avec ce virus, dont elles constituent une propriété caractéristique, subsistant dans toute l’échelle des Vertébrés. — M. Charrin présente encore des intestins de lapins ayant succombé à des injections intra-veineuses, les uns, de sublimé, les autres de toxines pyocyaniques; les uns et les autres ont subi des lésions semblables, consistant en hémorragies et ulcérations. — MM. A. Rodet et G. Roux ont repris la question de la fermentation des sucres par le bacille d'Eberth d’une part et celui d'Escherich de l’autre; avec la galactose, tous les phénomènes sont identiques pour les deux microbes, Avec la lactose, il est vrai qu’en général la fermentation très nette avec le B. Coli n’a pas lieu avec le bacille typhique, Mais les auteurs ont eu deux fois du B. Coli bien caractérisé qui ne faisait pas du tout fermenter la lactose; après quelques géné- rations, la propriété fermentative à réapparu. Il n'y a donc pas dans ce phénomène le caractère profondé- ment distinctif qu’on a voulu y voir, Séance du 14 mai. M. Dastre lit une notice sur la vie et les travaux de E. von Brücke. — M. Feré discute les conclusions de la note de M. Bosc sur la nutrition dans l’hystérie (séance précédente) ; il a vu des faits contradictoires avec ceux de M. Bosc ; il conclut en résumé qu’il n’y a pas de caractère distinctif absolu entre l’hystérie et l’épi- lepsie, — On a proposé les injections de -pilocarpine comme traitement de l’épilepsie : M. Feré a vu, au contraire, des attaques provoquées par ces injections. — M. Brown-Séquard expose des expériences confir- matives de celles de MM, Abelous et Langlois (séance précédente); sur des cobayes qui étaient sur le point de mourir à la suite de l’ablation des capsules surré- Rales, il a vu l'injection d’extrait aqueux de ces organes 388 ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ranimer les animaux et leur procurer une survie de plusieurs heures. — M. Grigoresceu a examiné deux sujets, un paraplégique et un ataxique, chez lesquels la vitesse de transmission nerveuse sensitive était ra- lentie ; les injections de liquide testiculaire ont ramené cette vitesse à la normale, — M. Gellé examine la valeur symptomatique des troubles que peut présenter le réflexe de l’accommodation binauriculaire décrit par lui. — M. Bédart étudie la théorie mécanique de l'é- lévation du corps sur la pointe des pieds; il appuie cette étude sur le fonctionnement d’un appareil sché- matique. — M. G. Pouchet : Note sur la Baleine ob- servée par Néarque (voir C. R., 9 mai). — MM, Pouchet et Biétrix signalent qu’ils ont en 1891, en avril, comme les deux années précédentes, observé quelques rares sardines avec des œufs mûrs. — M. Dastre signale le fait suivant : des sangs qui contiennent trop peu de fibrine pour coaguler spontanément donnent une petite quantité de fibrine par le battage. — M. Cornil a repris l'étude de l'anatomie fine du bulbe olfactif par la méthode de Golgi; il expose les résultats de ces recherches, L. Laricoue. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 20 mai Une couche d'air, comprise entre deux lames mé- talliques, devient conductrice, ainsi que l’a signalé Ed. Becquerel, lorsqu'on porte les deux lames à la température du rouge, M. Branly a repris l'étude de ce phénomène et en a découvert deux curieuses parti- cularilés : 14° pour que la couche gazeuse devienne conductrice, il suffit de porter au rouge une seule des lames, l’autre restant froide; 2 suivant le pôle auquel est reliée la lame chauffée, la conductibilité diffère considérablement, et pour une température assez basse, elle ne se produit plus que pour un pôle, elle devient unipolaire. Ainsi, lorsque la lame froide est en alu- minium et l’autre en platine, le courant passe beau- coup mieux si l'aluminium est négatif que s'il est po- sitif, M.Branly projette d'une facon très démonstrative ces délicates expériences. La plaque froide d’alumi- nium fait partie d’un électroscope à feuilles d’or et en remplace la boule. On la charge par l’un des pôles d'une pile d’un grand nombre d'éléments, (Dans la construction de l’électroscope, l’auteur trouve avanta- geux de laisser mobile une seule des feuilles, l’autre étant constituée par une lame fixe.) En regard de la plaque d'aluminium se trouve, au lieu d'une lame, une spirale de platine qu'on peut porter au rouge au moyen d'un courant électrique. On suit en projection la déper- dition entre l'aluminium et le platine. On voit ainsi que la perte est de beaucoup la plus lente avec l’élec- troscope chargé positivement. et en portant le platine à des températures de moins en moins élevées, on ar- rive à annuler la déperdition quand l'aluminium est positif, tandis qu'à la mème température, elle est en- core très notable pour l'aluminium négatif, L'auteur varie de diverses facons le dispositif de l'expérience, Au lieu de la spirale de platine, il fait arriver, par as- piration, les gaz chauds d’une flamme après leur pas- sage à travers un serpentin froid ; dans ce cas, la déperdition est indépendante de la nature de l'électri- cité. Ou bien il substitue à la spirale de platine une lame du même métal, chauffée en l’un de ses points, ou encore un bec de gaz dont la cheminée est en métal. Avec ce dernier dispositif, il a pu étudier commodé- ment un grand nombre de substances. Il a constaté ainsi que les résultats précédents sont parfois ren- versés, Tel est le cas du nickel, de l'aluminium, du bis- muth, du colcothar. M. Branly à encore étudié le phé- nomène dans le cas de hautes tensions. Au moyen d’un double micromètre à étincelles, il a mesuré les distances explosives équivalentes, d’une part, entre une boule et une plaque métallique froide, d’autre part, entre une boule semblable et la même plaque portée au rouge, — M, Amagat a délerminé à nouveau les constantes critiques de l'acide carbonique ainsi que sa densité à l’état liquide et à l’état de vapeur saturée, I opère dans l’éprouvette ordinaire de l'appareil Cail- letet, et au lieu de rechercher la position un peu incer- laine pour laquelle il y a saturation sans liquide en excès, il préfère effectuer les lectures en présence d'une certaine quantité de liquide, En opérant ainsi pour deux rapports différents de liquide et de vapeur, il obtient une première relation; le rapport entre les quantités dont ont varié le volume du liquide et celui de la vapeur est égal au rapport inverse des deux den- sités, De plus, une lecture en valeur absolue des vo- lumes respectifs du liquide et de la vapeur fournit une seconde relation, obtenue en exprimant que la somme des poids du liquide et de la vapeur est égale au poids total du gaz. M. Amagal à pu ainsi construire à nou- veau la courbe de MM. Cailletet et Mathias représen- tative des deux densités, et il a retrouvé la même formesune sorte de parabole, Sa méthode lui permet d'approcher un peu plus que ses devanciers de la tem- pérature critique ; il a opéré jusqu’au voisinage de 31°. Il a déduit de cette courbe les valeurs des éléments critiques: il trouve en particulier pour température cri- tique 31°,35 et pour pression critique 72%t2,9, nombre inférieur à toutes les valeurs obtenues jusqu'ici; il considère ce résultat comme dù à une plus grande pureté de l'acide carbonique. Au cours de ces expé- riences, il a observé une apparence intermédiaire nou- velle au momentde la disparition du niveau du liquide. La variation brusque d'indice entre le liquide et la va- peur, d’où semble résulter une différence d'épaisseur entre les parties correspondantes du tube de verre, fait place pendant quelques instants, avant l'apparition de la bande opaque ordinaire, à une variation progressive, de telle sorte que ces deux portions de tube, en appa- rence de diamètre différent, semblent se raccorder par une courbe continue, que l’auteur a pu photogra- phier, Puis, dans certains cas, au moment de la réap- parition du ménisque, il a observé, outre une ébulli- tion du liquide,une pluie de goultelettes. M. Amagat a construit ensuite la courbe de saturation ou courbe critique, limitalive des valeurs de p, v pour lesquelles il peut coexister du liquide et de la vapeur. Il a déter- miné expérimentalement quelques courbes, lieux des points pour lesquels le rapport entre les volumes du liquide et de la vapeur est constant, En particulier, la courbe correspondant au cas où ces deux volumes sont égaux est rigoureusement une droite, mais elle n’est pas exactement perpendiculaire à l’axe des v. La droite perpendiculaire est encore un de ces lieux, — M. Ra- veau signale à ce propos une curieuse propriété des courbes, lieux des points pour lesquels c’est non plus le rapport des volumes, mais celui des poids du liquide et de la vapeur qui reste constant. Un raisonnement très simple montre que ces courbes doivent présenter un minimum par rapport au volume, D'où il suit que, lorsque dans un tube de Natterer, le niveau s'élève en même temps que la température augmente, il n’en ré- sulte pas forcément que la proportion de liquide aug- mente. La diminution apparente du volume de la va- peur, bien que la masse en augmente, peut résulter simplement de son énorme compressibilité, — M. Léon Vidal, dans le dessein de se rendre compte de la va- leur pratique de la méthode, à repris les tentatives faites, il y à une quinzaine d'années, par Ch. Cros et Ducos du Hauron, pour obtenir en projection la photo- graphie des objets avec leurs couleurs, Cette méthode n'a pas la rigueurscientifique de celle de M. Lippmann; néanmoins le principe en est ingénieux, et de plus, avec les moyens actuels, elle permet d'obtenir de fort beaux résultats, ainsi qu'en témoignent les superbes projeelions faites sous les yeux de la Société, On part de ce fait, signalé pour la première fois par Brewster, qu'il est possible de choisir trois couleurs fondamen:- tales, dont l’ensemble donne du blanc, ef qui, mélangées deux à deux, reproduisent toutes les couleurs, Brewster avait fait un choix imparfait; le plus satisfaisant con- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 389 siste dans l'emploi du bleu, du vert cyané et du rouge orangé. Dès lors, en mettant à profit les substances actuellement employées pour l’orthochromatisme, on peut préparer trois couches dont chacune n’est sen- sible que pour une de ces trois couleurs. Au moyen de ces trois plaques, on fait trois poses identiques d’un ême objet, et on lire trois positifs transparents cor- respondants. On les projette sur un même écran, et on les amène à se superposer rigoureusement, IL suffit alors, dans la lanterne de projection, d’interposer de- vant chacun des trois positifs un verre coloré de la même teinte que celle pour laquelle le négatif corres- pondant a été sensibilisé pour qu'on obtienne dans la projection multiple la photographie de l’objet avec toutes ses couleurs. Edgard Haupié. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 18 mai M. Schlegel adresse un Mémoire sur une méthode pour représenter dans le plan lescubes magiques à n di- mensions., — M. Demoulin donne une solution com- plète du problème de la détermination des courbes dont les tangentes font partie d’un complexe tétraédral en ramenant ce problème, par une série de transfor- mations analytiques, à l'intégration de l'équation d'Euler dx? + dy? = ds?, dont on sait obtenir toutes les solutions sans avoir à effectuer aucune quadrature. Il signale, en outre, une détermination nouvelle des courbes dont les tangentes font partie d’un complexe linéaire, courbes dont M. Pi- card s’est occupé dans sa thèse. -— M. Raffy indique un moyen de former des classes étendues de surfaces dont on sache obtenir les lignes asymptotiques, — M. Lery fait une communication sur un problème d'analyse indéterminée du second degré. M. d'OcAGxe. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 28 avril 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — Lord Kelvin (Sir Wil- liam Thompson) établit d'une manière décisive que la doctrine de Maxwell et Boltzmann, relativement à la distribution de l'énergie cinétique, n’est pas exacte; on enseigne communément comme l’une des propositions fondamentales de la thermodynamique que la tempé- rature d'un solide ou d'un liquide est égale à son énergie cinétique moyenne par atome; or, c'est seule- ment dans le cas d'un gaz parfait, c’est-à-dire d’un as- semblage de molécules dans lequel chaque molécule se meut pendant des temps comparativement longs, suivant des lignes très approximativement droites et subit des changements de vitesse et de direction en des temps de chocs comparativement très courts, que la température est égale à l'énergie cinétique moyenne par molécule. — M. A. Macaulay : Sur la théorie mathématique de l’électro-magnétlisme. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. W. J. Dibdin : Sur la photométrie stellaire. On n'avait jusqu’à présent dé- terminé la luminosité des diverses éloiles que par rap- port les unes aux autres et sans jamais se rapporter à aucune unité terrestre connue. Les diverses méthodes qui ont été employées n'indiquent pas l'intensité réelle, L'auteur a entrepris ses recherches pour élucider la question, particulièrement en ce qui concerne les étoiles dont la couleur présente une difficulté ; il a préparé une séric-élalon d’éloiles arlificielles de cou- leurs variées et d'intensité connue. L'intensité est cal- culée d'après la bougie-étalon anglaise. Cette série va de l'intensité de {1 bougie à celle de 0,000018 bougie. Lorsqu'elle est placée à une certaine distance du té- lescope, elle peut servir de série-étalon pour faire des comparaisons. Le tableau suivant indique quelques-uns des résultats moyens de détermination de l'intensité d'une série d'étoiles en ordre d'éclat décroissant. Il indique en même temps leur grandeur respective et leurs intensités théoriques calculées, en supposant qu’une étoile de seconde grandeur a un éclat égal à celui de 0,00075 bougie, placée à une distance de 100 pieds; ce facteur est déduit de la moyenne de toutes les déterminations faites : POUVOIR POUVOIR ÉCLAIRANT ECLAIRANT ÉTOILES GRANDEUR[TROUVÉ. BOUGIE THÉORIQUE A 100 PrEps Vega... A RAIOYSE 0.0039 0,0041 Capellas-c-ccre 0,08 0,0017 0,0020 Aldébaran...... 1712 0,0015 0,0017 ET ReAtE 1519) 0,00085 0,00090 OATIS MARNE 2,05 0,00081 0,00072 y Ursac Minoris. 3,02 0,00029 0,00029 CE 5 3,87 0000013 0,000021 Les déterminations de la lumière de Jupiter assignent à cette planète une lumière égale à 0,020 bougie, placée à une distance de 109 pieds. La lumière totale des étoiles est évaluée égale à celle de 1,446 bougies pla- cées à une distance de 100 pieds. Si l’on tient compte que 1 seulement des étoiles peuvent éclairer une surface donnée au même moment, on verra que leur pouvoir éclairant est égal à celui d’une bougie-étalon placée à une distance de 210 pieds. — M, John Aitken : Sur quelques phénomènes relatifs à la condensation des nuages. Lorsqu'on électrise un jet de vapeur, la con- densation devient brusquement très dense, M. Aitken constate que les changements d'apparences du jet peu- vent être produits par quatre autres causes. Les cinq influences qui peuvent agir sont : {° l'électricité ; 2° une grande quantité de poussière dans l'air; 3° Ja basse température de l'air; 4° la haute pression de la vapeur; 5° les obstructions à l'entrée du tuyau et les tuyaux rugueux ou irréguliers. Il montre que l'accroissement de densité produit par l’électrisation est dû à un ac- croissement du nombre des particules aqueuses dans le jet, et non à un accroissement de la dimension des gouttes, Il à aussi étudié certains phénomènes de colo- ration qui ont été observés lorsque la condensation se produit dans les conditions indiquées ci-dessus, Ces expériences montrent que le nombre des particules de poussière qui deviennent des centres de condensation dépend de la rapidité avec laquelle la condensation se fait; les condensations lentes produisent peu de par- ticules aqueuses et un nuage peu dense, tandis que les condensalions rapides produisent un très grand nombre de particules aqueuses et un nuage épais. C'est seulement quand les particules de poussière sont en pelit nombre qu'elles deviennent toutes des centres actifs de condensation. 3° SCIENCES NATURELLES, — M. A. H. Church com- munique le résultat de ces recherches sur un pigment animal qui contient du cuivre, la {uracine, Ces recher- ches sont la suite de celles qui ont paru il y a 33 ans (Phil. Trans., vol. 159, p. 627, 636, 1869): M. Church a retrouvé d'une manière constante un pigment orga- nique défini contenant comme élément essentiel en- viron 9 °/, de cuivre chez 18 des 25 espèces connues de Musophagidæ. On retrouve la turacine chez toutes les espèces connues des trois genres Twracus, Gallirer et Musophaga, mais elle fait défaut dans toutes les es- pèces de Corythæola de Schizorhis et de Gymnosrhizo- rhis. Les analyses de laturacine donnent des résultats qui correspondent à la formule empirique C$? HS! Cu? A7? 053, La turacine présente quelques analogies avec l'hé- matine et abandonne par dissolution dans l'huile de vitriol un dérivé coloré, la fwraco-porphyrine, les spec- tres de ce dérivé en solutions acide et alcaline présen- tant des ressemblances frappantes avec ceux de l’hé- matoporphyrine le dérivé correspondant de l'hématine, mais il y a du cuivre dans le dérivé de la turacine, 390 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tandis qu'il n’y a point de fer dan s son analogue sup posé le dérivé de l'hématine. Séance du 5 mai 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G.. T.Bennett : Surles résidus des puissances des nombres de (out module composite réel ou complexe. 2° ScrENcEs PHYSIQUES. — M. F. W. Dyson : Sur le poten- tiel d’une sonnerie à ancre. — M. W. de W. Abney : Sur la transmission de la lumière solaire à travers l'at- mosphère terrestre. Partie 2. Dispersion aux différentes altitudes. On a mesuré lesintensités lumineuses en ex- posant du papier au platine à la lumière du ciel. Les résultats d'observations faites de cette manière mon- trent que l'intensité lumineuse totale est la même que si les observations avaient été faites sur un rayon isolé de } 4 240, les observations faites à des altitudes variant du niveau de la mer à 12,000 pieds. Elles ont été faites en différents pays en différents moments de l’année et pendant plusieurs années, Les résultats con- cordent exactement avec ceux qui ont été obtenus par les mensurations du spectre décrites dans un mémoire précédent. — M. William Ellis : Sur la simultanéité des variations magnéliques en différents endroits au moment des perturbations magnétiques et sur la rela- tion qui existe entre les phénomènes magnétiques et les courants terrestres. Le résultat général auquel est arrivé M. Ellis c’estque, pendantlesmouvements magné- tiques définis qui précèdent la perturbation, les aimants qui se trouvent en un même endroit sont simullané- ment impressionnés. Il en est de même pour des lieux dont la position géographique est très différente; il en est du moins à peu près de même. Il existe en effet pour certains endroits une petite différence cons- tante qui peut être réelle ou seulement accidentelle, mais dont il est désirable de déterminer le caractère, A Greenwich les mouvements magnétiques définis sont accompagnés par des mouvements dus au courant terrestre qui sont simultanés, mais ni les irrégularités magnétiques ni les variations ordinaires ne semblent pouvoir s'expliquer par l'hypothèse qu'ils résultent de l’action directe des courants terrestres, — M. E. Mat- they : Sur la liquation des métaux du groupe du pla- tine, L'auteur a recherché quels étaient les effets du refroidissement sur des masses considérables des al- liages suivants : or-platine, or-palladium, platine-pal- ladium, platine-rhodium et or-aluminiun. Le résultat général auquel il est arrivé, c'est que dans le refroiïdis- sement d’une masse fluide des deux métaux, il se so- lidifie d’abord à la périphérie un alliage riche dans le plus fusible des deux composants qui repousse vers le centre le composant le moins fusible. Séance du A2 mai 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. John Perry :Sur les transformateurs. L'auteur développe un grand nombre de formules qui se rapportent à l’hystérisis magné- tique. — Général Strachey : Sur l’effet probable de la limitation à 15 du nombre des membres ordinaires de la Société royale élus chaque année sur le nombre total éventuel des membres. SCIENCES NATURELLES. — M. J. W. Hulke : Sur la ceinture scapulaire des Ichthyosauriens et des Saurop- térygiens. L'auteur discute la structure de la ceinture scapulaire et les homologies de ses diverses parties dans ces familles, Il montre que l'hypothèse de l'exis- tence d’un précoracoide chez les Ichthyosauriens re- pose sur des fondements insuflisants: il apporte des preuves que chez les Plésiosauriens l'anneau ventral an- térieur n’est pas seulement théoriquement mais réelle- ment précoracoïde, Il monire aussi que l’anneau dorsal de la ceinture est homologue avec l’omoplate des Tes- tudinés et des autres reptiles, — M. J. B. Farmer : Sur l'embryologie de l’Angiopteris evecta (Hoffni). On ne connait pas le développementde l'embryon chezles divers membres du groupe des Filicinées eusporan- giées ; M, Farmer pour déterminer ce développement embryologique a réuniun grand nombrede jeunesplants ÿ et de prothallium d’Angiopteris evecta recueillis dans les bancs de craie situés au voisinage de Péradéniya (Ceylan). Ces observations portent sur un trop grand nombre de détails pour qu'il soit possible d’en donner un résumé, — M. Georges Bidder : Sur l’exerétion chez les éponges. Il avait décrit antérieurement l’épithé- lium glandulaire (flask-shaped) qui constitue d’après lui l'enveloppe externe la plus commune dans tous les groupes d’éponges, etil avait proposé de donner le nom de cellules de Metschnikoff à certaines autres cel- lules granulaires qui, d’après Metschnikoff, formaient un mésoderme, et d’après Dendy servaient d'habitation à des algues symbiotiques. Il s'attache maintenant à « prouver que chez l’Ascetta clathrus les cellules de Metsch- nikoff sont des cellules du col métamorphosées, que les pores se forment lorsqu'elles atteignent l'extérieur et se perforent et que les granulations de ces cellules et de l’ectoderme et de l’ectoderme glandulaire en gé- néral (et peut-être aussi les cellules ‘granuleuses si fréquemment décrites au-dessous de lui chez les éponges siliceuses) sont d'origine excrétoire. Séance du 19 mai, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. D. R. et Me Hug- gins : Sur l'étoile Nova Aurigæ. Les auteurs ont ajouté de nouveaux détails à leurs notes préliminaires com- muniquées à la Société le 23 février (Revue générale des Sciences, 30 mars 1892). Ils ont vu triples quelques- unes des raies du spectre de Nova Aurigæ, et ils sug- gèrent comme une explication possible de ce fait l’idée que les raies ont été renversées par une cause analo- sue à celle qui détermine le renversement des raies du calcium et d’autres substances dans les expériences de laboratoire, Ils croient que l'apparence de la nou- velle étoile est due plutôt à l’échappement d’un gaz surchauffé hors d’une enveloppe moins chaude qu'à la collision de deux ou trois corps dans l’espace. © 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Shelford-Bidwell : Sur les changements produits par l’aimantation dans la longueur des fils de fer et autres métaux que traver- sent des courants. Les résultats généraux auxquels ces expériences ont conduit l’auteur sont que, dans un fil de fer que traverse un courant, l’élongation magné- tique maxima est plus grande et la rétraction dans les champs forts, moindre que lorsque le fil n’est tra- versé par aucun courant. L'effet du courant est opposé à celui de la tension. Les rétractions magnétiques du nickel et du cobalt ne sont pas sensiblement modifiées par le passage d’un courant (la tension modifie consi- dérablement la rétraction magnétique du nickel, mais non celle du cobalt), — M. Thomas Gray : Sur la mesure des propriétés magnétiques du fer. Il a fait porter ses recherches sur le temps que met un courant à se développer dans un circuit qui possède üne inertie électromagnétique considérable. Les résultats aux- quels il est arrivé montrent qu'entre des limites très éloignées le temps nécessaire pour que le courant de- vienne uniforme est en gros inversement propor- tionnel à la force électro-motrice en action, etque, pour les valeurs faibles de la f. e. m., ce temps peut de- venir considérable si, par exemple, la f. e. m. est de deux volts et que le courantest envoyé dans une direc- tion telle qu'il doit renverser le sens de l’aimantation laissée dans l’aimant parun courant antérieur de même intensité, le temps nécessaire pour que le courant s’é- tablisse est de plus de trois minutes, Des expériences ont aussi été faites qui montrent que la dissipation d'énergie due à la retentivité magnélique (hystérésis magnétique) est simplement proportionnelle à l’induc- tion totale produite, quand les mesures sont faites par les méthodes cinétiques. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. N. Garstang : Sur le développement des stigmates chez les Ascidiens. Les recherches de l’auteur montrent que nous avons dans le Pyrosoma un type primitif des Tuniciers caduci- chordes qui est antérieur au phylum tout entier des 2.2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ascidiacés et dans lequel on retrouve très exactement la forme ancestrale de pharynx d’où sont dérivés les organes respiratoires compliqués des Ascidiens fixés. Elles montrent aussi que la Clavelina et ses alliés ne peuvent plus être regardés comme les membres les plus primitifs de l’ordre des Ascidiacés, et que le Bo- tryllus et les Styelinæ doivent prendre cette place, car en ce qui regarde la structure et le développement du pharynx aussi bien que sous d’autres rapports, ces der- nières formes s’approchent de plus près que tous les autres ascidiens du type ancestral représenté par le Pyrosoma.— M. A. Willey : Sur le développement post- embryonnaire de la Ciona intestinalis et de la Clavelina lepadiformis. La table suivante d’homologie indique les résultats principaux auxquels l'auteur est arrivé : a cavité proboscidienne des Ascidiens — cavité proboscidienne et trou préoral de l'Amphioxus, b endostyle des Ascidiens = endostyle de lAmphioxus. ec bouche des Ascidiens = bouche de l'Amphioxus. d première paire de fentes branchiales des Ascidiens dans le sens rectifié du terme — 1° paire de fentes bran- chiales de l'Amphioxus. L'homologie de la glande en massue de l’Amphioxus avec l'intestin des Ascidiens telle qu'elle a été sup- posée par Van Beneden et Julin semblerait donc tout à fait hors de cause. Il semble à peine nécessaire de faire remarquer que si les homologies invoquées par M. Willey sont réellement exactes, les relations entre l'Amphioxus et les Ascidiens sont beaucoup plus étroites que ne portaient à l’admettre les opinions jusqu'ici acceptées. — M. À. M. Patterson: Sur le sacrum humain. Cette note a trait aux caractères du sacrum, à sa forme, à ses anomalies, à sa corrélation avec les autres régions de la colonne vertébrale chez l’homme et les autres mammifères, àses relations avec le système nerveux spinal et à son ossificalion. Richard A. GREGORY. SOCIÉTÉ DE PHYSIOLOGIE DE BERLIN Séance du 3 mai, M. le D’ Boruttau parle de la différence des durées trouvées par les différents expérimentateurs pour le temps perdu de la contraction des muscles, soit dans l'excitation directe du muscle, soit dans l’excitation indirecte par le nerf, lorsque les muscles sont excilés au maximum ou au delà. Pour léclaircissement de ce fait, il a été avancé d’une part que, si le temps perdu est plus long dans lexcitation indirecte, cela tient à ce que les organes terminaux des nerfs moteurs, les plaques motrices, opposent à la propagation de l'exci- tation une certaine résistance qui produit le relard. D'autre part on a prétendu que l'allongement du temps perdu lors de l'excitation indirecte ne s’observe que sur le gastrocnémien, parce que là, dans le cas de l'excitation directe, le muscle et les nerfs sont excilés en même temps et que la sommation des excitations produit une accélération ; dans les muscles à fibres parallèles où l’on peut exciter le muscle seul à l’ex- clusion des nerfs, la différence signalée ne se produit pas, vu même il s’en produit une de sens inverse. L'auteur à institué une série de recherches dans le but de décider entre les deux hypothèses : il a étudié le temps perdu dans l'excitation directe et dans l’exci- tation indirecte du gastrocnémien et ses modifications sous l'influence de la fatigue, de l'échauffement et du refroidissement ; il ne lui a pas été possible de faire varier aucunement le temps perdu ; il s’est ainsi con- vaincu que la durée plus longue du temps perdu lors de lPexcitation indirecté tient à la résistance des pla- ques motrices. — M. le professeur Gad signale l'im- portance de ces recherches si on les applique aux acquisitions récentes que nous avons faites sur l’ana- tomie fine du cerveau. Puisqu'il est établi qu'il n’y a pas continuité entre le cylindre-axe du conducteur et les prolongements des ganglions, il est vraisemblable qu'il y ait là un organe intermédiaire comme entre le 391 nerf moteur et le muscle, et l'existence de ces inter- médiaires explique la lenteur de la transmission des excilations dans le cerveau. — M. le professeur Wolff présente un malade sur lequel il a pratiqué l’extirpa- tion totale du larynx, et auquel il à appris à parler à voix haute et claire au moyen dun larynx artificiel, L'opération était nécessitée par un néoplasme ayant envahi tout le larynx, comme le montrent les pièces présentées, — M. le professeur Gad expose le dispo- silif et le fonctionnement du larynx artificiel, ainsi que les progrès encore à réaliser. Séance du 13 mai. M. le D' Lœwy a institué dans le cabinet pneuma- tique de l'hôpital juif des recherches sur la respiration dans l'air raréfié; le dispositif permet d’abaisser en peu de temps la pression aux deux tiers ou même à la moitié d’une atmosphère, La composition de l'air reste constante; en particulier l’auteur s’est assuré que la teneur en acide carbonique ne dépasse pas 0,4 0/0 dans la raréfaction extrème. La raréfaction rapide est comparable à une ascension aérostatique qui dépasserait 6.000 mètres en 10 minutes. L'influence de cette décompression brusque et intense se mani- festa de manières très différentes sur les trois sujets soumis aux expériences ; Z.., dont le volume respira- toire dépasse 500%%% supporta très bien la raréfaction ; L..., avec un volume respiratoire d’un peu plus de 40065, la supporta moins bien, et M... la supporta très mal ; son volume respiraloire n’était que de 250cm8, D'autre part, chez un même individu, la raréfaction de l'air produisit des effets différents; elle est mieux sup- portée à jeun qu'après le repas, mieux pendant le tra- vail qu'au repos; les accidents nerveux et la faiblesse causés par le manque d'oxygène cessaient aussitôt qu'on donnait de l'oxygène, et de même quand on donnait de l'acide carbonique. L'action favorable du travail et des inhalations d'acide carbonique s'explique, d’après l’auteur, par la respiration plus active qu'ils déterminent, et l’action défavorable du repas par la gène du diaphragme. Sur les échanges nutritüfs, la raréfaction modérée n’exerce aucune influence; pous- sée jusqu'à une demi-atmosphère et au-dessous, elle amène une augmentation de l’acide carbonique éliminé; comme l'absorption d'oxygène reste constante, cette augmentation ne peut pas être rapportée à une surac- tivité des combustions. Quant à la mécanique respi- ratoire, elle est influencée de la facon suivante par la raréfaction de l'air : tant que celle-ci est bien sup- portée, la diminulion de tension de l'oxygène est compensée par une augmentation dans la profondeur de l'inspiration. — M. le Dr Wertheim décrit la dis- tribution des vaisseaux sanguins dans l'œil de l'oiseau ; il en à étudié le développement sur une série de pré- parations obtenues sur les embryons au moyen d’une méthode d'injection particulière ; il présente ces pré- parations à la Société, D' W. SKLARERK. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances du 3-24 avril 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Righi donne la descrip- tion d’un appareil imaginé par lui et d’une très grande précision pour la mesure des différences de phase pro- duites par des lames cristallines, et pour la construc- tion des lames d’un quart d'onde et d’une demi-onde. L'appareil se compose d’un nicol polariseur, d'un prisme biréfringent, donnant deux images dans une ouverture carrée, placée entre le prisme et le polari- seur, et d’un nicol analyseur, mobile au centre d’un cercle gradué. Les deux nicols au commencement sont croisés, et le prisme a sa section principale parallèle à l’une de celles des nicols, ce qui fait que la lumière est éteinte, La lame biréfringente est placée entre l’ou- verture carrée et le prisme, et, par une disposition simple, on obtient que ses lignes neutres se trouvent à 45° du plan de polarisation primitif (en la faisant tour- 392 ner de 45° à partir de la position pour laquelle la lame rétablit l'obscurité). On tourne l’'analyseur d'un angle a jusqu'à ce que les deux images du carré aient la même intensité. La différence de phase cherchée p est donnée en degrés par p= k. 360° E 22, k étant un nombre en- tier. Pour des lames d’une demi-onde, on doit avoir 2 — 90° où & — 45°. Le signe de sw et la valeur de k peuvent être déterminés avec l'appareil de Noremberg ou avec le sphéromètre, ou encore en exécutant deux mesures avec deux longueurs d'onde différentes, L'au- teur a trouvé pour des lames de mica que pa des va- leurs dans le rapport de 0,93 : 1 : 1,06 : 1,30 suivant que les mesures sont faites avec une lumière rouge, jaune, verte ou bleue. Ces lumières, sensiblement mo nochromatiques, étaient obtenues par M. Righi à l’aide de dispositfs dont il donne les détails. Il est facile, avec l’appareil, de construire pour les quatre lumières des lames d'un quart d'onde et d’une demi-onde; et on peut calculer avec une approximation suffisante pour quelle longueur d'onde une lame donnée peut être considérée comme étant d’une demi-onde ou d'un quart d'onde, puisqu'on sait que les différences de phase sont sensiblement en rapport inverse de la longueur d'onde, — M. Vincentini a poursuivi ses recherches sur les remarquables phénomènes lu- mineux produits dans les gaz raréfiés, par des décharges électriques à travers des conducteurs continus. L'auteur observe que ces décharges ne don- nent lieu, dans l'air raréfié où se trouvent les conduc- teurs, à aucune stratification; pour de fortes raréfac- tions les phénomènes de phosphorescence se produisent sans variation quant au signe de Pélectricité. M. Vin- centini donne, en outre, la description d'une curieuse décharge globulaire observée dans un tube cylindrique, et des décharges lumineuses qu'il a obtenues avec des cylindres conducteurs formés par une fine toile métal- lique dans un récipient à air raréfié, — M. Guglielmo: Sur les tensions partielles et sur les pressions osmoti- ques des mélanges de deux liquides volatils; descrip- tion d’une nouvelle méthode de mesure. — MM. Ciami- cian et Zanetti se sont occupés de déterminer le poids moléculaire des peptones; pour la peptone d’al- bumine, en solution aqueuse à la concentration de 14 pour 100, les auteurs ont trouvé un poids molécu- laire de 500 environ, — MM. Magnanini et Scheidt ont obtenu, par l’action de l’aldéhyde benzoïque et de la potasse caustique sur le dérivé ammoniacal CS H1 Az0 de l'acide acétyllévulinique, un nouveau produit de condensation, qui forme des aiguillés jaunes fusibles à 208°,5 et dont la composition © Reno A à la formule C5 H 5 Az0. — M. Andreocci a étudié les propriétés de quelques dérivés urétaniques. 2° SCIENCES NATURELLES. — M, Tizzoni et M. Cattani ont fait d’intéressantes observations sur la transmission héréditaire de l'immunité contre le tétanos. Des souris et des lapins immunisés, supportant sans souffrir des injections de cultures très virulentes, furent choisis, et leurs jeunes furent soumis à l'épreuve de l'infection tétanique. L'expérience donna un résultat négatif, tandis qu'un jeune animal, né de parents non immu- nisés, succomba à l injection d’une faible dose de cul- ture, au tétanos bien caractérisé. Ces résultats prou- vent qu'il est possible aux animaux de transmettre leur immunité par hérédité. Les deux expérimenta- teurs se proposent de déterminer si un seul des pa- rents suffit à transmettre l'immunité, et, dans ce cas, lequel des deux jouit de cette propriété, — M. Pigo- rini combat l'opinion de ces savants qui nient que les peuples italiques de l’âge du bronze aient exercé la pêche, en s'appuyant sur le fait qu'il ne nous est par- venu ni restes des poissons, ni outils de pêche. M. Pi. gorini, au contraire, rappelle les découvertes faites ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES dans les ferremare du Modanais et dans le lac de Garde, où vécut un peuple identique à celui des terremare, dé- couvertes Den que ces peuples faisaient usage d’hamecons et même de têtes de harpon en bronze, — M. Emery présente à l'Académie le résultat de ses nouvelles recherches sur le Pelobates fuseus qui confir- ment les conclusions de son précédent travail.M. Emery, en outre, à reconnu dans È P, fuseus : 19 Un rudiment cartilagineux du carpal; 2 un rudiment cartilagineux pisiforme qui se confond finalement avec l’ulnaire ; 3° la participation de l'intermédium à la formation du « semi-lunaire » qui représente ainsi un radio-intermé- dium-central, De cette manière est démontrée la pré- sence dans le carpe des Anoures de tous les éléments essentiels de cette partie du squelette. Ainsi se trouve confirmé le type hexadactyle du carpe des Anoures, signalé précédemment par M. Emery. —M. Mingazzini décrit le cycle évolutif de la Bedenia oc topiana, et il dé- montre que la reproduction de cette espèce s’accomplit de deux manières, c’est-à-dire par spores et par des corpuscules falciformes, L'évolution des coccidiens est donc double, et dans une classification, on doit tenir compte de ces deux phases. Les spores communiquent l'infection au milieu ambiant; les corpuscules falci- formes donnent l'infection à l'hôte. — M. Cerulli a poursuivi l'étude de la structure de la racine des Lilia- cées-Dracénées, Les résultats les plus intéressants de cette étude sont les suivants : 4° Dans les tribus des Dracénées, il y a deux types de structure de la racine, Dans le premier, à l'extérieur de l’endoderme, on trouve une couche mécanique de cellules considéra- blement épaissies; et dans le parenchyme du cylindre central à parois épaissies, se rencontrent les vaisseaux centraux où medullaires (Dasylirion, Yucca). Dans le second type de structure, il n'y a pas de couche selé- reuse en dehors de l’endoderme; dans le parenchyme médullaire, on trouve des vaisseaux centraux ou bien des vaisseaux et des tubes cribreux (Cordyline, Dra- cæna). 2 Dans le genre Dasylirion, les espèces peu vent être distribuées en deux groupes suivant la struc- ture de la racine, groupes qui correspondent parfaite- ment à ceux qui ont été établis par M. Pirotta pour la structure de la feuille, 3° Les vaisseaux, ordinairement très grands, que l’on retrouve dans le parenchyme médullaire du cylindre central, ont une origine tout à fait particulière, indépendante des faisceaux procam- biaux ; ils se forment par différenciation directe d’une série de cellules superposées du méristème. — MM. Lo Monaco et Oddi ont étudié l’action physiologique de l'ortie. Après avoir rappelé les applications des diverses espèces d'orties chez les anciens et les plus récentes expériences entreprises pour utiliser la propriété hé- moslatique de la plante, les auteurs décrivent la mé- thode qu'ils ont suivie pour préparer l'extrait d’ortie et en suivre les effets sur les animaux. Une injection hypodermique de 1°%5 d'extrait produit dans les gre- nouilles une paralysie progressive, et le cœur est le dernier à cesser de vivre; sur les mammifères, lapins et chiens, cette action est très faible. Pour étudier l’ac- tion de l'extrait sur les vaisseaux, on eut recours à la circulation artificielle dans des reins frais de cochon. Les expériences démontrèrent que l'extrait mêlé au sang qui passe dans le rein produisait un effet de cons- triclion qui persista longtemps; une action identique se produisit dans les vaisseaux pulmonaires du chien, dilatés auparavant par le passage d’une solution d’an- tipyrine. Les auteurs one d'avis que le principe actif de l'extrait d’ortie est une substance azotée cristalli- sable, présentant bien quelques caractères propres aux alcaloïdes et qu'ils ont réussi à isoler; MM. Lo Monaco et Oddi poursuivent l'étude de cette substance. Ernesto Mancini. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 3° ANNÉE Neal 15 JUIN 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LA LOI DES VALENCES ATOMIQUES La loi des liens atomiques qui relient entre elles les diverses parties élémentaires d’une mo- lécule et celle des valences atomiques ne sont pas nées d'hier : depuis longtemps les savants s’en servent couramment dans l'interprétation des phénomènes chimiques. Il n'y aurait donc pas lieu d’en parler dans cette Revue, si d’intéressantes considérations ne ve- naient d'être développées sur cette question par M. J. Flavitsky!, ainsi que par M. Carlo Émilio Carbonelli ?, en vue de faire disparaitre et d’a- planir certaines difficultés très sérieuses aux- quelles se heurtent ces lois. Les idées mises en avant dans ce but méritent d'être signalées et discutées. Elles touchent aux questions les plus délicates de la philosophie chimique. Il Rappelons d’abord, en quelques mots, les par- lies les plus essentielles de la théorie, On admet que les éléments se combinent entre eux pour former des nolécules, suivant des rapports déterminés, qui ont reçu les noms d’équivalènts de substitution. Dans une molécule complète ou satu- rée, à chaque équivalent d’un élément doit se trouver opposé un équivalent d’un autre élément. C'est, on le voit, l’ancien principe dualistique de Berzelius élargi et modifié. Re re me cé, À Pret l Fravirsky, Annales de chimie et de physique, série 6, t'XXV, p. 5, 1892. Ë 2 CarBoNELLI. Atti della Societa linguistica di science na- turali. Anno III, vol, II, REVUE GÉNÉRALE DEs ScIgNcEs, 1892. Pour un élément donné, l'équivalent est son unité de combinaison : 35,5 de chlore valent 80 de brome, 127 d'iode, 1 d'hydrogène. L'équivalent ne se confond pas avec l’atome chimique, c'est-à-dire avec la plus petite quantité d’un élément suscep- tible d'entrer dans une molécule. La molécule chimique est définie comme la plus petite quantité d’un corps, simple ou composé, pouvant exister en liberté. Les grandeurs rela- tives des molécules sont fournies par les densités gazeuses ou de vapeur, conformément au principe d'Avogadro, ou par application de la loi de Raoult. Le poids atomique d’un corps simple est tantôt égal au poids équivalent, tantôt, au contraire, il vaut 2,3, 4 fois l'équivalent. Il résulte de là que, pour les éléments polyatomiques, l’unité chimique ne fonctionne jamais isolément dans une réaction, de quelque nalure qu'elle soit, mais par groupes indivisibles de 2, 3, 4 équivalents, suivant le degré d'atomicité de l'élément, La loi de saturation énoncée plus haut conduit à la règle suivante qui est très simple : dans toute molécule complète, quelle que soit sa complica- tion. la somme des atomicilés des éléments consti- tuants est toujours divisible par deux, ces atomi- cités se saturant réciproquement, L'application de ces divers principes aux faits variés de la chimie n'offrirait aucune difficulté, si la valence atomique était définie d’une façon simple, uniforme et incontestée. Or c’est précisé- ment là que nous rencontrons le principal obs- tacle, = Les lrois moyens rincipaux qui sont à notre Il 394 P. SCHUTZENBERGER. — LA LOI DES VALENCES ATOMIQUES disposition pour fixer l’atomicité d’unélément con- sistent à délerminer par expérience quels sont les plus grands nombres d’alomes d'hydrogène, ou de chlore, ou d'oxygène susceptibles de s’unir à un atome de cet élément. L'atome d'hydrogène est monovalent par défi- nilion, puisque dans la mesure des poids ato- miques et des équivalents on a pris comme unité le poids atomique et l'équivalent de l'hydrogène. D’après les faits connus, toutes les fois que le chlore fonctionne vis-à-vis d’un autre élément comme électro-négatif, il est également monova- lent. L'oxygène est biatomique toutes les fois, — ce qui est le cas général, — qu'il est en conflit avec un élément moins électro-négatif que lui. Lorsque ces trois moyens de mesure sont appli- cables et conduisent aux mêmes conclusions, on est en droit d'admettre que l'atomicité trouvée est la vraie. Ce résultat n’a été atteint jusqu'ici que pour les premiers termes, carbone et silicium, du quatrième groupe du système périodique de M. Mendelejeff !, groupe qui comprend, outre ces deux corps, le titane, le zirconium, l’étain et le plomb, ainsi que le cérium et le didyme. Le car- bone et le silicium sont tétratomiques, aussi bien du fait de leurs combinaisons avec l'hydrogène que de celui de leurs combinaisons avec le chlore et avec l'oxygène. Les diverses combinaisons satu- rées et contenant un atome de carbone ou de sili- cium par molécule, répondent, en effet, aux types : XNA OX Cl Xe 07 Quant au tilane, au zirconium, à l’étain et au plomb, également tétravalents, on réalise les deux derniers types; le premier, X.H*, manque, il esl vrai; mais on peut y suppléer avec le secours des radicaux alcooliques tels que le méthyle (CH3 — R) avec lesquels ils forment des combinai- sons du lype XR®. Le carbone étant incontestablement reconnu té- tratomique, CH! constitue une molécule saturée, et CH? formera un groupement monovalent éleetro- 1 Voici la Table de Mendelejeff; les corps simples y sont rangés suivant des séries périodiques en chacune desquelles l’accroissement des poids atomiques est régulier: VII VIN IX IX Az Ph v Mn As S Br Nb Sb Fe | Co|Ni Ru | Rh|Pd Ta Bi (21 Ur (?) Pr|Pt (Note de la Rédaction positif, entièrement comparable à H au point de vue des substitutions. Pour les trois premiers groupes du système pé- riodique on ne dispose pas non plus du type hydro- géné; mais on obvie à cette lacune par le même artifice que tout à l'heure. Dans le groupe I les types observés sont : X.R,; X Cl; X2.0. Les éléments de ce groupe (lithium, sodium, potassium, rubidium, césium, cuivre, argent, or) sont donc nettement monovalents. Pour le groupe II,les types caractéristiques sont ceux d'éléments bivalents : XSRIe LOSC CD (glucinium, magnésium, calcium, zine, strontium, cadmium, baryum, mercure). Enfin dansle groupe III (qui renferme aluminium, scandium, gallium, yttrium, indium, lanthane, ytterbium, thallium) les types observés : XIRS EX CI EX DS montrent que l'on a affaire à des éléments franche- ment trivalents. En résumé, pour les quatre premiers groupes périodiques, l’atomicité des éléments semble sufii- samment fixée. Cette atomicité va en croissant d’une unité d’un groupe à l’autre et est égale au numéro du groupe. Dans les trois groupes suivants, en grande partie constitués par les métalloïdes, associés à quelques métaux se rapprochant des métalloïdes par cer- taines de leurs propriétés chimiques, cet accord si remarquable entre les types oxygénés saturés et les types hydrogénés ou méthylés similaires cesse brusquement. Le désaccord est d'autant plus marqué ici que les types hydrogénés sont effec- tuables et fréquents. La loi de progression de l’atomicité subsiste dans les combinaisons oxygénées. Le type oxygéné saturé est, en effet, pour le cinquième groupe (azote, phosphore, vanadium, arsenic, niobium, antimoine, tantale,bismuth), X?0°; X est donc pen- tavalent; pour le sixième groupe (oxygène, soufre, chrome, sélénium, molybdène, tellure, tungstène) le type oxygéné saturé est X. 0%. X est hexavalent. Dans le septième groupe, qui est celui du fluor, du chlore, du manganèse, du brome et de liode, le type oxygéné le plus saturé, X?0°, correspond à un élément heptavalent. L’atomicité par rapport à l'hydrogène ou au méthyle suit une marche in- verse à partir du groupe IV; elle décroît d’une unité d’un groupe à l’autre. De quatre qu'elle est pour le quatrième groupe, elle tombe à 3 pour le cinquième, à 2 pour le sixième el à 4 pour le septième, Les combinaisons saturées des éléments des P. SCHUTZENBERGER. — LA LOI DES VALENCES ATOMIQUES cinquième, sixième et septième groupes avec le chlore ou les éléments de la famille du chlore cor- respondent dans beaucoup de cas aux types oxygénés. Il n’en reste pas moins deux degrés d'atomicité bien distincts, pour les éléments des trois der- niers groupes du système périodique : l’atomicité par rapport à l’hydrogène et l’atomicité par rap- port à l'oxygène et au chlore. IL est à remarquer qu'à partir du quatrième groupe la somme des atomicités prises par rapport à l'hydrogène et à l'oxygène est constante et égale à 8:(44+4; 543; 6492; 71), tandis que pour les trois premiers cette somme est respectivement: H+H1,2+492;3 +3). La valeur de l’atomicité d’un élément métal- loïde paraît dépendre du rôle électrolytique qu'il joue vis-à-vis de l'élément auquel on le compare. Ainsi,le soufre se révèle comme hexavalent dans l’'anhydride sulfurique SO*, où il joue le rôle élec- tropositif; il est bivalent dans l'acide sulfhydrique, dans lequel il est au contraire électro-négatif. Ceci permettrait de distinguer les deux genres d'atomi- cités d'un élément en les désignant par les mots d'atomicités positives et d'atomicités négatives. Il Voici maintenant comment M. Flavitsky cherche à concilier ces deux oppositions, en vue d'écarterla notion génante d’une atomicité variable. Il fait observer qu'en envisageant l'hydroxyle OH comme un groupement monovalent et en le fai- sant intervenir concurremment avec l'hydrogène dans des combinaisons avec un atome unique de carbone, on peut déduire théoriquement les cinq formes primitives suivantes, formes dont les deux dernières sont seules connues. (1) C(OH)!; (4) C.H$.0H; (2) C.H.(OH; (5) C.H£ (3) C.H2.(0H)’; Par élimination d'une molécule d’eau H°?0 ou par déshydratation primaire, la forme (1) se con- vertit en la forme (6) : C.(OH)?.0; la forme (2) donne la forme (7) : C.H.(0H).0, — ou la forme (8) incomplète et bivalente : C.(OH} ; la forme (3) fournit la forme (9): C.H°.0, — ou la forme bivalente : C.H.(0H); enfin la forme (4) ne peut conduire qu’au type incomplet bivalent : CHEN Quelques-uns de ces types sont représentés par 1 On arrive à l’anhydride saturé en formant la molécule d’eau aux dépens de l'hydroxyle seulement — 2(0H) donnent H20 +0 ; l'oxygène bivalent reste dans la molécule et se substitue aux deux hydroxyles. Les anhydrides incomplets résultent de l'élimination d'une molécule d'eau formée par un d’hydroxyle et un atome d'hydrogène directement lié au carbone, Il se produit ainsi deux lacunes non compensées. 395 des combinaisons réelles. Le type (6) est celui des carbonates ; le type (7) répond à l'acide formique et aux formiates ; Le type (9) est celui de l’aldéhyde formique. Au moyen d'une nouvelle élimination d’une molécule d’eau, ou par une déshydratation secon- daire appliquée à ceux de ces anhydrides primaires qui renferment encore les éléments de l’eau, on atteint les anhydrides secondaires : C.(0H)2.0 — H20 = CO? (anhydride carbonique saturé); CH.(0H).0 — H20 = CO (oxyde de carbone, corps incomplet). On arrive ainsi à prévoir théoriquement l’exis- tence de 9 types saturés distincts sur lesquels on en connait 7: CH* (méthane); CH*.0H (carbinol ou alcool méthylique) ; C. (0H) .0 {carbonates); CH(OH).0 (acide formique et formiates); CH°0 (aldéhyde formique); CO? (anhydride carboni- que), Lypes auxquels vient s'ajouter la forme in- complète C.0. Appliquons cette méthode, comme l’a fait Fla- vitsky, à l'un des éléments du cinquième groupe, au phosphore par exemple. En lui attribuant une atomicité égale à 5, telle qu’elle est déduite de ses combinaisons saturées avec l'oxygène et le chlore, on peut prévoir les six formes primitives suivantes : P.(OH)5; P.H.(OH):...P.Ht.OH; P.HS qui conduisent, par élimination d'une molécule d’eau, aux anhydrides primaires saturés : P.(0H}.0; P.H.(0H)2.0; P.H?. (0H).0; P.H3.0, etauxanhydrides primairesincompletsetbivalents : P.(OH):; P.H.(0H)2; P.H2.0H; P.H5. Par une seconde déshydratation opérée sur ceux de ces types qui s’y prètent, on trouve les formes saturées : P.0H.0?; P:H°0?, et les formes bivalentes P.0H.0 et P.H.0, ainsi que les formes tétravalentes P.OH ; P.H. On forme ainsi vingt types dont on connait un certain nombre de représentants, qui sont : L'acide orthophosphorique P.(0H).0 , an- hydride primaire ; l'acide métaphosphorique P.(0H).0?, anhydride secondaire ; l'acide phospho- reux P.H.(0H}.0, ou P.(0H}; l'acide hypophos- phoreux P.H?.(0H).0, ou P.H.(0H}. D’après cette manière de voir, l'hydrogène phos- phoré P.H* serait l’anhydride primaire incomplet dérivé du type P.H*.0H ou hydrate de phospho- nium. Il en serait de même pour l’ammoniaque Az.H° ou anhydride primaire incomplet dérivé du type Az.H*.0H (hydrate d’ammonium). Ces considérations tendent à établir que les com- binaisons hydrogénées des éléments du cinquième groupe dérivent de composés hydrogénés et hydroxylés plus complexes, dans lesquels ces élé+ 396 ments sont pentavalents, par perte de deux unités chimiques (OH et H), comme le méthy- Jène CH? dériverait, s’il existait, du type C.H°.0H. Ces combinaisons, étant incomplètes, ne peuvent pas, par cela même, donner la mesure de l’atomi- cité de l'élément. Si, pour ces éléments, la forme primitive P.H° n'existe pas, cela tient au défaut de stabilité du type hydrogéné saturé. Dans cet ordre d'idées, l’hydroxylamine, — soit qu’on l'envisage comme conslituée d’après la for- mule saturée Az.H°.,0, ou qu'on la fasse rentrer dans le type incomplet Az.H?.0H, — peut être considérée comme l’anhydride primaire du {ype Az.H®.(0H}?, où l'azote est pentavalent. Le chlorure ou l'iodure d’ammonium Az.H#.Cl ou Az.H'.1, le chlorure ou l’iodure de phospho- nium P.H*.Cl ou P.H*.I appartiennent aux types complets pentavalents Az.H*.0H ou P.H*.0Heten découlent simplement par substitution à OH d’une quantité équivalente de chlore ou d’iode. Le peu de stabilité de l’iodure de phosphonium et surtout du chlorure répond bien à l’idée d’après laquelle P.H* serait un résidu incomplet. Cette notion est encore appuyée par des obser- vations d'ordre physique. On a constaté que, dans les combinaisons salu- rées du carbone, la réfraction atomique du carbone, déduite de la formule de Cauchy (avecune lumière de longueur d'onde très grande)est, d’après les ob- servations faites avec la raie à de l'hydrogène, égale à 5,0, tandis qu'elle devient égale à 6,2 avec les combinaisons incomplètes, à liaisons doubles. De même pour l'azote, les azotates fournissent le nombre 4,65, tandis que les amines donnent 5, 15; ceci s'accorde avec la règle observée pour le carbone, d’après laquelle les composés incom- plets d’un élément conduisent à une réfraction atomique de cet élément plus grande que celle donnée par les corps salurés. Des considérations analogues aux précédentes sont applicables aux groupes hexavalent (VI) et heptavalent (VII) par rapport à l'oxygène. Ainsi, pour le soufre, hexavalent vis-à-vis de l'oxygène, on connait deux de ses trois anhydrides tertiaires : anhydride sulfurique SO*; anhydride sulfureux 50°; le troisième SO n’a pas été préparé, mais il trouve son correspondant SeO dans la série du sélénium. L’acide sulfurique normal et les sulfates du type S.(OH):.0? peuvent êlre envisagés comme des anhydrides secondaires el saturés dérivés, soit de S.(0H){.0 par perte de H0, soit de S.(OH)S par perte de 2 (H°0). L'hydrate solide SO‘H?, H?0, qui prend naissance à"8, ne serait autre que le composé S.(0H)'.0, P. SCHUTZENBERGER. — LA LOI DES VALENCES ATOMIQUES tandis que l’hydrate liquide SO‘H?.2H°?0, auquel répond le maximum de contraction et le maximum d’élévation de température pour un mélange d’eau et d'acide normal, représenterait la forme primitive S.(0H)6. Le sulfate de chaux cristallisé serait du même type S.(OSH1.Ca), ainsi que le sul- fate basique de mercure S.(0°Hg). Parmi les composés hydrogénés possibles (S.H5, saturé; S.H°, monovalent, ... S. H?, tetravalent; S. H pentavalent) le seul stable est S.H?, représen- tant dans cette théorie l'anhydride secondaire in- complet et tetravalent, issu du .type primitif S.H(OH}. La non-saturation de l'hydrogène sul- furé se révèle dans ses dérivés à radicaux orga- niques, tels que le sulfure de méthyle S.(CH°}. On sait que ce corps est susceptible de s’assimiler deux unités chimiques pour donner les sulfines de Cahours, qui se rattachent au type encore incom- plet S. H2. (0H). Les réfractions atomiques du soufre déduites de l'étude des sulfures S.X?, des sulfines S.X! el de l'acide sulfurique S.XS sont respectivement pour la raie 4 de l'hydrogène : 14; 8,09; 4, 8, confor- mément à la règle mentionnée plus haut. Les faits connus s'accordent doncavec la théorie d’après laquelle l'hydrogène sulfuré dériverait, par élimination d'un certain nombre d'unités chimi- ques, d’un type saturé plus élevé. Telle est, en substance, l'explication que M. Fla- vitsky donne de la différence entre l’atomicité vis- à-vis de l'oxygène et celle vis-à-vis de l'hydrogène, entre l'atomicité électro-négative et l’atomicité électro-positive, explication dont il cherche de bien desmanières à faire ressortir l'accord avec les données expérimentales. III L'idée de rattacher certains groupes de com- posés à d’autres groupes par deshydratalion à élé appliquée dans divers cas. C’est ainsi que l'on envisage les acides organiques comme les anhydrides primaires de dérivés trihydroxylés du type R.C.(OH)? donnant par perte de H°0 R.C. (OH). 0. Les aldéhydes et les acétones ont élé dérivées de la même manière des types R.C.H.(OH} et R.R’.C. (0H)? donnant: RAGE OMerEL De même l'acide métaphosphorique P.(OH)0? dérive de l’acide orthophosphorique P.(0H)°.0, par perte de H°0, sans changement dans la saturation du phosphore. ; M. Flavitsky a appliqué et développé d’une ma- nière ingénieuse et savante cette interprétation des faits dans le but de démontrer l’unilé d’atomicité, P. SCHUTZENBERGER. — LA LOI DES VALENCES ATOMIQUES 397 À première vue on est séduit el presque con- vaincu. k Cependant, en y réfléchissant, on arrive à voir que ces explications ont un côté artificiel et à con- clure qu’au fond et, dégagée de tous les détails scientifiques qui l’enveloppent, la théorie de M. Flavitsky revient à dire que, a valence étant une grandeur constante pour chaque élément, il convient, pour la mesurer, de choisir parmi les combinaisons connues d’un élément celles qui répondent à la valence la plus élevée. Les autres combinaisons sont incomplètes. Elles se révèlent dans certains cas comme telles par la possibilité de remonter par addition au type complet. S'il n’en est pas ainsi, cela tient à l'instabilité des types supérieurs correspondants. Iln'y a en réalité pas de différence essentielle entre une semblable explication et celle qui con- sisle à attribuer à un élément, comme le soufre, deux degrés d’'atomicité, dont l’un est6 ou 7 (vis-à- vis de l'oxygène), et dont l’autre est 2 (vis-à-vis de l'hydrogène). Afomicité marima ne signilie pas autre chose, en effet, que le degré Le plus élevé de satura- tion d’un élément par un autre, degré fourni par l'expérience et l'observation. Affirmer que le degré d'atomicité du soufre vis-à-vis de l'hydrogène pour- rait être 6, si le composé $. HS était stable, n'est-ce pas nous autoriser à penser que, par rapport à l’oxy- gène, il pourrait être 8 ou 10, el que, s’il n’en est pas ainsi, c'est uniquement parce que les types S.0!; S.0? elc.. ne sont pas stables. Nous sommes donc, malgré tous les artifices, ra- menés pour les métalloïdes et les quelques mé- laux des 5°,6° et 7° groupes du système périodique, aux deux atomocités distinctes, l’une électro-néga- tive, l’autre électro-positive, c’est-à-dire ramenés à la réalité des faits. L'atomicité des éléments, ou le pouvoir de satu- ration des éléments, est une grandeur variable avec la nature des unités chimiques qui servent à la mesurer; vouloir l'unifier pour tous les cas, c'est se condamner à torturer l'expérience et chercher à faire concorder deux ordres defaits de nature bien distincte, comme le sout la combinaison d’un corps simple avec l'oxygène électro-négatif d'une part, el sa combinaison avec l’hydrogène électro-posilif d'autre part. Nous ne considérons pas comme très probable que les combinaisons des soixante et quelques éléments connus puissent obéir à une loi aussi simple et aussi uniforme que celle de l’atomicité maxima. Cette loi réussit admirablement pour le carbone dont elle domine toute l'histoire chimique; mais est-ce à dire pour cela qu'il doit en être de même pour les autres éléments? L'atome de chacun d'eux conslitue une individualité spéciale, dans REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. | laquelle résident des conditions mécaniques particulières, se révèlant par la façon caractéris- tique avec laquelle il se comporte lorsqu'il est mis en conflit avec d’autres éléments, d’où naissent des m»modus vivendi bien distincts d'une espèce à l’autre. Qu'on se serve de l’atomicité comme d’une loi approchée, en utilisant ses grandes lignes vérifiées par l'expérience, comme un moyen de rapprochement, de classification som- maire, d’un aide-mémoire et d'un plus utile et de plus légitime; aller plus loin, donner à tous les éléments d'un groupe la même uniformité, c’est, pensons-nous, nuire aux progrès de la science plus que le favo- riser. guide, rien de mais, vouloir IV Puisque l’occasion s’en présente ici, nous discu- terons, aussi brièvement que possible, une hypo- thèse qui nous est venue à l'esprit il y a longtemps déjà, qui jusqu'ici n’a pas encore été présentée officiellement, à notre connaissance, bien qu'elle paraisse conduire très naturellement à l'interpréta- tion de faits nombreux; — faits dont la théorie des liens atomiques, telle quelle est comprise actuel- lement, rend difficilement compte. Cette hypo- thèse qui ne se butte, pensons-nous, à aucune ob- jection irréductible, consiste à introduire, dans la théorie des liens équivalents, reliant les atomes divers d'une molécule, la notion du fractionne- ment possible des équivalents de combinaison. Ces équivalents, en effet, ne sont pas des atomes; ce sont des rapports de saturation; or, ces rapports fixes subsisteront intacls si nous parta- geons l’équivalent appartenant à un atome donné entre plusieurs atomes distincts, dont chacun perdra de ce fait une fraction de sa capacité de saturation égale à la fraction d'équivalent qui s’unit à lui. Actuellement on a toujours l'habi- tude de saturer un équivalent d’un atome par un équivalent d'un autre atome. Les schémas de structure qui en résultent sont évidemment plus simples; mais ils laissent inexpliqués bien des faits, par exemple, l'influence qu’exerce le voi- sinage d’un élément ou d'un groupe d'éléments sur un autre qui lui est voisin dans la molécule, sans que cependant il y ait des liens directs de combinaison entre eux. La théorie actuelle est de plus impuissante à justifier l'existence des nom- breuses combinaisons dites moléculaires, telles que les sels doubles, alors que la notion du fractionne- ment des valences en rend parfaitement compte. Un exemple ou deux expliqueront plus nette- ment notre pensée : Le degré de valence de l'azote par rapport à l'hydrogène est égal à 3. L’ammoniaque AzH® est ins 398 a. P. SCHUTZENBERGER. — LA LOI DES VALENCES ATOMIQUES done une molécule saturée d'hydrogène. Lorsque ce corps se combine à une molécule d'acide chlor- hydrique pour donner le chlorhydrate d’ammo- niaque, on explique le phénomène chimique en admettant que l'azote fonctionne alors comme élé- ment pentavalent, comme dans l'acide azotique. C'est très bien et très simple; mais, que de contra- dictions et de contre-bon-sens dans cette explica- tion, si simple et sinalurelle en apparence ! Tout à l'heure l'azote était saturé d'hydrogène dans l'am- moniaque, et le voici qui devient subitement aple à s'unir à un nouvel atome d'hydrogène en mème lemps qu'à un atome de chlore ! Sans cet atome de chlore, le quatrième alome d'hydrogène ne tien- drait pas à l’azote ! Mais voici qui est plus singulier et plus étonnant encore. Le chlore, qui a tant d’aflinités pour l’hydro- sène, qui s’unit à lui en dégageant 22 grandes ca- lories par molécule d'acide chlorhydrique formé, se sépare de cet élément dès qu'il est en présence de l’ammoniaque, el va se souder à l'azote, pour lequel il professe, — tout le monde le sait, — la plus profonde antipathie. Antipathie tellement profonde que, si, par force, il a été associé à cet élément, il s’en sépare violemment et avec explosion sous l'in- fluence du moindre choc. La formule schématique, qui dans tous les ou- vrages de chimie représente le chlorure d'ammo- nium, Hi AN est done, d’une manière évidente, en contradiclion formelle avec les affinités respectives les mieux établies des éléments qui constituent celte mo- lécule. Le chlore n'a aucune aflinilé pour l'azote; il en à beaucoup, au contraire, pour l'hydrogène ; et c'est malgré cela qu'on associe le chlore à l'azole el qu'on le laisse absolument indépendant de l'hydro- gène! Et pourquoi? Uniquement parce qu'avec la manière dont on interprète la théorie des liens atomiques, c’est le seul procédé possible, — étant donné que Clet H sont monovalents, — de consli- tuer une molécule. Considérons, au contraire, celte CIAzH! de chlorhydrate d’ammoniaque sans aucun parti pris d'avance; tenons uniquement compte des affinités respectives des trois éléments, en admettant la possibilité du fractionnement des équivalents contenus dans ce groupe de cinq molécule atomes. Le chlore, avons-nous dil, n'a que des aflinités négatives pour l'azote. Le chlorure d'azote est explosif et se forme indirectement dans des condi- tions spéciales; nous nous garderons donc de l'unir à l’azole par voie directe, comme le veut la théorie admise. Par contre il s’unit avec dégagement de chaleur à l'hydrogène, pour lequel il offre les afli- nités les plus puissantes. Il n'y a aucune raison de supposer que l'atome de chlore Cl est combiné à l'un des 4 atomes d'hydrogène de la molécule plu- {ôt qu'à l’autre. Nous le mettons en relation avec chacun par + de valence, ce qui épuise la puissance de combinaison du chlore vis-à-vis de l'hydrogène. Chaque atome d'hydrogène a perdu de ce fait le # d'un équivalent; il en garde #, qui servent à l’unir à l'azote : 4>X du rapport el la rapproche de 0,55. Dès que l'animal travaille, dès qu'il se livre à un exercice musculaire violent, la quantité d'acide carbonique exhalée et d'oxygène consommée augmentent ra- ! Le fait a été récemment contesté par Pflüger. Pour lui l'albumine est le combustible musculaire par excellence (1891). : | pidement, mais non dans les mêmes proportions. L'augmentation se fait de telle sorte que le quotient - respiratoire tend à se rapprocher de l’unité, indé- -pendamment de la nature de l'alimentation. La valeur du quotient respiratoire nous indique donc ici qu'il s’agit d'une combustion de matières hydro- carbonées. j Il est donc bien établi aujourd’hui que le sucre venant de l'intestin et dérivant des féculents de l'alimentation est arrèté dans le foie et s'y … dépose sous forme de glycogène — que d’autre part le dépôt de glycogène hépatique est cons- tamment attaqué et transformé petit à petit en sucre — sucre entrainé par le sang et distribué aux différents organes. Tous ces faits découverts par Claude Bernard il y a près de 35 ans, puis contestés par d’autres expérimentateurs,sont fina- lement sortis triomphants de la longue critique à laquelle ils ont été soumis. HIT En est-il de même d’un autre point très im- portant de la doctrine de Claude Bernard? Le glycogène du foie peut il avoir une autre ori- gine que les féculents de l'alimentation ? Claude Bernard avait cru résoudre cette question en nourrissant des chiens exclusivement avec de la viande : leur foie s'était montré fort riche en glycogène. Mais, à cette époque, Claude Bernard “ignorait que la viande de boucherie, et surtout les muscles de cheval (nourriture habituelle des chiens de laboratoire), contiennenttoujours une proportion notable d'hydrocarbonés. Le glycogène trouvé dans le foie des chiens ne provenait-il pas du sucre ou du glycogène contenu dans la viande ingérée ? Wolffberg, Naunyn et d’autres répétèrent l’ex- périence de Claude Bernard, en nourrissant leurs chiens avec de la viande qu'ils avaient fait bouillir avec de l'eau, et ils trouvèrent également une grande quantité de glycogène dans le foie des animaux. Külz a montré que ces dernières expé- riences elles-mêmes ne sont pas à l’abri de toute critique. Après plusieurs heures d’ébullition, la viande de boucherie peut encore contenir du glyco- gène ou d'autres hydrates de carbone. Pour l'en débarrasser complètement, Külz a prolongé la ma- cération de la viande pendant deux jours dans de l’eau à 30-38. Il fit également des expériences en nourrissant des animaux (soumis à un jeûne préa- lable) avec de la fibrine, de la caséine, de l’albu- mine du sérum ou du blanc d'œuf. Dans la plupart de ces expériences, il constata la formation de glycogène dans le foie. Les expériences faites avec .de l’albumine exempte de graisse et d’hydrates de carbone sont particulièrement démonstratives. Elles établissent pour la première fois, d’une façon R£VUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892 L. FREDERICQ. — LE FOIE, LABORATOIRE DE RÉSERVES ALIMENTAIRES 405 irréfutable, la possibilité de la formation du glyco- gène aux dépens d’albumine. [ci encore les expé- riences les plus récentes, exécutées avec les pré- cautions les plus minutieuses, n’ont fait que confirmer l'exactitude des faits découverts par Claude Bernard. Le glycogène peut-il se former également aux dépens de la graisse de l'alimentation? Cest là une question qu'aucun physiologiste n’a, je crois, cherché à résoudre. Il faudrait prendre un cer- tain nombre d'animaux identiques, chiens, pou- lets, pigeons, faire disparaitre au préalable le glycogène de leur foie et de leurs museles ou tout au moins le réduire à un minimum par un ou plusieurs des moyens appropriés : jeûne, exer- cice musculaire, froid, etc., puis leur faire ingérer une certaine quantité de graisse exempte d’albu- mine et d'hydrocarbonés. Le dosage du glycogène hépatique d’après le procédé de Külz (ébullition du foie en présence de la potasse), praliqué chez des animaux n'ayant ingéré que de la graisse, et chez des animaux n'ayant rien ingéré, permettrait de vérifier si la graisse a eu une influence sur la pro- duction de glycogène. Il faudrait également tenir compte, dans ces expériences, de la valeur des échanges respiratoires et de l’excrétion d’azote, pour pouvoir déterminer si le glycogène formé dans le foie l’a été au moyen de la graisse ingérée. Nous venons de voir que tout le glycogène du foie peut ne pas provenir des hydrocarbonés de l'alimentation. Il est intéressant de poser la ques- tion inverse et de se demander si toute la fécule ou tout le sucre provenant de l'alimentation est des- tiné à se déposer dans le foie sous forme de gly- cogène. On admettail, il y a quelques années, que la glycose, la dextrine, formées par la digestion et dérivées des aliments, n'étaient propres qu'à être brûlées immédiatement ou à se transformer en glycogène. L'influence bien connue d’une alimen- tation riche en féculents, sur la production de la graisse du corps.était expliquée par une action in- directe (Voit). La fécule permettait d’épargner une certaine quantité d’albumine qui, sans cela, aurait été détruite intégralement, tandis que, grâce à la fécule, une partie de l’albumine se transformait en graisse. Cette opinion exclusive a été abandonnée par Voit lui-même. Il est établi aujourd’hui qu'une partie notable des féculents de l'alimentation peut (au moins chez les herbivores) servir à fabriquer de la graisse dans l'organisme. C’est ce qu'ont prouvé un grand nombre d'expé- riences d’engraissement pratiquées sur des oies, des porcs, etc., expériences au cours desquelles on analvsa les evcreta et les èngesta des sujets, et à ALES 406 la fin desquelles on dosa la quantité de graisse contenue dans leur corps. Une détermination de graisse faile au début de l'expérience chez un ou plusieurs sujets témoins aussi semblables que pos- sible, servait de point de départ. B. Schul!z a trouvé, par exemple, chez des oies nourries avec beaucoup de féculents et peu de graisse et d’albumine, que 19 °/, au moins de la graisse formée provenait des féculents de l'ali- mentation. Un des exemples les plus démonstra- tifs a été publié par Soxhlet en 1881. Un porc ayant ingéré en quatre-vingts jours une quantité de riz contenant 11 kilos 314 d’albumine,0, kilo 343 de graisse et 120 kilos 824 de fécule, avait formé et déposé dans ses tissus 22, kilos 480 de graisse. De ces 22, kilos 180, 0, kilo 343, c'est-à-dire 1,5 °/, pouvaient provenir de la graisse des aliments; 3, kilos 685, c'est-à-dire 16,9 °/, pouvaient prove- nir de 7, kilos 469 d’albumine alimentaire dispo- nible. Le reste de l'albumine alimentaire avait servi à faire de la viande ou avait été détruit !. Mais les 81,6 °/, restants de la graisse formée ne | pouvaient provenir que de la fécule de l’alimenta- tion. J. Munk, Voit, etc., sont arrivés à des résul- tats analogues. La fécule non transformée en graisse avait été brûlée. À chaque repas riche en fécule correspond une augmentation dans le chiffre de l’oxygène consommé et dans celui de CO? produit. Le quotient respiratoire se rapproche dans ces condi- tions de l’unité (comme le quotient de combustion | l'huile de lin et un peu de viande. Les deux chiens de la fécule), preuve que c’est bien à une destruc- tion de fécule qu’il faut attribuer l'exagération des phénomènes de combustion interstitielle. IV Où se trouve le laboratoire qui dans l'organisme transforme les hydrocarbonés en graisse? Les données que nous possédons ne nous permettent pas de résoudre cette question avec le même degré de certitude que pour la transformation des hydro- carbonés en glycogène. 11 me semble extrémement probable que c’est également dans le foie : à côté de sa fonction glycogénique, le foie remplirail égale- ment une fonction adipogénigue. Une partie du * Une alimentation formée exclusivement de féculents ou de graisses, ou d’un mélange des deux, n'est pas capable d’en- | tretenir la vie. En effet, la destruction des albuminoïdes dans le corps et l’excrétion d’azote par les urines ne s’arrêtent ja- mais : l’azote éliminé n’étant pas remplacé, il s'ensuit que le corps s’appauvrit graduellement en albuminoïdes, jusqu’à ce que survienne la mort, L’adjonction des féculents à la ration alimentaire d'un ani- mal carnivore agit de la même facon que l’adjonction de graisse : elle permet de diminuer la proportion d’albumi- noïdes de l’alimentatien. Voit et Pettenkofer admettent que 175 grammes de fécule peuvent en effet protéger contre la combustion orzanique 100 grammes de graisse. | sucre qui est amené au foie par la veine porte L. FREDERICQ. — LE FOIE, LABORATOIRE DE RÉSERVES ALIMENTAIRES | second, très diffluente, fournit plus d’un kil du + NS", POUR 1 se FRE UT, r transformerait sur place en graisse. Celte gre se déposerait d’abord dans le foie, puis dans rents autres organes : tissu cellulaire sous-a tané, mésentère, surface des reins, du cœurelk C'est un fait reconnu depuis longtemps que de cellules hépatiques se chargent de globules d graisse après tout repas abondant; et que cet graisse disparait ensuile peu à peu pendant Je périodes d’abstinence. Comme pour le glycogèni et le sucre, le foie serait à la fois lieu de produez= tion de la graisse et lieu de dépôt de cette subs tance. È Quant à l’origine de la graisse du corps, nous savons aujourd'hui qu’elle est triple. Une pa lie de la graisse déposée dans nos organes provien! directement de la graisse de l’alimentation; une autre partie résulte de la transformation des hydrocarbonés ; enfin l’albumine peut également fournir les matériaux aux dépens desquels se cons- tituent les molécules de trioléine, tripalmitine tristéarine, etc. Comme exemple de graisse du corps empruntée directement à l'alimentation, citons une expé rience de Lebedeff (1882). Deux chiens furent a préalable soumis à un jeûne de trente jours : i perdirent 40 Z de leur poids, ce qui correspond à une disparition presque complète de la graisse du corps; l’un d’eux fut nourri pendant trois semaines avec du suif de mouton et une petite quantité de viande; l’autre reçut pendant le même temps de du furent tués : la graisse du premier était solide et semblable à celle du mouton. La graisse du d'huile ne se solidifiant pas à 0° et très analogue à l'huile de lin. Quant à la possibilité de la transformation des albuminoïdes en matières grasses, elle a été établie par de nombreuses séries de dosages d'ingesta el d'excreta exécutés par Voit et Pettenkofer et par d'autres sous leur inspiration et d’après leurs méthodes. Voici une de leurs expériences: un grand chien fut nourri d’une grande quantité de viande; tout l’azote de l’alimentation fut retrouvé dans les urines et les excréments (Pettenkofer et« Voit n’admettent pas l’exhalation d’azote par les poumons), preuve que la teneur du corps en azote“ albuminoïde n’avait pas changé : mais une partie notable du charbon contenu dans les aliments n'avait pas reparu sous forme de CO? dans l’air expiré. L'augmentation de poids de l’animal consi- déré comme graisse correspondait assez exacte- ment à la quantité de charbon fixée dans les tissus. Un grand nombre d’autres faits ont d’ailleurs surabondamment prouvé la possibilité de la for- $ PET 0e LI mation de la graisse aux dépens de matériaux buminoïdes !. Le foie parait donc jouer vis-à-vis des deux des catégories de matières alimentaires non de dépôt, un magasin de réserves nulritives el une usine où se fabriquent ces réserves aux dépens de matériaux hétérogènes. Mais est-il bien nécessaire d'établir ici une op- LE FOND _ Si, à beaucoup d’égards, notamment par le dé- sarroi général des esprits, la défaillance des carac- tères et l’affaiblissement de la notion du bien public, en face des progrès constants de l'égoïsme individuel, le siècle où nous vivons mérite tout autre chose que de l’admiration, il est du moins un honneur qu'on ne saurait lui contester : c'est d’avoir inauguré, sur mer, la série des croisières purement scientifiques. Tandis qu’autrefois on voyait des navires écumer les océans, soit au profit d’un particulier entreprenant, soit pour le compte d’une nation avide de conquérir de nou- weaux territoires ; tandis que, plus tard, de hardis navigaleurs se sont risqués à travers les glaces, avec l'espérance chimérique d’y trouver un pas- sage dont le commerce pourrail profiter, il était . réservé à notre époque de voir des gouvernements ou des sociétés équiper à grands frais des expédi- + tions, dont la science désintéressée formait l’u- nique objet. De ces récentes campagnes la plus mémorable est sans contredit celle que le navire anglais le Challenger a exécutée, de 1873 à 1876. 4 "1 ) Thomson. Depuis le jour où le chef de l'expédition a fait connaître, dans son livre « Les Abimes de lu mer », les premiers résultats de ses merveilleux dragages, l'attention publique a été constamment tenue en éveil par l’apparition successive de plus de trente magnifiques volumes, où des spécialistes éminents ont décrit toutes les classes d’orga- nismes recueillis, et les zoologistes peuvent dire quel riche trésor d'informations nouvelles ces luxueuses publications ont ajouté à nos connais sances sur le monde vivant, Mais la description des dépôts minéraux se fai- sait toujours attendre, et si l’on avait eu soin d'indiquer au furet à mesure, par une suite de rap- ds LS VENTES 1 La portée de ces faits à récemment été contestée par. Pflüger, A. DE LAPPARENT. — L sous la direction scientifique de sir Wyville | E FOND DES MERS ct les albuminoïdes de l'alimentation? Je ne le pense pas. L'augmentation de poids que le foie présente à la suite d’une digestion copieuse corres- pond autant à un gain de matières albuminoïdes qu'à une richesse plus grande en glycogène et en graisse. Il me parait probable qu'ici aussi le foie joue le rôle de grenier d'abondance où s’emmagasinent les réserves nutrilives azolées. Léon Fredericq, , ologie Professeur de Physi à l'Université de Liège. DES MERS ports sommaires, les résultats généraux oblenus dans cette branche d'investigations, du moins il tardait au monde savant d’avoir sous les yeux, avec le même luxe de détails, l’ensemble des do- cuments recueillis. C’est à ce vœu que vient de répondre la publication, par MM. John Murray et A. Renard, d’un superbe volume grand in-# de 526 pages, avec 29 planches coloriées, 43 cartes et 22 diagrammes #. C’est M. John Murray qui, au cours de l’expédi- lion avait été chargé de recueillir, d'examiner et de conserver tous les échantillons de dépôts ma- rins rapportés par la sonde ou la drague. En 1876, il en fit connaitre l’ensemble dans les Proceedings des Sociétés royales de Londres et d'Édimbourg. Deux ans après, l’éminent minéralogiste belge l'abbé A. Renard, aujourd’hui professeur à l'Uni- versité de Gand, fut invité par sir Wyville Thomson à assister M. Murray dans l’étude lithologique des dépôts, et de cette collaboration résultérent, en 1884, plusieurs mémoires préliminaires. Depuis lors, les études ont été poursuivies, non seulement sur les échantillons du Challenger, maïs sur ceux | recueillis par les expéditions norwégiennes, ita- | liennes, françaises, allemandes et américaines, qui s'étaient organisées à l'exemple de la première, De plus, les auteurs ont eu 4 leur disposition les malériaux dragués dans loutes les mers par la marine britannique et spécialement par les navires employés à la pose des câbles sous-marins. C’est donc une sorte d'inventaire général du fond des | mers qu'ils ont pu dresser, et l’on pourrait presque dire que la carte lithologique du lit des océans, qui accompagne le bel ouvrage publié par MM. Murray et Renard, offre moins de lacunes que la carte géologique de l’ensemble des continents, telle qu’on peut la dresser aujourd'hui. En effet, s’il est 1 Report on deep sex deposils, based in specimens collec- Led during We vogage of H. M. $S. Challenger, 1891. 408 A. DE LAPPARENT. — LE FOND DES MERS encore plus d'un massif montagneux où d’un désert où les géologues ont été empêchés de pé- nétrer, soit par la sauvagerie des hommes, soit par l’inclémence des conditions physiques, les mers ont été sillonnées en tout sens, el la drague a partout révélé la nature des dépôts qui en tapis- sent le fond. D'ailleurs, dans ce milieu où l'érosion ne joue aucun rôle, où la température demeure invariable, sans qu'aucune cause de perturbation se fasse jamais sentir, les circonstances varient très progressivement, demeurant les mêmes sur de vastes étendues, en sorte que quelques coups de drague, convenablement espacés, suflisent à définir les diverses régions abyssales. Néanmoins, le fait d'avoir pu, en si peu de temps, marquer sur une carte les variations de la nature du fond. aussi bien que celles de la population qui l'habite, demeure l’un des plus remarquables tours de force dont notre époque ait le droit de s'enorgueil: lir ;elil en faut faire honneur, à la fois aux natu- ralistes qui ont su mener à bien cette tâche, et aux marins par qui l’art des sondages a été récem- ment si bien perfectionné. On sait que M. J. Murray a divisé les sédiments marins en deux classes : 1° les dépôts terrigènes, formés, tout contre les masses continentales, var des débris provenant de la destruction de ces mêmes masses; 2 les dépôts pélagiques, qui pren- nent naissance loin de la terre ferme, dans des eaux profondes, et à la composition desquels les débris du continent ne prennent qu’une part insi- gnifiante. Parmi les dépôts terrigènes, il y a des sables, des graviers el des vases, déposés contre le ri- vage, dans l'intervalle du jeu des marées : ce sont les dépôts littoraux; il y à aussi d’autres sables, graviers el vases, formés entre le niveau de basse mer et la ligne de cent brasses ; ce sont les sédiments d’eau peu profonde ; enfin il y a aussi les sédiments d’eau profonde, qui comprennent des vases bleues, rouges ou vertes, des vases volca- niques el des vases coralliennes. Quant aux dépôts pélagiques, ils sont d’ori- gine organique ou chimique, et comprennent : la boue à globigérines, Va boue à diatomées, Va boue à radioluires, enfin l'argile rouge des grands fonds. Ces diverses catégories de sédiments ont été suffisamment bien définies, dans les précédentes publications des auteurs, pour qu’il soit superilu d'y revenir ici. Mais ce qui est nouveau, c’est l'exacte détermination, pour la première fois en- treprise, des superficies réciproques occupées par ces formations. En voici le tableau, réduit en mè- tres pour les profondeurs, et en kilomètres carrés pour les surfaces : TENEUR MOYENNE EN CARBONATE CALCIQUE SUPERFICIE EN KILOM. CARRÉS PROFONDEUR DÉPOTS MOYENNE 133.385 .000 5.931.100 28.179.200 128.256,800 .036 000 .622.142 4996 5296 2703 3693 Argile rouge........ Boue à radiolaires.. Boue à diatomées.…, Boue à globigérines, Boue à ptéropodes.. 1910 Vase corallienne.... 1354 Sable corallien 322 Autres sédiments terrigènes,...-... .069.500 19.20 1559 Il ressort de ce tableau que tous les sédiments. terrigènes (catégories 6, 7 et 8) n’occupent ensem- ble que 14 % de la superficie du fond des mers. Le reste appartient aux dépôts chimiques et orga- niques : L’argile rouge des grands fonds et la boue à globigérines se disputent la prééminence, la pre- mière occupant 38 %, et la seconde 36 % de la superficie totale. Mais elles sont loin d’être égale- ment réparlies entre les divers océans. La belle carte jointe au rapport de MM. Murray et Renard le montre clairement. On peut dire que l’Atlan- tique presque tout entier et la majeure partie de l’océan indien sont occupés par la boue à globi- gérines, landis que l'argile rouge réclame pour elle seule près des deux tiers de l'océan Pacifique. Si l’on réfléchit que le Pacifique se distingue surtout des autres mers par le petit nombre de fleuves dont il recoit le tribut, et que précisément la boue à globigérines y fait absolument défaut, sur une largeur de plus de 30 degrés de longitude en moyenne, toul le long du littoral des deux Amé- riques, ou moins jusqu’à la moitié du Chili, il pa- raitra naturel, au premier abord, d'en conclure que le développement des globigérines dans l’At- lantique, sous toules les latitudes sans distinction, peut tenir à la provision de matières nutritives apportées dans cet océan par les eaux douces. En effet, la boue à globigérines résulte surtout de la chute continue, sur le fond, des enveloppes cal- caires des foraminifères qui vivent dans les eaux de surface. Mais il ne faut pas oublier non plus que la carte des dépôts du fond ne donne qu'une idée très incomplète de la distribulion des orga- nismes de surface. En effet, l'observalion a dé- montré qu'à partir de 4.000 mètres de profondeur, les enveloppes de globigérines devenaient extré- mement friables et que, plus bas, elles cessaient d'être reconnaissables, comme si la pression qui règne dans ces abimes en favorisait la dissolution; de fait, la boue à globigérines fait entièrement défaut dans les grandes fosses atlantiques siluées au large des Antilles, comme aussi dans cette zone de fonds de 8.000 mètres qui s'étend, dans le Pa- cifique, tout contre le Japon et les iles Kouriles. De mème, l'apparition des fonds de 4 à 6 mille ms PS T ve crédit Lane à #} LUS A. DE LAPPARENT. — LE FOND DES MERS 409 mètres, à l’ouest de la Patagonie, fait naître une grande tache d’argile rouge au milieu d'un espace tout entier occupé par les dépouilles des globigé- rines. De la sorte, il convient, dans la prédomi- nance de l'argile rouge, de faire une part, et pro- bablement la part principale, à la dissolution qui empêche les globigérines d'arriver sur le fond. La même raison suflirait à expliquer pourquoi la boue en question, absente de toute partie orien- tale du Pacifique, reparait au contraire en abon- dance autour de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande, du Japon et des chaines d’iles polynésiennes. Il faudrait tout un volume pour exposer conve- nablement les particularités des divers dépôts péla- giques. Obligé ici de nous borner, nous laisserons de côté les sédiments organiques, renvoyant ceux qui seraient désireux de les bien connaitre aux belles planches de l’ouvrage Murray et Renard, où sont dessinées avec tant de soin et figurées avec leurs couleurs naturelles non seulement les dé- pouilles des protozoaires, des ptéropodes, des algues, coccolithes, rhabdolithes, etc., mais encore toutes les formes de particules minérales qui s’y trouvent mélangées, et qu'après lessivage on re- trouve dans les fre washings. Nous insisterons seu- lement sur les formations purement chimiques qui accompagnent l'argile rouge des grandes profon- deurs. Dans l'Atlantique du Nord, cette argile est rouge-brique, tandis que, dans le Pacifique méri- dional, elle tourne au brun chocolat. A la différence des argiles pures, elle fond au chalumeau en une perle noire, souvent magnétique. En général, elle est douce et presque savonneuse au toucher ; cepen- dant la présence de fines aiguilles de pierre ponce peut lui donner par exception une texture grenue. D'où vient cette argile, formée sur des fonds où ne peut arriver aucun détritus provenant de la terre ferme? MM.Murray et Renard pensent qu'elle dérive de la décomposition de matières volcaniques. En tout cas sa formation doit être très lente, et c’est tout au plus si, depuis les temps tertiaires, il s’en est déposé quelques dizaines de millimètres ! La preuve en est fournie par l’extraordinaire abondance, à la surface de cette argile, d’ossements de cétacés et de dents de squales, dont les uns appartiennent certainement à la faune actuelle, tandis que d’autres ne peuvent être identifiés qu'avec des espèces ter- liaires. Dans cette dernière catégorie se rangent les énormes dents de Carcharodon meyalodon, trou- vées dans le Pacifique méridional par 4.700 mètres de profondeur. Ainsi d'innombrables générations de Vertébrés marins ont pu semerles parties dures de leur organisme sur le fond du Pacifique, sans que, depuis lors, l'épaisseur de l'argile rouge en- gendrée ait suffi pour les recouvrir. Les surfaces occupées par cette argile sont donc comme un os- suaire, où les débris des àges les plus divers gisent pèle-mêle, et le nombre en est tel qu'un seul coup de drague a rapporté une fois 50 caisses tympa- niques de cétacés et 1.500 dents de squales, sans compter 12 fragments roulés de pierre ponce et deux à trois boisseaux de nodules d'oxyde de man- ganèse hydraté ! Ces concrélions ne sont pas le produit le moins curieux des grandes profondeurs. Capables d'at- teindre la grosseur du poing, elles se composent de couches concentriques d'oxyde hydraté de manga- nèse, répondant, d'après M. Renard, à la formule RTE 2 Mn 0? + 3 H°0, et toujours mélangé de limonite. L’oxyde de manganèse s'y est déposé, en pellicules successives, autour d’un corps étranger, le plus souvent une dent de squale. Est-ce par la décom- position des matières volcaniques basiques, verres palagonitiques et autres, qui accompagnent ces no- dules ? Est-ce par la précipitation, à l’élat d'oxyde, du carbonate de manganèse contenu dans les eaux de la mer? La question reste à éclaircir. En tout cas, on verra avec grand intérêt les dessins de ces nodules, donnés dans les planches I à IV de l’ou- vrage, mais surtout les représentations microsco- piques coloriées des planches XVI, XVII, XVII, XIX, XX VIII et XXIX. La structure tantôl dendri- tique, tantôt zonaire, tantôt bréchiforme des no- dules, y est admirablement mise en évidence, ainsi que la part fréquemment prise par les verres pala- gonitiques à la formation du nucléus des con- crélions. Ainsi, par ces profondeurs de plus de 4000 mètres, à une température extrêmement voisine de zéro, il s'accomplit des réactions chimiques par suite desquelles un enduit manganésé vient s'appliquer autour des corps durs répandus sur le fond. Encore n'est-ce là qu'une simple concrétion ; M. Renard a montré qu'il se passe dans ces abimes des réac- tions encore plus remarquables, aboutissant à la formation de petits cristaux bien définis, dans lesquels il a déterminé l’espèce de zéolithe connue des minéralogistes sous le nom de phillipsite ou christianite (harmotome calcaire). Répandus dans l'argile rouge, où, pour les apercevoir. il faut le plus souvent un grossissement de 280 diamèlres, ces cristaux peuvent aussi s’assembler en sphérolithes radiés d’un dixième de millimètre, formant le nu- cléus d'un nodule de manganèse : si l’on réfléchit que, dans les coulées volcaniques de la surface des continents, les zéolithes, en particulier la chistia- nite, apparaissent souvent dans les cavités de la lave, à litre de produits d’altération de cette der- nière, on ne sera pas autrement surpris de retrou- ver ces minéraux sur le. fond des mers, au sein d’une formation qui résulte, elle aussi, de lalté- 410 D' A. LEDOUX-LEBARD. — MICRO-ORGANISMES THERMOPHILES ET THERMOGÈNES ration des matériaux volcaniques ambiants. Il y a des cas où la christianite forme jusqu'à 20 et même 30 °/, de l’argile où on l’observe. Les études de MM. Murray et Renard ont encore jeté une vive lumière sur le mode de formation de la glauconie, cet hydrosilicate de fer et de potasse, qui est répandu en pelils grains verts dans ün si grand nombre de formations géologiques. La glau- conie se rencontre dans toutes les vases vertes, el même on la trouve en grains isolés dans les vases bleues terrigènes. Rarement les grains ont plus d’un millimètre de diamètre. Les plus typiques sont arrondis, parfois mamelonnés; leur couleur est le vert foncé ou noiràtre, Leur forme a souvent une vague ressemblance avec celle des foramini- fères, et comme, parmi ces grains, on en rencontre toujours quelques-uns qui sont incontestablement des moulages de ces protozoaires ; comme enfin les foraminifères se montrent fréquemment remplis, en totalité ou en partie, de glauconie, —l'idée s’im- pose que ce minéral a dû se former par voie de dépôt dans les cavités des organismes cealeaires. En plus d’un cas, les apparences des grains con- duisent à admettre que la glauconie, en grossis- sant, à fait éclater l'enveloppe calcaire qui la ren- fermait. Il faudrait encore mentionner les intéressants détails donnés sur la formation des concrétions phosphatées, ainsi que la description de ces cu- rieux globules, analogues aux chondres météori- ques, et auxquels MM. Murray et Renard attribuent une originecosmique. Mais’est dans le livre même de ces savants qu’il en faut lire la description, ac- compagnée de figures qui valent presque la vue directe des échantillons. Notre but était seule- ment d'appeler, sur celte remarquable publication, l'attention de tous les géologues, et d'exprimer en leur nom la reconnaissance qui esl due, soit aux gouvernements assez avisés pour prendre l’initia- tive de pareilles entreprises, soit aux hommes ca- pables, comme M. John Murray, d'y dépenser pendant {tant d'années une telle dose de sagacité. de persévérance el de désintéressement. A. de Lapparent. MICRO-ORGANISMES THERMOPHILES ET THERMOGÈNES LEUR CULTURE NATU Jusqu'à ces derniers temps le rôle du sol dans la propagation des maladies virulentes est resté fort obscur. Les biologistes ont tendance à ad- meltre que les conditions diverses réclamées par les microbes pathogènes pour se multiplier, S'y trouvent rarement réunies. Les faits que nous nous proposons d'exposer conduisent à de nou- velles inductions à ce sujet. Ils sont relatifs à la culture naturelle des micro-organismes, lhermo- philes et thermogènes, dans les couches superfi- cielles de la terre. I Adanson a observé au Sénégal diverses plantes qui végétaient et conservaient leur verdure, bien que leurs racines fussent plongées dans un sable atteignant, à de certains moments, la température de 77°. Forster a trouvé le Véter agnus castüs au pied d'un volcan de l'ile Tanna, dont le terrain était à 80°. De Candolle !, qui cite ces observations, en rappelle beaucoup d’autres semblables. Ce sont là des faits exceptionnels. En général, une lempéra- ture de 50°, prolongée pendant quelque temps, est mortelle pour les plantes supérieures. Mais on sait, depuis longtemps, que certains groupes de végétaux vivent normalement dans les eaux ther- males et à des températures égales ou supérieures y è 1 Awuc-Pyr. pe Canoe. Physiol. végétale, t. II, p. 876. RELLE DANS LE SOL à 50°. Telles sont les oscillaires qui vivent dans les eaux de Plombières à 51°, de Carlsbad à 50, L. Olivier ! a montré que certains organismes, trouvés dans des sources chaudes de Cauterets, peuvent vivre en vie active, se développer en un mot, à 65° GC. et même au voisinage de 70° C. Certes etGarrigou ? ont découvert, dans une source de Luchon, à 64, des bâtonnets courts et mobiles et d’autres plus allongés et immobiles, qu’on trou- vait, à l'exclusion de tous autres organismes el qui augmentaient de nombre, lorsqu'on s’éloignait de la source, tant que l’eau conservait une tem- péralure supérieure à 48°. En aval de cette limite, on ne trouvait plus ces bacilles, mais on voyait apparaitre les oscillaires, les diatomées, les infu- soires el enfin les bactéries de la putréfaction. Depuis quelques années, le domaine de ces microbes thermophiles s'est beaucoup étendu. Ce n’est pas seulement dans les eaux thermales qu’on les trouve, mais dans certaines eaux de rivière et dans toutes les couches superficielles du sol. Miquel *, le premier, a constaté dans le sol, dans l’eau, dans le contenu intestinal de l’homme el des animaux, la présence fréquente d'un bacille ! Louis Ozrvier. Sur la flore microscopique des eaux sul- fureuses, C. Rend., t. CIE, p. 556. 2 C. Rend. T. CII, p. 105. 3 Bacille vivant au delà de 70°, Ann. de microgr., I, 1888. « D D' A. LEDOUX-LEBARD. — MICRO-ORGANISMES THERMOPHILES ET THERMOGÈNES 411 qui végète activement entre 65° et 70° et qu'il a dénommé, pour cette raison, Bacillus thermophilus. Il cesse de pousser au-dessous de 42°. Il meurt au-dessus de 70°. À 50° c’est un bâtonnet qui pro- duit une spore à son extrémité; à 60°-70°, c’est un filament. Ce pléomorphisme, dû à l’action de la température, esi fréquent. La forme filamenteuse correspond ordinairement aux températures éle- vées, encore compatibles avec le développement de la plante, mais probablement nuisibles. Van Tieghem ! a également observé à 60°, 65°, 70°, la végétation et la sporulation de plusieurs es- pèces bactériennes. Globig, reprenant cette étude, a montré que ces microbes thæmophiles abondent dans les couches superficielles du sol. Il à isolé de la terre de jardin 30 espèces qui poussaient sur pomme de terre à 58°. Ces espèces bactériennes affectaient dans tous les cas la forme cylindrique : c’élaient des bacilles dont plusieurs produisaient des spores au bout de 2% heures. Aucun d'eux n'était pathogène. On ne connait pas de microbe pathogène qui pousse sur pomme de terre à 58°. Ces espèces thermophiles du sol ne sont pas thermophiles au même degré; lorsqu'on élève de plus en plus la température, les ensemencements faits avec la terre porteuse de ces germes, ne don- nent pas les mêmes cullures.Certaines espèces,qui poussaient à 50°,ne poussentplus à 60°; mais, à cette température, des espèces nouvelles apparaissent. Le nombre des colonies diminue de plus en plus avec l’élévalion de la température : à 68, il est déjà très réduit; au-dessus de 70°, les ensemence- ments sur pomme de terre restent stériles. On réalise ainsi, par l’expérience, un phénomène de même ordre que celui auquel on assiste dans les montagnes où la flore se modifie avec l'altitude. Celle des glaciers n’est pas celle de la zone des sa- pins ; plus haut encore, elle se réduit à quelques types qui disparaissent sur les dernières cimes. Il importait de savoir si les microbes qui se développent à 58° peuvent aussi se cultiver à la température ordinaire. Les limites de température maximum et minimum au delà desquelles la végé- talion s'arrête ont un écart variable, selon les plantes. C'était à l'expérience de décider si certains micro-organismes du sol sont assez indifférents à la température pour se cultiver à des degrés ther- miques très variés ou si, au contraire, leur déve- loppement ne souffre qu'un faible écart entre les degrés extrêmes. Globig a fait cette recherche pour douze espèces thermophiles issues du sol, et les résultats qu'il a obtenus ont été très divers suivant les espèces. Pour l’une d'elles, l'écart entre le minimum et le maximum de lempéralure 1 Société botanique de France. Bulletin, t: XXVIIL, p. 35. était considérable. Elle poussait à 60°, mais aussi à 68° et à 20-25°, Pour les autres espèces, la limite inférieure était, soit 54°, soit 50°, ou bien elle était comprise entre 40° et 50°; aucune de ces espèces ne pouvait donc se développer, comme dans le cas précédent, à la température de la chambre. Il y a donc, dans le sol, des microbes qui ne se développent qu’à des températures élevées lors- qu’on les cultive sur des milieux tels que la pomme de terre ou le sérum et dont il faut maintenant rechercher la provenance, car ces germes n’ap- partiennent pas nécessairement à la flore du sol, Ce peuvent être des germes importés, supposition qui s'allie bien avec ce fait que dans les terres non remuées, les couches superficielles, où l’apport des organismes de l’air et de l’eau est évident, sont les seules où se rencontrent les espèces thermophiles. Contrairement aux prévisions, des échantillons de poussière recueillie au voisinage des poëles, où les bactéries thermophiles devaient trouver des conditions favorables de température, n'ont pas donné de culture sur pomme de terre à 65°, alors que des poussières prises sur des escaliers con- duisant aux caves ou aux combles, fournissaient de nombreuses colonies en deux jours. Globig a essayé de cultiver sur pomme de terre à 63° les bactéries contenues dans les déjections inteslinales ou les matières fécales de l’homme et de nombreux animaux et aussi dans les eaux sales, dans les eaux de conduites, et n’a guère obtenu que des résultats négatifs. Il n’a pas trouvé, dans l'eau, de microbes thermophiles, tandis que Miquel y signale la présence de son « Bacillus ther- mophilus ». Quelque solution que donnent des tra- vaux ultérieurs à ces questions particulières, cette richesse du sol en bactéries thermophiles, opposée à leur rareté en dehors de ce milieu, semble bien autoriser à considérer ces espèces comme apparte- nant à la flore du sol. Mais alors comment s’expli- quer le développement de ces espèces dans le sol? Est-il permis de supposer que, grâce à des condi- tions de milieu qui se rencontrent dans le sol, ces microbes peuvent se développer à des tempé- ratures peu élevées. À l'appui de celte idée sur l'influence du milieu, on pourrait citer le bacille du choléra, qui pousse sur gélatine à de basses températures, mais non sur pomme de terre. Mais, pour celles des bactéries thermophiles du sol qui ne se cultivent pas sur sérum ou sur pomme de terre, au-dessous de 50°, cette limite inférieure est si élevée que le pouvoir attribué au terrain de renare la végétation possible à une température de beaucoup inférieure deviendrait une hypothèse peu fondée. On se trouve ainsi conduit à admettre que ces bactéries (rouvent dans le sol les sources de chaleur nécessaires à leur développement. A2 D' A. LEDOUX-LEBARD. — MICRO-ORGANISMES THERMOPHILES ET THERMOGÈNES Il n’est pas probable qu'il faille faire fintervenir ici l’action directe de la chaleur solaire. Les microbes thermophiles se rencontrent aussi bien dans le sol de Drontheim, en Norwège, que dans celui de la Nouvelie-Guinée. Dans ces sols de régions si différentes, on retrouve les mêmes espèces thermophiles que dans nos contrées. Il nous semble qu’on peut s'expliquer le déve- loppement des espèces thermophiles dans le sol sans invoquer l’action du soleil, mais à la condi- tion de lenir compte des relations symbiotiques que ces êtres peuvent affecter avec d'autres espèces | végétales et aussi de se faire une idée exacte de ce qu'est la température du sol. Les microbes ne vivent pas dans le sol à l’état d'espèces isolées, telles que nous cherchons à les obtenir dans nos cultures. Ils rencontrent autour d'eux d’autres espèces avec lesquelles ils peuvent, avec profit, s'unir en symbiose. Il en est peut-être ainsi pour les microbes thermophiles qui trouve- raient alors au contact intime des éléments associés la chaleur nécessaire à leur mode de vie. « Si, dit « Engelmann, chez les plantes, lachaleur produite « à l’intérieur des cellules, dans les molécules, est « énormément inférieure, en quantité, à l'énergie « qui, dans les conditions ordinaires, est amenée « du dehors par voie de rayonnement, elle a par « contre l'avantage dû à ce que les sources de la « chaleur ne se trouvent qu'à une distance molé- « culaire des particules qui doivent l'absorber dans « le plasma, de pouvoir arriver avec toute sa can- «centration au point où elle doit agir. En outre, «il est facile de comprendre que ces températures « des molécules, qui par leur dédoublement ouleur «oxydation fonctionnent comme sources calori- « fiques internes, peuvent être dans beaucoup de «cellules, ou même doivent être extrèmement éle- «vées, si élevées que l’exiguïté et le petit nombre « de ces sources calorifiques sont peut-être les « seules causes qui nous empêchent deles voir bril- ler !. » On comprend donc que, pour les microbes thermophiles, il y ait avantage à vivre en symbiose ou comme parasites sur des cellules elles-mêmes productives de chaleur. En second lieu, les phénomènes chimiques du sol sont une abondante source de chaleur. Le ther- momètre ne nous donne qu'une moyenne de la température du sol à l'endroit qu’il occupe. Il ne nous fait pas connaitre les températures que pro- duisent dans les molécules ou même dans les fines particules de matière, visibles au microscope, les phénomènes de combinaison ou de dédoublement dont les molécules ou leurs agrégats sont le siège. Parmi ces phénomènes, les uns absorbent, les * ExGELMANN. Les Bacléries pourprées et leurs relations avec la lumnière. Arch.néerlandaises, t. XXIIT. 2: livr. p. 189. autres émettent de la chaleur, Celle-ci se commu- nique aux corps plus froids qui environnent le foyer ; l’eau, retenue dans le sol, absorbe à elle seule une quantité considérable de ce calorique, à cause de sa chaleur spécifique élevée. Lorsque le corps qui émet de la chaleur a une masse très petite et le corps qui la reçoit une masse très grande, la température de ce dernier peut ne s'élever que d’une manière insensible ; il en est autrement si les corps ont des masses com- parables et si l’on considère, par exemple, des mi- crobes contigus à de fines parcelles de substance organique en voie de putréfaction. On ne peut ap- précier directement ces températures locales; li- mitées à de minimes espaces; mais la théorie in- dique qu’elles doivent atteindre un degré élevé. Ces hypothèses, destinées à orienter la recher- che, trouvent quelque appui dans ce que l’on va dire des micro-organismes thermogènes. Il Cette épithète de thermogène, pas plus que celle de thermophile, ne doit être prise à la lettre. Tous les êtres vivantsontbesoin de chaleur,tous dégagent de la chaleur. Mais les êtres thermophiles peuvent vivre à une température élevée, les thermogènes produisent une forte quantité relative de chaleur. Ce n’est que l’exagération d’une propriété générale. Les micro-organismes thermogènes sont très nombreux. On pourrait comprendre parmi eux un certain nombre de ferments. Schlæsing ‘ et plus récemment Suchsland ? ont attiré l'attention sur le rôle des bactéries dans la fermentation du tabac qui s'accompagne d’une élévation de température de 57°,5, suivant Nessler *, mais qui peut atteindre, dans certains cas, 80° et même 90°, d’après Pinet et Grouvelle #. Nous ne parlerons ici que de quel- ques faits étudiés dans ces dernières années. Cohn Ÿ a observé que l’orge commencant à ger- mer et mise en {as est, dans certaines conditions, le siège d’une fermentation secondaire, due au dé- veloppement d’un champignon : l'Aspergillus fu- migatus. Sous l'influence de la germination, la température s'élève vers 35°, dans les premiers jours, puis des moisissures se développent et en- lacent les grains d'orge de leurs mycéliums : la température atteint alors 40°; l'orge meurt à cette température qui continue à s'élever et ne laisse sur- vivre que l'Aspergillus fumigalus qui pousse à de hautes températures. Il pénètre de ses filaments mycéliens la masse d'orge qu'il transforme en un 1 Ur. ScaLæsiNG. Sur la fermentation en masse du tabac pour poudre. Mém. des manuf, de l'Etat. T. II. Livr. I. 1889. 2 SucasLanp. Tab. ferment., Ber. et D. bot Ges. 1891, $ 79. 3 Nesscer, Der Tabak, Mannheim. 1867. 4 Pier et GROUVELLE : Sur la ferm.en masse du tabac pour poudre. Mém. des manufactures de l’état. T. V. Livr. [, 1889. ® Jahresber. d. schles.Gesellsch. fur vaterl. Cultur.16 Feb. 89. po e D' A. LEDOUX-LEBARD. — MICRO-ORGANISMES THERMOPHILES ET THERMOGÈNES 415 bloc compact, comme le fait l’Aspergillus Orizæ avec le riz, dans la préparation du saké. En même temps, la température s'élève de plus en plus et elle atteint ou dépasse 60e. Il est possible, dit Cohn, qu'en variant la disposition de l’expérience, on puisse constater encore de plus hautes tempéra- tures. Ce dégagement de chaleur, d’après le même auteur, est dû à l'oxygène de l'air qui brûle les hydrates de carbone de l’orge germée. Le cham- pignon met en œuvre cet oxygène qui, sans lui, demeurerait inactif. —Si les microbes thermophiles pouvaient s'associer à des êtres tels que l'Asper- gillus fumigatus, ils trouveraient et au delà une température suffisante pour leur croissance. La putréfaction de substances animales va nous fournirun autre exemple de microbes thermogènes : Schottelius ! ayant observé la persistance, pen- dant des années, de la colorabilité et de la viru- lence des bacilles tuberculeux enfouis dans le sol, enterra des organes sains ou tüuberculeux d'hommes et d'animaux à une profondeur de 1“25. Des ther- momètres à maxima placés dans ces organes el d'autres mis directement dans la terre, au même niveau, devaient indiquer le maximum de tempéra- ture pendant la durée de l'expérience. Au bout de T à 8 mois, les organes furent déterrés : la tempé- ralure du sol avait atteint 13°, celle d’un poumon sain 22°, celle d’un poumon tuberculeux 36°. Karlinski ? a répété ces expériences pour un plus grand nombre de cas. Il a observé aussi ce fait curieux d'une plus haute température atteinte par les organeslésés, comparés aux organes sains. Mais, toujours, l'élévation de température était manifeste. Dans un cas où les organes provenaient d'un malade atteint de fièvre typhoïde avec com- plication de pneumonie (du type Friedlander), le poumon hépalisé atteignit la température de 32°, 4; dans le même temps et au même endroit, à la même profondeur dans le sol, la température maxima d'un poumon sain enfoui pareillement fut de 27°; enfin, le maximum de température du sol pendantcette expérience n'avait pas dépassé 14°, 2. — La rate d’un autre malade mortde fièvretyphoïde, enterrée de même, a atteint le maximum thermique de 39°,6, tandis que la température du sol, au même point, montait au plus à 15°. Ce sont là des tem- pératures qui suffisent au développement de tous les microbes pathogènes, mème les plus exigeants en fait de chaleur, comme le bacille tuberculeux. La terre, purificateur des eaux contaminées qui filtrent à travers des assises suffisammentépaisses, conserve vivants dans ses couches superficielles de 1 Ueber Temperatursteigerung in beerdigten Phihisiken Lungen. Centralbl. für Bacter. Bd. VIH, n° 9, 21 Febr. 1890. 2 Untersuchungen über die Temperatursteigerung in becr- digten Kærpertheilen, Ibid. IX Bd., n° 13, 7 April 1891. nombreux microbes pathogènes. Le charbon, par exemple, qui n’exige, pour son développement, qu'une température supérieure à 12, peut végéter à la surface du sol sur des substances organiques,et ladiffusion de ses germes entrainés par les eaux peut faire comprendre la propagation du microbe sur le sol, de la maladie chez l'animal. C'est là l'explica- tion de l’école allemande. Elle n’exclut pas celle que Pasteur a donnée le premier avec preuves à l'appui. Les bacilles enfouis avec les cadavres d’a- nimaux charbonneux se.développent dans le soL.Il importe peu que la température de ce milieu reste parfois inférieure à 12°, puisque,dansles organes en putréfaction, elle dépasse ce chiffre et de beaucoup. Le bacille tuberculeux est d’une culture plus difficile que la bactéridie charbonneuse. Pour lui, le choix du terrain, la température ne sont plus aussi indifférents. Se conserve-t-il seulement dans le sol ou n’y garde-t-il sa virulence que parce qu'il se cultive et prolifère dans ce milieu? On ne sait. Du moins, les expériences de Schottelius et Karlinski nous apprennent que les bacilles tuber- culeux peuvent trouver dans le sol l’optimum de température pour leur prolifération (37-38°). Ces exemples suffisent à montrer quel facteur important est la température du sol dans l’étio- logie des maladies infectieuses. Revenant aux ré- sultats acquis par Schottelius et Karlinski, nous pouvons nous représenter celle température du sol d'une manière un peu plus approchée de la vérité. Les organes morts enfouis dans le sol sont atteints par la putréfaction et élèvent leur tempé- rature à 20°-39. Ilest encore impossible de faire l'analyse des actes chimiques qui interviennent dans ce dégagement de chaleur, mais ces actes chimiques sont liés à la vie de micro-organismes thermogènes : microbes ou champignons inférieurs qui envahissent l'organe mort. Alors, la tempéra- ture s'élève et le thermomètre donne la mesure du phénomène dans le cas où la masse de l'organe est grande. Mais cette température reste la même, quoique non mesurable, pour la même substance organisée réduite à l’état de débris épars dans le sol,attaquée par les mêmes microbes,disloquée par les mêmes processus chimiques. Or la terre con- tient une infinité de tels débris : issus d’animaux, de plantes, cadavres de toute origine; ce sont au- tant de mondes habités par des milliers d'êtres vivants, autant de foyers de chaleur où la tempé- rature peut atteindre 30-39° par le mouvement de la matière que les microbes thermogènes décom- posent. Les bactéries thermophiles trouvent peut- être autour de ces foyers de chaleur des conditions de vie favorables.L'avenir diraquelrôleellesjouent dans le sol. D: A. Ledoux-Lebard, Chef du laboratoire de la clinique à l'Hôpital des enfants malades. A14 EXAMEN PSYCHOLOGIQUE DU CALCULATEUR INAUDI RAPPORTS DE LA COMMISSION DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES CHARGÉE D'EXAMINER LE CALCULATEUR INAUDI Dans notre numéro du A5 février (Supplément, p. ZX) nous avons rendu compte des exercices extraordinaires de calcul mental auxquels M. Tnaudi s'étail livré le 8 février devant l’Académie des Sciences de Paris. Nous annon- cions en même temps que l'Académie avait nommé une Commission — composée de MI. Tisserand, Charcot, Darboux et Poincaré, — pour étudier l'état psycholo- gique et les procédés de calcul de M. Inaudi. MI. Charcot et Darboux, rapporteurs, ont fait con- naître la semaine dernière à l'Académie les résultats très dignes d'intérêt auxquels la Commission est arrivée. Ceux de nos lecteurs qui ne reçoivent pas les Comptes rendus, nous sauront gré d'ajouter quelques pages au présent numéro de la Revue pour reproduire ici in extenso les deux remarquables rapports de MM. Charcot et Darboux!, RAPPORT DE M. J. CHARCOT Il La Commission, que l’Académie a chargée d'examiner les procédés que M. Inaudi met en usage dans ses opérations de calcul, s’est proposé, comme but, de réunir sur cel intéressant calcula- teur un ensemble d'observations et d’expériences qui pussent servir ultérieurement de documents à ceux qui écriront l’histoire naturelle des caleula- teurs prodiges. Jacques Inaudi est né à Onorato (Piémont) en 1867; il passa ses premières années à garder les moutons; c'est vers l’âge de six ans qu'il montra pour la première fois cette passion des chiffres qui, depuis, ne s’est jamais démentie. La plupart des enfants précoces, qui commencent à calculer dès leurs premières années, avant d’avoir appris à lire et à écrire, se servent d’une numération maté- rielle : ils comptent sur leurs doigts ou avec des cailloux. Le jeune Inaudi ne se représentait pas de cette manière les nombres qu'il combinait dans sa tête; il se servait uniquement des nombres que son frère lui avait appris, en les récitant devant lui. Cette circonstance curieuse a peut-être exercé sur les procédés de calcul de M. Inaudi une 1 Ces deux rapports ont été lus à l'Académie dans sa séance du 7 courant; influence que nous indiquerons plus loin. Le jeune pätre, grâce à ses apliludes prodigieuses, fit de rapides progrès. Il quitta bientôt son pays pour suivre ses parents dans leurs courses à travers la Provence : il quêtait dans les rues et offrait aux personnes qu'il rencontrait de’ résoudre mentale- ment quelques problèmes, et il se montra dans plusieurs établissements publics. En 1880, âgé de douze ans, il vint à Paris et fut présenté à la Société d’Anthropologie par Broca, qui, après avoir analysé ses procédés de calcul, ajoute : «Il ne sait ni lire ni écrire; il a les chiffres dans la tête, mais ne les écrit pas. » Depuis lors, sous l'influence d’un exercice continuel, il a agrandi la sphère de ses opéralions: à vingt ans il a appris à lire et à écrire; quoique son instruc- tion tardive soit restée rudimentaire sur un très grand nombre de points, il a l’intelligence ouverte el l'esprit vif; son caractère est doux et modeste. C'est aujourd'hui un jeune homme de vingt- quatre ans; il est petit (1®,52), d'aspect robuste, normalement conformé ; le cràne, nettement pla- giocéphale, présente, en avant, une légère saillie de la bosse pariétale gauche; à la partie postérieure de la suture interpariétale, on perçoit au toucher une crête longitudinale, de 0,20, formée par le pariétal droit relevé; les oreilles sont symétriques, détachées de la tête en entonnoir; la face est légè- rement asymétrique, le côté droit plus petit que le gauche; l'angle facial est presque droit (89°); les autres mensurations cranio-faciales n'indi- quent aucune anomalie remarquable. L'examen méthodique de la vue et de l’ouïe n’a révélé dans ces organes ni altération ni hyperacuité. La Commission s’est attachée tout particulière- ment à mettre en lumière les aptitudes psycholo- giques qui permettent à M. Inaudi de résoudre des problèmes complexes par une opération purement mentale, c’est-à-dire sans le secours de la lecture et de l’écriture. Il est incontestable que la mémoire doit remplir, dans ces circonstances, le rôle princi- pal ; sans constituer, à proprement parler, la faculté du caleul, elle est nécessaire pour réunir les don- nées du problème et ses solutions partielles, jusqu'au moment où la solution définilive est trouvée. Il à donc paru à la Commission que son premier soin devait être d'étudier l'état de la mé- moire chez M. Inaudi: a EXAMEN PSYCHOLOGIQUE DU CALCULATEUR INAUDI 18) Les recherches anatomo-cliniques de ces der- nières années ont contribué à démontrer que la faculté de l'esprit désignée vulgairement sous le nom de mémoire n’est qu'un complexus, un en- semble. Il n’y a, en dernière analyse, que des mémoires partielles, spéciales, ou, comme on dit encore, locales, jouissant d’une indépendance réci- proque relative, et si, dans les conditions qu'on peut appeler normales, le développement respeclif des diverses formes de mémoire marche en quelque sorte de pair, il était à prévoir que, dans cer- laines conditions anormales, l'une d'elles pour- rait s’affaiblir, ou, au contraire, se développer à l'excès sans qu'il y ait nécessairement participa- tion des autres. Cela est ainsi dans la réalité des choses, et il n’est pas absolument exceptionnel, par exemple, que l'activité de l’une des mémoires acquière isolément des proportions considérables, et atteigne même parfois un degré tellement au- dessus de la commune mesure qu'elle excite l'é- tonnement et l’admiration. Dans la catégorie de ces mémoires partielles extraordinaires, l’hypermnésie des chiffres et des nombres occupe en quelque sorte le premier plan; c’est elle, pour le moins, qui, peut-être en raison des conditions d'appréciation en apparence simple où elle se présente, attire le plus l'attention des observateurs. M. Inaudi en fournit un exemple re- marquable. L'ensemble des interrogations et des expériences auxquelles on l’a soumis ont bien montré que, chez lui, la mémoire des couleurs, des formes, des évènements, des lieux, des airs musicaux, ete., ne dépasse pas la moyenne normale, et reste même inférieure à la moyenne; il est incapable de se re- présenter les pièces el les cases d’un échiquier, et s'étonne quand on lui parle de joueurs qui peuvent engager de tête une partie; il ne parait présenter aucune aptitude exceptionnelle, en dehors des chiffres et des nombres, pour lesquels il montre une mémoire si remarquable. Il rêve souvent de chiffres, de nombres et de calculs, et résout quel- quefois ainsi des problèmes dont il n’a pas trouvé la solution pendant le jour : ce sont les seuls rêves dont il garde, au réveil, un souvenir distinct, tan- dis que les rêves qui portent sur les événements ordinaires de la vie ne laissent après eux qu'une impression peu durable. Il est utile, pour apprécier exaclement l’étendue de la mémoire des chiffres chez M. Inaudi, de la comparer à une autre mémoire, celle des lettres et des mots. Sollicité de répéter un certain nombre de lettres ou de mots qu’on vient de prononcer devant lui, Inaudi se montre incapable d'en re- produire plus de cinq ou six ; de même, il n'arrive pas à se rappeler, après une première audition deux lignes de prose ou de poésie. Au contraire, il peut, sans fatigue, sans hésitation el avec une précision absolue, répéter de longues séries de chiffres, variant, par exemple, de 25 à 30, dont il n’a entendu qu’une seule fois l'énoncé. Il reproduit à volonté la série, soit dans l’ordre où elle a été dite, soit dans l’ordre inverse, et il peut même, si on le lui demande, conserver le souvenir des chiffres pendant plusieurs semaines. A la fin d’une séance, pendant laquelle on lui avait proposé de nombreux problèmes, M. Inaudi a pu répéter, sans erreurs, tous les chiffres et dans l’ordre où les problèmes ont été posés; le nombre de ces chiffres s'élevait à deux cent trente deux; dans une autre réunion, il a pu en répéter quatre cents. L'étendue, la précision et la souplesse de cette mémoire spéciale des chiffres ont donné lieu à une foule d'expériences, trop longues à rapporter en détail, qui ont bien démontré qu'au point de vue de la mémoire, Inaudi ne le cède à aucun des cal- culateurs prodiges qui l’ont précédé. Un seul exemple suffira par en donner une idée. Cauchy expose, dans son intéressant rapport, l'expérience suivante à laquelle les Commissaires avaient sou- mis le calculateur Mondeux : apprendre un nombre de vingt-quatre chiffres partagé en quatre tranches, de manière à pouvoir énoncer à volonté les six chiffres renfermés dans chacune d'elles. Pour arri- ver à ce résultat, Mondeux mit cinq minutes. Or, Inaudi a appris un nombre de vingt-quatre chiffres, divisé en tranches analogues; il a répété la deuxième et la troisième tranches, puis la pre- mière tranche à rebours, et enfin le nombre entier en commençant par le dernier chiffre, le tout en cinquante-neuf secondes. IL Une autre question, relative aussi à la mémoire des chiffres, a ensuite sollicité l'attention de la Commission. Il s'agissait de savoir quelle est Ja nature des images mnémoniques que M. Inaudi emploie pour se représenter les nombres de ses opérations. La recherche de ce procédé psycholo- gique a permis de faire une observation impor- lante qui doit modifier, ce nous semble, les idées courantes sur les procédés des calculateurs pro- diges. e Si l’on consulte, en effet, les quelques études biographiques qui ont paru jusqu’à ce jour sur les calculateurs les plus célèbres et que l’on trouve consignés dans un récent article de M. Scripture [Arithmetical Prodigies. Amerie. Jour. of Psyck., avril 4891], on constate que ces calculateurs, d'après leur témoignage, emploient, comme base principale de leurs opérations mentales, la mé- 416 EXAMEN PSYCHOLOGIQUE DU CALCULATEUR INAUDI moire visuelle, Au moment où l’on énonce devant eux les données du problème, ils se donnent la vision intérieure des nombres énoncés, el ces nombres, pendant toutle temps nécessaire à l’opé- ration, restent devant leur inspiration comme s'ils étaient écrits sur un tableau fictif placé devant leurs yeux. Ce procédé de visualisation était celui de Mondeux, de Colburn, de tous ceux, en un mot, qui ont eu l’occasion des’expliquer clairement. A ce sujet, Bidder, un autre calculateur émérite, a même écrit dans ses Mémoires, qu'il ne compren- drait pas la possibilité du calcul mental sans cette faculté de se représenter les chiffres comme si on les voyait. Il parait résulter, d’ailleurs, des recher- ches de M. Galton, que beaucoup de caleulateurs opèrent sur des images visuelles dans lesquelles les chiffres, parfois, sont écrits sur des lignes ou groupés dans des cases dont la forme varie avec les individus (Number forms). L'étude des procédés de M. Inaudi montre qu'on ne saurait tirer des faits précédents une conclu- sion générale. Bien qu'il puisse paraitre rationnel d'admettre que le moyen le plus simple, pour un calculateur, de remplacer le tableau noir et le chiffre écrit qu'il ne voit pas, c'est de se donner une représentalion visuelle du tableau et du chiffre, on doit reconnaitre la possibilité d'arriver au même résultat par des procédés d’une nature absolument différente. Inaudi ne fait pas appel à la vision mentale, mais bien à l’audition mentale. Son témoignage, l'attitude qu'il prend pendant qu'il calcule, et les différentes épreuves auxquelles on l’a soumis ne laissent aucun doute à cet égard. Interrogé par la Commission sur ses impressions subjectives, il répond sans hésiter : « J'entends « les nombres, et c’est l'oreille qui les retient. « Pendant que j'essaye de les reproduire de mé- « moire, je les entends résonner en moi, avec le « timbre de ma propre voix, et je continuerai à « Les entendre pendant une bonne partie de la jour- « née. Dans une heure, dans deux heures, si je « veux penser au nombre qui vient d’être énoncé, «je pourrai le répèter aussi exactement que je « viens de le faire.» Quelque temps après, la Commission revient sur celle question importante, et Inaudi déve- loppe sa première assertion avec beaucoup de clarté et d'intelligence. « Je ne sais pas les chiffres, « dit-il, je dirai même que j'ai beaucoup plus de « difficulté à me rappeler les nombres etles chiffres « lorsqu'ils me sont communiqués par écrit que « lorsqu'ils me sont communiqués par la parole. Je « me sens fort gèné dans le premier cas. Je n’aime «pas non plus écrire moi-même les chiffres; les « écrire ne me suflirait pas à les rappeler; j'aime « beaucoup mieux les entendre.» À une autre occasion Inaudi fait la remarque suivante, utile à retenir : n'ayant appris à lire et à écrire que depuis quatre ans, il n'aurait pas pu, avant cette époque, se représenter le chiffre écrit, puisqu'il ne le con- naissait pas. La Commission a pu, à plusieurs reprises, vérifier l'exactitude de ces assertions. Il est certain qu'Inaudi calcule avec plus de facilité lorsqu'on lui communique les données du problème par la parole que dans le cas où on place la donnée écrite sous ses yeux; la vue des chiffres écrits l’embarrasse, et alors, revenant à ses procédés naturels, il récite lui-même, à voix haute ou à voix basse, le nombre qu'il doit retenir dans sa mémoire. On doit remarquer aussi que, quand on annonce devant lui une série de chiffres, il lui est nécessaire de les articuler à haute voix pour les fixer etles conserver dans sa mémoire, et, pendant qu'il opére cette fixation, comme pendant qu'il calcule, on l'entend chuchoter grande rapidité les noms des chiffres. L’articula- tion des nombres fait partie intégrante de ses procédés de calcul, si bien que tout artifice d’expé- rience qui entrave ce moment d’articulation ra- lentit le calcul ou le rend moins exact. Une expé- rience directe, dont le résultat ne manque pas d'intérêt, a pu servir à contrôler le témoignage du sujet sur ces questions délicates. Après avoir disposé sur une feuille de papier, en échiquier, cinq nombres de cinq chiffres cha- cun, on montre cet échiquier à M. Inaudi et on lui demande de l’apprendre. Il le fait suivant sa méthode habituelle, c’est-à-dire en disant les nombres à haute voix. Puis on le prie d’énoncer de mémoire soit les diagonales, soit telle ou telle tranche verticale ou horizontale de l’échiquier. Il y parvient, non sans difficulté, après bien des hésitations. Si Inaudi appartenait à la catégorie des visuels, il n'aurait pas besoin de ces tàtonne- ments et lirait la réponse devant lui sans hésita- tion, comme sur un tableau fictif. La conclusion à retenir, c'est qu'Inaudi, à la différence de la plupart des calculateurs qui l'ont précédé, n’emploie pas la mémoire visuelle dans ses opérations mentales ; il fait appel concurrem- ment aux images auditives et aux images motrices d'articulation. Quel est celui de ces deux éléments qui prédomine? Est-ce l'élément moteur ou l’élé- ment sensitif? L'absence d'un procédé expéri- mental permettant de les isoler l’un de l’autre empêche de fixer la part respective de chacun d'eux. Il paraît cependant très vraisemblable que l'articulation des chiffres n'intervient que pour renforcer les phénomènes d’audition intérieure, qui sont nécessairement les premiers en date. C'est là, du reste, l'opinion de M. Inaudi lui- même. avec une très EXAMEN PSYCHOLOGIQUE DU CALCULATEUR INAUDI 417 III La Commission, après avoir constaté chez M. Inaudi les caractères de précocilé et d'impul- sion au calcul qu'on rencontre dans l’histoire des calculateurs prodiges, s'est demandé sous l'in- fluence de quelles conditions anthropologiques ce jeune calculateur s’est développé. On sait que, dans certains cas où des individus ont paru doués de très bonne heure d’aptitudes remarquables, on a pu trouver dans d’autres membres de leur fa- mille soit des aptitudes analogues (comme, par exemple, dans les familles célèbres de musiciens), soit des phénomènes d'hérédité névropathique. L'enquête que la Commission a ouverle sur ces questions importantes n'a pu malheureusement donner que des résultats en grande partie négatifs. L'hérédité, quoique interrogée avec soin, n’a ré- vélé que quelques bizarreries et incoordinations de caractère chez l'ascendant paternel; il ne pa- rait pas que les frères de M. Inaudi ou d’autres personnes de sa famille aient jamais présenté d’aptitudes spéciales en aucun genre. Les antécé- dents personnels du sujet n’ont aucun intérêt, et l'examen anthropologique auquel on l'a soumis n’a mis en lumière, comme 6n l’a vu, que des stigmates peu nombreux et peu importants. La Commission émet le vœu que l'attention des observateurs soit éveillée à l'avenir sur ces ques- tions, et qu’on recueille avec grand soin toutes les conditions de famille susceptibles d’éclaircir un . développement aussi considérable et aussi anor- mal de certaines facultés psychiques. J. Charcot. de l'Académie des Sicenccss RAPPORT DE M. DARBOUX I Au Rapport si inléressant que l’Académie vient d'entendre, la Commission a cru devoir ajouter quelques détails sur la manière dont Inaudiexécute les opérations arithmétiques qui lui sont deman- dées, et elle m'a confié cette partie du Rapport. La tâche m'est rendue facile par les innombrables expériences auxquelles Inaudi a bien voulu se prèter. Ils’est tenu à notre disposition et à celle de tousles savants sérieux; et les renseignements que nous avons obtenus sont aussi complets que nous pouvions le désirer. Le résultat de notre examen nous parait mériter d'être communiqué à l’Académie; mais, pour apporter quelque clarté dans notre exposé, il nous paraît indispensable de séparer, dans Inaudi, le calculateur qui effectue des opérations arithmétiques élémentaires et l'homme qui résout, d’une manière plus ou moins complète, les problèmes de mathématiques dont la solution lui est demandée. Je parlerai d'abord du calculateur. Répétons-le tout d’abord, les résultats vérita- blement extraordinaires dont nous avons été lé- moins reposent avant tout sur une mémoire pro- digieuse. A la fin d’une séance donnée aux élèves de nos lycées,Inaudi a répété une série de nombres comprenant plus de 400 chiffres, et s’il y a eu une ou deux hésitations, Inaudi n’a eu besoin de per- sonne (ila même prié qu'on ne l’aidàt pas) pour rectifier les erreurs minimes qu'il commettait, ou pour retrouver des chiffres un peu oubliés. Dans une de nos réunions nous avons donné à Inaudi un nombre de 22 chiffres. Huit jours après, il pouvait nous le répéter, bien que nous ne l’eussions pas prévenu que nous le lui demanderions de nouveau. Il est inutile d’insister sur les faits de ce genre; nous ferons toutefois remarquer que la mémoire d’Inaudi s’est beaucoup accrue par l'exercice. IL y a quelques années à peine, à Lyon, il se contentait de multiplier des nombres de 3 chiffres. Actuelle- ment, ilipeut effectuer des multiplications dont chacun des facteurs a au moins 6 chiffres. Ces opérations se font d’abord avec une rapidité ex- traordinaire, et Inaudi a mis certainement moins de dix secondes à effectuer le cube de 27. Il Un second point, qui nous parait des plus in- téressants, a élé laissé de côté par la plupart des personnes qui l'ont examiné, On à analysé avec soin les procédés, à coup sûr très simples, qu'em- ploie Inaudi pour exécuter les différentes opéra- lions ; mais on n’a pas assez remarqué un fait qui est de toute évidence : c'est que ces procédés ont été imaginés par le calculateur lui-même, qu'ils sont tout à fait originaux. Ainsi, tandis que Mondeux et bien d'autres prodiges avaient été instruits par des hommes qui leur communiquaient les méthodes usuelles, Inaudi, n'ayant jamais eu de maitre, a cer- tainement imaginé les règles qu'il applique à cha- cune des opérations. Et ce qu'il ÿ a d’intéressant, c'est que ces règles diffèrent de celles qui sont enseignées partout en Europe dans les écoles pri- maires, tandis que quelques-unes se rapprochent, à certains égards, de celles qui sont suivies chez les Hindous, par exemple. Cest ce que mettra en évidence l'exposé suivant : Addition. — Inaudi ajoute facilement 6 nombres 418 EXAMEN PSYCHOLOGIQUE DU CALCULATEUR INAUDI de 4à 5 chiffres; mais il procède successivement, ajoutant les deux premiers, puis la somme au suivant, et ainsi de suite. Il commence loujours l'addition par la gauche, comme le font aujourd'hui les Hindous, au lieu de la commencer par la droite, comme nous. Soustraction. — C’est un des triomphes d'Inaudi. Il soustrait facilement l'un de l’autre deux nom- bres d'une vingtaine de chiffres, ex commencant encore par la gauche. Multiplication. — Les procédés suivis sont tout élémentaires, mais ils exigent la mémoire d’Inaudi. Par exemple, pour multiplier 834 << 36, il fait les décomposilions suivantes : 800 >< 30 — 24000 S00< 6— 4800 30>x<36— 1080 Lx 36— 144 Total : 30024. Dans loules ces multiplications partielles, un des facteurs n’a jamais qu'un chiffre significatif. Cependant Inaudi connait et emploie la propriété du facteur 25; il sait que, pour multiplier par ce nombre, il suffit de prendre le quart du centuple. Par exemple, pour le carré de 27, il fera la décom- position suivante : c e ter | Total 729. Quelquefois il emploie des produits partiels affectés du signe —. Par exemple, pour le cube de 27, c'est-à-dire le produit de 729 par 27, il effectuera la décomposition 700 >< 20 { ou 730 X<27— 19740 100% 7 — 27 27 30 x 20 30>< 71 | Résultat... 19683 Division. -— Ici Inaudi suit au fond la règle ordinaire, qui ramène la division à une soustrac- tion, mais en employant quelquefois les simplifi- cations que lui permet sa mémoire, à laquelle il faut toujours revenir. Élévation aux puissances. — Pour l'élévation aux carrés, Inaudi connaît et applique la règle rela- live au carré d’une somme. Par exemple, pour le carré de 234.567 il emploie la décomposition : 234000 +2 x 234000 >< 567 567 Extraction des racines. — Ici aucune règle n’est suivie; il n’y a que de simples tàtonnements. Par exemple, pour trouver une racine qui est 14 672, Inaudi aura essayé 14 000 et 15 000, puis 14 600, puis 14 650, 1% 660, 14670, …, et, chaque fois, la puissance du nombre essayé aura été retranchée du nombre donné. Pour les racines d'ordre supérieur, il est clair que l'opération est d'autant plus facile que l'indice de la racine est plus élevé. C’est ce que ne com- prennent pas toujours les personnes qui s'émer- veillent de l'extraction d'une racine cinquième, LI Il nous reste à dire quelques mots des pro- blèmes qu'Inaudi, de lui-même, a commencé à résoudre dans ces dernières années. Nous ne par- lons pas ici des questions qui se ramènent d’une manière évidente à une suite de calculs. Inaudi, par exemple, a su évaluer avec rapidité le nombre lotal des grains de blé que, dit-on, l'inventeur du jeu des échecs réclamait comme récompense; il lui a suffi de calculer et d'ajouter successivement les nombres de grains qui devraient être placés sur chacune des cases de l’échiquier. Mais il a pu résoudre quelquefois des questions d’Arithmétique et d'Algèbre plus difficiles dont la solution était fournie par des nombres entiers. Il trouverait rapidement les racines entières de certaines équa- tions algébriques; mais, quand nous lui avons proposé des problèmes qui conduisent à des équa- tions du premier degré, nous avons vu que ses procédés sont de simples tätonnements et qu'il commence par supposer entières les solutions cherchées. Il ne peut guère en être autrement. On ne peut lui demander de retrouver tout seul l'Al- gèbre et les Mathématiques tout entières. Mais nous avons reconnu qu'il est intelligent et qu'il à l'esprit très ouvert, Si nous remarquons aussi que la mémoire dont il est doué s'est rencontrée chez plusieurs mathématiciens célèbres, nous devons regretter que, dans l’âge où il pouvait étudier, il n'ait pas recu les lecons d'un maitre intelligent el habile. G. Darboux, de l’Académie des Sciences. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 419 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. Appell (P.). — Sur les fonctions périodiques de deux variables. — Journal de Liouville, 4° série, tome VII, Gauthier-Villars et fils, 1892. Les fonctions ®, ou plutôt les quotients de pareilles fonctions, constituent un élément à l’aide duquel s’ex- priment toutes les fonctions périodiques qui n'ont, à distance finie, que les singularités des fractions ralion- nelles, Bien connu pour le cas d’une variable, ce fait semblerait ne pas devoir subsister d’une facon géné- rale; car on ne peut pas donner à une fonction © de » variables des périodes choisies arbitrairement : ces n(n—1) 2 périodes sont liées par relations, Or il se trouve que ces relations ne sont pas particu- lières aux fonctions @, mais doivent nécessairement exister entre les ?n systèmes de périodes d’une fonc- tion den variables. Ce fait, annoncé par Riemann, avait été démontré par MM. Poincaré et Picard, en partant de la relation algébrique que doivent vérifier n +1 fonctions de n variables qui admettent les 2 n mêmes périodes, ainsi que l’a établi M. Weierstrass. M. Appell présente une démonstration directe du même fait, Mais tel n’est point l’unique but de son mé- moire, que l’on peut considérer comme une nouvelle exposition systématique de la théorie des fonctions pé- riodiques. Le point de départ est emprunté à des recherches de M. Guichard, fournissant le moyen de satisfaire par une fonction entière à l'équation : G(z+ 1) — G(:) = H(:) où H (2) est une fonction entière donnée. Si maintenant on considère une fonction périodique méromorphe, celle-ci pourra s'exprimer par le quo- tient de deux fonctions entières, mais non d’une seule facon : rien n'empêche de multiplier ces deux fonc- tions par n'importe quelle fonction entière dépourvue de zéros, autrement dit de la forme el, C'est ce facteur exponentiel que la méthode de M, Guichard permet de déterminer de facon à donner aux fonclions entières qui figurent au numérateur et au dénominateur des propriétés de périodicité en rapport avec celles de la fonction donnée. Si, par exemple, on étudie le cas d’une fonction dou- blement périodique d’une variable, on trouve que l’on peut prendre pour termes de la fraction des fonctions entières jouissant de ce que M. Hermite appelle la double périodicité de troisième espèce. Ces fonctions, que M. Hermite introduit a priori dans son Cours de la Faculté des sciences, sont donc amenées ici par une voie complètement analytique et directe. Pour étendre cette méthode au cas de deux variables, il suffit d'utiliser le célèbre théorème de M. Poincaré : « Une fonction analytique uniforme f (æ,y) de deux va- « riables æ et y,se comportant comme une fraction ra- « tionnelle en tous les points à distance finie, peut se «mettre sous la forme T1 [\&, y) = 2) = 9) Y(æ y) «+ et étant entières et ne s’annulant simultanément « qu'aux points où la fonction f est indéterminée. » On arrive alors, par des voies analogues à celles qui ont été suivies dans le cas d’une variable, à une relation entre les périodes, laquelle équivaut, moyennant une transformation simple, à celle que présentent les fonc- tions 6, . De plus on obtient une forme canonique des fonc- tions de deux variables admettant quatre systèmes de périodes, exprimées par des quotients de fonctions entières, lesquelles ne sont autres que des fonctions ©, et on en déduit l'existence d’une relation algébrique entre trois pareilles fonctions, En un mot, la méthode de M. Appell permet de démontrer tous les principes fondamentaux relatifs aux fonctions quadruplement pé- riodiques de deux variables. J. Hapamarn. Duquesnay. Directeur des manufactures de l'Etat : Résistance des matériaux. Un volume pelit in-8° (2 fr. 50) de l'Encyclopédie scientifique des Aide-Mémoire dirigée par M. H. Léauté. Gauthier-Villars et fils, et G. Masson, Paris, 1892. Il n’est guère possible de réaliser plus rigoureuse- ment le programme arrêté par les savants qui ont fondé l'Encyclopédie des Aide-Mémoire, que ne Pa fait M. Duquesnay dans ce volume. Le programme conseil- lait aux auteurs d'adopter la division suivante : 10 Théorie. 20 Formules pratiques. 3° Exemples d'application. 49 Bibliographie. Eu observant scrupuleusement cet ordre, M. Duques- nay en a démontré la logique et Putilité. La partie théorique a le mérite d'être à la fois très concise, très claire et substantielle. Le lecteur y trouvera nettement donnée la raison des formules d’un usage courant, et, pour celles qu’on ne rencontre que rarement, il pourra les rechercher dans les ouvrages cités dans la biblio- graphie. La deuxième partie rappelle naturellement les for- mulaires d'ingénieurs, mais avec cet avantage considé- rable que la matière est présentée dans un ordre scien- tifique, approprié aux démonstrations de la première partie, toujours rappelées par leur numéro, — La troisième partie donne un choix judicieux d’applica- tions des formules au calcul des câbles, des rivures, des arbres, des colonnes, des poutres à plusieurs travées, des canons frettés, des murs de soutènement, des res- sorts. — La bibliographie est peut-être un peu sobre. Nous aurions aimé y voir figurer aussi des ouvrages ren- seignant sur les réalités expérimentales, à défaut des- quelles le constructeur, trop confiant dans les formules théoriques, risque de sortir, sans s’en apercevoir, des limites au delà desquelles les formules cessent d’être applicables, — A part cette légère critique, que l’auteur nous pardonnera, nous croyons que ce livre rendra de grands services non seulement aux constructeurs et aux ingénieurs, mais encore aux étudiants qui, grâce à la clarté et à la concision de l'exposé, trouveront en ce livre un guide mnémotechnique des plus précieux. V. DwEeLSHAUVERS-DERY. NWitz (Aimé). Traité théorique et pratique des Moteurs à gaz. — 3° édition. Un volume grand in-8° (15 fr.). E. Bernard et Cie, éditeurs, Paris, 1892. Cet ouvrage, dont la première édition avait paru en 1886, est resté, grâce aux remaniements qu'il à subis, le traité Le plus complet qui existe sur la matière : l’au- teur ne se contente pas d'exposer ses travaux, mais il fait une large part aux études de MM. Staby, Clerk, Brooks, Kidwell, etc., et il les discute avec compétence. Voilà au point de vue théorique. Les praticiens trouve- ront, d'autre part, dans ce livre, la description détaillée des 43 moteurs les plus connus. Un dernier chapitre renferme d'importantes considérations sur l'état pré- sent et l'avenir du moteur à gaz. L. O. 420 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques. Janet (Paul), Chargé de cours à la Faculté des Sciences de Grenoble, Electricité industrielle : Piles, Ac- cumulateurs, Dynamos, Transformateurs. — Cours municipal professé à la Faculté des Sciences de Grenoble. Un volume de 290 pages (Prix : k fr. 50) A. Gratier, éditeur, 23, Grande-Rue, à Grenoble, 1892. Les applications industrielles de l'électricité sont devenues aujourd’hui si variées et si ingénieuses, qu'il faut, pour les comprendre et les utiliser, des connais- sances très nombreuses et très précises ; sur plus d’un point, l'industrie a même devancé la science; elle lui a, d’ailleurs, emprunté ses méthodes de mesure les plus délicates et elle fait usage de son langage le plus exact. On a, depuis plusieurs années, professé avec grand succès, dans les écoles spéciales, des cours dogmati- ques à l'usage des futurs ingénieurs électriciens Mais on n'avait guère encore donné, au moins en province, un enseignement public sur ces matières si intéressantes. M. Paul Janet a pensé, avec beaucoup de raison, qu'il appartenait aux professeurs de nos Facultés dessciences de mettre leur talent de savant et de professeur au service de ceux qui désirent apprendre les principes d’une science qu'ils ont journellement à appliquer. Aussi bien, la ville de Grenoble se trouvait-elle naturel- lement indiquée pour une semblable innovation : de- puis 1885, époque des célèbres expériences de M. Marcel Deprez, les industries électriques se sont tellement dé- veloppées dans le Dauphiné, que l’on peut trouver pour chaque application, dans le pays même, un exemple typique et instructif ; en de multiples endroits, on uti- lise l’eau qui provient de la fonte des neiges des Alpes, on transforme l'énergie de ces chutes en énergie élec- trique, consommant ainsi, pour produire l’électricité, ce que l’un des hommes qui ont le plus fait dansla région pour le progrès de la science et de l’industrie, appelle poétiquement la houille blanche de la montagne. Les lecons professées par M. Paul Janet ont le grand mérite d'être tout à la fois très claires, presque à la portée de tout le monde, et cependant savantes et au courant des idées les plus récentes, des progrès les plus nouveaux. L'auteur a dù, bien évidemment, renon- cer plus d’une fois à donner telle ou telle démonstra- tion difficile que l’on ne saurait conduire à bien sans le secours du calcul ; mais il n'a nullement pour cela abandonné la rigueur et la précision scientifiques : il signale lui-même, les points où il passe sans insister. Le cours est un tout complet, qui peut servir d’intro- duction à la lecture des traités spéciaux les plus déve- loppés ; il ne suppose au lecteur aucune connaissance particulière des lois de lélectricité ; il ne demande, pour être compris, qu'une éducation scientifique tout à fait élémentaire, et pourtant il conduira, sans trop de peine, à l'intelligence des questions les plus complexes relatives aux machines, à leur fonctionnement, à leur théorie. Nous ne pouvons mieux faire, pour donner une idée de l’ensemble, qu'énumérer rapidement à la suite les uns des autres, les sujets traités dans l’ordre où ils ont été introduits, Après quelques généralités, l'auteur explique immédiatement le rôle de l’industrie électri- que, qui est la production et l’utilisation de l'énergie électrique ; il donne un exemple de la production, un exemple de l’utilisation ; il définit ensuite le travail, la puissance, la mesure de ces grandeurs en unités prati- ques; puis viennent: un exposé très simple des lois des courants électriques; la définition et le rôle d’un géné- rateur ; la définition et le rôle du récepteur ; la défini- tion du rendement ; une étude sommaire, maistrès nette des principales piles, avec des notions sur la polarisa- tion et application aux accumulateurs. Ici on trouvera quelques détails intéressants sur les constantes des accumulateurs et leur emploi comme transformateurs ou comme volants; les machines dynamos sont ensuite très soigneusement étudiées. M. Janet donne d’abord un rapide apercu du magnétisme : il introduit la notion de lignes de force, de lignes d’induction, explique l’aimantation par influence et la production d'un cou- rant induit lorsque le flux d'induction qui traverse un circuit vient à varier; il explique le principe des machines à courants continus, étudie soigneusement le rôle et le fonctionnement de l’inducteur, de l’induit et du collecteur dans les divers types en usage ; il insiste sur les trois modes généraux d’excitation, exa- mine les machines au point de vue du rendement et les causes de perte de puissance, en signalant parti- culièrement l'hystérésis et les courants de Foucault; il aborde ensuite la description etla théorie des dynamos à courants alternatifs, aussi bien celles dont linduit est sans fer, que celles dont l’induit est à noyau de fer; il fait enfin une étude sommaire des transformateurs ; en terminant, l’auteur appelle l'attention sur l'avenir des courants alternatifs à hautes fréquences et décrit les belles expériences de M. Tesla sur ce sujet. Nous devons, à ce propos, signaler le nombre considérable des expériences faites par le professeur pendant les lecons, et le choix judicieux qu'il a su faire des plus instructives; il a même eu occasion de montrer plu- sieurs nouveautés du plus haut intérêt : c’est ainsi qu'outre les expériences de M. Tesla qu'il a reproduites avec un dispositif des plus simples, il a fait fonctionner devant ses auditeurs une machine Gramme fournis- sant des courants triphasés actionnant une autre ma- chine réceptrice. A Ce rapide apereu du cours professé à Grenoble par M. Janet suffira sans doute à expliquer le succès obtenu par le professeur : on comprendra aisément que ses auditeurs aient tenu à rédiger les lecons qu’ils ve- naient d'entendre avec tant de profit. Lucien PoiNCARÉ. RBoscoe et Schorlemmer. Treatise on Che- mistry, vol. III : Organic Chemistry, part. II et VI. (Traité de chimie, vol. III : Chimie organique 3° et 6° parties). 2 volumes, de 433 et 582 pages (22 fr. 90 et 26 francs). — Macmillan et Cie, éditeurs, Bedford Street, Covent Garden, London, 1891-92. . Les deux savants professeurs anglais avaient com- mencé, il y a quelque temps, la publication d’un traité complet de chimie ; ils avaient déjà fait paraître la chimie minérale et une grande partie de la chimie orga- nique. Les deux ouvrages que nous signalons et qui ont été publiés dernièrement ne le cèdent en rien aux volumes précédemment parus. La troisième partie comprend le commencement de la série aromatique ; le volume que nous analysons est une seconde édition qui avait été rendue nécessaire par suite des récents travaux exécutés dans cette branche de la chimie. Les auteurs débutent par une introduc- tion assez longue consacrée aux composés aromatiques, à leur constitution, aux réactions caractéristiques de certains de ces corps ; ils examinent ensuite le groupe de la benzine, ses dérivés d'addition et de substitution, le phénol et ses composés, les amides de la benzine, enfin les composés que les substances de cette série forment avec les principaux métalloïdes ou métaux. Dans la sixième partie, MM. Roscoe et Schorlemmer s'occupent d’abord des groupes de l'indine et de la naphtaline. Ils étudient les dérivés d’addition et de substitution de ce dernier corps, les naphiols et leurs composés ; les auteurs signalent, en passant, les matières colorantes azoïques ou diazoïques appartenant à cette série et terminent par les composés de la naphtaline avec divers corps simples. Viennent ensuite les homo- logues immédiats de la naphtaline : méthylnaphtaline, diméthylnaphtaline, éthylnaphtaline; les dérivés supé- rieurs contenant plus de douze atomes de carbone ; les groupes du naphtindol, de l’acénaphtène, du pyrène, des composés diphénylés etde leurs homologues; enfin sont étudiés par petits chapitres les dérivés diphénylés contenant plus de 14 atomes de carbone, les matières colorantes qui s’y rattachent, les groupes du fluorène, du phénanthrène, du rétène, du fluoranthène, de la + BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX phénylnaphtaline, du chrysène, les composés dinaph- tylés, diphénylbenzéniques et triphénylbenzéniques,. Tous ces sujets sont traités de main de maître ; ils sont expliqués avec une rare clarté; de nombreux tableaux et résumés permettent d’embrasser l’ensem- ble des propriétés des corps d’un même groupe ; le texte, les formules de constitution, parfois si complexes dans les composés aromatiques, sont l’objet d’un soin tout particulier ; l'étude des principaux sujets indus- triels : benzine, nitrobenzine, aniline etc. est facilitée par un certain nombre de gravures; des indications bibliographiquesbien détaillées, permettant de recourir aux mémoires originaux, indiquent un grand travail de compilation ; enfin, des index placés à la fin des volumes aident à les consulter. Les livres que nous venons de signaler seront lusavec grand profit par les personnes qui font de la chimie une étude spéciale. Par la publication de leur Traité, les deux savants anglais ont élevé à la chimie mo- derne un monument digne de l'importance qu’elle a acquise aujourd'hui ; on ne saurait faire un meilleur éloge de l'ouvrage de MM. Roscoe et Schorlemmer. A. Héperr. 3° Sciences naturelles. Geddes (P,) et Thomson (Gi. Arthur). L'évo- lution du sexe. — Traduction francaise avec fiqures par Henri de Varigny. — Bibliothèque évolutioniste TIL. — Un vol, in12 (7 fr.). Veuve Babé et Cie, 23, rue de l'Ecole-de-Médecine, Paris, 1892, MM. Geddes et Thomson ont réuni dans cet ouvrage un grand nombre de documents relatifs à la génération des êtres vivants, principalement des animaux, et ils ont essayé d’y présenter une esquisse aussi complète que possible des principaux processus de la reprodue- tion, Après avoir exposé les caractères sexuels primaires et secondaires et résumé la théorie de la sélection sexuelle de Darwin, ainsi que les objections faites à cette théorie par Wallace, Brooks, Mivart, Mante- gazza, etc., les auteurs établissent que, si la sélection sexuelle peut expliquer la persistance des caractères sexuels secondaires, elle ne donne pas la raison de leur origine. Celle-ci, selon eux, doit être recherchée dans les processus cataboliques et anaboliques qui dominent chez les mâles et les femelles respectivement. Chez les mâles, les processus destructifs de la matière vivante, du protoplasma, lemportent sur les processus constructifs. Un phénomène inverse se produit chez les femelles. Les males vivent à perte et sont catabo- liques; les femelles vivent à bénéfice et sont anaboliques : les processus constructifs dominent dans leur vie; d’où résulte la faculté de produire des rejetons. Les facteurs les plus importants pour déterminer le sexe d’un être vivant sont : la nutrition et l’âge des pa- rents, la condition des éléments sexuels et le milieu environnant l’embryon.Les conditions anaboliquesfavo- risent la prépondérance des femelles; les conditions cataboliques tendent à produire des mäles, MM. Geddes et Thomson examinent ensuite avec soin les différentes formes d'hermaphrodisme, la constitution des éléments sexuels, de l'œuf et du spermatozoïde, les théories de la fécondation, la parthénogénèse, les diffé- rents modes de reproduction sexuelle et non sexuelle et les alternances de générations; ils terminent leur ouvrage par une théorie de la reproduction, Nous nous bornerons à résumer leurs principales conelu-ions. L’hermaphrodisme est primitif; l’état unisexué a été une différenciation subséquente. Les cas actuels d’her- maphrodisme impliquent la persistance ou la réversion. L'œufest gros, passif, nourri, anabolique : le sperma- tozoïde est petil, actif, catabolique. La fécondation peut être comparée à une digestion mutuelle et, bien que liée à la reproduction, elle est née d’un besoin de nutrition. La cellule essentiellement catabolique mâle, se débarassant de toute matière 421 nutritive accessoire,contenue dans la queue du sperma- tozoïide ou ailleurs, apporte à l'œuf une provision de produits de désassimilation caractéristiques, ou catas- tates qui stimulent ce dernier à la division. Les œufs qui se développent parthénogénésiquement doivent être considérés comme des cellules femelles incomplètement différenciées, qui conservent une quan- tité de produits cataboliques (relativement mâles) et par suile n’ont pas besoin de fécondation. La génération asexuelle doit être regardée comme l'expression d’un anabolisme dominant, et la géné- ration sexuelle comme étant essentiellement catabo- lique. L’allernance des générations n’est qu'un rythme entre la prépondérance de l’anabolisme et du catabo- lisme. A travers toute la vie organique, il y à un contraste ou un rythme entre la croissance et la multiplication, entre la nutrition et la reproduction, correspondant au mouvement de bascule organique fondamental entre l'anabolisme et le catabolisme. Pourtant la nutrition et la reproduction sont fondamentalement presque de même famille. Les contrastes entre la croissance con- tinue et la multiplication discontinue, entre la repro- duction asexuelle et la reproduction sexuelle, entre la parthénogénèse et la sexualité, entre les générations alternantes sont tous des expressions différentes de la même antithèse fondamentale, Le fait essentiel de la reproduction est la séparation d'une partie de l'organisme parent pour commencer une vie nouvelle. La reproduction commence par une rupture, une crise catabolique, Les gradations entre la multiplication asexuelle discontinue et la reproduction sexuelle ordinaire montrent une diminution du sacri- lice vital; mais toutes demandent une rupture ou une prépondérance catabolique du commencement jusqu’à la fin; la reproduction est liée à la mort. Les condi- tions de milieu d’un caractère anabolique favorisent la reproduction sexuelle. Nous n’aborderons pas ici la critique de la théorie de MM. Geddes et Thomson, que nous avons résumée aussi exactement que possible en employant les expressions mêmes des auteurs, Quelle que soit la valeur de cette théorie, l'Evolution du sexe est un ouvrage des plus suggestifs el qui intéressera vivement tous les biolo- gistes. Il est seulement à regretter que le style des auteurs, tantôt beaucoup trop concis, tantôt absolument métaphorique, en rende la lecture pénible et nuise souvent à l'intelligence des idées, EF. HENNEGUY. Gaubert (P.), Recherches sur les organes des sens et sur les systèmes tégumentaire, glan- dulaire et musculaire des appendices des Arachnides. — Thèse de doctorat de la Faculté des Sciences de Paris. G. Masson, éditeur, Paris, 1892. Les organes appendiculaires des Arachnides ont élé l’objet de nombreux travaux qui ont été entrepris en vue d'établir leur homologie avec ceux des autres Ar- thropodes, mais l’homologie des articles constituant ces appendices était toujours restée fort obscure ; il y avait là une lacune que M. Gaubert s’est proposé de combler en étudiant le squelette tégumentaire et le système musculaire des appendices chez ces animaux. Il a reconnu que ces appendices offraient dans tout le groupe la mème constitution, et qu'il existait une forme primitive unique, donnant naissance, par des modifications secondaires, à tous les types de pattes- mächoires et de pattes ambulatoires caractéristiques des différentes classes d’Arachnides. Cette étude a fourni à l’auteur l’occasion de faire des observations {rès intéressantes sur les nombreuses formes de glandes, ainsi que sur les organes des sens que portent les appendices et dont la structure histo- logique élait, en général, fort mal connue, Les organes s sens sont de quatre types différents : les organes x s, le peigne des Scorpions, les raquettes coxales, et enfin un nouvel organe découvert chez les 422 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Galéodes. Les organes lyriformes sont très fréquents dans tout le groupe des Arachnides : ils sont formés de bandes parallèles très minces recouvrant une fente traversant la cuticule; d’après lesexpériences faites par M. Gaubert, ils percoivent les sensations caloriliques. Le peigne des Scorpions présente des terminaisons nerveuses tactiles et un appareil museculäire très com- pliqué qui lui permet d'exécuter certains mouvements. Les raquettes coxales offrent cette particularité fort curieuse que les organes terminaux se trouvent ren- fermés dans une rainure assez profonde, et que l’ani- mal doit préalablement dévaginer celte rainure pour les découvrir quand il veut percevoir les impressions du dehors. Nous ne suivrons pas M. Gaubert dans la partie spé- ciale de son travail qui comprend la description des appendices dans toutes les classes d’Arachnides. L'étude à laquelle il s'est livré lui a permis de rectifier des descriptions acceptées depuis longtemps et de faire connaître quelques dispositions nouvelles. En parti- culier, son travail renferme des données très impor- tantes sur la structure et la forme des pièces buccales, ainsi que sur les muscles qui les font mouvoir, J'ai indiqué plus haut la conclusion importante qui se dégage de cette étude; en lisant le travail de M. Gau- ber, “chacun pourra s’apercevoir de tout le parti que peut tirer, d'un sujet paraissant au premier abord épuisé, un observateur consciencieux et instruit. R. KœnLer. 4° Sciences médicales. Magnan (D') et Sérieux (D'.). Le Délire chro- nique à évolution systématique. Un volume in-16 de 18% pages (2 fr. 50), de l'Encyclopédie scientifique des Aide-Mémoire, dirigée par M. H. Léauté, —G. Mas- son et Gauthier- Villars, éditeurs, Paris 1892. L'une des plus belles parties de l’œuvre de M, Ma- gnan, ce sont sans aucun doute ses travaux sur le dé- lire chronique. Le premier, il a établi qu'à côté des délires instables et changeants de persécution ou de grandeur qui peuvent se rencontrer au cours de di- verses formes de maladies mentales, il fallait faire une place à une maladie à évolution régulière, le délire chronique, où venaient se fondre le délire de persécu- tion de Lasègue et la mégalomanie de Foville; la marche de l’affection, caractérisée par quatre périodes, — inquiétude, persécution, ambition, démence, — qui se succèdent dans un ordre invariable, ne permet de la confondre avec aucune autre forme mentale. M, Ma- gnan, dans le court volume qu'il publie en collabo- ration avec M, P. Sérieux, donne, après un rapide historique, une description clinique très claire et très précise des diverses phases de la maladie; il insiste particulièrement sur la période d'incubation et sur les hallucinations auditives de caractère très particulier, qui marquent la seconde et la troisième période. Il montre comment des formes délirantes multiples, très différentes en apparence les unes des autres (posses- sion, démonopathie, théomanie, etc.), viennent natu- rellement se ranger dans le cadre du délire chronique. Deux chapitres sont consacrés au diagnostic diffé- rentiel du délire chronique avec les délires qu'on pourrait confondre avec lui et spécialement avec les délires systématisés des dégénérés. L'ouvrage se termine par un chapitre sur Te traitement et sur les applications médico-légales. Il est à peine besoin de faire l'éloge d'un livre qui porte la signature de M. Magnan; son nom est une recommandation suf- fisante auprès de {ous ceux qui connaissent ses tra- vaux, c'està-dire, auprès de tous les aliénistes et de tous les psychologues. La brièveté même de cet ou- vrage le rendra plus utile encore; peut-être n'est-ce guère un aide-mémoire, mais l'étiquette importe peu après fout. L. MARILLIER. Mangin (L.), Professeur au lycée Louis-le-Grand et à la maison nationale d'éducation de la Légion d'honneur. — Eléments d'hygiène. Un vol. in-16 de 388 pages avec figures dans le texte, (Prix : 3 franes). Hachette et Cie, Paris, 1892. Ce petit livre est remarquable. Il s'adresse aux élèves de l’enseignement secondaire, aü grand publie, A ces lecteurs “dépourvus de toute initiation, il devait faire connaître, avec les lois et préceptes de l hy£ siène, les statistiques, les faits d'observation et d'expérience, les notions DE de physiologie normale et patho- logique qui s’y rapportent. L'auteur a su les exposer d'une facon cite et saisissante : se gardant de tout détail parasite, il a très heureusement choisi le petit nombre de faits qu'il importe le plus de bien établir et de faire pénétrer dans les esprits, et il y a insisté comme il convenait. Toutes les idées dominantes et directrices en hygiène se trouvent ainsi mises en lu- mière, introduites et fixées, sans surcharge, dans la mémoire. Au début et au premier plan apparaît la démons- tration très simple et cependant rigoureuse, convain- cante, de cette vérité que les contages des maladies transmissibles sont des êtres vivants. Les voies di- verses que, selon leur spécificité, ces agents suivent pour nous atteindre, et les procédés de défense pré- ventive dont nous disposons contre chacun d’eux, sont nettement indiqués. Variole, scarlatine, rougeole, fièvre typhoïde, diphtérie, choléra et tuberculose sont spécialement étudiés, . Il faut louer l’auteur d’avoir donné à cette partie de son livre un grand développement, car, — bien qu'au premier abord cette idée puisse paraitre para doxale, — l'hygiène publique est, pour les particu- liers eux-mêmes, mille fois plus importante que l’hy- giène privée : ce que chacun de nous peut tenter iso- lement pour échapper à la fièvre typhoïde, par exemple, est le plus souvent vain effort; d’une facon ‘générale, la seule protection efficace que nous puissions ré- clamer est celle de la Société; or, nous ne l’obte- nons que dans la mesure où l'esprit public, le con- seiller municipal et son électeur sont persuadés de la nécessité d’une sévère et intelligente prophylaxie. À ce point de vue, l'ouvrage de M. Mangin sera, nous l’es- pérons, d'une vrande ‘et très bienfaisante portée so ciale, L'hygiène alimentaire, en particulier la question des conserves, celle des empoisonnements par les viandes, le choix et l’usage des boissons, l'hygiène de la respi= ration, de l'exercice musculaire, de la vue, du vête- ment, de l'habitation, etc., sont décrits dans le même esprit, c’est-à-dire d'une facon scientifique et sans termes techniques, avec la méthode du savant et l’art du professeur. Quelques chapitres cependant eussent gagné, croyons- nous, à être un peu plus discutés. A propos de l'exer- cice, il eût 6té intéressant de bien marquer qu'il doit varier avec l’âge et l’état des sujets, comme le recom- mande avec raison le D' Lagrange; l'exercice violent, utile dans la jeunesse, est, en général, contre- indiqué après 30 ou 35 ans : il risque alors de déterminer des affections cardiaques. Au sujetdes rations alimentaires, nous eussions aimé trouver, dans le livre de M. Man- gin, des menus à l'appui de ses prescriptions, car il ne suffit pas de conseiller l’ingestion de quantités déter- minées de matières albuminoïdes, grasses, sucrées, etc. ; dans la pratique, il importe, en outre, de préciser quels mets ou associations de mets fournissent, selon les rapports requis par la physiologie, ces diverses classes de substances nutritives. En réalité, ces critiques pourraient être adressées à presque tous les traités d'hygiène. Si nous les for- mulons à l’occasion des Eléments de M. Mangin, c'est que son livre, nous semble-tl, confine à la perfec- lion, AO ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 193 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 23 mui 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Painlevé : Sur les intégrales de la dynamique. — M. R. Liouville : Sur les ‘équations de la dynamique. — M. de Sparre : Equation approchée de la trajectoire d’un projectile dans l'air lorsqu'on suppose la résistance proportion nelle à la quatrième puissance de la vitesse. — M, Pé- rigaud, qui avait éludié antérieurement la flexion du cercle mural de Gambey, indépendamment de la lu- nette, a repris, par une méthode simple, l'étude de la flexion provenant des effets combinés du cercle et de la lunette: cette flexion est, pour ainsi dire, négligeable. Mais dans les observations du ciel réfléchi, il peut se produire une erreur notable provenant de l'axe coni- que de rotation et variable, en effet, avec le serrage de l’écrou qui maintient l'extrémité libre de cet axe. Cette erreur, qui a été révélée d’abord par l'observation d’un grand nombre d'étoiles réfléchies, et ensuite par le collimateur zénithal, avait échappé aux anciens obser- vateurs du cercle de Gambey faute d’un bain de mer- cure suffisamment calme. — M. G. Bigourdan décrit un aspect particulier des anneaux de Saturne, dont le plan, en ce moment, passe presque exactement par la terre; la section se montre amincie dans la partie Ja plus voisine de la planète. — M. F.-B. de Mas a étudié expérimentalement la résistance à la traction des diverses formes de bateaux employés dans la navi- gation intérieure; il a reconnu, pour des vitesses mo- dérées et telles qu’ on les rencontre dans la pratique, qu'il y a des différences considérables entre les résis- tances de ces diverses formes, soit par tonne, soit par mètre carré de section mouillée au maître-bau, bien qu’elles possèdent des coefficients d’affinement très voisins. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M, Ch. Antoine : Sur l’é- quation caractéristique de diverses vapeurs, — M. J. Gal a fait arriver des vapeurs de soufre à la surface d’un liquide froid ; il a obtenu ainsi une variété parti- culière de soufre mou, se présentant sous forme de petits grains arrondis, agglomérés en paillettes; elle est constituée par un mélange de soufres soluble et insoluble, dans des proportions variables suivant la température de l’expérience., — MM, G. Rousseau et G. Tite ont appliqué à divers azotales métalliques la méthode décrite par l’un d’eux pour obtenir, à l'état cristallisé, les sels basiques en général, et qui consiste à chauffer en tube scellé les Aydrates solides des sels neutres avec du carbonate de chaux; ils ont obtenu ainsi les azotates basiques de nickel, de zinc, de cad- mium,ainsi que l’azotate basique de chaux,en chauffant Paydrate de l’azote neutre avec un peu de chaux caus- tique. — M. P. Schützenberger a repris la délermi- nation du poids atomique du nickel; il a préparé du sulfate de nickel pur en partant du carbonate pur, et séchant les cristaux à 4409 dans un courant d'azote sec et pur. Le sulfate anhydre est décomposé à une tem- pérature comprise entre le rouge sombre et le rouge cerise dans une flamme oxydante. Le poids d'oxyde obtenu, comparé au poids du sulfate mis en œuvre, donne une première valeur. Cet oxyde, réduit par l'hydrogène et maintenu dans l'azote, donne directe- ment le poids du nickel, Les deux déterminations ont fourni des valeurs concordantes voisines de 58,5 pour Ni. L'auteur signale les faits suivants: l’oxyde de nickel, obtenu par la décomposition au-dessous du rouge cerise, est jaune et pulvérulent; chauffé au rouge blane, il s’agglomère, devient vert et perd quelques milliè- mes de son poids sans que celte perte augmente avec la durée de la chauffe, Ce même oxyde vert, traité par l'hydrogène au rouge sombre, ne se réduit pas entiè- rement, mais devient apte à une nouvelle réduction, après s refroidissement, par un nouveau chauffage, Dans cet oxyde vert, le poids atomique du nickel semble être 60, — M. E. Guenez a préparé le cyanure d’ar- senic en faisant réagir au sein du sulfure de carbone, à l'abri de l'oxygène, T'iodure de cyanogène sur l’arsenic en poudre fine ; ce composé, qui répond à la formule As Cy*, se présente sous forme d'une poudre cristal- line légèr ement Jaunûtre. — MM. Berthelot et Mati- gnon ont repris à nouveau les chaleurs de combustion et de formation de l'alcool et des acides formique et acétique. Les valeurs obtenues diffèrent peu des chif- fres déterminés autrefois par M. Berthelot ou admis par lui après discussion; les conclusions tirées par lui de ces chiffres subsistent done en général. — M. de Forcrand à préparé la pyrocatéchine monosodée en altaquant par le sodium dans une atmosphère d’hy- drogène la solution alcoolique de pyrocatéchine; le produit est extrèmement altérable à Pair, mais peut être conservé dans l'azote. La déterminalion des cons- tantes thermochimiques de ce corps on donné des valeurs qui surpassent celles du phénol ordinaire. Ici, comme dans la comparaison des alcools mono et dia- tomiques, la répétition de la fonction exagère la valeur de celle que l’on sature la première, — M. C. Mati- gnon à fait voir antérieurement que la substitution d’un même radical alcoolique à un hydrogène, substi- tution qui augmente, comme on sait, la chaleur de combustion d’une quantité constante quand la liaison se fait par un carbone, donne lieu à une augmentation plus considérable si le même radical est lié à un azote, c'est-à-dire que l’échange de valenes C-C (premier cas) dégage plus de chaleur que la liaison C Az (deuxième cas). M. Matignon vient de faire l’étude thermique du dérivé nitré de la guanidine récemment découvert par M. Thiele, dans lequel le groupe Az0? est nécessaire- ment lié à un azote ; la substitution dégage 30 cal, au lieu de 36 cal., chaleur de formation constante pour les dérivés nitrés avec liaison au carbone, Donc l’é- change de valences C-Az dégage plus de chaleur que l'échange de valences Az-Az. — M.G. Massol a préparé l'acide bibromo-malonique et ses sels de potassium pour en faire l'étude thermique ; les quantités de cha- leur dégagées par la saturation de l'acide bromé sont supérieures à celles que fournit l'acide malonique ; l'augmentation est d'environ 10 cal. pour chaque aci- dité. — M. P.-Th. Muller en faisant réagir l'acide fu- marique sur l’éther cyanacélique sodé à obtenu l’éther a cyanotricarballylique (pentane-cyano-2 trioïque 1,3, à), isomère de l’éther 6 découvert par MM. Haller et Barthe; l’action de l'acide citraconique sur l’éther cyanacétique sodé lui à fourni l’éther $ méthyl-x cyanotricarballylique. — M. Ch. Lauth à préparé la méta-azo-diméthylaniline par réduction de la méta- nitrodi-méthylaniline, puis l'a transformée en tétra- méthyl-méta-diamidobenzidine par une nouvelle réduc- tion à l'abri de l’air, et l’action de l'acide chlorhydrique bouillant ; cette base, qui se distingue nettement par diverses réactions de son isomère ortho découvert par MM. Michler et Pattinson, est également peu apte à fournir des matières colorantes. — M. E. Jungfieisch et C. Leger ont repris l'étude de l’action d2 l'acide chlorhydrique à 140-1509 sur Ja cinchonine pour con- trôler le travail de M. Hesse sur ce point et comparer les résultats de la réaction à ceux que leur avait fournis l'acide sulfurique dans des conditions analogues. Les isomères produits ont été les mêmes, mais l'acide chlorhydrique ne fournit pas d’oxycinchonines, ce qui confirme la provenance de ces bases par l'intermé- diaire de produits sulfonés. Quant à la diapocinchonine de M. Hesse, elle est un mélange et non un principe défini, — M. C. Bardy décrit une méthode destinée à la recherche et au dosage approximatif des alcools supérieurs dans l'alcool vinique ; cette méthode repose sur l'emploi comme dissolvants d’une solution saturée de sel marin d’une part et de sulfure de carbone de l’autre. 32 SCIENCES NATURELLES. — MM. À. Gautier et L. Landi (Voir C. R., 9 mai) décrivent les méthodes analytiques qu'ils ont employées dans leurs recherches sur les pro- duits des muscles séparés de l'animal. — M, &. Pruvot décrit les premières phases du développement de Pron- comenia aglaopheniæ. De cette étude, rapprochée de celle de Dondersia banyulensis de la même famille, il conclut que le développement des Néoméniens s'é- loigne considérablement de celui des mollusques, mais montre, dans l’évolution des feuillets au moins, d’étroites ressemblances avec celui des Annélides infé- rieurs. — M. Kæhler discute la valeur morphologique des lacunes irrégulièrement distribuées entre la paroi du corps et le tube digestif chez les Cirrhipèdes; il s'é- lève contre l’opinion de M. Nussbaum qui veut y voir un cœur et des vaisseaux, quand il ne s’agit que de lacunes sans paroi propre, c’est la cavilé générale. M. Kœæhler décrit les reins des cirrhipèdes, jusqu'ici négligés par les auteurs; ces organes ne laissent pas voir de canal excréteur; ce sont plutôt des reins d’ac- cumulation que des reins d'élimination. — M. A. Char- pentier a antérieurement distingué dans la persistance des impressions lumineuses sur la rétine deux phases: l'une, où l'excitation reste égale à elle-même, la se- conde, où l'excitation va décroissant graduellement; il a fait voir que la durée de la première phase est en raison inverse de la racine carrée de l'intensité de la lumière et du temps pendant lequel elle a agi ; pour la seconde phase, ses recherches montrent, au contraire, que la durée en est d'autant plus longue que l’exci- tation a été plus vive et plus prolongée. — M. C. Houl- bert : Etude anatomique du bois secondaire des apé- tales à ovaire infère. (La note du 19 avril 1892 se rap- portait aux apétales à ovaire libre.) — M. Ad. Carnot s’est servi de son procédé de dosage du fluor pour doser cet élément dans les os modernes et dans les os fossiles, La comparaison des deux séries de chiffres montre pour les os fossiles un enrichissement notable en fluor. — M. A. Pomel a étudié la faune des petits rongeurs des phosphorites de la Tunisie; il y à un très grand nombre de petits ossements enchevêtrés sans ordre, provenant sans doute des réjections d'oi- seaux de proie. Dans cette faune, M. Pomel a re- connu l'existence d'un crâne et d’une mâchoire d’un type très particulier, bien que présentant certains rap- ports avec les Campagnols ; il propose pour ce type le nom de Bramus barbarus. — M. A. de Grossouvre à reconnu sur toute la bordure sud-est du bassin de Paris que les couches triasiques vont en s’amincissant vers le nord et finissent par manquer, le lias reposant alors directement sur les roches cristallines. Il en con- clut qu'au début de l’époque secondaire, le bassin de Paris n'existait pas, et que le trias s’est, au contraire, déposé dans les régions considérées, au fond d’un golfe ouvert au sud-est vers Autun et Lyon, contre un rivage occupant le centre de ce qui sera à l'époque tertiaire le bassin de Paris. — M. E.-A. Martel décrit un puits naturel, l'Abime du Creux-pereé, qu'il a exploré dans la Côte-d'Or; le fond de ce puits constitue une glacière naturelle à ciel ouvert. — M. E. Renou à dressé le ta- bleau des températures moyennes pour Paris des années 162-1878; la moyenne générale de la période est en excès de 0°,3 sur la normale, et fait ainsi com- pensalion avec la période depuis 1878, qui est au-des- sous de la normale à peu près de la même quantité. Diverses raisons portent à croire qu'il y a balancement àce point de vue entre l'Amérique du Nord et l’Europe. ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES Mémoires présentés. — M. Papy adresse une note sur la théorie des parallèles. — M. Duponchel : Théorie ralionnelle des cyclones et des orages. — M, A. Mili- voievith adresse une note relative à un moyen de combattre le phylloxéra. — M. J. Estienne : La proba- bilité de plusieurs causes élant connue, à quelle cause estil plausible d'attribuer l'arrivée de l'événement ? Séance (lu 30 mai. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Serret : Sur une propriété commune à trois groupes de deux polygones : inscrits, circonserits ou conjugués à une même co- nique, — M. A. Tresse : Sur les développements cano- niques en séries, dont les coefficients sont les inva- riants différentiels d'un groupe continu. — M. Hatt : Des coordonnées rectangulaires, — M. de Sparre : Sur le calcul du coefficient de la résistance de lair, lors- qu'on suppose la résistance proportionnelle à la qua- trième puissance de la vitesse. — M. Mouchez : Obser- vations des petites planètes, faites au grand instrument méridien de l'Observatoire de Paris, pendant les deuxième et troisième trimestres de l’année 1891. 2° SciENCES PHYSIQUES. — M, H. Poincaré revient sur sa communication du 9 mai, relativement à la théorie des oscillations hertziennes; il indique comment on peut tenir compte des dimensions du conducteur, de facon à rendre compte de l'amortissement rapide ob- servé par M. Blondlot. — M. P. Marix indique un moyen permettant d'amener en contact intime, en proportions déterminées, deux liquides non miscibles: si l’on verse les deux liquides à la fois dans un vase pourvu d'un fin orifice latéral, et que l’alimentation soit précisément égale au débit, de facon que le niveau reste constant, la surface de séparation des liquides s'élablit au niveau de l'ouverture, tous deux sortent à la fois, et dans des proportions égales à celles de l’ali- mentation, — M, Faye constate que la théorie des cyclones ascendants vient de subir un nouvel échec ; les nombreux cyclones qui ont lieu en hiver dans les haules latitudes ne peuvent, en effet, nullement s'ex- pliquer que par une convection due à des différences de température suivant la verticale ; les météorologistes, partisans de la convection, ont donc été obligés d'ad- mettre une espèce différente de cyclones pour les zones tempérées, mais cette distinchon est inadmissible, comme le montre M. Faye par un exemple de cyclone qui à passé d’une zone dans l’autre. En résumé, la théorie des courants centripètes ascendants subit sans cesse de nouvelles corrections sans parvenir jamais à s’'accorder avec les faits, — M, A. Pictet annoce qu'il a réalisé dans son laboratoire une installarton lui per- mettant de faire des expériences à de basses tempé- ratures jusqu'à — 210°, au moyen de cycles successifs de compression et de décompression d’acide sulfureux et d'acide carbonique, puis de protoxyde d'azote, enfin d'air atmosphérique. Les phénomènes physiques, à ces très basses températures, revêtent des formes para- doxales; ainsi les thermomètres ne donnent plus les températures des changements d'état, comme M. Pictet a eu occasion de s'en apercevoir par la marche des indications de cet appareil pendant la cristallisa- tion du chloroforme., — M. Berthelot fait savoir que M. Werner avait, de son côté, étudié l’azotate de chaux basique décrit à la séance précédente par MM. Rousseau et Tite; les résultats de cette étude paraîtront pro- chainement, — Dans une communication précédente, MM. G. Rousseau el G. Tite avaient signalé, dans la préparation de l'azotate basique de cadmium, suivant leur méthode, la formation d’un enduit cristallin tapis- sant la paroi des tubes ; ils ont isolé et étudié le corps constituant cet enduit, c’est un hydrosilicate de cad- mium, — M. A. Besson a étudié l’action de la chaleur sur le composé PCF,8AzH qu'il a décrit antérieure- ment; ce composé perd d’abord de l’ammoniac; si l’on continue à chauffer sous pression réduite, il se su- blime au-dessous de 200° des cristaux répondant à la formule PCPAz; le résidu, chauffé à une plus haute ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 193 température, dégage du chlorhydrate d'ammoniaque et laisse du phospham; celui-ci, chauffé encore dans le vide, se décompose graduellement avec perte d'azote et d'hydrogène et finit par mettre du phosphore en liberté à la température du rouge vif, — M. L. Barthe indique le moyen d'obtenir à l'état pur chacun des trois phosphates destrontiane, —M.Scheurer-Kestner insiste sur l'impossibilité d'obtenir le pouvoir calari- fique d'une houille d’après sa composition centésimale, au moyen de la formule de Dulong; si les nouvelles déterminations par la bombe calorimétrique, qui ont donné des chiffres plus faibles que les anciennes, ont diminué l'écart pour les houilles dont le pouvoir calo- rifique réel surpasse celui donné par le calcul, elles Pont augmenté pour les houiiles qui sont dans le cas inverse; l’auteur donne comme exemple l'étude d'une houille du Pas-de-Calais, dont la composition comme le pouvoir calorifique ont été vériliés par des observa- teurs indépendants; il y a une différence de plus de 6°/, entre la formule et l’expérience., — M. G. Hin- richs : Détermination mécanique des points d’ébul- lition des composés à substitution terminale complexe. — M.Œchsner de Coninck expose quelques réactions différentielles des trois acides amido-benzoïques. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A.-B. Griffiths a extrait du sang de Sabella (annélides) le pigment respiratoire vert nommé chlorocruorine par M.Lankester; il en donne la composition centésimale (0,45 0/0 de Fe}; on trouve de l’hématine dans les produits de dédoublement. L'auteur donne aussi l'analyse des cendres du sang total de Sabella. — M. A. Trillat a reconnu que la for- maldéhyde est très antiseptique, elle l’est même à plus petite dose que le sublimé ; il à déterminé les doses antisepliques de cette substance vis-à-vis de diverses espèces microbiennes, — M. E. Guinochet à réussi à cultiver le bacille de la diphtérie dans de Furine exempte d’albumine ; la toxine habiluelle se forme dans ces cultures ; l’auteur en conelut que celte toxine peut être élaborée en l'absence de toute matière albu- minoide, — M. Brown-Séquard rappelle la théorie qu'il a émise il y a longtemps déjà sur la sécrétion interne des glandes ; en particulier, il avait admis que les glandes sexuelles, outre leur rôle dans la repro- duction, ont pour fonclion de verser dans le sang des produits spéciaux qui vont augmenter la tonicité des centres nerveux. Il à trouvé la confirmation de cette hypothèse dans des expériences faites sur des vieillards; chez ceux-ci, la glande sexuelle a cessé de fonclionner, et ne fournit plus ces produits au système nerveux ; or, on peut ramener la vigueur chez les vieillards af- faiblis en leur injectant l'extrait aqueux de glandes sexuelles actives. M. Brown-Séquard rapporte plusieurs cas démonstralifs. — M. E.-L. Bouvier confirme la note récente de M. Boutan relativement à l'existence chez les Nerilidés de la grèle commissure croisée qui fait du système nerveux de ces animaux un système chiastoneure ; mais il insiste sur ce fait que lune des commissures est au-dessus de l'intestin et l’autre au- dessous, Il en tire des conclusions relatives à la for- mation de la chiastoneurie et à la phylogénie de Pro- sobranches. — M. P. Fischer expose les caractères ostéologiques d’un Mesoplodon Sowerbyensis mâle, ré- cemment échoué sur le littoral de la France, — MM. E. Chevreux et J. de Guerne ont examiné un Gammarus recueilli par M. Delebecque dans la source sous lacus- tre du lac d'Annecy; ils le considèrent comme une espèce nouvelle qu'ils dédient à M, Delebecque. Ils examinent à ce propos les diverses formes du genre en Europe. — M. J. Raulin a essayé l’action de diverses substances {toxiques sur les œufs, les larves et les in- sectes parfaits du Bombyr Mori. — MM. E. Heckel et F. Schlagdenhauten ont éludié chimiquement les produits secrélés par diverses espèces des genres Gar- denia et Spermolepis ; ils ont reconnu que ces substances, semblables quant à leur aspect et leurs propriétés physiques à des gommes ou à des résines, se rappro- chent au contraire des lannins par leurs propriétés chimiques. — M. L. Daniel à fait de nouvelles expé- riences relatives aux greffes entre plantes herbacées ; il à étudié spécialement la greffe des choux verts sur diverses crucifères et réciproquement; il a noté des accommodations curieuses entre le sujet et le greffon, quand l’un est annuel, l’autre bisannuel ou vivace, quand les deux plantes sont de tailles très différentes, ete. — M. À. Gaudry présente un maxillaire de singe qui a été découvert par M. Harlé dans le quaternaire de la Haute-Garonne. L'espèce présente une grande ressem- blance avec le Magot de Gibraltar, — M. J. Gosselet a repris l'étude du calcaire de Visé. spécialement au point de vue des relations entre le dévonien et le car- bonifère, — M. A. Lacroix présente un Mémoire rela- üf à l’application des propriétés optiques des miné- raux à l'étude des enclaves des roches volcaniques. — M. G. Rolland expose les résultats des observations faites pendant ces trois dernières années à la station météorologique d'Ayata (Oued Rir). — M. A. Aubley, à propos de la note de M. Mely (21 avril), rapporte qu'à Rhodes, le remède contre les parasites de la vigne cité par Strabon est toujours en honneur ; on frotte les ceps avec une terre particulière pour détruire les pucerons. M. Aublez envoie des échantillons de cette terre. Nominations. — M. Amsler est élu correspondant pour la Section de Mécanique. Mémoires présentés. — M. Radau : Sur les inégalités planétaires de la Lune. — M. E. Gérard : Sur l'acide daturique. — M. B2ch: Sur la théorie du microphone. — M. L. Hugo: Sur un anneau elliptique de quarante points stellaires, discernable à côté de la nébuleuse de la Lyre dans la photographie du P. Denza. — M. 4r- naud Charles : Sur la déterminalion du nombre des nombres premiers inférieurs à une quantité donnée, — M. Thonion annonce que l’on peut examiner au microscope la circulation capillaire dans les vaisseaux superliciels de la conjonction humaine. L. Lapicoue. ACADEMIE DE MÉDECINE Séance du 24 mui. Suite de la discussion sur le traitement de la pleu- résie : MM. Léon Colin et Trasbot. Séance du 31 mai M. Desnos est proclamé membre titulaire dans la IV: section (thérapeutique et histoire naturelle médi- cale), en remplacement de M. Féréol, décédé. — Suite de la discussion sur le traitement de la pleurésie, à laquelle prennent part M. Trasbot, Le Roy de Méri- court, Laborde, Potain, Verneuil, Dieulafoy, Hardy. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 21 mai. M. Feré a étudié les variations dans Le temps perdu du mouvement volontaire, suivant que le sujet connait ou ne connait pas d'avance l'intensité de la résistance qu'il a à surmonter; il y a un allongement considé- rable du temps perdu dans le second cas M. Feré signale ce fait que pour lâcher un poids, le temps perdu est plus long si le poids est lourd que si le poids est léger. — M, Luys présente des aquarelles faites par des sujets hypnotisés figurant des flammes bleues et rouges aux pôles nord et sud des aimants, — MM. Langlois et Charrin ont étudié au moyen du calorimètre de l’un d'eux la thermogenèse des lapins pyocyaniques; on voit la courbe du rayonnement baisser beaucoup plus vite que la courbe de la tempé- rature. — MM. de Nabias et Sabrazès décrivent diverses particularités qu'ils ont pu observer sur les embryons de la Filaria sanguinis hominis trouvés dans une hydrocèle chyleuse. — M, Phisalix revient sur le mécanisme des mouvements des chromatophores chez les céphalopodes ; il maintient que GE uouveneimts” 126 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sont produits par des fibres musculaires radiaires et réfute les objections de M. Joubin., — M. Remy- Saint-Loup, voulant savoir, pour s’éclairer sur la nature des pigments mélaniques, s'il y a du fer dans les produits de la desquamafion cutanée des tritons à crête, à traité par le tanin l’eau dans laquelle un de ces animaux avait vécu plusieurs jours; cette eau ne contenait pas de fer, mais une matière colorante qui présente des affinités avec l'indigo. — M. Laulanie : Recherches expérimentales sur les variations corréla- tives de l'intensité de la thermogènèse et des échanges respiratoires ; influence de l'alimentation. — M. Giard expose les nouveaux résultats obtenus, tanten Europe, qu'en Amérique, par l'emploi des champignons ento- mophages pour la destruction des insectes nuisibles. — M, Charpentier : Influence de la durée de l’exci- tation sur la persistance totale des impressions lumi- neuses (Voir C. R., 23 mai). — M. J. Passy : Pouvoir odorant des alcools. (Voir C, R., 16 mai.) Séance du 28 mai M. P. Gilis : Anatomie des Scalènes (Costo-trache- liens) chez les Ruminants, les Solipèdes et les Carnas- siers. — M. Dewevre : Etude sur le rôle de l’élasticité de la voûte plantaire dans le mécanisme de la marche et sur la physiologie du pied plat, — M. F. Heim étudie rapidement les matières colorantes des œufs de crustacés; ces pigments n’ont pas de rôle respiratoire, mais peut-être les radiations lumineuses qu'ils absor- bent jouent-elles un rôle dans les mutations organiques de l’œuf. Avant d'arriver à l’œuf, ces pigments sont charriés par le sang de la mère, ce qui explique les divergences des auteurs au sujet de la coloration du sang des crustacés. — M. Bedart examine théorique- ment comment se combinent entre elles, pendant les mouvements du navire, les diverses sensations du pas- sager, Il montre qu'il doit y avoir désaccord entre la verticale apparente donnée par les yeux, et la pesan- teur apparente fournie par la plante des pieds; de là, à chaque moment, une impression analogue à celle du faux pas; de la répétition de cette impression résulte le vertige particulier qui est le mal de mer. — M. P. Regnard à fait vivre pendant un mois un cobaye sous une cloche où il était soumis à la dépression corres- pondante à l'altitude de 3,000 mètres. Au bout de ce temps, le sang du sujet a présenté une capacité respi- ratoire plus forte d'un tiers que celle des témoins, dont les conditions générales de nutrition étaient pour- tant meilleures, Cette expérience démontre done que l'hyperglobulie des grandes altitudes est bien dans la dépendance de l'élément décompression, — M. A. Nicolas : Les sphères attractives et le fuseau achro- matique dans le testicule adulte, dans la glande géni- tale et le rein embryonnaires de la Salamandre, — MM. Jolyet et Sigalas indiquent un dispositif élégant pour montrer dans un cours que l’excilation nerveuse de fermeture nait au pôle négatif, celle de rupture au pôle positif, — M. Rebourgeon indique la marche gé- nérale des épidémies de fièvre jaune en 1891-92 dans l'Amérique du Sud. Les expériences de vaccination, faites suivant la méthode qu'il a décrite antérieure- ment s’affirment de plus en plus comme efficaces. — M. E. Guinochet: Contribution à l'étude de Ja toxine du bacille de la diphtérie (Voir G. R., 30 mai). — MM. Raïlliet el Cadiot rapportent un cas de strongy- lose du cœur et du poumon (Strongylus vasorum) chez un chien, Les auteurs remarquent que ce parasite n'a été jusqu’iei signalé qu'à Toulouse; le chien en question a été observé à Paris, mais avait antérieurement vécu à Toulouse. L. Laricoue. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 3 juin M. D. Hurmuzescu a repris l’étude de Ja diffraction éloignée, Il a d’abord répété les expériences de M. Gouy, qui, le premier, à signalé le phénomène, Il a travaillé lui-même avec une grande perfection les écrans à bords tranchants, qui servent à la production du phénomène, et a modifié légèrement le dispositif de M. Gouy, en faisant arriver sur le bord de l'écran de la lumière parallèle, Il a confirmé les résultats de son devancier. Contrairement aux idées de Fresnel, l'écran n'a pas seulement un pur rôle passif, il intervient activement en produisant une coloration, accompagnée d’une polarisation perpendiculaire au plan de diffraction. La coloration, qui dépend de la nature du métal, est d’abord tres faible au voisinage de l'ombre géométrique et augmente à mesure qu'on s’écarte d’angles de plus en plus grands. Peut-être pourra-l-on trouver une explication de ces colorations en faisant intervenir la vitesse de la lumière dans les différents métaux. D'autre part, il montre qu'en partant des idées de M. Quincke, on peut expliquer la présence des nom- breuses franges fines qui apparaissent entre les franges principales. Enfin, le but principal de son travail était d'étudier ce que devient le phénomène lorsque, aux écrans métalliques, on substitue des écrans diélectri- ques, l’ébonite par exemple. La question a une très grande importance au point de vue de l'explication du phénomène tirée de la théorie électromagnétique de la lumière, On trouve alors que la polarisation est dans le même sens que dans le cas des écrans conducteurs, mais élle est beaucoup plus petite ; de plus avec une lumière incidente polarisée dans un azimut quel- conque, on n'observe pas de polarisation elliptique. — M. Bouty fait une communication sur la coexistence du pouvoir diélectrique et de la conductibilité électro- lytique. L'étude magistrale qu'il poursuit sur les dié- lectriques, et dont diverses parlies ont fait l’objet de communications antérieures, l’a conduit à rechercher si, comme on l’admet ordinairement, les corps se ran- gent bien en trois cat“gories entièrement distinctes : les conducteurs métalliques, les conducteurs électro- lytiques, et les diélectriques. Par exemple, on sait que, si l’on élève la température d'un corps isolant comme le verre, il arrive à acquérir une conductibilité élec- trolytique mesurable tout en conservant uue constante diélectrique. Dès lors n'y aurait-il pas lieu de réduire les trois catégories à deux ? Pour résoudre cette grave question M. Bouly emploie la même méthode que dans ses expériences antérieures sur le mica : il mesure les charges prises parun condensateur après des durées de charge qui varient depuis +5 de seconde. Il faut d'abord bien observer ce qu'on obüent : {° avec un condensateur à diélectrique parfait ; 2 avec une auge électrolytique parfaite, c'est-à-dire dans laquelle la polarisation ne vient pas compliquer les phénomènes. Or un conden- sateur à diélectrique parfait, un condensateur à lame d'air, atteint sa limite de charge en un temps moindre que 5% de seconde, et cette charge reste ensuite par- faitement constante, D'autre part, au lieu d’une auge électrolytique parfaite, on peut employer un système doué d'une capacité de polarisation énorme, tel que deux lames de laiton, plongeant dans deux auges remplies d'eau distillée et communiquant par un gros siphon; pour toule durée inférieure à 0°,03, la quantité d'électricité débitée est proportionnelle au temps, il n'y à pas encore de manifeslation de polari- salion. Au moyen de dispositifs variés, M. Bouty s'est assuré d’une manière complète que, dans les limites indiquées, on est bien à l'abri de toute polarisation. Dès lors, en superposant les deux ordres de phéno- mènes, on yoil ce que devra donner un condensateur dont l’isolant est un électrolyte, si néanmoins la cons- tante diélectrique subsiste. On devra touver une charge initiale déterminée, dont la valeur est fixée par la constante diélectrique, et ensuite une quantité d'élec- tricité variable proportionnellementau temps.La discus- sion des formules montre que, dans les conditions expé- rimentales présentes, c’est-à-dire lorsqu'on ne peut des- cendre au-dessous de 555; de seconde, l'investigation ue peut porter avec certitude que sur des corps dont la conductibilité spécifique est au moins égale à 10$ ohms, = ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES L'eau distillée et l'alcool le plus pur, ont encore une conductibilité beaucoup trop grande. On n’a alors à sa disposition que trois sortes de corps : 1°les mélanges de liquides, par exemple alcool et benzine ; 2° Ja glace à de très basses températures ; 3° les sels facilement fusibles, à condition de les prendre à l’état solide, et à une température éloignée du point de fusion. Dans tous ces cas, la charge d'un condensateur dont la lame isolante est formée de ces diverses substances apparaît bien conforme aux prévisions indiquées : elle part d'une certaine valeur, puis croît linéairement,. De plus, il est très remarquable que lorsque, avec un même corps, on opère à des températures différentes, la con- ductibilité varie souvent dans un rapport énorme, tandis que la constante diélectrique conserve une valeur invariable, au degré de précision des expé- riences. L'ensemble de ces résultats, qui confirme bien l’idée théorique de la superposition, de la coexis- tence des propriétés diélectriques et électrolytiques, montre donc qu'il est naturel de supposer qu'il n'existe que deux catégories de corps, les métaux et les élec- trolytes. Pour ces derniers, la conductibilité, lorsqu’elle est assez grande, masque les propriétés diélectriques ; au contraire, lorsque la conductibilité est assez faible, les propriétés diélectriques se manifestent seules, — M. Amagat ajoute un complément à la communi- cation qu'il à faite dans la dernière séance. On se rap- pelle que le lieu des points par lesquels les volumes de liquide et de vapeur restent égaux aux diverses températures à été trouvé par l'expérience être rigou- reusement une droite. M. Amagat moutre la relation entre la forme de ce lieu et la position de l'axe de la courbe parabolique qui représente à la fois les densités à l’état liquide et à l’état de vapeur, Si cet axe était rigoureusement horizontal, le lieu serait rigoureuse- ment aussi une droite, Cet axe étant légèrement incliné par rapport à la ligne des températures, le calcul mon- tre très facilement que le lieu, rapporté aux coor- données » f, est un branche d’hyperbole, En repassant de là aux p, v, le tracé de la courbe se modifie, en amenant une courbure contraire à celle de l’hyperbole. Il n’est dès lors pas étonnant que les deux effets puis- sent se détruire et donner comme lieu une droite, D'autre part, d’après une remarque de M. Vaschy, les courbes, lieu des rapports constants entre les volumes de liquide et de vapeur, semblent, d'après le calcul, devoir présenter un maximum par rapport au volume ; mais M. Amaäagal montre que ce maximum ne peut se produire que pour un pelit nombre de courbes, celles pour lesquelles le rapport est très voisin de l'unité. Edgard Haupié. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 1° juin. M. Fouret démontre par de simples considérations uéométriques deux théorèmes de M. Jamet sur les rayons de courbure des courbes triangulaires et des courbes tétraédrales symétriques. — M, d'Ocagne fait voir comment la considération de certaines courbes adjointes qu'il a étudiées dans un précédent mémoire (American journal of Mathematics ; 1888), permet d’effec- tuer la détermination géométrique des rayons de cour- bure de la développée d'une courbe plane, M. Bioche présente quelques remarques sur une suite de points pris sur une ellipse et tels que chacun d’eux se trouve à l'intersection de la courbe et du cercle os- culateur correspondant au point qui le précède. Il étudie les relations moyennant lesquelles une telle suite est limitée, — M, Demoulin établit diverses for- mules relatives aux éléments fondamentaux d’une courbe gauche en se basant sur la considération du déplacement du trièdre trirectangle formé par la tan- sente, la binormale et la normale principale. M. p'Ocacxr. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 13 mai M. R. Inwards lit une note sur un instrument à tracer des paraboles, Il servira à décrire les courbes de court foyer, telles qu’elles sont nécessaires pour les réflecteurs et pour les diagrammes des trajectoires des comètes et des projectiles. Leur construction est basée sur Ja propriété fondamentale d’être telles que chaque point de la courbe est équidistant du foyer et de la ‘irectrice. Dans le diagramme ci-contre (fig. 1), AB est Fig. 1. une glissière représentant la directrice, FGHI un paral- lélogramme articulé, pouvant tourner autour de F: CD indique use droite qui peut glisser en étant guidée aux points H et [. Une tige LE est liée au point C par une barre GM telle que les longueurs LM, ME, MG soient égales. L et G glissant le long de AB, le point E décrit une parabole dont le paramètre dépend de la distance de F à AB, Dans l'instrument, F est porté par un bras mobile qui permet de régler sa position. GE est tou- Jours perpendiculaire à AB et égal à EF. M. Boys demande si l'instrument pourrait être modifié pour tracer une seclion conique quelconque en s’arrangeant pour que le rapport de EF à EG, au lieu d’être égal à 1, fût plus grand ou plus petit que l'unité, M. Perry dit qu'un instrument tracant les courbes représentées par l'équation y = x" serait d’une grande utilité dans les travaux d'ingénieur. — M. Nalder présente et décrit quelques appareils électriques. Le premier est un gal- vanomètre balistique avec un couple de bobines, dont les qualités distinetives sont la facilité avec laquelle on le manie, un faible amortissement, une grande sensi- bilité, et la disposition du contrôle. Le contrôle est ob- tenu par un «aimant à queue », porté sur un tube hori- zontal supporté par un pilier en dehors de la cage, comme l'a proposé M. Walmsley. Un petit aimant sur l& couvercle sert à régler le zéro. Le système suspendu se compose de quatre aimants, dont deux sont au mi- lieu de la bobine et les deux autres en haut et en bas, disposés de manière à donner un système astatique, La sensibilité de l'instrument est telle qu'un £ de mi- crocoulomb donne 300 divisions(quarantièmesde pouce) quand la période est 10 secondes et la distance de l'échelle 3 pieds. La résistance du galvanomètre est d'environ 10000 ohms. Pour amener l'aiguille à rester tranquille, on a disposé une bobine amortissante mon- tée sur un support réglable et une clef de commu- lation spéciale munie de résistances, La clef a des contacts successifs disposés de telle sorte que, quand on presse légèrement, un faible courant traverse la bobine amortissante; tandis que, si l’on presse fort, il passe un courant plus intense. Les courants intenses servent à arrèter les grandes déviations, et les faibles à amener à la fin l'aiguille au zéro. Un support de lampe avec une échelle translucide, disposée pour se servir d’une lampe à incandescence, sont ensuite présentés. Au lieu de faire les lectures avec l’image d’un fil, comme cela se fait d'ordinaire, la lanterne est disposée pour | donner un disque brillant de lumière avec une ligne | noire au milieu. M. Blakesley demande si le gal- vanomètre estastalique. Pour amortir un galvanomètre ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES non astatique, il a trouvé commode d'enrouler plu- sieurs tours de fils autour de la bobine et de les mettre en série avec quelques soudures thermoélectriques qu'on chauffe avec la main, et avec une clef. M, Nal- der répond que le galvanomètre est astatique, mais que la bobine amortissante doit être placée de facon à agir sur un des couples d’aimants plus que sur l’autre, — MM. Edgar et Stansfield présentent une nole sur un instrument transportable pour la mesure des champs magnétiques, et quelques observations sur l'intensité des flux perdus des dynamos. L'instrument est l'in- verse du galvanomètre d’Arsonval, car la tension néces- saire pour maintenir un cadre mobile traversé par un courant constant et parallèle au champ, donne une mesure de l'intensité du champ. Le courant constant est fourni par une pile sèche de Hellensen, que les auteurs trouvent remarquablement constante. L'instru- ment se compose d’une bobine d'environ 50 ohms, en- roulée sur du mica et suspendue dans un tube par des bandes de maillechort. Un index est fixé au mica, ainsi qu'un tambour divisé, auquel est fixée par son côté extérieur une des bandes, servant à mesurer la tension, Un commutateur est en relation avec le tam- bour et renverse automatiquement le courant dans la bobine quand le tambour est tourné dans des direc- lions opposées à partir du zéro. Deux lectures faites ainsi éliminent l’erreur due à la pesanteur et tenant à un défaut de parfait équilibre de la bobine. On donne les moyens de régler et de mesurer la torsion de la suspension. La constante de l'instrument se détermine en plongeant la bobine dans le champ ®un galvano- mètre d'Helmholtz; on trouve qu’elle est de 0,293 par 4°. Un autre champest par conséquent donné pour 0,293 (n + 1)0, 6 étant l’angle de torsion en degrés, et n le multiple de 50 ohms qui représente la résistance en série avec la bobine. Des champs de 2 ou 3 unités C. G. S. peuvent être mesurés à environ ? °/, avec l'ap- pareil, et même le champ terrestre est appréciable, Les auteurs ont étudié des champs de dynamos à l'Expo- sition du Palais de Cristal, et ils donnent dans leur note les résultats obtenus. On a observé que les flux perdus des machines multipolaires tombent beaucoup plus rapidement que ceux des machines à deux pôles quand les distances augmentent, el que près des angles et des arètes des aimants, les champs sont beaucoup plus intenses qu'au voisinage des sur- faces planes. L'effet perturbateur des réactions de Par- mature sur l'intensité des flux perdus a été me- suré, et on aobservé la forme des champs dans quelques cas. Des expériences sur les montres aimantées sont décrites dans la note. M. Whipple dit que c’est au Comité de Kew que revient en quelque mesure le mé- rile des expériences en question, car c'est à ses frais que les recherches ont été commencées. Relativement aux montres dites non magnétiques, il était nécessaire de connaître quelle intensité de champ elles peuvent supporter sans s’aimanter, L’instrument employé pour ces essais est très intéressant et donne des résultats de grande valeur, M. Trotter espère que les auteurs donneront un supplément à leur travail en (racçant les directions des champs des dynamos, et il décrit une méthode simple pour y arriver au moyen d'une aiguille témoin, employée comme un timbre de caoutchouc. La question des montres est, à son avis, bien vite résolue: mème les montres non magnéliques s'arrêtent dans les champs intenses, à cause des courants de Fou- cault qui prennent naissance dans les pièces mobiles. M. Blakesley demande si l'instrument peut être em- ployé dans une position quelconque. Il croit que trois observations seraient nécessaires pour délerminer complètement un champ. M. Stansfeld répond qu'il emploie une aiguille indicatrice pour avoir la direc- tion du champ, et il place la bobine suivant cette direction. L'instrument pourrait être employé dans une position quelconque, car le poids de la bobine n’est que de 2 grammes environ, et il n’altère pas beaucoup la tension de la suspension, qui est d'ordinaire voisine { | le 300 grammes. Une horloge à balancier de laiton ne serait pas influencée par un champ de 10 unités G.G.8., mais le serait sérieusement par un champ de 40. — M. Joseph Loribond lit un mémoire sur une unité de mesure pour la lusnière et la couleur, Le mémoire est illustré de planches coloriées, de diagrammes et de modèles, et diverses pièces de l'appareil qui permet de mesurer des couleurs sont présentées. Le principe de la mesure est dans l'absorption sélective des parties constituantes de Ja lumière blanche normale par des verres colorés (rouge, jaune et bleu), Le foncé de la teinte des verres est gradué avec soin de façon à donner l'absorption en proportions numériques. Par exemple, deux verres égaux, appelés chacun une unité rouge, donnent ensemble la même absorption que deux unités rouges, et ainsi de suite, Les unités de rouge, jaune et bleu, sont choisies de facon qu'une combinaison de trois verres unités absorbe la lumière blanche sans donner à la lumière transmise aucune coloration. Une telle combinaison s'appelle une « teinte neutre unité », Par l'emploi de teintes neutres unilés successives, de la lumière blanche peut être graduellement absorbée sans donner trace de coloration, et le nombre de pa- reilles unités nécessaire pour produire l'absorption. complète, fournit une mesure de lintensité ou de la luminosité de la lumière blanche. L'auteur indique des méthodes .pourreprésenter les couleurs par des cereles et des papiers, et illustre par des diagrammes l'in- fluence de la durée d'observation sur la pénétrabilité pour les différentes couleurs. Il montre les représen- tations, par des diagrammes, des résultats de 154 ex- périences de mélanges de couleurs. Après avoir lu le mémoire, M. et Mlle Loribond montrent les méthodes employées pour assortir et mesurer les couleurs. — M. Paul expose sa forme de pont de Wheatstone, dis- posée pour occuper le méme espace et remplir les mêmes conditions que le modèle bien connu du Post- Office. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 17 mars M. Wyndham R. Dunstan : Elude des conditions qui déterminent la combinaison entre les cyanures de zinc et de mercure; composition et propriélés du sel double résultant. En mélangeant des solutions de sulfate de zinc et de cyanure de mercure et de potas- sium, on oblient un précipité blanc auquel Gmelin a attribué la formule Zn K? (CAz)'. L'auteur montre que cette formule n’est pas exacte. Le précipité lavé à l'eau froide perd une grande quantité de cyanure de mercure, Il semble qu'on ait affaire là à un phénomène de décomposition limitée. II tend à se former le com- posé Zn‘Hy (CAz)'0, mais ce corps est décomposé par l’eau, et la composition du précipité obtenu varie beau- coup avec la concentration des liqueurs employées. — M. E. Thorpe : Expérience de cours destiné à illustrer le phénomène des explosions de poussières de houille. — M. Henry Armstrong et Stanley Kipping: Pro- duction de la célone 1 : 2 : 4, acétylorthoxylène par l'action de l'acide sulfurique et du chlorure de zine sur le camphre, —M. W. Pullinger : Tétrachlorure de pla- tine. L'auteur à obtenu cette substance en chauffant du chlorhydrate platinique hydralé dans un courant d'acide chlorhydrique sec, à 165°, pendant quinze heures, C’est alors une substance très soluble, mais non déliquescente, — M. W. H. Perkin : Note sur un nouvel acide dérivé de l’acide camphorique. L’acide camphorique chauffé à 65° avec de l'acide sulfurique est transformé en acide sulfocamphorique, avec mise en liberté d’eau et d'oxyde de carbone. C10H1604 + SO1H2 = C?H16 SO CO + H20 D'après M. Perkin, l'acide ainsi obtenu est un isomère de l'acide sulfocamphorique ordinaire. — James Sul- livan : Pouvoir rotatoire spécifique et pouvoir réduc- teur (liqueur cuprique) du sucre inlerverti et du dpi ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES dextrose déduits du sucre de canne au moyen de l’in- vertase, — M. Hodgkinson et Léonhard Limpach: Ethyldiméthyl-amido-benzine. Les auteurs ont préparé cette amine en chauffant du chlorhydrate de paraxy- lidine avec de l'alcool chine sous pression à 2500-3009, L’amine pure bout à 2479, Son dérivé for- mylé cristallise en aiguilles R à 104-105°; son dérivé acétylé forme des prismes brillants fondant à 142-143, — M. A. C. Perkin: Action de l'acide nitrique sur l’oxanilide et ses analogues. Quoique l’acétanilide et les composés analogues soient facilement convertis en dérivés mononitrés, la composition de leurs dé- rivés dinitrés est souvent difficile, et l’anilide trinitrée n'a jamais pu être déduite directement de l’aniline ou de ses dérivés. L'auteur trouve que l’oxanilide et les corps analogues sont facilement convertis, par nitra- tion, en dérivés complètement nitrés. M. Perkin décrit la préparation et les propriétés des substances suivantes : tétra et hexa-nitroxanilide, di et titra- nitroxalorthotoluidine , tétranitronalparaloluidine , dinitro-p-naphtylide, acides mono, di et trinitroxani- niliques, Séance du T avril. John Clark: Séparation de l'arsenic, de l’anti- moine et de l’étain. — Shenstone et C. R. Beck: Le chlorure platineux et son emploi comme source de chlore. Les auteurs concluent que le chlorure plati- neux préparé par un procédé quelconque, même celui de M. Pigeon, contient une quantité appréciable d’un composé basique dont la décomposition produit de l’eau en même lemps que de l’oxygène et de l'acide chlorhydrique. — A. Shenstone : Note sur l’adhésion du mercure au verre en présence des halogènes. L’au- teur trouve quele chlore, le brome ou P iode soigneuse- ment purifiés agissent sur le mercure comme l'ozone en le faisant adhérer au verre, — Percy Frankland et John S. Lumsden : Décomposition du mannitol et du dextrose par le Bacillus ethaceticus. La décompo- Si du mannitol peut être représentée par la for- mule : , SCSHUO6 + H20 = C2Hi0? + 5 C2H6 0 + 5 CH? 0? + CO2 tandis que dans le cas du dextrose on a les proportions suivantes : 2,5C2H60 : 1,5C2H40?2 : 3CH?0? : CO? Dans le cas du dextrose, il y a donc plus d'acide acé- tique en proportion de l'alcool et de l'acide formique. L'acide carbonique oblenu provient de la décomposi- tion du carbonate de calcium présent en excès par un acide fixe insoluble dont la nature n’a pu être déter- minée. — H. G. Colman: Préparation de l'acide gly- colique. L’acide glycolique peut être obtenu en faisant bouillir pendant longtemps dans un appareil à reflux une solution de chloracétale de potassium. — Emer- son Reynolds : Recherches sur les composés du sili- cium et leurs dérivés. VI partie. Action du tétrachlo- rure de silicium sur les phénylamines substituées. — Augustus Dixon: Chimie des composés de la (hiourée et des thiocarbimides avec l'aldéhydate d’ammoniaque. Laréaction 2énérale étudiée est donnée par la formule: R—AzCS + 2R'CH(OH) AzH? = CS Az H°R (CHR)? + 2H°0 Les propriétés des corps ainsi obtenues tendent à faire admettre pour les thiourées monosubstituées une for- mule de la forme, AzH He A7 CC NSH — Hoskyns Abrahall : Poids atomique du bore. Les expériences ont été faites en précipilant par un sel d'argent le bromure de bore. La moyenne des déter- minalions donne B—10,816 (0 = 16) l’erreur probable élant de 0,0055, 429 Séance du 21 avril. Dropp Richmond et Hussein Of. La masrite, nouveau minerai égyptien, contenant peut-être un élément encore inconnu, Les auteurs croient avoir trouvé dans le minerai en question de petites quantités d’un nouvel élément qu'ils appellent le masrium. En le supposant bivalent, on trouve pour son poids atomique environ 228; or il est à remarquer que dans le tableau de Mendeleeff il y à une place vacante dans le groupe du glucinium et du calcium; cette place correspond au poids atomique 225. La masrite à la composition suivante : (AL, Fe)?05 (Ms, Mn, Co, Fe) O. 4 Séance SO3, 20 H20. du 5 mai Wyndham Dunstan et Dymond:L'existence de deux acétaldoximes. Les auteurs trouvent que l’acétaldoxime peut se présenter sous deux formes isomériques; l'une fondant à 46°, 5 a-acétaldoxime, l’autre liquide à la température ordinaire B- acétaldoxime.— GT. Moody : Acides sulfonés dérivés des anisols, L’anisol et le phénétol donnent presque exclusivement des acides parasulfoniques. — W. Spring: Formation de trithio- nate par l’action de l’iode sur un mélange de sulfite et d'hyposulfite. — J. Sakuraï: Détermination de la tem- péralure de la vapeur émise par une solution saline en ébullition. L'auteur conclut, contredisant en cela Rudberg et Muller que la température de la vapeur émise par une solution saline bouillante est la même que celle de la solution. — J. Sakurai : Note sur une observation de Gerlach relative au point d’ébulli- tion d'une solution de sulfate de sodium, — Emile Werner: Chimie des thiourées, SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du 16 mai 1° SciENCES Physiques. — L'astronome royal pour l'Ecosse présente un appareil de photographie stellaire du D° Gill de l'Observatoire du Cap. — M. Peddie: Sur la loi de transformation de l'énergie et ses applications, IL montre par des exemples spéciaux qu'une généra- lisation du second principe applicable aux formes de l'énergie autres que la chaleur, conduit à des résultats déjà trouvés par d’autres méthodes. — MM. Knett et Shand communiquent une courte nole sur les effets de l’aimantation sur le volume, note qui fait suite aux résultats communiqués à la Société l'an dernier par le premier des deux auteurs, Quand un tube de fer d’une grandeur particulière est aimanté, le volume intérieur subit une série remarquable de changements. Dans des champs très faibles, il y a d’abord un petit accroisse- ment qui, quand le champ devient plus intense, passe d’abord par un maximum, puis s’annule et change de signe. À partir de ce point (environ 20) jusqu'à une va- leur du champ de 120, il y a une diminution de vo- lume. Celle diminution est maximum pour un champ de 64. Dans des champs supérieurs à 120, il y a un ac- croissement de volume qui atteint un maximum pour un champ d'environ 400 unités, et tombe très lente- ment pour des champs plus élevés. IL montre que cette variation curieuse de la dilatation cubique avec l’inten- se du champ implique une dilatation ae {trans- “ersale de signe généralement opposé à la dilatation a dal bien connue. La grandeur et la position des points maximum et les points nuls de ces dilata- tions linéaires corrélatives diffèrent suffisamment dans le détail pour produire les changements de signe par- ticulièrement répétés dans la dilatation cubique. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. Hunter Stewart lit une note sur la ventilation des écoles et des bâtiments publics. La première partie du mémoire contient une recherche sur la présence des matières organiques azotées dans l’air expiré. Diverses méthodes sont em- ployées pour absorber et recueillir ces produits; on a même les matières organiques par le procédé de 430 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Kjeldahl, consistant à convertir l'azote en ammoniaque. Les résultats montrent que, par pied cubique d’air ex- piré, il y a une proportion moyenne de 0,1149%er d'am- moniaque telle quelle, et 0,002%8r diminué des ma- lières organiques, L'eau condensée contient, par 10 pieds cubes d'air expiré, une moyenne de 0,5% de résidu solide qui disparait entièrement à l'ignition, Ces ré- sultats, confirmation des observations de Hermann et Lehmann, prouvent que les matières organiques dans des espaces mal aérés ne proviennent pas de la respi- ration, mais de la peau et des vêtements des personnes qui s’y trouvent, — M, James Geikie lit une note sur la succession glacière en Europe. Les dépôts qui ont donné pour la première fois la preuve évidente de l'ac- tion glacière sont généralement rapportés à la période pliocène. Ce sont les plus anciennes moraines de l’Eu- rope centrale, les moraines situées sur le « diluvium inférieur » de la Suède. Des conditions climatériques fécondantes suivent cette période dans une grande étendue de pays, la Grande-Bretagne étant rattachée au continent. Puis vient l’époque de la glaciation maxi- mum, les nappes de glaces de l’Ecosse et de la Scan- dinavie étant continues. Les conditions climatériques fécondantes viennent ensuite, la Grande-Bretagne étant toujours continentale. Puis vient une submersion d'une hauteur de 509 pieds, suivie d'une autre époque glacière dans laquelle les glaces écossaises et scan- dinaves sont encore continues. Cette période est suivie encore de conditions favorables à la fécondation, la Grande-Bretagne étant seule rattachée au continent. Un abaissement de 100 pieds se produit, et alors com- mencent les conditions arctiques avec les nappes de glace locales, auxquelles succèdent des conditions tempérées sur une grande étendue de pays, et à la suite un abaissement de niveau de 50 pieds. Ensuite vient une autre période froide avec des glaciers locaux; c’est la dernière en Grande-Bretagne. W. PEDDIE, Docteur de l'Université. ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE Séance du 5 mars. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. CI. Servais : Sur la courbure dans les sections coniques. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. P. de Heen: Déter- mination théorique du rayon de la sphère d'activité moléculaire des liquides en général. Dans sa méthode, l’auteur s'appuie sur la remarque suivante, faite par W. Thomson : Dans un tube capillaire de hauteur k, la tension de la vapeur au niveau d’une surface plane est égale à la tension de la vapeur émanant de la surface concave, augmentée de la pression exèrcée par une colonne de vapeur de hauteur À. L'auteur est conduit par le calcul à la formule suivante : » —0,0000000215T V, dans laquelle > représente le rayon de la sphère d’acti- vité, T la tension superficielle et V le volume molé- culaire, Voici, entre autres, quelques valeurs trouvées pour #: Bbaileanr see rence r = 0,00000297 Pour l’argent fondu à 1000°. r = 0,00000991 Pour le mercure....... É r = 0,00001740 Ces nombres sont d'accord avec les résultats obtenus jusqu'à ce jour : pour l’eau, la valeur de » est infé- rieure à 02% 0000567 ainsi que l’a démontré M.Plateau. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. P.-J, Van Beneden : Le mâle de certains Caligidés et un nouveau genre de cette famille. H, Burmeister avait distingué deux formes parmi les parasites d’un squale qui lui avaient été adressés par le D Stannius. Il rapporta l’une au genre Pandarus, autre au genre Dinemoura. Ces deux formes sont le mâle et la femelle d’une même espèce, Autre erreur : le Spicilliqus curticaudis de Dana est le mâle d’un des trois Pandarus qu'il décrit, Enfin M. G.-M. Thomson vient de faire la même observation à la Nou- velle-Zélande sur le Nogagus elongatus de Heller, qui est le mâle du Pandarus dentatus. Dans sa présente note, M. Van Beneden fait conuaïître : 1° le mâle de Pandarus Cranchii; 2 le mâle et la femelle de Pandarus affinis (espèce nouvelle) ; 3° un genre nouveau, le CAla- mys incisus; 4° le mäle de Dinemoura elongata, — M. A. Bienfait : Recherches sur la physiologie des centres respiratoires, L'auteur, à la suite d'expériences variées, est arrivé aux conclusions suivantes : 4° les centres respiratoires médullaires sont impuissants à produire et à gouverner la fonction respiratoire, alors qu'ils sont séparés des centres respiratoires princi- paux. Les apparences de mouvements respiratoires observés quelquefois après la section du bulbe sont dues à l’activité persistante de la moelle dans les appa- reils de la vie de relation; 2° le centre respiratoire principal exerce une action excitante et non inhibi- trice sur les centres respiratoires médullaires ; 39 le centre respiratoire bulbaire, isolé par deux sections transversales des centres respiratoires accessoires, peut fonctionner seul et présider aux mouvements res- piratoires de la glotte. — M. A. Grifiiths : Sur une nouvelle ptomaine obtenue par la culture du Bacterium Alli. En cultivant le B. Allü sur de l’agar-agar pep- tonisé, précédemment stérilisé, il se produit une pto- maine cristallisant en aiguilles microscopiques, appar- tenant au système prismatique. L'auteur en indique les différentes réactions et propriélés et en décrit un chloroplatinate cristallisable. Les analyses de la base elle-même ont conduit à la formule C!0H17Az (hydroco- ridine), ce qui la rattache à la série des bases pyri- diques. Cet alcaloïde est le résultat de la décompo- sition de l’albumine par le Bacterium Allii, Ce microbe produit de petites quantités de gaz HPS, Séance du 2 avril 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. Folie : Nouvelle recherche des termes du second ordre dans les for- mules de réduction des circompolaires en ascension droite et déclinaison. — M. P. Stroobant: Note sur le diamètre du Soleil et de la Lune et l’équation per- sonnelle dans les observations de passage. —M. F. Ter- by : Sur l'aspect de Titan en passage devant Sa- lurne. 20 ScrENcEs PHYSIQUES. — M. F. Folie : Sur les agran- dissements des photographies lunaires de Lick Obser- vatory exécutées par M.Prinz, assistant à l'Observatoire royal. Une première image sur verre, déjà amplifiée au double par les astronomes américains, fut agrandie cinq fois sans perdre de sa nettelé, ln agrandissement à vingt diamètres permet d'obtenir encore de belles images. Une épreuve du cratère Copernic ayant été amplifiée de cent diamètres, a donné une vue de ce cirque sous un diamètre de 30 centimètres. Sur cette épreuve, le grain, ordinairement ponctué des plaques, est remplacé par des stries diffuses, très serrées, ayant de 12 à 14 millimètres de longueur, donnant, à une certaine distance, une grande douceur à l'épreuve. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. P.-J. Van Beneden : Un cétacé fluviatile d'Afrique. La tête de ce cétacé, provenant de la baie Man of war (Kameroun), est par- venue au professeur Willy Kükenthal, de Iéna, qui lui a donné le nom de Sotalia Teuszü. L’estomac contenait des graminées, des herbes et surtout des fruits en partie digérés, ce qui indique que c’est un Dauphin à régime végétal. Les Sotalia ont une nageoire pectorale très large, comme les Platanistes ; leur bassin proba- blement est formé d’un os médian unique, comme le fait supposer un squelette recu récemment par M. Van Beneden fils; de plus, ils sont à demi marins. Les Sotalia, qui font la transition des fluviatiles aux marins, apparaissent avec des caractères génériques communs à la fois en Amérique, en Asie et en Afrique. L'auteur donne ensuite la description de la tête du Sotalia Teuszi. L'animal devait avoir deux mètres de longueur, — M. C. Malaise : 1° Découverte de la faune frasnienne dans le bassin de Namur : l’auteur a ren- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES A31 contré, dans des schistes jaunâtres, situés au-dessous du marbre noir de Golzinne, parmi d’autres espèces, le Cardium palmatum, Goniatites, Bacrites, Rhynchonella euboïdes, etc. 2° Sur les calcaires dévoniens de Som- breffe, Dans cette localité, on observe des bancs de calcaire caractérisés par le Stringocephalus Burtini. Au- dessus se trouvent des calcaires noirâtres contenant le Spirifer unguiculus. Puis viennent des calschistes ayant de prime abord un aspect frasnien et où l’auteur a recueilli un bel exemplaire de Stringocephalus Bur- tini, ce qui fixe, d'après l’auteur, l’âge givetien de ces dernières couches, — M. G. Ansiaux : Recherches cri- tiques et expérimentales sur le sphygmoscope de Chauveau-Marey et les manomètres élastiques. Les conclusions de ce travail sont les suivantes : tous les appareils examinés au cours de ces recherches, — lesphygmoscope de Chauveau-Marey, les manomètres de Fick, Gad et Hürthle — sont des enregistreurs très exacts et propres à rendre kes détails des variations cardiaques de la pression sanguine. L'auteur fait res- sortir l'exactitude du sphygmoscope. Avant toute expé- rience, il importe d'éprouver les manomètres élas- tiques avec un appareil vérificateur semblable à celui employé par l’auteur. De plus, chaque appareil doit être adapté aux conditions particulières dans lesquelles on opère. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 28 mai 4° SGIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P.-H. Schoute pré- sente, au nom de l’auteur, la seconde partie du caleul intégral de M. F. Gomes Teixeira. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. Th. H. Behrens fait connaître le résultat d’une étude microscopique de deux alliages de cuivre de zinc obtenus à la température ordinaire, par la compression, par M. W. Spring de . Liège. L'un des deux (jaune rougeàtre) contient 90 % cuivre et 10 % zinc, l’autre (légèrement jaune) 70 cuivre et 30 % zinc. Ils avaient été limés en poudre et rendus compacts au moyen de deux compressions suc- cessives. Le premier est plus doux que le laiton ordi- naire; au contraire, le second est plus dur et plus fragile. Tous les deux contiennent une grande quan- tité d’un alliage jaune à structure amorphe qui ne montre même pas trace des cristallites caractéris- tiques du laiton ordinaire obtenu par fusion. De plus ils contiennent un grand nombre de petits morceaux anguleux de cuivre à fils jaunes entre les bandes rouges et quelques petits morceaux et fils de zinc, les derniers se rendant du centre à la périphérie cylindrique des échantillons. L’alliage jaune et le zinc ont subi, sans doute, un mouvement de translation, et rien n'indique un état de fusion intermédiaire. Il faut donc admettre qu’à l’aide des actions répétées de limer et comprimer, le cuivre et le zinc se sont liés intimement. M. Spring, en poursuivant ses travaux, obtiendra probablement des alliages à propriétés remarquables, qui n'ont pas en- core été obtenus par la fusion, — M. J.-L.-C. Schræ- der van der Kolk : Sur une étude macro et micros- copique de trois roches erratiques du diluvium de Markeloo (porphyre d’Aland, porphyre d'Elfdalen, dia- base d'Asby). — M. M. Weber présente le second fas- cicule du tome second de son travail : Zoëlogische Ergebnisse einer Reise in Niederländisch, -0s tIndien. — M. H.-J. Hamburger : Sur la différence de compo- sition du sang artériel et du sang veineux. SCHOUTE, Membre de l’Académie, ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 5 mai 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. von Escherich : Sur les multiplicateurs d’un système d'équations difré- rentielles, linéaires et homogènes.—M,. A.-J.G-meiner : Loi générale de réciprocité des bicubiques. — M. Nico- laus Fialkowski : Première solution mathématique exacte du problème de Deli. — M. A. Sucharda : Réci- proque concernant une série de surfaces centrées du quatrième ordre. — M. E. Presh von Haerdtl: Sur deux termes de perturbations à longue période causées par l'attraction de la planète Vénus. — M. F. Mertens : La loi fondamentale de l'algèbre, 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. le capitaine de frégate Wilhelm Môrth, commandant le vaissean Pola, adresse une notice sur l'installation de ce vaisseau, en vue de faire l'étude de la profondeur des mers. — MM. H. Paschkis et Fritz Ohermayer : Recherches pharmacologiques sur les acétoximes et les cétones, Les auteurs étudient l’action physiologique de quelques cétones et celle des acétoximes correspondantes; ils expérimentent avec l’acétone, la diéthylacétone, la mé- thyÿInonylcétone, la méthylphényleétone et le camphre, auxquels correspondent l’acétoxine, la diéthylacé- toxime, etc. Il résulte de ce travail que les cétones agissent en général comme les alcooïs, leur action dé- pend à la fois du poids moléculaire et des radicaux alcooliques substitués; elle n’est pas influencée par l'introduction du groupe caractéristique des oximes, le camphre et son oxime sont les seuls à présenter quelque différence. — M. R. Zaloriecki : Sur l’exis- tence et la formation du sulfate de soude à Kalusz. — Sur les bases pyridiques contenues dans le pétrole, — M. Max Grog'er : Sur une nouvelle combinaison de l'iode et du plomb. — M. J. Horbaczeuski : Théorie de la formation de l'acide urique dans l'organisme des Mammifères, — M. A. Adamkiewicz : Procédé de traitement des Carcinomes. — M. J. Hann : Recherches sur les oscillations diurnes du baromètre. La première partie de ce long travail est consacrée à l’analyse dé- taillée des oscillations barométriques au sommet et au pied des montagnes; les observations qui servent de point de départ sont celles qui ont été faites d'heure en heure aux stations suivantes : Blue Hill, 493,5 m., Tour Eïffel, 312 m. 9, Ben N 1463, Wendelstein, 1727.2 m., Schafberg, 1776 m. 1; Saint-Bernard, 2475,6; Obir, 204%; Sonnblick, 3105. L'amplitude des oscillations diminue d'abord avec la hauteur pour croître ensuite. Le minimum a lieu vers six heures du matin au sommet, el entre trois et quatre heures au pied de la montagne, L'auteur fait ensuite une étude approfondie de l'influence que peut avoir la varialion de température sur la production des oscil- lations ; il arrive à relier les formules qui donnent en un mème lieu la variation de pression et la variation de température avec le temps, — Observatoire de Vienne : Observations météorologiques et magnétiques faites pendant le mois de mars (altitude : 202m, 5). 3° SCIENCES NATURELLES. — M, Majsisovics : Sur les céphalopodes du trias de l'Himalaya, — M. Franz Toula : 1° Découverte de deux nouveaux gisements de Mammifères dans la presqu’ile des Balkans; 2° Compte rendu détaillé de recherches géologiques effectuées dans l’ouest des Balkans, dans d’autres parties de la Bul- garie ef dans l’ouest de la Roumélie, Emil Weyr, Membre de l’Académie, 432 NOTICE NECROLOGIQUE NOTICE NÉCROLOGIQUE A. W. VON HOFMANN La science chimique vient de perdre un de ses vété- rans les plus illustres ; l'Allemagne, un des artisans les plus actifs de son développement scientifique et indus- triel : A. W. Hofmann a terminé sa longue carrière le 5 mai 4892. Comme la vie, la mort lui fut clémente; elle l’a pris subitement, sans souffrances, sans troubler la sérénité de sa verte vieillesse : en pleine gloire. Avec lui disparaît l’un des derniers représentants de cette admirable phalange de savants, élèves et con- tinuateurs de Dumas et de Liebig — Laurent, Gehrardt, Würtz, Cahours, Graham, Stas, etc. — dont les travaux ont fait la chimie ce qu’elle est aujourd’hui. L’œuvre accomplie par Hofmann, pendant une période d’acti- vité ininterrompue de plus d’un demi-siècle, est con- sidérable ; elle intéresse également la chimie théorique et les applications industrielles. Hofmann naquit à Giessen en 1818, et tout jeune, se livra d’abord à l'étude des langues vivantes, puis à celle du droit ; mais l'influence toute-puissante de Liebig, dont le laboratoire de Giessen était alors le centre de l’activité scientifique en Allemagne, l’arracha bientôt à ces études pour le donner à la chimie. A Giessen, Hofmann travailla pendant huit ans comme élève d’a- bord, puis comme assistant; et c’est là, chez Liebig même, qu'il se Jia avee Würtz d’une amitié qui ne se démentit jamais. En 1848, il fut appelé à Londres au Royal College of Chemistry, et il fit du laboratoire de cette institution la première école de chimie que l’Angleterre ait possédée ; il professa à Londres Jusqu'en 1862, puis revint en Allemagne, à Bonn d'abord, et dès l’an- née suivante (1863) à Berlin, où il succéda à Mit- scherlich, C’est là que, pendant près de 30 ans, il pour- suivit ses recherches, formant d'innombrables élèves, trouvant cependant le temps nécessaire pour organiser la vie chimique en Allemagne, mettant toujours au ser- vice de la science et de l’industrie l'influence considé- rable qu’il avait dans les conseils du Gouvernement, Les premières recherches d'Hofmann furent faites à Giessen, en 1843; elles avaient pour objet l'étude chimique des bases contenues dans le goudron de houille; ce travail, qu'il poursuivit pendant plusieurs années consécutives, fut fécond en résultats impor- tants. Dès le début, il identifia une de ces bases, ap- pelée Kyanol avec l’aniline, obtenue par la distillation de l'indigo avec la potasse, et une seconde, appelée Leucol, avec la Quinoléine; il fit ensuite une étude complète de l’amline, de ses sels, de ses dérivés, et la rapprocha très heureusement de l’ammoniaque. Aban- donnée pendant quelques années, celte étude fut re- prise par lui, quand l’aniline, préparée par le procédé de M. Béchamp, fut devenue un produit industriel; on vit alors des mains du savant sortir une éclatante série de couleurs nouvelles : il prépara la fuchsine par le tétrachlorure de carbone et l’aniline; il trans- forma ensuite cette fuchsine par l’action des iodures alcooliques en magnifiques colorants violets, Il ne cessa, depuis cette époque, de s'intéresser aux pro- grès de l'industrie des matières colorantes, il y con- tribua puissamment lui-même ; je rappellerai seule- ment les études sur Ja constitution de la Rosaniline; sur le Vert méthyle (avec M. Ch, Girard), sur la Chry- soïdine, sur l'Eosine, et sur l'emploi des Xylidines et des Naphtylamines pour la préparation des couleurs. Dans le domaine de la science pure, son œuvre est plus considérable encore et touche à tous les chapitres de la chimie organique. Würtz venait de faire connaître les ammoniaques composées, et en avait, de toutes pièces, créé la théorie; mais les seuls termes jusqu’a- lors découverts par lui étaient les amines primaires; Hofmann, par un procédé différent — l’action des io- dures alcooliques sur l'ammoniaque, — obtient à la fois des amines primaires, secondaires et tertiaires, en même temps que les sels des ammoniums quaternaires, remplissant ainsi tout le cadre si magistralement tracé par son illustre ami, L'étude des ammoniaques com- posées ne cessa plus de l’occuper jusqu’à la fin de sa vie, et il ne se passait guère d’année sans qu'il ajoutât quelque fait nouveau à leur histoire, Je rappellerai qu'il découvrit les isocyanures où Carbylamines presque en mème temps que M. A. Gautier, qui venait de les faire connaître, et à qui revient par conséquent la priorité de cette belle découverte. Hofmann les obtint par une réaction devenue classique, l’action du chloroforme et de la potasse sur les amines primaires. Plus tard (1884), il indiqua un nouveau procédé pour la préparation des amines primaires ; l’action du brome sur des amides en présence des alcalis; il montra, dans une série de remarquables recherches, que cette même réaction peut être conduite de manière à donner des nitriles ou des urées substituées, En 1851, Hofmann vint à Paris et se rencontra avec Cahours ; les deux savants s’apprécièrent bien vite et commencèrent en collaboration une série de recherches, dont les résultats furent publiés en 1857 dans les An- nales de Physique et de Chimie. Dans un premier mé- moire sur Une nouvelle classe d'alcools, üs firent con- naître l'alcool allylique, premier terme de la série des alcools non saturés; ils en préparèrent et décerivirent une série de dérivés : les éthers, les allylamines, les allylurées, et relièrent à eux, dans un travail magis- tral, une série de composés connus, mais dont on igno- rait l’étroite parenté. Dans un second mémoire, publié la même année, Recherches sur les bases phosphorées, Cahours et Hofmann décrivent les phosphines et font ressortir avec force l’analogie étroite qui relie les ammoniaques compo- sées aux Arsines déjà découvertes par Cahours; aux ‘ Süibines et aux Phosphines, et montrent que dans ces composés, l’azote, le phosphore, l’arsenic et l’antimoine jouent absolument le mème rôle. Plus tard, Hofmann continua seul ses recherches et réussit à obtenir les phosphines primaires et secondaires, par l’action de l’iodure de phosphonium sur les alcools en présence d'un oxyde métallique, Nous ne pouvons, dans cette courte notice, tout citer; mais on ne peut passer sous silence le travail énorme qu'il fit sur les éthers isosul- focyaniques ou Sénévols,ses études sur la Guanidine,et surtout sur les bases pyridiques et les alcaioïdes, Cette dernière partie de la chimie des bases organiques lui doit quelques-uns de ses plus grands progrès : les relations entre la Pipéridine et la Pyridine, la préparation des homologues de la pipéridine ; enfin, ce fut lui qui éta- blit la constitution de la Conicine et de la Conyrine, attribuant à la première la formule de l'«-propylpi- péridine, et à la seconde celle de la-propylpyridine; la synthèse effectuée plus tard par M. Ladenburg est venue confirmer d'une facon éclatante la justesse de ces vues, Hofmann a également beaucoup contribué à perfec- tionner l'outillage des laboratoires, el il n’est personne qui ne se soit servi de son appareil pour la mesure des densités de vapeur, heureuse transformalion du pro- cédé de Gay-Lussac. Enfin, nous ne devons pas oublier qu'Hofmann, fidèle aux amitiés de toute sa vie, n'a ja- mais perdu une occasion de rendre hommage aux maîtres de la Chimie française. Il consacra à la mé- moire de Dumas une longue étude biographique, la plus complète peut-être qui ait été écrite, véritable monument élevé à la gloire de l’illustre maître. Il fit de même pour Würtz, dont il raconta longuement la vie en un livre plein de pages émues : « Dire la vie de ses amis défunts, écrivait-il, c’est revivre sa propre jeunesse, » Ces deux importantes biographies parurent dans les Berichte der Deutschen Chemischen Gesellschaft, comme aussi les articles qu'il écrivit pour Chevreul et Cahours. Hofmann disparait à son tour, et nous venons nous incliner devant la tombe de celui qui fut un grand savant et un ami fidèle. A. Comes, Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER Paris,— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. At d … : ii déni Fe nn. de ht as, MIT IUT ES PL A béfe M 20 3° ANNÉE Non? 30 JUIN 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES ALIMENTS DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ Procurer au peuple une alimentation suflisante, saine et à bon marché, est un des problèmes dignes d'occuper à notre époque l'attention de l’'économiste et du savant. Sa solution ne résou- drait certes pas la question sociale tout entière, mais elle satisferait à l’une des conditions de ce triple desideratum qu'il faut réaliser à tout prix : alimenter normalement , élever mora- lement, instruire utilement l'ouvrier et le pay- san. L’alimentation du peuple repose sur quatre ou cinq produits essentiels : le pain, la viande, le vin et autres liqueurs fermentées, l’eau, les légumes, les corps gras et quelques excitants ou condi- ments : fruits, café, sucre, eau-de-vie..…., qui sont comme le luxe de ses repas. Je vais essayer de passer en revue chacun de ces principaux facteurs de son alimentation jour- nalière, et de déterminer à quels caractères on re- connait leurs qualités et leurs défauts. I. — LE PAIN Le pain est le principal aliment de l’homme : On peut vivre uniquement de pain, mais non de viande. Riche ou pauvre, en moyenne, chacun de nous consomme journellement à Paris 430 gram- mes de pain; mais la ration de l’ouvrier qui tra- vaille s'élève à 800 grammes. Paris entier en mange quotidiennement 900000 kilogrammes. 1 Conférence faite par M. Armand Gaurier le 26 avril, au Congrès d'hygiène des délégations ouvrières, tenu à l'Hôtel des Chambres syndicales à Paris. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. Dans celle conférence je ne parlerai que du pain ordinaire, du pain de 4 livres, qui représente les trois quarts de la consommation parisienne, soit 673 mille kilos à peu près par jour. On le fabrique généralement à Paris avec de la farine de froment de bonne qualité. Celle-ci contient deux parties essentielles : l’une est le gluten qui a même composition que le blanc de l’œuf, véritable viande végélale destinée à re- produire nos muscles, nos instruments de travail ; l’autre est l’amidon, substance non azotée, suscep- tible de se changer facilement en sucre dans l'in- testin, en graisse dans l’organisme, et dont le rôle essentiel consiste à nous fournir la chaleur et la force nécessaires. Le pain résulte du pétrissage de cette farine avec l'eau et le levain, el de la cuisson de ce mé- lange à une température qui varie de 70° pour le centre de la mie à 240° ou 260° pour la croûte. Le levain a pour effet de rendre le pain poreux, sa- voureux et digestible. Il est formé d’une multitude de petits organismes cellulaires qui, travaillant la pâte, y font naître de l'alcool et de l'acide carbo- nique. En se dilatant et s’échappant à la chaleur du four, ceux-ci forment les æils,les pores du pain. D'autre part, sous l'influence de la cuisson, l’amidon insoluble de la farine se gonfle, s’unit à l’eau, se change en partie en dextrine et en sucre et devient assimilable. Enfin la cuisson a pour effet de purifier le pain des organismes, moisissures ou microbes, qu'y avaient introduits l’eau et les farines, et qui pouvaient rendre ce pain corruptible et dan- gereux. 12 43% ——]_—_—— Suivant les meilleurs auteurs ‘, le pain fait et cuit à point contient pour 100 parties : Matières solides.................. 66 Faure Pr ac eudtemerceee 34 A00 2 Or 100 parties de farine moyenne * contenant 84 parties de substances uliles et 16 parties d’eau, il s'ensuit qur 100 kilos de cette farine doivent produire 129 kilos de pain cuit à point. Les usages veulent que le bon pain ordinaire ne contienne pas au delà de 34 à 35 pour 400 d’eau, ce qui répond bien à un rendement de 129 à 130 kilos de pain pour 100 kilos de farine moyenne. Il suit de là que tout pain qui contiendra plus de 34 à 35°/, d’eau est un pain aqueux, n'ayant du poids que l'apparence, l'eau y remplaçant en partie les matériaux utiles. Or, parmi les boulangers, ceux qui veulent lar- gement augmenter leurs profits procèdent comme il suit : pour le pain dit de luxe ou de fantaisie, qu'on ne pèse pas, ils donnent 330 à 350 grammes à la livre. Ceci est la règle générale à Paris. S'il s’agit du pain de l'ouvrier où le poids est ré- glementaire, ils s'arrangent pour que 100 kilos de farine produisent non pas 130 kilos de pain à 34 ou 35 ?/, d’eau, mais 140 et 145 kilos à 10 el 22 °/, Sur 100 kilos de ce pain aqueux qu'ils débi- tent, ils livrent en réalité 92 à 89 kilos de pain et environ 10 kilos d’eau. Pour unefamille composée du père, de la mère, d’un grand parent et de deux enfants, c'est près de 2 kilos de pain de plus qu'il faut acheter par semaine. ILest facile d'obtenir du pain aqueux; ou bien on additionne la farine de froment de farine de maïs ou de riz, ou de certaines drogues, d’ailleurs à peu près inoffensives (ces fraudes sont rares parce qu'elles se reconnaissent facilement), ou bien, ce qui est plus pratique, on surchauffe le four au moment de l’enfournage, de façon à saisir le pain qu’on cuit moins longtemps, et à garder au-des- sous de la croûte, rapidement produite el durcie, une quantité d'humidité supérieure à la normale. Voilà une fraude grave sur laquelle il est bon que votre attention soit éveillée. Je ne veux pas examiner aujourd'hui les qualités de la farine em- ployée (elle est généralement bonne à Paris); ni ses mélanges à d'autres céréales, etc.; tenons-nous- en au surmouillage du pain, et voyons ses résultats pour Paris et pour une seule journée. D NN ee RE ER 1 Rivot, Poggiale, Kœnig, Wauklyn, Ch. Girard, Cooper. 2 Rivot a trouvé pour le pain cuit à point : eau 30 à 3#0/.. Ch. Girard admet 33 à 34 °%. Wauklyn et Cooper, en Angle- terre, 34 °/o. 3 Mélange de farine de blé tendre et de blé dur, variant de , 2 ie EEE £ à ? de la première pour Là de la seconde. A. GAUTIER. — LES ALIMENTS DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ DR EUTULEE LR — Sur les 673000 kilos de pain fabriqué, 40 ?/, d'eau laissée en trop donneraient un déficit réel el journalier de 67 500 kilos, si cette fraude se faisait dans cette mesure et se généralisait, ce qui n’est pas, j'ai hâte de le dire. Dans quelques essais que j'ai faits, j'ai trouvé le plus souvent dans le pain long de? kilos de 36 à 38°/, d'eau. Mais remarquons que pour l’ensemble du pain vendu à Paris,à chaque 1 0/, d'eau, à partir de 34 e/,, correspond par jour un déficit de 6750 kilos. C'est 13 500 livres d’eau vendues en place de pain à l’ouvrier, aux pelits ménages, etc., et payés à raison de 0 fr. 475 le ki- logramme. Ou sous une autre forme, grâce à cette fraude, l’ouvrier ne paye plus son pain 0 fr. 475 le kilo, prix exorbitant, même pour le bon pain, ainsi que nous allons le voir, mais 0 fr. 50 à O fr. 53 le kilo. La fraude en vaut la peine, et cependant, si je consulte les documents officiels, elle me parait bien mollement, bien rarement poursuivie, si tant est qu'elle le soit. Comment s'y soustraire ? Par deux moyens : Exiger un pain bien cuit et de bonne qualité. Le bon pain est léger, sonore, bien levé.Sa mie élastique à larges cavités,modérément comprimée entre le pouce et l'index, ne colle pas, mais elle reprend lentement son volume; elle ne s'attache pas aux doigts lorsqu'on ly pétrit. La croûte en est dorée, épaisse, cassante, bien adhé- rente à la mie. Le bon pain ne contient pas de grumeaux solides blanchätres. Si l'on en fait la soupe, il est apte à absorber beaucoup de liquide chaud, sans se délayer. Si on le roule entre les doigts, il ne s’effrite pas. Son odeur douce de fro- ment ne doit rappeler ni l’aigre, ni le moisi, ni l’enfermé, ni le fermenté. Sa couleur n'est ni brune, ni blanche, ni jaune, ni bleuàtre, ni grise, mais d'un blanc translucide, légèrement teinté de jaune clair. Enfin séché au four, sans être grillé ni roussi, le pain ne doit pas perdre au delà de 34 9/, d’eau (35 au plus), ou bien laissé sécher à l'air de l'appartement, en tranches de 1 centimètre environ d'épaisseur, il ne doit pas diminuer, même après quinze jours, de plus de 25 ?/, de son poids. Le pain trop aqueux est lourd, mal levé, mat à la percussion. Sa mie pèteuse laisse, entre le pouce et l'index où on l’écrase, comme une trace légère- ment onctueuse. Sa croûte pèse moins de 1/6° du poids total. Il est un autre moyen de manger, à bon marché, du bon pain et qui ait le poids. C’est celui auquel ont surtout recouru les ouvriers anglais et belges : la coopération. Je n'ai pas ici à aborder mon sujet à ce point de vue; permettez-moi seulement de vous signaler en passant quelques-uns des résul- Lats oblenus par la mise en pratique de ce puis- sant principe économique. À Gand, ville ouvrière ie vs Not nt «RE le A. GAUTIER. — LES ALIMENTS DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ 43 © de 200 000 habitants, le Vosruit, société coopé- rative socialiste, vend par an pour plus de . 300.000 francs de pain aux ouvriers, à 0 fr. 32 le kilo, avec une remise de 5 à 7 centimes par kilo. Le VolXsbelang, société rivale anti-socialiste de la . même ville, vend à peu près la même quantité de pain etau même prix. À Bruxelles, les socialistes ont créé le Peuple, qui produit et vend à peu près 5 000 kilos de pain par jour au prix net de 0 fr.26 le kilo porté à domicile. La Société le Peuple fait de très bon pain d’après les ‘derniers perfectionne- ments, pain surveillé et garanti comme panifica- tion, cuisson et poids. A Paris, la meunerie-bou- langerie Seipion qui, quoique service municipal, ne fournit guère aujourd’hui que les hôpitaux, fabri- que chaque jour 14 mille kilos d’excellent pain, qu’elle livre à 0 fr. 32 le kilo. Voilà du vrai socia- lisme ; celui-là met le pain fourrissant et à bon marché dans la main de l'ouvrier et l’enrichit plus que des théories creuses et des promesses qu'on _ne tient pas. Notre pays voudra-l-il rester en ar- Drière ? Paris voudra-t-il continuer à payer son pain plus de 47 centimes le kilo, 40 centimes à Lyon, alors qu’on réalise déjà des bénéfices à -32 centimes? Alors que le sac de farine de 157 kilos valait en février dernier 54 francs et vaut en moyenne 54 à 60 francs? Voudra-t-il que la valeur du blé baissant depuis des années dans notre pays au point de compromettre la production natio- nale, le prix du pain continue à monter ou àse maintenir à un niveau injustifiable ! ? IT. — LA VIANDE Après le pain, la viande. Ces deux aliments se * complètent et doivent, dans nos climats, s’accom- pagner dans un régime bien compris. Ajoutez-Y quelques légumes, des corps gras et un peu delait, ! Un sac de farine moyenne de 457 kilos produit 210 kilos de pain à 37 °/, d’eau. Ce sac de farine, grevé du bénéfice du meunier, coutant en moyenne 56 francs, la farine nécessaire | pour faire 1 kilo de pain ordinaire revient donc à 0 fr. 2617 à Paris. Pour avoir le prix de revient de ce kilo de pain, il faut, d'après les calculs de S. Barrabé, ajouter 0 fr. 095 pour «frais généraux, intérêts des capitaux engagés, fabrication, nourriture du boulanger, de sa famille ct de ses aides, etc., pour une boulangerie parisienne ordinaire vendant 410 kilos ! de pain par jour. Le kilo de pain vendu et porté à domicile revient donc au plus à 0 fr. 267 + 0 fr. 095 — 0 fr. 362, ct nous ayons même vu que la meuncrie-boulangerie Scipion donne ce pain à 0 fr. 32 avec bénéfice. Le boulanger qui vend 410 kilos de pain à 0 fr. 475 gagne donc au moins 0 fr. 413 par kilo, tous frais payés, ou 45 francs par jour, auxquels il faut ajouter pour vente de braise, location du four, petits bénéfices, pains de luxe, etc., 4 à 5 francs par jour au minimum. C’est donc 49 francs par jour ou 17885 francs par an que lui rapporte une avance de 18 à 20000 francs en ca- pital, c’est-à-dire que son revenu est d'au moins 90 0}, des sommes qu'il a engagées, sans compter le logement et la nourriture de toute la famille, dont il bénéficie encore. En somme, à Paris, le boulanger double au moins son argent “chaque année. Tel est le résultat de ce qu’on appelle la li- berté de la boulangerie. et vous aurez l’ensemble de l'alimentation de l’ouvrier. À Paris, chacun de nous consomme en moyenne 213 grammes de viande par jour. Je ne parlerai dans celte conférence que de la viande de boucherie, et surtout de la viande de bœuf, du pot au feu. Pour être de bonne qualité et bien nourrissante cette viande prise à l’étal du boucher doit être d’un rouge vif, ferme, élastique, d’un grain serré, d’une odeur douce et fraiche. Lorsqu'on la tranche, elle laisse suinter sous la pression un peu de jus rouge clair et neutre au goût. La viande d’un animal en bon point est re- couverte, lorsqu'elle provient des parties superfi- cielles de la bête, d’une couche de graisse blanche ou légèrement jaunâtre, résistant à la pression. Sur la coupe de la partie rouge ou musculaire se voient de fines arborisations formées par les trabé- cules du Lissu conjoncetif et adipeux, qui donnent à ces viandes un aspect marbré ou persillé de blanc sur rouge vif. Voilà les caractères de la bonne viande, et il n'est pas indifférent de se nourrir de bonne ou de médiocre. Indépendamment du goût plus savou- reux, plus délicat de la première, son assimilabi- lité, son pouvoir alimentaire, est bien plus grand. La viande d’un bon animal médiocrement gras et à point contient, eneftet, 39 à 40 °/, d’eau; la viande maigre en contient jusqu’à 60 °/, : BŒUF GRAS BŒUF MAIGRE UE RE are tue ete Ge rene ae 39 60 CHAR AE RAR ER, 36 31 CLASSES ES some dose 24 8,7 Matières extractives........:.... 4,5 1,4 Les viandes de qualité inférieure sont ou trop décolorées ou trop foncées suivant leur origine. Elles sont pauvres en graisse, sans marbrure, ni persillé, molles à la coupe, flasques. Elles sèchent facilement et noircissent à l’air. Leur jus est pâle ou jauntre,ou sanieux, ou mêlé de sang noir. Leur odeur est fade, ou aigre, ou légèrement éthérée et aromatique (odeur de relent). Leur graisse jaunit rapidement. Les viandes de qualité inférieure sont moins chères, il est vrai, mais leur déficit en ma- tières utilisables les rend, en réalité, au moins aussi coûteuses que les viandes de meilleure qualité. Les animaux morts de maladie, saignés tardive- ment,fiévreux,etc., donnent des viandes d’un rouge pourpré, saigneuses, infiltrées d'un sang noirâtre ; leurs graisses et tissus membraneux, ou aponévro- tiques, sont rougeàtres; leurs vaisseaux sanguins sont remplis de caillots. Toutes ces viandes doivent être rejetées et le sont, en effet, par Pinspection de la boucherie qui se fait très bien à Paris, quoique confiée à un per- sonnel trop restreint, mais capable et dévoué. Toute viande de teinte grisätre, terne, plombée, 436 A. GAUTIER. — LES ALIMENTS DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ violacée,noirâtre,jaunàtre,de consistance mollasse, glutineuse, d’odeur aigre, rance, butyrique, alcoo- lique, cadavérique, ete., doit être repoussée. La population parisienne consomme, par an, plus de 21000 chevaux, ânes ou mulets, dont la viande représente une valeur de 4 millions de francs environ, au prix moyen de 0 fr. 80 le kilo. Cette viande, lorsqu'elle a reçu l’estampille des inspecteurs de la boucherie, est bonne et saine. J'en dirai autant des viandes conservées dans la glace ou congelées qui viennent d'Autriche, de Hongrie, de Prusse, et de celles de la République Argentine, viandes qu'on consomme en très grande proportion en Allemagne et à Londres, mais qu’on a tenté sans grand succès jusqu'à ce jour d'importer à Paris. J'ai mangé souvent par curiosité, où comme étude, de ces viandes congelées; j'en ai fait manger aux miens et à mes amis; elles sont excellentes el auraient été certainement peu à peu acceptées de la population parisienne. Mais, d'une part, nos bouchers et nos producteurs sont parvenus à em- pêcher l'importation des viandes en wagons-gla- cières grâce à l'adoption de cette mesure qu'elles n'arriveraient que munies de leurs viscères, sous le prétexte de juger ainsi que l'animal était sain ou malade au moment de l’abatage. Cette exigence bien inutile, d’après les vétérinaires et inspec- teurs les plus compétents, n’a eu d'autre but que d'empêcher le transport et l'importation de ces viandes qui, dans ces conditions, se corrompent, et ne pouvant dès lors nous arriver, ne contri- buent plus à la baisse. D'autre part, les impor- tateurs de viande américaine congelée et les bou- chers spéciaux qui les débitent n’ont pas compris que pour faire adopler leur viande, d’ailleurs excellente, il fallait qu'on la vendit comme viande conservée et à un prix relativement bas. Au même prix, le public préférera toujours de la viande fraiche. Le prix moyen de la viande en gros au marché dela Villette a été, dans la période 1886-1890, de 4 fr. 35 le kilo de viande nette‘. Le prix moyen de la viande de bonne qualité a été, d’après les registres des Criées des Halles de 1882 à 1890, de 1 fr. 77 le kilo. A ce marché des Criées, se fournissent les petits bouchers, les revendeurs au panier, et quelques particuliers. Même en admettant que le prix de la viande dans les boucheries de quartier ne dépassàt pas celui de la viande au demi-gros qui se fait aux Criées des Halles, on voit que le boucher qui achète 1 Le boucher qui achète en gros bénéficie, en outre, de la valeur des issues, intestins, poumons, déchets, qui lui revien- nent, et s'ajoutent à son bénéfice. Par conséquent, la valeur de ces parties secondaires serait à déduire du prix de la viande prise aux abattoirs (1 fr. 35), l'acheteur en gros ne payant que sur le poids de la viande nette. aux abattoirs bénéficie au moins de la différence du gros au demi-gros, soit À fr. 717 — 1 fr. 35—0 fr. 42 par kilo de viande débitée aux particuliers. De ce bénéfice brut il faut soustraire les prix de trans- ports, les déchets, la location de la boutique, le payement du personnel, les intérêts du capital engagé, elc., que l’on ne saurait apprécier exacle- ment et qui varient en chaque cas, mais qui,large- ment comptés et pour une boutique moyenne de boucher à Paris vendant par semaine 4 950 kilos environ de viande‘, s'élèvent à 330 francs?. Les 1 950 kilos de viande donnant au moins, d’après les nombres ci-dessus, un bénéfice brut de 819 francs, le bénéfice netmoyen,d’une boucherie à l’autre,est done de 819 — 330 — 489 francs par semaine ou de 25 428 francs l’an. Pour le capital moyen engagé c'est un revenu de 125 à 430 pour 100 que perçoit le marchand boucher. Je parle ici des boucheries ordinaires, car chez les bouchers habiles et dans les bons quarliers, ce bénéfice peut s'élever bien plus haut. « En théorie et dans l'intérêt public, » écrit un homme essentiellement compétent en ces ques- tions, M. A. Goubaux, l’ancien et savant direc- teur de l'École vétérinaire d’Alfort, «il semble que, dans les conditions où il fait son commerce, le boucher devrait se contenter d’un bénéfice peu considérable, car celui-ci, se répélant au moins 52 fois l’an*, finit par donner un résul- lat qu'aucun autre commerce ne peut attein- dre #. » LIT. — LE vin Nous consommons annuellement en France Al millions d’hectolitres de vin, sur lesquels 1 Paris, en 1890,a consommé 1831795492 kilos, soit près de 184 millions de kilogrammes de viande de boucherie. Il y exis- tait, d'autre part, 1 884 boutiques de bouchers, qui, avec les étaux sur marchés, portent le nombre de ces marchands à 2000. Chacun d'eux vend donc en moyenne 91990 kilos de viande par an, ou 1950 kilos par semaine. C’est, en effet, la moyenne, relevée par l’administration, de la vente des bou- cheries parisiennes. 2 Cette somme, qui est aussi une moyenne, peut subir de grandes variations. En voici le décompte approximatif : une cais- sière,un chef d'élal,un sous-chef, deux apprentis : par semaine, 130 francs. Intérêts du capital engagé pour installation du fonds de commerce, location de la boutique, patente, impôts, chauffage, éclairage, domestique, viande impayée, déchets, blanchissage, entretien de la boutique, etc. : par semaine, 200 francs. Total par semaine de tousles frais : 330 francs. 3 En effet,le boucher achète en général deux fois la semaine; ilne pourrait acheter pour pluslongtemps sous peine de corrup- ion de sa viande. Il revend celle-ci aussitôt et généralement au comptant; l’argent employé à ses achats lui revient donc en entier chaque semaine augmenté du bénéfice réalisé qui se reproduit ainsi au moins 52 fois l'an, et grâce à un capital qui, faisant 52 fois la navette, n’a pas besoin d’être bien con- sidérable. 4 A. Gousaux. Rapport au Conseil d'hygiène el de salu- brité de la Seine sur le Colportage des viandes de boucherie, Paris 1882, p. 22. A. GAUTIER. — LES ALIMENTS DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ 431 10 millions et demi nous viennent aujourd'hui de l'étranger. Sur ces 41 millions d’hectolitres, 25 au moins sont des vins de qualité ordinaire, bus par le petit bourgeois, l’ouvrier, le paysan, qui les paye environ 0 fr. 40 le litre(0 fr.60 à Paris avec les frais d'octroi, elc.). C'est donc un milliard qui sort an- nuellement de ce chef des mains du travailleur. Voyons ce qu'on lui donne pour son argent. Le vin, le vrai vin, est le produit qui résulte de la fermentation alcoolique du jus de raisin frais. C'est une liqueur fort complexe, mais contenant principalement de l'alcool (55 à 100 grammes au litre), accompagné d'une petite proportion de tan- nins, de crème de tartre, de glycérine, d’essences et d’éthers, qui font de celte boisson à la fois un excitant et un aliment d'épargne. Lorsque nous buvons un litre de vin, soit 80 grammes d’alcool environ, nousemmagasinons une réserve de combustibles répondant, si elle était complètement brûlée dans nos tissus, à 560 gran- des calories ou unités de chaleur pouvant donner, outre une calorification des muscles et du sang s’é- levant à 374 calories, un travail efficace, dans la machine humaine de 60 000 kilogrammètres, c'est-à- dire la force nécessaire pour soulever successive- ment 60000 kilos à 1 mètre de hauteur, ou pour hisser une balle de un quintal métrique (100 kilos) au sommet d'une tour deux fois aussi haute que la tour Eiffel. C'est ce qui peut se réaliser, au moins partiel- lement, lorsque nous buvons l'alcool étendu sous forme de vin, par petites quantités à la fois, de facon qu'il ne traverse pas nos oryanes sans s’y brûler, car, s’il ne s’y consommait pas, il se bornerait à devenir un excitant, un irritant souvent dange- reux, ainsi qu'on le verra tout à l'heure. Le vin pris en quantité modérée est donc un précieux agent d'activité. Aliment à la fois et exci- tant des centres nerveux par son alcool, il nous nourrit encore par sa crème de tartre et ses phos- phates qui fournissent à nos cellules la potasse et le phosphore nécessaires, et par sa glycérine qui sert à la production des graisses; il nous convient aussi par les éthers qui le parfument, il nous sou- tient par ses malières lanniques et colorantes qui aous tonifient à la façon du quinquina, qui activent les fonctions de l'estomac et, de même que l’al- cool, agissent aussi comme anliseptiques. Mais tout cela n’est vrai que du bon vin. Un bon vin est vermeil, limpide, d’odeur agréable, de sa- veur vineuse et parfumée. Il n’est ni douceàtre, ni plat, ni fade, ni piqué ou aigri, mais astringent, savoureux, légèrement acidule ou vert. Il ne râpe pas à la gorge; il n’agace pas les dents par son aci- dité; il ne laisse aucun désagréable arrière-goût, ni amertume, ni brûlure, ni sécheresse à l’arrière- gorge. Il échauffe doucement l'estomac, surtout à jeun, sans laisser au palais le goût d’alcool. Il peut, sans se troubler, se conserver quelques jours en bouteille à demi-vide. Il doit supporter l'eau, c'est-à-dire que, mêlé de deux ou trois fois son volume d’eau de fontaine, il doit rester plai- sant au goût et non plat, vermeil et non violacé, clair et non trouble. Un bon vin naturel peut, suivant le cépage, l’an- née ou l’origine, marquer de 7° à 13° centésimaux, c'est-à-dire contenir par litre de 56 à 104 grammes d'alcool.Mais par suite des droits d'octroiélevés dont la ville de Paris, tout particulièrement, a jusqu'ici frappé, bien à tort pourses intérêts comme on va le voir, cet aliment de première nécessité !, les vins naturels, les vins d'origine particulièrement les vins français, ne sont plus guère bus à Paris. Les com- mercants en gros y introduisent surtout des vins riches en alcool,propres à être coupés d’eau par le marchand de vin au détail. D’une barriquealcoolisée à 15° on en fait une et demie à 10° ; l’on bénéficie donc ainsi d'une partie desfrais de douane,de trans- port et d'octroi. Et comme, dans l'intérêt de la per- ception de ces derniers droits, le laboratoire mu- nicipal croit pouvoir exiger des vins de coupage, vendus à Paris, un minimum de 10 degrés alcoo- liques, et que la moyenne des vins français na- turels s'élève à peine à ce degré; comme, d'autre part, les petits vins excellents du centre et du midi de la France à 7° et 8°, à 10° même, ne sauraient permettre le mouillage, c’est à l'Etranger, à l'Ita- lie et à l'Espagne surtout, qu'on va demander ces vins alcooliques, le plus souvent suralcoolisés hors des frontières, que nous buvons après qu’ils ont été ramenés à 10° par addition d’eau. Nos estomacs en souffrent, notre bourse aussi, la production nationale est sacrifiée; les droits perçus aux douanes et octrois sont diminués dans la proportion du mouillage et le pays s’appauvrit; car ilne faut pas oublier que 10 millions et demi d'hectolitres achetés hors de France au prix moyen de 16 francs, font sortir chaque année, à destina- tion de l'Espagne, de l'Italie, de la Hongrie, de la Grèce, 468 millions de franes et plus de 200 mil- lions avec les frais de transport et autres payés à l'Etranger. Telle est la conséquence d’une fausse conception i Ces droits d'octroi pour les vins ordinaires dépassent dans les grandes villes et en particulier à Paris la valeur moyenne de la marchandise payée au producteur. Les droits d’octroi par hectolitre sont pour Paris de 18 fr. 87 pour des vins achetés dans le Midi à 12 ou 15 francs! Ces droits atteignent au contraire à peine la 20€ partie de la valeur des vins de prix. Le conseil municipal a plusieurs fois réclamé un dégrève- ment des droits d’octroi sur les vins ordinaires. Mais ces votes ont toujours été considérés par l'Etat comme irrégu- liers et n’ont pas abouti. 438 A. GAUTIER. — LES ALIMENTS DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ de la base de cet impôt. Tout le monde y perd, producteur, consommateur, État, villes ; seuls quel- ques marchands en gros font fortune, et, ce qui estplus grave, nous enrichissons les pays que nous aurions intérêt à diminuer, l'Italie et l'Allemagne en particulier. L'Allemagne, en effet, n’a pas, ou n’a que fort peu de vignes, mais elle a ses vastes étendues depommes deterreetde betteraves qu'elledistilleetdontl’alcool sert à relever le titre des vins qui nous arrivent de l'Étranger. Car, si l’on suralcoolisait les vins avant leur entrée en France avec de bon alcool extrait du vin lui-même, seuls la douane et les octrois au- raient à réclamer. Quant au public, au bon publie, maintenant qu'il y est fait, il se consoleraitde boire des vins mouillés, pourvu qu'ils ne soient pas malsains. Mais ce n’est pas ici le cas. Ces vins alcoolisés à l'É- tranger l’ont été généralement avec des alcools de mauvaise qualité, provenant des eaux-de-vie de betterave, de grains, de pommes de terre. Gräce à une excellente rectificalion, on enlève à ces eaux- de-vie le cœur, l'alcool pur, vendus à part pour faire les faux cognacs, liqueurs fines, ete... et l’on sé- pare,comme suffisamment bons à viner les vins, les produits de tête et de queue qui contiennent de vrais poisons (alcools amyliques, isobutyliques, aldé- hydes, furfurol).Si'bien qu'au Reichstag allemand un orateur a pu dire, à la grande satisfaction de nos voi- sins, que par cette voie détournée, la France débar- rasse l’Allemagne de ses alcools impurs, qui, vendus aux Italiens et aux Espagnols, rentrent chez nous sous forme de vins alcoolisés, prêts au mouillage. De fait, lorsque vous achetez ces vins vinés et mouillés de !/, d'eau, par exemple, vous recevez, au lieu d’un litre de vin pur et naturel, 80 centi- litres d’un vin altéré et vicié. Vous croyez payer 0 fr. 70 ce litre de vin, vous le payez en réalité 88 centimes; vous croyez recevoir de l'alcool de vin, on vous donne des résidus d’alcool de pomme de terre ou de grain. Je sais que le marchand répond : «Nos vins sont mouillés, il estvrai,mais aussi sont-ils vendus moins cher; y a-t-il donc lieu de tant gémir pour un peu d’eau! L'ouvrier s’en grisera moins, et sa ménagère sera fort heureuse de payer son litre moins cher.» Mais de quel droit jugez-vous devoir ainsi prendre à la fois malgré lui les intérêts et l'argent de votre acheteur? Est-il bon de lui enlever le cinquième ou le quart du verre de vin sur lequel il compte pour se réconforler? Faut-il le pousser à boire de l'alcool au verre faute de celui qu'il sent bien ne pas trouver dans sa bouteille de vin? Mais, en vérité, est-il vraiment bien sain ce vin que vous venez ainsi de baptiser au moment où il va paraître sur votre comptoir de zinc? Est-ce bien de l’eau stérilisée, bouillie, distillée ou fil- à trée que vous ajoutez à cette boisson déjà fre- latée? Non, vous puisez dans votre fleuve ou votre puits l’eau qui convient à ce trafic, et avec elle vous introduisez dans cette boisson les microbes de votre cité ou de votre maison. S'ils sont dangereux, ils empoisonnent le vin; s’ils sont vulgaires etcom- muns, ils y apportent des germes de maladie qui les altèrent, les troublent et en empêchent la con- servation. c C'est donc avec raison que les laboratoires muni- cipaux saisissent ces vins alcoolisés et mouillés lorsque l'autorité les y convie ; mais, il faut bien le reconnaitre, les pouvoirs publics n’aiment pas beau- coup à gêner le commerce du marchand de vin! Aujourd'hui, les vins colorés à la cochenille, à la fuchsine et autres couleurs dérivées de la houille, au sureau, à la mauve, etc., ont, en grande partie, disparu. Ces fraudes étaient faciles à reconnaitre, mais quoique fort regrettables, elles étaient cer- tainement moins dangereuses que les précédentes. S'assurer qu'un vin est mouillé ou sophistiqué n’est pas à la portée du public. C’est l'affaire des chi- mistes. Mais voulez-vous boire des vins naturels et à bon marché, entendez-vous, formez des sociétés de consommation qui achètent directement aux producteurs et ne livrent que des vins authentiques et analysés. Demandez aux Chambres qu’elles fixent des droits de douane proporlionnels au titre alcoolique des vins étrangers ; aux Conseils muni- cipaux qu'ils abaissent les droits d'entrée aux octrois pour les vins ordinaires et les élèvent pour les vins de prix, qu'on peut facilement suivre depuis le producteur jusqu’au marchand au détail, car ils ne voyagent pas sans un acquit-à-caution. Demandez que toutc fraude soit poursuivie sans pitié, à la suite d’une analyse complète et contrôlée, sans tenir compte de cette malheureuse moyenne de 10 degrés, dont l'effet le plus direct est de nous faire consommer aujourd’hui, à Paris, des vins étrangers vinés avec de l’eau-de-vie détestable et de faire sortir, chaque année, 200 millions de francs de notre pays. IV. — ALCOOLS A la suite du vin, je tiens à vous dire ce que je pense des liqueurs alcooliques; mais un mot seu- lement, car ce ne sont certes pas là des aliments de première nécessité! Ge sont plutôt des exci- tants à la facon du thé ou du café,mais de tous les excitants les plus dangereux lorsqu'on les emploie avec abus. Ces eaux-de-vie frelatées, mélangées d'alcool de marc et de pommes de terre,parfumées d'essence allemande de cognac; ces rhums artificiels qui renferment du méthylal, de l’infusion de cuir et des phlegmes d’alcool amylique; ces kirschs à l'acide prussique, à la nitrobenzine et au furfurol; A. GAUTIER. — LES ALIMENTS DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ ces apéritifs de toute sorte, dont la strychnine n'est pas toujours exclue; ces liqueurs fines qui ont toutes les couleurs d’un arc-en-ciel extrait de la houille ; ces absinthes qui tiennent en solution une essence apte à abrutir lentement, mais sûrement, et à donner à l’homme et aux animaux des accès de tout point semblables à ceux de la rage..…, toutes ces liqueurs alcooliques dénaturées constituent un vrai péril social, universel. Grâce à ces boissons, à la syphilis et à la variole, autant de fléaux im- portés par l'homme civilisé, les races du Nouveau- Monde et du continent africain sont en train de dis- paraitre; des peuples entiers sont lentement mois- sonnés ! Qu'est-il besoin de la poudre! Avec l'eau- de-vie en Afrique et l’opium en Asie,nous sommes bien sûrs d'une conquête pacifique et définitive ! L'abus des boissons alcooliques produit l'ivresse avec ses formes maniaques, convulsives et apoplec- tiques; l'alcoolisme héréditaire, l'excitabilité du caractère, la dégradation de l'intelligence, l’affai- blissement de la volonté et des forces physiques, le delirium tremens; la violence, la démence quel- quefois, toujours la vieillesse anticipée. De ces êtres devenus plus ou moins stupides naissent, le plus souvent, des enfants cacochymes qu’enlèvent les convulsions précoces, où qui deviennent plus tard épileptiques, vicieux et criminels #, V. — L'EAU POTABLE Si le pain, à Paris, est excellent, mais trop cher, si la bonne viande est hors de prix, si le vin ordi- naire est généralement frelaté, du moins peut-on y trouver de bonne eau potable? Les lourds impôts que nous payons permeltent sans doute, à la Ville, de nous donner ce bien dont jouissaient déjà les populations primitives, et dont se préoccupent même les peuplades sauvages, avant de faire une halte ou de fonder un nouveau village : de bonne eau polable ? Vous savez que l’eau suffit encore à cette heure aux peuples les plus divers : Arabes mahométans, Tures, Indiens, Chinois, Japonais ne boivent que de l’eau ou des infusions aqueuses. Rien n'est plus sain et n'étanche mieux la soif qu'un verre d’eau fraiche et pure; mais rien peut-être n’est plus dangereux qu'un verre d'eau malsaine. Si l’eau est la boisson par excellence, c’est aussi un aliment. Elle entre pour les trois quarts de leur poids dans la constitution de nos organes; elle contribue à la formation de nos cellules parses sels de chaux. Lorsqu'elle est bonne, elle active la digestion ; elle l’arrête en provoquant des fermen- 1 500/, des assassins, 57 0/, des incendiaires, 88 0}, des condamnés pour attentats aux mœurs ou violences contre les personnes ont été reconnus alcooliques. (Communication à l’Académie de médecine.) 439 tations anormales lorsqu'elle est de mauvaise qua- lité. Il importe donc de la bien connaitre. Une bonne eau potable doit être fraiche, lim- pide, sans odeur, agréable au goût, aérée, légère à l'estomac, imputrescible, propre aux principaux usages domestiques. Elle est fraiche si sa température est constam- ment inférieure de plusieurs degrés à la tem- pérature de l'air ambiant. Dans nos villes, on obtient cette qualité en faisant circuler sous le sol, à 8 ou 10 mètres de la surface, comme on le fait à Paris, les canalisations qui amènent l’eau potable. Une eau limpide est celle qui permet de distin- guer, même sous une grande épaisseur, les formes et les arêtes vives des objets. Les eaux de la Vanne et de la Dhuis, à Paris, sont limpides; celles de la Seine ne le sont jamais. Toute eau limpide vue en masse est bleuàtre; toute eau teintée de jaune ou de vert ne l’est pas et dépose peu à peu du limon dans les vases où on la conserve. Elle doit dès lors être rejetée ou filtrée. Les eaux qui, soit directement, soitlorsqu'on les conserve quelques jours en vase fermé, possèdent ou prennent une odeur de marais, de croupi, sont mauvaises. Presque toujours, elles manquent de limpidité; elles se troublent lorsqu'on les garde en vase clos, durant quelques semaines, puis se clari- fient lentement. C’est que les êtres microscopiques qu'elles hébergent, après y avoir rapidement pul- lulé, y meurent et s'y déposent sous forme de limon. Essayez de conserver en bouteille les eaux de la Seine, elles se troubleront, prendront un ton vert jaunâtre et une odeur marécageuse. Celles de la Dhuis louchiront à peine ; celles de la Vanne res- teront parfaitement claires :ce sont les meilleures. Une eau qui lorsqu'on la conserve perd sa lim- pidité et prend un goût fade ou marécageux, de- vient lourde à l'estomac et consomme tout son oxygène. Elle est alors indigeste; non pas, comme on le dit souvent, parce qu’elle est désaérée, mais parce que cette désaération est le signe et la conséquence de la pullulation de myriades de mi- crobes qui provoquent, dans l’estomac, des fer- mentalions nuisibles. Les eaux bouillies, quoique désaérées, sont cependant légères et digestibles. L'eau doit être propre au savonnage et à la cuis- son des légumes : d’une part, celles qui ne rempli- raient pas ces condilions seraient difficilement uti- lisables dans nos maisons ; de l’autre, si elles gru- mellent le savon au lieu de Le dissoudre, et si elles durcissent les légumes, c’est qu’elles contiennent trop de chaux, qu’elles sont plätreuses, saumâtres ou magnésiennes. L’aptitude au savonnage et à la cuisson des légumes, que chacun peut constater, suffit, avec la limpidité et l'absence de toute odeur 440 A. GAUTIER. — LES ALIMENTS DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ fade ou marécageuse, lorsqu'on les a gardées douze à quinze jours en vase clos, pour caractériser les bonnes eaux potables. Les microbes des eaux font partie de cet immense domaine microscopique des êtres inférieurs qu'on retrouve partout, dans l’air, la terre et les eaux, et dont notre illustre Pasteur a découvert le Monde nouveau el le rôle immense et surprenant. On en connait de figure et d’aptitudes les plus diverses : monas et coccus sous forme de points ou d'œufs dont un millier et plus tiendraient sur la pointe d’une épingle; vibrions qui nagent ou rampent dans les infusions à la facon d'anguilles; spirilles en lire- bouchons; sfreptocoques en chapelets; bactéries en bâtonnets immobiles; z00glées en pelites masses proliférantes et gluantes ; moisissures, dont tout le monde connaît la variété infinie; /evüres qui bour- geonnent en tous sens, etc., êtres variés el poly- morphes, tantôt inoffensifs, tantôt au contraire des plus redoutables, car c'est surtout par les eaux de boisson que nous contractions la peste, la fièvre typhoïde, le choléra, la dysenterie, les embarras gastriques, la fièvre jaune, la fièvre bilieuse des pays chauds,et bien d’autres maladies épidémiques. Ces microbes pullulent dans les eaux avec une grande activité. D'après le D'Miquel, voici comment ils se reproduisent dans les eaux de la Vanne : A l’arrivée des eaux au bassin de Montsouris............. 48 bactéries par cm3 d’eau 3 heures aprés..........: UE 125 — DANhéUrES MER re eine isole 3800 — SHHOUTES EL ANNE Reese 125000 — TAPREUTES NN sense se fee 590000 — puis leur nombre va en diminuant et tombe, après quelques mois, à 95 par centimètre cube. Tant que ces pelits êtres ne proviennent pas des déjections des villes ou des campagnes, ils ne sont pas très dangereux. Il n’en est plus de même de ceux qu'on trouve dans les eaux d’un fleuve qui, comme la Seine, traverse de grandes villes. I] faut, dans ce cas, filtrer ces eaux, ou mieux #ncore, les faire bouillir, pour les rendre inoffensives. Les meilleurs filtres sont ceux en pierre poreuse des ménages parisiens, s'ils sont bien tenus, raclés ou lavés de temps en temps à l'acide chlorhydrique et surtout bien exempts de fissures. Les filtres en biscuit de porcelaine, s'ils ne débitent pas trop, sont bons aussi, mais demandent que l’eau soit sous pression. Je citerai encore les filtres au char- bon d'os à diaphragme d'amiante. Je me sers de ces derniers et m'en trouve bien. Le charbon d'os parait avoir la propriété non seulement d'arrêter mécaniquement les microbes dans ses pores, mais de les faire disparaitre, peut-être en activant leur oxydation. On peut, dans les cas pressants, dans Îles 1 moments d’épidémie, purifier les eaux à fond et sans filtre en les soumettant à l’ébullition. Il suffit d'un chaudron de cuivre, autant que possible non élamé. On y fait bouillir l’eau le soir quelques mi- nutes; on la retrouve fraiche et prête à boire le lendemain. Cette eau est sans mauvais goût et fa- cile à digérer. La Ville de Paris nous donne-t-elle de bonne eau potable? Elle reçoil chaque jour et distribue à ses habitants, ou emploie, pour les services pu- blics, 454700 mètres cubes d’eau des provenances suivantes ! : loErurtdesource Dhs. Mer re cr 18861 m. c, — Vannes ME ST 17906% —— ATOUBIL See Ce RE 984 _ Sources du Nord......... 269 — Puits deGrenelleetde Passy. 6757 Totale ere 145755 DONTUNTATeMEUUE SEINE EE Fee Eee 106317 — Marne Be NE 76595 Rotal Rene rte 182912 3° Eaux du canal de FOurcq 4................ 126057 Total EE 45#12% Comme on voit, le tiers à peine de l'eau distri- buée à Paris est de l’eau de source, de l’eau potable! Encore une partie de cette dernière est-elle, vue sa pression, employée à faire monter les ascenseurs, alors même, qu'en pleine épidémie, on distribue de l’eau de Seine faute d'euux de source. Je sais bien qu'autant que possible les eaux de Seine et de Marne sont ulilisées pour les arrosages et lavages des rues et des maisons. Mais Paris boit aussi les eaux de son fleuve et de ses canaux, et non pas seulement de celles prises en amont de la grande ville, mais en aval, à Javel, dans la Seine, après sa traversée ! Paris boit, chose plus étonnante encore, de l’eau ïinfecte du canal de l’Ourcq prise au bassin de la Villette! Ne craignez-vous pas que, dans les siècles à venir, en déchiffrant les Archives du temps présent, un savant de cette lointaine époque ne dise en parlant de nous: «Il existait, en «ces temps, sur les rives de la Seine, un peuple « assez spirituel, mais naïf et fort sale, car il «entretenait de ses deniers des hommes spéciaux « chargés de lui faire accepter et boire, avec son eau « de table, ses propres déjections. » L'eau de Seine prise à Choisy, en amont de Paris, contient 500 microbes par centimètre cube. Elie en a 5000 à Villejuif; les approches de la grande Ville commencent à se faire sentir. Après la traversée de Paris, à Clichy, en amont du grand collecteur, 1 J'emprunte les nombres qui vont suivre Annuaire statistique de la ville de Paris, 1889. 2 Prises du Port-à-l’Anglais, d’'Ivry, de Maisons-Alfort, du pont d’Austerlitz, de Bercy. Chaillot, Javel. 3 Prise de Saint-Maur. 4 Prise d’eau du bassin de la Villette, au dernier A. GAUTIER. — LES ALIMENTS DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ AA à peu près au point où l’on puise l’eau destinée à cette partie de Paris ainsi qu'à Saint-Denis, elle contient 116 mille microbes par centimètre cube, 26 millions de microbes par verre d’eau! La diffé- rence, plus de 110 mille par centimètre cube, est versée au fleuve par la ville. Ce sont donc là des microbes suspects ou dangereux. Parmi eux, il en est certes beaucoup qui sont bien fils et petits- fils de ceux qui ont déjà semé dans notre popula- tion la maladie et la mort. Ce sont ces eaux dan- gereuses, que l’on distribue encore à une partie de Paris, et dont on gratifie tour à tour chacun de nos quartiers. Pour emprunter ici le mot d’un homme d’esprit (J. Simon), « lorsque c’est notre arrondissement qui est frappé, il me semble que j'entends l'Administration nous dire paternelle- ment : « Allons, mes enfants, c'est à votre tour « d’avoir la fièvre typhoïde. En voilà pour vingt « jours...» Consultez les statistiques municipales, elles vous diront qu'en effet, dix à douze jours après, c’est vingt, trente, cinquante victimes et plus, qui, par semaine, restent sur le carreau. li est temps que cet élat de choses cesse; que la vie humaine ne soit plus à la disposition d’une Compagnie des Euux; que l'Administration ne puisse plus, à sa guise, ouvrir et fermer le robinet qui donne passage au typhus. On s’en occcupe, je le sais, et l'Avre et l'Ivette vont bientôt, nous dit-on, arriver dans nos murs. Mais combien faudra-t-il de temps pour que nous ayons partout dans Paris deux canalisations indépendantes? Et quand Paris aura de bonnes eaux, les 6 à 700 mille habitants de sa banlieue continueront-ils à être soumis au régime de eaux infectes ? On a eu moins d’hésitations ailleurs : à Vienne la fièvre typhoïde a presque complètement disparu depuis que les eaux du Danube ont été remplacées par celles des belles sources qui coulent des mon- tagnes; Londres à aujourd'hui généralement de bonnes eaux potables; Berlin filtre en grand les siennes ; Paris, où est née et fleurit l'École de Pas- teur, restera-t-il longtemps encorela ville où, grâce à l’inobservance des Règlements ou des règles de l'hygiène, fleurissent mieux que partout ailleurs la rage et la fièvre typhoïde ? VI. — CONCLUSIONS A côté des principaux aliments : le pain, la viande, le vin et l’eau, j'aurais pu examiner aussi le lait, les corps gras, les légumes, la bière et le cidre, le café, le sucre et les condiments les plus usuels. Mais, à l'exception des légumes, ce ne sont point là des aliments indispensables, de pre- mière nécessité, etil ne fallait pas trop allonger cette conférence. D'ailleurs, les légumes et les REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. fruits, que recherchent avec raison toutes les classes, ne sauraient se frauder. Ne les négligezpas dans votre alimentation; ce sont des aliments à la fois sains, nutrilifs, suffisants même, à ce point que certains peuples en font leur nourriture ex- clusive; qu’en Angleterre, en Allemagne, en Russie, de nombreuses sectes se font un devoir de ne ja- mais manger de viande; que dans l'Inde les classes supérieures n'en mangent jamais, sous peine de déchéance, ayant reconnu depuis longtemps que les végétaux suflisent à donner la force, qu'ils adoucissent les mœurs et entretiennent l’homme en santé mieux que la viande, dont l'abus produit l’épaississement de la race, la goutte, le rhuma- tisme, les maladies de la peau, etc... Pour nous, qui vivons sous un ciel moins clément, recourons à une alimentation mixte. Du pain, pourvu qu'il soit bon et abondant, un peu de de viande, des légumes, du vin modérément, de bonne eau potable, voilà de quoi entretenir un peuple en santé et en vigueur. Tant que l’ouvrier français mangera près de ses deux livres de pain blanc par jour, je réponds de sa gaieté, de son in- telligence, de son affabilité. Donnez-lui en plus un peu de bifsteak, et quelques verrées de bon vin, et vous en faites un travailleur et un soldat incom- parables. À propos de nos principaux aliments, J'ai cru, Messieurs, devoir vous dire la vérité telle qu'elle est, un peu crue, un peu triste même, n’hésitant pas à froisser bien des intérèts et des amours- propres, mais confiant dans votre raison el dans votre bon sens. Je ne suis pas de ceux qui pensent qu'on doit tenir le peuple en tutelle; je crois au contraire qu'il faut qu’il entende la vérité et qu'il en profite. Il ne prend confiance qu’en ceux qui dé- fendent ses intérêts, et ceux-là seuls pourront lui parler utilement de sa responsabilité et de ses de- voirs qui sauront réclamer et défendre ses droits. Et maintenant je ne voudrais pas que, de cette conférence, il restàt dans vos esprits rien qui püt y exciter des sentiments trop ardents de regret ou d’amertune. Sur un point précis et restreint du problème social, l'alimentation du peuple, je vous ai dit ce que je savais : le mal et le bien, les dé- fauts, mais aussi le remède. Ce remède, il est surtout dans l'association, le travail et l'entente. Cette entente ne sauraits’établir que par la paix sociale et grâce au respect de la li- berté de chacun. La force ne fonde rien de durable : la coopération employée avec intelligence, persé- vérance, sans violence, sans éclats, viendra à bout de tout. La puissance et l'avenir lui appartiennent. Armand Gautier, de l’Académie des Sciences Professeur à la Faculté de Médecine. 12 L. ROULE. — LES ÉLÉMENTS DE LA SEXUALITÉ CHEZ LES ANIMAUX LES ÉLÉMENTS DE LA SEXUALITÉ CHEZ LES ANIMAUX La reproduction des animaux, celle des plantes, ont de tout temps attiré l’altention des naturalistes et stimulé leurs recherches; voir se développer un organisme souvent complexe aux dépens d’élé- ments très pelits et très simples est, en effet, un des phénomènes les plus remarquables parmi ceux que présentent les êtres vivants. On pensait autrefois que l’un de ces éléments exerçait une action pré- pondérante, sinon exclusive ; on admet aujourd'hui que tous deux ont une influence presque égale, bien que l’exerçant de manières différentes. Les études approfondies qui ont été faites à cet égard durant ces dernières années ont fourni nombre de particularités intéressantes, malheureusement éparses dans les ouvrages spéciaux ; il sera peut- être utile de les résumer brièvement, et de signaler en même temps plusieurs des notions générales qu’elles suggèrent. Il La reproduction sexuelle est propre aux ani- maux pluricellulaires. Elle s’effectue par le moyen de deux éléments, l’ovule et le spermatozoïde, desli- nés à se fusionner en un seul corps capable de se développer et de former un embryon; ce corps, étant le germe initial et provenant de l'ovule accru du spermatozoïde, mérite bien par là le nom d'oospore, c'est-à-dire d'œuf-germe, tout comme son correspondant des végétaux. Parmi ces élé- ments, l’ovule représente le sexe femelle, et le spermatozoïde le sexe mâle ; ils possèdent donc, à cet égard, une polarité différente ; et leur union, qui confond en un tout simple leur substance et leurs forces, est la fécondation. Parfois, l'ovule a la propriété d'évoluer, de se convertir en un embryon, sans se joindre au préalable avec un spermato- zoïde ; ce phénomène, assez rare, et qui n'inter- vient jamais d’une manière continue dans la série des générations, est la parthénogenèse. Les produits sexuels offrent des caractères com- muns et des caractères particuliers. — Les premiers tiennent à leur développement et à leur nature morphologique. L’ovule et le spermatozcïde pro- viennent de cellules-mères qui se multiplient pour les engendrer; tous deux sont également des cel- lules simples. Ce fait est très net pour les sper- matozoïdes, moins pour les ovules. Souvent ceux- ci absorbent, avant la fécondation, et assimilent à leur propre substance quelques éléments cellu- laires voisins ; mais les parcelles nucléaires de ces éléments se détruisent, et la simplicité de l’ovule est donc réelle dans tous les cas. —Les seconds ca- ractères découlent des différences qui s'élablissent entre les procédés employés pour effectuer la fécondation. Les spermatozoïdes doivent se dé- placer pour aller trouver les ovules ; aussi la majeure partie de leur protoplasme est-elle con- vertie en organes de translation, el notamment en fouets mobiles. Par contre, les ovules ne se dépla- cent pas, et, en conséquence, ils sont privés d’ap- pendices locomoteurs ; de plus,ces éléments possè- dent en eux-mêmes le protoplasme et les réserves nutritives qui vont servir à former le corps de l'embryon, et, par suite, ils sont plus gros que les spermalozoïdes. D’autres différences interviennent encore. Comme l’ovule a pour fonction de donner au germe la substance organique nécessaire pour le produire et de constituer la majeure part de cette substance, le rôle du spermatozoïde est tout de rajeunissement. L’apport qu'il fournit en proloplasme est insigni- fiant, tellement il est réduit ; son noyau, étant la seule chose importante, est seul bien développé, et occupe en lui la plus grande masse ; le sperma- Lozoïde est une cellule presque réduite à son noyau, el pourvue d'ordinaire de la quantité de proto- plasme strictement nécessaire pour produire les mouvements locomoteurs. D'autre part, ces élé- ments sont obligés de se déplacer pour aller s'unir aux ovules; beaucoup d’entre eux sont susceptibles de s'égarer, et ne parviennent point, en effet, à leur destination; aussi, d'habitude, sont-ils de beaucoup plus nombreux que les éléments fe- melles. La fécondation des animaux pluricellulaires découle directement dela conjugaison des animaux monocellulaires supérieurs. Comme elle, elle con- siste en la fusion de deux cellules, devenant par là capables de se partager en un nombre considé- rable de segments. La conjugaison amène un dou- ble effet : par la fusion des noyaux, elle détermine le rajeunissement du corps conjugué où 4uxospore, et lui donne une vitalité, une aptitude à la multi- plication, que les deux éléments primitifs n'avaient point séparément; par l'union des protoplasmes, elle donne à l’auxospore une quantité de substance organique suflisante pour permettre cette multi- plication. Il n’en est pas ainsi dans la fécondation: l’ovule seul contient en lui la matière organisée qui va servir à édifier le germe ; mais le rajeunis- sement nucléaire lui manque, et le spermalozoïde, réduit presque à son noyau, est chargé de le lui donner. — Déjà cette division du travail se mani- feste chez plusieurs animaux monocellulaires ap- L. ROULE. — LES ÉLÉMENTS DE LA SEXUALITÉ CHEZ LES ANIMAUX 413 partenant à la famille des Vorticellines : les indi- vidus destinés à se conjuguer diffèrent entre eux, car les uns, ou macroyonidies, sont gros et immo- biles, alors que les autres, ou #microgonidies, sont petits el errants. La dissemblance des éléments sexuels des animaux pluricellulaires n'est autre qu'une exagération de celle présentée par les Vorticellines. Celte comparaison entre la fécondation des animaux pluricellulaires et la conjugaison des animaux monocellulaires autorise à admettre, tout d’abord, que la première découle de la seconde; ensuite elle permet de bien concevoir où réside, dans l’élément sexuel, l’ensemble des forces qui constitue sa polarité. Cet ensemble n'est pas localisé dans le protoplasme seul de la cellule que cet élément représente, ni dans son noyau, mais dans les deux à la fois. En effet, si l’on remonte à l'origine même de la fécondation, on trouve que ce phénomène comporte deux effets, dont l’un, l'accroissement, intéresse le proto- plasme, et dont l’autre, le rajeunissement, tient aux noyaux; partant, l'influence sexuelle appar- tient aux deux parties des éléments mis eu jeu. Mais le rajeunissement seul conserve son impor- tance primordiale : à la suite de cette division du travail qui donne à l’ovule la faculté de posséder la substance nécessaire à la production du germe, le spermalozoïde reste presque indifférent sous ce rapport, et sa fonction d’accroissement se trouve diminuée d'autant. L’hérédilé intervient ensuile pour amoindrir encore les ressemblances fondamentales qui exis- tent entre la conjugaison et la fécondation. La première est le propre des animaux unicellulaires ; et lorsque l’auxospore s'est divisée en segments, ceux-ci se séparent les uns des autres, car chacun d'eux se convertit en un individu distinct, auto- nome. La fécondation appartient aux animaux pluricellulaires ; en conséquence l’oospore, homo- logue de l’auxospore du cas précédent, se partage en segments qui restent accolés les uns aux autres tout en augmentant en nombre, et qui ne s’isolent point; une oospore ne produit donc qu'un seul embryon, formé par l'association de plusieurs cel- lules. II Les homologies indiscutables établies entre le spermatozoïde et l’ovule dérivent encore plus net- tement de leur évolution que de leur structure dé- finitive. Les considérations suivantes montrent, en effet, que chaque spermatozoïde est strictement l’'égal de chaque ovule; leurs dissemblances tien- nent aux différences de leur mode d'action, mais n’altèrent en rien l’équivalence parfaite qui existe entre eux. Les amas d'éléments sexuels sont d'ordinaire localisés dans une région déterminée du corps du générateur ; ils portent le nom de {esticules lors- qu'ils sont mâles, et d’ovvires lorsqu'ils sont femel- les. Ils se séparent des autres organes bien avant l'âge adulte de l'individu qui les possède, et appa- raissent à l’état d’ébauches dans le cours des phases embryonnaires, du moins le plus souvent ; ces ébauches sont d’abord confondues avec celles des autres organes, et ne se distinguent d’elles par aucun caractère appréciable à nos sens. Il n’en est cependant pas loujours ainsi; les ébauches sexuelles fort jeunes sont composées d’un petit nombre de cellules et ne sont représentées, tout à leur début, que par une seule cellule; or, dans certains cas, on voit cette dernière prendre nais- sance dès les premiers états du développement. On donne alors à cette cellule le num d’énitiale sexuelle; la présence de telles initiales a été signalée chez plusieurs animaux, les Chætognathes par exemple, mais ne parait pas être générale, contrairement à l'avis de plusieurs auteurs qui voudraient la retrouver partout, Il semble plutôt que les ébau- ches sexuelles sont d’abord confondues avec les autres éléments du jeune organisme, et ne se déli- milent que durant les phases postérieures à la seg- mentation. Il est sans doute permis de concevoir l'existence sur notre globe, à une époque très reculée, d'animaux pluricellulaires à structure fort simple, qui n'étaient pas plus perfectionnés qu'une oospore segmentée {out en possédant des cellules sexuelles ; mais il n’en est plus ainsi pour les animaux pluricellulaires actuels, qui sont plus complexes, et dont les cellules sexuelles se mani- festent assez lard. Mettant à part les conduits qui servent à mener au dehors les éléments reproducteurs, les jeunes ovaires et les jeunes testicules sont composés de cellules agglomérées qui doivent donner naissance aux ovules et aux spermatozoïdes par les mêmes moyens; cette identité parfaite a été démontrée par nombre d'auteurs récents, dont les principaux sont Sabalier et Giard pour la France, Ed, van Be- neden, 0. Hertwig pour l’Étranger. Étant donné leur rôle, qui consiste à produire par leur division les éléments fécondateurs, ces cellules sont nom- mées spermaloblastes où spermatogonies dans les tes- ticules, et ovoblastes où ovogonies dans les ovaires : elles sont en réalité, et leur nom l'indique, les cel- lules-mères des spermatozoïdes ou des ovules. Chaque spermatoblaste se partage, par des scissions répétées, en un groupe cellulaire compact, le spermalogemme ; les éléments qui composent ce dernier sont des protospermaties où encore des 444 L. ROULE. — LES ÉLÉMENTS DE LA SEXUALITÉ CHEZ LES ANIMAUX spermatocytes ; Vun deux s’amplifie beaucoup, gros- sit plus que les autres, et sert à les porter: c’est le cylophore. Celui-ci ne joue ensuite aucun rôle, mais non les spermatocytes. Chacun d'eux se partage deux fois de suite, dans un laps de temps fort court, et engendre par ce moyen quatre cellules, les deuto- spermaties où simplement spermaties, qui se trans- forment directement en spermatozoïdes. Ce dernier phénomène n’a pas encore élé trouvé chez tous les animaux, car il s'agit ici d'observations déli- cates et fort difficiles ; mais la plupart des travaux publiés sur ce sujet tendent à prouver sa géné- ralité. Une succession similaire de faits se présente dans le développement des ovules. Chaque ovo- blasie se divise en plusieurs cellules, qui restent accolées et constituent par leur réunion un corps qu'il serait permis d'appeler ovogemme, par ana- logie avec son correspondant des spermatozoïdes. L'une d’entre elles, équivalent du cytophore pré- cédent, grandit plus que ses voisines, et devient l'ovocyte ; les autres se disposent autour d'elle de manière à l'envelopper, restent petites, et forment ainsi une couche périphérique nommée le follicule. Les cellules folliculaires ne jouent aucun rôle dans la fécondation ; leurs fonclions tiennent à la nu- trition ou à la protection de l'ovocyte et se bornent là. Puis l’ovocyle se partage deux fois de suite, tout comme les spermaties déjà connues; mais comme son protoplasme doil servir à lédifi- cation du jeune embryon, celte double division a seulement pour effet de séparer de lui deux petites cellules, dites cellules polaires. Après quoi, l'ovocyte, ayant parcouru la même série de bipartitions que le spermatozoïde, est aple à la fécondalion, el constitue l’ovule définitif. La concordance esl parfaite à tous égards, el elle est des plus intéressantes, car elle dénote l’'équivalence absolue de l’ovule et du sperma- tozoïde qui s'unissent dans la fécondation. Les seules dissemblances portent sur le choix, dans le spermatogemme el l’'ovogemme, des éléments qui se transformeront en spermatozoïdes ou en ovules; il existe à cet égard, entre Les deux sexualités, une opposition remarquable, mise en lumière par A. Sabatier et dont cet auteur a montré toute l'im- portance. La cause de cette opposition est attri- buable, sans doute, à la différence des rôles joués dans l’acte fécondateur par les éléments sexuels. | Les uns sont obligés de se déplacer pour aller trouver les autres ; partant, afin de parer aux pertes causées par cette nécessité, car la plupart d'entre eux s’égarent, ils doivent être plus nom- breux; tel est le cas des spermatozoïdes. L'inverse a lieu pour les ovules ; et, de plus, afin d'accu- muler en eux-mêmes une grande masse de prolo- plasme, ces derniers sont forcés d'emprunter le surcroit dans les milieux environnants. Le raison- nement permet d'admettre que ces deux tendances différentes conduisent aux oppositions signalées ; la plupart des éléments des spermatogemmes de- viendront! des spermatocvtes, alors qu’un seul des éléments de l’ovogemme se modifiera en un oyo- cyte, qui absorbera souvent ses voisins du follicule et se les assimilera pour augmenter sa propre subs- tance. Il est nécessaire de répéter que ces faits n’ont pas été trouvés chez tous les animaux, car les ob- servations acquises, bien que nombreuses, sont encore insuffisantes; pourtant, comme on les a rencontrés dans la plupart des principaux groupes et chez des êtres divers, tout porte à admettreleur généralité. Quelques exceptions cependant ont été constatées ; mais elles tiennent plutôt à la quantité des éléments produits parces divisions successives et à leur rôle qu'à l'essence même des phéno- mènes. En somme, ces phases principales du déve- loppement des produits sexuels paraissent exister d'une manière invariahle chez tous les animaux pluricellulaires, tout en offrant parfois des varia- tions de plus vu de moins; et elles démontrent l'homologie parfaite et l'équivalence complète du spermatozoïde el de l’ovule en tant que cellules pourvues de sexualité. — Quant à la signification précise qu'il convient d'attribuer aux deux der- nières bipartitions, qui divisent le spermatocyte en quatre spermalies et l’ovocyte en un ovule et deux cellules polaires, les avis sont partagés. Il ne s'agit point en cela des faits observés, qui sont indiscutables, mais de l'interprétation à leur donner. L'opinion la plus acceptable est celle portant à croire qu'il s’agit ici de phénomènes anciens, présentés dans leur développement par les cellules sexuelles des ancêtres des animaux pluricellulaires, el reproduits aujourd'hui encore par atavisme. Louis Roule, Professeur de Zoologie A la Faculté des Sciences de Toulouse. E. MANCINI. — LA GUÉRISON DE LA RAGE DÉCLARÉE LA GUÉRISON DE LA RAGE DÉCLARÉE EXPÉRIENCES DE MM. TIZZONI ET CENTANNI ! Il ya déjà quelque temps qu’au laboratoire de pathologie de l'Université de Bologne, le Profes seur Tizzoni et la Doctoresse Cattani poursuivent des expériences sur le télanos el sur les moyens propres à communiquer aux animaux l’immunité contre la terrible maladie. Bien des gens se sont déjà livrés à cette étude; mais les résultats obtenus jusqu’à ce jour par M. Tizzoni et par M"° Callani sont les plus positifs et ont déjà recu des applica- tions pratiques. En résumant brièvement ces tra- vaux, nous dirons qu'on commença par isoler le liquide produit par les bacilles du tétanos en exa- minant ensuite quels effets il produisait surles ani- maux auxquels on l'avait inoculé, et en recon- naissant que les animaux pouvaient, à la suite d’injections, devenir réfractaires à des inoculations virulentes et successives de tétanos. La substance à laquelle l’immunité élait due fut séparée du sérum du sang et on eut ainsi un véritable vacein doué de propriétés caractéristiques ; après la vaccina- tion, en effet, il n'était plus possible de trans- mettre aux animaux l'infection au moyen du sang ou de l'urine d’un animal mort du tétanos, tandis que l’intoxicalion élait fatale chez un animal non racciné. Ainsi donc, lorsqu'on mettait l’antitoxique dans un sang tétanique, celui-ci perdait son carac- tère toxique. En présence d’une telle sûreté des résultats, on pensa pouvoir répéter sur l’homme les expériences ci-dessus décrites, et aujourd'hui on a une slatis- tique suffisante de personnes qui, atteintes de léla- nos, et même dans un cas après avoir subi l’amputation, se sont, grâce aux injections anli- toxiques, complètement guéries. Ajoutons que les ! Pour bien comprendre l'importance de la découverte annoncée par le Professeur Tizzoni et le Dr Centanni, il est utile de rappeler que, — contrairement à l’opinion répandue dans le public, — la vaccination antirabique de Pasteur est essentiellement préventive et non curative. Rien ne sert d'ino- culer les personnes atteintes de rage. On inocule les personnes mordues, parce que, en raison des conditions de linjection, le vaccin a chance de se développer dans l’organisme plus rapidement que la substance virulente introduite par mor- sure. Quand il en est ainsi, c'est-à-dire dans presque tous les cas, il y a production d’état réfractaire avant toute apparition de manifestation rabique ct l’immunité contre les effets de la morsure est assurée, MM. Tizzoni et Centanni nous annoncent un pas de plus, une grande découverte : la cure même du mal manifesté. La Revue est fitre de constater, à cette occa- sion, que les deux éminents expérimentateurs de Bologne sont des disciples de notre grand Pasteur : la gloire de notre illustre compatriote grandit avec le progrès de la science que son génie a fondée. A0; observations les plus récentes des deux expéri- mentateurs ont démontré que l’immunité conférée aux animaux, lapins et souris, est héréditaire. Des petits, nés de parents rendus réfractaires au téta- nos, subissent eux aussi sans danger des inocula- tions tétaniques auxquelles les animaux nés de pa- rentsnonrendus réfractaires succombent toujours. Ces expériences sur le télanos ont suggéré des recherches analogues sur la rage. La méthode Pasteur, qui constitue une découverte de portée incalculable pour le traitement de l'hydrophobie, prévient, comme on sait, le développement du mal, mais devient inefficace quand les premiers symptômes de la rage se sont manifestés. Dans une Note présentée à la dernière séance de l’Académie royale des Lincei, le Professeur Tizzoni a annoncé qu'il avait réussi, de concert avec le Docteur Cen- anni, à obtenir par une méthode nouvelle la gué- rison de la rage déclarée. M. Tizzoni avait prouvé déjà, avec M. Schwarz, dans des travaux antérieurs, que le sérum du sang d'un animal rendu réfractaire à la rage par vacci- nation exerce une action désinfectante, en détrui- sant le virus rabique inoculé à des lapins ; et cela pour un intervalle de temps, soit avant, soit après l'infection, d'environ 48 heures. Ils reconnurent, — démontrant ainsi la justesse des idées émises par Valli au commencement du siècle, — que la digestion artificielle dans un tel sérum fait perdre sa virulence au système nerveux des animaux atteints de rage; la substance nerveuse ainsi trai- Lée agil par injection comme les moelles de Pas- teur, rendant les lapins ineculés réfractaires à la rage. Dans ces circonstances, on commença par cher- cher si, dans le sérum du sang des animaux rendus indemnes, il se trouvait un principe actif capable de s'opposer à l'infection rabique. Et l’on vit que ce sérum détruit le virus de la rage, non seulement sur le verre, mais aussi chez les animaux auxquels la rage avait élé inoculée de la manière la plus sûre, c’est-à-dire par la voie du nerf sciatique. Le sérum des animaux indemmes, non seulement prévient le développement des phénomènes rabi- ques, mais guérit la rage, même lorsque celle-ci a envahi le système nerveux et a suscilé des symp- tômes morbides spéciaux, tels que la paralysie dans la moitié inférieure du corps, l'abattement, la fièvre, la diminution de poids et l'aspect spécial caractéristique de l'animal rabique. 445 PES PET “à 46 C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE La méthode italienne de vaccination antirabique constitue done un progrès sur celle de Pasteur, car elle agit même quand le virus s’est déjà répandu dans le système nerveux; elle n'est impuissante à neutraliser le virus que dans le cas, ce qui est na- turel du reste, où l'infection a eu le temps de pro- duire de profondes lésions anatomiques. En con- séquence, il faut, pour l'homme, recourir au trai- tement antirabique dans la première période de l'infection, promptement révélée par des phéno- mènes caractéristiques et nombreux. Les auteurs rapportent spécialement dans leur mémoire les expériences sur les lapins, traités après la manifestation de la rage et guéris par des inoculations de sérum. Le traitement ne demande pas de grandes quantités de liquide : celui-ci peut être injecté sous la peau ou dans les vaisseaux san- guins; maintenu à l'abri de la lumière et de la chaleur, il conserve pendant longtemps ses pro- priétés. Ces recherches confirment donc tout ce qui a été reconnu de meilleur dans le traitement des mala- dies infectieuses ; avec les anciennes méthodes de vaccination l’immunité estdue à une substance non curative, mais vaccinante, à une action indirecte, laquelle d'une manière lente et secondaire, et par un procédé inconnu jusqu'alors, donne naissance dans l'organisme à une substance qui produit l’im- munité. Le Professeur Tizzoni et le Docteur Cen- tanni ont réussi en réalité, avec des méthodes et des solutions spéciales, à extraire de la moelle d’un animal rabique la substance vaccinante, exempte de la virulence qui forme l'agent actif du traitement Pasteur. Cette dernière substance, avec un traite- ment préventif, préserve toujours les lapins infectés par trépanation; mais, si le traitement commence sept jours après qu'on a pratiqué l'infection, il reste complètement inefficace. Si donc, au lieu de recou- rir à la substance ci-dessus mentionnée, on fait usage du sérum d'animaux vaccinés, on profite de la substance préservatrice déjà élaborée dans l’or- ganisme de l'animal réfractaire, laquelle agit di- rectement et instantanément sur le virus rabique. En d’autres termes, la substance vaccinante reste inerte lorsque la maladie est développée; la subs- tance préservatrice donne le moyen de combaitre le mal, alors que tout autre moyen, quel qu’il soit, avait jusqu'ici été reconnu ineflicace. MM. Tizzoni et Centanni déclarent qu'ils seront bientôt en mesure d'appliquer leur méthode cu- rative à l'homme lui-même; ils n'attendent que l'occasion pour en faire la preuve. Il y a tout lieu d'espérer qu'un éclatant succès couronnera leurs efforts, juste prix de tant de fatigues et de luttes soutenues dans l'intérêt de la science et de l’huma- nité. Ernesto Mancini, Secrétaire de l'Académie royale des Lincei. REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE Les diverses parties de la physique ont été de- puis un an l’objet d'investigations nombreuses, el sur certains points des résultats importants ont été obtenus. Quelques-unes des questions les plus in- téressantes ont fait l'objet d'études spéciales dans la Revue générale des Sciences, et nous n’aurons pas à nous y arrêter, non plus qu’à celles qui doivent yêtre prochainement étudiées en détail. Malgré cela, nous ne pouvons songer à indiquer même sommairement tous les sujets qui mériteraient d'attirer l'attention, et nous serons obligé de nous limiter à l'indication d'un certain nombre d’entre eux, sans prétendre que ceux que nous devrons ainsi passer sous silence ne présentent pas un réel intérêt; mais nous espérons avoir l’occasion de les signaler ultérieurement, en les rapprochant d’au- tres questions du même ordre. Il La reproduction des couleurs par la photogra- phie, question toujours à l'ordre du jour, a fail depuis un an de réels progrès, et nous tenons d’au- tant plus à y revenir que nous avions émis, il ya un an, quelques doutes sur l'extension que pour- raient prendre les premières recherches de M. Lipp- manp, dont nous n'avions pas cependant méconnu le grand intérêt, Ces restrictions ne sauraient subsister aujourd’hui, non seulement parce que M. Lippmann a présenté des résultats matériels probants, et que rien ne saurait valoir contre un fait, mais aussi parce que ce savant éminent a donné une théorie complète des phénomènes qui se produisent dans les plaques photographiques dont il fait usage suivant la méthode que nous avons indiquée sommairement dans la précédente Revue. M. Lippmann est parvenu à obtenir la reproduc- lion colorée directement d'objets divers; il n’a pas encore atteint la perfection absolue, mais ces ré- sultats sont déjà bien intéressants, car ils suffisent à montrer que le principe est fécond et que la réussite complète ne dépend plus que de modi- -C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE ANT fications dans le procédé opératoire. La même remarque doit être faite relativement au temps de pose qui est encore fort long, mais qui pourra cer- tainement être notablement réduit : nous ne dou- tons pas qu'il ne se produise, à ce point de vue, des améliorations analogues à celles qui se sont produites pour la photographie monochroma- tique et qui ont amené la durée du temps de pose à être réduite dans une proporlion que personne n'aurait osé prévoir il y a quelques années. Mais, nous le répétons, et cela n’est pas ce qui nous à le moins frappé, M. Lippmann ne s’est pas borné à fournir des preuves matérielles de la pos- sibilité de résoudre le problème qu'il étudie : il en a aussi donné la théorie complète, d’une manière très nette et très élégante. Nous ne pouvons son- ger à la développer; mais nous voulons toutefois donner quelques indications à cet égard, sans ce- pendant revenir sur l’exposé du principe que nous supposerons connu ‘. Nous rappellerons seulement que, dans l'épaisseur de la couche sensible, il se prodnit des phénomènes d’interférence entre des ondes directes et des ondes réfléchies, phénomènes qui ont pour résultat, dans le cas d’une lumière simple, d'amener une action chimique, variable périodiquement d’un point à l’autre et, par suite de provoquer, aussi périodiquement, un dépôt d’ar- gent, variable d’un point à l’autre. Il résulte de là que, après fixation, les différents points de la couche sensible présentent un pouvoir réflecteur différent; que la variation de ce pouvoir réflecteur n’est pas quelconque, mais est périodique, la dis- tance qui sépare, dans l’intérieur de la couche sen- sible, la position des points où existent un maxi- mum et un minimum de ce pouvoir réflecteur dé- pendant de la longueur d'onde de la lumière mo- nochromatique qui a produit l’action. M. Lippmann a recherché quel est l'effet d’une lame présentant un semblable dépôt réfléchissant sur un rayon de lumière simple et, de la formule obtenue, a déduit une représentation géométrique faisant connaître l'intensité du rayon réfléchi; l’é- tude de cette représentation géométrique lui a montré que cette intensité, pour une épaisseur donnée, est maxima si la lumière incidente est identique à celle qui a produit le dépôt, mais varie très rapidement pour des lumières ayant des longueurs d'onde différentes, de telle sorte que, seules, les lumières très voisines, celles qui correspondent sensiblement à la même colora- tion, ont une intensité appréciable après la ré- flexion. Si done, sur une plaque influencée par ‘une lumière simple, on fait tomber un faisceau de 1 Voir Revue annuelle de physique, 30 juin 1891, in Revue générale des Sciences. lumière blanche, il n’y aura à considérer, comme produisant un effet appréciable dans le faisceau réfléchi, que la lumière identique à la lumière ayant produit l’action chimique primitive ou les lumières très voisines. La plaque reproduira donc la couleur correspondante à celle de l’objet mono- chromatique dont on avait obtenu l’image. Si la lumière produisant l’action photographique est composée, chacune des lumières simples qu'elle comprend agit pour son propre compte et le dépôt d'argent a, en chaque point, une valeur qui est la somme des valeurs que produisent séparément chacune de ses lumières. M. Lippmann a montré, mais nous ne pouvons nous arrêter à sa démons- tralion intéressante, que l’action de ce dépôt, dé- fini par une loi complexe, est la somme des effets que produirait chacun des dépôts correspondant à une lumière simple. Dès lors, pour un faisceau incident de lumière blanche, le faisceau réflé- chi présentera seulement les mêmes lumières simples qui existaient dans le faisceau ayant agi chimiquement et, au point de vue de la couleur, le résultat sera done le même pour un observateur impressionné par celui-ci ou par le faisceau réflé- chi par la plaque photographique. Nous le répétons, la question nous paraît réelle- ment résolue, sauf certains détails de pratique, et ce résultat méritait d’être signalé d'une manière toute spéciale. Cette solution complète d’un problème qui pré- sente un intérêt incontestable diminue l'impor-. tance des procédés indirects qui ont été proposés pourarriver à reproduire la couleur des objets par la photographie. Nous croyons cependant devoir signaler les résultats auxquels est parvenu M. Vidal en réalisant, d’une manière satisfaisante, un pro- cédé signalé antérieurement par MM. C. Cros et Ducos de Hauran. Il utilise trois épreuves sur verre obtenues par l’interposition de milieux co- lorés convenablement choisis, épreuves dont cha- cune ne correspond dès lors qu'à l’action de cer- taines lumières. Il projette sur un écran, en les superposant exactement, les images de ces trois épreuves en éclairant chacune d’elles par une lu- mière identique à celle qui a agi eflicacement. Si ces lumières ont été bien choisies, il résulte en chaque point de l'écran un mélange de couleurs qui reproduit l'effet de l’objet qui a été photogra- phié. Le résultat est très satisfaisant. Nous regrettons de ne pouvoir nous arrêter à si- gnaler diverses études faites sur quelques points d'optique et qui auront sans doute pour résultat de faire pénétrer plus intimement dans la nature des phénomènes ; nous espérons avoir ultérieure- ment l’occasion de résumer l’ensemble de ces tra- Vaux. Il L'étude de la lumière dans ses rapports avec l'électricité présente également un intérêt consi- dérable : on sait que, d'après les idées de Maxwell, le rapport v entre l'unité électromagnétique et l'unité électrostatique d'électricité doit représenter la vitesse de propagation des radiations Iumi- neuses : il est inutile d’insister sur l'importance de la vérification expérimentale de ce résultat. Aussi divers observateurs ont-ils cherché à déter- miner directement la valeur de ce rapport; sans remonter aux premières recherches, nous signa- lerons les nombres suivants : 3,004 x 1010 donné par W. Thomson 3,000 >< 1010 E.-B. Rosa 2,982 >< 1010 Rowland 2,996 >< 4010 J. Thomson et Searle, On voit que ces valeurs, sauf une, sont concor- dantes : c’est à un résultat analogue qu'est parvenu M. Pellat dans une série d'expériences qu'il a exé- cutées à l’aide d’une méthode simple qui lui a paru susceptible d’une grande précision et dans laquelle il a employé l’électrodynamomètre absolu qu'il venait de réaliser. Cette méthode consiste à mesurer une même différence de potentiel successivement en unités électromagnétiques et en unités electro- statiques : la première mesure s’effectue à l’aide de l’électrodynamomètre absolu, la deuxième à l’aide de l’électremètre absolu de Sir William Thomson. Sans entrer daus le détail des expériences, nous dirons que M. Pellat a pris de minutieuses précau- tions qui lui ont permis d'obtenir, dans deux séries d'expériences faites à plusieurs mois d'intervalle des résultats très concordants; les nombres qu'il a trouvés sont en effet de 3,0093 >< 10!° pour une sé- rie, de 3,0091 >< 10!° pour l’autre. D’après M. Pellat, les erreurs systématiques susceptibles de fausser les moyennes des mesures nombreuses qu il a exé- cutées correspondent aux déterminations électro- statiques qui ne présentent pas la même exaclitude que les déterminations magnétiques. Quoi qu'il en soit, on voit que ces résultats diffè- rent très peu de ceux fournis par d’autres expéri- mentateurs; ajoutons, et le fait est capital comme nous l’avons äit, que ces valeurs de v diffèrent éga- lement peu de celle de la vitesse de la lumière qui a été trouvée par M. Cornu, vitesse qui est de 3,003 >< 10%, Il ya là une vérification de la théorie électromagnétique de la lumière de Maxwell sur laquelle il était bon d'appeler l'attention, puis- qu'elle établit une relation entre des phénomènes qui, pendant longtemps, ontété considérés comme étant d'ordre différent. A ce point de vue, les recherches faites sur les C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE oscillations électriques de très courte durée pré- sentent un intérêt capilal; aussi se sont-elles mul- tipliées, et nous croyons devoir signaler quelques- unes des principales en rappelant sommairement le point de départ, renvoyant d’ailleurs pour certains détails à des articles déjà publiés dans la Revue. On sail que, lorsqu'une élincelle éclate entre deux conducteurs qui sont à des potentiels différents, elle peut, suivant les conditions, être continue ou oscillatoire. Comme nous l'avons dit, M. Hertz, en employant une bobine d'induction pour produire des churges rapides de conducteurs qui se dé- chargent par oscillalion, est parvenu à produire d'une manière continue des oscillations qui sont susceptibles de se propager et dont l'existence a été mise nettement en évidence. Depuis, M. Elihu Thomson, puis M. Tesla ont obtenu des résultats remarquables en actionnant le fil primaire de la bobine d'induclion par la décharge d'un conden- sateur ou par un alternateur spécial, capable de donner plusieurs milliers d'inversions par seconde; dans ces conditions, le nombre des oscillations par seconde que peuvent produire les décharges dues à l’action du fil secondaire peut atteindre plusieurs centaines de mille, plusieurs millions. On comprend l'intérêt qui s’atlache à l'étude d'un mouvement oscillatoire de ce genre, et l’on ne doit pas être surpris d'observer des effets s'écar- tant notablement de ceux que l’on connaissait avant de disposer de tels moyens d'investigation, d'autant que la différence de potentiel atteint des valeurs considérables, valeurs qui ont été évaluées à 150 000 volts par M. E. Thomson. On sat, et c'est là un fait important, que, pour des oscillations électriques, très rapidement va- riables, la propagation ne se fait pas à l’intérieur du conducteur, mais seulement à sa surface. M. Ste- fan a étudié la question au point de vue théorique d'abord, et les expériences qu'il a faites ont con- firmé les résultats obtenus par le calcul. La dé- termination de la vitesse de propagalion d’oscil- lations électriques de très courte durée le long d'un fil donné, donne la vitesse de propagation dans l’air; si donc, comme l’a pensé Maxwell, il y à identité entre les vibrations lumineuses et les perturbations périodiques d’un champ élec- tro-magnélique, on doit trouver pour les deux ordres de phénomènes la même valeur pour la vi- tesse de propagation, valeur qui, comme nous l'a- vons dit précédemment, doit être égale au rapport des unités d'électricité électromagnétique et élec- troslatique. Aussi comprend-on que cetle question ait été abordée par divers savants, parmi lesquels nous citerons Lodge, qui a trouvé pour cette vitesse | Revue générale des Sciences, 1891, p. 117 268, 616. C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE 449 uxe valeur se rapprochant sensiblement de la vi- tesse de propagation de la lumière; il convient de citer spécialement, d'autre part, les résultats de M. Blondlot qui à fait de très importantes recher- ches sur les oscillations hertziennes, parmi les- quels figure la détermination de leur vitesse de propagation. Sans entrer dans le détail, nous di- rons qu'il a d’abord, dans une certaine mesure, vé- rifié la formule de W. Thomson qui donne la durée des oscillations dans des conditions déter- minées ; il a modifié ingénieusement la disposition de l'excitateuret celle du résonnateur qui sert à ex- plorer le champ parcouru par les ondulations. Pour la détermination de la vitesse de propa- gation, il s’est appuyé sur la formule générale À Vi, dans laquelle X est la longueur d’onde,f, la durée d’une vibration et V, la vitesse de propaga- tion ; la connaissance de À et de { donne donc im- médiatement V. La valeur de { dépend du réson- nateur, comme l’ont montré MM. Sarazin et de La Rive; M. Blondlot a construit le résonnateur en employant un concensaleur de grande capacité dont les lames sont réunies par un fil court, ce qui diminue les chances de perturbation; il était alors possible de lui appliquer la formule classique. La valeur de À était déterminée directement par le déplacement du résonnateur le long de deux fils parallèles, ou plutôt en déplaçant un pont qui réunissait ces fils au delà du résonnateur. En faisant varier les conditions de l'expérience, M. Blondlot à pu obtenir des longueurs d'onde dont la valeur a varié entre 9 et 35 mètres. Les va- leurs de V déduites de ces recherches sont com- prises entre 2,883 >< 1010 et 3,041 >< 1010, valeurs peu éloignées de celle de v que nous avons donnée plus haut, valeur peu éloignée de celle de la vitesse de propagation de la lumière. M. Witz à fait des recherches analogues, et no- tamment il a étudié la propagation dans des mi- lieux autres que l'air en immergeant le conducteur dans des liquides : il a réussi pour le pétrole à dé- terminer la valeur de À, et a trouvé qu'elle est moindre que dans l'air. Le rapport des valeurs de À dans l’air et dans le pétrole serait même voisin de l'indice de réfraction du pétrole pour la raie D. M. J.-J. Thomson a de même cherché à détermi- ner la vitesse de propagation des ondulations élec- triques dans les diélectriques, en agissant sur deux fils métalliques, dont l’un est recouvert d’une couche mince de divers isolants : dans ces condi- tions, un calcul simple montre que le rapport des longueurs correspondant au minimum de distance explosible est égal au rapport des vitesses de trans- mission le long des fils. Les résullats des expé- riences de M.J.-J.Thomson montrent que ces vitesses son! à peu près proportionnelles à l'inverse de la racine carrée du pouvoirélectrique des diélectriques dont on compare l’action. Nous ne pouvons songer à relater, mème som- mairement, toutes les recherches faites sur les oscillations hertziennes, et nous nous bornerons, pour terminer, à citer les expériences de MM. Ru- bens et Ritter qui ont eu l’idée d'étudier l'effet d’un réseau sur ces oscillations : ce réseau était consli- tué par une série de fils de cuivre tendus parallè- lement dans un cadre que l'on interposait sur la direction des rayons électriques : l'intensité des oscillations, donnée par un appareil analogue à un bolomètre, était déterminée pour diverses inclinai- sons des fils sur la direction de la vibration élec- trique. Dans la discussion des résultats numériques obtenus, MM. Rubens et Ritler ont trouvé que, dans l'oscillation électrique transmise, le réseau a éteint la composante parallèle aux fils. Par contre, le ré- seau réfléchit presque complètement cette compo- sante parallèle à ses fils. L'effet produit sur les oscillations électriques par l'interposition de lames isolantes entre les pla- teaux d'un condensateur reliés à des fils le long desquels ces oscillations se propagent permet d'é- tudier la valeur de la constante diélectrique de la substance interposée; diverses recherches ont été faites dans ce sens dans des conditions un peu dif- férentes ; malheureusement les résultats n’ont pas été absolument concordants. Ainsi M. Lecher a trouvé que la constante diélectrique augmente quand la durée de charge diminue ; d'autre part, M. J.-J. Thomson a pensé que la détermination de la constante diélectrique serait peut-être plus pré- cise en employant des charges variant avec une extrème rapidité; pour des oscillations, dont le nombre était évalué à 25.000.000 par seconde, il a trouvé pour la constante diélectrique du verre une valeur qui, conformément à la loi de Maxwell est bien égale au carré de l'indice de réfraction, alors que dans des expériences failes par d’autres mé- thodes le même accord était loin d'exister. M. Blondlot a repris des expériences analogues avec un appareil un peu différent et il a trouvé des résultats qui concordent avec ceux obtenus par M. J.-J. Thomson : il semble donc que l'emploi des oscillations herlziennes puisse être recommandé pour les recherches de ce genre; en tout cas, il se- rait intéressant que de nouvelles déterminations vinssent confirmer cette opinion. Nous terminerons ce que nous voulons dire relalti- vement à cette très intéressante question, en ajou- tant que les moyens d'exploration ne sont plus restreints, comme ils l’étaient au début, au seul résonnateur, au cadre à étincelles, mais qu'on à utilisé aussi, pour l'étude des oscillations électri- ques, le téléphone et le tube de Geissler qui, dans 450 C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE des conditions convenables, ont donné des résul- tals satisfaisants. IL nous resterait maintenant à parler des effets que produisent ces courants de durée excessive- ment courte et de très hauts potentiels, effets vé- ritablement extraordinaires et dont il nous semble impossible de prévoir, quant à présent, tout le parti qu'on pourra tirer au point de vue des appli- cations, bien que nous soyons convaincu que ces applications seront nombreuses et intéressantes. Mais l'indication de ces effets doit être présentée prochainement dans un article spécial aux lecteurs de la Revue et nous ne pouvons que les y renvoyer. III Nous devons rapprocher des expériences rela- tives aux oscillations hertziennes les très intéres- santes recherches de M. Schwedoff sur la distribu- tion dans l’espace de l'énergie d’une masse en mouvement : il admet que l’action électrique ne se propage pas avec une vitesse infinie et cherche les conséquences de cette hypothèse; autrement dit, si une masse électrique apparait dans l'espace à un certain moment, les lignes de force qui en émanent ne surgissent pas instantanément jusqu’à l'infini, mais s'allongent graduellement avec une vitesse finie, quoique extrêmement grande : il en est de même naturellement des surfaces équipo- tentielles ; il résulte de là, nécessairement, que l'existence très courte d'une masse électrique en- gendre dans l'espace une couche très mince de surfaces équipolentielles qui se propagent dans l’espace à l'instar d’une onde, M. Schwedoff a développé les conséquences de cette hypothèse et les a appliquées notamment à l'étude des oscillations hertziennes dont il donne ainsi une (héorie intéressante qui semble bien d'accord avec les faits observés. Mais les recher- ches de M. Schwedoff sont plus générales, elles s'appliquent également aux phénomènes lumineux : et enfin il convient de citer l'application qu'en a faite M. Schwedoff pour expliquer la forme des queues des comètes. Il n’en est pas moins vrai que ces recherches présentent aujourd'hui au point de vue des phénomènes électriques un intérêt tout particulier. Il serait injuste, d'ailleurs, de ne parler que des recherches se rapportant aux ondulations élec- iriques, pour celte partie de la physique, et nous devons signaler d’autres travaux, quoique nous soyons obligé de nous restreindre, faute d’étendue suffisante. C'est ainsi que nous analyserons rapidement les importantes recherches de M. Bouty sur les pro- priétés diélectriques du mica, substance qu'il avait déjà étudiée et pour laquelle il avait démontré que, constituant la lame isolante d’un condensateur, elle ne donne passage à aucun courant permanent d'intensité appréciable aux procédés les plus dé- licats. L'étude de divers condensateurs étalons, faite avec un grand soin par M. Bouty, l’a conduit à des résultats importants que nous ne pouvons tous indiquer, mais parmi lesquels nous signalerons le suivant : les subdivisions d'un condensateur en mica ne peuvent être considérées, en général, comme proporlionnelles à leurs valeurs nominales que pour une seule durée de charge ou de dé- charge. De ces résullats, obtenus avec des conden- sateurs de mica à feuilles d’élain, M. Bouty conclut que les mesures prises à l’aide de ces appareils, avec de courtes durées de charge et des circuits très résistants, peuvent être dénuées de toute signi- fication physique. Les condensateurs tels qu'on les construisait présentaient des défauts qui expliquent les ré- sultats signalés : l'élain n'adhère pas directement au mica, mais seulement par l'intermédiaire d’une couche de gomme laque qui contient une certaine quantité d'air que les variations de pression peu- vent modifier, M. Bouty, ayant constaté que le mica, dans une direction perpendiculaire aux plans de clivage, possède une constante diélectrique bien déterminée, a conclu que cette substance devait fournir des condensateurs donnant des résultats satisfaisants si l’on pouvait obvier à cette cause d'erreur, et il a construit des condensateurs dans lesquels les feuilles d’étain sont remplacées par des couches minces d'argent qui, adhérant direc- tement au verre, ne doivent pas présenter les mêmes inconvénients ; c'est d’ailleurs ce qui semble résuller des expériences de vérification qu'il a entreprises. Ce résultat est important, puisqu'il met les expérimentateurs en possession d’un appa- reil sur les indications duquel il est possible de compler absolument, condition indispensable dans les recherches de précision. Nous signalerons, d'autre part, ce résultat que la valeur de la constante diélectrique du mica fournie par des mesures de M. Bouly ne satisfait pas à la loi de Maxwell que nous avons rappelée plus haut; il y a là un point intéressant dont la signification devra être élucidée. M. Blondel a étudié l'arc voltaïque alternaüf en employant l'enregistrement direct par la photo= graphie. À cet effet, reprenant un procédé qui avait été employé précédemment par M. Joubert, mais que celui-ci avait seulement indiqué sans le décrire, M. Blondel projette une image amplifiée de l’are sur un papier sensible appliqué à la surface d'un tambour entraîné par l’axe d’une dynamo; il C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE 451 isole, à l’aide d’un écran percé d’une fente, une bande très mince de l’image, de façon à déter- miner la succession des phénomènes avec une grande précision. M. Blondel à pu mettre ainsi en évidence l'influence des divers éléments qui contri- buent à la production d’un arc voltaïque : il a trouvé ainsi, par exemple, que dans le cas de décharge entre deux charbons, dont l’un très gros et l’autre très pelit, le transport du charbon se fait bien de l’électrode positive à la négative, el que la vitesse ne dépasse pas 160 mètres par seconde; quoi- qu'une certaine incertitude puisse exister sur celte valeur, elle détermine cependant nettement l’ordre de grandeur du phénomène. Il a trouvé, d'autre part, que l’arc sifflant prend naissance dans le cas de ruptures périodiques très rapprochées, 2000 par seconde dans une expérience, condilion qui corres- pond à une diminution du rendement de l’are. M. Blondel a employé un procédé reposant sur le même principe pour l'étude des courants alter- natifs : un contact instantané, dont on peut faire varier l’époque par rapport à la période du courant, charge un condensateur qui se décharge dans un galvanomètre, dont la déviation est inscrite sur un papier sensible qui se déroule uniformément : en réalité, les organes existent en double pour pou- voir donner à la fois la tension et l'intensité. M. Blondel a appliqué cette méthode à l'étude des ares alternatifs et est arrivé à des résultats inté- ressants que nous ne pouvons signaler ; d’ailleurs, M. Blondel se propose de complèter cette étude. IV La valeur de l'équivalent mécanique de la cha- leur n’est pas encore connue avec une précision telle qu'il soit inutile de signaler les recherches récentes faites à ce sujet. M. Sahulka a effectué une nouvelle détermination de celte valeur en réglant les conditions de l'expérience de manière que la chaleur, développée à chaque instant par le travail, soit perdue par rayonnement, de manière, en un mot, que l’appareil arrive à une tempé- rature stationnaire, malgré la transformation con- tinue d’une certaine quantité de travail mécanique. A cet effet, l'appareil comprend deux cônes con- centriques : le cône extérieur est mis en mouvement de rotation autour de son axe, tandis que le cône intérieur, contre lequel frotte le précédent, est maintenu immobile par un frein réglé par un poids agissant à l’extrémité d’un bras de levier connu. Du mercure chaud, versé dans l'appareil, se re- froidit progressivement jusqu'à atteindre une température stationnaire {. Le calcul du travail dépensé se fait comme dans les expériences ana- logues ; l'évaluation de la chaleur s'obtient en étu- diant directement le refroidissement de la même masse de mercure pour des températures voisines de {. La valeur moyenne trouvée pour l'équivalent mécanique de la chaleur est de 426%" 26 : les valeurs extrêmes ont été 422: 18 et 431% 79. M. Miculescu à opéré par une méthode diffé- rente : le moteur employé était une machine Gramme actionnée par des accumulateurs et sus- pendue à un bâti mobiie autour d'un axe horizon- tal coïncidant avec l'axe de rotation de la machine. Lorsque la machine produit un travail extérieur, le bâti s'incline ; mais on le ramène à la position nor- male en lui appliquant une force dont le moment puisse être déterminé; on a alors directement le moyen d'évaluer le travail produit à chaque ins- tant. Ajoutons, condition intéressante, que ce tra- vail était considérable dans les expériences dont il s’agit, la puissance de la machine étant de 1 che- val-vapeur. ; Le mouvement de cette machine était communi- qué à une série d'hélices tournant dans un vase rempli d'eau : on maintenait constante la tempéra- ture de ce liquide en faisant circuler un courant d’eau froide autour du vase, de telle sorte que la quantité de chaleur produite était déterminée par le poids d’eau ainsi utilisé. Nous ne pouvons nous arrêter à indiquer les dis- positions de détail prises dans le but d'éviter les erreurs : nous nous bornerons à dire que 31 me- sures furent effectuées, ayant des durées variables de 3238 à 11% 33° et donnèrent pour l'équivalent mécanique de la chaleur des valeurs comprises entre 426,91 et 42782,12 : la moyenne est de ADTREDNTe Une autre question occupe actuellement un cer- tain nombre de physiciens : c'est la mesure des hautes températures. La question présente un in- térêt réel : la température n’est, en somme, que l'indication numérique d’un état calorifique déter- miné, et il est utile de pouvoir considérer un état, de manière à le reproduire absolument, dans l'in- dustrie ou dans les expériences physiques où chi- miques, de manière à réaliser strictement les condi- tions qui ont conduit à un résullat que lon veut obtenir de nouveau. Dans quelques cas, cet état calorifique pourra être délerminé par l'indication d’un phénomène simple qui s'y manifeste, tel que la fusion d’un métal déterminé; mais on n'aurait pas ainsi une échelle dont les indications fussent assez rapprochées, et il faut avoir des indications, représentées par des nombres, qu'il s’agit de pré- ciser. Le nombre qui caractérise une température correspond à la mesure d'un effet déterminé pour un corps déterminé et exige par suite, outre le choix de l'effet et des corps, celui de l'unité qui sert à la | mesure de l'effet, et le point de départ de la gra- 452 C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE dualion, car, en réalité, on n'effectue que des me- sures de différences de températures. Nous n'avons pas à traiter complètement la ques- lion,et nous devons nous borner à l'exposé des points dont son élude a été récemment l’objet. M. H. Le Châtelier a fait à ce sujet d’intéressantes recherches et, notamment, il a étudié les pyro- mètres thermo-électriques : il à indiqué comme particulièrement convenable l'emploi du platine el de certains de ses alliages, notamment du platine rhodié; — il a reconnu que les galvanomètres à cadre mobile, modèle Deprez-d’Arsonval,donnaient de bons résultats, à la condition d'yapporter de lé- gères modifications et de prendre certaines pré- cautions expérimentales. Quant à la graduation, elle présente une certaine indétermination; elle repose sur la comparaison avec la température de fusion de certains mélaux, température dont la valeur en degrés centigrades n’est pas absolument déterminée. Mais est-il vraiment nécessaire d'éva- luer les hautes températures en degrés centigrades et ne pourrait-on pas se borner, utilement au point de vue pratique, à adopter conventionnellement des valeurs quelconques pour ces points de fusion : si ceux-ci sont suffisamment invariables, si des couples thermo-électriques différents, mais basés sur le même principe, sont comparables, les valeurs numériques obtenues auraientune signification pré- cise, bien qu'elles ne se rattachassent point à l’é- chelle centigrade. En tous cas, l'emploi des couples thermo-élec- triques parait borné aux recherches de laboratoire parce qu'ils exigent des opérations délicates. Pour l'industrie, M. Le Châtelier préconise l'emploi d'une méthode photométrique, et il évalue, à l’aide d’un appareil spécialement construit dans ce but, l'intensité des radiations rouges émises par le corps considéré dans des conditions convenables et des radiations de même couleur émises par une petite lampe à pétrole. La graduation a été obtenue par une comparaison directe avec des métaux en fusion, or, palladium, platine, dont on supposait la température connue recherches anté- rieures, ainsi qu'avec d’autres températures déler- minées directement à l’aide des couples thermo- électriques, ce qui a permis d'établir une relation entre la variation de l'intensité photométrique ét la lempérature observée. Les travaux de M. Le Châtelier n’ont pas été sans donner lieu à quelque discussion à des points de vue divers,notamment de MM. Becquerel, Violle et Crova : nous nous arrêterons seulement aux obser- vations présentées par ce dernier savant qui, comme on le sait, a donné un procédé de mesure des températures par le rapport de deux déter- minations photométriques des lumières simples par les émises par le corps incandescent et par une lampe Carcel, dans deux régions de leurs spectres déter- minées par leurs longueurs d'onde. Cette méthode est peut-être moins commode au point de vue pra- tique, mais elle nous paraît préférable comme exactitude. Nous ne voulons pas d’ailleurs insister sur cette question, mais nous tenons à transcrire les lignes suivantes dans lesquelles M. Crova con- firme l’opinion que nous avons exprimée précé- demment. « Au delà de 1600°, qui a été pour moi la limite « des températures mesurables au thermomètre à « gaz, les degrés opliques permettraient de repé- « rer les hautes températures ; mais leur traduc- « tion en degrés centigrades, ne peut s’obtenir que « par l’extrapolalion de formules empiriques, qui « peuvent donner des écarts très considérables sui- « vant les formules employées. La loi exacte du « rayonnement nous est encore inconnue dans l’é- « tendue des températures extrêmes que nous pou- « vons oblenir; dans ces conditions, il me semble « préférable de faire usage d'une échelle photo- « mélrique conventionnelle, plutôt que de donner « en degrés centigrades des nombres qui pour- « raient être souvent modifiés dans une large me- « sure, par suite du progrès de nos connaissances. « Si les physiciens adoptaient une échelle de ce « genre, une température si élevée qu'elle soit se- « rait repérée par son degré optique. » Sans chercher de transition, parlons des tempé- raltures très basses : on sait que, dans les labora- toires, il était beaucoup moins facile d'obtenir un notable abaissement, qu'une élévation, même considérable, de température. Les recherches de M. Cailletet et de M. Pictet avaient fourni des ré- sultats intéressants au point de vue de la réfrigé- ration; le premier de ces savants a doté les labo- ratoires d'un nouvel instrument, le cryogène, qui nous parait appelé à rendre de grands services : il se compose de deux vases concentriques en cuivre nickelé ; un serpentin cireule dans le vase intérieur qui est rempli d'alcool; l’une de ses extrémités est à l'extérieur, l’autre vient déboucher dans l’espace annulaire. Pour se servir de l'appareil, on met le serpentin en communication avec une bouteille à acide carbonique liquide dont on ouvre le robinet. La vaporisation de l’acide liquide, puis la détente, amènent une réfrigération énergique, qui peut amener la température à — 70°; pour amener irois litres d'alcool à cette température, il suflit de dépenser environ 2,500 d’acide carbonique li- quide. Nous voudrions bien parler des effets observés à basse température par M. Pictet; mais il doit com- pléter ultérieurement l'indication des résullats obtenus, et nous pensons qu’il est préférable C.-M. GARIEL. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIQUE 453 d'attendre pour exposer ses recherches dans leur ensemble. M L'étude des propriétés moléculares, qui nous a toujours paru pleine d'intérêt, est de nouveau, depuis quelques années, l’objet de recherches nom- breuses : on peut juger de leur importance par les articles spéciaux qui ont été publiés dans cette Revue ! ; aussi ne croyons-nous pas devoir y insister d’une manière générale et nous nous bornerons à signaler un travail de M. Gossart; nous avons eu à parler antérieurement de ce savant à l’occa- sion de sa thèse sur la forme des gouttes liquides ?; c’est sur le même sujet, au fond, que reposent les recherches qui, indépendamment de leur intérêt théorique, peuvent donner lieu à des applications pratiques. En résumant rapidement les résultats obtenus, nous dirons qu'en obtenant, entre deux lames cylindriques, un ménisque formant un plan faible- ment incliné, M. Gossart a montré qu'on peut faire rouler à la surface de ce plan des gouttes du même liquide à la condition de les laisser tomber doucement, de 1 millimètre de hauteur, par exemple. Il se produit dans ce cas une véritable caléfac- tion à froid, caléfaclion due à la présence d'une couche très mince de vapeur qui entoure la goutte et qui n’a aucune tendance à disparaitre par son contact avec le liquide, parce que celui-ci est saluré de cette vapeur. L'expérience réussit pour un très grand nombre de liquides, mais non pour l’eau ni pour les liquides qui ne sont pas du tout volatils à froid; par contre, ceux-ci roulent très bien si on les chauffe à une température assez élevée pour qu'ils émettent des vapeurs. Mais, si l’on prend deux liquides purs, différents, l Rev. gén. des Sc., 15 avril 1891, 15 octobre 1891. 15 mai 1892, ? Rev. gén. des Sc., t. 1, 30 mai 1890. l'expérience montre qu'on ne parvient jamais à les faire rouler l’un sur l’autre : il semble que la couche de vapeur qui enloure la goutte se dissolve dans le liquide qui sert de support, que cette goutte n'étant plus soutenue se met en contact avec le liquide et que le mélange s'effectue. Enfin, si on a des mélanges de deux liquides, des cas différents peuvent se produire : si les propor- tions du mélange sont les mêmes dans la goutte et dans leliquide qui sert de support, il s agit d'une même substance, et le roulement a toujours lieu; le roulement a lieu également si la proportion des substances qui constituent le mélange pour la goutte et pour le réactif s'écarte peu de légalité; mais, dès que la différence de proportion devient un peu notable, le roulement ne peut avoir lieu, et les gouttes s’enfoncent dans le liquide. M. Gos- sart a étudié pour cerlains liquides les proportions nécessaires pour obtenir ce dernier effet et a donné une représentation géométrique des résultats obtenus. La question n’est pas seulement intéressante au point de vue théorique, mais elle parait suscep- tible d’applicalions pratiques, et M. Gossart con- sidère les résullats que nous venons d'indiquer sommairement comme permettant de reconnaitre les falsifications et les altérations de divers liquides et même, en se servant comme réactifs de mé- langes lilrés, d'arriver à déterminer la proportion des matières étrangères introduites; il a donné le nom d'Aoméotropie à ce mode particulier d'analyse qu'ilregarde comme applicable, d'une manière très pratique, notamment à l'analyse des alcools, soit qu'il s'agisse d'alcools d'industrie mal rectifiés, soil qu’il s'agisse d’alcools dénaturés qu'on remet en circulalion après les avoir purifiés le mieux pos- sible. Ce côté pratique est intéressant à divers égards et nous parail mériter d’être signalé tout spéciale- ment. C.-M. Gariel, Professeur de Physique à la Faculté de Médecine de Paris Membre de l'Académie de Médecine. 454 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. Gomes Teixeira (F.). — Curso de Analyse inf- Hadamard, ancien élève de l'Ecole normale supé- nitésimal. Calculo integral. — Un vol ere en rieuwre. — Essai sur l'étude des fonctions données par leur développement de Taylor. — Thèse de doctorat soutenue devant la Faculté des Sciences de Paris le 11 mai 1892, Gauthier-Villars 1892. On connaît le rôle fondamental que jouent en ana- lyse mathématique les séries entières, c’est-à dire les séries ordonnées suivant les puissances entières et positives d’une variable æ#. Cauchy a démontré que toute fonction régulière dans un cercle de centre &æ — 0 peut être représentée, dans ce cercle, par un dévelop- pement de cette forme, Réciproquement, toute série entière, convergente en quelque point, définit une fonc- tion régulière dans un certain cercle de convergence; M. Weierstrass et M. Méray prennent la série comme définition même de la fonction ou, du moins, d'une branche de la fonction qu'il s’agit ensuite, autant que possible, d'étudier dans son ensemble. En se placant à ce point de vue, M. Hadamard prend une série entière comme définition d'une fonclion et se propose de résoudre les questions suivantes : 4° quel est le rayon du cercle de convergence de cette série: 2° comment se comporte la fonction sur le cercle de convergence ; quelle est la nature des singularités de la fonction sur ce cercle ? La première question est résolue par M. Hadamard : il donne une règle faisant connaître le rayon du cercle de convergence. En cherchant en particulier la con- dition pour que ce rayon soit infini, ou encore pour que la série converge dans tout e plan, il trouve comme condition nécessaire et suffisante que la racine d'ordre x du coefficient de æ" doit tendre vers zéro. La deuxième question est traitée dans la deuxième el la troisième partie de la thèse, Il est évident qu'on ne peut pas résoudre la question d'une manière générale, car une série entière peut représenter une fonction quelconque, avec les singularités les plus compliquées sur le cercle de convergence, Tout ce qu'on peut faire, c’est de chercher à reconnaitre l'existence des singula- rités les plus élémentaires, des pôles d’abord, puis des points singuliers isolés, d'ordre fini, commensurable ou non, etc., en prenant des cas de plus en plus com- pliqués. Tout d’abord M. Hadamard étudie les discon- tinuités en supposant qu'elle sont toutes des pôles : il donne la condition nécessaire et suffisante pour qu'il y ait p pôles sur le cercle de convergence et il indique une équation déterminant ces pôles. On ne peut s'at- tendre. en restant dans les généralités où l’auteur a voulu se maintenir, à obtenir des formules d’une appli- cation simple; aussi ces formules appliquées à des exemples particuliers donneraient lieu à des calculs très longs; mais, pour les établir, l’auteur à fait preuve d'une pénétration fort remarquable, M. Hadamard étudie ensuite les singularités d'ordre quelcunque : il classe les différents types de points singuliers dont il s'occupe, puis il définit l’ordre de la fonction en un point du cercle de convergence. Si l'on suppose les points singuliers sur le cerclé en nombre limité et d'ordre fini, si de plus on ajoute une autre condition d’un caractère très général dont l'énoncé ne saurait trouver place ici, on peut déterminer ces points et leur ordre. Dans cet important travail, M. Hadamard a déployé une critique pénétrante et dépensé un talent supérieur aux résultats obtenus, si intéressants qu'ils soient, ce qui tient à la question même el non à la façon dont elle est traitée. P. APPELL. pographia occidental 80, rua da fabrica, Porto, 1892, Nous avons rendu compte dans la Revue du premier volume que M. Gomes Teixeira a publié sur le calcul intégral ; il vient de terminer son œuvre par un second volume consacré aux fonctions de variables imaginaires, aux intégrales eulériennes, aux fonctions elliptiques et à leurs applications à la méthode des variations. Ainsi se trouve acheyé un ouvrage d'enseignement très complet, très au courant de la science, et qui fait grand honneur au savant professeur et directeur de l’Académie Polytechnique de Porto. L. O. Bapst (Germain), — Essai sur l’histoire des pano-’ ramas et des Dioramas. — Plaquette grand in 8 de 30 pages imprimées en édition de luxe, avec illustrations de M. Edouard Detaille (Prix 5 fr.) Imprimerie Natio- nale, et librairie Masson, Paris 1892. Cette histoire est passionnante : c’est celle des efforts déployés depuis cent ans pour créer une merveille d'art : la sensation que nous donnent actuellement les panoramas. La misère fut la première conseillère des inventeurs : vers 1785 un jeune peintre d'Edimbourg, Robert Barker, retenu en prison pour dettes, y fut frappé de l’aspect des objets éclairés par le soupirail et découvrit ainsi le principe des panoramas, Le sys- tème ne cessa de se perfectionner. M. Bapst prend soin d'indiquer les modifications successives que l’ex- périence etle génie des inventeurs lui ont fait subir, Sous une forme élémentaire il fait bien comprendre en quoi consiste le phénomène psycho-physique du pano- rama, et précise les conditions requises pour le pro- duire au maximum d'intensité. Les détails techniques donnés à ce sujet, la description des essais variés des artistes, notamment ceux où les peintres Neuville et Detaille ont fait intervenir la photographie, sont pleins d'intérêt. Au charme du récit l’auteur a voulu joindre celui d’une illustration exceptionnelle : deux belles planches relatives aux constructions panoramiques, enfin d’admirables photogravures de tableaux signés Stevens et Gervex, des esquisses inédites de M. Edouard Detaille, ajoutent à la saveur de cette étude, que goù- teront surtout les délicats. co L. O. Mouchez (LE coNTRE-AMIRAL E.), Dü'ectewr de l'Obser- valoire de Paris. — Rapport annuel sur l'état de l'Observatoire de Paris pour l’année 1891. Un vol. broch. gr. in-8° de 93 pages. Gauthier-Villars et fils, Paris, 1892, Ce volume rend compile de Ja troisième réunion du Comité international permanent pour l'exécution de la Carte du Ciel, des observations de M. Périgaud au cercle méridien, de M. Læwy au cercle méridien du Jardin, de MM. Læwy et Puiseux aux équatoriaux cou- dés, de M. Bigourdan à l’équalorial de la Tour de POuest, de Mile Klumpke à l’équatorial de la Tour de l'Est, des travaux de MM. Paul et Prosper Henry au ser- vice de photographie astronomique, de M. Wolf au service de l'heure, de M. Deslandres sur la spectros- copie astronomique, de M. Gautier au grand télescope. Longridge (J.-A.), Membre de l'Institut des Ingénieurs civils. — Le canon de campagne de l'avenir. Une brochure in-8° de 28 payes (3 francs). E. et FE. N. Spon, 125, Stand, Londres, 1892. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 455 2° Sciences physiques. Drincourt (E.). — Cours de Chimie, à l'usage de la classe de Mathématiques élémentaires, des cadidats à la seconde partie scientifique du Baccalawréat, de l'En- seignement seconduire classique et des candiduts à PEcole Centrale des Arts et Manufactures. (Prix 5 fr.) A, Colin et Cie, éditeurs, 5,rue de Mézières, Paris, 1892. Nous recevons sous ce litre un joli volume in-8° de 460 pages, dans la préface duquel l’auteur nous an- nonce son intention de moderniser l’enseignement de la chimie élémentaire; en conséquence, il se propose de donner plus d’extension aux lois fondamentales, d'appliquer les règles de la Thermochimie aux réac- tions classiques, enfin d'écrire simultanément toutes les formules dans les deux systèmes exigés par le programme d'admission à l'Ecole Centrale. Limité par le cadre même de son ouvrage, il invite les élèves qui désireraient étendre leurs connaissances en Chimie générale à se reporter au livre de M. Gaudin, que les lecteurs de la Revue connaissent déjà par l'excellente analyse qui en a élé faite dans ce recueil par M. De- marcay !. Nous ne pouvons que féliciter l’auteur de son excel- lente idée : les traités de chimie classiques sont nom- breux, mais tous ont en effet un peu vieilli. Quelques- uns cependant sont encore bons; la tentative de M. Drincourt nous montre qu'il est difficile de faire mieux. N'osant rompre résolument avec les traditions, le nouveau Cours consacre seulement 10 pages à la théorie atomique : l'hypothèse d’Avogadro passe alors à peu près inapercue, toutes les notions fondamentales sont formulées en équivalents, et nous voyons encore altri- buer des équivalents en volumes distincts aux divers composés volatils de la Chimie minérale, alors même que l’auteur a pris soin de nous dire que les formules rationnelles de Peau et du protoxyde d’azote doivent s'écrire H20? et AzZ202. Il en résulte que le cyanogène forme toujours une éternelle exception aux lois de Gay- Lussac; on nous dit, page 305, que cette exception tient à ce que le cyanogène est un radical et non un com- posé ordinaire, Peut-être n'est-il pas inutile d'ajouter que plus tard, en chimie organique (page 434), ce même cyanogène est rangé parmi les amides dérivées de l'acide formique et de l’anhydride carbonique. Le principe de la substitution introduit dans les for- mules équivalentes donne aux sels des symboles si étranges (C?2O6Na? pour le carbonate de sodium, POSNa-H pour le phosphate bisodique) que son emploi nous fait presque regretter Ja vieille théorie dualis- tique. A propos de la loi de Dulong et Pelit, nous relevons la phrase incompréhensible suivante (page 42) : « La loi précédente conduiruit à doubler les équivalents de Pargent et des métaux alcalins, c’est-à-dire du potas- süun, du sodium, du calcium et du baryum. » Enfin, combien peu clair est le mode de représen- lation adopté pour le calcul thermique des réactions : cherchant, par exemple, à déterminer théoriquement l’action de l'acide sulfurique étendu sur le zinc, l’au- teur pose les deux équations qui suivent : 1° S2OSH? (dissous) +210#2Zn = S?05Zn?(dissous) +252,6+2H et 20 S205H2 (dissous) + 210 Zn=4(S?2 05 Zn? ) (dissous) +126,3 + 2H0 +2 X 34,5 + SO? (dissous) + 38,4. On se demande quel élève d’élémentaires se recon- naitra jamais dans un pareil chaos et surtout quelle idée cet élève pourra bien se faire d'équations dont les deux membres sont formés de sommes inégales. 1 Revue générale des Sciences, 1891, t. II, p. 518. Après avoir ainsi exposé les lois et la nomenclature chimique, M. Drincourt étudie, dans un ordre quel- conque d’ailleurs, les différents corps qui figurent aux programmes officiels. Nous regrettons d’avoir à si- gnaler ici de nouvelles imperfections qui sont plus graves que les précédentes, parce qu'elles touchent au fond même de l’enseignement, tandis que les premières élaient surtout d'ordre pédagogique ; c’est ainsi, entre autres exemples, que nous lisons, page 240, à propos de la fabrication industrielle de l'acide sulfurique : « Dans cerlaines fabriques d'Angleterre on remplace la chambre G » (celle du milieu !) « par une tour dite tour de Glover. » Le rôle de cette tour est d'ailleurs passé sous silence. Il y a là sûrement quelque faute d’im- pression. Page 314, on nous enseigne que : « Le bore est un corps solide Se présentant sous les trois états : amorphe, graphitoïide et cristallisé, » Dans la classe des métalloides nous retrouvons, comme il y a 50 ans, le bore à côté du carbone et du silicium, et à ce propos Pauteur nous dit, page 318 : « Le carbone ne S'unit pas au fluor, tandis que le bore et le silicium forment deux fluorures importants. » Puis, un peu plus loin, page 319 : « Un atome de chacun de ces corps (carbone, bore et silicium) se combine avec 4 atomes d'hydrogène pour que la saturation soit complète. » Enfin, page 324, immédiatement après la classifi- cation des métaux, nous apprenons avec une véritable surprise que « fous les métaux sont divulents, excepté le potassium, le sodium, le bismuth, l’'antimoine et l'argent, qui sont monovalents ». Il est clair que ces phrases ont échappé à l'auteur dans la hâte d’une rédaction trop précipitée; il n'en est pas moins fâcheux de les rencontrer dans un de ces livres de classe où l'étudiant met d'ordinaire toute sa confiance, parce qu'on avait jusqu'à présent l'habitude de n’y enseigner que des choses exactes. L. MAQUENNE. Laboratoire de M, Ch, Friedel. — Confé- rences (faites au laboratoü'e de M. Friedel pendant l'année scolaire 1889-1890). — 3° fascicule. Un vol. grand in-8° de 196 pages. (Prix :5 fr.).G. Carré, éditeur, 58, rue Saint-André-des-Arts. Paris, 1892. L'éloge de cette utile publication n’est plus à faire : physiciens et chimistes savent combien précieuse est cette collection de conférences qu'un maitre illustre à instituées dans son laboratoire pour y entretenir, à côté de l'éducation technique, le goût des hautes spéculations de la science, Découvertes récentes, problèmes à l’ordre du jour, tendances nouvelles dans les diverses bran- ches de la chimie, — générale, minérale, organique et même industrielle, — y sont exposés par des spécia- listes autorisés. Dès que, dans ce vaste domaine, sur- git une question intéressante à connaitre ou à discuter, M. Friedel charge de la traiter le savant qui se trouve le plus désigné à cet effet par ses études personnelles. C’est ainsi que le présent fascicule renferme les le- cons suivantes, professées pendant l’année scolaire 1889-1890 : 1° Sur le point critique et léquation des fluides, par M. Ph. A. Guye, dont nos lecteurs connaissent les beaux travaux sur la matière !, 20 Sur la pression osmotique (lois de Raoult et de Van'’t Hoff), par M. Lespieau?; 3° Sur les Pinacones, par M. F. Couturier ; 49 Sur les chlorures d'acides basiques, par M. V. Auger; 50 Sur quelques dérivés de la glycérine (notamment, nou- velle préparation de l’épichlorhydrine et découverte d’un isomère), par M. C. Bigot; 1 Voyez à ce sujet la Revue générale des Sciences, passim t. I, Il et IL, et notamment t. [, page 365 et suiv. 2 Sur cet important sujet, voyez aussi: À. Etard, Sur la pression osmotique, Revue générale des Sciences, t, 1 pages 193 et suiv. : 2 q | 3 1 PARLE, mi site lol 2 mn Ses D PR ES O4 Cs BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 60 Sur l'oxydation des carbures (carb. forméniques, éthyléniques et acétyléniques; benzène et carb. benzé- niques substitués; carb. aromatiques à plusieurs noyaux benzéniques diversement unis; carbures téré- béniques; étude du mécanisme de leur oxydation réa- lisée au moyen d’oxydants peu énergiques), par M. L. Tissier ; 70 Sur les composés diazoides de la série grasse (revi- sion de ces diazoïques et de leurs connexions, à l’oc- casion de la découverte de Curtius), par feu Demètre Vladesco ; La lecture de ces Conférences continue donc, comme on le voit, de s'imposer à tous ceux — élèves et maitres — qui désirent arriver ou se maintenir à l'avant-garde du progrès chimique. Formulons toutefois une légère critique, en souhai- tant que la publication de ces importantes lecons en suive de plus près l'exposition orale. 0. 8° Sciences naturelles. Michel-Lévy (A.). — Notes sur la chaîne des Puys, le Mont-Dore et les éruptions de la Lima- gne. Bulletin de la Société géologique. t. XVNHT. L'histoire géologique du Plateau Central de la France s’est enrichie récemment de documeñts d’une grande importance. La réunion extraordinaire de la Société géologique de France à Clermont-Ferrand, en 1890, à fourni en effet à M. Michel-Lévy l’occasion de publier une monographie de la chaine des Puys, du Mont-Dore et d’une partie de laLimagne, dans la laquelle, pour la première fois, une région française est étudiée avec toutes les ressources que fournissent la stratigraphie et la pétrographie moderne. L'auteur examine la posi- tion du Plateau Central par rapport à la chaine des Alpes. D’après lui, d’une part entre la Saône et la Loire, d'autre part entre la Loire et l'Allier, le sous-sol ancien représente un anticlinal à grand rayon de cour- bure dont la clef de voûte se serait effondrée par un tassement vertical. En Auvergne, ce tassement commencé avant le dé- pôt des couches pliocènes, aurait continué jusqu'après le dépôt du pliocène moyen à Mastodon arvernensis. Des plissements à petite courbure de l’âgedes Alpes seraient venus superposer leur action à celle des plis plus ré- pétésetplus violents de l’époque carbonifère et seraient comme eux le résultat de pressions horizontales. Les éruptions volcaniques ont rendu manifestes les effondrements consécutifs au développement du sys- tème alpin, etleur siège est limité par les contours d'un triangle déterminés par le grand changement de direc- tion des plis carbonifères (systèmes varisque et armo- ricain de M. Suess). M. Michel-Lévy rejette l’opinion qui relie nécessai- rement le siège des volcans au voisinage des mers. Il fait remarquer en effet que la partie volcanique du Pla- teau Central est bien éloignée des rivages de la mer pliocène et que les lacs oligocènes étaient eux-mêmes desséchés depuislongtemps lorsque ont eulieules débuts des projections trachytiques du Mont-Dore. L'étude attentive des relations existant entre les pro- duits volcaniques et les assises tertiaires a conduit l'auteur aux conclusions suivantes au sujet de l’âge des éruptions dans cette partie de l'Auvergne: En ce qui concerne la Limagne, il reste des doutes pour le point de départ des éruptions, mais la majorité des coulées de basalte de cette région affaissée est pos- térieure au miocène à Melania aquitanica et même au miocène supérieur. Toutes les éruptions du Mont-Dore paraissent con- temporaines du pliocène moyen; les tufs de la base contiennent une flore de l’âge de celle de Meximieux. Les ponces fluviatiles à Mastodon arvernensis, renfer- ment des galets de trachyte; enfin, toutes les variétés des roches du Mont-Dore se rencontrent dans le plio- cène supérieur à Elephas méridionalis. Les volcans de la chaine des Puys sont quaternaires, et l’activité volcanique n’a cessé qu’à l’âge du Renne. Il subsiste cependant quelque incertitude au sujet de l’âge exact des domites dont la venue a précédé celle des roches plus basiques (andésites, labradorites, ba- saltes). Au point de vue de la nature des produits volcani- ques et de leur ordre de succession dans les divers centres éruptifs, une étude très approfondie a permis à M. Michel-Lévy de faire voir qu'à part quelques ro- ches basiques intercalées à la base des projections acides, le début du Mont-Dore est trachytique avec exagérations locales d’acidité et production de vérita- bles rhyolites, associées à des phonolithes inférieures ; à la cinérite supérieure succèdent des andésites, des trachyles, des téphrites; puis viennent les grandes poussées de phonolite et enfin une riche série de ro- ches basaltiques. Dans la chaine des Puys, les premiers produits formés sont des trachytes acides (domites) suivis de roches an- désitiques et basaltiques. L'importance des résultats acquis au point de vue pétrographique ne le cède en rien à ceux qui vien- nent d’être rapidement énumérés au point de vue de de la stratigraphie. M. Michel-Lévy, bien connu par ses remarquables travaux sur les propriétes optiques des feldspaths, a montré récemment les services que pouvait rendre l’étude de la face g! de ces minéraux (dans les plaques minces) pour leur détermination dans les roches. La classification pétrographique française étant basée sur la connaissance des feldspaths, cette question est donc de la plus haute importance, La partie pétrographique du mémoire que nous ana- lysons brièvement ici peut être donnée comme exemple des services que rendent ces procédés délicats, Ils ont permis à M. Michel-Lévy de préciser la nature des felds- paths anciens et microlitiques dans chacune des roches volcaniques étudiées et de montrer combien ces felds- paths étaient variables de composition, non seulement dans une même roche, mais encore dans les diverses parties d'un même cristal. Les-limites étroites d’un comple rendu sommaire ne me permettent pas de suivre l’auteur dans la descrip- tion approfondie des diverses roches volcaniques de cette intéressante région ; je me bornerai à citer quel- ques types pétrographiques rares ou nouveaux mis en pleine lumière par M. Michel-Lévy. Dans la chaine des Puys, la domite, trachyte très acide, est surtout caractérisée par la forme de ses mi- crolites d’orthose, aplatis suivant g! et présentant des formes dentelées, des groupements très caractéristiques. Les feldspaths anciens sont constitués par de l’orthose etde l’andésine, Dans une série très remarquable d’andésites ef de la- bradorites, M. Michel-Lévy à fait connaître l'existence de péridot microlitique, notamment dans l’andésite ce- pendant si connue de Volvic qui ne semblait pas devoir donner sujet à de nouvelles découvertes. Au Mont-Dore, les types spéciaux sont plus nom- breux ; je citerai tout d’abord de très beaux trachytes, et des andésites acides à grands cristaux de sanidine, des trachytes augiliques à olivine plus basiques, dans les- quels on trouve l’association anomale de grands cris- taux d’olivine, de sanidine, d’anorthose et de felds- paths basiques, englobés par un magma microlitique riche en augile. Le groupe des andésites renferme des fypes sodi- ques, des andésites à Haüyne, établissant le passage aux véritables téphrites. Les rhyolites de Lusclade sont riches en sphérolites de composition variée. Enfin les basaltes présentent un type fort curieux, désigné par M. MichelLévy sous le nom de basalte semi-0phi- tique, et caractérisé par ce fait que les grands cris- taux, englobés par le magma microlitique, sont en grande partie formés par de l’augite et du labrador à structure ophitique. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 457 Les deux monographies que nous venons d’éludier sont suivies du compte rendu des excursions que la Société géologique a faites sous la direction de M. Mi- chel-Lévy ; on y trouve, discutées plus sommairement, des questionsimportantes telles que, par exemple, l'ori- sine des pépérites, l’âge des failles de la Limagne, ce- lui des arkoses de la base du tertiaire des environs d'Issoire, reconnues tongriennes inférieures, etc. Le mémoire de M. Michel- -Lévy peut servir de texte explicatif de la feuille de Clermont (Carte géo- logique détaillée de la France). Il sera d’un grand se- cours aux géologues qui visiteront cette partie de l’Au- yergne. A. Lacrorx. Annales de l'Ecole d'Agriculture de Montpellier, un vol. in-8° de 300 pages avec planches sur cuivre, t. VI. Camille Coulet, à Montpellier, 1892. Ce volume renferme la monographie du pourridié, par M. Viala, travail dont la Revue a déjà rendu compte; des recherches, dues à MM. Viala, Sauvageau, Boyer, Valery-Mayet et Foex sur divers parasites de ja vigne, du citronnier et de l'olivier; deux études sur l'alimen= tation du ver à soie par M. Lambert et M. Chapelle ; enfin des observations de météorologie agricole par MM. Crova, Chabaneix et Houdaille, À LRO! Lavoïisior., — La chaleur animale et la respi- ration (1778-1789). Bichat, — La mort par l'asphyxie (1761-1802). 2 vol, petit in-8° de chacun une centaine de pages (Prix : 4 frunc le volume) de la Bibliothèque rétrospective : Les Maîtres de la Science, dirigée par M. Ch. Richet. Paris, G. Masson, 1892. Nous avons plaisir à signaler ces deux volumes, les premiers d’une collection entreprise par M. Ch. Richet pour rendre facilement accessibles aux hommes de pensée les chefs-d’œuvre anciens des Maîtres de la science, « D'une part, écrit le directeur de cette précieuse | publication, nous voulons que cette Bibliothèque soit franchement scientifique, avec des faits et des détails utiles encore à connaître aujourd'hui; et, d'autre part, nous avons l'intention de n’admettre que des travaux devenus absolument classiques et consacrés par l’ad- miralion universelle, « À notre époque, en cette fièvre de production hà- tive, on se dispense trop d’avoir recours aux auteurs originaux, Une analyse, presque toujours inexacte et toujours insuffisante, voilà ce que demandent le lec- teur superficiel, l'étudiant et même le professeur. Quant à se repor ter aux ouvrages fondamentaux et ori- ginaux, on n'y pense guère, e el peut-être n’y pense-t- on pas parce que rien n’est plus pénible que d’aller ne TE les vieux documents bibliographiques. » Détachons encore de lAvant-Propos de M. Richet cette belle pensée, que nous eussions aimé voir ins- crite, en manière d’épigraphe, sur la couverture de la collection : « Pour être un homme de bonne société, il faut fréquenter les gens de bonne société : eh bien ! pour apprendre à penser, il faut fréquenter ceux qui ont pensé profondément, ceux qui, par leur pénétra- tion, ont régénéré la science et ouvert des voies nou- velles. » Ces Ans rendent, croyons-nous, tout commen- taire inutile. Nous n ’ajouterons qu'un mot, pour ap- plaudir au € choix des auteurs dont on nous promet de prochains extraits: —Harvey, Haller, Lamarck, Laënnec, Legallois, Flourens, W. Milne-Edwards, — et souhaiter que M. Richet, élargissant le cadre de la Bibliothèque rétrospective, Y comprenne d’autres savants que des physiologistes : Galilée, Copernic, Newton, Laplace, Volta, Coulon, Ampère, Faraday, Gay- Lassae, elcs elec. réclament aussi leur place dans ce Panthéon scienti- fique. L, O 4° Sciences médicales. Martha, — Note sur deux cas d'otite moyenne purulente ; Arch. de médec. expérim., . IV, p. 130, « Paris 1892. Dans ces deux cas, M. Martha a constaté la présence du bacille pyocyanique à l’état de pureté. Il semble donc que ce bacille ait été, dans l’espèce, pyogène, Il faut toutefois ajouter qu’ un des deux malades était tuberculeux, et l’on sait que l'examen microscopique peut être insuffisant pour déte rminer la présence du ba- cille tuberculeux, Mais le deuxième ne présentait aucune manifestation tuberculeuse, et l’origine pyocyanique de l’otite moyenne peut être maintenue pour lui d’une manière tout à fait plausible. D' Henri HARTMANN. Lombroso (C.). — Nouvelles recherches de psy- chiatrie et d'anthropologie criminelles. — Un vol. in-12 de 180 pages, 2 fr. 80. Alcan, 1892, Les travaux sur l'anthropologie criminelle se mul- tiplient avec une telle abondance qu’au bout de moins de deux ans M. Lombroso a pu donner une suite à son livre intitulé l’Anthropologie criminelle et ses ré- cents progrès, dont il a été rendu compte ici même. Il résume rapidement en ce nouvel ouvrage les résul- tats des recherches récentes sur les anomalies mor- phologiques et fonctionnelles des criminels. M. Lombroso est resté en apparence fidèle à la théorie à laquelle il à attaché son nom; mais on ne peut douter cependant, lorsqu'on examine les choses de près, qu'il n'ait quelque peu changé de position: il ne soutient plus avec la même netteté qu'autrefois que le criminel est un attardé dans notre civilisation, un proche parent des sauvages actuels; il tend maintenant à faire de tous les criminels des aliénés, Cela est cer- tain pour les criminels-nés, et M. Lombroso a été enfin contraint à l’admettre sous la pression des faits; les aliénés criminels sont des aliénés comme les autres, et l'impulsion au meurtre ou au vol est sem- blable à toutes les autres impulsions. Seulement il est bon nombre de criminels qui ne présentent aucune tare mentale, aucune anomalie physique, et, d'autre part, on ne ‘peut constituer avec les criminels une famille naturelle comme avec les fous, puisque la no- tion du crime est une notion juridique et légale, con- ventionnelle par conséquent. M. Lombroso serait tenté de faire rentrer tous les criminels-nés dans la catégorie des épileptiques ; il y a à cela de grosses difficultés : un imbécile ou un dégénéré peuvent commettre les mêmes actes délictueux qu'un épileptique, s'ils ne les commettent pas de la même manière. Il y a un assez grand nombre de ces malades parmi les criminels et même parmi les criminels condamnés et leur manière de réagir est aussi différente de celle des épileptiques que de celle des hommes normaux. Ce qui est vrai, c’est que l’épilepsie, sous ses formes atténuées, est une maladie plus répandue qu'on ne le croyait autrefois, et qui, grâce aux progrès toujours croissants de l’al- coolisme, tend chaque jour à se répandre davan- tage. 11 faut signaler particulièrement parmi les travaux analysés par M. Lombroso les recherches d'Ottolenghi sur les anomalies du champ visuel chez les épilep- tiques et les criminels-nés. M. Lombroso à consacré un long chapitre aux causes des révolutions où il sou- tient, avec des arguments qui ne paraïtront peut-être pas convaicants, sa théorie favorite qui assimile les réformateurs aux mattoides. On sera peut-être surpris de voir que, d’après M. Lom- broso, la preuve la plus forte en faveur de ses théo- ries, c'est que « ses conclusions sont adoptées pres- que à leur insu par des hommes de génie comme Zola, Daudet, Tolstoi, Dostoiewsky, dont les préoceu- Pi ations et la tâche littéraire n’ont rien à voir avec sa science », Le Men 458 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 7 juin M. Péan : De l’ablation totale de l'utérus pour les grandes fumeurs fibreuses et fibrocystiques de cet organe. L'auteur décrit sa nouvelle méthode d’ablation totale de Putérus pour les cas indiqués et pose les conditions suivantes : 4° foutes les fois qu'il est indi- qué d'enlever une grande tumeur fibreuse ou fibro- cystique, interstitielle, du corps de l'utérus, il convient de recourir à notre méthode d’ablation totale de cet organe par la voie abdominale et par la voie vaginale combinée; 2° cette méthode permet d'enlever plus rapidement l'utérus malade et ses annexes que les méthodes intra et extra-péritonéales; 3 elle agrandit le domaine de la chirurgie en augmentant le nombre des guérisons. — M. Semmola (de Naples) : Contri- butions expérimentales et cliniques à la pathologie de linfluenza. M. Semmola a fait connaître, il y a dix mois, ses recherches biologiques expérimentales. Il expose aujourd’hui quelques-uns des résultats obtenus dans le cas de l’influenza, — M. Béchamp : Traitement de la pleurésie, Séance du 14 juin M. Pinard est proclamé membre titulaire dans la VII section (Accouchements) en remplacement de M. Barthez, décédé. — M. Marjolin : Sur la contami- nation des nourrices par des enfants atteints de syphi- lis. L'auteur propose la mesure suivante, dans le but de diminuer le nombre de cas de contamination des nour- rices : lorsqu'une femme atteinte de syphilis accouche dans un hôpital ou dans une maison placée sous la surveillance de l’Assistance, si elle ne veut pas garder son enfant et si, de l'hôpital, il est envoyé en nourrice ou dans un hospice dépositaire, quel que soit le parti adopté, le bulletin de l’enfant devra toujours indiquer que la mère étant atteinte d'une maladie contagieuse, l'enfant ne peut être élevé que par un procédé arti- ficiel, — M. Béchamp : Traitement de la pleurésie, SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 17 juin. M. Raveau fait une communication sur les adiaba- tiques d’un système de liquide et de vapeur. Si l’on pos- sède des données très complètes sur les isothermes, il est loin d’en être de même pour les adiabatiques. On sait seulement que l’adiabatique doit être tangente à la courbe de saturation aux deux points d’inversion de la chaleur spécifique de la vapeur saturée; l’un de ces deux points est connu depuis assez longtemps, l’exis- tence du second a été démontrée pour la première fois par M. Mathias. M. Raveau met en lumière un certain nombre de propriétés importantes des adiabatiques, permettant de se rendre compte de l'allure et du tracé de ces courbes, Nous ne pouvons que nous borner ici à indiquer brièvement les résultats. Tout d'abord, à l’in- térieur de la courbe critique, le faisceau des adiaba- tiques va en s'épanouissant à mesure que la tempéra- ture s’abaisse. Les adiabatiques présentent, comme les isothermes, une brusque discontinuité en traversant la courbe de saturation, il y a réfraction de l’adiabatique. Les adiabatiques se redressent en passant de l’intérieur à l'extérieur de la courbe de saturation, Au voisinage du point critique, il y a encore brisement, comme dans les autres régions. Au point critique même on peut pré- ciser davantage le tracé de l’adiabatique. Pour cela, M. Raveau rappelle que les deux chaleurs spécifiques, aussi bien de liquide saturé que de vapeur saturée, de- viennent toutes deux infinies en ce point, et il en donne une nouvelle démonstration plus simple que celle de M. Duhem. Il démontre, de plus, que le rapport des va- leurs absolues de ces deux chaleurs spécifiques tend vers l’unilé, tandis que leur différence reste finie, De là résulte que l’adiabatique du point critique est tan- gente en ce point à la courbe pour laquelle il y 4 des masses égales de liquide et de vapeur, c’est-à-dire au diamètre des cordes de la courbe de saturation paral- lèle à l’axe des v. S'occupant maintenant de la détente adiabétique, il démontre que, pour toute température supérieure au second point d'inversion on peut établir entre les masses du liquide et de la vapeur un rapport tel qu'une détente adiabatique conserve ce rapport, Il en est de même à toute température inférieure à celle du premier, L'intérieur de la courbe de saturation se trouve ainsi divisé en trois régions, deux dans lesquelles une détente adiabatique est accompagnée d'une con- densation, l’autre dans laquelle elle est accompagnée d’une volatilisation, — M. P. Curie expose les recher- ches poursuivies, d’une part, par son frère, M. J. Curie, d'autre part, par MM. Warburg et Tegetmeier, sur la conductibilité du quartz. Ces recherches de M. J. Curie font partie d’un travail plus étendu publié en 1889 sur le pouvoir inducteur spécifique et la conductibilité des corps cristallisés. Ce travail, très remarqué, a été effec- tué par une méthode fort originale fondée sur l'emploi des propriétés piézotlectriques du quartz, découvertes et étudiées antérieurement par les deux frères, MM. J. et P. Curie, Le quartz piézoélectrique constitue une source d'électricité très commode et susceptible de donner des quantités d'électricité qui s’évaluent immédiatement, puisqu'elles sont proportionnelles aux poids qui pro-- duisent la traction sur le quartz. L'appareil, sensible déjà à quelques décigrammes, peut recevoir jusqu'à cinq kilogrammes, Dans le travail actuel il est employé pour compenser, et par suite, pour évaluer par une mé- thode de zéro, les charges prises par le quartz étudié, qu’on a armé de manière à consliluer un condensateur à anneau de garde. La méthode de mesure des conduc- tibilités de M. Curie donne encore de très bons résul- lats pour les substances dont la résistance peut atteindre 10000 fois celle du verre à 15°, L'auteur a pu constater ainsi les lois des intensités des courants de charge ou de décharge. En particulier ces intensités obéissent à la loi de superposition ou d'indépendance des effets, chaque variation de la force électromotrice ajoutant à l'intensité précédente la même intensité que si elle était seule. En ce qui concerne le quartz, on trouve que la charge instantanée, qui dépend de la constante dié- lectrique reste sensiblement la même lorsque la lame est parallèle ou perpendiculaire à laxe, tandis que la conductibilité peut varier dans un rapport énorme, tel que 1 à 10000 entre ces deux directions. Cette grande différence entre les conductibilités parallèlement et normalement à l'axe, permet d’expliquer l'étrange phé- nomène observé par M. Curie, de la déviation progres- sive des lignes de force dans le quartz parallèle, dévia- tion de plus en plus rapide à mesure que la température s'élève. Relativement à l’invariabilité de la constante diélectrique, les durées de charge ont pu être réduites Jusqu'à £ de seconde, mais la méthode ne permettait pas des durées aussi faibles que celle de M. Bouty. D'ailleurs les résultats relatifs au mica sont en parfaite harmonie avec ceux de M. Bouty. Tandis que la cons- tante diélectrique demeure la même pour les divers échantillons, la conductibilité mesurée dans la même direction varie considérablement : avec certains échan- " à tillons, elle présente des variations dans le rapport de 4 à 12, ce qui montre que la conductibilité doit être due simplement aux matières étrangères qui accompagnent le quartz. Ce sont ces impuretés qui doivent subir une olarisation résiduelle progressive : ainsi s’expliquerait ‘allure des courants de charge et de décharge en fonc- tion du temps. Il y aurait alors une liaison complète entre la conductibilité résiduelle et l’électrolyse. On assisterait à la genèse de l’électrolyse. 11 suflirait d’une proportion d’impuretés plus considérable pour obtenir une électrolyse véritable et le passage d’un courant permanent.— M. Violle étudie les lois du rayonnement aux températures élevées. Le problème comporte trois parties : 1°]Ja variation d'énergie totale émise à mesure que la température s'élève; 2° la variation d'intensité absolue d’une radiation déterminée; 3 la variation du rapport de l'énergie correspondant à une radiation dé- terminée à l'énergie totale. La dernière partie a été étudiée par Draper, Ed. Becquerel, M. Garbe ; la pre- mière, par Dulong et Petit, Stéfan et M. Rivière. Rela- tivement à la seconde partie, c'est Ed. Becquerel qui à le premier donné une formule représentant la variation d'énergie d’une radiation déterminée avec la tempéra- ture. M. Violle, reprenant cette étude au moyen du spectrophotomètre, est arrivé à une loi d’accroissement beaucoup moins rapide; l'énergie de la radiation ne croît pas très rapidement quand la température s'élève de plus en plus, les choses se passent presque comme S'il y avait un maximum. M. Violle montre que l’idée d’un tel maximum à une température déterminée pour chaque radiation ne concorde pas avec la formule de M. Le Châtelier qui donne un accroissement indéfini. La formule de M. Le Châtelier correspond à une expo- nentielle, tandis que la loi de M. Violle correspond à une courbe parabolique, tournant sa convexité vers l’axe des intensités croissantes, D'ailleurs la divergence ne commence qu'au delà de 45000, M. Violle montre que la critique faite à ses expériences par M. le Châtelier n’est pas fondée; l'enceinte du creuset n’est certaine- ment pas à une température inférieure au culot de pla- tine en voie de solidification, D'ailleurs des expériences inédites confirment l'allure parabolique de la courbe. D'autre part, il peut se faire que le verre rouge em- ployé par M. Le Châtelier devienne de moins en moins monochromatique à mesure que la température du corps qui rayonne s'élève, — M. Le Châtelier réplique que les verres conservent bien la même nuance, et que, d'autre part, l'égalité de température affirmée par M. Violle entre le creuset et le platine est difficile à prouver, Edgard Haunié. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 15 juin M. d'Ocagne indique une construction simple du point le plus probable donné sur une carte par une série de recoupements non convergents, ce point étant défini celui dont la somme des carrés des distances à ces re- coupements, multipliés par certains coefficients, est mi- nimum, c’est-à-dire celui qui se confond avec le centre de gravité de ses projections sur ces recoupements af- fectées de masses proportionnelles à ces coefficients, — M. Rafy, en faisant usage d’une certaine transfor- mation des formules de Codazzi, établit le criterium qui permet de reconnaître si une surface donnée est applicable sur une surface à courbure moyenne cons- tante quelconque, c’est-à-dire susceptible d'être défor- mée sans déchirure ni duplicature de facon à donner une surface à courbure moyenne constante, L’équa- tion par laquelle se traduit ce criterium n’est inté- grable que lorsque la courbure moyenne est nulle, c'est-à-dire lorsqu'il s’agit d’une surface minima. Cette équation se ramène alors au type bien connu dit équa- tion de Liouville, M. D'OCAGNE,. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 2 juin 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES, — Major Hippisley : Sur les courbes usuelles, — M. J. Larmor : Sur la théorie de l’électrodynamique appliquée au cas de l'excitation des diélectriques par des forces mécaniques naturelles. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — Major Darwin : Sur la méthode d'examen des objectifs photographiques à l'observatoire de Kew. L'objet de cet examen est de permettre à tout le monde d'obtenir des renseignements authentiques sur la valeur d’un objectif pour les usages ordinaires. Les objectifs sont soumis à divers essais au moyen d'un appareil spécialement construit pour cet usage et qu'on appelle la chambre d'essai. Il est inutile de décrire ici les méthodes employées ; cette description n'aurait, en effet, d'intérêt que si on pou- vait donner des détails complets que nous interdit le manque d'espace, — Lord Kelvin : Sur une nouvelle forme de condensateur à air (air-Leyden) et ses appli- cations à la mesure des petites capacités électrosta- tiques. L'appareil décrit par Lord Kelvin fournit, lors- qu'il est en rapport avec un électromètre approprié, un moyen commode de mesurer de petites capacités électro-statiques, celles, par exemple, de faibles lon- gueurs de cäbles. L'instrument se compose de deux pièces métalliques réciproquement isolées, qui consti- tuent les deux systèmes d’un condensateur à air. Les systèmes sont composés de lames parallèles de forme carrée, reliées les unes aux autres par quatre longues tiges de métal qui passent à travers des trous pratiqués aux angles de ces lames. La distance d’une lame à une autre dans le même système est réglée par des pièces annulaires qui s'adaptent exactement aux tiges et qui sont identiques les unes aux autres à tous égards. Les deux systèmes sont disposés de telle sorte que chacune des lames d'un système donné soit intercalée entre deux lames de l’autre système. Dans l'instrument présenté à la société, lun des systèmes était composé de 22 lames, l’autre de 93, ils enfermaient donc à eux deux #4 es- paces pleins d'air, La capacité du condensateur tout entier était environ de 301,4 en mesure électro-statique. Lord Kelvin a constaté que son voltamètre multicellu- laire est celui dont il est le plus commode de se servir avec cet appareil. La capacité du câble peut être déter- minée en termes de la capacité du condensateur en un très court espace de temps. — M. Wright : Sur cer- tains alliages ternaires, Partie VI: Alliages contenant de l'aluminium allié à du plomb ou à du bismuth et à de l’étain ou à de l’argent. Les expériences ont été faites sur des mélanges de plomb (ou de bismuth) employé comme métal lourd immiscible, d'aluminium employé comme métal léger immiscible, et d’étain (ou d'argent) employé comme dissolvant. Un des résultats de ces recherches est de montrer que la composition des al- liages au point critique correspond à un rapport entre les deux métaux immiscibles qui varie dans chaque cas avec la nature du dissolvant. Voici les rapports qui ont été trouvés dans les huit cas suivants : MÉTAUX IMMESCIBLES DISSOLVANTS RAPPORT APPROCHE Plombrétizinc:-c-7#°.. étain PbZn6 Dit à Joudochro argent Hb?Zn Plomb et aluminium... étain Pb? AI7 SM M cap note argent Pb? AI Bismuth et zinc....... étain 3iZn10 DIR MIT EE argent BiZn? Bismuth et aluminium. étain BiAl!0 DM ER M argent BiAl M. V.-H. Veley : Sur les conditions de formation et de décomposition de l'acide nitreux. Il n’y a peut-être pas dans toute la chimie de réactif à qui l’on fasse aussi souvent jouer un rôle dans les diverses transformations que l'acide nitreux, mais dont on sache aussi peu de choses précisément. M. Veley a fait de cet acide une étude très complète; voici les deux conclusions prinei- 460 ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES pales auxquelles il aboutit : 1° le peroxyde d'azote, qui donne à l'acide nitrique la teinte jaune bien connue se forme dans l'acide concentré dès la température de 30 degrés, et dans les acides dilués, à des températures de 100 à 150 degrés, même quand l'acide n’est pas ex- posé au soleil; 2° la réaction entre l’oxyde d’azote et l'acide nitrique peut être regardée comme réversible, c'est-à-dire que : 2A70 + HAz0? LH?0 —3HAz0? pourvu que l'acide soit suffisamment dilué et la tem- pérature suffisamment basse. Dans ces conditions, l'équilibre s'établit entre les masses des acidesnitriques quand le rapport du premier au second est en chiffres ronds comme 9 est à 1. Le rapport réel varie légè- rement dans un sens ou dans l’autre, d’après les con- ditions de l'expérience. Avec des acides plus concen- trés et à des températures plus hautes, les change- ments chimiques qui se produisent sont plus compliqués et la décomposition de l'acide est plus profonde. 3° SCIENCES NATURELLES. — Sir J.-W. Dawson pré- sente un rapport supplémentaire sur l'examen des arbres restés debout et qui contiennent des restes d'animaux que l’on trouve dans les formations carbo- nifères de la Nouvelle-Ecosse, — M. À. Hill : Sur l'Hip- pocampe. L'auteur a pu se procurer deux spécimens de cerveaux de baleines (bottle-nosed whale) de nar- val, de marsouin et de veau marin. Il voulait rechercher en quelle mesure l’hippocampe diffère du type habituel chez les animaux qui sont dépourvus d'odorat ou qui ne sont doués de ce sens qu’à un très faible degré. La région de l’hippocampe a été, dans chacun de ces cerveaux, dé- coupée en une série de tranches, et M. Hill a pu montrer ainsi que, chez l’Hyperoodon et le Monodon, il n’y a pas de Fascia dentata, que chez le Phocaena, cette formation est très rudimentaire, que chez le Phoca, elle est plutôt moins développée que chez l’homme. Il pense que le fait que Fascia dentata, fait complètement défaut chez les animaux qui ne possèdent ni bulbe ni nerfolfactifs et qu'il est plus ou moins développé, suivant la dimen- sion de ces organes, jette quelque lumière sur les fonctions de la région hippocampienne et invite à une nouvelle délimitation de ces diverses parties et à une revision de leur nomenclature. Richard-A. GRERORY, SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 27 mai M. Lodge lit une communication sur l’état actuel de nos connaissances sur les relations entre l’éther et Ja matière : résumé historique. Sur les difficultés soulevées par l’aberration de la lumière, quand le mi- lieu est supposé transporté par la terre sur son orbite, M. Lodge décrit l'expérience du télescope rempli d’eau, indiquée par Boscovitch et exécutée par Klinkerfues, qui fut conduit à conclure que la constante d’aberration dépend du milieu qui remplit le télescope; l'expérience de Klinkerfues, fut répétée par Sir G.B. Airy, mais non confirmée, Des observations astronomiques ne sont pas nécessaires pour déterminer le point de visée, car une source fixe devant un collimateur peut ètre employée avec avantage. Hoek a étudié la question dans cette voie avec les mêmes résultats négatifs. On peut donc conclure que les opéralions d’arpentage ne sont pas affectées par le mouvement terrestre,Ce résultat, néan- moins, ne prouve rien sur l'existence ou la non-exis- tence d’un entrainement de l’éther par la terre, car, puisque la source et le récepteur de la lumière se meuvent ensemble, un effet produit par un tel entrai- nement serait compensé par l’aberration due au mou- vement du récepteur. Parlant de la réfraction, il montre que, si l’éther était stationnaire dans l’espace, le verre et les autres corps terrestres auraient de l’éther qui les pénétrerait, et que la réfraction dans le verre varierait avec la direction dans laquelle l’éther serait entraîné par rapport à lui. Pour voir s'il en est ainsi, Arago place un prisme achromatique sur l'objectif d’une lunette de cercle mural et observe la hauteur des étoiles. Pour faire varier la direction de l’éther entraîné à travers le prisme on observait des étoiles dans différents azimuts ; mais les résultats ne montrent aucun changement appréciable dans la déviation produite par le prisme et due à la direction du mouvement de la terre. Maxwell emploie le spectroscope pour résoudre la même ques- tion. De la lumière provenant d’une croisée de fil éclai- rée traverse une lunette, un prisme, un collimateur est réfléchie de manière à suivre le même chemin, par un miroir : on vise dans la lunette. Des observations faites dans différentes positions de l’instrument ne dénotent aucun changement dans les positions relatives des fils et de leurs images. Mascart a aussi essayé l’expérience avec un dispositif plus simple, mais n’est pas arrivé à déceler aucun changement. Ces observations amenèrent naturellement à penser que l’éther est au repos par rapport à la terre; mais la nature, simple en apparence, de l’aberration, rend cette idée difficile à admettre. Les deux phénomènes sont d'accord avec l'hypothèse de Fresnel, à savoir, que c’est seulement l'excès d’éther que possède la substance sur l’éther de l’espace envi- ronnant, qui se meut avec le corps : car, dans cette hypothèse, les effets d'aberration, de réfraction et d’en- trainement de l’éther se compensent mutuellement. L'idée de Fresnel est établie pratiquement par l’expé- rience bien connue de Fizeau sur l'effet du mouvement de l’eau sur la vitesse de la lumière, et par les résultats obtenus par Michelson. La seule autre théorie qui s’ac- corde avec les résultats expérimentaux est une théorie du Pr J.-J, Thomson, qui admet que la vitesse de la lu- mière dans l'expérience de Fizeau doit être altérée de la demi-vitesse dans le milieu. Pour les milieux dont les indices de réfraction sont V2 les deux théories con- duisent au même résultat, et, comme les indices de substances telles que l’eau ne diffèrent guère de celte valeur, il est difficile de décider entre elles. Regardée à un autre point de vue, l'expérience de Fizeau présente une difficulté, car, comme l’a montré M. Lodge, toute l’eau se meut avec la terre, par suite, la lumière de- vrait être avancée ou retardée suivant la direction dans laquelle elle traverse l’eau. IL est douteux que l'effet existe, mais le résultat n'a jamais été mis en évidence par l'expérience, Il est, par suite, nécessaire de cher- cher si l'effet ne pourrait pas être observé directement, car l'expérience a été tentée avec un appareil interfé- rentiel par Babinet, Hoek, Jamin et Mascart, etn’a donné de résultat dans aucun cas. Il semblerait parsuite que l’é- ther serait « stagnant » c’est-à-dire stationnaire par rap- port à la terre, Mascart a aussi essayé siles anneaux de Newton et le pouvoir rotatoire du quartz sont affectés par l'entraînement de l’éther : le résultat a été négatif. Ces observations sont, néanmoins, également compa- tibles avec l'hypothèse de Fresnel, d’un éther fixe par rapport à la matière, et d’un éther libre dans l’espace qui pénètre toutes les substances; car, suivant cette idée, il n'y a pas plus de mouvement de l’éther dans l'eau que dans le verre, que dans l'air, puisque le temps d'accomplir le tour d’un cyele fermé est indépendant de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 461 la direction dans laquelle la lumière traverse ce con- tour, Le temps de cheminer entre deux points n’est, de la sorte, pas affecté par le mouvement terrestre, comme le prouvent les expériences de Babinet, Hoek et Mas- cart sur les interférences; l’auteur en conclut done que l’éther est un éther stagnant ou a un potentiel de vi- tesse. Dans l’éther en mouvement, il est nécessaire de définir un rayon, et la méthode de Lorentz est la meil- leure, Supposons que CP (fig. 1) représente la vitesse de la lumière (V) dans l’éther au repos, et SC la vitesse de l'éther (v); alors la perturbation issue de Sse transmet tout le long de SP, qui est la direction du rayon, tandis que CP est la normale à l'onde. Dans la figure ci-des- sus, SENS CD UE sin 1 CP V. a constante de l’aberration. La vitesse le long du rayon est SP. Désignant celte vitesse par V' on à : V'= Vcose + v cos0 La marche du rayon est déterminée par le fait que le temps employé à la propagation soit minimum, el la formule B ds LE T'—= — = un minimum A est l'équation du rayon, A et B sont les extrémités, el ds un élément de la trajectoire. Si l’éther est en mou- vement, il faut substituer V' à V et écrire SUR Rd A = ——— — un minimum à V cose + vcos0 Celle intégrale peut s’écrire : " ds cosô vcos( Tcosû ?vu cosû DU ds — — | — ds. V 1— 4? V2(1— a?) 1— à? V2 1—42 Le dernier terme est le seul en développant suivant les puissances croissantes de l’entrainement de l’éther, et il s'annule dans le cas où il y a un potentiel des ; do vitesses; car alors cos 5 = ei où & est le potentiel des cs PB— PA ee À : V2{(1 —02) ne dépend que des points initial et final, et non du chemin suivi. Sices points sont les mêmes, c’est-à-dire si le contour est fermé, l'intégrale devient nulle, ce qui concilie toutes les expériences faites jusqu'ici. On peut admettre néanmoins que si a n’est pas une cons- tante, la question reste ouverte; mais il n'y a pas de raison de supposer que 4 puisse varier dans le même 5 . He + . \ plan horizontal. Si le milieu change, V devient ne et, : : : be pour retrouver le même potentiel des vitesses dans le vitesses, el l’on peut écrir et ainsi sa valeur milieu changé, v doit devenir < qui es i changé, v doit devenir — , ce qui est la loi de Fresnel. Le Pr Lodge montre que la condition relative au potentiel des vitesses renferme la loi de Fresnel comme cas particulier, On peut en général conclure qu'il ne peut exister aucun effet optique de premier ordre dû au mouvement de la terre sous une forme où on puisse le découvrir. Il est toujours compensé par quelque autre. Les quantités du second ordre de gran- deur doivent par conséquent être prises en considéra- tion, De la première équation ci-dessus, il suit que cos e — V1 — «? sin?6, et que la durée de propagation dans l’éther en mouvement est donnée par V1 — œsin26 1 — o? AVR où T est le temps si tout est stationnaire. C'est là, en peu de mots, la théorie de la récente expérience de Michelson. Si la lumière marche par rapport à la di- rection d'entrainement de l’éther de facon que 6— 0, et 5 — 90, La vitesse de propagation dans la direction de l’entrai- nement doit donc différer de la vitesse dans une direc- tion normale à l'entraînement dans Le rapport de V1 — & à 1. Ce point a été très soigneusement étudié par Mi- chelson; mais on n’a rien observé qui approchàt du quart de l'effet théorique. Son résultat négatif semble- rait conclure à un mouvement relatif, même sans rota- tion, et montrer que l’éther est au repos relativement à la surface de la terre, D'un autre côté, l'auteur (M. Lodge) a récemment fait des expériences sur l'in- fluence de la rotation rapide de disques d'acier sur l'éther, expériences qui prouvent que l’éther west pas affecté par le mouvement de la matière située au con- tact d’une quantité égale au -E de la vitesse de la ma- tière. Ces expériences sont en conflit avec l'expérience actuelle, Le professeur Fitzgerald a indiqué un moyen d'éluder la difficulté en supposant que la grosseur des corps est une fonction de leur vitesse à travers l’éther. Revenant aux démonstrations qui ontété faites de la loi de Fresnel, Glazebrook a montré que l « extraden- sité » actuelle de l’éther n'était pas nécessaire à ad- mettre, car si la masse virtuelle est altérée, le même résultat s'ensuit: tout ce qui est nécessaire c’est d'avoir un terme dépendant de laccélération relative de l’éther et de la matière. Dans les idées modernes, l'idée de la surcharge d’éther due à la présence de la malière a besoin d’être corrigée, et les effets de mou- vement relatif observés sont regardés comme les résul- tats de réactions secondaires de la matière sur l’éther. Dans cette conception, l’éther de l’espace ne serait pas du tout affecté par le mouvement de la matière. Dans la théorie des anneaux-tourbillons, pour expliquer la matière, il est naturel d'admettre que l'éther, dans son voisinage, serait affecté par son mouvement sans acqué- rir de mouvement de rotation. Et si un potentiel des vitesses est admis, comme on ne doit rien supposer qui ressemble à la viscosité, les résultats de toutes les expériences d’interférence, de réfraction et d'aberra- tion peuvent être prédits, et la théorie complète est aussi simple que possible. La seule expérience digne de foi qui contredise cette manière de voir est celle de Michelson. L'auteur imagine qu'on peut dans une cer- faine mesure la négliger. En réponse à une question de M. Ayrton, M. Lodge dit que, quand on substitue Pair à l'eau dans l'expérience de Fizeau, on observe rien. On pouvait s’y attendre, car la différence dans les du- rées de propagation par les deux chemins dépend 2 de _— et comme west très voisin de l'unité pour be l'air, l'effet de l'air est trop faible pour être per- ceptible, M. D. J. Lodge dit quedans l'expérience inter- férentielle de Hoek on peut dire que léther en mouve- ment dans l’eau en repos est contrebalancé par celui qui est en mouvement dans l'air au repos ; mais, puis- que le mouvement de l’eau elle-même rompait léqui- libre, c’est que le mouvement de l'air ne donne rien d'appréciable. Le seul genre de mouvement qui pour- rait déranger les effets optiques serait un mouvement tourbillonnaire, et non un simple mouvement d’entraine- ment, Le P' J. V. Jones demande comment l’expé- rience de Fizeau peut s'expliquer dans la théorie de l'éther condensé; car, puisque la vitesse de la matière affecte la vitesse de la lumière, il semble en résulter une condensation dépendant de ladirection. Un simple terme additionnel à la densité ou un coefficient d’ac- célération n'expliquerait pas cela; il semble ÿ avoir 7? 462 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES besoin d'un coefficient d’un terme de la vitesse. La question a été soulevée par Lord Rayleigh qui a montré (sous le titre : « Aberration » Nature, mars 1892) que la vitesse de propagation des ondes dans une corde chargée serait affectée par le déplacement de Ja charge. La question n’est pas parfaitement simple et l’analogie n’est pas complète. La chose dépend en grande partie de la nature de la liaison qu’on exprime par ce mot de charge. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 19 mai M. W. H. Perkin : Rolation magnétique des com- posés d’origine célonique ou qu’on suppose contenir le groupement acétyle. Les recherches de Brühl sur la réfraction de l’acéloacétate d’éthyle l’ont conduit à admettre dans ce corps l'existence d’une fonction céto- nique. L'étude de la rotation magnétique conduit à la même conclusion. L'auteur examine, en outre, au point de vue de la rotation magnétique un grand nombre de composés cétoniques. — M. Henry Armstrong : I. L'origine de la couleur ; composition des nitro-dérivés colorés. Dans une communication antérieure, l’auteur en discutant les relations entre la couleur et la consti- tution chimique arrivait à conclure que, dans le cas des azoiques, des rosanilines, du bleu de méthylène, etc., la couleur est causée par une structure quinonique. Les recherches publiées depuis celte époque confir- ment cette hypothèse. Nietzki a aussi signalé la struc- ture quinonique d'un grand nombre de couleurs sans chercher à en faire une application générale, Les déri- vés nitrés ne rentrent pas dans cette théorie de la couleur ; mais il faut remarquer qu'ils ne sont pas tous colorés ; un grand nombre d’entre eux sont inco- lores quand ils sont parfaitement purs. Le groupe nitrosyle ne suffit donc pas à donner la couleur; il faut, en outre, une structure particulière, Par exemple, le paranitrophénol est incolore, tandis que l’orthoni- trophénol est fortement coloré en jaune. D'autre part, les méthoxynitrobenzines dérivées de l’ortho et du paranitrophénol sont toutes deux incolores. IL faut done attribuer la coloration de l’orthonitrophénol à une structure particulière ; M. Armstrong propose une formule quinonique, l’orthonitrophénol devenant ainsi le quinone-orthonitroxime. — II. Origine de la couleur, — III, La couleur considérée comme preuve des chan- sements isodynamiques. Existence d’acides isodyna- miques. — M. Arthur Ling : Etudes sur les trans- formations isomériques. — Dérivés halogénés de la quinone, — M. William Pope : Forme cristalline des dérivés sodés des acides aniliques substitués. Ces cris- taux appartiennent au système anorthique et présen- tent une grande similitude. — M. Stanley Kipping : Formation d'un hydrocarbure répondant à la formule C8H!2 en partant de l'acide phénylpropionique. — M. R. T. Plimpton : Dérivés mélalliques de l’acéty- lène. L'auteur décrit les dérivés obtenus avec l’argent et le mercure, — M. Augustus Dixon : Les isomères dans les thio-urées substituées. — M. Moritz et Glen- dinning : Note sur l’action des diastases, Les conclu- sions de cette note sont les suivantes : La production d’un état stationnaire dans la transformation de l’ami- don par la diastase ne prouve nullement que l’énergie de la diastase soit épuisée, L'énergie de la diastase « résiduelle » est en réalité très considérable. Cette diastase peut encore transformer jusqu'au point limite des quantités considérables d’amidon rajoutées suc- cessivement. SOCIÈTÉ PHILOSOPHIQUE DE MANCHESTER Séance du 26 avril. La sociélé pourvoil aux vacances causées par la mort des membres honoraires en nommant MM, V.Baeyer, Brioschi, G. Darboux, A. de Candolle, de Mari- gnac, E. du Bois-Reymond, Edison, Hermite, Hoo- ker, F. Klein, A. Marshall, Perkin, F.-A. Walker. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE MANCHESTER Séance du 8 avril M. Ferdinand Fanta : Sur la préparation commer- ciale de l’oxygène, Les procédés pour préparer l’oxy- gène fondés sur celui de Tessié du Motay sont sujets à deux défauts; le mélange de manganate de soude et de soude caustique s’agglomère au lieu de rester à l’état sranuleux et poreux, ou bien il entre en fusion. L'au- teur arrive à se soustraire à ces deux accidents en fai- sant mélanger par des moyens mécaniques du mran- ganate de soude avec une petite quantité d’eau contenant 5 — 10 °/, de soude, et en chauffant le mé- lange d’abord doucement el ensuite dans un creuset au rouge blanc, température à laquelle il ne fond plus après ce traitement. Les réactions qui se produisent d’après l’auteur sont : 10 Na? Mn 0' + Na HO + 10 H20 == 21 Na HO + 5 Mn 0% + OÙ; l’action inverse a lieu en présence de l’azote de l'air. Il est essentiel de sur- chauffer la vapeur d’eau dans la première réaction, et de sécher complètement l'air dans la seconde en le faisant passer sur de la chaux vive; les deux gaz doi- vent atteindre une température au moins égale à celle de la cornue avant d'y pénétrer. Le réglage de l’appa- reil se fait automatiquement; il y a deux séries de cornues semblables, contenant le mélange de manga- nate et de soude, et dans lesquelles on fait arriver l'air et la vapeur à tour de rôle. M. Bowman dit que la température du mélange n’a pas besoin de dépasser 314° Ce, de sorte que les tuyaux en fonte ne se délério- rent pas. Le gaz sortant de l'appareil contient 95 d'oxygène pur. Le mélange chimique ne s’altère pas avec le temps. — MM. Budenberg et Heys : Sur les accidents qui se produisent dans les appareils contenant des gaz à pressions élevées, Les au- teurs ont trouvé que, dans les appareils ordinaires, la pression s'élève dans les jauges Bourdon ins- tantanément jusqu'à son maximum dès qu’on ouvre le robinet de communication. Ceci montre qu'il doit se produire une élévation de température très grande, due 1° au frottement dans les tuyaux et 2° à la compression subite de l’air dans les appareils acces- soires. Pour éviter les accidents il faut : 1° empêcher la présence de toute trace de matière huileuse ou hy- drocarbonée dans les appareils; 2° fermer l’orifice par où sort le gaz par un septum compact et poreux; 3° éviter de se servir de caisses fermées, une pelite fuite à l’intérieur de la caisse pouvant déterminer une explosion ultérieure ; 4°comme précaution additionnelle, rendre les espaces vides dans les appareils accessoires aussi petits que possible. Les fabricants des jauges les essaient souvent à la pompe à huile; ces jauges ne doivent pas servir pour les appareils à haute pression de gaz. Les auteurs appellent lattention sur le fait que les explosions causées par la présence de l'huile produisent leur effet sur une aire de peu d’étendue, et engendrent une température suffisante pour faire fondre le laiton et l'acier; c'est ainsi qu’elles brisent les appareils bien plus facilement que des explosions de mélanges tonnants. — M. Carter Bell a trouvé moins de chlore et d’acide sulfurique dans un échantillon de neige recueillie près d’une fabrique de produits chi- miques, que dans des échantillons provenant du centre de Manchester. — M. Seymour Rothwel a fait des ex- périences qui démontrent, d’une manière concluante que, contrairement à ce qu'on a supposé jusqu'ici, les tissus de coton mouillés et gelés ne s’affaiblissent pas à la suite de celte opération, Ce qui est vrai c’est qu'ils sont fragiles lorsqu'ils sont gelés, mais ceci n’altère pas la force de tension de la fibre. CHRONIQUE 163 Séance du 6 mai M. G. E. Davis a étudié les variations de pouvoir éclairant du gaz de Salford, lequel est égal en moyenne à 15 « candles » (bougies réglementaires) le soir, mais baisse jusqu'à 12 ou 13 pendant le jour, M. New a essayé de se rendre compte de ces irrégula- rités et a trouvé 7 0/0 d'azote en moyenne dans le gaz pris pendant la soirée et jusqu’à 14 0/0 dans des échan- tillons pris pendant la Journée. — M. G. H. Hurst a modifié la forme du viscosimètre dont on se sert dans l'essai des huiles. Il remplace le tube en verre par un vase en cuivre en forme de soucoupe muni d’un orifice que l’on peut fermer à volonté et entouré par un bain- marie, Les résultats obtenus sont plus uniformes que ceux que donne l'appareil ordinaire. Séance du 24 mai M. C. O. Weber : Second mémoire sur les laques. Dans les matières colorantes contenant un groupe sul- foné et un groupe amidé, il est essentiel de neutraliser le groupe sulfoné par du chlorure de baryum avant de teindre les tissus en coton, sinon les teintes sont fugi- tives. Si on mordance les lissus avec du tanin et de l’'émétique, des matières colorantes du genre précité, traitées comme il a été dit, donnent de très belles teintes. Les corps basiques sulfonés sontles seuls qu'on peut traiter ainsi; ceux contenant des groupements acides sont précipités complètement par le chlorure de baryum. — M. Weber : Sur un moyen d'enlever sur les tissus de coton des taches formées de graisse et de fer. L'auteur traite les tissus par un mélange d’une partie de savon à la potasse, d’une partie de glycérine et trois parties d’eau. — M. Davis a confirmé les analyses du gaz de Salford faites par M. New. Il a trouvé dans un échantillon Az — 13,9 0/0,0 — 2,1 0/0; il pense que l'on y a introduit de l'air avec intention. — M. J. A. Wilson : Sur l'huile pour rouge. Il croit que le meilleur moyen d’en déceler les sophistications, c’est la détermination des « valeurs acétyliques » selon le procédé de Benedikt Les méthodes d'analyse usuelles ne donnent pas de résultats. — M, Wilson : Sur le do- sage de l’amidon. Les méthodes en usage donnent des résultats très différents, etiln'ya pas encore de moyen bien satisfaisant de doser ce corps. L'auteur a trouvé que l'inversion au moyen de la diastase est préférable à l'inversion au moyen des acides, et à la méthode alcalimétrique qui est sans valeur, Il est important de commencer par un lavage destiné à enlever les corps tels que le sucre ou les gommes, capables de réduire la dissolution de Fehling. Avec un certain échantillon de farine les chiffres obtenus avant et après ce lavage étaient de 67,2 0/0 et de 56 0/0. On fait digérer 5 grammes du corps pendant 2 heures avec 50 grammes d’éther; on traite de même le résidu avec l'alcool, puis avec de l’eau froide. On chauffe ensuite à une tempé- rature de 68°C dans un verre de Bohème avec de l’eau, en y ajoutant 5 centigrammes de diastase en poudre. On détermine ensuite la densité, le pouvoir rotatoire, et le pouvoir réducteur de la substance. — M. Bell a voulu déterminer l’inflammabilité relative des tissus imprégnés par diverses espèces d'huiles, cette donnée ayant de l'importance pour les compagnies d'assurance. L'auteur prend en général une quantité donnée du tissu, etl'imprègne avec 10 grammes de l'huile en ques- tion. Il l’introduit ensuite dans un cylindre en fer-blanc perforé aux. deux bouts et entouré par un manchon à eau chaude. Il mesure ensuite la température maxi- mum dans le cylindre. Cette température était de 315°C, avec un certain tissu et imprégné avec 8 0/0 d’huile d’o- live, de 236°C avec un tissu teint en gris brun, de 273C avec un tissu teint en brun, de 162 avec un tissu blanc. L'auteur n'a jamais pu déterminer inflammation spon- tanée avec la proportion d'huile employée dans les fa- briques de tissus de laine. M. Bell parle ensuite de analyse des huiles; il pense que la détermination des matières saponifiables suffit pour caractériser l'huile au point de vue des compagnies d'assurance, M. We- ber croit au contraire qu'il faut distinguer entre les fal- sifications d’origine minérale, et les éthers de la cho- lestérine, M. Davis dit que l’on peut provoquer l'inflam- malion spontanée des tissus imprégnés d'huile en les laissant dans un atmosphère d'oxygène, P.-J. Harroc. CHRONIQUE LE COURS D'ANTHROPOLOGIE DU MUSÉUM OUVERTURE DE CE COURS PAR M. HAMY Il y a quelques jours, M. Hamy a ouvert le cours d’Anthropologie : sa première lecon a été entièrement consacrée à la mémoire de l’homme éminent qu'on peut regarder comme le véritable créateur de cet enseigne- ment au Muséum. Tout autre que M. Hamy eût pu, comme lui, signaler dans la carrière de de Quatrefages ces exemples accomplis d'une volonté et d’une énergie qui, mises au service d’aputudes éminentes, ont su briser les obstacles et assurer le triomphe : mais nul n'aurait mieux mis en relief les traits caractéristiques de cette haute intelli- sence, alliée à un grand caractère, de cet homme qui, dans le cours de sa longue existence, n’a pas eu un seul moment de défaillance et qui, dans lâpreté des luttes scientifiques, eut l’insigne et rare bonheur de ne ren- contrer que des contradicteurs et jamais d’ennemis. Jean-Louis Armand de Quatrefages de Bréau naquit le 10 février 1810 dans le Gard, au hameau de Berthe- zène, commune de Vallerangue, en pleines Cévennes : il était fils de Francois de Quatrefages et de Marguerite Cabanes, et sa famille très ancienne appartenait à la re- ligion réformée : dès l’enfance il manifeste un goût ardent pour l’étude : les mathémaliques sont, des diverses branches, celles qui le passionnent le plus. Il est envoyé au collège de Tournon, où il termine ses classes, puis vient à Strasbourgen 1827 et ne tarde pas à obtenir la chaire d'astronomie de la Faculté. Son père voulait qu'il embrassdt la carrière médicale; il obéit sans pourtant délaisser les mathématiques. En 1829, à’àge de vingt ans, il soutient une thèse de docteur ès sciences, ayant pour litre : Théorie d'un coup de canon ; puis il se met avec ardeur à l’étude de la médecine, tout en remplissant les fonctions de préparateur de chimie à la Faculté des Sciences, De tels succès aussi précoces lui avaient conquis une grande influence aux yeux des étudiants de Strasbourc : ceux-ci convinrent qu'un Casino serait fondé et ils nom=- mèrent président leur distingué camarade, Le but de l'Association était de réunir dans une communauté de sentiments toute la jeunesse des universités de France d'Allemagne etde Suisse, et c'était de ce Casino que de- vait s'élancer la bonne parole, Dans le discours inaugural, le jeune président de- mandait des cœurs pour sympathiser avec les idées généreuses et les nobles émotions, et il terminait par cette période enflammée : « Etsi, ce qu'à Dieu ne plaise, un nouveau 25 juillet se levait pour la patrie, si l’autocrate du Nord, vainqueur ensanglanté de la Pologne, déchaïnait contre nous ses hordes sauvages et esclaves, alors, nous quitterions nos salles de lecture, et le Casino, transformé en bataillon sacré, irait, derrière les barricades ou sur les frontières vaincre où mourir pour le maintien des droits de l'homme et du peuple francais L'Association ne devait avoir qu'une existence éphé- mère : la fermentation des jeunes esprits surexcités par AGA CHRONIQUE la Révolution de Juillet était trop violente pour qu'elle pèt prospérer, et le Casino fut dissous. De Quatrefages laissa la politique et revint à ses études médicales. En 1832, à vingt deux ans, il passait sa thèse sur l’extroversion de la vessie. Après un sé- jour limité à Paris et à Montpellier, il s'installa à Tou- use où il fonda le Journal de Médecine et de Chirurgie, le même que celui qui se publie actuellement. En 1835,il prend part à la deuxième session du congrès méridional et c’est là, sans doute, qu'il puise ses inspirations sur la grave question du prolétariat qu’il abordait quarante ans plus tard d’une manière scientifique. La chaire de zoologie étant devenue vacante à la Faculté des Sciences, l'intérim lui en est offert et, quelque modeste que fùt cette position, il n'hésite pas à sacriliersa clientèle, Onluiavaitaussi promis la direction du Jardin des Plantes et, après le doctorat ès sciences, il devait devenir le titulaire de la chaire : la promesse ne fut pas tenue, et de Quatrefages blessé, mais non découragé, démissionna et vint à Paris, Là il s'établit dans un logement modeste comme ses ressources, qui n'étaient guère représentées que par les gains que lui procuraient sa plume et son pinceau : car c'était un peintre d'histoire naturelle, possédant une fraîcheur de tons et une exactitude qui égalent celles qui ont rendu célèbre Alexandre Lesueur : enfin sa collabo- ration à la Revue des Deux Mondes lui permettait d’at- tendre des jours meilleurs. A cette époque, la complication organique des ani- maux inférieurs était un problème resté insoluble pour les naturalistes. Les uns, comme Ehrenberg, leur attribuaient une organisation relativement élevée; les autres, comme Dujardin, les regardaient comme des êtres simples, seulement supérieurs aux Infusoires. De Quatrefages, grâce à ses études médicales, à sa science de l’homme et des animaux, à ses études mi- croscopiques, estimait que la dégradation organique doit comporter des échelons et que la taille reste in- dépendante de la complexité. Il entrevoyait que la so- Jution de ce problème exige l'étude des animaux infé- rieurs de grande dimension, lesquels n'existent que dans les mers et ne peuvent être observés que vivants. C'est alors qu'il entreprend ses explorations suivies sur les divers points du littoral et qui furent si fécondes en résultats; car il découvrit des espèces nouvelles et des types regardés jusque-là comme étrangers à la faune marine, et il put ainsi commencer la série de ses 84 grandes monographies sur la zoologie. Ces travaux lui valurent la chaire d'histoire natu- relle. au lycée Henri IV en 1850, et en 1852, le fauteuil de Savigny à l’Institut. Une place au Muséum ne devait pas tarder à devenir vacante par le passage de Serres à la chaire de Duvernoy. Serres avait bien, dans la chaire d'histoire naturelle, professé l'histoire de l’homme, mais cette partie étail reléguée au second plan. En fait, l'anthropologie at- tendait un représentant sérieux et il y en avait alors deux de haute valeur, de Quatrefages et Gratiolet,. Ce dernier avait l'appui de Chevreul, le premier celui de Milne Edwards, L’Académie des Sciences présenta en tète de la liste de Quatrefages; le ministre ratifia son choix et. en juin 1856, le nouveau professeur commença son cours. Naturaliste avant tout, il procède à lhistoire de l’homme comme il l’eût fait pour tout autre animal ; mais cette histoire est depuis longtemps explorée et il l’envisage bientôt dans la collectivité pour en suivre les modifications diverses. Ayant, depuis, médité sur la question des espèces, il proclame que la base fon- damentale de anthropologie est l'unité spécifique : il n’y a qu'une espèce d'homme et les autres groupes ne sont que des variétés héréditaires, des races en un mot. Ainsi, dès le premier jour, M. de Quatrefages inau- gura un enseignement monogéniste. î Mais l’homme est un être organisé et vivant : il obéit donc aux lois générales des êtres organisés et vivants, et toute doctrine qui l’en distrait -est fausse; d’autre part, le professeur n’oubliera pas que l’homme a des qualités intellectuelles qui lui sont propres, et ce sera un sujet d’études sur lequel son enseignement jettera de vives lumières. En 1860, il entre à la Société d’Anthropologie fondée par Broca avec lequel il conservera toujours les plus amicales relations malgré la divergence de leurs vues : chez les hommes supérieurs, l'amour pour la science est désintéressé, et chacun d’eux n'apporte de passion que pour ce qu'il croit être le vrai et le bien. Broca re- présentait l'Ecole d'Anthrovologie, et Quatrefages le Muséum : il pouvait y ävoir antagonisme dans les doc- trines et cependant leurs représentants restèrent {ou- jours indissolublement unis. Un instant on a pu sen- tir passer quelques nuages, mais ils n’ont pas tardé à se dissiper : ceux qui les ont soufflés sont aujour- d’hui et pour jamais hors d’état de troubler la paix scientifique. On se souvient des débats qui ont eu lieu lors de la découverte de la mâchoire de Moulin-Qui- gnon : M. de Quatrefages y eut le premier rôle et la cause de l'Homme quaternaire fut définitivement gagnée. Le Muséum appportait donc son concours à la doc- trine nouvelle. Chez M. de Quatrefages, le cœur égalait l’intelli- gence. Il accueillait toujours avec bienveillance les travaux des chercheurs qu'il faisait surgir du sein de son audiloire. M. Hamy, qui fut mêlé si directement à sa vie scien- tifique, rapporte un trait de sa haute équité. Au mo- ment de la publication des Crania Ethnica, faite en commun, le professeur écrivit une Préface où il dé- clare que la réalisation de l'ouvrage est restée à bien peu près en entier à la charge de son collaborateur. C’est dans cette remarquable publication qu'on voit la pensée du maître ramenée du côté des races sau- vages et le conduire à une série d'articles sur les Tas- maniens,les archipels mélanésiques, ete.,etc., articles qui ont formé plus tard le livre célèbre : Hommes fos- siles et hommes sauvages. ‘ Ses grands travaux ne le détournaient pas des ques- tions qui avaient toujours ses prédilections : il reve- nait constamment à l’Espèce humaine, qui a eu neuf édi- tions. Là il combat le transformisme, mais avec tant de mesure et d'équité que Darwin lui écrivit ces mots flat- teurs : «J'aime mieux être critiqué par vous que loué par bien d'autres : chaque parole porte le sceau de votre amour pour la vérité. » La réfutation de la théorie darwiniste occupait encore sa pensée quand la mort est venue l'arrêter. M. de Quatrefages était l’orateur favori de toutes les réunions savantes : sa parole mesurée, pleine de verve, toujours aimable, forcait l'admiration même de ses adversaires, et l’un d’eux, Wirchow s'exprime ainsi : « Il nous apparaissait comme la plus pure expression de l’idiome francais cultivé : l'ordonnance de ses dis- cours, l'élégance de ses expressions, en faisaient un des maitres de la parole. » Dans les jours qui ont précédé sa fin, aucun affai- blissement intellectuel apparent ne la faisait présager. Suivant l’heureuse expression de M. Alph. Milne- Edwards, il a passé de la vie active au repos de la tombe. Il eut une longue vie etune douce mort. Aux pompes du langage que peuvent inspirer les grands sujets, mais qui ne conviennent pas à l'éloge d'un savant, dont l'existence fut tout entière consacrée au travail, M. Hamy a préféré la simplicité dans l'exposé des faits, la lucidité dans l’analyse des travaux du maitre, la vérité et l’impartialité dans les jugements : et, lorsqu'après avoir magistralement dérouléles phases d’une vie aussi féconde, il est arrivé au dernier soupir de ce maitre illustre entre tous, il à su faire passer dans l'âme de ses nombreux auditeurs la sincère émo- tion qu'il ressentait si vivement aux souvenirs évoqués d’une des gloires les plus pures de la science. D: Er, MARTIN. Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 3° ANNÉE N° 13 15 JUILLET 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER SADI CARNOT ET LA SCIENCE DE L'ÉNERGIE Le Professeur Tail, en rendant compte, dans le journal anglais Nature, de l'important traité de Thermodynamique de M. Poincaré ', oppose à cet ouvrage l’admirable petit manuel de Maxwell sur la Théorie de la chaleur ?, et critique avec esprit, mais non sans amertume, la méthode mathéma- tique employée par notre savant compatriote dans l'exposé des lois de la Thermodynamique. Ce n’est pas la première fois que le Professeur Tait rompt une lance en faveur de la méthode scientifique; mais il me semble que, dans la cir- constance actuelle, ses critiques, peut-être fon- dées, sont certainement mal dirigées. Le Manuel de Maxwell et le Traité de M. Poin- caré ne sont pas des ouvrages comparables; ils ont été conçus à des points de vue opposés, pour répondre à des besoins différents. Maxwell a fait avant tout, en Thermodynamique, œuvre de vulgarisateur; il a voulu montrer, et il y a pleinement réussi, que la science la plus com- plète et la plus profonde peut s’enseigner sans for- mules, d'une manière profitable aussi bien au sa- vant qu'à l'ignorant. Le traité de M. Poincaré est un résumé de leçons professées à la Sorbonne devant un audi- toire composé de candidats aux grades universi- taires. L'auteur s'est trouvé astreint à suivre un programme déterminé et à faire usage d’une mé- 1 Cours de Physique mathématique. — Thermodynamique. Paris, Georges CARRE, 1892. 2? La Chaleur, leçons élémentaires sur la Thermodynamique et la Dissipation de l'Énergie. Paris, Tianor, 1891. REVUE GENÉRALE DES SCIENCES, 1892, thode que définit suffisamment le titre même du cours dont il est chargé : le cours de physique ma- thématique. M. Poincaré, cependant, loin de sacrifier exclu- sivement à la science dont il est l’un des plus bril- lants représentants, a tout fait pour élargir le cadre de ses leçons et pour sortir, dans la limite conve- nable, de la voie empirique qu'imposent les usages et l'esprit du temps. Il a cherché à définir avec soin les notions fondamentales, température et quantité de chaleur, ce que personne n'avait fait avant lui; ila précisé, autant qu'on le peut, l'é- noncé trop vague du principe de Clausius; dans les applications, auxquelles la moitié de son ou- vrage est consacré, il a séparé nettement les données expérimentales des raisonnements mathé- matiques. Enfin son livre est un modèle de clarté et de sobriété qui vient prendre naturellement place à côté des élégantes lecons de M. Lippmann sur le même sujet ‘, et de l’étincelant traité ? de M. Bertrand où, grâce à son goût littéraire si délicat, l'éminent académicien a su prêter un très grand charme à une matière en elle-même fort aride. Les critiques du professeur d'Édimbourg ne sauraient donc atteindre le professeur de la Sor- bonne; elles me paraissent devoir être reportées plutôt sur nos programmes, sur notre enseigne- ment scientifique, et surtout sur celui de la Phy- sique mathématique. M.Tait renouvelle, à l'adresse i Cours de Thermodynamique, Paris, Georges CARRÉ, 1891. 2 Thermodynamique. Paris, GauraiER-ViLLars, 1887. 466 CG. MOURET. — SADICARNOT ET LA SCIENCE DE L'ÉNERGIE de l'Université française, l'attaque brillante qu'il y a un demi-siècle, son illustre compatriote Sir William Hamillon exécula contre l'Université de Cambridge. Sans doute, à la science ou plutôt à la méthode scientifique qui a recu le nom de Physique mathématique se rattachent de beaux monuments: l'œuvre de Fresnel, celle de Fourier sont la gloire de l’École française, el nous sommes assuré que dans les mains de M. Poincaré et de M: Duhem, parexemple, la méthode analytique inaugurée par Lagrange sera toujours appliquée avee éclat. Mais, il n'est pas donné à tous de savoir allier l'analyse et la physique sans porter préjudice à l'une et à l'autre; les esprits ordinaires, — et ce sontceux-là qu'il faut considérer dans l’enseignement, — ne sa- vent pas détacher d'une expression algébrique sa signification concrèle. Voltaire l’a dit, les mathé- matiques laissentl‘esprit où elles le trouvent; indis- pensables dans les applications des principes aux cas particuliers, elles deviennent funestes comme méthode d'exposition des principes eux-mêmes. De sèches formules ne suffisent pas à traduire complètement la grande diversité des phéno- mènes; ce sont des titres de chapitres, non les chapitres, — des planches, non le texte. Par leur facile accord avec l'hypothèse purement matéria- liste, qui domine encore de nos jours dans l’expli- cation des manifestations diverses de la force, — elles sont le plus formidable obstazle à l'alliance si désirable de la science et d’une saine philoso- phie. Dans tous les cas, elles peuvent enrayer le mou- vement scientifique suivant certaines directions. Il y a même, selon moi, quelque raison de penser que c’est dans l'extension de la méthode analy- tique à des matières qui ne l’exigent pas essen- tiellement, qu'on doit chercher la cause du peu de faveur dont jouit, en France, la doctrine de l'Énergie, puisque là est la principale critique formulée par M. Tait à l'adresse de M. Poin- caré. Et cependant celte Science de l'Énergie, comme sa rivale préférée, la Physique mathématique, est née en France, et elle y est née à une époque dont on peut même préciser la dateexacte : en 1824. C'est, en effet, en 1824 que Sadi Carnot, faisant un pas de plus dans le chemin marqué par l'étape de Newton, publia son immortel opuscule : Ré- Jlexions sur la puissance motrice du feu, où, pour la première fois, sont appliquées à l’élude des rela- tions entre la chaleur et l’élasticité ces méthodes que le grand philosophe anglais avait appliquées à la science du mouvement. Mais la semence jelée par le jeune polylechni- cien de 1824, digne héritier de l’auteur des Prin- cipes fondamentaux de l'équilibre et du mouvemeñt, n'a pu germer sur le sol français. C'est sur le sol étranger que la nouvelle science s’est constituée ; ce sont d’habiles architectes anglais et allemands, Mayer, Joule, Clausius, Rankine, William Thom- son, Helmholtz, qui ont élevé pierre par pierre le vaste édifice de la Thermodynamique moderne, mais qui l'ont fondé sur la base fragile des hypothèses cinétiques, en dehors donc de lin- fluence des idées larges et philosophiques de Saai Carnot. Le sort de ces idées n’a vraiment pas été heu- reux, et notre patriotisme scientifique, si prompt à s'enflammer, est resté assez froid à leur égard ; ce sont les étrangers, c'est Clausius jadis, c’est maintenant Tait qui nous rappellent les mérites exceplionnels de notre compatriote. Passée ina- perçue du vivant de Carnot, la nouvelle doctrine, émise en dehors des académies,est restée longtemps ensevelie, perdue avec le nom même de son auteur dans l'oubli le plus profond !, et elle n’a reparu au jour que pour être critiquée, et, ce qui est pire, mal interprétée. M. H. Le Chatelier ? a été le premier, je crois, à indiquer la signification vérilable et profonde de la doctrine de Carnot, et à insister sur ce que le principe de Carnot, tel qu'il a été formulé par Carnot lui-même, se prête beaucoup plus simple- ment à l’étude des lois de l'équilibre et du mouve- ment chimique que ne le fait le principe de Clausius. Pour ma part, je vais plus loin, et j'estime que c'est à l'influence exercée par les mémoires et par le traité de Clausius sur l’enseignement de la Ther- modynamique en France, qu'il faut attribuer l’a- bandon actuel des idées de Sadi Carnot, et l'ex- clusion, dans la Physique, des méthodes de la Dy- namique générale. | C’est là une assertion qui peut paraitre hardie, élant donné que tout le monde, avec Clausius *, ! A ce propos Lord Kelvin (Sir William Thomson) raconte, dans un récent numéro de la Fortnightly Review que dans un voyage qu'il fit à Paris en 1845, il parcourut toutes les librairies de la Capitale sans pouvoir se procurer l’opuscule de Carnot. « Caino ? lui répondait-on, je ne connais pas cet auteur-là. » Et après que Sir William Thomson s’était évertué à faire comprendre qu’il s'agissait de Carnot et non de Caino, « — Ah! Carrrnot! oui, voici son ouvrage », ct le libraire produisit avec empressement un volume sur quelque ques- tion sociale, par Hippolyte Carnot; mais les Réflexions sur la puissance motrice du feu étaient tout à fait incon- nucs. 2 Sur le second principe de la Thermodynamique et son application aux phénomènes chimiques. Bulletin de la Société chimique de Paris. 3 Théorie mécanique de la chaleur, t. chap. xu, $ 1. I, chap. 111, $ 4, et G. MOURET. — SADI CARNOT ET LA SCIENCE DE L'ÉNERGIE 467 s'accorde à reconnaitre que la théorie de Sadi Carnot est entachée d’une erreur fondamentale. Clausius, nous dit M. Bertrand, a fait preuve de modestie en conservant au théorème qui fait l’objet de ce chapitre, le nom illustre de Carnot. Carnot, dans son admirable opuscule, a étudié seulement le cycle qui porte son nom. Dans l’énoncé des théorèmes rela- tifs à ce cycle, il laisse subsister une fonction incon- nue ; Clausius a transformé l'énoncé, l’a rendu appli- cable à tous les cas, déterminé la fonction et remplacé, dans la démonstration, des hypothèses inacceptables par un postulaltum qui n'a jamais été mis en défaut, Malgré l'opinion courante, malgré l’autorité lé- gitime qui s'attache à la parole de M. Bertrand, malgré la symétrie et la perfection mathématique de l’œuvre de Clausius, je ne saurais pourtant souscrire à cetle appréciation des mérites respec- tifs de Carnot et de Clausius. Certes, si je tends à rendre à Carnot la justice qu'on lui a jusqu'à présent refusée complète, je ne veux point, pour cela, faire descendre Clausius du rang élevé auquel l'estime du monde savant l’a universellement placé; je ne veux nier en rien la grande valeur de ses travaux. Non seulement le regretté professeur de Bonn a su tirer tout le parti possible des principes élablis par Carnot et par Joule, mais encore il en a dégagé, en même temps que Rankine, une notion nouvelle, dont ni l’im- portance, ni la véritable signification ne sont en- core bien comprises par tous, je veux parler de l’entropie. Et surtout Clausius, élargissant le prin- cipe général établi par Carnot, a su énoncer sim- plement, grâce à celte notion nouvelle, la grande loi qui régit les changements irréversibles spon- tanés, et qui trouve son application dans la plu- part des phénomènes naturels. Mais les découvertes de Clausius sont restées pour ainsi dire stériles. Son principe sur l’aug- mentation de l’entropie, qu’il a exprimé par une formule trop brève et sans insister suffisamment sur les conditions de sa validité, est contesté et l’on a cité des expériences qui infirment l’exacti- tude de la formule. Même sa notion d’entropie n’a pas élé accueillie par les expérimentateurs, par ceux qui, sans écarter les spéculations théoriques, les veulent sous une forme permettant l'application immédiate à la science du laboratoire. Pourquoi donc cette notion d’entropie, pourquoi ce principe sur l’entropie sont-ils morts-nés? C'est qu'il leur manque, c’est qu'il manque à toutes les spéculations de Clausius sur la chaleur le principe vivifiant qui anime l’œuvre de Carnot, le principe d'activité, l’idée même du dynamisme. Je ne prélends donc pas seulement, avec M. H. Le Chatelier, reporter à Carnot l'honneur d’avoir énoncé le principe qui porte le nom de REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, Clausius, mais je prétends aussi trouver dans l'œuvre de Carnot, une chose essentielle, une notion fondamentale qui a échappé à Clausius : la notion d'équilibre, dont bien peu, encore aujour- d’hui, tiennent un compte suffisant. Assurément cette notion, envisagée comme notion générale et non plus simplement comme notion de mécanique, existait depuis longtemps à titre d'image et avait même passé dans la langue vulgaire; mais Sadi Carnot a été le premier à la mettre sous une forme scientifique et à l’introduire expressément dans la science de la chaleur et des phénomènes qui s’y rattachent. Si Clausius a négligé la notion de l'équilibre, c'est que, d'une part, tout en prétendant écarter les hypothèses, son esprit était rempli de la croyance à la constitution moléculaire de la ma- tière, et que, d'autre part, il n’a pas saisi l’idée réelle que s’est faite Carnot des causes de produc- tion de la force motrice par la chaleur. Clausius s'est mis en tête, et il aimprégné de celtecroyance tous ceux qui l’ont suivi, que la théorie de Sadi Carnot dépend essentiellement de la conservation du calorique. Il a done été conduit à penser que celte théorie devait être modifiée, et qu'il conve- nait de la fonder sur une nouvelle base pour la mettre d'accord avec le principe de Joule; qu'ainsi, il fallait, de toute nécessité, formuler « un nou- veau principe ». Mais cette interprétation des idées de Carnot est inexacte; la théorie de Carnot est indépendante de la conservation du calorique tout aussi bien que du principe de Joule, et s’il y a lieu de substituer un nouveau principe à cette hypothèse de la con- servalion du calorique, ce principe serait plutôt celui énoncé par Thomson ou par Maxwell, et non pas celui énoncé par Clausius. Mais, avant de jus- tifier ce que j'avance ici, il ne sera peut-être pas inutile de rappeler les énoncés du « nouveau prin- cipe » de Clausius. L'énoncé a d’abord été le suivant : LA CHALEUR NE PEUT PASSER D'ELLE-MËME D'UN CORPS FROID A UN CORPS CHAUD. Reconnaissant ensuite le manque de précision de cette formule, Clausius y substitua ce nouvel énoncé : UNE TRANSMISSION DE CHALEUR D'UN CORPS PLUS FROID A UN CORPS PLUS CHAUD NE PEUT AVOIR LIEU SANS COMPENSATION. Mais le mot « compensaiion » est peut-être encore plus vague que l'expression « d'elle-même»; il fallait l’expliquer. Une compensation, d'après Clausius, est : UNE TRANSMISSION INVERSE DE CHALEUR D'UN CORFS PLUS CHAUD A UN CORPS PLUS FROID, — OU UNE MODIFICATION QUELCONQUE JOUISSANT DE LA PRO- 13* » li es 468 G. MOURET. — SADI CARNOT ET LA SCIENCE DE L'ÉNERGIE PRIÉTÉ DE NE POUVOIR S'EFFECTUER EN SENS INVERSE SANS OCCASIONNER DE SON COTÉ, IMMÉDIATEMENT OÙ MÉ- DIATEMENT, UNE SEMBLABLE TRANSMISSION DE CHALEUR EN SENS CONTRAIRE. Dans tous ces énoncés, même dans le dernier, comme aussi dans les énoncés analogues qu’on y a substitués "poslérieurement, le phénomène de transmission de chaleur entre des corps à des températures différentes est considéré à l’état brut, si je puis m'exprimer ainsi. Or, la grande supério- rité de Carnot est d’avoir aperçu, dès le début, qu'il y a sous ce fait brut un refour ou une tendance au relour vers l'équilibre, d'un système hors d'équi- libre. Pour Clausius le phénomène de lransmission de chaleur n’est rien autre qu'une concomitance de deux changements opposés, un gain et une perte de chaleur; mais Carnot y voit, en plus, un change- menttendant vers un but délerminé ; il a conscience non seulement du changement, mais aussi de sa finalité. Là où aucun changement n'apparait, là où il ny a ni perte ni gain de chaleur, Clausius concelurait à l'absence réelle de tout phénomène. Tout autre est la conception de Carnot; l'équilibre n'est pas une négation pure et simple, une négation absolue; c’est la négalion d'un changement possible, c’est l'opposition de deux forces qui neutralisent leurs effets. Le rôle donc que joue, dans la théorie de Carnot, l'hypothèse de la conservation du calorique, est fortuit, occasionnel. La destruction partielle du calorique, sa destruction tolale, ne changerait rien à l’idée essentielle que Sadi Carnot s’est faite du phénomène de production de la force motrice. À supposer même qu'on ne constatàt entre les deux corps, à des lempéraluves différentes, aucun échange de chaleur, cependant l'explication de Carnot resterait toujours applicable : il suffit qu’à défaut de variation de chaleur, un phénomène quelconque marque le retour vers l'équilibre de tempéralure, par exemple que le corps chaud de- vienne obseur, et que le corps froid devienne lu- mineux. Dans la théorie de Clausius, la produc- tion de force motrice serait alors due à un déplace- ment de lumière: dans la théorie de Carnot, elle est toujours expliquée par un retour vers l’équi- libre. La seule discussion possible de la théorie de Carnot ne peut porter que sur les caractères qui marquent le retour vers l’équilibre, non sur le fait, le principe fondamental. Lorsqu'un système hors d'équilibre est abandonné à lui-même, diverses manifestations s'accomplissent simultanément changements de volume, de température, de cou- leur, perte ou gain de chaleur, ete... Sadi Carnot, au fond, fait abstraclion de ces changements pour ne considérer que le sens du phénomène. Clausius n’aperçoit pas ce sens, puisqu'il n'aperçoit pas le but;ilne voit que l'un des changements connexes, et c'est sur ce changement qu'il édifie son principe. Or si la connexion n’est pas constante, il s'ensuit que ce principe peut, en certain cas, se trouver en défaut. Il Dès le début de son Mémoire, l’idée de Carnot s'affirme nettement. Laproduelion de force motrice, dit-il à plusieurs reprises (pages 5 et 6), est toujours accompagnée d'un ( RÉTABLISSEMENT D'ÉQUILIBRE DU CALORIQUE », et Carnot ajoute (page 6) : (IL NE SUF- FIT PAS, POUR DONNER NAISSANCE A LA PUISSANCE MOTRICE, DE PRODUIRE DE LA CHALEUR, IL FAUT ENCORE SE PRO- CURER DU FROID ; SANS LUI LA CHALEUR SERAIT INUTILE. » La conservation du calorique n’est pas visée expres- sément par Carnot, qui ne l’a considéré qu’à titre de fait lié au rétablissement de l'équilibre. Plus loin (pages 7 et 9), Carnot insiste sur la réciprocité de la connexion entre le travail et la chaleur : « PARTOUT OU IL EXISTE UNE DIFFÉRENCE DE TEMPÉRA- TURE, PARTOUT OU IL PEUT Y AVOIR RÉTABLISSEMENT D'ÉQUILIBRE, IL PEUT Y AVOIR AUSSI PRODUCTION DE PUISSANCE MOTRICE... RÉCIPROQUEMENT, PARTOUT OU L’ON PEUT CONSOMMER DE CETTE PUISSANCE, IL EST POS- SIBLE DE FAIRE NAIÎTRE UNE DIFFÉRENCE DE TEMPÉRA- TURE, IL EST POSSIBLE D'OCCASIONNER UNE RUPTURE D'ÉQUILIBRE DANS LE CALORIQUE. Mais Carnot, après avoir indiqué la possibilité d’une dépendance mutuelle entre le retour vers l'équilibre du calorique et la production de force motrice, ne s'en lient pas là; il précise les condi- tions de cette possibilité. De même que le retour d’un système vers l’équi- libre statique peut s'effectuer sans aucun change- ment extérieur au système, le retour vers l'équi- libre du calorique peut aussi s'effectuer sans production de travail à l'extérieur; c’est le cas de la conduction. Pour que le retour vers l'équilibre devienne une source de travail, il faut qu'il soit contrarié, il faut qu'un agent intervienne pour rétablir l'équilibre à tout moment. Cet agent, qui sert d'intermédiaire pour trans- former en travail extérieur le changement qui s'accomplit dans le système hors d'équilibre ther- mique, doit revenir à son élal initial. IL rem- plit donc lerûle d’une véritable machine, c’est- à-dire qu'il sert à déplacer les énergies, sans en créer ou en absorber lui-même. Ceci posé, Carnot remarque que la proportion de travail produit peut varier, pour une chute donnée de calorique, suivant la manière dont l'opération G. MOURET. — SADI CARNOT ET LA SCIENCE DE L'ÉNERGIE 469 est conduite, et qu’à priori il n’est pas impossible que la nature de l'agent puisse avoir aussi une influence. IL montre alors que, si l'opération est réversible, comme on dit aujourd’hui, le travail produit est maximum et indépendant de la nature de l’agent et de ses transformations. Sadi Carnot, qui, le premier, a introduit la notion importante de la réversibililé, l'a définie rigoureusement, et sur ce point spécial, il dépasse ses successeurs modernes, dont quelques-uns sont encore à se demander : qu'est-ce que la réver- sibilité? Telle que la comprend Carnot, la réversibililé implique et n'implique que deux conditions, savoir : 1° Le maintien de l'équilibre à tout moment de la transformation du système thermique, à l’aide d’an agent extérieur (corps variable, machine ther- mique) qui prend successivement la température de chaque partie du système ; 2° La possibilité, par une transformation inverse, à l’aide du même agent et dans les mêmes condi- lions, de repasser par tous les états successifs d'équilibre, aux mêmes pressions et aux mêmes températures, et de revenir ainsi à l’état inilial du système, les quantités de chaleurs absorbées ou perdues par les éléments de ce système élant exac- tement rendues ou récupérées. Le raisonnement que Sadi Carnot a employé pour prouver que la proportion de travail produit est indépendante de l’agent employé à le produire, est un chef-d'œuvre de simplicité, eu égard surtout à l'importance et à la généralité du résultat. C’est le premier exemple d’un raisonnement de Dyna- mique générale, débarrassé d'un appareil mathé- malique toujours inutile. Je répèle ce raisonne- ment parce que toute la théorie de Carnot s'y trouve condensée. Carnot considère un système hors d'équilibre formé de deux corps À et B à des températures différentes, le corps À élant le plus chaud et le corps B le plus froid. Deux agents différents, tels que la vapeur d’eau et celle d’éther permettront de développer, par le passage d’une même quantité de calorique Q d’un corps dans l’autre, des forces motrices © et &' dont il faut démontrer l'égalité. Employons d’abord la vapeur d’eau à produire la force motrice ©, en faisant passer le calorique Q du corps À sur le corps B; puis profitons de la réversibilité pour employer l’éther, en dépensant la force motrice G, à faire repasser cette quantité de calorique du corps B sur le corps A, et par con-- séquent à ramener le système à son état initial. Il faut alors que la force motrice dépensée ©! dans cetle opération ne soit pas inférieure à la force motrice créée ©, car autrement on devrait admettre que de la force motrice aurait été créée de rien ‘. Cela, nous dit Carnot, est contraire à la nolion qu'on se fait de l'impossibilité du mouvement perpétuel : on ne peut réaliser &UNE CRÉATION INDÉFINIE DE FORCE MOTRICE SANS CONSOMMATION NI DE CALORIQUE NI DE QUELQUE AUTRE AGENT QUE CE SOIT » (page 11). Tel est le raisonnement de Carnot, dont on a contesté souvent la validité en prétendant qu'il repose essentiellement sur une donnée inexacte, la conservation du calorique, qu’en réalité du calorique est détruit et qu'il n’est pas sûr, par conséquent, que le système revienne forcément à sa posilion initiale; alors, prétend-on, ce n'est plus le cas d’invoquer le principe de l’impossi- bilité du mouvement perpétuel. Mais, c'est aller bien vite en besogne, et il suffit d’un instant de réflexion pour se convaincre que la démonstration de ce qu'on appelle la seconde loi de la Thermodynamique ne repose pas sur un seul, mais sur deux principes distincts l’un de l’autre. L'un est l'impossibilité de tirer du travail de rien ; l’autre se trouve nécessairement contenu dans l'hypothèse de la conservation du calorique, aussi bien que dans le principe d'équivalence de Joule (mais n'est pas ce principe) ; en effet, la conclusion à laquelle arrive Carnot étant exacte et son mode de raisonnement étant logique, il faut bien que, dans ses prémisses, il admette plus qu'il n’est né- cessaire, et que l'erreur dont est entachée sa théorie du calorique ne joue aucun rôle essentiel dans le raisonnement. Il n’est d’ailleurs pas dif- ficile de voir que ce principe que Carnot n’a pas énoncé, mais qui est compatible à la fois avec l'hy- pothèse ancienne du calorique et avec la théorie moderne élablie par Joule, doit être le suivant : Dans toute opération réversible, simple ou complexe, un corps À ne peut gagner (ou perdre) une quantité de chaleur Q sans qu'un autre autre corps B ne perde (ou ne gagne) une quantité de chaleur Q". Ce principe a un corollaire important qu’on peut établir à l’aide du mode de raisonnement dû à Carnot. En effet, dans l'opération réversible directe faite avec la vapeur d'eau, nous enlevons au corps À une quantité de chaleur Q et nous portons, d’après le principe en question, une quantité de chaleur Q' sur lecorps B; puis, dans l'opération inverse, faite avec la vapeur d’éther, nous enlevons au corps B cette quantité de chaleur Q', et nous portons sur le corps À une quantité de chaleur Q,. À la suite de cette double opération, le corps B est revenu à son état initial, et par applicalion du même prin- l Par les opérations inverses, on prouverait de même que € ne peut être inférieur à @!, d’où il s’ensuit que € et sont égaux, 470 cipe en question, le corps À qui a fourni la quan- tité de chaleur Q et reçu la quantité Q, doit re- venir à son état initial; il faut donc que les quan- tités Q et Q, soient égales; en d'autres termes, la proportion des chaleurs perdues el gagnées dans une opération réversible simple{ou, complexe est indépen- dante de la nature des agents employés dans les opé- rations !. Les quantités Q et Q' sont donc détermi- nées l'une par l’autre et leur rapport ne dépend que des températures des corps À et B. L'erreur de Carnot a été de croire que ce rapport est égal à l'unité, alors qu’en réalité il est plus grand que l'unité; mais celte erreur ne vicie en aucune manière son raisonnement, lequel repose uniquement, pour ce point, sur la détermination mutuelle des quantités Q et Q', c’est-à-dire sur la constance de leur rapport, quel que soit ce rap- port. En d'autres termes, la démonstration de la se- conde loi de la Thermodynamique est indépen- dante de l'exactitude du principe de Joule. Elle suppose d'ailleurs le principe général énoncé par Carnot; effectivement, quoique nous soyons as- surés qu'à la suite de la seconde opération réver- sible, tout le système est ramené à son état ini- tial, nous ne pouvons conclure à l'égalité des tra- vaux © et ©’ mis en jeu, sans invoquer ce prin- cipe général, que du travail ne peut être créé de rien. L'idée que Sadi Carnot s'est faite de la causalité du phénomène de production de force motrice par la chaleur et le corollaire important qu’il a tiré de son principe ne sont donc pas liés inséparablement à une hypothèse inexacle, et sa manière de voir, quoi qu'en dise Clausius, n’est pas en contradic- tion avec les idées actuelles. Bien au contraire, le fait que Sadi Carnot envisage la marche d’une machine à feu comme un retour vers l'équilibre du calorique, et qu'il généralise par là la notion de 1 Ce corollaire est important, parce que non seulement il fonde la seconde loi de la Thermodynamique, mais aussi parce qu’on peut en tirer directement la définition rationnelle de l'entropie. L’entropie est cette propriété des changements thermiques de se déterminer mutuellement par voie réver- sible ou, pour prendre le langage des géomètres, d’être con- jugués dans un cycle réversible. Il y a égalité d'entropie, quand les deux changements considérés sont respectivement conjugués à un troisième, et en vertu du principe général, deux changements conjugués à un troisième, pris eux-mêmes en sens inverse, sont conjugués entre eux. De là ce corollaire que, dans loute transformation réver- sible, il y a conservation d’entropie. En présentant la notion d’entropie, comme je viens de le faire, dégagée du principe de l’équivalence, de la considéra- tion des températures absolues et de toute formule pure- . d ment conventionnelle, telle que f , la Thermodynamique gagnerait beaucoup en élégance et en simplicité, et pourrait être mise sous une forme aussi logique et aussi concise que les éléments d’Euclide. G. MOURET. — SADI CARNOT ET LA SCIENCE DE L'ÉNERGIE l'équilibre et les principes qui s’y rattachent, au- torise à soutenir qu'il a devancé les auteurs de la théorie moderne de l'Énergie ! et qu'il est le véri- table père dela science dont Youngestle parrain. III La principale cause des difficultés relatives à l'exposé de la seconde loi de la Thermodynamique dérive de ce que, dans l'établissement de cette loi, deux principes sont en jeu, qu'on a rappro- chés, confondus même, el qui sont cependant dis- tincts en tant que principes spécifiques. L'un, énoncé plus haut, que Carnot admet implicite- ment, se trouve contenu dans toutes les hypo- thèses faites au sujet de la chaleur. L'autre, que Carnot énonce explicitement, représente, sous une forme scientifique, la vieille loi métaphy- sique de l'impossibilité du mouvement perpétuel. Le premier de ces principes, auquel me parais- sent se rattacher plus ou moins les énoncés dus à Maxwell, à sir William Thomson et à M. Lipp- mann, règle la transmission réversible de cha- leur, abstraction faite de la connexion entre ce phénomène et la création de puissance motrice. L'autre, que Clausius a eu plus spécialement en vue et qu'il a exprimé sous une forme si impar- faite, a trait à cette connexion même, à la dépen- dance nécessaire mutuelle entre la transmission réversible de chaleur et la production réversible de travail. Le premier principe s'applique à deux systèmes de même espèce, respectivement en équi- libre séparément; le second principe concerne deux systèmes d'espèces différentes, respective- ment hors d'équilibre séparément *?. Mais bornons-nous au second de ces principes, à celui que Carnot a énoncé explicitement. On en sentira mieux le véritable caractère et l’on saisira bien la supériorité de l’énoncé de Carnot sur celui —————————————————— { On a posé parfois, et M. Poincaré entre autres, la question de savoir s’il existe une définition générale de l'Energie. La théorie de Sadi Carnot renferme cette définition, car l’éner- gie en général peut être définie la propriété, capacité ou pouvoir de tout retour vers l'équilibre ou le repos de déter- miner un changement inverse dans le même système ou dans un autre système. 2 L’unet l’autre principe pourraient d’ailleurs être réunis sous un énoncé général qui comprendrait aussi le vrai prin- cipe nouveau établi par Clausius, celui qui a trait aux trans- formations irréversibles des systèmes isolés, solidaires ou continus. Voici cet énoncé : À loute transformation envi- sagée par rapport à l’état d'équilibre ou de repos répond nécessairement au moins une transformation en sens opposé, dans le même système, ou ailleurs, qu'il y ail ou non réver- sibililé. Ce postulat universel aurait pour corollaire le prin- cipe àe Helmholtz sur la conservation de l'énergie, le prin- cipe de Joule sur l’équivalence et le principe de Clausius sur l'entropie. Associé au principe de la dissipation d'énergie, il constituerait la grande loi qui règle les déplacements et les transformations de l'Energie. mt mme. mis te Dé. G. MOURET. — SADI CARNOT ET LA SCIENCE DE L'ÉNERGIE de Clausius, en se dégageant, comme l’a suggéré Carnot (page 12), de la considération de tout phé- nomène particulier, tel qu'un phénomène ther- mique ou mécanique. Ce principe prend alors la forme suivante : Tout système en équilibre ne peut s'éloigner ou tendre à s'éloigner de son état d'équilibre sans qu'un autre syslème reprenne ou tende à reprendre son élat d'équilibre . Tel est, au fond, le postulat de l'im- possibilité du mouvement perpétuel. Avant Carnot on se contentait de poser en principe que du mou- vement ne peut être tiré de rien; Carnot a compris et aexpliqué que par rien, il faut entendre la né- gation d'un retour vers l'équilibre de quelque agent que ce soit. En comparant cet énoncé général et celui de Clausius, on trouvera sans doute que ces énoncés expriment le mème fait, et cela doit être. Les « modifications quelconques » dont il est question dans l'énoncé de Clausius et qui servent à établir une connexion entre deux transmissions ther- miques de sens opposé ne sont autres que des retours vers l'équilibre. Mais on ne peut arriver à cette identification qu'en prêtant à Clausius des idées qu'il n’a pas eues, tout au moins qu'il n’a pas exprimées, ni même fait sentir. Clausius ne voit la compensalion qu'entre deux changements thermiques opposés; les change- ments mécaniques ou tous autres ne jouent plus qu'un rôle accessoire, un rôle d’intermédiaire. Sur la nature de ces changements, sur leur essence, sur leur point de ressemblance générale, Clausius ne s'explique pas. Aussi son principe ne peut maintenant nous paraitre clair, et tel il apparait vraiment, qu'en raison des explications qui pré- cèdent, que parce qu'on voit derrière son énoncé l'énoncé et lesidées de Sadi Carnot. Isolé de ces idées, le principe de Clausius perd une grande partie de sa signification; 1l cesse d’être directement applicable aux phénomènes où la chaleur ne joue aucun rôle, à la production d'électricité par le mouvement, par exemple. Si même la chaleur intervient dans un phéno- mène quelconque, pour peu que ce phénomène ne soit pas très simple, l'application du principe de Clausius devient incertaine et prèle à la dis- cussion. C'est le cas de l'expérience citée par Hirn. Dans ‘ Il est entendu que l'on suppose remplie cette condition qu'en dehors des deux systèmes considérés, tous les systèmes avec lesquels ceux-ci peuvent se trouver en relation ne changent pas, ou s'ils subissent des modifications, reviennent à leur état initial. S'il n’en était pas ainsi, il faudrait pour appliquer le principe, englober les systèmes qui varient dans l’un ou l’autre des systèmes considérés. Carnot a eu bien soin d’insister sur la condition du retour à l'état initial. (Voir spé- cialement note de la page 20 du mémoire de Carnot.) H AT cette expérience, à l’aide d'un foyer à 100° et sans dépenser de travail, on élève à 120° la température d’un gaz primitivement à 0°.Or, d’après le principe de Clausius, on ne peut, dans ces conditions, faire passer de la chaleur d'un corps froid dans un corps chaud, et cependant l’on voit que de la chaleur contenue primitivement dans un corps à 100° se trouve à la fin de l'expérience dans un corps à 120°. Le principe de Clausius paraît incontesta- blement contredit. Clausius répond, il est vrai, que le phénomène d’élévation de chaleur se trouve compensé par une chute de chaleur d'un corps à 100? sur un corps à 0°, mais la réponse paraitra peu convaincante si l’on observe que l'élévation de la chaleur est définitive, tandis que la chute de la chaleur n’est que provisoire. A la fin de l’opéra- tion, on ne peut plus dire que de la chaleur qui était dans un corps à 400° se trouve maintenant dans un corps à 0°. On ne peut sortir de la dif- ficulté qu’en admettant que l'expérience de Hirn ne contredit ni ne viole le principe de Clausius, que ce principe n’a, par conséquent, qu'une portée restreinte et ne possède pas toute la généralité que lui attribue son auteur. Examinons maintenant l'expérience de Hirn à la lumière du principe énoncé par Carnot ‘. Nous voyons de suite que le système, à son état initial, composé de la source à 100° et du gaz à 0°, est un système hors d'équilibre thermique; nous voyons aussi que le système, à son état final, composé de la source à 100° et du gaz à 120°, est encore un système hors d'équilibre thermique; mais rien n'indique à priori que, dans cet état final, le sys- tème soit plus éloigné de son état d'équilibre qu'il ne l'était à l'état initial, et que par conséquent le principe énoncé par Carnot soit contredit. Pour appliquer ce principe, il faut comparer, à ce poin de vue, l'état final et l’état initial, et examiner sous lequel des deux états l'énergie utilisable est la plus grande. Hirn a fait le calcul (page 265, tome 1), et il a trouvé que l'énergie la plus grande est celle possédée par le système à l'état initial. Il résulte de là que le principe énoncé par Carnot se trouve bien vérifié, que l'expérience de Hirn est d'accord avec ce principe. Mais, on le voit, le principe de Clausius ne pouvait faire soupçonner ce que Hirn avait bien compris, c'est qu'il ne suflit pas d'établir qu’il existe deux transformations provisoires opposées, il faut encore montrer que la compensation présente un sens définitif com- patible avec l'absence de tout travail extérieur. 1 Je ne donne pas à ce principe le nom de Carnot, afin d'éviter toute confusion. Dans le langage ordinaire, qu’on ne peut songer à modifier, le principe de Carnot désigne en effet le corollaire connu aussi sous le nom de seconde loi de la Thermodynamique, et non un véritable principe. 472 Avec cette observation sur lexpérience si dis- cutée de Hirn, j'ai terminé ici ma tâche, car je voulais seulement mettre en lumière la portée et le véritable caractère de la doctrine de Sadi Carnot, en prenant pour terme de comparaison l’œuvre la plus achevée qui ait été accomplie après lui sur le continent. A considérer l'esprit quil'inspire, la doctrine de Carnot s'élève bien au-dessus des théories qui l’ont suivie. Si aujourd'hui nous sommes en état de comprendre, pour la plupart, comment les phénomènes naturels s’enchainent mutuelle- ment, de telle sorte qu'un changement ne puisse avoir lieu en un point sans que ce changement soit accompagné d’un changement distinet et opposé en ce point ou ailleurs, c’est parce que Carnot nous à appris à ne tenir compte, dans l'extrême complexité de formes empruntées par les phénomènes, que du rapprochement ou de l'éloignement des systèmes matériels de leur état d'équilibre. Si nous pouvons isoler ces change- ments des changements analogues qui ont lieu par rapport à l’état de repos, c’est parce que Carnot nous a montré la possibilité d'opérer les trans- formalions par voie réversible. Si nous sommes en mesure actuellement d’égaler, de quantifier, de mesurer ces changements, de les abslraire des formes spécifiques qui n'en sont que des accidents et de les unifier sous le nom d'Énergie, c'est parce que Carnot nous a enseigné à appliquer son prin- cipe à une succession de changements simples, opérés directement en sens contraire. Bref, c’est seulement en passant par la considéralion de toutes les notions nouvelles contenues dans l’opuscule de Carnot que nous pouvons saisir la signification D A. AUVARD ET L. TOUVENAINT, — LA PUERPÉRALITÉ profonde de la loi de Conservation de l'Énergie et discerner qu'elle est l'expression du principe mème énoncé par Carnot sous une forme propre à frapper l'esprit, parce qu'elle éveille l’idée de subs- tance, parce qu’elle prête à l'énergie la qualité même qui, pour nous, constitue la réalité objective de la matière, c'est-à-dire la persistance de l’exis- tence dans l'infinie variété des impressions. Quoi qu'il en soit, d’ailleurs, de l'exactitude des généralisations dont je crois la doctrine de Carnot susceptible, et malgré l’imperfection de sa théorie du calorique, je m'estimerai heureux si le lecteur partage avec moi celte conviction que l’œuvre de Sadi Carnot demeure debout, et qu'elle est encore, tout au moins par la méthode, le mo- nument le plus solide élevé à la science de l’Éner- gie. C'est un caractère qu'elle doit à la hauteur de vue, à la largeur de compréhension que révèlent suffisamment les Réflexions sur la puissance motrice du feu. Sans deute, Sadi Carnot a pu largement em prunter à sonpère, qui lui a certainement transmis comme un précieux — et probablement unique — héritage la forte philosophie du xviu° siècle; on ne saurait cependant sans injustice nier les qualités propres de son esprit et son incomparable vigueur de penser. Par l'ampleur et la nouveauté de ses conceptions, Sadi Carnot a incontestable- ment le droit de prendre place dans l’éblouissante pléiade des initiateurs, non loin d’Archimède, de Galilée, de Newton, de tous ceux dont le nom ne se perd jamais dans la mémoire des hommes, et . dont les œuvres constituent la véritable Bible de l'humanité. Georges Mouret, Ingénieur en chef des Ponts et Chaussées. LA PUERPÉRALITÉ Les auteurs sont loin d’être d'accord sur la dé- finition à donner du mot puerpéralité. Introduit dans le langage obstétrical par Flamant, ce mot vient de puerperium, enfantement. Aussi Stolz, dans son article du Nouveau diction- naire de médecine ete chirurgie pratiques, admet-il que l’état puerpéral est l'état dans lequel se trouve une femme qui vient d'accoucher. Et il cite comme autorité Plessmann, l’auteur d’un petitlivre publié en 1798, intitulé la Médecine puerpérale, qui dit que puerperium était employé chez les Romains pour désigner uniquement l'accouchement. Monneret, au concours ouvert en juin 1851 pour une chaire de pathologie interne, ayant à traiter de l’état puerpéral, a considérablement étendu la signification de ce mot. Selon lui, la parturition ne présente qu'une phase de l’état physiologique, qui commence au moment de l’imprégnation, se continue pendant la grossesse, aboutit à la partu- rition et a pour dernier terme le sevrage et le retour des règles. On doit considérer celte succes- sion d'actes comme un seul et même état physio- logique, auquel la dénomination d'état puerpéral convient parfaitement. Allant encore plus loin, M. Tarnier, dans sa thèse inaugurale (1857), veut qu'on y comprenne aussi la menstruation. A quel degré de cette extension progressive de la signification du mot puerpéralité convient-il de s'arrêter ? D A. AUVARD ET L. TOUVENAINT. — LA PUERPÉRALITÉ AT3 Il importe de bien savoir que, depuis le moment | de la conception jusqu'à la fin de l'allaitement, la femme se trouve placée dans un élat physiolo- gique spécial qui modifie le fonctionnement de l'organisme, et qui, au point de vue pathologique, l’expose à des accidents divers. Nous entendrons donc par puerpéralité l’époque qui s'étend de l'imprégnation jusqu'à la fin de l'allai- lement ou jusqu'à trois mois après l'accouchement, si la femme ne nourrit pas. Nous prenons trois mois après l'accouchement, car, de l'avis général, c’est à ce moment environ que l’utérus (muscle et muqueuse) est rendu com- plètement à son état normal. Quand l'allaitement n’a pas lieu, la puerpéralité dure donc une année, quatre trimestres, trois étant consacrés à la gestation, un à la régression de l'utérus. Avec l'allaitement, la durée de la puerpéralité est variable ; elle cesse après le sevrage. Cette longue période, qui crée momentanément une nouvelle vie à la femme, est très intéressante à étudier dans ses traits généraux et dans son reten- tissement sur la physiologie et la pathologie fémi- nines. Nous diviserons cette étude en deux parties : dans la première nous passerons en revue les mo- difications qui surviennent du côté de l'appareil génital ; dans la seconde, celles qui se produisent dans les autres systèmes. Enfin, dans un prochain article, nous exposerons l'hygiène de la puerpéra- lité. 1 MODIFICATIONS DE L'APPAREIL GÉNITAL $S |. État physiologique de la puberté à la ménopause La femme pendant sa vie génitale, c’est-à-dire de la puberté à la ménopause, présente, au point de vue physiologique, trois états absolument dis- tincts : l’état de repos, l'état menstruel, l’état puerpéral. L'état de repos représente l'intervalle entre les menstrualions, en dehors, bien entendu, de la puerpéralité. C’est une période pendant laquelle l'ovaire est ordinairement inactif, ainsi que tous les organes de la zone génitale; les rapports sexuels ne sont qu'un simple incident au milieu de ce calme. Pendant les règles, dont la durée est variable, existe un état spécial qui- place la femme dans des conditions nouvelles. L'influence de la menstrua- tion se fait en effet sentir de différentes manières ; la sensibilité nerveuse est exagérée et les accidents névropathiques sont souvent aggravés à ce mo- ment. L'action des règles sur les diverses maladies générales et locales n’a pas été encore bien étu- diée. Raciborsky s’est occupé de la question; mais, s’il a tracé assez complètement l'influence des di- vers élats pathologiques sur la menstruation, il est resté vague dans la détermination contraire. Il n'en est pas de même pour les affections lo- cales : ovarite, métrite, pelvi-péritonite, dont l’ag- gravation par le processus menstruel est des plus nettement établie. Cette sensibilité nerveuse et génitale, qui existe pendant la menstruation, justifie pleinement la distinction faite entre l’état menstruel et l’état de repos. La femme, durant les règles, est placée dans une condilion d'infériorité physiologique réelle, et demande, pendant cette période, des ménage- ments particuliers, inutiles dans l'intervalle mens- truel. C’est pourquoi certains auteurs ont voulu faire rentrer la menstruation dans la puerpéralité; mais c’est aller (rop loin que d’assimiler complètement ces deux états, et les considérations qu2 nous développerons plus loin au sujet de l’état puer- péral ne pouvant s'appliquer à l’état menstruel, on a là une preuve de la nécessité qu’il y a à établir une distinction. $ ?, Menstruation et Fécondation Avant d'arriver à l’étude de la grossesse, pre- mière étape de la puerpéralilé, il est indispensable d'avoir quelques notions sur la menstruation et la fécondation, qui en sont les préliminaires. On désigne sous le nom de #enstruation un écou- lement de sang, qui se fait périodiquement par les organes génitaux. La mens!ruation, appelée vulgai- rement règles, se compose de deux phénomènes essentiels : 1° l'ovulation; 2° l’écoulement sanguin. Chacun d’eux demande une étude spéciale. L'ovulation est la mise en liberté par l'ovaire d'une cellule, importante par le rôle qu'elle est appelée à jouer ultérieurement, et à laquelle on donne le nom d’ovule. L'ovule mesure comme diamètre de 10 à 20 mil- lièmes de millimètre. Chaque femme possède environ 600.000 ovules, et, comme l’a fait remarquer le savant anatomiste M. Sappey, si tous ces ovules étaient fécondés, un seul ovaire pourrait peupler une ville comme Mar- seille (300.000 habitants) et trois femmes pour-- raient suflire à la population de Paris (4 million 800.000 habitants). L'écoulement sanguin revient périodiquement etle plus souvent tous les vingt-huit jours ; mais l'intervalle qui existe entre deux époques peut varier suivant les femmes ; chez quelques-unes, il 474 D" A. AUVARD ET L. TOUVENAINT. — LA PUERPÉRALITÉ est de trente et même de trente-deux jours; chez d'autres, de vingt-quatre à vingt-cinq jours. Cette hémorragie a lieu pour la première fois à un âge variable, en moyenne à quinze ans, et finit vers quarante-cinq ans. C’est dire que la vie génitale de la femme dure trente ans. Mais on observe des variations fréquentes dans la période d'apparition et de cessation des règles. Comme fait de menstruation précoce, on peut citer le cas de Carus concernant l'observation d’une femme qui, réglée à deux ans, devint grosse à huit ; celui de d’Outrepont, qui observa une fille dont l'écoulement génital périodique commença à neuf mois ; elle avait alors de longs cheveux et les seins très proéminents; et enfin celui de Comarmond, où, chez une enfant de trois mois, les parties géni- tales et les aisselles se garnirent de poils et vers sept mois la menstrualion commença. L'écoulement sanguin peut au contraire persis- ter bien au delà de l’époque habituelle de la mé- nopause. Cornélie, mère des Gracques, fut réglée jusqu’à soixante-seize ans et accoucha à cet âge. Dupeyron a observé des règles jusqu'à quatre- vingt-dix-neuf ans. Mauriceau cite un cas de Schen- kius où les règles avaient persisté jusqu’à l’âge de cent trois ans. La durée de l'écoulement menstruel est le plus communément de trois à six jours. Il est très difficile d'apprécier la quantité de sang perdu à chaque époque menstruelle, mais on peut considérer comme pathologique une quan- tité moindre que 50 grammes ou supérieure à 500 grammes. Le sang s'échappe de la cavité ulérine; à cette époque les vaisseaux si nombreux qui se rendent à l'utérus sont le siège d’une congestion très mar- quée. Quel rapport existe-t-il entre l'ovulation et l’é- coulement sanguin ? Cette question, fort difficile à résoudre, a suscité de nombreuses opinions. Il existe vraisembla- blement un certain degré d'indépendance entre ces deux phénomènes, qui ont néanmoins une parenté étroite. L'ovulation est l’acte essentiel de la menstruation et l'écoulement sanguin en est l'élément accessoire. L’un assure la fécondation, l'autre la prépare. Leur union place la femme dans les conditions les plus favorables à la conception. Étant connus ces faits relatifs à la menstruation, nous pouvons aborder l'étude succincte de la fécon- dation ou conception. La fécondation est l'union des éléments mâle et femelle, dans le but de procréer un nouvel être. Nous avons déjà parlé de l'élément femelle, l'ovule ; il nous faut maintenant dire quelques mots du spermalozoïde, l'élément mâle. Il se compose d'une tête de forme ovalaire, d’une petite tige cylin- drique et d’une queue ondulante, qui va en s’a- mincissant et dont la longueur est de 45 millièmes de millimètre, la longueur totale du spermato- zoïde étant de 55 millièmes de millimètre. Quand on porte sous le microscope une goutte de sperme récemment éjaculé, on aperçoit les spermatozoïdes en grand nombre, circulant avec une vitesse assez grande. En une seconde, le sper- matozoïde franchit sa longueur; il parcourt done 2 à 3 millimètres par minute. Voyons maintenant comment se comportent les deux éléments mâle et femelle vis-à-vis l’un de l’autre. Au moment de la ponte ovulaire, l’ovule est mis en liberté à la surface de l'ovaire; le sper- matozoïde est d'autre part, à la suite du coït, dé- posé à l’orifice exlerne de l'utérus. Les deux éléments progressent l’un vers l’autre et se ren- contrent en un point variable de l'appareil génital de la femme. Dès qu'ils se sont rencontrés, la fécondation est faite, la femme a conçu, la gros- sesse commence. Presque toujours la fécondation a lieu pendant les premiers jours qui suivent la menstruation, plus rarement pendant ceux qui la précèdent. Tou- tefois la conception est possible à toute époque; elle est même possible pendant les règles. $S 3. Grossesse Dès que la fécondation a eu lieu, l’ovule fécondé subit une série de transformations qui vont abou- Lir à la création du fœtus ; simultanément l’orga- nisme maternel éprouve une série de modifications destinées à favoriser le développement de l'œuf. L'ensemble de ces changements constitue la grossesse, qui s'étend de la conception à l’expul- sion de l’œuf. L'ovule fécondé vient se fixer en un point va- riable de la cavité utérine, où il se développe durant les neuf mois que dure la grossesse. Des premières modifications auxquelles la fécon- dalion donne lieu résulte la formation des enve- loppes de l'œuf el du placenta, du cordon et du fœtus. Les enveloppes de l'œuf, au nombre de trois, sont, en allant de la paroi utérine vers le fœtus : la caduque, le chorion et l'amnios. Le placenta, trait d'union entre les circulations maternelle et fœtale, est une sorle de disque charnu et vasculaire terminant par une deses faces le cordon et par l’autre s’accolant à la paroi in- terne de l'utérus. Il mesure vingt centimètres en- viron de diamètre et trois centimètres d'épaisseur vers le centre. Toute la cavité de l’amnios est remplie d'un D“ A. AUVARD ET L. TOUVENAINT. — LA PUERPÉRALITÉ 475 liquide, appelé liquide amniotique, dans lequel flotte le fœtus. Le cordon ombilical est une tige flexible qui réu- nit le placenta au fœtus; sa longueur habituelle est de 50 centimètres; son diamètre est à peu près celui du petit doigt. L’inserlion du cordon a lieu d’une part à l’om- bilic du fœtus, d'autre part à la face interne du placenta. A l’intérieur du cordon se trouvent deux artères el une veine. Le cordon sert de trail d'union entre la mère et le fœtus par l'intermédiaire du placenta ; le sang apporlé au placenta va au fœtus par la veine et en revient par les artères. Le fœtus à terme pèse en moyenne 3 kilogram- mes ; sa longueur esten général de 50 centimètres. Il est pelotonné dans l’intérieur de la cavité uté- rine et sa forme générale est celle d’un ovoïde, dont la grosse extrémité correspond au siège et la petite à la tête. Quand on explore avecle doigt la tête d’un fœtus, on trouve à l’union des os qui la composent des solutions de continuité (sutures et fontanelles), dont l'importance est considérable, car leur connais- sance permet pendant l’aceouchement de diagnos- tiquer la situation et l'orientation de l'extrémité céphalique, qui se présente. Les sulures sont la ligne de réunion de deux os voisins et les fontanelles le confluent de deux ou plusieurs sutures. , Les diamètres de la tête sont des plus impor- lants à connaitre, car, au moment de la sortie de l'enfant, ces divers diamètres doivent s’accommo- der avec les diamètres du bassin maternel et, dans certains cas, quand ceux-ci sont lrop petits, l’ac- couchement est des plus difliciles, quelquefois impossible. Pendant son séjour dans la cavité utérine, l'en- fant reçoit, ainsi que nous l'avons déjà dit, du sang de la mère, grâce au placenta. Dans son parcours placentaire, le sang fœtal, placé au contact du sang maternel, comme il l’est au contact de l’air dans la respiration pulmonaire de l'adulte, se décharge de son acide carbonique et fait provision d'oxygène. Toute cause d’arrêt de la circulation placentaire conduit le fœtus à l’asphyxie. Le placenta est donc pour le fœtus un véritable poumon. La nutrition se fait chez le fœtus par l’intermé- diaire du sang et du liquide amniotique. Le sang se charge au niveau du placenta de tous les éléments nutritifs contenus dans le sang ma- ternel. Abordons maintenant les modifications de l’or- ganisme maternel pendant la grossesse, nous bor- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, nant pour le moment aux modifications du sys- tème génital. La forme générale de l'utérus est celle d’une poire dont la grosse extrémité constitue le corps, la petite le col. Le corps et le col sont réunis par une partie amincie, appelée isthme. Le corps contenant l’œuf et le col s’opposant à sa sortie jouent dans la grossesse un rôle physio- logique essentiellement différent. Examinons d'abord les modifications du corps. Le diamètre vertical mesure environ 1% centi- mètres au troisième mois, 21 au sixième et 35 au neuvième. La capacité de l'utérus, qui est de 2 à 3 centi- mètres cubes à l’état de vacuité, est portée à Æou 5 litres. La forme générale de l’utérus à terme est, comme avant la grossesse, celle d’un ovoide à petite extrémité tournée en bas, ce qui fait com- prendre pourquoi, dans l’accouchement, la tête est la partie qui se présente le plus souvent la pre- mière, Au fur et à mesure que la grossesse avance, l'utérus, augmentant progressivement de volume, monte dans la cavité abdominale et le rapport du fond de l'utérus avec la paroi abdominale est inté- ressent à déterminer, car il sert de point de repère pour l’évaluation approximative de la grossesse. C'est ainsi que vers le milieu de celle-ci le fond alteint l’ombilic, et à terme il se trouve au voisi- nage du creux épigastrique. Quant au col, il est modifié dans sa forme, dans sa situalion, dans son volume, dans sa consis- tance. Ce qui domine, c’est la diminution progres- sive de consistance du col pendant la grossesse. Des modifications analogues, mais d’un autre ordre, s’observent du côté de la vulve, du vagin, du périnée, des annexes de l’utérus, des articula- tions du bassin. La peau de l'abdomen, distendue par l’utérus gran- dissant, présente une série d’éraillures sous-épi- dermiques qui forment autant de petites plaques gaufrées, d'apparence cicatricielle. Ce sont les vergelures. Sur la ligne. médiane de l'abdomen, la peau se pigmente longitudinalement : on observe à ce niveau une véritable ligne brune. Du côté des seins, le mamelon augmenté de volume, érectile et sensible, devient parfois hyper- esthésique et douloureux. Aulour du mamelon on aperçoit deux zones de coloration inégale : l’une, voisine du mamelon, est l’aréole vraie, qui est parsemée de tubercules dits de Montyomery, les- quels s’hypertrophient ; l’autre, aréole secondaire, est une sorte de cercle atténué entourant le pré- cédent. Avant d'aborder ce qui a trait à l'accouchement, 13** 476 il est nécessaire de dire quelques mots de la silua- tion qu'oceupe le fœtus dans la cavité utérine. Pelotonné, ainsi que nous l’avons déjà dit, l'enfant est généralement fléchi : la tête est fléchie sur le tronc, les avant-bras sur les bras, les mains sur les avant-bras, les cuisses sur le tronc, les jambes sur les cuisses, les pieds sur les jambes. En résumé, la formé générale du fœtus est celle d’un oyoïde. Cet ovoïde se subdivise en deux ovoïdes plus petits, qui, pendant l'expulsion, jouent un rôle essentiellement distinct. Ces deux ovoïdes sont représentés, l'un par la tête, l’autre par le trone, auquel sont joints, comme annexes, les membres supérieurs et inférieurs. Or, tout œuf qu'on essaie de faire passer à tra- vers un canal peut le franchir, soit par sa grosse, soit par sa petite extrémité, soitencore de travers. Théoriquement, il y a donc pour tout ovoïde trois présentations : gros bout, petit bout, de travers. Il en est de même pour chacun des ovoides fœætaux. L'ovoiïde céphalique peut, en effet, se présenter : 1° tantôt par sa grosse extrémité (sommet) ; 2° tan- tôt par sa petile extrémité (face); 3° tantôt de tra- vers (front). Il en est de même pour l'ovoide cormique (zopuos, lronc) qui se présente : 1° tantôt par sa grosse extrémité (siège); 2° tantôt par sa petite extrémité (thorax ou épaule); 3° tantôt de travers (lombes et abdomen). De ces diverses présentations, la plus fréquente de beaucoup estcelle du sommet, que l’on observe dix-neuf fois sur vingt accouchements. Quelle est la cause de la présentation? C'est l'accommodalion ou l’adaptation du con- tenu fœtus au contenant utérus, qui régit la silua- tion de l'enfant pendant la grossesse. Comme la forme générale du fœtus est celle d'un ovoïde à grosse extrémité correspondant au siège et la pe- tite à la tête, comme de plus la forme générale de l’ulérus est également celle d’un ovoïde dont la grosse extrémité occupe le fond et la petite le seg- ment inférieur, l'accommodalion veut que le siège du fœtus soit au fond de l'utérus et la tête dans le segment inférieur. Pourquoi donc, dans certains cas, le fœtus se présente-t-il autrement que par le sommet? Cela peut tenir soit à un rétrécissement du bassin, soit à une altération de la forme normale de l'utérus ou du fœlus, soit enfin à une anomalie du côté des annexes ovulaires (insertion vicieuse du placenta, exagération de la quantité du liquide amnictique ou hydramnios, circulaires du cordon autour du cou fœtal). Nous venons de voir ce qu'on entend par présen- tation du fœtus. Or ce dernier, quelle que soit sa présentation, peut, sans en changer, exécuter dans D" A. AUVARD ET L. TOUVENAINT, — LA PUERPÉRALITÉ la cavilé utérine une évolulion, une rotation autour de son axe, et il offrira pendant cette évolution une série de situations nouvelles. C'est à ces situations diverses qu'on a donné le nom de positions. Il importe de distinguer nettement les présenta- tions des positions. La présentalion est constituée par la région fœ- tale qui descend la première. La position est l'orientation du fœtus ou mieux de la région fœtale qui se présente. Afin de dénommer les positions, on a choisi pour chaque présentation un point de repère fœtal et un point de repère maternel; ces derniers ont élé choisis sur le pourtour du bassin. Pour le sommet, le point de repère fœtal est l'occiput ; pour la face et le front, c’est le menton. Pour le siège, c’est le sacrum ; pour le thorax, c'est l’acromion. Ces préliminaires indispensables élant bien ac- quis, arrivons à l'accouchement. $ 4. Accouchement et délivrance, L'accouchement est l'expulsion du fœtus hors de l'organisme maternel. Suivant l’époque de la grossesse à laquelle il a lieu, l'accouchement reçoit des dénominations di- verses : 1° Pendant les six premiers mois : avortement ou fausse-couche ; 2° Pendant les trois derniers mois : accouche- ment prématuré ; 3° Au terme normal : accouchement à terme; 4° Après le terme normal : accouchement re- tardé. L'accouchement se fait généralement en deux temps : Premier temps : expulsion du fœtus, Deuxième lemps : expulsion des annexes. IL y a donc deux accouchements successifs : 1° Accouchement fœtal ou accouchement propre- mentdit; 2° Accouchement annexiel ou délivrance. On comprend sous le nom générique de #avail l'ensemble des phénomènes qui accompagnent l'accouchement, qui le constituent : une femme qui accouche est en travail. Avant d'aller plus loin, voyons quelles sont les causes de l'accouchement. On les divise en causes déterminantes et en causes eflicientes. à La cause efliciente de l'accouchement est la con- traction de l'utérus, aidée à la fin par la contrac- tion des muscles abdominaux. Quelles sont les causes déterminantes? Pour- D" A. AUVARD ET L. TOUVENAINT. — LA PUERPÉRALITÉ 471 quoi l'utérus entre-t-il en contraction à la fin du neuvième mois, époque. du terme normal de la grossesse ? Bien des théories ont été émises à ce propos, mais aucune ne démontre clairement pourquoi ce travail se produit régulièrement au terme normal. De telle sorte que nous ne sommes guère plus avancés qu'au temps d'Avicenne, qui se contentait, comme cause déterminante, de l’inter- vention divine : « Au temps voulu, l'accouchement se fait par la grâce de Dieu. » Ainsi donc, arrivée au terme de sa grossesse, la femme entre en travail et ressent des douleurs. Les contractions utérines sont en effet doulou- reuses ; elles sont, de plus, intermittentes et invo- lontaires. Les douleurs augmentent progressivement d’in- lensité et arrachent à la patiente des cris, plaintes bruyantes, entremélés de paroles de déses- poir. En même temps, la femme perd des glares, sorte de liquide gluant, gélatineux. La contraction de l'utérus amène l'ouverture successive du col, du vagin et de la vulve. Le col commence par s’effacer, puis s’entr'ouvre, se dilate peu à peu jusqu'à permettre le passage de la tête fœtale ; on dit à ce moment que la dila- lation est complète. Par suite de l’ouverture de l’orifice ulérin, une portion de plus en plus grande des membranes ovulaires est mise à nu, constituant ce qu'on ap- pelle la poche des eaux. Cette poche des eaux se rompt à un moment donné, ordinairement quand la dilatation est complète, quelquefois avant; le liquide amniotique s'écoule alors librement au dehors ; l’œuf est ouvert. Sous l'influence des contractions utérines, des mouvements sont imprimés au fœtus, mouvements qui sont destinés à faciliter son expulsion hors des parlies maternelles. La partie fœtale qui se présente descend de plus en plus dans la filière génitale, le périnée se dis- tend, la vulve s’entr'ouvre et bientôt le fœtus est expulsé au dehors. La durée de l'accouchement est très variable; cependant, en moyenne, on peut la fixer à douze heures chez les primipares et à six chez les multi- pares. Quand l'enfant vient de sortir des voies géni- tales, il est encore retenu à la mère par le cordon ombilical; on attend alors quelques instants, puis on coupe le cordon après avoir eu soin d’en faire la ligature. La femme, qui vient de traverser cette phase douloureuse, serait fort aise de goûter alors un re- pos dont elle a grand besoin. Mais il lui reste en- core à expulser les anuexes de l’œuf, le placenta et les membranes, ce qui constitue la délivrance. Au bout d’un temps variable, le placenta se dé- colle et tombe dans le vagin; la femme éprouve un vague besoin de pousser; sous l'influence de quelques efforts d'expulsion, le placenta progresse vers l’orifice vulvaire, apparait à cet orifice et enfin le franchit, entraînant à sa suite les membranes. La femme est délivrée, $ 5. Postpartum, L'utérus est évacué, le postpartum commence ; il sera continué ou non par l’allaitement. Le fait caractéristique de cette période est la blessure génitale, blessure multiple, exposant l’accouchée à l'infection, si l’on ne prend pas de rigoureuses précautions, à cause des nombreuses voies ou- vertes pour la pénétration des microbes. Il faut qu'à l'abri de tout agent infectieux, la nature ait le temps de réparer les traumas nombreux pro- duits par l’accouchement. Le trimestre que dure cette régression utérine comprend deux stades : l’un, pendant lequel on peut suivre l'utérus dans son retrait graduel et qui s'étend de l'accouchement jusqu’à la réapparition de la menstruation (six semaines environ), et l'autre, où le microscope seul révèle l’état incom- plet du retour à l’état normal, latent par consé- quent, et qui va jusqu’à la fin du troisième mois. Cette régression se divise donc en deux périodes à peu près égales : l’une apparente, l’autre la- tente, séparées l’une de l’autre par le retour de couches. Au bout d’un an après la conception, l'utérus est rendu à son état normal. La maternité (sans allaitement) occupe donc une année entière de la vie de la femme. La laclation crée une quatrième et dernière pé- riode à la puerpéralité. L’allaitement commence peu de temps après l'accouchement ; il se confond en partie avec la régression utérine, qui ne paraît pas d’ailleurs influencée d’une manière notable par son existence. L’allaitement dirige toute l’activité génilale du côté des seins. La vie féminine vient, durant cette période, se concentrer dans le fonctionnement de la glande mammaire. Le système génital, qui, chez la femme, encore plus que chez l’homme, joue un rôle considérable et prépondérant dans la vie et dans l’organisation, se subdivise en trois chefs : l'utérus, l’ovaire, la mamelle, qui régissent successivement l’être fémi- nin, le premier pendant la gestation, le second en dehors de la puerpéralilé, le troisième pendant l’allaitement. De telle sorte qu'au point de vue spécial qui nous occupe, la femme, suivant la 478 D'' A. AUVARD ET L. TOUVENAINT. — LA PUERPÉRALITÉ période de sa vie, est tantôt ovarienne, tantôt utérine, tantôt mammaire. Pendant la lactation les organes génitaux se reposent ; la menstruation n'existe plus. Ce calme, survenant après l'orage de la grossesse et surtout de la parturition, est particulièrement favorable au rétablissement complet de ces organes fali- gués ; c'est en cela surtout que la lactation est bienfaisante, c’est pour cela également qu'elle doit être prolongée aussi longtemps que possible, l'enfant et la mère ne pouvant qu'y gagner. $ 6. Pathologie puerpérale. Nous venons de passer en revue les divers phé- nomènes physiologiques qui se succèdent pendant l'état puerpéral, c'est-à-dire depuis la conception jusqu'à la fin de l’allaitement. Durant cette période bien des maladies peuvent atteindre la femme ; l’ensemble de ces maladies constitue la pathologie puerpérale, au sujet de laquelle nous serons brefs. Nous ne parlerons pas des affections générales qui peuvent se montrer au cours de la grossesse aussi bien qu'en dehors et qui n'ont pas de rap- port direct avec l’état puerpéral. Pendant la grossesse, on peut observer des va- rices, des vomissements incoercibles ou de l’albu- minurie. Des varices peuvent apparaître soit aux mem- bres inférieurs, soit aux organes génitaux, soit à l'anus. Ces dilatations veineuses, qui peuvent se rompre et être le point de départ d'hémorragies parfois très sérieuses, s’affaissent ordinairement d’elles-mêmes après l'accouchement. Les vomissements, symptôme banal de la gros- sesse, deviennent parfois graves, étant susceptibles d’altérer la santé générale de la femme. Dans cer- tains cas même, ils résistent à tous les traitements qu’on leur oppose et peuvent entrainer la mort de la parturiente. L'albuminurie n’est pas une maladie, mais un symptôme constitué par la présence de l'albumine dans l’urine. Son importance est considérable dans la puerpéralité, car elle expose la femme à une série d'accès convulsifs, analogues à ceux de l’épilepsie et de la grande hystérie et constituant l’attaque d’éclampsie. Cette affection, qui survient le plus souvent au voisinage de l’accouchement, est toujours sérieuse quand elle n’est pas combaltue à temps, car le quart au moins des éclamptiques succombent. A côté de ces maladies, il faut citer l’sertion vicieuse du placenta, qui expose la femme à des hémorragies parfois mortelles et à des présen- tations ennuyeuses du fœtus. Après l'accouchement, on peut voir survenir, quand toutes les précautions antiseptiques n’ont pas élé absolument bien prises, soit de la septi« cémie (seplicémie aiguë, suppurée ou non, péri- tonite, etc.), soit une phlébite particulière, appelée phleymatia alba dolens. Nous devons enfin, pour être complets, ajouter que, chezcertaines femmes, l'accouchement est fort entravé et même quelquefois rendu impossible par l'existence d’un rétrécissement des diamètres du bassin. Quand ce rétrécissement est trop accen- tué, il ne reste, comme ressource, pour terminer l'accouchement, si la femme est à terme, qu'à sacrifier la vie de l’enfant ou à pratiquer l’opéra- üion césarienne. Dans le cas où l'existence du rétrécissement a élé reconnue avant la fin de la grossesse, ce qui arrive si la femme a été examinée par un médecin pendant le cours de celle-ci, on peut, en provoquant l'accouchement avant le terme et à un moment précis, déterminé exacte- ment, obtenir un enfant vivant sans exposer la mère à une opéralion sérieuse. IT. — MODIFICATIONS EN DEHORS DE L'APPAREIL GÉNITAL Nous avons tracé dans {out ce qui précède un tableau général des phénomènes qui sont liés à la puerpéralité; mais, jusqu'ici, nous nous sommes bornés à l'exposé des modifications spéciales aux organes génitaux. Il nous faut maintenant éludier l'influence qu'exerce la puerpéralité sur les autres appareils de l’organisme. Cette influence, qui est des plus nettes, ainsi que nous. espérons le démontrer, a une importance capitale, et, en passant successive- ment en revue les divers systèmes, nous aurons l'occasion de faire ressortir les modifications im- primées par la puerpéralité. $S 1. Modifications dans les divers systèmes Le système nerveux est presque toujours un des plus influencés. La sensibilité de la femme est exagérée, d’où impressionnabilité plus grande. L'intelligence subit également le contre-coup de la grossesse, et telle femme, spirituelle et vive à l'état normal, devient lourde, somnolente, alors qu’elle est enceinte. : Les allérations de la volonté ne sont pas les moindres, elles sont englobées sous le nom bien connu d'envies. Quelques exemples seront ici plus clairs que toute description : Le D' Hamberger, cité par Sue, rapporte le fait d'une femme enceinte, qui, ayant acheté un plein panier d'œufs au marché, vint trouver son mari et D" A. AUVARD ET L. TOUVENAINT. — LA PUERPÉRALITÉ 419 lui exposa qu’elle était prise du désir irrésistible de lui casser ces œufs sur la figure. Le mari mit une serviette devant sa figure et se laissa faire. Capura cile le cas d’une gestante qui voulait absolument manger l’épaule d’un boulanger qu’elle avait vu en passant, et celui d’une autre femme, dansla mêmesituation, qui ne trouvait pas de plus grand plaisir que d'introduire le bout d’un soufflet dans sa bouche et d’avaler à longs traits le vent qui en sortait. Les envies en d’autres cas peuvent être des perversions de goût. Telle la femme, dont parle M. Charpentier, dont la passion consistait à dévo- rer des bouts de bougie, ou encore le plaisir de celle autre à lécher les murs humides et couverts de salpêtre. Ces aberrations diverses sont dues à un vice de fonctionnement cérébral, produit par la gros- sesse el présentant une certaine analogie avec d’autres troubles viscéraux. Ilest bon de contrarier le moins possible ces envies puerpérales ; le cerveau féminin pendant la gestalion doit être ménagé comme un organe ma- lade. On a prétendu que ces envies, de même que les frayeurs ou vives émotions éprouvées par la femme durant le développement du fœtus, pou- vaient être la cause de malformations; c’est là une simple hypothèse qu'aucun fait positif n’est venu confirmer et à laquelle la science n’ajoute aucune foi. En dehors de ces troubles psychiques, la gros- sesse prédispose à des névralgies diverses et en particulier aux odontalgies, surtout chez les femmes dont les dents sont mauvaises. A cet égard, le dicton populaire : Chaque enfant coûteunedent à sa mère, ne manque pas d’une certaine justesse. Du côté de l'appareil resraloire, les modifications apportées par la puerpéralité sont de deux ordres: mécaniques et chimiques. Pendant la grossesse, la base du thorax s’élargit, en même temps que cette cavité diminue dans son diamètre vertical et son diamètre antéro-postérieur, tandis que le rapport inverse se produit après l'accouchement. Le diaphragme étant refoulé en haut et s’abais- sant moins, le champ respiratoire setrouverétréci, ce que prouve du reste la fréquence plus grande des mouvements respiratoires et la dyspnée, l’es- soufflement, qui se manifestent chez les femmes enceintes à la fin de la grossesse, à la suite du moindre effort. Cette dyspnée diminue dans les derniers jours de la grossesse. Comme modifications chimiques, Andral et Ga- varret ont constaté que, pendant toute la durée de la grossesse, la quantité d'acide carbonique, exhalée par les poumons, va toujours en augmen- tant. Ce n’est pas l'avis de M. Regnard, qui a trouvé juste l'inverse. Les modifications que subit l'appareil circulatoire portent à la fois sur la quantité et la qualité du liquide, ainsi que sur le cœur et les vaisseaux. Les modifications du sang sont au nombre de trois principales : pléthore séreuse ; anémie globulaire (sauf pour les leucocytes) ; diminution des princi- pes solides{(sauf la fibrine). La quantité d’eau composant le sang est notable - ment augmentée, de telle sorte que la masse totale du liquide sanguin est plus grande pendant la grossesse qu'à l’état de vacuité. Il y a donc exagéra- tion de la tension vasculaire, filtration au niveau des capillaires d’une certaine quantité de sérosité qui amène un gonflement généralisé des tissus, sorte d'œdème gravidique surtout manifeste à la face, qui est bouffie, et aux doigts, où les bagues deviennent trop petites et produisent un véritable étranglement. Ce gonflement ne doit pas être con- fondu avec un certain degré d’adipose, qui est, ainsi que nous le verrons plus loin, un résultat fréquent de la puerpéralité. Outre l'infiltration générale des tissus, l’augmen- tation de la masse totale du sang a deux autres effets : 1° prédisposer aux hémorragies (épistaxis, etc.); 2 gèner le fonctionnement de certains orga- nes, en particulier du cœur (hypertrophie, dilata- tion) et du rein (congestion, néphrite, albuminu- rie). Sous l'influence de l'excès de travail qui lui est imposé, le cœur subit pendant la grossesse des modifications importantes. L'hypertrophie car- diaque (cœur gauche) existe, mais n’est pas cons- tante ; quand elle manque, on note la dilatation, surtout marquée au niveau du cœurdroit. L’hyper- trophie et la dilatation peuvent d’ailleurs coïnci- der. L'augmentation de la tension vasculaire a comme résultat, au niveau des artères, des pulsations plus énergiques, plus résistantes (pouls dur) et, au niveau des veines, une tendance à la dilatation dont l’aboutissant fréquent est la production de varices. Le système digestif subit dans son fonction- nement des changements très importants, qui retenlissent d’une facon marquée sur la nutrition. .L’appétit est ordinairement diminué et la diges- tion laborieuse. En outre, les vomissements ou les nausées sont un accident banal de la grossesse, survenant tantôt le matin à jeun, tantôt au milieu des repas ou après eux. La constipation est presque la règle et est due soit à la compression exercée par l’utérus sur le rectum, soit plutôt à une parésie 480 D'" A. AUVARD ET L. TOUVENAINT. — LA PUERPÉRALITÉ réflexe de l'intestin. Nous reviendrons plus loin sur cette question du ralentissement de la nutri- tion et sur lesconséquences qui en dérivent. Du côté du système urinaire, il existe une conges- tion et une gêne circulatoire des reins, prédispo- sant àla néphrite. D'autre part l'utérus par son développement gêne plus ou moins la vessie dans son expansion et amène des changements dans la forme et la situation du réservoir urinaire. Enfin, l'urine subit des modifications qui, comme celles du sang, sont au nombre de trois principales : augmentation de la quantité d’eau; diminution des principes solides (sauf les chlorures) ; appari- tion de principes nouveaux (kyestéine, albumine, glycose). Le squelette éprouve des modifications dans son attitude générale et dans sa nutrition. Par suite du développement du ventre, la femme, pour main- tenir son équilibre, estobligée derenverserla partie supérieure du corps en arrière, d’où lordose de la colonne vertébrale. Cette lordose, donnant une attitude et une démarche spéciales à la femme, permet souvent à un œil exercé de reconnaitre l'existence de la grossesse, en observant la démar- che vue de dos. En outre, chez les femmes dont la grossesse survient de dix-huit à vingt-deux ans, on voit quelquefois, soit avant l'accouchement, soit de préférence après, une augmentation notable de la taille; la puerpéralité semble momentanément exciter le développement osseux. Nous avons déjà indiqué plus haut la modifica- tion que subissait la peau; outre les différents sièges que nous avons signalés, la pigmentalion gravidique peut se faire en divers autres points, notamment au niveau de la face, où elle cons- titue le masque de la grossesse. La nutrition des ongles serait également troublée; ils diminue- raient d'épaisseur, $2?. Modifications dans la nutrition Nous allons maintenant étudier avec plus de détails l'influence de la puerpéralité sur la nutri- tion. Comme on le sait, la nutrition se compose de quatre actes successifs : l'absorption, l’assimila- tion, la désassimilation, l'élimination. La gesta- tion est susceptible de jeter un trouble plus ou moins profond dans chacun de ces actes. L’absorption est gènée par les vomissements, qui parfois deviennent incoercibles,et aussi exception- nellement par la diarrhée. L'assimilation est ralentie, et deux maladies gé- nérales, entièrement liées à ce processus de ra- lentissement, sont aggravées ou produites par la grossesse : la scrofule et l’anémie. La désassimilation est également (roublée, les combustions deviennent incomplètes.On n’observe plus, comme tout à l'heure, un ralentissement de l’assimilation, mais bien de la désassimilation. Tout un nouveau groupe pathologique va en être le résultat : c’est celui qu'on désigne d'habitude sous le nom d'arthritisme, auquel il convient de jondre le diabète et l’ostéomalacie. L'élimination peut aussi être entravée et le ré- sultat est une terrible maladie, souvent mor- telle : l'éclampsie. Donc, ralentissement général de la nutrition, ralentissement de l'absorption, de l'assimilation, de la désassimilation et de l'élimination, telle est la caractéristique de la puerpéralité pendant la période de gestation. Insistons un peu plus spécialement sur les phé- nomènes de désassimilation. Les aliments, après avoir été transformés par la digestion, sont absorbés et pénètrent dans le torrent circulatoire. Une partie se fusionne avec les éléments du corps et forme partie intégrante des tissus ; l’autre continue à circuler dans le sang et n’est utilisée que pour la combustion destinée à entretenir la chaleur du corps humain. Si cette combustion est complète, les trois seuls déchets qui en résultent sont l’urée, l'acide carbo- nique et l’eau. Mais, si elle est incomplète, diffé- rents produits prennent naissance, parmi lesquels nous noterons simplement l’acide urique, l'acide lactique, le sucre, la graisse. Les acides urique et lactique proviennent de l'oxydation incomplète de la substance azotée; la combustion complète produit l’urée. Quant au sucre et à la graisse, ils prennent leur origine soit directementdans les aliments de même nature, soit dans la transformation de la substance azotée. L'excès d'acide lactique peut constituer deux états pathologiques : le rumatisme et l’ostéomalacie. L'excès d'acide urique dans le sang constitue la goulte et son dépôt dans les voies urinaires la gru- velle. Nous arrivons au sujet le plus intéressant, aux effets de l'accumulation de la graisse dans l’éco- nomie, qui conduit à deux manifestations patho- logiques : l’obésité et la lithiase biliaire. La graisse est le combustible accumulé dans dif- férents points de l’économie et mis en réserve pour les besoins de l'oxydation. Quand l'assimilation est plus active que la dé- sassimilation et quand les différents produits absorbés ne sont pas utilisés par les divers or- D" A. AUVARD ET L. TOUVENAINT. — LA PUERPÉRALITÉ 481 ganes de l’économie, ils s’accumuient sous forme de issu adipeux. La graisse est l’épargne de l’économie, mais certains tempéraments poussent cette épargne à l’avarice : l’obésité se trouve ainsi constituée. La graisse, alors qu’elle n’est pas brûlée, s’éli- mine en faible partie par l'urine et en grande partie parle foie sous forme de cholestérine. Or, l'excès de cholestérine dans la bile ef sa précipitation sous forme de calculs, sous l'influence de cet excès même ou du manque relatif des acides biliaires, amènent la formation des calculs et tous les acci- dents de la lithiase biliaire. Nous ne dirons que quelques mots du diabète sucré. L'excès de sucre, c'est-à-dire la glycosurie, peut provenir d’une surabondante production de sucre au niveau du foie ou d’une combustion insuf- fisante au niveau des capillaires sanguins. À ce dernier titre, le diabète, comme lobésité, peut donc être considéré comme une maladie de ralen- tissement de la nutrition. Après avoir parcouru tout le cadre des maladies par retard de la désassimilation et de la combus- tion, nous allons montrer que la grossesse favorise leur apparition etleur évolution, en insistant sur l’obésité. L'obésité a une prédilection marquée pour la femme ; d'après M. Bouchard, elle atteint la femme deux fois plus souvent que l'homme. M. Bouchard a de plus établi nettement les rapports quiexistent entre l’obésité et la gestation. Sur 51 femmes, il a noté l'apparition de l'obésité 17 fois comme con- séquence de la premiere grossesse et 9 fois des grossesses subséquentes. Ce qui démontre que la moitié environ des femmes obèses le deviennent à la suite d’une grossesse et un tiers à la suite de la première grossesse. La gestation a donc dans la production de l’obé- sité l'influence la plus nette; la grossesse est un des principaux facteurs de l’obésité. Le quatrième et dernier stade de la nutrition, l'élimination, se fait par la peau, l'intestin (y compris les glandes qui l'entourent et en particulier le foie), le poumon et les reins. Nous ignorons ce que deviennent pendant la gestation les éliminations cutanées et intestinales. Pour le poumon, ainsique nous l’avons déjà dit, les auteurs ne sont pas d’ac- cord. Nous ne parlerons donc que des reins. L’éli- mination rénale est ralentie. Les chlorures aug- mentent, il est vrai, dans l'urine, mais les phos- phates, les sulfates, l'urée, l'acide urique, la créatine, la créatinine diminuent. Parfois il se produit une véritable intoxication de l’économie par le sang mal épuré; celte intoxication n’est autre que l’éclampsie puerpérale. Après la découverte des rapports de l’éclampsie avec l'albuminurie, ce trouble de la sécrétion ré- nale devint le point dominant, bientôt unique, dans l'explication pathogénique de la maladie. Ce précepte est faux; l’albuminurie en effet n’est pas la cause de l’éclampsie, mais c'est le vice du fonc- tionnement rénal, dont l'albuminurie est un symp- tôme. Aussi l’éclampsie, même d’origine rénale, peut exister avec une faible albuminurie et même en son absence. Pourbien mettre en lumière les troubles que la gestalion amène dans la nutrition, nous allons les résumer dans le tableau suivant : 19 Troubles de l'absorption : a) Vomissements simples et incoercibles. 2e Troubles de l'assimilation : a) Lymphatisme, scrofule ; b) Anémie simple et pernicieuse, 3° Troubles de la désassimilation : a) Rhumatisme ; b) Ostéomalacie ; c) Goutte; d) Gravelle urinaire ; e) Obésité; f) Lithiase biliaire ; g) Diabète. 40 Troubles de l'élimination : a) Eclampsie. Nous serons très brefs sur les modifications nu- tritives amenées par la régression utérine et l’allai- tement. La parturilion, espace court et solennel de la puerpéralité, constitue le trait d'union entre la gestation etles suites de couches, Pendant les quelques instants que dure l’accou- chement, il n’y a guère qu’un acte de la nutrition qui soit profondément modifié, le stade de désassi- milation. Les combustions ralenties de la gros- sesse reprennent toute leur activité d'autrefois et même les dépassent. Cette exagération des com- bustions surcharge le sang des produits excrémen- titiels et expose par conséquent à l’éclampsie. C'est, parmi les maladies précédemment étudiées, la seule à laquelle l'accouchement prédispose d'une façon indiscutable et très marquée. Après l'expulsion de l'œuf, le calme renait, et l'organisme va procéder à la réparation des dé- sordres produits par la grossesse. La période de régression commence ; elle diffère beaucoup sui- vant que l’allaitement a lieu ou est artificiellement supprimé. Quand la femme nourrit son enfant, la fonction mammaire absorbe l’être et imprime une nouvelle modalité aux échanges nutritifs. Si, au contraire, l'allaitement n'a pas lieu, la régression est simple- ment une période de convalescence qui conduit de l'accouchement à l’état physiologique normal, c’est-à-dire au rétablissement de la fonction ova- rienne, de la menstruation. éartisaé Les 482 D': A. AUVARD ET L. TOUVENAINT. — LA PUERPÉRALITÉ Pendant la régression simple, ies différents stades de la nutrition reviennent vraisemblable- ment à leur élat normal, variant d’intensité avec le tempérament de la femme, ou peut-être sont-ils légèrement exagérés. | Pendant l'allaitement, larégression utérine con- tünue el, quoi qu'on en ait dit, il ne semble pas prouvé qu’elle soit modifiée par lui, soit en bien, soit en mal. L’allaitement agit sur la nutrition dans le même sens que la grossesse, quant à ce qui concerne l'assimilation er la désassimilalion, mais en sens vpposé, si l’on considère l’absorption et l’élimina- tion. L'absorption est activée, les nourrices ont d’ha- bitude excellent appétit el jamais de vomisse- ments. L’élimination est également accélérée, d’abord par le fait même de la sécrétion mammaire, puis par les urines qui, outre les éléments habituels, entrainent de nombreuses granulations grais- seuses. L'assimilation est ralentie; aussi les nourrices sont-elles exposées à l’anémie, et parfois à un vé- ritable épuisement. La lactation prédispose aux manifestations de la scrofule et de la tuberculose. La désassimilation est également ralentie, comme pendant la grossesse. En résumé done, la gestation est une cause de ra- lentissement pour les quatre stades de la nutri- tion, et elle expose à l'apparition de toutes les maladies qui peuvent résulter de ces troubles. La régression simplesemble, au contraire, activer tous les stades de la nutrition; elle agit en sens contraire de la gestation et ramène l'organisme à son état normal. L'allaitement, tout en laissant le processus local de la régression s'effectuer normalement, modifie les conditions de la nutrition. L’allaitement semble tenir le milieu entre la gestation et la régression simple; car, de même que la gestation, il ralentit l'assimilation et la désassimilation; mais, contrai- rement à la grossesse et comme la régression simple qu'il accompagne, il favorise l'absorption et l'élimination. Quant à l'obésité, elle trouve une cause produc- trice certaine et puissante dans la grossesse; la lactalion parait agir dans le même sens; la régres- sion simple sans allaitement tendrait au contraire à l’atténuer. Étudions maintenant l'influence de l'obésité sur la puerpéralité. L’obésité est un état pathologique, une maladie. Elle est susceptible d'amener dans l'organisme des troubles divers, etnotamment dans les fonctions génitales. Nous allons passer successivement en revue l’in- : fluence de l’obésilé sur la menstruation, sur la conception, sur la gestation, sur l'accouchement, sur la régression, sur l'allaitement. La plupart des auteurs sont d'accord pour ad- mettre que les femmes obèses, même jeunes, sont peu réglées et souvent pas du tout; certains affir- ment même qu'elles sont communément stériles. Ilest certain qu'il y a du vrai dans cette assertion; mais il ne faudrait pas poser ce fait comme une règle absolue, et, parmi les femmes adipeuses, à côté de celles dont la menstruation est languis- sante, il en est, dans une proportion difficile à déterminer, chez lesquelles les règles sont abso- lument normales. Depuis longtemps on considère l'obésité comme une cause de stérilité; il existe en effet des exem- ples de femmes qui, après une première grossesse, prennent de l’embonpoint, deviennent obèses et n'ont plus d'enfants. Suivent-elles un régime etun traitement appropriés, l’adiposilé disparaissant ou diminuant, une nouvelle grossesse survient. Mais comment l'obésité gène-t-elle la conception? Est-ce par une modification générale de l'individu, par une déchéance de l'organisme, ou au contraire par une influence purement locale sur les organes génitaux ? Il est difficile de conclure, et il est probable que les deux éléments, — général et local, — y entrent chacun pour une part. L'élément général serait représenté par l’anémie, compagne habituelle de l'obésité, et l'élément local par les modifications de l'ovaire et de l'utérus. L'ovaire peut subir, sous l'influence de la poly- sarcie, une véritable infiltration graisseuse; l'ovaire devient obèse comme tout le corps, comme aussi les autres viscères. Cet envahissement ralentit l'activité glandulaire; la ponte ovulaire est géné- talement supprimée; la stérilité en est la consé- quence. L'ulérus a également à souffrir de l'obésité ; tantôt il subit une véritable infiltration graisseuse de ses éléments musculaires, tantôt et plus sou- vent il s’atrophie simplement. Quel que soit le mécanisme par lequel se pro- duit l’infécondité, le fail de son existence, sous l'influence de l'obésité, existe d'une façon positive. Mais une autre question se pose ici: celle de savoir si toute femme obèse est stérile. En d’autres termes, si l'obésité est une cause de stérilité, en est-elle une cause constante et obligée ? Il y a, parmi les femmes, des obèses stériles et des obèses fécondes et celte variabilité d’action de l'adiposilé lient à ce que l'obésité peut, dans certains Cas, accompagner un élat absolument normal quant au fonctionnement viscéral et, en particulier, quant à celui des organes génilaux, ‘A. HELD. — DÉCOUVERTE D'UN NOUVEL ÉLÉMENT : LE MASRIUM tandis que dans d’autres, au contraire, elle est | greffée sur un état pathologique. Dans l'obésité, c’est la déchéance organique qu'il faut améliorer ou guérir si l’on veut remé- dier à la stérilité. En fortifiant les femmes obèses, on les rend aptes à la fécondation ; l’amaigrisse- ment n’est qu'une condition accessoire. L'obésité semble d’autre part avoir une influence néfaste sur la grossesse ; elle prédispose à l'avor- tement. Il est des femmes qui ont une série d’avor- tements successifs, que l’on ne peut expliquer que par l’existence de l'obésité. Nous arrivons enfin à l’accouchement. L’obésité constitue une gêne très considérable pour la parturiente et pour l'accoucheur. Pour l’accoucheur, parce qu'à travers cette couche graisseuse le diagnostic devient singulière- ment difficile; l'utérus devient en quelque sorte inaccessible elle médecin se trouve parfois dans un grand embarras pour pratiquer l'exploration. La gène n’est pas seulement pour l’accoucheur, mais aussi pour la parturiente. L’accommodation de l’enfant se fait mal, et, si la grossesse n’est pas surveillée, les présentations vicieuses ne seront pas rares. Pendant l'accouchement, la période de dilata- tion est ralentie. L'expulsion est également entra- vée et l’on est souvent obligé de recourir au forceps. La difficulté de l’expulsion semble tenir à une double cause : d'abord à la faiblesse de la contraclion utéro-abdominale, et, en outre, à l’obstacle que la présence de la graisse crée sur le chemin du fœtus. Enfin l'obésité maternelle peut encore rendre difficile l'accouchement d’une manière assez inat- tendue, par l'obésité même du fœtus. Chez les femmes obèses, l'enfant prend en effet un déve- loppement supérieur à la moyenne : il est même parfois véritablement obèse. 483 L'obésité influe-t-elle en bien ou en mal sur la régression utérine ? À priori il semble que l’obé- sité doive être une entrave pour la régression locale et générale; mais c’est là une simple hypo- thèse vraisemblable, qui a besoin d’être con- firmée. Mais ce qu'on peut affirmer, c'est que, chez les femmes obèses el en particulier chez celles qui le sont devenues pendant leur grossesse, il faut redouter plus que chez toute autre la septicémie puerpérale; quand elle se déclare, cette septicémie prend souvent, dans ces circonstances, des allures graves el rapidement mortelles par promple géné- ralisation de l'infection ; il faut également redou- ter l’éclampsie, non seulement comme fréquence, mais aussi comme gravité de pronostic. Il nous reste, pour terminer ce qui a trait à l’o- bésité, à examiner l'influence qu'elle exerce sur l'allaitement. Une opinion assez généralement acceptée est que les femmes obèses sont mauvaises nourrices. En réalité elles sont aussi capables d’al- laiter leur enfant que les femmes maigres ou d’embonpoint normal. Une nourrice se juge sur- tout à ses seins. Or les seins ne s’apprécient pas à la vue, — à la facon des artistes qui voient dans leur fermeté et leur résistance aux lois de la pesanteur le signe de la beauté, — mais à l’aide du palper. Ce sont les doigts qui, fouillant le contenu mammaire, indi- quent à l’accoucheur si la glande est bien déve- loppée, bien fournie, et pourront faire penser que telle femme sera bonne ou mauvaise nour- rice. Quelle que soit la quantité de graisse, quand la glande est bonne et bien développée, la sécrétion lactée se fera bien; sinon, elle sera pauvre, incom- plète. D' A. Auvard, Accoucheur des Hôpitaux. D’ L. Touvenaint, Lauréat de l'Académie de Médecine. et DÉCOUVERTE D'UN NOUVEL ÉLÉMENT : LE MASRIUM ‘ Dans le courant des années 1890 et 1891,S. E. Johnson Pacha avait recueilli dans le lit, desséché { La découverte, qui vient d’être annoncée, du Masrium intéresse trop la chimie pour que, malgré la singularité des propriétés attribuées à ce corps, nous négligions d’attirer sur lui l’attention du lecteur. Il convient, cependant, croyons- nous, de faire remarquer combien étranges semblent les combinaisons du nouvel élément : d’une part, il donnerait une sorte d’alun, et, d'autre part, offrirait les propriétés des métaux alcalino-terreux et du zinc. Si l'on est vraiment en depuis longtemps, d'un cours d’eau de la haute Égypte, quelques échantillons d'un alun fibreux qui lui avait paru présenter quelques caractères particuliers. Il est fait mention dans l’histoire, et à une dale présence, non d'un mélange, mais d’un corps simple, le fait serait d’une importance considérable pour la philosophie chimique. (Note de la Direction.) 481 A. HELD. — DÉCOUVERTE D'UN NOUVEL ÉLÉMENT : LE MASRIUM À ur eee RE des plus reculées, de cette rivière desséchée que les indigènes de la région désignent aujourd'hui sous le nom de « Bahr-bela-mà » ou « Rivière sans eau ». Il existe encore çà et là, sur le trajet primitif de ce cours d’eau, de petits lacs dont les eaux, fortement minéralisées, sont réputées pour leurs propriétés euratives. Les échantillons recueillis par Johnson Pacha furent remis à MM. H. Droop Richmond et D' Hus- sein Off, chimistes du laboratoire khédivial du Caire, qui, à la suite d’une analyse effectuée sur une faible quantité du minéral, y trouvèrent des quantités variant de 1,02 à 3,63 pour cent de cobalt, métal dont la présence n’avait encore jamais été signalée en Égypte ‘. A la demande du concessionnaire de ce gise- ment, ces chimistes s'attachèrent, en opérant sur de grandes quantités de minerai, à en extraire le cobalt et, au cours de leurs recherches, ils consta- tèrent, outre la présence du fer, de l'aluminium, du cobalt et du manganèse, la présence, en petile quantité, d'un autre oxyde, dont les propriétés dif- féraient beaucoup, sur certains points, de celles des autres oxydes métalliques connus. C’est en traitant la solution aqueuse du minéral, après addition d’acétate de soude, par un courant d'hydrogène sulfuré, que les auteurs observèrent la production d’un précipité blanc gélatineux, avant celle des précipités noirs des sulfures de cobalt et de fer. Ce sulfure est celui d'un nouveau métal qui a été appelé Masrium du nom arabe de l'Égypte (Masr); le minerai d’où il a été extrait fut appelé Masrite. Le symbole chimique adopté pour cet élément est Ms. D’après les analyses faites par MM. Droop Rich- mond et Hussein Off, la composition de la Masrite correspondrait à la formule : (AI, Fe)205, (Ms, Mn, Co, Fe) 0,4S05 + 20H20. La proportion d'oxyde de Masrium que renferme la Masrite est très faible (0,20 pour cent). La purification du produit isolé par l’action de l'hydrogène sulfuré sur la solution acétique du minerai se fait de la façon suivante : le précipité blanc du sulfure obtenu, comme il vient d’être dit, est recueilli avant que ne se précipitent le cobalt et le fer. On le lave abondamment à l’eau, puis à l'acide chlorhydrique étendu, et on le dissout dans l'eau régale. Cette dissolution est évaporée pour 1 Journal of the Chemical Soc., 305, p. 491. P chasser l'excès d'acide, et le résidu repris par de l'eau légèrement acidulée par de l'acide chlorhy- drique; on sépare par filtration un peu de sulfate de chaux qui ne se dissout pas, et on précipite la solution filtrée par l'ammoniaque. L'hydrate ainsi obtenu est lavé soigneusement, redissous dans un léger excès d'acide sulfurique étendu, et la solution, concentrée et additionnée de son volume d'alcool à 95°, est abandonnée à la cristallisation. Une seconde cristallisation dans de l'alcool à 50° fournit des cristaux à peu près purs. Pour débarrasser le produit des dernières traces de fer qu’il peut renfermer, on précipite sa solu- tion aqueuse par un excès de soude, qui redissout l'oxyde de Masrium; on sépare l’oxyde de fer par filtration, et on reprécipite l’oxyde de Masrium de sa solution alcaline par addition de chlorure am- monique. Après lavage et dissolution dans l’acide chlorhy- drique, on renouvelle le traitement à la soude et au chlorhydrate d’ammoniaque. L'oxyde ainsi obtenu est absolument pur; après lavages suffisants, on le dissout à saturation dans l'acide chlorhydrique. Cette solution est acide au papier de tournesol, et neutre à l’'orangé de mé- thyle. IL La détermination, tout au moins approximative, du poids atomique du Masrium a été faite de la façon suivante : 1° Un poids connu de chlorure de Masrium a été précipité par l’ammoniaque, et le précipité lavé, séché, calciné, a été pesé; 92° Une seconde portion a été précipitée par le phosphate de soude et d’ammoniaque, et le phos- phate obtenu pesé après calcination ; 3° Dans une troisième portion on a dosé le chlore par les procédés habituels !; 4 Enfin une assez grande quantité de chlorure a été précipitée par l’oxalate d’ammoniaque qui fournit un précipité insoluble dans les mêmes con- ditions que l’oxalate de calcium. Cet oxalate a servi à faire le dosage de l'acide oxalique de l’eau et de l’oxyde de Masrium. Dans cette dernière opération la moyenne des résultats obtenus a été de : Résidu de la calcination (oxyde)......... 55.75 Acide oxalique anhydre.................. 15.85 Patent Ciepeeeneeee 31:21 102.87 © ‘ Pour ces trois premières opérations les résultats numé- riques publiés par les auteurs sont incomplets ou insuffisants : ils ne donnent aucun chiffre pour l'analyse du phosphate, et pour les autres, ils ont négligé d'indiquer les quantités de substance employée et le pour cent obtenu. Il nous a paru inutile de relater ces résultats. A. HELD. — DÉCOUVERTE D'UN NOUVEL ÉLÉMENT : LE MASRIUM 485 D’après l’ensemble de ces résultats, on peut at- tribuer à l’oxyde de Masriumle nombre 122 comme équivalent, soit 114 pour le métal, et en admettant pour celui-ci la bivalence, son poids atomique serait de 228. Or le système périodique de Newlands et Men- delejeff prévoit l'existence d’un élément dont le poids atomique serait 225 dans la famille du glu- cinium, calcium, strontium, baryum. III Le tableau ci-dessous des principales réactions des sels de Masrium permettra de se rendre compte des analogies qui existent entre ce métal et le glucinium d’une part, le calcium d'autre part, tout au moins en ce qui concerne l’oxalate. On pourra en même temps constater certaines propriétés communes aux composés du zinc: RÉACTIFS RÉACTIONS Soudo caustique........... Précipité blanc, soluble dans un excès du réaclif. Ammoniaque......... ..... Précipité blanc, insoluble dans un excès. Précipité blanc, insoluble dans un excès même à chaud. Rien dans une solution neutre ou acide; en solution acé- tique, précipité blanc, gélati- neux, soluble dans H CI con- centré, insoluble dans l'acide acétique. Précipité blanc, gélatineux, in- soluble dans un excès. Précipité blanc, gélatineux, in- soluble dans un excès. Précipité blanc, insoluble dans un excès, soluble dans l'acide acétique, et un excès de chlo- rure de Masrium. Précipité blanc, insoluble dans un excès. Ferrocyanure de potassium. Précipité blanc, insoluble dans un excès de réactif, soluble dans un excès de chlorure de Masrium. Rien. Carbonate d’ammoniaque.. Hydrogène sulfuré ........ Phosphate d'ammoniaque.. Ferricyanure de potassium, Chromate de potasse....... excès, soluble dans un excès de chlorure de Masrium. Précipité blanc, insoluble dans excès, soluble dans un excès du chlorure. Tartrate de potasse ct de Précipité blanc, soluble dans Sonloncéoousdonvedossdue un excès de réactif; lammo- niaque et la soude ne préci- pitent pas cette dissolution. Ajouté à une solution concen- trée et chaude, donne un pré- cipité blanc : le liquide filtré après ébullition ne cristallise pas par refroidissement. L’am- moniaque n’y produit qu’un léger louche, et après évapo- ration on ne trouve au micros- Cyanure de potassium..... cope aucun cristal cubique ou octaédrique dans le résidu. Précipité blanc à chaud, se redis- solvant par refroidissement. Acétate de soude.......... Chauffé avec du nitrate de cobalt, l’oxyde donne une coloration bleuâtre faible. Après calcination, l’oxyde augmente de poids quand on le laisse exposé à l'air; mais, chauffé pendant longtemps dans un courant d'hydrogène, il ne perd pas de son poids. Toutes les tentatives faites pour isoler le métal de ses combinaisons sont jusqu'à présent restées infructueuses ; ni la fusion avec le sodium sous une couche de chlorure de sodium, ni l’électrolyse de la solution alcaline de tartrate n’ont donné de résultats, IV On ne connait encore qu'un seul oxyde du Mas- rium, celui répondant à la formule Ms0. Cet oxyde se présente sous forme d'une poudre blanche, res- semblant beaucoup aux oxydes du groupe de cal- cium. Son chlorure ne cristallise pas ; évaporé à sec, ilse présente sous forme d’une masse d’aspect nacré, se mouillant difficilement à l’eau, mais néanmoins très soluble, même après une calci- nation ménagée. Le nitrate cristallise, quoique difficilement, de sa solution dans l’alcoo! à 50 °/,. Il n’a pas été analysé. Le sulfate est le seul sel qui cristallise nettement en beaux cristaux dans l'alcool à 50°; ses solutions aqueuses ne cristallisent pas. Sa composition répond à la formule MsSO‘ + 8H°0. Il s’unit au sulfate d'alumine pour former un sel double, analogue aux aluns. L'oxalate MsC?0* + 8H°0 est une poudre blanche insoluble dans l’eau, soluble dans l’acide acétique, et dans un excès de chlorure de Masrium. De l’ensemble de ces caractères il semble nette- ment établi que le Masrium possède une individua- lité propre, malgré les affinités qu’il présente avec les métaux du groupe du zinc et du groupe des métaux alcalino-terreux. L'étude plus approfondie qui se poursuit de ce corps ne laissera probable- ment aucun doute à cet égard. A. Held, Professeur à l'École supérieure de Pharmacie de Nancy. 486 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Hagen (Johann G.), S. J, Director der Sternwarte des Georgetown Collège, Washington. — Synopsis der hœheren Mathematik. — T.1I: Artihmetische und algebraische Analyse. 1 vol. gr. in-4° de 398 p. (Prix : 37fr.50).F. L. Dames, #7 Tauben-Strasse ; Berlin, 1891. Présenter un tableau méthodique et complet de Pétat actuel des parties supérieures des sciences mathéma- tiques, tel est le but de cet ouvrage. Disons tout de suite qu'il atteint de la facon la plus satisfaisante pour la partie déjà parue dont nous croyons devoir énumérer les mile divisions : I. Théorie des nombres. — Il. Théorie des grandeurs complexes. III. Théorie des combinaisons. IV. Théorie des séries, — V. Théorie des produits infinis et des facultés, — VI. Théorie des fractions continues. VII. Théorie des différences et des sommes. — VIII. Théorie des fonctions. — IX. Théorie des déterminants. — X. Théorie des invariants, — XI. Théorie des substitutions. — XII. Théorie des équations. Cette énumération définit bien nettement le cadre du volume. Pour le remplir, l’auteur s’est efforcé, par une savante synthèse des travaux relatifs à chacune des théories qu'il comprend, de donner, sous forme d'un tableau logiquement ordonné, l'ensemble tant des définitions nécessaires à l'intelligence du sujet que des résultats obtenus jusqu’à ce jour et marquant le terme auquel sont parvenues les investigations poursuivies dans ces diverses directions. Les démons- trations restent en dehors de son programme. Il ne les effleure sur quelques points que lorsqu'il ne peut faire autrement, en vue de mieux faire saisir cer- taines liaisons. Cette coordination générale des di- verses parties de chacune des grandes théories de la science l’amène tout naturellement à mettre en lu- mière les principales lacunes à combler; il souligne chacune de celles-ci avec un soin minutieux. Ainsi ne se contente-t-il pas de faire connaître aux chercheurs les domaines déjà acquis, mais leur montre-t-il encore les conquêtes qui restent à faire. L’exposé est d’ailleurs complété par toutes les indi- cations bibliographiques nécessaires pour permettre au lecteur de se reporter aux sources principales rela- tives aux divers points traités. Ajoutons que pour ces citations, l’auteur, ne se contentant pas de données de seconde main, s'est livré à une vérification complète sur les textes originaux. On peut hardiment affirmer que le magnifique tra- vail du P, Hagen vient répondre à un desideratum de tous ceux qui s'intéressent aux sciences mathématiques, desideratum que personne ne s’aventurait guère à for- muler tant sa réalisation semblait difficile, Celle-ci exigeait à la fois une patience, un dévouement et une érudition dont on n'osait espérer l'assemblage au degré où il s’est rencontré chez le savant directeur de l'observatoire du Georgetown College. Nous nous permettrons de faire, à l’occasion de cette importante publication, deux simples réflexions. En premier lieu, nous regreltons que l’époque à laquelle ont été publiées les décisions du Congrès international de bibliographie mathématique tenu à Paris en 1889! n'ait pas permis à l'auteur de suivre la classification adoptée par ce Congrès, Il est bien dési- rable, en effet, que cette classification, élaborée avec le 1 Consulter au sujet des travaux de ce Congrès l'article publié dans la Revue (30 mars 1891, p. 170). ET INDEX plus grand soin par une réunion de savants où chaque branche des mathématiques comptait des représen- tants hautement autorisés, soit définitivement admise par tous les travailleurs, à qui elle permettra de se mieux entendre. Son adoption par le P. Hagen eût, on n’en saurait douter, fortement contribué à sa diffusion. Aussi émeltrons-nous le vœu de voir le savant auteur s’y conformer pour la suite de son œuvre (qui doit comprendre quatre volumes) si toutefois le point où en est la préparation de celle-ci permet encore un remaniement en ce sens. Notre seconde reflexion est d'ordre plus délicat, Elle pourrait sembler dictée par un sentiment d'amour- propre national tout à fait étranger à la question, si nous n'avions soin de déclarer tout d’abord que nous sommes aussi éloigné que possible d’une telle préoc- cupation et bien convaincu, au contraire, que, sur e terrain de la science, les rivalités de mation à nation ne sauraient intervenir à aucun chef. Nous plaçant donc à un point de vue en quelque sorte théorique, nous avouerons qu'à notre sens un livre d’un carac- tère aussi universel que celui du P, Hagen aurait gagné à être écrit en francais. Ne peut-on pas dire, en elfet, que, depuis que le latin a cessé d’être la langue universelle des gens de science, c'est le français qui se trouve, en fait, le plus près de jouer ce rôle? Le fran- ais, entendu par la presque généralité des hommes qui, en tout pays, sont pourvus d’un certain degré de culture scientifique, est resté la langue des congrès internationaux. Son emploi, pour la rédaction d'un livre appelé à être consulté partout où se cultivent les mathématiques, nous eût semblé tout indiqué. Les observations qui précèdent ne sauraient atténuer en rien l'appréciation entièrement favorable que nous portons ici du bel ouvrage du P. Hagen, tant au point de vue de sa haute utilité que de la facon remarquable dont il a été concu et réalisé. Cet ouvrage permettra au chercheur abordant quelque théorie nouvelle pour lui de saisir d'un coup d’œil l’ordonnance générale de celle-ci, ce qui lui en facilitera singulièrement ensuite l'étude de détail faite aux sources originales signalées d’ailleurs dans le texte même, Mais là, ne se bornera pas son rôle ; à une époque où le domaine de la science s’est si prodigieusement développé que chacun, pour faire œuvre utile, est forcé de se confiner en un champ de recherches relativement restreint, il mettra qui- conque a le désir d'élargir l'horizon de ses idées géné- rales, au delà du cercle de ses études familières, à même d'acquérir rapidement une notion très précise et très suffisamment complète des théories qui sont en dehors de ce cercle. On peut dire, à ce point de vue, que le livre du P. Hagen, c’est, dans l’ordre mathéma- tique, l'érudition mise sans effort à la portée de tout le monde. Ce n’est pas là le moindre mérite de cette belle publication évidemment appelée à une rapide et vaste notoriété. M. D'OCAGNE, Chamousset (F.). Nouvelle théorie élémen- taire de la rotation des corps. Gyroscope, tou- pie, ete... Petit opuscule de 22 pages, avec fiqures. In- prümerie Chaix. Paris, 1892. L'auteur reprend, par une méthode qui lui est pro- pre, l'étude du mouvement d'un solide homogène pe- sant, fixé par un point de son axe de figure; les résul- tats qu'il obtient diffèrent de ceux généralement admis en ce qui concerne les surfaces décrites par l’axe de figure et l’axe instantané de rotation. Re BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 487 2° Sciences physiques. Picou (R.-V.), Ingénieur des arts et manufactures. — Distribution de l'électricité par installations iso- lées.— Un volume, petit in-8° de 168 pages de lEncyclo- pédie scientifique des Aide-Mémoire, de M. Léauté (2 fr. 50). Librairies Gauthier-Villars et J. Masson, Paris 1892, Etant donné les appareils de production de l'énergie électrique : dynamos, accumulateurs ou transforma- teurs et ceux d'utilisation : lampes diverses, moteurs ou bacs d’électrolyse, il faut étudier les procédés qui permettent de les alimenter d'une manière indépen- dante dans les meilleures conditions, les règles à suivre pour déterminer les conducteurs qui les relient, ainsi que les dispositifs nécessaires pour assurer la sécurité du fonctionnement et celle des personnes. Cette distribution peut se faire dans des espaces restreints, comme cela a lieu dans les installations isolées qui possédent leur propre source d'énergie, ou, an contraire, s’étendre à un quartier, une ville entière, ou à divers centres secondaires reliés à une même usine génératrice. Dans les deux cas les règles générales sont les mêmes; mais, dans le second, le réseau des conduc- teurs prend une importance capitale et de sa dispo- sition dépend en grande partie le succès de l’entre- prise. C’est sans doute cette raison qui a engagé M. Picou à ne traiter dans ce volume que ce qui concerne les installations isolées, en réservant les stations centrales pour un autre ouvrage.Le seul inconvénient de ce plan, c'est que bien des questions devront être reprises à nouveau, car les points communs aux deux cas sont nombreux. Le volume actuel est divisé en deux parties ; la pre- mière, la plus étendue, contient l’exposé des principes et l'établissement ou le rappel des formules dont on a besoin dans l’étude d’un projet de distribution, tandis que la seconde donne les constantes et tables numé- riques ainsi que des applications. Après avoir rappelé brièvement les définitions des divers systèmes de distribution et les propriétés physiques des conducteurs électriques, M. Picou traite d'une manière complète de l’échauffement des fils par le courant; c’est en effet la condition qui détermine ou limite le plus souvent la dimension des fils à em- ployer. Ces préliminaires établis, l’auteur entre dans le vif de l’étude des systèmes en série et en dérivation, en donnant en particulier toutes les formules nécessaires au calcul des conducteurs et branchements et la ma- nière de déterminer les conditions de minimum de frais d'installation et d'exploitation. C’est le point de vue théorique de la question. Les côtés pratiques sont traités dans les deux derniers chapitres qui renferment les indications sur la manière de disposer une instal- lation en dérivation, sur le contrôle de l’isolement des circuits et les précautions à prendre en vue de la sécurité des personnes, des appareils et des locaux où ils sont placés. La seconde partie contient, comme nous l’avons dit, des constantes numériques et des tables pratiques calculées au moyen des formules précédemment éta- blies, ainsi que des applications à des exemples donnés. Nous n'avons pas à faire l’éloge de ce petit livre, qui rendra certainement des services; la compétence de l'auteur est indiscutable et il a su donner aux dévelop- pements un tour aisé. Il sera facile de faire disparaître des éditions suivantes quelques imperfections de détail, erreurs de formules ou obscurités, qui se sont glissées particulièrement dans le chapitre consacré à la me- sure de l'isolement des circuits et dont la nature est trop spéciale pour qu’il soit utile de les relever à cette place. E. MEyLax. Matignon (C.). — Recherches sur les Uréides. — Thèse présentée à la Faculté des Sciences de Paris. Gauthier- Villars, Paris 1892. La thèse de M. Matignon est un travail considérable de thermochimie, qui embrasse presque tous les corps de la série urique, depuis les produits de substitution simples de l’urée, comme l'éthylurée, la sulfo-urée et la guanidine, jusqu’à ses produits de condensation avec les acides organiques, c’est-à-dire aux uréides propre- ment dites. On sait que ces corps possèdent une struc- ture moléculaire fort complexe, qui, par la présence de groupes CO liés à des restes d’ammmoniaque, leur communique une fonction pseudo-acide, souvent diffi- cile à distinguer de la fonction acide vraie; à ce point de vue particulier de l'influence réciproque des groupes fonctionnels dans la molécule des uréides Ja thermochimie pouvait rendre des services : M. Mati- gnon est, en effet, arrivé dansses recherches à plusieurs résultats importants. Nous passerons rapidement sur la première partie de son travail, qu'il est du reste impossible de résumer : l’auteur y donne le détail de ses mesures calorimétri- ques, qui portent à la fois sur la chaleur de combustion des uréides et sur leur chaleur de neutralisation par les bases alcalines; il faitremarquer, en passant, que l'acide hydurilique, NcH— CH< Nco \ CO — A7H/ que l’on considérait jusqu'ici, avec M. von Baeyer, comme seulement bibasique, est en réalité capable de s’unir avec trois molécules de potasse; cette troi- sième basicité est d’ailleurs très faible, inférieure même à celle desorthophosphates bimétalliques. A côté de ces données thermochimiques nous trou- yons quelques considérations générales sur la struc- ture moléculaire des uréides, qu'il eût peut-être été préférable, pour la clarté de l'exposition, de réunir dans un chapitre spécial : c’est ainsi que M. Matignon considère les acides iso-urique et pseudo-urique, isomères de l'acide urique, comme le nitrile et l’amide d’un acide encore inconnu, Az H — CO N CH — AzH — COOH. NAzH — CO/ L’acide purpurique, dont la murexide représente le sel ammoniacal, serait d’après lui l’imide de l'alloxan- tine : AzH Mais c’est surtout la seconde partie de ce long mé- moire quiest intéressante, par les conclusions que l'auteur fait ressortir de ses mesures thermiques. Comparant entre elles les chaleurs de combustion des composés uriques homologues, ditférant par l'in- troduction de n groupes CH? dans leur molécule, M. Matignon fait remarquer que la différence de ces chaleurs de combustion est égale à n >< 164 calories, quand les méthyles sont directement fixés sur l'azote. La même différence s’observant entre les chaleurs de combustion d’autres homologues à fonctions très di- verses, tels que le glycocolle CO? H — CH?— Az H? et la sarcosine CO?H — CH? — AzH — CH3,ou encore l'ammo- niaque et les trois méthylamines, on peut conclure à la généralité de cette loi. Or, la substitution d'un méthyle à un atome d'hydro- gène dans un groupe carboné augmente la chaleur de combustion de 154-155 calories seulement; il en résulte que la substitution d’un radical alcoolique lié à l'azote augmente la chaleur de combustion d'une quantité plus grande que la substitution du même radical lié au carbone. La différence est en moyenne de 8 calories, nombre 488 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX qui dépasse de beaucoup l'erreur possible dans les me- sures calorimétriques eflectuées à l’aide de la bombe. On voit immédiatement l'importance que présente cette règle dans la recherche des formules de conslitu- tion ; en l’appliquant à l'étude du pyruvile, M. Mati- gnon montre que ce corps représente bien un dérivé méthylé sur le carbone de l'allantoine, ainsi que M. Grimaux l'avait précédemment admis, en s'appuyant sur le mode de synthèse de ces deux corps, qu'il a obtenus en condensant l’urée avec l'acide pyruvique ou l’acide glyoxylique. Les chaleurs de combustion du pyruvile et de l’allantoine sont en effet 566,9 et 413,c18, dont la différence est 153,11. Les mêmes considérations permettent d'expliquer la transformation de certains corps méthylés sur l'azote en leurs isomères méthylés dans le noyau, par exemple celle du chlorhydrate de méthylaniline en chlorhydrate de paratoluidine, qui s’accomplit à 3600, avec un dégagement de chaleur de 13 calories environ. L'auteur essaie ensuite de montrer que l'introduction, dans une molécule organique quelconque, d’un radi :al alcoolique ou phénolique diminue le travail positif néces- saire pour effectuer la dissolution d'un corps solide, en d’autres termes, que la chaleur de dissolution croît, dans une suite d’homologues, à mesure que le poids moléculaire s'élève; mais les Hifférences observées sont faibles et les exemples peut-être trop peu nombreux encore pour permettre une généralisation, En résumé, la thèse de M. Matignon ajoute à nos connaissances un grand nombre de données thermo- chimiques, relatives à des corps complexes, souvent difficiles à obtenir purs, et nous montre, entre la cha- leur de combustion de ces corps et leur formule de structure, une relation nouvelle qui paraît être sérieu- sement établie. Ce dernier résultat suffit à faire voir l'importance du travail que nous analysons : c’est à notre sens un pas considérable de franchi dans les applications si déli- cates de la thermochimie à l'étude des composés or- ganiques. L. MAQUENNE. 3° Sciences naturelles. Boule (M.), Agrégé de l'Université, Docteur ès sciences, Collaborateur du Service de la carte géologique de la France. Description géologique du Velay. 1 vol. in-8° de 259 pages avec 80 fig. dans le texte et 11 pl. Paris, Baudry, 1892 (Ministère des Travaux Publics. Bulletin du Service de la carte géologique de la France et des topographies souterraines, n° 28, t.IV, 1891-92). Le Bulletin du Service de la carte géologique est rapi- dement devenu, depuis sa fondation par M. Michel- Lévy en 1889, un recueil de premier ordre, par l'im- portance des travaux originaux qui y paraissent chaque année. Le rôle pendant si longtemps dévolu au Bulletin de la Société Géologique de France et, à un autre point de vue, aux Annales fondées par Hébert, parait devoir passer désormais, en ce qui concerne Ja connaissance spéciale de notre territoire, au nouveau recueil officiel : plus de trente mémoires, relatifs aux régions francaises les plus diverses, y ont déjà vu le jour. Quelques-uns, comme la Description géologique du Velay de M. Boule — c’est la seconde des thèses de doc- torat insérées au Bulletin du Service! — constituent des monographies définitives, auxquelles l'avenir ne saurait rien ajouter d’essentiel. Le Velay était resté, jusqu'à ces derniers temps, le moins connu des districts volcaniques du Centre de la France. Aussi M. Boule, que sa parfaite familiarité avec la géologie de l'Auvergne désignait tout spécialement pour une pareille tâche, a-t-il été bien inspiré en diri- geant ses recherches sur ce pays injustement oublié, où l'intérêt et la variété des problèmes géologiques le disputent d’ailleurs au charme et à l'originalité du 1 Voir l'analyse de la thèse de M. Hauc, Revue générale des Sciences, II, p. 161. paysage. On savait depuis longtemps qu’il existe aux environs du Puy de riches gisements de mammifères fossiles; M. Boule a pensé que leur étude détaillée jet- terait peut-être quelque lumière sur l’ordre de succes- sion et l’âge précis des produits éruptifs si enchevêtrés qui constituent les massifs adjacents. Cette attente n’a pas été trompée, comme le montre le beau volume dans lequel M. Boule vient de consigner les résultats de ses recherches et dont nous allons reproduire les conclusions principales, La région comprend trois parties bien distinctes : 1° le double massif du Mezenc et du Mégal, à l’est; 2° le bassin du Puy, qui correspond à la vallée supé- rieure de la Loire, au centre; et 3° la chaîne volcanique du Velay, appelée aussi chaîne du Devès, du nom de son sommet principal, à l’ouest. Au delà de la chaîne du Velay vient la vallée de l’Allier, grossièrement parallèle à celle de la Loire, puis le massif granitique des monts de la Margeride. Les schistes cristallins forment le long de l’Allier une bande étroite bordée de part et d’autre. par du granite ; la dépression correspondante semble avoir été déterminée lors du grand ridement hercynien, qui date des temps carbonifères. S'il n'existe plus, dans le Velay, de terrains secon- daires en place, la présence de chailles fossilifères remaniées, dans certains dépôts fluvio-lacustres rap- portés par M. Boule au Miocène supérieur, indique que les mers jurassiques s’avancaient beaucoup plus loin que les affleurements actuels des Causses ou de la vallée du Rhône; il n’est malheureusement pas pos- sible de préciser davantage. Au début des temps tertiaires, l'Auvergne et le Velay devaient présenter des reliefs peu considérables, résul- tat du travail prolongé des agents atmosphériques. Nous pouvons encore en juger indirectement par la forme du substratum des masses volcaniques, forme qui est caractérisée par de larges ondulations et des pentes à peine perceptibles, comme le montre la carte hypsométrique placée par M. Boule en regard de celle qui figure le relief actuel (p. 6 et 7) 1. Puis s’établissent les lacs au fond desquels se sont déposées les arkoses éocènes du bassin du Puy, bien antérieures comme àge à celles du Puy-de-Dôme, si l’on s’en rapporte au témoignage de la paléontologie végé- tale, Un mouvement tres important marque ensuite le début de l’Oligocène : l'altitude du Plateau Central con- tinuant à être faible, il se forme dans le Velay comme en Auvergne, de nouveaux lacs, souvent transformés en lagunes par l’accès temporaire des eaux marines : c’est l’époque des marnes et des gypses infra-tongriens, caractérisée par la présence des palcotherium. Avec l'époque tongrienne, ce régime saumâtre cesse défini- tivement dans le bassin du Puy, et les calcaires de Ronzon se déposent au centre du lac, où la sédimenta- tion a peut-être continué pendant l’Aquitanien. Enfin, après le dépôt des alluvions à chailles suivant l’empla- cement actuel du Mézenc, à la fin de l’époque miocène, interviennent de grands mouvements du sol, contre- coup des plissements alpins, qui déterminent la forma- tion d’une série d’anticlinaux et de synclinaux à grand rayon de courbure. D’après M. Boule, « le développe- ment de ces plis a été gèné par la présence des massifs granitiques du Velay. De grandes fractures ont découpé la province en un certain nombre de compartiments ou de voussoirs, qui ont joué les uns par rapport aux autres, en établissant les principaux traits de l’orogra- phie actuelle. » Telles sont les failles qui encadrent le horst granitique de Peyredeyre, entre la dépression du Puy et le petit bassin tertiaire de l’Emblavès, et dont 1 Nous félicitons M. Boule de cette louable initiative. Quelques services étrangers ont l’habitude de joindre aux notices accompagnant chaque feuille des cartes géologiques dont l'exécution leur est confiée, des cartes hypsométriques teintées, embrassant à une échelle réduite le mème périmètre. C’est là un exemple qu’on ne saurait trop imiter. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX l’analogie avec le voussoir relevé de Saint-Yvoine, dans la Limagne, est frappante, C’est de la même époque que datent les débuts de l'activité volcanique, qui a continué pencant toute la durée du Pliocène et une grande partie du Pléistocène !, mais en se déplaçant progressivement vers l’ouest, Les coulées les plus anciennes se relient aux basaltes des Coirons, dans la vallée du Rhône, lesquelles sont con- temporaines de la célèbre faune de Pikermi et du Léberon. Pendant toute la durée du Pliocène inférieur, les éruptions sont nombreuses et abondantes dans l’est; leur masse principale correspond à d'énormes coulées plus ou moins basiques: andésites augitiques, labrado- rites augitiques, basaltes compacts et basaltes por- phyroïdes. Puis survient, à la fin du Pliocène inférieur ou au commencement du Pliocène moyen, une sortie formidable de phonolithes, dont les pitons caractéris- tiques impriment au Mézenc et au Mégal une physio- nomie toute particulière. L'activité volcanique s'éteint enfin, de ce côté, avec l’'épanchement d’un basalte for- mant la couverture extérieure du massif, Les cours d’eau qui sillonraient le versant occiden- tal du Mézenc entrainaient jusque dans le bassin du Puy des fragments de toutes ces roches volcaniques, qu'on retrouve dans les alluvions pliccènes inférieures distinguées par M. Boule sous le nom de sables à mas- todontes. C’est seulement après le dépôt de cette for- mation que les nombreux cratères des environs du Puy entrent en activité, en comblant de leurs projec- tions, aujourd’hui cimentées à l’état de brèches lim- burgitiques, les vallées préexistantes; ces brèches, dé- coupées plus tard par l'érosion, constituent le rocher Corneille et le rocher Saint-Michel, dont l'origine a donné lieu à tant de discussions. En même temps s’établissaient dans la chaine du Velay quelques volcans ; leurs coulées sont descendues jusqu’au fond de la vallée de lAllier, qui n'a guère changé de configuration depuis lors, grâce à sa faible altitude, Toutefois, c’est au Pliocène supérieur qu’ap- partiennent la majeure partie des éruptions de la chaîne du Velay : « Les cratères, dit M. Boule, s’ouvri- rent alors par centaines », leurs déjections, réunies en une bande continue, font disparaître tous les ter- rains antérieurs sous une couverture dont la puissance dépasse souvent 100 mètres. Du côté de la Loire, cette inondation basaltique nivela l'ancien sol et le trans- forma en un vaste plateau, dans lequel les cours d’eau du bassin durent recommencer à creuser leur lit, travail que nous trouvons à peu près achevé au début du Pleistocène : la faune à Elephas primigenius se ren- contre en effet dans des alluvions situées au niveau actuel des cours d’eau. D'après M. Boule, les célèbres ossements humains de la Montagne de Denise seraient réellement contem- porains des dernières manifestations volcaniques du Velay (p. 219-221). Quant à la légende d’éruptions qui auraient eu lieu au v° siècle de notre ère, on sait que M. S. Reinach en a fait justice : elle repose sur une er- reur de traduction d’un passage de Sidoine Apollinaire. Notons enfin qu’il n’y aurait, dans la région, « aucune formation détritique qui offre les divers caractères ac- compagnant partout les véritables produits glaciaires », M. Boule, en véritable naturaliste, n’a négligé aucune des faces de son sujet: pétrographie, stratigraphie, pa- 4 M. Boule a résolument rompu avec l’usage de faire du Quaternaire une division de même ordre que le Primaire, le Secondaire et le Tertiaire : « Considérant l’époque dite qua- lernaire comme ayant une importance tout au plus égale à l'une des autres grandes divisions du Tertiaire, le Pliocène par exemple, je lui ai appliqué l'ancien terme Pléistocène qu’emploient actuellement, dans le même sens, un grand nombre de géologues anglais, américains, suisses, etc. » (p. 166-167). On ne peut que souscrire à cette réforme, que tout justifie soit au point de vue stratigraphique, soit au point de vue paléontologique. La continuité entre le passé et le présent n’est d’ailleurs nulle part aussi manifeste, en France, que dans le Velay. 489 léontologie, topographie — tout à été traité avec une égale ampleur et un égal succès dans cette thèse remar- quable, qui fait le plus grand honneur à la géologie francaise. Pleine justice a d’ailleurs été rendue, dans un historique fort bien fait (p. 11-19), aux savants qui ont, précédé l’auteur aux environs du Puy; on trouvera l’'énumération complète de leurs travaux, par ordre de dates, à la fin de l'ouvrage (p. 247-256). Après avoir loué le fond, il nous reste à dire quel- ques mots de la forme : le texte est semé de nombreux croquis, de coupes et de cartes schématiques, qui ne laissent aucun point essentiel dans l'ombre. Parmi les planches, on doit signaler toute une série de phototy- pies, exécutées d’après les clichés de l’auteur et figu- rant les sites les plus remarquables du Velay; des reproductions de plaques minces, dues au talent bien connu de M. Jacquemin, et des paysages exécutés au trait par un habile artiste, M. J. Eysséric. En fermant ce volume si bien rempli, le lecteur n'éprouve qu’un regret, c’est de ne pas y trouver une carte générale de la région étudiée, d'autant plus que la feuille du Puy, de la carte détaillée de la France, ne paraîtra probablement pas avant quelques années : on devra donc, d'ici-là, se contenter de la Carte géolo- gique dé la Haute-Loire, de Tournaire. Nous n’en atten- drons qu'avec plus d’impatience ce complément naturel du beau travail de M. Boule, Emm. DE MARGERIE. Girod (D' Paul), Professeur adjoint à la Faculté des Sciences de Clermont-Ferrand. — Manipulations de Zoologie. Guide pour les travaux pratiques de dissection : Animaux vertébrés. 1 vol. gr. in-8 de 158 pages, avec 32 planches en noir et en couleurs. (Prix : 10 fr.) Librairie J.-B. Bailliére et fils, 19, rue Haute- feuille, Paris, 1892. Le premier volume des Manipulations de Zoologie, paru en 1889, était consacré aux animaux invertébrés. Le présent volume, concernant les animaux vertébrés, est en quelque sorte le complément du premier. L'auteur a choisi comme types pour ses monogra- phies successives les Vertébrés les plus connus: la Grenouille, la Perche, la Poule, le Lapin, allant ainsi, par gradation, du Vertébré le plus facile à disséquer à celui dont l’organisation est beaucoup plus complexe, et par suite, la dissection plus délicate. Chaque monographie renferme des indications géné- rales sur la facon de conserver l’animal, sur sa prépa- ration, et comprend une série de planches avec texte explicatif. Celles-ci, en couleurs pour la circulation, ont été dessinées d’après les dissections personnelles de l’auteur, qui s’est efforcé de mettre en évidence les points les plus importants, facilitant ainsi le travail de l'étudiant, Ajoutons que les croquis ont été complétés par de belles figures des squelettes, qui seront très précieux à l'étudiant éloigné des collections. En résumé, ce volume, comme le précédent, a sa place marquée sur la table de travail de tout élève s’oc- cupant de sciences naturelles, et sera particulièrement apprécié des candidats à la licence. Ed. BELZUNG. 4° Sciences médicales. Garrod (D' Archibald).— Traité du rhumatisme et de l’arthrite rhumatoïde, traduit par le d' Brachet. 1 vol. in-8° avec 410 gravures. (12 fr.) Société d'éditions scientifiques 1891. L'auteur de ce traité dit lui-même dans sa préface qu'il s’est efforcé « de présenter un bon tableau du rhumatisme considéré comme une maladie organique, dont les lésions articulaires sont une des manifesta- tions les plus fréquentes et les plus remarquables, mais qui peut intéresser d’autres appareils et d’autres tissus du corps et prendre des formes très variées sui- vant les cas ». ; C’est donc une sorte de mise en place des connais- sances acquises, disséminées, depuis les grands lraités classiques déjà anciens, dans des mémoires et des comptes rendus de sociétés savantes. 490 Après avoir examiné consciencieusement les différen- tes théories pathogéniques du rhumatisme et men- tionné les recherches bactériologiques les plus récentes, l’auteur conclut ainsi : « Le temps seul per- mettra de dire si l’un ou l’autre des auteurs dont nous avons parlé a découvert la cause spécifique des phéno- mènes. Pour aujourd'hui, nous devons nous en tenir aux études cliniques : celles-ci semblent indiquer que, malgré l'apparence constitutionnelle de la maladie, aucune des théories professées jusqu’à ce jour sur la pathogénie n’en explique aussi bien les particularités que celle qui lui attribue une origine infectieuse. » Aussi, plus de fièvre rhumatismale primitive; la fièvre dans le rhumatisme a une origine locale, qui est la polyarthrite, ou les complications viscérales. Il est certain que la notion d'infection localisée sur les séreuses articulaires, périendocardiques, pleurales,etc., répond bien à la physionomie de l'attaque rhumatismale : c’estsuivant cette interprétation que M. Arch. Garrod a étudié successivement les diverses manifestations du rhumatisme articulaire aigu. Pour la chorée, il la range dans les affections rhu- matismales du système nerveux; il admettrait volon- tiers l'hypothèse émise par Cheadle en 1888, que la chorée « serait le symptôme extérieur d’une localisa- tion sur les centres nerveux, d'un accident dù à quel- que exagération temporaire du développement de leurs éléments fibreux » (page 58). La conclusion de ce chapitre est franche : toutes les fois que la névrose (chorée) existe dans une famille, elle est d’origine rhumatismale, même lorsqu'il ny à pas de rhumatisme articulaire. Rien ne montre mieux l influence d'un motsurlesidées que l’histoire du rhumatisme : rhumatisme,tout ce qui atteint les articulations; rhumatisme,tout ce qui est dou- leur; rhumatisme, tout ce qui semble causé par le froid! Aussi M. Arch. Garrod se croit-il obligé de traiter dans le volume du rhumatisme, et de l’arthrite blennor- ragique, et de l’arthrite dysentérique, en un mot, de toutes les arthrites infectieuses, qui n’ont de commun avec le rhumatisme vrai que la localisation articulaire. Du reste, il a soin de les ranger dans un chapitre sous le titre d’ «affections articulaires auxquelles le nom de rhumatisme a été donné mal à propos ». C'est le même ordre d'idées qui lui a fait consacrer les cent dernières pages de son traité à l'étude de l’ar- thrite rhumatoïde : ici, il est fidèle à la tradition de son père, Sir Alfred Garrod, qui, contrairement à PE- cole francaise d'alors, protestait contre le nom de rhumatisme chronique et de rhumatisme noueux, non moins que contre le rapprochement pathogénique de cette affection et du rhumatisme, L'arthrite rhumatoïde (Garrod) est une dystrophie des jointures comparable aux arthropathies nerveuses, sans que, toutefois, on uisse la rattacher à une lésion centrale connue. C’est A une opinion adoptée par M. Bouchard qui fait du rhumatisme nerveux « le premier des faux rhuma- tismes », Les auteurs du récent Traité de médecine, consé- quents avec cette manière de voir, décrivent le rhuma- tisme chronique progressif dans le chapitre des mala- dies de la nutrition, alors que le rhumatisme proprement dit est rejeté à un volume complètement distinct (disons même en passant que nous ne voyons pas bien où on elasssera le rhumatisme qui n’a pas paru dans le cadre des maladies infectieuses). M. Archibald Garrod a donc groupé dans un même Traité des maladies fort différentes pour respecter la tradition du mot, et c’est là, malgré la distinction bien nette qu'il établit, une concession qui nous semble propre à entretenir une confusion regrettable. Le Traité du rhumatisme est une digne continuation des travaux si remarquables dont nous sommes rede- vables au nom-de Garrod, — Le D' Brachet a fait de ce livre utile une traduction soigneuse et clairement écrite, D' Ray. Duranp-FARDEL. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Villaïn (L.). — La viande saine. Moyens de la reconnaître et de l'apprécier. 1 vol. in-18 de 434 p. avec 25 figures dans le texte (3 fr.). G. Carré, Paris, 1892, L'importance d’une viande saine pour l'alimentation ne saurait échapper à personne, On commence à bien connaitre les dangers que peuvent faire courir cer- taines viandes, soit par les produits de décomposition interstitielle, — leucomaines, protéines qui ont pu se former dans les tissus, — soit encore par les germes pathogènes, qui ont frappé l'animal en vie et qui con- servent leur virulence dans ses organes après la mort, M. Villain, chef du service de l'inspection des viandes de Paris, s’est attaché, dans une série de conférences pratiques faites aux Halles centrales, à exposer les connaissances nécessaires à fous ceux qui ont charge de recevoir et d’inspecter les viandes. Ce sont ces con- férences qu'il vient de publier en volume. Bien que faites dans un but essentiellement pratique, ces causeries seront utiles même aux personnes qui, tout en n'étant pas appelées par profession à examiner les viandes, s'intéressent aux choses de l'hygiène. Qu'il nous soit permis de rappeler ici, pour démon- trer l'utilité de ces connaissances, le rôle que doivent jouer, en ce qui concerne l'alimentation de leurs hommes, les commandants de compagnie ou de corps de troupe détachés. Trop souvent, pendant les manœu- vres et mème en temps de paix, des fournisseurs peu scrupuleux ont profité de l’incompétence, et quelque- fois aussi de la négligence des officiers, pour livrer aux troupes des viandes malsaines ou de qualité infé- rieure, Avec le système actuel de la nation armée, un certain nombre d’entre nous peuvent se trouver, du jour au lendemain, chargés de fonctions analogues, M. Villain passe en revue les animaux de boucherie au point de vue de leurs races, de la qualité de leur viande, du rendement qu'ils peuvent donner. Il est important, en effet, de pouvoir supputer, d’après le poids brut d’un animal, la quantité de viande qu’il pourra fournir; ilest même bon de savoir apprécier ce rendement pour tel ou tel morceau, la proportion entre les os et la viande variant d’une partie à l’autre. La distinction des viandes par qualité fait l’objet d’un chapitre spécial, et nous croyons volontiers l’auteur quand il nous dit que ce n’est pas chose facile que d’assigner une ligne de démarcation tranchée entre les différentes nuances, de dire où la première qualité commence et où elle finit. Le meilleur crite- rium, surtout pour le bœuf, serait encore la quantité de graisse ferme et son mode de dissémination dans les régions diverses de l'animal. Enfin nous arrivons, un peu lentement peut-être, à la conférence consacrée au parallèle entre la viande saine et la viande malade. Nous eussions voulu voir cette partie un peu plus développée : c’est elle, au point de vue qui nous préoccupe, qui devrait être l’objet essentiel de ce livre. M. Villain insiste sur le mode même de préparation de la viande. Les bêtes malades sont, en effet, souvent abaîtues et découpées par des gens n’appartenant pas à la profession, d’où un manque de netteté dans les sections des os, la présence du sang caillé sur la surface de section des morceaux, etc., — faits qui doivent appeler l'attention d’un inspecteur dans un abattoir, Les signes positifs, tels que la päleur des muscles peaussiers, les infiltrations san- guines dans la graisse du rognon, la teinte gris-terne des muscles provenant d'animaux morts en état de fièvre sont plus importants. L'intégrité des séreuses, des poumons et du péritoine donne encore le meilleur renseignement quand on peut examiner ces viscères, ce qui malheureusement n’est pas toujours le cas, Ce livre, quoique fort intéressant, n’est certes pas complet; mais, si le lecteur veut des données plus pré- cises, il les trouvera dans le grand ouvrage du même auteur : Manuel de l'inspecteur des viandes, dont il a été rendu compte dans cette Revue(n° du 30 mai 1890). ve ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 491 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du T juin 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Picard : Sur une classe de fonctions analytiques d’une variable dépen- dant de deux constantes réelles arbitraires, — M. P. Painlevé : Sur les groupes discontinus des substitu- tions non linéaires à une variable. — M. H. Poincaré : Sur l'application de la méthode de M. Lindstedt au pro- blème de trois corps. — M. Coculesco : Sur la stabi- lité du mouvement dans un cas particulier du pro- blème destrois corps. — M.P.Serret : Surune propriété commune à trois groupes de deux polygones inscrits, circonscrits ou conjugués à une conique, — M. Tac- chini : Observations solaires du premier trimestre de l’année 1892, — M. Delauney : De l’accéléraliou de la mortalité en France. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. E.-H. Amagat: Sur la densité des gaz liquéfiés et de leurs vapeurs saturées etsur les constantes du point critique de l'acide carbo- nique (Voir Soc. de physique, 3 juin). — M. A. Berget indique une relation qui permet de calculer la conduc- tibilité thermique de deux barres métalliques, con- naissant le coefficient de dilatation linéaire de cha- cune d'elles, ainsi que le rapport des allongements qu'elles prennent lorsque dans une enceinte à 0°, une de leurs extrémités est chauffée à T°, Ce dernier re ap- port peut se déterminer avec la plus grande précision, par une méthode interférentielle, soit qu’on polisse spé- culairement les extrémités des deux barres mises côte à côte, pour s’en servir comme des deux miroirs de l'expérience de Fresnel, soit que l’on utilise les an- seaux de Newton produits entre un plan fixé à l’extré- mité de la première et une lentille portée par tte mité de la seconde, — M. E. Jannettaz avait, il y 4 longtemps déjà, posé la loi suivante relative à la ee gation de la ln dans les corps cristallins : Les axes de plus facile propagation thermique sont parallèles aux clivages les plus faciles; ce fait est immédiatement vérifié pour les substances qui ne possèdent qu’un plan de clivage. Dans le cas où un cristal possède plusieurs plans de clivage, M. Jannettaz admet que l'axe de plus facile propagation thermique est parallèle à la résul- tante des clivages. Suivant que cette résultante se rap- proche plus de la base ou de l’axe, l’ellipsoide de con- ductibilité thermique présente un grand axe dans lun ou l’autre sens. Cette loi soumise à une vérification expérimentale sur quarante-quatre espèces de cristaux est justifiée, sauf dans deux cas qui sont précisément deux cas très voisins de la limite entre l’une et l’autre orientation de la résultante, — M. H. Abraham a re- pris, au moyen du condensateur étalon (condensateur lan à anneau de garde) qu’il a décrit Spiénenrenens a détermination du rapport v entre les unités C.G.S électromagnéliques et électrostatiques; il arrive à la valeur 299,2.108 dont il estime l'approximation à un millième. — M.J. Riban, en traitant à l’ébullition l'a- zotate neutre de zinc par un excès de métal, a obtenu un azotate basique distinct de celui que MM. Rousseau et Tite ont préparé récemment par une autre méthode; cet azotate cristallise avec huit molécules d’eau; on l'obtient à sept molécules lorsque sa solution a été chauffée en tube scellé à 150° degrés pendant quelques heures. — M. E. Péchard avait signalé antérieurement l'existence de permolybdates:ila préparé de nouveaux sels de ce genre, les permolybdates de soude, de ma- gnésie, de baryte; les permolybdates des métaux lourds s'obtiennent facilement par double décomposition. — En faisant réagir de diverses manières la silice et l’a- lumine en présence d’un excès de fluorure de potassium fondu, M.A.Duboinaobtenuunsilicate double d’alumine et de potasse, répondant à la composition et aux carac- tères minéralogiques de la leucite ; dans quelques-unes de ses expériences, il a obtenu à côté de la leucite un fluo- rure double d’alumine et de potassium, répondant à la cryolithe potassique. — M, F. Parmentier après avoir montré que les eaux minérales de la région du centre se comportent comme si elles avaient élé formées au sein d’une atmosphère d'acide carbonique pur, et que les altérations qu’elles subissent après lembouteillage sont dues à l’action de l'air atmosphérique pendant la ma- nipulation, conseille, pour transporter ces eaux en vue de leur analyse, de les embouteiller dans ur. atmos- phère artificielle d’acide carbonique ; avec cette précau- tion, elles se conservent absolument inaltérées. — M. G. Hinrichs : Détermination mécanique des points d’ébullition des alcools et des acides, — M. de For- crand à préparé (de la même facon qu'il avait préparé la pyrocatéchine monosodée}, la résoreine monosodée et lhydroquinone monosodée, e ét il a déterminé leurs don- nées HheAO CURE La réaction : diphénol sol. _ Na sol. — H gaz. + sel sol., dégage, pour la résor- cine comme pour l’ hydroquinone, sensiblement 39 Cal., soit la même quantité de chaleur que la saturation du phénol par la soude ; la pyrocatéchine au contraire, dans ces conditions, dégage 44 Cal, Par conséquent, la répélition de la fonction exalte la valeur de celle que l’on sature la première, seulement quand ces deux fonc- tions sont en position ortho, c’est-à-dire voisines. — M.G. Massol arrive à une conclusion {très analogue en comparant les chaleurs de neutralisation des acides de la série oxalique. Il avait reconnu antérieurement que pour les acides normaux, la chaleur dégagée dans la formation des sels solides diminue quand le poids mo- léculaire s'élève; l'étude de quelques acides non nor- maux démontre que celte diminution d’acidité tient à l’écartement des groupes CO?H ; en effet l'acide méthyl malonique (isosuccinique) où cet écartement est le même que dans l'acide malonique se rapproche par la chaleur qu'il dégage, de l'acide malonique et non de l'acide succinique; “de même l’acide B-pyrotartrique (méthylsuccinique) dégage autant de chaleur que l’a- cide succinique. — M.P. Petit, en trailant de la fécule par l'acide azotique concentré dans des conditions don- nées, obtient une matière blanche qui, traitée par l'eau ou l'alcool chaud, dégage de l'acide carbonique et des vapeurs nitreuses; le produit en solution répond à la formule C#H60$; ce composé présente les propriétés générales des sucres; il est en même temps fortement acide. M. A. Haller, en chauffant un mélange de deux molécules d’isocyanate de phényle et d’une molé icule d’a- cide phtalique ou succinique, à obtenu respectivement la phénylphtalimide et la phénylsuccinimide;il discute avec expériences à l'appui, le mécanisme de cette réac- tion, — MM. E. Louise et Perrier ont reconnu que les acétones aromatiques chauffées à 40° pendant plusieurs heures dans le sulfure de carbone au contact des chlo- rures métalliques anhydres donnent naissance à des composés Organo-mé talliques. Ces e omposés se forment bien plus facilement lorsque l’acétone réagit à lPétat naissant; par exemple, tandis que le be nzoylmesitylène dissous dans le sulfure de carbone donne avec le chlo- rure d'aluminium un produit amorphe, on obtient des cristaux volumineux si l’on fait réagir à basse tempé- rature le chlorure d'aluminium sur le mésitylène et le chlorure de benzoyle dissous dans le sulfure de carbone. La formation de ces combinaisons permet d'obtenir di- verses acétones qui se forment avec d’autres par la mé- PR TI 1 EVLE Ve PR E ACADÉMIES ET SOCIËTÉS SAVANTES thode de MM. Friedel et Crafts et qu'on n'avait pu en- core isoler. — M. A. Berg a préparé les dérivés chlorés des isobutylamines par la même méthode qui lui avait donné les composés correspondants des amylamines. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Brown-Séquard, comme suite à sa communication du 30 mai sur l’action phy- siologique des principes solubles contenus dans les testicules, rapporte de nombreuses observations médi- cales prouvant que les propriétés tonifiantes de ces principes combattent avec succès l’adynamie du sys- tème nerveux dans divers états morbides, en particu- lier dans la tuberculose et l’ataxie locomotrice, — MM. A. Gautier et L. Landi donnent une partie des conclusions de leurs recherches sur les produits du tissu musculaire séparé de lêtre vivant, et conservé à l'abri de l’air et des microbes. — M. A.-B. Griffiths a extrait une ptomaine de l'urine des morveux et une autre de l'urine des pneumoniques, — M. H. Viallanes a cherché à déterminer comparativement la quantité d’eau que filtre dans un temps donné une huitre, une moule, ou une huitre portugaise ; il a constaté que l’huître comestible est très inférieure sous ce rapport aux deux autres mollusques étudiés ; ceux-ci doivent donc être écartés des parcs où l’on élève l’huître, car ils font à celle-ci, au point de vue de l'absorption des matières nutritives, une concurrence écrasante. — M. L. Trabut signale que celte année, en Algérie, presque tous les Criquets pèlerins sont envahis par le Lachnidium ; en divers endroits, les pontes sont dé- truites par les larves d’une mouche. — MM. J. Héri- court et Ch. Richet confirment leur communicalion récente (4 avril 1892) relative à la vaccination contre la tuberculose humaine par la tuberculose aviaire chez le chien, — M. A. Lacroix a fait l'étude de beaux échantillons de dioptase rapportés par M. Thollon des environs de Brazzaville ; le Congo francais semble contenir en abondance celte espèce minéralogique jusqu'ici très rare, « Rapports. — Rapports de MM. Charcot et Darhoux au nom de la commission chargée de l'examen du cal- culateur Inaudi. (Ces rapports ont été reproduits in extenso dans le précédent numéro de la Revue.) Nomination. — M. Sophus Lie est nommé corres- pondant pour la section de géométrie, Mémoires présentés. — M. J. Gaube adresse un mé- moire ayant pour titre : Du sol animal. — M. Ferret adresse un mémoire sur l’éliologie, la prophylaxie et le traitement médical de la cataracte corticale com- mune. — M, J. Morin adresse une note sur un procédé de mesure de l'intensité des courants d'induction en thérapeutique. Séance du 13 juin. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. L. Raffy : Sur le problème général de la déformation des surfaces. — M. L. Schlesinger : Sur la théorie des fonctions fuch- siennes. — M. P. Painlevé : Sur les transformations en mécanique. — M. M. d'Ocagne : Sur la détermina- tion du point le plus probable donné par une série de droites non convergentes. — M. G. E. Hale présente une photographie prise par lui le 25 mai d'une protu- bérance solaire; on voit sur cette photographie toutes les raies ultra-violettes signalées jusqu'ici, plus quatre qui sont nouvelles. l’auteur rappelle qu'il a signalé à différentes reprises que les raies H etK se prêtent faci- lement à la mesure des vitesses radiales des protubé- rances. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Vaschy : Sur les considérations d'homogénéité en physique. — M. de Swarte formule une réclamation de priorité relative à la communication récente de M. Witz (22 février 1892) sur la non-réalisation de l’état sphéroïdal dans les chaudières à vapeur. Il a publié en 1886 que sur des plaques de tôle chauffées au rouge cerise (900%), la caléfaction ne se produit pas et que la vaporisation dans ces conditions dépasse 1600 kilog, par mètre carré et par heure. Il opérait en chauffant au rouge le fond de la chaudière vide et alimentant ensuite; ces expé- riences lui paraissent plus d'accord que celles de M Witz avec les conditions industrielles, — M. E. Bouty : Sur la coexistence du pouvoir diélectrique et de la conductibilité électrolytique (Voù: Société de phy- sique, 3 juin). — M. C. Poulenc expose une méthode générale permettant de préparer, à l’état cristallisé, des fluorures anhydres des métaux lourds, cette méthode consiste à partir du fluorure double M F2, n AzH#F qu'il a décrit récemment et à décomposer ce fluorure double par la chaleur dans un gaz inerte; on obtient un fluorure anhydre amorphe qui cristallise lorsqu'on le chauffe dans la vapeur d'acide fluorhydrique anhydre; M. Poulenc décrit le fluorure de nickel et celui de cobalt ainsi obtenus. — M. P. Sabatier et J.-B. Sen- derens ont repris l'étude de l’action peu connue de l’oxyde azolique sur les métaux, les réactions ont été opérées à des températures variables mais toujours au- dessous de 500 ; les métaux inoxydables à l'air ne sont pas attaqués ; les métaux oxydables à l'air sont peu attaqués, à moins qu'on ne les prenne à l’état divisé, tels que les donne la réduction des oxydes par l'hydrogène; il se forme alors des oxydes différents de ceux que donne l’oxygène, généralement des #ro- toxydes purs; un certain nombre d’oxydes inférieurs sont aussi oxydés par l’oxyde azotique, mais d’une facon différente de celle de l'air ou de l’oxygène., — M. C. Matignon a déterminé la chaleur de formation et la chaleur de neutralisation de la guanidine; c’est une base puissante, mais elle ne possède qu’une seule fonction basique malgré la répétition du groupement Az H?. — M. de Forcrand a déterminé les chaleurs de formation des dérivés disodiques des trois diphénols isomères. Pour la pyrocatéchine le second équivalent de soude dégage moins de chaleur que le premier, et la demi-somme est précisément égale à la chaleur dégagée par la saturation du phénol ordinaire; il y a là un fait identique à celui qu'a observé l’auteur dans la comparaison thermochimique du glycol avec les alcools monoatomiques primaires. Pour la résorcine, les deux fonctions phénoliques ont la même valeur. Pour l'hydroquinone, si la première fonction phéno- lique a la même valeur que celle du phénol ordinaire, la seconde est inférieure de près de 2 Cal; la position para, telle qu’elle est représentée dans nos schémas actuels, si elle explique la diminution de l'acidité moyenne par 2 groupes CH intercalés entre les COH, rend difficile la conception d’une combinaison intra- moléculaire entre les deux fonctions pouvant expliquer leur inégalité, — M. G. Massol a déterminé la chaleur de neutralisation de l'acide pyrotartrique normal (glutarique); elle est plus faible que celle de J’acide succinique et que celle de l’acide méthylsuccinique ou pyrotartrique 6. C’est donc une confirmation de la note de la séance précédente, — MM. J. Hausér et P. Th. Müller continuent leurs recherches sur la vitesse de décomposition des diazoïques par l’eau. Ils ont constaté que parmi les produits de décomposition, le phénol exerce une influence retardante sur le phé- nomène, et que cette propriété du phénol est impu- table au noyau benzénique. 30 SCIENCES NATURELLES, -— MM. Brown-Séquard et d'Arsonval exposent que le phénomènede la sécrétion interne est général, et que c’est une méthode théra- peutique générale que d’injecter les liquides d'or- ganes d'animaux sains à des malades chez qui tel or- gane déterminé ne peut plus fonctionner. Ilest reconnu aujourd'hui que de telles injections sont inoffensives, surtout si l’on emploie le procédé de filtration et de stérilisation de M. d'Arsonval (filtration sur une bougie d’alumine sous la pression des vapeurs d'acide car- bonique liquéfié). Les organes pour lesquels le fait est démontré actuellement sont : les glandes génitales (M. Brown-Séquard), le corps thyroïque (M. Gley), les capsules surrénales (M. Brown-Séquard, MM. Abelous et Langlois), Il a été fait dans le service de M. Bouchard par M. Charrin deux essais de traitement du myxædème ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 493 par l'injection de suc thyroïdien, le succès a élé com- plet. — M. Grigoreseu : Trois cas d'augmentation de la vitesse de transmission des impressions sensitives sous l'influence d'injection du liquide testiculaire. (Voir Soc. de Biologie, 14 mai.) — M. A. Charpentier avait avancé antérieurement, en se fondant sur diverses con- sidérations, que les divers rayons de la lumière blanche sont perçus avec un retard différent pour chaque cou- leur et croissant avec la réfrangibilité. Il apporte au- jourd'hui deux expériences qui sont la vérification di- recte de cette théorie. 1° Une lumière instantanée blanche éclatant devant la fente d’un spectroscope donne à l’œil placé à l’oculaire la sensation d’un spectre se déroulant rapidement du rouge au violet. 20 Un corps blanc étroit se déplacant sur fond noir avec des conditions de vitesse et d'éclairage bien choïi- sies, l'œil étant rigoureusement immobile, donne la sen- sation d’un spectre peu intense, mais bien visible com- prenant la région du rouge au vert. — M. A. Chatin signale une nouvelle espèce de Terfis qui lui a été envoyée de Biskra, le Tirmania Cambonii, —M.J. Welsch décrit le système des plis du terrain secondaire dans les environ de Poitiers, — M. L, Mazzuoli a étudié la formation ophiolitique puissante qui se présente dans la Ligurie orientale parmi les terrains éocènes ; les principales roches qui constituent celte formation sont la serpentine, l’euphotide, les jaspes et les phtanites, disposées dans cet ordre, le tout reposant sur les schistes et les calcaires de l’éocène inférieur. M. Maz- zuoli étudie les relations qui existent entre ces diverses espèces. Nomination. — M, von Helmholtz est nommé associé étranger, Séance du 20 juin 1° SCIENGES MATHÉMATIQUES, — M. S. Mangeot : De la loi de correspondance des plans tangents dans la trans- formalion des surfaces par symétrie courbe, — M. Fla- ment : Sur la répartition des pressions dans un solide rectangulaire chargé transversalement.— M. P. Vieille avait, il y à dix ans, avec M. Sarvau, déterminé la loi de résistance descylindres de cuivre dont l’écrasement dans le manomètre crusher mesure la pression déve- loppée par les explosifs; cette détermination avait été faite au moyen de la balance de Jæssel, mais dans les conditions propres à éliminer les forces d'inertie qui interviennent dans le jeu normal de cet appareil et faussent le tarage, le fonctionnement du manomètre étant en réalité statique. Toutefois, comme il subsis- tait une cause d’erreur possible dans les frottements de l'appareil, M. Vieille a repris ces déterminations au moyen d’un appareil plus simple, constitué par un piston libre du système de M. Amagat, d'assez fort dia- mètre et reposant, par l'intermédiaire d’un liquide vis- queux, sur une des branches d’un manomètre à mer- cure ; les frottements sont éliminés par une méthode de retournement, L'écrasement est ici très lent parrap- port à celui que donnent les explosifs ; mais la série des résultats obtenus montre que la loi de résistance des cylindres ne dépend que des déformations et non du mode suivant lequel ces déterminations sont effec- tuées. 2° ScrencEs PHysiQuEs. — M. Moessard montre que, lorsqu'on veutexprimer dans sa généralité la loi qui régit dans le cas d'un corps sonore et d'un observateur en mouvement, la hauteur du son perçu par l'observateur il est impossible de calculer la variation de cette hau- teur, comme le veut la méthode Doppler-Fizeau, en ne considérant que le mouvement des deux points. Cette considération s'applique aux mouvements des corps lumineux. — M. Vaschy : Examen de la possibilité d’une action réciproque entre un corps électrisé et un aimant, — MM. P. Sabatier et J.B. Senderens, qui dans leur note de la séance précédente, étudiaient lac- tion oxydante de l’oxyde azotique sur les métaux et les oxydes inférieurs, exposent diverses réactions où cet agent intervient comme réducteur; dans divers cas il y a formation d’azotites en l'absence de l'oxygène de l'air. — M. A. Besson a obtenu le composé PBr-Az, par l’action de la chaleur sur le pentabromure de phos- phore ammoniacal qu'il avait décritantérieurement. — M. E. Péchard a pu isoler l'acide des permolybdates qu'il décrivait récemment, — M. J. Riban a dosépar le permanganate le fer resté en solution dans diverses eaux minérales ferrugineuses après qu'elles avaient été conservées quelque temps en bouteille; les résul- tats, comparés à la composition qu'offrent ces eaux à la source, d’après les auteurs, indiquent un appauvris- sement énormeen fer, — M. P. Cazeneuve, après avoir constaté que l'acide gallique se combine à l’aniline, a vu par le chauffage du produit à l'air libre se produire du pyrogallate d'aniline; la plupart des amines aro- matiques liquides constituent également un milieu fa- vorable à la transformation de l’acide gallique en py- rogallol, sans doute avec formation intermédiaire du gallate correspondant. Le pyrogallol ainsi obtenu fond à 132; les pyrogallols d'originesdiverses suffisamment purifiés présentent un point de fusion voisin de celui- là, qui serait le vrai point de fusion du pyrogallol, et non 115°, chiffre classique. 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Gautier et L. Landi donnent les conclusions de leurs recherches sur la vie résiduelle des muscles séparés de l'être vivant. Séparé de l'animal et conservé à l'abri de l'air et des microbes, le musele continue à fonctionner chimique- ment. Sa vie anaérobie a pour effet de l’acidilier et de peptoniser une faible proportion de ses matières pro- téiques; en mêmetemps une partie de sa myoalbumine se change d’une part en caséine, de l’autre, en leuco- maines diverses. Ses graisses ne varient pas sensible- ment; le glycogène, qui n'existait qu'en très petite quantité, disparait avec formation d’un peu d’alcool; il ne se forme pas durée, et l’ammoniaque, qui existait à l’état de traces, augmente à peine; il se forme une très petite quantité d'acide carbonique, ne répondant même pas au dédoublement du glycogène; il se dégage encore un peu d'hydrogène et d'azote. Les auteurs pas- sent ensuite en revue les bases extraites du tissu mus- culaire et notent brièvement leur action physiologique, — M. Arloing a étudié systématiquement les chan- gements de composition que les filtres de porcelaine font subir aux liquides qui les traversent; il a pris, comme objet d'étude, le liquide qui s'échappe des pulpes de betteraves des sucreries après leur fermenta- tion en silo ; c’est un liquide complexe, contenant des diastases et des acides, et fortement toxique. Le pas- sage sur les filtres Chamberland dépouille ce liquide d’une partie notable de ses divers principes, dans une proportion variant de 20 à 40 0/0, la toxicité baisse des quatre cinquièmes. M, Arloing tire la conclusion que l'emploi des filtres pour l'étude des produits solubles d’origine microbienne présente de sérieux inconvé- nients. — MM. Ch. Bohr et V. Henriquez ont com- paré sur le chien, après avoir ralenti par un disposi- tif particulier la circulation pulmonaire, d’une part, les gaz du sang du ventricule droit et du sang de la carotide, d’autre part les gaz de la respiration dans le même temps. La différence trouvée entre les deux sangs ne rendant compte que d’une partie de l’acide carboni- que exhalé et de l'oxygène absorbé par le poumon, les auteurs en conclurent à l'existence d’oxydations éner- giques dans le poumon lui-même. — M. Ch. Richet a étudié l'influence de divers sels métalliques sur la fer- mentation lactique, il donne brièvement le résultat de ses expériences : il faut distinguer pour les sels qui s'opposent à la fermentation lactique, une dose ralen- tissante et une dose empêchante, ces deux doses étant dans un rapport très différent suivant la substance considérée; au-dessous de la dose ralentissante, les métaux, même les plus toxiques, exercent une action accélératrice, L'effet de la substance porte moins sur l'activité chimique propre du ferment que sur sa pulln- lation. Deux métaux chimiquement voisins peuvent avoir des activités toxiques très différentes, suivant 494 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES que l’un est usuel et l’autre rare, celui-ci étant le plus toxique. — M. J.-P. Morat a vérifié, par des méthodes précises, l'existence de nerfs vaso-dilatateurs pour le membre inférieur dans les racines postérieures du plexus lombaire. Un fait remarquable c’est que le centre trophique de ces nerfs centrifuges est situé dans le ganglion de la racine, comme celui des nerfs sensitifs de cette même racine. — M. P. Brouardel expose le système sanitaire adopté par la conférence de Venise pour empêcher le choléra de pénétrer en Europe par listhme de Suez. — M. C. Viguier a eu l’occasion de contrôler expérimentalement les obser- vations de MM. Groom et Loeb sur l’héliotropisme des Nauplius de balanes, observations dont il avait rendu compte, dans cette Revue, dans un article sur la faune pélagique publié en juillet et août 1890 ; il a reconnu que le phénomène est bien moins simple que ne l'in- diquaient ces auteurs, — M. G. Pouchet a eu l'occa- sion d'examiner de nombreux échantillons d’ambre gris ; il expose diverses remarques qu’il a faites sur ces productions intestinales du Cachalot. — M. G. Ber- trand a cherché à séparer les divers principes 1mmé- diats de la paille; le traitement par une lessive alcaline donne la æylane de MM. Allen et Tollens et une matière jaune nouvelle, la lignine; le résidu est composé de cel- lulose et de vasculose. Les tissus lignifiés les plus va- riés donnent toujours ces quatre principes. — M. A. Muntz a examiné sur un vignoble de la Gironde, la facon dont se répartissent, les divers éléments des en- grais dans le vin, les marcs, les feuilles, le sarment, etc. Le vin enlève fort peu de chose, ce sont les feuilles qui contiennent de beaucoup la plus grande partie de l'azote, de l'acide phosphorique, de la potasse, etc. — M. A. Delebecque a exploré divers petits lacs du Jura, du Bugey et de l'Isère ; il donne quelques détails sur les plus intéressants d'entre eux. Mémoires présentés. M. A. Basin adresse une nole sur le transport des eaux minérales en baril. L. LAPICQUE. SOCIÈTÉ DE BIOLOGIE Séance du 4 juin MM. Abelous et P. Langlois : L'extrait alcoolique, repris par l'eau, provenant des muscles d'une grenouille normale, n’a aucune HE si on l'injecte à une gre- nouille qui vient de subir l'ablation de deux capsules surrénales ; le même extrait, provenant de grenouilles mortes à la suite de l'acapsulation, ou de grenouilles télanisées jusqu'à épuisement, produit instantanément, chez les grenouilles acapsulées, le syndrome See par les auteurs comme la suite de cette ablation. M. P. Richer présente un appareil destiné à mesurer chez l’homme vivant l'épaisseur du pannicule adipeux. — MM. Alezaiïs et d'Astros : Les arlères nourricières du moteur oculaire commun et du pathétique. — A propos d’une communication récente sur la guérison de l’épilepsie par les inoculations antirabiques, M. Féré rappelle que presque toutes les maladies intercurrentes influencent les accès épilepliques, soit pour les sus- pendre, soil pour les réveiller. — MM. Arnaud et Charrin, à propos de la note récente de M. Guinochet sur la formation des toxines diphtéritiques dans l'urine exempte d’albumine, insistent sur la nécessité, si l’on veut tirer légitimement des conclusions comme celles que M. Guinochet tire de ses expériences, d'opérer sur des milieux synthétiques parfaitement connus. C'est © qu'ils ont fait pour le bacille procyanique. Avec l'urine au contraire, ou tout autre milieu naturel, la connais- sance des conditions chimiques est limitée par la sen- sibilité des réactifs, et celle-ci est généralement insuf- fisante. — M. Grimaux appuie ces considérations. — MM. L. Lapicque et A. Malbec ont étudié chez le chien l’action de l'iodure de strontium sur la cireu- lation ; on peut reconnaitre d’abord l’action du stron- tium, puis celle de l'iode, commune à tous les iodures, consistant en un abaissement de la pression avec accé- lération du cœur. — M. Lapicque a cherché à déter- miner l’activité physiologique relative de divers iodures en fixant la quantité minima de chacun d’eux qui produit chez le chien la chute de pression caractéris- tique. Les chiffres ainsi obtenus pour les iodures de sodium, de potassium, de calcium et de strontium, sont très voisins les uns des autres, Cet effet circulatoire doit d’ailleurs étre rapporté à une paralysie cardiaque et non à une action vaso-motrice avec des doses moindres, et en se placant dans des conditions parti- culières, on peut obtenir, au contraire, par l’iodure de sodium le renfoncement de la puissance tonique du cœur, D'autre part, l'iodate de sodium est pour le cœur de la grenouille un poison systolique. Ces derniers faits rendent comptent vraisemblablement de l’emploi thérapeutique des iodures dans les affections car- diaques. Séance du 11 juin M. Depoux expose l’histoire d’un ataxique avéré qui a été guéri par des injections du suc testiculaire ; l'absence du reflexe rotulien a seule persisté. — M. Brown-Sequard signale un certain nombre de résultats analogues obtenus par divers praticiens. — MM. C. Nourry et C. Michel ont inoculé à quatre chiens du virus tuberculeux provenant d’une vache, après avoir pratiqué sur deux de ces chiens des injec- tions de suc testiculaire; ces deux-là n'ont pas été malades, les deux autres sont morts. — M. G. Mari- nesco indique un manuel opératoire permettant d’at- teindre et de détruire l'hypophyse chez le chat, par la voie buccale; cette lésion est compatible avec une survie de plusieurs semaines. — M. Tuffier signale un cas de suppuration rénale chez l’homme dans lequel tous les essais de culture ont été stériles. — MM. Ch. Féré, L. Herbert et F. Peyrot: Note sur l'accumu- lation et l'élimination du bromure de strontium. — M. G. Pouchet annonce qu'il a obtenu encore une fois la mélanine en trailant du sang de baleine par le bichlo- rure de mercure et l'alcool ; le même auteur rapporte quelques observations qui démontrent que la colo- ration grise des pièces anatomiques conservées dans l'alcool a besoin, pour se produire, de l'accès de l’oxy- gène atmosphérique, — M. J.-B. Charcot présente un appareil destiné à évoquer les images motrices gra- phiques chez les sujets atteints de cécité verbale ; : les observations qu'il a faites avec cet appareil lui parais- sent démontrer l'existence d'un centre moteur graphique fonctionnellement distinct. — M. Ouspenski rapporte diverses observations de tuberculeux considérablement améliorés par les injections de suc testiculaire ; il a mème obtenu par ce traitement plusieurs guérisons qui semblent définitives. — M. H. Beauregard expose une nouvelle théorie du rôle de lappareil de Corti dans l'audition, théorie à laquelle il a été conduit par ses études sur l’anatomie comparée de l'oreille chez les mammifères: au passage des ondes liquidiennes de l'oreille interne, l’ensemble de l'appareil de Corti (membrane basilaire, ares de Corti, cellules de soutien et cellules à bàâtonnet), ensemble qui constitue une sorte de sommier élastique plus ou moins tendu, c’est- à-dire, accordé pour des vibrations plus ou moins rapides, entre en vibration tout entier; les cellules à bâtonnet viennent heurter la membrane fectoria et donnent lieu à la sensation, — M. A Treille ayant observé des flagella dans l'urine hématurique d’un sujet qui ne présentait aucun symptôme de paludisme, dénie toute valeur pathogénique à ces flagella. — M. Roger a constaté que les grenouilles qui “ont subi l’ablation totale du foie meurent rapidement si on les laisse dans un aquarium clos, mais survivent plusieurs semaines si on les maintient dans de l’eau courante. — M. Dewèvre : Note sur la contracture plantaire pro- duite par le surmenage. Séance du 18 juin. M. Strauss a réussi au moyen de la solution fuchsi- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1953 née de Zechl à mettre en évidence le flagellum de quel- ques bactéries mobiles sur le microorganisme vivant. — M.Lépine a constaté chez un chien intoxiqué par la vératrine que le pouvoir glycolytique n’avait pas varié, mais que le pouvoir saccharifiant du sang s'était exa- géré. Tel serait le mécanisme de la glycosure veratri- nique signalée chez la grenouille par Araki. — MM. Railliet et Moussu, en faisant l’autopsie d’un äne de Bohémiens atteint dela filariose hémorragique cu- tanée des chevaux d'Orient, ont pu déterminer l'habi- tat du parasite qui gite dans le tissu conjonctif sous- cutané; mais la filaire peut se trouver à l’état aberrant dans divers organes, et même dans la moelle épinière. Ces auteurs ont découvert le mâle jusqu'ici inconnu ; ils donnent la diagnose complète de l’espèce. — M. Grigorescu rapporte un nouveau cas d’accéléra- tion de la vitesse de transmission sensitive chez un ataxique traité par des injections de suc testiculaire. — M. Brown-Sequard et M. d’Arsonval rapportent chacun de leur côté de nouveaux cas d'amélioration d'ataxique par ces injections. — MM. Gley et Charrin signalent deux localisations spontanées du bacille pyo- cyanique, l’une dans les ganglions d'un porc mort de broncho-pneumonie, l’autre dans le péricarde d'un chien sacrifié pour une expérience quelconque, Ils passent en revue à ce propos les habitats extrêmement variés de ce microbe., — M. Dastre avait indiqué ré- cemment que des sangs incoaguables donnent un peu de fibrine par le battage ; inversement on peut obser- ver des sangs qui, ne donnant aucun filament par le battage, se coagulent spontanément au bout d’un temps plus ou moins long. — M. Beauregard étudiant com- pialivement la fenêtre ronde chez les diverses espè- ces de chauves-souris, a constaté que cetorifice dif- fère considérablement des chauves-souris insectivores aux frugivores. Chez les premières qui, on le sait, ont l’ouie très fine et percoivent des sons de grande hau- teur, la fenêtre est beaucoup plus petite que chez les secondes, moins bien douées sous le rapport de l'audition, Quelques considérations d'acoutisque font voir que les différences anatomiques concordent avec les différences fonctionnelles, et les observations de M. Beauregard confirment ainsi le rôle attribué à la fenêtre ronde, de permettre des vibrations plus ou moins amples du liquide labyrinthique. — M. Lau- lanié a observé quelquefois chez le chien, en enregis- trant simultanément la pression sanguine par un ma- nomètre inscripteur et la pulsation cardiaque par un cardiographe spécial, des systoles s’effectuant à vide et n'influencant pas la pression : dans ce cas, la courbe du cardiographe est différente de la courbe nor- male et présente l'aspect d'un tracé de secousse mus- culaire simple. M. Laulanié discute à ce propos la na- ture de la contraction ventriculaire, — M. Laulanié décrit un dispositif de prise d'air dans le courant respi- ratoire pour l'étude des échanges gazeux chez les ani- maux de grande taille. —-M, L. Blanc à trouvé surune coupe d'ovaire de Mus documanus un ovule bien cons- titué avec deux noyaux. L. LaricQue. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 1°" juillet Dans une Thèse toute récente, appréciée par le jury d'une facon fort élogieuse, M. Abraham vient d’eflec- tuer une nouvelle détermination précise au 4 du rapport des unités électrostatiques et électromagné- tiques, par une méthode de mesure des capacités. Pour la mise en œuvre de cette méthode, l'auteur avait eu recours à un premier procédé très ingénieux, et qu'il expose à la Société, Ce procédé repose sur la réalisa- tion d'une machine électrostatique à influence, de ca- pacité calculable d’après ses dimensions géométriques. La machine se compose de deux disques de verre, parallèles et fixes, argentés sur leurs faces en regard. L'argenture à été enlevée sur les deux, suivant une même ligne diamétrale, de manière à constituer deux couples de demi-disques. Le premier couple jouera le rôle d'inducteur,et le second, celui de collecteur. Entre les deux tourne le porteur, constitué par un troisième disque de verre argenté sur ses deux faces de facon à présenter sur chacune une surface métallique annu- laire, s'étendant jusqu'au bas du disque et séparée en deux suivant un diamètre, Les deux demi-anneaux en regard sur les deux faces du disque sont réunis entre eux par un ruban d'argent collé sur la tranche de verre. Chacun des deux demi-anneaux, en passant entre les inducteurs, se trouve mis en communication avec le sol par un ressort et se charge par influence; puis il arrive entre les collecteurs, il entre en commu- nication avec eux au moyen d’un autre ressort, et leur cède sa charge. Les inducteurs sont chargés au moyen d'une pile de 80 à 160 éléments Gouy. Le plateau mo- bile est mu par un moteur Gramme d’un demi-cheval ; la constance de la vitesse de rotation est assurée au =; elle est contrôlée d'abord par une méthode stro- boscopique, puis par une méthode électrique qui per- met d'atteindre une sensibilité plus grande, Le débit de la machine peut se calculer à priori, puisqu'on con- naît la vitesse de rotation et que, de plus, la forme géométrique donnée à toutes les parties permet de calculer la capacité du condensateur formé par les inducteurs et le porteur. L’intensité du courant de dé- charge se mesure par une méthode de zéro, au moyen d’un galvanomètre différentiel, dont le second circuit est parcouru par une dérivation prise sur la pile de charge elle-même. M. Abraham a observé les trois résultats principaux suivants : 1° le débit de la ma- chine est rigoureusement proportionnel au potentiel de la charge de l’inducteur; 2° l'intensité du courant de décharge est encore rigoureusement proportionnelle à la vitesse; la vitesse est connue au +, les résultats ne diffèrent eux-mêmes que du millième; 3° le coeffi- cient de débit observé coïncide au {avec le coefficient calculé d’après les dimensions de la machine, Cette mesure des coefficients de débit n’est autre qu’une mesure du rapport v. En effet, au moyen des dimen- sions géométriques, c’est la capacité électrostatique qu'on calcule, tandis que le galvanomètre donne l’in- tensité électromagnétique. Les valeurs trouvées, sui- vant qu'on prend le débit observé ou calculé, sont 3,014 X 1010 et 2,98 X 19 1. Le calcul ne peut être fait qu'au #&, car, dans le calcul de la capacité, inter- viennent deux corrections, d’abord celle des bords ex- ternes, qui peut s'évaluer d'une facon satisfaisante, et aussi celle relative au bord interne de l’argen- ture, continuée par une plaque de verre, correction difficile à évaluer et qui amène une perturbation de l’ordre du 400°. — M. P. Curie complète l'exposé cri- tique entrepris dans la dernière séance des travaux de M. J. Curie et de MM. Warburg et Tegetmeier sur la conductibilité du quartz. Pour rechercher si, dans le quartz, c'est bien l’eau retenue dans les petites cavités intérieures qui joue un rôle prépondérant au point de vue de la conductibilité, M. J. Curie à opéré sur un corps tel que la porcelaine dégourdie, dont on puisse faire varier à volonté le degré d'humidité intérieure. On arme la lame de porcelaine en crayonrant les deux faces avec du graphite, de manière à dessiner une partie centrale et un anneau de garde. Dans une at- mosphère très humide, la porcelaine est traversée par un courant constant comme un électrolyte. Pour une atmosphère un peu plus sèche, on à encore un courant constant, mais plus faible, L'état hygrométrique deve- nant de plus en plus faible, la conductibilité devient variable avec le temps, et baisse d'autant plus rapide- ment que l’état hygrométrique est plus bas; enfin, les phénomènes de polarisation commencent à se mani- fester et donnent lieu à des décharges en tout analogues à la décharge résiduelle des diélectriques. Si on des- sèche complètement la lame, elle se comporte comme un diélectrique parfait. On retrouve là des lois de variations des conductibilités avec le temps en tout 496 ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES identiques à celles que montrent les divers diélec- triques. En particuher, la loi de superposition se vé- rifie très bien. En présence d’une présomption aussi forte, M. Curie a achevé la démonstration du rôle de l’eau dans le quartz, en opérant sur des lames de quartz perpendiculaires à l’axe, après les avoir portées à des températures de plus en plus élevées. Les résultats ont été absolument les mêmes que pour la porcelaine hu- mide, Quant aux quartz parallèles, dont la conducti- bilité est déjà très faible, la chauffe ne les modifie pas, si ce n’est que la déviation progressive des lignes de force avec le temps ne se produit plus. MM. Warburg et Tegetmeier ont beaucoup douté que l’eau füt la cause des phénomènes présentés par le quartz. Pour étudier la conductibilité d’une lame de quartz, ils consti- tuent l'anode et la cathode en contact avec la lame cristalline, soitavec du mercure, soit avec un amalgame contenu dans un vase de fer. Ils ont d'abord montré qu’en placant du mercure pur des deux côtés, et en opérant soit sur du quartz, soit sur du verre, le courant s’arrète bientôt. M. Warburg avait montré antérieure- ment que, dans le cas du verre, cet arrêt était dù à la formation d’une couche de silice. Les auteurs émettent alors l'hypothèse que la substance étrangère contenue dans le quartz pourrait être, non pas de l’eau, mais un silicate alcalin, répandu dans le quartz comme un sel dans son dissolvant. En prenant comme anode de l’amalgame de sodium, le verre présente une véritable conductibilité électrolytique et le sodium le traverse en quantité déterminée par la loi de Faraday. Le li- thium traverse, suivant la même loi. Ainsi, dans un verre à 13 °/, de sodium, le lithium est venu s'y subs- tituer jusqu'à 8 °/.,. Au contraire, le potassium, ne tra- verse nullement le verre. Avec le quartz, les résultats relatifs au sodium, au lithium et au potassium sont identiques à ceux que présentent le verre. En analy- sant divers échantillons de quartz, les auteurs ont trouvé qu'il y avait toujours des traces de sodium et de lithium, et d’après eux, ce serait ces traces qui entreraient en jeu pour produire la conductibilité, D'ailleurs, les lois de celte conductibilité sont com- plexes. La lame cristalline devient progressivement plus conductrice, à mesure que la différence du poten- üiel augmente; mais, si l'on maintient alors constante la différence de potentiel, la conductibilité décroit de nouveau, Puis, si l’on fait passer le courant en sens inverse, du mercure à l’amalgame de sodium, il se forme une couche de silice, et la conductibilité s’an- nule. Qu'on retourne le courant, la lame redevient con- ductrice. Ce résultat pourrait être dù à la présence de traces de soude dans l’amalgame de sodium. Enfin, M. Tegetmeier a porté les lames de quartz à diverses températures et a toujours trouvé les mêmes résultats que pour des lames vierges. C’est là une contradic- tion absolue avec les expériences de M. J. Curie, L’exa- men des mémoires des deux auteurs conduit à croire que les deux faits sont vrais à la fois. Dans les condi- tions où s’est placé M. Curie, la lame ne conduit certai- nement plus, mais cette lame, installée avec le dispo- sitif de M. Tegetmeier, redevient conductrice, c'est-à- dire que c'est au contact de la soude que les plaques de quartz recouvrent leur conductibilité. Une seconde discordance consiste en ce que la valeur trouvée par M. Curie pour la conductibilité est mille fois plus faible. Mais il est bien difficile de faire une comparaison entre les deux méthodes opératoires. M. Curie conclut que l'exposé de ces divers travaux montre bien que, si la charge instantanée d’un diélectrique est un phénomène entièrement distinct; au contraire, il y a continuité parfaite entre le courant d'intensité décroissante qui correspond à la charge résiduelle et le courant cons- tant de conductibilité de la substance, Ces courants résultent de la présence d’une matière étrangère dans le diélectrique. Lorsque la quantité de matière est faible, il ne peut y avoir encore d’électrolyse, par suite, pas de courant continu; on a simplement une forte polarisation en volume, Edgard Haunié. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Depuis notre dernier compte rendu, la société chi- mique a recules communications suivantes : M. Caze- neuve : Sur les camphosulfophénols ; et sur une cé- tone nitrée dérivée. Sur l’action de l’éthylate de sodium sur l’anbhydride camphorique. — M. Gorgeu : Sur l'électrolyse de l’azolate d'argent. — M. Friedel : Sur un éther camphorique mono-éthylique cristallisé. — M, Bi- got : Sur un hydrocarbure obtenu par distillation de l'acide pimarique. — MM. Prud'homme et Rabaut : Sur la transformation des amines aromatiques en ni- trophénols par le chlorure cuivreux. — M. Güntz : Sur les propriétés du manganèse. — MM. Moitessier et Bertin-Sans : Sur la formation de loxyhémoglobine à l’aide de l’hématine et d’une matière albuminoïde, — M. Trillat : Sur les chlorhydrates cristallisés de mono et diméthylaniline, — M. Béchamp : Sur l'acidité du lait. — M. Istrati : Sur les pétroles de Roumanie, — M. Scheurer-Kestner : Sur le pouvoir calorifique de la houille. — M. Lauth : Sur les matières colorantes dé- rivées de la tétraméthyldiamidobenzidine. — MM. Bé- hal et Auger : Action du chlorure de malonyle et de ses homologues sur les hydrocarbures benzéniques en présence de chlorure d’aluminium.—M. Matignon : Sur la valeur thermique des substitutions hydrocarbonées en relation avec l'azote, —M. Friedel : Sur la réforme de la nomenclature. — M. Maquenne : Sur les hy- drures de toluène, — M, Magna : Essais de formules stéréochimiques nouvelles. — MM. Lachaud et Le- pierre : Sur de nouveaux sulfates doubles de fer et d’ammonium, — MM. Béhal et Desgrès : Action de l’a- cide acétique sur les hydrocarbures non saturés, — MM. Lauth : Sur la paradiamidophénylsulfone. — M. Lepercaq : Sur la formation des acides bromés, Séance du 1° juin M. Dupont a cherché à appliquer la réaction indi- quée par M. A. Pictet pour la préparation des amines secondaires, aromatiques, à l'obtention de la méthylben- zoylanilide, et a constaté que ce procédé qui donne de bons rendements avec la formanilide et l’acétanilide ne donne que des résultats négatifs pour la benzoylanilide. - MM. Béhal et Desgrès ont entrepris une série de recherches pour obtenir des dérivés organiques dans lesquels le soufre se comporterait comme élément qua- drivalent; ils n’ont pas réussi à obtenir le sulfuryle SO; ils n'ont pu obtenir non plus des composés analogues aux hydrocarbures saturés par laction de l'argent, du zinc, ou du sodium sur l’iodure de triméthylsulfine; on n'obtient que de l’iodure et du sulfure de méthyle. Dans toutes les réactions qu'ils ont tentées le soufre tend à revenir à l’état bivalent. — M. Le Bel fait une communication sur les changements de signe du pour- voir rotatoire et sur quelques nouvelles observations se rapportant aux chlorhydrines des alcools secondaires. Séance du 10 juin. MM. Béhal et Auger complètent une communication qu'ils ont présentée à une séance précédente, sur l’ac- tion du chlorure d’éthylmalonyle sur l’éthylbenzine. — M. Moureux indique un nouveau procédé de prépa- ration de l'acide propènoïque (acrylique) qui consiste à traiter l'acide bromopropanoique par la soude caus- tique à l’ébullition; les rendements s'élèvent à 80 °/, du rendement théorique; le propènoate (lacrylate) de sodium, traité par l'oxychlorure de phosphore, donne le chlorure de propènoyle; l’auteur a également obtenu, en partant de ce ce chlorure, l’anhydride propènoique, et la propènamide, — M. Fiquet a étudié l’action des aldéhydes sur l'acide propanoïque nitrile (cyanacétique) et a obtenu des produits de condensation dontil donne les propriétés, ainsi que celles de leurs dérivés. Sous l'influence de la chaleur ils perdent de l'acide carbo- nique et donnent des nitriles non saturés, / CAz C5 Hs — CH = C = C02+-06H5—CH—CH — Car Nco:H ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES L'auteur a préparé le nitrile cinnamique (propényl- nitrile benzène) ainsi que ses homologues dérivés des toluidines ortho, meta et para et le nitrile crotonique (butènenitrile)., — M. Guerbet donne un procédé de préparation de l'acide campholique qui consiste à pré- cipiter par l'acide carbonique la solution alcaline ob- tenue en reprenant par l’eau un mélange de camphre sodé et de bornéol sodé chauffé à 280°, l'acide campho- lique est purifié parcristallisation dans l'alcool. L'acide campholique se comporte vis-à-vis des réactifs colorés comme l'acide camphorique; il n’est pas acide, à l’orangé 3. L'anhydride acétique et le chlorure d'acétyle CIOHTON CuHI70 L’éther éthylique CIMHITO2C2H5 n'est saponifié ni par la polasse aqueuse ni par la potasse alcoolique ; tous ces faits viennent à l'appui de la formule poposée par M. Friedel qui considère l’acide campholique comme un alcool cétone. — M. Haller, afin de vérifier l’exis- tence de la fonction alcool cétone de l'acide campholique, a traité celui-ci par l’isocyanate de phényle; on nobtient pas un uréthane, mais il se dégage de l'acide carbo- nique, et on obtient un anilide; cette expérience ne peut donc pas éclaircir la question de la constitution de l’acide campholique. — M. Bouveault propose une nouvelle formule du camphre qui présenterait un double noyau hexaméthylénique CH5 le transforment en anhydride campholique CH FA H2C\ Ses Co PARA HCX 7 CH? CH qui ne contient plus de double liaison et montre que celte formule s'accorde avec la formule de l'acide camphorique de M. Friedel et permet de remonter fa- cilement à la constitution des dérivés du camphre ou de l’acide camphorique. —: M. Haller indique les rai- sons qui lui font admettre une liaison éthylénique dans le camphre el, par conséquent, rejeter la formule de M. Bouveault, — M. Bertrand a trouvé que le xylose est un produit constant du dédoublement des matières incrustantes chez les végétaux angiospermes, et a été conduit à étudier les propriétés qui permettent de ca- ractériser ce sucre important sur de très petites quan- tités de matière. — MM. Sabatier et Senderens expo- sent le résultat de leurs recherches sur l’action du bioxyde d’azote sur les métaux et les oxydes métal- liques : certains métaux, réduits de leur oxyde par l’hy- drogène, sont oxydés dès la température de 150° à 200; c’est le cas du nickel, du cobalt, du fer etde l’antimoine. Passant en revue l’action sur les divers oxydes métal- liques, M. Sabatier montre que le bioxyde d'azote peut agir comme réducteur sur certains bioxydes tels que l'acide chromique, l'oxyde d'argent, le bioxyde de man- ganèse et le bioxyde de plomb ce qui est en concordance absolue avec les données thermochimiques, A. CouBEs. SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 16 juin 4° SCIENCES PHYSIQUES. — Lord Armstrong : Sur une machine à induction à bobines multiples. En unissant six bobines Ruhmkorff, disposées parallèlement et en les actionnant par six batteries indépendantes, lord Armstrong à obtenu une plus grande production d’é- nergie électrique que celle que l’on aurait obtenue si l’on s'était servi du même poids de fil pour la cons- truction d’une seule grande bobine, On s’est servi d’un interrupteur mécanique, ce système ayant l'avantage de faire se produire les étincelles en succession régu- lière, séparées par des intervalles égaux. La quantité de chaleur développée aux points où le circuit du cou- » 497 rant secondaire est interrompu (ai gaps) est très con- sidérable, mais cette chaleur est presque entièrement localisée au côté négatif de l’intervalle, A une distance de 0,6 pouces, la chaleur était suffisante pour fondre l'extrémité du fil de platine formant l'électrode néga- tive, et quand la distance était réduite à quelques cen- tièmes de pouces, le fil de platine fondait avec une grande rapidité et se ramassait sur lui-même en un globule jusqu’à ce qu’il fût sorti de la région de l'arc où la chaleur était suffisante pour le fondre; un calcul approximatif à montré qu'il se développait environ 42 fois plus de chaleur dans l'électrode négative que dans l’électrode positive. On a étudié l’action des étin- celles sur les poussières et l’on a obtenu quelques ré- sullats remarquables; la poussière la mieux appro- priée à cet ordre de recherches se compose de magnésie calcinée que l’on pile dans un mortier avec une quan- üité suffisante de noir de fumée purifié, de manière à donner à toute la masse une teinte ardoisée sombre. Quand les étincelles passent au-dessus d’un peu de celle poussière étalée sur une feuille de carton blanc il se produit de belles lignes courbes et des figures symétriques. Ces figures montrent de la manière la plus évidente que les fils qui forment les électrodes exercent, comme l’étincelle elle-même, une action dis- persive. Il est bien connu qu’un fil très fin peut être brisé lorsqu'il est traversé par la décharge d'une puis- sante batterie de Leyde ; dans les conditions ordinaires, la cohésion des molécules resserre ces mouvements dans de très étroites limites et restreint leur action aux impulsions imprimées à l'air environnant, On peut donc considérer le trajet d'une étincelle comme un conducteur aérien dont les molécules n’ont pas de co- hésion et qui, par conséquent, se brise à chaque dé- charge, produisant ainsi une dispersion plus considé- rable que celle que détermine le fil. Des expériences ont aussi été faites pour montrer quelle est l’action d’une flamme à travers laquelle on fait passer l’are et l'étincelle, — M. T. Andrews : Sur les effets électro- chimiques du fer aimanté, partie IV. Des barres de même longueur et de même diamètre ont été coupées dans une longue tige soigneusement polie, de telle sorte qu'on puisse les considérer comme pratiquement identiques de composition et de structure, Pour chaque groupe d'expériences, on à aimanté l’une de ces barres d'acier, laissant l’autre dans l’état non aimanté. Les barres ont élé pesées chacune dans une balance et ensuile elles ont été plongées chacune en des vases séparés dans une quantité égale d’une solution de chlorure de cuivre. Après avoir laissé ces barres dans la solution pendant des lemps variés, on les a pesées de nouveau; le résultat moyen d’une série de vingt- {rois expériences, c’est que la corrosion de l'acier ai- manté est plus considérable d'environ 3% — M, F. G. Hopkins : Sur la recherche de l'acide urique dans l'urine. Les procédés décrits sont la conséquence des faits suivants : 1° l’urate d’ammoniaque est tout à fait insoluble dans les solutions saturées de chlorhydrate d'ammoniaque ; 2° si l’on sature des solutions qui con- tiennent mélangés les urates de différentes bases, comme urine par exemple, avec le chlorhydrate d’ammoniaque, la grande action de masse qu'il exerce assure la rapide et complète transformation de tout l'acide urique en biurate d’ammoniaque qui se préci- pite. Dans le cas de l'urine, la saturation par le chlo- rhydrate d'ammoniaque est suivie de la complète pré- cipitation de tout l'acide urique en deux heures au plus. — MM. G. D. Liveing et J. Dewar : Sur les spectres des flammes de quelques composés métalli- ques. Les flammes des substances, telies que les com- posés organo-métalliques dans lesquels les métaux entrent comme éléments chimiques n’ont point encore jusqu'ici été étudiées; les spectres du nickel carbonyle et du zinc éthyle ont été étudiés par les auteurs qui ont déterminé la position des raies et des bandes. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. William Marcet : Contribution à l’histoire de l’échange des gaz pulmo- 149 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES naires dans la respiration de l'homme. On peut ré- sumer comme suit les résultats de ses recherches : 1° l'azote ne joue qu'un rôle très peu considérable, si même il en joue un dans l'échange des gaz pulmonaires ; 20 l'influence de la température atmosphérique sur l'oxygène consommé, l'acide carbonique produit et l'oxygène absorbé est très marquée dans le cas de l’auteur. L'oxygène consommé et l'acide carbonique produit augmentent en même temps que s’abaisse la température, tandis que l'oxygène absorbé diminue; 3° l'oxygène consommé et l'acide carbonique produit augmentent sousl'influence de lanourriture. L'influence de la nourriture sur l'absorption de l’oxygène varie avec_les différentes personnes. — MM. T. Théodore Cash et Wyndham R. Dunstan : Sur l’action physio- logique des nitrites de la série de la paraffine dans leur rapport avec leur constilution chimique; partie IL : ac- lion des nitrites sur le tissu musculaire et discussion des résultats. Continuant leur examen de l’action physio- logique des divers nitrites organiques purs de la série de la paraffine, les auteurs ont étudié leur action sur le tissu musculaire strié. Les conclusions auxquelles ils sont arrivés sont que l’action physiologique de ces nitrites ne dépend point seulement et, dans certains cas, ne dépend mème point principalement de la quantité de nitroxile (AZO*) et que pour toutes les phases de l’activité physiologique, les nitrites secon- daires et tertiaires sont plus puissants que les com- posés primaires correspondants, — MM. S. H. Vines et J. R. Green : Sur les réserves protéiques de Ja ra- cine de l’asperge. L'objet de ces recherches était de déterminer la nature de la substance dont se forme l'asparagine qui est si abondante au printemps dans les jeunes pousses de la plante. Les expériences montrent que la racine de l’asperge ne contient qu'une seule matière protéique de réserve qui, bien qu'étant essen- tiellement une albumine, présente avec les globulines des relalions de parenté qui ne se retrouvent point dans les albumines animales. Outre cette matière pro- téique, on à trouvé dans les extraits trois substances indéterminées dont aucune n’est de nalure protéique. La Société s’ajourne au 17 novembre, Richard A. GREGORY. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 10 juin MM. Gladstone et Hibbert : Sur quelques questions qui se rattachent à la force électromotrice des batte- ries secondaires. La communication contient des ré- ponses à certaines questions soulevées par M. Darriens dans une note lue à la Société internationale des Elec- triciens, le 4 mai 1892, et aux idées exprimées par MM. Armstrong et Robertson dans la discussion d’une note des auteurs, lue devant l'Institution des Ingénieurs électriciens, les 12 et 19 mai. Elle renferme aussi le résultat de leurs récentes expériences sur ce sujet. M. Darriens est d'accord avec MM. Armstrong et Rober- tson sur ce fait que la f. 6, m. considérable qui suit immédiatement Ja charge est due à de l'acide persul- furique et repousse la théorie ordinaire qui veut que le produit ultime de Ja décharge soit du sulfate de plomb aux deux armatures, au moins en ce qui con- cerne l’armature positive, Les auteurs attribuent les grandes quantités d'oxyde de plomb que trouve M. Dar- riens aux difficultés d'analyse, car il n’est pas facile d’odmettre que l’oxyde de plomb resterait tel quel en présence d'acide sulfurique. Ils ont montré aussi que les changements de la f. é. m. durant la charge et Ja décharge coincident très bien avec ceux qu'on obtient en mettant des plaques de Pb et de PbO? dans des solutions acides diversement concentrées, et concluent « que les changements de la f. 6. m. dépendent de la concentration de l'acide qui est entre les surfaces ac- tives des plaques ». MM. Armstrong et Robertson n’ont pas la même manière de voir que les auteurs, et sup- posent que l’acide sulfurique employé est souillé par des peroxydes solubles, et ils estiment aussi que SO/H? lui-même joue un rôle dans les réactions. En ce qui concerne la première objection, les auteurs ne voient pas de raison pour que les traces de peroxyde soluble (s'il y en a) sur les plaques, varient toujours en rap- port avec la concentration de l'acide libre dans lequel plongent les plaques, Sur le second point, ils laissent la question ouverte, En réponse aux critiques relatives à la sommation des deux courbes obtenues respecti- vement avec deux plateaux de plomb et deux de per- oxyde de plomb dans des acides de concentrations di- verses, ils montrent que la courbe résultante coïncide, comme forme et comme grandeur, avec celle qui est déterminée directement quand on met des plateaux de Pb et PbO? dans des solutions acides directement concentrées. Tandis qu'ils admettentla possibilité d'une modification des résultats par Les supports de plomb, ils ne peuvent pas concevoir que des différences aussi notables et aussi constantes que celles qu'ils donnent dans leur note puissent être attribuées à des effets accidentels d'action locale, Pour montrer que l’acerois- sement de la f. é. m. ne dépend pas de la présence ou de l'absence d'acide persulfurique, les auteurs ont étudié la f.e, m. d’une plaque de Pb et d’une de PhO, libres d’oxydes solubles, dans de l'acide sulfurique à 15 °/, de concentration: un diaphragme poreux sépare les deux plateaux. La f. 6. m. était 1,945 volts. Après addition de 4 °, de persulfate de potassium dans le liquide qui entoure PbO?, la f.é.m. est restée inaltérée, tandis que, en plongeant Pb dans le même liquide, on réduit la f. 6. m. à 1,954. On a expérimenté aussi sur des piles à acide phosphorique de différentes concen- trations, En portant la densité de 1,05 à 1,5,on augmente la f. é. m. de 0,176 volts, alors que le calcul fondé sur la loi de Lord Kelvin donnerait 0,171 volts. Dans ce cas, ils considèrent qu’il ne peut y avoir aucun acide analogue à l'acide persulfurique. Ils trouvent aussi que les effets de la charge et du repos sur la f. é. m. dans les pôles à acide phosphorique sont tout à fait ana- logues à ceux qu'on obtient avec l'acide sulfurique. M. Ayrton croit qu'il n'y a aucun doute sur la relation étroite entre la concentration de l'acide et les change- ments de f. é. m. Le point important, selon lui, est de savoir si les changements sont les effets directs de la concentration de l'acide ou s'ils sont dus à des actions secondaires produites par les altérations de la concen- tration, M. Smith dit que M. Robertson et lui ré- pètent les expériences des auteurs avec deux plaques de PbO? continues. Ils ont obtenu des résul- tats analogues à ceux qui sont mentionnés dans la note, mais la véritable explication des effets est encore à chercher, M. Hibbert maintient que les oxydes solubles dont parlent MM. Armstrong et Robertson ne se sont pas présentés dans leurs expériences. Ils ont donc pensé que les changements dans la concentration de l'acide altèrent la f. é. m., tandis que la présence d'acide persulfurique n’a pas d'action. M. Gladstone répond qu'ils ont aussi fait des expériences conti- nues, mais ne les ont pas assez avancées pour pou- voir les discuter dès maintenant. M. Hibbert et lui croient que les effets dus aux actions locales sont de peu d'importance, tandis que MM. Armstrong ef Robertson leur en attribuent beaucoup. Il espère qu'a- vant longtemps la question sera tranchée définiti- vement, — MM. Ayrton et Mather : « Sur des galvano- mètres d'atelier, balistiques et autres, cuirassés. Les galvanomètres décrits sont du type à bobines mobiles et aimants fixes, système dont les avantages sont bien connus, En construisant l'instrument balistique, le but poursuivi a été d'obtenir un instrument sensible et portatif, soustrait aux influences extérieures, car il est souvent désirable de mesurer les flux magnétiques et les champs des dynamos avec des appareils au voisinage des machines. Un des dispositifs adoptés est la bobine étroite décrite dans un mémoire : « Sur la forme des bobines mobiles », lu devant la Société en 1890. Ces bobines ont des avantages particuliers pour CORRESPONDANCE 199 les instruments balistiques ; non seulement on peut obtenir de plus grandes impulsions par la décharge d’une quantité donnée d'électricité à travers cette bo- bine qu'à travers les bobines de forme ordinaire, quand les durées des périodes sont les mêmes; mais, même quand on emploie le même aimant régulateur, la même longueur de fil dans la bobine, et qu'on la suspend dans le même champ, la bobine étroite est plus sen- sible à la décharge qu'aucune autre forme de bobine, Une autre disposition est l’emgloi d’une bande de bronze phosphoré pour la suspension au lieu de fil cireulaire, Pour un poids tenseur donné, l’aimant régu- lateur est diminué par l'emploi de la bande. En fé- vrier 1888, les auteurs ont employé un d’Arsonval du type ordinaire comme instrument balistique et trouvé que, quoiqu'il soit commode pour comparer des con- densateurs, pour les mesures d’induction l'amortis sement était excessif, à moins que la résistance dans le circuit ne fût très grande, ce qui réduisait beau- coup la sensibilité. En 1890, ils ont essayé un milli- ampèremètre Carpentier comme instrument balistique, mais ont trouvé qu'il manquait de sensibilité. Un ins- trument à bobine étroite, fait la même année, se trouve sensible pour les courants continus ;mais, comme la bo- bine mobile était enrouléé sur du cuivre pour donner un amortissement, il ne pouvait servir comme balistique, En janvier 1892, un instrument analogue fut construit pour être employé comme balistique, et on le trouva très sensible et très convenable. Bien que la bobine n'eùt qu'une résistance de 13 ohms, un microcoulomb donne une impulsion de 170 divisions d'une échelle à une distance de 2.000 divisions, la durée de la période étant 27 secondes. L’instrument peut être employé à côté d’électro-aimants ou de dynamos, et il est si sen- sible que, pour les mesures d’induction ordinaires, on peut mettre en série avec lui de grandes résistances, en {réduisant ainsi l'amortissement à une valeur très faible. D'un autre côté, la bobine peut être amenée à s'arrêter immédiatement au moyen d’une clef qui met en court-circuit, et a l'avantage qu'il n’est pas néces- saire de redéterminer la constante chaque fois que l’on s’en sert. Le principal mconvénient de tels instruments est leur amortissement variable avec la résistance du circuit sur lequel on les ferme. On peut le surmonter néanmoins en disposant des shants et des résistances de telle sorte, que la résistance extérieure, entre les bornes du galvanomètre, soit la même pour toutes les sensibilités. Un instrumtent balistique portatif, disposé pour l'usage des ateliers, est décrit ensuite. C’est une bobine étroite et un index mobile sur un disque dont la circonférence totale est divisée en 200 parties, L’ins- trument a été calculé pour donner un tour complet pour un renversement d’un flux de 2 millions d’uni- tés C. G.S., mais l’index peut effectuer une ou plusieurs révolutions. Pour étudier les flux perdus, on emploie une bobine d’épreuve avec une aire totale de 10,000 cm. carrés, et munie d’un dispositif à détente qui permet de le faire tourner brusquement de 180°. L'instrument donne ainsi. par lecture directe, l'intensité du champ en lignes C. G. S. On emploie des résistances pour faire varier la sensibilité dans des rapports connus, Revenant aux perfectionnements apportés aux instru- ments à cadre mobile depuis janvier 1890, au moment où une communication sur « les galvanomètres » fut lue devant la Société par le D' Sumpner et les auteurs actuels, M. Ayrton dit que M. Cramplon a beaucoup augmenté la sensibililé de l'instrument Carpentier en suspendant le cadre avec une bande de bronze phos- phoré., — M. Paul a exposé un instrument à bobine étroite, qui réunit les avantages d'être portatif, S’amor- lissant aisément, à indications rapides et sensibles, On a montré des spécimens de ces instruments. Les bobines mobiles sont enfermées dans des tubes d’ar- gent qui servent à amortir les oscillations. Une telle bobine est suspendue dans un tube de laiton qui forme aussi le support dumiroir, et passe entre les pôles d’un aimant circulaire fixé à la base. Pour arrêter la bobine, une cheville montée dans un ressort à rainure passe à travers un trou dans le tube de laiton. On peut, en quelques secondes, enlever un tube et le remplacer par un autre renfermant une bobine de résistance diffé- rente, Un instrument de ce genre, avec une bobine de 300 ohms, donne 95 divisions par microampère, et l'amortissement en circuit ouvert est tel qu'une impal- sion n'est que le £ de ce qu'on prévoit, En comparant les instruments récents à ceux qui sont mentionnés dans le mémoire sur les galvanomètres cité plus haut la différence de dispositif est apparente, car leur sensi- bilité est, pour la même résistance et lamème durée de période, aussi grande que celle des galvanomètres Thomson. Le Professeur Perry remarque que les forces dont il s’agit sont extrêmement faibles. M. Swin- burne pense que les galvanomètres balistiques doivent être plutôt regardés comme des instruments indiquant l'intégrale de temps de la f.é.m. que comme donnant la quantité. Illustrant sa pensée en se rappor- tant aux dynamos, il dit que, si deux machines, dynamo et moteur, sont reliées par des fils, et que si l’armature de la dynamo tourne d’un angle quelconque, celle du moteur tournerait du même angle en supposant éli- miné le frottement, etc. Parlant des figures de mérite, il montre que la puissance dépensée est le facteur im- portant. Le Professeur S.-P. Thompson demande quelles sont les plus grandes périodes obtenues jus- qu'ici avec les instruments à bobine étroite, La désai- mantation, dans les grandes dynamos, est si lente, qu'il faut des instruments à très longue période, Il a lui-même employé une bobine surchargée d'un poids pour de pareilles mesures. IL cherche aussi à savoir pourquoi les figures de mérite sont exprimées en divi- sions de l’échelle située à une distance de 2.000 divi- siôns, au lieu d’être exprimées en mesure angulaire ou en tangente. M. Smith demande quelle est la lon- gueur de la bande qu'il faut employer pour empêcher un déplacement permanent quand la déflexion dépasse une révolution. M. Trotter estime qu’en étudiant des flux magnétiques avec l'instrument balistique d’a- telier, la bobine d’épreuve peut être laissée dans le circuit au lieu d’être mise sur un autre circuit, Il vou- drait savoir quelle erreur introduit le changement d'amortissement qui a lieu quand la résistance du cir- cuit ne reste pas absolument constante. En répondant, M. Ayrton dit que M. Boys a montré que la manière scientifique d’allonger la période n'est pas de sur- charger les cadres ou les aiguilles mobiles, mais d’af. faiblir Paimant régulateur, On a obtenu des périodes de cinq secondes. Jusqu'ici, il n’est pas aisé d’obtenir des périodes plus longues, à cause des difficultés qu’on a à obtenir des bandes suffisamment minces, et à cause du magnétisme des matières employées, CORRESPONDANCE SUR LES VARIATIONS DE Mon cher directeur, Dans l'article, si plein de vues originales, que M. Schützenberger vient de faire paraître dans votre excellente Revue, se trouve soulevée une question à laquelle, malgré tous les progrès de la chimie moderne, LA VALENCE EN CHIMIE il est encore bien difficile de répondre : c'est celle de la variabilité des valences chez les différents corps simples, ou plutôt de la cause de cette variabilité, car personne, je crois, ne songe guère aujourd’hui à re- garder la valence comme une caractéristique immuable EN AE RER ed it df LT | rs, > Lot din. 54 1 i É. 500 de chaque élément. Ne sait-on pas, en effet, que cer- tains corps, comme le mercure el le cadmium, sont zérovalents à l’état de vapeur, alors qu'ils sont diva- lents dans leurs composés ? M. Flavitsky, néanmoins, fait remarquer que la va- lence maxima d’un élément peut être considérée comme fixe : ses composés incomplets dérivent alors, par transformation simple, de combinaisons instables, qui, à l’origine, étaient saturées. M. Schützenberger, d'avis contraire, incline à prendre comme valence principale celle qui correspond au mi- nimum de la capacité de saturation et, par un partage convenable des affinités de l’azote, il arrive à montrer que ce corps, trivalent dans le gaz ammoniac, garde encore le même caractère dans le chlorure d’ammo- nium. Le schéma qu'il propose pour ce composé présente, sur la formule classique du sel ammoniac, l'avantage de mieux établir les relations réciproques des atomes qui composent sa molécule; mais il ne m’appartient pas de discuter ici des théories ingénieuses : je voudrais seu- lement, à propos de ces théories et sur le même sujet, exposer quelques-unes de mes idées personnelles, qui n’ont d’ailleurs d'autre mérite que leur extrême sim- plicité. On sait, en chimie organique, que la capacité de saturation du carbone n’est pas toujours exactement remplie : à côté de l’hexane, par exemple, qui est sa- turé, nous trouvons l’hexylène C$H!, le diallyle CFH10, le diallylène C6HS et le dipropargyle CSH6, dont les valences croissent régulièrement, par paires d'unités, depuis 2 jusqu’à 8; tous ces corps sont en relation simple les uns avec les autres, puisque par hydrogéna- tion ils reproduisent le même type saturé C‘H!‘; on peut donc les considérer comme dérivant d'un même noyau Cf, qui joue dans leur molécule le rôle d’un radical indivisible, c’est-à-dire d’un véritable corps simple, et change progressivement de valence, absolu- ment comme le soufre ou le chlore, dans la série de leurs acides oxygénés. Dès lors ne pourrait-on pas rapprocher ces corps en apparence si distincts, et expliquer leurs variations de valence de la même ma- nière ? Il semble d'autant plus logique de le faire que la capacité de saturation des corps simples, azote, soufre ou chlore, peu importe, varie ordinairement d'un nombre pair, exactement comme celle des hydrocar- bures. L’acide persulfurique SO‘H paraît offrir une exception à cette règle, en nous obligeant à y voir fonctionner le soufre comme heptavalent; mais la for- mule précédente est-elle assez sûre pour qu'il soit in- terdit de la doubler? tous les autres acides du soufre sont bibasiques; en outre, la production, signalée par M. Berthelot, de l’acide persulfurique dans l’action de l’eau oxygénée sur l'acide sulfurique ordinaire, n'est pas sans analogie avec la préparation des peroxydes d’acétyle ou de benzoyle de Brodie; par suite, le pe- roxyde d’acétyle étant C2H30 — 02—C2H°0, on serait peut-être en droit de représenter l'acide per- ! sulfurique par la formule (0) (0) Il (l HO — S—0?—$S—0OH || |l (0) 0 qui rend compte, aussi bien que possible, de ses pro- priétés et laisse au soufre sa valence paire habituelle. Mais revenons à l’'analogie signalée entre les corps organiques et les corps minéraux incomplets; il n’y a que deux moyens d'interpréter la non-saturation des ————————————————————— CORRESPONDANCE ——— ————…—…”…"…"—"—"—" —"—"—"——…"—…—…—…—…—…"—"…"…"—"…"…"…"…"…"…"…"…"…"—"—"—…——……… —"—Ù————————— carbures éthyléniques : ou bien les deux valences qui s’y trouvent disponibles sont libres de toute attache, et alors l’éthylène prendra la forme : HO | —C—C—: [NE He ou bien elles sont momentanément échangées entre atomes voisins, et alors le même carbure devra être écrit : ÉRE | | DE | | HUE C’est ce dernier symbole qu'on préfère, parce que c'est le seul qui permette de comprendre pourquoi il n'existe pas de carbures renfermant un nombre impair d’atomes d'hydrogène. L'éthylène devient par suite une sorte de corps cyclique, dont la chaîne, en s’ou- vrant, met eu liberté deux valences, ainsi qu'il arrive avec le triméthylène quand on le traite par le brome. Mais les hydrocarbures cycliques peuvent renfermer un nombre x quelconque d’atomes de carbone; pour n—1, nousauronsle premier des carbures éthyléniques possibles : c’est le méthylène CH?, dont l’oxyde de car- bone représente un dérivé réel; la double liaison de l’éthylène y est remplacée par la soudure interne de deux valences empruntées au même atome de carbone, Si l’on préfère, dans les carbures éthyléniques laisser libres les valences qu’ils manifestent dans leurs réactions, on fera de même pour l’oxyde de carbone. Ce gaz ne pourra alors être représenté que par l’une des deux formules : —10—10 =) =) qui correspondent exactement, c’est là le point capital de cette discussion, aux deux schémas possibles de l’éthylène ou de ses dérivés. Le même raisonnement étant applicable à tout autre corps que le carbone, on concoit ainsi comment la va- lence peut, d’une manière générale, présenter des va- riations qui sont toujours un multiple de 2. Il y a plus : quand on compare avec soin les car- bures éthyléniques aux carbures saturés, on s'aperçoit bientôt que ces deux séries parallèles diffèrent par autre chose que leur formule brute et leur capacité de saturation, La puissance réfractive de leurs noyaux, par exemple, est notablement plus forte dans le pre- mier cas que dans le second, et cela quel que soit le nombre n de leurs atomes de carbone, Il est légitime d'admettre qu’il en est encore de même pourn = 1, d'où enfin il résulte que l'atome de carbone divalent n'est pas identique à l'atome de carbone ordinaire té- travalent. S'il en est ainsi pour le carbone, nous pourrons sup- poser qu'il existe de même 4 espèces d’atomes de chlore, respectivement mono, tri, penta et heptavalents, 3 espèces d’atomes de soufre, etc., qui représentent autant de formes allotropiques de ces corps et qui, comme ces dernières, se laissent aisément transformer les unes dans les autres. C’est peut-être là le moyen le plus simple d'inter- préter tous ces phénomènes; mais, en pareil'e matière, il est impossible de rien affirmer, je n'insiste donc pas davantage ; ces quelques considérations me paraissent surtout de nature à provoquer de nouveaux rapproche- ments entre la chimie organique et la chimie miné- rale, sans avoir recours à aucure hypothèse nouvelle; je vous les livre pour ce qu'elles valent et vous prie d’agréer, ete. et L. MAQUENNE. Le Directeur- Gérant : Louis Ozrvier Paris.— Imprimerie F, Levé, rue Cassette, 17. T'apporté au côtés BC et BA, x’ et y! les coordonnées du "point C, rapporté aux côtés CA et CB. Etant donnés les points A, B,, C, et les sit Coordonnées X, Y,xX,Y,X',V, construire le triangle ABC. — M. d' Ocagne étudie une transformation qua- dratique rationnelle qui permet, entre autres, d’en- sendrer des courbes unicursales dont l’ordre égale la classe, Il en fait l'application à la construction par points et tangentes des cubiques cuspidales (unicursales du 3° ordre et de la 3° classe). Il en déduit aussi un tracé extrêmement simple de l ellipse déterminée par deux de ses diamètres conjugués, tracé qui peut être avantageusement utilisé dans la pratique. M. D'OcaGxe. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 24 juin. M. W.-B. Croft : Sur les figures de souffle, Après avoir rappelé les observations des premiers expéri- mentateurs sur la question, l’auteur décrit une mé- thode qui l’a conduit à de bons résultats, Une pièce de monnaie est mise sur une lame de verre, et se trouve isolée, Une autre lame de verre qui doit recevoir l’im- pression est polie avec soin et repose sur la pièce, tandis qu'une seconde pièce est placée sur la lame, Les pièces sont mises en relation avec les pôles d'une machine électrique donnant des étincelles d’un pouce toutes les deux minutes, Quand les pièces sont enlevées et qu’on souffle sur le verre, le dessin des pièces appa- rait sur le verre. Le microscope montre que l’hu- midité est déposée sur la surface entière, la grosseur du léger grain constitué par l’eau étant plus considé- rable dans la partie du dessin où l'ombre est le plus foncée. L’épaisseur du verre semble sans influence sur le résultat, et l’on à pu empiler alternativement des lames et des pièces de monnaie. Si on les met soigneusement à l'abri, le temps n’a qu'un effet insen- sible sur les figures, mais on peut les effacer en frot- tant tant que le verre est humide. On discute les in- succès et leurs causes, et l’on décrit les phénomènes plus complexes produits par de fortes décharges. On a montré aussi que les figures de souffle peuvent être produites en mettant une pièce de monnaie sur une surface de mica récemment mise à nu. Des repro- ductions parfaites d'imprimés ont été obtenues en pla- cant du papier imprimé d’un côté seulement entre deux feuillets de verre pendant dix heures. Quelques substances telles que la soie, en contact avec le verre donnent des images blanches, tandis que la laine, le co- ton, en donnent de noires. Divers effets analogues sont indiqués dans le mémoire, et les diverses hypothèses émises pour l’explication de ces phénomènes sont exa- minées, — M. le prof. Perry lit une communication sur le même sujet, du Rév. F.-J. Smith. Il a réussi à pho- tographier les images imprimées, et il en montre les épreuves. Il à étudié aussi l'influence de divers gaz sur le résultat, et trouve que l'oxygène donne les images les meilleures, Dans le vide, on n’a point d'images. Il a étudié aussi l'effet de la température. M. “8. QE Thompson dit que le détail des premières recherches a paru aux Annales de Poggendorff en 1842. On y mon- trait que les meilleurs résultats s’obtiennent en fai- sant partir l’étincelle entre la pièce de monnaie et la machine. Comme les effets ne dépendent pas du sens dans lequel passent les étincelles, il est probable qu’on a affaire à des oscillations électriques. Il a lui-même travaillé sur ce sujet en 1881, et HAE récemment quelques-unes des expériences, Les figures se produi- saient sur une surface polie quelconque. On a eu de bons résultats en employant une petite bobine d’in- duction donnant environ une étincelle de 5" toutes les eq secondes. En 1881, il a remarqué accidentel- lement que les photographies peuvent s'obtenir sur l’é- bonite. Des pièces chaudes posées sur du verre mal- propre donnent de bonnes figures de souffle. Un membre de la Société dit qu’au lieu de souffler sur les lames, M. Garrett et lui ont saupoudré les lames de minium finement pulvérisé pour voir les figures. Ils ont aussi fixé les figures en attaquant par l'acide fluorhydrique.M. Croft montre quelques figures qu'il à obtenues il y a deux ans, et qui sont encore très nettes. — M. Wythe Smith : Sur la mesure de la résistance intérieure des piles. Après avoir rappelé les méthodes employées jusqu'ici, l’auteur expose une modification de l’expérience de Mance qu'il a récemment appliquée. Un pôle de la pile à mesurer est en communication avec les pôles de même nom de deux autres piles. Chaque pile à un circuit distinct, à travers lequel on fait passer un courant, En choisisnt un point A au pôle opposé de la pile à étudier, on trouve des points B et C dans les circuits des piles auxiliaires, dont les po- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 529 tentiels sont égaux à celui de A. Les résistances entre chaque couple de points AB, AC, BC, sont ainsi me- surées par un pont de Wheatstone. En appelant ces résistances R,, R,, R,, on montre que la résistance extérieure cherchée est donnée par la formule R, +R, —R, 2 du circuit contenant la pile étudiée. Pour un accumu- lateur qui se déchage b = x à environ 2 pour cent. M. Perry demande jusqu’à quel point les résultats obtenus s'accordent avec ceux que donnent les autres méthodes, et s'ils dépendent du temps que les clefs restent fermées. Dans les anciennes méthodes, on sup- posait qu'un accroissement instantané dans la diffé- rence de potentiel se produit à la rupture du circuit. Cela peut être vrai ou n'être pas vrai. Il incline à re- garder la différence de potentiel et le courant comme tous deux fonctions de la résistance et du temps. La manière dont se comportent les piles semble indi- quer l'existence de quelque chose comme une capa- cité, ou plutôt des capacités et des résistances en série. M. Ayrton dit que le mémoire est d’un grand intérêt, car il rend possible ce qu'on ne pou- vait faire auparavant : trouver la résistance d’une pile sans altérer sensiblement le courant qui la traverse. Quoique la nouvelle méthode exige plus de piles, ce n'est pas un motif qui la fasse rejeter, car le résultat atteint a une importance scientifique considérable. La même méthode est applicable pour trouver la résistance d'une armature de dynamo en marche, quatité inacces- sible jusqu'ici par les mesures directes. M.Lane Fox ditque les changements produits dans la différence de potentiel des piles secondaires, et qui embrouillent, sont en rapport avec les changements dans l’électro- lyte qui arrive dans les pores des plaques. Il ne dé- couvre aucune faute dans le raisonnement donné plus haut, M. Sumpner remarque que la méthode est bonne car elle dépend d’un réglage de pont, qui peut être fait avec beaucoup d’exactitude, D'un autre côté, c’est une méthode de faux zéro, sujette, par suite, aux erreurs provenant des déplacements du zéro. M.Ayrton montre que ces erreurs peuvent être éliminées en renversant la pile du pont.M.Rémiugton dit, que bien que les courants d'essai soient petits, ils peuvent affec- ter la force é m, et introduire ainsi une erreur sur b, On pourrait donc expérimenter en employant les cou- rants alternatifs et le téléphone. Répondant à M, Perry, M. Smith dit que les résultats concordent avec ceux qu'on a obtenus par des méthodes antérieures dans les limites d'exactitude dont étaient susceptibles ces méthodes-là, ce qui peut atteindre quelque chose comme 15 pour 100.—M.W. Williams: Sur la relation entre les dimensions des quantités physiques et les directions de l’espace. En février 1889, M. Rücker appelait l'attention sur ce fait que les formules ordi- naires de dimension pour les grandeurs électriques, les dimensions de uw (perméabilité) et de k (pouvoir inducteur spécifique) sont supprimées, Dans la discus- sion de ce mémoire, M. S.-P. Thompson montra que les longueurs pouvaient être considérées comme ayant une direction aussi bien qu'une grandeur, et qu’en se placant à ce point de vue on évite les difficultés prove- nant de ce que des unités différentes, comme le couple et le travail, ont les mêmes dimensions. Développant cette idée, l'auteur trace trois axes rectangulaires le long desquels on mesure les longueurs. En appelant les longueurs unités suivant les trois axes X, Y et Z,les diverses unités dynamiques, telles que la vitesse, l’ac- célération, la force, le travail, ete., sont exprimées en fonction de M, T, X, Y et Z. Les formules dénotent ainsi les relations de direction aussi bien que les rela- üons de nombre entre les unités, et les formules de dimensions apparaissent, par conséquent, comme l’ex- DUR et » est la résistance extérieure pression symbolique de la nature physique des quan- tités, en tant qu'elles dépendent de la longueur, de la masse et du temps. Dans ce système les aires et les volumes sont représentés par des produits de diffé- rentes longueurs vectorielles, au lieu d’être les puis- sances d’une longueur unique, et les angles et les déplacements angulaires par des quotients de vecteurs rectangulaires, au lieu d’être des nombres abstraits. En physique les nombres abstraits peuvent être défi- nis par les rapports des grandeurs concrètes de même espèce et semblablement dirigées (si elles ont une direction), Un angle plan a pour dimensions X=1 Y, X étant dans la direction du rayon, et Y dans celle de l'arc, tandis qu'un angle solide a pour dimen- sions YZX—?, et un rayon de courbure Y? X-1, On montre ainsi que x est une quantité concrète ayant les dimensions, ou de langle plan ou de l'angle solide. Cela est d’une importance considérable, à cause de la relation avec les flux suivant les rayons ou suivant les circuits dans le champ électromagné- tique. En déduisant les formules de dimension pour les unités électriques et magnétiques, on emploie les relations rationnelies et simplifiées données par M. Oliver Heaviside dans lElectrician du 16 et du 30 octobre 1891. On trace des axes instantanés en un point quelconque d'un milieu isotrope (l’éther),tels que X coïncide avec le déplacement électrique, Y avec le déplacement magnétique, et Z avec l'intersection des deux surfaces équipotentielles en un point. En partant de la relation y H2— énergie par unité de volume, on peut obtenir des formules pour diverses quantités en fonction de &. Par simplification on arrive à celles du système électromagnétique ordinaire en faisant pu — 1, et supprimant la distinction entre X, Y et Z. En pre- nant, de mème, pour point de départ k E? — énergie par unité de volume, on obtient des formules où entre 4, et qui, simplifiées comme plus haut, donnent celles du système électrostatique ordinaire, Le mémoire ren- ferme des exemples de la facon dont on exprime les résultats, et le sujet en entier est discuté en détail à la fois en coordonnées cartésiennes et en coordonnées vectorielles. Les formules en fonction de y et de 4 sont appliquées à l’étude de diverses analogies entre l’élec- tromagnétisme et la dynamique, d'où l’on déduit une théorie dynamique correspondante de l’électromagné- tisme. On recherche quelles dimensions de y et de en fonction de M, T, X, Y. Z rendraient simple, natu- relle et pleinement intelligible l'interprétation des unités électriques et magnétiques. Les conditions im- posées (pour des raisons établies dans le mémoire) sont : premièrement, que les dimensions de y et de k satisfassent à la relation [uk] = Z?T—?; secondement, que les puissances des unités fondamentales dans les formules de dimensions ne soient ni supérieures, ni inférieures, à celles qu'on trouve dans les formules des quantités dynamiques ordinaires ; et, troisièmement, que les quantités qui sont scalaires ou dirigées soient aussi scalaires ou dirigées quand leurs dimensions sont exprimées d’une facon absolue. En se soumettant à ces conditions, on montre que les valeurs possibles pour les dimensions de & et de À sont au nombre de huit. De ce nombre, il n'y en a que deux qui con- duisent à des résultats intelligibles. Ce sont (1) u—M(NYZ)netk = M IXNZEIT?; et (2)u— M XYZ IT: et k = M (XYZ). D’après (1) & est la densité du milieu, l'énergie électrique est de l'énergie potentielle et l’é- nergie magnétique, de l’énergie cinétique. D’après (2). k est la densité du milieu, l'énergie électrique est ci- nétique, et l’énergie magnélique est potentielle. L'in- terprétation complète des formules de dimensions de toutes les grandeurs électromagnétiques obtenues en se conformant aux conditions indiquées plus haut, est donnée dansle mémoire, — M.S.-P.Thompson déclare que ce mémoire est très important, etestime que l’idée de trouver pour et pour # des dimensions qui rendent raisonnablesles formules de dimensions ordinaires,cons- titue un grand pas. L'emploi des vecteurs est un heureux 530 perfectionnement : l’emploie de X, Yet Z au lieu de L, écarte plusieurs difficultés relatives aux formules de dimensions. D’autres difficultés peuvent être éclaircies en ayant égard au signe des produits et des quotients de vecteurs, et à l’ordre dans lequel on écrit les sym- boles. Un autre sujet important est l'emploi des «unités rationnelles » de M. Heaviside, système qui mérite une sérieuse aftention.Pour conclure,M.Thompson exprime l'espoir que, conformément à la résolution du congrès d'électricité de Francfort, la perméabilité et le pouvoir inducteur spécifique seront tous deux représentés par des lettres grecques. M. Henrici exprime son admiration pour la facon dont le sujet a été bien traité dans le mémoire. Il a longtemps pensé que les méthodes vectorielles éclaireraient beaucoup les idées sur les quantités physiques. Il félicite aussi l’auteur pour sa facon de considérer les angles plans et solides comme des quantités concrètes, — Dans une communication adressée au secrétaire, M. O.-J. Lodge remarque que les physiciens, en Angleterre, étaient plus ou moins familiers avec les avantages de représenter y et k par leurs formules de dimensions, jusqu’au jour où le pro- fesseur Rücker, en février 1889, a rendu le sujet acces- sible aux étudiants, Le système de dimensions méca- niques suggéré par les grandeurs électriques dans un appendice aux « Idées modernes en électricité » n’était pas présenté comme le seul possible, mais comme ayant en sa faveur une certaine probabilité de vérité. — M. Rücker dit que, bien que M. Williams et lui se soient rencontrés sur quelques points de moindre im- portance, les idées fondamentales développées dans le mémoire sont tout à fait originales, ayant été entière- ment développées par M. Williams avant que l’auteur ne lui eùt parlé du sujet. Une note sur les forces mo- léculaires,par M. Sutherland est remise à la prochaine séance. Ce mémoire et celui de M. Williams seront im- primés dans le Philosophical Magazine durant les va- cances, de telle sorte qu'ils pourront être discutés im- médiatement à la prochaine session. SOCIETE ROYALE D’EDIMBOURG Séance du 20 juin. 1° SciENGES PuYsIQUES, — M. Buchan étudie les varia- tions diurnes de la hauteur barométrique aux régions polaires durant l'été. D'observations faites à l'été 1876 et aux étés suivants, au centre de l'Atlantique nord, entre 62 et 80° de latitude nord, il déduit qu'il n’y a qu'un maximum et qu'un minimum durant le jour. Des observations faites par l'état-major du Challenger à de hautes latitudes antarctiques conduisent au même ré- sultat, On trouve aussi un seul maximum et un seul minimum dans les régions intérieures des continents polaires; mais ils se produisent à des heures du jour différentes des heures du maximum et du minimum de l'Océan, La superposition de ces deux genres de variation donne la variation semblable à celle qu’on observe couramment. — M. Hunter Stewart : Sur les variations de la quantité d'acide carbonique dans Pair. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. Traquaix : Restes d’ani- maux du tuf volcanique de Ténérifle. W. PEonte, Membre de la Société. ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE Séance du 10 mai. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M, J. De Tilly : Essai de géométrie analytique générale. — M. F. Folie: Nou- velle recherche des termes du second ordre dans les formules de réduction des circompolaires en ascension droite et déclinaison. (2° communication.) — M. P. De Heen : Sur la cause probable de la formation de la queue des comètes. D'après l’auteur, une difficulté in- surmontable s’opposerait, dans le cas actuel, à l’adop- tion de l'hypothèse qui consiste à admettre l'existence d’une force répulsive du calorique. Les observations les plus récentes tendent, en effet, à élablir que, dans ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES le mouvement des comètes, les choses se passent comme si celles-ci étaient soumises à l'attraction new- tonienne seule. Or, si l'hypothèse de l’action répulsive était vraie, il en résulterait une altération sensible du mouvement de ces astres. On doit done conclure que cette formation est due à une action d'origine interne et non à une action d’origine externe. Les recherches de Crookes éclairent vivement la question. L'auteur expose la théorie qui rend compte du mouvement du radiomètre et en tire, comme conséquence immédiate, la formation de la queue des comètes. Ces astres sont, en effet, considérés comme étant formés de particules solides ou liquides en suspension dans une atmos- phère d'autant plus raréfiée que la comète se rapproche davantage du Soleil. Cela étant, chacune de ces parti- cules joue le rôle des ailettes du moulinet dans la théorie du radiomètre. La face tournée du côté du Soleil, étant plus échauffée que la face opposée, sera repoussée. Ces particules, dans leur mouvement de recul, entraïîneront avec elles le gaz ambiant, dont le frottement intérieur n’est pas négligeable, Cette action exclusivement interne doit déterminer la production de l’appendice cométaire, sans modifier le mouvement du centre de gravité du système, — M, F. Terby: I. Sur les halos remarquables observés à Louvain les 5 et 6 avril 1892. — II. Sur un nouveau passage de Titan et de son ombre observé à Louvain, le soir du 12 avril 1892, — M. E. Catalan : À propos d'une note de M. Servais. — M. J. Deruyts:Sur les relations qui existent entre certains déterminants. -- M, C1. Servais : Sur les co- niques osculatrices dans les courbes du troisième ordre. — M. A. Demoulin : Quelques propriétés du système de deux courbes algébriques planes. 2° SGtENGES NATURELLES. — M. Ch. van Bambeke : Contribution à l'étude des hyphes vasculaires des Aga- ricinés ; hyphes vasculaires du Lentinus cochleatus. L'auteur décrit les hyphes vasculaires renfermées dans le stype et le chapeau du Lentinus eochleatus. Elles se terminent à la périphérie de ces deux régions dans une épaisse couche de chlamydospores, et à la péri- : phérie des lamelles entre les parties constituantes du subhyménium et de l’hyménium. Ces hyphes, ainsi que leurs terminaisons, généralement en forme de bouteille à deux articles, ne deviennent apparentes qu'après traitement, à l’état frais, par l'acide osmique. La coloration, variant du gris au noir foncé, doit être attribuée à la présence d’une huile essentielle formant la majeure partie du contenu des hyphes. Cette essence, charriée par les hyphes vasculaires, est sans doute éliminée par leur portion terminale, jouant le rôle d’organe excréteur, ce qui explique l'odeur anisée que répand ce champignon. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 25 juin. 1° SCIENCES MATHÉMATHIQUES. — M. J. Cardinaal : Génération de surfaces du quatrième ordre à droite double à l’aide de faisceaux projectifs de quadriques. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Kamerlingh Onnes À B Fig. 1. étudie les mesures du phénomène de M. Kerr dans la réfiexion polaire du fer, du cobalt et du nickel, faites ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 331 par M. P. Zeeman, Puis, il fait connaitre un tout autre phénomène, découvert par M. J.-P. Kuenen, obtenu en comprimant un mélange de deux gaz el annoncé par lui dans sa {thèse comme une conséquence de la théorie de M. Van der Waals (voir la Revue, t. HE, p- 343); ce phénomène est celui de la condensation ré- trograde. La forme du pli APRB (fig. 1) et la position du point de plissement P (la figure est empruntée au mémoire de M. Van der Waals, Archives Néerlandaises, t. XXIV, p.55) montrent que, pour des mélanges dont le rapport de composition se trouve entre x, et #7, la di- minution de volume commence par faire accroître la quantité de liquide, tandis qu'en continuant, cette quantité atteint une valeur maximum, décroit ensuite et finit par disparaître. Ce phénomène explique en même temps la disparition inexpliquée du ménisque observée par M. Caïlletet (Comptes rendus, t. XC, p.210). 3° SCIENCES NATURELLES. — La commission Limnoria dépose les résultats de ses recherches dans un rapport définitif —M.A.-A.-W.Hubrecht fait d’abord connaître le contenu de ce rapport, trop volumineux pour être analysé ici (I. Histoire et distribution géographique. — II. Etude de la Limnoria lignorum, au point de vue zoologique : a. Extérieur et accessoires ; b. Caractères distinctifs de la structure anatomique ; e. Place de la Limnoria dans le système zoologique ; d. La Limnoria en activité. — II, Distribution sur la côte néerlandaise, distribution en rapport avec le percentage de sel de l’eau de mer, — IV. Condition dont dépend l'apparition de Limnoria. — Moyens pour combattre l'ennemi. — NI. Conclusions.) — M. P.-P.-C. Hoek donne ensuite un résumé de l’histoire naturelle de l'animal. D'après la commission le meilleur moyen de préserver les pilotis est de les ferrer avec des clous à grande tête. Ce moyen est plus efficace contre la Limnoria que contre la Térédo; il a plus d’effet que le créosotage. Un mélange de créosote et de liquide vénéneux équivaudrait peut-être à la préservation à l’aide de clous.— M. M.-W. Beyerinck s'occupe de la culture des organismes de la nitrification sur agar-agar et sur gélatine. Il dé- montre, d'accord avec les découvertes de MM. Warington et Winogradsky, que la nitrification s’accomplit en deux phases : la formation de l'acide nitreux par l'oxydation des sels ammoniacaux par une bactérie spécifique et la transformation des mitrites en nitrates par une autre espèce de bactérie indépendante. L’oxy- dation de l’ammoniaque se fait quantitativement en acide nitreux ; seulement, quand le processus est ex- ceptionnellement actif, il peut se former une trace de nitrate sous l'influence de la bactérie nitreuse. L'auteur remarque ensuite que ces deux processus ont lieu seulement quand les matières organiques solubles sont réduites à un minimum, comme il avait été déjà prouvé par les recherches classiques de M. Wino- sradsky et des Frankland. L’acétate de chaux, même à 0,1 % nuisait à l'oxydation et à la multiplication, Enfin, l'auteur démontre que les matières organiques solides et insolubles n’ont pas le moindre effet sur la vitesse et le cours de la nitrification. D’après cette remarque, il doit être possible de cultiver les bactéries nitreuse et nitrique sur de lPagar-agar complètement débarrassé des matières solubles par une longue extraction avec de l’eau distillée, additionnée et bouillie avec les sels organiques nécessaires pour la nitrification, Les faits s'accordent parfaitement avec cette opinion. Si l’on ajoute aux sels encore un peu de carbonate de chaux à l’agar, on peut obtenir une plaque qui permet l’ense- mencement direct des bactéries du sol et le dénom- brement des bactéries nitreuses qui y sont comprises, Pour atteindre ce résultat, l’agar carbonaté est versé dans une boîte en verre et, après solidification, une pe- tite quantité de terre suspendue dans de l’eau stérilisée est jetée sur la surface de la plaque. Après trois ou qua- tre semaines les colonies nitreuses deviennent visibles comme centres de petits champs de diffusion parfai- tement circulaires et transparents, formés par la trans- formation du carbonate insoluble en nitrite de calcium, très soluble et diffusant dans toutes directions dans la plaque. Par cette manipulation, l’auteur a constaté que la terre des racines de trèfle rempant contient envi- ron 30 bactéries nitreuses par 10 milligrammes qui ne sont pourtant pas toutes de la même activité nitritiante, comme le démontre la différence d'extension des champs de diffusion clairs autour des colonies. Cependant l’es- pèce est, sans doute, identique avec la forme, dite ewro- péenne, de M. Winogradsky, croissant tout comme celle- ci enzooglées ou en microcoques à un seul cil libres et très agiles. Si l’on prépare de la gélatine avec les mêmes soins que l’agar, celte matière peut aussi servir de base solide pour la nitrification. Mais, ce sont surtout les nombreuses bactéries liquéfiantes qui rendent l’ex- traction avec de l’eau, comme toute expérimentation ultérieure, très difficile, Aussi la formation de l’acide nitreux cesse après peu de temps, tandis que sur l’agar ce processus ne dépend que de la présence de sels am- moniacaux et de l’accumulation des nitrites qui, à la dose de 1 %, entravaient l'oxydation, La bactérie ni- treuse ne liquéfie pas la gélatine et y prend facilement la forme de zooglée. Quoique les bactéries nitreuses cessent de croître et d'oxyder par suite de la présence des corps organiques solubles, elles ne perdent pas néanmoins ces propriétés par suite de ce contact, mais se multiplient ef fonctionnent de nouveau dans des circonstances favorables. La bactérie nitrique fut de même isolée sur des plaques d’agar-agar parfaite- ment exemples de matières organiques solubles et ad- ditionnée de 0,1 % de nitrite de potasse et d’un peu de phosphate. Les colonies sont très petites, un peu trans- parentes et colorées en jaune très clair. Elles consistent en microcoques sans mouvement qui sont parfois un peu allongés. Contrairement à ce qui a lieu avec la bactérie nitreuse, la bactérie nitrique, tout en perdant le pouvoir d’oxyder les nitrites par le contact avec les corps organiques solubles dépassant une certaine con- centration minimum, ne perd pas pour cela en même temps le pouvoir de se multiplier. La bactérie nitrique ne peut pas oxyder les sels ammoniacaux et elle est aussi sans action sur le sulfocyanate de potasse et sur le chlorhydrate d'hydroxylamine. Une méthode simple pour la préparation de plaques stériles de silice sans et avec carbonate a été décrite, et nombre de cultures sur agar et silice ont été présentées, — M. C.-A.-J.-A. Oudemans présente sa « Quatorzième contribution à la flore mycologique des Pays-Bas ». 4° SCIENCES MÉDICALES. — M. J. Forster fait connaître les résultats de quelques recherches exécutées dans le laboratoire d'hygiène d'Amsterdam, D'abord, il s’agit du minimum de la haute température qui détruit la vie des bacilles de la tuberculose, L'auteur fait ressortir qu'il est bon de connaitre cette température. Car, en faisant bouillir la viande de bœufs tuberculeux, la tem- pérature de 1009 C ne pénètre pas à l’intérieur et, en faisant bouillir le lait de vaches tuberculeuses, on en altère le goût de manière qu'on préfère boire le lait cru, Les expériences montrent que les bacilles en question ne supportent pas pendant une heure une température de 60° C et non plus pendant six heures une température de 55°, Des températures de 80° et 90° C détruisent la matière infectante dans 40 minutes, La pasteurisation à 80° pendant une minute n’est pas suffisante. L'auteur expose ensuite ses recherches sur l'influence du froid sur la vie des bactéries. Il pré- tend avoir trouvé que plusieurs bactéries peuvent vivre et se multiplier dans la glace fondante, non seulement d’eau de mer, mais tout aussi bien d’eau douce et d’eau douce salée. Ce résultat est d'accord avec l’observation que les mets conservés dans la glace prennent, à la longue, un goût désagréable. Si l’on veut conserver des aliments à l’aide de températures basses il faut qu'on les conserve bien secs. En effet, dans les nou- velles caves à rafraichir, au lieu de la glace fondante, on se sert d’air sec refroidi. — M.H.-J. Hamburger : Sur la différence entre le sang artériel et le sang veineux. Non seulement à cause de la différence en percen- tage de CO?, mais aussi par suite d'autres influences, le sérum du sang veineux défibriné contient en général plus de matières solides et moins de chlorures que le sérum du sang artériel défibriné. Même la manière de défibriner a de l'influence sur la composition du sérum et des globules de sang. Le battement du sang à l'air fait perdre du sérum avec l’écume, change donc le rapport des quantités de sérum et de globules et al- tère mème l'échange des parties composantes entre globules et liquide. Ainsi la comparaison exacte du sang artériel et du sang veineux exige une étude spé- ciale des globules et du liquide, tandis que l'emploi de sang défibriné ne peut être admis qu’à la condition de tenir compte de la manière de défibriner. Pour le sang de cheval, recueilli sous l'huile pour empècher la coagu- lation, l'échange de matière entre sérum et globules a lieu, comme pour le sang défibriné, en ajoutant de pe- tites quantités d'acide ou d’alcali. SCHOUTE, Membre de l’Académie. SOCIÉTÉ DE. PHYSIOLOGIE DE BERLIN Séance du 24 juin. M. le P' Kossel expose les recherches que M. le D" Monti a entreprises sous sa direction relativement à l'absorption d'oxygène par les tissus après la mort. La méthode employée a été celle que M. le D" Borutteau a essayée et reconnue exacte dans ses recherches sur l'action réductrice du pyrogallol et de la résorcine dans les tissus et les sécrétions; elle consiste à appli- quer sur des plaques photographiques sensibles des tranches du tissu fraisalcalinisé et à apprécier le degré de leur pouvoir réducteur par l'intensité du noircisse- ment de la plaque. On a constaté que les différents tissus noircissaient les plaques à des degrés divers et que l’action variait suivant le temps écoulé depuis la mort de l'animal. Les capsules surrénales, la rate, le thymus, le tissu cortical du rein, exercaient la réduc- tion la plus rapide et la plus intense ; les muscles, et surtout le cerveau se sont montrés les tissus les moins actifs à ce point de vue. — Voulant étudier la répartition du phosphore dans les divers organes et les divers tissus du corps, M. le D' Lilienfeld a traité par le molybdate d’ammoniaque, puis le pyrogallol des coupes microscopiques préparées par la technique ha- bituelle. Suivant la quantité de phosphore contenue dans le tissu, suivant aussi la facilité plus ou moins grande avec laquelle ce phosphore abandonneses com binaisons, il se produit une coloration qui va du jaune clair au noir en passant par le brun. Les noyaux etno- tamment leurs chromosomes se colorent vivement, tan- dis que le plasma cellulaire reste incolore, excepté dans quelques cas, comme, par exemple, pour le cer- veau, où le cytoplasma prend une couleur jaune plus intense même que celle des noyaux de ce tissu, D'une facon très générale, la réaction caractéristique du phosphore a été intense dans le noyau des cellules en prolifération, tandis que les cellules plus spécialisées se coloraient peu ou pas. — Le P' Litten a attiré l'at- tention du Pr Gad sur le fait suivant, qui se produit régulièrement chez l’homme normal et avait pourtant échappé aux physiologistes. Si un homme respire pai- siblement dans le décubitus dorsal, tandis que la lu- mière du soleil ou celle d'un jour clair tombe d'une fenêtre en rasant le corps, on voit à chaque inspira- tion l'ombre d’une onde se propager sur le thorax de haut en bas ; pendant l'expiration l’onde va de bas en haut. Le phénomène est plus visible chez les sujets à respiration abdominale que chez ceux à respiration thoracique. Dr W. SRLAREK. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Depuis notre dernier compte rendu l'Académie a reçu les communications suivantes : 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Josef Finger : Sur les relations mutuelles des surfaces du second ordre d'un emploi avantageux en mécanique; leur applica- Lis ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tion au problème de l’astatique. Cette communication a pour but de compléter et de généraliser les résultats géométriques de M, Darboux sur le problème astatique, elle doit servir d'introduction à une série de recher- ches sur les pôles de force d’un système de forces en nombre quelconque agissant sur un système de points invariables, — M. J. Sobotka : Sur la courbure et l’in- dicatrice de l’hélicoïide. — M. L. Weneik à l’Obser- vatoire de Prague, qui avait adressé le 24 janvier un dessin grossi vingt fois de la carte de Petavius prise à l'Observatoire du mont Hamilton (Californie) présente aujourd’hui une héliographie de cette étude qui rend mieux les caractères et les détails que les copies pho- tographiques ; il ajoute aussi : 1° une héliographie du Mare Crisium grossi quatre fois ; 2° une héliographie des chaînes Archimedes et Arzachel avec un grossissement égal à 20; 3° une impression en couleurs de l’éclipse de lune du 28 janvier 4888 ; 4° enfin trois tables en hélio- gravure des cratères de la Lune. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Ch. A. H. Schellhorn : Recherches sur la mécanique du monde, — M. Gustav Jäger : « L'équation des gaz dans ses applications aux solutions. » — M.G. Jaumann, à Prague : « Essais d’une théorie chimique fondée sur la comparaison des pro- priétés physiques. » — M. Franz Exner à Vienne : « Recherches électrochimiques, suite, » Cette deuxième communication étudie la facon dont se comportent les métaux dans SO*H?, AzOSH, CO?, C2H20#, C2H10? C2H#CIO?, C2H2C20?, CHCI#0?, C*H#BrO? ainsi que dans une série de sels des acides précédents et des acides HCI, HBr, HI, HFI l’auteur mesure les diffé- rences de potentiel entre l’eau pure et les solutions aqueuses des corps précédents; ses résultats au point de vue qualitatif sont en concordance parfaite avec la théorie de la dissociation. — M. Paul Czermak : Sur la décharge oscillante. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Frid. Krasser : Sur la structure dunoyau cellulaire immobile. --M.A.Wagner à Innsbruck : «Sur la structure des feuilles des plantes alpestres et sa valeur biologique ». Les feuilles des plantes alpestres sont essentiellement adaptées à une activité assimilatrice plus considérable, qui se traduit par un développement exagéré des cellules en palissade, par une structure plus lâche du mésophylle, par la pré- sence de nombreuses stomates sur la surface supérieure des feuilles. Le développement exagéré du tissu assi-- milateur est dû aux facteurs suivants : à) radiations lumineuses plus intenses, b) diminution de la teneur de l'air en acide carbonique proportionnée à l’augmen- tation d'altitude, ec) diminution de la durée de la végé- tation, L'adaptation à ces différents facteurs est dau- tant plus parfaite qu'une espèce est plus plastique, C’est l'assimilation et non pas la transpiration qui détermine avant tout la structure du mésophylle, Le nombre et les dimensions des cellules en palisssade dépend des conditions d'assimilation; les formations intra-cellulaires, par contre, sont en relation avec les conditions de transpiration. — M.°E. Hering : Sur la connaissance des Alciopides de Messine. — M. Wilhem Sigmund : Relations entre les ferments qui agissent sur les corps gras el ceux qui agissent sur les glyco- sides. L'auteur fait agir sur des corps gras des ferments comme l’émulsine, la myrosine qui dédoublentles gly- cosides; d'autre part les graines de plantes oléagi- neuses, comme le chanvre, Le pavot, le colza, dans les- quelles on n’a reconnu jusqu'ici aucun ferment glyco- sique, furent mises en présence d’amygdaline et de sali- cine sous forme d’émulsion ou en prenant l'extrait aqueux. L'auteur donne aussi provisoirement quelques recherches sur Paction des glandes du pancréas sur les glycosides précédents, Il conclut de tout ce travail que les ferments gras et glycosiques peuvent se remplacer mutuellement dans leurs actions. — M. Alfred Nalepa : Sur de nouveaux microbes de la bile. L'auteur donne la description et la classification de ces nouveaux mi- crobes. Emil Weyr, Membre de l'Académie. En Le Directeur-Gérant : Louis Over Paris.— Imprimerie F. Levé, rue Cassette, 17. 3° ANNÉE N° 15 15 AOÛT 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES CARBONYLES MÉTALLIQUES ‘ Justus Liebig, l'esprit le plus prophétique peut- être parmi les savants modernes, écrivait en 1834 : « J'ai annoncé précédemment que l'oxyde de carbone peut être considéré comme un radical dont l'acide carbonique et l'acide oxalique sont les oxydes, et le gaz phosgène, le chlorure. La poursuite de cette idée m'a conduit aux résultats les plus singuliers et les plus remarquables *. » Liebig ne nous a jamais dit ce que ces résultats ont été. Les lignes suivantes feront connaitre les récentes découvertes réalisées dans la direction que l’illustre chimiste indiquait. L'acide carbonique CO? peut secomporter comme radical et se combiner à d’autres corps; on l’ap- pelle alors carbonyle, et l’on dit de ses composés avec d’autres éléments ou radicaux que ce sont des carbonyles. Liebig a défini un radical comme un composé doué des caractères d'un corps simple, susceptible de se combiner avecles corps simples, de se substi- tuer à ces éléments ou d’être remplacé par eux. Dans des temps plus rapprochés de nous, on a dé- fini le radical chimique : un corps non saturé. Si 1 Depuis que M. Charpy a annoncé et décrit ici même (Revue du 15 novembre 1890, t. 1, p. 657) la découverte du nickel tétracarbonyle, ce corps et plusieurs composés du même type, trouvés depuis, ont été de la part de divers sa- vants, notamment de M. L. Mond et de M. Berthelot, l'objet d'importantes recherches. La portée philosophique des résul- tats obtenus nous a engagé à revenir aujourd'hui sur ce sujet. Le présent article expose l’ensemble de la question soulevée par la remarquable découverte de MM. Mond, Langer et Quincke. (Note de la Rédaction.) 2 Annales de Pharmacie, 1834. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, nous le considérons au point de vue moderne, le carbonyle devrait être le véritable type du radical, parce que deux seulement des quatre valences de son atome de carbone sont saturées. Il sem- blerait qu'il doive être un radical très violent, puisque, de tous les radicaux organiques, c’est le seul qui existe à l’état de molécule simple. Tous les autres radicaux organiques, même queiques- uns bien typiques, comme le cyanogène et l’acé- tylène, ne sont connus qu'à l’élat de molécules renfermant chacune deux fois le même radical, de sorte que le gaz cyanogène ou le gaz acétylène que nous connaissons devraient être plus juste- ment appelés di-cyanogène et di-acétylène. L'oxyde de carbone constitue donc une exceplion unique. Chose curieuse, ce gaz est, en quelque sorte, le contraire d’un corps violent : au lieu d’être prêt à attaquer avec ses deux valences libres tout ce qui se trouve sur sa route, ce n’est que tout dernière- ment qu'il nous est apparu se combinant à des substances douées elle-mêmes äe pouvoirs d'at- taque considérables : le chlore et le potassium, par exemple. Bien que Liebig l’eût depuis si longtemps déjà proclamé radical, le monde chimique fut ab- solument étonné, lorsqu'il y a deux ans, j'annon- çai dans un travail communiqué à la Société de Chimie de Londres, et fait avec les docteurs Lan- ger et Quincke, qu’à la température ordinaire, l’'oxyde de carbone se combine à un élément aussi inactif que le nickel, et forme avec ce dernier un composé bien défini, remarquable par la singula- rilé de ses propriétés. Le fait que l’oxyde de carbone ne possède pas 15 534 l'activité chimique qu'on est tenté d'attribuer à un radical isolé peut, je crois, s'expliquer en admel- tant que les deux valences de son atomede car- bone, qui ne sont pas combinées à l'oxygène, se saturent ou se neutralisent l’une l’autre. Tout le monde admet aujourd’hui que les valences réputées égales de deux atomes de carbone, peuvent se neu- traliser mutuellement. D'après cette supposition, l'oxyde de carbone peut être considéré comme un corps se satisfaisant lui-même, un corps qui, au- dedans de lui-même, tient en quelque sorte en arrêt ses affinités libres. Le mémoire publié par Liebig en 1834 et dont j'ai déjà cité un passage avait pour titre : « De l’action de l’oxyde de carbone sur le potassium. » Liebig y a complètement décrit la préparation et les propriétés du premier carbonyle métallique connu, un composé de polassium et d'oxyde de carbone. Il obtenait ce corps par l’action directe de l'oxyde de carbone sur le potassium à une tem- pérature de 80° C; il l’a reconnu identique à une substance faisant partie du résidu très désagréable de la fabrication du potassium, extrait de la po- lasse au moyen du carbone par la méthode de Brunner. Cette substance constitue une poudre grise, non volatile; traitée par l'eau, elle produit une solution rouge, virant peu à peu au jaune au contact de l'air; par l’évaporation, on en obtient un sel jaune, appelé en raison de sa couleur croconate de potassium. Liebig a démontré que ce sel consiste en deux atomes de potassium, cinq de carbone et cinq d'oxygène, el qu'il ne con- tient pas d'hydrogène, comme on l'avait d'abord supposé. Depuis le travail de Liebig, le carbonyle de potassium a élé étudié par un grand nombre de savants, parmi lesquels sir Benjamin Brodie mérite une mention particulière; mais il a été réservé à Nietzki et Benkiser de déterminer fina- lement, en 1885, par une série de brillantes in- vestigations, la constitution exacte de ce corps et sa place dans le domaine de la chimie. Ces savants ont démontré que ce composé a pour formule K6CSOS, que ses six atomes de carbone sont liés en- semble sous la forme d’un anneau de benzole ; c'est de l’hexhydroxylbenzole dans lequel tout l'hydro- gène est remplacé par du potassium. Le corps que Liebig a obtenu par l'action directe de l’oxyde de carbone sur le potassium nous a ainsi permis de préparer, synthéliquement et très simplement, en le tirant soit de substances purement inorga- niques, soit de la potasse et du carbone, à notre choix, ou même si nous le voulons de la potasse et du fer, la série entière de ces composés très importants et très intéressants, qualifiés d’aroma- tiques, qui renferment les innombrables couleurs L. MOND. — LES CARBONYLES MÉTALLIQUES ——_—_—_—_—_— —— —"—…— .— ———————— des goudrons, et toute une pléiade de subs- tances infiniment précieuses pour la thérapeu- tique. I Un très petit nombre d’expériencesont été faites depuis Liebig avec d’autres métaux alcalins ; on a vu que le sodium, malgré son étroite parenté avec le potassium, ne se combine pas à l’oxyde de car- bone ; quant au lithium et au cæsium, on a reconnu qu'ils se conduisent comme le potassium. Les métaux d'autres groupes n’ont été l’objet pour ainsi dire d'aucune attention. Le rôle très important que joue l’oxyde de carbone dans la fa- brication du fer a conduit un certain nombre de métallurgistes (parmi lesquels il faut surtout citer Sir Lowthian Bell et le D' Alder Wright) à étudier l’action de ce gaz sur le fer métallique et autres métaux lourds, y compris le nickel et le cobalt, à de hautes températures. Ces expérimentateurs ont reconnu que ces métaux ont la propriété de dé- composer l’oxyde de carbone en carbone et acide carbonique à une basse chaleur rouge; c'était là un résultat important qui a jeté une nouvelle lumière sur lachimie du haut fourneau. Aucun de ces sa- vants cependant n’a cherché à produire, par l’union de ces métaux à l’oxyde de carbone, des composés nouveaux ; d’ailleurs, en raison de la haute tempé- rature et des autres conditions dans lesquelles ils opéraient, l'existence detels composés n’eût pu être décelée. Pour obtenir ces corps, on doit observer des conditions très spéciales. Il convient d'opérer sur les métaux très finement pulvérisés et faire agir l’oxyde de carbone à basse température. On oblient les meilleurs résullats quand l’oxalate du métal est chauffé dans un cou- rant d'hydrogène à la plus basse température à laquelle sa réduction à l'état métallique est pos- sible. L'oxyde de carbone, avant d'entrer dans le tube, brûle avec une flamme bleue non lumineuse. Après avoir passé au-dessus du nickel, il brûle avec une flamme extrêmement lumineuse, parce que, dans le tube chauffé par la flamme jusqu’à l’incan- descence, du nickel métallique se sépare du carbo- nyle de nickel déjà formé. En faisant passer le gaz qui sort de ce tube à travers un tube de verre chauffé à environ 200°, on obtient un miroir mé- tallique de nickel pur, parce qu’à cette tempéra- ture le carbonyle de nickel se résout complètement en ses constituants :le nickel etl’oxyde decarbone. Si l’on fait passer le gaz à travers un mélange ré- frigérant, un liquide sans couleur se condense : c’est le carbonyle de nickel à l’état pur: Ni (CO)f. Refroidi à — 25° C., ce liquide se solidifie, donnant des cristaux en forme d’aiguilles. La vapeur de carbonyle de nickel possède une odeur L. MOND. — LES CARBONYLES MÉTALLIQUES 533 caractéristique: elle est délétère, mais pas plus que le gaz oxyde de carbone. Le professeur M. Ken- drick a étudié l’action physiologique de ce liquide, et a trouvé que, lorsqu'il est injecté sous la peau en quantités extrèémement petites à des lapins, il amène un abaissement extraordinaire de tempéra- ture, qui, dans certains cas, va jusqu'à 12°. Le liquide peut être complètement distillé sans décomposition; mais, à cause de sa solution dans des liquides à points d'ébullition plus élevés, on ne peut l'obtenir par rectification. Si l’on chaufte une telle solulion, le composé se décompose, du nickel se précipite, tandis que de l'oxyde de car- bone s'échappe. De même, quand le carbonyle de nickel est atla- qué par des agents oxydants, tels que l'acide nitrique, le brome ou le chlore, la molécule ne tarde pas à se briser, des sels de nickel venant à se former et l'oxyde de carbone étant mis en liberté. Le soufre agit pareillement. Les métaux, même le potassium, les alcalis et les acides privés de pouvoir oxydant, sont sans action sur le liquide, el il en est de même des sels d'autres métaux. Le carbonyle de nickel se comporte donc chimique- ment d'une manière entièrement différente du carbonyle de potassium, et n’amène point, comme ce dernier, par des méthodes faciles, à des composés organiques compliqués. Il ne manifesie aucune des réactions si neltes chez les corps organiques qui contiennent du carbonyle, tels que les célones et les quinones; et nous n'avons pu, malgré de très nombreuses expériences, soit remplacer dans ce composé l’oxyde de carbone par d'autres grou- pes bi-valents, ou introduire l’oxyde de carbone au moyen de ce composé dans des substances orga- niques. Quand on expose le liquide à l'air libre, il se forme lentement un précipité de carbonate de nickel d’une composition variable, précipité d'un blanc jaunätre, si l’on emploie de l'air parfaitement sec, passant du vert clair au brun sale selon la plus ou moins grande abondance de l’humidilé dans l’air. Tous ces précipilés se dissolvent faci- lement et complètement dans de l'acide étendu d'eau, avec dégagement d'acide carbonique, lais- sant derrière eux des sels ordinaires de nickel, résultat contraire à l'opinion récemment émise par M. Berthelot !, qui voit dans ces précipités un composé de nickel avec carbone el oxygène, com- parable aux oxydes des composés organo-métal- liques. Dans le même travail, M. Berthelot a décrit une belle réaction du carbonyle de nickel avec l’oxyde nitrique. On dissout le carbonyle de nickel dans | Comptes rendus de l'Académie des Sciences de Paris. l'alcool et l’on fait passer au travers de l’oxyde nitrique : on observe dans ces conditions une magnifique coloralion bleue. Il Les propriélés chimiques du composé que Je viens de décrire sont sans exemple : nous ne con- naissons pas une seule substance ayant de pareilles réactions. Il est donc très intéressant d'étudier les propriélés physiques du nouveau corps. Le P' Quincke, de Heidelberg, a eu l’obligeance de déterminer ses propriétés magnétiques et a trouvé qu’il possède à un haut degré la propriété découverte par Faraday, et appelée par lui diama- gnétisme, qui est d'autant plus remarquable que tous les autres composés de nickel sont parama- gnétiques. Il à trouvé aussi que c'est un non- conducteur presque parfait d'électricité, ce qui le distingue à ce point de vue de tous les autres com- posés du nickel. Le spectre d'absorption, et aussi le spectre de la flamme de notre composé sont en ce moment l'objet des recherches de deux infatigables spectro- copistes, les P' Dewar et Liveing. Grâce à leur obligeance, je puis, avant la présentation de leur travail à la Société Royale de Londres, indi- quer quelques-uns de leurs résultats. Ces savants ont photographié le spectre d'absorplion du carbo- nyle de nickel contenu à l’état liquide à l'intérieur d’un prisme à lames de quartz, et en faisant passer du fer à travers le spectre. Or, la photographie ne montre aucun des rayons ultra-violets du spectre de fer : ces rayons ont donc été complètement absorbés par le carbonyle de nickel, qui est ainsi tout à fait opaque pour tous les rayons au delà de la longueur d'onde 3820. Le spectre de la flamme puissamment lumineuse du carbonyle de nickel est absolument continu ; mais, si le carbonyle de nickel est mélangé d'hydrogène, et qu'on brüle le mé- lange au moyen d'oxygène, les gaz brûlent avec une flamme brillante d'un vert-jaunâtre sans fu- mée visible; le spectre de cette flamme montre dans sa partie visible, sur le fond d'un spectre con- tinu, un grand nombre de bandes vertes, très bril- lantes, mais s'étendant vers le rouge au delà de la ligne rouge du lithium, et vers le violet s’éten- dant jusque dans le bleu. La photographie montre dans lultra-violet un grand nombre de lignes bien définies, plus de cinquante. Toutes ces lignes correspondent absolument aux lignes appartenant au spectre de lélincelle; effectivement, la plus grande partie des lignes visibles dans le spectre de l’éiacelle apparaissent aussi dans le spectre de flamme. Nous avons ici un très frappant exemple du fait découvertle même jour par les P'° Dewar et Li= #36 L. MOND. — LES CARBONYLES MÉTALLIQUES veing, et par le D' Huggins, que le spectre des flammes lumineuses n’est pas toujours continu dans toute la série, fait qui, à un moment, a été l'objet de nombreux débats. Unedes découvertes les plus remarquables, faites danslelaboratoire dela Royal Institution parl'homme illustre dont nous avons célébré le centenaire l'an dernier, a été celle d’une relation entre le magné- tisme et la lumière, alors que, sous l'influence d’un champ magnétique, le plan de la lumière polarisée subit une rotation d’un certain angle. Le D° W. H. Perkin a poursuivi cette découverte de Faraday dans une longue série de recherches des plus sé- rieuses, et il a établi ce fait considérable qu'il y a un rapport déterminéentre le pouvoir rotatoire ma- gnétique de divers corps et leur constitution chi- mique. Ce phénomène jette quelque jour sur la structure des composés chimiques. M. Perkin a eu la bonté de rechercher le pouvoir rotatoire ma- gnétique du carbonyle de nickel, et l’a trouvé, de même que ses propriétés chimiques, en dehors de l'ordinaire, c'est-à-dire qu'il est plus grand que celui de toutes les substances examinées jusqu'à présent, le phosphore excepté. L'étude du pouvoir réfracteur et dispersif, ma- gistralement conduite par M. Gladstone, est venue aussi éclairer d’une vive lumière la constitution des composés chimiques. Je me suis donc appliqué à déterminer les pouvoirs réfracteur et dispersif du carbonyle de nickel. J'ai fait ce travail à Rome avec la collaboration du P' Nasini. Nous avons trouvé que la réfraction atomique du nickel dans le carbonyle de nickel est presque deux fois et demie aussi considérable que dans tout autre composé du même mélal, différence très supé- rieure à celles qu'on avait jamais observées au- paravant dans la réfraction atomique d'un élé- ment. On suppose généralement que, si un élément montre des pouvoirs réfracteurs atomiques difré- rents dans les divers composés, il entre avec un plus grand nombre de valences dans le composé où s’observe le pouvoir réfracteur plus élevé. D'ac- cord avec cette manière de voir, le pouvoir réfrac- teur beaucoup plus grand du nickel dans le carbo- nyle trouverait une explication en admettant que cet élément — bivalent dans loutes ses autres combinaisons connues — exerce dans le carbo- nyle la limite de sa valence, qui est 8, limite que lui a assignée Mendelejeff en le plaçant dans le 8° groupe de sa Z'able. Cela signifierait que l'atome de nickel contenu dans le carbonyle de nickel est combiné directement à chacun des quatre atomes bivalents du carbonyle, dont chacun saturerait deux des huit valences de nickel, comme le montre le tableau suivant : Cette manière de voir semble plausible; elle s'accorde avec les propriétés chimiques de la subs- tance, et je n’hésiterais pas à l’accepter si nous n'avions pas, en continuant nos travaux sur les carbonyles métalliques, trouvé une autre substance, — un liquide composéde fer et d’oxyde de carbone, — qui, par ses propriétés, ressemble tellement au composé de nickel qu’on est tenté de lui attribuer la même constitution, tandis que sa composition rend presque impossible l'adoption d’une formule structurale similaire. Il contient, pour un équiva- lent de fer, cinq équivalents de carbonyle. Pour lui assigner une constitution similaire, il faudrait donc supposer que le fer exerce dix valences, deux de plus qu'aucun élément connu, manière de voir que très peu de chimistes seraient dispo- sés à adopter. La réfraction atomique du fer dans ce composé, — réfraction que M. Gladstone a eu l’obligeance de déterminer, — est aussi extraor- dinaire que celle du nickel dans le composé de nickel el conserve à peu près les mêmes rapports vis-à-vis de la réfraction atomique du fer dans d'autres composés. Nous avons donc à chercher une autre explication pour la réfraction atomique extraordinairement élevée de ces mélaux dans leurs composés avec un monoxyde de carbone. Cette explication viendra peut-être modifier notre manière de voir actuelle. Quant à la structure de ces composés eux-mêmes, nous sommes presque forcés d'admettre qu'ils contiennent les atomes de carbonyle sous la forme d’une chaîne. Le ferro-carbonyle se prépare d’une manière si- milaire à celle du composé de nickel. Le fer em- ployé est obtenu en chauffant de l’oxalate de fer à la plus basse température possible. Toutefois, ce carbonyle se forme si difficilement que, pendant longtemps, son existence nous a échappé, et il a fallu de grandes précautions pour en obtenir une pelite quantité. Il forme un liquide couleur d’ambre, qui se solidifie à —21° C. en une massede cristaux en forme d'aiguilles. Si l’on chauffe sa va- peur à 180° C.,ilse décompose complètement en fer et oxyde de carbone. On peut obtenir de cette façon des miroirs de fer. Ce corps a pour for- mule : Fe (CO). Il est intéressant de remarquer que, peu de temps après que nous avions fait connaître l’exis- tence de ce corps, sir Henry Roscoe letrouvait dans de l’oxyde de carbone resté comprimé pendant très L. MOND. — LES CARBONYLES MÉTALLIQUES 537 longtemps à l'intérieur d’un cylindre de fer. Ce savant a exprimé l’opinion que le dépôt rouge, qui se forme quelquefois dans les becs de gaz de stéa- tile ordinaire, est dù à la présence de cette subs- tance dans le gaz d'éclairage. Sa présence dans le gaz comprimé employé pour la lumière de Drum- mond a élé indiquée par le D'Thorne, dont l’atten- tion a été éveillée par ce fait que parfois ce gaz ne donne pas une lumière convenable, parce que la chaux incandescente se couvre d'oxyde de fer. M. Garnier, dans un mémoire communiqué à l'Académie des Sciences de Paris, suppose même que ce gaz se forme en grandes quantités dans les hauts fourneaux, lursque ceux-ci fonctionnent à des températures trop basses, et il cite plusieurs cas dans lesquels il a trouvé de larges dépôts d'oxyde de fer dans les tubes qui entraînent le gaz hors de ces fourneaux. Il me parait difficile de croire que la température d’un haut fourneau puisse être assez réduite pour donner naissance à ce composé. D'un autre côté, il est bien probable que la formation du composé de fer et oxyde de carbone peut jouer un rôle important dans ce pro- cédé mystérieux, dit de cémentation, au moyen duquel nous faisons encore aujourd'hui, et avons fabriqué pendant des siècles, l’acier de la plus belle qualité. L’attitude chimique du carbonyle de fer vis-à-vis des acides et des agents oxydants est absolument la même que celle du composé de nickel, mais vis-à-vis des alcalis il se comporte différemment. Le liquide se dissout sans dégagement de gaz. Au bout de quelque temps, il se forme un précipité verdàtre qui contient surtout un oxyde ferreux hydraté, et la solution devient brune. Exposée à l'air, elle absorbe de l'oxygène; la couleur devient rouge foncé, pendant que l’oxyde de fer hydraté se décompose. Jusqu'à présent nous n’avons pas pu obtenir de cette solution un composé propre à l’analyse, et nous sommes encore en train de rechercher la na- ture de la réaction qui se produit et celle des com- posés qui se forment. Bien qu’en apparence la solution ressemble jus- qu'à un certain point aux solutions obtenues en traitant le carbonyle de potassium avec l’eau, elle ne donne aucune des réactions caractéristiques de ce dernier. En parlant du carbonyle de potassium, j'ai dit qu'en le traitant avec l’eau, on obtient le croconate de potassium, qui a pour formule K? C° 0°. Nous avons transformé ce corps, par une double décom- position, en croconate ferreux Fe Cÿ 0°, sel for- mant des cristaux foncés d'un lustre métallique qui ressemblent à l’iodine. Ce sel n'estpoint volalil; il se dissout facilement dans l’eau, la solution don- nant toutes les réactions bien connues du fer et de l'acide croconique. Il convient de remarquer combien les propriétés de celte substance diffèrent de celles du carbonyle de fer; toutefois, par rap- port à sa composition, on trouve qu'il contient exactement le même nombre d’atomes de fer, carbone et oxygène que ce dernier. C’est là un cas très intéressant d’isomérie, si l’on considère que les deux composés contiennent seulement du fer, du carbone et de l'oxygène. La différence dans les propriélés de ces deux corps s'explique en compa- rant leurs formules de structure. J'appellerai maintenant l'attention sur la grande différence entre la constitution du carbonyle de potassium, et celle du nickel et du ferro-carbonyle. Dans le premier, le métal potassium se combine à l'oxygène dans le carbonyle; dans le dernier, les métaux nickel et fer se combinent au carbone du carbonyle. Dans le premier cas nous avons un cycle de benzole avec ses trois liaisons simples et trois liaisons doubles ; dans le second une chaîne fermée avec seulement des liaisons simples. Il est évident que les propriétés chimiques de ces subs- tances doivent être extrêmement différentes. Le ferro-penta-carbonyle reste absolument sans changement dans l'obscurité; mais, s'il est exposé à la lumière du soleil, il est transformé en un corps solide d’une couleur or éclatante. Ce corps solide n’est pas volatil; mais, si on le chauffe à l'abri de l’air, le fer se sépare, et du ferro- carbonyle distille. Si, cependant, il est chauffé avec soin dans un courant d'oxyde de carbone, il est converti à nouveau en ferro-penla-carbonyle, et complètement volatilisé. Jusqu’à présent nous n’a- vons pas trouvé de dissolvant pour cette substance, de sorte que nous n'avons encore aucun moyen de l'obtenir à l’état parfaitement pur. Plusieurs déter- minalions du fer dans différents échantillons de la substance ont produit des chiffres assez concor- dants qui correspondent à la formule Fe? (CO) ou bi-ferro-heptacarbonyle. III Les intéressantes propriétés des substances qui viennent d’être décrites nous ont amené naturelle- ment à penser qu'il serait, — suivant lajolie expres- sion de Lord Kelvin, — possible « de donner des ailes à d’autres métaux lourds ». Nous avons essayé tous les métaux connus, et un très grand nombre de mé- taux plus rares ; mais, sauf pour le nickel et le fer, nous avons jusqu’à ce jour échoué complètement. Même le cobalt, qui ressemble tant au nickel, n’a pas donné la plus petite trace d’un carbonyle. Cela m'a amené à étudier la question de savoir si, au moyen de l’action de l’oxyde de carbone, la sépa- 538 L. MOND. — LES CARBONYLES MÉTALLIQUES Te En ration du nickel et du coball ne pourrait pas s'ef- fectuer sur une grande échelle, ce qui jusqu'à présent a élé une opération métallurgique très compliquée; subséquemment., j'ai été amené à re- chercher s’il ne serait pas possible d'employer l’oxyde de carbone pour extraire industriellement le nickel de ses minerais. Il a été établi que du nickel pur, préparé avec une grande précaution dans un tube de verre, pouvait être en partie volalilisé par de l’oxyde de carbone, et que du gaz ainsi obtenu le nickel pou- vait être séparé à nouveau par la chaleur. Les questions à étudier étaient donc de savoir : 4° s’il serait possible de réduire les minerais, dans les opérations industrielles, de telle sorte qu’on obtint le nickel à un état de division suffisamment fin et dans un état assez actif pour que l'oxyde de car- bone le volatilise; 2° si une telle action serait suffisamment rapide pour la rendre applicable dans l’industrie; 3° si elle serait suffisamment complète pour enlever tout le nickel du minerai: 4 si aucun des autres éléments du minerai ne se- rait susceptible de passer avec le nickel et rendre celui-ci inutilisable: 5° si le nickel pourrait être complètement séparé du gaz dans des limites pra- tiques; 6° enfin si l’on pourrait indéfiniment em- ployer l’oxyde de carbone recouvré. Pour résoudre ces problèmes dans les limites des ressources d'un laboratoire, j'ai imaginé un appareil qui consiste en un cylindre divisé en un grand nombre de compartiments, à travers lequel on fait passer très lentement, au moyen d’agita- teurs attachés à une tige, le minerai préparé d’une manière convenable. En quittant le fond de ce cylindre, le minerai passe à travers une vis de transport; de là il arrive à un élévateur qui le renvoie à la partie supérieure du cylindre, de sorte qu'il passe bien des fois à travers le cylindre, jusqu’à ce que tout le nickel soit volatilisé. Nous faisons, dans le fond de ce cylindre, passer de l'oxyde de carbone, qui en sort dans le haut chargé de vapeur de carbonyle de nickel et passe à travers des tubes placés dans un fourneau et chauffés à 200°. Le nickel se sépare alors du carbonyle de nickel. L'oxyde de carbone est régénéré et ramené au cylindre au moyen d’un ventilateur, de sorte qu'on oblige le même gaz à transporter de nou- velles quantités de nickel hors da minerai dans le cylindre, et à déposer celui-ci dans les tubes un nombre infini de fois. C'est sur ces principes que M. Langer a cons- truit une installation complète sur une échelle lilli- putienne, qui a fonctionné dans mon laboratoire un temps considérable. Au fond le minerai est versé dans la vis de transport; il passe à travers un fourneau, et de cette vis à un élévateur qui renvoie le minerai au haut du cylindre, de sorte que le minerai passe et repasse constamment et lentement à travers le cylindre, jusqu'à ce que le nickel qu'il contient soit enlevé. Le gaz oxyde de carbone, préparé d’une manière quelconque. arrive au fond du cylindre, et en sort par le haut. Il passe alors à travers un filtre destiné à retenir la poussière qu’il peut contenir, et de là dans une série de tubes de fer construits à l’inté- rieur d'un fourneau, où ils sont chauffés à environ 200° C. Dans ces tubes le carbonyle de nickel en- trainé par l’oxyde de carbone est complètement décomposé, et le nickel déposé contre les parois des tubes est de temps en temps retiré; on l’obtient alors sous la forme de tubes ou de plaques. L'oxyde de carbone, régénéré dans ces tubes, passe à travers un autre filtre, et de là à travers un épurateur à chaux pour absorber tout l'acide carbonique qui peut s'être formé par l’action du nickel divisé en parties très fines sur l’oxyde de carbone; il est alors renvoyé au moyen d’un petit ventilateur au fond du cylindre. Toute cette installation est maintenue automatiquement en mouvement au moyen d’un moteur électrique. Au moyen de cet appareil nous avons réussi à extraire le nickel d’une grande quantité de mine- rai, dans un espace de temps variant, suivant la nature du minerai, entre quelques heures et plu- sieurs jours. Avant la fin de cette année-ci, ce procédé doit être monté à Birmingham sur une échelle qui me permeltra de faire cesser tout doute sur sa valeur industrielle, de sorte que j'ai tout lieu d'espérer que, dans quelques mois, le carbonyle de nickel, substance qui était absolument inconuue il y a deux ans, et qui est encore aujourd’hui un article très rare, à peine sorti du laboratoire du chimiste, sera produit en très grandes quantités, el jouera un rôle important en métallurgie. Le procédé possède, en plus de sa grande sim- plicité, l'avantage additionnel qu’il est possible d'obtenir le nickel immédiatement sous n'importe quelle forme définie. Si nous le déposons dans des tubes, nous obtenons des tubes de nickel; dans un globe nous obtenons un globe de nickel; dans des moules chauffés, on a des copies de ces moules sous forme d’un nickel métallique pur et d’une cohésion ferme. Un dépôt de nickel repro- dut les détails les plus minutieux des moules avec la même perfection que les reproductions galva- niques. Il est facile de nickeler toute surface capa- ble de supporter la température de 180° C., en la chauffant à cetle température, et en l'exposant à la vapeur ou même à une solution de carbonyle de nickel, procédé qui peut dans bien des cas pré- senter des avantages sur la galvanoplastie. Te EN EE ve ten din en. ii nisuwluéi GERS. : R. KŒHLER. — LA FÉCONDATION Les propriétés les plus précieuses de l’alliage du nickel et du fer appelé nickel-acier, qui nous pro- met de nous donner des cuirassés impénétrables, font de la production abondante et à bon marché de ce mélal une question d’un intérêt national. La beauté des objets que nous avons fait fabriquer soit en nickel pur, soit nickelés, témoigne de la facilité que notre procédé offre pour produire de très belles copies et pour fabriquer des articles de formes telles qu'on n'avait pu jusqu'à présent les oblenir sans le concours de la presse hydraulique. Le premier emploi pratique du procédé a été fait par le P' Ramsay, qui, pour se livrer à des re- cherches chimiques, a fait un charmant appareil de nickel pur, tout d’un seul morceau. J'ai commencé cet article en rappelant une idée de Liebig qui dale de cinquante-huit ans. Liebig en avait-il tous les développements devant les yeux 539 de sa puissante et féconde imagination? C'est là une question à laquelle il est impossible de ré- pondre. Qui pourra se risquer à mesurer la portée du coup d'œil de nos grands hommes qui, de toute la hauteur de leur esprit, regardent au loin dans le domaine de la Science, et nous révèlent des choses merveilleuses dont nous ne pouvons recon- naître l'existence qu'après avoir marché longtemps et péniblement sur la route qu'ils nous ont tracée. Que Liebig ait deviné ou non ces résultats, ce n’en est pas moins à lui et à des hommes comme lui qu'on doit de voir la Science continuer sa merveil- leuse marche en avant, dispersant les ténèbres qui nous environnent, et ajoutant toujours à l’éten- due et à l’exactitude de nos connaissances, pour le plus grand bien matériel et moral de l’huma- nitée Ludwig Mond, de la Société royale de Londres. LES PHÉNOMÈNES INTIMES DE LA FÉCONDATION Nos connaissances sur là nature des phénomènes intimes de la fécondation sont d’origine toute ré- cente. Peu d’années nous séparent de l’époque où l’on croyait que la fécondation se réduisait à la pénétration du spermatozoïde dans l'œuf et au mélange de sa substance avec le vitellus. On savait encore que, vers le moment où s'opérait la fécondation, l'œuf donnait naissance, par une sorte de bourgeonnement, aux globules polaires, qu'on appelait sphères directrices ou corpuscules de rebut, suivant qu'on voulait indiquer que ces élé- ments marquaient la direction du premier plan de segmentation ou servaient à débarrasser l'œuf de produits inutiles ou nuisibles. À partir de l’époque où des observateurs comme Fol, Hertwig, Van Beneden, étudièrent la péné- tration du zoosperme dans l'œuf et reconnurent les modifications que cet élément y subit,les ques- tions relatives à la fécondation n’ont cessé de pas- sionner les zoologistes: elles offrent, en effet, un intérêt considérable, et elles ont une haute portée philosophique. Les botanistes n'ont pas non plus négligé l'étude de ces phénomènes chez les végé- taux, et ils sont arrivés à des résultats qui con- firment pleinement ceux qui ont été obtenus chez les animaux, si bien qu'aujourd'hui, — quoiqu'il y ait encore plusieurs points à l’étude, — les actes essentiels de la fécondation peuvent être considérés comme connus. Je me propose d’exposer ici l’état actuel de nos connaissances sur les phénomènes morpholo- giques de la fécondation, en étudiant successive- ment les modifications que subissent, lors de cet acte, le noyau et le protoplasma des éléments mis en présence, — puis de discuter la signification de ces phénomènes et de rechercher l'importance de la fécondation chez les êtres vivants. Il Il faut distinguer chez les animaux la maturation de l’œuf de la fécondation. L’ovule complètement développé (fig. 1) n’est pas encore apte à être Fig. 1. — Ovule d'Oursin immédiatement avant la formation des globules polaires, fécondé : il doit préalablement subir deux divi- sions quiauront pour résultat la formation des glo- bules polaires (ordinairement au nombre de deux), 1 Cet article est extrait d'une étude que l’auteur vient de publier dans le journal anglais Nature du 7 juillet 1892. © = © R. KŒHLER. — LA FÉCONDATION et en même temps une diminution de la substance chromatique du noyau. La genèse des globules polaires a été observée pour la première fois sur les œufs d’Echinodermes par H. Fol, dont les recherches sont restées classi- ques. Ce savant a vu la vésicule germinative (fig. 2-7) se transformer en un corps fusiforme, l’amplhiaster (fig. 2), analogue à celui qui exisie dans les cel- lules en division, et présentant à chaque extrémité un système de rayons (soleil, aster). Le fuseau se dirige vers la périphérie de l'œuf, puis l’aster le plus rapproché du bord sort du vilellus et fournit un premier globule polaire (fig. 3 et 4). Le reste fig.2 Fig. 2-1. — Formation des globules polaires chez l’Oursin g.p. globules polaires; en centrosomes (d'après Hertwig). du fuseau forme de nouveau un amphiaster (fig. 5) qui donnera naissance de la même manière à un deuxième globule (fig. 6). Le reste de la vésicule germinalive, ainsi diminuée par ces deux élimina- tions successives forme un noyau, le noyau de l'œuf, ou pronucleus femelle (fig. 7). À cet élat l'œuf est apte à être fécondé !. L'étude des œufs d'Échinodermes n’a pas permis de reconnailre comment se comportent les élé- ments chromaliques du noyau ou chromosomes. Mais tout récemment les modificalions que subissent ces éléments ont pu être observées, dans tous leurs détails, sur les œufs du Pyrrhocoris et surtout de l’Ascaris du cheval; cette découverte a jeté un grand jour sur l’histoire des produits sexuels. Chez l’Ascaris?, les œufs prennent naissance à la suite de divisions répétées de cellules, qui sont les cellules mères primordiales ; ces divisions termi- nées, les cellules entrent en repos et grandissent : 1 La formation des globules polaires est absolument indé- pendante de la pénétration du zoosperme dans l'œuf: suivant les cas, elle a lieu, tantôt avant, tantôt après, et parfois même pendant cette pénétration. 2 L'Ascaris du cheval (4 megalocephala) se prête admira- blement à toutes les études relatives à la fécondation et à la segmentation de l’œuf. Depuis l’époque où il fut l'objet des premières observations de van Beneden, ila acquis une grande céiébrité, et il est devenu l’animal classique pour les études d'embryologie, comme la grenouille l'est depuis longtemps pour les études physiologiques. quand elles auront acquis une certaine taille, elles formeront les globules polaires. Ces corps pren- nent naissance par uu processus karyokinétique qui présente des caractères fort remarquables et tout à fait inattendus. Les noyaux des cellules mères renferment tous quatre chromosomes #; lorsque, la période de repos et d’accroissement étant terminée, ces cellules rentrent en activité, ces chromosomes se dédoublent, ce qui porte leur nombre à huit ; puis il se disposent en une plaque équatoriale comprenant de chaque côté quatre segments, et située au milieu d'un fuseau de fibres achromatiques (fig. 8). Toute la figure se porte vers la périphérie de l’œuf et les quatre chromo- somes les plus voisins de la surface, s'écartant des autres, sortent de l’œuf avec la porlion voisine du fuseau (fig. 9). Le premier globule polaire se trouve ainsi constitué. Immédiatement après, et sans que le noyau rentre au repos, il se forme un nou- veau fuseau (fig. 10) sur les filaments duquel se groupent deux par deux les quatre chromosomes restés dans l’œuf, et, par un processus identique au précédent, deux de ces éléments sont rejetés en formant le deuxième globule. Dès lors, il ne reste plus dans l’œuf qu'un noyau ou pronucleus renfer- mant seulement deux chromosomes, el non pas quatre, ainsi que cela serait arrivé si les divisions s'élaient effectuées normalement, c’est-à-dire si elles avaient été séparées par une période de repos. Ge noyau ayant subi une réduction de moitié fig — Fig. 8-10, — Formation des globules polaires chez l'Ascaris megalocephala, sp spermatozoïde. dans le rombre de ses éléments chromatiques, n'est plus qu’un dexi-noyau. La formation des glo- bules polaires a done pour effet de produire la réduction des chromosomes de l'œuf. Remarquons que le premier globule renferme quatre chromosomes, c’est-à-dire autant que le deuxième globule et le pronucleus en possèdent ensemble. Chez l’Ascaris, ce premier globule ne se l Ilest très intéressant de remarquer qu’il existe deux va- riétés d’Ascaris différant entre elles par le nombre de chromo- somes de leurs noyaux: une variété wnivalens dont les noyaux renferment deux chromosomes, et une variété bivalens dont les noyaux en possèdent quatre. C'est de cette dernière qu'il sera toujours question dans cet article. MERE. D Se R. KŒHLER. — LA FÉCONDATION divise pas; mais chez plusieurs autres animaux, qui sous ce rapport conservent le mode primitif, il se divise en deux autres renfermant chacun deux chromosomes, ainsi que cela à été fréquemment observé chez les Vers, les Mollusques et les Ver- tébrés. Comme les globules polaires sont des élé- ments inutiles et destinés à disparaitre, il importe peu que la division du premier globule se fasse ou ne se fasse pas. Nous pouvons donc dire qu'à la suite des deux dernières divisions qu’elle subit — divisions qui présentent le caractère absolument ex- traordinaire de se produire coup sur coup et sans phase de repos intermédiaire, — la cellule sexuelle femelle fournit quatre cellules filles ayant même valeur morphologique et ne différant que par leur taille : l’une très grosse, qui est l'œuf capable de développement ultérieur, et trois beaucoup plus petites destinées à disparaitre !. Le développement des spermatozoïdes de l’As- caris ressemble étonnamment à celui des œufs. Les cellules mères primordiales ou spermalogonies se divisent un grand nombre de fois dans la glande mâle ; après une période de repos et d’accroisse- ment, elles rentrent brusquement en activité, el elles subissent deux bipartitions pour donner naissance chacune à quatre cellules filles ou sper- matocytes dont chacune deviendra un spermato- zoïde. Or ici,comme dans l'œuf, ces deux divisions se produisent coup sur coup, sans laisser au noyau le temps de revenir au repos, el les spermatocytes renferment constamment un nombre de chromo- somes moilié moindre que les spermatogonies; ces dernières en possédaient quatre el les sper- matocytes n’en ont plus que deux. Une réduction analogue a été observée chez les Gastéropodes, les Lépidoptères et la Salamandre. Chez ce dernier animal, les spermatocyles renfer- ment douze chromosomes, tandis que leurs cel- lules-mères en possédaient vingt-quatre. La conclusion importante qui se dégage de ces observations, c’est que, dans l'élément mâle comme dans l’élément femelle, les parties chro- maliques des noyaux sexuels subissent, lors des deux dernières divisions dont ils sont le siège, une réduclion de moilié, el que, chez un même animal, le nombre des chromosomes de l'œuf est rigoureusement le même que celui des sper- matozoïdes, mais que ce nombre est exacte- ment la moitié de celui qu'on observe dans les cellules de cet animal. Les éléments sexuels ne possèdent donc que des demi-noyaux. 1 Däns les œufs du Pyrrhocoris récemment étudiés par Henking, les éléments chromatiques ne se comportent pas exactement comme chez l'Ascaris, mais le résultat définitif n’est point modifié: après l'élimination des globules polaires, ls nombre des chromosomes se trouve réduit de moitié. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. D41 Il Il suftit de mélanger dans de l’eau de mer les œufs etles spermatozoïdes d'un Échinoderme, d’un Oursin par exemple, pour observer sous le micros- cope les phases principales de la fécondation, comme l’a fait Fol en 1875 (fig. 11-13). On verra alors le spermatozoïde pénétrer dans la couche muqueuse qui enveloppe l'œuf, dont le vitellus se soulève en une petite saillie dirigée vers le sper- |, matozoïde (fig. 11). Celui-ci vient s'y appli- quer (fig. 12), et, dès que le contact est opéré, la Fig. 11 Fig. 12 Fig. 13 Fig. 41-13. — Copulation de l’œuf et du spermatozoïde chez l'Oursin. couche périphérique de l'œuf se gonfle et s’é- paissit (fig. 13) de manière à s'opposer à l’entrée d’un deuxième zoosperme. Le corps du spermato- zoïde pénètre alors dans l'œuf où il prend l’appa- rence d'un petit noyau clair entouré de slries ra- diaires (fig. 14) : c’est le pronucleus male qui marche vers le pronucleus femelle, auquel il ne tardera pas à s'unir pour former un noyau unique : le noyau de l'œuf, qui entrera immédiatement en divi- sion. Pour étudier d'une manière plus complète l’his- toire des pronucleus, nous nous adresserons encore à l'œuf de l’Ascaris (fig. 15-18). Chez ce Ver, les œufs Fig. 14, — Œuf d'Oursin fécondé.Le pronucleus mâle (p..) entouré d’un soleil marche à la rencontre du pronucleus fe- melle (p. f.). sont entourés d’une membrane intérrompue vers l’un des pôles où le protoplasma reste nu; c’est à ce point que le zoosperme s'applique, puis il s'en- ! fonce dans le vilellus, tandis que la membrane se 15° 542 R. KŒHLER. — LA FÉCONDATION reforme au pôle d'imprégnation !. Pendant ce temps les globules polaires prennent naissance ; dès que le deuxième globule est formé, le zo0s- perme se transforme en un pronucleus qui s'établit aux dépens de son noyau et de la zone protoplas- mique avoisinant immédiatement ce noyau, tandis que le reste du spermatozoïde s’en sépare et diflue dans le vitellus. Le globule chromatique se divise alors en quatre corpuscules, et tandis que les dimensions du pronucleus s’accroissent notable- ment, ces corpuscules se résolvent en granulations qui se disposent en réseau (fig. 15) pour former fig16 Fig. 15-18. — Formation de deux pronucleus (pr) et de la plaque équatoriale dans l'œuf de l’Ascaris (d’après Boveri). ensuite deux anses chromaliques. En même temps, des changements identiques se passent dans la partie de la vésicule germinative qui reste après l'expulsion des globules polaires, de telle sorte qu’à cette phase on trouve dans l'œuf, à la place du spermatozoïde et de la vésicule germinative, un pronuecleus mäàle et un pronueleus femelle, qui procèdent de ces deux éléments ; et qui sont constitués chacun par un noyau élair à contours nets, renfermant deux chromosomes (fig. 16 pr). Ces deux pronucleus vont à la rencontre l’un de l'autre, puis ils s’accouplent tout en conservant, pendant un temps assez long leurs contours dis- tincts et sans mélanger leurs sucs nucléaires; c'est ce qui arrive aussi chez les Mollusques, tandis que chezles Échinodermes les pronucleus se fusionnent dès qu’ils se sont touchés. Il n'y a pas lieu d'éta- blir de distinction profonde entre ces deux cas, 1 Les spermatozoïdes de l'Ascaris, comme ceux des autres Nématodes, n’ont pas la forme ordinaire : au lieu de filaments allongés, ce sont des corps en forme de cône (fig. 8 sp) dont la grosse extrémité, qui est celle par laquelle le zoosperme se fixe sur l’œuf, est nue, tandis que la partie eflilée est recouverte d’une membrane. Le noyau renferme un gros globule chroma- tique. car il importe peu que la ligne de démarcation entre les deux pronucleus disparaisse de bonne heure ou tardivement, avant ou pendant la karyo- kinèse. Dès que les deux pronucleus se sont ac- couplés, la fécondation est opérée, et l'on peut dire que la première cellule de l'embryon est constituée, car ces deux pronucleus, fusionnés ou non, vont se comporter comme un noyau de cel- lule unique. Mais, ce qu'il est important de constater, c’est que les quatre chromosomes restent toujours distincts, et qu'à aucun moment ils ne se confon- dent ni ne se fusionnent. Les deux anses chroma- tiques provenant de chaque pronucleus, obéissant à l’attraction d'éléments dont nous parlerons tout à l'heure, viennent en effet se disposer en une plaque équatoriale située au milieu d’un espace clair constitué par les sucs nucléaires des deux pronucleus, et dans lequel se différencient les fila- ments achromatiques (fig. 17 et 18). Comme dans toute division, les chromosomes subissent un dé- doublement longitudinal, et ils se partagent en deux anses secondaires qui se rendent chacune en sens inverse aux deux pôles du fuseau. Ainsi se forment deux groupes de chromosomes, compre- nant chacun deux anses mâles et deux anses femelles, et qui deviendront les éléments chromatiques des noyaux des deux premières cellules embryon- naires, lesquelles s’établiront d’après le mode ordinaire, Il en résulte que ces deux cellules, mères de toutes les autres, renferment dans leurs noyaux #ne quantité rigoureusement égale de substance FE ig. 19-24. — Schéma de la division karyokinétique que subit l'œuf fécondé pour donner naissance aux noyaux des deux premières cellules embryonnaires. (Les chromosomes males sont pleins; les chromosomes femelles sont représentés par des hachures). chromatique maternelle et paternelle. I est inutile d’in- sister sur l'importance capitale de ce fait (voir les | figures 19:24). R. KŒHLER. — LA FÉCONDATION 543 III Nous ne nous sommes préoccupés jusqu'ici que des phénomènes intéressant les noyaux des éléments reproducteurs; c'est à ces phénomènes seuls qu'on attribuait de l'importance il y a quelques années. On sail maintenant, gräce à des décou- vertes récentes, que toutes les cellules renferment dans leur protoplasma des éléments particuliers, les centrosomes où sphères directrices, qui existent aussi bien dans l'œuf que dans le spermatozoïde. Ces éléments, d’origine essentiellement protoplas- mique, sont constitués par un corps central ou centrosome qui en est l'élément essentiel, ef par une zone périphérique plus ou moins large (fig. 2-6 et 15-18 cn). Ce sont de véritables centres d’altraction pour le reste du protoplasma, dont les granulalions se disposent autour d'eux en files radiaires quand la cellule entre en division ; de plus, leur position dans la cellule détermine l'orientation du plan de division, car la plaque équatoriale s'établit cons- tamment dans un plan perpendiculaire à la ligne qui relie les centrosomes, vers lesquels convergent tous les filaments de fuseau (fig. 18 et 19-24. Les sphères directrices sont de véritables organes de la cellule au même litre que le noyau; ordinaire- ment les cellules animales renferment une seule sphère quand elles sont au repos; mais, quand une division doit avoir lieu, le centrosome se divise en deux moiliés qui se séparent en entrainant cha- cune une partie de la zone périphérique. Ainsi se conslituent deux sphères directrices qui, pendant la division, sont situées de part et d'autre de la plaque équatoriale, et dont chacune passera dans le protoplasma de la cellule fille correspondante. Les sphères directrices ont été découvertes, il y a déjà longtemps, dans les œufs des Échinodermes : elles furent étudiées ensuite chez d’autres animaux, mais il avait été impossible d'établir avec certitude l'origine de ces éléments que les uns faisaient pro- venir exclusivement des spermatozoïdes, les autres de l’œuf. Tout récemment, en 1891, Fol à pu observer, sur les œufs d'Oursin, le rôle de ces sphères dans la fécondation, el ila reconnu qu'elles étaient soumises dans l'œuf à des mouvements fort curieux et très exactement réglés qu'il a décrils sous le nom pittoresque de guadrille des centres, (fig. 25-29). L’œuf et le spermalozoïde possèdent chacun un centrosome; en pénétrant dans l'œuf, le spermatozoide (fig. 25, s.) est accompagné de son centrosome que Fol appelle le spermocentre (sc) pour l’opposer à celui de œuf, ou ovocentre (ov), qui est silué au voisinage du pronucleus femelle (pf\. Les centres accompagnent leurs pronucléus respec- tifs pendant que ceux-ci vont à la rencontre l’un de l’autre, et lorsque leur accouplement est effec- tué (fig. 26), l'ovocentre d'abord, puis le spermo- centre se dédoublent chacun en deux corpuscules qui restent reliés pendant un certain temps comme dans une haltère (fig. 27). Ces haltères se placent dechaque côté des deux pronucleus accouplés dans un plan, qui est celui de la future division; puis les deux corpuscules de chacune d'elles se séparent et décrivent, chacun en sens inverse, un quart de tour (fig. 28), de telle sorte que de chaque côté les: demi-centres de provenance différente se trouvent réunis. Ces deux demi-centres se fusionnent (fig. 29) Fig. 25-29. — Quadrille des centres. Les centres mâles sont représentés par des cercles foncés et les centres femelles par des cercles clairs (d’après Fol), s. spermatozoide, sc. spermocentre, pf. pronucléus, ov. ovocentre. el donnent ainsi naissance à deux centres nou- veaux, les astrocentres (ac), dont chacun est formé par un demi-ovocentre el un demi-spermocentre. Ces astrocentres sont situés en des points qui répondent aux deux extrémités du futur fuseau de division. Chacun d’eux deviendra la sphère directrice de la cellule-fille correspondante, lui fournissant ainsi une égale quantité de substance protoplasmique paternelle et maternelle. Chez l’Ascaris les sphères attractives, ou, pour ètre plus précis, les astrocentres, atteignent des dimensions considérables. Les figures que je repro- duis ici el qui sont empruntées à un mémoire de Boveri (fig. 15-16) montrent nettement les diffé- rences que ces éléments présentent avant et pen- dant la karyokinèse, La figure 17 est particulière- ment intéressante : les fibres radiaires qui partent des sphères sont remarquablement développées du côté des chromosomes qu’elles paraissent chercher et attirer vers le milieu de l'œuf. IV Par suite des difficultés considérables qu'offre leur observation, les phénomènes que nous venons d'étudier, aussi bien ceux qui se passent dans le noyau que ceux dontle protoplasmaestlesiège, n’ont encore été aperçus que chez un nombre très restreint d'animaux. Il y a lieu d'espérer toutefois que des ob- servations faites sur d'autres espèces confirmeront et étendront les résultats maintenant acquis à la oe 47 R. KŒHLER. — LA FÉCONDATION science, et démontreront que l’évolution des élé- ments sexuels est identique chez lous les Mé- tazoaires. D'ailleurs, les études récentes dont cer- laines plantes ont été l'objet ont montré d'une manière péremploire que les éléments reproduc- teurs offrent la même constitution et s’établis- sent à la suite des mêmes processus que chez les animaux. M. Guignard !, dont les observations sur la genèse et sur les transformations de ces éléments ontune importance capitale, a découvertrécemment que les grains de pollen et l’oosphère subissent, au cours de leur développement, une réduction de moitié dans le nombre de leurs chromosomes, réduction qui s'effectue de la même manière que chez les animaux, lors des deux dernières divisions subies par ces éléments. Ce savant a en outre reconnu chez les végétaux l'existence de sphères directrices, et il a pu s’assurer que les centrosomes des grains de pollen et de l’oosphère contribuent, par parties rigoureusement égales, à la formation des sphères directrices des deux premières cellules de l'embryon. Dans l’élat actuel de la science, en présence des confirmations mutuelles fournies par l'étude simul- tanée des animaux el des végélaux, les naturalistes se croient autorisés à conclure que la réduction des chromosomes subie par les éléments sexuels lors des deux dernières divisions, est un phéno- mène constant chez les Mélazoaires comme chez les Phanérogames. Ces deux divisions x exlremis qui offrent, dans tous les cas étudiés, cette parti- cularité de se succéder avec une rapidité qui ne permet pas au noyau de revenir au repos, ont une importance considérable, puisqu'elles rendent possible la fécondalion; elles ont pour effet de préparer les deux demi-noyaux que cet acte réunit en un noyau unique doué nouvelles. A l’époque où l’on ne possédait pas de rensei- gnements précis sur la composilion des noyaux dans les éléments sexuels, etoù l’on n'avait aucune raison pour attribuer à ces noyaux une valeur à part, on considérait ces éléments, œufs, sperma- tozoïdes ou grains de pollen,comme des cellules ne différant que par leur adaplation spéciale des autres cellules de l'organisme. Mais, dès qu'il fut prouvé que ces éléments ne possèdent que des demi-noyaux, il devint évident qu'il était impos- sible de continuer à les désigner sous le nom de cellules. Aussi van Beneden avait-il proposé, en 1884, de les appeler yonocytes, et il donnait au spermotozoïde le nom de gonocyte mâle, et à l'œuf de propriétés 1 Les observations de M. Guignard ont été analysées ici mème par M. Mangin dans la Revue annuelle de botanique (voir le numéro du 30 mai 1892). celui de gonocyte femelle; le terme de pronucleus, synonyme de demi-noyau, était déjà entré depuis quelques années dans le langage courant. Pour ce savant, la fécondation consistait essentiellement dans l'achèvement du gonocyte femelle et sa trans- formation en une cellule à l’aide des éléments nouveaux apportés par le gonocyte mäle, et il ajoutait : « Les éléments nucléaires éliminés (globules polaires) sont remplacés par le pro- nucleus mäle; et de même que les globules polaires, confondus avec le pronucleus femelle, constituent un noyau de cellule, de même le pronucleus mâle et le pronucleus femelle réunis représentent, à eux deux, un noyau de cellule unique. Un œuf, pourvu de ses deux pronucleus, est l'équivalent d’une cellule ordinaire; il est indiffé- rent que ces deux pronueleus soient soudés en un élément unique en apparence, ou qu'ils restent séparés. » Van Beneden n'avait pas pu décider si le proto- plasma des gonocytes était aussi le siège d'échanges ou de remplacements comme les pro- nucleus. Les auteurs qui ont étudié la fécon- dalion après lui sont à peu près lous unanimes pour reconnaitre que cet acte est exclusivement nucléaire, el que le protoplasma n'intervient que d’une manière tout à fait secondaire, comme sup- porten quelque sorte des pronucleus.Cette manière de voir a régné dans la science jusqu’à l’an dernier, c'est-à-dire jusqu'au moment où les observations de Guignard chez les végétaux, de Fol chez les animaux, démontraient presque simultanément le rôle important des sphères directrices dans la fécondation. Nous ne devons plus considérer main- tenant la fécondation comme un phénomène pure- ment nucléaire; cet acte ne consiste pas seule- ment en une simple addition de substance chromatique à un noyau qui en renferme une quantité trop faible pour pouvoir se diviser. La découverte des sphères directrices doit faire res- tituer au protoplasma des gonocyles une impor- tance considérable : ce que nous savons de ces éléments, et particulièrement la propriété qu'ils possèdent de déterminer l'orientation des chromo- somes et du plan de division des cellules, nous indique qu'ils jouent dans la vie de la cellule un rôle prépondérant. C’est surtout dans le dévelop- pement embrvonnaire que l’orientation du plan de division es une “hose capitale, car, ainsi que l'ont appris des recherches récentes, non seule- ment chaque cellule de l'œuf a sa destinée, mais mème la première division de l’œuf détermine la séparation des deux moitiés droite et gauche de l'embryon. La définition de la fécondation donnée par van Beneden reste donc parfaitement exacte : R. KŒHLER. — LA FÉCONDATION D45 c’est bien la transformation du gonocyte femelle en une cellule, grâce aux éléments apportés par le gonocyte mâle; mais il faut entendre que cet achèvement est dû à l’apport d'éléments proto- plasmiques autant qu'afcelui d'éléments nucléaires. V La différence de taille qui existe entre l’œuf el le spermatozoïde avait fait croire à une grande inégalité de substance active dans les deux gono- cytes. Or nous savons que ces deux éléments sont parfaitement équivalents et que, chez les animaux comme chez les plantes, les deux pronucleus, qu'ils soient inégaux comme chez les Oursins, ou qu'ils aient les mêmes dimensions comme chez l’Asearis, renferment un même nombre de chromo- somes, et que les astrocentres se constituent avec une égale quantité de substance protoplasmique paternelle et maternelle. 11 n'y a donc pas prépon- dérance de l'élément femelle. D'autre part, pour que cette égalité rigoureuse soit réalisée, il est in- dispensable qu'un seul spermatozoïde intervienne dans la fécondation. C’est ce qui arrive le plus habi- tuellement, et certaines dispositions, — étroitesse du micropyle, différenciation d’une membrane autour de l’œuf dès qu'un premier spermalozoïde s’est fixé au vitellus, ete., — s'opposent souvent à l'entrée de plusieurs zoospermes. Néanmoins il peut arriver que plusieurs spermatozoïdes pénèe- trent dans l’œuf; dans ce cas, ou bien tous ces spermatozoïdes formeront des pronueleus mäles qui s'uniront au pronucleus femelle, et le dévelop- pement sera monstrueux; ou bien la substance de ces spermatozoïdes, à l’exception d'un seul qui formera un pronucleus, sera absorbée par le pro- toplasma de l’œuf. Cette sorte de fécondation complémentaire parait être normale chez certains animaux, le crapaud et la lamproie, par exemple, et elle n’a d'autre effet que de fournir à l'œuf un supplément de matériaux nutrilifs ‘. 1 Toutefois une exception remarquable serait offerte par l’Arion Empiricorum chez lequel, d'après Platner, l'œuf possè- derait de nombreux chromosomes et le spermatozoïde deux seulement. Des faits d’un autre ordre indiquent également que le développement de l'œuf peut s’effectuer alors qu'il n’y a pas égalité entre les deux éléments sexuels, mais à condition que l'élément femelle ait la prépondérance. Il y a une dizaine d'’an- nées déjà, à une époque où il n’était pas encore question de comparer le nombre des anses chromatiques dans les noyaux en division, J'ai pu constater, dans des expériences d’hybrida- tion entre plusieurs espèces d'Oursins Réguliers et Irréguliers, les différences qu’offrait le développement des œufs suivant les dimensions relatives du noyau de l’œuf et du spermato- zoïde mis en présence. Ces expériences ont porté sur différentes espèces dont la plus petite, le Psammechinus miliaris, offre un diamètre de 15 millimètres, et dont les plus grosses, le Sphæ- rechinus granularis et le Spalangus purpureus atteignent 10 centimètres de diamètre. Or, tandis qu’en mettant en pré- Au moment où il va se diviser, l'œuf renferme donc les parties les plus essentielles et les plus hautement différenciées de la cellule : les chromo- somes dans le noyau, les centrosomes dans le pro- toplasma. Ces parties doivent être considérées comme le subtratum des propriétés héréditaires. Nous savons que, par suite du dédoublement que subissent les anses chromatiques formées par les deux pronucleus, les noyaux filles renferment chacun un même nombre de segments mâles et femelles. Or ces chromosomes vont-ils toujours rester distinelts et se transmettre indéfiniment de noyau en noyau en traversant la série des divisions à la suite desquelles l'organisme s'établit, sans subir d’autres modifications que des dédouble- ments longitudinaux ? Cette manière de voir, qui fut soutenue il y a quelques années, n’est plus admise aujourd’hui : elle n’est d’ailleurs point nécessaire pour fournir la preuve anatomique de l’'hérédité. Il importe peu, en effet, que les anses chromatiques conservent leur individualité et se coupent loujours aux mêmes points, ou, au con- traire, ce qui est beaucoup plus vraisemblable, que les particules chromatiques se mélangent inti- mement pendant le stade de pelotonnement : à cause du dédoublement longitudinal qui intervient à chaque division, les deux noyaux filles seront toujours parfaitement identiques entre eux, et ils renfermeront,ex égale quantité, les particules trans- mises du père et de la mère, puisque, à chaque division, ces particules se partagent également et avec une régularité mathématique. Nous savons que les chromosomes des deux pronucleus ne se fusionnent pas ; ils restent distincts dans la plaque équatoriale, et, d’après les règles de la division karyokinétique, les deux premiers noyaux formés renferment un même nombre d'anses pa- ternelles et maternelles venant directement de cette plaque. Aussi les noyaux de toutes les cel- lules d’un organisme, qui procèdent de ces deux premiers noyaux, renferment-ils l’ensemble des propriétés héréditaires transmises aux deux pro- nucleus. Il n'y a donc rien d'étonnant à ce que toute cellule placée dans des conditions favorables, puisse reproduire un organisme semblable à celui dont elle provient. sence les petits œufs de Psammechinus et les gros sperma - tozoïdes de Sphærechinus ou de Spatangue j’obtenais à peine quelques fécondations, et que les œufs fécondés dépassaient rarement le stade de blastula, lorsque je fécondais les gros œufs de Spatangue ou de Sphærechinus par les spermato- zoïdes de Psammechinus, j'obtenais des gastrula et des Plu- teus qui vivaient plusieurs jours. (Recherches sur les Echi- nides des côtes de Provence. Ann. Mus. Marseille, 1883.) Ces faits prouvent que dans certains cas la substance chro- matique mäle peut être diminuée sans que pour cela le déve- loppement soit rendu impossible. N’y a-t-il pas dans cette tendance un acheminement vers la parthénogénèse? w 546 R. KŒHLER. — LA FÉCONDATION N'oublions pas non plus que les centrosomes qui, au cours de chaque division, se partagent en deux parties égales, renferment une égale quantité de protoplasma paternel et maternel. Nous n’avons aucune raison de douter qu'ils ne transmettent aussi des propriétés héréditaires. Eu égard au rôle qu'ils jouent dans la dynamique de la cellule, il semble rationnel de les considérer comme les éléments chargés de transmettre la forme des générateurs. Mais, si grande que soit l'importance de ces élé- ments, chromosomes et centrosomes, il ne fau- drait point considérer qu’une cellule de l’orga- nisme nouveau nest qu'une somme d'éléments transmis hérédilairement par les deux gonocytes générateurs, que telle des moitiés de cette cellule est d'origine paternelle, et l’autre moitié d'origine maternelle. La masse héréditaire est, en effet, fort petite, elle est le siège de modifications et d'é- changes, et, dans l'organisme en voie d'évolution, elle s’accroit d’une manière considérable. Aussi les particules constitutives des cellules, incessamment remaniées, prennent-elles bien vite une indivi- dualité propre; elles cessent de bonne heure d’être des parties détachées des parents pour devenir parties du nouvel organisme dont elles détermi- nent la manière d’être et les qualités. Les trans- formations qu’elles subissent font qu'en définitive cet organisme prend une individualité et quil devient quelqu'un. VI On ne saurait traiter les questions relatives à la fécondation sans examiner le cas des œufs qui se développent sans fécondation, ou, comme on dit, par parthénogenèse. Non seulement il importe de posséder l'explication anatomique de cetle ano- malie, mais les résultats fournis par l'étude com- parée des différents modes de parthénogenèse fournissent une confirmation indirecte des idées actuellement admises sur la signification des élé- ments reproducteurs. L'histoire de la parthénogenèse se lie intime- ment à celle des globules polaires. Nous n'avons jusqu'ici considéré ces corps qu'au point de vue des deux divisions réductionnelles que subit l'œuf; il convient maintenant de préciser leurs homolo- gies. L’ovule forme successivement les globules polaires par divisions karyokinétiques.et, quand le premier globule se divise, ce qui estle cas primitif, quatre éléments parfaitement homologues pren- nent naissance : ce sont, si l’on veut, quatre œufs, dont trois avortent. L'œuf et les globules polaires ont la valeur morphologique d'un spermatozoïde ; et tous ces éléments, œuf, globules polaires, sper- matozoïdes, ont la valeur de gonocytes. Dans la glande mâle comme dans la glande femelle, les deux dernières divisions qui s'opèrent dans les cellules sexuelles fournissent quatre éléments à noyau réduit. De même que l’on appelle spermalo- gemme l'ensemble de quatre spermatocyles nés d'une même spermatogonie, de même on pourrait appeler cogemme l'ensemble formé par l’œuf et les globules polaires. La ressemblance serait complète si les cellules de l’oogemme étaient égales. Mais l’on s'explique facilement pourquoi l’une d'elles seule se développe lorsqu'on réfléchit que l’œuf, renfermant une grande quantité de matériaux nutrilifs, l'ovule devrait avoir un volume quatre fois plus considérable si toutes les cellules issues de la double bipartition devenaient des œufs. L’a- vortement de trois d’entre elles est un phénomène du même ordre que celui qu'on observe dans l'ovaire où un grand nombre de cellules sont saeri- fiées pour permettre le développement de certaines cellules privilégiées qui deviennent seules des ovules. La valeur d’œufs avortés que nous accor- dons aux globules polaires se trouve d’ailleurs confirmée par cerlains faits exceptionnels observés chez divers échantillons d’Æelix et d'Ascaris où les globules polaires étaient remarquablement gros et atteignaient la taille de l'œuf. Il existe un grand nombre d’animaux ayant la faculté de produire des œufs parthénogénétiques : c'est surtout chez les Arthropodes qu'on en trouve des exemples. Ces cas sont connus depuis long- temps, mais l'explication de la parthénogenèse n’a été fournie d'une manière satisfaisante qu'à la suite de recherches loutes récentes. Avant tout, il importe de distinguer, comme l’a fait M. Giard, deux sortes de pathogenèses. Chez les Cladocères, les Ostracodes, les Rotifères, il existe deux sortes d'œufs : des œufs d'hiver qui ne se dé- veloppent qu’à la condilion d’être fécondés, et des œufs d'été parthénogénétiques; or, ces derniers ne forment qu'un seul globule polaire, tandis que les premiers en éliminent deux. Les renseignements que nous possédons maintenant sur la valeur de ces globules nous permettent de nous expliquer cette différence. Ce qui reste dans la vésicule ger- minative après l'expulsion du premier globule, re- présente le pronucleus femelle plus le deuxième globule (qui n’est expulsé que lorsque la féconda- lion doit avoir lieu), et nous savons que ce deuxième globule a la valeur morphologique d'un spermatozoïde. D'autre part, la réduction des chro- mosomes ne s'effectue que lors de l'expulsion du deuxième globule polaire. Le noyau de l'œuf, après l'expulsion du premier globule est un élément complet, qui n'a donc pas besoin d'être complété par un spermatozoïde comme doit l'être le demi- R. KŒHLER. — LA FÉCONDATION 947 noyau que représente un pronucleus après la double élimination. La non-expulsion du deuxième globule polaire équivaut donc à une fécondation. Aussi, les œufs qui n’éliminent qu'un seul globule polaire sont-ils nécessairement parthénogénétiques : ils sont prédestinés, comme l’a dit Giard, à se déve- lopper sans fécondation. A la vérité, il ne s’agit là que d'une fausse parthénogenése, car les œufs se trouvent exactement pourvus des mèmes éléments que ceux qui ont été fécondés normalement. C’est dans cette catégorie d'œufs qu'il convient de ran- ger ceux des Pucerons, des Cynipides, des Chermes, des Apus, ete., chez lesquels les générations agames el sexuées allernent périodiquement. La vraie parthénogenèse s’observe dans des œufs qui éliminent deux globules polaires, tout comme ceux destinés à être fécondés; ces œufs ne sont qu'accidentellement parthénogénétiques. C’est ce qui arrive chez les Abeilles pour les œufs qui donnent des màles, etchez un Lépidoptère,le ZLiparis dispar. On ne connaît que ces deux exemples bien établis de vraie parthenogénése, c'est-à-dire du dévelop- pement d'œufs pourvus d’un seul pronucleus. Cette faculté est done une chose fort rare dans le règne animal, si rare qu'on peut presque dire -qu’elle constitue une véritable monstruosité. On connait d'ailleurs certains phénomènes anormaux qui rappellent cette parthénogenèse. Ainsi, Hertwig, en mélangeant des fragments d'œufs el des spermatozoïdes d’Astéries, a vu ces derniers pénétrer dans les fragments dépourvus de noyau. y former des pronucleus et la masse se diviser comme une cellule complète. VII À part quelques formes tout à fait inférieures, les Monades, les Myxomycètes, les Acrasiées, tous les êtres organisés, animaux ou végétaux, possèdent la faculté de se reproduire sexuellement. Lorsque la génération agame existe, on la voit loujours, à deux ou {rois exceplions près, allerner régulière- ment ou irrégulièrement, avec la reproduction sexuée. Ces alternatives avaient fail supposer autrefois que la reproduction agame était inca- pable, à elle seule, d'assurer le maintien de l’es- pèce. La preuve directe de cette incapacité a été fournie dernièrement par M. Maupas. Ce savant a observé que, chez les Infusoires, la série des repro- duetions agames était limitée pour chaque espèce, et que, lorsqu'elle se prolongeail outre mesure, elle avait pour conséquence chez les rejetons une dégénérescence comparable à la-décrépitude cau- sée par la vieillesse chez les organismes supérieurs, la dégénérescence sénile. La fécondation, en com- plétant en quelque sorte un organisme par un autre, arrête l’action délétère de cette dégénéres- cence et répare les ravages qu’elle a causés; elle exerce un véritable ræeunissement sans lequel les organismes seraient inévitablement livrés à la mort. Il semble, commele dit Van Beneden, que la faculté que possèdent les cellules de se multiplier par division soit limitée : il arrive un moment où elles ne sont plus capables de se diviser ultérieu- rement, à moins qu'elles ne subissent le phéno- mène du rajeunissement par le fait de la féconda- tion. Celle conception, qui fait de la fécondation un simple phénomène de rajeunissement, est à peu près universellement adoptée aujourd'hui; elle nous rend d’ailleurs parfaitement compte du mode d'évolution des noyaux sexuels. Chez les êtres unicellulaires inférieurs, la fécondation est une conjugaison dans laquelle deux individus sont absorbés en entier pour former un nouvel être : la formation de la cellule rajeunie entraine la dispa- rition des deux conjoints. Chez les Infusoires le rajeuuissement s'effectue, au cours d’une conjugai- son durant plusieurs jours, par l'échange de cer- tains éléments, puis, les deux conjoints, s'étant mutuellement rajeunis, se séparent et recommen- cent à se diviser. On voit donc que, dans ces deux cas, iln°y a pas augmentation du nombre des indi- vidus, il y a même diminution immédiate dans le premier cas et médiate dans le deuxième, car, pen- dant tout le temps que dure la conjugaison, les divisions sont arrêtées. Ainsi que l’a fait remar- quer Maupas, la fécondation et la reproduction ne sont pas indissolublement liées l’une à l’autre, et l'une n'est pas toujours la conséquence de l’autre chez les êtres inférieurs. Chez les êtres supérieurs, la faculté de rajeunissement s’est localisée dans des éléments spéciaux : les zoospermes et les grains de pollen sont seuls capables de rajeunir, et les œufs d'être rajeunis. La fécondation n'exige plus dès lors le concours de l'organisme tout entier, et elle cesse d’avoir pour conséquence une diminution momentanée des individus. Au début de cet important processus de différenciation, les cellules reproductrices ne diffécaient pas beaucoup des autres cellulesde l'organisme, etelles pouvaient mème continuer à vivre si la fécondation n'avait pas lieu : nous voyons encore les gamètes se divi- sant comme des zygospores chez certains Thallo- phytes. Avec le perfectionnement de l’organisme, les éléments reproducteurs se sont de plus en plus différenciés. Il était avantageux qu'ils fussent nombreux et incapables de tout développement ultérieur; il était important en outre que- leur fusion en une cellule unique cessàät d’avoir pour conséquence une diminution de cellules. Ce sont ces trois facteurs réunis qui ont déterminé, dans les 548 E. BICHAT. — SUR UNE THÉORIE DE LA POLARISATION ROTATOIRE éléments reproducteurs, cette réduction des chro- mosomes qui apparaît si constamment chez tous les Mélazoaires et les Phanérogames. Mais il y a dans la fécondation autre chose qu'une rénovalion, qu'une reconstitution à nouveau d’une cellule capable de divisions ultérieures. La transmission héréditaire des propriétés paternelles et maternelles détermine, chez les descendants, la conservation des formes et des tendances tant phy- siques que psychiques. Mais, de plus, la fécondation permet à l’espèce de varier, car le produit nouveau, tout en se rattachant par ses caractères à ses deux générateurs, diffère de chacun d’eux pris en parti- culier. Comme l’a montré Weissmann, la reproduc- tion sexuelle accroît les différences préexistantes et les combine toujours à nouveau; en mélangeant continuellement les caractères les plus différents, elle constitue le facteur le plus important de la variation. On sait en effet que les processus de sélection, c’est-à-dire ceux qui donnent de nou- veaux caractères par la gradation progressive des caractères qui existaient déjà, ne sont pas possibles chez les espèces à reproduction asexuelle. La fécondation a donc pour effet de maintenir l'espèce perpéluellement jeune et perpétuellement apte à.se transformer. Claude Bernard ne semble-t- il pas avoir prévu les découvertes futures quand il écrivait, il y a vingt ans déjà : « Ainsi l'espèce sera restaurée périodiquement par la réapparition d'une génération sexuelle entre les générations agames; la sexualité, source de toute impulsion nutritive, rouvrira constamment le cycle vital qui tend à se fermer. » Les découvertes récentes n’ont-elles pas donné une éclalante confirmation à cette parole du grand physiologiste? R. Kœhler, Chargé d'un cours complémentaire de Zoologie à la Faculté des Sciences de Lyon. SUR UNE THÉORIE DE LA POLARISATION ROTATOIRE En formant une pile de lames de mica idenli- ques dont les axes sont alternativement croisés, Norremberg a pu reproduire les phénomènes opti- ques des cristaux à un axe. Son successeur à l’Uni- versité de Tubingue, M. Reusch !, est parvenu, en superposant des lames de mica de mème épaisseur dont les axes font entre eux des angles de 60° ou de 45°, à reproduire les phénomènes présentés par les cristaux qui jouissent naturellement du pou- voir rolatoire. Ces piles de mica observées en lumière parallèle donnent une rotalion du plan de polarisation vers la droite ou vers la gauche, sui- vant queles angles égaux que font entre eux les axes des lames de mica superposées sont complés vers la gauche ou vers la droite à partir du premier. En lumière convergente on obtient des anneaux traversés par une croix qui ne va pas jus= qu'au centre. En interposant un mica d'un quart d'onde, les anneaux se brisent et forment des spi- rales droites ou gauches, suivant que l’angle de combinaison ést compté vers la gauche ou vers la droite. Enfin deux piles de sens contraire étant superposées, on obtient les spirales d’Airy : tout se passe comme si on avaitaffaire à un quartz taille perpendiculairement à l'axe. M. Sohncke ? a donné, dans le cas de l'incidence normale, la théorie des phénomènes observés par 1 Ann. de Chimie el de Physique, 4° série, t. XX, p. 207. ? Pogg. Annalen Ergænzungs, Bd., p. 16 (1876) Norremberg et Reusch. M. Mallard ! a traité d'une façon plus générale le problème des combinaisons des lames minces. Cette théorie explique non seu- lement leseffets que nous venons de rappeler, mais aussi les propriélés optiques des mélanges isomor- phes et la dispersion tournante des substances orthorhombiques étudiées par MM. Des Cloizeaux et Wyrouboff ?. Si l’on suppose en particulier que la pile soit constituée parun certain nombre de paquets super- posés contenantchacunplames biréfringentes iden- tiques et que, dans chaque paquet,lesaxes des lames « s UT successives fassent entre eux un angle égal à —, on p peut, non seulement rendre compte du pouvoir rotatoire que l’on observe, mais encore calculer sa valeur. Siles lamelles sont infiniment minces et si chaque paquet en contient un nombre #ndéfini- ment grand, la rotation 9 du plan de polarisation est donnée par la relation très simple : o e=3 (5) où A représente la somme des différences de mar- che introduites par les lamelles successives, et À la longueur d'onde de la lumière employée. Dans cette manière de voir, un cristal, en appa- 1 Annales des Mines, t. X. p.119 (1876) ct mars et avril 1881. 2? Bulletin Société minéralogique,t.V, p..58 et p. 172 (1882). E. BICHAT. — SUR UNE THÉORIE DE LA POLARISATION ROTATOIRE 949 rence homogène, jouissant du pouvoir rotaltoire, sérait le résultat de l’empilement symétrique d'un nombre très considérable de lamelles biréfrin- gentes. Pour le quartz, par exemple, en admettant un groupement ternaire, c’est-à-dire des lames dont les sections principales font entre elles des angles de 60 degrés, ilfaudraitadmettre 722 paquets par millimètre. Chaque paquet aurait ainsi pour épaisseur 0",385, et, comme ils contiennent trois lamelles, l'épaisseur de chacune d'elles serait 0,46, c'est-à-dire inférieure à d’onde de la lumière jaune !. Dans une thèse remarquable soutenue en 1886, M. Wyrouboff a montré par un très grand nombre d'exemples que tous les corps doués du pouvoir rotatoire sont en effet des corps pseudo-symétri- ques et que,quel que soitle système cristallin auquel ils appartiennent, ils sont toujours le produit d’un empilement de lames optiquement biaxes croisées suivant des lois déterminées. Dans l'immense majorité des cas, les cristaux ne sont pas homo- gènes el les rayons qui les traversent ont une ellipticité plus ou moins grande, Toutes les foisque l’on a pu faire varier dans des limites étendues les conditions de cristallisation, on a pu, non seule- ment découvrir l'existence des lamelles superpo- sées, mais encore déterminer la symétrie propre à la forme primitive de ces lamelles. Tous ces fails sont de nature à faire accepter par la science la théorie basée sur lPexpérience des micas de Reusch. Il m'a semblé intéressant néan- moins de vérifier directement cetle théorie dans le cas d’un paquet symétrique composé d’un nom- bre indéfiniment grand de lamelles infiniment minces et de comparer la rotalion observée à celle qui est donnée par la relation (1). Ilest à peu près impossible, on le conçoit aisé- ment, de résoudre ce problème en empilant des lames cristallines taillées artificiellement ou obte- nues par clivage. Ces lames ont toujours une épaisseur finie el cetle épaisseur est relativement grande. On réalise au contraire facilement lescon- ditions théoriques en utilisant les phénomènes de doubleréfraclion électrique découverts parM.Kerr*. la longueur On sait que si l’onexamine un corps diélectrique ou médiocrement conducteur entre les deux arma- tures d’un condensateur plan, on constate que le corps est devenu biréfringent. Il produit sur la lumière polarisée des phénomènes identiques à ceux que présenteraient des lames minces ceristal- lines uniaxes laillées parallélement à l'axe et dont l'axe serait parallèle aux lignes de force dans la 1 V. Mascarr. Traité d’oplique, t. II, p. 334. 2 Phil. Mag. {\5] t. XXVI, p. 231 (1888) et J, de Phys. [2] t. VIII, p. 86 (1880). portion uniforme du champ du condensateur. La différence de marche des deux composantes sui- vantles deux directions parallèles ou perpendicu- laires à ces lignes de force est proportionnelle au carré de la force électrique et à l'épaisseur du diélectrique soumis à l’action du champ comptée normalement aux lignes de force. Si donc on dési- gne par K une certaine constante, par / l'épaisseur du diélectrique, par V,—V, la différence de poten- tiel des armatures et par e la distance qui les sé- pare, la différence de marche À pour une longueur d'onde À sera donnée par la relation : =. (=) Ve À e \ K est ce que l'on pourrait appeler la constante de Kerr : c'est la différence de marche pour l'unité d'épaisseur et pour une force électrique égale à l'unité. Cela posé, imaginons que, dans un diélectique li- quide, du sulfure de carbone, par exemple, on dis- pose l’un à la suite de l’autre une série de petits condensateurs plans dont les lignes de force fassent successivemententre elles desangles égaux. Le pre- mier condensateur aura, par exemple, seslignes de force verlicales : les lignes de force du deuxième seront inclinées sur les premières d’un angle @, cet angle étant, je suppose, compté vers la droite; celles du troisième feront un angle & avec celle du second, du même côté, et ainsi de suite. Suppo- sons enfin que les lignes de force du dernier con- densateur soient parallèles à celles du premier, On aura ainsi formé une pile symétrique et fermée de lames cristallines constituée comme celle de Reusch. Pour réaliser cette pile et remplir en même temps la condition théorique d’un nombre extrêmement grand de lames extrêémement min- ces, on réunit tous les condensateurs élémentaires en un condensateur unique dont les armatures sont constituées de la manière suivante. Soient deux hélices de même pas tracées sur un cylindre vertical ; supposons une droite assujettie à s’ap- puyer sur ces deux hélices et qui se déplace en en restant parallèle au plan horizontal; elle en- gendrera un conoïde. C’est sur ce conoïdeque l’on soulera les armatures du condensateur. Pour les réaliser on trace sur. un cylindre en bois deux hé- lices de même pas, puis, au moyen d’un outil con- venable, on enlève le bois compris entre le conoïde et la surface convexe du cylindre. Il suffit alors de marteler une lame de cuivre afin de lui faire épouser exactement la forme du conoïde pour obtenir une armature qui possède la forme théorique requise. Les deux armatures ainsi préparées sont fixées, 550 E. BICHAT. — SUR UNE THÉORIE DE LA POLARISATION ROTATOIRE comme l'indique la figure 1, aux deux branches de tubesen verre, recourbés en forme d’U, qui les main- tiennentà une distance convenable l’unede l’autre. On plonge ce condensateur dans une cuve formée par des glaces parallèles, contenant du sulfure de Fig. 1. carbone el placée entre le polariseur et l’analyseur du polarimètre Laurent. L'une des armatures était réunie au sol et l’autre élait mise en communica- tion avecl'électomètre absolu à cylindres que nous avons imaginé, M. Blondlot et moi, il y a quelques années !. Les mêmes armatures étaient reliées à un trop-plein électrique età une machine de Holtz. On pourrait ainsi mesurer d'une manière précise la différence depotentiel en valeur absolue et lamain- tenir constante pendant tout le temps nécessaire pour effectuer les mesures optiques. Dans ces conditions, on constate aisément que l'égalité de teinte des deux portions du disque de l'appareil à pénombre cesse d'exister dès que la différence de potentiel atteint une certaine valeur et que cette inégalité devient de plus en plus grande à mesure que la différence de potentiel augmente. Pour un état électrique donné, on peut d’ailleurs ramener l'égalité des teintes en tournant l’analyseur dans un sens convenable. Si les lignes de force tournent vers la droite dans le condensa- teur hélicoïdal, la rotalion est gauche, comme le veut la théorie. Il s'agit d’ailleurs d'une véritable rotation, que l'on peut compenser, comme je l'ai vérifié, au moyen d'une dissolution de sucre de concentration et d'épaisseur convenables. Il ne restait plus qu'à déterminer la valeur de cette rotation el de la comparer à celle que l’on peut calculer au moyen de la "formule (4). Pour cela, il était indispensable de connaitre la difré- ! V. J. de Physique [2], t. V, p. 335 et 451. rence de marche et, par suite, la valeur de la constante de Kerr. Or, M. Quincke ! a déterminé la valeur de K par un très grandnombre d'expériences effectuées sur des échantillons différents de sul- fure de carbone, les phénomènes optiques présen- sentés par ce liquide étant observés entre les armatures d'un condensateur plan dont les dimen- sions avaient été déterminées avecune très grande précision. Les valeurs de K, obtenues pourune lon- gueur d'onde voisine de celle de la raie D du spec- tre solaire, varient depuis 29,3 >< 10° jusqu’à 36,77 10%, L'auteur admet, comme moyenne le nombre 32,798 >< 108 2, Dans le condensateur hélicoïdal que j'ai em- ployé on avait : e—06",9, /—1T0m, Vi — Vo = 82,4. En admettant la constante moyennede Quincke, on trouve : À 328 10-S Æ | x 17 OLA 2) Il © 1— = ES —) À On en conclu : = (0,0 167)? = 0,003297 Ce qui correspond à 10 minutes environ. Or l'expérience, répétée plusieurs fois, a donné des nombres variant entre 8 et 12 minutes, La théorie, basée sur l'expérience des piles de mica de Reusch et les calculs de M: Mallard, trouve ainsi une nouvelle et intéressante vérifica- tion. E. Bichat, Doyen de la Faculté des Sciences do Nancy. 1 Wiedemann’s Annalen, t. XIX, p. 129 (1883). - 2 Il serait intéressant de reprendre ces mesures en tenant compte des perturbations qui se produisent dans le voisi- nage des extrémités du condensateur plan. On peurrait aï- sément éliminer ces perturbations en faisant une première mesure A, avec un condensateur plan de longueur quel- conque, puis une seconde mesure À, en augmentant la lon- gueur du premier condensateur d’une longueur / parfaite- ment connue. Dans les expériences successives ainsi faites, les perturbations dans le voisinage des extrémités sont les mêmes, et la différence A, — A, mesurerait la différence de marche due à un condensateur de longueur / dontle champ serait uniforme. D“ AUVARD ET TOUVENAINT. — HYGIÈNE DE LA PUERPÉRALITÉ 551 HYGIÈNE DE LA PUERPÉRALITÉ enceinte, tous ses efforts doivent tendre à mener sa grossesse à terme pour accoucher d'une part dans les meilleures conditions possibles, et d'autre part pour que son enfant vienne au monde fort et Yigoureux. Il est à cet égard certains préceptes hygiéniques Du jour où une femme soupçonne qu'elle est que la gestante se trouvera bien de suivre *. Mauriceau donnait déjà en 1721 les conseils sui- vants que nous reproduisons ici, car ils sont fort sages ettoujours bons à rappeler : « La femme doit prendre garde à bien dompler et modérer ses pas- sions, comme à ne pas se laisser aller à la colère par excès, ni séduire par la jalousie, ainsi que plusieurs ont coutume de faire, et on doit surtout éviter de faire peur à la femme grosse, comme aussi de lui dire subitement quelques nouvelles qui la puissent attrister; car ces passions, quand elles sont violentes, sont capables de meltre la confusion et le désordre dans la génération, et même de faire accoucher la femme sur l'heure, à quelque terme qu’elle puisse être, ainsi qu'il arriva à la mère de mon cousin M. Dionis Marchand, le père duquel ayant été tué subitement par un de ses domestiques d’un coup d'épée qu'il lui donna en trahison au travers du corps, le rencontrant par la ville, pour le dépit el la rage qu'il avait que son mailre quelques jours avant l’avait chassé de son logis; et la mauvaise nouvelle ayant été aussitôt annoncée à celte femme qui était pour lors grosse de huit mois, à laquelle on apporta incontinent après son mari mort, elle fut d’abord prise d’un si grand tremblement pour ce subit effroi qu'elle accoucha tout sur l'heure du même Dionis. C'est pourquoi si on a des nouvelles à dire à la femme grosse, que ce soit plutôt de celles qui lui peuvent donner une joie modérée; car l'excessive peur peut aussi bien porter préjudice en cet état; et si c'était nécessité absolue qu'elle soit quelque mauvaise, pour lors on doit chercher les moyens les plus sûrs pour la lui faire connaître peu à peu, non pas tout d'un coup. » Souvent le médecin est interrogé au sujet des envies que la femme présente pendant sa gros- | I. —— PRÉCAUTIONS DIVERSES 1 Sur l’état puerpéral lui-méme, voyez l’étude publiée par les mêmes auteurs dans la Revue du 15 juillet 4892, t. IT. p. 472. 2 Plusieurs des conseils qui suivent sont empruntés au Traité d'accouchement du D'° Auvard, 1891. sesse; voici l'opinion de Smellie à cet égard : « L'avortement peut être occasionné par un ap- pélit désordonné, par des choses qu’une femme ne peut obtenir aisément, ou assez tôt, ou qu'elle a. honte de demander, particulièrement lorsqu'elle est grosse de son premier enfant, surtout pour différentes sorles de choses propres à manger ou à boire. Si l’on ne salisfait pas à ces sortes d’appé- tit, il en peut quelquefois résulter une fausse couche, ou du moins l'enfant en est tellement af- fecté, qu'il porte sur son corps des marques qui, par leur figure ou par leur couleur, ressemblent à ce dont la mère avait envie. Il est donc à propos de salisfaire ces sortes d’envies, quelque déraison- nables et ridicules qu'elles puissent paraître. La mère, de son côté, doit éviter tout ce qui peut faire quelque impression désagréable sur ses sens, parce que l’avortement peut encore survenir, en conséquence de quelque surprise, ou pour avoir vu quelque chose d’étrange et d’horrible. » Sans croire aux influences fâcheuses que Smellie attribue aux envies non satisfaites, la conduite qu'il trace est digne d’être approuvée. À moins de troubles digestifs sérieux, l’alimen- talion ne sera pas modifiée pendant la grossesse. Il n'est pas rare toutefois que la femme enceinte prenne en dégoût certains aliments, la viande par exemple, et recherche au contraire très volontiers des mets très épicés; il ne faut pas lrop contrarier les perversions d’appétit qui se produisent alors. Il faut néanmoins éviter toutes les substances capables de provoquer des troubles digestifs. Il en est de même pour les boissons : l’eau-de- vie, que certaines femmes grosses boivent très vo- lontiers, alors qu'elles n’en avaient jamais pu prendre auparavant, ne peut être permise qu'à faibles doses. Les femmes, ordinairement constipées, le sont davantage pendant la grossesse ; d’où la nécessité de donner des laxatifs, de manière à éviter l’en- combrement intestinal et les efforts violents de défécation. IT. — RAPPORTS SEXUELS Les rapports sexuels peuvent-ils être continués sans inconvénient pendant la grossesse ? Sacombe, dans la Zuciniade, s'exprime ainsi à cet égard : Epouses, je vous dois un conseil salutaire : Quand vous aurez concu, n’allez point à Cythère. La nacelle à Vénus, sur les flots amoureux, Peut souvent rencontrer des écueils dangereux. 552 D AUVARD ET TOUVENAINT. — HYGIÈNE DE LA PUERPÉRALITÉ D'ailleurs, l'ile où les Ris, les jeux dansent sans cesse Est un séjour funeste à l’état de grossesse. Des folâtres amours l’aveugle emportement Dans le cours des neuf mois produit l’avortement. Aristote, plus tolérant, croyait, au contraire, que le coïl, préparant la voie que doit suivre l’enfant, devait être conseillé surtout à la fin de la gros- sesse. Les Tures, polygames, s’abstiennent de toute relation conjugale avec celle de leurs femmes dont la grossesse est avérée. Mais, chez les peuples monogames, le médecin ne peut user de pareille sévérité, et, à moins d'accidents de la grossesse, il peut laisser libre cours à la vie sexuelle des époux, tout en donnant quelques conseils de modération. Dans les cas d’utérus irritable et chez la femme disposée à l'avortement, toute relation sexuelle doit être interdite pendant la grossesse, surtout au moment correspondant à la menstruation. En résumé, il faut, autant que possible, réduire la fréquence des rapports sexuels, et, du reste, chez quelques femmes, la nature s'est chargée de résoudre la question, car Stolz dit en avoir vu « qui, lorsqu'elles étaient enceintes, avaient hor- reur de leur mari ». IT. — VÊTEMENTS ET EXERCICE Quant à la question des vêtements, il ne faut pas oublier que tout vêlement serré doit être absolu- ment proscrit. Le corset ne saurait être porté sans de grands inconvénients. Tout au plus peut-on permettre l'usage de corsets dits de grossesse qui, assouplis par des liens élastiques, n’exercent, en général, aucune compression fâcheuse sur l'utérus et sur les seins. Encore est-il que, dans certains cas, le corset le plus läche devient la cause de malaises, qui disparaissent par sa simple suppres- sion, Chez les femmes prédisposées aux varices ou à l’ædème des membres inférieurs, il sera bon de remplacer les jarretières par des jarretelles, en les fixant au bas du corset. Chez les multipares, dont la paroi abdominale a été relàächée par des grossesses antérieures, une ceinture hypogastrique sera d'un heureux secours, à la condition d’être large et d’embrasser les deux tiers inférieurs du ventre. Le médecin à quelquefois de la peine à obtenir d'une femme ces quelques petits sacrifices à sa co- quetterie ; il est important qu'il sache l'y déter- miner. Son influence doit également se faire sentir au sujet de tout ce qui concerne le repos et l’exer- cice. Beaucoup de femmes, soit par paresse natu- relle, soit par crainte exagérée d'un avortement, profitent de leur état de grossesse pour se confiner dans un repos exagéré el pour passer la plus grande partie de leur temps dans leur lit ou sur une chaise longue. À moins d'indication spéciale, cette pra- tique est déplorable : elle affaiblit la gestante et - la prépare mal à l'accouchement et à l'allaitement. Des sorties quotidiennes sont nécessaires, soit à pied, soit en voiture. A l'opposé, l’on trouve des imprudentes qui, malgré leur grossesse, continuent toute l'agitation de leur vie antérieure, vont au bal, au théâtre, montent à cheval, voyagent en mer, en chemin de fer, ete. Les promenades en voilure sont en général fa- vorables, en évitant toutefois les secousses qu'un véhicule mal suspendu et une mauvaise route peuvent produire. L'équitation est à déconseiller. Cependant il faut reconnaitre que certaines femmes, très habituées à ce genre d'exercice, n’en éprouvent le plus souvent aucun inconvénient pendant leur grossesse. La danse est déplorable pourla femme enceinte ; car à la fatigue physique, elle joint une excitation génitale, contraire au calme que demande l'utérus. Les traversées en meretles voyages en chemin de fer ne semblent pas entraver le cours d’une gros- sesse normale. Toutefois, chez les primigestes dont on ignore la tolérance utérine et chez toute femme dont l’évolution de la grossesse présentera quelque irrégularité, il sera prudent d'empêcher les longs trajets; d’une facon générale les grands voyages devront être déconseillés pendant la grossesse, à moins d’absolue nécessité. Toutes choses égales d’ailleurs, la femme étant plus exposée à l'avortement pendant l'époque correspondant à la menstruation, les conseils de prudence devront surtout s'adresser à celte pé- riode. Si un voyage esi absolument indispensable, il est préférable que la femme enceinte l’entreprenne de quatre mois et demi à sept mois et demi. IV.— MÉDICATION ET OPÉRATIONS CHIRURGICALES Bien que la grossesse soit un état physiologique, il n'en est pas moins vrai que la femme à ce moment supporterait mal certaines influences bien tolérées à l’état normal. C'est ainsi, par exemple, que l’on doit se montrer très prudent dans l’administration de certains médicaments. Tout médicament donné à dose toxique est sus- ceplible de produire l'avortement. Quelle que soit la médication employée pendant la grossesse, il importe done, pour les agents toxiques, de se borner à des doses relativement légères. IL y a cependant quelques exceptions, par exemple pour le sulfate de quinine dans la malaria, le mercure D‘ AUVARD ET TOUVENAINT. — HYGIÈNE DE LA PUERPÉRALITÉ dans la syphilis, où une action énergique est né- cessaire pour atteindre le but désiré. Il importe en particulier d'éviter l'emploi de vomitifs, de purgalifs énergiques ou drastiques, des médicaments dits emménagogues ou abortifs : rue, sabine, if, seigle ergoté, pilocarpine, camo- mille, absinthe, armoise, salicylate de soude et acide salicylique. Voilà pour ee qui concerne les médicaments. Il est une autre question qui se pose immédiatement à côté, à savoir : Une gestante peut-elle subir sans inconvénient une opération chirurgicale ? Cette question doit être envisagée à un double point de vue : 1° La grossesse nuit-elle aux suites de l’opéra- tion? Le réponse est négative pour la majorité des cas. La gestation ne semble pas entraver la cica- trisation, ni prédisposer aux complications. 2° L'opération peut-elle interrompre le cours de la grossesse ? Toute opération expose à l’avorte- ment, ei cela d'autant plus qu’elle est faite plus près de la zone génilale; mais bien souvent des interventions sur l'utérus lui-même (amputation du col, ablation de fibromes développés dans la paroi utérine) n'ont élé suivies d’aucun résultat fächeux. D'autre part, le danger d’avortement n’est nullement en rapport avec la gravité de l’o- péralion ; ainsi telle femme continue sa grossesse malgré une ovariotomie, qui avortera à la suite de l’avulsion d’une dent. En présence de cette variabilité dans les résul- tats, il sera prudent de ne faire pendant la gros- sesse que les opérations d'urgence, et de différer après l'accouchement toules celles qu'on peut remettre sans inconvénient réel. V. — PROFESSIONS Certaines professions sont défavorables à l’évo- lulion normale de la grossesse : les unes en expo- sant à l'intoxicalion : ouvrières qui travaillent dans le plomb, le caoutchouc (sulfure de carbone), dans les manufactures de tabac. Les autres en imposant des fatigues excessives : blanchisseuses et employées de magasin, obligées de rester debout toute la journée; femmes ayant à faire marcher pendant longtemps une coudre, etc. Ces professions devront être évitées pendant la grossesse dans la mesure du possible, ou leurs inconvénients atlénués. machine à VI. — SOINS DE PROPRETÉ ET ANTISEPSIE Il nous faut maintenant aborder une question fort importante, celle qui concerne les soins de propreté, les toilettes. | | BEBE) Les bains chauds doivent ètre recommandés aux femmes enceintes, dès le début de la grossesse, malgré l'opinion courante que les femmes ne péu- vent prendre de bains avant le sixième ou le sep- ième mois. Ces bains ne peuvent être que favo- rables, mais ils doivent être de courte durée (un quart d'heure au maximum), peu chauds (30 à 35°) et répétés tous les quinze jours seulement et toutes les semaines dans le dernier mois de la grossesse. Les bains froids de rivière el de mer seront sans inconvénient si la grossesse est normale et la femme bien portante, maisil faut éviter la fatigue qui en peut résulter. Les bains de pieds chauds, capables d'amener un flux rapide de sang vers les extrémités inférieures, devront être évités. L’hydrothérapie (douches en pluie et enjet le long de la colonne vertébrale) pourra être continuée sans danger pendant la grossesse, si la femme a été soumise à ce traitement depuis un certain temps; il est même favorable à beaucoup de ges- tantes, mais il faut éviter de commencer cette médication après la conception. Les toilettes vulvaires sont hygiéniques ; mais les injections vaginales doivent être proscrites avant les quinze derniers jours de la grossesse à cause des traumatismes que peut exercer sur le col la mau- vaise direction de la canule ou le jet trop violent du liquide. Ces injections toutefois seront néces- saires dans certains cas, que sait apprécier l’ac- coucheur. A côté des précautions hygiéniques que nous venons d'exposer et qui constituent l'hygiène de la grossesse, il existe une hygiène de l'accouchement et une hygiène de postpartum, toutes deux d’une importance capitale, car de l'observation minu- tieuse des règles qui y président dépend le succès et par suite le prompt rétablissement de l’accou- chée, sans les suites, si longues parfois, qui résul- tent d’une négligence ou d’un manque de savoir. C'est qu'en effet, ainsi que l’avons dit, l’accou- chée est une blessée qu'il faut mettre à l'abri de l'infection, qu'il faut protéger contre les microbes prêts à envahir son système génital et à y causer les désordres si graves dont nous avons parlé sous le nom de septicémie puerpérale. Or nous possé- dons aujourd'hui une arme absolument puissante qui nous permet de mettre les femmes dans les meilleures conditions possibles ; nous avons l’an- tisepsie qui a transformé la chirurgie et qui donne aux accoucheurs de si brillants succès. C’est donc là un point d’une importance capitale, et tout médecin qui néglige de faire usage des moyens si simples et si précieux que nous avons en notre possession est un ignorant ou un criminel, D94 D" AUVARD ET TOUVENAINT. — HYGIÈNE DE LA PUERPÉRALIT É Au point de vue des précautions anliseptiques à observer au moment de l'accouchement, nous aurons peu de chose à dire. Pendant les quinze derniers jours de la gros- sesse, des injections quotidiennes pratiquées avec une solution de sublimé prépareront l’antisepsie des voies génilales. Au moment même de l'accou- chement, la plus scrupuleuse propreté est indis- pensable pour l’accoucheur ; il ne doit toucher la femme qu'après s'être au préalable désinfecté soi- gneusement les mains. Si le travail dure longtemps, il est utile de donner de temps à autre à la partu- riente une injection. L'accouchement et la délivrance surviennent enfin. C’est alors que les plus grandes précautions sont nécessaires ; des injections biquotidiennes d’une solution antiseptique, un tampon d’ouate hydrophile phéniquée en permanence sur la vulve assureront l’antisepsie el s’opposeront à la péné- tration des microbes dans les voies génitales. VIL. — ALLAITEMENT Il nous reste, pour terminer ce qui à trait à l'hygiène de la puerpéralité, à examiner l’allai- tement. Pendant la grossesse, deux questions sont à résoudre : 1° La gestante pourra-t-elle nourrir ? 2% Quelles précautions prendre en prévision de l'allaitement, La réponse à la première de ces questions dépend des examens général et local. La plupart des maladies chroniques sont une contre-indication à l'allaitement, et parmi elles la tuberculose mérite une mention spéciale. Toute femme atteinte de tuberculose ou même prédis- posée à cette maladie devra, pour elle et pour son enfant, renoncer à l'allaitement. Parmi lesmaladieschroniques,uneexceplion doit être faite en faveur de la syphilis : la syphilis est une indication absolue de l'allaitement maternel, même quand la mère ou l'enfant paraît seul atteint de cette maladie à l'exclusion l’un de l’autre. L'hystérie ou l’impressionnabilité excessive de la mère sont une contre-indication à l’allaitement, plus pour l'enfant que pour elle, à cause de l'irré- gularilé de la sécrétion lactée, sous l'influence de ce manque d'équilibre nerveux. L'anémie prononcée, la faiblesse, quelle que soit leur origine, constituent également une contre- indication. Au point de vue local, un mamelon plat ou om- biliqué rend l'allaitement diflicile, parfois impos- sible; le plus souvent, on peut cependant remédier à ce défaut par certains moyens. Le développement de la glande mammaire et l'abondance du colostrum doivent être pris en sérieuse considération. Suivant que ces deux ma- nifeslations de l’activité glandulaire seront faibles, Inoyennes ou prononcées, On pourra présumer que la femme fera une mauvaise, passable ou excel- lente nourrice. Quelles sont les précautions à prendre en prévi- sion de l'allaitement? Pendant tout le dernier mois, il est bon de faire des lotions quotidiennes sur le mamelon avec de l'eau-de-vie. Durant les quinze derniers jours, il est utile de faire sur le mamelon des aspirations quotidiennes avec la téterelle bi-aspiratrice; on impose ainsi au bout du sein une sorte d'éducation, qui le prépare d'avance à la succion de l’enfant. Après l'accouchement, quand l'allaitement ne doit pas avoir lieu, on donne d'habitude un pur- galif le lendemain de la montée du lait et on entoure les seins d'un bandage de corps avec une légère couche de ouate, de manière à les ramener sur la ligne médiane. Si la femme allaite, elle doit prendre quelques précaulions hygiéniques : Sa nourriture se composera de préférence de féculents (haricots, lentilles, etc.). Comme boisson, elle pourra prendre du vin ou de la bière ; cette dernière a une réputalion galac- togogue. Elle fera un usage modéré du thé, du café et des liqueurs. Elle devra s'abstenir d'ail, d'asperges, d’oignon, de carottes, dont les principes passent dans le lait el impressionnent désagréablement l'enfant ; même abstention pour la salade, les choux. Pendant l'allaitement, les rapports conjugaux, de mème que toute excitalion génitale, sont défa- vorables à la sécrétion mammaire, outre qu'ils exposent à la conception et par là à la diminution et à la disparition du lait; néanmoins, il est difi- cile de les empêcher complètement. Les bains tièdes et courts sont sans inconvé- nient ; il en est de même de l’usage de l'hydro- thérapie chez les femmes qui en ont l'habitude. Telles sont les règles générales de l'hygiène de la puerpéralité ; mais elles n’ont rien d’absolu et varient essentiellement suivant les phénomènes qui peuvent survenir au cours de la grossesse ou du postpartum, chacun de ces phénomènes pou- vant fournir des indicalions spéciales. el D: A. Auvard. Accoucheur des Hôpitaux. D' L. Touvenaint, Lauréat de l'Académie de Médecine BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX © © ©c BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Picard (Emile) Membre de l'Institut :T. Sur le nombre de racines communes à plusieurs équations si- multanées; Il. Sur certains systèmes d'équations aux dérivées partielles, généralisant les équa- tions de la théorie des fonctions d'une variable complexe. (Extraits du Journal de Mathématiques pures et appliquées.) Gauthier-Villars et fils, éditeurs, 59, quai des Grands-Augustins. Paris, 1892, I. — Considérons un système de » équations, algé- briques ou non, entre » inconnues 41,..,. 4. On peut imaginer que les variables 1,..., x, sont les coordon- nées d’un point # dans un hyperespace E, à n dimen- sions et appeler racine du système tout point dont les coordonnées satisfont aux » équations simultanées, Il est aisé alors d’apercevoir ce qu'il faut entendre par racine comprise dans une portion ou domaine 4, de l’hyperespace E,. M. Kronecker, l'illustre géomètre berlinois, a mon- tré depuis longtemps que la valeur d’une certaine intégrale (n — 1)" étendue au A, fournissait l'excès du nombre des racines du domaine, qui rendent positive une certaine fonction @ (4, 4»,..., æ,), sur le nombre des racines qui rendent ? négative. S'il se trouve que 9 ne peut jamais devenir négative, la valeur de l’'inté- grale fournira le nombre {otal des racines situées dans le domaine. Telle est la remarque dont part M. Picard; grâce à un artifice habile et se placant dans un hyperespace Er+1,il s'arrange de facon que + devienne un carré parfait, c’est-à-dire toujours positive; le nombre des racines est fourni par la valeur d’une certaine intégrale nurle, Sont traités par la méthode les cas d’une, deux et trois équations. Il est bien inutile d’insister sur la grande impor- tance des résultats obtenus. IL, — 11 est beaucoup plus difficile de donner une idée succincte du second mémoire de M. Picard, qui roule sur un point d'analyse tout à fait abstrait. Soient la variable complexe et une fonction de z = fs) = PR; y) ÉTQ(c ty) TD TN on à le système bien connu d'équations aux dérivées partielles. DPAUOQ MR DRE DO dr d/ dr Considérons maintenant une autre fonction wu—=P'+iQ! el prenons pour variable non plus z mais 4; on aura encore DEMO! dP L DQ dP! dQ! DOME par suite le système des équations aux dérivées par- tielles ’aura pas changé de forme. Généralisant cette vue, M. Picard étudie les systèmes d'équations aux dérivées partielles qui ne changent pas de forme, lorsqu'on prend pour variables nouvelles un système quelconque de solutions. Les développements de M. Picard sont trop abstrails pour trouver place ici, même en résumé; nous ren- voyons le lecteur au texte de l’auteur. Il nous suffira de signaler le lien entre les présentes ET INDEX recherches et la théorie des groupes continus de trans- formations, due à M. Lie et dont le rôle dans la science ne fait que croitre de jour en jour, Léon AUTONNE, Gonnessiat (F.), Aide Astronome à l'Observatoire de Lyon, chargé d'un cours complémentaire d'Astronomie à la Faculté des Sciences de Lyon. — Recherches sur l'équation personnelle dans les observations as- tronomiques de passages. Thèse de la Faculté des Sciences de Paris. G. Masson, édilewr, Paris, 1892. Plusieurs observateurs voyant le mème phénomène, supposé répété un grand nombre de fois, et notant les heures correspondantes sur la même pendule, trou- vent des temps différents et qui en moyenne s'écartent toujours dans le même sens d’un observateur à l’autre. La différence entre l'heure observée ét l'heure exacte constitue pour chäque observateur une erreur person- nelle, une équation personnelle, qui joue un rôle très important dans Jes observations astronomiques, Après avoir fait l'historique de la découverte de cette équation personnelle dans les passages d'étoiles derrière les fils du réticule d’une lunette, et des re- cherches dont elle a été l’objet, l’auteur décrit l’appa- reil à étoiles artificielles et à vitesses variables avec lequel il à abordé à son tour l'étude de la même ques- tion, Il compare d'abord, au point de vue de la précision, les deux méthodes d'observation ordinairement em- ployées. Les heures des passages des étoiles derrière les fils du réticule s’observent, en effet, par deux pro- cédés bien différents : dans l’un, le plus récemment imaginé, on donne un signal électrique à l'instant où l'œil voit le passage se produire; dans l’autre, l'oreille écoute les battements successifs de la pendule, l'œil voit le passage et le cerveau juge à quelle seconde et fraction de seconde il s’est produit. M. Gonnessiat trouve une supériorité nettement ac- cusée à la méthode d'enregistrement électrique, du moins jusqu'aux vitesses correspondant aux déclinai- sons de 0° à 75°. Près du pôle, la méthode dite de l'œil et de l'oreille présente de plus grands avantages, La dis tance zénitale exerce aussi une influence, Après avoir déterminé son équation personnelle dans des conditions variées, il étudie l'équation déci- male : quand on considère un très grand nombre de passages d'étoiles, 10,000 par exemple, observés chacun au dixième de seconde, il n’y à pas de raison pour que, en moyenne, tous les dixièmes ne reviennent pas chacun un égal nombre de fois, Il n’en est rien cepen- dant, et chaque observateur affectionne en quelque sorte tel ou tel dixième à l’exclusion de tel autre : c’est ce qui constitue l’erreur ou équation décimale de cet observateur, Enfin, M. Gonnessiat aborde la question ardue de l'origine de l'équation personnelle, Une partie tien- drait à ce que l'observateur m’écouterait plus en quelque sorte la seconde, mais il la rythmerait men- talement, à côté et non en coïncidence, ce qui produi- rait ce que M. Gonnessiat appelle l'équation rythmique : il ne parait pas douteux, en effet, que celte cause puisse intervenir. La persistance de l'impression lumi- neuse sur la rétine doit également jouer un rôle, ainsi que le défaut de coordination entre deux perceptions différentes, l’une donnée par l’œil et l’autre par l'o- reille. Enfin l’équation décimale intervient aussi. L'auteur à su tenir compte des données récentes fournies par la physiologie, partieulièrement de la pe- riode latente dont M, Raphael Dubois a entretenu les e © er] BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX lecteurs de la Revue (t. 1, p. 198), et, dans son ensemble, ce travail est des plus importants; il représente un labeur considérable et se rapporte à une branche diffi- cile et ingrate, dans laquelle M. Gonnessiat a déjà su se faire un nom : je veux parler de la construction des catalogues d'étoiles fondamentales, dont l'importance est capitale pour l'astronomie de précision. G. BIGOURDAN. XWitz (A). Docteur ès sciences, Ingénieur des Arts et Ma- manufactures. — Thermodynamique à l'usage des Ingénieurs. — (Encyclopédie scientifique des Aide-Mé- more, dirigée par M. Léauté). Un volume in-8. de 215 pages. (Prix : 2 fr. 50.) Gauthier-Villars et Masson, Pu- ris, 1892. Cet ouvrage fait partie de l'Encyclopédie des Aide-Mc- moire publiée sous la direction de M. Léauté, membre de l’Institut. C’est plus spécialement pour l'utilité des ingénieurs que l’auteur a écrit ce livre et non seulement il a donné à ses démonstrations toute la précision scientifique dé- sirable, mais encore il a disposé les idées dans ua ordre qui permet de retenir plus facilement les théo- rèmes et les formules qui en sont la conséquence. L'esprit pratique du livre est défini dès le début d'ail- leurs, l’auteur faisant remarquer que la thermodyna- mique est une science expérimentale et qui peut être établie indépendamment de toute hypothèse sur la na- ture intime de la chaleur. Le principe de M. Mayer, principe de l’équivalence de la chaleur et du travail, est l’objet d’une étude appro- fondie où sont discutées les expériences faites en vue de la détermination du coefficient de l’équivalence et en particulier les expériences de Joule, Cette étude est suivie des formules qui traduisent le principe de lé- quivalence et de celles qui lientles chaleurs spécifiques et les chaleurs latentes. Viennent ensuite le principe de Carnot ou de la con- servation de l’entropie, l'étude des gaz, des solides, des liquides, des vapeurs sèches et des vapeurs humides, de l’écoulement des gaz et des vapeurs. Tout ce qui est nécessaire à l'étude des machines thermiques est exposé de la facon la plus méthodique et aussi la plus mnémonique, car ainsi que le dit l’auteur : «Il ne suffit pas d’avoir compris les théorèmes, il faut encore en re- tenir les formules pour pouvoir s’en servir dans les ap- plications ». M. Witz a donné les solutions de nombreuses ques- tions tirées de son recueil d’Exercices de Physique. Ces solutions numériques ajoutent une grande clarté à l'exposition des formules en même temps qu’elles la rendent moins aride, Enfin chaque chapitre est terminé par un rappel des formules qui y ont été démontrées. L'auteur a adopté un numérotage et des notations qu'il emploiera dans les quatre volumes que lui a encore confiés M. Léauté et qui sont les suivants : Théorie des machines thermiques; Théorie générique de la machine à vapeur; Théorie expérimentale de la machine à vapeur; Calculs d'établissement des machines motrices. Les ingénieurs n’ont qu'à souhaiter la publication ra- pide de ces ouvrages qui, avec le précédent constitue- ront un ensemble de la plus haute utilité pratique et ne tarderont pas à être dans toutes les mains. A. GOUILLY, 2° Sciences physiques. Boys (C.-V.), dela Société royale de Londres. — Bulles de savon, traduit de l'anglais par Ch.-Ed. Guillaume. Un vol. in-8° de 145 pages avec figures dans le texte (2 fr. 75). Gauthier- Villars, Paris, 1892. | « Soufflez une bulle de savon et regardez-la, vous | pourrez l’étudier votre vie durant et toujours en tirer | des lecons de science », a écrit quelque part Lord | Kelvin. L'agréable petit livre de M. Boys que M. Ch.-Ed, | Guillaume vient de nous faire connaitre justifie l’asser- tion du grand savant anglais. Comme le dit très spiri- tuellement le traducteur, le titre est bien léger, mais le contenu, sous sa forme souvent humoristique, est des plus sérieux et des plus instructifs, M. Boys avait fait quatre conférences sur la capillarité qu'il a réunies et publiées; M. Guillaume ne s’est point contenté de les traduire littéralement ; il a atténué en maints en- droits la forme purement didactique, a supprimé des allusions trop exclusivement britanniques,mais a donné, en revanche, la description de nouvelles expériences de M. Boys, en particulier celle des expériences dé- montrant le magnétisme de l'oxygène ; il a, en outre, ajouté quelques notes sur d'intéressants sujets : tour- billons du camphre, action de l’huile sur les vagues, ete.; l'ouvrage très bien imprimé, orné de jolies gravures, constitue un petit traité élémentaire qui conduira gra- duellement le lecteur à la conception exacte des forces capillaires. Toutes les expériences sont décrites avec le plus grand soin, elles ne nécessitent, dans la plupart des cas, pour être répétées, qu'un matériel tout à fait rudimentaire, un tube de verre ou de caoutchouc; on trouve, d’ailleurs, à la fin du volume les indications les plus précises sur le mode opératoire. Ce petit volume ne saurait manquer d'obtenir le plus vif succès ; il est un exemple excellent de cette vérité, souvent méconnue, que des idées très savantes peuvent parfois être exprimées d’une facon rigoureu- sement scientifique sans qu'il soit besoin de recourir à un grand appareil mathématique ; il démontre aussi que les expériences les plus délicates, les plus précises, peuvent être conduites à bien, alors mème que l’on ne posséderait point d'instruments compliqués et coûteux. Lucien Poincaré. Charpy(G.)—Recherches sur les solutions salines. — Thèse de la Faculté des Sciences de Paris. — Gauthier- Villars et fils, Paris, 1892. Le travail de M. Charpy est relatif à l'étude des den- sités des solutions salines et des variations de volume, qui accompagnent les phénomenes de dissolution ou de dilution. Peut-être trouvera-t-on que le titre de ce mémoire est un peu général. Quant à nous, nous ne saurions nous en plaindre; il nous fait au contraire espérer que l’auteur ne s'arrêtera pas là. Après les densités, d’autres propriétés seront sans doute soumi- ses par lui à de nouvelles études, avec le même esprit de clarté et de critique qui caractérise ce premier tra- vail. La thèse de M, Charpy débute par une analyse biblio- graphique très sobre des travaux de ses devanciers. Les recherches antérieures de MM. de Marignac, Val- son, Mendelejeff et Pikering sur les densités des solu- tions, sont successivement passées en revue. Les résultats contradictoires obtenus par ces _deux derniers savants sont mis en évidence, et l’on est tout naturellement amené à conclure à la nécessité de nou- elles recherches sur cette question. Le chapitre suivant concerne les méthodes expéri- mentales suivies par M. Charpy. Elles sont décrites avec beaucoup de soin et donnent uneidée très nette de la précision qu'on peut attendre de ce genre de recher- ches. Viennent ensuite les résultats généraux qui se résu- ment dans les énoncés suivants : 1. Le coefficient de contraction est toujours plus petit que l'unité. Par suite, la dilution est toujours accompagnée d’une contraction. 2. Pour un sel donné le coefficient de contraction diminue continuellement quand la concentration augmente. Par suite, la contraction qui se produit, quand on ajoute à une solution un volume déterminé d'eau, est d'autant plus grande que la solution est plus concentrée. . 3. Le coefficient de contraction augmente quand la tempé- r'ature s'élève. Par suite, la contraction produite lors de la dilution d'une solution donnée est d'autant plus petite que l'opération se fait à une plus haute température, >" er." Pa. LL > Dalt 10337 ut BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 551 Par des considérations empruntées à la théorie méca- nique de la chaleur, M. Charpy établit ensuite, comme conséquences de ces premiers énoncés, les propositions suivantes : 1. Lapression osmotique d'une solution donnée augmente toujours quand la pression extérieure augmente. 2, La variation de la pression osmotique par la pression extérieure est d'autant plus grande que la solution est plus concentrée. 3. La variation de la pression osmotique par la pression extérieure est d'autant plus faible que la température est plus élevée. De cet ensemble de résultats on peut conclure que le coefficient de contraction est une grandeur qui peut être rapprochée de celle des tensions de vapeur et des abaissements des points de congétation. C’est ce qui amène M.Charpy à discuter, avecbeaucoup de soin, les variations du coefficient de contraction en fonction de diverses variables indépendantes. De celte étude, pré- sentée avec une grande clarté, il ressort que : « Lorsqu'on représente la concentration parlerapport du nombre de molécules du corps dissous au nombre tolal de molécules de la dissolution, les courbes qui représentent la variation du coefficient de concentration en fonction de la concentration prennent une forme particulièrement simple; de plus, les courbes ne se coupent pas en général, et, pour chaque série de corps analogues, elles se rangent dans l’ordre de grandeur des poids moléculaires des corps. » Les résultats obtenus sur les solutions des acides gras, et notamment de l’acide acétique présentent quelques irrégularités. Ces dernières s'expliquent sisément si l’on admet que la molécule d'acide acétique à l’état de liquide est plus complexe qu'à l’état de gaz parfait; c’est déjà la conclusion à laquelle MM. Raoult et Re- coura sont arrivés dans leurs études sur les tensions de vapeur des solutions dans l'acide acétique; c'est également la conclusion de MM. Ramsay et Young à la suite de leurs recherches sur les densités et les ten- sions de vapeur de l'acide acétique. De semblables irrégularités n’ont donc rien que de très naturel, et ce qu'il convient surtout de signaler, c’est le rôle très important joué par le choix de la va- riable indépendante pour la représentation des phéno- mènes de contraction, Les travaux de Clausius et de MM. Van der Waals et Sarrau, relatifs à l'équation des fluides et ceux de M. Etard sur le point de fusion des mélanges de sels et d’eau avaient déjà fait ressortir toute l’importance que peut avoir le choix de la varia- ble indépendante pour la représentation des phénomè- nes physiques. On ne peut donc assez insister sur la nouvelle confirmation que l’on doit à M.Charpy, quine s’est du reste pas borné à étudier les variations du coefficient de contraction, mais aussi celles des densi- tés des solutions. Après avoir élabli que ces densités dépendent de deux facteurs (la contraction et la den- sité du sel dissous) agissant tantôt dans le même sens, tantôt en sens inverse, M. Charpy démontre que les densités des solutions métalliques peuvent être consi- dérées comme des fonctions linéaires de la concentra- tion, quand celle-ci est représentée par une variable convenable. Telles sont, rapidement esquissées, les conclusions qui se dégagent du travail de M. Charpy. Soit par ses recherches expérimentales, soit par la discussion de ses propres résultats et de ceux de ses devanciers, ce savant nous apporte un chapitre bien étudié de la physico-chimie des solutions. C'est le meilleur éloge que l’on puisse en faire, surtout à une époque où l’on a écrit et publié tant de choses obscures sur ces ques- tions, si importantes et si intéressantes. Philippe-A, Guye. 3° Sciences naturelles. Boné Baëeff, — Leseauxde l’Arve. Recherches de Géologie expérimentale sur l'érosion et le trans- port dans les rivières torrentielles ayant des affluents glaciaires. — Un vol. in-8° de 100 pages. Genève, 1891. Le travail de M. Boné Baëff porte le sous-titre « Re- cherches de Géologie expérimentale » qui, à lui seul, suffirait pour attirer la bienveillance de tous les géo- logues qui croient, et nous sommes du nombre, que la géologie est une science assez avancée pour entrer dans la voie de l’expérimentation. Mais ce mémoire mérite encore d’autres éloges : l'auteur a étudié l’Arve d’une facon scientifique, tenant compte des phéno- mènes d’érosion, de dissolution, de transport, etc.,et de leurs variations suivant les modifications des conditions physiques ambiantes auxquelles ils sont dus. Bien des faits qu'il relate étaient déjà connus; mais les chiffres qu'il donne, résultant de mesures précises, accusent en- core l’imporance de certains d’entre eux. Nous signale- rons comme chapitres particulièrement intéressants celui qui est relatif aux matièresen suspension eten dis- solution et celui quitraite du chlore. Dans les conelu- sions qui terminent ce dernier chapitre, l’auteur semble s'êlre laissé par trop influencer parla quantité vraiment considérable de chlore (2530 tonnes en neufmois), dosée dans l’'Arve, quand il conclut que ce sont les fleuves qui fournissent ce corps aux eaux de la mer. Bien qu'incomplète, ainsi que M. Boné Baëfl le re- connaît lui-même, cette monographie de l’Arve peut servir de modèle pour toute étude similaire. Si nous connaissions ainsi tous les cours d’eau d’un même bassin, que de faits encore obscurs, dans les phéno- mènes d'érosion et d'alluvionnement nous seraient expliqués! Alors la fin de la période tertiaire et la période dite quaternaire ne nous présenteraient plus ces difficultés d'interprétation qui en ont relardé si longtemps l'étude vraiment scientifique. J. BERGERON. Pailleux (A.) et Bois (D.).— Le Potager d'un cu- rieux. Histoire, culture et usages de 200 plantes comestibles peu connues ou inconnues. Un vol, de 575 pages, avec 54 fiqures. Deurième édition en- tièrement refaite (prix : 10 francs). Librairie agricole de la Maison rustique, Paris, 1892. Voilà un livre excellent et bien intéressant que feraient bien de méditer tous les agriculteurs et tous ceux qui tiennent à sortir des sentiers battus, S'il est en effet un fait certain, c’est que les légumes que nous absorbons pour notre alimentation sont d’une mono- tonie désespérante. Les horticulteurs qui cherchent à améliorer une pomme de terre ou une betterave son- gent surtout à eux, en créant des races à très forts rendements. Mais pour le palais du consommateur, une pomme de terre, si modifiée soit-elle, sera toujours une pomme de terre, Pourquoi ne chercherions-nous pas à découvrir dans les pays voisins des plantes ali- mentaires que nous pourrions acclimater chez nous, et à varier ainsi nos menus? El puis, qui sait si, dans nos recherches, nous ne trouverons pas un légume supé- rieur, pour ce qui est du rendement et du goût, à ceux que nous consommons actuellement? MM. Pailleux et Bois, depuis bientôt vingt ans, poursuivent des expé- riences dirigées dans ce sens et les résultats qu'ils ont déjà obtenus sont parfois très beaux. C’est le cas de dire de l’ouvrage que nous analysons : cecy est un livre de bonne foy. Les auteurs y énumèrent les diverses plantes qu’ils ont essayé d’acclimater et notent les suc- cès et les insuccès qu'eux mêmes ou d'autres ont obte- nus. Ils ont jusqu’à ce jour étudié plus de deux cents plantes exotiques : ainsi envisagée, une pareille étude est une véritable science et bien digne d’altirer les es- prits curieux, Et si ces recherches sont déjà fort inté- ressantes en ce qui concerne notre pays, combien leur intérêt est-il encore augmenté quand on envisage nos colonies ! « Dans plusieurs de nos possessions existent, aux frais de l'Etat, des jardins dans lesquels on cultive les légumes d'Europe, et quelques-uns y végètent pas- sablement, à condition que les semences en soient fré- CE 58 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX quemment renouvelées. Dans toutes leurs stations, nos missionnaires entretiennent aussi des jardins dans les- quels ils cultivent ces mêmes légumes, pour leur propre alimentation, et aussi pour en enseigner et en propager la culture et l'usage, Combien donc serait abondant et salutaire l’approvisionnement végétal de nos colonies, si, àces légumes d'Europe,péniblementobtenus,venaient se joindre ceux qui n’acceptent pas notre climat, mais qui prospéraient aussi bien à la Guyane qu’au Gabon, aux Antilles qu'en Cochinchine, etc., et qui se répan- draient partout ou nos compatriotes subissent encore aujourd'hui de cruelles privations par l’extrème rareté des végétaux alimentaires, » Parmi les nombreux chapitres intéressants, citons celui qui est relatif aux Stachys tuberifera, dont les tu- bercules (crosnes), sous l’impulsion de M. Pailleux, commencent à prendre chez nous une certaine place dans l'alimentation. Citons aussi le chapitre relatif aux Ignames, bulbilles des Dioscorea, dont la culture serait très rémunératrice dans les pays chauds et humides, peut-être même dans le midi de la France. Voici encore la Soya, cette légumineuse si employée au Japon et en Cochinchine et dont la culture en Europe s'étend de plus en plus. Il serait trop long d’énumérer toutes les plantes décrites : nous faisons des vœux pour que ce beau livre inspire aux chercheurs le désir de prendre quelques-unes de ces plantes et de les étudier en dé- tail : le succès n’est pas douteux. Un botaniste améri- cain, M. Léwis Sturtevant a calculé que, dans le monde entier, il y a à peu près 4233 plantes comestibles; il y a donc là un champ immense pour les chercheurs. En pensant aux services que Parmentier a rendus en pré- conisant la culture de la pomme de terre, naguère in- connue, on ne peut que louer les savants qui cherchent à étendre le nombre des espèces alimentaires : à cet égard, le livre de MM. Pailleux et Bois mérite tous les éloges. Henri Courin. Léger (L.). — Recherches sur les Grégarines. Thèse de la Farulté des Sciences de Paris. Oudin et C*, 4, rue de l'Eperon, Poitiers, 1892. Le groupe des Sporozoaires parait aujourd'hui appelé à jouer dans la pathologie de l’homme et des animaux un rôle de plus en plus important, et les recherches sur leur évolution en acquièrent d'autant plus d'intérêt. Parmi eux, les Grégarines, parasites dans le tube digestif et la cavité générale d’un grand nombre d'in- vertébrés, sont actuellement les mieux connues, grâce surtout aux travaux de M. Aimé Schneider; mais le nombre des formes dont le cycle évolutif, si complexe chez ces animaux, a élé suivi dans son entier, était encore trop restreint pour permettre le moindre essai de classification naturelle. M. Léger l’a accru considérablement; il n’a pas étudié moins de 38 espèces toutes nouvelles ou du moins très imparfaitement connues et a pu les répartir en 10 familles d’après la considération de leurs spores; il a, en effet, trouvé toujours une concordance remarquable entre la forme des spores et le mode d'évolution de la Grégarine qui commande le nombre absolu de ses segments. M. Léger a étudié toutes les parties constiluantes du corps des Grégarines, leur enkystement, leurs singu- lières associations en chaînes comprenant parfois un grand nombre d'individus; mais la partie la plus importante de son travail est, sans contredit, celle qui a trait à la succession et à la comparaison des phases évolutives chez les différentes espèces. On sait, en effet, que celles-ci ont été décrites de façons par- fois si différentes et si incompatibles qu'il est impos- sible de concevoir entre elles le moindre lien. A l’état de plus grande complexité du eyele évolutif la grégarine adulte, unicellulaire, mais divisée en deux segments par un septum, libre dans l'intestin de l'hôte, le sporadin, devient sphérique et se transforme en un kyste qui est rejeté au dehors avec les excré- ments. Son contenu se divise alors en un nombre considérable de spores qui sont mises en liberté par la rupture de l'enveloppe du kyste, et celles-ci, avalées par un animal susceptible d’être infesté,. s'ouvrent à leur tour dans son intestin sous l’action du suc digestif, mettant en liberté de 4 à 8 corpuscules falciformes résultant d’une division nouvelle du contenu de la spore. Chaque corpuscule pénètre au moyen de son extrémité antérieure, elfilée et résistante (rostre), dans une cellule épithéliale, se nourrit de son protoplasma et, par suite de son accroissement, fait éclater la paroi de la cellule à laquelle iladhère encore par son extré- milé céphalique (épimérite), tandis qu'il pend libre- ment dans la Inmière de l'intestin par son extrémité caudale qui se divise bientôt en deux segments (proto et deutomérile) par un septum ; c'est le stade de gréga- rine jeune ou de céphalin qui n’a plus qu’à se détacher de la paroi intestinale en perdant son épimérite pour devenir le sporadin du point de départ. Toutefois, un certain nombre de grégarines parais- saient évoluer d'une manière totalement différente, entre autres le Porospora giganteu, la grégarine géante du homard, M. Léger a démontré qu'il n’en est rien et que le développement suit la même marche chez toutes les grégarines intestinales. Mais il existe encore un groupe plus important qu'il paraissait impossible de relier au type précédent, celui des grégarines à un seul segment, les Monocys- tidées, qui vivent dans la cavité générale de leur hôte et ne sont fixées à aucune époque de leur vie. Or, M. Léger a trouvé entre eux des formes de transition tout à fait intéressantes et inattendues : Beaucoup de grégarines vivent dans des larves d'insectes, et quand celui-ci subit des métamorphoses complètes, ou, du moins, quand l’imago est séparée de la période larvaire par une longue période de nymphose, on doit se demander comment le parasite, quand il persiste pour assurer la conservation de l'espèce, peut faire face à ce temps de jeùne prolongé. M. Léger a trouvé que certaines espèces qui se sont développées de la manière ordinaire pendant toute la période larvaire se comportent tout différemment quand approche le moment de la nymphose. Le tube digestif de l'hôte est alors vide de parasites et les derniers corpuscules falciformes avalés, au lieu de se développer du côté de la lumière intestinale, traversent la paroi en s’en coiffant et, par leur accroissement ultérieur, font saillie dans le cœælome sous forme de petites masses simplement globuleuses et privées de, mouvements caractéristiques de la grégarine. Un travail actif de sporulation s'effectue à leur intérieur et elles se trans- forment ainsi en kystes, qui tombent dans la cavité générale où ils demeurent jusqu’à la fin de la vie de l'insecte. Les spores, qui ne peuvent être évacuées au dehors que par la décomposition des tissus de l’hôte, sont ainsi transportées au loin; elles ont aussi une paroi plus épaisse que les spores ordinaires ; ce sont des spores de conservation et de dissémination de l'espèce. D’autres grégarines (Etrmocystis polymorpha) montrent dans une même génération tous les passages entre la grégarine à deux segments, mobile, du tube digestif et la forme cœlomique sphérique et immobile. D’autres enfin, chez d’autres invertébrés, ne pré- sentent dans leur évolution que cette dernière; telles l’Urospora sipunculi et V'U. Synaptæ, et ainsi se rencon- trent toutes les étapes d’un passage insensible entre les Polycystidées intestinales et les Monocystidées adaptées à la vie cæœlomique. D'où résulte que l'évolu- tion plus simple de ces dernières n’est qu'un dévelop- pement raccourci, et l’évolution de la classe des gré- garines dans son ensemble doit être conçue de la manière suivante : Un corpuscule falciforme pénètre dans la paroi intes- tinale et tantôt se dirige, pour évacuer ses spores, de dehors en dedans, vers la cavité intestinale (Polycys- tidées mobiles, plurisegmentées et munies d’un BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX organe de fixation pour résister à l'entraînement par le courant alimentaire), tantôt reste dans l'épaisseur de la paroi (Formes cælomiques, immobiles et s'enkys- tant directement) et tantôt enfin traverse rapidement la paroi pour arriver dans la cavité générale (Monocys- idées qui peuvent ainsi conserver leur motilité et n'ont qu'à grandir avant l’enkystement sans avoir besoin dans ce milieu en repos de développer d’épi- mérite fixateur), G. Pruvor. Blanchard (D' Raphaël). — Histoire zoologique et médicale des Téniadés du genre Hymenolepis. Un volume in-8° de 112 pages avec nombreuses figures (2 fr. 50). Société d'éditions scientifiques, Paris, 1894. M. Blanchard, dont on connaît les beaux travaux sur les Téniadés, nous donne une monographie fort intéressante d’un genre de ce groupe: les Hymeno- lepis Weinland. L'Hymenolepis nana est de tous les Ces- todes parasites de l’homme le plus petit : il atteint en moyenne 40 à 15 millimètres. Mais nous ne pouvons résumer ici la description complète qu’en donne M. Blanchard. Dans l'étude des parasites, ce qu'il importe surtout de saisir, c’est le dé- veloppement et le mode de propagation. Dans quel hôte, avant d'atteindre son développement complet, l’'Hymenolepis nana passe-t-il sa vie larvaire? On a incriminé les insectes ou les mollusques; peut-être même la migration se fait-elle simplement dans le même organisme, mais dans des organes différents, comme Grassi à pu vérifier le fait pour l'H. murina. La partie zoologique de ce travail se termine par une description des qualorze espèces connues du genre Hymenolepis. ! Les dernierschapitres sont consacrés aux observations médicales. Les accidents observés sont ceux qui ont été déjà décrits pour les Cestodes en général, notamment les troubles nerveux pouvant aller jusqu'aux convul- sions épileptiformes, Il existe quelques cas de mort rapportés par Bilharz, par Visconti; dans ces cas, les vers étaient en quantité considérable, jusqu’à 400 dans l'intestin grêle, Comme conclusion pratique, M. Blanchard conseille, le diagnostic étant établi par l'examen microscopique des matières évacuées, d'employer l'extrait éthéré de Fougère mâle. L10. Dineur (D'E.). — Recherches sur la Sensibilité des Leucocytes à l'électricité. Annales de la Société royale des Sciences médicales et naturelles de Bruxelles, H. Lamertin, 20, rue du Marché-au-Bois, Bruxelles, 1892. Appelons l’attention du lecteur sur ces curieuses re- cherches d’où l’auteur conclut que les globules blancs de la lymphe et du sang sont attirés ou repoussés par l'électricité positive, suivant qu'ils se trouvent à l’état sain ou à l’état inflammatoire. Les faits constatés par M. Dineur montrent de la facon la plus nette que les globules sont, dans une certaine mesure, sensibles aux variations électriques, et tendent à établir que l'élec- tricité agit sur eux d’une facon directe et indépendante des phénomènes intermédiaires d’électrolyse. IL y au- rait intérêt à déterminer les limites de cette influence, et à rechercher si elle se produit, en dehors de l’expé- rimentation, pendant la vie physiologique ou patholo- gique. IEOIE Buckton (G.B.)., Membre de la Société Royale de Londres. — Monograph of the British Cicadæ, — 7 vol. in-8° de chacun 200 pages; Macmillan and ©, London 1892, En raison du caractère très spécial de cette publica- tion, nous ne pouvons que la signaler ici, Dirigée avec un soin extrême et magnifiquement illustrée, elle mérite toute l’attention des entomologistes, 4° Sciences médicales. Drouet (D' H.) — De la valeur et des effets du lait bouilli et du lait cru dans l'allaitement artificiel. Un vol. in-8 de170 p.(4 fr.), Société d'éditions scientifiques, Paris, 1892, De tout temps on faisait bouillir le lait pour l’empê- cher de « tourner », c’est-à-dire pour prévenir la for- mation d'acide qui amène la coagulation de la caséine et rend le lait aigre, Mais les découvertes plus récentes de la transmissibilité possible, probable même des maladies infectieuses, notamment de la tuberculose, par le lait de vaches malades, ont conduit à conseiller l’ébullition pour tous les laits destinés à l’alimenta- tion, Mais le lait bouilli présente-t-il les mêmes valeurs nutritives que le lait cru; est-il aussi bien digéré par l'estomac de l'enfant ? M. Drouet a repris cette ques- tion au point de vue de l'allaitement artificiel. En eri- tique sévère, il expose les opinions émises, souvent contradictoires. L'influence du lait vivant, qui avait séduit les auteurs anciens, ef qui a été si judicieuse- ment contestée par M. Tarnier, ne supporte pas la discussion; mais il en est autrement des modifications chimiques apportées au lait par la cuisson. Il ne faut pas oublier que le lait est une solution d’albumine, que les albuminoïdes sont coaaulés par la chaleur, que le lait en un mot est nécessairement modifié par l’ébulli- tion. M. Drouet soutient que ces modifications ne sont pas toujours nuisibles à l'enfant. Le lait de vache, on le sait, est beaucoup plus riche en albumine que le lait de femme. Or, cette pellicule qui se forme sur le lait cuit, la frangipane de Richer, n’est autre que de l’albu- mine coagulée. Par le fait de la cuisson seule, le lait de vache est donc ramené vers la composition du lait de femme, et l’on concoit ainsi pourquoi certains esto- macs supportent mieux le lait cuit que le lait cru. Le meilleur réactif du lait est encore l'enfant qui le re- coil; or l'expérience journalière montre que les enfants digèrent fort bien le lait bouilli, dans la plupart des cas. L'auteur qui a fait à la Maternité de l'hôpital Beaujon de nombreuses observations, avec pesées mé- thodiques, est absolument affirmatif à cet égard : l’ac- croissement des nourrissons alimentés @e lait bouilli n'est aucunement inférieur à celui des enfants nourris au lait cru, (Voyez la Revue du 30 septembre 1891, t. I, p. 620.) Après avoir exposé les connaissances acquises sur la transmissibilité de la diarrhée verte, de la fièvre ty- phoïde, de la scarlatine, de la tuberculose par le lait, M. Drouet conclut naturellement au chauffage à 100° C de tout lait destiné à l'alimentation artificielle. Le livre se termine par une bibliographie assez com- plète des travaux français et allemands sur cette ques- tion; les auteurs anglais ont été, croyons-nous, un peu négligés. A0? MWurtz (R.). — Technique bactériologique. Un vol. petit in-8° de 192 pages, de l'Encyclopédie scientifique des Aide-Mémoire de M, Léauté (Priæ : broché 2 fr. 50 ; cartonné 3 fr.). Gauthier-Villurs et fils et G. Masson, éditeurs. Paris, 1892. Sous une forme claire et concise, ce manuel résume la technique bactériologique applicable à la préparation des milieux nutritifs, la stérilisation, enfin les divers modes de culture, d'examen et de coloration des micro- organismes. Comme application immédiate et pratique, l’auteur esquisse la technique de l’analyse microbienne de l’air, de l’eau et du sol. Le dernier chapitre résume les principales méthodes employées pour isoler les produits solubles sécrétés par les microbes; ces notions ne se trouvent, jusqu'à présent, dans aucun manuel, Bref et pratique, ce petit ouvrage expose les notions qu'un débutant doit posséder à fond avant d’aborder l'étude proprement dite des microbes. D' H. VINCENT. 560 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER (La plupart des Académies et Sociélés savantes, dont la Revue analyse régulièrement les travaux, sont actuellement en vacances.) ACADÉMIE DES SCIENCES Séance du 11 juillet. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. Boussinesq : Sur une légère correction additive qu'il peut y avoir lieu de faire subir aux hauteurs d’eau indiquées par les marégraphes, quand l'agitation houleuse ou clapoteuse de la mer atteint une grande intensité : cas d’une mer houleuse. — M. G. Defforges : Mesure de l'intensité absolue de la pesanteur à Breteuil (Bureau international des Poids et Mesures). — M.E. Hale présente des pholo- graphies de la chromosphère, des protubérances et des facules solaires qu'il a obtenues à l'Observatoire d’As- tronomie physique de Kenwood-Chicago à l’aide de la méthode fondée sur l'emploi de son spectrohéliographe. Cette méthode repose sur ce fait que les raies H et K du calcium sont plus brillantes que les raies de l’hy- drogène dans chaque protubérance solaire; de plus, elles sont plus brillantes dans les facules que dans les protubérances, Les photographies oblenues rendront possible la résolution d’un grand nombre de questions, telles que la relation qui existe entre les protubé- rances, les taches et les facules, ete. — M. H.Parenty : Sur le calcul pratique de la dimension des orifices d'écoulement de la vapeur d’eau saturée dans l’afmos- phère, en régime constant et en régime varié ; appli- calion aux soupapes de sûreté, 29 SciENCES PHYSIQUES. — MM. H. Moissan et H. Gau- tier décrivent une nouvelle méthode de détermination de la densité d’un corps gazeux, basée sur celle de Dumas pour la recherche des densités de vapeur. Elle permet d'opérer sur 100 centimètrescubesde gazenviron; l'erreur possible n'atteint pas 5 dans les conditions les plus défavorables, approximation suffisante pour vérifier et suivre une réaction de laboratoire ; la mé- thode permet, en outre, d'uliliser l’échantillon de gaz pesé au dosage des éléments qu’il contient. — M.Cham- brelent signale les effets de la gelée et de la séche- resse sur les récoltes de celte année et fait connaitre les moyens tentés pour combattre le mal. — L'étude du dédoublement des alcoyleyanocamphres conduit M. Haller à adopler pour ces corps une formule de constitution différente de celle admise primitivement. D'autre part, les éthers benzène-azocamphocarbo- niques donnent lieu réellement, en présence des chlo- rures diazoïques, à des composés azoiques. — La grande analogie des sels de platine avec ceux de pal- ladium a conduit M. M. Vèzes à tenter sur ce dernier métal les mêmes essais faits sur le platine; il a obtenu de cette facon un palladiodichloronitrite de potassium, Pd (Az0?): CE K?, tout à fait comparable au platodi- chloronitrite. L'auteur en décrit les propriétés et réac- tions. — M. A. Chassevant, poursuivant ses études sur le chlorure de lithium et les chlorures de la série magnésienne, à obtenu quatre chlorures isomorphes de cette série, correspondant tous à la formule type 2 M CI, Li CI, 6H0. — MM. Ch. Lepierre et Lachaud décrivent la nouvelle série de corps obtenus par lac- tion du bisulfate d'ammonium sur les sels de nickel et de cobalt. — M. E. Grimaux, étudiant l’action à froid des alcalis sur le mono et le di-iodométhylate de quinine, a pu déterminer que l’iode du mono-iodomé- thylate de quinine est fixé sur l’azote qui n'appartient pas au groupe quinoléique. L'auteur montre aussi sur lequel des atomes d’azote se fixe la première mo- lécule d'acide dans la formation des sels et indique DE PARIS l'action de l'iodure de méthyle sur le sulfate basique de quinine, — M. J. Minguin maintient la constitu- tion, mise en doute par M. Brübhl, qu'il a attribuée aux éthers camphocarboniques méthylés et au méthylcam- phre. L'auteur étudie ensuite quelques dérivés azoïques du camphre eyané et l'action exercée sur eux par la potasse alcoolique. — M. R. Vidal, chauffant en vase clos du phénol avec du phospham à la température de 300°, a obtenu uniquement de la diphénylamine, ce qui confirme son interprétation de l’action du phos- pham sur les alcools méthylique et éthylique. Avec le naphtol 8 il a obtenu un produit, différant des dinaphtylamines par ses caractères physiques et chi- miques, mais ayant la même composition centésimale. — M. H. leChatelier ajoute quelques observations per- sonnelles à celles de MM. Parmentier et Riban sur quelques médicaments ferrugineux. — M. F, Parmen- tier signale la présence de l’alumine dans toutes les eaux naturelles, minérales ou autres, analysées par lui. 3° SCIENCES NATURELLES, — M. Cuénot, dans un tra- vail fait en commun avec M. Klobb, à comparé la quan- tité d'oxygène contenue d’une part dans l’eau du la- boratoire, d'autre part dans le sang des Helix ; il en résulte : 1° que le sang de ce Gastéropode pulmoné, pourvu, comme on sait, d'hémocyanine, est capable d’absorber plus d'oxygène qu'un égal volume d’eau; 2 que le pouvoir absorbant de l’hémocyanine pour l'oxygène est très faible, comparalivement à l'hémo- globine des Vertébrés. L'auteur la considère toutefois comme un véhicule respiratoire, — Des analyses aux- quelles s’est livré M. A. Poehl, il résulte que la sper- mine ne se confond pas avec l’éthylènimine, comme le supposent MM. Ladenburg et Abel, et qu'elle ne se change pas en un polymère de l’éthylènimine, la pipéra- zine que M. Kobert considère comme étant une disper- mine, M. Poehl lui attribue la formule CÿH!1Az? ou peut- être une formule plus complexe. Etudiantensuite l’action physiologique de la spermine, il trouve que cette base possède une action {onifiante et dynamogène de tout point semblable à celle du liquide testiculaire de M. Brown-Séquard. Elle est, par sa présence dans l’or- ganisme, un excitant des oxydations intra-organiques comme le prouve la mesure du rapport existant dans les urines entre l'azote total excrété et Pazote de l’urée ; son action favorable chez les diabétiques s'explique par une diminulion de la spermine produite par le pancréas des malades. De plus, étant un élément cons- tant du sang normal et de beaucoup de tissus, son ad- ministrationest absolumentsans danger. —M.}F. Hous- say rend compte du résultat de ses recherches relati- vement à la circulation embryonnaire dans la tête chez PAxolotl; il ramène celle région au même type vas- culaire que les métamères du tronc. — M. Maupas décrit un nouveau Copépode d’eau douce, le Belisarius Viquieri, de la famille des Harpactides. — M. Dareste, ayant soumis l’œuf pendant l’incubation à un mouve- ment de rotation dans lequel son grand axe tourne dans un plan vertical, a trouvé que ce mouvement est un obstacle au développement complet de l'embryon. IL fait périr celui-ci au moment de la formation de l’allantoïide, époque critique de la vie embryonnaire. — M. A. Trécul : De l’ordre d'apparition des premiers vaisseaux dans les fleurs de quelques Lactuca. — M. A. Pomel signale la découverte dans le terrain pliocène plaisancien d'Algérie, d’une mandibule droite d’un nouvel animal de l'ordre des Ruminants, ayant des ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 864 affinités avec l’Helladotherium et désigné sous le nom de Libytherium maurusium. — MM. Ch.-Eg. Bertrand et B. Renault décrivent la composition et le mode de formation du boghead d’Autun, qu'ils regardent comme une roche d’origine végétale et ulmique, formée dans des eaux brunes presque sans courant, dans lesquelles vivaient des poissons, — M. R. Zeïller, étudiant la constitution des épis de fructification du Sphenophyllum euneifolium, conclut que, si les Sphenophyllum rappel- lent les Lycopodinées par la structure de leur axe, ils s’en éloignent par la disposition spéciale de Jeur appareil fructificateur, qui les rapproche plutôt des Rhizocarpées. L'auteur ajoute que les divers Bowmanites, étant à n’en pas douter des épis de Sphenophyllum, doivent disparaître de lanomenclature, — M. Stanislas Meunier : Apercu sur la constitution géologique des régions situées entre Berubé et le pic Crampel (Congo) d’après les échantillons recueillis par M. J. Dybowski, Mémores présentés : M. Léopold Hugo : Sur les spires étoilées latérales à la nébuleuse de la Lyre. — M. Mas- cart fait hommage à l’Académie de la première partie du troisième volume de son Traité d'Oplique. Nominations : M. Perrotin est élu correspondant pour la section d’Astronomie, en remplacement de feu M. Adams. Ed, BELZUNG. ACADEMIE DE MEDECINE Séance du 28 juin. M. Berger est proclamé membre titulaire de la cin- quième section (Médecine opératoire), en remplacement de M. Richet, décédé. — M. G. Sée : Le nouveau ré- gime alimentaire pour l'individu sain et pour le dys- peptique. L'auteur étudie : 1° l’aliment; 2 la propor- ton du régime azoté à l’état normal et pathologique; 3 Ja valeur nourrissante des aliments. L’aliment a pour fonction l'apport d’une provision d'énergie poten- tielle qui se transforme dans le corps en force vive. L'énergie s’exprime par la quantité de chaleur qui de- vient libre lors de la combustion de l'aliment; elle se mesure par les calories. On ne peut considérer comme aliments que les substances qui brèlent et fournissent des chaleurs de combustion. À ce point de vue, ül n'existe que trois aliments, à savoir : 1° les albumines, ne se détruisant que d’une manière incomplète ; 2° les graisses; 3° les hydrates de carbone (fécules et sucres), Ces deux dernières catégories de substance se consument entièrement dans le corps en fournissant CO? et H20. La ration alimentaire ancienne avait la composition sui- vante : 118 grammes d'albuminate fournissant 50 grammes de graisse....... 450 grammes de fécule ou sucre tandis que la ration moderne est celle-ci : 617,8 grammes d’albumine fournissant. ........ 278 calories Glierammestdetonaisses #5"; Le 562 — 494 grammes d’hydrates de carbone. ...... 2026 — On voit donc que la ration azotée a été diminuée, Au- cun aliment, gras ni hydrocarboné, ne peut rempla- cer l’albumine dans la reconstitution des tissus. Quel- que minime que soit la ration azotée, elle suffit pour remplir l'acte réparatoire. Les moyens d'économie de l’albumine sont normalement les graisses et les hy- drates de carbone; les moyens d'épargne accessoires sont l'alcool et la gélatine. Les plus actives parmi les albumines sont : les albumines animales et végétales. Les albumines et les peptones n’ont qu'un pouvoir d'’é- pargne de l’albumine. Quelles sont les substances nourrissantes? Doivent être considérées comme nour- rissants les aliments qui, par rapport à leurs poids et volume, fournissent les plus grandes quantités de prin- cipe nutrilif, qui, de plus, soient supportés par l'estomac en quantité marquée, qui ont le plus grand pouvoir ther- mogène possible et qui satisfonten même temps le goût. Chez les personnes dont l'estomac est supprimé chimi- quement par la maladie, c'est l'intestin qui prend com- plètement les fonctions et la place de lestomac. Les conditions pour obtenir cette force compensatrice de l'intestin résident surtout dans le mode de préparation des aliments. Séance du 5 juillet. M. Dumontpallier est proclamé membre titulaire dans la sixième section (Thérapeutique et Histoire natu- relle médicale), en remplacement de M. Moutard-Martin, décédé, — M. Laborde : De la mort apparente à la suite de l’asphyxie par submersion ou noyade, et d’un moyen inconnu ou Jusqu'à présent inappliqué d'y re- médier, Ce moyen consiste à saisir la langue et à opé- rer sur elle des tractions réitérées et rythmées qui suf- fisent souvent à elles seules à provoquer le retour de la respiration. — Discussion : MM. Le Roy de Méricourt, Laborde, Larrey, Léon Le Fort, Guéniot. —M.Maur- jolin : Préservation des nourrices et des nourrissons contre la syphilis, — Discussion : MM. Charpentier Marjolin. SOCIETE CHIMIQUE DE PARIS Séance du 2% juin. MM. Béhal et Desvignes ont étudié l‘extrait de suie de bois bien connu en pharmacie sous le nom d’asbo- line ; ils ont reconnu qu'ilest essentiellement constitué par de la pyrocatéchine et de l'homopyrocatéchine. Ce dernier composé qui est décrit comme liquide est en réalité solide; il fond à 51° et bout à 2529. — M. A. Gau- tier présente un travail de M. Mourgues sur les prin- cipes immédiats du persil. L'auteur dit avoir obtenu un homologue supérieur à Papiol qu'il nomme eariol et qui aurait pour formule : CIHISO*, — M. Béchamp et M. Trillat présentent les premiers résultats de leurs expériences sur la conservation du lait au moyen de doses croissantes d’aldéhyde méthylique; ils ont em- ployé des quantités d’aldéhyde variant de 0 gr. 0005 à 0 gr, Of pour 300 centimètres cubes de lait, M. Bé- champ a également cherché à étudier l’action de l’al- déhyde ordinaire sur le lait, et constaté que dès les premières heures, il se forme de la résine aldéhyde ; l'auteur pense que ce fait témoigne en faveur de lab- sence d'acide libre dans le lait. — M. Adam a obtenu l’'éther méthylène-malonique en traitant par les déshy- dratants, ou simplement la chaleur, l’éther isomalique obtenu par l'acide cyanhydrique, et l'acide pyruvique, par saponification et puis éthérification. — M. Friedel présente un mémoire de M. Guichard sur le dosage de l'amidon et l'action des acides étendes sur la cellu- lose. — M. A. Gautier fait une communication sur une méthode générale d'extraction des alcaloïdes vé- gétaux ou animaux, Cette communication est trop longue pour être résumée ici. L'auteur en à fait une application à l'extraction des bases contenues dans les feuilles du tabac. — M. Le Bel présente une étude de M. Raïisonnier sur les produits de la décomposition du glycérinate monosodique à haute température, — M. Trillat dit quel’aldéhyde formique en quantité très minime décolore complètement, après quelque temps à froid, très vite à chaud, les vins naturels ; les ma- tières colorantes artificielles ne sont généralement pas précipitées ; quelques-unes sont transformées : tel est le cas des sels de rosaniline. Ces propriétés de l'aldé- hyde formique peuvent donner lieu à de nouvelles méthodes pour l'analyse des vins. —-- M. Verneuil pré- sente au nom de M. Treuil une note sur lapréparation d’un sous-azolate de zinc cristallisé. — M. Bertrand a étudié la composition immédiate des tissus ligneux. Chez les plantes Angiospermes il a reconnu que la cel- lulose était imprégnée de vasculose, de lignine et de xylane. Cette dernière n’existe pas chez les Gymno- spermes, elle y est remplacée par une substance, don- nant du mannose à l’hydrolyse, associée à une petite quantité de galactose. La vasculose très abondante dans la lamelle moyenne, existe en moindres proportions 962 ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES dans les membranes ; les tissus ligneux lui doivent toutes leurs réactions microchimiques. Quant à la li- gnine c’est une substance, à poids moléculaire élevé, voisine des phénols ; l’auteur en indique les princi- pales réactions, Sa composition centésimale est la sui- vante : CGI NA PS AREA ZE A. COMBES. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 20 juillet. M.Laisant communique à la Société une lettre d’Abel Transon, écrite en 1868 et relative aux principes du calcul directif. — M. Félix Lucas fait une commu- nication relative aux courants polyphasés non sinusoi- daux. — M. Bioche : Sur les singularités des courbes planes. L'égalité de 2 nombres corrélatifs entraine l'égalité des autres sauf pour 2? cas; les courbes d’or- dre n et de classe minima ne sont unicursales que si n esl inférieur ou égal à 5. j La Société suspend ses séances jusqu'au mois de novembre prochain. M. d'OcaAGne. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 2 juin. Meldola et Streatfeild : Dérivés éthyléniques des composés diazoamides. — Brereton Baker: Action de la lumière sur le chlorure d'argent, L'auteur s’est pro- posé de vérifier le fait avancé par Robert Hunt que le chlorure d'argent absorbe l'oxygène de l’air sous lin fluence de la lumière. Ce fait se vérifie complètement; de plus, le noircissement du chlorure d'argent ne se produit pas dans le vide ou l'acide carbonique. Les do- sages du composé formé donnent des résultats assez divergents, mais qui se rapprochent de la formule Ag? CI O0. — Barrows et Thomas Turner: Dosage des scories dans le fer forgé. Les auteurs dosent la scorie en dissolvant le fer dans du chlorure de cuivre et de sodium. — James Dobbie et Alexander Lauder : Corydaline. L’alcalcide étudié par les auteurs esl identique à celui qu'Adermann à relevé des racines du Corydalis cava. Hs analysent les différents sels de cette base. — Augustus Dixon: Action du brome sur l'allylthiocarbimide, En solution dans le chloroforme, il se produit de la dibromopropylthiocarbimide, En so- lution dans l’aniline, il se dégage de l'HBretil se forme un composé répondant à la formule C0 H!! Br AZS. — James Sullivan: Fonction hydrolytique de la levüre. M. Sullivan montre que, contrairement à l'opinion de Berthelot, la levüre saine n’abandonne pas de diastase à l'eau avec laquelle on la met en contact; la trans- formation du sucre ne s'effectue que sous l'influence immédiate du plasma de la cellule. — Samuel Hoolser : Constitution de l'acide lapachique et de ses dérivés. L'auteur propose les formules suivantes : O 0 /N/NcH=CH— CH CH2 CH C HT | OH 0” 0 0 ‘ acide lapachique «& lapachone DES F /N\ cH>CHC?H Joe O0 B lapachone SOCIÉTÉ ROYALE D'ÉDIMBOURG Séance du # juillet. 10 SGIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Tait communique la seconde partie d'un mémoire sur les lois du mouve- ment. Si l'on admet les principes de l’inertie de la malière et de la conservation de l'énergie (l'énergie d'un système abandonné à lui-même comprenant l'é- nergie cinétique de l’ensemble de toutes les parties supposées animées d’un mouvement dont la vitesse est celle du centre d'inertie, l’énergie cinétique du mouvement relatif de ses diverses parties, et enfin l’é- nergie potentielle de toutes ses parties), le fait que nous ne pouvons attacher un sens précis au principe de la conservation, excepté quand le mouvement du système est lemouvement deGalilée, conduit à la fois à la première et à la troisième loi du mouvement, puisque le centre de gravité est animé d’un mouvement recti- ligne et uniforme ; et la seconde loi devient simplement une définition du mot « force », tel qu'il est employé dans l'énoncé de la première loi, et employé au lieu des mots « action » et « réaction » dans lexplication de la troisième. 20 SCIENCES PHYSIQUES, — MM. Knott et Shand com- muniquent quelques remarques complémentaires sur les variations de volume produites par l’aimantation. Cinq tubes de fer, de calibres variant entre 1672 à gun de diamètre, mais identiques d’ailleurs de forme et de substance, sont soumis à une série de forces magnétisantes. Dans les champs faibles, les tubes dont la paroi est la plus mince éprouvent la plus grande augmentation de volume intérieur; mais, dans les champs intenses, ceux qui ont le plus étroit calibre causent de beaucoup les plus grandes dilatations. Par exemple, dans un champ de 1400, les dilatations des tubes sont, en commencant par celui quia le plus large calibre etla paroi la plus mince: 1+4,— 3.— 20, —53 et — 129, chacun de ces nombres multiplié par 10 — 7, Avec les deux tubes de plus grand calibre, le changement de volume a atteint sa limite à ce champ élevé, la substance étant pratiquement saturée; mais, avec les tubes d’étroit calibre, il n’y a rien qui indique que la limite soit atteinte, les couches internes du fer étant encore évidemment loin de la limite pratique de la saturation, Quelques illustrations intéressantes des effets du magnétisme rémanent sont aussi décrites. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. Hughes lit un mémoire sur les mouvements de rotation de la colonne verté- brale lombaire, Entre autres résultats, il montre que, tandis que les vertèbres lombaires ne peuvent pas tourner autour d’un arc vertical, les vertèbres dorsales sont capables d’une rotation considérable, la rotation totale de cette partie de la colonne vertébrale étant 45° en plus, et les vertèbres cervicales sont encore plus libres, la rotation totale est au moins 90°. — M. Griffi- ths : Sur le sang des invertébrés. — M. Kidston étudie le genre Lepidophloios, Sternb. W, PEDDIE, Membre de la Société. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 17 juin. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. L. Geg'enbauer : Sur le plus grand commun diviseur, — M. Georg Pick : Sur les équations différentielles linéaires ad- jointes. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. H. Weidel et J. Hoff : 1° Elude des acides non azotés provenant des acides pyrodinecarboniques (2° communication). L'acide cin- chonique C*H$O6 qu'on obtient par l’action de l’amal- game de sodium sur lacide cinchoméronique CTH$Az' se comporte généralement comme un acide bibasique et donne, avec les carbonates, des sels de formule CTHOMe?06, que l’eau transforme en sels tertiaires CTHTMe?07, L’acide cinchonique fournit un éther avec deux groupes éthyle, que le pentachlorure de phos- phore transforme en un produit chloré décomposable qui donne avec l'alcool un éther chloré d'un acide tri- carbonique C#HTCI (CO?C2H5}ÿ, Réduit par l'acide iodhy- drique, l'acide cinchonique donne un acide tricarbo- NOTICE NECROLOGIQUE 563 nique CTH!006, qui se présente sous deux modifications isomériques géométriquement; toutes deux perdent de l'acide carbonique quand on les chauffe en donnant naissance à l'acide 4 méthylglutarique. La distillation sèche de l'acide cinchonique élimine de l’eau et de Vacide carbonique et laisse comme résidus l’anhydride de l'acide pyrocinchonique, lequel s'empare facilement de l'hydrogène pour engendrer l'acide diméthylsueci- nique, L'éthylate de sodium transforme l’acide cincho- nique en acide à oxyéthylsuccinique qui donne l'acide éthylsuceinique par réduction. Les faits précédents ca- ractérisent l'acide cinchonique comme un acide lacto- nique et permettent de le regarder comme l'acide à oxy-2-6-y butényltricarbonique lactone en à. La dé- composition de l'acide cinchonique par l’amalgame de sodium est analogue à celle de l'acide pyridinemono- carbonique, il se forme aussi le groupe CO en position #. — 2, Sur la connaissance des acides mesitylique el mésitonique. La formation de lacide mésitylique CSH!#Az10% réussit non seulementpar l'action du cya- nure de potassium sur le produit chloré condensé de l’acétone obtenu au moyen de l'acide chlorhydrique, mais encore par l’action du même sel sur la combi- naison chlorhydrique de l’oxyde de mésilyle. L’acide mésitylique est transformé en acide mésitonique CTH100% par l'acide chlorhydrique agissant à tempéra- ture élevée avec mise en liberté d’ammoniaque et d'oxyde de carbone, L'hydroxylamine donne avec l'acide mésitonique une combinaison isonitrosée carac- téristique. — M. F. Emich : Action de la chaleur sur l’oxyde d'azote (2° communication). D'accord avec le travail de M. Berthelot (Compt. rend. 77, 1448), l’auteur montre que la décomposition de l’oxyde d'azote com- mence au rouge naissant; MM. Changer et V. Meyer prétendent donc à tort qu'il ne se détruit pas aux tem- pératures comprises entre 900° et 12009, — M. Carl Puchl : Sur l’élasticité des gaz. — M. Herm Fritz : Relalions entre les propriétés physiques et les pro- priétés chimiques des éléments chimiques et de leurs combinaisons. — M. A. Handl : Sur un hydroden- simètre très simple, — M. Ad. Lieben : Préparation de l'aldéhyde crotonique. — MM.R. Pribram etC.Glücks- mann : Aclion des thiocarbonates sur les phénols. MM. W. R. Orndoff et S. B. Newburg : Préparation de l’aldol et de l’aldéhyde crotonique, —- MM. J. Luksch et J. Wolf : Recherches physiques effectuées dans Pest de la mer Méditerranée à bord du Pola. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. F. Steindachner : Sur quelques espèces nouvelles et rares de poissons des collections du musée impérial d'histoire naturelle, — M.C. Diener, chargé par l’Académie d’un voyage d’ex- ploration dans l'Himalaya central, adresse une lettre datée d’Almora 23 mai, relatant les préparatifs et les premières élapes de l’expédilion. — M. Friedrich Brauer fait observer que l’espèce Pachystilum, décrite par Macquart, lui parait identique avec le Chaetomera étudié par lui et M. Bergenstamm. Séance du 23 juin. SCIENCES MATHÉMATIQUES. -— M. Gustav Jäger : Sur la théorie des fluides. — Le secrétaire ouvre un pli ca- cheté de M. Max Müller de Vienne avec les titres sui- vants : 4° Projet de construction d’un ballon dirigeable l’Aécroslat-Beaupré avec une dépense de force réduite à 90 0/0, — 2 Descriplion d'une machine volante sans ballon gazeux où la force à dépenser est réduite à 80 0/0. — Observatoire de Vienne : « Observations ma- gnétliques et météorologiques faites pendant le mois de mai 1892, » Émil Weyr, Membre de l'Académie. NOTICE NÉCROLOGIQUE LE CONTRE-AMIRAL E. MOUCHEZ L'amiral Mouchez est mort, enlevé à la science et à l'affection de ses amis par un coup imprévu du sort, qui a devancé de beaucoup le terme naturel de cette vie si bien remplie, Il nous reste le triste devoir d’en informer nos lecteurs, et de leur rappeler, en quelques mots, les qualités et Les mérites de celui dont nous déplorons la perte. Successeur d’Arago, de Le Verrier, de Delaunay, l’a- miral Mouchez a dirigé, d’une main ferme, l'Observa- toire de Paris pendant quatorze ans ; il y laisse le sou- venir d’un administrateur énergique et intelligent, plein d'initialive, ouvert aux idées nouvelles, infatigable pour assurer le succès de toute entreprise utile, Son passage à l'Observatoire marquera dans l’histoire de l’Astronomie par des œuvres considérables, dont il à été l’inspirateur ou le ferme et fidèle soutien. 11 à im- primé une forte et durable impulsion, non seulement au service d'observations, mais à tous les genres de travaux qui sont du domaine de ce grand établissement scientifique. > Ses rapports-annuels, présentés avec régularité au Conseil, portent un éclatant témoignage de celte acti- vité persévérante et féconde. C’est ainsi qu'il a pu faire paraitre, dans un espace de temps relativement court, plus de vingt volumes des Annales, remplis de maté- riaux d'observation et de Mémoires qui touchent à toutes les branches de l’Astronomie pratique et théo- rique. C’est encore ainsi qu'il a pu commencer l’im- pression de ce grand Catalogue de l'Observatoire de Pa- ris, comprenant les positions des étoiles observées aux instruments méridiens depuis 1837, et destiné à rendre accessibles aux astronomes des matériaux vraiment précieux, accumulés dans le cours d’un demi-siècle, mais enfouis dans des registres d'observations que peu de personnes avaient le courage de compulser, On sait que Le Verrier, dès qu'il fut à la tête de l'Ob- servatoire de Paris, forma le dessein d'entreprendre la réobservation des étoiles de Lalande, tâche gigantesque qui devait exiger, au bas mot, 300.000 observations méridiennes, et pour laquelle on était à peine suffi- samment oulillé. Les 20.000 ou 30.000 observations re- cueillies pendant les seize années de la direction d'A- rago, et qui n'étaient même pas réduites, ne formaient qu'un faible appoint, et, en 1878, M. Mouchez trouva le Catalogue arrivé seulement au tiers de son exécution. Il sut vaincre tous les obstacles; le nombre des obser- valions annuelles utiles, qui n’avait été jusque-là que de quelques milliers, dépassa bientôt 25.000, et grâce à l’activité du Bureau des calculs, si habilement dirigé par M. Gaillot, l'impression du Catalogue put commen- cer en 1887. Déjà ont paru quatre gros volumes in-#, deux du Catalogue proprement dit, et deux consacrés aux observations qui en forment la base. Mais le grand œuvre de l’Amiral, son plus beau titre de gloire aux yeux de la postérité, c’est sa splendide conception de la carte photographique du Ciel. Les pro- grès réalisés, en matière de photographie céleste, par MM. Paul et Prosper Henry, lui avaient fait entrevoir la possibilité d’une pareille entreprise; il s’en fit le pro- moteur et l'apôtre ardent, Il s'agissait de faire, en quelques années, avec le concours d'une dizaine d’ob- servatoires, la carte complète de la voûte céleste, com- prenant jusqu'aux étoiles les plus faibles, vaguement soupconnées par lœil, aidé du secours d’un puissant instrument. « Cette carte, disait-il, qui sera formée des 2.010 feuilles nécessaires pour représenter, à une échelle suffisamment grande, les 42.000° carrés que comprend la surface de la sphère, léguera aux siècles futurs l’état du ciel à la fin du x1Ix° siècle avec une au- thenticité et une exactitude absolues, La comparaison 564 7 NOUVELLES de cette carte avec celles qu'on pourra refaire à des époques de plus en plus éloignées permettra aux astro- nomes de l'avenir de constater de bien nombreux changements en position et en grandeur, à peine soup- connés ou mesurés aujourd'hui pour un petit nombre d'étoiles seulement, et d’où ressortiront certainement bien des faits inattendus et d’importantes décou- vertes, » Et immédiatement l’Amiral commenca sa pro- pagande, Le premier Congrès astrophotographique fut convoqué à Paris au mois d'avril 1887; il en a présidé plusieurs autres, auxquels prenaient part les délégués des observatoires du monde entier, sachant leur com- muniquer sa foi dans le succès. Aujourd’hui, tout cela est en bonne voie d'exécution, et l’on peut être certain que cet inventaire général du Ciel, rêvé par l’amiral Mouchez, sera bientôt une réalité, Il a su assurer à la France l'honneur de cette initiative ; et ne revenait-elle pas de droit à la nation qui a découvert la photogra- phie? L'Observatoire de Paris doit beaucoup à M. Mouchez, sous le rapport matériel. Il en à agrandi les terrains, pour installer de nouveaux instruments. Il y a créé ce curieux Musée où se trouvent réunis nombre d’instru- ments anciens et toutes sortes de tableaux et de docu- ments d'un haut intérêt. N'oublions pas de mentionner aussi l'Ecole d’Astronomie qu'il avait fondée, ainsi que l'Observatoire d’études de Montsouris, dont il eut l'i- dée, et qui fut organisé en 1875, sous le patronage du Bureau des longitudes, avec les instruments et les ca- banes légères rapportés par la mission qu'il avait con- duite à l'ile Saint-Paul. C’est une école d’Astronomie où les officiers de terre et de mer, les explorateurs, les futurs professeurs, viennent s'exercer au maniement des instruments et à la pratique des observations cou- rantes, principalement de celles qui ont pour objet la détermination des positions géographiques. M. Mouchez portait un vif intérêt à cet établissement, placé sous sa direction personnelle; on sait qu'il avait une rare compétence pour ce genre d'observations, qu'il avait si longtemps pratiqué dans le cours de ses voyages. C’est ce qui nous amène à dire ici un mot de sa carrière de marin, Né à Madrid, de parents français, le 24 août 1821, Amédée-Ernest-Barthélemy Mouchez entra à l'Ecole de marine à seize ans, Nommé aspirant, il eut bientôt l’oc- casion, au cours de diverses campagnes dans les mers de Chine et de l’Inde, aux Antilles et dans les mers du Nord, de faire remarquer son aptitude spéciale pour les observations et les calculs nautiques. Il ne devait pas tarder à commencer ces fameux levés de côte qui lui ont assuré une grande place dans l'hydrographie francaise. Parti pour la Plata, en 1856, il passa quatre ou cinq ans dans ces parages, occupé à lever d’abord le cours du Paraguay, puis à reconnaitre toute la côte du Brésil, plus de mille lieues, travail qui ne lui prit que deux ans et demi. On le voit, plus tard, consacrer cinq années à refaire la côte d'Algérie, Ces divers travaux avaient marqué la place du capi- taine Mouchez au Bureau des longitudes, dont il faisait déjà partie lorsqu'il se chargea, en 1874, de conduire à l'ile Saint-Paul la mission qui devait y observer le pas- sage de Vénus. Les conditions climatologiques de cet ilot, perdu dans. le vaste bassin des mers australes, ne permettaient guère d'espérer un succès; il s’y joignait des difficultés exceptionnelles de débarquement et des chances d’avaries, Mais la position isolée de Saint- Paul donnait une telle importance aux observations qu'on pouvait y faire, que l’entreprise valait la peine d’être tentée, et, chose merveilleuse, elle réussit contre tout espoir! M. Mouchez a raconté les émouvantes péri- péties de cette mission dans une lecture faite devant les cinq Académies, en octobre 1875; les résultats en ont été publiés dans un fort volume in-4°. Elle lui va- lut les étoiles de contre-amiral, et un fauteuil à l’Aca- démie des Sciences, où il remplaca, en 18%, M. Ma- thieu, Après la mort de Le Verrier, il accepta, en 1878, la direction de notre Observatoire national, aux desti- nées duquel il à présidé, si dignement, pendant qua- torze ans. La mort l’a surpris, le 25 juin dernier, en pleine force et en pleine activité, dans sa propriété de Wissous, près Antony, où il élait allé, le jour même, chercher un peu de repos. Comme l’a si bien dit M. le vice-amiral de Jonquières, dans un bref discours prononcé aux funérailles, Pami- ral Mouchez était un intelligent, un vaillant et un sa- vant. Il lègue à son fils un nom respecté et glorieux. Félix TissERAND, de l'Académie des Sciences, Directeur de l Observatoire de Paris. NOUVELLIES LA SYNTHÈSE DE L’ACIDE AZOTHYDRIQUE Les lecteurs de la Revue connaissent déjà ce gaz sin- gulier, qui répond à la formule Az’H, et que l’auteur de sa découverte, M. Curtius, à nommé acide azothy- drique à cause de la facilité avec laquelle il échange son hydrogène contre une proportion équivalente de métal. Ce corps n'avait pu être préparé jusqu'à pré- sent qu'avec l’hydrazine ou les nitranilines ?, c'est-à- dire avec des composés organiques renfermant le groupe Az H?, que l’on modifie ensuite par l'acide ni- treux; M. Wislicenus vient de découvrir# un mode de production de l'acide azothydrique qui est de l'ordre des réactions les plus simples de la chimie minérale : sa méthode consiste à décomposer l’amidure de sodium par le protoxyde d'azote, dans des limites de tempéra- ture convenables, La réaction s’accomplit conformé- ment à l'équation suivante : Az Az 2Na AzH2 + O0 | — Na AZ [| Na OH + Az A7 Az 1 Revue générale des Sciences, t. I, p. 656. 2 Nœlting, 4bid., t. IT, p. 262. LES 3 Ber. d. d. chemischen Gesellschaft, t. XXV, p. 208#. et donne de suite l’azothydrate de sodium mélangé de soude, que l’on distille enfin avec de l'acide sulfurique dilué, en s’entourant, bien entendu, de toutes les pré- cautions qu'exige le maniement de corps aussi violem- ment explosifs. En pratique, on chauffe du sodium, divisé en frag- ments de 3 à 5 décigrammes, dans une atmosphère de gaz ammoniac sec, jusqu'à ce que le métal soit entiè- rement transformé en amidure, puis on abaisse la tempéralure jusque vers 250°, au maximum, et on di- rige dans le tube un courant de protoxyde d'azote; la réaction s’accomplit lentement, avec mise en liberté d’ammoniaque et un léger boursouflement de la masse. Lorsqu'elle est terminée, on trouve dans la nacelle une proportion d’azoture AZNa correspondant à environ 50 ?/, du rendement théorique. L'amidure de zinc se comporte, en présence du pro- toxyde d'azote, comme l’amidure de sodium, mais son emploi parait moins avantageux. L'auteur s'occupe de rendre sa méthode pratique: espérons qu'il arrivera bientôt à nous donner le moyen de préparer l'acide azothydrique aussi facilement que les autres combinaisons de lazote. L, MAQuENNe. Paris.— Imprimerie Le Lirecteur- Gérant : Louis OLIVIER . Levé, rue Cassette, 17. 3° ANNÉE N° 16 30 AOUT 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER ONGULÉS ABERRANTS DES TERRAINS TERTIAIRES ET PLÉISTOCÈNES DE L'AMÉRIQUE DU SUD Depuis un certain nombre d'années paléontolo- gistes et zoologistes ont eu très fréquemment la surprise de rencontrer des formes étranges d’On- gulés dans les roches tertiaires des Etats-Unis. La découverte de ces animaux a grandement modifié nos idées sur les relations entre les divers groupes des Mammifères à sabot ou à ongle; ils sont cause qu'on a adopté en général le système de l'unité ordinale de tous ces lypes si variés. Plusieurs d’entre eux, à la vérité, ainsi que nous pouvons en juger d’après leurs squelettes, offrent l'indice évi- dent d’une transition entre les modifications péris sodactyles et proboscidiennes de la structure ongu- lée; mais aucun d’eux n'est de nature à briser en quoi que ce soit la ligne de démarcalion si nette- ment marquée que l’on observe entre les modifica- tions périssodactyles (doigts impairs) et artio- dactyles (doigts pairs) constatées dans tous les dépôts tertiaires du Vieux Monde. D'ailleurs, après un petit « Lassement », tous ces Ongulés de l’Amé- rique du Nord, à l'exception d’un genre très curieux de Rongeurs, le lotherium, arrivent à trouver assez bien leurs places dans l’ordre des Ongulés; quelques-uns pourtant des premiers et plus petits types présentent des indices d'une affi- nité étroite avec l’ensemble du groupe d’où l’on peut présumer qu'Ongulés el Carnivores sont issus. En ce moment cette série de découvertes de nouvelles formes semble passer, comme une vague, de la moitié septentrionale à la partie méridionale du Nouveau Monde, de sorte que, tandis que les REVUE GÉNÉRALE DES SOIENCES, 1892, paléontologistes des États-Unis s'adonnent surtout à la tâche importante de reviser et compléter le travail préliminaire des vingt dernières années, leurs confrères de la République Argentine inon- dent presque la littérature scientifique des des- criptions — parfois un peu hätives — d’une foule de formes nouvelles ou imparfaitement connues jusqu’à ce jour de Mammifères éteints. Ce travail descriptif a surtout été entrepris par MM. Ame- ghino, Burmeister et Moreno. Malheureusement, la plus grande partie de ce travail existe sous la forme de notices préliminaires, dépourvues d’il- lustrations; sur divers points les trois auteurs que nous venons de nommer ne sont nullement d’ac- cord, et il est absolument certain qu’on a publié souvent bien des noms inutiles. Il y a, il est vrai, un grand travail illustré de figures, publié par le doc- teur Ameghino ; mais,sinous sommes bien informé, il n’en existe qu'un seul exemplaire (au Muséum d'Histoire naturelle) en Angleterre, et les paléon- tologistes n’ont point eu l’occasion de lui consa- crer, dans le silence du cabinet, l'attention que son importance réclame. Toutefois, malgré ces défauts, les renseigne- ments qui nous sont présentés — quelque impar- faits qu'ils soient, — nous font connaître divers groupes d’Ongulés éteints, totalement différents des Ongulés trouvés sur le reste du globe; ils offrent un intérêt particulier parce qu'ils tendent, jusqu’à un certain point, à effacer la distinction entre Pé- rissodactyles et Artiodactyles. 16 568 vent presque entièrement perdus les caractères des Rongeurs, si marqués chez le Z'ypotherium ; il y à rapprochement avec le type normal Ongulé ; on ne sait s’il y avait des clavicules. Encore plus généralisé est un groupe allié représenté par l’Znteratherium, dans lequel la den- tilion est toujours complète ; les prémolaires anté- rieures ont des racines distinctes, et les incisives des racines coniques. Ce genre et son allié, le Pro- typotherium, semblent ainsi se rapporter tous deux au Typotherium et aux Toxodontes, le nom spéci- fique de rongeur appliqué à l’une des espèces de PFrotypotherium indiquant vraisemblablement l'existence d'incisives supérieures du genre ron- geur. L'existence de ces formes intermédiaires fait qu'il est difficile d'arriver à une conclusion satis- faisante sur la question de savoir si le 7ypotherium a réellement une affinité naturelle avec les Ron- geurs (parmi lesquels il a été placé par feu M. Alston) ; car, s’il avait quelques rapports avec ce groupe, on serait porté à faire descendre tous les Rongeurs d’une forme plus ou moins étroitement alliée à l’Znteratherium, hypothèse bien difficile à défendre. Il est assez évident que ces Typothéroïdes étaient cependant d'une manière quelconque reliés aux Toxodontes; et il y ades indications presque aussi claires d’une parenté plus ou moins éloignée entre les Toxodontes et les Macrauchenia. L'explication la plus probable de cette dernière parenté, c’est que les deux groupes ont tiré leur origine des On- gulés du {ype général, alliés à ceux trouvés dans C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE l'Éocène des États-Unis et connus sous le nom de Condylarthra. Ceux-ci semblent avoir été le groupe ancestral commun aux deux modifications Artio- dactyles et Périssodactyles de l’ordre. De ce point de vue, on s'explique facilement la persistance des caractères communs à ces deux groupes chez les Toxodontes et les Wacrauchenia. Ceux-ci auraient acquis des caractères périssodactyles assez bien marqués pour qu’on les admetle dans le groupe, tandis que les Toxodontes ne sauraient être placés dans l’une ou l’autre des deux divisions des Ongu- lés typiques. Ayant ainsi à une époque reculée (et peut-être dans quelque région de l'Amérique centrale) divergé du groupe Ongulé primitif et gé- néralisé, les ancêtres Toxodontes et Macrauchenia seraient devenus les formes dominantes dans l’A- mérique méridionale, où elles semblent s'être dé- veloppées avec des modifications si nombreuses et si imprévues de structure que la tâche de déchif- frer leurs relations mutuelles et de déterminer leur position systématique exacte est devenue extrè- mement diflicile, sinon impossible. Nous croyons toutefois que l'existence de ces types embarrassants el égarés ne saurait déranger le moins du monde la classification généralement admise des Ongulés actuels, bien qu'ilpuisse exister un doute légitime sur la question de savoir si l’on doit classer les Hacrauchenia parmi les Périssodac- tyles, au lieu de les maintenir chez les Toxodontes comme un groupe spécial, doué des caractères généraux de cet ordre, mais offrant en outre des particularités très singulières de structure .! R.Lydekker. L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE PREMIÈRE PARTIE : LES OBSERVATIONS RÉCENTES ET LES THÉORIES ACTUELLES Les phénomènes électriques de l'atmosphère forment bien certainement l’une des parties les plus curieuses de ce que l'on a pris l'habitude d'appeler la Physique du globe ; et, même en lais- | sant de côtéles manifestations à la fois magnifiques et terribles que produisent les nuages orageux, on trouve, dans l'étude des faits électriques qui se produisent d’une façon continue dans l’atmos- phère par le temps le plus beau, un vaste sujet d'étude; bien curieuse, en effet, est cette force provenant de l'électricité atmosphérique qui, constante, d’après M. Thomson, depuis la surface de la Terre jusqu'aux limites supérieures de l’At- mosphère et peut-être même au delà, s’anéantit brusquement dès qu’on pénètre,si peu que ce soit, à l'intérieur de notre globe. Depuis un siècle elle a fait l'objet d’un grand nombre de travaux. Mais son étude n'est devenue réellement pra- tique que par l'emploi de la méthode d'enregistre- ment, qu'on applique depuis assez longtemps, avec tant de succès, à l'examen de tous les phénomènes météorologiques, et qu'a réalisée M. Mascart avec l'appareil à enregistrement photographique qui porte son nom et est aujourd’hui presque univer- sellement employé. Cet appareil est d’ailleurs trop connu pour que nous en donnions la description. C’est en nous servant des observations faites avec 1 Cet article est extrait du journal anglais Nature no 1174, vol. 45, 1892, C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE 569 un semblable instrument de 1885 à 1891 à l'Obser- vatoire de Lyon, que nous nous proposons de dis- euter les théories récemment émises sur l’origine et les lois de l'électricité atmosphérique. Nous nous bornerons d’ailleurs à l'étude des phénomènes électriques qui se produisent par beau temps, alors qu'aucun apport de nuages ne vient les troubler. I. — OBSERVATIONS RÉCENTES 1. Phénomènes électriques par beau temps. — Défi- nissons d’abord ce que nous entendons par jour beau : c’est un jour non brumeux et tel que, sur nos {reize observations quotidiennes de nébulosité, une seule donne une valeur au plus égale à wn dixième. Ceci posé, l'appareil enregistreur donne, pour chacun de ces jours, une courbe continue, dessi- nant les variations successives de la différence du potentiel entre le sol et le point où se fait l'écoulement d’eau du collecteur, autrement dit dans le champ électrique au point d'observation. Nous relevons ces courbes d'heure en heure, de façon à pouvoir obtenir soit le champ électrique moyen de la journée, soit, par la combinaison des potentiels correspondant à la même heure dans les différents jours, une sorte de jour moyen électrique représentant l’ensemble des jours considérés. Deux faits importants se dégagent immédia- tement de cette étude. 4° Le champ électrique moyen d’un jour beau varie d’une saison à l'autre : en hiver il est presque double (134 volts) de ce qu'il esten été (73 ‘), et dans les autres saisons, printemps et automne, il a des valeurs (96 * et 82 *) intermédiaires. 2° La variation du champ électrique pendant le jour moyen, c'est-à-dire la variation diurne du champ électrique, n’est pas la même dans les dif- férentes saisons : elle forme toujours une courbe doublement sinusoïdale ; mais l'amplitude de l’os- cillation nocturne va en diminuant constamment de l’hiver, où elle est maximum (61 ‘), à l'été où elle est réduite à plus de moitié (27 *). Si l’on cherche à se rendre compte des causes de ces différences,et si, dans ce but, on classe les jours beaux ci-dessus suivant la direction générale du vent pendant la journée, on trouve qu'en hiver, et sur 34 jours, on en a 17 de vent du nord et 47 de vent du sud, tandis qu’en été, sur 46 jours, il y en a 35 de vent du nord et seulement 11 de vent du sud. Il semble donc que ce soit la prédominance des jours de vent du nord qui donne à la variation diurne estivale son caractère particulier, et l'on se trouve ainsi conduit à partager les jours beaux en deux groupes, l’un de vent du nord, l’autre de vent dusud ; en outre, pour éliminer l'influence possible de la vitesse du vent, il convient de traiter à part les jours où le vent ne dépasse pas 230 à la seconde : ce sont les jours calmes et sereins ; on ob- tient ainsi les deux variations diurnes représen- tées ci-contre (fig. 1), qui se rapportent à la saison OM PIN ER GP SR NOPI ENE 120 18 20 22 2% Nord (&ke) (et EN 4 mn 1 l 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 Fig. 1. d'été. Je ferai remarquer d’ailleurs que l’adjonc- tion à ces jours calmes de ceux où le vent a une vitesse plus ou moins grande ne change pas sensi- blement les résultats (fig. 2). Enfin, dans chaque saison, les caractères diffé- rentiels des deux régimes de vent se retrouvent, avec ce point commun que les heures des diffé- rents maxima et minima y paraissent à peu près les mêmes. Il y a donc lieu, semble-t-il, de com- biner toutes les belles journées de l’année où le vent a été nord et celles où il a soufflé du sud, afin d'en déduire pour ainsi dire le mode type de va- riation diurne qui convient à chacun de ces deux cas. L'ensemble des jours dont on dispose est alors de 136, 49 correspondant à un vent général de sud et 85 à un vent général de nord; les courbes que l'on obtient ainsi (fig. 3) ne uiffèrent pas sensible- ment de celles qui précèdent. 568 C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE vent presque entièrement perdus les caractères des Rongeurs, si marqués chez le Z'ypotherium ; il y a rapprochement avec le type normal Ongule; on ne sait s’il y avait des clavicules. Encore plus généralisé est un groupe allié représenté par l’Znteratherium, dans lequel la den- tition est toujours complète ; les prémolaires anté- rieures ont des racines distinctes, et les incisives des racines coniques. Ce genre et son allié, le Pro- typotherium, semblent ainsi se rapporter tous deux au Typotherium et aux Toxodontes, le nom spéci- fique de rongeur appliqué à l’une des espèces de Frotypotherium indiquant vraisemblablement l'existence d'incisives supérieures du genre ron- geur. L'existence de ces formes intermédiaires fait qu'il est difficile d'arriver à une conclusion satis- faisante sur la question de savoir si le 7’ypotherium a réellement une affinité naturelle avec les Ron- geurs (parmi lesquels il a été placé par feu M. Alston) ; car, s’il avait quelques rapports avec ce groupe, on serait porté à faire descendre tous les Rongeurs d’une forme plus ou moins étroilement alliée à l’Znteratherium, hypothèse bien difficile à défendre. Il est assez évident que ces Typothéroïdes étaient cependant d’une manière quelconque reliés aux Toxodontes; et il y ades indications presque aussi claires d’une parenté plus ou moins éloignée entre les Toxodontes et les Macrauchenia. L'explication la plus probable de cette dernière parenté, c’est que les deux groupes ont tiré leur origine des On- gulés du type général, alliés à ceux trouvés dans l'Éocène des États-Unis et connus sous le nom de Condylarthra. Ceux-ci semblent avoir été le groupe ancestral commun aux deux modifications Artio- dactyles et Périssodactyles de l’ordre. De ce point de vue, on s'explique facilement la persistance des caractères communs à ces deux groupes chez les Toxodontes el les Macrauchenia. Ceux-ci auraient acquis des caractères périssodactyles assez bien marqués pour qu’on les admette dans le groupe, tandis que les Toxodontes ne sauraient être placés dans l’une ou l’autre des deux divisions des Ongu- lés typiques. Ayant ainsi à une époque reculée (et peut-être dans quelque région de l'Amérique centrale) divergé du groupe Ongulé primitif et gé- néralisé, les ancêtres Toxodontes et Macrauchenia seraient devenus les formes dominantes dans l’A- mérique méridionale, où elles semblent s'être dé- veloppées avec des modificalions si nombreuses et si imprévues de structure que la tâche de déchif- frer leurs relations mutuelles et de déterminer leur position systématique exacte est devenue extrè- mement diflicile, sinon impossible. Nous croyons toutefois que l’existence de ces types embarrassant(s et égarés ne saurait déranger le moins du monde la classification généralement admise des Ongulés actuels, bien qu'ilpuisse exister un doute légitime sur la question de savoir si l’on doit classer les Hacrauchenia parmi les Périssodac- tyles, au lieu de les maintenir chez les Toxodontes comme un groupe spécial, doué des caractères généraux de cet ordre, mais offrant en outre des parlicularités très singulières de structure .? R. Lydekker. L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE PREMIÈRE PARTIE : LES OBSERVATIONS RÉCENTES ET LES THÉORIES ACTUELLES Les phénomènes électriques de l'atmosphère forment bien certainement l’une des parties les plus curieuses de ce que l'on a pris l'habitude d'appeler la Physique du globe ; et, même en lais- sant de côtéles manifestations à la fois magnifiques et terribles que produisent les nuages orageux, on trouve, dans l'étude des faits électriques qui se produisent d’une façon continue dans l’atmos- phère par le temps le plus beau, un vaste sujet d'étude; bien curieuse, en effet, est cette force provenant de l'électricité atmosphérique qui, constante, d’après M. Thomson, depuis la surface de la Terre jusqu'aux limites supérieures de l’At- mosphère et peut-être même au delà, s’anéantit brusquement dès qu'on pénètre,si peu que ce soit, à l'intérieur de notre globe. Depuis un siècle elle a fait l'objet d’un grand nombre de travaux. Mais son étude n'est devenue réellement pra- tique que par l'emploi de la méthode d’enregistre- ment, qu'on applique depuis assez longtemps, avec tant de succès, à l'examen de tous les phénomènes météorologiques, et qu'a réalisée M. Mascart avec l'appareil à enregistrement photographique qui porte son nom et est aujourd'hui presque univer- sellement employé. Cet appareil est d’ailleurs trop connu pour que nous en donnions la description. C’est en nous servant des observations faites avec 1 Cet article est extrait du journal anglais Nature no 1174, vol. 45, 1892, rpm EE Sn C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE 369 un semblable instrument de 1885 à 1891 à l’'Obser- vatoire de Lyon, que nous nous proposons de dis- cuter les théories récemment émises sur l’origine et les lois de l'électricité atmosphérique. Nous nous bornerons d’ailleurs à l’étude des phénomènes électriques qui se produisent par beau temps, alors qu'aucun apport de nuages ne vient les troubler. I. — OBSERVATIONS RÉCENTES 4. Phénomènes électriques par beau temps. — Défi- nissons d'abord ce que nous entendons par jour beau: c’est un jour non brumeux et tel que, sur nos {reize observations quotidiennes de nébulosité, une seule donne une valeur au plus égale à wn dixième. Ceci posé, l'appareil enregistreur donne, pour chacun de ces jours, une courbe continue, dessi- nant les variations successives de la différence du potentiel entre le sol et le point où se fait l'écoulement d’eau du collecteur, autrement dit dans le champ électrique au point d'observation. Nous relevons ces courbes d'heure en heure, de façon à pouvoir obtenir soit le champ électrique moyen de la journée, soit, par la combinaison des potentiels correspondant à la même heure dans les différents jours, une sorte de your moyen électrique représentant l’ensemble des jours considérés. Deux faits importants se dégagent immédia- tement de cette étude. 4° Le champ électrique moyen d’un jour beau varie d'une saison à l'autre : en hiver il est presque double (134 volts) de ce qu'il esten été (75 ‘), et dans les autres saisons, printemps et automne, il a des valeurs (96 * et 82 ‘) intermédiaires. 29 La variation du champ électrique pendant le jour moyen, c’est-à-dire la variation diurne du champ électrique, n’est pas la même dans les dif- férentes saisons : elle forme toujours une courbe doublement sinusoïdale ; mais l'amplitude de l’os- cillation nocturne va en diminuant constamment de l’hiver, où elle est maximum (61 ‘), à l'été où elle est réduite à plus de moitié (27 ‘). Si l’on cherche à se rendre compte des causes de ces différences,et si, dans ce but, on classe les jours beaux ci-dessus suivant la direction générale du vent pendant la journée, on trouve qu’en hiver, et sur 34 jours, on en a 17 de vent du nord et 47 de vent du sud, tandis qu’en été, sur 46 jours, il y en a 35 de vent du nord et seulement 41 de vent du sud. Il semble donc que ce soit la prédominance des jours de vent du nord qui donne à la variation diurne estivale son caractère particulier, et l’on se trouve ainsi conduit à partager lesjours beaux en deux groupes, l’un de vent du nord, l’autre de vent n dusud ; en outre, pour éliminer l'influence possible de la vitesse du vent, il convient de traiter à part les jours où le vent ne dépasse pas 2 "50 à la seconde : ce sont les jowrs calmes et sereins ; on ob- tient ainsi les deux variations diurnes représen- tées ci-contre (fig. 1), qui se rapportent à la saison 0 2 % 6 8 10 12 14 16 18 20 22 2% olrd|(Elté — 2 # 6 8 10 12 l4 16 18 20 22 24 Fig. 1. d'été. Je ferai remarquer d’ailleurs que l’adjonc- tion à ces jours calmes de ceux où le vent a une vitesse plus ou moins grande ne change pas sensi- blement les résultats (fig. 2). Enfin, dans chaque saison, les caractères diffé- rentiels des deux régimes de vent se retrouvent, avec ce point commun que les heures des diffé- rents maxima et minima y paraissent à peu près les mêmes. Il y a donc lieu, semble-t-il, de com- biner toutes les belles journées de l’année où le vent a été nord et celles où il a soufflé du sud, afin d'en déduire pour ainsi dire le mode type de va- riation diurne qui convient à chacun de ces deux cas. L'ensemble des jours dont on dispose est alors de 136, 49 correspondant à un vent général de sud et 85 à un vent général de nord; les courbes que l'on obtient ainsi (fig. 3) ne üiffèrent pas sensible- ment de celles qui précèdent. 570 La variation diurne que nous conslatons ici par beau temps dans le potentiel électrique de l’at- mosphère est donc la combinaison de deux va- rialions diurnes d’allure différente et correspon- dant à deux modes différents de distribution des pres- sions relativement au lieu d'observation. C’est là, D2ER 10 12 14 6 8 120 == 16 18 20 22 24 Tan no L 18 20 22 24 Eig. 2. à notre avis, un fait important qui établit une liaison directe entre les variations de l'électricité atmosphérique et celles des éléments météorolo- giques ordinaires. 2. Electricité négative par beau temps. — Cette liai- son se montre encore bien nettement dans le fait remarquable que voici : parfois, par vent de sud (nous n'avons pasrencontré pareil phénomène par vent de nord, quoique ce vent soit ici le plus fréquent), le minimum de l'après-midi se creuse | (fig. 4) et passe au négatif, sans que l'allure géné- rale de la courbe enregistrée diffère alors sensible- ment de son allure ordinaire, et que les oscilla- tions y soient à ce moment plus rapides; le mode de variation diurne y est aussi le même que pour les autres jours, quoique plus accentué; d’un autre côté, la vitesse du vent n’y devient pas nécessai- rement très considérable. Ainsi, dans la série d’ob- Lie dés. d RH A? C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE servations que nous discutons, nous comptons trois jours de cet ordre : le 24 juin et le 45 sep- == IE — 1 lime JOURS BEAUX Î \ l Fig. 3 tembre 1885 et Le 10 juillet 1889; or, les maxima de vilesse du vent, qui sont concomitants aux minima électriques, sont de 64 le 2% juin 1885, q' 2 & 6 8 1012 # 16 18 20 2224 2 & 6 120Ÿ- no + L 100 | 90 “A 70 JE 60/_ Fig. 4. de 11%8 le 10 juillet 1889, et de 15% O le 15 sep- tembre 1885. Mais ces jours-là, l’état météorologique, sensi- fi han y C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE blement le même dans les trois cas, est tout spé- cial et caractérisé par les faits suivants : 1° Temps beau et chaud non seulement le jour, mais la veille et le lendemain, et cela sur le centre el le sud-est de la France : - 2% Distribution anormale de la température sui- vant la verticale. Ainsi, on a, pour les jours cités, les minima suivants au Pare et au Mont-Verdun, ainsi qu'à Clermont et au sommet du Puy-de- Dôme : Mont- Puy-de- Parc Verdun Clermont Dôme (75m) (625m) (388m) (1467) 24 juin 1885....... 905 1208 6°2 S°5 15 septembre 1885. G°4 1229 GE 1405 AOwjuillet 3... 1607 1807 1500 1503 3° Une très grande sécheresse relative de l’at- mosphère. Ainsi, depuis l’année 1883, époque où a été ins- tallé notre hygromètre enregistreur, on ne trouve pendant lesmois dejuin, juillet et août que 11 jours dont l'humidité moyenne soit inférieure, et encore de fort peu, à lhumidité moyenne 45,7 du 24 juin 1885, et 15 pour lesquels elle estinférieure à la valeur 47,3, qui correspond au 10 juillet 1889. De même, pendant le mois de septembre, on ne trouve, pour les huil années, que 7 jours dont l’hu- midité moyenne est inférieure à 56,9 valeur qui correspond au 15 septembre 1885. Fait peut-être encore plus significatif, le minimum absolu 26,0 d'humidité relative du 24 juin 1885, dont l'heure tombe au milieu de ces chutes négatives, est le mi- nimum absolu de l'humidité relative pour la pé- riode de juin, juillet et août pendant les huit an- nées ; et, si l’on trouve 76 jours (sur 720) où le minimum soit inférieur à celui du 10 juillet 1889, on ne trouve dans les huit mois de septembre que 8 jours où le minimum hygrométrique soit infé- rieur, et encore de fort peu, à celui du 10 sep- tembre 1885, Il y aévidemment là un ensemble de caractères locaux tout à fait remarquable, auquel correspond d’ailleurs une distribution générale des pressions également intéressante, à savoir centre de hautes pressions sur le centre de l'Europe et basses pressions au large de nos côtes occidentales. Les relations entre l'électricité atmosphérique et les phénomènes météorologiques ordinaires s'ac- cusent donc assez nettement. On peut pousser plus loin la démonstration de leur existence. 3. Variations diverses de certains éléments météorolo- giques. — Les changements que nous venons de constater dans le mode des variations diurnes du potentiel électrique, avec la distribution des pres- sions par rapport au lieu d'observation, ne sont 571 point en effet limités à cet élément; on les trouve aussi dans la pression barométrique, le vent et le poids de la vapeur d’eau contenue dans un vo- lume déterminé d'air. $ Les figures 5, 6 et 7 représentent les variations diurnes de la vapeur d’eau, de la direction et de l'intensité du vent résultant, pendant la saison gr. où 2 6 & 10 12 14 16 18 20 22 2k. 9%10 + —— à Vapeur d'eau ord(Eté Ens tous mbie de les |jours 80 [ — 70! | | 50 8,30 10,40 10,00 [x 14 16 18 20 22 2# [= 6 8 10 712 d'été, pourchacun des deux groupesdes jours beaux déjà considérés. La variation diurne y est bien différente pour chaque groupe; les courbes relatives à la vapeur d’eau offrent, en outre, ceci de remarquable que les variations diurnes qu’elles indiquent sont presque parallèles à celles qui leur correspondent pour le potentiel électrique. Il est donc bien démontré que la variation diurne des éléments, — champ électrique, poids de la va- peur d’eau, pression atmosphérique et vent, — est affectée par le mode de distribution des pressions au-dessus de la région d'observation; et l’on est porté par cela mème à admettre que ces diffé- rences dans les modes de variation diurne de ces divers éléments sont dues à la même cause. Or, M. A.Angot a démontré‘ queles mouvements 1 Étude sur la marche diurne du baromètre, par M. A. Ax- cor. Annales du bureau central météorologique de France, 1887. Mémoires. 512000 ascendants et descendants quotidiens de l’atmos- phère commandent une partie importante de la variation diurne du baromètre; j'ai, de mon côté, montré ? que le poids de la vapeur d’eau contenue dans un volume déterminé d'air est gouvernée tout au moins en grande parlie par ces mêmes courants ; leur influence sur la variation diurne du vent est évidente : il semble donc probable que la variation diurne du champ électrique par beau temps dépend, elle aussi, tout au moins en partie, des mêmes mouvements verticaux. Les théories récemment émises pour expliquer les phénomènes électriques de l'atmosphère sont- HN EEE elles d'accord avec les faits que nous venons de signaler et conduisent-elles aux mêmes conclu- sions ? IT. — ThÉORIES ÉLECTRIQUES 1. Théories de Peltier. — D'après Peltier, qui a le premier donné une théorie ayant consistance des phénomènes électriques de l'atmosphère ?, « la ! Relations des phénomènes météorologiques déduites de leurs varialions diurnes el annuelles par M. Ch. Anpré. Lyon, 1892, (Georg éditeur.) ? Recherches sur les causes de l'électricité des nuages, par Perrier. Comptes rendus des séances de l'Académie des Sciences, vol. XII. 4841. C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE «terre agit comme un corps puissamment négatif, « l'espace céleste comme un corps puissamment « positif, et tous les corps interposés entre eux « s'électrisent par influence et non par le contact « de l'air... L'espace céleste étant positif, l'eau à « la surface du globe est conséquemment dans un Fig. 7. «état négatif, et l'évaporation se fait sous cette (Cinfluence…. » On en déduitévidemment,par des condensations et vaporisations successives, la possibilité de nuages positifs et négatifs. Mais les expériences à l’aide desquelles Peltier croyaitavoirdémontré que la vapeur d’eau est élec- trisée négativement ont été reprises depuis par un grand nombre de savants: L. J. Blacke!, F. Exner?, E. Lecher#, L. Palmiéri*, et en dernière analyse on est arrivé ainsi à prouver que, sous l'influence de fortes charges, on a un phénomène très dif- férent de celui de l’évaporation naturelle et seule- ment des traces d'électricité. Depuis Peltier, W. Thomson * et Pellatf ont l Widemann’s Annalen, vol. XIX, p. 524. ? Comptes rendus de l’Académie de Vienne, 1886, p. 248. 3 Comptes rendus de l'Académie de Vienne, 1888, p. 103. 4 Lois et origines de l'électricité atmosphérique. 5 Traité d'électricité slatique, par E. Mascarr. vol. II, p. 515 et suiv. 6 Sur l'électricité des nuages. Journal de physique, 1885. C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE 573 montré que l’état électrique de l'atmosphère par beau temps, de même que l'électrisation des nuages, peut s'expliquer par le seul fait d'un excès de charge négative à la surface de la terre, sans qu'il soit besoin d’une couche d'électricité positive aux limites de notre atmosphère. Mais, si cette théorie ainsi simplifiée rend compte de l’ensemble des phénomènes, elle laisse de côté des points très importants, comme la variation diurne et annuelle de l'électricité atmosphérique par beau temps. Pour les expliquer, M.le P'F. Ex- ner combine les idées de Thompson avec une por- tion de celles de Peltier, qu'il cherche d’ailleurs à préciser. 2, Théorie de M. F. Exner. — La doctrine de M. F. Exner peut être résumée comme il suit : la charge électrique totale, que la Terre possède comme corps céleste, est à chaque instant partagée en deux: une partie reste sur la surface de la terre, une autre partie est emportée par la vapeur d'eau due à l’'évaporalion, de sorte que la densité électrique en un point, ou, ce qui revient au même, le champ électrique qui lui est proportionnel, dépend à chaque instant de la quantité plus ou moins grande de vapeur d'eau contenue dans l’atmos- phère !. ; av J ; : En désignant par le champ électrique au point déterminé, on arrive aisément à la formule : av A ne LED où À et & sont des constantes et où p désigne le poids de vapeur d’eau contenu actuellement dans l'air au lieu d'observation *. Le champ électrique ! Uber die Ursache und die Geselze der almosphärischen Elektricilät vom Wassergehalle der Luft von prof. Franz Exxer. Comptes rendus de l'Académie de Vienne, 1886 ot 1858. 2 Le calcul de cette expression est facile : si la terre n’émettait pas de vapeur d’eau, sa surface aurait en un lieu déterminé une charge électrique maximum ;: soit y la densité électrique correspondante et A la valeur simultanée du champ électrique de sorte que, & étant une constante, AIG U: Mais, comme l'atmosphère recoit toujours de la terre une certaine quantité de vapeur d’eau, une partie de cette charge u va avec elle dans latmosphère ; soit y’ la densité corres- pondante, la densité restante au lieu d’observation sera dv u-u), et si nous désignons par FR la nouvelle valeur du ln champ électrique nous avons av ; ; —— =a(u— vu); an d’an autre côté la densité y! est proportionnelle à la fois au poids p de la vapeur d'eau qui lui sert de support et à la : densité électrique restante de la surface de la terre c'est-à- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, se trouve ainsi exprimé en fonction d’une seule variable: le poids de la vapeur d’eau contenue dans l'unité de volume d’air au point d'observation. L'électricité atmosphérique par beau temps se trouve donc être ainsi un élément météorologique ordinaire, et les lois de ses variations absolument identiques à celles qui font varier le poids de la vapeur d’eau. Pour vérifier cette loi, M. Exner à fait par beau temps un très grand nombre d'observations (133) dans des stations différentes: Dobling près Vienne, Saint-Gilgen dans la haute Autriche et sur le bord de la mer à Venise, avec un électromètre portatif, qui n'est autre chose qu'une modification, d'ail- leurs fort heureuse, de l’ancien électroscope à feuilles d’or de Bennet ; rangeant les résultats de ces observations par ordre de poids de vapeur, il en forme dix groupes, et, à l’aide des valeurs moyennes qu'ilen déduit, obtient le tableau suivant 2 S © CO On Or # CO 19 = ren 12 &z où V, est le champ électrique observé,et V, le champ électrique calculé comme il va être dit. Les nom- bres de ce tableau fournissent, entre les inconnues Aet # et des quantités connues, une série d’équa- Lions d’où l’on peut tirer leurs valeurs. Au lieu de les combiner ensemble, Exner en choisit deux, cor- respondant au groupe (1), parce que c’est celui de poids maximum de vapeur d’eau, et au groupe (7) parce que, parmi ceux de fort poids de vapeur, c'est celui qui provient du plus grand nombre d'observations; il en déduit : A = 1300v RME Se servant alors des poids de vapeur inscrits dans la colonne p, il calcule avec ces nombres les valeurs théoriques V, du champ électrique. ——————— : av : k ; » dire à la valeur D du champ électrique à cette surface ; on an a donc IV DE DER ÿ P dn d’où av A an 1 + kp ou k = ab. 574 A part le premier nombre, celui qui correspond au groupe (2), l'écart entre l'observation et le cal- cul est très faible et cet accord semble confirmer la loi énoncée ; c’est d’ailleurs la conclusion qu'en a lirée M. le Professeur Exner. Mais une discussion attentive du tableau précé- dent conduit à un résultat contraire ; par exemple, d’autres groupements que ceux adoptés par M. Exner donnent pour les constantes A et % des valeurs bien différentes : A DHAR 1 k (2) et (10) = 2,4 A—"920 k—4;02; (5) et (10) Réduisons donc à la forme ordinaire les relations qui fournissent les groupes d'observations précé- dents; nous aurons, en posant a = 100, les dix équations suivantes : A — 7,18.0 A — 8,90.4 — 106, A — 11,29. A —,9,22"at—"97, A — 8,61. A — S,14.a — 84, A — 9,13. A — 8,43.a — 14, A — 7,89. A— 8,50; — 168 Les coeflicients des inconnues y sont très sensi- blement constants, tandis que le terme tout connu y prend au contraire des valeurs constamment décroissantes et variant à fort peu près dans le rapport de 5 à 1. Un pareil ensemble d'équations est absolument indéterminé, et son emploi ne peut être d'aucun appui pour la vérification cher- chée. Il convient donc de soumettre cette loi à l'épreuve d’autres observations : c’est ce que nous avons fait à l’aide des résultats que nous fournis- sent les courbes de notre enregistreur. Pour les jours beaux considérés plus haut et pour chaque heure du jour, nous avons pris Lous les potentiels correspondant à des poids de vapeur compris entre 3 el 4 grammes d’une part, et ceux compris entre 9 et 11 grammes d'autre part; nous avons oblenu ainsi deux séries de valeurs moyennes des poids de vapeur et du potentiel, telles que les poids de vapeur ont entre eux une différence considérable et résultent d’ailleurs d’un très grand nombre d'observations : 494 pour la série de 3 gr. 60% pour la série de 9 gr. Si l'hypothèse de M. Exner est exacte, l'ensemble des valeurs correspondant à une heure déterminée dans chaque série fournit une équation de la forme : k(p'V'—pV)+V'—V=0 où V et V' désignent les champs électriques; la combinaison des 24 équations correspondantes aux 24 heures du jour nous fera connaïilre la valeur la plus probable de l’inconnue #; on trouve ainsi: C. ANDRE. —- L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE k = 0,093. Introduite dans les équations de la forme A = A+ Xp déduites de chaque groupe de valeurs horaires moyennes, elle nous conduira à deux séries de valeurs de A qui doivent être égales entre elles. Le tableau suivant renferme les 48 valeurs ainsi obtenues; les colonnes À se rapportent au groupe de 9 grammes et les colonnes A’ au groupe de 3 grammes. 0 1 2 3 4 5 L'examen de ce tableau montre que la quan- tité À ainsi déterminée n’est pas constante; elle varie avec l'heure de la journée comme le poten- tiel lui-même, et ses variations sont même beau- coup plus considérables. La relation admise par M. le Professeur Exner entre le poids de vapeur d’eau contenu dans un volume déterminé d’air à la surface du sol et le champ électrique en ce point n’est donc point exacte. Mais s’ensuit-il que l'idée première, le principe même de sa théorie soit faux? On ne peut l’affirmer ; il faut remarquer, en effet, que la vapeur d’eau contenue dans l'atmosphère provient surtout de deux sources différentes, l’évaporation et la transpiration des plantes, qui la lui fournissent en quantité à peu près égale !. Or, M. Exner n'a évidemment en vue que la première de ces deux sources, tandis que, dans la vérification expérimen- tale de la loi, c'est la somme des effets dus à ces deux causes que l’on mesure. Il faudrait donc, en toute rigueur, pouvoir faire, dans la vérification, le partage des deux effets et ne mesurer que la vapeur d’eau provenant de l'évaporalion. Dans l'état actuel, un tel partage nous paraît impossible; et, sous cette réserve, nous croyons pouvoir dire qu’on ne peut accepter l'explication que donne M. Exner des variations diurne et annuelle du champ électrique en un point déterminé. 3. Théorie de Sohncke. — Un peu avant M. Exner, M. le Professeur Sohncke avait proposé une expli- cation toute différente des phénomènes électri- | Relations de phénomènes méléorologiques, par M. Ch. ANDRE, p. 16 et suiv. C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE GYb) ques !. Pour lui, leur cause n’est point préexis- tante, antérieure et pour ainsi dire inhérente à la matière même du globe terrestre, comme pour M. Exner, mais elle prend au contraire naissance à chaque inslant dans les hautes régions de l’at- mosphère, comme conséquence d'un phéno- mène naturel, accessible à l'expérimentalion, — le frottement des cristaux de glaces qui se trouvent continuellement dans l'air, flottant à des hauteurs plus ou moins grandes,et que choquent les masses de gouttelettes d’eau qu'emportent avec eux les grands courants atmosphériques : les cristaux de glace se chargeraient positivement, et les goulle- lettes d’eau prendraient l'électricité négative. Comme en général la température décroit à me- sure qu'on s'élève, on doit admettre qu’en moyenne le courant de cristaux de glace est supérieur à l’autre ; tout naturellement, les gouttelettes d’eau appartenant à un courant moins élevé tombent (en général sous forme de pluie) plus tôl sur la surface de la terre que les cristaux de glace; la surface de la terre s'électrise ainsi négativement, et cet état d’électrisation doit y durer, parce que les phénomènes que nous venons de décrire se répètent continuellement; au contraire, dans les couches élevées de l'atmosphère restent suspen- dus les cristaux de glace avec leur électricité po- sitive. C’est, comme on le voit, el au point de vue des masses électriques agissantes, une sorte de retour aux idées de Peltier. Ceci admis, M. Sohncke explique comme il suit les diverses variations qu'éprouve, pendant le cours de l’année ou de la journée, le potentiel électrique mesuré par beau temps en un point voisin de la surface du sol. En hiver, la couche atmosphérique isotherme de température zéro, qui forme d’après lui la limite inférieure des masses posilives, se rapproche de plus en plus de la surface de la terre, jusqu'à ce que finalement elle pénètre à son intérieur; pen- dant ce mouvement de descente, le potentiel, ainsi mesuré, doit croilre; sa valeur doit donc être maximum en hiver, Quant à la variation diurne, M. Sohncke affirme d’abord qu’elle est identique à celle de la pression barométrique : or, cette « dernière variation pa- «rait liée à ces faits, que, pendant l'échauffement « diurne, il se produit un mouvement général « ascendant de l'air, accompagné d'un écoulement « Jatéral dans les hautes régions, tandis que le « refroidissement nocturne amène l'effet inverse. Il « doit s’ensuivre un mouvement oscillatoire de la 1 Die Ursprung der Elektricität-Gewilter und der gewühn- liche Elektricilät der Almosphäre,von D' LEoNHARD SOHNCKE, Jena, « surface isotherme zéro, comme l’ont d’ailleurs « montré les observations faites en ballon. Dans «les premières heures de l'après-midi, lorsque & l’'échauffement du sol est maximum, le courant « ascendant est aussi maximum; la surface iso- «therme zéro, avec ses cristaux de glace électrisés « positivement, est le plus éloignée de la surface «terrestre; aussi l’électromètlre accuse-t-il le mi- «nimum de l'électricité positive. Au malin, au « contraire, la surface isotherme zéro est la plus « basse, et par conséquent l'électricité positive « doit être maximum. «On explique donc ainsi au moins les deux « extrêmes diurnes bien marqués de l'électricité atmosphérique. » Il convient d’ajouter que, dans une série d’expé- riences instituées dans ce but, M. Sohncke a, en effet, démontré que le frottement d’une masse d'air, mêlée de globules de vapeur d’eau et lancée par sa pression contre des cristaux de glace secs, charge ceux-ci d'électricité positive et les globules d’eau d'électricité négative; au contraire, la même masse d'air se charge positivement si elle est projetée sur une lame conductrice, cuivre ou laiton, ce der- nier étant alors électrisé négativement. Admettons qu'en effet ces variations de distance puissent produire au point d'observation les diffé- rences énoncées de potentiel, point assez obscur que M. Sohncke aurait dû expliquer plus claire- ment, et comparons cette théorie aux faits obser- VÉS* Les valeurs moyennes correspondant aux jours beaux, données plus haut pour chacune des saisons de l'année, confirment en partie les vues de M. Sohncke : le potentiel moyen de l'hiver est en effet de beaucoup supérieur à celui des au- tres saisons ; mais, au contraire, celui de la saison d'automne est plus petit que le potentiel moyen de l'été, ce qui parait contraire aux idées émises par ce physicien. Passons maintenant à la varialion diurne, et occupons-nous, par exemple, de la saison d'été, Pendant celle saison, entre 6 heures et 7 heures du soir, le mouvement général ascensionnel de l'atmosphère cesse et se trouve bientôt remplacé par un courant descendant !; d’après la théorie de M. Sohncke, ce doit être le moment du minimum pour le potentiel électrique; c'est bien en effet ce que nous montrent les courbes qui résument les observations; soit par vent de nord, soit par vent de sud, ces courbes nous indiquent un minimum du potentiel vers 5 heures du soir. À parlir de cette heure, le courant descendant l Relation des phénomènes méléorologiques, par M. Ch. ANDRE, p. 19 etsuiv. 516 s'accentue jusque vers # heures du malin, pour diminuer ensuite et être remplacé vers 7 heures du matin par le courant ascendant dont nous venons de parler; le potentiel devrait donc croître cons- tamment jusque vers 7 heures du malin, où aurait lieu son maximum diurne. Or, en réalité, après le minimum de à heures du soir, le potentiel aug- mente rapidement, atteint vers 9 heures un maxi- mum qui,par vent de nord,est le maximum absolu des 24 heures ; il décroit ensuite très rapidement, reste faible pendant toute la nuit el passe vers 4 heures par un second minimum qui, par vent de nord, est le minimum absolu des 2% heures ; après quoi, il croit rapidement et atteint entre 7 heures et 8 heures, un second maximum qui, par vent de sud, est le maximum absolu du jour tout entier. Ainsi, la théorie de M. Sohncke n'explique ni la faiblesse des valeurs du potentiel pendant la plus grande partie de la nuit, intervalle où elles devraient être relativement considérables, ni l'existence du second maximum de 9 heures du soir. En d’autres termes, si la cause de variation qu'indique M. Sohncke était seule ou toujours de beaucoup la plus importante, la courbe représen- tative de la marche diurne du potentiel électrique devrait être très voisine d’une courbe simplement sinusoïdale; tandis qu'en réalité, et surtout par vent de nord, cette courbe accuse très nettement une variation doublement périodique pendant la durée du jour tout entier. L'insuffisance de la théorie de M. Sohncke est donc bien différente suivant les deux modes lypes de situation atmosphérique que nous avons choisis. Par vent de nord, c’est le caractère doublement oscillatoire de la variation diurne qui la rend in- complète. Par vent de sud, c’est le défaut presque absolu de variation du potentiel pendant la nuit qui la contredit; il en résulterait, en effet, que, d'après M. Sohncke, les portions de l'atmosphère élevées pendant la seconde moitié du jour par l’échauffement progressif du sol, resteraient sensi- blement à la même hauteur à partir de 6 heures du soir, pour redescendre presque subitement et tout à coup vers 10 heures du malin, c’est-à-dire après que les observations barométriques nous indiquent que probablement leur mouvement as- censionnel a déjà commencé. On doit conelure de cette discussion que la théo- rie de M. Sohncke ne peut suflire à expliquer C. ANDRE. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE l’ensemble des phénomènes qu’elle prétend élu- cider. 4. Théorie de M. Palmieri. — D'après M. L. Palmieri ! la valeur du potentiel en un point « dépend exclusivement de l'humidité relative « dans la zone atmosphérique surplombant le lieu « d'observation. » et, d'autre part, «lorsque « l'humidité relative augmente, le potentiel de « l'air s'élève ». Or, la première de ces assertions est bien dif- ficile à soumettre au contrôle de l’observalion; et, quant à la seconde, il suffit d’un simple coup d'œil sur nos relevés hygrométriques et électriques, cor- respondant aux jours beaux et non brumeux que nous avons employés, pour se convaincre qu'elle est inexacle, et qu'à des états hygrométriques con- sidérables correspondent des potentiels minima et inversement. Le tableau suivant qui contient les élats hygrométriques et les potentiels correspon- dants, en renferme quelques exemples pris abso- lument au hasard : 1er MINIMUM À LT MAXIMUM D 2° MINIMUM Ÿ 2° MAXIMUM Etat … Etat État e hygr. Potentiel hygr. hyor. Potentiel Potentiel [Potentiel 110 110 80 130 155 120 1885 Aout10 1888 Août A0 Août 12 1885 Juill.21 — Juill.27 — Juill.28 La relation entre l’état hygrométrique et le potentiel électrique, si elle existe, n’est donc pas une relation directe et simple, comme le prétend M. Palmieri. Aucune des théories émises Jusqu'ici n’est donc suffisante ; mais, pour pouvoir indiquer toutes les conditions auxquelles une théorie complèle doit salisfaire, nous devrons étudier quelques faits nouveaux. Ch. André, Directeur de l'Observatoire de Lyon. La fin prochainement.) ! Lois et origines de l'électricité atmosphérique, par M. L. PaLMIERI. — À consulter aussi deux notes insérées dans les Comptes rendus de l’Académie de Naples pour l'année 1891. | L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE Comme dans mes Revues précédentes, je m'abs- liendrai de {oute indication bibliographique. Les lecteurs, curieux de recourir aux sources, peuvent consulter la lable des noms d'auteurs parue à la fin de l’année 1891 du Centralblatt für Physiologie. Cette table les renverra à la page, où ils trouveront le litre complet et parfois une analyse de la publi- cation qui les intéresse. Il est bien entendu que cette Revue annuelle ne peut avoir la prétention d'être complète. Je n'ai lu qu'une partie des lravaux de physiologie parus en 1891; parmi ces lravaux, je n'ai pu me dé- fendre d’une certaine partialité pour les sujets de recherches qui me sont particulièrement familiers. I. — SANG, LyYMPuE ET RESPIRATION. 1.— Le sang des Mammifères contient, à côté des globules rouges (hématies) et blancs (leucocytes), des éléments figurés plus petits, les Plaquettes de Bizzozero où Æématoblastes de Hayem. La plupart desexpérimentateurs (voir le travailrécent de Muir) leur font jouer un rôle important dans la coagula- tion du sang. Lilienfeld croit avoir démontré que les plaquettes ne sont pas des éléments autonomes du sang. Ce seraient des produits de destruction des globules blanes : ils auraient pour origine une fragmentation du noyau des leucocytes, fragmen- tation qui se produirait sur une large échelle au moment où le sang se trouve extrait du corps, en contact avec des corpuseules étrangers. Les plaquettes sont, pour Lilienfeld, constituées par de la nucléine et de l’albumine (nucléo-albu- mine), tout comme les noyaux cellulaires dont elles dérivent : c’est de ces plaquettes qu'émane,au mo- ment de la coagulation du sang, l'influence qui provoque la transformation du fibrinogène en fibrine. Le ferment de lu fibrine serait une nucléo-al- bumine. On connait différents moyens de suspendre la coagulabilité du sang chez l'animal vivant. Men- tionnons l'injection intra-vasculaire d'extrait de sangsue (Hayeraft), d'extrait de museles d’écrevisse (Heidenhain), de peptonecommerciale(Hofmeister), de ferments digestifs. Dickinson a montré que la substance active de l'extrait de sangsue est soluble dans l’eau, insoluble dans l'alcool; elle n'est pas altérée par la température de l’ébullition, et se laisse précipiter lorsqu'on salure sa solution par le sulfate d’ammoniaque. Elle partage ces pro- priétés avec la propeptone, dont elle n’est peut-être -qu'une variété. Elle parait n’âvoir aûcune action sur le fibrinogène, mais détruit rapidement le fer- ment de la fibrine, ce qui expliquerait son action anlicoagulante. Denys, Polt, Grosjean, Shore, Lahousse, Blach- stein, Grandis, ont étudié récemment l’action des injections intravasculaires de peptone. Et d'a- bord que faut-il entendre par peplone dans ces expériences? Hofmeisler, puis Fano, avaient fait leurs essais sur la coagulation du sang au moyen de peplone commerciale. Or, la peptone commer- ciale est, comme on sait, un mélange de plusieurs substances : peplone, propeplone, ete. Grosjean a opéré avec des produits purs, préparés exprès. Il constate que la propeptone ou albumose est ici l'agent actif de la peptone commerciale. Une injection de 15 centigrammes de propeptone pure, par kilo- gramme d'animal, suffit pour suspendre chez le chien la coagulation du sang, et pour amener une chute considérable de la pression sanguine. Ces recherches ont révélé un faitextrèmement curieux : l'injection d'une petite quantité de propeptone, — > centigrammes par exemple par kilogramme d’a- nimal, — produit une chute de pression marquée, mais peu durable. Si l’on fait ensuite une seconde, une {roisième injection, la seconde injection n’a presque plus d'effet, et la troisième passe totale- ment inaperçue. La première injection procure donc à l’animal une véritable immunité vis-à-vis de nouvelles injections. L'animal est vacciné contre l’action de la propeptone. Ces expériences sont d'autant plus intéressantes que la peptone et la propeptone sont des produits normaux de la di- gestion gastrique et intestinale de l’albumine. Lahousse avait constaté que le sang des ani- maux auxquels on à injecté de la peptone était extrèmement pauvre en acide carbonique. Blach- slein et Grandis ont découvert que l'injection de peptone avait pour effet d'élever notablement la tension de C0? du sang, d’où élimination plus facile de ce gaz par la surface pulmonaire, ce qui expli- que sa faible proportion dans le sang. La peptone et la propeptone, qui proviennent de la digestion normale ou celles que l’on introduit artificiellement par injection intraveineuse, dispa- raissent très rapidement du sang. On ne les retrouve plus cinq minutes après l'injection. Elles ont sans doule servi à reconstituer l’albumine né- cessaire à l’organisme. Où se fait cette transformation de la peptone en albumine? Est-ce dans les cellules du foie ou par l’action des leucocytes et des cellules lymphoïdes, comme le veut Hofmeister? Shore a fait à cetégard 578 L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE un grand nombre d'expériences sous la direction d’'Heidenhain. Il admet, avec Neumeister, que les cellules qui constituent le revêtement épithélial de l'intestin sontles agents actifs de la transformation de la peptone ou de la propeptone en albuminoïdes vrais. Shore a fait également des recherches sur la coagulabilité comparée du sang et de la lymphe à la suite d'injection intravasculaire de peptone. Dans plusieurs cas, il constata que la lymphe du canal thoracique avait recouvré la faculté de se coaguler, alors que le sang était toujours incoa- gulable. C'est une preuve nouvelle ajoutée à tant d’autres que la lymphe est autre chose qu'un simple liquide de transsudation. J'ai brièvement signalé ici-même les premières recherches de Hei- denhain sur Ja formation de la lymphe. Ce liquide n’est pas, comme on l’admeltait généralement, avee l'école de Ludwig, un produit de filtration du plasma sanguin, formé sous l'influence exclusive de l’action mécanique de la pression sanguine. Pour Heidenhain, la lymphe est un véritable li- quide de sécrétion, fabriqué par l’activité des cel- lules vivantes qui constituent la paroi des capil- laires. La quantité de !ymphe produite n’est nullement en rapport avec la valeur de la pression sanguine. Certaines substances, que l’auteur appelle lymphagoques, excitent puissamment la sécrétion de la lymphe, à condition que les cellules des parois des capillaires soient intactes : extrait de muscles d'écrevisses, extrait de sangsue, extrait de blanc d'œuf, ete. D’autres substances, parmi lesquelles il faut citer le sucre, l’urée, les sels neutres, augmen- tent la quantité de lymphe, par un mécanisme différent. Ces substances enlèvent une quantité notable d’eau aux éléments vivants des tissus. Une partie de cette eau est résorbée par le sang, une autre partie contribue à augmenter la quantité de lymphe. 2. — Je puis passer sous silence les travaux de Hédon, Arthus, Lépine, Barraletd’autres surl’extir- pation du pancréas et la glycolyse intravasculaire, puisque la Revue leur a consacré un article fort complet !. 3.— On sait qu'il est impossible de séparer com- plètement par décantation les globules et autres élé- ments figurés du sang d'avec le plasma ou le sérum et qu’on ne peut songer à recourir à la filtration ; d’où la difficulté de déterminer directement la pro- portion de solide et deliquide du sang. MM. E. etL. Bleibtreu ont imaginé plusieurs méthodes permet- tant de déterminer indirectement cette proportion Ils ont constaté que, chez le cheval, la proportion (en volume) de globules peut varier de 26 à 40 % et chez le chien, de 25,6 à 44,2 %. 4 Voyez la Revue du 30 juillet 1891, t. II, p. 469 et suiv. Plusieurs élèves d'Alex. Schmidt, de Dorpat, ont étudié, sous sa direction, l’action que les cellules de la rate et du foie exercent sur l'hémoglobine. Les effets bactéricides du sérum ont fait le sujet de nombreuses recherches qui sortent du cadre de la physiologie normale. F. Viault a fait sur les hauts plateaux du Pérou et de la Bolivie une série de recherches sur l’in- fluence que le séjour à de grandes altitudes exerce sur la capacité respiratoire du sang, et sur sa teneur en hémoglobine et en globules rouges. L’habitant des plaines brusquement transporté sur les hauts plateaux (4.000 mètres environ au- dessus du niveau de la mer) met un certain temps à s’acclimater et à se débarrasser de l’infirmité du mal des montagnes. Le phénomène le plus caracté- ristique de cet acclimatement consiste dans une multiplication des globules rouges du sang, dont le nombre peut monter de 5 à8 millions, — et au delà,—par millimètre cube. En même temps, le vo- lume des globules diminue, d’où augmentation de la surface d'absorption d'oxygène. Le sang des Mammifères acclimatés est aussi riche en oxygène à 4.000 mètres de hauteur, que le sang des indi- vidus qui vivent dans la plaine. La diminution de tension del’oxygène respiré se trouve icicompensée par l'augmentation de la surface d'absorption des globules ; la quantité absolue d’hémoglobine du sang n’est en effet que faiblement augmentée. Müntz a pleinement confirmé les résultats des recherches de Viault. P. Regnard a cherché à réaliser artificiellement dans le laboratoire les effets physiologiques du séjour sur les hauts plateaux. Il introduisit un cochon d'Inde dans une cloche où la pression at- mosphérique fut maintenue à la moitié de sa valeur pendant un mois. L'examen du sang montra que ce liquide avait subi les changements carac- téristiques de l’acclimatement sur les hauts pla- {eaux : augmentation de surface des globules par suite de leur mulliplicalion el de leur diminu- tion de volume. è Les résultats thérapeutiques merveilleux que l’on obtient en Suisse, dans certaines formes d’ané- mie, s'expliquent peut-être par l’action excitante que le séjour dans une atmosphère raréfiée exerce sur le renouvellement du sang. 4.— On sait que les vapeurs irritantes de chloro- forme, d’ammoniaque,debromure d’éthyle agissant sur les voies aériennes supérieures (cavité nasale, larynx), provoquent des mouvements réflexes d'expiration auxquels viennent, d’après François Franck et Lazarus, s'ajouter une contraction géné- rale des petites bronches. Zagari constate que les mêmes vapeurs, ainsi que CO?, à la concen- tration d’au moins 50 %, appliqués à la surface L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE D19 interne de la muqueuse des grosses bronches, pro- voquent,par voie réflexe,desmouvements d'inspira- tion. L'expérience donneles mêmes résullats après section des laryngés supérieurs et des récurrents à leur origine ; mais la section des pneumogastriques supprime le réflexe d'inspiration. Il s’agit d’une excitation de filets sensibles, émanant du tronc du preumogastrique, au-dessous du point d’origine du récurrent. Signalons les recherches de Howell, Huber, Exner, Munk sur l'innervation du larynx; celles de Hanriot, Ch. Richet, Chapman, Brubaker, Gréhant, Marcet, Loewy, v. Hôsslin, Oddi, Vicarelli, ete., sur la valeur des échanges respiratoires. IT. — CIRCULATION, Cœur. —1.—Ilexiste, comme on sait, deux mé- thodes principales pour obtenir un tracé de la pul- sation cardiaque, méthodes imaginées toutes deux par Chauveau etMarey. L'une de ces méthodes con- siste à introduire, par les vaisseaux du cou de l’ani- mal vivant, une sonde terminée par une ampoule exploratrice. L’ampoule est poussée jusque dans l'oreillette, ou dans le ventricule droit, par la veine jugulaire, ou jusque dans le ventricule gauche par une carotide ; elle est reliée extérieurement à un appareil inscripteur (le tambour à levier) qui trace la courbe des variations de la pression intra-ventri- culaire (ou intra-auriculaire)-sur le papier enfumé de l'appareilenregistreur. L'autre méthode consiste à enregistrer le chocextérieur du cœur, c'est-à-dire l’'ébranlement que la pulsation du cœur imprime à la paroi thoracique. On applique à l'extérieur de la poitrine, au niveau de la pointe du cœur, un explorateur, une capsule à air, ‘fermée par une membrane en caoutchouc, portant une saillie en forme de bouton. L’explorateur est relié à un tambour à levier. Les deux méthodes ont fourni entre les mains de Chauveau et Marey et de plusieurs de leurs successeurs des résultats identiques. Les tracés du choc du cœur, pris dans de bonnes conditions, sont comparables à ceux de la pression intra-ventricu- laire. Si l'on combine l'inscription deces graphiques avec l’auscultation du cœur, et si l’on opère sur de grands animaux à pulsations lentes, tels que de vieux chevaux, les résultats obtenus sont extrème- ment démonstralifs, et ne laissent aucune place au doute. Malheureusement la plupart des expérimenta- teurs ne se sont pas placés dans les mêmes condi- tions favorables que les illustres initiateurs des procédés cardiographiques. Aussi la signification des tracés cardiographiques et sphygmographiques, qui aurait dû être fixée dé- | finitivement à la suite des recherches cardiogra- phiques de Chauveau et Marey, a, dans ces dernières années, été l'objet de vives controverses parmi les physiologistes, Un point paraissait cependant ac- quis : on était d'accord sur la forme générale de ces tracés. Ainsi, la plupart des physiologistes ad- mettaient, avec Chauveau et Marey, que le tracé cardiographique présente à chaque pulsation une forme trapézoïde (Fig 1.) On y distingue une ascension brusque (be, fig. 1), un plateau systolique ondulé c de, puis une ligne de descente ef avec une inflexion finale f. Les divergences commencaient dès qu'ils’agissait d'interpréter le graphique en question : j'avais pu s +2 nS Movctues Fig. 1. — Tracé de choc du cœur (cardiogramme extérieur) ab, systole de l'orcillette; be, début de la systole ventricu- laire. La fin de la systole ventriculaire, la clôture des sig- moïdes aortiques, et le second bruit du cœur correspon- dent : pour Martius, au creux qui sépare c de d; pour Landois, à la saillie d; pour Chauveau et Marey, à la ligne de descente ef; pour Edgren, au bas de cette ligne f; —cde, plateau systolique de Chauveau et Marey. représenter d’une façon schématique ces diver- gences sur le tracé cardiographique de la fig. 4 (qui a été reproduit dans plusieurs journaux scien- tifiques anglais etallemands, et qui montre à quelle portion du tracé cardiographique correspond pour les différents expérimentaleurs le moment de la fermeture des sigmoïdes aortiques et le second bruit du cœur,et par conséquent la fin de la contrac- tion ou systole des ventricules). Chacune des marques faites sur ce tracé corres- pond à une conception différente du mécanisme du cœur et de la durée de la systole ventriculaire. Si Chauveau et Marey, suivis par les physiologistes français, par Hürthle, Edgren, ete.; si Landois et les cliniciens allemands, si Martius admettent tous que la ligne d’ascension 0e correspond au début de la systole ou contraction ventriculaire,et au premier bruit ducœur,etmarque le durcissement du muscle cardiaque, ils ne sont plus d'accord, dès qu'il s'agit de déterminer la fin de cette systole, c'est-à-dire le moment de fermeture des valvules sigmoïdes. Martius fixe le second bruit du cœur, dù, comme on sait, à la clôture des sigmoïdes, au niveau du premier creux (entre « et d ) du plateau. Landois, Maurer, von Ziemssen et les cliniciens allemands 580 L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE en général, entendent le second bruit soit en 4, soil entre det s, landis que Chauveau et Marey, et l’au- teur de ces lignes affirment que le second bruit du cœur coïncide avec la ligne de descente ef, Edgren le place tout au bas de cette ligne, en f. La marque de Martius et celle d'Edgren diffèrent de près d’un quart de seconde. Cela dépasse cer- tainement les limites des erreurs personnelles per- mises dans ce genre d'observations. Voilà bien des divergences que je ne m'explique que par un phénomène d’autosuggestion. Chaque observateur croit entendre le second bruit au moment où il doit se produire d’après la théorie de la pulsation cardiaque qu'il a adoptée. Il semblait difficile d'embrouiller davantage une question, assez simple en somme, el capitale au point de vue de la physiologie de la pulsation du cœur et de celle des artères, qui n’en est qu'une émanation. C'est cependant ce qui est arrivé. La forme même du tracé cardiographique à été remise en question. Pour J. B. Haycraft, les auteurs se sont trompés jusqu'à présent sur la forme et l'interprétation du tracé du choc du cœur. Ce tracé s’élèverait pendant la diastole, pour descendre pendant la systole, con- formément à la diminution systolique du diamètre antéro-postérieur du cœur. Tout au plus y a-t-il au début de la systole une légère élévation du tracé. correspondant à l’appui que le cœur prend à ce moment contre la paroi thoracique. Haycraft emploie un cardiographe dont la co- quille exploratrice ne porte pas de bouton. C’est la présence de ce bouton, qui, d’après lui, a jusqu’à présent faussé les indications cardiographiques. Ce bouton déprime, pendant la diastole, à travers la paroi thoracique, la substance du cœur; pendant la systole, le bouton est soulevé violemment, pro- duisant une ascension marquée de la courbe, la- quelle est alors due aux conditions artificielles de l'expérience. Dans le livre qu’il vient de publier sur le pouls et qui est dédié à ses illustres maîtres v. Brücke et Ludwig, un physiologiste très connu, von Frey, prend comme base de Lout son exposé de la théorie de la pulsation cardiaque et de la pulsation arté- rielle, cette idée, formulée autrefois par Marey, que, la contraction ventriculaire étant une secousse mus- culaire simple, le tracé de pression intra-ventricu- laire doit être identique au tracé de la secousse musculaire, et ne saurait par conséquent présenter de plateau systolique c de entre la ligne d’ascension be et la ligne de descente ef. Pour von Frey, les sondes cardiographiques, in- troduites dans le ventricule, inscrivent un tracé beaucoup .plus. simple, dans lequel on ne voit ! qu'une colline à Sommet unique, là ligne.de des- cente faisant immédiatement suite à la ligne d’as- cension. Ainsi se trouvent supprimés et le plateau systolique, dont les ondulations ont donné lieu à tant de controverses, et l’ondulation finale f. Ainsi se trouve singulièrement simplifiée l'interprétation du tracé sphygmographique. Qui sait si cette sim- plicilté ne séduira pas les cliniciens, et ne sera pas un élément de fortune pour la nouvelle théorie ? Le plateau systolique qui se voit sur les tracés de pression intra-cardiaque de Chauveau et Marey et de leurs successeurs, est dû, d’après von Frey, à une position défectueuse de la sonde intracar- diaque. Cette sonde, étant poussée trop loin dans le ventricule, verrait son orifice obstrué dès le début de la contraction ventriculaire par la paroi interne du cœur : le plateau systolique se produi- rait par troncature artificielle du sommet simple de la courbe de secousse myographique. Hürthle a montré le peu de fondement du re- proche adressé par von Frey aux résultats fournis par les sondes intracardiaques, entre les mains de Chauveau et Marey et de leurs successeurs. Le pla- teau systolique persiste, quelle que soit la position de l’ampoule exploratrice dans le ventricule, que celle-ci soit située près de l’orifice artériel, ou qu’elle soit poussée vers la pointe du ventricule, à condition que l'explorateur fonctionne correcte- ment, ce qui n’est pas le cas pour l'appareil ima- giné par von Frey. Le tonomètre-de von Frey pré- sente un tube long et étroit, dans lequelse déplace, à chaque pulsalion, une quantilé considérable de liquide : d'où déformation de la courbe, usure de tous ses angles, transformation du plateau tra- pézoïde classique en une colline mollement ar- rondie. ; Quant au tracé cardiographique proprement dit, ou tracé du choc du cœur, il ne présente, d’après von Frey, rien de constant : il varierait d’un point de la poitrine à l’autre et n’aurait rien de commun avec le tracé de pression intra-cardiaque. Martius, Roy et Adami avaient d'ailleurs déjà insisté sur les différences que présentent, selon eux, les tracés de pression intra-cardiaque el ceux de choc du cœur. Nous n’aurions pas parlé du travail de von Frey, tellement il s'éloigne des idées reçues, tellement il est en contradiction avec les faits qui paraissent le mieux élablis, si le livre en question n'’élait signé d’un nom justement estimé, s’il ne sortait du la- boratoire de Leipzig. Comme on le voit, les contradictions el les di- vergences qui règnent actuellement parmi les physiologistes sur la signification du tracé cardio- graphique et sur le mécanisme du cœur ont atteint des. proportions réellement effrayantes. Il est grandement temps que la lumière renaisse de ce L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE chaos. Peut-être l'institution des Congrès interna- tionaux de physiologie pourra-t-elle contribuer à mettre d'accord les physiologistes dissidents. M. Chauveau a fait espérer qu'il répéterait au Congrès de Liège (août 1892) ses célèbres expé- riences de cardiographie du cœur du cheval. 2.— Tigerstedt adéterminéchezlelapin le volume de sang qui est lancé dans l'aorte à chaque pulsa- tion ventriculaire. Ce volume est beaucoup plus faible qu'on l’admet en général. En raisonnant par analogie, on arrive à attribuer au ventricule gauche de l'homme un débit de 50 à 70 grammes de sang par pulsalion, ce qui nous met fort loin des clas- siques 180 grammes qui figurent dans tous les traités de physiologie. 3. — La place nous manque pour analyser en détail les recherches de Fr. Franck; H. Kronecker. E. Gley sur l’innervation du cœur des Mammi- fères, celles de Waller, Bayliss et Starling sur les phénomènes électromoteurs de la systole car- diaque du cœur des Mammifères. Vaisseaux. — La pulsation artérielle n’est qu'une émanation de la pulsation ventriculaire : aussi est- il naturel de retrouver, dans l'interprétation des tracés sphygmographiques, l'écho des divergences dont nous venons de parler à propos des tracés cardiographiques. Les figures 2 et 3 rendent ces Fig. 2. — Représentation schématique de l'interprétation de Landoïs et de Chauveau-Marey du tracé cardiographique. Les parties laissées en blanc correspondent à la durée de la systole ventriculaire, divergences sensibles. Elles représentent schéma- tiquement les interprétations de Landois adoptées Fig. 3. — Représentation schématique de linterprétation de Landois et de Chauveau-Marey du tracé Sphygmographique. Les parties laissées en blanc correspondent à la phase sys- tolique de la pulsation. : . Pour Landois, K représente l'ondulation de clôture des sigmoïdes aortiques, tandis que pour Chauveau-Marey, c'est l'ondulation dicrote R qui marque la fermeture des sigmoïdes. généralement en Allemagne, et celles de Chauveau- Marey qui sont classiques en France. 81 Une autre circonstance a peut-être contribué à compliquer celte question. La propagation de la pulsation dans les artères est un phénomène pure- ment physique, comparable à celui de la propaga- tion des ondes dans des tubes de caoutchoue, ac- cessible, semble-t-il. aux méthodes d'investigation de la physique mathématique. Beaucoup de phy- siologistes n’ont pu résister à la tentation d'a- border le problème par son côté mathématique. Au lieu de commencer par rechercher expérimen- talement ce qui se passe réellement dans les ar- tères du chien, du lapin ou de l’homme, ils ont cherché à déterminer théoriquement ce qui doit, à priori, se produire dans un tube élastique parcouru par des afflux intermittents. Une fois leur convic- tion bien arrêtée, ils ont institué des expériences sur des schémas, et n'ont eu recours qu’exception- nellement à la vivisection. De là, des discussions interminables pour décider si l'ondulation dicrote et les autres ondulations secondaires du pouls sont d'origine centrale et dues à l’action propulsive du cœur, où naissent, au contraire, à la périphérie par réflexion : question que l’expérimentation di- recte sur l'animal vivant est bien plus apte à ré- soudre que l’analyse mathématique. Il suffit, en effet, comme l’a fait Hürthle, comme Chauveau et Marey l'avaient fait il y a longlemps, de com- parer deux tracés arlériels, recueillis avec un bon manomètre, l’un près du cœur, l'autre à la péri- phérie, pour reconnaitre que les ondes les plus marquées du tracé de pression artérielle marchent toutes du centre à la périphérie, conformément à l'interprétation de Chauveau et Marey. L'introduction du calcul, comme procédé exclusif el prépondérant d’investigalion, nous parait ici aussi prématurée que dans l’étude du vol des Oi- seaux. Tout ce que le calcul a pu faire jusqu'à présent pour élucider le problème de l'aviation, a-t-on dit plaisamment, c’est de démontrer par & + b l'impossibilité mécanique du vol des Oiseaux. Signalons les recherches de Wertheimer sur le balancement entre la circulation superficielle et la circulation viscérale, celles de Langley, Bradford, Baylin sur les vaso-moteurs de la patte du chien, d'Aducco sur les centres vaso-moteurs de la moelle épinière, de Mall sur les vaso-moteurs de la veine-porte, de Morat sur les vaso-moteurs de la tête, etc. Doyon localise les vaso-dilatateurs de la rétine à la fois dans le grand sympathique et dans le lri- jumeau. Chaleur animale. — La fièvre est, comme on le sait, un élat morbide caractérisé par une élévation de la température interne du corps. Comment se produit celte élévation? Est-ce par une exagéra- + tion de l'intensité des combustions interstitielles, par une augmentation dans la production de la chaleur, comme l’admettent la plupart des physio- logistes et des pathologistes? Ou faut-il, comme le faisait Traube, attribuer l'hyperthermie fébrile à une diminution dans les pertes de chaleur, à une rétention du calorique produit en quantité égale à la normale, ou même moindre que cette dernière? Les expériences de Rosenthal, faites au moyen d'un calorimètre analogue à celui de d’Arsonval, le portent à admettre la théorie de Traube de la rétention de chaleur, au moins pour la période d'augmentation de la chaleur, celle pendant la- quelle s'établit l'élévation de la température in- terne. Signalons également les recherches calorimétri- ques de Rubner. Un procédé nouveau a été appliqué aux recher- ches de thermométrie physiologique. Ge procédé consiste à utiliser, pour la mesure de la tempéra- ture d’un fil ou d’un treillis métallique, qui sert d’explorateur, les variations de conductibilité élec- trique présentées par ce fil ou ce treillis. Le pro- cédé est d’une sensibilité extraordinaire. G. N. Stewart l’a employé récemment pour mesurer la température de la peau humaine. Ch. Richet, H. White ont étudié l’hyperthermie qui survient à la suite des lésions du système ner- veux central. III, — Drcesrion. NUTRITION. SÉCRÉTION. 1. — Le suc gastrique, le suc pancréatique alta- quent et dissolvent rapidement, comme on le sait, les matières albuminoïdes, que ces matières soient mortes ou qu'elles fassent partie des Lissus vi- vants, Comment se fait-il que la paroi de l'estomac, que les tissus de l'intestin, directement exposés à l’action corrosive des sucs digestifs, ne soient pas liquéfiés en peu de temps? Comment les vers in- testinaux et autres parasites, dont le corps est formé de matières albuminoïdes, résistent-ils à l’action dissolvante des sucs dans lesquels ils vi- vent? J'avais émis autrefois l'hypothèse que les éléments histologiques de la surface de l'estomac et de l'intestin, que le revêtement épidermique des vers intestinaux ne se laissent pas imbiber par les ferments digestifs. On sait, en effet, que les cel- lules et les éléments histologiques, en général, n'absorbent pas indifféremment toutes les subs- tances dissoutes qu'on leur offre en solution :elles font un véritable choix parmi ces substances, ac- ceptant les unes, rejetant les autres. Au reste, les ferments sont des corps peu diffusibles, qui ont peu de tendance à traverser les membranes orga- niques. Frenzel, qui ne parait pas avoir eu con- L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE naissance de mes expériences, a récemment repris cette question et est arrivé à formuler une nou- velle hypothèse. D'après lui, les ferments pénètre- raient à travers le protoplasme du revêtement épi- thélial de l'intestin ou de la peau des helminthes, mais ces ferment(s y rencontreraient des substances spécialement destinées à neutraliser, à contreba- lancer leur action dissolvante. Kühne, Chittenden et d’autres ont montré que les matières albuminoïdes soumises à l’action di- gestive du suc gastrique, ou, ce qui revient au même, d'un mélange de pepsine et d'acide chlor- hydrique très dilué, ne se transforment pas direc- tement en peptone. Elles se transforment d’abord en albumine acide (syntonine, précipitable par simple neutralisalion du liquide), puis en a/bumoses ou propeptones (précipitables par le sulfate d’ammo- niaque à saluralion) et finalement en peptone pro- prement dite. Les recherches récentes de Chitten- den et Hartwell d'une part, de Grosjean de l’autre, ont mis en lumière ce fait intéressant que le pas- sage du second stade de la digestion au troisième, c'est-à-dire la transformalion de la propeptone en peptone, se fait avec une lenteur et une difliculté extraordinaires.C'est à peine si,au bout de huitjours de digestion à l’étuve, on obtient 50 °/, de peptone. Ces données sont probablement applicables à la digestion naturelle : il faut donc en conclure qu'à l'état normal, il se forme très peu de peptone dans notre estomac et que la transformation des albu- minoïdes ne dépasse pas en général le stade albu- mose où propeptone. Signalons les recherches d'Arloing sur les filets sécrétoires du grand sympathique cervical, de Klug sur la digestion des Oiseaux, de Krüger, Lieber- mann, Fermi, Contejean sur les ferments digestifs, de N. Zuntz, Hagemann, Studemund, Jiro Tsuboïi, Hosaku Murata, Huber, von Gerlach sur la nutri- tion et le bilan de l’économie animale, de Strass- man et von Noorden sur le rôle nutritif de l’alcool. Zawadsky a pu analyser du suc pancréatique provenant d'une fistule chez une femme opérée pour une tumeur du pancréas. La composition de ce liquide se rapproche beaucoup de celle du sue pancréalique du chien. Macfardien, Nencki et Sieber ont utilisé un cas de fistule intestinale pour étudier la digestion in- testinale dans l'espèce humaine. Il nous est impos- sible d'analyser en détail cet intéressant travail. Bornons-nous à dire que les auteurs sont d’avis que les microbes intestinaux ne jouent pas dans la digestion le rôle important ou indispensable que certains ont voulu leur attribuer. J. Munk a utilisé un cas de fistule du canal tho- racique chez la femme pour réaliser plusieurs expériences intéressantes concernant la résorption L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 583 des graisses. Après une ingestion de 20 grammes de blanc de baleine (palmitate de cétyle), le chyle qui s'écoulait de la fistule de la patiente contenait non du palmitate de cétyle, mais de la tripalmitine. Le blanc de baleine avait donc été saponifié et l’a- cide palmitique s'était uni à la glycérine pour être ensuite absorbé sous forme de palmitine. Même résultat avec l’éther amylique de l'acide oléique qui est absorbé à la surface de l'intestin après transformation en éther glycérique de l'acide oléi- que (trioléine). J. Munk et Rosenstein ont répété les mêmes expériences chez le chien, et étudié, tant chez la femme atleinte de fistule, que chez les chiens, les phases de la résorption des différentes graisses. Rachford a montré que la saponificalion de la graisse par le ferment pancréatique est favorisée par la présence de la bile. J. Munk a constaté que l'établissement d’une fistule biliaire entrave considérablement chez le chien la résorption de la graisse solide ou peu fu- sible {suif), tandis que la graisse de pore est ré- sorbée aux deux tiers. Les acides gras sont résorbés en proportion plus forte qu'avant l’opéralion. Dastre a imaginé, comme on le sait, un procédé de fistule biliaire, applicable au chien, qui permet de conserver l'animal en pleine santé, et de re- cueillir chaque jour la totalité de la bile sécrétée par le foie. Il a utilisé ce procédé pour faire une série de dosages du fer de la bile et résoudre la question encore controversée de l’origine de ce fer. Il a constaté que la proportion de fer éliminée par la bile peut varier du simple au triple quoique l'alimentation reste la même. Ces variations doi- vent donc dépendre de causes internes, indépen- dantes de la teneur en fer de l'alimentation. L'au- teur les rapporte à des variations temporaires de la destruction et de la néo-formation des globules rouges. 2.—I]l ya trois ans, M. Brown-Séquard a fait con- naitre les effets merveilleux que produisait, chez l’homme affaibli ou vieux, l'injection sous-cutanée de suc testiculaire emprunté à un animal jeune et vigoureux. Déjà en juin 1889, l'illustre expérimen- tateur avait dit que ce qu'il faisait pour le Lesticule pouvait et devait être fait pour les autres glandes avec ou sans conduits excréteurs. Il à continué ses expériences avec M. d’Arsonval sur les sucs pré- parés au moyen des organes les plus divers : rate, reins, foie, capsules surrénales, poumons, cer- veau, etc. Le tissu dont on veut expérimenter l'extrait est broyé avec cinq fois son poids d’eau distillée con- tenant 10 0/,, de sel marin, ce qui constitue un sérum artificiel. On peut également employer un mélange d’eau, de glycérine et d'acide borique. Le broyage est fait dans un mortier avec adjonction de sable calciné pour faciliter la division du tissu. Le tout est filtré, puis soumis pendant une heure à l'action de l'acide carbonique sous pression (50 atmosphères), ce qui constitue un excellent procédé de stérilisation, L'injection de ce liquide aseptisé manifeste des effets physiologiques très accentués, variables suivant sa provenance, et sans danger pour la vie de l'animal. Brown-Séquard et d’Arsonval arrivent à cette conclusion que tous les tissus — glandulaires ou non — donnent quelque chose de spécial au sang, que tout acte de nutrition s'accompagne de ce qu'ils appellent une sécrétion interne. Ils croient, en conséquence, que « tous les tissus pourront et devront être employés dans des cas spéciaux comme mode de traitement; qu’il y a,en un mot, à créer une (thérapeutique nouvelle dont les médicaments seront des produits fabriqués par les différents tissus de l'organisme. — Les produits bactériens », ajoutent-ils, « nous ont appris com- bien élaient actifs les composés chimiques crééspar les infiniment pelits; la cellule vivante, à quelque tissu de l’organisme qu’elle appartienne, doit, par analogie, sécréter des produits dont l'efficacité n'est pas moindre. C'est l'étude de cette action physiologique que nous poursuivons depuis qu’il nous à été prouvé que d'action de l'acide carbo- nique à haute pression permettait : 1° de rendre aseptiques les extraits de tous les tissus, et 2° de conserver aux ferments qu'ils sécrètent toutes leurs propriétés. Dès à présent ces liquides peuvent être injectés à l'homme sans danger, dans un but thé- rapeutique. Le champ ouvert aux recherches dans cette voie est immense. « Nous sommes en train d'essayer entre autres le suc extrait du pancréas dans le diabète, le suc de la rate dans la fièvre intermittente; le sue de la rate et de la moelle des os pour reconstituer le sang après les hémorragies expérimentales ou dans l’anémie et la chlorose. Des expériences analogues sont inslituées avec les capsules surré- nales dans la maladie d'Addison, avec la glande Ce dernier point a fait l'objet des recherches de G. Vassale et de E. Gley. On sait que l’extirpation complète du corps thyroïde, chez le chien, déter- mine des accidents convulsifs très graves et la mort à bref délai (cachexie strumiprive). Or, l'injee- tion intra-veineuse du liquide obtenu par tritura- tion du corps thyroïde avec de l’eau, produit chez les chiens thyroïdectomisés des effets extrèmement remarquables. Supposons que l'injection soit pra- tiquée alors que le chien présente déjà, depuis vingt-quatre heures, des acidents graves : mar- che titubante ou même impossibilité de se tenir 584 L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE debout, contractions violentes et incessantes de tous les muscles, polypnée, etc. Au bout de quel- ques minutes, on voit ces accidents disparaitre : peu à peu, les accès convulsifs diminuent d’inten- sité et bientôt cessent complètement, la respiration reprend son rythme normal, la paralysie des exten- seurs disparait, l'animal se tient debout, marche bien, se met à boire, et un peu plus tard se met à manger. Le plus souvent les accidents reparaissent le lendemain, mais on peut encore les faire cesser par une nouvelle injection. L'expérience réussit également bien avec le suc extrait de thyroïdes de mouton. On sait que Munk et plus récemment Arthaud et Magnon ont nié l'existence de la cachexie strumi- prive. D’après Arthaud et Magnon, les accidents graves qui surviennent à la suite de la thyroïdec- tomie, doivent être altribués, non à la suppression du corps thyroïde, mais à l’inflammation du tronc du pneumogastrique cervical, inflammation qui est une conséquence de l'opération. Ils sont ici en contradiction flagrante avec la plupart des auteurs qui ont étudié la question. Breisacher constate que les chiens supportent beaucoup mieux l’ablation du corps thyroïde, si on les nourrit avec du lait, que s'ils mangent de la viande. Breisacher croit que la viande ingérée exerce une action toxique sur le système nerveux du chien, action toxique contrebalancée chez l’a- nimal intact par l'influence de la glande thyroïde. On sait que le lapin, animal à régime herbivore; résiste en général à l’extirpation du corps thyroïde. Gley vient de nous donner l’explication de l’immu- nité apparente que présente le lapin vis-à-vis de la thyroïdectomie. Il existe chez le lapin une glande thyroïde accessoire qui, jusqu'à présent, avait passé inaperçue. La thyroïdectomie complète, c'est-à-dire comprenant la thyroïde accessoire, est loujours mortelle chez le lapin. Je me borne à signaler les recherches d'A belos et Langlois sur l’ablation des capsules surrénales. J'ai analysé dans cette Revue quelques-uns des travaux les plus récents parus sur la question de la glycogénèse et du rôle des hydrocarbonés dans la nutrition'. Je puis donc me dispenser d'y re- venir ici. IV. — Musczrs. 1. — La contraction musculaire la plus brève, la plus simple que nous puissions exécuter (par exem- ple le mouvement rapide d'extension et de flexion que le pianiste imprime au doigt), n’est pas simple, mais se compose en réalité de plusieurs contrac- tions simples (3 ou 4 au minimum) ou secousses 1 Voyez la Revue du 15 juin 1892, t. IIT, p. 400 et suiv. plus ou moins fusionnées. Elle constitue ce que les physiologistes appellent un {éfanos ou une contrac- tion tétanique, par opposition avec la secousse où con- traction simple. Chacune de ces secousses élémen- taires est provoquée par une excitation spéciale qui lui est envoyée des centres nerveux par les nerfs moteurs. De même, la contraction en apparence permanente d'un de nos muscles est en réalité un phénomène discontinu, correspondant à un certain nombre de décharges nerveuses et de se- cousses musculaires simples, dont les effels méca- niques se confondent. Les -excitations motrices émanées des centres nerveux ne sont donc pas con- tinues, mais sesuccèdentsuivantun certain rythme. Jusque dans ces derniers temps, les physiologistes admettaient que ce rythme est régulier, typique, et que les centres nerveux envoient aux muscles un nombre déterminé (18 à 20 pour les uns, 9 à 10 pour les autres) d’excitations à la seconde. Plu- sieurs travaux récents sont venus ébranler cette. doctrine classique. M. Delsaux a étudié le rythme des contractions musculaires volontaires, en utilisant le phéno- mène électrique de la variation négative comme indice du nombre des secousses élémentaires dont se compose ce tétanos physiologique. La surface des muscles en expérience est reliée à l’électro- mètre de Lippmann. A chaque contraction muscu- laire la colonne mercurielle de l'instrument s'é- branle et exécute des oscillations en nombre égal à celui des contractions simples. M. Delsaux a réussi à pholographier ces oscillations sur une bande de papier sensible entrainée par le mouve- ment du cylindre enregistreur. Il a constaté ainsi que le rythme ne présentait rien de typique etpou- vait varier d’un instant à l’autre. Wedenski arrive à un résultat analogue, en em- ployant le téléphone comme indicateur des varia- tions électriques du tétanos musculaire. Il constate également que le rythme de la contraction mus- culaire volontaire est essentiellement variable. Il en est de même du rythme des contractions provo-. quées par une excitation artificielle des centres nerveux moteurs. Dans ce cas, le rythme du téta- nos musculaire peut être entièrement différent du rythme des excitations nerveuses artificielles. 2. — Le muscle est une machine chimique : il brüle du combustible et transforme en travail mé- canique une partie de l'énergie chimique mise en liberté par le fait de l'oxydation. La plupart des physivlogistes ont abandonné l’ancienne théorie de Liebig, en vertu de laquelle le muscle était censé brûler de l’albumine : on admet aujourd’hui que le combustible musculaire par excellence, c’est le sucre ou le glycogène. Une preuve que l’on cite fréquemment en faveur de la doctrine de la nature L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE hydrocarbonée du combustible musculaire, c’est qu'un exercice violent et prolongé augmente con- sidérablement chez l’homme et les animaux la va- leur des échanges respiratoires (oxygène con- sommé, CO? exhalé), mais n’a guère d'influence sur la destruction organique de l’albumine et sur l’ex- crétion d'azote par les urines, à condition, bien entendu, que l'organisme soit nourri suffisamment et n’ail pas à vivre de sa propre substance orga- nisée. Dans ces derniers temps, plusieurs physiologistes, Benege, R. Oddi, Pflüger, sont arrivés à cette con- clusion, qu’on ne peut considérer les hydrocarbo- nés comme la source unique du travail musculaire. Pflüger a même affirmé que l’albumine est le combustible musculaire par excellence, celui que les. éléments vivants, et notamment les fibres mus- culaires, brûlent de préférence. La graisse, la gly- cose ne seraient attaquées qu’à défaut d’albumine. Pflüger affirme que le travail musculaire augmente la destruction des matériaux azotés el l'excrétion de l’urée, mème en présence d'une quantité sufli- sante de graisses ou d’hydrates de carbone. 3.— D'Arsonval a précisé les conditions de l’ex- cilabilité électrique des nerfs et des muscles. Il a fait connaitre des applications thérapeutiques nouvelles de l'électricité à haute tension. V.— SYSTÈME NERVEUX. 1. — On sait que le fonctionnement des muscles met en liberté une quantité énorme d'énergie et comporte une dépense équivalente de combustible organique : d’où fatigue et épuisement rapide du muscle soustrait à l’action restauratrice de l’irriga- tion sanguine. Les nerfs périphériques paraissent au contraire fonctionner sans dépense appréciable de maté- riaux nutrilifs : d’où leur grande résistance à la suppression de la circulation. Bernstein avait déjà montré que les nerfs de grenouille sont infatigables, qu'ils peuvent être tétanisés pendant des heures entières sans que leur excitabilité diminue. Bow- ditch a fourni la même démonstration pour les nerfs des animaux à sang chaud. Il tétanise le bout périphérique du nerf sciatique chez un chat em- poisonné par le curare et maintenu en vie grâce à la respiration artificielle. La tétanisation est pro- longée pendant plusieurs heures, jusqu’à ce que les muscles immobilisés par le curare aient recouvré leur activité. À ce stade de la restauralion, la té- lanisation du nerf provoque des contractions mus- culaires, ce qui prouve que l’excitation prolongée du nerf n'a pas compromis son fonctionnement. Szana à pareillement démontré que les fibres cardio-inhibitrices du nerf pneumogastrique ne 2 do © peuvent être fatiguées par une excitation prolon- gée. De mème que Bowditch avait employé le cu- rare pour mettre hors de cause les organes termi- naux (muscles) dont l’activité s’'épuise rapidement, Szana a employé l’atropine qui paralyse les termi- naisons intracardiaques des pneumogastriques. Ces nerfs furent tétanisés chez le lapin atropinisé; quoique l'excitation eût été prolongée pendant plu- sieurs heures, elle commença à exercer sur les pulsations cardiaques son action modératrice bien connue, aussitôt que le poison eut été éliminé du corps. Heymans et Gad ont démontré que la myéline des fibres nerveuses est constituée par de la léci- thine, ou par une combinaison peu stable de léci- thine. Ambronn est arrivé au même résultat et a constaté, en outre, que c'est à la présence de la léthicine que les fibres nerveuses doivent leur bi- réfringence négative. Si l’on enlève la lécithine au moyen d’éther, on constate que la gaine des fibres nerveuses présente la biréfringence positive. 2.— La question des nerfs trophiques a fait récemment l’objet de recherches intéressantes, Existe-t-il, — à côté desnerfs centrifuges ordinaires (nerfs moteurs ordinaires, y compris les vasomo- teurs el les nerfs électriques de certains poissons, nerfs sécréloires, nerfs d’inhibition), — une caté- gorie spéciale de nerfs dont le rôle consiste à règlerles échanges nutritifs dont les lissus sont le siège, en un mot, des nerfs (rophiques ? Les altérations de la cornée qui surviennent à la suite de la section du trijumeau avaient été invo- quées à l'appui de l'existence de fibres trophiques spéciales contenues dans le tronc de la branche ophtalmique du trijumeau, jusqu'à ce que l’on eut démontré que ces altérations sont uniquement dues à la suppression de la sensibilité de la cornée et par conséquent à la suppression des réflexes (clignement des paupières, larmoiement, ete.,) pro- tecteurs de l'œil. Si l’on a soin de protéger conve- nablement l'œil, par exemple en interposant au de- vant de lui une partie du pavillon de l'oreille, la section du trijumeau pourra ne pas avoir surla nu- trition de la cornée l'influence fâcheuse signalée par les premiers expérimentateurs. Gaule a repris cette question : il a vérifié les assertions de ses prédécesseurs, tant qu'il s’agit d’une section du trijumeau pratiquée en arrière du ganglion de Gasser. Si ce ganglion reste en rapport avec l’œil, la cornée protégée convenablement reste indemne. Si la cornée insensibilisée est expo- sée à l’action vulnérante des corps étrangers, elle s’enflammera au bout d’un certain temps : dans ce cas, il- s’agit d’une Æératite lraumatique, non d’une altération trophique. Mais, si la section est pratiquée dans le ganglion 580 de Gasser ou au-devant de celui-ci, entre lui etl’œil (section de la branche ophthalmique, par exemple), les résultats sont lout différents. Dans ce cas, que l'œil ait été protégé ou non, la cornée devient im- médiatement (en quelques secondes ou quelques minutes) le siège de troubles nutritifs qui vont en s’'aggravant. Il existe donc une relation étroite entre la nutrition de la cornée et l'intégrité du ganglion de Gasser et de la branche ophthalmique. Je ne suivrai pas l’auteur dans la théorie un peu subtile qu'il propose pour expliquer les faits sans passer par l'hypothèse des nerfs trophiques. Gaule a constaté également des modifications intéres- santes de la nutrition de la peau à la suite de la lésion d’un ganglion spinal chez la grenouille. 3. — D’Arsonval a montré récemment que la lu- mière est capable d'exciter directement les fibres musculaires. Korangi a constaté également que la peau et l'écorce cérébrale de la grenouille sont sen- sibles à l’action directe des radiations lumineuses (lumière froide). Eugène Steinach conslate également que les changements de coloration que présente la peau de la grenouille et de la rainette, sous l'influence de la lumière, peuvent se produire en dehors de toute influence nerveuse réflexe. Ici aussi il faut admettre une action excitante directe des rayons lumineux sur les cellules pigmentées de la peau: la lumière provoque leur contraction. Je citerai l'expérience suivante, qui est particulièrement in- téressante. On recouvre la peau du dos d’une rai- nette d’un papier noir présentant un ou plusieurs trous carrés, et l’on expose l'animal à la lumière. Lessurfaces carrées, soumises aux radiations lumi- neuses, prennent un ton vert clair qui tranche vive- ment sur le fond vert sombre du reste du dos. On enlève le papier noir et on transporte l’animal au fond de la chambre où l'éclairage est faible. Les surfaces carrées prennent un ton de plus en plus foncé, tandis que le reste du dos pälit légèrement, de sorte qu'au bout de peu de temps on observe des carrés sombres sur fond relativement clair. L'expérience peut réussir sur une rainette dont on a détruit le système nerveux central ainsi que les nerfs périphériques. Steinach a fait des expériences analogues sur plusieurs espèces de poissons, 4. — Langley et Sherrington ont réussi à déter- miner le trajet des filels nerveux qui animent les muscles moteurs despoils, etauxquels ilsont donné le nom de nerfs pilomoteurs. Ces nerfssortent tous de la moelle épinière, au niveau de la région dorsale ou de la partie supérieure de la région lombaire et suivent un trajet analogue à celui des nerfs vaso- moteurs. Langley, Dickinson, Langendorff ont montré L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE que les ganglions du grand sympathique cervical sont de vérilables centres nerveux, constituent des stations d’élape pour les fibres nerveuses qui y aboutissent et qui en repartent. La nicotine em- poisonne les ganglions, mais laisse les fibres in- tactes : l'asphyxie atteint les ganglions bien avant les fibres nerveuses ou les organes périphériques. Il est possible, chez l’animal nicotinisé ou asphyxié, de choisir un stade de l’empoisonne- ment, où l’excitation du cordon du sympathique ne produit aucun effet, lorsqu'elle atteint le nerf avant son entrée dans le ganglion, tandis qu’au delà du ganglion l’excitation produit la dilatation de la pupille, la constriction des vaisseaux de la tête, etc. 5. — Schtscherback, Sandmeyer, Slernberg, W. Bechterew, J. N. Langley et Grünbaum, Beevor, Loeb et Horsley ont étudié la Lopogra- phie physiologique de la moelle épinière et de l’encéphale chez les différents animaux. Mention- nons les recherches de Déjerine et de Luys sur l’a- phasie. , 6. — Le nerf acoustique se divise, comme on sait, au niveau de l'oreille interne, en deux bran- ches, dont l’une se rend au limaçon et l’autre au labyrinthe. Il résulterait des expériences de Cor- radi que la branche limacéenne seule intervient dans l'audition. La destruction bilatérale du li- maçon produirait la surdité absolue chez le cochon d'Inde. Ewald a fait chez le chien, le pigeon, la gre- nouille et les poissons de nombreuses expériences sur l'influence que les canaux semi-circulaires de l'oreille exercent sur l'intégrité des mouvements musculaires. Il a été conduit à admettre que, chez l’animal normal et intact, le labyrinthe de l'oreille est constamment le point de départ d’impressions sensibles qui remontent par le nerf acoustique vers les centres nerveux moteurs el qui influen- cent par voie réflexe l’innervation musculaire to- nique. La destruction des canaux semi-cireulaires supprime cette action tonique et exerce une action des plus nuisibles sur le sens musculaire et par conséquent sur la correction et l'intégrité des dif- férents mouvements. Ce sont particulièrement les muscles de la partie antérieure du corps, de la tête, qui sont atteints dans leur fonctionne- ment. On sait que les animaux vertébrés, soumis à un mouvement de rotation plus ou moins rapide, sur le plateau d’une machine à force centrifuge exécu- tent des mouvements forcés, et prennent des atti- tudes spéciales. L. Schæfer a répélé ces expé- riences sur des Invertébrés. Les résullats les plus intéressants ont été observés sur les escargots. Ces mollusques tournent la tête ou se meuvent L. FREDERICQ. — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 587 dans une direction opposée à celle de la rotation. Si l’on se soumet à un mouvement de rotation, modérémentrapide, dans une espèce de carrousel, on éprouve une illusion curieuse sur la position des objets environnants : les objets verticaux pa- raissent inclinés. Un grand nombre de sourds- muets n’éprouvent point cette illusion. Kreide y voit une preuve que la notion de la si- tuation de notre corps, ou plus exactement de notre tête dans l’espace, par rapport à la direction de la pesanteur ou des forces analogues à la gravi- lation, est liée au fonctionnement de certaines parties de l'appareil auditif (otolithes). ! VI. — ORGANES DES SENS, PEAU, ETC. 4. — H. Magnus a étudié la façon dont se produi- sent les débuts de la cataracte due à une alimenta- tion riche en sucre, en sel, ou due à l’ingestion de naphtaline,et en a tiré des conclusions intéressantes au sujet du courant de lymphe qui nourrit le cris- tallin. La cataracte débute régulièrement suivant une zone étroite, circulaire, siégeant à la face postérieure de la superficie du cristallin, un peu en arrière de l'équateur : puis le trouble s'étend à la portion corticale périphérique antérieure pour envahir ensuite le reste du cristallin. Si l’on vient à suspendre l'administration du sel, du sucre ou de la naphtaline, le issu cristallinien, troublé par le dépôt de ces substances, reprend sa transpa- rence primitive. Ici, ce sont également les portions phériphériques poslériennes qui s’éclaireissent en premier lieu. Nicati a fait des recherches intéressantes sur la glande des procès ciliaires : c’est le nom sous lequel il désigne l’épithélium qui tapisse la face postérieure des procès (pars, ciliaris, retinæ). Cest elle qui sécrète l'humeur aqueuse. Tscherning a appelé l'attention sur la quatrième image de Pur- kinje, produite par réflexion à la surface posté- rieure de la cornée transparente. Cette image très peu lumineuse n’est visible qu’à la périphérie de la cornée, là où la courbure postérieure de cette membrane est différente de la courbure antérieure. 2, — On admet, en général, que la peau intacte n'a qu'un pouvoir absorbant très faible et que les sels des métaux alcalins ne sont pas absorbés à sa surface. Baschkis et Obermayer ont montré que celte conclusion est trop absolue : ils ont réussi à déceler la présence du lithium dans les urines de sujets qui avaient subi pendant une demi-heure n l'application d'une pommade composée de lanoline et doléate de lithium à la région du dos. 3. — Les anatomistes ont signalé depuis long- temps la présence de bourgeons gustatifs à la face interne de l'épiglotte. Michelson et Langendorff y ont constaté récemment l'existence de la sensibi- lité gustative. 4. — La plupart des physiologistes admettent avec Helmholtz que le timbre des voyelles est carac- térisé par des sons harmoniques de hauteur déter- minée el invariable pour chaque voyelle, mais différente d’une voyelle à l’autre. Hermann a com- battu cette hypothèse et proposé une nouvelle théorie des voyelles. Chaque voyelle est pour lui caractérisée par un son d'une hauteur déterminée qui présente des variations périodiques dans son intensité. Ces variations d'intensité sont d'autant plus nombreuses que la voyelle est chantée sur un ton plus haut, d'autant moins nombreuses que la voyelle est chantée sur un ton plus grave. Hermann a réalisé l'analyse du son correspondant à chaque voyelle, en photographiant les excursions d’un pin- ceau de lumière tombant sur un miroir adhérant à la membrane du phonautographe. La synthèse de la voyelle & fut obtenue au moyen d'une sirène de Kœnig. VIT. — REPRODUCTION. Presque tous les travaux parus en 4891 sur la reproduction des animaux sont des recherches d’embryologie pure.Je puis les passer sous silence, puisqu'ils sortent du cadre de la physiologie pro- prement dite. Je ferai cependant une exception pour le mémoire de Maupas sur le déterminisme de la sexualité chez l’Æydatina Senta. Les femelles de ce petit Rotifère, conservées à une température de 26° à 28°, ne donnent naissance qu'à des mâles, tandis que les femelles, maintenues à une tempé- rature relativement basse (14 à 15°), donnent sur- tout naissance à des œufs femelles. Le sexe de l'œur est donc ici prédestiné et dé- terminé par la température. On sait que, dans d’autres groupes d'animaux, le sexe peut dépendre de conditions tout à fait diffé- rentes. Ainsi, chez les abeilles, les œufs fécondés donnent toujours naissance à des femelles (reines ou ouvrières), tandis que les œufs non fécondés ou parthénogénétiques donnent naissance aux mâles ou faux bourdons. Léon Fredericq. Professeur à l'Université et Directeur de l'Institut de Physiologie à Liège * à ardt RS D88 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Paraf (A.), Ancien élève de l Ecole Normale supérieure. — Sur le problème de Dirichlet et son extension au cas de l'équation linéaire du second ordre, Thèse de doctorat de la Faculté des sciences de Paris, Gauthier-Villurs et fils, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1892, Ou appelle fonction « harmonique » de deux ou trois variables indépendantes toute intégrale de l’équation aux dérivés partielles du second ordre Du dû D? — =0 dy? AI ou Du Ni Dr? Du dy SLNAE Fa pourvu que l'intégrale satisfasse à certaines conditions bien connues de continuité et d’uniformité dans l’inté- rieur d’une région donnée du plan ou de l’espace, Le problème de Dirichlet dans le cas de deux variables consiste à trouver une fonction # harmonique à l’inté- rieur d’un contour, et dont les valeurs sur le contour se succèdent suivant une loi donnée arbitrairement à l’avance, La fonction v est alors déterminée et possède des propriétés bien connues. Le problème à été complètement résolu par le ma- thématicien Schwarz, autant du moins qu'il s’agit d'é- tablir l'existence de la fonction. Cet ordre de recher- ches est fort important, tant en analyse qu’en physique mathématique. En analyse, il comprend toute la théorie des fonctions d’une variable imaginaire, M, Poincaré aussi s’en est servi pour établir cette très générale et très profonde proposition : « Soit y une fonction ana- lyüque quelconque de x, non uniforme ; on peut toujours trouver une troisième variable z, telle que + ety soient fonctions uniformes de z », c’est-à-dire n'aient pour un z donné qu'une seule valeur chacun, En physique mathématique, on a affaire à l'équation A u — 0 dans les questions de chaleur, de potentiel électrique ou newtonien.… M. Poincaré a eu l’idée d'introduire dans les recher- ches purement analytiques sur la matière des considé- rations de physique et de mécanique; le procédé, entre les mains du savant géomètre, a été très fructueux; M. Paraf reprend la méthode de M. Poincaré, en en changeant quelques parties. Tel est le premier cha- pitre de la thèse. La solution consiste d’ailleurs à construire le développement de la fonction inconnue en série trigonométrique uniformément convergente, c'est-à-dire en série procédant suivant les sinus et co- sinus des mulliples d’un arc variable et dont la conver- gence n'est pas altérée quand l’ordre des termes change. Une première généralisation du problème de Diri- chlet amène à donner à l’équation À # — 0, un se- cond membre f (x, y) différent de zéro. Pour être ra- mené au problème de Dirichlet, il suffit de trouver une solution de À w = f s’annulant sur le contour. C’est ce que fait M. Paraf dans son second chapitre, Le troisième est consacré à l'équation : D? ne? dx’ k dy Du Du yat + c où 4, b, c désignent des fonctions dx et d'y, C'est un ET INDEX type d'équations récemment traité par M. Picard avec grand succès par la méthode des « approximations suc- Cessives ». M. Paraf cherche d’abord si la loi de variation sur un contour suffit à déterminer l'intégrale dans l’intérieur du contour, Pour toute région du plan où € est négatif ou nul, l'intégrale est unique, si elle existe. Existe-t-elle? La question n’est pas complètement élucidée par l’auteur, qui appelle sur ce point de nouvelles recherches. La difficulté se produit quand le contour présente un angle aigu arbitraire. Telle est lintéressante thèse de M. Paraf où les re- cherches personnelles de l’auteur s’étayent sur de nombreux et importants résultats dus à MM. Poincaré, Picard, Harnack, Schwarz, Neumann... qu’on a plaisir à retrouver si heureusement mis en œuvre, Léon AUTONNE. André (Ch.) Directeur de l'Observatoire de Lyon. — Notes sur un séjour à l'Observatoire du pie du Midi. — Broch. in-8° de 15 p.; Association typo- graphique, Lyon, 1892. Ayant utilisé pour des observations d’occultation l'Observatoire météorologique du pic du Midi, M. André fait remarquer que cette station est particulièrement favorable aux études d'astronomie. Il demande qu’on y adjoigne une installation astronomique. « Il suffirait, dit-il, d’une grande chambre renfermant des abris fixes pour les lunettes... On aurait ainsi, à peu de frais un observatoire d'astronomie physique, placé dans des conditions d'observation absolument exception- nelles, ouvert à toutes les recherches sans qu'il y ait lieu de faire, pour chaque observation et pour chaque étude, une installation nouvelle, et, en même temps, on augmenterait dans une proportion considérable le rendement scientifique du bel établissement que nous possédons au sommet du pic du Midi. » Rappelons que PAmiral Mouchez, dont le monde savant déplore la perte récente, avait aussi exprimé le même souhait, L. O. Æhurston (Robert, H.). Directeur du Sibley College. — À Manual of the steam engine for the Engineers and pratical Schools. (Manuel de la machine à vapeur pour les ingénieurs et les écoles pratiques.) Deuxième partie : Design, construction, operation. 2° vol. John Wiley and Sons, New-York, 1891, Notre compile rendu du premier volume, inséré dans la Revue du 15 décembre dernier, exprimait en même temps notre foi dans le succès de l’ouvrage et notre désir de voir paraître prochainement la seconde partie. Celle-ci a suivi de près. Son contenu est résumé dans ces trois mots : design, construction, opération. Elle forme une étude complète du tracé, de l'exécution et de la conduite des machines à vapeur : choix du type, des matériaux, des formes, des lubrifiants; proportion- nement des parties; exéculion des pièces, montage, réglage; essais de réceplion el d'économie; conduite, entretien, réparations ; contrats de vente, etc., rien n’y manque, et le côté financier même n'est pas oublié. L'ensemble comporte assez de développements et est assez largement traité pour constituer un livre précieux non seulement pour le constructeur, mais encore pour l’acheteur ou le propriétaire d’une machine à vapeur, Mème sans le premier volume, le succès de celui-ci serait assuré, parce que son ulilité est directe pour tous ceux qui ont affaire avec ces machines. V. DwELSHAUVERS-DERY, BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 589 2° Sciences physiques. Hepworth, — Les travaux du soir de l’amateur photographe, traduit par C. Klary. Un vol. in-8° de 280 p. avec nombreuses illustrations (4 fr.). Société d'éditions scientifiques. Paris, 1892, Les amateurs photographes aiment le soleil, et sa disparition, l'hiver ou le soir, semble devoir mettre fin à leurs travaux. La lecture du livre de M. Hepworth leur permettra de s’adonner à leur art favori, même la nuit. L'auteur apprend à couper les glaces, à pré- parer les plaques isochromatiques, dont l'usâge ne s’est pas assez répandu, les divers procédés à employer pour faire des photocopies transparentes pour la pro- jJection, la manière de confectionner des cadres, enfin l’usage des lumières artificielles (magnésium, lumière électrique, etc.). Nous sommes heureux de voir M. Hepworth faire l’éloge de l’objectif simple, qui est à tort délaissé par les amateurs, sans doute à cause de son prix peu élevé. Seulement si l’auteur ne le conseille que pour le paysage, nous nous permettons de le trouver aussi très recommandable pour les instan- tanés. Les seules critiques que nous ayons à faire à l'ouvrage portent sur la traduction qui, selon lhabi- tude de M. Klary, serre le texte d'un peu trop près, ce qui entraine quelquefois des locutions obscures, G. H, Niewenglowski. Le Sourd (Paul). — Traité pratique des vins, cidres, spiritueux et vinaigres, publié avec la col- laboration de MM. S. Desclozeaux, A. M. Desmoulins, Ed. Delle et H. Ferrand (3° édition), 1 vol. in-8° de 752 pages, illustré de 82 fig. (Prix: 12 fr.) G. Masson, Paris et Coulet, Montpellier, 1892, Ce n’est pas en industrie seulement que la division du travail s impose ; nous sommes déjà parvenus à une époque où l'ouvrage didactique, à moins de se main- tenir dans les strictes limites d’un cadre étroit, exige le concours de plusieurs collaborateurs, écrivant chacun dans sa spécialité, sous la direction de l’un d’ eux, qui imprime à l’œuvre l’unité de vues et de plan indispen- sable, Tel est le cas du livre que vient d'éditer M. Mas- son, livre dont les divers auteurs : MM, Le Sourd, Des- clozeaux, Desmoulins, Delle et Ferrand, ont fait une sorte d’encyclopédie, résumant toute une série d’ou- vrages d'agriculture, de chimie, de technologie, de législation, relatifs aux liqueurs fermentées. Sans autres préambules qu'une courte promenade géographique, l’auteur aborde directement en premier lieu la question de la vinification. La principale con- dition, pour obtenir une boisson de bonne qualité, est assurément de disposer de fruits intacts et sains ; mal- heureusement les intempéries causent des dommages qu’apprécient trop bien, cette année, les Bourguignons, les Bordelais, les Montpelliérains, et, d’ autres part, l'oidium, le mildew, et tutti quanti livrent aux récoltes des assauts sans cesse renouvelés. Le livre indique brièvement la nature du mal et les remèdes à employer et, à ce propos, nous formulons le vœu que des agro- nomes compétents puissent enfin nous éclairer au sujet de l'efficacité absolue du verdet, dont l’emploi pour combattre le mildew est si commode et se généraliserait encore, si l'industrie arrivait à produire à bas prix ce sel, dont la fabrication est exposée avec détails dans l'ouvrage qui nous occupe. Inversement, la description des opérations de vendange nous amène à regretter que le plâtrage, contre lequel les ænologues du nord de la France éprouv ent tant de préjugés, ait été soumis à une réglementation si sévèrement rigoureuse que IF opération perde toute son utilité pratique. Néanmoins, à quelque chose malheur sera bon : l’agriculteur se trouvera obligé de mieux surveiller la fabrication de ses vins, en évitant des fautes dont il se fût peu soucié jadis. L'art de produire un vin agréable autant que solide constitue à présent une branche de la chimie dont les principes sont fort bien exposés dans le livre de M. Le Sourd, Les viticulteurs et les négociants intel- ligents trouveront dans le chapitre du traitement des vins peu de principes qu'ils ne connaissent déjà par instinct ou tradition. La routine ici supplée à la science, d'autant que les fraitements à l'électricité, n’ont pas été mis en pratique, en dehors du laboratoire; il en est de même de la congélation et de l'exposition à la lu- miére, Après avoir montré comment s’obtiennent les vins de marcs, Vauteur, s'appuyant sur l'opinion de M. Aimé Girard, explique que, malgré certaines qualités, ces liquides laissent à désirer au point de vue de l'extrait, du tartre, du tannin, des matières colorantes, et ne peuvent être assimilés aux véritables vins provenant du pur jus de raisins. Des vins de marc aux vins de raisins secs, la transition est naturelle. Leur fabrication exige encore plus de propreté minutieuse que la fer- mentation de la vendange fraîche; nous pensons du reste que les vins de raisins secs, n'ayant plus de raison d’être depuis que la France a reconstitué nombre de vignobles productifs, disparaîtront peu à peu, après avoir rendu transitoirement quelques bons services, lorsque sévissait la crise phylloxérique. Le chapitre relatif à la dégustation précède naturel- lement celui du coupage, procédé qui, pratiqué intelli- gemment et loyalement, non seulement n’est pas blämable, mais peut favoriser à la fois les intérêts des producteurs, du commerce et des consommateurs. Bien longue est la liste des maladies et altérations des vins ! Le lecteur pourra se sentir découragé en parcou- rant l'énumération de tous les moux qui peuvent assaillir l’infortunée boisson. Heureusement à côté du mal figure le remède, ordinairement préconisé par M. Pasteur, dont l’autorité, en pareil sujet, est souve- raine, Du reste, lors de la vinification, des soins de propreté bien entendus, permettent de parer d'avance à bien des déboires. A la suite des vins, un paragraphe spécial est con- sacré aux cidres et potrés, Notons, pour la bonne fabri- cation du cidre, l'utilité de l’emploi du mustimètre qui permet de juger, sans analyse chimique, de la richesse saccharine des jus de pommes : or, la connaissance du degré de maturation du fruit est une circonstance capitale. La plupart des maladies et quelques-unes des sophistications du cidre correspondent à des altérations similaires, à des fraudes identiques pour les vins blancs. Observons que le cidre le plus alcoolique cor- respond, comme degré, à un vin de force moyenne. Les alcools, les boissons dérivées de l'alcool, les liqueurs, les sirops viennent à leur tour et occupent une bonne partie de l’ouvrage. A ce propos, nous lisons avec regret qu'aucun cépage américain producteur direct, n'a pu encore fournir une eau-de-vie assez fine pour remplacer les anciens crus des Charentes, aujourd'hui disparus. Mentionnons simplement les aux winaigres, aux futailles, aux lies et tartres. Le livre, à propos de l'analyse des boissons, décrit les appareils propres à doser l'alcool des vins; l’un d’eux, l’'œnomètre Rey a cela de curieux qu'il fonctionne à la fois comme ébullioscope et comme alambic distilla- teur. En dehors du laboratoire la méthode de l’œnoba- romètre indique l'extrait avec une suffisante précision. Divers instruments permettent à un ignorant en chimie de constater si le plâtrage a été poussé en dehors des limites légales, Au contraire, loin d’être définitivement tranchées, maintes questions relatives aux vins de raisins secs et aux colorants artificiels font l’objet de discussions brûlantes entre les savants les plus dis- tingués, Quelques règles de législation pratique, relatives à l'achat ou à la vente des boissons fermentées com- plètent très heureusement cet intéressant ouvrage technologique mis au courant de la science moderne et qui cependant dans ses 7 à 800 pages ne renferme pas un passage inintelligible pour un profane. UE DE SAPORTA, chapitres consacrés 590 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 8° Sciences naturelles. Ærutat (Eugène), Directeur du Musée d'Histoire natu- relle de Toulouse. — Essai sur l’histoire naturelle du Desman des Pyrénées. Un vol. in-8° de 107 pages avec 14 planches hors texte (Prix : 6 francs). Edouard Privat, 45, rue des Tourneurs, Toulouse, 1892. Le petit Mammifère qui fait l’objet de cette mono- graphie avait été, jusqu’à présent, peu étudié, en raison du caractère restreint de son habitat, de sa rareté, enfin de ses mœurs qui rendent sa capture très diffi- cile, L'ouvrage, magnifiquement édité, que M. Trutat lui consacre, nous le fait connaître jusque dans le mi- nulieux détail de son histologie, Aujourd’hui que l’ana- tomie macroscopique des Vertébrés est faite, les re- cherches des naturalistes doivent, comme l’a fort bien compris M. Trutat, viser surtout l'analyse microsco- pique des organes et des tissus : c’est uniquement dans cette voie et dans celle de l’'embryologie qu’on a chance de rencontrer d’intéressantes nouveautés : ces études semblent promettre un précieux apport à la zoologie, notamment à la discussion des particularités anato- miques attribuées à l'adaptation. L. O. Hartog (Marcus M.). — Quelques problèmes de re- production : étude comparative de la gamétogé- nie, de la sénescence et du rajeunissement du protoplasma. Quarterly Journal of microscopical Science, 1892, L'auteur a résumé, d’après les travaux les plus ré- cents, les différentes formes de la reproduction sexuelle, dans le régne végétal et dans le règne animal, et il formule les conclusions générales suivantes : Les formes absolument agames existent dans le groupe les Monadinées, chez lesquelles le repos est le seul mode derajeunissement. Le changement de genre de vie est un mode de rajeunissement qui s’observe fréquemment chez les êtres apogames ou qui se fécon- dent eux-mêmes. Chez les monadinées les plus élevées et les myxomy- cètes, il se forme un plasmodium, de sorte que le cyto- plasme est renouvelé par plastogamie, tandis que les noyaux émigrent de leur cytoplasme originel. L’isogamie, multiple ou binaire, est un progrès sur la formation d'un plasmodium; elle comprend, aussi bien que la plastogamie, la karyogamie, ou la reconstitu- tion du noyau par la fusion d’un des anciens noyaux. Le rajeunissement de la karyogamie est dù à ce que le noyau et le cytoplasme de la zygote constituent une nouvelle association cellulaire, Un semblable rajeunis- sement s’observe lors de la migration d'un noyau dans une masse protoplasmique dépourvue de noyau, comme lorsqu'un spermatozoide pénètre dans un fragment énucléé d'œuf d’'Echinoderme, S Beaucoup de cas de soi-disant parthénogénèse con- sistent réellement dans la fusion de noyaux, le noyau résultant différant essentiellement des noyaux du cycle cellulaire antérieur. D’autres modes de rajeunissement peuvent rempla- cer la karyogamie des gamètes : un repos prolongé de la cellule gamétogoniale du Botrydium donne à ses cellules-filles la faculté de se développer d'une ma- nière indépendante, au lieu de s’unir comme gamètes. Les organismes qui ont acquis la faculté de se rajeu- nir par karyogamie peuvent, s'ils se rajeunisent long- temps par division sans karyogamie, arriver à un état de sénilité caractérisé par une incapacité reproduc- trice. Chez eux, cependant, le rajeunissement karyoga- miqne est devenu essentiel pour la conservation de Pespèce. Une division nucléaire fréquemment répétée, sans in- tervalles de repos suffisants pour la nutrition et la re- constitution, peut amoindrir l'énergie vitale ou la cons- titution de la cellule, et accélérer son incapacité repro- ductrice ; el cela peut être le processus physiologique de la division, qui si souvent différencie le gamète et détermine ses caractères distinclils. L'incapacité reproductrice de beaucoup de microgamè- tes s'explique cependant suffisamment par l'extrême réduction de leur cytoplasme. Cette incapacité, due à une fissiparité longtemps ou rapidement répétée sans être interrompue par la karyogamie, est une affaire de tempérament coustitutionnel ou de vigueur caracté- ristique seulement de l’espèce : elle manque dans les types primitifs, agames; elle est peu marquée dans les groupes chez lesquels existe la parthénogénèse, bien qu’elle soit souvent absolue dans des formes étroite- ment alliées ; elle a été perdue dans les groupes apo- games. Une évolution ultérieure de cette faiblesse constitu- tionnelle s’observe dans les formes qui sont soit exoga- mes, soit différenciées sexuellement. Chez elles, les noyaux qui se fusionnent pour récupérer leur faculté reproductrice par rajeunissement doivent être d’origine différente. L'exogamie des isogamètes ne peul pas être considérée comme l'indication d’un sexe latent; elle est plutôt l'expression d’une incompatibilité karyogamique, à cause d'une étroite relation consanguine; sous le nom d'allogamie elle à été depuis longtemps reconnue comme étant associée et surajoutée à la bissexua- lité. La faiblesse constitutionnelle atteint son plus haut degré dans les organismes chez lesquels l'allogamie est la plus marquée ; les mauvais effets d'une union entre parents sont proportionnels aux avantages habi- tuels du croisement, qui devient ici une nécessité acquise. Par suite de l'existence occasionnelle de types, qui ne présentent pas de dégénérescence par union entre parents, on constate que la nécessité de l’allogamie n’est pas absolue, mais n’est qu'une question de fai- blesse ou de vigueur constitutionnelle, De ce que dans tous les cas de rajeunissement plas- modial etkaryogamique on observe que, soit la migration du noyau dans un cytoplasme étranger, soit la recons- titution du cytoplasme ou du noyau, soit la combinai- son de ces deux éléments, sont les seuls facteurs néces- saires, on en conclut que la faiblesse constitutionnelle des derniers termes d’un cycle de fissiparité est due à une association trop longtemps prolongée du noyau et du cytoplasme. D’après des considérations tirées des fonctions con- nues du noyau, de sa composition chimique, des effets du repos, du changement de forme ou d’habitat (poly- morphisme et hétéræcisme)sur le rajeunissement, effets qui souvent remplacent ceux produits par la karyoga- mie, il est à penser que les mauvais effets de l’associa- tion prolongée du noyau et de la cellule sont dus : 1° à ce que le noyau répond moins activement aux excita- tions du cytoplasme, et exerce par conséquent un pou- voir directeur insuffisant ; 2° à la nutrition imparfaite du noyau, et 3 à la déchéance de la cellule comme tout organique. Le processus de laréduction nucléaire dans les cellu- les progamétales et dans les gamètes, quoique général, n'est ni uniforme ni universel. Sa constatation dans les cellules mères du pollen des phanérogames permet de conclure à son existence dans les cellules mères des éléments reproducteurs en général, sexuels et asexuels. Les théories de remplacement, pour expliquer la fé- condation, sont inadmissibles, puisqu'elles sont contre- dites par les faits suivants : l’isogamie multiple; la non différenciation des descendants des exo-isogamètes en deux catégories, les membres de l’une des catégo- ries pouvant s’unir à ceux de l’autre, mais ne pouvant s'unir entre eux; l’absence de phénomène d’élimina- tion d'aucune sorte dans la plupart des cas de gamé- togénie ; l'existence d’une véritable parthénogénèse des gamètes mâles aussi bien que des gamètes femelles ; la formation d'individus mâles aux dépens de l'œuf exclusivement femelle chez les abeilles. F. HENNEGUY. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 591 4° Sciences médicales. Loir (D' Adrien). Directeur de l'Austrian Pasteur Ins- titute, — La microbiologie en Australie. Etudes d'hygiène et de pathologie comparée poursuivies à l'Institut Pasteur de Sydney. Thèse de la Faculté de médecine de Paris; un vol. in-8 de 96 p. G. Steinheil. 2, rue Casimir-Delavigne, 1892, Cette thèse est Le résumé des travaux que M. Loir à poursuivis depuis quatre ans en Australie. Ce pays dit-il, « ne contenait, au moment de sa découverte, que des habitants clair-semés et privés d'animaux domestiques. Colons et troupeaux lui sont venus de l'extérieur à des dates variées et relativement récen- tes, Pendant la longue traversée nécessaire autre- fois pour aborder le continent nouveau, les animaux malades sur le quai de départ ont pu disparaitre, de sorte que l'importation d'espèces nouvelles n’a pas nécessairement été accompagnée de l'importation de toutes les maladies qui sévissent sur ces espèces dans notre vieux continent. Puis, à un jour donné, telle ou telle de ces maladies a apparu, à la suite de l’extension des échanges, de l’éfablissement de stations intermé- diaires, de la diminution de plus en plus grande de la durée du voyage. « Une fois installée, et rencontrant une population vierge de toute atteinte, elle s’est développée plus ou moins vite et acclimatée. Puis est venue la période de lutte. Le pays était neuf et n'avait pas eu le temps de se préoccuper des progrès accomplis par la science. Il a cherché une protection dans les lois douanières, et s’est entouré d’un régime de quarantaines plus rigoureusement observées qu'en aucun autre pays du monde. Quel a été l'effet de ces quarantaines ? Jusqu'à quel point ont-elles réussi à protéger le continent nou veau des maladies qui n’y existaient pas encore au moment où elles ont été inaugurées? » Ce sont là toutes questions que M. Loir aborde dans sa thèse. Envoyé par M. Pasteur pour porter en Aus- tralie la connaissance d’un moyen propre à combattre la pullulation des lapins, M. Loir n’a pu jusqu'ici, par suite d’intrigues politiques, qu'ilexplique démontrer l’ef- ficacité du choléra des poules pour la destruction du fléau. Aujourd’hui les obstacles ont disparu, et désormais M. Loir peut espérerintroduire le procédé Pasteur dans les régions de la Nouvelle-Galles du Sud, infestées par les lapins. Mais les résultats déjà obtenus par la mission Pas- teur constituent dès à présent un sérieux dédomma- gement au retard qu'a subi la question des lapins. D'abord c’est la fondation arrêtée en principe d'un Institut Pasteur à Sydney d’après les plans de celui de Paris, et dont la construction va être commencée. Cet Institut fonctionne en réalité depuis un an dans un laboratoire organisé sur un petit ilot de la grande rade de Sydney. M. Loir y a préparé l'an dernier la vaccine charbonneuse nécessaire à la vaccination de 250.000 moutons. Les lecteurs de la Revue savent déjà combien la mortalité par cette maladie charbonneuse est élevée; aussi n’en parlerons-nous pas, pas plus que de l’inoculation du charbon aux marsupiaux, et, sans nous arrêter à l'étude d'une maladie spontanée, trouvée sur les lapins australiens, nous passons tout de suite à la péripneumonie contagieuse des bêtes à cornes, qui a fait son apparilion en Australie, en 1858. « Elle à été introduite dans la station de Boadle, du district Plentey (colonie de Victoria) par une vache que cet éleveur avait fait venir d'Angleterre. « Les conditions de l’élevage du gros bétail sont telles en Australie que la maladie se répandit avec une rapidité effrayante. Les mesures de police sanitaire qui, dans les pays où la production est restreinte, où les animaux sont surveillés de près, parviennent à arrêter la maladie, se montrent impuissantes dans ces déserts où des milliers de bêtes à cornes sont laissées seules sans surveillance dans d'immenses pares où on ne les voit que de loin en loin, » On doit à M. Loir d’avoir organisé à Sydney une station où l’on conserve le vaccin antipéripneumonique et d’où on l'envoie aux propriétaires des troupeaux contaminés. Cette station a, lan dernier, satisfait à plus de 300 demandes, Pour arriver à ce résultat, M. Loir a mis en pratique un procédé indiqué par M. Pasteur en 1892 au moment où il étudiait la péripneumonie aux environs de Paris. L’illustre savant écrivait alors, au sujet du virus ser- vant de vaccin : « Un poumon peut en fournir d'assez grandes quanti- tés, faciles à éprouver pour sa pureté dans les étuves ou même aux températures ordinaires. Avec un seul pou- mon on peut s'en procurer assez pour servir à des séries nombreuses d'animaux. Il y à plus : sans recou- rir à de nouveaux poumons, on pourrait entretenir cette provision de virus de la facon suivante : Il suffi- rait, avant l'épuisement d’une première provision du virus, d’inoculer un jeune veau au fanon ou derrière l'épaule : la mort arrive assez promptement et tous les tissus près ou assez loin du voisinage de la piqûre sont infiltrés de sérosité, laquelle est virulente à son tour ; on peut également la recueillir et la conserver à l’état de pureté. » « Ce procédé, dit M. Loir, n'avait jamais été mis en pratique, il répond absolument aux besoins des pro- priétaires australiens, Si, en effet, la lymphe de l’infiltra- tion est aussi bonne que la lymphe du poumon, il sera facile d’avoir une station où l’on entretiendra conti- nuellement un veau sous l'action de l’inoculation dans une partie défendue, de conserver le virus de cet ædème dans des tubes stérilisés qui seront envoyés au propriétaire et serviront de point de départ à de nou- velles inoculations. « En somme le procédé de M, Pasteur pour conser- ver le virus de la péripneumonie fonctionne en Austra- lie et avec succès. Chaque jour on a des preuves de son efficacité, » La rage est inconnue en Australie; il est imposé une quarantaine de 6 mois pour les chiens. Etant donné sa qualité d'élève de M. Pasteur, M. Loir fut consulté par le Ministre de Agriculture sur la nécessité de ces quarantaines. La réponse de M. Loir fut communiquée à M. Pasteur qui l’approuva dans la lettre ci-jointe que nous pensons intéressant de reproduire : «Tu as parfaitement raison de dire que dans les con- ditions présentes du voyage en Australie et avec les qua- rantaines actuelles, il est pratiquement et scientifiquement probable que l'Australie continuera à jouir de son immu- nilé pour cette maladie, Quoi qu'on puisse t'ouver le con- tratre dans de vieilles publications, il est certain que la rage n'est jamais spontanée chez les animaux. Les chiens peuvent êbre placés dans les conditions les plus contraires à leur genre de vie, froid, chaleur, nourriture, aucun ne deviendra hydrophobe. « La rage,en dernière analyse, est toujours le résultat de la morsure d’un chien enragé. Il serait oiseux de discuter la question de savoir d'où vient le premier animal affecté : la science esf incapable de résoudre la question de l'ori- gine et de la fin des choses. Il est très probable, comme tu le dis dans ta lettre au Ministre, qu'un chien partant d'Europe après avoir été mordu par un animal enragé, mourra pendant le voyage ow pendant la quarantaine qui lui est imposée à son arrivée en Australie; ainsi le veut la période d'incubation. Cette règle n'est pourtant pas absolue ; la science signale des périodes d’incubation de la rage d'une année, même de deux ans et quelques mois, mais ce sont là des exceptions très extraordinaires. Je crois méme que nous n'avons aucune preuve certaine à ce sujet pour la race canine; on peut en citer peut-être un ou deux exemples dans la race humaine. » L. PASTEUR. Nous ne pouvons énumérer ici toutes les questions que M. Loir a traitées dans sa thèse; il l'a remplie de documents importants que voudront consulter tous les spécialistes, L. O, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER (La plupart des Académies et Sociétés savantes, dont la Revue analyse régulièrement les travaux, sont actuellement en vacances.) ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 18 juillet. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, J. Boussinesq : Sur une légère correction additive qu'il peut y avoir lieu de faire subir aux hauteurs d’eau indiquées par les marégraphes, quand l'agitation houleuse ou clapo- teuse de la mer atteint une grande intensité : cas d’une mer elapoteuse. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Pionchon a appliqué à l'aluminium la méthode de détermination des cha- leurs spécifiques aux températures élevées. En exami- nant la ligne qui représente les valeurs de q5, four- nies par l'expérience, on trouve que, jusqu’à 580°, elle présente une courbure modérée et lentement crois- sante. La chaleur spécifique vraie, qui est de 0,201 à Ov, devient, en effet, égale à 0,2894 à 550”. Mais vers 5800, où la fusion se prépare, la courbe se relève rapidement, pour devenir verticale entre 623° et 628°. A cette tem- pérature, la fusion est achevée. Le métal, un peu avant la fusion, prend une structure singulière. Il devient friable et s'écrase sous la moindre pression. L'auteur assigne à l’aluminium, comme point de fusion, la température de 625°. Enfin, fait remarquable, la cha- leur latente de fusion de ce métal a été trouvée égale à 80 calories, c'est-à-dire égale à celle de l’eau, — M. A. Pérot donne les nombres qu'il a trouvés par d'autres procédés, pour la valeur de la constante diélectrique du verre. En déterminant # par la mesure de la capa- cité d’un condensateur, on trouve un nombre qui dé- croît avec la durée de la charge, et tend vers une li- mite qui paraît être égale au nombre donné par la mesure de la déviation des surfaces équipotentielles ; cette valeur serait la véritable constante diélectrique. — M. H. Le Chatelier précise la nature du désaccord entre le principe du travail maximum de M. Berthelot et quelques conséquences des principes fondamentaux de la Thermodynamique. — M. H. Moissan a préparé un nouvel iodure de carbone, le proto-iodure de car- bone, C?I#, en décomposant le tétra-iodure par une faible élévation de température, ou en réduisant ce même composé, en solution sulfocarbonique, par la poudre d'argent. Il en décritles principales propriétés. — M. A. Werner étudie un nitrate basique de calcium répondant à la formule Ca (Az 03)? + Ca (0H)? +21H?0, et cristallisant en longues aiguilles, — MM. H. Bau- bigny et E. Péchard ont trouvé que, pour le sulfate de cuivre et quelques autres sulfates métalliques, la vitesse d’effleurissement peut être considérablement modifiée par la présence de petites quantités d'acide sulfurique dans la liqueur qui fournit ces sels; il sera par suite nécessaire, quand on voudra obtenir des hy- drates stables pour ces sulfates, de s'assurer que leur dissolution est bien neutre au méthylorange. — MM. G. Rousseau et G. Tite présentent les résultats de leurs nouvelles expériences relatives à la décompo- sition des azotates basiques de bismuth et d'urane. — M. E. Fink a préparé une série de composés renfer- mant du palladium, du phosphore et du chlore, entre autres le chlorure phosphopalladeux PhCBPdCE, un acide de formule Ph{(OH)*Pd CI? et les éthers corres- pondants. — M. G. Hinrichs montre que le radical monovalent de cyanogène n’a point une composition du même ordre que le radical simple et monovalent de chlore ; qu’en d’autres termes, les éléments chimiques, si ce sont des substances complexes, ne sont pas du mème ordre de composition que les radicaux com- muns, — M, A. Rosenstiehl, étudiant l'influence du groupe méthyle, substitué à un hydrogène benzénique, sur les propriétés de l’orthotoluidine, fait ressortir la régularité avec laquelle se modifient les fonctions du groupe méthyle. Placé en ortho par rapport au groupe azoté, il cède à une amine secondaire quelques-unes des propriétés des amines tertiaires ; à l’amine tertiaire, ayant libre la place para, il donnera les propriétés d’une amine substituée en para; enfin, à l’amine ter- tiaire, ayant Az H? à la place para, il donnera les pro- priétés d’une diamine alcolylée dissymétrique. — M. P. Cazeneuve montre : 1° que l’instabilité du car- boxyle, soudé au noyau benzénique dans les acides- phénols, croît avec le nombre des hydroxyles phéno- liques qui figurent également dans la molécule; 2 que cette instabilité du carboxyle paraît augmenter avec les substitutions halogénées ou autres dans le noyau; 3° enfin, que dans les acides-phénols, les hydroxyles phénoliques ont, suivant leur position, une influence variable sur la stabilité du carboxyle. — M. J. Riban maintient la manière de procéder et les conclusions insérées dans sa précédente note au sujet des eaux minérales ferrugineuses conservées. — S, A. Albert I‘, prince de Monaco, indique un projet d'observatoires météorologiques à créer sur les îles éparses de l’Atlan- tique (Iles du Cap Vert, Bermudes, Acores, etc.). Ces postes pourraient recueillir les observations qui, étant ensuite centralisées, permettraient d’en tirer des con- séquences pour la prévision du temps. L'auteur a l'in- tention de proposer une réunion de savants délégués par les pays intéressés, — M. Mascart, faisant ressortir l'importance des observations éventuelles des Acores, et à sa suite, M. Bouquet de la Grye, appuient la proposition précédente. 3° SCIENCES NATURELLES, — M. Duclaux, au sujet du rôle physiologique attribué par M. Poehl à la spermine, fait remarquer que, dans l'expérience consistant à faire agir le chlorure d'or sur le magnésium en poudre, ce n’est point cette propriété chimique de la sper- mine d’exciter, par sa présence seule, les oxydations, qui entre en jeu, mais bien cette propriété physique, commune à tant d’autres substances, de rendre mous- seux le liquide dans lequel s'accomplit Ja réaction. On peut, en effet, reproduire l'expérience ci-dessus avec une foule de corps, l’eau de savon et la saponine, par exemple. — M. A.-B. Grifiths a extrait, par une mé- thode qu'il décrit, une nouvelle leucomaine des urines des épileptiques, ayant pour formule C'2H16 A7 OT ; c’est une substance blanche, cristallisant en prismes obliques. Cette leucomaïne vénéneuse produit les trem- blements, les évacuations inteslinales et urinaires, la dilatation pupillaire, les convulsions, et enfin la mort. — M. G. Philippon, recherchant les causes des diffé- rences constatées dans les expériences de Paul Bert soumettant des lapins à des pressions de 6 à 8 atmos- phères, puis à des décompressions plus ou moins brusques, arrive aux conclusions suivantes : 1° c’est par l’action mécanique des gaz qui se dégagent dans leurs vaisseaux, que meurent les animaux placés dans l'air comprimé, par suite de la décompression brusque; 2° il suffirait de quelques instants, moins de deux minutes, pour que le gaz accumulé dans le sang, par suite de la compression, soit éliminé com- plètement par les poumons, ce qui explique le retour des animaux à l’état normal, quand on les ramène len- D. Put LA ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tement à la pression ordinaire, — M. Paul Marchal, ayant étudié la glande coxale du Scorpion, a trouvé qu'il y avait communication entre la substance médul- laire et la substance corticale de cette glande. La glande coxale des Arachnides peut être considérée comme étant de même nature que la glande antennaire et la glande du test des Crustacés; de plus, la substance médullaire du Scorpion correspond au saccule des Crustacés. Ces organes des Arachnides et des Crustacés peuvent être regardés comme faisant partie d'une série métamérique comparable à celle des organes segmen- taires des Vers. — M. A. Pomel décrit les ossements des membres d’une espèce de Singe, dont la tête et la dentition sont encore inconnues, et provenant des phos- phorites quaternaires d'Algérie. L'auteur pense qu'il s’agit là d’un Macaque, et il le désigne sous le nom de Macacus trarensis. — MM. Simon Duplay et Maurice Cazin traitent de la réparation immédiate des pertes de substance intra-osseuse, à l’aide de corps asep- tiques. Pour obtenir une réparation plus rapide et plus parfaite des cavités osseuses, les auteurs rem- plissent ces cavités, rendues aseptiques, avec différents corps spongieux, employés journellement en chirurgie ; ils recommandent plus spécialement l’éponge, la gaze aseptique ou le catgut, comme leur ayant donné les meilleurs résultats. Ces expériences ont été faites sur les animaux. Pour appliquer cette méthode à l’homme, il convient de stériliser parfaitement la cavité patholo- gique, tout en rendant le corps obturant absolument aseptique. Les auteurs continuent leurs recherches dans cette voie. — Des faits constatés par lui trois jours après la catastrophe de Saint-Gervais-les-Bains (Haute-Savoie), M. F.-A. Forel conclut que celle-ci est due à une avalanche du glacier suspendu des Têtes - Rousses. Cette avalanche, ayant fait d’abord une chute de 1500 mètres de hauteur sur un parcours de 2 kilo- mètres, sous forme de masse glacée à peu près pure, s’est transformée en une masse boueuse, semi-liquide, qui a parcouru comme une coulée vaseuse, un trajet de 11 kilomètres pour se déverser dans l’Arve, qui l’a diluée et emportée au Rhône. L'auteur ajoute que, selon lui, la catastrophe ne pouvait être prévue, mais il pense que l’on peut en empêcher le retour. — M. Emile Belloc rend compte de l'étude qu'il a faite sur certaines formes de comblement, obser- vées dans quelques lacs des recherches, lPauteur a fait un très grand nombre de sondages à l’aide de son nouvel appareil de sondage portatif à fil d'acier 1, ce qui lui a permis de relever, topographiquement, le relief immergé de ces bassins lacustres et de pratiquer de nombreuses coupes avec beaucoup d’exactitude, Mémoires présentés. — M. E. Geoffroy : Sur les pro- priétés toxiques du Robinia Nicou, et sur le principe actif de cette plante. Nomination. — M. van Beneen est élu associé étranger, en remplacement de feu sir George Airy. Séance du 25 juillet, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Tacchini : Ré- sumé des observations solaires faites à l'Observatoire royal du Collège romain pendant le deuxième tri- mestre de 4892. — M. Em. Marchand : Observations du Soleil, faites à l'Observatoire de Lyon (équatorial Brunner), pendant le premier semestre de 1892. — M. Deslandres fait connaître les résultats nouveaux obtenus sur l'hydrogène par l'étude spectrale du So- leil. M. Balmer a indiqué une fonction simple des nombres entiers successifs, qui représente exactement la série des quatorze radiations de l’hydrogène, assi- milables à une série d’harmoniques sonores. Cette fonction, qui s'applique aussi à la plupart des métaux, est la suivante : N= A — —, N étant le nombre de vi- n- ! Voir au sujet de cet appareil la Revue du 15 avril 1892, page 234. Pyrénées, Dans ces. 593 brations, À et B deux constantes, et n un nombre entier variant de 3 à 16. Or l’auteur a trouvé, dans le Soleil, la série des harmoniques de l'hydrogène, avec cinq radiations en plus, correspondant exactement aux cinq termes suivants de la formule de Balmer. Les résultats précédents ont été obtenus en photographiant le spectre d’une protubérance extraordinairement in- tense. Or, le spectre de l'étoile temporaire du Cocher, dans la région de l’épreuve, est identique pour la composition à celui de la protubérance. De plus, les raies du spectre de l'étoile offrent, de même que celle du calcium, à la base de la protubérance, des renver- sements, qui sont liés à la rotation de l’astre, — M. Zenger fait remarquer que les dernières érup- tions volcaniques accusent la même périodicité que les grands mouvements atmosphériques et sismiques: il cherche à montrer comment on peut, à l’aide de l’hé- liophotographie, en prévoir le retour à l'avance. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. R. Blondilot traite de la vitesse de propagation des ondulations électromagné- tiques dans les milieux isolants, et de la relation de Maxwell, L'auteur énonce la proposition suivante : Un oscillateur étant donné, la longueur des ondes qu'il est susceptible d’émettre doit rester la même, quel que soit le milieu isolant dans lequel l'expérience est faite. Cette proposition a été vérifiée pour l'essence de téré- benthine et l'huile de ricin. L'auteur en a déduit, en outre, la relation de Maxwell 4=— »2., — M. Berthelot présente quelques observations nouvelles relatives à l'emploi de la bombe calorimétrique et insiste sur les conditions différentes qui président à son emploi, pour brûler les divers corps combustibles fixes, volatils ou gazeux. — M. H. Moissan indique plusieurs prépara- tions du trisulfure de bore, Bo?S5, et résume quelques propriétés nouvelles de cet important composé, peu étudié jusqu'ici. — M. P. Schutzenberger rend compte de ses recherches sur la constitution chimique des peptones. Les premiers résultats obtenus se rap- portent à la fibrine du sang de cheval et à sa transfor- mation, sous l'influence de la pepsine dite extractive à 100 pour 100, en présence de l'acide chlorhydrique. L'auteur a obtenu une poudre jaunâtre, la fibrinpep- tone, renfermant des albumoses. Cette fibrinpeptone décomposée sous l’action de la baryte, a donné un résidu fixe se rapprochant de la forme générale Cr H?"Az20; il y a, en outre, mise en liberté de com- posés volatils appartenant au groupe du pyrrol ou de la pyridine. Les analyses ont montré que là fibrinpep- tone, prise dans son ensemble, ne diffère de la fibrine initiale que par les éléments de l’eau, Sous l'influence de la baryte, elle perd, comme les albuminoïdes en général, le quart de son azote total sous forme d'am- moniaque ; 1l se sépare en même temps de l'acide car- bonique et de l'acide acétique. — M. E. Péchard, poursuivant ses recherches sur l’acide permolybdique et les permolybdates, fait connaître les résultats ob- tenus pour la chaleur de formation de ces composés. D'après les chiffres obtenus, l'acide permolybdique déplacera l'acide carbonique de ses combinaisons et sera déplacé par les acides forts; de plus, ce corps se formant avec absorption de chaleur, nécessite parsuite l’intérvention d’une énergie étrangère, — M. Gran- ger a obtenu le phosphure de mercure cristallisé, Hgÿ Ph?, soit en faisant réagir les combinaisons halo- génées du phosphore (iodure) sur le mercure, soit en faisant passer l’iodure de phosphore sur du mercure chauffé vers 250°, Mais, dans ce dernier cas, le phosphure et l'iodure se subliment, et leur séparation est longue et pénible, — M. T. Klobb a fait connaître, dans une communication précédente, le procédé, fondé sur l’em- ploi du sulfate d’'ammoniaque, à l’aide duquel on peut obtenir, à l’état cristallin, certains sulfates anhydres. L'auteur a appliqué ce traitement au sulfate de plomb et au sulfate de cuivre; avec ce dernier sel, on obtient des sulfates dont la nature est en rapport avec la tem- pérature à laquelle on s'arrête. — M. G. Guillemin, à la suite des recherches de MM. Osmond et Werth sur 94 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES la détermination de la structure de l'acier fondu, a été amené à soumettre au même procédé, c’est-à-dire à l'analyse microchimique, divers alliages industriels. Cette méthode lui a permis de déterminerrapidement et d’une facon sommaire la nature d’un bronze ou d’un al- liage industriel, par la simple inspection d’une surface polie et dérochée, et de reconnaitre si cet alliage a été simplement moulé ou bien s'il a été seulement es- tampé, laminé ou étiré. — M. H. Cousin a modifié le procédé d’extraction de l'homopyrocatéchine, et, avec ce composé, il a préparé deux dérivés mononitrés iso- mères de formule CT HT Az0', — MM. Paul Sabatier et J.-B. Senderens font connaître une nouvelle classe de combinaisons, les métaux nitrés, qu'ils obtiennent par l'action à froid du peroxyde d'azote, débarrassé des traces d'acide azotique qu'il peut contenir, sur certains métaux, tels que le cuivre et le cobalt; les auteurs traitent aussi des propriétés du peroxyde d'azote. — M. G. Hinrichs traite de la chaleur spécifique des atomes et de leur constitution mécanique. Entre le ra- dical simple (élément chimique) et le radical complexe, se manifeste un contraste mécanique qui fait renoncer à l’idée de considérer les éléments comme étant des radicaux non encore décomposés. Le principe fonda- mental à été énoncé par M. Berthelot, L'auteur donne la démonstration élémentaire de sa signification méca- nique, laquelle peut être formulée de la facon sui- vante : Dans les composés chimiques, les atomes des éléments entrent en individualités intégrantes, retenant un mouvement propre de vibration; mais les atomes des éléments chimiques vrais sont des corps solides ou liquides, dont les atomes constituants n’ont pas de mouvements individuels, — M. F. Chancel a préparé la monopropylurée : 1° par l’action de l’ammoniaque sur l’isocyanate de propyle, et 2° par l’action de l’iso- cyanate de potasse sur le sulfate de monopropylamine. L'auteur à préparé aussi la dipropylurée dissymétrique par l’action de l'isocyanate de potasse sur le sulfate de dipropylamine. — M. Adolphe Carnot fait connaitre les résultats obtenus quant à la composition des osse- ments fossiles et à la variation de leur teneur en fluor pour les différents étages géologiques. En premier lieu, la proportion de fluor est, dans beaucoup d’ossements fossiles, dix ou quinze fois aussi grande que dans les os modernes. En second lieu, dans les terrains pri- maires et secondaires, les proportions relatives de fluor et d'acide phosphorique sont, en moyenne, presque les mêmes que dans l’apatite cristallisée. Dans les terrains tertiaires el quaternaires, il y a décrois- sance progressive et très marquée de la proportion de fluor, Mais celle-ci reste encore beaucoup plus élevée dans les ossements quaternaires que dans ceux de l'ère moderne. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. P, Petit a {rouvé que: 1° la presque totalité du fer se trouve dans l'orge à l’état de nucléine; 2° le fer est contenu exclusivement dans les téguments et dans l’embryon, ce dernier ren- fermant dix fois plus de fer que l'orge prise en bloc; 3° pendant la germination, la quantité de fer non nu- cléique varie peu, mais la proportion de fer dimi- nue, ce qui prouve que l'embryon possède en lui-même toute la réserve de fer. — MM. P. Blocq et J. Onanoff ont entrepris des études dans le but d'établir les rap- ports numériques existant entre les fibres nerveuses d’origine cérébrale destinées aux membres, Leurs nu- mérations leur ont prouvé que les fibres nerveuses d’origine cérébrale destinées au mouvement sont plus nombreuses pour les membres supérieurs que pour les membres inférieurs, dans la proportion de 5 pour 1 environ. On sait, en effet, que les membres thoraciques sont utilisés surtout pour les mouvements intelligents et conscients, tandis que les membres abdominaux sont employés principalement pour les actes automatiques et inconscients. Les auteurs tirent, en outre, de leurs résullats, quelques déductions au point de vue patho- logique. — M. P. Binet, étudiant la toxicité comparée des métaux alcalins et alcalino-terreux, employés à l’état de chlorures et en injections sous-cutanées, énonce les résultats auxquels il est conduit. La pro- priété la plus générale, exercée sur l'organisme par les sels métalliques, est la perte d'excitabilité du système nerveux, central et périphérique, puis lal- tération de la contractilité musculaire. L'auteur a étudié, de plus, les caractères particuliers qui dis- tinguent les métaux et qui permettent d'établir une relation entre la nature de l’action physiologique exer- cée par le métal et la place qu'il occupe dans la clas- sification physique. — M. C. Phisalix, continuant ses recherches sur le Bacillus Anthracis, montre que la perte, chez ce bacille, de la propriété sporogène, si- gnalée par lui dans une communication précédente, doit être attribuée à l’action combinée de la chaleur et de l'air et à l'oxydation lente du protoplasma. La pri- vation d'oxygène contrebalance l’action de la chaleur et conserve au protoplasma ses propriétés reproduc- trices. En ensemencant des cultures restées asporo- gènes depuis plusieurs mois et pendant plusieurs géné- rations, dans du bouillon ordinaire étalé en couche mince et additionné de quelques gouttes de sang frais de cobaye, on restitue à ces cultures la faculté sporu- lative. L'auteur signale à cet égard le rapprochement inattendu entre la fonction reproductrice et la fonction virulente. Dans le but d’élucider le mécanisme du re- tour de la propriété sporogène dans l'expérience pré- cédente, l’auteur fait remarquer que les pseudo-spores ou spores rudimentaires, corpuscules réfringents si- gnalés par M. Chauveau dans le mycélium chauffé à 420, se montraient dans toutes les cultures devenues as- porogènes avec l’aspect et les caractères des spores atténuées, ne se distinguant que grâce à leur différence de résistance à la chaleur, résistance variable avec les conditions de vie et de nutrition du microbe. — M. L. Cuénot, ayant étudié les organes excréteurs des Gastéropodes pulmonés par la méthode dite des injec- tions physiologiques, a reconnu chez eux trois sortes d'organes excréteurs : 1° le rein; 2 certaines cellules du foie (cellules vacuolaires); 4° les grandes cellules vésiculeuses du tissu conjonctif (cellules de Leydig), les deux premiers étant des organes d'élimination, le troisième un rein d’accumulation. L'auteur s’est servi, pour ses injections, de solutions peptoniques renfer- mant diverses matières colorantes solubles dont il in- dique le lieu d'élimination. Il fait remarquer finale- ment que le rôle physiologique du foie des Pulmonés, dans l’excrétion, permet de les rapprocher des Opis- thobranches, dont le foie renferme des cellules excré- trices à grandes vacuoles, tandis que le foie des Proso- branches paraît être uniquement une glande digestive. — M. A.-B. Griffiths signale une globuline incolore, l'achroglobine, qu'il a retirée du sang de la Patella vul- gata et qui possède une fonction respiratoire à la ma- nière de l'hémoglobine et de lhémocyanine. —- M. Louis Mangin, étudiant la constitution de la trame organique qui, dans les cystolithes, sert de sup- port aux cristaux, y a constaté d’abord la présence constante des composés pectiques associés à la cellu- lose ; il y a découvert, en outre, la présence de la callose. L'auteur fait connaître les méthodes permettant de mettre cette substance en évidence, ainsi que les di- verses cellules et les organes où on la rencontre; on la trouve en particulier dans les membranes des cel- lules de l’épiderme ou du parenchyme qui limitent les régions subérifiées à la suite d'une mutilation de la feuille. — M. J. Huber et F. Jadin font connaître une nouvelle algue perforante à ajouter aux végétaux semblables, au nombre de dix, actuellement connus. C'est une Chamæsiphonée, à laquelle les auteurs ont donné le nom de Hyella fontana, trouvée à la source du Lez et dans d’autres cours d’eau près de Montpellier; cette algue vit aussi bien dans les vieilles coquilles de Mollusques terrestres, ayant séjourné dans les eaux douces, que dans les pierres calcaires du fond des ruis- seanx et rivières. — M, Schribaux rend compte du résultat de ses recherches pour l'amélioration des ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 595 plantes cultivées, Il a trouvé que, dans une inflores- cence, les fleurs les plus précoces produisent les se- mences les plus lourdes, et que ce sont celles-ci qui muürissent les premières. Il en résulte que, quelle que soit la destination des plantes que l’on cultive, il con- vient de donner la préférence aux grosses semences. — M. Pomel fait connaître deux nouveaux Ruminants par leurs restes fossiles trouvés dans les gisements quaternaires de la dernière époque néolithique en Al- série. Ce sont le Cervus pachygenys et lAntilope Mau- pasi, connus, le premier par des portions de mandi- bules, et le second par des arrière-molaires supérieures’ et inférieures. — MM. J. Vallot et A. Delebecque, ayant cherché à déterminer d’une facon précise les causes de la catastrophe survenue à Saint-Gervais, pensent que, vu la configuration des lieux, l'hypothèse d'une simple avalanche de glace doit être écartée ; leur opinion est qu'il s’est formé là un lac sous-glaciaire, et les effets destructeurs observés seraient dus à une avalanche d'environ 100.000 mètres cubes d’eau et 90.000 mètres cubes de glace. Les auteurs pensent, en outre, que ce lac se reformera peu à peu et que le remède consisterait à faire sauter les seuils rocheux, afin de permettre l'écoulement des eaux de fusion du glacier. _ Mémoires présentés. — M. L. Hugo : Sur quelques particularités de la Carte de la voie lactée, dans la constellation du Cocher, — M. Drillon : Sur un projet de paquebots à grande vitesse. — M. Ch. Lestoquoi demande l’ouverture d'un pli cacheté contenant une note intitulée : « Projet-étude d’un manomètre à com- mutateur, susceptible de nombreuses applications en Hydraulique et Hydrographie. » — M. A. Allemand : Complément à ses précédentes communicalions sur le choléra, — M. Stabikoff : Nouvelle étude sur l'univers. En. BELZUNG. Séance du 1 août. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Alphonse Dumou- lin : Sur les courbes tétraédrales symétriques, M. Ja- met à énoncé la proposition suivante : Un point M étant pris arbitrairement sur une courbe tétraédrale, consi- dérons la cubique gauche tangente en M à la courbe té- traédrale et passant par les sommets du tétraèdre de symétrie. 1° La courbe tétraédrale et la cubique gauche ont, au point M même plan osculateur. 2 Lorsque le point M se meut sur la courbe tétraé- drale, le rapport des courbures, au point M, de la cu- bique gauche à la cubique tétraédrale, demeure cons- tant. En établissant quelques propriétés infinitésimales des courbes dont les tangentes font partie d’un com- plexe quelconque algébrique ou transcendant, l’auteur complète ainsi le théorème : 3° Au point M, la courbe tétraédrale et la cubique gauche ont des torsions égales. — M. le Secrétaire perpétuel signale, parmi les pièces imprimées de la correspondance, sept nou- velles feuilles des cartes de France et de Tunisie, pu- bliées par le Service géographique de l’armée. 29 SaiENCES PHYSIQUES. — M. G. Salet : M. Stokes a énoncé la loi suivante : Les rayons émis par une subs- tance fluorescente ont toujours une réfrangibilité moindre que celle des rayons excitateurs. Par un dis- positif expérimental nouveau, M. Salet montre l’exacti- tude de celte loi et réduit à néant les attaques de M. Lourmel en même temps qu'il rattache la loi au principe de Carnot par l'intermédiaire de la remarque de M. Pellat : Les rayons les plus réfrangibles qui ap- paraissent dans le spectre à des températures de plus en plus élevées, peuvent effectuer des réactions chi- miques qui ont besoin, pour se produire, du concours de sources de chaleur à températures également crois- santes. — M. H. Moissan, qui a préparé le trisulfure de bore en faisant réagir le soufre sur le triodure de bore par voie sèche au rouge sombre, obtient le pentasulfure Bo?S5 en répétant la même réaction à la température prdinaire et en solution sulfocarbonique; c’est une ooudre blanche, bien cristalline, de densité 1,85, fon- dant à 3909, décomposable immédiatement par l’eau en acide borique, hydrogène sulfuré, avec dépôt de soufre ; chauffé dans le vide vers 400%, il se dédouble en soufre et trisulfure ; le même dédoublement a lieu en présence des métaux. — M. de Forcrand s'appuie sur ses études thermochimiques récentes, sur les pyrogallols sodés, pour montrer que des deux formules admises pour le pyrogallol, C6HS(OH)Ÿ, , , ou C6HS(OH)#,, ,, la première seule s'accorde avec ses nombres thermiques, la se- conde est à rejeter, — M. Leprince a isolé de l'écorce de Rhamnus Prushiana où Cascara Sagrada un corps nouveau la cascurine qui paraît être le principe actif de la plante; il se présente en aiguilles prismatiques d’un jaune orange, solubles en rouge pourpre foncé dans les alcalis ; sa formule est C2 H10 05; il appartient à la série aromatique, car la fusion avec la potasse fournit la phloroglucine ; la rhamnétine de M. Schutzenberger lui est peut-être identique ou simplement isomérique avec elle. — M. F. Parmentier répond à la dernière com- munication de M. Riban relative aux eaux ferrugi- neuses. C. MATiGNoN. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. P.-P. Dehérain : Surles cultures dérobées d'automne, utilisées comme engrais verts. Par les analyses des eaux de drainage provenant des pluies d'automne, on trouve que les pertes d'azote nitrique sont très réduites, ou même supprimées, lors- que les terres sont couvertes de végétaux. En semant à l'automne, immédiatement après une céréale, de la graine de vesce, on met pour ainsi dire l’azote des ni- trates en réserve dans une malière organique; cet azote ne devient assimilable qu'au printemps suivant, alors qu'il peut être utilisé par les plantes occupant le sol; de plus, dans le cas d’une légumineuse, le sol s’enri- chit en azote prélevé sur l'atmosphère. — MM. Chibret et Huguet rendent compte des résultats de l'examen physiologique de quatre vélocipédistes après une course de 397 kilomètres. Ils ont trouvé, entre autres, que le coefficient d’utilisalion de l’azote urinaire varie en rai- son inverse du degré de fatigue, que ce coefficient est un peu inférieur à la normale pour un individu non fa- tigué par la course et que la fatigue est liée au gaspil- lage de lazote. Enfin le premier arrivé a dù probable- ment son succès à l’énergie anglo-saxonne, aidée par l'alcool et la kola. — MM. F. Berlioz et A. Trillat ex- posent les résultats qu'ils ont obtenus concernant les propriétés des vapeurs de l’aldéhyde formique ou for- mol. Celles-ci se diffusent rapidement dans les tissus animaux, qu’elles rendent imputrescibles, ets’opposent, même en faible quantité, au développement des bacté- ries et des organismes. Elles stérilisent en quelques minutes les substances imprégnées de bacilles d’Eberth et de charbon. Enfin les vapeurs ne sont toxiques que respirées en grande quantité et pendant plusieurs heures. — M. E. Hédon, par un procédé qu'il décrit, a réussi à obtenir la greffe sous-cutanée du pancréas, De l'opération conduite comme il l'indique, l’auteur tire les conclusions suivantes, importantes au point de vue de la théorie du diabète d’origine pancréatique : 4° si à un chien porteur d'une greffe on extirpe tout le pan- créas qui reste dans l'abdomen, il ne se produit pas de glycosurie ; 2° l’extirpation de la greffe, faite sans anes- thésie, en quelques minutes, comme on enlève une tu- meur, est suivie d’une glycosurie très intense, qui se développe en quelques heures et persiste jusqu'à la mort de l’animal. Ces expériences de greffe prouvent que le pancréas fonctionne comme une glande vascu- laire sanguine, — M. Léon Vaillant fait un certain nombre de remarques sur l'alimentation chez les Ophi- diens. Les observations se rapportent à un exemplaire du grand Anacondo de l'Amérique méridionale (Eunec- tes murinus, Linné), long d’environ six mètres, qui, chose rare pour l'espèce, a accepté la nourriture dès son arrivée à la ménagerie des reptiles du Muséum. Depuis son entrée, ce serpent à mangé en moyenne cinq fois par an. Sa nourriture a consisté, presque tou- jours, en boucs et chèvres de petite taille; il a pris néanmoins, dans l’espace de six ans, trois fois des la- ER 596 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES : pins, et une fois une oie, Les serpents manifestent de véritables goûts, mais lorsque l’on est arrivé difficile- ment à leur faire prendre le premier repas, ils accep- tent ensuite beaucoup plus aisément ce qui leur est offert, Quant au volume des proies, l’Anacondo dont il s’agit a avalé un jour un chevreau de douze kilos, re- présentant à peu près le sixième du poids du sujet, Le volume relatif de l’animal ingéré, chez les serpents à l’état de liberté, doit être souvent beaucoup plus grand, ainsi que le prouve le fait suivant. Une vipère de France (Pelias berus, Linné) ayant été placée dans une même cage avec une vipère à cornes (Cerastes cerastes, Linné) à peu près de même taille, dès la nuit suivante, cette dernière avala sa compagne de captivité; son corps s’é- tait distendu au point de laisser entre les écailles écar- tées, un espace nu, égal à leur propre largeur ; la di- gestion eut lieu normalement, Les résidus de la digestion sont évacués en une seule fois, après chaque repas, mais dans les déjections on peut trouver des débris provenant des repas antérieurs, — M. Frédéric Guitel rend compte de ses observations relatives aux mœurs du Clinus argentatus, Cuv. et Val., que l’on trouve dans la Méditerranée, au Cap de Bonne-Espérance et en Aus- tralie. Cette espèce est ovipare, contrairement à ce que l’on avait constaté, mais pour quelques autres espèces seulement. L'auteur a réussi à faire vivre les Clinus en captivité dans un bac à courant constant, contenant quel- ques touffes de Cystoseira, algues dans lesquelles ils vivent à l’état de liberté, fixées sur des fragments de roche. L'auteur a vu les femelles pondre leurs œufs au milieu de ces algues, et un seul mâle venir ensuite, après s'être frayé un canal au travers de la masse de ces œufs, les féconder et les garder. La coque de l’œuf du Clinus argentatus porte un grand nombre de fila- ments fixés sur une calotte peu étendue, et disposés en faisceaux onduleux enroulés régulièrement autour de l’œuf ovarien mûr. Au moment de la ponte, les faisceaux se déroulent ; les filaments quiles constituent se collent avec ceux des autres œufs, s’enchevêtrent parmi les branches des algues et s’y fixent. L'auteur décrit en détail les faits, dont il a été témoin, concernant les ha- bitudes de ce poisson. — M. Emile Blanchard, au sujet de la note précédente, fait remarquer que les espèces du genre Epinoche ont des mœurs analogues à celles du Clinus étudié.—MM. C.-Eg. Bertrand et B. Renault décrivent une algue permienne à structure conservée, trouvée dans le boghead d’Autun, à laquelle ils don- nent le nom de Pila bibractensis. C'est un thalle ellip- soide multicellulaire, les cellules étant disposées à peu près radialement. Celles-ci renfermaient un proto- plasme réticulé et un gros noyau axial; les thalles se dissociaient par leur région centrale. Les Pilas s’accu- mulaient en lits sensiblement alignés et vivaient libres et flottants dans les eaux brunes de l’époque permienne, au moment de la formation des schistes bitumineux supérieurs. — M. A. de Grossouvre a signalé précé- demment les relations de synchronisme existant entre les assises crétacées de la Touraine et celles de la craie blanche du bassin de Paris. L'auteur confirme aujourd’hui ces données par l’observation directe, d’où il résulte que la craie des environs de Chartres est constituée par des sédiments intermédiaires entre ceux de la craie de la Touraine et ceux de la craie blanche proprement dite. Des courants, dirigés du sud au nord, ont fait pénétrer, vers la fin de l’époque cénomanienne, la faune aquitanienne dans le bassin de Paris, Les dif- férences de faunes observées dans les assises synchro- niques des deux bassins, proviennent surtout des va- riations bathymétriques. Mémoires présentés. — M. Dubut : Note relative à un liquide propre à détruire le Phylloxéra. — M. G. Bou- ron : Procédé pour rendre les objets incombustibles, M. Eugène Soulié : Petit appareil figurant les particu- larités d’une éclipse partielle de Lune. Ep, BELzuNG, ACADEMIE DE MEDECINE Séance du 12 juillet. M. Magitot : De l’hystérie chez les nouveau-nés, Ce terme «l’hystérie desnouveau-nés », admis parM. Chau- mier, n’est qu'un mode d'interprétation pour désigner un groupe d'accidents infantiles attribués communé- ment à la dentition. L'auteur entreprend le procès à fond de cette interprétation et conclut par ces mots : « Nous souhaitons que la classe des maladies dites de la dentition, chez l'homme, soit définitivement rayée du cadre de la nosologie médicale. » —M. A. Béchamp : Discussion sur la pleurésie et son traitement. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 6 juillet. M. Zune présente un nouveau modèle de microscope polarisant disposé pour la vision binoculaire. Il montre qu'on peut déceler les huiles grasses dans le beurre par l’examen microscopique après l’avoir refroidi plu- sieurs heures dans une glacière; les huiles cristalli- sent en longues aiguilles. — M. Béchamp indique les précautions nécessaires pour obtenir un pouvoir rota- toire constant dans la préparation de l'acide gum- mique. — M. Adrian fait ressortir l'intérêt que pré- sente l’étude du pouvoir rotatoire comme moyen de caractériser les gommes de diverses provenances. — M. Causse présente un acétal cristallisé résultant de la combinaison de l’acétone et de la résorcine en pré- sence d'acide sulfurique concentré. Cet acétal a pour formule : Cf H140*, H° 0. Séance du 9 juillet. M. Brochet a étudié l’action du chlore sur l'alcool isobutylique, et constaté qu'il se produit principale- ment de l'aldéhyde isobutylique monochlorée : CHS SCO CHO CH” Méthyl 2 — chloro 2 — propanol. L’acide sulfurique polymérise cette aldéhyde en donnant un composé fut sible à 37° et bouillant 110°-120°, l'examen cryosco- pique lui donne comme formule [C*HTCIOR. — M. Grimaux a cherché à différencier les deux atomes d'azote que renferme le quinine; l’un d’eux appartient vraisemblablement à un noyau quinoléique et l’autre à un noyau pyridique. Si l’on traite à froid le diiodo- méthylate de quinine par la soude, il s’élimine une molécule d’iodure de méthyle et il se forme un iodo- méthylate différent de celui que l’on obtient par fixa- tion directe de l’iodure de méthyle sur la quinine. On obtient le même isomère en traitant par l’iodure de méthyle,non plus la base libre, mais le sulfate basique, en même temps il se produit de l'acide sulfurique libre. L'iodométhylate de quinanisol étant de même décomposé à froid par la soude, tandis que l’iodomé- thylate de pyridine résiste. M. Grimaux admet que dans l'iodométhylate de quinine ordinaire, c’est l’azote pyridique qui est saturé. Dans l’action des alcalis sur l'iodométhylate de quinine ou de quinanisol, M. Gri- maux a obtenu une substance cristallisée douée d’une fluorescence verte considérable, — M. Léger a obtenu, dans la décomposition des iodométhylates de quinine sans l'intervention des alcalis, la même fluorescence verte. A. ComBEs. Errarum, — Dans notre dernier numéro, page 535, 2° colonne, ligne 32 : Au lieu de : du fer à travers le spectre, lisez : à tra- vers le spectre du fer, EN Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER Paris.— Imprimerie F,. Levé, rue Cassette, 17, «had | VOTE 3° ANNÉE N° 17 15 SEPTEMBRE 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LA NOMENCLATURE CHIMIQUE AU CONGR L, Association francase pour l'avancement des sciences a mis dès l’an dernier, à l’ordre du jour de sa Section de chimie, la question de la réforme de la nomenclature chimique; et elle a publié le texte complet des rapports qui ont été présentés à la Commission internationale par la sous-commis- sion française !. Les lecteurs de la Revue n'ont pas oublié qu'un Congrès international s’est réuni à Genève au mois d'avril dernier, et qu'il a pris un grand nombre de résolutions que nous avons briè- vement résumées ici même ?. Depuis la réunion de Genève, on s’est mis à l’œuvre et l’on a cherché à appliquer rigoureusement les décisions prises; comme nous le faisions prévoir, on s’est heurté à de graves difficultés dans l'application stricte des règles posées, et l’on a constaté un nombre impor- ant de lacunes, qu'il faut combler. C'est au Congrès de l'Association française pour l'avancement des sciences, qui s'ouvre aujourd'hui même à Pau, que pourront s'agiler et se résoudre les questions restées en suspens. Les savants de tous les pays, qui se sont rendus à Genève, ont été invités à venir à Pau : beaucoup le feront et l’on peut, dès à présent, espérer une entente com- plète. L'Association qui a, dès l’origine, soutenu les initiateurs de l'œuvre, aura, parson achève- 1 On peut se procurer le texte complet de ces rapports, suivi des résolutions prises au Congrès de Genève, au siège de l’Associalion, 28, rue Serpente. 2 Voyez à ce sujet la Revue du 30 avril 1892, t, Il,.p. 257 et suiv. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, = H 1 S DE PAU ment, rendu un signalé service à la science, et justifié une fois de plus son titre. Je vais maintenant exposer, de la manière la plus simple et la plus courte possible, comment est posée la question à l'heure actuelle, et com- ment, à mon sens, elle peut se résoudre facilement en ajoutant simplement aux décisions du Congrès de Genève quelques conventions complémentaires. Les idées que je vais exposer, sous ma responsa- bililé, ne me sont pas absolument personnelles; elles résument, je crois, l’opinion de la sous-com- mission francaise. Il Les principes sur lesquels repose la nouvelle nomenclature peuvent être ainsi résumés : Dans un composé organique, on envisage une chaîne où un noyau que l’on considère comme pré- pondérant, etauquel on rapporte, par substitution, tous les corps qui peuvent en dériver. Dans la série grasse, c’est la chaine la plus longue d’atomes de carbone qui joue ce rôle; dans Lx série benzé- nique, c’est la molécule du benzène; dans la série de la pyridine ou de la quinoléine, ce sont ces deux composés. Tout ce quiesl relié aux noyaux ainsi définis par des atomes de carbone, est regardé comme ré- sultant des substitutions et exprimé au moyen de CH3 — CH — CH* préfixes, Aïnsi, Pisobutane | est CH* 598 1e F “A TR A. COMBES. — LA NOMENCLATURE CHIMIQUE AU CONGRÈS DE PAU considéré comme un méthyl-propane ; les fonctions introduites par substitution dans la molécule de l'hydrocarbure, sont alors exprimées par des suf- fixes. L'alcool isobutylique CH3 — CH— CH? OH | CH3 devient le méthylpropan-ol. Le numérotage des atomes de carbone d’un hydrocarbure, et la manière de nommer ce com- posé étant d’ailleurs fixés d’une manière inva- riable, on voit que tous les corps renfermant le même groupement d’atomes de carbone, unis entre eux de la même manière que dans l'hydrocarbure donné, porteront tous le nom de cet hydrocarbure, modifié seulement par une terminaison; et les di- vers atomes de carbone seront désignés par les mêmes chiffres ; tous les composés organiques sont alors sériés en familles naturelles ; ainsi : CH?2—CH—CH® devient le propène, SR ae 0 I — lJ'iodo3 propène, 1 CH? — CH — Ce OH — le propénol 3, CH2=—CH—CHO — le propénal, CH2=CH—COH — l'ac.propénoique. le popylène l'iodure d’allyle l'alcool allylique l’acroléine l'acide acrylique Tout cela est extrêmement facile ; mais nous ne considérons ici que des fonctions simples et pla- cées toujours dans la chaine la plus longue; que va-t-il arriver si la fonction qu'il faut désigner par un suffixe se trouve dans une chaine latérale, cas qui se présente fréquemment pour les fonc- tions acide, nitrile et acétone? C’est là que se pré- sentent les premières difficultés. Soit, par exemple, à nommer le composé sui- vant : CH3— CH2— CH — CH? — CH3 don qui s'appelait acide diéthyl-acétique. L'hydrocarbure dont il dérive par oxydation est le méthylpentane; par conséquent, si on applique à la lettre la no- menclature actuelle, on devra dire : acide #éthyl- pentanoïique ; mais ce nom-là appartient évidemment aussi à l’acide dont la formule est : (ONE) EE CO) CH3—CH2—CH—CH?2—CO?H. Gr Il faut donc compléter le premier en indiquant par des chiffres la position des substitutions, et on devra dire : Acide méthyl3-pentanoïque3! pourle premier de ces acides, et méthyl3- pentanoïque ? pour le second. On voit immédiatement le grave inconvénient qu'il yaà procéder dans le second mot, le préfixe méthyl 3 exprime qu’il y a réellement substitution d'un groupe méthylique sur l'atome de carbone 3 de l'acide pentanoïque; dans le ainsi ; premier, au contraire, ce mot méthyl 3 n’a plus la même signification, parce que, à la fin du nom, se trouve la désinence vîque, qui signifie transfor- mation de CH$ en CO?H, suivie du chiffre 3‘ qui indique que cette transformation porte justement sur le groupe CH, placé en chaine latérale, de sorte que le mot méthyle a deux significations dif- férentes, et que, dans le premier cas, il est séparé de la terminaison qui indique la modification subie par le groupe CH$. Enfin, ce double sens peut se trouver à l’intérieur d’un même mot quand il existe des chaines latérales modifiées et d’autres qui ne le sont pas. Prenons, par exemple, l'acide isopro- pyl-éthyl-acétique : CH3—CH—CH—CH:— bus Cor CH? Le nom construit d’après les mêmes principes sera : Acide diméthyl 2.3 — pentanoïque 3! qui est certainement mauvais, puisqu'ici le mot méthyl exprime à la fois deux subslitutions diffé- rentes. Cette difficulté se rencontre naturellement toutes les fois qu'une fonction quelconque est placée dans une chaine latérale; voici comment il me semble qu'on pourrait supprimer cet inconvénient grave. IT Il a été décidé à Genève que l’on continuerait à se servir de radicaux, c’est-à-dire de composés hypothétiques résultant de la soustraction d’un atome d'hydrogène à un hydrocarbure ou à un de ses dérivés, et qu’on exprimerait cette soustrac- tion par la terminaison yle, remplaçant la termi- naison en ane des hydrocarbures saturés, ou ajoutés au nom des autres hydrocarbures; dès lors, le résidu du méthane CH est le méthyle — CH3, j le résidu du méthanol CH8OH est le méthylol — CHÈ OH, le résidu de l'acide méthanoïque HCO2?H est le méthyloïque CO°H. Or, ces résidus sont précisément les chaînes laté- rales à un atome de carbone possédant une fonc- tion acide, alcool etc., etles noms de ces résidus contiennent le suflixe caractéristique de la fonction qu'ils renferment. Nous proposons donc, foutes les fois qu'une chaîne latérale renferme une fonction, de joindre au mot qui erprime l'existence de cette chaîne latérale le suffixe qui indique la fonction qu'elle possède : ainsi, le résidu CO?H s'appelant méthyloïque, nous dirons dans les exemples précédemment cités : CH5— CH? — CH —CH2—CHS | CO?H Acide Pentane-méthyloique 3. A. COMBES. — LA NOMENCLATURE CHIMIQUE AU CONGRÈS DE PAU CH3— CH — CH —CH?—CH3 bus do Acide méthyl 2 — pentane-méthyloïque 3. On évite de cette manière toute ambiguïté, eton respecte absolument l'esprit des nouveaux procédés de nomenclature, qui est d'indiquer dans les noms le noyau, c’est-à-dire ieila chaîne la plus longue et les chaînes latérales qui s'y rattachent de manière à figurer immédiatement le squelette invariable des atomes de carbone, en réservant aux suflixes le rôle de désigner la fonction, ces suflixes restant d’ailleurs les mêmes dans la chaine principale, el dans les chaines latérales. Nous ne pensonspas qu’on doive conserver, pour désigner le groupe CO?H, les termes carbonique ou earbozxylique; le mot méthyloïque est plus expressif et surtout donne à la nomenclature adoptée une grande unité, la chaîne latérale méthyl devenant, suivant les modifications qu'elle subit : méthylol, méthylal, méthylnitrile, méthylvique. 11 est inutile de répéter, pour les chaînes à deux ou plusieurs atomes de carbone, ce qui vient d'être développé. Ainsi l’éthyl devient de même é/hylol, éthylal, éthyloique. La suppression du mot cyano et son remplace- ment par le mot méthylnitrile, sont aussi tout à fait nécessaires. En effet, dans le cas où le groupe CAz est placé dans la chaine la plus longue, on dit nitrile. Ainsi CH3— CH? — CAz est le propane nitrile; on ne peut admettre que, quand ce groupe CAz est en chaine latérale, comme dans l'exemple suivant : : H CH3— CH2— C—CH°—CH$ | CAz on dise cyanopentane, car on ne peut donner à une même fonction deux noms différents suivant : la place qu’elle occupe dans la molécule. III La nomenclature des composés à fonction com plexe n’a pas été fixée au Congrès de Genève: c’est que, les difficultés que nous venons d'exposer, et pour lesquelles nous avons proposé des solu- tions, s'étaient vivement fait sentir; on arrivait forcément à la fin des mots à une accumulation de suffixes tout à fait inacceptable dans le langage parié ; les procédés que nous avons indiqués plus haut ont l'avantage de diminuer cette accumu- lation, et, grâce à cel arlifice, on peut former des noms qui peuvent être employés dans le langage parlé comme dans le langage écrit, 11 nous reste à fixer les propositions qui per- mettent de donner à un composé déterminé un seul nom, el à montrer, par des exemples, combien 599 l'application est simple et commode dans la plu- part des cas. Nous proposerons les règles suivantes : 1° Dans un composé à fonction complexe, toutes les fonctions comprises dans la chaine principale seront exprimées par les suflixes et préfixes em- ployés dans le cas des fonctions simples, ajoutés au nom de celte chaine principale, numérotée comme le serait l'hydrocarbure dont elle dérive théoriquement. Exemples : l'acétol CH#—CO—CH2O0H s’appellera propanol-one, l'alanine CH — CH—CO?H l'acide amino 2-propanoïque, | AzH? Ja leucine l’amino 2-hexanoïque, à l'acide aspartique CO2H—CH2—CH—CO2H | , AzH? sera l’acide amino 2 — butane dioique, l’asparagine CO2H— CH? —CH—CO AzH2 AzH2? Acide amino? — butanamidoïque. 2° S'il existe des chaines latérales, elles seront nommées comme dans le cas des fonctions simples, par les mots méthyl, éthyl.., et, si elles sont modifiées par l'introduction d’une fonction quel- conque, l'expression de cette modification sera Jointe à ces mots; on s'arrangera loujours pour introduire dans la chaîne principale le plus grand nombre possible de fonctions. Ainsi, l'acide cyanocrotonique : CH3 N Mure CAz 1 C=CH—CO?H 2 3 4 sera l'acide méthyl 2-buténoïque 4-nitrile 1 : L'acide méthylacétylacétique 4 D AE CH$—CO—CH—CO2H | CH3 sera l'acide méthyl 2-butanone 3- oïque 1 ; L'acide diméthyl-tartrique CO?H—COH—COH—CO2H | CH CHS sera l'acide diméthyl 2.3, butanediol dioïque. Ces exemples sont suflisants pour expliquer les énoncés précédents; mais il est nécessaire de faire quelques conventions complémentaires sur le numérotage et sur l’ordre dans lequel on énoncera les désinences caractéristiques des fone- lions. Quand la chaine hydrocarbonée possède des chaînes latérales ou des liaisons multiples, le nu- mérotage est fixé d’après les mêmes règles que les hydrocarbures; mais, quand elle ne possède aucune de ces modifications pour fixer le sens du numé- rolage, nous admettrons : 600 3° Le numérotage partira de l’extrémité de ia chaine qui possède la substitution d’ordre le plus élevé, ou qui est la plus voisine d’une substi- tution; dans le cas d’ambiguïté, de l'extrémité la plus voisine de la substitution d'ordre le plus élevé. Par conséquent, si une chaine normale possède un groupe CO?H, il portera le numéro 1; à défaut de ce groupe, ce seront successivement les substi- tutions : CO, AzH?, CAz, CHO, CH?OH qui décide- ront. Exemples : É CO?H — CHOH — CH OH Propanediol 2.3-oïque Acide oxyglultarique : 1 2 3 4 5 CO2H— CHOH — CH? - CH? — CO?H Pentanol2-dioique Pour n'avoir qu'un seul nom, il est également nécessaire de savoir dans quel ordre les suflixes ol, al, one vique, amide, nitrile, seront énoncés quand ils se trouvent réunis à la fin d’un mot. Il paraît naturel de suivre l’ordre de grandeur de la substitution, en considérant de plus si les suffixes expriment des fonctions placées néces- sairement à l'extrémité de la chaine, comme les fonctions aldéhyde, acide, amide, nitrile, ou pou- vant se trouver à l’intérieur de la molécule comme la fonction alcool ou cétone. Nous n'avons pas à nous préoccuper des fonctions amino, chloro, bromo, méthoxy, etc., qui sont employées en pré- fixes et par conséquent énoncées dans l’ordre que leur assigne le numéro de l'atome de carbone auquel elles sont rattachées. Nous placerons done en première ligne la fonction alcool; le suflixe 07, répondant à la substitution d’un atome d'hydrogène, sera done immédiatement ajouté au nom de lhy- drocarbure; puis le suflixe one, qui exprime le rem- placement de deux atomes d'hydrogène apparte- nant à un carbone contenu dans la chaîne princi- pale; puis al, thial, la fonction aldéhyde se trou- vant forcément à l'extrémité de la chaine ; puis amaide, nitrile, oique, chacun de ces suflixes étant immédiatement suivi, si cela est nécessaire, du ou des chiffres qui expriment leur place dans la molé- cule. Exemples : (6) (1) Glucose CH? OH — (CHOH){CHO Hexanepentol-al 1 2 6. Lévulose CH?20H— CO — (CH OH); — CH? 0H Hexanepentol-one 2. ë (2 (1) Acide thiolactique CH5— CH (SH) —CO?2H Propanethiol 2-oïque Acide dioxypopylmalonique 1 2 ] 4 5 CO2H — CH — CH?2— CHOH— CH? 0H | CO?2H Acide méthyloïque 2-pentane diol 4.5-oïque 1. A. COMBES. — LA NOMENCLATURE CHIMIQUE AU CONGRÈS DE PAU IV Les procédés de nomenclature, tels que nous venons de les exposer, ne résolvent pas absolument toutes les questions qui se posent dans la pratique, mais permettent presque toujours de donner un seul nom à un composé déterminé. Il ne nous reste plus qu'à donner quelques exemples que nous choisirons à dessein parmi les composés les plus compliqués dont on connaisse la constitution. La nouvelle nomenclature fait heureusement disparaître une foule de synonymes inutiles et de termes barbares n'ayant aucune signification ; elle présente des avantages incontestables au point de vue de l’enseignement en permettant de grou- per les composés d’une manière extrêmement ra- tionnelle. Enfin, si l’on veut, comme le demande une des résolutions du Congrès de Genève, concilier les exigences de la nomenclature écrite avec celle de’ la nomenclalure parlée, on peut très facilement rejeter après le nom d’un composé tous les chiffres qui expriment la position des diverses fonctions dans la molécule, el constituer ainsi un symbole chiffré qui sera absolument analogue à celui que nous avons élabli pour les dérivés polysubstitués du benzène; et qui ne laissera place à aucune fausse interprétation, si l’on admet que ces chiffres s’appliqueront aux divers préfires et sufiires dans l’ordre même où ils sont énoncés. Exemples : L'alcool : allyldipropylcarbinol 1 2 3 4 5 6 1 CH? —CH—CH?— COH— CH? — CH? — CH3 x Ve Ce bus qui s'appelle propyli- heptène\ol-4, peut s'énoncer propylheptènol 4.1.4. EXEMPLES SUR L'APPLICATION DE LA NOMENCLATURE Diméthylisopropylallyl carbinol : 7 6 o] 4 3 2 il CH3— COH — CH? — CH = CH — CH — CHS | | CH3 CHS Diméthyl 2.6 — Heptène 3 — ol 6 Diméthylhepténol 2.6.3.6 Méthyldiallylcarbinol : L CH? = CH — CH? — COH — CH? — CH = CH? | CHS Méthyl 4 — heptadiène 1,6 — ol 4 Méthylheptadiènol 4.1.6.4 Pinacone isobutylique : 1 2 3 4 5 6 CH — CH —CHOH—CHOH — CH — CH3 | CH> CH Diméthy12.5-hexanediol 34. Diméthylhexane diol 2 5.3.% 1. Pl M. KAUFMANN. — LA TUBERCULINE Diméthylacétonyl carbinol : 5 4 3 2 1 CH$— CO — CH? — COH — CH3 | CH? Méthyl2-pentanol2-one 4. Méthyl pentanol one 2-2-4. CH?= CH — CHOH — CHOH— CH? —CH?2 Hexadiène 1.5-diol 3.4 Hexadiène diol 1.5.3.4. Acropinacone : Les exemples précédents montrent suffisamment l'emploi que l’on peut faire des chiffres placés après le nom, pour obtenir des mots faciles à pro- noncer; dans les exemples suivants, nous ne met- irons plus que le nom de la nomenclature écrite, contenant après l’expression de la fonction le chiffre qui en indique la place : Acide malonique CO?2H — CH? — CO*H Acide Propane dioïque Méthylmalonique CO?2H— CH — CO?H | CH3 Méthyl 2-propane dioïque. Acide acétylacétique CH#— CO — CH? — CO?H Acide butanone 3 — oïque 1 Acide tricarballyliqne : CO2H — CH? — CH — CH? — CO?H CO?H Acide pentanedioïque — méthyloïque 3. Acide acétyldiméthylsuccinique : CH | CH? — CO — C—— CH — COH | | CO?H CH? 601 Acide diméthy12.3 — pentanone 4 — oïque 1 — méthyloïque 3. ou acide diméthyl-pentanoneoïque-méthyloïque (2.3.4 .1.3.) Acide glucosaccharique : CH°OH — (CHOH CHOH — COH —CO?H | CH° Acide méthyl 2 — pentanetétrol. oïque 1 L’acide : CO?H — C—CH — CH —CO2H | | CO?H CO?H Acide pentène 2 — dioïque — diméthyloïque 2.4. Leucine CH* —(CH2)3— CH — CO2H | AzH? Acide amino 2 — hexanoïque. Acéturamide : C2H$0 — AzH — CH? — CO AzH2 Ethanoylamino-éthanamide Acides thiocarbamiques : AzH? — COSH acide amino méthane thiolique, AzH? — CS — OH acide amino méthane thionique, Je me bornerai à ces quelques exemples: ils me paraissent montrer suffisamment la nécessité des conventions que j'ai admises, et aussi mettre en évidence la clarté du nouveau langage chimique. Il reste évidemment encore d’autres difficultés et, en particulier, la nomenclature des composés renfer- mant plusieurs noyaux aromatiques. Il serait trop long d'exposer ici les solutions qui vont être pro- posées au Congrès de Pau; les projets étudiés qui y seront présentés permettent de compter sur une solution définitive. A. Combes, Docteur ès Sciences. LA TUBERCULINE AGENT RÉVÉLATEUR DE LA TUBERCULOSE CHEZ LES BOVIDÉS La découverte de la tuberculine par le D' Koch a provoqué, depuis deux ans, un nombre considérable de recherches sur les produits solubles fabriqués par les microbes pathogènes. En ce qui ccncerne spécialement le produit fourni par le bacille tu- berculeux, c'est-à-dire la tuberculine, les résultats obtenus jusqu'à présent confirment les faits prin- cipaux annoncés par le savant bactériologiste de Berlin, mais infirment aussi ses conclusions les plusimportantes. Koch croyait pouvoir appliquer la tuberculine à la fois à la prophylaxie, à la quérison et au diagnostic de la tuberculose. Il est reconnu aujourd'hui que cette substance n'a pas la valeur curative que Koch lui avait attri- buée quand il disait : « Je suis disposé à admettre qu'une phtisie commencçante peut être guérie d’une manière certaine à l’aide de ce remède. Quant aux phtisiques qui portent de grandes cavernes et chez lesquels il existe la plupart du temps des compli- cations, ils ne relirent qu'exceptionnellement un bénéfice durable de l'emploi de ce remède. Cepen- dant les malades de celte catégorie sont aussi améliorés passagèrement dans la plupart des cas. » Après avoir excité le plus vif enthousiasme et occupé toute la presse médicale pendant plusieurs mois, celte conclusion a été reconnue erronée. Les résultats obtenus dans les hôpitaux de tous les pays ont élé si désastreux que ce nouveau re- mède est tombé, comme tant d’autres, dans un juste oubli. La deuxième conclusion de Koch, — celle qui attribuait à la tuberculine une vertu prophylac- tique ou vaccinale, — à eu le même sort que la précédente. Les expériences ultérieures ont montré que 602 l'immunité conférée par les injections de tubercu- line n’est ni certaine ni durable. Cette substance, sur laquelle on avait fondé tant d'espérance, n’a donc ni vertu curative ni vertu vaccinale. Mais la troisième conclusion äe Koch reste de- bout : la tuberculine constitue réellement, comme il l’a dit, un réactif certain de la tuberculose. Je n’ai pas à examiner ici les avantages que les méde- cins pourront retirer de l'emploi de cette substance dans le diagnostic de la tuberculose humaine; je me propose simplement de faire connaître aux lec- teurs de la Revue les services qu'elle peut rendre à la Médecine vétérinaire et à l'Hygiène publique comme agent révélateur de la tuberculose bovine, dans les cas où cetle maladie non seulement ne peut pas être reconnue, mais ne peut même pas être soupçonnée. Les mémorables recherches de Villemin ont éla- bli dès 1865 la nature virulente de la tuberculose. Elles ont montré, pour la première fois, que la tu- berculose humaine, ainsi que celle du singe et de la vache, peut être transmise par inoculation aux principaux animaux domestiques. La déductionlé- gitime de ces expériences, c'est que la phtisie de l'homme, du singe et de la vache, est une même affection virulente, spécifique, contagieuse. En 1868, Chauveau a apporté de nouveaux faits à l’appui de ceux de Villemin. Il a démontré que la tuberculose se transmet aux animaux, non seulement lorsque la matière tuberculeuse est in- sérée par effraction dans le tissu conjonctif, mais encore lorsqu'elle est ingérée par le tube digestif sain. Il a établi aussi que la virulence de la matière tuberculeuse siège, non pas dans les gros éléments, mais bien dans de très fines granulations micros- copiques, absolument comme dans le virus-vaccin ou dans le virus morveux. On sait maintenant que le virus tuberculeux est, en effet, un parasite microscopique surajouté à l'organisme, un bacille très fin, découvert par Koch en 1882. Ce bacille peut végéter et se mul- tiplier en dehors de l’organisme de l’homme et des animaux : il suffit de l’ensemencer sur des milieux nutritifs appropriés. C'est grâce à cette particula- rité qu'on est parvenu à sele procurer en quantité assez grande pour en extraire le principe soluble connu sous le nom de fuberculine. La contagion de la tuberculose peut se faire par toute matière renfermant le bacille spécifique de Koch. Les voies les plus ordinaires par lesquelles s’infectent l’homme et les animaux sont : la voie digestive et la voie respiratoire. Cependant la trans- mission de la maladie par une inoculation acci- dentelle a été observée aussi. Ainsi une servante, M. KAUFMANN. — LA TUBERCULINE qui s'était blessé le doigt avec les fragments du crachoir d’un phtisique, eut une infection tubercu- leuse du bras qu’on a heureusement pu enrayer par l’enlèvement des ganglions du coude et de l’ais- selle, Un vétérinaire s’est inoculé la maladie en faisant l’autopsie d’une vache tuberculeuse. Dans ce dernier cas la tuberculose est restée localisée au point d’inoculation ; on a obtenu la guérison par l'extirpation des tissus envahis, qui furent trouvés riches en bacilles tuberculeux caractéristi- ques. M. Nocard a raconté, en 1884, à la tribune de l'Académie de Médecine qu'un autre vétérinaire, nommé Moses, bien portant et exempt de prédis- positions héréditaires, s’est blessé en 1885, pendant qu'il pratiquait l’autopsie d’une vache tubercu- leuse. La plaie qui suivit s’ulcéra, puis guérit; mais on assista à l’évolution d’une tuberculose in- terne qui emporta le malade, en 1888. Ces deux derniers faits montrent de la manière la plus nette qu'il y a identité de nature entre la tuberculose de l'homme et la tuberculose bovine. Les nombreuses expériences de Chauveau avaient établi depuis longtemps que la tuberculose humaine se transmet facilement aux animaux de l'espèce bovine, et que la maladie ainsi obtenue ne se dis- tingue par aucun caractère de celle qu’on déve- loppe en employant, pour matière infectante, les tubercules provenant des vaches phtisiques. Les observations citées plus haut ne laissent plus aucun doute, et on admet partout aujourd’hui que la tuberculose bovine se transmet à l’homme, comme celle de l'homme se transmet à la vache. Les animaux tuberculeux appartenant à l'espèce bovine constituent donc un grand danger non seu- lement pour ceux de leur espèce, mais encore pour l’homme. La vache tuberculeuse infecte ses voi- sines par les mucosités expectorées qui souillent les fourrages, elle infecte l'homme surtout par son lait et sa viande. Les preuves de la transmission de la tuberculose par le lait et la viande provenant de vaches tu- berculeuses abondent. Il me suffira de citer quelques faits des plus démonstratifs : Gerlach, de l’école vétérinaire de Berlin, nourrit pendant 21 à 50 jours avec du lait suspect : 2 veaux, 2 pores, 1 mouton et 2 lapins. Tous ces animaux, sauf un veau qui mourut prématurément, offrirent à l’autopsie des lésions tuberculeuses du tube di- gestif, des ganglions mésentériques des poumons et des plèvres. M. Peuch, de Lyon, sacrifia successivement, après leur avoir fait ingérer pendant 35, 52, 93 et 130 jours du lait de vaches tuberculeuses, 2 pores et lapins; il trouva sur tous les 4 des lésions tu- berculeuses proportionnelles en étendue à laquan- tité de lait ingéré. M. KAUFMANN. — LA TUBERCULINE M. Nocard a communiqué la tuberculose à de jeunes chats en leur faisant prendre une seule fois du lait tuberculeux. M. Galtier a transmis la tuber- eulose avec des fromages faits avec du lait tuber- leux. Enfin, M. Olivier et M. Boutet ont fait con- naître un exemple de transmission de la tubercu- lose à l'espèce humaine par l'ingestion du lait.Cette maladie s’est en effet développée sur six jeunes filles qui, durant leur séjour dans un pensionnat, avaient bu dulait provenant d'une vache laitière tu- berculeuse. Les exemples queje viens de citer, démontrent de la manière la plus nette le danger que présente pour l’homme la consommation de lait provenant de vaches tuberculeuses. Ce danger existe surtout à un très haut degré quand la tuberculose est ac- compagnée de lésions des mamelles, qui déversent incessamment des bacilles dans le lait. Comme le lait, la viande provenant d'animaux tuberculeux peut infecter l'homme et les animaux. On a trouvé le bacille de Koch dans le sang des tu- berculeux, surtout à certains moments de l’évolu- tion de la maladie ; ce même bacille peut donc être disséminé dans toutes les parties de l’organisme. Des expériences très précises et nombreuses ont d’ailleurs établi directement la virulence possible des muscles des animaux phtisiques, quand même ces organes ne sont le siège d'aucune lésion tuber- culeuse. Ainsi, Harmz, Gunther, Zurn, Gerlach, Johne, Peuch ete., ont tuberculisé divers animaux en leur faisant ingérer de la viande crue provenant de vaches tuberculeuses,. Il est donc bien établi que Le lait et la viande des animaux de l'espèce bovine atteints de tuberculose sont dangereux pour l'alimentation, Il Pour prévenir la transmission de la tuberculose à l’homme parle lait et la viande, le seul moyen réel- lement efficace consiste à éteindre immédiatement tout foyer tuberculeux naissant parmi les animaux de l'espèce bovine. Mais on ne peut espérer obte- nir l'extinction de la maladie que si l’on possède un moyen permettant de la diagnostiquer partout où elle commence à apparaitre. Or, ni l’examen cli- nique des animaux, ni l'examen bactériologique des mucosités expectorées, ni les inoculations de ces mêmes mucosités ne permettent d'atteindre complètement ce but. Seule la tuberculine parait avoir une valeur diagnostique suffisante dans la pratique. La méthode est fondée sur la facilité avec laquelle cette substance allume le processus fébrile chez les animaux tuberculeux. Injectée dans le tissu conjonctif sous-cutané, en quantité convenable, la tuberculine provoque en général une action pyrétique très marquée chezles 603 sujets tuberculeux, tandis qu'elle ne produit pres- que rien sur les sujets sains. < L'action hyperthermique, qu'on appelle réaction a élé constatée par tous les expérimentateurs sur les animaux tuberculeux de l'espèce bovine. Mais quelques-uns ont voulu nier la valeur diagnostique de cette substance en se basant sur des résultats contradictoires dans lesquels la réaction ne s’est pas montrée sur des animaux reconnus tubereu- leux à l’autopsie, tandis qu'elle s’est montrée par- fois sur des animaux sains ou atteints d’affections non tuberculeuses, Des faits de ce genre ont été observés notamment par M. Arloing, qui les a fait connaître au Congrès de la Tuberculose dans la session tenue à Paris du 21 juillet au 2 août 1891. Des résultats de même ordre ont été publiés par le Professeur Siedamkro- wsky, de Dresde, M. Lahu, de Crefeld, M. Gensers, de Meneburg, etc. On sait aujourd’hui que les contradictions ne sont qu'apparentes, que les faits exceptionnels si- gnalés par les expérimentateurs précédents peu- vent être évités par un bon choix de la tubercu- line el un dosage convenable de cette substance. Les premières expériences faites à l'Étranger ont donné des résulatsitrès favorables. C'est ainsi que M. Gutmann, de Dorpat, M.Stricke, de Cologne, M. Delvos, de Gladbach, MM. Schütz et Rækl, de Berlin, M. Bang, de Copenhague, M. Lydtin, de Carlsruhe, ont constamment observé que les in- jections de tuberculine provoquent chez les ani- maux de l’espèce bovine tuberculeux une réaction de 0°6 à 2°2, tandis qu'elles ne déterminent pas de réaction notable chez les bêtes bovines saines. En France, les premiers résultats favorables à l'emploi de la tuberculine ont été obtenus dans les expériences entreprises par la Société pralique de médecine vétérinaire. Les résultats de ces recher- ches, faites à l'École vétérinaire d’Alfort par une Commission nommée à cet effet, ont été commu- niqués au Congrès de la Tuberculose de 1891 par le Professeur Barrier, rapporteur de la Commission. Voici quelques-unes des conclusions les plus im- portantes de ce travail : 1° L'injection de doses suffisantes de tuberculine dans le tissu conjonctif détermine ordinairement, chez les bêtes bovines tuberculeuses, une élévation de la température qui se manifeste d'habitude entre la quinzième et la vingtième heure; souvent elle est plus précoce (8 heures); parfois elle est plus tardive (48 heures ou davantage.) 2° La réaction thermique semble ordinairement proportionnelle à la quantité de tuberculine ad- ministrée. 3° La tuberculine peut déterminer des effets va- riables, non seulementsuivant l’étenduedeslésions, ete 2 4, y‘ vomi Ste * …# Dr er 47 Li h. 24e TOR & 604 mais aussi selon le degré de sensibilité des sujets dont on interroge l'état, ce qui explique l’ab- sence de réaction avec des doses trop faibles. 4 Toutes les tuberculines n’ont pas la même activité ; elles paraissent s'atténuer en vieillissant. 5° Les animaux sains ne réagissent pas ordinai- rement, sauf dans certains cas exceptionnels, et ce faiblement. 6° En employant dès la première injection une forte dose de tuberculine, après repos et observa- tion préalable des sujets, il y a beaucoup de chances d'obtenir avec celte substance une réac- tion suffisamment nelle et rapide sur les sujets tubereuleux. La même injeclion a, par contre, toutes chances de ne rien produire ou de ne déter- miner qu'une hyperthermie insignifiante sur les bovidés sains ou habituellement apyrétiques. III Au moment de la discussion de ces importantes conclusions par les membres du Congrès, M. No- card a annoncé qu'à la suite d'expériences per- sonnelles, il est arrivé aux mêmes conclusions que la Commission dont je viens de parler. A la même séance M. le Professeur Degive, de l'École vétérinaire de Bruxelles, a fait connaitre les ré- sultats obtenus à l'École vétérinaire de Cureghem, par une Commission spéciale, nommée par M. le Ministre de l'Agriculture en vue de déterminer la valeur de la lymphe de Koch comme moyen révélateur de la tuberculose chez les bêtes bovines. Les bêtes luberculeuses, au nombre de cinq, ont toutes présenté une réaction variant de 0°,8 à 3°,3, à l'exception de l’une d’entre elles, la plus malade, celle qui a montré à l’autopsie les lésions tubereuleuses les plus nombreuses et les plus étendues. Les bêtes non tuberculeuses, au nom- bre de trois, une saine et deux affectées, l’une de bronchite et de pleurésie chronique, l’autre de sarcomatose généralisée, n'ont pas réagi sensible- ment. M. Degive conclut que la tuberculine cons- ütue un réactif dont l'emploi peut être utile pour déceler l'existence de la tuberculose. Il lui parait acquis qu'une réaction hyperthermique prononcée (de 2 à 3 degrés), observée dans les vingt heures qui suivent une injection hypodermique, conslilue un symptôme à peu près certain de tuberculose. Deux autres membres du Congrès, M. Thomassen, d'Utrecht, et M. Cagny, de Senlis, ajoutèrent encore de nouveaux faits recueillis par eux ou par d’autres expérimentateurs, en grande majorité favorables à l'emploi de la tuberculine. Mais les faits les plus décisifs, et les plus dé- monstratifs ont été obtenus depuis par le Profes- seur Nocard, d’Alfort. Dans la séance du 14 octo- bre 1891, il a lu à l’Académie de Médecine un a AP ut lnid M. KAUFMANN. — LA TUBERCULINE premier travail fort remarquable qui a eu un grand retentissement. Grâce à l'obligeance d’un boucher, il lui a été possible d’administrer de la tuberculine à 57 bovidés adultes. Chaque animal a reçu dans le Lissu conjonclif une injection de 20 à 40 centi- grammes de tuberculine en une seule fois. Sur les 51 animaux, 19 ont éprouvé, entre la sixième et la vingtième heure, une réaction thermique de 4°,4à 29,9; un seul n’a montré qu’une élévation de 0°,8. Or, à l’autopsie, 17 de ces animaux ont été trouvés tuberculeux à des degrés divers; les deux autres n'offraient pas trace de tuberculose et avaient: l’un de la cirrhose hépatique d’origine distomateuse, l’autre de l’adénite généralisée. Des 38 animaux qui n’ont pas réagi, 2 étaient tuberculeux très avancés, phtisiques au sens propre du mot et chez lesquels la maladie était facile à diagnostiquer par les signes cliniques. Le 25 mai dernier, M. Nocard a entretenu la #0- cièté centrale vétérinaire des expériences nouvelles qu'il a faites et dont les résultats ne laissent plus le moindre doute sur la haute valeur diagnostique de la tuberculine. Un propriétaire desenvirons de Paris avait envoyé à M. Nocard une vache jer- seyaise du plus beau type, manifestement tuber- culeuse; cette bêle a succombé à la première injec- tion de tuberculine, mais sans offrir de réaction thermique. Le propriétaire, avisé, consentit à sou- mettre à l'injection révélatrice de la tuberculine tous les animaux qui avaient pu subir le contact direct ou indirect de la vache tuberculeuse. L’étable d’où sortait la malade contenait encore dix animaux de la race de Jersey; de ce nombre, deux seulement présentaient quelques signes, — toux,embonpoint moins salisfaisant, — permettant de suspecter leur état de santé; tous les autres élaient en parfait élat. Une deuxième étable con- tiguë à la précédente et communiquant avec elle par une porte renfermait sept vaches, un taureau et un laurillon bretons. Tous ces animaux, jerseyais et bretons, reçurent le même jour, la même dose, 0 gr. 30 de tubercu- line préparée à l’Inslitut Pasteur. Aucune des vaches brelones ne réagit sous l’action de la tuber- culine; neuf sur dix jerseyaises, au contraire, ma- nifestèrent une réaction supérieure à deux degrés. Le propriélaire ordonna l’abatage des dix animaux jerseyais. L’autopsie, faile avee les plus grands soins, a montré des lésions tuberculeuses sur les neuf vaches qui avaient manifesté la réaction: le dixième animal aballu, qui élait un veau et qui avait supporté sans aucune réaction l’injeetion de tubereuline, était absolument indemne. Les résultats parurent si concluants que le pro- priélaire fit soumettre à l'injection de tuberculine vingt superbes vachesnormandes entretenues dans C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE 605 une étable éloignée des deux autres. Aucune de ces | vaches ne réagit à l'injection. M. Nocard communiqua dans la inème séance un autre fait favorable, recueilli par M. Besnard, vétérinaire à Loudun. Ce praticien a injeclé la tu- berculine à 16 bovins qui ne présentaient aucun des signes cliniques de la tuberculose; 10 de ces animaux ont montré une réaction et ont élé re- connus tuberculeux à l’autopsie; des 6 animaux qui ont supporté l'épreuve sans réagir, un seul a été abattu, et l’autopsie la plus minutieuse n’a pas montré la plus petite lésion tuberculeuse. De l'examen minutieux de tous les faits connus actuellement il est permis de poser les conclusions suivantes : 1° La tuberculine provoque constamment une réaction de 1°4 à 3° sur les animaux tuberculeux, non fiévreux, c'est-à-dire sur ceux chez lesquels la maladie n’est pas très avancée et n’altère pas les apparences de la santé. 2° Elle ne provoque parfois aucune réaction chez les animaux noloirement tuberculeux, quand ceux- ci sont arrivés à la dernière période de la maladie et qu'ils sont déjà dans un état fébrile. Dans ces cas les injections de tuberculine deviennent inu- tiles, puisque la maladie est facile à diagnostiquer à l’aide des signes cliniques. 3° On doit considérer comme tuberculeux tout animal de l'espèce bovine chez lequel l'injection hypodermique d'une dose convenable de tubereu- line produit une réaction fébrile supérieure à 4° 4, Chez les animaux sains l'élévation de température atteint rarement 4°. Quand elle atteint de 0,6 à 4e, l'animal doit être considéré comme suspect et être soumis, après un délai d’un mois environ, à une nouvelle injection d’une dose plus considérable de tuberculine. 4° La tuberculine permet de révéler avec certi- tude les moindres lésions tuberculeuses chez les bovidés. C’est donc, comme le dit M. Nocard, un moyen de diagnostic d'une sûreté el d'une délica- tesse incomparables. De plus, elle ne porte jamais aucune action nuisible ni sur la laclation, ni sur la gestalion. La valeur diagnostique de la tuberculine étant établie, il est permis d'espérer que cet agent sera appelé à rendre les plus grands services à l’Agricul- ture et à l'Inspection sanitaire des étables où l’on produit du lait destiné à l'alimentation publique. M. Kaufmann, Professeur de Physiologie à l'Ecole vétérinaire d’Alfort, L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE DEUXIÈME PARTIE : LES VARIATIONS DE Dans un précédent article ! nous avons exposé quelques observations nouvelles relatives à l'état électrique de l'atmosphère, et montré l’insuffi- sance des doctrines régnantes à les expliquer complètement. Nous nous proposons aujourd'hui d’attirer l'attention sur le champ négatif et les variations de la force électrique constatées dans l'air par beau temps en divers Observatoires. Nous essaierons en même temps d'indiquer les modifi- cations que les faits nouvellement mis au jour imposent aux théories de l'électricité atmosphé- rique. I. — LE CHAMP NÉGATIF Un fait fort important est celui de l'électricité négalive par beau temps, que nous avons décrit ici même. Au siècle dernier, Beccaria avait constaté (6 fois en 15 ans d'observations) le même phéno- mène : dans ces dernières années, L. Palmieri et F. Dellmann l’ont aussi vérifié : on doit donc le considérer comme absolument démontré. 1 Sur ce même sujet : Première partie. Voyez la Revue du 30 août 1892, t. III, page 568 et suiv. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, SENS ET DE GRANDEUR DU POTENTIEL M. Palmieri, qui le rattache à une loi plus géné- rale énoncée par lui !, et qui en trouve la cause dans une pluie voisine, dit à ce sujet : « J'ai vérifié moi- « même les faits à diverses reprises en me procu- «rant des indicalions sur le temps qu'il faisait « dans les régions avoisinantes et j'ai observé de « l'électricité par un ciel clair. » Mais, d’une part, les observations de Dellmann ont été faites « dans des conditions qui ne s’accor- dent pas avec l'explication de M. Palmieri » 2, et qui se rattacheraient, d’après lui, à la formation de l'ozone suivant la théorie du Professeur Meissner ; d'autre part, l'explication de M. Palmieri ne s’ap- plique pas non plus aux cas que nous avons observés. Ces faits ne s'expliquent d’ailleurs pas plus dans la théorie de M.Sohncke que dans celle de M. Exner; entre la couche négative formée par la surface du sol et la couche positive donnée bien au-dessus ! Lois el origines de l'électricité atmosphérique, p. 36. 2? Uber die Erscheinung der negativen Luftelectiricität bei heilerem Himmel, von F. DecLmanx. Annalen der Physik und Chimie von J.-C. Poggendorf, 4885, p. 175. 17° 606 C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE d’elle par les cristaux de glace électrisés du pre- mier, il n’y a, en effet, qu'un champ électrique positif possible; il en est de même au-dessus de la couche négative terrestre. M. Sohncke nes'est point occupé de ces cas particuliers, mais M. Exner en a cherché une explication étrangère à sa théorie. Il s'appuie pour cela sur certaine relation qu'à l'Ob- servatoire du Vésuve M. Palmieri a constatée «entre l’arrivée de l’éléctricité négative et la pré- « sence de la fumée ou de la cendre du volcan », et sur une observation fort intéressante faite par W. Siemens au sommet de la pyramide de Chéops !, par un ciel très beau, mais par un simoun très violent qui entrainait la poussière du désert : « L’électricité négative augmentait en mème temps « que croissait la vitesse du vent et devenait par- «fois tellement forte qu’à l’aide d’une bouteille « de Leyde rapidement improvisée, on obtenait des «étincelles d'environ 10 millimètres. » Dans ces cas particuliers, la formation de l’élec- tricité négative parait à M. Exner évidemment due aux poussières elles-mêmes qui apportaient avec elles cette électricité ; et, généralisant ensuite, il attribue toujours à la présence de la poussière ou de la fumée l'existence de l'électricité négative constatée par beau temps. Quoi qu'il en soit de la valeur même de celte explication dans les cas que M. Exner a rappelés, elle ne s'applique certainement pas aux exemples que nous avons observés. En effet, dans les jours en question, nous n’a- vons pas constaté qu'il y eût apport inusité de poussière ou de fumée dans l'atmosphère. Bien plus, nous avons vu en d’autres jours le vent apporter d'assez grandes quantités de poussière sans que les courbes de l'électromètre offrissenten même temps rien de particulier. En outre, c’est seulement lors du vent de sud que nous observons ce passage au négatif par beau temps. Avec le vent de nord, nous n’avons jamais constaté fait analogue, et cependant sa violence maximum par beau temps est au moins égale à celle du vent de sud ; et, d’un autre côté, par suite de notre situation au midi d’une grande agglomé- ration industrielle, il nous apporte. évidemment beaucoup plus de poussière et de fumée que le vent de sud, lequel nous arrive après avoir traversé la campagne cultivée. Enfin. dans les trois cas, le phénomène se pro- duit sensiblement à la même heure, et constitue comme une sorle de creusement du minimum de l'après-midi ; il ne parail donc pas dû à une cause RE 1 Beschreibung ungewühnlich slarker elektrischer Erschei- nungen auf des Cheops-Pyramide bei Cairo während des Wehens der Chamsin, von W. Siemens. Annalen von Pog- gendorf, vol. CIX, p 355. exceptionnelle, étrangère à la marche ordinaire de l'électricité atmosphérique, pas plus qu’à une per- turbalion atmosphérique voisine, mais bien plutôt comme l’exagéralion d’un mode de variation diurne de l'électricité atmosphérique qui le comprendrait comme cas particulier, d’ailleurs fort rare dans nos régions. Pour toutes ces raisons, nous pensons que cette existence de champ électrique négatif doit faire partie de l’ensemble des données sur lesquelles toute théorie complète de l'électricité atmosphé- rique serait basée. En d’autres termes, toutes ces théories doivent pouvoir rendre compte des cas particuliers dans lesquels la force électrique, au lieu d’être comme à l'ordinaire dirigée de haut en bas, est dirigée de bas en haut. Prenons comme exemple la théorie de M.Sohncke qui parait la plus voisine de l'explication vraie pour le minimum électrique de l'après-midi. Il faudrait la modifier et la compléter de façon qu’elle permit à la force électrique de devenir ascendante lorsque l'intensité du courant atmosphérique ascendant deviendrait très considérable, et par conséquent, de façon à donner, tout au moins dans ces cas exceptionnels, l'entrée graduelle dans l'atmosphère à des masses électriques agissantes négatives. II. — LES VARIATIONS AVEC L'ALTITUDE Il convient maintenant de discuter les expé- riences faites en vue d'étudier la variation du po- tentiel avec la hauteur par beau temps. Thomson et Joule ont les premiers entrepris son étude systématique. Observant sur une plage au bord de la mer, à Aberdeen, avec un électroscope portatif, ils trouvèrent une variation du potentiel d'environ 100 volts par mètre. En 1876, MM. Mascart et Joubert reprirent ces expériences sur une grève de la côte d’Erqui (Côtes-du-Nord), avec un électromètre portatif et un électromètre à cadrans. Les appareils collec- teurs d’électricité étaient des mèches placées au sommet de mâts, l’un de 5 mètres, l’autre de 10 mètres de hauteur. « Le parallélisme des deux « courbes estfrappant, et montre que ia hauteur à « laquelle on doit observer est à peu près indifré- «rente ; les variations restent toujours propor- « Lionnelles, et il suffit dans la pratique de s’ar- « rêter au point où les indications sont d'intensité « moyenne, convenable pour l’instrument que l’on « emploie t, » Ces résultats sont contredits par M. L. Palmieri, qui trouve dans les observations simultanées faites l L’électricilé atmosphérique, d’après les travaux de Sir W. Thomson et la conférence de M. Mascar!, par M. Axcor. Annuaire de la Société météorologique de France, tome XXV, p. 153 et suiv. L PTT C. ANDRÉ. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE 607 à l'Observatoire de l’Université de Naples el à l'Observatoire du Vésuve une preuve deleur inexac- litude. « C'est une erreur », dit-il encore tout récemment ‘, «de croire que l'électricité aug- « mente avec la hauteur, puisque les observations «comparables et simultanées, mille fois répétées «prouvent le contraire. » Mais il faut remarquer, avec M. Exner, que ces deux stations ne sont pas siluées dans des condi- tions topographiques qui permettent d’en déduire une conclusion aussi affirmative. À Naples, en effet, les observations se font sur le chäteau Saint-Elme, c’est-à-dire sur le sommet d’une colline, assezbien isolée, d'environ 200 mètres de haut; l'Observatoire du Vésuve est au contraire situé sur la pente même dela montagne, sensiblement à mi-côte (617%). Dans la première station, les surfaces du niveau sont sensiblement horizontales et serrées ; dans la seconde, au contraire, elles sont inclinées et plus éloignées les unes des autres. La méthode d'ob- servation, dite du conducteur mobile, qu'emploie M. Palmieri, doit donc lui donner des valeurs moindres sur le flane du Vésuve qu'à Naples mème ; etil n'ya dans cette contradiction appa- rente rien qui puisse infirmerles résultats qui pré- cèdent,. De 1884 à 1887, M. Exner a repris l'étude de cette question : les nombreuses expériences qu'il a failes à ce sujet peuvent se partager en trois groupes : 1° De petits ballons gonflés à l'hydrogène soule- vaient une mèche portée par un fil fin de cuivre et dont l’extrémité inférieure était reliée à un élec- tromètre portatif. On observait au bord de la mer, dans un lieu parfaitement découvert, par un temps absolument calme, el à peu près toujours à la même heure pour éliminer l'influence de la varia- tion diurne. Voici les résultats obtenus : Hauteurenmetres : "017 48: 20-24 199 : 24 95927 30 34% 36 40 46 48 100, 110, 130, 160, 160, 170, 190, 204, 950, 240, 280, 320, 350. Potentiel en volts : Les variations du potentiel peuvent être consi- dérées comme proportionnelles à celles de la hau- teur ; et elles conduisent à une variation de 68 volts par mètre. M. Exner a fait des observalions analogues sur le sommet d’une montagne voisine, le Schafberg, haute de 1870 mètres ; la variation du potentiel y a encore ététrouvée proportionnelle à celle de l'alti- tude, mais le coefficient de proportionnalité était beaucoup plus considérable et correspondait à une augmentation de potentiel égale à 318 volts par mètre. 1 Sul Periodo diurno dell eleltricila atmosferica, per L. PazmierI. Rendiconti della R. Academia delle scienze fisiche e mathematiche di Napoli. fasc. 7° et 80, 1891. 2 Dans l'hiver 1824-85, en un lieu situé en rase campagne, aux environs de Vienne, el dont l’hori- zon élait parfaitement découvert, M. Exner a fait une nouvelle série d'observations avec un électros- cope portatif et une flamme comme collecteur ; son but spécial était de déterminer la valeur du champélectrique dans l’air le plus pur et il avait à cette fin commencé les observations dans une période de janvier où la température élait infé- rieure à zéro et où une couche de neigesèche assu- rait la pureté de l’air; elles furent d’ailleurs conti- nuées jusqu'en avril suivant, mais loujours par beau temps. Voici les résultats obtenus, avec le poids correspondant de vapeur d’eau par mètre cube : NOMBRE CHAMP POIDS TEMPI- HAUTEURS électrique | de vapeur en d’eau volt-mètres| en gram. d'observations RATURE et dates RÉTORE LIMITES 5—271 janv.1885 k—29 janv.1885 T—14févr. 1885 6—30mars18°5 7—23 avril 1885 3—95 avril 1885 0730 —1m25 0m30—4{m(( Om30—1m75 0m75 - 5mi( Lu25—5m925 2m5( — 5m5( CAC EE PR DOC UC 0: LL On voit par là la grandeur des variations que peuvent subir par leplus beau temps les valeurs du champ électrique en un point déterminé ! ; et d’au- tre part, contrairement aux idées de M. Palmieri, on constate lalongue durée (27 au 29 janvier), d'un champ électrique notoirement maximum, sans qu'il y &it dans l'atmosphère aucune condensation de vapeur d’eau. 3° Pour de plus grandes hauteurs, M. Exner a fait en ballon quelques observations malheureusement trop peu nombreuses : il en résults qu'à la hau- teur moyenne de 550 mètres la valeur du champ électrique était de 205 volts, tandis qu’au même moment elle élait de 98 volts à la surface de la terre. De l’ensemble de toutes ces observations, on est autorisé à conclure que, si par beau temps le champ électrique parait, au voisinage du sol, invariable le long d'une même verticale, il n’en est pas de même lorsqu'on s'éloigne notablement de la sur- face de la terre. C'est là un point fortimportant, et loute théorie acceptable doit Pexpliquer; celle de M. Sohncke en rend difficilement compte, il est au contraire üne conséquence directe de celle de M.Exner?, ainsi qu’il 1 Il est à remarquer que cette série ne vérifie pas plus la loi énoncée par Exner que celles que nous avons déjà dis- cutées. 2 Puisque, d'après Exner, la vapeur d'eau emporte dans l'atmosphère une quantité d'électricité négative qui, toutes choses égales d’ailleurs, est proportionnelle à son poids, on 608 C. ANDRE. — L'ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE 0 est facile de le montrer; le théorie de M. Exner per- met en outre de calculer la valeur du champ élec- peut admettre que, dans un élément de volume de l'atmos- phère pris à une hauteur quelconque x, la densité électrique cubique P? est proportionnelle au poids g de vapeur d'eau contenu dans l'unité de volume prise en ce point ; on a donc par l’équation de Poisson, ŒV dV dax? dy dv dz? = — 4rp = D.q. Mais d’une part on peut, sans erreur sensible, supposer g proportionnel à la pression p de la vapeur d’eau mesurée au point considéré ; et d'autre part, Hann a donné comme exprimant Ja veriatien de la pression de la vapeur d'eauavec la hauteur (Die Abnuhme des Wasserdampfgehalles der At- mosphäre mit sunehmender Hühe. Von DrJ. Haxx. Zeits- chrift der Osterreichen Geselhchaft für Metcorologie, vol. IX, 187%, p.193 et suiv.) la formule (1) P= Po U — an + Bn?), où p, etp sont les pressions simultanées à la surface du sol et à la hauteur n, u=0,246, B—0,01569, et où l'unité de hauteur est le kilomètre. Cette formule n'est applicable qu'environ jusqu’à 1 kilo- mètres, car pour des valeurs graduellement croissantes de ñ, elle donnerait des valeurs de p graduellement et indéfini- ment croissantes: or, l'observation montre que, pour une hauteur de 6 kil. 7, la pression p r’est plus que le sept cen- tièmes de Po. D'ailleurs, si l'on cherche la variation du potentiel suivant la verticale, GÉNIE 0 CAM Co dy? dV dY 2 — an? on a donc EN =D.p;(l — an—+fn?), dan? d'où 2 av — A ns 8 2 Eye (2) Te = D.po (72 nT de nm?) +B, Le champ électrique, au lieu d’être constant dans l’atmos- phère, varie donc à mesure que change l'altitude au-dessus du niveau de la mer ; et, comme avec les valeurs données ci- dessus pour les constantes, on a très sensiblement dN _dn {aN\ œ ee 0.05 de d (E)=( BB gs us on en conclut que le champ électrique est constamment crois- sant jusqu'aux limites où la formule (1) est applicable ; la formule (2) permettrait d'ailleurs de calculer, dans ces limites, les valeurs du champ électrique correspondant à toute hau— teur, si l'on connaissait les constantes qu’elle contient. La valeur de B est bien facile à obtenir, elle correspondau cas où n = 0, c'est-à-dire que c’est la valeur du champ élec- trique mesurée à la surface du sol en même temps que celle prise à la hauteur 7. La valeur de D est plus difficile à déter- miner; Exner y arrive comme suit : à une hauteur telle quetoute la vapeur d’eau atmosphérique se trouve au-dessous du lieu d'observation, le champ électrique doit évidemment avoir la valeur maximum À qu'on trouverait à la surface de la terre si celle-ni n’avait perdu aucune parcelle de sa vapeur d'eau. Or, à cette hauteur, p —0 ; admettons que la formule de Hann soit encore applicable (cette hypothèse est inadmissible ; nous avons en effet vu plus haut que, avec les coefficients adoptés l'équation A— an +fn?=0. n'a point de racines réelles), de l'équation (1) tirons ? en fonc- tion de p et remplacons dans l'équation (2) faisons y ensuite trique à une hauteur » déterminée. Ainsi, avec la valeur À — 1300 qu’a obtenue M. Exner, on trouve pour #7 —550 mètres un champ électrique égal à 326 volts, nombre bien différent de celui qu'avait donné l'observation. . En résumé, si la théorie de M. Exner fait prévoir l'augmentation continue du champ électrique avec l'altitude, que Pobservation parait bien indiquer, elle n’est point capable de rendre compte numéri- quement du mode de variation de cette donnée fondamentale pour la connaissance des faits de l'électricité atmosphérique. [TI. — ConcLusIoxs Les conclusions qui se déduisent de la discussion qui précède peuvent être résumées ainsi : 1° Aucune des théories que nous avons étudiées ne suffit pour expliquer l’ensemble des phénomènes électriques de l'atmosphère se produisant par beau temps, c’est-à-dire dans les conditions en apparence les plus simples et les plus régulières. 2° Les variations de la force électrique constatées par beau temps en un point de l’atmosphère au voi- sinage du sol, dans des conditions d'installation fixes et absolument définies, doivent être consi- dérées comme se rapportant à ce point de l’atmos- phère et non pas comme mesurant les variations du potentiel électrique du sol lui-même. En effet: a) La simultanéité des changements de mode de variation diurne, que les régimes différents de dis- tribution générale des pressions au-dessus du lieu d'observation causent pour la pression baromé- trique, la vapeur d’eau, le vent et le potentiel élec- trique, porte à admettre que toutes ces variations diurnes constituent des phénomènes analogues; b) Par suile de la grande conductibilité de la croûte solide du globe terrestre, il est inadmissible qu'une différence de potentiel importante puisse subsister entre deux points différents de sa surface ; p = 0 nous aurons, puisque le premier membre sera égal à A æ B A = D.poM| 1 — ï M + a + B, où, pour abrèger, on a posé et d'où l’on tirerait D. Il est plus simple de l’exprimer en fonction de À ; posons f I—Snt+in=n sn] nous obtiendrons aisément dV _A—B UT (3) ——= —— Pre), dn MN 2 3. équation qui ne contient plus que des quantités connues. On peut dès lors calculer les valeurs théoriques du champ élec- trique et les comparer aux observations. P. JANET. — LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE PSYCHOLOGIE EXPÉRIMENTALE au même instant physique les potentiels de deux points différents de la surface du sol sont done sen- siblement les mêmes. Or, les différences de poten- tiel dans les différentes stations entre un point de l'atmosphère et le sol varient d’une façon très régulière avec l’heure solaire locale. Au même instant physique, elles diffèrent donc, toutes choses égales d’ailleurs, avec les longitudes des stations situées sur un même parallèle ; le potenti2l du sol étant le même à chaque instant dans ces différents points, les différences observées ne peu- vent provenir que de l’atmosphère elle-même. En fait, les mesures si nombreuses d’intensilé des courants telluriques, faites par M. Aïiry en An- gleterre, et M. Blavier ‘ en France, ne donnent pas en général, entre les points de départ et d'arrivée souvent très distants, des différences de potentiel supérieures à 5 ou 6 volts. 3° Du parallélisme des courbes de variation 609 diurne de la force électrique et du poids de vapeur d’eau, on est porté à conclure que, pour le premier comme pour le second de ces éléments météorolo- giques, existe une cause continue de renouvellement ou de production, régie par des lois semblables à cel- les qui gouvernent la production de la vapeur d’eau. Cette cause de renouvellement ou de production serait telle qu'au moins dans de certaines condi- tions elle amène dans l'atmosphère des masses élec- triques agissantes! négatives, de sorte qu'à un courant atmosphérique extraordinairement ascen- dant puisse correspondre une force électrique également ascendante : elle devrait aussi être telle qu'elle donne lieu à un champ électrique non ho- mogène, mais croissant avec l'altitude, tout au moins jusqu'à certaines limites. Ch. André, Directeur de l'Observatoire de Lyon. LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE PSYCHOLOGIE EXPÉRIMENTALE Les congrès ne font pas la science, sans doute, mais ils la préparentet ils mettent en évidence ses progrès. Si l’on cherchait une nouvelle preuve du développement vraiment extraordinaire que les études morales ont pris depuis quelques années, on la trouverait dans le succès du Congrès psycho- logique de Londres. Au moment de l'Exposition de 1889, la Société de Psychologie physiologique de Paris a organisé le premier congrès de ce genre, lequel s’est réuni au mois d'août à l'École de Mé- decine. C'était une tentative délicate et difficile : la psychologie scientifique était-elle assez déve- loppée pour qu'il füt possible de la présenter en public, pour que l’on püt éviter dans les discus- sions deux écueils dangereux : les spéculations pu- rement théoriques de la métaphysique et les exa- gérations enthousiastes des mystiques? L’évène- ment répondit d'une facon très nelte, et, pour un début, le Congrès de Paris fut remarquable. L’ex- périence acquise n’a pas été perdue et le deuxième Congrès de psychologie, qui s’est réuni à Londres le 4% août 1892 sous la présidence de M. le Profes- seur Sidgwick, a prouvé par un succès éclatant la vitalité de notre nouvelle science. Il faut reconnaitre avant tout qu'une chose a contribué puissamment à donner au Congrès de Londres son caractère : c’est l’activité, le dévoue- ment et l’amabilité de ses organisateurs. Le prési- dent, M. Sidgwick, professeur de philosophie à Cambridge, dont les ouvrages sur la psychologie 1 Étude des courants telluriques, par M. BLavier, 1884. et la morale sont justement célèbres, les deux secrétaires du Congrès M. F. W. H. Myers et M. James Sully, les membres de la Society for psychi- cal researches, ont consacré un travail considérable à préparer le Congrès dans ses moindres détails. Ils ont rendu faciles et intéressantes les discussions et, en même temps, ils n’ont rien oublié de ce qui pouvait rendre agréable à leurs hôtes leur séjour en Angleterre. Tous les membres du Congrès leur en sont profondément reconnaissants. Le Congrès s’est réuni le lundi 1” août et les trois jours suivants dans les salles de lUniversity College, obligeamment prètées par le Directeur, et nous avons été agréablement surpris en voyant le nombre considérable de personnes appartenant à tous les pays qui étaient réunies le premier jour pour écouter le discours de bienvenue du président. Le nombre total des membres du Congrès a été à peu près de 300. Naturellement, les Anglais et même quelques dames anglaises qui s'intéressent aux études morales, formèrent la majorité. Nous ne pouvons que signaler quelques noms parmi les illustres savants ou philosophes de l'Angleterre qui ont assisté aux séances: $. Alexander, P' Bain, The right hon. A. I. Balfour, À. W. Barrett, D' David Brodie, D' Milne Bramwell, D' Ferrier, Francis Galton, D' Shadworth Hodgson, Pr W. Horsley, D' Hughlings Jackson, P' O. I. Lodge, D' Mercier, P' Lloyd, P' Croom Robertson, P' 1 Sur lPélectricilé atmosphérique, par M. Mascarr. Comptes rendus des séances de l'Académie des sciences, vol. XCI, 1880, p. 159. 610 P. JANET. — LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE PSYCHOLOGIE EXPÉRIMENTALE EE Schaefer, D' R. Percy Smith, Herbert Spencer, Henri M. Stanley, G. F. Stout, D' Hack Tuke, D° Waller, D' de Watteville. Les membres étrangers présents au Congrès étaient beaucoup plus nom- breux qu'on ne l'aurait pu croire. L’un des plus célèbres savants de l'Allemagne, von Helmholtz, à assisté aux premières séances; l'Université de Berlin était encore représentée par les P® Preyer et Ebbinghans et par le D'Goldscheider ; le P° Hit- zig, IL E. Mueller, de Gottingue, le P° Muenster- berg, le D'von Shrenck Notzing, le D'Sperling, le D: Titchener, le D' Leightner Witmer ont pris la parole à plusieurs reprises, Parmi les Russes nous avons remarqué MM. Alsikosoff, N. Lange, D° M. Mendelssohn. La Belgique, la Hollande, la Suède, la Suisse et même l'Amérique avaient envoyé des re- présentants. Parmi les Français présents au Congrès nous citerons : MM. Bérillon, Bernheim, Liégeois, Marillier, Mouret, L. Olivier, Ch. Richet, etc. Une grande difficulté enlève d'ordinaire beau- coup d'intérêt à ces congrès internationaux qui réunissent tant de savants appartenant à des pays différents. Ils ne demandent tous qu’à s’estimer, à s’applaudir réciproquement, mais ils ont bien de la peine à se comprendre. Les communications se fai- saient en trois langues différentes, — l'anglais, l’al- lemand et le français, — et beaucoup de personnes, dont je fais partie malheureusement, ont peine à suivre des discussions difficiles exprimées dans une langue étrangère. Pour diminuer autant que pos- sible cet inconvénient inévitable, les organisa- teurs du Congrès ont pris une excellente mesure. Ils ont demandé d'avance à chaque orateur un résumé net et complet de la communication qu'il comptait faire, etils ont fait imprimer tous ces som- maires. Au début de chaque séance, on distribuait ainsi une note imprimée qui permettait de suivre avec plus de facilité les discours et les discussions. L’abondance des communications proposées au Congrès rendit nécessaire une division en sections, l’une consacrée plus spécialement à Ja neurologie et à la psycho-physique, l’autre à l'étude del’hypno- tisme et des questions connexes. Mais, le plus sou- vent, l'après-midi était occupé par une réunion où l’on discutait les questions moins spéciales. Nous ne pouvons suivre dans leurs travaux ces différentes seclions et il ne nous parait pas néces- saire de résumer les communications dans l’ordre même où elles ont été présentées. Il nous semble plus ulile de les grouper suivant la nature des questions, afin d'indiquer les diverses directions suivies dans les recherches de psychologie expé- rimentale. Sans aucun doute, les recherches de psychologie ont une Lrès grande unité et se pro- posent toujours un même but : la connaissance de l'esprit humain; mais ces études, dont l’objet est semblable, diffèrent par la méthode employée de préférence. C’est d’après ces méthodes que nous croyons pouvoir distinguer les 4 classes suivantes : 1° Psychologie descriptive. Nous donnons ce nom, faute d’un meilleur, à l’étude des esprits normaux, soit que le psychologue essaie de la faire sur lui- même au moyen de la conscience, soit qu'il observe les autres hommes sans user d'instruments ou de procédés spéciaux. 2 Psychologie physiologique. Ce mot a été bien souvent pris d’une manière vague pour désigner toute étude scientifique et expérimentale; il vaut mieux le restreindre à son sens précis. Une étude mérite ce nom quand elle a pour but la découverte des relations entre la pensée et les organes corpo- rels, ainsi que cela a lieu, par exemple, dans l’exa- men des localisations cérébrales. 3° Psychologie mathématique. Ce n’est pas seule- ment l’ancienne psycho-physique, mais toute étude qui cherche à imposer aux phénomènes de pensée l’ordre et la mesure numériques. % La Psychologie pathologique ou Psychiatrie cherche à comprendre le fonctionnement normal de l'esprit en étudiant lesexagérations ou les sup- pressions que produit la maladie et qui sont autant de belles expériences naturelles. Elle s’ingénie aussi à lirer une utilité pratique des recherches psychologiques en les appliquant à la pédagogie et à la thérapeutique. Chacune de ces quatre classes a été représentée au Congrès par des communicalions intéressantes, dont nous ne pouvons que résumer les principales. I. — PSYCHOLOGIE DESCRIPTIVE La première communication présentée au Con- grès aussitôt après le discours du Président, a été, à notre avis, des plus significatives. On pouvait craindre et on avait même souvent prétendu que les nouvelles études de psychologie expérimentale étaient en opposilion avec les études anciennes des moralistes et des philosophes et semblaient disposées à les mépriser. Le P' Alexandre Bain, l’un des plus célèbres représentants de ce que l’on peut appeler la psychologie ancienne, s'est chargé de dissiper ce malentendu. Il a montré que, dans les études de ce genre, la méthode d'énfrospection, qui consisle à examiner par la conscience ce qui se passe en nous-mêmes, ella méthode des expériences psycho-physiques, qui consiste à calculer, d’après les manifestationsextérieures, ce qui se passe dans l'esprit des autres, devaient nécessairement s'unir et se compléter l’une l'autre. Sans aucun doute nous ne pouvons comprendre un phénomène moral qui se passe chez autrui si nous n'avons jamais constaté dans notre propre conscience quelque chose d'analogue. Certaines études, au contraire, 1 P. JANET. — LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE PSYCHOLOGIE EXPÉRIMENTALE 611 l'analyse du mouvement, celle de la mémoire, de l’association des idées, du champ de la conscience, ete. seront plus facilement abordées par la méthode objective. « En tous cas l'expérience peut venir en aide à l’introspection, mais ne pourrait sans dom- mage el sans faute essayer de la supprimer, » M. Charles Richet nous à fait entrevoir l’ave- nir des études psychologiques, fondées désormais sur les méthodes scientifiques. Il a montré com- ment l'anatomie et la physiologie d’un côté, la morale etla pédagogie de l’autre, profiteraient du progrès de nos connaissances sur notre propre esprit. Avec beaucoup de modération, il s’est demandé s’il ne faudrait pas faire un jour une place à une psychologie transcendentale qui mettrait en usage des puissances encore inconnues de l’es- prit humain. Par une sorte de délicatesse, les membres de la Society for psychical researches ont presque complètement évilé pendant le Congrès de discuter des questionsde ce genre. Ils voulaient faire bien comprendre qu’en assistant à celte réu- nion organisée par eux, aucunsavant ne s'engageait le moins du monde en faveur des recherches un peu aventureuses entreprises par la Société. Il élait juste cependant de faire une petite place à la psychologie transcendante, et nous signalerons, à la fin du Congrès, quelques communications répon- dant à la proposition de M. Richet. Pour compléter les études relatives à laméthode psychologique, nous rappelons la note de M. Beau- nis sur les questionnaires individuels. M. Beaunis, qui n'a pu malheureusement se rendre au Congrès, propose un plan d'études à suivre pour décrire complètement un individu. Dans ce plan, l’auteur donne une place à tous les caractères anthropolo- giques, médicaux et psychologiques. Si nous ne nous trompons, ce questionnaire rappelle un peu celui de M. Bourneville, qui est en usage à Bicêtre pour l’examen des idiots. J’ailoujours trouvé, pour ma part, que ces plans d'étude sont peu pratiques ; rien n'est plus difficile que la description complète d’un individu, et l’on pourrait presque dire qu'il faut un plan spécial pour chacun. Cependant, il faut reconnaitre que des questionnaires comme celui de M. Beaunis peuvent aider la mémoire quand il s’agit d'un examen rapide. Parmi les études de psychologie descriptive proprement dite, nous devons signaler un travail du P°M.Lange, d'Odessa, sur une loi de la perception. Il établit avec raison plusieurs moments ou degrés dans le processus de la perception : 4° le «shock » simple et sans qualité précise dans la conscience; 2° la conscience delamodalité générale de la sensation; 3° la conscience de la qualité spécifique, qui distingue une sensation d'une autre ; 4° la conscience de la situation dans l’espace de ces différents phénomènes. l’auteur montre ensuite que différentes catégories de mouvement correspondent, comme autant de réactions spé- ciales, à ces différents degrés de perception. M. le P' Ribot, qui n’a pu assister au Con- grès, a envoyé une note qui résume un travail très intéressant sur les idées générales. « Le but de celle enquête a été de rechercher l’état im- médiat de l'esprit au moment où un concept est pensé, de déterminer si cet état diffère suivant les individus et d'essayer une classification de ces variétés, » Par exemple, au moment où l’on pro- nonce devant vous le mot « Zoi » ou le mot « #féni » quelle est l’image qui vous vient à l'esprit quand vous comprenez ce mot? Chez la plupart des personnes, le terme général éveille une représenta- tion concrète, ordinairement une image visuelle; chez d’autres surgit une image visuelle du mot écrit où même imprimé; d’autres enfin prétendent qu'ils n’ont à ce moment absolument rien dans l'esprit. « Il ya donc quelques concepts auxquels correspond un état inconscient. » M. Ribol expose quelques recherches pour déterminer la nature de cet état inconscient, puis il répartit en classes ces différentes personnesetexpose quelques conclusions provisoires sur l’état permanent de certains esprits qui pensent sans cesse des abstractions. Le D' Newbold expose les caractères et les conditions des plus simples formes de la croyance. Le P' Baldwin, de l’Université de Toronto, cher- che à déterminer les rapports entre la suggestion et la volonte. Il décrit la suggestion comme un fait pri- mitif, qui se constate dans {tousles actes del’enfant; la volonté ne serait qu’un développement, une complication de la suggestion. Il distingue bien limitation simple, sans effort, et l’imilation volon- taire, dans laquelle il ya comparaison et coordi- nation des excitations différentes. Le D' Wallascheck lit une communication fort curieuse sur une petite question d'esthétique qui se rattache de près à la psychologie : l'effet de la sé- lection naturelle sur le développement de la musique. L'auteur voit surtout dans la musique son carac- tère en quelque sorte social. C’est elle qui, par le rythme, dirige les mouvements d'ensemble, anime d'une même pensée les guerriers et les chasseurs. Elle a été un moyen d'organisation pour les masses incohérentes, et, par conséquent, elle s’est développée comme un caractère utile, comme une cause de supériorité dans le strugqle for life. Rattachons aussi à la psychologie descriptive le travail du P' Lloyd Morgan sur {es limites de l’intel- ligence animale, en remarquant que peu de commu- nicalions ont porté sur la psychologie comparée, qui doit cependant former une branche importante de ces études. II. — PSYCHOLOGIE PHYSIOLOGIQUE La recherche des localisations cérébrales, de ces points du cerveau dont les fonctions correspondent à des phénomènes psychologiques déterminés, a été l’objet de communications et de discussions intéressantes. Nous ne nous étendrons guère sur ces très importantes études,la Revue se proposant de leur consacrer un article spécial, Le P' Horsley a montré les incertitudes qui existent encore quand on cherche à localiser avec précision les mouvements et les sensations corrélatives. Le D' W. B. Ransom a rapporté une observalion médicale qui peut être très utile pour ces études. Il s’agit d'une épilepsie localisée (qu'on appelle en France épilepsie Jacksonienne) qui provoquait des secousses et des spasmes dans la main gauche, en même temps qu’une légère anesthésie tactile et musculaire au même endroit. La trépanation fit découvrir un kyste comprimant le centre cortical de la main gauche. Après l'opération, on fit des expériences précises,lesquelles avaient rarement pu être tentées sur l’homme. L’électrisation en ce point de l'écorce amena la contraction des muscles de l'avant-bras et de la main, mais donna lieu, en outre, à des sensations tactiles et musculaires accu- sées par le sujet dans ces mêmes parties. On nota également l’affaiblissement du pouvoir moteur vo- lontaire après une forte contraction provoquée. Le travail de M. le D' A. D. Waller sur Les fonc- tions attribuées à l'écorce cérébrale est des plus remar- quables; mais nous ne pouvons y insister, car il sera publié prochainement dans la Æevue. Signalons plutôt une recherche expérimentale , dont les résultats sont un peu inattendus, qui a été communiquée par le P' À. Schaefer au sujet des fonctions des lobes préfrontaux; on a souvent soutenu l'opinion que ces lobes devaient être regardés comme le siège des opérations intellectuelles. On s’'appuyait sur diverses considérations et aussi sur des expériences de Ferrier, Horsley, Hitzig et Goltz. Les animaux, après l’ablation de ces parties du cer- veau, restaient apathiques et stupides et semblaient avoir perdu loute faculté d'observation attentive etintelligente. L'auteur prétend que ces expériences déjà anciennes n’ont pas été faites avec toutes les précautions d'une asepsie rigoureuse etque, d'autre part, les lésions étaient trop étendues. Si l’on se contente de sectionner complètement les connec- tions de ces lobes avec les autres parties du cer- veau, on peut faire l'opération d’une facon très aseptique et sans grand shock opératoire. Des singes opérés de la sorte n’ont présenté aucun symptôme appréciable el paraissaient aussi vifs et intelligents qu'ils l'étaient auparavant. Ces expé- riences ne semblent pas d'accord avec l'idée que l’on P. JANET. — LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE PSYCHOLOGIE E XPÉRIMENTALE se faisait du rôle important des lobes préfrontaux. Si une étude anatomique doil intéresser les psy- chologues, c’est certainement l'examen du cerveau d’une personne célèbre dans les annales de la psychologie. On se souvient des nombreuses études qui ont été publiées sur l'éducation de Zaura Bridyman, aveugle, sourde et muetle presque depuis sa naissance. Le D' H. Donaldson a eu le bonheur de pouvoir étudier ce cerveau et a communiqué au Congrès son observalion. Il n’a pas rencontré de grosses lésions anatomiques, mais il a élé frappé de l’amaigrissement des circonvolutions et surtout de la faible épaisseur de la substance cor- ticale sur certains points. Les points les plus net- tement frappés d’atrophie étaient le centre de Broca, la première circonvolution temporale des deux côtés, les deux pôles occipitaux. Ces points correspondent, comme on le voit, aux centres admis pour les sens qui manquaient à la malade. Les études sur le sens visuel, son anatomie et sa physiologie ont été particulièrement nom- breuses. Le DS. E. Henschen, d'Upsala, a étudié les voies suivies par les impressions visuelles et le centre visuel. T1 se fonde sur un certain nombre d’obser- valions cliniques suivies d'autopsie. Nous ne pou- vons suivre le nerf visuel dans le corps genouillé externe, dans le tubereule antérieur des corps quadrijumeaux. Nous notons seulement que, d’après l’auteur, une lésion de la partie postérieure de la capsule interne ne produit jamais l’hémia- nopsie et qu'il fait passer toutes lesfibres visuelles dans un petit faisceau épais de peu de millimètres, situé à la hauteur de la deuxième circonvolution temporale, du deuxième sillon temporal et de la scissure calcarine. Le centre visuel serait localisé par cet auteur avec une grande précision dans l'écorce de la scissure calcarine et les différents points de cette scissure correspondraient aux dif- férents points de la rétine. Le D' H. Hebbinghaus, de Berlin, résume et dis- cute les dernières études sur la théorie de la vision d-s couleurs. Il trouve insuffisantes l’ancienne théorie de Yung-Helmholtz et celle de Héring, et croit pouvoir expliquer toules les impressions co- lorées par des modifications du pourpre rétinien. Une dame, M'° Ladd Francklin, discute ces ques- tions délicates avec une grande compétence ; elle admet que la substance chimique qui excite la réline s’est peu à peu différenciée et qu'il y a main- tenant trois corps différents produisant, sous l’in- fluence des différentes parties du spectre, trois sen- sations différentes, celles de rouge, vert et bleu. Le D' E. D. Titchener, de Leipzig, complèle ces études sur le sens visuel par un travail sur les’effets binoculaires d'excitations monoculaires ; il vé- rifie par les procédés de la psycho-physique une P. JANET. -- LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE PSYCHOLOGIE EXPÉRIMENTALE relation fonctionnelle entre les deux rétines, rela- tion déja mise en évidence par des recherches physiologiques. Le D' Verriest, de Louvain, expose quelques re- marques intéressantes sur l'origine du langage rythmé; il montre que le rythme de certaines pen- sées et de cerlaines paroles se rattache au fonc- tionnement rythmé de certains organes. Rattachons à ces études anatomiques une courte note, que M. Binet a envoyée au Congrès sur/es nerfs des ailes chez quelques Insectes. On peut distinguer chez quelques Coléoptères une racine dorsale, qui serait plus spécialement motrice, et une racine ventrale, qui serait sensitive. IIT. — PSYGHOLOGIE MATHÉMATIQUE Les études de ce genre, nées en Allemagne, sont toujours en grand honneurchezles psychologues de ce pays et chez ceux qui ont été instruits en Alle- magne. Elles ont été en général fort discutées en France; mais il faut avouer, après avoir éludié quelques-unes des communications présentées au Congrès, qu’elles fournissent quelquefois des ré- sultats précis et d’une valeur générale. Le P° Heymans applique la loi de Weber au phé- nomène de l'inhibilion des représentalions. On sait que, d’après celte loi, il existe une relation mathé- malique déterminée entre la quantité de l’excita- tion extérieure et l'intensité de la sensation éprou- vée. L'auteur pense qu’il faut une relation numé- rique du même genre entre deux excitations, pour que l’une fasse disparaitre l’autre de la conscience. Le D' Mendelssohn, de Saint-Pétersbourg, a es- sayé d'appliquer une loi de Fechner, dite Za loi pa- rallèle, aux modifications pathologiques de la sen- sibilité. « D’après la loi de Fechner considérée comme une simple conséquence de celle de Wéber, lorsque la perceptibilité d'un sens varie également pour deux excitants, la perceptibilité de ce même sens pour leur différence relative ne varie point pour cela. » Un sens affaibli pathologiquement et percevant moins bien chaque excitation considérée isolément devrait continuer à distinguer aussi bien les différences relatives entre ces excitations. Les résultats des expériences sont loin d'être con- formes à ceux que le calcul aurait fait prévoir. Le P' W. Tschisch, de Dorpat, étudie le rapport entre l'étendue de la perception et le temps de la réaction ; il constate un résultat intéressant, c’est qu'une perception étendue, capable de saisir dans un même instant un grandnombre d’impressions élé- mentaires, est en même lemps une perception ra- pide. Quand la perception faiblit, quand elle a moins d’étendue, elle semble s’affaiblir de toutes manières, car elle est en même temps ralentie. Le D'A. Lehmeun fail connaître les résultats 613 de ses recherches expérimentales sur le rapport entre la respiration et l'attention. Les oscillations de l’atten- tion ne sont pas toujours explicables par une fa- tigue des muscles de l’accommodation. Il ne fau- drait pas croire qu’elles soient mieux expliquées par les lois qui régissent l'intervention des museles respiratoires. L'auteur tend à rattacher ce phéno- mène à des variations dans la pression sanguine intra-cérébrale pendant l'inspiration etl’expiralion. Je voudrais insister un peu sur un travail très cu- rieux du P' H. Muensterberg, intitulé Fondement psy- cho-pluysique des sentiments, car il nous montre bien à la fois l'intérêt et le danger de certaines expériences minutieuses. Essayons de faire avec la main droite un petit mouvement, de tracer, par exemple, une ligne de 10 centimètres de longueur; quand nous sommes bien exercés à ce mouvement, essayons de le répéter les yeux fermés en dirigeant notre main de droite à gauche par un mouvement de flexion (centripète) ou de gauche à droite par un mouve- ment d'extension (centrifuge). Cerlainement, mal- gré nos efforls, la ligne tracée les yeux fermés n'aura pas exactement une longueur de dix cen- timètres, et l'erreur inévitable sera plus ou moins accentuée tantôt dans les mouvements de flexion, tantôt dans les mouvements d'extension. Répétons cette expérience dans différentes circonstances, quand nous sommes aclifs et gais, quand nous nous sentons déprimés, tristes, colères, elc., elno- tons les erreurs etleur sens. Nous verrons, d’après M. Muensterberg, se manifester une loi très pré- cise : pour ne parler que de deux sentiments, nous verronsque, dans le chagrin, les mouvements d’ex- tension (centrifuges) sont trop courts (erreur moyenne de — 10 millimètres), elles mouvements de flexion (centripètes) sont trop grands (erreur moyenne + 12 mm.). Dans la joie, au contraire, les mouvements centrifuges sont trop grands ( + 10) et les mouvements centripètes trop courts (— 20). D'où l’on peut conclure que dans le cha- grin il y à une tendance à la flexion et dans le plaisir à l'extension. Les sentiments sont tout de suile classés et mème expliqués par ces tendances différentes : l'opposition des sentiments centripèles et des sentiments centrifuges est immédiatement rattachée à tout notre développement psychologique et rend compte des émotions diverses que nous éprouvons. Le point de départ nous semble une observation de détail intéressante et probablement exacte. Bien entendu, que M. Muensterberg a pris toutes les précautions né- cessaires :il sait l'influence des modificalions du sens kinesthésique sur des mouvements exéculés les yeux fermés ;il sait l'influence énorme des idées préconçues sur la longueur des petits mou- vements de ce genre. Les expériences, nous le sup- nous supposons 614 P. JANET. — LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE PSYCHOLOGIE EXPÉRIMENTALE posons, quoique l’auteur n’y insiste pas suffisam- ment, ont toujours dû être faites sur des per- sonnes absolument ignorantes de toute recherche psychologique et n’ayant jamais entendu parler de la théorie dessentiments centripètes etcentrifuges. Admettons qu'elles soient entièrement vérifiées ; aurons nous trouvé la classification et la théorie des émotions? Pour ma part, j'ai le regret de dire que je n’en suis pas entièrement convaincu. Peut- être serait-il plus prudent d'ajouter ce petit dé- tail à la grande somme d'observations déjà faites sur les sentiments, et d'attendre pour les expliquer une théorie plus compréhensive, qui tienne plus compte des autres phénomènes. Notre critique ne s'adresse pas à M. Muensterberg, qui probable- ment, dans sa théorie générale des sentiments, réunit bien d’autres faits etne s’en tient pas à ce petit détail intéressant. Elle a pour but de montrer à ceux des lecteurs de la Revue qui ne sont pas habitués aux recherches de la psycho-physique, ce qu'il ya d’intéressant, de précis dans ces études, et ce qui pourrait en constituer le danger. Le travail du P' M. Preyer, d'Iena, qui a pour titre Arifhmogenesis, nous semble aussi exagérer un peu l'importance d’un fait de détail. M. Preyer, qui est très musicien et qui a l'oreille fort juste, croit que les notions de nombre se forment toutes par la sensation des rapports entre les tons musicaux. Comment les personnes qui ont l'oreille abomina- blement fausse arrivent-elles à découvrir les no- tions élémentaires de l’arithmétique? Enfin rattachons à la psychologie mathématique l’étude du D' Lightner Witmer sur la valeur esthé- tique des proportions mathématiques des fiqures simples. De nouvelles expériences viennent confirmer une théorie des anciens artistes grecs. En dehors de l'égalité des parties, — qui est la proportion la plus agréable, — l’auteur a trouvé qu'un rapport entre À et? procure à la plupartdes personnes un sentiment esthétique bien net. C'est à peu près ce que l’on désignait autrefois sous le nom de la section dorée. Ces éludes très nombreuses et les discussions qu’elles ont provoquées montrent la grande part que la psychologie mathématique a eue justement dans le Congrès. IV. — PSYCHOLOGIE PATHOLOGIQUE. PSYCHIATRIE La pathologie mentale nous réserve bien des ressources pour comprendre l'esprit humain:elleest aussi inséparable de la psychologie que la méde- cine de la physiologie. Aussi avons-nous à signaler de nombreuses communications sur ce sujet. M. Lombroso, qui n'a pu venir lui-même au Congrès, a envoyé une Étude sur la sensibilité des femmes normales, aliénées el criminelles. Le D° Golds- cheider, dans ses recherches sur le sens musculaire des aveugles, a vérifié, par des expériences précises, une ancienne croyance presque populaire qui avait be- soin de confirmation. Il a montré que les aveugles arrivent, à force d'attention, à un développementex- traordinaire du sens tactile et du sens kinesthésique. M. le P' Bernheim (De la nature psychique de l'a- maurose hystérique) reproduit le récit de quelques expériences qui tendent à prouver que l’anesthésie hystérique est de nature essentiellement psychique. J'aurais mauvaise grâce à contester l'intérêt de ces expériences, puisque j'ai signalé moi-même en 1887 exactement les mêmes faits et que, depuis, je les ai décrits à plusieurs reprises !. Je n’insisterai pas non plus sur ma propre communication au Congrès : Etude sur quelques cas d'amnésie antérograde dans la maladie de la désagrégation psychologique, car ce tra- vail doit paraitre prochainement dans la Revue. M. F. W. H. Myers, l'un des membres les plus actifs de la S. P.R. et l’un des organisateurs du Congrès, a décrit un phénomène des plus curieux, qui est, à mon avis, très important, quoique peu connu en France. Certaines personnes ne peuvent fixer longtemps une surface éclairée et brillante sans éprouver de singulières perturbations men- tales. L'un de ces troubles consiste à voir peu à peu une image, une véritable hallucination visuelle se dessiner sur la surface vide qu’elles regardent. Cest là, comme le dit M. Myers, une production expé- rimentale d'hallucinations. Ge fait, très anciennement connu, a donné lieu à bien des superstitions : il constituait le fond de l’ancienne divination par les cristaux et par lesmiroirs. Aujourd’hui, sous le nom de erystal-vision, il est étudié scientifiquement. On constate alors qu'ilest absolument analogue au phé- nomène, bien connu, de l'écriture automatique des médiums, et qu'il peut servir, de la même façon, à pénétrer plus profondément dans l’analyse de cer- tains phénomènes subconscients, dont le sujet lui- même ne se rend pas compte. M. Myers, dans une étude très complète, analyse ce fait dans tous ses dé- tails. Depuis quelque temps déjà, j'avais été amenéà m'occuper de la erystal-vision par la lecture d’ar- ticles très suggestifs de Miss Freer, parus dans les Proceedings ofthe S. P. R., et j'avais constaté l’exac- titude et l’importance de ces observations. Une seule chose me séparait el me sépare encore de ces deux auteurs : c'est qu'ils considèrent le fait comme normal chez l'homme bien portant et que je le considère comme essentiellement patholo- gique. J’ajouterai même tout bas que mon voyage en Angleterre et lavue des personnes qui éprouvent ces hallucinations m'ont confirmé dans mon opi- nion. Mais, peu importe cette discussion, il n’en était pas moins juste d'appuyer au Congrès les 1. Archives de neurologie 1892, n° 69, p. 323. P. JANET. — LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE PSYCHOLOGIE EXPÉRIMENTALE 615 observations de mon ami, M. Myers. J'ai rapporté plusieurs cas de ces phénomènes observés pour la plupart dans le service de mon éminent maitre, M. le P'Charcot. Après des attaques de somnan- bulisme, qui enlèvent en apparence au malade toute mémoire de ce qu'il vient de faire, le sou- venir se manifeste quelquefois d’une manière très précise soit dans l’écriture automatique soit dans les hallucinations provoquées par la erys- tal-vision. Certains états maladifs souvent fort graves sont dus, à notre avis, à des idées fixes dont les sujets ne se rendent pas compte et qui persis- tent quelquefois en eux tout à fait à leur insu. J’ai cherché tous les moyens de mettre au jour ces idées fixes subconscientes et j'ai constaté que sou- vent le procédé décrit par M. Myers donnait des résultats fort intéressants. Cette hallucination dépend, croyons-nous, de bien des causes : la sug- gestion, le rêve, des états analogues à l’hypno- tisme, interviennent certainement. Mais un fait particulier, une perturbation maladive de l'atten- tion nous paraît jouer ici le plus grand rôle. Les hallucinations actuelles ont été l’objet, en Angleterre, d’un grand travail. La S. P. R. a entre- pris, depuis plusieurs années, de dresser une s{atis- tique des hallucinations, analogue à celle que Brière et Boismont avaient établie autrefois. Mais, grâce aux ressources dont la Société dispose, cette en- quête a pris des proportions tout à fait inusitées. On a distribué de tous côtés des questionnaires de- mandant à chaque personne si elle avait jamais éprouvé une hallucination et dans quelles circons- tances. Plus de 17.000 réponses ont été dépouillées, et les résultats de ce long travail ont été présentés au Congrès par M. Sidgwick et par M. Marillier. 9,9 sur 100 personnes seulement ont donné une réponse aflirmative. Il ne faut pas oublier dans quelles conditions cette enquête a été conduite elle avait pour but d'étudier l’état de santé et non la maladie ; aussi a-l-on systématiquement laissé de côté les malades et les aliénés. Ce point de dé- part peut être l’objet de bien des critiques; je les _avais déjà exposées en 1889, quand l'enquête a été résolue; je n’y ai pas entièrement renoncé et j'ai vu avec plaisir qu'elles ont étéen partie reproduites cette année par le D" Osler, de Johns Hopkins Uni- versity. Peut-on considérer comme ayant l'esprit sain une personne capable d'éprouver une halluei- nation? Comment déterminer la limite entre les personnes prétendues saines, donton accepte lesré- ponses, et les aliénés que l’on repousse? Tous les fous, il s’en faut de beaucoup, ne sont pas dans les asiles el il n'est pas facile de les reconnaitre à première vue. La Commission qui s’est chargée de l'enquête a répondu, autant que possible, à ces cri- tiques : elle a dressé une table particulière où l’état de santé des personnes interrogées est indiqué ; elle a réuni une grande quantité de détails sur les phénomènes qu'elle classait. En un mot, cette enquête a fourni une riche collection de matériaux qu'il sera nécessaire d'utiliser pour l'étude deshal- lucinalions, mais qu'il faudra savoir interpréter. L'hypnotisme a été naturellement l’objet de nombreuses discussions qui ne nous semblent pas avoir apporté beaucoup de notions nouvelles. Au premier abord on croyait, en entendant les ora- teurs, que la question ne s'était aucunement modi- fiée depuis quelques années. Les mêmes personnes ont répété exactement les mêmes phrases sans plus de précision ni de clarté; mais, en réalité, il y avait dans leurs discours une modification très singulière. Autrefois on s’efforçait de montrer la réalité et l’importance des phénomènes hypno- tiques, de les distinguer, autant que possible, de la simulation et de la simple complaisance. Aujour- d’hui, parait-il, tout est changé, l'hypnotisme s’est confondu avec les phénomènes les plus simples de la vie courante, la suggestion n’est rien d’autre que la gronderie d’une mère ou la lecon d’un professeur ; bien mieux, on renonce au mot Aypnotisme et à la chose même : «L'hypnotisme, a dit M. Bernheïm, ce n'est rien, rien du tout; la suggestion, cela est tout à fait inoffensif, c'est un bon conseil, voilà tout; l’hallucination,c’est un rêve, une petite rêverie ; est- ce que cela existe, l’halluecination ? mais non, cela n’est rien, rien du tout.» On ne conserve plus qu'une seule notion, c’est que cet hypnotisme, qui n’est rien, possède une puissance merveilleuse et gué- rit absolument tout. Reconnaissons cependant que M. Bérillon a essayé une timide protestation : « L'hypnotisme, a-t-il dit, est peul-être quelque chose et peut-être ne guérit-il pas très complète- ment. » Mais ses maitres en hypnotisme Ini out vivement reproché cette indépendance. Singulière manière d'étudier les phénomènes de l'esprit! Faut-il donc que la psychologie, introduite dans la médecine, vienne simplement y apporter le gàchis ? Claude Bernard l’a déja démontré autre- fois : tous les phénomènes pathologiques contien- nent à leur point de départ des phénomènes nor- maux et en sont cependant bien distincts. Il se peut que l’hypnotisme et la suggestion appliqués au hasard à des personnes bien portantes ne soient (rien, rien du tout », j'en conviens; mais cela ne supprime pas l'existence du somnambu- lisme réel, des idées fixes ni des hallucinations. M. le D' Bramwell a montré quelques expé- riences d'hypnotisme. En général, je pense qu’il faut être sévère pour ce genre d’exhibitions de tous points fâcheuses, et inutiles pour la science. On peut être plus indulgent dans un Congrès et reconnaitre que les faits présentés par M. Bram- : oi 616 P. JANET. — LE CONGRÈS INTERNATIONAL DE PSYCHOLOGIE EXPÉRIMENTALE well ont élé des plus nets et des plus intéressants. Les applications de l’hypnolisme à la jurispru- dence ont été l’objet des travaux de M.J. Liégeois. Dans une étude intéressante sur Mme Weiss, l’em- poisonneuse d'Ain-Fezza, il a fait ressortir toutes les difficultés que présente, au point de vue de la jus- tice criminelle, l’ancienne théorie de la responsabi- lité. Peut-être dans ce cas, — M. Liégeois ne serait pas éloigné d’en convenir, — s'agit-il moins d’hyp- notisme proprement dit que de maladie mentale. Plusieurs auteurs ont exposé des applications de la suggestion à la thérapeutique. M. Hilzig a montré comment, dans bien des cas, les attaques naturelles du sommeil peuvent être modifiées, puis supprimées par la suggestion hypnotique. MM. Liébault et Liégeois ont raconté l’histoire d'une monomanie du suicide quérie par suggestion pen- dant le sommeil provoqué. J'ai été d'autant plus inté- ressé par cette communicalion que déjà, dans mes études sur les idées fixes, j'avais pu en voir toute l'exactitude. Je serais cependant plus inquiet que ces auteurs sur l’avenir des malades qui conser- vent une tendance des plus dangereuses aux idées fixes et à la suggestion. M. Bérillon a exposé /es applications de la suggestion hypnotique à l'éducation. Ses propositions sont très modestes et très justes et il n’applique guère ce moyen dangereux qu'à des enfants malades pré- sentant des phénomènes nerveux analogues à des idées fixes comme l’incontinence d'urine, la klep- tomanie, etc. Cependant, elles ont provoqué une discussion qui m'a paru bizarre; ceux qui tout à l'heure trouvaient que l’hallucination n’est abso- lument rien, prétendent maintenant que les sug- gestions de M. Bérillon sont dangereuses pour les enfants et qu'il faut se contenter de bons conseils et de prédications morales. Mais, enfin, si les beaux discours ont échoué, pourquoi ne pas essayer un procédé dangereux, mais puissant ? Le médecin se sert quelquefois de la digilale et ne traite pas toutes les maladies avec de l'eau sucrée. Le discours de M. Van Eeden sur la théorie de lu psychothérapeutique peut servir de conclusion à ces recherches. L’auteur nous fail entrevoir un avenir encore lointain où la psychologie aura un grand rôle dans la thérapeutique. Malheureusement, il reste dans les généralités un peu vagues, affirmant que l'esprit a une grande action sur le corps et que l’éducalion est un grand remède pour cer- taines maladies nerveuses. Nous en sommes tous parfaitement convaincus, mais ce que nous deman- dons, ce sont les règles précises de cette éduca- tion, les éléments du diagnostic moral, les moyens pratiques appropriés à tel ou tel cas. M. Van Eeden a raison aussi en disant que l’hypnolisme est quelque chose et même quelque chose de grave. Mais pourquoi le proscrire absolument de la thé- rapeulique? Certains accidents nerveux prennent leur origine dans des états analogues à l’hypno- tisme et seront bien plus rapidement supprimés si l’on reproduit cet état, Qu'on ne parle pas de l'hyp- nolisme à tout propos, cela est évident; mais qu'on lui laisse sa place et sa très grande place dans l'étude et le traitement des psychoses. Pourquoi ne pas parler de psychologie transcen- dentale, comme dit M. Ch. Richet, pourquoi ne pas nous aventurer un peu dans l'inconnu ? M. Delbæuf nous parle de l'appréciation du temps par les somnam- bules. Les fails curieux qu'ilprésente semblent mon- trer qu'il peut y avoir, en dehors de la conscience normale, une faculté de mesurer le temps. MM. H. Sidgwick nous a rapporté les résultats des dernières recherches de la S. P. R. sur les phénomènes de #hought transference où de sugges- tion mentale. « Par thought transférence on entend la communication des idées d'une personne appelée agent à une autre appelée percipient, de toute autre manière que par le moyen des sens que nous con- naissons. » Pour faire ces expériences, on sépare l’un de l’autre l'agent et le percipient, on place un écran entre eux et cependant le percipient arrive souvent à reproduire les dessins, les mots, ou les nombres pensés par l'agent. Ces recherches mal- heureusement n’ontpas fait de bien grands progrès : ce sont toujours des faits curieux, mais isolés, dont le déterminisme reste bien vague et l’on ne croit guère que ceque l’on comprend ou ce que l’on croit compendre. (Une discussion assez sévère de ces expériences vient de paraître dans la Revue philo- sophique.) I faut louer cependantles personnes qui poursuivent ces éludes avec précision et patience : elles préparentpeut-êtreles découvertes de l'avenir. Bien qu'incomplets, ces quelques résumés mon- trent le nombre et la variété des travaux qui ont été présentés au Congrès de Londres. Ils nous ont fait passer en revue d'une manière rapide toute la psychologie expérimentale. Ils nous ont montré aussi les tendances diverses de chaque pays : en. admettant, bien entendu, de nombreuses excep- tions et en ne parlant que du Congrès, les travaux sur l’anatomie cérébrale ont surtout été présentés par les Anglais, les communications sur la psycho- logie mathématique par des Allemands, les études de psychiatrie par des Français. Au prochain Con- grès, qui aura lieu à Munich, cet ordre sera pro- bablement très modifié, car ces réunions, qui per- mettent aux savants de se connaître et de se lier, confondent les méthodes des différents pays et donnent plus d'unité à la science universelle. Pierre Janet, Docteur ès lettres, Professeur de Philosophie, au Collège Rollin. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 617 : BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Haton de la Goupillière. Membre de l'Institut, Directeur de l'Ecole des Mines. — Cours de ma- chines, T. 11. 2° fascicule : Chaudières à vapeur. Un vol. in 8°, pages 929 à 909, avec 206 fig. (Prix 15 fr.). Vue Ch. Dunod, Paris 1892, Ce fascicule termine le Cours d'exploitation des Mines et des Machines, dont la publication a commencé en 1883 : cet important et remarquable ouvrage ren- ferme la matière de l’enseignement des deux chaires principales de l'Ecole nationale supérieure des Mines, formées par le dédoublement de celle qu'occupait M. Haton de la Goupillière, avant de devenir directeur de l'Ecole. La division de l’ouvrage en deux parties dis- tinctes, relatives la première à l’exploitation des mines proprement dite, et la seconde, aux moteurs hydrauli- ques et thermiques, correspond à ce dédoublement, qui a été imposé par la nécessité d’alléger un enseignement devenu excessivement chargé et beaucoup trop vaste. L'importance toute spéciale de ce dernier fascicule ressort des fonctions mêmes des ingénieurs du corps des mines, auxquels est confiée en France la surveil- lance des générateurs de vapeur. On professe des cours de chaudières à vapeur dans un grand nombre d'écoles, écoles professionnelles, écoles des arts et métiers, instituts industriels, écoles du génie civil, ete., car ces établissements d'application se sont extrêmement multipliés depuis quelques années. Mais le cours de chaudières de l'Ecole des Mines n’est com- parable à aucun autre; nous sommes ici dans la pre- mière école d'application de France, dont les élèves se recrutent au sommet d’une autre école, qui a opéré ellemême une sélection parmi des intelligences dis- tinguées : s’il est vrai de dire qu'aucun professeur de chaudières ne saurait trouver ailleurs de plus bel audi- toire, il faut reconnaître, d'autre part, que cet auditoire d'élite doit recevoir l’enseignement le plus complet et le plus élevé qui puisse se donner. Comment un membre de l’Institut parlera-t-il de chaudières à vapeur en s'adressant à ces élèves, qui ne seront rebutés par au- cune théorie et pour lesquels aucun calcul ne présente de difficultés? On pouvait croire que l'ouvrage serait émaillé de calculs transcendants et de théories ardues, et qu'il serait d’une lecture fort difficile, Il n'en est rien : M. Haton de la Goupillière s’est proposé de faire connaître à fond aux futurs ingénieurs des mines la chaudièresous ses formes multiples, avec ses nombreux accessoires ; il en fait des descriptions très précises, mais fort simples etadmirablement lucides; il en expose les théories, d’une manière complète et très ration- nelle, mais sans aucune recherche et en élaguant de son exposé toute inutilité; il ne calcule que ce qu'il faut, par les voies les plus simples, et nous ne trouvons qu'une fois ou deux des intégrales dans ce livre, qui peut dès lors être lu et compris de tous. Les grands sa- vants ne compliquent pas les questions qu'ils traitent, ils les simplifient plutôt : en voilà une preuve nouvelle, Telle est la première impression que nous avons éprouvée en étudiant ce livre pour en faire l’analyse, Il se compose de treize chapitres : Le premier est réservé à l’étude générale de la combustion, le second à la construction des chaudières, les trois suivants aux divers types de générateurs, deux autres aux acces- soires et aux appareils d'alimentation, Les diverses monographies dont se composent ces chapitres sont pré- sentées d’une facon fort limpide et les descriptions sont éclairées par des figures bien dessinées et bien gravées, ce dont il faut savoir gré à l’auteur autant qu'à ET INDEX l'éditeur. Les dépôts et incrustations, les explosions et leurs causes, les règlements et leur interprétation font l'objet de chapitres spéciaux et conduisent à l'étude des divers appareils de sûreté, prescrits ou non par les or- donnances et les décrets qui régissent la matière. Vien- nent ensuite deux études, qu'on ne s'attendait pas à trouver dans un cours de chaudières, mais qui ont été renvoyées sans doule à ce dernier fascicule par des nécessités de tirage : c’est d’abord la théorie des con- denseurs, puis la description des appareils indicateurs employés pour relever des diagrammes et ausculter les machines, que M. Thurston à appelés avec tant de rai- son les stéthoscopes de l'ingénieur. Chacun de ces chapitres est accompagné de notes bibliographiques extrèmement complètes et parfaite- ment classées, qui permettront au lecteur de remon- ter aux sources; mais nous lui méconseillerons le plus souvent de s'engager dans cette voie, car l’auteur a extrait la quintessence des travaux qu'il cite, nous l'avons constaté à maintes reprises, et l’on retrouve dans le texte toute l’érudition dont les notes font preuve. Mais aussi faut-il lire ce texte avec attentionetle méditer alin de ne rien perdre de ce qu’il renferme : il est peu d'ouvrages qui méritent cet éloge. — Un livre aussi dense ne peut évidemment pas s’analyser en quelques lignes, car il est lui-même déjà une analyse raisonnée d'une science que plusieurs auteurs ont exposée en de fort gros volumes et non pas en 384 pages. Et pourtant l'étude que M. Haton de la Goupillière fait de la ques- tion est très complète; mais son ouvrage est un cours et non point un fraité; on sent que cela a été parlé et en- seigné et que la préoccupation didactique l'emporte sur l'amour du document, qu’on observe chez quelques écri- vains, Citons un exemple caractéristique : un seul ta- bleau d'une page renferme, pour les principales classes de combustibles naturels, toutes les données qu’il est utile de connaître relativement àla composition élémen- taire, aux résidus en coke et cendres, etau pouvoir calo- rifique des houilles. Vous en faut-il davantage? Vous trouverez en note l'indication des travaux originaux et des compilations de MM, Meunier-Dollfus, de Marsilly, Scheurer-Kestner, Cornut, Bour, Walther-Meunier, ser, Mahler, etc. Mais le texte vous suffit pour vous faire con- naître la classification des houilles, leurs caractères, leurs propriétés générales et les meilleures conditions de leur emploi, c’est-à-dire les choses essentielles. Deux questions ont élé laissées de côté par l’auteur : il ne parle pas des cheminées, dont l'étude a été faite dans une autre partie du cours, et il ne fait guère qu'une allusion discrète à la grave question du primage. Il est vrai que les entraînements d’eau, dont Hirn a fait res- sortir le premier l'importance, intéressent surtout les ingénieurs qui ont à faire des essais de machines à va- peur; nous ne signalons ces deux omissions que pour trouver l'occasion de répéter que toutes les autres études sont bien complètes et fort détaillées, Aucune recher- che nouvelle, aucun mémoire original n’a été passé sous silence, je le sais, et je suis heureux de pouvoir en exprimerici publiquement ma profonde reconnaissance au savant professeur de l'Ecole des Mines, — En somme, le cours de chaudières de M. Haton de la Goupillière constitue un remarquable exposé de la théorie et de la pratique des générateurs de vapeur, dans lequel non seulement les ingénieurs des mines, mais les cons- tructeurs et les industriels trouveront tous les éléments d’une saine appréciation de tout ce qui les intéresse au point de vue de la sécurité, de la bonne marche des appareils et de leur rendement, A, Wirz, 618 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques. Cadiat et Dubost,—Electricité industrielle,#° édi- tion, un beau volume, gr. in-8° de 667 pages et 257 fig. (16 fr. 50). Baudry et Cie, éditeurs, 15, rue des Saints- Pères, Paris, 1892, Parmi les innombrables ouvrages que le développe- ment moderne de l’industrie électrique a fait éclore, il en est peu qui aient eu le succès du Cadiat et Dubost, comme on dit depuis longtemps. Ce succès s’explique aisément; les auteurs ont cherché, et ils y ont réussi, à donner dans un langage aisément compréhensible les principes pratiques de la science électrique, et d’en exposer les principales applications; peu de ma- thématiques, et rien que des élémentaires; beaucoup de raisonnements populaires et tangibles, tel est le mode d’exposition; puis, de bonnes descriptions de méthodes et d'appareils, avec la manière de s’en servir; peu, trop peu peut-être, de méthode graphique dans la partie théorique, ce qui, avec Pexclusion du calcul différentiel, oblige parfois à des méthodes dé- tournées et peu élégantes, mais c'est là un défaut sans importance. - F L'ouvrage est divisé en six parties : Principes généraux, unités et mesures ; Appareils producteurs de l'électricité ; Eclairage électrique; Transmission électrique de la force; Galvanoplastie et électro-métallurgie ; Téléphonie. Des tableaux de constantes sont donnés dans un appendice, ù i À L'absence de la télégraphie de ce sommaire précise l'intention des auteurs; la télégraphie est une branche très spéciale de l'électricité; elle a ses ingénieurs et son personnel; les premiers peuvent se passer d'un traité élémentaire, et les télégraphistes ont leurs guides spéciaux et leur apprentissage qui na rien d’électrique; le traité que nous analysons n’est donc pas encyclopédique ; il vise directement les applica- tions avec lesquelles tout ingénieur, tout spécialiste, ou même tout contremaître peut se trouver aux prises. Et non seulement les appareils sont décrits avec soin, avec l'indication de leurs constantes ; mais encore, en maint endroit, se trouvent des exemples concrets de calculs se rapportant à un cas particulier, soit inventé pour les besoins de louvrage, soit pris dans la pra- tique ; c’est ainsi qu'à propos de l'éclairage, on donne le détail des installations faites aux ateliers de lArtil- lerie à Paris, aux magasins du Bon-Marché, dans di- vers établissements publics, dans des voitures de che- mins de fer, des mines et des bateaux; le tout est accompagné de quelques devis. Cette tendance absolument pratique de louvrage se reconnaît à maint petit détail; c’est ainsi que sont groupés, dans une même partie, les piles, les machines dynamos et les accumulateurs; ce chapitre est d’avance débarrassé de toute théorie par l'introduction, dans laquelle les premiers principes sont traités d’une ma- nière sommaire, mais cependant très suffisante. Dans la quatrième partie, on revient aux dynamos, pour démontrer leur réversibilité, et son application à la transmission de la force motrice: la distribution, qui ourrait former une partie indépendante de l’ouvrage, est traitée à la suite de l'éclairage. Cette classification qui pèche au point de vue pure: ment logique a ce grand avantage d'indiquer l'endroit précis de l'ouvrage où l’on trouvera l’ensemble des renseignements que l’on cherche, débarrassé de tout ce dont on n’a pas momentanément besoin. ! Ce désir d’être pratiques a même entrainé, il nous semble, les auteurs un peu loin; ainsi dans les calculs relatifs aux machines, les formules conduisent direc- tement à des kilogrammètres par seconde, et c’est par une transformation que l’on revient au watt. La notion du watt n'est-elle pas encore assez nelle pour que l'on puisse lui rapporter directement la puissance élec- trique ? Il ne faudrait pas croire cependant que l'ouvrage de MM. Cadiat et Dubost soit en retard ; à part quelques constantes à reviser, celte quatrième édition est très actuelle; les moteurs à champ tournant y sont décrits (un peu sommairement il est vrai), et les procédés nou- veaux de l’électro-métallurgie y occupent leur petite place. Ch.-Ed. GUILLAUME, Beiïlstein (D' F.). — Handbuch der organischen Chemie. 3% édition (Prix : 2 fr. 25 le fascicule de 4 feuilles). Léopold Voss, Hambourg et Leipzig, 1892, Nous n'avons plus à faire l'éloge du Handbuch de Beilstein : c’est un livre qui se trouve aujourd’hui sur la table de tous les chimistes soucieux de connaître à fond l’histoire des sujets qu'ils étudient, et nous avons tellement l'habitude de le consulter que nous nous demandons quelquefois s'il serait possible de faire actuellement de la chimie organique sans lui. D'ailleurs, le succès des deux premières éditions, immédiatement épuisées, témoigne suffisamment de son utilité de premier ordre. — Dans l’édition nouvelle, dont cinq fascicules sont déjà mis en vente, nous avons à signaler quelques améliorations de forme et de fond qui la rendent encore supérieure aux deux précé- dentes : les marges sont plus étendues, les caractères de titres sont un peu plus gros, la synonymie est indi- quée avec plus de soin encore qu'autrefois ; quelques rares omissions sont remplies, enfin nous voyons appa- raîitre quelques-uns des noms systématiques proposés récemment par M. von Baeyer pourla nomenclature des carbures d'hydrogène : c’est ainsi que l'érythrène est ap- pelé butadiène 1,3, le méthylpropylacétylène, hexine 4, etc., ce qui est plus court et incontestablement plus clair, Il est regrettable, à ce point de vue, que les conclu- sions du Congrès de Genève n’eussent pas été formulées quelques mois plus tôt, car il est probable que M. Beils- tein en aurait adopté au moins quelques-unes, et que nous verrions dans son ouvrage, en place des mots 2-hydroxy-2,4,4 triméthylpentane et 4-hydroxy-5-mé- thyl-4-isopropyl-1-hexène, que je prends au hasard parmi les alcools à structure complexe, les expres- sions triméthyl-pentanol 2,2,4-4 et méthyl-méthoëthyl- hexénol 2-3-5,3, qui sont évidemment plus avanta- geuses et tout aussi explicites. — L’exécution typogra- phique, absolument parfaite, continue à faire le plus grand honneur à l'éditeur du Handbuch. L. MAQUENNE. Lunge (G.). Professeur de Chimie industrielle à l'École polytechnique de Zwrich. —Vade-mecum du fabricant de produits chimiques. Traduction française de V. Hassreidter et E. Prost. Un vol. in-12 de 312 pages avec figures (Prix 7 fr. 50). Baudry et Cie, Paris, 1892. Cet ouvrage, qui comprend une série de tables et de données numériques utilisables dans la grande in- dustrie chimique, possède un caractère, en quelque sorte, officiel. Il a été rédigé sur la demande de l’asso- ciation allemande des fabricants de produits chi- miques, pour fixerles procédés analytiques à employer dans les essais industriels, donner des tables uni- formes et éviter ainsi toute discussion entre l’acheteur et le vendeur, Aussi le savant professeur de Zurich a-t-il fait tout autre chose que les compilations qui cons- tituent les ouvrages analogues. Un grand nombre des données numériques que contient ce petit livre ont été obtenues directement par l’auteur qui à consacré plu- sieurs années à ce travail, On obtient ainsi un ensemble de résultats sur l'exactitude desquels on peut compter. Enfin l'ouvrage comporte une indication des méthodes d'analyse que l’auteur recommande pour les produits de la grande industrie chimique, après étude compa- rative des divers procédés connus. G. Cuarpy. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 619 8° Sciences naturelles. Sauvageau (C.), Docteur ès sciences, Agrégé de l'Uni- versité. — Sur quelques Algues phéosporées para- sites, Journal de Botanique, t. VI, 1892. La pénétration de certaines algues brunes (Phéo- phycées) dans le thalle d’autres algues a été rarement décrite. M. Sauvageau consacre à celte observation un mémoire important, dont l’intérèt dépasse le groupe qu’il a étudié. Son travail, très philosophique, mérite, d'une façon générale, l’attention des biologistes, jus- tement attirée depuis quelques années sur les ques- tions de parasitisme et de symbiose. Il est curieux de rencontrer ces phénomènes chez les représentants les moins élevés du règne végétal, et de constater les modifications qu'imprime à ces organismes peu diffé- renciés l'adaptation réciproque. Les naturalistes, que passionnent ces problèmes, trouveront, dans le mé- moire de M. Sauvageau, une riche moisson de faits à interpréter, A0; Huxley(Th.). — Les sciences naturelles et l'édu- cation. Edition française, 1 vol. in-16 de 320 pages de la Bibl. scientifique contemporaine (3.50). Librairie J.-B. Bailliére et fils, 19, rue Hautefeuille, Paris, 1892. Ce livre comprend un certain nombre de discours et d'essais écrits par M. Huxley au cours de ces trente- quatre dernières années. Les titres en sont assez variés, qu'on en juge : le premier essai est « sur le Discours de la Méthode » ; puis viennent: « Du positivisme dans ses rap- ports avec la science ; de l'éducation libérale, où peut- on la trouver? de l'éducation médicale; ce que doit enseigner l’école ; l'éducation universitaire, » etc. Au premier abord il semble que ces sujets ont bien peu de rapports entre eux. «Néanmoins, quand j'y regarde à nouveau, dittrès justement l’auteur dans sa préface, je m'imagine qu’ils ne manquent pas de connexion autant que je l’aurais cru tout d’abord, mais qu'en réalité ils expriment les différents aspects d’une même idée. » Cette idée, c’est que « les résultats et surtout les méthodes de l’investigation scientifique ont une influence profonde sur la façon dont les hommes doi- vent comprendre leur propre nature comme leurs rela- tions avec le reste de l'Univers ». M. Huxley réclame donc une large place pour les sciences et particulièrement pour la biologie dans un plan d'éducation digne de ce nom. Quand Ja plupart de ces essais ont paru pour la première fois, la biologie n’était point goùtée comme aujourd’hui, et M. Huxley constate que de grands progrès ont été faits bien qu'il reste encore beaucoup à faire sous ce rapport. Dans le chapitre « Ce que doit enseigner l’école », M. Huxley comprend : l'entraînement physique et l'exercice ; puis l'éducation technique, éléments du travail et économie domestique ; la morale ou partie sociale de l’éducation ; enfin les éléments de la science physique, ainsi que le dessin, le modelage et le chant. Ne sont-ce pas précisément les matières que ren- ferment aujourd’hui les programmes de nos écoles primaires? C’est ce programme et la méthode qu'il comporte que l'auteur veut voir développer dans toute l’échelle de l’enseignement. Dans son essai sur « l'éducation libérale », il critique Les programmes en vertu desquels l'enfant n’apprend pas un mot de l'his- toire politique ou de l’organisation de son propre pays. « Ge que l'enfant apprend moins que toute autre chose, dans notre système d'éducation primaire, c'est à se rendre compte des lois du monde physique et des relations de cause à effet qui y règnent. » Aussi a-t-on pu dire qu'il serait préférable de ne pas appren- dre à lire et à écrire aux masses ; car on n'a pas ac- compagné ces notions de l’enseignement d’une méthode qui permit à ceux qui les possédaient de s’en servir en vue du vrai et du bien et dans leur propre intérêt ou celui de la société. Comme on le voit, M. Huxley aborde des questions d’un haut intérêt. « M'aventurant dans ces régions où la science et la philosophie arrivent à se rencontrer, j'ai été amené, dit-il, à peser les droits de deux Fran- cais éminents à être considérés comme les représen- tants de cette pensée scientifique moderne, que quel- ques-uns appellent la nouvelle philosophie, » Il s’agit de Descartes et d’Auguste Comte. Le premier est « le père véritable de la pensée moderne » ; le se- cond « a exercé une influence négative ou même fà- cheuse sur les sciences physiques ». On lira avec intérêt la démonstration (rès intéres- sante de ces propositions. La traduction est très claire et d’une lecture facile, Elle est d’ailleurs en grande partie de M. H. de Varigny. D' H. BEAUREGARD. Quatrefages (A. de).— Darwinetses précurseurs français. Etude sur le transformisme, 2° édition. Un volume de la Bibliothèque scientifique internationale (Prix 6 fr.), F. Alcan, 108, boulevard Saint-Germain, Paris, 1892. Tous ceux qui s'intéressent aux questions transfor- mistes ont lu la première édition de ce livre, divisé en deux parties bien distinctes : dans la première, de Quatrefages passe en revue quelques-uns des précur- seurs, y compris Lamarck; dans la seconde, il expose les raisons qui l’empêchent d'adopter le corps de doc- trines et de lois auquel Darwin a attaché son nom. De- puis 1870, date de la première édition, les idées trans- formistes ont fait de tels progrès qu'il n’en est que plus intéressant de lire un livre d'opposition, le dernier peut-être, écrit avec un sens droit et une loyauté par- faite, qui étaient comme la caractéristique du savant dont on déplore la perte. La seconde édition diffère de la première par de nombreuses additions, entre autres un chapitre entier sur les origines de l’homme, mais les arguments et l’esprit général sont restés les mêmes. De Quatrefages croyait à la variabilité de l'espèce dans certaines limites, mais n'admettait pas qu’elle puisse se transformer en une autre espèce ; il repoussait natu- rellement toutes les théories qui attribuent à l’homme un ancêtre simien, plus ou moins rapproché des An- thropoiïdes actuels. Pour établir la différence entre l’es- pèce, physiologiquement immuable, et la race qui ré- sulte de la variation morphologique de l'espèce, le grand argument de de Quatrefages était d’une part la difficulté des hybridations et la non-fécondité des hy- brides, d’autre part la facilité des métissages et la fé- condité indéfinie des métis : pour lui, la seule défini- tion possible de l’espèce était une définition physiolo- gique. Ce qui distingue de Quatrefages des anciens an- titransformistes, c’est qu'il ne se déclare nulle part pour la doctrine des créations séparées, qui est pour- tant l’autre terme du dilemme; il détruit, mais n’édifie pas; pour lui, le problème de l’origine des êtres vi- vants est un désert où la science s’égare, et il n’entre- voit nulle solution possible : sur ce sujet, il est aussi positiviste que Comte. L. Cuénor. Coupin (H.). — Les Mollusques, Introduction à l'étude de leur organisation, développement, classifica- tion, affinités et principaux types, à l'usage des can- didats à la licence ès sciences naturelles (Prix de chacun des 3 fase. parus : 4 fr.). G. Carré, éditeur, 58, rue Saint-André-des-Arts, Paris, 1892, Vaut-il mieux, pour préparer la licence, que l’étu- diant fouille dans les mémoires originaux pour y com- pléter ses cours, ou qu'il trouve dans des livres ad hoc les renseignements qu'il ne peut recueillir sans une certaine perte de temps? Si la première méthode développe lesprit d'originalité, elle offre aussi des difficultés matérielles; M. Coupin a voulu venir en aide aux étudiants naturalistes en publiant les Mollusques, dans le même esprit que les Vers et les Arthropodes de M. Pruvot; c’est dire que ce livre est concu tout à BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX fait dans un sens pratique, la partie classification étant réduite au nécessaire, aux espèces à connaître, la partie anatomique. et morphologique au contraire étant très développée; il est illustré de nombreuses figures schématiques se rapportant de préférence à des types communs, disséqués fréquemment dans les laboratoires. Les six classes de Mollusques sont étu- diées séparément en détail; le dernier chapitre est consacré à une synthèse du groupe, où sont passées rapidement en revue les modifications des divers systèmes organiques. Le livre est bien au courant des découvertes récentes, ce qui n’était pas une petite difficulté, nos connais- sances sur les Mollusques s'étant assez accrues durant ces dernières années pour que la mise au point ait nécessité un gros travail; je n'ai relevé que quatre ou cinq petites erreurs ou négligences de rédaction qu’il sera facile de rectifier. En somme, le travail de M. Coupin est un bon cours écrit, avec les avantages du livre, très complet, et représentant pour ainsi dire le maximum de ce qu’on peut exiger d’un licencié ; il rendra de réels services aux étudiants, en remplaçant les chapitres des traités classiques, trop condensés et peu illustrés, et surtout écrits dans un but tout différent. L. Cuénor. Gadeau de Ker ville (Henri). —Faune dela Nor- mandie, fase. II, Oiseaux (Carnivores, Omnivores, Insectivores et Granivores). J.-B. Baillière et fils, 19, rue Hautefeuille, Paris, 1892. Ce fascicule est consacré aux oiseaux carnivores, omnivores, insectivores et granivores. Quoique bien connue, cette partie de la faune normande ne laissait pas que d'être délicate à traiter. L'auteur a donné une synonymie détaillée, une bibliographie très complète et des renseignements fort intéressants sur la vie et les mœurs de ces animaux. Starcke (C. N.). — La famille primitive, ses ori- gines et son développement. Un vol, in-8 de 287 pages (Prix : 6 fr.) de la Bibliothèque scientifique internationale. F. Alcan, éditeur, 108, boulevard Saint- Germain, Paris, 1892. WWestermarck (E.). — The History of human marriage (Histoire du mariage humain). Un vol, in-8° de 644 pages (Prix : 17 fr. 50), Macmillan and Ce, 29, Bedfort street, Covent garden, Londres, 1892. Les questions traitées dans ces deux ouvrages relè- vent de sciences qui ne rentrent point dans le cadre habituel de cette Revue : l’ethnographie comparée, la psychologie sociale et la sociologie. Aussi, malgré leur importance, ne pouvons-nous guère que signaler ces deux livres considérables. Les deux auteurs s'accordent à combattre la théorie qui a voulu attribuer au régime matriareal un caractère primitif et faire du matriarcat un stade par lequel ont dû nécessairement passer toutes les sociétés au cours de leur évolution; ils se sont également attachés à montrer que l'hypothèse d’une promiscuilé primitive qu'ont acceptée la plupart des sociologistes ne repose pas sur de solides fonde- ments. Starcke s’est spécialement occupé, dans son livre, de la détermination de la parenté et des rapports dans les sociétés primitives de la famille et du clan. M. Westermarck, avec une méthode moins juridique et plus voisine de celles quisont en usage dans les sciences naturelles, s’est efforcé de rattacher le mariage humain aux unions plus ou moins durables des mâles et des fe- melles dans les diverses espèces animales ; puis, il a étudié successivement les préliminaires du mariage (la cour, etc.), la façon dontle mariage se contracte (enlèvement, achat, choix,ete.), les interdictions d'union entre parents, les rites du mariage et ses formes di- verses. Il a consacré plusieurs chapitres à l’étude de la sélection sexuelle, examinée comparativement chez l'homme et les animaux; il combat très vivement la théorie de Darwin et attribue avec Wallace à la sélec- tion naturelle l'apparition des caractères sexuels se- condaires. Le livre de M. Westermarck est, sans con- tredit, lune des meilleures monographies sociologiques qui aient été faites et c’est à l'heure actuelle l'ouvrage le plus complet, le plus riche tn informations que l’on possède sur cette question du mariage et celui où l’on trouve la plus sûre et la plus pénétrante critique ; si le caractère de cette Revue l'avait permis, il eût fallu lui consacrer un long article. L. MaRILLiER. ArthaudetButte. — Du nerf pneumogastrique. (Physiologie normale et pathologique). Bibliothèque gé- nérale de Médecine. Un vol. in-8° (6 fr.). Société d’édi- lions scientifiques. Paris, 1892. Le livre que MM. Arthaud et Butte ont fait récemment paraître, sera lu avec un grand intérêt par les physio- logistes et les pathologistes. Les premiers y trouveront, tout d’abord, un résumé exact et complet des connais- sances qu'on possède sur le nerf pneumogastrique, et ceux qui s'occupent de ce nerf seront bien aises de rencontrer ainsi rapprochés et condensés les rensei- gnements dont ils pourraient avoir besoin, et qui sont épars dans un grand nombre de mémoires. De plus, les auteurs ne se sont pas contentés de classer les ré- sultats de leurs devanciers, ils ont fait eux-mêmes un grand nombre de recherches originales. On peut si- gnaler particulièrement leurs travaux sur la sécrétion urinaire et la sécrétion biliaire. Ils ont montré, pour ce qui est de la première, que, par suite d'effets vaso- moteurs, le pneumogastrique avait sur elle une action directe, et que son excitation ralentissait et même arrêé- tait la sécrétion. Relativement à la sécrétion biliaire, ils ont établi que, là encore, on avait des phénomènes analogues : le mécanisme serait probablement le même, mais les auteurs réservent leurs conclusions. Un chapitre très intéressant de l'ouvrage, est celui qui a trait aux recherches sur la nutrition élémentaire (rejet de l’acide carbonique et de Purée), après exci- tation ou section des nerfs. La section des nerfs dimi- nue les échanges respiratoires (ainsi que nous l’avions déjà établi chez les oiseaux) : quant à la production de l’urée dans ces conditions, les auteurs n’ont pu formuler de conclusions, à cause de la survie trop courte de leurs animaux : ils ont seulement pu éta- blir qu'une excitation intense du bout central du nerf produit une azoturie marquée, Les auteurs ont encore signalé dans leur ouvrage un certain nombre de faits nouveaux (effets sur la rate, le pancréas, ete.); quelques-uns d’entre eux (action motrice sur l'intestin, vaso-motrice directe sur l’estomac et l'intestin) appelleraient peut-être de nouvelles re- cherches. Les pathologistes, avons-nous dit, seront également intéressés par la lecture de cet ouvrage. MM. Arthaud et Butte ont institué, en effet, un procédé de recher- ches qui semble devoir être des plus féconds : les névrites expérimentales. Ils ont provoqué, par l'injection de substances irritantes, des phénomènes d’inflam- mation dans le nerf vague; et sont arrivés à produire des troubles caractéristiques, que l’on retrouve dans le diabète et l’albuminurie. L'importance de sembla- bles résultats ne saurait échapper à personne, Les auteurs ont pu constater que, dans le cas de névrite du bout périphérique du vague, l’animal suc- combe toujours avec les lésions du diabète spontané, après avoir offert pendant sa vie tous les symptômes de cette maladie. S'appuyant sur ces résultats et un certain nombre d’autres, MM. Arthaud et Butte ont attribué aux filets du vague un rôle trophique pour les organes auxquels ils se distribuent : cette dernière conclusion est peut- être un peu prématurée; quoi qu'il en soit, c'est un beau résultat que d’avoir pu reproduire expérimen- talement une maladie, qui, comme le diabète, a été l’objet de tant de controverses. E. Couvreur. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 4° Sciences médicales. Fuchs (E.). Professeur ordinaire d'Ophtalmologie à l'U- niversité de Vienne. — Manuel d'Ophtalmologie. Un vol. in-8° de 815 pages, avec nomireuses figures de texte, traduction de MM. Lacompte et Leplat. (Prix 24fr.) G. Curré, 58, rue Saint-André-des-Arts. Paris, 1892. Le Manuel d'Ophtalmologie, dont nous avons main- tenant une traduction francaise, grâce à MM. Lacompte et Leplat, diffère essentiellement des autres manuels par l'ordonnance des matières et par la facon de les traiter. C’est d’ailleurs ce que nous fait remarquer l’auteur lui-même, dès les premières lignes de sa pré- face. Ce livre est plutôt un résumé de son enseignement et s'adresse aussi bien aux étudiants qu'aux médecins praticiens. Nous connaissions depuis longtemps les nombreux et remarquables travaux du professeur de Vienne ; ce livre nous permet d'apprécier aujourd’hui la clarté, la netteté clinique, je dirai presque l'ingé- niosilé de son enseignement. Dans la division de son livre, il part de cette idée que le débutant dans la science se heurte à une telle foule de faits nouveaux, qu'il est incapable de discerner le principal de l'accessoire; des faits rares ou étranges se gravent mieux dans la mémoire, que ceux qui s’ob- servent tous les jours et paraissent naturels, Maint étudiant qui se rappelle d'emblée qu'on a observé des cataractes après un coup de foudre, ne se souviendra peut-être pas d’en avoir vu après un décollement réli- nien ou une irido-choroïdite, Pour ces motifs, Fuchs a adopté deux types de caractères différents : les prin- cipes fondamentaux de l’ophtalmologie sont imprimés en grand caractère, le pelit texte étant réservé aux explications plus approfondies, aux discussions théori- ques d’un intérêt général et à des conseils utiles aux praticiens. À cet égard, je ferai une petite critique de détail; je n'aime guère cette division en deux types de caractères qui se succèdent et se confondent dans le même chapitre. Malgré tout, l’auteur est ainené à certaines redites; en second lieu. l'étudiant — et je connais maint docteur resté éludiant à ce point de vue, — a une tendance invincible à passer le petit texte, qu'il s'agisse de discussions importantes aussi bien que d'observations. Fuchs l’a si bien senti qu'il est obligé d'inviter l'étudiant de ne pas considérer le petit texte comme une sorte de pancarte sur laquelle est écrit : « chemin réservé »; il l’engage au contraire à s'y promener souvent. “y Une place extrêmement importante est accordée aux affections du segment antérieur de l'œil. Ge sont les plus fréquentes; leur diagnostic est relativement facile et à la portée des étudiants ou des praliciens non spécialistes; elles fournissent à la thérapeutique le champ le plus vaste et le moins ingrat : pour toutes ces raisons, elles méritent dans le manuel, comme dans l’enseignement classique, la place qui leur est donnée. Je n'ai pas l'intention de suivre l’auteur dans la suc- cession des chapitres de son livre si intéressant; qu’il me soit permis seulement de signaler quelques points qui m'ont particulièrement frappé, précisément dans cette partie chirurgicale. Dans la conjonctivite catarrhale et mème dans la conjonctivite purulente, Fuchs conseille de dépasser rarement le titre de 1/50 pour les cautérisations au nitrate d'argent, et il recommande de ne pas en faire le soir, pour éviter l’aclion permanente des caustiques pendant la nuit, les paupières restant fermées. Il n'admet pas sans réserves les conclusions de Wecks sur le bacille du pink eye : d’ailleurs la conjonctivite catarrhale ne lui semble pas très contagieuse, du moins par contage direct, et une des raisons qu'il en donne, c’est qu'en transportant de la sécrétion catarrhale sur une conjonctive saine, on ne reproduit pas la maladie. Cette raison ne me paraît pas péremploire : nous savons qu'il faut des conditions spéciales de réceptivité pour 621 que l’inoculation se produise, et les épidémies maintes fois observées dans les familles, dans les écoles, ne peuvent guère s'expliquer que par la contagiosité très grande de celte affection. — Au sujet du trachôme, l’au- teur s'élève, lui aussi, contre l’origine égyptienne de la maladie, qui était observée en Europe depuis l’anti- quité. Celse en a donné une bonne description, et, comme le faisait remarquer dernièrement M. Panas, presque tous les traitements employés aujourd’hui, entre autres le brossage et les scarilications, avaient été recommandés par les anciens. Quant à la nature intime, il n’y a qu'une seule espèce de trachome, se présentant sous diverses formes. L'origine est blennorrhagique. L’ophtalmie blennorrhagique passe à l’état de blen- norrhée chronique qui, inoculée à un œil sain, donne une inflammation chronique, le trachome se propa- geant alors comme tel. On sait que cette théorie, qui n'est guère admise en France, est depuis longtemps soutenue en Allemagne, et l’on s'appuie, entre autres arguments, sur les analogies du trachomacoceus de Sattler et Michel avec le gonocoque. La trachome doit être nettement séparé de la conjonctivite folliculaire, qui peut se produire sans infection, après instillations prolongées d’atropine. La granulation d'ailleurs n’est pas typique du trachome, elle résulte de l’inflammation chronique et se rencontre dans des infections diverses: on l’a observée dans la tuberculose conjonctivale. Les kéralites sont divisées en : 1° suppuratives, com- prenant l'ulcère, l’abcès, la kéralite, suite de la- sophtalmos, la kératomalacie de l'enfance, et la kératite neuroparalylique; 2° non suppuralives, les unes super- ficielles, panneuses, vésiculées, les autres profondes, kéralites parenchymateuses, profondes, selérosantes, kératites venant de la paroi postérieure. Le chapitre consacré aux maladies de l'iris et du corps ciliaire est précédé d’une étude très intéres- sante sur l'anatomie et la physiologie de l’uvée, mem- brane nourricière de l'œil, On connaît d’ailleurs les intéressantes recherches de Fuchs sur les cryptes de l'iris, qui constituent des ouvertures conduisant dans l'intérieur des lissus iridiens, qui par là est en commu- nication directe avec la chambre antérieure, Cette disposition facilite le changement rapide du volume de l'iris pendant le jeu de la pupille, puisqu'elle permet au liquide de vider sur-le-champ le tissu iridien et de passer dans la chambre antérieure, et réciproquement. Dans le glaucome, l’iridectomie est, bien entendu, l'opération de choix; elle est d'autant plus eflicace qu’elle est plus hâtive et que la tension est plus augmentée avant l'opération. Dans le glaucome inflam- matoire, l'opération agit favorablement sur l’inflam- mation et sur l’acuité visuelle, et le succès persiste ; elle est indiquée sans réserve. Dans le glaucome simple, au contraire, on doit compter uniquement sur le maintien du statu quo : dans un certain nombre de cas, l'opération est inutile ou même nuisible. Je ne puis malheureusement insister sur les diffé- rents chapitres consacrés aux maladies du cristallin, et de la rétine, ainsi qu'aux affections des anvexes de l'œil, Pai voulu seulement montrer l'intérêt pratique de ce livre qui répond bien au programme que s'était tracé le Professeur Fuchs. D' F, ne LAPERSONNE. Jouin (F.).—Des différents types de métrite. Leur traitement. Un vol. in-8° de 380 pages (6 fr.). Société d'éditions scientifiques, Paris, 1892, Ce livre comprend trois parties : dans la première l’auteur expose la pathogénie des métrites:; dans la seconde il traite de la thérapeutique de cette affection. Enfin la troisième comprend une série d’études sur des points spéciaux ayant des relations intimes avec les métrites (rapports de l’albuminurie avec les inflam- mations du petit bassin; stérilité, hygiène génilale, ete.). D' Henri HarTMANN. LA ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER (La plupart des Académies et Sociétés savantes, dont la Revue analyse régulièrement les travaux, sont actuellement en vacances.) ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 8 août. 1° Scrences PHYSIQUES. — MM. Ch. Reignier et Gabriel Parrot, par la discussion de l'expression de l'énergie électrique d’une machine dynamo, ont été conduits à remplacer les conducteurs de cuivre par des lamelles minces composées, en partie de leur épaisseur, d’un métal très magnétique et d’un métal très bon conduc- teur, placées de facon que les lignes d’induction soient perpendiculaires à leur épaisseur; l'énergie devient alors sensiblement proportionnelle à la hauteur des conducteurs. L'appareil construitsur ce principe donne une utilisation spécifique de 42 watts environ par kilo- gramme de machine. — M. A. Leduc détermine la com- position de l’eau en volumes et en poids par la mesure de la densité du mélange d'oxygène et d'hydrogène produit par l’électrolyse d'une solution alcaline à 30 pour 100 au sein de laquelle l'ozone ne peut se -pro- duire ; il est nécessaire de maintenir le voltamètre à la pression atmosphérique; on trouve ainsi 15,877 pour le poids atomique à moins de: la synthèse de l'eau avait fourni au même auteur 15,882, de sorte qu'il convient d'adopter le nombre 15,88; comme consé- quence, la densité expérimentale de la vapeur d'eau ne peut descendre au-dessous de 0,622, — M. G. Hinrichs montre l'importance exceptionnelle des recherches expérimentales sur les courbes d’ébullition des com- posés à substitution centrale; elles conduiront à la dé- termination inductive de la forme géométrique et des dimensions linéaires des atomes élémentaires, — M. Paul de Mondésir montre dans les terres, l'existence d’une matière minérale acide encore indéterminée, matière très stable, qui n’est pas détruite lors de la combustion complète de la matière organique au rouge sombre, lors même qu’on l’a privée de ses bases par un lavage préalable de la terre avec les acides dilués; ce serait probablement un silicate sous forme argi- leuse, — M. A. Vivien montre que les dépôts qui se forment dans les chaudières à vapeur et qui sont la cause des explosions ne sont pas des savons calcaires dus à l'alimentation des générateurs avec un mélange d'eaux calcaires et d’eaux de condensation chargée des matière grasse. C. MATIGNON. 2° SCIENCES NATURELLES, — M. R. Lépine, à l’occasion de la communication de M. Schützenberger (séance du 25 juillet), signale ce fait que la peptone, en contact avec le sang, dans certaines conditions, donne nais- sance à du sucre. En opérant à 30 degrés C., il est indispensable de fluorer le sang afin d'empêcher la coagulation et la glycolyse, celle-ci masquant en partie la production du sucre. — M, A.-B. Griffiths a extrait une nouvelle substance, la pupine, des peaux des pupes (chrysalides) de quelques Lépidoptères, C’est une subs- tance incolore et amorphe. Bouillie longtemps avec les acides minéraux forts, elle se transforme en leu- cine et acide carbonique. Elle répond à la formule CIH°047205. La pupine est sécrétée par les pores de la larve, après qu'elle a changé de peau pour la der- nière fois. Le même auteur a extrait une grande quan- tité du pigment rouge auquel donnent lieu les cultures sur pomme de terre du Micrococcus prodigiosus ; l'ana- lyse lui a donné la formule C##H56A705; la solution alcoolique donne, au spectroscope, deux bandes d’ab- sorption, l’une dans le bleu et l’autre dans le vert, En inoculant, avec le Micrococcus prodigiosus, des grains de blé en voie de germination, on trouve que le blé pro- duit présente une corrosion semblable à celle déjà signalée par M. Prillieux. On détruit ce parasite en se- ringuant les récoltes avec des solutions de sulfate ferreux ou de sulfate de cuivre. — M, C. Sauvageau signale, chez les Algues nostocacées hétérocystées, outre les deux modes connus de propagation par des hormogonies et par des spores ou kystes, un troisième mode non encore décrit, qu’il a eu l’occasion d'observer dans une espèce de Nostoc, rapporté provisoirement au N. punctiforme Hariot (N. Hederulæ Menegh.). Il se com- pose de cellules végétatives différenciées comme dans le cas de la propagation par spores ; mais il en diffère en ce que ses cellules, au lieu de rester en repos com- plet, continuent à se diviser et à se multiplier sous une forme rappelant certains genres à colonies amorphes de la famille des Chroococcacées. L'auteur désigne cet état sous le nom d’éfat coccoïde, et les éléments isolés, sous le nom de Cocci; il a obtenu, dans ses cultures, le passage de l’état Nostoc à l’état coccoïde, puis le retour de celui-ci au précédent, et encore une fois de l’état primitif à l’état coccoïde, Pareil exemple de pléomor- phisme n’avait pas encore été constaté dans le groupe des Algues hétérocystées. — M. P. Hariot, ayant recherché s'il y avait réellement deux plantes de genres différents dans l’Anabæna, algue que l’on rencontre dans les Cycas, et dans le Nostoc (N. Gunneræ), qui abonde dans les Gunnera, étudiés tous deux par le pro- fesseur Reinke, a trouvé qu'il ne s'agissait là que d’une seule et même plante, un Nostoc de la section Amorpha; l’auteur identifie cette espèce au ANostoc punctiforme (Kütz.) P. Hariot, qui, lorsqu'il est aquatique, s'appelle Nostoc Hederulæ, et Polycoccus punctiformis lorsqu'il est terrestre; mais, dans les deux milieux, il présente exactement les mêmes caractères. Cette plante, outre qu'elle est assez répandue dans les cultures, est inté- ressante en ce qu'elle peut se présenter sous la forme Chroococcoïde, signalée dans la communication précé- dente, — M. Albert Gaudry signale l'acquisition, faite par le Muséum, du museau d’un Pythonomorphe, qui pouvait avoir 40 mètres de long, et qui a été découvert dans la craie supérieure de Cardesse, non loin de Pau. Il est semblable au museau du Mosasaurus giganteus de Maëstricht, dont il diffère par la forme de certaines dents. Cette pièce est inscrite sous le nom de Liodon mosasauroides. L'auteur présente, en même temps, la photographie du museau d'une espèce plus petite, trouvée dans la craie à Belemnitella quadrata de Michery, près de Sens. Ce museau est semblable à celui de la grande espèce; mais la coupe des dents a une forme différente, Ce spécimen est inscrit sous le nom de Liodon compressidens. L'auteur publiera, dans les Mé- moires de la Société géologique, un travail où il établit des comparaisons entre ces nouvelles espèces et les Pythonomorphes déjà connus. — M. Charles Barrois rend compte de ses études sur le terrain azoïque de la Bretagne. Le niveau des quartzites charbonneux peut, à volonté, être rangé au sommet du terrain primitif ou à la base du système précambrien des phyllades de Saint-Lô. Leur âge est établi d’une facon absolue, surtout par le fait que ces quartzites et phtanites char- bonneux ont été retrouvés, à l’état de galets, dans les poudingues cambriens et précambriens de la région, Les phtanites charbonneux des environs de Lamballe sont intéressants en ce qu'ils montrent au microscope, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 623 parmi les grains de quartz, de charbon et de pyrite, des sections circulaires ou contournées, d’origine orga- nique non douteuse, indiquant d’une facon indéniable la présence de Radiolaires, ayant même pu être rappor- tées aux Monospheridæ. Ces radiolaires des phtanites de Lamballe sont les plus anciens débris organiques trouvés jusqu’à ce jour, car ces phtanites, classés jus- qu'ici dans le terrain azoïque primitif, se trouvent réel- lement vers la limite des systèmes laurentien et pré- cambrien., — M. Ch. Depéret a recueilli dans la vallée de la Saône, entre Villefranche et le pont de Beaure- gard, dans les graviers grossiers qui se trouvent au- dessous des sables fins exploités, une quantité consi- dérable d’ossements et de dents de Mammifères, qui permettent de considérer la faune des sables de Beau- regard, comme une faune quaternaire de climat tempéré ou chaud, analogue à la faune dite chelléenne, et qu'au point de vue stratigraphique, elle occupe une position interglaciaire. Dans ces mêmes graviers à faune tem- pérée, l’auteur a découvert plusieurs silex taillés du type de Saint-Acheul, Ils constituent une preuve cer- taine, et la plus ancienne connue, de la présence de l’homme dans le bassin de la Saône, à l’époque de réchauffement qui a suivi la plus grande extension des glaciers alpins, — M. P. Demontzey : Sur la lave du 12 juillet 1892, dans les torrents de Bionnassay et du Bon-Nant (catastrophe de Saint-Gervais). L'auteur conclut que cette lave s’est comportée comme toutes celles qu'on a pu étudier dans les torrents des Alpes et des Pyrénées, et que la catastrophe ne pouvait être prévue, personne n'ayant eu l’idée d'explorer aupara- vant le glacier de Tète-Rousse. D'après les données recueillies, la vitesse moyenne de la lave, dans le trajet de la gorge des bains au Fayet, aurait été de 6 mètres par seconde, Mémoires présentés. — M, A.-J, Zune adresse deux notes intitulées : Recherche des huiles grasses, ani- males ou végétales, dans les beurres, et, analyse des beurres; valeur merciognostique des indices de réfrac- tion, simples et différentiels, et des angles différen- tiels. Ed. BELZUNG. Séance du 16 août. 4 Scrences paysIQuEs. — M. Désiré Korda donne la théorie complète d’un condensateur intercalé dans le circuit secondaire d’un transformateur ; il fixe les conditions nécessaires et suffisantes pour qu'il existe une valeur réelle de la capacité rétablissant la loi d’Ohm pour l'amplitude du courant. — M. de Swarte, à propos de la vaporisation dans les chaudières, montre que ses conclusions sur ce sujet, données en 1885, sont analogues à celles de M. Witz publiées en 1892. — M. Raoul Varet cherche à préciser la notion de va- lence moléculaire par l’étude méthodique des combi- naisons de sels métalliques avec les composés orga- niques azotés d'ordre basique ; il étudie l’action de “la pipéridine sur les sels d'argent et obtient les composés Agl. CSH!1A7, AgBr. 2 C5 H'!Az, Ag CI. 2 CÿH!1Az et AgCAz. 2CSH11 A7. C. MATIGNON. 20 SCIENCES NATURELLES, — MM. Lancereaux et A. Thiroloix : Le diabète pancréatique, Les auteurs ont répété un grand nombre de fois, et toujours avec un résultat identique, l'expérience suivante : on opère, sous la peau de l'abdomen d’un chien, l’ectopie d’une portion du parenchyme pancréatique avec son pédicule vasculo-nerveux. Deux ou trois semaines plus tard, on pratique l’extirpation de tout le reste du pancréas abdominal, en même temps que la section du pédicule vasculo-nerveux se rendant à la portion pancréatique ectopiée. Gette dernière portion, restant, par suite, seule greffée sur l'animal, déverse au dehors son pro- duit de sécrétion par l'intermédiaire d’un trajet fistu- leux. L'animal n'est pas diabétique jusqu'à ce moment, Mais, si l’on vient alors à enlever la greffe, la glycosurie et l’azoturie apparaissent au bout de quelques heures, Voici les conclusions que les auteurs tirent de leurs expériences et observations : Il existe un diabète, réel- lement lié à la destruction du pancréas; ce diabète ne provient pas de labsence de la sécrétion glandulaire externe, mais simplement de l'absence du suc sécrété intérieurement par la glande et résorbé par les vais- seaux sanguins et lymphatiques. — MM. Claudius Nourry et C. Michel ont appliqué à deux chevaux morveux les procédés les plus récents employés pour la guérison de la tuberculose pulmonaire, c’est-à-dire les injections hypodermiques d'huile créosotée et chlorure de zinc, Cette dernière substance a été utilisée en lavage dans les naseaux, Au bout de deux mois, les deux chevaux paraissaient totalement guéris, ce dont les auteurs se sont assurés en les sacrifiant tous deux. —- Des nombreuses séries d’analyses auxquelles M. Adolphe Carnot s’est livré sur des ossements fos- siles de tous les âges, il résulte que l’analyse chimique permet d’en fixer l’âge, en se fondant sur ce fait que les ossements fossiles sont plus riches en fluor que les ossements modernes, L'auteur a eu l’occasion d'ap- pliquer sa méthode sur un tibia humain récent trouvé parmi des ossements d'animaux quaternaires dans les sablières de Billancourt. L’os humain renfermait, en effet, la proportion de fluor contenue normalement dans les os modernes, tandis que les os des animaux quaternaires en contenaient de sept à neuf fois plus. — M.B. Renault décrit la tige spermo-carbonifère d’un genre nouveau de Gymnosperme houiller, le G. Retino- dendron Rigolloti, qui a été recueilli dans les gise- ments silicifiés d’Autun. Ce nouveau genre faisait pro- bablement partie d'une famille de Gymnospermes actuellement éteinte ; il est remarquable surtout par le développement extraordinaire des canaux qui ont pu sécréter les gommes ou les résines que l’on ren- contre houillifiées, sous forme de substances jaunes ou brunes, dans les schistes bitumineux, la houille et le cannel-coal. Mémoires présentés : M. Léopold Hugo adresse une Note sur une conséquence du théorème relatif aux polyèdres réguliers étoilés., — M. Delastelle : Nouveau système de cryptographie, — M. A. Bernard : Varia- tions de la proportion de calcaire, avec la ténuité des terres. Ed. BELZUNG. Séance du 22 août. 1° ScrENCES PHYSIQUES. — MM. Berthelot et Matignon après avoir fait l'étude thermochimique des composés chlorés dérivés des carbures d'hydrogène fondamen- taux tels que la benzine, l’éthane, l’éthylène, le for- mène, et comparé les quantités de chaleur développées par la substitution du chlore à l'hydrogène, étendent cette comparaison à des composés doués d’une autre fonction chimique, la fonction acide, Leurs recherches portent surles acides monochloracétique et trichloraté- tique, ainsi que sur le triméthylène chloré, qui offre des particularités ‘äintéressantes dans ses propriétés physiques à cause de sa formule cyclique. — Dans une seconde note, MW. Berthelot et Matignon donnent les constantes thermiques de l'acide glyoxylique ou dioxya- cétique; ils en concluent que les changements suc- cessifs introduits par l’action de l'oxygène dans la fonction chimique, correspondent à des dégagements de chaleur de plus en plus grands; le fait paraît g géné- ral et indépendant des fonctions du corps qui sert de point de départ. — M. Léo Vignon étudie l'influence de certains groupements sur les fonctions basiques des corps, en s'adressant à trois bases complexes dérivées du triphénylméthane; il conclut que la présence du groupe cétonique CO annule sensiblement les fonctions basiques dans les bases COR?; au contraire le groupe- ment thiocétonique CS laisse subsister partiellement ces fonctions. — M. L. A. Hallopeau donne une méthode nouvelle, rapide et précise, pour doser la peptone; elle consiste à précipiter la solution de cette dernière, exempte d’autres albuminoïdes, par un grand excès de nitrate mercurique en solution neutre ou très légère- ment acide. Il est nécessaire de débarrasser le nitrate mercurique pur du commerce de l’excès d’acide ni- 624 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES trique libre qu'il contient et d'enlever à la liqueur à analyser les autres albuminoïdes qu'elle contient; dans ces conditions, il se forme du peptonate de mercure dont les 2/3 représentent le poids de peptone. C. MATIGNON. 2° SCIENGES NATURELLES. — M. Pasteur, en présentant l'ouvrage de M. le D' Daremberg intitulé : Le choléra, ses causes, moyen de s'en préserver, signale les points sui- vants : M. Daremberg s’élève contre la pollution des cours d’eau et du sol par les eaux d’égouts. Il pense que les germes du choléra peuvent séjourner vivants et virulents pendant plusieurs années dans le sol et amener, ultérieurement, des foyers cholériques. Le choléra actuel de la banlieue de Paris proviendrait de germes cholériques, conservés depuis la dernière épi- démie de 1884. L'auteur cite les expériences tentées ré- cemment pour arriver à préserver du choléra les ani- maux et même les hommes. — M. V Babès, dans une maladie des moutons, en Roumanie, appelée Carceag, a trouvé un nouveau représentant du groupe des para- sites, qu'il a placé entre les Bactéries et les Proto- zoaires. Ce parasite ou hémalococeus, communique aux moutons une maladie aiguë, fébrile, avec hémorragies et œdèmes, et surtout avec une inflammation hémor- ragique et souvent nécrotique du rectum. Dans une par- tie des globules rouges du sang existent des cocci ronds, immobiles, colorables au violet de méthyle, offrant par- fois une ligne transversale, L'auteur n’est pas parvenu à cultiver ce parasite, L’hématococcus du mouton se rapproche beaucoup de celui du bœuf, mais il en dif- fère par la morphologie, la localisation et la marche de la maladie qu’il occasionne. — M. J. Ferran : Sur une nouvelle fonction chimique du bacille virgule du choléra asiatique. Si l’on cultive le bacille virgule dans du bouillon légèrement alcalin, contenant de la lac- tose, il produit de l'acide paralactique, transformation analogue à celle que produisent divers autres bacilles, entre autres le Bacillus coli communis. Le bacille virgule du choléra, semé dans du bouillon alcalin contenu dans de grands matras, pourvus de tampons de coton, peut vivre plus de trois ans, Dans les mêmes conditions, mais avec la différence que le bouillon soit lactosé, la vie de ce microphyte s'éteint rapidement, à cause de l'acidité qu'il produit lui-même dans le milieu. L’acide paralactique paralyse donc l’activité chimique du ba- cille virgule ; il semble rationnel d'employer lacide lac- tique contre le choléra, et de l’associer à la morphine, qui a un pouvoir anexosmotique. Mémoires présentés. — M. J. Camus : Mémoire sur la périphérie de l’ellipse. — M. P. de Goy : Note rela- tive à l'emploi d’un angle auxiliaire, pour la solution de divers problèmes de géométrie. — M. P. Marone : Note sur une nouvelle méthode pour préserver la vigne contre l’action des Cryptogames, du Peronospora, du Phylloxera, etc. Ed. BELZUNG. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 19 juillet. M. V. Cornil : Sur la tuberculose du globe de l'œil, L'auteur fait l'étude anatomique et histologique de l'œil malade enlevé. Comparant ensuite le cas présent aux observations de tuberculose de l'œil connues, il conclut qu'aux deux variétés de tuberculose, généralisée el iridienne, il convient d’en ajouter une troisième, la tuberculose primitive, en masse, du corps ciliaire etde la choroïde pouvant envahir, par son extension circon- férientielle, la sclérotique et la conjonctive. Cette forme de tuberculose n’atteint que très peu ou point du tout la rétine, Discussion : MM. Bucquoy et Cornil. — MM. P. Budin et Chavanne : Note sur l'allaitement des nouveau-nés. Au point de vue de l'allaitement, les enfants peuvent être classés dans trois catégories : la première catégorie comprend ceux qui ont l'allaitement maternel, la deuxième ceux qui ont l'allaitement mixte, la troisième ceux qui ont l’allaitement artificiel. Voici le résultat des observations faites par les auteurs du 4°r avril au 28 juin 1892 : Parmi 491 nouveau-nés, 89 ont été, à partir du troisième jour, exclusivement nourris par leur mère. L'augmentation de poids à partir du deuxième jour, a été en moyenne, de 28 gr. 17 par jour. Pour les 91 enfants ayant eu l'allaitement mixte, c’est-à-dire l'allaitement avec le sein de la mère et avec du lait stérilisé suivant la méthode Soxhlet, l’augmentation moyenne de poidsa été de 18 gr. 16 par jour, Enfin onze enfants n’ont eu que du lait stérilisé; leur accroissement journalier a été de 14 gr. 24. Pour les 191 enfants observés le résultat à done été une augmentation moyenne de 22gr.59 par jour. Voici maintenant les résultats du côté du tube digestif: sur les 89 enfants nourris au sein, 6 ont eu la diarrhée ; sur les 91 soumis à l'allaitement mixte, 7 ont eu de là diarrhée; enfin sur les 11 allaités artificiellement, aucun n’a eu de troubles digestifs. Les résultats obtenus chez les nouveau-nés sont en rapport avec ceux cons- tatés chez les enfants plus âgés : ils digèrent le lait stérilisé, Les auteurs ont eu recours, pour stériliser le lait, au procédé indiqué par Soxhlet (Munich), dont ils signalent les inconvénients; en terminant, ils font remarquer que rien ne vaut pour l'enfant l'allaitement par sa mère ou par une nourrice. Séance du 26 juillet. M. Laënnec (de Nantes) est proclamé correspondant national pour la première division (Médecine) des cor- respondants nationaux. —MM. V.Babès (de Bucharest), et Ad. d'Espine (de Genève) sont proclamés correspon- dants étrangers dans la première division (Médecine). — M. Polaïllon : Ovariotomie double chez une femme enceinte, continuation de la grossesse, Accouchement à terme d’un enfant vivant. Cette opération fut nécessitée par l’existeuce d’un kyste de lovaire remplissant tout l'abdomen, Les suites en furent des plus simples. La grossesse continua sans accident jusqu'à terminaison, Discussion : MM. Péan, Polaillon. Séance du 2 août. M. Verneuil: Trois opérations simples suivies de mort chez des sujels atteints d'anciennes maladies du foie, L'auteur décrit longuement les trois cas observés dans son service. Il s'agissait d'une ancienne blessure, d’un polype utérin bénin et d’un étranglement her- niaire récent, Trois opérations ont été pratiquées : une arthrotomie, une kélotomie et une section du pé- dicule ; ces trois opérations ont parfaitement réussi, et pourtant, les trois cas ont été suivis de mort. L'au- teur conclut : 4° qne si les trois malades, à titre d'opé- rées, sont incontestablement mortes par le foie, à titre d'hépatiques, elles ont succombé prématurément par le fait du traumatisme opératoire; 2° que l’opérateur doit endosser nécessairement une part de responsa- bilité, variable suivant les cas. Cette communication est suivie d’un index bibliographique des travaux de l'auteur ou de ses élèves sur les rapports entre les maladies du foie et les diverses affections chirurgicales, traumatiques ou autres. — M. Semmola (de Naples) traite de la syphilis du cœur. 11 appelle l'attention sur une série de cardiopathies primitives, pouvant se déve- lopper chez des anciens syphilitiques, caractérisées au début par des troubles fonctionnels insignifiants, tels que l’arythmie, seule ou accompagnée de tachycardie, rebelles à tous les moyens thérapeutiques, et auxquels il convient d'appliquer un traitement spécifique bien dirigé, D'une série d'observations cliniques, sur vingt- sept malades, l’auteur conclut que lorsqu'un ancien syphilitique bien avéré se présente à l'observation du médecin avec des symptômes d’arythmie continuelle persistante, avec ou même sans gêne dans la respira- tion, et rebelle à tous les moyens hygiéniques et phar- maceutiques que l’on peut employer pour régulariser la fonction cardiaque, le clinicien doit soupconner de suite qu'il y a là un processus syphilitique et conseiller au malade un traitement spécifique bien dirigé, alors même qu'il n'y a plus actuellement aucun symptôme ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 6235 qui puisse donner la démonstration visible de la syphi- lis constitutionnelle, Discussion : MM. Lancereaux, Semmola. Séance du 9 août. M. Bérenger-Féraud : Le ténia dans les colomies francaises, l'Algérie et la Tunisie. L'auteur complète pour le Sénégal, la Cochinchine, l'Algérie et la Tunisie les indications, fournies le 26 janvier dernier, concer- nant l’augmentation de fréquence du ténia dans notre pays. Au Sénégal, la fréquence du parasite, qui a aug- menté notablement depuis 1860, paraît due à une im- portation de germes par les nègres venant du bassin du Niger, dont un sur trois portait des ténias, Pour la Cochinchine, le ténia devient fréquent en 1872; cela provient sans doute de la consommation plus abondante, depuis cette époque, des bœufs de Siam et de Mongolie, presque tous porteurs de cysticerques. En Algérie, l'augmentation n’a pas eu lieu dans d'aussi grandes proportions, mais le parasite était déjà très fréquent au moment de la conquête. — M. Pamard : Des acci- dents de la dentition. L'auteur, se basant sur une longue expérience et sur des centaines d'observations, affirme les faits suivants : 1° tout travail de dentition s'accompagne d'un trouble dans la santé des enfants; 20 dans les climats froids, et de même dans la saison froide, tout travail s'accompagne de phénomènes réflexes du côté des organes respiratoires; 3° dans les pays chauds, et de même dans la saison chaude, il s’ac- compagne de phénomènes réflexes du côté des organes digestifs. Ces phénomènes s’observent chez tous les enfants avec plus ou moins d'intensité et sont plus accusés chez ceux qui ne sont pas soumis aux règles d’une bonne hygiène. L'enfant, privé de lait au mo- ment où il fait ses dents, est fatalement condamné. L'auteur recommande l’ouverture de la gencive non au bistouri, mais avec l’ongle, suffisant le plus souvent pour faire cesser aussitôt les accidents convulsifs liés à la dentition. On doit donc admettre qu'il y a des accidents qu'il faut considérer comme étant d'ori- ine dentaire. Les maladies de la dentition ne doivent He pas disparaitre du cadre nosologique. Discussion : MM. Ollivier, Le Roy de Méricourt, Hérard, Char- pentier, Hardy, Peter, Pamard, C. Paul. — M. G. Sée : Du traitement de l’albuminurie par les sels de strontium. Il s’agit d’un malade présentant une ana- sarque révélant une néphrite parenchymateuse; la déperdition quotidienne à élé de 23 grammes, Le ma- lade fut mis aux bromures alcalino-terreux de stron- tium et de calcium, alternativement, à la dose de 4 à 5 grammes par jour, Au bout de quelques jours l'urine ne renferma plus que des traces d’albumine, l’ana- sarque et tous les autres symptômes de néphrite ayant diminué. Pour le régime qu'il a fait suivre au malade, l’auteur part de ce principe que la quantité d’albumi- nates peut être abaissée jusqu’à 60 grammes, à la con- dition qu'on fournisse à l'organisme des graisses et des hydrocarbures susceptibles de fournir 2.500 à 3.000 calories, chiffre normal pour un.adulte. Le malade n’a pas pris une goutte de lait, qu'il ne supportait d'ail- leurs pas. Il lui a conseillé la suppression des viandes et des œufs, et seulement un peu de poulet et très peu de poisson ; du macaroni avec peu de fromage, beurre et graisses à discrétion; régime presque. végétarien : chocolat, pommes de terre, riz peu cuit, cervelle de mouton et ris de veau. Suppression du vin et des autres boissons alcooliques, Comme boisson, du thé ou cer- taines eaux minérales, Discussion : MM. Dujardin- Beaumetz, Le Roy de Méricourt, G. Sée. Séance du 16 août. M. Bérenger-Féraud poursuit sa communication sur la distribution géographique des ténias de l'homme. Quant à la prophylaxie des ténias, elle doit être basée sur une double action : protection des animaux contre les œufs fournis par l'homme, et protection de l'homme contre les larves fournies par les animaux. Pour garantir ‘homme il suffit de lui faire manger de Ja viande suffisamment cuite afin que les larves aient été tuées par la chaleur. Pour garantir les animaux il suffirait de détruire les œufs contenus dans les déjections humaines; mais cette prescription ne peut avoir une sanction pratique et il faut avoir recours à la surveil- lance de leur alimentation. Discussion : MM. Lagneau et Bérenger-Féraud. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 2 juillet. M. Vincent communique les résultats expérimen- taux de l’association assez fréquente du streptocoque et du bacille typhique. Cette association, lorsqu'elle existe, a pour effet de déterminer une issue fatale à la maladie. ln ensemencant divers microbes, le Bacterium coli par exemple, avec le bacille d’Eberth, celui-ci dis- parait très vite, Au contraire, associé avec le strepto- coque, le bacille d'Eberth n’est pas gèné dans son dé- veloppement et les deux organismes vivent côte à côte. Le bacille typhique et le streptocoque, inoculés simul- tanément, tuent l'animal presque fatalement, alors que des inoculations isolées de lun ou de l’aufre ne le tuent pas. — M. Galezowski montre un appareil per- mettant d'obtenir des images très agrandies de la ré- line et des vaisseaux du fond de l’œil. — M. Brown- Séquard rapporte une observalion de guérison du myxædème consécutive à quelques injections d'extrait du corps thyroïde: il signale aussi l'influence du liquide testiculaire dans divers autres cas. — M. Chau- veau à constaté souvent par l’expérience suivante, l'influence de l’anémie ou de l’ischémie sur le fonc- tionnement cérébral. 11 perfore les deux pariétaux d’un cheval et y fixe un ajutage et un tube en caoutchouc. En introduisant de l’eau d'un côté, produisant par suite une compression de lhémisphère, d'où une is- chémie, l'animal tombait du côté opposé avec mouve- ments convulsifs violents ; le liquide s'étant bientôt ré- sorbé l'animalse relevait, Mèmes phénomènes par lin- jection faite de l’autre côté, mais avec chute du côté opposé à l'hémisphère comprimé. — M. Laborde a obtenu les mêmes phénomènes en remplaçant l'eau par le sang. — M. Laveran a observé récemment un soldat avec hémiplégie droite et aphasie sans agra- phie. Il n'avait aucune lésion cérébrale, mais dans les - artères de la base, il y avait une artérite de la sylvienne gauche et du tronc basilaire. M. Dastre dit que, vu les connexions vasculaires des artères du cerveau d'un hémisphère à l'autre, l’'hémorragie d’une carotide pro- duisant l’ischémie d’un seul côté paraît paradoxale. — M. Laborde rend compte des résultats que lui a don- nés l’étude des nouvelles bases, cupréine, quinéthyline et quinopropyline, obtenues par MM. Grimaux et Ar- naud. Pour la cupréine, étudiée sous forme de chlorhy- drate, les effets produits sont les mêmes qu'avec la quinine, mais à un moindre degré. Discussion : M. Gley. — M. Guépin à observé une famille dont plusieurs membres présentaient une luxation congénitale de l’articulation cubito-carpienne des deux côtés. — MM. Giard et Billiet signalent les distomes recueillis sur des bœufs abattus à Kao-Bang (Tonkin), parmi les- quels un distome nouveau et un nématode fort rare. M. Gillis rend compte d’une étude sur le ligament rond de l'articulation coxo-fémorale. —MM, Reymond et Guyon présentent les pièces d’un lapin démontrant le mécanisme de l'infection de la vessie, par l’Uroba- cillus liquefaciens à travers ses parois de dehors en de- dans. — MM. Roger et Charrin démontrent que le sérum à des propriétés bactéricides exaltées chez les animaux vaccinés contre un agent pathogène, — MM. Chambrelent et Tarnier : Toxicité du sérum des éclamptiques. — MM. Charrin et Langlois présentent les tracés cardiographiques fournis par des malades atteints de la maladie d'Addison et montrant une fai- blesse cardiaque assez marquée. Ils ont constaté chez les malades l'effet diurétique très net dû à des injec- tions d'extrait de capsules surrénales. 626 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Séance du 9 juillet. M. Railliet présente quelques nématodes (amphis- tomes) recueillis chez un bœuf à Son-Tay (Tonkin) en 4886, par M. Bourgès. — M. Grigorescu : Recherches de contrôle sur l'accélération de la conduction ner- veuse motrice chez les grenouilles, après le traitement au suc testiculaire de cobaye. — M. Retterer signale la congestion et la dilatation extrêmes des vaisseaux se produisant au moment du rut, M. Mégnin dit que chez les chiennes, il y a, aumoment durut, émission sanguine constituant de vraies règles. — MM. Morat et Doyon ont étudié l'influence de la pilocarpine et de l’atropine sur l’appareil régulateur de la température, À dose faible le premier de ces poisons diminue la température centrale précisément de la même quantité dont l’autre l’augmente ; les deux courbes obtenues sont symé- triques, mais inverses. — M. Chouppe, à l’occasion des faits {signalés par MM. Brown-Séquard et Chauveau dans la dernière séance, rend compte de l’observation clinique concernant un aphasique par déshydrémie cérébrale, M. Babinski pense qu'il s’agit plutôt d’un cas de mutisme hystérique. — M. Laborde a employé la traction rythmique de la langue comme moyen efti- cace à appliquer dans les cas d’asphyxie par submersion. L'examen de la pupille permet de reconnaître si le sujet est mort ou non; lorsqu'elle est contractée, il peut n’y avoir que mort apparente, quoique l’on ne puisse ercevoir les bruits du cœur qui continue néanmoins à attre, Discussion : MM. Dastre et Laborde. — M. Lau- lanié : Recherches expérimentales sur les variations corrélatives de l'intensité de la thermogenèse et des échanges respiratoires. — M. Blanchard dit que le ténia inerme existe en France et en Europe depuis des siècles et qu’il domine beaucoup comme fréquence. — M. Haffkine a étudié expérimentalement le choléra asiatique chez le cobaye. Il a d’abord réalisé l’exalta- tion du virus cholérique par passage de l'animal à l'animal ; entre le vingtième et le trentième passage, il n’y a plus d’exaltation, Le microbe a alors une viru- lence vingt fois plus grande qu'auparavant. Pour obte- nir du virus atténué, on cultive le microbe à 39 dans . une atmosphère renouvelée fréquemment. En inoculant alors successivement la série de virus obtenue en pas- sant du plus atténué au plus exalté, l'auteur est arrivé à pouvoir inoculer impunément au cobaye du virus le plus actif. Séance du 16 juillet. M. Luys signale l’état particulier d’éréthisme dans lequel se trouve la rétine de sujets mis en état d'hypno- tisme et les diverses colorations percues par eux dans cet état, — MM. Blocq et Marinesceu ont étudié un cas de myopathie progressive type Landouzy-Dejerine dans lequel les coupes du nerf radial présentaient des aires transparentes claires, représentant, selon les auteurs, des tubes nerveux profondément modifiés, renfermant des débris de cylindres-axes sectionnés, — M. Gley montre un lapin offrant une série de troubles cutanés, survenus au bout de deux ou trois mois, à la suite de l'enlèvement du corps thyroïde. C’est le troisième animal sur lequel il a pu obtenir cette affection chro- nique, les autres ayant succombé aux suites de l’opé- ration. M. Gley à observé aussi l’hypertrophie très marquée de l’hypophyse. Discussion : MM, Dastre, Gley, Charrin, Phisalix. — MM. Couvreur et Ba- taillon : Fonclion glycogénique chez le ver à soie au moment de sa transformation en chrysalide, — M. Charrin rend compte de l’action physiologique de la cinchonamine ; la dose toxique est, par kilogramme, de 61 milligrammes chez la grenouille, de 23 milli- grammes chez le lapin, et de 17 milligrammes chez l’homme ; il signale aussi la puissance antithermique de ce corps sur les fièvres les plus diverses, —- M. Haukine dit que les procédés de vaccination par les virus atlénués et exaltés, indiqués dans la séance précédente, sont applicables au pigeon et au lapin, auxquels ils confèrent limimunilé contre l'infection par le microbe du choléra de Paris, qui a montré la même virulence pour les animaux que les microbes de Madras, de Saigon et de Calcutta, — M. Bruhl a pu vacciner des lapins contre la culture entière du Vibæio Metchnikoffi en leur injectant dans les veines des cultures stérilisées de Vibrio Metchnikoffi. Le sérum des lapins immunisés a été trouvé être à la fois vaccinant et curateur dans l'infection par le vibrio virulent. SOCIETE DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 16 juin. M. Henry Armstrong : Contribution à un système international de nomenclature. Nomenclature des composés cycliques. — MM. N. Collie et W. S. Myers : Production de dérivés de la pyridine en partant de la lactone de l'acide triacétique. Les auteurs montrent que l’on obtient probablement par l'action de l’ammo- niaque sur la lactone triacétique de l’xy-dihydroxy-4- picoline. — MM. Percy Frankland et John Mac Gré- gor : Fermentation de l’arabinose produite par le ba- cille éthacétique. Les produits sont qualitativement les mêmes que ceux de la fermentation de la glycérine sous l'influence du même organisme, savoir : alcool éthylique. acide acétique, anhydride carbonique, acide succinique (traces) et un autre acide non déterminé, — MM. T. Purdie et J. Wallace Walker : Résolution de l'acide lactique en ses composants optiquement actifs, La méthode des cristallisations successives à permis d'isoler deux composés, l’un dextrogyre, l’autre lévogyre. — MM. R. Meldola et E. M. Hankins : Mé- thode pour déterminer le nombre de groupes AzH? contenus dans une base organique. La méthode pro- posée repose sur le dosage de l’azote contenu dans l’azoïimide que l'on peut obtenir par l’action de l’am- moniaque sur le diazoïque bromé. — MM. Wyndham Dunstanet T. S. Dymond : Existence de deux acé- taldoxymes. L'existence de deux isomères corres- pondant aux deux benzaldoxymes semble démon- trée. Ce seraient là deux isomères stéréochimiques. — M. James Walker : Constantes de dissocia- tion de quelques acides organiques. — Note sur la préparation des iodures de radicaux alcooliques. — MM. W. F. Laycock et F. Klingemann : Examen des produits obtenus dans la distillation sèche du son en présence de la chaux. — MM.G. H. Bailey et Thornton Lamb : Poids atomique du palladium. Cette détermi- nation repose sur l'analyse du chlorure de palladam- monium Pd(AzH#Cl)?. Le résultat est 105,5 au lieu de 106,35 donné par Berzélius. — M. P. Wynne : Action du chlorure de sulfuryle sur lacéto-orthotoluidine et l’acéto-paratoluidine. ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE Séance du 4 juin. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — MM. E. Lagrange et P. Strobant : Une nouvelle méthode astrophotomé- trique. La solution du problème complexe de la déter- mination de l'intensité lumineuse absolue des étoiles dépend de la connaissance de différents facteurs, tels que l’absorption qu'exerce l’atmosphère terrestre et la distance qui nous sépare des astres. Mais, pour le plus grand nombre des étoiles, dont la parallaxe est peu sensible, il ne peut plus être question de déterminer l'intensité absolue,mais seulement le rapport de l'éclat d’une étoile avec celui d’une autre. Les auteurs expo- sent les principales méthodes photométriques propo- sées pour mesurer l'éclat relatif des étoiles et dont les premières datent de la fin de xvu*siècle, Ils proposent ensuite l'emploi d’un photomètre se composant essen- tiellement d’une lunette astronomique munie d’un ocu- laire à long foyer, donnant, par conséquent, un faible grossissement. On produit dans le champ de la lunette et près de l’astre, dont on veut déterminer l'éclat, une étoile artificielle exactement semblable à celle obser- . Low ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 627 vée. Suit la description de la disposition permettant d'arriver à ce résultat. Il est essentiel, dans le genre de mesure dont il s’agit, que l’intensité lumineuse de la lampe à incandescence, qui sert de point de compa- raison, soit constante. Les auteurs ont constaté que les variations de différence de potentiel entraînaient des variations corrélatives, atteignant 7 °/, de l'intensité lumineuse de la lampe, Aussi conseillent-ils d’enregis- trer d’une manière continue cette différence de poten- tiel à l’aide d’un galvanomètre Deprez-d'Arsonval, ce qui permet de corriger les mesures photométriques effectuées. Le procédé photométrique des auteurs per- met de déterminer non seulement le rapport de Féclat lumineux des diverses étoiles, mais encore d’évaluer, ar les expériences qu'ils indiquent, la quantité de umière que chacune nous envoie. Enfin on peut aisé- ment donner à l’éloile artificielle la même couleur qu’à l’astre observé, en plaçant près de la lampe élec- trique un verre coloré plus ou moins épais. On peut toujours donner la même coloration aux rayons lumi- neux émanant de la lampe carcel à laquelle on com- pare en définitive l’astre dont on veut déterminer l'éclat. On ramène de la sorte la détermination de la magnitude d'étoiles différemment colorées, à la compa- raison dé l’éclat de deux sources lumineuses. 20 SCIENCES PHYSIQUES, — M. Paul Henry : Sur les transformations réciproques des lactones et des acides lactones; étude de dynamique chimique. Voici les con- clusions de l'étude à laquelle l’auteur s’est livré : La transformation des lactones en sel d’acide-alcool sous l’action des bases se fait proportionnellement à l’inten- sité du caractère basique de celles-ci. La valérolactone, lactone d’un acide-alcool secondaire, est plus stable sous l’action des bases que la butyrolactone, lactone d’acide-alcool primaire. Inversement, l’acide y-oxyva- lérique se débouble plus rapidement que l'acide y-oxy- butyrique. La partie active des bases dans la réaction étudiée n’est pas l'ion métal, mais l’hydroxyle. Les acides, en agissant catalytiquement sur les acides-al- cools y, agissent proportionnellement à leur coefficient d’affinité. Le dédoublement momentané de l'acide y- oxyvalérique est déterminé par l'hydrogène qu’aban- donne cet acide. Enfin c’est la partie non dissociée de l'acide qui subit la transformation, — MM. Rindeman et Motteu rendent compte de leurs recherches concer- nant l'application des propriétés oxydantes du chlo- rure de chaux au dosage du soufre dans les sulfures minéraux naturels, et spécialement dans les sulfures organiques. Ils décrivent le mode opératoire employé et font connaître les résultats obtenus par lindication des données numériques. Celles-ci semblent justifier l'emploi du chlorure de chaux par le dosage rapide du soufre dans les sulfures minéraux. Il suffit d’une heure pour amener le minerai en élat d’être précipité par le BaClË. Le chlorure de chaux renfermant souvent du sulfate de chaux; il sera donc nécessaire de déterminer préalablement sa teneur en acide sulfurique. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A.-B. Griffiths : Sur un nouveau bacille trouvé dans l’eau de pluie. Il s’agit d'un bacille découvert dans l’eau de pluie conservée dans un baril exposé à l’air durant un hiver doux. Les cultures sur plaques de ce bacille sont caractéristiques. En quatre jours il se forme une petite colonie jaune dont la périphérie devient jaunâtre, trouble, et s’en- toure d’une zone de liquéfaction. Ce microbe ne forme pas de spores et se colore très bien par les couleurs d’aniline. Quoique découvert dans l’eau, il ne vit pas dans l’eau distillée; il a besoin d’une certaine quan- tité de matières organiques. Cultivé sur gélatine pepto- nisée pendant plusieurs jours, il se produit une pto- maine qui a été extraite par la méthode de M, Gautier. C’est un corps solide blanc, cristallisant en aiguilles ou prismes clinorhombiques nacrés, solubles dans l’eau bouillante et insolubles dans l’éther. Gette ptomaine agit comme un diurétique puissant, et provient sans aucun doute de la décompostion des molécules de la gélatine peptonisée, L'auteur a donné à ce microbe le non de Bacillus pluviatilis. — Le même auteur fait con- naître la méthode qui lui a permis d’extraire une nou- velle ptomaïne de l’urine des érysipélateux. C’est une base vénéneuse, produisant une forte fièvre et la mort dans les dix-huit heures, Cette ptomaïne, nommé érysipéline par l’auteur, ne se rencontre pas dans les urines normales, — L'auteur rend compte enfin des résultats que lui ont donnés les analyses de l’hé- mocyanine du sang des Homarus, Sepia et Cancer. I a trouvé que cette substance, qui joue chez ces animaux le rôle de l’hémoglobine chez les vertébrés, présente une composition bien uniforme et est plus stable que cette dernière, Elle existe à deux états, c’est-à-dire à l’état d’oxyhémocyanine et d’hémocyanine réduite. Elle bleuit en se chargeant d'oxygène dans les organes respiratoires de l’animal dont le sang artériel est bleu foncé, puis se décolore par la perte de son oxygène au sein des tissus, — M. Paul Cerfontaine : Contribution à l'étude du système nerveux central du Lombric terrestre. L'étude des fibres géantes du Lombric à conduit cet auteur aux conclusions suivantes relative- ment à la nature et à la fonction de ces éléments : Les fibres géantes de Leydig sont des éléments nerveux résultant de la réunion des prolongements des cylin- dres-axes de plusieurs cellules, Le courant nerveux est antéro-postérieur dans la fibre géante médiane et pos- téro-antérieur dans les fibres géantes latérales. Sur leur trajet, les fibres géantes donnent, dans chaque ganglion, des ramifications. Ces fibres servent à éta- blir des connexions, dans le sens de la longueur, entre les différentes parties du système nerveux. Enfin, ce sont ces fibres géantes qui permettent aux lombrics de produire des contractions musculaires à la fois dans toute l'étendue du corps. Le travail se termine par une étude de la distribution des cellules nerveuses dans la chaîne ganglionnaire et indique le trajet des prolon- gements de ces cellules. SOCIETE DE PHYSIOLOGIE DE BERLIN Séance du 8 juillet. M. Dessoir expose les résultats de ses recherches sur le sens de la température qu'il considère comme étant une unité physiologique, non divisible par consé- quent, ainsi que le font Hertzen, Blix, etGoldscheider, en sens de la chaleur et sens du froid. Trois régions du corps, parmilesquelles la partie inférieure ducardia, la partie respiratoire des fosses nasales, ont été trouvées insensibles à l’action de la température. Les rapports du sens de la température avec le sens de la pression n’ont pu être affirmés au cours des recherches; mais l’auteur a expérimenté une méthode de recherches lui permettant de déterminer dans quelle portion de lé- corce cérébrale se trouvait le siège de la perception de la température. Au cours de la discussion à laquelle a donné lieu cette communication, M. Goldscheïder fait connaître à nouveau les raisons qui l’ont déterminé, lui et ses devanciers, à admettre l'existence des sens spéciaux de la chaleur et du froid, opinion que M. Des- soir ne serait parvenu aucunement à réfuter. Plusieurs autres points de la communication de M. Dessoir ont été attaqués par M. Goldscheider et d'autres physiolo- gistes. y Séance du 22 juillet. M. Zuntz rend compte de l'influence de l’activité mus- culaire sur l’alcalinité du sang auquel il convient d’at- tribuer aussi bien une certaine acidité qu'une certaine alcalinité, cette dernière étant mesurée par la puis- sance d'absorption de l'acide carbonique. Les mus- cles donnant naissance, pendant leur contraction, à de l’acide lactique, il en résulte que l’'alcalinité du sang doit diminuer, fait que M. Zuntz avait cons- taté précédemment chez le lapin ; chez le chien, au contraire, malgré une forte tétanisation des extré- mités postérieures, la teneur du sang en alcali ne subit aucune variation. Cette différence pouvait pro- venir de ce que, chez le carnivore, l'acide lactique for- 628 np de ae ds Ch ce LU ee 5 7 Share di D ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES + mé était soit détruit au fur età mesure de sa production, soit masqué par la présence de l'ammoniaque alors que chez l'herbivore ce n’était pas le cas. Pour lever cette incertitude, M. Cohnstein a étudié, dans le labora- toire de M. Zuntz, l'influence de l'alimentation sur la variation de l’alcalinité pendant l’activité musculaire, Un chien soumis au travail fut nourri de viande seule pen- dant une période et pendant une autre avec du riz et de la graisse ; dans les deux cas, cependant l’alcalinité du sang ne montra aucune variation sensible, malgré l'état de travail de l'animal, durant lequel au contraire on constate chez le lapinune très grande diminution de l’alcalinité ; bien plus, en obligeant le chien à travail- ler pendant longtemps, on constata même une éléva- tion de l’alcalinité du sang. Chez le carnivore il existe donc, indépendamment de la nature de l'alimentation, une disposition en vertu de laquelle les produits acides de l'activité musculaire sont détruits. Cela explique pourquoi l’on peut chasser le lièvre, animal herbivore, à mort, mais non le chien, carnivore. — M. Lilienfeld, dans ses recherches chimiques sur le sang, a décou- vert l’existence dans les leucocytes d’une substance, signalée précédemment par M. Kossel et décrite sous le nom de histone. Ce corps possède l’importante pro- priété de conserver au sang sa fluidité, d’entraver sa coagulation. L'auteur montre dans des flacons plu- sieurs échantillons de sang qui, traité par une solu- tion de histone, est resté parfaitement fluide, La his- tone est combinée dans les leucocytes avec la nucléine et est fixée dans les corpuscules à l’état de nucléohis- tone, La nucléine a sur le sang une action contraire ; elle amène celui-ci en état de coagulation, et elle est dans le sang le seul agent de la coagulation; il n'y existerait pas dans le fibrinferment, Le sang dans les vaisseaux garde sa fluidité parce que la nucléine com- binée avec la histone est maintenue fortement dans les leucocytes. En extrayantle sang des vaisseaux quelques globules blancs meurent, leur nucléohistone se répand dans le plasma sanguin, où elle se trouve en présence des sels de chaux: ceux-ci la décomposent et rendent ainsi possible la coagulation par l'intermédiaire de la nucléine, Le rôle indispensable bien connu des sels de chaux dans la coagulation résiderait donc dans la propriété de ces sels de décomposer la nucléohistone. — M. Zuntz a entrepris quelques expériences sur l’ac- tion réciproque de diverses sensations gustatives. Lors- que, à une dissolution d’une substance agréable au goût, une dissolution de sucre à une certaine concentration par exemple, provoquantune sensation d’une intensité dé- terminée, on mélange une dissolution d'une substance de saveurdifférente, une dissolution de sel de cuisine par exemple, à une concentration telle que seuleelle ne produise aucune impression salée, qu'elle soit par conséquent au-dessous de la limite de sensalion, dans ces conditions, on observe une exaltation dans la perception de la saveur sucrée ; la mème dissolution sucrée a une saveur plus sucrée avec la dissolution salée que sans elle. Une dissolution étendue de qui- nine, ne révélant à elle seule aucune amertume au goût, produit une action adoucissante analogue sur la dissolution sucrée, Dr W. SKLAREK. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du T juillet. 19 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J.-E. Pfel donne l'étude et les conditions de formation d’un nouvel engrais, d’un emploi particulièrement recommandable pour la vigne, — M. K. Natterer : Recherches chimiques sur l’eau de la Méditerranée. Expédition faite dans l’été de 1891 à bord du Pola dans les environs de l'ile de Crète, Comme dans la mer Tonienne, on trouva que les rap- ports des corps dissous à l’un d'eux sont des nombres presque constants, Sur les côtes de l'Afrique, à l’ouest d'Alexandrie, la teneur en brome présente une diminu- tion frappante, tant à la surface qu’à une profondeur de 50 mètres, ce qui porte à croire que certaines plantes doivent s’assimiler cet élément. 29 SCIENCES NATURELLES, — M. Alfred Nalepa : Nou- velles espèces du genre Phytoptus Duj. et Cecidophyes Nal, — M. Karl Fritsch donne la description de trois espèces de Prunus du sud-ouest de l'Asie, cultivées dans le jardin botanique de Vienne : les Prunus Kurdica Fenz}, Prunus Fenzliana Fritsch et Prunus bifrons Fritsch, — M. Richard von Wettstein : Sur la flore fossile de l’'Hôttinger Breccie. Séance du 14 juillet. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Tesar : Sur le pro- blème des normales relatif à un groupe de sections coniques homofocales. : 29 SctExcEs PHYSIQUES. — MM. I. Klemencic et Paul Czermak étudient les interférences des ondes élec- triques faibles dans l'air à l’aide d’un inducteur pri- maire construit d’après les indications de Hertz dans son mémoire : « Sur les radiations de la force élec- trique »; ils renforcent l'effet par l'addition de deux miroirs concaves. La méthode employée consiste à. faire interférer deux ondes provenant du même exci- tateur; c’est le procédé de Hertz modifié par l’emploi de deux miroirs plans au lieu d’un seul. Ces miroirs sont placés de facon que chacun d'eux recoive en partie l’onde venant d’un miroir concave primaire dans le miroir concave secondaire où les deux parties inter- fèrent en donnant une ligne lumineuse, Les résultats sont les suivants : 1° À chaque longueur du réson- nateur correspond une courbe d’interférences propre; cependant on n'obtient une courbe bien limitée et présentant un caractère oscillatoire très net qu'entre certaines limites qui sont 90 et 40 centimètres. Les courbes d’interférences obtenues entre ces limites cor- respondent à des longueurs d'onde comprises entre 70 et 40 centimètres ; la plus grande longueur d’onde correspond à la plus grande longueur du résonnateur. L’intensité des oscillations, déterminée en fonction de la longueur du résonnateur, présente un maximum pour 5% centimètres ; la longueur d'onde est alors de 51 em. 2, longueur qu'on doit regarder comme carac- téristique des radiations électriques. L'erreur de déter- minalions ne dépasse pas 5 %. 2° La limite supérieure du décrément logarithmique fut trouvée égale à 0,39 avec une longueur d’éclair de 3 mm. 3. Les circonstances différentes expliquent pourquoi le nombre est un peu plus petit que celui qui résulte des observations de Bjerknes (Ann. Wied. 44,74). 3° La longueur des éclairs de l’inducteur primaire n’a aucune influence sur la longueur d’onde mais croît avec l'amortissement. Ce dernier résultat résulte aussi des expériences de Bjerknes., — M. Titus Schindler : Sur l'acide tri- méthyllactique. Glücksmann a cherché à préparer la triméthylacétaldéhyde par l’action de l'acide sulfurique sur l'acide triméthyléthylidènelactique; le produit obtenu en présente la composition mais fournit par oxydation de l'acide acétique au lieu d’acide trimé- thylacétique. M. Schindler a montré que le produit de séparation de l'acide triméthyllactique m'était pas la triméthylacétaldéhyde mais son isomère, la méthyl- isopropylcétone qui se forme grâce à une transfor- mation intramoiéculaire. Quand on remplace l'acide sulfurique par l'acide chlorhydrique, l’acide trimé- thyllactique n’est point attaqué. ; ù 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Wiesner, après avoir partagé les plantes en orthotropes ou verticales, clino- tropes ou couchées et hémiorthotropes, qui présentent une inclinaison voisine de 45°, étudie l'influence de leur position dans l’espace sur leur organisation. — M. Wei- denfeld : Influence des museles intercostaux sur la capa- cité du thorax. —M,. L. Réthi : Sur les filets nerveux des museles du palais et de la bouche, Emil Weyn. Membre de l’Académie. Paris.— Imprimerie K. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER Levé, rue Cassette, 17. 3° ANNÉE N° 18 30 SEPTEMBRE 1892 REVUE GÉNÉRALE ES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER CARCINOMES Dans une revue, publiée tout récemment, M. Baumgarlen ! reproche à l’auteur du Traité d'anatomie pathologique le plus répandu actuel- lement, M. Ziegler, de ne pas accepter la théorie des Lumeurs de Cohnheim. Pour M. Baumgarten, celle théorie « est pour le moment la seule accep- table et probablement aussi la seule vraie de toutes les théories émises dans la branche la plus obscure de l’histologie pathologique ». La théorie des tumeurs de Cohnheim, très répan- due parmi les pathologistes, surtout en Allemagne, admet que les tumeurs, en général, et les tumeurs malignes, en particulier, sont dues à la végétation exagérée des foyers primitifs, détachés des feuillets embryonnaires et équrés dans des points différents de l'organisme. Ces germes des tumeurs égarés peuvent (toujours d’après la théorie de Cohnheim) séjourner pendant toute une série d'années ou de décades, sans manifester aucun signe de leur existence. Mais voilà qu’au bout d’une si longue période d'inactivité, les particules des feuillets embryonnaires commencent à proliférer d’une façon extraordinaire, envahissent l'individu et finissent par lui donner la mort. Cette théorie n’est point déduite des fails cons- tatés par la méthode scientifique, mais inventée d’une façon purement spéculative et ne repose que sur des probabilités. Comme les feuillets embryon- naires sont propres à tous les animaux métazoaires (c'est-à-dire polycellulaires), il est tout naturel de supposer que les Invertébrés sont propres aussi 1 Berliner klinische Wochenschrift, 1892, p. 780, REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, ET COCCIDIES au développement de tumeurs analogues à celles de l’homme et des animaux supérieurs. On observe souvent chez toutes sortes d'Invertébrés des mons- truosités dues au développement anormal de dif- férentes parties. Mais, quoique les animaux infé- rieurs possèdent un ectoderme et un entoderme, tout comme les Verlébrés, on n’a jamais pu trou- ver chez eux rien qui ressemble à des tumeurs épithéliales. Parmi les si nombreuses maladies des animaux inférieurs (Insectes, Crustacés, Vers, elc.), on rencontre beaucoup d'infections, mais jamais le cancer. Et cependant, si, pour pro: duire ce dernier, il ne faut qu'un fragment de feuillet embryonnaire égaré, on ne comprend pas pourquoi les Invertébrés seraient indemnes de pareilles productions. D'un autre côté, les Invertébrés, — et les orga- nismes inférieurs en général, —nous présentent des cas nombreux de tumeurs ; seulement ces tumeurs ont toujours une origine parasitaire. Toutle monde connait les galles, si variables chez beaucoup de plantes : ce sont des véritables {umeurs, dévelop- pées à la suite d'une prolifération anormale des cellules végétales. Mais toujours la cause de ces néoplasmes réside dans un parasite qui s’est intro- duit dans la plante. Chez les Invertébrés, on a observé aussi des tumeurs. Les polypes présentent des végétations abondantes autour des animaux étrangers qui ont pénétré dans la masse des polypiers. La même règle se confirme donc toujours. Chez les êtres inférieurs toutes les néoplasies sont d’ori- gine parasitaire. Il existe des tumeurs infectieuses ; 18 ie 7 630 mais il n’y a point de fragments des feuillets em- bryonnaires détachés et transformés en néo- plasme. Ne serait-il pas possible que l'homme et les animaux supérieurs soient soumis à la même loi, que, chez eux aussi, les véritables néoplasies, et surtout les tumeurs malignes soient d’origine pa- rasitaire ? Cette supposition, soulevée mainte fois en pathologie, a le plus souvent été rejetée par les gens du métier. Voici comment l’auteur de la théorie embryonnaire des néoplasies — Cohnheim — formule sa critique de la théorie parasitaire : « Jamais », dit-il !, « on n’a observé d’épidémie ou d'endémie de véritables tumeurs. De plus, on n’a jamais pu constater la transmission d’une tumeur d’un individu à un autre. Jamais un chirurgien ne s’est infecté avec une tumeur pendant l'opération; on n’a jamais vu non plus qu'un homme prenne le cancroïde du pénis à la suite du cancer utérin de sa femme. Et combien d'expériences infructueuses n’a-t-on pas tentées dans le but de transmettre les tumeurs de l'homme à des animaux, ou d’un indi- vidu de la même espèce à un autre? » Dans les dix années écoulées depuis la publica- tion de ces lignes, les idées sur les infections se sont beaucoup modifiées. Personne ne sera surpris de voir une maladie répandue sur toute la terre être bien une maladie infectieuse d’origine parasi- aire. La tuberculose ne présente point de carac- tère épidémique ou endémique, et, malgré cela, elle est bien due au parasitisme du bacille de Koch. L'absence de contagion, sur laquelle insiste Cohnheim., ne peut être nullement invoquée contre la nature parasitaire d’une maladie. Les maladies miasmaliques, sans être contagieuses, ne sont pas moins des infections dues au parasilisme micro- bien. Du temps de Cohnheim, on connaissait déjà l'histoire de la maladie coccidienne des lapins, intéressante à plusieurs points de vue. Ce ne sera pas une digression inutile, si, avant d'aborder notre sujet principal, nous nous arrêlons un peu sur cette coccidiose, dont la connaissance jette beaucoup de lumière sur la question du cancer. I Il se trouve souvent dans le foie des lapins des nodules grisàtres ou blancs, composés d'une mem- brane épaisse et d’un contenu caséeux ou puri- forme. En examinant au microscope les produits que renferment ces « tubercules », on y trouve un grand nombre de Coccidies ou corps ovales très semblables à des œufs d'Helminthes (Fig. 1). Chez de jeunes lapins, la présence de ces organismes * Allgemeine Pathologie, 2° édit., 1882, p. 735. EL. METCHNIKOFF. — CARCINOMES ET COCCIDIES + provoque une maladie souvent mortelle, tandis que les lapins adultes supportent le parasitisme sans trop de mal. La coccidiose des lapins est donc sûrement une maladie infectieuse, parasitaire. Et cependant, elle Fig, 4. — Coccidie du lapin. ne se transmet jamais par véritable contagion. Si l'on donne à manger à des lapins sains des nodules du foie renfermant des masses de coccidies, on ne provoquera jamais la maladie. Les coccidies ava- lées seront digérées, et l'infection n’aura pas lieu. La coccidiose, n'étant pas une maladie conta- gieuse, est accompagnée de véritables tumeurs. Si l’on examine les nodules du foie sur des coupes, on constate facilement qu'ils sont constitués par des végétlations abondantes des canaux biliaires (Fig. 2), entourées d’une couche de tissu conjonctif Fig. 2. — Hyperplasie des canaux biliaires du lapin, atteints de coccidies. plus ou moins épais. L’épithélium des canaux con- serve ses propriétés habituelles et ne se distingue que par une hyperplasie considérable, donnant lieu à la formation de nombreuses ramifications. Voilà done un exemple d'une tumeur maligne etnon contagieuse. Dira-t-on avec Cohnheim qu’elle n'est pas infectieuse? Non, et cela parce que le parasite qui provoque la tumeur est un organisme volumineux, dont l'existence et le rôle ne peuvent nullement être mis en doute. La coccidiose des lapins est une infeclion mias- matique. Les coccidies ovales, pour donner la ma- ladie à de nouveaux lapins, doivent d’abord subir une transformation déterminée qui ne s'accompiit qu'en dehors de l'organisme. Dans du sable, dans la terre ou dans l'eau. dans des conditions de température (15-25°) et d'aération convenables, le contenu des coccidies se divise en quatre cellules et EL. METCHNIKOFF. — CARCINOMES ET COCCIDIES 631 se transforme en quatre spores munies d’une enve- loppe très résistante (Fig. 3). Chaque spore renferme deux embryons falciformes et très délicats qui donnent naissance à de nouveaux parasites, provo- quant ainsi la maladie si terrible. Avalées avec les aliments souillés, les coccidies sporifères pénètrent dans le canal digestif des lapins. L’enveloppe de la spore protège les embryons falciformes contre action du suc gastrique et leur permet de passer dans l'intestin et le foie. Les cellules épithéliales de l'intestin grêle et des canaux biliaires deviennent le siège de l'infection. Les jeunes coccidies, sous forme de petits corps ronds, s'introduisent dans le protoplasma des cellules épithéliales (Fig. 4), Fig. 3. — Coccidie renfer- Fig. #4 — Cellule épithéliale mant quatre spores. du lapin avec une jeune coccidie ; —n#, noyau ; p, pa- rasite. y croissent et se transforment en des parasites ovales, représentant la forme adulte. Mais, à côté de ce cycle de développement, il en existe un autre, découvert par M.R. Pfeiffer ! (de Berlin). Les corps ronds se divisent en un grand nombre de segments qui se transforment en stade de crois- sant (Fig. 5), dont la signification n’a pas encore été déterminée. Il est probable que ces formes en croissant, servent à propager l'infection dans l'or- ganisme du lapin atleint de la coccidiose. Ils servent ainsi à augmenter l’auto-infection, tandis que les spores (développées en dehors de l’orga- nisme du lapin) jouent le rôle de véritable miasme. Dans la coccidiose du lapin nous avons donc un exemple d’une maladie infectieuse miasmatique, produite par des coccidies, dont la présence dans l'organisme du lapin provoque une véritable tu- meur maligne. Voyons quelle utilité présente cette maladie de rongeurs pour la pathologie humaine. IT Existe-t-il des maladies coccidiennes de l’homme ? Celle question est résolue de la facon la plus posi- live, grâce à la découverte du parasite malarique, faite par M. Laveran. Le microbe de cette maladie est un parasite intra-cellulaire, comme la coccidie du lapin ; mais. tandis que celle-ci végète dans le 1 Beilræge zur Protozoen-Forschung, Berlin, 1892, > 2 protapslama des cellules épithéliales des canaux bi- liaires et de l'intestin, le microbe de l'impalu- disme pénètre dans l’intérieur des globules rouges du sang, où il trouve les conditions nécessaires pour sa vie. Le parasite malarique a ceci de commun avec la coccidie du lapin qu'il se présente à l’état de petit Fig.5.— Corps en crois- sant de la coccidie du lapin. Fig.6. — Parasite malarique.— 4, stade amiboïde ; b, forme sphé- rique; €, croissant; d, forme flagellée, corps sphérique et forme des croissants (Fig. 6, b, c). Mais, en outre, il possède un stade amiboïde (Fig.#, a,) qui n’a pas été encore retrouvé chez la coccidie du lapin (ce stade est du reste très répandu dans le monde des coccidies) et un stade flagellé, très original (Fig. 6, d). L'absence de ce dernier état chez la coccidie du lapin ne peut servir d’objection contre le rapprochement du parasite malarique avec les coccidies, car, parmi des coccidies indiscutables (coccidie de l'intestin de la Salamandre maculée), il y a des exemples du stade flagellé. D'un aulre côté, on ne connait pas encore chez le parasite malarique de véritables spores, munies d'une enveloppe protectrice. IL est cependant plus que probable que ces spores existent dans la na- ture et que c’est à l’aide de cet état résistant que l'impaludisme envahit l’organisme humain. Cette maladie a cela de commun avec la coccidiose du la- pin qu’elle représente une maladie miasmatique des plus typiques. Il n’est point contestable que les carcinomes se rapprochent aussi de la catégorie des affections miasmatiques. Quoique moins prononcé que dans l'impaludisme ou le goitre, le caractère endémique des carcinomes est cependant un fait qui a souvent frappé les observateurs. La fréquence de ces tu- meurs malignes est loin d’être égale dans tous les pays. À côté des points du globe indemnes ou à peu près (Féroë, Islande, etc.) de cette maladie, il en existe d’autres où les carcimones sont très fré- quents. Mais, en outre de ce trait commun avec les ma- ladies coccidiennes, les carcinomes en présentent un autre. Comme dans la coccidiose du lapin, les 632 EL. METCHNIKOFF. — CARCINOMES ET COCCIDIES carcinomes se distinguent par une prolifération exagérée des cellules épithéliales des organes lésés. C’est précisément ce caractère qui a frappé M. Ma- lassez lorsqu'il fit ses recherches sur les nodules coccidiens des lapins. Le fait que, dans cet exemple, la néoplasie épithéliale était d’origine incontesta- blement parasitaire, a suggéré à M. Malassez l’hy- pothèse que les carcinomes pourraient bien être aussi des tumeurs provoquées par le parasitismede quelque Sporozoaire. Des tentatives nombreuses, faites dans le but de découvrir des bactéries pathogènes dans les carci- nomes, n’ont donné, malgré les assertions de MM. Scheuerlen, Koubassoif et autres, que des ré- sullats purement négatifs. Cet insuccès fournissait encore une indication indirecte que les carcinomes pourraient être dus au parasitisme d'autres mi- crobes que les bactéries. La question du parasitisme des tumeurs était dans cet élat d’incubalion, lorsque M. Darier ‘, un collaborateur de M. Malassez au Collège de France, découvrit, dans un cas de la maladie de Paget (ma- ladie de la peau qui se rattache au cancer), tout à fait au milieu des éléments de l’épithélium tumé- fié, des cellules très particulières. M. Malassez assigna à ces cellules, apparemment étrangères à l'organisme humain, une place parmi les parasites sporozoaires. La découverte de M. Darier a élé bientôt suivie de celle de M. Albarran ? (élève de Malassez), qui vit des celluies parasilaires dans un cas de cancer de la mâchoire. Peu de temps après, se développa Loute une littérature sur les parasites des maladies culanées (psorospermose folliculaire de Darier, maladie de Paget) el surtout des carcinomes. MM. Darier, Wickham, Vincent en France, MM. Thoma, Sojbring, Heuxelom, en Allemagne, M. Kossinsky à Varsovie, contribuèrent àéclaireir celte question diflicile de l’éliologie parasilaire des tumeurs épithéliales. Les premiers résullals ont élé,en général, encou- rageants dans le sens de la découverte de sporo- zoaires, se ratlachant surtout au groupe des coc- cidies, comme cause des carcinomes etde certaines maladies cutanées. Mais celle période d’optimisme peul-êlre un peu exagéré a élé bientôt suivie d’un scepticisme non moins extrême. Toule une série d’observateurs, qui ont vérifié les données des auteurs mentionnés, se sont prononcés contre la découverte de parasites coccidiens dans les tumeurs. Ces prétendus para- siles ne seraient, d’après eux, autre chose que des cellules dégénérées des lumeurs mêmes. Dans ce sens se sont prononcés en France MM. Borrel, Ca zin, Duplay, Fabre-Domergue; en Allemagne MM. Klebs, Ribbert, Schütz et beaucoup d'autres: L'esprit sceptique gagna bientôt le terrain à tel point que plusieurs auteurs considéraient la que tion des coccidies dans les tumeurs comme défi: nitivement enterrée. Quelques observateurs cepen cependant, MM. Strochbe el Sleinhaus, étaient moins affirmatifs dans la négation et exprimèrent l'avis qu’en outre des cellules dégénérées, il pou rait bien se trouver aussi des formes vraimenb parasitaires. L'intérêt général de la question devintsi consi-= dérable que, presque dans tous les laboratoires, om se mit à l’étudier avec un grand zèle. Il s’ensuivil toute une série de travaux qui forment la dernière période dans l'étude du parasite des tumeurs Nous leur consacrerons un chapitre parliculier. nous arrétant presque exclusivement sur les car cinomes, III Il est incontestable que, parmi les auteurs cités beaucoup ont vu, à côté de toutes sortes de cellules dégénérées, de fragments de noyaux, etc., des corps étrangers à la cellule carcinomateuse. Mais” comme, en raison dela complexité des phénomènes et du fait que les tumeurs malignes ont été sur- tout étudiées par les pathologistes, il est extrème ment difficile de s’en faire une idée précise d’après les descriptions, nous nous en tiendrons surtout aux figures données par les auteurs. Il est incontestable que, sur la planche jointe par M. Sjôbring ‘ (de Lund) à son mémoire sur l& parasite du carcinome, il se trouve, à côté des figures qui sûrementn’ont rien de commun ave@ ce parasite, des formes qui se rapportent au mi- crobe du carcinome. Ce sont d’abord de petits corps ronds, logés dans le protoplasma des cellules carcinomateuses, et ensuite des cellules remplies de corps ronds analogues. Ce sont, je crois, les pre mières figures, en général, sur lesquelles on peut reconnaitre des parasites du cancer. Mais, dansla descriplion des préparations de M. Sjôbring, 01 trouve si peu de netteté qu’on hésite à les inter- préter d'une facon précise. C’est dans un cas dé cancer de la mamelle que M. Sjobring a trouvé la plupart des formes décrites par lui. Dans un autre cas de la même néoplasie, M. Foa? (de Turin) a constaté la présence de corps rond logés dans des cellules cancéreuses. Il en donn des figures, sur lesquelles on peut distinguer, dans les cellules cancéreuses, des éléments étrangers ‘ Comptes rendus de la Sociélé de Biologie, 13 avril 1889. 2 Semaine médicale, 4889, p. 117. 1 l'ortschrille der Medicin, 1890 p. 529, pl. IV. 2 Gazzetla medica di Torino, 1891, n, 36. EL. METCHNIKOFF. — CARCINOMES ET COCCIDIES 633 renfermant un petit noyau etdes appendices élran- ges en forme de rayons. M. Foa est tout prêt à ad- mettre la nature parasitaire de ces corps. Les mêmes formes ont été retrouvées par M. Soudakewitch ‘ dans un grand nombre de cas (plus de cinquante) de différents carcinomes. Elles étaient surtout abondantes dans un cancer pri- maire du pancréas et dans les métastases de ses ganglions lymphatiques. Les cellules cancéreuses étaient littéralement bourrées de parasites qui se présentaient tantôtsous forme de cellules rondes et très petites, abritées à côté du noyau de la cellule cancéreuse, tantôt sous forme de grands corps ovales, munis d’une enveloppe épaisse et rappelant les coccidies adultes. La description et les figures de M. Soudakewitch ne laissent aucun doute qu'il ne s’agit pas, dans son cas, de produits de dégéné- rescence cellulaire ou nucléaire quelconque. Les corps décrits par lui ont tout à fait l’aspect de cel- lules étrangères à l'organisme de l'homme et pré- sentent la plus grande ressemblance avec des spo- rozoaires et notamment avec des coccidies. Dans un second travail M. Soudakewitch ? a décrit les mêmes corps dans un grand nombre d’autres cas de différents carcinomes. Les découvertes si importantes de M. Souda- kewitch n'ont pas Lardé à soulever des objections. M. Fabre-Domergue *, dans une Note présentée à la Société de Biologie, a déclaré que les parasites de M. Soudakewitch n'étaient que des pseudo-cocci- dies et ne présentaient en réalité que des produits de dégénérescence cellulaire qui, comme dans d’au- tres corps, ont été pris pour des parasites des tu- meurs. Les confirmations ont été cependant beaucoup plus nombreuses que les critiques. M. Foa *, dans un nouveau travail, a retrouvé les mêmes corps parasitaires dans plusieurs cas de cancer. M. Borrel* a vu, dans de vérilables épithéliomas, des corps pa- rasiliques tout à fait semblables à ceux qui ont élé décrits par MM. Foa et Soudakewitch. Le té- moignage de M. Borrel est d'autant plus précieux qu'il était auparavant en opposition avec les don- nées des auteurs acceptant les parasites du cancer. Il à réussi à très bien distinguer les cellules dégé- nérées et modifiées, si fréquentes dans les épithé- liomas, des corps qui peuvent être envisagés comme des intrus d’origine étrangère. Une autre confirmation est venue d'Angleterre. 1 Annales de l’Inslilut Pasteur, 1892, 145 PI. V-VII. 2 Jbid., août, p. 545. PI. XI-XII. 3 Comptes rendus de la Société de Biologie, 1892. 4 Gazetla medica di Torino 1892, p. 351. 5 Évolution cellulaire el parasilisme dans l'épithélioma | Montpellier 1892. mars, p. Deux savants, MM. Ruffer et Walker !, ont retrouvé les mêmes parasites dans un grand nombre de car- cinomes, entre autres dans un cas de carcinome métastatique du foie. Leurs préparations, colorées par le mélange de Biondi, mettent en évidence les parasites avec la plus grande netteté qu’on puisse désirer. Les coccidies, colorées en bleu clair, renferment un nucléole brun foncé ; la cellule can- céreuse se colore en orange sale el son no yau prend une teinte verte. Comme sur les préparations de M. Soudakewitch, celles de MM. Ruffer et Walker présentent toute une série d'états de développe- ment, à partir de tous petits corps ronds, renfer- mant un nueléole, jusqu'à des formes ovales et occupant tout le contenu de la cellule carcinoma- teuse. M. Sawtchenko? (de Kieff), qui, dans son premier mémoire (exécuté en collaboration avec M. Podwys- sotski) n’a vu que des images peu distinctes, a pu, dans un second travail #, confirmer les données de M. Soudakewitch et retrouver le même parasite. Le doute n’est done pas possible. Dans un grand nombre de différents carcinomes on a trouvé, logés dansle protoplasma des cellules cancéreuses, des corps ronds, constitués comme des véritables cellules et ne présentant aucun caractère de dégé- nérescence du protoplasma ou de noyaux cellu- laires. Il nous reste à examiner ces Corps d’un peu plus près, afin de déterminer leur nature et leurs rapports ave c d’autres productions analogues. IV En raclant un peu le lissu carcinomateux d’un organe quelconque, par exemple de la glande mammaire, et en l’examinant dans l'humeur aqueuse ou une autre liqueur non altérante, avec de forts grossissements, on trouve dans un certain nombre de cellules carcinomateuses de petits corps ronds, nettement délimités (Fig. 7). Logés Fig. 1. — Une cellule cancéreuse avec son parasite. Cancer du sein.— n, noyau; p, parusite. dans l'intérieur du protoplasma, ces corps pré- sentent la plus grande ressemblance avec les jeunes stades de la coccidie du lapin, comme on — 1 British medical Journal, 1892, n. 1646, p. 113. 2 Centralblalt für Bakteriologie, T. XI, 1392, p. 4934 5 Jbid., 1892, T. XII, 'p. A1. 634 peut s’en assurer en comparant les deux forma- tions (Fig. 4 et 7). Comme les jeunes coccidies du lapin, les corps ronds des carcinomes croissent dans l'intérieur des cellules. Sur des préparations de ces tumeurs on voit toute une série d'états de croissance : les petits corps ronds grossissent et deviennent de plus en plus nets à cause du déve- loppement de leur membrane (Fig.8). Les mêmes Fig, 8. — Cellules cancéreuses avec deux parasites, d'après M. Soudakewitch. faits s'observent aussi d’une façon frappante dans le foie du lapin, infecté de coccidies. Il arrive parfois qu'une cellule cancéreuse ren- ferme plusieurs parasites, serrés les uns contre les autres (Fig. 9). Le même phénomène s'observe remplie de parasites, cancéreuse, d’après M. Soudakewitch. Fig. 9, — Une cellule également chez la coccidie du lapin. (Très souvent, dit M.R. Pfeiffer, une cellule épithéliale renferme 4, 5 jeunes coccidies et plus. Les parasites sont alors si serrés qu'ils prennent des contours polyé- driques !. » . La structure des corps ronds des carcinomes présente la plus grande ressemblance avec celle des états de développement des coceidies du lapin. Dans les deux cas on voit une membrane cellulaire qui devient de plus en plus épaisse, un contenu protoplasmique qui ne prend que diflicilement la coloration, et un gros nucléole qui remplit le noyau transparent. L'analogie frappante entre les carcinomes el la coccidiose du lapin s'étend aussi, comme il à déjà METCHNIKOFF, — CARCINOMES ET COCCIDIES 1 Loc. cit. page 6. été mentionné plus haut, sur les lésions anato= miques des organes. Les végétations épithéliales de l'intestin et du foie du lapin peuvent étre surtout comparées aux adénocarcinomes, c’est à-dire, aux tumeurs épithéliales conservant em core le type glandulaire. Il n’y a qu'à jeter ur coup d'œil sur les deux figures ci-jointes (Fig. 28 10) pour ètre frappé de la ressemblance de l'hyper plasie des canaux biliaires du lapin, atteints dé 3 Voussel — Adénocarcinome du rectum de l’homme, d’après, M. Zicgler. Fig. 10. coccidies, avec l’adénocarcinome du rectum de l’homme. À côté de toutes ces analogies, les différences n'ont pas assez d'importance pour qu’on puisse les opposer à la conclusion de la parenté des carci= nomes avec les coccidioses. Celles-ci ne produisent pas de véritables métastases. Mais il y a aussi des cancers qui ne donnent point ou ne produisent que rarement des métastases, ce qui ne les empêche pas d’être intimement liés avec d'autres carei nomes, Dans les cancers on n’a vu jusqu'à présent qu'un nombre de stades beaucoup plus limité que dans les coccidioses. Cela est incontestablement un grand obstacle pour se former un jugement tout à fai définitif. Mais il ne faut pas oublier que l'étude d parasitisme dans les carcinomes ne vient que dé débuter. On connaît les coccidies du lapin depuis un demi-siècle et ce n’est que tout récemment que: grâce aux recherches importantes de M. R. Pfeiffer, on a découvert la formation endogène des corps falciformes. Il ne faut done pas désespérer de trouver des stades nouveaux dans les carcinomes: Plusieurs pathologistes, qui se sont dernière ment occupés du parasitisme dans les carcinomes ont cru pouvoir combler cette lacune. C’est ainsk que MM. Stroebe, Podwyssotski et Sawtchenko, et tout récemment M. Soudakewitch, ont décrit des corps falciformes dans plusieurs cas de carcinomes: D'après tout ce que j'ai pu observer jusqu'à pré sent, ainsi que d’après les données des auteurs . que je viens de citer, les formations, prises pas eux pour des corps falciformes, ou (ce qui est l& même chose) pour des stades du croissant, ne peuvent nullement être comparées aux produes C.-E. GUYE. — LA PRODUCTION DU FROID ET SES RÉCENTES APPLICATIONS 635 EE UN TT tions correspondantes des coccidies ou des sporo- zoaires en général. Les véritables corps en crois- sant, comme, par exemple, ceux de M. Laveran dans l’impaludisme, se distinguent par la forme régulière des contours, par la grande ressemblance des individus entre eux et par une série de détails quifont défaut dans les pseudo-croissants des car- cinomes. Pour s'assurer de cette différence, je prie le lecteur de comparer les deux figures ci-jointes (Fig. 11, a,b), dont l'une (b) représenteles véritables Fig. 11. — a, les pseudo-croissants Fig. 12. — Pseudo-coc- dans une cellule carcinomateuse cidie, d’après M. L,. (d’après MM. Podwyssotski et Pfeifter. Sawtchenko) ; b, véritables crois- sants d’une coccidie, Klossia (d’après M. Balbiani), croissants d'une coccidie, et l’autre (a) les forma- lions prises pour des croissants dans le cancer. Je considère celles-ci comme des figures chroma- tiques du noyau des cellules cancéreuses. Elles peuvent être désignées comme des pseudo-crois- sants, tout à fait comme dans les cancers (surtout dans lesépithéliomes)il faut distinguer des pseudo- coccidies (Fig. 12), si souvent confondues avec des formations vraiment analogues aux Sporozoaires. Malgré l'impossibilité d'admettre des corps falci- formes dans les carcinomes et malgré certaines dif- férences qui existentencore entre ces tumeurs etles coccidioses, on ne peut pas nier que /es corps ronds si souvent trouvés dans les carcinomes présentent, d'après l'état actuel de nos connaissances, la plus grande ana- logie avec les coccidies. Quoique ce ne soit pas encore le dernier mot, cette conclusion peut servir déjà comme point de départ pour beaucoup de recherches nouvelles. Lorsqu'on se rappellera le fait que la coccidiose du lapin n’est point contagieuse, on comprendra facilement l'échec de tant de tentatives d’inocula- tion des carcinomes. D’un autre côté, les cas de con- tagion cités dans la littérature, ainsi que quelques expériences positives de transmission des cancers (celles de M. Hanau avec le cancer des rats, de M. Wehr, etc.), pourraient être expliqués par la présence de stades développés sur la superficie de l'organisme atteint. On sait que le miasme de la coccidiose du lapin (c’est-à-dire les spores du para- site) se forme en dehors de l'organisme, mais peut se trouver dans le voisinage le plus intime de ces animaux. Pour démontrer le caractère peu contagieux des maladies coccidiennes, on peut citer l'exemple de l'impaludisme. Chez les oiseaux, où l’impaludisme est d’une fréquence extraordinaire, la contagion par le sang, renfermant des parasites, n’a jamais pu être réalisée d'une facon probante. Il est donc tout à fait naturel que les cancers présentent plutôt un caractère miasmatique que contagieux. D'après le résumé donné dans cet article, on voit bien que l’étude microbique des carcinomes n’est qu'à son début. Mais on voit aussi que ce début est encourageant et que, pour arriver à la solution du problème, il serait désirable que les pathologistes s'unissent aux zoologistes versés dans la science des Sporozoaires. El. Metchnikoff, Chef de Service à l'Institut Pasteur. LA PRODUCTION DU FROID ET SES RÉCENTES APPLICATIONS La conversion de la chaleur en travail mécani- que, tel est le problème qu'on se pose généralement dans l'étude des machines thermiques. Chacun sait les services immenses que la Thermodynami- que a rendus à cet égard; grâce aux mémorables travaux de Sadi Carnot, de Joule, de Clausius, de Mayer, de Hirn, on à pu définir en quelque sorte d'emblée les solutions que l’on élait en droit de rechercher et celles qu'il fallait écarter dans la réalisation des machines thermiques. Mais le problème inverse, — l'étude des moyens qui permettent de relirer aux corps une partie de leur chaleur en dépensant du travail mécanique, — ne présente pas un moindre intérêt. Relevant des mêmes lois, ce problème a élé résolu dans la pratique par des méthodes absolument différentes, qui ont été l’objet de grands perfectionnements depuis une vingtaine d'années. Ce sont ces méthodes que nous nous proposons de passer en revue. Les principes sur lesquels elles reposent seront rapidement esquissés ; leurs appli- cations les plus importantes et surtoutles plus ré- centes seront ensuite exposées avec quelques dé- tails. ÏJ. — PRODUCTION DU FROID, Les procédés mis en œuvre pour produire le froid sont nombreux et varient naturellement sui- 636 _— vant le but à atteindre. Dans les laboratoires, pour les usages domestiques et la petite industrie, on emploie de préférence les mélanges réfrigérants ou des appareils produisant le froid d’une façon dis- continue, comme l'appareil classique à solution ammoniacale de M. Carré. Au contraire, dans les applications industrielles importantes on faitusag de machines puissantes fonclionnant sans inter- ruption et donnant un rendement bien supérieur. Telles sont, par exemple, les machines à détente de gaz comprimé et les machines à évaporation de liquides volatils. Il importe donc de donner d’abord quelques détails précis sur ces diverses méthodes. $ 1. Mélanges réfrigérants Lorsqu'un sel se dissout dans un liquide sans qu'il y ait action chimique, il se produit un abaissement de température. Le corps dissous prend au sein de la dissolution un volume beau- coup plus grand qu’à l'état solide. Dans celle aug- mentation de volume résultant du passage de l’état solide à l’état de corps dissous, il y a néces- sairement travail mécanique contre les forces moléculaires de cohésion, et ce travail ne peut s'effectuer qu'aux dépens de la chaleur même de la dissolution. Si l’on veut obtenir un grand abaissement de température, il faudra faire dissoudre la plus grande quantité possible de sel, ce qui revient à dire qu'il faut combiner les proportions du mé- lange réfrigérant de façon qu'après dissolution complète du sel, la solution soit saturée à la température finale. Cette température finale, dépendra naturellement de la température ini- liale des corps mélangés, de la température, de la chaleur spécifique et de la masse du corps à refroidir, du rayonnement de l'enceinte, etc. Mais, sa limite inférieure est le point de con- gélation de la dissolution. Si la température pouvait baisser à partir de ce point, une partie de la dissolution se solidifierait nécessairement en dégageant sa chaleur latente et relèverait ainsi immédiatement la température du mélange vers le point de congélation. Sauf dans le cas de surfusion, la température de congélalion du mélange est donc une limite inférieure qu'il n'est pas possible de dépasser. Ser donne dans un traité de physique industrielle un calcul approxi- matif permettant de se faire une idée du faible ren- dement des mélanges réfrigérants. Il suppose le cas de 1 kilogr. d'azotate d'ammoniaque se dissol- vant dans un kilogr. d'eau. Il est reconnu que, dans les conditions habituelles, la température de la dis- solution s’abaisse de 26 degrés centigrades. La chaleur spécifique de l'azotate étant 0,40, celle de Le regretté L. C.-E. GUYE. — LA PRODUCTION DU FROID ET SES RÉCENTES APPLICATIONS l'eau 1, la chaleur spécifique du mélange est 0,70, elle nombre de calories absorbées pour un abais- sement de température de 26 degrés est égal à 26 X 0,70 X 2, soit 36,4 calories. Si l'on voulait alors retirer l'azotate en évaporant l'eau pour utili- serla dissolution de ce sel dans une seconde opéra- tion, il faudrait dépenser 600 calories environ; ce nombre représentant la quantité de chaleur néces- saire pour faire passer un kilogramme d’eau de l'état liquide à l’état gazeux, le rendement serait de 5. soit de 6 % environ. $ 2. Machines frigorifiques à fonctionnement continu Les machines frigorifiques à fonctionnement continu sont bien supérieures. On les a classées en trois catégories : les machines à détente de gaz comprimé, les machines à évaporation de liquides volatils, et les machines à aflinité. Machines à détente. — Dans les machines à dé- tente on commence généralement par comprimer une certaine masse gazeuse (de l'air) en mainte- nant autant que possible sa température constante. A cet effet, les cylindres de compression sont dis- posés dans un réfrigérant traversé par de l’eau froide, ce qui réduit notablement le travail néces- saire à la compression. On laisse ensuite cette masse d'air se détendre en agissant sur un piston relié à l'arbre moteur du compresseur. Une partie du travail dépensé lors de la compression est donc rendu sous forme de travail mécanique et tend à faciliter le jeu du compresseur. L'air détendu et refroidi se rend ensuite au congela- teur où frigorifère,qu'il parcourt en se réchauffant au contact des corps à refroidir. Dans un grand nom- bre de machines l'air qui possède encore ausortir du frigorifère une température plus basse que l'air ambiant retourne directement au compresseur, de sorte que le cycle se trouve fermé et que c’est la : même masse gazeuse, tour à tour comprimée et détendue, qui sert à refroidir le congélateur. Les simplifications que l’on fait subir aux for- mules de la Thermodynamique dans le cas des gaz parfaits permettent de se rendre aisément compte de l’abaissement de température que l’on est en droit d'obtenir avec de semblables machines. Soit un kilogramme d'air occupant le volume», à la pression p, et à la température absolue T,. D'un coup de piston comprimons cette masse gazeuse, et, poursimplifier, supposons que la cha- leur résultant de la compression reste, pour le moment, entièrement confinée au gaz. Après cette opération, le kilogramme d'air se trouve occuper C.-E. GUYE. — LA PRODUCTION DU FROID ET SES RÉCENTES APPLICATIONS 637 le volume », sous la pression p, à la température absolue T,. Les lois de Mariotte et de Gay-Lussac, qui re- lient le volume, la pression et la température des gaz parfaits, nous donnent, pour l’état initial et l'état final, les deux expressions : Povo — R; (1) pv = RT;, (2) R étant une constante qui dépend de la nature du gaz et des unités employées. D'autre part, comme nous avons supposé la compression s'effectuant sans perle ni gain de chaleur de l'extérieur, nous avons une lransforma- tion adiabatique et la Thermodynamique des gaz donne, dans ce cas, l’expression : K K Pi01 —=Poo —= constante (3) Kk étant le rapport des deux chaleurs spécifiques à pression et à volume constants. Les expressions (1), (2) et (3) donnent en définitive : K—1 Un me n = (x) relation qui permet de calculer les températures correspondant aux diverses pressions dans la trans- formation adiabatique. Bien que la transformation adiabatique ne soil jamais rigoureusement réalisée dans la pratique, on peut néanmoins la considérer comme une première approximalion dans bien des cas. Si l’on applique ces formules, on trouve qu'en comprimant de 1 à 3 atmosphères de l'air pris à la température de Æ 17 degrés, il s'échauffe jusqu’à — 128 degrés. Si maintenant, au moyen d'un réfrigérant quel- conque, on refroidit cet air comprimé jusqu'à ce que sa température atteigne de nouveau 17 degrés, le volume restant constant, la pression tombe à 2,1% atmosphères. En laissant alors cet air se dé- tendre adiabatiquement de 2,17 à 1 atmosphère, sa température descend à — 42,3 degrés, et nous obtenons un abaissement total de 42,3 Æ 17, soit 59,3 degrés. (SER, Physique industrielle.) Voyons maintenant le nombre de kilogram- mètres que nécessite théoriquement la production d'une frigorie, soit le travail qu'il faut dépenser pour soutirer une calorie au congélateur et la faire passer dans le réfrigérant du compresseur. Le coefficient économique du cycle d’une ma- chine thermique ordinaire est, comme on sait, le rapport de la quantité de chaleur convertie en travail à la quantité de chaleur empruntée à la source chaude. En désignant par Q la quantité de chaleur empruntée à la source chaude, par Q' la quantité cédée à la source froide, le coefficient REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, 1 e ; CE 5 : économique est donc = , et l’on sait que Car- Q « not a démontré que ce rapport est précisément 1! rn T et T' représentant les tempéra- tures absolues des deux sources. Le travail & pro- duit par une machine thermique fonctionnant sui- vant un cycle de Carnot peut done s'exprimer par T—T' T—T' Res où E représente l'équivalent mécanique de la cha- leur. Si le même cycle est parcouru en sens inverse, le travail et les quantités de chaleur changent de signe (voir PoINcARÉ, Zhermodynam.). C'est le cas des machines frigorifiques. Il faudra donc fournir à la machine une certaine quantité de travail. En outre, le corps qui sert aux transformations et qui est en général de l’air, empruntera une quantité de chaleur Q'à la source froide (frigorifère) et cédera une quantilé de chaleur Q à la source chaude (ré- frigérant du compresseur). Les formules sont donc les mêmes au signe près, etla quantité de travail que nécessite la production T—T Si l’on veut réduire ce travail, il faudra en con- séquence abaisser la température T du compres- seur et opérer avec une détente réduite, ne produi- sant pas une chute de température trop considé- rable dans le frigorifère. Dans la pratique on limite généralement la détente à 5 atmosphères. D'autre part, en réduisant trop l’étendue de la détente on se trouverait conduit à construire des machines de grandes dimensions, encombrantes et coù- teuses. Ep appliquant la formule précédente, on verrait que le travail théoriquement nécessaire pour pro- duire une frigorie, est égal à 65 kilogrammètres lorsque la température du compresseur est de — 30 degrés, celle du frigorifère de — 10 degrés. En pratique, ce nombre est toujours largement dépassé et l’on compte dans les conditions ordi- naires environ 270 kilogrammètres par frigorie. égal à la relation bien connue G —EQ deQ'frigories aura pourexpression& = EQ' Machines à évaporation. — Dans les machines à évaporalion le frigorifère est constitué par un vase clos renfermant le liquide volatil. Au moyen d’une pompe, on produit l’évaporation rapide du liquide, et la chaleur latente de vaporisation est empruntée au liquide même, dont la température s’abaisse d'autant plus rapidement que l'aspiration est plus énergique. Les vapeurs aspirées sont refoulées et liquéfiées dans un second récipient dit « conden- seur », entouré d’un réfrigérant à eau courante. Cette, eau emporte à la fois la chaleur de compres- 18* 638 C.-E. GUYE. — LA PRODUCTION DU FROID ET SES RÉCENTES APPLICATIONS sion et la chaleur latente dégagée par la liquéfac- tion des vapeurs. La pression dans le condenseur est naturellement la tension maximum de la va- peur saturée à la température du condenseur. Comme cette température est toujours supérieure à celle du frigorifère, il en résulte que la pression est plus forte dans le condenseur, et qu'il est pos- sible de faire passer continuellement du conden- seur dans le frigorifère une quantité de liquide précisément égale à la quantité vaporisée. De cette façon la machine forme un cycle fermé el fonc- tionne sans interruption. Le choix des liquides dépend naturellement de leur prix de revient, de la conservation des appa- reils, des dangers d'inflammation ou d’intoxica- tion. L’éther, que l'on employait au début, a été presque complètement abandonné comme présen- tant de trop grands dangers et nécessitant des machines dont les joints soient parfaits. L’ammo- niaque liquide ne présente pas les mêmes incon- vénients. Sa chaleur latente de volatilisation est 259 calories, et il suffit d’une pression de 12 atmos- phères pour produire sa liquéfaction à la tempéra- ture de + 30 degrés. Néanmoins l'ammoniaque a l'inconvénient d'émettre une odeur fort désa- gréable et d’attaquer le cuivre. On est donc obligé de proscrire ce métal dans la fabrication de ce genre de machines. L’anhydride carbonique, l’anhydride sulfureux et récemment le chlorure de méthyle ont donné aussi de très bons résultats. On emploie aussi avec avantage des mélanges de liquides volatils ayant la propriété de se dissocier sous faible pression et de se recombiner sous l'in- fluence de pressions modérées. Le plus employé de ces liquides est le mélange d'anhydride carbonique et d'anhydride sulfureux dit « liquide Pictet ». Dernièrement on a proposé un mélange d’anhydride sulfureux et d’acétone. En résumé le rendement des machines frigori- fiques à liquide volatil est très satisfaisant et l’on arrive à produire, à l’aide de ces machines, de 20 à 25 kilogrammes de glace par kilogramme de charbon brülé dans le foyer du moteur. II. — APPLICATIONS DU FROID $S 1. Réfrigération de l'air et de l’eau L'habitude de rafraichir l’air des lieux habités et particulièrement des grandes salles de réunion, tend à se répandre toujours plus. Bien qu’on ne fasse généralement pas usage des procédés que nous venons de décrire, il importe de donner quelques détails sur ces applications du froid. Le plus souvent on se contente d'installer de grands ventilateurs destinés à amener de l'air ayant préalablement circulé dans des galeries sou- terraines au contact desquelles il s’est rafraichi. Ce procédé est employé pour la ventilation de la Chambre des Députés à Paris et du Palais du Troca- déro. Dans ce dernier édifice l’air nécessaire à la ventilation provient de carrières situées à quelque distance. Dans d’autres édifices (la Nouvelle Sor- bonne, le Parlement de Londres), le rafraichisse- ment de l’air s’oblient par l’évaporation de l’eau. Avant d'arriver aux salles, J'air circule à travers un nuage d’eau pulvérisée. La grande surface que pré- sente l’eau sous cette forme permet une évapora- tion active qui enlève rapidement à l’air une partie de sa chaleur. Il a été reconnu qu’une différence de 4 à 5 degrés entre la température de la salle et celle de l'air extérieur est plus que suffisante pour rafraichir une salle. Dès que l’on dépasse cette limite, l'impression devient désagréable. Lorsqu'il s'agit de refroidir l'air à de basses températures, comme dans les caves de brasseries ou dans les locaux aménagés pour la conservation des viandes, on fait usage de glace ou des machines frigorifiques dont nous avons parlé. Les appareils à détente d’air sont particulièrement employés à bord des navires qui ne peuvent renouveler facile- ment la provision de glace nécessaire au maintien d'une température convenable. Si l’on emploie des machines à évaporalion, les frigorifères sont alors constitués par des tuyaux à ailettes, à grande sur- face, semblables à ceux en usage pour le chauffage par la vapeur ou l’air chaud. L'air de la salle se refroidit au contact de ces tuyaux. Dans ces instal- lations il faut prendre des précautions spéciales pour éviter les dépôts de givre qui nuisent beau- coup à la transmission du froid. Parmi les applications de la production artifi- cielle du froid, mentionnons aussi la congélation des cadavres. Chacun sait que la Morgue de Paris possède un excellent appareil frigorifique qui fonc- tionne avec pleine satisfaction depuis plusieurs années sans interruption. Au point de vue industriel, la fabrication de la glace, particulièrement dans les pays chauds, cons- titue l’une des applications les plus importantes des machines frigorifiques. On produit actuellement à volonté la glace transparente ou la glace opaque. Il suffit, pour obtenir de la glace transparente, d'employer de l’eau qui ne contienne pas d’air en dissolution. On la soumet donc à une distillation préalable; d’autres fois on emploie simplement l’eau de condensation des machines à vapeur. $ 2. Purification des produits chimiques La purification des produits chimiques et phar- maceutiques par cristallisation à basse tempéra- ture est peut-être l'application la plus originale de la production du froid. Il est intéressant, à ce pro- pos, de dire quelques mots d'une installation de L. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 639 laboratoires créés à Berlin pour l'étude des appli- cations du froid. Ces laboratoires de recherches sont placés sous la direction scientifique de M. le P' Raoul Pictet, le savant bien connu dont le nom restera associé à celui de M. Cailletet pour ses travaux fondamentaux sur la liquéfaction des gaz. Le refroidissement des appareils d'expériences est obtenu par l’évaporation de liquides volatils ou de gaz liquéfiés. La machine frigorifique, qui per- met d'obtenir et de régler la température, se com- pose en réalité de trois machines frigorifiques for- mant trois cycles distincts. Ces machines nécessi- tent l'emploi de pompes de compression puissantes qu'on n'a généralement pas à disposition dans les laboratoires scientifiques et qui font, de l’installa- tion de M. Pictet, un laboratoire de premier ordre pour l’étude des basses températures. Les frigorifères de ces trois cycles de machines peuvent être placés les uns dans les autres et se servir mutuellement d'enceinte :le frigorifère du premier cycle servant d'enceinte à celui du second ; celui du second cycle à celui du troisième. Decette facon ilest possible de maintenir pendant des se- maines au sein du troisième frigorifère unfroid pou- vant descendre jusqu'à — 200° degrés environ !. Pour ces trois cycles M. Pictet emploie 1° le mé- lange d’anhydride carbonique et d’anhydride sulfureux; 2° le protoxyde d'azote liquéfié; 3° Pair atmosphérique. Le fonctionnement du troisième cycle est intermittent; mais on peut obtenir, toutes les demi-heures plus de 500 grammes d'air liquide qui se vaporise dans le troisième frigorifère. Ces installations fonctionnent depuis quelques temps déjà d’une facon régulière. Elles fournis- sent à un grand nombre de cliniques médicales un chloroforme très pur, obtenu en faisant cristal- liserle chloroforme entre — 80 et — 100 degrés. Ce produit est d’une pureté si parfaite que sa densité à 15 degrés, prise sur six échantillons différents, n'a varié que de 1,5000 à 1,5004 (HezBwNGs Pharmaco- logical Record, N° V, March 1892). Il bout à + 61°,1 sous la pression normale, sans laisser de résidus susceplibles d'être pesés. En outre, l’inaltérabilité de ce chloroforme serait plus grande. Il est intéressant de relater ici les expériences entreprises sur les animaux par M. le D' du Bois- Reymond pour rechercher l’aclion physiologique du chloroforme chimiquement pur. M. le D: du Bois-Reymond a comparé, dans ce but, l'effet de ce chloroforme et des résidus de la cristallisation préalablement soumis à une distillation et renfer- mant, par conséquent, à l’élat concentré, les im- puretés du chloroforme ordinaire. Il résulte des expériences faites sur les grenouilles et les lapins que, dans les narcoses produites par inhalation, le ralentissement des battements du cœur est plus grand avec les résidus qu'avec le chloroforme pur. En outre, l'aspiration des résidus entraîne l’arrèt de la respiration dans un temps beaucoup plus court que le chloroforme pur. Il ressort de l’en- semble de ces résultats que les impuretés non cris- lallisables à basse température renferment un principe dangereux plus actif que le chloroforme pur, et l’on comprend l'importance que peut avoir la purificalion de ce produit par voie frigorifique. Ce mode de préparation du chloroforme médi- cinal est, croyons-nous, la première application de la purification par cristallisation aux basses tem- pératures. Ilest à présumer qu’elle ne sera pas la seule. Jusqu'à présent on n'avait pas les moyens d'étudier sur une aussi grande échelle les applica- tions du froid. C'est à grand’peine que l’on expéri- mentait dans les laboratoires et toujours dans des enceintes de capacité très réduite. La préparation de quelques centimètres cubes d’air liquide était déjà considérée à juste titre comme une fort belle expérience. Les moyens mis en œuvre dans le la- boratoire de M. Pictet dépassent, par leur puis- sance, tout ce qui s'est fait jusqu'à présent dans cet ordre d'idées. On peut donc espérer qu'ils seront féconds en résultats utiles concernant les applica- tions des très basses températures. C.-E. Guye, Docteur ès-sciences, REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE I. — PLATEAU CENTRAL Bien que le plateau central de la France ait été l’objet d’un grand nombre de travaux, certaines parties de cette vaste région naturelle sont encore 1 Pour plus de détails, voir : Verhandlung der physikalis chen Gesellschaft zur Berlin, 1891. peu connues; l'étude de M. Boule sur le Velay! vient combler une des plus importantes lacunes. La région étudiée comprend une grande partie du département de la Haute-Loire (moins l’arron- dissement de Brioude) et une faible portion des ! Bull. des services de la carte géol. de la France et des lopogr. souterraines, L. IV, 640 L. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE départements de la Lozère et de l'Ardèche; elle renferme les montagnes de la Margeride, la chaine du Velay et le versant occidental des monts du Vi- varais. Les terrains les plus anciens sont formés par des schistes cristallins (gneiss el micaschistes), qui ont été métamorphisés de très bonne heure par des épanchements formidables de roches éruptives acides (granite el granulite). Ils ont subi en même temps des actions mécaniques intenses. Vers l’époque carbonifère probablement, sont sortis des porphyres et des roches analogues aux andésites et aux labradorites récentes; il est pro- bable que de véritables volcans existaient déjà, bien que les érosions n'aient pas laissé de traces des appareils de projection ou des coulées. Au même moment devait se former une chaine de montagnes assez élevée. L'œuvre des temps secondaires est diflicile à apprécier; il semble qu'elle a dû consister dans l’abrasion de la chaine antérieurement formée, par les phénomènes atmosphériques. Pendant la durée de l'Éocène, des oscillations ont dû se produire; c’est à l’une d’elles qu'il faut altribuer la formation temporaire, dans le bassin du Puy, d'un lac où se sont déposées les arkoses, qui paraissent bien remonter à cette époque. Le début de l'Oligocène est marqué par un mou- vement très important qui a permis l'établissement dans le Velay, comme en Auvergne, de nombreux lacs d'eau douce, parfois transformés temporaire- ment en véritables lagunes remplies d’eau sau- mätre. Mais les incursions de la mer cessèrent bientôt, d’abord dans le bassin du Puy, ensuite dans ceux de Montbrison et de Roanne; c’est alors que se déposèrent les marnes de Ronzon avec leur faune remarquable de mammifères : elles appar- tiennent au Tongrien et peut-être aussi à l'Aquita- nien. Pendant le Miocène (supérieur, probablement) un large cours d’eau ou un lac se trouvait sur l'em- placement du massif actuel du Mézenc, ainsi que l'attestent les dépôts de sables quartzeux que l'on rencontre en différents points. De grands mouve- ments du sol ont alors transformé complètement le Plateau central: les plissements alpins, bien qu'ils aient été gènés dans leur développement par la présence de massifs graniliques, se sont fait sentir jusque dans le Velay en produisant une série d’an- ticlinaux et de synclinaux à grands rayons de courbure. Toutefois le relief résultant de cesphéno- mènes n’était pas considérable: la différence entre les points les plus élevés et les plus bas de la région ne devait pas dépasser 500 mètres, alors que, par suite de l’entassement des éruptions vol- caniques et le creusement de vallées profondes, cette différence atteint actuellement 1200 mètres. C'est alors que l’activité volcanique commença à se manifester, ainsi qu'en témoignent les coulées de basalle du Mézenc et du Mégal; elle s’est con- tinuée pendant toute la durée du Pliocène et une grande partie du Pléistocène, mais en se déplaçant progressivement de l’est vers l’ouest. Pendant le Pliocène inférieur, les éruptions ont été nombreuses et abondantes; elles ont produit d’abord quelques masses trachytiques, puis d’é- normes coulées plus ou moins basiques, andésites augitiques, labradorites augitiques, basaltes com- pacts et basaltes porphyroïdes; puis, vers la fin du Pliocène moyen, une nouvelle poussée acide a eu lieu, caractérisée par des épanchements phonolithi- ques formidables, suivis d’une dernière éruption basallique. Les volcans du Mézenc et au Mégal étaient à peu près éteints quand ceux des environs du Puy et de la chaine du Velay entrèrent en activité; de nom- breux cratères s’établirent, dès le Pliocène moyen, et donnèrent naissance à des coulées de basaltes, en même temps qu'ils projetèrent des lapilli et des cendres qui formèrent les brèches limburgitiques. Les éruptions du Pliocène moyen ne furent que le prélude de la poussée basaltique du Pliocène supérieur; c’est à ce moment que se place la grande période éruptive du Velay. Les bouches volcaniques s'ouvrent par centaines, formant une trainée de plus de 40 kilomètres de longueur et font dispa- raitre tous les terrains antérieurs sous une cou- verture de lave de plus de 100 mètres d'épaisseur. Ces coulées ne purent obstruer le cours de PAT lier, dont la vallée était très profonde, mais, du côté de la vallée de la Loire, elles nivelèrent l’an- cien sol et en firent un vaste plateau dans lequel les cours d’eau durent recommencer à creuser leur lit. Au débat du Pléistocène, le creusement de la vallée de la Loire et de ses affluents était à peu près terminé aux environs du Puy; la faune à Eleyhas meridionalis, Rhinoceros tichorinus, Ursus speleus, se trouve, en effet, dans des dépôts situés au niveau actuel des cours d’eau. L’homme semble avoir fait son apparition dès cette époque et avoir eu le spectacle des dernières convulsions volca- niques du Velay, car on a découvert quelques os- sements humains au milieu des tufs et des scories volcaniques de la montagne de Denise. II. — BAssiIN DE BRIVE De l’autre côté du Plateau central, M. Mouret ! a fait connaitre l'allure et l'étendue des dépôts 1 Bassin houiller et permien de Brive (Etude des gîtes minéraux de la France). L. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 641 houillers et permiens qui avoisinent la ville de Brive. Les bassins houillers du Plateau central peuvent être divisés en deux catégories : les uns occupent l’intérieur même du Plateau et sont gé- néralement considérés comme des remplissages de lacs isolés ; les autres sont des bassins littoraux distribués sur le pourtour actuel du massif cris- tallin. C’est à cette dernière catégorie qu’appar- lient celui de Brive. Le bassin de Brive est un des bassins permiens les plus étendus de la région du Midi; on y ob- serve facilement le passage graduel du Houiller au Permien, déjà signalé dans le bassin de la Sarre. Les dépôts permiens affleurent sur un es- pace étendu, en forme de lance, constituant la région connue sous le nom de bas Limousin, et présentent une orientation générale semblable à celle des plissements du massif cristallin, c'est-à- dire du nord-ouest au sud-est. Voici la succession des couches admise M. Mouret : par / 7. Grès de la Ramitre, 6. Grès de Meyssac. . Grès de Grammont. Grès rouges supérieurs | à 4. Grès et argiles rouges de Brive. 3. Grès à Walchia. Couches à Walchia et | 2: Calcaire de Saint-Antoine. à Poissons Permo-Houiller....... 1. Grès rouges inférieurs et grès houillers,. La première zone correspond, d’après la flore qui a été recueillie à sa base, aux couches les plus élevées du terrain houiller supérieur, à l’étage des Calamodendrées de M. Grand’Eury; toutefois, il existe, dans la masse des grès, quelques niveaux renfermant, avec des espèces houillères, d'autres réputées permiennes, de sorte que l’ensemble peut être considéré comme une couche de passage du Houiller au Permien. Les grès à Walchia el les calcaires qui s’y rat- tachent, représentent la base du Permien propre- ment dit, comme la flore le démontre sans doute possible. Quant aux grès rouges de Brive, ils corres- pondraient au Rothliegende supérieur de l’Alle- magne, le grès de la Ramière représentant peut- être le Zechstein. Un trait saillant de tout l’ensemble, c’est la co- loration rouge lie de vin, rougeàtre ou violacée, très particulière aux roches permiennes; cette coloration résulte, pour l’auteur, d'un phénomène chimique qui s’est opéré dans le ciment de la roche, quelquefois postérieurement au dépôt, mais le plus souvent au moment même, sous l’action des matières ferrugineuses carbonatées tenues en dissolution dans les eaux ; l’origine de cette colo- ration serait donc hydrothermale. Après avoir ensuite comparé le bassin de Brive avec les autres bassins du Plateau central, l'auteur tire de son étude quelques conclusions intéres- santes : 1. Les couches les plus anciennes, postérieures aux grands mouvements du Plateau central, sont des grès appartenant à l’époque du Houiller supé- rieur. 2. Les grès houillers plus récents se sont dé- posés en transgression sur les premiers. 3. Les couches à Walchia du Sud correspondent au niveau des schistes d’Aulun, mais n'en repré- sentent peut-être que la partie moyenne, 4. Il y a eu, pendant le dépôt des grès houillers et permiens, des mouvements du terrain ou des eaux ; ces mouvements se sont traduits par des transgressions de chaque étage sur le précédent. >. Il y a eu, après le dépôt des derniers grès permiens, de grands mouvements qui ont occa- sionné des plissements plus ou moins marqués des terrains dans la région du nord-est et de l’est, et qui ont produit des failles ou de simples affais- sements à l’ouest et au sud-ouest. 6. Les éruptions de roches contemporaines des grès houillers récents et des grès permiens se sont localisées dans le sud, surtout aux environs de Figeac ; elles sont peu importantes, si on les com- pare aux éruptions du même àge des Vosges et de l'Allemagne. III. — ALPES FRANÇAISES La géologie des Alpes françaises avail été très délaissée jusqu’à ces derniers temps: mais plusieurs habiles explorateurs ont entrepris la tâche difficile d'étudier cetle région si tourmentée et chaque année nous apporte maintenant des travaux im- portants sur cette partie de notre territoire; nous en signalerons deux dans cette revue. Le premier est dû à M. Termier ‘et a trait au massif de la Vanoise, situé en Savoie, et parfaite- ment limité de tous côtés par de profondes cou- pures. Il est constitué par les terrains suivants : Schistes lustrés, Houiller, Permien, Trias. Les Schistes lustrés étaient attribués par Lory au Trias supérieur; mais, depuis un certain nombre d'années, les géologues italiens, notamment MM. Zaccagna et Mattirolo, proteslaient contre cette assimilation. Les études récentes de MM. Ber- trand, Potier et Kilian ont fait abandonner défini- tivement les idées de Lory: les Schistes lustrés sont archéens ou au moins antéhouillers. Ils se distinguent aisément des autres terrains de la région : ce sont en général des schistes à la fois l Bull. des services de la carte géologique de la France et des topographies souterraines, t. II. 642 L. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE phyllileux, quartzeux et calcaires, gris ou noirs, très fissiles, renfermant beaucoup de quartz blanc. Le terrain houiller (grès à anthracite) n'avait pas encore été signalé, bien qu’ilrenferme quelques veinules de combustible que l’on a vainement tenté d'exploiter; il affleure dans la haute vallée du Doron sous la forme d'un anticlinal étroit, entouré de tous côtés par les schistes métamor- phiques du Permien. La limite du Houiller et du Permien est absolu- ment arbitraire ; il y a passage graduel et insen- sible des phyllades gris ou noirs du Houiller aux phyllades du Permien verts ou violets, parfois faiblement feldspathisés et contenant des minéraux (tourmaline, chlorite, sphène, rutile). Le Permien comprend par suite les phyllades à chlorite et séricite qui séparent, dans la région de la Vanoise, les schistes houillers à anthracite des quartzites du Trias; il faut y comprendre égale- ment les phyllades réputés primitifs de Cham- pagny et d'Entre-deux-Eaux. Quant au Trias, il peut être divisé ainsi de bas en haut : 1. Quartzites blancs, alternant parfois avec des schistes sériciteux blancs ou vert clair; 2. marbres chloriteux, plus souvent sériciteux, alternant avec des schistes noirs, des cargneules, des gypses, un calcaire magnésien, etc; 3. calcaires de la Vanoise, ordinairement grisâtres, plus rarement blanes ou noirs, toujours un peu siliceux et magnésiens; 4. cargneules supérieures apparaissant seulement dans la vallée de l'Arc. En l'absence de fossiles, on ne peut faire que des conjectures sur l’assimilation précise de ces couches avec les niveaux généralement reconnus : il semble toutefois probable que la première assise représente le Grès bigarré, la deuxième le Muschelkalk inférieur, la troisième le Muschelkalk supérieur et une partie du Keuper,la quatrième le reste du Keuper. Une grande partie de ces couches étaient rap- portées par Lory au Jurassique. Tous les terrains du massif de la Vanoise sont profondément métamorphisés. D'après M. Termier, la cause de ce métamorphisme doit être cherchée non dans une venue hydrothermale, mais dans la chaleur produite par l'intensité des mouvements orogéniques. La structure du massif a été étudiée avec soin; il est caractérisé par la rareté des failles et la fré- quence des plis, souvent irès aigus et même ren- versés. Nous citerons les lambeaux de recouvre- ment de Laisse-Dessus et de la crête de la Sana, où les Schistes lustrés reposent horizontalement sur diverses assises du Trias. IV. — CHAINES SUBALPINES Le deuxième travail relatif aux Alpes françaises a servi de thèse de doctorat à M. Haug ; il traite de la géologie des chaines subalpines siluées entre Gap et Digne !. L'auteur décrit d’abord les divers terrains ren- contrés; il passe rapidement sur les Schistes à sé- ricite et le Houiller, puis arrive au Trias, qui pré- sente ses trois divisions bien nettes, quoique le Muaschelkalk soit très réduit ettotalement dépourvu de fossiles. Le Jurassique est très développé; l'Infralias, le Lias, comprennent un grand nombre dedivisions, connues pour la plupart antérieurement. Le groupe oolithique moyen, au contraire, n’avait pas été étu- dié en détails; il se divise, d’après M. H. Haug, de la facon suivante : Bajocien. 1. Zone à Aarpoceras Murchisonx ; 2. Zone à Harjoceras concavum ; 3. Zone à Sphaeroce- ras Sauzei; 4. Zone à Sonniniu Romani; 5. Zone à Cosmoceras subfureatum. Bathonien. 1. Zone à Oppelia fusca; 2. Zone à Oppelia aspidoides. La série des zones paléontologiques reconnues en Souabe, dans le bassin de Paris et en Angle- terre a pu, comme on le voit, être retrouvée dans les Basses-Alpes ; c’est à peine si la présence des genres Zytoceras et Phylloceras imprime aux assises bajociennes et bathoniennes des Basses-Alpes un cachet particulier. Le Callovien et l'Oxfordien montrent aussi de nombreuses subdivisions dans quelques localités privilégiées; M. Haug a pu distinguer : 1. la zone à Macrocephalites macrocephalus; 2. la zone à Rai- neckeia anceps ; 3. la zone à Peltoceras athleta; 4. la zone à Aspidoceras perarmalum ; 5. la zone à Pelto- ceras transversartium ; 6. la zone à Peltoceras bimam- matum. Le Kimméridgien comprend : 1. Zone à Oppelia tenuilobata ei à Perisphincles polyplocus; 2. Zone à Waagenia Beckeri et à Reineckeia pseudo-mutabilis, et enfin le Portlandien termine le Jurassique avec les zones à Perisphinctes geron, à Perisphinctes transi- torius et à Hoplites Boissieri. Les dislocations subies par cette région sont in- téressantes. Les plis simples sont assez fréquents ; mais le trait dominant estl’existence de plis-failles, souvent difficiles à distinguer des failles ordinaires par suile des modifications considérables occasion- nées par l'érosion. Quant aux chevauchements horizontaux, ils sont abondants dans les chaines subalpines étudiées ; 1, Bull. des Services de la Carte Géol. de la France et des Topographies soulerraines, t. HI. L. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 643 =—_—— nous dirons quelques mots de ceux de Bayons, d’Entraix et du vallon de Turriers. Entre Bayons et Astoin, on voit un lambeau horizontal de Trias supérieur (Keuper) reposer sur les couches liasiques, bajociennes, bathoniennes et calloviennes, inclinées d'environ 450; il y a là un bel exemple de recouvrement s'étendant sur plu- sieurs kilomètres. A Entraix, on voit également du Trias (Grès bi- garré et Keuper) recouvrir les diverses assises ju- rassiques, en conservant une position presque ho- rizontale., Enfin à Turriers, la situation de deux petits affleurements de Lias inférieur sur le Batho- nien ne peut être expliquée que par une poussée horizontale. Les failles verticales et rectilignes n’ont qu'une faible importance; par contre, les failles périphé- riques délimitant des bassins d’affaissement, for- ment un des traits caractéristiques de la région. Les trois principaux champs d’affaissement sont ceux de Turriers-Faucon (Oolithique moyen el Tertiaire entourés parle Lias), d'Esclangon (Juras- sique moyen et supérieur, Crétacé et Tertiaire, en- tourés de Trias et de Lias) et de Thoard-Champter- cier (bassin tertiaire, limité au nord et à l'est par un réseau de failles périphériques qui déterminent la présence, entre la Mollasse marine affaissée el le massif liasique surélevé, d’une bande de terrains divers très disloqués.) V. — GRÈS ARMORICAIN La position du Grès armoricain dans la série silu- rienne générale donnait lieu à des interprétations diverses ; si, en effet, la succession des couches en Bretagne esthien certaine, l’absence de fossiles au- dessous de l’assise en question laissait place à quelques doutes. On savait seulement que le Grès armoricain était plus ancien que les Schistes d’An- gers, représentant d'une partie de la faune se- conde. M. Barrois ! a cherché à élucider cette question par l'étude de la faune recueillie dans le Grès ar- moricain du centre de la Bretagne. La présence de Trilobites du genre Ogygia, de Céphalopodes et de nombreux Lamellibranches prouve que ce niveau ne peut correspondre à la faune primordiale, mais doit être compris dans la faune seconde, au- dessous de la zone de Llandeilo, qui est représen- tée en France par les Schistes d'Angers. Si l’on cherche à préciser davantage, on s’aper- çcoit que les Lamellibranches ne peuvent mener à une solution, les genres qui se trouvent réunis dans le Grès armoricain ayant apparu successive- ment en Bohème dans les diverses zones de la faune seconde. Il semble toutefois, d’après la com- paraison de la faune du Grès armoricain avec celle des diverses régions siluriennes, que cet étage ne peut pas correspondre au début de la faune se- conde ; les Lamellibranches y sont trop évolués. Il représente la base des couches de Llandeilo (Are- nig) et non les couches de Tremadoc; on ne peut assimiler les Grès armoricains aux Lingula Flags de la Grande-Bretagne, malgré l'identité des Bi- lobites et des Scolithes que l'on rencontre de part et d'autre. VI. — DISTRIBUTION DES GRAPTOLITHES M. Barrois ‘s’est occupé également de la dis- tribution des Graptolithes dans les couches silu- riennes de la France. Depuis la découverte de ces petits fossiles en Normandie par Deslongchamps vers 1830, des gisements nombreux ont élé signa- lés, mais les résultats acquis par les divers obser- vateurs réclamaient une coordination qui permit de tirer des faits connus des déduclions générales. C'est ce que vient de faire M. Barrois. Cette étude était d'autant plus désirable que l'absence, dans le Silurien supérieur français, des fossiles considé- rés comme caractéristiques des zones, a rendu impossible jusqu'à ce jour la subdivision de ce vaste ensemble. Les Graptolithes sont limités, en France, à certains horizons, généralement minces, du système silurien; ils s’y trouvent alors réunis en grandnombre, couvrant de leurs débris accumu- lés et entre-croisés les bancs rocheux sur d'im- menses surfaces ; ils sont le plus souvent ren- fermés dans des schistes noirs, fins, tendres, généralement alumino-pyriteux, ampéliteux, et remarquables par l’absence de grains de quartz clastiques et d’autres dépôts terrigènes. Ces ani- maux se distinguent à la fois, entre tous les groupes de fossiles paléozoïques, par leur exten- sion verticale très restreinte et par leur vaste dis- sémination horizontale. Les niveaux successifs, caractérisés par une ou plusieurs espèces sont, en Angleterre, au nombre de vingt, d'après M. Lap- worth; en France, on est bien loin d’avoir reconnu un pareil nombre de zones, mais il est possible d’assimiler les gisements graptolithiques français aux divisions de premier ordre admises par le géo- logue anglais et qui sont toutes représentées chez nous, sauf la plus ancienne (Tremadoc). Le niveau de l’Arenig correspond aux schistes à Didymograp- tus de Boutoury (Languedoc) et aux schistes de Huy, Statte et Sart-Bernard, dans les Ardennes. Le Llandeilo comprend les schistes à Asaphus Four- 1 Ann. Soc. Géol. du Nord, t. XIX,p. 134. 1 Ann. Soc. Géol. du Nord, t. XX. 64% L. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE neti du Languedoc et les schistes de Sion de la Bretagne, tandis que le Caradoc est représenté par les schistes noirs de Gembloux et les grès de Saint-Germain-sur-Ille. Llandovery correspond aux schistes grisätres de Grandmanil (Ardennes) et aux phtanites de l’Anjou ; Tarannon aux schistes à Monograptus crassus, Becki, comerinus des Pyrénées, aux psammites de Grandmanil (Ardennes), el aux ampélites de Poligné (Bretagne). Le Wenlock est représenté, dans le Languedoc, par lesschistes et calcaires ampéliteux à Cardiola interrupla, dans les Pyrénées par les schistes et calcaires à Cyrt. Murchisoni, et Cardiola interrupta, dans les Ar- dennes par les schistes gris bleuâtre de Grand- manil, Naninne, en Normandie par les schistes am- péliteux de Domfront, en Bretagne par les schistes ampéliteux de la Ménardais, Andouillé. Enfin la seule assise assimilable au Ludlow est celle des schistes de Malonne et Caffiers dans les Ardennes. VIT. — QUATERNAIRE Les géologues anglais s'occupent beaucoup de l'étude du Quaternaire ; bien qu'ils ne soient pas encore parvenus à s'entendre sur l’origine desdivers dépôtsquile constituent, nisurle nombre des pério- des glaciaires, il nous parait intéressant derappeler les opinionsémises récemment sur cessujets par les principaux d’entre eux. M.Bulman ! se demande si le Boulder Clay {argile à cailloux) a été formé sous la glace; il constate que rien de semblable à ce dépôt ne se voit dans les Alpes aux points récemmentabandonnés parles glaciers. Dans les régions polaires il semble bien en être de même, si l’on s’en rapporte aux observa- tions de M. Nordenskiôld au Groënland; ce voya- geur décrit, en effet, les territoires récemment abandonnés par la glace comme constitués par des éminences arrondies de gneiss avec quelques blocs erratiques, mais sans aucune trace de moraines. Quant aux bancs d'argile de ce pays, ils pourraient quelquefois provenir des rivières descendant des glaciers, mais en général ils se sont déposés au dessous du niveau de la mer. Rien dans les des- criptions de ce voyageur ne ressemble au Boulder Clay. Après avoir rappelé les résultats des études sur les glaciers de l'Amérique du Nord, l’auteur déclare que les argiles, dites Boulder Clay, ont problable- ment plusieurs origines; les dépôts les plus impor- tants doivent s'être formés soit dans la mer, soit dans des lacs, soit même dans une vallée occupée par un glacier, mais il est très peu probable qu'ils se soient formés sous la glace. 1 Geol. Mag., t. IX, p. 305. VIII. — DÉPOTS GLACIAIRES M.Mellard Reade ! s'occupe depuis plus de vingt ans de l'étude des dépôts glaciaires des environs de Liverpool. Lorsqu'il a commencé sesrecherches, on croyait généralement qu'il existait deux assises de Bouider Clay, séparées par des sables et graviers, dits interglaciaires; mais il n’a jamais admis cette classification, et il considère tout l’ensemble comme glaciaire de bas en haut. Deux théories principales sont en présence pour expliquer l’origine de ces dépôts caillouteux : la théorie de la glace terrestre et la théorie glacio- marine. Dans la première hypothèse, au moment de la formalion de ces terrains, les niveaux relatifs de la terre et de la mer étaient les mêmes qu'actuelle- ment, et un vaste manteau de glace, descendant du nord sur la mer d'Irlande, creusait les dépôts existant préalablement au fond de la mer et les poussail devant lui ou les entrainait, pris dans la glace de fond, pour les abandonner au moment où celle-ci venait à fondre. De nombreuses objections peuvent être faites à cette hypothèse; l’une des principales est qu'il faut supposer l’existence dans la mer d'Irlande de dépôts préglaciaires dont on n'a jamais vu de traces. En outre, il est impossible d'expliquer, d’après cette théorie, la distribution des blocs et cailloux erratiques, telle qu’elle a été constalée, ni leur présence à toutes les altitudes depuis le niveau de la mer jusqu’à 1400 pieds au dessus de celle-ei dans le pays de Galles. Enfin on a trouvé, dans le drift du Shropshire, de nombreux cailloux de silex ainsi que des fossiles du Lias, du Gault et de la Craie; tous ces débris ne peuvent pas être venus du nord, mais seulement du sud ou de l’est. L'hypothèse de la glace terrestre ne pouvant expliquer nombre de phénomènes bien constatés, il faut revenir à la vieille idée de la submersion, c'est-à-dire à la théorie glacio-marine, qui donne une explication beaucoup plus simple et plus rai- sonnable de la formation du drift. La dispersion des blocs et des cailloux, la présence de coquilles marines, l’état arrondi des grains de quartz, tout cela cadre très bien avec l’idée d’un dépôt marin glaciaire. Plusieurs objections ont pourtant été faites à celle théorie ; ses adversaires disent que les dé- pôts élevés devraient être beaucoup plus abon- dants qu'ils ne le sont en réalité; mais il est à remarquer que la rareté des carrières ou autres excavations sur les hauteurs empêche d'y cons- tater l'existence du drift aussi facilement que dans les vallées. 1 Geol. Mag., t. IX, p. 310. L. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE Les mêmes géologues déclarent que les di- verses espèces de mollusques trouvées réunies dans le drift ont des habitats très différents et n'ont certainement pas vécu ensemble. M. Mel- lard Reade répond à cette objection que, sur les plages actuelles, on peut recueillir en un même point, ramassées par les vagues et les cou- rants, des coquilles qui ont vécu à des profondeurs très diverses. Pour l'auteur, il est évident, malgré les argu- ments mis en avant par ses contradicteurs, que les dépôts glaciaires de l'Angleterre ont une ori- gine glacio-marine. IX. — LES GRAVIERS AU SUD DE LA TAMISE M. H. W. Monckton ! a étudié les graviers qui se voient au sud de la Tamise, entre Guilford el Newbury ; il pense que ces dépôts se sont formés peu de temps après que la région s’est élevée pour la dernière fois au-dessus de la mer. La dénuda- tion a commencé aussilôt, les vallées se sont creu- sées et les graviers s'y sont répandus ; peu à peu les flancs des vallées ont été détruits par l'érosion, tandis que les parties recouvertes par le gravier, protégées par lui, offraient plus de résistance el finissaient par former une colline. Le gravier lui- même était alors attaqué et transporté par degrés à des niveaux plus bas, où il était de nouveau étendu à la surface du sol, et, reprenant son rôle protecteur, amenait la formation de nouvelles ter- rasses où de plateaux moins élevés. Le même phé- nomène se serait reproduit à plusieurs reprises, donnant ainsi naissance aux divers niveaux de graviers que l’on peut constater actuellement. Bien que cette hypothèse semble avoir été assez généralement acceplée par les géologues anglais présents à la séance dans laquelle elle a élé ex- posée, elle nous semble bien compliquée et bien peu naturelle. X. — LE RUBBLE DRIFT Pour M. Prestwich ?, en dehors du drift d'âge glaciaire ou post-glaciaire, d'origine subaérienne, marine ou fluviatile, il existe une autre sorte de drift qui n’est dû à aucune des causes indiquées ci-dessus. Ce terrain, qu'il nomme Rubble drift, est très répandu en Angleterre et présente souvent des caractères très voisins de ceux des Graviers des vallées ou de ceux dus à l’action glaciaire ou subaérienne ; il recouvre fréquemment les plages soulevées, mais se trouve aussi dans des gise- ments indépendants de ces dernières. Cette forma- lion a été reconnue en un grand nombre de points a 1 Quarterly Journal Geol. Soc., t. XLVII, p. 29. 2 Quarterly Journal Geol. Soc., t. XLVIII, p. 263. 645 de la côle anglaise, depuis l'embouchure de la Tamise jusqu’à la pointe de Saint-Davids dans le pays de Galles; de plus, elle a été rencontrée en des localités fort éloignées de la mer, notamment entre Oxford et Reading. On peut fixer l’âge de ces dépôts d’après celui des plages soulevées qu'ils recouvrent; celles-ci sont contemporaines des drifts les plus bas des vallées et appartiennent à l’une des dernières phases de la période post-glaciaire, ou plutôt de la dernière période glaciaire: le Rubble drift est done la dernière manifestation des phénomènes quater- naires,. : De nombreux géologues ont tenté d'expliquer l'origine du Rubble drift : Mantell, De la Beche, Godwin-Austen, Murchison, Dixon, Lyell, Pengelly, Tylor, Wood, Ussher, CI. Reid, ont proposé des hypothèses diverses qui peuvent se ramener à cinq. Le Rubble drift serait dû : 1. Au lavage des débris de surface des anciennes falaises par des pluies extrêmement abondantes, ayant eu lieu pendant une période de grand froid causé soit par le soulèvement de la terre, soit par le voisinage des glaces; 2. A l’action de la glace et de la neige glissant sur les pentes des collines, aidée par les courants d’eau résultant de la fonte de la neige et de la la glace; 3. À une vague de translation ou à un cataclysme causé par des tremblements de terre; 4. À une action fluviatile et torrentielle, secon- dée par les glaces floltantes, pendant une période de grand froid; >. À une action subaérienne. La première hypothèse est inadmissible, car le Rubble drift ne se présente pas avec la forme ca- ractérisltique en éventail des cônes de déjectron, et n'est pas en rapport avec les dépressions du sol que l’eau aurait dû suivre de préférence. De plus, les débris qui constituent ce dépôt ne sont nulle- ment roulés, ce qui scraitimpossible àcomprendre, s'ils avaient été amenés par des torrents. La deuxième explication parait au premier abord plus vraisemblable ; pourtant elle ne permet pas de comprendre certains faits, tels que l'éloignement de la falaise, comme à Godrevy, le peu d’étendue des régions qui ont joué le rôle de centres de dis- persiou, et la faible inclinaison des pentes. Quant à la troisième théorie, bien que plus sé- duisante que les autres, elle ne met pas en jeu une force suflisante pour expliquer l'effet produit. Enfin l'hypothèse de Paction fluvialile, proposée par Lyell et CI. Reid, ne montre, pas plus que la première, pourquoi les dépôts se sont formés de- vant les parties élevées des falaises et non à l’em- bouchure des vallées. 646 Aucune des explications proposées ne rendant compte des faits constatés : état anguleux et petitesse des débris constituants les plus durs, — provenance des matériaux des terrains élevés si- tués derrière les plages soulevées, — absence de coquilles marines et fluviatiles, — présence en certains points d’ossements de mammifères et de coquilles terrestres, — absence de stratification régulière, — M. Prestwich est amené à proposer une hypothèse toute différente. Immédiatement après le dépôt du drift des bas niveaux des vallées, un affaissement considérable (d'au moins mille pieds)s’estproduit dans le sud de l'Angleterre qui s’est trouvé recouvert compléte- ment par les eaux de la mer. Cet état n’a eu qu'une durée fort courte, et bientôtun phénomène inverse s’est fait sentir : une série de mouvements d’ex- haussement, d'intensité variable, a occasionné des courants qui ont entrainé les débris qui for- ment actuellement le Rubble drift; le plus ou moins de grosseur des éléments qui composent chaque lit dépend de la force plus ou moins grande du courant au moment de son dépôt. Ce mouve- ment d’émersion a eu lieu à une époque très rap- prochée, puisqu'il n'existe aucun dépôt entre le Rubble driftet les alluvions récentes des rivières. Malgré l'abondance d'arguments mis en avant par M. Prestwich et dont nous n'avons reproduit qu'une partie, malgré l’énergie de sa conviction, il nous parait qu'il ne faudrait pas trop abuser de ces hypothèses de soulèvements et d’affaissements successifs, lorsqu'ils ne sont pas démontrés pé- remptoirement. Or, dans le cas présent, nous ne voyons nullement la nécessité de faire intervenir l’action des eaux de la mer dans la formation de dépôts qui ne renferment aucun débris marin, mais seulement des fossiles terrestres. XI. — LA GÉOLOGIE EN RUSSIE Jusqu'à ces dernières années, la géologie de la Russie avait été fort négligée; c’est à peine si un voyageur, venu de l'Europe occidentale, publiait de temps à autre le récit d’un voyage plus ou moins rapide. Aujourd’hui il n’en est plus de même; les géologues russes, sans être encore aussi nom- breux que le réclamerait leur immense territoire, se sont mis à l’œuvre avec ardeur, et il ne se passe pas d'année où ils ne publient quelque travail im- portant. Nous appellerons l'attention sur celui que vient de faire paraitre M. Paylow, avec la collabo- ration partielle de M. Lamplugh!. Frappé du peu de concordance qui semblait exister entre les couches secondaires de la Russie et celles de l’Europe occidentale, M. Pavlow a pensé 1, Bull. de la Soc. imp. Naturalistes de Moscou, 1891 (1892): L. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE que l’étude des gisements et des collections d’An- gleterre et de France lui permettrait très proba- blement d'arriver à des résullats plus précis; il a donc visité les localités classiques de nos régions et s’est livré à une étude comparative minutieuse des fossiles recueillis, en particulier des Bélem- nites et des Ammonites. L'auteur s’est attaché spé- cialement dans son dernier travail à fixer dans les divers pays de l'Europe les équivalents des couches connues en Angleterre sous le nom d’argiles de Speeton et qui ont été étudiées dans ces der- nières années avec un soin tout particulier; il est remarquable de constater que ce sont les couches de la Russie orientale, qui, malgré leur éloignement, ont le plus de rapports avec celles de l'Angleterre. Au-dessus du Gault de la région du Volga, on voit apparaitre des argiles avec concrétions de cal- caire marneux, contenant Æoplites Deshayesi, Amal- theus bicurvatus el de grands Ancyloceras : c'est l’Aptien bien caractérisé. Ces couches reposent sur une puissante série d’argiles plus ou moins marneuses et gypsifères, présentant deux horizons fossilifères : l’un supé- rieur avec Olcostephanus Decheni, O. discofalcatus, O. progrediens, O. umbonatus ; O. speelonensis, Belem- nites Jasikowi; l'autre, inférieur à Olcostephanus versicolor, O. inversus, Belemnites Jasikowi. C'est le Néocomien supérieur et peut-être aussi le Néoco- mien moyen. Jusque-là, la concordance avec la série de Spee- ton est absolue et les mêmes Céphalopodes se re- trouvent dans le même ordre de succession. Plus bas il n’en est pas de même; l’horizon caractérisé à Speeton par Aoplites regalis et Roubaudi, Astieria Astieri, Belemnites jaculum, fait défaut en Russie. Mais la ressemblance recommence aussitôt après; l'auteur vient en effet de découvrir à Syzran (gou- vernement de Simbirsk), une zone de rognons phos- phatés (Petchorien) avec Olcostephanus Keyserlingi, Belemnitessubquadratus, Bel. lateralis, Aucelles, qui a son représentant exact à Speeton. C’est alors que commence l'étage supérieur de Rouillier avec Olcostephanus Kaschpuricus, O. subditus, Belemnites lateralis B. russiensis, Aucelles. Il repose sur des marnes, sableset schistes rapportés au Portlandien etcontenant Perisphinctes Boidini, P. Nikitini, P.vir- gatus, P. Pallasi, Belemnites mosquensis, B.absolutus, Aucelles. Cel étage recouvre lui-même le Kimmeridgien, argiles schisteuses et marneuses à Æoplites pseudo- mutabilis, H. eudozus, Oppelia tenuilobata, Cardioceras alternans, Perisphincetes eumelus, Belemnites Panderi, B. magnificus, Aucelles. L'étage de Rouillier a un correspondant bien certain à Speeton; de même les couches kimme- ridgiennes y sont nettement représentées par des + L. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE assises renfermant Æoplites eudoxus, pseudomutabilis, comme en Russie. Il en résulte que la zone si connue dans ce dernier pays sous le nom de couche à Virgati, el comprise entre le Kimmeridgien et l’étage de Rouillier, doit être rapportée au Copro- lite Bed de l'Angleterre, lequel n’a jamais donné que des fossiles en mauvais état. On trouve encore au-dessous, en Russie, l'Ox- fordien et le Callovien supérieur avec Cardioceras armatum, ©. Goliathum, Aspidoceras perarmatum, Belemnites Panderi, B. breviaxis ; le Callovien moyen avec Slephanoceras coronatum, Cosmoceras Jason, Belemniles Oweni, Bel. subextensus; et le Callovien inférieur à Cosmoceras Gowerianum, Cadoceras Elatmæ, C!. surense, Cardiocerus Chamousseti. M. Pavlow cherche ensuite à établir le parallé- lisme entre les couches jurassiques de la Russie et celles dites tithoniques du midi de la France. Sans parlerde l'Aptien dout l’identitéest reconnue depuis longtemps, on trouve deux zones qui peuvent être identifiées avec certitude, car elles renferment les mêmes fossiles dans les deux régions; l’une est le Néocomien à Æoplites neocomiensis, Roubaudi, ambly- gonius,Astieria Aslieri; l’autre le Kimméridgien typique à Æoplites eudoxus, pseudo-mutabilis, ete. On est amené à conclure, sans aucun doute possible, que les trois horizons compris en Russie entre ces deux limites : à savoir les couches à Polyptychiles Keyserlingi, l'étage de Rouillier à Ocostephanus Kaschpurieus et subditus et les couches à Virgates sont synchroniques du Tithonique français, en y comprenant toutefois, en outre des trois zones gé- néralementadmises(/Æoplites Malbosi, Hoplites calisto, Perisphineles geron), l'horizon de l’'Oppelia hithogra- phica, rattachée ordinairement au Kimméridgien. Quant à la synchronisation précise de ces zones, elle est actuellement problématique, car elles ne renferment pas d'espèces communes aux deux pays. Comme conclusion de ses études, M. Pavlow cherche à démontrer qu'il est impossible de sé- parer les différents étages du Tithonique, contrai- rement à l'opinion que M. Kilian cherche à faire prédominer; le géologue russe établit d'abord que le Tithonique (y compris la zone à Oppelia lithogra- phica) est l'équivalent exact du Portlandien, avec le représentant lacustre de sa partie supérieure, le Purbeckien, puis il montre que l’un et l’autre for- ment, au point de vue de la faune, un ensemble bien homogène, qui ne pourrait sans incon- vénient être réparti entre deux divisions de premier ordre. Si l’on ajoute à cet argument celui tiré de la priorité historique, il semble naturel de placer la limite du Jurassique et du Crétacé au-dessus du Berriasien et du Porlandien-Purbeckien, et de ne faire commencer le Crétacé que par le Néoco- mien inférieur à Æoplites neocomiensis et Roubaudi. | XII. — LA GÉOLOGIE DU SAHARA M. Rolland !, qui s’occupe depuis de longues an- nées de l'étude géologique du nord de l'Afrique, à cherché à résumer l’histoire du Sahara depuis les temps primaires. L'Afrique semble être le plus ancien des conti- nents; l’intérieur n’est constitué en effet que par des terrains antétriasiques, à l'exception des for- mations continentales. Les sédiments marins se- condaires ne s’observent que sur le pourtour, le long des rivages actuels ou à proximité; ils n'y occu- pent d’ailleurs que des zones généralement étroites. De plus, si l’on exceptele massif tourmenté de l'Atlas, l'Afrique ne présente que des couches très régulières et généralement peu dérangées de leur position primitive. En ce qui concerne plus particulièrement le Sa- hara, ce quiest connu indique qu'il a été recouvert, au moins en grande partie, par la merdévonienne; mais, à la fin de cette époque, un mouvement d’é- mersion se produisit dans le Sahara central où le Carbonifère est à peine représenté; la mer carbo- nifère continuait toutefois à occuper le Sahara occi- dental et l'Atlas marocain, Ce dernier est resté submergé pendant les périodes permiennes et triasiques ; mais, à partir de cette époque, l'émer- sion est devenue définitive à la fois pour l'Atlas marocain et pour le Sahara occidental et central, en exceptant toutefois pour ce dernier, la zone sep- tentrionale qui s’est affaissée pendant le Erétacé. On trouve en effet dans tout le Sahara algérien et tripolitain des couches de la craie moyenne, repo- sant directement sur le Dévonien sans qu'il y ait de trace des terrains intermédiaires. Quant au Sahara oriental, son histoire est plus controversée à cause de la présence des grès de Nubie dont l’âge est fort douteux. Si l’on admet qu'ils appartiennent au Permo-carbonifère, on est conduit pour cette région à des conclusions ana- logues aux précédentes : émersion vers la fin des temps paléozoïques et retour graduel de la mer crétacée dans Le nord à partir du Cénomanien. Si, au contraire, on considère les grès de Nubie comme albiens, il en résulterait que la mer aurait envahi tout leSahara oriental au début de la Craiemoyenne pour se retirer fort peu de temps après. Pendant tout le Crétacé moyen et supérieur, il n’y eut guère de modifications dans l'étendue oc- cupée par la mer; mais, vers la fin du Crétacé, l'Afrique du Nord participa aux oscillations de l'écorce terrestre qui amenèrent de si grands chan- gements en Europe ; alors commença un mouve- ment lent et progressif d’exhaussement et d’exon- 1 Bull. Soc. Géol. de France, 3° série, t. XIX, p. 237. 648 L. CAREZ. — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE dalion du Sahara septentrional, mouvement d’ailleurs inégal suivant ses diverses régions. Dès la fin du Crétacé, le Sahara tripolitain était entièrement émergé et définitivement annexé au continent africain. Quant au Sahara algérien et tunisien, son émersion graduelle, encore incom- plète au début de l'Éocène, était achevée avant la fin de l'Éocène inférieur. Dès lors une plaine im- mense s'élevait en pente douce vers le massif en relief du Sahara central. L’émersion de l’Atlasalgérien et tunisien fut bien postérieure ; les mouvements de la fin du Crétacé eurent pour unique effet dans celte région de déranger les couches de leur position originelle et d’occasionner ainsi les discordances que l'on y observe fréquemment entre le Nummulitique et les formations sous-jacentes. C’est seulement après le Miocène moyen (Helvétien) que la mer a défini- tivement quitté cette région ; c’est de cetteépoque que datent l’'émersion définilive du massif monta- gneux de l'Algérie et de la Tunisie et la forma- tion de ses ridements caractéristiques. L'émersion de la zone côtière du Sahara oriental fat plus tardive; à l’époque nummulitique, un vaste golfe couvrait la parlie orientale du désert lybique et le désert arabique : il persista jusqu’à la fin de PÉocène moyen. C'est alors seulement que la mer se retira et que le Sahara oriental émergea tout entier; depuis lors, il n'a cessé d’être relié à la terre ferme, exceplé dans la partie nord des déserts lybique et arabique que la mer du Miocène moyen est revenue couvrir. Quant à l'hypothèse d'une mer quaternaire au Sahara, elle doit ètre, en principe, écartée ; tout au plus pourrait-on admettre, jusqu'à nouvel ordre, l'existence possible d'un golfe quaternaire de la Méditerranée à l’ouest du delta du Nil. La question de la présence d’un golfe méditerranéen quater- naire, dans les chotts du Sud tunisien et algérien, doit être résolue négativement. XIII. — LE CONGRÈS GÉOLOGIQUE DE WASHINGTON Nous ne pouvons terminer cette revue sans dire quelques mots du Congrès géologique qui s'est tenu à Washington, au mois de septembre 1891, et dont M. Emmanuel de Margerie ! a donné un compte rendu très complet. La longueur du voyage avait effrayé les géo- logues européens qui ne s'étaient décidés qu’en petit nombre à traverser l’Allanlique pour assister à la réunion; aussi, malgré l’épithète d'interna- tional, le Congrès était-il composé en grande ma- jorité par les savants des États-Unis. Par suite 1 Bull. Soc. Géographie (Paris), 4° trim., 1891. probablement de celle composilion de la réunion, on a quelque peu oublié, ce nous semble, le but du Congrès; nous voyons, en effet, que les séances ont été, pour la plus grande partie, occupées par des communications, certes fort intéressantes, mais qui ne rentrent pas dans le cadre des ques- tions qui devraient être traitées dans des réunions de ce genre. | La classification des terrains qualernaires a donné lieu à une importante discussion: M. Cham- berlin a développé un système de classification génétique, qui lui parait seul applicable au Pléis- tocène (terme très généralement employé aujour- d’hui au lieu de celui de Quaternaire) de l'Amérique du Nord. Cette manière de voir qui ne tend à rien moins qu'à déclarer impossible la connaissance de l’ordre de succession des dépôts, n’est pas admise par tous les géologues américains; M. Cope, notamment, déclare que l’étude des Vertébrés montre l’exis- tence de deux faunes quaternaires bien distinctes, l'une tropicale et l’autre boréale ; cette dernière est la plus récente. Plusieurs séances ont été occupées à la recherche des meilleures méthodes à employer pour le raccor- dement à distance des séries stratigraphiques; on a discuté la valeur relative des caractères physiques de la faune et de la flore; certains géologues, parmi lesquels M. Zittel, pensent que les Inver- tébrés marins onl une importance prédominante, tandis que M. Marsh considère les Vertébrés comme donnant de très précieuses indications. Quant aux plantes, d'après M. Lester Ward, elles peuvent servir surtout à caractériser les grandes divisions des temps géologiques; pourtant, avec des maté- riaux nombreux, on arrive à déterminer avec exac- titude l’âge relatif des couches. Les membres du Congrès ont ensuite porté leur attention sur les modes de coloriage des cartes géologiques; mais il ne nous parait pas, d’après le résumé que nous avons sous les yeux, qu'il ait été émis à cet égard aucune idée nouvelle. Enfin, le Congrès a procédé à la nomination d’un comité chargé d’examiner quels seraient les moyens pratiques de faciliter aux géologues les recherches bibliographiques, qui deviennent de jour en jour plus pénibles, par suite du rapide ac- croissement de Ja littérature géologique. Souhai- tons que ce nouveau comité réussisse dans l’ac- complissement de son utile mission et n'imite pas celui dit de la Carte géologique d'Europe qui, malgré ses promesses formelles et les subventions considérables qu’il a reçues, n’a pu, en onze an- nées, arriver à aucun résultat. L. Carez, Docteur ès sciences, BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 649 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. Poincaré (H.). Membre de l'Institut. — Les méthodes nouvelles de la Mécanique céleste. Tome I, un vol. in-8° de 385 pages. (Prix : 12 francs). Gauthier- Villars et fils, éditeurs, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1892. De tous les grands problèmes soulevés par la décou- verte de la gravitation, le problème des trois corps est celui qui a causé le plus de soucis aux géomètres et devant lequel sont venus se briser le plus d'efforts. Aussi, la publication d’un ouvrage consacré à ce sujet rend-elle l'importance d’un gros événement scienti- fique, lorsque l'autorité de l’auteur repose sur une œuvre déjà considérable, Armant les chercheurs d'instruments perfectionnés, leur ouvrant un vaste champ d’exploration, le livre de M. Poincaré s'adresse aux géomètres et aux astronomes, qui y trouveront des résultats fort importants con- cernant le problème des trois corps et l’exposé des méthodes destinées à transformer l'outillage mathé- matique en usage depuis la fondation de la mécanique céleste. Initier le lecteur aux procédés d’approximation récemment proposés en vue d'obtenir des développe- ments exempts de termes séculaires dont l'emploi s’im- pose surtout dans la théorie des satellites; étendre au cas général du problème des trois corps les conelu- sions de son célèbre mémoire couronné à Stockolm : tel est le but que M. Poincaré s’est proposé en écri- vant son ouvrage sur les méthodes nouvelles de la méca- nique céleste, Grâce aux facilités qu’elles prêtent aux recherches théoriques, les équations canoniques d'Hamilton et de Jacobi ont définitivement pris place, au premier rang, parmi les instruments d'investigation dont dispose la science. Elles jouent un rôle exclusif dans les travaux de Delaunay; M. Tisserand en a fait la base de son grand ouvrage; on les rencontre à tout instant sous la plume de M. Poincaré. Le volume s'ouvre par un exposé sommaire de leurs propriétés ; application en est faite au mouvement képlérien, Viennent ensuite la mise en équation du problème des trois corps et la réduction du nombre des variables indépendantes au moyen des intégrales connues. Le second chapitre traite de l'intégration par les séries. Le théorème de Cauchy, relatif à l'existence des intégrales des équations différentielles, y recoit une grande extension. On y trouve aussi le résumé des travaux récents sur les équations différentielles li- néaires à coefficients périodiques, qui jouent un rôle capital dans la suite de l’ouvrage. Le premier champ d’études de M. Poincaré concerne la recherche des solutions particulières périodiques du problème des trois corps, dans le cas très important où, relativement à un corps central, les autres ont des masses très petites. L'idée maîtresse consiste à partir d’un mouvement périodique résultant des circonstances simples, pour arriver ensuite, par voie de continuité, à des condilions plus complexes. Il fallait, pour réussir, les ressources analytiques dont tous les travaux de M. Poincaré con- servent l'empreinte et qui font honneur à linépuisable fécondité de son talent. Par leur souplesse etleur géné- ralité, les méthodes que l’auteur a développées, en vue des grands problèmes de l’astronomie, serviront d’ail- leurs à résoudre de nombreuses questions de dyna- mique. Elles constituent une introduction magistrale à l'étude analytique de tous les phénomènes sensiblement périodiques. Les conclusions du chapitre II se résument comme il suit : Lorsque les conditions initiales du mouvement sont convenables, le problème des trois corps admet des solutions périodiques. Ces solutions sont représen- tées par des développements convergents dont on peut calculer les coefficients, une fois leur existence établie. Voicicomment M. Poincaré s’est exprimé à l’égard de leur application à l'astronomie : « Les solutions périodi- quessemblent d’abord sans aucun intérêt dans la prati- que. La probabilité pour que les circonstances initiales du mouvementsoient précisément celles qui correspondent à une pareille solution est évidemment nulle. Mais il peut très bien arriver qu’elles en diffèrent fort peu; la solution périodique pourra jouer alors le rôle de première approximation, » M. Hill, dans la théorie de la Lune, M. Tisserand, dans celle d’Hypérion, ont déjà montré quel parti la science peut tirer de l’em- ploi de ces solutions particulières du problème des trois corps. Lorsque, en s’appuyant sur l’idée de continuité, on veut passer d’une solution particulière périodique aux solu- tions qui en diffèrent très peu, ou estamené à l’intégra- tion d’un système d'équations différentielles linéaires à coefficients périodiques (chap. IV). La considération de certains exposants « exposants caractéristiques », ana- logues à ceux que l’on rencontre dans l'intégration des équations différentielles linéaires à coefficients cons- tants, joue un rôle essentiel, Leur expression purement imaginaire, où imaginaire avec une partie réelle, est intimement liée à la nature du problème. Dans le pre- mier cas, la solution est dite stable. Dans le secondcas, il y à instabilité; la solution ne reste pas toujours aussi voisine qu'on le veut d’une solution périodique, bien qu’elle tende à se confondre avec elle dans l'avenir ou le passé, suivant le signe de la partie réelle de l’ex- posant. Comme application, M. Poincaré a traité spécialement le cas où le mouvement ayant lieu dans un plan, l’une des petites masses est nulle, et l’autre décrit une orbite circulaire autour du corps central; c’est le problème restreint. Les équations différentielles du problème des trois corps admettent un certain nombre d’intégrales algé- briques. Ce sont celle du mouvement du centre de gravité, celles des aires, celle des forces vives. En existe- t-il d’autres? La réponse à cette question difficile fait l’objet du chapitre V. L'auteur rappelle les résultats de M. Bruns concernant la non-existence de nouvelles intégrales algébriques. Il les complète par cette belle proposition : les équations différentielles du problème des trois corps n'admettent, comme intégrales uni- formes, que les intégrales connues, La démonstration complète nécessite la connaissance des valeurs approchées des coefficients de termes éloi- gnés du développement de la fonction perturbatrice. M. Poincaré obtient cette évaluation en mettant à profit un beau mémoire de M. Darboux sur l’approximation des fonctions de très grands nombres. C'est là une question de la plus haute importance, pour le calcul des inégalités à longue période, que Hausen a déclaré constituer la plus grosse difficulté de la théorie de lalune. Ce beau volume se termine par l'étude des solutions asymptotiques dont la propriété caractéristique est de se rapprocher ou-de s'éloigner indéfiniment des solu- tions périodiques (chap. VII). Les développements qui les représentent, sans être toujours cenvergents, peu- ventnéanmoins servir aux applications numériques, au même titre que la série de Stirling. Maurice Hay. 650 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX Le Dantec (l'abbé L.M.), Professeur de sciences à Tré- quier (Côtes-du-Nord). — Nouvelle analyse des vi- brations lumineuses, basée sur la mécanique de l’élasticité et conduisant logiquement à l’expli- cation de tous les phénomènes de l’Optique. — Un vol. in 8° de 156 p. avec figures (3 fr. 50). Librairie centrale des Sciences, J. Michelet, quai des Grands-Au- gustins, 25, Paris 1892. Le titre de cet ouvrage indique suffisamment le but que s'est proposé l’auteur ; adversaire des théories ci- nétiques, du moins telles qu'on les concoit générale- ment aujourd’hui, il base son système sur les proprié- tés d’un éther impondérable constitué par la Juxtapo- sition de cellules extrêmement élastiques ne lais- sant entre elles que le vide que laissent forcément de petites sphères qui se touchent; il imagine, dans le milieu ainsi constitué, un mode de propagation des ondes avec formation de nœuds et de ventres de vibration ; il applique ensuite ces principes à l’ex- plication des phénomènes de réfraction, d’interfé- rences, de double réfraction, de polarisation rota- toire, etc., etc. Cet ouvrage très élémentaire ne comporte aucun développement analytique; Jes questions ne peuvent donc guère y être traitées qu’au point de vue de la possibilité pour ainsi dire qualitative des phénomènes dans le système adopté; on y trouve du reste des apercus intéressants, des explications ingénieuses généralement en dehors des voies ordinaires, ce dont je me garderai bien de faire un reproche à l’auteur. ENHNAS Pollard (J.) et Dudebout (A.), Ingénieurs de la Marine, Professewrs à l'Ecole d’Application du Génie militaire. — Théorie du Navire (tome II) : Dyna- mique du navire. Un wol. in-8° de 520 p. (Prix : 13 fr.) Gauthier-Villars et fils, éditeurs, 55, quai des Grands-Augustins, Paris, 1892, Dans l’avant-propos de ce troisième volume, les au- teurs s’excusent du développement inusité qu'ils ont donné à certaines parties, telles que l’'Hydrodynamique, la théorie des Ondes d’oscillation et la Résistance des carènes. Cette précaution n'était point nécessaire. L'importance de ces questions, surtout de la dernière, en architecture navale, justifie largement tous les soins qu'on a pris d'en faire un exposé méthodique et complet. Il suffit de se rendre compte du rôle prédominant de la théorie dans ces matières, pour applaudir à l’idée de leur donner nettement pour base la science hydro- dynamique. Sans le secours de l'analyse, en effet, la connaissance que nous aurions des mouvements du pavire en milieu houleux serait fort restreinte, pour ne pas dire absolument nulle, Ce sont les beaux tra- vaux de M. de Saint-Venant et de M. Bertin qui ont créé de toutes pièces la théorie de la houle, et qui nous ont révélé les lois du roulis et du tangage sur houle, qu'aucune expérience n'aurait pu élucider, D'un autre côté, en dépit de nombreuses expériences accumulées depuis plus d’un siècle et demi, le pro- blème de la résistance des carènes n’a guère progressé. De tant de faits d'observation recueillis, médités, com- parés, il n’est sorti, et ne pouvait sortir, que des for- mules empiriques dont l’approximation est bien gros- sière ; de sorte que, s’il est une chose à regretter, c’est que l’état d'avancement de l’Hydrodynamique ne ré- ponde pas encore aux nécessités de l'heure présente, Sans parler des théories classiques autrement que pour en signaler la claire ordonnance, nous indique- rons rapidement les travaux récents qui mettent au courant des derniers progrès de la science le savant traité de MM. Pollard et Dudebout. Une méthode analytique due à M. de Bussy, est ve- nue compléter les recherches de Froude sur les résis- tances qu’un milieu houleux oppose au mouvement de roulis. M. Ferrand a déterminé l'influence de la houle sur la stabilité, et mis en relief le danger que la houle peut faire courir aux petits bâtiments, et en particu- lier aux torpitleurs, en diminuant dans des proportions considérables leur stabilité transversale, En 1891, alors qu'il était encore élève-ingénieur, M. Marbec indiquait une curieuse méthode pour intégrer géométriquement l'équation du roulis sur houle non résistante. Enfin, dans un trop court chapitre, les auteurs, rappelant les théorèmes généraux récemment donnés par M. Vicaire, sur le mouvement oscillatoire d’un système matériel soumis à des forces perturbatrices périodiques, mon- trent que toute la théorie de la houle en est le corol- laire immédiat, Le problème de la Résistance des carènes est un de ceux qui intéressent au plus haut degré l’art de l’ingé- génieur. Maisil offre de grandes difficultés, soit que l’on cherche, comme on l’a longtemps essayé, à procéder des formes simples aux formes complexes, soit qu'avec plus de raison l’on étudie de prime abord les carènes à surface courbe, qui donnent naissance à des pertur- bations moins complexes du liquide environnant. Au- jourd’hui la tendance de la théorie est de décomposer la résistance totale, en plusieurs résistances partielles que l’on attribue à des causes nettement distinctes et que l’on étudie séparément. Quelle que soit la simplifi- cation qui en résulte, on peut se demander si cette di- vision des causes est bien légitime, si elle répond bien à la nature des faits, et si elle ne risque pas d’égarer les investigations. En fait, ces divers ordres de phéno- mènes, résistance directe, résistance de frottement, résis- tance dueaux remous, sillage, formation des vagues, sont dansune telle dépendance mutuelle, quela connaissance de chacun d'eux en particulierne conduitpasà unenotion précise de leur résultante. Il faudrait déterminer leurs influences réciproques, problème encore plus com- pliqué que celui de la résistance totale. En présence de tant de difficultés, il n’est pas éton- nant qu'on se soit surtout attaché à coordonner les ré- sultats expérimentaux au moyen de formules empi- riques, en vue de calculer d'avance la résistance d’une carène et d’un propulseur donnés. Mais on a aussi essayé de déterminer les formes des carènes qui offri- raient une résistance minima. M. Simonot, élève-ingénieur de la marine, a fait, en 1891, d'intéressantes études dans cette voie, qui pa- raissait abandonnée depuis Rankine. En partant des hypothèses de ce dernier sur les lignes de courant, il a trouvé par l'analyse des séries de formes de trajectoires, des lignes de courant et aussi des surfaces trajectoires, donnant en liquide parfait la résistance minima. Mais, évidemment, lexpérience seule pourrait dire dans quelle mesure ces conclusions devraient être modifiées par l'hypothèse d’un liquide naturel, La méthode qui paraît la plus pratique actuellement, au point de vue de la préparation des projets, consiste à expérimenter sur des modèles à échelle réduite, et à déduire de ces résultats, par la loi de similitude dyna- mique, la résistance probable du navire correspondant. Cette méthode a recu en Angleterre, entre les mains du célèbre Froude, un développementconsidérable, D'autre part, M. Dudebout est parvenu récemment, au moyen de considérations purement théoriques, à établir la relation qui existe entre les utilisations de deux carènes dérivées, Pour conclure, l'impression qui se dégage de la lec- ture de ces intéressants chapitres, c'est qu'il serait très désirable que nos ingénieurs de la marine fussent mis en possession de toutes les ressources matérielles, d’une organisation et d’un outillage leur permettant de conduire sur une plus vaste échelle des séries d’expé- priences raisonnées. Il ÿY a peu de doute que le plus utile peut-être et le plus arriéré des problèmes de architecture navale, la Résistance des carènes, ne fit alors de sensibles progrès. L,. Viver. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 651 2° Sciences physiques. Abraham (Henri). — Sur une nouvelle détermina- tion du rapport entre les unités électromagné- tiques et électrostatiques. Thèse de la Faculté des Sciences de Paris. Gauthier- Villars et fils, éditeurs, quai des Grands-Augustins. Paris, 1892. La détermination du rapport v entre les unités C. G.S. électromagnétiques et électrostatiques présente un intérêt tout particulier: Maxwell a montré, en effet, que, moyennant quelques hypothèses, ce rapport a une signification physique très remarquable : il représente la vitesse de propagation des ondes électromagné- tiques dans le milieu où sont supposées faites les expé- riences, c’est-à-dire aussi bien la vitesse de propaga- tion des ondes lumineuses (considérées, il est vrai, comme ayant une longueur d'onde infinie), en admet- tant le principe fondamental de la théorie électroma- gnétique de la lumière, Aux très nombreuses recherches qui ont été effec- tuées en vue de faire cette détermination, M. Abraham vient d'ajouter une nouvelle mesure et des meilleures, Le mémoire commence par la définition exacte des deux systèmes d'unités; l’auteur explique comment il y a théoriquement un nombre illimité de systèmes abso- lus, deux seulement étant compatibles avec la restric- tion de n’introduire aucun coefficient numérique dans les équations considérées comme fondamentales; il fait très justement observer qu'il ne s’agit ici que des unités et nullement des dimensions, puisque, rationnel- lement, il ne saurait y avoir qu'un seul système de dimensions ; ce ne sont point là, à coup sûr, des idées originales : on les retrouverait sans peine dans plus d'un mémoire ou d’untraité classique ; elles sont ensei- gnées dans la plupart des cours, mais on ne peut que louer M. Abraham d’avoir tenu à démontrer qu'il ne partageait pas, sur ce sujet, les singulières erreurs de certains savants et non des moins illustres. Plus de la moitié de la thèse est ensuite consacrée à la description sommaire et à la discussion détaillée des expériences antérieures ; l'auteur ne s’est point seulement montré un bibliographe érudit, il a fait là œuvre de véritable eritique scientifique très fin et très avisé. Il montre que le rapport v doit être considéré comme connu seulement à + près de sa valeur; pour ne citer que les expériences les plus récentes, les mesures de M. Pellat, faites avec toute l’habileté que l’on connaît à ce savant physicien, ne comportent que ce degré de précision, puisqu'il faisait usage d'un élec- tromètre absolu dont la constante n’est déterminée qu’à ce degré d’approximation. Les procédés que l’on peut employer sont, comme l’a montré Maxwell, au nombre de cinq, ils doivent nécessairement consister en une mesure électrostatique et une mesure électro- magnétique d’une des grandeurs : quantité d’électri- cité, courant, résistance, force électromotrice, capa- cité. Dans l’état actuel de nos instruments de préci- sion, la seule méthode qui puisse conduire à une valeur exacte à plus de + est celle d’une mesure de capacité de forme connue, faite d’ailleurs par la méthode du gal- vanomètre différentiel, car le procédé du pont de Wheastone est sujet à une grave erreur due aux capaci- tés parasites des boîtes derésistances, galvanomètre, etc. M. Abraham a donc utilisé un galvanomètre différen- tiel que traversent, d’une part, les décharges périodiques d'un condensateur, et d’autre part, un courant dérivé fourni par la pile de charge. Le condensateur est un instrument très remarquable : c’est un condensateur plan à anneau de garde; les sur- faces conductrices sont constituées par l’argenture de deux dalles circulaires en glace de Saint-Gobain, tra- vaillées en verre d'optique; pour déterminer la dis- tance moyenne des dernières surfaces conductrices sur l'appareil prêt à fonctionner, on utilise ce fait que les deux disques argentés constituent un excellent miroir plan, M. Abraham en profite pour employer un procédé optique élégant : le commutateur qui doit charger le condensateur et le décharger ensuite dans le gal- vanomètre est un commutateur tournant, analogue à celui de J.-J, Thomson, et, grâce à la méthode strobos- copique, telle que M. Lippmann l’a proposée pour la comparaison de deux pendules, on peut régulariser et mesurer exactement sa vitesse de rotation; toutes les mesures ont, bien entendu, été rapportées aux étalons G. G. S. : les résistances, comparées à l’ohm légal, les longueurs au mètre, les temps à la seconde d’une hor- loge réglée sur l'Observatoire; 14 mesures ont été ainsi effectuées; la plus forte donne pour » la valeur 299,04 x 105 DU, ja plus faible 299,04 X 105. La seconde moyenne générale est 299,2 X 105. M. Abraham croit pouvoir assurer que cette valeur est exacte au = près (la vitesse de la lumière déterminée avec le même ordre d’approximation est 300 X 108); peut-être cette conclusion est-elle un peu optimiste; il convient, dans un pareil ensemble de mesures, de ne jamais oublier la possibilité des erreurs systématiques; l’auteur a lui-même, avec grande perspicacité, signalé un point délicat; quand un courant continu agit sur l'aiguille aimantée, les forces en jeu sont-elles en tous points sembables à celles qu'exerce un courant continu de même intensité moyenne? Il serait difficile de se pro- noncer sur cette question. M. Abraham précise d’ail- leurs l’objection que l’on pourrait faire, en partant de là, à la méthode employée : elle est limitée dans le cas de ses expériences, mais peut-il néanmoins de ce chef ne résulter qu’une erreur insensible ? Quoi qu'il en soit, on doit louer sans réserve l’habileté de l’expérimenta- teur, et la valeur qu'il trouve sera bien certainement considérée partout comme l’une des plus précises don- nées jusqu'à ce jour. Lucien Poincaré. Filippo Cintolesi (D'), professeur de Physique à Ulnstitut royal technique de Livourne. — Problèmes d'électricité pratique. — Un vol. petit in-8 de 160 pages, traduit de l'italien par Félix Leconte. Librai- rie génerale de Ad. Hoste, éditeur, 47, rue des Champs, Gand, 1892. Ce petit volume, d’un caractère essentiellement pra- tique, est destiné aux personnes qui ont à s'occuper de questions d'électricité industrielle. Il contient les énoncés et les solutions de près de trois cents problèmes bien choisis et d’une application fréquente ; toutes les questions que l’on peut rencontrer lorsqu'on fait de la lumière électrique ou de l’électrolyse, lorsqu'on s’oc- cupe de piles ou de dynamos, sont successivement traitées à l’aide d'exemples numériques. Get ouvrage, sans aucune prétention théorique, très sobre, très condensé, rendra service aux prati- ciens. ECO} Oechsner de Coninck, — Cours de Chimie or- ganique. Premier fascicule. Un vol. in-8° de 131 pages (Prix: 2 fr. 50). G. Masson, éditeur, 120, boulevard Saint-Germain, Paris, 1892. Le projet de loi sur les Universités à provoqué une grande activité dans les Facultés de province. Les plus importantes possèdent maintenant un organe pério- dique et produisent de nombreuses publications, C’est sans doute à ce mouyement scientifique que nous devons la publication du cours professé par M. Oechsner de Coninck à Montpellier, Un premier fascicule seule- ment a paru jusqu'à présent, Il comprend Ja classifi- cation des composés organiques d’aprèsleurs fonctions, des lecons sur lisomérie et la polymérie, et la des- cription des procédés pour l'analyse des substances organiques et la détermination des poids moléculaires, L'auteur annonce la publication de deux autres parties, relatives l’une à la série grasse, l’autre à la série aroma- tique. G. CHaRPy, © O4 19 (BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 3° Sciences naturelles. Russell (W.) Recherches sur les Bourgeons mul- tiples. Thèse de la Faculté des Sciences de Paris. (Ann. des Se, nat.) G. Masson, éditeur. Paris, 1892. Un grand nombre de plantes présentent à l’aisselle de leurs feuilles plusieurs bourgeons plus ou moins développés et même plus ou moins visibles, qui peuvent ou avorter ou se développer de bonne heure, ou bien rester plusieurs années à l’état de vie latente. Ces plantes sont connues depuis longtemps ; on en a dressé des listes et on a constaté qu’elles appartiennent à des familles fort différentes. Mais, l'interprétation de la nature et de l’origine de ces bourgeons multiples à donné lieu à des discussions entre les auteurs qui se sont occupés de ce sujet. Pour les uns, le bourgeon axillaire unique à l’aisselle d’une feuille est une excep- tion ; les bourgeons sont normalement multiples. Pour les autres, les bourgeons multiples naissent seulement en apparence à l’aisselle d’une même feuille axillante, ils sont des produits d’axes très courts, leur apparition n'est pas simultanée et, au début, il n'y a qu'un seul bourgeon axillaire. M. Russel a étudié, par la méthode anatomique, de nombreuses plantes possédant des bourgeons mul- tiples; mais, malgré le caractère général du titre de son travail, il s’est adressé presque exclusivement aux Dicotylédones. La conclusion à laquelle il est arrivé est que « la loi de l’unité de bourgeon axillaire ne souffre aucune exception ». Les bourgeons latéraux, dont la présence donne l’impression de bourgeons multiples, naissent le plus souvent de très bonne heure sur le bourgeon axillaire; ils se développent simultanément avec lui et rendent la ramification plus touffue, ou bien le remplacent normalement s’il se transforme en vrille, en épine ou en inflorescence, ou s’il se détruit acciden- tellement ou normalement; ils peuvent aussi rester longtemps à l’état de bourgeons dormants, et sont alors l'origine des branches gourmandes qui apparaissent dans diverses circonstances sur les végétaux ligneux. GC, SAUVAGEAU. Couvreur (E.). — Sur le pneumogastrique des Oiseaux. Physiologie comparée. — Thése de la Fa- culté des Siences de Paris. G. Masson, éditeur, Paris, 1892. Les recherches expérimentales que M. E. Couvreur vient de publier dans sa thèse seront accueillies avec satisfaction par tous les physiologistes. Elles nous ap- portent un grand nombre de faits nouveaux qui élar- gissent beaucoup le cercle de nos connaissances relati- vement aux fonctions du pneumogastrique chez les oiseaux et les mammifères. Le travail de l’auteur est divisé en trois parties : La première partie est consacrée à l’étude anato- mique du pneumogastrique. Elle est moins riche en données nouvelles que la partie physiologique. Ce- pendant un certain nombre de faits méritent une mention particulière, Le nerf spinal, réduit exclusive- ment à ses racines bulbaires, se jette en totalité dans le pneumogastrique. Ce fait confirme l'opinion de plusieurs auteurs qui tendent à considérer la branche externe du spinal comme faisant partie virtuellement du pneumogastrique chez tous les animaux. Après sa sortie du crâne, ce nerf envoie une ou deux anas- tomoses au glosso-pharyngien. C’est ce dernier nerf qui fournit les fibres du rameau anastomotique. Dans la région du cou, le pneumogastrique accompagne la jugulaire et non la carotide. Peu après sa pénétration dans le thorax, il se renfle en un ganglion visible à l'œil nu, que l’auteur appelle ganglion thoracique; puis il fournit des filets au plexus cardiaque, au plexus pul- monaire et au plexus stomacal, etenfin va se jeter dans le plexus sympathique cœliaque. Le récurrent offre ceci de particulier qu'il ne fournit aucun filet au larynx supérieur ;il s’épuise dans le jabot ou la portion æso- phagienne correspondante. Malgré l'absence d'anastomoses entre le sympathique etle pneumogastrique, sauf au niveau des ramifications constituant les plexus, il faut admettre que, chez les oiseaux comme chez les autres animaux, ce nerf ren- ferme des fibres sympathiques au cou; c'est donc un vago-sympathique dans toute son étendue. Dans la deuxième partie, l’auteur étudie l'influence du pneumogastrique sur les fonctions de nutrition : 1° Influence sur la respiration. — a) Effets mécaniques, La section des deux pneumogastriques au cou ne mo- difie pas les mouvements du larynx et de la glotte, ce qui prouve que le récurrent ne se distribue pas au larynx. Celui-ci est innervé par l’analogue du laryngé supérieur. Quand une excitation porte sur celui-ci, js glotte sedilate, le pharynxse contracte, animal pousse un cri et la respiration s’arrête en expiration. En exci- tant isolément le pneumogastrique et le glosso-pha- ryngien dans le bout central et periphérique, on arrive à cette conclusion que toutes les fibres sensitives du larynx sont fournies par le pneumogastrique,les fibres motrices constrictives de la glotte étant fournies par le pneumogastrique etles fibres dilatatrices par le glosso- pharyngien. La section unilatérale du pneumogastrique au cou ralentit un peu la respiration et la rend irré- gulière pendant quelques jours, puis elle revient à son rythme normal. La section bilatérale amène une di- minution du nombre des mouvements respiratoires, des pauses expiraloires prolongées; l'amplitude des mouvements augmente d’abord, puis diminue graduel- lement dans la suite jusqu'a la mort, M. E. Couvyreur trouve les causes de la modification profonde du rythme qui suit la double section des vagues dans la présence du mucus dans les bronches, et dans la suppression de l'innervation sensitive du poumon. L'excitation faible du nerf, dans sa continuité au- dessous du laryngé, amène une accélération du rythme respiratoire; l'excitation forte produit au contraire un arrêt immédiat en inspiration. Pendant l’anesthésie ou la fatigue du nerf, l'irritation du bout céphalique pro- duit un arrêt en expiration. IL semble donc, confor- mément à l'opinion de Fredericq, que le pneumogas- trique renferme au cou des fibres inspiratrices et expiratrices, que les premières se fatiguent plus vite que les secondes et qu’on peut les paralyser par les anesthésiques. L'excitation du nerf laryngé supérieur ou bien du pneumogastrique au-dessus du point où se détache ce nerf donne toujours un arrêt expiratoire. Pendant l’ex- citation du bout périphérique d’un des nerfs, l’autre res- tantintact,on voitse produire une accélération manifeste des mouvements respiratoires qui diminuent légèrement d'amplitude. Quand les deux nerfs sont coupés, l’ex- citation n'amène plus d'accélération. L'auteur n'a pas pu mettre en évidence la contraction des fibres de Reis- seissen par l'excitation du pneumo-gastrique chez les oiseaux; mais il a démontré que, comme chez les mam- mifères, le vague fournit au poumon des nerfs sen- sitifs. La double section du pneumogastrique produit une baisse considérable de la ventilation pulmonaire. La rareté des mouvements respiratoires est donc loin d'être compensée par leur amplitude, comme on l’ad- met chez les mammifères. b) Effets chimiques. L'auteur a constaté que, chez les oiseaux la double section des pneumogastriques est suivie de phénomènes asphyxiques très nets. La quantité d'acide carbonique éliminée dans un temps donné est moindre, ainsi que la quantité d'oxygène absorbée. Cette diminution des échanges respiratoires s'explique par l’engouement du poumon et par la gêne que subit la circulation pulmonaire. Les troubles pulmonaires consécutifs à la double section des vagues consistent seulement en une con- gestion veineuse marquée, accompagnée de rupture des capillaires, tandis que, chez les mammifères, il y a en même temps emphysème et broncho-pneumonie, due à la pénétration des aliments dans la trachée. 29 Influence sur la circulation. Contrairement à ce qui BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 653 a lieu chez les mammifères, la section, soit unilatérale soit bilatérale, du vague ne produit pas d'accélération cardiaque, Mais l'excitation de ces nerfs entraine une diminution très nette des battements qui deviennent en même temps plus amples, L'arrêt complet est im- possible à produire, L'action modératrice cardiaque disparaît pendant l’empoisonnement par l’atropine, mais il ne survient aucune accélération, Le pneumo- gastrique des oiseaux ne semble donc pas contenir de fibres cardiaques accélératrices. Mais il fournit au cœur des fibres sensitives, comme chez les mammifères, Sur la pression sanguine les excitations des pneumo- gastriques produisent les mêmes effets que chez les mammifères, c’est-à-dire que l’on obtient une dimi- nution en agissant sur le bout périphérique, due au ralentissement, et une élévation en agissant sur le bout central, due à une vaso-constriction réflexe. La section et l'excitation du bout periphérique du pneumogastrique ont fourni des résultats qui indiquent la présence, dans le tronc de ces nerfs, de fibres vaso- motrices se distribuant à l’æsophage, au jabot, à l'es- tomac, aux reins et à la rate, L'état asphyxique qui survient après la double section détermine des effets vaso-moteurs dans le foie et l'intestin. 3° Influence sur la digestion. Le pneumogastrique est le nerf moteur de l'estomac et du jabot. La section bilatérale du vague produit l'arrêt de la digestion gas- trique. L'auteur démontre que cet arrèt de la digestion ne peut pas être imputé à l’arrét de la sécrétion du suc gastrique, mais bien au défaut de l'excrétion de ce sue, à cause de la paralysie de l'estomac. La digestion intes- tinale n’est entravée en rien par la double section du vague; la sécrétion pancréatique n’est pas atteinte; la sécrétion biliaire est exagérée. 4° Influence sw la sécrétion urinaire. Les nerfs pneu- mogastriques exercent chez les oiseaux comme chez les mammifères une action sur la sécrétion urinaire, Cette action est en grande partie vaso-motrice. La section unilatérale exagère la sécrétion des deux côtés mais surtout du côté du nerf coupé. La double section pro- duit aussitôt une exagération de la sécrétion urinaire, égale des deux côtés; l'urine est plus riche en eau, plus pauvre en acide urique ; elle ne renferme ni albu- mine ni bile, Quelque temps après la section, l'hyper- sécrétion disparaît, alors survient un affaiblissement dans l’excrétion urinaire. L’excitation des vagues pro- duit des effets inverses : elle ralentit la sécrétion, 5° Influence sur la fonction glycogénique. Aucune re- . cherche de ce genre n'avait été faite chez les oiseaux. L'auteur a fait sur ces animaux des expériences nom- breuses qui conduisent aux résultats suivants : 4° Le premier effet de la double section des vagues est une dis- parition rapide du glycogène,avec hyperglycémie : l'hy- poglycémie ne se produit pas plus tard ; 2° Ces phéno- mènes sont dus à des troubles respiratoires, qui amè- nent une asphyxie lente, et à des troubles nutritifs. Le mécanisme est le suivant : l'asphyxie provoque une hyperhémie dans le foie; sous l'influence de cette vascularisation et de l’état asphyxique du sang, le glycogène se transforme activement en sucre, et, n'étant pas remplacé, diminue rapidement dans le foie. Quant au sucre versé dans le sang, il se détruit assez lentement pour des raisons multiples. 3° En définitive, à l’état normal, le pneumogastrique ne joue aucun rôle dans la glycogenèse, et ce n’est qu'indirectement que sa double section vient troubler cette fonction, En étudiant, dans la troisième partie de son travail, l'influence des pneumogastriques sur la nutrition intime, l’auteur arrive à la conclusion suivante : Les causes de la mort par double section des vagues sont des troubles de nutrition élémentaire amenés par l'asphyxie lente et l’inanition; la disparition du gly- cogène, qui est un des facteurs les plus importants de cette mort, n’a pas d’autres causes. Sans nier abso- lument toute influence trophique du vague, l’auteur pense qu'il ést prématuré de rien affirmer sur ce point. M. KAUFMANN. 4 Sciences médicales. Bouveault(L.).— Études chimiques sur le Bacille dela Tuberculose aviaire. These présentée à la Faculté de Médecine de Paris. In-$°, 46 p. H. Jouve. Paris, 1892. M. Bouveault a entrepris de déterminer les modifi- cations que produit, dans les bouillons de culture, la vie du bacille aviaire, La brochure actuelle ne contient que le début de cette étude, fort délicate et fort longue, comme on peut le penser d'après ce que nous savons de la question ; les produits intéressants des microbes, en effet, existent dans leurs cultures en quantités ex- trèmement petites, et, si l’on veut les retrouver, il faut avoir fait au préalable une analyse extrèmement minu- tieuse du milieu de culture. C’est ce qu’a d’abord fait M. Bouveaull; pour pénétrer plus avant qu'on ne l’a- vait fait jusqu'ici dans la connaissance de la composi- tion du bouillon de veau, il a employé une méthode de précipitation fractionnée par l'alcool, puis par l’éther, après avoir concentré le bouillon par distillation dans le vide: l'étude complète des diverses portions n’est d’ailleurs pas encore terminée. Après que ce bouillon, additionné de peptone, de sucre de canne et de glycé- rine en proportions déterminées, eut été ensemencé du bacille aviaire, et fut resté à l’étuve jusqu'à ce que les cultures cessassent de s'accroître, les mêmes opérations furent répétées. Voici les principales modifications observées : La den- sité du bouillon a diminué de moitié environ; la des- truction de matière, indiquée par ce fait, semble avoir porté principalement sur la glycérine ; le sucre n’a pas été touché; la gélatine a été peptonisée; les peptones elles-mêmes ne semblent pas avoir été consommées; la sarcine a été diminuée de moitié environ; la créatine, la créatinine, la xantine ont dis- paru à peu près totalement; de même, l’'ammoniaque et quelques alkylamines, dont l'auteur avait constaté la présence dans le bouillon naturel,ne se retrouvent plus dans le bouillon cultivé. Si donc l'on veut faire la somme des matières nutritives que le bacille a em- pruntées pour sa vie et sa prolifération à son milieu, on voit que ce sont la glycérine pour les aliments ter- naires, et, pour les aliments azolés, les composés les plus simples, l’ammoniaque et les amines, et ceux dont l’'ammoniaque ou une amine peut être le plus facile- ment dégagée. Quant aux produits spéciaux, M. Bou- veault à préparé un extrait analogue à la fubereuline pu- rifiée de M. Koch, lequel extrait, expérimenté par M. Ri- chet, s'est montré toxique pour les lapins tuberculeux, et à peu près inoffensif pour les autres. Il a égale- ment répété sur les corps des bacilles, isolés par le filtre, les recherches qu'Hammerschlag avait faites sur le bacille de la tuberculose humaine; il à trouvé une composition analogue. La conclusion que M. Bouveault a tirée de ces pre- mières recherches, c’est qu'il doit être possible de cul- tiver le bacille sur des milieux plus simples, plus faciles à connaître, et- sans doute même, mieux appropriés à sa végétation, que les milieux empiriques usités jus- qu'ici; c’est ainsi que rien ne justifie la pratique de donner au bacille du sucre de canne qu’il ne sait même pas intervertir. IL faut espérer que M. Bouveault tien- dra la promesse, qu'il nous faite à la fin de sa thèse,de trouver pour le bacille de la tuberculose aviaire un ter- rain de culture artificiel, exempt de matières albumi- noïdes, afin de pouvoir en extraire aisément les toxal- bumines que le microbe y aura élaborées. Cette conclusion est exactement celle à laquelle sont arrivés de leur côté MM. Charrin et Arnaud en étudiant un autre microbe; dans une récente séance de la Société de Biologie, ces deux auteurs insistaient encore sur la nécessité de n’entreprendre des études comme celle-ci, que sur des milieux synthétiques parfaitement connus. Les recherches de M. Bouveault apportent un appui sé- rieux à cette manière de voir, L. LAPICQUE. Re. 654 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER (La plupart des Académies et Sociélés savantes, dont la Revue analyse régulièrement les travaux, sont actuellement en vacances.) ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 29 Août 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Tisserand présente à l’Académie le tome XX des « Annalesde l’observatoire de Paris. » — M.J. Bertrand fait don à l'Académie, pour être déposé à la Bibliothèque de l’Institut, d'un petit manuscrit portant pour titre « Agenda de Malus, capitaine du génie, employé à l’armée d'Orient (Expé- dition d'Egypte) ». — M.G.Bigourdan communique ses observations de la nouvelle planète M. Wolf, faites à l'Observatoire de Paris (équatorial de la tour de l’ouest). La planète était de grandeur 12,5 au 27 août. — M. C. Flammarion a repris la mesure du diamètre de Mars à l'opposition actuelle, car les anciennes mesures présentent desdivergences qui ne sont pasen harmonie avec les progrès accomplis récemment dans la connais- sance de cette planète. Le diamètre adopté par Le Verrier est trop grand de environ. —M. P. Tacchini, communique ses résultats sur la distribution en latitude des phénomènes solaires, observés à l'Observatoire royal du Collège romain pendant le second trimestre de 1892; ces résultats se rapportent à chaque zone de 10° dans les deux hémisphères du Soleil. Les protubérances font encore défaut dans le voisinage des pôles. C. MATIGNON. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. L Guéneaude Lamar- lière traite de l'assimilation comparée des plantes de même espèce développées au soleil ou à l’ombre. Il résulte de cette étude que l’intensité de la décomposition de l'acide carbonique, les conditions extérieures étant les mêmes, varie pour les feuilles d’une même espèce, selon les conditions de développement de ces feuilles. De plus, la quantité de l'acide carbonique décomposé est plus forte pour les feuilles développées au soleil, que pour celles de la même espèce développées à l'ombre. — M. Domingos Freire, de l’étude bactériologique à laquelle il s’est livré relativement à la fièvre bilieuse des pays chaudset à la fièvre jaune, conclut que l'agent producteur de la première maladie est différent de celui de la seconde; les différences dans les symptômes des deux fièvres ont été établies d'ailleurs depuis longtemps par les cliniciens, L'examen microscopique montre que le microbe de la fièvre bilieuse des pays chauds est un bacille mesurant en moyenne 9 microns de longueur sur 3 de largeur, se segmentant rapidement en articles plus ou moins courts qui donnent naissance à des spores terminales, Son inoculation produit chez le cobaye une infection paludéenne. Au contraire l’agent vivant de la fièvre jaune n’est pas un bacille mais un microcoque rond, très réfringent, ne mesurant dans les conditions ordinaires qu'un micron; ses cultures, à l’état virulent, donnent lieu, par l’inoculation chez le cobaye, à une fièvre jaune bien caractérisée. —M,. Fouqué com- munique à l’Académie une lettre que lui a adressée M. Wallerant au sujet de l’éruption actuelle de l’'Etna qui, au {42 août, paraissait entrer dans une nouvelle phase. L'auteur décrit, longuement et avec détail, les laits qu’il a constatés avec M. Chudeau ; il signale, entre autres, les particularités intéressantes offertes par le cône volcanique. Mémoires présentés, — M. Léopold Hugo : Remarques relatives aux planètes Mars et Jupiter. — M. Hermann Ohlsen (de New-York) : La solution du problème de la communication avecles habitants de Mars. — M. Durand- F'ardel adresse une note sur trois secousses de trem- blement de terre ressenties à Vichy, dans la matinée du 26 août. — Mme Vve F, Bauer demande l’ouverture d’un pli cacheté déposé le 20 octobre 1879 par M. Fré- déric Bauer, contenant un mémoire sur un projet d’avia- tion, En, BELZUNG. Séance du 5 septembre, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — MM, Rayet, Picart et Courty communiquent leurs observations de la comète Denning (1892, Il) faites au grand équatorial de l'Ob- servatoire de Bordeaux. La comète s'est toujours mon- trée comme une nébulosité ronde. d’un éclat très faible, — M. Bigourdan a observé la nouvelle comète Brooks (c. 1892) et la nouvelle planète Wolf à l’'Obser- vatoire de Paris (équatorial de la tour de l'Ouest), — M. Le Cadet communique aussi ses observations de la comète Brooks faites à l’équatorial Brunner de lOb- servatoire de Lyon. — M. Perrotin a observé à la surface de la planète Mars des renflements brillants de couleur et d'éclat comparables à ceux de la calotte polaire australe, Ces projections en dehors du disque ont au moins un ou deux dixièmes de seconde d'arc, c’est-à-dire que le phénomène auquel elles corres- pondent s'élève à plus de 30 ou 60 kilomètres d'altitude. L'auteur joint aussi ses observations sur la calotte nei- geuse australe; elle a notablement diminué depuis deux mois et est actuellement en train de se disloquer. Le lac du Soleil a subi aussi quelques changements dans son aspect, — M. Callandreau donne des mé- thodes simplifiées pour le calcul des inégalités d'ordre élevé ; il légitime l'emploi de la série de Legendre sous certaines conditions dans le cas où elle devient semi- convergente, — M. Larrey dépose sur le bureau un album de croquis remontant à la campagne d'Egypte. 2 ScreNces PHYSIQUES. — M. J. Morin donne une nouvelle forme d'appareil d’induction d’un emploi commode en électrothérapie; ce sont deux anneaux plats, concentriques, dans lesquels sont creusées, par l'extérieur, deux gorges de forme appropriée, servant à contenir les fils conducteurs isolés; on peut obtenir alors facilement un courant diminuant régulièrement d'énergie depuis le maximum jusqu’au zéro, quelle que soit l'intensité du courant inducteur. G.MATIGNoN. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. D. Clos note la réappa- rition de la Chélidoine à feuille de Fumeterre (Cheli- donium fumariæfolium); cette plante, signalée, il y a près de deux siècles, par Morison et Tournefort, diffère par divers caractères de la grande Chélidoine ou Eclaire (Chelidonium majus L.). La Chélidoine à feuille de Fume- terre, ainsi que diverses autres plantes citées par l’auteur, ne sont pas des variétés, mais bien des dévia- tions du type spécifique. — M. Brown-Séquard rend compte de l'influence bienfaisante exercée par des injections hypodermiques de liquide testiculaire chez des individus souffrant du cancer. L'amélioration ob- tenue serait due, non pas à une action directe du liquide testiculaire sur les microbes ou autres agents pathogènes, mais bien à l’augmentation des puis- sances d'action du système nerveux que produit ce liquide. L'auteur appelle en outre lattention des médecins sur la grande utilité de l'emploi des injections sous-cutanées de ce liquide contre le choléra, au début de la maladie ou après guérison, alors que le malade estdans un état de profonde adynamie.—De l’ensemble de 114 observations, fournies par l’étude de la thyroï- dectomie chez le rat blanc, M, Cristiani lire les con- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 655 clusions suivantes : la thyroïdectomie totale chez le rat, entraine la mort au bout d’un espace de temps variable et avec des symptômes analogues à ceux que présente le chat. Dans les cas de survie de l’animal, l'extirpation n’a pas été totale, car en pratiquant une nouvelle opération, on trouve un ou plusieurs organes régénérés, occupant la place des anciens, Enfin en greffant l'organe extirpé dans le péritoine on écarte ou amende les symptômes, el l’on peut sauver la vie de l'animal. Mémoires présentés : M. Al. Lissevéo : Complément à sa communication précédente sur le postulatum d’'Eu- clide. — M. P, Campanakis : Sur la communication des deux Mondes par l’Atlantis, aux époques préhisto- riques. — M. Méhay : Sur une nouvelle unité d’ac- tivité, proposée pour remplacer le cheval-vapeur dans les estimations de la pratique industrielle, — M, Bour- dellès : Note relative aux mères de vinaigre. Ed, BELzuNG. Séance du 12 septembre 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Faye présente à l'Académie le volume de la « Connaissance des Temps », pour l’année 1895. — M. F. Gonnessiat donne ses observations sur les passages des étoiles circompo- laires faites de 1883 à 90, à l'instrument Eichens de l'Observatoire de Lyon; il en déduit leurs positions absolues et leurs mouvements propres par un mode de discussion original et très simple. — M. R. Liouville s'était occupé de résoudre précédemment le cas où les équations différentielles du mouvement d'un système de points matériels jouissent des propriétés suivantes : 1e À existe une intégrale des forces vives ; 2° à chaque système il en correspond au moins un autre ayant en commun avec le premier les équations des trajectoires; il généralise aujourd'hui la solution de ce problème dans le cas où le nombre des variables est supérieur à deux et en déduit des démonstrations simples de théo- rèmes énoncés par MM. Beltrami et Painlevé, — M. Paul Serret fait connaître une série récurrente de pentagones, inscriptibles à une même courbe géné- rale du troisième ordre, et que l’on peut construire par le seul emploi de la règle. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Le Goarant de Tro- melin, à propos de la répartition calorifique de la chaleur du soleil à la surface des hémisphères nord et sud du globe terrestre, démontre, contrairement aux idées admises, que la quantité de chaleur re- cue par l'hémisphère nord pendant le printemps et l'été est la même que celle recue par l'hémisphère sud pendant l'automne et l’hiver réunis; c’est l’iné- galité des quantités de chaleur perdues par rayon- nement qui est la cause de l'inégalité des températures moyennes des deux hémisphères. — M, Désiré Korda revient sur la théorie d’un condensateur intercalé dans le circuit secondaire d’un transformateur et donne une méthode graphique très simple et exacte pour dé- terminer tous les éléments du problème. — M. Ch.-Ed. Guillaume reprend l'étude de la variation {thermique de la résistance électrique du mercure avec des appa- reils perfectionnés ; il en déduit que la valeur de l’ohm UE à 00, — M. G. (microlitre) + Trouvé annonce qu'il vient de réaliser, au château de Craig-y-Nos, la construction d’une fontaine lumineuse à colorations variables automatiquement. — M. Ber- thelot, à propos de la chaleur de combustion de l’acide glycolique, signale une erreur de transcription qui mo- difie certaines conelusions relatives à acide glycolique et signalées dans une note précédente de MM. Berthelot et Matignon. — M. A.-B. Griffiths isole le Micrococcus tetragenus des crachats de pthisiques et le cultive pen- dant plusieurs jours sur gélatine peptonisée; une pto- maine se produit: c’est un corps solide blanc, cristalli- sable, formant des chlorhydrate, chloroaurate et chloroplatinate cristallisables; sa formule est CSH6Az0?; il résulte de la décomposition chimique de molécules atteint largement 106,3 albuminoïdes dérivées de la gélatine peptonisée, durant la vie du microbe en question. — M. A.-B. Griffiths a fait l'étude de l’échinochrome, un pigment respiratoire découvert par M. Mac Munn dans le fluide périviscéral de certains Echinodermes; l’auteur lui assigne la for- mule C2HNAZP2FeS20!2; les acides minéraux le dédou- blent en hématoporphyrine, hémochromogène et acide sulfurique. C. MATIGNON. 3° SCIENCES NATURELLES. -— M. A, Chatin, dans le cours de l'été sec et chaud de 1892, a étudié, au point de vue pratique, le degré de résistance présenté par les plantes des différentes espèces qui composent les prairies naturelles, L'auteur énumère les espèces qui ont le mieux résisté à la sécheresse et signale plus spécialement celles des plantes fourragères qui se sont trouvées dans ce cas. — On sait que les greffes pancréa- tiques empêchent, chez les chiens privés de pancréas abdominal, l'apparition des phénomènes du diabète sucré, M. Thiroloix à observé un chien, privé de pancréas abdominal et porteur d’une greffe, lequel, au bout de vingt et un jours, a présenté brusquement d’un jour à l’autre une glycosurie, et dans la suite tous les phénomènes du diabète sucré expérimental, Or, d’une part, le parenchyme glandulaire au niveau de la sreffe avait persisté ; d'autre part, il y avait continua- tion de la sécrétion pancréatique externe. Il en résulte donc que, sous une influence encore à déterminer, la sécrétion pancréatique interne, résorbée par les vais- seaux lymphatiques et sanguins, a été supprimée, et que c’est cetle suppression qui à eu pour résultat de faire apparaître le diabète sucré, — M. Brown-Sé- quard rapporte les faits nouveaux suivants concernant la physiologie de l’épilepsie : la section d’un des nerfs sciatiques ou encore, et avec plus de netteté, l’ampu- tation de la cuisse donnent lieu constamment à l’ap- parition de l’épilepsie chez les cobayes. Si l’amputation est faite à la partie inférieure de la cuisse, la maladie se développe plus lentement que lorsqu'elle est faite à la partie supérieure, mais elle dure indéfiniment dans les deux cas. Au contraire lorsque le membre a été coupé au-dessous du genou, l'affection se complète rarement. D'autre part, une lésion ou une irritation de la moelle cervicale donnent lieu à une attaque d’épilep- sie, Mais, avant l'apparition de l'attaque elle-même, il y a développement d’un état morbide spécial rendant possible l’attaque convulsive. L'existence de cet état morbide est démontrée par ce fait, qu'en asphyxiant un cobaye en apparence à l'élat normal, mais ayant eu une lésion de la moelle et par suite une attaque d’épi- lepsie, on voit survenir non pas de simples convulsions, mais bien une attaque épileptique complète, L'auteur fait remarquer en outre qu'il faut un temps assez long pour produire l’état morbide. Enfin il termine en mon- trant que l’épilepsie n’a pas de siège spécial dans l’en- céphale, et que toutes les parties du système nerveux central ou périphérique peuvent la produire. — MM. A. Charrin et H. Roger, étudiant l'influence de quelques gaz délétères, l’oxyde de carbone principalement, sur la marche de linfection charbonneuse chez le cobaye, ont trouvé que les gaz étudiés n’influencent pas l’évo- lution du charbon virulent, mais rendent possible le développement du charbon atténué, — M. Barthélemy fait connaître un appareil imaginé par lui pour pratiquer lhypodermie aseptique. L'appareil sert à la fois de récipient et d’injecteur et c’est l’air stérilisé qui rem- plit office du piston. — M, Emile Rivière : Détermi- nation par l'analyse chimique, de la contemporanéité ou de la non-contemporanéité des ossements humains et des ossements d'animaux trouvés dans un même gisement. L'auteur constate que, d'après les résultats récents obtenus par M. Adolphe Carnot, l'opinion qu'il avait émise antérieurement au sujet des ossements humains, découverts avec des espèces quaternaires dans les sablières quaternaires de Billancourt, est au- jourd’hui hors de doute, Les ossements humains de Billancourt sont plus récents que les restes de la faune quaternaire des mêmes sablières, 656 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Mémoires présentés : MM. À. et I. Garaycochea annon- cent, de Lima, l'envoi d’un ouvrage manuscrit de leur père sur le caleul binomial. — M. Léopold Hugo : Note sur diverses questions relatives à l’histoire de l’Astro- nomie. — M. G. de Rocquigny Adanson : Quelques indications sur le tremblement de terre, ressenti à Parc-de-Baleine (Allier), le 26 août, à dix heures dix. minutes du matin (heure de Paris), — M. A. Luton Sur la composition de solutions salines, ou sérums arti- ficiels, permettant d'obtenir les effets produits par les liquides organiques de M. Brown-Séquard. — M. Nou- jade : Complément à son Mémoire sur la prophylaxie du choléra, Ep. BELZUNG, ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 23 août. M.Zambaco Pacha : Les lépreux de la Bretagne en 1892. Les longues recherches entreprises par ce savant mettent hors de doute la présence actuelle de la lépre autochtone en Bretagne, revêtant ses diverses formes : mutilante, nerveuse ou anesthésique de Danielssen, ulcé- reuse et même tuberculeuse. La lèpre, selon M. Zambaco, serait d’origine orientale, phénicienne ou juive, Elle a été signalée pour la première fois en Bretagne au vire siècle de notre ère,et, depuis cette époque, elle à Ta- vagé l’Armorique pendant plusieurs siècles. Elle s’y est conservée par son hérédité ancestrale, par atavisme. Elle y présente parfois tous les caractères classiques; elle est alors facile à diagnostiquer. Mais, dans la grande ma- jorité des cas, elle est légère, incomplète, atténuée, ne signalant son existence que par un ou deux symptômes, en un mot, elle est fruste, La lèpre sporadique, dissé- minée, existe partout en France et dans toute l'Europe. La paréso-analgésie ou mal de Morvan ne serait pas une maladie nouvelle, mais un reliquat de la lèpre qui a sévi en Bretagne etun peu partout en Europe pen- dant des siècles. En effet, la lèpre ne pouvait dispa- raître complètement de l’Armorique, qu’elle a ravagée au point de nécessiter la création de nombreuses lépro- series aux abords de chaque ville, sans laisser des traces de son lugubre passage; le voyageur, à chaque instant, dans les dé partements du Finistère et du Morbihan surtout, se trouve en face d'une ancienne léproserie ou corderie, ou madeleine, ele. Il était donc à prévoir que la lèpre devait être encore en survivance en Bretagne. La maladie de Morvan n’est pas autre chose que la lèpre mutilante qui, parfois évolue en suivant son cycle, mais qui, dans la plupart des cas, légère et atténuée, s'arrête à ses premières étapes. La syringomyélie comprend des malades dissemblables qui ont besoin d'être disc ernés, différenciés, triés. L'auteur pense que quelques-uns de ces malades sont atteints de la lèpre anesthésique de Danielssen, plus ou moins atténuée, dans certains cas. Discussion : MM. Lancereaux, Le Roy de Méricourt, Vidal, La- gneau. Séance du 30 août M. Magitot : Des maladies de la dentition. L'auteur reprend cette question pour répondre à une communi- cation antérieure de M.Pamard. Il maintient ses affir- mations précédentes d’après lesquelles il n'existerait pas d'accidents de dentition, et que ce n’est pas dans la période purement physiologique du premier âge et de la dentition qu’il faudrait en rechercher la cause, Les troubles divers du premier âge chez l'homme sont peut-être simplement d'ordre banal et accidentel, mais leur pathogénie est peu connue jusqu'à ce jour. Dis- cussion : MM. Charpentier, Magitot, Le Roy de Mé- ricourt. — M. Dujardin-Beaumetz : Sur le régime alimentaire des néphrétiques chroniques. Dans les né- phrites chroniques le chiffre de l'albumine émis ne joue qu'un rôle secondaire et ne peut servir à établir le pronostic. Celui-ci, ainsi que le traitement et le ré- gime alimentaire de ces malades, doit avoir pour bases la perméabilité du rein et la rétention des toxines dans l'économie, Pour le traitement, il consistera à faciliter par des purgaltifs, des diurétiques et la suractivité des fonctions de la peau, l'élimination des toxines, et à réduire la production de celles-ci par le repos, l'an- tisepsie intestinale au benzonaphtol, supérieur au sa- lol, et un régime alimentaire approprié. Celui-ci sera surtout un régime végétarien : laitages, œufs, féculents, légumes verts et fruits. Par contre les viandes en gé- néral et surtout le gibier, les poissons, les mollusques, les crustacés, les fromages avancés et l’alcool sont des aliments défendus chez les brightiques. Discussion : MM. Le Roy de Méricourt, Dujardin-Beaumetz. — M. G. Sée : Sur le régime et le traitement des albumi- nuries, Dans l’état actuel de la science, on doit recon- naître cinq espèces d’albuminuries comprenant, sauf la première, des lésions rénales. Ce sont : l’albuminu- rie fonctionnelle, l’albuminurie cardiaque, les né- phrites, l'albuminurie hématogène, alimentaire, et les albuminuries toxiques, bactériques, toxiniques, pto- maiques,urotoxiques,et chimio-trophiques. L’auteurin- dique les causes de chacune de ces maladies et dé- crit leurs caractères et leur évolution, Séance du 6 septembre. M. Henri B. Millard (de New-York) : Sommaire de ce que l’on peut accomplir dans le traitement de la maladie chronique de Bright, L'auteur passe en revue les différents cas dénommés « maladies de Bright ». Dans le cas de cirrhose avancée, de même que dans la dégénérescence graisseuse des reins, dans le cas du rein amyloide, ou dans le gros rein blanc, on ne doit pas compter en général sur la guérison. IL est cepen- dant des cas susceptibles de guérison pratique, par exemple lorsque la cirrhose, au lieu d’être générale est seulement limitée, ou encore lorsqu'elle n ‘affecte qu'un rein, L'auteur cite un cas de guérison complète d’un cas grave de néphrite interstitielle chronique, d’origine syphilitique. Quant à la maladie de Bright à l’état aigu, c'est une maladie curable dans la plupart des cas. L’auteur termine sa communication par l'indication d'un certain nombre de médicaments à recommander dans le traitement dela maladie de Bright. — M. G. Sée : Sur le régime et le traitement des albuminuries. L’au- teur continue et termine sa première communication sur ce sujet (voir la séance précédente) par l'étude des néphrétiques qui sont caractérisés par un retard dans l’équilibration entre les recettes et les dépenses d’azote. L'auteur étudie successivement les aliments d’origine animale et d’origine végétale, et il en indique la compo- sition, la digestibilité et l’action sur l'organisme, Il termine enfin par les indications de thérapeutique alimentaire et pharmacologique spéciales aux cinq groupes d’albumino-néphrétiques établis précédem- ment. — M, Delthil : Sur le traitement antiseptique local de la phtisie pulmonaire par les inhalations gazeuses d'essence de térébenthine iodoformée ou iodolée, Séance du 13 septembre M. Pamard, en réponse à la communication de M. Magitot (séance du 30 août) au sujet des accidents de la dentition, maintient les conclusions de son étude, basées sur des centaines d'observations, et qui confir- ment les règles de la dentition exposées par Trousseau dans une de ses € liniques. — M. Mignot (de Chantelle) rend compte d'une épidémie de cholérine et de quelques cas de choléra nostras qui se sont produits dans son canton. Il signale la disposition générale, sur- venue dans la population, sous l'influence des grandes chaleurs, à contracter une diarrhée aqueuse, à l’occasion de causes accidentelles, Les malades différaient des cholériques en ce que le pouls n’avait pas cessé d’être sensible et qu'il n’y avait eu aucune chute de tempéra- ture, L'auteur conseille, contre la diarrhée et les vomis- sements, Pemploi de la décoction de citron ; il recom- mande aussi les injections sous-cutanées d’ éther et les applications d’eau sédative camphrée forte sur la région dent. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 657 précordiale. — A l’occasion de cette communication M. Brouardel proleste contre l’assertion de M, Mignot aux termes de laquelle le choléra asiatique sévirait ac- tuellement à Paris, Il affirme, en son nom et au nom de ses collègues du Comité de direction du service de l'hygiène, avoir toujours dit tout ce qu’il savait concer- nant la morbidité et la mortalité de l'épidémie. Il n'a fait de réserves que sur la nature de l'épidémie sur laquelle il est impossible aujourd'hui d'émettre une opinion scientifique. — M. Bouchard : Sur les condi- tions pathogéniques des albuminuries qui ne sont pas d'origine rénale, L'auteur signale quelques groupes pa- thogéniques fréquents d’albuminurie, qui dépendent d’un état morbide ou de troubles fonctionnels autres que le rein. Telles sont, l'albuminurie réflexe provoquée par l'excitation des nerfs cutanés, les albuminuries dé- pendant, non de la néphrite chronique, mais de la goutte, du diabète ou de l'obésité, l’albuminurie dyspeptique, celle principalement qui accompagne la dilatation de l'estomac, l’albuminurie hépatique ; quant à l’albuminurie intermittente, on peut dire que toutes les albuminuries qui ne sont pas rénales, sont inter- miltentes. Dans le traitement de ces diverses albumi- nuries on doit viser à combattre non le symptôme mais la condition pathogénique de ce symptôme. — M. H.-B Millard rend compte de quelques observations sur la reconnaissance de petites quantités d’albumine dans l'urine et sur l'existence de la soi-disant albuminurie physiologique. — M. Semmola (de Naples) constate, au sujet de la discussion et des communications de MM. Dujardin-Beaumetz et G. Sée sur le régime ali- mentaire et sur le traitement des albuminuries brightiques, que les conclusions de ces auteurs confir- ment les résultats des expériences faites par lui en 1850. — M. Zune : Sur la filariose. — M. Desprez (de Saint-Quentin) : Sur le traitement du choléra asia- tique par le chloroforme composé. SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du 2% juillet MM. Gley et Thiroloix exposent les résullats de leurs expériences relatives à la greffe du pancréas chez le chien, Ces résultats, identiques à ceux obtenus égale- ment par M. Hédon (voir C. R. du 1°" août, page 595), montrent que la fonction du pancréas, dont l’extirpa- ion entraine la glycosurie, est une fonction de glande vasculaire sanguine, — MM. Dejerine et Sottas citent une observation de syringomyélie présentant cette par- ticularité de s’être développée chez un homme de 55 ans et d’avoir été unilatérale. L’autopsie a fait découvrir une cavité gliomateuse s'étendant dans toute la hau- teur de la moelle, mais seulement à droite. Discus- sion : MM. Hallopeau et Dejerine. — L'étude appro- fondie des réfractions et réflexions dans les milieux de l'œil, a permis à M. Czerny de distinguer, outre les lumières utiles et perdues, une lumière nuisible don- nant lieu sur Ja rétine à une fausse image, très pâle et symétrique de la véritable, Il signale en outre l’existence de deux autres images, dont une nouvelle, Ces trois images, jointes aux quatre classiques, for- ment donc en tout sept images pour l’œil humain, — MM. Magnan et Galippe présentent un héréditaire dégénéré et porteur d'un grand nombre de stigmates physiques, en particulier une malformation de la bouche, constituant une espèce nouvelle d’atrésie, — M. Gley fait connaître les propriétés cardio-vascu- laires de l’anagyrine, alcaloïde extrait de lAnagyris fœ- tida. C’est un puissant excitant du cœur, dont laction ne peut être combattue que par l'injection préalable de chloral dans les veines. — Le même auteur fixe au 30° jour environ l’âge auquel apparait chez le jeune chien la propriété du cœur de tomber en trémulation sous l'influence des excitations électriques fortes, — M. Soulié : Utilité de la recherche deshématozoaires du paludisme ; son importance pour le diagnostic, — M. Lapicque indique quelques nouveaux chiffres con - cernant la richesse en fer du foie et de la rate chez les jeunes animaux. — M. Morat : Sur l'antagonisme de latropine et de la pilocarpine, relativement aux phéno- mènes respiratoires, — M. Bose : Formule urinaire complète de l’attaque d'hystérie, — M, Pilliet : Altéra- tion particulière de la fibre cardiaque observée dans l'empoisonnement expérimental par le sublimé. — M. de Santi : Application dans les pays chauds de la méthode de purification de l’eau par précipitation. Séance du 30 juillet. M. Féré a recherché si, chez les épilepliques, les organes de l’olfaction et de la gustation fonctionnent normalement, Il a constaté que 60 °/, des épileptiques présentaient un affaiblissement des sensibilités spé- ciales, — MM. Langlois et Charrin, en injectant à des lapins par petites doses répétées, des produits solubles du bacille pyocyanique, ont vérifié que la température vitale de l'animal ne variait pas, mais, que par contre, le rayonnement diminuait notablement, En injectant d’un coup une forte dose, le rayonnement tombe presque à zéro, bien avant le début de l’abaissement de température, — MM. Toupet et Segall, ayant étudié le développement des vaisseaux et des globules san- guins dans l’épiploon des embryons de cobayes, pensent que, dans ce lissu, il existe des cellules vaso- formatives distinctes des cellules hémoformatives, — M. Gamaleia présente une préparation d’intestin de chien ayant succombé au choléra expérimental, Les lésions produites sont comparables à celles que l’on trouve chez l’homme. Les chiens qui ne succombent pas acquièrent rapidement l’immunité. Le même auteur a fait de nouvelles expériences sur l’action vaso-mo- trice des produits solubles des bacilles pyocyaniques. On peut guérir rapidement les lésions provoquées par l'injection postérieure des substances diminuant l'in- flammation, — M. Haffkine a expérimenté sur lui et sur quatre autres médecins, son procédé de vaccination anticholérique. Le premier virus a produit un malaise de 24 heures; les suivants une réaction légère seule- ment, L'auteur pense qu'il est maintenant en possession d’une immunité absolue, — M, Moussu a fait un grand nombre de thyroïdectomies sur diverses espèces ani- males, avec un succès presque constant au point de vue de la survie de l’animal.Il a constaté des symptômes semblables à ceux du myxædème. La prochaine séance est fixée au 15 octobre, ACADEMIE ROYALE DE BELGIQUE Séance du % juillet, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Baschwitz : Une identité remarquable, 29 SGiENCES PHYSIQUES, — MM. W. Spring et M. Lucion: Sur la déshydratation, au sein de Peau, de l’hydrate de cuivre et de quelques-uns de ses composés basiques, La température exerce une influence considérable sur la déshydratation. Ainsi la déshydratation spontanée de l'hydrate de cuivre ne s'achève qu'après neuf mois environ à la température de 15°, tandis qu'à 30° elle est complète en 86 heures et à 45° en 38 heures, et même, au-dessus de 54°, lhydrate ne se forme plus. Quand l’hydrate de cuivre, au lieu se trouver dans l’eau pure, est au sein d’une solution de sel, on trouve que la présence de ce sel dans l’eau produit un effet comparable à celui d’une élévation de la température, Quant aux vitesses de déshydratation, on trouve qu'à 45° elles sont à peu près les mêmes pour les chlo- rures des métaux monovalents dont les vitesses de déshydratation sont moitié moindres que pour les chlo- rures des métaux bivalents., De ce qu'une solution de sel provoque le départ de l’eau de lhydrate de cuivre jusqu'à épuisement, les auteurs pensent qu'il est permis de généraliser et d'étendre ce mode d’action aux divers hydrates. Les faits signalés dans ce travail permettent d'expliquer pourquoi certains terrains de sédiment sont formés de composés déshydratés, alors que d’autres sont demeurés à l’état d’hydrates. CHE CHRONIQUE CHRONIQUE LE CONGRÈS D'ANTHROPOLOGIE CRIMINELLE DE BRUXELLES Dans la deuxième semaine du mois d'août dernier, s'est tenu à Bruxelles un CONGRÈS D'ANTHROPOLOGIE CRIMINELLE, sur lequel il nous paraît utile d'appeler l'attention de nos lecteurs. Les questions de criminalité, considérées au point de vue juridique, échappent à la compétence de cette REVUE. Mais les faits d'ordre scientifique découverts ou simplement invo- qués à l’occasion des doctrines criminaltises sont de son domaine et ne peuvent laisser indifférent aueun de ses lec- teurs, Pour cette raison nous nous réjouissons de leur donner la primeur du remarquable Rapport que M. le Pro- fesseur Héger, vice-président du Congrès, vient de consa- crer, sous forme de discours de clôture, à l'examen des travaux présentés. Voici presqu’in extenso cet important document : Pour entrer dans le cœur de toutes les questions traitées, pour proposer une appréciation, il faudrait être compétent; en vérité, cette compétence devrait être appuyée sur une encyclopédie scientifique : il fau- drait être aliéniste avec Magnan, Mendel, Motet, Gar- nier, Voisin, Jelgersma; jurisconsulte avec Gauckler, Van Hamel, Von Listz, Prins; psychologue avec Bene- dikt, Tarde; anatomiste avec Gaudenzi, Manouvrier, Houzé, Warnots; sociologue avec Lacassagne, avec Tarde encore, avec Denis; il faudrait réunir en soi toutes ces compétences, tout ce travail individuel, toutes ces finesses, toutes ces énergies. L'homme qui réaliserait en lui pareille synthèse serait certainement le type de l’anthropologiste-criminel-né. Inutile de vous le dire, je n'ai pas cette prétention Beaucoup de questions de fait vous ont été soumises, et, à part d’inévitables nuances, elles ont été acceptées et entérinées. A ces questions se rattachent, en premier lieu, les constatations relatives aux caractères physiques et moraux des criminels, à leur anatomie, à leur physio- logie, à leur pathologie. Les questions anatomiques qui ont soulevé tant de discussions ailleurs paraissent aujourd'hui définitive- ment classées on ne conteste plus l'existence de tares physiques fréquentes chez les criminels, mais on a re- noncé à considérer jamais telle ou telle de ces tares, ni même leur réunion, comme pathognomonique. Personne ne s’est trouvé ici pour défendre le type cri- minelné, combattu par MM. Manouvrier, Houzé, Warnots. Vous avez pris connaissance des derniers perfection- nements apportés aux méthodes craniométriques et craniographiques par la construction des appareils de M. Benedikt et de M. Gaudenzi. La physiologie du criminel est un sujet moins ex- ploré; M. Lacassagne vous a exposé un classement basé sur la physiologie cérébrale; divisant les crimi- nels en frontaux, pariétaux, occipitaux, il rattache sa théorie cérébrale aux essais de Gall et aux travaux d’Auguste Comte ; il estime que l’étude du fonctionne- ment cérébral des délinquants doit être prépondérante, et il trouve même que l’on s’est trop occupé de leur anatomie. M. Lacassagne pourrait trouver cependant dans cette anatomie du crâne, si bien étudiée par nos prédécesseurs, plusieurs arguments en faveur de sa thèse : je veux parler surtout du développement de la région pariéto-occipitale et de la hauteur du crâne, si marqués chez beaucoup d’assassins. Mu Tarnowsky, dans une consciencieuse étude sur les organes des sens chez les femmes criminelles, nous a montré qu’elle sait appliquer avec rigueur les prin- cipes de l’expérimentation physiologique la plus ar- due ; il me sera permis de la féliciter, de la remercier d’être venue parmi nous et dela donner comme exemple à ses confrères du sexe fort. Le premier sujet traité parmi ceux qui se rappor- taient en même temps à la pathologie et à la psycho- logie des délinquants, était, vous vous en souvenez, l’obsession criminelle. Avec MM. Magnan et Ladame, vous avez fait l’analyse de ces états psychologiques si profondément intéressants. Magnan vous a dépeint, en un saisissant tableau clinique, la situation de ces mal- heureux qui se rendent compte du mal qu'ils font, et sont impuissants à s'empêcher de nuire. M. Garniera insisté sur la période de lutte intérieure avec ses victoires passagères, son naufrage final et la « décharge motrice » amenant le soulagement. L’ob- session morbide, l’idée fixe, se loge de préférence et s'installe en maitresse dans le cerveau des dégénérés. Ce fait ayant été généralement reconnu (sauf par le D' Näcke qui considère plutôt l’obsession comme un symptôme de maladie mentale survenant même chez les non-dégénérés), vous en avez discuté la fréquence. M. Benedikt vous a déclaré qu’on peut observer sou- vent l’obsession chez les criminels, surtout chez ceux qu'il appelle les « récidivistes honnêtes ». M. Näcke n’est point de cet avis. La pathologie du criminel confine à la médecine mentale ; c’est un aliéniste, M. le D' Jelgersma, qui in- troduit ici cette thèse que le criminel ne doit pas être considéré comme un martyr de l’hérédité, comme une victime de l’atavisme, mais avant tout comme un ma- lade. Il identifie le criminel-né avec le « fou moral » de Préchard. Tel n’est pas l'avis de M. Masoin, ni celui de M. Dektereff, ni celui de plusieurs autres aliénistes ; après une intéressante discussion, la question est restée entière et aucune conclusion positive n’est ressortie de ces débats. La thèse de M. le D' Jelgersma sera discutée long- temps encore : la classification des maladies mentales n'est pas bien établie, et pour cause; nous devrions, pour faire une classification nette, pouvoir la baser sur la physiologie pathologique du cerveau et sur les loca- lisations cérébrales ; toute classification basée seule- ment sur les symptômes comporte des états intermé- diaires qui prêtent à discussion. Vous avez entendu aussi la lecture d'une communi- cation de M. Cuylits sur l’origine morbide des carac- tères reconnus chez les criminels-nés. Ensuite, une grave question de physiologie et de pa- thologie mentale a été abordée : la suggestion a fait l'objet des rapports de MM. Benedikt, Voisin et Bérillon. M. Benedikt ne croit pas à la suggestion, en ce sens qu'il ne voit pas dans les faits qu'il lui a été donné d'observer ou de connaître, un ensemble suffisamment précis, suffisamment défini, pour être dès maintenant soumis à une critique scientifique. M. Mendel prévoit que l'ère des guérisons par l’hyp- notisme et la suggestion sera courte; il n'a aucune confiance dans l’efficacité réelle de ces pratiques. M. Crocq n’est pas loin de partager cet avis, et il in- siste surtout sur les dangers de l’hypnotisme, La suggestion, contestée ainsi jusque dans sa réalité, trouve d’énergiques défenseurs dans MM. Voisin, Béril- lon, Ladame, Houzé, Masoin. Tous, d’ailleurs, s'accordent à reconnaitre que la suggestion hypnotique doit être employée avec circons- pection par le médecin. Peut-on, comme M. Voisin croit l'avoir prouvé, faire CHRONIQUE 659 exécuter des actes criminels par suggestion hypno- tique? En pareil cas, qui faut-il punir? M. Voisin estime que l'hypnotiseur déshonnète, qui a suggéré le délit ou le crime, n'échappe pas à la ré- pression : on pourra fout au moins le connaître en hyp- notisant l'individu qui a commis l'acte délictueux ou criminel; dans cet état second, celui-ci avouera le nom de celui qui l’a poussé au mal. Pendant que M. Masoin tranche affirmativement la question de savoir si la suggestion hypnotique est as- sez efficace pour provoquer l’accomplissement d’un vé- ritable crime, M. Motet, au contraire, ne croit pas qu'un homme normal puisse être amené à commettre un crime par le seul effet d’une suggestion. Ilestime que la ques- tion n'est pas mûre ; il faut le croire, car, la discussion terminée, chacun garde son opinion. Avec le rapport de M. Dallemagne sur létiologie fonctionnelle du erime s'ouvre, dès le premier jour,un horizon tout autre que celui qui se limite à l'individu; le crime, dit M. Dallemagne, est un fait biologique et social. Les développements qu'il donne à sa pensée prouvent qu'il s’est bien rendu compte de la complexité du problème soulevé par cette définition d'apparence si simple. Tout phénomène biologique est complexe : Le moindre animalcule, c’est l'infini vivant. L’un de vous a eu rai- son de dire que celui qui ne voit pas cela, celui qui croit comprendre la vie ne lient pas compte de tout ce qu'il ignore, Mais, si compliqué que soit le grumeau de protoplasme qui représente un être, les histologistes n'ont-ils pas abordé le problème de sa structure? Ne l’ont-ils pas rendu accessible même aux étudiants ? Nous trouvons dans les sciences astronomiques des exemples plus frappants encore de solutions exactes données par de patientes recherches télescopiques et spectroscopiques aux problèmes originairement les plus complexes; n’avons-nous pas vu analyser jusqu’à la lumière solaire elle-même? Il ne faut donc pas se rebuter sous le prétexte que le problème est trop difficile ou trop complexe : M. Dal- lemagne a braqué le télescope sur la nébuleuse, et je l'en félicite. Chemin faisant, il a rencontré de graves questions de principe qui ont éveillé aussitôt l'attention de las- semblée entière; il ne se produisit cependant, le premier jour, qu'une joute préparatoire, où le dé- légué de la Chine vint nous apporter le concours de ses lumières; c’est le lendemain, à la lecture du rapport de M. Drill, que la discussion s’engagea sur le fond, 5 M. Drill a tenté de formuler les principes fondamen- taux de l'Ecole d'anthropologie criminelle ; il a opposé la « vieille école classique du droit criminel » à l’école positiviste d'anthropologie criminelle. Vous n’attendez pas de moi, Messieurs, le résumé de l’intéressante discussion qui a suivi; elle est encore toute fraiche dans votre souvenir : il y a eu des expli- cations sincères et complètes, des oppositions éner- giques; vous avez entendu ces dernières se produire par l'organe de MM. Cuylits, Zakrewsky, Meyers; je ne veux les rappeler ici que pour insister sur l'attitude prise aussitôt, et comme d'instinct, par l'assemblée entière. Permettez-moi de m’arrêter sur ce point, car il est capital. En premier lieu, vous avez laissé hors de cause la querelle de l'Ecole italienne, et après avoir entendu prononcer contre elle ce que M. Garnier appelait un « réquisitoire », vous avez trouvé, avec M. Tarde, qu'auprès de vous les absents ne doivent pas avoir tort, Vous avez trouvé aussi qu'il ne faut jamais person- nilier une science dans un homme, quel qu'il soit, quel que soit son génie. D'ailleurs, vous vous êtes associés aux témoignages rendus à l’initiative persévérante des Lombroso et des Ferri, Messieurs, lorsque Moleschott, au Congrès de Paris, prit la présidence de la séance d'ouverture, il erut de son devoir d’insister sur la continuité de nos congrès, sur le lien qui les rattache et les fait dériver l’un de l’autre. M, Drill exprimaitlamême pensée en vous disant: Si nous sommes ici, nous troisième Congrès d’anthro- pologie criminelle, nous le devons à l'initiative, à la poussée donnée par les savants italiens. N'obéissons pas à la « suggestion du nom », comme disait M. Tarde, mais acceptons l'idée : ne dérivons- nous pas directement du Congrès de Rome? Si nous avons pu, pendant ces quelques jours, échangeravec fruit et agrément nos idées, c’est aux fondateurs du Congrès de Rome que nous le devons : c’est un fait, sans eux nous ne serions pas ici! Quelques-uns se sont demandé à ce propos, et sur- tout en voyant l'extension prise par ce troisième Con- grès, quelques-uns, comme M. Gauckler, ont demandé : « Sommes-nous encore l'anthropologie criminelle? Avons-nous évolué au point de différer de notre aïeul ou marchons-nous toujours dans la voie qu'il nous a tracée ? » La réponse est facile à donner : ouvrons les Comptes rendus du Congrès de Rome, page 55; j'y trouve ces passages : « À l’heure actuelle, que veut l'Ecole anthro- « pologique? Elle désire apporter la méthode et la « rigueur scientifique dans l’étude des questions de « criminalité, Les métaphysiciens et les juristes ont « créé les entités pénales...; pour nous, il n’y a pas de « crimes, il n'y à que des criminels, ce sont eux que « nous voulons étudier et connaître, » Qui s’exprimait ainsi? C’est M. Lacassagne, rappelant un mot célèbre de Corvisart : « Il n’y a pas de maladies, il y a des malades. » N'est-ce pas encore ce que nous disons aujourd'hui? Qu'importe que les uns insistent davantage sur l'anatomie ou la physiologie, les autres sur les fac- teurs sociaux de la criminalité? Le premier Congrès de Rome avait à sen programme la sociologie criminelle comme nous l'avons aujourd’hui. Et si nous avons vu ici MM. Tarde, Van Hamel, von Litz, Prins, nous donner de sages conseils, si nous avons entendu l’un d’entre eux dire à un magistrat cette parole qui restera : « Faites venir le médecin pour apprendre à douter», n'a-t-on pas vu de même, à Rome, un célèbre juriste, M. de Holtzendorff, venir constater, en s’en félcitant, cette alliance étroite qui se préparait entre la science juridique et les sciences médicales? Tant que sera maintenue cette alliance féconde, lan- thropologie criminelle vivra : elle est née de cette union, elle est née à Rome; beaucoup de ceux qui m'écoutent assistaient à son glorieux baptême. Il y a eu, il y aura toujours des querelles d'Ecole; elles paraissent indispensables à la vie de la science comme les crises de croissance à la vie de l’individu ; celui-ci peut en sortir agrandi, fortifié. Tel est le cas pour ce Congrès d'anthropologie criminelle; soyons donc reconnaissants à nos parents d’être aujourd'hui si bien vivants. La discussion sur les «principes » de l'anthropologie criminelle présentait encore d’autres écueils, et surtout ce vieil écueil : l'opposition de méthode, les arguments métaphysiques, le libre arbitre. Nous n'avons pas à regretter qu'un tel conflit ait été soulevé, car vous avez vu qu'il s’est heureusement terminé et vous avez tous applaudi à ces propositions de conciliation basées sur le respect des convictions de chacun et sur une con- vergence efficace dans les questions d'application. Nous ayons yu un jeune prètre venir à nous et nous offrir son concours dans tout ce qui peut servir la cause de l’anthropologie criminelle; un magistrat du fond de la Flandre a écrit à notre président, vous vous en souvenez, une lettre touchante pour nous dire : « Je suis avec VOUS ». Conciliation basée sur le respect des convictions in= tégrales de chacun, association efficace dans les ques- tions d'application, abandon des discussions stériles pour faire un grand effort, un grand progrès; efface- ment de tous les dissentiments de nationalité, de tous 660 CHRONIQUE les conflits, c'est beau, Messieurs, c'est fort beau. c’est un rêve! Mais que cet idéal s'affirme, qu'il soit senti par cha- cun, ne fût-ce qu'un jour, ne fût-ce qu'un instant, c'est déjà quelque chose, car la dignité humaine s’en trouve agrandie, Et comme toute impression, si fugitive qu’elle soit, laisse après elle sa trace, nous agissons mieux ensuite parce que nous avons entrevu cet idéal. Ainsi, ce grand résultat a été obtenu : des barrières sont tombées, des hommes appartenant aux opinions les plus opposées ont décidé de marcher vers un but commun : l'amélioration de la société. Et, résultat non moins désirable, d'autres barrières ont été maintenues ou élevées, car on ne peut être l’allié de tout le monde Ces barrières maintenues parce qu'on les reconnait nécessaires, ce sont celles qui séparent le présent du passé, | « Ecole d'en arrière », comme le disait Bene- dikt dans son pittoresque langage, de l « Ecole d'en avant ». Il n’y à pas de place ici pour les écoles intransi- seantes, qui refusent d'avancer avec nous, qui refusent d'accepter au jour le jour les résultats précis de la science expérimentale : nous ne faisons, nous ne ferons jamais aucune concession sur la méthode. Comment traduire en fait tous ces beaux sentiments? Comment aboutir à cette sanction pratique sans la- quelle ils n'auraient qu'une valeur éphémère? Mes- sieurs, votre Congrès n'a pas négligé ce point de vue; le désir d'arriver à des mesures efficaces, la volonté d'améliorer les lois pénales et l'administration se sont affirmés de toutes parts; c’est même la dominante de ce troisième Congrès, que cette tendance vers les solu- tions pratiques urgentes; telle, en premier lieu, cette idée de la décentralisation de la justice et de la mul- tiplication des juridictions locales, développée par M. Prins. Souvenez-vous aussi des rapports de M. Gauckler sur l'importance relative des éléments sociaux et des élé- ments anthropologiques dans la détermination de la pénalité ; du rapport de M. Garnier sur la nécessité de l'examen psycho-moral de certains délinquants; des rapports de MM. Van Hamel, Thiry, Maus, sur les me- sures à prendre vis-à-vis des incorrigibles; n'est-il pas vrai que les solutions approchent, qu'on les sent venir et que quelques-unes sont là, nettes et précises ? Parmi celles qui s'imposent, je citerai les mesures qui concernent l'enfance criminelle : « L'étude de la criminalité chez l'enfant, vous disait M. Motet, démontre la nécessité d’une répression plus efficace, qui appuierait les décisions judiciawres sur les données de la science. » Dans le même ordre d'idées, le discours de M. Legrain a été bien instructif, et nul doute qu'il ne fasse germer dés réformes utiles. Vous avez aussi donné votre assentiment à la création d’asiles spéciaux pour les aliénés délinquants ; les conclu- sions présentées par MM. De Boeck et Otlet ont été ap- prouvées avec raison : sans doute, le jour n’est pas venu où les prisons seront comparables à des « observa- toùres psychologiques », selon l'expression dé Mauds- ley; en attendant, il faut créer de tels observatoires dans les asiles spéciaux. Sil y a dans l'anthropologie criminelle un fondement sérieux, si tant de travaux ont abouti à prouver que les soi-disant criminels ne sont pas toujours des cou- pables, mais souvent des déshérités de la nature, des dégénérés, des mal conformés, et souvent aussi des aliénés et des épileptiques, il faut que ces travaux aient une sanclion, Je lai dit, il y a onze ans, se borner à reconnaitre « que cela est et continuer à confondre les criminels « dans l’uniformité de la peine à subir », ce serait un non-sens ; quelque chose est changé dans nos apprécia- tions sur le crime, sur sa nature, sur ses éléments ; quelque chose doit changer dans notre manière de combattre le crime, de le réprimer et de le prévenir. Changer nos lois ? Renverser les codes! M. l'avocat de Baets vous l’a dit en excellents termes : « Ne làchez « pas le Code pénal, mais rajeunissez-le, rendez-le pra- « tique ». « Ce qu'il faut poursuivre, disait Garofalo à Rome, « ce sont des essais d'application qui, sans détruire le « système des lois existantes, les rapprochent un peu < du vrai but qu’elles doivent avoir : l'utilité sociale, » Je pense, Messieurs, que la plus urgente des appli- cations actuellement en vue est la création des asiles spéciaux; ils sont un élément de cet ensemble qui pré- pare l’individualisation de la peine. à J'aurais encore, pour terminer ma tâche, à vous en- tretenir de plusieurs objets importants, mais vos mo- ments sont comptés, je dois abréger. Qu'il me soit permis cependant, en terminant, de vous rappeler d’une facon toute spéciale les travaux qui vous ont été communiqués dans notre séance solen- nelle par MM. Hector Denis et Tarde, + M. Denis vous a démontré l’effrayant parallélisme qui existe entre la criminalité et le prix du pain ou le taux des salaires : lorsque le prix du pain augmente ou que le taux des salaires diminue, en un mot lorsque la crise économique sévit, les crimes augmentent; en même temps, la matrimonialité diminue comme la natalité. L'homme traqué par la misère devient aisé- ment criminel ; les courbes se superposent avec une netteté qui est une démonstration poignante. ; On a parlé parfois de l'éloquence des chiffres, la voilà; et du même coup, voilà bien la preuve que Labor improbus omnia vineit. Par quel labeur ingrat on arrive à ces synthèses, ceux-là seuls qui ont peiné dans les mêmes chemins peuvent l’apprécier. Réduire en un diagramme les phénomènes sociaux, traduire le phé- nomène biologique le plus complèxe par une ligne qui exprime sa loi, c’est la pensée de Quetelet réalisée par Denis : c’est la Physique sociale. M. Tarde a un autre genre d’éloquence : il excelle aussi dans l'analyse profonde et pénétrante des phéno- ‘mènes sociaux; comme on voit sous l'effort d’un puis- sant télescope une nébuleuse se résoudre en étoiles brillantes, j'allais dire en « avenues de soleils », selon l'expression de notre regretté Houzeau, on entre avec M. Tarde dans le drame social et l’on est tout surpris d'y voir clair. Une telle précision, une telle lumière, dans des phéno- mènes aussi impalpables et flottants que la criminalité des foules, nous donnent l'espoir que vraiment l’intel- ligence humaine saura déméler et résoudre les redou- tables problèmes soulevés par l'étude de l’anthropo- logie criminelle. Messieurs, quand on entend de tels hommes, quand on assiste à un congrès comme celui-ci, on sent que les injustes défiances sont tombées ; le temps n’est plus où l’on nous considérait comme les défenseurs « obsti- nés des coupables !»;c’en est fini de cette légende. On le sait, on le voit aujourd’hui : nous sommes tous ici les défenseurs, non pas de tel ou tel ordre établi, mais de la société elle-même menacée par le crime, Et maintenant, tâächons, comme le souhaitait M. van Hamel, de faire une société qui mérite d'être dé- fendue ! Dr Pauz HÉGER, Professeur de Physiologie à l'Université de Bruxelles. 1 Rome, discours d'ouverture, Lombroso, page 50. EE DT 1e MR EU Le Directeur- Gérant : Louis OLIVIER PRE —— Paris. — Imprimerie. Levé, rue Cassette, 11. Le 4 3° ANNÉE N° 19 15 OCTOBRE 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LES PROJECTILES PRIS AU VOL MÉTHODE POUR L'ÉTUDE DES MOUVEMENTS DANS LES GAZ ! Il arrive souvent en Physique d'entreprendre une série d'expériences par simple: amour de Part, et pour le plaisir de vaincre les difficultés, puis de trouver, au cours des recherches, tant de particu- larités intéressantes que l’on est finalement récom- pensé de son travail par des résultats considérés au début comme de simples sous-produits. Cest ce qui m'arriva lorsque, après MM. Mach et Sal- cher, j'eus attaqué le problème de la photographie des projectiles en marche. La photographie instantanée est un puissant moyen d'investigation, puisqu'elle nous révèle des phénomènes fugitifs qu'aucun autre moyen d'obser- vation ne nous permettrait d’éludier ou même de pressentir. Qu'il me suflise de rappeler ici les admirables travaux, bien connus des lecteurs de la Revue ?, consacrés par M. Marey à l'étude de la machine animale. Mais le degré d'’instantanéité d’une opération photographique peut être très différent. On nomme KE ! M. Boys F. R. $S. nous a récemment montré, dans son laboratoire du Royal College of Science à Londres, ses ad- mirables expériences sur ce sujet. [l voulut bien alors nous promettre d'en réserver la description écrite à la Revue géné- rale des Sciences, après en avoir fait l’objet d’une communi- cation orale au Congrès de la British Association à Édim- bourg. Nous le remercions vivement de cette précieuse fa- veur. — Les figures qui accompagnent cet article sont des reproductions héliographiques sans retouche des photographies originales, sur verre, de M.Boys. (Nole de la Direction). 2 Voyez à ce sujet la Revue du 15 novembre 1891, t. IN, p. 609 et suiv. REV ,Æ GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. communément photographie épreuve prise en un dixième instantanée une ou un centième de Fig. 1. — Œil photographié à l’éclair magnésique. La pupille était dilatée par le séjour à l'obscurité. seconde. Pour l'étude de la plupart des mouve- ments des êtres animés, le millième ou le dix- Fig. 2, — Œil photographié à la lumière ordinaire, millième sont suflisants. Mais une balle de nos fusils actuels parcourt 600 mètres en une seconde, et 6 centimètres en un dix-millième de seconde; une 19 662 C.-V. BOYS. — LES PROJECTILES PRIS AU VOL telle durée d'exposition donnerait une simple ombre vague sur la plaque. Avec un millionième de seconde, l'image serait indistincte à l'avant et à l'arrière, et les phénomènes qui accompagnent le passage de la balle dans l’air perdraient toute délicatesse; il est donc nécessaire de diminuer la durée de l’exposition au delà de cette limite; je dirai tout à l'heure comment on y parvient; mais je voudrais d’abord donner deux exemples très Se Fig. 3. — Veine liquide photogra- phiée à l'aide d’une étincelle électrique. différents des résultats scientifiques obtenus par la photographie instantanée. Le premier (fig. 1, page 661) ! est l’image d’un œil exposé pendant un certain temps à l'obscurité et illuminé subitement par un éclair magnésique. La pupille est restée dilatée, tandis qu'elle est toute petite dans l’œil de la figure 2, photographié avec un éclairage ordinaire; je n’insisterai pas sur les avantages que les oculistes pourraient Lirer de ce procédé pour l'examen de l'œil. La figure 3 représente une veine liquide à l'ins- tant où elle se résout en gouttelettes; la forme pas- sagère de chaque goutte est parfaitement nette; 1 Cette figure est empruntée à un travail récemment publié. x. — Photographie d’une balle obtenue étincelle de trop longue durée. cette épreuve a été faite à l’aide d’une étincelle électrique; mais, comme le mouvement est nul relativement à celui d’un projectile, une étincelle ordinaire suffit !, Le mème degré d’instantanéité appliqué aux pro- jectiles produit une image (fig. 4) dont on ne peut tirer aucun parti. Il est clair du reste qu'aucun dispositif méca- nique ne permettrait d'obtenir une durée d’expo- OS E avec une ) B P =. Fig. 5. — Schéma des appareils. — C, grand conden- sateur, c petit condensateur. L’étincelle excitatrice éclate en E/, l’étincelle active en E.La balle B ferme le circuit. P, plaque photographique. silion suffisamment courte, et que seule l’étincelle électrique permet de résoudre le problème; or l'exemple ci-dessus nous montre que même une élincelle peut être cent fois trop lente pour don- ner un bon résultat ; l'étincelle doit êlre brillante en même temps que de très courte durée; la con- dition est donc que le circuit dans lequel elle éclate ail une assez grande capacité, en même temps qu'une induclion propre extrêmement pe- tite ; en un mot, il doit donc contenir un condensa- teur, et êlre court. D'autre part, le seul moyen d'obtenir l’étincelle au moment voulu est de faire 1 Voir Boys, Bulles de savon, traduction Guillaume (Gau- thier-Villars 1892). mr ER C.-V. BOYS. — LES PROJECTILES PRIS AU VOL 663 fermer le circuit par la balle elle-même; mais, si l’étincelle active éclate dans le cercle ainsi com- plété, elle est trop rapprochée, ou bien le circuit est trop long et surtout l’élincelle qui éclate près de la balle est si brillante que la plaque est forcé- ment voilée; il faut donc avoir recours à un artifice particulier; voici la disposition à laquelle je me suis arrêté : une solution de chlorure de calcium. Le grand con- densateur peut se décharger par E, E', tandis que le petit se ferme sur E' B. Lorsqu'une balle, pas- sant en B, met les fils en communication, le con- densateur c se décharge en produisant uné pelite étincelle en E!; la résistance du circuit, de G est subitement diminuée, et le grand condensaleur devient capable de se décharger par E'etE. L'élin- ; Fig. 6. — Vue générale des appareils servant à la photographie des projectiles. (A gauche, l'opérateur tire dans la caisse qu’on voit au centre de la figure. Cette caisse, ordinairement fermée pour consti- tuer une chambre noire, est ici représentée ouverte afin de montrer sur son bord interne (le œauche) la plaque photo- graphique. L’étincelle active éclate à l'extrémité de Vappendice rectangulaire visible à droite de la caisse. L'appareil qui produit cette étincelle est celui qu’actionne un aide vers la droite de la figure.) Un grand condensateur C (fig. 5) est en con- nexion avec un autre plus petit ec; les armatures ==] Fig. 7. — Soupape électrique de sureté, (Les deux boules sont reliées aux bornes du circuit élec- trique. Celle de droite porte une vis de réglage. L’effluve, allant de cette vis vers la boule de gauche, maintient le potentiel au-dessous de la valeur dangereuse, extérieures sont en court-circuit, tandis que les autres sont réunies par un fil de coton trempé dans celle E' est cachée par un écran, tandis que l’autre élincelle projette l'ombre dela balle sur la plaque P. Durant la charge du système, les condensateurs 12 indh Rama , PE. Shasle FE Re le Fig. 8. — Photographie, obtenue à l’aide du miroir tournant, d’une étincelle électrique de courte durée. (La partie brillante de Vétincelle ne correspond qu’à une petite fraction d’une division de l'échelle des temps. Cha- cune de ces divisions représente un millionième de se- conde). Cet c ont leurs armatures respectivement au même potentiel, l'équilibre se faisant par le morceau de fil ; bib 664 C.-V. BOYS. — LES PROJECTILES PRIS AU VOL É mais la décharge est de trop courte durée pour que ce mauvais conducteur y prenne aucune part, et la charge entière du condensateur C passe par E et E'. On sait, d'autre part, que, pour une lon- : gueur donnée, l’élincelle en E est plus brillante si le cireuit contient une autre interruption que s'il est complet. Cet arrangement réunit donc tous les avantages. La figure 6 (page 663) montre la disposition de l’en- semble des appareils; c'est dans la boîte ouverte au Fig. 9. — Photographie d’une balle de fusil à magasin lorsqu'elle est près de suffire à la décharge spon- tanée. Dans certains cas, j'ai jugé utile de munir l'appareil d’une soupape électrique, représentée dans la figure 7 (page 663). En avançant plus ou moins la vis, on règle sa position de telle sorte que l’effluve suffise pour maintenir le potentiel au- dessous de la valeur dangereuse. Dans les expériences dont j'ai parlé au début, MM. Mach et Salcher se servaient d'une chambre noire et oblenaient des épreuves très petites. La L : vitesse — 600 mètres par seconde. .(L’air comprimé produit les ondes qui partent de l'avant et de l'arrière du projectile. Les lignes fortes et sinueuses que l'on voit au-dessous de la balle sont produites par l'ombre des fils du circuit électrique. Les gros fils sont en cuivre, les petts, qui les terminent, sont en plomb). milieu de la figure que se trouve la plaque. La balle y entre en perçant un papier qui ferme l’ou- verture du côté de l'opérateur. Pour que l'expérience réussisse comme je viens de la décrire, il est nécessaire que la différence de potentiel produisant l’étincelle soit comprise entre certaines limites : si elle est trop faible, l’étincelle active n’éclate pas; si elle est trop forte, elle part sans être excitée, et la plaque est perdue. Lord Rayleigh, dans des expériences analogues sur la rupture des bulles de savon, se servait d'un petit électroscope en dérivation sur le condensa- teur; mais, lorsqu'on a une machine statique d'un débit régulier, il est beaucoup plus simple de compter les tours de roue, et d'arrêter la charge méthode de projection que j'ai employée donne des images un peu agrandies ; la plus grande sim- plicité des appareils m'a permis d'attaquer des problèmes plus divers. È <—< Fig. 10. — Schéma montrant la relation qui existe entre la vitesse de la balle, la vitesse du son et l’inclinaison des ondes sur la trajectoire. Le circuit que je viens de décrire peut être étu- dié, au point de vue de son eflicacité, par un pro- cédé indirect permettant de fixer d'avance les conditions dans lesquelles on peut obtenir de bons . 4 C.-V. BOYS. — LES PROJECTILES PRIS AU VOL 665 résultats; il suffit, pour cela, de photographier rieure à un millionième de seconde; mais, une T étincelle active, étalée “ne à l'aide d’un | petite portion seulement, celle qui passe pendant Fig. 11. — Photographie d’une balle dans un ‘milieu très dense constitué par de l'acide carbonique saturé de vapeur d’éther. (Les ondes sont de ce fait beaucoup plus inclinées que dans la figure 9.) miroir tournant. La figure 8 (page 663) représente | le premier dixième de ce temps, est assez intense une image ainsi obtenue avec un miroir faisant | pour produire l’image du projectile; le reste est Fig. 12. — Photographie d’ une balle de fusil Martini-Henry lancée entre deux plaques de tôle, montrant la propagation d’une onde aérienne dans un espace limité. (En avant de la balle on voit l'onde frontale. Les nombreuses stries que l’on remarque eutre les tôles ou à l’extérieur sont dues à des réflexions des ondes sur les parois de la caisse et sur les tôles elles-mêmes.) 512 tours par seconde ; l'échelle tracée au-dessous | presque inactif. La durée efficace de l’étincelle montre que la durée totale de l’étincelle est infé- | est d'environ} de seconde. he ne 666 Dans toutes les photographies que je vais décrire se trouve l'ombre des fils que la balle relie pour produire l'étincelle; cette ombre est gênante, mais il est impossible de l’éviter. J'ajouterai seu- lement, comme détail pratique, que le conducteur est terminé par de petits fils de plomb, les seuls qui m'aient donné de bons résultats. La figure 9 (page 664, reproduitune photographie, sans aucune complication, du projectile d’un fusil à C:-V, BOYS. — LES PROJECTILES PRIS AU VOL pas toujours, comme le montre une expérience très simple. Si nous plongeons une aiguille dans une cuvette d'eau tranquille, et si nous la déplaçons avec une faible vitesse, elle ne laisse aucune trace ; mais, si nous la faisons mouvoir de plus en plus vite, ilarrivera un moment où une onde apparaîtra ; ce moment est précisément celui où l'aiguille pos- sède la vitesse de propagation d’une ride à la sur- face de l'eau. Il en est de même dans l'air, où les Fig. 13. — Photographie des ondes aériennes, coupées perpendiculairement ou obliquement par des plans. (Dans la rencontre perpendiculaire, il n'y a pas de réflexion. Dans la rencontre oblique, l'onde se réfléchit, et les régions sombres et claires sont interverties. Vers le bas de la figure, à droite, on remarque que l’arête de la tôle a produit une diffraction.) magasin avec une vitesse de 600 mètres par seconde. La netteté de l’image nous montre la courte durée de la pose; mais, ce qui est surtout remarquable, ce sont les doubles lignes sombres et claires partant de l’avant et de l’arrière de la balle, et qui rendent compte des perturbations occasionnées dans l'air par le passage du projec- tile. Ces ombres rappellent absolument les deux vagues produites sur une eau tranquille par le passage d'un bateau dont la poupe se termine brusquement; le remous que l’on voit dans le pro- longement de la balle est analogue au sillage laissé par le bateau. Ces ondes ne se produisent ombres singulières de la figure 9 nesont engendrées que par des balles dont la vitesse est supérieure à celle du son. Mais, comment l’air produit-il cette ombre? La lumière traversant des couches d'air de densités très différentes est réfractée et rejetée à l'intérieur de l’onde, où elle produit une ligne lu- mineuse. Tout le monde a vu les stries qui se pro- duisent au-dessus du verre d’une lampe ou sur une route exposée au soleil ; les phénomènes que nous décrivons sont de même nature. Un caleul très simple nous montrera beaucoup plus nettement ce que nous révèle l'étude de ces ondes. C.-V. BOYS. — LES PROJECTILES PRIS AU VOL à …__ Fig. 14. — Décharge d'un fusil de chasse äZcanon cylindrique. Chaque grain de grenaille; produit une onde. L'onde frontale, à gauche, est due au mélange de l'air et des gaz de la poudre La bourre, située à droite, suit la décharge.) Fig. 15. — Première phase de la traversée d’une plaque de verre par une balle. (Le verre, pulvérisé, est rejeté à l'arrière. Les lignes, très peu visibles de part et d’autre de la plaque de verre, sont dues à la vibration de cette plaque. Le réseau d'ondes, au centre de la figure, est produit par des parcelles de carton précédemment pulvérisé par la balle et dont on voit, tout à droite, les plus gros fragments). 668 C.-V. BOYS. — LES PROJECTILES PRIS AU VOL d'une plaque de Fig. 16. — Deuxième phase de la traversée verre par une balle. (Les ondes qui ont atteint le bord de la plaque reviennent vers le centre.) Considérons (fig. 10 page 664) une balle allant de À vers B. Au moment où elle atteint le point A, Fig. 17. - entraine un nuage de verre pulvérisé. La plaque commence à se dés accusée, Les stries très faibles à la partie supérieure de la figure sont produites par la vibration de la plaque.) (Le projectile { l'onde part de ce point et rayonne dans toutes les di- rections ; la même chose se produit pour tous les points compris entre À et B; la ligne C B est l'enve- loppe de ces ondes. Tandis que la balle a décrit le chemin A B, l'onde a parcouru la distance A C, et les longueurs AC et BG sont dans le rapport des deux vitesses ; nous aurons donc la relation : ABC vitesse du :8? 4 vitesse du projectile Pour montrer le parti que l’on peut tirer de cette relation, j'ai rempli la caisse d'expérience d'acide carbonique et de vapeur d’éther. La figure 11 (page 665), obtenue dans ces conditions, présente des ondes beaucoup plus inclinées ; la mesure de leur inclinaison, comparée à la précé- dente, nous donnerait la valeur de la vitesse relative du son dans l'air et dans le mélange lourd de la dernière expérience. Les conditions de la propagation des pressions dans un espace clos ne sont pas les mêmes qu'à l'air libre ; c’est pourquoi il est intéressant d’exa- miner l'onde frontale de la figure 12 (page 665), produite par le passage d’une balle de Martini- Henry entre deux plaques de cuivre mince. La vitesse du projectile n’est ici que de 395 mètres par seconde, et l’on voit, à l'extérieur des plaques, deux ondes faibles et très peu inclinées. AA, RAR ER NE ECS ÈS dei mé Troisième phase de la traversée d’une plaque de verre par une balle. sréver, L’onde frontale est fortement C.-V. BOYS. — LES PROJECTILES PRIS AU VOL NPA ET CES 2 n 669 La figure 13 (page 666) est plus instruclive, parce qu'elle nous montre des ondes se propageant sans réflexion sur une plaque, qu’elles coupent presque perpendiculairement(partiesupérieure delafigure), et, au contraire, des ondes réfléchies avec la netteté d’un rayon lumineux par une plaque coupée oblique- ment. On voit même, — ce que l’on pouvait prévoir — que les régions sombres et claires des ondes se sont inversées par la réflexion. Mais, la particu- larité la plus curieuse de cette épreuve se voit à l'extrémité de la plaque horizontale. L'onde, coupée par le bord de la tôle, se partage en deux parties : l’une continue au-dessous, l’autre se réfléchit ; puis, entre deux, nous voyons les ondes re- courbées par une sin- gulière perturbation du phénomène qui se produit au bord du mi- roir. Je ne crois pas exagérer l'importance de ce phénomène en disant que son étude systématique nous en- seignera quelque cho- se sur la propagation du son au voisinage d’un obstacle ; qui sail? sur la diffraction de la lumière peut-être. Je passerai rapide- ment sur la figure 14, qui nous montre la dé- charge d’un fusil de chasse; la bourre suit de près la grenaille, et l’onde frontale est produite autant par les gaz de la poudre que | par cette dernière. J'insisterai seulement à ce pro- pos sur la possibilité de l'étude, par la photogra- phie, de la balistique du fusil de chasse; l’une des projections orthogonales de la décharge se voit sur la cible, la photographie nous donne la seconde. La figure reproduite ici correspond à ‘un canon cylindrique. Le cäoke bored, légèrement conique à la bouche, donne une décharge plus ramassée. J'ai étudié avec quelques détails les diverses périodes de la traversée d’une plaque de verre, que représentent les figures 15, 16, 17 et 18. Dans la première, la balle est à peine engagée dans la plaque; elle rejette de toutes parts en arrière. le verre pulvérisé, et produit déjà une onde frontale REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, Fig, 18. — Quatrième phase de 1 verre pulvérisé.) a traversée d’une plaque de verre par une balle. (Le projectile est sorti du nuage de poussière qu’on voit à droite. Un gros fragment de la plaque est visible au-dessus de la balle, Derrière elle, Pair est sillonné d'ondes produites par les éclats du de l’autre côté. Parmi les ondes aériennes, les plus remarquables sont ici celles qui sont symé- triques par rapport à la plaque et très peu inclinées; elles sont dues au léger mouvement d’oscillation que prend la plaque au moment du choc. Ce mouvement se propage dans la plaque en même temps que le premier déplacement chemine dans l'air; et, pour la raison qui a élé donnée plus haut, le sinus de l'angle d’inclinaison de ces lignes donne le rapport des deux vitesses. Une autre expérience se trouve représentée sur la même figure : la balle, ayant traversé une feuille de carton avant d'arriver à la plaque de verre, l'avait réduite en me- nus fragments dont chacun a donné une onde aérienne. L’en- semble de ces ondes produit le fouillis que l’on voit en arrière de la balle. La seconde période de la traversée est donnée par la fi- gure 16, sur laquelle je ferai remarquer le retour des ondes qui ont atteint le bord de la plaque, où elles se sont réfléchies; en y regardant de près, on voit que ces ondes se composent de sections allernativement elai- res et sombres vers la plaque; les premières correspondent, à un mouvement en avant, les autres à un mou- vement rétrograde ; Ca l’ensemble des deux sections consécutives donne done la longueur d’une onde entière. Les ondes à l'arrière sont précisé- ment inverses de celles que l’on voit à l'avant, d’où l’on conclut que l'oscillation de la plaque est trans- versale. Dans la figure suivante (fig. 17), la balle a traversé; elle entraine après elle un véritable nuage de verre pulvérisé dont chaque miette pro- duit une onde, et l’ensemble donne naissance à l'énorme onde frontale que l’on voit à l'avant. Les premières éclaboussures sont parties en arrière, tandis que le mouvement de vibration de la plaque la réduit en menus morceaux que l’on voit se déta- cher. Enfin, dans la figure 18, la balle est à 40 cen- ltimètres derrière la plaque; elle a quitté son nuage 19* 670 A. MILNE-EDWARDS. — OBSERVATIONS SUR LES MAMMIFÈRES DU THIBET de poussière vitreuse, dont un fragment plus gros, coupé comme à l'emporte-pièce par la balle, s’est détaché el chemine seul à Pavant. Je pourrais mulliplier les exemples, et montrer des modifications des expériences que j'ai dé- crites; mais je ne m'étais point proposé, dans cet article, de traiter dans tous ses détails la question de la photographie des projectiles; mon but étail seulement de montrer quelques-unes des nom- breuses expériences que l’on peut exécuter avec le dispositif très simple dont je me suis servi. Peut-être les constructeurs d'armes en tireront-ils quelque parti? On peut espérer aussi que, grâce à certaines analogies, les expériences, convenable- ment dirigées, ne seront pas absolument stériles pour la Physique. C.-V. Boys, de la Société Royale de Londres, OBSERVATIONS SUR LES MAMMIFÈRES DU THIBET Lorsque le Comité d'organisation du Congrès de Zoologie m'a demandé quelles étaient les questions qui me paraissaient pouvoir être traitées avec avan- tage, je n’ai pas hésité à indiquer celles relatives à la faune de l'Asie centrale. Je savais que si, person- nellement, je n'avais que peu de chose à dire à ce sujet, les savantsrusses ne manqueraient pas de répondre à cet appel, etque nous aurions beaucoup à apprendre d'eux, car l’Asie centrale, de la Perse à la Chine, a été l’objet de leurs études de prédi- lection. À diverses reprises ils ont parcouru le pays. ils en ont étudié la Géologie, la Flore et la Faune, et ils ont rapporté, comme Severtzov, Fedjenko, Przewalski et Groum-Grgimaïlo, d’ad- mivables collections qui ont servi de bases à des travaux considérables. Plusieurs voyageurs français ont, de leur côté, exploré la Chine, la Mongolie, le Thibet, l'Indo- Chine, etles documents qu'ils ont réunis offrent un grand intérêt. Tous les naturalistes connaissent les belles découvertes faites, 1l y a 25 ans, par M. l'abbé Armand David : elles ont été une véri- table révélation de la richesse de la faune thibé- taine, Depuis cette époque, M. le D° Harmand, M. Pavie, M. Joseph Martin, le prince Henri d'Or- léans et M. G. Bonvalot, M. Dutreuil de Rhins el les missionnaires français de Tatsi-en-lou, dirigés par ME Biet, ont beaucoup contribué à nous faire connaître les productions naturelles de l'Asie cen- trale et orientale. Les collections recueillies par le prince Henri d'Orléans comprennent un {très grand nombre de mammifères et d'oiseaux : il les a offertes au Muséum d'histoire naturelle et ce sont elles qui m'ont fourni principalement les éléments de cette communication. Les oiseaux ont été étudiés récem- ment par M. le D' Oustalet; aussi n'aurai-je pas à en parler ici. Se ‘ Communication faite le 22 août à la séance d'ouverture du Congrès international de zoologie de Moscou, dont nous rendons compte ci-aprés, La faune du Turkestan est bien distincte de celle de la région Chibétaine. Les monts Tian-Chan du Turkestan chinois sont habités par de grands qua- drupèdes peu différents de ceux de l’Europe : ce sont des loups et des ours, des cerfs (Zervus Xantho- pyqus À. M. Ed.), des chevreuils (Cervus Pygarqus). Destigres et des panthères, venus du sud de l'Asie, s'y montrent fréquemment. Dans le désert stérile et sablonneux qui s'étend de Korla au Lob-Nor la faune offre d'autres carac- tères: les Gazelles y abondent(Gazella Subqutturosu). On les rencontre par petites troupes au milieu de ces plaines couvertes d’une herbe rare, de Saxaouls et de Tamaris, où les seuls arbres sont des peupliers rabougris et tordus et où le fleuve Tarim se déve- loppe dans de grands marécages. La couleur du pelage de ces quadrupèdes s’harmonise admirable- ment à celle du sable : les renards sont de teinte | jaune clair (Vulpes flavescens, Blan.); les gerbilles Gerbillus psammophilus) sont nombreuses et ressem- blent à celles du Sahara ; un chat (Æelis Shawiana) est très semblable par son pelage au #elis Margarilæ des déserts du Nord de l'Afrique. Les chameaux sauvages se montrent par bandes peu nombreuses. En s'élevant sur les pentes de l’Altyn-Tagh, on trouve d’autres animaux : ce sont les Grands Moutons (Ovis Poli), les Burrhels (Pseudouis Burrhel), les Orongos (Pantholops Hodysoni), VAnti- lope Ada (Gazella picticauda), les Yacks sauvages à pelage brun foncé et à grandes cornes divergentes, les Koulanes (Zquus Kiang), et de nombreux Ron- veurs, Lièvres et Lagomys (Lagomys erythrotis, Buchner). Du Tengri-Nor à Batang, la faune est plus riche. Les montagnes, couvertes de forêts de Conitfères et de laillis de Rhododendrons, donnent asile à beau- coup de Mammifères. Nos voyageurs ont aperçu un Singe noir à grande queue sans pouvoir l'appro- cher; mais ils ont capturé plusieurs Macaques Rhésus, remarquables par leur grande taille, leur fourrure épaisse el longue, leur queue courte. Ces Fat die à ide Limit UC TOR ee CS RS FV A. MILNE-EDWARDS. — OBSERVATIONS SUR LES MAMMIFÈRES DU THIBET ER = =. PATENT sh Î É - 671 animaux, à l’état adulte, sont comparables par leurs dimensions aux grands Cynocéphales d'Afrique; ils vivent par troupes nombreuses, on les voit jus- qu'au milieu des neiges, et ils se réfugient dans les trous des rochers. Les habitants les respectent et souvent leur donnent à manger. Une jeune femelle, achetée le 7 mai 1890 à Kian Tatie, a été rapportée à Paris, et elle vit encore aujourd'hui à la ménagerie du Muséum. Malgré son séjour dans un bâtiment chauffé, elle a conservé la toison épaisse et longue qui à fait donner à l'espèce le nom de acacus vestitus *. Le Macaque du Thibet (M. Thibetanus), si répandu dans la vallée de Moupin, et le Rhinopithèque de Roxellane n’ont pas été signalés de Batang à Tatsien-lou. Les Panthères et les Onces sont abondants, ainsi que les Lynx (Zynæ rufus);on y trouve aussi le Æelis scripla el une autre espèce de forte taille apparte- nantau même groupe quele F. Chaus, mais différente de ce dernier et que j'ai désignée souslenom de FÆelis Bieli? ; le Felis tristis * qui atteint des dimensions plus 1 Macacus veslilus. — Cette grande espèce est voisine du Macacus Rhesus et du M. Tcheliensis, mais elle se distingue par son épaisse toison. Les poils des épaules et des bras forment une sorte de camail et ils sont aussi développés que ceux des Cynocéphales hamadryas ; chez les mâles adultes ils ont plus de 12 centimètres, ils sont gris dans presque toute leur étendue, leur extrémité seule est annelée de jaune. Sur les lombes et dans la partie postérieure du corps, ainsi que sur les cuisses et les jambes, les teintes sont plus intenses et d'un roux ferrugineux. La face est rouge, encadrée de sourcils et de favoris longs et dressés, les mains sont d'un gris noir plus foncé que celui des pieds. La poitrine, le ventre et la face interne des membres sont d’un gris clair. La queue est plus courte que chez le Rhesus et le M. Tcheliensis. Dimensions d'un mâle adulte : Longueur totale, du museau à la base de la queue : 0 m. 71. Longueur de la tête : 0 m. 21. Longueur de la queue (sans poils), 0 m. 16, avec les poils terminaux, 0 m. 21. Ë Tour du corps en arrière des bras : 0 m. 68. 2? Felis Bieli. — Ce chat est plus gros et beaucoup plus bas sur pattes que le Felis chaus ; les oreilles portent à leur extrémité un fort pinceau de poils roux, les joues sont marquées de deux bandes longitudinales brunes se détachant sur le poil gris clair. Le corps est traversé par environ douze bandes peu distinctes, plus foncées que le reste du pelage, les épaules et les cuisses portent des maculations indistinctes. La queue est très fournie et plus longue que celle du F. Chaus, chez cette espèce elle n’atteint pas le sol, tandis que chez le F. Bieli elle dépasse beaucoup le pied, elle est ornée de cinq anneaux noirs et terminée par un pinceau de cette couleur. La face inférieure des pieds est noire. La teinte générale est d’un gris jaunätre, plus foncé sur le dessus du cou, en avant des épaules; le poil est très fourni et quelques poils clairsemés dépassent beaucoup le reste de la fourrure. Longueur totale du museau à la base de la queue : 0 m. 70. Longueur de la queue, dans les poils terminaux, 0 m. 55, avec les poils, 0 m. 51. Hauteur au garrot : 0 m. 3%. La dent carnassière supérieure porte un tubercule interne beaucoup plus petit que chez le F. Chaus et le troisième lobe de la deuxième prémolaire supérieure est notablement moins fort que dans cette espèce. 3 Felis tristis. — Ce chat ayant été décrit d’après une peau préparée comme fourrure, je crois utile d’en donner considérables que l’on ne le supposait générale- ment, le Æelis Manul (Pallas), remarquable par les teintes noires de sa poitrine et appartenant à la variété désignée par Hodgson sous le nom de Felis nigripectus. Les loups sont communs et l’on y voit des Cuons à longs poils roux appartenant probablement à l'espèce C. Dukhunensis; des renards (Vulpes ferrilatus), des putois et des Martres une nouvelle complets. La tête est maculée de gris, de jaune, de brun et de noir; mais elle offre cependant quelques lignes ou bandes assez ueties. La lèvre supérieure est marquée de noirätre sur un fond jaune roux. Une bande blanche assez large, et nettement limitée par une bordure brun noirâtre, nait au-dessous de l'œil, et se dirige en arrière en suivant à peu près le trajet de l’arcade zygomatique. Arrivée au niveau de l'articulation de la mâchoire, elle s'incurve en bas et en arrière pour aller se perdre dans les teintes grises du cou. La bordure nôire vient se raccorder avec la première bande brune qui traverse le pelage grisâtre du dessous du cou, à la naissance de la gorge. Une bande blanche borde l'œil inférieurement, dépasse son angle interne et descend verticalement pour se terminer brus- quement par une extrémité arrondie de chaque côté de la base du nez dont le pelage est d’un gris noirâtre uniforme. Les oreilles sont bordées d’un liséré jaune plus large du côté interne, et sont couvertes sur leur face externe d’un noir presque pur vers la pointe, passant au gris noirâtre sur le reste de l'oreille et sur les côtés du cou. Sur la nuque, entre les deux oreilles, naissent quatre bandes étroites d’un brun roux mélé de noir séparées par trois larges plages d'un roux jaune. Ces bandes se continuent sur le dessus du cou et sur la région scapulaire où elles s'élargissent et divergent, deux à droite et deux à gauche. Les deux internes, après un assez court trajet, viennent finir en s’arrondissant à la naissance du dos, vers l’extrémité postéro-supérieure de l’omoplate. Les deux bandes externes divergent davantage en décrivant une courbe à convexité postérieure, embrassent, dans leur circuit, presque toute la région scapulaire proprement dite, et se terminent en arrière et au-dessous du niveau de la tète de lhumérus. Dans leur portion élargie, ces quatre bandes présentent une teinte rousse régulièrement bordée intérieurement et en arrière d'une ligne brun noïirâtre. Les teintes jaune roux des espaces intermédiaires s’accentuent encore sur la région scapulaire, ce qui donne à cette partie du corps une vivacité de ton qui tranche sur le reste du pelage. Cet éclat roux brülé reparaît encore sur la partie postérieure de la croupe et à la naissance de la queue. Le dessous du menton, la portion adjacente du milieu du cou et le poitrail sont d’un blanc grisâtre parsemé de taches d'un roux brun formant des bandes transver- sales, la première bien dessinée au niveau de la gorge, les autres plus en arrière, irrégulières et confuses à la naissance du cou et sur le poitrail. Sur le milieu du dos, on remarque des taches analogues à celles de la nuque, mais plus foncées, qui s’allongent davan- tage, et forment des bandes continues dans la région sacro- lombaire. Les épaules, les flancs, la face externe des hanches et les cuisses présentent des maculatures rousses, cerclées de brun foncé sur un gris blanchätre: Ces taches sont disséminées sans aucun ordre apparent, sauf sur les flancs, où elles paraissent former trois séries longitudinales légèrement con- vergentes vers le haut de l'épaule, à l'extrémité de la bande interne émanant de la nuque, et dont il a été question plus haut. description faite sur des exemplaires plus lignes d’un brun MESURES D'UN MALE ADULTE Longueur de l'extrémité du museau à la naissance de la CEE TE oc ou ds oo es 4 loc min Manon O ne 0 m. 87 Fonguenridelalquenerr rene. nuiar.-ehes 0 m. 36 672 D' M. SPRINGER. — FRAGMENT D'HISTOIRE MÉDICALE : BRETONNEAU ET SES ÉLÈVES (Pulorius davidianus et Marta flaviqula); deux ours de grande taille, l’un noir à tache pectorale jaune (Crsus Tibetanus), l'autre brun varié de jaune clair el identique à celui que Fr. Cuvier a décrit sous le nom d’Ursus collaris; un blaireau (Aretonyr obscurus À. M. Edw.) et le Panda éclatant (Aÿurus fulyens). L'Ailuropus melanoleucus est inconnu dans cette région. Les rongeurs sont représentés par de très grands Pteromys (P4£. alborufus), par plusieurs écureuils à ventre roux (Sciurus erythrogaster ei Sc. Pernyi), par un Tamias (7. Maclellundi), une marmotte (Arcto- mys robustus), différentes espèces de Mus, un Siph- neus distinct de ceux déjà connus (S. fibetanus), un lièvre (Lepus hypsibius) dont les pattes sont fortement {teintées en roux par leur contact avec un sol ferrugineux, deux espèces de Lagomys (L. Koslowi et L. Melanostomus, Buchner). Les ruminants sont très variés. Je citerai les yaks sauvages, des moutons Nahors(Ovis Nahoura) et une espèce à cornes comprimées que je crois nouvelle ! ; des Orongos (Pantholops Hodgsoni), de grands Nemorhedus de la taille du N. bubalinus de l’Inde, mais pourvus d’une longue crinière de poils blancs et se rapportant à l'espèce que le Père Heudes a appelée WNemorhedus Argyrochætus ; deux variélés de chevrolain porte-musc, l'une à poil d’un gris noir, l’autre de teinte plus claire et tirant sur le jaune; l'Æaphodus cephalophus à pelage moins roux que celui de la vallée de Moupin, mais cependant de même espèce; un chevreuil sem- blable à celui des monts Thian-Chan, mais géné- ralement plus robuste (Capreolus Pygarqus); un cerf du groupe des Rusa et différant du Sambur de l'Inde et de Cochinchine par sa queue plus fournie, plus longue et noire, par ses oreilles plus grandes, son museau bordé de noir el ses pattes d’un blanc jaunàtre à leur extrémité. On est en-droit de s'étonner qu'en si peu de temps nos voyageurs aient pu se procurer un aussi grand nombre d'espèces, et il est évident que de nouvelles études faites dans la même région feront connaitre d’autres mammifères. Mgr Biet, évêque de Diana et missionnaire apostolique du Thibet, a bien voulu donner des instructions pour envoyer des chasseurs à la recherche des animaux de la haute vallée du Yang-tse-Kiang ; mais, dès à pré- sent, nous voyons déjà s'accentuer la ressemblance des animaux de celte partie du Thibet avec ceux de l’Indo-Chine, et nous remarquons, en même temps, certains traits particuliers qui ne se retrou- vent pas ailleurs. A. Milne-Edwards, de l'Académie des Sciences, Directeur du Muséum. FRAGMENTS D'HISTOIRE MÉDICALE BRETONNEAU.ET SES ÉLÈVES La publication du livre de M. le D" Triaire, qui renferme un grand nombre de lettres de Breton- neau ainsi que quelques-unes de celles de ses amis et de ses élèves ?, évoque un passé qui semble déjà lointain et presque effacé. Souvent le temps se mesure par le nombre de faits accomplis. Or, 1 Ovis Henrii. — Cette espèce de mouton est de la taille de l’Ovis Nahoura. Sa couleur est la même que celle de l’Ovis Pol; le dessus du cou est cependant plus foncé et garni d'une sorte de crinière de longs poils qui, naiss: arrière des cornes, sur l’occiput, s’étend jusqu’en dessus et en avant des épaules. La ligne dorsale est d’un brun plus foncé que les flancs. Ceux-ci ne portent pas de bandes noires, mais il existe une tache noire et allongée sur les pattes au devant du poignet. La croupe est d’un blanc jaunätre, la queue, de mème couleur, est très courte. Les cornes de la femelle sont très divergentes, très aplaties en forme de lame et portent, en avant, quelques traces d'annulation. Longueur du museau à la naissance de la queue, 136; Queue, 0,06 centimètres; Hauteur au garrot, 0®79 ; Longueur des cornes, 015; Largeur, 0®05; Epaisseur, 0008. 2 P. TRiaiRe : Bretonneau el ses correspondants, précédé d’une introduction de L. Lereboullet. T. 1 et II, 2 fort vol. Gr. in-8° de 596 p. et 648 p. (Prix : 25 fr.). F, Alcan, 1892. depuis quatre-vingts ans la science médicale a fait plus d’acquisitions importantes que pendant tous les siècles précédents. Il résulte de cette grande production que les travailleurs du début de cette époque se trouvent relégués dans une période qui, pour paraitre préhistorique, n’en est pas moins chronologiquement récente. C'est là une réflexion dont on est assailli dès l’abord, lorsqu'on parcourt la correspondance de Bretonneau, médecin à Tours, avec ses élèves. Ces quelques pages rappellent une des phases les plus glorieuses de notre histoire médicale. Il n’est pas inulile de remettre sous les yeux de notre jeune génération cetle époque trop oubliée. En effet, c’est de la France qu'est partie cette grande révolution médicale, qui devait définitivement fixer l'étude rationnelle et scientifique des ma- lades. Jusque-là on retrouve dans la médecine une sorte de mysticisme nuageux; toute question se complique de considérations mélaphysiques. Si l’on considère que. jusqu’à une période relative- D: M. SPRINGER. — FRAGMENT D'HISTOIRE MÉDICALE : BRETONNEAU ET SES ÉLEV ES 673 ment moderne, la pathologie était souvent do- minée par l’étude des astres et des songes, il n’est pas malaisé de comprendre quels efforts il a fallu -pour affranchir la science médicale de cette singu- lière tutelle. L'École de Paris donna le signal de cet effondrement. Bretonneau et ses deux élèves Trousseau et Velpeau abordèrent énergiquement la lutte; ils attaquèrent d'une part les doctrines médicales régnantes qui n'avaient pour elles que leur ancienneté, on pourrait dire leur sénilité, et d'autre part ils s'élevèrent avec force contre la théorie réformatrice de Broussais, qui eut un reten- tissement immense au commencement de ce siècle. Brelonneau et ses deux enfants adoptifs rencon- trèrent dans Broussais un adversaire tout d'abord triomphant. Chirurgien des armées de l'Empire, Broussais avait parcouru les champs de bataille de Napoléon et il avail rapporté de son éducation militaire des qualités de combativité inconnues jusqu'alors dans la sereine atmosphère médicale. A l’aide de procédés révolutionnaires, il secoue la torpeur des médecins de son temps, il les en- flamme de son ardeur communicative, monte à l'assaut des vieilles doctrines, les renverse et reste pour un instant maître du champ de bataille, Mais sa victoire est de courte durée. Il avait, il est vrai, amorcé le mouvement scientifique qui sommeil- lait; mais, une fois actionnée, cette force se re- tourna contre lui. C’est que, de toutes parts, s’éle- vaient des hommes comme Bretonneau, Trousseau, Velpeau, Laennec, Louis, Bichat, Corvisart, Bayle, Andral, Chomel, Bouillaud, ete., et, en quelques années, la clinique médicale apparut faconnée par une méthode précise, de rigoureuse observalion. La doctrine physiologique de Broussais com- portait un réel progrès; mais, poussée à l'extrême, jusqu'à l’absurde, avec l'assurance implacable d’un pontife, elle devait s'effondrer rapidement. La réac- tion ne se fit pas seulement contre la doctrine, mais aussi contre l'homme. Que l’on juge du ton de bienveillance avec lequel il traite ses contempo- rains : «Les insectes parlans qui repullulent aujour- d'hui avec plus de force que jamais sous l'influence d’astres malins, trop visibles pour qu'ilsoit besoin de les montrer; ces êtres, dont le souffle flétrit tout ce qu'il touche, ont déjà dit que le dépit de n'être pas là où je crois devoir être me fait tenir ce lan- gage. — Je sais que je blesse bien des amour- propres et que le motif d’être utile à mes semblables ne me servira point d’excuse auprès de bien des gens. On se plaindra du défaut de respect pour certaines autorités révérées, on s’indignera, on cherchera à m'humilier : J'ai tout prévu, rien ne m'arrête. Puis-je ignorer que tous les hommes qui ont voulu éclairer leurs concitoyens ont été cruellement persécutés, et que les découvertes les plus utiles ont excité les murmures de la multi- tude irréfléchie? Harvey passa pour fou quand ilannonça la découverte de la circulation; l’ino- culation fut solennellement prohibée, etla vaccine, malgré Lousses bienfaits, trouve encore aujourd'hui de violents antagonistes. » Ce langage n'est que le pàle reflet de l’acuité et de la passion que Broussais apportait aux discus- sions scientifiques. Le scepticisme narquois n'avait pas encore envahi les esprits; il n'était alors l’apa- nage que de quelques intelligences d'élite. Le fougueux Broussais rencontrait dans Breton- neau et dans Laennec des adversaires redoutables ; aussi ceux-ci étaient-ils le point de mire de ses at- taques et de ses sarcasmes. Laennec, en décou- vrant l’auscultation, battait en brèche le prétendu physiologisme de Broussais, qui riposte vivement : « Laennec, dit-il, est un homme opiniâtre dominé par un petit nombre d'idées fixes et n’épargnant pas les sophismes pour les faire prévaloir; ce qui le conduit souvent aux contradictions. Il est petit et mesquin dans sa théorie comme dans ses re- cherches. De plus, Laennec à le malheur d’être lrop passionné, ce qui le fait à chaque pas tomber dans l'injustice. » Broussais ne soupçonnait sans doute pas le haut effet comique de son jugement. Quant à Bretonneau, il le considère comme un homme dangereux. Sur un ton quelque peu dé- gagé, il le présente ainsi : € M. Bretonneau de Tours donna l’idée à nos Parisiens d’un nouveau genre de fièvre, que l’on crut pouvoir établir d’une manière solide, sur les bases anatomico-patholo- giques posées par Laennec. Il à cru observer dans la Touraine que les fièvres épidémiques qui s'accompagnent de stupeur, délire, mouve- ments spasmodiques et tétaniques, prostration, fétidité des excréments, avec une langue sèche, brûlée ou encroutée, fuligineuse, et plus ou moins de diarrhée, étaient dues àune éruption de pustules qui se formaient dans la membrane muqueuse du tube digestif et qui avaient pour siège les follicules ou glandes mucipares de Peyer et de Brunner, — les premières, éparses dans cette membrane, les se- condes, disposées en plaques elliptiques et prédo- minantes, surtout vers la fin de l'intestin ileum. Il attribue à ces fièvres une marche et une durée déterminées et prétend qu'on ne les éprouve guère qu'une fois dans le cours de sa vie. Selon lui, il est aussi impossible d'en arrêter l'explosion et la marche que celles de la petite vérole. Tout ce que l’on peut faire, c'est d’en diminuer les symptômes en maintenant la fièvre dans de justes bornes, c’est-à-dire, la modérant si elle était trop forte, la 674 ranimant, au contraire, si les forces tombaient dans la langueur, » En écrivant ces lignes, Broussais n'avait certes pas l'intention de faire l'apologie de Bretonneau, el cependant il cilait un passage qui établit d’une manière indiscutable la part glorieuse du médecin de Tours dans la description de la fièvre typhoïde. (fl En découvrant la lésion de la fièvre typhoïde, Bretonneau ne créait pas seulement une entité morbide, il faisait plus : il établissait sur une base indestructible une grande idée de pathologie gé- nérale, sur laquelle devait s'élayer toute la méde- cine contemporaine : la spécificité dans les mala- dies. Ce fait, qui nous parail aujourd'hui évident, rencontra au début des oppositions violentes. Bretonneau et Broussais se sont trouvés aux prises; le modeste praticien de province est resté maitre du terrain. Selon Broussais, il n'existe qu'une cause morbi- fique, c’est l'application excessive ou intempestive des excitants ou des stimulants au corps de l’homme, d'où résulte l'irrilation dans les tissus. Que cette irrilabilité soit exagérée, ou qu'elle soit diminuée, elle dépend toujours de la quantité de la cause morbifique et jamais de sa qualité. La célèbre médication antiphlogistique, qui a joui d’une si grande vogue, se déduit fort logique- ment de cette doctrine. Il est certain que, si la doctrine de Broussais, prise dans son ensemble, est fausse, elle n’en exprime pas moins un fail de pathologie générale exact, qui s'associe parfaitement à l’idée de spéci- ficité. C’est qu’en effet, l’irritabililé imprime souvent à la symptomatologie une allure spéciale qui se tra- duit, par exemple, sous les différents aspects de la congestion; or, suivant les doctrines actuellement admises, cette irritabilité est actionnée par l'agent pathogène spécifique. Suivant Broussais, l'irritabilité était la cause des maladies; Bretonneau, en montrant qu'elle n’était qu'un effet, avait vu plus haut : il démontrait que, parmi les facteurs pathogéniques, l’irritabilité est sous la dépendance directe d'une autre cause spé- ciale, Loujours semblable à elle-même, déterminant constamment des symptômes identiques et corres- pondant à la même lésion. La spécificité élait dé- sormais établie. III Brelonneau donna à ses élèves leur première éducation médicale, et, lorsqu'illes jugea suffisam- ment façonnés et armés pour la lutte, il les envoya à Paris. Velpeau vint le premier. En arrivant dans D' M. SPRINGER. — FRAGMENT D'HISTOIRE MÉDICALE : BRETONNEAU ET SES ÉLÈVES la capitale, il est tout surpris de constater dans quel gâchis pataugent les cliniciens de la grande ville; aussi exprime-t-il son étonnement à son maitre Brelonneau : («Toutes les fièvres, écrit-il, décrites sous les noms de muqueuses, bilieuses, ataxiques, adynamiques, de gastro-entérites, ne sont autre chose que la fièvre entéro-mesentérique à différents degrés d'intensité. » Puis il raconte qu’il a assisté, à la Charité, à l’autopsie d’un jeune homme, mort au vingtième jour de la fièvre ty- phoïde dans le service de M. Fouquet : « On com- mence par le crâne; tout était dans l’état que vous avez vu lant de fois, mais ils le trouvèrent très malade et furent presque tentés de s’en tenir là. Enfin, on ouvrit le ventre : ganglions très gros, intestins violets, livides par plaques à lexté- rieur. Dans l’intérieur, boutons, plaques, ulcères, muqueuse de couleur vineuse. Moi, qui étais dans l'amphithéätre, par conséquent assez éloigné, je les distinguais très bien. Je devais donc m’attendre à ce que ces désorganisations fussent attentive - ment examinées par ceux qui en étaient très près; mais non! M. Fouquet y jette un coup d’æil en disant : « Oui, c'est évidemment enflammé », puis tous se sauvèrent. Ma foi, je n'y pus pas tenir; je sautai dans l’enceinte, pris le scalpel de l’interne, ouvris la plus grande partie de l’iléon et lui fis baiser les boutons, les plaques et les ulcères en lui disant : «C'est cela qu'il faut examiner et non « pas cette rougeur qui n’est qu'accidentelle. » Le pauvre diable fut un peu étonné de voir ces énormes plaques, mais il n’en continua pas moins à nettoyer ses mains et ne parut pas en penser plus long. Admirez, s'il vous plait, la sagacité de pareils ob- servaleurs et leur utilité pour les progrès de la science! » IV Brelonneau ne se contenta pas d'établir la spé- cificilé de la fièvre typhoïde : par ses recherches, empreintes de l'esprit d'un véritable génie médical, il démontra la nature de la diphtérie. Séparant celte affection des maladies dont la symptomato - logie est fort semblable, on peut dire qu'il créa l'autonomie de la diphtérie. Dans la volumineuse Correspondance publiée par M. le D' Triaire, on rencontre presque à chaque page la trace des luttes soutenues par Bretonneau et surtout par ses élèves Trousseau et Velpeau. Disciples convaincus et affectueux, Trousseau et Velpeau parvinrent tous deux aux plus hautes dignités médicales justement conquises. À mesure qu'ils s'élevaient, ils profitaient de leur situation pour proclamer la valeur de leur maître, pour dé- fendre et revendiquer ses grandes découvertes, donnant ainsi l'exemple d’un attachement pro- D' M. SPRINGER. -— FRAGMENT D'HISTOIRE MÉDICALE : BRETONNEAU ET SES ÉLÈVES fond. Mais en faisant connaître les recherches du médecin de Tours, ils n'accomplissaient pas seule- ment un devoir, ils apportaient surtout une con- viction profonde. Avant Bretonneau, la diphtérie était confondue avec un grand nombre d'affections. En 1807, Na- poléon [‘* avait ouvert un concours international sur la nature et le traitement du croup. Tous les auteurs des ouvrages couronnés retracent les idées de $S. Bard et de Home. Sans doute ces deux médecins avaient réalisé un grand progrès, Home en décrivant le croup, et Bard en étudiant l’an- gine diphtérique. Mais, c’est à Brelonneau que re- vient l'honneur d’avoir nettement établi et prouvé que le croup, l’angine diphtéritique, ainsi que les autres manifestations qui apparaissent dans le cours d’une épidémie et peuvent frapper la mu- queuse des fosses nasales, de la trachée, des bron- ches, et la surface cutanée excoriée, ne sont que les symptômes d’une seule et même maladie, la diphtérite, dénomination à laquelle Trousseau substitua celle de diphthérie, qui exprime mieux l’idée d'intoxication générale. « Lorsque l’on con- sidère, dit Trousseau, combien sont grandes les différences qu'offrent entre elles les diverses formes de la maladie, il semblerait que celle qui tue par strangulation aux voies respiratoires el celle qui tue par intoxication générale fussent de nature très distincie. Eh bien, dans celte diversité de forme, nous retrouvons toujours la même maladie. » C'était là l’enseignement de Bretonneau, qui s’insurgeail contre les résistances que rencontrait sa diphtérite. « Comment, écrit-il à Trousseau, on a donné à rien le nom de sorcel- lerie, de magnétisme, de perkinisme, de rabdo- mancie, de gastrite, d'artérite, elc., ete., eLon en a fait quelque chose, el je n'aurai pas donné un nom à un être matériel qui peut être transporté d’un lieu à un autre, qui frappe celui-ci à la bouche et à la gorge, qui étrangle celui-là, et qui saisit cel autre entre les fesses ! » Enfin 1l s'élève avec force contre les médecins à esprit rétrograde qui refusent de se rendre à l’évi- dence de ses démonstralions : «./e le répète donc en- core : un germe Spécial, propre à chaque contagion, donne naissance à chaque maludie contagieuse. Les fléaux épi- démiques ne sont engendrés, disséminés que par leur germe reproducteur. » Écrite en 1853 cette phrase pourrait servir d’épigraphe à un ouvrage de bac- tériologie contemporaine. Vÿ Bretonneau ne ful pas seulement un clinicien émérite et un maitre de pathologie générale, mais. dans l’ordre pratique, il fit faire de grands progrès 675 à l’art de traiter les malades. Pour la fièvre typhoïde, il lutla courageusement contre les spolialions sanguines qu'employait Broussais, et qui l’avaient fait surnommer par quelques con- temporains fort irrévérencieux le plus grand saigneur de son temps. Aussi, au traitement fé- roce du médecin du Val-de-(rràce oppose-t-il ce que l’on appelle aujourd’hui l’expectation armée, que Trousseau formule ainsi : & La marche de la fièvre typhoïde est bien peu susceptible d’être mo- difiée par les moyens que la médecine tient à sa dis- position. Lorsque les cas sont légers, la guérison ar- rive d'elle-même, et un médecin sage doit se garder de troubler les efforts de la nature par une médi- cation intempestive. » Il n'est pas sans intérêt de mettre en regard du trailementrationnel etsymptomatique de l’École de Tours, la méthode systématique de Broussais, telle que nous la trouvons retracée dans une lettre de Trousseau à Bretonneau. Il s’agit d’un jeune homme qui est mort au vingt-deuxième jour de la fièvre typhoïde : « Au quatrième jour on lui met quarante sangsues sur le ventre ; le lendemain quarante autres sangsues; puis on le laisse tran- quille. Au neuvième jour Broussais prescrit vingl sangsues à l'anus pour la colite manifestée par la diarrhée ; vingt-trois sangsues pour la gastrite. Le lendemain le ventre est météorisé : vingt sangsues à l’épigastre.. le malade s’éteint paisiblement au vingt-deuxième jour. » Bretonneau ne réagit pas seulement contre les orgies sanguinaires dans la fièvre typhoïde, mais il institua encore une méthode de traitement dans la diphtérie — méthode que l’on applique encore aujourd'hui, puisque les recherches bactériologi- ques contemporaines confirment en tous points les travaux de Bretonneau. Enfin, on peut dire que le mailre de Trousseau appliqua la trachéotomie au traitement du croup et que l'élève en fixa les indications et le manuel opéraloire avec netteté et précision. Lorsqu'une découverte importante se produit, il est habituel de voir surgir tout à coup des adeptes qui, par un enthousiasme outré, risquent de gâter les meilleures causes, tandis que d’autres, érudits à esprit moins large, fouillent dans les textes de l'antiquité et prouvent que la découverte est fort ancienne, démontrant une fois de plus qu'il n'y à rien de nouveau sous le soleil. C'est ainsi que la trachéotomie fut inventée à une époque fort re- culée, puisque cent ans avant Jésus-Christ, Asclé- piade de Bithynie, au dire de Galien, la pratiquail à Rome. Depuis lors, celle opération, tous les deux ou trois siècles, est redécouverte, — puis retombe dans l’oubli à cause de ses dangers et de ses mau- vais résultats. À partir du xvi° siècle les redécou- 676 vertes deviennent plus fréquentes et le manuel opératoire fait de notables progrès. En 1765 Home propose de remédier à la suffocation par la tra- chéotomie. Quelques médecins défendent avec chaleur cette opération, mais leur voix reste sans écho et la trachéotomie n’est pas adoptée, Au commencement de ce siècle apparait Brelonneau, et Trousseau, avec son ardeur communicaltive, ré- pand dans le monde entier cette opération qui arrache de nombreuses victimes à la suffocation laryngée. En 1825 Brelonneau avait pratiqué cinq fois la trachéotomie sans succès lorsqu'il fut appelé auprès de l'enfant d'un de ses amis, petite fille ägée de quatre ans. Le malheureux père avait déjà perdu trois enfants enlevés par le croup, et il voyait sa fille mourante sous ses yeux. C’est alors que Bre- tonneau lui proposa l'opération sans dissimuler sa nouveauté, ses dangers et les insuccès qu'il avait éprouvés : « Faites, dit le père, comme pour votre enfant. » Bretonneau opéra; l'enfant guérit. — «Je crois être le second, dit Trousseau dans ses Clini- ques, qui, suivant l'exemple de mon maitre, ait fait la trachéotomie dans un cas de diphtérie la- ryngée et, le second aussi, j’eus à enregistrer une guérison et, aujourd'hui que j'ai pratiqué plus de deux cents fois cette opération, je suis assez heu- reux pour compter plus d’un quart de succès. » En 1858, dans une thèse restée classique, M. Millard fixait définitivement les indications de l’opération de Bretonneau, et Trousseau, citant longuement les conclusions du travail de son jeune confrère, s'exprime ainsi : « Ce sont là, messieurs, de sages et judicieuses paroles, et, pour ma part, je leur donne toute mon approbation. » Ce serait done man- quer de justice que de passer sous silence la part importante de M. Millard dans l’histoire de la tra- chéotomie. W. F. DENNING. — DÉCOUVERTE D'UN CINQUIÈME SATELLITE DE JUPITER VI Comme dans toutes les existences médicales quelque peu mouvementées, la Correspondance de Bretonneau reflète les préoccupations constantes des examens et des concours de ses élèves; pour lui-même il n'avait aucune ambition personnelle. Il conserva jusqu'à la fin sa modeste situation et dédaigna les honneurs. Cela n’empêcha pas sa ré- pulalion d'être universelle et, aujourd’hui encore, la postérité lui décerne un plus juste tribut d’ad- miralion, à mesure que les découvertes viennent confirmer ses immortels travaux. Mais, s’il ne con- voitait pas pour lui-même l’estampille officielle du mérite, il concentrait du moins toute son ambition sur Velpeau et sur Trousseau. Chaque fois que ses” élèves chéris franchissent une étape et s'élèvent d'un degré dans la hiérarchie médicale, il éprouve une joie des plus vives. D'ailleurs, il ne se con- tente pas de les encourager; il ne néglige rien pour les appuyer, et toute sa Correspondance est parsemée de ses préoccupations paternelles pour l’avenir de ses deux enfants adoptifs. Bretonneau était un esprit d’une grande origina- lité. Par ses travaux il montra une intelligence élevée. Éducateur de premier ordre, il transmit à ses élèves quelque chose de son génie médical. IL éprouva la joie suprême de les voir parvenir à la plus haute situation scientifique; et, sentiments touchants et quelque peu rares, tandis que le vieux Bretonneau s’enorgueillissait de la gloire de ceux qu'il avait élevés, Trousseau et Velpeau, ar- rivés au faite des honneurs et de la réputation, ne cessent de rendre justice à leur vénéré Maitre, et tous deux, jusqu'à leur dernier souffle, donnent l'exemple d’une reconnaissance inaltérable. D' Maurice Springer, Chef de laboratoire à la Clinique médicale de la Charité. DÉCOUVERTE D'UN CINQUIÈME SATELLITE DE JUPITER En janvier 1610, Galilée découvrit à Padoue quatre satellites tournant autour de Jupiter. Bien que plus de 282 années se soient écoulées depuis cette mémorable date jusqu'au mois d'août 1892, aucun autre salellite n'avait été aperçu près de la planète ; les astronomes pensaient done qu'il n’en existait que quatre. C’est là la notion classique, répétée dans tous les traités d'astronomie publiés depuis bientôt trois siècles. Aussi, personne ne pensait-il à la mettre en doute. En ce qui concerne les planètes encore plus éloignées, Uranus et Neptune, il y avait tout lieu de croire qu'on décou- vrirait d’autres satellites ; mais avec Jupiter les circonstances étaient un peu différentes. Les quatre satellites étaient si brillants, si facilement visibles même dans de très petits télescopes qu'on pouvait à peine croire qu'il en restàt encore un autre assez petit pour passer inaperçu. D'ailleurs, on regardait comme un fait acquis l'augmentation régulière du nombre de satellites autour des pla- nètes Mars, Jupiter et Saturne. On savait que Mars a deux satellites, Jupiter quatre, Saturne huit, et, comme le nombre allait en doublant chaque fois à mesure qu'on s’éloignait du Soleil, on considérait comme probable que l'harmonie de la série ne se- rait pas dérangée. R. BLANCHARD. — LE CONGRÈS ZOOLOGIQUE DE MOSCOU 677 Aujourd’hui pourtant, le monde astronomique a un grand événement à enregistrer : un nouveau satellite de Jupiter vient d’être découvert; sa dis- tance au centre de la planète est de 112.400 milles, et sa période de révolution de 47 h. 36 minutes. Cette découverte est due au P' Barnard, de l'Obser- valoire de Lick, situé sur le mont Hamilton en Cali- fornie. Comme ce savant s'est toujours montré très habile observateur, surtout pour les comètes, que d’ailleurs il dispose du télescope le plus puissant qui ait été construit jusqu’à ce jour, il n‘y a aucun motif de douter de sa très importante observation. On se demandera naturellement comment ce nou- veau satellite a réussi à échapper aux investigations des astronomes pendant une période de près de trois siècles, durant laquelle les recherches téles- copiques n'ont pas cessé un seul instant. Comment se fait-il que pas un de ces milliers d’observateurs qui ont étudié cette planète et les lunes qui l’envi- ronnent au moyen d'instruments puissants, n'ait jamais apereu le tout petit astre qui vient de se révéler au vigilant astronome américain? Si nous ne nous trompons, la principale raison de l’insuccès consiste en ce que le nouveau satellite n'offre que l'éclat de la treizième grandeur, et est situé très près de Jupiter; sa petite lumière s'est, sans doute, avec nos instruments ordinaires, trouvée entièrement noyée dans l'éblouissante lumière qui l’entourait. Mais il est peut-être un peu singulier qu'elle n’ait pas été découverte par son ombre : celle-ci doit se projeter sur le disque de Jupiter toutes les fois que le satellite passe entre la planète et la Terre; c'est un phénomène qui doit se produire journellement. À ce moment, l'ombre doit apparaitre sous forme d'une petite tache noire, circulaire, se mouvant rapidement de l’est à l’ouest à travers le disque, et avec une vitesse apparente plus grande que les taches connues. Il peut bien se faire que l'ombre ait été observée dans plus d’une occasion, mais on l’aura sans doute prise pour une lache ordinaire de la surface de Jupiter. Un fait curieux, relatif à ce nouveau satellite, c’est sa faible grandeur, comparée à celle des quatre autres satellites découverts par Galilée. Mais, on constate la même disparilé de dimensions entre les satellites de Saturne : pour en être frappé, il suffit de comparer le brillant Titan aux satellites extrèmement pàles qui portent les noms de Mimas et d'Hyperion. Toutefois, si pelit qu'il paraisse, ce nouveau satellite de Jupiter est cer- tainement beaucoup plus grand que l’un ou l’autre des deux lunes, si anormalement petites, de Mars. Il y à donc lieu de féliciter l’astronome amé- ricain de l’importante découverte qui vient d'être faite. L'activité scientifique s’est rapidement déve- loppée aux États-Unis depuis quelques années, et c’est une chose que l’on constate surtout dans le vaste el attrayant domaine de l’Astronomie !. W. F. Denning. LE CONGRÈS ZOOLOGIQUE DE MOSCOU Le Congrès international de Zoologie, fondé par la Société zoologique de France et réuni pour la première fois à Paris en 1889 sous la prési- dence de M. A. Milne-Edwards, a tenusa seconde session à Moscou du 10-22 au 18-30 août dernier. De l'avis unanime, l’entreprise hardie de la Société zoologique de France avait été couronnée du plus grandsuccès : celte fois, le succès a été, si possible, encore plus marqué, et ce résultat est d'autant plus important à enregistrer, que les conditions sani- taires de Moscou, en proie à l'épidémie cholérique, ont empêché de se rendre au Congrès bon nombre de savants dont la présence avait été annoncée, Toutefois, il convient de dire dès maintenant que les journaux politiques ont semé dans l’opi- nion une terreur bien peu justifiée : pendant les douze jours que nous avons passés à Moscou, le choléra n’a guère fait parler de lui : les cliniques étaient totalement inhabitées et la population manifestait la plus entière indifférence à l'égard de ce fléau, incapable d'enrichir en un jour l'Achéron, puisqu'il se contentait de deux ou trois victimes par Jour. Sansles pittoresques processions d'images saintes, escortées par une foule grouillante et ba- riolée de moujiks, que l’on rencontrait à travers la ville et qui ajoutaient encore à son pittoresaue déjà si puissant, rien ne nous eût appris qu'il fût nécessaire d'implorer la clémence céleste. Est-ce à ces prières de chaque jour que nous devons notre salut? Je ne sais; toujours est-il qu'aucun des Congressistes, réunis au nombre de 200 en- viron, n’a fait la désagréatle connaissance du microbe en virgule. Un décès a pourtant attristé la fin du Congrès : M. A. Wilkins, bien connu pour ses travaux sur la faune du Turkestan et venu de Tashkent pour assisler à nos séances, est mort à Moscou. On ne saurait pourtant le compter au nombre des victimes du choléra : le 12-24, il nous faisait une impor- tente communication sur les affinités de la faune 1 Cet article vient de paraître en anglais dans Nature (n° 1195, vol. 46). 4 678 R. BLANCHARD. — LE CONGRÈS ZOOLOGIQUE DE MOSCOU de l'Asie centrale, el son extrême affaiblissement était l'indice d’une santé très ébranlée, sans pour- tant nous faire appréhender une mort aussi prochaine. Le 10-22 août la plupart des membres du Con- grès étaient arrivés à Moscou. Une réunion prépa- ratoire, suivie d’un banquet, avait lieu le soir à l'hôtel Continental, afin de leur permettre de se rencontrer et de faire connaissance. Une liste de propositions pour le Bureau et le Conseil était mise en circulation. Les Français présents élaient M. et Mme E. Chantre (de Lyon), MM. Milne-Edwards, Barthélemy (de Nancy), Ed. Blanc, R. Blanchard, A. Brian (de Gênes), J. de Guerne, Janet, ingénieur de la marine, D' Poussié, C. Schlumberger. La Suisse était représentée par M. Th. Studer (de Berne), la Hollande par MM. Jentink et Reuvens (de Leyde), l'Allemagne par MM. R. etH. Virchow, la Croatie par M. Sp. Brusina (d’Agram), l'Italie par M. Sergi (de Rome), la Turquie par Halil Edhem- bey, etc. La grande majorité des membres du Congrès étaient des savants venus de toutes les parties du vaste empire russe : on remarquait no- tamment MM. Oshanin et Wilkins (de Tashkent), M. et Mme Kashtshenko (de Tomsk), M. Shavrov (de Tiflis). Nous avions le plaisir de retrouver d'anciens collègues du Congrès de 1889, le véné- | rable P' Bogdanov, MM. Brusina, Sluder, Kavraïs- ky, ou d'anciens compagnons d’études comme le D' Bajénov. Le 11-23 une première séance avait lieu dans la matinée pour la constitution du Bureau et du Conseil. La présidence du Congrès étail donnée à | M. le comte Paul Kapnist, curateur de l’Université de Moscou, la présidence honoraire à MM. Milne- Edwards (France), Jentink (Pays-Bas), Smitt ‘Suède), Studer (Suisse), R. Virchow (Allemagne), Brusina (Moscou), A. Bogdanov Étaient élus vice-présidents MM. Anutshin (Moscou), R. Blan- chard (Paris), E. Chantre (Lyon), J. de Guerne (Paris), Halil-Edhem bey (Constantinople), Kash- tshenko (Tomsk), von Kennel {Dorpal), Schlum- berger (Paris), A. Tikhomirov (Moscou), H. Vir- chow (Berlin). Le P' N. Zograf était élu secrétaire général. On procédait aussi à l'élection des secré- taires et des membres du Conseil. (Moscou). L'après-midi la séance d’inauguration avait lieu dans la salle des fêtes de l’ancienne Université. M. le comte Kapnist souhaite la bienvenue aux membres du Congrès; son discours, affable et écrit dans le français le plus pur, est fréquemment interrompu par les applaudissements. M. le P' A. Milne-Edwards, délégué du Gouvernement fran- çais, lit ensuite un mémoire sur la faune du Thi- bet : il établit une comparaison entre les récoltes Autriche-Hongrie), prince W. Galitzin | grie), I rapportées par les expéditions de Fedtshenko, de Przevalski et celles que le Muséum de Paris doit aux explorations de Bonvalot, du prince Henri d'Or- léans et des missionnaires du Thibet, etc. Cette | savante communication ! exeile au plus haut point l'intérêt des naturalistes russes, qui lui font le plus chaleureux accueil. Le 12-24 août, dans la matinée, commencent les séances de sections. M. Milne-Edwards préside: il esL assisté de MM. H. Virchow et Raslviétov, vice- présidents. Le regretté M. Wilkins lit un travail sur les aflinités de la faune de l'Asie centrale. Puis viennent des communications de M. Oshanin sur les limites et les subdivisions de la région paléarc- tique, basées sur l'étude de la faune des Hémip- tères ; de M. Ch. Greve (Saint-Pélersbourg), sur la distribution des Carnassiers; de M. le baron Rosen, sur la faune malacologique de la région transcas- pienne; de M.J. de Bedriaga (Nice), sur les Vipères d'Europe et de la région circeum-méditerranéenne. L’après-midi, visile du Musée zoologique de l’Université, puis excursion au rucher de la Société impériale d’acclimatation. Le 13-95 la séance est présidée par M. Jentink, qu’assistent MM. de Guerne et Kashtshenko. Com- munications de M. Kholodkovsky sur la théorie du mésoderme et de la métamérie; de Mme O. Tikho- mirova, sur le développement de Chrysopa; de M. Kulagin, sur le développement des Hyménop- tères parasites; de M. H. von Jhering, sur l’exis- tence ou l'absence de l'appareil excréteur des organes génitaux des Métazoaires. L’après-midi, tandis que la plupart des Congres- sistes visitent le Kremlin, la petite colonie française se rend à l’Ermitage, où M. Kæhler, l’un des Mé- cène des institutions scientifiques de Moscou et l’un des bienfaiteurs du Congrès, lui ménage un diner plantureux, offert avec cette bonne grâce exquise et cette cordialité communicative dont tant de preuves nous ont été données pendant notre séjour à Moscou. Le 14-26 la séance est présidée par M. Studer, qu'assistent MM. Schlumberger et Kholodkovsky. S. A. I. le grand-duc Serge Alexandrovitsh, frère de S. M. l'Empereur et gouverneur général de Moscou, honore la séance de sa présence. Commu- | nications de M. Brusina sur les couches tertiaires à Congeria des environs d’Agram et sur leurs rela- tions avec la faune récente de la mer Caspienne; de M. Bunge (Saint-Pétersbourg), sur son expédi- tion aux iles de la Nouvelle-Sibérie; de M. R. Blan- chard, sur la faune des lacs salés d'Algérie et sur ses relations avec celle des lacs salés du Turkestan ; de M. le baron J. de Guerne, sur les résultats zoo- 1 Publiée ci-dessus. (N. de la Réd.) PEU rs Clé S - r _ R. BLANCHARD. — LE CONGRÈS ZOOLOGIQUE DE MOSCOU 679 logiques des expéditions de S. A. le prince de Mo- naco sur le yacht l’Æirondelle; de M. Bogdanov, sur le rôle scientifique des jardins zoologiques. Après la séance, le grand-duc Serge visite l’ex- position zoologique réunie à l'Université : on y remarque d'importantes collections provenant des expéditions Fedtshenko et Przevalski, une collec- tion d'animaux de l'Asie centrale exposée par M. le Professeur Milne-Edwards, une collection provenant des expéditions de l'Æirondelle et offerte au Musée de l’Université de Moscou par le prince de Monaco, une collection d'instruments de physio- logie exposés par M. le professeur Morokhovetz, de belles séries de photographies ethniques expo- sées par M. Zograf, les publications de la Société impériale des amis des sciences naturelles, etc. L'après-midi visite au Jardin zoologique; le grand-duc et la grande-duchesse Elisavela Fedo- rovna honorent celte visite de leur présence. La rigueur des hivers ne permet pas d'entretenir au Jardin un grand nombre d'animaux ; la plupart de ceux qui y vivent appartiennent à la faune septen- trionale de l'Europe et de lAsie et augmentent d'autant plus l'intérêt que présente le Jardin. Nous y voyons une série d'animaux inconnus ou rares dans les Jardins zoologiques de l’Europe occiden- tale : le phoque de la mer Caspienne (Phoca cas- pica), le Glouton (Gulo borealis), lIsatis ou renard bleu (Canis lagopus) et plusieurs espèces de carni- vores de taille moyenne, analogues au chacal. Cette intéressante visite s’est terminée par un diner gra- cieusement offert aux membres du Congrès par M. Kulagin, directeur du jardin, et par Mme Kulagin. Le soir enfin, les Congressistes se trouvaient réunis dans les salons de LL. AA. IT. le grand- duc et la grande-duchesse, qui donnaient une soirée en leur honneur. Le 15-27 la séance est présidée par M. Brusina, assisté de MM. R. Blanchard et A. Tikhomirov. Communications de M. von Stein (Moscou), sur les fonctions du labyrinthe de l'oreille; de M. Moro- khovelz, sur les globulines du sang; de M. Janet, sur divers réaclifs à l’élat naissant, utilisables pour les préparations zoologiques ; de M. Johansen, sur la structure de l'œil de Vanessa; de M. Korsa- kov, sur le rachilisme expérimental; de M. A. Tikhomirov, sur les résultats des études embryolo- giques, au point de vue de la classification, Nous passons sous silence une malheureuse communica- tion de M. Durdufi (Moscou), qui prétend expliquer une foule de maladies, telles que l’eczéma et le cho- léra,par la présence de «chenilles processionnaires » et autres insectes dans la peau des malades! L’après-midi, visite au Musée polytechnique, où est servi un diner dont Mme Zograf fait les hon- neurs avec sa grâce accoutumée. Le 16-98, en l’absence de Halil-Edhem bey, pré- sident désigné, la séance est présidée par M. Ma- klakov, qu'assistent Mme Tsviétaiéva et M. Tol- matshev. Communication deM. Zograf sur l’origine et la parenté des Arthropodes, principalement des Arthropodes trachéates; de M. kovalevsky, sur les organes excréteurs des Arthropodes terrestres. Lecture est donnée d'un travail de M. Ch. Girard (Paris) sur quelques points de la nomenclature zoologique. Finalement, la parole est donnée à M. R. Blanchard, qui commence l'exposé de son rapport sur la nomenclature des êtres organisés. Faute de temps, le Congrès de 1889 n'avait pu achever la discussion d’un premier rapport de l’au- teur sur ce même sujel ; d'un commun accord, la suite de la discussion avait été renvoyée au Congrès de 1892, qui devait et qui a pu effectivement en finir avec celte importante question, au sujet de laquelle une longue discussion s’est engagée. Si je ne craignais de paraitre peu modesle, j'oserais dire que le vote des règles de la nomenclature zoolo- gique est le principal résultat du Congrès : le mé- rite de cet heureux événement revient bien moins à mon Æapport qu'à l'importance même de la question, à la solution de laquelle s’intéressaient tous les zoologistes descripteurs. Les règles adop- tées, que nous transcrivons plus bas, ont d’ailleurs pour la plupart un intérêt général, car elles peuvent trouver leur application dans d’autres sciences. L'après-midi, visite des cliniques, de l'Institut anatomique et de divers établissements dépendants de la Faculté de médecine. Ces magnifiques éta- blissements, construits d’après les exigences les plus récentes de la science et de l'hygiène, font le plus grand honneur à l'Université de Moscou et à l'administration libérale et clairvoyante de son curateur, M. le comte Kapnist. Le 17-29 août, la séance est présidée par M. Chantre, qu’assistent MM. Bunge et Oshanin. Après une courte communication de M. Kojevnikov sur la faune de la mer Baltique, M. R. Blanchard continue l'exposé de son rapport sur la nomencla- ture. Grâce à une prolongation de la séance au delà de l'heure accoutumée, la question est enfin discutée et résolue entièrement. L'après-midi, visite à l’Académie d’agricullure de Pétrovsky Razumovsky : ce bel Institut, installé somplueusement dans un palais acquis du prince Razumovsky, s'élève à quelques verstes de Moscou, dans un site agréable; c'est là que M. Timiriazev, un savant bien connu, enseigne la botanique. Après une visite détaillée de l'établissement et de ses dépendances, les Congressistes prennent part à un diner des plus appétissants. Mais la petite colonie française sait résister à la séduction des zakouski et du caviar et rentre en ville pour se 680 R. BLANCHARD. — LE CONGRÈS ZOOLOGIQUE DE MOSCOU rendre à la gracieuse invilalion de notre consul général, M..le comte de Kergaradec. Le 18-30 août la séance est présidée par M. A. Tikhomirov, assisté de M. Ed. Blanc; M. Wilkins, désigné pour la vice-présidence, est absent. Com- munications de M. Herzenstein (Saint-Pétersbourg) sur la faune malacologique de l'Océan glacial russe ; de M. Butshinsky, sur la faune de la mer Noire. Lecture est donnée d'un travail de M. J. Ri- chard (Paris) sur la distribution des Cladocères d’eau douce, et de différents autres mémoires. À 2 heures, séance de clôture du Congrès, sous la présidence de M. le comte Kapnist. Dans son discours, le président résume les travaux du Con- grès et met en relief les principaux résultats qui s'en dégagent. Le secrétaire général, M. Zograf, donne également un compte rendu détaillé des travaux du Congrès et fait connaitre à l’assemblée quelques décisions prises par le Conseil : ces déci- sions, dont il sera question plus loin,sont mises aux voix et adoplées par acclamation. Puis, au nom deleurs pays respectifs, MM. Milne- Edwards, Studer, Jentink, Halil-Edhem bey, re- mercient la Russie et la ville de Moscou de leur généreuse hospitalité et les organisateurs du Congrès de leur zèle pour la science. Un éclatant hommage est rendu à M. le Professeur A. Bogda- nov, ce savant modeste elsympathique entre tous, à l’abnégation infatigable et à la persévérante activité duquel le Congrès doit de s’être constitué et d’avoir remporté un grand et légitime succès. Sur la proposition de M. Milne-Edwards, le Congrès décide par acclamation que l'autorisation sera demandée à S. A. I. le grand-duc Serge de placer son portrait en tête du second volume des travaux du Congrès, en témoignage de respec- tueuse gratitude pour la haute proteclion qu'il à accordée au Congrès el pour les nombreuses marques de sympathie qu'il lui a données. M. le président déclare alors close la deuxième session du Congrès international de Zoologie. La langue française, jusqu'alors employée à l'exclusion de toute autre, ayant perdu son carac- tère officiel, M. Brusina propose en langue russe un triple hourra en l'honneur de la Russie et du Tsar ; une musique militaire, postée dans une pièce voisine, joue l'hymne national, que tous les assis- tants reprennent en chœur, puis la séance est levée. La musique va se placer sur un palier qui domine l'escalier et salue de ses plus joyeuses fanfares le passage des savants étrangers. Pour clore celte belle journée, un banquet de plus de cent couverts réunissait bientôt, une der- nière fois, les Congressistes dans les salons de l’'Ermilage, sous la présidence de M. le comte Kapnist. Je renonce à décrire l'enthousiasme, la cordiale et franche sympathie,que nos amis russes nous ont manifestés pendant loute la durée du Congrès el qui ont atteint leur période à ce ban- quel final, — les Loasts prononcés, — les orateurs serrés sur des cœurs battant à l’unisson du leur, acclamés, portés en triomphe, — la foule énorme massée devant l’Ermitage et faisant de chaleu- reuses ovalions aux savants élrangers, particu- lièrement aux Français. Ce sont là des scènes inou- bliables, dont le souvenir fait tressaillir le cœur d’une fière et patriotique émotion. On a pu voir, par ce qui précède, l'intérêt et la variété des questions discutées au Congrès. Le Conseil a fait, lui aussi, de la bonne besogne et a pris plusieurs résolutions d'une haute importance, qui, nous l'avons dit, ont été ratifiées par acclama- tion par l'assemblée du Congrès, dans la séance de clôture. A l’exemple de ce qui a lieu déjà pour le Congrès internalional d’Anthropologie et d’Ethnographie préhistoriques, il a été institué un Comité perma- nent du Congrès international de zoologie. Ce Co- mité, dont le siège permanent est à Paris, se cons- lituera au premier jour; dans l'intervalle d’un Congrès à l’autre, il centralise el exécute toutes les affaires relatives au Congrès, affaires qui, on va le voir, ne sont pas sans intérêt. IL comprend des membres perpéluels et des membres temporaires. Sont de droit membres perpétuels : 1° Les fondateurs au Congrès international de zoologie : MM. Milne-Edwards, R. Blanchard, E. Chantre, J. de Guerne, C. Schlumberger, L. Vaillant; 2 Les anciens présidents. — M. Milne-Edwards, président du Congrès de 1889, figure déjà dans la catégorie précédente. Actuellement, M. le comte Kapnist fait donc seul partie de cette seconde ca- tégorie ; 3° Le président du futur Congrès, quand il a été désigné au préalable. Le Congrès ayant acelamé la ville de Leyde comme siège et M. Jentink comme président du Congrès de 1895, M. Jentink, direc- teur du Musée de Leyde, est donc de droit membre perpétuel du Comité. 4° Les présidents honoraires ayant élé élus trois fois ; 5° Les vice-présidents ayant été élus trois fois. Est de droit membre temporaire, le secrétaire général pour toule la période qui va du Congrès pendant lequel il était en fonctions jusqu’au Con- grès suivant. — M. N. Zograf, secrétaire général du Congrès de Moscou, fait partie de celte catégorie. Par mesure transitoire, il a été décidé en outre que les présidents honoraires et les vice-présidents des trois premiers Congrès feraient partie du R. BLANCHARD. — LE CONGRÈS ZOOLOGIQUE DE MOSCOU 681 RE GGÇELC SRE Comité, à titre temporaire, jusqu’à l’ouverture de la quatrième session. MM. P. J. Van Beneden, A. Bogdanov, Sp. Brusina, prince W.Galitzin, A.S. Packard, Rütimeyer, de Selys-Longchamps, Ad. Smitt, Studer, R. Trimen et R. Virchow bénéficient de cette mesure, au titre de présidents honoraires; MM. D. Anutshin, A. Fritsch, Halil-Edhem bey, N. Kashtshenko, von Kennel, A. Kojevnikov, Kurts- hinsky, N. Miller, L. Morokhovetz, Edm. Perrier, Razviétov, G. Retzius, À. Sabatier, R. B. Sharpe, Sklifassovsky, A. Tikhomirov, Tshaussov et H. Virchow, au titre de vice-présidents. S. M. l'Empereur Alexandre IIT à daigné accor- der aux Congrès inlernalionaux d’Anthropologie préhistorique et de Zoologie, réunis successive- ment à Moscou, une somme de 15.000 roubles argent (60.000 francs), en témoignage de l'intérêt qu'il prenait à leurs travaux. Le Congrès de Zoologie a décidé de perpétuer le souvenir de cette gracieuse libéralité, en préle- vantune somme de 3.500 roubles argent(14.000 fr.) qui sera capilalisée et gérée par le trésorier de la Société impériale des amis des sciences naturelles de Moscou. Les intérêts serviront à instiluer des prix, qui seront atlribués alternativement au Congrès d'Anthropologie et d'Ethnographie préhis- toriques et au Congrès de Zoologie, ainsi qu'à la Société impériale des amis des sciences naturelles. Ces Congrès ayant lieu tous les trois ans, les in- térêts de deux annuités seront altribués allernali- vement à chacun d'eux; les intérêts de la troisième annuité restent acquis à la Sociélé impériale des amis des sciences naturelles, qui les affectera éga- lement à des prix. En conséquence, le prix établi en l'honneur de S. M. l'Empereur Alexandre III sera décerné pour la première fois par le Congrès international d’Anthropologie et d'Ethnographie préhistoriques en 1895, pour la seconde fois par le Congrès international de Zoologie en 1898, et ainsi de suite. D'autre part, S. A. I. le Tsarévitch a daigné ac- corder spécialement au Congrès de zoologie une somme de 16.000 roubles argent (40.000 francs). Pour perpétuer le souvenir de cette gracieuse libé- ralité, le Congrès a décidé de prélever une somme de 2.000 roubles argent (8.000 francs), qui sera capitalisée et gérée par le trésorier de la Société impériale des amis des sciences naturelles. Les in- térêts de deux annuilés conséculives seront attri- bués au Congrès de Zoologie, qui les affectera à un prix décerné à chaque session; les intérêts de la troisième annuité resteni acquis à la Société des amis des sciences naturelles, qui les affectera éga- lement à des prix. En conséquence, le prix établi en l’honneur deS. A. I. le Tsarévitch sera décerné pour la première fois par le Congrès international de Zoologie en 1895, à la session de Leyde, puis à toutes les sessions suivantes. Le Comité permanent du Congrès de Zoologie a pleins pouvoirs pour établir le programme et les conditions du concours pour les deux prix qu'il décerne; ces prix consisteront soit en médailles, soit en sommes d’argent. Toutefois, il est entendu dès maintenant que tous les savants sont admis au concours, à l'exception de ceux appartenant au pays dans lequel doit avoir lieu la prochaine session du Congrès. Le nom des lauréats sera proclamé en séance solennelle; il sera transmis sans délai au président de la Société des amis des sciences na- turelles. Enfin, il a été décidé que la langue française se- rail seule admise pour toutes les affaires du Con- grès, notamment pour la correspondance et pour les travaux manuscrits où imprimés. En achevant ce compte rendu, j'ai grand plaisir à adresser mon plus cordial souvenir à M. le Pro- fesseur À. Bogdanov, qui a su organiser d’une fa- çon grandiose celte inoubliable fête scientifique ; à M.C. CG. Ushkov, dans l’hospitalière demeure duquel plusieurs de nos compatriotes ont été ac- cueillis avec la plus fraternelle cordialité; à M. le professeur N. Zograf, qui, par l’'exquise urbanité dont il a fait preuve dans ses fonctions de secré- taire général, a su se faire un ami de chacun de nous ; à M. Kæhler, dont l’intelligente libéralité a contribué dans une large mesure à l'éclat du Con- grès; à Lous ceux enfin qui se sont ingéniés pour augmenter encore le charme pénétrant de Moscou, la ville sainte aux coupoles dorées. R. Blanchard, Professeur agrégé d'Histoire naturelle à la Faculté de Médecine de Paris. NOMENCLATURE ADOPTÉE PAR LE CONGRÈS I. — De la nomenclature des êtres organisés. ARTICLE PREMIER. — @. — Dans la notation des hybrides, le nom du procréateur mäle sera cité en premier lieu et sera réuni au nom du procréateur femelle par le signe x. Dès lors, l'emploi des signes sexuels est inutile. Exemples : Capra hircus © X Ovis aries ®, et Capra hircus X Ovis aries sont deux formules également bonnes. b. — On peut tout aussi bien noter les hybrides à l’aide dune fraction dont le numérateur scrait représenté par le procréateur mâle et le dénominateur par le procréateur femelle. Ex. : Capra hircus Cette seconde méthode est plus avantageuse, en ce qu’elle permet au besoin d'indiquer le nom de celui qui à observé la forme hybride. Ex. : Bernicla canadensis ——— Rabé. Anser cygnoïdes c. — L'emploi des formules de ce second type est indis- pensable, quand l’un ou l’autre des procréateurs est lui- même un hybride. Ex. : 682 Tetrao letrir X Tetlrao urogallus Gallus gallinaceus Ë d. — Quand les procréateurs d’un hybride ne sont pas connus, celui-ci prend provisoirement un nom spécifique simple, précédé du signe x. Ex. : X Salix Erdingeri Kerner. Il. — Du nom générique. ART. 2. — Un mot quelconqe,u adopté comme générique ou spécifique, ne doit pas être détourné du sens qu’il pos- sède dans sa langue originelle, s’il y désigne un être organisé. IT. — Du nom spécifique. ART. 3. — Les noms géographiques des pays qui n’ont pas d'écriture propre ou qui ne font pas usage des caractérés latins, seront transcrits d'après les règles adoptées par ia Sociélé de géographie de Paris. ART. 4. — L'article précédent et l’article 21 des Règles adoptées par le Congrès de 1889 sont également applicables aux noms d’Homme. Ex. : Bogdanovi, Metshnikovr. ART. 5. — Malgré les signes diacritiques dont sont sur- chargées les lettres, on doit conserver l'orthographe originale du roumain, de certaines langues slaves (polonais, croate, tchèque) et en général de toutes les langues pour lesquelles il est fait usage de l'alphabet latin. ART. 6. — Les noms spécifiques peuvent être formés à l'aide du nom patronymique d'une femme ou d'un groupe d'individus. Le génitif se forme alors en ajoutant la dési- nence æ ou orum au nom exact et complet de la personne à laquelle on dédie. Ex. : Merianæ, Pfeifferæ. IV. — De la manière d'écrire les noms. ART. 7. — a. — Les noms patronymiques ou les prénoms employés à la formation des noms spécifiques s’écriront tou- jours par une première lettre capitale. Ex. : Rhizostoma Cuvieri, Francolinus Lucani, Laophonte Mohammed. b. — La capitale sera encore utilisée pour certains noms géographiques. Ex.: Antillarum, Galliæ. €. — Dans tout autre cas, le nom spécifique s’écrira par une première lettre ordinaire. Ex. : OEstrus bovis. Arr. 8. — Le nom du sous-genre, quand il est utile de le citer, se place en parenthèse entre le nom du genre et celui de l’espèce. Ex. : Hirudo (Hæmopis) sanquisuga Bergmann. ART. 9. — Le nom d’une variété ou d’une sous-espèce vient en troisième lieu, sans interposition de virgule ni de parenthèse. Le nom de l’auteur de cette variété ou sous-es- pèce peut être cité lui-même, également sans virgule ni parenthèse. Ex. : Rana esculenla marmorata Hallowell. ART. 10. — Quand une espèce a été transportée ultérieu- rement dans un genre autre que celui où son auteur l’avait placée, le nom de cet auteur est conservé mais placé en parenthèse. Ex. : Pon‘obdella muricala (Linné). V. — Subdivision, réunion des genres et espèces. ART. 11. — Quand une espèce vient à être divisée, l'espèce restreinte, à laquelle est attribué le nom spécifique de l’es- pèce primitive, recoit une notation indiquant tout à la fois le nom de l’auteur qui a établi l’espèce primitive et le nom de l’auteur qui a effectué la subdivision de cette espèce. Ex. : Tænia peclinala Güze partim Riehm. Par application de l'article 10, le nom du premier auteur est mis entre paren- thèses, si l'espèce a été transportée dans un autre genre Ex. : Moniezia peclinata (Güze partim) Riehm. VI. — Du nom de famille. Arr. 12. — Un nom de famille doit disparaitre et être rem- placé, si le nom générique, aux dépens duquel il était formé, tombe en synonymie et disparait lui-même de la nomenclature. VII. — Loi de priorité. ART. 43.— La dixième édition du Systema naturæ (175$) est le point de départ de la nomenclature zoologique. L’an- née 1758 est donc la date à laquelle les zoologistes doivent remonter pour rechercher les noms génériques ou spécifiques les plus anciens, pourvu qu'ils soient conformes aux règles fondamentales de la nomenclature. ART. 14. — La loi de priorité est applicable aux noms de familles ou de groupes plus élevés, tout aussi bien qu’aux R. BLANCHARD. — LE CONGRÈS ZOOLOGIQUE DE MOSCOU noms de genres et d'espèces, à la condition qu'il s'agisse de groupes ayant même extension. ART. 15. — Une espèce qui a été faussement identifiée doit reprendre son nom primitif, en raison de l'article 35 des Règles adoptées par le Congrès de 1889. ART. 16. — La loi de priorité doit prévaloir, et par consé- quent le nom le plus ancien doit être conservé : a. — Quand une partie quelconque d'un être a été dénom- mée avant l’être lui-même (cas des fossiles). b. — Quand la larve, considérée par erreur comme un étre adulte, a été dénommée avant la forme parfaite. Exception doit être faite pour les Cestodes, les Trématodes, les Nématodes, les Acanthocéphales, les Acariens, en un mot pour les animaux à métamorphoses et à migrations, dont beau- coup d’espèces devraient être soumises à une revision, d'où résulterait un bouleversement profond de la nomenclature. c. — Quand les deux sexes d’une même espèce ont été con- sidérés comme des espèces distinctes ou même comme appar- tenant à des genres distincts. d. — Quand lanimal présente une succession régulière de générations dissemblables, ayant été considérées comme ap- partenant à des espèces ou même à des genres distincts. ART, 17. — Il est très désirable que chaque nouvelle des- cription de genre ou d’espèce soit accompagnée d’une dia- gnose latine, à la fois individuelle et différentielle, au moins d’une diagnose dans l’une des quatre langues européennes les plus répandues (francais, anglais, allemand, italien). ART. 18. — Pour les travaux qui ne sont pas publiés dans l’une ou l’autre de ces quatre langues, il est très désirable que l’explication des planches soit traduite intégralement soit en latin, soit dans l’une quelconque de ces langues. ART. 19. — Quand plusieurs noms ont été proposés sans qu’il soit possible d'établir la priorité, on adoptera : a. — Le nom à l'appui duquel une espèce typique est dési- gnée, s’il s’agit d’un nom de genre ; b. — Le nom qui est accompagné soit d’une figure, soit d'une diagnose, soit de la description d’un adulte. ART. 20. — Tout nom générique déjà employé dans le mème règne devra être rejeté. ART. 21. — On doit éviter l'emploi de noms qui ne se dis- tinguent que par la terminaison masculine, féminine ou neulre, ou par un simple changement orthographique. ART. 22. — Sera rejeté de même tout nom spécifique em- ployé déjà dans le même genre. Arr. 23. — Tout nom générique ou spécifique, devant être rejeté par application des règles précédentes, ne pourra être employé de nouveau, même avec une acception différente, si c’est un nom de genre, dans le même règne, si c'est un nom d'espèce, dans le même genre. ART. 24. — Un nom générique ou spécifique, une fois publié, ne pourra plus être rejeté pour cause d’impropriété. ART. 25. — Tout barbarisme, tout solécisme devra être rectifié ; toutefois, les noms hybrides seront conservés tels quels. Ex. : Geovula, Vermipsylla. VIII. — Questions connexes. ART. 26.— Le système métrique est seul employé en z00- logie pour l'évaluation des mesures. Le pied, le pouce, la livre, l’once, etc., doivent étre rigoureusement bannis du langage scientifique. ART. 27. — Les altitudes, les profondeurs, les vitesses et toute mesure généralement quelconque sont exprimées en mètres.Les brasses, les nœuds, les milles marins, etc., doivent disparaître du langage scientifique. ART. 28. — Le millième de millimètre (0mmO01{), repré- senté par la lettre grecque y, est l’unité de mesure adoptée en micrographie. Arr. 29. — Les températures sont exprimées en degrés du thermomètre centigrade de Celsius. ART. 30. — L'indication du grossissement ou de la réduc- tion est indispensable à l'intelligence d'un dessin. Elle s'ex- prime en chiffres, et non en mentionnant le numéro des len- tilles à l’aide desquelles l’image a été obtenue. ART. 31. — Il est utile d'indiquer s’il s’agit d’un agran- dissement linéaire ou d’un grossissement en surface. Ex. : X 50 fois [| indique un grossissement de 50 fois en sur- face ; x 50 fois — indique un grossissement linéaire de 50 fois. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 683 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. Schapira (D' Hermann), Professeur à l'Université de Heidelberg.— Theorie der allgemeiner Cofunctionen und einige ihrer Anwendungen (Théorie générale des cofonctions et quelques-unes de leurs applications), tome I, premier fascicule de la seconde partie. Un vol. in-8° de 22% p. (7 fr. 50). Teubner, éditeur; Leipzig, 1892, M. Schapira prend pour point de départ la remarque suivante : si plusieurs fonctions transcendantes sont liées par des relations alsébriques, ou, s’il en est de même de divers arguments pour une même fonc- lion, on peut ne pas considérer ces fonctions comme essentiellement distinctes : elles appartiennent à un même domaine de transcendance. Ge sont des «cofonc- tions » aux termes de l’auteur. Ainsi sin x et cos x sont des cofonctions; ainsi encore sin x, sin ox, sin &Xx,... sont des cofonctions, les « étant des racines d’une même équation algébrique, à coefficients cons- tants. Cette remarque est en elle-même ingénieuse et pro- fonde, mais elle n’est pas nouvelle, Du reste, l’auteur ne la donne pas pour telle. Il est facile de citer dans la science des travaux considérables issus de vues analogues. Telles sont par exemple les recherches de Galois, de MM. Jordan, Kronecker,..….. sur lirrationa- lité algébrique. Sont rangés là dans un même domaine d'irrationalité les nombres qui deviennent rationnels, lorsqu'on prend pour rationnelles par définition, lorsqu'on « s’adjoint », suivant l'expression consacrée, une ou plusieurs racines d’une équation algébrique donnée. Citons encore les travaux d'Halphen sur le profit que l’on peut tirer pour l'intégration d’une équation différentielle linéaire de relations algébriques connues entre des intégrales d’ailleurs inconnues. Ces intégrales seraient des « cofonctions ». L'ouvrage que nous analysons est annoncé comme un exposé systématique soit de résultats déjà publiés, soit de résultats nouveaux, Les théories qui auraient profité des procédés de l’auteur seraient celles des fonc- tions algébriques, des équations différentielles, de l’arithmétique supérieure, Tout cela promet d’être fort intéressant, mais le lecteur n'est pas encore en état d’en juger commodé- ment, D'abord l'ouvrage débute par le premier fascicule de la seconde partie du tome I, par une huitième section. Le reste du tome I est annoncé pour la fin de l’année courante. Il semble que l’auteur ait voulu aller au plus pressé et se soit hâté de justifier l'importance de sa méthode en publiant tout d'abord des résultats obtenus sur des champs inexplorés. Ensuite, dans sa préface, M. Schapira exprime le regret de n'avoir pu encore amener ses théories à la perfection voulue, en élaguant les complications inu- tiles de notations et de raisonnements; il présente son travail surtout comme une ébauche, où l’idée fon- damentale, le « kerngedanke », importe seule. Le lec- teur est forcé de reconnaître qu’une pareille précau- tion oratoire n’est pas superflue, Quoi qu’il en soit, voici ce que l’on trouvera dans le fascicule paru : M. Schapira s'occupe de développer en série, aux abords d'un point du plan, les racines d’une équation algébrique à coefficients variables. Il recherche surtout les relations entre les développements des diverses racines d’une même équation. Après les innombrables travaux dont les fonctions algébriques ont été l’objet, la longueur des calculs est dans la matière la seule difficulté, à la vérité considé- rable. M. Schapira essaie d’en triompher en introdui- sant des notations convenables et des algorithmes, dont chacun représente toute une longue opération. D’importants résultats sont promis pour le second volume, Les critiques que nous nous permettons portent, on le voit, non sur le fond, mais sur le mode d’exposition et de publication. A part cela, l’œuvre annoncée de M. Schapira, qu’on ne peut apprécier sur un fascicule d'attente, ne paraît devoir manquer ni d'intérêt ni d'importance. La publication de l'ouvrage complet mettra les mathématiciens à même d'en juger. Léon AUTONNE. Appell (P.), Professeur de Mécanique rationnelle à la Faculté des Sciences de Paris, — Sur des équations différentielles linéaires transformables en elles- mêmes par un changement de fonclion et de variable. (Acta Mathemutica, tome 15.) On sait, depuis les travaux de M. Kænigs, que les propriétés des équations fonctionnelles de la forme lRG@I= #16) dépendent essentiellement d'une fonction fondamen- tale, que M. Kœnigs désigne par la notation B(:), et qui satisfait à l'équation (1) B [#(:)]=4aB () Cette fonction et ses puissances donnent d’ailleurs la solution la plus générale de l'équation (1), sous cer- taines conditions de régularité. Ces remarques ont permis à M. Appell d'étudier les équations différentielles linéaires qui ne changent pas de forme par le changement dezen + (:), pourvu qu’en même temps on multiplie la fonction cherchée par un facteur convenable. Soit, par exemple, l'équation d'u @) ds —uf(z) =0 Elle ne changera pas quand on remplacera z par & (2) et u par u Va), si les fonctions fet+ sont liées par la relation ATEN 2ep"— 3? k pli 1 = f() + p? M. Appell, se donnant la fonction > équation par rapport à f (2). En étudiant alors les intégrales (supposées régulières au point de vue de la théorie des fonctions), on recon- nait qu'elles s'expriment à l’aide de la fonction B (2) et de ses dérivées, et qu’il en est de même de f On en déduit l’intégration complète de l'équation (2) et, de plus, qu’elle admet une infinité de transforma - tions de la même forme, puisqu'elle est définie quand on se donne B(:) et qu'à une fonction B(z) correspon- dent une infinité de fonctions +, ainsi que l'a montré M. Kœnigs. Enfin on peut en conclure que, par un changement de variables convenable, on arrive à transformer l’équa- tion donnée en une équation à coefficients constants. Ces théorèmes, et particulièrement le dernier, s’éten- dent d’ailleurs aux équations d’ordre supérieur. M. Appell parvient, comme on le voit, à des résultats fort remarquables, étant donné la simplicité de l'hypo- thèse qui sert de point de départ. fr ()] (z), résout cette J. HapamaRD, BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX ——————…— ——……—…—…—…—…—…—…—…—…——î#“_—— ——————"——"——— —— 2° Sciences physiques. Peddie (W.). — A manual of Physics : being an introduction to the study of physical Science (Manuel de Physique). Un volume petit in-8° 500 pages, petit caractère, Baïllere, Tyndall and Cox, 20 et 21, King William Street. (Prix : 9 fr. 50.) Lon- dres, 1892. Cet ouvrage, concu dans l'esprit imaginatif des physi- ciens anglais, écrit à l’école de Lord Kelvin et de M. Tait, est l'opposé de ce que nous considérons, sur le conti- nent, comme un manuel de Physique: la classification, la belle ordonnance y sont choses secondaires; il est peu complet, surtout au point de vue de la science étrangère; mais, combien d'aperçus nouveaux et de chapitres d’une véritable originalité! Seuls, les cha- pitres sur la constitution de la matière et sur les pro- riétés élémentaires de l'éther montreraient à quel point de vue élevé et hardi l'ouvrage a été écrit. Le premier chapitre est consacré à l’univers physique, sa définition, les preuves de sa réalité, la matière et l'énergie et leur conservation, l’inertie, la différence entre le principe de conservation pour la matière et l'énergie (quantités dépourvues de signe), et le principe, en général, d’après lequel, la somme algébrique restant constante, la production d’une quantité négative ne peut avoir lieu que par une production d'une quantité positive égale. L'auteur ne s’embarrasse pas dans les définitions a priori, difficiles à donner et le plus sou- vent parfaitement inutiles. « Chacun sait, dit-il, ce qu’on entend par le mot matière »; en effet, sa défini- tion vraie n’est autre chose que l'énoncé de ses pro- riétés, et, à ce titre, l'ouvrage entier en donne la définition de plus en plus précise. 3 Les méthodes de la Physique (expériences et hypo- thèses, ecperimentum crucis, méthodes mathématiques) sont l’objet du second chapitre; le troisième traite de la théorie des contours : contours fermés, boucles, leur génération ; application aux isothermes en général, qui sont considérées comme les intersections de la surface thermodynamique par divers plans parallèles, projetés surle plan VT. La cmémaique, traitée au chapitre V, sert d'introduction au suivant dans lequel le mouvementest considéré en connexion comme la matière. Nous signa- lerons, particulièrement dans le chapitre V, la théorie de la circulation, ce terme désignant l'expression vds, produit de la vitesse par les chemins parcourus; des théorèmes sur le mouvement des vortex terminent ce chapitre, L’inertie, la rigidité, la tension superficielle, introduites dans lesuivant, permettent d'aborder le problème réel du mouvement, la vibration, la propaga- tion des ondes; tout cela est traité, avec une suffisante rigueur et avec beaucoup de simplicité; les raison- nements amènent droit au but. Le simple énoncé des titres des autres chapitres en dira beaucoup sur l'esprit dans lequel l'ouvrage est concu; ce sont les suivants : Propriétés de la matière, gravitation, propriétés des az, des liquides, des solides, la constitution de la matière, sa theorie cinétique; le son; la lumière : intensité, vitesse, théorie; réflexion, réfraction, dis- persion; radiation et absorption; interférences, diffrac- tion, double réfraction, polarisation; la nature de la chaleur: radiation etabsorption de la chaleur; ses effets, dilatation ; changement de température et changement d'état; conduction et convection de la chaleur; ther- modynamique; électrostatique, thermoélectricité, cou- rants électriques, magnétisme, électromagnétisme, théorie électromagnétique de la lumière; Péther. Dans le chapitre sur la constitution de la matière, l’auteur rappelle l'hypothèse de Lucrèce, celle de Boscowich; expose la théorie des vorlex-atomes, donne enfin un exposé assez complet des tentatives faites pour estimer la grandeur des molécules. Le dernier chapitre contient les diverses hypothèses faites sur la constitution de l’éther, l'évaluation de sa densité, et de son mode d’action. ; Très complet et très moderne au point de vue théo- rique, cet excellent ouvrage pèche un peu au point de vue expérimental ; le mélange entre les unités métriques et anglaises y est aussi trop constant. Ebloui par ses maîtres, l'auteur n’a pas toujours vu ce qui était au loin; nous n’en tirerons que plus de profit, car il nous en- verra un vif reflet de la brillante école anglaise, Ch.-Ed, GUILLAUME. Hepites (Stefan-C.). — Analele Institutului me- teorologic al Romanici, in-4° de 2000 pages, {. V, Bucaresti, 1892. e Ces Annales de l’Institut météorologique de Roumanie renferment la description des instruments employés à cet Institut, et des résultats obtenus à leur aide en 1889, une multitude de documents bien classés et publiés à la fois en roumain et en francais. Villon (A, M.) Ingénieur-Chimiste, — Dictionnaire de Chimie industrielle. T. 1°" fase. I, II et III (le fasci- cule, 3 fr.). L'ouvrage complet formera 3 volumes in-#, de 36 fase. et 3.000 pages environ (60 francs au comp- tant, 75 francs à terme). Bernard Tignol, éditeur, 53 bis, quai des Grands-Augustins. Paris, 1892. Frappé des difficultés que rencontrent souvent les chimistes pour se procurer les renseignements techni- ques et industriels qui leur sont nécessaires, M. Villon a voulu y remédier par la publication d’un Dictionnaire de chimie véritablement industrielle, Les trois premiers fascicules de cet important ouvrage viennent de paraître. Le livre, d’une forme toute spéciale, est en effet concu dans un esprit très pratique et contient un grand nom- bre de détails inédits. Comme le dit fort bien l’au- teur, c’est une entreprise originale et non une simple compilation. L'intelligence du texte est facilitée par de nombreuses gravures représentant des appareils et par des dessins schématiques très suffisants, Enfin, on a introduit dans ce dictionnaire une innovation très utile, consistant dans la traduction russe, anglaise, alle- mande, espagnole et italienne de la plupart des termes techniques. Il eùt peut-être été bon d’insister davantage sur la partie bibliographique et de donner, pour chaque ar- ticle, une notice succincte permettant de se reporter aux documents ou aux brevets originaux, Une pagina- tion numérotée aurait également rendu plus commode dans certains cas la consultation des articles. Mais, à part ces légères critiques, et si nous en ju- geons par le début de l’ouvrage, le Dictionnaire de chimie industrielle de M. Villon constitue une tenta- tive qui mérite pleine approbation. La partie scientifique n’y est pas oubliée; tout ce qui, dans les diverses sciences physiques, se rattache d’une facon quelconque à l’industrie chimique s’y trouve étudié avec soin. Les fascicules I, Il et IIT contiennent, entre autres, les articles suivants : absinthe, absorption, acétates, acéti- métrie et les acides acétique, antimonieux et anti- monique, arsénieux et arsénique, azoteux et azotique, benzoïque, borique, bromhydrique, butyrique, carbo- nique, chlorhydrique, phosphorique, picrique, pyro- gallique, saccharique, selicylique, sulfhydrique, sul- foricinique, sulfureux et sulfurique. À ce dernier l’auteur a, comme il convenait, consacré un long arti- cle, très bien fait, où nous remarquons avec intérêt la discussion des théories récentes relatives aux réactions dans les chambres de plomb. Nous ne pourrions analyser, même sommairement, chacun de ces articles en particulier ; nous dirons seu- lement que tous les procédés employés, tant en France qu'à l'Etranger, pour la fabrication ou l'extraction de tous les produits industriels sont décrits et détaillés très longnement ; les réactions sur lesquelles s'appuient ces méthodes sont également bien expliquées. C’est un bon commencement, Souhaitons que l’œuvre considé- rable que l’auteur a entreprise avec la collaboration d'un groupe de chimistes et d'ingénieurs, soit continuée avec le mème succès, A. HÉéBerr. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 685 3° Sciences naturelles. Matruchot (L.). — Recherches sur le développe- ment dequelques Mucédinées. Thèse de la Faculté des Sciences de Paris. Armand Colin, éditeur, Paris, 1892. Le groupe des Mucédinées, tel que l'entend M. Ma- truchot, correspond au groupe des Hyphomycètes de Saccardo. On sait que les Hyphomycètes com- prennent toutes les moississures, et il y en a des milliers d'espèces, dont les seuls organes reproduc- teurs connus sont des conidies, ou spores externes nées directement sur les filaments, Les travaux de Tulasne, de de Bary, etc. ont montré que certaines espèces de ce groupe, considérées jusque-là comme indépendantes, ne sont autre chose que des formes conidiennes, c’est- à-dire imparfaites, d'Ascomycètes, de Basidiomycètes ou d’Oomycètes. Des auteurs ont généralisé les résultats de ces travaux et ont envisagé toutes les Mucédinées comme des formes imparfaites de champignons appar- tenant à des groupes déterminés et bien caractérisés; on ignorait seulement à quelles espèces on devait les rapporter. La vraie manière d'étudier les Moisissures paraissait donc de les cultiver pour obtenir l’appareil parfait de reproduction, et fixer ainsi leur place dans la classification ; toutefois, les essais tentés dans cette voie ont été loin de réussir tous, Quoi qu'il en soit, pour la plupart des Mycologues, les Hyphomycètes consti- tuent un groupe artificiel et provisoire, destiné à se réduire au fur et à mesure qu'il sera mieux connu; beaucoup de genres sont mal définis et ont seulement un caractère d'attente. Les espèces de Moisissures, auxquelles M. Matruchot s’est adressé, ne lui onf jamais donné, dans ses cul- tures, d'appareil ascosporé ni basidiosporé; mais, tout en restant mucédinées, elles ont varié d’une facon inté- ressante : des genres et des espèces que l’on croyait distincts, ont été reconnus comme étant des états suc- cessifs ou des formes variables suivant le milieu. Les procédés de culture employés sont ceux qui sont prali- qués par les bactériologistes. D'après l’auteur, les genres Helicosporium et Helico- myces sont identiques, car l’Helicosporium lumbricoides, cultivé sur gélose, perd la coloration brune de son mycélium et par suite devient un Helicomyces ; la même espèce, cultivée sur pomme de terre, ressemble au genre Coniothecium ;enfin, dans les cultures cellulaires, elle a donné un Sfemphylium; mais l’auteur n'a pas réussi à faire la transformation inverse. La parenté des genres OEdocephalum et Gonatobotrys, soupconnée par différents auteurs, est affirmée par M. Matruchot. En plus de ses conidies caractéristiques, une moisissure très commune, le Cephalothecium roseum, produit des conidies différentes : toujours sur pomme de terre, parfois sur carotte, mais jamais en milieu liquide. L'auteur cite encore d’autres faits de polymorphisme, et décrit un nouveau genre : le Costantinella. En résumé, l’auteur a montré la parenté de plusieurs genres ou espèces différents, et il a mis en évidence l'influence du milieu nutritif sur la forme et la nature de l’appareil reproducteur chez plusieurs des espèces étudiées. C. SAUVAGEAU. Varigny (Henry de). — Experimental Evolution, Lectures delivered in the « Summer School of Art and Science » (Conférences sur l’Evolution). University Hall, Edinburgh. Un volume üin-8& «de 271 pages des « Nature Series » (Prix : 6 fr. 25.). Mac- millan and C°, Londres, 1892. Le livre de M. de Varigny comprend une série de conférences faites à Edimbourg en 1891, dans les quelles il à étudié un des plus intéressants problèmes trans- formistes, l'importance et les causes de la variation chez les animaux et végétaux, S'adressant à un public étranger, il a accordé une place prépondérante aux travaux d’origine francaise, moins familiers à son au- ditoire, Après avoir exposé l’histoire succincte et les preuves générales du transformisme, il conclut que nous n’a- yons pas encore la preuve expérimentale de lévolu- tion, c'est-à-dire la transformation positive d’une es- pèce en une autre espèce permanente. À part cette introduction, le reste du volume est consacré à l'étude de la variation ; M. de Varigny montre,par des exemples bien choisis, que les orga- nismes sont essentiellement variables, aussi bien dans leurs caractères morphologiques (couleur, dimensions, forme, développement, etc.) que dans leurs propriétés physiologiques et chimiques (résistance aux maladies, aux poisons, etc.) on sait d’ailleurs quel parti l'homme a tiré de la variation spontanée pour la domestication et la culture. Après avoir solidement établi l’universalité de la va- riation, l’auteur passe au problème beaucoup plus diffi- cile de linfluence du milieu sur l'être vivant: action de la salure de l’eau (expériences de Schmankewitsch, ete.), de la température, de la pression (expériences de Certes répétées par Regnard), modifications des plantes sui- vant les influences externes, etc. En somme, M, de Va- rigny attribue une grande importance aux actions de milieu comme facteur évolutif, bien qu'il ne se pro- nonce pas positivement pour le Darwinisme ou le La- marckisme ; il critique cependant les idées de Weis- mann, pur darwiniste comme l’on sait, qui n’admet pas que de nouvelles espèces puissent se former sous la seule influence des actions de milieu, sans l’interven- tion toute-puissante de la sélection naturelle. M. de Varigny termine son livre en réclamant sur tous ces problèmes des expériences à longue durée, destinées à nous donner la preuve irréfutable de l’évo- lution et à nous révéler ses vraies causes; il en trace même une sorte de programme, assez vague, il est vrai. Mais la science marche bien vite; qui nous assure que ces expériences n'auront pas perdu tout intérêt bien ayant leur achèvement? L. CUÉNOT. Marchal (Paul). — Recherches anatomiques et physiologiques sur l'appareil excréteur des Crustacés Décapodes. Thèse de la Faculté des Sciences de Paris (Arch. de Zoologie expériment., 2usér., VOL X, 1892), in-80. de 219 p.,. 9 planches. A. Hennuyer, 7, rue Darcet, Paris, 1892. M. Paul Marchal poursuit depuis plusieurs années d’intéressantes études sur lappareil excréteur des Crustacés. Déjà, dans sa thèse de Doctorat en méde- cine, publiée en 1890 dans les Mémoires de la Société zoologique de Frante, et médaillée par la Faculté de Paris, on trouve de nombreux documents sur le sujet. Ce travail a servi en quelque sorte d'introduction au présent mémoire. Celui-ci est divisé en deux parties. Dans la première, l’auteur étudie, sur de très nom- breux types de Brachyures, d'Anomoures et de Ma- croures, l'anatomie et l'histologie de l'appareil excré- teur, La seconde est consacrée à la physiologie, à l'hystophysiologie et à la chimie physiologique. Les faits nouveaux mis en lumière el exposés avec détail par M. Marchal, ne comportent guère l’analyse. Aussi faut-il se borner à l'énoncé des résultats obtenus. Le voici, presque texluellement emprunté aux con- clusions de la thèse : L'appareil excréteur des crustacés décapodes est en général pair et formé de trois parties : le saceule, le labyrinthe et la vessie, communiquant entre elles dans l’ordre où elles sont énumérées. La vessie communique d'autre part avec l’extérieur par lintermédiaire d'un canal vésical qui débouche au niveau du premier article de l’antenne. Le saccule et le labyrinthe forment en- semble une seule masse glandulaire, le rein ou glande antennaire. Le saccule est toujours morphologiquement placé au-dessus du labyrinthe ; il ne communique jamais avec le labyrinthe qu’en un seul point silué en avant de la glande, 686 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX M. Marchal donne le nom de labyrinthe à toute la partie de la glande qui est intermédiaire au saccule et à la vessie ; il en fait connaître la structure en em- ployant, outre la méthode des coupes, le procédé des injections à la celloïdine et à l’asphalte ainsi que celui des injections physiologiques. Le labyrinthe peut tou- jours être considéré comme dérivant d’un sac qui se complique par la formation de trabécules et de cloi- sons traversant sa cavité. L'absence d’un tube qui, en se pelotonnant, consti- tuerait toute la partie de la glande faisant suite au saccule est la règle chez les Décapodes; ce fait est en opposition absolue avec ce que l’on admettait jusqu'ici, en généralisant trop tôt les résultats obtenus chez les crustacés inférieurs et chez l’écrevisse. Le labyrinthe peut être considéré comme le représentant de ce tube devenu très court et très élargi. Après une description détaillée de ces diverses par- ties chez un grand nombre de types, l’auteur étudie le mécanisme de l’excrétion. L'urine est, en général, accumulée dans un système vésical. De patientes observations, prolongées pendant des heures sur les animaux vivants, ont permis à M. Marchal de constater par quel mécanisme ce liquide est évacué au dehors. Sa sécrétion n’est pas un simple phénomène de dia- lyse, mais se fait par séparation de parties cellulaires. La vessie participe à la sécrétion, au moins dans un grandnombre de cas,etnotamment chez les Brachyures, les Pagurides et les Caridides. Le liquide excrété est produit en quantité considé- rable ; les vessies d’un Maia peuvent en contenir 48 centimètres cubes. Ce liquide provient uniquement de la sécrétion rénale et vésicale ; il ne contient pas d'eau de mer venue directement du dehors. L’urine du Maia offre à peu près le même degré de salure que celle-ci. Elle ne contient ni urée, ni acide urique, mais renferme une base organique (leucomaine) comparable aux alcaloïdes des végétaux. On y rencontre, en outre, un acide organique spécial, très énergique, dont les caractères ont été étudiés par M. Letellier, et qui a recu le nom d'acide carcinurique. Ses réactions sem- blent devoir le faire ranger parmi les acides carbopy- ridiques. La présence d’un pareil acide, jointe à celle d’une leucomaine, comme produit normal et essentiel de la désassimilation de l'azote, chez un animal, est un fait remarquable et inattendu. ; Neuf planches, dessinées par l’auteur et en partie coloriées, permettent de suivre les descriptions, parfois un peu ardues, des organes étudiés. Vingt figures, in- tercalées dans le texte, aident d’ailleurs à sa compré- hension, et il est à souhaiter que de pareils dessins, même schématiques, se multiplient de plus en plus dans les travaux d'histoire naturelle. Les recherches de M. Marchal ont été poursuivies dans les laboratoires fondés par M. de Lacaze Duthiers à Roscoff et à Banyuls. Des animaux expédiés vivants de la Manche ou de la Méditerranée ont d’ailleurs per- mis de faire à la Faculté de médecine de Paris, sous la direction du professeur A. Gautier, les études chimi- ques dont il a été rendu compte ci-dessus. Jules DE GUERNE. 4° Sciences médicales. Lucas-Championnière (J.) — Cure radicale des hernies, avec une étude statistique de 275 opé- rations. Un vol. in-8° de 720 pages avec 50 figures dans le tete (Prix : 12 francs). Rueff et Cie, 106, boules vard Saint-Germain, Paris, 1892. Lorsqu'en 1883 la question de la cure radicale des hernies était donnée à traiter au concours de l’agré- gation, il n'existait dans toute la chirurgie francaise que cinq cas opérés, dont quatre par M. Champion- nière. Depuis cette époque, par sa pratique, par ses publica- tions, par la part active qu'il a prise à toutes les discus- sions soulevées soit à la Société de chirurgie, soit dans les divers congrès, ce dernier chirurgien n’a pas cessé de défendre énergiquement le traitement opératoire des hernies, Soutenu au début par quelques rares amis, adeptes comme lui, non seulement en théorie, mais en fait, des méthodes antiseptiques, M. Championnière, d’abord violemment attaqué, a fait triompher d’une manière définitive la cause qu’il défendait et l’on peut dire qu'à quelques rares exceptions près, la cure opé- ratoire des hernies est aujourd’hui acceptée par tous les chirurgiens. C'est avec 275 opérations de cure radicale qu'il se présente aujourd’hui; 482 des malades opérés ont été revus à longue échéance. C’est dire que cet important ouvrage permet d'apprécier non seulement la valeur immédiate, mais encore les résultats éloignés de l’opé- ration. L'opération est indiquée dans les hernies irréduc- tibles, dans les hernies réductibles, mais incoercibles, dans la hernie congénitale avec ectopie testiculaire, dans les hernies douloureuses, qui ne le sont souvent que parce qu’elles s’accompagnent d’adhérences épiploiques, dans les hernies croissantes, dans celles accompagnées d'accidents. Enfin, on peut y être amené par certaines convenances sociales (le service militaire, le mariage chez les jeunes filles, etc.). Au contraire, il faut écarter les vieillards, les très jeunes enfants au-dessous de six à sept ans, les grands cachectiques (albuminuriques, diabétiques, tuberculeux avancés), les emphyséma- teux, plus exposés que d’autres à des accidents post- opératoires, les hernieux qui font des hernies partout, dont la paroi abdominale s'effondre en tous sens. Il existe pour toutes les hernies une méthode géné- rale de traitement, La hernie est caractérisée par l'issue des viscères abdominaux dans un sac séreuæ à tra- vers un orifice anormal ou agrandi. Il faut donc : 1° Modifier ou détruire la séreuse, la suppression de la surface glissante supprimant la tendance au glisse- ment interstitiel. On doit supprimer tout infundibulum et pour cela enlever la séreuse bien au-dessus du sac. 2 Constituer à la place de lorifice la cicatrice la plus résistante possible pour former barrière, ce qu’on obtient par l’accolement exact d’une plaie. opératoire cruentée très étendue, 3° Détacher ou détruire les parties non indispen- sables aux fonctions, qui sortent de l’abdomen, En par- ticulier on réséquera l’épiploon dans la plus grande étendue possible, Après avoir étudié successivement ces divers poin{s envisagés d’une manière générale et quelle que soit la variété de hernie en présence de laquelle on se trouve, M. Championnière passe à la description de l’opération propre à chacune de ces variétés. De là une série de chapitres sur la cure de la hernie inguinale, de la hernie crurale et de la hernie ombilicale. A propos de la hernie inguinale avec ectopie, l’auteur insiste sur la conservation du testicule. On ne peut savoir si le tes- ticule peut être abaïissé, qu'après avoir détaché soigneu- sement le cordon du sac herniaire; cette dissection minutieuse préalable est absolument indispensable, Les suites opératoires et les complications de la cure radicale sont ensuite abordées. Nous noterons que, dans quatre cas, M. Championnière a observé des accidents d’étranglement et a guéri ses malades par la laparo- tomie, Chaque point fait dans ce livre l’objet d’une étude détaillée, et l’on y trouve tous les renseignements que peut demander un opérateur. Quant à l'efficacité de la méthode, elle est démontrée par les résultats : sur ses 266 hernieux, M. Champion- nière n'a perdu qu'un malade, qu'il avait opéré dans un service autre que le sien. La récidive n’a été notée que dans quatorze cas. Notons que, pendant les pre- miers mois, il fait porter à ses malades un bandage soutenant le ventre au-dessus de la cicatrice, pas à son niveau, D: Henri HAaRTMANN. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 687 Féré (D'Ch.), Médecin de Bicêtre. — Épilepsie. Un vol. petit in-8° de 203 pages de l'Encyclopédie scientifique des Aide-Mémotre de M. Léauté (Prix 2 fr. 50). G. Mas- son et Gauthier- Villars, éditeurs, Paris, 1892. Ce petit volume est le résumé de la partie clinique d'un traité plus étendu, paru en 1890, intitulé : Les Epilepsies et les Epileptiques. Ce traité, — l'ouvrage le plus considérable qui ait encore paru sur le sujet, — renfermait aussi une étude approfondie de la physio- logie des épileptiques, physiologie qui avait donné lieu, de la part de M. Féré, à des recherches bien con- nues portant surtout sur les phénomènes d’épuise- ment. Au contraire, un aide-mémoire devait surtout avoir pour but d'exposer le côté pratique de la question; c’est ce qu'a fait M. Féré avec l'autorité que tout le monde lui reconnait à propos de l’épilepsie. Les descriptions cliniques sont excessivement pré- cises; on trouvera minutieusement exposés les phéno- mènes de l’épilepsie générale, les paroxysmes incom- plets de lépilepsie, l’épilepsie partielle, lépilepsie sensorielle et la migraine ophtalmique; on trouvera aussi mentionnés les phénomènes sensoriels, viscéraux et psychiques, dont l’ensemble, joint aux phénomènes plus grossiers des convulsions, forme un tout dont les différentes parties ont au fond la même origine, comme le montre bien l'allure paroxystique et l'épuisement consécutif, Mais le point important, en ce qui concerne non pas la pratique, mais la théorie même, est la facon toute personnelle dont M. Féré conçoit l’épilep- sie, Il est bon que le lecteur soit prévenu dès l’abord de ses idées nouvelles, encore trop peu répandues. Voici comment s'exprime M. Féré : a Actuellement, on doit comprendre l’épilepsie comme un syndrome pouvant, au cours d'états patho- logiques très divers, apparaître au plus ou moins grand complet, tantôt sous une forme, tantôt sous une autre, mais au fond toujours le même. Dire qu'il y a une seule épilepsie vraie, essentielle, celle qui survient sans cause appréciable, ne nous semble pas plus ad- missible que de prétendre qu'il n’y a qu'une seule an- gine de poitrine vraie, celle qui reconnaît pour cause le rétrécissement des artères coronaires, et de fausses angines, toxiques, hystériques, etc. On ne doit pas perdre de vue que ces désignations, épilepsie, angine, s'adressent seulement au tableau symptomatique; et tout ce que l’on peut dire, c’est que des causes très variées peuvent produire le même syndrome cli- nique. » Aussi ne devra-t-on pas s'étonner que M. Féré considère l’éclampsie des femmes enceintes et les con- vulsions de l’enfance comme des épilepsies aiguës. Notons encore le rôle capital que l’hérédité joue dans l’étiologie des épilepsies, peut-être même ce rôle est-il indispensable à la production de la névrose, L’é- tude des causes déterminantes générales et locales, le diagnostic de l’existence même de l’épilepsie, le dia- gnostic de la cause, bien important à établir lorsqu'il s’agit d’épilepsie jacksonienne, sont faits de telle sorte que les médecins embarrassés dans un cas donné n'auront qu’à consulter les chapitres qui y sont consa- crés, pour y trouver tous les renseignements néces- saires. Le chapitre du traitement est aussi fort complet, ou plutôt les médicaments vraiment utiles sont indiqués avec les détails requis, tandis que toutes les médications bizarres qui ont élé proposées sont à peine signalées ou passées justement sous silence. En un mot,ce manuel répond parfaitement à son but et en outre il porte l'empreinte tout à fait origi- nale qui avait déjà assuré le succès du grand traité de M. Féré, Cette originalité fondée sur des recherches personnelles s'étend même à la question de l’assis- tance des épileptiques et de leur médecine légale. Il me semble qu’il y a intérêt à faire vemarquer particu- lièrement les idées contenues dans le dernier chapitre qui y est affecté; car, si la majorité des médecins est capable de reconnaître et de traiter les épileptiques, il y en a encore beaucoup qui n’ont pas la notion de ce qui peut être vraiment utile au point de vue de l’assis- tance des malades pauvres et qui ne savent pas, dans les questions de médecine légale, apporter la réserve prudente qui est indispensable, La tendance générale des recherches de M. Féré est de rendre manifestement objectifs tous les symptômes pathologiques, soma- tiques ou psychiques. Il veut aussi que, dans les ques- tions légales, on n’affirme rien qui ne soit objective- ment prouvé. C’est là la marque d'un esprit réellement scientifique; elle se retrouve partout, même dans ce manuel, dont le but est tout pratique; d’ailleurs, un bon manuel ne peut être fait que par quelqu'un de su- périeur au niveau et à la portée d’un pareil ouvrage; cela se sent bien dans cette Epilepsie et c’est pour cela que cet aide-mémoire est bon. Dr Ph. CHAsLiN. Azoulay (D' L.). — Les attitudes du corps comme méthode d’examen, de diagnostic et de pronostic dans les maladies du cœur. Un vol in-8 de 130 p. (4 fr.). Société d'Éditions scientifiques. Paris, 1892. Les bruits normaux ou anormaux du cœur sont modifiés dans leur rythme et leur intensité par les diverses attitudes du corps, dont l’action s’explique par les variations de tension sanguine : plus la tension est élevée, plus les bruits normaux du cœur sont forts et plus le pouls se ralentit, D'une facon générale (car ces lois sont sujettes à des exceptions assez nombreuses), dans la station debout, les bruits ont leur minimum d'intensité, ou même sont nuls, les battements sont rapides. Dans la station assise, certains bruits peuvent apparaître, d’autres qui existaient s’accentuer, le cœur bat moins rapidement. Dans la station couchée, les phénomènes précédents sont encore plus sensibles. Enfin, le maximum d'’inten- sité des bruits et de ralentissement des pulsations est obtenu dans l'attitude relevée imaginée par l’auteur, et dont voici la description : Après avoir enlevé tout oreiller, et mis le traversin tout contre le chevet du lit, placer le malade aussi horizontalement que possible; lui relever fortement la. tête avec le traversin; élever les bras lentement et les porter étendus en arrière sur le chevet du lit; fléchir les genoux, de facon que, les pieds reposant sur le lit, les talons soient aussi près que possible des ischions. Il faut avoir soin que ces mouvements s’exécutent doucement, afin d'éviter l'accélération d’effort, et en tous cas, ne pratiquer l'examen que quelques minutes après que l’attitude est prise. On obtient ainsi lapparition des bruits anormaux qu'on ne percevait pas dans lesautres attitudes, laccen- tuation des bruits déjà notés, et la dissociation des bruits complexes, en raison de l’allongement des pé- riodes d'évolution par ralentissement du rythme. Il vasans dire que dans les cas où les bruits anormaux sont confus en raison même de l'excès de leur intensité, on aura avantage à s'éloigner graduellement de cette attitude pour arriver à la station debout, Des infractions à ces règles, il est possible de tirer des indications pronostiques : dans les lésions valvulai- res non compensées, l'attitude relevée amène l’accé- lération du pouls au lieu de son ralentissement; plus ce pouls sera alors accéléré, irrégulier, en même temps que la respiration devient dyspnéique, plus on devra craindre la rupture de compensation, l’asystolie. Le ralentissement du rythme et l'augmentation de l'intensité obtenus dans l'attitude relevée, permettent aussi de mieux reconnaître un bruit extra-cardiaque dont l'apparition méso-systolique à la pointe, et méso- diastolique à la base, constitue le caractère le plus certain. Le D'Azoulay a appuyé cette étude de nombreuses observations prises dans les services hospitaliers de Paris. D' Ray. DuraNb-FARDEL, 688 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER (La plupart des Académies et Sociétés savantes, dont la Revue analyse régulièrement les travaux, sont encore actuellement en vacances.) ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 19 septembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Bigourdan com- munique ses observations de la nouvelle planète Wolf (13 septembre 1892) et de la planète Borrelly-Wolf faites à l'Observatoire de Paris (équatorial de la tour de l'Ouest). Cette dernière planète parait être identique à Erigone. — M. Paul Serret continue l'exposé des propriétés d'une série récurrente de pentagones ins- crits à une même courbe générale du troisième ordre, 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M, Mascart expose une théorie nouvelle de l’arc-en-ciel blanc, ou cercle d’Ulloa, car l'explication de Bravais, fondée sur l'hypothèse des vésicules, semble tout à fait improbable; l’auteur montre que la disparition des couleurs tient à l'extension des franges d'interférences qui se recouvrent et achroma- tisent ainsi l’arc-en-ciel; il reprend, en la complétant, la théorie d’Airy et cherche quel est le diamètre des gouttes qui donnent le meillenr achromatisme. Cette interprétation des phénomènes est conforme à tous les renseignements fournis par tous les observateurs d'arcs-en-cie] blancs. — MM. Sarazin et de la Rive produisent l’étincelle de l’oscillateur de Hertz dans un diélectrique liquide au lieu d'air, Les interférences de la force électromotrice par réflexion sur une surface métallique plane donnent les mêmes résultats que lorsque la décharge de l’oscillateur a lieu dans l’air, c’est-à-dire qu’elles donnent la longueur d'onde propre au résonnateur employé. L'appareil fonctionnant pen- dant plus de vingt minutes ne donne lieu à aucune altération d'intensité, — M. W. Markovnikof a étudié l’action du brome en présence du bromure d’alumi- nium sur les carbures à chaînes cycliques, il a posé la règle suivante : «L'action du brome sur les naphtènes, en présence du bromure d'aluminium, à la température ordinaire, se porte principalement sur les atomes d’hy- drogène de la chaîne cyclique en le transformant en noyau de benzine, dans lequel tous les atomes d’hydro- gène sont substitués par le brome tandis que les chaines latérales restent intactes .» — M, Léo Vignon montre que le pouvoir rotatoire de la solution chlo- rhydrique de fibroïne ne peut pas s'expliquer par la décomposition de ce produit; il précipite, en effet, la solution par l'alcool et retrouve un corps qui a toutes les propriétés de la fibroine primitive, — M. W. de Fonvielle fait une communication sur la découverte de la ligne sans déclinaison. C. MATIGNON. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Gaston Bonnier à étudié, dans le pavillon des Halles centrales, à Paris, l'influence qu'exerce la lumière électrique continue et discontinue sur la structure anatomique des arbres. Il ré- sulte des expériences que l’éclairage électrique continu provoque de grandes modifications de structure dans les feuilles et les jeunes tiges des arbres. Dans ces conditions, les plantes respirent, assimilent et trans- pirent jour et nuit d’une manière invariable ; elles sont comme gènées pour l’utilisation et la différenciation ultérieure des substances assimilées et les tissus ac- quièrent une structure plus simple. La structure pro- duite dans les divers organes par l'éclairage électrique discontinu, avec douze heures d’obscurilé sur vingt- quatre, se rapproche plus de la structure normale que celle résultant de la lumière électrique ininterrompue. — MM.J.Jad et G. Marinesco ont fait un grand nombre d'expériences dans le but d’élucider la question du centre respiratoire bulbaire, sur le siège et la na- ture duquel les principaux physiologistes ne sont pas d'accord. Les auteurs dans leurs recherches ont employé de petites baguettes en verre portées à une température élevée à l’aide desquelles ils détruisaient lentement et progressivement la région présumée du centre respiratoire. Il en résulte : 4° que la destruction des noyaux bulbaires, considérés par les divers auteurs comme des centres respiratoires, ne détermine pas, lorsqu'elle est faite dans certaines conditions, l'arrêt définitif de la respiration; 2° qu'il existe, dans la moitié inférieure du bulbe, une masse cellulaire située pro- fondément, dont la destruction détermine l'arrêt et dont l'excitation entraine des modifications caractéris- tiques de la respiration; 3° que cette région, jouant le rôle de centre respiratoire, n’est pas nettement cir- conscrite, mais est constituée par une association de cellules nerveuses disséminées de chaque côté des racines de l'hypoglosse; 4° enfin, que les voies centri- fuges qui descendent dans la moelle sont directes et occupent la zone réticulaire antérieure. Mémoires présentés : M. A. Netter : Quelques re- marques sur la nature et le traitement du choléra. En. BELZUNG. Séance du 26 septembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M, Hatt a appliqué à la triangulation des côtes de Corse, un nouveau sys- tème conventionnel de coordonnées obtenu en trans- formant en coordonnés rectangulaires planes, les coor- données polaires comptées sur la sphère autour d’une origine, L'expérience a donné des résultats satisfaisants au point de vue de la précision et de la facilité des calculs. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Mascart apporte à sa théorie précédente de l’arc-en-ciel blanc une modifica- tion importante qui rend l'explication plus satisfai- sante; l’achromatisme le plus parfait a lieu avec des gouttes de diamètre 30u. — M. Markovnikoff, en trai- tant l'alcool subéronylique avec de l’acide iodhydrique fumant, a obtenu un corps identique, l'hectanaphtène; il donne comme lui du pentabromotoluène en présence du brome et du bromure d'aluminium. On réalise ainsi le premier exemple d'une transformation de la chaîne cyclique heptacarbonique en une chaîne hexacarbo- nique sous l'influence du bromure d'aluminium. — M. Raoul Varet a préparé les chlorocadmiate, bromo- cadmiate et iodocadmiate de pipéridine et de pyridine. Le bromure et l’iodure de cadmium fournissent dans les deux cas considérés des combinaisons répondant aux mêmes formules. Le chlorure de cadmium en- cendre des composés du même type, avec les deux bases examinées, GC. MATIGNON. 3° SCIENCES NATURELLES : M. J.-D. Tholozan : Lieux d’origine ou d’émergence des grandes épidémies cho- lériques et particulièrement de la pandémie de 18#6- 1849, L'auteur, s'appuyant sur des documents dignes de foi, cherche à déterminer quelles sont les contrées où débuta la pandémie cholérique qui, après avoir traversé la Perse, envahit l’Europe et l'Amérique en 1847, 1848 et 1849, Des divers témoignages cités il ré- sulte que ce choléra, au lieu de partir dans l'Inde de l'aire endémique et de se diriger du sud-est au nord- ouest, a progressé au contraire de l’ouest à l’est, du Turkestan vers l'Inde, c’est-à-dire d’un point de l'Asie centrale vers sa mère patrie, et jusque sur les confins ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de l'aire endémique. D’après l’auteur il faudrait consi=. dérer les points d’émergence des épidémies cholé- riques comme leur foyer d’origine et abandonner l'idée de faire venir directement de l’Inde les diffé- rentes manifestations pandémiques du choléra. Ce qui fait l'épidémie envahissante ou pandémie, c’est la révi- viscence du principe ou du germe cholérique, sa révwvis- cence complète avec tous ses attributs primitifs. Dans l’Inde, ce sont de semblables réviviscences, véritables éclosions, qui perpétuent l’endémie annuelle et les épidémies qui se montrent tous les trois, quatre ou cinq ans. L'auteur pense que c'est sur ce fait capital et primordial que doivent porter les recherches micro- biologiques. Mémoires présentés. — M. Léopold Hugo : Remarques sur l’ancienne arithmétique chinoise. — M. J. Péroche adresse une Note portant pour titre : Les glaces polaires. En. BELZUNG. Séance du 3 octobre. 4° SGIENCES MATHÉMATIQUES. — MM. Rambaud et Sy communiquent leurs observations de la nouvelle pla- nète Borelly, faites à l'Observatoire d'Alger (équatorial coudé). — M. C. Clavenad fait quelques observations générales sur les considérations d’homogénéité en Physique et montre que la relation v — entre = VyÀ la vitesse de propagation d’un courant, la capacité et le coefficient de selfinduction de la ligne, admise par M. Vaschy, est inexacte, on doit la remplacer par la suivante v — À We if 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. E. Cohn à propos de la coexistence du pouvoir diélectrique et de la conducti- bilité électrique adresse une réclamation de priorité; sa méthode et ses conclusions sont les mêmes que celles de M. Bouty. — M. Pierre Lesage a comparé l’évaporation des solutions de chlorure de sodium, de chlorure de potassium et d’eau pure; les résultats sont d’accord avec la comparaison des tensions de vapeur de ces solutions. —- M. T. L. Phipson envoie l’analyse d’un bois fossile contenant 3,90 pour 100 de fluor. — M. T. L. Phipson considère la cascarine de M. Le- prince comme identique avec sa rhamnoxanthine. — M. Delaurier adresse une note intitulée : Nouveaux procédés pour la recherche de l'azote dans les com- posés organiques el inorganiques. C. MATIGNON. 3 SCIENCES NATURELLES. — M. A.-B. Griffiths a trouvé dans le sang des Chitons une globuline respira- toire incolore ayant, au point de vue physiologique, les propriétés de l’'hémoglobine et des autres substances respiratoires du sang des invertébrés. L'auteur lui a donné le nom de G-achroglobine pour la distinguer de l’achroglobine qui existe dans le sang de la Patelle. Elle se présente sous deux états, soit chargée d'oxygène aclif, soit dépourvue de ce gaz. Dans le premier cas, c'est une substance incolore. — M. Gaston Bonnier fait connaître aujourd'hui les modifications de structure anatomique qu'on observe chez les plantes herbacées, soumises à l'influence de la lumière électrique sous globe continue, constante et prolongée, discontinue et aussi à la lumière électrique directe. Les résultats mon- trent que si, à la lumière électrique continue, sous verre il y a verdissement intense, pour une plante donnée, la structure des organes est d'abord très différenciée; si les mêmes conditions sont maintenues pendant plu- sieurs mois, les nouveaux organes formés pour cette plante présentent de remarquables modifications de structure dans leurs tissus et sont moins différenciés, quoique étant toujours riches en chlorophylle. Enfin, la lumière électrique directe est nuisible par ses rayons ultra-violets au développement normal des tissus, même à une distance des lampes de plus de trois mètres. En, BELZUNG, Là 689 2 LA ACADEMTIE DE MEDECINE Séance du 20 septembre. M. Mignot revient sur sa précédente note (Séance du 13 septembre) relative à une épidémie de cholérine et quelques cas de choléra nostras, pour maintenir ses conclusions, contrairement à l'opinion de M. Brouar- del, à savoir que le choléra qui sévit à Paris etau Havre est bienle choléra morbus. — M. Peter : Le choléra à Paris en 1892, L'auteur expose les faits ob- servés dans son service et en tire les conclusions qui en découlent. La clinique et la bactériologie condui- sent toutes deux à cette même conclusion : unicité du choléra, Il n’y a pas trois choléras, il n’y a que des formes cliniques différentes suivant la nature des or- ganismes contaminés. Dans cette épidémie de 1892, on observe, dans les mêmes localités, la diarrhée persis- tante sans vomissements, puis la diarrhée avec vomis- sement{s et crampes, c’est la cholérine ; cette première sériemorbide se continue par le choléra avec déjections bilieuses, crampes continuelles, refroidissement des extrémités et parfois cyanose: c’est le choléra dit nos- tras; enfin, dans d’autres cas, symptômes généraux plus graves, déjections d'emblée riziformes ou le deve- nant après avoir élé bilieuses : c’est le choléra dit indien. L'auteur est d’avis de supprimer l’épithète d'in- dien et de dire, au lieu de choléra nostras, choléra bilieux, et, au lieu de choléra indien, choléra riziforme. Pour ce qui est de la contagiosité, l’auteur dit que le choléra a la contagiosité relative des maladies à mi- crobes, tandis que les maladies dont on ne connait pas le microbe, telles que la scarlatine, la variole, la rou- geole, ont une contagiosité absolue. Ne sont frappés.du choléra que les débilités, ceux que le milieu intérieur prédispose à le contracter, exposésqu'ils sontau milieu extérieur, Quant au traitement, il importe de combattre la diarrhée initiale, de débarrasser l’organisme des leucomaines toxiques qui sont, pour l’auteur, la cause du choléra; dans le cas de persistance de la diarrhée, il faut employer les préparations d’opium contre les crampes et appliquer sur la colonne vertébrale le sac à glace de Chapmann, Au cours de la discussion qui suit entre MM. Brouardel, Verneuil et Peter, ce dernier admet la possibilité du transformisme des microorganismes et dit que, dans le cas particulier du choléra, suivant les conditions morbides, le Bacterium Coli subirait des modifications telles, qu'il deviendrait morphologiquement identique au bacille virgule de Koch, après avoir présenté le caractère du bacille vir- sule de Finkler et Prior, intermédiaire entre les deux précédents. Pour M, Verneuil lavirulence très variable de certaines bactéries, inoffensives à l’état normal, s'expliquerait plutôt par les associations microbiennes. Séance du?7 septembre. M. Gibert : L’épidémie de choléra au Havre en 1892. Dans cette communication l’auteur étudie la na- ture, l’origine et le caractère épidémique du choléra qui a sévi au Havre; il fait connaitre ensuite l’organi- sation instituée pour lutter contre cette épidémie, Voici les conclusions de cette étude : 1° le choléra du Havre est bien le choléra asiatique; 2° il n’a pas été importé par mer, mais bien directement de Courbe- voie; 3° la diarrhée cholériforme de Paris est par con- séquent le choléra morbus sous sa forme épidémique habituelle. L'auteur termine sa note par la question de contagion. — MM. Verneuil et Forestier (d’Aix-les- Bains) : Fracture de la colonne vertébrale par cause musculaire, longtemps méconnue et révélée par l’ap- parition de douleurs névralgiques en ceinture et d’une gibbosité tardive. Après avoir exposé et discuté lon- suement les observations relatives au malade dont il s’agit, les auteurs formulent, entre autres conclusions, les suivantes : les mouvements actifs violents de la co- lonne vertébrale peuvent, comme les mouvements pas- sifs, mais beaucoup plus rarement, produire une variété 690 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES particulière de fracture du rachis, dite par action mus- culaire, fracture comparable à celles dites par tasse- ment, écrasement, pénétration qu'on observe sur d’autres os spongieux. Les suites habituelles de l’acci- dent peuvent faire défaut même pendant plusieurs mois; mais, à un moment donné, la gibbosité peut se produire, ainsi que les douleurs médullaires ou inter- costales, Le diagnostic entre ces fractures et l’entorse médullaire est, par suite, rendu difficile. S'il y a doute, appliquer le traitement comme s’il s'agissait de la fracture et s’il se présentait des complications médul- laires nerveuses ou viscérales, il convient de les traiter comme dans les fractures rachidiennes en général, Discussion : MM. Polaillon, Weber, Verneuil. — M. Chauvel : Du traumatisme dans l’étiologie des af- fections de l'appareil auditif. Sur un total de 1,470 ob- servations d’affections de l’oreille, l’auteur en a relevé 108 ayant pour cause le traumatisme. Dans ce nombre les affections dues aux traumatismes directs (coups et chutes sur la tête, fractures du crâne etc...) sont plus communes que celles ayant pour cause les trauma- tismes indirects (tir du canon, du fusil, explosion, etc.). Dans les traumatismes directs l’otite scléreuse et la sur- dité nerveuse se montrent avec une fréquence presque égale à celle de l’otite purulente, tandis que, dans les traumatismes indirects l'affection de beaucoup la plus commune est l’otite purulente; mais il y a dispro- portion entre les suites des deux traumatismes en ce sens que, dans les traumatismes directs, les affections sont en bien plus grand nombre; en outre, intéressant dans la profondeur les parties les plus délicates de l'oreille, elles sont beaucoup plus graves, etles chances de guérison radicale sont par conséquent très faibles. — M. Galliard : Sur la transfusion intra-veineuse de sérum artificiel chez les cholériques. ACADEMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 24 septembre, 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. A. Lorentz : Ré- flexion de la lumière par un corps en mouvement, d’après la théorie électro-magnétique de la lumière (Maxwell). L'auteur explique d’abord quelques nota- tions nouvelles. Si M représente un vecteur et si M;, M,, M. sont les composantes de ce vecteur par rap- port à un système de coordonnées participant au mou- vement de la matière pondérable, le symbole div. M divergence de M) indiquera l’expression dMz : dMy, dM- dx dy ds tandis que le symbole rot. M (rotation de M) représen- tera le vecteur aux composantes DM: DM, DMz DM: dMy dMz dy D: Dz dr Dr dy et le symbole Mle vecteur aux composantes dMz DM, DM: DM ATP Enfin l'expression vect, (M N) va indiquer le vecteur aux. composantes M, N>—. M: N,, MN; — M>N;,, M; N,— M, Nz. A côté de la vitesse p de lamatière pon- dérable l’auteur introduit : 1° deux vecteurs D et E qui se réduisent au déplacement diélectrique et à la force électrice dans le cas p — 0, et 2° La force magnétique H, Si V représente la vitesse de propagation de la lumière dans l’éther et n l'indice absolu de réfraction de la matière (supposée en repos), les équations du mouve- ment sont : div. D=0(), div H=0(), rot. E——H (2), rot. [n it 5 vect. &)| = 4rD (3), nE + vect. (Hp) = 47 V2D (3), où les chiffres (1) ef (3) entre parenthèses indiquent le nombre des équations simples équivalentes. Ces équa- tions montrent d’abord que la supposition d’une matière pondérable parfaitement perméable pour l’éther fait retrouver le coefficient d'entraînement 1 ; 2e 1 — = de Fresnel, Ensuite elles s'appliquent au cas d'un milieu non homogène en considérant une sépara- tion distincte de deux milieux comme cas limite d’une transition continue. Ainsi l’on trouve pour les condi- tions limites au plan de séparation la continuité 4° des composantes normales à ce plan de D et Het 2° des composantes tangentielles (parallèles à ce plan) de E et È 1 du vecteur [n + V3 vect. (Ep). |. Pour p = 0 les équa- tions prennent des formes connues. Enfin l’auteur examine la réflexion d’un pinceau de rayons parallèles polarisés par un plan qui sépare deux milieux trans- parents à indices de réfraction absolues n, et n,. Ces résultats sont les suivants : 4° les rayons relatifs obéis- sent aux lois ordinaires de la réflexion et réfraction; 2° Le temps de vibration subit une modification qui s'accorde avec le principe connu de Doppler; 3 En l'amplitude de la lumière incidente comme unité celle de la lumière réfléchie est représentée par sin(i— 7») | 2p; cosi sin(i+7r) Va À ou par tang(i— 7) 1 2p,cosi tang(i +7) Var à mesure que les rayons sont polarisés dans le plan d'incidence ou normal à ce plan. Dans ces expressions i et » représentent les angles d'incidence et de réflexion des rayons relatifs; tandis que p, indique la projection de p sur la normale du plan, projection comptée posi- tivement si elle tend vers le second milieu; on y a FN . D : négligé les puissances de ® . Ces résultats s'accordent avec le principe de la conservation de l'énergie. En effet, dans le cas plus simple #, —1,n, = æ (réflexion absolue parun miroir reculant) l'amplitude dela lumière b] réfléchie est 4 — SL et l’on vérifie aisément que la perte correspondante d'énergie est regagnée de moitié dans la vibration des parties nouvelles qui participent au mouvement de la lumière et de moitié dans la pression éprouvée par le miroir, d’après les résultats de Maxwell, — M. J. M. Van Bemmelen a préparé Fe? O3 Na? O en cristaux de forme différente. A l’aide de l’eau tous ces cristaux se changent en hydrates sans perdre leur transparence et leurs propriétés op- tiques. Es SCIENCES NATURELLES, — M, H. Van Cappelle : Géologie de Lochem, — M. J. L. C. Schroeder van der Kolk: Distribution des erratiques cristallins dans le nord-est des Pays-Bas, SCHOUTE, Membre de l'Académie. CORRESPONDANCE 691 CORRESPONDANCE SUR L'AMAUROSE ET L'ÉTAT HYPNOTIQUE Au sujet du récent article de M. Pierre Janet sur le Congrès psychologique de Londres !, M. le D' Bernheim, de Nancy, nous prie d'insérer la Note suivante : Je suis obligé de rectifier les assertions de M. Pierre Janet, me concernant, insérées dans son article sur le Congrès international de Psychologie expérimentale (Revue du 15 septembre). 40 L'auteur veut bien ne pas contester l’intérét de mes expériences sur la nature psychique de l’amaurose, « puisque, dit-il, il a signalé lui-même, en 1887, exac- ment les mêmes faits et que, depuis, il les a décrits à plusieurs reprises ». Le lecteur pourrait conclure de ce qui précède que je n’ai fait que répéter les expériences de M. Janet, ce qui est le contraire de la vérité; caril oublie d'ajouter que ma première communication sur ce sujet a élé faite en 1886 à l'Association pour l'Avancement des Sciences, session de Nancy (voir 15e session, page 744 et Revue de l'Hypnotisme, 1° an- née, page 68). Si je suis revenu à la charge avec de nouveaux faits, c'est parce que le professeur Pitres et M. Gilles de la Tourette ont récemment combattu mon interprétation. 2° M. Janet a travesti et dénaturé les idées que, à la demande de M. le président Sidgwick, j'ai exposées au Congrès sur la suggestion et l’hvpnotisme. Je n'ai ja- mais prononcé la phrase qu'il me fait dire entre quillemets, je n'ai pas dit que l'hallucination n'est rien, je n'ai pas dit que l'hypnotisme guérit tout. Jai dit que l’état dit hypnotique n’est pas une névrose, que le sommeil ob- tenu par suggestion ne diffère pas essentiellement du sommeil normal, que les phénomènes qu'on produit dans l’un chez certains sujets (catalepsie, anesthésie, hallucinations, etc.) peuvent être obtenus dans l’autre chez quelques-uns, que les rêves sont des hallucina- tions spontanées du sommeil naturel, comme les hal- lucinations suggérées sont des rêves provoqués, que tous les phénomènes dits hypnotiques peuvent être ob- tenus chez les personnes suggestibles, sans sommeil, que ce qu'on appelle hypnotisme n’est autre chose que la mise en. activité d’une propriété physiologique du cerveau, la suggestibilité, que l’'hypnotisme n’est dange- reux que par les suggestions mauvaises qu'on peutfaire. Ces idées se trouvent développées dans mon livre Hypnotisme, Suggestion, Psychothérapie, dans mon Rap- port sur la valeur relative des divers procédés destinés à provoquer lhypnose, etc. (Congrès international de l’hypnotisme expérimental et thérapeutique de Paris, 4889, — Revue de l'hypnotisme, 1889, page 105) et dans une étude intitulée Définition et conception des mots suggestion et hypnotisme, communiquée à la Société d'Hypnologie (Revue de l’Hypnotisme, septembre et oc- tobre 1891). Les faits sur lesquels j’appuie ces idées, je les montre à tous ceux qui visitent ma clinique. Je prie le lecteur qui désire réellement connaître mes idées sur la suggestion, de les chercher dans ces écrits et à ma clinique et de juger par lui-même les appréciations que M. Pierre Janet, à la suite d’autres élèves de la Salpêtrière, a cru devoir en donner, avec une désinvolture qui n’a rien de scientifique. BERNHEIM. 1 Voyez à ce sujet la Revue du 15 septembre 1892, €. III, p. 609 et suiv. M. P. Janet, auquel nous avons communiqué la Note ci-dessus, nous adresse la réponse que voici : Je ne désire pas entamer une discussion avec M. Bernheim sur une question de bibliographie, ni sur un problème psychologique; je désire seulement lui expliquer les quelques mots qui lui ont déplu dans mon compte rendu du Congrès de Londres, Je n’avais pu retenir entièrement l’expression d’un mécontente- ment que j'avais éprouvé, moi aussi, ef qui était, je crois, bien naturel. La légéreté avec laquelle, — bien involontairement sans doute, — M. Bernheim, dans sa communication sur les anesthésies hystériques, oubliait tous les travaux qui avaient été faits sur ce problème, m'avait causé une certaine surprise. Sans doute, cet auteur a publié en 1886 un article sur les amauroses unilatérales, et je connais bien ce travail pour l'avoir souvent cité, lon- guement discuté et défendu même contre certaines critiques, Mais cet article reproduisait seulement les expériences anciennes de M. Régnard et de M. Parinaud sur les amauroses unilatérales, avec une autre inter- prétation, il est vrai, Dans sa communication au Con- grès, M. Bernheim a rapidement laissé de côté ce point de détail pour parler d'expériences sur les anesthésies tactiles et sur les insensibilités hystériques en général. Quand même M. Bernheim aurait parlé de ces expé- riences-là avant 1887, ce que je ne crois pas, il me semble inadmissible de les présenter aujourd’hui comme n ouvelles, alors que, depuis cinq ans, elles ont été l’objet d'une grande quantité de travaux et de contro- verses. Depuis longtemps, bien avant d’avoir l'honneur d’être un élève de la Salpêtrière, j'avais été étonné de la confusion que M. Bernheim cherchait à faire entre tous les phénomènes psychologiques et surtout entre les faits normaux et les phénomènes pathologiques. Je ne puis admettre qu'il soit bon de répéter sans cesse que l’accès de somnambulisme est identique au sommeil normal, que l’hallucination, éprouvée au milieu de la veille et malgré les sensations réelles environnantes, soit identique au rêvede la nuit, Quels que soient les intermédiaires innombrables qui permettent de mon- trer dans ce cas, comme dans tous les autres, l’évolu- tion des phénomènes normaux vers les phénomènes pathologiques, il faut que le médecin aussi bien que le psychologue sache distinguer des choses qui ne sont pas identiques. Exprimer cette opinion, cela n’a rien, je pense, de blessant pour M. Bernheim. Or cette confusion, que je regrettais, a élé encore ac- centuée au Congrès de Londres, et elle a été exprimée en termes tellement exagérés que j’ai cru devoir les écrire sous la dictée de M. Bernheim. J'ai reproduit ces termes d’après mes notes, précisément pour que l’on ne püt pas m’accuser de mal interpréter ses paroles. Je regrette que M. Bernheim ne se souvienne pas de ces expressions qui ont étonné et même provoqué une réplique. Mais je suis heureux de prendre acte de sa déclaration : ces paroles dépassent sa pensée, Peut- être M. Bernheim n'est-il pas aussi éloigné que je l'ai cru, d’après quelques exagérations de langage, d'accepter l'opinion qui me semble à moi-même la plus exacte sur ces phénomènes névropathiques, Pierre JANET. e Muni di CHRONIQUE CHRONIQUE GÉNÉRALISATION DE LA « PROJECTION DE MERCATOR » A L'AIDE D'INSTRUMENTS ÉLECTRIQUES ! En 1568 Gerhard Kramer, — connu généralement sous le nom de « Mercator » (son nom latin), — inventa sa carte, devenue d’un usage universel en navigation. Dans cette carte, toute ile, baie ou eôte, si elle n’a pas plus de deux ou trois degrés de longitude, est indiquée d’une façon assez exacte sous sa vraie forme; la repré- sentation est même rigoureusement exacte,-s’il s’agit de distances égales seulement à une différence infinitési- male delongitude : l’angle entre deuxlignes quelconques d'intersection sur la surface du globe est alors rigoureu- sement égal à l'angle correspondant dessiné sur la carte. On peut se représenter la carte de Mercator comme obtenue de la facon suivante : sur toute la surface d’un globe, sauf au pôle, on appliquerait une feuille très mince et extensible, telle que serait, par exemple, une pellicule de caoutchouc, si cette substance éminemment extensible pouvait être dépourvue de son élasticité; on couperait la feuille suivant un méridien, par exemple celui qui est à 180° de Greenwich; puis on étendrait chaque hémisphère dans tous les sens, excepté le long de l’'Equateur, jusqu’à rendre tous les cercles de lati- tude égaux en longueur à la circonférence de l’équateur; suivant le méridien on étendrait la feuille dans le même rapport, de facon à maintenir à angles droits les inter- sections des méridiens avec les parallèles. La feuille ainsi modifiée, étant posée à plat ou roulée comme une feuille de papier, ce serait là la carte de Meércator. Appelons généralisation de cette carte pour un corps de forme sphérique ou non sphérique, une mince feuille indiquant à la place de toutes lignes d’intersec- tion susceptibles d’être tirées à la surface du corps, des lignes correspondantes se coupant suivant les mêmes angles. Une carte de Mercator de dimensions détermi- nées ne peut représenter qu'une partie de la surface complète d’un corps déterminé, si le corps est simple- ment continu, c’est-à-dire s’il n’est traversé par aucun trou, ni tunnel. La surface entière d’un anneau d’an- crage peut évidemment être mercalorisée sur une carte. On voit facilement que, dans le cas du globe, deux cartes suffisent à mercatoriser toute la surface. Nous allons démontrer que trois cartes suffisent pour n'importe quelle surface fermée continue, quelque dif- férente qu'elle soit de la forme sphérique. Dans le Journal de Liouville pour 1847, Liouville, di- recteur de cette publication, a donné une étude ana- lytique d’après laquelle, si lon possède l'équation d'une surface quelconque, on peut tracer dans cette surface une série de lignes satisfaisant à la condition de la diviser en carrés infinitésimaux par leur inter- section avec la série de leurs perpendiculaires dans les- dites surfaces, Il est donc évident que, si nous avons une portion d’une surface courbe ainsi divisée dans toute son étendue en carrés infinitésimaux, entourés chacun de quatre carrés, nous pouvons modifier tous ces carrés dans le même rapport et les appliquer sur une surface plane, chacun d'eux se trouvant en contact avec ses quatres voisins primitifs ; la portion de surface que nous venons de considérer se trouvera ainsi mercatorisée. Excepté pour le cas d’une figure de révolution, le cas d’un ellipsoïde, ou d’autres virtuellement équiva- lents, les équations différentielles de Liouville sont d’une application très difficile. Ce n’est que tout dernièrement que j'ai remarqué que nous pouvons résoudre graphiquement le problème avec l'exactitude qu'il exigerait si, — hypothèse con- traire à la réalité, — c'était là un problème pratique. A l’aide d’un voltamètre et d'une batterie voltaique, ou de tout autre système de production de courants électriques, nous pourrons résoudre le problème; il 1° Construire la surface à mercatoriser en produisant une feuille métallique d'épaisseur très mince et par- tout uniforme, Par «mince, » j'entends que l'épaisseur devra être une. petite fraction du plus petit rayon de courbure d'une partie quelconque de la surface ; 2° Choisir deux points quelconques de la surface, N, Set y appliquer les électrodes d’une batterie ; 3° Au moyen des électrodes mobiles du voltamètre, tracer une ligne équipotentielle E, aussi près qu’on peut autour d'une électrode et une autre ligne équipo- tentielle F, aussi près qu'on peut autour de lautre électrode. Entre ces deux équipotentielles E, EF, tra- cer une grande quantité 7 d’équipotentielles équi-dif- férentes. Diviser une quelconque des équipotentielles en 7 parts égales; par les points de division on tire des lignes coupant la série entière des équipotentielles à angles droits. Ces lignes transversales et les équipoten- tielles partagent toute la surface entre E et F en carrés infinitésimaux. 4° Réduire tousles carrés à la même dimension et l’on place les ensembles, comme il a été expliqué ci-dessus. On a ainsi une carte Mercator de toute la surface entreEet F.NetS de notre généralisation correspondent aux pôles Nordet Sud de la Carte du Monde de Mercator ; et notre règle généralisée montre qu'une carte rem- plissant le principe essentiel de similarité réalisée par Mercator peut être construite pour une surface sphé- rique en choisissant pour N,$, deux points quelcon- ques qui ne soient pas nécessairement les pôles à l’extrémité d’un diamètre. Si les points N, S sont infi- niment près l'un de l’autre, la Carte Mercator, dans le cas d’une surface sphérique, est la projection stéréo- graphique de la surface sur le plan tangent à l’extré- mité opposée du diamètre passant par le point G, à moi- tié chemin entre N et S. Dans ce cas les équipotentielles et les lignes de courant sont des cercles sur la surface sphérique coupant N S à angles droits, et le touchant, respectivement. Pour une surface sphérique ou toute autre surface, nous pouvons mercatoriser toute portion rectangulaire ABCD, de cette surface limitée par quatre courbes, AB, BC, CD, DA, se coupant l’une l’autre à angles droits, comme suit : découpez cette partie sur la feuille mé- tallique complète ; à deux de ses bords opposés, AB, DC, par exemple, fixez des bandes infinimentconductrices, Appliquez les électrodes d’une batterie voltaique à ces bandes; (racez n lignes équipotentielles équi-dif- férentes entre AB et DC. Divisez une quelconque de ces équipotentielles en » parties égales, et, par les points de division, tracez des courbes coupant perpendiculai- rement toute la série des équipotentielles. Ces courbes et les équipotentielles diviseront tout l’espace en car- rés infinitésimaux. Egalisez les carrés et mettez-les en- semble à plat comme ci-dessus. Si nous n'avons pas d'instruments de mathématiques pour tracer un système de courbes à angles droits sur un système déjà dessiné, nous pouvons nous en passer entièrement et compléter le problème de la division en carrés par des instruments électriques : à cet effet, retirez les bandes conductrices de AB, DC; appliquez des bandes infiniment conductrices à AD et BC, appli- quez des électrodes à ces bandes conductrices, et, comme ci-dessus, tracez n équipotentielles équi-diffé- rentes. Cette seconde série d’équipotentielles, et la pre- mière série partageront tout l’espace en carrés. KELVIN (Sir Wicciam THomsow), Président de la Société Royale de Londres. ! Cet article est extrait du journal anglais Nature (n° du 22 septembre 1892). suffirait d'effectuer les opérations suivantes : Le Directeur-Gérant : Louis Ouvrier Paris. — Imprimerie. Levé, rue Cassette, 17. 3° ANNÉE F 30 OCTOBRE 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LA BRITISH ASSOCIATION CONGRÈS D’'ÉDIMBOURG C'est une banalité de dire que les Français voya- gent peu. Quand on s'étonne de la rareté de nos hommes de science aux congrès étrangers, el qu'on leur reproche à cet égard une sorte d’incu- riosité, — très surprenante, en effet, chez des sa- vants, — on commet une grosse injustice. La vé- rité est que la plupart, qui aimeraient courir le monde, sont retenus par la modicité de leurs trai- tements. El cela, il faut oser le dire, est honteux pour notre pays. Le public, en France, s'imagine avoir beaucoup fait pour la science après avoir re- levé d’une manière notable, mais encore insufli- sante, l’enseignement scientifique. Il ignore qu'à côté de l’enseignement, il y a la science elle-même à organiser, à pourvoir de ressources de toutes sortes, surtout d’abondants crédits, enfin la vie du savant à assurer, à rendre large et altrayante. En Angleterre, en Écosse, même en Irlande, le pro- fesseur est beaucoup plus rétribué que chez nous, et, qui mieux est, on trouve tout naturel le sup- plément de gain, parfois considérable, que l’indus- trie lui fournit. Tel savant renommé qui, dans une grande école du Royaume, enseigne la Mécanique, la Physique ou la Chimie, exerce, en dehors de cette fonction officielle, la profession d’ingénieur civil, d'ingénieur-conseil d’une ou plusieurs usines, dirige, — au grand profit de l’industrie régionale, — un laboratoire d'analyse ou d'étalonnage élec- trique. Au lieu de se tenir réciproquement en pe- tite estime, industriels et scientists apprécient l’aide mutuelle qu'ils se prêtent, et souvent chefs de fa- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. briques et de maisons de commerce, reconnais- sants envers la science qui les enrichit, se font un honneur de la servir. Il y a sur tout le territoire britannique un grand nombre d'amateurs qui s’in- téressent sincèrement à la science, l’aident à se développer et parfois la cultivent eux-mêmes avec éclat. Constamment mélés aux savants de profession, ils exercent sur le progrès et l'orientation des re- cherches une influence bienfaisante ; peu leur im- porte qu'un travail ne mène à aucune position officielle : on les voit se consacrer à des études aventurées, que les programmes classiques, — forcément en retard sur le mouvement des idées, — n'ont pu prévoir, et auxquelles aucune chaire de l'État n'est affectée. Là est peut-être, en partie, en dehors du génie de la race. le secret de cette puissante originalité qui caractérise à un si haut degré la science anglaise. Ces réflexions nous viennent à l'esprit au mo- ment de rendre compte du congrès que la British Association for the Advancement of Science a tenu cet été du 4 au 12 août à Édimbourg. L'Association comprend 6.000 membres : 2.000 ont pris part au Congrès. Sans doute, parmi ces 2.000 personnes, toutes n'étaient pas, à proprement parler, des sa- vants ; mais toutes se ratlachaient à la science par quelque côté, au moins par le désir d'entendre ses plus éminents représentants. La plupart des illus- tralions scientifiques de la Grande-Bretagne s’é- taient, en effet, donné rendez-vous à Édimbourg, 20 ul ALL D ed Org | .] ee War NES QU D DÉS EE LL 2 tit à RE __ LE CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION 694 CH.-ED. GUILLAUME. et, avec elles, nombre de professeurs anglais, écossais et irlandais. Leur fidélité aux réunions annuelles de la British Association s'explique aisément. Moins centralisé que chez nous, l’enseignement supérieur du Royaume-Uni est réparti entre universités d’im- portance diverse, quelquefois rivales. La distinc- tion un peu bourgeoise que nous faisons entre la Capitale et la Province y est inconnue : on ne con- cevrait pas, par exemple, que Londres dédaignât Glasgow; les membres de ces deux célèbres uni- versités ont le même intérêt à se rechercher; et aucun professeur d'Oxford, de Cambridge ou de Dublin, se rendant chez ses collègues d'Édimbourg, n’a le sentiment de perdre son temps. Le temps, disent nos voisins, c’est de l'argent : ils l'emploient en conséquence dans leurs congrès. Tout y est admirablement disposé . Les séances sont longues et le plus souvent très chargées : elles durent, dans chaque section, de 9 h.1/2 du matin à 2 h. 1/2 de l'après-midi. En général elles sont très suivies, et il est d'usage d'y assister du commencement à la fin; il y règne une évidente animation, que se plaisent à entretenir les plus plus hauts dignitaires de la science, jaloux de par- ticiper aux discussions et de diriger les débats. Presque toutes les communications sont de leur part objet de commentaire ou de critique. Cest ainsi que, dans la Section de Physique, ont très fréquemment pris la parole, à l'occasion des mé- moires présentés : Lord Kelvin (Sir William Thom- son), Lord M’Laren, Sir G. G. Stokes, MM. W. Andrews. A. Siemens, W. Preece, les P* P. G. Tait, E. Ayrton, Oliver Lodge, C. V. Boys, G. 1 L'organisation matérielle du Congrès est elle-même très remarquable. Service de renseignements, de la poste, du té- légraphe, salles de réunion, de lecture et de correspondance, buffet, restaurant, lavabos, jusqu’à un salon de coiffure, tout s’y trouve. Le matin, dans la solle commune, sont distribués avec les programmes imprimés des séances de la journée l'indication des orateurs inscrits et des sujets qu’ils traite ront. Dans chaque section on délivre aux membres les résu- més des communications qui vont être présentées, ce qui facilite l'intelligence des discours prononcés en diverses langues et rend possibles les discussions. Grâce au nombre élevé de ses souscripteurs, l'Association britannique fait, sans subvention, face à toutes ces dépenses, et institue, en outre, pour l'agrément de ses membres, des lec- tures du soir magnifiquement illustrées. Ces conférences, peut- ètre un peu moins soignées que chez nous quant à la forme littéraire, sont des modèles d'habile vulgarisation : l’orateur expose son sujet ab ovo, se limite à un petit nombre d'idées sur lesquelles il revient sans cesse, ne cite d'abord que des faits connus de tout le monde, puis, les groupant, les rap- prochant, amène, pour ainsi dire, l'auditeur à en formuler lui- même la loi. I1 ne parle d'aucun objet, si accessoire soit-il, sans le montrer en nature ou en projection. Tous les phéno- mènes décrits sont représentés sur l'écran dans l’ordre de leur succession naturelle, si bien que l’auditoire, passant par toutes les phases de la découverte, arrive, en fin de compte, à comprendre des théories dont l'intelligence sem- blait réservée à une élite de spécialistes. Fitzgerald, J. À. Ewing, Hugues, Meldola, Schuster, Liveing, Silv, Thomson, le D' Schoute (de Grü- ningue), le P' Wiedemann (d'Erlangen) et l’un des plus grands savants, non seulement de l’Alle- magne, mais du monde, von Helmol{z. Dans la Section de Chimie, où quelques groupes se dessinaient autour de deux hardis novateurs, M. Arrhénius (de Stockholm) et M. Oswald (de Leipzig), il faut citer : Sir H. E. Roscoe, MM. W. Crookes et J. Gibson, les P* Gladstone, N.Lockyer, W. H. Perkin, W. Ramsay et W. Roberts-Austen ; — parmi les biologistes : le P' Michael Foster, se- crétaire perpétuel de Ja Société Royale de Londres; les PS Burdon-Sanderson, G. Forbes, Romanes, Rutherford, E. Yung (de Genève) et Errera (de Bruxelles); — parmi les géologues et géographes : le Président du Congrès, Sir Archibald Geiïkie, le P' Sollas, les célébres océanographes J. Murray et J. Buchanan, le Prince de Monaco, le géologue- chimiste Otto Petterson (de Stockholm), l'abbé Re- nard (de Gand), notre éminent collaborateur, M. Marcel Bertrand. Le Congrès occupait huit sections, dont il est intéressant d’énoncer les litres, ces rubriques té- moignant assez bien de l'intérêt relatif que nos voisins accordent à chaque science : 1° Mathématiques et Physique (Les mathématiques pures n’ont, pour ainsi dire, pas été représentées); 20 Chimie ; 3° Géologie; 4° Géographie ; >° Biologie (comprenant : Botanique, Zoologie, Physiologie normale el pathologique) ; 6° Anthropologie ; T° Mécanique ; 8° Économie politique et statistique. De celte dernière section nous n'avons point à entretenir nos lecteurs ; nous laisserons de côté aujourd'hui les travaux sur la Mécanique, parce qu'ils seront bientôt l’objet d'un article spécial dans la Æevue. Quant aux autres sections, nous avons pensé qu'à défaut d’un compte rendu com- plet, — qui exigerait tout un volume, — le lecteur aimerait en connailre les traits dominants. A ces esquisses sont consacrées les Notes suivantes. Louis Olivier. I. — PrYSIQUE Depuis quelque temps, les physiciens ne crai- gnent plus de quitter le terrain du fait bien acquis pour voyager au petit bonheur dans l’hypo- thèse, grêle échafaudage destiné à disparaitre, mais qui, en attendant, soutient l'édifice. Nulle part comme en Angleterre, on le sait, les physiciens ne montrent cette hardiesse, cette indépendance de vues, ce souverain mépris du qu’en dira-t-on qui, parmi des pelletées de terre, font parfois découvrir une pierre précieuse. Cette tendance à atlaquer de front les plus grands problèmes avec un esprit non prévenu et à courir au-devant de l’improbabilité d'aujourd'hui, — certitude ou absurdité de demain, — se fait sentir particuliè- rement{ dansles discours d'ouverture des présidents qui se succèdent àla Section de Physique de l’Asso- ciation britannique. Ces discours sont des manifes- tes dont l'écho parfois retentit au loin. On a beau- coup commenté l’année dernière celui de M. Lodge, et l’on a été surpris de voir un physicien de grand renom aux prises avec la télépathie; on s’est étonné davantage peut-être d'entendre un théo- ricien et un rêveur assigner aux mesures de pré- cision une place d'honneur au sommet de la Physique et dire que de grandes découvertes se feront autour de la sixième décimale. Cette opi- nion, que beaucoup prenaient, il ÿ à un an, pour une aimable facétie, à gagné du terrain, et deviendra bientôt lieu commun. Après M. Lodge, la tâche du Président était rendue difficile; le discours de M. Schuster, qui dirigeait cette année les débats, fera moins de bruit, bien qu'il contienne des vues très intéres- santes. On parle beaucoup en Angleterre d’une réorganisation de l’enseignement supérieur, que l’on voudrait en quelque sorte à l'instar du con- tinent. M. Schuster combat celte idée : chaque peuple a son génie propre, sa manière personnelle d'aller à la découverte. En Angleterre, on est frappé de ce que la science doit à l’amaleur, c'est-à- dire à l'homme auquel aucun programme n’est spé- cifié, et qui se laisse aller à sa propre impulsion sans être englobé dans le filet de l'Université; M. Schuster pense qu'un Ministère de l'Instruction publique rendrait le travail impossible à des hommes comme Joule ou Faraday. « Je doute, dit-il, que l’on gagnerait quelque chose à transplanter chez nous le mode de travail qui convient si bien à l'esprit allemand; est-il désirable de combler les ravins, si la terre dont on dispose doit être prise aux dépens des sommets? L'Université doit se développer comme un orga- nisme, et s'adapter aux conditions du climat. » M. Lodge avait abordé la grosse question des relations entre la matière et l’éther, le plus inté- ressant ensemble de problèmes que la physique se pose en ce moment. M. Schuster y revient à son tour, résume et coordonne les fails; la célèbre expérience de M.Fizeau, — entrainement de l'éther par l’eau, — celle de Lord Rayleigh, — vitesse de la lumière dans un électrolyte, — celle de M. Rowland, — action électro-magnétique d’une charge électrique en mouvement, — permellent © CH.-ED. GUILLAUME. — LE CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION 695 déjà de résoudre quelques problèmes et condui- sent à en poser une infinité d'autres. Le discours de M. Schuster se résume dans les questions dont il donne l’énoncé : 1. Une grande masse en rotation constitue-t-elle toujours un aimant ? 2. Se trouve-{-il dans l’espace interplanétaire assez de matière pour le rendre conducteur? Cela parait probable, mais la conductibilité est faible; car, sans cela, la Terre se mettrait à tourner au- tour de son axe magnétique !; 3. Qu'est-ce qu'une tache solaire? On pense, en général, que ce phénomène est de la nature d’un cyclone; mais, si tel est le cas, le groupe entier doit avoir un mouvement de rotation, et il semble que l'étude du mouvement des taches déciderait de cette opinion ; 4. Si une tache n'est pas due à un cyclone, ne pourrait-on penser qu'une décharge électrique, accélérant l’évaporalion, produise un abaissement de température suffisant pour rendre compte de cette diminution d'éclat? >. La périodicité des taches solaires et la con- cordance avec la variation du magnétisme terres- tre ne peut-elle pas être due à l’accroissement de conductibilité de l’espace entourant le Soleil? Ces deux dernières idées surtout nous parais- sent dignes d’être approfondies. F Il ne saurait être question de donner ici un résumé même succinct des communications faites à ia Section de Physique; leur seul énoncé rem- plirait l’espace dont nous disposons; du reste, la plupart d'entre elles reviendront dans les Magazines, el seront mentionnées en leur temps dans la bibliographie de la Revue, Trois grandes questions surtout ont été agitées: la première concerne la création d’un laboratoire nalional; la seconde se rapporte à la nomenclature des unités; la troisième aux unités électriques fondamentales. C'est à la suite du discours prononcé l’année der- nière par M. Lodge, que la question du laboratoire nalional a fait son chemin, bien que, d'après le P: Fitzgerald, la Chambre des Communes ne soit pas assez instruite pour comprendre que le progrès des travaux scientifiques représente une valeur na- tionale.Quel serait le travail de ce laboratoire? Tout dépendrait de ses crédits. Avant tout, il serait chargé de la conservation et de la comparaison des étalons de toutes sortes; il fournirait aussi aux autres laboratoires des appareils complexes, exac- tement ajustés; enfin, il serait outillé pour toutes 1 Sans doute la transformation d’énergie due aux courants de Foucault arrèterait tout mouvement ayant que l’axe ait pu se déplacer beaucoup. 696 les mesures de précision, et fournirait à la Phy- sique les constantes dont elle a besoin. La physique des recherches doit, en effet, suivre la voie de l’in- dustrie : répartir la besogne pour gagner du temps. Le moindre travail de précision exige de bons étalons de longueur et de masse, que seul un éta- blissement spécial peut déterminer ; maisil faut en outre des thermomètres, des étalons électriques, des appareils de mesure, etc. Chacun peut, il est vrai, construire et étudier ces derniers; mais la moindre de ces éludes nécessite une certaine ins- tallation et constitue un travail de plusieurs mois pour celui qui n’en a pas l'habitude, tandis que ce travail sera réduit dans une très forte proportion dans un laboratoire spécialement outillé, et pourvu d'un personuel rompu à un pelit nombre de tra- Vaux. Il existe déjà des établissements nationaux de ce genre. Le mieux monté est actuellement l’Institut physico-technique de l'Empire d'Allemagne, qui fonctionne depuis trois ans environ sous la direc- tion de M. von Helmholtz; son budget permet de con- sacrer annuellement 75.000 francs à l’achat d’appa- reils el aux dépenses courantes pour les travaux. En une seule année, cet élablissement a examiné 90.000 thermomètres, de second ordre bien en- tendu. Des travaux importants y sont en prépara- tion; pour le moment, cet Institut étudie ses propres étalons, qui pourront ensuite être mulli- pliés à l'infini avec fort peu de peine. Puis certai- taines questions industrielles y recevront prochai- nement une solution. Ainsi, les métaux propres aux constructions y sont étudiés, et l'unification des pas de vis dans l'Empire d'Allemagne sortira toute préparée de ses ateliers; les diapasons mêmes y sont examinés; est-ce de là que nous viendra l'harmonie universelle ? C'est quelque chose de semblable que l’on vou- drait faire en Angleterre, et ilest fort à désirer que la France, qui possède au Conservatoire des Arts et Métiers, au Bureau national des poids el me- sures (bureau des aréomètres), et au Laboraloire central d'électricité, les premiers éléments d'un établissement de ce genre, se lance aussi dans la voie de ces laboraloires-usines appelés à rendre infiniment plus facile et plus fructueux le travail des laboratoires universilaires. Nous passerons rapidement sur la question de la nomenclature des unités, qui n’a guère avancé. Les propositions de M. Lodge, rapporteur, abouti- raient à de profondes modifications de notre sys- tème d'unités, que l’on préfèrera garder légère- ment défectueux que de changer sans trêve ni repos. M. Lodge voudrait abolir le cowlomb et nommer /arad le microfarad; puis, renoncer au watt actuel et transférer son nom sur le walt- heure. Ces propositions, tout inoffensives qu'elles paraissent, ont jeté une certaine défaveur sur le rapport de M. Lodge, où se trouvaient définies et baptisées de nouvelles unités, — fort accepta- bles, — relatives au circuitmagnétique. Un pas beaucoup plus important a été fait dans le système restreint des unités électriques légales. On se souvient qu’un projet de loi élaboré l’année dernière visait ia réforme de l'unité de résistance et l'adoption de valeurs normales pour l’inten- sité du courant et la force électromotrice. Ces dernières n’ont pas élé modifiées; mais, dans la Commission, dont quelques étrangers avaient été invités à faire partie et dont Lord Kelvin (Sir William Thomson) a suivi assidûment les débats, on est revenu sur la définition de l’om, qui était jusqu'ici dérivé de l’unilé B. A, au moyen d'un certain facteur de réduction. A la suite de la dis- cussion, l’étalon B. À a été abandonné, et l’on a décidé de définir le nouvel ohm légal par la résis- tance d’une colonne mercurielle de 106,3 em. de longueur et de (1 microlitre)? de section à 0°. Cette dernière seclion, sensiblement équivalente au millimètre carré, est définie pratiquement par ce fait que le mercure occupant 1 mètre du tube pèse 13,5956 grammes (13,5956 élant la densité du mercure rapportée à celle de l’eau à 4, prise comme unité). Gelte décision, qui sera sans doute ralifiée par le Gouvernement anglais, donne satis- faction à un désir dès longtemps exprimé par les physiciens du continent. De notre côté nous aurions un pas à faire pour que l'accord fût parfait ; il sufirait d'abandonner l’ohm légal 106,0 pour prendre l’ohm 106,3; espérons que ce changement ne tardera pas à s'effectuer; il est d'autant plus facile que l’ohm 106, dit légal, n’est pas encore entièrement entré dans la pratique sur le continent où: la rouline a conservé de nombreux adeptes à l'unité Siemens et l’unité B. A. Une des particularités de l’Associalion britan- nique est la constitution de ses Comités. Veut-on êlre éclairé sur une question délicate à l’ordre du jour, on nomme un Comité chargé de présenter, l'année suivante, l'état de la question ; au besoin, on ouvre des crédits parfois considérables pour des recherches de laboratoire. Les noms de quel- ques-uns de ces Comités donneront une idée du genre de spécialisation dans le travail que l’on atteint par leur moyen. Citons les Comités de la photographie météorologique, de la radiation so- laire, des poussières méléoriques, des phénomènes sismiques au Japon, de la température du sol, des décharges électriques dans les gaz. Des hommes lels que l'illustre Sir G. Stokes ne dédaignent pas de faire ce travail de compilation et de présenter des rapports surles sujets misàl'étude. Sn te dus FRERE AS CH.-ED. GUILLAUME. LE CONGRES DE LA BRITISH ASSOCIATION CH.-ED. GUILLAUME. — LE CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION 697 ‘ Il nous reste à mentionner maintenant quelques- unes des communications faites à la Section de Physique. < Nos lecteurs connaissent, sans doute, les belles expériences des Professeurs Reynold et Rücker, sur les pellicules d’eau de savon, expériences qui peuvent conduire à d’intéressantes conclusions, relativement à la physique moléculaire, Ces pelli- cules arrivent, avant de se rompre, à une épais- seur de l’ordre du centième de micron ‘; or, à ce moment, la conductibilité de la solution est aug- mentée dans une forte proportion ; dans les plus minces des lamelles, elle atteint sept fois sa con- ductibilité primitive ; en revanche, lorsque l’eau de savon contient un électrolyte métallique, la conductibilité est constante. Le premier de ces effets est très curieux et peut metire sur la voie d’autres phénomènes. M. Dawson Turner montre, sous une forme faci- lement réalisable, une expérience analogue à celles qui attirèrent d'abord l'attention sur M. Hertz. Si l’on tasse dans un tube de verre une poudre métallique entre deux électrodes, chaque fois que l'on fait éclater une étincelle dans son voisinage, sa résistance électrique se trouve subitement dimi- nuée, et ne reprend sa première valeur que peu à peu. Y a-t-il, comme dans les phénomènes étudiés par MM. Lenard et Wolf ?, pulvérisation par la lu- mière ultra-violette ? Il est assez singulier cepen- dant que l’action de l’étincelle soit sensible à tra- vers le verre; cette parlicularité ferait croire que l'effet observé est dû à l'induction plutôt qu’à la radiation. C'est encore la décharge dans les gaz qui a fourni à M. Schuster la matière d’une intéressante com- munication. Lorqu’une décharge électrique tra- verse un gaz simple enfermé dans un tube, on n’observe aucune polarisation. Avec des gaz com- posés, au contraire, il existe une polarisation marquée : un hydrocarbure entre des électrodes d'aluminium ou de magnésium produit, après le passage du courant, une force électromotrice de 35 volts qui se dissipe peu à peu. L'effet est sans doute analogue à celui que l’on observe dans l’arc électrique, où la polarisation est précisément du même ordre de grandeur. Sous une forme encore peu définie, le Professeur Fitzgerald fait entrevoir un commencement de solu- tion à un intéressant problème, celui de la propa- gation du magnétisme dans le fer. Quelle que soit la théorie ultime du magnétisme, il parait certain l Le micron est le millième de millimètre. (Note de la Rédaction.) ? Sur les belles expériences de MM. Lenard et Wolf, voyez la Revue du 30 novembre 1890, t. 1, page 696. que le fer se compose de petits aimants ! ; leur grandeur et leur moment magnétique peuvent faire l’objet d'une estimation encore très vague et con- duiraient à admettre que le nombre de leurs vibra- tions est de l’ordre de cent millions par seconde. Une vibration dont la période serait celle des os- cillations produisant la lumière ne serait pas pro- pagée dans le fer. Dans une communication de très haute science, bien difficile à résumer en quelques lignes, M. A. Michelson montre comment la méthode spectros- copique, imaginée par lui, permet de démontrer l'existence de lignes doubles du spectre, que l’on n'aurait pas pu résoudre par les plus puissants spectroscopes ; c’est un procédé analogue qui lui avait permis de mesurer avec une grande exacti- tude le diamètre apparent des satellites de Jupiter. Lord Rayleigh avait indiqué, il y a quelques années, une relation entre le mouvement des molécules gazeuses et l’interférence de la lumière qu'elles émettent. M. Michelson, en vérifiant cette relation sur un grand nombre de substances, a irréfutablement démontré un fait contesté par d’autres physiciens, et qui est en harmonie par- faite avec la théorie cinétique des gaz. MM. Harker et P.-J. Hartog substituent l’acide acétique à la glace dans le calorimètre de Bunsen, ce qui permet d'opérer à la température ordinaire. Mentionnons encore d’intéressantes expériences de M. Smithells sur la radiation de la flamme, et la séparation des spectres d’oxydation et deréduction (voir ci-dessous Chap. Il); une communication de M. Preece sur les orages magnéliques nombreux en 1892, et l'utilité d'observer ces orages sur de nom- breux points du globe ; de fort jolis réseaux de fils fins construits par M.du Bois(d’Amsterdam) permet- tant de polariser les radiations de grande longueur d'onde ; la preuve expérimentale donnée par M. Peddie que le coefficient d'absorption n'est pas affecté par l'intensité (densité) de la radiation ; ung communicatiôn de M. E. Wiedemann sur la décharge dans les gaz, un travail du Professeur Oswald sur l'énergie. Beaucoup de nos lecteurs ont suivi les recher- ches mathématiques de M. Poincaré sur la stabi- lité des mouvements périodiques, recherches si importantes pour la connaissance du système du monde. Lord Kelvin, reprenant la question, arrive par des méthodes différentes à des résultats analogues. Un appareil très simple lui permet de vérifier ses conclusions par l'expérience : un pen- dule est suspendu à une tige à laquelle on com- 1 Voyez Ewing, L’induction magnétique et les phénomènes moléculaires, Revue du 30 novembre 1891, t. [[, pages 737 et suiv. e 698 PH.-J. HARTOG. — LE CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION munique un mouvement vertical de va-et-vient. Lorsque la période de ce mouvement atteint la moitié de celle d’oscillation du pendule, l'équilibre de celui-ci devient instable, etla plus légère dévia- tion s'accentue de plus en plus, jusqu'à ce que le pendule fasse le tour. Au contraire, un bâton sup- porté verticalement en équilibre instable prend un équilibre stable si on lui communique un mouve- ment vertical de va-et-vient d’une période conve- nable. Ces expériences paraissent d’une simplicité enfantine ; mais il est merveilleux de voir com- bien, chemin faisant, l'illustre physicien de Glas- gow entr'ouvre de portes donnant accès à de vastes domaines encore peu explorés. L'énumération des travaux présentés est loin de donner la note de la réunion; ce qui la caractérise, c'est la discussion; avant d’aban- donner la présidence de la Société française de Physique, M, Wolf exprimait le regret que la crainte de dire une hérésie empêche beaucoup de nos confrères de prendre la paroïe. Cette crainte n'existe pas chez nos voisins, et nous avons eu plus d’une fois le plaisir d'entendre des maitres de la, Physique exprimer, sans détour, l'ébauche d’une opinion sur quelques-uns des plus obs- curs parmi les problèmes que la Science se pose aujourd’hui. ; Ch.-Ed. Guillaume. IT. — CnimtE M. H. Macleod, président de la Section de Chimie, a ouvert la première séance par un discours dans lequel il a traité de l’histoire des formules chi- miques et des actions dites catalytiques. Il croit que ce dernier mot devra bientôt disparaitre du lexique de la chimie. Il rappelle à ce propos une de ses propres expériences, d'après laquelle le bioxyde de manganèse cristallisé, mêlé au chlorate de potasse pour faciliter le dégagement de son oxygène, serait transformé à la fin de l’opération en une poudre amorphe, montrant ainsi qu'il à pris part aux réactions chimiques. M. Macleod a confirmé aussi l'expérience de Vortmann qui à fait voir que le protoxyde de cobalt, mis en contact avec du chlorure de chaux, se transforme en un oxyde supérieur, et aue c'est grâce à la formation intermédiaire de ce composé peu stable que le protoxyde de cobalt agit pour dégager l'oxygène du chlorure de chaux. Des nombreuses communications faites devant la Section nous ne pouvons citer que quelques- unes : M. V. B. Lewes a exposé une longue série de recherches sur les causes de la luminosité des flammes. Il croit que les particules solides et incan- descentes auxquelles cette luminosité est due, sont formées par la dissociation de l’acétylène; la ma- jeure partie des carbures lourds, qui ne sont pas brûlés, sont convertis en acétylène avant d’at- teindre la partie lumineuse de la flamme. M. Smithells a montré les belles expériences qu'il vient de faire surles flammes non lumineuses. On fixe à une lampe Bunsen un tube de verre ayant environ le même diamètre et ouvert par le haut, et on le maintient en position verticale ; un second tube de verre d’un diamètre un peu supérieur, mais plus court, est fixé sur le premier tube au moyen d'une rondelle en caoutchouc qui permet de le faire glisser à volonté dans le sens vertical: on fait coïncider exactement les axes des deux tubes concentriques au moyen de ressorts en lai- ton. On fait d’abord glisser le tube extérieur de facon que son ouverture dépasse de 10 à 20 centi- mètres l'ouverture du tube extérieur. On ouvre le robinet et on allume les gaz qui sortent; c’est la flamme non lumineuse qui se forme; on envoie dans la flamme une quantité d'air graduellement croissante (il est commode de se servir d’un cylindre d'air comprimé); après une période d’os- cillation, la flamme se divise nettement en deux cônes concentriques, dont l’un brûle sur l’ouver- ture du tube extérieur, tandis que l’autre descend et s’arrêle à l'ouverture du tube intérieur. Si l’on abaisse alors le tube extérieur jusqu'à ce que les deux ouvertures arrivent au même plan, les cônes se réunissent pour former de nouveau une seule flamme. M. Smithells démontre ainsi que laflamme non lumineuse consiste en deux cônes très minces, le cône extérieur étant produit par la combustion des gaz incomplètement brûlés formés dans le cône intérieur. C'est la confirmation des idées émises il y a quelques années par M. Blochmann. M. Smithells explique la séparation des deux cônes d'une façon très ingénieuse en rappelant que les vitesses de combastion dans les mélanges explosifs de compositions différentes, qui ali- mentent les deux cônes, sont aussi différentes. En ajoutant jusqu'à un certain point de l'air au mélange gazeux, on augmente la vitesse de com- bustion propre à ce mélange. La vitesse du flux de gaz, qui suffit pour empêcher le cône extérieur de revenir en arrière, n'est pas suflisante pour arrêter le cône intérieur; celui-ci se propage donc jusqu'à ce qu'il soit arrêté à l'embouchure du tube étroit, où la vitesse du flux est naturellement plus grande que dans le tube plus large. L'auteur a entrepris toute une série de recherches sur la nature des gaz à l’intérieur des flammes, recherches que nous ne pouvons guère discuter ici; rappelons seulement deux faits remarquables : 4° MM. Smithells et Ingle ont trouvé que les gaz entre les deux cônes contiennent beaucoup d’oxyde PH.-J. HARTOG. — LE CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION 699 de carbone et d'hydrogène, ce qui confirme les théories de M. Dixon sur l'équilibre dans un système de ce genre; 2° que, si l’on envoie dans la flamme divisée une pluie de chlorure de cuivre au moyen de l'appareil de M. Gouy, il ne se produit aucune co- loration dans le cône intérieur, tandis que le cône extérieur, moins chaud, est coloré en vert. M. Smi- thells croit que les flammes colorées ne se produi- sent que quand les vapeurs se combinent avec de l'oxygène. Ses expériences ont élé longuement discutées dans les sections de Chimie et de Phy- sique par Lord Kelvin, Sir G. Stokes, M. Ramsay, M. Schuster et beaucoup d’autres savants. M. Arrhenius a présenté untravailimportant sur la diffusion des corps dissous dans l’eau. Il à fait le raisonnement suivant pour prouver que la pression osmotique ne peut pas être due à une attraction entre les molécules des corps dissous et celles de l’eau pure. Considérons, dit-il, un vase dans lequel il y a une couche formée d’une dissolution de sucre surmontée par une couche d’eau pure : soit AB (fig. 4) le plan séparant les deux couches. L’at- traction entre deux molécules de sucre doit être, d’après la théorie qu’il repousse, plus petite que oW, or or Fig. 1. celle entre une molécule de sucre et une molé- cule d’eau, la distance entre les deux paires de mo- lécules étant la même. Considérons une molécule de sucre R. On peut regarder l’eau au-dessous de AB comme l'image de l’eau au-dessus, et dont une partie W, correspond exactement à l’eau W qui dissout le sucre, landis que les molécules d'eau W, correspondent aux molécules de sucre. La molécule de sucre R est sollicitée par W et W, avec des forces égales, mais de signes contraires. La force qui meut R vers le haut est égale à la composante verticale de la différence entre les attractions qui existent entre R et W,, et R etr. Si maintenant nous doublons le nombre des mo- lécules de sucre, nous doublons en même temps W,, et par conséquent la force par laquelle chaque molécule de sucre est sollicitée vers le haut. Or, en admettant, comme on le fait généralement, que le frottement est proportionnel à la composante de la vitesse des molécules dans le sens de la diffusion, cette vitesse doit être proportionnelle à la force qui les sollicite. La quantité de matière diffusée dans l’unilé de temps est proportionnelle et à cette vitesse et au nombre de molécules présentes, de sorte que, si la théorie de l'attraction est exacte, la quantité qui diffuse est proportionnelle au carré de la concentration, et le coefficient de diffusion est proportion- nel & la concentration elle-même. Or, une longue série d'expériences a montré que, dans les dissolutions étendues, ce coefficient ne varie pas avec la con- centration ; donc l'hypothèse de l'attraction, appli- quée aux dissolultions étendues, est inexacte. En partant, au contraire, de la théorie cinétique de la pression osmolique, appliquée par Nernst aux phénomènes de diffusion, nous arrivons au résultat donné par l'expérience. — Cette importante com- municalion, qui a vivement intéressé la Section, a suscité une discussion animée. M. Ramsay a étudié l’action de la lumière sur le chloroforme en présence de l’air. Les expériences montrent qu'il se forme du chlorure de carbonyle, d'après l'équation suivante : 2CHCB + 02 = 2C0 CI? + 2H CI. M. Ramsay et Miss Aston ont redéterminé le poids atomique du bore : ils ont trouvé le chiffre 10,966, valeur sensiblement plus élevée que celle, — 10,825, — trouvée par Abrahall au moyen d'une autre méthode. MM. Crun Brown et Walker ont fait une série de synthèses par une méthode générale qui consiste à praliquer l’électrolyse de corps tels que le ma- lonate de polassium et d’éthyle; celui-ci donne l’éther de l’acide sueccinique. Les auteurs ont re- monté ainsi jusqu'aux éthers de l'acide sébacique ; mais, pour les termes supérieurs, le rendement diminue. M. W. H. Perkin a décrit quelques synthèses effectuées à l’aide des éthers du butane et du pen- tane tétra-carbonylés. M. Roberts-Austen a exposé des expériences très curieuses sur l'effet des petites quantités de malières étrangères sur les métaux. Deux dixièmes pour cent de plomb ou de bismuth, ajoutés à l'or, le rendent cassant; de très petites quantités de phosphore, de magnésium ou de zinc rendent le nickel malléable. La ténacité de l'or est diminuée par l'addition des métaux dont le volume atomique est plus grand que le sien, et augmentée par les métaux de volume atomique égal ou moindre. Le lithium et l'aluminium n'obéissent pas à cette règle. Un alliage d’or avec 10 °/, d'aluminium fond à une température inférieure de 400 degrés à la température de fusion de l'or; un alliage contenant 23 °/, présente une température de fu- sion qui dépasse celle de l'or. M.J. À. Harker a étudié l'équilibre qui se pro- 700 E. DE MARGERIE. — LÉ CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION duit quand on fait détoner des mélanges composés d'hydrogène, de chlore et d'oxygène. Il a trouvé que, quelle que soit la composition initiale du mé- lange, la relation suivante existe toujours entre les quantités respectives «, b, ce, d de l'acide chlor- hydrique, de l'oxygène, de la vapeur d'eau et du chlore : a — —= const. = 23, « cd Ces résultats diffèrent de ceux de MM. Haute- feuille et Margottet, qui ont opéré avec un eudio- mètre froid, sur lequel la vapeur d’eau pouvait se condenser, tandis que M. Harker a maintenu les parois de son appareil à 110 degrés environ, pour conserver le système entier à l'état gazeux. Signalons, pour terminer, le Rapport que M. G. H. Bailey a présenté sur les travaux de l'Air Ana- lysis Committee de Manchester. Plusieurs centaines d'expériences ont été faites sur l'air de Man- chester et de Londres dans le but d'évaluer les quantités d'acide sulfureux et de matière orga- nique répandus dans l'atmosphère des grandes villes parles temps clairs et pendant les brouillards. Par un temps clair l'acide sulfureux ne dépasse pas 3 de milligramme environ par mètre cube. Pen- dant les périodes anticyeloniques et les brouillards cette quantité peut s'accroitre de 50 fois. Les im- puretés organiques augmentent dans la même proportion que l’acide sulfureux. Sir D. Gallon, M. Fletcher et quelques au- tres chimistes ont fait remarquer l'importance de ces recherches et espèrent les voir continuer. M. Fletcher croit qu'on arrivera à filtrer partout l'air en le faisant passer à travers du coton avant de l'introduire dans les maisons particulières. On se sert déjà de cette méthode à la Chambre des Com- munes et dans beaucoup d'établissements privés. Depuis plusieurs années cette question de la pollution de l'air et les moyens d'y remédier préoccupent vivement les hygiènistes et les in- dustriels. Les premiers, frappés de la noci- vité des fumées de nos usines et de l’obscurilé qu’elles produisent, ont entrepris, dans quelques- unes de nos grandes cités manufacturières, sur- tout dans le Lancashire, une campagne contre la mise en liberté des poussières et des gaz méphitiques de nos fourneaux. Le publie s’est ému du danger qu'ils lui ont signalé, et un conflit s’est élevé entre lui et les industriels, intéressés au maintien du régime actuel. Il est bien certain que si l’on imposait, comme il en a été sérieusement question, aux établissements industriels l'obligation de déverser leurs fumées loin des villes ou de les détruire sur place, on provoquerait du même coup la fermeture immé- diate des usines. Municipalités et Sociétés sa- vantes ont done mis à l'étude le difficile problème de rendre inoffensives pour la santé publique les effluves gazeux et les poussières que déversent continuellement dans l'air des grandes villes d’An- gleterre et d'Écosse les manufactures et même les cheminées des maisons particulières. Le lecteur se rappelle peut-être les discussions qui se sont élevées à ce sujet à la Section de la Société des Industries chimiques de Manchester, discussions que j'ai rapportées l'hiver dernier en rendant compte ici même des travaux de cette Société. Au Congrès d'Édimbourg le Rapport de M, Bailey, les commentaires de Sir D. Galton et ceux de M. Fletcher ont de nouveau attiré l'attention sur ce gros problème d'hygiène sociale el fait entre- voir, en ce qui concerne l'hygiène des établis- sements publics et des demeures privées, un commencement de solution. Mais, c'est surtout aux questions de science pure que les membres de la Section de Chimie ont con- sacré leurs communicalions. Ne pouvant donner ici même la simple énumération de tous ces tra- vaux, bornons-nous à indiquer qu'ils ont prinei- palement porté sur la chimie générale et la chimie minérale. L’organique a été moins représentée qu'aux précédents congrès. 1l semble que l’orien- tation des recherches soit en train de changer : on se lasse un peu de trouver de nouveaux composés organiques et, comme aux premiers jours de la Chimie, l'attention parait se reporter sur les com- binaisons minérales et les lois générales de la science. Ph. J. Hartog. IT. — GÉOLOGIE ET GÉOGRAPHIE (réologie. — La géologie, comme dans les précé- dentes réunions de la British Association, a tenu une large place au Congrès d'Édimbourg ; de nombreux travaux ont élé présentés à la Section compétente, qui comptait dans son sein les spécialistes les plus connus de la Grande-Bretagne, ainsi que quelques savants étrangers, parmi lesquels on remarquait MM. les Professeurs F. von Richthofen, A. Renard, Marcel Bertrand et M. A. Blytt. Les séances, qui réunissaient toujours beaucoup d’auditeurs, ont été bien remplies; enfin, c’est à un géologue, Sir Archibald Geikie, ancien professeur à l'Université d'Édimbourg et aujourd'hui Directeur général du Service Géologique du Royaume-Uni, qu'était dévolu, cette année, l'honneur de présider le Con- grès. IL est d'usage, à l'Association Britannique, que le Président prenne pour matière de son discours d'ouverture une question rentrant dans la sphère de sesétudes personnelles; cette tradition ne laisse POP Re) Tir te + Wléhros MON, cr 7 | LP , | a LT mA) in Ta 4 E. DE MARGERIE. — LE CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION pas que d'être parfois difficile à suivre, l’écueil des discussions par trop techniques, en présence d’un auditoire composé en majeure partie de gens du monde, élant toujours à redouter. Aussi Sir A. Geikie a-t-il été bien inspiré en choisissant pour sujet de son adresse Æutton et son influence sur les progrès de la Géologie : rien n'est plus populaire en effet, chez nos voisins, que ces évocations du passé de notre globe où excelle le savant Directeur général, disciple lui-même de la glorieuse Ecole dont il célébrait le fondateur. C'està Édimbourg même que Hutton, il y a juste un siècle, posait définitivement, dans sa Théorie de la Terre, les bases de la Géologie moderne; longtemps méconnu, malgré la brillante exposition de Playfair, le génie du savant écossais est aujour- d’hui pleinement réhabilité : il ne manque qu'une chose pour que la réparation soit complète, c’est de faire réimprimer son œuvre, devenue raris- sime !. La génération actuelle doit bien cet hom- mage à la mémoire du plus grand des anciens Maitres. Sir À. Geikie a parfaitement su, d’ailleurs, appli- quer le correclif nécessaire aux exagérations des successeurs de Hutton, en répudiant la célèbre for- mule no trace of a beginning, no indication of an end; faisant allusion aux travaux de lord Kelvin (Sir W. Thomson), il a montré que la Physique et l’Astro- nomie nous conduisent à admettre une durée rela- tivement limitée pour la formation de l’ensemble des terrains sédimentaires, durée que Sir Archi- bald serait du reste porté à croire un peu plus longue que ne l’indiquent les évaluations de l'il- lustre physicien. On peut done le dire aujour- d'hui, l’uniformitarianisme de Lyell a vécu, et les géologues anglais renoncent définitivement à ces incalculables millions de siècles qu'ils multipliaient avec tant de facilité, il y a peu d'années encore. Le discours du Président de la Section, M. Lap- worth, servant en quelque sorte de pendant à celui de Sir À. Geikie, visait, au lieu du passé de la géologie, son avenir. Dans l'opinion de l’éminent professeur de Birmingham, la période d'éclat est close pour la stratigraphie : l'échelle des terrains et la succession des faunes sont définitivement fixées, il n’y a plus de grandes découvertes à faire dans ce domaine, dont l’extension ultérieure n’in- téresse désormais que les seuls gens du métier. Toutefois, l'explication des phénomènes dont la série des couches terrestres est à la fois le résultat et le témoignage, la philosophie de la science, en un mot, est à peine à ses débuls : des trois phases ! La Theory of the Earth ne se trouve dans aucune biblio- thèque publique de Paris. Nous ne connaissons qu’un exem- plaire dépareillé du premier volume, appartenant à M. Dau- brée. | REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. que comprend la vie normale d’un terrain sédi- mentaire, érosion, dépôt, émersion, on peut dire en effet que, si la première est bien connue, la se- conde l'est encore fort peu, malgré les révéla- tions récentes du Challenger ; quant à la troisième, presque tout reste à faire. M. Lapworth, cher- chant à interpréter les premiers paragraphes de ce futur chapitre de la géologie, s'est efforcé d'établir que le relief de la surface du globe se ramène à la juxtaposition d’une série d'ondes so- lides , d'amplitude et de longueur variées; après Heim, Suess et leurs émules, il a montré dans ces traits extérieurs le reflet dela structure profonde des masses minérales, où le p est, en somme, l’élé- ment générateur de toutes les combinaisons ob- servées. Indiquant alors les caractères des divers types de plis, l’orateur a fait voir comment on peut assimiler leur développement progressif à une véritable évolution, chacun des termes de ce cycle idéal trouvant d’ailleurs son illustration dans les différents cas particuliers que nous offre la nature actuelle, depuis les simples ondulations comme celle du Weald, où le pendage des couches est à peine perceptible à l'œil, jusqu'aux pus couchés de l'Écosse et des Alpes, où les mouvements ont atleintun maximum qu’ils ne sauraient dépas- ser. La place nous manque pour reproduire les formules, souvent heureuses et parfois hardies, dans lesquelles M. Lapworth a résumé les nouvelles conquêtes des études orogéniques. Le lien qui rat- tache d’une manière continue les petits plis des roches feuilletées, dont le microscope nous révèle seul l'existence, aux accidents géographiques les plus grandioses, comme l'Himalaya ou la chaine des Andes, à rarement été mieux exposé. En ter- minant, l’ingénieux auteur du Secret of the Highlands a prédit à l'étude des phénomènes de plissement le plus brillant avenir. Les mémoires présentés à la seclion, au nom- bre d’une quarantaine environ, se rapportaient pour la majeure partie aux terrains anciens et aux roches cristallines des Iles Britanniques d’une part, à l’époque glaciaire de l’autre. Les com- munications intéressant particulièrement l'Écosse ont été, comme on pouvaits’y attendre,nombreuses et importantes. En premier lieu, nous citerons celle de MM. Peach et Horne sur la découverte d’un horizon à Radiolaires dans le Silurien inférieur ‘ (Étage d’Arenig) du Sud de l'Écosse : ce dépôt, qui affleure en un grand nombre de points et occupe plusieurs milliers de kilomètres carrés dans les Southern Uplands, s’est sans doute formé dans une mer profonde ; il devient plus détritique dans la direction du Nord, à mesure qu’on se rapproche du ! Ordovicien de M. Lapworth. 20* k.. Er a F > à. r dé noyau ancien des Aighlands. M. Horne a décrit les modifications que cette roche subit au contact du granite du Loch Doon: on peut suivre le méta- morphisme jusqu'à cristallisation complète de ses éléments primitifs. M. le P' Sollas a également signalé la découverte de Radiclaires, ou du moins de corps paraissant être des Radiolaires dans le Silurien de l'Irlande (Howth et Culdaff). M. Hicks s’est occupé de la série schisto-cristal- line des Grampians, qu'il croit pouvoir considérer comme précambrienne. M. Blake a parlé des grès de Torridon, cette puissante formation infrasilu- rienne du Nord-Ouest de l'Écosse ; pour lui, la pré- sence récemment constatée des Olenellus cam- briens dans les couches supérieures au Torridon ne démontre pas nécessairement que ce terrain soit précambrien. M. Goodchild, à propos des granites de l'ile de Mull, à discuté le mécanisme de l'intrusion des roches de profondeur : la fusion du terrain pré- existant el son remplacement par le magma érup- üf, lui semblent plus probables, en général, qu'un écurtement direct. M. le P' Bonney a comparé les cailloux du Trias anglais avec ceux que renferme l’O/d Red Sandstone d'Écosse, en cherchant à en déduire quelques don- nées sur la géographie du pays à l’époque de leur dépôt. Quant à la géologie quaternaire ou pléistocène (pour nous servir de l'expression qui semble avoir aujourd’hui la préférence), il y a lieu de signaler, outre le Rapport annuel du Comité des blocs er- ratiques, deux notes de MM. Peach et Horne, relatives l’une et l’autre au pays d’Assynt (Suther- landshire); dans la première les auteurs établis- sent que la ligne de faite entre le versant de l'Atlantique et celui de la Mer du Nord se trouvait, à l’époque de la plus grande extension des glaciers, notablement plus à l'Est que de nos jours; dans la seconde, ils signalent les résultats de leurs explo- rations dans une grotte de la même région, avec ossements de renne portant des traces de la pré- sence de l’homme, et restes de foyers. M. Lomas a étudié la dispersion des blocs de roche à Riebeckite originaires de l'ilot d’Aiïlsa, à l'entrée du Firth of Clyde : on en rencontre jus- qu’à Anglesey, dans le Nord du pays de Galles et aux environs de Liverpool. M. D. Bell s’est occupé des gisements de coquilles marines dans le drift de Clava, dans le Nord de Craig et de Chapelhall, à l'Est de Glasgow : il admet un transport par les glaces continentales et ne croit pas ces fossiles en place, comme le pensent les partisans d’une submersion générale. Enfin M. £I. Reid a donné la liste de 27 espèces LL 4 des. h<, + par" E. DE MARGERIE. — LE CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION de plantes arcliques, recueillies dans les dépôts d'anciens étangs, aux environs d'Edimbourg (Saliz polaris, Dryas oclopetala, ete.). La paléontologie était représentée, en ce qui concerne l'Écosse, par un travail de M. Laurie sur quelques formes nouvelles d'Euryptérides des Pent- land Hills (074 Red Sudnstone) el par un Rapport de M. Newton sur les reptiles triasiques des grès d’EI- gin, dont les affinités africaines (Xwroo) sont re- marquables. En Pétrographie, la question de la succession de termes bien définis dans la série des gneiss a été traitée par M.J. H. Teall; M. A.Irving a décrit les différents types de roches cristallines des Malvern hills, et M. Somervail, ceux de la région du cap Lizard (Cornwall), qu’il regarde comme des pro- duits de ségrégation d’un même magma. M. Ussher, à propos des bosses granitiques de lamême région et du Devonshire, a parlé des relations existant entre les phénomènes orogéniques et la produc- tion des laccolithes. Enfin, M. Harker a examiné l'origine des grands cristaux de quartz que lon rencontre dans certaines roches éruptives basiques. Parmi les documents, d’ailleurs peu nombreux, qui ontété apportés au Congrès sur la géologie des pays étrangers, il y a lieu de mentionner un tra- vail fort intéressant de Miss M. Ogilvie sur les en- virons de Saint-Cassian, dans le Tyrol méridional; l’auteur y met en lumière le rôle considérable joué par les éboulements dans les terrains marneux et les complications qui en résultent pour la carte géologique du pays; ces accidents déterminent souvent des mélanges de fossiles appartenant en réalité à des zones paléontologiques distinctes. Il y aurait encore à parler de l’œuvre poursuivie par les Comités spéciaux, dont une dizaine environ sont du ressort de la Section de Géologie ; bornons- nous à signaler le Rapport présenté avec sa compé- tence habituelle, au nom du Comité du Vésuve, par M. le D' Johnston-Lavis, celui du Comité séismolo- gique, dû à M. Ch. Davison, et celui du Comité chargé de centraliser les photographies géologi- ques : à cet égard, les résultats déjà oblenus, grâce au concours de simples amateurs, sont fort encou- rageants, comme le montrait la belle série d’é- preuves exposée dans une des salles du New Uni- versity Building. Enfin, M. Sollas a proposé de faire exécuter des sondages à travers l'épaisseur d’un récif corallien : peul-être arriverons-nous ainsi à mieux nous rendre compte des circonstances qui ont présidé à la formalion, encore si énigmatique, des atolls. Géographie. — L'adresse présidentielle de M. J. Geikie nous servira de transition à une rapide analyse des travaux de la Section de Géographie, Le savant professeur de l'Université d'Édimbourg, PR CG OA LS LR USER DT Rte A UD APE, Sinon us ai tite 2-1 dés ut à enter: de: J. DE GUERNE. — LE CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION 103 dont les publications sur l'époque glaciaire sont | bien connues, avait en effet choisi pour thème développement des lignes de rivages. Les brillants ré- sultats de M. Suess sur la succession des grandes chaines de plissement en Europe, sur l’étenduedes transgressions marines, sur le contraste entre le «type pacifique » etle «type atlantique » ont formé la matière principale de ce discours d'ouverture ; c'est la première fois, croyons-nous, qu'ils élaient exposés devantun auditoire britannique. M. Geikie affirmait ainsi que la géographie, pour devenir sé- rieuse, doit, à ses yeux, s’appuyer sur la géologie. Nous n’avons malheureusement pas à enregistrer d’autrescommunications faites dans lemême esprit, mais c’est là une tentative pleine de promesses pour l'avenir ; par contre, les études océanographiques ont été brillamment représentées à Edimbourg, grâce à MM. Murray, Mill, Buchanan, Petterson, An- droussoff, etc. Le prince de Monaco a présenté sa nouvelle carte des courants de l'Atlantique Nord et développé son projet de création d’observatoires météorologiques à Madère et aux Açores. Une réunion spéciale des Sections de Chimie et de Géographie a eu lieu, en outre, pour discuter diverses questions se rapportant aux méthodes d'examen des eaux marines. Signalons encore le rapport du Comité chargé de centraliser les docu- ments sur la Météorologie de l'Afrique tropicale. Quant à la Géographie mathématique, on a sur- tout remarqué une communication de M. le D'H. Schlichter sur une nouvelle méthode pour la déter- mination des longitudes par les distances lunaires, méthode basée sur l'emploi de la Photographie. M. Ravenstein a entretenu la Section du projet de carte du globe au millionième, développé l’année dernière au Congrès de Berne par M. Penck, en montrant que sa réalisation n'avait rien d'utopi- que. Enfin, le Col. Tanner s’est occupé des applica- tions de la Photographie à la Topographie. Les récits d’explorations, toujours très goûtés du public, et les communications d’ordre écono- mique où historique sortent par trop du cadre de la Revue pour que nous ayons à y insister ici. Excursions géologiques. — Pour terminer, il nous resterait à dire quelque mots des excursions géo- logiques qui ont accompagné ou suivi le Congrès. Aucun centre ne peut être mieux choisi sous ce rapport que ne l’est Édimbourg ; sous la conduite de plusieurs membres du Service Géologique de l’Ecosse, MM. Peach, Horne, Goodchild et Cadell, les géologues faisant partie du Congrès ont pu ainsi visiter le célèbre massif éruplif d’Arthur’s Seal, dont plus d'une particularité de structure reste encore inexpliquée; les Braid Hills, avec leurs tufs, leurs porphyrites, leurs traces gla- ciaires ; la chaine plus élevée des Pentlands et sa série éruptive el sédimentaire si variée. Sir Arch, Geikie à tenu à nous mener en personne le long des falaises de North Berwick, pour nous montrer quelques-uns de ces necks ou anciennes cheminées volcaniques, d'âge carbonifère, qui ont rendu fa- meux, à l’Etranger, le bassin du Forth. Un pèle- rinage à Moffat et à Dobb's Linn, cette terre classique des recherches de M. Lapworth sur les graptolithes, devenus entre ses mains de précieux instruments pour classer les assises siluriennes, a terminé la série des excursions officielles. Nous ne dirons rien de la belle course organisée par M. Peach, après la clôture du Congrès, dans le Nord-Ouest des Highlands, ce couronnement des travaux de la Section réclamant un compte rendu spécial, dont M. Marcel Bertrand a bien voulu se charger pour la Revue. Emm. de Margerie. IV. — BroLocre Ce n’est pas chose facile que de rendre compte des travaux de cette Section. Son domaine nous appa- rait tellement vaste qu’il est malaisé d'en indiquer les limites. Toutes les études relatives à la nature vivante, qu'il s'agisse de botanique, de zoologie pure, d'anatomie ou de physiologie comparée, voire mème de psychologie et de médecine expérimen- tale, arrivent à la Section de Biologie. Depuis 1884 seulement, l’anthropologie en a été distraite : aussi se trouve-t-on amené à grouper les communica- tions suivant leur caractère et à créer des dépar- tements, des sous-sections qui se réunissent aux mêmes heures et qui divisent nécessairement le public. Une grande activité règne d'ailleurs partout, et cela contribue àrendre singulièrement laborieuse la préparation d’une analyse comme celle-ci. Je me plais du reste à déclarer que, si j'ai accepté celle tâche ingrate, c’est surtout pour avoir l’oc- casion de rendre hommage aux savants anglais dont l'accueil sympathique m'a laissé tant de bons souvenirs. À Edimbourg même, où j'aieu l'honneur, en 1891, de prendre la parole à la Société Royale, je retrouvais nombre d'amis. Qu'il me soit permis de les remercier ici de leur cordiale hospitalité et de leur complaisance à me mettre en rapport avec les plus distingués d’entre leurs collègues. La Section de Biologie, dirigée l’année dernière au Congrès de Cardiff, par un botaniste éminent, Francis Darwin, avait cette fois pour président le savant physiologiste William Rutherford, profes- seur à l'Université d’Edimbourg. Son discours d'ouverture traite avec une grande clarté et beau- coup de compétence le sujet délicat de la Vision des couleurs. Après avoir exposé et discuté les théo- ries diverses de Newton, de Th. Young et d'Hel- moltz, auteur aborde la question de la cécité des 704 J. DE GUERNE. — LE CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION couleurs, si intéressante au point de vue pratique. Son importance a du reste été bien comprise par la plupart des gouvernements, qui l’on fait étudier par des Commissions spéciales. Tout récemment encore, en juillet 1892, la Société Royale de Londres publiait un rapport à ce sujet. L’achromatopsie est assez fréquente et s’observe chez l’homme beau- coup plus souvent que chez la femme, sans qu'on puisse encore se rendre compte de cette inégale répartition. Mais elle varie de forme et d'intensité, n’affectant parfois qu'un seul œil. Les cas de ce genre sont des plus instructifs; ils permettent d'obtenir de l’infirme lui-même de curieux ren- seignements. D'ingénieuses méthodes servent à tâter, en quelque sorte, la sensibilité de l'œil aux couleurs; elles ne sauraient être décrites ici, et je ne puis mieux faire que de renvoyer le lecteur au texte original, paru dans le n° 1189 du journal anglais Nature. On y trouvera une masse de faits, qu'il est impossible de résumer, sur la perception des couleurs en divers points de la rétine nor- male, sur les contrastes simultanés, sur la nature nerveuse ou photo-chimique des sensations colo- rées, etc., etc. M. Rutherford a su condenser de la facon la plus heureuse un ensemble très complexe de résultats d'observations, d'expériences, de vues théoriques touchant aux problèmes les plus ardus de la physique et de la physiologie. Huit rapports ont été lus ensuite au nom de plusieurs Commissions, sur des sujets mis à l’ordre du jour par le Comité de la Section lors des précé- dents Congrès et pour l'étude desquels l’Associa- Lion a voté des subsides plus ou moins importants : 4° Cinquième rapport sur la faune et la flore des Antilles (West Indian Islands). 2° Désignation d’un zoologiste compétent pour étudier la morphologie des Ascidies (ou toute autre question déterminée) au laboratoire de Naples. Depuis longtemps, 100 livres sterling sont em- ployées chaque année par l'Association pour per- mettre à un ou plusieurs naturalistes anglais de travailler à la station du D'Dohrn. C’est un excel- lent moyen d'introduire peu à peu dans le haut enseignement du Royaume-Uni les meilleures mé- thodes de recherche employées en zoologie. 3° La faune des iles Sandwich. Il est grand temps d'étudier les animaux de l’Archipel, qui ne sauraient tarder à disparaitre ou à subir de pro- fondes modifications sous l'influence de la culture et du progrès venu surtout d'Amérique. 4° Sixième rapport sur le laboratoire de bota- nique établi à Peradeniya (Ceylan). 5° Observations recueillies sur le passage des oiseaux près des phares et des bateaux-feux. 6° Occupation d’une table au laboratoire de Marine biological Association à Plymouth. 1° Perfectionnement et essais d’un filet pélagique pouvant s'ouvrir et se fermer dans l’eau à des pro- fondeurs déterminées. 8° Projet de loi sur la protection des œufs. Le discours présidentiel et les rapports des com- missions ayant occupé toute la matinée du 4 août, trois communications seulement purent être faites dans l'après-midi du même jour. M. E. B. Poulton expose, avec échantillons à l'appui, le résultat d'expériences récemment faites par lui sur les changements de couleur qui se produisent chez les Chenilles sous l'influence du milieu. —M. Preyer traite de la physiologie du protoplasme et M. Hartog aborde un de ces sujets où des observations his- tologiques extrèmement délicates servent de point de départ, sinon de base définitive, aux théories les plus abstraites de l’hérédité; d’après lui, la prétendue personnalité des segments du noyau ne saurail être soutenue et cela entraine la ruine de diverses hypothèses émises, en Allemagne, par le Professeur Weismann. L'intérêt de ces études n’est pas contestable, mais je traduirai peut-être l'im- pression d'une partie notable de l’auditoire en ajoutant ici qu'elles paraissent convenir davantage à l'esprit spéculatif des races germaniques qu’au caractère pralique et essentiellement positif des Anglais. Deux séances générales ont eu lieu les 6 et 8 août. Les travaux présentés dans la première sont de nature très variée; on en jugera par le sommaire ci-après : Mac Kendrick, Myographe pour la pro- jection des courbes musculaires, méthode pour enregistrer la durée des mouvements volontaires ; — G. Fritsch, Origine des nerfs électriques des Torpedo, Gymnotus, Mormyrus et Malapterus; — Iiall, La feuille du Victoria Regia ; S. Musgraves, Les vaisseaux sanguins et lymphatiques de la rétine ; — N. O. Forbes, Remarques sur une série d'oiseaux subfossiles, récemment découverts à la Nouvelle-Zélande etaux îles Chatham; — J. Clark, Relations naturelles entre la température et le mouvement protoplasmique ; — /d. Expériences sur les fonctions du noyau des cellules végétales; — F. Warner, coordination de l’accroissement des cellules par les forces physiques ; — John Wälson, Quelques Albuca (Liliacées) et leurs hybrides. Dans la matinée du 8 août, le programme atti- rait à la Section de Biologie un nombreux public. La séance devait être consacrée à l'exposé de ques- tions relatives à la pêche locale et à l'étude scien- tifique des poissons. Le P'Mac Intosh fait d’abord l'histoire des pêcheries écossaises depuis dix ans dans ses rapports avec la zoologie. Personne plus que lui n’est autorisé à trailer ce sujet, car il a été l’un des premiers,dans son pays,à entreprendre des recherches suivies sur la faune marine. C’est à son L. MANOUVRIER. — LE CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION iniliative que les naluralistes doivent la création du laboratoire de Saint-Andrews, qui existait en fait avant même d’être officiellement reconnu et subven- tionné. Les travaux du P' Mac Intosh, ont en effet précédé d’une dizaine d'années pourle moins l'or- ganisation définitive de la station biologique de Saint-Andrews et son rattachement au Fishery board d'Écosse. Une grande activité y règne aujourd’hui, grâce à l'impulsion donnée par le Maitre, dont les élèves et les assistants, — M. E.G. Prince entre autres, — ont publié de beaux mémoires, sur les- quels j'aurai bientôt l’occasion de revenir. Jules de Guerne. V. — ANTHROPOLOGIE L’Anthropologie a été très largement représentée au Congrès d'Edimbourg. Cette science, on le sait, possède à son service une importante Société : l’Anthropological Institute of Great Britain and Ireland, fondée un an après la Société d’Anthropologie de Paris, en 1860, et siégeant à Londres. Plusieurs des membres les plus éminents de l’Anthropological Institute s'étaient fait inscrire à la Section compé- tente, présidée, cette année, par le P'A. Macalister. Il y avait, entre autres, les Professeurs Sir William Turner, de l'Université d'Edimbourg, SirJohn Stru- thers, de l'Université d’Aberdeen, MM. Cleland, de Glascow, Haddon de Dublin, Geddes de Dundee, Moriz Benedikt de Vienne, les Docteurs Garson du Royal College of surgeons, Bloxam, Brabrook, Galton, Garner, Hepburn, Anderson, Sir Arthur Mitchell, et beaucoup d’autres médecins, analtomistes ou physiologistes, dont la plupart ont présenté des travaux à la Section. Les séances se tenaient dans le grand amphi- théâtre de l'École de médecine situé dans le nou- veau bâtiment de l’Université. Plusieurs fois ce vaste local s’est trouvé trop petit pour contenir la foule des membres titulaires ou adhérents de l’As- sociation curieux des questions anthropologiques. Les dames étaient en grand nombre, formant bien un tiers de l'assistance, etsuivaient avec un intérêt visible les communications de toutes sortes. Plu- sieurs ladies prirent même la parole sans que les gentlemen en fussent étonnés. Il m’a paru manifeste que le niveau de l'instruction scientifique des femmes est beaucoup plus élevé en Écosse que chez nous, ce qui, n'en déplaise aux descendants de Chrysale, n'empêche pas les maisons écossaises d'être fort bien tenues. Peut-être même cela contri- buerait-il à assurer à nos voisins d’outre-Manche quelque supériorité sous ce rapport et sur maint autre point. Mais reslons au Congrès. Les meetings de la Section se prolongeaient, malgré la sobriété remarquable des discussions, 705 depuis le matin jusqu’à 3 heures et plus, avec une interruption d’une heure à peine pour le lunch lé- ger quiremplace là-bas notre déjeuner de midi. Les ordres du jour, très chargés, étaient préparés quotidiennement par le Comité de la Section. Au premier meeting, le président Macalister lut une longue et intéressante adresse sur les progrès de l’Anthropologie. Il présida toutes les séances suivantes avec ponctualité et fit ressortir avec beau- coup de tact et de compétence l’inlérêt de chaque lecture. Il fit lui-même diverses communications anatomiques sur le cerveau d'un Australien, sur des crânes du Haut-Congo, sur divers caractères faciaux des anciens Egyptiens. N'ayant pas prévu que j'aurais à faire un compte rendu et faute de me rappeler ous les papers lus à la Section, je citerai seulement ceux du P' Struthers sur les apophyses articulaires chez l'Homme et le Gorille, et sur une variation costo- vertébrale chez le Gorille, celui du P' W. Turner sur les têtes momifices et réduites de Bolivie, celui du P' Had- don sur le classement des motifs d'ornementation chez les peuples sauvages, celui du D' Garson sur l’Ostéo- métrie, celui du D' Garner sur le langage des singes, un autre du D° Mansel Weale sur Les cris et les ono- matopées chez les sauvages, un autre du D' David Hepburn sur les plis de la main et du pied chez l'homme ot les Anthropoides, un du D' Francis Warner sur les déviations physiques observées chez 50.000 enfants, un du P' Hartwell Jones sur la conception de la vie future chez les Indo-Européens, enfin un mien travail sur une formalion cérébrale fronto-limbique. Cette forma- tion consiste en un sillon qui, sur un grand nombre de cerveaux humains, divise la circonvolution du corps calleux appartenant au grand lobe limbique de Broca, de la même façon que chez le cheval, l'âne et divers animaux domestiques. J'ai essayé de démontrer que, chez l’homme, cette réapparition d'une complication du lobe limbique constitue un moyen d'agrandissement du lobe frontal aux dépens du gyrus fornicatus. Deux questions avaient été mises d’avance à l’ordre jour de la Section par le Comité et annon- cées comme devant être l’objet de discussions : 1° l'identification anthropométrique, % l'anthropologie criminelle. Chargé par le Comité d'ouvrir la discussion sur la première question, j’exposai le procédé d’iden- üfication anthropométrique de M. Alphonse Bertil- lon, procédé en usage depuis plusieurs années à la préfecture de police de Paris, dans les principales prisons de France, d’Algérieet de Tunisie, à Genève, à Bruxelles, à Saint-Pétershourg etaux États-Unis. Ce procédé consiste essentiellement à donner à chaque individu arrêté une sorte de nom composé de neuf nombres disposés dans un ordre constant et représentant en millimètres les dimensions 4 ADS. PRATT PRR T 706 L. MANOUVRIER. — LE CONGRÈS DE LA BRITISH ASSOCIATION exactement mesurées de diverses parties du corps. Une fois écrit sur une fiche derrière la photogra- phie de l’inculpé, ce nom sera retrouvé en une mi- aute au milieu d’un million d’autres, de la même facon que l’on trouve un mot quelconque dans un dictionnaire. Connaissant très bien ce procédé, je Pexposai de mon mieux et en fis ressortir les mul- tiples avantages non seulement au point de vue des recherches judiciaires, mais encore au point de vue de l’Anthropologie pure. C'était là un sujet de great attraction, paraît-il, car l'auditoire, ce jour-là, dépassait bien le chiffre de mille personnes. Puisqu'il s’agit d’une œuvre qui ne m'appartient pas, il m'est permis de dire que j’obtins un certain succès, bien que (je dois ajouter cela à la louange de mes auditeurs) mon speech fût prononcé en langue française. On opposacependantau procédé de M. A. Bertillon celui deM.Francis Galton, qui consiste simplement à prendre l'empreinte de la face palmaire des pouces dont les lignes papillaires forment des dispositions variables suivant les individus et fort ingénieuse- ment classées par M. Galton. Dans la réfutation du système galtonien au point de vue de lidenti- fication, je fus puissamment soutenu par les Professeurs Macalister et Haddon, si bien que la plupart des membres de la British Association parurent très désireux de voir l'identification an- thropométrique prochainement introduite en Grande-Bretagne. Nous imitons assez volontiers les Anglais pour qu'ils nous empruntent sans re- gret cette institution très apte d'ailleurs à leur rendre service. Les empreintes du pouce n’en conservent pas moins leur intérêt anthropologique et pourront être ajoutées, si l’on y tient, mais non substituées aux diverses mesures anthropométriques adoptées à Paris. A la condition de ne pas changer un &{a au procédé de M. Alph. Bertillon, il serait à sou- haiter que l'installation et la direction des futurs bureaux d'identification de la Grande-Bretagne fussent organisées de façon à pouvoir fournir des documents”aussi variés que possible à l’anthropo- logie pure. A l'issue de la séance, j’eus l’occasion de voir une application du procédé de M. Galton. Une dame, munie d'un registre, d'un tampon imbibé d'encre d’aniline et d’un petit balai de crins des- tiné à un simulacre de lavage des doigts, me demanda d’apposer sur son registre l’em- preinte de mes pouces avec ma signature. Je ne reculai ni devant le tampon ni devant le petit ba- lai; mais, tout en reconnaissant la facilité avec la- quelle mes empreintes pourront être classées dans Pune des calégories de Galton, je demande com- mentil serait possible dereconnaïître cesempreintes parmi celles du même groupe, lorsque ce groupe arrivera à comprendre quelques milliers ou même quelques centaines d'individus, au cas où l’on voudrait les retrouver sans le secours de la signa- ture. Peut-être serait-ce possible, mais la recon- naissance exigerait beaucoup de temps et de pa: tience sans être absolument probatoire, tandis que lidentification par le procédé anthropomé- trique ne demande qu’un instant et ne permet ja- mais le moindre doute. Du reste, l’Anthropométrie est très en honneur en Angleterre. Au Congrès d'Édimbourg, un labo- ratoire anthropométrique avait été installé dans la salle commune des étudiants et chacun pouvait venir s’y faire mesurer. La deuxième.discussion sur l’anthropologie cri- minelle fut ouverte par un médecin aliéniste, le D: Clouston, qui communiqua une statistique sur la fréquence des anomalies ou défectuosités de la bouche et de la voûte palatine chez les aliénés, les criminels et les honnêtes gens. M. Bénédikt, qui a l'avantage de s’exprimer spirituellement en plu- sieurs langues, prit ensuite la parole, et, tout en réclamant pour lui-même la priorité sur M. Lom- broso en ce qui concerne les recherches sur les caractères anatomiques des criminels, il parla de facon à ne plus être classé, désormais, parmi les partisans du criminaliste de Turin. Mon tour vint après. En me convoquant à cette discussion, à laquelle avait été convié aussi le P' Lombroso (qui s’est excusé pour raison de santé), les anthropolo- gistes dela British Association ne s’attendaient pas sans doute, de sa part et de la mienne, à des com- pliments mutuels. Ayant entrepris, au Congrès international d’Anthropologie criminelle tenu à Paris en 1889, la réfutation de la doctrine lombro- sienne, travail qui n’a pas été infructueux, je ré- sumai à Edimbourg cette réfutation. J'essayai en outre de rétablir l'historique de la question et de montrer que, si la revendication de M. Benedikt était légitime, il n'était pas moins juste de recon- naître la priorité des Maudsley, des Morel et Des- pine, des Gall et Spurzheim, etc., au sujet de l'étude des rapports qui peuvent exister entre le crime d’une part et la folie, la dégénérescence, la conformation analomique d’autre part. Il y a eu dans cet ordre d'idées des iniliateurs véritables ; il serait injuste et préjudiciable à l’histoire de la science de les oublier au profit d’un écrivain devenu célèbre en exagérant les vérités et ressus- citant ou mettant à la mode les erreurs dites par ses devanciers. Il m'a semblé, du reste, que les savants britan- niques etle public du meeting d’Edimbourg n’a- vaient pas besoin d’être beaucoup refroidis à l’é- gard de l’atavisme et de l’innéité du crime, soit à he: vu cet cb dE EN LÉ és LE ir, pois — Ed L'E és 2 F. SINIGAGLIA. — LE CONTROLE DE LA VITESSE DES TRAINS DE CHEMINS DE FER 707 cause de l'élévation du niveau scientifique en Écosse, soit parce que la « bosse » ou la « fosselte » de l'engouement sont relativement rares dans les pays septentrionaux. Devant assister au Congrès d’Anthropologie cri- minelle de Bruxelles où aeulieu, en grandepompe, l'enterrement de la doctrine néo-criminologique, il m'a fallu quitter avant sa clôture le Congrès de l'Association britannique, non sans emporter le meilleur souvenir de l'hospitalité écossaise et des savants avec lesquels j'ai eu l'honneur d'entrer en relation. Inutile de dire que j'ai trouvé en Écosse beaucoup de bons exemples à suivre. L. Manouvrier. LE CONTROLE DE LA VITESSE DES TRAINS DE CHEMINS DE FER I. — NÉCESSITÉ DU CONTROLE Les compagnies de chemins de fer ont, depuis très longtemps, compris la haute importance du contrôle dela vitesse des trains en marche. Il y a eneffet un double intérêt enjeu: l’intérêtdu publie, auquel on doit assurer autant que possible les correspondances directes des trains et la sé- curité à l'égard des accidents ; l'intérêt des Compa- gnies, qui ont le devoir de prévenir toute cause de plaintes, de dépenses inutiles, de préoccupations et de travail excessif du personnel, pendant le ser- vice en route, déjà si pénible en lui-même. Que d'accidents, de frais, d’ennuis, de regrets, j'allais dire de remords, 6n aurait pu épargner avec un contrôle sûr et précis, permettant du même coup d'établir la part de responsabilité de chaque agent! Un mécanicien qui ne ralentit pas la marche dans les courbes, ou qui, soit pour regagner du retard, soit par imprudence, lance le train à une vitesse exagérée sur une pente, risque d’être cause de malheurs et de dégâts considérables. S'il ne se sent pas surveillé d’une façon efficace, il répétera ses bravades jusqu’au jour où, fatalement, il les payera de sa vie, entraînant d’autres victimes avec lui. On le conçoit, le contrôle de la vitesse constitue un problème à la fois humanitaire et économique, qui intéresse de très près la sécurité des voya- geurs, l'entretien du matériel et de la voie. II. — LA FEUILLE DE MARCHE BULLETIN DE TRACTION ET LE Le moyen de contrôle usité dans toutes les li- gnes de chemin de fer consiste dans la rédaction, confiée aux agents des trains et des gares, de deux documents : le journal du train ou feuille de mar- che et le bulletin de traction. Le premier intéresse le mouvement et le trafic des marchandises, de sorte qu’on constate la charge réelle, la charge maximum, etc.; le second se rat- tache à la traction et donne les heures d'arrivée et de départ, les ralentissements, les arrêts anor- maux, et tous les faits en rapport avec le service, Le moyen de contrôle de la marche des trains est parfait en théorie, parce qu'il permet aux Compagnies de connaître non seulement les faits réguliers et irréguliers qui se passent en route, mais d'appliquer à chaque agentsa part de respon- sabilité. Malheureusement, il dépend, en pratique, de certaines conditions à remplir qui lui ôtent une grande partie de sa valeur. D'abord, il n’est pas possible d'apprécier certains faits avec une précision suffisante pour qu'aucune discussion ultérieure ne s’ensuive; en second lieu, il est bien permis de croire aux erreurs involon- taires ou à une entente momentanée entre les agents, dans le but de s’aider mutuellement, toutes les fois que cela est possible, ce qui arrive en effet pour le marquage des heures d'arrivée et de départ du train. Un tel état de choses devait nécessairement appeler l'attention des Compagnies de chemins de fer et des mécaniciens, dont l’ingéniosité trouve un vaste champ de travail dans l’étude des appa- reils de contrôle à l'abri de tout attentat de la part du personnel. IIT. — APPAREILS DE CONTRÔLE Un appareil de contrôle complet devrait fournir au service de traction toutes les indications néces- saires de manière à rendre inutile la rédaction de documents en route. Ilest à espérer qu’on arrivera à ce résultat; pour le moment, on se contente de contrôler mécaniquement la vitesse de marche, qui est du reste l’élément qu’il importe le plus de connaitre avec précision. D'après M. Silvola, ingénieur en chef de la Sec- tion principale des Chemins de fer de la Méditer- ranée (Italie), tous les appareils de contrôle ren- trent dans l’une des deux catégories générales suivantes : 1° Appareils placés sur le train; 2° Appareils placés le long de la voie !. SORTE RER © 5 ||: CR RSS RSR 1 Voir Bulletin de la Commission internationale du Con- 108 F. SINIGAGLIA. — LE CONTROLE DE LA VITESSE DES TRAINS DE CHEMINS DE FER A l’aide des premiers, on contrôle la marche du train en un point quelconque de la voie par des indications certaines ou presque certaines; les seconds se bornent à signaler la vitesse en certaines sections déterminées, aux abords de grands ponts, aux fortes rampes, en un mot dans tous les pas- sages où la vitesse maximum est fixée à l'avance. Nous empruntons à M. Silvola le tableau synop- tique que voici, qui montre clairement les ca- ractères secondaires des appareils de contrôle : Appareils contrôleurs de la vitesse des trains uniquement | sur CNOTERN | ET NN les locomotives - ‘S/géométrique....... A fixes S Le 8 Le] d & = enregistreurs . F mobiles 2 dynamique sur 2 : les wagons : z|avec mobile indicateurs et} enregistreurs |® fixes électrique avec pédales\cinématique placés le long de la voie à pneumatique mixte mobiles IV. — APPAREILS PLACÉS SUR LE TRAIN On place les appareils sur la locomotive ou sur un wagon quelconque; il y en a qui sont tout sim- plementindicateurs de vitesse; ainsi un cadran, un liquide quimonte ou descend à l’intérieur d'un tuyau permettent au conducteur de la locomotive ou du train de lire à chaque instant la vitesse de marche. grès des Chemins de fer, page 2113 à page 2151,où M Silvola décrit et donne les dessins d'un certain nombre d'appareils. Parmi ceux placés sur les trains on y trouve : l'appareil Guébhard ; lindicateur Strondley; le chronotachymètre Pouget; l’appareil de Haushalter; celui de Petri et Siemens et Halske; le chronotachymètre Paris-Lyon-Méditerrance ; le pendule d’inertie de M Desdouits; le chronotachygraphe Ferrero; le tachymèêtre Pennats; l'appareil Grafti et l'appareil Klüse. Parmi ceux placés le long de la voie on remarque : l'ap- pareil portatif à diapason Labouret; le sablier en mercure Bourguion; le dromoscope le Boulangé; le dromo-pétard le Boulangé; l'appareil enregistreur à cadran Paris-Lyon- Méditerranée; l'appareil enregistreur à bande de papier Paris-Lyon-Méditerranée; l'appareil enregistreur électrique Labouret; l’appareil fixe du chemin de fer de Etat (France); l'appareil fixe des chemins de fer hollandais et l'appareil enregistreur Siemens et Halske. transmission Ris ab P'EUPS [mécaniques indiqué Sans nier l’importance d’un bon appareil de ce genre comme guide pour le personnel, on voit sans peine qu'aucun contrôle n’est possible de la part de l'Administration, faute d’une trace perma- nente. Les indicateurs Strondley, Bun Jombart et C, Kaptein, Bruggemann appartiennent à cette calégorie. En résumé, la sécurité du service exige non seu- lement que le mécanicien puisse juger d’un coup d’œil la marche du train à chaque instant, mais à déclanchement....... cinématique- ment par les pièces mobiles bielles # du matériel par manivelles = transmission 2 avec excentriquesÿ? | par une S courroies = horloge =) Le! = ParAfTICHONe eee CAE = Es _ = si (2 = = mn à Ê HrL ERESTATSE RARE Ê s ES par S BSITATIS RE EEE ne onde KE par friction sur les ralls................. *|indirec- © © A | tement = liquide par les secousses du train..." à pendule parun mouvement d'horloger électriques /le temps 16( échappement | avec des étant par les. vibrations des diapasons indirectement aussi qu’il se sache lui-même surveillé d'une facon inévitable. Dès lors les appareils de contrôle doi- vent être à la fois indicateurs et enregistreurs des faits à signaler. Nous sortirions du modeste cadre que nous nous sommes tracé en nous plaçant au point de vue gé- néral, si nous étudiions en détail les appareils très ingénieux acceplés ou simplement essayés par les différentes Compagnies de chemins de fer. Qu'il nous suflise de rappeler qu'un appareil enregis- treur comporte en principe un organe mobile ou plusieurs pointes, crayons, destinés à laisser des traces sur un autre organe, par exemple un tam- bour animé d’un mouvement de rotation uniforme. On obtient ainsi des diagrammes qui dounent le moyen de déterminer les conditions de marche du train à chaque instant ou à des intervalles très pe- tits. L’organe mobile ou traceur est mis en mouve- ment par la marche du train et par des moyens qui diffèrent essentiellement entre eux. Ainsi l'horloge-enregistreur Guébhard, dont le RS MR OA LL, Eee Sr É ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE (Quelques Académies et Sociétés savantes, ment en vacances.) ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 10 octobre, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Emile Picard pré- sente le premier fascicule du tome Il de son Trailé d’A- nalyse : Fonctions harmoniques et fonctions analy- tiques. Introduction à la théorie des équations différen- tielles, et fonctions algébriques. M. H. Faye insiste sur l'échec que vient de faire à Ja théorie du mouvement centripète et ascendant des cyclones un travail important de M. Dallas, des Indes Anglaises; l’auteur en tire la conclusion suivante : Les trombes, les tornados et les cyclones sont des mouvements ratoires ou des tourbillons qui naissent dans les cou- rants supérieurs de l'atmosphère (à des étages très ans Leur translalion toute géométrique répond ces courants et ils en dessinent la marche par la An que leurs ravages tracent sur le sol ou sur la mer. — M. Bischoffsheim présente de la part de M. Weineck de Prague, une photographie du cratère lunaire désigné par le nom de Vendelinus. — M. Paul Painlevé, revient sur les transformations des équa- tions de Lagrange ; il énonce avec plus de détails son théorème précédemment démontré en discutantles di- vers cas qui peuvent se présenter ; il termine en mon- trant que la généralisation qu'a donnée M. Liouville de son théorème est inexacte. — M, A. Pellet donne quelques propriétés des courbes définies par l'équation gi- générale AX® + BY® + CZ® — 0, auxquelles s’ap- plique le théorème de M. Jamet relatif aux courbes triangulaires symétriques; l’auteur examine aussi AXm-E A/X,n 2) A X,m E, A X, —"0 (KX;ZetX;X,.. sont des fonctions quelconques “des coordonées courantes). -- M. G. Floquet forme cer- laines équations aux dérivées partielles qui permettent souvent une étude facile du mouvement d’un fil dans l’espace ; on connaît en chaque point du fil le produit de son épaisseur par sa densité et chaque élément matériel #uds est sollicité par une force extérieure donnée Fmds. -— M, le secrétaire perpétuel signale parmi les pièces imprimées de la correspondance : 1° un volume de M. Hugo Gylden intitulé : Nou- velles recherches sur les séries employées dans les théories des planètes; 2° un volume de M. Prosper de Laffite : Essai d’une théorie rationnelle des sociétés de secours mutuels. L'ouvrage se termine par des tables de commutation à divers taux d'intérêt pour les trois assurances. 2 SCIENCES PHYSIQUES, — M. Bernard Brunhes a étudié les variations de phase produites dans la ré flexion cristalline interne ; en généralil y a double réflexion, Dans le cas de la réflexion totale, il y a éga- lité entre les différences de phases entre les deux vi- brations rétléchies, qu’elles proviennent de l’incidente ordinaire ou de l’incidente extraordinaire; cette éga- lité de phases se déduit des équations de M, Potier étendues au cas de la réflexion totale. Enfin la diffé- rence de phase entre les deux vibrations réfléchies, mesuréeexpérimentalement, s'accorde avecles nombres prévus par la théorie. — M. Charles Henry donne une préparation nouvelle du sulfure de zinc phospho- rescent qui permet de l'obtenir en grande quantité ; on chauffe à blanc du sulfure de zine amorphe, obtenu par préc RMATION d’une solution d'oxyde de zinc am- moniacale, L'auteur a mesuré l'intensité lumineuse maxima de ce sulfate et étudié sa loi d'émission, les surfaces dont la R:vue L'ÉTRANGER analyse régulièrement les travauv, sont encore actuelle- MM. H Causse et C. Bayard ont préparé deux éthers avec le pyrogallol et l'acide antimonieux, un antimo- ZAOËS nite acide Cô m2 O =SbOH et un antimonite neutre OH CS HO Sb; le chlorure d’acétyle et l’anhydrideacétique n'engendrent aucun produit de substitution, Les au- teurs en concluent avec M. de Forcrand que, dans le pyrogallol, les trois oxhydriles occupent les positions (1) (2) (3). — M. P. Freundler a repris l’étude des éthers tartriques au point de vue des lois du pouvoir rotatoire déduites de la notion du produit d'asymétrie; l’auteur en conclut, avec M. Guye, que, si la masse cons- titue le principal facteur permettant de prévoir le signe de Pactivité optique, il faut encore tenir compte de l’arrangement des atomes ou ce qui revient au même, des bras de levier sur lesquels agissent les masses. — M, L. Barthe indique un nouveau dosage volumétrique des alcaloïdes, fondé sur l'indifférence de la phtaléine du phénol en présence de ces corps. L'alcaloïde est dissous dans un acide minéral et la li- queur est litrée par la potasse successivement en pré- sence du tournesol et de la phtaléine. — M. Edouard Blanc expose un nouveau mode de fabrication de la brique usité dans certaines parties de l'Asie centrale, et qui permet d’obtenir, avec une argile médiocre et des appareils d’une grande simplicité, des matériaux présentant une dureté etune cohésion ‘extraordinaires. — M. Ernest Milliau donne un procédé pour recon- naître la pureté des huiles de coprah et des huiles de palmiste, fondé sur la mesure de la solubilité de ces produits dans l'alcool absolu, L'analyse chimique ne donne que des résultats incertains. . MATIGNON. 3° SCIENCES NATURELLES, — M. L. Guéneau de La- marlière a étendu à la respiration et la transpiration ses recherches comparatives concernant l'intensité de Ja décomposition de l'acide carbonique par la chloro- phylle pour les feuilles développées soit au soleil, soit à l'ombre. Il en résulte que les fonctions étudiées sont plus intenses au soleil qu'à l'ombre ; de plus le rapport du poids sec au poids frais des feuilles développées au soleil est supérieur à celui des feuilles développées à l'ombre. — M. W. Russell a reconnu que les plantes des Garrigues de la région méditerranéenne présentent fré- quemment dans leurs tiges, comme chez les plantes des régions désertiques, un ‘tissu assimilateur chloro- phyllien bien différencié, lequel peut être rapporté à trois types fondamentaux de structure. — L'étude expé- rimentale de l’action de l'humidité du sol sur la struc- ture de la tige et des feuilles a permis à M. A. Oger de constater qu'il est possible d'obtenir dans de pareilles conditions, pour une espèce donnée, des modifica- tions de structure de même ordre, mais moins accusées, que celles servant à caractériser des espèces voisines, adaptées les unes au sol humide et les autres au sol — M. Ant. Magnin fait connaître les faits les plus intéressants qu'il a observés concernant la végétation des lacs du massif jurassien et les causes qui la modi- fient, Parmi celles-ci il faut ranger l'influence de la profondeur, qui règle surtout la distribution des plantes dans un lac, — M. Marey à appliqué la chronophoto- graphie à l'étude des mouvements du cœur, afin de faire connaître les déplacements et les changements de forme des oreillettes et des ventricules quis “emplissent et se vident tour à tour. Les expériences ont porté sur un cœur de tortue placé dans les conditions de la cir- sec ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES culationartificielleetquiavaitété préalablementblanchi au pinceau avec de la gouache, afin de le rendre pho- togénique L'auteur a obtenu ainsi, pendant une révo- lution cardiaque, une série d'images successives, prises à des intervalles de temps très courts, sur lesquelles on peut suivre les phases du mouvement et les change- ments d’aspects des différentes parties du cœur. Le même procédé d'investigation permet de montrer aux yeux le mécanisme de la pulsation du cœur. L'auteur décrit une expérience rendant visible le durcissement des ventricules coïncidant avec leur systole, c’est-à-dire l'effort par lequel le ventricule en contraction repousse toute pression extérieure tendant à le déformer. — M. H. Roger fait connaitre le mécanisme des phéno- mènes inhibitoires qui se manifestent à la suite du choc nerveux. Celui-ci résulte de violentes excitations .agissant sur les centres soit directement, soit par l’in- l'intermédiaire des nerfs centripètes, et amenant comme hénomène capital l'arrêt des échanges entre-le sang et es tissus. Il en résulte une diminution dans la produc- tion de l'acide carbonique et secondairement un abais- sement de la température, un ralentissement de la res- piration et parfois de la circulation. — Des nouvelles expériences auxquelles s’est livré M. A. Poehl relati- vement aux réactions de la spermine, il résulte que l'intensité de l'oxydation n’est pas en rapport avec la quantité de spermine employée, qu’elle agit par sa pré- sence, même à des doses très faibles. Quant au rôle de la spermine dans les oxydations intra-organiques, il résulte des effets toniques constatés par un grand nombre de physiologistes et de médecins, principale- ment dans les maladies nerveuses compliquées d’ané- mie. — M. J. Thoulet rend compte de ses observa- tions relalives au bassin d'Arcachon (Gironde) qui est un véritable type géologique. Ce bassin dans les condi- tions actuelles, ne tardera pas à se combler; il se trans- formera promptement en un lac fermé et finalement en un marécage. — MM. Roussel et de Grossouvre exposent les faits qu'ils ont constatés, dans la région comprise entre Foix et Bugarach, concernant la strati- graphie des Pyrénées. — L'étude de la météorite ré- cemment tombée à Hassi Iekna (Algérie) a fait recon- naître à M. St. Meunier que la masse résulte essen- tiellement du mélange de la kamacite (Fe! Ni) avec la plessite (Fei9 Ni). La composition qui résulte de l’ana- lyse concorde avec les caractères physiques et la struc- ture pour faire rentrer cette météorite dans le type lithologique distingué par l’auteur sous le nom de sehwetzite. — MM, L. Dupare et L, Mrazec ont reconnu l’analogie la plus complète entre les bombes de l’'Etna rapportées au mois de septembre de cette année et celles provenant de l’éruption de 1886. Mémoires présentés. — M. G. Rambault : Les si- gnaux en temps de brume, — M. F, Noblot : Théorie de la décomposition de l'eau dans le voltamètre. — M. J.-B. Kremer : Note relative à un remède contre la diphtérie, Ed. BELzuNG. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 4 octobre. M. E. Lancereaux: L'albuminurie au point de vue de l'indication thérapeutique; la pathogénie de l’albumi- nurie survenant au cours du diabète, Après avoir fait remarquer que le régime préconisé pour les albuminu- riques repose sur des théories plutôt que sur des faits cliniques, l’auteur pense, avec ses collègues, que l’albu- minurie n’est qu'un symptôme; ce qu'il faut redouter c'est l’urémie qui met l'existence en danger, C’est elle qu'il faut combattre en rétablissant la fonction rénale par l'emploi des'diurétiques et en stimulant les fonc- tions gastro-intestinale et cutanée par des purgatifs drastiques et des frictions sur la peau. Quand l’urémie a cessé, il faut chercher à modifier les tissus altérés par l'usage de l’iodure de potassium ou de la teinture de cantharides, suivant que ce sont les tissus conjone- tivo-vasculaires ou les tissus épithéliaux qui sont en jeu. L'auteur indique ensuite les circonstances dans lesquelles le lait est indiqué. Pour ce qui concerne les albuminuries accompagnant fréquemment le diabète, parmi les trois diabètes, diabète constitutionnel et hé- réditaire, diabète nerveux ou de Claude-Bernard et diabète pancréatique, le premier seul est suivi souvent d’albuminurie, le second exceptionnellement et le troi- sième jamais, quoique étant le plus grave et avec glyco- surie abondante. — Discussion : MM. G. Sée et Lance- reaux. — M. Peter : Sur l’étiologie et la pathogénie du choléra. L'auteur, après avoir rappelé qu'il a cons- taté, avec d’autres observateurs, une même maladie, le choléra, avec trois germes différents : le Bacterium Coli, le bacille-virgule de Finkler-Prior, et le bacille-virgule de Koch; des maladies différentes, le choléra, la dysen- terie, la fièvre typhoïde, avec le même germe, le Bacte- rium Coli, fait remarquer ensuite, avec faits à l’appui, que le choléra est spontané, autochtone, aussi bien à Paris que dans l'Inde. Puis l’auteur rend compte des études bactériologiques de Cunningham, à Calcutta, d'après lesquelles il y aurait une échelle graduée de formes et de propriétés dans les bacilles-virgules, et que l'invasion du choléra chez un individu semble n'être autre chose qu'une occasion fournie à quelqu'une des nombreuses espèces de microbes, vivant normale- ment dans l'intestin, de se développer aux dépens des autres. Le choléra serait dà au changement de forme et de propriétés du Bacterium Coli, devenant bacille courbe et toxique, par le fait de l’empoisonnement alcaloïdique intestinal du cholérique ; quant à la conta- giosité du choléra, elle n’est que relative; il y faut la prédisposition et aussi le contact le plus direct. Pour ce qui est de l’épidémicité, il y a, selon l’auteur, la mème différence entre le choléra sporadique et lépi- démique qu'entre la dysenterie sporadique et l’épidé- mique. Voici les conclusions de son étude : 1° le cholé- rique est un empoisonné ; 2° il est empoisonné par des ptomaines ou autres toxines ; 3° celles-ci sont formées dans le tube digestif et empoisonnent à la fois l'individu et son Bacterium Coli ; 4° ce dernier, soit resté tel, soit transformé, mais empoisonné, peut être le vecteur du poison cholérique, et devenir ainsi cholérigène. — Discussion : MM. Proust, Peter, Brouardel. — M. Corlieu : Sur la médecine militaire dans les ar- mées grecques et romaines dans l’antiquité. Séance du 11 octobre. M. le Président annonce la mort de M. Villemin. — MM. Duguet et Léon Colin donnent lecture des dis- cours qu'ils ont prononcés sur la tombe de cet illustre médecin, L'Académie lève ensuite la séance en signe de deuil. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 15 octovre , M. Hédon envoie une note relative à l'opération de la fistule pancréatique. — M. Nepveu : Altérations du foie dans les fièvres pernicieuses. — M. Lataste : Epithélium du vagin des rongeurs. — M. Ferrant éta - blit ses droits à la priorité de la vaccination anticho- lérique par des cultures atténuées du bacille-virgule. Il propose de nouveau l'infection des sources par des cultures vaccinales pour préserver en masse les popu- lations menacées. M. Chauveau combat ce procédé, les microbes du choléra pouvant parfaitement récupé- rer, dans bien des conditions encore inconnues, leur virulence primitive. — M. Louis Blanc étudie l’in- fluence de la lumière sur l'orientation de l'embryon dans l'œuf de poule, Il aurait obtenu, à l’aide de cet agent, des modifications tératologiques. — M. Féré présente une note de M. Peyrot sur l’excrétion uri- naire dans des cas pathologiques, — M. Féré cite un cas d'ivresse mécanique survenant après un exercice violent chez un individu qui présenta, un an plus tard seulement, d’autres symptômes de névropathie, — M. D’Arsonval présente une note du D' Apostoli, qui, / ( RCE ANTON RS AT “ie pour la première fois, a employé en électrothérapie les courants sinusoidaux alternatifs à période lente de M. D'’Arsonval. 34 sujets atteints de maladies de luté- rus ont été traités par ce procédé. Les courants étaient produits par une machine de Clarke modifiée par M. D'Arsonval ; un pôle était placé dans l'utérus, l’autre sur le ventre, Ce procédé provoque quelquefois les hé- morrhagies, la douleur diminue, la leucorrhée peut être combattue, mais non l’hydrorrhée; la régression des fibrômes n'est pas encore suffisamment établie, — M. Galezowski présente une lampe pour l’examen du champ visuel et l'exploration des sensations colorées. Il conclut de ses observations que les bâtonnets perce- vraient les couleurs, et les cônes le blanc et le noir, ce qui est contraire à la théorie de Young et Helmholtz. — M. Girode lit l'observation de 78 cas decholéra; il éludie particulièrement l'action du bacille sur le foie el le pancréas. — M. Retterer présente une note de M. Meyer relative à la capacité respiratoire du sang et à la chaleur animale. Dans l’intoxication par l’aniline, ete., la chaleur est en rapportavec le degré d’altération de l’hémoglobine. Il présente en outre une note de M. Debierre sur la valeur de la fossette occi- pitale moyenne. — MM. Regnault et Lajard signalent la fréquence d’altérations trophiques des cheveux et des ongles, dans une peuplade des Basses-Pyrénées, connue sous le nom de cagots. Ils signalent aussi la disparition fréquente des incisives latérales à la mà- choire supérieure. Ils pensent que les cagots sont des descendants des anciens lépreux. M. Galippe con- firme cette conclusion, mais il fait remarquer que la disparition des incisives laférales est fréquente chez l’homme, et doit être considérée ici comme une coïin- cidence fortuite. Ch. CONTEIEAN. Séance du 22 octobre. M. Depoux présente un capilaine d'infanterie at- teint d'ataxie locomotrice depuis deux ans et demi. Ce malade à été guéri en 3 mois par des injections de liquide testiculaire. — M. Brown-Séquard rappelle que les ataxiques sont presque toujours guéris par sa méthode, mais que le réflexe rotulien ne réapparaît que très rarement. Il cite le cas d’une femme enceinte et ataxique qui, à 6 mois de grossesse, recut des injec- tions de liquide testiculaire. Elle accoucha à terme d’un enfant en parfaite santé. Les mouvements du fœtus n’ont été sensibles qu’à partir de la première in- jection, — Il présente une note de M. Christiani sur la thyroïdectomie chez le rat albinos. Si cet animal survit quelquefois à cette opération c’est qu'il possède des glandules accessoires microscopiques, analogues à celles que M. Gley a signalées chez le lapin. 114 rats albinos bien opérés sont morts. — MM. Ch. Féré et P. Batigne. : Nole sur les empreintes de la pulpe des doigts et des orteils, — M. Leven : Remarques sur le système nerveux et ses maladies. — M. Thiroloix pré- sente un chien qui a subi en deux temps l’extirpation totale du pancréas. Après l’extirpation de la portion duodénale de cette glande, l'animal ne présentait de la glycosurie qu'à la suite d’un régime amylacé, Après l’extirpation de la portion splénique, l'animal présenta une glycosurie, un azoturie et une polyurie considérables, sans toutefois perdre de son poids et de sa vigueur, grâce à une alimentation abondante. — M. Gley cite le cas exceptionnel d’un chien dépancréa- tisé mort au bout d’un an dans une cachexie profonde sans avoir présenté de glycosurie. — M. Gréhant Modification du grisoumètre de Coquillon, — M. D’Ar- sonval étudie l’action des basses températures sur les ferments solubles et organisés, L'invertine résiste à — 40°, mais elle est tuée à — 100, tandis que la le- vüre résiste à — 100°. Ces recherches sont d'accord avec celles de M. Raoul Pictet, au laboratoire de Du Bois- Reymond. Le froid de — 150? tue les ferments solubles et respecte les ferments organisés, M. R. Pictet a décou- vert en outre que,à — 150°, toute combinaison chimique est devenue impossible. L'acide sulfurique anhydre ne ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES. réagit plus sur la potasse, Le sodium ne perd pas son éclat en présence de l'acide nitrique anhydre. On peut provoquer les combinaisons en fournissant de l’énergie sous forme d'électricité, par exemple. En laissant se réchauffer graduellement les corps refroidis on peut, à certaines températures, produire tels ou tels composés parfaitement purs. M. Pictet prépare indus- triellement par cette méthode de lalcool, de l’éther, du chloroforme etc., rigoureusement purs. Leurs den- silés différentes des chiffres classiques, montrent que jusqu'à présent on n’avait jamais pu obtenir ces corps dans un état de pureté absolue. Ainsi la glycérine pure marque 31°, 5. M. Dastre rappelle qu'il a signalé autrefois que le suc gastrique refroidi pendant trois heures à — 50° n'était pas détruit. Les propriétés di- gestives étaient même plus actives. D’après Young, le colimacon résisterait à la température de — 1009, — MM. Lejard et Magitot discutent sur l’origine des cagots des Pyrénées, — M. Edmond Perrier présente le deuxième fascicule de son Traile de Zoologie. — M. Marès : Note sur l’hibernation. ACADÉMIE RGYALE DE BELGIQUE Séance du 6 août. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M.J. Deruyts : Sur certaines substitutions linéaires. — M. L. Niesten : Note relative aux variations de latitude, L'auteur établit dans ce tra- vail que les variations de latitude doivent être consi- dérées comme réelles et qu’elles sont en rapport avec la position de la Terre sur son orbite, De plus, la pé- riode d’oscillation ou de rotation du pôle est annuelle et sensiblement constante; les écarts de la latitude par rapport à la moyenne varient entre 0°20 et 0°30. 2° SciENCES PHYSIQUES. — M. P. de Heen: Variabilité de la température critique. Les déterminations exécu- tées par l’auteur établissent que la température cri- tique t, telle qu'elle est envisagée par Cagniard-Latour et contrairement à ce que l’on admettait jusqu’à pré- sent, doit être considérée comme variable; quant à la température critique d’Andrews, désignée par T,, elle représente rigoureusement la limite supérieure de fe. La température critique & de Cagniard-Latour repré- sente la température à laquelle la vapeur formée est susceptible de dissoudre la totalité du liquide sous- jacent. On concoit, d’après cette manière de voir, l’ac- croissement que subit cette température avec la pro- portion de liquide renfermé dans le tube. L'auteur, afin d'éviter les confusions, propose de désigner la tempé- rature fe sous le nom de température de transformation, pour la distinguer de la température T,, définie comme il a été dit, à laquelle on conserverait le nom de tem- pérature critique. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Van Gehuchten : Contributions à l'étude des ganglions cérébro-spinaux. L'auteur donne un apercu des principales études faites d’une part sur les ganglions spinaux et, d'autre part, sur les ganglions cérébraux des vertébrés. Voici quelques-unes des conclusions de son travail : Les cel- lules nerveuses des ganglions spinaux de la plupart des poissons sont opposito-bipolaires, et celles des au- tres vertébrés sont, à l'état adulte, toutes unipo- laires. Les ganglions spinaux des poissons cyclos- tomes présentent, à l’état adulte, outre les deux formes précédentes, toutes Les formes intermédiaires. Il en est de même des embryons des mammifères,des oiseaux et des reptiles dont les cellules bipolaires se transforment dans le cours du développement encellulesunipolaires. En outre, les ganglions spinaux des vertébrés doivent être considérés comme noyaux d'origine réelle pour la partie sensitive de tous les nerfs spinaux et à la fois pour les fibres périphériques et centrales. Quant aux wanglions du trijumeau, du glosso-pharyngien et du vague ils sont en tous points comparables aux ganglions spinaux; de plus le ganglion spinal du nerf acoustique est comparable aussi à un ganglion spinal. Mais les diet arte à | ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES UT ON cellules nerveuses de ce ganglion ont conservé, d'une facon permanente, la forme des cellules bipolaires. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Depuis notre dernier Compte rendu, l'Académie a recu les communications suivantes : 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Gegenbauer : Sur les nombres complexes primaires formés par les racines d'ordre égal à quatre. — M. le capitaine Hartl chargé de l'étude trigonométrique de l'Autriche a pris comme base de ses travaux la détermination exacte des longitude et latitude de l'Observatoire d'Athènes, il a trouvé des nombres concordant avec les observations récentes du directeur, M. Bouris.— M. Weiss a fait une étude détaillée des catalogues d'étoiles fournis par les Observatoires du sud, il a trouvé entre ces catalogues des différences systématiques dont la discussion lui a permis d'établir des formules de correction. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Luggin a mesuré le potentiel des métaux au premier instant de leur contact avec des électrolytes. Un mécanisme permettait d'établir le contact entre la liqueur et le métal pur relié avec un électromètre à quadrants et de rompre aussitôt la liaison avec l’électromètre; la durée du contact pouvait s’abaisser à 2 de seconde. A part l'aluminium, le potentiel augmente avec la durée du contact. On a une analogie complète entre le courant produit par l'écou- lement du mercure dans un électrolyte et entre le courant qu’on admet devoir se former à l'immersion du métal. Ces expériences portent à croire que la théo- rie des couches doubles est en défaut. — M. R. Wegs- cheider a préparé les opianates de plomb et de soude qui cristallisent,le premier avec deux ou trois molécules d’eau, le second avec deux molécules. Chauffés avec l’iodure de méthyle, le premier donne, suivant les con- ditions, l’éther 9-méthylopianique ou bien l’éther mé- thylique normal, le second ne donne que l’éther nor- mal. Le chlorure de l'acide s’oblient en chauffant à 70° le pentachlorure de phosphore et l'acide ; le produit brut mélangé avec l’alcool méthylique en excès four- nit aussitôt l'éther normal; c’est le meilleur procédé de réparation; une quantité insuffisante d'alcool méthy- He fournit l’éther + . Toutes ces réactions s'accordent avec les formules proposées par l’auteur pour ces deux éthers, — M. A. Pelmutter montre que l’amalgame de sodium réduit l'acide quinolique en donnant une combinaison non azotée, la ô-oxy-2-y-è-butényltricar- bonique-ë-lactone : CTH5Az04 + 2H20 + H? — C7 HS O6 + AzH5. La composition de celte substance non cristallisée fut déterminée par l’étude de ses sels de baryte secon- daire et tertiaire et de.son éther éthylique. Son carac- tère lactonique résulte de la composition de ses deux sels de baryte et de l’action de l'acide iodhydrique qui fournit l’acide a-y-è-butényltricarbonique. L’acide tri- carbonique CTH!°08 est bien cristallisé et donne un sel de calcium bien caractérisé Caÿ (C?H7O5)?; la chaleur le décompose en acide carbonique et acide n-adipique CGH100!, — M. Gustav Jager : Sur la variation de la constante capillaire du mercure avec la température. — M. Jahn fait une communication provisoire sur la dendroïde, — M. Gustav Pum : Sur les transforma- tions de la cinchonine. — M. Georg Neumann : Action de l’acide iodhydrique sur la cinchonine. L'auteur décrit dans un premier travail quelques bases isomères avec la cinchonine; l’une est identique avec l'isocin- chonine déjà connue, deux autres se confondent pro- bablement avec les isomères optiques de la cinchonine décrits par Jungfleisch et Léger. Ces bases se produi- sent par addition et séparation successives de l'acide iodhydrique et de la cinchonine; les résultats sont différents suivant que l’acide est enlevé par la potasse caustique ou le nitmate d'argent. Les bases non iden- tifiées sonf désignées 8 et y cinchonine, Le tableau sui- vant résume les transformations : { cinchonine et Cinchonine et potasse alcoolique........... FAQs : DO E SCO RAUEE eue RS | isocinchonine f-cinchon. et Cinchonine et nitra l'arge | à : 0 ALE 'APEEN CNE Socio ' à -Ccinc : B-cinchon. et potasse alcoolique............ j FEnCHOP RCE B-cinchon. et nitrate d'argent f-cinchon. et isocinchonine { y-cinchon. et Isocinchon. et potasse alcoolique......... Were : dE ! UE ** | isocinchonine Dans une deuxième note, l’auteur a obtenu un pro- duit d’addition de la cinchonidine et de l'acide iodhy- drique CH224720 (HI qu'il regarde comme une base iodée. La potasse et le nitrate d'argent enlèvent com- plètement l’acide,mais régénèrent deux bases nouvelles la etlay cinchonidine dont la plupart des sels ne sont pas cristallisés. — M. Guido Goldschmiedt : Sur la laudanine. D'après Hesse, la laudanine a pour for- mule CH25Azotet est douée de propriétés optiques tan- dis que la lumière polarisée est sans action sur son chlorhydrate. L'auteur montre que la base pure est inactive, qu'elle contient trois groupes OCHS et un oxyhydrile CITHISAz (OCHS)OH, L’acide métahémipi- nique CSH? (OCH>}(COOHR fut reconnu parmi ses pro- duits d’oxydation, ce qui paraît faire dériver la lauda- nine de l’isoquinoline, — M. G. Goldschmiedt et F. Schranzhofer décrivent l’anhydride, les éthers éthy- lique et méthylique de l'acide papavérique et quelques sels de l'acide papavérinamique. — M. Franz von Hemmelmeyr : Sur la méconinphénylméthylcétone. Ce corps,décrit par Goldschmiedt, traité par la potasse à l’ébullition, se décompose en acétophénone et acide opiauique. L'auteur en décrit l'hydrazone, la dihydra- zone et l’oxime qui se transforme, par cristallisation dans lalcool, en un isomère stéréochimique. — M. Karl Brunner a fait la synthèse de l'acide isoma- lique en saponifiant par l'acide chlorhydrique le cya- nure diacétique. L'identité avec l'acide de Schmôger fut établie par la comparaison des propriétés de l’acide et de ses sels d'argent et de baryum, — M. Meyer- hoffer : Sur un nouveau sel double et les conditions de son existence. L'auteur, dans la première partie de son mémoire étudie d’une manière générale les méthodes qui ont été employées dans ces derniers temps pour faire l'étude des combinaisons moléculaires, particuliè- rement celle des hydrates et celle des sels doubles; il s'arrête surtout aux méthodes fondées sur la recherche de la solubilité. La seconde partie contient une appli- cation à l’étude du chlorure double de cuivre et de li- thium bihydraté CuCl2LiCP2H20, l’auteur en conclut que l’eau dans la molécule n’est pas liée au CuCP mais au chlorure de lithium, Il résulte de là la nécessité d’in- troduire des formules plus rationnelles pour représen- ter les combinaisons contenant de l’eau de cristallisa- tion, formules rendant compte des liaisons des molécules entre elles. — Observatoire de Vienne : Observations mé- téréologiques et magnétiques faites pendant le mois de juin à la station centrale, 3° ScrENGES NATURELLES. — M. C. L. Griesbach : Lettre adressée de Milam, camp vià Almora (Coumaon) à M. van Mojsisovics et fournissant des renseignements sur la constitution géologique de ce pays. — M. Stein- dachner : Sur deux espèces nouvelles de Notrotrema non encore signalées eb trouvées à l’Equateur et en Bolivie, le Notrotrema Weinlandi et le N. boliviarum. Le premier est proche parent du N. festudinem, le second du N. plumbeum. — M. Karl Kælbel : Nouveau crustacé de l’est de l'Asie, Celte nouvelle espèce se dif- férencie de l’Astacus Schrenkiü Kessl.et de l'A, Dauricus Pall, par la structure du rostrum et en outre par la non-existence de l’épine cervicale; au contraire elle a les plus grandes ressemblances avec l’Astacus Japonicus Häan, Séance du 6 octobre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Mach : Communi- _ cation complémentaire sur les projectiles. —M. Weinek adresse une copie photographique du mont Vendelinus de la Lune reproduite d’après un cliché positif pris le 31 août 1890 à l'observatoire du mont Hamilton (Cali- fornie) ; l'épreuve est grossie vingt fois. L'auteur y joint une notice où sont consignées ses observations. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — MM. J. Elster et H. Geïtel : Observations de feux de Saint-Elme sur le Sonnblick. Les auteurs ont réuni dans ce travail les observations de feux de Saint-Elme faites à la station du Sonnblick depuis le 20 juin 1890 jusqu’au 30 juin 1892; ils en con- cluent les conditions nécessaires pour l'apparition de ces feux, — M. P.C. Pusch1 : Sur les équivalents chi- miques, — M. G. C. Schmidt : La loi périodique, — M. Fritz Obermayer adresse une réclamation de prio- rité pour ses « études chimiques de l’albumine ». 3° ScrENCESs NATURELLES. — M. Claus adresse la suite de son travail intitulé : Recherches de l'Institut zoolo- gique de l’Université impériale de Vienne et de la sta- tion zoologique de Trieste, — M. le Ministre de l’agri- culture envoie la publication suivante : Description géo- logique des terrains du Pribram. — M. Alfred Nalepa envoie sa cinquième communication sur les nouveaux microbes de la bile. Il décrit successivement les Phyto- ptæ pilosellæ, tenellus, glaber, gibbosus, alpestris, et les Phyllocoptes gracilipes, compressus, gigantorhinchus, co- matus. — M. le secrétaire lit les dépêches adressées depuis Le 46 août par le commandant en chef de l’ex- pédition scientifique à bord du vaisseau Pola. — M. F. Steindachner communique une lettre de Port- Said, donnant le plan des travaux scientifiques effec- tués à bord du vaisseau Pola, et une seconde lettre de M. J. Luksch chargé de la direction des recherches: scientifiques à bord du Pola. 23 essais montrèrent l'exactitude du rapport antérieurement constaté entre la salinité de l’eau de mer et la température, Cette salinité dans le bassin austral va en augmentant depuis la surface jusqu’au fond, tandis que dans l’est de la Méditerranée elle est indépendante de la profondeur. La température augmente quand on marche du nord au sud ou de l’ouest à l’est, La coloration de la mer diminue quand la hauteur du soleil augmente. La pro- fondeur maxima trouvée fut de 3.786 mètres à 20°59°18" longitude et 36924" de latitude. Les éléments des ondes furent déterminés. De nombreuses observa- tions météréologiques furent poursuivies systémati- quement. — M. Diener,chargé de la direction de l’ex- pédition géologique de l'Himalaya, adresse deux lettres donnantdes détailssur l'expédition, À Lauka Encamping Ground, l'auteur a découvert des couches du même type que celles de Hallstätter; elles sont très riches en cé- phalopodes qui sont malheureusement effrités pour la° * plupart et tombent en poussière quand on les retire du calcaire très dur; il à pu recueillir à 17.000 pieds de hauteur de nombreux myophories, daonelles et brachio- podes, un bel échantillon de Cladiscites subtornatus, un magnifique Tropites et plusieurs Ammonites (Arpadites). — M. von Mojsisovics : Lettre recue de M. Diener et datée de Milam donnant des détails sur le plan de l'expédition et la description géographique des endroits explorés. Emil Weyr, Membre de l'Académie. NOUVELLES LA PHOTOGRAPHIE EN COULEURS SUR ALBUMINE M. le Professeur Lippmann a présenté à l'Académie des Sciences, dans la séance du 24 octobre, le résultat d'expériences très curieuses qu’il à faites relativement à la photographie en couleurs du spectre solaire, sur des couches ne contenant pas de composé d’argent. Il a employé cette fois de l'albumine contenant du bichromate de potasse. On sait que cette dernière subs- tance est déjà utilisée depuis longtemps dans les ap- plications industrielles de la photographie, par exemple dans les tirages aux encres grasses : on admet que, sous l’action de la lumière, il se forme un composé organo-métallique du chrome et de la substance qui constitue la couche étendue sur la plaque. Dans ces conditions les parties impressionnées par Ja lumière ne sont plus sensibles à l’action de l'humidité qui, si elle agit sur la plaque, ne gonflera que les parties non impressionnées. Ceci posé, voici quelles sont les expériences de M. Lippmann : ‘ Il à pris une glace recouverte d’albumine bichro- malée, a mis cette couche en contact avec une surface réfléchissante de mercure formant miroir, et a placé le tout au foyer d’une chambre photographique sur l’ob- jectif de laquelle tombait un faisceau de lumière blanche décomposé par un prisme. L'image réelle du spectre se produisait sur la couche sensible, le phéno- mène des interférences avait lieu, grâce au miroir de mercure, dans l'épaisseur de la couche sensible, don- nant à celle-ci une structure lamellaire, comme cela a lieu pour le phénomène ordinaire de la photographie des couleurs. La lame, ainsi exposée pendant 8 à 10 minutes, est alors simplement plongée dans l’eau :aussitôt, par suite de la différence des indices de réfraction, les couleurs apparaissent avec beaucoup de vivacité, et, chose très particulière, sont visibles dans toutes les directions, au lieu de ne l'être, comme dans le cas des photographies colorées ordinaires, que dans une direction déterminée. Ces couleurs disparaissent quand on sèche l’épreuve et reparaissent de nouveau lorsqu'on l’immerge une nouvelle fois. Les spectres obtenus par ce moyen mon- trent très nettement, par transparence, les couleurs complémentaires, Telle est, en substance, la communication de M. Lipp- mann,. Il à fait, sous les yeux de l’Académie, l’expé- rience du développement d’une plaque impressionnée par la seule immersion dans l’eau : la vivacité des couleurs a excité l'admiration de l’assistance. Une chose faite pour surprendre, c’est qu’on n'ait jamais observé ces couleurs dans les applications in- dustrielles auxquelles la gélatine bichromatée a donné lieu jusqu'ici. Souvent en effet, on impressionne des couches de cette substance étendues sur des plaques de cuivre ou de zinc poli qui constituent un miroir suffi- sant pour que le phénomène des interférences ait lieu. Dans ces conditions on aurait à coup sûr observé des couleurs si, au lieu d'opérer le tirage à l’aide d’un contre-type retourné, tiré en blanc et noir, on avait impressionné directement la couche avec de la lumière colorée. Alphonse Bencer, Docteur ès sciences. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER Paris. — Imprimerie. Levé, rue Cassette, 17. PPT EE PE PT PUR ES RE 3° ANNÉE N° 15 NOVEMBRE 1892 REVUE GÉNÉRALE S SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER À PROPOS DE QUELQUES RÉCENTS TRAVAUX MATHÉMATIQUES Je ne me propose pas, dans l’article qu'on va lire, de faire une revue des travaux mathéma- tiques intéressants parus depuis la dernière revue d'Analyse que j'ai publiée dans ces colonnes en 4890 !. On voudra bien voir dans les pages qui suivent une simple conversalion mathématique, à propos de quelques-uns des sujets qui préoccupent en ce moment les géomètres : j'ai choisi la théorie des groupes et celle des équations différentielles. 2 J'ai déjà parlé ? avec quelques détails de l’ad- mirable théorie des groupes de trans'ormalions due à M. Sophus Lie. L'illustre géomètre norvégien continue son œuvre. Il vient de consacrer deux mémoires aux fondements de la géométrie. La question est d'un assez grand intérèt philoso- phique pour que nous nous y arrêtions de nouveau. On sait combien les travaux de Gauss et de Rie- mann sont importants dans l’histoire de nos idées sur les hypothèses qui sont à la base de la géo- métrie. Dans cette théorie, c'est l'expression de l'élément de distance qui joue le rôle essentiel, et les recherches de ces grands géomètres ont été l’origine de développements analytiques du plus haut intérêt concernant en particulier les formes quadratiques de différentielles. On doitreconnaitre cependant que Gauss et Riemann n'ont pas vu le véritable point de départ à adopter dans l'étude 1 Voir la Reoue du 30 novembre 1890, t. I, p. 702 et suiv. 2ML0C- CLE. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. des fondements de la géométrie. Il semble que ce soit Helmoltz qui ait le premier placé la question sur son véritable lerrain : son idée fondamentale consiste à porter l'attention sur l’ensemble des mouvements possibles dans l’espace dont on fait l'étude. La théorie des groupes n’étail pas encore créée à l’époque où le célèbre physicien écrivait son mémoire; il était presque inévitable qu'il commit quelques erreurs. M. Lie vient de re- prendre complètement cette étude en se plaçant au point de vue de la théorie des groupes, et nous allons résumer les conclusions auxquelles il est parvenu. Nous considérons un espace à trois dimensions et nous regardons un point de cet espace comme défini par trois quantités (+, y, z) que l’on appelle les coordonnées du point. Qu'appellerons-nous mouvement dans cet espace ? Un mouvement d'une portion de l’espace est défini par trois équations : Par cette points (+, y, 2) devient un autre ensemble Z!' de points (&' y'z') : la transformation qui précède est pour nous un #»#ouvement qui amène Z en Z". Ceci posé, nous faisons sur l’espace que nous voulons éludier les hypothèses suivantes : 1° Les mouvements possibles dans cet espace sont tels qu'ils laissent invariable une fonction Q(v,,Y1,2,,%,Y3, 2) des coordonnées de deux points quelconques (x,, y,,2,) et (+,,7,, 2). En d’autres 2); (&'o Y'o Z'a) 21 transformation un ensemble Z de termes, si on désigne par (z!, y!, 726 E. PICARD. — A PROPOS DE QUELQUES RÉCENTS TRAVAUX MATHÉMATIQUES les coordonnées de ces points après un quelconque des mouvements possibles, on aura Q (ris Vis 2 Los Ya, 22) = Q (ais Vs Sas Do Yo Fo). L'origine de cette hypothèse s'aperçoit d’elle- même : en langage ordinaire et sans signe algé- brique, on peut dire grossièrement que, en la fai- sant, on veut qu'il y ait relativement à deux points de l’espace quelque chose qui reste invariable après le mouvement; on pourra appeler ce quelque chose la distance de deux points. 20 On veut, comme le disait Helmoltz, que le mouvement libre soit possible dans une certaine région de l’espace. Voici ce que l’on doit entendre par cette hypothèse complexe, bien approfondie par M. Lie. Tout d'abord, quand un point de la région est fixé, lout autre point de cette région, sans aucune exception, décrit une surface (multipli- cité à deux dimensions). Ensuite quand deux points sont fixés, un point arbitraire (des excep- tions étant possibles) décrit une courbe (multipli- cité à une dimension); enfin si trois points arbi- traires sont fixés dans la région, tous les points de celles-ci restent en repos (des exceptions étant possibles). Telles sont lesconditions que nous imposons à l'espace. Il en résulle nécessairement que l’en- semble des mouvements possibles doit former un groupe à six paramètres. On connaît deux types d'espaces satisfaisant à ces conditions. C'est tout d’abord l’espace ordinaire ou euclidien ; tels sont aussi les deux espaces non euclidiens, c’est-à-dire les espaces dans lesquels le groupe des mouvements possibles est le groupe projectif transformant en elle-même l’une ou l’autre des surfaces du second degré : a? + y + EI—=O0. M. Lie a établi que les groupes précédents sont les seuls qui jouissent des propriétés (1) et (2): c’est là un résultat bien remarquable etqui montre que les espaces euclidien etnon euclidiens sont les seuls où l’on puisse faire logiquement les hy- pothèses qui, dégagées, bien entendu, de leur forme scientifique, sont regardées par quiconque n'a pas réfléchi à ces questions comme ayant un caractère nécessaire. La démonstration du théorème de M. Lie est fort délicate. Ainsi les mots « sans aucune exception», que nous avons soulignés plus haut, sont d’une extrême importance. Si l'on cherche le groupe des mouvements à six paramètres satisfaisant à l'hy- pothèse (2), on ne trouve que les groupes eucli- dien et non euclidiens, mais si on supprime les mots soulignés, on reconnait qu'il existe d'autres groupes que les précédents. Ajoutons encore que les problèmes analogues dans le plan admettent des solutions entièrement différentes : lesespaces à deux dimensions euclidien et non euclidiens ne sont pas caractérisés par les propriétés qui leur appartien- nent uniquement dans le cas de trois dimensions. Cette circonstance n'avait pas autrefois échappé à Helmoltz. On peut dire, en résumé, que les der- nières recherches de M. Lie épuisent, pour les géo- mètres, sinon pour les philosophes, la question des principes de la géométrie. Nous ne nous éloignerons pas de la théorie des groupes en parlant des quantités complexes. C'est une question sur laquelle a plané longtemps une cer- taine obscurité, qu'entretenait le mot un peu mys- tique de quantilés imaginaires. Le sujet ne présente plus aujourd’hui rien de mystérieux. Dans un mé- moire publié en 1884, M. Weierstrass a développé une théorie des nombres complexes. Il suppose que l’on considère des nombres de la forme L161 É To69 + ... + Tn En où les z sont des nombres réels ordinaires. Les e sont de purs symboles. On fait l'hypothèse que la somme, la différence, le produitet le quotient de deux nombres de l’ensemble font eux-mêmes par- tie de cetensemble. Les produits epey(p; q = 1,2 .-..;n) sont donc des expressions E,, linéaires et homo- gènes en 6,, 8, ..…, A Qui jouent le rôle essentiel dans la théorie. M. Weierstrass suppose de plus que les théorèmes dits commutatif et associatif sub- sistent tant pour l'addition que pour la multiplica- tion. Pour l'addition ils sont vérifiés d'eux-mêmes ; pour la multiplication, ils s'expriment par les égalités : (1) ab = ba (2) (ab)ce = a (bc) a, b, e étant trois nombres quelconques de l’en- semble. Ces conditions conduisent à certaines re- lations entre les coefficients de formes linéaires E,,4 - Atout système de coefficients de formes E,7 vérifiant ces relations, correspondra un ensemble de nombres complexes. Les quantités complexes or- dinaires correspondent à : en — 4; Les nombres complexes, que nous venons de dé- finir, diffèrent seulement en un point des nombres complexes ordinaires. Quand » est supérieur à deux, il existe des nombres différents de zéro, dont le produit par certains autres nombres est nul. M. Weierstrass appelle ces nombres des divi- seurs de zéro. Malgré cette singularité, celte nou- velle algèbreest réductible à l'algèbre des nombres complexes de la formea<+fi l'illustre géomètre de Berlin a en effet établi que, si aet b désignent deux nombres quelconques de l’ensemble, on peut E. PICARD. — A PROPOS DE QUELQUES RÉCENTS TRAVAUX MATHÉMATIQUES 727 les décomposer en un certain nombre de com- posanis a, a …, ar, bi, bn... b, tels que a = & + Go + ... + Da de Han. deb ab = a by + a2by + ... + Gr br EN TE) dr les composants a;, b: dépendant seulement d'une ou deux unités fondamentales. Ce théorème montre bien que le calcul des nouvelles quantités se dé- duira toujours avec facilité du calcul ordinaire; il n'y a pas là un instrument nouveau dont puisse profiter l'Analyse mathématique. Nous avons admis que les lois commutative et associative subsistaient dans l'algèbre précédente. On s’est placé à un point de vue plus général en supposant que, seule, la loi associative exprimée par l'égalité (2) subsistait. On a alors une algèbre beaucoup plus générale; celle-ci est complète- ment déterminée par le système des expressions li- néaires E»s. Un exemple célèbre d’un système à quatre unitése,,e,, e,, e, est fourni par les quater- nions d'Hamillon où l’on à : CU} = 0; =} e = À avec les relations = 724% ——1 = — ji Jk= — kj =i ki=—ik = 7j. Une remarque très intéressante de M. Poincaré va nousramener à la théorie de groupes. L'éminent géomètre a fait le premierla remarque qu'à chaque système d'unités complexes correspond un groupe continu de substitutions linéaires à x variables, dont les coefficients sont des fonctions linéaires de n paramètres arbitraires. Cette idée a été appro- fondie, dans un mémoire récent, par un élève de M. Lie, M. Scheffer, qui a été ainsi conduit à partager les nombres complexes en deux classes, suivant que le groupe qui leur correspond est inté- grable ou non intégrable. A cette dernière classe ap- partient le groupe correspondant aux quaternions et ceux-ci sont les représentants les plus simples de cette catégorie de nombres complexes. On de- mandera peut-être maintenant si ce vaste symbo- lisme est susceptible d'accroître un jour la puissance de l’Analyse. IL est dangereux d’être prophète, mais il me semble que ces algèbres nouvelles ne pourront avoir d'autre intérêt pratique que de con- duire peut-être à desnotalions plus condensées ; on le voit, au reste, pour les quaternions dont l’em- ploi, si prisé en Angleterre, n’est nulle part indis- pensable. Le rapprochement entre la théorie des groupes el le calcul symbolique n’en est pas moins, au point de vue spéculatif, d’un grand intérêt. L'idée d'un système de fonctions formant un REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. groupe, n'est pas seulement bornée au cas où il n’y à dans l’ensemble qu'un nombre fini de para mètres. M. Lie s’est beaucoup occupé dans ces der- niers temps des groupes jus, les groupes consi- | dérés jusqu'ici étant dits groupes fxis parce qu’ils dépendent d’un nombre fini de paramètres arbi- traires. Considérons un système d'équations aux dérivées partielles d'ordre quelconque contenant à fonctions ,, w,,..., w den variables z,,,,..,%n; ces équations définiront un groupe si, prenant deux solulions quelconques (Gear) (CE cn) NE pee LS *) An ) on obtient encore une solulion en prenant les fonctions F5 (Bi, Do, ..., D). La théorie des invariants différentiels s'étend aux groupes infinis. On entend par invariant dif- férentiel relatifà mEplettresæ,, x,,...,4m,2, 2, z toute fonction des, des z et de leurs dérivées considérées comme fonctions des +, qui garde la même forme quand on effectue sur les x et les z les substitutions du groupe. Nous reviendrons tout à l'heure sur leur rôle important dans la théorie des équations différentielles. Certains groupes infinis jouissent de propriétés particulières. J’ai appelé l'attention sur les cas où les équations aux dérivées partielles qui définissent le groupe, ne renferment pas explicitement les va- riables indépendantes. La recherche de ces équa- tions revient alors à la formation de certains groupes finis. Ces équations peuvent être considé- réés comme généralisant les deux équations clas- siques dans la théorie des fonctions d’une variable complexe, et c’est en cela que leur étude mérite- rait d'être poursuivie. Il est d’ailleurs vraisem blable qu'il y a d’autres cas que ceux que je viens de signaler dans lesquels la recherche des groupes infinis peut se ramener à la recherche des groupes finis. Il On entend quelquefois des personnes, d’ailleurs très instruites, mais pour qui les mathématiques se réduisent aux cas d'égalité des triangles, se demander ce qu'il peut bien y avoir à faire aujour- d'hui en mathématiques. Il est malheureux qu’on ne puisse leur donner le conseil d'apprendre le calcul intégral, pour juger des progrès que récla- merait la théorie des équations différentielles. Malgré les efforts des plus grands géomètres, cette théorie se réduisit longtemps à une mono- graphie de cas particuliers. Un des résultats les plus intéressants des travaux de M. Lie est d’avoir fait une vaste synthèse de ces travaux isolés. Le 21% 728 E. PICARD. — A PROPOS DE QUELQUES RÉCENTS TRAVAUX MATHÉMATIQUES fait d'admettre un groupe de transformations ré- duit, pour une équation différentielle, la difficulté de l'intégration, et on peut rattacher aux théories du géomètre norwégien la plupart des cas élémen- taires connus. À un point de vue plus profond, la théorie des groupes infinis paraît extrèmement im- portante pour l'étude des équations différentielles et il semble que, dans cette voie, les recherches promettent d'être fécondes. Ainsi M. Lie montre qu'une équation différentielle ordinaire d'ordre quelconque possède des invariants relativement à toute transformation de points. Les invariants con- sidérés autrefois par Laguerre et Halphen dans la théorie des équations linéaires forment, pour une transformation de points particulière, un bien remarquable exemple ; il en est de même des inva- rianis considérés par M. Appell et par M. Roger Liouville. Voici un genre d'applications fort inté- ressantes, auxquelles conduit la conception géné- rale de M. Lie. Halphen, dans un mémoire célèbre, a trouvé les conditions pour qu’une équation différentielle linéaire puisse être ramenée à une équation linéaire intégrable. Ce problème peut s'é- tendre à une équation non linéaire d'ordre quel- conque ; on peut chercher à quelles conditions une telle équation sera, par une transformation ponc- tuelle ou par une transformation de contact, ré- ductible à une équation intégrable d’un type donné. Parmi des applications d’une nature un peu différente, je citerai une thèse fort remarquable de M. Vessiol. J'avais, il y a quelques années, indiqué comment on pourrait étendre aux équations diffé- rentielles linéaires la théorie célèbre de Galois re- lative aux équations algébriques : à chaque équation linéaire on peut faire correspondre un groupe de transformations linéaire et homogène, qui est l'analogue du groupe de Galois pour les équations algébriques. M. Vessiot a développé complètement la théorie que je n’avais qu'esquissée, et parmi les applications qu'il en a faites, une des plus élégantes est la recherche des conditions pour qu'une équa- tion linéaire s'intègre par quadratures; c’est le problème analogue à celui des équations algé- briques résolubles par radicaux. On voit que les travaux de M. Lie sont venus ra- jeunir singulièrement ce que l’on pourrait appeler l’ancienne théorie des équations différentielles. Ils ne peuvent, par leur nature même, conduire à des cas d’intégrations essentiellement nouveaux, puis- qu'ils ont principalement pour objets des questions de transformations. Pour avoir des cas vraiment nouveaux, il est manifestement indispensable d’in- troduire des transcendantes nouvelles. La théorie des fonctions analytiques a fait naître à ce sujet les plus grandes espérances, et celles-ci ont élé tout à fait justifiées en ce qui regarde les équations linéaires. Il n’en a pas été tout à fait de même Jusqu'ici pour les équations non linéaires; dans cette voie ce sont les résultats négatifs qui ont été les plus saillants. Il en est parmi eux d’ex- trèmement intéressants. Ainsi, l'attention ayant été appelée par M, Fuchs sur les équations algé- briques du premier ordre à points critiques fixes, M. Poincaré a montré qu'on pouvait ramener ce cas à des quadratures ou à une équation de Ric- cati. Dans un remarquable mémoire couronné il y a deux ans par l’Académie des Sciences, M. Pain- levé a notablement étendu ces résultats, en con- sidérant les équations du premier ordre dont les intégrales n’ont qu'un nombre limité de valeurs autour de l’ensemble des points critiques mobiles. Une des conclusions de ses recherches est que l'intégrale supposée transcendante, de toute équa- tion algébrique du premier ordre, qui satisfait à la condition précédente, est une fonction algé- brique de l'intégrale d’une équation de Riceati dont les coefficients dépendent algébriquement de ceux de l'équation donnée. On est donc assuré de ne pas obtenir par cette voie de transcendantes nouvelles ; il faudra s'adresser aux équations d'ordre supé- rieur dont l'étude, au point de vue qui nous occupe, présente encore des difficultés considérables qui ne seront pas sans doute levées de sitôt. Abordons maintenant une autre direction dans laquelle tend à se développer aujourd'hui la théorie des équations différentielles. Le désir bien naturel d'appliquer à ces équations les résultats obtenus par Cauchy dans la théorie des fonctions d’une va- riable complexe semblait avoir fait presque com- plètement outlier le cas où les variables et les fonctions restent réelles. C'est M. Poincaré qui, par une suite de brillants travaux, appela de nou- veau l’attention sur des éludes si importantes pour les applications. L'étude des courbes définies par les équations différentielles offre un intérêt de pre- mier ordre : de la connaissance générale de la forme de ces courbes résultent les conséquences essentielles pour le problème que l’on traite, qu’il s'agisse de géométrie ou de mécanique. Il est ma- nifeste, par exemple, que le problème des trois corps en Mécanique céleste pourrait être regardé comme résolu si l’on pouvait obtenir une connais- sance générale de la forme des courbes trajec- toires. Bornons-nous à un cas très simple qui montrera suffisamment l’objet des recherches de ce genre. Soit une équation du premier ordre de la forme : dx __ dy TEE X et Y étant des polyñômes en & et y. M. Poincaré commence par faire l'étude des points singuliers de l'équation différentielle. Ceux-ci sont en général DUC, (1 Mit nr, dé ri FD su G. ROCHÉ. — L'ORGANISATION DE LA PÊCHE FRANÇAISE SUR LA COTE DU SAHARA 729 de trois sortes. Ce sont d’abord les cols par lesquels passent deux courbes intégrales et deux seule- ment, puis les nœuds où viennent passer une infi- nité de ces courbes et enfin les foyers qui sont pour les courbes intégrales des points asymptotiques. On peut exceptionnellement avoir des centres autour desquels les courbes intégrales se présentent sous la forme de courbes fermées s’enveloppant mutuel- lement et enveloppant le centre. Ces éléments ne suffisent pas pour qu’on puisse se faire une idée de la forme des courbes intégrales. Pour éviter toute difficulté relative à l'infini, faisons une pro- jection sphérique de la figure. Si l’on chemine alors sur une courbe intégrale, qu'arrivera-t-il? Cette courbe peut être fermée de telle sorte qu'on re- viendra au point de départ; elle peut aussi avoir un des foyers comme point asymptote. Il peut sembler à première vue que ce sont les seuls cas possibles ; ce serait une grave erreur. La courbe considérée peut encore avoir pour courbe asymptote une courbe fermée satisfaisant d'ailleurs à l’équa- tion différentielle. Qu'il me suflise de dire que ces courbes fermées (cycles limites) jouent le rôle essen- tiel dans la théorie, et c'est dans les cas où il est possible de se rendre compte de leur position que la diseussion de l'équation peut être faite d'une manière complète. En restant dans le même ordre d'idées et à un point de vue seulement un peu différent, M. Poin- caré a étudié, dans un mémoire célèbre, les équa- tions différentielles de la dynamique. Je ne veux pas parler de ces belles recherches et de leur grande importance pour la Mécanique céleste; l'auteur en a fait lui même un résumé dans cette Revue !. C'est seulement de l'intérêt qu'elles peu- vent avoir pour l'Analyse générale que nous avons à nous occuper ici. Elles ont appelé l’atten- tion sur les solutions périodiques des équations différentielles et sur les solutions asymptotiques ; sans doute, M. Poincaré se trouve dans un cas spécial où il profite de la présence d’une constante très pelite dans les équations, et il raisonne alors par continuité; mais on peut espérer qu'un jour, au moins dans des cas étendus, on trouvera quelque autre manière de pénétrer dans l'étude de ces so- lutions. Quoi qu'il en soit, il semble qu'il y ait dans cette direction un vaste programme de tra- vaux à tenter; si l'on réussit dans cette voie, on y trouvera probablement des armes nouvelles pour revenir plus tard aux cas où la variable est complexe, cas où les progrès sont maintenant si difliciles. Em. Picard, do l'Académie des Sciences. L'ORGANISATION DE LA GRANDE PÈCHE FRANÇAISE SUR LA COTE DU SAHARA Depuis quelques années, en France et à l'Étran- ger, beaucoup d’économistes se sont préoccupés de la possibilité d’une exploitation active des eaux poissonneuses de la côte occidentale d'Afrique. A diverses reprises aussi, les pouvoirs publics ont fait procéder à une enquête sur les ressources que les parages marilimes de la côte saharienne pourraient fournir à l’industrie de la grande pêche. Des études générales et des enquêtes sur ce sujet, il résulte, en somme, qu'en une région qui nous appartient, où la navigation est relativement fa- cile, où les conditions climatologiques sont favo- rables, nos pêcheurs pourraient réaliser, à l'heure actuelle, de considérables bénéfices, en exploitant d'une facon moderne la faune marine exception- nellement riche de cette région. Il Aux siècles passés, le gouvernement français parut altacher beaucoup d'importance à notre domination sur le littoral saharien. Il s'assura la possession de l'ile d’Arguin, petite terre aride, désolée, abritée dans une äécoupure de la côte africaine; possession chèrement disputée, à di- verses reprises, du reste, parles autres puissances européennes. A la vérité, ce fut moins pour tirer directement parti d'Arguin que pour empé- cher qu'il ne s’y installàt des factoreries étran- gères, entravant notre trafic sénégalais, que nous voulûmes absolument y assurer notre domination. Depuis 1758, toutefois, nous laissons cette île inoccupée. Les pêcheurs canariens fréquentent seuls ses atterrages ; encore ne descendent-ils ja- mais à terre, craignant les tribus nomades du désert. Or, voici plus de cinquante années, main- tenant, qu'un homme éminent, au patriotisme éclairé, Sabin Berthelot, alors consul de France aux Canaries, signala, dans un ouvrage très docu- menté, l'importance exceptionnelle que les parages maritimes du banc d’Arguin et du cap Blanc pré- 1 Voir à ce sujet la Revue du 15 janvier 1891, t. Il, page 4, MR (RS on bre ir GE M TES fase 130 G. ROCHÉ. — L'ORGANISATION DE LA PÊCHE FRANÇAISE SUR LA COTE DU SAHARA sentaient au point de vue spécial de l’établisse- ment de pêcheries !. Il disait, en énumérant les poissons comestibles de la région, quelles récoltes merveilleuses en = EH a lonite est formes dans l'intérieur ; A æ parallèle prolonge Z # 3 = Æ.OBFRLIN Fig. 1. — Région de la baie du Lévrier et de la baie d’Arguin. faisaient ces tsleños canariens qui, avec des bateaux assez primitifs el de faible portée, des engins im- parfaits el des procédés de conservation rudimen- taires, exploitaient, depuis des siècles, les eaux littorales de la côte occidentale d'Afrique. Son appel ne parait pas avoir été entendu. On ne prit pas garde à la comparaison rigoureuse que faisait Berthelot des statistiques de rendements des pêcheries terre-neuviennes et africaines, où il établissait, d’une façon indéniable, la supériorité de ces dernières. En somme, les grandes pêches françaises fournissant alors d'assez bons revenus, on parut se soucier assez peu d'aller exploiter les eaux poissonneuses des paragés tropicaux ; d’au- tant plus que certains hommes faisaient d’assez tristes descriptions de cette côte saharienne, brûlée par un soleil écrasant et si inhospitalière, assurait-on, que les Maures massacraient sans merci, pour les piller, les équipages qui relà- chaient à terre. 1 SamiN BerrueLcor : La Pêche sur la côle occidentale d'Afrique. Paris, Béthune, édit. 1840. A. Mere. La Pêche de la Morue à la Côte occidentale dAfrique. Rev. de Géograph., 10€ année, 2 livraison, août 1886, p. 87. Cu. Soccer. Les Caravanes du Soudan occidental et Les Pécheries d’Arguin. Bull. de la Soc. de Géogr. comm. de Paris, t. X, 1883-1888, n° 3, p. 280. Dr Exrico Srassano. La pesca sulle spiagge del Sahara. Annali di Agricoltura. Roma, 1890. EEE —— — Il y a quelques années cependant, une société marseillaise entreprit l'exploitation des atlerrages du banc d’Arguin. Elle ne réussit pas, pour di- verses raisons d'ordre financier sur lesquelles je ne saurais insister, mais qui doivent nous faire considérer comme complètement nulle l’expé- rience qu’elle a tentée. En lialie et en Espagne, on s’est, du reste, beau- coup préoccupé, récemment, de la Grande Pêche depuis le cap Bojador jusqu’au cap Blanc. Pour la France, il importe aujourd’hui de reprendre l'étude scientifique et économique des parages inexplorés par nos engins, s'étendant du cap Blanc au cap Mirik, qui sont plus spécialement sous notre domi- nalion, puisque, par suite d’une convention négo- ciée avec le gouvernement espagnol (et dont les conclusions ne sauraient se faire longtemps at- tendre), notre protectorat s'étend sur la côte du désert jusqu’au parallèle de 21°20'N. Il Au point de vue géographique, établissement de Pêcheries dans les parages d’Arguin serait grandement facilité par les découpures du littoral, en raison de l'abri offert aux bâliments par le grand nombre de caps, de baies et de bons mouil- lages qu’on y rencontre. L'étude hydrographique et bathymétrique de la région a été faite avec beaucoup de soins par M. l'amiral Roussin et M. l'amiral Aube, autrefois; puis, en 1886, par M. le lieutenant de vaisseau Raf- fenel, commandant l’Ardent, aviso-slationnaire du Sénégal. Des rapports de ces éminents spécialistes, nous reliendrons seulement que, dans larégion qui nous occupe, l'Océan forme à la côte des échancrures profondes, dont deux nous intéressent plus spécia- lement : ce sont la baie du Lévrier et la baie d'Arquin, que sépare le cap Sainte-Anne, et dont la plus méri- dionale, défendue au large par des bancs paral- lèles peu profonds de sables ou de rochers, abrite l'archipel des trois îles : Arguin, Ardent et Marque- rite. Dans la baie du Lévrier que forme, avec la côte saharienne, la presqu'ile du Cap Blanc, se trouvent d'excellents mouillages, entre autres celui de la baie Cansado, où peuvent avoir accès en tous temps les bâtiments ayant six mètres de tirant d’eau. Aussi bien, la côte owest de cette baie présente seule un réel intérêt pour les abris que peuxent rechercher les pêcheurs, — la côte est se trouvant défendue à trois ou quatre milles de terre par de nombreux brisants et n’offrant pas de mouillages. L'entrée de la baie du Lévrier et de la baie d’Ar- guin est commandée par la baie de l'Ouest, située entre le faux cap et le cap Blanc. Elle est fréquentée eu G. ROCHÉ. — L'ORGANISATION DE LA PÊCHE FRANÇAISE SUR LA COTE DU SAHARA 731 par les isleños, mais la mer y est assez dure, alors que souflent les grandes brises du large. Quant à la baie d’Arguin, son accès est rendu quelque peu difficile par un banc de sable, ne permettant guère le passage aux navires de plus de 450 de tirant d’eau. Séparées entre elles et séparées de l'ile d’Ar- guin par d’étroits chenaux, asséchant, par en- droits, à marée basse, les iles Ardent et Marque- rite, — ainsi nommées par M. Raffenel, en l’absence de toute désignation antérieure, — ne nous pré- sentent aucun intérêt. L'ile d’Arguin, par contré, beaucoup plus considérable, a toujours paru offrir une réelle importance pour l'installation d'élablis- sements de pêcheries, en raison de son isole- ment la mettant à l'abri des incursions des Maures, en raison aussi de sa configuration orographique, permettant la création et l'exploitation de salines, en raison enfin des excellentes citernes qui y sont construites déjà, — vestiges des travaux d’art d’une occupation ancienne, qui peuvent fournir de mille à douze cents tonneaux d’eau par an. Dans la baie du Lévrier, comme dans celle d’Ar- guin, le facies du sol sous-marin estassez irrégulier. La nature lithologique de la côte, la violence de certains courants de marées expliquent assez bien les discordances des chiffres donnés par la sonde. Ainsi, le long dela côte ouest du cap Blanc jusqu'au cap Cansado les brasseyages passent brusquement de 5 à 14 mètres. Les fonds élevés de la baie du Lévrier sont formés, d’une façon générale, de sa- bles mélangés de coquillages brisés ; dans les par- ties les plus septentrionales de ce golfe, ils font place aux sables vasards. Des fonds sableux se trouvent dans la baie de l'Ouest, mais ils sont crayeux et durs. Les vases se montrent dans les chenaux creusés par les courants ; elles forment aussi des masses épaisses au large de la baie d’Ar- guin et sont alors colorées en rouge, tandis que, dans la baie même, elles sont verdàlres et alternent avec des sables vasards. Les fonds rocheux sont peu fréquents dans ces parages. Dans la baie du Lévrier et dans celle d’Arguin, il faut signaler la présence de nombreux banes sableux que laisse à découvert la mer qui se retire ou qui sont toujours surmontés de trois ou quatre mètres d’eau. Au large d’Arguin ils forment plu- sieurs lignes parallèles séparées par des eaux rela- tivement profondes. Quant au courant qui, du large, pénètre dans ces échancrures de la côte, il suit une ligne irrégu- lière et, changeant continuellement la forme et la position des bancs, change lui-même de direction. Il paraît cependant, d'une façon générale, passer à un mille de terre. Dans ces eaux, au-dessus de ce sol tourmenté, ne pourrait, je crois, être pratiquée la pêche au grand chalut, sauf, peut-être, à l’accore ouest du banc d’Arguin, mais on pourrait fort bien se livrer à la pêche aux filets dormants, au tramail, à la grande ligne ou aux palancres. III Dans le carnet des dragages du 7alisman à la date du 14 juillet 1883 et à l'observation 97, il est noté que, se trouvant par le travers du banc d’Ar- guin, la mer prit un aspect vert bouteille. On nota également que la densité des eaux, qui estde 1.027,8 dans larégion des alizés, était tombée à 1.024,8 à l'endroit où fut faite l'observation. Cet abaissement de poids spécifique du liquide marin en ce point de la côte occidentale d'Afrique ne pouvait s'expliquer que par un phénomène de circulation sous-marine en raison de l'éloignement où l’on se trouvait des eaux douces. M. Hautreux, lieutenant de vaisseau, capitaine de port à Bordeaux, qui a été frappé de ce fait, a essayé, au moyen des tableaux de températures dressés par l'expédition du Talisman, de suivre ce courant de la circulation polaire-équatoriale. La diminution de la salure des eaux, accom- pagnée de l'abaissement de la lempérature, l’a donc amené à considérer la nappe de surgisse- ment d'Arguin comme le point ultime de la cireu- lation profonde des eaux de fusion arctique. D'autre part, s'aidant de données incontestables acquises sur les conditions thermiques de l’exis- tence de la morue, il expliqua la présence de cet animal dans les parages d’Arguin. Je ne saurais insister sur les raisons d'ordres océanographique, zoologique ou physiologique qui font révoquer en doute la présence de la morue terre-neuvienne à la côte occidentale d'Afrique; je me borneraïi à dire que la morue pêchée à Arguin n'est pas le Gadus morrhua, le Gadus carbonarius ou le Gadus æœglifinus des mers septentrionales ; mais les Mora mediterranea et Phycis mediterranea des eaux plus chaudes de la région tempérée. Ceci n’enlève, du reste, aucunement, aux obser- vations de M. Hautreux leur portée pratique; et, dans l’enchainement régulier des faits naturels, il est évident que le courant, dont il a voulu suivre le trajet, présente une influence absolue sur la biologie des animaux comestibles dont la capture intéresse notre industrie. Non seulement les courants sont caractérisés par une température et une salure différentes de celle des eaux calmes environnantes, mais encore par une faune toute différente de celle de ces mêmes eaux. L'expédition du Challenger a étudié dans l'Océan Pacifique cette différence de composition faunique des courants et du milieu dans lequel ils 132 G. ROCHÉ. — L'ORGANISATION DE LA PÊCHE FRANÇAISE SUR LA COTE DU SAHARA circulent, trouvant ici des globigérines et là des diatomées, des infusoires, des hydroméduses, etc. Du reste, la faune des courants est beaucoup plus riche que celle des eaux avoisinantes, ainsi que le rappelait dans cette Revue même M.Kæhler!. Si, au point de vue philosophique, le transport d'animaux pélagiques soulève ainsi d’attachants problèmes pourla formation des dépôtssous-marins et leur nature, au point de vue pratique immédiat, il nous explique l’abondance des espèces de pois- sons comestibles dans les régions de surgissement des colonnes liquides de la circulation océanique. Depuis janvier jusqu’à juillet, le centre froid des eaux de la côte occidentale d'Afrique se trouve vers Arguin. De juillet à décembre, par contre, ce centre froid est repoussé au nord vers le cap Blanc, plus haut même. En tous cas, les découpures nombreuses du littoral sont éminemment favorables au dévelop- pement et à la multiplication des espèces comes- tibles, tandis que l'apport continuel des matériaux nutritifs par les courants superficiels et profonds peuvent nous assurer, en quelque sorte, une exploi- tation régulière, continue, de ces eaux, sans que nous puissions craindre de les épuiser jamais. La faune ichthyologique de la côte occidentale d'Afrique a été étudiée jusqu'ici par des savants éminents : Adamson, Cuvier et Valenciennes, À. Duméril, Gill, Cope, Steindachner, de Roche- brune, Enrico Stassano et Vinciguerra. Mais la zoologie spéciale des parages s'étendant du cap Blanc au cap Mirik a surtout été bien éta- blie par Sabin Berthelot, en 1840, et par le D' Stas- sano, en 1890. Le grand travail de M. de Roche- brune sur la Faune de la Sénégambie, bien qu’envi- sageant exclusivement le côté descriptif de cette zoologie régionale, nous fournit aussi d'importants renseignements pour l'étude spéciale qui nous occupe. Nous n'avons à nous occuper que des espèces qui intéressent plus ou moins directement l’indus- trie des Pêcheries. Or, parmi celles-ci, un certain nombre (et des meilleures) sont inconnues dans nos eaux françaises et pourraient fournir, en rai- son de leur qualité et de leur abondance, une im- portante ressource coloniale?. Tous ces poissons 1 Voyez la Revue du 15 février 1892, p. 77 et suivantes. 2 Labrax lupus (Lacép.); Serranus papilionaceus (C.et V.); Serr. lineo ocellatus (Guich.) ; Serr. fimbriatus (Lôwe.); (Serr. fuscus (Lüwe); Serr. œæneus (G.-S--H.); Serr. acutirostris (C. et V.); Pristipoma macrophthalmum (Bleck) ; Diagramma mediterranea (Guich.);, Dentex vulgaris (C. et V ); D. filosus (Val.); Mullus barbatus (Linné) ; Box salpa (Linné); Sarqus fascialus (C. et V.); S. cervinus (Lôwe); Pagellus erythrinus (C. et V.); Chrysophrys ceruleostica (C. et V.); Pagrus vulgaris (C. et V.); Scorpæna scrofa (L.); Trigla hirundo ; T. lineala (L.); Umbrina canariensis (Val.); Sciæna senega- lensis (C. et V.): Sc. epipercus (Bluk); Sc. Sauvagei (Ro- ne sont pas, du reste, d’une même qualité comes- tible. Il en est mêmeun, — le Temnodon saltator, — qu'on ne pourrait utiliser que pour la fabrication d’une huile qu'il fournit en grande quantité (d’au- tant plus qu’en avril et mai il aborde la côte en bancs épais et peut être facilement senné). D’autres poissons encore sont de maigre valeur; en tous cas, tous ne sont pas également abondants aux mêmes époques de l’année, tels que les Thons, par exemple, qui, voyageant par bandes, ne peuvent être pris au large de la côte qu’en avril-mai, alors que les Pélamides se rencontrent avec une plus grande abondance en février-mars. L’atterrissage des diverses espèces variant aussi, naturellement, il sera nécessaire d'étudier exactement leurs mon- tées périodiques annuelles ou saisonnières. Le D' Stassano, dans son bon mémoire sur la pêche à la côte du Sahara, signale aussi spécia- lement, dans la baie du Lévrier, la présence de la Langouste (Palinurus vulgaris) en grande quantité. Au large du cap Blanc et du banc d’Arguin, les profondeurs maxima où l’on rencontre les grandes espèces comeslibles(Denter,Serranus, Mora, Phycis, Sciæna)ne dépassent pas cinquante mètres. Leur taille est souvent considérable, et le poids moyen de ces animaux est de 7 à 8 kilogrammes. En ce qui concerne les Mora mediterranea et Phycis mediterranea, je ne saurais mieux faire que de citer ici les lignes que leur consacre Sabin Berthelot : « Leur chair est ferme et blanche, très subs- tantielle et d’un excellent goût. Elle supporte bien toutes sortes de préparations, soil qu'on veuille la conserver ex vert, la saler complètement, la ma- riner ou la sécher simplement... Ces deux espèces acquièrent d'assez grandes dimensions; elles sont préférables à la morue du Nord, et forment, tant l'une que l’autre, le fond des cargaisons des bri- gantins de pêche. Les pêcheurs de Lancerotte en rapportent souvent aux Canaries qui pèsent plus de 12 kilogrammes. » IV Ainsi que je l'ai rappelé déjà, il se forma à Mar- seille, en 1876, une sociélé : la Marée des Deux Mondes, qui tenta l'exploitation en grand des pa- rages maritimes d'Arguin pour la récolte des poissons de conserve, analogue à la morue de Terre-Neuve ou d'Islande et pour celle du poisson cheb); Corvina nigra (C. et V.); C. nigrita (C. et V.); Thy- nus pelamys (C. et V.); Th. alalonga (C. et N.); Pelamys sarda (C. et V.); Elacale nigra (Cur.); Caranx senegallus (C. et V.); C. dentex (C. et V.); Temnodon saltator (C. et V.); Xiphias gladius (L.); Mugil chelo (Cuv.); Centriscus gracilis (Lüwe); Scarus cretensis (Aldr.); Mora mediterranea (Risso); Phycis medilerranea (Delar.); Solea senegalensis (Kamp.) ; Clupea dorsalis (C. et V.); CL. senegalensis (C. et V.). LS sd. CES PDO SCT 2 G. ROCHÉ. — L'ORGANISATION DE LA PÊCHE FRANÇAISE SUR LA COTE DU SAHARA 733 frais que l’on voulait ramener en Europe au moyen de navires frigorifiques. En 1877 (novembre), le capitaine Husson, de cette compagnie, se rendit à Las Palmas, pour entamer avec les armateurs canariens des pourparlers d’où résultèrent les conventions suivantes : « Les pê- cheurs isleños s’engageaient à livrer sur le pont des navires de la Société du poisson vivant ou frais, au prix de 12 francs les 100 kilogrammes. Ces navires devaient mouiller au centre des pa- rages de pêche et devaient, par temps de calme, se rendre auprès des embarcations pour recueillir le poisson. » Du détail des trois campagnes accomplies par la Société en 1880 et 1881, au moment de l’année le plus défavorable à une bonne pêche, je ne veux retenir ici que ce fait, signalé par le capilaine Husson : qu'un équipage de seize hommes peut journel- lement pêcher, charger à bord et nréparer 3.000 kilos de poisson. Les avaries qu'éprouvèrent les navires de cette Société servirent de prétexte à la cessation d’une exploitalion que suspendirent, en réalité, beaucoup d’autres causes qui échappent à mon analyse et à ma compétence. Son expérience, non décisive, nous a cependant appris d'une façon positive la richesse exception- nelle de la faune ichthyologique régionale; en ce qui concerne l’ile d’Arguin, elle a montré aussi qu'on la pourrait uliliser pour l'installation de sécheries à terre, avec la création possible de sa- lines au sud et au nord de l’ile ; enfin, elle a déter- miné un chenal, permettant en tout temps l'accès d’Arguin aux navires calant 4"50 d’eau, jusqu’au mouillage situé au N.-E. de cette même ile. Mais, aujourd’hui, l’on songe à la possibilité d’une installation de pêcheries, non pas à Arguin même, mais dans la baie du Lévrier, dont la na- vigation n'est pas difficile et où, à l'excel- lent mouillage de Cansado, on pourrait provisoi- rement établir des pontons, si l’on ne veut pas s'installer à terre. La crainte des Maures pillards est la principale raison qui s'oppose à la création d'établissements sur le continent ; encore, d’après les rapports de nos officiers, cette crainte n'est-elle pas très fondée aujourd’hui, et pourrait-on exercer une facile pro- tection sur les installations de nos nationaux. Dans toute la région saharienne de l'Atlantique 1 Les goëélettes canariennes qui fréquentent surtout cette région en avril-mai appartiennent aux ports de Las Palmas (Grande Canarie) et d’Arerecife (Lanzarote). Elles comprennent un éguipage de 18 à 36 hommes et appartiennent exclusi- vement à des armateurs qui prélèvent les 4/5 du profit de la vente. Le poisson est vendu aux Canaries de 45 à 22 fr, 50 les 100 kilos. — Un bateau rapporte par campagne d’un mois environ 28.000 kilos de poisson salé, qui nous occupe, la température est fort modérée et régulière. En juin, la moyenne est de 20° (Raf- fenel) ; elle est de 23° en novembre (capitaine Hus- son) et de 18-19° en avril-mai (Hautreux); enfin, il n'existe aucun marais aux environs. Les grandes brises soufflent dans ces parages, d'avril à la fin de juillet, où arrive la période de la mousson sur toute la côte comprise entre le cap Bojador et le Sénégal. En août surviennent de petites pluies intermittentes, qui s’arrètent en sep- tembre; alors règnent de petites brises variables, du N.-E. à l'E.-N.-E. jusqu'en mars, où s'élèvent les vents du N.au N.-N.-0. Il n’y a pas à redouter de gros temps; mais il s'élève parfois quelques brumes. Je ne crois pas cependant qu’il se produise spon- tanément une évolution de nos armateurs et de nos pêcheurs vers les eaux poissonneuses de la côte africaine. Il me parait plutôt, en raison des études préalables nécessaires à une exploitation rationnelle, que celle-ci sera l’œuvre d’abord d’une Société puissante, bien outillée et rigoureusement administrée. À priori, en ce qui concerne le poisson destiné à être consommé à l’état frais, j’incline à croire que la conservation en glace pourrait fournir quelques bons résultats. Pour les animaux de forte taille, pêchés par 40 ou 60 mètres de profondeur, au large du cap Blanc (Dentex, Corvina, Stiæna), la révolu- tion physiologique que leur ferait subir, lors de leur capture, leur brusque ascension à la surface des flots ne permettrait pas de pouvoir subir un assez long voyage en baleaux-viviers, pour être amenés dans les ports de France. Cependant, des expériences tentées à l'Étranger ont permis de conserver en pleine vitalité, pendant plus de dix jours, des poissons pris dans de semblables condi- tions, auxquels on ponctionnait la vessie natatoire, dès qu'ils étaient amenés sur le pont des navires de pèche. En tous cas, pour les animaux capturés à la surface des eaux ou à moins de dix mètres de profondeur, il ne serait pas coûteux de tenter tout d’abord de les ramener en des viviers analogues à ceux qu'emploient, pour les Pleuronectes, les Amé- ricains du Nord, les Anglais et les Hollandais. En ce qui a rapport à l’emploi des glacières, il ne faut pas oublier, du reste, que nos chalutiers de l’Ouest en font aujourd’hui un usage constant, par suite de la durée de leurs sorties qui sont sou- vent de huit jours et plus. Les Canariens ne recueillent le poisson, à la côte occidentale, qu’en vue de le saler — du moins le plus généralement. Malheureusement, comme ils ne descendent jamais à terre, le poisson est préparé à bord, après un nettoyage suceinct, et arrimé de suite dans la cale, entre deux couches 734 L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE de sel. Souvent donc, les animaux ainsi traités s’avarient et il en résulte une perle considérable sur les 7.500.000 kilogrammes de poissons dont les Canariens approvisionnent leurs îles annuelle- ment. Avec nos connaissances exactes des méthodes pastoriennes nous n'aurions évidemment pas à redouter de pareils inconvénients. De plus, ainsi que le fait remarquer avec beaucoup de justesse le D' Stassano, la conservation, en boïle, du thon, par le procédé Appert, ne saurait manquer de fournir d'excellents résultats. Mais alors il faudrait créer une usine à terre. Le guano et l'huile de poisson me paraissent devoir être facilement préparés avec une installa- tion peu coûteuse. La durée probable de la traversée, calculée par les officiers de notre marine pour des bâtiments de pêche qui viendraient de France opérer aux abords de la baie du Lévrier et de la baie d'Arguin, serait de 13 à 15 jours. Le retour serait plus long (25 jours) — pas plus long cependant que celui de Terre-Neuve et moins dangereux, en tous cas. 11 serait aussi facile de faire rapporter le poisson salé par des bâtiments des lignes de la côte occi- dentale d’Afrique ou par des cargoboats à vapeur spéciaux. Enfin, il serait nécessaire de déterminer les meilleures époques de l’année pour la pratique de la pêche. Sur ce point les auteurs ne sont pas d'accord, non plus que sur le centre à adopter pour l'installation immédiate de sécheries. Malgré l'avantage que présente l'isolement d'Arguin qui la garantit contre les incursions de Ouled-Delim, malgré les citernes qui y sont amé- nagées déjà, M. Raffenel préconise une installation à la baie Cansado, en raison des difficultés d'accès de cette ile d’Arguin. Il parait, en effet, que son approche est peu praticable par suite des courants marins de la région et des hauts bancs qu'ils dé- placent. Mais n'est-il pas de haut intérêt d'apprécier sé- rieusement les éléments que nous pouvons fournir au travail de nos pêcheurs ? L'hypothèse de la pèche française dans les parages d’Arguin est, à l'heure actuelle, une des plus graves qui puissent intéresser notre écono- mie, alors que, pour des causes diverses, mais également inquiétantes, nous voyons nos pêcheries de la morue et de la sardine subir une doulou- reuse crise et que l’on commence aussi à s’inquié- ter sur notre littoral, depuis Dunkerque jusqu’à Saint-Jean-de-Luz, de la décrudescence sensible de rendements de la pêche au grand chalut. Georges Roché, Docteur ès sciences. LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE Longtemps la Physiologie a pu paraitre un cha- pitre accessoire de la Médecine; dans les livres elle se trouvait reléguée à la fin des descriptions anatomiques, sous forme d'un simple De usu par- tium. Mais avec W. Edwards, Magendie et CI. Ber- nard, elle a conquis son autonomie en même temps que son caractère franchement expéri- mental. Dès lorsil était naturel de la traiter comme les autres sciences et de lui consacrer un Congrès particulier. La Société physiologique de Londres a pris, en 1888, l'initiative de ce progrès : c’est elle qui a fondé le Congrès international de Physiologie. En créant cette institution, la Société a fait une œuvre originale : à côté des associalions scienti- fiques qui accueillent des communications orales, elle à voulu constituer une réunion où l’on fit sur- tout des expériences. Personne n'attend l’ouver- ture d’un Congrès pour exposer une découverte : dès qu’une recherche est (erminée, l’auteur la sou- met aux Sociétés savantes, et les journaux spéciaux la font connaitre aux intéressés. Ce que ceux-ci doivent demander à un Congrès, c'est done princi- palement la possibilité d'examiner de près les faits réels, d'assister au fonctionnement des appareils, d'observer le mode opératoire de chaque auteur. En conséquence, il fut décidé que le Congrès inter- national de Physiologie serait, en majeure partie, expérimental, que les adhérents y apporteraient des instruments nouveaux, des documents tech- niques, des pièces à conviction, si je puis dire, et répèêteraient eux-mêmes, devant leurs confrères; leurs plus récentes expériences. Ce programme a groupé un nombre considé- rable de physiologistes. Rassemblés pour la pre- mière fois à Bale, en 1889, ils ont résolu de se réunir ensuile tous les trois ans. Leur deuxième Congrès a eu lieu les 29, 30 et 31 août de cette année à Liège. Le choix de celte ville était un juste hommage à - l'éclat des travaux sortis de l’École de Liège et surtout dus à son chef, notre éminent collabora- teur, M. Léon Fredericq. Mais peut-être plus d’un physiologiste, quittant Londres, Paris ou Berlin pour se rendre au Congrès, a-{-il conçu quelque L. OLIVIER. — LE DEUXIÈMÉ CONGRES INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE 735 crainte au sujet du matériel scientifique dont, pou- vait disposer, dans un petit État, une ville de pro- vince. Si cette pensée est venue à l'esprit de plu- sieurs, grande a dû être leur surprise en péné- trant dans les palais où nous avons été reçus. Les laboratoires universitaires de Liège sont de magnifiques établissements qu'il est, — pour nous Français, — très instructif et-très humi- liant de visiter. Ils ont été fondés à la suite des élections législalives de 1878, qui portèrent M. Frère-Orban à la présidence du Ministère. Le Gouvernement décida alors «la création d'un vaste ensemble d’Instituts scientifiques des- Peace Delcour_ y avait élé admirablement organisé : grâce aux soins de M. le P* Frederieq, Directeur de l’Institut, et de son assistant, M. Delsaux, les savants ins- crits pour des expériences trouvèrent dès leur arrivée tous les instruments, aides et animaux dont ils avaient prévu le besoin. Il est vraiment remarquable qu’un seul établissement ait pu four- nir à tant de physiologistes réunis au même mo- ment l'emplacement et les appareils requis par chacun d’eux. 107 personnes, dont une dame, ont pris part au Congrès. Indépendamment des Belges qui nous recevaient, on remarquait parmi les Elrangers J amour En | Fig. 1. — Rez-de-chaussée de l'Institut de Physiologie de l’Université de Liège. À, salle de cours; al, vestiaire; @?, salle de préparation du cours (vivisection et physique physiologique) ; a, chambre de l'héliostat ; at, galerie de démonstration ; a’, salle de préparation du cours (chimie) ; aÿ, chambre noire. Section de chimie physiologique. — b1, b2, bi, laboratoires de chimie physiologique ; bé, salle des balances ; 66, atelier du mécanicien. Section de vivisection el de physique. — e\, c?, grand et petit vivisectorium; cÿ, salle des pompes à mercure; c4, analyse des gaz; c°, électrophysiologie ; c6, bibliothèque ; e7, bureau. tiné à compléter les locaux des Universités de Gand et de Liège, et déclara prendre à sa charge la plus grande partie des dépenses qui devaient en résul- ter. En 1879, il fil voter par les Chambres un pre- mier crédit de cinq millions, dont 2.700.000 francs pour l’Université de Liège. Sur cette somme, 600.000 francs représentaient la part d’interven- tion de l'État dans la création des nouveaux Ins- tituts d'Anatomie et de Physiologie !, » C'est aux Instituts de Zoologie et de Physiologie que le Congrès a tenu ses séances. La plupart des expériences ont eu lieu dans les salles du rez-de- chaussée (fig. 1) de ce dernier établissement. Tout 1 Léon Frederic, Travaux du laboratoire de l'Institut de Physiologie de l’Université de Liège, 1 vol. in-8°, Liège, 1888, page X. Nous empruntons à cet ouvrage la figure 1. REVUE GÉNÉRALE DES SCIFNOES, 1892, MM. Foster, Horsley, B. Sanderson, Schäfer, Halli- burton, Sherrington, Gotch, Stirling, Mott et Waller (Anglais); W. Kühne, J. Rosenthal, V. Hensen, Hürthle et Jacobj (Allemands); Marès (Tchèque) et et Cybulski (Polonais); H.-J. Hamburger et Zwaar- demaker (Hollandais) ; Grigorescu et A.-N. Vitzou (Roumains); Wedensky (Russe); F.Holmgren(Sué- dois) ; Hugo Kronecker, F. Miescher (Suisses). Les Français étaient au nombre de vingt; citons parmi eux : MM.Arloing, Chauveau, Dastre, Gréhant,Kauf- mann, Langlois, Laulanié, Meyer, Marat et Wer- theimer. La présidence a été successivement offerte à MM. Chauveau, B.Sanderson, Héger, Grigorescu, Kühnn et Wedensky. Presque toutes les parties de la physiologie nor- male ont été l’objet d'expériences importantes. 4x 736 L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE Nous allons essayer de décrire toutes celles qui ont été faites ; pour la commodité de l’exposition, nous les classerons par questions, sans aucun souci de l’ordre suivant lequel elles ont été pré- sentées !. I. — LYMPHE, SANG ET CIRCULATION SANGUINE Sur la lymphe et le sang les travaux soumis au Congrès ont été de deux sortes : les uns se rap- portent à la constitution de ces humeurs; les autres à la circulation sanguine. LE $ 1. — Éléments figurés de la lymphe et du sang. A ces éléments n’ont été consacrées que trois communications. Remarquons, à ce propos, que je microscope a tenu peu de place au Congrès : l'appareil enregistreur, au contraire, y à été très représenté. Ce n’est pas oue les deux établissements où nous recevions l'hospitalité ne fussent abondamment pourvus de tous les genres d'instruments. À l'Ins- titut de Zoologie, où M. Sherrington (de Londres) avait exposé une riche collection de leucocytes diversement préparés, une vinglaine de micros- copes avaient été mis à sa disposition. Tous ses confrères ont pu ainsi apprécier de visu le haut intérêt de ses observations, qui établissent, parmi les globules blancs, l'existence de plusieurs varié- tés et assignent à chacune des caractères fixes: M. Sherrington en décrit trois sortes chez le chien : 1° Cellules à protoplasme muni de grosses granu- lations : 2° Cellules à protoplasme finement gra- nuleux : 3° Cellules arrondies. La proportion de ces éléments dans le sang varie suivant les cir- constances physiologiques. Le rôle phagocytaire qu'ils y jouent a été, depuis quelques années, l'objet de vives discussions. MM. Massart et Bordet (de Bruxelles) ont répélé, à ce sujet, leurs intéressantes expériences de chi- miotaxie. Des tubes de verre effilés, contenant diverses cultures microbiennes, avec ou sans microbes, sont ouverts à leur extrémité fine el introduits dans la cavité péritonéale de lapins vivants; par leur diffusion les produits solubles des cultures attirent vers les tubes une mulli- tude de leucocyles. Après un séjour de dix heures dans le ventre des animaux, les tubes sont remplis d'une véritable boue de ces organites. RE — Ï— — ———]— 1 Qu'il nous soit permis de formuler une légère critique : le Congrès ne publiant pas de bulletin, il est utile que les journaux scientifiques consacrent à ses travaux un compte Mais un tel compte rendu ne peut ètre exact des notes émanées des auteurs. Il rendu détaillé. que s'il est fait d’après c rs. | serait à désirer que le Congrès international de Physiologie adoptàt le système des Congrès anglais, où chaque orateur est tenu de fournir au Comité directeur un résumé de sa communication avant de la prononcer. Sur les globules rouges du sang, M. Hamburger (d'Utrecht) a présenté un travail dont l’importance nous semble considérable : cherchant à déterminer suivant le principe de l'iso{onie, élabli par Hugo de Vries pour les cellules végétales, la perméabilité des hématies à l'égard de l’eau dans des solutions salines, ce savant a fixé pour chaque sel la con- centration qui provoque la plasmolyse. Celle étude la conduit à reconnaitre que, sous l'influence de diverses solutions, les globules rouges en cir- culation dans le sang d’une part abandonnent au liquide ambiant certains de leurs éléments consti- tuants, et, d'autre part,absorbent quelques-unes des substances dissoutes dans leur entourage. M. Ham- burger a trouvé aussi que la perméabilité des glo- bules dépend de la quantité de CO? dissous dans le plasma sanguin; el il a montré à ce sujet une série d'échantillons de sang diversement colo- rés par l'hémoglobine, diffusée sous l'influence des solulions salines et de l'acide carbonique. Est-il besoin de faire remarquer le haut intérêt de ces recherches pour la physiologie des hématies et leur rôle dans les phénomènes de nutrilion? $ 2. — Circulation. M. Chauveau a répété les expériences célèbres qu'il avait instituées autrefois pour étudier chez le Cheval la pulsation cardiaque. On sait que ses conclusions, devenues classiques, ont été depuis quelques années altaquées par plusieurs cliniciens allemands. Ces médecins interprètent autrement que lui la correspondance des bruits du cœur avec les différentes phases de ses diastoles et systloles. Ce désaccord a été récemment exposé ici-même par M. Fredericq !; ce savant se faisait alors l'interprète de tous les physiologistes en expri- mant le vœu que M. Chauveau vint répéter ses expériences à Liège. On peul dire qu’elles ont été la grande attraction du Congrès. L'auteur a eu soin de les faire sur un vieux cheval, — la grande taille de l'animal et la lenteur de ses pulsations, quand il est âgé, permettant d'obtenir une netteté particulière des graphiques. Ceux que M. Chau- veau a projelés sur un vasle écran, au cours même de l'inscription, et que nous avons vus s'enregistrer d’une facon {out automatique, ont montré, par la coïncidence des bruits cardiaques avec des points particuliers des tracés de la pression, le bien-fondé de la doctrine professée en France par MM. Chau- veau et Marey ?. Si nous ne nous étendons pas da- vanlage sur ce sujet, c’est qu’en raison de son extrème importance, nous avons obtenu de M. Chau- 1 Voyez la Revue du 30 août 1892, t. III, p. 579. 2 Sur cette doctrine, voyez le récent article de M. Frede- ricq dans la Revue, loc. cit. L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE veau la promesse de le traiter prochainement dans la Revue. Les anomalies, quelquefois observées dans le rythme des mouvements et des bruits cardiaques, ont conduit M. Arloing (de Lyon) à admettre la possibilité de la dissociation fonctionnelle des deux ventricules. C’est à un défaut de leur synchronisme quil attribue le redoublement des bruits constaté, en quelques cas, au moment où la sonde cardiogra- phique, introduite dans l’un des ventricules, en in- 3 9) A De gr à ATOS is. ANT 137 d’abord des tracés intra-cardiaques où l’on voit la Juxtaposition de deux ou trois systoles ; des gra phiques indiquant la persistance du resserrement de l'oreillette et du ventricule, obtenue chez un sujet par la ligature d'une branche du pneumo- gastrique ; des diagrammes accusant la persistance de la systole pendant l'excitation galvanique du bout périphérique du vague; l'effet tétanisant oblenu à la suite d’un tiraillement du vague gauche intact sur un cheval qui présentait des Fig. 2. — Cardiographe à aiguille de M. Laulanié. e, tambour explorateur: ai, aiguille reposant sur le cœur par son extrémité inférieure après avoir traversé les parois thoraciques , pm, plaque métallique portant le support Sw du tambour et attachée à la peau par les deux agrafes ag. dique la systole. Les pathologistes, notamment MM. Potain, Raymond Tripier, Francois Franck, re- poussent cette explication. Cependant, fait remar- quer M. Arloing, si le myocarde peut entrer en télanos par excitalion directe, n'est-il pas logique d'admettre que certaines parties de son système nerveux intrinsèque et extrinsèque sont capables d'engendrer cet état? A l'appui de celte opinion, l’'éminent professeur a mis sous nos yeux un certain nombre de faits démontrant que le myocarde peut être mis en télanos à un état éloigné du maximum de contraction cardiaque, sous l'influence de cer- taines excilalions mécaniques ou électriques de ses nerfs et même des pneumogastriques. Ce sont troubles respiratoires et de la myocardite intersti- tielle. Peut-être, dit M. Arloing, y a-t-il, dans le cordon nerveux complexe représenté par le vague, des fibres motrices proprement dites analogues à celles des muscles ordinaires. L'exagération de ce phénomène aboutirait à la dissociation réelle. M. Heger (de Bruxelles) est venu confirmer les conclusions de M. Arloing en ce qui concerne l’in- dépendance fonctionnelle des deux ventricules; il a rappelé que cetle queslion avait été portée à l'ordre du jour du Congrès par M. le docteur Bayet (de Bruxelles). Les tracés kymographiques re- cueillis par M. Bayet, parallèlement dans l'artère pulmonaire et dans la carotide chez le chien, dé- montrent à l'évidence, dit M. Heger, le fait de la disjonction des systoles ventriculaires, fait déjà signalé, chez le lapin, par Knoll. La disjonetion se ceractérise quelquefois par la survie du ventricule gauche, plus souvent, comme dans l’agonie, par la survie du cœur droit; elle apparait clairement sous l'influence de la digitaline. Le désaccord des physiologistes et des clini- ciens en ces questions si délicates fait ressortir tout l'intérêt des perfectionnements apportés aux mélhodes cardiographiques. Aussi le Congrès a-t-il accordé la plus grande attention au fonctionne- ment de deux appareils présentés, l’un par M. K. Hurtle (de Breslau), l'autre par M. Laulanié (de Toulouse) pour enregistrer : le premier, les bruits: le second, les mouvements du cœur. Dans l'appareil de M. Hurtle les bruits impres- sionnent d'abord la membrane d’un microphone L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE et elle doit être atteinte par des méthodes directes: On n'est parvenu à la saisir jusqu'ici, à l'exemple de M. François Franck, qu’à l’aide d’explorateurs placés immédiatement à la surface de l'organe, préalablement mis à découvert par la résection des parois thoraciques. L'application du cardiographe à aiguille ne comporte, au contraire, aucune muti= lation et peut être faite très aisément sur le chiem couché sur la table de vivisection ou sur le cheval debout !. L'explorateur (e, fig. 2), tambour de grand dia= mètre dont la membrane est tendue par un ressork à boudin de forme conique, s'appuie sur le cœur par l'intermédiaire d'une aiguille (4), coudée à angle droit à son extrémité cardiaque et reposant, sans le blesser, sur le péricarde par sa portion inflé=« chie. L’immobilité de l’explorateur est assurée de la manière la plus absolue par les dispositions du support. Celui-ci a pour base une plaque mé Fig. 8. — Graphique des contractions du cœur, recueillies chez un chien à l'aide du cardiographe à aiguille de M. Laulaniss a, contractions ; b, secondes. très sensible intercalé dans le circuit primaire d’un appareil d'induction. En reliant un téléphone au circuit secondaire, on peut y entendre distincte- ment les bruits du cœur, Pour pouvoir enregistrer ces bruits, on intercale dans le circuit secondaire, à la place du téléphone, une patte galvanoscopique qui inscrit, à chaque bruit, la contraction qu'elle éprouve. Le retard entre l'inscription et la pro- duetion du bruit se mesure exactement : il équi- vaut à un peu moins de + de seconde. L'appareil de M. Laulanié, qu'il nomme cardio- graphe à aiguille (fig.2), est un myographe direc- tement actionné par le muscle cardiaque, dont il recueille et transmet fidèlement les contractions. Cet instrument répond, par conséquent, à un tout autre objet que celui des sondes cardiographiques chargées de recueillir les variations de la pression intra-cardiaque et des cardiographes ordinaires destinés à l'exploration du choc précordial. La du cœur est la cause de ces deux faits (choc et pression), trouve souvent que d’une manière fort imparfaile, contraction mais elle ne s’y re- tallique (pm), au centre de laquelle est ménagé un large orifice, et pourvue de deux montants laté= raux (ml). Des agrafes très aiguës (ag), attachées à ces montants par des liens très courts et très fortement élastiques, sont enfoncées dans deux plis cutanés et fixent complètement l'appareil. Le support (Su) est une tige cylindrique sur laquelle l'explorateur peut être placé à telle hauteur que l’on voudra. Il est lié à la plaque par une genouil- lère qui permet de l’orienter convenablement. Grèce à son mode d’attache, l'appareil ne peut subir aucun déplacement et les rapports du cœur et du tambour qui l’explore ne sont jamais modi- L'aiguille qui établit ces rapports se meut ainsi perpendiculairement à la paroi thoracique, qu'elle traverse par un trajet capillaire, et reste constamment fixée par ses deux extrémités entre le cœur, qui la soulève à chacune de ses contrac- lions, et l'explorateur élastique, qui la ramène et la liés. EEE 2e PE 2 2 Te PC AR ER ON RTE EE PRES RES 1 Lorsqu'on opère sur le chien, il est indispensable d'anes- thésier l'animal, ON L, OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE 139 maintient constamment appliquée sur l'organe. Elle est d’ailleurs guidée par un petit anneau atte- nant au support et qui n’a pas été représenté sur la figure, L'application du myographe au chien comporte les opérations suivantes : anesthésier l’animal; le coucher sur le côté droit; explorer de ce côté le choc précordial et déterminer le point où il est le plus manifeste; enfoncer l'aiguille au point symé- trique de la paroi thoracique gauche; aller à la recherche du cœur en redressant et enfonçant l'aiguille, qui est alors maintenue par un aide; artérielle chez le chien. Les tracés ci-joints (fig à 9) donneront une idée des résultats qu'il a oble- la parfaite innocuité de la pression de l'aiguille sur le péricarde. Le même physiologiste, frappé des inconvé- nients altachés à l’usage de tous les instruments qui s'ouvrent dans les vaisseaux artériels, comme les manomètres ou les sphygmoscopes, etc., dont le fonctionnement peut être interrompu ou altéré par la coagulation du sang, a essayé d'appliquer le sphygmographe à l'analyse de la circulation 1 nus, Le sphygmographe, au moyen duquel ils ont Fig. 4. fém., fémorale; attacher la plaque; placer l'anneau servant de guide à l'aiguille; fixer l'explorateur sur le sup- port en ayant soin de le faire peser sur le sommet de l'aiguille, de manière à tendre convenablement le ressort. Le tracé suivant (fig. 3) donne une idée fort exacte des graphiques fournis par le cardiographe à aiguille. On y voit en particulier la systole auri- culaire précédant immédiatement la systole ven- triculaire, les ondulations du plateau systolique, la réplétion diastolique, etc. On remarquera éga- Jement les variations respiratoires du rythme du cœur, dont MM. B. Sanderson, Fredericq, Werthei- mer ont étudié la loi et le mécanisme. M. Laulanié a appelé l'attention sur ce fait, parce qu'il prouve — Tracés du pouls obtenus |chez le chien à l'aide de Sec., secondes; Sig., signal électrique. — N. Période de rythme normal. P. Période de ralentissement par excitation centrifuge du nerf vague. la pince sphygmographique de M. Laulanié; Car., carotide; été recueillis, consiste en une pince dont les bran- ches articulées sur leur trajet saisissent el défor- ment l'artère à son extrémité et agissent sur un tambour explorateur par l’autre extrémité. À l’aide d’un ressort dont ia tension peut être facilement graduée, la pince exerce sur l'artère le degré de pression qui convient et se plie à tous les change- ments de son diamètre. Par l'examen des quelques tracés suivants, on pourra juger du nombre, de la fidélité des indica- tions de cet instrument et des services qu'il peut rendre en physiologie. Le graphique de la figure 4 contient les tracés superposés de la carotide et de la fémorale d'un chien de grande taille. On y retrouve les caractères 740 L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE particuliers de l’ondulation dicrote qui survient plus tardivement dans le vaisseau le plus éloigné du cœur. Dans les tracés de la série P, la circulation est modifiée par l'excitation centrifuge du pneu- mogastrique. Les pulsalions, moins fréquentes, ont, par corrélation, plus d'amplitude. L’allongement de la phase diastolique laisse un intervalle suffisant pour la production d'une nouvelle onde secondaire, que les pulsations se succèdent sans interruption sensible et que l'onde sigmoïdienne n’a pas le temps de se propager jusqu'au point exploré. Le ralentissement artificiellement provoqué a eu cet effet d'introduire entre chaque systole un inter- valle d’une durée assez considérable pour per mettre à l’onde sigmoïdienne de prendre naissance et de se propager. Fig. 5. — Tracé du pouls norma de la fémorale chez un chien anesthésié; P, pulsations; Sec., secondes, Sig; signal électrique. et le pouls devient polycrote. Le polycrotisme est encore très marqué dans le pouls fémoral d’un autre chien (fig. 5) sur lequel l’anesthésie avait réduit le rythme cardiaque à 60 pulsations par minute. Dans les tracés de la figure 6 on peut observer comparativement les résultats fournis d'une façon simultanée par le sphygmoscope (Sp) et par la Sig Sec Le même tracé permet d'assister au déplacement progressif de l’ondulation dicrote au fur et à mesure que l'excitation épuise ses premiers effets et que le rythme s’accélère. Elle occupe bientôt la fin de la période de descente et s'interpose entre deux pulsations. Mais ce déplacement est pure- ment apparent : il est entièrement dû à l’abré- viation progressive de la phase diastolique des Fig. 6. — Tracés du pouls de la fémorale d'un chien, obtenus simultanément à l'aide de la pince sphygmographique de M. Laulanié, Ps, et du sphygmoscupe, Sp. pince sphygmographique (Ps). Ces derniers sônt au moins aussi bons, et, dans le cas particulier, ils nous font saisir l’une des conditions du dicrotisme qui n'apparait que durant le ralentissement du rythme, provoqué par l’excilation du pneumogastrique. Avant l’excilation, le rythme est extrêmement fré- quent, grâce à la section bilatérale des nerfs vagues, et comporte 200 pulsations par minute. La phase diastolique est réduite à un minimum (el pulsations artérielles. Ainsi, pour une artère déter- minée, la production et la place du dicrotisme dans la pulsation dépendent de la durée de la phase diastolique et, par conséquent, du rythme . 1 Il est à peine besoin de rappeler que le premier effet, on pourrait dire l'unique effet du rythme, est de modifier la durée de la phase diastolique, c’est-à-dire de la réplétion ven- à sa suite tous les autres carac- triculaire, Ce fait entraine tères de la pulsation. L. OLIVIER. — LE DÉUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE Le tracé de la figure 7 a été détaché d’une courbe | pulsation artérielle. On y voit bien comment l’al- dont le développement a duré plus de trois heures. | longement de là phase diastolique entraine : 4° le S 0 g ANNNNNAANAANNNNNNNNANNNNMNNNNNANNNANNANNNNNNNNNNNNNNANNANNNNNNNNNNNNNNNNUNN I NNANNNNNNNNNNNNNNNNNNNNNNNANNNNNNANNNNNNNNNNNNNNNNNNNANNNNNNANNNANNNNNL ANA Ann Sig nn à y ; ca UM TERRARA AA H Sig AAA) Fig. 1. — Tracé de la pulsation carotidienne du {chien et des changements qu’elle subit sous l'influence des excitations continuelles du nerf vague (pince sphygmographique de M. Laulanié) ; Ps., pulsations ; Sig., signal. déplacement relatif du dicrotisme ; 2° la réplétion une excitation centri- | plus complète des ventricules ; 3° l’accroissement la beauté | de volume de l'onde artérielle poussée par le cœur; Durant tout ce temps, on n’a cessé de maintenir sur le pneumogastrique fuge. Nous donnons ce tracé pour + LIEN Sig Sec — Tracé d’un réflexe modérateur cardiaque obtenu, chez un chien,fpar excitation du bout central de l'un des nerfs VE Sp, pulsations de la fémorale, recueillies à l'aide de la pince sphygmographique de M. Laulanié ; Man, inscription de la pression carotidienne. exceptionnelle des courbes sphygmographiques. | 4° l'amplitude corrélative des pulsations. Tous ces Il est, d'autre part, on ne peut mieux démonstratif | faits coïncident avec l'abaissement de la pression de l'influence du rythme sur les caractères de la | constante, accusée d’ailleurs, dès le début, par la 142 L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE marche descendante des minima, et on incline à voir dans cet abaissement la cause immédiate et exelusive de tous les changements qui l’accompa- gnent et qui se traduisent, en particulier, par l’ac- croissement de l’amplitude des pulsalions. Mais cet abaissement de la pression est, comme tous les autres changements, la conséquence de ce fait premier: l'allongement de la phase diastolique. On ne saurait trop se rappeler que le pouls ou la pres- sion variable a pour mesure le volume de l’ondée sanguine jetée dans les artères à chaque systole, et que ce volume est d'autant plus grand que le cœur et les artères ont plus de temps, le premier pour se remplir, el les secondes pour se vider. C’est Les oscillations de la colonne manométrique qui s'inscrivaient en même temps (Man.) sont évidemment plus accusées, au moins en ce qui touche les changements de la pression constante ; mais c’est à peu près toul ce que nous y voyons. Il en est autrement des sphygmogrammes {Sp.) qui nous renseignen{ sur tous les autres change- ments survenus dans la circulation. celte dans le magnifique tracé de la figure 9 qui ex- Nous retrouvons richesse d'indications prime les effets d’un réflexe vaso-constricteur obtenu sur le même chien par excitation du boul central du nerf vague (après section bilatérale). Le tracé manométrique (Man.) indique seulement Fix. 9. - Tracé d’un réflexe vaso-constricteur vagues (section bilatérale.) Sp. pouls de la fémorale, tracé de la pression carotidienne. dans ce sens qu'il faut interpréter la loi de l'inver- sionnalité de la pression constante et de la pres- sion variable. D'après M. Laulanié, cette loi n’au- rait d’ailleurs pas le caractère absolu qu’on incline trop à lui donner par une interprétation abusive des conclusions de M. Marey, et nous allons voir bientôt un exemple des restrictions qu'elle com- porte. Il serait, sans doute, plus exact de dire que l'amplitude des pulsations est en raison inverse du rythme. On a déjà remarqué dans les lracés précédents que le sphygmographe trahit très fidèlement les changements de la pression constante. Ses indi- cations, à cet égard, ne sont pas moins nettes dans le tracé de la figure 8, qui exprime les effets d'un réflexe modérateur du cœur par excitation du bout central de l’un des nerfs vagues, l’autre nerf étant intact. le chien recucilli à l’aide de la pince sphygmographique de M. Laulanié; Man obtenu chez par l'excitation du bout central de l’un des nerfs avec clarté l'accroissement de la pression et, à un certain moment, le ralentissement du rythme. Tous les autres détails échappent à l'analyse et à l'interprétation. La courbe sphygmographique est autrement explicite. Et d’abord, elle dénonce très nettement aussi l'accroissement de la pression. On voit, en outre, pendant toute une longue pé- riode, qu'au fur et à mesure que la pression s'élève, l'amplitude des pulsations s’accroit au point de tripler sa valeur première, sans qu'aucune modi- fication corrélative se soit encore produite dans le rythme. Il devient visible que le cœur est sensible à l’accroissement de la pression et qu'il lutte contre les nouvelles résistances qui lui sont offertes par des systoles plus énergiques et aussi nombreuses. Il se soustrait provisoirement à la loi du «tra- vail constant ». Mais, la compensation tend à s'é- tablir par un procédé d’ailleurs assez rare. Les L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRES INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE contractions du cœur conservent le même rythme, mais elles sont alternativement très fortes et très faibles, et, en lisant attentivement le tracé de gauche à droite, on assiste à l’avortement progres- sif d’une systole sur deux. Dès qu’on cesse l’exci- tation, on assiste à une série inverse de phéno- mènes qui rétablit progressivement l’uniformité du travail cardiaque. Ce tracé peut encore être l’occasion de montrer une application particulière du sphygmographe. Cet instrument est en effet actionné immédiate- ment par les variations du diamètre du vaisseau qu’il embrasse et ses indications dénoncent, par là même, le volume de l’ondée sanguine qui se pro- page dans ce vaisseau. Les variations du débit d’une artère deviennent donc sensibles dans les variations d’une courbe sphygmographique. Ce débit est en effet propor- tionnel à l’amplitude et au rythme des pulsations, et conséquemment à la surface couverte par la courbe sphygmographique. Or, en examinant à ce point de vue celle de la figure 9, on se rend très ai- sément compte des variations que le réflexe vaso- moteur aintroduites dans le débit artériel etonesl amené à celte conclusion d'apparence paradoxale que la constriction vasculaire généralisée à toute la périphérie a eu pour effet d'augmenter le débit artériel. En réalité, il n’y a là qu’une autre manière d'exprimer l'augmentation du travail mécanique du cœur et l'accumulation du sang dans le vase artériel. Ces quelques faits suffisent sans doute à établir la multiplicité des indications fournies par un bon sphygmographe et des applications qu’on en peut tirer. En dehors du rythme et de la forme du pouls, dont ilest le témoin par excellence, il donne des renseignements sur les variations de la pression constante du travail cardiaque et du débit arté- riel. On peut done, dit M. Laulanié, l'appliquer fort aisément à l’étude expérimentale des condi- tions capables d’influencer ces divers éléments de la circulation, et la recherche est d'autant plus sûre qu'elle n’est jamais arrêtée par les accidents de coagulation qui interrompent si fréquemment le fonctionnement des autres explorateurs. Avec un enregistreur convenable, on peut dès lors poursuivre indéfiniment une expérience et en va- rier à volonté la direction. À la suite de cette magistrale étude, citons les recherches de notre distingué collaborateur, M. Kaufmann (d’Alfort),sur les variations d’émigra- tion sanguine quise produisent dans le muscle pen- dant la contraction. Il a opéré sur le masséter du cheval. Il suffit de donner de l’avoine à l’animal pour provoquer la mastication; si l’on enregistre REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, 143 en même temps les contractions du musele, la pression sanguine dans les vaisseaux maxillo- musculaires du masséter et dans la carotide, les graphiques montrent que : 1° Dès le début de la mastication, le jeu du cœur s'accélère et la pres- sion artérielle générale augmente; 2° la pression diminue dans l’artère maxillo-musculaire et aug- mente énormément dans la veine correspondante. Les vaisseaux sont dilatés : pendant toute la durée de son activité, le muscle est donc beaucoup plus abondamment irrigué qu’à l’état de repos. Mentionnons enfin l'inscription des variations de vitesse du sang, réalisée par M. N. Cybulski (de Cracovie) au moyen de son #émotachomètre. Un tube de verre est intercalé sur le trajet de la carotide d'un chien; ce tube porte deux tubulures latérales, qui communiquent avec un manomètre différen- tiel en U. Dans ce tube une colonne liquide monte où descend suivant que la vitesse du sang aug- mente ou diminue. Les oscillations de la colonne manométrique sont enregistrées par la phothogra- phie. — Quoique décrit depuis plusieurs années, cet appareil était resté à peu près inconnu des physiologistes; il a fonctionné pendant: toute la durée du Congrès et y a été très remarqué. II. — THERMOGENÈSE ET RESPIRATION Les deux méthodes, l’une physique, l’autre chi- mique, qui permettent d'étudier la production de chaleur et la respiration, ont récemment reçu de divers physiologistes quelques perfectionnements présentés au Congrès. $ 1. — Détermination des variations thermiques. La calorimétrie animale, après avoir traversé une assez longue période de stagnation depuis les recherches célèbres de Boussingault, a de nouveau occupé les physiologistes en ces dernières années. Au Congrès de Liège, M. Rosenthal (d’Erlangen) a décrit les perfectionnements qu'il a récemment apportés à l'étude de la radiation thermique. Il fait usage d'un calorimètre à air, analogue à celui de M. d’Arsonval, mais qui en diffère par la parti- cularité suivante : tandis que l'appareil de M. d’Ar- sonval comprend un calorimètre principal et un calorimètre compensateur, reliés aux extrémités d'un manomètre différentiel, M. Rosenthal rem- place le compensateur par des tubes qui entourent la chambre calorimétrique proprement dite et équilibrent aussi son action sur le manomètre. Un système de ventilation fait passer les gaz de la chambre calorimétrique à travers des tubes à potasse caustique qui fixent le CO? exhalé. L'auteur détermine ainsi chez le chien d’une 24 +4* 74 façon simullanée la production de chaleur el la valeur des échanges respiratoires, au moins en ce qui concerne la formation de CO?. Les ani- maux étant observés pendant de longues périodes et soumis à un régime alimentaire uniforme, il a relevé les courbes diurnes de production de cha- leur et d'exhalaison de C0?. La comparaison de ces courbes (qui ne sont pas exactement parallèles) permet de tirer des conclusions importantes sur la nature du combustible qui brûle dans l'orga- nisme aux différentes phases de l'expérience. M. Max Cremer (de Munich) a fait observer à ce sujet que les dosages d’ingesta et d’excreta, tels qu'ils sont pratiqués dans la méthode de Voit et Pettenkofer, fournissent des indications plus cor- rectes sur les phénomènes intimes de la nutrition. M. Fredericq croit également que la nature du combustible qui brûle à chaque instant dans l’or- ganisme animal peut être déterminée d’une façon plus rigoureuse par l'étude du quotient respiratoire. M. P. Langlois (de Paris) a parlé des variations de la thermogénèse dans la maladie pyocyanique. Il a fait cette communication au nom de M. Char- rin (de Paris) et au sien. Parmi les agents infec- tieux qui agissent sur les variations thermiques, dit M. Langlois, il n’en est pas d’aussi bien connu que le virus du pus bleu. On peut modifier sa viru- lence, utiliser le virus actif de ses produits so- lubles, etc. Cet agent était donc indiqué pourétu- dier les variations de la thermogénèse dans une maladie infectieuse tout à fait typique. Les mesures calorimétriques ont été faites avec des calorimètres à air : calorimètre à siphon de M. Ch. Richet et calorimètre à cloche de M. d’Ar- sonval. À Liège, M. Langlois a répété l'expérience avec le calorimètre à manomètre de M. Fredericq. Deux lapins, l’un servant de témoin, l’autre en puissance de maladie pyocyanique, y furent mis en observation. Le second présenta de l’hypo- thermie. Mais le fait le plus saillant, c’est la diminution de la radiation thermique, même quand la tempé- rature rectale ne présente que de faibles variations. Avec les produits solubles, on peut régler, beau- coup mieux qu'avec les virus vivants, le degré d’in- toxicalion. Avec une dose assez faible de culture stérilisée (8°), la température reste fort peu au- dessous de la normale, tandis que la radiation thermique diminue notablement. Il est permis de déduire de ces deux observations que les proces- sus thermogéniques offrent un affaiblissement marqué. Avec des doses beaucoup plus fortes, ces phé- nomènes sont alors bien plus accentués : la radia- tion peut arriver à n'être plus que les deux tiers de la radiation normale; mais celle décroissance est L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE alors insuffisante pour compenser la diminution de la thermogénèse, et la température centrale baisse rapidement. Citons encore sur la thermogénèse une expé- rience très curieuse que M. Waller (de Londres) a faite sur lui-même devant le Congrès. Ce physio- logiste s'applique au niveau du biceps un ther- moscope, sorte de réservoir à parois minces, fixé au moyen d'une bande; il attend que l'appareil ait pris une température stationnaire, puis il le relie à un manomètre en U très sensible. Le ma- nomètre est placé dans la lanterne magique : ses oscillations sont projetées, très amplifiées, sur un écran, ce qui rend l’expérience très élégante el permet à tout l'auditoire de suivre de visu les chan- gements de température. L’expérimentateur fait travailler le biceps pen- dant une minute en actionnant à la main le ressort d’un dynamomètre qui enregistre le travail exécuté. L’élévation de température atteint son maximum (5 à À de degré) au bout de deux à trois minutes. Cette élévation est presque exclusivement due à l'accélération de la circulation. Elle est en effet à peine sensible, si l’on anémie le bras, avant l’expé- rience, par compression des vaisseaux au moyen du lien d'Esmarch. Le facteur thermique vasculaire l’emporte donc de beaucoup sur le facteur muscu- laire. M. Waller a projeté ensuite une série de tracés résumant les résultats de ses expériences. Il a mon- tré, par exemple, que l’augmentation de tempéra- ture accusée par l’appareil est plus marquée pour la contraction musculaire volontaire que pour la contraction musculaire provoquée par l’excilation locale faradique. L'augmentation de température est également plus prononcée pour un travail exécuté en un temps court que pour le même tra- vail exécuté en un temps plus long. Ces variations thermiques offrent un haut inté- rêt. M. Laulanié (de Toulouse) nous a donné les moyens de les inscrire, quelle que soit la partie du corps, interne ou externe, à laquelle elles se rap- portent. Son appareil (fig. 10) se compose essen- tiellement d’un tube en U rempli d’eau à mi- hauteur ({). Pour en faire un manomètre inscrip- teur, il suffisait de trouver un bon flotteur. Après bien des tentatives infructueuses, l’auteur s’est arrêté à un cylindre taillé régulièrement dans une bougie de manière à permettre son introduction facile dans l’une des branches du tube. La bougie est un flotteur idéal. Comme cette substance n’est pas mouillée par l’eau, elle reste enveloppée d’un manchon liquide qui la sépare constamment des parois du tube et le frottement est pratiquement nul. Les mouvements linéaires du flotteur sont transformés en mouvements angulaires par une Éd Cl L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE 745 poulie à laquelle il estrelié au moyen d'un fil tendu par un contrepoids. La poulie, dont l'axe porte la plume (p), fait partie d’un cône en bois (C!) d’une extrème légèreté, creusé de six gorges qui, pour un même déplacement du flotteur, peuvent offrir six vilesses angulaires différentes. La potence (po) qui porte l'axe du cône est mue par une crémaillère (Cr) qui permet le déplacement horizontal du cône el la substitution d’une pou- vient particulièrement à la recherche des varia- lions de la température. Il suffit, pour en faire un {hermographe, de relier la branche libre à un explorateur ad hoc :. Après avoir inscrit l’échauffement, on peut ins- crire la courbe et fixer la loi du refroidissement : il suffit de changer le zéro par la manœuvre qui fait descendre le tube manométrique, et d'amener la plume sur la nouvelle abscisse choisie. Fig. 10. — Thermographe de M. Laulanié. t, tube en U rempli d’eau à mi-hauteur et dont la branche libre est munie d’un flotteur en bougie; — C, cône portant la plume; — po, potence; — (7, crémaillère agissant sur le cône; — Cr crémaillère agissant sur le tube manométrique et servant à déplacer le zéro; — V, vis de réglage pour l’exacte application de la plume. lie à l’autre. Le tube manométrique est également actionné par une crémaillère (Cr) qui permet de déplacer le zéro et de choisir sur le cylindre ins- cripteur telle abscisse que l’on veut. Enfin le support qui soutient l’ensemble est pourvu de trois vis calantes et l’axe est mû par une vis de réglage (VW), à l’aide de laquelle on gradue l’appli- cation de la plume sur le cylindre inscripteur. Comme on le voit, ce manomètre a une sensibililé variable, dont les limites sont données par les vi- tesses angulaires de la plus grande et de la plus petite des poulies ; il peut ainsi s'approprier à l'étude des phénomènes les plus différents. Il con- $ 2. — Dosage des gaz absorbés et exhalés. Il'est, comme on sait, très important d'inscrire. en même temps que la variation de la chaleur, celle des échanges respiratoires. C'est à quoi M. Laulanié utilise aussi le précédent appareil. 1 C’estainsi qu'au moyen d'un explorateur rectal et en em- ployant la vitesse angulaire la plus grande, on peut inscrire les effets thermiques de la tétanisation électrique d’un chien. La plume abandonne l'abscisse dès les premiers moments et la courbe s’élève avec une vitesse qui varie avec le nombre et l’intensité des excitations. On agit facilement sur cette vi- tesse, soit en fermant la gueule de l’animal pour l’empécher de lutter contre l'échauffement par la polypnée, soit en lui appliquant une couverture. TT 146 L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRES INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE En plaçant l'explorateur dans un bain d'acide sulfurique, où barbote un courant d’air chargé des gaz de la respiration d’un animal, on obtient la courbe de la vapeur d’eau exhalée !. L'auteur a également pu appliquer son mano- mètre à l'inscription des variations du quotient respiratoire pendant l’asphyxie en vase clos. À cet effet, un petit animal, — le cobaye convient d’une manière toute spéciale, — est placé dans une cloche assez grande pour qu’on puisse négliger les effets thermiques, et la cloche est reliée au manomètre inscripteur. De la même façon on peut rendre sensibles les phénomènes de la respiration élémentaire. Il suffit d'enfermer des tissus vivants en présence d’un bain de potasse et de relier l’en- ceinte au manomètre. En somme, le manomètre inscripteur universel se prête à des applications extrêmement variées qui permettent d'instituer, soit des recherches méthodiques, soit des expé- riences de cours très élégantes et démonstratives. Le mème physiologiste s’est préoccupé d'étendre aux grandes espèces animales les recherches qu'il a entreprises pour déterminer les lois de la va- riation des quotients thermiques de l'oxygène et du carbone. Il a dû ainsi abandonner l'appareil de Regnault et Reiset pour avoir recours à la méthode de la ventilalion ouverte, instituée par Pettenkoffer et Voit. Le problème, dans cette méthode, est de mesurer les altérations de la masse d'air qui a traversé l'enceinte habitée par l'animal pendant toute la durée de l’expérience.La solution adoptée par Pettenkoffer et Voitne saurait convenir, et ce n’est pas le lieu de reproduire les objections qu'elle a suscitées. Celle que M. Laulanié a adoptée est d’une très grande simplicité. Il s’agit, en somme, de déterminer la composition centésimale de la masse d’air qui a traversé l'enceinte habitée par l'animal, et la difficulté résulte de cette double circonstance que :es altéralions de cet air sont extrêmement faibles et que sa masse est énorme. Ainsi posée, la question comporte les deux deside- rata suivants : 1° prélever sur le courant de sor- tie un échantillon chimiquement identique à la masse d’air qui a traversé l’enceinte ; 2 faire l'analyse quantitative de l'échantillon. Pour répondre à la première partie du problème, M. Laulanié effectue à l’origine même du courant de sortie une prise uniforme, continue et de même durée que l'expérience. Il se sert à cet effet d’une pompe aspirante et foulante qui fonctionne sans interruption et accumule ses prises dans un sac de caoutchouc. La pompe est faite d’un tube en U contenant du mercure à mi-hauteur et soumis à 1 Il faut, dans ce cas, adapter une poulie de grand rayon, parce que la chaleur d’hydratation de l'acide sulfurique est considérable. un mouvement incessant d'oscillation pendulaire. Les deux branches du tube communiquent cha- cune d’une part avec l’origine du courant de sortie et, d'autre part, avec le réservoir de caoutchouc par l'intermédiaire d’un système de soupapes de Muller, qui déterminent le sens du courant vers le sac. On a ainsi deux pompes qui fonctionnent ensemble et en sens inverse, de telle facon que pendant que l'une effectue un appel, l’autre opère un refoulement égal, et vice versa. Les deux opérations, appel et refoulement, ont done chacune une continuité parfaite. La prise d’air est uniforme el continue, et à tous les instants l’air prélevé sur le courant de sortie est chimiquement identique à l’air qui passe, et l'échantillon qui to- talise la prise est chimiquement identique à la masse d'air qui a traversé l'enceinte pendant toute la durée de l'expérience. La première partie du problème est ainsi résolue. Quant à l'analyse quantitative de l'air récolté, elle est réalisée au moyen d’un eudiomètre dont la description ne peut être ici que fort sommaire. Il consiste en une pompe à mercure qui appelle simultanément dans deux tubes mesureurs un échantillon de 100 de l’air à analyser et refoule ensuite les deux échantillons dans deux labora- toires, où ils perdent : l’un, son acide carbonique au contact de la potasse ; l’autre, son oxygène au contact du phosphore. Quant on a ramené le sys- tème à la pression almosphérique en rappelant l'air dans les mesureurs, le mercure a pris dans les derniers la place du gaz absorbé et il n’y a plus qu’à faire une bonne lecture. Par sa grande capa- cité, cet eudiomètre se prête à la mesure des alté- rations les plus faibles de l’air. De plus, il permet d'opérer simultanément le dosage de l’oxygène et de l’acide carbonique. M. N. Gréhant (de Paris) nous a montré le pro- cédé qu'il a employé pour découvrir la loi suivant laquelle le sang d’un Mammifère vivant absorbe l'oxyde de carbone. Ce savant compose une série de mélanges titrés d’air et d'oxyde de carbone renfermant =, 5666, so €t x de ce dernier gaz, il les fait respirer à quatre chiens différents pen- dant une demi-heure. Avant chaque expérience, il introduit, dans son appareil extracteur des gaz du sang, 25®% de sang artériel normal; à la fin de l'expérience, il extrait de même les gaz du sang partiellement intoxiqué, en opérant à la tempéra- ture de 40°; puis, dans le second échantillon de sang, il fait pénétrer de l'acide acétique en excès: le bain chaud a été porté à 100° et quelques coups de pompe à mercure permettent de recueillir l'oxyde de carbone dégagé avec quelques traces d’acidecarbonique, d'oxygène et d'azote provenant ne PEL +de. 07 D a L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE 741 de l'acide acétique. Pour faire l'analyse des gaz, on absorbe l'acide carbonique par la potasse, l’oxy- gène par l’acide pyrogallique ; on porte ensuite la cloche à mercure sur l’eau pour faire écouler les réactifs ; on absorbe facilement l’oxyde de carbone à l’aide d’un petit tube contenant du protochlorure de cuivre dissous dans l'acide chlorhydrique. Les résultats obtenus ont été calculés pour 100°° de sang : SANG ARTÉRIEL NORMAL A = Me 8 D RE cÈ LE LE & CS NS SN FO 35 8 SRE ë0 CEE nn Dir RE SRE 4 ôS 5 as É 3 RE NN RE NT TE. 1000 1 45.9 2.2 15 is 18 15.3 1.5 2.8 1 Dee —— 42,2 En AR ST ET 40 15 1.8 3000 4 13.4 1 1 ; 287 5 GENE RNNTSE) 40.4 2 455 2000 4 1.5 5 On voit que le deuxième échantillon de sang contient toujours moins d'oxygène que le premier; mais il y aun fait plus important : les nombres qui représentent l’oxyde de carbone dégagé sont sen- siblement proportionnels aux quantités de gaz toxique introduites dans l'air; d’où M. Gréhant conclut que l'oxyde de carbone se dissout dans les globules du sang en obéissant à la loi de Dalton. Il ne faut pas perdre de vue cependant que l'oxyde de carbone adhère à l’hémoglobine avec beaucoup plus d'énergie que l'oxygène, puisque le vide seul à 40° ne parvient pas à l’extraire. L'auteur a commencé l’application de ce procédé et de la loi d'absorption à la recherche de l'oxyde de carbone dans l’air confiné : il a pu déceler dans un cas particulier 5£ d'oxyde de carbone. III. — PRINCIPES IMMÉDIATS, NUTRITION, SÉCRÉTION Dans ce chapitre nous dislinguerons : 4° l'évolu- tion des principes immédiats dans l’économie, et l'élimination des poisons; 2° les sécrétions in- ternes. $ 1. — Évolution des principes immédiats et élimination des poisons, M. Halliburton (de Londres) a cherché à extraire des différents organes, rein, foie, cerveau, etc.., les nucléo-albumines et à déterminer les propriétés de ces substances. Il a suivi deux méthodes. L'une, applicable aux glandes lymphatiques, au thymus, au testicule, au rein, mais non au cerveau el au foie, consiste en ceci : Le tissu, débarrassé de sang, est trituré avec NaCl et un peu d’eau. La masse vis- queuse obtenue est délayée dans un très grand vo- lume d’eau. La nucléo-albumine se sépare sous forme de filaments qui se contractent et se réu- nissent à la surface du liquide, tandis que les restes du tissu et la globuline se précipitent au fond du vase. On purifie la substance en répétant la même opération. La deuxième méthode, applicable à tous les organes cités, est identique au procédé imaginé par Wooldridge pour isoler le fibrinogène : l’ex- trait aqueux du tissu est traité par l'acide acétique dilué qui précipite la nucléo-albumine. Les substances préparées suivant ces deux pro- cédés sont identiques, offrent même teneur en phosphore (0,3 ©/;) et provoquent de la même façon la coagulation intravasculaire du sang, qu’elles soient ou non débarrassées par le chloro- forme de leur principale impureté, la lécithine. Au contraire, la nucléo-albumine qui ne provient pas des cellules n’exerce aucune action sur la coa- gulation. — M. Halliburton a rappellé que, suivant M. Pekelharing, le zymogène du ferment de la fibrine est une nucléo-albumine. La difficulté de ces recherches résulte surtout des changements incessants qui accompagnent l'évolution des albuminoïdes dans l’économie, Dès 1875, le grand physiologiste Pflüger soutenait que les albuminoïdes du protoplasme vivant dif- fèrent des albuminoïdes du protoplasme mort. M. Loew (de Munich) a été plus loin: il s'est demandé si la substance albuminoïde formée par synthèse dans la plante est, même avant son incorporation au protoplasme, différente de l’al- bumine ordinaire, c'est-à-dire de l’albumine morte. On sait depuis longtemps que le suc cellu- laire contient de l’albumine, mais on croyait que c'était de l’albumine ordinaire. M. Loew nous a montré qu'il n’en est pas ainsi. En solution aqueuse étendue, la plupart des bases déterminent, dansles cellules végétales vivantes, la formation de menus granules, même en solution trop faible pour tuer le protoplasme; par exemple, à un demi pour cent, la caféine et l’antipyrine donnent lieu à la production de petits globules qui se réunissent en gouttes plus réfringentes. Ces gouttes, appelées protéosomes par l’auteur et par M. Bokorny, mani- festent les réactions essentielles des albuminoïdes; mais elles contiennent presque toujours, en faible proportion, il est vrai, de la lécithine et du tannin. Fait digne d'intérêt, ces dernières substances font défaut quand la plante, — l'expérience a porté sur les Spirogyres, — a été cultivée dans des solutions riches en nitrates. Les protéosomes provoquent alors la réduction des sels d'argent, même en milieu faiblement alcalin. Cette propriété disparait après l’action des acides étendus, comme aussi après la mort des cellules. En ce cas les protéo- 748 L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE somes deviennent creux et troubles, leur subs- tance semblant se coaguler et s'affaisser. L’expé- rience établit done que non seulement l’albumine organisée du protoplasme vivant, mais aussi l’al- bumine dissoute dans le suc cellulaire diffèrent de l’albumine ordinaire qu'on trouve dans les cellules mortes. D'autres principesimmédiats ont fourni à M. Max Cremer (de Munich) le sujet d’intéressantes obser- vations. Ce physiologiste a constaté que l’ingestion d'isomaltose détérmine, comme la maltose, chez | l'animal vivant l’augmentation de la provision de glycogène hépatique. La dextromannose, au contraire, se comporte comme la galactose et apparait dans les urines sans produire d'augmentation notable de glycogène hépatique. Deux expériences faites au moyen de rhamnose ont fourni des résultats in- certains. M. E. Starling (de Londres) a présenté quelques | expériences sur le sort de la peptone introduite dans le sang et la lymphe. On avait eru jusqu'à présent que la peptone introduite dans le sang disparaissait en quelques minutes. Ce résultat inexact était dû à l’insuffisance des procédés em- ployés pour la recherche de petites quantités de peptone dans les liquides albumineux tels que le sang et la lymphe. M. Starling a employé un pro- cédé plus précis : il précipite les matières albumi- noïdes en mélangeant le sang ou la lymphe avec un égal volume d'acide trichloracétique au dixième. La peptone peut être recherchée directement par la réaction du biuret dans le liquide filtré. De cette façon, après une injection de peptone de Grubler à la dose de 0 gr. 05 par kilogramme d'animal, cette substance peut être retrouvée dans le sang et la lymphe une heure, même une heure et demie après l'injection. Elle apparait dans la lymphe du canal thoracique après un temps assez court; la quantité s’y élève graduellement: au bout d'un quart d'heure elle dépasse la proportion con- tenue dans le sang. La teneur des deux liquides en peptone baisse ensuite graduellement, la lymphe restant toujours plus riche en peptone que le sang. M. Starling n’a trouvé aucune relation entre le degré de coagulabilité du sang et la proportion de peptone que ce liquide renferme. M. R. Verhoogen (de Bruxelles) s'est proposé de rechercher si les substances étrangères à l'orga- nisme, introduites dans la circulation, diffusent et se répandent dans tous les lissus d’une manière uniforme. On sait depuis les travaux de MM. Schiff, Heger, Roger, etc, que les alcaloïdes -ab- sorbés dans le tube digestif et pénétrant dans le sang de la veine-porte, sunt retenus par le foie. Se passe-t-il quelque chose d’analogue lorsque l’alca- loïde est introduit directement dans la grande circu- lation? Pour le déterminer, M. Verhoogen a admi- nistré à des chiens duchlorhydrate de morphine en injections sous-cutanées ou inlra-veineuses. Il a constaté ainsi tout d’abord que, si l’on pratique chez l'animal en expérience la respiration artificielle, on peut lui administrer des doses de morphine bien plus considérables qu'on ne croit généralement. C'est ainsi que, en 1 heure, il a pu injecter, dans la jugulaire d’un chien de 8 kilog., 8 grammes de chlorhydrate de morphine sec, soit un gramme par kilogramme d’animal. Dès les premières in- | jections, le chien fut pris de violentes convulsions, qui se calmèrent rapidement, et, trois heures plus tard, ilne présentait d’autres phénomènes que ceux qui sont habituels chez les animaux soumis aussi longtemps à la respiration artificielle. Ayant ainsi intoxiqué des chiens à l’aide de doses considérables, il les sacrifia au bout d’un temps variant de quelques minutes à plusieurs heures; puis il recueillit leurs organes et en isola l’alcaloïde par le procédé de Stas. Il a constaté que le foie, la moelle osseuse, la rate, contiennent une | quantité d’alcaloïde bien supérieure à celle qu'on trouve dans le musele,le tissu nerveux, ete...Si, par exemple, on prend une moyenne sur quatre chiens pesant ensemble 21 kilogs et ayant reçu en injec- tion intraveineuse 24 grammes de chlorhydrate ; de morphine, on constate que le foie contient 0,6 °/%, la rate 0,45, la moelle 0,4, tandis que le sang ne contient que 0,3 et le muscle 0,2. Cette proportion s'est retrouvée dans toutesles analyses, et souvent à un degré beaucoup plus marqué. Une semblable localisation de l’alcaloïde dans des organes comme le foie, la rate, la moelle osseuse, est naturellementmoinsprononcée lorsque l'animal est tué quelques moments après la dernière injec- tion; elle se voit le mieux lorsqu'on le conserve en vie pendant deux ou trois heures, et diminue à mesure que se fait l'élimination. L'auteur a tenté les mêmes recherches avec un sel minéral, l’iodure de sodium, choisi à cause de sa grande diffusibilité et parce qu'il n’agit pas sur le cœur comme l’iodure de potassium, qui tue les chiens en quelques minutes. Il a injecté dans la jugulaire des quantités allant jusqu’à 2 grammes par kilog d'animal. L’extrait alcoolique des organes étant repris par l’eau, il a dosé l’iode. Cette expé- rience a montré que l'iodure de sodium diffuse peu dans lestissus. Même après plusieurs heures, le sang contient encore une quantité d’iodure bien supérieure à celle qui a pénétré dans le muscle. Le foie agit encore ici comme pour les alcaloïdes, et retient une grande quantité d’iodure. La même localisation s’observe pour la rate. Lorsque l’éli- mination se fait, on trouve beaucoup d’iode dans L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE F 149 le rein et dans l’urine ; ce phénomene s'observe par- fois très rapidement. M. Verhoogen a fait une troisième série d’expé- riences : En injectant dans le péritoine d’une souris blanche un gramme d’une solution aqueuse de car- bonate de lithine à 4 p, 500, et tuant l'animal après cinq minutes, il a trouvé dans tous les tissus la raie de la lithine. Ce corps diffuse donc rapide- ment dans tout l'organisme. En injectant quelques centigrammes seulement de la solution, et luant l'animal après cinq minutes, il ne parvint pas à déceler dans les organesle selde lithine, parce que la quantité de lithine injectée, diffusant partout, devenait trop minime pour donner la raie ca- ractéristique. Si alors il laissait à la souris une survie d’une heure, il arrivait à constater la raie rouge exclusivement dans le foie, Le sel s’étail donc accumulé dans cet organe. Après un temps plus long, la lithine ne se retrouvait plus que dans l’urine. I1 semble résulter de ces expériences que le foie joue à l'égard des principes circulant dans le sang: un rôle de filtre analogue à celui qu'on lui a de- puis longtemps reconnu pour la circulation-porte. D’après M. Verhoogen, la moelle osseuse joue- rait un rôle analogue, plus marqué peut-être à l’é- gard des alcaloïdes. Il ne lui a pas été possible de reconnaitre si elle exerce une actionsemblable sur les sels minéraux, la quantité de moelle que l’on peut recueillir chez un chien étant trop faible pour donner des résultats certains par l'analyse. Rapprochons de ce travail les expériences de M. Wertheimer (de Lille) sur le foie. Ce physiolo- giste prépare chez un chien une fistule biliaire, puis injecte de la bile de mouton dans la veine fémorale de l’animal. Après quelques minutes, la bile inoculée apparaît, en nature, dans le liquide complexe qui s'écoule de la fistule. On la recon- naît au spectroscope, la bile de mouton présen- tant quatre raies qu'on ne trouve pas dans la bile des autres animaux, notamment du chien. Le même savant a donné au Congrès la primeur de ses recherches sur l'élimination des pigments par le foie. Après avoir constaté que le foie est apte à rejeterensubstanceles pigments biliairesintroduits dans le sang, il a recherché si le foie se comporte de même à l'égard d’autres pigments d'origine végé- tale ou animale. Ses expériences ont d'abord porté sur la chlorophylle. Mais, comme cette substance n'est soluble que dans des véhicules qu’il y aurait eu grand inconvénient à injecter dans le sang, il a employé l’un des principes qui entrent, d’après M. Fremy, dans la constitution de la matière colo- rante des feuilles : l'acide phyllocyanique. Le phyl- locyanate de potasse offrait l'avantage d'être soluble dans l’eau sous l'influence d’un léger excès de bore, etde donner, aussi nettement que la chlo- rophylle, la bande d'absorption dans le rouge, si caractéristique. Chez un chien curarisé auquel il avait pratiqué une fistule de la vésicule biliaire, l’auteur a injecté dans la veine fémorale huit centimètres cubes d’une solution de phyllocyanate de potasse. Cette solution était d'un beau vert et montrait au spec- troscope la bande dans le rouge très prononcée, pour ne parler que de la bande principale. Le liquide qui s’écoulait de la fistule fut ensuite porté au spectroscope de quart d'heure en quart d'heure. Dans le deuxième échantillon de bile, ainsi examiné, on voyait déjà très nettement la bande de la chlorophylle, et le produit de sécré- tion, normalement jaune clair, avait pris une teinte verte. La coloration verle se prononça ensuite de plus en plus, se rapprochant de celle de la solu- tion qui avait servi à l'injection, en même temps que les caractères de la bande d’absorption mon- traient aussi que le pigment végétal passait dans la bile en quantité de plus en plus considérable. — Au bout de deux heures environ, l'animal ayant été sacrifié, on trouva dans la vessie 4 à 5 centi- mètres cubes d’une urine qui ne présentait ni teinte verte, ni trace de bande dans le rouge. Il y avait donc eu une action élective du foie sur le pig- ment végétal. — Il est à remarquer que la chloro- phylle et la bilirubine offrent, comme l'a établi M. le P' A. Gautier, les plus grandes analogies. Ces deux corps ont les mêmes dissolvants, jouent tous les deux le rôle d'un acide faible, etc., et en particulier l'acide phyllocyanique est isologue de la bilirubine. Il parait donc probable que ces deux corps sont éliminés par le foie de la même façon. $ 2. — Sécrétions internes. La physiologie des sécrétions subit, en ce moment, une évolution très remarquable. En 1889, MM. von Mering et Minkowski mirent en lu- mière une nouvelle fonction spécifique du pan- créas : ils avaient observé ce fait considérable que l'ablation fofale du pancréas rend le chien diabétique. Les expériences ullérieures de ces auteurs et de plusieurs autres, notamment de MM. Hédon, Gley, Lépine et Barral établirent que : 1° Le trouble de la nutrition, qui se produit alors, est caractérisé par un défaut dans l’utilisation des matériaux azotés : 2° ce défaut résulte de la sup- pression, — non des diastases digestives, — mais d'un ferment qui, normalement déversé par le pancréas dans le sang, a pour effet d'y détruire le SUGTEAE 1 Voyez à ce sujet le remarquable article consacré par M. Gley aux Récents travaux sur le Pancréas dans la Revue du 30 juillet 4891, t. IT, p. 469. 750 En ajoutant au rôle de glande digestive, que joue le pancréas, celui de glande vasculaire san- guine, ces découvertes ramenaient l'attention sur un ordre de.sécrétions fort peu étudiées depuis les mémorables expériences de Cl. Bernard sur la fonc- tion glycogénique du foie. On se demanda si les glandes vasculaires, comme le corps thyroïde et les capsules surrénales, dont la haute importance était connue, mais la fonction ignorée, n'auraient pas pour mission de déverser des ferments spéciaux dans le sang et d'y opérer soit des dédoublements utiles à la nutrition, soit la neutralisation d’excré- tions toxiques normales. À cette dernière idée conduisaient aussi les données bactériologiques : les excrétions bactériennes sont toxiques pour les microbes qui les produisent; ce que fait une cel- lule microbienne, il est naturel qu’une cellule d’un tissu le fasse aussi. Pourquoi les poisons continuel- lement fabriqués par nos cellules ne seraient-ils pas en partie neutralisés dans l’économie, comme semblent y être détruits par certains vaccins solubles les produits virulents des microbes patho- gènes? Enfin, les effels surprenants, annoncés par M. Brown-Séquard au sujet de l'injection du liquide testiculaire, sont venus aussi imposer la recherche des sécrétions internes dans tous les organes glandulaires, surtout ceux dont la fonction était demeurée inconnue. Cette question a provoqué, en ces derniers temps, des travaux d’un haut intérêt. Au Congrès de Liège, elle a été l’objet de plusieurs communica- tions importantes. M. Hédon (de Montpellier) a exposé des expé- riences nouvelles qui établissent un départ très net entre la sécrétion interne (intra-sanguine) du pancréas et la sécrétion complexe de cette glande dans le tube digestif. 11 a eu l’idée de maintenir la première et d’abolir la seconde chez le même animal, en extirpant du tube digestif le pancréas et le greffant sous la peau. Chez le chien on réussit à greffer le pancréas sous la peau de l’abdomen, en opérant de la façon suivante : On isole la portion duodénale descendante de la glande, en la séparant du reste par une section entre deux ligatures el en déchi- rant le mésentère. Il faut avoir soin de respecter un pédicule vasculaire qui aborde cette portion de glande par son extrémité, et qui est constitué par une artère et une veine venant des vaisseaux mésentériques. Grâce à la longueur de ce pédi- cule vasculaire, on peut attirer complètement hors de l'abdomen, à travers les lèvres de l'incision abdominale, le morceau de glande détaché. Ce fragment est fixé sous la peau du ventre décollée à côté de l’incision, et continue de recevoir des L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE éléments de nutrition, puisque la circulation est conservée. Quand la plaie est cicatrisée, le pan- créas ectopié n'a plus d'autre connexion avec la cavité abdominale que celle de ses deux vaisseaux qui passent à travers le tissu de cicatrice. On peut alors lier ces vaisseaux sans compromettre la vitalité de la glande, parce que des vaisseaux de nouvelle formation, venant du tissu cellulaire sous- cutané, ont pénétré dans son tissu. Le suc pan- créatique continue d’être sécrété par une petite fistule qui persiste en un point de la ligne de cica- trisation. Le liquide qui s’en écoule a tous les caractères de la sécrétion normale : il saccharifie l'empois d’amidon, émulsionne les graisses, digère l’albumine. Les résultats de l'opération sont très démons- tratifs : si, à un chien porteur d’une greffe, on extirpe tout le pancréas resté dans l’abdomen, la glycosurie ne se produit pas. Le chien non greffé, auquel on enlève toute la glande, devient, au con- traire, diabétique. L'absence de glycosurie doit donc être rapportée à la présence du fragment de pancréas sous la peau. En effet, si, sur un chien porteur d’une greffe et déjà privé de son pancréas intra-abdominal, on extirpe la greffe, la glycosurie se produit immédiatement et avec une très forte intensité, Si, chez un chien greffé ayant déjà subi l’extirpation du pancréas intra-abdominal, et non glycosurique, la greffe sous-cutanée du pancréas s'atrophie à la suite de la ligature de son pédicule vasculaire, — ce qui arrive dans quelques cas, — la glycosurie apparaît et augmente peu à peu d'intensité à mesure que l’atrophie de la greffe fait des progrès. Ces expériences sont évidemment décisives. M. Slosse (de Bruxelles) a présenté, au nom de M. Godart (de Bruxelles) et au sien, un chien thy- roïdectomisé ; la même opération pratiquée au même moment sur 13 autres chiens les avait tués. L'animal survivanta offert les symptômes habituels chez les opérés de ce genre, et cela avec une intensité remarquable. Peu à peu, ces symptômes s'amendèrent, les accès convulsifs se manifestèrent à des intervalles de plus en plus rares, et l'animal est passé, après quatorze mois, de l’état de misère physiologique le plus accentué, à un état de santé satisfaisant. Il semble donc, disent MM. Godart et Slosse, que le corps thyroïde n’est pas indispen- sable à l'animal adulte. C'est aussi à cette conclusion qu’aboutissent les recherches exposées par M. Moussu (d’Alfort). Ce | physiologiste n’a constaté aucune modification du sang, quant à la teneur en gaz, sucre et hémoglo- bine, chez les Carnassiers thyroïdectomisés, bien que des accidents graves soient toujours la consé- |! quence de l'opération. Celle-ci, d’après lui, même m7 > L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE 151 quand elle est complèteet ne laisse rien des glandes accessoires, semble sans effet nécessaire chez les Rongeurs et les Herbivores (cheval, âne, chèvre, bélier) et les Omnivores (porc) arrivés à l’âge adulte. Inversement M. Moussu a cité le cas d'un porcelet de dix jours chez lequel la thyroïdectomie entraîna le myxædème et finalement la mort. Généralisant ces observations, l’auteur a formulé les conclusions suivantes : Les carnivores étant mis à part, 1° le corps thyroïde doit surtout jouer un rôle important pendant le jeune âge; 2° les glandes dites accessoires sont, pour ainsi dire, sans importance physiologique quant à la fonction de suppléance qu'on leur a attribuée; 3° le régime n’a aucune action dans l’évolution des accidents; 4 le myxædème peut être produit aussi bien chez certains animaux que chez l'homme. Sur cette question du corps thyroïde, mention- nons enfin un travail de MM. Godard et Slosse, relatif à la toxicité urinaire des animaux éthy- roïdés. Les auteurs ont fait remarquer qu'avant l'opération la toxicité est si variable qu’on ne peut la comparer utilement à la toxicité après la sup- pression de la glande. Pour interpréter les résul- tals, ils ont comparé les moyennes de la toxicité avant et après l'opération. Cette méthode ne dé- cèle, suivant eux, aucun changement. Enfin ilsont signalé comme doublement vicieux le procédé qui consiste à doser la toxicité urinaire au moyen d’injections faites au lapin, la dilution des produits toxiques élant très variable, variable aussi la sen- sibilité de l’animal inoculé. Ce dernier point doit en effet fixer l’attention, car les auteurs annoncent avoir obtenu des effets très différents en injectant à des lapins de même poids des quantités égales de sels de strychnine. Or, jus- qu'à présent la toxicité de ces sels passait pour bien déterminée. M. R. Hürtle (de Breslau) a montré des injec- tions colorées des lymphatiques de la glande thy- roïde. Ces injections donnent l'impression que les parties vides du follicule communiquent avec les lymphatiques par des fentes séparant les cellules. Les capsules surrénales ont été, en ces der- niers temps, l’objet d'importantes recherches. M. P. Langlois (de Paris) a exposé au Congrès les résultats qui se dégagent à l'heure actuelle de l’ensemble des travaux qu'il a faits sur ce su- jet en collaboration avec M, Abelous (de Tou- louse). Rappelons d’abord que les premières recherches sur les fonctions des capsules surrénales datent de 1856. Dans un Mémoire, remarquable par l'ori- ginalité de l’expérimentation et la profondeur des aperçus, M. Brown-Séquard montrait, à cette époque, que la destruction totale des capsules en- traine la mort à brève échéance. Déjà l’illustre sa- vant insistait sur le fonctionnement des glandes à sécrétion interne, question qui tient aujourd’hui une si grande place dans les préoccupations des physiologistes. Mais le processus même, qui entraînait la mort de l’animal privé de ses capsules était demeuré inconnu. C’est cette question que MM. Abelous et Langlois ont abordée. Leurs premières recherches ont porté sur les grenouilles. La destruction des organes suprarénaux chez ces animaux est relati- vement facile au moyen d’une anse de fer rougie ou d'un galvano-cautère. Les auteurs ont abouti aux résultats suivants : 1° La destruction des deux capsules surrénalesen- traine fatalement et rapidement la mort (survie de 36 à 48 heures en élé, plus longue en hiver) ; 2° La destruction d’une seule capsule n’entraine pas la mort, l'animal ne présente aucun trouble ; 3° La destruction complète d’une capsule et la destruction de la moilié de l’autre n’entrainent pas la mort ; 4° Quand la destruction de la 2° capsule porte sur la presque totalité de l'organe, l’animal meurt; mais la survie est toujours plus longue qu'après la destruction complète des 2 capsules. La mort est précédée de phénomènes de paralysie débutant par les membres postérieurs, gagnant le train antérieur, puis l'appareil respiratoire hyoïdien. Ces troubles ne commencent à se manifester qu’au bout d’un certain temps : immédiatement après la double destruction des capsules, les grenouilles réagissent avec leur vivacité habituelle ; il n°y a pas trace de choc post-opératoire ; 5° La mort est le résultat d’une auto-intoxica- Lion. La preuve, c’est que l'injection du sang d'une grenouille mourante à la suite de la destruction de ses deux capsules à une grenouille récemment opérée et encore très vivace entraine, au bout de quelques minutes, la paralysie et la mort. Cette injection faite à une grenouille normale ou privée d’une seule capsule n’entraine que des troubles légers et passagers ; 6° Si, après la destruction des deux capsules, on insère dans un des sacs lymphatiques de la gre- nouille opérée des fragments de rein avec les cap- sules attenantles pris à une grenouille normale, la survie de la grenouille opérée est manifestement prolongée (5 à 6 jours en moyenne) ; 1° L'injection intra-veineuse ou sous-cutanée d'extrait aqueux préparé avec des capsules surré- nales produit à peu près les mêmes effets. De quelle nature est la paralysie qui se mani- feste après injection de sang de grenouille acap- sulée ou après la destruction des deux capsules ? Cette paralysie rappelle beaucoup la paralysie cu- 7152 L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE rarique. Elle porte en effet sur les terminaisons des nerfs dans les muscles, comme les auteurs s’en sont assurés en répélant l'expérience classique de CI. Bernard (ligature d’une patte postérieure au-dessus du sciatique). Cependant l’irritabilité musculaire paraît un peu plus atteinte que dans l'intoxicalion curarique. Ainsi se trouve établi ce fait capital : La mort des grenouilles à la suite de la destruction des capsules surrénales est la conséquence de l’accu- mulation dans l'organisme de substances toxiques qui normalement sont modifiées, neutralisées ou détruites par un produit de secrétion interne que les capsules surrénales déversent dans le sang. Ces substances toxiques, principalement cura- risantes sont produites au cours des échanges chimiques et probablement au cours du travail musculaire, car les grenouilles fatiguées par des mouvements réactionnels provoqués, meurent beaucoup plus vite que des grenouilles au repos. MM. Abelous et Langlois ont poursuivi leurs investigations sur les Mammifères, presque exclu- sivement sur le Cobaye. Ils sont arrivés à la même loi. Les animaux meurent par paralysie. Quelque temps avant la mort, le sciatique n’est plus exci- table; même quand le cœur bat encore, l'excitation faradique du nerf phrénique n’amène aucune con- traction du diaphragme, alors que ce muscle, excité directement, se contracte d'une façon éner- gique. Cette paralysie curariforme résulte d’une auto-intoxication, car l'injection de 5 à 6 centi- mètres cubes de sang pris à un cobaye qui vient de mourir, faite sous la peau d’une grenouille normale, entraine rapidement une paralysie complète, para- lysie portant sur les terminaisons des nerfs mo- teurs. L'injection de sang de cobaye mort à la suite d’autres traumatismes ou de cobayes mono- capsulés et sacrifiés ne produit pas de troubles chez les grenouilles auxquelles ce sang est injecté. Ces faits permettent d'étendre aux Mammifères les conclusions que comportaient les recherches sur la grenouille : Les capsules surrénales sont des glandes vasculaires sanguines destinées à élaborer des substances de nature encore inconnue, mais dont l'existence est certaine et qui sont indispensables à la vie. Ce sont en effet des subs- lances anti-toxiques qui neutralisent, modifient ou détrui- sent des matières toxiques se produisant au cours des échanges nutritifs et spécialement du travail musculaire. A l’occasion de ce travail, M. Langlois a établi un rapprochement entre l’état des capsules surré- nales et la maladie d'Addison. Dans cette maladie, la pigmentation anormale de la peau n'est pas le symptôme unique : l’impotence générale est non moins caractéristique. Or, MM. Abelous et Lan- glois signalent une relation entre cette impotence et l’altération des capsules. Leurs recherches, faites avec M. Charrin, ont établi que chez l'addi- sonien vrai la courbe de la fatigue est spécifique; suivant qu'on obtiendrait ou non cette courbe chez le malade, on pourrait, d’après ces auteurs, conclure à l’altération ou à l'intégrité des capsules. IV. — MUSCLES ET SYSTÈME NERVEUX C'est sur ce chapitre de la Physiologie que les communications ont été les plus nombreuses. M. E. A. Schäfer (de Londres) aexposé une série de magnifiques préparations de fibres musculaires d'insectes durcies, et les a montrées en projection; on y voit les fibrilles musculaires aux états dits allongé et contracté, les disques musculaires (élé- ment sarceux), etc. Dans les disques obeurs de chaque fibrille se trouvent, de chaque côté, jus- qu'au voisinage de la strie de Hensen, "mais non plus loin, de petits canalicules clairs. Ceux-ci ne sont sans doute autres que les fibrilles longitudi- nales bien connues. Au moment de la contraction, l'épaissseur desstries claires diminue par suite dela pénétration, dans les canalicules, des disques obs- curs de la substance monoréfringente; le diamètre longitudinal des disques obscurs augmente alors. Quant aux expériences, elles ont surtout porté sur les éléments nerveux. Nous considérerons suc- cessivement celles qui ont trait à l’action des poisons sur l’excitabilité nerveuse, celles qui se rap- portent à divers modes d’excitation et de fonction- nement des nerfs, aux localisations cérébrales du mouvement et de la sensibilité, enfin à l’excitabi- lité générale du protoplasme. $ 1. — Action des poisons sur l’excitabilité des nerfs et des muscles. M. Wertheimer (de Lille) nous afmontré d’élé- gantes expériences relatives à l’action de la strych- nine sur les nerfs vaso-moteurs. Cet alcaloïde est, comme on sait, un agent vaso-constricteur des plus énergiques. C’est au point qu’il peut faire monter la pression artérielle au double de sa va- leur normale, même quand, par la curarisation, on a éliminé l'influence des convulsions des museles de la vie animale. Ce qauiest moins connu, c’est que la même substance peut aussi pro- voquer la vaso-dilatation. M. Wertheimer à fait l'expérience que voici : il injecte dans la veine fémorale d’un chien curarisé 2 à 4 milli- grammes de sulfate de strychnine : une rougeur excessivement intense envahit, au bout de quelques secondes, la muqueuse des lèvres, des gencives et de la langue. Si l’on enregistre en même temps la pression, on voit que la rougeur se manifeste soit L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE 153 au moment où la pression arrive à son maximum, soit un peu plus tard; puis, la congestion disparait en même temps que la tension baisse. L’explication du phénomène est assez simple : la strychnine excitenon seulement les centres vaso- constricteurs, mais encore les centres antagonistes. Par conséquent, dans les régions où les actions vaso-dilatatrices prédominent, celles-ci se mani- festeront seules. Après section unilatérale du lin- gual, la rougeur disparait dans la moitié de la langue qui correspond à la section nerveuse. Les effets de la strychnine sur les centres nerveux font donc ressortir d’une façon saisissante la cause de l’antagonisme observé entre la circulation pro- fonde et la circulation périphérique, c’est-à-dire le jeu de l’un des mécanismes qui assurent la ré- gulation de la pression artérielle. M. G. Grigorescu (de Bucarest) a exposé l'analyse graphique comparative à laquelle il s’est livré au sujet de l’action que les substances toxiques exercent sur l’excitabilité des muscles et des nerfs périphériques. A l’état normal l’excitabilité offre à peu près les mêmes caractères dans les nerfs cen- trifuges, les muscles et les nerfs sensitifs : si, par exemple, on lance un même courant induit d’eftet minimum successivement dans le nerf sciatique d’une grenouille, le muscle gastrocnémien et la patte du même membre, les contractions du gas- trocnémien servant de réponse à ces trois systèmes, on obtient sur l'appareil inscripteur (rois tracés identiques. Même résultat, quand l’animal a reçu au préalable en injection hypodermique l’une des substances suivantes : morphine, narcotine, phy- sostigmine, pilocarpine, aconitine, cocaïne, véra- trine, digitaline, bromure de potassium, caféine, théine, chloral hydraté. Ces agents diminuent dans le même rapport l’excitabilité des trois sys- tèmes. Au contraire, après injection d’opium, narcéine, codéine, papavérine, les tracés sont nettement discordants : l’excitabilité est diminuée dans les nerfs, mais non dans les muscles. Sem- blable discordance étant produite aussi par le cu- rare, l’auteur se demande si les poisons énumérés en dernier lieu agissent à la façon du curare sur les terminaisons périphériques des nerfs. J1 en vient à cette supposition que l’uniformité d’excita- bilité serait maintenue après l'injection des toxiques à action centrale, tandis que les poisons à action périphérique la détruiraient complète- ment. Si cette hypothèse était bien fondée, elle entrainerait, en thérapeutique, d’importantes innovations : on pourrait opposer les substances du premier type à celles du second. M. Grigoreseu a obtenu cet antagonisme en opposant le butyl- chloral à la strychine ; à ce dernier poison il a ainsi trouvé un puissant antidote. Toutefois, comme ila eu soin de le faire remarquer, ce résultat est en- core insuffisant pour asseoir la théorie. Rapprochons de cet intéressant travail sur les poisons nerveux les recherches de MM. N. Gréhant et Martin (de Paris), relatives à l’action physio- logique de la fumée d’opium. On sait que l’opium est fumé par cinq millions de Chinois; le fumeur n’emploie point l'extrait gommeux d’opium, mais une préparalion spéciale obtenue par fermenta- tion et qui à recu le nom de chandoo. Il est couché et il introduit dans un trou pratiqué dans le fourneau de la pipe une petite boulette qu'il prépare en faisant agir la flamme d'une lampe sur une gouttelette de chandoo; la même flamme sert à décomposer l’opium; il se produit une fumée épaisse que le fumeur fait pénétrer dans les poumons par une inspiration aussi forte que possible : à la neuvième ou dixième pipe, sur- vient un sommeil profond, accompagné, paraît-il, de rêverics agréables. MM. Gréhant et Martin se sont servis du chan- doo que M. le D' Kermogant leur avait envoyé de Saïgon. N'osant expérimenter sur l’homme, ils ont fait respirer à des chiens la fumée provenant de la décomposition de 10 grammes d’extrait d’opium ou de 10 grammes de chandoo, quantité qu’un Chinois fumerait en quinze jours. L'appareil qui leur a permis de réaliser l'expérience et qu'ils ont fait fonctionner devant les membres du Congrès, se compose d'un creuset C (fig. 11) qui a reçu — Appareil servant à faire fumer l’opium. Fig. 11. 10 grammes d’exirait d’opium, d’un couvercle métallique scellé au plâtre, traversé par deux tubes {et t': le premier tube f est uni à une sou- pape de Muller I servant à régler l'inspiration; le second tube {' communique avec un tube réfrigé- rant R, traversé par un courant d’eau froide ; en outre, un tube en T, réuni à une soupape de Muller E, servant à l'expiration, communique avec une muselière de caoutchouc fixée sur la tête d’un chien attaché convenablement ; on chauffe le creu- set avec un bec de Bunsen et on fait respirer à l'animal tous les produits de décomposition. Ceux- ci circulent dans les poumons et donnent encore, après s'être dissous en partie dans l’eau de la sou- pape d'expiration, une fumée abondante qui s’é- chappe dans l'air; l'expérience dure une heure. 754 Les auteurs ont mesuré chez un chien la pres- sion normale du sang dans l'artère carotide. Ils ont reconnu que le second tracé, obtenu lorsque l'animal à respiré la fumée d’opium, recouvre exactement le premier tracé; ainsi les produits de décomposition de l’opium par la chaleur ne pa- raissent pas modifier l'énergie des battements du cœur. MM. Gréhant et Marlin pesèrent ensuite l'acide carbonique exhalé en deux minutes par un chien; ils oblinrent un poids plus grand d'acide carbonique exhalé par l'animal qui avait fumé 10 grammes d'extrait d’opium. Cette différence s'explique facilement : les produits de décomposi- tion de la matière organique renfermaient de l’acide carbonique, qui s'était fixé dans le sang et dans les tissus. Dans une autre série d'épreuves, l'inhalation de la fumée d’opium fut suivie de l’inhalation de la vapeur fournie par un mélange d'un quart de chlo- roforme et de trois quarts d'alcool (procédé de M. le D' Quinquaud); on remarqua que l’insen- sibilité complète de la cornée est précédée d’une période d’agitation beaucoup moins prononcée que si l’animal était à l’état normal. Comparant ces fails, constatés chez les ani- maux, à ceux qu'on a depuis longtemps observés chez l’homme, MM. Gréhant et Martin concluent que, si l’on considère la fumée d'opium comme un réactif physiologique, il y a une différence consi- dérable entre le système nerveux central de l’homme et celui d’un Mammifère. C’est encore un problème d’action toxique sur le système nerveux qu'ont résolu MM.J. Courmont et Doyon (de Lyon), en étudiant la physiologie pathologique du tétanos. Dans un article que nos lecteurs n’ont certainement pas oublié {, M. le D' Vincent, exposant ses travaux, faits avec M. Vaillard, et ceux de quelques autres microbio- logistes, montrait que le microbe de Nicolaïer doit son action tétanisante aux substances ou à l’une des substances qu'il excrèle. Il restait à savoir si ce poison soluble porte son action toxique sur le muscle ou sur le système nerveux. MM. Courmont et Doyon ont essayé d’élucider la question. Il leur a paru difficile de la bien étudier sur le lapin et le cobaye. Chez ces animaux, l’évolution de la ma- ladie est trop rapide, surtout chez le cobaye. Les auteurs ont réussi à inoculer le tétanos à la gre- nouille, Chez cet animal, les éléments anatomiques sont plus résistants, partant l'analyse physiolo- gique plus facile. Sur le lapin et le cobaye téta- nisés, on voit, après l’empcisonnement par le curare, subsister encore de la raideur de certains muscles. Chez la grenouille, les membres de- 1 Voyez la Revue du 15 mai 1891, t. II, p. 296. L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE viennent absolument flasques. Le poison tétanique n'est donc pas un poison musculaire, ce qu'on ne pouvait voir sur les deux Rongeurs. Lés auteurs énervèrent ensuite la patte posté- rieure d'un lapin; ils enlevèrent la moelle lom- baire sur le lapin et le cobaye. Si l'opération est complète, les pattes ainsi privées de leurs con- nexions nerveuses avec la moelle sont à l'abri d’un télanos même généralisé. Mais rien n'est moins cerlain que la réussite de ces opérations. Souvent elles sont incomplètes. Aussi les résultats ne peu- vent-ils entraîner une conviction absolue. L'expé- rience suivante, répétée souvent sur la grenouille, est au contraire décisive : On sectionne les racines qui innervent d'un côté la palte postérieure d’une grenouille ; on inocule une goutte de culture en un point quelconque. Au bout de 6 à 7 jours la gre- nouille manifeste le tétanos.Seulela patte énervée reste toujours absolument indemne. C’est donc sur lesystème nerveux, non sur le muscle, que le poi- son tétanique exerce son influence. $ 2. — Excitation et fonctionnement des nerfs. Indépendamment de l’action chimique, divers facteurs interviennent dans l'excitation des muscles et des nerfs. L'étude des phénomènes qu’ils provo- quent semble à l’ordre du jour de la physiologie, si l’on en juge par le nombre des communications présentées sur ce sujet. M. Francis Gotch (de Liverpool) a exposé les résultats,de ses expériences relatives à l'influence que les variations de la température exercent sur l’excitabilité des muscles etdes nerfs. Généralisant des faits observés sur les nerfs de la grenouille, on avait supposé que, dans certaines limites, l’excita- bilité des nerfs et des muscles augmente avec l'élé- valion de la température, au moins jusqu’à 30° C. Hering et Bidermann ont signalé une exception à cette règle : l'augmentation d’excitabilité de la gre- nouillerefroidie.OrM.Gotcha trouvé que, lorsqu'on emploie les courants d’induction pour exciter un nerf, l'élévation locale de température ainsi produite (jusqu’à 35°C.)rendle tissu dela région chauffée plus apte à éprouver cette forme destimulation. Comme le phénomène était hors de toute proportion avec un changement dans la résistance du tissu dû à la température, M. Gotch conelut qu'à cette tempéra- ture le nerf devient réellement plus sensible à ce mode d’excitation. Il en est tout autrement des autres stimulants: l'excitation à la fermeture et à l'ouverture d’un courant galvanique (si courtes soient-elles), l'excitation par stimulants mécani- ques ou chimiques, sont loujours favorisées par le refroidissement dusiège de l'excitation. Ce phé- nomène s’observe même quand le refroidissement L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE 755 atteint 3° C. L'auteur l'a constaté sur le nerf mo- teur du muscle de la grenouille, le muscle cura- risé, la substance musculaire du cœur et les nerfs moteurs des muscles des Mammifères. Ainsi appa- rait ce fait remarquable que le nerf sciatique du chat, du lapin, etc..., refroidi dans son ensemble Jusqu'à 4° C., est beaucoup plus sensible qu'à la température normale à ces derniers stimulants. On voit donc, dit M. Gotch, que la propriété de répondre à des stimulants {c'est-à-dire l’excitabi- lité) est influencée par une température diamétra- lement opposée à celle qui agit le plus sur la con- ductibilité du tissu. Ses expériences tendent, selon lui, à demontrer que le pouvoir stimulant du courant induit est absolument différent du pouvoir stimulant des courants galvaniques et des agenis mécaniques ou chimiques. Dans toutes les expériences, il importe donc de lenir compte du mode d’excitation. Signalons à ce propos la méthode dont M. Cybulski(de Cracovie)est venu préconiser l’emploi. Il recommande d’exciter les muscles et les nerfs par les décharges du con- densateur. L'action physiologique de la décharge dépend uniquement de son énergie; cette loi res- sort, dit l’auteur, des nombreuses expériences qu'il a instituées avec son collaborateur, M. Zanietowski, expériences dans lesquelles ces savants ont fait usage de plusieurs condensateurs avec des diffé- rences variées de potentiel. Selon M. Cybulski, ce procédé est actuellement le seul qui permette de définir d’une façon complète l’excitation élec- trique : il le recommande en conséquence comme méthode générale d’excitation. — M. Mendelsohn (de Saint-Pétersbourg) a fait observer que cette méthode est depuis longtemps pratiquée en France. M. F. Marès (de Prague) a montré un appareil (fig. 12) servant à l'excitation des nerfs par des courants d’induction magnétique. L'étude de l’exei- tation des nerfs par de tels courants a été jusqu'à présent assez rare. En ces derniers temps, elle a été abordée par MM. Prützner et Schott, qui ont employé les courants de la machine de Stührer et de la sirène électrique de Prützner. M. Joubert, il y a quelques années, avait proposé d'imprimer un mouvement rotaloire ou d'oscillation à un barreau aimanté placé en présence d’une bobine. Mais jusqu'à présent ce projet n’a pas élé réalisé. L'appareil de M. F. Marès (fig. 12) résout le problème d’avoir des courants d’induction magné- tique physiquement déterminés et variables à vo- lonté : un aimant A traverse une bobine d’induc- tion B avec une vitesse régulièrement variable, conformément aux lois de la chute des corps. C’est une sorte de machine d'Atwood qu'a employée M. F. Marès. Le mouvement de l’aimant A, passant au travers de la bobine B, donne naissance à un courant électrique, composé de deux variations de sens contraire; la quantité d'électricité mise en mouvement dépend de la force magnétique de l’ai- ! (l 1 ! 1 ( | l [ 1 i Û es rm — v l 1] | LL Fig. 13. — A, Schéma des secousses musculaires. — B, Intensités des parties du courant induit auxquelles correspondentles secousses musculaires (Schéma). Fix. 12, — Appareil de . Marès. — A, ai- mant;E,fil; R, roue ; D, contre poids: B,bo- bine : C, vis pour fixer la bobine à di- verses hauteurs sur l'échelle E. mant et de la nature de la bobine; elle est indé- pendante de la vitesse de ce mouvement. En faisant agir cette onde électrique sur le nerf moteur, on trouve que l'excitation, mesurée par l'amplitude de la secousse musculaire, dépend de la vitesse du passage de l’aimant au travers de la bobine. En faisant varier cette vitesse régu- lièrement et symétriquement, on peut faire tracer par le muscle des courbes d’une netteté parfaite, que l’on dirait gravées par une machine; cette régularité absolue démontre que, dans ce procédé, l'excitation du nerf est physiquement délerminée. L'auteur a exposé un grand nombre de graphi- ques témoignant de cette régularité. L'inten- sité du courant étant minime et le courant étant composé de deux variations de sens contraire, on peut faire plus de 500 excitations du même nerf sans le fatiguer, ni le polariser. L'appareil de F. Marès fonctionne aussi comme un rhéotome pour fractionner l’onde électrique et n'en lancer qu'une partie dans un nerf ou dans un galvanomètre. Si l'on procède d’une façon succes- sive, pour étudier l'effet de chacune des portions 756 L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE de l'onde, au moment où l’aimant met le rhéotome en action, on obtient un tracé composé de se- cousses musculaires (A, fig. 13), el un autre corré- laûüf (B, fig. 13), dont les ordonnées indiquent l'in- tensité de la partie du courant induit qui a produit l'excitation correspondante du nerf. De cette sorte on peut construire la courbe de l'inten- sité de l’onde électrique induite dans une bobine par le passage d’un aimant. L'appareil de M. Marès convient, comme on le voit, pour étudier la relation qui existe entre l’ex- citation du nerf et les divers facteurs physiques de cette excitation. L’instrument permet, en effet, de faire varier l’un après l’autre chacun de ces facteurs, offrant ainsi les avantages qu’on avait demandés jusqu'ici aux condensateurs. Les services que l’électromètre capillaire de Lippmann rend tous les jours à l’étude des cou- rants dans les muscles et les nerfs ont suggéré à MM. Burdon Sanderson et Burch (d'Oxford) l’idée d'enregistrer simultanément sur la même plaque photographique : 1° les excursions de la colonne mercurielle de l’électromètre, qui traduisent les variations électriques du muscle pendant la con- traction ; 2° les phases du raccourcissement méca- nique du muscle; 3° le graphique du temps. Ces physiologistes ont projeté, au moyen de la lan- terne, plusieurs exemples des tracés obtenus et toute une série de photographies représentant la disposition de leurs appareils. La question de l’infatigabilité des nerfs, qui préoccupe en ce moment les neurologistes, a été traitée par M. N. Wedensky (de Saint-Pétersbourg). De ses recherches antérieures ce savant avait conclu que le nerf peut supporter pendant plu- sieurs heures une irritation continuelle sans se fatiguer, et le fait avait été admis à la suite de nouvelles expériences, par MM. Bowditch, Mas- chesck et Szana. M. Wedensky, allant plus loin, soutient aujourd’hui que le nerf, simple conduc- teur, est absolument infatigable. Il en donne pour preuve la comparaison, réalisée par M. Four dans son laboratoire, entre la survie d’un nerf irrité el celle d’un nerf demeuré au repos. Les expériences ont été faites sur les nerfs des animaux à sang chaud ; comme indicateur de leur vitalité, on se servait de leurs actions électriques sur le téléphone et sur le galvanomètre. Les deux nerfs manifeslaient la même survie et mouraient parallèlement. M. Wedensky conclut que l'activité du nerf n’est accompagnée d'aucune fatigue ni d'aucun épuisement. Le même auteur a fait fonctionner devant les membres du Congrès un dispositif ingénieux pour déceler les courants d’action dans les nerfs. Le téléphone, relié directement au nerf (2 ou 4 nerfs sciatiques de grenouilles), fait entendre le son qui correspond au nombre des courants in- duits excitants. L'intensité du son croit aussitôt qu'on renforce un peu les irrilalions; celles-ci atteignent un maximum, après lequel il n’y a plus renforcement du son téléphonique ; au contraire, le son commence à s’affaiblir quand les irriltations deviennent très fortes. Si l’on tue le nerf par l’ammoniaque, le son téléphonique disparait. Ce sont seulement les courants excessivement forts qui font entendre, sur le nerf tué, des actions unipolaires, lesquelles se caractérisent par un timbre singulier et par leur renforcement. L'expérience suivante, faite par M. Wedensky sur ses auditeurs, a eu beaucoup de succès : le sujet plonge les deux mains dans deux baquets contenant une solution conductrice; les baquets sont reliés à deux téléphones appliqués aux deux oreilles de l'observateur. Chaque fois que l’homme en expérience ferme énergiquement les deux poings ou l’un d'eux, on entend dans le téléphone un bruit rappelant le son que l’on perçoit par l’aus- cultation directe du muscle. Ainsi le téléphone peut servir à révéler les courants qu'engendre la contraction volontaire !. M. Wedensky l’a en outre utilisé pour étudier les changements électrotoniques de l’excitabilité du nerf. L'appareil complète heureusement les indications du galvanomètre : les indications de ce dernier instrument ne dépendent pas de la section transversale du nerf, autrement dit de l'intensité du courant nerveux à l’état de repos. Tandis que le galvanomètre, dans les cas où les courants de repos sont très faibles, n'indique pas du tout de variations négatives ou même traduit seulement les variations positives, le téléphone continue toujours de révéler l’activité du nerf. On n'a qu'à appliquer au nerf une nouvelle section transver- sale pour observer de nouveau au galvanomètre des variations négatives intenses. En outre, le téléphone avertit, mieux que tout autre appareil, de l'approche de la mort du nerf. À mesure que le nerf meurt, le son téléphonique perd de sa netteté et se complique de bruits différents; enfin, immédiate- ment avant la mort, on n'entend qu’un bruit faible; alors le téléphone devient moins sensible que le galvanomètre. C'est le contraire que l’on observe sur un nerf frais. ! Cette élégante expérience rappelle celle que nous à récemment montrée à Londres un autre physiologiste, présent au Congrès de Liège, M. Waller. Ce savant relie une solution saline à un électromètre capillaire de Lippmann. Son chien plonge les pattes de devant dans la solution. Tant qu’on ne s'occupe pas de l'animal, aucune dénivellation ne se produit dans l’appareil; mais, si on le caresse, même de là voix; immédiatement la colonne mercurielle se met à osciller. L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRES INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE Le mème auteur nous a rendus témoins d’une série d'expériences très délicates touchant l’opti- mum et le pessimum d'action que les irritations électriques intermittentes exercent sur le couple neuro-musculaire. Un musele de grenouille excité par l'intermédiaire du nerf avec des courants induits forts et fréquents (l'interrupteur donnant 100 vibrations par seconde) se relâche bientôt; si l'ên affaiblit alors les irritations jusqu’à un certain degré (optimum), le muscle reprend les contrac- tions; les irritations étant renforcées de nouveau, le musele se relâche de nouveau (pessimum). Pour montrer que le pessimum met le muscle en étal d'arrêt, on l’excite par des courants modérés el peu fréquents appliqués directement à ses deux extrémités; l’irritation pessimum du nerf fait dis- paraitre les contractions produites par les courants appliqués au muscle. Nous ne saurions quitter ces études sur les nerfs sans mentionner deux très intéressantes commu- nications. M. W. M. Bayliss (de Londres) a montré de magnifiques courbes de pression sanguine in- diquant l'influence que le nerf dépresseur exerce sur la circulation. Ces tracés expriment, d’après l’auteur, les lois suivantes : 1° La baisse de pres- sion qui suit l’excitation du nerf est due à la dila- tation des vaisseaux sanguins des membres toul autant que des vaisseaux des viscères, probable- ment aussi de ceux de la langue. Il n’y a donc pas, dans ce cas, antagonisme entre les vaisseaux des viscères et ceux des membres; 2° Cette dilatation vasculaire est probablement due à une excitation directe des vaso-dilatateurs et n’est pas une inhibi- Uüion réflexe du tonus vasculaire; 3° Le nerf dépres- seur ne se fatigue pas aisément. L’effet dépresseur est tout aussi marqué à la fin d’une période d’exci- tation de 17 minutes qu’au début; 4° L’accommoda- tion de l'appareil vasculaire à de grandes quantités de liquide injecté dépend de l'intégrité du nerf dépresseur. M. Léon Fredericq, —ayant mis tous ses ins- truments au service de ses hôtes, — s’est borné à nous montrer un curieux phénomène, dont l'étude peut se faire sans appareil compliqué. Il s’agit de l'aulotomie, dont les recherches de l’auteur ont, comme on sait, fait connaitre le mécanisme. Dans le cas du Crabe (Curcinus mœnas), la condition, pour que l’animal casse ses pattes, est que le nerf sen- sible de la patte soit irrité mécaniquement. Cette cassure est réalisée par la contraction du musele extenseur du second article de la patte : elle n'est nullement due à la fragilité exagérée de ces appendices. Sur un crabe mort ou paralysé, les pattes résistent, avant de se rompre, à un effort de traction représentant plus de cent fois le poids du corps de l’animal. Dans l'expérience réalisée 157 devant le Congrès, il fallut suspendre un poids de 4 kilogs et demi pour arracher la patte. Cette communication a été faite dans le petit amphithéâtre de l’Institut de Zoologie, spéciale- ment aménagé pour les démonstrations. La salle est obscurcie et un faisceau de lumière électrique est concentré sur la table d'expérience. La dispo- sition de l’amphithéàätre, en forme d’entonnoir, permet à tous les auditeurs de voir, sans se dépla- cer, le détail des manipulations et autopsies. $ 3. — Localisations cérébrales. La recherche des localisations cérébrales a tenu une grande place au Congrès. M. Schäfer (de Lon- dres)a apporté à celte étude une contribution pleine d'intérêt, qui a grandement étonné ses confrères. Comme l'ont établi les expériences de M. Ferrier, de M. Yeo, et celles de l’auteur, l’ablation des lobes frontaux provoque, chez le singe, un certain élat de stupidité et d’apathie, ce qui avait fait croire à une diminution de l’activité psychique. Ayant vu souvent les mêmes symptômes se pro- duire à la suite de lablation d’autres parties du cerveau, notamment des lobes temporaux, M. Schä- fer s’est demandé si les phénomènes observés ne dépendraient pas tout simplement d’une action mécanique, les parties cérébrales laissées en place après l’ablation manquant de soutien. Pour véri- fier le bien-fondé de cette hypothèse, il a cherché à supprimer le fonctionnement du lobe frontal en pratiquant une simple section, sans rien enlever de la substance du cerveau. Ce procédé offre d'’ail- leurs l’avantage de diminuer l’hémorragie. Or, dans toutes les expériences où cette méthode des sections fut substituée à celle de l’ablation, M. Schä- fer ne remarqua ni diminution de l'intelligence, ni apathie. Les animaux lui parurent normaux sous tous les rapports. Il serait très intéressant de les sacrifier pour vérifier à l’autopsie dans quelle mesure les parties ont élé isolées par sec- tion. Ces recherches sur le cerveau semblent réserver encore bien des surprises aux physiologistes. L'un des plus autorisés en la matière, M. Vitzou (de Bucarest), a décrit les effets obtenus chez le chien par l'hémi-décérébration, opérée en un temps. L'opération portant sur la totalité de l'hémisphère gauche, les membres du côté droit perdent de ce fait toute tonicité : ils restent flasques, même quand l’animal, guéri de l’opération, a repris sa gaité accoutumée, Si l’on couvre son œil droit, on observe de l’hémianopsie homonyme. Pour que l'œil gauche voie très mal, il est d'ail- leurs inutile d'enlever tout l'hémisphère du même côté : il suflit d’en extirper la partie postérieure 158 L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE (Are, 2° et 3° circonvolutions parallèles) correspon- dant au lobe occipital des autres Mammifères. Ce résultat, en désaccord avec les observations de M. Goltz, prouve, dit M. Vitzou, que, dans le chiasma des nerfs opliques, l’entrecroisement des fibres est incomplet. Il conduit aussi l’auteur à localiser les centres visuels dans les lobes occi- pitaux. Cette question, tout à l’ordre du jour, des loca- lisations cérébrales, s’est enrichie d’une impor- tante acquisition, dont le Congrès a eu la primeur. M. Ch. S. Sherrington (de Londres) y a exécuté, sur des macaques, des expériences remarquables qui lui ont permis de fixer exactement la position des centres moteurs de l'anus, du vagin et des orteils. L'auteur fit d’abord constater que la cons- triction et la poussée en avant de l’anus peuvent être produites par l'excitation de l'hémisphère cérébral. Puis il montra que le mouvement de l'anus, — constriction avec ou sans poussée en avant, — peut provenir de toute la portion assez étendue de substance grise, qui est ombrée dans la figure ci-jointe (fig. 14). En dehors de ce champ, l’excitation n'est efficace que si elle va jusqu'à produire des convulsions épileptoïdes ; elle se Fig. 14. — Centres cérébro-moteurs de l’anus et du vagin. manifeste en dernier lieu dans le processus du phénomène jacksonien. Les effets de l'excitation apparaissent, au contraire, dès le début, quand on la pratique à l’intérieur de la surface qu'in- dique la figure. Une faible stimulation dans la petite surface la plus fortement ombrée déter- mine un mouvement localisé de l'anus sans constriction des organes voisins. À mesure qu’on éloigne les électrodes du point focal pour les por- ter en arrière (surface moins fortement ombrée), on provoque des mouvements de l'anus, du vagin et des orteils ; ces mouvements sont simultanés ou consécutifs.Lorsquelesélectrodes sont transportées au delà de la région focale (la plus ombrée) on observe des mouvements de l'anus, du vagin et de la queue ; celle-ci s'incline à l’opposé de l’excita- tion. Le foyer cortical du mouvement de l'anus se trouve donc, chez le macaque, au milieu du « cen- tre caudal » de Ferrier. Bien qu'il ne soit pas absolument unilatéral, le mouvement anal commandé par la substance grise s’accuse plus sur le côté opposé que sur le même côté du corps. Si l’on excite la surface corticale gauche au moyen de courants très faibles, le côté droit de l’anus se meut plus que le gauche; le phénomène est très net ; à mesure que croit l'exei- tation, cette prépondérance d’action devient de moins en moins sensible et finit par ne plus se manifester. L'inégalité de l'influence bilatérale apparait surtout quand on introduit un levier dans l'anus, car on le voit dévier du côté de la moindre action. $ 4. — Excitabilité générale du protoplasme. À ces travaux sur le système nerveux rattachons les curieuses expériences exposées par M. Max Verworn (d’Iéna) relativement à l'excitation élec- trique d'une substance infiniment moins spécia- lisée que la cellule nerveuse : le protoplasme des Rhizopodes et des Infusoires. Les observations de ce savant nous montrent dans la matière vivante la moins différenciée le rudiment des phénomènes d’électro-physiologie qu’on rencontre au maximum de complication chez les animaux supérieurs. M. Kühne déjà avait constaté que le protoplasme de l’Actinosphaerium, Rhizopode d’eau douce, mani- feste, aussitôt après la fermeture d’un courant constant, des phénomènes d'irrilation à l’anode. M. Kühne avait fait ses expériences avec des élec- | trodes métalliques. M. Verworn, pour éviter l’effet chimique des produits électrolytiques, s’est servi d’électrodes dites « impolarisables ». Il a ainsi confirmé les résultats de M. Kühne. Chez tous les Rhizopodes, l’irritation est caractérisée par la ré- traction des pseudopodes et, si lirritation est surmaximale, par la dissolution du protoplasme. Un phénomène très intéressant a été constaté chez les Infusoires. Si l'on met entre les électrodes impolarisables un grand nombre de Paramæcium, In- fusoire cilié (fig. 15,4), dès que le courant est fermé, Fig. 15. — Paramæcium. tous les individus dirigent leurextrémité antérieure vers le pôle négatif, et, nageant dans cette direc- tion, s’assemblent à ce pôle. Au bout de quelques minutes, le pôle positif est tout à fait désert. Ce phénomène est un effet du courant galvanique sur les organismes uni-cellulaires, tout analogue L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE 159 à l'effet de la lumière, de la chaleur, des excitants chimiques ou mécaniques, etc., c’est-à-dire ana- logue à l’héliotropisme, thermotropisme, chimio- tropisme, hiémotropisme, ete. Pour celte raison, M. Verworn lui a donné le nom de « galvanotro- pisme ». Si l'on emploie des courants très forts pour faire une irritation surmaximale, on voit que la partie postérieure du Paramæcium, qui est di- rigée au pôle positif, montre des phénomènes de contraction (fig. 15, b). Cela prouve que le galvano- tropisme du Paramaæcium est produit par une irri- tation localisée à l’anode. La plupart des Infusoires ciliés se comportent comme le Paramæcium. Maïs, si l'on fait la même expérience avec des Opalines’ (fig. 16, a), Infusoires vivant dans l'intestin de la Fig. 16. — Opalines. grenouille, ou avec certains Infusoires flagellés, on voit l’effet contraire : tous les individus, quittant le pôle négatif, s'assemblent au pôle po- silif. Après avoir constaté que le galvanotropisme négatif (cas du Paramæcium) est produit par une irritation de l’anode, M. Verworn supposa que le galvanotropisme positif (cas des Opalines) est pro- duit par une irritation localisée à la katode. Les expériences avec des excitations surmaximales sur l’Opaline ont prouvé la justesse de cette prévision : le protoplasme de l’Opaline se dissout à la katode (fig. 16, b). Très curieuses sont les expériences chez un autre Infusoire cilié, le. Spirostomum (fig. 17, 4). Si l’on ferme le courant galvanique (position a), les Spirostomum ne s’assemblent ni au pôle positif ni au pôle négatif; mais ils dirigent leur axe longi- tudinal dans la direction même du courant (posi- tion b). Avec des courants plus forts, le galvanotropisme transversal est produit par une irritation bipolaire localisée et à l’anode et à la katode (fig. 16 à). A ces études sur la sensibilité et le mouvement, se rapportent les méthodes que j'ai décrites, au Congrès, pour déceler les liaisons intercellulaires du protoplasme chez les êtres organisés. Ces con- nectifs vivants rendent, en effet, possible le con- sensus des protoplasmes dans les tissus; c’est par eux que, chez les végétaux et tous les organismes dépourvus de système nerveux différencié, la transmission de la sensibilité est assurée d’une e ellule à l’autre. Fig. 17. — Spürostomum. Orientation du corps dans le sens du courant, V. — ORGANES DES SENS Tout en s’interdisant la psychologie pure, le Congrès accorde une place à l'étude des sensations dans la mesure où l’expérimentation physiologique y intervient. C’est ainsi qu'ont été très utilement traitées à Liège plusieurs questions relatives : A au sens de la force: 2° au fonctionnement des sens Spéciaux. $ 1. — Sens de la force. Pour que le sens du toucher s'exerce, une cer- taine pression des objets sur les organes du tact est nécessaire. Cependant les physiologistes dis- tinguent depuis longtemps du sens tactile la faculté que nous avons d’apprécier les différences de pression, les divers degrés d'effort requis pour soutenir des poids différents. Un sens musculaire spécifique est-il affecté à cette perception ? M. Carl Jacobj (de Strasbourg) a institué sur ce sujet des expériences ingénieuses. Il s'est d'abord appliqué à déterminer les différences de poids que l’orga- nisme normal perçoit pour des charges variées; puis il a étudié le trouble qu'apporte au jugement sur le poids la suppression successive des divers facteurs présumés de ce jugement. Cette méthode l’a conduit aux résultats suivants : 1° Entre 300 et 3.000 grammes, plus le poids est élevé, plus l'addition dont on le charge est appré- ciable; entre 3.000 et 4.000 grammes la finesse du jugement demeure stationnaire; à partir de 6.000 grammes, elle augmente de nouveau. 99 La diminution de la finesse tactile ne parait pas diminuer la faculté d'apprécier la pression, car cette pression est évaluée de lamême manière par les dents nues ou recouvertes de caoutchouc. De 760 3° Ce n’est pas l'énergie de la contraction mus- culaire équilibrant la charge qui renseigne sur la valeur de cette charge, mais plutôt la sensation du mouvement effectué. Ainsi, quand on emploie la langue pour soulever un fardeau, il est difficile d'en apprécier le poids ; or, dans ce cas, le travail des articulations est supprimé, tandis que la con- traction du muscle subsiste. 4 Les agents qui engourdissent l’innervation, cocaïne, alcool, etc., diminuent la sensibilité du jugement. 5° Le sujet en expérience ignorant la valeur du poids à soulever, la période latente de la contrac- tion varie avec la grandeur de la charge. Comme la durée de cette période est en rapport avec la puissance (il serait plus juste de dire le travail) d'innervalion, M. Jacob) autorisé à se croit L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE de molécules. Si ce sont celles-ci qui agissent, comment parviennent-elles à la muqueuse olfac- tive ? Il y a quelques années Polsen a fait connaitre le chemin que l’air aspiré parcourt dans les fosses nasales. Un courant d’air chargé d’ammoniaque marquait sa route sur de petits papiers de tourne- soi acidulés et humides qu’on avait appliqués à différents endroits des fosses nasales d’un cadavre. Ce chemin décrivait un arc le long de la cloison, mais n’atteignait jamais le sommet de la fosse. M. Zwardemaker (d’Utrecht) a présenté sur ce sujet des considérations nouvelles. Il soutient qu'au moins chez les Mammifères respirant par le nez, le courant d’air ne peut que frôler la région olfac- tive. A l'appui de cette opinion, il a montré des préparalions anatomiques et des dessins où la Fig. 18. — Fosse nasale du Cheval sciée par le milieu. admettre que l'innervation est proportionnée à la charge. Bref, il conclut que l'appréciation du poids résulle d’une sensation de mouvement commu- niquée par les articulations: c’est la conscience de la dépense correspondante d’innervation. $2. — Les sens spéciaux. Parmi les sens spéciaux, l'odorat semble, à l'heure actuelle, celui dont le mécanisme est le moins connu. Rien ne peut encore décider entre l'hypothèse des vibrations odorantes el la doctrine du contact des particules matérielles avec l’organe olfactif. La première a été imaginée en considéra- tion de la quantité, pour ainsi dire infinitésimale, de chlore, phénol, etc., qui suflit pour produire la sensation olfactive. Mais il faut remarquer que cette infime quantité contient des milliards disposition des parlies s'oppose à ce qu'un courant d'air dirigé de l'entrée des fosses nasales vers la conque atteigne les bourrelets olfactifs. A plus forte raison, sopt aussi soustraits au courant les bourrelels situés dans les fosses maxillaire et frontale. L'auteur scie par le milieu, dans le sens longitu- dinal, la fosse nasale d’un cheval (fig. 18), fait le moulage en plàtre d'une des moitiés, puis rem- place la cloison par une plaque de verre. A l’ar- rière de la fosse il fixe un tube de verre qui, relié à une pompe, provoque une aspiration continue. Si l’on place alors à l'avant de la fosse nasale une lampe qui fume, on voit, à travers la vitre, la fumée assombrir le trajet du courant. On constate qu'elle n’atteint pas les parties sur lesquelles s’é- tend le nerf olfactif. M. Zwardemaker pense donc qu'on peut sentir sans que le courant matériel touche les bourrelets olfactifs, et il admet que les L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE 761 molécules odorantes y arrivent uniquement par diffusion !. Il a, en outre, attiré notre attention sur une autre particularité du courant d'air aspiré par le nez. Polsen a trouvé que le courant expiré suit le même chemin que le courant aspiré ?. Si l'on tient sous le nez une glace métallique, et qu'on expire de l'air, deux taches se forment sur la glace; chaque tache est elle-même divisée en une partie antérieure médiane et une partie postérieure laté- rale. M. Zwardemaker cherche la cause de ce phénomène dans la conque nasale, qui divise le courant de respiration en deux branches, dont l’une passe par-dessus la conque et l'autre la parcourt pour sortir par la partie inférieure. L'air qui passe par la moitié antérieure du conduit nasal serait donc seul actif dans le phénomène de l'olfaction. Toutes ces études sur la physiologie des sens sont hérissées de difficultés. Même après les admi- rables travaux d'Helmoltz, il s’en faut de beaucoup que le fonctionnement de l'appareil auditif soit complètement connu. M. J.-P. Morat (de Lyon) a contribué à l’éclairer par de délicates recherches sur l’accommodation du tympan à divers ordres de vibrations. La membrane tympanique est dé- formée par le jeu du marteau, commandé lui- même par un musele, dont le mode d’innervation avait été peu étudié. M. Morat s’est appliqué à le préciser. A cet effet il enlève, sur un chien que lon vient de tuer, la voûte du crâne, puis l'encéphale et, d'un coup de pince de Liston, l’arête supérieure du rocher. On voit apparaitre alors un petit corps mou, arrondi, logé dans l’épaisseur de l’os et qui n’est autre que le musele interne du marteau ; ce muscle est proportionnellement beaucoup plus développé chez le chien que chez l'homme. Par un tendon très fin il va s'insérer sur une petite apophyse de la branche du marteau. Le filet nerveux, parfois double, qui s’y rend, lui vient du trijumeau. Sur l'animal récemment mis à mort et dont l’excitabi- lité nerveuse est encore conservée, il est facile de démontrer cette provenance : il suffit d'exciter la racine du trijumeau pour voir le muscle entrer en contraction *. Né de la troisième branche du triju- EE — ——_—]—]———]— ! Chez l'homme le chemin à parcourir ne dépasse pas deux centimètres. Or, M. Zwardemaker a constaté que beau- coup de substances odorantes effectuent ce trajet par diffu- sion en deux dixièémes de seconde. 2? Cela n'est vrai que grosso modo, car les tourbillons qui doivent nécessairement se former dans le pharynx supérieur modifient plus ou moins cette route. 5 Cette méthode, fait remarquer l'auteur, est plus simple et plus certaine que celle de Politzer consistant à déceler cette contraction par le moyen d’un manomètre qui traduit les changements de pression de l'air dans l'oreille moyenne; à chaque déplacement de la membrane du tympan. meau, le petit nerf traverse le ganglion otique, duquel on le voit se détacher; mais, avant de pé- nétrer dans le muscle du marteau, il présente un : petit renflement. M. Morat a déterminé la struc- ture de ce renflement soit au moyen de coupes d'ensemble, soit en faisant des dissociations. C’est, chez le chien, un ganglion composé de cellules ner- veuses à un seul novau et présentant l'aspect des cellules des ganglions du grand sympathique. De ce ganglion partent des faisceaux nerveux com- posés de fibres myéliniques d’une grande finesse. Ces faisceaux pénètrent dans l’intérieur du müsele et s’y ramifient dichotomiquement avec une grande régularité. La présence d’un organe ganglionnaire sur le trajet du nerf allant au muscle du marteau est un fait intéressant, en ce qu'il fortifie l’analogie déjà signalée entre ce muscle et ceux qui, dans l’ap- pareil oculaire, produisent la contraction de l'iris et la déformation du cristallin (muscle irien et muscle ciliaire). Le ganglion dont il vient d'être question est donc l'équivalent du plexus ganglion- naire situé le long de la grande circonférence de l'iris et d'où partent les filets terminaux destinés aux muscles intrinsèques de l'œil; le ganglion olique, d'où part le nerf du muscle du marteau, est l'équivalent du ganglion ophtalmique d’où par- tent les nerfs ciliaires. M. Morat a fait remarquer en outre que le nerf du muscle du marteau offre les caractères essen- tiels des nerfs moteurs de la vie organique el doit être classé parmi les xerfs sympathiques. A cette série de communications sur les sens se rapporte un travail très curieux de M. L. Her- mann (de Konigsberg), présenté, au nom de l’au- teur absent, par M. L. Fredericq. M. Hermann, étudiant les qualités de la voix et notamment le mode de formation des voyelles, a été amené à construire un nouvel appareil pour l'analyse des sons. La voyelle ou le son que l’on veut analyser sont chantés de la manière ordinaire devant le phonographe d’Edison. La membrane vibrante porte un très petit miroir dont les excursions s’en- registrent optiquement. Le miroir réfléchit un pin- ceau lumineux linéaire vertical et l’envoie agir sur le papier photographique qui recouvre un cylin- dre enregistreur, Le cylindre est horizontal et ren- fermé dans une chambre noire percée d’une fente linéaire verticale. Dans les précédentes expériences de l’auteur, l'enregistrement photographique du son s'obtenait au moment même où le son était émis !. Dans ses nouvelles études, M. Hermann a opéré en deux temps : 1 Voir Archives de Pflüger. Vol. XLV. p. 1889, p. 582 e Vol. XLVIII, 1891, p. 181 et p. 543. 762 Premier temps. — 11 commence par produire un tracé phonographique ordinaire, la pointe du phonographe seulptant dans le cylindre de cire la courbe sinueuse correspondant au son pro- duit. Second temps. — Pour obtenir une inscription photographique agrandie de cette courbe, l’auteur fait repasser la pointe du phonographe sur le cylin- dre de cire, comme pour la reproduction du son ; mais il emploie une vitesse vingt-cinq fois plus faible que lors de la réception du tracé. Ce sont ces mouvements fortement ralentis de la membrane qu'il photographie au moyen du dispositif indiqué plus haut. Une superbe collection de tracés obtenus par ce procédé a été placée sous les yeux des membres du Congrès. L'étude de ces courbes confirme pleine- ment, d'après l'auleur, sa nouvelle théorie des voyelles et notamment les intermittences pé- riodiques caractéristiques du son des différentes voyelles. VI.— APPAREILS, GRAPHIQUES ET DESSINS EXPOSÉS Les organisateurs du Congrès avaient eu l’excel- lente idée d’affecter plusieurs salles de l’Institut que dirige M. Fredericq à une exposition d’instru- ments de physiologie. C’est ainsi qu'indépendam- ment des appareils ci-dessus décrits, les membres du Congrès ont tous pu étudier à loisir de nou- veaux modèles dus à des constructeurs de divers pays. Parmi les instruments exposés on remar- quait les olfactomètres de M. Zwaardemaker (d'Utrecht), l'isochronoscope et le phonauto- graphe de feu Donders, l'appareil de Willis pour la reproduction des voyelles, l'astigmomètre de MM. Javal et Schiôtz, les chambres humides et les rhéoslats de M. Engelmann, tous appareils sor- tis des ateliers de M. Kagenaar, mécanicien à Utrecht; les manomètres inscripteurs de M. Mo- rat, construits par M. Trenta (de Lyon), un cy- lindre enregistreur de M. Sherrington (de Lon- dres), un myographe de M. Spehl (de Bruxelles), L. OLIVIER. — LE DEUXIÈME CONGRÈS INTERNATIONAL DE PHYSIOLOGIE a ——]—]— —— ———]—" a M le microphone de Ludwig pour l’excilation des nerfs, exposé par M. Wilhem Petzold (de Leipzig), le grisoumètre de M. Coquillon perfectionné par M. N. Gréhant (de Paris), un cardiographe de M. Verdin (de Paris). Des coupes d'appareils, faites à grande échelle, des dessins relatifs à divers dispositifs d’expé- riences , des tracés recueillis par inscription et servant à l'analyse de cas critiques, enfin des photographies complétaient cette exposition. Huit photographies, envoyées par M. Otto Bowditch (de Boston), ont surtout attiré l’attention. Ce sont des photographies composites, obtenues par la méthode, bien connue, de M. Galton. Les sept premières représentent chacune un groupe de douze soldats : trois groupes de Wendes, quatre de Saxons. Au centre de chaque groupe de douze por- traits se trouve l’image composite ou résullante. Un huitième carton montre les sept photographies composites et, au milieu, une image composite ré- sultant de leur combinaison. Cette figure centrale correspond donc au type moyen résultant de la su- perposition de 84 portraits individuels de soldats allemands. Le lecteur s'étonnera sans doute que tant d'ap- pareils, de faits et d’expériences, aient pu être exposés par les auteurs et minutieusement étudiés par une centaine de personnes dans le court espace de trois jours. C’est que, comme nous le faisions remarquer au début de cet article, le grand nombre des salles, des appareils, des aides et des animaux, mis à notre disposition, aplanissait toutes les difficultés. C’est aussi que le Congrès avait résolument banni de son programme les fêtes et discours qui prolongent souvent sans profit les réunions scientifiques. Les physiologistes auraient pourlant poussé trop loin le désir de rester austères, s'ils n'avaient clos leurs assises par un banquet. De nombreux toasts y ont été portés : on a notam- ment applaudi M. le Professeur Dastre, dont le petit discours pimpant, bien décadent, très réussi, nous à charmés. Louis Olivier. DR EL A pete Le rt BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX : 163 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques. Favé et Rollet de l'Isle — Abaque pour la dé- termination du point à la mer. (Annales hydrogra- phiques, 1892.) La vitesse toujours croissante, le nombre toujours plus grand des navires sillonnant les océans donnent une importance de plus en plus marquée au problème de la détermination du point à la mer. La difficulté pratique qui s'attache à ce problème tient aux calculs numériques qu'il exige, calculs longs, compliqués, sujets à erreurs, surtout dans les conditions maté- rielles où sont placés ceux qui sont appelés à les faire. Tous les efforts des théoriciens de Part nautique ont tendu à simplifier ces calculs dans la plus large mesure possible; méthodes et tables nouvelles se sont multi- pliées en très grand nombre. L'apparition d’une théorie générale des tableaux graphiques de calcul ou «abaques, constituée par M. d'Ocagne sous le nom de Nomographie !, était de nature à appeler l'attention des marins sur le parti qu'il pouvait y avoir à tirer de ce moyen spécial de suppléer au caleul numérique, en vue des besoins de la navigation. Cette étude à été entreprise par deux ingénieurs hydrographes de la marine francaise, MM. Favé et Rollet de l'Isle, qui viennent d'exposer la théorie et l'usage de l’abaque auquel les a con- duits leurs recherches dans un remarquable Mémoire inséré aux Annales hydrographiques. RCE Théoriquement, le problème de la détermination du point à la mer revient à la résolution d’un triangle sphérique quelconque dont on connaît deux côtés et l’angle compris. La formule au moyen de laquelle s'opère cette résolution est de celles qui se prêtent à l'application de la méthode que M. d'Ocagne a fait connaître sous le nom de méthode des points doublement isoplèthes, et, de fait, l’'abaque correspondant, construit à l’occasion d’un autre problème, figure parmi les exemples de la Nomographie (p. 85, fig. 34). Mais cet abaque présenterait, en l’espèce, inconvénient suivant : d’une part, les besoins de la navigation rendant néces- saire l’approximation de la minute, de l’autre, les abaques à points doublement isoplèthes n’étant point fractionnables, on serait conduit, pour approprier Pabaque en question aux exigences de l’art nautique, à lui donner des dimensions qui rendraient son emploi impraticable, | Vas de Il s'agissait donc, avant de songer à recourir à un abaque, de modifier la solution du problème de facon à éviter la résolution d’un triangle quelconque. C'est ce qu'ont fait très heureusement MM. Favé et Rollet de l'Isle en substituant à cette résolution celle de deux triangles sphériques rectangles. Les formules correspon- dantes se prêtent, en effet, comme ils le montrent dans leur Mémoire, à la construction d’abaques permettant d'obtenir l’approximation requise sur un tableau de dimensionstout à fait acceptables pour la pratique,celles du format des cartes marines. Ce sont, à la vérité, deux abaques qu'ils ont construits; mais, sur chacun de ceux- ci, les deux premiers systèmes d’isoplèthes étant les axes d’un quadrillage régulier, et les courbes du troi- sième système d'isoplèthes étant, de l’un à l’autre, de- forme tout à fait distincte, ils ont pu, sans nul incon- 1 M. d’Ocagne a donné lui-même dans la Revue (t. II, p. 604) un apercu historique des principes de la Nomo- graphie. La Revue a en outre publié (t. IT, p. 27) une analyse bibliographique du livre où il a exposé cette théorie. ET INDEX vénient, superposer ces deux abaques sur une même feuille. Nous n’entrerons dans aucun détail mathématique au sujet de cet intéressant abaque. Disons seulement qu'après l'avoir établi par un procédé analytique con- forme à la méthode nomographique générale, les auteurs font voir qu'on en peut donner une curieuse interprétation géométrique, qui est propre à en faciliter l'emploi. Get emploi est d'ailleurs des plus simples, et conduit, en deux ou trois minutes, au résultat cherché. L’abaque de MM. Favé et Rollet de l'Isle ne se prête pas seulement à la détermination du point. Il permet encore, cela va de soi, de résoudre tous les problèmes se ramenant à la résolution d’un triangle sphérique. C’est ainsi qu'il peut servir de table d'azimuts et de cherche-étoile, qu'il permet de trouver l'heure du lever ou du coucher d’un astre et l’azimut à l'hori- zon, d'obtenir l'angle horaire, de déterminer la route à suivre pour Ja navigation par l'arc de grand cercle, ainsi que la distance sphérique de deux points. Le Mémoire contient le schéma de l’abaque à une échelle réduite, ainsi qu'un fragment à l'échelle d'exécution. Les auteurs, qui s’occupent de le faire graver tout entier à cette échelle, ont eu l’idée de le compléter par un dispositif spécial, dessiné sur une feuille transparente mobile, qui permettra d'effectuer l'interpolation avec toute la précision désirable pour les besoins de la pratique. Espérons que le tirage de cet abaque à échelle d'exécution ne se fera pas attendre. L'emploi de ce précieux instrument de calcul ne tardera certainement pas à se répandre parmi les intéressés; il n’y a point de routine, en effet, qui puisse prévaloir contre ses inestimables avantages, En inventant cet abaque, MM. Favé et Rollet de l’Isle ont rendu aux navigateurs un signalé service, que ceux-ci, à l'usage, ne seront pas longs à reconnaitre et que nous aurons été heu- reux de proclamer l’un des premiers. Cette belle application vient en outre confirmer l'importance pratique de la Nomographie que M. d’O- cagne a déjà mise en relief dans son livre. E. Prévor. 2° Sciences physiques. vwWVeber (H, F.). — Allgemeine Theorie des elek- trischen Glühlichtes. (Théorie générale de la lu- mière à incandescence), Rapport présenté au Congrès international des électriciens tenu à Francfort en sep- tembre 1891, Dans cet important mémoire, l’auteur applique sa formule de radiation Intensité d’une radiation — Æ e au calcul des constantes des lampes à incandes- cence. Ce travail est appuyé par un examen minutieux de 33 types divers de lampes, dont l’auteur a mesuré la température (par la résistance du filament), la radia- tion relative dans diverses directions, le pouvoir rayon- nant, déduit de l’énergie absorbée et de la mesure de la surface. La formule ci-dessus exprime deux lois in- dépendantes : en intégrant par rapport à À, on trouve Energie totale = CTeaT en faisant T constant et en introduisant dans la for- mule diverses valeurs de }, on retrouve à peu près les courbes de Langley. Si l’on a déterminé expérimenta- lement les constantes a b et c pour une lampe, la 764 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX théorie complète de cette lampe peut être établie, Parmi les résultats trouvés par M. Weber, nous men- tionnerons les suivants : Entre 1100 et 1 600° (absolus), une augmentation de l'énergie de ? pour cent élève de 1 degré la température du filament. L’intensité lumi- neuse moyenne entre 14602 et 1560° est proportionnelle au cube de l’énergie et inversement proportionnelle au carré de la surface du filament. Le rendement optique augmente de 0,0055 à 0,0117 lorsque la température passe de 1500° à 1650°. Ces derniers résultats confir- ment ceux auxquels nous étions arrivé par une autre méthode (Voyez la Revue du 15 janvier 1892). Ch.-Ed, GUILLAUME. €Cohn (D: Lassar). — Méthodes de travail pour les laboratoires de chimie organique. Un volume in-12 de 371 pages, traduit de l'allemand par M. E. Ackermann. (Prix : relié 7 fr. 50.) Baudry et Cie, 15, rue des Saints-Pères, Paris, 1893. L'ouvrage que M. Ackermann nous présente sous ce titre un peu vague a pour objet de fournir aux dé- butants en chimie organique, des renseignements pra- tiques du même ordre que ceux qu’on rencontre dans les traités de manipulations en usage dans les labora- toires de chimie minérale. « En théorie, lisons-nous dans la préface, il peut à peine y avoir quelque chose de plus simple que la pré- paralion des éthers ; toutefois celui qui a eu à en pré- arer, celui qui opère des transformations dans le la- Potaiaire. trouve très rapidement qu'il n'est possible d’avoir un bon rendement qu'en se maintenant dans des conditions bien précises. » L'observation est Juste, mais est-il possible, dans un ouvrage qui, pour répondrè à un pareil but, doit rester élémentaire et par conséquent peu volumineux, de réunir assez de documents, je devrais dire assez d’ar- tifices, pour permeltre à un élève, ou même à un chi- miste déjà exercé, d'obtenir à coup sûr le maximum du rendement dans une préparation quelconque? Evi- demment non, et quoi qu'en dise M. Cohn, il nous semble fort difficile, avec le seul secours de son livre, d'arriver à préparer avec succès même les éthers les plus simples : nous y voyons, par exemple, que, pour obtenir l’acétate d’éthyle, on chauffe pendant 4 heures 10 grammes d'acide sulfurique avec 50 grammes d’a- cide acétique et 38 grammes d'alcool. La méthode est peu encourageante pour le chimiste qui aurait besoin de plusieurs kilogrammes de ce corps. D'autre part, dans le même chapitre, l’action éthéri- fiante des chlorures d'acides et des anhydrides n’est qu'indiquée en quelques lignes ; l'influence du chlorure de zinc, si heureuse dans une foule de circonstances, n’est même pas signalée; en revanche on insiste sur la préparation de l’éther acétone dicarbonique, de la té- trabenzoylglucose, du salol, etc , qui ne sont pas des produits courants. Après avoir lu ces pages, je ne sais vraiment pas comment un élève s'y prendrait pour préparer de la tributyrine ou de la diacétylhydroquinone ; il est fort probable qu'après s'être livré à un certain nombre d'essais infructueux, il serait finalement obligé d'avoir recours à un traité de chimie pour mener à bien son opération ; mais c’est alors ce que nous faisons tous, et c’est là, je crois, en dehors de l’enseignement oral, la seule méthode de fravail qui soit à recommander dans les laboratoires de chimie organique ou inorganique. ‘ Le livre de M. Cohn renferme une description som- maire des appareils employés en chimie et quelques généralités, avec exemples à l’appui, sur les méthodes dont on se sert pour chlorer, bromer, ioder, nitrer, oxyder ou réduire les corps organiques; un chapitre assez court, relatif à l'analyse élémentaire des com- posés complexes, termine l’ouvrage. On y trouve, en un mot, beaucoup d'indications utiles, mais il est à craindre que l'obscurité de sa rédaction et le manque absolu d'ordre dans l'exposé n’en limitent considéra- blement l’usage. L. MAQUENNE. 3° Sciences naturelles. Lepsius (Dr Richard), Directeur de l'Institut géologique de Darmstadt. — Geologie von Deutschland und den angrenzenden Gebieten (Géologie de l’Alle- magne el des contrées limitrophes). T. I°7, troisième li- vraison, 1 volume in-8° pages 459 à 800 et I-XIV, avec 4 tableaux, À planche en coulewr et nombreuses figures dans le texte: (Prix 17 fr. 50. Le volume T complet, 40 fr. 70.) (Handbücher zur Deutchen Landes — und Volkskunde, herausgegeben von der Central Kommission für wissenschaftliche Landeskunde von Deutschland.) Stuttgart, J. Engelhorn, 1892. Ce nouveau fascicule de la Géologie de l'Allemagne de M. Lepsius, qui complète le premier volume de cet important ouvrage, termine la description de l’Alle- magne occidentale et méridionale; il est entièrement consacré au bassin supérieur du Rhin et comprend une série de chapitres sur les terrains jurassiques (Souabe et Franconie, Jura suisse, Alsace, Lorraine), crétacés (environs de Ratisbonne) et tertiaires (dépôts sidéroli- thiques, mollasse de la Souabe, dépression rhénane, Vogelsberg et Rhôn), et sur les alluvions quaternaires (Diluvium) et modernes (Alluvium). L'historique de tous ces terrains est exposé par l’auteur avec détails et leur description est suivie de listes de fossiles souvent fort étendues, Après l’étude des formations sédimentaires vient celle des roches éruptives tant anciennes que ré- centes, par ordre géographique; M. Lepsius a enrichi cette partie de son travail d’un très grand nombre d'analyses chimiques, empruntées à différents auteurs. L'ouvrage est essentiellement concu, comme on le voit, sur un plan stratigraphique; à ce titre, il rendra les plus grands services aux géologues français appelés à s'occuper de nos régions anciennes, dont l’analogie de constitution avec les massifs de l'Allemagne cen- trale est frappante. Mais on regrettera que M. Lepsius n'ait pas fait suivre cette revue des terrains d’une par- tie tectonique, où l'étude de l’ensemble aurait pu être reprise au point de vue de l'agencement des masses minérales et de l’histoire de la formation du sol. D'abondantes notes infrapaginales donnent la biblio- graphie des principaux sujets traités ; quant aux figures, elles représentent presque toutes des coupes de localités typiques; la plupart sont empruntées à des publications antérieures, dont le titre est toujours soigneusement indiqué. Plusieurs tableaux hors texte font connaître la classification des couches jurassiques de la Souabe, ainsi que le synchronisme des princi- paux gisements tertiaires de Allemagne du Sud et de la région rhénane. Le volume est complété par deux tables alphabétiques des noms de fossiles et des noms de localités cités dans le cours de l’ouvrage. Au fascicule est jointe une planche de profils (lon- gueurs au : 1.200.000, hauteurs au 1 : 200.000), em- pruntée à la monographie du Rhin publiée sous la direction de M. Honsell. Ces coupes, dressées par M. Lepsius, sont menées suivant différentes directions à travers l'Allemagne occidentale; il est fâcheux que les failles, représentées d’ailleurs comme étant toutes verticales, y aient été multipliées outre mesure. Le second volume de la Geologie von Deutschland traitera de l'Allemagne du Nord et de l'Est, et le troi- sième des Alpes allemandes, Souhaitons, dans l'intérêt même de cette publication, que les fascicules puissent se succéder désormais plus rapidement (l'impression complète du tome premier, commencée en 1887, na pas demandé moins de six ans). Enfin, quelle que soit la beauté de l'exécution typographique, il est difficile de ne pas trouver trop élevé le prix de chaque livraison. Emm. DE MARGERIE. Sabatier (A.), P' à la Fac. des Sciences de Montpellier Directeur de la Station zoologique de Cette. — Essai sur la vie et la mort. Un vol. in-8° de 282 p. de la Biblio- thèque évolutionniste.(6 fr.) Vve Babé et Cie, Paris, 1892. M. Henry de Verigny, bien connu des zoologistes et BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 16 © des physiologistes par ses intéressants travaux, à conçu un projet qui mérite d'attirer l'attention de tou- tes les personnes curieuses des choses de la nature et de la philosophie : celui de publier, sous le titre de Bibliothèque évolutionniste, un recueil d'ouvrages con- sacrés à l’étude de l’évolution des êtres, et à l'examen critique de toutes les données que suggère cette étude. Depuis deux ans, quatre volumes ont paru; le qua- trième est dù à M. A. Sabatier, dont les naturalistes estiment justement les savantes recherches d'anatomie comparée et d’embryologie. : : Ce livre, malgré son modeste titre d’ « Essai », qui dénote déjà une qualité assez rare, est de beaucoup au-dessus de ceux qui l’ont précédé. Ces derniers, dus à R. Wallace, à P. Ball, à Geddes et Thomson, consis- tent un peu trop en notions abstraites; la science est surtout un répertoire de faits, que l’on doit classer et comparer pour en tirer les conclusions immédiates capables d’édifier une synthèse, et non un prétexte à raisonnements spéculatifs. Puis, ces auteurs bornent leurs efforts à rechercher les causes de l’évolution des êtres. Cette étude ne manque pas de grandeur; mais en supposant, ce qui est loin d’exister encore, que lon soit parvenu à se représenter le mécanisme de ces changements, la question la plus importante entre toutes, celle de l’origine première de la ma- tière vivante, se trouve encore irrésolue. C'est à cette tâche que M. Sabatier s’est attaqué; en s’ai- dant des résullats auxquels est parvenue la science mo- derne, il a tenté de pénétrer dans cet inconnu, et d’en éclairer quelques parties. Un ouvrage de cette va- leur ne peut être résumé en quelques lignes; la moindre phrase porte avec elle son effet, et il faudrait citer le livre entier; pourtant, les principaux traits se dégagent assez bien de l’ensemble pour qu'une brève analyse les mette en lumière. Le volume est divisé en trois parts : la première traite de la vie, la deuxième de la mort, la troisième de la théorie que l’auteur propose pour concevoir, à la fois, et la nature de l’une, et la cause de cette destruction finale qui atteint tout organisme. — La part consacrée à la vie est la plus longue des trois. Existe-t-il entre les êtres vivants et la matière minérale une différence profonde, une limite infranchissable? Les premiers jouissent évidemment de propriétés que la seconde ne possède pas, mais les plus importantes de ces propriétés se retrouvent, bien qu'atténuées et de faible amplitude encore, dans les corps inorganiques. La faculté qui pa- rait étre spéciale à la matière vivante est celle de la nutrition; cette matière est capable de puiser dans les milieux qui l’entourent les aliments nécessaires pour réparer ses pertes, et pour augmenter sa masse; une parcelle de cette matière joue, dans les conditions nor- males et vis-à-vis de ces milieux, un rôle d’amorce, qui consiste à prendre dans ces derniers de quoi faire une nouvelle quantité de substance douée de vie. Le pro- cédé suivant lequel s'effectue la nutrition est, dans son essence, un amorcage; l'être organisé existant au préalable, il enlève, durant sa vie entière et d’une facon continue, des particules aux corps environnants pour en former de la matière semblable à celle qui le cons- titue. Or, celte capacité existe dans la nature inorga- nique. Certaines solutions salines et saturées ne cris- tallisent point lorsqu'on les abandonne à elles-mêmes; mais si l’on plonge dans leurintérieur un cristal, si mi- nime soit-il, du mème produit, ce cristal devient une amorce, car le sel en dissolution se dépose autour de lui. En ramenant à sa forme la plus simple la nutrition de la matière vivante, on s’apercoit qu’elle se rapproche beaucoup de ce phénomène d’amorçage présenté par un assez grand nombre de substances. Est-ce à dire, au surplus, que la manière suivant laquelle cette nutrition s’accomplitsoit également identique au mode d’acerois- sement des cristaux ? Oui, répond M. Sabatier, car les mi- néraux augmentent leur masse par juxtaposition, et les êtres organisés font de même; l’intussusception, c’est-à- dire ce phénomène propre à la matière vivante, qui consiste à répartir égalemerit les nouvelles parties ac- quises par la nutrition, est toute de surface; la juxta- position est le fait fondamental, car les molécules ré- cemment apportées se mettent à côté des autres et ne pénètrent point dans leur intérieur, En somme, les dif- férences entre les corps organiques et les corps non organisés sont moins grandes qu'on ne l’admet d’ordi- naire ; la matière dite brute est vivante par certains côtés, et sa vie, avec celle de la matière organique, sont deux aspects, deux moments divers de la vie gé- nérale. Pourquoi ceper.dant, malgré cette ressemblance, les êtres vivants meurent-ils? La mort est une décomposi- tion cadavérique quia pour objet derésoudre lasubstance de ces êtres en ses éléments simples, ou en éléments composés peu complexes. Weïssmann à déjà montré, depuis quelques années, que les êtres unicellulaires ne meurent point, et que cette décomposition n’appar- tient qu'aux organismes plus élevés par leur struc- ture. D'autres naturalistes ont ensuite disserté sur les notions premières ainsi acquises ; et, dans la se- conde partie de son ouvrage, M. Sabatier expose les plus importantes des considérations auxquelles sont parvenus ces auteurs, en signalant au passage leurs points faibles. Puis, après avoir résumé les quelques données certaines qui subsistent après celte critique, il rentre lui-même en scène, et recherche les. causes de la mort. À cet égard, ses idées se rapprochent de celles de Weissmann, mais avec une plus grande pénétration, ef un souci constant de s'abstenir de toute spéculation abstraite : souci que ne montrent guère la plupart des auteurs qui se sont déjà appliqués à ce genre d’études, A mesure que la matière vivante, que le pr'otoplasme, pour employer le terme usité, est allé en se différen- ciant, il a perdu de son pouvoir d’amorce, Les êtres élevés en organisation, et constitués par l'union de plusieurs cellules, ont été obligés par suite de di- viser leur corps en deux parties : l’une qui se trans- forme pour se prèter à l’accomplissement des diverses fonctions, et qui diminue par cela même sa puissance d’amorce; l’autre qui ne se modifie en rien, et conserve cette puissance entière. La première est la partie soma- tique de l’économie, expression due dans son principe à Weissmann, et la seconde la partie génératrice. Celle- ci, qui a gardé intact son pouvoir d'’amorce, l’exerce lorsqu'elle se trouve libre, et s'accroît, se nourrit aux dépens des milieux qui l’entourent, produit en somme un nouvel être. Par contre, la partie somatique, dont la capacité sous ce rapport est assez faible, l’exerce bien pendant quelque temps; mais cette influence dimi- nue toujours à mesure qu'elle accomplit son effet, et finalement disparait; celte partie, impuissante dès lors à réparer ses pertes, meurt. La pactie génératrice, composée par l’ovule et le spermatozoïide, se trans- met toujours vivante de génération en génération, alors que la partie somatique est condamnée à une dé- composition nécessaire, inéluctable, qui lui vient de l'usure progressive de son pouvoir de nutrition. Ce livre, dont le précédent résumé ne donne qu'une image fort affaiblie, s'impose à l'attention des natura- listes, des philosophes, de toute personne soucieuse de concevoir le pourquoi des choses, et de ne point borner les facultés de l'esprit à la sèche contemplation de ce qui nous entoure. Tel qu'il paraît, d’après cette analyse, il semble dù à un matérialiste convaincu, puisqu’en somme il a pour effet de baser sur des don- nées matérielles l’explication de l’origine des corps vivants. Il n’en est rien; dans une éloquente introduc- tion, M. Sabatier expose ses sentiments de croyant sin- cère : « Pour moi, dit-il, qui crois à la création et au Créateur, je déclare qu'il ne m'est pas encore arrivé d’entrevoir, dans le domaine de la science que je cul- tive, la moindre occasion de contrainte intellectuelle, etle moindre sujet d’inquiétade pour mes convictions. » L'ouvrage entier est écrit suivant cette tendance, d’après un continuel désir de vérité, une constante soif 766 BIBLIOGRAPHIE, — ANALYSES ET INDEX de montrer la grandeur de la cause derrière la gran- deur de l'effet; et l’accent de sincérité profonde qui est en lui permet de lui appliquer avec justesse l’an- cienne épigraphe : « Gecy est un livre de bonne foy. » Louis RouLE. 4° Sciences médicales. Proust (A.). — La défense de l'Europe contre le cholera. Un vol. in-8° de 459 pages avec cartes an- nezes. (Prix : 9 fr.) G. Masson éditeur, 120, boulevard Saint-Germain, Paris, 1892, Daremberg (G.). — Le choléra, ses causes et moyens de s’en préserver. Un volume in-8° (Prix : 3 fr. 50.) Rueff et Cie, éditeurs, 106, boulevard Saint- Germain, Paris, 1892. Monod (H.). — Le choléra (Histoire d'une épidémie) : Finistère 1885-86. Un très fort vol. in-8° de 546 pages avec cartes. (Prix : 30 fr.) Ch. Delagrave, éditeur, 15, rue Soufflot, Paris, 1892. Ces trois ouvrages ne se trouvent pas seulement réunis sous la même rubrique par le hasard de leur date de publication; nous les avons intentionnelle- ment rapprochés, parce qu'ils se complètent l’un l’autre. Tous trois défendent la même doctrine. M. le Pr Proust, après un exposé de l'historique de la ques- tion, où l’on retrouve la clarté, la précision et la net- teté de vues de l'éminent professeur, dégage tous les enseignements que comporte l'étude des grandes épi- démies. Son livre n'est pas seulement un ouvrage de science empreint d’un esprit élevé et vraiment philo- sophique. C’est une œuvre sociale et même politique d’où émergent les qualités du diplomate, qui, délégué dans les Congrès internationaux, s’est toujours inspiré des grands intérêts de l’Europe, sans négliger de faire valoir le bon renom de la France. Avec M. le P' Brouardel, M. Proust s'est efforcé de concilier les règlements sanitaires avec les inté- rêts commerciaux, si bien que certaines nations qui, comme l'Angleterre, s'étaient montrées récalcitrantes à la police sanitaire de l'Europe, se sont finalement ralliées aux propositions de M. Proust et des autres délégués français. Se fondant sur les mauvais résultats des quaran- taines, qui sont vexatoires et inefficaces, M. le P:' Proust, dès 1884, donne une orientation nou- velle à la prophylaxie du choléra. Il ne s’agit plus d'i- soler, ce qui dans la pratique est illusoire, mais de détruire les germes, La désinfection est l'agent le plus puissant à opposer au choléra, La maladie se transmet par des microbes qui sont exceptionnellement trans- portés par l’air, et habituellement par les objets, surtout par les linges et les vêtements. Toute la doctrine préconisée par M. le Pr Proust re- pose sur ce fait; les règlements sanitaires consisteront donc à désinfecter à l'aide d'étuves, par l’ébullition, ou par l'emploi de substances antiseptiques énergiques,les selles des cholériques ou les pièces de vêtements qu'ils ont pu souiller. L'expérience est faite; elle semble concluante, C'est ce qui ressort de la lecture du livre de M. Monod. En 1885-1886 une épidémie cholérique se déclare dans le département du Finistère, dont M. H. Monod était alors préfet. M. le D' Charrin pour- suivit cette épidémie avec ténacité, si bien qu’au bout d'un mois environ, il n’y eut plus un seul cas de choléra dans le département. D'autre part, on sait quels services ont rendus les postes sanitaires installés aux frontières des Pyré- nées, lors de l'épidémie en Espagne en 1890. Quel- ques cas de choléra furent importés en France, mais les foyers furent rapidement éteints et la maladie ne se propagea pas. Suivre la trace de toute personne venant d’un lieu contaminé et tout désinfecter, si elle devient malade : tel est le principe des mesures sani- taires auxquelles M. le Dr Proust a attaché son nom. Ces vues nouvelles, fondées sur les découvertes de la bactériologie rendent pour ainsi dire illimité le champ où l’hygiéniste peut étendre son action salutaire. « Nous ne supprimerons jamais toutes les causes des maladies, dit M. le D' Proust, mais nous avons sur les maladies infectieuses et contagieuses une ac- tion énorme. Sans doute nous n’augmenterons pas la longueur de l’espace que les lois dela physiologie nous ont départi, mais nous donnerons à un nombre tou- jours croissant d'individus les années que la nature leur avait promises et que les accidents de chaque jour viennent trop souvent abréger. Et c’est ainsi que nous remplirons le rôle le plus élevé que puissent se pro- poser le médecin et l'hygiéniste. » Pour atteindre ce but, la science actuelle nous offre deux moyens : la désinfection qui permet de détruire les germes morbides, et la salubrité qui ne les laissent pas envahir l’organisme. Faire de l’antisepsie, c’est bien, réaliser l’asepsie, c’est mieux. Cette question est traitée de main de maître dans l'ouvrage de M. le D* Daremberg. Dans un style exquis, dont le charme vous séduit, le distingué écrivain du Journal des Débats nous retrace, à grands coups de pinceau, le tableau des différentes épidémies cholériques pour arriver rapide- ment à celle de cette année. Là M. Daremberg aban- donne la plume de l'historien impartial, pour prendre avec ardeur celle du polémiste. Il s’insurge avec véhé- mence contre les fautes et l’incurie gouvernementales qui,fermant les yeux sur toutes les grandes découvertes scientifiques, déverse avec une sérénité parfaite la fièvre typhoïde et le choléra à tous les riverains de la Seine. Tandis que M. Daremberg réclame la destruction des matières fécales, au moyen d’usines spéciales, et la création d’un canal de Paris à la mer, système qui ne saurait être réalisé que dans une vingtaine d’an- nées, un grand nombre d’hygiénistes des plus émi- nents réclament le tout-à-légout et l’utilisation de ces trésors de matières azotées pour l’agriculture, M. Proust s’est fait récemment le défenseur autorisé de cette doctrine, qu'il a soutenue avec éclat devant le Parle- ment. Or, on sait comment le Gouvernement interpré- tait cette solution qui sauvegardait les intérêts natio- naux, ne lésant que ceux de quelques particuliers, influents d’ailleurs : il laisse projeter dans les rivières les immondices de la grande ville, et transforme ainsi les bords riants de la poétique vallée de la Seine, en berges puantes d’un infect cloaque; — mais ce n'est pas tout : onpuise dans cette vaste fosse d’aisances l'eau à boire envoyée à de nombreuses localités en aval de Paris. M. Daremberg dénonce cet état de choses : d’après lui, le sol en contact avec les germes devient un en- trepôt, où ceux-ci sont bien conservés en attendant leur reviviscence. Il a fallu des épidémies meurtrières de fièvre typhoïde et la crainte d’être atteint du choléra pour décider les élus du suffrage universel à déverser cette source permanente d'infection et de contamina- tion. — La loi est votée : on ne boira plus que de l’eau de source; la Seine ne sera plus infectée, les eaux d’égouts fertiliseront des champs .stériles, les microbes se livreront des combats gigantesques dans les champs d'épandage et les bacs seront victorieux, à la grande satisfaction des populations. Tels sont les résultats qu’on nous promet, mais, en attendant qu'ils soient réalisés, il coulera encore de l’eau confaminée sous les ponts; les bacilles auront encore des beaux jours, et mettront à profit la méthodique lenteur ad- ministrative qui, rompant avec ses traditions, se sera fait tirer l'oreille pour chercher la petite bête. D' M. SPRINGER. Baratoux (D'J.), Professeur d'Otologie, de Rhinologie et de Laryngologie. — Guide pratique pour le traite- ment des maladies de l'oreille. ! vo/.in-18 de 136 p. avec figures dans le texte, (3 fr.) Société d'éditions scientifiques, 4, rue Antoine-Dubois, Paris, 1892. dit ot mie Rire tt ou” oies. +0 “ide. uns ee à ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 767 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 17 octobre, 41° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Emile Picard, dans une longue note, développe l'application aux équations différentielles ordinaires de certaines méthodes d’ap- proximalions successives; les résultats, pour certaines classes d'équations, sont particulièrement simples. — M. F. Tisserand expose les conditions de la décou- verte du cinquième satellite de Jupiter, par M. Barnard, de l'Observatoire de Lick, en Californie : la durée de sa révolution est de 11 heures 50 minutes, sa distance au centre de la planète est de 2,5, en prenant comme unité le rayon équatorial de Jupiter, de sorte que le satellite sort à peine de la région de lumière diffusée par la planète ; de là la difficulté de son observation. Son éclat est celui d’une étoile de treizième grandeur, M. Barnard a découvert aussi une comète par la pho- tographie., — M, Flammarion adresse à l’Académie une dépèche qui confirme la découverte du cinquième satellite de Jupiter. — M. Perrotin communique les observations de trois nouvelles planètes découvertes à l'observatoire de Nice, au moyen de la photographie, par M. Charlois. Il ajoute quelques réflexions au sujet du nombre considérable de ces nouveaux corps, dont il devient impossible de calculer les positions et sur lesquels on ne peut faire des observations régulières ; la photographie y suppléera. 2° SciENGES PHYSIQUES. — M. E. Bouty, à propos de la coexistence du pouvoir diélectrique et de la conduc- tibilité électrolytique, répond à MM. Cohn et Arons que sa méthode diffère essentiellement de la leur; l’auteur n’a à mesurer qu'une seule quantité absolue, tandis qu'ils sont obligés d'en déterminer trois. — M. N. Piltschikof a étudié à Kharkow la polarisation spectrale du ciel : il a trouvé que l'intensité de polari- sation dans le ciel pour la lumière bleue est sensible- ment plus grande que pour la lumière rouge, résultat en désaccord avec la théorie de la couleur bleue du ciel de M. Lallemand. La différence des polarisations au bleu-et au rouge varie avec la direelion du vent, elle présente son maximum pour le sud-est et s’'annule pour la direction nord-ouest, Enfin, quand la polari- sation de l’atmosphère s'élève ou s'abaisse, elle s'élève ou s’abaisse plus dans les radiations moins réfrangibles que dans les autres. — M. Huc adresse un mémoire re- latif à la constitution des espaces interplanétaires. — M. L. Maquenne applique la décomposition par l’eau du carbure de baryum pour produire l'acétylène, il pré- pare facilement le carbure en chauffant au rouge vif un mélange de carbonate de baryte, de magnésium en poudre et de charbon de cornue; ce carbure brut, ainsi obtenu, fournit un dégagement régulier d’acétylène, quand on fait arriver de l’eau froide goutte à goutte. L'auteur signale, en outre, quelques propriétés du car- bure de baryum BaC?,—M. Quantin donne un procédé d'analyse des mélanges d’ammoniaque et de méthyl- amines qui constituent la méthylamine commerciale. L’ammoniaque est dosée à l’état de phosphate ammo- niaco-magnésien, la précipitation est complète, grâce à la présence des méthylamines qui maintiennent l’al- calinité indispensable. On forme ensuite les chloropla- tinates du mélange, celui de triméthylamine est enlevé par des lavages à l’alcool absolu. C. MATIGNON, 3° SCIENCES NATURELLES. — M, Ducelaux revient sur les propriétés oxydantes attribuées par M. Poehl à la spermine et pense que les propriétés curatives éner- giques de cette substance sont absolument indépen- dantes de son action sur le magnésium en présence du chlorure de platine ou du chlorure de cuivre. — M. H.-B. Griffiths a trouvé, par l'analyse chimique, que dans les tissus nerveux de quelques invertébrés (Insectes, Crustacés, etc.), la neurokératine est rem- placée par la neurochiline, dont l’auteur indique la composition, Chez les êtres inférieurs, comme chez les êtres supérieurs, la matière des nerfs est fort altérable. Alcaline à l’état frais, elle s’acidifie après la mort,’et la myéline se coagule. — De l'examen auquel s’est livré M. St. Meunier sur des échantillons de roches recueillies par le prince Henri d'Orléans sur la basse Rivière Noire (Tonkin), il résulte que celles-ci sont constituées principalement par des calcaires noirs charbonneux contenant des indices de fossiles. A ces calcaires sont associées un grand nombre de roches éruptives dont quelques-unes renferment fréquemment l’épidote comme produit d’altération, L'auteur men- tionne, en outre, comme provenant de la même région, une serpentine très caractérisée et une ophite compa- rable à nos variétés pyrénéennes. — L'étude des étages miocènes de l'Algérie a conduit M. J. Welech aux ré- sultals suivants : Les faunes de Mascara et des Beni Rached et Carnot n'appartiennent pas à deux étages différents, comme on l’a cru jusqu'ici, mais sont au contraire identiques ; quant au dernier soulèvement de V’Atlas, il est post-tortonien et il a eu lieu à la fin du miocène supérieur, Mémoires présentés. — M. Huc : Constitution des es- paces interplanétaires, — M, F. Bordez : Note relative à un appareil sous-marin, — M, V. Razous : Mémoire relatif à une machine agricole que l’auteur nomme la Paysanne. Nominalions. — MM. Cornu et Sarrau sont désignés comme devant être présentés à M. le ministre de la guerre pour faire partie du Conseil de perfectionnement de l'Ecole polytechnique, pendant l’année 1892-93. Ed. Beczuxc. Séance du 24 octobre, 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Poincaré fait hommage à l’Académie d’un volume intitulé : « Théorie mathématique de la lumière. Nouvelles études sur la diffraction. Théorie de la dispersion de Helmholtz, » — M. L. Autonne en continuant et généralisant ses - recherches précédentes est arrivé à constituer une théorie des intégrales algébriques de l'équation diffé- rentielle du premier ordre.— M. Th. Caronnet, à pro- pos des centres de courbure géodésique, établit deux théorèmes : Th. 1. Pour que les droiles qui joignent les centres de courbure géodésique d’un système or- thogonal quelconque engendrent une congruence de normales, il faut et il suffit que les courbures géodé- siques correspondantes soient fonctions l’une del’autre, Th. IT : Pour qu’une droite qui joint un centre de pre- mière courbure principal au centre de seconde cour- bure géodésiqueengendre une congruence de normales, il faut et il suflit que les courbures considérées soient fonctions l’une de l’autre. -— M. A. J. Stodolkiewitz : Sur le problème de Pfaff, — M. Bigourdan commu- nique ses observations de la nouvelle comète Barnard (de 1892), faites à l'Observatoire de Paris (équatorial de la tour de l'Ouest). La comète très faible est diffuse et plus brillante vers le centre. -- M. Schulhof a cal- culé les éléments paraboliques de la comète Barnard en partant des observations de M. Bigourdan, ils pré- sentent une grande ressemblance avec les éléments de la comète périodique de Wolf et paraissent confirmer ce fait que les points de proximité des comètes pério- diques de Jupiter se groupent particulièrement vers N 768 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES l’aphélie de cette grosse planète, — M, Tisserand pré- sente la suite et fin de la théorie du mouvement des planètes par G. Leveau et une brochure intitulée : Cadran solaire, système Ch. Chamberland. 2e SGrENGEs PHYSIQUES. — M. Vaschy répond à la note de M. Clavenad, La formule qui donne la vitesse de pro- pagation d’un courant sur une ligne électrique et que l’auteur a retrouvée par des considérations d'homogé- néité était déjà établie par d’autres considérations, elle est done exacte et l’objection faite par M. Clavenad ne peut subsister, — M. Charles Henry, en employant le sulfure de zinc phosphorescent comme étalon photomé- trique, a construit un photomètre-photoptomètre des- tiné à la mesure de faibles éclairements. On produit l'illumination du sulfure par la combustion d’un fil de magnésium et l'on note le temps écoulé entre l'extinction du magnésium et le moment où il y a éga- lité d'éclat entre l’écran phosphorescent et l'écran translucide : la loi de déperdition de la lumière du sulfure permet de calculer l'éclat au moment de l’éga- lité. — M. G. Lippmann : Photographies colorées du spectre sur albumine et sur gélatine bichromatées 1. — M. Bernard Brunhes donne deux méthodes capables de vérifier le parallélisme à l’axe optique des lames cristallines uniaxes, ces méthodes fournissent en même temps une évaluation du défaut de parallélisme et n’exisent qu'un polariseur, un analyseur et un spec- troscope, — M. de Place donne la description d’un schi- séophone, nouvel appareil servant à explorer la struc- ture intime des masses métalliques à l’aide d’un pro- cédé électro-mécanique (sonomètre d’induction joint à un microphone). La méthode est la suivante : 1°frapper le métal à éprouver, 2 recevoir dans un microphone le son émis par le métal, 3° apprécier ce son à l'aide d’un sonomètre d’induction. — M: Berthelot a fait de nouvelles recherches sur la fixation de l’azote atmosphé- rique par les microbes dans le but d'établir les méca- nismes suivant lesquels cette fixation s’accomplit. L'auteur a ajouté à des acides humiques, naturel et artificiel, placés dans uneatmosphère limitée,des traces microscopiques de végétaux inférieurs verdâtres déve- loppés au fond d’un flacon contenant de l’eau ordi- naire, au bout de quatre mois il a constaté dans les acides humiques transformés une augmentation notable d'azote; l'atmosphère ambiant contenait en outre de l’acide carbonique, — MM. H. Baubigny et E. Pé- chard ont constaté la dissociation de l’alun de chrome ; après de nombeuses précipitations à l’alcool il donne toujours une liqueur acide au méthylorange ; ramené à la neutralité par l’ammoniaque, l'acidité re- paraît. Cette particularité est due au sulfate de chrome qui se comporte de la même facon. — M. L. de Coppet rappelle d’abord la loi de Despretz d'après laquelle l’abaissement D de la température du maximum de densité de l’eau au-dessous de 4 degrés est à peu près proportionnel au poids M de substance dissoute dans 100 parties d'eau, loi qui conduit à la notion du coeffi- cient d’abaissement Tt Il énonce ensuite la loi sui- vante : les substances de constitution semblable (et quelquefois de nature très différente) ont sensiblement le même abaissement moléculaire de la température du maximum de densité. L’abaissement moléculaire nl) à : : est la quantité ni X A où A est le poids atomique de la substance dissoute. Les rapports des coefficients d’a- baissement du point de congélation et de la tempéra- ture du maximum de densité présentent aussi quelques relations intéressantes, — M, E. Grimaux, en remar- quant que, dans les sels basiques de quinine, l'acide est uni, non à l'azote du groupe quinoléique, mais à l'azote de l’autre groupe, a pensé qu'il devait se former des sels doubles de quinine à deux acides différents. L'auteur décrit en effet les chlorhydro-sulfate, bromhy- 4. Voir à ce sujet le numéro précédent de la Revue, p. 124. sulfate et iodhydro-sulfate de quinine. — M. de Forcrand a calculé les chaleurs de substitution de un, deux ou trois atomes de sodium dans la molécule de l’acide orthophosphorique. Les grandeurs trouvées, comparées aux quantités déterminées dans ses précé- dents travaux sur les phénols, montrent qu'il est impos- sible d'admettre dans cet acide, soit deux fonctions phénoliques et une fonction acide, soit deux fonctions acides et une fonction phénolique ; c’est un acide pré- sentant trois fonctions acides identiques, sa formule doit être représentée par (PA * 0) (0 H}., — M. Léo Vi- gnon, en présence des différentes définitions et des différents modes d'obtention de fibroine de la soie grège indique une nouvelle préparation qui fournit un produit très blanc, très brillant, souple, tenace et élas- tique qui doit être envisagé d'après lui comme la vraie fibroine ; l’auteur donne les propriétés de cette fibroïne, — M. Ricco qui a signalé la simultanéité des taches solaires et des perturbations magnétiques, donne un tableau des époques des maxima des perturbations et celles des passages des taches au méridien central. Toutes les perturbations sont en retard par rapport au passage des taches d'environ 45 heures ; ce retard indi- querait une vitesse de propagation du soleil à la terre, pour l’action des taches sur le magnétisme de celle-ci d'environ 913 kilomètres, c'est-à-dire 335 fois moindre que la vitesse de la lumière, — M. L. Harsten adresse une réclamation de priorité au nom de M. Plügge pour son dosage des acides des sels d’alcaloïdes avec la phé- nolpthaléine comme indicateur. C. MATIGNON, 3°SCIENCES NATURELLES. — M. P. Miquel fait connaître les méthodes de culture qui permettent d'assister aux phénomènes qui accompagnent le rétablissement de la forme dite sporangiale chez les Diatomacées et il indique de quelle facon il s’accomplit. — M. Alphonse Labbé a étudié les protozoaires parasites du sang des vertébrés qui presque tous appartiennent au groupe des Drepani- dium.Geux-ci sont des sporozoaires de forme bien dé- terminée ressemblant à de petites grégarines habitant les hématies, les leucocytes, les cellules du foie, etc. Les formes adultes s’y enkystent et se transforment en une sorte de morula dont chaque partie représente un Spo- rozoîte, lequel ressemble entièrement aux plus jeunes Drepanidium intra-globulaires. L'auteur pense que les caractères différentiels des Drepanidium sont assez im- portants pour légitimer en leur faveur la création du groupe des Hémosporidées, IL sépare de ce groupe les parasites de la malaria de l’homme et des oiseaux qu’il classe entre les Rhizopodes et les Sporozoaires ; à ce second groupe d’hématozoaires se rattache, sous le nom de Cytamæba ranarum, un hémamibe signalé chez la grenouille et que presque tous les auteurs introduisent dans le eyele évolutif du Drepanidium ranarum. — M. S. Jourdain a reconnu deux modes différents de fixation de certains Acariens, qui, à l’état de larves hexapodes, vivent en parasites sur divers articulés. Chez les larves de quelques Acariens on trouve un ap- pareil analogue aux stomatorhizes des Sacculines et qui n’en diffère que par l’absence de l'organe lagéni- forme qui termine Les tubes ; ceux-ci sont ouverts chezces formes acariennes et l’hémalymphe du parasitifère passe directement dans les stomatorhizes. Cette hémalymphe, pour être utilisée par le parasite, doit, au préalable, subir une digestion. — M. E. Yung signale le fait que les animaux présentant des cas de symbiose font exception à la règle posée par lui précédemment quant à l’in- fluence des lumières colorées sur le développement des animaux aquatiques. Des recherches récentes lui ont montré que l’Hydre d’eau douce (Hydra viridis) se développe plus vite et plus abondamment à la lumière rouge qu'à la lumière blanche; celle-ci leur est plus avantageuse que la lumière verte et surtout que la lu- mière violette; enfin, l'obscurité est fatale à leur déve- loppement, — M. Ed. Piette fait connaître les osse- ments et les silex que l’on rencontre dans la caverne de Brassempouy, et fait remarquer qu'à l'époque de Solutré le Mammouth et l'Eléphant indien ont vécu côte hi bic dE : déni ai Ce NN EN Le TE D Le" vo ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES à côte à Brassempouy; il signale en ouire l’absence ou la rareté du Renne dans les amas équidiens de l’époque magdalénienne, — M. Marcellin Boule rend compte de la découverte d’un squelette d’Elephas meridionalis dans les cendres basaltiques du volcan de Senèze (Haute-Loire) ; il ressemble à l’Elephas méridionalis du crag anglais. [étude des ossements fossiles du Senèze montre que les volcans basaltiques de la vallée de VAI- lier datent de l’époque où l’Elephas meridionalis a rem- placé dans nos pays les Mastodontes. Les environs de Brioude avaient alors acquis les principaux traits du relief actuel. — M. R. Zeiïller a reconnu parmi les empreintes végétales provenant du sondage de Douvres deux espèces dont la présence indique que les couches traversées par le sondage appartiennent bien, comme le présumait M. Brady, à la région supérieure du Houiller moyen. Ed. BELZUNG. Seance du 31 octobre. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Poincaré pré- sente une note sur l’Analysis silus ou géométrie de posi- ion.Ilmontre que les nombres de Betti (ordres de con- nexion de la surface) ne suffisent pas pour déterminer une surface fermée au point de vue de l'Analysis situs, c’est-à-dire, étant donné deux surfaces fermées qui possèdent mêmes nombres de Betti, on ne peut pas toujours passer de l’une à l’autre par voie de défor- mation continue, Cette détermination, suffisante dans l'espace à trois dimensions, ne l’est plus dans un es- pace quelconque. — M. R. Liouville, à propos de ses études sur les équations de la dynamique, répond aux critiques de M. Painlevé, — M. E. Vallier indique une marche rationnelle pour évaluer un paramètre rendant possible l'intégration des équations du mouvement dans le problème balistique. — M. F. Sy communique ses observations de la comète Barnard faites à l’Obser- vatoire d'Alger à l'équatorial coudé., La comète, de très faible diamètre occupe une étendue circulaire de 20° de diamètre environ. — M. Schulhof, par la comparaison des éléments de la comète Barnard et de ceux de la comète Wolf en 1891, arrive à conclure que les deux comètes doivent dériver d’un même corps qui a dù, à un moment donné, se diviser en deux ou plusieurs parties, tout comme les comètes périodiques de Biéla et de Brooks. 20 SGIENCES PHYSIQUES. — M, Amagat a étudié la com- pression des liquides par deux méthodes décrites anté- rieurement, La pression a été poussée jusqu’à 3.000 atmosphères pour l’eau, l’éther, le sulfure de carbone, les alcools méthylique, éthylique, propylique, ally- lique, les chlorure, bromure, iodure d’éthyle, l’acé- tone et le chlorure de phosphore, seulement jusqu'à 1.000 atm. pour l’eau. Dans tous les cas, le coefficient de compressibilité décroit régulièrement quand la pression croit; à part l’eau, il augmente toujours avec la température sous toutes les pressions. — M. C. De- charme étudie les déplacements évolutifs d’un aimant sur le mercure sous l’action d’un courant électrique. — M. L. de Coppet a mesuré la température du maxi- mum de densité des mélanges d'alcool et d’eau, et la température de congélation de ces mêmes mélanges. L'abaissement du point de congélation est propor- tionnel à la quantité d'alcool, il n’en est plus de même pour l’abaissement de température du maximum de densité. — M. Deniau adresse une note sur une nou- velle machine pneumatique. — M. Delaurier adresse le mémoire suivant : Recherches sur les combinaisons optiques et photographiques qui, avec les instruments actuels, peuvent servir pour observer notre satellite avec le plus fort grossissement. — M, le Ministre des Affaires étrangères transmet une lettre du vice-consul de France à Erzeroum sur une observation d’un arc- en-ciel lunaire, — M. Schlæsing, à propos de la fixa- tion d'azote par les microbes, répond à M. Berthelot qu'il n'admet pas cette fixation dans le cas d’une terre végétale nue. exempte de toute végétation apparente, — M. Berthelot réplique en rappelant les expériences 7169 qu'il a exposées depuis de longues années et où il a montré que,'sous l'influence des microbes,c’est-à-dire des organismes inférieurs contenus dans la terre végé- tale, et indépendamment de la présence et de l’action dés plantes supérieures, celle-ci fixe l'azote. — M. H. Le Châtelier montre que la dissociation du bioxyde de baryum est très complexe et ne peut être comparée à celle dé l’oxyde du cuivre. La baryte anhydre à 500° n’absorbe pas la moindre trace d'oxygène si elle est pure; il est nécessaire qu’elle soit partiellement hy- dratée pour rendre l'absorption possible ; le bioxyde à une température déterminée n’a pas une tension fixe. — M. Albert Colson a étudié l’action de l'hydrogène sulfuré sur certains sels métalliques dissous dans la benzine exempte d’eau et observé que la décomposition n’est pas complète et donne lieu à des équilibres tout à fait particuliers. Le chlorure mercurique, entièrement décomposable dans sa solution aqueuse, subit dans la benzine une décomposition qui s'arrête avec la for- mation du corps Hg? C2 HgS. — MM. Th Schlæsing fils et Em. Laurent ont continué leurs expériences sur la fixation de l'azote libre par les plantes : ils ont re- connu, en opérant sur des sols riches en azote dans lesquels étaient cultivées des plantes supérieures, que la fixation n'avait point lieu. Un sol témoin sans culture a également rien absorbé. — MM. À. et P. Buisine ont fait des essais importants d'épuration des eaux d'égouts parle sulfate ferrique, employé concurremment avec le procédé à la chaux; le sulfate fournit des eaux plus pures et a en outre l'avantage de séparer des boues azotées utilisables comme engrais en agriculture. — M.Ballanda fait des expériences sur le pain et le biscuit pour déterminer la quantité d’eau contenue dans leurs différentes parties; 1l a cherché aussi comment variait cette hydratation avec la forme des pains. —M. A. B. Grifiths a extrait des urines deux ptomaines nouvelles, l’une l’érysipéline dans l’érysipèle, la seconde dans la fièvre puerpérale, Ce sont des substances bien cristal- lisées capables de former avec certains sels des com- binaisons bien définies; leurs formules respectives sont C'1 H13 Az O5 et C2? H1° Az 02. — M. A. B. Grifiths a découvert dans le sang de Sipunculus et de Phascoloma un nouveau pigment respiratoire dont il indique quel- ques propriétés et auquel il donne le nom d’hermé- rythrine, Quand on passe des pigments respiratoires des invertébrés inférieurs à ceux des invertébrés supé- rieurs, le nombre des atomes augmente dans la molé- cule, — M, Alexandre Pœhl transmet des micropho- togravures de cristaux de phosphate de spermine, Il conclut à l'identité des cristaux de Charcot et des cris- taux de Schreiner, — M. Delaurier adresse une note sur des procédés chimiques de gravure sur bois. C. MATIGNON. 3° Scrences NATURELLES. — M. Léon Guignard fait connaitre la structure et le mode de développement de l'appareil sécréteur des Copaifera, lequel constitue le premier exemple d'appareil sécréteur schizogène dans le bois des Légumineuses. — M. Ant. Magnin expose ses nouvelles observations sur la sexualité et la castration parasitaire. l’auteur a observé le déve- loppement variable des rudiments staminaux chez les fleurs femelles du Lychnis diurna et vespertina, ainsi que les particularités du développement de l'Ustilago Vaillantii dans les étamines rudimentaires des fleurs stériles du Muscari comosum. Dans ce cas le parasite provoque lagrandissement des parties accessoires, atrophiées, mais préexistantes de l'organe mâle ; il en est de même pour l’organe femelle, représenté par un petit mamelon oyarien, lequel grossit mais ne produit jamais d’ovules. — M. St. Meunier décrit une expé- rience facile à réaliser reproduisant les géminations des canaux de Mars, et permettant de se rendre compte de la cause possible de ce phénomène et des particula- rités qu'il présente. — M. J. Seunes énumère la suc- cession des terrains paléozoïques de la vallée d’Aspe et de la région de Lescun; il signale la faune des calcaires schisteux à Spürifer Verneuili, qui appartient 770 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES au dévonien supérieur (Frasnien), — M, le secrétaire perpétuel signale la troisième édition du traité de géo- logie de M. de Lapparent. — M. Edm. Perrier montre, par l'étude du squelette des étoiles de mer, comment les diverses formes qu’il présente peuvent être reliées entre elles par une série de gradations. En ce qui con- cerne le squelette des bras des étoiles de mer, il doit être considéré comme formé initialement de segments successifs; quant au squelette du disque, on y trouve souvent les équivalents des pièces du calice des Cri- noïdes. Ces pièces calicinales sont des points fixes autour desquels se développent les pièces accessoires, ou pièces discinales, — M. le commandant Bienaimé ré- sume d'une facon succincte les résultats du voyage du transport-aviso la Manche en Islande, à Jean Mayen et au Spitzherg, pendant l’été de 1892; ces résultats seront ultérieurement publiés en détail, — M. A. Ricco pré- sente des photographies qu'il a faite de l’éruption de l'Etna en 1892 et les accompagne d’explications et de diverses considérations concernant l'orientation de l’axe de l’éruption, — M. Jacques Passy, après avoir fait remarquer que plusieurs odeurs différentes pou- vaient coexister dans le même composé et donner à l’odorat l'impression d'un mélange, montre qu'on peut arriver à dissocier expérimenfalement ces odeurs en se basant sur l’existence du minimum perceptible propre à chacune d'elles; en faisant décroîitre progres- sivement la quantité de substance, on voit en effet les odeurs disparaître les unes après les autres. — M. N. Ketscher relate ses expériences ayant trait au pou- voir immunisant que confère aux cobayes contre une dose mortelle du choléra le lait de chèvres vaccinées; il fait connaître en outre les expériences qu'il a faites dans le but d'étudier le pouvoir curatif du lait. Il en résulte que le lait d’une chèvre vaccinée contre le cho- léra outre qu’il vaccine les cobayes contre une infec- tion cholérique ultérieure, les guérit aussi, une fois la maladie déclarée, — M. G. Bay décrit un appareil à injections hypodermiques qu'il a imaginé, afin de re- médier aux inconvénients des systèmes de seringues à piston, tels que le desséchement du cuir du piston, l’ir- régularité dans le calibrage des verres, etc. —M.R. H. van Dorsten adresse quelques remarques à propos d’une communication de M. Delauney du 7 juin der- nier, sur l'accélération de la mortalité en France. Mémoires présentés : M. Willot adresse un mémoire ayant pour titre : Maladies de la betterave ; destruction de l’Heterodera Schachtii. Ed. BELZUNG. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 18 octobre. M. Jungfleisch s’est demandé ce que devenait le mercure pendant etaprès les opérations dusécrélage des poils. Cette industrie consiste à modifier le poil de lapin de manière à lui permettre de se feutrer facile- ment. On obtient ce résultat en imprégnant les peaux couvertes de poils avec une solution de nitrate de mer- cure et en les chauffant à l’étuve. Or, les ouvriers sécré- teurs et les chapeliers eux-mêmes présentent souvent des accidents dus au mercure, qui proviennent de ce fait que, dans les couperies de poils, les ouvriers se trouvent exposés à l'action des fines poussières chargées de mercure que soulèvent en abondance les opérations auxquelles sont soumises les peaux sécré- tées. L'auteur a constaté par l'analyse que chaque cha- peau de feutre en usage contient en moyenne un demi- gramme de mercure, lequel s'y trouve combiné à l’état d'oxyde avec la kératine des poils, formant ainsi un composé peu soluble dans l’eau. Pour combattre cette industrie insalubre, l’auteur propose la substitu- tion du sécrétage sans mercure au sécrétage par le mercure, Suite de la discussion sur l'épidémie de choléra en 1892 : M. Marrotte préconise l'emploi du chlorhydrate d’ammoniaque et dit que le choléra nostras et le choléra indien sont deux maladies dis- tinctes quelque part que l’on accorde aux microbes. Pour M. Hardy le bacille-virgule appartient bien au choléra que nous recevons tout fait, le poison venantdu dehors d'une part par l’eau et d'autre part, surtout par l’airatmosphérique., Pourcetauteur, c'est bien le choléra indien qui a régné à Nanterre, au Havre et dans la banlieue de Paris, mais il n’est pas né sur place. Pour M. Brouardel le choléra vient toujours d’une trans- mission soit par l'eau, soit par les vomissements et les déjections des cholériques. Enfin M. Léon Colin pense que l'épidémie actuelle est de nature exotique; que l'assainissement de la banlieue nordde Parisestun gage de sécurité pour l’ensemble du territoire et que cette maladie est une de celles qui révèlent le mieux la puis- sance de l'hygiène pour les combattre. Séance du 25 octobre, M. Magitot : Sur une variété de cagots des Pyré- nées. L'auteur a étudié les altérations des extrémités des doigts, des ongles et du système pileux qu'il a observées dans le pays de Béarn; il en résulte que ces altérations seraient des manifestations lépreuses atté- nuées, établissant par suite la survivance de la lèpre jusqu’à l’époque actuelle dans la région pyrénéenne, — M, A. Béchamp : Sur les albumines physiologiques normales et pathologiques et sur l’albuminurie physio- logique. L'auteur fait remarquer que, dans l’état de santé, l'urine humaine peut contenir jusqu’à près de 4 grammes d’albumine par litre. L’albumine du sérum ne filtre pas à travers le rein; celle de l'urine ne pro- vient donc pas du sang. Il traite ensuite de l’origine des ferments solubles ou zymases, et de la théorie du microzyma. Quant aux albuminoïdes l’auteur a été con- duit à admettre, y compris les zymases, environ 60 es- pèces d’albuminoïdes solubles et insolubles, absolument irréductibles à une substance unique qui serait l’albu- mine du blanc d'œuf de poule. L'existence des micro- zymas permet d'expliquer celle d'une albuminurie physiologique, dans l’état de santé parfaite, laquelle prouve que le rein possède une fonction propre et qu'il n’est pas simplement un appareil de filtration. Puis l'auteur aborde la théorie chimique dela nutrition, dont le premier acte, la digestion est un phénomène d’ana- lyse; elle est superficielle par rapport à l'organisme ; le deuxième acte, l'assimilation, est un phénomène de synthèse qui s’accomplit au niveau des tissus ; enfin le troisième acte de la nutrition, la désassimilation, s'accomplit dans la cellule et dans le mycrozyma. — M. Nicaise: Hyperplasie d’origine tuberculeuse, arthrite tuberculeuse avec hyperplasie fibro-plastique et graisseuse de la synoviale, — M. Ch. Leroux : Sur l'impétigo des enfants, affection contagieuse, inoculable et microbienne, SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE $ Séance du 29 octobre. M. Brown-Séquard expose les résultats des injec- tions de liquide testiculaire. Plus de 200.000 injections ont été faites, aucune n’a été suivie d'accident, Quel- quefois elles donnent lieu à une douleur persistant deux ou trois jours, très rarement on observe de la fièvre, fièvre qui est de nature réflexe, Il cite des cas de diminution de volume des cancers et des fibromes. La paralysie agitante a été deux fois guérie; des tuber- culeux ont été améliorés. L’ataxie locomotrice et la sclérose latérale de la moelle sont généralement gué- ries, Le diabète a aussi disparu dans un cas qui résis- tait à l'extrait de pancréas. M. d’Arsonval est parvenu à préparer un nouveau liquide testiculaire plus énergi- que. — M. Charrin communique les résultats de ses expériences sur l’hérédité de la vaccination pour la maladie pyocyanique à l’aide de bacilles atténués ou de produits solubles, Les animaux nés de parents vaccinés sont vaccinés, La vaccination du père seul serait insuf- fisante, — M. Hénocque a perfectionné sa méthode pour étudier spectroscopiquement le sang à la surface des tissus vivants, À l’aide d’un verre condensateur ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 171 RE EEEEEEEE———————————— EE bleu spécial il peut augmenter l'intensité des deux bandes de l’oxyhémoglobine. On peut déterminer la quantité d’oxyhémoglobine contenue dans le sang, en éteignant les bandes du spectre à l’aide de verres orangés d'épaisseurs progressives. Une table dressée empiriquement donne la quantité d’oxyhémoglobine correspondant au verre employé. — M. Roger présente des cultures d'un microbe très semblable au Proteus vulgaris, mais coagulant le lait en le laissant alcalin. — M. Azoulay : Sur les attitudes du corps. — MM. Pilliet et Cathelineau : Sur les lésions de l'organisme et par- ticulièrement du rein dans l’empoisonnement par le sublimé corrosif, — MM. Gamaleïa et Ketscher ont vacciné contre le choléra des cochons d'Inde en leur injectant dans l'abdomen du lait provenant d’une chè- vre vaccinée. Ce lait injecté dans le péritoine rend inefficace une inoculation de choléra faite dans les muscles de la cuisse, On peut même par ce procédé guérir des animaux atteints de choléra en leur inocu- lant ce lait 5 heures avant la mort des témoins. Aucun bacille n’existe dans le lait vaccinateur; l’ébullition détruit ses propriétés vaccinantes, le chauffage à 70° les atténue. Le petit-lait possèdele pouvoir immunisant, — M. Grimaux a préparé un chlorhydrosulfate de quinine très solubleetparsuiteappelé àrendre de grands services en thérapeutique. D’après M. Laborde, son action est identique à celle du sulfate. — M. Bouvier étudie les variations du jeune âge à l’âge adulte chez les cétacés du genre Hyperodon. Séance du 5 novembre. M. Leven : Irritations de la moelleet du plexus so- laire; maladies ®t dyspepsies qui en résultent, — M. Depoux présente un sujet atteint d’ataxie et de myélite ascendante guéri par des injections de liquide testiculaire. Seul, le réflexe rotulien n’a pas réapparu. — Il présente un autre sujet guéri de névrite rhuma- tismale (diagnostic réservé) par le même traitement, Il a constaté aussi sur une dame âgée de 94 ans, que le liquide testiculaire pouvait faire recouvrer l’intelli- gence perdue. — M. Brown-Séquard annonce qu'il a observé lui-même une amélioration notable de l’intel- ligence, après quinze jours de traitement, chez un ma- lade dont les fonctions cérébrales étaient altérées à la suite d’un traumatisme. — En outre une note de M. Ouspenski de Saint-Pétersbourg, qui, à Tiflis, a guéri 8 cas terribles de choléra sur 10 traités par le liquide testiculaire à dose massive, M. Brown-Séquard insiste ensuite sur la valeur des injections des liquides organiques. Il pense que le liquide cérébral, et autres analogues n’agissent que par le suc testiculaire qu'ils renferment, ce dernier imprégnagt tout l'organisme, — M. Gley : Effets de la destruction lente du pancréas; confirmation des faits annoncés par M. Thiroloix, — M. Ch. Richet : Le singe, si sensible à la tubercu- lose humaine, résiste complètement à l’inoculation de tuberculose aviaire. — M. Hénocque à constaté, par des analyses faites avec du sang in vitro, l'exactitude de la méthode de dosage sur le vivant pour l’oxyhémo- globine. — M. Moreau : Streptocoque nouveau de la bouche, — M. Charrin étudie les habitats naturels du bacille pyocyanique et son évolution sur différents représentants de la série animale, Inoculé au lombrie, il perd rapidement ses propriétés habituelles. M. Char- rin à réussi à l’inoculer à des Cactées, et à créer ainsi une nouvelle maladie pour ces plantes. Il étudiera, avec M. Guignard, les lésions localisées ainsi déterminées, et ces recherches jetteront un nouveau jour sur le mécanisme de la défense de l'organisme contre les invasions microbiennes, défense que, dans ce cas, -on ne peut attribuer à la phagocytose. — M. Passy : fait une communication sur la puissance odorante et qualité des odeurs, continuant ainsi la série des recherches dont il a déjà entretenu la Société. Ch. CONTEJEAN. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 4 novembre. M. Raveau expose les nouveaux travaux de M, Ma- thias relatifs à la densité critique et au théorème des états correspondants. M. Mathias est parvenu à déter- miner d’une facon très précise la densité critique, dont la mesure directe est fatalement entachée de fortes er- reurs, et à préciser les conditions dans lesquelles est applicable le théorème des états correspondants. Il s'appuie sur les deux lois qu'il a énoncées antérieure - ment. La première, la loi du tiers de la densité, découle de la valeur 3 b du volume critique dans la formule de Van der Waals. Il s'ensuit que la densité critique d’un corps tend vers le tiers de la densité du même corps à l’état liquide, prise à la température la plus éloignée possible de la température critique. La seconde loi, celle du diamètre rectiligne, qu'il a énoncée dans un tra- vail fait en collaboration avec M. Cailletet, a été con- firmée récemment par M. Amagat, Elle consiste en ce double fait que les deux courbes de densités du li- quide et de la vapeur saturée d’un même corps, se raccordent en une courbe unique et que cette der- nière présente un diamètre rigoureusement rectiligne, Mais, sauf pour l'acide sulfureux, la vérification n’avait porté jusqu'ici que sur des intervalles de température peu étendus. Les récentes expériences de M. Sydney Young, effectuées en partie avec la collaboration de M. Ramsay, fournissent à M. Mathias une brillante con- firmation de ses deux lois, et lui permettent d’en tirer d'importantes conséquences. La loi du tiers de la den- sité se trouve vérifiée sur les douze corps étudiés par M. Young, et laloi du diamètre rectiligne demeure ri- goureusement applicable à tous ces corps pour un in- tervalle de température qui atteint 300°. Par suite les densités critiques de ces corps se trouvent déterminées avec précision, car leur valeur se déduit immédiate- ment de la connaissance de leur diamètre rectiligne. On trouve en outre que les trois premiers alcools ont rigoureusement la même densité critique. Les données expérimentales sont encore trop peu nombreuses pour permettre de voir si la loi se poursuit; cependant la probabilité est très grande, car les densités critiques de tous les alcools primaires jusqu'en C$, déduites de la loi du tiers de la densité, demeurent toutes com- prises entre 0,270 et 0,278. L’équation du diamètre rectiligne ne contient, en dehors des éléments cri- tiques, qu'une seule constante, En vertu du théorème des états correspondants, cette constante devrait être la même pour tous les corps. A ce point de vue, les douze corps de M. Young se groupent en deux caté- gories, l'une composée de huit corps, l’autre de quatre, présentant chacune une valeur déterminée de la cons- tante. De là résulte que le théorème des états corres- pondants doit s'appliquer non pas à tous les corps pris en bloc, mais qu'il faut les grouper en séries, le théo- rème conservant toute sa valeur pour les divers corps d’une même série. La loi du diämètre fournit une autre conséquence. M. Mathias considère la tempé- rature à laquelle la densité atteint le triple de la den- sité critique comme une limite inférieure de la tem- pérature de solidification du liquide. Or, si la loi du diamètre se conserve, cette température doit se trouver précisément égale à la moitié de la tempéra- ture absolue critique. Le fait se vérifie pour un cer- tain nombre de corps, notamment pour la benzine. Cependant il existe des corps pour lesquels la tempé- rature de solidification est certainement plus basse, M. Mathias en propose une explication. — La loi du tiers de la densité, jointe à celle du diamètre, conduit à une formule qui permet de calculer la densité critique avec une approximation plus grande que celle qui a été indiquée plus haut. La formule est d’ailleurs très simple, elle ne dépend que de la connaissance d’une densité, et de celle de la température critique, Cette nouvelle formule donne certainement les densités cri- tiques au +. M. Guyÿe en avait déjà proposé uneautre, 7172 mais elle repose sur une hypothèse gratuite et ne saurait représenter les faits. M. Mathias à pu ainsi établir avec une précision toute nouvelle un tableau de densités critiques assez certaines pour pouvoir être considérées comme de véritables constantes nouvelles de la physique. — MM. Cailletet et Colar- deau ont effectué à la Tour Eiffel des recherches expé- rimentales sur la chute des corps et la résistance de J'air, que M. Colardeau fait connaître à la Société. Toutes les expériences antérieures, et notamment celles de M. Langley, exposées précédemment à la Société par M. Lauriol, prètaient à une grave critique. Dans toutes, il s'agissait d’un mouvement de rotation produit par un manège. Or, dans ces conditions, il y a forcément entrainement de la masse d'air voisine, ce qui, ainsi que l’a montré M. le commandant Renard, modifie considérablement les résultats. Les auteurs ont tenu à réaliser une méthode irréprochable, Ils ont étudié Ja résistance de l'air sur un corps tombant en chute libre de la seconde plate-forme de la Tour, c'est- à-dire d’une hauteur de 420 mètres. Pour connaître la loi du mouvement des corps, ils ont partagé la hauteur totale de chute en six intervalles égaux, c’est-à-dire qu'ils ont repéré les distances successives de 20, 40 mètres de chute, et ils ont noté les temps auxquels le mobile atteint ces différentes positions. Dans ce but, ils ont enroulé un même fil, fin et léger, sur six bobines coniques consécutives présentant la pointe en bas et portant chacune 20 mètres de fil. Ce fil a son extrémité attachée au mobile; il le suit dans son mou- vement sans lui opposer une résistance appréciable. Lorsque le fil, en se déroulant, passe d’une bobine à la suivante, il écarte un contact électrique très souple offrant une très faible résistance à l’écartement, et cette rupture du courant actionne le style d’un enre- gistreur sur lequel un diapason électrique inscrit le temps avec une précision du + de seconde. Le retard sur la chute théorique dans le vide, dû à la fois à la résistance du fil au déroulement et à la résistance du contact électrique, évalué par des mesures directes, atteint fout au plus le £ de sa valeur. Par cette mé- thode, MM. Cailletet et Colardeau ont vérifié que la résistance opposée par l'air à des plans d’égale sur- face est indépendante de leur forme, et que, pour des plans de surfaces différentes, elle est proportionnelle à la surface. De plus en lestant un même plan de poids variables, ils ont pu étudier Ja variation de la résis- tance de l’air en fonction de la vitesse du mobile, Ils ont trouvé ainsi comme coefficient de proportionnalité entre la pression de l’air par unité de surface etle earré de la vitesse, pour des vitesses inférieures à 25 mètres par seconde, lenombre0,071, tandis que M.Langley pro- pose 0,08. Enfin pour des vitesses plus considérables, ce coefficient augmente avec la vitesse, c’est-à-dire que la résistance de l'air croît plus vite que le carré de la vitesse. En terminant, les auteurs présentent aux membres de la Société les graphiques originaux fournis par les appareils enregistreurs : ils sont d’une beauté et d’une netteté remarquables, Edgard Haunié. SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 2? novembre. M. d’Ocagne : Nouvelle construction simplifiée du point le plus probable donné par un système de droites non convergentes. Cette construction dérive de la con- sidération d'un élément géométrique spécial dont l’au- teur démontre les propriétés fondamentales, — M, G. Humbert : Sur une transformée homographique à 16 paramètres arbitraires de la surface des ondes, Etude des coniques et des biquadratiques situées sur la surface. — M. Genty donne des démonstrations sim- plifiées de plusieurs résultats connus relatifs aux invo- lutions d'espèce supérieure et y ajoute diverses for- mules nouvelles dont il indique quelques applications, — AÀ ce propos, M. Humbert présente quelques ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES . remarques relatives aux involutions de points marqués sur des courbes de genre quelconque. M. D'OCAGNE. ACADEMIE DES SCIENCES D’'AMSTERDAM Séance du 29 septembre, 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. P.-H. Schoute dé- T2 ue montre le théorème suivant : Si TL 1: = À 2 b2 sente une ellipse donnée E, et f (x,y)forme l’expres- sion homogène des termes du nèw ordre de lé- quation d’une courbe C* par rapport aux mêmes axes, les anomalies excentriques 4x des points d’intersec- tion Sx (4 = 1, 2,... 2n) de E et C* ont une somme A f(a, 1b). ren ET f (a, — it) ensuite connaître des cas particuliers. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Kamerlingh Onnes continue sa communicafion des résultats des mesures de M. P. Zeeman sur le phénomène de Kerr (voir Re- vue, &. 1, p. 530). Elles confirment pour la réflexion polaire du fer et du cobalt la découverte de M. Sissingh, qu'il faut ajouter à la théorie de M. Lorentz une difté- rence de phase d’une valeur constante, la différence de phase S de Sissingh. Elles confirment donc en même temps la théorie de M. Goldhammer. M. Zeeman trouve dans S une dispersion magnétlo-optique dephase, 3° SCIENCES NATURELLES. M. Th. W. Engelmann s’occupe d’abord de l'influence des irritalions réflexes et centrales du nerf optique sur le mouvement des cônes de la rétine à l’occasion d'expériences faites dans lelabora- toire physiologique d'Utrecht par M. W, Nahmmacher, Si l’on irrite la rétine de l’un des yeux d’une grenouille, les courants électriques de la rétine de l’autre subissent des oscillations caractéristiques (voir Revue, t. I, p. 654). Cette expérience semble démontrer l'existence de fibres centrifuges dans le nerf optique. Cependant MM. V. Horsley et Gotch ont trouvé que la moelle épi- nière des chats et des singes montre aussi des mouve- ments réflexes de racine sensible à racine sensible, Aussi, l’auteur a jugé nécessaire de chercher à dé- cider de la question de l'hypothèse des fibres centri- fuges dans le nerf optique à l’aide d'une étude des déformations des cônes. Afin d'éviter chaque irri- {ation lumineuse,on a fait usage de réactions chimiques en déposant des cristaux de NaC] à la surface de l’autre œil dans la première série d'observations et au chiasma des nerfs optiques mis à nu dans la seconde série, On avait pris soin de tenir les grenouilles faiblement cura- risées dans l'obscurité pendant 5 à 6 heures avant l’ap- plication des cristaux. Ensuite on déposait les cristaux aussi vite que possible à l'aide d’une lumière rouge très faible; on rétablissait l'obscurité parfaite et5 minu- tes après on éloignait les cristaux. Enfin, 10 minutes plus tard, on décapitait les grenouilles, on dureit les têtes dans l'acide nitrique à 3 40/, et on examinait les rétines 12 heures après suivant la méthode décrite par M. van Genderen Stort. En même temps on prenait des séries d'expériences de contrôle sans irritation chimique (a), avec irritation chimique etsection d'un des deux nerfs optiques (b), avec des grenouilles tenues seule- ment dans l’obscurité (ce). On examinait seulement la position des cônes, le pigmentne montrant pas de chan- sement caractéristique. On distinguait les trois posi- tions suivantes : 1. Position proximale (myoïde en lon- sueur —1 à 2 ellipsoïde, contraction forte). 2. Position mésiale (myoide = 2 à 4 ellipsoïde, contraction modé- rée}. 3, Position distale (myoïde = 4 à 6 ellipsoïde, allongement maximal). Voici le résultat des expé- riences : Série I. Irritation de l’autre œil. Les deux nerfs optiques intacts. Pour 15 cas, 13 à position proxi- male (les autres mésiales et distales). Contrôle à, b, €, de 52 cas, 40 à p. distale (pour les autres 6 mésiales, 4 proxim., etc). Série IL. Irritation du chiasma : Le nerf optique intact. Pour 52 cas, 42 à p. proximale (pour repré- déterminée par la relation ei — COR IT TT PV Pre ee AT ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES L 4 te A à CE ai té ne 7173 les autres 2 mésiales, 6 distales, etc.). Contrôle à, b, €, : pour 98 cas, 78 à p.mésiale ou distale (pour les autres 18 proximales). Le nombre relativement grand des cas à p.proximales parmi les expériences de contrôle de la seconde série s'explique suffisamment par l’impossi- bilité d'empêcher totalement la diffusion de la solution saline vers l'extrémité périphérique du nerf coupé. En somme, les expériences de M. Nahmmacher démon- trent incontestablement que le nerf optique contient des fibres centrifugales, dont l’irritaltion cause la con- traction des cônes en se transportant par action réflexe de l'œil irrité à l’autre. —M. Th. W.Engelmann s'est occupé de la théorie de la contraction des muscles. Jusqu'ici la question de savoir de quelle manière le travail chimique, qui produit la contraction du muscle, se transforme en travail mécanique, est restée sans ré- ponse. Cette transformation est-elle due directement à l'attraction chimique ou à l'intermédiaire de la cha- leur ou de l'énergie électrique? Plusieurs physiolo- gistes (MM. Pflüger, Fick,Verworn) s’en tiennent à lat- traction chimique. Cependant le nombre extrêmement petit des molécules actives pendant une contraction, ne s'accorde pas avec cette théorie. En effet, de quel- que manière que l’on se représente la forme, les di- mensions, la position et la sphère d'action de ces molécules actives, il reste impossible de s’imaginer qu'elles puissent mouvoir la masse relativement in- finie des molécules chimiquement inactives à l’aide de l'attraction chimique directe. L'auteur explique cette difficulté par le calcul. La seconde hypothèse, qui dérive l’énergie mécanique de la chaleur dégagée par la combustion physiologique, offre plus de vrai- semblance. D’après elle, le processus de la con- traction du muscle est analogue à la marche des machines à vapeur et des machines thermiques. M. Sol- vay s’est opposé à cette analogie en remarquant que le muscle travaille beaucoup plus avantageusement que ne le font les machines citées. À la vérité, les dif- férences en effet utile sont considérables, mais il est probable que des améliorations futures des machines réduiront ces différences de manière à ne plus surpas- ser les différences entre les machines elles-mêmes, D'un autre côté plusieurs physiologistes croient avec M. Fick que l'hypothèse de l’origine thermique de la force musculaire est à rejeter, parce qu’elle ne s’ac- corde pas avec le second théorème fondamental de la théorie mécanique de la chaleur (loi de Clausius). Suivant l'opinion de l’auteur, cet argument est insou- tenable, ce qu'il va prouver par la théorie et par l’ex- périence. Déjà en 1875, M. Pflüger a remarqué que la température mesurée des organes n’est que la moyenne d’une infinité de températures différentes de plusieurs points de ces organes et que particulièrement la température des molécules en combustion doit être très considérable. Peu après, l’auteur a appliqué des considérations analogues aux muscles. Le fait même qu'un nombre extrêmement petit des molécules de la masse musculaire fonctionne comme source de chaleur, pour laquelle le reste forme une enveloppe refroidis- sante d'extension énorme, fait présumer qu’au con- traire la condition générale de transformation de cha- leur en travail (transmission de chaleur d’un corps de température élevée à un corps de température basse) se trouve satisfaite, et même, eu égard à la différence extrêmement grande des températures, d’une manière très avantageuse. Seulement il faut avouer, qu'il n’est pas encore démontré que la nature s’empare de cette méthode pour produire l'énergie mécanique. A présent l’auteur va indiquer quelques idées,qu'il espère pouvoir préciser plus tard. Toutes les parties contractiles con- tiennent en premier lieu des éléments positivement bi-réfringents, à un axe optique, dont la direction coïncide avec celle de la contraction. Il n’y a plus au- eun doute que ces éléments ne soientle siège des forces contractantes. De même les partiesorganisées qui pos- sèdent le même pouvoir bi-réfringent peuvent se rac- courcir dans la direction de laxe optique, après la mort, sous l'influence de certains agents et même avec force, vitesse et étendue mesurables comme celles de la contraction musculaire. Ce raccourcissement se montre généralement avec une imbibition augmentée, Lorsque l’auteur trouvait, il y a vingt ans, que les cou- ches bi-réfringentes des muscles à stries transversales se gonflent par l’imbibition d’eau livrée provenant des couches mono-réfringentes, on put croire avoir dé- couvert la cause de la contraction musculaire. Ce- pendant on ne connaissait pas encore la cause du déplacement de l’eau. L'auteur s’est alors borné à la remarque générale que probablement le processus chimique mis en action dans le muscle par l’irrita- tion entraine ce déplacement, Il y ajoute que ce pro- cessus peut se faire de deux manières différentes : en premier lieu par un changement de la constitu- tion chimique du liquide qui environne les couches bi-réfringentes, l’état d’imbibition dépendant de cette constitution, On s’imagine par exemple la forma- tion de l'acide lactique, dans laquelle les couches anisotropes du muscle se gonflent considérablement. Cependant cette hypothèse est soumise à la dif- ficulté du nombre relativement petit des molécules chimiquement actives. Cette difficulté n'existe pas dans la seconde hypothèse, celle de l’échauffement à haute température. Par l’échauffement tous les éléments positivement bi-réfringents subissent la contraction caractéristique, suivie du rallongement après refroi- dissement.La température où la contraction commence dépend en premier lieu de la nature du liquide envi- ronnant ; par l'addition d’une petite quantité d’alcäli ou d'acide, elle peut s’abaisser de 60° à 40°.La question de savoir si la chaleur agit par un changement de l’é- tat d’imbibition ou d’une autre manière,reste indécise, Il s’agit seulement de prouver que la chaleur cause la contraction de tous les éléments organisés bi-réfrin- gents, même des éléments morts, Dans les derniers temps, l’auteur à étudié ce phénomène surtout par rapport au tissu connectif fibreux, pour l’étude du- quel les cordes de violons paraissent une matière convenable. Voici la description de son appareil, Un bout de corde E parfaitement imbibé d’eau porte un poids tenseur, el est suspendu à un des bras d'un levier, dont l’autre porte des contrepoids mo- biles et se termine par une pointe dessinant sur un plan mobile les positions successives. La corde est librement entourée par une spirale de platine qui peut être échauflée par un courant électrique. La corde et la spirale sont plongées dans une éprouvette remplie d’eau, qui contient aussi un thermomètre. La corde, chargée de 50 à 100 grammes, conserve sa lon- gueur pendant que latempérature reste constante ou ne s'élève pas jusqu'au delà d’une certaine limite (p. ex. 60°). En surpassant cette limite à l’aide d'un échauffement faible par une flamme, on voit la corde se raccourcir lentement. Si maintenant on fait passer le courant dans la spirale,la corde se contracte subite- ment et d’une quantité considérable pour se rallonger immédiatement quand on interrompt le courant. Et pendant ce temps le thermomètre ne montre qu'une variation minimale de la température (p. ex. de 0,1), On peut répéter cette épreuve avec la même corde des centaines de fois avec le même effet et produire ainsi une quantité considérable de travail mécanique. Le calcul du pourcentage de la chaleur transformée de cette matière en travail mécanique montre que l'appareil fonctionne très avantageusement,Peut-être ce pourcen- tage surpasse-t-il même celui de l’action musculaire. En effet, l'appareil en question représente un musele : la corde bi-réfringente forme l'élément contractile bi: réfringent; l’eau environnante remplace la masse mus- culaire refroidissante; la spirale équivaut aux molé- cules thermogènes irritables et le passage du courant tient lieu d'irritation. L'auteur présente plusieurs dia- grammes produits par l’appareil et par l'action muscu- laire,qui montrent entre eux une analogie parfaite. Après une période d'action latente on voit une période d’éner- 774 gie montante (expression de M. von Helmholtz) qui, à son tour,est suivie d’une période d'énergie diminuante. L'appareil construit par M. Engelmann peut aussi ser- vir à réfuter la théorie pyro-électrique de la contrac- tion, développée par M. G. E. Muller avec beaucoup de sagacité, D’après cette théorie, le muscle doit se dé- tendre aussitôt que la température des particules biré- fringentes devient constante. Cependant le muscle rac- courci reste à sa mème longueur, s’il neserefroidit pas. Cette longueur est une fonction de la température ins- tantanée entre les limites où elle dépend de la tem- pérature; entre ces limites, elle ne dépend nullement de la vitesse de la variation de la température. Enfin l’auteur fait voir comment sa théorie peut expliquer les autres formes de contractilité, le mouvement des cils vibratils et celui du protoplasme. Cependant on ne doit pas exiger que tous les phénomènes spé- ciaux de l’action musculaire se vérifient par son ap- pareil, la complication des phénomènes, même celle des phénomènes mécaniques dans les muscles vivants étant si grande. Seulement le principe de la transfor- mation d'énergie chimique en travail mécanique à l’aide d’échauffement à haute température dans l’action musculaire est démontré par les expériences. SCHOUTE, Membre de l'Académie. SOCIÈTE DE PHYSIOLOGIE DE BERLIN Séance du M. Kossel: Suite de ses recherches sur la chimie du corps cellulaire. L’auteur s’occupe surtout des proté- ides, qu'il étudie depuis plusieurs années déjà. Ces corps, parmi lesquels on peut citer la nucléine, sont des combinaisons d’albumine avec un groupement « prostétique ». Le groupement qui dans la nucléine est combiné avec l’albumine est l'acide nucléique que l’auteur a extrait d'abord de préférence de la levüre, puis du sperme du saumon et finalement des leuco- cytes du thymus. Dans les trois acides nucléiques ainsi obtenus le rapport du phosphore à l'azote a cons- tamment été trouvé égal à un tiers; en outre, ils se sont décomposés en bases telles que la guanine, l’adé- nine et d'autres encore. Ces divers acides nucléiques diffèrent les uns des autres par leurs autres propriétés: néanmoins la différence entre les deux acides d’ori- gine animale n’est pas aussi importante que celle qui existe entre ceux-ci et l'acide nucléique d’origine vé- gétale. Ce dernier acide a ceci de particulier, que par- mi ses produits de décomposition se rencontre un hy- drocarbure qui, à un examen plus minutieux se trouva renfermer aussi bien une hexose qu'une pentose. La nucléine des leucocytes montre dans ses réactions chi- miques une analogie d'autant plus grande avec la chro- matine qu’elle renfermait moins d’albumine. Malgré maintes analogies entre l'acide nucléique et lacide urique, il ne fut pas possible d'établir la parenté chi- mique de l'acide urique et de la nucléine, ni sa déri- vation probable de cette dernière substance. Les rap- ports de l'acide nucléique avec l’albumine parurent être d’une importance particulière; ces relations s'étendent également de l'acide nucléique d'une cel- lule à l’albumine d’autres cellules, et c’est sur cette parenté que semblent reposer les propriétés bacté- ricides des leucocytes. L'auteur poursuit ses recher- ches dans cetle voie. — M. Gad établit sur les phé- nomènes d’excitation dont le muscle est le siège une théorie reposant sur les vues de Fick, lequel considère la fibre musculaire comme formée, en dedans de la gaine musculaire (sarcolemma) de deux couches alter- nantes de liquides hétérogènes non miscibles l’un avec l’autre, Au moment de l’excilation, le premier changement consiste dans une transformation chimique de l’une de ces deux couches, à la suite de laquelle la seconde pénètre la première transformée, elle s’élargit et il en résulte un raccourcissement de la fibre, A ce premier processus en succède un second qui a pour 14 octobre. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES effet le rétablissement de l’état primitif, Par suite des diverses circonstances extérieures et intérieures, ces deux processus peuvent se combiner diversement de telle manière que l'effet final observé puisse être diffé- rent, La facon variable dont se comporte la contraction isotonique et isométrique du muscle dans le tétanos, les effets des excitations de « sommation » et d’autres phénomènes ont trouvé leur explication en partant de l'hypothèse précédente. Dr W. SkLAREK. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 13 octobre. 1° SGIENGES PHYSIQUES.— M. Franz Exner : Recherches électrochimiques (3° communication), L'auteur étudie comment se comportent, au point de vue électrique, les métaux dans les bases fortes (KOH, NaOH,AzHÿ) et mesure les différences de potentiel à la surface de séparation des bases précédentes avec les acides AzO3H, SO‘H?, HCI, HBr, HI, HEI, C?20‘H? et C20?Hf, Ces différences oscillent entre quelques millièmes et quelques dixièmes de volt suivant la nature et la con- centration des acides, Sauf quelques exceptions, les acides sont positifs vis-à-vis des bases. Il n'y a que des relations qualitatives entre les valeurs thermiques et les valeurs électriques. 20 SCIENCES NATURELLES, — M. Ludwig Roskiewicz adresse une réclamation de priorité pour son « Etude sur la structure des montagnes ». — M. G. Haber- landt : Recherches anatomiques et physiologiques sur les feuilles des plantes tropicales. Sur la transpiration de quelques plantes (1° communication).Cesrecherches, effectuées au jardin botanique de Buitenzorg, à Java, montrèrent que la transpiration, dans ces climats chauds et humides, est moindre qu'en Europe. Eu égard à l’abondante végétation de ce pays, il en résulte que le courant de transpiration ne peut être regardé comme le véhicule des sels chargés de nourrir la plante, opi- nion généralement admise, — M. Ph. Knoll : Sur la connaissance des fibres des muscles striés présentant des stries doubles disposées obliquement. — M. Mojsi- sovics donne quelques renseignements sur les décou- vertes amenées par de nouvelles fouilles dans le trias de Hallstätter. Emil WEyr, Membre de l'Académie. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Pendant la période des vacances (août-octobre), les publications de l’Académie des Lincei ont continué à paraître régulièrement; et, comme le jour approche où les séances vont recommencer, nous donnons, comme les dernières années, un résumé des principales com- munications qui ont été faites jusqu’à ce jour, 1° SGtENGEs MATHÉMATIQUES. — M. Volterra a publié deux notes dans lesquelles il s'occupe de la propagation des vibrations lumineuses dans des milieux isotropes, — M. Bianchi a étudié les déformations infinitésimales des surfaces flexibles et inextensibles, et dans un autre travail il a traité de la transformation de Bäklund pour des systèmes triples orthogonaux pseudosphériques. — M. Pizetti : La loi de probabilité des erreurs d’ob- servation. — M. Somigliana : Sur les expressions ana- lytiques générales des mouvements oscillatoires. — M. FErattini : Sur quelques théorèmes de M. Tchebi- cheff, — M, Del Re : Sur la surface du cinquième ordre, qui à une cubique double et un point triple. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Righi avait déjà donné la description du phénomène suivant : Dans un petit ballon en verre, où l’air est raréfié, se trouve une élec- trode en communication avec le pôle négatif d’une pile dont le pôle positif est relié à la terre; la surface ar- gentée interne du ballon se trouve de même en com- munication avec la terre, Une autre électrode mobile est reliée à un électromètre à quadrants, À mesur qu'on éloigne les deux électrodes et qu'on exécute des mesures, on voit que la déviation s’accroit jusqu'à un ; ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 715 maximum, pour redescendre ensuite. M. Righi a ré- pété cette expérience en substituant un galvanomètre à l'électromètre, et il décrit les variations du potentiel au- tour de lacathode, lesquelles montrent qu’à proximité de cette dernière se trouve une surface idéale où le potentiel présente une valeur minima ; cette surface est dite né- gative par M. Righi. — M. Ascoli a repris les recherches de M. Pisati sur la ténacité du fer à diverses tempéra- tures en se servant de bandes de tôle au lieu de fils. Il a vu que la ténacité présente un minimum à 70° etun maximum à 2360; la différence entre le maxi- mum et le minimum est le 35°/, de la ténacité à la température ordinaire. D’autres expériences ont été exécutées pour étudier la plasticité du fer, c’est-à-dire le rapport entre la déformation permanente et l'effet qui la produit. La plasticité diminue régulièrement jusqu’à un minimum voisin de 150°, pour s’accroitre ensuite, — M. Vicentini a poursuivi ses recherches sur les phénomènes lumineux dus à des décharges électriques dans des conducteurs métalliques placés dans l'air raréfié; il donne la description des phé- nomènes qui se produisent avec un cylindre vide et percé et avec deux disques. — M. Cantone a reconnu, en étudiant les variations de la résistance de nickel dans un champ magnétique, que la loi de proportion: nalité entre ces variations et les carrés des intensités magnétiques, se vérifie seulement lorsque le corps possède, au commencement de l'expérience, un ma- gnétisme résiduel ; lorsqu'on part d’un état neutre, la marche du phénomène change, probablement parce que le processus d'orientation des molécules est plus compliqué. — MM. Agamennone et Bonetti on fait construire un nouveau type d’hygromètre, qui présente l’avantage de soumettre la même masse d’air à une double méthode d'expérimentation, ce qui permet de contrôler les résultats, et de mesurer l'humidité de l’air dans un instant déterminé, — Un autre appareil, dû à M. Agamennone, sert à enregistrer les perturbations séismiques. Cet appareil est à double vitesse, c’est-à- dire que lorsqu'une secousse se produit, l’enregistreur se met à marcher avec une vitesse beaucoup plus grande, ce qui donne des tracés agrandis et très dé- taillés pendant le court délai du mouvement séis- mique. — M. Cardani a proposé une nouvelle mé- thode pour déterminer la constante diélectrique du soufre ; il a observé que cette constante s'accroît à me- sure que devient plus forte l'intensité du champ ma- gnétique dans lequel on fait les expériences, et que, pour des champs peu intenses, la constante se trouve comprise entre 3, 6 et 3, 5. — M. Guglielmo, en vue de l'intérêt spécial que présente, d’après la loi de Raoult, la connaissance des tensions de la vapeur des solutions, a étudié la tension des vapeurs des solutions de soufre et de phosphore dans le sulfure de carbone. — Dans une deuxième note, le même auteur donne la des- cription d’un nouveau dispositif de pompes à mercure, dans lesquelles la pénétration de l'air extérieur et la formation de vapeurs internes sont empêchées, tandis que l’air est complètement chassé de l’intérieur de la pompe. — M. Arno a imaginé diverses expériences qui montrent le phénomène de l'hystérésis électrostatique dans les corps diélectriques, et qui permettent de faire des mesures et des recherches en changeant de poten- tiel et de diélectrique, — M. Reggiani : Recherches sur le coefficient de pression des thermomètres à mer- cure, et sur l’élasticité du verre. — M. Sani, en étu- diant l’essence de raifort (Cochlearia Armoracit) a re- connu qu’elle a la même composition etles mêmes pro- priétés que celles de la sulfocarbilamine de la moutarde noire. — M. Gammarelli, en soumettant à de nou- velles recherches la méthode proposée par M. Arnaud pour la détermination des nitrates de l’eau à l’aide de la cinchonamine (alcaloïde de Remija purdeiana) dé- montre que cette méthode ne peutpas être sûrement employée. — MM. Balbiano el Severini : Sur quelques acides de la série pirrazolique. — MM. Anderlini et Borisi : Concentration des éthers formique el sueci- nique. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM.Tizzoniet Centanni ont réussi à précipiter par l'alcool la substance active antirabique qui se trouve dans le sang des animaux immunisés. Ce précipité, dissous de nouveau dans l'eau, se montre capable de détruire la virulence de la moelle rabique. Des expériences nombreuses ont été faites, même en inoculant la solution aqueuse du pré- cipité lorsque chez les animäux, qui avaient recu le virus rabique, commencaient à se manifester dans le nerf sciatique les premiers symptômes de la rage; les animaux vaccinés, ont toujours survécu, tandis que les animaux témoins sont morts rabiques. De cette manière restent confirmées les propriétés immunisantes du sé- rum; la substance immunisante peut se conserver longtemps à l'état solide, et il devient dès lors facile de l’expédier à distance. — M. Grassi, avec l’aide de M. Calandruccio, pour éclaircir la mystérieuse origine des murènes, des grongs et des anguilles, a fait des recherches sur les Leptocéphalidés, espèce de larves diaphanes que l’on pêche sur les côtes de la Sicile, et il a découvert que ces larves représentent un état de transformation des Murénides. Dans leur première évolution les larves se rapetissent en absorbant en par- tie leur squelette gélatineux. Elles passent, à cause de leur petitesse, à travers les maiiles des filets, ou bien, étant pas comestibles, elles sont jetées par les pê- cheurs. — M. Mazzarelli a étudié l'œil anal larvaire des larves des Opistobranches dans plusieurs variétés; après de nombreuses considérations anatomiques, il arrive à la conclusion que ce prétendu œil anal est simplement le rein définitif de ces Gastéropodes. — M. Ruffini donne une longue description de la termi- naison nerveuse des fuseaux musculaires, et, se repor- tant à leurs caractères morphologiques spéciaux et aux nombreuses et particulières terminaisons qu’ils con- tiennent, il croit qu'au lieu de considérer ces fuseaux comme des fibres musculaires en voie de développe- ment, on doit y voir plutôt des organes nerveux à fonc- tion inconnue. Dans un autre travail, M. Ruffini signale l'existence de nerfs dans les papilles vasculaires de la peau de l’homme, — M. Fabrini s'occupe des carac- ières des ossements de deux espèces de Felis qui se trouvent dans la collection des mammifères pliocènes de l’Institut supérieur de Florence, Après avoir étudié les restes fossiles que nous connaissons, il émet l’opi- nion que, pendant le Pliocène, les Felis devaient avoir atteint leur plus grand développement. — M. de Stefa- ni a adressé à l'Adadémie une description des fossiles du Crétacé qu'il a retrouvés en place dans les Apen- nins. — M, de Toni résume les travaux récemment parus qui contiennent des notices sur la flore algolo- gique de la côte africaine, et il dresse un catalogue d'algues tripolitaines. L'Académie, au cours des dernières élections, à nommé Associé étranger, M. H. Léauté, membre de l'Académie des Sciences de Paris. Ernesto MANcINI, 716 NOTICE NÉCROLOGIQUE CORRESPONDANCE SUR UNE EXPÉRIENCE D'ÉLECTRICITÉ! Le dernier numéro de la Revue renferme un très in- téressant compte rendu des travaux du Congrès d'Edim- bourg du mois d’août de cette année. Je demande la permission d'apporter un éclaircissement sur un point. Je lis, à la page 697, que M. Dawson Turner à pré- senté une expérience relative à la diminution considé- rable de résistance d'une poudre métallique sous l’in- Îluence d’une étincelle électrique éclatant dans son voisinage. L'expérience décrite est, sans changement, une de celles que j'ai répétées à Pâques à Ja séance annuelle de la Société française de Physique, devant M. Turner lui-même, Quand il vint ensuite me voir à mon laboratoire, je lui ai précisé les meilleures dispo- sitions à prendre pour reproduire ces phénomènes qui lui étaient inconnus. M. Dawson Turner, en faisant sa communication au Congrès d’Edimbourg, n’a certainement pas manqué d'indiquer que je suis l’auteur de ces recherches, En tout cas, les lecteurs qui savent ces questions trouve- ront cette expérience dans les deux notes que j'ai pré- sentées à l’Académie le 24 novembre 1890 et le 12 jan- vier 4891. Dans le numéro 78 du Bulletin international des Electriciens, en mai 1894, j'ai publié un résumé de l’ensemble de mes recherches sur ce sujet. Personne, avant moi, n'avait observé ces variations de résistance. Edouard BRranzy. L’omission que nous signale M. Branly est évidem- ment imputable à cette circonstance que son nom a dû être prononcé en anglais : Idouerde Brainlé. Sous ce travestissement, il aura échappé à M. Guillaume, et c’est aussi l’avis de notre distingué collaborateur, (Note de la Direction.) NOTICE NÉCROLOGIQUE J.-A. VILLEMIN. Lorsque, le décembre 1865, Villemin vint annoncer, dans son mémoire Sur les causes et la nature de la Tuberculose, que cette affection est transmissible et inoculable, son œuvre ne fut pas loin d’être considérée comme l'erreur d’un esprit révolutionnaire. A cette époque hésilante où la science médicale, encore emplie des doctrines broussaisiennes, pensait synthé- tiser les processus morbides les plus divers dans l’étroite formule d’une perversion des actes physiolo- giques, il fallait, certes, posséder uue clairvoyance gé- niale pour découvrir la spécificité de la tuberculose, et une audace bien singulière pour venir l’affirmer à la tribune de l’Académie de Médecine, Ce novateur, ainsi touché de l’étincelle du génie, eut des débuts assez modestes. Fils d’un instituteur, Jean- Antoine Villemin naquit à Prey (Vosges) le 25 jan- vier 1827 et fut sur le point de suivre la carrière de son père. C’est à la Faculté de Strasbourg qu'il fit ses étu- des médicales, encouragé par le Pr Fée, au laboratoire duquel il fut nommé aide-naturaliste, En 1853, ilentra comme stagiaire au Val-de-Grâce et, quelques années plus tard, fut envoyé à Strasbourg comme répétiteur de physiologie à l'Ecole du Service de santé militaire. Il s’y adonna à des études microscopiques qui nous ont valu un Traité d’'Histologie humaine, normale et patho- logique, fait en collaboration avec Morel: ce fut le premier ouvrage de ce genre publié en France. Un concours d’agrégation de médecine s’ouvrait au Val-de-Gräce : Villemin y fut recu eñ 1853 et publia une série de mémoires : Sur l'allération épithéliale de la conjonctive oculaire dans l'héméralopie; sur le Sclérome des adultes ; sur la Vésicule pulmonaÿre et sur l'Emphysème. Enfin, dans un travail paru en 1861 (Du Tubercule au point de vue de son siège, de son évolution et de sa na- ture), Villemin commencait déjà à poser les prémisses de sa découverte, l’une des plus belles de la médecine. La lésion tuberculeuse est inoculable; après une période d’incubation de durée variable, la tubereulose expérimentale se développe et entraîne la mort de l’a- nimal. La tumeur. blanche articulaire, l’ostéite fon- gueuse, l’abcès froid, la dégénérescence caséeuse des tissus sont, au même titre que la phtisie vulgaire, l’ex- pression symptomatique d'une même cause spécifique : tels furent les faits dont Villemin apporta la retentis- sante démonstration dans sa célèbre communication à l’Académie de Médecine (V. Bull. de l'Acad. de Méd., 1866, p. 152 et 897). Rappeler la description lumineuse et sagace de ses expériences et l'explosion d’objections qu’elles soulevèrent d’abord à l'Etranger et, — il faut bien le dire aussi, — en France, ne serait ajouter rien qui ne soit connu du lecteur. C’est avec une entière sérénité que Villemin attendit du temps la consécration de son œuvre : elle ne se fit point longtemps attendre même de la part de ses premiers détracteurs, tels que Conheim. Et lorsque, plus tard, les Allemands essayè- rent d'opposer au nom de Villemin celui de Koch et de revendiquer en faveur de celui-ci la priorité de la même découverte, les prières instantes des amis de Villemin ne purent jamais le décider à répondre à une prétention entièrement fausse, ni ébranler cette philo- sophie modeste et charmante qui était le trait dominant de son caractère. On doit à Villemin un certain nombre d’autres mé- moires sur la prophylaxie de la phtisie pulmonaire, sur le scorbut. Son Etude sur la Tuberculose (Paris, 1868), couronnée par l’Institut et par la Faculté de Médecine, nous montre par quelle voie inductive il fut amené à la conception de l’inoculabilité et de l’unicité désormais irréfutables de cette affection. Dans un nouveau Mé- moire (Académie de Médecine, 13 avril 14869), Villemin appelait l'attention sur l'influence des poussières de crachats desséchés comme agents de propagation habi- tuelle du virus tuberculeux. En 1874, l’Académie de Médecine l’appela parmi ses membres. Nommé en 1882 professeur au Val-de-Grâàce, Villemin sut y faire admirer, dans des lecons toutes fa- milières, sa fine et pénétrante logique de clinicien. Sa place était toute désignée au Congrès de la Tuberculose, dont il présida la deuxième session (1891). Villemin est mort le 12 octobre 1892. Il fut un pré- curseur, L'un des premiers, il sut employer l’expéri- mentation à la démonstration d’une des idées les plus fécondes de la médecine. A ce titre, son nom mérite d’être associé à celui des gloires scientifiques de notre siècle, D' H, Vincewr. ErraTuu., — Dans l’article de M. F. Sinigaglia : Page 708, 1" col., ligne 3, au lieu de certaines ou presque certaines, lüre : continues ou presque continues ; Dans la table synoptique, même page: au lieu de le rendement étant transmis, lire : le mouvement étant transmis, Page 709, 2° col., ligne 21 au lieu de bromo- pétard, lire : dromo-pétard. Dans la note, 2° col., même page, au lieu de M. F. Bighio, lire : M.K. Biglia. Le Directeur- Gérant : Louis OuviEr Paris. — Imprimerie. Levé, rue Cassette, 11. 3° ANNÉE 19 19 30 NOVEMBRE 1892 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER SUR LA DURÉE DU CHOC Dans les premières discussions sur la question de la collision par Wren, Wallis et Huygens, nulle attention ne semble avoir été accordée à la durée du choc; peut-être serait-il plus exact de dire qu'on l'avait considéré comme absolument instantané, parce que les corps qui se heurtaient élaient regardés comme absolument durs. Avant de rendre compte de ses propres expériences sur ce sujet, Newton fait allusion aux travaux de ses prédécesseurs, et dit en particulier que leur con- clusion, — à savoir que des corps durs se séparent après la collision avec la même vilesse relative, — « peut être affirmée avec plus de certitude pour des corps par- faitement élastiques ». Ses expériences l’avaient amené à conclure que la vitesse relative de sépa- ralion de deux corps qui se choquent représente une fraction définie (appelée maintenant coeffi- cient de restitution) de la vitesse relative avant la rencontre. Newton attribue ce résultat à une élas- ticité imparfaite. Nous savons maintenant que cette terminologie est incorrecte, et que, — comme dans le cas d’une cloche, par exemple, — une large part de l’énergie de translation de deux corps en collision peut être emmagasinée comme énergie vibratoire dans l’un de ces corps ou dans les deux; et ainsi, même si Lous deux sont parfaitement élas- tiques, la vitesse relative de séparation peut être très inférieure à celle de l'approche. Mais la for- mule de Newton montre expressément que le choc ne peut, comme ses prédécesseurs semblent l’a- voir cru, être dans aucun cas instantané. La loi ex- périmentale de Newton a été vérifiée avec grand soin en 1834 par Hodgkinson; mais aucun essai ? REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. ne semble avoir élé fait pour déterminer la durée du choc, à l'exception d’un récent mémoire de Hertz, exclusivement relatif aux vitesses extrême- ment petites. Le seul travail sur la véritable nature d’une rencontre entre deux corps élastiques dans le- quel, si je suis bien informé, on ait tenu compte des circonstances de leur déformation mutuelle, est ce mémoire de Hertz!. Les savants qui s'étaient avant lui occupés du choc s'étaient bornés à étu- dier des distorsions longitudinales, telles qu’elles se produisent lorsque deux barres se rencontrent l’une l’autre dans le sens de leur longueur. De Saint-Venant, en se plaçant à cet unique point de vue, était arrivé à quelques résultats singuliers. Le mémoire de Hertz est très remarquable, bien que les difficultés mathématiques du problème soient si formidables que la solution se trouve en pratique limitée au cas de déformations infinilé- simales. D'une façon générale, cette solution ne sauraitconvenir qu'au cas decorpstrès durs, à moins que la vitesse relative ne soit extrêmement petite. La plus grande partie de son étude est consa- crée à l'aspect statique des déformations mu- tuelles de deux solides pressés l'un contre l’autre, comme, par exemple, dans la disposition usitée en Optique pour produire les anneaux de Newton. En réalité le problème est traité comme cas parti- culier d’une pression d’une grandeur indéfinie exercée sur une surface de contact indéfiniment petite. Hertz termine son mémoire par un coup 1 Journal de Crelle, XCII, 1882. 1 1 D d'œil sur le côté cinétique de la question, et con- sidère la collision de deux sphères qui se meuvent avec une petite vitesse relative suivant la ligne de jonction de leurs centres. On voit que la durée du choc est infinie quand la vitesse relative est infi- niment petite. Si les sphères sont d’acier, qu’elles aient un rayon de 25 millimètres, et si leur vi- tesse relative avant le choc est de 10 millimètres ! par seconde, on trouve que le rayon de la surface commune de contact à l'instant de la compression maximum est de 0""13. La plus grande force totale entre les sphères est 2,47 en poids, la plus grande pression (au point central de la surface de contact) est un poids de 75 k. par millimètre carré; la durée du choc est de 0°,00038. Ma passion pour le jeu du Golf a été, pour moi, l’occasion de quelques expériences sur ces ques- tions. Dans ce jeu une petite balle solide de gutta- percha est lancée avec une grande vitesse par un coup violent qu'on lui applique au moyen dun « club » (canne). Ce bäton est en bois dur; sa tête frappante est chargée de plomb. Le vol de la balle suggère de nombreuses questions d’un grand intérêt physique : d'une part, en effet, la résistance de l’air peut s'élever jusqu'à trente fois le poids de la balle; et, d'autre part, quand, par suite de la maladresse du joueur, la balle reçoit un mouve- ment de rotation rapide, sa course subit des mo- difications très remarquables. Mais les problèmes présentés par le coup initial sont tout aussi inté- ressants, et c'est à eux que nous allons nous limi- ler. La balle a un diamètre d'environ 44 millimètres; sa masse est d'environ 42 grammes, la tête du «club », dont la masse est d'environ 220 grammes, la rencontre à une vitesse de 100 mètres par se- conde ou même davantage. La balle, on le conçoit, se trouve considérablement déformée pendant le choc, à ce point que la surface circulaire de contact offre quelquefois un diamètre de 20 millimètres. Combien de temps dure ce contact? La balle reste- t-elle aplatie sur la surface du «club» pendant une partie notable quelconque de leur course com- mune, ou les deux objets se séparent-ils immé- diatement après la collision? Plusieurs circons- tances se rapportant à la nature du jeu semblent indiquer que la durée du choc doit être extrème- ment courte. En particulier, quand une balle est «jerked» (c’est-à-dire frappée de telle manière que le mouvement du bâton soit arrêté par le gazon au moment même où le coup est donné) elle acquiert presque autant de vitesse que lorsqu'on laisse le «club » suivre librement la balle. Il est clair que, dans l’état actuel de la science, il serait inutile de tenter la solution du problème mathématique qui se présente ici. J'ai donc essayé P. G. TAIT. — SUR LA DURÉE DU CHOC d'obtenir par voie d'expérience une solution au moins approximative. Naturellement mon seul but, et même mon but principal, en me livrant à ces expériences, n'était point d'étudier la question intéressante que soulève le jeu de Goff. En réalité, il nest point facile de voir comment (dans les circonstances nécessaires de l’expé- rience) j'aurais pu réaliser d’une manière tant soit peu exacte toutes les conditions du problème. Afin de pouvoir enregistrer automatiquement le choc, il faut que l’un ou l’autre des corps se heur- tant soit fixé, et que, virtuellement, il se trouve frappé d’une facon simultanée sur les deux côtés. Dans tous les cas je n’ai point réussi à imaginer un procédé permettant de surmonter cette fâcheuse complication. Mais, d'autre part, la méthode que j'ai adoptée conduit de suite à des résultats appli- cables à l’action d’un marteau sur un clou, d'un mouton sur un pieu, et à des questions similaires, qu'on rencontre dans la pratique. Mon appareil (fig. 1) ressemble beaucoup à une guillotine. La masse tombante À est un bloc rec- tangulaire de bois dur, quelquefois garni d’une plaque d'acier dur à son extrémité inférieure. Ce bloc glisse aisément entre deux rails-guides bien huilés. Son poids est d'environ 2,2 kilogrammes, mais peut à volonté être doublé ou même qua- druplé ; il suffit pour cela de visser à son extrémité supérieure une ou deux plaques épaisses de plomb. Le corps tombe de champ, à partir d'une hau- teur connue, sur un court cylindre de substance élastique B, dont le tiers inférieur est fixé dans une large masse de plomb C. Celle-ci, à son tour, est solidement cimentée dans le sol en asphalte d’une cave. Dans les premières séries d'expériences les cy- lindres élastiques avaient 30 millimètres de lon- gueur, et 30 millimètres de diamètre. Une seconde série d'expériences fut faite avec des cylindres beaucoup plus grands. Tous ces cylindres avaient leur surface supérieure légèrement convexe. Les malières étaient aussi variées que possible, com- prenant des corps aussi différents dans leurs pro- priélés que verre, liège, bois dur (platane par exemple), caoutchouc naturel ou vulcanisé, vulca- nil; 1er, ELC-.- Le bloc était muni d’une pointe aiguë en acier, dirigée perpendiculairement à son plan, et pressée doucement en avant par un ressort destiné à la maintenir en contact avec un disque de verre D (dont la position seule est indiquée dans la figure par un cercle ponctué), disque d’un diamètre de 700 millimètres, fixé à un volant massif, et rece- vant un mouvement de rotation dans un plan ver- tical vis-à-vis du bloc tombant; au début de l'expérience, la pointe d’acier s'enfonçait dans son P. G. TAIT. — SUR LA DURÉE DU CHOC 719 support et y demeurait maintenue par un cro- chet d'arrêt E, pendant la première partie de la chute du bloc. Mais un système de détente la mettait en liberté au moment précis où elle venait L TI M Il Ill [fl (1 Fig. 4. — Appareil pour mesurer la durée du choc. — , Bloc de bois dur employé pour produire le choc; —B, Cy- lyndre de substance élastique recevant le choc; — C, Masse de plomb dans laquelle est enchässé le cylindre B; —TJ, Fil employé pour produire le déclanchement du bloc A: — H, Point où a lieu le déclanchement; — E, Crochet d'arrêt maintenant enfoncée dans le bloc A une pointe d'acier pendant que le bloc est au-dessus du disque D, et déclan- chant la pointe au moment où elle atteint le bord de ce disque; — F, Diapason ; — G, Brosse portée par l’une des branches du diapason et en tracant les vibrations sur la surface enfumée du disque D ; — D, Disque tournant. de dépasser le bord supérieur du disque de verre D: elle atteignait alors la surface de la plaque de verre, surface parfaitement plane, recouverte d’une lé- gère couche d'encre fine d'imprimerie, appliquée au moyen du rouleau ordinaire. La pointe d'acier enregislrait ainsi sur la plaque la résultante des deux mouvements: chute verticale du bloc avec reculs successifs, el rotation uniforme du disque. Le disque et le volant recevaient un mouvement de rotation au moyen d’un moteur à gaz, dont la courroie de chasse était lancée sur une poulie folle, juste avant le commencement de chaque expé- rience, le tout étant alors abandonné à son propre grand moment d'inertie, ce qui rendait dans la pratique la vitesse angulaire constante pendant plus d’une révolution entière. La vitesse angulaire devait être spécialement mesurée pour chaque expérience, parce que sa valeur était sensiblement différente selon que le moteur à gaz avait ou non une explosion juste avant que la courroie fût rejetée. Cette mesure était effectuée au moyen d’un diapason F (128 vibrations par seconde), lequel traçait, au moyen d’une courte brosse G attachée à l’une de ses branches, une courbe ondulante cir- culaire sur le disque pendant la chule du bloc. Quand le diapason était maintenu en action pen- dant plus d’une rotation complète du disque, la partie doublée du tracé indiquait d’un seul coup d'œil l’uniformité de la vitesse angulaire. Le tracé de la pointe d'acier consistait en une série de lignes brisées, correspondant respective- ment aux phénomènes suivants : chute, choc, élé-. vation, chute, choc, etc., jusqu’à ce que le bloc arrivät à se reposer sur le cylindre élastique, mo- ment où le tracé devenait finalement /e cercle de repère (fig. 2). On l’'employait pour mesurer les va- leurs de la distorsion longitudinale du cylindre dans les chocs successifs. Ces parties du tracé, qui se trouvent en dehors du cercle, étaient évidem- ment tracées pendant les chocs, de sorte que les durées de collision sont proportionnelles aux arcs correspondants du cercle, et peuvent être inter- prétées de suite au moyen du tracé du diapason. On a pu enregistrer sur la plaque de verre les détails de chacune des cinq ou six expériences successives faites sur la même substance élastique, et avec des circonstances variées de masses se heurtant, de hauteur de chute, etc. Les tracés res- taient isolés les uns des autres sur la plaque, parce qu'on avait soin, après chaque expérience, de changer le point d'attache de la pointe à tracer fixée au bloc tombant, et aussi la position du dia- pason. La figure 2, qui représente à une échelle très réduite (1/5) le tracé complet d’une seule expérience faite sur du caoutchouc vuleanisé, avec au moins treize soubresauts successifs, permettra au lecteur de comprendre les détails de la descrip- tion qui vient d’être donnée. Dans cettefigure, X marque le premier contact de la pointe sur le verre; X, 1, 1..., est la branche tracée pendant la première chute du bloc ; 2, 2, 2. ATLAS , celle qui est tracée pendant le premier recul et la deuxième chute, etc. La théorie de cette expérience montre que, s’il 180 P. G. TAIT. — SUR LA DURÉE DU CHOC n'y avait pas de frottement entre le bloc tombant et les guides, l'équation polaire d’une partie quelconque de la course libre (c'est-à-dire pendant! que le bloc n’est pas en contact avec le cylindre, devrait prendre la forme extrèmement simple de : = à + b0? de TPE Fig. 2. a première chute ; —- 2, où à ! est en proportion directe avec l'intensité de ! Dans cette équation : » est le rayon vecteur; 8, l'angle dont à tourné le disque; a et b, deux quantités mesurables. Une portion de la branche 2, 2..., est presque circulaire, tandis que les branches 7..., 8. , 9... sont très approximati- vement droites. Cela tient à ce que la valeur de b (dans l’équa- tion ci-dessus) est respectivement pour ces branches pres- qu’égale àa/2. Donc l’équation devient, pour ces branches- là : n—= a (1 Æ 02/2); ce qui différe peu de >» — a cosb, ou r — 4 secb, quand la valeur 6/x est petite. 1 — Diagramme obtenu au cours d'une expérience. y ! 3 ARS : Ë : z ; X,! Premier contact de la pointe d'acier avec la surface enfumée du disque en rotation; — X, 1, 1,..., Branche tracée gravité, et en proportion inverse avec le carré dela vitesse angulaire du disque. Mais, comme le frot- tement est inévitable et qu'il aide à la gravité pendant chaque ascension du bloc, et agit contre elle pendant la descente, chaque branche de la course entre les chocs successifs consiste en deux Minime choc pendant 2..., Branche tracée pendant la deuxième chute; — 3, 3...., Pendant la troisième chute; — etc. parties pour lesquelles les valeurs de à sont différentes. Ces valeurs se caleulent facilement d'après les données mesurées, qui consistent dans les coordonnées polaires de divers points choisis du tracé. On a ainsi trouvé qu'en pratique le frottement est presque le même dans le mouve- ment ascendant el dans le mouvement descendant; en général, il représente environ 2 ou 3 pour cent du poids du bloc tombant. Cela est dû en partie à la pression de la pointe d'acier sur le verre; on peut réduire cette pression en employant une pointe légèrement émoussée au lieu d'une aiguille. Le P. G. TAIT. — SUR LA DURÉE DU CHOC frottementpourraitétre fortementréduil en écartant un peu les guides-rails. Mais cela produit un autre inconvénient encore bien plusgénant: celui de don- ner au bloc un petit jeu oscillatoire, de sorte qu’a- près le choc, le bloc a parfois une sorte de frétil- lement qui non seulement entrave beaucoup sa liberté, mais rend les indications du tracé quelque peu incertaines. Lorsque la somme des deux valeurs de b, calcu- lée comme ci-dessus pour une branche quelconque de la courbe, eut été multipliée par le carré de la vitesse angulaire du disque, on obtint des approxi- malions très serrées pour la valeur de la quan- tité constante de gravité dans la grande majorilé des expériences, et l’on prouva ainsi, d'une ma- nière concluante, que les autres indications de ces expériences méritaient pleine confiance au moins comme se rapprochant assez de la vérité. Quand la hauteur de la chute et la distorsion longitudinale du cylindre sont données, il est facile de trouver les limites entre lesquelles la durée de compression doit être comprise. Car, évidem- ment, elle doit être plus grande que D/V, D élant la distorsion, et V la vitesse du choc. Mais, comme la force mutuelle augmente avec la distorsion, sa valeur moyenne par seconde pendant la compres- sion est nécessairement plus grande que sa valeur moyenne par unité de longueur; c’est : V/T> V2/2D ou T<2D/V. Si nous adoptons le principe de Newton que la force élastique, à chaque degré de la restitution, est efois celle qui existe au même degré de la com- pression, la durée du rétablissement sera plus longue que celle de la distorsion dans le rapport 1/e, et ainsi toute la durée du choc se trouve entre (+? nine 7 DA et le double de cette quantité. Ce raisonnement ne peut être que grossièrement approximatif: 1° parce qu'il est presque certain que le contact cesse en général avant que le rétablissement soit complet: 2° parce que nous avons négligé entièrement les considérations thermo-dynamiques qui, dans les chocs violents, introduisent de sérieuses modifica- tions dues à des changements de température dans la substance élastique. Voici les résultats généraux des expériences avec les cylindres courts, la vitesse du premier choc étant dans chaque cas d'environ 4"8 par seconde, et la masse du bloc tombant, 2 : Caoutchouc vulcanisé. Durée du choc — environ 0*,0078. Cette durée a augmenté à chaque choc suc- cessif, jusqu’à ce que, avec des vitesses très faibles, elle se soit élevée à environ 0,015. La valeur 131 moyenne de e était de 0,6 pour le premier soubre- saut; mais elle augmenta pour les chocs moins violents, jusqu'à arriver à une limite d'environ 0,15. Vulcanite. La durée du premier choc fut de 0*,0018, et s’est élevée dans les chocs successifs jusqu'à environ (0°,003. La valeur de e élait légè- rement inférieure à 0,6. Liège. Pour le premier choc, e était presque 0,37, ct a augmenté considérablement aux vilesses inférieures. La durée du premier choc fut 0°,046 ; elle devint 0,025 au second, 0,022 au troisième, et sa valeur limite semble être à peu près 0°,02. On voit ainsi que la force de restitution mise en jeu par une compression longitudinale du liège s'élève d'abord en simple proportion avec la dis- torsion; elle augmente moins rapidement; mais, pour des distorsions encore plus grandes, elle atteint un taux beaucoup plus élevé. Si nous rappelons que la masse du bloc est presque 50 fois celle de la balle de Golf, nous voyons que, même si la balle n'avait que le pouvoir rebondissant du liège, la durée de contact avec le «club » ne pourrait pas dépasser 0°,0003. Mais cette estimation est évidemment, — et pour bien des raisons, — excessive. La vérilable durée de la collision peut être considérée comme notablement au-dessous de 0°,0001, et c’est pourquoi le «club» et la balle ne voyagent pas ensemble sur la lon- gueur d’un seul centimètre ! La force moyenne entre le bâton et la balle, pendant le coup, dépasse d'environ 160.000 fois le poids de la balle, c'est-à-dire environ 6.700 kilogrammes! Les résultats généraux des expériences avec les grands cylindres ressemblent beaucoup à ceux des expériences avec les petits cylindres : la prin- cipale différence consisie en ce que les valeurs de distorsion, dans des circonstances similaires, ont été dans toutes les expériences considérable- ment augmentées, tandis que la durée de contact est notablement plus longue. Le coefficient de res- ütution est un peu plus grand qu'avant. En particulier, avec le nouveau cylindre de caoutchouc vulcanisé, le coefficient de restitution diminue continuellement avec l'augmentation de distorsion, que cette augmentalion soit due à une plus grande masse, ou à une plus grande hauteur de chute. Mais, la durée du choc augmente seule- ment avec l'augmentation de masse, et non avec l'augmentation de hauteur de chute. Toutes choses égales d’ailleurs, lorsqu'on substitue une extrémité émoussée à la plaque de fer au bas du bloc de bois, le coefficient de restitution est diminué, et la durée du choc est augmentée. PAGATait, Professeur de Physique à l'Université d'Édimbourg, Secrétaire général de la Société Royale d'Édimbourg. 182 D' LEDOUX-LEBARD. — LA DIPHTÉRIE ET SON TRAITEMENT LA DIPHTÉRIE ET SON TRAITEMENT PAR LE SÉRUM D'ANIMAUX IMMUNISÉS Chaque année, il meurt dans notre pays 20.000 personnes de la diphtérie, il en meurt encore plus en Allemagne ; dans toutes les grandes villes de l'Europe, même à Bruxelles et à Londres, où la mortalité est trois fois moindre qu'à Paris, la diph- térie fait de nombreuses victimes !. On comprend donc l'intérêt qu'offre pour nous toute découverte qui nous fait mieux connaitre un ennemi si redou- table. On peut dire que les progrès dans cette voie, ont été plus grands en ces derniers temps qu'ils ne l'avaient jamais été auparavant, si grands et si rapides que les médecins qui commençaient leurs études, il y a une vinglaine d'années, ne peuvent comparer, sans étonnement, ce qu’on leur ensei- gnait alors à ce qu’ils savent maintenant. Il faut louer l'œuvre des anciens, l’œuvre de cliniciens tels que S. Bard et Bretonneau, qui ont apporté une forte part de vérités à l’étude de la diphtérie, grâce à une patience dans l'accumulation des faits, à une sagacité d'observation vraiment admirables. Mais notre époque, mieux outillée pour la recherche, a découvert la véritable nature de la diphtérie. La genèse des symptômes se trouvait du même coup mieux expliquée, l'étio- logie mieux comprise, et notre espoir de voir un jour guérir cette maladie, fondé sur une base autrement solide que la théorie de la spontanéité morbide. C'est ce que nous voudrions montrer dans cet article en donnant d’abord un aperçu rapide de nos connaissances sur le microbe de la diphtérie, en exposant ensuite la méthode inventée par Behring pour prévenir ou guérir cette maladie chez les animaux. Ï Klebs et Lœffler ont découvert le bacille de la diphtérie. Lœæffler, par une probité scientifique louable, a cru devoir faire des réserves sur la spé- cificité du microbe qu'il avait étudié et à l’aide duquel il avait pu déterminer l’apparition de faus- ses membranes chez les lapins, les pigeons, les cobayeset les poules. Roux et Yersin * ont démontré cette spécificité. C'est dans leurs beaux travaux qu'il faut lire à 1 Godart et Kirchner. La diphtérie en Belgique. Ac. de méd. de Bels. 1892. 3 Ann. de l’Institut Pasteur. 17 mémoire 1888, p. 629. 9e mémoire 1889, p. 273. 3° mémoire 1890, p. 385. peu près lout ce que l’on sait aujourd’hui sur la biologie du bacille diphtérique. _ Ce microbe se développe, chez l'homme, à la surface des muqueuses voisines des orifices ou sur la peau excoriée. Sa présence détermine de la part de ces tissus une exsudation fibrineuse ou fausse membrane. Son siège de prédilection est la gorge (angine diphtérique) et le larynx (laryngite diph- térique ou croup). Le microbe reste localisé aux points qu’il a envahis tout d’abord ou aux régions environnantes; il ne pénètre qu’exceptionnelle- ment dans le sang et les viscères. Mais le caractère de localisation n’est pas telle- ment prononcé que l'affection soit à siège unique. Il y a souvent plusieurs foyers ; des colonies nom- breuses peuvent se développer sur le même indi- vidu, dans la gorge, au larynx, aux parties géni- tales, sur la peau ulcérée, etce., provoquant ici et là l’exsudation de fausses membranes. Ces colo- nies ont tantôt une origine externe, tantôt elles proviennent de germes issus du malade iui-même. Au niveau de chacune d'elles, le bacille, selon sa vitalilé ou sa race, sécrète de plus ou moins grandes quantités de poison ou toxine qui diffu- sent lentement dans l'organisme atteint et l’intoxi- quent. La maladie est donc locale si l’on ne con- sidère que la distribution du parasite ; elle est générale, si l’on a en vue l’intoxication. Celle-ci est constante, mais variable d'intensité: suivant la dose de poison absorbé, suivant la durée de cette absorption, elle parcourt, avec des tran- sitions insensibles, toute une série de degrés de- puis le plus léger jusqu’au plus grave, affectant, soit la forme aiguë ow rapide, soit la forme lente ou chronique. L'un des symptômes les plus frap- pants de celte intoxication est la paralysie. Roux et Yersin! ont reproduit cette paralysie chez l'animal avec (ous les caractères qu’elle offre chez l'homme, en inoculant des cultures de diphtérie ou bien en injectant seulement le bouillon de cul- ture filtré sur porcelaine et privé de germes. Le poison est si violent qu'un huitième de centimètre cube de bouillon de culture filtré peut suflire pour tuer un cobaye. Dans un centimètre cube de liquide actif, la quantité de poison n’atteint pas quatre dixièmes de milligramme. Cette dose suffit cepen- dant à tuer 8 cobayes de 400 grammes ?. Le même, 1 Premier mémoire, loc. cit. p. 629 et suiv. 2 Roux et YERSIN, 2° mémoire, loc. cil. p. 287. PR ’ se !: dé tt ec à PNA d EE a 4 VO Le dt di | a ii Le" 2 4 i d 4 D' LEDOUX-LEBARD. — LA DIPHTÉRIE ET SON TRAITEMENT 183 EE EEE poison, si actif lorsqu'il est inoculé sous la peau, parait sans action quand il est ingéré en quantité bien plus grande par les pigeons ou les cobayes. Il n’est pas moins étonnant de voir les rats et les souris résister à des doses capables de tuer des lapins, et ne succomber que sous l’action de doses massives, par exemple 17 centimètres cubes de li- quide toxique concentré dans le vide et réduit à 1 centimètre cube, quantité suffisante pour faire périr plus de 80 cobayes. Les cultures âgées, plus toxiques que les cultures jeunes, ont au contraire perdu une partie de leur virulence. Mais cette diminution de virulence ne se maintient pas dans des ensemencements suc- cessifs : elle n’est pas héréditaire; ce n’est done pas une atténuation. La culture sur milieux artificiels, loin d’atténuer la virulence, l’augmente parfois, comme l'ont observé Behring, K. Wernicke, qui ar- rivent à tuer les cobayes en cinq jours avee 0 ‘#5 01 de bouillon de culture de deux jours d’äge !. La virulence du bacille de Klebs dépend d’ail- leurs de son origine. Les fausses membranes diphtériques peuvent donner, par ensemencement, des colonies de tous les degrés de virulence depuis le plus élevé jusqu'au plus faible. Loeffler y a dé- couvert un bacille semblable au bacille diphté- rique, mais non virulent:le bacille pseudo-diphté- rique, qu'il considère comme une espèce distincte. Il est vrai qu'on n'a pu modifier le bacille pseudo-diphtérique au point de lui donner la virulence. Mais, d'autre part, on arrive à atténuer à tous les degrés le bacille diphtérique vrai. Si le bacille atténué conserve une légère action sur le cobaye, on peut bien lui rendre sa virulence: si, au contraire, il ne possède plus aucune action pa- thogène, on ne connait pas de moyen de lui rendre sa virulence perdue. La similitude avec le bacille pseudo-diphlérique est complète, mais la dé- monstralion rigoureuse de l’unité d'espèce des deux bacilles exigerait qu'on sût faire äu bacille pseudo-diphtérique un bacille virulent. Quoi qu'il en soit, on comprend que des bacilles puissent recouvrer leur virulence passagèrement affaiblie et produire la diphtérie, s'ils trouvent une muqueuse excoriée, un organisme fatigué el surtout s'ils rencontrent, parmi les nombreux mi- crobes de la bouche, un commensal dont Tlasso- ciation favorise leur pouvoir pathogène. On sait que le streplocoque de l’érysipèle peut jouer ce rôle d’auxiliaire ?, et Barbier, Martin * ont montré la * Immunisivunz von Versuchsthieven bei diphterie Zeitschr. f. Hyg. 12 Bd, 1 Heft, 1892, p. 24. * Roux et YERSIN. 3€ mémoire. 3 Barpier. De quelques associations microbiennes dans la diphtérie. Arch. de méd. exp. et d’Anat. path. T, 11, 1891. 4 An. Inst. Pasteur, 1892, n° 5. gravité possible de certaines angines diphtériques à streptocoques. Cette série de découvertes met, à la place des idées confuses d'autrefois sur la nature de la diphlérie, des notions précises; elle éclaire Pétio- logie, la genèse des symptômes, elle offre à la re- cherche de nouveaux problèmes, de nouvelles voies d'étude de haute portée pour l'avenir. Comme le savant, le médecin est frappé de l'œuvre scientifique accomplie, mais il est frappé aussi et plus qu'aucun autre de ces décès renou- velés que la diphtérie sème où elle passe et aux- quels il assiste non sans émotion. Peut-être se demande-t-il si tant de progrès ont donné jusqu'ici ces résultats utiles que toute découverte apporte un jour avec elle, ou s'il faut ne leur demander encore que ce plaisir de l’esprit de savoir plus et mieux. On peut répondre que certainement la pro- phylaxie profitera, si elle ne l’a déjà fait, de ces travaux. La technique assez rapide qui permet de trouver le bacille de Klebs dans les angines diphté- riques, par suite, la possibilité d'assurer un diag- nostie parfois hésitant et d'éviter ces méprises qui font ranger un sujet atteint d’angine simple parmi des diphtériques ou un diphtérique au milieu d’autres malades; la connaissance rendue facile du jour où le bacille virulent disparait de la bouche des convalescenis d’angine couenneuse ou du croup, des faits précis sur la résistance du bacille aux antiseptiques, à la chaleur, au temps, et sur la toxicité descultures,—toutes cesnotionspermettent de poser des règles sûres relatives à l'isolement des malades, à l'hygiène de la bouche, à la désin- fection. Nous croyons que cette prophylaxie ne serait pas vaine si elle était sérieusement appliquée. Mais est- il nécessaire de dire quelle résistance opiniàtre oppose la coutume à toute règle nouvelle d'hygiène? Quelle que soit l'efficacité de ces mesures, l’ubi- quité du bacille diphtérique en fera toujours un microbe plus difficile à éviter que celui dela fièvre typhoïde, par exemple. La diphtérie n’est pas une de ces maladies que l'hygiène à elle seule puisse donner l'espoir de voir supprimer et le but de tous les efforts est d'apprendre à la guérir. A ce point de vue, la connaissance du bacille de Klebs et de ses propriétés a mis fin à de regret- tables erreurs de thérapeutique. Il n’y a pas long- temps encore, les médecins étaient partagés d'opi- nion sur l'utilité d'enlever ou de détruire, où elles se produisaient, les fausses membranes diphté- riques. Beaucoup et des plus instruits déconseil- laient cette ablation. Puisque la diphtérie est une maladie générale, à quoi bon, disaient-ils, imposer aux malades cette opération inutile, toujours à re- faire, car la fausse membrane revient sans cesse, 184 D' LEDOUX-LEBARD. — LA DIPHTÉRIE ET SON TRAITEMENT comme l'effet d’une cause persistante? D'autres, au contraire, pensaient qu'il faut lutter énergique- ment contre la reproduction de la fausse membrane, et Gaucher ‘, en particulier, a défendu cette thèse, qui est la vraie. Nous le savons maintenant : la fausse membrane est le résultat de la réaction des tissus envahis localement par les bacilles. C'est là que s’élaborent les poisons, cause de l’intoxication. La destruction de ces fausses membranes est doublement indiquée. Mais enfin, cette pratique est pleine d'incertitude ou inapplicable si laffection s'étend au larynx, aux anfractuosités de l’arrière-gorge. On souhai- terait que le traitement de la diphtérie, ramené aux conditions précises de l'expérience, trouvàt sa formule scientifique. Or, pour la première fois, le problème vient de recevoir un commencement de solution. Il Behring ?, ayant observé que le bacille du charbon prolifère dans le sérum des souris, des cobayes, etc., animaux réceptifs vis-à-vis du charbon, tandis qu'il ne se développe pas, mais dégénère et meurt dans le sérum du rat blanc, animal relativement réfractaire, pensa qu'il exis- tait peut-être un rapport entre ce pouvoir bacté- ricide du sérum et l’immunité du rat, et que même l'immunité, en général, pouvait être due à une action de ce genre. Au lieu de regarder le pouvoir bactéricide du sérum comme une propriélé du sérum en général, quelle que soit sa provenance, ainsi que l’avaient considéré Gscheidlen, Traube, Buchner, il en faisait une propriété spéciale à certains sérums et qui dépendait de la réceptivité variable de l'espèce animale qui avait fourni le liquide. L'induction de Behring allait être bientôt démentie par l'expérience. Il n’y a pas de rapport constant entre l’immunité et le pouvoir bactéricide du sang, et Behring put le constater lui-même dans ses travaux avec Missen ?; mais, c’est en partant de cette idée erronée el par ses recherches pour la vérifier qu'il fut amené à sa découverte de la sérum-thérapie. Cette théorie de l'immunité n’est pas exacte, avons-nous dit. C'est ainsi que le sé- rum du lapin, animal peu résistant, tue, en grand nombre, les bacilles du charbon qui, au contraire, poussent et produisent des spores dans le sérum de la grenouille, du pigeon, de la poule, animaux possédant une immunité plus ou moins complète. 1 Ann. de Laryngologie. Décembre, 1881. 2 Centrabll, f. Klin. méd. 1888, n° 38. Voir aussi : Roux et Mercaxixore. Sur la propriété bactéricide du sang de rat. Ann. de lInst. Pusteur, 1891, p. 479. 3 BeurinG et Missen. Ueber bactérien feindlische eigen- schaften des Blertserums, Zeitschr. f. Hyq., 1890. Bd. 8. Lorsqu'on étudie l’action, sur un microbe, du sé- rum d'animaux vaccinés contre le microbe, iei en- core il n’y a pas de règle générale pour exprimer les résultats, dans l'ignorance où l’on est des con- ditions déterminantes du phénomène; mais alors s'observent des faits d’un haut intérêt. Le sang du cobaye ne lue pas le Vibrion de Metchnikoff, mais le sang du cobaye vacciné tue le Vibrion. Par contre, le sang du cobaye vacciné ou non contre le charbon, ne possède pas de pouvoir bactéricide contre la bactéridie. Nous avons vu que la diphtérie est une maladie toxique. Elle appartient à ce groupe de maladies microbiennes dont le type est le tétanos, dans lesquelles le microbe sécrète des toxines extrême- ment actives. On parvient à donner l'immunité aux animaux contre la diphlérie et le tétanos. Le sérum de ces animaux immunisés ne tue pasles ba- cilles correspondants, mais il détruit leurs toxines. Le bacille de Klebs pousse abondamment dans sérum des cobayes immunisés contre la diphtérie, mais ce sérum détruit les toxines que le bacille sécrète !. Cette propriété antiloxique n'appartient d’ailleurs qu'au sérum des animaux immunisés et non au sérum des animaux possé- dant l’immunilé naturelle. Par exemple, les rats, les souris, les chiens, les chevaux, les vaches, ayant une immunité plus ou moins grande contre la diphtérie, livrent un sérum sans propriété anti toxique. Quelle que soit l'interprétation que l'on donne à ces fails si intéressants, on voit de suite la con- séquence pratique qui en découle pour le traite- mentdes maladies toxiques, telles que le tétanos et la diphtérie. C'est en 1890 que Behring et Kitasato ? ont fait connaître cette méthode et son applica- tion au télanos et à la diphtérie. Nous allons en indiquer, dans ses grandes lignes, la technique, en nous limitant à la diphtérie el d’après le mémoire de Behring et Wernicke ÿ. La méthode consiste : 4° À donner l’immunité contre la diphtérie à des animaux réceptifs ; 29 A recueillir le sérum du sang de ces animaux et à l’inoculer à d’autres animaux, soit pour leur conférer l'immunité contre une diphtérie ulté- rieure, soit pour les guérir d’une diphtérie déclarée. le 1 Ilest nécessaire, pour obtenir le sérum anti- toxique, de donner l’immunité à des animaux réceptifs. 1 Zeitschr. f. Hygiene. 12 Bd., 1 H., S. 26. 2 Ueber das Zustande Kommen der diphtherie immunilät und des Telanus immunilät bei TarereN, Deurson. méd. Wochenschr., 1890, n° 49. 3 Zeilschr.f. Hyg. loc. cit. PL PTT don: cf D' LEDOUX-LEBARD. — LA DIPHTÉRIE ET SON TRAITEMENT 185 Behring et Kitasato !, puis Brieger et Fraen- kel? ont décrit plusieurs procédés pour con- férer aux animaux l’immunité contre la diphté- rie. Ces procédés sont encore imparfaits en ce sens qu'ils exposent à perdre un certain nombre d'animaux. Ils ne sont donc pas actuellement ap- plicables à l’homme. Le procédé de Brieger et Frankel consiste à chauffer un bouillon de culture de trois semaines, pendant une heure à 60°-70°, 10 à 20 centimètres cubes de ce bouillon chauffé, injectés sous la peau d'un cobaye, lui donnent l’immunité contre une inoculation ultérieure avec une culture virulente, pourvu que cette seconde inoculation soit faite, au plus Lôt, quatorze jours après la première. Dans les jours qui suivent l’inoculation préventive, la réceptivité, loin de diminuer, augmente. Fraenkel pense que les sécrétions du bacille centiennent une substance loxique, qui serait dé- truite à 55°-60°, et une substance immunisante sup- portant des températures plus élevées. Celle-ci persisterait seule à 60°-70°. Behring et Wernicke, après avoir essayé divers procédés, se sont arrêlés aux suivants pour les co- bayes : Aussitôt après l'inoculation virulente, on injecte, à l'endroit de l’inoculation, 2? centimètres cubes d'une solution de trichlorure d’iode à 4 ou 2°/,. L'animal peut guérir et, après plusieurs opérations semblables, il possède l'immunité contre la diph- térie. Au lieu de procéder ainsi, il est préférable de faire agir le trichlorure d’iode sur le bouillon de culture en dehors de l’organisme, dans la propor- tion de -£. La toxicité du bouillon diminue pen- dant 48 heures pour demeurer ensuite station- naire. C'est ce liquide qu'on inocule en quantité suffisante pour produire une réaction locale et gé- nérale. Il est d’ailleurs indifférent d'employer le bouil- lon de culture lui-même ou le bouillon filtré. Ce qui importe, c'est de connaître la toxicité du liquide. Le plus simple est d’avoir des bouillons de toxicité constante. Behring et Wernicke em- ploient des bouillons de culture ayant séjourné 4 mois à l’étuve et filtrés sur papier, ce qui les dé- barrasse de la plus grande partie des bacilles. Ce liquide, additionné de 0,5 ?/, au plus de phénol, se conserve longtemps sans perdre ses propriétés toxiques. Le liquide ainsi préparé par Behring et Wernicke tuait un cobaye à la dose de 0°" ,15. Après 5 à 6 inoculations avec le mélange de 1 Loc. cit 2 Ueber immunisirungs Versuche bei diphtérie, Berlin. Klin. Wochenschr, n° 49, 1890. REVUE GÉNÉRALE DES SCIFNCES, 1892. cullure et de trichlorure d'iode, les cobayes ac- quièrent l’immunité. Ce traitement exige 4 à 2 mois. Le même procédé est applicable aux moutons. Pour les lapins, il faut recourir à d’autres moyens, tels que l'introduction de cultures dans l’esto- mac, etc. Chaque inoculation, pour être efficace, doit être suivie d'une réaction locale el générale. D'autre part, si cette réaction est trop forte, la résistance au poison diminue au lieu d'augmenter, et ce n’est que tardivement, si la santé se rétablit, que l'on constate une notable augmentation de cette im- munilé. Behring el Wernicke racontent qu'ils doi- vent au hasard les premiers cas de forte immu- nité qu'ils ont observés : par suite d'une absence de l’un d’eux, des cobayes ayant déjà subi des inoculations préventives ne furent remis en expérience qu'après un intervalle de 4 à 6 mois, pendant lequel l’immunité ne fit qu'augmen- ter. Pour évaluer le degré d’immunité, on cherche par tätonnement la dose minima de culture capable de donner la mort à un cobaye neuf. L'immunité, si l’on adopte la notation proposée par Ehrlich, sera égale à 1, 2,3, elc., suivant que l'animal pourra supporter 1, 2, 3, etc., doses égales à cette dose minima. L'animal meurt si l’on essaie une dose trop forte eu égard à son immunilé. Il en résulte iei une grande perte de temps et de labeur, car il faut reprendre à son début le long traitement pré- ventif sur des animaux neufs et le conduire jus- qu’au point où on l'avait déjà mené, avant d'at- teindre le mème degré d'immunité. Ce grave inconvénient peut être évité si l’on se propose seulement d'obtenir un sérum actif. Alors, il n’est pas nécessaire d'apprécier directement l'immunité de l’animal d’où l’on tire le sérum; il suffit de connaitre l’activité de ce sérum. Or, il sera toujours possible, pendant la durée du traitement destiné à conférer limmunité croissante contre la diphlérie à un cobaye ou à un mouton, par exemple, de pratiquer, de temps à autre, une saignée, de récolter le sérum et d’en étudier l’acli- vité. On inoculera une série de cobayes, le premier avec une quantité de ce sérum égale à + poids, le second avec une quantité égale à & de son poids et ainsi de suite. Le lendemain, les cobayes seront inoculés avec la dose minima de culture qui tue en 4 jours un cobaye neuf. Si le premier cobaye meurt, si les autres survivent à partir du deuxième, on dira que 2 parties en poids de sérum donnent l’immunité à 100 parties en poids de cobaye. Le rapport £° pourra repré- 22* de son 780 D: LEDOUX-LEBARD. — LA DIPHTÉRIE ET SON TRAITEMENT senter le degré d'activité du sérum à l'égard du cobaye. L'expérience montre que ces deux termes : acli- vité du sérum et immunité acquise varient dans le même sens : le sérum est d'autant plus actif que l’immunité acquise est plus grande. Il est im- portant de bien entendre qu'il s'agit de l’immunité acquise et non de l’immunité, d'une manière abso- lue. Deux animaux arrivés au même degré d’im- munité, grâce au traitement préventif, ne four- nissent pas nécessairement un sérum également actif. Si l'un d'eux seulement possédait un certain degré d'immunité naturelle, avant le traitement, il fournira un sérum d'activité moindre. L'imru- nité acquise, c’est la différence entre l'immunité mesurée après le traitement et limmunilé natu- relle. 2° Lorsque le sérum possède une aclivité sufli- sante. on en recueille une certaine quantité, que l'on conserve en y ajoutant 0,5 °/, de phénol. If faut plus de sérum actif pour guérir la diphtérie que pour donner l'immunité contre cette maladie. Pour guérir des cobayes qu'on venait d'inoculer avec une dose de culture, donnant la mort en À jours, il fallait 1,5 à 2 fois plus de sérum que pour immuniser des animaux de même espèce contre la même dose. La quantité de sérum néces- saire est encore plus grande si l'infection date déjà de 24 à 36 heures. Le sérum le plus actif que Behring et Wernicke aient réussi à préparer provenail d’un cobaye im- munisé. Il avait un degré d'activité égal à 1.000 à l'égard du cobaye qu'on venait d’inoculer de diphtérie. Cette activité tombait à 400 à l'égard du cobaye également inoculé de diphtérie, mais présentant déjà des symptômes locaux el géné- aux. Les animaux immunisés avec le sérum et qui résistent à une inoculation virulente ou toxique acquièrent,une immunité plus forte. De là un pro- cédé indirect de créer ou d'accroître l’immunité, lorsqu'on possède déjà du sérum actifet par suite le moyen d’en fabriquer de nouvelles quantités. Le mode d'injection sous la peau ou dans le pé- ritoine paraît indifférent lorsqu'il s'agit de donner limmunité ou de guérir d'une diphtérie inoculée il y a quelques instants. Si la maladie est plus an- cienne, l'injection péritonéale est préférable. Nous espérons avoir fait comprendre le prin- cipe de la sérum-thérapie, son application à la diphtérie, et aussi la précision, la rigueur de mé- thode qui, seules, peuvent en assurer le succès. En admettant que tous ces faits reçoivent pleine con- firmation, pouvons-nous espérer que la nouvelle thérapeutique puisse s'appliquer à l’homme? Si l’on suppose qu'un sérum ait une aclivité repré- sentée par le nombre 400 à l’égard du cobaye alleint déjà de manifestations diphtériques lo- cales et générales et qu’il conserve cette activité à l'égard d’un enfant diphtérique pesant par exemple 20 kilog., il faudrait injecter à cet en- fant #%ou 50 centimètres cubes de sérum pour le guérir. Cette évaluation serait même exagée, si, comme le pensent les inventeurs du procédé, l'homme est moins réceptif que le cobaye pour la diphtérie. Mais le contraire nous semble pro- bable. Le cobaye ne prend pas. que nous sachions, la diphtérie spontanément, comme l’homme; l'angine diphlérique expérimentale ne se déve- loppe chez le cobaye que sur des excoriations de la muqueuse gutturale, tandis que cette angine nait dans la gorge de l’homme sans lésions de la mu- queuse ou avec des lésions de surface si faible que le plus souvent elles passent inaperçues. Mais celte objection ne vise, en tous cas, que la quantité de sérum curalif à injecter. Ce qui nous parait de conséquence plus grave, c'est la diffé- rence entre la diphtérie expérimentale par inoecu- lation sous la peau. telle que Behring ou Wernicke l'ont traitée, chez le cobaye par leur méthode, et la diphtérie humaine. Chez le cobaye la lésion locale est négligeable auprès de l'intoxication ; chez l'homme cette lésion locale, par l’entrave qu'elle apporte à la respiration lorsqu'elle s'étend au larynx, peut causer la mort. Ür ii n'est pas prouvé que l’action antitoxique du sérum actif s'accompagne du pouvoir d’entraver la formalion des fausses membranes. Cette action antitoxique ne crée pas, chez l'animal traité, le pouvoir bacté- ricide du sang extrait par la saignée, puisque ce sang peut servir de milieu de culture pour le mi- crobe de Klebs !, ni le pouvoir bactéricide des tissus, dans l'animal lui-même, car les bacilles inoculés y restent longtemps vivants ?: il y a done lieu de craindre que ceux-ci ne puissent aussi se développer et proliférer assez activement sinon sous la peau, au moins sur les muqueuses pour amener l’exsudation des fausses membranes. En ce cas, les injections de sérum, pleinement eflicaces dans les formes toxiques de diphtérie qui tuent sans obstacle à la respiration par l'abondance ou la violence des toxines sécrétées, ne joueraient plus que le rôle d’une médication symptomatique, pour combattre l'intoxication, dans les formes ordi- naires à fausses membranes envahissantes. Et dans la pénurie où nous sommes de tout médicament de ce genre, cette action du sérum serait encore de haute valeur. 1 Behring et Wernicke, loc. cit. * 2 Behring. Ueber desinfection im thieischren organismus Congrès d'hygiène de Londres 1891, W. FOESTER ET O. JESSE. — LES NUAGES NOCTURNES LUMINEUX Ces quelques objections suflisent à montrer qu'il faut attendre l'épreuve de l’expérimentation avant de juger le traitement de la diphtérie humaine par le sérum d'animaux immunisés. Ces réserves, que commande le désir de ne pas s'exposer à l'illusion, laissent entière notre admira- 787 lion pour tous ces travaux qui nous mènent par une route sûre vers ce but autrefois environné de ténèbres el que maintenant l’on croit entrevoir : la guérison de la diphtérie humaine. Ledoux-Lebard, Chef du Laboratoire de la Clinique à Hôpital des Enfants. LES NUAGES NOCTURNES LUMINEUX Depuis l’année 1885 on a observé sous nos lati- tudes un phénomène céleste très remarquable : les nuages nocturnes lumineux. Ce phénomène méritant d'attirer toute l'attention des astronomes et des météorologistes, nous allons essayer de ré- sumer l’état présent de la science sur ce sujet. A la lalitude de Berlin le phénomène ne s’observe que durant une période relativement courte de l’année : du 23 mai au 11 août. Tandis que, dans les premières années, on le voyait assez fréquem- ment même avant minuit, durant les quatre der- nières années, il est devenu plus rare et ne s’esl guère manifesté qu'après minuit. L'aspect est celui de cirrhus brillants qui tranchent sur le fond crépusculaire du ciel. C’est ce qui distingue spéci- fiquement ces nuages des cirrhus ordinaires ; ceux- ei, à la hauteur du Soleil au-dessous de Phorizon à laquelle on voit actuellement les nuages lumineux, semblent foncés sur le ciel léger du crépuscule. De nombreuses photographies prises d’une façon simultanée à Berlin et aux environs montrent que l'altitude des nuages lumineux est constante et très considérable : 82 kilomètres. En conséquence, ils reçoivent la lumière du Soleil situé au-dessous de l'horizon, ce qui leur donne l'apparence d’une nébulosité brillante sur le ciel crépusculaire. Ils ne sont visibles que tant que le Soleil brille sur eux ; aussitôt que l'ombre de la Terre passe au- dessus d’eux, ils deviennent invisibles. Générale- ment, ils commencent le matin, peu avant le cré- puseule, et ils disparaissent dès que le Soleil se tient à plus de 8° à 10° au-dessous de l'horizon. Dans ces dernières années, e£s r'iages ont élé rares. Cette année-ei on les a vus environ dix fois. tandis que, dans les premières années, on les voyait très fréquemment. Leur apparition est sujette à de grands changements : tandis que souvent ils n’exis- tent que sous forme d’un petit nombre de petites bandes lumineuses, parfois ils constituent de plus grandes accumulations, et leur lumière est plus intense. C’est spécialement dans les derniers jours de la période, du 2 au 6 août, que leur lumière semble être le plus considérable à nos latitudes. Après minuit ces nuages sont toujours à 40° de la direction N.-E. L'observation fréquente qu'on a faite de leurs mouvements conduit à les attribuer principalement au milieu résistant de l’espace cé- leste. Cette théorie s'accorde avec le fait que, dans la demi-année après son apparition en Allemagne, le phénomène a élé observé fréquemment aux la- litudes méridionales de 53° par M. Stubenrauch, météorologiste à Punta Arenas, ainsi qu’à plusieurs reprises par des capitaines denavires. D'autres observations viennent confirmer la sup- position d'une course errante annuelle de cette sorte. Par exemple, à Graham's Lown, par 33° de latitude S., le phénomène a été observé le 27 oc- tobre 1891 !, et à Haverford par 40° latitude N., suivant renseignement écrit, il a été observé le 17 mai 1892. Ces dates, rapprochées de l’époque de l'apparition en Prusse, indiquent évidemment le transport du phénomène de N. à S. et vice-versa. La fréquence d’apparilion, aussi bien que l’éten- due et l'intensité lumineuse de ces nuages dimi- nuent de plus en plus. Le phénomène disparaitra done entièrement d'ici quelques années. Il semble cependant qu'en 1893 et 189% il sera encore pos- sible de faire des observations susceptibles d’éclair- cir plusieurs questions d'intérêt capital. Il serait très important d'avoir des mesures de l'altitude apparente des nuages lumineux, surtout à l'époque où la limile supérieure du segment crépusculaire offre l'altitude relativement petite de 4° à 10°, En ces dernières années le segment crépusculaire a élé bien plus rarement occupé par les nuages lu- mineux. On doit donc se demander si le point cul- minant du phénomène se trouve réellement vers la limite de l'ombre de la Terre. Afin de s'assurer que les mesures sont adaptées à leur fin, il faut les répéter autant que possible à des intervalles de quelques minutes. Le soir cette limite est généra- tement marquée par ce fait qu'au-dessous le phé- nomène disparait en partie de la région supé- rieure, tandis que le matin de nouvelles parties deviennent toujours visibles à l’intérieur de la li- mite et en remontant. Le tableau suivant indique l Comparez Astr, Nachr., No 300$. 783 ladistancezénithale dans la verticale du Soleil pour la latitude de Berlin, en supposant que le phé- nomène s’étende sur tout le segment crépuscu- laire : Distance zénithale de la limite supérieure Hauteur du Soleil au-dessous de l'horizon 12°0 80° 12.5 83 13.0 85 13.5 86 14.0 87 D'ailleurs, comme en général le télescope fait voir la limite supérieure du phénomène un peu plus haute que ne fait l’œil nu, il est à désirer que le télescope soit toujours ajusté à la ligne-limite vue à l’œil nu. Une comparaison de l'apparition vue à l’œil nu avec celle vue au télescope, per- mettra à l'observateur de découvrir facilement la ligne correspondante à celle vue à l'œil nu. L'exac- titude de ces mesures doit être environ de 3" à 6", par rapport à l'azimut et l’allitude, tandis que le temps devra être exact, à 2 ou à 4" près. L'emploi d’un appareil photographique est avan- tageux pour indiquer la place, aussi bien que les mouvements duphénomène.Maisil n’y ad’appareils convenables que ceux dans lesquels la proportion du diamètre del’ouverture par rapport à la distance focale ». LS Ko LES FORMES D'ÉQUILIBRE D'UNE MASSE FLUIDE EN ROTATION D’après les idées généralement admises, tous les astres ont élé originairement liquides ou ga- zeux, et ceux qui n'ont pas conservé leur fluidité primitive, ont gardé, en se solidifiant, la figure qu'ils avaient prise quand ils étaient encore fluides. Les astronomes ontainsi été conduits à se poser le problème suivant, afin d'expliquer la figure des corps célestes : Quelles sont les forces auxquelles élaient soumises ces masses fluides qui sont deve- nues les astres actuels et quelles formes d’équi- libre devaient prendre ces masses sous l'influence de ces forces? La première de ces forces était l'attraction new- tonienne. Chaque molécule fluide élait attirée par les autres parties de la masse en raison directe des masses et en raison inverse du carré des dis- tances. La seconde était la force centrifuge pro- duite par la rotation de la masse. On admet que cette rotation devait être uniforme, c'est-à-dire que toutes les parties de la masse devaient effec- tuer un lour complet dans le même temps. Et en effet, si cette uniformité n'existait pas, le frotte- ment mutuel des diverses parties du fluide l’au- rait promptement rétablie. Déterminer la figure d'équilibre d'un fluide sou- mis à ces forces est un problème d’hydrostatique. Ce problème est très difficile, etsa solution, quelque incomplète qu’elle soit encore, a exigé de grands efforts, que l'importance de la question justifiait d’ailleurs pleinement. Plusieurs géomèêtres du siècle dernier, parmi REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, lesquels Clairaut doit être cité en première ligne, ont résolu le problème, en supposant que la rola- tion est lente et que la figure d'équilibre diffère peu d’une sphère. C’est bien le cas, en effet, pour toutes les planètes dans leur état actuel ; et cependant cela ne saurait suffire, car on peut se demander s'il en est encore de même pour cer- taines éloiles, comme les étoiles variables, par exemple. On peut aussi supposer, comme le faisait Laplace, que la matière, qui a servi à former les planètes, a d’abord, en se détachant du Soleil, affecté une forme annulaire et par conséquent très différente d'une sphère. Dès qu’on ne se restreint plus aux figures sphé- roïdales, le problème devient beaucoup plus 4iffi- ‘cile, el il est encore bien loin d'être résolu, même en supposant, comme nous allons le faire, que la masse fluide considérée est homogène, c'est-à-dire que sa densité est constante. Mac-Lorin à montré qu'une des figures d’équi- libre que peut affecter un fluide homogène en ro- talion-est wn ellipsoide de révolution aplati. Pendant longtemps on a pu croire que cette solution était unique. Mais Jacobi, au commencement de ce siècle, a découvert une solution vraiment inattendue : cer- tains ellipsoïdes à trois axes inégaux, appelés au- jourd'hui ellipsoïdes de Jacobi, sont également des figures d'équilibre. La rotation s'effectue autour du petit axe. Ce résultat causa un grand étonnement. On s’é- 23 810 tait habitué à regarder comme évident que toutes les formes d'équilibre devaient être des surfaces de révolution. Il n’y a aucune raison pour cela, et cette évidence apparente était vaine. L'exemple n'est d’ailleurs pas rare dans les annales de la science et ce n’est pas là le premier fantôme de ce genre qu'on ait vu se dissiper ainsi. Certaines personnes ont voulu expliquer de la sorte la variabilité de certaines étoiles à courte pé- riode. Si ces astres ont la forme d’ellipsoïdes de Jacobi, ils se présentent à nous tantôt par le grand axe, tantôt par l’axe moyen el leur surface appa- rente doit varier périodiquement. Il est impossible pour le moment de se prononcer sur la valeur de cette explication. On a fait une autre hypothèse qui se trouve reproduite dans quelques ouvrages, bien qu'elle ne soutienne pas un instant d'examen. À une certaine époque, les géodésiens avaient cru observer que l’aplatissement du globe n’est pas le même pour les différents méridiens et que la Terre affecte la forme d'un ellipsoïde à trois axes iné- gaux. On a dit que cette figure devait être un ellip- soïde de Jacobi. C’élait oublier que les ellipsoïdes de Jacobi diffèrent tous beaucoup de la sphère et que le seul qui soit compatible avec la vitesse de rotation de la Terre est une sorte d’aiguille très allongée. Après la découverte de Jacobi, on a été naturel- lement conduit à se demander s'il n'existait pas d’autres formes d'équilibre non ellipsoïdales. Le problème a été nettement posé dans l’admi- rable traité de philosophie naturelle de Thomson et Tait où se trouvent quelques pages éminemment suggeslives. Ce sont ces pages qui ont inspiré les recherches ultérieures, parmi lesquelles les plus importantes sont, sans contredit, celles de M. Lia- pounoff. Les travaux de ce savant russe, ceux de M. Mathiessen, de Mme Kowalevski et les miens ont mis en évidence l'existence de nombreuses formes d'équilibre sur lesquelles je voudrais donner quelques détails. I. — FORMES NOUVELLES D'ÉQUILIBRE Équilibre. — Si l’on fait varier d’une manière continue lé moment de rotation (c’est-à-dire le produit du moment d'inertie par la vitesse de rota- tion), les ellipsoïdes de Mac-Lorin, comme ceux de Jacobi se déforment d'une manière continue. Considérons d’abord les ellipsoïdes de révolu- tion de Mac-Lorin. Quand le moment de rotation croitra, l’aplatissement, d’abord très faible, croitra constamment et finira par devenir très considéra- ble ; la vitesse de rotation croitra jusqu’à un cer- tain maximum, pour décroitre ensuile jusqu’à s’annuler. H. POINCARÉ. — LES FORMES D'ÉQUILIBRE D'UNE MASSE FLUIDE EN ROTATION Elle peut en effet décroitre, bien que le moment de rotation croisse, parce que l’autre facteur, qui est le moment d'inertie, croit très rapidement. On arrive à des résultats analogues, ainsi que l'a montré Liouville, en ce qui concerne les ellip- soïdes de Jacobi. Ces ellipsoïdes n’existent que si le moment de rotation esl supérieur à une cer- taine valeur. Quand ce moment va en croissant à partir de cette valeur, la vitesse de rotation déeroît et finit par s’annuler; le grand axe va en crois- sant et le petit axe en décroissant sans cesse; l'axe moyen décroit plus rapidement encore. D'abord il est égal au grand axe, de telle facon que l’ellip- soïde est de révolution autour du petit axe, c’est- à-dire de l'axe de rotalion; au contraire quand le moment de rotation est très grand et la vitesse de rotation très petite, l’axe moyen est presque égal au petit axe, de telle sorte que la figure ressemble à un ellipsoïde de révolution très allongé. On voit que les deux catégories d’ellipsoïdes forment deux séries continues de figures d’équi- libre. Mais il y a une figure qui est commune aux deux séries et qui est, si l'on veut me permettre cette comparaison, un point de bifurcation. Je veux parler de l'ellipsoïde de Jacoui qui cor- respond à la valeur minimum du moment de rotalion; il est en effet en même temps, ainsi que je viens de le dire, un ellipsoïde de révolution aplali. Je l’appellerai Pellipsoïde E,. Les figures nouvelles d'équilibre dont il me reste à parler forment de même des séries conti- nues; et quelques-unes d’entre elles, qui appar- tiennent en même temps à la série des ellipsoïdes de Mac-Lorin ou à celle des ellipsoïdes de Jacobi, sont de véritables figures de bifurcation analogues à E,. Je vais chercher à faire comprendre la forme de ces figures nouvelles. Prenons d'abord pour point de départ un ellipsoïde de révolution. Partageons- en la surface en # + 1 zones, en y traçant x paral- lèles. Partageons-la de même en 2p fuseaux égaux par p méridiens équidistants. Ces parallèles el ces méridiens, se coupant à angle droit, déterminent une sorte de damier ; ima- ginons maintenant que la surface de l’ellipsoïde se creuse ou se soulève, de telle façon que les cases noires de notre damier soient remplacées par des montagnes très peu élevées et les cases blanches par des vallées très peu profondes ; nous obtien- drons ainsi une figure d'équilibre très peu diffé- rente de l’ellipsoïde. Pour nous rendre compte de la forme des autres solides d'équilibre de la même série, nousn’avons qu'à supposer que ces relifs vont en s'accentuant H. POINCARÉ. — LES FORMES D'ÉQUILIBRE D'UNE MASSE FLUIDE EN ROTATION 811 et que les lignes qui séparent les dépressions des montagnes se déforment peu à peu. Il est inutile d'ajouter que l’aplatissement de l'ellipsoïde qui sert de point de départ et les lati- tudes de nos » parallèles ne peuvent pas être choisis arbitrairement et qu'ils ne sont pas les mêmes pour toutes les séries. Le nombre # peut être nul de telle sorte que l'el- lipsoïde soit seulement divisé en fuseaux; le nombre y peut aussi être nul, de sorte qu'il soit seulement divisé en zones. À chaque combinaison des deux nombres » et p correspond une série de figures nouvelles d’é- quilibre. Observons toutefois que les combinai- sons (eo SMS ENTRE VEN EI) ne donnent que l’ellipsoïde de Mac-Lorin déplacé, mais non déformé, et que la série qui correspond à la combinaison (#7 — 0, p 2) n’est autre chose que la série des ellipsoïdes de Jacobi. Ces figures nouvelles d'équilibre admettent p plans de symétrie passant par l’axe de rotation. Si p est nul, elles sont de révolution autour de cet axe. Enfin, si # est pair, elles ont un p + 1°, plan de symétrie perpendiculaire à l’axe de rola- tion. Il existe d’autres séries de formes d'équilibre que l’on obtient en prenant comme point de dé- part un ‘ellipsoïde de Jacobi. Voici comment on les obtient : Traçons à la surface d’un ellipsoïde de Jacobi » lignes convenablement choisies de façon à la di- viser en x + 1 zones, entourant les pôles du grand axe. (Ges lignes doivent être choisies parmi celles que les géomètres appellent lignes de courbure.) Imaginons maintenant que la surface de l’elli- psoïde se creuse ou se soulève de telle facon que la première de ces zones soit remplacée par une montagne, la zone suivante par une vallée, la sui- vante par une montagne et ainsi de suite. Nous obliendrons ainsi une figure d'équilibre très peu différente de l’ellipsoïde. Pour nous rendre compte de la forme des autres solides d'équilibre de la même série, nous n'avons qu'à supposer que ces reliefs vont en s’accenluant. Notre ellipsoïde déformé va présenter alors une suile de renflements et d’étranglements alternatifs, formant comme une série de plis transversaux. À chaque valeur du nombre #, à partir de n = 3 inclusivement, correspond une de ces séries de figures d'équilibre. Toutes admettent deux plans de symétrie rec- tangulaires, l’un perpendiculaire à l’axe de rotation, l’autre passant par cet axe. Les figures d'équilibre qui correspondent à une valeur paire de » admet- | tent un troisième plan de symétrie perpendiculaire aux deux premiers. J'appellerai particulièrement l'attention sur la série qui correspond à # == 3. Je représente sur la figure 1 l’un des solides d'équilibre de cette série. Le trait pointillé est le contour de l’ellipsoïde de Jacobi qui a servi de point de départ, et le trai plein est le contour de la nouvelle figure d'équi- libre. Parmi les figures de cette série, il y en a une qui est en même temps un ellipsoïde de Jacobi. Je l’appellerai l’ellipsoïde E . Slabilité. — Tous ces solides sont des figures d'équilibre, mais cet équilibre est-il stable ? C’est ce que nous avons encore à examiner. Lord Kelirn {Sir W. Thomson) et M. Tait, dans l'ouvrage que j'ai cité plus haut, ont les premiers remarqué qu'il y a deux sortes de stabilité. Observons d'abord qu’il y a deux espèces d’équi- libre. Il y a, en premier lieu, l'équilibre absolu qui est atteint quand tous les corps envisagés sont en repos; mais ce n’est pas celui-là que nous avons à considérer dans le problème qui nous occupe, puisque notre masse fluide n’est pas en l'epos mais en rotation. Seulement, elle paraitrait en repos, à un observateur qui serait entrainé comme elle dans un mouvement de rotation uniforme : elle serait en équilibre relatif par rapport à cet obser- raleur. Les lois de l'équilibre absolu et celles de l’équi- libre relatif ne sont pas tout à fait les mêmes. L'un et l’autre sont stables quand ils correspondent au minimum de l'énergie totale du système envisagé. Il est clair en effet que, pour faire sortir le système de sa situation d'équilibre, il faut lui fournir une certaine quantité d'énergie, et qu’il ne pourra s'en écarter beaucoup que si cette dépense d'énergie est très grande. Cette condition, qui esl toujours suffisante, est nécessaire dans le cas de l'équilibre absolu; elle ne l’est pas dans le cas de l'équilibre relatif; un système animé d'un mouvement de rotation très rapide peut être en équilibre stable sans que l’é- nergie soit minimum. C’est là l'explication d'une foule de paradoxes dynamiques; je n’en citerai qu'un qui est d’obser- 812 H. POINCARE. — LES FORMES D'ÉQUILIBRE D'UNE MASSE FLUIDE EN ROTATION vation vulgaire et qui, pour celte raison, a presque cessé de nous sembler surprenant:la toupie, quand elle Lourne assez vile, peut se maintenir debout sur la pointe. Ainsi, quand même l'énergie n’est pas minimum, un système peut conserver son état d'équilibre re- latif pendant un temps indéfini. Il le pourrait du moins siles frottements étaient nuls. Mais Lord Kelvin a démontré que, si les frotte- ments existent, quelque faibles qu’ils soient, ils n’en est plus de même et que l’équilibre finira par être détruit, à moins que l'énergie ne soit minimum. C'est ainsi, pour reprendre notre exemple, que la toupie finit par se ralentir et par tomber. Il y a donc deux sortes de stabilité : la stabilité ordinaire, dont les frottements finissent par avoir raison, et la stabilité séculaire que les frolttements ne peuvent détruire. C’est la seconde qui doit nous intéresser le plus. En se plaçant au point de vue de la stabilité sé- eulaire, les ellipsoïdes de Mac Lorin, moins aplatis que E,, sont stables ; les autres sont instables. Les ellipsoïdes de Jacobi, moinsdifférents de l’ellipsoide de révolution que E,, sont stables: les autres sont instables. Enfin toutes les figures nouvelles dont nous avons parlé plus haut sont instables, à l'exception de la série sur laquelle nous avons insisté à la fin du paragraphe précédent. C'est celle qui dérive de l’ellipsoïde de Jacobi et qui correspond au cas de # — 3. Cest elle dont fait partie la forme d'équilibre que nous avons représentée plus haut sur la figure 1. Il. — CONSÉQUENCES COSMOGONIQUES On peul tirer de ce qui précède quelques consé- quences intéressantes. Supposons une masse fluide homogène animée d'une rotation uniforme. Imagi- nons que celle masse se refroidisse et se condense; supposons qu'en se condensant elle demeure homo- gène et que son refroidissement soit assez lent pour que les frottements aient le temps de main- tenir l’uniformité de la rotation. Le moment de rotation de la masse devra de- meurer constant et, comme son moment d'inerlie va en diminuant, sa vitesse de rotalion ira au con- traire en augmentant. Si, au début de la condensa- tion, la vitesse de rotation est faible et la figure de notre masse fluide peu différente d'un sphère, son aplatissement ira en croissant avec la vitesse de rotation. La masse fluide conservera pendant quelque tempsla forme d’un ellipsoïde de révolution d’abord peu aplali (fig. 2), puis plus aplati (fig. 3.) (Dans les figures 2 à 9 qui représentent les for- mes successives de la masse qui se condense, cha- cune de ces formes est représentée par deux pro- jections l'une verticale dans la partie supérieure de la figure, l'autre horizontale dans la partie infé- rieure ; l'axe de rotation est supposé vertical.) Fig. 2. ? Fig. 3. L'ellipsoïde, s'aplatissant de plus en plus, cessera bientôt d'être stable, ou du moins de conserver la stabilité séculaire. Il est vrai qu'il conservera en- core quelque temps la stabilité ordinaire ; mais, les figures d'équilibre qui ne possèdent que cette sorte de stabilité finissent, comme nous l’avons vu, par être détruites par les frottements. Si donc le re- froidissement est assez lent, ces ellipsoïdes ne pour- ront subsister, et la masse fluide devra prendre la forme d’un ellipsoïde de Jacobi, d’abord peu différent d’un ellipsoïde de révolution (fig. 4) puis plus allongé (fig. 5). - Mais l’ellipsoïde de Jacobi cessera, à son tour, PÉTER LE, Fig. 4 Fig. 5. cs d'étre stable et la masse fluide prendra des formes d'équilibre appartenant à la série de figures nou- velles représentées plus haut (fig. 4). D'abord peu différente de l’ellipsoïde E,, notre masse fluide prendra pour ainsi dire la forme d'un œuf avec un gros et un petit bout. Puis elle sc creusera dans le voisinage du petit bout (fig. 6); ce relief s’accentuant peu à peu, il se produira à cette place un étranglement (fig. 7) qui fera présager la division du fluide en deux masses distinctes. Ces deux masses, s'étant séparées, restent d'abord voisines l'une de l’autre. Chacune d'elles, sous l'influence de l’altraction de l’autre masse, prend une figure pyriforme (fig. 8). Le refroidissement continuant, chacune des masses se condense, sa rolalion devient de plusen html —< ” H. POINCARÉ. — LES FORMES D'ÉQUILIBRE D'UNE MASSE FLUIDE EN ROTATION 813 Anneau de Saturne. — Les figures dont nous plus rapide et cesse d'être égale à la vitesse de ré- volution des deux masses autour de leur centre de gravité commun. Enfin, quand les dimensions des deux masses sont devenues suffisamment petites Fig. 6. Fig. 1. par rapport à la distance qui les sépare, leur figure se rapproche de l’ellipsoïde (fig. 9). On pourrail être tenté de Lirer de là des consé- quences cosmogoniques et d'expliquer de cette manière l'origine des planètes. Le Soleil, en se condensant peu à peu, n'aurait pas alors, comme le croyait Laplace, abandonné successivement des : D L'ig. 8. Fig..9. anneaux d'où les planètes seraient sorties ensuile ; il se serait au contraire déformé jusqu'à ce qu’une petite masse, destinée à devenir une planète, se détache d’un point quelconque de son équateur. Mais, avant d'adopter cette conclusion, il faut tenir compte de certaines remarques qui lui enlèvent beaucoup de probabilité. En premier lieu, nous avons supposé notre masse homogène; au contraire, la nébuleuse, qui a servi à former le système solaire, était sans doute très hétérogène et une grande partie de sa masse devait être condensée au centre. Il est impossible, pour le moment, de se rendre compte des change- ments que cette hétérogénéité apporterait dans nos résultats. En second lieu, lies deux masses représentées dans la figure 9 sont comparables; la plus petite serait sans doute la moitié vu le tiers de l’autre; au contraire la masse de Jupiter n’est que la mil- lième partie de celle du Soleil. Peut-être le processus que je viens de décrire (fig. 2 à 9) se rapproche-t-il plus de celui qui a produit certaines étoiles doubles que de celui d’où est sorti le système solaire. Tout dans tous les cas reste très hypothétique. venons de parler ne sont pas les seules qui soient connues. Il y a longtemps déjà, M. Ma- thiessen avait entrevu la possibilité des figures annulaires d'équilibre, et le même résultat avail élé retrouvé ensuite par Lord Kelvin, qui s'est borné à l’'énoncer. Grèce aux travaux de Mme Kowalevski etaux miens, nous en possédons une démonstration rigoureuse, peu différente probablement de celle que Lord Kelvin avait découverte, mais n’a pas publiée. On peut établir qu'une masse fluide en rotation, soustraile à toute action extérieure, peut prendre la forme d’un anneau analogue à celui de Saturne, mais sans masse centrale. Si la vitesse de rotation est faible, cet anneau sera une sorte de tore très délié dont la section méridienne différera très peu d'une ellipse peu aplatie; mais l'équilibre de ces figures est instable. Pour bien le faire comprendre, le mieux est de dire quelques mots des travaux de Maxwell sur la stabilité de l’anneau de Saturne. On peut faire, au sujet de la nature de cet astre, trois hypothèses différentes : 1° L’anneau est solide ; 2° [Test formé d’un très grand nombre de satel- lites très petits, que le lélescope ne peul séparer les uns des autres; 3° Il est fluide. Laplace avait fait voir depuis longtemps que, si l'anneau est solide, son équilibre ne peut être stable si sa figure est symétrique et si son centre de gravité coïncide avec son centre de figure. Mais il croyait qu'il suflisait, pour rétablir la stabilité, de supposer des irrégularités peu importantes que les observations ne pouvaient déceler. Un savant anglais, dont des travaux d’une tout autre nature ont illustré le nom, le célèbre élec- tricien Clerk Maxwell, a repris la question par une analyse très simple. Il a montré qu'un anneau solide est instable à moins de présenter des irré- gularités énormes. Si elles existaient, le télescope nous les aurait fait connaitre depuis longtemps. Si j'ajoute que, d'après les calculs de Hirn, un an- neau solide, plusieurs milliers de fois plus résistant que l'acier, se romprait sous l'effort des attractions subies par l'anneau de Saturne, on conclura que la première hypothèse doit être rejetée. Passons à la seconde, qui a été proposée autrefois par Cassini. Il serait trop difficile de traiter le pro- blème dans toute sa généralité; aussi Maxwell s'est-il borné à quelques cas simples ; je ne parlerai que du plus simple de Lous. Imaginons une couronne de satellites égaux, également espacés sur une circonférence ayant pour centre Saturne et décri- vant cette circonférence d’un mouvement uniforme, 814 H. POINCARÉ. — LES FORMES D'ÉQUILIBRE D'UNE MASSE FLUIDE EN ROTATION Il est clair que ce mouvement peut se continuer indéfiniment si aucune cause extérieure ne vient le troubler. Mais, si une semblable cause vient y apporter une perturbation très petite, la couronne va-t-elle finir par se disloquer, ou bien sa défor- mation restera-t-elle très petite? En d’autres ter- mes, l'équilibre de notre couronne sera-t-il stable? Je ne puis,bien entendu, reproduire ici l'analyse du savant anglais, et je dois me contenter d'un aperçu grossier. On peut voir d’abord que, si l’astre central n'existait pas, l’équibre serait instable, Si, en effet, l'un des satellites prend l'avance pourune cause quelconque, il se rapproche du satellite qui est devant lui et s'éloigne de celui qui est derrière. Il est plus attiré par le premier et moins par le second : sa marche est encore accélérée; son avance tend à s'accroitre et la couronne à se dis- loquer. Si nous supposons au contraire que les masses des satellites soient infiniment petites par rapport à celle de Saturne, chaque satellite se comportera comme s'il était seul ; or, nous savons que le mou- vement d'un satellite isolé est stable, On peut donc prévoir, sans qu'il soit nécessaire d'avoir recours à un calcul complet, que la condi- tion de la stabilité de notre couronne sera que sa masse soit suffisamment pelilte par rapport à celle de l’astre central. Le même résultat subsiste pour un système plus compliqué de satellites; c'est encore le même qu'obtient Maxwell dans la troisième hypothèse, c’est-à-dire en supposant la masse fluide. Par un caleul qui n'est peut-être pas parfaitement rigou- reux, il démontre qu'un anneau fluide ne peut-être stable que si sa densité moyenne est au plus égale à la 300° partie de celle de la planète. Mais, on peut compléter le résultat de Maxwell par un raisonnement qui est assez court pour être reproduit ici, On sait que les électriciens se repré- sentent un champ électrostatique comme sillonné par un très grand nombre de lignes de force. Ce qui définit une de ces lignes, c'est qu'en chacun de ses points la tangente est la direction de la force électrique. Cette image leur est très précieuse, car elle peut remplacer dans la pratique une foule de formules mathématiques qui sont abstraites et compliquées. Mais ils usent aussi d’une autre image ; ils suppo- sent chacune de ces lignes de force remplacée par un petit canal qui est parcouru par un liquide fictif avec un débit constant el dans le sens de la force électrique. La quantité de ce liquide imagi- naire qui passe à travers une surface quelconque, s'appelle le flux de force qui traverse cette surface. Tout se passe alors comme si chaque molécule d'électricité positive émettait continuellement une quantité constante de ce liquide, et si chaque mo- lécule d'électricité négative en absorbait au con- traire continuellement une quantité constante. On peut, en d’autres termes, résumer toutes les lois de l'électrostatique, en disant que le flux de force qui traverse une surface fermée est proportionnel à la somme algébrique des masses électriques contenues à l’intérieur de cette surface. La même règle peut s'appliquer à l'attraction newtonienne: cette force suit, en effet, la même loi que l'attraction électrique, qui est la raison inverse du carré des distances. Elle s'applique encore quand, au lieu de considérer la gravitation seule, on considère la résultante de la gravitation et de la force centrifuge. Imaginons en effet une matière fictive dont l’ac- tion sur les corps voisins soit conforme à la loi de Newton, mais soit répulsive, au lieu d’être attrac- tive. C'est ce que l’on peut exprimer, si l’on préfère, en disant que la densité de cette matière est néga- tive. Supposons que celte matière fictive affecte la forme d’un cylindre de révolution indéfini, à l’in- térieur duquel se trouvent tous les corps que l’on veut envisager, et que sa densité soit proportion- nelle au carré de la vitesse de rotation. La répul- sion exercée par cetle masse fictive aura même grandeur et même direction que la force centrifuge. Pour obtenir la résultante de la gravitalion et de la force centrifuge, il suflira donc de considérer à la fois l’action de toutes ces masses, {ant réelles que fictives. Cela posé, considérons notre masse fluide en ro- tation et une molécule superficielle faisant partie de cette masse, et soumise par conséquent à la gravitation et à la force centrifuge. La force totale, qui agit sur cette molécule, doit, pour qu'il y ait équilibre, être normale à la surface de la masse; mais, pour que cet équilibre soit stable, il faut de plus que cette force soit dirigée vers l'intérieur de la masse fluide, sans quoi elle tendrait à en déta- cher notre molécule. Toutes les lignes de force coupent donc normalement la surface de la masse, et le liquide imaginaire, qui est supposé les par- courir, et dont la vitesse a même direction que la force totale, doit toujours traverser cette surface en allant du dehors au dedans. Il en résulle que le flux de force total qui traverse cette surface est positif, et comme, d’après la règle énoncée plus haut, il est proportionnel à la somme algébrique de toutes les masses, tant réelles que fictives, si- tuées à l'intérieur de cette surface, cette somme algébrique doit aussi être positive. En d’autres termes, la densité moyenne du fluide réel doit être supérieure en valeur absolue à la densité de la matière fictive, laquelle, comme M. KAUFMANN. — MORVE ET MALLÉINE S15 nous l'avons vu, est elle-même proportionnelle au carré de la vitesse de rotation. Cette règle, appliquée à l’anneau de Saturne, nous apprend qu'un anneau fluide ne peut être stable que si sa densité est au moins égale à la seizième partie de celle de la planète. Ge résultat, rapproché de celui de Maxwell, nous amène à cette conclusion que l'anneau ne peut être fluide, et nous force à adopter l'hypothèse de Cassini, que les observations de M. Trouvelot semblent d’ailleurs confirmer. Pour la même raison, les figures annulaires d’é- quilibre, étudiées par Mme Kowalevski, ne peuvent être stables. Figure de la Terre. — Je ne dirai que quelques mots du cas beaucoup plus difficile où la masse en rotation est supposée hétérogène. C’est certaine- ment ce qui se passe pour la Terre, et ce qui com- plique encore la question, c'est que la loi suivant laquelle la densité varie dans l’intérieur du globe nous est absolument inconnue. Loin de pouvoir nous en servir pour calculer l’aplatissement, nous devons, au contraire, profiter des mesures des géo- désiens pour tächer de deviner cette loi. Nous disposons pour résoudre ce problème d’une autre donnée, qui est la constante de la précession des équinoxes. On sait en effet que ce phénomène est dû à l’action du Soleil sur le renflement équa- torial du globe terrestre, etcomme cette action dé- pend de la façon dont varie la densité intérieure, les observations de la précession peuvent nous renseigner sur cetle variation. Au premier abord, on serait tenté de croire que le problème est non seulement toujours possible, mais qu'il reste indéterminé et qu'on pourra trou- ver une infinité de lois satisfaisant à ces deux données d'observation. Loin de là : une série de recherches récentes, parmi lesquelles celles de M. Radau sont les premières en date et en impor- tance, ont montré qu'on ne peut trouver aucune MORVE ET La morve est une maladie contagieuse, micro bienne, inoculable, qui s’observe surtout chez les animaux solipèdes (cheval, âne, mulet); cependant elle se transmet aussi aux autres mammifères do- mestiques et à l’homme. Elle affecte deux formes: la forme morveuse proprement dite, caractérisée par des ulcères sur la muqueuse nasale et par du jctage; la forme farcineuse, se traduisant par des tumeurs et des ulcères cutanés. Il est démontré aujourd’hui que la morve et le farcin ne sont que loi des densités qui satisfasse à la fois à l’apla- tissement mesuré el à la précession observée. Les géodésiens concluent à un aplatissement de, tandis que l’aplatissement le plus grand qui soit compatible avec la précession observée est de +. Il est impossible pour le moment de se pro- noncer sur la valeur des nombreuses hypothèses que l’on peut faire pour expliquer cette divergence. Les mesures géodésiques doivent-elles être revi- sées? doit-on supposer que la Terre n’est pas un ellipsoïde de révolution el que l’aplatissement n’est pas le mème suivant les divers méridiens ou dans les deux hémisphères ? Je ne crois pas que les mesures les plus récentes autorisent cette conclusion. Admettra-t-on que la Terre, solidifiée depuis longtemps dans presque toute sa masse, a conservé l’aplatissement dû à la vitesse de rotation qu’elle possédait au moment de sa solidification et que sa rotation a depuis cette époque été considérable- ment ralentie par l’action des marées? Croira-t-on au contraire que la croûte solide est très mince et que l’intérieur, resté liquide, est le siège de mouvements compliqués très différents de ceux que peut prendre un corps solide? Les cal- culs de Laplace ayant été faits en regardant la Terre comme un solide invariable, on conçoit que la précession d’un pareil système puisse être très différente de la précession théorique. Enfin,onpeutsupposer encore que l’aplatissement primitif a été altéré parce que les diverses couches, en se contractant par suite du refroidissement du globe, ont exercé les unes sur les autres des pres- sions et se sont mutuellement déformées. Mais je m'arrête, il est inutile de multiplier les hypothèses puisque toutes ces questions doivent rester provisoirement indécises. H. Poincaré, de l'Académie des Sciences, MALLÉINE deux formes cliniques d’une seule et même affec- tion, qu'on désigne communément sous le nom d'affection farcino-morveuse ou simplement de morve. Quelle que soit la forme où elle se présente, l’af- fection farcino-morveuse peut être aiguë ou chro- nique suivant la rapidité de son évolution. Lors- qu'elle est chronique, et c’est ce qui se présente le plus souvent chez le cheval, les symptômes peu- vent rester plus ou moins cachés ou manquer de 816 M. KAUF YANN. — MORVE ET MALLÉINE Ro 2 CNE TRS CEE NI RE SES TE. netteté. La morve peut aussi exister sans signes extérieurs et rester latente pendant une période de temps quelquefois très longue. Le cheval atteint de morve, soit aiguë, soit chro- nique, soit latente, constitue un danger pour les animaux sains, puisqu'il est capable de leur com- muniquer la maladie par contagion. Il est donc très important de pouvoir reconnaitre l'existence de l'affection morvo-farcineuse, même lorsque nul signe extérieur ne permet de la soupçonner. Jusque dans ces derniers temps, les vélérinaires n'avaient, outre les signes cliniques ordinaires bien connus, qu’un seul moyen pour s'assurer d’une façon à peu près certaine de l'existence de la morve: c'était l'inoculation du jelage, du pus ou d'un autre produit suspect à l'âne ou à un autre animal susceplible de contracter la maladie. Mais, le procédé de diagnostic basé sur l'inocula- Lion n’était mis en pratique que pour s'assurer de l'existence de la morve chez des chevaux suspecls, offrant déjà quelques symptômes morveux; On ne pouvait pas songer à l'utiliser sur tous les chevaux composant la cavalerie des grandes administra- tions ou de l’armée. De plus, le procédé était coù- teux et assez long, puisqu'il fallait toujours plu- sieurs jours avant de connaitre le résultat de l’ino- culation. Les chevaux atteints de morve latente ne pôu- vant être dénoncés, continuaient à séjourner au milieu des chevaux sains et ne tardaient pas à in- fecter ceux-ci. La morve latente est en effet conla- gieuse comme la morve ordinaire, C'est ainsi qu'il faut expliquer l'explosion subite des épidémies de morve parmi les chevaux de l'armée ou des grandes administrations. Jadis le développement de la morve, sans aucune cause apparente de con- tagion, fut attribué à des causes ordinaires et on allait jusqu’à croire que cette maladie pouvail naître spontanément. Aujourd'hui il est démontré que le seul mode de propagation de cette affection c'est la contagion. Nous possédons aussi heureusement un moyen certain et rapide pour déceler la morve latente et qui permeltra d'empêcher la contagion et la pro- pagation de cetle terrible maladie. On se rappelle qu'en 4890 le professeur Koch, après avoir étudié les propriétés de la tuberculine qu'il venait de découvrir, à pu conclure de ses recherches que cette substance, injectée sous la peau de l'homme ou de l'animal atteint de tubercu- lose. déterminait une réaction thermique caraclé- ristique, tandis quelle ne modifiail pas sensible- ment la température chez les individus sains. Le procédé de Koch a été appliqué depuis, avec le plus grand succès, au diagnostic précoce de la tuberculose chez les bovidés; l’agriculture et CT l'hygiène publique en ont déjà largement bénéf- cié. Tous les travaux faits en France et à l'étranger sur ce sujet depuis la publication de l’article paru dans le numéro de cette Revue‘ confirment pleine- ment les résultats antérieurs: ils témoignent nette- ment de la haute valeur diagnostique de la tuber- culine chez les animaux de l’espèce bovine. Mais là ne s'arrêtent pas les avantages qu'on a relirés de la découverte de Koch. Son procédé a élé appliqué récemment, avec au moins autant de succès, au diagnostic de la morve latente chez le cheval. C'est Kalning, vétérinaire militaire russe, qui, en appliquant les procédés de Koch aux cultures du bacille morveux, a obtenu le premier, en 1891, une substance soluble qu'il a appelée mulléine et qui permet de révéler avec une certitude à peu près complète l’existence de la morve latente. La mal- léine, employée en injection sous-cutanée, déter- mine chez les chevaux atteints de morve, une élé- vation thermique au moins égale à celle que l’on oblient sur les bêtes bovines tuberculeuses qui re- coivent de la tuberculine. Kalning fit la première préparation de mal- léine en diluant dans 20 grammes d’eau 5 grammes de cultures morveuses sur pommes de lerre, et en filtrant ensuite cette dilution après l'avoir soumise plusieurs fois à la tempéralure de 120°. Le liquide jaune-clair qu'il obtint fut injecté à la dose de 1 gramme sous la peau de 5 chevaux, dont 3 mor- veux el 2 sains. Sur les premiers, la température s'éleva à 40° 3, 40°5, 40° 7: sur les autres, elle resta normale. Kalning voului poursuivre ses recherches; mal- heureusement, il contracta accidentellement la morve et paya de sa vie l'honneur de ja décou- verte de la malléine. Mais bientôt surgirent une foule de travaux dont les résultats confirmèrent entièrement ceux obte- nus par le regretté vétérinaire russe. Aujourd'hui la malléine a été essayée dans taus les pays sur un nombre considérable de chevanx morveux el de chevaux sains. Partout et toujours les résultats ont nettement témoigné de la haute valeur diagnostique de cette substance. Dans ce travail, qui est destiné à montrer l’en- semble des progrès accomplis, il ne m'est pas pos- sible d'analyser en détail les recherches de tous les auteurs qui ont vérifié le procédé de Kalning. Je me bornerai à indiquer les principaux résultats obtenus en France. C'est le P' Nocard qui a expérimenté la malléine sur la plus grande échelle. Personnellement il a 1 Ne du 15 septembre 92, page 601 et suiv. M. BERTRAND. — LES MONTAGNES DE L'ÉCOSSE 817 inoculé plusieurs centaines de chevaux. Il s’est tou- jours servi de la malléine préparée à l’Institut Pas- teur par M. Roux etiln’a jamais eu un seul insuccès. Ayant eu l'occasion d'essayer la malléine sur 247 chevaux appartenant à une grande Administra- lion qui a eu de la morve dans plusieurs de ses écuries, il a pu déclarer morveux 126 de ces ani- maux. Pour tous ces derniers sujets abaltus, l'au- topsie a confirmé les indicalions de la malléine: il n’y a pas eu un démenti: tous ont présenté les lésions caractéristiques de la morve. Les nombreuses expériences faites par M. Nocard lui ont permis de fixer exactement la dose de mal- léine de Roux qu'il convient d’injecter, et dedéter- miner la signification des différents degrés de l’élé- valion thermique consécutive aux injections. La malléine préparée par M. Roux doit s’injecter à la dose moyenne de 0 gr. 25. «14° Si l'élévation de la température provoquée par cette dose de malléine est supérieure à 2 degrés, on peut, par cela seul, déclarer l'animal morveux ; «2° Quand l’hyperthermie est comprise entre 1°, 5 el 2 degrés, on peut encore dire que l'animal est morveux, si l’æœdème consécutif à l’inoculation est considérable, si surlout la température est encore, après 24 heures, notablement élevée; «3° L’élévation comprise entre 1 degré et 1° doit faire considérer l’animal comme suspect; « 4° Quand elle n’atleint pas un degré, l'animal doit être considéré comme sain. » Ce qu'il y a de très remarquable, c’est que sou- vent la réaction la plus accusée s’observe chez les animaux dont les lésions sont les moins étendues. * où Ces conclusions ont été confirmées depuis par ur grand nombre de professeurs et de vétérinaires praticiens, parmi lesquels il faut citer: MM. Degive, directeur de l’École vétérinaire de Cureghem- Bruxelles ; Domény, vétérinaire militaire ; Laquer- rière, vélérinaire du service sanitaire de la Seine; Thomassen, professeur à l'École vétérinaire d'U- trecht; Pilavios, vétérinaire de l’armée grecque ; Olivet, vétérinaire à Genève; Weber, membre de l’Académie de médecine; Leclainche, professeur à l'École vétérinaire de Toulouse, etc. Dans les expériences que le P' Cadiot, de l’École d’Alfort, a faites avec la malléine de M.Roux sur des chevaux alteints d’affections autres que la morve (lésions traumatiques, synovites, arthrites, maux de garrotet d'encolure, phlébites, pneumonie chro- nique, létanos, mélanose), l'hyperthermie provo- quée par les injections a varié de zéro à 1 degré et demi. Les données précédentes, que je n’ai fait qu'expo- ser très brièvement, démontrent péremptoirement que la malléine est un excellent réactif de l’affec- tion morvo-farcineuse, que cette substance est appelée à rendre les plus grands services à l'hy- giène publique en permettant de déceler, avec la plus grande sûreté, la morve latente qui jusqu'ici n'avait pas pu êlre diagnostiquée. Grâce à l'emploi de la malléine, on restreindra énormément ies chances de contagion; peut-être même pourra-t-on espérer l'extinction à peu près complète de la maladie. M. Kaufmann, Professeur de Physiologie à l'Ecole vétérinaire d'Alfort, LES MONTAGNES DE L'ÉCOSSE L'impression dominante que rapportent tous ceux qui ont visité l'Écosse, c’est que l'Écosse est un pays de montagnes. Malgré l'altitude assez faible des sommets (le pic le plus élevé, le Ben Nevis, n'atteint pas 1400 mètres), on pourrait en beaucoup de points se croire transporté dans les hautes vallées ou sur les hauts plateaux des Alpes. Il y a là un peu une question de latitude. Comme pour la flore, à laquelle ses aspects sont liés, il existe pour le paysage un caractère seplentrional, qui se rapproche par beaucoup de traits du carac- tère alpestre. L'impression produite n'en cor- respond pas moins à une réalité géologique l'Écosse est un des pays où l’on retrouve les traces les mieux marquées de ces grands mouvements de l'écorce terrestre qui ont créé les montagnes. C'est un témoin d’une ancienne chaine qui se pour- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. suivait en Norwège, dont le noyau central devait se trouver dans le massif des Grampians, et dont les chainons, légèrement divergents, s'orientaient au nord-est du côté d'Edimbourg et presque au nord le long de la côte occidentale en face des Hébrides. Gette chaine présente un double intérêt, d'abord à cause de la grandeur et de la com- plicalion des accidents que les études poursuivies depuis dix uns y ont fait connaitre, et aussi à cause de sa haute antiquité : la chaîne calédonienne est une des plus anciennes, sinon la plus ancienne que nous puissions reconstituer. On se trouve là en face de mouvements qui datent du début des temps primaires, c'est-à-dire d’une époque où théori- quement ‘ l'épaisseur moyenne de l’écorce affectée 1 L'application de la théorie du refroidissement au globe 23" 818 M. BERTRAND. — LES MONTAGNES DE L'ÉCOSSE par ces mouvements devait être sensiblement moindre que lors de la formation des Alpes. Y a-t-il eu là une cause appréciable de différence dans l'allure des phénomènes ? Quelles analogies dans l’ensemble et quelles modifications dans les détails montrera une comparaison avec les Alpes? Sans doute l'interprétation de ces différences res- tera toujours un peu arbitraire; mais il suflit de signaler la question à laquelle elles peuvent se rattacher pour en faire comprendre l'intérêt. Si l'on ajoute que ies travaux entrepris dans le nord de l'Écosse semblent de nature à jeter quelque lumière sur le problème encore si obscur de la genèse des gneiss, on voit que la portée en dépasse de beaucoup celle d’une simple description régio- nale. Ils sont, je crois, de ceux qui méritent d'être présentés avec quelques détails aux lecteurs de la Revue. Grâce à une aimable invitation de Sir Archibald Geikie, directeur général du Service géologique de la Grande-Bretagne, nous avons pu, M. de Margerie et moi, étudier pendant l'été dernier la région du lac Assynt, sous la conduite de M. Peach, qui di- rige spécialement les travaux de la Carte d'Écosse !, M. Peach nous a fait vérifier les principales coupes publiées; nous avons constaté avec lui les preuves irréfutables sur lesquelles elles s'appuient, et nous avons admiré la minutieuse exactilude des relevés. M. Peach nous disait au départ : «Je ne crois pas qu’il y ait maintenant, dans toute la Grande-Bre- tagne, de région mieux et plus complètement.con- nue que celle que nous allons visiter. » Nous pou- vons ajouter, après ce que nous avons vu, que, dans aucune autre partie de l'Europe, le travail d'une carte géologique n’a pu être poussé plus loin ni faire plus d'honneur à ses auteurs. I Avant d'exposer les résultats des derniers lra- vaux, il convient de dire quelques-mots de ceux qui les ont précédés. Cette partie du nord de l’E- cosse est depuis longtemps célèbre par les discus- sions auxquelles elle a donné lieu. La découverte de fossiles en 1854 dans le calcaire de Durness amena Murchison à étudier la région, et ce fut lui qui appela l'attention sur les particularités de sa structure : une série puissante de sédiments, com- posés de quartzites et de calcaires, s'appuie à terrestre n’est pas sans objections; il faut admettre à la fois que la terre est homogène, solide et plastique. Ce sont là des hypothèses qui ne sont certainement pas toutes exactes et qu’on ne peut admettre que par approximation. Je crois pour- tant que les formules peuvent être considérées comme indi- quant le sens des phénomènes. 1 Nous avons eu la bonne fortune de faire cette excursion avec M. de Richthofen, l’illustre professeur de Berlin, et avec MM. Hughes, Harker, Sollas et Watts. l’ouest sur les gneiss de la côte et va s’enfoncer, avec une pente régulière et assez faible, sous une masse énorme de schistes micacés et de nouveaux gneiss, sans que nulle part la série semble offrir indice d’une interruption ni d'une discordance. Murchison en conclut que les gneiss supérieurs étaient des « gneiss récents », et qu'il fallait y voir des couches siluriennes, supérieures aux couches fossilifères et postérieurement métamorphisées. Le Professeur Nicol, d'Edimbourg, qui accompa- gnait Murchison dans sa première visite, fut amené le premier, en reprenant les années suivantes la mème étude, à proposer une interprétation diffé- rente : il pensa que les quartzites et calcaires silu- riens de la base élaient répétés plusieurs fois par plis et par failles, que la concordance avec les. gneiss supérieurs était seulement locale et appa- rente et qu’en réalité ilexistait entre eux une faille, le long de laquelle les gneiss de l’est avaient été poussés au-dessus du silurien. Ces vues remarqua- bles et destinées à être confirmées avec éclat étaient appuyées par une comparaison avec les phénomènes connus dans les Alpes. Malheureuse- ment elles n'étaient pas accompagnées despreuves décisives qui eussent seules pu alors faire accep- ter de pareilles nouveautés. L'autorité de Murchison prévalut, etl’on continua, pendant plus de vingtans, à admettre, sans discussions etsans réserves, l’exis- tence en Ecosse de gneiss siluriens. La question, reprise à partir de 1878 dans les notes de MM. Hicks, Bonney, Hudleston et Calla- way, entra dans une nouvelle phase à la suite du travail mémorable de M. Lapworth, intitulé Le secret des Highlands *. M. Lapworth, en 1882 et 1883, s'astreignit à faire la carte détaillée des dis- tricts de Durness et d’Eriboll ; il fut ainsi conduit à reprendre l'opinion de Nicol, mais cette fois avec preuves décisives à l'appui. Ces preuves étaient singulièrement difficiles à trouver. Les fossiles font défaut, ou à peu près: il s'agissait donc de mener à bien une étude strati- graphique, fondée seulement sur des caractères li- thologiques, et pour cela il fallait mettre en évi- dence, dans une série en apparence très uniforme, ou au moins se réduisant à deux termes bien dis- tincts, un nombre suffisant d'horizons précis. Je me rappelle l’étonnement, je dirai presque l’effroi dont nous avons été saisis, M. de Margerie et moi, le premier jour où M. Peach nous a montré les ca- ractères qui différencient ces horizons successifs ; leur insignifiance apparente, leur nature presque fugilive appelle immédiatement deux idées!: la première, qu'on aurait été incapable de les distin- 1 Geol. Magazine, T. XX, 1883, p. 120, 393, et 137, et Pro- ceedings Geolog. Association, vol. VII, p. 438. at Ms à hit M. BERTRAND. — LES MONTAGNES DE L'ÉCOSSE 819 guer soi-même, et la seconde qu'il faut être bien hardi pour établir sur de pareilles bases d'aussi grandioses résullats. Mais ces caractères, recon- nus d'abord sur un champ d’études restreint, se sont retrouvés les mêmes, sans modifications, sur une longueur de 150 kilomètres. MM. Peach et Horne ont multiplié le nombre de ces horizons, et leurs subdivisions, aussi bien que les divisions principales de M. Lapworth, se répètent dans toute la région avec la même rigueur. Chacune des preuves, prise isolément, semblerait de faible va- leur ; mais elles s'accumulent et l’ensemble forme un faisceau indestructible. M. Lapworth a démontré ainsi que l'énorme épaisseur apparente du système était formée par un petit nombre de couches, entassées sur elles- mêmes (piled again and again) et indéfiniment répé- tées, toujours avecle même pendage. Il devient dès lors naturel d’atiribuer à ce même phénomène d'empilement, la présence du gneiss au-dessus du silurien. Là les preuves sont d’un autre ordre, et lirées de la nature même de ces gneiss et mica- schistes; on constate en effet qu'ils on subi d’é- normes mouvements, que leurs particules ont été soumises à un véritable réarrangement, qui permet pourtant en certains points d’y reconnaitre des pa- quets, moins transformés, des gneiss anciens de la côte ou des assises siluriennes. Ce serait un en- semble hétérogène, écrasé et broyé par les actions mécaniques et reproduisant, par suite d’une sorte de clivage général, l'apparence d’une stratifica- tion primitive. Ainsi se trouvait établie pour ie nord de l'Ecosse l'existence de phénomènes qui n'élaient encore admis que pour certaines régions des Alpes et pour le bassin houiller franco-belge : la mise en mouvement et le charriage horizontal sur plusieurs kilomètres de puissantes masses super- ficielles. Les exemples semblables abondent main- tenant, ils se sont appelés les uns les autres. Mais, il y a dix ans, il n’en était pas ainsi, et l’on m'a raconté que M. Lapworth, pris d’une sorte de fièvre en face des conséquences qu'il voyait progressive- ment se dérouler, se croyait darts ses rêves saisi dans l’engrenage de ces énormes mouvements et écrasé le long des plans de charriage. Peu de carrières géologiques offrent l'exemple de succès comparables à ceux de M. Lapworth. Dans le sud de l'Écosse, c’est à l’aide des grapto- lithes, organismes inférieurs, dont la valeur pa- léontologique pouvait sembler contestable, qu'il a établi des horizons dans une série qui avait défié tous les efforts, et les zones établies dans le petit coin de Dobbs Linn se retrouvent maintenant dans toute l’Europe et jusque dans l'Amérique. Pour le nord de l'Écosse, c’est avec des données moindres encore, avec des traces de vers, avec des différences lithologiques de couleur et de grain, qu'il a fixé ses horizons, qui, là encore, se sont trouvés d’une constance et d’une extension inattendues. A l’aide de cesoutils qu'il a forgés lui-même et que d’autres eussent dédaignés, il a donné la clef de la géologie de deux grandes provinces de l'Écosse; il a fait ainsi pour la stratigraphie des Highlands ce que Sir Archibald Geikie a fait pour l’histoire des éruptions de la région, et leur nom restera associé à l’une des phases les plus brillantes de la géologie écossaise. IT La part de ceux qui ont suivi M. Lapworth est assez belle pour que j'aie pu, sans diminuer leurs mérites, insister sur celui qui a été le précurseur. Les premiers travaux avaient montré les rapports d'ensemble avec les Alpes. Ceux de MM. Peach et Horne, en permettant de préciser ces rapports, ont en même temps fait ressortir des différences dont l'intérêt est considérable. Le Service de la Carte géologique, quoique plutôt prévenu en faveur des anciennes idées, s’empressa d'entreprendre l'étude générale de la région où pouvaient se vérifier et se poursuivre les phénomènes signalés par M. Lapworth. Dès 1884, M. Peach, chargé de la surveillance générale et de la coordination de ces travaux, pouvait convier le Directeur général à venir en contrôler les-résultats décisifs, et Sir Archibald Geikie, renonçant à l'opinion qu’il avait précédem- ment soutenue, s'empressa de se rendre à l'évi- dence des faits, et de le déclarer hautement, en publiant dans le journal Nature * «es conclusions auxquelles les géologues du service, pas à pas et presque malgré eux, avaient élé amenés ». Mais c'est en 1888 seulement que parut un Rapport détaillé ?, embrassant l’ensemble des observations faites par MM. Peach, Horne, Gunn, Clough, Hinx- mann et Cadell. Depuis lors, les éludes ont été poursuivies, les observations se sont complétées, mais le rapport de 1888 continue à représenter les traits principaux des résultats acquis. Ces résultats sont remarquables à plus d’un titre. En apprenant que les montagnes d'Écosse montraient la trace de déplacements horizontaux comparables à ceux des chaines plus récentes, on a pu croire que la chaine ancienne allait se montrer construite exactement sur le plan des Alpes. En constatant plus tard, dans les coupes de MM. Peach 1 The Nature, 13 novembre 1884. ? Recent work of the geological Survey in the North-West Highlands of Scotland, Quart. Journal of the eol. So- ciety, 1888, p. 378. 820 M. BERTRAND. — LES MONTAGNES DE L'ÉCOSSE et Horne, des différences importantes avec le types classiques de la Suisse, on a pu croire encore à une part d'interprétation qui aurait rendu ces différences plus apparentes que réelles et aurait permis de ramener les unes et les autres à une même coupe schématique. Il faut, je crois, renoncer à toute idée de ce genre; les différences sont réelles et profondes ; on peut en discuter la cause et la valeur théorique, mais on ne peut les con- tester. Tout d’abord, il y a trois grands plans, ou mieux trois grandes surfaces indépendantes de poussée ou de charriage (trust planes). Chacun d’eux a produit des déplacements horizontaux de plusieurs kilomètres ; pour le dernier, le plus oriental, ces déplacements vont jusqu'à 15 kilomètres. Les deux premiers n’ont amené en superposition au- dessus de la série normale que des couches ana- logues à celles qu'ils surplombent; le troisième, au contraire, a amené en superposition une série différente, précisément celle des anciens « gneiss récents » de Murchison. Le dernier plan de poussée arrive par places à chevaucher au-dessus des deux premiers; si bien qu'on a alors un édifice à trois étages, les deux premiers construits avecles mêmes malériaux que le soubassement, et le troisième formé de matériaux différents. Ce qui est plus extra- ordinaire encore, et ce qui semble pourtant certain (quoique je n’en aie vu qu'un exemple, et sans pou- voir consacrer un temps suflisant à son examen), c'est que le troisième étage ne repose pas partout sur le second, mais arrive à le couper en biseau pour descendre sur le premier, ou même directe- ment sur le soubassement. Il ÿ a là une complication extraordinaire, dont on n’a pas signalé d’autres exemples. On connait bien, en Provence notam- ment, une série de plans de poussée qui s'éche- lonnent les uns derrière les autres, et ont produit chacun des déplacements horizontaux de plusieurs kilomètres. Mais chacun d’eux correspond à un pli distinct; chacun d’eux a son domaine propre el n'empièle pas sur le voisin. En Écosse, on ne peut se défendre de l'impression qu'on est en face d’un phénomène unique et que la division en trois plis, dont chacun aurait formé un des trois élages, serait une division illusoire. Mais il existe une différence plus importante encore à mes yeux : c'est l'absence générale de couches renversées. Dans les Alpes et en Provence, ce qui caractérise ces phénomènes de charriage horizontal, c’est l'existence plus ou moins intermittente de couches se succédant dans l’ordre inverse de la stratification primitive, la plus ancienne en haut et la plus récente en bas. Ces couches renversées sont en même temps ordinairement éfirées, c’est-à- dire que l'épaisseur normale des étages y est réduite dans une très forte proportion. Ce sont elles qui semblent donner la clef du phénomène et qui ont permis à M. Heim d’en formuler la théorie, en l’assimilant au déroulement d'un pli, dont la base, forcée de s'étendre sur un plus grand espace, subit une sorte de laminage. Il serait bien simple, il est vrai, de répondre qu'en Écosse la réduction d'épaisseur est allée jusqu’à zéro, que l’étirement estallé jusqu’à la suppression, et qu'on n’en peut pas moins invoquer le même mécanisme. Mais il y a autre chose : au-dessous de chaque plan de poussée, on trouve aussi en Écosse des couches dans une position anormale ; seulement cette posilion est tout autre; ces couches sont obliques au plan de poussée, et se répètent indé- finiment par suite d'une série de pelites failles, un peu plus obliques que les couches. En d’autres termes, chacun de nos trois élages a un plancher ; mais ce plancher, au lieu d’être formé par des lattes parallèles à la base de l’étage, aurait été formé en laillant ces lattes en tranches qu'on aurait relevées obliquement. Toules ces tranches sont semblables entre elles, toujours inclinées vers l’est, c'est-à-dire vers le côté d'où est venu le mouvement, et les couches n'y sont jamais renversées. Les petites failles de séparation sont généralement peu visibles, et il en résulle que, retrouvant sur de longs espaces des couches semblables, sans horizons apparents et toujours inclinées dans le même sens, on serait amené à leur prêter des épaisseurs invraisemblables. C'est là qu’éclate l'utilité des subdivisions introduites dans la série: on est en face de couches nwmérotées, dont les numéros sont peu visibles, mais bien connus, et partout retrouvables à l’aide d'un examen minu- lieux. Get examen a élé fait avec un soin et une conscience extraordinaires. Dans la région que nous avons visitée, au milieu de ce dédale de couches qui se ressemblent toujours et se répè- tent par étroits compartiments, nous n’avons pas abordé un compartiment dont M. Peach n’ail pu nous montrer le délail représenté, sans essai de schématisation, sur ses minutes au dix millième !; nous n'avons pas traversé une couche dont M. Peach n'ait pu à l'avance nous dire le numéro. La disposition que je viens d'essayer de décrire est précisément celle que M. Suess a décrile sous le nom de schuppen-Structur (structure imbriquée), et on la voit, dans le Jura bernois par exemple, se pro- duire comme cas particulier des plissements; c'est, en somme, celle qu'on obtient en imaginant une série de plis couchés dans le même sens, el en sup- posant que, dans tous ces plis, la moitié correspon- dant aux couches renversées ait élé supprimée. Ce 1 L'échelle exacte est -1— 10560 D TT TE EP RONA EN IT TT TP | ; A {l M. BERTRAND. — LES MONTAGNES DE L'ÉCOSSE 821 qui rend ici l'explication difficile, c’est que le mou- vement est localisé dans les planchers des trois étages, c’est-à-dire dans des bandes de terrains peu épaisses ; on est d’abord amené dans ces con- ditions à l’attribuer à la friction exercée par les masses charriées. On concevrait bien que la fric- tion ait plissé ces bandes, comme on peut plisser une étoffe en promenant la main à sa surface, mais on conçoit moins facilement comment ces plis ont éte remplacés par des moitiés de plis, ou pour mieux dire comment le plissement à pu être rem- placé par une fragmentation avec relèvement uni- forme des fragments successifs. Sans chercher pour le moment le sens el la rai- son de chacune de ces complications, on voit se dégager un caractère commun : les plis font défaut ou n'existent que sous une forme dissimulée. Ceux qu'on rencontre du moins sont des accidents locaux, qu'on ne peut guère invoquer pour expli- quer l’ensemble. On peut toujours schémalique- ment ramener un mouvement quelconque à un pli dont une partie a disparu; mais, {tandis que, dans les Alpes, la disparition est toujours momentanée et laisse à peu de distance reparaitre le pli com- plet, en Écosse la disparition des parties renver- sées est constante et presque sans exception. Dans ün cas, l'explication par les plis résulte directe- ment de l'observation ; dans l'autre elle devient une question de système. La différence peut s’ex- primer encore sous une autre forme : dans les Alpes les suppressions de couches se font presque toujours par des glissements parallèles à la strati- fication, et j'ai essayé, dans un article précédent", d'expliquer qu'il y avait là une conséquence natu- relle du parallélisme des couches avec les forces de compression. En Écosse, ce même parallélisme existe, et pourtant les glissements, sauf les trois grands mouvements de charriage, sont presque toujours obliques à la stralification des banes. Il y a certainement, à un changement aussi complet, une cause générale et profonde. Elle ne peut être cherchée raisonnablement dans la nature des forces agissantes ; il faut donc que ce soil dans les résis- lances mises en jeu. Une série remarquable d’ex- périences, faites par M. Cadell, en partie avec la collaboration de M. Peach, est peut-être de nature à jeter quelque jour sur la question ?. Il fallait agir sur des corps susceptibles de se plisser dans une certaine mesure, mais incapables de supporter, sans se briser, un effort plus grand : des allernances de plâtre et de sable humide ont réalisé cette condition ; on a de plus laissé libre ! Les récents progrès de nos connaissances orogéniques, Revue générale des Sciences, t. III, p. 1. ? Transactions of ihe Royal Soc. of Edinburgh, vol. xxxv, part. 2, p. 337. jeu à la déformation en ne chargeant pas, par un poids étranger, l’ensemble des lits comprimés. C'est là s’écarter sensiblement des conditions de la na- ture, où le poids des couches, à cause de la grandeur des masses en mouvement, joue un rôle considérable, tandis que dans l'expérience ce rôle est négligeable. D'un autre côté, si l’on donne naissance ainsi à des structures comparables à celles des Highlands, on pourra conclure que les raisons des particularités présentées par cette structure doivent être cherchées dans une plasti- cité moindre, due soit à la nature des couches, soit plutôt à leur moindre épaisseur. On admet en effet, maintenant, à la suite de M. Heim, que la plas- ticité dont témoignent les plissements des couches dans les montagnes est due, d’une part, à la lenteur des mouvements, et, de l’autre, au poids énorme qui chargeait les parties plissées. Pour les corps solides, avec des pressions suffisantes, la réparti- tion de ces pressions arrive à se faire, comme pour les liquides, également dans tous les sens ; et alors, même si les forces de cohésion sont surmontées, les particules, énergiquement maintenues de toutes parts, ne peuvent prendre que de très petits mou- vements relatifs; le corps se déforme progressi- vement et sans se briser. En fait, les expériences de M. Cadell ont repro- duit avec une étonnante fidélité quelques-unes des coupes singulières décrites en Écosse, notamment les plans de poussée superposés etles couches em- pilées sur elles-mêmes. Le point de départ est toujours la formation d’un pli; mais les couches amenées en saillie, n'étant plus maintenues latéra- lement, se brisent et leurs morceaux chevauchent les uns au-dessus des autres; le pli reste visible en profondeur bien après que l'apparence en a disparu à la surface par cette sorte de morcellement. Quant à l’'empilement, les expériences ne le produisent qu'à la partie supérieure du système, presque tou- jours au-dessus d’un plan de poussée, et comme cas extrême du morcellement d’une voûte. La fric- tion exercée par un plan de poussée supérieur ne joue donc là aucun rôle, et on est conduit alors à penser qu'il en a été de même dans le phénomène naturel, ou du moins que la friction supérieure n’est intervenue que pour coucher dans le sens du mouvement, pour rapprocher de la direction hori- zontale les morceaux empilés. En d’autres (termes, les tranches de couches empilées représenteraient des tranches qui se sont avancées plus loin que ce qui est au-dessus d’elles, et moins loin que ce qui est au-dessous; qui, de plus, à cause de leur faible épaisseur, ont subi, dans une plus forte mesure, l’action retardatrice ou accélératrice des masses entre lesquelles elles étaient comprises. Sous cette forme, on s'aperçoit immédiatement que la for- mule peut être généralisée et donne très simple- ment une explication générale des phénomènes : les masses charriées se sont divisées en une série M. BERTRAND. — LES MONTAGNES DE L'ÉCOSSE de tranches horizontales qui se sont mues indé- | pendamment les unes des autres! : les masses les plus épaisses tout d'un bloc, les autres, en subis- sant l’influence secondaire des masses voisines. Cette formule ne diffère alors de celle par laquelle j'ai essayé précédemment de résumer les mouve- ments alpins, que parce que, dans ces derniers, les tranches successives sont précisément les couches elles-mêmes, les plans de division étant les plans de stratification et par conséquent en nombre presque indéfini. En Écosse, comme dans les Alpes, les pressions auraient d’abord formé une voûte, puis, à mesure qu'elles s’accentuaient, la voûte dans un cas se serait couchée, et dans l’autre se serait brisée. La pression continuant à agir, les mouvements de glissement auraient eu lieu, sui- vant les bancs dans la voûte couchée, suivant les fractures dans la voûte brisée. La différence des deux régions serait due à une différence de plasti- cité, c’est-à-dire à une différence de poids ou d'é- paisseur des masses comprimées. On voit combien l'explication serait conforme à la théorie ? d’après laquelle l'épaisseur des couches superficielles, comprimées par suite du refroidissement terrestre, irait en croissant avec le temps. Les différences entre les montagnes d'Écosse et les Alpes seraient une question d'âge. Ce n’est sans doute là qu'une conséquence encore hypothétique ; on peut ajouter pourtant qu'elle serait encore confirmée par la comparaison avec la chaine de l’époque houillère. Cette chaine, si bien étudiée par M. Gosselet dans l’Ardenne, montre, sur les bords du bassin houiller, une structure intermédiaire, le rôle des failles y étant plus accusé que dans les Alpes et moins accusé qu’en Écosse. En tout cas, je ne puis parta- ger l'opinion de M. Cadell lorsqu'il dit qu'en exa- minant les Alpes à la lumière des faits nouveaux, reconnus dans les Highlands et confirmés par les expériences de laboratoire, on y retrouvera les mêmes structures. Ce ne sont pas les observateurs qu'il faut accuser, ce sont les montagnes qui ne sont pas les mêmes. III A côté de l’étude des mouvements eux-mêmes, il faut signaler celle du métamorphisme dû à ces mouvements. Nulle part peut-être, en dehors des ! C’est la formule même que je proposais il y a deux ans, en indiquant les coupes d'Écosse comme montrant la réalisa- tion matérielle de cette idée théorique (voir C. R. Ac. Sc., 29 déc. 1890, Rapport de M. Daubrée sur le prix Vaillant). ? Davison et Darwin, Phil, Transactions of Royal Society, 1887, p. 281. travaux de M. Reusch en Norwège, on n'en a dé- crit d'exemples plus nets et plus instructifs. Dans les bancs de poudingues, on voit les cailloux s’al- longer dans la direction du mouvement; la séricite se développe dans les quartzites, en les transfor- mant en des schistes micacés, parsemés de petites veines feldspathiques (veins of peymatit). Tous ces effets vont en augmentant à mesure qu'on se rap- proche de l’est, et au-dessous du dernier grand plan de poussée, nous avons pu voir une coupe re- marquable, où, par suite de la répétition des bancs, on suil presque pas à pas les progrès de la trans- formation jusqu’au point où les couches cessent complètement d’être reconnaissables et ne peuvent plus se distinguer avec certitude de l’ensemble des schistes cristallins (Moine schists) qui les sur- montent. En d’autres points au contraire, ceux où l’élage supérieur (par suite d'une dénudation moindre) s’avance plus loin vers l'ouest, la séparation des deux systèmes est nette et tranchée; on trouve alors à la base des schistes cristallins une véritable brèche de friction, épaisse de plusieurs mètres, où les fragments brisés sont visibles à l'œil nu, mais qui se divise en bancs parallèles et semble strati- fiée. Lastratification est là évidemment mécanique ; c’est un clivage de la masse broyée. Pour M. Peach le phénomène est le même quand les fragments cessent d’être visibles et quand ils sont fondus en une pâte entièrement cristalline. Tout alors, le grain de la roche, comme l’apparence de sédimen- tation, comme sa structure cristalline, serait le produit d'actions mécaniques, et cela sur une étendue de plusieurs milliers de kilomètres carrés. Il n’y aurait même pas nécessité de supposer que cette masse énorme de schistes corresponde à un élage spécial; les matériaux en auraient été four- nis pêle-mêle par les roches et dépôts antérieurs aux mouvements. Ici l'hypothèse prend quelque chose de trop colossal pour qu’on puisse s’y asso- cier. Il me semble difficile de ne pas voir, dans l’en- semble de ces schistes cristallins, une formation spéciale, d'âge défini, sinon déterminé, certaine- ment antérieure au Cambrien, un véritable éfage dans le sens ordinaire du mot, et plus ou moins à rapprocher des schistes micacés et phyllades qui forment en France le sommet de la série cristallo- phyllienne. On peut admettre que l’épaisseur ap- parente de cet ensemble est augmentée par une série de plans de poussées et par le mécanisme déjà décrit des empilements; on peut admettre que la stratification visible est un clivage. Mais on ne peut guère, à moins de nouveaux arguments, aller plus loin; les paquets d'anciens gneiss ou de couches siluriennes, encore reconnaissables, qu’on y a si- gnalés, doivent être considérés comme des parties M. BERTRAND. — LES MONTAGNES DE L'ÉCOSSE 823 plus anciennes ou plus récentes, ramenées par plis ou par failles; mais ils ne peuvent entrainer la conclusion que toute la masse soit formée des mêmes matériaux. Quant à cette brusque appari- tion d’une puissante série sédimentaire, qui fait complètement défaut à quelques kilomètres plus à l’ouest, elle rappelle exactement ce qui se passe dans les Alpes, dans la zone comprise entre les massifs du mont Blanc et du mont Rose. On pour- rait même suivre, terme par lerme, une curieuse relation de position entre les séries des deux ré- gions : les gneiss de la chaine du mont Blanc cor- respondraient à ceux dela côte écossaise ; sur ces gneiss s'appuient en discordance, d’une part les terrains houillers, de l’autre les grès de Torridon, dont je parlerai tout à l’heure; les quartzites et les calcaires du Trias occupent la place des quartzites et des calcaires cambriens d'Écosse, et à l’est de ces derniers, au lieu de voir réapparaitre les termes plus anciens sur lesquels ils s’appuyaient à l’ouest, on ne rencontre plus qu'une immense succession de schistes, inconnus de l’autre côté, les Moine schists en Écosse et les schistes lustrés dans les Alpes. Dans ces derniers d’ailleurs on trouve inter- calés des lambeaux pincés de Trias, comme on trouve des lambeaux cambriens dans les schistes d'Écosse. Ce n’est d’ailleurs pas le lieu d’insister sur ces Moine schists, la question qui de toutes reste la plus obscure et sur laquelle presque rien n'est publié. Les dernières observations que je veux mentionner en terminant sont celles qui sont rela- tives aux gneiss de la côte. Là les mouvements post-cambriens ont cessé de se faire sentir; à la région prodigieusement disloquée, que nous ve- nons d'étudier, en succède une autre, où règne l'apparence du calme le plus complet, où les gneiss eux-mêmes ne se montrent que faiblemement et mollement ondulés, où les grès qui les recouvrent sont presque partout restés horizontaux. Ces grès (grès de Torridon), dont j'ai déjà dit un mot, par leur nature grossièrement détritique, et par leur teinte rouge et brune, rappellent l’aspect de notre étage permien; sur toute leur épaisseur, qui est considérable, il n’y a pas de trace de méta- morphisme. Ils sont pourtant incontestablement plus anciens que les quartzites cambriens, qu'on voit partout s'appuyer en discordance, avec une légère inclinaison vers l’est, sur les tranches des -grès horizontaux coupés en biseau. L’érosion a profondément découpé ces grès, en pics isolés, aux formes bizarres et abruptes, sortes d’immenses chàteaux forts qui s'échelonnent le long de la côte, « étrangers, a dit Mac Culloch, le premier géologue qui les a décrits, par leur nature et par leur struc- Lure, à tout ce qui les entoure et semblant eux- mêmes s'étonner de se trouver à cette place ». Leur horizontalité, leur fraicheur, leur ressemblance avec des dépôts récents, sont autant d'indices qui prouvent que leur soubassement est, lui aussi, resté à peu près ce qu'il était à ces époques recu- lées. Ce qu'on peut étudier à leurs pieds, ce sont donc des gneiss tels qu'ils étaient avant la période cambrienne. C'est là un point d’une grande importance; c’est gräce à de semblables circonstances que l'étude des gneiss sera toujours plus facile et plus fruc- tueuse dans les pays septentrionaux que dans les nôtres. Là, en effet, où la croûte terrestre a été dislo- quée jusqu'à des époques plus récentes, les gneiss ne se montrent à nous qu'avec toutesles transforma- tions dues aux métamorphismes et aux injections successives de roches ignées. Il ne semble pas jus- qu'ici que cette complexité ait donné lieu à des types spéciaux (quoique je ne croie pas qu'une étude sérieuse, sans idée préconçue, ait été faite encore dans cette direction); mais, en tout cas,ellerend la part de chacune des actions plus difficile à dé- mêler dans l’ensemble. Là au contraire où, comme en Écosse, la déformation s’est arrêtée à son pre- mier stade, le problème se présente avec une sim- plicité plus grande, et il y a plus de chances pour que des conclusions précises puissent se dégager. Les gneiss de la côte d'Écosse sont des gneiss basiques, où le mica est remplacé par de l’amphi- bole et du pyroxène; ce sont des gneiss grani- toïdes, c’est-à-dire où l’arrangement des matériaux foncés suivant les lignes parallèles est à peine indiqué. Ils sont traversés par de nombreux filons basiques, allant des diabases aux péridotites, et tous antérieurs aux grès de Torridon. Ces gneiss, comme je lai dit, ont constitué la plate-forme contre laquelle l'immense flol des déplacementse siluriens est venu s'arrêter sans l’ébranler ; mais on y trouve la trace de mouvements plus anciens, postérieurs aux filons basiques et antérieurs aux grès de Torridon. Ce sont ces mouvements qu’on a pu étudier en détail et qui fournissent des don- nées précieuses. Ces mouvements sont étroitement localisés sui- vant des lignes ou des bandes de faible largeur, que M. Peach compare à des plans de poussée verticaux: le long de ces lignes, qui quelquefois suivent les filons, ceux-ci sont transformés en schistes amphiboliques, avec un peu de mica et des lentilles de nature dioritique; les péridotites passent à des schistes talqueux. Dans les gneiss, il y a formation de mica qui s’aligne suivant la direction du mouvement; les nouveaux plans d'orientation sont indépendants de la schistosité primitive qu'ils coupent ou qu’ils arrivent à effacer complètement, et l’on peut suivre tous les stades & a : LE En 82% ir. D" M. TSCHERNING. — LES SEPT IMAGES DE L'OEIL HUMAIN de transformation. On voit, puisque la schistosité primitive ne joue aucun rôle, que le résultat aurait été le même sur un granite ; on assiste done ainsi à la Formation de gneiss et de schistes amphibo- tiques par laminage de roches granitoides. On a déjà plusieurs fois proposé cette théorie et cité à l'appui d'autres faits d'observation; mais je ne crois pas qu'aucun d'eux puisse se présenter avec une plus grande netteté ni offrir une vérification plus facile. On peut objecter que l'effet n’est produit aue sur d'élroits espaces; mais il l'est par un phéno- mène qui n'est qu'exceptionnellement localisé et qui, d’après ce qu'on sait de ses autres effets, est susceptible de s'étendre à des masses presque in- définies. On est donc en droit de conclure que le laminage des roches éruptives est un des modes possibles, et même probables, de formation des gneiss. Cela ne veut pas dire naturellement que tous les gneiss soient formés ainsi. D'abord, comme on l’a vu plus haut, le même métamorphisme mé- canique peut s'appliquer à des sédiments. De plus, M. Michel Lévy a démontré que l'injection des roches éruptives dans des sédiments peut égale- ment produire de véritables gneiss; peut-être seu- lement dans ce cas est-il moins facile de concevoir l'extension du phénomène à de vastes espaces. Enfin, il peut y avoir des gneiss formés, dès l’ori- gine et directement à l’état de gneiss, correspon- dant alors à la première croûte du globe solidifié. M. Lawson en a décrit au Canada un exemple intéressant, qui rapprocherait ce mode de for- mation de celui des roches éruptives. Voilà donc trois origines possibles, en dehors de toute théorie, etil faut avouer que le choix, dans l’état de nos connaissances, est bien rarement possible pour chaque cas particulier. Les observations de MM. Peach et Horne marquent pourtant un nou- veau pas vers la solution, et l’on peut répéter ici ce que L. de Buch disait du Tyrol : tous les géo- logues qui s'occupent de ces questions devraient faire un pèlermage à la côte d'Écosse. En terminant cet exposé, il me reste à émettre le vœu que ces belles découvertes soient le plus tôt possible publiées dans tous leurs détails. Le Rapport de 1888 n’est qu'un résumé des résultats les plus importants; on a le droit d'attendre et de demander une monographie complète. Tous les éléments en seront bientôt réunis; il faut les faire paraître. Il serait désirable qu'une étude micrographique püt accompagner et préciser toutes les observations relatives au métamorphisme; il serait désirable surtout qu'on pût suivre la lecture du mémoire sur les cartes détaillées. Un travail immense a été fait pour ces minutes ; la réduction à une échelle six fois moindre donnera lieu à une complication de contours presque inextricable, et perdra le bénéfice d’une partie de ce travail. La région présente un intérêt assez exceptionnel et assez général pour qu'on sorte pour elle du cadre ordinaire, et la question de frais ne peut pas être un obstacle : l'Angleterre est assez riche pour payer sa gloire. Marcel Bertrand, Professeur à l'École des Mines. : LES SEPT IMAGES DE L’ŒIL HUMAIN Un rayon lumineux ne traverse jamais une surface séparant deux milieux transparents, sans qu'une partie de la lumière soit réfléchie. Dans un instrument dioptrique ilse fait ainsitoute une série de réflexions. Je désigne la quantité totale de la lumière réfléchie, qui sort de l'instrument du côté de l'objectif, comme lumière perdue, pour la distin- guer de la lumière wtile, qui contribue à la forma- tion de l’image que nous employons. Mais, avant de sortir de l'instrument, la plupart des rayons perdus rencontrent une ou plusieurs surfaces, qui réfléchissent de nouveau une partie de la lumière; cette lumière finit par sortir de l'oculaire et peut ainsi entrer dans l'œil de l'obser- vateur, Comme elle ne contribue pas à former l'image utile, elle est souvent une cause de gêne : Je désigne cette partie de la lumière comme nuisible. Il se forme ainsi danstout instrument dioptrique une série d'images, qu'on peut observer en em- plovant comme objet une flamme quelconque. Même une simple lentille montre des images correspondant aux trois catégories de la lumière. En la plaçant à quelque distance d’une flamme, si l'observateur se place du côté de celle-ci, il voit deux images catoptriques, dues aux rayons perdus, et, s’il se place de l’autre côlé, il voit, à côté de l’image utile, une petite image pâle, formée par deux réflexions successives dans l'intérieur de la lentille, et qui représente la lumière nuisible. Théoriquement, on devrait ainsi pouvoir observer une série infinie d'images, dues à des réflexions répétées; mais, l'intensité des rayonsréfléchis dimi- nue si vile qu'en général on ne voit que les quatre dont je viens de parler. En faisant l'intensité du rayon incident égale D: M. TSCHERNING. — LES SEPT IMAGES DE L'OEIL HUMAIN + + 825 à 4 et en négligeant l’angle d'incidence, l'intensité du rayon réfléchi s'exprime par : ve De Ne =(— où x désigne l'intensité relative des deux milieux. Au moyen de cette formule on trouve pour une simple lentille de verre la répartition suivante : Pomieremutilessn. 2 ehnenense 92 % » PeTOUe ER EC re ce 8 % » NO ER TS On Ce 1/6 % Dans les instruments composés la perte est bien plus grande et peut atteindre un tiers de la lumière incidente, ou davantage. Si on regarde la flamme d'une bougie à travers un prisme très faible (1-2°), on voit, outre la flamme elle-même, deux images secondaires, dont la deuxième est très pâle. Les rayons qui la forment ont subi quatre réflexions sur des surfaces de verre; leur intensité n’est donc que 1/5000 °/, de la lumière incidente. Nous allons, dans la suite, considérer cette intensité comme la limite de visi- bilité. Les remarques que nousvenons de faire Ss’ap- pliquent aussi bien à l'œil qu'à tout autre ins- trument d'optique. Dans l'œil nous avons aussi des rayons wtiles, qui forment l’image sur la rétine, des rayons perdus qui sortent de nouveau de l'œil, et des rayons #wisibles, qui, après avoir subi une première réflexion sur l’une des surfaces réfrin- gentes de l'œil, sont de nouveau réfléchis par une autre surface et reviennent ainsi vers la rétine. Mais, avant d'exposer la manière dont on peut observer les images formées par ces différents rayons, nous allons en quelques mots rappeler la construction oplique de l’œil. La réfraction oculaire se fait au moyen de deux lentilles : la cornée, qui est concave-convexe, et le cristallin, qui est biconvexe. Les deux lentilles sont séparées par l'humeur aqueuse, et le cris- tallin est séparé de la rétine qui forme l'écran, par le corps vitré. Ces deux liquides ont à peu près le même indice que l’eau. En général on se figure la réfraction oculaire un peu autrement. On admet que l'indice de la cor- née ne diffère guère de celui de l'humeur aqueuse, et on considère toute la réfraction cornéenne comme ayant lieu à la surface antérieure de la membrane. Quoique l’erreur, qu’on commet ainsi, ne soit pas très grande, on a pourtant tort en négli- geant complètement la différence d'indice entre la cornée et l'humeur aqueuse, car elle est en réalité assez considérable.Je m'en suis aperçu à l’occasion du fait suivant. Pour pouvoir mieux examiner les images caloptriques du cristallin, je désirais faire disparaître l’image de la surface antérieure de la cornée, qui, par son grand éclat, gène l’obser- valion des autres images. J'ai donc plongé l'œil que je voulais examiner, dans une petite cuve, rem- plie d’eau salée et fermée en avant par un verre plan, à travers lequel j'observais l'œil. Je pensais ainsi faire disparaitre l'image en question; mais elle persislait toujours, et son éclal, quoique for- tement diminué, dépassait encore celui des autres images. L'indice de la cornée doit donc différer sensiblement de celui de l’eau, et pour ies raisons qui vont suivre, nous allons admettre un indice de 4,377 pour la cornée et de 1,3365 pour l'hu- meur aqueuse et le corps vitré. Le rayon de la surface antérieure de la cornée est d'environ 0"008; d'après mes mensurations, celui de la sur- face postérieure mesure environ 0"006. Les rayons du cristallin mesurent 0010 et 0006. Quant à son indice, c'est la moins connue de toutes les constantes optiques de l'œil. Helmbholz la d’a- bord fixé à 1,45 plus tard à 1,4% D'après mes recherches, il ne doit guère dépasser 1,42, chiffre que nous admettrons dans la suite !. Il Nous allons maintenant voir ce que devient un rayon lumineux, qui entre Cans l'œil. Dans la figure À j'en ai dessiné la marche, en supposant Fig. 1. — Trajet d'un rayon lumineux dans l’œil. — Le trait le plus accentué À représente le rayon incident. l’objet, d’où sort le rayon, silué à 20° au-dessous de l’axe de l’œil. Le rayon incident traverse les quatre surfaces réfringentes et vient frapper la rétine en VII comme rayon utile. Mais à chaque surface il se fait une réflexion, ce qui donne origine aux quatre rayons perdus [, IF, II, IV. De ces rayons 1 L'indice du cristallin n’est pas unilorme ; il augmente vers le centre. L'indice mentionné dans le texte est ce qu'on ap- pelle l'indice total, c’est-à-dire l'indice d'une lentille uni- forme, ayant la même forme et la même distance focale que le cristallin. Pour l'indice de la couche superficielle du cris tallin, nous admettrons la valeur de 1,40. 826 D' M. TSCHERNING. — LES SEPT IMAGES DE L'OEIL HUMAIN perdus trois doivent traverser la surface anté- rieure de la cornée, où une partie de leur lumière est réfléchie. Il se forme ainsi deux rayons per- dus, V et VI, dus à une première réflexion sur une des cristalloïdes et une deuxième sur la surface antérieure de la cornée, Le troisième, qui serait produit par une double réflexion dans l’intérieur de la cornée,est trop faible pour être distingué. En calculant l'intensité de ces différeuts rayons, on trouve les chiffres suivants : ste ie sion ee nee clone . 2,5 % de la lumière incidente 10 RARES bn S da HAE 20 0,02 % RE set ete 0,05: % VERRE rene rene 0,05 % Lumière perdue en tout.. 2,62 % Von an mac dons eee 0,001 % 0 SE RAR ATEN 0,001 % Lumière nuisible, en tout. 0,002 % VII (Lumière utile)...... 97Æ % L'intensité de tous ces rayons est plus grande que celle que nous avons admise comme limite. Ils doi- vent donc tous être visibles. On voit en outre que l'œil est à cet égard supérieur non seulement à un instrument dioptrique quelconque, mais même à une simple lentille, puisque la lumière perdue n’atteint pas trois pour cent, et la lumière nuisible est réduite à un minimum. D’après ce qui précède, nous devons done avoir sept images d’un même objet lumineux dans l'œil humain. La figure 2 montre la position de ces S Fig. 2. — Position des sept images dans l’œil humain, l'objet étant situé à l'infini et à 20° en bas. images en supposant l’objet situé à l'infini à 20° en bas. On peut très bien se rendre compte de ces images au moyen d’un œil artificiel, qu'on peut facilement construire, en fermant un tube, noirei intérieure- ment, en avant par un verre de montre, en arrière par un verre plan. On fixe préalablement dans le tube une lentille biconvexe, qui remplace le cris- tallin, et on remplit le tube avec de l'eau distillée et bouillie. En plaçant une flamme à quelque distance d’un tel œil artificiel, il est facile de se rendre compte des images en question. TT Nous allonsmainlenant voircommenton peut les observer dans l'œil humain. Je n’insisterai pas sur l'image ulile, la seule dont on s'occupe habituel- lement. Parmi les quatre images qui sont formées par les rayons perdus, trois sont bien connues sous le nom des images de Purkinje; ce sont l’image produite par la surface antérieure de la cornée et celles formées par les deux cristalloïdes, Mais je viens de trouver que la quatrième image, due à la réflexion sur la surface postérieure de la cornée est également visible. L'histoire de cette image est assez curieuse : elle fut décrite, avec les trois autres, par Purkinje au commencement de ce siècle ; mais, depuis, on l’a perdue de vue. C’est ainsi que Helmhollz déclare qu'il s’est donné beaucoup de peine pour la cher- cher, mais qu’il n’a pas pu la trouver. f La manière la plus simple pour l’observer con- siste à placer une forte lampe près de l'œil et à exa- miner l’image catoptrique de la surface anté- rieure au moyend'une loupe. On voit alors, dès que cette image se rapproche du bord de la pupille, et encore mieux lorsqu'elle le dépasse et vient se trouver en avant de l'iris, qu’elle est accompagnée d’une petite image, qui suit la grande comme un satellite sa planète, et qui se trouve toujours entre la grande image et le milieu de la pupille. Plus les images se rapprochent du bord cornéen, plus elles sont distantes l’une de l’autre. Au milieu de la pu- pille, au contraire, elles coïncident et je n’ai pas réussi à les séparer à cet endroit. La petite image est assez nette, pour qu'on puisse l'employer pour mesurer la courbure de la surface. J'emploie à cet effet un instrument, que j'ai construit pour mesurer les rayons de courbure du cristallin, et auquel j'ai donné le nom d’oph- talmophacomètre. 11 est composé d’une petite lu- nette et d'un grand arc de cercle en cuivre fixé sur la lunette et mobile autour de son axe. La place de l’œil observé est au centre de l’arc, qui se trouve sur l’axe de la lunette à 86 centimètres de l'objectif. Les images catoptriques qui servent pour#la mensuration, se produisent au moyen de lampes à incandescence, qui glissent sur l'arc. Au moyen de cet instrument, j'ai pu constater que le rayon de la surface postérieure de la cornée mesure environ 6 millimètres. J'ai également trouvé que la surface montre souvent une défor- mation analogue à celle de la surface antérieure, le méridien vertical étant plus courbe que le mé- ridien horizontal. Comme la surface est négative, Ces D' M. TSCHERNING. — LES SEPT IMAGES DE L'OEIL HUMAIN 827 l'astigmatisme produit par cette déformation con- tribue en général à compenser celui de la surface antérieure. L'épaisseur de la cornée, qu'on peut également mesurer au moyen de cette image, est d'environ 1 millimètre. Il s'ensuit que le centre de la surface postérieure se trouve à environ 1 millimètre en avant du centre de la surface antérieure, et que, par conséquent, les deux foyers catoptriques coïn- cident. C'est là la raison pour laquelle on n'arrive pas à séparer les deux images au milieu de la pupille, et c’est probablement parce qu'il l’a cher- chée à cet endroit, que Helmhollz ne l’a pas trouvée, car l’image n’est nullement difficile à voir. IV Les images formées par les rayons nuisibles doivent être subjectives, puisque les rayons sont dirigés vers la réline. Je m'étais placé un jour devant l’ophtalmophacomètre pour démontrer à un confrère, sur mon propre œil, certains chan- gements que subit l'œil pendant l’accommodation et qui ont passé inaperçus jusqu’à présent. Mon œil se trouvait donc au centre de l'arc sur l’axe de la lunette; et je regardais l'objectif, pendant que la lampe à incandescence, qui se trouvait à environ 20° de celui-ci, envoyait sa lumière, concentrée par une lentille, vers mon œil. Je me suis alors apercu d’une lueur blanchâtre, qui se trouvait de l’autre côté de la ligne visuelle, placée à peu près symé- triquement à la lampe par rapport à celle-ci, et qui changeait de position chaque fois que je déplaçais le regard. Je me suis alors mis à étudier le phéno- mène et j'ai trouvé qu'il était dû au rayon VI. La manière la plus facile de l’observer consiste à regarder droit devant soi dans une chambre obs- cure, tandis qu'on tient à la main une bougie allumée à peu près à 20°, En promenant la bougie un peu de côté et d'autre, on aperçoit, de l’autre coté de la ligne visuelle, une image pâle de la flamme, qui se meut symétriquement à la bougie par rapport à la ligne visuelle. L'image est assez nette pour qu'on puisse constater qu'elle est ren- versée. Outre différentes réfractions, les rayons qui forment cette image ont subi deux réflexions, une première sur la surface postérieure du cristallin et une deuxième sur la surface antérieure de la cornée. Le système optique, qui la forme, est donc assez compliqué ; mais on peut, au moyen des for- mules connues, caleuler le système simple qui le remplace. On trouve alors que le foyer du système esl situé un peu en avant de la rétine de l'œil normal et que l’image est droite ; nous la voyons renversée par la projection en dehors. Les myopes voient souvent l’image difficilement et mal définie, la rétine se trouvant trop loin d'elle. Pour la voir nettement, il faut placer la flamme tout près de l'œil ou corriger la myopie. Après avoir trouvé cette image, je me suis dit, qu'il doit nécessairement en exister une autre, due à une première réflexion sur la cristulloïde anté- rieure, et une deuxième sur la surface antérieure de la cornée. J'ai aussi pu constater sa présence dans l'œil artificiel, mais je n’ai pas pu la trouver dans l'œil humain, En calculant son système op- tique, on en découvre facilement la raison. Le foyer se trouve en effet près de la cristalloïde postérieure (5, fig. 2), et on conçoit que, dans ces circonstances la lumière, déjà faible, doit être tellement disper- sée, avant d'arriver à la rétine, qu'on ne puisse pas la distinguer. Pour que l’image se forme sur la rétine, l’objet devait se trouver entre la cornée et le cristallin ; mais, si on essaie par des moyens optiques à former un point lumineux à cet endroit, les rayons utiles remplissent l'œil, de manière qu’on ne peut pas observer autre chose. Pour celui qui se sert d’un instrument d'optique, les images accessoires ne sont d'aucune utilité, quelquefois elles sont même une cause de gêne. Pour le constructeur, elles ont au contraire une grande importance : les opliciens s’en servent en effet pour apprécier le degré de polissage des surfaces, le centrage des lentilles etc. Ilen est de même pour l'œil : pour la vision, les images accessoires n’ont aucune importance ; mais, pour l'étude de la phy- siologie de l'œil, elles jouent un grand rôle. Les nouvelles images dont je viens de constater l’exis- tence, peuvent ainsi servir à résoudre différentes questions, concernant l’Optique physiologique, auxquelles je reviendrai dans une autre occasion. D' M. Tscherninyg, Directeur-adjoint du Laboratoire d'Ophtalmologie à la Sorbonne. 828 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET 1° Sciences mathématiques. Grondslag van een bibliographisch Repertorium der Wiskundige wetenschappen. (Classification adoptée pour le Répertoire bibliographique des Sciences mathématiques.) 1 vol. in-8° de 108 p. Versluys, Ams- terdam, 1892, L'œuvre du Répertoire bibliographique des sciences mathématiques, dont nousavons parlé dans cette Revue (T. I, p. 150), se poursuit avec activité non seulement en France, mais encore dans la plupart des autres na- tions. Dans ce mouvement international, les savants hollandais se sont particulièrement distingués, appor- tant un zèle des plus marqués à se conformer aux dé- cisions de la Commission permanente, Afin de rendre leur besogne plus aisée, la Société mathématique d'Amsterdam a eu la très heureuse idée de faire tra- duire en hollandais la classification arrêtée par la Com- mission pour ce répertoire. Cette traduction, principa- lement due à M. Schoute, le savant professeur de Grôningue et à M. Korteweg, le très distingué président de la Société, fait Pobjet de la brochure dont le titre est donné ci-dessus. Elle se distingue de l'original fran- cais par l’adjonction de notes au bas de la page des- tinées à préciser certaines définitions peu répandues et à renvoyer aux sources bibliographiques correspon- dantes, et d’une table alphabétique très complète qui est du plus grand secours pour l'usage du tableau de classification, Ces deux innovations sont des plus heu- reuses, Il faut enfin remarquer que cette brochure met à la disposition de toutes les personnes parlant le fran- cais un lexique complet de la langue mathématique hollandaise, ce qui leur facilitera singulièrement la lecture dans le texte original des travaux si variés et si remarquables publiés par les savants néerlandais. M. D'OcAGNE. Rudio (D' F.), Professor am eidgenüssischen Polytech- nikum, Leipzig. — Deutsch Heransgegeben und : mit einer Vebersicht über die Geschichte des Problemes von der Quadratur des Zirkels von den altesten Zeiten bis auf unsere Tage. Archi- mède, Huygens, Lambert, Legendre: Gravier abhand- lungen über die kreismessung. Un vol. grand in-8° de 166 pages, avec figures dans le texte. Leipzig, Druck und Verlag von B. G, Teubner, 1892, Depuis 4000 ans les mathématiciens se préoccupent des questions que soulève la transcendance du nombre z; c’est l'un des plus anciens problèmes qu’ait traités l'humanité. Les travaux d’Archimède, d'Huygens, d'Euler, de Lambert, de Legendre, de Liouville sont connus de tous les géomètres, Jusqu'à ces dernières années la quadrature du cercle semblait ne plus donner lieu à de nouvelles recher- ches, lorsqu’à la suite des célèbres travaux de M. Her- mite sur la fonction exponentielle, d'importants résul- tats obtenus par M. Lindemann d'abord, par M. Weiers- trass ensuite vinrent réveiller l'attention sur ce point capital. C'est en raison de ces travaux et de la lumière in- tense qui enest résultée pour cette grande question, que M. Rudio a cru utile de donner aux savants alle- mands une traduction des quatre célèbres Mémoires qui constituent, en quelque sorte, comme il le dit, les quatre étapes dans le développement historique du problème de la quadrature du cercle; ces quatre Mé- moires sont les suivants : Archimède, Ki%ov éronou. — Huygens, De circuli ma- gnitudine inventa. — Lambert, Vorlaüfige Kenntnisse INDEX für die, so die Quadratur und Rectification des Cireuls suchen ; —Legendre, Note où l’on démontre que le rap- port de la circonférence au diamètre et son quarré sont des nombres irrationnels. M. Rudio fait précéder ces traductions d’un coup d’œil historique rapide sur ce vaste sujet et, dans un exposé très condensé, d'environ 70 pages, rappelle et résume les recherches successives qui, depuis les Egypliens jusqu’à nos jours, se sont accumulées sur ce point si important des Mathématiques. re Greendhill (A. G.). M. A. F.R, S., Professor of Ma- thematies in the Artillery College (Woolwich). — The applications of elliplic Functions. Un vol. grand inS de 357 pages avec figures dans le texte. Macmillan and C°, London and New-York, 1892. S Un des officiers généraux les plus distingués de notre armée, parlant un jour à un illustre mathématicien du magnifique Traité des fonctions elliptiques laissé par le regretté Halphen, lui disait : «C’est très beau, jen’en disconviens pas, mais cela servira-til jamais à quelque chose? » Le mathématicien lui répondit : « Je ne serais pas étonné que, dans cinquante ans, tout cela fût dans le programme de l’enseignement de nos lycées. » C’est qu'en effet les limites de la science s’éloignent chaque jour ; ce qui aujourd’hui constitue les bornes extrèmes de la théorie, trouve demain une application et sera sous peu devenu classique. Les fonctions ellip- tiques en sont un exemple : elles n'étaient comprises, il ÿ a quarante ans, que de quelques initiés ; peu à peu elles ont trouvé des applications et ont pénétré dans l’enseignement supérieur; depuis quelques années, elles sont enseignées à l'Ecole Polytechnique et à l’E- cole Normale ; n’est-il pas permis de croire que dans un demi-siècle elles feront partie de l’enseignement secondaire ? M. Greenhill semble être de cet avis, et c’est pour hâter ce moment, pour mettre entre les mains de tous ce puissant outil, qu'il a écrit son livre destiné à tous ceux qui, s’occupant des applications des mathéma- tiques, veulent acquérir une connaissance pratique des fonctions elliptiques. Son ouvrage a donc ce caractère très net, qui en constitue à la fois l’originalité et l'intérêt, qu'il est fait en vue des applications ; ce n’est pas un traité pure- ment analytique comme ceux d’Abel, Jacobi, Cayley, Künigsberger, Enneper, Weber... : c’est plutôt un livre analogue à celui d'Halphen, mais avec des proportions plus modestes, et une envergure beaucoup moindre ; seulement, tandis qu'Halphen consacre un volume à la théorie et un volume aux applications, M. Greenhill, fidèle au but qu’il vise, fait marcher toujours les deux à la fois. Nous croyons que louvrage de M. Greenhill, avec les qualités de méthode et de clarté qu'il présente, rendra service aux physiciens, aux mécaniciens et, d’une facon générale, aux personnes adonnées aux sciences d'application ; il contribuera à faire sortir les fonctions elliptiques des mathématiques pures où elles sont restées trop longtemps enfermées et d’où elles doivent maintenant sortir. L. O. Fournier (E.). — Le Ciel pittoresque. Astronomie descriptive, historique et anecdotique. La terre, la lune et ses éclipses. Un volume in-8° de 272 pages, avec 48 figures gravées par l'auteur et intercalées dans le texte, Michelin, éditeur, 25, quai des Grands-Augus- tins, Paris, 1892. BIBLIOGRAPHIZ. — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques. Badoureau (A.). — Les sciences expérimentales. 2e édition. Un vol, in-8° de 266 pages (prix 5 fr.) Quan- tin, 7,rue Suint-Benoît, Paris, 1892. Si l’auteur s'était proposé d'écrire l’antithèse d'un livre classique, il n’eùût pu mieux réussir, Très mo- derne et parfois même un peu subversif, rempli de toutes les hypothèses géniales, de toutes les théories avenlureuses qui ont vu le jour depuis quelque vingt ans, et avec cela bourré de faits d'expérience, cet ou- vrage sera lu avec plaisir par ceux qui pratiquent les sciences, et avec étonnement par ceux qui sortent de l’école, Bien des chapitres leur montreront des hori- zons nouveaux de la science : certains d’entre eux ne les convaincront pas, mais leur procurerontun moment de réflexion agréable et suggestive. Dès l'introduction, la manière de l’auteur se montre sans détour; quelques définitions, un peu d'histoire, la récapitulation des théories atomiques, l'affirmation que l’éther et l'électricité ne font qu'un, donnent un avant-goût de ce qui va suivre; puis vient l'étude des états des corps, etune excursion à travers les phéno- mènes naturels, intéressante assurément, mais dans laquelle une partie des æ pourrait être avantageuse- ment remplacée. La physique en occupe naturellement la plus grande partie, puis ua rien de chimie, de la biologie, y compris la définition de la vertu, des peuples, du patriotisme, avec un post-scriptum sur les expériences de M. Tesla, Chemin faisant nous trouvons un intéressant paragraphe sur l'astronomie, et peut- être une trop cordiale hospitalité pour cette idée de M. Cb. lleury, généralisée de Leibnitz, et d’après la- quelle « les actes des hommes el des animaux parais- sent relever d’une mathématique inconsciente ». Les quelques problèmes, qui terminent ou peu s’en faut l’ouvrage, conduisent tout naturellement à cette conclusion de l’auteur qui est celle de ce livre plein de points d'interrogation : « Les progrès immenses qu'ont faits, depuis quelques siècles, les sciences ex- périmentales ont permis aux savants de se rendre, un peu mieux que leurs devanciers, compte de leur igno- rance ». Ch.-Ed, GUILLAUME. Ritter von Urbanitzky (A.). — Die Elektricitat, Kurze und verständliche Darstellung der Grund- gesetze sowie der Anwendungen der Elektricität, etc. (L'électricité, Exposé suvcincet el élémentaire des lois fondamentales de Pelectricité et de ses applications au transport de l'énergie, à l'éclairage, la galvinoplastie, la télégraphie et la téléphonie.) Plaquette cartonnée de 156 pages (1 fr. 90). A. Hartleben, à Vienne, Pesth et Leipzig, 1892, Tel’ est le titre d’un petit livre de 156 pages et autant de figures, titre qui est lui-même une bibliographie à laquelle nous n’aurons que fort peu de chose à ajouter, M. von Urbanitzky a rassemblé, dans cet ouvrage, et fondu dans un même moule une série de monographies à l’usage des gens du monde, dues à MM. H. Schwartze, E. Japing, et A. Wilke, Très complet et franchement mo- derne, contenant une quantité considérable de maté- riaux, ce petit ouvrage serait parfait si, pour être sans doute plus élémentaires, les auteurs n’employaient, par-ci, par-là, des expressions trop peu précises; par exemple, p. 108: « L'intensité du cowrant nécessaire à la décomposition de diversliquides est très variable; l’eau se laisse décomposer très difficilement, même si elle est soumise à l’action des courants intenses (Ja- ping), » ou cette phrase à laquelle il est impossible d'attribuer un sens quelconque : « La lumière de l'arc est 1000 fois plus intense que la lumière Drummond, et 260 fois plus quecelle du magnésium » (p. 8%). Mais ce sont peccadilles, faciles à éviter dans une cinquième édition, car le succès de cet exposéest affirmé par la quatrième, que nous avons sous les yeux. Ch.-Ed. GutLLAUNE, 829 Vibert (Paul et Théodore). — L'électricité à la portée des gens du monde. { vol. in 8° de 26% pages (3 fr. 50). J. Michelet, Paris, 1892. Sujets traités : lampes à arc et à incandescence; piles, traction électrique; production de l'électricité ; Echophone et Phonographe ; dépôts électrochimiques ; métalloplastie ; Hydrophone, sous-produits de l’électri- cité; cables marins; éclairages dans les mines; son- neries; électricité médicale; boussole; paratonnerre ; éclairage au gaz et à l'électricité; canalisation; appli- cations diverses aux villes, aux colonies, aux maisons, à l'aérostation, à la photographie, etc. Belfort de la Roque (L. de). — Guide pratique de la fabrication du chocolat. 1 volume in-8., 255 pages uvec 45 figures dans le texte (prix : 4 fr. 50). Bibliothèque des actualités industrielles. Bernard Tignol, éditeur, 53 bis, quai des Grands-Augustins, Paris. En lisant cet ouvrage qui traite, comme l'indique son titre, d'une étude toute spéciale, on voit que son auteur possède à fond l’industrie qu'il y expose et qu'il la déerite dans le minimum de place. Le petit livre que nous analysons contient en effet tout ce qu'il est essentiel de connaître pour les personnes s'inté- ressant à un titre quelconque à la fabrication du cho- colat. Après une préface, qui est plutôt un historique du sujet, M. de Belfort de la Roque s'occupe de l’élément principal du chocolat, le cacao, el lexamine au triple point de vue agricole, commercial et chimique. L’au- teur constate l'intérét qu'on aurait à appliquer au cacaoyer une culture soignée et rationnelle, et qui est loin d’être observée dans les pays où croit cet arbre; puis il indique les principales opérations destinées à rendre le cacao marchand : récolte soignée, écalage ou séparation des amandes et de l'écorce, terrage ou ensilage des amandes pendant cinq ou six jours, enfin ensachage, Viennent ensuite la composition chimique du cacao et l’histoire de ses principaux éléments. Dans le chapitre suivant, se trouvent bien détaillées les conditions que doivent réunir les bonnes amandes de cacao : grosseur et couleur uniformes, peau lisse, cassure conchoiïdale, arome france et agréable. Abandonnant le cacao, l'auteur examine rapidement les aromates du chocolat : sucre, vanille, cannelle, muscade, girofle, huiles essentielles et essences de fruits, etc., les deux premiers étant d’ailleurs presque toujours les seuls aromates introduits dans les cho- colats francais. M. de la Roque aborde alors la fabrication industrielle du chocolat : triage et nettoyage des amandes de cacao, torréfaction, décortication, granulage ou broyage, extraction du beurre de cacao, mélange du cacao avec les aromates, moulinage et broyage, expulsion des bulles d'air de la masse du chocolat, moulage et empaquetage. Tous les appareils destinés à effectuer ces diverses opérations sont décrits avec soin et font l’objet d’un certain nombre de gravures; enfin l’ins- lallation moderne d’une chocolaterie, l’étude des diverses sortes de chocolat, les recherches des falsifica- lions, la législation douanière des chocolats forment les derniers chapitres de l'ouvrage. A. HÉBERT, 3° Sciences naturelles. Delebecque (A), Ingénieur des Ponts et Chaussées. — Atlas des Lacs français, publié sous les auspices du Ministère des Travaux publics, imprimé par Erhard, 35, rue Denfert-Rochereau, Paris, 1892. M. A. Delebecque, ingénieur au Corps des Ponts et Chaussées, vient de terminer, sous le nom d’Atlas des Lacs français, la publication en sept planches, des plans de douze lacs. D'abord celui du Léman, dont la 830 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX partie française a été raccordée aux sondages si re- marquablement exécutés par M. l'ingénieur J, Hôrnli- limann, du Bureau topographique fédéral ; Péchelle est 1/50.000 avec équidistance de 410 mètres pour les courbes isobathes. Viennent ensuite le lac du Bourget (Savoie) au 1/20.000 avec équidistance de 5 mètres pour la courbe limitant la beine et de 10 en 10 mètres pour les courbes successives, avec quelques amorces en pointillé de courbes intermédiaires de 5 mètres; le lac d'Annecy (Haute-Savoie) au 1/20.000, avec courbes équidistantes de 5 mètres; les lacs d’Aiguebelette (Savoie), de Paladru (Isère), des Brenets, de Saint-Point, de Remoray et de Malpas dans le Doubs, de Nantua, de Genin et de Sylans dans l’Ain. Ces derniers sont tous à l'échelle de 1/10.000 avec isobathes équidistantes de 5 mètres, Ces courbes sont tracées en bleu et l’empla- cement de chaque coup de sonde est marqué par un point noir. Le tout constitue un beau et consciencieux travail fait avec beaucoup de patience et de talent. Sur le rendu, exécuté par MM. Erhard frères et qui ne laisse rien à désirer, les différentes aires isobathes sont marquées par des teintes plates bleues, unies ou re- couvertes de hachures indiquant l'augmentation de profondeur par l'accroissement de leur intensité, et dont la gradation atteint le nombre de sept pour cer- tains lacs, Les courbes de M. Delebecque ont pour origine le plan de l'étiage, nécessairement variable en altitude absolue selon le lac. La méthode des ingé- nieurs suisses, un peu différente, consiste à tracer les courbes équidistantes à partir du zéro fédéral sans distinction de terrain émergé ou immergé. Les deux méthodes possèdent leurs avantages et, à supposer que celle adoptée en Suisse soit préférable, il serait, en cas de besoin et grâce à la topographie si précise qu'on possède maintenant, très aisé de raccorder les lacs français avec le nivellement général de la France. On ne saurait donc faire trop d’éloges de cette publi- cation si longtemps attendue et qui doit encore être complétée par les lacs du Plateau central, du Jura et Laffrey (Isère). Lorsque nous-même, en 1889, après une mission officielle en Suisse qui avait précisément pour but l'examen des procédés employés dansce pays pour le relevé topographique et l’étude physique des lacs, nous conslations avec regret que la superticie oc- cupée par les lacs français, beaucoup plus vaste qu’on ne serait tenté de le croire au premier abord, n'était encore, aussi bien topographiquement que géologique- ment, qu'une tache blanche et nous souhaitions qu’un tel état de choses eût un terme, nous n'étions pas sans quelque pensée que ce vœu serait écouté, et cependant nous n’aurions pas osé espérer le voir réalisé avec une telle promptitude, Il appartenait à l'Administration des Ponts et Chaussées et à M. Delebecque de consacrer à cette œuvre leurs puissantes ressources et leurs soins habiles, La science a lieu de se féliciter de posséder désormais la topographie des lacs de France et l’atlas qui en réunit l’ensemble fait honorablement pendant aux cartes de l’Atlas des Alpes allemandes du Dr Geistbeck. Les gens de science sont insatiables, dit-on, et aussi- tôt qu'un résultat a été obtenu, ils éprouvent l’ambi- tion, d'ailleurs tout à leur louange, de le voir suivi d'un nouveau résultat. C'est pourquoi nous ne crain- drons pas, puisque notre premier vœu a été si bien accompli, d'en formuler un second. I? Atlas de M. A, Geistbeck possède un texte en outre de ses planches ; l’auteur a compris que, si parlante que soit aux yeux une carte lorsqu'elle est tracée par courbes équidis- tantes, un plan n’est par lui-même qu’une base d’édi- fice et non un édifice. Rien ne peut se faire sans lui et il faut, pour ce motif, toujours commencer par le dres- ser; mais il offre ce caractère que, lorsqu'il est fait, rien n’est encore fait, au point de vue scientifique. Le texte de l'Atlas des lacs des Alpes fournit de très utiles informations, bien qu'il ne soit malheureusement pas exempt de ces énumérations et classifications dont un ouvrage allemand semble pouvoir si rarement se passer et qui, n'étant ni meilleures ni pires que celles qui les ont précédées ou qui les suivront, prennent une place si considérable et pourtant si facile à mieux employer, même en la laissant vide. Malgré ses longueurs, je suis persuadé que M. Delebecque trouverait avantage à le relire avant de rédiger la suite qu’il est indispensable de donner et qu’il donnera sans doute à son travail. Il faut absolument un texte, moins pour la topogra- phie que pour l’étude géologique, océanographique ou, si l’on préfère limnographique et physique. Les lacs sont le champ d’études intermédiaire entre le labora- toire et la mer, où se cherche la solution des problèmes de l’océanographie. Or ceux-ci, par suite des difficul- tés de la navigation et de la grandeur même des phé- nomènes, ne sont abordables avec chances de succès que si l’on se trouve mis préalablement sur la trace de leur solution, ou seulement des procédés d’expérimen- tation, par des travaux exécutés sur des espaces plus resserrés, où les conditions générales, plus naturelles que celles du laboratoire, n’ont point toutefois la com- plication de celles qu’on rencontre sur l'Océan. Il est avant tout nécessaire de dresser la carte géologique des lacs et d’avoir des analyses chimiques et minéralo- giques de leurs sédiments, de connaître les minéraux constituants, leur transformations, l'arrondissement, le non-arrondissement et la dimension des grains, en un mot, tout ce qui peut servir à élucider les lois de la sédimentation. M. Delebecque quia su trouver un col- laborateur habile dans un professeur de Genève, M. L, Duparc, adéjà du reste Fe plusieurs notes à cesujet. C’est dans ce sens qu’il importe de continuer en procé- dant systématiquement d’abord pour un lac et succes- sivement pour tous les autres. Une foule de questions attendent des éclaircissements. M. Delebecque possède l’inestimable avantage d’avoir à sa disposition du temps, des ressources et du personnel; il réside sur les bords du Léman, dans le voisinage immédiat des Universités de Genève et de Lausanne et du maître incontesté en tout ce qui touche la physique et la zoologie des lacs, lé- minent Dr F.-A. Forel, de Morges. De si précieux avan- tages dont tant de personnes sont privées — nous le savons, hélas! par nous-même — sont comme la no- blesse : ils obligent. Combien il serait utile d’être fixé sur la marche du courant dans un lac traversé par un fleuve tel que le Rhône pour le Léman ou le Doubs pour les lacs des Brenets et de Saint-Point! Avec un petit flotteur de Mitchell, une embarcation et deux hommes, on y parviendrait sans peine. La question des courants superposés, si importante, ne sera pas résolue sur la mer, tant qu'on se bornera à mesurer, comme on l'a fait jusqu’à présent, les courants de surface et qu'on ne l’aura pas abordée dans sa condition de plus grande simplicité, dans les lacs. Faut-il mentionner encore la relation entre la température de l’eau et le climat, à traiter non par de respectables et fastidieux tableaux de mesuresde températures qui ne concluent à rien, mais de facon à la formuler en quelques lois résumant les faits et permettant de les retenir; la transparence, la distribution des gaz dissous, le régime des seiches,qui doit être particulièrement curieux dans des lacs à fond irrégulier comme celui d'Aiguebelette ? Ces questions résolues serviront à leur tour aux re- cherches des naturalistes, botanistes et zoologistes. Je sais que ceux-ci en ont besoin, car un professeur de la Faculté des Sciences de Besancon, M. Magnin, a déjà commencé à examiner la végétation des lacs du Jura. Tout en félicitant vivement et sincèrement M. Dele- becque du travail auquel il s’est livré, nous ne saurions trop l’encourager à ne le considérer que comme une sorte d'entrée en matière et à commencer l'étude complète, géologique, mécanique et physique, des lacs francais, Le temps n’est plus aux explorations multi- pliées et forcément incomplètes; ils’agit maintenantde découvrir des lois générales : voilà l’œuvre véritable. M. Delebecque l’accomplira sans aucun doute et, dans un avenir prochain, nous en avons la conviction, il pu- bliera l’Explication à l'Atlas des Lacs de France, J. THouLer. pm tt re sa bé hs handle.” BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 4° Sciences médicales. Auvard (D'A.). — Gynécologie, séméiologie géni- tale. Un volume petit in-8° de 175 pages, de l'Encyclopédie des Aide-mémoire, dirigée par M. H. Léaute (prix : 3 fr. 50). G. Masson et Gauthier-Villars, Paris, 1892. Dans ce Manuel de séméiologie génitale, M. Auvard passe successivement en revue les divers troubles extra-génitaux ou génilaux dont souffrent les femmes atteintes d’une lésion utérine ou utéro-ovarienne, Puis il étudie les signes de ces lésions fournis par linspec- tion, la palpation, la percussion, l’auscultation et le toucher. Les symptômes douloureux des « génito- pathies » et la topographie des zones qu'ils occupent sont longuement décrits par l’auteur, D: Henri HARTMANN. Millet (D' Jules). — Audition colorée. Une bro- chure in-8° de 84 pages (2 fr.). O. Doin, 18, place de l'Odéon, Paris, 1892. Le livre de M. le Dr Millet réunit deux qualités le plus souvent séparées, le sérieux du fonds et lagré- ment de la forme. L'ouvrage est écrit sur un ton quel- quefois léger et plaisant, il contient des descrip- tions empruntées à des artistes ou à des poètes, que l’on n’est pas habitué à rencontrer dans une thèse de médecine; mais il renferme cependant une étude sérieuse sur un fait psychologique assez bizarre, qui depuis quelques années à vivement attiré l’atten- tion des chercheurs. Le mot « audition colorée, colour hearing » désigne assez bien la nature du phénomène ; c’est une sensation complexe, moitié auditive, moitié visuelle, que cer- taines personnes éprouvent quand elles entendent cer- tains sons, Pour comprendre la description de ce fait, il n’est pas mauvais de rappeler quelques notions de psychologie normale, Une impression faite sur un de nos sens ne provoque presque jamais en nous une sen- sation simple, isolée de tout autre fait psychologique. Il ne faudrait pas croire qu’au moment où nous sentons une rose, nous ayons uniquement dans l’esprit la sen- sation d’odeur de rose, comme la célèbre statue de Condillac. Notre esprit est un peu plus compliqué : au moment où une sensalion se produit, elle se trouve immédiatement accompagnée dans l'esprit par des souvenirs, par des images d'autres sensations qui ne sont pas actuellement le résultat d’une impression exté- rieure appropriée, mais qui se reproduisent spontané- ment d’une manière plus ou moins complète. Si je sens, par exemple, l’odeur d’une rose, d’un œillet ou d'une violette, en gardant les yeux fermés, je crois voir devant moi en mème temps la fleur elle-même et cependant je n’ai pas l'imagination visuelle bien déve: loppée. C'est là un phénomène bien connu, que lon désigne ordinairement sous le nom de perception ac- quise, tandis que l’on réserve le nom de perception naturelle aux sensations primitives et spécifiques four- nies par chacun de nos sens. A côté de ces perceptions complexes bien connues, on en a signalé d’autres qui, tout en étant à peu près du même genre, ne semblaient pas être soumises aux mêmes lois ni s’expliquer de la mème manière. Chez certaines personnes, une sensation se présentait tou- jours accompagnée d’une image empruntée à un autre sens : ce phénomène semblait remonter à leur pre- mière enfance et aucune expérience, aucune habitude ne paraissait intervenir dans la formation de cette association. On donna le nom de synesthésies à ces sen- sations complexes et l’on remarqua que l'une d’entre elles était particulièrement fréquente et curieuse. Chez quelques personnes « l'audition d’un son, d’un bruit, d'une voyelle, d’un mot, dit M. Beaunis, détermine une sensation (à notre avis, il vaudrait mieux dire une image) de couleur, variable suivant la nature du son et l'individualité du sujet. » Les voyelles surtout sem- blent jouir de ce privilège, et leurs couleurs mysté- rieuses ont été chantées par les poètes : 831 A noir, E blanc, 1 rouge, U vert, O bleu, voyelles, Je dirai quelque jour vos naissances latentes |, M. Millet a recherché avec beaucoup de précision tous les cas intéressants et à peu près authentiques dans lesquels on a signalé cette bizarrerie mentale. Il remonte jusqu'à l'observation de Sachs (1812) « qui colorait les voyelles, les consonnes, les notes de mu- sique, le son des instruments, les noms des villes, les jours de la semaine, les dates, les époques de l’his- toire et les phases de la vie humaine ». Il nous rap- pelle,chemin faisant, Théophile Gautier qui « entendait le bruit des couleurs et voyait des sons verts, rouges, bleus, jaunes ». Il termine par sa propre observation, car M. Millet est un auditif coloriste assez remarquable, ce qui lui permet de parler du phénomène avec une compétence toute spéciale. Toule cette partie histo- rique du livre est le résumé de longs travaux d’érudi- tion, elle peut rendre beaucoup de services aux cher- cheurs. Nous espérons qu'ils sauront, en la reproduisant, manifester leur reconnaissance à M. Millet. Au milieu de toutes ces observations, il est néces- saire de faire un choix et de rassembler les faits qui semblent les plus certains et qui ont été observés le plus fréquemment (p. 52). L'auteur nous montre qu'il existe 35 cas connus de coloration des voyelles, sons et bruits, 57 cas de coloration des voyelles seulement; il nous apprend que À est généralement noir, E jaune, I blanc, O rouge et U vert. Ces lois et quelques autres n'ont rien d’absolu : elles expriment seulement la moyenne des meilleures observations. Les théories qui pourront expliquer ce phénomène sont naturellement bien vagues et peu importantes; on ne peut reprocher à M. Millet de les avoir résumées d’une manière assez brève. Il a bien montré qu'aucune hypothèse physique sur la nature des sons et des cou- leurs, aucune théorie physiologique sur les sens et les nerfs sensitifs ne rendait compte des faits à expliquer. Il ne nous semble pas que son étude soit aussi com- plète pour les explications psychologiques. A plusieurs reprises l’auteur déclare qu'il faut nettement séparer l’audition colorée des associations d'idées, sans que nous puissions bien comprendre ce qu’il entend pré- cisément par association d'idées. Ses arguments nous semblent peu démonstratifs. Ainsi, il propose d’inter- roger un sujet sur la coloration des voyelles à plusieurs reprises et à plusieurs mois d'intervalle, Si le sujet change de réponses et colore un A tantôt en noir tantôt en vert, le phénomène sera chez lui une simple asso- ciation d'idées; au contraire s’il colore les voyelles régulièrement de la même teinte, ce sera de l'audition colorée et non de l’association. Nous pensions au con- traire que la régularité parfaite était un signe d’une as- sociation d'idées incontestable et bien organisée, Toute cette discussion nous semble beaucoup trop vague. Les conclusions de lauteur sont cependant très sages : 1° Ce phénomène se produit chez les individus qui appartiennent à la catégorie des visuels, et2 Il dépend probablement de ce caractère anatomique que l’on a désigné par cette expression originale : : « l’en- srenage des centres nerveux. » La sphère visuelle, dit- il, s’engrène probablement avec la sphère auditive. Ce n’est là sans doute que la traduction du fait en langage anatomique, ce n’est pas une explication. M. Millet a seulement voulu décrire un phénomène psy- chologique et montrer l'intérêt que présente cette cu- rieuse association d'idées. Nous apprenons avec regret que M. Millet, médecin de marine, est mort récemment dans les colonies. Son ouvrage sur l'audition colorée nous faisait espérer d’autres recherches de médecine et de psychologie aussi érudites et ingénieuses. Nous nous associons aux regrets de ses amis, Pierre JANET. ——_—_—_———— —""—"—"— — —————— — 1 Sonnet d'Arthur Rimbaud, 832 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 21 novembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Darboux présenle à l’Académie le tome XVI et dernier des œuvres de La- grange. Ce volume dont les matériaux ont été réunis par les soins de M. Ludovic Lalanne contient tout ce que l’on a pu retrouver de la correspondance de La- grange avec Euler, Laplace, Condorcet et quelques autres personnes. — M. Tisserand communique les observations des petites planètes, faites au grand ins- trument méridien de l’observatoire de Paris du 1° oc- tobre 1891 au 30 juin 1892. — MM. G. Rayet et L. Pi- cart adressent leurs observations de la comète Holmes (6 novembre), faites au grand équatorial de l'ob- servatoire de Bordeaux, — M. Tisserand présente une photographie de la comète Holmes, obtenue le 14 no- vembre dernier à l'observatoire de Paris par MM. Paul et Prosper Henry à laide de l’équatorial photogra- phique employé pour la carte du ciel, — MM. Trépied, Rambaud et Sy communiquent leurs observations de la comète Holmes faite à l’observatoire d'Alger (équa- torial coudé). — M. G. Le Cadet adresse ses observa- tions de la comète Holmes (6 novembre), faites à l’é quatorial coudé de l'observatoire de Lyon. — M. Schul- hofa calculé les éléments elliptiques de la comète Holmes, en s'appuyant sur les observations de M. Bi- gourdan, L’excentricité est tellement faible que l’on pourra probablement, avec les instruments les plus puissants, suivre la comète dans tous les points de son orbite. — M. S. de Glasenapp annonce la création d’un observatoire astronomique, nommé Géorgiewskaja à Abastonman, gouvernement de Tiflis (Russie). La hauteur de cette station est de 1.393 mètres au-dessus du niveau de la mer, — M. Haton de la Goupillière donne le moyen de déterminer le centre des moyennes distances des centres de courbure des developpées successives d'une ligne plane quelconque. L'auteur fait des applications à la spirale logarithmique et aux épicycloïdes extérieures ou intérieures. — M. Mau- rice Hamy donne une nouvelle marche à suivre pour la détermination des inégalités d'ordre élevé et ap- plique cette méthode à l'inégalité lunaire à longue pé- riode causée par Vénus. — M. Désiré André définit un partage entre quatre groupes des permutations des n premiers nombres et établit une suite de théorèmes concernant ces quatre groupes. — M. Paul Painlevé demande la rectification d’une faute d'impression con- tenue dans sa communication sur les équations de la _dynamique. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M Gustave Hermite com- munique les résultats d'expériences entreprises à l’aide de ballons gonflés au gaz d'éclairage, dans Île but de déterminer ce qui se passe dans l'atmosphère, à une altitude à laquelle les aéronautes ne peuvent parvenir. La température diminue en moyenne de un degré cenligrade quand on s’élève de 260 à 280 mètres. — M.P. Janet expose une méthode qui lui a permis d'étudier les oscillationsélectriques qui, sous certaines conditions, se produisent dans un circuit doué de ca- pacité et de self-induction, et de déterminer avec pré- cision non seulement la fréquence, mais encore la forme exacte de ces oscillations. L'auteur donne en- suite les résultats obtenus qui paraissent conformes, dans leur ligne générale, aux lois connues de l’induc- tion, — M. Izarn indique la préparation d’un savon résineux particulièrement commode pour la confection des bulles de savon et signale certaines expériences de capillarité curieuses que ce savon a permis de réaliser. — M. Raoul Varet a poursuivi ses recherches entre- prises sur les valences moléculaires, en examinant l’action de la pipéridine sur les sels halogènes du mer- cure. Il décrit les chloro, bromo, cyano et iodomercu- rate de pipéridine qui tous contiennent deux molécules de base pour une molécule de sel de mercure. — M. Th. Schlæsing fils s’est proposé d'étudier les échanges d’acide carbonique et d'oxygène entre les plantes et l'atmosphère en opérant sur des plantes entières et pendant toute la durée de son existence. Les plantes sont étudiées en vase clos et l’on étudie di- rectement les variations de l'acide carbonique et de l'oxygène enfermés avec elles. — M. E. Mau- mené adresse une note relative à la communication faite le 7 novembre par M. Pictet, sur un essai de mé- thode générale de synthèse chimique. — M. A. Ber- thier adresse une note relative à une nouvelle mé- thode interférentielle, pour la reproduction des cou- leurs par la photographie. — M. Kleïinhof adresse une note relative aux agrandissements obtenus par la pho- tographie. — M. Leroy de Keraniou adresse un mé- moire relatif au rôle de la navigation dans les progrès et la propagation des sciences. C. MATIGNON. SCIENCES NARURELLES. — M. Marcel Baudouin: Un nouveau cas de monstre xiphopage vivant : les sœurs Radica Doodica, nées à Orissa, au sud de Calculta. Ces fillettes, âgées de trois ans et deux mois, sont actuelle- ment exposées à Bruxelles ; elles sont réunies de l’ap- pendice xipho'de jusqu'aunombril. L’inversion desvis- cères n'existe pas, et l'intervention chirurgicale pour les séparer est parfaitement possible, Une opération analogue a déjà été exécutée avec succès par Kœænig en 1689 et par Bôhm en 1886. — M. À. Perrin : Sur le pied des Batracienset des Sauriens. Chez cesanimauxles muscles du pied présentent une grande uniformité. Les extenseurs naissent tous du tarse, et les fléchisseurs forment deux couches. L'auteur combat la théorie de l’archiptérygium de Gegenbaur, et étudie la dichoto- mie des axes osseux, — M. de Saint Joseph : Sur la croissance asymétrique des Annélides polychètes, Fré- quemment le nombre des segments thoraciques n’est pas le même des deux côtés du corps sur un seul et même individu: fait observé sur plusieurs espèces de Sabellidés, — M. Gaïn : Influence de l'humidité surla végétation, L'action del’humidité du sol sur une plante varie suivant l'habitat ordinaire de cette plante. Elle a un optimum pour chaque plante el chaque organe. Au commencement de la germination, elle accélère la croissance de la lige, puis le développement des feuilles. La floraison est plus précoce, ainsi que la fructification, Au contraire la floraison retardée par la sécheresse du sol, est accélérée par celle de l'air, et elle est ralentie par l'humidité de l’atmosphère, — M. F. Mesnard : Sur le mode de production du parfum dans les fleurs. Les huiles essentielles sont mises en évidence en exposant les coupes à la vapeur de l'acide chlorhydrique hydraté. L'huile essentielle est généra- lement localisée dans les cellules épidermiques de la face supérieure des pélales ou des sépales. Le chloro- phylle semble donner-naissance à l'huile essentielle. Le parfun ne se fait sentir que lorsque l'huile est dé- gagée des produits qui lui ont donné naissance. Il est en rapport inverse avec la production du tanin et pig- ments. —M. Paul Vuillemin : Existence d’unappareil conidien chez les Urédinées constatée chez Endophyl- lum sempervivi, parasite du Sempervivum montanum ; les conidrès apparaissent dans les corbeilles à téleu- tospores. L'affinité des Urédinées et des Trémellinées prévue par Tulasne estainsi démontrée. — MM. Roussel et de Grossouvre : Découverte d’une bélemnitelle, Ac- tinocomaæ quadh'atus, dans le sénonien des Pyrénées, Cette découverte permet d'affirmer l'existence d’un grand pli couché allant de Guillan à Cucugnan. — M. Emile Haug : Formation de la vallée de l’Arve. L’Arve coule jusqu'à Chamonix dans un synelinal, puis dans une vallée transversale, Des dislocations (failles) ont alors facilité l'érosion. — M. Stanislas Meunier : Expérience imitant artificiellement la gémination des canaux de Mars, Ch. CONTEJEAN, Séance du 28 novembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Poincaré présente le premier fascicule du second volume de son ouvrage intitulé : « Les méthodes nouvelles de la Mécanique céleste. » L’auteur expose dans ce fasicule les méthodes de MM. Newcomb et Lindstedt auxquelles il apporte des perfectionnements notables et des extensions impor- tantes, — M. O. Collandreau communique ses obser- vations de la comète Holmes (f. 1892), faites à l’obser- vatoire de Paris, à l’équatorial de la tour de l’ouest. — M. P. Racchini donne les détails d'observalions d’une protubérance remarquable observée à Rome le 16 no- vembre dernier. Le spectre de cette protubérance était normal, la raie D était visible aussi à une grande hauteur. L'auteur estime qu'on doit considérer le phénomène comme un grand incendie solaire, c'est-à- dire comme un changement d'état de la matière et un véritable transport. — M. Rabut définit les invariants universels et annonce quelques propriétés de ces fonc- tions. — M. E. Gosserat donne la généralisation suivante d’une proposition connue sur les congruences formées de normales à des surfaces. Le problème de la détermination des surfaces découpées suivant un réseau conjugué par les développables d’une con- gruence (D) équivaut à celui de la recherche des congruences admettant même représentation sphérique de leurs développables que (D). L'auteur annonce en outre que, siles congruences consliluées par les axes opliques d’une surface M sont formées de normales à des surfaces, cette surface M est à courbure normale constante. — M, Haton de la Goupillière présente le treizième album de statistique graphique, vour 1892, publié par le ministère des travaux publics, sous la direction de M. Cheysson. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Nordenskiold adresse un ouvrage en langue suédoise intitulé : Lettres et annotations au laboratoire de Carl Wilhem Scheele. Ce volume contient 135 lettres de lillustre chimiste adressées à Retzius, à Gahn, à Torbern Bergman et à Hjelm. Des figures originales montrent la simplicité des appareils employés par Scheele, — M. le secrétaire perpétuel signale le tome I des Travaux du laboratoire de M. Charles Richet à la Faculté de médecine de Paris : système nerveux, chaleur animale, — M. J. Janssen communique une note sur l'observatoire du mont Blanc. Deux points sont désormais acquis : la fixité relative de la calotte neigeuse du sommet qui ne peut subir que des mouvements très lents et Ia résis- tance suffisante de la neige durcie dn sommet. La construction mobile maintenant réalisée a la forme d'une pyramide tronquée à deux étages dont la base doit être enfouie dans la neige; il ne reste plus qu'à la transporter au sommet du mont, — M, E.-H. Amagat a étudié la dilatation de plusieurs liquides (eau, alcool, éther, sulfure de carbone, etc.) sous des pressions différentes. Le coefficient de dilatation diminue régu- lièrement quand la pression augmente, l’eau seule fait exception, Ce même coefficient croit d’abord régulière- ment avec la température pour passer ensuite par un maximum. Les isothermes des liquides comme celles des gaz présentent une légère courbure tournée vers l’axe des abcisses (en prenant pour coordonnées : p sur les abcisses et p V sur les ordonnées). — M. P. Joubin donne une démonstration expérimentale du théorème de M. Gouy : une onde sphérique en passant par son ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 333 foyer prend une avance d’une demi-longueur d'onde, — M. L. C. Baudin montre que l’abaissement du zéro d’un thermomètre, après immersion dans la vapeur d'eau, lequel est constant pour un même verre non recuit, diminue par le reeuit et d'autant plus que le thermomètre a été chauffé plus longtemps. -— M. A. Joannis a étudié la décomposition du carbonate de chaux à de très hautes températures, sans faire intervenir de pression mécanique comme Hall et M. Le Châtelier; il a pu transformer ainsi le carbonate pré- cipité en une substance analogue à la craie ordinaire, celle-ci a produit également un produit ressemblant au marbre et capable d’être poli. — MM. A. Ditte et R. Metzner ont cherché à faire disparaître les diver- gences qui existent sur l'attaque de l’antimoine par l’acide chlorhydrique. Les auteurs établissent que l'acide chlorhydrique étendu ou concentré, chaud ou froid, n'attaque jamais l’antimoine pur; si l'oxygène peut intervenir, ilne se dégage pas d'hydrogène, mais l’antimoine se dissout dans l'acide en quantité propor- tionnelle au poids d'oxygène intervenu. — M. G. Ber- trand a préparé des combinaisons de l’oxyde de zinc avec les bases alcalino-terreuses; ces zincates sont bien cristallisés et répondent aux formules Zn? Ca. H2_03% 4 H2 O, Zn? Ba H? 03 7 H? O et Zn? Sb H? 0% 7 H? O0. — M. C. Poulenc a préparé les fluo- rures de fer anhydres et bien cristallisés par trois méthodes : 1° Action de l'acide fluorhydrique sur Île métal à température élevée; 2 action de l'acide fluorhydrique sur les chlorures et les oxydes; 3° trans: formation des fluorures hydratés en fluorures anhydres, sous l'influence de lacide fluorhydrique. L'auteur décrit les propriétés de ces nouveaux corps et signale en outre le composé FeFP, 4 H° 0, — M. Em. Placet a préparé des quantités notables de chrome métallique par l’électrolyse d’une solution aqueuse d’alun de chrome additionnée d’un sulfate alcalin et d’une petite quantité d'un acide minéral, Ce métal résiste aux agents atmos- phériques et n’est pas attaqué par les acides; il est facile d’en obtenir des dépôts électrolytiques à la sur- face d’autres métaux. — M E. Léger prépare l'acide bromhydrique gazeux par la réaction de l'acide sulfu- rique sur le bromure de sodium, car l’action réductrice du, gaz sur lacide sulfurique n’est pas immédiate. Le gaz se débarrasse d'acide sulfureux et de brome en passant dans deux flacons laveurs contenant l’un, une solution aqueuse saturée d'acide bromhydrique addi- tionnée de brome; l’autre la même solution contenant du phosphore rouge. — M. Albert Colson répond aux observations de M. Friedel à propos du pouvoir rotatoire des sels de diamines. Il cite à l'appui de ses proposi- tions plusieurs passages de la stéréochimie de M. Van’t Hoff, — M. A. Etard a étudié les lignes de solubilité complètes de couples organiques et a cons- taté que la limite naturelle supérieure de solubilité était le point de fusion du corps dissous, et que la limite inférieure était déterminée par le point de fusion du dissolvant. — M. Th. Muller, en traitant le chlorure de succinyle par l'éther cynacétique sodé, a obtenu deux corps nouveaux, les éthers succinocyanacétique et succinodicyanacétique, le second est un acide biba- sique qui fournit des sels de sodium, d'argent et de cuivre bien cristallisés, — M. C. Matignon montre que l'acide hydurilique indiqué comme bibasique possède en réalité trois fonctions acides nettement caractérisées. La découverte de la troisième fonction lui a permis de préparer les hydurilates de potasse bien cristallisés et d'expliquer pourquoi M. Bæyer n'avait pu les obtenir. — M. A.B. Griffiths a étudié le pigment vert contenu dans les ailes de certains lépidoptères ; il a pour for- mule Gt H!£ A78 O1, donne des sels bibasiques et se décompose par l’eau bouillante en urée, alloxane et acide carbonique. — MM. CI. Nourry et C. Michelont montré que l’acide carbonique ne retarde la coagula- tion du lait qu'’autant qué celui-ci n’a pas été chauffé antérieurement. C. MATIGNON. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES . 3° Screxces NarüRELLEs, — M. Chauveau démontré l'existence des centres nerveux distincts pour la per- ception des couleurs fondamentales du spectre. — Le sommeil anéantit successivement différentes régions du système nerveux central tandis que les organes pé- riphériques ne perdent rien de leur activité propre. Au moment du réveil, les différents centres nerveux ne récupérent pas simultanément leurs fonctions. Lots- qu'on sort d'un profond sommeil, et que les paupières se soulèvent immédiatement au moment du réveil, les objets de couleur claire et vivement éclairés pa- raissent illuminés en vert pur. Il doit doncexistertrois couleurs fondamentales, le vert dont l'existence est démontrée avec le rouge et le violet, comme le veut la théorie Yung-Helmholtz, Des cellules distinctes ou des cellules douées de trois sensibilités indépendantes se trouvent dans les centres nerveux destinés à percevoir les impressions coloriées. — MM, Nourry et Michel : Action microbicide de l'acide carbonique dans le lait. —M. Paul Gaubert montre que les pattes des Phalan- gides, amputées par autotomie, s’agitent convulsivement tandis qu’elles demeurent immobiles chez les autres Arthropodes. Ces mouvements sont dus à un ganglion nerveux situé dans l’extrémité proximale du troisième arlicle; ils sont supprimés si on le détruit, — M. Thé- lohan étudie plusieurs myxosporodies nouvelles para- sites de la vésicule biliaire des poissons. — M. A. Pru- net : montre que, au moment du dégel, les plantes manifestent un ralentissement de l'absorption et un accroissement de vaporisation, dus à des modifications profondes apportées par la gelée dans les propriétés des éléments anatomiques. Ainsi s'explique la dessicca- tion rapide des bourgeons et des jeunes pousses des plantes gelées, — M. Vuillemin éludie l’Æcidiconium Bosteli, urédinée parasite des aiguilles du Pinus mon- tana, et qui produit, dans des conditions normales, un appareil conidien analogue à celui déjà signalé chez Endophyllum sempervivi, — M. Ch. Deperet : Classili- cation et parallélisme du système miocène, {1° Etage inférieure Burdigalien avec faluns de Saucats et Léo- gnon à la base, et molasse calcaire au sommet. Trans- gression marine, Faune archaïque des sables de l'Or- léanais. 2 Deuxième étage : Helvétien. Molasse suisse, Maximum de transgression de la mer miocène. Faune de Sansan. 3° Tortonien. Régression de lamer. Molasse lacustre, Faune ressemblant à celle de Sansan, mais avec une nuance un peu plus jeune, — 4° Sarma- tique du Danube, même faune. 5° Pontique ou couches à Congéries, Faune de Pikermi, — M. P. Termier: Existence de la microgranulite et de l’orthophyre dans les terrains primaires des Alpes francaises. — M. La- croix : Modifications minéralogiques effectuées par la cherzolite sur les calcaires du jurassique inférieur de l'Ariège. Il démontre que la cherzolite est bien une roche éruptive et qu’elle est antérieure aux calcaires cristal- lins supérieurs de la haute Ariège, Elle aurait donc apparu entre le lias supérieur et le jurassique supé- rieur, — M. de Sacorries : Distribution géographique, origine et âge des ophites et des cherzolites de l'Ariège. — M. Paul Gautier, Observations géologiques sur le creux du Souci (Puy-de-Dôme). . Ch. CONTEJEAN. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 8 novembre. Séance générale, consacrée à la distribution des prix. Séance du 15 novembre, Dr Fischer de Carlsruhe : Ueber Variola M. vaccini, (Ouvrage présenté par M. Bouchard.) L'auteur y soutient la théorie, fortement combattue par M. Chauveau, que la vaccine et la variole sont une seule et même mala- die, — M. Leven : Système nerveux des maladies, — M. Tholozan étudie les causes et les foyers des ma- uifestations cholériques. — M. Emile Berger : Anato- mie normale et pathologique de l'œil, — M. Arges : Action sur la pleurésie des eaux sulfureuses thermales, — M. Dargelos : Sécrétage des poils sans mercure à l’aide d’une eau régale faible, à la température de l'étuve., — Rapport de M. Chauvel sur le service des épidémies en 1891, — Rapport de la commission char- gée d'examiner les mémoires pour le prix Daudet en 1892; question proposée : de la leucoplasie buccale, — M. Bazy : Lihotritie chez les obèses. — M. Ali: Epi- démies cholériques en Orient, — M. Fournier : Spéci- ficité de la fièvre typhoïde, Séance du 22 novembre. Ouvrages présentés : M, Feulard : Musée de l’hô- pital Saint-Louis, — M. Juhel-Rénoy : Fièvre {y- phoïde (Bibl. Charcot Debove), —MM.J.-V. Laborde et Camille Billot font une communication sur le traite- ment de l'asphyxie par la traction de la langue. Les tractions doivent être rythmées de manière à imiter le rythme respiratoire. La respiration se rétablit bientôt. Un homme asphyxié par le gaz des égouts a pu ainsi être rappelé à la vie. M. Mutelet, médecin-vétérinaire, a traité aussi avec succès, par cette méthode, Pasphyxie du nouveau-né sur un veau en état de mort apparente après l'accouchement, Ch. CONTEJEAN. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 26 novembre, M. Bloch expose les procédés qu'il a employés au- trefois pour déterminer la sensibilité tactile, et montre qu'ils sont bien différents de ceux de Kammeler. — MM. Gley et Charrin montrent que le bacille pyo- cyanique fabrique des produits toxiques d'action dif- férente sur les systèmes organiques. Les produits solu- bles dans l'alcool n’ont pas d'action sur la grenouille, Les produits diastaséiformes précipités par lPalcool mettent cette animal en état de parésie complète. Voilà pour l’action sur la moelle. Les deux poisons agissent sur le cœur en le ralentissant, mais les produits inso- lubles agissent plus énergiquement que les solubles, — M. Pilliet : Transformation des angiômes de la rate en kystes hématiques. — M. Giard présente une note de M. P. Gautier sur l'appareil de l’audition des Pois- sons, — M. Laveran montre que les corps en crois- sants observés par les Italiens dans la malaria ne sont que des modifications de son hématozoaire, — M. Beau- regard étudie le développement du canal carotidien chez les Roussettes. — M,Chouppe est proclamé mem- bre de la Société, Ch. COoNTEJEAN. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 18 novembre. Certains inventeurs, s’imaginant qu'il n’y a aucune difficulté à passer d'une idée à sa réalisation, ont ré- cemment, à grand renfort de publicité, fait connaître leur projet de lancer de petits ballons capables de s'é- lever à vingt kilomètres de hauteur et d’emporter des appareils enegistreurs. Aussi M. le commandant Re- nard, qui poursuit sans bruit depuis plusieurs mois la solution de la même question, est-il amené à faire con- naître, dès maintenant, le résultat de ses recherches. Il expose les nombreuses difficultés du problème, et fait connaître le mode d'exécution qu’il a adopté. Il pré- sente en même temps les appareils qu'il a déjà réali- sés, Tout d’abord le ballon doit être de faibles dimen- sions, afin que la dépense soit modérée, et qu'il soit possible de répéter un grand nombre d’expériences : c'est là, en effet, la condition indispensable dans des recherches vraiment scientifiques. La dimension la plus convenable semble être celle d’un ballon de 6 mètres de diamètre, cubant 113 mètres cubes. Les enveloppes ordinaires pèsent 300 grammes par mètre carré; elles seraient beaucoup trop lourdes dans le cas actuel, car elles nécessiteraient une capacité bien plus considé- rable (on sait que la capacité croît proportionnelle- ne 1 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 835 ment au cube du poids de l’enveloppe par mètre carré). M. Renard a réussi à trouver une enveloppe pratique- ment imperméable, et ne pesant que 50 grammes par mètre carré. Elle est formée de papier japonais recou- vert d’un vernis spécial. D'autre part, grâce à l’emploi de l'aluminium, il a pu faire construire des baro- mètres et thermomètres enregistreurs, ne pesant que 1150 grammes. La cage d’osier au centre de laquelle est placé l’instrument enregistreur pèse 350 grammes seulement. Cependant sa solidité est complète, et le mode de suspension de l'instrument si parfait, qu’elle peut impunément être exposée à des chocs violents. M. Renard en donne une démonstration complète, en lançant par terre avec force, à plusieurs reprises, celte légère nacelle. A la fin de l'expérience, le mouvement d’horlogerie de l'appareil enregistreur qu’elle contenait n'avait pas cessé de battre régulièrement, À lappareil est jointe une instruction détaillée à l’usage des paysans qui recueilleront le ballon. Grâce à cet ensemble de dispositions, Le ballon pourra atteindre une zone où la pression n'est plus que le À de la pression normale, zone située à une altitude supérieure à 20 kilomètres. Mais pour monter à une pareille hauteur, le ballon doit au départ posséder une force ascensionnelle considé- rable. Elle est de 110 kilogrammes. Il est donc de toute nécessité de la modérer au début. Or il n’y a pas d’aéronaute pour manœuvrer le lest. M. Renard met en œuvre deux solutions très élégantes, l’une qui con- vient par mauvais temps, lorsque le ballon peut se trou- ver alourdi par la pluie, l’autre relative au beau temps. La première consiste dans l’addition à la nacelle d’un réservoir d’eau à robinet ouvert et produisant dès le début un écoulement lent. Dans la seconde, on rem- pa incomplètement le ballon, et on y pratique une égère fuite systématique. Enfin la descente du ballon est assurée à une vitesse inférieure à deux mètres par seconde. Grâce à cet ensemble de dispositions, on peut certainement atteindre 20 kilomètres. Des expériences vont être incessamment entreprises pour étudier les lois des variations thermométriques et actinométriques avec l'altitude. — M, Berget décrit la nouvelle méthode astrophotométrique de MM. Lagrange et Stroobant, de Bruxelles, La méthode consiste à évaluer l’éclat respectif des diverses étoiles en les comparant séparé- ment à une source de lumière bien constante, A la monture d’une lunette astronomique est fixée une lampe à incandescence, puis un diaphragme à ouverture variable (c’est le diaphragme iris des photographes), et un système de deux prismes opposés constituant une lame de verre d'épaisseur variable, Cet ensemble four- nit un faisceau d’une intensité variable à volonté et di- rigé parallèlement à l'axe de l'instrument. On le fait pénétrer dans la lunette, et se superposer au faisceau direct venant de l’étoile, au moyen de deux miroirs à 45° et d'une lentille, De la sorte, l’œil voit à la fois Vastre et la source artificielle. On agit sur le diaphragme et on règle l'épaisseur de la lame de verce, jusqu'à amener l'égalité d'éclat. Un tarage préalable a été effec- tué en observant une première fois, non pas une étoile, mais une lampe Carcel étalon, Enfin pendant la me- sure photométrique, on enregistre la courbe de va- riation des forces électromotrices de la lampe, afin d’en déduire les intensités correspondantes, et de faire les corrections pour ramener les observations à ce qu’elles auraient dû être pourune intensité constante. — M. Abraham s’est proposé une nouvelle détermination du rapport v entre les unités C. G. S, électromagné- tiques et électrostatiques. Il expose à la Société l’en- semble de son travail que les lecteurs de la Revue ont déjà pu apprécier (n° du 30 septembre 1892, p. 651). Le souci d'une précision extrême, apporté par Pauteur dans toutes déterminations, et la discussion scrupuleuse des diverses causes d’erreur préalablement réduites au minimum, permettent d'attribuer à ses déterminations une haute valeur, — M. Wyrouboff expose ses travaux sur le pouvoir rotatoire des solutions, En discutant avec précision les différents cas, il a pu formuler une loitrès simple, à savoir que les corps isomorphes ont des pouvoirs rotatoires spécifiques, très sensiblement identiques. Tels sont les deux groupes d’hydrates à cinq et à six molécules d’eau du sulfate et du séléniate de strychnine. Il en est encore de mème pour les solu- tions alcooliques des deux sels correspondants de cin- chonine. Les cristaux isomorphes de sulfate et de sé- léniate de cinchonine, que fournissent ces solutions alcooliques offrent la particularité de contenir une mo- lécule d'alcool de cristallisation. De même la quinidine dissoute dans les divers alcools, prend toujours en cris- tallisant une molécule des alcools dans lesquels on la dissout, et les cristaux sont absolument isomorphes entre eux. Si les pouvoirs rotatoire moléculaires adop- tés jusqu'ici ne semblaient pas conduire à cette loi, c'est qu'on ne prenait pas les véritables poids molécu- laires, On ne tenait pas compte, par exemple, des mo- lécules d’eau et d'alcool de cristallisation, Séance du ? décembre. M. P. Curie fait une communication sur l’emploi des condensateurs à anneau de garde et des électromètres absolus, Dans son travail sur la mesure du rapport présenté dans la dernière séance, M. Abraham a mon- tré comment on peut employer le condensateur plan à anneau de garde comme instrument de haute précision. De son côté, M. P. Curie, dans ses recherches effec- tuées en 1889, en commun avec son frère, sur la piézo- électricité et la conductibilité du quartz et qu’il a expo- sées récemment à la Société (voir Revue générale des Sciences, 30 juin 1892, p.458), avait déjà eu recours à l'emploi d’un condensateur de cette espèce. L'étude de cet instrument lui avait révélé diverses particularités qu'il fait connaître aujourd’hui et dont il importe de tenir compte, surtout lorsqu'il s’agit d'expériences d’électrostatique, pour pouvoir obtenir de ce précieux instrument toute la précision espérée. Ce condensateur pèche par l'isolement : il ne suffit pas de le placer à l'intérieur d’une enceinte bien desséchée, il faut encore éviter tout déplacement d’air, c'est-à-dire qu'il est nécessaire que cette enceinte soit, en outre, herméti- quement fermée et capable de tenir la pression. Si le desséchement est si nécessaire, c’est que la ligne sui- vant laquelle le verre dépouillé d’argenture sépare l'anneau de garde du plateau collecteur, est le siège d’une petite force électromotrice qui prend naissance lorsque le verre est humide et ne disparaît que lors- qu'il est bien desséché. D'autre part, cette ligne de séparation n'offre pas un isolement absolu ; il y a tou- jours une petite conductibilité due au verre, et qui n’est pas négligeable dans des expériences d’électro- statique. Aussi MM. Curie ont-ils modifié le mode d’em- ploi de ce condensateur. Leurs expériences consistaient à charger d’abord par influence l’un des plateaux du condensateur, et à compenser ensuite cette charge par celle qui prend naissance dans la traction du quartz. Au lieu de charger comme d'ordinaire le plateau col- lecteur à anneau de garde, ils faisaient l'inverse et chargeaient le plateau continu. La charge n'est plus uniforme, les lignes de force ne sont plus des normales aux deux plateaux, mais il n'importe. On sait d’après le théorème de M. Bertrand que la capacité réciproque est indépendante de celui des plateaux dont on fait choix pour le relier avec la pile de charge. Pour les mêmes motifs, M. Curie propose de modifier de la même manière le mode d'emploi des électromètres absolus, Mais alors, de ce que la charge demeure la même, quel que soit le plateau dont on fait choix, il n’en résulte pas du tout que l'attraction entre les pla- teaux reste également la même. Cependant, en exa- minant séparément les trois termes dont elle se com- pose alors, l’auteur montre que la force est presque la même que si c'était le plateau central qui produisait l'attraction. Il n'y à à introduire qu'un petit terme correctif facile à évaluer. De plus, M. Curie propose de substituer au ressort de Sir W, Thomson une balance et de préférence une balance portant à l’une des extré- 836 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES mités du fléau un micromètre qu’on vise au micros- cope, et qui permet de lire immédiatement les faibles variations de poids. Alors c’est le plateau continu qui est suspendu à la balance et qui se trouve en dessus La balance est préférable au ressort en ce qu’elle élimine l'emploi de la vis qui règle le plateau. Pour calculer le terme correctif pour une distance donnée des plateaux, il suffit de faire trois expériences en portant successivement au même potentiel, d'abord le disque central seul, puis le disque central et le pour- tour, enfin le pourtour seul. On a aussi trois équations qui permettent de comparer l'attraction vraie à la valeur approchée donnée par la méthode renversée de M. Curie, et par suite de calculer la valeur du terme de correction. On calcule ainsi ce terme pour les diffé- rentes distances. Celte méthode renversée est encore applicable à l’électromètre absolu sphérique de M. Lipp- mann, Dans ce cas, il n’y a plus de terme correctif. Il faut seulement prendre garde que la formule n’est plus la mème que dans le cas ordinaire, — M. Abraham fait voir que dans ses expériences où intervient un galvanomètre il n’est plus aussi nécessaire que pour des expériences d'électrostatique d'obtenir un isole- ment rigoureux, surtout si le commutateur est disposé convenablement. D'ailleurs cet isolement était encore très satisfaisant puisque les résistances d'isolement du condensateur étaient supérieures à 89 milliards d’ohms. — M. Pellat fait quelques réserves sur la substitution de la balance au ressort dans l’électro- mètre absolu. — M. Curie défend son opinion. — M. Lippmann fait connaitre ses nouveaux résultats relatifs aux photographies colorées du spectre non plus sur des couches contenant des sels d'argent, mais sur des couches bichromatées, La théorie de la formation des photographies colorées donnée par M. Lippmann fait prévoir que la production du phéno- mène est indépendante de la nature de la substance sensible. C’est ce que l’auteur à voulu confirmer par l’expérience. Le dispositif ordinaire avee miroir de mercure reste identiquement le même, sauf que la nouvelle couche sensible diffère ; dans le cas actuel, c’est une couche d’albumine (ou de gélatine) bichro- matée. Aux points où agit la lumière, la matière orga- nique est modifiée, elle devient moins hygrométrique, c'est-à-dire que les plans successifs formés dans les expériences antérieures par de l’argent réduit, sont maintenant constitués par des plans d’albumine deve- nue incapable d’absorder l’eau, tandis que le reste de l’albumine conserve la propriété de se gonfler par l’eau, Par suite, lorsque la plaque à été impressionnée, les couleurs apparaîtront dès qu’on la plonge dans l'eau. M. Lippmann reproduit l'expérience devant les mem- bres de la Société : cette expérience est très curieuse et fort belle, les couleurs sont excessivement brillantes. On les voit sous toutes les incidences, c’est-à-dire en dehors de l'incidence de la réflexion régulière, En re- gardant la plaque par transparence on voit nettement les complémentaires des couleurs vues par réflexion. Cette immersion dans l’eau pure, en enlevant le bi- chromate, fixe l'épreuve en même temps qu’il la déve- loppe. L'image disparaît quand on sèche la plaque, pour reparaître chaque fois qu'on la mouille de nou- veau. Il est à remarquer que les couleurs n’apparais- sent pas exactement à l’'endroitoù elles ontété produites par la source lumineuse. Le spectre entier est déplacé dans son ensemble, de telle sorte que le rouge est à la place qu'occupait le vert dans l'impression lumineuse. Cela tient précisément au fait que les lames de géla- tine non impressionnée se sont gonflées, et que par suite la distance des plans de gélatine insoluble a augmenté. Avec l’eau salée, la dilatation de la couche est moindre et le spectre se déplace moins. Lorsqu'on emploie l’albumine, il faut avoir soin de la coaguler au bichlorure de mercure, sans quoi l’albumine non impressionnée se dissoudrait lors du lavage à l’eau pure, — M. Berget expose ses expériences sur la dila- tation magnétique du fer dans un champ magnétique, ainsi que les expériences analogues de M. Van Aubel sur le bismuth.Les deux expérimentateurs ont, chacun de leur côté, eu recours à la méthode du déplacement des franges indiquée par Fizeau pour l'étude de la di- latation des cristaux. Le cylindre de fer de M. Berget est placé dans la région centrale de la bobine, de facon que le champ puisse être considéré comme uniforme, etil est prolongé de chaque côté par des cylindres de cuivre de même diamètre, L’appareil producteur des franges est constitué, d’une part, par la base supé- rieure du barreau de cuivre, et, d’autre part, par une lentille hémisphérique très voisine, portée par un sup- port spécial à vis calantes monté sur le bâti de l’'appa- reil. Un prisme à réflexion totale renvoie horizontale- ment la lumière, — Le dispositif de M. Van Aubel est analogue, senlement l’auteur amplifie, en outre, les déplacements au moyen d’un levier. M. Berget signale qu'il est facile de séparer la dilatation thermique qui est lente et progressive de la dilatation magnétique qui est instantanée. Les deux métaux, bismuth et fer, four- nissent des résultats entièrement opposés. On sait que le bismuth présente une conductibilité thermique ou électrique qui varie considérablement dans un champ magnétique, Mais au point de vue de la dilatation ma- gnétique, il se trouve complètement inerte ; il n'y a aucun allongement. Pour le fer, au contraire, les va- riations de conductibilité sont très faibles, tandis que l'allongement magnétique est très notable, Un barreau de 52 millimètres s’allonge de 0u,#12 pour un champ de 10% unités C.G.S. La courbe des allongements en fonction de l’intensité du champ présente une allure semblable à celle qui représente l'intensité d’aiman- tation en fonction de la force magnétisante. Le dispo- sitif de M. Berget se prête très bien à la projection du phénomène. — Sur une question de M. Curie, M. Ber- get indique qu'il n’a constaté aucun effet d’hystérésis. — M. Raveau fait observer que l'effet magnétique ne doit pas être immédiat, Il rappelle l'existence de la viscosité magnétique étudiée par Ewing et Lord Ray- leigh. On sait, en effet, que si l’on passe d’une valeur donnée de la force magnétisante à une valeur supé- rieure, l’aimantation induite n’atteint pas immédiate- ment ia valeur finale donnée par la courbe d’hystérésis, elle met un temps notable à l’atteindre. Edgard Havoré. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 11 novembre. M. Burton résume la discussion sur le mémoire de M. Williams : « Les dimensions des quantités physiques. » Il remarque que l'idée de faire des quantités dites « spécifiques » telles que le poids spécifique, des gran- deurs purement numériques, est erronnée, et doit mener à des difficultés. La « pesenteur spécifique » d’une substance est une grandeur de même nature que la densité, et ce n’est une grandeur purement numé- rique qu’en vertu de la convention qui prend la densité de l’eau pour unité. Si l’on donnait des dimensions aux quantités spécifiques, l'interprétation en serait aisée, selon lui, quand on aurait trouvé les formules de di- mensions rationnelles. Relativement aux remarques de M. Fitzgerald, il dit que bien que la tendance à rame- ner en dernière analyse toute énergie à être de l’éner- gie cinétique soit indéniable, la distinction qu’on éta- blit communément entre l'énergie cinétique et poten- telle ne comporte rten qui soit contraire à cette ma- nière de voir, et qu’elle est utile et convenable dans bien des cas. Sur la question des dimensions de y de k,: il incline vers la manière de voir de M. Williams, car plusieurs considérations suggèrent l’idée que les deux capacités d’un milieu sont essentiellement différentes. Il donne à l'appui des arguments pour montrer que west probablement une constante absolue dans l’éther, tandis que À peut être variable, Des deux systèmes de dimensions pour y et proposés par M. Williams, celui qui fait de & une densité semble préférable. — Nr TT FT TT ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 837 M. Lodge trouve qu'il y a grand intérêt à propager l’idée que les grandeurs physiques sont concrètes et par suite que la communication de M. Williams est ia bien venue, Il croit désirable de conserver quelques noms pour des nombres abstraits, et celui de « pe- santeur spécifique » (specific gravity) doit être un de ces noms. Si l’on cherche un autre nom comportant des dimensions, « poids spécifique » (specific weight 1) ou «poids par unilé de volume » peuvent être em- ployés. — Parlant des dimensions des divers termes d’une équation, il ne pense pas qu'on remarque d’ordi- naire que le principe des termes dirigés s'applique rigoureusement à l'algèbre vectorielle et à la géométrie cartésienne ; car, s'ils ont une direction quelconque, tous les termes d’une pareille équation sont dirigés le long de la même ligne. A ce point de vue l'algèbre ordinaire est plus raide que l'algèbre vectorielle. Même si l’on introduit les fonctions circulaires, comme en coordonnées polaires, elles ont pour effet de don- ner la même direction à tous les termes. l’auteur cite d’autres exemples de problèmes qui démontrent le même fait. — M. Boys croit que M. Madden à fait un cercle vicieux en partant de l’unité astronomique de masse et en déduisant les dimensions de la masse 3 2 É de l'équation MLT? — ii possible que l'équation puisse être vraie sans intro- duire y (la constante de la gravitation) au second membre, La méthode de M. Williams est tout à fait l'inverse car il maintient que, sans introduire k et y dans les dimensions des grandeurs électriques et magné- tiques, on ne peut tirer aucune indicalion sur la véri- table nature de ces quantités, de leurs formules de dimensions; et ainsi l’objection est levée. —M. Baily, bien que d’accord avec M. Williams sur les points es- sentiels, croit que la suppression totale de L des for- mules de dimensions rend les expressions plus com- pliquées et moins symétriques. Par exemple, des car il est tout à fait im- expressions telles que ? X2et XYZ qui représentent Z. respectivement une grandeur non dirigée, une surface et un volume peuvent avec avantage s’écrire L, L?et L8. La restriction des dimensions deget 4 à celles qui donnent des formules de dimensions qu'on puisse interpréter pour les grandeurs électriques et magnéti- ques semble strictement justifiée. Les deux systèmes proposés ne peuvent être exacts et il est plus conforme au défaut actuel de nos connaissances d'introduire une quantité U de dimensions inconnues, telle que y ou k —U?: densité, et k — 1 ou p — 1 = U?: rigidité. Cela mettrait en lumière le fait que les dimensions ab- solues des quantités qui contienneni U sont inconnues. L'auteur donne une liste des dimensions de diverses grandeurs, fondées sur cette combinaison. — M. Swin- burne, se rapportant à la nature conventionnelle de plusieurs unités, dit qu'il y a de grandes différences entre les idées que se font des personnes différentes sur ce genre d'unité. Partant de la convention qui per- met de multiplier des grandeurs différentes, il peut avoir 6 ampères parcourant un circuit électrique sous une pression de 10 volts, et dire qu'il a 60 voltam- pères. Le terme « voltampère » peut être regardé comme indiquant que 60 est le résultat numérique de la multiplication du nombre de volts par le nombre d’ampères, et d’un autre côté il peut être compris comme une nouvelle unité, le watt, dérivée du volt et de l’ampère. Avant que lemémoire de M.Rückersur«les dimensions supprimées » ne fût publié, un électricien peutavoir proposé de mesurerla longueur d’un bancen y envoyant un courant alternatif et déterminant sa selfinduction, qu'il regarde comme une longueur, 1 Les quautités pour lesquelles M. Lodge propose ces noms de specific gravily et specific weight sont ce que nous appe- lons d'une part, poids spécifique relatif, et d'autre part, poids spécifique absolu. M. Rücker, néanmoins, dirait que cela ne donne pas de bon résultat, car on devrait tenir compte de y. Il in- cline à croire que les dimensions peuvent étre un mau- vais guide. Se reportant aux écrivains scientifiques comme autorité, il dit que Maxwell a commis des négli- gences dans quelques cas, car il a parfois donné des formules de dimensions comme zéro, qui réellement eussent dû être L°M°T° ou l'unité. Dans l'édition fran- caise les erreurs ont été corrigées. — M. Williams répondant à ces remarques de M. Madden, sur la self. induction qui est une longueur, montre que l’on peut traiter le sujet de deux facons différentes, suivant qu'on regarde l'étalon de selfinduclion comme l’étalon pra- tique des mesures ou l’unité de slfinduction comme une quantité physique. Dans le premier cas, l’étalon est une longueur, mais dans le dernier l’unité est une quantité de même espèce que la selfinduction, dent la nature est encore inconnue, Si sa nature dynamique était connue, alors les dimensions absolues de toutes les autres grandeurs magnétiques et électriques se- raient déterminées. En réponse aux remarques de M. Fitzgerald, il dit qu'il est à peine probable qu'il ne se Soit pas habitué à l’idée connue qui fait des éner- gies potentielle et cinétique, des grandeurs de même espèce, car c'est une idée avec laquelle il est, lui, très familier. Le fait qu’elles ont mêmes dimensions, suffit à montrer leur identité et l'idée que toute énergie est en dernière analyse de l'énergie cinétique estfondamen: tale dans ce mémoire. Cela n'implique pas, toutefois que l’électrisationetl’aimantation soient nécessairement la même chose, et l'hypothèse qu’elles pourraient être la même chose, n’est qu'une des nombreuses « hypo- thèses probables » dont toutes ont des titres à la consi- dération. La principale raison pour regarder comme probablement incorrecte l'hypothèse de M. Fitzce- rald, est qu'elle conduit à un système de formules de dimensions qui n’est pas susceptible d'interprétation mécanique rationnelle, et qui contient des puissances fraclionnaires des unités fondamentales. Le système de M. Fitzgerald ferait de la résistance un nombre abstrait, etde w et de 4 des grandeurs dirigées, tandis que la premièrede ces quantités est une quantité concrète et les deux autres doivent être scalaires dans les mi. lieux isotropes. S'il s’est trompé (lui M. Williams), en traitant l’électrisation et l’aimantation comme des phé- nomènes différents, il aurait toujours pour excuse qu’il n'a fait que suivre, en la matière, des autorités telles que lord Kelvin, M. Lodge et M. O. Heaviside, — La discussion du mémoire de M. Litherland : « Les lois de la force moléculaire », est rouverte par M. Perry qui lit une communication du Président, M, Fitzge- rald, Il s'attaque aux théories discontinues. alors que Clausius a donné des formules continues beaucoup plus exactes dans un très long intervalle qu'une for- mule discontinue de M. Sutherland. L'introduction des mouvements browniens sans étudier avec soin les con- dilions requises et l'énergie mise en jeu, et sans don- ner d'explication dynamique de leur existence, n’est pas satisfaisante. Ce qui eût été très intéressant. c’eût été si M. Sutherland avait calculé la loi de variation de la température avec la hauteur dans une colonne de gaz soustraile à la convection, sous l’influence de la conduction seule (car Maxwell pense que la loi de l’in- verse de la cinquième puissance, est la seule loi d’at- traction moléculaire qui donne l’uniformité de tempé: rature dans ces conditions), et si nécessairement des expériences étaient faites avec des bases solides. Rela- livement à Passertion que l'attraction moléculaire à un centimètre, est comparable à la gravitation à la méme distance, il pense que M. Boys la révoquera en doute elil indique un experimentum crucis pour la loi de Jin: verse de la quatrième puissance. Les deux lois de l’in- verse de la quatrième puissance et de l'inverse de la cinquième, supposent une symétrie qui ne doit pas exister : il rejette aussi les autres parties du mémoire — M. Gladstone sur les équivalents dyniques relatifs et pour la réfraction, donnés dans le tableau XX VIII du 838 mémoire, dit qu'il lui paraît intéressant de faire une pareille comparaison entre les équivalents dyniques et de dispersion, et les pouvoirs rotatoires magnétiques. Le résultat, donné dans un tableau complet, montre une certaine proportionnalité entre les quatre colonnes, mais les différences dépassent les limites des erreurs ’expérience. M. Sutherland, néanmoins, regarde lé- quivalent de l'hydrogène, tantôt comme égal à 0,215, tantôt, en d’autres endroits, comme négligeable. Les analogies entre les équivalents optiques dépendent moins de la proportionnalité des nombres que du fait que les équivalents de réfraction, de dispersion et de pouvoir rotatoire magnétique d’un composé, sont la somme des équivalents correspondants de ses atomes constituants, modifiée en quelque mesure par la façon dont ils sont combinés. Bien qu'une relation quelque peu semblable soit vraie pour les équivalents dyniques, l'effet de « double liaison » des atomes de carbone, si manifeste dans Les propriétés optiques, est à peine per- ceptible. Le résultat obtenu en calculant les constantes à partir de M au lieu de M?Lest ensuite discuté; parcette substitution on arrive à une proportionnalité plus re- marquable. — M. Burbury dit qu'en se reportant au mémoire primitif de l’auteur, sur lequel s'appuie le mémoire actuel, il trouve qu'il suppose une distribu- tion uniforme des molécules. Avec cette hypothèse, les démonstrations données sont tout à fait correctes et le potentiel est maximum. Si, d’ailleurs, les molécules sont en mouvement, le potentiel moyen peut être infé- rieur au maximum, et les déductions du mémoire ac- tuel, fondées sur des hypothèses inexactes, peuvent in- duire en erreur, — M. Ramsay remarque que bien des assertions du mémoire, au sujet des points critiques, sont très douteuses. Des équations séparées pour les différents états de la matière ne sont pas satisfaisantes, pas plus que la divison artificielle des substances en cinq classes. Les différences qui étaient prédites dans les points critiques et qui étaient dues à la capillarité, n’ont pas été trouvées exister, Parlant de l'équation du viriel, il dit que, jusqu'ici on a fait R constant. Des considérations l’ont conduit récemment à penser que R n'est pas constant. Toute la question serait à re- prendre en regardant R comme variable. — M. Macfar- lane Gray dit qu'il a travaillé sur des sujets semblables à ceux dont s’occupe M. Sutherland, mais en partant d’un point de vue opposé sans supposer aucune attrac- tion entre les molécules, En étudiant théoriquement la vapeur il trouve qu'on n'a besoin d'aucune constante arbitraire, car toutes sont déterminées par la thermo- dynamique. Les résultats calculés sont en parfait accord avec les expériences de M. Cailletet sauf aux très hautes pressions, et même ici, le volume théorique est la moyenne entre ceux qui ont été obtenus expérimenta- lement par Cailletet et par Battelli. — M. Herschel re- marque que Villarceau a discuté l’équation du viriel, quand les énergies chimique et mécanique ne sont pas supposéesse contrebalancer. Le mémoire de M. Suther- land repose tout entier sur l’existence d’un tel équi- libre, et il (M. Herschel) ne comprend pas en quoi cet équilibre est nécessaire, La discussion est close et la séance levée. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 26 novembre. 19 SCrENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. H. Schoute con- tinue sa communication de la séance précédente !, il indique le rapport entre son théorème et des résultats antérieurs de Laguerre. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. H. Kamerlingh Onnes fait connaître les mesures du potentiel nécessaire pour produire la décharge obtenue par M. A. H. Borgesius à l’aide d'expériences avec un nouvel électromètre, dit doublement bifilaire. Dans les mesures antérieures 1 Voir Revue II, 7172 où septembre est à remplacer par octobre. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES on a négligé l'influence de pression et de température, ce qui explique la divergence des résultats. Dans le cas de cylindres concentriques l’auleur trouve, d’ac- cord avec M. Gaugain, que la décharge ne dépend que de la charge du cylindre intérieur. En déchargeant la surface du cylindre intérieur par une lueur, il réussit à maintenir sur des corps un potentiel très élevé cons- tant, indépendamment de la quantité d'électricité qui afflue. Enfin il étudie, par des séries d’expériments, la grande résistance diélectrique de couches minces d'air. —M. H. A. Lorentz s'occupe du mouvement relatif de la terre et de l’éther, Dans un mémoire de l'année 1886 ! l’auteur s’est occupé de l’aberration de la lumière et des phénomènes qui s’y rattachent; Pen- semble des faits observés lui semblait alors plaider en faveur de la théorie de Fresnel, suivant laquelle l'éther ne participe pas au mouvement de la terre. Cependant il lui paraissait impossible d'expliquer une expérience ingénieuse de M. Michelson ?, Supposons l’éther im- mobile et indiquons par P et A deux points qui sont fixement liés à la terre; alors, comme M. Maxwell le fit remarquer le premier, le temps qu'il faut à la lumière pour se propager de P vers À et pour retourner en P dépendra de la direction de la ligne P A. En appelant l la longueur de P A, V la vitesse de la lumière etp celle de la ferre, on trouve pour ce temps 2 (145) v v? si la ligne P A est parallèle au mouvement de notre planète et l p°? OÙ DE, 9] "4 (: 55 2 v? (Si) si elle lui est perpendiculaire. L'appareil de M. Mi- chelson comprenait deux bras horizontaux et perpen- diculaires entre eux qui partaient d’un point central O et dont chacun portait à son extrémité un miroir per- pendiculaire à sa longueur. Il se produisait un phéno- mène d'interférence dans lequel les deux rayons étaient séparés au point O, pour se diriger chacun vers l’un des miroirs, et se réunissaient après avoir de nou- veau atteint le point central. L'appareil entier, y com- pris la lampe et la lunette, pouvait tourner autour d’un axe vertical; chaque bras pouvait ainsi être amené à son tour dans la direction du mouvement de la terre. Les expressions (1) et (2) étant inégales, une rotation de 90° devait donner lieu à un déplacement des franges dont cependant les observations ne décelaient aucune trace, Après avoir reconnu que la longueur des bras était un peu trop petite pour que le phénomène cherché se produisit nettement, M. Michelson, en coopération cette fois avec M. Morlez, a répété l'expérience 5, en augmentant, par le moyen des réflexions successives, la longueur des chemins parcourus. Cette nouvelle expérience, dans laquelle toutes les pièces de l'appareil étaient montées sur une pierre flottant sur du mercure, avait le même résultat négatif. Voici la seule manière dont j'ai pu réconcilier ce résultat avec la théorie de Fresnel, On peut admettre que la distance de deux points P et À d’un corps solide n’est pas absolument invariable, mais qu’elle change si on fait tourner le corps. Si, par exemple, cette distance est {, lorsque la ligne P A est perpendiculaire au mouvement de la terre, et [(1— ) si elle est parallèle à ce mouvement, la première des expressions (1) et (2) devra être multi- pliée par (1 —4) et elle deviendra égale à la seconde expression si Un tel chargement de la longueur des bras métalliques dans le premier appareil de M. Michelson et des di- 1 Archives néerlandaises, t. XXI, p. 103. 2 American Journal of Science, 31 Ser. Vol. XXII, p. 120. 3 American Journal of Science, 31 Sér. Vol XXXIV, p. 333. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 839 EEE a——aaZa mensions de la pierre dans la seconde expérience ne semble pas impossible à M. H. A. Lorentz. En effet, ce qui détermine la forme et la grandeur d’un corps solide, c’est évidemment l'intensité des forces moléculaires. Or, dès qu’on admet que les actions électriques et magnétiques sont dues à l'intervention de l’éther, il est naturel d'étendre cette manière de voir aux forces moléculaires: il faudra alors s'attendre à ce que l’ac- tion mutuelle de deux points matériels qui se déplacent à travers l’éther avec une vitessse commune, éprouve par cela même une modification qui dépend de la di- rection du mouvement. On s'assure facilement que ce a QUE chargement ne saurait être que de l’ordre FPS Les équations que l’auteur a établies dans un Mémoire récemment paru ! lui ont permis d'évaluer, dans le cas des forces électriques, les modifications dont il s’agit. Soient : A un système de points matériels, ayant des charges électriques et se trouvant en repos au sein de l’éther, B le système des mêmes points, se déplaçant avec la vitesse p dans la direction de l'axe des +, Gun système de points immobiles qu’on obtient en auÿ- > mentant dans la proportion de 1 à 1 + JS toutes les dimensions de système A qui sont parallèles à l'axe OX, tout en laissant constantes les lignes perpendiculaires à cet axe, Alors les composantes des forces parallèles à OX sont les mêmes dans les systèmes B et C, et, quant aux composantes perpendiculaires, à OX, on en obtient les valeurs dans le système B en multipliant M? par { — celles qu’elles ont dans le troisième sys- tème. S'il était permis d'appliquer ce résultat aux forces moléculaires et de regarder un corps solide comme un système de particules qui se trouvent en équilibre sous l’action de leurs attractions et répul- sions mutuelles, c’est précisément la valeur (3) qu'on trouverait pour le coefficient &. En effet, l'équilibre exigerait que les forces agissant sur un quelconque des points se détruisent, condition qui serait remplie par l’un des systèmes Bet CG dès qu'il y est satisfait dans l’autre. Ces systèmes pourraient donc représenter un même corps solide se déplaçant ou non au milieu de l’éther. Sans vouloir attacher à ces remarques trop d'importance, M.H. A. Lorentz ose prétendre qu'on ne saurait nier la possibilité des changements dont il a été question, Du reste, si le coefficient & avait pour tous les corps la valeur (3) il serait impossible de dé- couvrir ces changements par des mesures directes. Non seulement les procédés dont on se sert dans la compa- raison des suites ne permettent pas d'aller jusqu'aux cent millionièmes de la longueur, mais deux barres juxtaposées subiraient toujours les mêmes change- ments. Il serait donc nécessaire de leur donner des positions perpendiculaires entre elles; si on voulait alors comparer les longueurs par le moyen des interté- rences, on reviendrait à l'expérience de M. Michelson et l’effet des changements de longueur serait compensé par la différence des temps (1) et (2). — M. J. M. van Bemmelen fait une communication sur la composition des hydrates colloïdaux (hydrogels), spécialement de l'hydrogel silicique, Il en à déterminé la tension de vapeur à 15°, tandis que le nombre des molécules d’eau dans le gel varia de 6 jusqu’à À H?0. Cette tension in- férieure àc elle de l’eau pure, diminue d’une manière continue avec la teneur d’eau, de sorte que la courbe, représentation graphique de ce phénomène, offre une courbure régulière, Cette constitution de l’hydrate col- loïdal semble permettre de le considérer comme une « solution fixe » de l’eau dans l'acide silicique. SCHOUTE, Menbre de l’Académie. 1 H. A. Lorenrz. La théorie électromagnétique de Maxwell et son application aux corps mouvants. Leide, E. J. Brill. (Extfuit des Archives néerlandaises, t. XXV.) SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE BERLIN Des circonstances imprévues ont empêché notre cor- respondant ordinaire de continuer à nous envoyer cette année les résumés des communications faites à la Sa- ciété de Physique de Berlin. Il nous a été impossible de le remplacer immédiatement; mais, pour ne pas interrompre nos comptes rendus nous donnons ci-après le relevé de tous les travaux communiqués à la Société depuis le commencement de 1892. Nous reprendrons nos analyses immédiatement après chaque séance, — M. F, Kurlbaum : Construction d’un bolomètre à sur- face. — M. E. Pringsheim: Rapport sur l'émission de la lumière par les corps gazeux non composés. M. E. Lampe : Léopold Kronecker (nécrologie), — M. E. Budde: Georg Biddel Aivy (nécrologie). — A. Konig': Au crépuscule un pigment bleu parait avoir plus d’é- clat qu'un pigment rouge, qui en plein jour avait le même éclat apparent, M. Kônig étudie les lois de ce phénomène pour des sujets à vue normale et pour des daltonistes. L'intensité de la lumière d’un bec de gaz étant très faible, l'éclat maximum se trouve pour tous les sujets étudiés au même endroit du spectre (1 = 553 microns). L’intensité absolue augmentant, le maximum se déplace vers les grandes longueurs d'onde, Le mou- vement de déplacement atteint une limite pour les grandes intensités aux environs de À — 570 microns pour les personnes auxquelles la sensation du rouge manque, aux environs de À — 610 microns pour tous les autres sujets examinés. — M. $S. Kalischer: Sur la théorie et le calcul des courants dans les conducteurs de dimensions linéaires. — M. E. Budde: Sur les fac- teurs intégrants et la température. — Msure des cha- leurs de vaporisation. — M. M. Thiesen : Théorie des instruments dioptriques parfaits. M. F. M. Stapf : De l'augmentation de la densité à l’intérieur de la Terre. — M, L. Arons : Expériences concernant la polarisation électrique : Le courant est amené à une auge remplie d'acide sulfurique par deux électrodes en platine. Au milieu de l’auge est placée une lame métallique à travers laquelle le courant est forcé de passer. Si la lame est formée par du platine de 0001 d'épaisseur le courant diminue, même quand la lame est percée d’un trou de 0®003 de diamètre. Le courant reste invariable quand on emploie, pour la séparation, de l'or ou de l’argent en feuilles. —- M. H. Rubens : Dispersion des rayons ultrarouges dans la fluorine, le sel gemme et la silvine, — M, Mewes : Éémission et absorption. — M. Th. Gross : De la décomposition du soufre par l’électrolyse. L'auteur suppose que le sou- fre est un corps composé contenant de l'hydrogène, — M. X. Budde : La production des espaces nommés espaces morts (Todte Räume) par M. Liebreich et la tension capillaire des surfaces d’émulsion. — M. O. Lummer : Un nouveau spectrophotomètre. qu'il permet tant d'appliquer le principe du contraste à la mesure photométrique; l'erreur moyenne d’un pointage est ainsi réduite à 1/5 pour cent. La théorie de cet ins- trument doit être basée sur les principes que M. Abbe a donnés pour microscope, — M. Th. Gross : Sur la théorie de l’entropie. — M. F. Neesen: L’entraîinement des poulies lâches par leurs axes. — M. W. Wien: Du mouvement deslignes de force dans le champ électro- magnétique. — M. Th. Gross : Sur la théorie de l’en- tropie (deuxième communication), — M, W. Wienet M. L. Holbow: De la mesure des températures élevées. H. W. Vogel : Sur la nouvelle méthode de photo- graphie en couleurs naturelles permettant la copie des clichés. —M. Vogel distingue deux procédés de photogra- phie en couleurs : 4° Le procédé direct, tel qu'il a été employé par M. Lippmann. M. Vogel lui reproche, de ne pas donner exactement la couleur naturelle, de ne s'appliquer qu'aux objets émettant beaucoup de lu- mière, d’être difficile à bien réussir, de nécessiter une nouvelle pose pour chaque épreuve. 2° Le procédé indi- rect, s’aidantde l'impression en couleur. L'avantage prin- cipaldeceprocédéestdepermettredetirerunnombrein- 840 ACADEMNIES ET SOCIÉTES SAVANTES défini d'épreuves sans nouvelle pose. Le principe de cette méthode a été indiqué en 1865 par Ransonnet en Au- triche et Collen en Angleterre. Ils proposaient de faire à travers des verres rouge, jaune et bleu, trois clichés du même objet, de copier les négatifs sur pierre et de les imprimer en rouge, jaune et bleu. Cros et Ducos de Hauron reprirent en 1869 les essais de Ransonnet en substituant au rouge, jaune et bleu le rouge, vert el violet. Mais le principe énoncé par Ransonnet ne pou- yait donner de bons résultats tant qu'on n'avait pas de plaques sensibles aux rayons rouges et jaunes. Ce n’est qu’en 1873 que l’auteur réussit à obtenir ces plaques. Cros et Ducos du Hauron en France et Albert à Munich, reprirent alors l'impression photographique. Albert co- piait le négatif sur une plaque de verre recouverte d’une colle chromée sensible à l’action de la lumière, Il tirait ses épreuves directement avec cette plaque, les parties altérées par la lumière prenant seules la couleur. On reconnut immédiatement que les clichés obtenus à tra- vers un verre d'une couleur donnée devaient être tirés avec la couleur complémentaire ; mais la difficulté était de trouver des pigments émettant une teinte exacte- ment complémentaire de celle que laissait passer le verre. Les pigments qu'employait Albert n'étaient pas choisis convenablement, aussi ses épreuves étaient loin de rendre les couleurs de l'original. En 1885 l’auteur réussit à faire faire un nouveau pas à la question en éliminant tout tàätonnement dans le choix de la couleur complémentaire. Voici en effet sa méthode : on em- ploie trois ou plusieurs plaques, sensibles chacune aux rayons d’une certaine partie du spectre. D'après le principe énoncé par M. Vogel en 1873 une plaque est rendue sensible au jaune par exemple, en mélant à la couche qui la recouvre un pigment absorbant le jaune, mais ce pigment qui absorbe le jaune doit émettre le bleu, etce bleu sera rigoureusement com- plémentaire du jaune absorbé. C’est ce bleu, ou son équivalent spectroscopique qui devra servir pour l'im- pression de la plaque due à action des rayons jaunes. Les verres colorés ne jouent plus ici qu'un rôle secon- daire, ils interceptent les rayons bleus auxquels toutes les plaques photographiques obtenues jusqu'à présent sont sensibles. M. Ulrich, réussit le premier à obtenir de bonnes photographies d'après cette méthode. Il les exposa en 1890 à Berlin, et dut à leur succès un pre- mier prix à l’exposition allemande à Londres en 1591. M. Ulrich employait, outre les trois plaques en couleur, une quatrième plaque foncée donnant les contours. D'après la théorie de l’auteur, cette plaque ne devait pas être nécessaire. Aussi M. E. Vogel jeune arriva-t-il à la supprimer en préparant lui-même des couleurs nouvelles. Il remplaca en même temps les verres co- lorés dont la teinte est très variable par des solutions de pigments dans le collodion. La justesse des tons des photographies que M. Vogel a obtenues promet un grand avenir à ce procédé, — A. Konig : Un nouveau spectro- photomètre, — M. E.J. G. du Bois présente plusieurs instruments d’une construction nouvelle. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 10 novembre. 1° SCIENCES MATHÉMATHIQUES. — M. O. Tunlirz La den- silé de la terre calculée d'après l’accélération de la pesanteur et l’aplatissement aux pôles. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — Le secrétaire annonce la fin des recherches physiques et océanographiques de la Pola dans l'est de la Méditerranée. — M. Victor Schu- mann: «Sur une nouvelle plaque sensible aux rayons ultraviolets et la photographie des rayons lumineux de petites longueurs d'onde, » L'énergie photographique des rayons ultraviolets en présence des plaques de collodion et de gélatine diminue rapidement à partir —— —— — des rayons correspondant à x = 200 quand on s’avance du côté de la réfraction, si bien qu'à partir de À — 185 il n’y a plus d'action sensible, Le col- lodion et la gélatine qui maintiennent la couche d’ar- cent sont des absorbants puissants ainsi que Pair traversé par les rayons; aussi, en supprimant la pertur- bation apportée par ces deux facteurs, il obtient des plaques beaucoup plus sensibles pour un même rayon et dont la sensibilité se prolonge bien au delà des rayons À — 185. La préparation des plaques sensibles aux sels d'argent pur présente de grandes difficul- tés; l’auteur est parvenu, à obtenir des plaques qui lui donnent de bons résultats. L'air est éliminé en fai- sant le vide dans l’appareil. 20 spectres étudiés dans ces conditions ont tous impressionné la plaque au delà du rayon x — 185,2; les raies ont été d’une beauté re- marquable, mais aucun des spectres n’a donné d’aussi beaux résultats que celui de l'hydrogène dans un tube de Geissler ; l’auteur a pu découvrir 600 raies nouvelles de l'hydrogène dont la longueur d’onde pour les plus pe- tites correspond à À — 100. — M. von Lang présente une plaque sensible de M. Schumann et une photogra- phie du spectre ultraviolet de l'hydrogène. à 3° ScrENCES NATURELLES. — M. Thaddaus Garbowski, à Vienne : Matériaux pour servir à l’étude de la faune de Galicie joints à des recherches biologiques systé- matiques. — M. A. Kreïidl, à Vienne : Nouvelles re- cherches sur la physiologie du labyrinthe de l'oreille. Séance du 17 novembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES, -- M. Josef Baschny : Marche rationnelle pour la décomposition d’un poly- nôme en ses facteurs. — M. Emil Weyr: Sur les quantités algébriques J,2,. — M. Jos. Finger : sur le moment de masses d’un système de points matériels résultant du moment d'inertie et du moment de dé- viation par rapport à un axe quelconque. L'auteur commence par définir le moment de masse et le mo- ment de déviation d’un système de points matériels et établit ensuite des relations entre ces nouvelles quan- tités et le moment d'inertie. 2 SGIENCES PHYSIQUES. — M. Emerich Selch, de Vienne, adresse un mémoire sur la dirésorcine et sa facon de se comporter avec l'acide sulfurique. L’auteur a étudié l’action des oxydants sur les dérivés de la di- resorcine pour obtenir un des acides dioxybenzoïques connus, et établir ainsi la constitution de la dirésor- cine non encore déterminée. L’oxydation de l’éther tétraéthylique de la dirésorcine lui a fourni des résul- tats positifs, il a pu obtenir des cristaux acides, fon- dant entre 97-98 qui présentent tous les caractères de l'acide diéthyloxybenzoïque où les trois groupe- ments CO?2H, OH, OH occupent les positions 1, 2 et #. L’acide sulfurique fournit avec la dirésorcine des pro- duits variables avec la température de la réaction : A froid, il se forme un acide dirésorcinedisulfonique qui fournit un sel de plomb bien cristallisé C2H801(S03)}Ph+4H20 mais avec lequel on ne peut ni préparer l’acide, ni obtenir d’autres sels; à 150-160», l'acide sulfurique denne naissance à une monosulfone de la dirésorcine C12H$ O0* SO? avec laquelle l’auteur a pu préparer un produit tétracétile. — Observatoire de Vienne. Ensemble des observations magnétiques et metéorologiques faites pendant le mois de sep- tembre 1892. — M. Josef Tuma de Vienne : Détermi- nation de la quantité d'électricité supportée par l'air d'un ballon, Emil WEyr. Membre de l'Académie. Erratus. — Rectifions une coquille qui dans la Notice sur Villemin (n° du 15 novembre, p. 7176) a trans- formé le nom de M. Klencke en celui de Koch. Il faut lire : Les Allemands essayèrent d’opposer au nom de Villemin celui de Klencke. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER Paris. — Imprimerie. Levé, rue Cassette, 17. 8° ANNÉE N° 24 30 DÉCEMBRE 1892 REVUE GÉNÉRALE ES SCIENCE PURES ET APPLIQUÉES DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER LE SOIXANTE-DIXIÈME ANNIVERSAIRE DE M. HERMITE Samedi dernier, 24 décembre, une touchante cé- rémonie rassemblait à la Sorbonne des élèves, amis el admirateurs de M. Hermile, désireux de fêler, en même temps que l’entrée de l'illustre Maitre dans sa soixante el onzième année, un demi-siècle de découvertes. La science est en soi chose aristocratique, et la gloire qu'elle procure a ce privilège, — car c'en est un, — de ne point franchir le cercle étroit du monde pensant. Les admirateurs de M. Hermite ont voulu s’y renfermer en donnant un caractère tout intime à leur réunion. Mais celte réunion eût été singulièrement incomplète, si aux éminents mathématiciens, qui l’ont provoquée, ne s'élaient joints des philosophes, des savants de spécia- lités diverses, tous tributaires du progrès général de la science et venus pour saluer, dans l'immense labeur mathématique de M. Hermite, un service de prix rendu à l'esprit humain. Dans l'assistance on remarquait aux côlés du Ministre de l’Intruction publique, qui présidait la séance, M. l'Ambassadeur de Suède et Norwège et M. le Général commandant l'Ecole Polytechnique ; près d'eux, M. Liard, Directeur de l'Enseignement Supérieur; M. Gréard, Recteur de l’Académie de Paris, ayant à sa droite M. Greenhill, de la Société Royale de Londres ; M. Darboux, Doyen de la Fa- cullé des Sciences, ayant à sa droite M. Schwartz, de l’Académie des Sciences de Berlin; M. Perrot, Directeur, et M. Tannery, Sous-Directeur de l'Ecole Normale Supérieure; M. Himly, Doyen de la Fa- culté des Lettres; M. Brouardel, Doyen de la Fa- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. culté de Médecine ; M. Gaston Boissier, Président du Collège de France, M. Milne-Edwards, Direc- teur du Muséum; M. Tisserand, Directeur de l'Ob- servatoire; M. Haton dela Goupillère, Directeur de l'Ecole des Mines; M. Mercadier, Directeur des Etudes Scientifiques à l'Ecole Polytechnique; M. Bichat, Doven de la Faculté des Sciences de Nancy; des membres des diverses Académies de l’Institut : M. Lavisse, de l’Académie Française; nombre de confrères äe M. Hermite à l’Académie des Sciences : MM. d'Abbadie, Président ; Pasteur, Secrétaire perpétuel honoraire ; J. Bertrand, Secré- taire perpétuel; Janssen, Bouquet de la Grye, Friedel, Moissan, Jordan, Poincaré, Picard, Ap- pelltetctetc: Environ soixante Sociétés, qui n'avaient pu se faire représenter à la cérémonie, ont tenu à s'y as- socier par l'envoi de leltres et de télégrammes. Le premier discours a été prononcé par M, Dar- boux, qui a rappelé la carrière scientifique de M. Hermite et rendu hommage à la grandeur de ses travaux. M. Darboux a annoncé que M. Cha- plain a bien voulu se charger de graver, à l'effigie de M. Hermile, une médaille offerte par äe nombreux souscripteurs. Au nom de ces derniers, M. H. Poincaré a pré- senté à l’illustre Mathématicien l’Adresse suivante, dont la lecture a été couverte d’applaudissements : « Cher et Illustre Maitre, « A l’occasion de votre 70° anniversaire, nous désirons vous offrir un témoignage de notre reconnaissance et aussi de notre respectueuse admiration pour tant 24 842 de beaux travaux accumulés pendant un demi-siècle. « Depuis cinquante ans, en effet, vous n'avez cessé de cultiver les parties les plus élevées de la science mathématique, celles où règne le nombre pur : l’Ana- lyse, l’Algèbre et lArithmélique, « Toutes trois vous doivent d’inestimables conquêtes. « À une époque où l’importance des fonctions abé- liennes commencail seulement à êlre soupconnée, après Jacobi, Rosenhain et Güpel, mais avantles grands travaux de Weierstrass ef de Riemann, paraissait votre Mémoire sur la division de ces transcendantes à peine connues, Quelques années après, vous publiiez votre mémorable travail sur leur transformation. « En même temps, vous faisiez vos premières décou- vertes sur la théorie naissante des formes algébriques et, attaquant successivement toutes les questions inté- ressantes de l’Arithmétique, vous agrandissiezet vous éclairiez d’une lumière nouvelle l’admirable édifice élevé par Gauss. « La théorie desnombres cessait d’être un dédale grâce à l'introduction des variables continues sur un terrain qui semblait réservé exclusivement à la discontinuité. « L’Analyse, sortant de son domaine, nous amenait ainsi un précieux renfort, « On peut dire, en effet, que le prix de vos découvertes est encore rehaussé par le soin que vous avez toujours eu de mettre en évidence l'appui mutuel que se prêtent les unes aux autres toutes ces sciences en apparence si diverses, « C'était l’Arithmétique qui recueillait les premiers fruits de cette alliance ; mais l’Analyse en devait aussi largement profiter, «Vos groupes de transformations semblables n’étaient- ils pas en effet des groupes discontinus et ne devaient- ils pas engendrer des transcendantes uniformes, utiles dans la théorie des équations linéaires ? « Pour la même raison vous deviez être séduit par les propriétés des fonctions elliptiques et par cette faci- lité presque mystérieuse avec laquelle on en déduit des théorèmes arithmétiques. L'étude de la transfor- mation et celle des équations modulaires vou ont fourni une riche moisson de découvertes, Vous y rattachiez d’abord le problème du nombre des classes, qu'abordait en même temps un savant dont l'Europe déplore la perte récente; puis la résolution de l'équation du cin- quième degré, cette belle conquête dont l’Algèbre est redevable à l'Analyse. « Enfin vous y trouviez l’occasion de montrerla véri- table nature de la fonction modulaire, qui devait deve- nir le premier type de toute une classe de transcen- dantes nouvelles, « Sans vouloir tout citer, nous ne pouvons cependant passer sous silence vos travaux sur la généralisation des fractions continues. Ces recherches, qui vous ont occupé toute votre vie, ont été couronnées par votre Mémoire sur le nombre et par la création d’une méthode élégante et féconde dont on s’est servi depuis pour établir l'impossibilité de la quadrature du cercle, cette vérité depuis si longtemps soupconnée et récem- ment démontrée, « Uniquement épris de science pure, vous vous êtes rarement préoccupé des applications ; mais elles vous sont venues par surcroit, On ne peut en effet oublier combien votre bel Ouvrage sur l’équation de Lamé, en dehors de son immense fécondité analytique, a été utile aux Mécaniciens et aux Astronomes. « Mais il faut nous arrêter ; car il ne nous appartient pas de rappeler tout ce que la science vous doit; nous pouvons parler du moins de ce que nous vous devons. « Votre enseignement si clair et si élevé; vos écrits si profonds et si suggestifs nous ont appris à comprendre la science; l’exemple de votre vie, qui lui a été con- sacrée tout entière, la chaleur de votre parole dès qu'il s’agit d’el'e, nous ont appris à l’aimer et com- ment il faut l'aimer, L. OLIVIER. — LE SOIXANTE-DIXIÈME ANNIVERSAIRE DE M. HERMITE « Ces idées que vous avezsemées comme sans y penser, quand nous les retrouvons ensuite, et que nous nous efforcons d’en tirer tout ce qu’elles contenaient, vous seriez tenté d'oublier qu’elles sont à vous. Mais nous, nous ne l'oublions pas; et ce n’est pas vrai seulement de ceux d’entre nous qui ont eu la bonne fortune de suivre vos lecons. Ceux aussi qui n’ont subi votre influence que de loin et indirectement n'ignorent pas quel en est le prix et sont également pénétrés de reconnaissance, « Indifférent à la gloire qui vous est venue sans que vous l’ayez cherchée, nous espérons toutefois que vous connaissez trop bien la sincérité de nos sentiments pour repousser ce modeste témoignage de notre res- pect. » Après M. Poincaré, M. Schwartz, au nom de l'Université de Gôttingue et de l’Académie des. Sciences de Berlin ; M. d’Abbadie, au nom de l’Aca- démie des Sciences de Paris; M. Vicaire, au nom de la Société mathématique de France ; M. Bichat, au nom du conseil municipal de cette ville où s’est écoulée l'enfance de M. Hermite, ont pris la parole. M. le Ministre de l'Instruction publique a annoncé, au milieu des applaudissements, qu'un décret présidentiel élevait M. Hermite à la dignité de Grand Officier de la Légion d'Honneur. M. l'Am- bassadeur de Suède et Norwège a remis de la part du Roi à l'illustre savant le Cordon de l'Étoile Polaire, qui n’avait jusqu'à présent que deux di- gnitaires en France : M. le Président de la Répu- blique et M. Pasteur. M. Hermite, très ému, a remercié successi- vement tous les orateurs, et ses dernières paroles, qui ont clos la séance, ont été saluées par une ovation. A l'heure où nous mettons sous presse le pré- sent numéro de la Æevwe, la Sorbonne est encore en fète: M. Pasteur est né trois jours après M. Hermite. La Patrie, qu'il a illustrée, a voulu lui renouveler, à l'occasion de sa 70° année, le témoi- gnage de son éternelle gratitude. C’est seulement dans notre numéro du 15 janvier que nous pour- rous rendre comple de cette imposante cérémonie. De telles fêtes ne sont pas seulement de légi- times hommages à la science et au génie. Au mi- lieu des tristesses et des ignominies de l'heure présente, ce spectacle de deux vies, si noblement consacrées à la recherche désintéressée du vrai, relève nos courages : il nous apprend à ne pas dé- sespérer de notre race; nous y voyons, suivant un mot célèbre de Renan, « la meilleure réponse à ceux qui regardent notre siècle comme deshérité des grands dons de l’âme ». Monsieur Hermite, Monsieur Pasteur, nous nous reconfortons nous-mêmes en vous glorifiant au- jourd’hui, Louis Olivier. W. C. UNWIN. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE LA MÉCANIQUE 843 LES RÉCENTS PROGRÈS DE LA MÉCANIQUE APPLIQUÉE IT. — L’ADDUCTION D'EAU A LIVERPOOL. L'année qui vient de s’écouler restera mémorable dans les annales de l'ingénieur. Elle a vu l’achève- ment de la magnifique distribution d’eau de Li- verpool. Cette distribution venant de la Vyrnwy, avait été commencée en 1879 et poursuivie jus- qu'en 1885 par M. Hawksley et M. Deacon; elle a été terminée par ce dernier ingénieur. C'est un des plus grands exemples de travaux entrepris par les municipalités, rendus nécessaires par l'ac- croissement de la population et possibles grâce au progrès de la richesse et de l'esprit publics. Pour fournir de l’eau à Liverpool, on a dû créer dans les Galles le plus grand lac artificiel de l'Eu- rope en barrant une vallée par un mur gigan- tesque. Le lac contient au delà de 55 millions de mètres cubes d’eau disponible. On l’a calculé pour fournir d’une part 182.000 mètres cubes par jour pour la consommation de Liverpool, et d'autre part 45.000 mètres cubes par jour à la Severne, et en outre, pendant 32 jours par an, 227.000 mètres cubes, à cette même cité, Le mur de barrage, un peu moins élevé que certains de ses semblables en France, est plus long; il a en longueur à peu près le double de celui de la Gieppe en Belgique !. Bien que les barrages en maçonneries datent de longtemps, c’est surtout grâce aux travaux et à la science des ingénieurs français qu'ils ont élé remis en honneur. Depuis la construction de la Vyrnwy, on en à fait encore un grand à la Tansa à Bombay. Ce dernier a une longueur de 3.200 mètres, une hauteur de 36 mètres, une épaisseur de 30"50 à la base; le réservoir peut fournir 500.000 mètres cubes par jour. Aux États-Unis on en a commencé un plus gigantesque encore sur la rivière Croton, pour alimenter New-York. Sa longueur sera de 610 mètres, sa hauteur de 87, sa plus grande épaisseur 65"50, Ce sera la construction la plus hardie du genre. Quant à l'alimentation d’eau de Liverpool,l'eau, prise au niveau le plus convenable, passe par un puits pourvu de toute la machinerie nécessaire, traverse le tunnel de Hirnaut, et de là est conduite par un aqueduc en partie creusé dans le roc, en parlie formé de tuyaux d'un diamètre de 0",99 à 1,06, et ayant une longueur de 109 kilomètres: c'est le plus long aqueduc connu. La traversée de 1 Sa longucur est de 357 mètres; sa hauteur depuis l’as- siette des fondations jusqu’à la voice charriable est de 49 mé- tres; du lit de la rivière au déversoir, 25,60; l'épaisseur à la base est de 36,m60, la Mersey par un aqueduc en tunnel a présenté les plus grandes difficultés. Le tunnel a été percé à travers des sables boulants, des graviers et des vases. À l'origine, l'avancement élaitlent, mais, dès qu'on eût adopté le système Greathead à l'air comprimé, on poussa jusqu'à 17"40 par semaine. Le travail est aujourd’hui complètement achevé, et Liverpool a une distribution supplémentaire d’eau pure de 182.000 mètres cubes par jour. Le projet est formé d'alimenter Manchester de l'eau pure du lac Thirlmere dans le Westmore- land. Nul doute que Birmingham ne suive bientôt le même exemple. Londres aussi, quoique placé à une plus grande distance des sources d’eau pure, et malgré des difficultés provenant d'intérêts lésés, aura, avant cinquante ans, de quoi fournir de l’eau à douze millions et demi d’habilants, ce qui représente un volume dix fois plus grand que celui du lac Vyrnwy. Il. — LE PERFECTIONNEMENT DES MACHINES A VAPEUR, Il y a 125 ans, Wait a fail une invention qui a profondément modifié toutes les conditions de la vie sociale, nationale, commerciale, indus- trielle. Si la population du Royaume-Uni a plus que triplé depuis le commencement du siècle, ce résullat est dû à la machine à vapeur plus qu’à toute autre cause prise isolément. Nous sommes tombés sous la dépendance de la vapeur pour tout ce qui concerne les combustibles, les transports, les manufactures, l'alimentation d’eau, l'hygiène, l’é- clairage. Des statistiques allemandes établissent que l’industrie consomme 49 millions de chevaux vapeur, et les transports par locomotives six mil- lions; les machines marines n'y figurent pas. La machine à vapeur esi devenue un facteur puissant de la civilisation, parce qu'elle fournit le travail mécanique à un prix déjà peu élevé. Les ingénieurs s'évertuent à réduire encore ce prix, et nombre d’entre eux n’ont d’autre occupation que de cher- cher à obtenir le travail mécanique à bon marché. On en fait une consommation considérable pour produire de la lumière ou de la force motrice dans des conditions locales plus favorables que celles que donnerait l'emploi direct de la machine à vapeur. Malgré tout, le rendement de la machine à vapeur est médiocre, et il est ulile de savoir pourquoi et de nous assurer si, et dans quelle mesure, nos con- naissancesscientifiquesnouspermellentde parvenir à l'améliorer. Je vais donc passer en revue quelques- unes des méthodes en usage pour employer éco- 844 W. C. UNWIN. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE LA MÉCANIQUE mm man nomiquement la force motrice ou pour l'adapter à des applications diverses, en l’engendrant à des stations centrales d’où elle serait distribuée; j’es- saierai de montrer que des sources moins coûteuses que la vapeur pourraient être employées au trans- port de l'énergie. Remontons un instant jusqu’à Watt. Ce qui ca- ractérise l'invention de la machine à vapeur, c’est qu'elle est née de recherches scientifiques telles que celles de la relation entre la pression et la température de la vapeur, de la chaleur absorbée pour la produire et du volume qu’elle occupe sous différentes pressions. Quand Watt fut en posses- sion de ces données, il put s'assurer que le poids de vapeur consommée par une pelite machine atmos- phérique qui servait de modèle dans un cabinet de physique, était considérablement plus grand que celui qui correspondait au volume engendré par le piston. Il y avait done perte. Découvrir la cause de la perte conduisait à trouver le remède. Il sépara le condenseur du cylindre et ainsi diminua la con- densation initiale et annula une bonne part de la perte. Walt a pénétré si profondément dans la connaissance de l’action de la machine que, sauf en un point, il n’a laissé à ses successeurs qu'à perfectionner, àaméliorerles détails et l’exécution, à adapter le nouveau moteur à des applications industrielles nouvelles. Dès l’origine il était clair qu'il y avait deux voies à explorer dans le sens du progrès économique : d'une part prolonger la dé- tente (de simples considérations mécaniques indi- quaient ce moyen), d'autre part augmenter, comme le conseillail la thermodynamique, la chute de température el par suite la pression. Mais les efforts des ingénieurs dans ces deux voies finirent souvent par des déceptions. Telles machines de Watt ne consommaient que 2 k. 250 de charbon par cheval-heure ; et bien des machines fonctionnant avec plus de détente et de plus hautes pressions ne consommaient pas moins. C’est que l'obstacle à l’économie gisait dans la même cause à laquelle Watt avait partiellement remédié: l’action des pa- rois du cylindre. Les premières expériences qui ont nettement renseigné à ce sujet sont celles d’Is- herwood faites entre 1860 et 1865. Cet illustre in- génieur a démontré que, dans des machines telles que celles de la Marine des États-Unis, à grands cylindres, à petite vitesse, si on diminuait l'admis- sion en dessous du tiers, on arrivait à une perte. Peu après, Hirn (1871 à 1875) entreprenait ses classiques recherches sur l'action de la chaleur aans une machine de 150 chevaux. Depuis, on n’a plus fait d'expériences ni aussi délicates, ni aussi complètes, ni aussi profondément étudiées; et Hirn, avec ses assistants Hallauer et M. Dwelshau- vers-Dery, a déterminé, une fois pour toutes, la méthode complète pour faire un parfait esssai de machine. Hirn a été le premier à montrer claire- ment que l'indicateur donne le moyen de détermi- ner le poids de vapeur présente pendant chaque période du cycle de la machine. Dès lors, la sur- chauffe étant ordinairement hors de question, nous avons le moyen de déterminer la quantité de chaleur présente et celle qui a disparu pour pro- duire du travail mécanique. Le chaleur fournie à la . machine s’oblient par des observations faites à la chaudière, accompagnées de mesures calorimé- triques pour déterminer le titre de la vapeur; Hirn a été le premier à les entreprendre. La différence, ou la disparition de chaleur dont iln'est pas rendu compte et qui est nécessaire pour établir la ba- lance, représente donc une perte due à des causes à rechercher, Hirn a inauguré une méthode com- plète d'analyse d’un essai, délerminant à chaque phase de l'opération la quantité de chaleur dont on pouvait rendre compte, et celle qu'il fallait ajouter pour établir la balance ; il est arrivé que celle-ci était très considérable. En même temps, des théoriciens, en particu- lier, Rankine et Clausius, avaient achevé la théorie thermodynamique de la machine à vapeur basée sur l’incontestable principe de Carnot. Le résultat de l'analyse de Hirn fut de montrer que ces théo- ries, appliquées à la machine à vapeur réelle, pou- vaient conduire à des erreurs de 50 et même 60 pour cent, pour l'unique raison qu'elles considé- raient comme négligeable l’action thermique des parois, c’est-à-dire l'échange continuel de chaleur entre les parois et la vapeur. En Angleterre, M. Mair Rumley, suivant la mé- thode de Hirn, fit une série d'expériences sur des machines en fonction dans l’industrie, el cela avec grand soin et d'une manière très complète. Toutes ces expériences ont démontré le fait d’une très forte condensation initiale de vapeur contre les parois du cylindre, qu'il soit ou non pourvu d’une enveloppe. L’eau ainsi déposée sur le métal pen- dant l'admission, est réévaporée partiellement pendant la détente et en plus grande quantité pendant l’émission; elle forme ainsi un simple vé- hicule, transportant de la chaudière au condenseur une certaine quantité de chaleur dans des condi- tions qui ne permeltent pas de l'utiliser à la pro- duction du travail. ; Il est devenu évident d’après les expériences de Hirn, sinon d'après celles plus anciennes d’Isher- wood, que, pour toute machine, il existe un degré de détente plus économique que tous les autres. Le P' Dwelshauvers-Dery a, depuis lors, déduit des expériences que la condition pratique du maximum de rendement est que le métal soit à peu près sec à la fin de la détente. Pour produire cette siccité, W. C. UNWIN. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE LA MÉCANIQUE 845 l'enveloppe exerce une grande influence. Malgré les discussions entre praticiens au sujet du béné- fice des enveloppes, il n’existe aucune expérience bien faite qui prouve que l’enveloppe ait causé une perte. Dans les anciens types à marche lente, la règle est que plus l'enveloppe condense de va- peur, plus grande est l’économie, la consommation de l’enveloppe fûüt-elle même de 20 °/, de la con- sommalion lolale. Il parait, cependant, que plus la marche est rapide, moindre est l’influence de l'enveloppe, de manière qu’il existe une vitesse li- mile où elle s’annule à peu près. Parmi les expériences faites spécialement en vue de déterminer l’action des parois métalliques, celles de Willans sont des plus remarquables. La mort prématurée de cet ingénieur est un malheur pour la science. Ses expériences sur machines à vapeur, dont quelques-unes ne sont pas encore publiées, sont de véritables modèles; elles sont graduées en vue d'isoler les effets des principales conditions de marche et ainsi de les étudier cha- cune à part. Les différences de consommalion qui varient de 21 à 8 kilogrammes par cheval-heure pour la même machine fonctionnant dans des con- ditions diverses, sont, croyons-nous, plus grandes qu'on ne l’avait jamais soupçonné ; el elles ont été plus marquées encore par les dernières expériences faites avec des charges utiles inférieures à la nor- male. La première série à pleine charge montrait la supériorité de la machine Compound dans tous les cas, mais la machine triple n’était supérieure à la Compound qu’au delà de certaines limites de pression et de vitesse. Dès 1878, le P' Cotterill avait montré que l’action des parois métalliques était au fond équivalente à celle d’une mince couche de mélal qui suivrait toutes les variations de température de la vapeur. L'extrème rapidité avec laquelle la surface des pa- rois abandonne la chaleur pendant l'émission, esl due à la vaporisation d’une mince couche d’eau déposée pendant l'admission. Dans le régime per- manent, la chaleur reçue par le métal pendant l'admission est entièrement restiluée après la fin de l'admission par la vaporisation de l’eau con- densée. Récemment, le P' Cotterill a poussé plus loin l’analyse du double phénomène de condensa- tion et de réévaporation, et jusqu'à un cerlain point il est parvenu à séparer l’action du métal de celle, plus ambiguë, de la couche d’eau. En négli- geant les actions de moindre importance, il aétabli une formule semi-empirique pour la condensation initiale, qui, dans un certain nombre de cas, s’ac- corde parfaitement avec les résultats d'expériences faites sur des types divers. Il est à espérer qu'avec les données pratiques qui vont s’accumulant, un grand pas sera bientôt fait vers la solution com- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, plète de la question. Sans doute, on trouve des personnes qui dédaignentlesrecherches quantita- tives de ce genre ; elles sont comme un chef d'usine qui conduirait ses affaires sans avoir égard à ses livres de comptes. En outre, les tentatives pour se guider par l'expérience en matière de machines à vapeur, ont échoué chaque fois qu’elles se sont passées du secours de l'analyse scientifique la plus stricte. I n'y a pas une seule question pratique fondamentale sur l’action thermique de la machine à vapeur, la détente, l'enveloppe, la multiplicité des cylindres, qui n’ait reçu des solutions contra- dictoires de personnes qui déduisent des conclu- sions de l’ensemble des essais, sans avoir une con- naissance complète et claire des conditions qui ont influencé les résultats particuliers. Interprétés à la lumière des lois de la thermodynamique, il est peu d'essais dont les résultats ne s'expliquent très clairement. Il n'existe qu'un seul moyen connu, encore que peu répandu, pour combattre directement la con- densation initiale : c’est la surchauffe. Il y a trente ans, l'économie considérable due à la surchauffe a élé démontrée par la pratique. Probablement l’in- venteur l’a attribuée à l’accroissement de la chute de tempéralure ; s’il en a été ainsi, il a fait une er- reur théorique.Car l’action refroidissante du cylin- dre est si grande que la vapeur est ramenée à la saturation avant qu'elle ait eu le Lemps de pro- duire du travail. Mais l’économie de la surchauffe est hors de doute, et elle est surprenante si l’on considère le peu de chaleur à dépenser pour l’ob- tenir. L’excès de chaleur apporté dans le cylindre réduit l’action des parois au point de rendre l’en- veloppe superflue.La surchauffe a été abandonnée pour des considéralions purement pratiques,parce que les appareils de surchauffe élaient dangereux. Récemment elle a été de nouveau essayée par M. Walthère-Meunier à Mulhouse, et ses essais sont intéressants par le fait que les pressions étaient plus élevées qu'anciennement, et que la machine élait une Compound. Même avec un foyer indé- pendant, la surchauffe a donné une économie de vapeur de 25 à 30 °/,,el une économie de combus- tible de 20 à 25 °/,; quatre chaudières avec la surchauffe donnaient le même rendement que cinq sans surchauffe. e Il faut remarquer que, si l’on élait en possession d’une méthode sûre de surchauffe, l'avantage de la machine triple sur la Compound serait de beaucoup diminué. La triple expansion s’adaple fort bien aux machines marines, mais pour les autres, elle est plus coûteuse et moins élastique si la charge est variable. On ne diminuera plus de beaucoup la consom- mation des bonnes machines, mais celles-ci sont 2t* 846 W. €. UNWIN. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE LA MÉCANIQUE rares et il y a beaucoup à faire pour améliorer les autres. Les plus économiques ne dépensent que 5 !/, à 6 kil. de vapeur par cheval-heure indiqué, ce qui correspond à une ulilisation de 16 °/, dela chaleur dépensée, ou, sil'on prend le cheval-heure au frein, à43 °/,. Si l'on y comprend la perte à la chaudière, le rendement total est réduit à 9 °/4. Mais il existe des machines chez lesquelles le même organe sert de foyer et de cylindre, machines à gaz ou à l’huile, et dont le rendement thermique est double du précédent. III. -— LE TRANSPORT DE L'ÉNERGIE DES CHUTES D'EAU. En 1878, M. Kaston exprimait l'opinion que la question des moteurs hydrauliques méritait plus d'attention qu’on ne lui en accordait généralement alors, et il attribuait le manque d'utilisation des cours d'eau aux variations considérables de leur débit. Les progrès accomplis depuis lors dansla tranc mission de l'énergie à de grandes distances ont donnéune importance nouvelle à la question des chutes d’eau. Il est probable qu'avant peu de temps leur utilisation s'effectuera sur une grande échelle, sans précédent, et d'une manière si économique qu'un mouvement industriel se produira vers les districts riches en force hydraulique disponible. Il ne faut pas remonter au delà du milieu du siècle dernier pour trouver lemoment où l’industrie textile, de domestique qu’elle était, est devenue manufacturière. La navette date de 1750, le métier à filer de 1767, et les machines Crampton n'ont élé d’un usage général qu'en 1787. On trouva bientôt que les nouvellesmachiness’accommodaient mieux d’un mouvement de rotation continu produit d’abord par la force motrice ; après y avoir employé des chevaux, on eut généralement recours aux chutes d’eau. Dans une brochure intéressante sur les progrès del’industriecotonnière, John Kennedy de Ardwick Hall (1815) remarquait que la nécessité de mettre les fabriques près des chutes d’eau avait le désavantage de les déplacer des endroits où se trouvaient d'habiles ouvriers el aussi des marchés où les marchandises s’écoulaient aisément. Néan- moins Kennedy rapporte que, peu de temps après qu'Arkwright eut édifié sa première filature à Cromford, toutes les grandes filatures furent bâties près des chules d’eau, parce qu'aucune autre force motrice ne semblait pouvoir s’y adapter avantageusement. Vers 1790, dit Kennedy, la machine à vapeur de Walt commença à être com- prise, et la force hydraulique diminua de valeur. Au lieu de transporter la population ouvrière vers la fabrique, on commença alors à établir la fa- brique au milieu de la population ouvrière. La vapeur a concentré la population industrielle en quelques grandes communautés et restreint les opérations manufacturières aux grandes fabriques. Économie de force motrice, de surveillance, avan- lage de la division du travail, prix des métiers, tout favorisa la création des grandes fabriques. Les conditions sociales des centres manufacturiers ont été profondément influencées par deux choses : 1° le charbon nécessaire à la production de la va- peur peut facilement être apporté là où il en manque, et 2° la force motrice de la vapeur est d'autant moins coûteuse qu'elle est produite plus en grand. On dirait qu'aujourd'hui même ces eon- ditions vont être renversées, que la tendance ac- tuelle est contraire. Remarquons d’abord que la force motrice de l'eau, là où elle existe, est tellement à meilleur marché et mieux appropriée que celle de la va- peur, qu’elle n’a jamais été vaincue par celle-ci. D’après Weissenbach, en 1876, les chutes d’eau utilisées dans la Suisse représentaient ensemble une force de 70.000 chevaux. Un recensement de 1880 compte, pour les Etats-Unis, une force to- tale de 3.400.000 chevaux, dont 2.185.000, ou 64°}, pour les machines à vapeur, et 4.225.000, ou 36 °/, pour les machines hydrauliques. Les manufac- tures de coton, de laine, de papier et les moulins à farine empruntent 760.000 chevaux à l’eau et 515.000 à la vapeur. Si l’on avait les statistiques pour d'autres pays, on trouverait sans doute que les chutes d’eau sont utilisées sur une très grande échelle. La firme Escher Wyss et Cie, de Zurich, a construit plus de 1.800 turbines représentant en- semble 111.460 chevaux. À peu d’exceptions près,toute force hydraulique est utilisée dans le voisinage immédiat du coup d'eau. Si l’on avait un moyen commode de trans- porter l'énergie du lieu de production à l'endroit où la consommation est la plus avantageuse, il n’y a pas de doute que bien des chutes d’eau seraient mises en valeur qui sont aujourd'hui négligées ; et, dans plusieurs contrées, l'importance relative de la vapeur et de l’eau serait probablement in- versée. C'est parce que les récents progrès de la science semblent avoir rendu ce transport possible sans trop grande perte et à un prix peu élevé, que l'intérêt a été porté vers l’utilisation de la force hydraulique. La Suisse, par exemple, paie aux autres nations un tribut annuel de 20 millions de francs pour s’alimenter de combustible. La force motrice que, dans tout le pays, on pourrait re- cueillir, ne va pas à moins de 582.000 chevaux, dont on n'utilise que 80.000. L'an dernier j'ai vu que toutes les grandes usines de la Suisse se pré- paraient à utiliser l’eau en transportant l'énergie à une plus ou moins grande distance. Outre les grands projets en exécution à Shaffhausen, Belle- garde, Genève, Zurich, on se propose d'emprunter W. C. UNWIN. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE LA MÉCANIQUE 847 10.000 chevaux à la Dranse près de Martigny. Il est donc aiséde voir que le problème du trans- port et de la distribution de l'énergie, c’est-à-dire la transformation de l'énergie mécanique en une autre, équivalente, facilement transportable et facilement utilisable, est maintenant de grand intérêt pour les ingénieurs. A part les besoins des manufactures, il y a aussi une demande croissante de distribution de force motrice facilement maniable dans les grandes villes : pour les tramways, les ascenseurs, la ma- nipulation des marchandises, les petites industries, la lumière électrique, l'hygiène. Jusqu'ici, ce sont des machines à vapeur ou à gaz qui y ont pourvu, et ellesétaient placées au lieu même de consomma- tion, mais cette génération sporadique d'énergie mécanique est coûteuseetanti-économique, surtout pour un travail intermittent; carla conduite etl’en- tretien coûtent cher, et les risques d'accidents sont grands. Pour cette raison, on songe à établir de vastes générateurs de travail mécanique placés à des stations centrales qui le distribuent sous une forme utilisable par des moteurs moins compli- qués que la machine à vapeur. De même que, dans les grandes villes, ilest de- venu nécessaire de substituer une distribution gé- nérale d’eau aux moyens particuliers -employés par les habitants ; de même qu’on a trouvé utile de faire des distributions de gaz et de chaleur, et des réseaux systématiques d’égouts; de même proba- blement on trouvera nécessaire de distribuer la force motrice à un prix proportionnel à la quantité employée etsous une forme qui la rende facile- ment utilisable, soit directement, soit par l’inter- médiaire de moteurs dont la conduite n’exige pas une habileté extraordinaire. Disons donc quelques mots des moyens de dis- tribution, et notamment de la transmission télé- dynamique. En 1850, à Logelbach en Alsace, Fer- dinand Hirn employait une courroie plate en acier pour transmettre directement la force à 80 mètres de distance. Plus tard, il y substilua un càble rond avec poulies à gorge, et s’en trouva si bien qu'il l’employa pour une distance de 240 mètres. Il étudia les détails de ce système avec un soin ex- trème en vue d’assurer la moindre dépense pre- mière, la moindre perte d'énergie, la plus grande |, durée des cäbles. Ce système se répandit avec tant de succès que, dans l’espace de 10 ans, M. Martin Stein de Mulhouse avait établi 400 transmissions représentant une force totale de 4.200 chevaux et une longueur de 72 kilomètres. Précisément àla mème époque, Moser, un manu- facturier de Schaffhausen, homme très capable et ayant des vues larges, avait formé le projet de res- susciter les industries de sa ville en utilisant une parlie des chutes du Rhin :c'est le système de Hirn qui rendit l’idée réalisable. Les travaux furent commencés en 1863. Trois turbines de 150 chevaux furent installées sur des chutes de 3" 50 à 5 mètres, créées en barrant le fleuve. La force des turbines est transmise par deux cäbles en une travée de 120 mètres d’une rive à l’autre du fleuve; des câbles semblables vont de là aux usines situées le long de la rive. En 1870, la trans- mission allait à une distance de 1.036 mètres. Le travailse vend àraison de 125 à 150 francs par cheval annuel, En 1886 il y avait23 consommateurs payant une rente de 87.500 francs. C'élait une bonne affaire financière ; elle continue loujours. A Zurich, à Freiberg, à Bellegarde, il y a des instal- lations semblables ; on projette d’en faire une très grande à Gokak dans l'Inde. Le câble télédyna- mique est peu coûteux et ne donne lieu qu'à des pertes insignifiantes. Il est assez maniable pour transmettre la force à des distances modérées, et à un petit nombre de fabriques. Mais il présente le défaut d’être encombrant pour de grandes forces de 600 ou 1.000 chevaux. L’usure des càbles, qui ne durent guère qu'un an, est plus grande qu'on ne croyait d’abord, et constitue une source defrais annuels considérables. L'introduction des distributions d’eau sous pres- sion est due à Lord Armstrong. Elles exigent : une station centrale où l’eau est refoulée dans un accu- mulateur par des pompes, un réseau de tuyaux distributeurs, des moteurs appropriés. Dès leur apparition, on reconnut les avantages qu’elles pré- senlaient pour des travaux intermittents tels que l'élévation des fardeaux par les ascenseurs, leur manipulation dans les docks, les grues, etc. Mais, de l’intermittence de la dépense découlait lanéces- sité d’accumuler l’énergie durant les périodes de moindre dépense pour la restituer lors des grandes demandes. L'invention de l'accumulateur par Armstrong fil le succès de la transmission hydrau- lique et fixa du coup la condition de son emploi économique : l’intermittence du travail à faire. Le système Armsirong, avec une pression de 50 à 55 almosphères, est fort en usage aujourd'hui. La plus grande installation est celle de la Æydraulie Power Company. Les rues de Londres comptent aujourd'hui plus de 80 kilomètres de conduite principale. La station du #alcon Wharf contient quatre installations de pompes mues par des ma- chines Compound de 200 chevaux chacune, On y a ajouté deux autres stations, et 1.500 ascenseurs sont branchés sur la mailresse conduite. Le prix minimum est de fr. 0.55 le mètre cube, prix avan- tageux pour des services intermittents comme ce- lui des ascenseurs, mais qui serait désastreux pour un service continu ; car il équivaudrait à 1.250 fr. 848 W. C. UNWIN. — LES RÉCENTS PROGRÉS DE LA MÉCANIQUE par cheval et par année de 3.000 heures, sans compter ni l'intérêt, ni l'amortissement, ni l’en- trelien des machines. C’est plus du quintuple de ce que coûterait la vapeur. Parfois cependant, des conditions locales per- mettent de distribuer à bon marché, par eau sous pression, la force motrice à des manufactures où le travail est continu; le cas se présente quand on peut créer de grands réservoirs à une grande hau- teur. Mais ni la transmission télédynamique, ni la transmission par eau sous pression ne présentent les qualités nécessaires à la distribution de l’éner- gie, partant d’une station centrale. On a essayé la vapeur et l’eau chaude en Amérique, mais sans réel succès. Il n’y a que deux autres systèmes pos- sibles : l’air comprimé et l'électricité. Depuis longtemps l'air comprimé a été utilisé au transport de l'énergie à distance dans le perce- ment des tunnels ou des galeries de mines. Ce n’est que récemment qu'il l’a été à une distribu- tion très ramifiée de force par station centrale. Dans plusieurs cas l'installation était faite grossiè- rement, contrairement aux principes et à toute science, en sorte que la perte d'énergie élait con- sidérable. C’est l’expérience du système Popp à Paris, qui a démontré les avantages de l’air com- primé. Ce système s’est développé graduellement, Vers 1870, il existait une très petite station qui ne servait qu'à transmettre l’heure à des horloges publiques ou privées par des impulsions intermit- tentes d'air produites dans des tuyaux inslallés principalement dans les égouts. En 1889 il y avait environ 800 horloges ainsi actionnées. Entre temps, l'air comprimé avait été aussi employé à alimenter des moteurs pour la petite industrie. La demande de force motrice s’accrut si rapidement qu'on dut ériger une seconde station rue Saint-Fargeau. En 1889, les compresseurs employaient 2.000 chevaux de force et on en construisait de nouveaux. La pression était alors de 5 atmosphères et les maitresses-conduites avaient 0"30 de diamètre. Comme moteurs pour les petites forces, on em- ployait de simples machines rotatives et, pour les grandes, des machines à vapeur converties en ma- chines à air comprimé. Le P' Kennedy à fait en 1889 des essais qui ont été communiqués à la Bri- tish Association. Il a trouvé qu'un moteur à 6 1/2 kilomètres de la stalion indiquait 40 chevaux pour une consommation qui avait coûté 20 chevaux à la station, soit un déchet de 50 % seulement. Il y avait alors 225 de cesrécepteurs qui s’alimentaient à Ja maitresse-conduite. Depuis 1889 des recherches plus étendues ont été faites par le P' Riedler, de Berlin, et la majeure partie de la perte a été attribuée à des défauts des compresseurs. On a, en conséquence, remplacé ceux-ci par des compresseurs Compound d’un rendement plus élevé. L'installation de Saint-Far- geau a été portée à 4.000 chevaux. On a érigé une nouvelle station au quai de la Gare, qui pourra fournir jusque 24.000 chevaux de force. Des com- presseurs de 10.000 chevaux sont déjà en cons- truction. La transmission par air comprimé, qu’elle soit ou non la plus économique, se prète fort bien à la distribulion sur une grande échelle et à de très grandes distances. Elle ne présente aucun principe nouveau, ni rien qui soit imparfaitement compris. L'air est employé dans les ateliers du consomma- teur au moyen de machines bien connues, parfois d'anciennes machines à vapeur légèrement trans- formées, mais sans qu'on n'ait rien changé aux transmissions intérieures. Point important: la quantité d'air employée peut être pratiquement bien mesurée au moyen de simples compteurs, et ainsi la force payée en raison de la consommation. Le rendement des compresseurs et des moteurs à air n'est pas aussi élevé que celui des dynamos et des moteurs électriques; mais à d’aulres points de vue, les distributions par l'air et par l'électricité sont équivalentes. Pour des dislances qui ne dé- passent pas quelques kilomètres, la perte due à la transmission est petite et même insignifiante. En ce qui concerne la distribution électrique je serai bref pour deux raisons : la première est que je ne suis guère expert en électricité, la seconde, que cette question a élé déjà amplement discutée. Aux États-Unis, il y a énormément de tramways élec- triques; en Angleterre, nous avons le South London et quelques autres; il y en a d’autres sur le conti- nent el notamment à La Haye en Hollande. Mais les distributions électriques de force motrice à des industries privées, par une station centrale, sont très rares, beaucoup plus rares qu’on ne s’y serait attendu, peut-être parce que les ingénieurs élec- triciens ont élé trop absorbés par l'étude de la distribution de la lumière. On peut citer plusieurs exemples de distribution par courant continu, entre autres celui d’'Oyonaz, décrit minutieusement l’an dernier par le P°G. For- bes. Là 300 chevaux générés par une turbine sont transmis à 8 kilomètres à la tension de 4.800 volts. Au bout de la conduite, la tension est réduite mé- caniquement à ce qu'elle doit être pour la lumière et l'alimentation des moteurs. Un bon nombre de petits moteurs utilisent la force transmise moyen- nant une rente annuelle fixe. Aux mines de Calumet et Hécla sur le lac Supé- rieur, aux mines de Dalmatia en Californie, et dans | quelques autres endroits, l'énergie générée par des turbines est transmise à quatre ou cinq kilomètres par des courants électriques continus, à des mo- W. C. UNWIN. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE LA MÉCANIQUE teurs employés aux travaux; et, l'an dernier, mon prédécesseur dans cette chaire a décrit plusieurs distributions faites dans les travaux mêmes. À Bradford, quelques moteurs sont branchés sur les conducteurs pour la lumière ; le plus fort est de 20 chevaux. Le prix auquel la force motrice est livrée n’est pas indiqué, mais il doit être élevé, surtout quand la dépense est ininterrompue et l'énergie engendrée par une machine à vapeur. A Schaffhausen, on vient de faire une transmis- sion électrique parallèlement à l’ancienne trans- mission hydraulique. Deux turbines y sont em- ployées; la transmission se fait à 750 mètres à 624 volts. Elle actionne une filature dans laquelle le plus fort moteur est de 380 chevaux. Le prix du cheval par année est de 75 francs. Nombre d'ingénieurs en sont venus à croire que les courants alternatifs élaient préférables pour les grandes distances. On les a appliqués à Gênes à la distribution de la lumière et de la force mo- trice. On a établi trois slations sur l’aqueduc qui amène les eaux de la Gorzente. Les réservoirs sont à 625 mètres au-dessus de Gênes, et, comme la pression est beaucoup plus qu'il ne faut pour les eaux alimentaires, on peut en retirer 4.600 chevaux de force, Dans la station érigée la première, il y a des turbines de 450 chevaux actionnant deux dynamos. En novembre dernier, la seconde a été achevée. Il s’y trouve 8 dynamos à courants aller- natifs, de 70 chevaux chacune. Six allernateurs sont actionnés en série, transmettant un courant de 6.000 volts, à 25 kilomètres de distance par un simple fil de cuivre de 85 mill. Le courant est utilisé au travail mécanique comme à la lumière. C'élaient des courants alternatifs qui ont été sou- mis aux essais dans la remarquable expérience faite l'an dernier à Francfort. L'énergie générée par des turbines à Laufen était transmise à Franc- fort, soit à une distance de 170 kilomètres. Le cou- rant élait engendré à basse tension, porté ensuite à 18 et même 27.000 volts pour la transmission, puis réduit à basse tension de nouveau pour la distribution. La perte dans les conducteurs variait entre à chevaux quand ils transmettaient 100 che- vaux, et 25 chevaux quand ils en transmettaient 200. Le rendement de la dynamo, des deux trans- formateurs el du fil était de 68 à 75 °/,, résultat remarquablement salisfaisant. Il n'y a pas de doute que, si l’on parvient à faire des transformateurs économiques et susceptibles d’une longue durée, le système du courant alter- natif aura un avantage considérable aux yeux d'un ingénieur ordinaire ; il semble aussi que la cons- truction des dynamos et des moteurs pour les pe- tites tensions soit plus conforme aux errements de la mécanique que pour les hautes. 849 J'ai parlé des demandes de plus en plus fré- quentes d'une distribution d'énergie dans les villes sous une forme appropriée. Les distributions par pression d'eau à Londres, Manchester, Bir- mingham et Liverpool, par air comprimé à Paris, montrent combien les clients s’empressent dès que la marchandise est à leur portée. L'exemple de la petite ville de Genève mérite aussi d’être cité. En 1871, peu après l’achèvement de la distribution à basse pression, le colonel Turettini demanda au Conseil municipal l’antorisation de placer une ma- chine à pression d’eau sur les conduites pour ac- tionner la fabrique de la Société pour la fabrication des instruments de physique. Le projet eut un tel succès que, neuf ans après, en 1880, il se trouvait à Genève 111 moteurs hydrauliques s’alimentant aux conduites à basse pression, dépensant un mil- lion de mèlres cubes annuellement et payant en- viron 50.000 franes à la municipalité. Le prix du cheval s'élevait par an de 900 à 1.200 francs pour 3.000 heures. Mais ce prix élevé n'empêchait pas les consommateurs de rechercher ce moyen aisé d'obtenir la force motrice. Depuis lors, on a établi un service à haute pression, l’eau étant refoulée du Rhône au moyen de turbines. Le prix du cheval est tombé à 200 francs environ par année. En 1889, la vente de l’eau à basse pression rapportait annuellement 52.200 francs et celle de l’eau à haute pression, 412.500 francs. Pour le système à haute pression, la recette en 1889 en élait à une augmentation de 22.000 francs par année. Cette même année, rien que pour le système à haute pression, la force motrice en distribution montait à 1.500.000 chevaux-heure fournis par 19 moteurs d’une force totale de 1.279 chevaux. À Zurich il existe un semblable système de dis- tribution. En une année, il a été consommé 9.000.000 de chevaux-heure pour la somme de 30.000 francs. IL faut noter que toute cette force distribuée à Genève et à Zurich est obtenue par de l’eau qui a dû être élevée au moyen de pompes, et que le bon marché est dû à ce que les pompes sont actionnées par des moteurs hydrauliques dont le travail ne coûte presque rien. Mais en outre, à Genève comme à Zurich, les dynamos qui produisent la lumière électrique sont aussi actionnées par des turbines recevant l’eau de la distribution. La hauteur de chute que l'on peut obtenir par les rivières est petite et très variable. Il y faut donc de grandes turbines susceptibles de marcher à des vitesses diverses. Comme il est coû- teux d'employer de grandes turbines à marche lente pour attaquer directement des dynamos dont la charge n’est considérable que pendant une petite partie du jour, on a fait en sorte que les turbines à basse pression installées à la rivière 850 W. C. UNWIN. — LES RÉCENTS PROGRÈS DE LA MÉCANIQUE élèvent l’eau à une hauteur constante. De là l’eau motrice descend dans les turbines à haute pression qui actionnent les dynamos, de manière que, pour celles-ci, la hauteur motrice est constante el leur vitesse régulière et facile à régulariser aux cas où la résistance vient à varier. Le système semble constituer un cercle vicieux; mais il est parfaite- ment rationnel et économique. Peu de personnes ont pu voir les chutes du Niagara sans remarquer qu'il s’y perd d'énormes quantilés d'énergie. La constance exceptionnelle du débit, l’invariabilité des niveaux, l'épaisseur d’eau au-dessus de l’escarpement, la solidité du roc, tout en un mot désigne Niagara pour devenir une station parfaite de génération hydraulique d'énergie; et d'autre part, les remarquables faci- lités de transport, tant par bateaux sur le lac que par les quatre voies ferrées qui y aboutissent, cons- tiluent des éléments commerciaux de la plus haute importance. D'un bassin de captation qui a plus de 600.000 kilomètres carrés, superficie supérieure à celle de la France, un volume d’eau de 58.500 mètres cubes par seconde descend du lac Érié dans le lac Ontario, d’une hauteur de 99%, 36 sur une distance de 60 kilomètres. En sup- posant possible d'utiliser tout ce coup d'eau, il représenterait 7 millions de chevaux, c'est-à-dire plus du double de la consommation totale actuelle des États-Unis. Immédiatement sous les chutes, la rivière se courbe à angle droit et coule à travers une gorge étroite. La ville de Niagara Falls, du côté américain, occupe le plateau dans cet angle. Les premiers qui s’établirent près des chutes construisirent en 1725 des moulins sur les ruis- seaux de la Upper River pour préparer les bois. Plus tard, la famille Porter bâtit des fabriques sur les iles dans les rapides en amont des chutes. Ce n’est cependant que depuis trente ans environ qu'on a fait des tentalives systématiques pour uliliser le coup d’eau. On construisit d’abord un canal à parlir de Port-Day, à environ 1.200 mètres en amont des chutes, jusqu’à une baie le long du rocher qui surplombe la rivière. En 1874 ful établi le moulin de la cataracte qui emprunte la force motrice à ce canal; d’autres vinrent ensuite jusqu'à une force de 6.000 chevaux. Ces moulins ont prospéré, mais l’idée que l'on allait détériorer une des plus grandes beautés naturelles se fit jour, etil n'y eut plus possibilité de donner une exten- sion nouvelle à ce travail. C'est feu Thomas Evershed, ingénieur pour les canaux de l'État de New-York, qui a eu l’idée d’une méthode d'utilisation des chutes, susceplible de développement et qui ne gâterait pas l'aspect du rocher par l’écoulement des eaux de décharge, comme c'élait le cas pour les moulins montés sur | | le canal. Il proposait de creuser des canaux d’ad- duction dans des terrains inoccupés, à environ trois kilomètres en amont des chutes. L'eau amenée tomberait dans des puits verlicaux pourvus de turbines, et se rendrait ensuite en tunnel de ces puits à un canal souterrain principal qui les conduirait à la rivière. À part une imperceptible diminution du débit des chutes, ce projet ne chan- geait en rien le paysage el créait une chute effec- live de 65 mètres. Il prit vite un corps et, en 1886, la Compagnie des Niayara Falls obtint son acte d'incorporalion, avec droit d'option sur les ter- rains s'étendant depuis Port-Day jusqu'à deux milles au delà le long des chutes. En 1889, la Société Cataract Construction fut fondée en vue d'amener le projet à malurité et de faire les travaux d'art. Le projet est aujourd’hui de créer une force effective de 100.000 chevaux. Le plus grand des travaux d'art consiste en un tunnel de 2.210 mètres destiné à recevoir la décharge des turbines. IL part des terrains appartenant à la Société et aboutit à la rivière. Il a une section de 5",80 sur 6,40, soit 35,9 mètres carrés; l'épaisseur des maçon- neries y est de 0%,40. Son assielte est à 62,50 en dessous de la prise d’eau et donne 42%,66 de chute dispouible aux turbines. Sur une longueur de 70 mètres à partir de la tête, la maçonnerie est recouverte de plaques protectrices eu fonte. Ce tunnel a été creusé avec une remarquable rapidité à l’aide de perforatrices à l’air comprimé. Le principal canal d'amenée, d'environ 67 mètres de largeur, longera la rivière sur une longueur de 1.500 mètres, et communiquera avec elle aux deux extrémités. Près du point le plus bas, la Société Soo Paper se monte déjà pour utiliser 6.000 che- vaux; les turbines déchargeront leurs eaux dans un tunnel spécial qui les conduira au tunnel prin- cipal. Tout près du même endroit seront placées deux slations principales de générateurs d’où l'énergie sera distribuée soit par l'électricité, soit par d’autres moyens non encore arrêtés. Les tur- bines de ces stations sont du type Fourneyron, de 5.000 chevaux; leur axe vertical activera des dynamos ou autres machines. Evershed avait projeté d’abord de distribuer l’eau aux consommateurs par des canaux à ciel ouvert, en sorle que les consommateurs auraient eu à creuser eux-mêmes leurs puils, à y installer leurs turbines, ct à faire leur tunnel jusqu'au grand collecteur. Sans doule une partie de la chute sera ainsi utilisée; les usines exigeant une force motrice très considérable, auront intérêt à s'as- surer une concession individuelle et des droits; mais il n'en est pas de même des petiles in- dustries; pour elles il vaut mieux distribuer la force motrice à partir d’une station de produc- N. GRÉHANT. — DOSAGE DU GRISOU ET DE L'OXYDE DE CARBONE 851 tion où est concentrée la surveillance. Et, quand on sera en possession de moyens de distribuer la force motrice au lieu d’eau, on pourra donner une grande extension au projet. Outre les industries de Niagara, on pourrait alimenter celles de Buffalo et de Tonawanda. On a déjà pris des dispositions pour transmettre 3.000 chevaux à une station d'éclairage électrique, à Buffalo, soit à 29 kilomètres de distance. En 1890, M. Adams, le Président de la Société de Niagara Construction, visitait l'Europe pour exa- miner les systèmes de distribution de force mo- trice. Ce fut à la suite de cette visite que l’on pensa à substituer une distribution de force à une distri- bution d’eau. Les ingénieurs américains désiraient avoir l’avis de ceux de l'Europe sur les méthodes les mieux appropriées aux conditions locales. Une Commission fut constituée, composée de Lord Kelvin, de MM. le D° Coleman Sellers, le P' Mas- cart et le Colonel Turettini; elle invita les ingé- nieurs américains et européens à un concours pour l’utilisation de la force motrice des chutes du Niagara et sa distribution aux consommateurs de Niagara et de Buffalo par l'électricité ou autre- ment. Un bon nombre de concurrents ont pré- senté des projets très soignés et très complets. Quant à la partie hydraulique, ils étaient d’accord entre eux; mais pour la distribution de la force motrice, les projets élaient les plus divers. Généralement la Commission préférait l’électri- cité, mais avec l’auxiliaire de l’aircomprimé. Géné- ralement aussi elle préférait les courants continus aux courants alternatifs. Depuis que ses Rapports ont été faits, les expériences de Francfort-Laufen ont élé exécutées, et, suivant l'opinion de quelques électriciens, il y a un véritable revirement vers l'emploi des courants alternatifs et des hautes tensions. La Société n’a encore pris aucune décision quant aux projets de station centrale, si ce n’est comme essai provisoire. On établira une ou plusieurs lur- bines de 5.000 chevaux, qui, probablement, ali- menteront Buffalo au moyen de courants alterna- tifs. À Buffalo on a compté que le prix du cheval par année était de 175 francs. Je crois que la Société pourra le fournir au tiers de ce prix pour les grandes forces, un peu plus pour les petites, et en comptant des journées de 24 heures. La nou- velle industrie de l'éclairage électrique a rendu né- cessaires les grandes provisions de force motrice. La traction électrique exige aussi des espèces de magasins de force motrice. Les nouveaux procédés chimiques et métallurgiques, qui ne cessent de s'introduire, présentent les mêmes exigences et veulent de la force motrice à bas prix. Niagara deviendra probablement non seulement un grand centre de production d'articles connus, mais encore le berceau d'importantes industries nou- velles 1, W. C. Unwin, de la Société Royale de Londres, Professeur de Génie civil à l’Institution Centrale de la Cité. RECHERCHE ET DOSAGE DU GRISOU ET DE L'OXYDE DE CARBONE La recherche du grisou dans les galeries de mines de charbon occupe depuis longtemps les ingénieurs; elle offre un très grand intérêt, puisqu'elle permet d'éviter les accidents qui se produisent encore très souvent lorsque le grisou, qui contient surtout du formène ou protocarbure d'hydrogène, est mélangé avec l'air en cerlaines proportions. Autrefois, c'était seulement par l'observation de la lampe de sûrelé que l’on reconnaissait la pré- sence du grisou dans l'atmosphère d’une mine; d’après les travaux de M. Mallard, inspecteur géné- ral des Mines, ce n’est qu'à partir de 6, 7 °/, que la lampe Mueseler donne des indications par l’auréole bleue qui entoure sa flamme: à ce moment, le dan- ger d'explosion est manifeste. Il était donc important d'employer un instru- ment plus exact; aussi M. Coquillion a-t-il rendu un grand service en imaginant le grisoumètre qui porte son nom et que j'ai appliqué, en le modifiant légèrement, à la recherche du grisou, ce qui inté- resse les mineurs, et à la recherche de l’oxyde de carbone, ce qui intéresse les hygiénistes et tous ceux qui emploient des appareils de chauffage dégageant dans l'air une certaine quantité d'oxyde de carbone. J'ai cherché à rendre faciles et aussi exacts que possible, les procédés de recherche et de dosage qui ont lieu exclusivement sur l'eau, et j'ai essayé d'établir une technique spéciale que je voudrais vulgariser. Je diviserai mon travail en deux parties : 1° Recherche et dosage du grisou; 2° Recherche et dosage de l’oxyde de carbone. 1 Extrait d’un mémoire présenté par M. le P° Unwin à la British Association for the Advancement of Science. TJ. — RECHERCHE ET DOSAGE DU GRISOU. Comment peut-on recueillir de l'air dans une galerie de mine afin de l’analyser ensuite dans le laboratoire qui doit être annexé à toute exploi- tation importante? Rien n’est plus simple : on descend dans les galeries avec un aide qui porte dans un panier plusieurs flacons pleins d’eau fermés par des bouchons de caoutchouc et munis d'étiquettes et de numéros; on fait vider chacun de ces flacons en différents points déterminés des galeries, qui sont désignés au crayon sur l’éti- quette; on fait rapporter au laboratoire les fla- cons, qui sont ensuite soumis à une série de re- cherches faites aussi promptement que possible. Tout d’abord, l’air contenu dans un flacon peut renfermer de l’acide carbonique, que l’on absorbe en fermant le col du flacon ouvert dans une cuve à eau avec un bouchon traversé par un petit tube à essai rempli d’unesolution concentrée de potasse; en agilant les gaz avec cette liqueur alcaline, on obtient rapidement l'absorption totale de l'acide carbonique. Si le gaz restant renferme du grisou, on ne sait pas dans quelle proportion il est contenu; aussi il est prudent de commencer par faire une analyse eudiométrique,car si l’on employait d’abord le gri- soumètre dont les parois sont minces, cet appareil ferait explosion, si la proportion du grisou appro- chait de la limite dangereuse. Pour donner un exemple d'emploi de l’eudio- mètre, je citerai une analyse de grisou que M. Le- bois, Directeur de l'École professionnelle de Saint- Étienne, a bien voulu m'envoyer; ce gaz a été obtenu de la manière suivante : On a creusé dans le sol, dans la houille, un petit bassin en forme de cuvette qui a été rempli d’eau, et on a percé deux trous parallèles d’une profon- deur égale à un mètre; le gaz qui s’est dégagé a été recueilli avec un entonnoir dans un flacon plein d’eau, comme s’il s'agissait de recueillir du gaz des marais. Pour faire l'analyse du grisou qui était conservé sur l’eau, j'ai fait passer dans l’eudiomètre gradué tout semblable à l'eudiomètre de Bunsen, 23° de gaz et un excès d'oxygène; le volume du mélange était égal à 89°, 1; j'ai fermé le tube avec un, bou- chon de caoutchouc traversé par un robinet de laiton ; après avoir agité les gaz, j'ai aspiré à l’aide d'une trompe, d'une pompe à main ou d’une se- ringue l’eau qui restait dans le tube, de manière à ne laisser qu'un centimètre cube de liquide au- dessus du bouchon; en opérant ainsi, on évite le dégagement des gaz dissous dans l’eau, dégage- ment qui aurait lieu, après la détonation, par suite de la formation d’un vide partiel; il est essentiel N. GRÉHANT. — DOSAGE DU GRISOU ET DE L'OXYDE DE CARBONE de placer l’eudiomètre dans son support et dans un grand bocal de verre fermé par une planche, afin de retenir les fragments du verre qui seraient violemment projetés si l'instrument éclatait. L’é- tincelle donnée par une bobine d’induction a pro- duit une forte détonation; la réduction a été égale à 36,2 ; en agitant les gaz avec un morceau de po- tasse, on a obtenu par absorption de l'acide car- bonique une nouvelle réduction de 19,4, à peu près la moilié de la première, ou une réduction totale de 55,6 dont le tiers 18,5 indique le for- mène ; la proportion de ce gaz dans le grisou était égal à 80,4°/,; sur d’autres échantillons de grisou, j'ai trouvé une proportion de gaz combustible en- core plus grande. Il est bon de s'exercer à l'emploi de l’eudio- mètre; pour cela on prépare, comme je l’ai fait, du formène pur avec l’acétate de soude et la chaux sodée, que l’on chauffe dans une cornue de grès; j'en compose une série de mélanges titrés d'air et de formène pour rechercher dans quelles li- mites d’exactitude l'analyse eudiométrique pra- tiquée comme je viens de l'indiquer permet de doser ce gaz : 1 : 1 Mélange à 5% détonation, on a irouvé..............". Té il — on détonation après addition de gaz de la 2 : : PH retracer: CAR CTEE 192 1 — CONTES oceronuasuc à — 50 Ë 50 1 — CE RM MA roirooc nano — 100 ; 116 : 1 — 30ù CR RE onto ee 209 L'expérience a montré qu'il est nécessaire d’im- merger l'eudiomètre dans un grand bocal plein d’eau avant chaque lecture, pour ramener tou- jours les gaz à la même température. Les figures ci-jointes montrent l'eudiomètre (fig. 4), le support qui sert à fixer cet instrument et à faire passer l’étincelle produite par une bo- bine d’induction (fig. 2), l'appareil semblable à celui de M. Bunsen qui sert à préparer le gaz de la pile (fig. 3). M. Coquillion a imaginé, pour doser le grisou, un instrument très ingénieux qui repose sur le fait suivant : lorsqu'on fait passer un courant électrique qui maintient au rouge une spirale de palladium ou de platine placée au milieu d'un es- pace clos qui renferme un mélange d'air et de grisou, il y a combustion du formène, absorption de deux volumes d'oxygène et production d’un vo- lume d'acide carbonique égal à celui du formène; il en résulle que la présence du grisou est rendue manifeste par la diminution du volume du mé- lange. N. GRÉHANT. — DOSAGE DU GRISOU ET DE L'OXYDE DE CARBONE L'appareil portatif de Coquillion se compose d’un tube à entonnoir fermé à sa partie supérieure par un bouchon de caoutchouc percé de trois trous que traversent un robinet de laiton et deux bornes auxquelles on a soudé un fil de platine enroulé en Fig. 1. — Eu- Fig. 2. — Sup- Fig. 3. — Appareil diomètre à port et exci- servant à prépa- robinet, tateur de Peu- rer le gaz de la diomètre. pile. spirale qui se trouve dans l’intérieur de la petite cloche; le tube porte 16 divisions d’égal volume et se termine à la partie inférieure dans une ampoule de caoutchouc pleine d’eau qui permet au gaz échauffé par le fil de platine porté au rouge de se dilater. J'ai reconnu que le bouchon de caoutchouc, porté à une température élevée par le voisinage du fil de platine maintenu au rouge, revient avec une grande lenteur à la température ordinaire et j'ai supprimé dans mon appareil le bouchon de caoutchouc; j'ai fait souder à une ampoule de verre, un robinet de verre et un tube long de 50 centimètres, gradué en parties d’égal volume; puis, sur chaque côté de l’ampoule, on a soudé deux fils de platine, qui sont les extrémités de la spirale pénétrant dans les axes de deux tubes de verre, que l’on remplit de mercure, et qui recoi- vent les fils venant d’un accumulateur ou d'une pile au bichromate de 6 éléments. J'emploie une pile de 6 éléments zinc amalgamé et charbon montés sur une planche de chêne dont les communications font saillie au-dessus de la planche et présentent des bornes qui permettent d'utiliser les éléments depuis 1 jusqu’à 6. Dans une boite à 12 compartiments se trouvent 6 bocaux vides et 6 bocaux pleins d’une solution, qui a élé faite à chaud, de 10 litres d’eau et d’un kilogramme de bichromale de potasse en poudre, REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892, 853 solution dans laquelle on a versé 2*5 d'acide su!- furique monohydraté (formule de Trouvé). L'intensité du courant des 6 éléments est telle que le fil de platine serait fondu si l’on n'avait pas soin de fermer le circuit un temps très court, en faisant manœuvrer l'interrupteur; on peut aussi n'utiliser que le nombre d'éléments suffisant pour porter le platine au rouge vif. L'instrument représenté par la figure 4 est rempli d'eau par aspiration, on le soulève et on laisse rentrer de l’air en ouvrant le robinet; l'air occupe par exemple le volume V de l’ampoule et 14% divi- sions : à l’aide d’un interrupteur et distributeur de courant, dont le jeu se comprend à la simple inspection de la (fig. 5), on porte la spirale de pla- Fig. 5. distributeur de courant. Fig.4.— Grisoumètre — Interrupteur et de Coquillion mo- difié par Gréhant. tine au rouge et à plusieurs reprises; je dcis faire remarquer ici, qu'en fixant quatre fils aux deux bornes du milieu on peut avec les quatre bornes du distributeur envoyer le courant dans trois ap- pareils différents : le grisoumètre, l'appareil de Bunsen et la bobine d’induction. On surveille at- tentivement pour que le gaz dilaté par la chaleur ne s'échappe point à la partie inférieure du tube; après le refroidissement dans l'air et dans l’eau, on retrouve exactement + 1%, la réduction à été nulle. On introduit dans le grisoumètre à l’aide d'une cloche graduée à robinet et d’un tube de caout- chouc un mélange titré d’air et de formène à £ qui occupe v—32; on fait passer plusieurs fois le cou- rant de la pile et après refroidissement dans l’eau on trouve v + 18; la réduction a été égale à 14. On compose un mélange à &, le volume introduit dans le grisoumètre est égal à v + 30; le fil de platine ayant été porté plusieurs fois au rouge vif, on trouve D4XA* après le refroidissement, v + 23; la réduction est égale à T, moitié du nombre précédent. Exemples : fl Pour 35 de grisou, la réduction est égale 4............. 14 1 Pour — — NV de ee anne art 7 Pou 1 4,2 r — ns NT At AE . 4,2 100 : L 1 . : Pour 550 la réduction serait égale à... 1 42 Le grisou mêtrede Coquillion, comme on le voit, permet de doser le grisou depuis des mélanges à 15, Qui sont très dangereux et peuvent déterminer des explosions dans les mines, jusqu’à des mé- langes à À et à +. A l’aide du grisoumètre de Coquillion et de l'eu- diomètre à eau qui se contrôlent mutuellement, il serait facile de construire pour chaque exploita- tion minière des courbes permettant de suivre, jour par jour et plusieurs fois par jour, la marche du dégagement du grisou dans certains points des galeries ou aux orifices de la sortie de l'air qui sert à la ventilation; l'étude de ces courbes pour- rait conduire à des conclusions ou à des amélio- ralions qui rendraient peut-être plus rares les ter- ribles accidents produils par le grisou. IT. — RECHERCHE ET DOSAGE DE L'OXYDE DE CARBONE. M. Coquillion a montré que le grisoumètre peut servir à déceler d’autres gaz combustibles que le formène; j'ai été conduit à l’employer pour la recherche de traces d'oxyde de carbone qui peuvent être introduites dans l’air par différents appareils de chauffage. Une difficulté s’est présentée tout d’abord : tandis que le formène absorbe en brülant le double de son volume d'oxygène, l’oxyde de carbone, pour se convertir en acide carbonique, n’absorbe qu’un demi-volume d'oxygène ; il en ré- sulte que la réduction est quatre fois moins sen- sible quand on emploie l'instrument à la recherche de l’oxyde de carbone qu'il ne l’est quand il sert à rechercher le grisou. Pour obvier à cet inconvénient, j'ai fait don- ner à l’ampoule du grisoumètre des dimensions 3 ou 4 fois plus grandes (fig. 6); j'ai fait souder dans les parois de verre deux fils de platine assez gros se terminant en dehors par deux boutons et en dedans par une spirale de fil fin de platine; cette disposition permet d'employer le support et l'exci- tateur représenté (fig. 2), que j'utilisais seulement pour l’eudiomèêtre. Mais en augmentant le volume de l’ampoule pour sensibiliser l'instrument, on voit que le fil de plaline porté au rouge dilate assez le gaz pour le faire échapper à la partie inférieure du tube gradué, ce qui fait manquer l'opération; jai donc été obligé de faire souder un second robinet de verre à la partie inférieure du tube pour main- N. GRÉHANT. — DOSAGE DU GRISOU ET DE L’OXYDE DE CARBONE tenir dans l’ampoule le gaz qüi ne peut plus se di- later. La fig.6 représente mon grisoumètre ainsi mo- difié. J'ai reconnu en outre la nécessité de faire les lectures, l'appareil étant tenu immergé verticalement et complè- tement dans l’eau et le robinet inférieur étant ouvert; je me sers pour cela, avec beaucoup d'avantage, d'un grand bocal de verre assez profond pour contenir entièrement le grisoumètre et qui re- çoit, par une tubulure inférieure, un courant d'eau continu dont la tempé- rature reste invariable. Un bec de gaz papillon, allumé à une petite distance du bocal, éclaire à travers l’eau les divisions et les chiffres et l’on examine avec une loupe la position exacte de la tangente au ménisque. Exemple : J'introduis dans une cloche graduée Fig. 6. 1000 d'air et 2° d’oxyde de carbone suoumes pur. Le grisoumètre est rempli d’eau par aspiration; on ferme le robinet supérieur par un tube de caoutchouc dans lequel on a fait passer du gaz de la cloche et qui est fixé au robinet supérieur, on fait pénétrer dans l’ampoule et dans le tube gradué du gaz qui, mesuré après une immersion de cinq minutes dans l’eau, occupe le volume de l’ampoule et 22 divisions. 1° On porte 20 fois au rouge le fil de platine, on immerge dans l'eau, on trouve 21,7. 2 On porte le fil au rouge 20 fois, on trouve 21,5. 3° On porte le fil au rouge 20 fois, on trouve 21,5. Donc + d'oxyde de carbone est décelé par une réduction d’une demi-division. J'ai composé ensuite un mélange à + d'oxyde de carbone qui occupait le volume de l’ampoule et 24,2 divisions, j'ai fait rougir le fil de platine 40 fois, j'ai retrouvé le même nombre 24,2; après 40 fois, j'ai obtenu 24; puis 23,9. On voit que moins est grande la proportion de CO, plus il faut faire rougir le fil de platine pour obtenir un dosage exact. Si l'emploi du grisoumètre Coquil- lion, modifié permet de reconnaitre et doser #5 d'oxyde de carbone, la recherche physiologique de ce gaz, faite par le procédé que j'ai indiqué au Congrès de Physiologie de Liège est beaucoup plus sensible et plus sûre, puisque 100° de sang d’un animal qui a respiré pendant une demi-heure un mélange à 4 d'oxyde de carbone et d'air, contiennent 535 d'oxyde de carbone que l’on peut extraire en totatité. Coquillion modifié par M. Gréhant. N. Gréhant, Docteur ès sciences et en médecine, Assistant de physiologie au Muséum. D: E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE L'épidémie de choléra qui a sévi en Russie, en Allemagne, en Autriche, en France, en Belgique et quelque peu en Angleterre est l'événement mé- dical le plus important de l’année 1892. Ce n'est pas l'épidémie qu'il faudrait dire, mais les épidémies car cet aphorisme que, « lorsque le choléra sévit sur un point quelconque de l’Europe, c’est qu'il ya été importé» est devenu aujourd’hui fort contestable. Tandis, en effet, que l’on surveil- lait le choléra asiatique s’acheminant, à travers la Russie, vers le cœur de l’Europe,uneépidémie écla- taiten France, envahissant peu à peu toute une ré- gion de la banlieue parisienne alimentée par de l’eau de Seine puisée dans les plus mauvaises condi- tions hygiéniques. Et cette épidémie était bien due au choléra asiatique, puisque non seulement elle se propageail à Paris, mais encore au Havre, puisque, chez les malades atteints, on trouvait le bacille- virgule, el on observait tous les signes que produit son infeclion. Au point de vue épidémiologique, la question sera traitée tout au long dans la Revue annuelle d'Hygiène, mais, au point de vue médical pur, nous devons en retenir certains côtés intéressants. Ce qui frappe d’abord, c’est l’innocuité du choléra en ce qui concerne la contagion: pour se mettre à l'abri de celle-ci, il a sufli de faire une antisepsie rigou- reuse aulour des sujets atteints et, les déjections étant le véhicule des bacilles-virgules, d’en éviter le contact; puis, la gravité de l'infection chez les sujets vivants dans de mauvaises conditions hygié- niques, chez les déprimés et principalement chez les alcooliques, gravité qui a maintenu la morta- lité, tant à Paris qu'au Havre et à Hambourg, à 42 °/, environ des cas observés. En ce qui concerne la prophylaxie de l'infection, nous avons vu passer dans le domaine de Ja cli- nique humaine les vaccinations anticholériques expérimentales, avec virus atténués, de Gamaleïa, Bnéger et Kitasato, Wasermann. Il est juste de dire que Ferran, le premier en 1884, avail tenté ces inocculations préventives el que la publica- tion des résultats obtenus par lui, avait élé accueil- lie, suivant une remarque récente de Chauveau à la Société de Biologie, avec un peu trop descepticisme. Pour ses vaccinations, Haffkine se sert d’un virus atténué par culture à une température de 30° dans une atmosphère constamment aérée; Klemperer provoque l’atténuation par la chaleur. Cet expérimentateur est, en outre, arrivé à rendre des animaux réfractaires, en leur injectant, dans le péritoine, du sérum d’un animal ou d'un homme préalablement vacciné. Relativement au traitement curaltif, des obser- valions faites à Hambourg par Eisenlor, Lauens- tein, Prausnitz, Michael, Schede, Rumpf, etc. ; de celles faites à Paris par Delpeuch, Siredey, Roger, Galliard, qui a dirigé le service le plus important de cholériques, etc.; au Havre par Gibert, res- sort l'insuccès des médicalions internes, même de celles visant l’anlisepsie intestinale et la neutra- lisalion des produits toxiques. Mais, un fait reste acquis, c’est l’efficacilé, malheureusement souvent passagère, mais aussi quelquefois durable, des in- jections de sérum artificiel (eau distillée, sulfate de soude, chlorure de sodium, suivant la formule de Hayem), injections sous-cutanées et, de préfé- rence inlra-veineuses dans les formes graves de choléra. I L'Académie de Médecine a consacré à la pleu- résie toute une suite de séances, pendant lesquelles se sont trouvées aux prises les anciennes et les nouvelles doctrines. Envisagé dans son ensemble, le débat a porté sur trois questions : l’une, de doc- trine pathogénique, la nature de la pleurésie sé- ro-fibrineuse; l’autre, d'observation clinique, la marche et le pronostic de la pleurésie à notre époque; la troisième, de thérapeutique, Les indi- cations de la thoracentèse. Au point de vue doctrinal, il y a peu de temps encore le froid et le rhumatisme étaient les seules causes admises d'épanchement séro-fibrineux de la plèvre; mais les études hactériologiques ont quelque peu modifié cette manière de voir, et leurs résultats tendent à prouver que la pleurésie est toujours la conséquence d’une infection, est tou- jours fonction (Landouzy) de maladie infectieuse ; que celte infection se détermine primitivement sur la plèvre par le pneumocoque, par exemple, où encore par le bacille d'Éberth, ou secondairement, dans le cours de la pneumonie, du rhumatisme articulaire aigu, de la rougeole, de la grippe, de la syphilis. La nature infectieuse de ces pleurésies ne fait doute pour personne, alors même que l’organisme infectieux ne s'y rencontrerait pas; ainsi Levy, Loriga et Pensuti, Troisier et Netter ! ont constaté l’absence du pneumocoque dans des cas de pleu- résies métapneumoniques avec épanchement abon- dant. Mais là où les avis sont encore partagés, c'est au sujet de la pleurésie franche, aiguë, a frigore. | Comples rendus de la Sociélé Médicale des Hôpitaux avril 1892. 856 D' E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE Est-on en présence d’une maladie protopathique, essentielle, que le coup de froid à lui seul a pu dé- terminer, ou bien d’une manifestation pleurale de maladie générale, infectieuse, simplement mise en œuvre par le coup de froid? Hardy, Peter et sur- tout Lancereaux se sont montrés chauds partisans de la première hypothèse; G. Sée, Dieulafoy, Du- jardin-Baumetz de Ja seconde, soutenant l’opinion émise il y a douze années déjà par Landouzy, que la maladie infectieuse en cause était presque tou- jours la tuberculose. Et, en effet, si on examine la question d’un peu près, le doute ne semble guère permis. Outre qu’un coup de froid, produisant à lui seul une inflamma- tion, ne salisfait guère les idées que nous nous faisons actuellement de la pathogénie des mala- dies, l’observation clinique démontre combien on rencontre fréquemment la pleurésie « frigore dans ies antécédents morbides des malades qui, plus tard, font de la tuberculose, Objecterait-on à ce propos, que Landouzy a pu quelque peu forcer sa manière de voir relative à l'avenir des pleurétiques pour mieux la faire pé- nétrer dans l'esprit des cliniciens, que l’on pourrait invoquer l'opinion du D’ A. Barrs! qui,recherchant en 1890 ce qu'étaient devenus 74 pleurésies avec épanchement, prümitives, soignées par lui de 1880 à 1884, a pu retrouver la trace de 54 de ses malades : 32 élaient morts, dont 22 de tuberculose pulmo- naire ou extra-thoracique. Les études anatomo-pathologiques et expérimen- tales conduisent d’ailleurs aux mêmes résultats que l'observation clinique. Kelsh et Vaillard, dans 18 autopsies de pleurésies primitives, ont reconnu chaque fois la nature tuberculeuse. Bien que les inoculations faites par Kelsh et Vaillard, Gilbert et Lion aient été souvent négatives, Gombault et Chauffard en ont obtenu 10 positives, sur 23; Netter arrive à une proportion de 70 pour cent de tuber- culose dans les pleurésies dites « frigore, en inter- prétant les résullats de 41 inoculations. Bisch- Hirchfeld, Landouzy, injectant du liquide de pleurésie franche, aiguë, ont déterminé chez des tuberculeux la réaction de Koch. Enfin, d’après le compte rendu officiel prussien sur les effets de la lymphe de Koch, celle-ci, injectée à des pleuré- tiques, a produit la réaction caractéristique 90 fois sur 100, presque aussi souvent (96) que chez des tuberculeux avérés. De toutes ces considérations, il est permis de dé- duire : que la pleurésie franche, aiguë, la fièvre pleurétique doit être rayée du cadre nosologique en tant que maladie protopathique, essentielle ; 1 Brilish Medical Journal, Mai1890, etAnnales de Médecine, Novembre 1892, e que, dans la grande majorité des cas, elle doit être rattachée à la (tuberculose ; que l’on peut la consi- dérer souvent comme une véritable fuberculose locale (Landouzy). Ces faits n’ont pas seulement un intérêt doctrinal ; ilsentrainent desconséquences essentiellement pra- tiques. Suivant, en effet, qu'illes acceptera ou non, le médecin considérera d’une façon toute différente le pleurétique, après la cessation de ses accidents aigus. Dans l’un et l’autre cas, il pourra le voir guéri: mais dans le premier, d’une maladie passa- gère qui n’aura pas grande influence sur son avenir pathologique; dans le second, d’une maladie in- fectieuse, la plus sévère de loutes, la tuberculose, dont le foyer, localisé une première fois, éteint, menace sans cesse de se rallumer et de s'étendre, si les règles sévères de l'hygiène commandée en pareil cas, ne sont pas suivies. — Contrairement à ce qu'annonçait Peter, et se- lon l'opinion de Hardy, Dieulafoy, Dujardin-Beau- melz, etc., la pleurésie n’est pas plus grave à notre époque qu'elle ne l'était autrefois ; sa suppuration n’est pas plus fréquente. Comme cause de cette suppuration, il serait injuste d’invoquer la pra- tiqae de la ponction évacuatrice. Jamais laponction, faite aseptiquement, n’a déterminé la formation du pus dans la plèvre; pratiquée d’après les indica- tions cliniques et suivantles préceptes formulés par Dieulafoy et par Potain, elle est tout à fait exempte de dangers et rend les plus grands services dans le traitement des vastes épanchements pleuraux. Il Dans nos Revues annuelles de médecine de 1890 et 1891 nous avons défini ce qu'étaient la #aladie de Morvan et la syringomyélie, et montré que les nombreux points de contact qu’elles présentaient entre elles, permeltait de les considérer comme deux variétés d’une même affection, se résumant, au point de vue anatomique, en de la myélite cavi- taire. C'élait là la manière de voir de tous les neuro- pathologistes qui semblait désormais indiscutable, lorsque ont été soumises à l’Académie de Méde- cine ! les observations de Zambaco-Pacha. Étudiant les cas décrits et en observation dans les hôpitaux sous le nom de syringomyélie ou de maladie de Morvan, il fut frappé de la ressemblance de cer- tains d’entre eux avec la lèpre anesthésique. Se rendant d’autre part en Bretagne, là où Morvan fit ses premières descriptions, il ne tarda pas à ren- contrer dans les fêtes, dans les pardons, une quan- tité notable de sujets atteints de lèpre, aussi bien dans ses formes mulilante, nerveuse ou anesthé- 1 Bulletin de l'Académie de Médecine, 23 août 1892, CRC" ET D' E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE sique, qu'ulcéreuse et même tuberculeuse. Etalors, il en conclut : que certains malades, considérés comme atteints de maladie de Morvan, ne sont autre chose que des spécimens de lèpre mutilante vraie; que cette nouvelle maladie n’est qu’un reli- quat de la lèpre antique qui, pendant de si lon- gues années et dès le vu siècle, eut un foyer con- sidérable en Armorique. Une telle élimination, non seulement tend à prouver la non-identité de la maladie de Morvan et de la syringomyélie, mais, en outre, semble établir que la syringomyélie, telle qu'elle venait d’être constituée, n’est pas une entité morbide : elle com- prendrait des « malades dissemblables qui ont be- soin d’être discernés, différenciés, triés ». Depuis cette communication, Magitot, Lejard, faisant des recherches dans les Pyrénées, sont arrivés à la conviction que les eagots de ces régions ne sont autre chose que les descendants des anciens lé- preux du moyen âge et que chez un certain nombre d'entre eux, il n’est pas rare de trouver un en- semble de symptômes morbides analogues au syn- drôme de Morvan d’une part, à la lèpre dégénérée de Zambaco-Pacha d'autre part. Ajoutons qu'Arning, Pitres ont trouvé le bacille de Hansen dans les nerfs sains en apparence de su- jets considérés comme syringomyéliques. Ces diverses observations n’ont pas seulement un intérêt doctrinal : elles marquent une étape importante dans l’histoire de la lèpre, qui semblait devoir être oubliée parmi nous. — Le rôle des auto-intoxications de l'organisme dans la genèse des troubles mentaux, bien qu'indis- cutable, est encore mal défini; la folie brightique survenant par intoxication urémique, certaines formes de mélancolies d’origine gastro-intestinale sont seules assez bien connues; M. Klippel ! vient d'y joindre la folie hépatique. Par la recherche de l'urobilinurie qui permet d’apprécier très exacte- ment l’état fonctionnel du foie, il a pu prouver que l'insuffisance hépatique est susceptible d’engendrer dans certains cas, continuer, dans d’autres, « des maladies mentales écloses sur un terrain préparé par d’autres causes ». En pareille matière, cette considéralion du terrain est de première impor- tance. C’est elle qui domine dans la pathogénie, car l’urémie, pas plus que l'insuffisance hépatique, pas plus que la puerpéralité, ne déterminerait la vésanie si le sujet n'y était préparé, le plus souvent héréditairement, III Les études sur la pathogènie des maladies infec- tieuses ont tenu une large place, comme les 1 Archives générales de médecine. Août 1892. années précédentes et depuis les découvertes pas- toriennes, dans les recherches cliniques et expéri- mentales. Il y a déjà quelques années, que les médecins militaires, tant en France qu’en Allemagne, avaient attiré l'attention sur la coïncidence d’épidémies de péripneumonie équine et de pneumonie fibrineuse atteignant des cavaliers, particulièrement en rap- port avec les chevaux malades. Dans certains cas, la coïncidence fut évidente : ainsi à Vendôme, au 10° chasseurs, il y eut, de mars à juillet 1887, épi- démies parallèles de péripneumonie et de pneu- monie humaine, cessant l’une et l’autre lorsque les troupes allèrent camper, à Stettin en 1886; une épidémie de pneumonie, prenant naissance dans les bâtiments d’une caserne réservés à l'artillerie, se propage ensuite à d’autres bâtiments. Or, les che- vaux de l'artillerie élaient atteints de péripneumo- nie, leur expectoration donnait des diplocoques identiques aux pneumocoques de l’homme. De là à conclure que les deux maladies, l’une et l’autre nettement infectieuses et épidémiques, se déve- loppant et évoluant dans le même temps, ont une même origine, il n’y a qu'un pas à faire; d'autant mieux qu'anatomiquement, l'une des formes cli- niques de la péripneumonie est identique à la pneumonie fibrineuse. Cependant, les recherches microbiologiques semblaient donner des résultats contradictoires : tandis que Peterlein, Perroncito et Brazzola tendaient à identifier l’agent patho- gène de la péripneumonie avec le pneumocoque de Talamon-Fraenkel, Lustig et surtout Schülz attri- buaient à l’un et à l’autre des caractères distinc- tifs basés sur les modes de culture et les réactions de la méthode de Gram; or, des travaux récents tendent à faire incliner la solution du problème vers l'identité. Dieudonné !, aide-major dans l’ar- mée bavaroise, observant une épidémie régnant sur les chevaux d'un régiment de chevau-légers, a trouvé chaque fois, dans lé mucus nasal pris aux différentes périodes de la maladie, des orga- nismes encapsulés, ne se décolorant pas par la méthode de Gram, absolument identiques aux pneumocoques de Talamon-Fraenkel. Ainsi donc, ce que l’évolution épidémique, ce que la clinique et l’anatomie comparées faisaient pressentir, loin de l'infirmer, la bactériologie semble au contraire devoir le confirmer; mais, comme le fait remarquer le Professeur Kelsh ? (Val-de-Grâce), avant de proclamer comme certain un fait qui intéresse à un si haut point les méde- cins de notre armée, il faut attendre la consécra- tion expérimentale, c'est-à-dire l’inoculation de la 1 DreuponNé. — Deulsche mililærærztliche Zeilschrift, mars 1892. 2 KeLsn. — Gazette hebdomadaire, 29 octobre 1892. 858 D: E. DE LAVARENNE, — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE EE pneumonie humaine au cheval, inoculation pro- duisant chez celui-ci une pneumonie semblable à celle qu'il contracte spontanément. — Du reste, il semble que bientôt ce problème, si complexe et récemment encore si obscur, de la pathogénie des pneumonies et des bronchopneu- monies, doive être complètement élucidé. La mi- crobiologie a nettement établi qu'il y avait, d’une part : une maladie essentielle, spécifique, la pneu- monie fibrineuse, toujours produite par le même organisme, le pneumocoque de Talamon-Fraenkel ; d'autre part, des affections pulmonaires, des bron- chopneumonies survenant à litre de complications dans le cours des maladies infectieuses, que leur diversité d’origine permettait de rattacher à des organismes pathogènes différents. Reprenant la question dans tous ses détails, Netter! a démontré, par des recherches venant corroborer les observations de Prudden et Northrup, Finkler, Queissner, Neumann, Raskin, Babès, Cantani, Weichselbaum, Mosny, elc., que les bronchopneumonies survenant dans le cours de la rougeole, de la coqueluche, de l’influenza, de la variole, de la fièvre typhoïde, de la diphté- rie, résultent d'une infection surajoutée, mixte ou secondaire, due à des microbes, nos hôtes habituels dans la bouche, le pharynx, les fosses nasales. Ce sont, par ordre de fréquence patho- génique : le pneumocoque, seul ou prépondérant ; le streptocoque, le bacille encapsulé de Friedlan- der, seuls ou associés; les staphylocoques pyo- gènes, rarement isolés, le plus souvent associés. Quant aux formes des bronchopneumonies, elles ne semblent pas être en rapport avec tel ou tel organisme, si ce n’est la forme pseudo-lobaire qui se rattacherait plutôt au bacille de Friedlander; dans la diphtérie, on trouve toujours le strepto- coque pyogène, avec divers collaborateurs ; dans la rougeole, tous les microbes pathogènes de la bronchopneumonie. Comment ces microbes, inoffensifs d'habitude, deviennent-ils pathogènes et produisent-ils les bronchopneumonies? Vraisemblablement par auto- infection, leur virulence s’exaltant sous l'influence de la maladie en cours. Ainsi Boulloche et Mery, dans leurs recherches sur la salive des enfants atteints de rougeole, ont pu constater l’exaltalion de virulence des pneumocoques et des strepto- coques salivaires ; Netter a vu dans la grippe, dans la rougeole (où tous les microbes peuvent entrer en jeu), ous les microbes de la bouche s’exalter, alors que, dans la diphtérie, dans la searlatine, une seule espèce s’exaltail. Il semble, en outre, que 1 Nerrer. — Archives de médecine expérimentale, jan- vier 4892. plus l'organisme est accoutumé à un microbe, moins l’exaltation donnera à celui-ci de puissance patho- gène, car les staphylocoques, qui sont les micro-or- ganismes le plus souvent apparents dans la bouche normale, sont aussi ceux qui produisent le moins souvent la bronchopneumonie. Cette exaltation survenant sous l’influence de la maladie première, par quel mécanisme se produit- elle? Y a-t-il modification du terrain? Y a-t-il as- sociation microbienne?.. La queslion se pose, mais il est encore impossible de la résoudre, d'autant mieux que le microbe pathogène de la plupart des maladies infectieuses se compliquant de broncho- pneumonies, esf encore inconnu. — Toutes les recherches faites pour trouver l’or- ganismefde la grippe, pendant l'épidémie de 1890-94, n'avaient guère donné de résultats salisfaisants, si bien qu’on en élait arrivé à se demander s’il y avait bien un agent spécifique producteur de la grippe, et si la maladie ne résidait pas tout entière dans des infections secondaires à streptocoques, staphy- locoques ou pneumocoques, ces organismes puisant leur virulence dans des conditions cosmiques ou météorologiques spéciales. Cependant, cette ma- mère de voir n’était pas admise par tous, el, tant en Allemagne qu'en France, des recherches se poursuivaient d'après l'idée patbogénique d’une infection primitive par un germe spécifique. C'est en suivant cette voie que Pfeiffer, Kitasato et Ca- non ont récemment décrit un micro-organisme à l'aspect en diplocoque et en courtes chainettes, qui se rapproche singulièrement de celui décrit et con- sidéré comme l'élément pathogène de l’influenza par Teissier, G. Roux et Pittion !. Ces observateurs ont trouvé, dans la grippe et jamais en dehors d'elle, un organisme polymorphe, diplobacille dans l'urine, streptobacille dans le sang; ces deux formes ne sont vraisemblablement qu’un mode de groupement différent ou deux phases d'évolution de ce même micro-organisme, car leur aclion patho- gène expérimentale sur le lapin donne absolument les mêmes résultats. Ce polymorphisme explique- rait et synthétiserait en quelque sorte les résultats d'apparence dissemblables obtenus jusqu’à ce jour par les divers expérimentateurs, qui tous ont as- signé à la grippe comme élément pathogène, soit un diplocoque ou un diplobacille (Seiffert, Jolles, Babès, Kierschner, Kowalski, Kosthiourine, Kra- unhals), soit un streptocoque (Finkler, Bouchard, Vaillard et Vincent, Laveran). IV Lorsque sévissait la septicémie puerpérale, il n'était pas rare de voir une amélioration considé- 1 Teissier, G. Roux et Pittion. — {Archives de Médecine erpérimentale, juillet-septembre 1892. D' E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE rable dans l’état des malades, suivie de guérison, coïncider avec l'apparition d'un foyer de suppura- tion en un point quelconque de l'organisme. Inter- prétant cette observation clinique, Fochier ! (de Lyon) s’est demandé si, dans le cours de maladies infectieuses avec tendance à la suppuration, on ne pourrait pas éviter cette suppuration en provoquant La formation d'abcès (abcès de fixation). Dans ce but, il s’est servi d'essence de térébenthine dont il a fait deux injections sous-cutanées dans chaque cas; à la suite de ces injections, très douloureuses pendant une à deux heures et même jusqu'à qua- rante-huit heures après les piqüres, surviennent bientôt des phlegmons aigus, intenses, plus ou moins diffus, qui suppurent, en donnant un pus amicrobien. Avec la formation du pus, se mani- feste une amélioration de l’état général, telle que Fochier a pu obtenir ainsi la guérison de cas gra- ves d'infections puerpérales. En opérant de même, Lépine, Dieulafoy faisant jusqu’à quatre piqûres, Gingeot ont oblenu des résultats analogues, suivis de guérison, chez des sujets atteints de pneumo- nies infectueuses graves, à forme ataxo-adyna- mique et menaçant de suppurer. Que se passe-t-il sous l’influence de cette suppu- ration provoquée? L'absence d’organismes dans le pus phlegmoneux fait rejeter l'hypothèse de Fochier, de la jiration des agents infectieux dissé- minés dans l’organisme. Ne pourrait-on pas invo- quer, avec Chantemesse, l’exagération de la leu- cocytose sous l'influence de la formation des abcès, par conséquent l'augmentation du nombre des phagocyles capables de détruire les microbes in- fectieux ? Quoi qu’il en soit, les résultats obtenus prouvent que cette méthode ne doit pas être négligée, mais aussi, qu'elle doit être réservée pour des cas graves, nous dirions presque désespérés. — De très intéressantes recherches cliniques et expérimentales, en vue du traitement du diabète sucré d’origine pancréatique, ont été faites par de Renzi et Reale ?, Ayant déterminé le diabète chez des chiens, par l'enlèvement du pancréas, ils ont vu ce diabète disparaitre complètement par suite de l’alimentalion avec des végétaux verts. Ils attri- buent ce fait à ce que l'amidon de ces végétaux, l'inuline, ne se transformant pas en dextrine, mais en lévuline, l'organisme diabétique qui a perdu la puissance glycolytique pour la dextrine, l’a conservée pour la lévuline. Appliquant ces don- nées à la pathologie humaine, ils ont observé : la persistance de la glycosurie avec l'alimentation carnée; la disparition du sucre avec l'alimentation 1 Académie de médecine. Avril 1892. 2 Gazelta degli Ospilali, n° 90 (Décembre 1891). 859 exclusive par les végétaux verts; la réapparition du sucre avec la reprise de l'alimentation carnée ; l'augmentation du poids du corps et des forces musculaires, la diminution de l’azoturie et de la phosphaturie chez les malades soumis à l’usage des végétaux verts, associés ou non à une nourri- lure animale. — M. Mosny a publié les résultats de ses études sur la vaccination contre l'infection pneumonique". II semble prouver que l’immunité acquise par les lapins vaccinés ne résulte pas du pouvoir bacté- ricide, mais de la puissance {oxinicide de leurs humeurs. En effet, le pneumocoque, ensemencé dans du sérum de lapins vaccinés, non seulement n'y meurt pas, mais y acquiert une longévité qu'il ne possède pas dans ses milieux de culture habi- tuels, non plus que dans le sang d'un lapin sain. Toutes les tentatives qu'il a faites pour obtenir la guérison d’un lapin, inoculé à l’aide d’injections de sérum d’un animal vacciné, sont restées néga- tives, qu’elles qu’aient été les conditions dans les- quelles elles ont élé pratiquées. Cependant, dans le même champ d'’expé- riences, J. Arkharow (de Kazan) obtenait des ré- sultats positifs, desquels il résulte que le sérum des animaux vaccinés, s’il ne tue pas le pneumo- coque qui y est introduit, agit du moins sur lui en l’affaiblissant. Les résultats opposés des deux ob- servateurs tiennent vraisemblablement à ce fait démontré par Arkharow, à savoir : que le sérum des différents animaux vaccinés possède des pro- priétés thérapeutiques différentes, que celles-ci se développent peu à peu, à mesure que la vaccina- tion s’avance : dans un premier degré, retardant simplement le développement du pneumocoque, dans un second produisant sa dégénérescence, le luant dans un troisième, qui du reste n’a pas en- core été obtenu expérimentalement. V Lorsque, en juin 1889, Brown-Séquard publia,de- vant la Société de Biologie, les résultats thérapeu- tiques obtenus sur lui-même à l’aide d’injections sous-cutanées de «liquide organique », sa com- munication fut: accueillie dans le monde scierli- fique avec un scepticisme que ne dissimulail guère la déférence due à un savant de cet ordre. Depuis lors, trois années se sont écoulées, des expériences nombreuses ont élé poursuivies de tous côtés, et il semble qu’elles doivent bientôt devenir le point de départ d’une méthode thérapeulique nouvelle, basée sur des données scientifiques d’une valeur indiscutable. 1 Archives de Médecine expérimentale. No 2. 1892. 860 D' E. DE LAVARENNE. — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE Cette méthode repose, du reste, sur la connais- sance des propriétés physiologiques des glandes, qui sécrètent et déversent dans le sang certains principes nécessaires au bon fonctionnement de notre organisme. Que cette sécrétion, sous l’in- fluence de l’évolution de notre être ou en vertu d'une cause morbide, vienne à diminuer ou à dis- paraître, il en résultera des troubles de nutrition, en: rapport avec l’action des produits de sécrétion de la glande atteinte. À ce point de vue, l’action des glandes séminales est implicitement connue de tous, et il n’est pas nécessaire de réfléchir longtemps pour s’apercevoir qu’elles n’ont pas seulement pour bul:la féconda- tion. Avec la sécrétion testiculaire, commence une imprégnation de l'organisme se traduisant par un ensemble de phénomènes de développement qui constituent la virilité ; lorsque diminue cette sécré- tion, survient la déchéance qui aboutit à la séni- lité, et point n’est besoin d’invoquer les déviations de nutrition observées chez les eunuques, pour en conclure qu'il existe un rapport intime entre le fonctionnement des testicules d’une part, la vi- gueur et la force de résistance de l’organisme, d'autre part. Ceci élant bien établi, il n’y a plus lieu de s’é- tonner de voir Brown-Séquard (dont les travaux ont tant servi à élucider ce rôle si complexe des glandes), tenter de remédier à l'insuffisance de la sécrétion glandulaire par des injections sous-cu- tanées de liquide testiculaire. En fait, les résul- tats ont élé ce qu'il avait prévu : une action dyna- mogénique nerveuse, se traduisant par une aug- mentalion de la force musculaire et de la capacité au travail. Les injections faites avec le liquide obtenu selon la méthode de d’Arsonval, d’après les préceptes de Brown-Séquard et en suivant les règles de l’asep- sie, n'ont jamais produit d’accidents et ont toutes déterminé, dans les expériences bien conduites, ce réveil de l'énergie organique et des facultés céré- brales (Variot, Villeneuve, de Marseille). Em- ployées chez des aliénés 5 (Maïret, de Montpellier, Marro et Rivano, Vito Copriati, de Naples), là où la suggestion ne peut êlre objectée, elles ont agi comme stimulant du système nerveux et amélioré la nutrition générale. Ces effets dynamogéniques sur le système ner- veux, partant sur la nutrilion, ont suggéré l’idée d'employer le liquide séminal dans des affections où il exisle une allération des centres nerveux, comme l’ataxie locomotrice (Brown-Séquard), dans celles où la nutrition est troublée par desinfections comme la cachexie palustre (Laurent, de Port- Louis), le choléra (Owpensky), la lèpre, la tuber- culose pulmonaire (Variot, Conil, Dumontpallier, G. Lemoine). Les résultats obtenus, au point de vue fonctionnel, permettent d'assurer qu’il existe dans ce liquide une substance active, dont les ef- fets thérapeutiques méritent toute l’attention des médecins. — C’est en appliquant les principes qui ont guidé Brown-Séquard que le P' Bouchard et Charrin ! ont tenté contre le myxædème ? les injections sous- cutanées de suc thyroïdien. Dans les deux cas ob- servés, les résultats obtenus furent étonnamment rapides et favorables de la façon la plus évidente. Mêmes constalations favorables ont été faites depuis lors, à la suite d’injeclions de suc thyroïde de mouton par Hurry Fenwick (de Londres), Bee Mendel (de Berlin). — Ce que les travaux de Langlois et Abelous ont appris sur l’action des glandes surrénales conduira certainement à pratiquer l'injection du liquide de ces glandes,dans le cours de la maladie d’Addison. En effet, expérimentant sur des grenouilles, ils ont prouvé que les glandes surrénales sécrèlent une substance dont le rôle consiste à détruire cer- tains principes toxiques produits dans l'organisme, principes provenant, d’après Albanese (de Turin), du travail des muscles et du système nerveux et possédant (Abelous et Langlois) “une action curari- sante sur les terminaisons nerveuses motrices et sur les muscles. Ainsi s’expliquerait (Abelous, Charrin et Langlois) cette fatigue musculaire et nerveuse, cet état d'asthénie générale dans lequel se trouvent les sujets atteints de maladie d’Addison. Donc, basée sur des données expérimentales certaines, la méthode de Brown-Séquard présente un grand intérêt thérapeutique; les résultats obtenus permettent d’ailleurs d'affirmer que ce n’est plus seulement la théorie qui doit nous en- gager à en poursuivre les applications. Mais, il y aurait imprudence à lui demander plus qu'elle ne peut donner, ce serait la dévier de son véritable but, qui semble être : l'introduction dans l’écono- mie de principes semblables à ceux des sécrélions glandulaires, destinés à les suppléer dans les cas où ils se montrent insuffisants. D' E. De Lavarenne. 1 Association pour l'avancement des Sciences, Pau, 1892; 2 Le myrædème est un ensemble symptomatique qui suc- cède à la cessation de la fonction du corps thyroïde. Turges- cence œdémateuse de la face, des avant-bras, des mains; torpeur physique et intellectuelle, dificulté à se mouvoir, lenteur de la parole, sensation de froid, abaissement de température, sont les principaux de ces symptômes. # Abelous et Langlois. — Archives de physiologie, avril et juillet 4892. Société de Biologie. Compte rendu, 1892. BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 861: BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques. Poincaré (H.), Membre de l'Institut. — Cours de Physique mathématique. Thermodynamique. Un vol. in-8° de 310 p. avec fig. (10 fr.) G. Carré. Paris, 1892. É Le volume que vient de publier M. Poincaré sur la Thermodynamique présente, comme les précédents dont il a été rendu compte dans cette Revue, un très grand intérêt. Outre qu'il se rapporte à un sujet dont l'importance n’est plus à indiquer, il est traité dans un esprit qui en rend la lecture véritablement sugges- tive, pour employer le mot à la mode. L'auteur ne se borne pas à poser les principes et à en déduire les conséquences : il précise, en les analysant avec soin, la signification de ces principes. Ce qu’on désigne, en somme, sous le nom de principe d’une manière géné- rale, c’est l’extension indéfinie, en dehors des limites de l'expérience, par conséquent, des résultats fournis entre certaines limites par l'observation et l’expérience. IL y a, dès lors, toujours lieu de se demander si cette généralisation est légitime et, même, ce qu’elle signifie au juste. M. Poincaré a fait, par exemple, une intéres- santeanalyse du principe de la conservation de l'énergie ; sans insister sur les cas particuliers qu’il étudie, nous signalerons les conclusions qu’il donne : « Si l’ont veut énoncer le principe dans toute sa gé- «néralité et en l’appliquant à l'Univers, dit-il, on le « voit pour ainsi dire s'évanouir et il ne reste plus que « ceci : Il y a quelque chose qui demeure constant. » Ce n’est pas qu'il faille rejeter la loi de Meyer; mais c’est que, comme il le fait remarquer, cette loi présente une forme assez ample pour qu'on y puisse faire ren- trer presque tout ce que l’on veut, mais que cependant, dans chaque cas particulier, et pourvu qu’on ne veuille pas pousser jusqu'à l'absolu, cette loi a un sens parfai- tement clair. Le second principe de la thermodynamique, principe e Carnot ou principe de Clausius, a été étudié avec détails par M. Poincaré qui insiste, non sans raison, sur ce qu'il devait sembler que le théorème de Carnot était appelé à disparaître avec l'hypothèse sur laquelle son auteur s'était appuyé et sur ce que ce fut l'honneur de Clausius de ne pas s'être laissé aller à ce jugement superficiel. M. Poincaré étw#die quelques-unes des con- séquences de ce principe, dont il expose ensuite l’exten- sion au cas où deux variables indépendantes ne suffi- sent pas à fixer l’état d'un système, ce qui conduit à introduire la notion de potentiel thermodynamique, notamment A l’aide des connaissances précédemment acquises, M. Poincaré étudie un certain nombre d'applications : les changements d'état, les machines à vapeur, la dis- sociation, les phénomènes électriques. On concoit que nous ne puissions insister sur le détail de ces chapitres qui sont particulièrement intéressants pour le physi- cien. Signalons le soin avec lequel l’auteur a indiqué les hypothèses qui sont faites dans la plupart des cas et qui ne sont pas toujours exposées d'une manière explicite dans un certain nombre d'ouvrages. Enfin, pour terminer, M. Poincaré étudie la possibi- lité de déduire les principes de la thermodynamique des principes généraux de la Mécanique; cette déduc- tion ne présente pas de difficultés pour le premier principe. Il n’en est pas de même du second qui exige l'introduction d’hypothèses particulières ; lesrecherches d’'Helmholtz sur ce sujet sont exposées dans un dernier chapitre. En résumé, M. Poincaré montre que l’on ne peut pas expliquer les phénomènes irréversibles ni le théorème de Clausius au moyen des équations de La- grange. Tel est brièvement exposé le plan de l’ouvrage de M. Poincaré; nous n'avons pu signaler que les plus importantes questions qui y sont traitées. Nous souhai- tons cependant en avoir dit assez, en essayant d’expli- quer dans quel esprit cet ouvrage a été composé, pour montrer quel intérêt il présente pour les physiciens. C. M. GARIEL, 2° Sciences physiques. REVISION DES TRAVAUX THERMOCHIMIQUES 1 Berthelot (M.) et Matignon (C.). — Sur l'acide glyoxylique ou dioxyacétique. Comptes rendus Acad, Se. 115. 350. Berthelot (M. — Chaleur de combustion de rate glycolique. Comptes rendus Acad. Sc. 115. Les recherches récentes de MM. Berthelot et Matignon ont porté sur la chaleur de formation de l'acide glyoxy- lique C? HO ou C?2H203% + H? 0. Ce composé est un des termes, et le corps le moins bien connu, de la série des produits d’oxydation de l’éthane : C?H56 C?H60 C?:H140 C?2H10? éthane alcool aldéhyde ac. acétique C?Hi 0: C?H104 C?H204 ac. glycolique ac. glyoxylique ac. oxalique Sa chaleur de combustion permet de calculer sa chaleur de formation : C?(diamant) +HA4gaz+40 gaz = C2HiO' cristallisé...+199Cal.1, Grâce à cette donnée nouvelle on connaît maintenant la chaleur de formation de tous les composés de la série précédente, et l’on peut comparer les quantités de chaleurs dégagées par l’action successive de l’oxy- gène sur l’éthane ou sur les combinaisons intermé- diaires. On obtient ainsi les deux tableaux suivants : Pour les premiers termes gazeux : O: sur C2H6,. gaz — C2H60 gaz'.........… . + 34,6 O sur C?2H60 gaz = C2Hi0 gaz + H20.... + 51,5 O'sur C2H{O gaz — C?H1O?gaz ........... + 60,0 Pour les derniers termes solides et cristallisés : O sur C2Hi0? solide — C2H10% solide + .......... +- 40,2, O sur C?2H403 solide = C2H103 solide+.......... + 39,2 O sur C2Hi 04 solide — C2 H20f solide + H?0 solide + 68,9. MM. Berthelot et Matignon font à ce sujet la re- marque que les nombres croissent dans chaque tableau à mesure que le rôle négatif du composé formé devient plus caractérisé. De plus, dans le premier tableau, le dernier nombre est voisin de + 59,2 qui exprime la chaleur de combustion de l'hydrogène avec formation d'eau gazeuse, et dans le second le dernier nombre n’est pas éloigné de + 70, 4, chaleur de combustion de lhÿdrogène avec production d’eau solide, Pour montrer ensuite que ces relations doivent être générales, ils donnent quelques résultats pris dans la série en C : O sur C*H50? (ac. propionique liquide) — C3 H60% (ac. lactique liquide) ... + 45,3 O2 sur C:H6 0% liq. = C*HiOf (ac. malonique solide) 4- H? 0 solide ... +61,1%<2 1 Cette Revision paraitra tous les deux mois. 862 BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX O sur C3 Hi Of sol. — CH405 (ac. tartronique solide) ... Æ 34,2 O sur C3 H405 sol. = C3 H{O6 (ac. mesoxalique solide) ... + 37,6. Ces résultats ne sont évidemment qu’approximatifs, l’état physique des corps n’étant pas toujours exac- tement comparables d’un tableau à l’autre, et quel- quefois dans la même série, On peut du moins en conclure, etc'estune notion importante, que, lorsqu'on oxyde un carbure saturé par des atomes d'oxygène successifs, il se change d’abord en alcool en dégageant environ + #0 cal., celui-ci en aldéhyde en donnant encore + 40 cal. enfin l’aldéhyde fournit un acide avec dégagement de + 65 cal. environ, Et l’on voit que la présence d’autres fonctions oxygénées dans la même molécule ne modifie pas ces relations générales, Déjà le tableau 29 de l'annuaire du bureau des Lon- gitudes (1888) permettait d'établir quelques rappro- chements de ce genre, mais la détermination de MM. Berthelot et Matignon montre qu'il s’agit d’une véritable loi, du moins en ce qui concerne les séries de faible condensation en carbone. Forcrand (R. de) — Constitution du Pyrogallol et de l'acide orthophosphorique. Comptes rendus de l’'Acad. Se. 115 p. 46, 284 et 610, Ces recherches apportent des arguments nouveaux à l'appui de l’opinion généralement admise aujourd'hui dans les deux cas. Elles ont pour point de départ les données ther- miques déterminées récemment et relatives à la subs- titution de Na à H dans chacune des trois fonctions de ces composés : PyrosAlole nettes ME Acide orthophosphorique.. +41,34 —-60,60 Pour le pyrogallol, l’auteur compare les trois nom- bres obtenus avec ceux que donnent le phénol ordi- naire, la pyrocatéchine, la résorcine, et l'hydroquinone, et montre que l’on doit écarter successivement les deux hypothèses (1,3, 5) et (1, 2, 4). Il ne reste donc que la formule (1, 2, 3). Le pyrogallol possède donc des fonc- tions continues et équivalentes. Si elles paraissent avoir des valeurs décroissantes, c’est qu'il existe des combinaisons intramoléculaires, qui successivement se forment et se détruisent, entre les fonctions modi- fiées par la substitution et celles qui n’ont pas encore réagi. Aussi le second nombre est il très voisin de la valeur moyennne + 38, 70 et de celle du phénol ordi- naire + 39, 10. Cette théorie permet même de mesurer l'énergie qui correspond à ces phénomènes intramolé- culaires. Elle a été confirmée tout récemment dans ses conséquences par les expériences de MM. Causse et Bayard sur les antimonites des phénols!, lesquelles conduisent également à la formule (1, 2, 3). Pour l'acide orthophosphorique, que beaucoup de chimistes considèrent comme un triacide véritable, dans lequel le phosphoryle serait uni à trois oxydriles, la manière dont il se comporte vis-à-vis des bases alca- lines en présence de l’eau faisait penser qu'il ne pos- sédait réellement qu’une fonction vraiment acide, les deux autres étant plutôt comparables à celles des phénols ou des alcools. Les nombres cités plus haut montrent plutôt que ces apparences sont dues uni- quement à l’action de l’eau. Il est vrai qu'ils sont dé- croissants, mais régulièrement et de la même manière que ceux que donne le pyrogallol dans lequel l'égalité des trois fonctions ne peut être contestée. Ici encore le second nombre + 49, 20 se confond avec la moyenne + 49, 38 et avec la valeur de beaucoup de monoacides, (de 49 à 51). Il est très probable que cette inégalité apparente des trois fonctions s'explique, comme pour les phénols et les alcools, par des combinaisons intra- moléculaires, et que la valeur véritable de chacune + 39.09 +49 90 435,66 438,33 ! Comptes rendus, t. 415, p. 507. des trois fonctions est. + 49, 38. La formule de l’acide orthophosphorique est donc bien : 0H Phr0—OH. NoxH Berthelot (M.). — Quelques observations nou- velles sur l'emploi de la bombe calorimétrique. Comptes Rendus Acad. Sc. 115. 201. Berthelot (M.) ct Matignon (C.). — Chaleur de combustion de divers composés chlorés, Comptes rendus Acad. Sc. 115. 347. Nous renvoyons pour l’analyse de ces travaux à un article qui sera prochainemeni publié sur la Bombe Calorimétrique, R. »E Forcrann, 3° Sciences naturelles. Nadaïllac (Marquis de), Correspondant de l’Institut. — Le problème de la vie. 1 vol. in-18 de 295 p. (Prix : 3 fr. 50.) G. Masson, Paris, 1893. Sous ce titre, M. de Nadaïllac donne sa manière de voir sur une série de questions d’une haute importance philosophique : l'apparition de la vie sur le globe, le développement des êtres animés et l’origine de l'homme. Reprenant les argumentsbien connus de Quatrefages, il n'accepte pas la doctrine transformiste, qui ne Jui paraît reposer sur aucune preuve convaincante; il dé- clare que la science ne peut rien nous apprendre sur la succession des organismes dans le temps. Il va peut- être un peu loin en disant que l'édifice élevé par Darwin a été démoli et bouleversé par quelques-uns de ses disciples ; les. exagérations d'Hæckel n’ont jamais fait de tort qu’à lui-même, et les discussions sur les causes de l’évolution ne touchent en rien au principe même de l’évolution, ce qu’oublient en général les an- titransformistes, Naturellement M. de Nadaillac, dont les préoccupations spiritualistes sont visibles, n'admet pas que l’homme provienne d’une souche animale, et il voit en lui l'objet d’une création spéciale, en se ba- sant surtout sur ses caractères intellectuels. L. CuÉnor. Pennetier (D: Georges). —Histoire naturelleagri- cole du gros et petit bétail. Un volume gr. in-8° de 780 pages. (Prix 20 fr.) Baudry et Cie, 15, rue des Saints-Pères. Paris, 1893. L'enseignement agricole a pris en France, depuis quelques années, une extension considérable, Au cours de la crise que nous venons de traverser, et dont les ef- fets se font encore sentir, les enquêtes poursuivies de toutes parts ont révélé bien des imperfections dans nos méthodes habituelles de culture, dans la conduite générale de nos exploitations, et surtout dans Île mode d'entrelien de nos animaux. Et, sous l'influence des réclamations multiples suscitées par un tel état de choses, l’administration de l'Agriculture, s'inspirant des méthodes mises en œuvre dans les pays voisins, a songé tout d’abord à développer l’enseignement agri- cole à tous les degrés. Là était en effet notre point faible, et si l’on objecte qu'en Angleterre, pays où l’agriculture est le plus florissante, il n'y a que peu ou point d'enseignement agricole, on peut répondre que les conditions économiques de ce pays et du nôtre ne sont nullement comparables, Mais point ne suffit d'organiser un enseignement officiel, car on ne peut ignorer que, dans la pratique, cetenseignement n’est accessible qu’à un petit nombre. Il importe de faire pénétrer dansla masse les principes scientifiques sur lesquels doit reposer toute exploita- tion agricole véritablement rationnelle, et un tel résul- tat ne peut guère être obtenu qu’à l’aide du livre. L'ouvrage que vient de publier M. Pennetier est évidemment de ceux qui concourront à atteindre ce but. Concu d’après un plan simple, écrit d’une facon claire | BIBLIOGRAPHIE. — ANALYSES ET INDEX 863 — et précise, il nous parait en effet, dans ses traits géné- raux, particulièrement propre à appeler et à retenir l'attention des agriculteurs désireux de s’instruire, Il ne faut point s’attendre, sans doute, à y trouver des données originales : c’est avant tout une œuvre de vulgarisation, dont les éléments ont été puisés en gé- néral dans les auteurs classiques, d’après un choix souvent heureux, puis coordonnés et mis au point en vue du but poursuivi. Comme l'indique le titre, l'au- teur n’a visé qu'une partie limitée de l'exploitation agricole, celle relative aux animaux domestiques. IL s’agitdonc surtout de données relatives à la zootechnie, et les incursions faites cà et là dans les domaines voi- sins ne peuvent êtreconsidérées que comme des faits ac- cessoires. Nous n’hésitons même pas à déclarer qu’elles eussent pu être supprimées sans le moindre inconvé- nient, et que la valeur du livre en eùl été au contraire augmentée. Il y a, par exemple, deux cents pages consacrées au traitement des maladies, et qui font véritablement tache dans l’ensemble, car elles visent à répandre des notions médicales dont l'application empirique est bien de nature à faire courir les plus sérieux dangers à la santé des animaux. Quant aux figures, assez nombreuses, qui sont in- tercalées dans le texte, elles sont presque toutes, il faut bien le dire, franchement mauvaises. Et c’est un oint qui a son importance en la matière : un dessin É fait représentant une race d'animaux devrait au contraire montrer à l’agriculteur le type idéal vers lequel il convient de diriger sa production. A la vérilé, ce sont là des points de détail sur les- quels il ne faut pas insister outre mesure. Dans son ensemble, l’Histoùe naturelle agricole de M. Pennetier représente un livre utile, propre à répandre dans le public éclairé des campagnes des notions scientifiques simples et précises, dont la mise en pratique contri- buera sans doute à augmenter le rendement du bétail et partant la fortune nationale, A. RAILLIET. 4° Sciences médicales. Richet (feu A.), Professeur de clinique chirurgicale à la Faculté de Médecine de Paris, chirurgien de l'Hôtel- Dieu, membre de l'Institut, ete., ete. — Clinique chi- rurgicale.! vol. in-8° de 660 pages. (Prix : 12 fr.) Paris. J.-B. Buillière, 1893, Le Professeur A. Richet, dont nous avons eu l'hon- neur d’être l'élève, avait, dans le cours d’une longue carrière scientifique bien remplie, recueilli un grand nombre de matériaux d'étude. Nous qui avons pu ju- ger du soin qu'il apportait dans la préparation de cha- cune de ses lecons, nous pouvons dire quelles richesses on pourra trouver dans toutes les notes qu'il a laissées. M. A Richet a toujours été considéré comme un chi- rurgien de la plus haute valeur et comme un grand clinicien. Il eût été regrettable que rien ne vint établir et justifier cette supériorité. Assurément on peut trouver épars, dans un grand nombre de journaux de médecine, des le’ons qui té- moignent de sa vaste expérience et de l’élévation de ses idées. Mais c’est le hasard qui les fera découvrir, ou bien la volonté ferme de les y chercher. Son fils, devenu son collëgue, M. le P' Ch. Richet, a donc fait œuvre pie et œuvre ulile en réunissant dans un volume quelques-uns des sujets que son père avait si magistralement traités. Ce n’est pas ici le lieu de les analyser :disons que ces sujets sont pris dans toutes les branches de la chirurgie et qu'ils sont traités avec la conscience et la compé- tence que l’on sait, et que ces lecons sont empreintes de l’esprit clinique, et par conséquent scientifique, le plus élevé, Nous n’exprimerons qu’un regret, c'est que ce vo- lume ne soit pas suivi par d’autres : il est vrai qu'il est atténué par la détermination qu’a prise M. Ch. Richet de déposer à la Bibliothèque de la Faculté, les notes qui ont servi à la rédaction des lecons, « mine très riche dans laquelle on pourra trouver quantité de do- cuments précieux », D: P. Bazy, Gedoelst (L.), Chargé de Cours à l'Ecole de Médecine vé- térinaire de l'Etat à Cureghem, Bruxelles. — Traité de Microbiologie appliquée à la médecine vétéri- naire. Un fort vol. grand in-8° de 452 pages avec 64 figures intercalées dans le texte. (Prix : 8 fr.) Joseph Van In el Cie, rue Droite, 48, Bruxelles, 1892. Les traités de microbiologie sont très nombreux; mais il n’en est qu'un très petit nombre qui traitent spécialement des affections microbiennes propres à nos animaux, Parmi ces derniers il n’en est point qui s'oc- cupeexclusivement de bactériologie ; généralement on y trouve décrit la symptomatologie, le pronostie, l’ana- tomie pathologique, le diagnostic et la thérapeutique des affections microbiennes. M. L. Gedoelst a essayé de rompre avec les traditions; dans son livre, il se borne exclusivement à l'étude microbiologique des diverses affections ; il fait l’histoire naturelle des mi- crobes pathogènes sans se préoccuper ni de la maladie ni du malade. S'il est intéressant au point de vue scientifique pur, de séparer la mierobie de la pathologie pour l’étu- dier isolément; il me semble qu'au point de vue des applications pratiques, ce procédé offre de nombreux inconvénients. Pour moi la microbiologie, pour porter tous ses fruits, doit rester tributaire de la pathologie. Elle doit constituer entre les mains du médecin un instrument ou un procédé scientifique nouveau et très important pour lui permettre de s’éclairer sur la nature et le mode de transmission, etc., des diverses affec- tions contagieuses. A part cette légère critique, je n’ai que des louanges à adresser à l’auteur, L'ouvrage est divisé en trois parties : microbiologie générale; microbiologie spéciale et technique microbio- logique. Dans la première partie on trouve six chapitres très intéressantsayantpour titre: morphologie des microbes; physiologie des microbes ; action des milieux sur les mi crobes ; action des microbes sur les milieux; théorie de l'infection et de l’immunité; signification et rôle des microbes dans la nature, Tous ces points sont traités avec compétence et ces divers chapitres seront lus avec plaisir par tous ceux qui s'intéressent à la pathologie microbienne. Dans la deuxième partie l’auteur fait l'étude détaillée et complète du microbe de chaque affection. La divi- sion qu'il a adoptée dans sa description n’est peut-être pas à l’abri de tout reproche; il réunit souvent dans un même chapitre des maladies très différentes au point de vue clinique; mais ce n’est qu'un côté secon- daire et sans grande importance, IL consacre aussi un chapitre spécial à l'étude microbiologique des altéra- tions du lait et de la viande. Dans la troisième partie consacrée à la technique microbiologique, l’auteur traite successivement de l'examen microscopique des microbes, des méthodes de culture et des méthodes d'expérimentation sur les animaux. Ce livre, très bien écrit, très documenté, rendra de grands services aux étudiants ; il permettra aussi aux chercheurs d’y trouver rapidement des documents bi- bliographiques; chaque chapitre étant en effet suivi d’un index bibliographique à peu près complet sur le sujet traité. M. Kaurmann. 864 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES —- 2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 5 décembre. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Faye répond à quelques-unes des questions posées par le professeur Schuster, au sujet des taches du soleil, dans la der- nière réunion de l'Association britannique, à Edim- bourg. D'après lui, la pénombre de la tache ne parti- cipe pas, en général, au mouvement cyclonique qui en est la cause, de même que dans les trombes et torna- dos observés à la surface de la terre, il se produit autour une gaine nuageuse qui ne participe pas à la rotation furieuse de l’intérieur. L'auteur n’admet pas la possibilité d’expliquer les taches par des décharges électriques persistant pendant des mois entiers au même endroit, — MM. E. Cosserat et E. Rossard adressent leurs observations de la comète périodique Wolf, faites au grand télescope de l'observatoire de Toulouse, — MM. Rambaudet Sy envoient leurs observations de la nouvelle comète Holmes faites à l’équatorial coudé de l'observatoire d’Alger, La comète a été photographiée avec une pose de une heure et demie, — M. Esmiol communique ses observations de la comète Brooks (découverte le 20 novembre 1892), faites à l’observatoire de Marseille (équatorial de 0®, 26 d'ouverture). — M. Fabry a fait des observa- tions sur la même comète et avec le même instrument, L’éclat de la comète de Brooks est comparable à celui d’une étoile de 11° grandeur, — M. Bertrand de Font- violant présente un mémoire sur le calcul des poutres continues, d’après une méthode satisfaisant aux nou- velles prescriptions du règlement ministériel du 29 août 1891. L'auteur expose une méthode graphique expédilive pour construire les lignes d'influence des diverses quantités nécessaires à connaître, soit dans l'étude d’un projet de pont, soit dans la vérification des conditions de résistance d’un pontexistant, savoir : moments fléchissants, efforts tranchants, réaction des appuis et flèches élastiques. Le mémoire se termine par l’exposé d’une méthode abrégée pour la construc- tion des lignes enveloppes des moments fléchissants, — M.E. Jaggey adresse une note faisant suite à son mémoire sur la théorie des fonctions. — M. A. Tresse considère un certain système d'invariants différentiels et montre qu'il existe un ordre limite tel que tous les invariants d'ordre supérieur se déduisent des inva- riants de cet ordre ou d’ordre inférieur en formant le quotient de deux déterminants fonctionnels. Les inva- riants de cet ordre limite et d'ordre inférieur donnent les conditions nécessaires et suffisantes pour que deux mulliplicités données puissent se ramener l’une à l'autre par une transformation du groupe, — M. Leva- vasseur résout un problème d'analyse indéterminée qui se rattache à l'étude des fonctions hyperfuch- siennes provenant des séries hypergéométriques à deux variables. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Le Châtelier qui avait d'abord transformé le carbonate de chaux, préei- pité chimiquement, en un calcaire compact, cristallisé, par l’emploi de fortes pressions mécaniques jointes à lélévation de température, a pu répéter la même expé- rience sans faire intervenir la pression; le carbonate de chaux précipité, chauffé à 1620° s’est aggloméré en une baguette de dureté analogue à celle de la craie, mais complètement cristallisée, Il donne une explica- tion probable de la discordance, entre ses résultats et ceux de M. Joannis. — M. Henri Moissan a fait l'étude chimique de la fumée d'opium des fumeurs, L'auteur a cherché à produire cette fumée dans les conditions mêmes où elle prend naissance dans la pipe des fumeurs ; il a trouvé de l’acétone, des bases pyridiques mêlées à des quantités notables de bases hydropyri- diques et du pyrrol dans la fumée fournie vers 300°; au contraire la fumée qui prend naissance vers 250° ne contient qu'une petite quantité de morphine et des parfums agréables, — M. Arm. Gautier donne quelques résultats de ses études sur la fumée de tabac; celle-ci contient, outre la nicotine, une base C!'H16A7? homo- logue de la nicotine, une lutidine C'H°Az, une dihydro- picoline C6HŸA7, une base C6H?A70 répondant à la for- mule d’un hydrate de picoline, et quelques autres bases moins volatiles. — M. C. Friedel adresse une réponse à la deuxième note de M. Colson sur la nota- tion stéréochimique., — M. P. C. Plugge adresse une réclamation de priorité pour ses travaux sur le dosage volumétrique des alcaloïdes en présence de la phtalé- nie de phénol. — MM. F. Houdaille et L. Semichon introduisent une nouvelle variable capable de fournir des renseignements sur la constitution physique des terres arables, la perméabilité, Après avoir défini cette quantité, ils donnent un procédé pour la mesurer et pour déterminer en même temps le nombre et la sur- face des particules contenues dans un centimètre cube du sol. — M. Th. Schlæsing fils s’est proposé de déterminer, à un moment quelconque, le volume de l'acide carbonique disparu et celui de l'oxygène apparu par le fait de la végétation d’une plante entière. Le rapport du volume d'acide carbonique disparu, à celui de l'oxygène apparu par le fait des plantes examinées pendant les six ou huit premières semaines de leur végétation a été trouvé notablement inférieur à l'unité. — M. L. Michel, en chauffant à 1200° une partie de fer-titané et deux parties de pyrite, a obtenu des cris- taux de rutile et des cristaux de pyrrhotine identiques aux cristaux naturels, — M. Jannettaz a réalisé un nouvel ellipsomètre à l’aide duquel on peut : 4° déter- miner la position des axes des ellipses isothermes avec une exactitude égale à celle que donnent les micros- copes polarisants pour les lignés d'élasticisé optique ou les lignes d'extinction dans les systèmes obliques; 2° savoir si la courbe isotherme est un cercle ou une ellipse, ce qui est d’une grande importance pour les cas limites, C. MATIGNON. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM, N. Gréhant et E. Martin étudient l’action de la fumée d’opium et de chandôo, inhalée par la voie respiratoire, sur l’homme et le chien. Le chien, respirant une quantité d’opium égale à celle qu'un fumeur consomme généralement en trois jours, ne présente aucun phénomène appré- ciable, ce qui, comme on ïe sait, n’a pas lieu chez l'homme. Il existe donc, à ce point de vue, une diffé- rence sensible entre le système nerveux central de l’homme et du chien, —M. W. Kilian montre l’exis- tence de phénomènes de recouvrement aux environs de Gréoulx (Basses-Alpes) et indique l’âge de ces dislo- cations, Ch. CONTEJEAN. Séance du 12 décembre. 1SGIENCES MATHÉMATIQUES. — Emile Picard établit un nouveau théorème qui permet de trouver certaines so- lutions asymptotiques des équations différentielles. — M. Deslandres a photographié plusieurs fois la comète Holmes avec un objectif anastigmat de Zeiss, qui per- met d'opérer, avec une pose deux fois moindre qu'avec les objectifs ordinairement employés. Des épreuves prises à des époques variables, montrent que l'éclat de la comète va en diminuant. — M. G. Fouret montre que lorsqu'un point décrit une épicycloïde ordinaire RER. "y Dre _. le centre des moyennes distances de ce point et des centres de courbure successifs, en nombre quelconque, qui lui courespondent, engendrent une épicyloïde ordi- naire, allongée ou raccourcie, du même genre que la première, — M. Jules Cels définit d’une facon nou- velle l’adjointe de la première ligne d’une équation différentielle linéaire ordinaire; il indique en outre une propriété caractéristique des équations équiva- lentes à leur »djointe de la première ligne, 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Amagat a étudié gra- phiquement sur des réseaux d’isothermes, les lois de dilatation à volume constant des fluides gazeux; ila trouvé que le coefficient des pressions B — _ aug- mente très rapidement quand le volume décroît, c’est- à-dire quand la pression initiale à zéro croit; le coef- 1 A ficient f r _ augmente d'abord quand le volume décroît, il passe par un maximum d'autant moins pro- noncé, que la température est plus élevée, puis décroît. Les variations du coefficient de pression B avec la tem- pérature, toujours très petites, s’annulent aux tempé- ratures suffisamment élevées sous toutes les pressions. — M. G. Van der Mensbrugghe donne une démons- tration théorique de l’existence de la tension superfi- cielle à laquelle il relie l’évaporation et tous les phé- nomènes connexes, tels que l’ébullition, l’état sphéroï- dal et le point critique. — M. P. Joubin donne une relation entre la vitesse de la lumière dans un milieu réfringent et la grandeur des molécules dans le même milieu, relation en vertu de laquelle on peut calculer simplement l'indice de réfraction de tous les corps dont on connait la composition chimique. La réfrac- tion se trouve ainsi ne dépendre que de la masse moyenne de la molécule. — M.Ch.Fabry établit, dans le cas de l'incidence obliqueet dans celui de lincidence normale, la propagation anormale des ondes lumi- neuses des anneaux de Newton. Quand l'incidence est oblique, chacune des ondes réfléchies a deux focales distinctes, et l'étude des franges permet de montrer l'avance d’un quart d'onde qui se produit lors du pas- sage d’une onde par une de ces lignes. — M. Frédu- reau emploie des globes particuliers pour diffuser la lumière électrique d’une facon économique et dimi- nuer la fatigue de l'œil; ces globes diffuseurs sont des enveloppes de verre ou de cristal transparent, munies sur leur surface extérieure d’anneaux prismatiques parallèles et perpendiculaires à l’axe du globe, — M. Runolfsson établit, par des données expérimentales, Ja relation suivante entre les capacités calorifiques et électriques. Le produit du poids moléculaire et de la ‘chaleur spécifique, divisé par la constante diélectrique est constant à une même température, etle même pour tous lés corps, soit à l’état solide, liquide ou gazeux. — M. P. Curie propose une nouvelle facon d'utiliser les condensateurs à anneaux de garde et les électromètres absolus. — M. Ch. Renard présente un mémoire sur l'emploi des ballons non montés, à l'exécution d’ob- servations météorologiques à très grande hauteur; il fait connaitre ses recherches sur les enveloppes légères et sur les instruments et parachocs légers, nécessaires à l'exécution d’une série continue de sondages aériens, — M. L. Benoit adresse un mémoire ayant pour titre : Esquisses sur les causes naturelles. — M, Foveau de Courmelles présente un mémoire intitulé : La biélec- trolyse, actions réciproques de deux corps complexes sous l'influence des courants électriques continus, — M. Moissan donne la description d’un nouveau four électrique, qui lui permet d'atteindre les températures comprises entre 2000 et 3000°. A 2500°, la chaux, la strontiane, la magnésie, cristallisent en quelques mi- nutes ; à 3000° la chaux vive fond et coule comme de l’eau, le charbon réduit avec rapidité les oxydes de calcium, d'uranium; les sesquioxydes de chrome, d'oxyde magnétique de fer, sont fondus rapidement. On peut préparer rapidement des quantités notables de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 865 nickel, de cobalt, de mangnanèse, de chrome, par la réduction de leurs oxydes. L'auteur a même pu repro- duire la synthèse du rubis en additionnant l’alumine fondu de petites quantités de sesquioxyde de chrome, L'élévation de température suflit pour déterminer la cristallisation des oxydes métalliques. — M.C. Friedel a pu isoler dans le fer météorique de Canon Diablo, de petites quantités de diamant rayant le corindon et fournissant à l’analyse la quantité calculée d'acide car- bonique, C’est la première fois qu’on trouve le diamant dans une gangue, que l’on peut considérer sûrement comme sa gangue primitive. — M. Raoul Pictet adresse un mémoire intitulé : Essai d’une méthode gé- nérale de synthèse chimique. — M. A. Leduc a mesuré la densité de l’oxyde de carbone et déterminé le poids atomique du carbone, la valeur de ce dernier nombre nombre coïncide avec ceux qu'on a déduits de la syn- thèse de l’acide carbonique.— M. G. Hinrichs fait une etude critique des recherches fondamentales de Stan effectuées sur le chlorate de potasse, en vue de préci- ser la valeur des équivalents de certains corps; l’auteur en conclut que le procédé au chlorate ne peut pas être appliqué à la détermination de loxygène, — M. A. Besson a préparé un chloroiodure de carbone CCLAI par l’action de l'iodure d'aluminium sur le chlorure CCL#; c’estun liquide jaune clair, qui perd facilement son iode pour donner du sesquichlorure, —M. Maurice Meslans a étudié l’action de l’action fluorhydrique anhydre sur les alcools; l’éthérification est beaucoup plus lente qu'avec l'acide chlorydrique et exige une température élevée ; à 220°, on prépare facilement les éthers dérivés des alcools normaux. — MM. G. Bou- chardat et Lafont ont étudié l’action de l’acide sul- furique sur le citrène, et ont obtenu des produits très différents de ceux que l’on observe avec le térében- thème ; le cynièneetle pseudocumène semblent préexis- ter dans le citrène. — M. L. Barthe donne le détail du mode opératoire à suivre pour essayer le sulfate de quinine et doser la quinine en présence des autres al- caloïdes du quinquina. — M. Apéry adresse un mé- moire sur la vitesse des combinaisons chimiques des différents corps en dissolution. C. MariGnon. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. S. Arloing : On peut diminuer le pouvoir pathogène des pulpes de bette- raves ensilées, 1° par la dessiccation, procédé trop coûteux dans la pratique, 2° par la neutralisation exacte du produit acide, 3° par le chauffage à la température de l’ébullition maintenue pendant quel- ques minutes, 4 par l’adjonction de sel marin. Pour ce dernier procédé, la proportion de + p. 190 est le plus favorable. — M. J. Cordier : Assimilation du feuillet à la caillette des Ruminants au point de vue de la formation de leur muqueuse. Les grandes lames de la caillette sont disposées comme celles du feuillet et séparées par des lames moins élevées. — M. Lesbre : Caractères ostéologiques des lapins et des lièvres. Le léporide n’a rien du lièvre dans son squelette, ce n’est qu’un lapin, — M. Milne-Ed- wards confirme ce fait observé encore tout récemment par M. Rémy Saint-Loup. On ne connaît pas un seul cas authentique de reproduction entre le lièvre et le lapin, — M. P. Thélohan : Myxosporidies de la vési- cule biliaire des poissons : Ceratomyxa arcuala (n. sp.) parasite de la vésicule de Motella tricimata; Sphæro- myxa Balbianii(n. sp.) chez M. tricimata et M. maculata ; Myxidium incurvatum (n. sp.) chez Entelurus æquoreus, Syngnathus acus, Callionymus lyra, Blennius pholis, — M. Maxime Cornu : Méthode pour conserver la vita- lité des graines provenant des régions tropicales loin- taines. On, place les jeunes plantes qui ont germé en voyage, sous cloche, à 25° ou 30° dans de la terre à Po- lypode. Quand la plante est redevenue verte, on peut la confier à la terre ordinaire. — M. Gaston Bonnier : La pression se transmet très rapidement à travers les tissus conducteurs des plantes vivantes ligneuses, mais non pas intégralement. La pression transmise 866 pendant un temps donné est d'autant plus forte que la distance est moins grande entre le tissu considéré et la région où la pression vient de changer brusquement. — La pression ne se transmet pas immédiatement à travers les tissus des plantes vivantes herbacées, et la pression transmise en un temps donné est beaucoup plus faible que pour les plantes ligneuses, — La pres- sion ne se transmet qu'avec une extrême lenteur à tra- vers les tissus des plantes grasses. — M. G. Poirault : Structure des Gleichéniacées. — M. Wedensky : En excitant le nerf tympanico-lingual et en recueillant la salive sous-maxillaire, on reconnaît qu’il existe un op- timum de fréquence (40 irritations par seconde). A mesure que l'appareil se fatigue, l’optimum se déplace vers des irritations de plus en plus rares. I] y a aussi un optimum d'intensité. La sécrétion cesse quand on le dépasse. En appliquant sur la corde deux paires d’électrodes voisines (courant optimum ou subopti- mum sur la paire inférieure, courant pessimum sur la paire supérieure), la sécrétion se ralentit, ou cesse. C’est l’appareil terminal qui passe à l’état d’inhibition dans ces cas. — M. Babès: Les animaux morveux réagissent mieux aux substances thermogènes que les animaux sains. Le sérum de sang de bœuf provoque chez les sujets morveux une réaction fébrile intense. Il possède aussi une action spécifique, thérapeutique et vaccinale dans cette maladie. CH. CONTEJEAN. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 29 novembre. Ouvrages présentés : MM. Duplay et Reclus : Chirur- gie. — M. Catoïs : Influenza. — M. A. Richet : Clinique chirurgicale. — M. Gailier : Coqueluche. La coqueluche est une maladie infectieuse. Elle est déterminée par un microbe de forme arrondie, aérobie, facile à cultiver et existant dans les crachats. Les gargarismes et inhala- tions térébenthinées sont très utiles dans son traite- ment, Elle est transmissible à certains animaux, notam- ment à la poule et au chien. — M. Courgey : Observa- tions vaccinales, — M. Charpentier : Vomissements incoercibles au cours d’une grossesse. — M, Péronne rappelle avoir employé trois fois avec succès le procédé des tractions successives de la langue, dù à M. Laborde, pour traiter l’asphyxie des nouveau-nés. — M, A. Pitres : De la valeur de l'examen bactériologique dans le diagnostic des formes frustes et anomales de la lèpre. La recherche du bacille de Hansen empêchera la confusion, quelquefois possible, avec la Syringo- myélie. L'examen bactériologique du sang, du pus, de la sérosité des vésicatoires, donne des résultats aléa- toires. L'examen doit porter sur des fragments de tu- bercules entassés, ou sur desfragments de nerfs excisés au-dessus des régions de la peau où la sensibilité et la nutrition sont altérées, — M. Paul Berger conseille l'amputation du membre infecté pour traiter le tétanos traumatique chronique à marche progressive. Les in- jections de sérum antitoxique sont sans effet, contrai- rement à ce qu'avaient observé Behring et Kitasato, — M. Polaillon combat ce procédé. —-M. Nocard sous- crit au contraire à la proposition de M. Berger; maisil affirme que, pour le tétanos chronique, les injections d’antitoxine peuvent être utiles. — M. Théophile Roussel combat l’opinion de M. Magitot voyant dans les Cagots des Pyrénées des descendants des an- ciens lépreux. Les déformations unguéales sont une affection endémique de ces peuples sans rapport avec la lèpre. Séance du 6 décembre. Discussion sur le tétanos et son traitement à la- quelle prennent part MM. Verneuil, Chauvel, Trasbot, Leblanc, Paul Berger, Larrey, Léon Le Fort, Péan, Laborde, Les conclusions générales sont les suivantes: Quoique le bacille de Nictlaïer reste longtemps can- tonné dans le voisinage du point d’inoculation, l’ampu- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tation du membre lésé ne donne pas toujours de bons résultats. Quand elle est couronnée de succès, la gué- rison aurait probablement été obtenue par d'autres méthodes (M. Chauvel). Il n’est pas démontré non plus que le sérum antitétanique ait une efficacité bien marquée. Le procédé de traitement le plus préconisé serait l'usage du chloral, associé ou non à la morphine. M. Léon Lefort insiste particulièrement sur le danger qu'il y a à chloroformiser les tétaniques. On provoque souvent ainsi le tétanos permanent des muscles de la respiration et la mort, M. Laborde affirme que les in- jections, même à dose massive, de chloral dans les veines, n’ont jamais donné lieu à des embolies grais- seuses, comme le fait a été récemment affirmé en Alle- magne, Enfin M. Verneuil combat l’assertion sans cesse répétée que le tétanos aigu est fatalement mortel et que le tétanos chroniqueserait facilement guérissable, et ce qu'il importe surtout d'après lui, c'est de consti- tuer la prophylaxie. Séance du 13 décembre. M. Cadet de Gassicourt : Rapport général sur les prix décernés en 1892, — M. Regnauld, président, proclame les résultats des concours de 1892, — M. Ber- geron fait l'éloge de M. Michel Lévy. CH. CONTEJEAN. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 3 décembre. M. Gilbert présente une note de M. Auché qui a constaté le passage de microbes de la suppuration (streptocoques et staphylocoques) à travers le placenta chez des femmes enceintes atteintes de variole. Chez les sujets varioleux, l'infection secondaire joue un rôle important dans l'avortement et l'infection du fœtus. — MM. Roger et Charrin réfutent les attaques de M. Metschnikoff contre leurs expériences montrant que le sang des animaux vaccinés atlénue la virulence des microbes pathogènes. — MM. Achard et Renaut montrent que l’urée n’est pas attaquée par les bacilles de l'infection urinaire, et même que la présence de l’urée gêne leur développement; à la dose de 5 °/,, elle l'empêche totalement. — M. Beauregard montre une préparation faite avec un très jeune mouton, où lon voit que le réseau admirable de la selle turcique recoit, en outre de ses artères génératrices et de l'artère spléno-épineuse, un rameau méningé important venant de l'artère occipitale, et par suite de la carotide primi- tive, par le trou déchiré postérieur. Celte artère, véri- table carotide interne, s’atrophie avec l’âge. — Sur la proposition de M. Ch. Richet, au nom de M. Herzen, de Lausanne, il est décidé que la Sociélé de Biologie prendra part à la publication des travaux de M. Moritz Schiff, à l’occasion de sa soixante-dixième année, — M. Michel présente un régulateur de température pour les étuves non chauffées par le gaz. — M. Ch. Henry présente un photoptomètre, basé sur la loi de la déperdition lumineuse d’un corps phosphorescent : le sulfure de zinc. — M. Dastre éludie les relations qui peuvent exister entre la teneur en fibrine d’un sang donné et la rapidité de sa coagulation. On admet généralement que plus un sang est riche en fibrine, plus il se coagule rapidement, M. Dastre combat cette opinion par plusieurs arguments; il montre que si l’on défibrine le sang d'un chien et qu’on le réinjecte dans ses veines à plusieurs reprises, il arrive un moment où la coagulation devient très lente et nécessite dix à douze minutes. Le sang est alors très pauvre en fibrine, et au début, quand sa teneur était normale, il se coa- gulait en une ou deux minutes, — M. Mathias Duval expose les résultats de ses recherches sur l’inversion des feuillets, chez les Rongeurs. Il montre que l’inver- sion existe, quoique tardive et méconnue jusqu'ici, chez le Lapin. Le chorion s’atrophie à la fin de la gestation. Les villosités, d’origine endodermique, sont alors omphalomésentériques et non choriales. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Séance du 10 décembre. M. Charrin présente une note de M. Gautier sur l'influence des corps à Pétat naissant sur les microbes. Si l’on soumet à l’électrolyse des cultures dans du sérum artificiel additionné d’iodure de potassium ou avec une électrode positive de cuivre, les microbes sont détruits en quelque temps. En arrêtant l'expérience à des mo- ments déterminés, et en ensemencant les produits ob- tenus, on donne naissance à des générations de mi- crobes atténués. — M. Jean Charcot montre que dans des cas d’eczéma et de psoriasis, on peut observer la dissociation de la sensibilité nerveuse du toucher : chaleur,contact, douleur,etc. — M. Gley fait remarquer que des physiologistes ont démontré ces fails bien avant les pathologistes. — M. Malassez présente un appareil nouveau pouvant servir à la fois à la conten- tion mécanique du chat, du lapin, du cobaye et du rat. — M. Gaston Bonnier présente une note de M. Costantin sur le rôle des dégoptures des carrières à champignons des environs de Paris, C’est à ces vieilles terres qui ont déjà couvert les meules de champignons qu'est due la propagation de la maladie appelée môle. En employant des terres nouvelles, on évite la maladie, — M. Bonnier présente ensuite en son nom une étude sur les mouvements de la Sensitive sous l'influence de la dépression, En placant une Sensilive sous une cloche et en déprimant l'air très lentement, les feuilles de la plante prennent une position de réveil exagéré ; c’est-à-dire que les folioles se placent dans un sens inverse de leur position de sommeil et le pétiole se re- lève encore plus qu’à l’état habituel, En mastiquant un fin manomètre dans le renflement moteur de la plante on constate que la position ne change pas dans les tissus ; c'est donc la différence relative des pressions qu'on peut considérer comme la cause première de ces mouvements qui mont jamais été exactement décrits. Si la pression s’abaisse au-dessous d’une certaine li- mite, tout mouvement devient bientôt impossible. — MM. Malbec et Pilliet étudient les altérations du rein produites par les sels de baryte. Elles sont moins graves que celles causées par le sublimé. L'élément épithélial des tubuli contorti est altéré, — M. Retterer montre que, chez l'homme et les autres mammifères, l'artère hépatique est toujours en avant de la veine porte (l'individu étant placé dans la position verticale, s’il s’agit d’un quadrupède). — M. Galippe rappelle, à propos de la présentation de M. Gilbert à la dernière séance, qu'il a trouvé autrefois des parasites dans le testicule. Il en a découvert depuis chez des fœtus de cobayes et de lapins. Il pense que les microbes pé- nètrent dans l’ovule avec des spermatozoïdes. — M. Gellé a observé chez un individu une surdité ab- solue qui a duré 15 jours, à la suite d'introduction d'huile rance dans un des conduits auditifs. L’oreille non endommagée était pourtant absolument intacte. A la suite de l’irritation, il avait dù se produire un spasme d'accommodation bilatéral dû à une action ré- flexe se produisant sur les deux oreilles. Ch. CONTEJEAN. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 16 décembre. L'ellipsomètre que présente M.Jannetaz est un ins- trument destiné à la détermination des axes des ellipses de fusion de la cire, dans l’étude de la conductibilité des cristaux, On placela lame mince portant la courbe à étudier sur la plate-forme de l'appareil de Desains pour la mesure du diamètre des anneaux de Newton, Dans le tube de la lunette, M. Jannettaz place un prisme biréfringent qui donne de l’ellipse deux images en partie superposées. La droite d’intersection des deux ellipses a en général une position quelconque, mais en tournant la plate-forme sur elle-même, on peut l’a- mener à former une ligne de symétrie droite des deux ellipses. L'un des axes lui est alors parallèle, et c’est S67 dans cette position qu’on en fait la mesure comme s’il s'agissait d’un anneau de Newton. — M. Colson apour- suivi l'étude des interférences électriques dans les fils médiocrement conducteurs, tels que des fils de lin imbibés de chlorure de calcium, Il opère d’abord en fixant un pareil fil à un seul des deux pôles d’une bo- bine de Rubhmkorff, et il étudie au téléphone l’inten- sité du son obtenu aux divers points de ce fil. Il trouve que cette intensité décroît en cascade. Ensuite il tend un fil analogue entre les deux fils de cuivre de la bo- bine, et trouve] une région continue d'extinction dont l'étendue diminue avec la longueur du fil. Il détermine aussi les positions que doit occuper une tige de cuivre tendue entre les deux ficelles mouillées pour se trouver dans la zone neutre. Il remplace le téléphone par un tube de Geissler et obtient les mêmes résultats. Il pro- pose une explication de ces divers phénomènes en con- sidérant les variations du potentiel le long du cir- cuit. — M. Hess fait une communication sur les dié- lectriques hétérogènes. D’après la théorie de Maxwell, la formation du résidu est une conséquence de l’hété- rogénéité des diélectriques etn’a pas lieu dans les subs- tances homogènes. Et en effet l'expérience a montré que deux diélectriques homogènes, qui séparément ne laissent aucun résidu, en forment un, quand ces die- lectriques sont superposés sous la forme de deux pla- teaux. On peut, par exemple, considérer le diélec- trique comme formé d’une première substance de pou- voir inducteur déterminé et de résistance infinie, dans laquelle sont noyées des particules d’une autre subs- tance possédant également un certain pouvoir induc- teur et aussi une certaine conductibililé. Ce système peut être représenté par le couplage en série de deux condensateurs de capacités déterminées et de résis- tance infinie tous deux, mais dont le second est shunté par une résistance p. On peut alors traiter complète- ment par le calcul toutes les circonstances de charge etde décharge de ce système, et en vérifier les résultats par l’expérience. C’est un cas particulier de la théorie des diélectriques hétérogènes donnée par Maxwell dans toute sa généralité. L'auteur trace d'abord les courbes qui donnent les différences de potentiel des deux condensateurs partiels et de l’ensemble en fonc- tion du temps, puis la courbe des intensités du courant de charge. Celte dernière explique pourquoi, avec des isolants presque parfaits commele mica, ainsi que l’a montré M. Bouly, on observe encore des intensités assez considérables au bout d’une durée de charge très longue. La courbe qui représente logI en fonction du temps est bien une droite, Ce résultat avait été trouvé expérimentalement par M. Curie pourun grand nombre de cristaux eta été vérifié par l’auteur sur la gutta, la paraffine, le caoutchouc. L'augmentation du courantde charge avec la température s'explique très bien en fai- sant diminuer p, ce qui est conforme à la réalité puisque dans les substances isolantes, l'élément conducteur est presque toujours l’eau, dont la résistance diminue quand la température s’élève. M. Hess explique aussi les divergences profondes fournies par l'étude des in- tensités de charge en fonction des différences de po- tentiel. Les uns admettent que « l'isolement » varie ; les autres au contraire, par exemple M. Curie et M. Preece, trouvent que l'isolement reste rigoureuse- ment constant, c’est-à-dire que les intensités demeu- rent proportionnelles aux différences de potentiel, Il montre que ces divergences sont dues aux condi- tions très dissemblables dans lesquelles se sont placés les divers expérimentatenrs. Ceux du premier groupe ont eu le tort de négliger la variation de l'intensité de charge avec la résistance du condensateur shunté, et avec celle du circuit. Enfin M. Hess montre comment son ensemble des deux condensateurs dont le second est shunté, explique les phénomènes d'absorption et de résidu, Il analyse d’une facon très claire les pé- riodes de charge, de décharge, puis d'isolement, enfin de décharge résiduelle. En définitive, il montre que ce cas particulier, le plus simple des diélectriques hété- 868 ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTÉS rogènes, suffit pour rendre compte de toutes les pro- : priétés des diélectriques. Lachargedes diélectriques est un phénomène continu dans lequel ilest inutile de dis- tinguer une charge instantanée et une charge lente, Il n’est pas nécessaire de faire intervenirune polarisation électrolytique. La considération d’un couplage de con- densateurs de différentes résistances et de divers pou- voirs inducteurs permet de retrouver par le calcul tous les résultats d'observation. — M. Curie fait ressortir l'intérêt de la communication de M. Hess et montre à quel point fut remarquable l'intuition de Maxwell lorsqu'il expliqua toutes les propriétés des diélec- triques par l’hétérogénéité, alors que, de son temps, il n’existait aucun fait expérimental permettant de donner un point d'appui à cette conception. Edgard Haunié. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 22 juillet. MM. Lachaud et Lepierre onftpoursuivi l'étude des réactions dn bisulfate d’ammoniaque, et ont obtenu avec le nickel et le cobalt les sulfates doubles (3S0%Ni) (2S0:(AzH')? et (3S0Co) 2S01(AzH*}? qui sontbien cris- tallisés, eten même temps les sulfates S0‘Co et SOi Ni. Ils ont remarqué que le bisulfate d’ammoniaque at- taque le vere en dissolvant toutela soude et lapotasse. — M. Béchamp a étudiéles fermentations provoquées par les microzymas de la craie de Sens, et constaté qu'on pouvait ainsi faire fermenter l’amidon et le sucre de canne en l’absence de toute levure. L'alcool lui-même ensolution à 1 pour cent fermente sous l’in- fluence de ces microorganismes; il se produit lesacides acétique, propionique, butyrique, valérique, ænanthy- lique etcaproïque, dont M. Béchamp présente des quan- tités considérables préparées par ce procédé, aucune de ces fermentations ne peut se faire, par l’action du car- bonate de chaux pur précipité, la présence des micro- zymas de la craie est nécessaire. — M. Brochet expose au nom de M. Etard une formule de la nicotine qui rend compte des propriétés de cet alcaloïde, y compris le pouvoir rotatoire : cette formule est la suivante : H H,CH-.-CH cc cx/\/\ca: : ape cK CH Az AzH La nicotine, d’après M. Etard, ne saurait être envisagée comme dérivant d’un dipyridyle. — M, Gasselin a étudié l’action du fluorure de Bore surle borate trimé- thylique Bo (OCH*} et à obtenu la monofluorhydrine FI © Bo et la difluorhydrine Bo ui se N(ocH3} (OCH3) produisent également dans l’action du fluorure de Bore sur l'alcool méthylique. M. Gasselin montre que l'acide fluoxyborique BoFI*OSH* bouillant à 92 sous une pression de 3 cent. n’est pas un composé défini mais un mélange d'acides résultant de l’hydratation du fluorure de Bore, 2Bo FI + 35H20 = 2H F1 + BoFH + Bo(OHys. Il signale l’action des fluoborates alcalins sur les sels neutres de calcium qui les décomposent en fluorure et acide fluorhydrique, d’ou la nécessité, pour préci- piter tout le fluor de ces corps, de saturer de nouveau l'acide fluorhydrique libre. — M. Granger a obtenu par combinaison directe des éléments le phosphure de cuivre Ph? Cu’, cristallisé ; le phosphure ne réagit pas sur le mercure, mais l’iodure de phosphore traité par le mercure donne naissance au phosphore cristallisé Ph#Hg3. — MM. Hauser et Muller ont étudié la vi- tesse de décomposition des diazoïques par l’eau, et don- nent des formules qui représentent très exactement les laits. — M. Desesquelles communique à la Société les premiers résultats des recherches qu'il a entreprises sur les phénols mercuriques, avec le naphtol il a ob- tenu le composé 0 Socio M. Garros a comparé les propriétés de la gomme ara- bique et de la gomme de cerisier, il a constaté que la première précipite par la sous-acètate de plomb, et est insoluble dans l'acide sulfurique concentré; le contraire se passe pour Ja gomme de cerisier. Dans cette dernière substance il a rencontré un ferment qui dis- sout les métagummates insolubles. Séance du 14 novembre. M. Maquenne a obtenu un carbure de baryum BaC? en faisant réagir un mélange de magnésium en poudre et du charbon sur la baryte caustique; l’eau détruit ce carbure en dégageant de l’acétylène à peu près pur. Le carbure de baryum traité par l’iode et puis par l’eau, donne un très bon rendement en éthylène per- iodé [tétraiodéthène] CI', ce même composé prend naissance dans l’action des hypoïodites sur l’acétylène. — M. Wyrouboff entretient la Société de ses recher- ches sur le pouvoir rotatoire des corps en solutions; il a expérimenté sur les alcaloïdes et a eu surtout en vue de rechercher quelle relation peut exister entre le pouvoir rotatoire des corps isomorphes, et conclut des données expérimentales qu’il a recueillies, que les so- lutions de corps géométriquement et physiquement isomorphes ont sensiblement le même pouvoir rota- toire. Il en résulte que le pouvoir rotatoire a pour cause immédiate la symétrie du réseau cristallin, et que la particule dissoute conserve cette symétrie. Cette particule n’est done point la molécule chimique et il n'y à pas de dissociation en éléments simples comme on tend à l’admettre actuellement, — M. Le Bel, répon- dant à M. Wyrouboff, ne pense pas qu'on puisse ad- mettre que la molécule cristalline persiste dans les solutions et dans les vapeurs, ce qui est contraire aux lois des densités des vapeurs et de la cryoscopie. Comme M. Wyrouboff, il constate l'incertitude des observations du pouvoir rotatoire dans l'alcool et dans l’eau due aux combinaisons que les corps actifs for- ment avec ces dissolvants; il est fâcheux que l’on soit obligé de recourir si souvent à ces liquides; mais, pré- cisément à cause de cela, les mesures de M. Wyrouboff, faites dans l’alcool, ne sont pas à l'abri de toute cri- tique, — M. Friedel ne pense pas que la voie suivie par M. Wyrouboff soit le meilleur chemin à prendre pour éclaircir la question controversée. Indépendam- ment de ce qu’il y a de singulier à admettre dans des liquides, etforcémentaussi dansles vapeurs, des groupe- ments cristallins, il est hors de doute que la symétrie des cristaux doit être intimement liée à celle de la molé- cule chimique. Pour expliquer la dissymétrie cristalline il faut. donc remonter à la dissymétrie de la molécule, et cette dernière, suffisant parfaitement pour produire la rotation du plan de polarisation de la lumière, il est inutile de recourir à l'hypothèse que fait M. Wyrouboff. Des observations intéressantes réunies par le savant cristallographe on ne pourrait tirer d’autres conclu- sions que l'égalité du pouvoir rotatoire dans les corps isomorphes, et ce fait, fut-il établi, il ne semble pas qu'on puisse en déduire une explication du pouvoir rotatoire, — M. A. Colson, à propos de la communica- tion de M. Wyrouboff, estime que ses expériences sur les dérivés de l’acide diacétyltartrique permettent d’é- noncer cette proposition, « , hypothèse du carbone asymétrique est impuissante à indiquer le sens du pouvoir rotatoire même quand on ajoute à cette hypo- thèse les considérations introduites par M. Guye. » A l’appui de son dire, M. Colson cite l’acide diacétyltar- trique, l’anhydride diacétyltartrique , et le diacétyl- PE OZ Soon lite leo : ACADÉVIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 869 tartrate d’éthylène diamine, dont il écrit les formules stéréochimiques de la manière suivante : H H C2H302— C— CO?H CHOC CO (0) | | C2H302—C — CO2H C2H302—C—C0/ H H H C2H302— C — CO2H — AzH? (!) | CH? | CH? C2H302 — C — CO?H — AzH°? H Les deux derniers corps font, d’après M. Colson, excep- tion à la règle du produit d’asymétrie énoncée par M. Ph. A. Guye. La communication de M. Colson donne lieu à un échange d'observations qui s’est continué à la séance suivante; nous en joindrons donc le compte rendu à celui de la séance du 25 novembre. — MM. A. et C. Combes résument devant la Société deux mé- moires dans lesquels ils ont exposé les recherches poursuivies par eux de l’action des amines grasses sur la pentanedione 2-4 et ses homologues; ils décrivent les produits obtenus par l’action de l’'ammoniaque, de l'éthylamine de la ire et font l'étude de l’action de l’iodure de méthyle sur l’amino 2, pen- ténone 2-4, ainsi que celle de la chaleur sur le même composé; dans cette dernière réaction il se produit plusieurs bases, ils ont réussi à isoler l’une d’elles qui a pour formule : CISHI8AZ?, L'action des diamines a été également étudiée par eux, ils décrivent le produit de l’action de l’éthylène diamine sur l’acétylacétone, ainsi que ceux qui dérivent de l’action de l’urée. La Guanidine réagit sur le pentanedione 2-4 en donnant une amino-diméthylpyrimidine : CH CH — sé Nc — cH3 Az Lo SE C | Az H? fusible à 153°; MM. A. et CG. Combes en décrivent quelques sels et un hydrate ; ils continuent cette études ils ont aussi expérimenté sur les diamines aromatique ; et communiqueront prochainement leurs résultats, ainsi que ceux que leur a donné le chlorure de soufre, agissant sur la pentanedione 2-#. A. Comses. 1 Il est nécessaire de faire remarquer ici : 1° que ces formules sont écrites dans le plan, ce qui ne saurait être admis pour représenter des formules construites dans l’es- pace; 2° que, comme l’a fait remarquer M. Le Bel, ces for- mules sont inexactes, car elles représentent non pas des corps actifs, mais bien des inactifs indédoublables, car elles ont un plan de symétrie. La notation stéréochimique oblige à écrire ces formules de la manière suivante, si on veut se passer du schéma tétraédrique beaucoup plus clair : C:H30 : CO?H C?2H a ° Far iLEs 22H302— C — © ( + HC —CO?H HC= ICO [ C2H5 02 cons H C2H302 — C — CO2H — AzH? | CH? CH? Î | HC— CO?H — AzH? C2 de 02 SOCIÉTÉ MATHÉMATIQUE DE FRANCE Séance du 7 décembre, M. Désiré André fait une communication sur le partage en quatre groupes des permutations des n premiers nombres, — M. Genty, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées à Oran, envoie un mémoire, que présente M. Laisant, sur l'application de la géométrie vectorielle à la théorie générale des surfaces. — M. Hariaut entretient la société des conditions pour qu’une fonction soit décomposable en une somme de fonctions homogènes, — M. Haton de la Goupillière expose des recherches sur le centre de gravité des centres de courbure successifs d’une courbe plane en un point, — M. Demoulin communique les propriétés, étudiées par lui, du complexe de Painwin, lieu des droites par chacune desquelles on peut mener deux plans tangents rectangulaires à une quadrique donnée, Séance du 22 décembre, M. d’Ocagne indique à quel caractère analytique on reconnaît que l'échelle de relation d’une suite récur- rente est susceptible de réduction et montre comment on peut, dans tous les cas, réduire l'échelle d’une suite donnée à sa plus simple expression. Il fait voir, en ayant recours à la considération des suites fondamen- tales qu'il a naguère introduite dans cette théorie, comment le fait pour l'équation génératrice de n’avoir que des racines de module inférieur à l'unité constitue une condition à la fois suffisante et nécessaire pour que la série formée par les termes d'une suite récur- rente soit convergente, lorsque l'échelle de relation a été réduite à sa plus simple expression. —M. Humbert fait une communication sur les involutions de points marqués sur courbes algébriques. Il ramène à ce problème celui qui consiste à trouver toutes Les surfaces sur lesquelles il y a des courbes unicursales ne se coupant deux à deux qu’en un point. Ces surfaces sont celles qui sont repré- sentables point par point sur un plan. Les courbes uni- cursales tracées sur ces surfaces sont les correspon- dantes des droites duplan, A titre de résultat particulier, M. Humbert cite celui-ci: Toute surface possédant une famille de coniques telle que, par chaque point de la surface, passe plus d’une conique, est une surface de Steiner. — M. Demoulin étudie la congruence formée par les axes centraux des complexes linéaires passant par trois droites données, Cette congruence, du 4e ordre et de la 3° classe, est formée par les droites communes à deux complexes de Painwin (complexe des droites d’où on peut mener à une quadrique deux plans tangents reclangulaires). Ici la quadrique servant à engendrer chacun de ces complexes se réduit à un sys- tème de deux points. La surface focale de la congruence est une surface du 6° ordre admettant une biquadra- tique gauche de 1° espèce comme ligne de rebrousse- ment et le cercle de l'infini comme ligne double inflexionnelle. M. d'OcaGne. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES La Société a repris, à la fin de novembre, le cours de ses séances hebdomadaires, suspendu depuis les vacances. Le jeudi 24 novembre, elle a célébré par un banquet l'anniversaire de sa fondation et décerné les plus hautes récompenses dont elle dispose : l'illustre P' Virchow, de Berlin, a reçu la médaille Copley : M. Nils C. Duner, Di- recteur de l'Observatoire de Lund, la médaille Rumford; le Pr Charles Pritchard, Directeur de l'Observatoire de l'Université d'Oxford, l'une des deux médailles Royales ; M. John Newport Langley, l'autre médaille Royale; M. le Pr Raoult, de Grenoble, la médaille Davy; Sir Joseph Dalton Hooker, la médaille Darwin. Nous avons le plaisir d'informer nos lecteurs que, par suite de nouvelles dispositions, au sujet desquelles nous adressons nos plus vifs remerciements à la Societé Royale, 870 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES nous recevrons désormais, après chacune de ses séances, la copie textuelle des Mémoires accueillis par elle. Chacun de ces Mémoires sera, sous la seule réserve de l'acquiesce- ment de l'Auteur, traduit par un savant spécialiste et pu- blié, autant que possible, in extenso dans nos colonnes, Les communications suivantes ont été faites à la Société depuis sa rentrée jusqu'à la date du 15 décembre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. Major P.-A. Mac Mahon.F.R.S.— Mémôire sur la théorie des compositions des nombres. — Dans la théorie des partitions des nombres l’ordre des par- ties est indifférent. Les compositions sont simplement des partitions où l’on tient compte de l’ordre des parties. Outre les nombres ordinaires ou « unipartits », on considère des nombres « multipartits », c’est-à-dire des nombres complexes formés par l’ensemble de n nombres unipartits. La première section traite des compositions des nombres unipartits, sujet frès simple, qui sert d'introduction à la théorie plus diffi- cile des nombres multipartits. Dans la théorie des partitions, on rencontre certaines partitions définies par cette propriété que chacune correspond à une partition de tout entier inférieur. L’énumération de ces partitions, dites « partitions par- faites », se trouve être identique avec celle des compo- sitions des nombres multipartits. La seconde section donne une théorie purement analytique des nombres multipartits. Un nombre mul- tipartit d'ordre n est désigné par une notation telle que P1P2,-.. Pn. Les parties dans lesquelles on les décompose sont elles-mêmes des nombres multipartits d'ordre n. Pour le nombre 21 on a Partitions Compositions (21) (21) (20 01) (20 01), (01 >) (It 01) É (ñ 10), (0 À) (10? 61) 10? 01), (10 01 10), (01 10°) ) \ 1 La fonction génératrice pour les nombres de composi- üons est ha + ho + hs +... Ah — ho — h3 — A — o + A3 — 1 —2 (4 — 049 + 43 — Fig. 1. où À, 4, représentent respectivement la somme des produits homogènes d’ordres et la somme des produits $ às de n quantités «,,œ,, ... an; et le nombre des com- positions du multipartit p, p, ... p, est le coefficient P1 P2 Pr 2 de a, «4 ,... an ‘ dans le développement de cette fonction. La section 3 s'occupe de la représentation graphique des nombres bipartits, On forme un réseau consistant en séries de points par lesquels passent des lignes dans deux directions définies, le contour général étant un parallélogramme. La figure 1 (AB) représente le nombre 54. Une composition de ce nombre est définie en fixant des nœuds en certains points tels que nul d’entre eux n’est à la fois au-dessus et à gauche d’au- cun autre. Le parallélogramme qui a pour sommets des nœuds voisins représente un certain nombre, et, en passant en revue les nœuds de À à B, on peut former les différentes compositions. Les théorèmes obtenus par ces considérations sont étendus dans la section # aux nombres tri et multi- partits. Dans cette section, la plus importante du tra- vail, on établit que 1 Il 2{[1— 51 (2œ + ao + ... + an ]][1— (2x +2% +0) ] ... [— sn oi +2 + ... +20n)] est aussi une fonction génératrice pour les nombres de compositions, La comparaison de cette fonction avec la précédente fournit une identité féconde en résultats, parmi lesquels on peut remarquer le suivant relatif à la théorie des permutations. Si l’on appelle contact majeur une inversion entre lettres consécutives, le nombre des permutations de lettres dans le produit PIN? Pn H] 2 .-- On qui possèdentexactement s contacts majeurs est donné CJ 0 Do Dr par le coefficient de x Fe se en?" dans le pro- duit. D Loi + À (ao + -.. + an JP fe + ao +X(as +... on) Pa 2 Da + +... +oan] ; et de plus égal au nombre des permutations pour les- quelles Da + Ta +...” —=S) r, désignant le nombre de fois que la lettre «, se trouve à l’une des p, + p, + ... +1 premières places. La section 5 donne une généralisation de l'idée de composition et des théorèmes précédents. 29 SCIENCES PHYSIQUES. Lord Kelvin. P.R.S. — Sur la vitesse du cou- rant de cathode de Crookes, — A sa bril- {ante découverte du courant de cathode (cou- rant partant de la cathode dans des vases de verre où l’on a fait le vide et qui sont sou- mis à la force électrique), Crookes a rattaché le fait que, lorsque la totalilé du courant, ou une part importante de ce courant total, est dirigée de manière à tomber sur 2 ou 3 cen- timètres carrés du vase contenant, cette partie du verre s’échauffe rapidement d’un grand nombre de degrés, quelquefois à plus de 2009 ou 3009, au-dessus de la température de la partie du verre adjacente. Soit v la vitesse en centimètres par se- conde, du courant de cathodeet p la quantité de matière de toutes les molécules contenues dans 1 centimètre cube de ce courant. Ad- mettons, — et les expériences de Crookes semblent prouver que ce n’est pas loin de la vérité, — que leur choc contre le verre esl pareil à celui des corps non élastiques, et qu'elles abandonnent toute leur énergie de translation en échauffant le verre. L'énergie ainsi abandonnée, par centimètre carré de surface, est £ovï pour une seconde de temps; l’équivalent en unités thermiques gramme-degré centigrade-eau, est approximative- ment : PF ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 871 1 se” 42.000.000 La vitesse avec laquelle elles échaufferont le verre est, en dégrés centigrades par seconde : 1 a (1) 105 X 420 a où 5 est la chaleur spécifique du verre, et « son épais- seur à l'endroit où le courant vient le frapper. La température limite à laquelle sera porté le verre est : 1 1 RieS Map (2) 42.000.000 où E est la somme des pouvoirs émissifs des deux sur- faces du verre dans les circonstances actuelles, Il est probable que G diffère beaucoup de la densité moyenne de l’air qui reste dans l’espace clos, Faisons néanmoins, pour avoir un exemple possible à conce- voir, pe — 10 —8 ce qui est la densité moyenne qu’au- rait l’air enfermé si le récipient était vidé jusqu’à 8 X 108 de la densité atmosphérique ordinaire, Pour complèter l’exemple faisons v — 100.000 cm. par sec, (c’est à peu près le double de la vitesse moyenne des molécules d’air ordinaire à la température ordinaire) et faisons : ça == Cm. 8 comme cela peut être pour un ballon de verre ordi- naire et vide, et faisons Ce _ 3000 ce qui ne peut pas être très loin de la vérité, Avec ceshypothèses, nous trouvons, en nous fondant sur (1) et (2) approximativement, 1° par seconde pour le taux initial d’élévation de la température et 3750 pour la température finale,ce qui ne s’écarte pas beau- coup des résultats trouvés dans quelques expériences de Crookes, La pression du courant de cathode, déduite de la vi- tesse et de la densité que nous avons supposées, dans l'exemple choisi est pv, on 100 dynes par centimètre carré, ou environ 100 milligrammes par centimètre carré, ce qui explique amplement les résultats mécani- ques étonnants de Crookes. La vitesse très modérée de 1 kilomètre par seconde que nous avons admise est beaucoup trop petite pour se manifester elle-même par un phénomène optique de coloration. Le fait que ce phénomène démonstratif aété cherché, et qu'on n’a pu trouver aucune indication sur la vitesse des molécules lumineuses, ne donne par suite aucune valeur à l’objection opposée à la théorie de Crookes du courant de cathode. WW. C. Dampier Whethans, Membre du Trinity College de Cambridge. — Les vitesses des Ions. — Afin d'expliquer le fait que, durant l’électrolyse d’une solution saline, les ions en lesquels est décomposé le sel n'apparaissent qu'aux électrodes, la solution située dans l'intervalle restant inaltérée, nous devons sup poser que les ions cheminent à travers le liquide dans des directions opposées. Kohlrausch, a déduit des ré- sultats d’une série d'expériences sur la conductibilité des solutions salines, que chaque ion ‘chemine dans une solution étendue avec une vitesse déterminée quand il est soumis à l’action d’une variation donnée de potentiel (potentiel gradient) indépendamment de l’autre ion en présence, et il a introduit l’idée de vi- tesse spécifique de l'ion. Il a calculé la valeur de cette vitesse pour plusieurs substances, en se servant de ses mesures personnelles de conductibilité pour avoir la somme arithmétique des vitesses des ions opposées, et des données de Hittorf sur la « migration » pour avoir leur rapport. De ces valeurs des vitesses ont été tirées les conductibilités deplusieurs solutions salines, et l'accord avec l'observation des résultats de ce calcul a fourni la première confirmation dela théorie, M. Oliver Lodge a actuellement observé la vitesse de l'hydrogène ion quand il chemine dans un tube contenant du chlorure de sodium dissous dans une gelée fluide, qu’il décolore sur son pas- sage la phthaléine du phénol. II a obtenu les nombres 0,0029, 00026 et 0,002% cm. par seconde pour la vi- tesse de l'hydrogène sous une varia- tion de potentiel de 1 volt par centi- mètre, alors que Kohlrausch donnait 0,0030. Cette concordance ma fait entreprendre une série d’expérien- ces afin de trouver une méthode de détermination des vitesses des ions dans des conditions mieux déter- minées. Considérons la surface de séparation de deux solutions sa- lines de densité légèrement diffé- rentes qui ont un ion commun, mais sont de couleurs différentes (fig. 2). Désignons les sels par AG et BC. Quandun couranttraverse la surface limite il y aura transport des ions Cdans une direction et de A et de B dans l’autre. Si A et B sont les ca- tions, la séparation des couleurs se * déplacera avec le courant, et sa vi- Fig. 2. tesse indiquera la vitesse de l'ion qui est la cause du changement de couleur. L'appareil employé (fig. 3) se compose de deux tubes de verre verticaux d'environ 2 cm. de diamètre, réunis par un troisième beaucoup plus étroit qui est disposé parallèlement aux autres par la plus grande partie da sa lon- gueur. Le long tube est rempli de la solution la plus dense à peu près au niveau À, et la plus légère remplit le tube au-dessus de A et une burette qui lui est reliée, Le courant passe par des électrodes de platine qui doivent être reliées à une batterie de vingt-six accumulateurs par des fils de platine. Les bouchons sont ajustés d’une facon assez lâche de facon à permettre à tous les gaz qui pourraient se dégager de s'échapper. Le tube de jonction a une longueur effec- tive de 13°%,8, qui, en divisant par elle la différence de poten- tiel totale, donne la variation de potentiel. La correction due aux changements de densité produits par le passage du courant est absolument négligeable. Quand les solutions ont des résistances spécifiques différentes, il y a une discontinuité dans la varia- tion du potentiel à la surface de séparation et une électrisation qui en résulte. Cela peut s’éviter par l'emploi de solutions de même résistance spécifique et dans tous les cas l’effet sur la vitesse de la surface limite est irréductible, et peut être à peu près éliminé en ren- 872 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES versant le courant et prenant la valeur moyenne de la vitesse. Si la vitesse est trouvée la même dans des di- rections opposées quand le courant est renversé, l'effet doit être négligeable, Les premières solutions em- ployées sont celles de chlorure de cuivre et d’ammo- niaque, dissoutes dans une solution aqueuse d’ammo- niaque. La solution de cuivre est bleue, l’autre inco- lore. Leur concentration était 0.18 gramme équivalent par litre. La vitesse moyenne quand le courant passait en montant était 0,0406 cm. par minute, et quand il descendait, 0,0441 cm. par minute, Dans les deux cas la surface de jonction se déplace avec le courant, La variation de potentiel était 2,73 volts par em. ce qui donne une vitesse unique spécifique 0cm,00026 par seconde Kohlraush donnait pour une dilution infinie 0cm,00031 par seconde Les solutions de permanganate et de chlorure de potas- sium ont servi à montrer le mouvement de radicaux acides, le mouvement de la surface de jonction est alors contre le courant. Si nous supposons que la dis- parition de la couleur rougene peut avoir lieu qu’au- tant que le permanganate est remplacé par lechlorure, le mouvement de la surface peut être regardé comme donnant la vitesse du chlore. Le résultat pour des so- lutions de 0,046 gramme équivalent par litre a été 0°%,00057, par sel et par des solutions d'environ £ de cette concentration 0°®,00057 par sec. Kohlrausch donnait 0cw,00059 par seconde pour la vitesse ionique spécifique du chlore. Le succès de ces expériences pré- liminaires m'a fait essayer de perfectionner la mé- thode, J'ai cherché un couple de sels ayant exactement la même résistance spécifique pour la même concen- tration, quoique dans les cas où cette condition n’est qu'à peu près remplie (comme dans le cas des chlo- rures de cuivre et d'ammonium), l'erreur qu’on intro- duit par là soit négligeable, L'évaluation directe de la variation du potentiel n’est pas suffisante, mais si nous mesurons la résistance spécifique de la solution (r), la surface du tube de jonction (A) et le courant (y), nous pouvons déduire la vitesse unique spécifique (v,), de la vitesse observée (v), pour la surface limite, car il est aisé de montrer que vA v La méthode a servi à répéter la détermination pour le cuivre, en employant des solutions dont la concen- tration était 0,1 gramme équivalent par litre. Les résis- tances spécifiques des chlorures de cuivre et d’ammo- nium sont mesurées par la méthode de Fitzpatrick, et sont respectivement mesurées par 157 X 109 et 117 X 10% en unités C. G.S. Le courant était mesuré par son passage à travers un galvanomètre préalablement gradué. La vitesse de la surface de jonction était dé- terminée en lisant sa position à différentes époques au moyen d'un cathétomètre. Quand le courant passait en montant, la vitesse d’ascension était 3,10; 1,60; 1,63; 10,43 par heure Moyenne : 4em,57 par heure. bn — quand il descendait, la vitesse de descente était 3,45: 1,65; 1cm,70 par heure Moyenne : 402,60 par heure, Cela donne une vitesse unique spécifique dans des so- lutions de 0,1 gramme équivalent, la valeur 0cm,000309 par seconde si on compare au nombre de Kohlrausch pour des so- lutions de dilution infinie, on trouve 0cm,00031 par seconde. Des solutions du bichromate et de carbonate de potas- sium ont des résistances spécifiques qui sont très sen- siblement, à 30/0 près, les mêmes pour des concentra- tions égales, et l’on réglait la concentration d’une solution de carbonate jusqu’à réduire encore la petite différence entre elles et la solution à £ de bichromate, Le premier point examiné avec ces solutions a été l’in- fluence du changement de la variation de potentiel sur la vitesse. Ces quantités, dans la théorie de Kohlrausch, sont proportionnelles, D'abord on a employé toutes les piles disponibles, la vitesse de la surface de jonction quand le courant descend était 3,63; 3,39; 3,65; 3°m,24 par heure Moyenne : 3°m,48 par heure. et de bas en haut. Quand le courant monte, la vitesse est dirigée de haut en bas et devient 3,28; 3,55; 3cm,45 par heure Moyenne : 3°2,43 par heure. ce qui donne v, — 0,00048 cm. par seconde, Une f-é-m. d'environ À de celle employée ci-dessus a été alors ap- pliquée. Vitesse moyenne de haut en bas : 4°m,44 par heure _ de bas en haut : 1,29 v, — 00m,00047 par seconde. Ainsi Ja valeur obtenue pour la vitesse unique spéci- fique est independante de la f-é-m, ou la vitesse des ions est proportionnelle à la variation du potentiel. Les expériences à grande f-é-m. ont été répétées avec de nouvelles solutions. v, = 0c%,00046 par seconde. La vitesse spécifique du groupe bichromale n'est pas donnée par Kohlrauhch, mais peut se déduire de la mé- thode de ce savant pour calculer la conductibilité mo- léculaire (9,10 X 10%) qui a été déterminée par Leng, et de la constante de migration qu'Hittorf a donnée comme égale à 0,502. La vitesse vient : v, — 0,000473, un nombre identique avec la valeur moyenne des nombres mesurés cotés plus haut. Afin d'apprécier l’effet d’une des continuités dans la variation du po- tentiel, on faisait une autre détermination de la vitesse du même ion, en remplaçant le carbonate par le chlo- rure de potassium, dont la conductibilité est considé- rablement pius grande que celle du bichromate (41,13 X 10-12 et 9,10 X 10—1?). On a fait deux ex- périences. I. Vitesse de haut en bas v, — 0,000516 — de bas en haut 0,000394 va — 0,000455. II. Vitesse de haut en bas v, = 0,000483 — de bas en haut v,000402 v, — 0,000443. Ces nombres montrent que l'effet est d'accroître la vi- tesse dansune direction et de la diminuer dans l’autre, tandis que (à condition que la différence des résistances spécifiques ne soit pas grande), la valeur moyenne donne une aussi bonne approximation que celle obte- nue en employant des solutions de conductibilité iden- tiques. Avec des solutions de résistances différentes la surface de jonction apparaît souvent comme nettement délimitée quand elle marche dans une direction, et va- guement quand elle chemine dans l’autre. Cela vient du fait que chacun des ions qui se séparent du corps prin- cipal, se trouve dans une région où la variation du po- tentiel est différente. Sa vitesse est par suite altérée ; dans le premier cas il regagne le rang; dans le second, il s’en sépare de plus en plus. La recherche a été étendue aussi au cas de solutions alcooliques. Elles ont une conductibilité très inférieure à celles des solutions aqueuses correspondantes, et la question de savoir si tac tre totalisant set Lam fat sis ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 873 la théorie de Kohlrausch leur est encore applicable est d’un grand intérêt. Les données pour les constantes de migration ne sont pas connues; on a donc appliqué une modification de la méthode. On a fait une mesure expérimentale de la vitesse des deux ions dans le même sel et comparé leur somme avec les valeurs dé- duites de la conductibilité. Le premier sel employé a été le chlorure de cobalt, qui en solution alcoolique, est d’une couleur bleu foncé. La vitesse du chlore à été mesurée en mettant au-dessus du chlorure de co- balt du nitrate de colbalt, dont la couleur est rouge. et celle du cobalt avec un couple de solutions de chlo- rure de cobalt et de chlorure de calcium, ce dernier sel étant incolore. On rencontre quelques difficultés dans le réglage des solutions à la concentration convenable. Si la concentration est très faible, les couleurs sont difficiles à voir; tandis que, si la concentration ap- proche de 0 1 gr. équivalent par litre, les irrégularités apparaissent. Finalement, on s’estservi de solutions de 0,05 grammes-équivalent, mais même ici on n’apprécie encore les effets d’une trop grande concentration, Chlore v, = 0,000026 Cobalt 0,000022 La somme est U = 0,000048 Elle peut être déduite dela conductibilité (2, 86 X 10 — 1) et on obtient : U = 0,000060 On a étudié ensuite le nitrate de cobalt, Sa conductibi- lité est supérieure à celle du chlorure (3,80 X 10 — 13) ce qui nous amène à nous attendre à trouver qu'elle se comporte d'une facon normale à des concentrations plus grandes que celle où commencent les irrégularités du chlorure. C’est en effet le cas. Nous devons suppo- ser aussi que la concordance avec la théorie sera meil- leure. Les couples employés sont: nitrate de cobalt- chlorure de cobalt et nitrate de cobalt, nitrate de cal- cium, Groupe nitrate (No3) v, = 0,000035 Cobalt v, = 0,000044. La somme est U — 0,000079. La valeur calculée, en partant de la conductibilité, est U = 0,000079. L’explication des irrégularités observées dans les so- lutions concentrées est très aisément expliquée en ad- mettant que des ions complexes se forment quand la concentration augmente. Une discussion plus appro- fondie de cette question est remise au moment où je communiquerai quelques expériences de plus. Voici une table de résultats : VITESSES UNIQUES SPÉCIFIQUES 1. — Solutions aqueuses. ER — — ———————eermmmemmmmmmmmet Vitesse Vitesse calculée ION déduite de la théorie observée de Kobhlrausch : 00026 ! CNE A eee | 0°000309 0,00031 0,00057 ! Chlore.….......| 6000501 0,00053 G TE CSE ER 0,00048 roupe bichromate| 660041 0.000413 2307 ? 2 GrOMS ..e 000046 | 1 Déterminations préliminaires. II. — Solutions alcooliques. VITESSE | VITESSE SOMME SOMME SEL de l’anion|du cation|des vitesses|des vitesses (observée) |(observée)| (observée) | (calculée) Chlorure de cobalt. ...| 0,000026 | 0,000022 0,000048 0,000060 Nitrate de cobalt ...| 0,000065 | 0,0000%% | 0,000079 0,000079 A. B. Basset F, R. S. — Stabilité et instabi- lité des liquides visqueux. — Le P' Osborne Rey- nolds a montré qu'un jet pénétrant à l’intérieur d’une masse liquide devient instable dès que sa vitesse est suffisamment grande. La théorie qu'il donne du phé- nomène, dans laquelle il ne tient pas compte du frot- tement sur les parois du tube, est insuffisante; une étude plus complète du problème mène aux deux con- clusions suivantes : 4° La tendance à l'instabilité varie dans le même sens que la vitesse du liquide, le rayon du tube et le coefficient du frottement de glissement, mais en sens inverse de la viscosité ; 2 La tendance à l'instabilité croît en même temps que la longueur d’onde de la perturbation. La suite du mémoire est consacrée à la discussion de divers problèmes : celui d’un jet cylindrique dans l'air, avec la considération du cas particulier où le liquide est électrisé, et celui de l’action de l’huile sur une mer agitée; il faut, pour que le calme se pro- duise, que la longueur d’onde de la perturbation ne soit pas comprise entre deux valeurs déterminées, 3° SCIENCES NATURELLES, E. T. Newton. F.G.S.— Sur quelques reptiles nouveaux du Grès d'Elgin.— L'auteur étudie des restes qui appartiennent maintenant au Musée d'Elgin et au Geological Survey. Ces restes représentent au moins huit squelettes distincts, dont sept se rapportent aux Dicyno- dontes, le huitième appartient à un reptile à cornes nouveau pour la science. Les os ayant disparu, tous ces restes se trouvaient à l’état de moules creux, etil a été nécessaire pour l’étude de relever leur empreinte avec de la gutta-percha. — Le premier spécimen, que Traquair avait rangé en 1885 parmi les Dicynodontes, est le Gordonia Traquairi. Le crâne ressemble à celui des Dicynodon et Oudonodon. Les narines sont doubles et dirigées latéralement, les orbites sont grandes et re- sardent un peu en avant et en dessus, La fosse supra- temporale est grande; elle est limitée en haut par la proéminente crête pariéto-squamosale, et en bas par la large barre supra-temporale qui s'étend en dessous et en arrière pour former un long pédicule sur lequel vient s’articuler la mâchoire inférieure. Il n’y a pas de barre temporale inférieure. Le maxillaire est dirigé en bas et en avant, etse termine par une petite dent. Vu d'en haut, le crâne est étroit dans la région inter-orbi- taire et rasale, mais il s’élargit au niveau des barres temporales, bien que la cavité cranienne soit fort étroite, On voit une srande fosse pinéale au milieu d’une aire fusiforme qui est limitée postérieurement par une paire de pariétaux, et antérieurement par un os intercalaire. Le palais est continu avec la base du crâne; les ptérygoïdes de chaque côté envoient une apophyse dans la région carrée, En avant, la partie mé- diane des ptérygoïdes réunis s’incurve vers le haut, et les côtés extérieurs descendent, formant un pro- fond sillon qui, si l’on en juge d’après d’autres spécimens, devait être transformé en tube et former les arrière-narines, grâce au développement des pala- tins du côté interne. Les branches de la mâchoire in- férieure présentent une grande dépression latérale, et 87% ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES sont complètement unies à la symphyse. L’occiput avait deux fosses post-temporales de chaque côté. Ce spécimen se distingue de Dicynodon par la présence de deux fosses post-temporales de chaque côté de l’oc- ciput, par la faible diminution de la dent maxillaire, et probablement par l'aire fusiforme allongée située autour de la fosse pinéale, ainsi que par la légère ossification des centres vertébraux. Dans un autre spécimen, le membre antérieur est conservé : l’humérus présente à ses extrémités l'expansion caractéristique des Anomo- dontes, sa grande crête deltoïde est anguleuse, el obli- quement située à l'extrémité distale. L'auteur donne une courte description comparative de trois autres espèces du même genre : G. Huæleyana, G. Duffiana et G. Juddiana. Une seconde forme générique est le Geikia Elgi- nensis. Le crâne de ce reptile se rapproche beaucoup de celui du Ptychognathus Owen, mais il s’en dis- tingue par un mufle plus court et par l’absence complète de dents. Caractéristique est aussi la partie supérieure du crâne située entre les orbites ; elle forme une profonde vallée antérieurement ouverte, et munie latéralement d’un bourrelet qui se termine par une grande proéminence en avant et au-dessus de l'orbite. L’occiput ne présente que des fosses tem- porales inférieures, et le maxillaire forme en dedans une saillie dentiforme ; eette saillie occupe la même place que les dents des Gorgonia; mais l'os est trop mince pour avoir supporté une dent, et il était très probablement couvert d’un bec corné. La mâchoire inférieure a une forte symphyse, une dépression laté- rale distincte, et le bord oral, dans la partie anté- rieure de chaque branche, porte une saillie rugueuse: — L'auteur donne le nom d’Elginia mirabilis à un rep- tile dont le crâne, grâce à l'extrême développement de ses cornes et de ses épines, rappelle les sauriens vi- vants des genres Moloch et Phrynosoma. La surface ex- terne de ce crâne est couverte de plaques osseuses et ne présente pour toute ouverture que les narines, les orbites et la fosse pinéale. La surface de ces as est creusée de dépressions profondes, comme dans les cro- codiles etles Labyrinthodontes. Les cornes et les épines, dont la longueur varie de 1/4 de pouce à 3 pouces, se trouvent sur presque tous les os externes. Le déve- loppement des épiotiques et l’arrangement des os ex- ternes rappellent plusles Labyrinthodontesqueles rep- tiles, tandis que le palais se rapproche de celui des Lacertiliens (Iguana, sphénodon), encore que les pté- rygoides iraient aussi en avantde la cavité psérygoide, I ya quatre saillies longitudinales le long du palais, et quelques-unes d’entre elles paraissent avoir porté des dents. Le bord oral avait une dentition pleuro- donte , on trouvait de chaque côté douze dents à cou- ronne spatulée, latéralement comprimées et dentées en scie, C’est la dentitionde l'Iguana, moins lé nombre de dents qui est plus faible. Grâce à ses affinités dou- bles, ce crâne ne ressemble à celui d'aucune forme vi- vante ou fossile ; la forme la plus voisine, quoique très éloignée, estle Pareiasaurus de l'Afrique méridionale. Edgardä J. Allen. B. Sc University college, London. — Mémoire préliminaire sur les néphridies et la ca- vité générale de la larve du Palæmonetes varians. — Pendant la plus grande partie de la vie larvaire Pau- teur a constaté l'existence de deux paires de néphri- dies : les glandes vertes et les glandes du test; les pre- mières s'ouvrent à la base des antennes externes, les secondes à la base des mâchoires postérieures. — Dans les larves âgées de quelques jours la glande verte res- semble à celle qu'ont décrite Weldon et Marchal chez les Crevettes adultes, avec cette différence toutefois que la remarquable dilatation de la vessie (sacs né- phropéritonéaux de Weldon) n’a pas encore un aussi grand développement. Chaque glande consiste en un sac terminal qui, par un tube en U, se met en relation avec l’uretère qui est très court; la portion distale du tube est légèrement élargie et constitue la vessie. A l’époque de l’éclosion la glande tout entière est repré- sentée par une masse de cellules dans laquelle on dis- tingue toutes les parties de l'organe, sauf la vessie: l'orifice externe est déjà formé. Peu de temps après l’éclosion, une lumière se produit dans la glande, par séparation des cellules, et ultérieurement on voit grandir la vessie qui se développe d’abord en avant de l’æsophage où elle rencontre son homologue du côté opposé, puis en arrière au-dessus de l’estomac, où la fusion médiane des prolongements opposés forme le sac néphropéritonéal impair. Ce mode de développe- ment confirme les vues de Weldon et de Marchal sur la nature de ce dernier sac, — La glande du test est un organe larvaire dont Claus avait déjà signalé l’existence dans le mysis des Callianasses. Dans les embryons presque mùrs, de même que dans les très jeunes larves, les glandes du test sont les seuls organes fonctionnels sériaux du Palæmonetes et Palwmon, la glande verte n'ayant pas encore de lumière. La glande du test du P, varians est très petite; elle est formée d’un tube à large lumière, dont la branche terminale impaire s'ouvre à la base des maxilles postérieures, et se con- tinue en arrière dans deux branches horizontales diver- gentes dont la plus interne se renfle à son extrémité en forme de sac. La structure histologique est la même que celle qu'a signalée Grobben pour la glande verte du Mysis. Passant à l'étude de la cavité du corps, V'au- teur dit que, dans un plan vertical passant par les secondes maxilles de la larve, la cavilé limitée par l'ectoderme peut se diviser en quatre régions : un sac dorsal entouré par une couche épithéliale définie et qui contient l'aorte cévhalique, une cavité centrale dans laquelle sont logés la corde nerveuse avec le foie et l'intestin, deux cavités latérales qui sont séparées des cavités centrales et qui reçoivent les glandes du test; enfin les cavités des appendices qui contien- nent les extrémités distales des mêmes organes. Les cavités des appendices communiquent avec les cavités latérales, et ces dernières entrent fréquemment en re- jation avec la cavité centrale, grâce à la disparition des trabécules conjonctifs. Toutes ces cavités contiennent du sang, à l'exception du sac dorsal qui en est toujours complètement dépourvu. L'auteur étudie longuement ce dernier sac, qu'il a aussi trouvé dans le Crangon et le Palæmon, et qui atteint de grandes dimensions chez l'adulte, Sous la forme d’un tube cylindrique allongé, il est situé en avant, sur le sac néphropéritonéal, et renferme l'aorte céphalique; en arrière, il s’élargit beaucoup et recouvre la partie frontale des ovaires. Le sac est complètement clos; il est entouré en avant par un tissu massif qui paraît donner sur sa face externe des globules sanguins, ainsi que l'avait suggéré à l’au- teur le Pr Weldon. Le sac se développe aux dépens d’une double couche de cellules situées dans lembryon, autour de l'aorte céphalique déjà constituée. Avant l’é- closion, les cellules et la couche externe grandissent beaucoup et forment bientôt une masse solide de chaque côté de l'aorte; ces masses se creusent chacune d’une lumière distincte, deux cavités sont ainsi formées, l’une à droite, l’autre à gauche de l'aorte et, par un processus qu'a suivi l’auteur, finissent par communiquer ventralement de manière à former un simple sac. Le développement ultérieur du sac dorsal, consiste surtout dans sa croissance; à son extrémité postérieure il donne naissance à une paire de lobes qui s'étendent jusqu’à l'extrémité antérieure du péricarde. Dans la région postérieure du thorax, les cavités centrales et latérales sont situées au-dessous du péricarde, qui est séparé de la cavité centrale du corps par le septum péricardique. Les organes génitaux sont situés à l'extrémité antérieure du péricarde, immédiatement au-dessous du septum. Dans la larve qui vient d’é- clore, ils consistent en deux masses cellulaires entou- rées d’un manchon mésodermique, mais les conduits sexuels n’existent pas encore. — Les recherches de l'auteur sur l'abdomen confirment les observations de Milne-Edwards et de Claus. Il y a deux sinus longitudi- ut D. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 875 naux, un dorsal qui entoure l'intestin, et un ventral qui renferme la chaîne ganglionnaire. Ces sinus sont séparés par les muscles, mais communiquent par des sinus latéraux, Passant à des considérations théoriques, l’auteur établit que la cavité du corps, dans la région anté- rieure du thorax, peut être comparée à celles des Peripatus, au stade où la portion dorsale des sommités mésoblastiques ont atteint leur développement maxi- mum : le sac dorsal du Palæmonetes est l’homologue des parties dorsales des sommités mésoblastiques du Peripatus, et sa cavité est un vrai cœlome. Les cavi- tés centrale et latérale, ainsi que celles des appen- dices, représentent le pseudocèle et, étant remplies de sang, peuvent être appelées hæmocéle, Dans la ré- gion postérieure du thorax, le cœur, le péricarde et le septum péricardique de Palæmonetes présentent exac- tement les mêmes relations que dans le Peripatus, et sont évidemment homologues dans ces deux animaux ; il faut noter toutefois que les néphridies n’exis- tent pas dans cette région, Les organes génitaux des Palæmonetes peuvent être regardés ici comme repré- sentant le cælome. Si ces homologies sont sérieuses, on peut dire que les cavités entérocèle (vrai cœlome) et pseudocèle existent chez les crustacés. L'entéro- cèle comprend le sac dorsal, la glande verte, la glande du test, ou les sacs terminaux de ces organes, ainsi que les organes génitaux et leurs conduits, le pseudo- cèle, pour sa part, est constitué par le cœur et les ar- tères, par les cavités péricardique, centrale et laté- rales du thorax, ainsi que par celles des appendices et par les nombreux sinus de l'abdomen. Dixey (F. A.), Membre du Wadham College à Oxford. — Note préliminaire sur les relations du derme sous -unguéal avec le périoste de la phalange unguéale. — Le derme sous-jacent à l'épithélium de l’ongle de l'embryon humain se distingue de très bonne heure de la peau proprement dite du reste du doigt par son épaisseur et sa densité plus grande. L’épaisse couche de tissu conjonctif résistant qui constitue le derme sous-unguéal ne se termine pas en s’amincissant en face de la rainure qui traverse la surface dorsale du doigt et représente le bord antérieur de l’ongle en voie de développement. Cette couche ne se continue pas non plus avec le derme de la peau du doigt mais, conservant toujours son épaisseur origi- nale, elle plonge profondément dans la substance du doigt et, prenant la forme d’une bande courbe bien définie, dont la convexité est d’une manière générale dirigée en avant, elle traverse le tissu sous-cutané lâche, atteint le périoste qui entoure l'extrémité distale de la phalange unguéale ef se continue avec lui. Le derme sous-unguéal ef le périoste de la phalange, qui pré- sentent des structures histologiques très analogues entre elles et très distinctes de celle du tissu conjonctif lâche qui forme la plus grande partie du segment ter- minal du doigt, sont ainsi en continuité complète, grâce à la bande courbe de tissu conjonctif dense dont on vient de lire la description. XVaymeuth Reid (E.), Professeur de Physiologie à University College, à Dundee. — Des propriétés élec- tro-motrices de la peau de l’anguille commune, — 4. On a soutenu que la force électromotrice du cou- rant de repos de la peau des poissons était due à la transformation muqueuse dont elle était le siège et qu'on ne pouvait l’attribuer à la présence d’élé- ments glandulaires ; cette hypothèse est infirmée dans le cas de l’anguille, par l’absence de tout processus de transformation muqueuse dans les cellules superfi- cielles de l’épiderme et par la présence de cellules sécrétoires abondantes, dispersées dans la peau. 2. L'existence de différences considérables de potentiel entre deux contacts sur la surface externe de la peau et le faïf que cette force électromotrice est capable de s’auzmenter sous l'influence d'excitants mécaniques, conc ordent avec l'hypothèse que la force électromotrice du courant de repos résulte de processus glandulaires d'activité variable et ne sont point compatibles avec la théorie qui attribue l’origine de la force électromotrice à la transformation muqueuse de la surface de la peau. 3. Les réductions de la force électromotrice du courant de repos normal qui suivent l'exposition de la peau à l'acide carbonique et à la vapeur de chloroforme et le rétablissement de cette force à son taux primitif que détermine l’exposition à l’air, sont une preuve très forte que l’origine de la force électromotrice réside dans quelque processus vital actif qui a son siège dans la peau, et il est raisonnable de supposer que c’est dans ses éléments sécrétoires qu'ils sont plus spécialement localisés. 4. Le fait que la force électromotrice de la peau de l’anguille subit uue variation excitatrice sous l'influence des excitants électriques, thermiques et mécaniques concorde avec ce que l’on sait à cet égard des autres appareils glandulaires, et le fait que cette variation excitatrice se révèle comme une variation positive du courant de repos concorde aussi en gros avec les phé nomènes observés en d’autres cas. 5, Le fait que la narcose chloroformique empêche com plètement de se produire la variation excitatrice sous linfluence des excitants, en même temps qu’elle réduit la force électromotrice du courant normal de repos à zéro, vient à l'appui de l'hypothèse que le courant de repos et le courant d'action ont une seule et même source. 6. Enfin, la réduction par l’atropinisation de la force électromotrice du courant normal de repos et l'absence complète dans ces mêmes conditions de toute variation excitatrice, sont des faits qui plaident fortement en fa- veur de l'hypothèse que la force électromotrice des deux courants dérive d’une source glandulaire, Sherrington (C.S.), Lecteur de Physiologie à Saint- Thomas’s Hospital, London. — Expériences sur la dis- tribution périphérique des fibres des racines pos- térieures de quelques nerfs rachidiens. — Après avoir rappelé rapidement les recherches expérimentales d'Eckhard, de Peyer, de Krause, de Koschewnikoff, de Meyer et de Turck et les travaux anatomiques de Herringham et Paterson, M. Sherrington passe en revue les observations cliniques de Thaburn, Starr, Head, Mackensie, etc. Il indique alors les méthodes dont il s’est servi dans ses expériences sur la gre- nouille, le chat et le singe. Chez ces deux derniers animaux, il a étudié l’action exercée par des sections consécutives en série ascendante ou descendante sur le mouvement réflexe que détermine l'excitation élec- trique du bout central d’un nerf périphérique, et cette étude lui a servi de guide pour découvrir les connexions centrales du nerf. Chez la grenouille et le singe, M. Sherrington s’est servi des excitations mécaniques de la surface cutanée, après section préalable d'un certain nombre de racines postérieures au-dessus et au-dessous de la racine considérée, pour déterminer l'aire de distribution périphérique de la racine nerveuse dans la peau. Les diverses expériences sont décrites chacune à part et les résultats de chaque série d’expé- riences groupés. Les champs de distribution cutanée des racines rachidiennes afférentes thoraciques et post-thoraciques ont été photographiés, et des esquisses en ont été faites au laboratoire au moment même des expériences, On a également photographié les champs de distribution cutanée des racines sensi- tives cervicales; mais M. Sherrington à réservé pour une autre communication la description des racines situées au-dessus de la première thoracique, et la dis- cussion de leurs aires de distribution, Voici les con- clusions auxquelles il est arrivé: Le champ cutané appartenant à chaque racine sensitive peut être appelé champ cutané segmentaire, Dans chaque champ seg- mentaire, il est moins aisé de provoquer un mouve- ment réflexe à la marge du champ qu’en tout autre 876 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES point. Les champs segmentaires ne présentent pas Ja même configuration que les champs de distribution des nerfs périphériques, Bien que, dans un plexus, chaque racine rachidienne postérieure fournisse des fibres à plusieurs troncs nerveux, le champ de distri- bution de la racine est continu et non point composé de parties isolées les unes des autres. La conséquence de cet arrangement, c’est que deux filets nerveux con- tigus au voisinage de leur terminaison, doivent conte- nir des fibres provenant de la même racine. C’est ainsi que le nerf digital collatéral dorsal, situé au côté tibial d’un orteil, sera semblable en sa composition, au nerf digital collatéral plantaire du même côté, bien qu'ils proviennent de troncs nerveux distincts. Cette ana- logie de composition se peut comparer à celle des divers filets nerveux moteurs qui innervent un même muscle. C’est ainsi que le tibialis anticus recoit fré- quemment des fibres de trois racines rachidiennes motrices, et recoit ces fibres par au moins trois branches nerveuses distinctes, dont la composition est approximativement la même. Le digital dorsal qui innerve l'intervalle entre le premier et le se- cond orteil est intercalé dans la série des nerfs digi- taux qui proviennent du nerf musculo-cutané, bien qu'il provienne lui-même du nerf tibial antérieur. Mais, si l’on tient compile de sa composition radicu- laire on voit qu'il constitue avec les autres nerfs digi- taux une série régulière. Chaque champ cutané seg- mentaire déborde quelque peu sur les champs voisins. 11 déborde quelque peu sur les champs qui lui sont immédiatement antérieurs et sur les champs qui lui sont immédiatement postérieurs; il déborde aussi la- téralement sur les champs correspondants qui occu- pent l’autre moitié du corps, à la fois en avant à la ligne ventrale médiane et en arrière, à la ligne mé- diane dorsale. Le chevauchement antérieur et posté- rieur est dans le corps entier fort considérable, et chacun des territoires cutanés semble être innervé par deux racines rachidiennes sensitives au moins, Le che- vauchement des champs cutanés des filets nerveux dis- tincts qui viennent d’une même racine est également considérable, La forme d’un champ cutané, c’est, là où elle est la plus simple, au cou par exemple ou sur le tronc, celle d’une bande, enveloppant transversale- ment une moitié latérale du corps; ses deux bords sont à peu près parallèles, mais elle est cependant un peu plus large à son extrémité ventrale qu'à son extrémité dorsale. Aux membres, les champs cutanés, segmentaires, subissent une sorte de torsion qui les fait dévier du type simple. M. Sherrington a déterminé pour chacun des champs segmentaires du membre postérieur et pour quelques-uns de ceux du membre antérieur, la forme particulière de torsion qu’il subis- sait et a marqué nettement le véritable bord antérieur, le véritable bord postérieur, et les véritables bords latéraux (dorsal et ventral), de chacun d’entre eux. Cette détermination n’est possible, qu'après que l’on a constaté qu'aux membres les segments cutanés n’ont pas seulement subi une (orsion, mais qu’en outre ils semblent avoir perdu leurs rapports normaux avec les lignes médianes, ventrales et dorsale du tronc. La ligne médiane dorsale du corps, laisse se détacher d’elle pour ainsi dire, à la hauteur du membre, une branche latérale, un axe secondaire presque à angle droit avec elle-même. Les choses sont de mêmes disposés par rapport à la ligne médiane ventrale. Sur ces lignes latérales, ventrales et dorsales viennent se ranger, comme sur des axes secondaires ventraux et dorsaux, les segments cutanés du membre comme ils se range- raient sur des portions repliées des lignes axiales du tronc lui-même, Les lignes axiales du membre posté- rieur se détachent obliquement de l'axe du tronc pre- nant une direction à la fois latérale et antéro-posté- rieure, Les lignes axiales du membre antérieur sont inversement dirigées de dedans en dehors et d’arrière en avant. La ligne axiale dorsale du membre posté- rieur se détache de la ligne dorsale médiane au- dessus du sacrum, passe en arrière de la jointure de la hanche et suit la face extérieure de la cuisse presque jusqu'au genou. Quant à la ligne axiale dorsale du membre antérieur, les expériences actuelles n’ont per- mis d'en déterminer que la portion la plus voisine de la ligne médiane du tronc; elle se détache de cette ligne médiane au-dessus de la fosse infra-épineuse de l’omo- plate et se dirige de dedans en dehors et d’arrière en avant. La ligne axiale ventrale du membre inférieur se détache de la face extérieure du corps du pubis et se dirige vers le bord interne de la cuisse, elle descend ensuite presque jusqu’au genou en suivant la ligne qui sépare les muscles adducteurs des muscles extenseurs, La direction de la ligne axiale ventrale du membre an- térieur n’a pu être déterminée par les expériences de M. Sherrington dans sa portion la plus voisine de la ligne médiane du tronc. Elle est située sur la poitrine au-dessous de la clavicule qu’elle suit de très près. La position de ces axes secondaires, sur le membre, une fois déterminée, il n’est pas difficile de découvrir le degré de dislocation apparente de chaque champ seg- mentaire et la nature de la torsion qu’il a subie, Si on considère le membre sous l’aspect, qu’au point de vue segmentaire, il faut regarder comme antérieur, on constate que chaque champ segmentaire s’est incurvé de manière à présenter un bord postérieur très con- vexe et qu’il chevauche très largement sur le champ situé derrière lui. Si on le considère au contraire sous son aspect postérieur, on constate que tous les champs segmentaires se sont incurvés de manière à présenter un bord postérieur très convexe et qu'ils chevauchent sur le champ placé au devant d'eux, de façon à en couvrir une notable partie. Les bords dorsaux et ven- traux des champs segmentaires des membres ne recoivent pas en longueur un accroissement considé- rable. Grâce à leur disposition en sève des champs segmentaires le long des lignes médianes secondaires, dorsales et ventrales, il se produit un chevauchement croisé secondaire de ces champs, qui fait que deux champs segmentaires fort éloignés l’un de l’autre dans la série segmentaire peuvent empiéter l’un sur l’autre en s’entre-croisant; c’est ainsi que le neuvième champ post-thoracique peut chevaucher sur le quatorzième et réciproquement. Cette séparation de quelques-uns des champs segmentaires des lignes médianes, dorsales et ventrales, que l’on observe dans les membres est plus apparente que réelle, et ne constitue pas un caractère fondamental de la segmentation des membres, car elle n'apparaît pas dans les types primitifs; on ne la cons- tate point par exemple sur les membres pelviens de la grenouille, Si l’on se sert du champ cutané comme d’un guide pour déterminer les positions morpholo- giques des divers points du corps, on constate que les bords du pied et de la main sont, dans les champs segmentaires du membre, situés à mi-chemin entre la ligne médiane dorsale et la ligne médiane ventrale; ils doivent donc correspondre environ à la ligne laté- rale du tronc. La conséquence, c’est qu'il faut consi- dérer les doigts comme des bourgeons qui naissent de la région de la ligne latérale. La vulve et l'anus ne sont point situés au pôle postérieur du corps, mais comme l'ombilic sur la ligne ventrale médiane. Si l’on s’en tenait à l'examen des racines motrices il ne serait pas aisé de démontrer que le premier doigt du pied ou de la main est segmentairement antérieur par rapport au cinquième doigt tant la composition radiculaire des appareils d’innervation motrice de ces deux groupes de muscles est semblable; mais l’étude des racines sen sitives permet de démontrer aisément que la peau du premier doigt est segmentairement antérieure par rap port à celle du second doigt; la peau du second par rapport à celle du troisième et ainsi de suite. On éta- blit aussi que la peau du dos du pied est segmentaire- ment antérieure par rapport à celle de la plante. Le mamelon est au milieu du quatrième champ thora- cique, mais il est également compris dans les champs des troisième et cinquième racines thoraciques. L’om- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 871 bilie est dans le champ de la onzième racine thora- cique, Le nombre de segments qui contribue à l'in- nervation de la peau d’un membre est plus grand que celui des segments qui contribue à l’innervation de ses muscles, Six segments innervent la région antérieure de la peau du membre antérieur, ce sont les 3°, 4°, 5e, Ge, 7e et 8e cervicaux; six segments innervent égale- ment la région antérieure de la peau du membre pos- térieur, ce sont les 1°r, 2e, 3°, 4°, 5e, et 6° post-thora- ciques. La jégion postérieure du membre antérieur est innervée par quatre segments; les 1°", 2e, 3° et 4€ tho- raciques, celle du membre postérieur par quatre seg- ments également, les 6°, 7°, 8° et 9° post-thoraciques. La région antérieure de chaque membre est segmen- tairement plus étendue que la région postérieure. Ce fait peut être mis en évidence d’une facon plus frappante encore en ce qui concerne les muscles, La division en quatre doigts ou en cinq doigts de l’extré- mité libre d'un membre ne peut donner aucune indi- cation sur le nombre de champs segmentaires cutanés en lesquels on doit le décomposer. Des jointures, comme le genou et la cheville, qui pour- raient paraître marquer des divisions na- turelles du membre, ne correspondent pas aux divisions véritables de la moelle, Phcuun qu'indiquent les positions des racines pos- 7 térieures. Le niveau segmentaire absolu > d’un point de la peau est sujet à des va- riations individuelles, ainsi qu'on l’a déjà démontré pour les divers points des mus- cles de la paroi du corps et des viscères, Ces variations individuelles dans l'inner- vation de la peau correspondent à des variations analogues dans la constitution des racines afférentes. Le plexus qui in- nerve un membre peut être reporté en arrière ou en avant par ses racines rachi- diennes sensitives comme il peut l'être par ses racines rachidiennes motrices. Un nerf mixte peut être reporté en ayant par ces deux groupes de racines; mais en cer- tains cas (chez la grenouille) un plexus peut être reporté en avant par ses racines correspondance entre l'aire cutanée « sexuelle », à la racine de Ja queue, sur la fesse et le long de la région postérieure de la cuisse d’une part et le champ cutané sensitif qui est innervé à la fois par les 10°, 9e et 8, racines post-thoraciques d'autre part, SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 9 décembre. Une communication de M. S. P. Thompson sur les « miroirs magiques japonais » est renvoyée à une autre séance, — M. W. B. Croft lit une note sur « les spec- tres des divers ordres de couleurs dans l'échelle de Newton ». Après avoir rappelé la définition de l’ordre des couleurs par la valeur du retard en longueur, d'onde produit par diverses épaisseurs de sélénite placées entre analyseur et le polariseur croisés, l’au- teur arrive à dire que divers ouvrages d’optiques sup- posent que le nombre de bandes dans les spectres de ces couleurs est le même que l’ordre de la couleur, En prenant les sélénites des quatre premiers ordres de x PA CELE motrices et ne l'être point par ses ra- Fig. 4. — Segments cutanés du membre pelvien du singe; face dorsale ou cines sensitives. et vice versd. La distribu- ventrale (le chovauchement des segments n'est pas indiqué). — A, ligne médiane-dorsale ou médiane-ventrale du tronc. — B, place où l’axe mé- tion des fibres de la racine rachidienne sensitive dans un membre comme dans les autres régions du corps a beaucoup plutôt une signification segmentaire qu'une significalion fonc- lionnelle qui reposerait sur la coordination. Sans nier l'existence de facteurs fonctionnels dans le développe- mentprogressif du membre, il faut cependant admettre qu'il y a peu de raisons de croire que la réunion des fibres qui constituent chaque racine sensitive résulte d'une sorte de classement de ces fibres qui auraient pour but la coordination de leurs fonctions. L’affirmation de Peyer que la distribution cutanée d’un nerf rachidien correspond point par point à sa distribution muscu- taire ne se vérifie pas chez le singe. Le neuvième nerf post-thoracique innerve les muscles propres du pied, mais son champ cutané est situé sur la fesse. Tous les points de la peau de la moitié inférieure du tronc et du membre pelvien sont innervés par des racines ra- chidiennes sensitives segmentairement antérieures aux racines rachidiennes motrices qui innervent les muscles sous-jacents., La peau de la région postérieure de la cuisse présente une exception à cette règle, elle est innervée par des racines qui sont au même niveau segmentaire que celles qui innervent les muscles, Les champs cutanés des racines rachidiennes postérieures ne correspondent pas aux champs de distribution cutanée des racines motrices tels que les déterminent les fibres pilo-motrices de ces racines. Les champs pilo-moteurs et les champs cutanés sensitifs ne se correspondent pas; en ce qui concerne les champs vaso-moteurs cutanés et les champs cutanés sensitifs, il semble qu'il y ait chez le Macacus rhesus une curieuse dian-dorsal ou médian-ventral se replie latéralement dans le membre. rouge de MM. Steeg et Reuter, il trouve que les trois premiers ordres donnent chacun une bande noire, et que le quatrième ordre donne trois bandes noires. L'expérience montre que l’épaisseur des sélénites est exactement dans les proportions requises pour donner les quatre premiers ordres de rouge. Les nombres de bandes dépendent des possibilités numériques des lon- gueurs d'onde dans le spectre visible; du fait de savoir si un multiple de la longueur d'onde d’une onde visible peut être un autre multiple d’une onde différente, Par exemple, en supposant que le spectre visible s’étende de A (0,000760) à H (0,00039%) et que la longueur d’onde de Ja raie E dans le vert soit 0,000527, on trouve que le rouge du premier ordre est dù à l’extinction du vert par une épaisseur de cristal proportionnelle à 1 X 0,000527, et qu'il donnerait une bande dans le vert. Pour le second ordre, lépaisseur du cristal est proportionnelle à 2 X 0,000527 = 0,001054, et ce membre n'est pas le multiple entier d'une autre longueur d’onde entre A èt H; par conséquent il n’y aura qu'une bande, De même pour le troisième ordre, on n'aura qu'une bande, Avec le quatrième ordre de rouge, on peut obtenir trois bandes, car : & X 0,000527 — 3 % 0,000703 = 5 X 0,000422. Il y à, par conséquent, des bandes auprès des raies E, A et G. Comme conclusion de cette note, M. Croft ap- pelle lattention sur une simple forme d'appareil de diffraction, au moyen duquel on peut voir la plupart 878 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES des phénomènes de diffraction, et qui sert aussi pour des opérations spectrales. — M. Miers indique que dans l « Optique pratique » de Louis Wright, on donne un tableau des bandes correspondantes aux rouges des quatre premiers ordres. Autant qu'il s’en souvienne, le sujet n’était pas complètement discuté dans le livre, — M. Croft répond qu'il à remarqué le tableau de M. Wright; mais il pense que le texte implique l’idée que le nombre de bandes est le même que l'ordre de la couleur, Tyndall a fait des déclarations nettes à cet égard, — M. Sumpner lit un mémoire sur « la diffusion de la lumière ». L'influence de la diffusion pour ac- croître l'éclairement des salles et des espaces ouverts, n'a pas été, selon lui, suffisamment appréciée. Frappé de l’importance du sujet, il a été conduit à faire des déterminations de coefficients de réflexion, d'absorption et de transmission des substances diffusantes, Pour donner de la précision à des termes quelquefois em- ployés dans un sens vague, il pose quelques délini- tions. Le pouvoir réflecteur est défini comme le rapport de la quantité de lumière réfléchie à la surface, à la quantité Lolale de lumière incidente qui l’a rencontrée : l'écluirement (illumination) de la surface, comme la quantité de lumière incidente par unité de surface ; l'unité de quantité de lumlère, comme le flux de radia- tion à travers l'unité de surface, sur la surface d’une sphère de rayon 1, au centre de laquelle est placée une unité de lumière; et l'éclat (brightness) comme le nombre de bougies par unité de surface dans la directien normale à la suriace. En désignant ces quantités respectivement par n, I, Q et B et admet- tant la loi du 'cosinus pour la diffusion (c’est-à-dire le nombre de bougies dans une direction, proportionnel au cosinus de l’angle de la direction et de la normale à la surface), on montre que x B =» I, et que l’éclaire- ment moyen | des parois d'un espace est relié à l’é- clairement dû à l’action directe des lumières par la formule I SE 1— "1 Si le pouvoir réflecteur des murs, elc., est 50 ,/° n=3etl =21, tandis que si n — 0 8 (nombre ap- proximativement vrai pour les surfaces blanches) l = 9 1. L’éclairement dù aux murs peut donc être de beaucoup plus important que celui qui est dù aux rayons directs de lumière, Quand les surfaces se com- posent de parties de pouvoirs réflecteurs différents, l’éclairement moyen peut être trouvé par l'équation’ — nAt+n A 27: m1 Ai A étant la surface totale, A,, A,, etc., les aires des sur- faces dont les pouvoirs réflecteurs sont respective. ment 1, #. L'auteur montre que la loi est tout à fait exacte pour les espaces sphériques. Pour mesurer les pouvoirs réflecteurs, la surface était attachée à un grand écran de velours noir, placé perpendiculaire- ment à trois mètres d’un banc de photomètre. On em- ploie deux lumières, l’une est un étalon Methven de 2 bougies, placé à l'extrémité du banc éloignée de la surface réfléchissante, et l’autre une lampe à incandes- cence d'environ 20 bougies, attachées à un curseur qui porte aussi un photomètre Lummer Brodhun. La lampe à incandescence sert à éclairer la surface réflé- chissante, mais le photomètre est mis à labri de ses rayons directs. Dans le mémoire sont établies les for- mules employées à la réduction des observations, et sont données des tables de résultats. Le pouvoir absor- bant se détermine en mesurant le nombre de bougies d’une lampe à incandescence, d’abord sans être cou- verte et ensuite surmontée d’un cylindre de la subs- tance à éludier. On trouve qu'il est de la plus haute importance de désigner entre l'absorption apparente et réelle : car la réflexion sur les surfaces des cylindres augmente l’éclairement intérieur, Le coefficient « d’ab- sorption vraie est donné par : kg — ko où est le pouvoir réflecteur, et %, et 4, les nombres de bougies avec et sans l'enveloppe de la matière en expé- rience. Pour déterminer le pouvoir diathermane, on place l’étalon de Methven et le photomètre d’un côté de la surface et la lampe à incandescence de l'autre, Des difficultés proviennent du fait que certaines ma- tières, telles que le papier calque, transmettent une partie de la lumière directement comme les substances transparentes, et une autre partie par diffusion, con- formément à la loi du cosinus. L'auteur décrit les mé- thodes employées pour faire la distinction entre les différentes parties, soit dans les expériences de ré- flexion, soit dans celles de transmission, et il a obtenu par là des résultats concordants, Le mémoire renferme œ = (1 — ») ‘des tables et des courbes montrant l'accord du calcul et de lobservation. Voici un extrait de quelques nombres donnés dans ces tables : MATIÈRES Pouvoir réflecteur (pour %) Pouvoir absorbant (pour %) Pouvoir diathermane | Papier buvard Papier-cartouche .....,,., Toile à calquer Papier calque 22 Miroir ordinaire 82 Papier-tellière ordinaire... |50 à 70 Papier de soie (une érais- seur) Papier de soie (deux épais- SEULE RER ere 6e Papicr peint jaune Papier bleu Papier brun foncé Papier peint en jaunc..... Toile noire Velours noir ttes. : = 1 12 + e appré- ciable Globes de lampe à air Opale mince..... Opale pas NE ee Voerre-dalle. .., Théoriquement la somme des pouvoirs réflecteur, ab- sorbant etdiathermane, doit même l'unité; mais dans le tableau ci-dessus on observe que la somme fdépasse cent pour cent de quantités plus grandes que ce qui peut être attribué aux erreurs d'expériences. L'auteur attribue la divergence à ce que la loi du cosinus ne doit pas être vérifiée exactement, — M. Trotte dit qu’il s'est occupé de la diffusion depuis plusieurs années avec l'idée d’atténuer l'éclat des lampes à arc. Quelques expériences faites sur le premier réflecteur ne lui ont pas donné de résultats satisfaisants, parce que, ainsi qu'il le voit maintenant, il ne faisait pas intervenir les angles solides sous-tendus par les surfaces réfléchis- santes. Le pouvoir réflecteur des substances a une grande importance dans l’éclairement des salles; dans un cas, où M. Sumpner et lui ontfait une mesure, deux tiers de l’éclairement total sont dus aux murs. On faci- literait beaucoup les mesures de pouvoirs réflecteurs, si l’on pouvait adopter comme étalon une substance déterminée. Sur la loi du cosinus, il dit qu'il la trou- vée vraie, sauf quand les angles d'incidence approchent de 90. Dans le cas où il y aura une réflexion totale considérable, l'éclat apparent au voisinage de la direc- tion normale dépasse beaucoup celui qu'on a dans les autres directions. Ces résultats sont illustrés par des courbes en coordonnées polaires. Il a aussi considéré ce que devrait être la nature d'une surface dépolie ou cannelée pour donner une loi du cosinus pour la diffu- sion. Aucune forme simple de rugosilés ne parait rem- ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 879 plir les conditions requises, M, Hoffert dit queles nombres élevés donnés pour les pouvoirs réflecteurs des substances présentent un grand intérét. Bien des personnes ont remarqué l'effet obtenu en étendant une toile cirée blanche sur une table dans une chambre or- dinaire. On a observé aussi que des papiers peints du même dessin, mais légèrement différents par la cou- leur donnent des effets très différents au point de vue de l’augmentation de l’éclairement et il voudrait sa- voir si l'influence de petites différences de couleur et de tissu sur le pouvoir diffusif a été étudiée. — M. Bla- kesley défend la la loi du cosinus et émet l’idée que, si la somme des pouvoirs dépasse l'unité, cela est dû au fait que l’espace clos réfléchit de la chaleur aussi bien que de la lumière, et que cela élève la tempéra- ture et accroit le rendement lumineux de la radiation. — M. Addenbrooke dit que l'importance du sujet l’a frappé quand il a traversé l'Amérique il y a trois ans, et qu'il à observé la facon grossière dont se fait l’éclai- rage électrique. En employant de bonnes surfaces ré- fléchissantes, on augmente l'éclairage d’une salle de 50 °/63 et l’on réduit le prix de l'électricité de 8° à 4° par unité. On ne peut concevoir de question d’un plus haut intérêt pratique. — M. Burtin ne comprend pas ce qu'on peut reprocher à la loi du cosinus, car il est possible qu'il n’y a pas de surface parfaitement diffu- sante, L'effet de la réflexion sur les murs pour éclai- rer un livre, ne serait pas, selon lui, aussi grand qu'on pourrait le croire d’après les nombres donnés, caron lit d'ordinaire à côté d'une lumière, et la lumière réflé- chie qui tombe sur le livre n’est qu'une petite partie de la lumière totale, eu égard à la grande distance des muis. — Un autre membre observe que, dans les expé- riences telles que celles qu’on a décrites, il est très im- portant de garantir le photomètre et les surfaces de toute radiation autre que celle qui est soumise à l’ex- périence. Il doute qu'aucune surface réfléchisse aussi bien qu’un miroir. Des surfaces blanches peuvent pro- duire cet effet, mais c’est sans doute parce que l'œil en fait une appréciation exagérée, à cause de la supério- rité du blanc pour rendre la vision distincte. — M. Sum- paer répond qu'il a employé du papier buvard comme étalon de pouvoir réflecteur et l’a trouvé très conve- nable. Ses mesures les plus soignées ont porté sur toutes les surfaces blanchâtres et non sur des surfaces colorées, Quand une couleur, comme le rouge, domine dans une salle, la lumière moyenne serait beaucoup plus rouge que celle émise par une source parce que les autres couleurs sont absorbées, En considérant l’é- clairement dans ses relations avec la vision distincte, il est nécessaire de tenir compte de l'œil lui-même, car la pupille se contracte à une lumière intense et s'ouvre à un faible éclairement. Il espèrè traiter complètement le sujet dans un mémoire ultérieur, SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 17 novembre, Thorpe et Walter Kirman : Acide fluosulfonique. Les auteurs ont obtenu le composé SOSHF en distillant dans un appareil en platine un mélange d'acide sulfu- rique etd'acidefluorydrique. —Thorpe el George Perry: Note sur la réaction de l’iode et du chlorate de potasse. Les auteurs trouvent que cette réaction doit être repré- sentée par la formule 2KC103 + 12 —2C 108 + CE et non par celle qu'on emploie d’ordinaire =K C103 LE [2 — KC1O{ + KIO3 + ICI + O2. W. H. Perkin : Rolalion magnétique des acides sulfu- rique et nitrique et de leurs solutions aqueuses, des solutions de sulfate de sodium et d’azotute de lithium, — S. U. Pickering : Note sur les indices de réfraction et les rotations magnétiques des solutions sulfuriques, M. Pickering retrouve dans les couches qui représentent les propriétés des points anguleux qu'il considère comme indiquant l'existence d’hydrates, — $, U, Pe- kering : La théorie des hydrales dans les solutions, quelques composés des amines avec l’eau. M, Pickering a isolé à l’état cristallin, un certain nombre d'hydrates des ammoniaques composés, Il donne les formules de ces hydrates. — Emily Aston et William Ramsay : Le poids atomique du boire. Deux séries d'expériences donnent les nombres 10,921 et 10,966, — Hogdkinson et Leonhard Limpach : Méthoxyamido, 1 : 3 : dimé- thylbenzène et ses dérivés. Séance du 1° décembre. S. U. Pickering : Séparation de deux hydrates de l'acide nitrique prévus par la théorie, L'auteur annonce avoir fait cristalliser le monohydrate et le trihydrate de l'acide azotique. — W. Fischer: Acideoxaliqueanhydre, L'auteur décrit les propriétés de lacide oxatique anhydre qu’il obtient en laissant de l'acide oxatique cristallisé en contact avec l'acide sulfurique concentré pendant plusieurs mois. — Collye et Myers : Produc- tion d’orcinol et d’autres produits de condensation au moyen de l'acide d'hydrautique, — Hartley : Obser- vations sur l’origine de la couleur et de la fluorescence. L'auteur énonce, entre autres, les résultats suivants : Toutes leschaines ouvertes d'hydrocarbures produisent, dans le spectre, une absorption continue dont l’éten- due dépend du nombre des atomes de carbone contenu dans la molécule, Toutes les matières colorantes orga- niques sont des composés endothermiques. — Henry Armstrong : L'origine de la couleur. Hydrocarbures colorés et fluorescence. Réponse au P° Hartley. SOCIÉTÉ PHILOSOPHIQUE DE MANCHESTER La Société a repris ses réunions ordinaires le 4 oc- tobre dernier; elle a recu depuis les communications suivantes : M. Osborne Reynolds décrit la rupture d’une chau- dière due à la formation d’une cavité rouillée dans sa paroi. Après avoir résisté à une pression hydraulique de 300 livres par pouce carré, la partie affaiblie a cédé à une pression de vapeur de 100 livres seulement, quelques jours après, Au-dessous de la couche de rouille on a trouvé un dépôt noir, dont la composition n’a pas été déterminée. Il est remarquable que les cavités de ce genre se produisent surtout dans la partie de la chaudière la plus éloignée du fourneau, — M. F. Hovenden croit avoir observé sous le microscope des mouvements vibratoires, analogues au mouvement brownien, dans des particules de fumée de tabac ren- fermées dans une auge et protégées contre les courants d'air, — La Société adresse ses remerciements à M.0s- borne Reynolds pour la biographie de Joule qu'il a écrite pourelle et qu'il vientde lui présenter. —M. Thomson a répété les expériences de M. Hovenden rapportées dans la dernière séance et a pu les confirmer dans une certaine mesure. — MM. Gwyther et Hoyle, au contraire, ont obtenu un résultat entièrement négatif. — M. le Dr Collier décrit l'effet d'une décharge élec- trique qui a jailli d'un rocher et l’a frappé en descen- dant un pic dans le Tyrol. — M. J. C. Melvilla lu un mémoire sur un spécimen du Trachelium cæruleum trouvé pour la première fois à Guernesey, il a aussi décrit une monstruosité remarquable du Ranunculus bulbatus venant de Sicile, Ph. J. Harroc, SOCIÉTÉ PHYSIOLOGIQUE DE BERLIN Séance du 11 novembre. M. le D' Ad. Lawy étudie l'influence, sur la respira- tion, des portions encéphaliques de la moelle allongée supérieures au centre respiratoire, Si lon sectionne à un lapin, d’abord les deux nerfs vagues, puis la moelle au niveau des noyaux acoustiques, la respiration prend un caractère spasmodique et l'animal périt, tandis que la simple vagotomie ne ferait que ralentir le rythme res- piratoire, Si les vagues sont intacts, la section de la 8 80 ACADÉÈMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES moelle au lieu d'élection n'a aucune influence sur la respiration. L'action du système nerveux, supérieure à la section, peut ètre centrale ou périphérique : l’exci- tation périphérique déterminant le rythme respiratoire ne peut cheminer que par le nerf trijumeau, Après la section des vagues, l'auteur a pratiqué la sec tion intracranienne des trijumaux, et n'a observé aucun changement dans la respiralion. Ainsi on voit que l'excitation arrivant des régions supérieures au centre respiratoire est automatique. — M. le D' René du Bois-Reymond a repris l'étude du fait suivant bien connu : quand on plonge la main dans un vase rempli d'acide carbonique, on éprouve une sensation de cha- leur, et a étendu ses recherches à une série d’autres gaz. La sensation thermique peut être plus intense que celle produite par l’acide carbonique avec les gaz suivants : acide sulfureux, chlore, vapeur de brome, peroxyde d'azote, ammoniaque, acide chlorhydrique, Îl comparait ces gaz à de l'air chauffé à différentes tem- pératures dans une étuve; il a pu ainsi établir que quelques-uns des gaz cités à la température égale de 17° produisaient la même sensation de chaleur que de l’air à 10°; l'acide carbonique parut plus ehaud de 5° envi- ron que de l'air à température égale. L'acide sul- fhydrique avait une action douteuse; l'hydrogène et le protoxyde d'azote parurent inactifs. Il n’eût pas été correct de mesurer, par les procédés physiques, l’élé- vation de température de la peau; la condensation des gaz par l'humidité de la peau, étant par elle seule en état de produire de la chaleur. La série des gaz étudiés progressivement d'après leurs chaleurs de dissolution, est tout autre que la série des mêmes gaz d’après leur action sur le toucher thermique. Par leur conductibi- lité thermique et par leur chaleur spécifique, ces gaz diffèrent si peu entre eux, qu'on ne peut interpréter par ces propriétés leur différence d'action physiolo- gique. Toute interprétation physique pour les sensa- üons de chaleur produites par les gaz cités plus haut est donc impossible; reste une interprétation physio- logique : l'excitation chimique du sens du toucher ther- mique, — M. le P' Emile du Bois-Reymond a présenté une jeune torpille, née dans lPaquarium de Berlin, qui, dès sa naissance, produisait, à chaque excitation, des décharges électriques. Ges décharges provoquaient des contractions violentes d’une patte galvanoscopique, etrecueillies par deux électrodes de platine placées sur le dos et le ventre de l'animal, déviaient bien au delà du champ d'observation l'aiguille d’un galvano- mètre à miroir, Cette expérience à déjà été faite par Davy en 1832 à Madeire; il est intéressant d’avoir pu la répéter sur une torpille née dans une capitale du nord de l’Europe. Dr WW. SkLaREck. ACADÉMIE DES SCIENCES DE SAINT-PETERSBOURG L'Académie a repris ses séances interrompues par les vacances el recu en ces dernières semaines les communications suivantes : 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — Brioschi : Sur l’équa- tion différentielle Lamé-Hermite, Ce mémoire est ré- digé en français. — Backlund : Sur les perturbations de Ja comète Encke. Les perturbations que cette comète éprouve par l'action de la Terre, de Vénus, et de Mercure sont insignifiantes, sans être né- gligeables. IL était donc intéressant de donner une formule générale pour exprimer ces perturbations pendant la présence de la comète dans la partie supé- rieure de son orbite. Ces formules permettront d’abré-- ger considérablement le travail du calcul, car, pour chaque révolution, il ne faudra plus déterminer que quelques fixes, ce qui peut être facilité par l'emploi de tables. L'auteur a donc composé des formules d’a- peès les principes de la division des orbites proposé par Hansen. Ces formules et les calculs qui les accom- pagnent composent le 5° fascicule des Calculs el re- cherches publiés par l'Académie. — Brédikhin: La nouvelle étoile dans la constellation de Cocher. Cette étoile dont l’auteur a entretenu l’Académie il y a quel- que temps, vient de s’éteindre au mois d'avril, ou du moins elle est devenue invisible même à l’aide des meilleurs télescopes. Tout à coup elle a reparu en août. mais offrant cette fois des qualilés nouvelles, Elle est enveloppée d'une nébuleuse ; son spectre diffère beau- coup de celui qu'elle offrait précédemment; par son éclat, c’est une étoile de 10° grandeur. Les observations sur cet astre intéressant continuent sous la direction de M. Biélopolskiy. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — Abels : Observation surles va- rialions périodiques de la température de Ja neige et détermination de la conductibilité de la neige comme fonction de son épaisseur. Afin de résoudre la ques- ion du pouvoir conducteur de la neige, M. Abels a or- ganisé pendant les hivers 1890-92, à l'observatoire d’E- katérinbourg, des observations faites toutes les heures sur la température des différentes couches de neige, depuis la surface jusqu'au sol, par tranches de 5 à 10 centimètres d'épaisseur, Il est arrivé aux résultats suivants. La conductibilité de la neige est proportion- nelle au carré de sa densité. Le pouvoir conducteur de la neige ayant un poids spécifique moyen de 0,2, est 20 fois moindre que celui de la glace ou du sol gelé. Mais la transmission des variations de la température de l’air à travers la neige et la terre gelée dépend encore de la capacité calorifique de ces corps. Ainsi une couche de neige d'épaisseur moyenne préserve le sol qu'elle recouvre des variations de température 4 fois et demie mieux que la glace ou le sol congelé d’égale épaisseur ; elle la préserve seulement une fois et demie mieux qu'une couche d’égale épaisseur d’un sol argi- leux. La chaleur du soleil pénètre dans la neige ramol- lie, poreuse non seulement à cause de la conductibilité de cette dernière, mais encore directement; les rayons du soleil traversent la couche de neige comme la vitre d'une fenêtre. En déterminant la conductibilité de la neige ou de tout autre corps pulvérisé, il faut donc tenir compte de leur densité. 3° SCIENCES NATURELLES, — Androussof : Sur l’état du bassin de la mer Noire pendant l’époque pliocène. C'est un résumé de l’histoire géologique de la mer Noire de- puis la période géologique sarmate (miocène) jusqu’à nos jours. Les recherches basimétriques, exécutées ré- cemment dans cette mer par une expédition russe dont l’auteur faisait partie, constituent avec les recherches géologiques faites sur les côtes une base solide pour les déductions de M. Androussof, —EÆ. Bichner : Une nouvelle espèce de chat (Felis pallida n. s.) provenant de Chine. Description d’un de ces «chats des roselières » des steppes de l’Asie centrale dont le spécimen a été rap- porté par feu Prjevalskiy. — V. Cheviakof : La dis- tribution géographique des protozoaires d'eau douce, avec plusieurs planches et une carte, Après avoir donné -un apercu systématique de tous les protozoaires qu'il a pu trouver, l’auteur s'occupe de leur distribution géo- graphique et discute les moyens à l’aide desquels s’est faite cette distribution. Suivant lui, le cosmopolitisme des protozoaires est déterminé autant par la simplicité de leur structure que par les moyens pour ainsi dire mécaniques el passifs à l’aide desquels ils peuvent être transportés à de grandes distances. O. BackLuNp, Membre de l'Académie, Le Directeur- Gérant : Louis OciviEr _ Paris. — Imprimerie. Levé, rue Cassette, 17. TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE TOME Ill DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES {bu 45 JANVIER AU 30 DÉCEMBRE 1892) I. — ARTICLES ORIGINAUX Astronomie et Météorologie AnNDRë (Ch.). — L'électricité atmosphérique : Première partie. — Les observations récentes et les théomes actuelles. #10. 7"2....-.. "rer Deuxième partie. — Les variations de sens et de grandeur du potentiel......................... Brcourpan (G.). — Revue annuelle d’Astronomie Cornu (A.). — La photographie céleste. — Méthodes optiques; application à l'étude du soleil, de la lune BAHESIOIO LES En Essen rene ere uee eee Dexnie (W. E.). — Découverte d'un cinquième satellite TEFTDPITET = 1e eheletsteplale alefeis sietote oise ie tie 2e 00 Fœsrter (W.) et Jesse. — Les nuages nocturnes lumi- DEUX ce lasporon tandis oO note DOUDOU Botanique DenéraIN (P. P.). — Revue annuelle d’Agronomie.... ManGin (L.). — Revue annuelle de Botanique ........ SauvAGEAU (C.), — Le Pourridié de la vigne et des arbres fruitiers, d'après M. P. Viala...................... VuizzemiN (P.). — Les Chalazogames de M; Treub et l'évolution des Phanérogames..................... Chimie Comges (A.).— Le Congrès international de nomencla- ro CE radeon ot or broano doloonduc 5 — La nomenclature chimique au Congrès de Pau..... Erarp (A.). — Etude expérimentale des solutions satu- rées — Revue annuelle de Chimie pure............,...... Frierez (Ch.). — Conférence de chimie donnée à la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève. La constitution de l’acide camphorique............ GréHaNT (N.) — Recherche ct dosage du grisou et de Roxyde/de carbone..." errors Guxe (Ph. A.). — Revue annuelle de Chimie appliquée. Matières colorantes et produits organiques......... Hecp (A.). — Découverte d'un nouvel élement : le Mas- Hazrer (A.). — Conférence de chimie donnée à la So- ciété de physique et d'histoire naturelle de Genève. La formule et la fonction de lacide ne TEL os Lab donnera ba none 00 one don Chimie ET ER te ote tenter et bn era late tele Dale el Lévy (A.). — Les eaux potables et la méthode hydroti- HOME Eos eb dope né NOb ae e Luce (G.). — Revue annuelle de Chimie appliquée. — Éa’grande industrie chimique::-:..".....,.1...""2" MaquenxE (L.). — Conférence de chimie donnée à la Société de physique et d'histoire naturelle de Ge- nève. Sur quelques propriétés des métaux alca- Mno=temen Eee re eee eurent ocbco Moxp (Ludwig). — Les Carbonyles métalliques. ,...... REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1892. 367 251 597 314 512 NœLrinc (E.). — Conférence de chimie donnée à la So- ciété de physique et d'histoire naturelle de Genève. aRtriaSITeeEPP Eee Le ee espece SCHÜTZENBERGER (P.). — La loi des valences atomiques. Chirurgie HARTMaNN (H.). — Revue annuelle de Chirurgie... ..... JANET (Dr J.). — Les progrès récents de l'endoscopie édoniloamenesne tone arts onanedonon HAE Enseignement des Sciences Le BEL (J. A.). — Les laboratoires d’enscignement chi- DNQUENPEUNAITE AMP EEE EPP Ozxvier (L.). — La British-Association; Congrès d'E- CM UP oops Loco eveocaocoe ac Géologie, Paléontologie et Océanographie BerrTranD (M.). — Les récents progrès de nos connais- SANCERNOROPÉNIANES bre ee D — Les montagnes de L'ÉCOSSe.. =... Carez (L.). — Revue annuelle de Géolopie ere DeLeBecquE (A.). — L'étude des lacs dans les Alpes et leJUr ANT ANCAISEE ER. rennes eee Larparenr (A. de). — Le fond des mers... Lyperker (R.). — La découverte des Mammifères ‘du type australien dans l'Amérique du sud........... — Les Ongulés aberrants des terrains tertiaires et pléistocènes de l'Amérique du sud................ MarGerie (Emm. de). — Le Congrès de la British Asso- ciation. Géologie et géographie................... Mathématiques AUTONNE (L.). — À propos de quelques travaux récents sur l'équation différentielle du premier ordre...... Dargoux (G.).— Examen psychologique du calculateur Inaudi. Rapport à l’Académie des Sciences. Derrorce (Commt) — Les anciennes et la nouvelle mesures de la méridienne de France Mourer (G.). — Sadi-Carnot et la science de l'Energie. Orivier (L.). — Le soixante-dixième anniversaire de ModSinnsandondoecaicanccenvoonnetengoenneoc Picarp (E.). — A propos de quelques récents travaux MAlhéMaAITUESS EC EEE Eee epe recette Poincaré (H.). — Les formes d'équilibre d'une masseHuidenenErOtALONEs er eee eee Mécanique appliquée DweLsHAuvERs-DERY. — Le perfectionnement « dernier et final » de la machine à vapeur... .............. — Essai de dynamique graphique. — La nouvelle mé- thode de M. Léauté pour l’étude du mouvement iroublédesimOleUTS EE rec ner eee cree Henry (R.). — Le travail mécanique des oiseaux dans la sustension simple en air calme................. 363 882 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES LonGrtnGE (A.). — Le Progrès de l’artillerie.......... 109 | Boys (C.-V.). — Les projectiles pris au vol. Méthode SiniGaGLtA (F.). — Le contrôle de la vitesse des trains pour l’étude des mouvements dans les gaz........ derchemimsideen etre rercecerre-er-c-ceree 107 | Gartez (C.-M.). — Revuc annuelle de Physique ....... Uxwin (W. C.). — Les récents progrés de la mécanique GuiLLAUME {Ch.-Ed.). — L'énergie dans le spectre... MEL Aou aombatis en rotoU ba o Tone 843 — Les Constantes radiométriques...........,....... ; Wrrz (A.). — De la puissance de vaporisation des — La British Association au congrès d’Edimburg. CHAUIENES EPA SR EU ete ie le 240 Physique "recentrer eee COTE 5 Guxe (C.-E.). — La production du froid et ses récentes É a 2 Are : aAPPICAHONS eee rec ee-rerer-i- 2e RenSone ANgiene OCR NERRS LiPPMANN (G.). — La photographie des couleurs. — Auvarp (A.) et TouvenainT (L.). — La puerpéralité... 472 Son principe, ses progrès les plus récents......... — Hygiène de la puerpéraïité.........,."" 4.027. 551 | Moureaux (Th). — Les phénomènes du magnétisme Gaurier (Armand). — Les aliments de première néces- terrestro titane Mere a de rec e eee CDI SOS TA A D RU nb rs LIT RE ARE PEU 2390 |WTATT, —Sur la tdurée du choc... 2-0 . KaurManx (M.). — La tuberculine, agent révélateur de la tuberculose chez les Boyidés "nn 601 : — MoryetetiMallémer "#22" Frre-- Perche 815 Loniogre LAvaRENNE (E. De). — Revue annuelle de Médecine... 855 | BLAuREGARD (Dr H.). — Revue annuelle de Zoologie. Leroux-Lesarn (D' A.). — Microorganismes thermo- BLancHaRD (R.). — Le Congrès zoologique de Moscou. ee et thermogènes. Leur culture naturelle dans se Cuinor (L.). — Les ancêtres et le développement de’ SASDONUE LÉ NRNRTSE PNR DE 5 Re ESS se lFindividur. 3 aeseremseneedeeenestee ER = In CRIER ORAN EMENECAr le sérum d’ani- a GuERNE (J. de). — Le Congrès de la British Association. AUS MINS SES Eee PE PE CP Ne 182 Biol ie ee A RÉ eSEn RE : MEN EN R) PA PenensQnte TE A BON R EE A R nER (R ss — Les phénomènes intimes de la fécon- Expériences, de MM Tizoniet Centanni..-."" = CET ud ape hob bebe done ob Dao du 000 Coude . Mrs (A) TURyeienepsoeiale ee SRUUE 6e ,, | — Les conditions d'existence des organismes péla- prinéipes, ses MÉTHONES” >... LE A PE s2 DIUES teen eesiee meer Oe EE TE MercaniKorr (El.). — Carcinomes et Coccidies ER 629 Maxouvrer (L.). — Le Congrès 4e Banner Ozivier (L.). — Revue annuelle d'Hygiène............ 188 5 TC le RER M drama dnatoe nelle. — ciation. ntHPOpOlopie eee eee Ho (DM) Re : Mizxe-Enwarps (A.). — Observations sur les M:mmi- TETOND BAL EL ASS IEEE SR creer eseces 672 Trousseau (A.). — L'œil considéré comme élément de fées du Thipet. eee career ete ere PET ABnaste. 5 : 358 RerTERER (Ed.). — Le placenta discoïde, d'après les DRE A Ce NA Re 2 LUS TNT USE ND ON 1 srane MES iravauxide M-Mathias Duval" #22" Rocué (Dr G.). — L'organisation de la pêche française Physiologie surlatcote dunSahard 2e. erce----Le-tree ere Cxarcor (J.). — Examen psychologique du calculateur Mr ne DE AGE ENS OMR QRE ee pa apporte des Sense AU | ann (2 Las es sculis cue d dan 186 è k pement et les relations des Cestodes ct des Tréma- sur la direction des as Le tel em ce LS 114 Falas Honeniee M) M Nbetqueiemes on ep boe nie On ES SE TER SE Joe tonubndor too Danupdoo cn RICOr Ne MB ESSELCALE- ee ere rec Peters . 905 Frépérice (L.). — Le foie, laboratoire de réserve ali- Revues annuelles ÉMNRduAdaen reom dodo dei dritebonaa too 400 — Revue annuelle de Physiologie.................... 571 | BEAUREGARD (H.). — Zoologie....................... Jaxer (Pierre). — Le Congrès international de psycho- BiaourpAN (G.). — Astronomie..................01% lometexpenmentale Er rRRene- meer re 609 NCArRez (D) =Géolonme Pere eee 0er LAMBLING (E.). — La pénétration et la répartition du DEuÉRAIN (P.-P.). — Agronomie...... see LEE TCIE fer dans l’organisme animal..........,.......... . 2954 PETARD (A) Chimie pure tt. MR CEE 3 Mosso (A.). — La température du cerveau en relation FRÉDERICQ (L.).. — "Physiologie... "e"- et AVECALACVILENDSYCRIQUBEr-E-see-ee-me-ee cer 264 | Gartez (C.-M.). — Physique............. 1000 Ozrvier (L.). — Le 2e Congrès international de physio- GuyxEe (Ph.-A.). — Chimie appliquée : 2 Maières es colo- as de ls ete cn de aeRe Dates sie ei eee eee 134 rantes el produits organiques... .................. TSCHERNING. — Les sept images de l’œil humain....... 82#2\NHARTMANN (H:). Chirurgie. 7.0... 1#008 LAvARENNE (E. de). — Médecine.......,....... Physique ! Luce (G.). — Chimie appliquée : La grande industrie CRIMIQUE SRI EE EEE Ce TETE . Bicnar (E.). — Sur une théorie de la polarisation ManeIn (D). —=#Botanique. "te..." POLATVE ete be eee Teen en 048 MOLIVIER (li) = HyElÈne PR TENTE dose IT. — BIBLIOGRAPHIE l° Sciences mathématiques. Barsr (G.). — Essai sur l’histoire des panoramas et dioramas sectes mener cos CIE Mathématiques Carwoy (J.). — Cours d'Algèbre supérieurc....,...... 7 Favé et Rozer DE L’Isce. — Abaque pour la détermi- ArrEeLz (P.). — Sur les fonctions périodiques de deux nation (AUSpoint 4 lAIMET- re. Ce variables. 44e nement etes ee de 419 | Gomes TerxeiRA (F.). — Curso de Analyse infinitesimal,. — Lecons sur l’attraction et la fonction potentielle... 521 CaleulontépTal Percer tee ee CREER — Sur des équations différentielles linéaires transfor- GReENHILL. — The applications of elliptic fonctions... mables en elles-mêmes par un changement de fonc- Hapamarp (J.). — Essai sur l'étude des fonctions don- Honet delvariable PER ecsnMerctR 683 nées par leur développement de Taylor...... aTSSS — Surune expression nouvelle des fonctions elliptiques HaGEn (J.-G.). — Synopsis des hœheren Mathematik. — par le quotient des deux séries........... Re 196 I. Arithmetische und algebraische Analyse....,... 5 661 446 12 93 69% 635 41 267 117 278 677 326 703 539 71 105 670 503 129 442 184 2178 52 639 789 512 571 446 123 709 855 120 361 188 454 716 763 45% 828 454 486 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 883 Hazpnen (G.). — Traité des fonctions elliptiques et de 2e partie : Dessin, construction, opération (en an- leurs applications. — 3e partie. — Fragments..... . 9332 glais)........ Paoboc cute tn MONS RARE 588 OcaGxE (M. d’). — Nomographie. — Calculs usuels effec- VERNY (E.). — Graissage des machines et du matériel QUÉSATMMOyEN Tes TADAQUES EEE eee eee 21 roulantdes Chemins IdEER ee -eemeceereree 381 Pané (H.). — Sur la représentation approchée d'une Wirz (A.), — Traité théorique et pratique des moteurs fonction par des fractions rationnelles. ............ 381 AL AZ ele Re etes ete dat cle tra us ee 119 Parar (A.). — Sur le problème de Dirichlet et son ex- — Thermodynamique à l'usage des Ingénieurs. ... ... 556 tension au cas de l'équation linéaire de second BE oodGbonondonmousadec dla btonngdbndod dant o 588 : : PrcarD (E.). — Traité d'analyse, t: I.................. 60 2° Sciences physiques. — Sur le nombre de racines communes à plusieurs équations simultanées.....,........,. ART US DEC 555 Physique. — Sur certains systèmes d'équations aux dérivées par- : tielles généralisant les équations de la théorie des AgranaM (H.). —; Sur une nouvelle détermination du fonctions d’une variation complexe................ 555 rapport entre les unités électrom agnétiques et élec- Renou (E.). — Répertoire bibliographique des sciences trostatiques........................:............ 651 mathématiques (en hollandais).................... 824 | ANNey (J. P.), — Manuel pratique de l'installation de la Roucné (E.) ct Comrerousse (Ch. de). — Traité de géo- lumière électrique. — Stations centrales.....,..... 166 métrie conforme aux programmes ofliciels (6e édi- Bapoureau (A.). — Les sciences expérimentales....... 829 RD a ion Pa ne cata de Cu 287 | Berrin-Sans. — Guide des travaux pratiques de phy- Rupio. — Histoire du problème de la quadrature du sique à la Faculté de médecine de Montpellier... 98 cercle depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos Boys (C: V.): — Bulles de savon...................... 556 TOUS CDI ANeMAN ee ee ec dre 828 | Buauer (A.). — L'année photosraphique............... 333 SoxapirA (Dr H.) — Théorie générale des cofonctions et Caprar et Dusosr. — Electricité industrielle. ....... .. 618 quelques-unes de leurs applications, t. I, 1er fasci- CALLENDAR (H. L.). — Sur la construction des thermo- Cole en a nant en AE en e en ece ere 683 métreslen platines. Lente nec eee 61 Werer (H.).— Elliptische Functionen und Algebraische Carpuis (J.) et Bercer (A.). — Lecons de physique gé- AARIEN Es eee secs bed Rene nue PÉOINGET nérale, t. III. Acoustique, Optique et Electro-op- tiquerereeneeere unes vente cie 96 Astronomie et Météorologie Cinrozesi (D° F.). — Problèmes d'électricité pratique... 651 Dary. — L’électricité dans la nature.................. 166 AnDRé (Ch.). — Note sur un séjour à l'Observatoire du Drincourr (E.). — Traité de physique à l'usage des MICIAUIM AM 2e nes emectnemeemecesecsecco 588 élèves de mathématiques élémentaires. ...... 198 Bicourpan (G.). — Observations de nébuleuses et d’a- Dunen (P). — Lecons sur l'électricité et le magnétisme. ASS AAITES ee ses ec -nee -Uere ; 6 I. — Les conducteurs à l'état permanent... 95 Boys (P. du). — Essai théorique sur les seiches....... 95 II. — Les aimants et les corps diélectriques.. ...... 382 Carre pu Ctez (Bulletin du Comité international per- TE De courants NÉE ARE ee ee 716 manent pour l'exécution de la)........ MR EURE 197 — Cours de physique mathématique et de cristallogra- Goxnessiar (F.). — Recherches sur l’équation person- DRE PE LEE Mer emiaesde dercerenemee tee nec ee 214 nelle dans les observations astronomiques de pas- EMTAGE. — Introduction à la théorie mathématique de SHRESETE PE EC RRTE Dee nee nee 555 l'électricité et du magnétisme.................... 197 Heprites (S. C.). — Analule Institutului meteorologic “ EsprrazLier (Commandant G.). — Les ballons et leur Ron ANNE BÉbotubne teSn bec bpo 060 ans 684 eMPlo Ta TUErrE en else sement 62 Moucnez (Contre-amiral). — Rapport annuel sur l'état Fagrx (Ch.). — Théorie de la visibilité ct de l’orien- de l'Observatoire de Paris pour l’année 1891......, 454 tation des-franges /d'interférence.........%...... 521 Poincaré (H.). — Les méthodes nouvelles de la méca- Héprworrx (T. LS — Manuel pratique des fonctions DITMENCÉLES TE Re - cime me cicle ae nie sise canelle sinaiele . 649 TUMIMEUSES EE TT Rec . 333 Tournier (E.). — Le Ciel pittoresque............... «+ 828 | — Lestravaux : du soir de l'amateur photographe... 589 JupponT (P.). — Aide-Mémoire de l'ingénieur électri- Thermodynamique, Mécanique”générale CLOTILDE lee mar ieretalete eee ete dre ets state ie en nes ein see SI NNNa te 128 et mécanique appliquée LE Daxrec (abbé). — Nouvelle analyse des vibrations lumineuses, basée sur la mécanique de l’élasticité BouQuET DE LA GRYE. — Paris port de mer........... 243 et conduisant logiquement à l'explication de tous CHamousser (F.).- Nouvelle théorie élémentaire de la leséphénoménoside l'optique. em ren eee 650 rotation des corps : gyroscope, toupie, etc........ 486 | Lucas (Félix). — Traité d'électricité à l'usage des ingé- CHarver. — Essais dynamométriques sur le tirage des DEUTSREMdeNICONSITUCIEUTSER Eee ere re 61 houes, grappins et bineuses. 4... ............,.... 333 | Mascarr. — Traité d'optique, t. III, 1e" fascicule... 796 ComPacniE continentale d'exploitation des chaudières sans Mrcuresou (C.). — Sur la détermination de l’équivalent FO adorouc ddbeto ou Men oo eno 1014 mécaniquerdelaiCalor een ocre. 166 DuQuEsNAY. — Résistance des matériaux............. 419 | Nrcuozs (E.) et Sxow {B.). — Influence de la tempéra- Dwecsnauvers-DEry (V.). — Etude calorimétrique de ture sunlaicouleurTespIpMENts ee. ere 288 laMaCHINE AVAPEUT ET Mere cet ecesse cases 521 — Surle caractère de la lumière émise par l’oxyde HATON DE LA GouPILLIÈRE. — Cours de machines, t. II, detzincancandesc enterrer ND Mt 288 2€ fascicule. — Chaudières à vapeur...,........ 617 | NrewexGrowskt (G. H.). — L'objectif photographique. 333 LErAy (P. A.). — Complément à l’essai de la synthèse PEppræ (W.). — Manuel de physique (en anglais). ..... 68% HESHONCESDAYSIQUEN eee eee ere ee . 287 | Prcou (R. V.). — Distribution de l'électricité par ins- LoNGrinGE (A.). — Le canon de campagne de l'ave- TaAMONS SOI S RP nr rem ee coco 487 DID etes seen tte mea dee in foin ie de .….... 454 | Proncuon (J.). — Introduction à l'étude des systèmes Mapamer (A.). — Tiroirs et distributeurs de vapeur... 381 de MeESUrENUSITÉS EN M phySIQUE.. LL. ee 128 — Détente variable de la vapeur. Dispositifs qui la Rirter voN UrBanisrzxt (A.). — L’Elcctricité. Exposé PROTUISEN PE e esse msaenaens times sed aae ce nenice sie 796 succinct des lois fondamentales de l'électricité et de Poincaré (H.). — Cours de physique mathématique. SESADPICAUONA Eee eee eee eo en ce 829 PHerMOAyNANMIQUE ee ven = - messes esse co Sorer (A.). — Optique photographique. Notions néces- PozrarD (J.) et DuDEbouT (A.). — Théorie Fi Navire, saires aux photographes amateurs. Étude de IIT, — Dynamique du Navire..................... . 650 l’ObJÉCHA MA DPICATONS AREA EE ere nee 128 TaursTON (R. H.). — Manuel de la machine à va- Tumzirz. — Théorie RpprRAnennRe de la lu- peur pour les Ingénieurs et les Ecoles pratiques. HN bons qubao op anobbnba oi Iaovdo so tn dde 333 884 Viserr (P. et T.). — L’Electricité à la portée des gens Cold dononnnnrer sos EM donendrocceteses Viozze. — Cours de physique, Il, 2e partie, optique HELD Don doPavovdé aodenvannosonddenoun ee Weger (H. F.). — Théorie générale de la libre à incandescencen(en allemand)..." Wirkowski (A. W.).— Sur la dilatation et la compres- SI00 ON AIT AIO HET IQUES- eee re Chimie Amar (L.). — Sur les phosphites et les pyrophosphites AUGER (V.). — Sur les chlorures d’acides basiques. (Conférences du laboratoire de M. Friedel)........ BaSN((J.).—Leconside chimie #15." "rer BeiLsTEIN (D° F.). — Handbuch der Organischen Cheese ne een Er CRE Bezrorr DE LA RoQuE (L. de). = Guide pratique de la fabrication UPChOCOlAL ER EEE PACE EME MEET BerrueLot (M.)— Chaleur de combustion de l’acide glyco- HUE EAN ENS CEE RE ARR EEE Ce — Quelques observations nouvelles sur l’emploi de la bombe caloriMÉtRiqUe rene ere Tee BerrTneLor (M.) et MariGxon (C.). — Sur l'acide glyoxy- HAUEROL OL YACERAUE RP L EC n -e ce — Chaleur de combustion de divers composés chlorés. Besson (A.). — Etude de quelques produits nouveaux obtenus par substitution dans les composés haloïdes des métalloïdes. Etude de quelques combinaisons nouvelles du gaz ammoniac et de l'hydrogène phos- phoré avec les Écomposés haloïdes des métal- RCE PA TRS SORTE AREA ESC RTE Cora Bicor (C.). — Sur quelques dérivés de la glycérine (Conférence du laboratoire de M. Friedel)........ Brrzy (de). — Note sur la fabrication de la fonte aux Hfats Unis eee Cuarpy (G.). — Recherches sur les solutions salines. os Coux (Dr Lassar). — Méthode de travail pour les labo- ratoires de chimie organique, traduit de l’allemand Dane AKerMaANN EE EE ere ce en Le CoururiEer (F.). — Sur les pinacones (CESR du laboratoire de M. ATHENA EE En DEnÉRAIN (P. P.). — Traité de chimie agricole ; déve- loppement des végétaux, terres arables, amende- mMPEDES EL AE OTAIS EE. ner ehsmr-e cents Een Drrrmar (W.) et HexpersoN (J. B.). — Sur la compo- SIHONIUe NEA TE Fe reee Drincourr (E.). ERLENMEYER JUNIOR. — Sur les acides phénylbromolac- tique et phénoxyacrylique actifs... ESPITALLIER (Commandant G.). — L’hydrogène et ses applications en aéronautique................,..... Ewaxs (Th.). — Sur le spectre d’absorption de quelques sels de cuivre en solution aqueuse. ............,.. Fiscuer (E.) et Picorx (O.). — Sur un nouvel acide pentonique et sur les deux acides trioxy-glutariques ITR ACUIS Se Reset celte Chante eue UE CN AE ForcranD (R. de), — Constitution du pyrogallol et de Pacideorthophosphorique.... 4" ee Friepez (Ch.). (Conférences de chimie faites au labo- ratoiretdeM) Are rt ne RES Gaurier (A ). — Cours de chimie, t. III. Chimie biolo- gique ODIOPOIDE NC ONE OT EI S CRT en 0 0 On PE Gaurier (H.) et Carey (G.). — Lecons de chimie à l’u- sage des élèves de mathématiques spéciales. ....... Guxe (Ph. A.).— Sur le point critique et l'équation des fluides. (C onférence du laboratoire de M. Friedel). HeizBoRx (E.). — A propos du coeflicient critique. Kvogcaucn. — Spectres d'absorption des solutions très ÉTENDUES EE ee Pie NL EN AN EST SI Lesptgau. — Sur la pression osmotique (Conférence du laboratoirerde MfEriedel)=2" "2. Le Sourn (P.). — Traité pratique des vins, cidres, Minadiores els DITIUOUX EE Le en Cab M AN LuxGE (G. ). — Vade-mecum du fabricant de pos chimiques eee en SANT MaGnier DE LA Source (Dr L.). — Analyse des vins. 829 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Marino (C.). — Recherches sur les Uréides....... se Œscuxer DE ConiNcxk. — Cours de chimie organique. Atnfasticulet--reec-e--e-e-r:crermrer-2rec0e Rosco et ScHoRLEMMER. — Traité de chimie. il, Chimic pratique, 32 et 60 parties................. Tisster (L.). — Sur l'oxydation des carburces (Confé- rence du laboratoire de M. Friedel)............... Vi (A. M.). — Dictionnaire de Chimie industrielle. 1er fascicule LUE "CRC PC ee, — Sur les ‘composés diazoïques de la série grasse (Conférence du laboratoire de M. Friedel).. Zeuinsky (N.). — Sur les formes stéréo-isomériques de l'acide diméthyldioxyglutarique ..,.........,...... 3° Sciences naturelles Géologie Boxi-Bazrr. — Les eaux de l’Arve, Recherches de géo- logie expérimentale sur l'érosion et le transport dans les rivières torrentielles ayant des affluents glaciaire eee re RCE PCT EEE . Boure (M.). — Description géologique du Velay....... Carez (L.) et Douvizré (H.). — Annuaire géologique universel. — Revue de géologie et de paléonto- lopie Ne ne nent e de CET CLR DELEBECQUE (A.) — Atlas des lacs français........... 3 HauG (E.).— Les chaines subalpines entre Digne et Gap. Lepsius (D° R.). — Géologie de l'Allemagne ct des con- trées limitrophes, t. Ler, DMVrASON-,--EeErr . MeuxiEeR (Stanislas). — Les méthodes de synthèse en minéralonte "Arret CCE Micnet-Lévy (A.). — Note sur la chaine des Puys, L Mont-Dore et les éruptions de la Limagne........ Mourer (G.).— Etudes des gites minéraux de la France. — Bassin houiller ét permien de Brive. I. Strati- CrAPE Ferre LP ec eRTEEC CCE . NickLës (R.).— Recherches géologiques sur les terrains secondaires et tertiaires de la province d’Alicante et du sud de la province de Valence (Espagne)... Rocné (Dr Georges). — Des procédés d’études employés par les missions d'exploration sous-océaniques et de la technique des pècheries marines à l'Exposition UDIVErSE NCA ABB ME ee re---ET ; WacGxer (H.). — Geographisches Jahrbuch............ Botanique ANNALES DE L'ÉCOLE D’AGRICULTURE DE MoNTPELLIER, L'ENCRE EE AO DL Ge os 0 à 5 Boire (A.). — Agriculture générale................. Ê DaxiEL (L.). — Recherches anatomiques ect physiolo- giques sur les bractées de l’involucre des com- POSE ART Lee RECU UE ee EE DEEE DePERRIÈRE. — Culture du chanvre.......,.......... Ê Fox (G.). — Cours complet de viticulture............ Hein (F.). — Recherches sur les Diptérocarpées ...... Mac-Lxop (J.).— Les fleurs des Pyrénées et leur fécon- dation par les insectes (en flamand)...,...... ce Marës (H.). — Description des cépages principaux de la région méditerranéenne de la France....... hoc Marrvonor (L.). — Recherches sur le développement delquelques mucédinées #2" te uen Paizzeux (A.) et Bois. — Le potager d’un curieux. — Histoire, culture et usages de 200 plantes comestibles DeUCONNUESLONMNCONNUES er Ce Ce Russezz (W.).—Recherches sur les bourgeons multiples SAUVAGEAU (C.). — Sur quelques algues phéosporées parasites senreere-crCecre cer ect ViaLa (P.). — Monographie du Pourridié des vignes et desfarbres fruitiers -ceme ent CEE ViaLa (P.). et Ravaz (L.). — Les vignes américaines ; adaptation, culture, greffage, pépinières........... 557 488 797 829 167 76% 62 456 522 63 384 334 457 129 24% 129 289 717 97 330 685 557 652 619 168 383 Zoologie, Anatomie et Physiologie de l’homme et des animaux ArraauD et Burre. — Du nerf pneumogastrique (Phy- siologie normale et pathologique), PET) TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Bicnar. — La mort par l'asphyxie.................... BLancrarD (R.). — Histoire zoologique et médicale des Téniadés du genre Hyménolépidés................ Buckxron (G.-B.) — Monographe of the British Cicadæ. Canv. — Les Copédodes du Boulonnais ; morphologie, ÉMbIYOlOP TE M AXONONNE eee Ce Pr eec-e Cowpr1N (H.). — Les mollusques....................... Courmonr (F.). — Le cervelet et ses fonctions........ Couvreur (E.). — Sur le pneumogastrique des oiseaux. — PHYSI010216 COMPATÉE... eme ss Demoor (J.). — Contribution à l’étude de la fibre ner- MEHSGTCOLÉDLO= Spin Ale etre eee een set meet Meucoeytes Aélectricités eee are rceu-cemercs Dorzo (L.). — La vice au sein des mers... Gapeau pe KerviLce (H.). — Faune de la Normandie. MT OEM por ucbopdacescadonodoe- dde ne GaugerT (P.).— Recherches sur les organes des sens et sur les systèmes tégumentaire, glandulaire et musculaire des appendices des Arachnides...,.... Geppes (P.) et Taomson (G.-A.). — L'évolution du Girop (P.). — Manipulations de zoologie. — Guide pour les travaux pratiques de dissection : Animaux TEE Lronasnnencatensredeceremtotondou1o0ee GuERNE (J. de). — Sur la zoologie à la British Associa- HD OP RER EE eee detecte HazLer. — La sensibilité et lirritabilité...........,... Harroc (Marcus M.). — Quelques problèmes de repro- duction. Etude comparative de la gamétogénie, de la sénescence et du rajeunissement {du proto- plasma........ Haewey. — Traité sur les mouvements du cœur et du SAN AGREE SMANIMAUT. Eee eee crever. Hécer (Dr P.). Le programme de l’Institut Solway..... — Le congrès d'anthropologie criminelle de Bruxelles. Henry (Ch.). — Loi générale des réactions psycho- DO NDICES REED ec eces HerrwiG (0.). — Comparaison de l’ovogénèse et de la spermatosénèse chez les Nématodes ........ JootvE Huxzey (Th.-H.). — La place del’homme dans la nature — Les sciences naturelles et l'éducation (édition Sema) sodobesodiodsroeronopansuo des omdt ont É KoroTnerr (A. de). — La Dolchinia mirabilis......... LAGuEssE (E.). — Recherches sur les développements dlenlarraterchez desipolssOns teen ce eee Lavoisier. — La chaleur animale et la respiration... Lécer. — Recherches sur les Grégarines.............. Locarp (A.). — Les coquilles marines des côtes de PE donnes ed Sonor too ns ne Marcnaz (P.). — Recherches anatomiques et physio- logiques sur l’appareil excréteur des Crustacis DéeroteinSononsreueserenostoemoposdeaocpeoc NaparzLac (Mis de). — Le problème de la vie.......... Parren (W.). — Les vertébrés ont-ils eu pour ancé- tres des Arachnides ? (en anglais)................, PENNETIER (Dr G.).— Histoire naturelle agricole du gros RME PIDÉ AE CEe- cree er reteereccrcee QuarTRerAGEs (de). — Darwin et ses précurseurs fran- cais. — Etude sur le transformisme............... Ricxarp (Jules). — Recherche sur le système glandu- laire et sur le système nerveux des Copépodes libres GR core deocdon orne ionaonoouecPononteo SABATIER (A.). — Essai sur la vie et la mort........... SrTaRCKkE (C.-N.). — La famille primitive ; ses origines ehsondéveloppementee "en "-ererrar---c--re Trssié (Dr Ph.). — Les rêves, physiologie et pathologie Trurar (E.). — Essai sur l’histoire naturelle du Des- mao Cle IR Sono ie donopetc orne) Varicny (H. de). — Conférences sur l'évolution (en anglais) WEsTERMARCK (E.). — Histoire du mariage humain (en cndEiibcencanonosnirenoonecoopooabebaDoceodos Wizsox (Sir D.). — La question de la main gauche (en anglais) Woopneap (G.-L.). — Les bactéries et leurs produits (anne) TE Cure donnee Mona ee vo un : 4° Sciences médicales Chirurgie, Gynécologie, Ophtalmologie AuvarD (A.). — Gynécologie. — Séméiologie génitale.. Dipssurx (H.). — Modifications à la technique des réimplantations dentaires..." "2.4". "#00." 0 Fucus (E.). — Manuel d’Ophtalmologie............... Terrier (F.) et HarrManN (H.). — De l'extirpation de PFutérus par laivoieiSacrÉe ee eee eeeer Icarp (Dr). — La femme pendant la période menstruelle Joux. — Des différents types de métrites. — Leur traitement: eme eee sels ehie eee Lucas-CHAMPIONNIÈRE (J.). — Cure radicale des hernies avec une étude statistique de 275 opérations........ MerGier. — Technique instrumentale concernant les SCIENCES IMEUTCAIES AE RER ET ee er -ce--C-e-r Pozzi et Baupron. — Quelques faits pour servir à la discussion sur le traitement des inflammations des annexes par la laparotomie ou l’hystérec- RicneroLze. — Chirurgie du poumon, pneumonie, Preumectomiener error encre reel Ricner (A). — Clinique chirurgicale.................. Médecine, Hygiène et Microbiologie médicale AzouLay (Dr). — Les attitudes du corps comme méthode d'examen de diagnostic et de pronostic dans les 830 216 621 686 maladies APCE Er ro rrecrrccdser ren 687 BazLanD (A.). — Recherches sur les cuirs employés aux Chaussures ide armee ee ee CL 236 Bararoux (DrJ.). — Guide pratique pour le traitement desmmaladies de l'oreille EEE CE PTE EEE tee 766 Baupouix (M.). — De l’hydronéphrose intermittente... 245 Biner (A.). — Les altérations de la personnalité........ 798 BLaNcHARD (R.). — Histoire zoologique et médicale des Téniadés du genre Hyménolépidés................. 559 BouveauLr (L.). — Études chimiques sur le bacille de lattiuberculnson a aime eee re-----cee 653 Crarrin (Dr A.). — Pathologie générale infectieuse.... 31 DaREMBERG (G.). — Le choléra ; ses causes et moyens LENS enSPreSEL Venere ee re cmeeeee 766 Dixon (Pr). — Tuberculosis....:..4."# #40... 384 Doc (Th.). — Contribution à l’étude de la morpholo- gie de l’actinomyces..............:0.............. 38% Drouer (D: H.). — De la valeur et des effets du lait bouilli et du lait cru dans l’allaitement artifi- CABLE nacelle ee stoeeieete sie eine rieLe(oie e- sistele 559 Drouin (R.). — Hémoalcalimétrie; hémoacidimétrie.. 719 HÉRE A MEDIEDSIl eee ee er 698 Garrop (Dr A.). — Traité du rhumatisme et de l’arthrite rhumatoïde nee eee 487 Gepoezsr (L.). — Traité de microbiologie appliquée à la médecine vétérinaire..........,7............... 863 GorGon (J.). — Le traitement de la “tuberculose dans l’état actuel de la science......................... 65 Guxox (A P.). — Influence de la dessication sur le ba- Clerduicholéra EEE Perses 245 Keocrus (A.). — Note sur le rôle du bacterium coli com- munis dans l'infection urinaire................... 130 Lagapix-Lacrave (Dr). — "Traité des maladies du CRE MDo TC TPE R SIC UeS Co UO HS 0000 EE QUREE 290 LAGRANGE (Dr F.). — De l’exercice chez les adultes... 65 LANNELONGUE et Acæarp. — Sur la présence du Staphy- lococcus Citreus dans un ancien foyer d’ostéomyé- lite este Arr es reeCeere- eee 384 LérTieNe. — Recherches bactériologiques sur la bile humaine ere een Ceres cee ee 99 Loir (Adrien). — La microbiologie en Australie. — Études d’hygiène et de pathologie comparée pour- suivies à l’Institut Pasteur de Sydney.............. 591 Lomsroso (C.) — Nouvelles recherches de psychiatrie et d'anthropologie criminelles............:........ 457 886 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Lworr (S.). — Étude sur les troubles intellectuels liés aux lésions circonscrites du cerveau............... Macxax et Sérieux, — Le délire chronique à évolution SYS TOMATE PE eee certes Mn Pre Mazvoz. — Le Bacillus coli communis comme agent habituel des péritonites d’origine intestinale. ...... MANGn (L.). — Éléments d’hygiène................... Marraa. — Note sur deux cas d’otite moyenne puru- lEnTE eee eee De eee Le Max-Simox (D'). — Les maladies de l’Esprit........... Mrerer (De J.). — Audition colorée............. Moxnx (Dr E.). — Formulaire de médecine pratique... Moxop (H.). — Le choléra (histoire d’une épidémie)... Nerrer. — Etude bactériologique de la broncho-pneu- MONS Lt Prenant nets de Li eo Eee te Nicaise, — Physiologie de la voix. — Dilatation de la trachéeNchez les/chanteurs- En" erer ee Proust (A.). — La défense de l’Enrope contre le cho- DÉTS Manteernes ee I en ee CU es Raymoxp (Dr P.). — Notes sur le traitement de la syphi- lis en Allemagne ct cn Autriche..............2.22. SrRAUS et GaAMALEïA. — Contribution à l'étude du poi- SONUDETCUICUR SE M EST EEE MR ERIaEe Tarcmanorr (prince Jean de). -- Hypnotisme, sugges- tiontet lecture des pensées ee re. TaioLoix (P.). — Le diabète pancréatique............ Tragur (L.). — Précis de botanique médicinale........ ViLLaix (L.).-— La viande saine. — Moyens de la recon- noireeMdelaPNrECIer see eh ee ects Weger (H.).— Des climats et des stations climatériques. Weiss (G.). — Technique d’électro-physiologie........ Wüurrz (R.). — Note sur deux caractères différentiels centre le bacille d’Eberth et le Bacterium coli com- — Lethniquelacténoloniques-- eee ce Wurrz (R.) et Herman. — De la présence fréquente du Bacterium coli commune dans les cadavres........ 168 422 130 422 457 216 831 290 166 336 THÈSES POUR LE DOCTORAT ÈS SCIENCES PRÉSENTÉES A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE PARIS (1891-1892), ET ANALYSÉES DANS LA REVUE EN 1892 1° Sciences mathématiques. Gonxessrar (F.). — Recherches sur l'équation person- nel'e dans les observations astronomiques de pas- SACS EE tete le sic sata ee see ele a ee sente . HapaMarD (J.). — Essai sur l’étude des fonctions don- nées par leur développement de Taylor........,... Pané (He). — Sur la représentation approchée d’une fonction par des fractions rationnelles.........., è PARAr (A.). — Sur le problème de Dirichlet et son ex- tension au cas de l'équation linéaire de second Ordres sienne eine te ACC ECS 2° Sciences physiques (Physique et chimie), ABRAnAM (H.). — Sur une nouvelle détermination du rapport entre les unités électro-magnétiques et élec- TOSANIQUES en -pee-CLe----0 Le CURE BEssox (A.). — Etude de quelques produits nouveaux obtenus par la substitution dans les composés ha- loïdes des métalloïdes. — Etude de quelques com- binaisons nouvelles du gaz ammoniac et de l'hy- drogène phosphoré avec les composés haloïdes des MÉCALOITRS EEE EEE EP ere ce C te RER . Cuarpy (G.). — Recherches sur les solutions salines... Fagry (Ch.). — Théorie de la visibilité et de l’orienta- tion destfransesdinterférence en 2-2 rene MariGxox (C.). — Recherches sur les Uréides.......... Micuzescu (C.). — Sur la détermination de l’équivalent mécaniquede la calories 3° Sciences naturelles Canu (E.). — Les Copépodes du Boulonnais; morpholo- gie, embryologie, taxonomie............, ere Couvreur (E.). — Sur le pneumogastrique des oiseaux. Physiologie comparée. "6h22 . DaxieLz (L.). — Recherches anatomiques et physiolo- giques surle s bractées de l’involucre des composées. GauBerT (P.). — Recherches sur les organes des sens et sur les systèmes tégumentaire, glardulaire et musculaire des appendices des arachnides...,..... Hein (F.). — Recherches sur les Diptérocarpées...... LAGUESsE (E.). — Recherches sur le développement de la rate chez les poissons.......... MOOD OU c ac ee Licer (L.). — Recherches sur les grégarines.......... MarcraL (Paul). — Recherches anatomiques et physio- logiques sur l'appareil excréteur des Copépodes Décapodes terre eee CCE TE Je Marrucnor (L.). — Recherches sur le développement defquelquestoucédiNÉEs Er ReP ec - RicnarD (J.). — Recherches sur le système glandulaire et sur le système nerveux des copépodes libres d’eau dOUCE. ere re ereeeeePrcoitee EEE CRE ; Russe (W.). — Recherches sur les bourgeons mul- TIPlES en -see-reenree Lecce: CREER III. — ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER Académie des Sciences de Paris. Séances des 21-28 décembre ASP ro tace — 4-1 janvier 1BOD see cmonee — 18 — EN RS PR ee — 2) ee RTE A TA 75 — der février A TIM DL — 8 — = PRE ee die ee — 15 _— ne Se _ 22 — A RE PR — 29 — A IE DS PTS — î mars nt nn cine ne - 14 — EC oo — 21 — ER are D — 28 — RO EE AUDE _- 4 avril ne TEA Te = 1 — = sh hadier intente — 19-25 — D A 0 — 2 mai = Séances des 16 mai 18026: nero — 23 — = 80 US NS — 30 _ ER it cocon — 7 juin Mon cocon Ê — 13 — 2, FRERES LE E _ 20 — Lise es STORE — 27 — OT bon rue — 4 juillet pe ve Re e — il — Vert eLiee — 18 — és eos — 2D — = hivce Fars-pee — Aer août D ONU o — 8 — tree ere _ 16-22 — — \iocrsnechatre — 29 — de 0 0 —- Se #septembre rec rt —_ 12 — prie ren is — 19-26 — PE on — 3 octobre create : — 10 — en . 651 - >» - Séances Séances des 22-29 Séances des Séances - TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES des 17-24 octobre TOP E-rea 767 31 _— TV ere ce que 769 T novembre LE Un PO 800 14 — te 801 21 — A nor co 832 22 — ter ec 833 5-12 décembre REP ES nb 863 Académie de Médecine. décembre SHERRE TEOee 67 5-12 janvier ABDE E cre 67 19-26 Mon ED DE 133 2 février OP RE BE | 2 133 9 — re te PEN 172 23 — RE AE SON EE 949 4er mars a annales de eue etes 249 8-15-22-29 — ee cs lee Cl 293 5-12 avril AA = ETS 293 19-26 — ee ete eme aGese 338 3 mai = ei nee cdot 338 10-17 — nan te ere 387 24-31 — Ron nc 425 7-14 juin RE A PT EEE in 458 21 — RNA reine 521 28 — A DOTE 564 5 juillet oc PEUR ONEETE 561 12 — on nec Uno 596 19-26 — NN SRE SARL 624 2 août HE 62% 9-16 — = Sr stage 625 23-30 — AE nes 656 GAS sSepleMbr CR 656 20-21 — = De ae 689 41 octobre Re Too 721 18-25 — De 710 3 novembre an 0e ADD OS 802 8-15-22 — M RTE S34 29 - Et 866 6-13 décembre — 866 Société de Biologie. 192 décembre ASE. re 34 19-26 — = hraniietéer aimes 35 9-16 janvier IR PPECRRRRE EE EE te 68 23 — ee Te 101 30 — SOU E 102 6 février = Ro eee 133 13 — Ps re ne 134 25-21 — ee SET 172 5-12 mars pe ee ne ae 219 19-26 — Le restait doit 294 2-9-23 avril OT Me LE 339 30 — A te 387 1-14 mai re de ARTE 387 21 — TANT. Ce 425 28 -- — 426 34-11-18 juin TS 494 25 — ES Dre à 527 2 juillet AE ATEN 625 9-16 _— En TO PT NUE à 626 24-30 — NE Ce 657 15 octobre AN EE ee DOME 721 22 — USSR ES Are Er 122 29 — one 710 5 novembre En 771 12-19 — PS ARS 802 26 — LUS Vo 834 3 décembre DE CR DA 856 40 — ee NS RER 867 Société française de Phys'que. des 15 janvier AS ODERRNENEE ASRE 68 5 février NRA 102 % mars ER A eur en 173 Séances des at mars RP oecrer tracer AS avril RO 6 mai MT taie ce te 20 — ed DOS AE PTE 3 juin ee Une 17 — TR A tr MR CT CE 4er juillet MA ENT 5 — ER cest afitele le 4% novembre TRES MENT ee 8 — SL DO SOUS 2 décembre RATE MTS AO 16 Société chimique Séances des 22 janvier RO R ee — 3 février ENT CP EEE DA en — 12 — NE SA Co nu — 26 — DO ae = 2 mars TS US MEMOUUS SE — 11-25 _— ED NOTE CCE — 6 avril note ue ComMUNICAONS..- 2. es -e--terl Séances des 1°r-10 juin NT on one — 24 — PRO EN NE AO Ces —= 6-9 juillet EN ER 0e CAO E 29 — = — 14 novembre a le Société française de Minéralogie. Séances des Séances des Séances des décembre 14 janvier ASP eee A1 février TR AT ie ae 10 mars Pete ie ee 14 avril — 6 janvier HP céndoen ie rade 20 — 4 PRE 3 février So INA TO TO 17 — REC ec 2 mars A ue 16 — RE NT TO Le 6-20 avril STE DOCS 4 mai En ob SE NEO 18 — ee ee ger juin te TS be 15 En PA 7-6 de SCT re 8 juillet RE 00e qobpése 20 — tee ae 2 novembre eee aie 17 — Se RE 00 1-22 décembre = Lu ee Société Royale de Londres A7. décembre 1! 4894: -%r 2.0"... 2 janvier NÉPÉSo soma ones 28 — eee Aro 4" février hear padcbaco#sso il _- PR cu 18-25 — ee 3-10 mars le em cierlussiete 17 — TR ce 31 — icone ace ere 28 avril 1h03 node an DU 5-12-19 mai TOR In SC IEe 2 juin Modo op coonene 16 — SAR OR UNS 18 décembre 22 janvier 888 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 7: ? 5 Avrier 9 74 Sé QE des fé re ie DEEE ch Académie des 'Sciences d'Amsterdam = a TATS FPE LE AMIENS cn Séances des 28 “novembre ASE. -"7 31. SE 2 r- Tan PME é on — 19 décembre ER EE à 38 13 mai REP EEE 0 — 30 = janvier 11892 2... 105 Æ ARE HR Te PU ns = 21 ‘érier. LT RENE EE 175 = il Jun DUC EENEEE Se _ 2 avril Re c 299 cou a = APE EME 808 — 29 — TL 342 a 28 octobre D SE RER pee = 28 mai eine EEE 431 — A4 novembre — "1-0... 836 ps 95 Eia Lu 320 SE à! décembres Mini 877 204 AS PSS ! — 24 septembre =, Lt ec CrCE 690 — 29 octobre A Ce 7112 Société de Chimie de Londres — 26 novembre Ten 0 € 838 Séances des à décembro M8 re CRE T . Société de Physique de Berlin = 17 — Ni ne ee Mn ride 435 | Séances des 20 “novembre 4189... 38 — 21 janvier LPS Score STE 15 — Eadétembre TT EE. 72 — 4 février I 145% |Mtravaux communiqués en M892/2%"0-.T-----eh-ce-er 839 _— 18 — RC TD SEC 253 = * mars D 7. Société de Physiologie de Berlin — Î — — Vale tatele so 1e 415 aloleipie, = LA Et 71-21 avril Re CROIRE 429 | Séances des 45 janvier} MS9D SECTE 12 _ 19 mai = Te Ie en SE 462 = 5 février us ds LÉ CE 253 ES 2 jun ET ENS CP 562 _ 19 — à re LR CEE 25% = 16 — RE EE 626 —_ 4 mars = ae RE 254 — AT ANOyYEMOLE EE ere 5.819 — 18 _— — passera CALE 300 — 4er avril D nn à 300 Société Royale d'Edimbourg — 3-13 mai = EN STE 391 — 24 juin AL DOC Dur en 20 532 Séances des 15 novembre A8 7 -eeee de 36 — 8-22 juillet LS ee ne 627 — 4 janvier ARCDE EE SES a ttr cre 72 — 14 octobre = L2142,00 STE 714 = 18 — ER OT oc 136 — 28 — EE LUE RE ORNE 805 Œ 1er février NAS See Sms — 11 novembre USE Sat at 819 4 ee 15 -- Sets nee ee 223 b on T mars AS TS ETS DE Académie des Sciences de Vienne ! — 14 — RD EE LEE certe ee 9 = 21 — SC CN CD se. OA Séances des 19=movxembre MSIE ER 38 = 16 mai RÉ nee ETS 0 429 —- 3-10 décembre = ee CE 38 — 20 juin ER SAUT 0 DES 530 — 17 — = a le IE 106 — TIM janvien 21802 0e" 1t6 Société philosophique de Manchester = 14-21 RE Co A ERSEEEE 137 — 4 février = rudes See 137 Séances des A5 tdécembre MOI ere ee ere 136 x 11-18 oo Torres 223 Æ 12 envier 1802 Me ee ee 136 — 15 mars node oc 254 22 96 — PRE RE re TRE 137 — 17 — A LT SPECTRE 255 + 9 février Te EN Sc cie 4131 = 2% = SE 300 La 23 ne Eye e ANS: 342 = 7 avril TE LM DRE 343 LS 8-29 mars SR TT Users CS 342 _ 5 mai 104 "RSC NNNUCEC ARE 431 Æ 26 avril RE moe e 62 — 17 juin mn toc biugruoocc 562 — 4 octobre Re 0 TO à 879 2 Er juillet TT osetssssesssennre 628 Communicalions.............. AS de ot ce 123 Société anglaise des Industries chimiques Séances des seb 1892............. Es (sECnOx DE aancresrER) A . Séances des Étidécenbre ASE 2 Tec us 37 _ SM ranvier ABODEEE . 137 Académie des Sciences de Saint-Pétersbourg — 15 février RE RE ant 298 #23 11 mars RE TN DEA RER 298 Séances des 416.- décembre "'A8M:- 20e. T3 = 8 avril RS Ne 462 — JT anvier M0 RES 138 = 6-24 mai RS TR 2e 463 — 10 février nn nue ne 255 , = D'MNOYCIMDLE M ira ue ene S04 = 24 = — sesseesereteetee 301 pus 1% mars pes ee Ne SÉTENR 301 sm 3 gs Communications...... Jane Ur Man CEE 806 Acndomiemerele, ic eee Communications.......... ARR PS CAC CCD de 0 2 8S0 Scances des 10 octobre RUSSES eidnbs “Où = T novembre AE Ne ER 37 Académie royale des Lincei décembre eee SA UR = janvier A8 eee PP RS EAnCes de HOVEMDLE MSI EEE RP CCR 74 — Aer février ON 000 >. 020) _— décembre A 14 — 5 mars 4e Crea 430 — janvier AB dre 176 Le 10 mai A ee ete 530 — février = RE AE 302 — 4 juin Mood acer cbune 626 — mars CET 302 Es 4 juillet Tales de diese 657 — 3-24 avril = rose PS 391 _ 6 août TT 2 0e 72901 Communicalionse een EN CUT 774 s TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES IV. — CHRONIQUES Amaxs (Dr). — Aéroplanes et aérocaves......... ..... 255 | Marrin (D: Er.). — Le cours d'anthropologie du Mu- Foa (Ed.). — La région de Porto-Novo............... 107 ÉTANE 0 1 ENS 80 dc DEN DE NS NE KELvin (Lord). — Généralisation de la « projection de Oztvier(L.).— À propos des incidents de l’hôpital Saint- Mercator » à l’aide d'instruments électriques. ..... 692 Né pto coin btood tonne pITITe0 do V. — CONGRES BLancraARD (R.). — Le congrès zoologique de Moscou.. 617 | Hécer (D:' P.). — Le congrès d'anthropologie crimi- Comses (A.). — Le congrès international de nomencla- nelletdetBraxeles EEPe eee -creerberere re: ROCHE oo0stranteodconodeedaebioroccoc 251 | Janer (Pierre). — Le congrès international de psycho- — La nomenclature chimique au congrès de Pau..... 597 losre expommentale ere eE enterrer -0ptat) Guerwe (J. de). — Le congrès de la British Association. Manouvrier (L.). — Le congrès de la British Associa- — OC CoAEÉcoe sonore eo ones oo e 703 Don PANTITOPDOlOPIE Eee eee ere — Sur la zoologie à la British Association............ 807 | Ozrvier (L.\. — La British Association au congrès d'E- GuizLaume (Ch. Ed.). — Le congrès de la British Asso- MDOUTE PME CEE Eee eee ee ce CHAUON SE RPRYSIQUE "2. an -ereere--er--rree 69% — Le deuxième congrès international de physiolo- HarroG (P. J.). — Le congrès de la British Association, HEbÉ oo eo doodotobo Demon nooonobOnree de doc Ones obesundooctanaicecatebne or 698 VI. — CORRESPONDANCE Sur les géométries non cuclidiennes (lettre de M. G.Mou- Ral:s sonoronérobolauoesocecoanoom ft ousconteeec 39 Sur les géométries non euclidiennes (lettre de M. H. POINTER) Ne ee LC re ec cer ec ceci 74 Sur Les minima d’odeur perceptibles (lettres de MM: Charles Henry et Lapicque).................. 224 Sur les minima d’odeur perceptibles (lettre de M. Charles HEADER de a 303 Sur les variations de la valence en chimie (lettre de M. Maquenne)........... JS mpbascdacnstestonroo Sur l'amaurose et l'état hypnotique (lettres de MMPBernheimiet#Paul Janet. ee Sur une expérience d’électricité (lettre de M. Ed. Branly). Sur la zoologie à la British Association (lettre de M. J. de GUErNE)Ee eee teen. Dé ooe butncoBre So obEno VII. — NOTICES NÉCROLOGIQUES BAAMAIDD) AT RICHE PMR treece nt 75 Caspari (E.). — Vice-amiral Jurien de la Gravière.... 303 CHAR (CE AS AIS TAS ee meet Loeb 40 Comses (A.). — A. W. von Hoffmann..,.............. 432 DENIKER (J.). — A. de Quatrefages.,................, TisserAND (F.). — Contre-amiral Mouchez.. ....... . Vincent (H.). — 3. A. Villemin................ RC VIII. — NOUVELLES BenGer (A.). — La photographie en couleurs sur albu- ME Doro oran en an eee once no 12% LippmanN (G.). — Perfectionnement de la méthode pour photographiermles couleursee he... cree 30% MAQUENNE (L.). — La synthèse de l’acide azothydrique, 56% Ouvrier (L.) ou L. O.— Sur la Tuberculose et la Dou- On aoune nant do nent nS I DEN DE — Le magnétisme de l’oxygëne.................... — L'encyclopédie scientifique des aide-mémoire...... 889 139 563 716 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS A Abelous, 35, 172, 387, 494, 802. Abels, 73, 880. Abney, 297. Abney (capitaine), 403, 174. Abney (W. de W.), 390. Abraham, 246, 491, 495, 651, Abria, 331. Achard, 35, 68, 339, 384, 866. Ackermann, 76+. Adam, 561. Adamkiewicz (A.), 138, 431. Adams (J. G.), 174. Addenbrooke, 819. Addyman, 36. Adler (Gottlieb), 806. Adrian, 221, 596. Agamennone, 115. Aignan, 248. Aitken, 72. Aiïtken (John), 389. Alard du Bois-Raymond (voir Bois- Raymond). Albanese, 302. Albert Ier, prince de Monaco, 133, 592, 848. Alezais, 339, 494. Ali, 834 Allemand (A.), 595. Allen (E. J.), 874. Almeida (G. de), 170, Alvisi, 14. Amagat, 128, 288, 386, 388, 427, 491, 169, 801, 833, 865. Amans (Dr), de Montpellier, 256. Amat, 62, 170. Amore (Luigi d'), 802. Amsler, 425. Anderlini, 115. Anderson (Dr), d'Edimbourg, 223. Anderson Stuart, 10. Andoyer, 66. André (Ch.), 101, 246, 292, 5681576, 588, 605 à 609. André (Désiré), 832, 869. André (G.), 61, 169, 217. Andreocci, 14, 116, 392, Andrews (T.), 497. Androussof, 880. Angeli, 302. Annales de l'École d'Agriculture de Montpellier, t. VI, 451. Anney (J. P.), 166. Ansiaux (G.), 431. Antoine (Ch.), 101, 423. Antomari, 70. Anton Handlirsch, 106. Antony, 302. Apéry, 865. Apostoli (Dr), 121. Appell (P.), 169, 337, 419, 454, 524, 683, 196. Arges, 834, 835, 896. 1 Les noms imprimés en caractères gras sont ceux des auteurs des articles originaux. Les chiffres gras reportent à ces articles. Arloing (S.), 33, 493, 525, 802, 865. Armstrong (Henry), 135, 175, 253, 428, 462, 626, 879. Armstrong (Lord), 497. Arnaud, 217, 339, 494. Arnaud (A.), 67, 246. Arnauld (Charles), 425. Arne, 715. Arnould (K.), 61. Arone (G. D. d’), 385. Arons, 839. Arrou, 102. Arsonval (A. 525, 021, 122: Arthaud, 33, 620. Arthur (ECS 808. Arthus (M.), 218, 802. Ascoli, 176, 115. Assmann, 12. Aston (E.), 819. Astros (d’), 339, 494. Athanasescu, 339. Aubel (van), 836. Aubin, 103. Aubley, 425. Auché, 866. Aufschlacger (H.), 254. Auger (V.), 455, 496. Autonne (L.), 24 à 26, 33, 110, 381, 521, 555, 588, 683, 767. Auvard (A.), 492 à 483, 551 à 554, 830. Auwers, 526. Aymonnet, 288. Ayrton, 71, 252, 34, d'), 249, 993, 492, 495, 498, 499, 529. Azoulay, 339, 387, 687, 111. B Babés (V.), 624, S66. Babinski, 626. Bachelard, 34. Backer, 297. Backlund (O.), 74, 139, 255, 302, 807, 880. Badoureau (A.), 8 Bacyer (V.), 462. Bagard, 337. Baïley (C.), 342. Bailey (G. H.), 626, 808. Baily, 831. Baillaud (B.), 241. Bakhuis-Roozeboum, 33, 313. Balbiano, 715. Balfis, 250. Balland, 525 Balland (A), Bambeke (Ch. Bapst (G.), 454 Baratoux (D'), 766. Barber Smith (J.), 299. Barbier (Ph.), 100, 246. Bardy (C.), 424 424, Barral, 34, 336. Van), 530. 219. Barrois, 33, 622 Barrow (J.), 31. Barrows, 562. Barthe (L.), 425, 720, 865. Barthélemy, 655. Bary (P.), 291. Baschny (J.), 840. Baschwitz, 651. Basin (A.), 494. Basin (J.), 797. Basset (A.-B.), 873. Bassot (L.), 800. Bataillon, 219, 339, 527, 626. Batemann, 33. Batigne (P.), 722, 802. Battandier (J. A.), 386. Baubigny (H.), 592, 368. Baudin (L-C.), 833. Baudoin (A.), 526, Baudouin (M.), 245, 832. Baudron, 130. Bauer (Vve F.\, Bay, 33, 770. Bayard (C.), 720. Bazin (A.), 171. Buzy, 16, 219, 834, 863. Beadle, 253. Beard (John), 808. Beauregard (D° H.), 33, 219, 248 à 286, 494, 495, 527, 619, 834, 866. Bech, 425. Béchamp, 250, 710, 802, 868. Beck (C. K.), 429. Becke (Friedrich), 301. Becker (L.), 342. Becquerel (Ed.), 33. Becquerel (H.), 132, 170, 246. Bédart, 387, 388, 426. Beddard, 342 Bédoin, 33. Béhal, 33, 246, 250, 385, 496, 525, 561. Behrens (H.), 343. Beïlstein (Dr EF.), 618. Belfort de la Roque (de), 829. Bell, 298, 463. Belloc (E.), 592. Beltrami, 302. Belzung (Ed.), 489, 561, 595, 596, 623, 624, 654, 655, 656, 688, 689, 721, 767, 769, 770, 801. Bemmelen (Van), 175, 690, 839. Beneden (P. J. Van), 31, 299, 430, 592. Benet (L.), 67. Bennett (G. T.), 390. Benoït (L.), 865. Beranger-Féraud, 133, 172, 625. Berg (A), 174, 492, Berger (Dr), 561. Berger (Emile), 834. Berger (Paul), 866. Bergeron (J.), 557, 866. Berget (A.), 96, 1406, 217, 244, 246, 247, 491, 724, 797, 800, 835. Berlesse, 33. Berlioz (F.), 595. Bernacki, 69. Bernard (A.), 623. Bernheim (Dr), 694. Berrus, 338. Berthelot, 67, 654. 293, 458, 496, 561, 596, 133, 169, 217, 292, 423. TABLE ALPHABÉTIQUE DES Fe LR PE VOST Ne Re ME à AUTEURS 891 593, 623, 655, 768, 169, 800, 801, 861, 862. Berthier (A.), 832. Berthot, 338. Bertin-Sans, 98, 292, 496. Bertrand, 496, 561, Bertrand (Ch. Eg.), 561, 596. Bertrand (G.), 494, 801, 833. Bertrand (J.), 247, 595, 654. Bertrand (M.), 5 à 12, S4% à S24. Bertrand (Marcel), 524. Bertrand de Fontviolant, 110, 864. Besson (A.), 34, 131, 173, 217, 246, 424, 493, 717, 865. Beyerinck, 106, 531. Bianchi, 714. Bichat (1761-1802), 457. Bichat (EE) 548 à 550. Bichner (E.), 74, 807, 880. Bidder, 390. Bidschof (F.), 301. Bielopolsky, 806. Bienaimé (Ct), 770. Bienfait (A.), 430. Bierens de Haan (D.), 37. Biétrix, 388. Bigot, 496. Bigot (C.), 455. Bigourdan (G.), 33, 82 à 59, 165, 946, 291, 493, 556, 654, 688, 7167, 801. Billiet, 625. Billot (Camille), 834. Billy (Ed. de), 717. Binet (A.), 1170, 294, 386, 387, 198. Binet (H.), 172. Binet (P.), 594. Bioche, 265, 427, 562. Bittner (A.), 255. Bjerknes, 800, Blakesley, 252, 341, 427, 428, 879. Blanc (Ed.), 720. Blanc (L.), 339, 495, 721. Blanchard, 626. Blanchard (E.), 596. Blanchard (R.), 33, 559, 6237 à 682. Blau (F.), 255, 343. Bleicher, 219, 358, 386. Bloch, 33, 834, Blocq, 626. Blocq (P.), 594. Blondel, 249. Blondin (J.), 127. Blondlot (R.), 132, 169, 593. Boëteau, 219. Boggio Lera, 74. Bohr (Ch.), 493, 525. Bois (D.), 551. Bois (E.-J.-G. du), 840. Bois-Reymond (Alard du), 38. Bois-Reymond (E. du), 880. Bois-Reymond (R. du), 253, 462, 880. Boitel (A.), 129. Bonaparte (prince Roland), 291. Boné Baëlf, 557. Bonetti, 71. Bonney (J. Q.), 104. Bonnier, 133. Bonnier (G.), 34, 134, 688, 689, 865, 867. Bonnier (J.), 338. Boquet (F.), 292. Bordet (Ch.), 245. Bordez (K.), 767. Borgesius, 838. Borisi, 715. Borrel (A.), 68. Boruttau (D'), 391. Bosc, 387, 651. Bosscha, 331. Bouchard, 651. Bouchardat (G.), 865. Bougaïeff, 33, 301. Bougarel, 221. Bouillot (J.), 800. Boule (M.), 488, 769. Bouquet de la Grye, 66, 243, 592. Bourdellès, 655. Bourgeois, 70. Bourgeois (L.), 62. Bourges, 802. Bouron (G.), 596. Bourquelot, 35. Boussinesq (J.), 247, 294, 299, 337, 526. 527, 560, 592. Boutan (L.). 386. Bouty, 217, 428, 492, 767, 801. Bouveault, 497, 653. Bouverct, 35. Bouvier (J.), 771. Bouvier (IE. L.), 129, 215, 248, 384, 495. Bouvier (J ), 387. Bower, 808. Bower (F. O.\, 86. Bowman, 462. Boys (C.-V.), 630, 837. Boys (P. du), 95. Bradford (J. R.), 222. Branly (E.), 66, 291, 388, 525, 716. Brauer (Friedrich), 106, 563. Bréal (E.), 246. Brebner, 808. Bredikhin, 880. Brereton Baker, 562. Brester (A.), 38. Bretonneau, 612, Breuer (A:), 137, 223, Briggs (J. K.), 253. Brillouin (M.), 131, 333, 801. Brioschi, 462, 880. Britten (James), 808. Brivois, 339. Broca (A.), 104, 102, 131. Brochet, 250, 596. Brochet (A.), 218, 525. Brockbank (W.), 342. Brodie, 175. Brongniart (Ch.), 34. Brouardel, 33, 657, 689, 721, 770. Brouardel (P.), 494. Broussais, 33. Brown (Adrian), 253. Brown (prof. Crum), 253, 808. Brown (Horace T.), 253. Brown-Séquard, 387, 425, 492, 494, 495, 625, 654, 655, 122, 110, 174. Bruchietti, 74. Brücke (E. von), 381. Brubl, 33, 626. Brumauld de Montgazon, 387. Brun (E.), 246. Brune (L.), 67. Brunet (A.), 381. Brunhes (Bernard), 69, 334, 720, 768. Brunner (Karl), 723. Buchon, 530. Buckton (G. B.), 559. Bucquoy, 624. Budde (E.), 839. Budenberg, 462. Budin, 624. Bué, 294. Buffard (J.), 387. Buffet-Delmas, 218, Buguet (Abel), 333. 105, 427, 556, 664 à Buisine (A.), 526, 769. Buisine (P.), 526, 769. Bukowski (G. von), 138. Burbury, 838. Burgaritzki (J.), 39. Burtin, 879. Burton, 297, 836. Butte, 53, 620. € Cadet de Gassicourt, 67, 387, 866. Cadiat, 618. Cadiot, 134, 426. Cahier, 521. Cahours, 33. Caïlletet, 526,712. Calandruccio, 1175. Calderwood, 807. Caligny (A. de), 170, 248. Callandreau (0.), 33, 165, 654, 833. Callendar (H. L.), 61. Caméré, 33, Campanakis, 248, 655. Camus (J.), 624. Candolle (A. de), 462. Canovetti (C.), 66. Cantaloube (A.), 291. Cantone, 115. Canu (E.), 718. Capazza (L.), 802. Capelli, 176. Capitan, 172. Capelle (H. van), 38, 105, 300, 690. Capus (G.), 331. Caralp, 248. Cardani, 7115. Cardew, 70. Cardinaal (J.), 530, Carez (L.), 639 à G48, 791. Carlet (G.), 248. Caxlier, 33, 808. Carnot(Ad.), 218, 248, 250, 238, 623. Carnot (Sadi), 465. Carnoy (J.), 116. Caron (C. D.), 293. Caronnet (Th.), 767. Carpentier, 33. Carruthers, 808. Cartailhac (E.), 216. Carte du ciel, 121. Carter Bell, 462. Carvallo, 68, 249, 250, 254. Carvallo (E.), 132, 246. Casalonga (D. A.), 527. Cash (T. Th.), 498. Caspari (E.), 304. Castelnau, 243. Catalan (E.), 298, 299, 530. Cathelineau, 33, 339, 771. Catois, 866. Catsaras, 33. Cattani, 392. Causard, 338. Causse, 34, 170, 174, 250, 385. 526, 596, 120: Cayeux, 110. Cazeneuve (P.), 34, 291, 338, 493, 496, 592, 801. Cazin (M.), 593. Cels (J.), 865. Centanni, 445, 115. Cerfontaine, 621. Certes (A.), 170. Cerulli, 392. Cesaro, 299. 494, 594, 892 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Chabaud, 221. Chabaud (V.), 66. Chabaud-Arnaud, 33. Chabrié (C.), 112, 527. Chamberland, (Ch.), 768. Chambrelent, 134, 173, 293, 560, 625. Chamousset (F.), 486. Champy (L.), 33. Chancel (F.), 248, 594. Chantemesse, 172. Chanute, 255. Chapel, 100, 293. HR RE Jones, 253. Chappuis (J.), 96, 432. Charcot (J.), 444 à 4177, 492, 494,867. Chardonnet (de), 171. Charlois, 331. Charpentier, 67, 133, 293, 428, 561, 625, 656, 866. Charpentier (A.), 424, 493, Charpy (G.), 40, 128, 169, 217, 246, 258, 334, 556, 618, 651, 717. Charrin (A), ET 339, 381, 425, 494, 495, 525, 527, 625, 7626, 655, 657, 110, 771, 802, 834, 866. Charvet, 333. Chassevant (A.), 560. Chaslin (Ph.), 686. Chassy (A.), 338. Chatin (A.), 67, 493, 655. Chatin (J.), 34, 134, 386. Chauveau, 294, 625, 721, 802, 834. Chauveaud (G.), 100, 433, 172. Chauvel, 690, 834, 866. Chavanne, 624. Chenot, 294. Cheviakof (V.), 880. Chevreux (E.), 425. Cheysson, 33, 833. Chibret, 595. Chouppe, 626, 834. Christemanos, 38. Christiani, 722. Christmas (de), 104. Chuard (E.), 404. Church (A. H.), 389. Chwolson, 73. Ciamician, 302, 392, Cintolesi (Dr F.), 651. Clado, 339. Clark (John), 429. Clarke (C. B.), 222. Claus (C.), 223, 724. Clavenad, 689. Clercy, 101. Clos (E.), 654. Clowes (F.), 296. Coculesco, 491. Codde, 386. Cohn (E.), 689, 801. Cohn (Dr Lassar), 164. Cohnstein, 628. Colardeau, 526, 172, Colefax, 71. Colin, Colin '(G. , 172, 293. Colin (L A 133, 293, 338, 425, 721, 510. Collie (Norman), 626. Collier (Dr), 879. Collye, 879. Colman (H. G.), 429. Colot, 246. Colson (A.), 867, 868. Colson (R.), 163, 173, 801. Combemale, 294. Comberousse (Ch. de), 287. 101, 170, 769, 800, 833, Combes (A.), 69, 103, 174, 221, 950, 25% à 260, 432, 497, 562, 596, 59% à 6014, 869. Combes (C.), 869. Considère, 33, 132. Contejean (Ch.), 217, 722, 111, 802, 803, 833, 834, 864, 866, 867. Coppet (L. de), 768, 769. Cordier (J.), 800, 865. Coret (A.), 381. Corlieu, 721. Corminbœuf (H.), 801. Cornevin, 292. Cornil, 172, 388, 624. Cornu, 250, 761. Cornu (A.), 101, 345 à 355. Cornu (M.), 855. Cossar Ewart, 37, 253, 807, 808. Cosserat (E.), 2#1, 833, 864. Costantin, 33, 171, 219, 291; 867. Cotteau (G.), 293. Coudray (F.), 219. Coupin (H.), 558, 619. Courgey, 866. Courmont (F.), 33, 289, Courmont (J.), 102. Courty, 654. Cousin (H.). 594. Couturier (F.), 455. Couvreur, 620, 626, 652. Crafts (J.-M.), 386. Crawley, 341. Crety, 74, 302. Cristiani, 654. Croft (W. B:), 528, 877, 818. Crossley (A. W.), 70 Crova, 331. Cruls, 248. Cuénot(L.), 326 à 334, 560, 594, 619, 620, 685, 862. Cunningham, 807. Curie (P.), 459, 495, 801, 835, 836, 865, 868. Curtel (G.), 291. Czeczetka, 38. Czermak (P.), 532, 628. Czerny, 657. Dalton Hooker (sir J.), 869. Dampier Whethans (W. C.), 871. Daniel, 244, 495. Darboux (C.), 132, 41% ct 418, [162, 492, 832, Daremberg, 766. Dareste, 560. Dargelos, 834. Darwin (Major), 459. Dary (G.), 166. Dastre, 33, 35, 387, 388, 722, 866. Daubré, 291. Davis, 131. Davis (G.-E.), 463. Dawson (J.-V.), 460. Dawson Turner, 36. Debierre, 33, 521, 122. Decagny (Ch), 132, 172. Decharme (C.), 769. Defforges (Ci), 47% à 560, Dehérain (P.-P.), 292, 382, 595, #89 à 295. Déjerine (Mr), 294, 527, 657. Déjerine (Mme), 527, Delachanal, 171. 195, 625, 626, 184, 5%, Delacre, 299. Delage (Y.), 144 à 1420. Delastelle, 623. Delauney, 491. Delaurier, 101, 293, 689, 769. Delebecque (A.), 337, 494, 527, 59%, 829. Delisle, 386. Delord, 249 Delthil, 33, ‘657. Demont, 134. Demarcay, 334. Demontzen, 623. Demoor (Jean), 244. Demons (D'), 387. Demoulin, 295, 340, 386, 388, 427, 530, 869. Deniau, 769. Denigès (G.), 338. Deniker (J.), 140. Denning (W. F.), 636 ct 67%. Denza (ar. 130, 337. Deperet (Gi. ), 241, 623, 834. Deperrière, 129. Depoux, 494, 722, 771. Derrécagaix, 132. Deruyts (J.), 530, 7122. Desesquelles, 868. Desgrès, 496. Desgrez (A.), 246. Deslandres, 132, 218, 593, 801, 684. Desnos, 425. Despcignes, 201, 521. Desprez, de Saint-Quentin, 6517. Dessoir, 627. Desvignes, 561, Devic, 35. Devignes, 525. Dewalque, 299. Dewar, 497. Dewevre, 68, 294, Dibdin, 389. Didsbury (H.), 216. Diener, 563, 124, 806. Dieulafoy, 293, 294, 338, 3817, 425. Dineur (Dr E.), 559. Ditte, 67, 833. Dittmar (W.), 96 Dixey (F. A.), 875. Dixon (Prof.), 384. Dixon (Augustus), 4 Dixon (H. B.), 342 Dobbie (James), 136, 562, Doléris, 802. Dollo (L.), 524. Domingos Freire, 654. Domec (Th.), 384. Donnemezan, 241. Dorrington (W.), 342. Dorsten (R. H. van), 710. Douliot, 33. Douvillé (H.), 197. Doyon, 626. Drasch (H.), 106. Dreyfus (Ch.), 805. Drillon, 595. Drincourt (E.), 128, 455. Dropp Richemond, 429. Drouet (Dr H.), 559. Drouin (R.), 66, 719. Druery (C. J.), 808. Drzwiecki (S.), 255, 294. Dubar (Dr), 387. Duboin (A.), 491, 527, Dubost, 618. Dubut, 596. Duchartre, 33. 496, 494. 429, 462, 562, 66, 23% à 240, PT] CNT TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 893 Duché (G.), 128. Ducla (V.), 101. Duclaux, 101, 592, 767, 800. Dudebout, 33, 650. Dufour, 33, 111, 169. Duguet, 293, 721. Duhem (P.), 95, 214, 389, 716. Dujardin-Beaumetz, 293, 338, 387, 527, 625, 656. Dulong (M®°), 291. Dumelle (H.), 802. Dumontpallier, 561. Dumoulin (A.), 595. Duner (Nils C ), 869, Dunod, 131. Dunstan (Prof.), 253. Dunstan (voir Wyndham Dunstan). Duparc (L.), 132, 337, 721. Duplay, 169, 593, 866. Duponchel (E.), 33, 67, 424 Dupont, 496. Dupuy, 33, 134. Duquesnay, 419. Durand-Fardel (Ray.), 290, 490, 524, 654, 687. Duroziez, 33. Dutczynski (A. J.), 106. Duval (Mathias), 512, 866. Duvillier, 221. Dwelshauvers-Dery, (\ 140, 363 à 367, 419, 52 Dymond, 36, 429, 626. Dyson (F, W.), 390. 1), 89 à 92, 1, 588. E Ebner, 223. Edgar, 428. Edison, 462. E. 4. A., 650. Elber, 296, 297. Ellis (William), 390. Elster (J.), 255, 124. Emerson Reynolds, 429, Emery, 392. Emich, 224, 563. Emtage, 127. Engelmann (Th. W.), 38, 772, 7173, Enright, 341. Enriquez, 102. Erlenmeyer junior, 96, Errera, 808. Escary, 219, 247, 248, 291. Escherich (G. von), 431. Esmiol, 864. Espine (Ad. d’), 624. Espitallier (Ct G.), 62. Estienne (J.), 424. Estienne (J. E.), 337. Etard (A.), 100, 131, 169, 218 344 à 322, 386, 5412 à 520, 833, 868. Evwans (Thomas), 288. Evwart (J.-C.), 222. Exner (Franz), 114. Exner (Karl), 223, 532. F Fabre (C.), 66. Fabre-Domergue, 172, 339. Fabrini, 115. Fabry, 864. Fabry (C.), 521, 865. Fabry (E.), 101. Famintzin, 138. Fanta (F.), 462. Farmer, 390. Fauconnier (Ad.), 100, Faurot, 33. Favé, 163. Faye, 33, 100, 171, 120, 86%. Fayod, 35, 102, 133. Fenyi (J.), 211. Féré, 68, 101, 134, 294, 339, 387, 495, 494, 657, 687, 121, 722, 802. Ferran (J.), 624. Ferrant, 721. Ferret, 492. Féry (C.), 33. Festing (Maj. gal), 103. Feulard (Dr), 834. Fialkowski (N.), 431. Field (E.), . Finger, 532, 840. Fink (E.), 592. Finot (Ch.), 134. Fiquet, 496. Fischer (Dr), 834. Fischer (Emil), 215. Fischer (P.), 425, 801. Fischer (W.), 879. Fitzgerald, 104, 105, 253, 803, 837. Flammarion, 65k, 761. Flament, 493. Fleissner, 39, 343. Fleming, 298. Fleurant (E.), 34, 385. Feliche (P), 338, 385. Floquet (G.), 720. Foa (Ed.), 108. Foester (W.), 287 et 288. Foex (G.), 289. Fogh (J.), 292. Folie et F. F., 31, 298, 299, 430, 530. Fonvielle (W. de), 688. Forcrand (de), 34, 100, 131, 132, 170. 217, 338, 385, 423, 491, 492, 526, 594, 168, 862. Forel, 593. Forestier, 689. Formaneck (C.), 343. Forster (J.), 531. Foster (W. M.), 253. Fouret, 33, 10, 251,295, 340, 427,803, 864. Fournier (Prof. A.), 305 à 313, 834. Foveau de Courmelles, 34, 526, 865. Frachimont, 176, 443. Francois-Franck (Ch. A.), 338. Frank (A. B.), 798. Frankland (Percy), 136, 429, 626. Frattini, 714. Frederiecq (L.), 37, 64, 527, 573 à 587. Frédureau, 865. Freire (voir Domingos Freire). Frémont, 219. Frenkel, 68. Frew (W.), 136. Freundler (P.), 720. Friedel {Ch.), 68, 250, 260 et 261, 455, 496, 801, 865,-868. Friedel (G.), 295. Friend (Hilderick), 808. Fritsch (K.), 628. Friswell (J.), 186. Fromholt (F.), 66. Frossard, 295, Fuchs (E.), 621. 247, 331, 424, 655, 4900 à 4907, & Gad, 391, 532, 114, 805. Gadeau de Kerville (H.), 623 Gailier, 866. Gaillot, 133. Gain, 832. Gal (J.), 423. Galezowski, 102, 339, 625, 722 Galippe, 657, 722, 8617. Galliard, 690. Gamaleïa (N°), 99, 472, TT, Gammarelli, 115. Garaycochea (A.), 656. Garaycochea ([.), 656. Garbowski (Thaddaus), 840. Gard (A.), 338. Gariel (C. M.), 446 à 453, S61. Garnier, 33. Garnier (Ch.), 171. Garrett, 528. Garrod (Dr-Archibald), 459 Garros, 220, 2417, 868. Garstang (N.), 390. Casin Se 868. Gaube (J.), 387, 492. Gaubert, 34, 421, 834. Gaudry (A.), 527, 622. Gaupillat (G.),5527, 804. Gautier, 867. Gautier (Armand), 28, 66, 169, 246, 249, 385,424, 433 à 441,492,493, 561,864, Gautier (G.), 171, 294, 802. Gautier (H.), 62, 334, 560. Gautier (Paul), 834. Gautrelet, 33. Gayet, 61. Geddes (P.), 421. Gedoelst (L.), 863. Gegenbauer (L.), 343, 562, 123. Gehuchten (A. yan\, 722. Geïkie (James), 430. Geitel (H.), 255, 724. Gelcich (Eugen), 223. Gellé, 388, 867. Genty, 512, 869. Genevée, 132. Genvresse (P.), 69, 217, 220, 250. Geoffroy (E.), 593. Geological Survey, 33. Gérard, 387, 425, 525. Gernez, 33, 171. Giard (A.), 68, 104, 526, 625, 802. Gibert, 689. Gibson, 253. Gülbault (H), 66, 131. Gilbert, 102, 134, 866. Gilis, 35, 426. Gill, 292, 429. Gilles de la Tourette, 33, 339. Gillis, 625. Gimbert, 35. Girard (A.), 431, 169. Girod (P.), 489. Girode (J.), 134, 223, 722. Giustiniani, 74. Gladstone, 498, 837. Glasenapp (S. de), 832 Glazebrooh (R. T.), 251. Glendinning, 462. Gley(E.), 29, 33, 34, 339, 495, 626, 651, TRPAUUTUEE 834, 867, Glücksmann, 563. Gmeiner, 106, 431. Godefroy (R.), 255. Godmann, 302. Gœæbel, 808. Goldschmiedt (G.), 137, 723. Gomes Teixeira (F.), 431, 454. Gonnard, 294, 295. 102; 172, 387, 426, 894 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Gonnessiat (F.), 101, 292, 555, 655. Gorgeu, 250, 292, 496. Gorgon (J.), 65. Gosselet, 425. Gouilly (A.), 243, 381, 382, 556. Goursat (E.), 33, 801. Gouré de Villemontée (G.), 800. Gouy, 66, 131, 169, 246, 800. Goy (P. de), 624. Grandis, 74. Granger, 34, 593, 868. Grassi, 116, 775. Gray (Thomas), 390. Graziani, 35. Green (J. R.), 498. Gregory (R. A.), 36, 11, 104, 174, 222, 2592, 296, 391, 460, 498. Gréhant (N.), 33, 133, 172, 339, 722, S51 à 854, 864. Griesbach, 723. Griffiths, 136, 562, 800. Grifliths (A.), 430. Griffiths (A. B.), 171, 291, 296, 425, 499, 592, 594, 622, 627, 655, 689, 769, 833. Griffiths (H. B.), 767. Grigorescu, 339, 388, 493, 495, 626. Grimaldi, 302. Grimaux, 247, 246, 494, 560, 596, 168, HA Grimshaw, 137. Grobben (C.), 137. Grôger (Max.), 431. Grohmann (Ed.), 223. Gross (T.), 255, 839. Grossmann, 39. Grossouvre (A. de), 424, 596, 721, 833. Grünshaw, 31. Grünwald (A.), 437. Guéneau de la Marlière, 654, 720. Guenez, 423. Guéniot, 152, 249, 293, 561. Guepin, 625. Guerbet, 497. Guérin, 249, 293, 338, 386, 527. Guerne (baron J. de), 102, 133, 335, 381, 425, 686, 03 à 305, S07 ct 808. Guéroult, 801. Guglielmo, 302, 392, 715. Guichard, 247, 561. Guignard (L.), 33, 68, 100, 102, 769. Guillaume (Ch. Ed.), 12 à 24, 62, 69, 93 et 94, 95, 102, 128, 244, 389, G1S, 655, 683, GG4 à 698, 717, 164, 829. Guillemin, 593. Guillon, 219. Guimaraes, 251. Guinochet (E.), 425. Guitel (Frédéric), 218, 596. Gumlich (Dr) 300. Güntz, 100, 496. Guy, 34. Guye (C. E.), 635 à 639. Guye (Ph: A.), 96, 423 à 426, 166, 471, 215, 455, 551. Guyon, 625. Guyon (F.), 171,381. Guyon (A. F.), 245, Guyou, 33. Gwyther (R. F.), 137, 819. Haberlandt, 137, 7174. Hadamard (J.), 385, 419, 454, 683, 796. Haffkine, 626, 657. Hagen (J. G.), 486. Hale (G. E.), 492, 560. Haller (1708-1177), 718. Haller (A.), 170, 171, 220, 491, 497, 525, 526, 560, Hallez (A.), 338. Hallez (P.), 386. Hallopeau, 623, 651. Halphen (G.), 332. Halphen (G. H.), 33. Hamburger (H. J.), 106, 176, 431, 531. Hamy, 463. Hamy (M.), 101, 337, 649, 832. Handl, 563. Hankine, 626. Hankins (E.-M.), 626. Hann (J.), 39, 431. Hanot, 402. Hanriot, 169, 170, 174. Hardy, 294, 338, 587, 425, 527, 625, 110. Hariaut, 869. Hariot (P.), 622. Harisson, 808. Harlé, 425. Harley (Vaughan), 174, 296. Harold Picton, 171. Harold Wager, 808. Harsten (L.), 768. Hartl, 723. Hartley (W. W.), 175, 879. Hartmann (H.), 68, 98, 99, 130, 216, 245, 289, 336, 384, 457, 621, 686, 209 à 5435, 198, 831. Hartog (M.), 808. Hartog (Marius M.), 590. Hartog (P. J.), 37, 137, 298, 342, 463, 6958 à 300, 805, 879. Harwey (1578-1657), 718. Haton de la Goupillière, 617, 832, 833, 869. Hatt, 424, G88. Haudié (Edgard), 103, 173, 220, 250, 340, 389, 427, 458, 496, 528, 772, 836, 868. Hauer (A.), 255. Haug (Em.), 167, 833. Hauser, 868. Hausser (J.), 217, 246, 248, 492. Haycraft (H.), 808. Hébert (A.), 129, 421, 522, 684, 829. Hebroun (F.), 35. Hecht (E.), 800. Heckel (E.), 425. Hédon, 32, 339, 595, 651. Heen (P. de), 299, 430, 530, 722. Héger (D' Paul), 64, 560. Heïlborn (E.), 244. Heim, 35, 248, 428, 7117. . Helbig, 74. Held (A.), 110, 171, 483 à 485. Hellriegel, 241. Helmholtz (von), 493. Hémitz, 806. Hemmelmeyer, 722. Henderson (J. B.), 96. Henneguy, 339. 526. Henneguy (F.), 470, 421, 527, 590. Henneguy (L. F.), 400. Hénocque, 310, 111. Henricher {E.), 344. Henrici, 5a0, 804. Henriquez, (V.), 493. Henry (Ch.), 133, 170, 224, 303, 336, 720, 768, 801, 867. Henry (Louis), 299. Henry (Paul), 621. Henry (R.), 322 à 326. Hepites, 684. Heptworth (T. C.), 333, 589. Hérard, 625, Herbert, 101, 134, 294, 494. Herdman, 808. Héricourt 291, 492. Hering, 532. Herm Fritz, 563. Hermann, 99, 170, 340. Hermann (Aloïs), 131. Hermite, 462, 832, S41. Herroum, 340, 341. Hersche, 297. Herschel, 838. Hertwig (O.), 97. Hervieux, 133, 293. Herzenstein, 301, 807. Herzig (J.), 343, 344. Hess, 867. Heys, 462. Hibbert, 498. Hill (A.), 460. Hillhouse 808. Himbert (A.), 34. Hinrichs (G.), 218, 338, 385, 386, 425, 491, 592, 594, 622, 865. Hipprisley (Major), 439. Hœk, 531. Hæœrnes, 106, Hoff, 562. Hoffert, 879. Hoffmann (A. W. von), 432. Hoffmann, 116, 343. Hogdkinson, 36, 136, 429, 879. Hoho, 102. Holbow (L.), 839. Holetschek (J.), 38. Holt, 807. Hooker, 462. Hoolser (Samuel), 562. Hopkins (F.G.), 497. Hopkinson, 251. Horbaczewski, 431. Horvath, 291. Hoskyns Abrahall, 429. Hospitalier (E.), 68. Houdaille (F.), S64. Houlbert (C.), 244, 337, 494. Houssay (F.), 386, 560. Hovenden (F.), 879. Howes, 808. Huber (Ad.), 802. Huber (J.), 594. Hubrecht (A. A. W.), 300, 531. Huc, 767. Huggins (D. R.), 390. Huggins (W..), 221. Huggins (Mme), 221. Hughes, 562. Hugo (L.), 101, 170, 219, 249, 295, 425, 561, 595, 623, 654, 656, 689, 801. Hugo Gylden, 720. Huguet, 595. Hulke (J. W.), 390. . Humbert, 33, 103, 712, 869. Humblot, 34. Hunter Stewart, 429, 530. Hurion, 292. Hurmuzescu, 171, 428. Hurst, 462. Hussein Of, 429. Huxley (M. H.), 216, 619. . Icard (D'), 99. Inaudi, 414, 492. Inwards (R.), 421. | TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 895 Irvine (Robert), 298. Isarn, 249. Istrati, 220, 496. Ivanovsky, 139, 301. Ivison O’Neale, 132, 172. Izarn, 832. Jablonski, 292. Jacquet (A.), 219. Jad (J.), 688. Jadin (F.), 594. Jaeger (Prof. Albert), 106. Jäger, 38. Jäger (Gustav), 254, 343, 532, 564, 723. Jaggy (E.), 864. Jahn (Hans), 38, 72, 123. Jahoda (R.), 137. Jamet (V.), 66. Jammes (L.), 526. Jandrier (E.), 133. Janet(Dr J.), 441 à 154, 691. Janet (Paul), 420. Janet (Pierre), 609 à G46, 831, 832. Jannettaz (E.), 295, 491, 864, 867. Janssen (J.), 170, 833. Jaumann, 38, 1371, 532. Javal, 133. Jesse (0.), 787% ct 488. Joannis, 218, 801, 833. Joly (A.), 33, 132. Jolyet, 104, 247, 426. Jones (J. V.), 461. Joubin (L.), 33. Joubin (P.), 833, 865. Jouin, 621. Jourdain, 66, 110, 526, 168. Jourdan, 33, 68. Joxé, 241. Juhel-Rénoy, 834. Julien (A.), 292, 337. Jumelle (H.), 35. Jungfleisch, 423, 770. Junius, 218. Juppont (P.), 128. Jurien de la Gravière (Amiral), 218, 303. K :Kalischer (S.), 839. Kalt, 35. Kammerlingh Onnes (H.), 530, 838. Kampf (J.), 805. Kapteyn (J. C.), 299, 342. Katzenstein (Dr), 254. Kaufmann, 601 à 6035, 653, 815 à 817, 863. Kelvin (Sir William Thompson), 389, 459, 692, 870. Kerner (Fritz von), 106. Kesslitz (W.), 301. Ketscher, 710, 771. Kidston, 562. Kilgour, 71. = Kilian (W.), 168, 864. Kipping (E.), 135. Kipping (Stanley), 428, 462. Kirman (Walther), 879. Kitt (M.), 301. Klein (F.), 462. Kleinhof, 832. Klemencic (1.), 223, 304, 628. Klingemann (F.), 626. Klippel, 219. Klobb (P.), 291, 560. Klobb (T.), 593. Klempke (M'e D.), 247, 291, Knecht (E.), 301. Knett, 429. Knoblauch, 288. Knoll (Ph.), 255, 114. Knott (G.), 136, 562, Koch (von), 803. Kæœæhler (R.), 7% à 8S, 216, 422, 424, 539 à 548, 715. Kœlbel (Karl), 723. Kæœnigs (G.), 33,66, 103, 247. Künig (A.), 839, 840. Konovalofr, 34, 66. Korda (Désiré), 623, 655. Korotneff (A. de), 335. Korteweg, 828. Kossel, 7174. Koster (W.), 106. Kousnetsoff, 807. Kovalevsky (A.), 138, 806. Krasser (F.), 38, 532, Kreidl (A.), 840. Kremer (J. B.), 721. Krogius (Ali), 35, 130. Kronecker (L.), 33, 66. Kuenen, 343. Kuhemann (G.), 175 Kunkel d’Herculais, 102, 434. Kurlbaum (F.), 839, L Labadie-Lagrave (Dr), 290. Labbé (Alph.), 768. Laborde, 133, 249, 293, 387, 425, 521, 561, 625, 626, 802, 834, 866. Laboulbène (A.), 248. Lacaze-Duthiers (de,, 248. Lachaud, 496, 560, 868. Lachaux, 292. Lachowicz, 343. Lacroix (A.), 34, 35, 70, 170, 295, 337, 425, 457, 492, S01, 834. Laënnec, 624. Lafite (Prosper de), 720. Lafont, 865. Lagneau, 625, 656, 802. Lagrange, 102, 299, 835. Lagrange (E.), 626. Lagrange (Dr F.), 65. Laguesse (E.), 29, 35, 219. Lainer, 38. Laisant, 103, 134, 174, 231, 598, 562. Lajard, 61, 122. Lalanne (Léon), 219. Lambert (M.), 294. Lambling (E.), 223 à 2383. Lampe (E.), 839. Lancereaux, 67, 338, 623, 625, 656, 802. Landerer (J. J.), 292, 525. Landes, 248. Landi (L.), 385, 424, 492, 493. Lane Fox, 529. Lang (von), 840, Langley, 220. Langley (J. N.), 221. Langlois, 35, 172, 381, 425, 494%, 524, 625, 657. Lannegrace, 241, 248. Lannelongue, 33, 384. Lapersonne (F. de), 621. Lapicque (L.), 34, 35, 65, 67, 68, 69, 102, 133, 134, 172, 113, 219, 224, 249, 293 294, 338, 340, 387, 388, 425, 426, 494, 495, 524, 527, 652, 651. _— Lo] Lapparent (A. de), 407 à 410, 710. Larat (J.), 294. Larmor, 459, Larrey, 338, 561, 654, 866. Laschober, 301. Lataste, 721. Lauder (Alex.), 136, 562. Laugier (M.), 802. Laulanié, 134, 339, 426, 495. Laurent, 800. Laurent (E. M.), 34. Laurent (Emile), 168. Lauriol, 220. Lauth, 338, 423, 496. Lavarenne (de), 8355 à S60. Laveran, 102, 172, 625, 802, 834. Lavocat, 386, Lavoisier, 457. Lawy (Dr Ad.), 8179. Layard (Nina), 808. Laycock (W. F.), 626. Léauté (H.), 61, 344, 363, 715. Lebedefr, 301. Le Bel (J. A.), 59, 88 et 89, 133, 220, 496, 868. Leblanc, 67, 172, 866. Le Cadet (G.), 291, 337, 654, 832. Le Chatelier (H.), 33, 66, 131, 169, 174, 173, 247, 458, 560, 592, 768, 801, 864. Lechien, 33. Lecomte (H.), 718. Lecoq de Boisbaudran, 218, 291. Lecornu, 217. Le Dantec (l'abbé), 650. Ledoux-Lebard (Dr A.), 410 à 445, 282 à 287. Leduc (A.), 526, 622, 865. Lees (C. H.), 135. Lefebvre (P.), 217. Lefévre (J.), 291. Le Fort, 33, 561, 866. Léger, 596. Léger (C.), 423. Léger (E.), 800, 833. Léger (L.), 558. Le Goarant do Tromelin, 247, 655. Legrain, 33. Leist (E.), 13. Lejard, 722. Leloir, 100. Leloutre, 33. Lemoine, 134, 803. Léotard, 386. Lepercq, 496. Lepierre, 292, 496, 560, 868. Lépine, 34, 219, 495, 622. Leprince, 595. Lepsius (Dr R.), 164. Leray (P. A.), 281. Leroux (Ch.), 110. Leroy, 34, 132. Leroy de Keraniou, 832, Le Roy de Méricourt, 133, 425, 561, 625, 656. Lery, 389. Lesage, 33, 100, 102, 689. Lesbre, 292, 865. Leskanne (F.), 526. Le Sourd (P.), 589. Lespieau, 455. Lestoquoi (Ch.), 595. Letellier (A.), 527. Létienne, 99. Levasseur (E.), 241. Levavasseur, 248, 864. Leveau (G.), 768. Leven, 122, 111, 834. 896 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Le Verrier, 292. Levinstein, 137, 802. Lévy (A.), 454 à 156 Lévy (Lucien), 134. Lévy (Manuel), 337. Lewes (prof.), 253. Lewes (Vivian B.), 136. Lewy (Dr Max), 72. Lie (Sophus), 132, 469, 171, 492. Lieben, 38, 255, 563. Lilienfeld, 300, 532, 628. Limb, 385. Limpach (Léonhard), 429, 879. Linder (S.), 71. Ling (Arthur), 462. Lion (G.), 134. Liouville (R.), 337, 423, 655, 769, 301. Lipmann, 39. Lippmann (Ed.), 343. Lippmann (G.), 41 à 45, 68, 304, 437, 340, 724, 768, 836. Lissenco, 338. Lissevéo, 655. Litherland, 837. Litten (prof.), 532. Liveing, 497. Liznar, 39, 223. Lloyd Morgan, 808. Locard (A.), 64. Lockhart Gillespie, 808. Lodge (O.), 295, 460, 530, 837. Lœwy (Dr), 391. Logde, 105. Loir (Adrien), 591. Loisel, 802. Lombroso (C.), 451. Lo Monaco, 392. Londe, 33. Longridge (A.), 109 à 414, 454. Lorentz, 690, 838. Loribond, 498. Lortet, 101, 527. Louise (E.), 491. Lowe, 298. Lucas, 103. Lucas (Ed.), 251. Lucas (Félix), 61, 20, 43%, 174, 250, 251, 562, Lucas-Championnière (J.), 686, Lucct, 34. Lucion, 651. Luedeking (C.), 21 Luggin (H.), 723. Luksch (J.), 563, 121, 805. Lummer (O.), 839. Lumsden, 429. Lunge (G.), 11, 129 à 123, 618. Luton, 656. Luys, 425, 626. Lwoff (S.), 168. Lydekker (R.), 504 à 505, 565 à 568. — M Macaigne, 102. Macaulay (A.), 389. Mac Cook, 808. Macfarlane Gray, 838. Mac Govan, 36. Mac Gregor (John), 626. Mach (L.), 137, 724. Mac Intosch, 807. Mackensie, 136. Mac Leod (J.), 97. Mac-Mahon (Maj. P. A.), 870. Mac Murrick, 808. Madamet (A.), 381, 796. Madau, 803. Madden, 837. Magitot, 596, 656, 722, 770, 802. Magna, 496. Magnan (Dr), 422, 651. Magnanini, 74, 392. Magnier de la Source (Dr), 522, Magnin (Ant.), 720, 768. Mairet, 387. Majsisovics, 431. Makarov, 806. Maiaise (C.), 430. Malassez, 219, 867. Malbec, 494, 867. Malbot (A.), 217. Malbot (H.), 217. Malcolm Laurie, 36, 72. Malfatti, 805. Malher (Ed.), 251. > Mallard, 35, 70, 294, Maltézos (C.), 337, 8(0, 801. Malvoz, 830. Mancini (Ernesto), T4, 116, 302, 392, AA45% et 446, 175. Manen, 1323. Mangeot (S.), 493. Mangin (L.), 34, 248, 367% à 380, 422, 594. Mangold (Carl), 344. Mann (G.), 808. Manouvrier (L.), 303 à 70%. Maquenne (L.), 66, 69, 131, 169, 246, 263 et 264, 292, 385, 455, 188, 496, 500, 564, 618, 717, 764, 767, 868. Marchal (Paul), 593, 685. Marchand (Em.), 66, 131, 170, 593. Marchette, 302. Marcet (William), 491. ” Marenescu, 805. Marès, 122, Mares (Franz), 131. Marès (H.), 335. Marcy, 338, 720. Margerie (Emm. de), 335, 489, 300 à 203, 764, 198. Margules, 343. Marignac (de), 462. Marillier (L.), 31, 64, 99, 168, 216, 336, 422, 457, 620, 799. Marinesco (G.), 494, 688. Marinescu, 626. Marinowitch (B.), 128. Marix (P.), 424. Marjolin, 458, 561. . Markoff (A.), 33, 66. Markoff (S.), 73. Markovnikoff (W.), 688. Marone, 624. Marrotte, 133, 770. Marshall (A.), 462. Marshall Ward, 36. Martel (E. A.), 247. Martha, 451. Martin (Dr A.-J), 45 à 52. Martin (D° Er.), 464, 864. Mas (F.-B. de), 423. Mascart, 33, 100, 170, 561, 592, 688, 796. Massol (G.), 34, 170, 171, 218, 423, 491, 492. Mather, 498. Mathias, 526, 171. Matignon (C.\, 423, 487, 492, 496, 595, 622, 623, 624, 654, 655, 688, 689, 720, 167, 768, 769, S00, 802, 832, 833, 861, 862, 864, 865. Matruchot (L.), 685. Matthews, 72. Matthey (E.), 390. Maumené (E.), 832. Maupas, 560. Maupeou (de), 33. Mauro, 302, Max-Simon (Dr), 216. Mayer (A.), 38. Mayer (R.), 255. Mazade, 289, 335. Mazelle (Ed.), 106. Mazzarella (J.), 171. Mazzarell, 175. Mazzuoli, 493, Megnin (P.), 35, 134, 626, 802. Meguta, 803. Mehay, 655. Meinshausen, 807. Meldola, 562, 626. Melvil (J. C.), 819. Melvill, 436. Mély (F. de). 337. Mensbrugghe (van der), 865. Mer, 151, 174. Mergier, 13). Merlateau, 34, 338. Meslans, 248, 338, 385, 865. Mesnard (E.), 525. Mesnard (F.), 832. Metchnikoff (E.), 294, 629 à 635. Metzner (R.), 833. Meunier, 32. Meunier (J.), 61. Meunier (M.), 241. Meunier (Stanislas), 62, 561, 721, 761, 168, 833. Mewes, 839. Meyer, 722. Meyerhoffer, 723. Meylan (E.), 429, 481. Michaelis, 807% Michel, 801, 866. Michel (C.), 494, 623, 833, 834. Michel (L.), 294, 802, 864 Michel-Lévy (A.), 248. 456. Miculescu (C.), 102, 166. Miers, 818. Mignot, 656, 689. Milivoiewith (A.), 424. Miller, 36. Millet (Dr Jules), 831. Milliau (E.), 720. Milne-Edwards (A.), 630 à 622, S65. Mingazzini, 14, 16, 302, 392, Minguin, 220, 560. Miquel (P.), 248, 768. Mireur, 33. Müirinny (F.), 401. Mitchell (J. C.), 37. Mittag-Lefler (G.), 801. Moessard, 493. Moissan (H.), 169, 170, 246, 560, 592, 593, 595, 864, 865. Moitessier (J.), 292, 496. Mojsisovics (Aug. von), 224, 124, 114. Moll (J. W.), 176. Mond (Ludwig), 533 à 539. Mondésir (Paul de), 622. Monod (D' E.), 290. Monod (Henri), 527, 166. Montemartini, 302; Montessus de Ballore (de), 293. Monti (Dr). 532, Moody (G T.), 135, 429. Morat, 626, 657. Morat (J. P.), 218, 494. dite thai à TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 897 Moreau, 711. Morel, 70, Morel (Ch.), 101. Morel (J.), 100. Morera, 302. Morin (J.), 492, 654. Moritz, 462. Mürth (Wilhelm), 431. Mosny (E.), 219. Mosso (A.), 264 à 266. Moiteu, 627. Mouchez (Amiral), 385, 424, 454, 563. Mouchot, 33. Moulin (H.), 801. Moureaux (Th.), 66, 169, 217, 218,2G' à 278. Mouret (Georges), 40, 46% à 47%, 522. Moureux, 496. Mourgues, 561. Moussu, 495, 657. Moutard-Martin, 61. Magnier de Villepoix, 172. Mrazec (L.), 721. Muller, 806, 868. Muller (Franz), 300. Muller (Max), 563. Muller (P.), 138. Muller (P. Th.), 217, 220, 246, 248, 423, 492. Muller (Th.), 833. Munier-Chalmas, 291. Munk, 254. Munitz (A.), 101, 170, 383, 494. Murmann (E.), 137. Murray (G.), 808. Murray (John), 298, 808. Mutelet, 834. Myers, 626, 819. N Nabras (de), 425, Nadaïllac (Mis de), 862. Nahmmacher, 172. Nalder, 427, 428. Nalepa (Alfred), 138, 532, 628, 726, Natterer, 628. Naud (C.), 245. Neesen, 839. Nègre, 386. Negreano, 169. Nekrassoff, 806. Nepveu, 33, 721. Netter, 33, 336. Netter (A.), 688. Neumann (Georg.), 39, 137, 723. Newburg (S. B.), 563. Newport Langley (J.), 869. Newton (E.T.), 873. Nicaise, 98, 710. Nicati, 386. Nichols (Edwards), 288. Nicklès (R.), 63. Nicolas (A.), 496, 527. Niessl (G. von), 137. Niesten (L.), 722. Niewenglowski (G. H.), 333, 589. Nivet, 338. Noble (capitaine), 135. Noblot (P.), 721. Nocard (E.), 101, 172, 249, 527, 866. Nœælting, 250, 262 et 263. Noguës (A. E ), 385. Nordenskiold, 833. Norman Collie, 626. Norman Lockyer (J.), 134, 174, 221, Normand (A.), 172. Noujade, 656. Nourry (C.), 494, 623, 833, 831. o Obermayer (Alb. von), 344, 124. Obecrmayer (Fritz), 431. Obrzul !A.), 224. Observatoire de Vienne (Autriche), 431. Ocagne (M. d’), 27, 33, 35, 10, 103, 134, AT4, 251, 295, 340, 389, 427, 459, 486, 492, 528, 562, 716, 712, 801, 803, 828, 869. Oddi, 392. Œhlert, 801. Œschner de Coninck, 35, 218, 248, 425, 651. Oger (A.), 720. Ohlsen (Herman), 654. | Olivier (Louis), ou L. O., 32, 62, 65, 10, 108, 127, 128, 120, ASS à 213, 214, 216, 243, 287, 289, 303, 336, 344, 384, 419, 429, 445, 454, 456, 457, 486, 490, 559, 588, 590, 591, 619, 651, 693 ct 694, 118, 719, 334 à 62, 797, S07, 828, S41 ct S42. Oliviero, 339, Ollivier, 67, 133, 625. Omond, 342. Onanoff, 35, 594. O'Neill, 137. Orndoff (W. R.), 563. Osaro, 31. Osborne Reynolds, 879. Osmond, 221. Ostrooumoff, 8017. Ostwald (W.), 136. Oudemans, 38, 531. Ouspenski, 494, 7174. Ouvrard, 100, Pachon, 219. Padé (H.), 381. Pailleux (A ), 551. Painleyé (P.), 61, 100, 132, 292, 386, 423, 494, 492, 720, 800, 832. Pamard, 625, 656. Panas, 617, 338. Papy, 424. Paquelin (Dr), 220. Paraf (A.), 588. Parcharides, 101. Parenty, 560. Parker (T. J.), 74. Parmentier (F.), 132, 247, 338, 491, 527, 560, 595. £ Parrot (Gabriel), 622. Pascheles, 406. Paschis (H.), 431. Passmore, 253. Passy (J.), 102, 133, 248, 386, 710, 7171. Pasteur (L.), 591, 624. Paton (Noël), 12, 298. Patten (William), 215. Patterson (A. M.), 391. Paul, 428, 499. Paul (Constantin), 293, 294, 625, Paul(R. W.), 341. Péan, 458, 624, 866. Péchard (E.), 101, 491, 493, 593, 768. Peddie (W.), 31, 72, 136, 1175, 223, 953, 298, 342, 429, 430, 530, 684, Pekelharing, 38, 105, 300. Pellat, 404, 171, 527, 836. Pellerin, 132. Pellet (A.), 720. Pelmutter (A.), 123, Pelseneer (P.), 248. Pennetier (Dr G.), 862. Périer, 293. Péricr (Ch.) 338, 387. Périgaud, 292, 423, 596. Perkin, 462. Perkin (A. C.), 429. Perkin (W. H.;, 428, 462, 879. Perkin junior, 36, 135, 136. Péroche (J.), 689. Péron (A.), 63. Péronne, 866. Pérot (A.), 101, 525, 526, 592, Perrier, 491. Perrier (Edm.), 722, 170. Perrier (G.), 171. Perrin (A.), 832. Perrin (Elie), 832. Perrotin, 561, 654, 761. Perry, 91, 105, 252, 297, 298, 427, 499, 803, 837, 819. Perry (John), 390. Pestre, 803. Peter, 293, 294, 338, 625, 689, 721. Petit (P.), 67, 491, 594, Petrini, 339. Peyron, 35. Peyrot;, 494, 721. Peyrou, 112. Pfel, 628. Philippe (L.), 171. Philippon (G.), 292, 592. Phipson, 689. Phragmen, 131, 169. Physalix (C.), 246, 294, 425, 525, 594, 626. Picard (E.), 33, 60, 131, 291, 4914, 555, 720, 423 à 329, 167, 864. Picart, 654, 832. Pichard (P.) 67, 171. Pick, 38, 562. Pickering (S. V.), 879. Picou (R. V.), 481. Picq, 294. Picqué, 294. Pictet (A.), 424. Pictet (Raoul), 800, 801, 865. Pietra-Santa (D' de), 802. Pictte (Ed.), 768. Pigeon (Dr), 101. Pigorini, 392. Pilliet, 68, 339, 657, 771, 834, 867. Piloty (O.), 215. Piltschikoff (N.), 1174, 761. Pinard, 458. Pionchon (J.), 128, 592. Pisani, 295. Pitres (A.), 866. Pittion, 291. Pizetti, 174. Pizon (A.), 131. Place (de), 768. Placet (Em.), 833. Plateau, 299, Playfair Mac Murrick (voir Mac Mur- rick. Pleske (Th.), 807. Plimpton (R. T.), 462. Plugge (P. C.), 864. Poehl (A.), 560, 721, 769. Poincaré (H.), 66, 15, 170, 385, 424, 491, 649, 767, 1769, 809 à S15, 833, 861. Poincaré (L.), 96, 166, 420, 522, 556, 651. 898 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Poirault (G.), 801, 866. Poirier, 33. Polaillon, 624, 690, 866. Pollard, 33, 650. Pomel (A.), 67,424, 560, 93, 595. Pope (William), 462 Popp, 254. Potain, 3817, 425. Potier, 292. Pouchet (G.), 34, 67, 68, 101, 102, 219, 385, 388, 494, 527. Poulenc (C.), 247, 492, 833. Poulet (J.\, 521, 796. Poulton (E. B.), 808. Pourrat, 68. Pozzi, 120. Prelinger (O.), 224. Prenant (A.), 98, 172, 219, 294. Presh von Haerdtl (E.), 431. Prévot (E.), 763. Pribram (R.), 563. Prillieux (E.), 34. Prince, 8017. Pringsheim (E.), 809. Pritchard, 33, 869. Prouho (Henri), 802. Proust, 29%, 338, 721. Proust (A.), 166. Prud’homme, 169, 250, 296. Prunet (A.), 800, 864. Pruvot (G.), 424, 559. Puchl, 563. Puchta, 223. Pullinger (W.), 429. Pam (G.), 723. Purdie (E.), 626. Puschl (Carl), 255, 724. Q Quantin, 169, 761. Quatrefages de Bréau (de), 40, 139, 463, 619. Quénu, 293. R Rabaud (C.), 169. Rabaut, 250, 496. Rabut, 801, 833. Racchini, 833. Raczkowski, 338. Radoïs, 218. Radau, 425. Raffy, 35, 174, 295, 340, 389, 459, 492, 803. Raïllet, 34, 803. Railliet, 102, 134, 339, 496, 495, 626, 863. Rainy Brown, 36. ‘Raïsonnier, 561. Rambaud, 338, 689, 721, 832, 864. Ramsay, 838. Ramsay (William), 175, 879. Ramsay Smith (Dr), 807. Ranvier, 218, 247. Raoult, 132, 869. Rateau (A.), 218. Raulin (J.), 386, 425. Ravaz (L.), 383. Raveau, 388, 458, 836. Rayet (G.), 33, 100, 169, 246, 292, 52 654, 832. Rayleigh (Lord), 221. Raymond (F.), 33. Raymond (Dr P.), 130. Razous (V.), 767. Re, 176. 7 ; Re (Del), 774. Reblaud, 35. Rebourgeon, 426. Reclus, 866. Recoura (A.), 34, 171. Reggiani, 715. Regnard (P.), 339, 426. Regnauld, 866. Regnault, 67, 294, 622. Reignier (Ch.), 622. Reketov, 806. Remington, 529. Remy-Saint-Loup, 172, 426. Renard (Commt.), 220, 834. Renard (Ch.), 865. Kenault (B.), 561, 596, 623. Renault (J.), 35, 339. Renaut, 866. Renou (E.), 424, 824. Resal (H.), 66, 100, 104, 470. Resal (J.), 21. Respaut, 101. Réthi (L.), 628. Retterer (Ed.), 30, 33, 68, 294, 593 à 542, 527, 625, 802. Reymond, 625. Reynolds (Emmerson), 136. Riban (J.), 491, 493, 592. Ribard, 247, 331. Ricard, 802. Ricco (A.), 768, 710. Richard, 808. Richard (Jules), 129, 133. Richards, 31, 298. Richer (P.), 387, 494. Richcrolle, 798. Richet (A.), 48, 67, 75, 863, 866. Richet (Ch.), 102, 172, 291, 294, 492 493, 171, 802, 833, 866. Rick (J.), 808. Righi, 391, 714. Rillet (A.), 34. Rindeman, 626. Riquier, 241. Risien-Russell (S.), 222, 296. Ritter (E.), 521. Ritter von Brücke (E.), 106. Ritter von Hauer, 39. Ritter von Urbanitzky (A.), 829. Rive (L. de la), 247, 688. Rivière (E.), 33, 172, 218, 248, 655. Riza, 250. Roberts Austen (W.C.), 103. Robertson, 498. Robin, 247. Robin (A.), 67, 293, 338. Robinson (A.), 808. Roché (Dr Georges), 384, 3429 à 234. Rocquigny Adanson (G. de), 293, 656. Rodet (A.), 102, 387. Rodet (A. Max.), 35. Roger, 494, 625, 7171, 802, 866. Roger (E.), 337, 800. Roger (H.), 655, 121. Rogon (Dr), 255. Rolland (G.), 172, 247, 425. Rollet de l’Isle, 763. Roos (L.), 218. Roque (de la), (voir de Belfort do la Roque). Roscoe, 420. Rosenberg (D'), 300. Rosenthal, 808. rosenstiehl (A.), 592. Roskiewiez (L:), 114. Rossard (E.), 864. Rossard (F.), 247. Rossiter (E.), 135. Rouché (E.), 287. Roule (L.), 442 à 444, 766. Rousseau, 132. Rousseau (G.), 67, 173, 423, 494, 592. Roussel, 721, 832. F Roussel (Th.), 866. Rouvier (E.), 400. Rouvicr (G.), 248. Roux (G.), 291, 387. Roux (Wilhelm), 106. Roy (C. S.), 174. Rubens (H.), 839. Rücker, 297, 530, 803. Rudet, 68. Rudio, 898. Ruffini, 175. Runolffson, 865. Russell (W.), 652, 720. Ruydts (de), 299. Ryn van Alkemade (A. C. van). s Sabatier (A.), 164. Sabatier (P.), 492, 493, 497, 594. Sabrazès, 495. Sacorries (de), 834. Saint-Germain (A. de), 241. Saint-Joseph, (de), 832. Saint-Martin (L. de), 338, 802. Saint-Rémy (G.), 184 à 188. Sakurai (J.), 429 Salet (G.), 595. Salvioli, 74, 302. Sanchez Toledo, 33. Sandias, 176. Sandras, 132, Santi (de), 657. Sani, 775. Saporta (de), 220, 589. Sarazin, 688. Sarrau, 761. Sauvageau (C.), 65, 97, 456 à 464, 218, 383, 526, 527, 619, 622, 632, 685, 198. Schafter, 38. Schapira (Dr H.), 683. Scheidt, 392. Schellhorn (Ch. A. H.), 532. Scheurer-Kestner, 100, 132, 221, 495, 496. Schierholz (C.), 106. Schindler, 38, 628. Schlagdenhaufen (F.), 425. Schlegel, 389. Schlesinger (L.), 386, 492, 526. Schlæsing fils (Th.), 34, 769, 800, 801 832, 864. Schmidt, 807. Schmidt (G. C.), 724. Schmidt (W.), 241. Schmitz, 808. Schorlemmer, 420. Schott (C. A.), 342. Schoute (P. H.), 38, 106, 176, 300, 342, 343, 431, 532, 690, 7172, 174, 828, 838, 839. Schranzhofer, 723. Schribaux, 594. Schræder van der Kolk, 431, 690. Schubert (A.), 106. Schulhof, 33, 767, 169, 832. Schumann (Victor), 840. Schunck, 342. Schuster, 70, 436. Lens td pd mi ét tes Let dabdiont. en. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 899 Schutzenberger (P.), 386, 393 à 399, 423, 593, 801. Schweizer (Dr), 300. Scott, 808. Sebileau, 402. Sée (Germain), 293, 338, 387, 561, 625, 656, 121. Seelcy, 221. Segall, 218, 387, 657. Selch (Emerich), 840. Semenoft, 302. Semichon (L.), 864. Semmola, 169, 458, 624, 625, 657 Senderens, 492, 493, 497, 594. Sérieux (P.), 101, 422. Serret (P.), 33, 424, 491, 655, 688. Servais (C1.), 430, 530. Servais (V.), 218. Seunes (J.), 67, 769. Severini, 115. Seward (A. C.), 808. Seymour Rottwel, 462. Shand, 429, 562, Shelford-Bidwell, 390, Shenstone, 429. Sherrington (C. S.), 251, 875. Shinner, 251. Sibileau, 35, Sicard (Dr H.), 215. Sidney Martin, 252. Sigalas, 247, 426. Sigmund (W.), 532. Silber, 302. Simon (L.), 338. Simoni (Angelo), 343. Sinclair, 136. Sinigaglia (F.), 7072 109. Sirks (J. L.), 37, 105. Sisson, 298. Skinner (P.), 175. Sklarek (Dr W.), 73, 254, 300, 391, 532, 628, 114, 805, 880. Skraup, 106. Skromnof, 170. Smith, 498, 499, 529. Smith (Rév. F. J.), 528. Smithells, 36, 136. Snow (B.), 288. Sobotka (J.), 532. Soldaini, 14, Solles, 387. Sollier, 33. Somigliana, 114. Sonnenthal, 38. Soret (A.). 128. Soret (Ch.), 241. Sottas, 657. Soulié, 657. Soulié (E.), 596. Soulier, 33. Sowin (N.), 806. Sparre (de), 217, 423, 424. Speckmann (A. W.), 342. Spring (W.), 429, 431, 657. Springer (Dr M.), 642 à 636, 766. Stabikoff, 595. Stackler, 338. Stanievitch, 100. Stansfield, 428. Stapff (F, M.), 839. Starcke, 620, Sias (J. S.), 40. Stefani (de), 175. Steindachner, 106, 563, 723, 724. Stenhouse (James), 135, Stodolkiewitz, 761. Stokes, 175. Strache, 301. Strachey (Ga'), 390. Straus (Prof.), 99. Strauss, 35, 172, 494. Streatfeild, 562. Streintz, 39. Stricht (Dr Van der), 299. Stroobant (P.), 430, 626, 835. Strüssner, 38. Stuart (Anderson), voir Anderson Stuart. Stuart Bruce, 341. Sullivan (James), 428, 562. Sumpner, 71, 105, 298, 529, 804, 818, 879. Surmont (H.), 68. Sutherland, 530, 804. Swainson, 808. Swan, 801. Swarte (de), 492, 623. Swinburne, 252, 341, 499, 831. Sy, 338, 689, 769, 832, 864. Symington (J.), 808. Szarvady (G.), 128. T Tacchini (P.), 101, 217, 337, 491, 593, 654, 801. Taft, 294. ait, 175, 223, 298, 562, 922 à 281. Tannery (J.), 332, 333. Tarchanoff (prince Jean de), 98. Tarin (E.), 337. Tarnier, 133, 173, 293, 625. Tchebycheff, 806. Teissier, 2941. : Terby, 37, 246, 430, 530. Termier, 834. Terreil (A.), 3317. Terrier (E.), 245. Terrier (F.), 336. Tesla, 173. Tesar (J.), 628. Thaddaus Garbowski, 840. Thélohan, 68, 400, 102, 526, 527, 834, 865. Thiesen, 839. Thiroloix, 524, 655, 657, 722. Thiroloix (A.), 623. Tholozan, 688, 834. Fhomas, 804. Thomas (E.), 218. Thomson, 253, 341. Thompson (sir William). Voir Lord Kel- vin. Thompson (S. P.), 71, 105, 1174, 252, 299, 598, 529, 817. Thompson, 879. Thomson {G. Arthur), 421. Thomson (James), 222. Thomson (W.), 137. Thonion, 425. Thornton Lamb, 626. Thorpe, 36, 428, 819. Thoulet (J.), 386, 326, 721, 830. Thurston (R. H.), 588. Tilden (W.), 253. Tillo (A. de), 132, 170, 337, 800. Tilly (J- de), 299, 530. Tisserand (F.), 174, 564, 654, 761, 832. Tissié (Dr Ph.), 30. Fissier (L.), 456. Tite (G.), 439, 173, 423, 494, 592, Tizzoni, 392, 445, 775. Todaro; T4, Toll (de) 138. Tolomei, 116. Toni (de), 115. Topsent (E.), 248. Toqué, 33. Toupet, 657. Tourneux (F.), 339. Tournier (E.), 828. Touvenaint (L.), 472 à 483, 551 à 554. Trabut (L.), 65, 492. Traquair, 342, Traquaix, 530. Trasbot, 425, 866. Trattini, 302. Traube, 70. Trécul (A.), 172, 560. Treille (A.), 494. Trépied, 834. Tresse (A.), 337, 424, 864. Treub, 24. Treuil, 561. Triboulet, 339, Trillat, 103, 338, 425, 496, 561, 595. Trocmé, 292. Trolard (P.), 219. Tromholt (Sophus), 343. Jrotte, 878. Trotter, 428, 499. Trouessart, 34. Trousseau (A.), 355 à 363. Trouvé (G.), 655. Truszkowski (Th. von), 39. Trutat (Eug.), 590. Tscherning, 53, 527, 824 à 827. Triffier, 387, 494. Tuma (J.), 840. Tumlirz, 38, 223, 333, 840. Turchini, 172. Turner (Thomas), 562. Turner (W.), 223: Tutton, 36. Umani, 74. Umney (J.), 253. Unwin (W.C.), 843 à 851. V Vaillant (L.), 33, 338, 385, 595. Valette, 386. Vallier (E.), 769. Vallin, 133. Vallot (J.), 595. Vaquez, 35, 387. Varet (R.), 131, 623, 688, 832. Varigny (Henry de), 685. Vaschy, 492, 493, 168. Vaudin, 250. Vayssières (A), 521. Veillon, 33. Velly (V. H.), 459. Ventre (C.), 110. Verneuil, 241, 293, 294, 338, 425, 527, 624, 689, 690, 866. Verny (E.), 381. Vesque (J.), 218, 294. Vèzes (M.), 526, 560. Viala (P.), 156, 168, 383, 526, 527. Viallanes (H.), 101, 387, 492. Vianna (A.), 294. Viault, 525, 527. Vibert (P.), 829. Vibert (T.), 829. Vicaire, 35. Vicentini, 302, 392, 775. Vidal, 656, 802. Vidal (L.), 388. Vidal (R.), 560, 900 Vieille (P.), 493. Vignon (L.), 100, 168. Viguier (C.), 494. Villain (L.), 490. Ville (J.), 134, 339. Villemin (J. A.), 116. Villon (A. M.), 684. Vincent, 317, 625. Vincent (C.), 171. Vincent (H.), 294, 559, 776. Vines (S. H.), 498. Violle, 33, 68, 244, 247, 249, Virchow (P°), 869. Viron (L.), 101. Visser (L. E. O. de), 38. Vivet (L.), 650. Vivien (A.), 622. Vladesco (Demetrc), 456. Vogel, 33, 839. Voguë (D.), 527, Voisin (J.), 339. Volterra, 114. Vrics (Jan de), 131. Vuillemin (P.), 22 à 24, 832, 834. Ww Waals (J. D. von der), 175. Waelsch (E.), 137. Wagner (A.), 532. Wagner (H.), 334. Waymouth Reid, 808, 875. Walker (F. A.), 462. Walker (James), 621. Wallace Walker (J.), 626. Wallerant, 654. Wallich, 33. Weber, 463, 690. Weber (C. O.), 463. Weber (H.), 65, 332. 170, 218, 623, 688, Weber (H.F.), 763. Weber (M.), 105, 431. Wegscheider (R.), 254, 723, Weidel (H.), 562. Wecidenfeld, 628. Weinech (L.), 137, 720. Weinek, 724. Weiss, de Vienne, 723. Weiss (Dr G.), 98, 524. Weldon, 222. Welsch (J.), 493, 761. Wencik (L.), 532. Werigo, 254. Werner, 424. Werner (A.), 592. Werner (E.), 429. Wertheim (Dr), 391. Wertheimer, 291. West (Sir), 293. Westermack (E.), 620. | Western, 136. Wettstein (Richard von), 628. Weyl (Dr Th.), 72 Weyr (Emil), 39, 106, 138, 224, 301, 344, 431, 806, 840. Whipple, 428. Wien (W.), 839. Wiesner, 301, 628. Wild (H.), 217, 806. Willey (A.), 391. Williams, 803, 837. Williams (Miss), 71. Williams (W.), 529. Williamson, 222. Willot, 710. Wilson, 463. Wilson (Rév. A. S.), Wilson (Sir Daniel}, Wilson (E ve Wilson (J. A.), 463. ERRATA P. 169, au lieu de P. Appel, lire P. APPELL. Pair BAS — Sherrinhton, lire SHERRINGTON. P. 833, P. 626, —- P. Shrobant, lire P. SrrooBaxr. P. 835, 2209; — F. Bighio, lire F. Biczia. P. 840 PM: _ Koch, lire KLENCKE. P. 869, P. 802, = Zeuger, lire ZENGER. P. 869 255, 532, 563, 628, 124, 114, TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Wisselingh (C. van), 38. Witkowski (A. W.), 214. Witz (Aimé), 170, 419, 526, 617. Wolf (J.), 563. Wolf (Max), 331. Wolf (Rod.), 100. Wolf (Prof.), 391. Woloki (V.), 343. Woodhead (G. L.), 289. Worthington (A. M.), 135. Wright, 104, 459. Wurtz (R.), 35, 99, 336, 559. Wyndham R. Dunstan, 428, 429, 498, 626. Wynne, 626. Wyrouboff, 35, 295, 802, Wythe Smith, 528. 835, 863. Y Yeo (G. F.), 35. Young, 804. Yung (E.), 368. Z Zaloriecki, 431, Zambaco-Pacha, 33, 656, 802. Zanetti, 392, Zaroudnye, 801. Zeemann (P.), 772. Zeiller (R.). 561, 769. Zclinsky (N.), 466. Zenger, 172, 217, 248, 292, 293, 593, 802. Zielke, 386. Zindler (Konrad), 131. Zuco (Marino), 302. Zukal (Hugo), 138. Zune, 403, 171, 221, 596, 623, 657, Zuntz, 254, 621, 628. Lord Kelirn, lire Lorp KEzvix. O. Collandreau, lire O. CALLANDREAU. E. Gosserat, lire E. CossERAT. O. Tunlirz, lire A. TumLirz. Hariaut, lire LAISANT. Painwin, lire PAINvIN. 240 à 242, 581, à M étés à dr amiante ments élite. dant suis TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LES ARTICLES ORIGINAUX, LA BIBLIOGRAPHIE, LES CHRONIQUES ET LES NOUVELLES A Agaque pour la détermination du point à la mer...... . 163 Agaques. — Monographie. — Calculs usuels effectués au moyen des — ........-..-..................:..... 27 ACIDE AZOTHYDRIQUE. — La Synthèse de l'— .......... 56% ACIDE CAMPHORIQUE. — La constitution de l —....... 260 — La formule et la fonction de l — ................. 261 ACIDE DIMÉTHYLDIOXYGLUTARIQUE. — Sur les formes sté- Téo-isomériques de li"... "0." 166 ACIDE DIOXYACÉTIQUE. — Sur l — .................... 861 Acipe GLycoLiQuE. — Chaleur de combustion de l — .. 861 ACIDE GLYOXYLIQUE. — Sur l’— ou dioxyacétique...... 861 Acibe orrHoprospnoriQue.— Constitution du pyrogallol CRIE — eee ere RCE LE DE DO 862 ACIDE PENTONIQUE. — Sur un nouvel — .............. 215 ACIDE PHÉNOXYACRYLIQUE. — Sur l —................ 96 ACIDE PHÉNYLBROMOLACTIQUE. — Sur l— ............. 96 ACIDES TRIOXYGLUTARIQUES. — Sur les deux — ........ 215 Acrnomyces. — Contribution à l'étude de la morpholo- gie del —............... Jenéeéensesosoetoto rar 384 ACTIVITÉ PSYCHIQUE. — La température du cerveau en PENO AO Le aient musee un Munster 264 AÉRONAUTIQUE. — L'hydrogène et ses applications Be re seance DOS RE TOO Ur OT ICS AE 62 AÉROPLANES ET AÉROCAVES 255 AGRICULTURE PÉNÉTAIE. ....... seen et4129 — Annales de l'Ecole d — de Montpellier, ï. APP AS 457 AGroNoMIE. — Revue annuelle d’— .................. 789 AIR ATMOSPHÉRIQUE. — Sur la dilatation et la compres- EN EN RS SR seu PTE ALGEBRAISCHE ANALYSE. — Synopsis der hocheren ma- thematik I. Arithmetische und — ,...............,. 486 PATIGEBRAISOHE IZAITIEN 0 cela rc 332 ALGeBre. — Cours d'— supérieure.:.................. 716 ALGues. — Sur quelques — phéosporées parasites... 619 ALIMENTS. — Les — de première nécessité............. 433 ALLAITEMENT ARTIFICIEL. — De la valeur et des effets du Jait bouilli et du lait cru dans À — ................ 559 ALLEMAGNE. — Géologie de | — et des contrées limi- ÉTODHOSE rer eme cc OOo no due 764 AMAS STELLAIRES. — Observations (RPC Le 165 AMATEUR PHOTOGRAPHE. — Les travaux Fe soirde l’—, 589 AMAUROSE. — Sur l’ — ct l’état hypnotique............ 691 ANATNS EE Dr AE IA Nr à reine eee eee A) ANALYSE INFINITESIMAL. — Curso de— Calculo integral. 454 Ancèrres. — Les — et le développement de l'individu. ANNIVERSAIRE.— Le soixante-dixième — de M. Hermite. 841 ANNUAIRE GÉOLOGIQUE universel. — Revue de géologie ctderpaléontolonte Entre eee Le Eee 797 ANTHROPOLOGIE. — L’ — au Congrès de la British Asso- NOEL Eee ce dope dont ee booon en dobdasa on 705 —_ es courstdi— duMuseum-.-""."."--."tr- ru 463 ANTHROPOLOGIE CRIMINELLE. — Nouvelles recherches PRO PAS RE Ce ee EEE Pre 457 — Je Conerés.d— de Bruxelles... 658 AraAcanines. — Recherches sur les organes des sens et sur les systèmes tégumentaire, glandulaire et mus- culaireldes appendicestdes —.................. 421 1 Les chiffres gras renvoient aux articles originaux, ARITEMETISCHE. — Synopsis der hoeheren mathematik I. — und algebraische Analyse............... De OO ARTHRITE RHUMATOÏDE. — Traité du rhumatisme et de PEL OS ee M ne en 2m UNE ta 489 ARTILLERIE. — Le Progrès del —.:.....:........... 109 ASPHYXIE. — Da mort par le" "NT... 457 ASTRONOMIE. — Revue annuelle d’ — ................ . 52 ATTITUDES DU corps. — Les — comme méthode d’exa- men de diagnostic et de pronostic dans les maladies AC Ur ES RE TS eee relate ee 687 ATTRACTION. — Lecons sur l — et la fonction poten- telles ERP MT Re seen 521 AUDITION COLORÉE . = siens = eleale eaneirieinlemiate es nisneeele lea ie 831 B Bacizze. — Etudes chimiques sur le — de la tuberculose AVIAITE ae ee de delete DOCS MO AE 653 — Influence de la dessiccation sur le — du choléra... 245 Bacizze D'Egerra. — Note sur deux caractères différen- tiels entre le — et le Bacterium coli commune...... 337 BaciLLus coLI comMunis. — Le — comme agent hab'- tuel des péritonites d’origine intestinale........... 130 BacTÉRIES. — Les — et leurs produits................ 289 BacTéri0LOGIQUE. — Etude — de la broncho-pneumonie 336 ATECORIQUE EE. Gba TE 559 BACTERIUM COLI COMMUNE — De la présence fréquente du — dans les cadavres......... Denon annee 59 — Note sur deux caractères différentiels entre le bacille CHEMIN NES PE ME c cocstoa code énonce 336 — Note sur le rôle du — dans l'infection urinaire.. 130 Bazzons. — Les — et leur emploi à la guerre......... 62 Bératz. — Histoire naturelle agricole du gros et du HN scooeeDoubumoadso be duo HE SRSOOHE dBo ae "002 Brice. — Recherches bactériologiques sur la — humaine. £9 Bioocre. — La — au Congrès de la British Association. 708 BoMBE CALORIMÉTRIQUE. — Quelques observations nou- velles sur lemplon delta EN CU ie 862 BOTANIQUE. — Revue annuelle de — :.....,.%....... 367 BOTANIQUE MÉDICINALE. — Précis de — ............... 65 BourGroxs. — Recherches sur les — multiples......... 652 BRITISH ASSOCIATION. — La — au Congrès d'Edimbourg.. 693 Brrtisn cicADŒ. — Monograph of the — ,............ 509 BRoNCHO-PNEUMONIE. — Etude bactériologique dela —. 336 BULTESADERS VON Per RREenEN een For ere rrer-ecee 596 € CANON DE CAMPAGNE. — Le — de l’avenir....... ...... 454 CARBONYLES MÉTALLIQUES. — Les — ................. 533 CARBURES. — Sur l’oxydation des — .............. . M300 CARCINOMESACT CO COIDIES Re ee mea eCheele 629 Carte pu CrEz. — Bulletin du Comité international permanent pour l'exécution de la — .............. 127 Cépages. — Description des — principaux de la région méditerranéenne de la France.................... 399 CÉRÉBRO-SPINALE. — Contribution à l'étude de la fibre NÉLVOUSO I EEE TEE se ere Ce 2%4 CERVELET. — Le — et ses fonctions.................... 289 Cesropes. — Les idées actuelles sur ie développement et les relations des — et des Trématodes..,........ 184 29556 902 Caine Des puys. — Note sur AE le Mont-Dore et les éruphonsidelatlimaene 1. Fher-e ce 0056 CHAINES SUB-ALPINES. — Les — entre Digne et Gap. 167 CHALAZOGAMES. — Les — de M. Treub et l'évolution des DÉADÉTOP AMENER peer Et 22 CHALEUR ANIMALE. — La — et la respiration........... 457 CHALEUR DE coMgusrion de l’acide glycolique. . ....... 861 — de divers composés chlorés 0... 862 CHANVRE == Culte Au ere 129 CHAUDIÈRES À VAPEUR. — Cours de machines, t. II, AP SASCICULEE AS. PR Eee te D ME TE 617 CHAUDIÈRES SANS FOYER. — Compagnie continentale exploitation )des ER Pre EEE MR RTE re 101 CæaussurEs. — Recherches sur les cuirs employés aux ide l'armée seen eue cas 336 Cmimie. — Conférences de — données à la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève : La Constitution de l'acide camphorique........... 260 La formule et la fonction de l’acide camphorique.. 261 TaBriazines Mean AR ne 262 Sur quelques propriétés des métaux alcalino-terreux. 268 — Conférences de — faites au laboratoire de M. Frie- Del nn Are re A ÉTer e RE DAT 455 — Leçons de — à l'usage des élèves de mathématiques SPÉCIALES ae nt RE ee Tel Re ER Eee Ts ent 334 = LCOUTSIUe = Tree en RE NUE 455 ns DEC OS IAE NP RS AR Re nent See - 197 — La — au Congrés de la British Association. ....... 698 CuiMiE AGRICOLE. — Traité de —. Développement des vé- gétaux, terres arables, amendements et engrais .... 382 CHIMIE APPLIQUÉE. — Revue annuelle de —. La grande AT AUS UNE CNAB AE ee ee LL PLV 120 — Revue annuelle de —. Matières colorantes et pro- d'tS OP ATIQUES. serrer Pere its 123 CHIMIE BIOLOGIQUE. — Cours de chimie, t. IL, — ..... 28 CHIMIE INDUSTRIELLE. — Dictionnaire de —, t. er, fasci- (OUI CD PUS TO 1 GE Oo PO Ure 68% CHIMIE ORGANIQUE. — Cours de —, Aer fascicule....... "651 CHIMIE PRATIQUE. — Traité de chimie. III —, 3 et GEDAT ES RE ER PER ET Men te ne ST 420 Cæimie PURE. — Revue annuelle de — ..............,. 512 CHmuRGICALE. — Clinique —................ CHiRuRGIE. — Revue annuelle de — TE CaLcorures. — Sur les — d'acides basiques............ 455 Cxoc:—Surla duréedu "#4... TTL Cnocorar. — Guide pratique de la fabrication du — ... 829 Cnocéra. — Le —, ses causes et moyens de s’en pré- SONORE Re ei ep etre ee Ti e 766 — Le — (Histoire d’une épidémie). ...... .. ......., 766 — La défense de l'Europe contre le — ,.............. 156 Cipres. — Traité pratique des vins, —, vinaigres et spi- DE Spor anne CH Son enr de nee 589 CIEL. — Le) — pittoresque. .......7:.#.,....... REC Crimars. — Des — et des stations climatériques........ 65 CLINIQUE chirurgicale... an RS en 863 Coccnies. — Carcinomes et — ....................... 629 COEFFICIENT CRITIQUE. — À propos du — .............. 244 Cœur. — Les mouvements du — ct du sang chez les BTIMAUS 2m eat MN NE A Men de EN TS 718 Coroncrions, — Théorie générale des — et quelques- unes de leurs applications, t. I, {tr fascicule de la DÉC Ro AE COUR bac td er oc: Le 683 Composés cHLorés. — Chaleur de combustion de di- vers — 862 ComPo ; 456 Composés HALOÏDEs. — Etude de quelques produits nou- veaux obtenus par substitution dans les — des mé- talloïdes. — Etude de quelques combinaisons nou- velles du gaz ammoniac et de l'hydrogène phospor: avecrles— "des metalloides. 2eme 717 CONSTANTES RADIOMÉTRIQUES. — Les — .....,........ 93 CopxPpopes. — Les — du Boulonnais ; morphologie, em- bryologie tax0nonmie remet eee 718 CoPÉPODES LIBRES. — RÉCAEnCHES sur le système glan- dulaire et sur le système nerveux des — d’eau dOUCO retenir dr unes else der e 129 CoQUILLES MARINES. — Les — des côtes de France... 64 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES CrisraLLoGrapmie. — Cours de physique mathématique PUS A en re nb cote Don ne 21% Crusracés DÉcapopes. — Recherches anatomiques et physiologiques sur l'appareil excréteur des — .... 685 Cuirs. — Recherches sur les — employés aux chaus- SULESIdENL AIMÉ eee Too .. 336 D DÉLIRE CHRONIQUE. — Le — à évolution systématique... 422 Desuax. — Essai sur l’histoire naturelle du — des Pyré- HÉeS A eererroumemr ce ee case CU IPC DEEE 590 Dérente variable de la vapeur. — Dispositifs qui la pro- duisents etre tierce ete ec ee Roses 796 DIABÈTE PANCRÉATIQUE. — Le — 524 Dioramas. — Essai sur l’histoire des panoramas et nn ou De Cm AE EE oi octo one 454 DirpuréRie. — La — et son traitement par le sérum d’a- nimaux immunisés... .. 782 DipréRocarpies. — Recherches sur les — . 717 DISTRIBUTEURS DE VAPEUR. — Tiroirs et — ..... ete 381 DorcniNTA MIRABILIS. — La... 339 Dourixe. — Sur la tuberculose etla — .,.......... 1010 DYNAMIQUE GRAPHIQUE. —- Essai de —, La nouvelle mé- thode de M. Léauté pour l'étude du mouvement troublées moteurs. eee share 80e E Eau. — Sur la composition de l— ................. 96 Eaux PorABLEs. — Les — ct la méthode hydrotimé- trique Hood ouioui gode cc » -151 Écore n’AcricuLTuRE. — Annales de l— de Montpel- lier, t. Vi . 451 E. — Montagnes de l— Mt Ececrricrré. — Traité d’'— à l'usage des ingénieurs et des CONSITUCIEULS eee eee ET CE 61 — Lecons sur l— et le magnétisme : I. Les conducteurs à l’état permanent......... 05 IT. Les aimants et les corps diélectriques.......... 382 III. Les courants linéaires. .... 716 — Sur une expérience d’—........... ee HO Écecrricrré. — Introduction à la théorie mathématique del=fet duvmamneétisme 2-2." ere 121 —L—danslanatures..s nu ere eee 166 — Distribution de l— par installations isolées. ...... 487 — L'-. Exposé succinet des lois fondamentales de l’— ct de ses applications........................... 1829 ÉLECTRICITÉ ATMOSPHÉRIQUE. — L’— Are partie : Les observations récentes et les théories actuelles 2e émane rene IN CEE 568 2% partie : Les yariations de sens et de grandeur du potentiel}... eue eet does 605 ÉLECTRICITÉ INDUSTRIELLE . . . ..... Ano0o ado gone daté os 618 — Piles, accumulateurs, dynamos, transformateurs ... 420 ÉLECTRICITÉ PRATIQUE. — Problèmes d'— ............. 651 ÉLecrroPæysioLocre. — Technique d'— Sr TT 524 Ezripric ruNcrions: — The applications of — ......... 828 ELLIPrISCHE FUNCTIONEN und algebraische Zahlen...... 332 ENCYCLOPÉDIE SCIENTIFIQUE DES AIDE-MÉMOIRE, — L'— . 34% Exposcoplie viscéRALE. — Les progrès récents de l— .. 4141 ENERGIE. — Sadi-Carnot et la science de l'— ..,.... 465 — L’— dans le spectre 12 ENSEIGNEMENT CHIMIQUE. — Les laboratoires d'— pri- Main AMP AISNE PEER UT RCE Ce nee 88 Éprr DO OO do CEA d'abus Po ed en oc. 687 ÉQUATION DIFFÉRENTIELLE. — À propos de quelques tra- vaux sur l'— du premier ordre..." "0% 24 ÉQUATION LINÉAIRE. — Sur le problème de Dirichlet et son extension au cas de l'— de second ordre...... 588 ÉquarTions. — Sur certains système d’— aux dérivées partielles généralisant les — de la théorie des fonc- tions d’une variation complexe...... FE CONT UE 559 ÉQUATIONS DIFFÉRENTIELLES. — Sur des — linéaires transformées en elles-mêmes par un changement de fonction et desvariable "2er rer ae D 0 683 obama. ÉQUATIONS SIMULTANÉES. — Sur le nombre de racines COMMUNES AIDIUSIEUNRS SN e sector D ÉQUIVALENT MÉCANIQUE. — Sur la détermination de l— dela CAlorIe RE Emotion sara scie terasse ESSAIS DYNAMOMÉTRIQUES sur le tirage des houes, grap- à PRÉNOM ubeneoc ose oo de bbe bep To0Ee Érar HYPNOTIQUE. — Sur l’amaurose et l’— ÉvoLUuTION. — L’— du sexe........................... == Conférences Sur LR nee GR Ru rate etes mans Exercice. — De l’— chez les adultes........,......... EXPLORATION SOUS-OCÉANIQUE. — Des procédés employés par les missions d'— et de la technique des pêche- ries marines à l'Exposition universelle de 4889 .... EXTIRPATION DE L’UrÉRUS. — De l’— par la voie sa- CRÉPIN Sienne eme nee dot nine des F FAMILLE PRIMITIVE. — La —, ses origines et son déve- loppementreneremeureete ei meer e ei eee: Fauxe de la Normandie. Fasc. II. Oiseaux............ FéconpatioN. — Les phénomènes intimes de la — ... Fer. — La pénétration et la répartition du — dans l'or- ganisme animal............. Damon t00qcroiounnont FLeurs pes PYRÉNÉES. — Les — et leur fécondation par les insectes. Al EC TR ee Do ete FLulves. — Sur le Doint critique et l'équation des — —.. Foie. — Le —, laboratoire de réserve alimentaire. .... FoncrioN POTENTIELLE, — Lecons sur l'attraction et A en eee ei ae near à Foxcrions. — Essai sur l'étude des — données par leur développement deuTaylonsener ere eee FoNCTIONS ELLIPTIQUES. — Traité des — et de leurs applications, 3° partie, fragments. ........,....... — Sur une expression nouvelle des — par le quotient JeSTdeUx SÉTIES eee -crePr see oBSab 0 5nsa roc 5 FoncrIoNs LUMINEUSES. — Manuel pratique des —..... FONCTIONS PÉRIODIQUES. — Sur les — de deux variables. FonTe. — Note sur la fabrication de la — aux Etats- SP A here Co race : Forces PHYSIQUES. — Complément à l'essai sur la syn- TROT ES fo0on2080048 ne ei tel ten Vue ForRMESs D'ÉQUILIBRE. — Sur les — d'une masse fluide en HANON oo sndo mes sondoccesntonccocenvans ane FRACTIONS RATIONNELLES. — Sur la représentation ap- prochée d’une fonction par des —................. FRANGES D’INTERFÉRENCE. — Théorie de la visibilité et de l'orientation des —....... DR ONE CAT D UC US ô & GéoGraPmiE. — Le Congrès de la British Association. GÉDIOR PIE Reese er Le Ce LL (EOGRAPHISCHES JahrDUChS 26, nes e:rc-Le Géooaie. — Le Congrès de la British Association, — et CÉDETAPRIE = MR A TE. ce de MN rRevierannuelle de EE ee PU — Annuaire géologique universel. Revue de — et de RATÉONTOIOPIS A een ee Dr : — de l'Allemagne et des contrées limitrophes........ GÉOLOGIE EXPÉRIMENTALE. — Les eaux de l’Arve, — Recherches de — sur l'érosion et le transport dans les rivières torrentielles ayant des afiluents gla- CIDIT ES Vers Pers paie aa een este nets enr NC Le 2e NU Géomérrie. — Traité de — conforme aux programmes OPHGIEIR ES ananas ele TE EP Te GÉOMÉTRIES NON EUCLIDIENNES, — Sur les — ......,... SE ee onde cameenono top or one oo dos GITES MINÉRAUX. — Etude des — de la France et bassin houiller et permien de Brive. I. Stratigra- PRIE rem ar ineebe ice rene GLYCÉRINE. — Sur quelques dérivés de la — GRAISSAGE des machines ct du matériel roulant des OU ME oonsvorbabcog dos eenAnoembouse Grisou, — Recherche et dosage du — et de j’oxyde de 555 166 333 691 421 685 65 384 336 620 620 539 225 700 33 903 CATDONE eee ae NE Ces cale eee 851 GyYNÉcoLociE. — Séméiologie génitale.................. 830 H HERNIES. — Cure radicale des —, avec une étude sta- Wshquerde 215 OPÉTALONS- een er 686 HÉMOACIDIMEDRIE eee ent te deb 719 HÉMOATGA DIMEDRIE es ae eee eeic ce anis 719 Histoire MÉDicALE. — Fragments d’—. Bretonneau et HÉMILE Ro bone tro deeu entire dio noob ne 672 Homme. — La place de l— dans la nature..... 216 Hoprraz Samr-Louis. — A propos des incidents ‘de RE CR dou due on a PAQUET ne 344 HypRoGÈNE. — L’— et ses applications en aéronautique. 62 HyproNÉPHROSE. — De l’— intermittente............. 245 Hyciène. — Éléments d'— 422 — Revue annuelle d’— 188 HYGIÈNE SOCIALE ; son dut, ses principes, ses méthodes, 45 HymixoréPinés. — Histoire zoologique et médicale des téniadés du genre —..:..... ann Ten e)s PHODBoN 559 HYPNOTISME, suggestion et lecture des pensées. . or nUb HysrerecromiE. — Quelques faits pour servir à la dis- cussion sur le traitement des inflammations des annexes par la laparatomie ou P— ............... 130 I IMAGES DE L'œIL. — Les sept — humain............... 824 Inaupr, — Examen physiologique du calculateur — ... 417 — Examen psychologique du calculateur — ....,.... 414 INFECTION URINAIRE. — Note sur le rôle du bactérium COL COMMUNSTANS EEE Terre 130 INFLAMMATION DES ANNEXES. — Quelques faits pour servir à la discussion sur le traitement des — par la laparatomie ou l’hysterectomie................. 130 INGÉNIEUR-ÉLECTRICIEN. — Aide-mémoire de l— ....... 128 Insrirur Sozway.— Le programme de l—........... 64 INVOLUCRE DES composées. — Recherches anatomiques et physiologiques sur les bractées de l'— ............ 24% IRRITABILITÉ. — La sensibilité et l— ..,.........,... 718 J Jupiter. — Découverte d’un cinquième satellite do — .. 676 L Lagoraroires. — Méthode de travail pour les — de Chimie OrPAMIQUE Recette Pepe eee 164 Lacs. — L'étude des — dans les Alpes et le Jura fran- GaiS esse seeds semestres 2338 — Atlas des — français ares pentes nee steel cle 829 Larr. — De la valeur et des effets du — bouilli et du — cru dans l'allaitement artificiel.............. : 559 LapARATOMIE. — Quelques faits pour servir à la Here sion sur le traitement des inflammations des annexes par la — oul'hysterectomie................ 130 Lecture DES PENSÉES. — Hypnotisme, suggestion et —. 98 Leucocyres. — Recherches sur la sensibilité des — à AO 218864 oo cb c oo és eo on 509 Limacne. — Note surla chaine des Puys, le Mont- Dore et les éruptions de la — ............ aooberanonac 456 Lumière, — Théorie électro-magnétique de la — ...... 333 LUMIÈRE À INCANDESCENCE. — Théorie générale de la —. 763 LUMIÈRE ÉLECTRIQUE. — Manuel pratique de linstalla- tion de la —. Stations centrales.....,...,........ . 166 M Macxixe A vapeur. — Le perfectionnement « dernier étfnal)delN re 22 1e re ein: Culotte 89 — Étude calorimétrique de la —.................... »21 — Manuel de la — pour les ingénieurs et les Ecoles pratiques, 2° partie. Dessin, construction, opération. 553 MacnérisMe. — Lecons sur l'électricité et le — : I. Les conducteurs à l’état permanent............. 95 904 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES II. Les aimants et les corps diélectriques.......... 382 ITLes'courants linéaires. ............... Gonao le) — Introduction à la théorie mathématique de l’électri- CÉSAR NÉE AS OA OC DU UT 000 Sono dn MP Macxérisme rERRESTRE. — Les phénomènes du — .. ... 267 MAIN GAuoHE. — La question de la — ................ 63 MALADIES DEIL'ESPRIT, — Les —...............-.-.e 216 Mazanres pu cœur. — Les attitudes du corps comme méthode d’examen de diagnostic et de pronostic TADSNES pee ere r eee ere en ee Vs eue 687 MALADIES DU FOIE. — Traité des — ................... 290 MALDEINE — More cliente ee eee 815 MamwmirèrEes. — Observations sur les — du Thibet..... 670 -— La découverte de — du type australien dans l’Amé- LIQUENADISU Ar NN Me De ARE NRA aol MaxreuLarioxs de zoologie. Guide pour les travaux pra- tiques de dissection des animaux vertébrés........ 4869 MARIAGE HUMAIN. — Histoire du —..................0° 620 Masrium. — Découverte d’un nouvel élément : le — ... 483 Mécanique AppLiquée..— Les récents progrès de la - —. 843 Mécanique cécesre. — Les méthodes nouvelles dela —. 649 Mévecine. = Revue annuelle de — ........ PA done 855 MÉDECINE véréRINAIRE. — Traité de microbiologie appli- quéera arr tren ele cree ee te ei 0S Mérinrexxe. — Les anciennes et la nouvelle mesures de IE de Franco See ri ne AO 174 MÉriDreNs DE L'œiz. — Les — et les jugements sur la diveéctionidestübiets en PRE Er er 114 MERS STE On ES Ne nn en 407 MÉTAUx ALCALINO-TERREUX. — Sur quelques propriétés des A ne seu ae dus Deer U een ee 263 MÉrTÉOROLOGIE. — Analule Institutului — al Biron ANT Re nan en nn Cd se RMS di me at 684 Mërrire. — Des différents types de —. Leur traitement. 621 MicrogloLocte. — La — en Australie. — Etudes d’hy- giéne et de pathologie comparée poursuivies à l’Ins- tint Pasteur de Sydney... cer 00. Hi — Traité de — appliquée à la médecine vétérinaire... 863 Micro-oRGANISMES thermophiles et thermogènes. — Leur culture naturelle dans le sol................. 410 MiNÉRALOGIE. — Les méthodes de synthèse en — ..... 62 MOLLUSQUES Les ele eut 619 MONTAGNES DE L’ECOSSE. — Les — ................... 817 Monr-Dore. — Note sur la chaîne des Puys, Je — et lestéruptons dela lamapnee.---"---."6e. .... 456 Morr. — Essai surlawie let la — ................... 764 MorveretiMalleinestte sien et meer etes taie 815 Moteurs À Gaz. — Traité théorique et pratique des —. 419 MOUVEMENT TROUBLÉ DES MOTEURS. — Essai de dyna- mique graphique. — La nouvelle méthode de M: Léauté pour l'étude du — ................2.. . 863 MOuvEMENTS DANS LES Gaz. — Les projectiles pris au vol —. Méthode pour l'étude des — ............... 661 Mucéninées. — Recherches sur le développement de QUELQUES ET PETER RCE te eee . 685 N NaviRe. — Théorie du — II. Dynamique du — ...... 650 NÉBULEUSES. — Observations de — et d’amas stellaires. 465 NÉMaAPoDEs. — Comparaison de l’orogénèse et de la spermatogénèse chez les — ................. ; 97 NOMENCLATURE CHIMIQUE. — Le Congrès international CERTES D AFS ee AO MT D an AO ia = auiConeres ele PAU. nn RTE PEER 597 NomoGraPxie. — Calculs usuels effectués au moyen des abaques CAD or bn STD En D PUR TRS CON 27 NOTICES NÉCROLOGIQUES. — J. S. Stas....... ......... 40 — x ACROSS TP ET CEA NE RS ER 75 = se ee OST — A. W. von in et — Contre-amiral IMOUCREZ. ee res 563 — JPA reine eee . aus d'A Re 176 Nuaces, — Les — nocturnes Manet OA dE Len: : 787 ( OBJECTIF PHOTOGRAPHIQUE. — L°— ......,....,......, 333 OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES. — Recherches sur l’é- quation personnelle dans les — de passages....... 555 OBSERVATOIRE DE PARIS. — Rapport annuel sur l'état de l — pour l'année 1891......... eee TRADE OBSERVATOIRE DU Pic DU Min. — Notes sur un séjour A RD DE nb ee en . 88 Din — Sur les minima d — perceptibles 2006000 A0 . 224 — Sur les minima d’ — perceptibles................. 303 Œrz. —L’ — considéré comme un élément de diagnos- 1 AO SOS ENS DO Lo anne ET De O0 2 . 355 Oiseaux. — Faune de la Normandie II. — ........... 620 — Le travail mécanique des — dans la sustension SMPIE eNMAITICALME TEE er e-eee Dee ous yep2 OxGuLÉs. — Les — aberrants des terrains tertiaires et pléistocènes de l'Amérique du Sud............... . 565 OPHTALMOLOGIE. — Manuel d’ — ..................... 621 OpPTiQuE. — Traité d’ — t. IL, der fascicule. see 0 ED) OPTIQUE PHOTOGRAPHIQUE. — Notions nécessaires aux photographes amateurs. — Etude de l'objectif. — Applications, ins enracenileeaeee es ERA OREILLE. — Guide Re pour le traitement des ma- ladies de l — Ddbaaadetéon dont sen Store Ib ORGANISCHEN CHEMIE. — Handbuch des te ere MOLS ORGANISMES PÉLAGIQUES. — Les non ‘d'existence des rite en ee ee ne DE LE 72 OROGÉNIQUES. — Les récents progrès de nos connais- SANCES eee Se Ce APR RE CCE 5 Orire. — Note sur deux cas ro — moyenne purulente. … 457 OxYDE DE CARBONE. — Recherche et dosage du grisou et Ce EE RS D A oc O UE de 851 OxYDE DE ziNc. — Sur le Caractère de la ne ‘émise par l — incandescent. DO re neo eoococe 288 OxycËNEe. — Le magnétisme de l — ................. . 4108 P PALÉONTOLOGIE. — Annuaire géologique universel. Re- vue de géologie et de — ......... SPAS dons 0 dan ZEN PANORAMAS. — Essai sur Midtoire des — a des diora- MAS allais nte sie lee 2 ei nee lee ere EE 45% PARIS YPORTADE | MERE Eee cisieaeten es cena CI MIE .… 243 PATHOLOGIE générale infectieuse. 4...."".."-4-." 31 PÊÈCHE FRANÇAISE. — L'organisation de DA — sur IE côte Au\SahAr A 2 me ie ee mere eo EE 729 PÊCHERIES MARINES. — Des procédés d'études employés par les missions d’exploration sous-océanique et de la technique des — à l’Exposition universelle de HITS oom en nc TA 0 E ee eee BE Met eur 384 PÉRIODE MENSTRUELLE. — La femme pendant la— :..12099 PÉRironITES. — Le bacillus coli communis comme agent habituel des — d’origine intestinale. ............ 1 AN) PERSONNALITÉ. — Les altérations dedans te OR PHANÉROGAMES. — Les Chalazogames de M. Treub etl'é- volution des 5... rer ee 22 Puospnites. — Sur les — et pyrophosphites........... 62 PHOTOGRAPHIE CÉLESTE. — La —, Méthodes optiques. — Application à l’étude du soleil, de la lune et des ÉtollES rene 2e ae etai vrais men nn Me ee .. 845 PHOTOGRAPHIE DES COULEURS, — Da —. Son principe, ses progrès lesplus/récents-. #72 ncee 41 —La —/suralbumine tree em ete 724 — Perfectionnement de la méthode pour obtenir la—. 304 PHOTOGRAPHIQUE. — L’année — 1891.....:............ 333 PuysioLocie. — Revue annuelle de — ......... ET de 577 — Le 2e Congrès international de — ................ 734 Paysique. — Revue annuelle de — ................... 446 — Manuel de... 7.2 DD IE doc Gcoons he — Cours de — II, 2° partie. Optique géométrique.... 244 — Traité de — à l’usage des élèves de mathématiques élémentaires see eee Ce CE LEE 128 — La — au Congrès de la British Association. ...... . 694 PuyYsiQuE GÉNÉRALE. — Lecons de — t. III. Acous- tique. Optique et Electro-optique.......... ter * 1096 ad nntadines ET n TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES 905 PHYSIQUE MATHÉMATIQUE. — Cours de — et de Cristallo- CLApRIe eee FOTO Trabant Joue Gdotor . 214 — Cours de —, Thermodynamique ob bp ne di 861 BINACONES SUR Iles ME ee cm eacreremeet . 455 PLacenrA niscoïibe. — Le — d’après les travaux de MAMAN SD uvalR ERP R eee -nreer er teee 503 PLANTES COMESTIBLES. — Le potager d’un curieux. His- toire, culture et usages de 200 — peu connues CHANGONNUPS RER Es erE een eRecmes ét HN PNEUMECTOMIE. — Ceci ‘da poumon.Pneumonie, — 7198 PNEUMOGASTRIQUE. — Du nerf — (physiologie normale et pathologique) ....... seceondaobroicéotono as 620 — Sur le — des Oiseaux. Physiologie comparée...... 652 PNEuMONIE. — Chirurgie du poumon.Pneumectomie, — 798 Point cRIriQuE. — Sur le — et l'équation des fluides... 455 Poison TuBERCULEUx. — Contribution à l’étude du —.,. 99 POLARISATION, — Sur une théorie de la — rotatoire.... 548 Porro-Novo. — La région de — ........... Ro one Ee 107 Poumon. — Chirurgie du —. Pneumonie, Pneumec- HOT roc noce so bo RE en cette 798 Pourripié. — Monographie du — des vignes et des arbres fruitiers........... TD O DM SO DCE GO 0 168 — Le — des vignes et des arbres fruitiers d'aprés MAAVaAlA PR area e ns NN ra sien ae 156 PRESSION OSMOTIQUE. — Sur la — ........... 20 20) PRODUCTION pu FROID, — La — et ses récentes applic: 1- DONS en ie farci tnt ae cn 635 PRODUITS CHIMIQUES. — Vade-mecum du fabricant CEE none ant bonne TO n EE CEIUS 618 Proseoron ne MErcAToR. — Généralisation de la — à l'aide d'instruments électriques................... 692 ProTopLAsMA. — Quelques problèmes de reproduction. — Etude comparative de la gamétogénie, de la sé- nescence et du rajeunissement du — ............ . 590 PROVINCES D'ALICANTE ET DE VALENCE, — Recherches géologiques sur les terrains secondaires et tertiaires CESSER See one eee cree ere 12100 Psycnrarrie. — Nouvelles recherches de — et d'anthro- polomiefcrimmeles 2renemreteceee-reeer rc Cire 457 Psyconorocte. — Le Congrès international de — expé- RE ENT nan ado e nou 20e — Hygiène de la — PyroGaAzLoz. — Constitution du — et de l’acide ortho- DEOSPROrIQUE Ernesto reectie u 862 PyRoPHOSPHITES. — Sur les phosphites et les — ... 62 © QUADRATURE DU CERCLE. — Histoire du problème de la — depuis les temps les plus reculés jusqu’à nos DURS ne ere ce REC 828 R Race DÉCLARÉE. — La guérison de la — Expériences de MM Tizzont et Centanni::.. 24... 445 Rare. — Recherches sur le développement de la — chez ESDOISSONS ERA EE Peer een ee CET 29 RÉACTIONS PSYCHO-MOTRICES. — Loi générale des — ... 336 RÉIMPLANTATIONS DENTAIRES. — Modifications à la tech- TOO COS Santos phobcodemobenanes 216 RéPerrtoiRe bibliographique des sciences mathéma- tiques (Classification adoptée pour le).............. 824 Rerropucrion. — Quelques problèmes de —; étude com- parative de la gamétogénie, de la sénescence et du rajeunissement du protoplasma................... 590 RÉSISTANCE DES MATÉRIAUX. « « + » se + «a se ee eee a one PEA RESsPIRATION. — La chaleur animale etla— ......,. .. 457 Rèves. — Les —. Physiologie et Pathologie........... 30 Revue. — Supplément de la — REVUE ANNUELLE d'Astronomie ë — delCHimienppliquée.--e-H--Cr-e--ErrRr EEE = CHE dodomeebooeocEnoconiianeanconuedeun duc = Co No er co oodoaoteete de PHYSIQUE CRE re. — de Chimie pure — de Physiologie de lGÉCIORTe ER ner ner clones — de Chirurgie — d’Agronomie.. = de MÉdECINE RS EN ERPINENER ER ee , RHUMATISME. — Traité du — et de l’arthrite rhuma- 489 RoTATION DES corps. — Nouvelle théorie élémentaire de 12 = Gyroscope, toupie, BIC... .. Mr... 486 S SANG. — Traité sur les mouvements du cœur et du — cherilesanttausees eee NE net Lien 718 SATELLITE DE JUPITER. -- Découverte d’un cinquième —, 676 SCIENCES NATURELLES. — Les — et l’éducation......... 619 SCIENCES EXPÉRIMENTALES. — Les — .................. 829 SEICHES. — Essais théoriques sur les — .............. 95 SENSIBILITÉ. — La — et l’irritabilité.................. 718 SEXUALITÉ. — Les éléments de la — chez les animaux.. 442 SMITHSONIAN INSTITUTION ANNUAL REPORT... 245 SOLUTIONS SALINES. — Recherches sur les — ......... 456 SOLUTIONS SATURÉES. — Etude expérimentale des — .. 314 SPECTRE. — J11éN0r210 dans le "#4... 0 12 SPECTRE D’ABSORPTION. — Sur le — de quelques sels de Cuivre en solUHON a UEUSC eee ce De 258 — des solutions très étendues..... . 288 SPIRITUEUX: — Traité pratique des vins, HEES, vi- Dale r es et here nee CE nn LL 589 STAPHYLOCOCCUS. — Sur la présence du — dans un an- CID ÉOYELTOSÉOMYEIO rer ee-ee re n noe 384 SUGGESTION. — Hypnotisme, — ct lecture des pensées. 98 SUSTENSION. — Le travail mécanique des oiseaux dans la Ssimplerentaricalme ere ere en 322 SYPHILIOGRAPHIE. — Le Dualisme en —. Ricord et Bas- SPEARS EE reste M re AL Ne EEE Re ie ELA 305 SypxiLis, — Note sur le traitement de la — en Alle- ma Tele EN PAUTICREERE SE eeee eee UE 130 SYSTÈMES DE MESURE. — Introduction à l'étude des — VON OÙ JO CE Luna Acocc octo oose Jéve HlAX) T TECHNIQUE INSTRUMENTALE concernant les sciences mé- dicales Arret he ONE DO E SRSUEIS 130 TEMPÉRATURE. — Influence de la — sur la couleur des RME oo pci oonnodo quete ee ne Cet 288 TEMPÉRATURE DU CERVEAU. — La — en relation avec Lac UVATE DST CQUE NAME RE EE ER EN 264 THERMODYNAMIQUE à l’usage des ingénieurs. .......... 556 — Cours de physique mathématique. — ........,.. (801 TuerMoMÈTRES. — Sur la construction des — de pla- LES OS DDASS SRE Ce IE TI ER 61 Trrorrs et distributeurs de vapeur...............,.... 381 TRANSFORMISME. — Darwin et ses Précurscurs francais. Etude sur le — 619 TRAVAIL MÉCANIQUE. — Le — des oiseaux dans la sus- LeUTONISMPIe en AITICAINE EPP Re 822 TRAVAUX MATHÉMATIQUES. — À propos de quelques TÉCEDES Se ee RE ee M nd er 725 TRAVAUX PRATIQUES. — Guide des — de physique à la Faculté de médecine de Montpellier............... 98 TRÉMAroDES. — Les idées actuelles sur le développe- ment des cestodes et des —"...,...... lot DRTAZINE ce Ta Re ee ti re ne . 262 TROUBLES INTELLECTUELS. — Étude sur les — liés aux lésions circonscrites du cerveau ................... 168 TuBERCULINE. — La —, agent révélateur de la tubercu- lose chez les Bovidés......... ban on SE OT D 601 TuBERCULOSE. — Les traitements de la — dans l’état actuelldetlatscrence tete UN 65 — Sur la — ct la Dourine....: 16 LUBERGULOSTS nt Cana ne ee MAIS EEE LR 384 906 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ————————————————"—"—…"—"—"—"…"…"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—…—…—…—…—…—…—"…—"—"—"—"…"—…"—…"—…—"—"…"—"—"——.".…"—— — Vie. — Essai sur la — etla mort ...........,......... 764 U —\La— au sein des mord 2 CC eeepc 52% — Leproblémelde la nee Tree 862 Uxirés. — Sur une nouvelle détermination du rapport VIGNES AMÉRICAINES. — Les —; adaptations, culture, entre les — électromagnétiques et électrostatiques. 651 greffage, pépiniéres................. LA dE © à 383 UréImDEs. — Recherches sur les — .................... 487 | Vixaicres. — Traité pratique des vins, cidres, — et SPITIÉUGUX 25e EUR cer eee El 589 Y Vins. '— Analyse des =." 7.2... ec 522 — Traité pratique des —, cidres, vinaigres et spiri= VALENCE. -— Sur les variations de la — en chimie...... 499 HO OHbnd nono nu AI oeGab end e. . 589 VALENCES ATOMIQUES. — La loi des — ............,... 393 | Viresse pes TRAINS. — Le contrôle de la — de chemins VAPORISATION. — De la puissance de — des chaudières. 240 dé fers -2emareseremenet ere ete . 707 VeLay. — Description géologique du — ............... 488 | Viricucrure. — Cours complet de — ...........:..... 289 VEerTÉBRÉs. — Les — ont-ils eu pour ancêtres des Ara- Voix. — Physiologie de la —. Dilatation de la trachée CHDIUES ane ee unie ion ete eee Lee 215 cheziles'chantenrs/"227" ©." Pire 98 — Manipulations de Zoologie. Guide pour les travaux pratiques de dissection. Animaux — .............. 489 Z VIANDE SAINE. — La —. Moyens de la reconnaître et de PADPréCIEr seen ee een een core 490 | ZooLocrE. — Revue annuelle de....................... 278 VIBRATIONS LUMINEUSES. — Nouvelle analyse des — Manipulations de —. Guide pour les travaux prati- basée sur la mécanique de l'élasticité et conduisant ques de dissection. Animaux vertébrés............. 489 logiquement à l'explication de tous les phénomènes — Sur la — à la British Association................. 807 defl'ophique--co--p-cr-2-epricetcreeet en ee 650 | Zoorocique. — Le congrès — de Moscou............. 677 PARIS. — IMPRIMERIE F. LEVÉ, RUE CASSETTE, 11.