.jiiiiii: J'y /- M N" DORDRE 349. THÈSES [?r,H'^AYER^, PRESENTEES A LA. FACULTE DES SCIENCES DE PARIS OBTENIR LE GRADE DE DOCTEUR ÈS-SCIENCES NATURELLES ^ M. ARMAND SABATIER -Agrégti (Sectidn d'Anatomie et Physiologie) et aucieu Chef des Travaux Analomique» de la Faculté de médeciue de Montpellier ; Membre de l'Académie des Scieuces et Lettres de Montpellier; Lauréat et Membre correspondant de la Société aoatomique de Paris ; Chevalier de ta Légion d'Honneur. Ire THÈSE. — Éti:DES sur le ObUR et L* GlRCUL.ilION CENTRALE DANS LA SÉRIE DES VERTÉBRÉS. 2uie THÈSE. — Propositions de Zoologie, de Botanique et de Géologie données par la Fajultb. sootenneg le/>yjiuln 11(73 devani la cominlsitlon d'Kxamen. MM. MILNE EDWARDS, Président. DUGHARTRE HÉBERT , Examinateu7-i MONTPELLIER TYPOGRAPHIE ET LITHOGRAPHIE BOEHM ET FILS imprimeurs de l'académie des sc;ièncbs et lettres DE la revue des sciences naturelles ; éditeurs du MONTPELLIER MÉDICAL 1873 vé^' ACADEMIE DE PARIS. FACULTÉ DES SCIENCES DE PARIS. MM. Doyen MILNE EDWARDS, Prot'essr. Zoologie, Auatomie, Physio- logie comparée. ( DUMAS. Professeurs honoraires.. J „.^.„„ ' BALAKD. DELAFOSSE Minéralogie. I CHASLES Géométrie sup>rieure. LE VERRIER Astronomie. P. DESAINS Physique. LIOUVILLE Mécanique rationnelle. PUISEUX Astronomie. HÉBERT Géologie. DUCHARTRE Botanique. JAMIN Physique. SERRET Calcul différenti.l et intégral . H. S'e-CLAIRE DE VIL LE... Chimie. PASTEUR Chimie. DE LACAZE-DUTHIERS. . . Anatomie , Phy^ologie com- parée, Zoologs. BERT Physiologie. HERMITE Algèbre supérieire. BRIOT Calcul des probaiilités, Phy- sique mathémaique. BOUQUET Mécanique physime et expé- rimentale. Professeurs. Agrégés . BERTRAND. .1. VIEILLE.. iSoiences mathémaiques. ' PELIGOT Sciences physique . Secrétaire PHILIPPON. A MESSIEURS MILNE EDWARDS ET DE QUATREFAGES, Membres de l'Institut. Armand SABATIER. A MESSIEURS LES PROFESSEIRS BOUISSON, MARTINS, CoiTespûiidauts de l'iiistitul; BENOIT, MOITESSIER, ROUGET. A MESSIEURS JOURDAI\i, E. PLANCHON, DE ROUVILLE, Professeurs à la Faculté des sciences de Montpellier. A MES AMIS ET AiNCIENS CONDISCIPLES Gustave PLANCHON, Prolesseur à lÉoole Supérieure .le Pharmacie do Pans LORTET , Profes, que Biscbofflui a également donné (PL VII, /î^. 1), (PI. VIII,A^- L^), (PI. IX, fig. 1, 2, 3) , (PI. XVIII, fig. 4). Ouoi(iue les vaisseaux soient fortement unis entre eux par une enveloppe commune de tissu fibreux éiasti(]uo, chacun n'en conserve pas moins ses caractères propres et ses dispositions particulières. C'est ainsi que, tandis que l'aorte droite a 'des parois fort épaisses, résistantes, très-puissantes, l'artère pulmonaire pos- sède des parois plus minces, moins consistantes, s'affaissant et se laissant plisser avec facilité. L'aorte gauche présente uneconslitutionintermédiaire à celle de ces deux vaisseaux. L'artère pulmonaire a son orifice en avant des deux orifices aortiques, dans l'angle que forment antérieurement ces deux orifices adossés, mais un peu vers la gauche. Cet orifice pulmonaire est par conséquent en avant et un peu à gauche de l'orifice de l'aorte gauche et directement en avant de l'orifice de l'aorte droite C (PI. VIII, fig. l, 2), C (PL IX, fig. 3), (PL XVI, fig. 4). De son point d'origine, l'artère pulmonaire se porte, en occupant la face antérieure du bulbe, très-obliquement en haut, à gauche et en arrière. Elle contourne ainsi le faisceau commun des deux aortes, en arrière desquehes elle se divise bientôt en deux gros troncs qui vont se distri- buer chacun au poumon correspondant. Dans ce parcours, elle présente une dilatation très-considérable (PL VIII, fig. 2), à laquelle participent à la fois le tronc primitif de l'artère et la première partie des deux branches qu'il fournit. Par là se constitue un vaste sinus dont les parois, relative- ment minces et très-extensibles, peuvent, même sous une faible pression, donner accès à une quantité considérable de sang. Je dois faire remarquer que la dilatation correspondante de l'aorte droite est loin d'avoir la même étendue et la même importance, toutes proportions gardées. Quant à l'aorte gauche, sa dilatation est plus faible encore et se fait à peine remarquer. On peut juger de ces dispositions et de ces rapports par l'examen des fig. 2 (PL VIII) B\,fig. 3 (PL IX), dans lesquelles C désigne l'artère pulmonaire, U l'aorte gauche et/1 .4' A" l'aorte droite et ses branches. L'aorte gauche B naissant du ventricule droit eu arrière et à droite de VENTRICULES. — CROGODILIENS. 81 l'orifice pulmonaire, se porte au-devant de cette dernière artère, et suit un trajet oblique de bas en haut et de droite à gauche, pour aller constituer, sans avoir fourni de branches, la crosse aortique gauche. L'aorte droite A, venant du ventricule gauche, occupe d'abord la face postérieure de l'artère pulmonaire, puis de l'aorte gauche. Accolée à cette dernière, elle remonte obliquement en arrière et à droite, pour former la crosse aortique corres- pondante, après avoir fourni des vaisseaux importants pour la tète, le cou et les membres antérieurs. Je ne dois point me borner à indiquer l'origine respective des troncs artériels; il importe aussi que je m'attache à en décrire les orifices, en in- sistant sur leurs formes et sur leurs rapports mutuels. Je signalerai tout d'abord le noyau ostéo-cartilagineux du cœur des Crocodiliens , qui, placé au point de contact des trois orifices artériels, joue un rôle très-important dans la constitution et les rapports de ces orifices. Ce noyau, je me hâte de le dire, n'est que le représentant accru et un peu modifié du noyau cartilagineux des Chéloniens , et l'on y retrouve les dis- positions essentielles déjà observées chez ces derniers, mais avec quelques changements appropriés à des conditions nouvelles. Ce noyau forme dans le ventricule droit une saillie remarquable E (PL Vil, fig. 1), E (PL VIII, fig. 1 et 2), saillie plus ou moins arrondie qui représente le corps même du noyau cartilagineux se voyant à nu dans le ventricule droit, tandis que chez les Chéloniens il est comme enfoui dans l'épaisseur de la fausse- cloison et de sa lèvre musculaire. Ce noyau est quelquefois irrégulier et présente des saillies et des dépressions plus ou moins multipliées. Tandis que chez les Chéloniens il conserve presque toujours sa nature cartilagineuse, chez les Crocodiliens il subit toujours en tout ou en partie une transformation osseuse qui, commençant au centre du noyau, s'étend plus ou moins vers la surface et envahit quelquefois le noyau tout entier. C'était le cas pour le cœur d'un petit Caïman (PL IX, fig. 1), et pour le cœur d'un autre Caïman de grande taille représenté dans fig. 1 ( PL VII,) de grandeur naturelle. Ce noyau ostéo-cartilagineux donne naissance, comme celui des Chélo- niens, à plusieurs apophyses, dont l'une antérieure et à droite, et l'autre postérieure. L'apophyse antérieure est placée entre l'orifice de l'artère pulmonaire et 11* 8î ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. celui (lo l'aorLc gaunlie. Celte apophyse, représcnLèeen Q, fig. 1 (PI. Vil el Pi. VIII), très-évidente en /î^. 2 (PI. IX), subit quelquefois partiellement une transformation osseuse. Elle constitue la partie antérieure et gauche du pourtour de l'orifice do l'aorte gauche. Chez les Chéloniens, elle donnait insertion à la partie supérieure de la lèvre de la fausse-cloison. Ici il n'en est rien, cette lèvre n'existant pas ou n'e.\istant qu'à l'état de vestige, comme en N, ng. 1 (PI. VII), fig. 1, 2 (PI. IX). L'apophyse postérieure du noyau cartilagineux est extrêmement remar- quable comme dimensions et comme situation. Elle est représentée en E',fig.[ (PI. VII). Ainsi qu'on peut en juger par cette figure, cette apo- physe forme une languette assez allongée, se terminant en pointe et placée entre les deux aortes droite et gauche. Comme chez les Chéloniens, elle constitue la lèvre antérieure d'une échancrure inter-aortique. Mais ce qu'il y a de remarquable ici, c'est que l'échancrure est transformée en une véri- table ouverture, en un orifice complet, parsuited'un changement de situation des valvules sigmoïdes aortiques et du développement de la cloison qui sépare les vestibules aortiques l'un de l'autre. Par là se trouve constituée en effet cette ouverture remarquable que Briicke a nommée Foramen Pan- inzzx, que Milne Edwards appelle plus justement Pertuis aortique, et qui sera décrite avec beaucoup de soin, à cause de son importance au point de vue de la physiologie et de la philosophie naturelle; j'y reviendrai après la description des orifices artériels. Pour compléter l'étude du noyau cartilagineux, je dois signaler encore une saillie peu prononcée qui se porte en avant et à gauche, entre l'aorte droite et l'artère pulmonaire. C'est là que se fait l'insertion gauche de l'anneau bulbaire, que je décrirai plus tard. L'orifice de l'artère pulmonaire est placé à l'extrémité d'un infundibulum ou entonnoir, et se trouve par conséquent dans un plan un peu supérieur à celui des orifices aortiques. Ses dimensions sont relativement plus grandes que celles de l'orifice correspondant des autres Reptiles. Il est muni de deux valvules sigmoïdes (PI. VII, fig. 1), (PI. VIII, fig. 2), (PI. IX, fig. 2), (PI. XVI, fig. i), dont l'une antérieure est attachée à la paroi antérieure du ventricule droit, et dont l'autre postérieure est adhérente au noyau car- tilagineux et semble tendue entre les deux apophyses antérieures de ce VENTRICULES. - CROCODILIENS. 83 noyau. Ces deux valvules sont du reste identiques à celles de l'orifice pul- monaire des Ghéloniens. Nous aurons à déterminer quelles sont leurs ho- mologues chez les Batraciens. L'orifice de l'aorte gauche mérite de nous arrêter plus longtemps. Je fais d'abord remarquer que cet oriflce échappe facilement à la vue lors- qu'on examine superficiellement la cavité ventriculaire droite. Il est, en effet, la plupart du temps di.ssimulé par des plis et des inégalités remar- quables que l'on n'est pas habitué à rencontrer autour des orifices arté- riels. Quand on l'étudié de prés, on s'aperçoit que son anneau diffère singulièrement des anneaux appartenant à d'autres orifices artériels. Loin d'être régulièrement arrondi, il présente une forme très-allongée dont le grand diamètre est dirigé d'arrière en avant et un peu de dedans en dehors (PI. VIII, fig. 2), (PI. IX, fig. 2), (PI. XVI, fig. 4). II n'est point béant, comme les orifices artériels, mais revenu sur lui-mêuie, ayant un calibre virtuel plutôt que réel. Il est limité par un rebord calleux plus ou moins résistant, dans tous les cas irréguUer et formant des bourrelets épais et inégaux qui rétrécissent l'ouverture. Si l'on examine encore plus intime- ment l'anneau artériel, on s'aperçoit qu'il est en réalité divisé en deux demi-anneaux, l'un interne et un peu antérieur, l'autre externe et un peu postérieur (PI. XVI, fig. 4), qui sont clairement représentés fig. 1 (PI. VII et PI. VIII). Ces deux demi-anneaux, ou plus justement ces deux demi-ellipses (puisque chacun représente un des côtés de l'orifice aplati) donnent cha- cune insertion à l'une des valvules sigmo'ides de l'aorte gauche, qui sont par conséquent, l'une externe et po.stérieure, l'autre interne et antérieure. La nature de ces deux demi-ellipses varie suivant les sujets, l'âge, etc. L'externe est quelquefois formée par un tissu fibreux de consistance cal- leuse, comme dans V Alligator sderops de \Af\g. 2 (PI. VIII). Quelquefois, au contraire, ce lissu fibro-calleux renferme un arc cartilagineux plus ou moins développé. D'autres fois, l'arc cartilagineux renferme un noyau os- seux plus ou moins étendu , et il peut aussi arriver que l'ossification ait tout envahi et que la demi-ellipse externe soit entièrement osseuse. Quant à la demi-ellipse interne, sa nature varie également. Je dois faire remarquer que, comme on peut en juger par les fig. 1 (PI. VII et PI. VIII), ce demi- anneau est plus étendu que l'autre, parce qu'il est continué par l'apophyse 84 ANATOMIK ET PHYSIOLOGIE. antérieuro (lu noyau ostéo-cartilagineux. Comme le demi-anneau externe, il est tantôt formé de tissu fibreux dense, de fibro-cartilage, ou même de tissu osseux, et le plus souvent d'un noyau cartilagineux central entouré et prolongé par des tissus fibreux. Ces diverses transformations histologi- (]ucs du pourtour de l'orifice aorlique gauche sont du reste dans un rapport fidèle avec les transformations correspondantes du noyau ostéo-cartilagi- neux. L'Alligator sclorops delà /ig. 2 (PI. VIII) avait un anneau aortique presque exclusivement fibro-calleux, sans cartilage, quoique l'animal fût de grande taille (2 met. 50 cent.). Le Crocodilux luciusàelsi Planche VII, qui était d'une taille un peu moindre, avait pourtant deux demi- ellipses cartilagineuses renfermant au centre un petit noyau osseux. Enfin le petit Caïman de la /'/HYSI()I,()(;IE. Lriculc des Batraciens et comme dans la loge artérielle des Reptiles à ven- tricules communicants, une paroi antérieure et une paroi postérieure sem- blables et symétriques l'une à l'autre (PI. VII, jig. '2). Du pourtour anté- rieur et postérieur de l'anneau auriculo-ventriculaire partent des colonnes charnues qui s'étalent en forme d'éventail et qui se dirigent, les unes, de beaucoup les plus nombreuses, en bas et à gauche vers le sommet et le bord gauche du cœur M, N (PI. VII, /ig. 2), et les autres, plus rares, en haut et à gauche vers l'angle supérieur gauche de cet organe. Ces colonnes se subdivisent et s'anastomosent plus ou moins, en formant des vacuoles et des trabécules bien moins multipliées que chez les Ghéloniens et à fortiori que chez les Batraciens. Ces colonnes plus ou moins subdivisées arri- vent au bord gauche de la cavité ventriculaire, et là s'unissent ou s'entre- croisent avec celles delà face opposée pour clore la cavité ventriculaire, et pour entrer ensuite dans la constitution des couches moyennes circulaires R (PI. VII, /ig. 2), et plus tard des couches superficielles du ventricule. La cloison interveutriculaire forme la troisième face de la cavité pyra- midale du ventricule gauche. Son étude chez lesCrocodiliens offre un vé- ritable intérêt, en ce qu'elle met pour ainsi dire à nu la constitution de cette cloison, qui est restée jusqu'à présent complètement inconnue chez les Ver- tébrés supérieurs, et sur laquelle il y aurait Ueu de revenir longuement dans un travail spécial sur la structure du cœur. On voit nettement dans la /ig. 2 (PI. VII) que les faisceaux musculaires M'N' des faces antérieure et postérieure du ventricule qui naissent en-dessous de la valvule auriculo- ventriculaire B, c'est-à-dire immédiatement au-dessous du bord inférieur de la cloison inter-auriculaire, au voisinage de l'aorte droite, sont plus dé- veloppés et plus puissants que ceux qui naissent plus à gauche. Or, ces faisceaux, plus forts, plus développés, loin de se porter plus ou moins vers la gauche, se dirigent plutôt en bas et directement vers la face opposée, de manière à s'entre-croiser. Ils correspondent exactement aux faisceaux Z, Y (PI. VI, fig. 2) et 0, P (PI. V, /ig. 3, 4); et si, comme ces derniers faisceaux, ils envoient un certain nombre de leurs fibres vers le bord gauche du cœur, ils emploient la plus grande partie d'entre elles à s'entre- croiser dans un plan vertical et antéro-postérieur, et à constituer la cloison interventficulaire. La seule différence qu'il y ait entre la /ig. 3 (PL V) et VENTRICULES — CliOGODILIENS. 99 lafig. 2 fPl. VII) n'est qu'une ditierence de degré, de niveau, l'entre-croise- ment des faisceaux chez les Crocodiliens s'élevant un peu plus haut el jus- qu'cà la hase du ventricule, tandis que chez les Ghéloniens, Ophidiens, etc., il reste au-dessus de l'entre-croisement un espace vide qui laisse commu- niquer largement la cavité ventriculaire gauche avec l'espace interventri- culaire. C'est au-dessus de cette cloison musculaire interventriculaire que s'élève chez les Crocodiliens la cloison membrano-fibreuse m«erues(«ôw/atVe que j'ai déjà signalée et montrée dans le ventricule droit (PI. VIII, fig. 1), et qui a été cachée dans la fig- 2 (PI. VII), par la nécessité de représenter à la fois la valvule B et la lumière de l'aorte droite ^. Si cette cloison inter- vestibulaire n'existait pas, le cœur des Crocodiles se distinguerait à peine de celui des Chéloniens, Sauriens et Ophidiens. C'est donc surtout par l'existence de cette cloison membraneuse intervestibulaire et par son union avec la cloison interventriculaire que le cœur des Crocodiliens peut être caractérisé ; car c'est là un trait de conformation qui commande pour ainsi dire tous les antres fpertuis aortique, situation des valvules sigmoï- des. transport vers la droite des orifices aortiques, etc.). De cette étude il résulte, comme notion générale de la constitution de la cloison interventriculaire, que cette cloison est formée de faisceaux rayon- nants superposés, naissant alternativement des faces antérieure et posté- rieure du ventricule au-dessous du niveau de la cloison inter-auriculaire. Le ventricule gauche possède deux orifices, celui de l'aorte droite et l'orifice auriculo-ventriculaire gauche. Ces deux orifices affectent des rap- ports réciproques bien différents de ceux que nous avons trouvés chez les autres Reptiles. En effet, tandis que chez les Chéloniens, Ophidiens, etc. (PI. VI, fig. 2; PI. XVI, fig. 3 et 3 his), l'orifice aortique droit est placé à droite et un peu en avant des deux orifices auriculo-ventriculaires, et se trjouve par conséquent éloigné de l'orifice auriculo-ventriculaire gauche, et séparé de ce dernier par l'orifice auriculo-venlriculaire droit ; chez les Crocodiliens au contraire (PI. XVI, fig. 4), l'orifice de l'aorte droite est placé au devant de l'orifice auiiculo-ventriculaire droit, au-devant et à droite de l'orifice auriculo-ventriculairo gauche. Il est donc en contact avec les deux orifices auriculo-ventriculaires et compris dans l'ouverture d'un angle formé en avant et à droite par ces deux orifices. Ce changement de inn ANATOMIE MT PHYSIOI-OGTi;. position a lioaiicoiip d'imporlance. Nous verrons plus tard comment il se proiluit ol (luello est son influence sur la constitution définitive du cœur des C.rocodiliens, c'est-à-dire d'un cœur à ventricules complètement séparés. L'orifice de l'aorte droite se trouve placé au sommet du vestibule aor- lique correspondant, et ce vestibule se trouve transformé en un entonnoir membrano-fibreux légèrement aplati, dont la paroi interne est constituée par la cloison intervestibulaire, et dont la paroi externe est formée par la valvule interne de l'orifice auriculo-vcntriculaire (PI. "VII, fig. 2; PI. XVI, liçi. 4). Ce rapport du vestibule de l'aorte droite avec la valvule ou demi- tente auriculo-ventriculaireest, chez les Crocodiliens, une conséquence de la nouvelle situation de l'aorte droite par rapport à l'orifice auriculaire. L'ori- fice de l'aorte droite, qui chez les Chéloniens se trouvait à gauche et un peu en arrière de l'orifice aortique gauche, se trouve, chez les Crocodiliens, à peu près dans la même situation. L'infundibulum vestibulaire a son axe dirigé obliquement en haut, en dedans et un peu en avant. L'orifice de l'aorte droite a un calibre double au moins de celui de l'aorte gauche. Il est, comme ce dernier, muni de deux valvules sigmo'ides, dont l'une, droite et antérieure, embrasse dans sa concavité le pertuis aortique; l'autre lui est directement opposée. Le pertuis aortique, qui appartient aussi bien à l'aorte droite qu'à la gauche, a été étudié avec assez de détails à propos de cette dernière pour que je n'aie pas à y revenir. L'orifice auriculo-ventriculaire gauche / (PI. "VU, fig. 2) a une forme presque circulaire, et occupe la partie interne et postérieure de la base du ventricule. Il est muni de deux valvules, l'une interne et l'autre externe. La valvule interne B (PI. VII, fig. 2) ; 4 (PI. XVI, fig. 4) est de beaucoup la plus considérable; elle représente exactement la demi-tente gauche des Chéloniens, Ophidiens, Sauriens ^(Pl. V, fg. 3) ; 4 (PI. XVI, fig. 3 et 3 bis); seulement elle s'en distingue, par ses rapports de nouvelle création, avec l'orifice de l'aorte droite. Le bord adhérent de cette valvule, en effet, au lieu de s'insérer sur toute sa longueur au bord inférieur de la cloison inler- auriculaire, comme chez les Chéloniens (PL XVI, fig. 3, 3 bis), ne con- tracte de courts rapports avec ce dernier que dans sa partie postérieure, et se trouve en avant en rapport avec la partie externe de l'anneau de l'aorte droite fPl. VII, //y. 2 ; PI. XVI, fig. 4), dont nous avons déjà signalé VENTRICULES. — CUOGOmLIENS. 101 le déplacement. Quant aux rapports de la partie adhérente de ce bord de la valvule avec la denai-lente droite, rapports qui étaient complets chez les Chéloniens, Ophidiens, etc. (PI. V, /ù;. 4 ; PI. VI, flg. 2 ; PI. XVI, flg. 3), j'y reviendrai en recherchant l'homologie de la valvule fibreuse droite des Crocodiliens avec la demi-tente droite des Chéloniens. Le bord libre delà valvule est plissé à l'état de repos, mais il est égal et un peu concave à l'état de tension. Les bords adhérents antérieur et postérieur sont en relation supérieurement avec unépaississement fibreux de l'endo- carde. La partie inférieure des bords et les angles inférieurs de la valvule donnent insertion à des faisceaux de colonnes charnues qui s'irradient de là dans la paroi antérieure et dans la paroi postérieure du ventricule, pour en- trer dans la constitution des colonnes charnues qui tapissent les parois cor- respondantes de cette cavité. Nous avons vu une disposition semblable, mais moins prononcée, chez les Chéloniens, etc., pour ce qui regarde les demi- tentes droite et gauche (PI. V, fig. 4), (PI. VI, flg. 2). L'appareil valvulaire prend plus de puissance et plus de précision à mesure que nous nous éle- vons dans la série des Vertébrés ; aussi voyons-nous la partie musculaire de cet appareil, c'est-à-dire la partie active, directrice, prendre un volume de plus en plus marqué. C'est ce que nous constaterons encore mieux chez les Vertébrés supérieurs. Vis -à-vis de la valvule interne, qui suffirait presque à elle seule pom* clore l'orifice correspondant, se trouve une valvule dont il n'existait que le rudiment chez les Chéloniens, Ophidiens, etc., et qui s'est développée chez les Crocodiliens, tout en conservant de petites proportions: c'est la val- vule externe C (PI. VII, fig. 2); 4' (PI. XVI, fig. 4) qui forme un petit crois- sant à concavité inférieure, dont les cornes donnent insertion à des faisceaux musculaires puissants. Cette valvule, qui représente pour la forme une valvule sigmoïde renversée, ap[ilique son bord libre tendu et relevé contre le bord libre de la valvule interne, et complète ainsi l'occlusion de l'orifice auriculo-ventriculaire. Pour achever de décrire ce qui a trait à l'anatomie du cœur et des gros vaisseaux chez les ('rocodiliens, je dois dire quelques mots de la distribu- tion générale des troncs aortiques qui partent du cœur. L'aorte droite, avant de se recourber pour former la crosse aortique correspondante, four- 103 ANATflMIK F.T PIlYSlOI.OnTK. nil un premier Ironc volmniiieux .-1 (l'I. VIII. ////. v') e 'l'I. XVIII, /ig. 'ij qui, après avoir donné naissance à l'arLère sous-claviére -ianchc et à ses dépen- dances (artère vertébrale, mammaire interne, collatérale du cou, etc.), forme le tronc coijimun des deux carotides ou carotide sitbvertébrak de Rathke. Au-dessus naît de la crosse aortiquo elle-même un tronc moins volumi- neux/l' (PI. VIII, //r/. 2,) e' (PI. XVIII, flg. k) qui est l'artère sous-clavière droite, dont les subdivisions sont symétriques cà celles de la sous-clavière gauche, mais qui ne fournit pas de carotide. Après avoir donné ces deux troncs, l'aorte droite A se recourbe derrière le tube digestif et, se rappro- chant de la ligne médiane, vient, après avoir reçu une anastomose de l'aorte gauche, former Y aorte abdominale, qui va se distribuer à la partie postérieure du tronc, aux membres postérieurs et à la queue. La crosse aortique gauche ne fournit pas de branches dans la région cervicale, mais arrivée sous la colonne vertébrale elle se divise en deux troncs: l'un, très-important, forme Y artère viscérale, qui se distribue à l'estomac, à l'intestin, au foie, à la rate, etc.: et l'autre, beaucoup moins volumineux, va s'aboucher obliquement dans l'aorte droite, qui devient, à ce niveau, aorte abdominale . L'étude très-détailléeque je viens de faire du cœur et des gros vaisseaux des Crocodiliens va me permettre d'aborder avec quelque fruit le pro- blème de la circulation du sang dans ces cavités, problème très-intéressant, complexe, controversé, encore plein d'obscurité, et sur lequel je désire jeter quelque lumière. Le problème à résoudre a deux faces : les Crocodiliens vivant tantôt à l'air libre et tantôt dans l'eau, il importe de déterminer la manière dont s'opère la circulation du sang dans ces deux conditions, très-dilïérentes en apjiarence. Je vais d'abord faire un exposé des différentes solutions qui ont été données à ce double problème. Après avoir montré ce qu'elles ont de contradictoire, je m'attacherai à l'étude du mécanisme de la circulation pendant la vie aérienne : j'utiliserai pour cela les données nouvelles que j'ai exposées dans les pages précédentes. Ce n'est que plus lard que je pourrai aborder utilement l'étude de la circulation des Vertébrés pendant VRNTHICULES. — CROCODILIENS. 103 la vie aquatique. Cette question cooiporte des développements importants et des considérations générales qui ne peuvent trouver place qu'après une étude des modifications du cœur et des gros vaisseaux dans les diverses classes des Vertébrés. Je passe à dessein sous silence ce qu'on a pu penser de la circulation centrale des Crocodiles avant que l'on connût l'existence du pertuis aorti- que. Le premier naturaliste qui a signalé cet orifice, Hentz, avait pensé que pendant l'état de respiration libre et aérienne il ne devait livrer passage qu'à très-peu de sang; et que pendant le séjour de l'animal au fond de l'eau et la suspension de la circulation qui en est la conséquence, la gêne de la circulation pulmonaire devait produire le passage d'une partie du sang veineux de l'aorte gauche dans l'aorte droite. Duvernoy, dans la seconde édition de VAnatomie comparée de Guvier, touten conservant quelques doutes regrettables sur la persistance du pertuis aortique, pensa que ce pertuis « sert surtout à introduire dans l'aorte gau- che une petite quantité de sang oxygéné venant de l'aorte droite w. A côté de ces deux opinions contradictoires, énoncées parleurs auteurs sans développements suffisants, se sont produites des appréciations physio- logiques de ce phénomène appuyées sur une étude plus complète desorga- neset sur une analyse plus sérieuse de leurs fonctions. Je dois citer d'abord Pannizza et Bischoff comme ayant les premiers cherché à donner au pro- blème une solution vraiment scientifique ; et puisque l'examen de leurs théories offre un véritable intérêt, je vais les mettre m extenso sous les yeux du lecteur. Ce n'est qu'après avoir exposé ces théories, qui ont par- ticulièrement attiré l'attention des naturalistes, que je pourrai faire connaître avec fruit les critiques qu'on a le droit de leur adresser. Un exposé succinct des opinions acceptées actuellement par des natu- rahstes éminents servira de complément à cet historique, et pourra mettre en lumière toute l'incertitude et l'indécision qui régnent encore sur la question. Voici la traduction à peu près littérale du remarquable passage de Pan- nizza : « Les deux veines caves et leur sinus commun versent leur sang dans lO'i ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. roroillcLte inférieure ou droilc. Celle-ci l'envoie dans le venlricule corres- pondanl ; et quand ce dernier vient à se contracter, le sang, empéclié par les valvules de refluer dans roreillette, pénètre dans les deux ouvertures artérielles, dont Tune corresiiond à l'arterc pulmonaire et l'autre à l'aorte gauche. Le sang de l'artère pulmonaire se rend au poumon, et revient de là par deux veines à .l'oreillette supérieure ou gauche. Celte deruière le verse dans le ventricule correspondant, dont la contraction pousse néces- sairement ce liquide dans l'orifice de la grande artère ou grande aorte, parce que la grande valvule déjà décrite s'oppose à son retour dans l'oreil- lette. De la grande aorte, une partie du sang passe aussitôt {subito) par l'orifice de communication dans l'aorte gauche, et s'y mêle ainsi au sang veineux de cette artère. La grande aorte donnant naissance aux deux sous- claviéres et à l'aorte droite, il en résulte que tous ces vaisseaux sont pour- vus uniquement de sang artériel. Plus loin l'aorte droite, après avoir dé- crit sa crosse, revenant directement vers la ligne médiane et se trouvant parallèle à l'aorte gauche, se met encore en communication avec cette der- nière par un ramuscule anastomotique. De là résulte qu'il y a dans l'artère pulmonaire du sang purement veineux, et dans l'aorte gauche du sang mixte, puisqu'elle reçoit du sang artériel de la grande aorte dès son origine par l'orifice de communication, et encore plus tard lorsqu'elle est devenue parallèle à l'aorte droite. Dans les artères sous-clavières, les carotides et l'aorte droite, il y a du sang artériel pur. » A cette opinion nettement formulée on peut opposer l'opinion non moins précise de Bischoff. « La circulation du sang, dit-il, s'accomplit de la fa- çon suivante chez le Crocodllus Inclus : le sang arrive des diverses parties du corps par les veines dans leur dilatation ou sinus, et de celui-ci dans l'oreillette droite. Lorsque celle-ci se contracte, les valvules placées à l'embouchure du sinus s'opposent au reflux du sang dans les veines , et ce liquide se précipite dans le ventricule droit. Lorsque ce dernier se con- tracte, les deux valvules s'opposent au retour du sang dans l'oreillette, et le sang s'écoule dans l'aorte gauche et dans l'artère pulmonaire, où il est retenu par des valvules sigmoïdes. Du poumon, le sang revient à l'oreillette gauche, qui le pousse dans le ventricule correspondant. Au moment de la contraction de ce dernier, les deux valvules qui se trouvent à l'orifice VENTRICULES — GROCODILIENS. 105 auriculo-ventriculaire s'opposentau relour du sang dans roreillelle, et le sang se jette dans l'aorte droite. Il coule dans l'aorte gauche du sang non hé- matose, et dans l'aorte droite du sang qui a respiré. Ces deux sortes de sang se mêlent ensuite à deux reprises dans ces vaisseaux ; une première fois par l'orifice de communication, et plus loin, au niveau de la région dor- sale, parle vaisseau anastomotique. Mais la question est desavoir si, par l'orifice de communication, c'est le sang veineux de l'aorte gauche qui va se mêler au sang artériel de l'aorte droite , ou bien si, au contraire, c'est le sang artériel de l'aorte droite qui pénétre dans le sang veineux de l'aorte gauche. Le choix entre ces deux solutions est difficile. Pannizza accepte la dernière, parce que, ainsi qu'il l'a justement remarqué, la dispo- sition des valvules sigmoïdes entre lesquelles le pertuis est placé permet de faire passer une sonde de l'aorte droite dans la gauche beaucoup plus facilement que dans le sens inverse. Cependant je serais disposé à penser que, tout au moins pendant que l'animal est sous l'eau, et que par con- séquent il ne respire pas, le cours du sang a lieu dans la direction opposée. Pendant ce temps, en effet, la circulation pulmonaire étant interrompue, le ventricule gauche ne peut envoyer du sang dans l'aorte droite, et tout le sang est poussé dans l'aorte gauche par le ventricule droit. Si, dans ces conditions, il n'existait pas d'orifice de communication entre les deux aortes, l'aorte droite et toutes ses branches resteraient privées de sang, et toute la partie supérieure de l'animal, et notamment la tête, n'en recevrait pas. Mais cela est très-invraisemblable, et il est plus rationnel de penser que, dans ce cas seulement , une partie du sang passe par le pertuis de l'aorte gauche dans la droite, et que les parties supérieures du corps sont ainsi pourvues de sang. Toutefois ce passage du sang ne peut avoir lieu que pendant la diastole ventriculaire, alors que le sang qui a été poussé dans l'aorte gauche tend à refluer vers le cœur. Dans ce cas, en effet, les valvules placées à l'orifice aortique s'abaissent et rendent libre l'orifice de communication, de telle sorte que le sang peut passer dans l'aorte droite. Pendant la systole ventriculaire, au contraire, le sang lancé relève les val- vules et les presse contre l'orifice, qui se trouve ainsi fermé des deux côtés. De tout cela il me semble résulter que cet orifice de communication ne sert que ■pendant que l'animal ne respire pas, et qu'en dehors de ce cas aucun mélange 14* 106 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. desdet/.r sangs ne peut avoir lieu à ce niveau. Ainsi donc, quand l'animai se trouve dans l'air, les parties supérieures du corps, la tête et les extré- mités supérieures, ne reçoivent que du sang artériel ; l'aorte gauche, qui se distribue aux organes abdominaux, ne contient que du sang veineux, et l'aorte droite descendante, dans laquelle s'abouche devant la colonne verté- brale le vaisseau anastomotiquc de l'aorte gauche, et qui se distribue à la queue et aux extrémités inférieures, renferme du sang mixte. La disposi- tion des vaisseaux au niveau de cette dernière anastomose permet tout au moins de penser que c'est le sang veineux de l'aorte gauche qui passe dans la droite, et non pas le contraire. » Les citations précédentes permettent de mesurer la distance qui sépare les opinions des deux illustres observateurs. Il y a, en effet, opposition complète entre les deux , quant au sens des courants sanguins dans les deux anastomoses aortiques. Dans le pertuis supérieur, ily a, pendantla vie aérienne, un courant d'une aorte à l'autre pour Pannizza ; il n'en existe pas pour BischofF. Le courant, quand il existe, va pour Bischoff de l'aorte gauche à l'aorte droite ; tandis que pour Pannizza il a une direction in- verse. Ce dernier pense que le mélange des deux sangs a lieu pendant la systole ventriculaire ; BischofF affirme que c'est seulement pendantla dia- stole. Dans l'anastomose prévertébrale, il y a pour Pannizza courant de l'aorte droite dans la gauche, et pour BischofF de l'aorte gauche dans la droite. Placé en présence de ces opinions si contradictoires, Briicke a recherché de quel côté se trouvait la vérité, et on ne peut nier qu'il n'ait apporté beau- coup de perspicacité et de discernement dans le choix de ce que chacune des deux opinions avait de vrai. Toutefois, comme il ne connaissait pas cer- tains faits que nous verrons être d'une grande utilité pour la solution de la question, et comme il lui manquait des éléments précieux de certitude, il n'a pu qu'être incomplet, parfois erroné, et dans presque tous les cas plein d'une légitime réserve. Conformément à l'opinion de Bischoff et en opposition avec celle de Pan- nizza, Briicke pense avec raison que le pertuis aortique n'est perméable au sang que pendantla diastole ventriculaire. Mais pour ce qui regarde le rôle de ce pertuis, quand l'animal respire librement, Briicke se range à l'avis VENTRICULES. — CROCODILIENS. 107 de Pannizza. Il pense, avec lui, que le saag artériel de l'aorte droite se jette alors dans l'aorte gauche, et non, avec Bischoff, qu'il n'y a pas de mélange des deux sangs à ce niveau dans les conditions de la vie aérienne. Nous verrons même qu'il va plus loin, et qu'il pense qu'il ne peut jamais y avoir là de courant en sens inverse. La raison capitale qu'il donne à l'appui de ces opinions est tirée de la différence de constitution des parois des deux ventricules. Le ventricule gauche étant en effet beaucoup plus puissant que le ventricule droit, on peut affirmer sans hésitation qu'à la fin de la systole ventriculaire la tension sanguine est plus grande dans ce ventricule et dans les vaisseaux qui en naissent que dans le ventricule droit et dans les vais- seaux qui dépendent de lui. La conséquence nécessaire de ce fait, c'est qu'au moment où les valvules s'abaissent et laissent libre le pertuis aorti- que, le sang se précipite aussitôt de l'aorte droite dans la gauche ; et comme pendant tout le temps de la diastole ventriculaire, c'est-à-dire pendant le seul temps où le foramen de Pannizza soit perméable, il n'y a pas de rai- son pour que la tension dans l'aorte droite se trouve inférieure à celle de l'aorte gauche, il ne semble pas juste de dire que le sang puisse jamais aller, par le foramen, de l'aorte gauche dans la droite. Si pendant la vie aérienne Briicke n'admet pas le passage du sang de l'aorte gauche dans la droite, il ne l'admet pas davantage pendant la vie sous-aquatique, quand l'animal ne respire pas librement. Combattant la théorie de Bischoff, il ne voit pas pourquoi, chez un Amphibie, la circula- tion pulmonaire serait interrompue pendant que l'animal ne respire pas. Tout en reconnaissant que les mouvements respiratoires apportent une aide considérable à la progression du sang dans le poumon, Briicke prétend que l'arrêt de ces mouvements peut simplement ralentir cette progression, mais qu'une interruption de la circulation pulmonaire aussi complète que le suppose Bischoff, ne pourrait résulter que d'une occlusion parfaite de l'artère pulmonaire, occlusion qui serait du reste possible chez les Tortues par exemple ' . Il ne serait pas rationnel, en effet, d'attribuer cet arrêt de la ' On se souvient que Briicke considère l'anueau bulbaire des Ghéloniens comme destiné à fermer l'orilice pulmonaire, etcommecajîablede produire une occlusion complète de ces vais- seaux . ANATOMIE RT l'IIYSTOLOGIR circiilatioa à une occlusion correspondante dos veines pulmonaires, puis- qu'un pareil phénomène exposerait les capillaires pulmonaires à la pression qui règne à l'orifice artériel du ventricule droit. Du reste, Brùcke a cherché dans l'expérimentation la confirmation do ce qu'il présumait être la vérité. N'ayant pas un Crocodile vivant à sa dis- position, il a cru pouvoir faire ses observations sur un autre Reptile qui, comme le Crocodile, pût rester un certain temps sous l'eau sans respirer. Il a enlevé pour cela le plastron d'une Emys etirop '•. i ^ iiL^iviAir,! 104 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. » Le Ironc du obo supérieur (PI. XIV, 4 /?,'/. 4, ol 7 fig. 6), du calibre de l'huménile, postérieur à ceux des lobes moyeus cl inférieurs, se dirige horizontalement de dehors en dedans et un peu d'avant en arrière, pour s'insérer dans la grande veine azygos, à un centimètre de la veine cave supérieure. » Le tronc du lobe moyen 6 (PI. XIV, (ig. 6), du volume de l'iliaque e.xterne, marche obliquement de bas en haut, de dehors en dedans, et vient se rendre dans la partie supérieure de la veine cave supérieure, à trois centimètres de l'oreillette droite. «Quant à celui du lobe inférieur 5 (PI. XIV, /î^. 6), formé par la réunion de quatre branches de calibre différent, il n'est pas plus volumineux qu'à l'état normal, et va se rendre horizontalement, comme de coutume, à l'an- gle inférieur droit de l'oreillette gauche. » Les veines bronchiques droites 6 (PI. XIV, fig. 4) n'offrent rien de particulier à noter ; il en est de même des veines pulmonaires gauches, ainsi que de la veine cave supérieure, de l'artère pulmonaire et de l'aorte. )i Le cœur n'est remarquable que par la persistance du trou de Botal ainsi constitué : Dans l'oreillette droite, sur la partie moyenne et un peu postérieure de la cloison inter-auriculaire, à 1 4""" au-dessous et un peu en arrière de l'orifice de la veine cave supérieure, et à 17""" au-dessus et un peu en avant de celui de la veine cave inférieure, se trouve un pertuis dont le grand diamètre horizontal offre 3°"" d'étendue, le petit n'en présentant pas plus de 2. Cet orifice, à bords mousses, est obturé à sa partie profonde par une valvule se continuant avec son bord inférieur et séparée du bord supérieur par une fente qui établit une communication directe entre les deux oreillettes. La valvule d'Eustachi mesure iômm de haut à sa partie moyenne Du côté de l'oreillette gauche, la valvule du trou ovale, épaisse et résistante, mesure 15™» de long sur 6™" de large, et constitue un relief assez prononcé Le trou ovale est complètement caché par sa valvule, qui le déborde en tous sens La disposition anatomique du trou ovale aurait pu permettre à une très-petite quantité de sang contenu dans l'oreillette droite de passer dans la gauche. Néanmoins il est à supposer que ce passage n'avait pas lieu, d'abord parce que le trou de Botal n'existait plus que sous la ORIGINE DES VEINES PULMONAIRES. 205 forme d'une fente trés-oblique et très-étroite, ensuite parce que pendant la contraction des oreillettes les parois de cette fente étaient appliquées 1 une contre l'autre par le choc du sang sur la cloison inter-auriculaire. » Le cas précédent n'est point unique dans la science ; mais ce qui m'a engagé à le rapporter ici, c'est la connaissance complète que m'en ont donnée la description de M. Guillabert, les excellents dessins de M. Gazai, et un rapport trés-détaillé fait sur ce cas, après examen de la pièce, et lu à la So- ciété académique du Var par MM. Secourgeon et Arlaud, chirurgiens en chef de l'hôpital militaire et de la marine à Toulon. Les faits tératologi- ques ne sauraient être connus avec trop de précision, et l'on ne peut se permettre de les analyser et d'en rechercher la signification et les consé- quences philosophiques que quand on en connaît toutes les particularités. On rapporte plusieurs cas qui peuvent être utilement rapprochés de celui que je dois à M. Guillabert. Meckel' parle d'un sujet chez lequel il ne trouva que trois veines pulmonaires s'ouvrant dans l'oreillette droite ; la quatrième, la veine pulmonaire droite supérieure, se rendait encore dans la veine cave supérieure. Les Archives de Reil (tom. IV, pag. 448,) contiennent encore un cas observé par Wilson. cas des plus remarquables, et à mon avis des plus instructifs. Un enfant, mort sept jours après sa naissance, présenta un cœur si imparfait, qu'il ne consistait qu'en une seule oreillette et un seul ventricule. Dans l'oreillette venaient aboutir les troncs à sang noir, et du ventricule naissait l'aorte; l'artère pulmonaire naissait directement de l'aorte, et les quatre veiyies pulmonaires venaient s'ouvrir dans la veine cave supérieure. Isidore Geoffroy Saiut-Hilaire {Histoire des Anomalies, I, pag. 482), sans rapporter des faits particuliers, dit fort bien que: «les veines pulmonaires ou une partie d'entre elles s'embranchent quelquefois sur la veine cave supérieure; mais à cette anomalie très-remarquable je n'ai guère à ajouter, dit-il, que leur anastomose avec quelques veines appartenant au système des veines caves, par exemple l'azygos ou une œsophagienne » . Aces faits je dois joindre une observation publiée à la fois par M. Lacroix, ' Reils Archiv-, tom. VI, pag. 597. •-'or, ANATOMll'; KT Î'IIYSIOI.OIUI;, alors interne (.les hôpitaux, dans le Journal de mcdeciiie pratique ûv, Monl- pellier, etparleprofesseurDubrueildansson Traité des anomalies artérielles. Dans la relation que je vais faire de ce cas, je me bornerai aux points qui intéressent mon sujet, et je me permettrai mémo de substituer dans quelques cas ma propre description à celle des auteurs que je viens de citer. J'ai pu, en effet, retrouver la pièce en question dans les collections de la Faculté de médecine, et après des examens multipliés et très-attentifs j'ai dû m'écarter sur quelques points de la description déjà donnée. Il s'agit d'un individu mort à rHôpital-Général de Montpellier, à l'âge de 43 ans, d'une péritonite subaiguë consécutive à un abcès de la fosse iliaque droite. 11 n'a jamais joui d'une bonne santé et a dû souvent sus- pendre ses occupations de travailleur de terre. Il n'y avait aucune trace de cyanose, mais il était en proie à une dyspnée extrême depuis quelques jours, lorsqu'il mourut. A l'autopsie, on trouve le péricardd distendu par ])lus d'un litre de séro- sité. Le cœur a acquis plus du double de son volume ordinaire ; la cavité de l'oreillette droite est agrandie et semble recevoir cinq vaisseaux, au lieu de trois : en haut et en avant la veine cave supérieure, en bas et en arriére la veine cave inférieure , entre elles et légèrement à gauche les deux veines pulmonaires droites; l'ouverture très-agrandie de la veine coronaire est dépourvue de valvule. La valvule d'Eustachi est plus développée que de coutume ; l'oreillette gauche ne reçoit en apparence que les deux veines pulmonaires gauches ; la cloison inter-auriculaire est percée d'une large ouverture régulièrement circulaire, dont le diamètre antéro-postérieur me- sure 3 centimètres et demi, et le diamètre vertical 3 centimètres. 11 m'a été facile de me convaincre que cette ouverture était limitée anté- rieurement par le bord arrondi de l'anneau de Vieussens, c'est-à-dire par la cloison des auricules, dont l'extrémité inférieure se continue comme d'ordinaire avec la valvule d'Eustachi. L'ouverture n'est limitée postérieu- rement que par la paroi postérieure des oreillettes. Cette paroi est du reste parfaitement lisse et ne présente aucune saillie, aucune irrégularité pouvant être considérées comme la trace de la cloison du sinus, ou de la valvule du trou ovale. La cloison des oreillettes est donc bornée à la cloison des auricules. Cette cloison des auricules, très-peu étendue dans les cas nor- ORIGINE DES VEINES PULMONAIRES. 207 maux, l'est, encore moins chez ce sujet. Ainsi, tandis qu'elle possèdeune corne inférieure qui va se réunir avec la valvule d'Eustachi , elle se ter- mine en pointe sur la paroi antérieure des oreillettes, et n'atteint pas leur paroi supérieure. De là résulte un agrandissement proportionnel du trou de Botal qui est très -considérable. Les faits que je viens de rapporter forment pour, ainsi dire une série naturelle et présentent une sorte de progression dans les degrés de con- formation anormale. Ils sont particulièrement instructifs à cet égard, et je puis, en les rapprochant des observations que nous a déjà fournies l'auatomie comparée, en tirer des conclusions intéressantes dont la légitimité ressortira de l'ensemble même des faits. Un premier point commun à tous ces cas, c'est la fusion, l'abouchement des veines pulmonaires (toutes ou quelques-unes seulement) dans le système veineux général. Cette assertion que les veines pulmonaires ont dépeudu, à une certaine période de la vie embryonnaire, du système veineux général, trouve sa contre-épreuve dans les cas anormaux où les veines du système veineux général viennent s'aboucher dans les veines pulmonaires, ou, pour parler plus exactement, dans le sinus des veines pulmonaires. Voici quelques-uns de ces faits. Sur une petite fille d'un an, Ring trouva la veine cave inférieure s'ou- vrant dans l'oreillette gauche et le trou de Botal ouvert. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire affirme qu'on a vu l'oreillette gauche recevoir, soit la veine cave inférieure (Ring), soit une veine cave supérieure, tandis qu'un autre tronc analogue allait s'ouvrir dans l'oreillette droite (Weese, Breschet), soit la grande veine coronaire (Meckel), soit une branche de l'azygos qui se divisait près du cœur en deux branches dont l'une allait s'ouvrir dans l'oreillette droite et l'autre dans l'oreillette gauche (Lecat), soit même un tronc commun aux veines hépatiques. En outre, quelques observations prouvent que deux de ces anomalies peuvent se rencontrer simultanément chez le même individu. Ainsi, chez des sujets où il existait deux veines caves supérieures dont l'une s'ouvrait dans l'oreillette gauche, on a vu cette même oreillette recevoir en même temps, soit le tronc commun des 208 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. hépatiques (Brescliel), soit la veine cave inférieure (Ring). Dans ce dernier cas, la cloison des ventricules était divisée: le sujet, âgé d'un an, était atteint de dyspnée et de cyanose depuis sa naissance. Enfle, comme cas trés-remar- quable et embrassant pour ainsi dire les deux ordres de faits que je viens de citer, j'ajouterai que l'on a vu les quatre veines pulmonaires s'ouvrir dans l'oreillette droite, tandis que les deux veines caves s'ouvraient dans l'oreillette gauche '. L'anatomie comparée est parfaitement d'accord avec les faits précédents, puisque nous avons vu les veines pulmonaires chez quelques Poissons, chez les Batraciens et chez les Reptiles, avoir des relations intimes avec les veines caves, et être embrassées, dans ces deux dernières classes, d'un côté par la veine cave supérieure gauche, et de l'autre par la veine cave supérieure droite, dont le tronc s'est plus ou moins fusionné avec celui de la veine cave inférieure. Cette concordance des faits zoologiques et des faits tératologiques nous porte naturellement à penser qu'à ime époque plus ou moins reculée de la vie embryonnaire, les veines pulmonaires n'ont été que des affluents du système veineux général . Mais nous pouvons aller plus loin dans nos conclusions, et déterminer à quelle portion du système veineux général ont appartenu les veines pulmo- naires chez les Vertébrés à double circulation. C'est ce que nous allons examiner. Il est clair qu'il ne peut être question ici que des veines qui viennent s'aboucher directement dans le cœur, en formant avec les veines pulmo- naires ce bouquet veineux qui constitue le pôle veineux du cœur de l'em- bryon. Les veines pulmonaires sont-elles originairement les affluents des veines caves supérieures ou de la veine cave inférieure ? L'anatomie comparée nous a déjà fourni à cet égard des données pré- cieuses. C'est ainsi que nous avons vu, chez les Ampbibiens et chez les Reptiles, le tronc commun des veines pulmonaires venir très-évidemment pénétrer dans l'angle supérieur de séparation des veines caves supérieures, et rester sans relations directes avec la veine cave inférieure (PI. XIV, * Nouveau Dictionnaire de médecine et de chirurgie pratiques. 1868. Article Cœur, par Maurice Raynaud. ORIGINE DES VEINES PULMONAIRES 209 Jig. 7), iPl. XYIIl, fig. 3). Ce rapport, qui existe aussi chez le Lepidosiren paradoxa, est moins évident chez les Oiseaux et encore moins chez les Mammifères, à cause des changements de volume et de situation qu'ont subis le sinus, les veines caves et les veines pulmonaires, par suite des progrès du développement. Mais ce que j'ai déjà dit sur ce point, et les considérations que je me propose de présenter un peu plus loin sur ces modifications dans les rapports des troncs veineux, permettent d'établir (jua chez les Vertébrés supérieurs, comme chez les Amphibiens et les Rep- tiles, les veines pulmonaires ont eu primitivement des relations exclusives avec les veines caves supérieures. Les faits tératologiques que je viens de rapporter nous conduiront à la même conclusion. Ces ftiits se divisent en deux catégories: la première ren- fermant les cas d'ectopie des veines pulmonaires, et la seconde les cas d'eclopie des veines du système veineux général. La première catégorie renferme des cas d'abouchement des veines pulmonaires dans la veine cave supérieure ou dans l'azygos, qui en est une dépendance' . On ne connaît aucun cas d'abouchement des veines pulmonaires dans la veine cave infé- rieure, de sorte que, d'après ce premier ordre de faits, on est jusqu'à un certain point autorisé à considérer les veines pulmonaires comme des affluents primitifs de la partie centrale des veines caves supérieures, c est-à-dire du canal de Cuvier. Quant aux faits de la seconde catégorie, c'est-à-dire présentant l'abou- chement des veines caves, coronaire ou azygos, dans l'oreillette gauche, je dois distinguer parmi eux les cas où il s'agit de la veine cave inférieure ou des veines hépatiques, des cas où l'oreillette gauche reçoit la veine cave supérieure droite, ou une veine cave supérieure gauche existant nor- malement, ou la grande veine coronaire, ou une branche de l'azygos. Ces derniers cas sont parfaitement en harmonie avec les faits d'insertion des veines pulmonaires sur la veine cave supérieure. Ils établissent à leur ma- nière la fusion primitive des veines pulmonaires el des veines caves supé- rieures. Nous savons en effet qu'il y a eu chez l'embryon deux veines cives ' Daas le fait de M. Guillabert, la veine pulmonaire du lobe supérieur du poumon s'ouvre dans l'azygos, mais au niveau de l'embouchure de cette dernière dans la veine cave supérieure; c'est ce que démonlre clairement la pg. i (PI. XIV). 27' •,'in ANATOMIR ET PHYSIOI.OOIK. supérieures ou canaux de Cuvier, tlonL le gauche se Iraiisforme chez l'Houimo en grande veine coronaire, et qui reçoivent les azygos ; de sorte que l'abou- chement de ces divers vaisseaux avec les veines pulmonaires ne représente que des degrés et des variétés de la fusion des veines pulmonaires avec les veines caves supérieures. (Juant aux faits d'abouchement dans l'oreillette gauche de la veine cave inférieure ou du tronc commun des veines hépa- tiques, qui n'est autre chose qu'un affluent de la veine cave inférieure, je ferai observer que la réalité de ces cas, très-rares du reste, a besoin d'être confirmée par de nouveaux exemples, parce qu'ils présentent plusieurs causes d'erreur. Ces anomalies coïncidaient en effet avec la permanence d'un trou de Bolal même agrandi, et n'ont été observées que chez des enfants fort jeunes (un an au plus). Or, à cet âge, l'embouchure de la veine ca 'e est déjà normalement dirigée vers le trou de Botal, c'est-à-dire vers l'oreillette gauche, et la valvule d'Eustachi a encore conservé des dimen- .sions notables qui accentueni fortement cette direction. Si l'on joint à cela l'absence de la valvule du trou ovale, on trouvera là une réunion suffisante de conditions propres à induire en erreur, et à faire considérer à tort l'ori- fice de la veine cave inférieure comme aboutissant à l'oreillette gauche. Du reste, en acceptant comme exactes les deux observations qui sont connues, et dont l'une est due à Ring et l'autre à Breschet ( Mémoire sur les ectopics du cœur), je dois faire observer que l'oreillette gauche recevait également dans les deux cas une veine cave supérieure. Cette disposition commune aux deux faits cités ne me paraît pas une simple co'incidence, et je m'en autorise pour étabhr que dans tous les cas les veines pulmonaires se souviennent de leur connexion primitive avec les veines caves supé- rieures. Les deux faits dont il s'agit, rapprochés des faits positifs et nombreux d'ouverture des veines pulmonaires dans une veine cave supérieure, no peuvent donc pas prouver que les veines pulmonaires ont eu des relations directes avec la veine cave inférieure ; ils ne permettent qu'une conclusion légitime : c'est que les veines pulmonaires ont été les affluents directs des veines caves supérieures, et que les veines caves supérieures ont été de leur coté directement reliées à la veine cave inférieure. Cette double relation, que je vais du reste appuyer sur l'anatomie comparée, servira d'explica- ORIGINE DKS VEINES PULMONAIRES. 211 tion nalarollc ;uix deux faits anormaux sur lesquels je viens de ni'arrèter longuement. On comprendra en effet facilement que l'introduction dans l'oreillette gauche d'une veine cave supérieure puisse entraîner avec elle ■ l'introduction d'un affluent de ce vaisseau, c'est-à-dire la veine cave infé- rieure. Mais alors Vahouchemnnt de la veine cave inférieure n'est à pro- prement parler qu'un abouchement de seconde main, et non un abouchement direct. Les relations de la veine cave postérieure ou inférieure avec les veines caves supérieures présentent un caractère constant chez les Vertébrés, c'est- à-dire que cette veine vient s'aboucher dans le confluent des veines caves supérieures, primitivement confluent des sinus de Cuvier, et s'introduit entre elles en les éloignant l'une de l'autre. C'est ce qui se voit clairement sur \esfig. 6 et 10 (PL XIII), et sur la fîg. 7 (PL XIV), où la veine cave 5 s'est introduite entre les deux veines caves supérieures / et 2. Mais ce que ces figures montrent clairement aussi, c'est que, loin de s'accroître, de se développer également de deux côtés et de repousser symétriquement les deux veines supérieures, la veine cave inférieure, pour des raisons que je n'ai pas à rechercher ici, étend plutôt son domaine vers la veine cave supé- rieure droite, et finit par se fondre avec elle. C'est ce que démontre bien la fig. 7 (PL XIV), où l'on voit la veine cave Jet l'une de ses dépendances, veine hépatique 4, venir se fondre en un tronc commun avec la veine cave supérieure droite 2 ; tandis que la veine cave su[térieure gauche / conserve sa position et son indépendance relatives jusqu'à son inosculation dans le sinus. Chez les Serpents, et le Python en particulier, dont la veine cave supérieure gauche n'a qu'un calibre très-faible sur la face posté- rieure du cœur , les dispositions que je signale se sont prononcées au plus haut degré. C'est ainsi que tandis que la veine cave supérieure gauche est tout à fait distincte et isolée jusqu'à son embouchure dans le sinus, la veine cave supérieure droite et la veine cave inférieure ont tellement con- fondu leurs axes et leurs parois, qu'on ne saurait déterminer leur limite respective (PL XVIII, fg. 3). Chez les Oiseaux, qui comme les Reptiles possèdent aussi deux veines caves supérieures, l'indépendance de la veine cave inférieure et de la veine cave supérieure gauche est nettement accusée par la saillie considérable de la valvule semi-lunaire ou de Thébésius 212 ANAÏOMIE ET l'JIYSIOLOOiE. / (PI. XIII, fig. 9), el s (FI. XIV, fig. 3); «lia dépendance des orifices do la veine cave supérieure droile et de la veine cave inférieure est tout aussi clairement indiquée par la présence des deux grandes valves parallèles qui embrassent simultanément ces deux orifices, et par les faibles dimensions de l'éperon qui les sépare. Cbez les Mammifères qui, comme les Rongeurs, possèdent deux veines caves supérieures, la valvule de Tbébésius, très-développée et saillante en forme d'éperon, témoigne suffisamment de l'indépendance delà veine cave supérieure gauche, tandis qne l'absence de tout éperon et le voisinage des orifices delà veine cave supérieure droite et de la veine cave inférieure prouvent suffisamment aussi les relations intimes qui existent entre ces deux vaisseaux. Ce que je viens dédire des Mammifères qui ont conservé deux veines caves supérieures peut aussi très-justement s'appliquer à ceux dont la veine cave supérieure gauche a été réduite à former la veine coronaire ou la terminaison de l'azygos. La veine cave inférieure, qui n'est, à partir du foiejusqu'au cœur, que l'ancien tronc commun des veines ombilicales, a été originairement d'une symétrie parfaite dans sa partie supérieure 10 (PI. X'V, fi.g. 12) ; et ce n'est ijue par des modifications successives que nous venons de suivre, que sa symétrie a disparu (PI. XV, fiq. 13) '. La disparition delà symétrie de la ' La veine cave iaférieure se compose de deux portions : lo La portion supérieure, qui s'étend du foie au cœur, était primitivement le tronc commun des veines ombilicales, et plus tard la continuation de la veine ombilicale gauche, la di'oite s' étant atrophiée. Cette partie est symétrique, impaire et médiane chez l'embryon (PI. XV, hg. 12). Il convient, je crois, de chercher la cause de son transport à droite et de sa fusion avec la veine cave supérieure droite dans le développement du foie, qui se fait surtout à droite et qui entraine avec lui la veine cave à laquelle il est si fortement uni. I» La seconde portion de la veine cave comprend toute la partie de cette veine qui est iaférieure au foie. Elle est constituée chez l'embryon-par une ou deux petites veines qui vien- nent s'aboucher dans le tronc commun des veines ombilicales. Les veines ombilicales dispa- raissant et la veine cave se développant d'une manière extraordinaire, le tronc commun des veines ombilicales devient la continuation réelle de la veine cave inférieure, et en constitue la partie supérieure. Ces notions-là sout acquises, mais une question encore pendante est celle de savoir si chez l'embryon cette partie inférieure de la veine cave n'est pas double, paire et symé- ORIGINE DES VEINES PULMONAIRES. 213 veine cave inférieure a entraîné la disparition de la symétrie des veines caves supérieures et a produit les différences remarquables que présen- tent leurs embouchures. Chacun des orifices des deu.v veines caves supérieures est séparé primi- tivement, par un éperon, de l'orifice de la veine cave inférieure qui leur est intermédiaire. Ces éperons sont symétriques tant que la veine cave inférieure ou tronc commun des veines ombilicales conserve elle-même sa symétrie. Mais quand la veine cave inférieure prend un développement trés-considérable et se porte du côté de la veine cave supérieure droite au point de se fondre avec elle, l'éperon qui séparait ces deux dernières veines s'émousse et tend à disparaître. Leurs deux orifices se fondent en un orifice considérable qui envahit une grande partie de la paroi posté- rieure du sinus ou de l'oreillette. C'est ainsi que chez les Reptiles l'orifice de la veine cave supérieure gauche 8 (PI. Xlll, fig. 7) reste à gauche et en bas du large orifice commun 6, 7 des veines caves inférieure et supé- rieure droite. L'éperon de séparation 7 (PI. XIV, fi;/. 7) de la veine cave supérieure gauche persiste, tandis que l'autre^ (PI. XIV, fio. 7) s'est con- sidérablement émoussé. Il a entièrement disparu chez les Pythons. Chez les Oiseaux et les Mammifères, où le sinus tout entier s'est incor- poré aux oreillettes, et où la veine cave supérieure gauche a conservé un volume égal à la droite, ou bien est restée en retard dans son développe- ment, comme chez les Mammifères su[iérieurs, l'orifice de la veine cave supérieure gauche ou de la veine coronaire reste en bas et à gauche, tan- dis que l'orifice commun des deux veines caves supérieure droite et infé- rieure envahit presque entièrement les parois postérieure et supérieure de Toreillette. L'éperon de séparation de la veine cave supérieure gauche et de la veine cave inférieure est devenu la valvule de Thébésius 0 (PI. XV, fig. 13). L'éperon de séparation delà veine cave inférieure et de la veine cave supérieure droite s'est encore conservé chez les Oiseaux, mais moins bien développé que la valvule de Thébésius : et chez les Mammifères, trique, c'est-à-dire s'il n'y a pas deux veines caves inférieures dont la gauche disparait (PI. XV, fig. 12 et 13); c'est là ce que l'anatomie comparée et la tératologie sembleraient dé- montrer. Je réserve du reste cette question pour un prochain travail, et je me borue à l'indiquer en passant. 21 i ANATOMIK I:T IMIVSIOLOr.lK. répcroii, nnlioreinenl effacé, n'est plus rem |ila(;é que par une sarl'acc con- vexe enlièreuient lisse. Mais dans ces deux classes, la symétrie de situa- tion des veines caves supérieures disparaît complètement, parce que la veine cave inférieure, ayant pris des dimensions considérables et s' étant (léjetée adroite, a repoussé en haut, en avant et à droite la veine cave supérieure droite, et l'a fortement éloignée de la veine cave supérieure gauche des Oiseaux, ou veine coronaire de la plupart des Mammifères. C'est ainsi quel'anatomie comparée vient compléter les données del'em- hryologie, et établir que la veine cave inférieure n'est en définitive qu'un affluent très-développé du confluent des veines caves supérieures. Cette donnée rend facile l'explication des deux cas, où il y avait dans l'oreillette gauche abouchement simultané delà veine cave supérieure gauche anor- malement conservée, et de la veine cave inférieure. Ce n'est pas, en effet, faire une hypothèse trop prétentieuse que de penser que dans ces cas-là la veine cave inférieure s'était étendue, élargie, non vers la veine cave su- [)érieure droite, mais vers la veine cave supérieure gauche, dont la conser- vation tenait peut-être à ce rapport extraordinaire. On sait combien sont fréquentes dans le système veineux ces variations d'insertion et de déve- loppement, qui peuvent du reste n'avoir aucune influence physiologique. Cette donnée accordée, on comprend (|ue la fusion déjà reconnue de la veine cave supérieure gauche et des veines pulmonaires, entraîne avec elle, dans ces cas particuliers, l'inosculation de la veine cave inférieure dans l'oreillette gaucho. Cette explication me parait du reste la seule possible eu présence de ces considérations, que la veine cave inférieure est un affluent du sinus des veines caves supérieures, et non un affluent indépen- dant et direct du cœur , et que l'ouverture anormale de la veine cave inférieure dans l'oreillette gauche a été accompagnée, dans les cas que je rapporte, de la conservation de la veine cave supérieure gauche et de son inosculation simultanée dans l'oreillette gauche. Les faits anormaux d'ouverture de la veine cave inférieure dans l'oreil- lette gauche, loin donc de paraître établir des relations directes entre ce vaisseau et les veines pulmonaires, confirment au contraire ce fait, appuyé du reste par d'autres considérations, que les veines pulmonaires sont en relation directe avec les veines caves supérieures, et en relation indirecte ORTGINK DES VEINES PULMONAIRES. 1\^> seulement, et par l'intermédiaire des veines caves supérieures, avec la veine cave inférieure. Si nous reconstituons maintenant d'une manière idéale le faisceau vei- neux de l'embryon, qui est comme l'épanouissement du pôle veineux du cœur, et dont l'ensemble vient s'aboucher et confondre son sang dans le sinus commun, nous le trouverons composé de la manière suivante (PI. XV, //<;. 12): 1° Deux vaisseaux 9,9', de beaucoup les plus considérables à celte époque et se dirigeant en sens opposé de chaque côté de la ligne médiane. Ce sont les canaux de Guvier, où aboutissent des veines caves supérieures 2, dont l'importance est bien plus grande que celle des autres veines, et les veines cardinales postérieures 4 qui formeront les veines azygos. 2o En arrière du confluent de ces veines vient s'aboucher le tronc commun ^0 des veines omphalo-mésentériques 5, que remplacent plus tard les veines ombilicales 6. Ce tronc est appelé à former dans l'avenir la partie supérieure de la veine cave inférieure. Il communique directement alors avec la partie postérieure du sinus S, et son orifice est immédiatement compris entre les orifices des deux veines caves supérieures. 3° Enfin s'ouvre dans le sinus, au-dessus et en avant des veines caves supérieures, et dans l'angle formé supérieurement par les orifices de ces veines, deux vaisseaux extrêmement petits, qui sont les veines pulmo- naires •/,-/' très-rudimentaires, apportant au sinus du sang noir, comme les autres veines , et appartenant à cette époque au système veineux général. Le sinus n'étant qu'une dilatation de la partie des veines voisine des auricules, nous devons, à cause même des faibles dimensions des veines pulmonaires et de leur apparition relativement tardive, regarder ces veines comme se rendant dans une partie de sinus qui est le résultat de la dilatation des veines caves supérieures, et par conséquent comme des affluents de ces mêmes veines . 11 nous reste maintenant à rechercher com ment se fait la séparation de ces deux ordres de veines, et comment s'étabHt par suite l'indépendance des deux systèmes veineux. C'est ce que nous allons examiner. ?!G ANATdMIK KT PIIYSK )I,(K;IK. Lafig. 7 (PI. XIV) représente un cœur de Tortue mauresque sur lequel on a sectionné la partie postérieure du sinus correspondant à la veine cave inférieure et à une portion des deuX' veines caves supérieures. Cette partie sectionnée a été renversée en bas. La large ouverture ainsi pratiquée a mis à nu, à droite l'orifice G des veines caves dans l'oreillette droite ferme par ses deux valvules, et à gauche de cet orifice la cloison ST, qui sépare le sinus des veines pulmonaires du sinus veineux général. Cette cloison est mince, délicate; elle a la forme d'un triangle isocèle dont le sommet, dirigé en bas, est légèrement recourbé vers la droite. La face postérieure est convexe dans le sens transversal ; cette cloison se compose du reste de deux parties qui se réunissent à angle droit arrondi: une partie gauche S ou transversale qui est la plus étendue, et une partie antéro-postérieure T qui forme une bande étroite à côté de l'orifice des veines caves. Si, comme sur la /hj. 7 bis, on pratique une fenêtre dans celte cloison, on met en communication directe le sinus du système veineux général avec le sinus veineux pulmonaire. Cette cloison est dont venue diviser l'ancien sinus commun en deux parties très-inégales, et consiiluela. cloison du sinus. Comment s'est formée cette cloison? C'est ce que je n'ai pas constaté directement ; mais il est permis de penser que cette cloison n'est autre chose que l'éperon S qui séparait les veines caves supérieures des veines pulmonaires, éperon qui, se prolongeant de haut en bas et d'arrière en avant, a fini par fermer l'ouverture de communication. Des deux bords de cet éperon, le droit est venu se souder à la face gauche de la cloison des auricules, au niveau du bord adhérent de la valve gauche de l'orifice des veines caves, et le bord gauche est attaché à la lèvre gauche de l'orifice de communication du sinus pulmonaire et de l'oreillette gauche (PI. XV, A.'/- 3). J'ai pu constater chez de jeunes Tortues que la cloison du sinus est constituée dans le jeune âge par une lame transversale légèrement convexe, comparable à celle des Batraciens 5 (PI. XV, /iy. 1). L'étroite bande antéro- postérieure T (PI. XIV, fig. 7) n'existe pas alors comme portion distincte. Ce n'est que par suite du développement et de la dilatation du sinus pul- monaire que la cloison du sinus prend à droite, où elle est libre et dégagée de la veine cave supérieure gauche, prend, dis-je, une convexité exagérée ORIGINE DES VEINES PULMONAIRES. îtT qui aboutit à la formation d'un angle droit arrondi, ei à la distinction de deux portions de la cloison, l'une transversale et l'autre antéro-postérieure plus étroite i0,3 (PI. XV, tifJ- 3). Tant que la cloison du sinus n'est pas venue adhérer à la cloison des auricules, il y a entre les deux sinus un orifice de communication en forme de boutonnière ou de fente, que j'appellerai fente de Botal, et qui correspond partiellement au trou de Botal des Vertébrés supérieurs ; je dis partielle- ment, pour des raisons que je soumettrai bientôt à l'appréciation du lecteur. L'observation directe n'a pas encore dévoilé ce qui se passe chez les Oiseaux et les Mammifères au niveau du sinus pulmonaire, pendant les pre- mières périodes de la vie embryonnaire. Toutefois, on retrouve si exac- tement, chez les fœtus et les adultes de ces Vertébrés supérieurs, des par- lies analogues à celles dont nous venons d'exposer le développement chez les Reptiles, qu'on est presque en droit de supposer qu'il n'y a pas de différences essentielles dans les processus. Il est certain qu'à une période reculée de la vie embryonnaire, vers les sixième ou septième semaines environ pour l'embryon humain, le système veineux pulmonaire n'a pas acquis une importance relative supérieure à celle qu'il a chez les Ghèloniens. Ghezle fœtushumain, nous trouvons net- tement la portion transversale de la cloison du sinus, iO (PI. XV, fig. 8), et la portion antéro-postérieure très-étroite 3, sous la forme d'une bande que j'ai rencontrée encore distincte chez des fœtus humains âgés de 6 mois environ P (PI. XIV, fig. 1). Ces deux portions de la cloison du sinus sont réunies à angle droit, comme chez les Reptiles. Pendant que s'est formée la cloison du sinus, apparaissait la cloison des auricules, sous la forme d'un croissant vertical partant de la paroi antérieure des oreillettes G (PI. XIV, fuj. 1); i, 2, (PI. XV, fig. 8). Tant que le sinus pulmonaire a de faibles dimensions, on conçoit que le bord postérieur de cette cloison des auri- cules puisse atteindre le bord antérieur de la bande antéro-postérieure de la cloison du sinus, de telle sorte qu'entre ces deux demi-cloisons existe une fente plutôt qu'un vrai trou de Botal, et c'est justement cette fente qui correspond exactement à ce que j'ai désigné chez les Ghèloniens sous le nom de fente de Botal. A cette époque donc, c'est-à-dire tant que les veines pulmonaires et le sinus sont très-réduits, la cloison des cavités auri- 28* "JIS ANATOMIK KY IMIYSIOl.OGIK. culairos du cœur des Oiseaux et des Mammifères ressemblerait à la cloison des Reptiles, avec cette différence que, tandis que les deux cloisons unissent par adhérer par leur bord correspondant chez les Reptiles, cette adhésion n'aurait point lieu chez les Oiseaux et chez les Mammifères. La cloison, quoique complète dans ses éléments, n'en serait pas moins imparfaite et permettrait au sang du sinus des veines caves de passer dans le sinus des veines pulmonaires. Si la soudure des deux cloisons avait lieu dans cet état, cette partie auriculaire du cœur représenterait donc exactement la partie correspondante du cœur des Reptiles. Deux ordres de conditions permettent que chez les Reptiles la sou- dure des deux cloisons s'effectue à cette période de leur formation : 1" L'imperfection de la cloison des ventricules et des aortes, etla conserva- tion de l'aorte gauche, qui laissent le sang des veines caves parvenir à Ira- vers le ventricule droit dans le ventricule gauche et dans les aortes, sans avoir à traverser l'oreillette gauche. Chez les Mammifères et les Oiseaux, la cloison ventriculaire se complète de très-bonne heure, et le passage du sang d'un ventricule à l'autre devient bientôt difficile et finalement impossible. C'est alors que commence pour le développement du cœur une nouvelle période dont je parlerai dans un instant, et qui correspond à la formation du trou de Botal proprement dit; 2" En second lieu, ce qui fait que chez les Reptiles la soudure de la cloison s'effectue à cette période de sa formation, c'est que c'est aussi à cette période que l'animal naît à la vie aérienne et pulmonaire, tandis que l'Oiseau et le Mammifère ne doivent y naître que beaucoup plus tard. Il s'ensuit que, l'inégalité de tension des deux oreillettes étant maintenue jusqu'à l'époque où fonctionne le système pulmonaire, il y a nécessairement écartement des deux cloisons par le sang qui passe du sinus des veines caves dans celui des veines pulmonaires; mais on com- prend que c'est là, entre l'état des Reptiles et celte période du développe- ment des oreillettes des Oiseaux et des Mammifères, une différence co7idi- tionnelle et non une différence essentielle. Mais bientôt surviennent chez les Oiseaux et les Mammifères des modifi- cations qui, éloignant l'un de l'autre les bords opposés de la boutonnière qui existe entre les deux cloisons, non-seulement empêchent leur sou- dure, mais établissent une perforation considérable entre les oreillettes. La ORIGINE DES VEINES PULMONAIRES. 219 cloison inlerventriculaire s'est complétée, et le système pulmonaire, se pré- parant au rôle important qu'il aura à remplir, commence à prendre anato- miquement un développement beaucoup plus considérable que chez les Reptiles et en rapport avec la destination purement et franchement aérienne de l'animal. Les veines et le sinus pulmonaires 11 (PI. XV, fig. 8) se dilatent considérablement; la fente de communication des sinus s'élargit fortement et se transforme en trou de Botal. Le trou de Botal proprement dit serait donc une disposition propre au cœur des animaux franchement aériens; il est la conséquence de l'importance e.xtraordinaire que prend le système pulmonaire. Le trou de Botal, disposition nouvelle, appelle la création d'un opercule nouveau : c'est la valvule du trou ovale, 3 a (PI. XV, /ig. 8), Z (PL XIV, /iy.i). queles embryologistes ont prise à tort pour la val- vule interne de la veine cave inférieure, et qui n'est en réalité qu'une partie surajoutée à la bande postérieure P (PL XIV, fig. 1), 3 b (PL XV, fig. 8) de la cloison du sinus, et par conséquent le résultat d'un développement extraordinaire de l'éperon de séparation des veines caves et des veines pulmonaires. Les vues que je viens d'exposer sont basées sur une comparaison ri- goureuse des dispositions anatomiques définitives, plutôt que sur l'obser- tion directe du développement des parties. La science présente sur ce sujet plus de desideratas que de faits acquis, et si je ne puis avoir la prétention d'éclairer tous les points obscurs, j'ai du moins le désir de provoquer de nouvelles observations en exposant des vues qui me paraissent dignes d'intérêt. Si ces vues étaient confirmées, il serait donc permis dédire que chez les embryons d'Oiseau et de Mammifère la séparation des systèmes veineux du cœur présente plusieurs périodes distinctes : 1" Première période, pendant laquelle il y a absence de la cloison; l'oreillette est comparable à l'oreillette des Poissons : je la désignerai sous le nom de période ichtliyenne; 2» Seconde période, pendant laquelle la cloison est complète maisimpar- faite, par suite du défaut de soudure des deux cloisons et de l'existence de la fente de Botal : je le désignerai sous le nom de période reptilienne, parce qu'on y trouve exactement les éléments de la cloison des Reptiles, et au même degré de développement ; 220 ANATOMIK KT PHYSIOLOGIE. 3" Troisième [)éi'iodo, [jendant laquelle existe lo trou dr, Jiotal, el à laquelle je donne le nom de période post-reptilienne ; 4» Enfin quatrième période, pendant laquelle la cloison du sinus s'est complétée par le développement de la valvule du trou ovale et par^la sou- dure des deux cloisons : c'est la période aérienne. J'insiste sur ces considérations, parce qu'elles intéressent l'anatomic phi- losophique, et qu'elles permettraient de rapprocher plus qu'on n'a cru être en droit de le faire, le cœur des embryons d'Oiseau et de Mammifère du cœur des Reptiles adultes. Il en résulterait que la persistance du trou de Hotal, que l'on a invoquée comme établissant une différence radicale entre le cœur de l'embryon des Mammifères et celui des Reptiles adultes, ne constitue pas le sujet d'une objection sérieuse an rapprochement de la série embryonnaire et de la série zoologique, |)uisque cet orifice appartien- drait à une période de développement qui a dépassé la période reptilienne et qui est exclusivement propre au développement des animaux à vie essen- tiellement aérienne, c'est-à-dire à large système veineux pulmonaire. J'ai cru devoir toucher ici à cette question, sur laquelleje reviendrai plus tard. La cloison du sinus, considérée dans son ensemble chez les Mammifè- res et les Oiseaux, se compose donc de deux portions unies à angle droit, une portion postérieure transversale qui sépare le sinus pulmonaire de la veine cave supérieure gauche ou de la veine coronaire 10 (PI. XV, fig. 5, 6, 7, 8), et une portion antéro-postérieure, décomposable eUe-méme en deux segments : un ruban postérieur que nous avons trouvé chez les Reptiles 5 (PI. XV, fig. 3 ) et f (Pl. XIV. fig. 1) , et la valvule du trou ovale qui sépare le sinus pulmonaire du sinus de la veine cave supérieure droite et de la veine cave inférieure. La longue élude que je viens de faire de l'origine et des transformations du système veineux pulmonaire m'a conduit à une théorie que je dois résumer en terminant. Il me paraît légitime de penser qu'au moment où les poumons appa- raissent chez l'embryon, non comme organe de la respiration, mais comme parties quelconques du corps ayant besoin dénutrition, un système vascu- laire complet leur est dévolu ; et il y a par conséquent des artères et des ORIGINE DES VEINES PULMONAIRES. !îl veines pulmonaires appartenant aux systé nés gcn&raux de la circulation. Si l'on n'est pas fixé sur l'origine et les transformations ultérieures des veines pulmonaires, il n'en est pas de même pour les artères. On sait en effet que ces artères, d'abord très-grèles, appartiennent au système artériel général, et sont de petites branches naissant du cinquième arc branchial gauche chez les Mammifères , du cinquième arc branchial droit chez les Ophidiens, des cinquièmes arcs branchiaux droit et gauche chez les Chéloniens et les Oiseaux' . On sait aussi que c'est par un cloisonne- ment progressif du bulbe aortique que ces artères deviennent de plus en plus indépendantes du système aortique général, pour constituer les artères pulmonaires ; et nous verrons plus tard que c'est aussi par un cloisonne» ment spécial du ventricule unique que les deux systèmes artériels se trou- vent complètement séparés et en relation chacun avec un compartiment spécial du ventricule. Enfin, quand l'organe pulmonaire a acquis toute son importance et remplit tout le rôle auquel il est appelé, les artères pulmo- naires acquièrent un volume proportionné à la mesure de leurs fonctions. Je rappelle ici ces faits pour ajouter que je ne crois pas pousser trop loin l'analogie en pensant que le système veineux pulmonaire doit présenter la même succession de phénomènes et de transformations. On est en effet conduit à penser que les veines pulmonaires formant primitivement le sys- témeveineux nutritif des poumons embryonnaires, sontd'abord de très-petites veines appartenant au système veineux général, et viennent comme telles se rendre au confluent ou sinus veineux général, dans l'angle formé supé- rieurement par les veines caves supérieures. Un cloisonnement progres- sif séparerait du sinus veineux général la portion de sinus où débouchent les veines pulmonaires ; et le prolongement de ce cloisonnement formerait la cloison du sinus, et conséquemment la portion postérieure de la cloison des oreillettes, de même que (nous le verrons plus loin) le prolongement du cloisonnement du bulbe artériel avait constitué une portion de la cloison interventriculaire. Le cloisonnement dos oreillettes se complétant antérieu- rement par la formation de la cloison des auricules, chacun des deux Ratlike; L'ntersuchungen ilber die Aortmwurzdn. {Denlischrijl de.r Acad. Wien. 1857.) 222 ANATOMIK KV PU VSU)!,1)(".IK. systèmes veineux se trouve eu relation avi.-c une cliauibi-e distincte de roreillelle commune. L'importance très-a(xruo de l'organe pulmonaire et son entrée en fonctions amènent un développement proportionnel des veines pulmonaires. Ainsi s'e.xpliquerait, sans forcer l'analogie et par des pro- cessus dont la réalité est constatée pour le système artériel, la séparation complète des systèmes veineu.x de la grande et de la petite circulation. Il me serait facile de démontrer que la théorie que je viens d'édifier sur les données de l'embryologie, de la tératologie et de l'anatomie comparée, rend un compte satisfaisant de tous les faits, soitnormaux, soit anormaux, et embrasse les données do la science sur cette question. Mais, comme il me reste encore un vaste champ à parcourir, je laisse au lecteur le soin de compléter mon travail à cet égard. DEUXIÈME PARTIE Philosophie naturelle. LIVRE PREMIER Transformations successives du Cœur dans la série des Vertébrés. L'objet de ce chapitre est démettre en lumière la série des modifications (jui permettent de s'élever progressivement du cœur de Poisson au cœur de Mammifère, et de démontrer par là que ces organes, si différents en apparence, ne sont, en fin de compte, que des modifications d'un même organe. L'étude que je vais faire des transformations successives du cœur repose tout entière sur les descriptions qui m'ont occupé jusqu'à présent. Cette étude a du reste été commencée dans le chapitre précédent : j'y ai montré en effet les changements successifs qui conduisent des oreillettes de Poisson aux oreillettes de Mammifère. Quand j'ai décrit les ventricules, il m'est également arrivé de poursuivre à travers les cinq classes de Verté- brés les états différents d'une même partie du cœur. Néanmoins, pour les chambres ventriculaires, pour le bulbe, pour les valvules auriculo-ventri- culaires, pour la cloison, pour les orifices et les troncs aortiques, je me suis borné à de simples indications, insuffisantes pour une matière aussi délicate et aussi intéressante. C'est donc là un sujet que je dois reprendre, en m'exposant volontairement à quelques redites ; je tiens du reste à le présenter dans son ensemble pour en faire un tout coordonné, sans comp- ter qu'il est utile de rapprocher les modifications survenues dans les par- ties avec les changements de direction que subit l'axe complexe des cavités du cœur. Ces diverses transformations de forme et de direction ont entre elles des corrélations très-importantes qui ne peuvent être mises en lu- mière que par une étude complète de l'ensemble. 224 PIIILOSOPHIK NATURErXK. CHAPITRE PREMIER PASSAGE DU CŒUR DE POISSON AU CŒUR D'AMPHIBIEN. Rien n'est plus facile que de démontrer les affinités profondes qu'il y a entre le cœur des Poissons et celui des Amphibiens, et de passer de l'un de ces organes à l'autre. Chez le Crapaud, la Grenouille, la Salamandre tache- lée, l'Axolotl, l'axe commun des trois cavités successives du cœur (bulbe, ventricule et oreillette) représente une anse ou tube en U à convexité in- férieure et placé dans un plan transversal, de telle sorte que l'orifice infé- rieur du bulbe et l'orifice auriculo-ventriculaire sont situés transversalement à côté l'un de l'autre, l'orifice bulbaire à droite de l'orifice ventriculaire (PI. XVI, /ig. 2). Nous savons, pour les Poissons, que si chez un certain nombre les cavités cardiaques forment une série antéro-postérieure dont l'axe général n'offre que des sinuosités, chez d'autres l'axe commun est courbé eu anse à convexité inférieure et placé dans un plan vertical aniéro- postérieur, de telle sorte que l'orifice bulbaire est exactement placé au- devant' de l'orifice auriculo-ventriculaire (PI. XVI, fig. Ij. Ces cœurs ne diffèrent donc à cet égard que par la direction du plan dans lequel s'opère la courbure primitive de l'axe. C'est là certes une différence sans importance, et qui tient peut-être au développement précoce , au volume ou à la position d'organes qui, comme les parois thoraciques par exemple, sont places sur les parties latérales du cœur. Mais cette diffé- rence, déjà incapable de s'opposer à une assimilation presque complète des deux cœurs, devient tout à fait négligeable, par cette considération que chez certains Poissons l'anse formée par l'axe des cavités du cœur se ' Je répète encore ici que j'ai pris pour poinl de départ, dans mes descriptions, la position du cœur de l'Homme. Le lecteur comprendra donc que au-ihmnl signifie au-dessuus, par rap- port à la station horizontale du Poisson. TRANSFORMATIONS DU CŒUR. 115 trouve dans un plan vertical oblique, c'est-à-dire intermédiaire entre le plan antéro-postérieur de certains Poissons et le plan transversal des Am- phibiens(Pl. XVI, /ig. 1 Ois ); et comme le plan oblique se rapproche plus ou moins de la direction transversale, la transition est on ne peut plus mé- nagée et la différence insensiblement effacée. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de revenir sur l'homologie parfaite que nous ont présentée les oreillettes des Poissons et les cavités de même nom des Batraciens. Chez ces derniers seulement, nous l'avons vu, une cloison s'établit dans le sinus et dans les auricules, pour séparer les deux systèmes veineux. Le Lepidosiren paradoxa, chez lequel la cloison des au- ricules est incomplète, forme un type intermédiaire extrêmement intéres- sant entre les Poissons et les Batraciens. La cavité ventriculaire des Amphibiens offre une identité complète avec celle des Poissons: pas de cloison et cavité unique. Chez quelques-uns cependant, le Siren laccrtina' par exemple, on constate une proéminence plus accentuée de deux colonnes charnues opposées, donnant lieu à l'exa- gération d'une de ces cloisons incomplètes, à bord concave, que nous avons vues dans le ventricule des Batraciens anoures (PI. XII, fig.Z). C'est là peut-être un premier degré de la cloison interventriculaire, que nous verrons plus accentuée chez tous les Reptiles proprement dits. J'ai déjà dit que la structure des parois venlriculaires des Poissons était moins aréolaire et ca- verneuse que celle des Amphibiens ; c'est là une différence de degré qui s'efface pourtant d'une manière complète dans certains cas. Ainsi, chez les Gades, suivant la remarque intéressante de M. le professeur Jourdain^, les parois ventriculaires manquent de la couche musculaire à tissu dense qu'on rencontre chez les Poissons. Toute l'épaisseur de la paroi ventriculaire pos- sède une structure spongieuse, et au moment do la diastole s'imbibe de sang noir. Aussi le cœur des Gades, comme celui des Batraciens anoures, ne possède-t-il pas de vaisseaux. Le bulbe seul reçoit un rameau presque capillaire de l'artère hyoïdienne. Le cœur des Poissons présente, comme celui des Amphibiens, une subdi- ' OweQ; Trans. oj the Zool. Soc, tom. I, pag. 216. '■^ Jourdaiu; Comptes-rendus de l'Académie des sciences. '28 janvier 1867. 2r 226 PHILOSOPHIE NATURELLE. vision de lacavilé venlriculairc par une saillie charuuo supérieure en deux loges très-inégales el communiquant Irès-lârgement entre elles. L'une, grande, est en relation directe avec les oreillettes: c'est la cavité ventriculaire proprement dite ; l'autre, petite, infundibuliforme, présentant supérieure- ment l'orifice du bulbe, forme la cavUè vestibulaire des troncs artériels. Chez les Amphibiens comme chez les Poissons, le bulbe conserve une certaine longueur et est tout à l'ait indépendant du ventricule. Chez la plupart des Poissons osseux, il ne possède de valvule qu'à son orifice inférieur; chez d'autres (les Plagiostomes, les Gaaoïdes), il a, comme chez les Amphibiens, un appareil valvulaire plus ou moins complet à ses deux extrémités. Chez certains Poissons (les Poissons osseux), le bulbe est formé presque uniquement de tissu élastique el de quelques rares fibres muscu- laires lisses; chez les Sélaciens, etc., il est entouré, comme chez les Batra- ciens, d'une épaisse couche de fibres musculaires striées, circulaires et concentriques. Il y a donc extérieurement identité entre le bulbe des Poissons et celui des Amphibiens; mais dans l'intérieur s'établit chez ces derniers une disposition nouvelle que nous avons longuement étudiée ; je veux parler de la demi-cloison en pas de vis qui divise la cavité du bulbe en deux rampes, l'une aortique et l'autre pulmonaire. Quant aux vaisseaux naissant du bulbe, l'histoire du développement du têtard de la Grenouihe et l'anatomie des Batraciens pérennibranches dé- montrent assez qu'ils ne sont que des modifications survenues dans les crosses branchiales primitives des Poissons. Je n'insiste pas sur ces points, qui sont faciles à saisir et dont la plupart sont parfaitement connus. Je préfère m'arrèter plus longuement sur la comparaison des cœurs d'Am- phibien et de Reptile; j'espère pouvoir sur ce point présenter quelques considérations nouvelles. TRANSFORMATIONS DU CCEUR. CHAPITRE II PASSAGE DU CŒUR D'AMPHIBIEN AU CŒUR DE REPTILE A VENTRICULES COMMUNICANTS. Je vais d'abord porter mon attention sur les Reptiles à ventricules com- municants, qui diffèrent notablement des Crocodiliens. Il y a dans le cœur des Chéloniens, que j'ai pris pour type (PI. XVI, fîg. 3), comparé au cœur des Batraciens [fig. 2), deux modifications très-impor- tantes à signaler. Je constate d'abord le transport de la branche droite de l'i/que forme l'axe courbe des cavités du cœur, en avant de la branche gauche et vers la gauche, de telle sorte que les orifices artériels, au lieu d'être, comme chez les Batraciens, directement à droite des orifices auriculo- ventriculaires, se trouvent en avant et un peu à droite. C'est ce que montre bien la/tg'. 3 (PI. XVI). qui représente exactement la coupe trans- versale d'un cœur de Tortue mauresque préalablement injecté au suif et dépouillé dans l'essence de térébenthine. Ce transport de la branche droite du cœur et ce changement de situation réciproque des deux bran- ches de 1'^ sont des conséquences du développement et un résultat pro- duit progressivement, de lehe sorte que la transition des Batraciens aux Reptiles est à cet égard très-facile à saisir. Une seconde modification, très-importante au.ssi, consiste dans une in- troduction partielle des éléments du bulbe dans la branche droite de VU, introduction qui va même jusqu'à la fusion partielle de ces éléments avec la portion ventriculaire droite du cœur. Il résulte de là que la por- tion droite ventriculaire du cœur ou la branche droite de 1'^ acquiert plus d'importance et de développement qu'elle n'en avait chez les Pois- sons et chez les Batraciens. Dans ces deux classes, en effet, cette partie du ventricule consistait simplement en une sorte dediverticulum très-restreint 228 PIIII.OSOPIIIK NATURKLLK. place à droite de la saillie rmisciilaire supérieuro (PI. I, jig. 1, 2). et for- mant un vestibule très-petit pour le bulbe. Chez les Chéloniens, tout le bulbe venant s'ajouter à cet infnndibulumen accroît les dimensions et l'im- portance. Toutes les autres dispositions particulières que nous avons signalées soi- gneusement dans le cœur des Chéloniens sont des conséquences plus ou moins directes de ces denx modifications capitales. C'est ce que nous allons constater en étudiant chacune de ces dernières. Le transport de la branche droite de VU en avant de la branche gauche et vers la gauche détermine la formation d'un véritable pli sur la face antérieure du ventricule. Ce pli, qui n'existait naturellement pas chez les Poissons et chez les Batraciens, apparaît pour la première fois chez les Reptiles, nous venons de dire pourquoi. Il forme extérieurement le sillon ventriculaire antérieur, tandis qu'à l'intérieur lui correspond la saillie que nous avons décrite sous le nom de fausse-cloison. En réalité, cette fausse- cloison n'est point; comme on l'a cru jusqu'à présent, une simple colonne charnue faisant saillie sur la paroi antérieure du ventricule et ne différant que par le volume des autres colonnes charnues ventriculaires. C'est un vé- ritable repli de la paroi ventriculaire, repli saillant à l'intérieur. Cela ressort du reste clairement de l'examen du sillon ventriculaire antérieur, où l'on voit les fibres superficielles du ventricule s'enfoncer des deux côtés dans le sillon, comme si ce dernier était en effet formé par un plissement verti- cal de la paroi antérieure du ventricule. Cette disposition, évidente chez les Reptiles, ne le devient pas moins à mesure que l'on s'élève dans la série. Je la signale une fois pour toutes, et je n'y reviendrai pas. La fausse-cloison peut donc être considérée comme une conséquence du changement de rapports réciproques des deux branches de VU transversal primitif. .Te parle uniquement de la fausse-cloison, et non pas de sa lèvre, sur laquelle je vais bientôt m'expliquer. Ce sont là deux parties qu'il con- vient de distinguer soigneusement, malgré leur entière continuité, et je dirai presque leur confusion. Maisl'une. la fausse-cloison, sépare la branche gauche de VU de la branche droite, c'est-à-dire la région essentiellement ventriculaire de la région vestibulaire , tandis que la lèvre sépare en réalité le vestibule de l'artère pulmonaire du vestibule commun des deux l'IîANSFORMATIONS DU CCEUR. ^29 aortes. Elle est une dépendauce de la cloison qui divise chez les Batraciens le bulbe en deux rampes, l'une pulmonaire et l'autre aortique. C'est ce que nous allons voir en étudiant la fusion, que j'ai déjà annoncée chez les Chéloniens, de la région bulbaire avec la région ventriculaire. L'homologie du bulbe des Batraciens anoures et des vestibules pulmo- naire et aortique des Chéloniens s'établit très-facilement. On retrouve en effet dans ces dernières parties la plupart des éléments du bulbe nettement représentés et facilement reconnaissables, malgré les modifications qu'ils ont subies. Les deux éléments par excellence du bulbe, c'est-à-dire les fibres circulaires et la demi-cloison fîbro- cartilagineuse, se retrouvent particuliè- rement. Les fibres circulaires forment deux groupes : l'un inférieur, com- posé de fibres complètement confondues avec les parois ventriculaires, et constituant une couche superficielle de fibres en cravate qui embrassent l'ensemble des vestibules pulmonaire et aortique. Ces fibres, que nous retrouvons dans toute la série des Vertébrés, sont représentées en X sur un cœnr de Mouton (PI. IX, fîg. 4). Le groupe supérieur forme ce demi- anneau bulbaire que j'ai décrit avec grand soin chez les Chéloniens et les Grocodiliens, et qui, épais sur les parois de l'artère pulmonaire, s'atténue sur l'aorte gauche et n'existe plus sur la droite 1 (PI. IX. fig. 3), H (PI. XIII, fig. 5). De même que, dans ce mouvement de fusion, les fibres circulaires du bulbe, dépassant leur limite inférieure primitive, viennent occuper la surface du ventricule, de même aussi les fibres profondes des parois ven- triculaires. c'est-à-dire les colonnes verticales ou obliques, s'étendent su- périeurement, non pas seulement, comme chez les Batraciens, -jusqu'à la limite inférieure du bulbe, mais jusqu'au voisinage de sa limite supérieure, c'est-à-dire jusqu'aux orifices artériels. Voir (PI. VI. fîg. 1,2), où X désigne le demi-anneau bulbaire. Il y a donc empiétement réciproque des deux ordres de fibres. La demi-cloison fibro-cartilagineuse du bulbe des Batraciens se trouve représentée par le noyau fibro-cartilagineux que nous avons vu occuper l'extrémité supérieure de la lèvre de la fau,sse-cloison des Chéloniens. Dans l'une et l'autre classe, ce noyau présente une extrémité supérieure volumi- neuse, tandisqu'il s'amincit et s'effile inférieurement.Dan=; les deux cas aussi de la partie volumineuse et supérieure du noyau, de .sa tête pour ainsi par- 230 PHILOSOPHIE iNATUHELI.E. 1er, naissent plusieurs apophyses fibreuses ou en rtilagineusos, dont l'une C (PI. I, /ig. 1), W (PI. XII, /(■//. 2) sépare le vestibule de l'artère pulmonaire du vestibule commun des aortes, et dont l'autre, naissant à un niveau su- périeur, sépare les deux aortes l'une de l'autre E (PI. 1, fif/. 1), E (Pi. XII, fig. 2), E (PI. VI. fig. 2). Nous avons également vu ehez les Chéloniens une apophyse antérieure gauche placée entre l'aorte droite et l'artère pul- monaire. Cette apophyse est également représentée chez les Batraciens par la saillie formée à droite par le cartilage, saillie à laquelle s'insère la pointe droite de la valvule sigmoïde 1 (PI. I, fig. 1). Je fais remarquer également que si. chez les Batraciens, ces diverses apophyses servent d'in- sertion au bord adhérent des valvules sigmoïdes des oriQces artériels cor- respondants, on trouve des relations identiques chez les Chéloniens. Il résulte de ces homologics que les valvules sigmoïdes des orifices artériels dans cette dernière classe représentent les valvules sigmoïdes supérieures du bulbe des Batraciens. Les valvules inférieures que possède le bulbe chez ces derniers animaux n'existent point chez les Chéloniens ; elles font défaut, et la limite précise qu'elles établissaient entre la cavité bulbaire et la cavité ventriculaire a entièrement disparu, puisqu'il y a eu fusion des deux cavités. On peut donc considérer qu'il y a là un travail d'absorption du bulbe parle ventricule, un travail de concentration du premier vers le second, et au profit du second. Aussi les orifices des aortes et de l'artère pulmo- naire, qui chez les Batraciens s'ouvraient dans la cavité bulbaire distincte du ventricule, et à un niveau bien supérieur à celui des oriQces auriculo- ventriculaires. se rapprochent-ils considérablement, chez les Chéloniens, du niveau de ces derniers orifices, tout en leur restant un peu supérieurs, et semblent-ils s'ouvrir directement et séparément dans le ventricule, puisque le bulbe a été absorbé par ce dernier. Seulement, tandis que le noyau cartilagineux des Batraciens ne formait inférieurement qu'une étroite lame fibro-cartilagineuse séparant le bulbe en deux rampes et atteignant, sans la dépasser, la limite inférieure du bulbe, chez les Chéloniens l'expansion inférieure du noyau cartilagineux atteint un plus haut degré de dévelop- pement et de perfection. Elle forme une lame flbro-musculaire épaisse quej'ai nommée lèvre de la fausse-cloison, et qui, àcausemêmede la fusion TKANSFOIiMATIONS DU CŒUR 231 du bulbe dans le ventricule, dépasse les limites présumables du premier, contracte des relations avec le second, et joue exactement, comme la lame fibro-cartilagineuse des Batraciens, le rôle de cloison de séparation entre la rampe pulmonaire devenue vestibule pulmonaire et la rampe aortique devenue vestibule des aortes. Cette lèvre musculaire se rétrécit de haut en bas, comme la lame fibro-cartilagineuse des Batraciens, et finit, en mou- rant, au niveau de l'e.xtrémité inférieure du bord libre delà fausse-cloison. Les modifications que nous venons d'étudier dans le cœur des Chélo- niens provoquent des modifications secondaires. En voici un exemple: le ventricule des Chéloniens, comme celui des Batraciens, se compose d'une masse musculaire antérieure et d'une masse postérieure d'où partent des colonnes charnues divergeant vers les bords et le sommet du ventricule. C'est là une disposition suffisamment étudiée déjà, et sur laquelle je n'ai pas à revenir. Je tiens seulement à faire remarquer que, tandis que cette disposition présente chez les Batraciens et chez les Poissons une régularité et une symétrie presque parfaites, ainsi que le montrent les fig. 3 (PI. XII) et /^v? . 2 (PI . XVI) , chez les Chéloniens se sont produits des changements qui ont troublé cette régularité et cette symétrie. C'est ainsi que le trans- port du pôle artériel du cœur en avant et vers la gauche détermine la formation du pli antérieur ou fausse-cloison ; cette dernière, atteignant par sa base la paroi postérieure du ventricule, sépare les colonnes charnues de cette paroi en deux groupes distincts et inégaux que j'ai désignés sous les noms de faisceaux droit postérieur et oblique gauche postérieur (PI. VI, fig. 1 et 2). De plus, le faisceau droit antérieur, qui est une dépendance de la masse charnue antérieure du ventricule H (PI. VI, fig. 1), se trouve entraîné en avant et vers le gauche avec le faisceau artériel, à la paroi antérieure duquel il appartient. Son extrémité inférieure étant relative- ment moins déplacée, ce faisceau acquiert ainsi une obliquité générale d'arrière en avant et de bas en haut, et par là s'établissent ces relations remarquables que j'ai longuement étudiées et qui lui permettent d'aplatir ra- pidement et d'oblitérer, lors de sa contraction, le vestibule de l'aorte gauche. J'ai décrit dans le cœur des Reptiles à ventricules communicants une disposition médiocrement prononcée, mais évidente, et qui est un état imparfait de formation de la cloison interventriculaire proprement dite. 232 PHILOSOPHIE NATURELLE. J'ai dit en effet que les colonnes charnues qui naissent au-dessous de la cloison inter-auriculaire sont plus saillantes que leurs voisines et s'entre- croisent plus tôt; c est là une modification que nous avons trouvée chez quelques Âmphibiens, mais seulement à l'état de vestige. Ces colonnes 0, P(P1. V, /ig. 3), }', Z (PI. VI, fig. 2) sont les premières traces de ce que j'ai désigné chez les Crocodiliens et les Vertébrés supérieurs sous le nom de faisceaux rayonnants antérieurs et postérieurs; leur rôle est d'étabhr un rétrécissement ou goulot entre la portion du ventricule dans laquelle s'ouvre l'oreillette droite et celle qui communique avec l'oreillette gauche. C'est réellement et précisément la trace de la cloison intervenir iculaire pro- prement dite qui correspond au plan de la cloison inter-auriculaire, et con- stitue sa continuation directe dans le ventricule. D'autre part, les Amphibiens et les Reptiles présentent des traces de di- vision du vestibule aortique sur lesquelles je dois revenir, pour jeter une pleine clarté sur le mode de formation de la cloison complète des Crocodi- liens. J'ai décrit chez les Batraciens une apophyse fibreuse supérieure du noyau cartilagineu.x du bulbe £'(P1. I, ftg. 1). Cette apophyse forme une demi-cloison qui divise en deux loges l'espace inter-aortique. Nous avons retrouvé chez les Chéloniens, les Ophidiens, etc., une apophyse semblable E (Pl.VI, fig. 1),E (PL XII, fig. 2). Seulement il y a chez ces Reptiles ce perfectionnement, que la saillie de cette apophyse est continuée infcrieu- rement par une bande fibreuse saillante 0 (PI. V, fig. 4), E (PI. VI, f\g. 2) dépendant d'une couche fibreuse épaisse qui recouvre la face postérieure de la fausse- cloison. Cette bande fibreuse recouvre l'angle saillant formé en arrière par l'union de la fausse-cloison et de sa lèvre. Une couche fibreuse épaisse occupe aussi la paroi postérieure du vestibule des aortes, mais sans former de saillie notable. Le vestibule commun des deux aortes présente donc ainsi, au niveau de l'angle postérieur de la fausse-cloison, un rudiment de cloisonnement et de division en vestibule de l'aorte gauche et vestibule de l'aorte droite. — On conçoit que si la saillie fibreuse antérieure parvenait à atteindre la paroi posiérieure, les deux vestibules seraient entièrement séparés, et il y aurait une vraie cloison intervestibutaire. Nous verrons plus loin que ce processus se réalise avec quelques modifications chez les Gro- codiliens et les Vertébrés supérieurs. Pour le moment, j'insiste sur la dis- TRANSFORMATIONS DU COEUR. 233 tinction de la cloison mtcrventricidairc et de la cloison intcrvcstibulaire. La première f (PI. XVI, //r/. 7j tend à séparer en deux comparlimenls la partie ventriculaire du cœur, en y continuant pour ainsi dire la cloison inier-auriculaire; la seconde 3 tend à diviser en deux la portion vesti- bulaire ou bulbaire du cœur, en y continuant la cloison Intcr-aovtique. La première est une radiation du pôle veineux dit cœur vers le ventricule, la seconde est une radiation du pôle artériel vers le ventricule également. La première est originairement musculaire, la seconde fibreuse. Chez les Chéloniens, les Ophidiens, les Sauriens, c'est-à-dire chez les Reptiles à ventricules communicants, ces deux cloisons n'atteignent pas leur entier développement et présentent toujours une lacune plus ou moins étendue; mais, en supposant qu'elles atteignissent tout leur développement, elles ne parviendraient point à former une cloison complète et à séparer parfaitement le ventricule en deux cavités. Pour cela, il faudrait en effet que le bord inférieur de la cloison intervestibulaire pût venir se souder au bord supérieur de la cloison interventriculaire. Or cette rencontre ne saurait avoir lieu chez les Reptiles à ventricules communicants, parce que les deux plans verticaux dans lesquels se trouvent comprises ces deux cloi- sons sont transversalement fort éloignés l'un de l'autre, ainsi qu'on peut le voir clairement sur les/*;/. 4 (PI. V), fig. 2 (PI. "VI), fig.2 (PI. XII}, fig. 7 (PI. XVI), et fig. 2 (PI. XVII). La figure schématique? (PL XVI), surtout, montre fidèlement toute la distance qui sépare ces deux cloisons et l'im- possibilité pour elles de se rencontrer bord à bord et de se souder. Pour que cette impossibilité disparût, il faudrait que les plans des deux cloisons se rapprochassent transversalement, et c'est précisément ce qui a lieu chez les Grocodiliens, par un mécanisme que nous étudierons soigneusement quand il s'agira de ces derniers (PL XVI, fig. 8 et 8 bis). Pour compléter cette étude du passage progressif du cœur des Batraciens à celui des Reptiles, il me reste à poursuivre dans ces deux classes le mode de constitution des valvules auriculo-ventriculaires. La disposition générale des valvules auriculo-ventriculaires chez les Poissons osseux est celle de valvules sigraoïdes à concavité inférieure, dont les cornes et quelquefois certains points du bord libre donnent insertion à des faisceaux musculaires dépendant des colonnes charnues des 3g* ?34 l'lllI,()SOPIIIR NATURELLE parois veiilriculaires. T.es Squales présentent une disposition différente: leur orifice auriculo-ventriculaire est garni d'une tente valvulaire fibreuse unique, dont le bord libre est attaché par plusieurs points de son pour- tour aux parois musculaires du ventricule '. Les organes valvulaires correspondants des Batraciens présentent des dispositions qu'il est très-aisé de considérer comme de simples modifications ou des combinaisons de ces dernières. Chez le Crapaud, par exemple, nous avons vu l'appareil valvulaire auriculo-ventriculaire se composer d'une série de valvules adhé- rentes par un de leurs borda au pourtour de l'orifice, et dont le bord libre dentelé et la face inférieure donnaient, insertion à de petits tendons nais- sant des colonnes charnues du ventricule. Dans d'autres cas, comme chez le Siren lacerUna, à cette disposition s'ajoute un appareil ou voile central, de faibles dimensions d'ailleurs, à la face supérieure duquel s'insère la cloison inter-auriculaire. et dont les extrémités antérieures et postérieures sont en relation avec les brides charnues du ventricule. J'ai à peine besoin de faire remarquer toute l'analogie qu'il y a entre l'appareil valvulaire des Poissons osseux et celui des Batraciens anoures, et entre l'appareil valvulaire des Squales et la tente centrale du Siren lacertina. Ce dernier animal présente en réalité une combinaison de ces deux appareils, l'un zonaire et périphérique, l'autre central. Du reste, je dois dire, pour com- prendre ces diverses dispositions dans une formule générale, que les val- vules auriculo-ventriculaires ne sont au fond que des appareils tendineux dépendant des faisceaux charnus les plus internes des parois ventriculaires. Or ces tendons, épanouis sous forme de lames, peuvent venir s'insérer directement à la portion correspondante du pourtour de l'orifice et con- stituer ainsi les valvules sigmoïdes des Poissons osseux, les valvules zonaires des Batraciens anoures ; ou bien ces lames tendineuses peuvent converger et venir se confondre les unes avec les autres vers le centre de l'orifice, de manière à constituer un voile aponévrotique central, comme chez les Squales et le Sh'en lacertina. Ces variétés de forme et de disposition ne doivent point nous surprendre, et ne portent aucune atteinte à la certitude des homologies ; car s'il est des appareils qui dans un même organe varient ' Cuvier; Anat. comp , tom. VI, |)dg 341. THANSFORMATIONS DU CŒiUR. 235 considérablement leur forme et leur disposition . ce sont certainement les appareils aponévrotiques et tendineux. Mais si les appareils valvulaires auriculo-ventriculaires présentent dans les classes précédentes des variations si remarquables qu'il semble quelquefois difficile d'établir clairement leur homologie, on peut atfirmer d'un autre côté que, dans les autres classes de Vertébrés, les modifications se font d'une manière plus graduée, les dispositions fondamentales se retrouvent nettement dans toute la série, et les homologies peuvent être déterminées avec une entière précision. C'est ce que nous montrera la suite de cette étude. Si le lecteur veut bien se reporter à la description que j'ai donnée du cœur des Cbéloniens, il lui sera fiicile de se convaincre que dans cette classe l'appareil valvulaire se compose d'une portion périphérique ou zonaire constituée par les deux valvules externes des orifices auriculo-ven- triculaires et d'une portion centrale beaucoup plus développée qui constitue la tente valvulaire si remarquable des Cbéloniens, des Ophidiens et des Sauriens (PI. XVI, fig. 3, ibis). De ces deux portions, la première est rudimentaire ; elle est formée de deux petites valvules ou replis placés au bord externe des orifices auriculo-ventriculaires, et dont les angles aigus ou cornes antérieure et postérieure s'insèrent sur les faisceaux charnus du ventricule. La seconde portion est très-importante et se continue par ses bords adhérents antérieur et postérieur, et surtout par ses angles externes, avec des faisceaux musculaires plus volumineux et plus importants que les précédents. A sa face supérieure adhère le bord inférieur de la cloison inter-auriculaire. La face inférieure présente un sillon au niveau de cette insertion, et par là, la tente valvulaire se trouve divisée en deux moitiés à peu près égales : l'une demi-tente droite, pour l'orifice ventriculaire droit ; et l'autre demi-tente gauche, pour l'orifice ventriculaire gauche. Nous re- trouverons ces quatre éléments, deux moyens et deux extrêmes, plus ou moins modifiés depuis les Cbéloniens jusqu'aux Mammifères. 236 r-lilLOSOlMlli: NATUIilU.LE. CHAPITRE m PASSAGE DU CŒUR DE REPTILE A VENTRICULES COMMUNI- CANTS AU CŒUR DE CROCODILIEN Jusqu'il présent nous avons pu passer, par des transitions ménagées et à travers des modifications d'une intelligence facile, du cœur des Poissons au cœur des Reptiles à ventricules communicants. Si l'on en jugeait parles affinités générales et par les conformités exté- rieures, le passage du cœur desChéloniens, Ophidiens, Sauriens, au cœur des Grocodiliens devrait présenter la plus grande simplicité, et rien ne sem- blerait devoir embarrasser dans une assimilation rationnelle des deux cœurs; mais il n'en est pas ainsi, et dès qu'on essaie de rapprocher le cœur de Crocodile du cœur de Tortue ou de Lézard, des difficultés importantes se présentent, et des questions délicates se soulèvent. Comment, en eflèt, s'établit chez les Crocodiliens la séparation complète des deux ventricules, qui eût été impossible chez les Ghéloniens? Chez ces derniers, les deux orifices aortiques sont à la droite des orifices auriculo-venlriculaires, de telle sorte que chacune des deux aortes peut recevoir du sang provenant des deux oreillettes. Il suit de là que la séparation du ventricule en deux loges, dont l'une droite communiquerait avec l'artère pulmonaire et l'aorte gauche, et dont l'autre gauche correspondrait à l'aorte droite, est impo.=sible chez les Chéloniens. Nous savons que la cause de cette impossibilité réside dans la distance qui sépare transversalement le plan de la cloison inter- ventriculaire de celui de la cloison intervestibulaire, et dans les relations que cet éloignement établit entre les cavités et les orifices ventriculaires. Ces relations sont telles, en effet, que si l'on supposait l'union des deux cloi- sons sans changer leur position relative 6 (PI. XVI, fig. 7), on obtiendrait d'un côté une cavité ventriculaire gauche dans laquelle s'ouvriraient les deux orifices auriculo-ventriculaires et l'aorte droite, et de l'autre côté une TRANSFORMATIOXS DU cœUR. 237 cavité droite communiquant avec l'aorte gauche et l'arlére pulmonaire, mais sans relations même indirectes avec les oreillettes. D'autre part, si l'on complétait supérieurement la cloison intervenlriculaire jusqu'à la face infé- rieure de la tente valvulaire S (PI XVI, fig. 7), ( PI. XVII, fig. 2), on aurait à gauche une cavité ventriculaire sans orifice artériel, et à droite un ventri- cule où aboutirait l'oreillette droite et d'où naîtraient tous les troncs aorti- queset pulmonaires.il est évident qu'un cœur à ventricules séparés, consti- tué de l'une ou de l'autre façon, ne pourrait pas fonctionner; et il faut, pour obtenir un cœur à double ventricule capable d'un jeu régulier, que la si- tuation relative des divers orifices soit modifiée d'une certaine manière; c'est précisément ce que nous observons chez les Crocodiliens. Nous avons vu que. en allant des Batraciens aux Chéloniens, les pôles artériel et veineux du cœur subissaient des changements de situation res- pective, en vertu desquels le pôle artériel ou la branche artérielle de VU se portait vers la gaucheet en avantdu pôle veineux ou branche veineuse. Ce changement de situation serait, il est vrai, plus justement exprimé en disant que dans ce cas, le pôle artériel du cœur restant fixe et immobile, le pôle veineux s'est porté en arriére de lui et vers la droite. C'est là l'ex- pression exacte du mouvement qui s'opère réellement; mais pour la clarté et la simplicité de ma démonstration je continuerai à considérer le pôle ar- tériel comme ayant été dé[ilacé et mis eu mouvement. Or ce mouvement, déjà prononcé chez les Chéloniens, s'accentue davantage chez les Ophidiens (PI. XVI, fig. 3 6w ) et chez les Sauriens, et se prononce enfin chez les Crocodiliens, au point que la cloison intervestibulaire qui appartient au pôle artériel se rapproche transversalement de la cloison intervenlriculaire, et vient se placer au-dessus et seulement un peu à droite de cette dernière' (PI. XVI, fi.g. 4 et 8). Le transport du pôle artériel vers la gauche est tel que. tandis que chez les Chéloniens (PI. XVI, fig. 3 et 7 ) l'orifice de l'aorte ' Chez les Batraciens et chez les Ghéloniens, où les deux branches de 1' 6' sont placées transver- salement ou à peu près transversalement, le cœur est plus ou moins aplati d'avant en arrière. On comprend pourquoi, chez les Ophidiens, les Saurien? et les Crocodiliens, les dimensions antoro-poslérieures du cœur augmentent, tandis que les dimensions transversales diminuent. Le cœur, quoique encore légèrement aplati, se rapproche de la forme conique régulière, qu'il aquierl au plus haut degré chez les Mammifères et surtout chez les Oiseaux. 238 inULOSOl'HIE NATUUELLK. droite était aussi bien que celui de la ganrhe tout à fait eu dehors et à droite de l'orifice auriculo-ventriculuire droit, chez les Crocodilieiis (PI. XVI,/?(/. 4 et 8), les orifices des aortes droite et gauche viennent se placer dans l'ouverture do l'angle que formaient en avant les deux oriGces auriculo- vcntriculaires, et par conséquent entre les cornes antérieures des deux val- vules auriculo-ventriculaires internes, mais pourtant surtout au-devant de la valvule auriculo-ventriculaire droite. Aussi trouvons-nous chez les Cro- codillens celle corne antérieure repoussée et déjetée fortement à droite et en arrière (PI. VII, /ig . 1), (PI. VIII, fuj. 1, 2). 5 ( PI. XVI, fig. 4). Ces changements de situation relative des oriOees aorliques et des ori- fices ventriculaires ont une importance majeure et constituent la condition nécessaire delà transformation du cœur des Reptiles à ventricules commu- nicants en cœur des Reptiles à ventricules séparés. Par suite en effet de ces nouvelles dispositions, l'aorte droite est rapprochée de l'orifice ventricu- laire gauche, et peut se trouver avec lui dans des rapports directs et sans l'intermédiaire de la portion du ventricule droit où s'ouvre l'orifice auriculo- ventriculaire droit. D'un autre côté, l'aorte gauche se met aussi en relation avec l'orifice auriculo-ventriculaire droit, et sans l'intermédiaire du vesti- bule de l'aorte droite. C'est ainsi que les conditions nécessaires à la consti- tution de deux ventricules ayant chacun leur orifice aortique distinct, sont réalisées d'une manière extrêmement simple et ingénieuse. Il ne restera, pour avoir un cœur de Crocodilien, qu'à souder entre elles parleurs bords correspondants les deux cloisons intervestibulaire et interventriculaire (PI. XVI, Ai/. Set 8 bis). La cloison intervestibulaire, dont les Chélouiens ne présentent que des traces, acquiert chez les Crocodiliens un développeuient tel, qu'elle sépare complètement les deux vestibules aortiques. Elle ne laisse subsister que la fente inter-aortique des Ghéloniens, qui se transforme ici en pertuis inter- aortique ou foramen de Pannizza iO{?\. XVI, fig. 8); son bord supérieur, épaissi et quelquefois cartilagineux ou même osseux, forme la demi-cir- conférence interne des orifices aorliques qui .sont contigus, et donne inser- tion, nous l'avons vu, au bord adhérent de deux valvules sigmoïdes, dont l'une appartient à l'aorte droite et l'autre à l'aorte gauche. La cloison intervestibulaire (PI. VIII, fig. 1) n'est point verticale. Sa direction suivant TRANSFORMATIONS DU CCEUR Î3(i un plan oblique en bas et à gauche (PI. XVI, f!g. 8) lui permet d'aller unir son bord inférieur an bord supérieur de la cloison interventriculaire, qui est un pen à gauche par rapport à la cloison intervestibulaire. Par là se constitue une cloison complète des deux ventricules, qui se trouve formée en bas et aussi eu arrière par la cloison interventriculaire. en haut et aussi en avant par la cloison intervestibulaire (PI. VIII, fig. 1), (PI. XVI, fig. 8). La première est musculaire, la seconde est à l'origine exclu- sivement fibreuse ; mais ces deux portions de la cloison se fusionnent par leurs bords correspondants, si bien que leur limite perd dans certains points tout caractère de netteté. C'est ainsi que. sur la face droite de la cloi- son (PI. VIII, fig. 1). des faisceaux rayonnants V'Z, soit postérieurs, soit antérieurs, tendent à empiéter sur la cloison intervestibulaire, et à recou- vrir sa lame fibreuse. Dans le ventricule gauche , c'est-à-dire sur la face gauche delà cloison, les limites sont plus tranchées, elle bord supérieur de la cloison interventriculaire est formé par un bourrelet musculaire au- dessus duquel se trouve à nu la lame fibreuse nacrée de la cloison interves- tibulaire. Ici la limite des deux cloisons est brusquement accusée. La /ig. 2 (PI. VII) ne montre que la cloison interventriculaire. Au-dessus et comme paroi interne de cet infundibulum fibreux dont la valvule auriculaire B forme la paroi externe, se trouve la cloison intervestibulaire, exclusive- ment fibreuse, qui n'eût pu être mise en vuequ"en sectionnant la valvule auriculo-ventriculaire B. J'ai supposé jusqu'à présenties cloisons interventriculaire et intervesti- bulaire entièrement développées : mais il me reste à dire comment elles arrivent à ce degré de développement. Chez les Chéloniens, les Ophidiens, nous avons remarqué que deux faisceaux musculaires opposés 0. P (PI. V, lig. 3). P, R (PI. V, fig. 4), F (PI. XII, fi.g. 2), 0, P (PI. XVI, fig. 9), naissant au niveau du bord inférieur de la cloison inter-auriculaire, étaient plus gros, faisaient plus de saillie que les faisceaux voisins, et se réunis- saient bientôt en entre-croisant leurs fibres. Leur angle de réunion est ar- rondi et occupé par des fibres en anse à concavité supérieure. II suit de là que la cavité ventriculaire a été ainsi subdivisée en deux loges communi- quant par un étranglement ou goulot dû à la saillie des deux faisceaux musculaires. Tandis que ces faisceaux, que j'ai nommés faisceaux rayon- 240 PIII1/)S0I>HII'; NATURELLE. nants anlérieur et postérieur, ne sont qu'au nombre de deux ou trois chez les Reptiles à ventricules communicants, ils luniient chez les Croco- diliens à se multiplier et à s'étaler plus largement vers la partie supérieure du ventricule. De plus, chez les Grocodiliens ou peut clairement observer que les faisceaux naissant de la face antérieure et ceux qui naissent de la face postérieure conservent exactement ii situation relative que nous avons notée pour tous les autres faisceaux ventriculairos, aussi bien chez les Batraciens que chez les Reptiles ordinaires, c'est-à-dire qu'ils s'appliquent les uns aux autres par leurs faces, les antérieurs alternant avec les postérieurs. Ce serait là une preuve que la cloison interventriculaire est le produit des colonnes charnues ventriculaires, si l'étude des Chéloniens, Ophidiens, etc., pouvait laisser le moindre doute à cet égard. Voici ce que nous observons sur les cœnvs de Crocodilus /wc«w* reproduits dans les (PI. y II, fig. 1, 2, et PI. VIII, fig. I). De la paroi antérieure du ventricule gauche part un faisceau M (PI. VII, f!g. 2j qui s'irradie en fas- cicules externes qui vont contribuer à la formation des parois ventriculaires, et en fascicules internes M', M" qui contribuent à la formation de la cloison interventriculaire. De la paroi postérieure du ventricule part un faisceau N, symétrique au premier, qui, contribuant de son côté à la formation des parois ventriculaires, vient encore en s'épanouissant se placer dans la cloison ventriculaire au-dessous du premier. On voit en N" ses (îbres quiont passé au-dessous du faisceau M' . Ces deux faisceaux se distinguent des fais- ceaux homologues des Chéloniens, Ophidiens (PI. V, fig. 3) en ce qu'ils s'éta- lent plus largement et remontent plus haut, de telle sorte que leur angle de réunion est presque entièrement rempli. Il l'est d'autant plus qu'il y a supérieurement un nombre considérable de fibres communes ou fibres en anses qui comblent l'ouverture de l'angle et le transforment en un arc très-largement ouvert. Si nous regardons la cloison par le ventricule droit, nous remarquons qu'elle est formée de faisceaux Y Y' (PI. VII, fig. \ ; PI. VIII, fig. 1), nés de la paroi postérieure du ventricule, s'irradiant en bas et en avant; je lui donne le nom Aq ■premier faisceau rayonnant postérieur. On peut remarquer en Z (PI. VII et PI. VIII, fig. 1) un bouquet de fibres irradiées qui partent de la partie postérieure du noyau cartilagineux, c'est- à-dire de la paroi antérieure du ventricule. Elles recouvrent le premier fais- TRANSFORMATIONS DU CœUR Î41 ceau rayonnant postérieur et consliluenl un premier faisceau rayonnant antérieur. Ces fibres sont dans tous les cas peu nombreuses; les supé- rieures horizontales et les moyennes obliques sont rares et manquent sou- vent ; les inférieures, qui sont plus nombreuses, existent toujours. Ces labres inférieures sont verticales ou obliques en avant et se confondent avec les fibres antérieures du premier faisceau rayonnant postérieur (PI. VIII, fuj. 1); chez les Oiseaux et les Mammifères, elles sont les seuls représentants du premier faisceau rayonnant antérieur. VoiLî pourquoi je les signale d'une manière particulière. . Au-dessous du premier faisceau rayonnant postérieur se trouve un second faisceau rayonnant antérieur. Celui-ci est situé entre le premier fais- ceau rayonnant postérieur et le deuxième faisceau rayonnant postérieur, qui est représenté en N' A'" (PI. VII. fUj. 2). Enfin ce dernier est lui-même recouvert par le troisième faisceau rayonnant antérieur, désigné en M, M' M" sur la même figure. Ainsi donc, la cloison interventriculaire est composée de cinq faisceaux d'inégale importance et alternant quant à leur origine, qui sont, de droite à gauche : 1" le premier faisceau rayonnant antérieur; 2" le premier faisceau rayonnant postérieur; 3° le second faisceau rayon- nant antérieur ; 4° le deuxième faisceau rayonnant postérieur ; et 5° le troi- sième faisceau rayonnant antérieur. Quant à la cloison intervestibulaire, nous ne pouvons suivre d'une manière aussi précise le mode de sa formation ; mais il est pourtant légi- time dépenser que la saillie fibreuse antérieure, que nous avons vue occuper chez les Chéloniens la saillie postérieure de la fausse-cloison et former la limite des deux vestibules aortiques (PI. V, Xfig. 3 et Ofig. 4), E (PI. VI, fig. 2), il est, dis-je, légitime de penser que cette sailhe, deve- nant plus prononcée, forme une véritable lame fibreuse triangulaire s'étendant dans son développement d'avant en arrière au-dessous de la fente inter-aortique. Son bord inférieur se relie avec le bord supérieur de la cloison interventriculaire, qui lui est contigu: son bord postérieur adhère à la face anléro-inférieure de la valvule auriculo-ventriculaire droite (PI. VIII, fig. 1); et son bord supérieur, correspondant au point de contact des deux aortes, forme la limite inférieure duforamen de Pannizza. Cette cloison, en effet, s'arrête en haut au niveau de la fente inter-aortique, 31* 2« PIlll.OSOFUlH NATUIUOLI,!';. ([u'i^llo'laissc libre, cl ([u'ellc transforme ainsi on perluis aorliqae. L'arrêt de formation de la cloison à ce niveau et le maintien du calibre du per- tuis aortique peuvent être justement regardés comme la conséquence du courant qui pousse nécessaireuient le sang du vestibule de l'aorte droite dans celui de l'aorle gauche. Los lois de l'analogie et la constatation la plus scrupuleuse des con- nexions permettent de concevoir comme je viens de le faire la formation de la cloison intervestibulaire. Une seule particularité de cette cloison des Grocodiliens se trouve sans trace et sans précédent dans le cœur des Rep- tiles à ventricules communicants : elle consiste dans le rapport du bord supérieur de la cloison avec les deux valvules sigmo'fdes internes des deux aortes. Comme nous le savons en effet, les Grocodiliens diffèrent entière- ment des autres Reptiles quant à la situation de ces valvules. 11 semblerait devoir surgir de là une difficulté pour la recherche des homologies, mais je me borne à dire ici que la difficulté n'existe pas en réalité, parce que, ainsi que je me propose de le démontrer plus loin, les valvules sigmoïdes des orifices artériels sont des organes accidentels, des organes de circonstance, dirai-je, et de perfectionnement. Or l'existence, la forme, la situation, les rapports de tels organes, présentent une très-grande contingence, ce qui ne permet point de les considérer au point de vue des homologies, comme on le fait pour les organes fondamentaux. 11 est intéressant de rechercher quelles sont les conséquences du chan- gement de situation des valvules sigmoïdes des deux aortes. On ne peut considérer ce fait comme le résultat d'un accident isolé et sans portée, puisqu'on le retrouve chez tous les Grocodiliens sans exception, c'est-à-dire chez tous les Reptiles à ventricules séparés, et seulement chez eux. Il semble donc qu'il y a là une corrélation dont la raison peut et doit être recherchée. Supposons pour un moment chez les Grocodiliens des valvules aortiques disposées comme celles des Ghéloniens : au lieu d'être l'une interne et l'autre externe pour chaque aorte, ces valvules seront, l'une antérieure et l'autre postérieure, et adhéreront aux bords antérieur et pos- térieur du pertuis aortique qui remplace la fente aortique. La cloison inter- vestibulaire se terminera supérieurement par un bord libre dégagé de val- vules, q ai formera la limite inférieure du pertuis aortique. Oue va-t-il se TRANSFORMATIONS -DU CœUU. 2i3 passer pendaiil la sysLole ventriculaire? Le sang rouge du ventricule gau- che pénétrera dans l'aorte droite, et en même temps par le pertuis aorti- que dans le vestibule de l'aorte gauche. Le lecteur doit se rappeler que chez les Chéloniens la contraction du faisceau droit commun et de la cra- vate bulbaire avait pour effet, à chaque systole, d'effacer rapidement le vestibule de l'aorte gauche en appliquant la masse ventriculaire posté- rieure contrôla face postérieure de la lèvre delà fausse-cloison. Ce. méca- nisme avait pour effet de diriger vers l'aorte gauche le sang rouge venant du vestibule de l'aorte droite, en interceptant toute communication entre les vestibules aortiques et le vestibule pulmonaire. Mais chez les Grocodi- iiens il ne peut en être ainsi, attendu que la lèvre de la fausse-cloison est supprimée, et que par conséquent l'etfacement rapide et précoce du ves- tibule de l'aorte gauche manque par cela même d'une de ses conditions essentielles. Le sang rouge pénétrerait donc du vestibule de l'aorte droite dans celui de l'aorte gauche, et de celui-ci dans le vestibule pulmonaire, qui n'en est pas séparé, puisque la fausse-cloison est trés-réduite et que sa lèvre fait entièrement défaut. Cette introduction partielle du sang rouge dans le système pulmonaire constituerait un degré d'imperfection et de rétrogradation de l'appareil central de la circulation qui jurerait avec les autres perfectionnements que la nature a apportés, soit dans la constitu- tion générale des Crocodiliens, soit dans la constitution de leur appareil cardiaque (complément de la cloison des ventricules, rapprochement des orifices artériels et auriculo-ventriculaires,elc.) . Il y aurait, d'un côté exagé- ration de la tendance à la séparation des deux sangs, et de l'autre exagération aussi de la tendance au mélange, et par conséquent, dans les combinaisons, hésitation et incohérence que nous ne sommes pas habitués à rencontrer dans l'œuvre du Créateur. On comprend, au contraire, que chez les Crocodiliens, tels qu'ils sont organisés, le relèvement des valvules sigmoïdes pendant la systole ventri- culaire établisse une séparation complète entre les deux aortes, et par con- séquent entre les deux ventricules, et que pendant la diastole l'abaissement des valvules, rétablissant la communication entre les deux aortes, s'oppose d'autre part à toute communication entre l'aorte gauche et son vestibule, et par conséquent à tout passage du sang rouge du vestibule aorlique ■r.'. PHILOSOPHIE NATURELLE. droit dans lo voslibule uortique gauche et dans le vosliliulo pulmonaire. Ainsi donc, la position des valvules sigraoïdcs aorliqucs et les relations qu'elles affectent, chez les Giocodiliens, avec la cloison interveslibulaire, sont en corrélation rationnelle avec le développement des cloisons inter- venlriculaire et inlervestibulaire, cl avec la disparition de la lèvre de la fausse- cloison. Elles constituent des conditions favorables à une séparation plus complète du système aortique et du système pulmonaire, et par con- séquent un perfectionnement important. Du reste, sans faire appel aux causes finales, dont il convient de n'user qu'avec la plus grande réserve, il est permis de penser qu'il y a une cor- rélation étroite entre la disposition des valvules aortiques des Grocodiliens et la constitution générale de ces animaux, qui est certainement supérieure à celle des autres Reptiles. Cette opinion est d'autant plus permise que la disposition valvulaire des Grocodiliens, en interdisant absolument l'entrée du sang noir à l'aorte droite, accentue bien mieux que chez les autres Rep- tiles la séparation des deux sangs, et devient par cela même une cause de perfectionnements dans la nulrition et dans le développement des systèmes et appareils anatomiques. Quant aux causes qui ont déterminé le change- ment de position des valvules et au mécanisme qui a présidé à ce trans- port, j'essaierai de les rechercher dans un article destiné à traiter des lois qui régissent la formation des appareils valvulaires. Je me borne à dire pour le moment que les valvules aortiques des Grocodiliens ne correspon- dent pas exactement à celles des Ghéloniens, etc. Ges dernières étaient insérées sur les bords delà fente inler-aortique, et devraient par conséquent se trouver sur Icshovds supérieurs du foramen de Pannizza. Elles ont dis- paru chez les Grocodiliens, et ont été remplacées par d'autres valvules qui ont pris naissance sur le bord inférieur du foramen, c'est-à-dire sur la cloison interveslibulaire. Ges dernières sont donc tout autres que les pre- mières, et elles se trouvent nécessairement placées à un niveau inférieur à celui des premières ; aussi, tandis que chez les Ghéloniens les orifices aortiques étaient bien supérieurs à l'orifice pulmonaire, on rencontre chez les Grocodiliens une disposilion inverse, et le niveau de l'orifice pulmo- naire est supérieur à celui des orifices aortiques, qui se sont forcément abaissés avec la ligne d'insertion de leurs valvules (PI. VII, f\g. 1). TRANSFORMATIONS DU CŒUR 245 J'ai déjà par anticipation insisté, à propos de la description du cœur des Grocodiliens. sur l'iiomologie des masses musculaires ventriculaires et des faisceaux divers, soit antérieurs, soit postérieurs, chez les Reptiles à ventricules communicants et chez les Grocodiliens. Je n'y reviendrai pas. Pour terminer ce que j'ai à dire des ventricules, il me reste à rapprocher les valvules auriculo-ventriculaires des Grocodiliens de celles des autres Reptiles. Je commence par dire qu'elles leur correspondent directement, malgré les différences importantes qui semblent devoir les séparer, dans le ventricule droit en particulier. J'ajoute que ces différences ne résident que dans des changements plus apparents que réels, et dont on peut suivre facilement la genèse en les attribuant à ce transport des orifices que nous avons vus caractériser le cœur des Grocodiliens. Comparons avec atten- tion ces valvules dans les deux grandes divisions des Reptiles, et analysons la manière dont se produisent leurs transformations eu passant de l'une à l'autre. La partie capitale de l'appareil valvulaire des Reptiles à ventricules communicants consiste dans la tente médiane. Nous savons que la cloison des oreillettes, s'insérant à sa face supérieure, la divise en deux parties qui forment les valvules internes des orifices auriculo-ventriculaires droit et gauche. Nous savons également que ces valvules présentent chacune une corne antérieure et une corne postérieure, où viennent s'insérer des fais- ceaux musculaires des parois ventriculaires. Les cornes antérieures des valvules embrassent entre elles un angle rentrant ouvert antérieurement ; il en est de même pour les cornes postérieures, mais d'une manière moins prononcée. G'est de la partie inférieure de ces angles rentrants que partent les faisceaux rayonnants antérieur et postérieur, qui constituent la cloison interventriculaire proprement dite. Ghez les Grocodiliens, on trouve également deux valvules auriculo-ven- triculaires internes, mais différant notablement de celles des Ghéloniens par leur forme, par leur direction et par certains de leurs rapports. La valvule auriculo-ventriculaire gauche, qui se trouvait chez les Ghéloniens, Ophidiens, T (PI. V, fig. 4), (PI. XIl, fig. 2), 4 (PI. XVI, fig. 3, 7), sans relations avec l'orifice et le vestibule de l'aorte droite, a contracté chez les Grocodiliens des relations intimes avec ces parties (PI. VII, fig. 2), 4 (PI. ?4ri l'IULOSOl'lUE NATURELLE. W'I, /Ig. 4,8,8 bis). Ces différences s'expliqueront facilement, etl'homologie de celte valvule auriculo-ventriculaire interne gauche des Ghéloniens ne sau- rait être douteuse. A côté des différences, les points de ressemblance ne manquent certes point. Dans les deux cas, en effet, la valvule est constituée par un voile membraneux, lrapézoïde,dont le plan est oblique de haut en bas et de dedans en dehors, dont le bord interne adhère au bord inférieur de la cloison des oreillettes, et dont les bords antérieur et postérieur, et plus par- ticulièrement les cornes, s'insèrent sur les colonnes musculaires des parois correspondantes du ventricule. Une seule différence importante est à noter : elle dépend uniquement du transport de l'aorte droite vers le côté gauche. Cette différence consiste en ceci, que le bord antérieur de la valvule, qui chez les Ghéloniens était, dans toute sa longueur, adhérent à la paroi ven- triculaire et sans relation môme indirecte avec l'aorte droite, se trouve, chez les Crocodiliens , contigu dans sa moitié postérieure à la demi- circonférence droite de l'anneau aortique (PI. XVI, /ig. 4). La valvule elle-même forme la paroi droite du vestibule de l'aorte. On voit donc qu'en tenant compte de cette modification, dont la cause ne saurait nous échapper, il n'y a pas de difficulté réelle dans l'établissement des homolo- gies de la valvule interne gauche des Ghéloniens et des Crocodiliens. Il n'en est pas de même quand il s'agit de retrouver des organes homo- logues dans la valvule interne droite des Ghéloniens et dans la valvule fibro-musculaire du ventricule droit des Crocodiliens. Je n'entre pas dans le détail des différences qui frappent au premier examen, leur notion ressort des descriptions que j'ai déjà données dans des chapitres précé- dents. Je me borne à renvoyer le lecteur à ce que j'en ai dit, et à la comparaison des fig. 4 (PI. 'V), fig. 2 (PI. VI), fig. 2 (PI. XII) d'une part, et des fig. 1 (PI. VII), fig. 1 et 2 (PI. VIII), fig. 1 (PI. IX) d'autre part. Gela fait, je vais exposer par quel mécanisme les valvules auriculo-ven- triculaires internes droite et gauche des Ghéloniens, Ophidiens, Sauriens, deviennent les valvules auriculaires droite et gauche des Crocodiliens. Il n'est pas nécessaire, pour en arriver là, d'invoquer des combinaisons de mouvements et de rapports autres que celles que j'ai signalées comme étant la source réelle et le fondement des dispositions caractéristiques du cœur des Crocodiliens. Les modifications diverses qu'il s'agit d'expliquer TRANSFORMATIONS DU Cœuii 247 n'ont point en effet d'autre cause que le transport déjà noté du pôle vei- neux du cœur en arriére du pôle artériel et vers la droite. De là résultent en effet des modifications qui pourront être facilement saisies sur les fig. 3 et 4 (PI. XVI) et sur les fig. 4 (PI. V) et fig. 1 (PI. VII). Nous avons vu qu'en vertu de ce transport et des nouveaux rapports qu'il créait, les orifices des aortes droite et gauche venaient se loger dans l'an- gle formé en avant par les cornes antérieures des deu.\ valvules , et se plaçaient, l'aorte gauche surtout, au-devant de la corne antérieure de la valvule droite, qu'elles repoussaient et déviaient à droite et en arriére, ("est ce que montre bien la fig. 4 (PI. XVI). Cette figure représente aussi une particularité qui a sa valeur : c'est que les orifices aortiques écartent ainsi les cornes antérieures des valvules, mais beaucoop moins la corne gauche. Les orifices aortiques restant à droite du plan de la cloison inter- auriculaire (PI. XVII, fig. 3). c'est la corne de la valvule droite qui est déjetée en dehors et qui cède sa place primitive aux orifices aortiques (PI. XVI, fig. 4). Chez les Chéloniens, le bord interne des deux valvules, par lequel elles adhèrent l'une à l'autre et à la cloison inter-auriculaire, présentait une longueur relativement considérable (PI. XVI, /î^. 3). Ce bord commun se trouve fortement raccourci chez les Grocodiliens, parce que de bonne heure le pôle artériel, étant venu se placer et se fî.xer à l'extrémité antérieure de cet axe commun des valvules, en a arrêté le développement dans ce sens. La fixité du pôle artériel déterminée par ses rapports immédiats avec les arcs branchiaux, et son développement centrifuge s'opposent, dans une cer- taine mesure, à l'extension antérieure de l'axe commun des valvules et de la cloison inter-auriculaire; et d'une autre part, cet axe commun, appuyé postérieurement contre la masse vertébrale et les organes placés dans cette région, est également arrêté dans son élongation postérieure. Il reste par conséquent limité à une petite étendue, pendant toutes les périodes subsé- quentes du développement et de l'état parfait. Les oreillettes et les orifices auriculo-ventriculaires, au contraire, étant libres dans leur développement antéro- postérieur (l'orifice ventriculaire gauche surtout), s'étendent dans ce sens et embrassent de plus en plus le pôle artériel. Il en résulte que les deux pôles fixés et adhérents l'un à l'autre se pénètrent de plus en plus 'i'iS I>HIL0S()1'HIE NATURELLK. profon(li3ment, et le pôle artériel Unit par l'oriiicr une enclave dans le pôle veineux. Ces modifications expliquent clairement pourquoi le bord antérieur de la valvule gauche4 (PI. XVI, fuj. 4 ) se compose de deux parties dis- tinctes: l'une postérieure qui est en relation avec l'orifice de l'aorte droite, et l'autre antérieure qui s'insère sur la paroi venlriculaire antérieure. Nous venons de voir que les choses se passent un peu autrement pour la valvule ven tri culaire droite. L'extrémité antérieure de l'orifice auriculo- ventriculaire, auquel elle appartient, est arrêtée en avant par les orifices aor- tiques et déjetée en dehors et en arrière. Ce mouvement de rotation de l'ex- trémité antérieure de l'orifice est nécessairement suivi par la corne antérieure de la valvule qui y est fixée, et dont le sommet est ainsi reporté en dehors et en arrière de l'orifice de l'aorte gauche, pour s'y terminer sur une masse fibreuse dont je parlerai bientôt, pour en déterminer la signifi- cation (PI. VII, fig. 1), (PI. VIII, /t^. 1 et 2), 5' (PI. XVI, fig. 4). Le bord antérieur de la valvule acquiert, par suite de ses rapports, une convexité an- térieure très-prononcée. Ainsi s'explique cette forme recourbée en arrière et en haut de la corne antérieure de la valvule auriculo-ventriculaire droite interne. Mais cette valvule présente encore une particulatité qui frappe au pre- mier abord : c'est la direction presque verticale de son grand axe (PI. VIII, fig. 1 et 2; PI. IX, fig. 1). Celte direction étonne et peut masquer l'homo- logie de celte valvule avec la valvule horizontale des Ghéloniens ; mais un examen attentif permet de s'apercevoir que, même chez ces derniers, cette valvule présente un certain degré d'inclinaison en bas, en arriére et eu dehors. De plus, en plaçant la valvule des Crocodiliens dans des situa- tions diverses, et plus particulièrement en l'abaissant, comme dans la. fig. 1 (PI. VII), on reconnaît bientôt que la partie inférieure ou musculan-e de la valvule des Crocodiliens n'est bien en réalité que la partie postérieure de la valvule des Ghéloniens, dont l'insertion aux faisceaux musculaires obli- ques postérieurs du ventricule est plus étendue, et a subi une inclinaison en bas et en dehors beaucoup plus prononcée. Grâce à cette inclinaison et à cet allongement, la corne postérieure de la valvule a pu atteindre la partie inférieure delà paroi venlriculaire postérieure. Mais les relations avec les faisceaux postérieurs obUqaes n'en restent pas moins identiques, et TRANSFORMATIONS DU COEUR. '249 les fibres musculaires qui tapissent la partie inférieure de la valvule ne sont point aulres que les faisceaux musculaires, qui chez les Chéloniens ve- naient aboutit à la corne valvulaire. Ainsi donc, malgré les différences appa- rentes, il y a homologie et correspondance parfaites, et le lecteur pourra s'en rendre facilement compte en comparant lu jiy. -i (PI. Vj aux fig. 1 (PI. VII), fiy. 1 et 2 (PI. VIIIj, fig. 1 (PI. IX), et fig. 3 et 4, (PI. XVI). D'après les données précédentes , il est facile de déterminer d'une manière rigoureuse les éléments de la valvule auriculo-ventriculaire droite et les modifications que ces éléments ont subies 5 (PI. XVI fig. 1). C'est ainsi que nous reconnaîtrons à la valvule : 1° un bord interne ou axe commun très-court; 2° un bord antérieur très-convexe en avant, dont la portion postérieure adhère à la face droite de la cloison inlervestibulaire ; 3° un bord postérieur très-long et fortement incliné en bas et en dehors; 4" un bord externe libre, dont la forme varie suivant que la valvule est abaissée ou relevée. La face supérieure de la valvule des Chéloniens est devenue postérieure, et la face inférieure forme ici la face antérieure. C'est sur cette dernière face que vient adhérer le bord postéro-supérieur de la cloison intervestibulaire (PI. VIII, fig. 1; PI. XVI, fig. 8 bis). Il faut remarquer en effet que les orifices aortiques s'étant placés, non point symétriquement dans l'angle antérieur des deux cornes valvulaires, mais surtout au-devant de la val- vule auriculo-ventriculaire droite, la cloison intervestibulaire qui corres- pond à l'interstice des deux aortes ne pouvait correspondre exactement à l'axe commun des deux valvules, mais devait se trouver à droite de cet axe. Il arrive en effet que la cloison intervestibulaire 3 vient par son bord postéro-supérieur adhérer à la tente valvulaire, non point précisément au- dessous de la cloison inter-auriculaire, mais à droite de ce plan et à la face inférieure de la valvule droite (PI. XVI, fig. 8 bis). Cette circonstance fournit une preuve positive de la différence d'origine des cloisons inter- ventriculaire et intervestibulaire, la première répondant exactement au plan vertical de la cloison inter-auriculaire, et l'autre se trouvant à droite de ce plan. Aussi la rencontre et la réunion de ces deux cloisons ne peu- vent-elles avoir lieu que grâce à un certain degré d'inclinaison de droite à gauche et de haut en bas de la cloison intervestibulaire. 32* ■250 CHILOSOPinE NATURKLLK Une analyse aussi complète et aussi détaillée doit donner une idée suf- fisante des particularités anatomiques de cette valvule et de ses homologies. Je terminerai ce que j'ai à en dire, en peignant par une image les chan- gemeuLs de direction que cette valvule a subis eu passant des Chéloniens aux Crocodiliens. Pour obtenir ce résultat, il semble qu'on ait saisi la corne antérieure de la valvule des Chéloniens et que. la tirant en haut, en arrière et en dehors, on ait fait basculer la valvule sur un axe transversal, de manière à porter sa corne postérieure en bas et en avant. Je dois maintenant rechercher ce que deviennent chez les Crocodiliens les deux valvules auriculo-ventriculaires externes des Chéloniens, etc. A gauche, on la retrouve à peine modifiée. C'est encore un petit repli fibreux en forme de croissant C {fig. 2, PI. Vil), dont les cornes don- nent insertion à des faisceaux musculaires plus distincts et plus accentués que ceux qui s'attachent à la valvule correspondante des Chéloniens. Les modifications sont beaucoup plus marquées du côté droit, et un examen superficiel pourrait laisser croire que toute trace de la valvule externe a disparu de ce côté. Il n'en est rien pourtant. Loin de disparaître sans laisser de vestiges, cette valvule a subi dans ses éléments des transforma- tions remarquables qui, tout en la perfectionnant, permettent à peine de la reconnaître. Cette valvule occupe chez les Chéloniens le bord externe de l'orifice auriculo-ventriculaire droit. Elle a deux cornes, une antérieure et l'autre postérieure, qui se relient plus ou moins aux faisceaux musculaires du ventricule, et qui, s'inclinant en bas et en dedans, passent pourtant au- dessus des cornes de la valvule interne. La valvule interne, aussi bien que l'externe, s'inclinant en bas vers le centre de la cavité ventriculaire, laissent entre elles les bords antérieur et postérieur de l'anneau auriculo- ventriculaire libres et dépourvus d'adhérences valvulaires (PI. XVI, fîg. 3). Chez les Crocodiliens, le transport circulaire en dehors et en arrière de l'extrémité antérieure de l'orifice auriculo-ventriculaire droit a fortement raijproché l'extrémité antérieure de cet orifice de la paroi postéro-latérale du ventricule, et a pour ainsi dire supprimé le côté externe de l'orifice (PI. XVI, fig. 4). De quadrilatère qu'il était chez les Chéloniens, l'orifice est devenu triangulaire et n'a plus que : 1° un côté interne, repré- sentant le côté interne des Chéloniens plus une partie du côté antérieur; TRANSFORMATIONS DU CœUR. 251 2° un côté externe correspondant ;i la seconde portion du côté antérieur déjeté en dehors et au côté externe très-raccourci ; et 3" un côté postérieur représentant exactement le côté postérieur des Chéloniens. Cette nouvelle conformation réduisant à de trés-faibles dimensions la place occupée primitivement par la valvule externe des Chéloniens, celle-ci se réduit à son tour à un noyau fibreux (PI. VII, fig. \), (PI. IX, fiq. 1),5' (PI. XVI, fig. 4), qui, parlant de l'extrémité de la corne de la valvule interne, atteint bientôt les faisceaux obliques gauches postérieurs du ventricule, c'est-à-dire précisément le point où venait correspondre la corne postérieure de la val- vule externe des Chéloniens. Mais si la partie de la valvule externe s'est tellement réduite qu'elle ne forme plus qu'un noyau fibreux, par com- pensation le faisceau musculaire oblique postérieur, dont elle constituait pour ainsi dire le tendon, a pris un développement compensateur et a formé la valvule musculaire S' (PL VII, fig. 1; PI. VIII, fig. 2; PI. IX, fig. 1), 5" (PI. XVI, fig. 4). Cette colonne ou valvule charnue, représentant un élément exagéré de la valvule externe des Chéloniens, vient, comme cette dernière, se terminer au voisinage de la corne postérieure de la valvule interne. Les deux valvules se rapprochant par leurs extrémités antérieure et postérieure continuent, malgré leurs transformations, à former une boutonnière, comme chez les Chéloniens. Leur inclinaison commune en bas et vers le centre du ventricule laisse, comme chez les Chéloniens aussi, le bord postérieur de l'anneau auriculo-ventriculaire libre d'attaches valvu- laires. Nous savons ce qu'il est advenu du bord antérieur. J'espère avoir été complet dans l'analyse qui précède, et avoir jeté quelque lumière sur les transformations du système valvulaire auriculo-ven- triculaire. II me reste peu à ajoutera ce que j'ai dit de l'anneau bulbaire des Grocodiliens; je veux seulement faire observer l'accroissement de puissance qu'il acquiert chez ces animaux et la tendance prononcée qu'il a à se con- fondre avec les parois ventriculaires proprement dites .Y (PI. IX, /(//. 3). Prenant la forme d'une courbe fortement convexe inférieurement, il tend à pénétrer dans les parois ventriculaires età se fondre avec les fibres qui com- posent les parois. Néanmoins, à l'extérieur il reste encore distinct, tandis qu'intérieurement se remarquent des traces plus évidentes de fusion. Chez 252 PHILOSOPHIE NATURETJ;E. les Chéloniens, les fibres verticales qui tapissent la paroi postérieure du vestibule pulmonaire ne commencent qu'au voisinage du bord inférieur de l'anneau musculaire; chez les Crocodiliens, des faisceaux verticaux déjà considérables des parois ventriculaires tapissent toute la face interne de l'anneau bulbaire, et le relient fortement au reste des parois ventriculaires (PI. VII, A'i7. l). Je n'ai pas besoin de revenir sur la comparaison et l'homologie complète à établir entre le noyau fibro-cartilagineux des Chéloniens et celui des Cro- codiliens; j'ai, dansle chapitre des Crocodiliens, déterminé l'homologie de toutes ses apophyses. J'en dirai autant de la fausse-cloison antérieure, dont j'ai signalé les transformations, consistant particulièrement dans la diminution de son importance et de ses dimensions, et dans la disparition de la lèvre. Quant aux gros troncs naissant du ventricule, pas n'est besoin de faire remarquer qu'ils se correspondent exactement, et que les différences ne se prononcent entre eux que dans la formation de leurs branches de deuxième ou de troisième ordre. L'anastomose abdominale est conservée; c'est tout ce que j'en dis iri, réservant les détails pour une partie spéciale de ce travail. TRANSFORMATIONS DU CCEUR. CHAPITRE IV PASSAGE DU CŒUR DE CROCODILIEN AU CŒUR D'OISEAU. L'élude du passage des Reptiles aux Oiseaux offre un très-grand intérêt. On sait aujourd'hui combien sont grandes les affinités entre ces deux classes; on sait aussi tout le parti qu'a voulu en tirer le savant naturaliste anglais Huxley en faveur de la doctrine de la transformation des espèces. Ces affinités sont réelles, on peut aisément les démontrer pour les divers systèmes de l'organisation tout entière ; mais ce n'est pas là le but que je me propose ici , et il nous suffira d'établir les ressemblances considérables qui rebent le cœur d'Oiseau à celui de Crocodilien, et d'expliquer d'une manière rationnelle les différences relativement faibles qu il y a entre eux. Je n'ai rien à ajouter à ce que j'ai déjà dit des oreillettes ; il me reste seule- ment à comparer les ventricules et les gros vaisseaux. Les Oiseaux présentent un transport du pôle veineux vers la droite plus prononcé que les Crocodiliens. De là résulte une plus grande torsion du faisceau artériel, qui, comme nous le savons, est fixé par sa partie .supé- rieure et constitue pour ainsi dire l'axe autour duquel s'opère le mouve- ment circulaire du pôle veineux. Cet axe, fixé supérieurement, se tord pour permettre le transport du pôle veineux ou pôle mobile. De là résulte vers la gaucbeune saillieplus grande del'artère pulmonaire quiseplace au-devant du ventricule gauche, et vers la droite une saillie très-prononcée de l'aorte qui reste au-devant de l'orifice auriculo-ventriculaire droit (PI. XVI, fig. .5) . Cette saillie de l'artère pulmonaire vers la gauche s'accompagne nécessaire- ment d'un prolongement de son vestibule dans cette même direction. Aussi la coupe horizontale du ventricule droit présente-t-elle chez les Oiseaux la forme d'une demi-lune dont la corne antérieure, correspondant au vesti- bule pulmonaire, recouvre non-seulement l'aorte droite, mais une partie de 254 PHILOSOPHIE NATURKLLE. la l'acc aiiti'rieui'cdu vciilriciile gauche. Une autre conséquence du transport du pôle veineux consiste dans le rapprochement de l'orifice do l'aorte droite (la seule qui existe chez les Oiseaux) du ventricule gauche, et dans la dimi- nulion et presque la suppression du vestibule de l'aorte droite (PI. XVII. lig. 4). C'est là un fait intéressant à noter, comme nous le verrons surtout à propos delà détermination des ventricules chez les Reptiles à ventricules communicants. Le ventricule droit des Oiseaux a pour caraclère très-important l'exis- tence de la valvule charnue. Cette valvule, que j'ai décrite avec soin dans un chapitre précédent, et que représente la fig. 1 (PI. IV;, est tellement caractéristique qu'elle permet de distinguer toujours avec une entière cer- titude le cœur des Oiseaux de celui de tout autre Vertébré. Et pourtant cette disposition, malgré sa singularité, n'a qu'une originalité plus appa- rente que réelle, et n'est qu'une modification, assez profonde il est vrai, de la disposition valvulairedéjà connue, je veux dire des valvules auriculo- ventriculaires droites des Crocodiliens ; c'est ce que je vais examiner. J'ai, dans le chapitre relatif aux ventricules des Oiseaux, recherché les homologues, dans cette classe, des faisceaux droits antérieur et postérieur et des faisceaux gauches postérieurs du cœur des Crocodiliens. L'examen des connexions nous a permis de conclure que la valvule des Oiseaux représen- tait, comme la valvule musculaire des Crocodiliens , une saillie exagérée de quelques faisceaux obliques gauches, et que la languette latérale D (PI. YV, fig. 2) n'était qu'un fascicule prématurément détaché des fibres obliques de la valvule pour se jeter sur la paroi interne. Quant à la lan- guette antérieure de la valvule des Oiseaux, il faut la considérer comme re- présentant la valvule musculo-membraneuse des Crocodiliens. En passant des Chéloniens aux Crocodiliens, cette valvule avait subi un mouvement de bascule dont nous avons déterminé le sens avec précision, et en vertu duquel l'extrémité postérieure de la valvule est portée en bas et en avant, tandis que l'extrémité antérieure se porte en haut et en arrière. Ce mou- vement de bascule se continue et s'exagère chez les Oiseaux, et atteint un degré tel, que l'extrémité inférieure de la valvule des Crocodiliens, qui se trouvait en relation avec le bord postérieur du premier faisceau rayonnant postérieur et se confondait là avec lui (PI. VIII. fig. 1), vient se porter chez THANSFOIiMATIONS DU cœUR. 255 les Oiseaux non loin de sou bord antérieur (PI. IV, fig. 1), et s'y confond également avec lui. Cette valvule, en se relevant ainsi, perd considérable- ment de son étendue, et sa partie supérieure seule subsiste ; elle se réduit par conséquent à une languette charnue oblique en bas et en avant, dont l'extrémité postéro-supérieure se continue directement avec la partie supé- rieure de la valvule/^' (PI. IV, fig. 1) qui, comme nous le savons, repré- sente la valvule charnue des Crocodiliens i" (PI. VII. fig. Ij. Chez ces der- niers, la continuité ne s'établit que par l'intermédiaire d'un petit noyau ou tendon fibreux que nous avons vu représenter la valvule externe des Ché- loniens. Dans le cœur des Oiseaux, ce noyau tendineux est remplacé par des fibres charnues qui établissent ainsi une continuité parfaite entre la languette antérieure (valvule fibreuse des Crocodiliens) et la valvule pro- prement dite (valvule musculaire des Crocodiliens). A travers tous ces changements de direction, de forme, de dimension, la languette anté- rieure des Oiseaux conserve exactement les mêmes connexions principales que la valvule fibreuse des Crocodiliens : extrémité inférieure reliée et con- fondue avecle premier faisceau rayonnant postérieur; extrémité supérieure reliéeet continue avec le sommet supérieur de la valvule musculaire; situa- tion delà languette exactement et immédiatement en arrière et au-dessous de la cicatrice de l'aorte gauche. Les homologies que je viens d'établir- se démontrent du reste d'elles- mêmes par un examen comparatif de fig. 1 (PI. IV) avec fig. 1 (PI. VII) et fiig. 1, (PI. IX), et de fiig. 4 (PI. XVI) avec fig. 5. On voit, dans les unes comme dans les autres, l'appareil valvulaire formant une large bouton- nière dont les angles inférieurs et supérieurs s'élargissent et s'émoussent considérablement chez les Oiseaux, par suite du mouvement de bascule de la lèvre antérieure de la boutonnière, et dont la commissure supérieure, tendineuse chez les Crocodiliens, est devenue musculaire chez les Oiseaux. Le plan delà boutonnière, oblique de haut en bas et de dehors en dedans, laisse, chez les Oiseaux comme chez les GrocodOiens , une partie de l'anneau auriculo-ventriculaire dépourvue de toute insertion valvulaire. Seulement, tandis que chez les Crocodiliens celte partie fibre était peu étendue et bornée au côté postérieur arrondi de l'orifice auriculo-ventri- culaire, chez les Oiseaux, le transport en avant de la valvule fibreuse 250 PHILOSOPHIE NATUKELLE. laisse libres loullebord interne de ccl orilice. (les l'aits-là, ainsi que tous ceux qui concernent les modifications des valvules auriculo-ventriculaires, rentrent dans une loi générale fort simple que j'exposerai plus tard, après avoir terminé cette revue des transformations cardiaques. Le bulbe artériel des Oiseaux est très-développé ; il est pourvu d'une épaisse couche de fibres circulaires, mais nous avons vu qu'il se confon- dait, sans limite précise déterminable, avec les parois ventriculaires. Chez les Crocodiliens, il y avait déjà un certain degré de fusion, puisque les parois internes de l'anneau bulbaire étaient tapissées de fibres verticales qui se continuaient sur les parois ventriculaires; mais au dehors l'anneau muscu- laire, confondu en apparence, pouvait pourtant être très-nettement délimité. Il n'en est plus ainsi chez les Oiseaux, et la couche annulaire du bulbe se continue à la surface du ventricule droit, en s 'évasant et en obliquant de plus en plus en bas et en dedans le plan de ses anneaux. Le bulbe n'embrasse que l'orifice de l'artère pulmonaire, l'orifice aor- tique gauche ayant disparu chez les Oiseaux pour des causes que j'exposerai plus loin. Par contre, l'orifice pulmonaire est d'un diamètre plus consi- dérable, et l'artère pulmonaire, qui se divise presque aussitôt après sa naissance en deux troncs volumineux, peut aisément recevoir tout le sang du ventricule droit / (PI. XIV, fig. 2). Le ventricule gauche des Oiseaux se distingue à peine de celui des Grocodihens: il a exactement la même forme, la même disposition des faisceaux musculaires, les mêmes valvules, et surtout, comme lui, il ne communique qu'avec l'aorte droite. Les seules différences à noter consistent: 1° dans la diminution de longueur du vestibule aortique ; 2° dans le rap- prochement consécutif de l'orifice aortique et de la cavité veutriculaire, rapprochement tel que sur une coupe horizontale les lumières de ces deux cavités, au lieu de rester éloignées et distinctes, se mettent en contact et se pénètrent même légèrement (PL XVII, fig. 4); 3° dans la conformation des valvules auriculo-ventriculaires. Ces deux valvules, dont la situation et les rapports généraux n'ont pas varié, sont moins inégales chez les Oiseaux que chez les Crocodiliens, la valvule externe ayant acquis plus d'étendue dans ses divers diamètres ; 4° une autre particularité doit être enfin notée, car, comme les précédentes, elle représente une forme de transition entre TliANSFORMATIONS l)V COEUH. 257 les Ciocodiliens et les Mammifères; c'estque, d'uueparl les cornes des val- vules se subdivisent en petits tendons qui vont s'insérer aux faisceaux antérieur et postérieur des parois venlriculaires, et d'autre part le bord libre" des valvules, au lieu d'être égal et tranchant comme celui des Croco- diliens, présente quelques dentelures qui se prolongent en filaments tendi- neux jusqu'aux faisceaux musculaires du ventricule, auxquels ils s'in- sèrent . La cloison interventriculaire s'est constituée comme celle des Croco- diliens, mais avec plus de perfection. On y retrouve la série alternative de couches ou faisceaux rayonnants, mais plus forts, d'une texture plus serrée; seulement le premier faisceau rayonnant antérieur des Crocodiliens Z (PI. YIII, flg. 1) se trouve réduit à ses fibres antérieures. Celles-ci se con- fondent avec le bord antérieur du premier faisceau rayonnant postérieur, qui a la même direction qu'elles. Le cœur des Mammifères nous présentera une constitution identique de la cloison interveniriculaire, et comme je puis en donner de bons dessins, je renvoie ce que je pourrais en dire ici au paragraphe qui traitera de la cloison des Mammifères. Je me réserve également de discuter plus tard une question pleine d'in- térêt: celle de la valeur et de la signification de l'aorte droite des Oiseaux. Ij'est là un sujet qui ne peut manquer d'exciter l'attention, car l'aflinité très-grande qu'il y a entre le cceur des Oiseaux et celui des Crocodiliens, affinité qui, je l'espère, sera évidente pour tout lecteur de ce travail, rend d'autant plus frappante la différence qu'il y a dans le nombre des aortes de ces deux classes d'animaux; les Oiseaux ne possèdent qu'une aorte, l'aorte droite, tandis qu'il y a chez les Crocodiheus une aorte droite et une aorte gauche. La discussion de ce fait perdrait beaucoup à être séparée de la question correspondante, mais inverse, qu'impose l'existence exclusive de l'aorte gauche chez les Mammifères. On conçoit combien la discussion de l'ensemble de ces faits gagnera en intérêt, par suite même des résultats op- posés que la nature a atteints dans ces diverses classes. Quelques lignes, consacrées aux modifications qui conduisent de l'appareil ventriculaire des Oiseaux à celui des Mammifères, me permettront bientôt d'aborder l'exa- men de la question des aortes. 33' Hllll.OSOplllK NATUHKIJ.K CHAPITRE V PASSAGE DU CŒUR D'OISEAU AU CŒUR DE MAMMIFÈRE. Comme le cœur des Oiseaux, mais peut-être à ua moindre degré, le cœur (les Mammifères présente un transport du polo veineux en arrière du pôle artériel et vers la droite. Je dis à un moindre degré, parce que l'artère pulmonaire et son vestibule font moins de saillie à gauche que chez les Oiseaux. Mais la différence est médiocrement prononcée, et l'on peut dire que, chez les uns de même que chez les autres, l'oriflce aortique est venu se placer dans l'angle formé antérieurement par les deux orifices auriculo- ventriculaires, mais plutôt cependant du côté de l'orifice auriculo-ventricu- laire droit. Le vestibule aortique a presque entièrement disparu (PI. XVII, fvj. 5), et l'orifice de l'aorte s'est tellement fondu dans l'orifice auriculo- ventriculaire gauche , qu'il ne forme qu'une faible saillie sur la demi- circonférence droite de cet orifice (PI. XVI, fig. 6 et 6 bis). Nous avons précédemment retrouvé, comme chez les Oiseaux, la cicatrice de l'orifice de l'aorte gauche dans le ventricule droit B (PI. X, fig. 1). Je vais maintenant établir la filiation de l'appareil valvulaire de deux ventri- cules avec celui que nous avons déjà décrit chez les Oiseaux. A gauche, les différences sont presque nulles ; il y a également deux valvules : l'une interne et l'autre externe, l'externe moins étendue que l'interne ; elles ne différent des valvules correspondantes des Oiseaux qu'en ce que leur bord libre est plus dentelé et donne insertion h un plus grand nombre de fila- ments tendineux. A droite, l'appareil valvulaire se complique, et l'on en chercherait vai- nement la signification et la valeur homologique, si l'on ne s'en rappor- tait aux principes généraux que j'ai émis précédemment sur les appareils valvulaires auriculo-ventriculaires. Cet a[)i)areil, qui chez l'Homme a reçu TliANSFORMATIONS DU CœUR. -259 le nom de valvule tricuspide, est en réalité composé de deux valves dis- tinctes, l'une interne et l'autre externe. Gomme je les ai déjà décrites, je n'y reviendrai pas, me bornant à renvoyer le lecteur à ce que j'en ai dit et à l'examen de la jig. 1 (PI. X). La valve externe représente indubitablement la valvule musculaire des Oiseaux et les deux valvules des Crocodiliens; seulement celte val- vule a subi plusieurs modifications dans sa constitution et dans sa forme. Sa constitution est redevenue à peu près ce qu'elle était chez les Croco- diliens, c'est-à-dire qu'au lieu d'être entièrement musculaire, comme chez Oiseaux, elle forme une lame tendineuse terminée à ses deux extrémités par une portion musculaire. Comparez /î^. 1 (PI. lN),fig. 1 (PI. VII), fig. 1 (PI. IX), fig. 1 (PI. X). Je ne dois point oublier de dire que la valvule exceptionnelle de l'Aptérix, qui est en partie membraneuse et dont le bord inférieur se relie par quelques tendons à une saillie musculaire de la paroi ventriculaire, fournit un point de rapprochement très-intéressant entre les Oiseaux et les Mammifères. La valvule externe des Mammifères se relie facilement à l'appareil valvulaire des Crocodiliens ; il suffit en effet, pour passer de l'im à l'autre, d'exagérer le mouvement de bascule que nous avons signalé en passant des Crocodiliens aux Oiseaux. Ce mouvement exagéré relève la languette antérieure de la valvule et la met en rapport avec le bord antérieur du premier faisceau rayonnant postérieur et avec la fausse- cloison. Chez l'Homme P (PL X, fig. l), chez le Mouton, cette ex- trémité antérieure charnue vient se confondre avec le bord antérieur des faisceaux rayonnants; mais chez certains Mammifères, le Porc par exemple, le mouvement de bascule semble poussé plus loin, et cette extrémité muscu- laire de la valvule se divise en deux faisceaux, dont l'un confond ses fibres avec celles du faisceau rayonnant, et dont l'autre H H' (PL X, fig. 2) se porte en haut et en avant perpendiculairement aux fibres de la fausse- cloison. La valve externe des Mammifères, si voisine, quant aux connexions, de celles des Crocodiliens, en diffère quant à la forme. La partie tendineuse, loin de former une lame pleine et régulière sur les faces de laquelle les fibres musculaires viennent s'insérer en formant une couche, représente au contraire une lame irrésuliorc dont le bord dentelé donne insertion à un 260 l'HlLOSOPinp; NATLÎUELLR nombre plus on moins considcrablc de pelits filots tendineux dnnl losexlré- milés opposées se rendent aux faisceaux charnus correspondants. La valve interne do l'orifice anriculo-vontriculaire droit des Mammi- fères est sans analogue dans les autres classes de Vertébrés; elle forme une lame tendineuse insérée sur le bord interne de cet orifice, c'est-à-dire sur la partie de ce bord que n'occupe pas la valve externe. Son bord libre dentelé donne insertion à des tendons attachés d'autre part à des fais- ceaux charnus qui par leur position . leurs rapports , leur direction , appartiennent évidemment à la première couche rayonnante postérieure. La valve interne doit donc être considérée comme une dépendance de cette couche rayonnante, dont les fibres superficielles, loin de rester mus- culaires jusqu'à leur extrémité supérieure, se sont transformées à ce niveau en tendons filiformes qui s'animent et s'étalent en un tendon aplati qui constitue la valve interne elle-même. C'est encore là une dé- monstration et une application de la loi générale que j'ai formulée comme présidant à la constitution des valvules auriculo ventriculaires dans la série des Vertébrés. La composition de la cloison interventriculairc chez les Mammifères est identique à ce qu'elle esl chez les Oiseaux. Cette cloison est également for- mée par une série de couches rayonnantes antérieures et postérieures. Ces couches rayonnantes sont exactement comparables à celles que nous avons décrites chez les Grocodiliens , elles n'en diffèrent que par deux conditions que je vais signaler : 1° Le rapprochement complet chez les Oiseaux et même la pénétration réciproque chez les Mammifères des deux anneaux aortique et auriculo-ventriculaire, en supprimant le vestibule aortique, mettent le bord supérieur des couches rayonnantes directement en contact avec l'anneau aortique et le point d'insertion des valvules sigmoïdes. Chez les Grocodiliens, la distance qui sépare ces deux orifices éloigne l'an- neau aortique des couches rayonnantes, et ces dernières ne sont reliées à cet anneau qu'indirectement et par l'intermédiaire delà portion fibreuse dsla cloison, c'est-à-dire par la cloison intervestibulaire (PL XVH, fig. 3, 4, 5). Il suit de là que la cloison intervestibulaire, marquée par des points dans ces figures, déjà très-étroite chez les Oiseaux, est entièrement suppri- mée chez les Mammifères; '1° Une seconde particularité des couches rayon- TliANSFORMATIONS DU COEUR. 2GI liantes chez les Oiseaux et les Mammifères, c'est qu'au lieu de naître, comme chez les Crocodiliens, presque exclusivement d'un point circonscrit des pa- rois antérieure et postérieure, pour rayonner de là dans un plan antéro- postérieur (PI. VII, fig. 2), (PI. VIII, fig. 1 ), les faisceaux rayonnants étendent leurs insertions sur toute la longueur du bord supérieur de la cloison interventriculaire, et forment ainsi des plans qui se recouvrent en- tièrement, non-seulement dans leur partie inférieure étalée, mais aussi dans leur partie supérieure. Par là se trouve réalisée une constitution plus ho- mogène et plus solide de la cloison interventriculaire, et par conséquent un degré de séparation ventriculaire supérieur à celui des Crocodiliens. Ces diverses dispositions sont exactement figurées sur plusieurs dessins joints à ce travail, et que je vais décrire succinctement. Comme les Oiseaux, les Mammifères ont un premier faisceau rayonnant antérieur réduit à des libres descendantes. Ces libres forment un petit faisceau qui, partant du l>ord postérieur de la fausse-cloison, se porte légèrement en arrière pour venir s'appliquer sur le bord antérieur du faisceau rayonnant postérieur et se confondre avec lui. Cette disposition est très-évidente dans la fig. 1 (PL X), en arrière du dernier faisceau M de la fausse-cloison. Elle se voit égale- ment très-bien sur le cœur de fœtus de Veau (PI. IV, flg. 2). Cette der- nière figure et la fig. 2 (PL X ) montrent clairement le premier faisceau rayonnant postérieur, qui est mis à nu par sa face gauche enRH', fig. 1 (PL XII). Au-dessous de celui-ci se trouve le second faisceau ou seconde couche rayonnante antérieure 0'^ (PL XII, fig. 1). Cette couche, qui a été enlevée en partie pour montrer la couche subjacente, est représentée entière en 00' (PL XI, fig. 2); enfin \afig. 1 (PL XI) montre réunis et confondus le second faisceau rayonnant postérieur P", et le troisième faisceau rayonnant antérieur P'. Ces fai.sceaux réunis Pf',/"' forment un éventail largement étalé: des coupes ont été faites sur certains points pour montrer la couche subjacente 0. J'ajoute que chez certains Mammifères, le Porc eu parti- culier, se détache de la cloison au-dessous de l'orifice aortique un faisceau musculaire (PL XI, /î^.l), et qui se divise bientôt en deux faisceaux musculo- tendineux, dont l'un va se jeter sur la paroi antérieure, et l'autre sur la pa- roi postérieure du ventricule. Ce faisceau représente là comme une synthèse do la fusion des deux derniers faisceaux rayonnants antérieur et postérieur. 262 PniI.OSOI'lUE NATUIiELI.K. L'étu(l(- quo j'ai failo dn la manière dont se forme la rloison iiitcr- veotrieulaire, depuis les Reptiles jusqu'aux Mammifères, a tait suffisam- ment comprendre le mécanisme de cette formation. Des faisceaux rayon- nants naissent symétriquement des parois antérieure et postérieure du ventricule au-dessous de la cloison inter-auriculaire, et, s'appliquaut alter- nativement les uns à côté des autres , déterminent ainsi la séparation des ventricules proprement dits. Cette conception diffère essentiellement de celle qu'a développée le D'' Pettigrew, il y a quelques années, dans un Mémoire important sur la structure du cœur (Pliilosopliical Transactions). Pour l'auteur de ce travail, la cloison interventriculaire est formée par un pli rentrant de la paroi antérieure du cœur qui s'étend peu à peu jusqu'à la paroi postérieure, à laquelle il se soude. On voit que le D'' Pettigrew attribue .à la cloison interventriculaire proprement dite le mode de for- mation que j'ai démontré exister pour la fausse-cloison. Pour ne s'être pas suffisamment appuyé sur l'anatomie comparée, le D'' Pettigrew a commis une confusion regrettable. Chez les Vertébrés supérieurs, en etïet, la fausse-cloison et la cloison interventriculaire se sont rapprochées transversalement et appliquées l'une à l'autre, au point qu'il faut être bien prévenu pour ne pas les confondre. Mais chez les Reptiles h ventricules commimicants toute méprise est im- possible: les deux cloisons sont nettement distinctes et éloignées transver- salement. C'est ce que montre bien la coupe de cœur de Python (PI. XVI, fig. 9), où OP désigne les faisceaux rayonnants de la cloison inter\entricu- laire, et où M désigne le repli antérieur qui constitue la fausse-cloison, d'où naîtra, il est vrai, la cloison interveslibulaire. TRANSKOHMATIONS 1)1" SYSTKME AOHTIQUE. 20.'. CHAPITRE IV TRANSFORMATIONS DU SYSTÈME AORTIQUE DANS LA SÉRIE DES VERTÉBRÉS Le moment est venu d'analyser les modifications du système aoi'tiijue dans la série des Vertébrés. Le système aortique des Poissons est une con- tinuation si fidèle de l'état embryonnaire, qu'il peut être pris pour le type primitif et le point de départ des transformations successives que présen- tent les autres classes de Vertébrés. 11 se compose, comme on le sait, de deux séries symétriques d'arcs aortiques en nombre variable (quatre, cinq, six ou septj, naissant d'un bulbe uniloculaire et se réunissant pour con- stituer l'aorte dorsale. Les Batraciens présentent une première modification de ce type; le bulbe s'y divise imparfaitement en deux loges, et les quatre paires d'arcs bran- chiaux que possède l'embryon subissent des transformations différentes, chez les Batraciens perennibranches et chez les Batraciens anoures. Chez les pre- miers, en général, les trois arcs antérieurs forment les racines branchiales aortiques, tandis que le quatrième constitue l'arc pulmonaire aortique. Chez les Batraciens anoures, en général, un des arcs branchiaux s'efface, et, des trois arcs restants, le postérieur constitue les artères pulmonaires, le moyen les arcs aortiques proprement dits, et les antérieurs les artères caro- tides. Ces modifications peuvent être facilement suivies, et je me borae à les signaler. C'est surtout chez les Vertébrés allantoïdiens que les transformations vasculaires, moins faciles à observer et plus profondes du reste, peuvent donner lieu à des obscurités et à des erreurs. Chez ces derniers, comme chez les Batraciens, la partie bulbaire du tronc artériel commun de l'em- bryon se divise en deux rampes, dont l'une appartiendra à l'artère pulmo- ■iiw l'iiH.osopiiu? .NAïriiKi.i.r.. nairo cL l'aiiLro aux aortes. Mais l'cUo jiorlioii Imlbaire seconcenlre, comme nous l'avons vu, vers la portion ventriculaire du cœur et s'y fond à des degrés divers. C'est dans la partie du tronc artériel commun qui est supé- rieure à cette portion bulbaire que so produisent des modifications qu'il convient d'analyser. Je dis ici pour mémoire et pour servir de base aux explications qui vont suivre, que du tronc artériel commun naissent deux séries symétriques de cinq arcs branchiaux que l'on désigne sous les noms de premier, second, etc., cinquième, suivant leur ordre successif d'appari- tion d'avant en arriére. Il faut noter en passant que, selon des observations récentes, il existe probablement deux autres arcs branchiaux antérieurs aux premiers, mais dont l'existence est si reculée et si fugace qu'ils étaient restés inapcr(;us. Comme ils ne paraissent jouer aucun rôle dans la con- stitution définitive du système vasculaire des Vertébrés allantoïdiens , nous n'avons pas besoin d'en tenir compte, et je considère seulement les cinq arcs branchiaux d'une apparition postérieure. Avec un tel point de départ, voyons comment se constitue le système aortique chez les Vertébrés allantoïdiens ' . Chez les Reptiles à ventricules communicants, le tronc artériel commun st' subdivise, par la forriiation de deux cloisons, en trois canaux distincts, l'artère pulmonaire et les deux aortes. Ces deux cloisons, qui paraissent se former de haut en bas, n'atteignent pas inférieurement le même niveau. La cloison qui sépare l'artère pulmonaire descend plus bas que la cloison de séparation des deux aortes. Nous savons en effet que cette dernière laisse subsister entre la base des deux aortes une fente assez considérable que j'ai fait connaître sous le nom de fente inter- aortique. Nous connais- sons également les relations des valvules sigmoïdes aortiques avec les ' Pour rendre justice à qui de droit, je dois dire ici que, pour traiter cette question, j'ai tenu grand compte des beaux travaux de H. Ratlike: Uebcr die Entivickeltmg der Arlerien •welche beiden Saiigethieren von den Bogen der Aorta ausgehen (MiJiler's Archiv. 1843). - IVher die Carotiden der Krokodile und der Vôgel (Miiller's Archiv. 1850).— UrUersuchungen liber dieAortenwiirzeln und die von hinen ausgehenden Arlerien der Saurier. ('Denlisclirifien der Ivaiscrl. Acad. der Vissensch. Dreizehnter Band. Wien. 1857.) J'ai emprunté même quelques figures a ces mémoires; mais aux faits émis par Rathlœ, j'en ai ajouté de nouveaux, et j'ai cru devoir même, sur cerlaius poiuls, m'éloigner des vues de cet émineut observateur et niodilier profondément ses (igures. THANSKOHMAl'lo.NS IH SVSTKMH AOHTIQUE. 2(;o lèvres de celte l'ente, puisque j'ai appel»; tout spécialement l'attention sur ce point. Ces trois compartiments distincts du tronc artériel comamn se mettent en relation avec un ou plusieurs des arcs vasculaires branchiaux, pour constituer les arcs pulmonaires et aortiques. Le compartiment pulmo- naire se continue directement, chez les Chéloniens, Sauriens, Crocodiliens, avec les deux arcs du cinquième rang, qui deviennent ainsi les deux branches de l'artère pulmonaire (PI. XVII, fig. 8). Chez les Ophidipns, le cinquième arc gauche s'atrophie, et le tronc pulmonaire ne reste en con- tinuité qu'avec le cinquième arc droit, d'où naissent les deux artères pul- monaires, qui sont quelquefois très-inégales (PI. XVII, fig. 6), A (PI. XVIII, fig. 3). Le second compartiment du tronc artériel commun se continue avec le quatrième arc gauche, qui forme la crosse aortique gauche, et le troi- sième compartiment se continue avec le quatrième arc droit, qui constitue la crosse aortique droite (PI. XVII, fig. 6). Celle-ci, à l'exclusion complète de la gauche, se met en relation à la fois avec les troisièmes, seconds et pre- miers arcs branchiaux et leurs portions récurrentes et terminales, pour for- mer le système brachial et carotidien. Chez les Ophidiens, l'aorte gauche ne fournit pas de branches (PI. XVII, fig. 3); chez les Chéloniens, elle donne naissance, par un ou plusieurs troncs, à toutes les artères du système chylo- po'iétique (PL XVII. fitg. 1 et 2). Chez les Sauriens, elle fournit selon les espèces une ou plusieurs des artères viscérales, les autres naissant de l'aorte abdominale. Chez tous les Reptiles, l'aorte gauche plus ou moins réduite va se confondre avec l'aorte droite, pour former l'aorte abdo- minale. Ce mode de développement du système aortique des Reptiles à ventri- cules communicants s'applique d'une manière assez exacte à la formation du système aortique des Crocodiliens. Chez ces derniers, comme chez les premiers, le tronc artériel commun se subdivise en trois compartiments, dont l'un se met en relation exclusivement avec les deux arcs de la cin- quième paire, pour constituer le système pulmonaire. Un autre compar- timent, situé à droite, forme la crosse aortique gauche en s'unissant au quatrième arc gauche ; et le compartiment postérieur et gauche s'unit au quatrième arc droit, pour constituer la crosse aortique droite. Nous avons vu comment la fente inter-aortique était transformée en pertuis 34' 266 l'HU.ÔSOl'IlIK NATU]{EI,LE. inler-aorliquc OU Ibramen de Paunizza, à la Ma parle développemenl de la cloison iotervestibulaire et par le remarquable changement de si- tuation des valvules sigmoïdes par rapport aux lèvres de l'ancienne fente inter-aortique. Nous avons vu également que c'était par un Irans- l)ort du pôle veineux du cœur vers la droite et en arrière du pôle artériel, que le ventricule droit se trouvait en relation avec l'artère pulmonaire et l'aorte gauche, tandis que le ventricule gauche ne communiquait qu'avec l'aorte droite. Chez les ^Crocodiliens comme chez les (Jhuloniens, le sys- tème artériel brachio-carotidien dépend exclusivement de la crosse aor- tique droite, et le système viscéral chylopoïètique exclusivement de l'aorte gauche descendante. Chez les Mammifères, le système aortique diffère tellement au premier abord de celui des Crocodihens, qu'on se demande comment pourra être fait leur rapprochement. D'une part, en effet (Mammifères): aorte gauche en relation avec le ventricule gauche, et pas d'aorte droite ; d'autre part (Crocodiliens) : aorte droite en relation avec le ventricule gauche et aorte gauche en relation avec le ventricule droit. Tout paraît opposition et contradiction entre ces deux systèmes; et pourtant j'espère pouvoir dé- montrer clairement qu'il y a, sinon identité, du moins rapprochement très- grand et véritable parenté. Je prendrai pour base de cette analyse le système aortique de l'Homme, auquel du reste les systèmes aortiques des autres Mammifères peuvent être facilement ramenés, malgré des différences de divers genres. Le système aortique des Crocodiliens paraît plus comple.xe que celui des Mammifères ; celui-ci possède une crosse aortique gauche , comme les Crocodihens. La crosse droite semble lui manquer, mais ce n'est là qu'un défaut apparent. L'aorte droite est représentée par le tronc brachio-céphalique et l'artère sous-clavière droite, de telle sorte que les deux arcs branchiaux du quatrième rang chez les Mammifères constituent, celui de gauche la crosse aortique gauche, qui conserve sa continuité avec l'aorte descendante, et celui de droite le tronc brachio- céphalique et l'artère sous-clavière droite, qui s'isolent entièrement du sys- tème aortique inférieur par l'atrophie de la portion descendante de cette aorte droite (PI. XVll, fty. 9j. Cette homologie' du vaisseau brachio-céjiha- TRANSFORMATIONS DU SYSTÈME AORTIQUE. 567 lique droit avec l'aorte droite, et par conséquent sa signification comme organe symétrique do la crosse aortique gauche, est clairement établie par l'observation embryologique. J'y ajouterai une preuve qui me paraît avoir sa valeur: c'est cette circonstance que le nerf récurrent du pneumogastrique droit embrasse dans sa courbure l'artère sous-clavière droite, de la même manière que le nerf récurrent gauche embrasse la crosse de l'aorte gauche. 11 y a là une identité do connexions très-spéciales, dont on sait qu'il faut tenir grand compte dans la recherche des homologies. Les Mammifères ont donc, comme les Crocodiliens, une crosse aortique droite et une crosse aortique gauche provenant des deux arcs branchiaux du quatrième rang. Mais "e qu'ils n'ont pas comme eux, ce sont deux compartiments aortiques ou deux aortes ascendantes. Les deux crosses aor- tiques des Mammifères naissent, en effet, d'un tronc ascendant unique et commun, d'une longueur variable (PI. XVII, fig. 9 et 9 bis). La cloison inter-aortique ne s'est point formée, et le tronc artériel commun ne s'est divisé qu'en deux compartiments : 1° compartiment pulmonaire, et 2° com- partiment commun des deux aortes. Ce défaut de cloison inter-aortique chez les Mammifères n'est pas du reste un fait entièrement nouveau et sans précédent dans les autres classes de Vertébrés. Nous en avons trouvé la trace dans l'existence de la fente inter-aortique des Reptiles à ventricules communicants, et dans le pertuis aortique des Crocodiliens. Chez les Mam- mifères, cette tendance (Je la cloison inter-aortique à rester incomplète a trouvé son entière réalisation: et les deux compartiments aortiques sont restés en communication par l'intermédiaire d'un foramen de Pan- nizza tellement considérable, qu'ils n'ont constitué qu'un seul et unique vaisseau, l'aorte ascendante (PI. XVII, fig. %bis). Pourreprésenterd'une manière complète les troncs réunis desdeux aortes des Crocodiliens, l'aorte ascendante des Mammifères devrait avoir un ori- fice dans le ventricule droit, comme elle en a un dans le ventricule gau- che. Ce dernier existe : et, quant au premier, j'ai sufCsamment montré sa trace et indiqué le mécanisme de son occlusion définitive, pour que je n'aie pas besoin d'y insister ici. Nous avons vu en effet que le faisceau droit commun et l'anneau bulbaire, qui aplatissaient et effaçaient cet orifice chez les Reptiles, et chez les Crocodiliens surtout, pendant une grande 2(i8 t^lIlLOSOPIIlK NATURELLE. partie de la systole veolriculaire, acquéraient chez les Mammifères et les Oiseaux une vigueur et une disposition telles, qu'ils maintenaient de très- bonne heure cet orifice dans un étal presque permaneut d'aplatissement et amenaient son oblitération définitive. Celte oblitération obtenue, les deux troncs aorliques ascendants, réunis en un seul chez les Mammifères, se trou- vent exclusivement en communication avec le ventricule gauche. C'est ainsi que s'explique la relation de l'aorte gauche des Mammifères avec ce ventri- cule, relation qui semble au premier abord en contradiction complète avec ce que l'on trouve chez les Crocodiliens , c'est-à-dire une aorte gauche communiquant avec un ventricule droit. En présence du cœur de Mammi- fère, il ne faut donc point oublier que ce n'est que parce que l'orifice de l'aorte gauche dans le ventricule droit s'est fermé, et parce que le tronc de l'aorte gauche est resté confondu avec celui de l'aorte droite, que cette aorte gauche se trouve communiquer avec le ventricule gauche. C'est là une relation indirecte comparable à celle qui existe chez les Crocodiliens, mais ayant lieu ici par l'intermédiaire d'un pertuis inter-aortique colossal. On peut comparer, pour se rendre compte de cette assimilation, la fig. 8 bis {?\. XVII) représentant les aortes de Crocodile, à la fîg. 9 bis, repré- sentant les aortes de Mammifère. Eu somme, le cœur de Mammifère n'est autre chose qu'un cœur de Croco- dile dont le foramen de Pannizza est considérablement dilaté , et dont l'orifice de l'aorte gauche dans le ventricule droit s'est oblitéré. Ou bien, en d'autres termes, un cœur de Crocodile, dont le pertuis aortique très-étendu ne pourrait être obturé par le relèvement des valvules sigmoïdes, et dont l'ori- fice de l'aorte gauche est fermé pendant la systole par la contraction bulbo- ventriculaire, représenterait, à l'état temporaire, l'état permanent du cœur de Mammifère. Ces rapprochements et ces assimilations si curieuses et si intéressantes ne sont point uniquement le fruit de la spéculation. On peut les appuyer sur des faits nombreux empruntés au domaine de la tératologie, et sur les- quels je vais m'arréter pour relever les interprétations fausses qu'on leur a données jusqu'à présent, par suite d'une analyse insuffisante, soit de ces faits eux-mêmes, soit des dispositions normales auxquelles on les a com- parées. TRANSFORMATIONS DU SYSTÈME AORTIQUE. 269 Les faits tératologiqiies dont il s'agit sont des cas d'insertion, chez l'Homme, de l'aorte sur les deux ventricules à la fois. Ces cas sont relati- vement assez nombreux ; et on en trouve une série, soit dans Isidore Geoffroy Saint-Hilaire', soit dans le Mémoire de Gendrin sur les Vices de conformation du cœur^. Le professeur Dubrueil (de Montpellier) en a rapporté un fait très caractérisé dans son livre intéressant sur les Ano- malies artérielles^ ; et M. Gubler en a présenté un autre à la Société de Biologie dans la séance du 14 septembre 1801 \ Je n'aurai garde de rap- porter tous ces faits, ce qui m'entraînerait trop loin. Je me bornerai à ré- sumer leurs caractères généraux, en insistant particulièrement sur le cas de Dubrueil, dont la pièce est conservée au Musée anatomique de Montpellier, où j'ai pu l'étudier attentivement. Voici quels sont les traits généraux des faits dont il s'agit. Sur certains sujets chez lesquels on a pendant la vie observé des phénomènes de cyanose et des accès plus ou moins prononcés de suffocation, on trouve à l'autopsie un cœur plus volumineux que dans l'état normal. Les parois du ventricule droit sont d'une épaisseur peu différente de colles du ventri- cule gauche. Le ventricule droit présente en avant uu infundibulum très- restreint qui aboutit à un orifice très-rétréci plus ou moins irrégulier, partiellement obstrué la plupart du temps par des concrétions ou des formations pathologiques. En arrière de l'infundibulum et au niveau de l'anneau auriculo-ventriculaire se trouve un orifice généralement assez ré- gulier, garni quelquefois de deux lèvres calleuses, et qui met le ventricule droit en communication avec l'aorte. Cet orifice est placé en arrière d'une colonne charnue qui le sépare de l'orifice pulmonaire (Gubler). L'aorte communique aussi avec le ventricule gauche par un orifice correspondant. Les trois valvules sigmoïdes existent saines ou plus ou moins indurées. Les deux orifices aortiques sont séparés l'un de l'autre par le bord supérieur de la cloison interventriculaire. Ce bord s'insère par ses deux extrémités dans deux interstices des valvules sigmoïdes aortiques, laissant une valvule du ' Is. Geoffroy Saint-Hilaire; Histoire génér. et part, des anomalies, 1S35, I, pag. 491. * Journal génér . de médec. CI, novembre et décembre 1827. ' Dubrueil; Des anomalies artérielles, pag. 21. 1847. ■• Comptes-rendus de la Société de biologie. 14 septembre 1861. ■:70 PIIILOSOIMIIE NATURELLE. côté (iu venlriculo droit, et, les deax autres du côté du ventricule gauche (Gubler). L'oriGce aortique est donc à cheval sur le bord supérieur de la cloison. Quelquefois la cloison interventriculaire présente au-dessous de l'orifice aortique une véritable échancrure, un défaut de développement. Mais dans d'autres cas, et je l'ai bien constaté dans le fait de Dubruoil, la cloison interventriculaire est complète; son bord supérieur est presque reclihgne ; toute communication directe est impossible entre les deux ven- tricules proprement dits, et il n'y a de communication qu'entre les seg- ments droit et gauche du cylindre aortique. L'aorte présente généralement une augmentation de calibre qui contraste avec l'exiguïté de l'artère pul- monaire. Le trou de Botal est conservé , mais très rétréci dans la plupart des cas. Telle est la constitution générale de ces cœurs monstrueux. On peut se demander quelle est la cause de leur conformation anormale et quel est le type auquel ils correspondent dans la série des Vertébrés. La réponse à la première question se déduit facilement des considérations que j'ai présentées sur l'obUtération de l'orifice de l'aorte gauche chez les Mammifères et les Oiseaux. Pour qu'une pareille oblitération se produise, il faut évidemment que le ventricule droit puisse effacer rapidement sa cavité, ce qui n'aura heu que si le sang trouve d'autre part une issue suffi- sante et même facile. Le développement extraordinaire et la prédominance du système pulmonaire chez les Mammifères et chez les Oiseaux transfor- ment l'artère pulmonaire en un large canal d'écoulement pour lesang du ven- tricule droit, et permettent un effacement rapide et précoce de l'orifice aor- tique qui se trouve dans ce ventricule. Mais si, comme cela s'est présenté dans tous les cas lératologiquesde cet ordre, ce canal d'écoulement vient à être rétréci ou obstrué par une cause quelconque ayant agi dans une période reculée du développement du cœur, il en résulte que l'orifice aortique du ventricule droit est maintenu béant pendant presque tout le temps de la systole ventriculaire, et est ainsi conserve anormalement pendant une durée plus ou moins prolongée de l'existence. A la même cause doit être attribuée la conservation relative du trou de Botal dans ces cas anormaux. C'est là l'explication naturelle et rationnelle des cas tératologiques dont il est question. Aussi, loin de les considérer, avec Dubrueil, comme des TRANSFOliMATIONS lil' SYSTKMK AOHTIQUE. 271 cclopies do l'aorte, et, avec Dubrueil et Jacquart', comme desa/nVi' de déve- loppement de la cloison interventriculaire, je crois qu'il faut plus justement les caractériser de la manière suivante : embarras et affaiblissement de la circulation pnlnionaire et conservation de l'orifice aortique du ventricule droit, sans cclopie de l'aorte. D'après les considérations qui précèdent, il est clair que ces cœurs mon- strueux représentent à un point de vue très-général la disposition et le fonctionnement du cœur des Reptiles. Il y a en effet, dans l'un et l'autre cas, deux orifices aortiques : l'un spécialement destiné au sang rouge, l'autre au sang noir. Il y a aussi, mais dans des proportions plus ou moins diffé- rentes, il est vrai, mélange des deux sangs; et il y a surtout enfin, comme fondement et cause supérieure de ces particularités (ainsi que je me réserve de le démontrer plus loin), diminution d'importance et défaut d'activité du système pulmonaire. Mais si nous voulons presser la comparaison et nous demander dans quelle famille de Reptiles doivent être recherchées les ana- logies les plus précises, nous ne répondrons pas, avec Dubrueil, que ces cœurs monstrueux doivent comme instruments être rapprochés du cœur d'une espèce d'Ophidiens, lai Couleuvre à collier, et nous n'essayerons pas, avec MM. Gubler et Jacquart, de les rapprocher du cœur de la Tortue. Ce n'est point en effet dans le cœur des Reptiles à ventricules communi- cants, mais chez les Reptiles à ventricules séparés, c'est-à-dire les Crocodi- liens, qu'il faut réellement chercher une analogie précise avec ces cœurs humains imparfaits. Il y a là, en effet, analogie presque parfaite. Les uns et les autres ont des ventricules séparés par une cloison complète et possè- dent la condition essentielle de cette séparation, c'est-à-dire le transport des orifices artériels dans l'angle antérieur de deux orifices auriculo-ventricu- laires. Les uns et les autres ont : 1" un ventricule droit distinct, qui possède un orifice auriculo-ventriculaire droit, un orifice pulmonaire et un ori- fice aortique; et 2° un ventricule gauche pourvu d'un orifice auriculo- ventriculaire et d'un orifice aortique. La seule différence qu'il y ait entre eux consiste dans le défaut de cloison inter-aortique, d'où il résulte que chez l'Homme les deux aortes confondues ne forment qu'un seul tronc, dont * Structure du cœur de la Tortue franche. (Ana. des se. natur.Zoolog., pag. 320. 1861.) in l'Illl.dSllI'IIIK NATUKRI.I.K. l'orifice inférieur se divise en deux parts : l'une plus considérable, comme chez les Crocodiliens pour le ventricule gauche, et l'autre plus étroite pour le droit. Los valvules sigmoïdes externes des deux orifices existent dans les deux ventricules. Les valvules internes, c'est-à-dire celles qui chez les Crocodiliens fermaient le perluis aorlique pendant la systole ventriculaire, manquent entièrement. Ce défaut des valvules internes n'a point lieu de nous étonner , il est la conséquence du défaut de cloison intervestibulaire. Les valvules internes peuvent être considérées en effet comme des dépen- dances et comme le complément supérieur de la cloison intervestibulaire. Les considérations que je viens de présenter me paraissent suffisantes pour jeter une vraie lumière sur le système aortique des Mammifères. Le moment est venu d'examiner ce système chez les Oiseaux. Ces derniers ayant une aorte droite communiquant avec le ventricule gauche, et pré- sentant en outre avec les Crocodiliens de grandes analogies de constitu- tion anatomique, il eût été plus rationnel d'étudier leur système aortique avant celui des Mammifères, qui semble s'en éloigner davantage; mais, pour aborder ce sujet avec irait, il était nécessaire d'avoir certaines notions que l'étude de l'aorte des Mammifères devait nous faire acquérir. Pour cette raison, j'ai retardé jusqu'à maintenant l'examen du système aorlique des Oiseaux. Ce système se compose d'une seule aorte, l'aorte droite, qui presque immédiatement après son origine donne naissance, par son bord gauche et antérieur, à deux troncs brachio-céphaliques, l'un droit et l'autre gauche. Celui-ci se détache le premier, celui-là naît immédiatement au-dessus de lui. Le rapport entre le calibre total de ces deux troncs et celui de la crosse aortique au-dessus de leur origine varie suivant les espèces. Chez les Oiseaux de haut vol, chacun de ces troncs brachio-céphaliques atteint et dépasse même quelquefois en volume la crosse aortique; le contraire a lieu chez les Oiseaux dont le vol est faible et peu étendu. L'aorte ascendante se porte d'abord à droite, mais la crosse aortique et l'aorte descendante se portent si rapidement en arrière et vers la gauche, qu'on peut être tenté, au premier abord, déconsidérer ce vaisseau comme une aorte gauche. Mais celte erreur se dissipe promptement lorsqu'on considère que ce vaisseau TRANSFORMATIONS DU SYSTÈME AORTIQUE. 273 fournil les troncs brachio-céphaliques par son bord gauche et qu'il est em- brassé par le nerf récurrent droit. L'aorte des Oiseaux représente donc bien réellement l'aorte droite des Reptiles et des Crocodiliens; et cette exis- tence d'une aorte droite communiquant avec un ventricule gauche con- stitue un point de rapprochement très-intéressant entre les Crocodiles et les Oiseaux. Mais les Oiseaux ont-ils une aorte gauche? et dans ce cas quelle est la partie de leur système aortique qui la représente ? Nous avons vu chez les Mammifères l'aorte droite représentée par l'artère sous-clavière droite; pouvons-nous considérer chez les Oiseaux le tronc brachio-céphalique gau- che comme étant l'homologue de l'aorte de ce côté? Rathke le pense ainsi, sans l'affirmer pourtant. La fig. 9 de la PI. VI de son important Mémoire sur les racines aortiques des Sauriens, ligure que j'ai reproduite (PI. XVII, fig. 7), représente sous une forme schématique le développement du sys- tème aortique et carotidien de l'Oiseau. Dans cette figure, les deux crosses branchiales du cinquième rang forment les deux artères pulmonaires. Lare droit du quatrième rang forme la crosse aortique droite, d'où naît l'artère sous-clavière correspondante. L'arc gauche du quatrième rang, perdant son anastomose inférieure avec l'aorte droite, constitue l'artère sous-clavière gauche; les arcs supérieurs servent, par eux-mêmes ou par leurs anastomoses, à fournir le système carotidien. Ainsi donc, d'après Rathke, l'arc gauche du quatrième rang, qui chez les Reptiles constitue certainement l'aorte gauche, se transformerait chez les Oiseaux en artère sous-clavière gauche, et représenterait sous cette forme incomplète l'aorte gauche des Reptiles. Malgré l'autorité de Rathke et sa compétence en pareille matière, je ne puis accepter cette opinion, qu'il ne donne du reste que comme une présomption. Voici les raisons que j'invoque à l'appui de ma manière de voir : 1° Si l'artère sous-clavière gauche des Oiseaux représentait l'aorte de ce côté, elle devrait avoir avec le nerf récurrent gauche des relations ana- logues à celles que le nerf récurrent droit a avec l'aorte droite chez les Oiseaux, et le nerf récurrent gauche avec l'aorte gauche des Mammifères et des Reptiles. Nous avons vu que l'artère sous-clavière droite des Mam- mifères, qui représentait l'aorte droite, éiait embrassée, comme leur aorte 35* 27'( PHILOSOPHIE NATURELLE. gauche, par le nerf récurrent du côté corresponiiant. Or. riiez les Oiseaux, l'artère sous-clavière gauche, ou le tronc brachio-céphalique correspondant, n'ont aucun rapport analogue avec le nerf récurrent gauche. Le nerf pneu- mogastrique et le récurrent de ce côté passent tous les deux également derrière ce vaisseau et ne l'embrassent en aucune manière. C'est ce que j'ai pu constater chez tous les Oiseaux quej'ai disséqués pour me rendre compte de ce fait, c'est-à-dire chez les Pigeon, Canard, Héron, Coq, Cigogne, Cor- beau, Vautour, etc. A cetégard donc, le tronc brachio-céphalique gauche des Oiseaux et l'artère sous-clavière qui en est la continuation directe, ne peuvent être considérés comme une crosse aortique gauche. 2° Voici la seconde raison qui me paraît donner gain de cause à mon opinion : les troncs brachio-céphaliques des Oiseaux correspondant exactement à ceux dos Crocodiliens, alors que le système brachio-céphalique des Crocodiliens présente des particularités fort remarquables qui établissent entre ces ani- maux et les Mammifères adultes des ditférences considérables. Ainsi (PL XVIIl, fig. 4), chacun des troncs brachio-céphaliques ee' fournit sur les parties latérales du cou une artère d'un Irès-faible calibre gg' qui accompagne la veine jugulaire interne et le nerf vague. Ces deux vaisseaux pairs représentent les carotides primitives des Mammi- fères: ce sont les carotides communes [carotis comrmmis) de Schlemm, Guvier, Meckel, Bischoff, etc., les collatérales du cou (collatérales colli) de Rathke ; en outre, chez les Serpents apparaît, plus tard que les caro- tides communes, un vaisseau impair qui vient se placer sous les vertèbres cervicales, et qui ne s'étend pas jusqu'à la tête: c'est V artère vertébrale de Cuvier, arteria coUaris de Schlemm, carotis snbvertebralis de Rathke. Chez les Crocodiliens existe aussi une artère cervicale impaire /'nais- sant du tronc brachio-céphahque gauche, prenant un développement considérable, s'étendant jusqu'à la tète et se reliant largement en arrière du crâne par deux branches terminales uniques mm' avec les deux carotides. Or, un très-grand nombre d'Oiseaux présentent exactement la même disposition que les Crocodiliens, et chez les autres on ne constate que des différences insignifiantes pour le fond de la question et ne portant que sur de légères modifications dans le développement. Si l'on considère de plus que les troncs brachio-céphaliques des Oiseaux donnent encore naissance. TRANSFORMATIONS DU SYSTÈME AORTIQUE. Î75 comme ceux des Crocodiliens, à des artères thoraciques ou mammaires in- ternes a', à des artères vertébrales proprement dites kk' , et se terminent enûn par un tronc sous-clavier ou axillaire, on verra que l'homologie est parfaite et que le tronc brachio-céphalique gauche des Oiseaux est bien pré- cisément le représentant fidèle du tronc brachio-céphalique des Reptiles et des Crocodiliens. Il résulte, de tout ce que je viens d'établir, que le système aortique des Oiseaux reproduit fidèlement et intégralement le système de l'aorte droite des Crocodiliens avec les deux troncs brachio-céphaliques qui en naissent. Il n'y a donc en lui aucune partie qui puisse correspondre à l'aorte gauche des Reptiles, et il nous reste à rechercher ce qu'est devenu ce vaisseau chez les Oiseaux. Voici ce qui me paraît ressortir de tout ce que nous connaissons de positif sur l'appareil central de la circulation dans cette classe de Vertébrés. Les affinités nombreuses que nous avons signalées entre les Oiseaux et les Reptiles, affinités qui, di.sons-Ie, s'étendent non-seulement à l'appa- reil de la circulation, mais à bien d'autres appareils de l'économie, me paraissent autoriser à penser que le tronc artériel commun s'est divisé, chez les Oiseaux comme chez les Reptiles, en artère pulmonaire, aorte droite et aorte gauche. Tandis que chez les Mammifères la cloison inter-aortique ne s'était pas formée, cette cloison a dû s'établir de très-bonne heure chez les Oiseaux, de façon à constituer une aorte gauche pourvue dans le ventricule droit d'un orifice dont nous avons déjà du reste constaté la position et la cicatrice L'aorte droite avec ses divisions, identique à l'aorte droite des Reptiles et des Crocodiliens, a dépendu, comme chez ces derniers, du ventricule gauche Le développement considérable et l'activité extraordinaire du système pulmonaire, tout aussi bien que la disposition anatomique de l'anneau bulbaire et du faisceau commun droit, amènent de très-bonne heure l'oblitération de l'orifice de l'aorte gauche. D'autre part , en supposant qu'un pertuis de communication inter-aortique analogue à celui des Crocodiliens ait été conservé à cette époque chez les Oiseaux, il est probable que ce pertuis a dû perdre ra- pidement de son calibre et bientôt disparaître, parce que, le système pectoral en parli('nlier acquérant cliez les Oiseaux un développement très- 376 l^HILUSOPllIE NATURELLE. précoce ot hors de proportion avec ce qu'il esl chez les Uepliles, les troncs brachio-céphaliques qui naissent de Taorte droite presque immédiatement après son origine s'emparent d'une très-grande partie du sang. Si l'on y joint la quantité de sang que gardent pour elles la crosse aortique droite et l'aorte corre.spondante, on verra que le système aorlique droit réclame pour lui une telle quantité de .sang qu'il doit en rester bien peu pour péné- trer de l'aorte droitedans la gauchepar le perluis inter-aortique. La faiblesse du courant dans cette direction est bien faite pour permettre le rétrécis- sement du pertuis et son oblitération. Cette oblitération doit être du reste très-favorisée par les contractions ventriculo-bulbaires, qui, étant trés- multipliées et très-puissantes chez les Oiseaux, aplatissent d'une manière presque continue la lumière de l'aorte gauche au niveau de .son origine, et par conséquent au niveau du pertuis aortique, et s'opposent au passage du sang à travers ce pertuis. Il résulte de cet ensemble de considérations que de très-bonne heure, chez les Oiseau.x, l'aorte gauche a dû recevoir très-peu de sang et que, l'importance relative des troncs brachio-céphaliques augmentant rapide- ment, l'aorte gauche et le pertuis aortique se sout bientôt rétrécis et ont finalement disparu. Telle me semble la marche probable des phénomènes qui président à la formation du système aortique des Oiseau.x, phénomènes qui peuvent se résumer ainsi : développement e.xtraordinaire de l'artère pulmona're et de l'aorte droite, et atrophie par balancement de l'aorte gauche. Quand j'étudierai le rôle fonctionnel de l'aorte gauche des Reptiles, j'aurai à revenir sur ces considérations, que je borne là pour le moment. LIVRE DEUXIÈME Détermination des Ventricules chez les Reptiles à ventricules communicants. Les notions que nous avons acquises sur les transformations diverses du cœur dans la série des Vertébrés vont nous permettre de discuter et de résoudre pleinement un problème qui a été le sujet de nombreuses con- troverses et qui est resté jusqu'à présent sans solution. En effet, la déter- mination des ventricules dans le cœur des Reptiles que j'ai nommés à ventricules communicants, a tellement embarrassé les naturalistes même les plus distingués, qu'elle a donné lieu de leur part à des solutions variées qui sont toutes, on peut le dire, ou des tentatives malheureuses, ou des fins de non-recevoir. Ces cœurs ont été pendant longtemps considérés comme n'ayant en réalité qu'un ventricule et comme n'offrant aucune trace de vraie séparation ven- triculaire. Cette opinion, qui n'est pas abandonnée depuis bien longtemps, ne donne à la fausse-cloison et à la lèvre d'autre signification et d'autre im- portance que celle d'une saillie charnue limitant l'infundibulum de l'artère pulmonaire. Ce n'est point là une vraie cl lison interventriculaire, et cette vraie cloison manque entièrement. Nous savons ce qu'il faut penser de ce défaut complet de cloison interventriculaire, puisque nous avons trouvé chez les Chéloniens, les Ophidiens et les Sauriens des faisceaux charnus rayonnants naissant des faces antérieure et postérieure du ventricule pré- cisément au-dessous et dans le plan de la cloison inter-auriculaire et pro- duisant par leurs saillies opposées une sorte de rétrécissement de la cavité ventriculaire. Nous avons suivi les transformations successives de ces faisceaux dans la série, et nous avons pu conclure de cet examen que c'étaient Î7S l'IIlLOSOPIIIK NATUHKLLE. là les rpprésciitants ot les élémenls fondamentaux delà cloison inlerventri- cnlairo proprement dite des Vertébrés supérieurs à ventricules séparés. Chez les Cliélonlens, Ophidiens, Sauriens, ces faisceaux limités dans leur développement laissent entre eux une portion rétrécie ou goulot qui est le Iroii interventriculaire . D'autres ont considéré le repli antérieur (fausse-cloison) et sa lèvre comme une vraie cloison interventriculaire incomplète, ou bien comme une limite ventriculaire, car celte saillie n'est point pour tous située exac- tement entre les deux ventricules et destinée à les séparer. Corti, par exemple, divise les cavités ventriculaires de la façon suivante : il appelle ventricule droit l'espace limité par le repli antérieur et sa lèvre, et qui forme le vestibule de l'artère pulmonaire ; la cavité comprise entre ce ven- tricule droit et le trou interventriculaire constitue pour lui l'espace inter- ventriculaire [spaiium interventriculare) . A cet espace correspondent les orifices des deux aortes et l'oriûce auriculo-ventriculaire droit. Le reste de la cavité ventricidaire qui en occupe l'extrémité gauche et qui n'est en rela- tion qu'avec l'orifice auriculo-ventriculaire gauche, constitue pour lui le ventricule gauche. Il est facile de se convaincre que les cavités auxquelles Corti donne le nom de ventricules sont loin de correspondre aux cavités de même nom chez les Mammifères et les Oiseaux. On doit considérer avec juste raison que chez ces derniers les ventricules ont atteint leur plus haut degré de perfectionnement et représentent l'état parfait. Ils se sont en effet très-net- tement délimités et séparés, et chacun d'eux a acquis, comme propriété exclusive, les orifices essentiels, c'est-à-dire uu orifice auriculaire pour lui fournir du sang, et un orifice artériel pour en permettre l'écoulement au dehors. Ce sont là les cavités que l'on désigne sous le nom de ventricules quand il s'agit des Mammifères et des Oiseaux. Je ne nie point qu'en ana- tomie comparée on no puisse choisir pour type du ventricule une cavité autrement constituée et ne possédant par exemple qu'un orifice. Ce serait le cas desventricules de Corti, dont le droiln'a que l'orifice artériel, et dont la gauche n'a que l'orifice auriculaire. Mais je ne pense pas qu'il soit d'une bonne méthode de choisir les types parmi les organes les moins parfaits, et surtout parmi ceux dont la constitution reste encore dans un état inter- DES DEUX VENTRICULES CHEZ LES REPTILES. -270 médiaire et conserve des formes indécises , comme il arrive pour le cœur des Reptiles à ventricules communicants. Je crois qu'il vaut mieux choisir les types, en anatomie comparée comme du reste en toute science comparative, parmi les sujets ou parmi les organes nettement dessinés et chez lesquels les tendances sont déjà transformées en faits accomplis. C'est là le caractère du cœur des Mammifères et des Oiseaux, où les tendances à la séparation des deux sangs, au cloisonnement des ventricules, etc., ont trouvé leur entière réalisation. Choisissant donc pour types les ven- tricules des Mammifères ou des Oiseau.x, nous sommes amené à rejeter les dénominations introduites par Corti ; elles peuvent d'autant moins être acceptées, qu'elles rejettent hors des ventricules des éléments tels que les orifices aortiques et l'orifice auriculo-venlriculaire droit, qui chez les Vertébrés supérieurs sont des parties constituantes des ventricules. La réunion de ces éléments divers dans un espace interventriculaire où ils semblent confusément entassés comme des volumes dépareillés dans le rayon des rebuts, constitue elle-même une condamnation de la détermina- tion des ventricules des Reptiles, telle que Corti l'a proposée. Au lieu de considérer, avec Corti, le cœur des Reptiles comme composé de trois cavités distinctes, on peut, avec la plupart des anatomistes et M. Gubler encore dernièrement ' , lui reconnaître deux ventricules com- muniquant entre eux par le trou interventriculaire. La cloison incomplète des deux ventricules serait alors formée non plus par la fausse-cloison et sa lèvre, mais bien par la vraie cloison interventriculaire des Mammifères et des Oiseaux incomplètement développée. Il y aurait donc: l°un ventricule gauche qui, identique au ventricule gauche de Corti, a un orifice auricu- laire et est dépourvu de tout orifice artériel; et S" un ventricule droit qui, comprenant à la fois le ventricule droit de Corti et l'espace interventriculaire du même auteur , possède un orifice auriculaire et les trois orifices artériels, aortes et artères pulmonaires. Ce ventricule droit serait divisé par le repli antérieur en deux loges, l'une supérieure (aortes et orifice auricu- laire) et l'autre inférieure (loge pulmonaire) . Ainsi donc, ventricule gauche incomplet et ventricule droit pourvu d'éléments en excès empruntés au I Compt.-rend. de la Suc. de hiol.. séance du 14 septembre 1861. 280 I>inT/)SnpiIIE NATURELLE. ventricule gauche : tels sont les résultats d'une pareille détermination. Il sufBt de les présenter pour en démontrer le défaut de justesse et pour en provoquer le rejet. Tandis que l'opinion précédente, conservant le ventricule gauche de Corli, réunissait l'espace inlervcntriculairc otle ventricule droit du même anatomiste, pour en constituer le ventricule droit, M. Jacquart ', prenant pour types les ventricules des Mammifères, renverse les termes précédents, conserve le ventricule droit de Corti, ,et réunit son ventricule gauche ù l'espace interventriculaire, pour en former le ventricule gauche. M. Jac- quart suppose donc que la cloison incomplète du ventricule droit (c'est-à- dire la fausse-cloison et sa lèvre) représente la paroi interventriculaiie complète des Mammifères. « Alors tout s'explique, ajoute M. Jacquart (fai- sant allusion aux difficultés soulevées par la théorie qui précède): l'unité de plan n'est plus détruite ; il y a seulement variété dans Tunité, et la loi des connexions vient nous guider dans la recherche des analogies, qui nous échappaient. Le cône pulmonaire, ou loge inférieure du ventricule droit, représente le cœur droit tout entier. La loge supérieure des auteurs n'est plus qu'un diverticulum du cœur gauche bilobé en quelque sorte, rétréci, comme étranglé au niveau du trou interventriculaire par un des piliers charnus qui garnissent sa cavité. Le ventricule gauche recouvre ainsi les vaisseaux aortiques auxquels il donne naissance ; c'est qu'ici, comme chez les Mammifères, le ventricule gauche empiète sur le droit eu arrière, tandis qu'en avant c'est le droit qui couvre le gauche. De plus, quand les valvules de la base des ventricules sont relevées, ces cavités communiquent non plus par un trou rétréci, mais par un passage assez large, et qui rend admissible l'hypothèse d'un rétrécissement entre les deux loges du ventricule gauche (PI. XVII, fig. 2 ter) '.» * Jacquart; Organisation de la circulalion chez le Serpent Python. (Ann. des scienc. nat., 4» série, tom. IV, pag. 236.) 2 Les figures 1 à 5 de la Plauche XVII sont destinées à peindre aux yeux les limites et les circonscriptions ventriculaires. Le rouge appartient au ventricule gauche, le bleu au ventricule droit, le vert à la cloison charnue interventriculaire. J'ai marqué par des points la cloison inter- vestibulaire quand elle existe, ou la place qu'elle devrait occuper quand elle n'existe pas. La fig. 1 ter reproduit la conception de M. Jacquart. DES DEUX VENTRICULES CHEZ LES REPTILES. 281 Telle est, textuellement rapportée, la théorie de M. Jacquart. Il sera facile (le démontrer que l'uulcur se fait illusion en la croyant propre à tout expli- quer. On peut d'abord lui demander s'il y a une analogie parfaite entre ce ventricule droit sans orifice auriculaire et le ventricule droit des Vertébrés supérieurs, ou bien encore entre ce ventricule gauche pourvu de deux ori- fices aorliques et des deux orifices auriculaires et le ventricule gauche des Vertébrés supérieurs? Il est évident que l'auteur s'est attaché à un point de vue erroné, et s'est appuyé sur des considérations qui manquent de jus- tesse. Il y a là une contradiction frappante. Le fait qui aux yeux de M. Jacquart blesse le plus l'analogie dans la théorie des anatomistes, adop- tée par M. Gubler, c'est « que le ventricule gauche ne donne plus nais- sance à aucun vaisseau. Les deux aortes, ajoute-t-il, ou, suivant Meckel et Carus, l'aorte qui devrait naître du ventricule gauche, prend naissance dans le ventricule droit, et celui-ci, par contre, donne naissance à la fois à l'aorte et à l'artère pulmonaire. » Mais on peut faire remarquer à M. Jacquart que le reproche qu'il adresse si judicieusement à une théorie que nous avons déjà condamnée, ne s'applique que trop justement à la sienne. Quand, en effet, prenant comme lui pour type les Mammifères, il s'agit de rechercher les ventricules des Reptiles à cloison incomplète, on n'a pas plus le droit de considérer comme ventricule une loge dépourvue d'orifice auriculaire (ventricule droit de Corti et de Jacquart), qu'une loge dépourvue d'ori- fice artériel (ventricule gauche de Corti et autres). Il va sans dire que nous pourrions apprécier delà même façon, soit une cavité pourvue à la fois des deux orifices auriculaires et des deux orifices aortiques (ventricule gauche de Jacquart), soit une loge pourvue uniquement des trois orifices artériels, aortiques et pulmonaire (ventricule droit des auteurs). Au reste, et je le montrerai clairement plus tard en exposant la conception qui m'est person- nelle, c'est une erreur de M. Jacquart' de penser que, chez les Mammifères et les Reptiles, le ventricule gauche empiète sur le droit en arrière, tandis qu'en_ avant c'est le droit qui couvre le gauche, et que les deux aortes doi- vent naître du ventricule gauche. Cette dernière proposition, qui ne saurait ' Jacquart ; Organes de la circulation du serpent Python [toc. cit.), et Structui'e du cœur de la Tortue Midas. (Ann. des se. nat. Zool., i' série, toni. XVI, 1861. J 282 FHILOSOPflIK NATURELLE. être acceptée par ceux qui ont lu h; chai)itre prccédeut, me paraît être une des principales causes qui ont induit en erreur l'auteur des deux Mémoires, du reste très-intéressants, que j'ai eu et que j'aurai encore l'occasion de citer. Je terminerai cette revue des conceptions diverses qui ont été mises en avant pour déterminer les ventricules des Reptiles, en disant que la diffi- culté d'une pareille détermination a fait adopter par quelques anatomisles des dénominations qui ne préjugent eu rien la question, et qui sont, dans tous les cas, utiles pour le langage descriptif. C'est ainsi que certains au- teurs ont donné à l'infundibulum le nom de loge pulmonaire, et au restant de la cavité le nom de loge aortique. Brticke considère le ventricule comme divisé en deux parties communiquant entre elles par le trou interventri- culaire. A gauche la loge artérielle [cavum arteriosum) , et à droite la loge veineuse {cavum venosum) qui est subdivisée par la lèvre de la fausse- cloison en deu.\ compartiments, l'un supérieur aortique et l'autre inférieur pulmonaire. Je viens de démontrer que toutes les théories précédentes, auxquelles on pourrait peut-être en ajouter d'autres moins importantes, ne peuvent ré- sister à un examen sérieux ou satisfaire aux exigences de l'anatoraie phi- losophique. Il leur manque à toutes d'être le fruit d'une étude comparative minutieuse des transformations du cœur dans la série zoologique, aussi bien que dans la série embryologique. Nées de la comparaison de points de la série trop distants les uns des autres, tels que la Tortue et les Mammi- fères, ellessenlent l'effort et ont quelque chose d'artificiel qui est contraire à la vérité. Ce n'est pas ainsi qu'il convient de procéder; et, loin de com- parer entre eux des termes extrêmes ou éloignés, il faut rechercher des •termes moyens qu'il soit possible de rapprocher en restant fidèle à la na- ture. Ce terme moyen, je le trouve naturellement dans le cœur des Croco- diliens, qui, demeurant encore un cœur de Reptile, est déjà presque un cœur d'Oiseau, et nous permet par là de passer au cœur des Mammifères. Quelques notions essentielles ont également manqué dans l'édification des théories précédentes. Je mets en première ligne la nolion du mode de formation de la cloison des ventricules des Crocodiliens et des Vertébrés DES DEUX VENTRICULES CHEZ LES REPTILES. 283 supérieurs par deux éléments distincts, la cloison interventriculaire propre- ment dite et la cloison intervesUbulaire . Il faut y ajouter la notion des changements de rapport de ces deux éléments de la cloison des ventricules qui, situés chez les Ghéloniens, Sauriens, etc., dans des plans éloignés transversalement, se rapprochent chez lesCrocodiliens au point de devenir continus et se rapprochent encore ()lus chez les Oiseaux et les Mammifères. J'ajoute enfin en troisième ligne la notion de la cause de ce rapprochement , c'est-à-dire le chevauchement l'un au-devant de l'autre des deux pôles artériel et veineux du tube cardiaque. Si ces notions fussent entrées en ligne de compte, on aurait compris chez les Ghéloniens l'accumulation à droite des orifices artériels et l'accu- mulation à gauche des orifices veineux , et chez lesCrocodiliens le rappro- chement et l'emboîtement de ces orifices de nature difi'érente. On n'eût point songé à attribuer l'orifice de l'aorte gauche au ventricule gauche, et l'on eut enfin, grâce à ces fils conducteurs, pu démêler avec sûreté chez les Ghéloniens, etc., les éléments entremêlés et quasi confondus des deux ventricules. G'est ce que je vais essayer de prouver, en apportant moi-même dans cette recherche la méthode et les notions qui m'ont paru désirables chez ceux qui m'ont précédé dans cette voie. Je n'ai pas besoin de revenir sur ce que j'ai déjà longuement développé dans maintes parties de ce travail, à savoir : l'honiologie et la correspon- dance parfaite des cavités ventriculaires des Mammifères et des Oiseaux. Le lecteur doit être parfaitement renseigné sur ce point, de telle sorte qu'il me suffira de prendre les ventricules des Oiseaux comme terme de com- paraison. Rapprochons maintenant ces derniers des ventricules des Groco- diliens, et voyons quels sont les éléments qui les constituent. Le ventricule droit, le plus complexe et le plus embarrassant des deux, comprend chez les Oiseaux, comme chez les Crocodiliens, en allant d'avant en arrière : 1" Antérieurement, l'infundibulum ou vestibule de l'artère pulmonaire; 2° Le vestibule de l'aorte gauche, dont l'orifice aplati, mais conservé chez les Grocodiliens, s'oblitère complètement chez les Oiseaux, ainsi que je l'ai suffisamment démontré ; 3" Enfin, en arrière, l'orifice auriculaire droit et la portion de la cavité ventriculaire qui, correspondant à cet orifice, se trouve immédiatement au- Î84 l'RILOsni'HIE N'ATUlilOT-l.E. dessous do lui et ;i droite (ie la cloison inlcrventrionlaire propremonl dili. Celte troisième partie, je l'appellerai portion auriculaire du ventricule droit. Ces trois éléments, considérés sur une coupe horizontale ( PI. XVII, fig. 3 et 4), forment une sorte d'arc ou croissant ouvert vers la gauche el embrassant le vestibule et l'orifice de l'aorte droite. Ils sont séparés de l'aorte droite et du ventricule gauche par des cloisons différentes d'ori gine. L'orifice et le vestibule pulmonaire sont séparés de l'aorte droite par la fausse-cloison. Entre le vestibule S'il est une classe qui puisse fournir un argument en faveur de la multi- plicité des centres de création, c'est bien la classe des Reptiles, et plus particulièrement les Grocodiliens. On peut dire en effet que les animaux appartenant à ce groupe considérable des Reptiles n'offrent pas d'exemples de migrations comparables à celles des Poissons, des Oiseaux ou même des Mammifères. Ceux qui sont terrestres s'éloignent peu du lieu où ils sont nés; les autres appartiennent, soit aux eaux douces toujours assez circonscrites, et vivent alors dans les mares, les lacs, les fleuves; soit aux oaux salées, et restent confinés dans les criques, au niveau des embouchu- res, près des côtes, etc. Il est donc incontestable que la dissémination de pareils animaux, soit dans l'étendue des grands continents, soit à travers les grandes mers, semble devoir présenter des difficultés considérables. Si donc, pour expliquer la présence des représentants de cette classe, soit dans les divers continents éloignés les uns des autres, soit dans la grande éten- due de ces mêmes continents, l'école transformiste était obligée d'admettre des centres multiples, non pas de création directe, mais de transformation, elle se créerait des objections capables de la faire reculer. Prenons pour exemple la famille des Grocodiliens , dont l'état actuel de dispersion sur quelques points du globe relativement rares et très-distants pourrait fournir un argument en faveur de la multiplicité des centres de ' Darwin ; Orir/inc des Espèces, ï" éclit., pag. 4"24 et 425. 324 PHILOSOI'IIIE NATUHEIJ.K. créalioii '. Si nous devons rapporlcr à [ilusiours souches distinctes l'origine par Iransfornialion dos divers groupes de (]rocodiliens qui existent ou ont existé, il nous reste à expliquer, suivant la théorie Darwinienne, comment se sont formées ces souches primitives. Il est évident que pour résoudre celte question on se trouve en présence de difficultés considérables, et que l'on en est réduit à faire appel à la foi la plus robuste dans la puissance des hasards heureux. N'oublions pas en effet qu'il ne s'agit pas seulement de modifications extérieures portant sur le squelette, ou sur les dents, ou sur la peau, ou sur la forme des membres, modifications pour lesquelles le milieu, le genre de vie, l'hérédité, la sélection naturelle, peuvent avoir une influence plus concevable ; mais il s'agit aussi de modifications très-singu- lières, ayant pour siège un organe interne , un viscère, sur lequel les influences extérieures sont relativement moins puissantes*, et ces modifi- cations se reproduisent avec une égale régularité et une exactitude sans ' Consulter, à propos des stations actuelles des Crocodiliens, un travail intéressant du D'' Alexandre Strauoh: Synopsis der gegemvàrtig lebetiden Crocodiliden, etc. (Mémoires de l'Aoad. impér. des Sciences de Saint-Pétersbourg, Vil' série, tom. X, nol3. 186G). — Il résulte de ce travail que le genre Crocodilus occupe l'Afrique centrale et méridionale au-dessous d'une ligne allant du Sénégal aux frontières sud de l'Egypte ; en Asie, la partie centrale et inférieure de l'Hindoustan, Geyian, le Bengale, l'Indo-Chine jusqu'à l'Himalaya, et à partir de ce point la Chine jusqu'au fleuve Bleu; en Océanie, les îles de la Sonde, la Nouvelle-Ouinée; en Australie, le tiers moyen de la côte nord et quelques petits îles de la Môlanésie, entre autres les îles Fidgi; en Amérique, la région inférieure du Mexique à partir de Tampico, toute la région rétréoie qui réunit les deux Amériques, la Nouvelle-Grenade, l'Equateur et Vene- zuela. Le genre Alligator se trouve aux États-Unis, dans les États du Sud seulement et parti- culièrement dans la partie inférieure du Mississipi et du Rio-Grande, ensuite dans le Yucatan, l'isthme de Panama et dans toute l'Amérique du Sud jusqu'à une ligne qui irait de la partie nord du Pérou à l'embouchure du Rio-de-la-Plata ; enfin les Gavials n'existent que dans le bassin immédiat du Gange, à Bornéo et à Java. ' On pourrait m' objecter que l'influence du milieu, des habitudes, etc., est très-considérable sur le jeu de l'appareil de la circulation et sur la conformation du cœur. Je suis loin de nier cette influence ; mais je veux dire seulement que des influences de miUeu capables de modifier puissamment la couleur du pelage, la forme des membres, la forme générale du corps, etc., sont loin d'atteindre aussi profondément la forme et le jeu de l'appareil circulatoire : ainsi, les Mammifères, plongeurs par excellence, acquièrent, comme les Poissons, des membres plus ou moins palmés ou en nageoires, une queue en nageoire, une forme allongée; il en est de même des Oiseaux plongeurs; et pourtant les uns et les autres conservent un appareil car- diaque conforme au type de celle des deux classes à laquelle ils appartiennent. I.K cœUR ET LE TRANSFORMISME 325 exception dans certains groupes bien distincts de la grande famille des Reptiles (Crocodiles, Alligators, Gavials). Ces groupes offrent du reste entre eux des affinités très-considérables et très-nombreuses. Ils ne peuvent être séparés dans une classification rationnelle, et forment par leur ensemble un groupe des plus naturels et des plus homogènes. Comment alors con- cevoir que, dans des points différents de la surface du globe, il se soit rencontré plusieurs combinaisons dans les conditions, soit de milieu, soit d'hérédité, soit de sélection, etc., plusieurs combinaisons, dis-jo, assez identiques dans leurs résultantes, pour que de certains types antérieurs plus ou moins rapprochés de nos Reptiles ordinaires aient surgi les divers représentants du type Crocodilien ? Comment s'est opérée, en un mot, sur différents points du globe , cette transformation cardiaque si remarquable et la même pour les Grocodiliens d'Afrique, d'Asie, ou d'Amérique, etc.? Comment, de plus et surtout, s'est-il fait que ces transformations car- diaques, dans tous les groupes où elles se sont produites, se sont con- stamment accompagnées d'un même ensemble de modifications portant sur divers organes ? Ainsi , chez tous les Grocodiliens on trouve un os tympa- nique soudé à la région occipitale par une articulation fixe, des dents uni- radiculées implantées dans des alvéoles distinctes et existant sur les deux mâchoires , un allongement et un aplatissement latéral de la queue qui est surmontée d'une crête, la présence d'un dermo-squelette, un dévelop- pement considérable de la taille, et quatre membres munis partiellement de griffes, de telle sorte que tous ces groupes de Reptiles se distinguent très-nettement de tous les autres Reptiles par un ensemble complet de caractères. Y a-t-il une corrélation nécessaire entre ces transformations exté- rieures et intérieures, de telle sorte que la production des premières en- traîne et explique la formation des secondes, ou vice versa ? On n'aurait le droit d'affirmer une proposition aussi étonnante qu'en la prouvant; et il est évident qu'on serait réduit sur ce terrain aux conjectures les plus hasar- dées et pour le moment les moins légitimes' . ' Cette proposition aurait d'autant plus besoin d'être in-ouvée, que la corn''lalion entre la constitution du cœur et les formes extérieures de l'animal ne paraît au fond que médiocrement étroite. Pour le démontrer, je me bornerai à un exemple. Les cœurs si semblables des Cliélo- niens, des Ophidiens et des Saiirien'^, c'est-à-dire des Reptiles à ventricules communicants. 326 [>inLOS()I>llIE NATURELLK. Il est vrai que j'ai, à propos de la loi des valvules, essayé de donui>r une explication rationnelle de la formation des valvules sigmoïdes aoiiiques des Grocodiliens. J'ai même émis l'opinion qu'un perfectionnement pareil dans l'appareil central delà circulation devait nécessairement produire un perfectionnement de l'ensemble de l'organisme. Si la question restait sur ce terrain général, il n'existerait donc pas de difficultés pour l'école trans- formiste, et sa réponse serait facile. Mais la dilliculté gît en réalité dans l'identité des modifications partielles et locales qui produisent le perfec- tionnement de l'ensemble. Chez tous les Grocodiliens, ces modifications sont les mêmes; et il est, pour le moment du moins, impossible de saisir leur corrélation avec les modifications de l'appareil cardiaque. Il me semble donc qu'en présence d'un fait comme celui que je viens d'exposer et de tous les faits semblables, la théorie Darwinienne, si elle admettait les centres multiples, ne pourrait essayer une explication qu'en se jetant à corps perdu dans nn système d'hypothèses à outrance, et que la doctrine opposée, celle delà création libre et directe, offrirait, hypo- thèse pour hypothèse, nne explication à la fois plus simple et plus ration- nelle. Les considérations que je viens de présentera propos d'un cas particu- lier des transformations cardiaques peuvent s'appliquer avec non moins de raison à bien d'autres particularités d'organisation qui ont été exposées dans le présent travail. On peut, par exemple, dire à propos du ventricule droit des Oiseaux et de sa valvule musculaire, ce qui vient d'être dit au sujet des valvules sigmoïdes des Grocodiliens. S'il était admis que la grande classe des Oiseaux, si nombreuse, si répandue, si variée, a pris naissance de plusieurs souches et dans plusieurs centres différents, comment expli- quer par la théorie Darwinienne cette uniformité qui se remarque dans l'organisation interne sous les différences de conformation extérieure? Par quelle série incompréhensible d'heureux hasards, par quelles combinai- sons miraculeuses, s'est-il fait que le ventricule droit de tous les Oiseaux, provenant de centres différents et éloignés de formation, ait acquis une s'associent à des formes extérieures et même à des particularités de constitution Ijieu dill'érentos les unes des autres. LE GOKUR F/r LK TliANSFOKMISME. 327 conlbriuaUun seiuLlable pour luus, identique même, el que chez lous, eu même temps que leburd interne de l'orifice auriculo-ventriculairese dégar- nissait de toute valvule, se soit formée cette valvule musculaire si constante, si caractéristique, qu'elle permet de distinguer immédiatement un cœur d'Oiseau du cœur de tout autre Vertébré' ? Y a-t-il une corrélation néces- saire entre l'apparition des caractères extérieurs et cette conformation du cœur des Oiseaux? ou, pour parler d'une manière plus précise, la naissance des plumes, la transformation des membres antérieurs en ailes , l'établisse- ment de la station bipède, l'armature cornée des maxillaires el l'absence ' La constitution du cœur de l'Oiseau est certainement en relation avec la suractivité de la respiration qu'exige la fonction du vol. Il n'est donc pas surprenant que le ventricule droit possède des moyens puissants d'impulsion pour la circulation pulmonaire. Ce qui me surprend davantage , et ce qui provoque mes réflexions, c'est l'uniformité HII,()Sn(>IIIK NATUliRl.LR. ment continuol do tension tel que la qnanlilé relative de sang provenant des deux aortes oscille constamment dans de faibles limites, ou que même le courant soit nul dans l'anastomose. Je crois même pouvoir ajouter que cette situation doit être la plus fréquente. Je le déduis de la lenteur bien connue des digestions et des fonctions chylopoïéliques chez les Reptiles ; et j'appelle également à l'appui de cette opinion cette considération, que j'ai constamment trouvé l'aorte abdominale d'un calibre un peu moindre que l'aorte droite, ce qui peut produire en faveur de cette dernière un accroissement de tension capable de s'opposer à l'écoulement du sang de l'aorte gauche dans la droite, mais insuffisant pour causer à lui seul le reflux du sang de cette dernière dans l'anastomose. Aux influences que je viens de signaler comme propres à modifier la circulation dans l'anastomose, il faut, pour être complet, en ajouter d'autres qui, moins importantes que la première, n'en sont pas moins réelles et viennent ajouter leur action aux actions précédentes. Les systèmes vascu- laires des muscles, de la peau et des parois en général, sont aussi soumis à des variations de calibre qui ne peuvent rester sans effet, .\insi, pour ne citer qu'un exemple, il est clair que si, pendant que le système circulatoire viscéral est largement ouvert, le système vasculaire général dépendant de l'aorte abdominale ou des troncs bracbio-céphaliques se trouve rétréci et coniraclé, il y a une raison de plus pour que le sang de l'aorte droite, au lieu de s'engager dans ces vaisseaux où la vitesse est très-faible, se déverse abondamment dans l'anastomose et remonte vers les artères viscérales. Or on sait que cet état de balancement entre les vaisseaux viscéraux et les vaisseaux pariétaux constitue une des conditions les plus constantes et les plus nécessaires de la physiologie normale du système vasculaire. Nous voyons donc que dans l'anastomose : 1° quand les organes chylo- poïétiques sont au repos, une faible quantité de sang passe de l'aorte gauche dans la droite, pendant le premier moment de la systole; la circulation s'in- terrompt pendant la fin de la systole cardiaque et à fortiori pendant la diastole, et l'anastomose reste plus ou moins distendue par une certaine quantité de sang stationnaire; 2* quand les organes chylopo'iétiques sont en grande activité, le cours du sang, avant le début de la systole, est nul ROLE DE I.'ANASTOMOSK ABDOMINALE. 369 dans l'anastomose, qui tend à revenir sur elle-même, vu la faible tension aortique; mais avec la systole il s'établit un courant progressivement croissant à travers l'anastomose de l'aorte droite vers la gauche, et plus particulièrement vers l'artère cardio-stomachique; 3° dans l'état d'activité modérée ou partielle des organes chylopo'iétiques, la circulation est nulle avant le début de la systole dans l'anastomose abdominale, qui reste faible- ment distendue à cause de rabaissement général de lensiondu système vasculaire. Au début ou vers la fin de la systole, il peut y avoir dans l'anastomose des oscillations de peu d'importance. En somme, cours du .sang dans l'anastomose : 1° toujours trés-faihle de l'aorte gauche à l'aorte droite, pendant l'état de contraction des artères viscérales ; 2° d'intensité variable de l'aorte droite à l'aorte gauche pen- dant l'état de dilatation des artères viscérales ; et 3» défaut de circulation ou simples oscillations dans les périodes ou dans les conditions intermé- diaires. II faut noter que dans le cas où il y a cours rétrograde du sang de l'aorte droite dans l'anastomose, ce sang va fournir à une partie des artères viscérales, tandis que le sang venu directement de l'aorte gauche fournit à l'autre partie. Tel est en définitive ce que nous pouvons présumer sur le rôle de l'anastomose chez les Ghélonieas du premier sous-type. L'étude des Ghéloniens du second sous- type va nous donner une confir- mation intéressante de ces vues. A cette catégorie appartiennent les Ghé- loniens chez lesquels, les artères viscérales naissant de l'aorte gauche au niveau même de son abouchement avec l'aorte droite, l'anastomose se trouve n'avoir pas de longueur réelle, et consiste en une large ouverture d'inosculation existant entre les deux aortes adossées l'une à l'autre en ce point. C'est là la disposition que j'ai pu observer avec soin chez trois Tortues caouanes dont la taille considérable contribuait à donner aux mesures de longueur et de diamètre des vaisseaux, et à la détermination des directions et des relations de ces vaisseaux, une précision et une valeur qu'on ne saurait leur prêter sans témérité et sans imprudence sur des animaux d'un petit volume. La disposition de ces vaisseaux (PI. XVIII, fig. 1) de- mande une description spéciale. L'aorte droite et la gauche, au-dessus du point où elles vont s'unir, .sont presque adossées l'une à l'autre pendant un 370 l'IIILOSOPIIIi: N'ATrREI.T.K. IKirroiirs de plusieurs conl.iaK'li'es. et comprciincnl par conséquent onlre elles un angle extrêmement aigu. Au niveau de leur point d'union, ces deux vaisseaux sont entièrement au contact l'un de l'autre; et si, comme je l'ai fait dans la figure, on ouvre l'aorte gauche B, on aperçoit un large orifice de communication 0 fait comme par un emporte-pièce. Cet orifice ovalaire a une grosse extrémité inférieure limitée par un bord assez arrondi; l'extrémité supérieure a un bord tranchant en forme d'éperon ou de repli falciforme. Immédiatement au-dessus du niveau de ce bord supérieur tranchant se trouve, sur la paroi de l'aorte gauche opposée à l'orifice de communication, l'orifice du tronc cœliaque H. qui se subdivise bientôt en deux branches inégales destinées à l'estomac, au foie et à la rate. L'em- bouchure du tronc cœliaque a la forme d'un entonnoir H largement évasé en haut et en dedans vers la partie supérieure de la cavité de l'aorte gauche, et représente là comme un renflement de ce vais.seau aorlique. Au-dessous de l'orifice de communication naît l'artère mésentérique C. L'aorte droite se rétrécit notablement au-dessous de l'orifice de commu- nication, de telle sorte que l'aorte abdominale qui lui fait suite est d'un calibre visiblement moindre que le sien. Ce rétrécissement se fait d'une manière assez brusque et forme une sorte de collet /. Il y a dans la direction réciproque de ces divers vaisseaux des points intéressants à signaler. L'aorte droite A se porte de haut en bas et de dehors en dedans jusqu'au niveau de l'oriflcc de communication, et se dirige ensuite de haut en bas et légère- ment de dedans en dehors, pour devenir plus tard verticale. L'aorte gauche, presque verticale jusqu'à l'orifice de communication, peut être considérée comme continuée par l'artère mésentérique, qui se porte de haut en bas, de dedans en dehors et un peu d'arrière en avant. Il résulte de là, comme on peut en juger par la figure, que ces deux vaisseaux semblent former un X très-allongé, que l'artère mésentérique semble poursuivre la direc- tion de l'aorte droite, et que l'aorte abdominale semble continuer la direc- tion de l 'aorte gauche. Ces parties sont en réalité fort bien disposées pour que le sang venant de l'aorte gauche puisse facilement être projeté dans l'aorte abdominale, et encore mieux pour que le sang de l'aorte droite soit projeté dans l'artère mésentérique. D'autre part, la disposition et la direction del'infundibulum du tronc cœliaque sont éminemment propres à ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE. 371 faire ongouCfrer le sang de l'aorte gauche dans le tronc c(Blia(iuc, tandis que la situation de l'orifice de ce même tronc au-dessus du foramen de communication et la directioix du bord tranchant de l'orifice sont bien faites pour éloigner de ce tronc cœliaque le sang venant de l'aorte droite et pour le rejeter vers l'artère mésentérique. Gesont là des faits positifs, ijui ne peuvent échapper à un observateur attentif, et dont le lecteur pourra faci- lement et légitimement tirer dos conséquences intéressantes quand j'aurai mis sous ses yeux les mesures comparatives de ces divers vaisseaux. Je donne ici ces mesures, prises sur trois Tortues caouanes injectées avec des matières grasses : 1° Tortue caouane de belle taille; injection bien réussie ayant également pénétré partout. I^es mesures des deux aortes ont été prises à 1 centimètre au-dessus de leur point d'union. Elles offrent à ce niveau une diminution de calibre qui occupe une étendue de plusieurs centimètres au-dessus, et qui fait suite à un renflement prolongé fusiforme qui occupe la plus grande partie des portions descendantes et des crosses des aortes. Les parties ascendantes des deux crosses sont d'un calibre à peu prés égal pour l'aorte droite, et inférieur, pour la gauche, à celui qu'elles ont un peu au-dessus du point d'union des deux aortes. Cette disposition permet l'accumulation du sang et la régularisation de l'écoulement dans les aortes, qui peuvent recevoir beaucoup de sang dans leur partie dilatée et le faire ensuite pro- gresser régulièrement par le retrait de leur paroi. L'aorte gauche, dont le calibre terminal reste supérieur au calibre initial, est, on le voit, disposée pour un abaissement de la tension. Voici du reste les mesures des diamètres prises avec un compas d'épaisseur à vis. Aorte gauche, ascendante 12""", 0 — descendante renflée 15 5 — — rétrécis 14 0 Tronc cœliaque, artère stomachique 5 5 — artère hépatique . mésentérique, splé- nique, etc il 0 — artère mésentérique proprement dite (irès-distendue par l'injection) 12 0 372 PKILOSOPIUR NATUREM.ii;. Aorte droite, ■■losso 1 1'""',0 — deseeiidanle renflée 12 0 — — rétrécifi Il 0 Aorte abdominale 3 0 L'orifico de communication correspond à un cercle de 9""» à 9°"", 5. 2" Tortue caouaiie de plus grande taille que la précédente, dont les artères viscérales, incomplètement remplies par l'injection, sont ridées et insuffisamment dilatées; l'artère mésentérique en particulier est mal remplie. Ces remarques expliqueront au lecteur les di£Férences considérables qui sembleraient exister dans les dimensions respectives des vaisseaux des deux Tortues. Aorte gauche, ascendante Hn-'^jS — descendante renflée "20 0 — — rétrécie 19 0 Tronc cœliaque (mal injecté) , artère stomachique fi 5 — artère splénique , mésentérique , hépa- tique, etc 10 (I — artère mésentérique proprement dite (mal injectée) 13 0 Aorte droite, crosse 15 0 — descendante renflée 16 0 — — rétrécie 15 0 Aorte abdominale I "2 0 3» Tortue caouane d'un gros volume; injection assez bien réussie. Aorte gauche, ascendante (en mauvais état) . — descendante renflée ig""". 0 — — rétrécie 18 0 Tronc cœliaque, artère stomachique 5 5 — artère hépatique , mésentérique , splé- nique, etc 10 5 — artère mésentérique proprement dite. . 13 5 Aorte droite, crosse (mal conservée) . — descendante renflée 16 0 — — rétrécie 14 7 Aorte abdominale 11 () ROI.E DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE. 373 Si nous rapprochons ces chiffres les uns des autres , chez la première Tortue, dont l'injection était partout également bien réussie, nous voyons que l'artère mésentérique. qui a 1 l°"n,5 de diamètre, pourrait recevoir à un moment donné tout le sang de l'aorte droite descendante (11"""). Nous voyons également que les artères hépatique et stomachique, etc., réunies (5""°,5 et 1 1°"°), pourraient à un moment donné recevoir presque tout le sang provenant de l'aorte gauche (1,3™™,. 5 en moyenne), puisque les cer- cles, c'est-à-dire les calibres des vaisseau.x étant entre eux comme les car- rés des rayons ou des diamètres, ces vai.ssean,x sont entre eux comme .30,25 + 100, c'est-à-dire 130,25 esta 182,25, ce qui dénote une diflé- rence dont l'effet peut être annulé en tout ou du moins en grande partie par la dilatationdespetits vaisseaux dépendant de ces artères viscérales. Les dimen- sions de l'orifice de communication (9"°", .5) sont intéressantes, en ce qu'elles prouvent combien l'échange des deux sangs peut se faire abondamment à ce niveau. Les dimensions de cet orifice, sa forme et sa situation prou- vent encore que presque tout le sang de l'aorte droite pourrait facilement passer dans la gauche et plus particulièrement dans l'artère mésentérique, et que dans des conditions différentes la plus grande partie du sang de l'aorte gauche pourrait passer dans l'aorte abdominale. Le rétrécissement assez brusque que présente l'aorte abdominale immédiatement au-dessous de l'orifice de communication, autorise à affirmer que le sang rencontre à ce point un certain obstacle à son facile écoulement, et qu'il peut y avoir là une sorte de reflux qui le rejette dans l'orifice de communication. Enfin, les dimensions considérables de cet orifice sont une preuve qu'il doit être le siège d'un échange actif entre les deux aortes, soit dans un sens, soit dans les deux alternativement; car, s'il en était autrement, l'orifice se serait rétréci ou aurait même disparu. Voilà ce qui ressort clairement de l'exa- men de la première Tortue et de la troisième, et ce qui ressortira aussi de l'examen de la deuxième, si l'on tient compte des différences que l'insuccès relatif de l'injection a apportées dans les dimensions de certains de ses vaisseaux. Examinons maintenant les diverses conditions physiologiques dans les- quelles peut se trouver le système vasculaire. Supposons d'abord les divi- sions des artères viscérales à l'état de contraction. Il en résultera que la HTA PHILOSOI'llIE N ATllilOLLE. tension sanguine s'élèvera dans les troncs d'ori^iiu; de ces vaisseaux ; mais la somme des calibres de ces troncs étant notablement supérieure au calibre de l'aorte gauche, il peut se faire que ces troncs viscéraux se trouvent encore capables de recevoir tout le sang provenant de cette dernière aorte, et l'on peut affirmer dans tous les cas que, s'il y a un excédant passant par le l'orameu de communication pour aller se mêler au sang de l'aorte droite, il n'existera qu'au début de la systole, et sera toujours extrêmement faible, comme chez les Chélonieus du premier sous-type, et pour les mêmes motifs. Si les artères viscérales abdominales sont largement dilatées, si l'écou- lement s'y fait facilement, leur tension diminue, et elles deviennent capa- bles de recevoir une quantité de sang très-considérable pour lequel le débit de l'aorte gauche ne suffit plus. 11 faut donc que du sang de l'aorte droite traversant le foramen pénètre dans l'aorte gauche. Cette quantité de sang fournie par l'aorte droite sera d'autant plus considérable que les vaisseaux qui dépendent d'elle ou de l'aorte abdominale seront plus con- tractés, rs'olable au début de la systole, cette quantité ira croissant jusqu'à la fin, et décroîtra jiendant la diastole, pour devenir nulle plus ou moins tôt avant la systole ventriculaire suivante. Dans les premiers temps de la sys- tole, en efl'et, l'aorte gauche est largement alimentée, mais le sang i[ui lui parvient diminue sans cesse et dans de fortes proportions jusqu'à la fin de la systole. C'est là une circonstance qui doit faire augmenter progressive- ■ ment la quantité de sang que lui envoie l'aorte droite par le foramen de communication. Pendant la diastole ventriculaire, la systole aortique vide l'aorte droite de son excédant dans l'aorte gauche, pour arriver à un moment donné au rétabhssement de l'équilibre de la tension, et par conséquent à l'absence du cours du sang dans l'anastomose. Comme je l'ai déjà dit en décrivant les dispositions anatomiques, il est permis d'affirmer que la plus grande partie du sang fournie par l'aorte gauche passe dans le tronc cœliaque, et que le sang provenant de l'aorte droite par l'orifice de communication v,a surtout alimenter la grande artère mésentérique. En résumant l'analyse que je viens de faire au nom de l'anatomie et des lois connues de la circulation, on peut donc dire que : 1° quand les artères ROLE DV. I.ANASTOMOSE ABDOMINAL!;. :;75 viscurales abdominales sont contraeiées et les autres artères, pariétales ou noa', sont dilatées, le sang peut passer par l'oriflce de communication de l'aorte gauche dans la droite, mais en faible quantité et pendant un temps relativement court; "2° quand les artères viscérales de l'abdomen sont dilatées et les autres artères contractées, ce sang passe abondamment de l'aorte droite "dans la gauche pendant toute la systole et une partie de la diastole. La disposition du canal de communication des deux aortes qui se trouve formé par un large orifice toujours béant, et qui n'oS're point de longueur réelle de trajet, ne permet pas absolument d'admettre qu'il n'y ait point un échange continuel à ce niveau entre les deux aortes; seulement il est permis de compreudre qu'il y ait des conditions physiologiques du système vasculaire telles que l'échange soit réduit à des proportions extrêmement faibles et pour ainsi dire à de simples oscillations. J'ajoute, en terminant, que le rétrécissement brusque de l'aorte droite immédiatement au-dessous de l'orifice, et les dimensions considérables des artères viscé- rales, qui représentent au contraire un élargissement brusque de l'aorte gauche, autorisent à penser que c'est de l'aorte droite dans la gauche qu'a heu le plus souvent l'écoulement, ce qui est du reste d'accord avec ce fait que les viscères abdominaux sont, de tous les organes, ceux qui font les appels, de sang le plus fréquents, le plus prolongés, le plus considé- rables. Pour terminer l'étude de la circulation de l'anastomose abdominale pendant la vie aérienne, il ne nous reste qu'à parler des Grocodiliens. C'est uniquement sur les animaux de cette famille qu'à porté jusqu'à pré- sent la discussion des zoologistes au sujet du cours du sang dans cette anastomose. Il était en effet universehement admis, pour tous les auti'es Reptiles, que c'était le sang de l'aorte gauche qni allait constamment se mêler à celui de la droite pour alimenter l'aorte abdominale. Le lecteur connaît les raisons pour lesquelles je rejette cette opinion, en ce qui con- ' J'entends par là toutes les artères de la tête, du cou, des membres, des reins, de l'appareil reproducteur et des parois du tronc, c'est-à-dire toutes les artères du système aortique autres que les artères des grands viscères chylopoïétiques, ou, eu d'autres mots, autres que les bran- ches de l'aorte gauche. PIIILOSOPIIIK N'ATIinELLD. cerne du moins les (-héloniens. Prenant ce point fie départ , je vais exami- ner ce qui se passe chez les Crocodiliens. Les Crocodiliens se trouvent, par rapport aux différences de tension entre les deux aortes, dans des conditions autres que les Chéloniens. Cela se comprend aisément quand on pense que le pertuis inter-aortique, ouvert pendant la systole et fermé pendant la diastole chez les Chéloniens, ne s'ouvre chez les Crocodiliens que pendant la diastole, pour se fermer pendant la systole. De plus, chez les Chéloniens, les cavités ventriculaires communiquent largement entre elles; les deux aortes participent à une même impulsion ventriculaire pendant le premier temps de la systole, alors que l'orifîce de l'aorte gauche n'est pas encore aplati et effacé. La cloison com- plète du cœur des Crocodiliens place ces derniers dans des conditions diffé- rentes pendant toute la systole, et permet à chacune des deux aortes d'ob- tenir une tension qui soit en rapport avec la puissance du ventricule auquel elle appartient. De ces difl'érences dans les conditions mécaniques de la circulation résultent des différences dans les rapports de tension des deux aortes. Je les résume dans le tableau suivant. CHÉLONIENS. | CROCODILIENS. .4. Avant le début de la Systole. La tension des deux sortes est à peu prés égale par suite de l'écoulement du sang des deux aortes , soit dans l'aorte abdominale , soit dans les artères vis- cérales. Je dis à peu près seulement, car il est probable qu'il y a un léger excès de tension en faveur de l'aorte droite. La tension des deux aortes doit être égale, çâvce que le foramen de Pannizza a permis un écoulement abondant de l'aorte droite dans la gauche. B. Systole. a. Pendant le premier temps de la systole, c'est-à-dire tant que l'orifice aortique gauche est ouvert, il y a sensi- blement ega/iïé de tension entre les deux aortes, parce qu'elles reçoivent leur sang de deux ventricules qui communi- a. Dès le début de la systole , les deux ventricules de puissance inégale étant entièrement séparés, et lepertuis aortique étant fermé, la tension devient inégale au profit de l'aorte droite, et la différence croît rapidement, parce que ROLE DE !.• ANASTOMOSE ABDOMINALE. CHÉLONIENS quent, et dans lesquels la pression se répartit également. b. Mais , l'orifice aortique gauche s'aplatissant et se fermant bientôt, les deux aortes ne communiquent plus que par la fente in ter-aor tique, qui elle- même va se rétrécissant de plus en plus ; aussi la différence de tension qui s'accuse lentement aux dépens de l'aorte gauche, pendant que l'orifice aortique gauche tend à s'aplatir, s'ac- croit plus rapidement à partir du mo- meut où la feute inter-aortique reste seule et se rétrécit. Ainsi donc, la diflérence de tension au profit de l'aorte droite et aux dé- pens de la gauche ne s'établit que quel- que temps après le début de la systole et croît d'abord très-lentement, et vers la fin un peu moins lentement. Cette difi'érence de tension n'est ja- mais considérable. CROCODILIENS. le ventricule droit, qui est plus faible, a deux orifices de débit, donll'un destiné à l'artère pulmonaire permet un écou- lement très-facile et abondant. ''. L'orifice aortique gauche s'apla- tissant et se fermant de bonne heure, et le pertuis aortique étant toujours fermé , la différence de tension croît encore plus rapidement au profit de l'aorte droite et aux dépens de la gauche. Ainsi donc, la différence de tension s'établit dès le début de la systole et croît d'abord rapidement, et vers la fin très- rapidement. Cette différence de tension devient très-considérable. C. Diastole. La différence de tension, qui est fai- ble, tend à diminuer par suite de l'écou- lement du sang des deux aortes dans leurs collatérales et à travers l'anas- tomose abdominale. La fente iuter- aortique étant fermée, l'échange entre les deux aortes ne peut se faire qu'à travers l'anastomose abdominale. La différence de tension doit donc s'effacer beaucoup plus lentement chez les Ché- louiens à anastomose longue et étroite que chez ceux du second sous-type. La différence de tension, qui est con- sidérable, diminue par suite de l'écoule- ment du sang de l'aorte droite dans l'aorte gauche , à travers l'anastomose abdominale; mais elle diminue surtout très-rapidement parce que le foramen de Pannizza, béant et largement ouvert, permet un .écoulement abondant de l'aorte droite dans la gauche. 48* 378 l'IlIl.OSOl'llll-; NATllHEr.l.K. Pour représenter d'une manière graphique ce que je viens de déve- lop[)er, je donne deux courbes (PI. XVIII, fig. 5) dont les degrés d'élé- vation expriment les différences de tension (ju'il y a entre les deux aortes chez les Chéloniens du premier sous-ty[)e cl chez les Crocodiliens. La courbe supérieure représente graphiquement les variations de la ditJ'éreuce de tension des deux aortes chez les Grocodiliens; la courbe inférieure a trait aux Chéloniens. Les chiffres placés sur la ligne horizontale corres- pondent aux divers moments de l'action du cœur. 1 indique le début de la systole, 2 la fermeture de l'orifice aorlique gauche, 3 la fermeture de la fente inter-aorlique chez les Chéloniens, 4 le début de la diastole et l'ouverture du foramen de Pannizza, 5 le moment où l'équilibre inter- aortique est établi chez les Chéloniens, 6 le moment où cet équilibre est L'iabli chez les Crocodiliens, 7 la fin de la période de diastole et de repos ventriculaire. Il est bien entendu que ces courbes sont purement théoriques et ne reposent que sur une analyse attentive des conditions mécaniques de l'appareil de la circulation. La comparaison que je viens d'établir entre les causes qui font varier la différence de pression entre les deux aortes me dispense d'analyser et d'expliquer ces courbes. Je laisse ce soin au lec- teur, me bornant à faire remarquer que la courbe des Chéloniens a trait à ceux du premier sous-type, qui se rapproche des Crocodiliens; on comprend que chez les autres, comme la Tortue caouane et la Tortue franche, la courbe serait bien plus surbaissée, et l'équilibre se rétablirait bien plus facilement à la fin de la diastole. Je viens d'exposer les phénomènes tels qu'ils auraient heu dans des systèmes vasculaires dont les canaux auraient partout la même constitution anatomique et dont les divers départements, constitués d'une manière iden- tique, conserveraient invariables leurs calibres respectifs. Mais nous avons déjà vu, à propos des Chéloniens, qu'il n'en est point ainsi et que des mo- difications physiologiques plus ou moins intermittentes modifient les calibres relatifs des divers départements de ce système d'irrigation, et changent à la fois la tension vasculaire des régions et par suite la rapidité ou le sens des courants. Il nous reste à étudier ces modifications, et c'est ce que je ferai bientôt ; mais avant, je dois donner quelques détails sur la ROLE DE L ANASTOMOSE ABDOMINALE. .-579 disposition des vaisseaux au niveau de l'anostornose chez les Groco- diliens. Ce qu'il y a de plus frappant, c'est le faible volume du rameau anas- tomotique. Ce rameau, étendu très-obliquement de l'aorte gauche à l'aorte droite, qui sont parallèles et presque contiguës à ce niveau, ce rameau, dis-je, ne représente qu'une petite artère se détachant de l'aorte gauche, tandis que le tronc viscéral, d'un volume considérable et se subdivisant au-dessous de l'anastomose en trois branches, constitue le prolongement effectif de l'aorte gauche. Ce faible calibre de la branche anastomotique a frappé les zoologistes. C'est ainsi que Pannizza l'a désignée sous le nom de ramoscello; pour Siebold etSlannius, c'est \m faible rameau communiquant; pour Carus un faible canal. Je répète ici que sur un Crocodilus hicius bien adulte, de plus de 2"',50 de longueur, Poëlman ' a constaté que le canal de communication présentait une direction oblique d'une longueur de 8 millimètres et un diamètre d'environ 2 millimètres. J'ai moi-même trouvé des mesures presque identiques à celles-là sur un Caïman adulte du Sénégal. Or, chez l'animal observé par Poëlman . lo pertuis aortique, de forme ova- laire, avait un diamètre Iransverse de 7 millimètres et un diamètre vertical de 3 millimètres. Ces dimensions du foramen de Pannizza permettent d'éva- luer à un centimètre au moins le diamètre des aortes. Il résulte de là que le diamètre de l'anastomose est tout au plus les 0,2 du diamètre de l'une des aortesprise pour unité. Or, chezlesChéloniens, telsque la Tortue mauresque, il en est les 0,6 environ, et chez la Tortue caouane il en est à peu prés les 0,7 ou les 0,8. Et comme les calibres des vaisseaux sont entre eux comme les carrés des rayons, le calibre d'une aorte est à celui de l'anas- tomose: Chez les Grocodiliens Chez la Tortue mauresque. Chez la Tortue caouane. . . 0,25 0,25 0,25 0,01. 0,09. 0,12ou 0,16. On voit déjà par là combien le rôle de l'anastomose comme canal pro- pre à déverser le sang d'une des aortes dans l'autre et à rétablir l'équili- ' Académie royale de Belgique. 4 février 1864. Classe lies Sciences. 380 PIIIUISOPFIIK NATURELLE. bre tle tension ontro ces deux vaisseaux, doit iHrc beaucoup plus restreint chez les Grocodiliens que chez les Chéloniens du second sous-type et même que chez ceux du premier. Chezdcjeuues Caïmans de 35et de 50 centimètresde longueur.j'ai trouvé que ce vaisseau avait un diamètre relativement bien supérieur à celui que je viens de signaler chez les animaux adultes. Ce fait-là n'a rien d'étonnant, attendu que, dès son apparition etdans les premières périodes de formation du système vasculaire, les deux aortes sont d'égal diamètre jusqu'au point de leur réunion, et que ce n'est que par suite de leur modification produite successivement par les progrès du développement de l'individu que l'anas- tomose se trouve réduite à un diamètre de plus en plus petit par rapport à celui des aortes. Le rôle de ce canal de communication doit être de peu d'importance chez les Grocodiliens adultes, et on peut présumer qu'il y a de nombreux moments où, revenu sur lai-même et son calibre étant plus ou moins efîacé. il n'est le siège d'aucune circulation. Ce qui prouve du reste que ce défaut de communication et d'échange par l'anastomose est loin d'être un fait absolument contraire à la régularité des fonctions et inconciliable avec la vie, c'est que Poëlman a trouvé ce vaisseau complète- ment oblitéré chez un Crocodile adulte. Si nous ajoutons ces notions à celles que nous avons précédemment acquises sur le mécanisme de la cir- culation centrale chez les Grocodiliens, nous pourrons arriver, je l'espère, à des notions suffisamment exactes sur le rôle de l'aorte gauche et de l'anas- tomose abdominale. Mais avant d'aborder directement cette question, il est bon, il est même nécessaire d'être fixé sur un point d'hydraulique physiologique sur lequel Briicke insiste beaucoup, et auquel il est regrettable qu'il ait donné une solution par trop théorique. Briicke préfère croire, avec Bischoff et contre Pannizza, que dans l'anastomose abdominale chez les Grocodiliens le sang coule de l'aorte gauche dans la droite, de telle sorte que c'est du sang mixte qui se rend aux extrémités postérieures. Reconnaissant cependant que la tension dans l'aorte droite est supérieure à la tension dans l'aorte gauche, il sent le besoin de démontrer que, malgré cette condition, le courant peut s'établir de cette dernière vers la première, et voici textuel- lement les raisons qu'il invoque à l'appui de cette possibilité. « Si l'on ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE. 381 considère un tube d'embranchement qui se détache sous un certain angle d'un canal cylindrique droit dans lequel coule un liquide, et si l'on veut mesurer la force avec laquelle le liquide tendra à passer dans le tuyau d'embranchement, on arrive au résultat suivant. Cette force, que je désigne par W, est représentée par la somme de deux quantités, dont la première est la pression /* qu'indique le manomètre appliqué dans le tube principal au niveau même de l'embranchement, et dont la seconde est une fonction de deux quantités variables, indépendantes l'une de l'autre, savoir : I»la vitesse v du courant dans le tube principal; et 2"rangle(p que forme l'em- branchement avec ce tube; de sorte que si l'on exprime cette force par la formule suivante : \V = h ■+- F {v ; cou 9) la seconde quantité de la somme augmente ou diminue avec eus m ou change même de sens, si l'on désigne toujours par

la pression dans le premier et par A' dans le second, par v" la vitesse dans le premier et par u' dans le second, on a les deux formules: W'o=: h" +F {v" ; cos 90) . W"=/i' -\-F' {v; coscp'). » Mais cos (p" étant une valeur positive, tandis que co,y cp' est une valeur négative, il est clair que par l'anastomose le courant pourra s'étabhr de AB vers CD, quoique h' soit supérieur à h", puisque la direction de ce cou- rant dépend uniquement de ce que W" — W représente une valeur posi- tive ou une valeur négative. Si ll'o > W, le courant va de AB vers CD; si W'' restant le même, v est considérablennent accru, comme cela peut se faire en rendant l'écoule- ment de AB très-facile, en élargissant par exemple le tube immédiatement au-dessous de l'anastomose, il peut se produire en (p° une véritable succion de l'anastomose dans AB, et par conséquent de CD vers AB. Ce sont là des considérations auxquelles Briicke n'a pas sans doute cru devoir donner l'importance qu'elles me paraissent naériter dans le cas actuel, et nous ver- rous que c'est ce qui l'a conduit à une opinion que je crois erronée sur la direction du cours du sang dans l'anastomose abdominale des Crocodiliens et des Cbéloniens. Pour déterminer cette direction du sang dans l'anastomose, j'ai voulu apprécier expérimentalement la valeur relative des termes de l'équation ll'= h -|-F (u; eus cpj . Mes expériences n'ont point la prétention de présenter une précision mathématique, qui n'est du reste pas possible dans les con- ditions où j'ai dû me placer ; mais j'y ai apporté assez de soin et d'atten- tion, et je les ai suffisamment multipliées pour que leurs résultats soient con- tenus dans des limites d'approximation satisfaisantes. Voici comment j'ai procédé : J'ai pris deux tubes en caoutchouc vulcanisé, ayant un mètre de long, un diamètre intérieur de 7 millimètres, et des parois très-élas- tiques et suffisamment résistantes. J'ai fait adapter avec soin sur le milieu de leur longueur un petit tube en caoutchouc d'un milUmètre et demi de diamètre intérieur et de 4 centimètres et demi de longueur. Ce petit tube a des parois épaisses de plusieurs millimètres, de manière à offrir une cer- taine résistance à la dilatation et à reproduire partiellement les conditions de l'anastomose abdominale, dont les parois épaisses et capables de revenir entièrement sur elles-mêmes peuvent interrompre toute communication entre les deux aortes quand la tension aortique est affaiblie. Ce tube anas- tomotique relie les deux tubes droits et parallèles sous la forme d'une sécante très-oblique faisant dans un même sens un angle de 35° avec l'un, et de 145° avec l'autre. Les orifices de communication dutubeanas- tomotique avec les grands tubes sont légèrement évasés vers la cavité de ces derniers , et ont été construits avec soin, de manière à ce qu'aucun obstacle matériel, aucune valvule ne vînt établir d'inégalité dans la facilité de pénétration du liquide dans un sens ou dans l'autre. ROLE DE LANASTOMOSE ABDOMINALE. 385 Sur chaque tube, au point diamétralement opposé à l'orilioe du tube anas- tomolique, j'ai fait adapter perpendiculairement à l'axe du grand tube un petit tube en caoutchouc de 30 centimètres de longueur et de 3 millimètres de diamètre. Chacun de ces deux petits tubes vient s'adapter à l'une des branches horizontales d'un manomètre comparatif dont le tube en U ren- ferme du mercure jusqu'à une certaine hauteur, et auprès duquel se trouve une échelle divisée en centimètres et en millimètres. La différence de niveau des deux colonnes est destinée à m'indiquer ainsi exactement la dif- férence de tension dans les deux tubes, au point même où se trouve l'orifice d'abouchement du tube anastomotique. D'autre part, en oblitérant par la compression l'anastomose et en laissant un des grands tubes en caoutchouc vide et sans pression, le manomètre peut m'indiquer la pression hydrosta- tique qui règne dans l'autre tube au niveau de l'insertion de l'anastomose. Chacun des deux grands tubes est fixé par son extrémité supérieure à un ajutage cylindrique d'un, calibre intérieur égal pour chaque côté, à peu prés égal à celui du tube en caoutchouc, et fixé lui-même à une tubulure placée latéralement à la partie inférieure d'un grand flacon. Les deux tubes ainsi disposés étaient ensuite couchés sur une planche d'une longueur égale à la leur, obliquement inclinée afin de favoriser l'écoulement, et dépassée à sa partie inférieure par l'extrémité des robinets fixés aux tubes, de manière à ce qu'on pût recueillir facilement les liquides écoulés. Les deux flacons, placés côte à côte de façon à ce que les tubes fussent sensiblement parallèles, étaient également posés sur un même plan hori- zontal, de manière à ce que leurs tubulures supérieure et inférieure fussent au même niveau pour les deux flacons. Par là, j'obtenais au-dessus des orifices de l'anastomose des hauteurs de colonne de hquide qui ne différaient que par la distance verticale qui séparait ces deux orifices. A l'aide de robinets convenablement disposés et de tubes en caoutchouc plongeant librement dans les flacons, j'amenais dans ces deux réservoirs de l'eau en excès qui déversait par l'orifice supérieur, ce qui me procurait un niveau constant, et par suite un écoulement constant par les tubes inférieurs. L'ad- jonction à frottement aux tubulures supérieures de larges tubes en verre de longueurs variées, recevant de l'eau par des robinets convenablement réglés, me permettait d'avoir un écoulement constant sous des pressions 49- 386 PHILOSOPHIE NATURELLE. supérieures à celles quo donnaient les flacons pleins; ou bien ces flacons, transformés en vases de Mariotte, me procuraient des écoulements constants sous des pressions plus faibles. Les tubes étaient munis inférieurement de robinets de laiton de calibres égaux et donnant des écoulements égaux sous des pressions égales. J'ujoute quo la diilerencc de niveau des orifices des petits tubes qui s'adaptaient au manomètre donnait, quand ces petits tubes étaient remplis d'eau jusqu'à la surface du mercure, et en dehors de toute pression venant des grands tubes, une différence de pression en faveur du tube dont l'orifice était le plus élevé. Cette différence, qui s'ac- cusait dans le manomètre par une différence de niveau de 2 à 3 millimètres suivant le degré d'inclinaison des grands tubes, était une valeur invariable pour une même situation des tubes, valeur notée à chaque expérience et dont il était tenu compte dans l'évaluation des différences manométriques de la tension dans les deux grands tubes. Enfin je dois ajouter que l'ouver- ture des angles formés par l'anastomose et les tubes qu'elle réunit était modifiée parle rapprochement des deux tubes, et que l'acuité et la régu- larité de ces angles étaient maintenues par deux vis placées à des distances convenables, fixées dans la planche qui supportait les tubes, et sur lesquelles étaient placés à cheval les sommets des angles alternes inter- nes aigus. La position des deux vis pouvait être changée de manière à augmenter ou à diminuer l'acuité de ces angles, et par conséquent l'obliquité de l'anastomose. Les appareils étant ainsi disposés, j'ai entrepris deux séries d'expériences qui m'ont conduit à des résultats qui se confirment réciproquement. Dans une première série, je me suis borné à introduire de l'eau dans un des deux flacons et à produire des écoulements constants par le tube correspon- dant. En faisant varier, soit la pression hydrostatique par les procédés que j'ai déjà indiqués, soit la vitesse d'écoulement à l'aide du robinet inférieur, je modifiais la poussée latérale ou tension dans le tube correspondant. Une quantité variable de liquide traversait l'anastomose. En l'ecueillant le liquide écoulé parle tube voisin dans un flacon d'une capacité déterminée, et en notant aussi le temps nécessaire pour que le flacon fût rempli, il m'était facile de calculer la quantité de liquide qui traversait l'anastomose pendant une seconde. Le flacon que j'avais choisi pour recueillir le liquide ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE. 387 était d'une capacité de 280". A l'aide d'un flacon de 1 1 45" destiné à recueillir le liquide du tube principal, il m'était facile de calculer la vitesse dans ce tube. Pour comparer dans des conditions exactement semblables l'influence de l'anastomose sur l'écoulement dont elle était le siège, je me servais toujours du même tube, dont je plaçais une des extrémités, tantôt en haut en rapport avec le flacon réservoir, tantôt en bas en rapport avec le robinet inférieur d'écoulement. Ainsi, l'angle aigu formé par l'anastomose était dirigé tantôt en haut et tantôt en bas. et. je pouvais comparer les quantités de hquide écoulées à travers l'anasto- mose dans les deux cas, dans des conditions identiques d'orifice, et en me mettant par là même à l'abri des inégalités que pouvaient produire dans l'écoulement les difi"érences possibles des orifices d'abouchement de l'anastomose avec les deux tubes. Après avoir opéré ainsi sur l'un des tubes, j'ai opéré également sur le tube opposé, et j'ai pu constater par les résultats, qui étaient sensiblement les mêmes dans les deux tubes, que leurs orifices de communication avec l'anastomose se trouvaient dans des conditions égales et parfaitement comparables. Je ne puis point ici rapporter les diverses combinaisons expérimentales que j'ai mises en œuvre dans ces conditions. Prenant une pression hydro- statique donnée, je faisais varier la vitesse et étudiais par là l'influence de la vitesse. D'autre part, avec une vitesse constanteje faisais varier la pres- sion hydrostatique, et je pouvais ainsi constater l'influence de cette der- nière. Pour exprimer les résultats que j'ai ainsi obtenus et pour éviter les répétitions et les longueurs, je préviens le lecteur que, quand le tube sera disposé de manière à ce que l'anastomose présente son angle aigu ouvert inférieurement, je le désignerai sous le nom d'aorte gauche, tandis que je l'appellerai aorte droite dans le cas contraire. 'Voici le résultat des expé- riences que j'ai ainsi exécutées. La poussée latérale ou tension du liquide croît avec l'augmentation de la pression hydrostatique et avec la diminution de la vitesse. Cette tension est d'autant plus grande que la différence entre ces deux quantités est elle-même plus grande. Gela ressort di; la loi de BernouilH citée plus haut. Le passage du liquide dans l'anastomose dépend de la tension au point d'abouchement de cette dernière. La quantité de liquide qui traverse 388 PHILOSOPHIE NATURELLE. l'anastomose dans les deux cas croît pins rapidement que la lensiou, ce qui se comprend parce que la force d'impulsion augmente, tandis que les ob- stacles (direction, longueur du tube, frottement, etc.) restent les mêmes ou ne croissent pas aussi rapidement. Cette quantité de liquide qui traverse l'anastomose croît plus rapidement pour l'aorte droite que pour la gaucbe. Quelle que soit la hauteur de la pression hydrostatique, pourvu que la vitesse soit telle que la tension soit la même, l'écoulement par l'anasto- mose reste sensiblement le même pour une même aorte. Voici quelques résultats numériques à l'appui de cette proposition. AORTE GAUCHE. PRESSION DÉPENSE VITESSE TENSION. à travers ranaslomose DANS L'AORTE HYDROSTATIQUE. par seconde. par seconde. 82mm 54"'"' 4*^', 5 _ 65 54 4 6 — 80 52 4 4 o-'.gg 65 52 4 4 0 56 82 30 3 2 65 31) 3 2 — 49 18 2 9 1 06 21 18 3 0 0 38 49 5 1 5 1 29 21 5 1 6 0 73 Si l'on compare maintenant l'aorte droite à l'aorte gauche, on constate que, plus la pression hydrostatique est grande par rapport à la vitesse, c'est-à-dire plus la tension est élevée, plus aussi l'influence de la direction de l'angle de l'anastomose devient faible. Ainsi, quand la tension s'élève ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE. 389 au-dessus de 3 ou 4 centimètres, la différence d'écoulement par l'anaslo- mose devient presque insignifiante. Voici quelques chiffres à l'appui : PRESSION HYDROSTATIQUE. TENSION. ÉCOULEMENT PAR l'anastomose. Aorte gauclie Aorte droite Aorte gauche Aorte droite Aorte gauche Aorte droite Aorte gauche Aorte droite 65mm 65 65 65 65 65 49 49 54mm 54 30 30 25 25 36 36 4«,6 4, 6 3, 2 3, 2 2, 77 2, 80 4, 3 4, 3 Mais quand la tension devient inférieure à 2 centimètres, soit parce que la pression hydrostatique a diminué, soit parce que la vitesse a augmenté, alors l'influence de l'angle se fait d'autant plus sentir que la tension est plus basse. Voici en effet les résultats obtenus. PRESSION HfDKOSTATlQDE. TENSION. ÉCOULEMENT à travers L'ANASTOMOSE. VITESSE par AORTE Aorte gauche . . Aorte droite . . . 65-""' 65 23""' 23 2« 7 2, 6 Aorte gauche . . Aorte droite . . . 49 18 18 2, 9 2, 4 1,"06 1, 04 Aorte gauche . . Aorte droite . . . 49 49 5 5 1, 5 0, 1 1, 28 1 , 30 1 390 PHILOSOPHIE NATURELLE Il résulte de ces nombres que, plus la lensioa devient grande, c'est-à- dire plus la pression hydrostatique est élevée par rapporta la vitesse, plus aussi l'influence de la direction de l'angle s'atténue. Si donc, la pression hydrostatique restant la même, la vitesse vient à décroître, la différence de l'écoulement dans les deux directions de l'anastomose s'affaiblira à mesure que la vitesse diminuera. L'atténuation de l'influence de l'angle dépend donc du degré de distance qu'il y a entre la pression hydrostatique et la vitesse, de telle sorte que si le maximum de cette influence existe quand aune faible pression hydrostatique correspond une grande vitesse, le mini- mum a lieu quand une forte pression hydrostatique se trouve combinée avec une vitesse faible. C'est là un fait qui ressort des nombreuses expériences que j'ai exécu- tées, et dont il est facile de donner l'explication. Il est clair, en effet, que quand, la pression étant élevée, la vitesse vient à diminuer, le liquide ren- fermé dans le tube se rapproche de plus en plus de l'état statique, c'est- à-dire de l'état dans lequel la pression s'exerce également dans toutes les directions. Il n'est donc pas étonnant que la direction de l'embranchement anastomotique perde de son influence. Si maintenant nous reprenons la formule W= h -f- F [v; cos. est positif; dès qu'il devient obtus, cos (p devient négatif. Examinons d'abord le cas où cos ç est positif. Plus l'angle 9 est aigu, plus la valeur des cos

l^ = p-r + "^ ^ ° mv + \ qui représente la force qui pousse le liquide dans le sens du mouvement sur une tranche de la lumière du tube égale à la lumière de l'embranche- ment. Il est à remarquer que dans ce cas nv, n'étant plus multiplié par une valeur fractionnaire, se trouve avoir atteint sa valeur maximum, ce qui est d"accord avec la théorie et l'expérience, puisque W représente alors la poussée du liquide dans le sens même du courant. Si (p atteint 90°, c'est-à-dire si l'embranchement devient perpendiculaire au tube principal, co5(p devient égal à 0, et la formule se réduit à W+ . . ce qui exprime bien en effet ce que nous savons, c'est-à-dire que la tension 392 PHILOSOPHIE NATURELLE . OU poussée latérale perpendiculaire au sens du courant dépend simplement d'un certain rapport entre la pression hydrostatique et la vitesse. Il ne nous reste enfin qu'à supposer l'angle cp compris entre 90° et 180°, et alors, cos cp devenant négatif, le terme nv.cos (p devient négatif aussi, et la valeur de W s'en trouve d'autant diminuée. Plus l'angle s'approchera de 180°, plus la valeur négative de oos(f, et par conséquent de nv.cos ç, augmentera, et plus la valeur de W diminuera. Enfin, si nous supposons ç = 180", et par conséquent co5 cp =: — 1 , W représentera la force qui tend à pousser le li- quide dans une direction opposée justement à celle dans laquelle il coule, et la formule aura nécessairement acauis sa valeur minimum W^ ;— , — nv ' mv -f- 1 dans laquelle IF décroît très-rapidement quand la vitesse augmente, et tend rapidement vers 0 quand v devient trop grand. • La valeur de m peut facilement être calculée; il suffit pour cela de con- sidérer le cas ou l'angle ep = 90°. En effet, cos cp étant alors égal à 0, la formule se réduit h W = r , d'où il est facile de tirer m = — îjt-. mv -h 1 Wv Or, si l'on connaît h, W et v, la valeur de m est par cela même connue. J'ai fait ce calcul pour diverses tensions obtenues sous une même pression hy- drostatique en faisant varier la vitesse d'écoulement au moyen d'un robinet placé à l'orifice inférieur du tube. Je donne ici quelques-uns de ces résul- tats. Les deux premières colonnes du tableau représentent une progression arithmétique des tensions dont la différence est 3; les deu.xième et troisième colonnes renferment quelques termes d'une progression arithmétique dont la différence est 5. ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE. PRESSION HYDROSTATIQUE = SO"" MULTIPLES DE 3. Tension. Vitesse. Tension. MULTIPLES DE 5. Vitesse. Valeur de m. - - 5°'- 110c,5 0,008 — - 10 106,4 0,0047 - - 15 99,7 0,0023 18mm 92^4 - - 0,0019 - - 20 90,8 0,0016 21 89,7 - - 0,0015 24 85,9 - - 0,0012 - - 25 83,5 0,0011 27 81,4 - - 0,0010 30 75,4 30 75,4 0,0009 33 67,5 — - 0,0007 36 61,8 - - 0,0006 39 54,1 - - 0,0005 - - 40 50,5 0,00049 - - 45 30,5 0,00030 — - 50 0 0 Il ressort clairement de ce tableau que, pour le cas donné, la valeur de m croît et décroit avec la vitesse et en sens inverse de la tension. Je ne doute point que la valeur de m ne varie suivant la pression hydrostatique et la nature du tuyau d'écoulement, etc.; mais il n'en reste pas moins vrai que dans un tuyau élastique analogue à celui dont je me suis servi pour mes e.xpériences, la valeur de m décroît de plus en plus lentement à me- sure que diminue la vitesse et que croît la tension. Ces variations, régu- 50* 394 PHILOSOPHIE NATUREl-LE. liéros dans la valeur du rapport de la pression hydrostatique et de la vitesse pour constituer la tension dans un même tuyau et sous une même pression, tiennent probablement aux conditions d'élasticité du tuyau et aux change- ments de calibre de ce tuyau provoqués par des tensions différentes. Dans tous mes calculs j'ai supposé constant le diamètre du tube, parce que ses parois étaient épaisses et sufSsamment résistantes par rapport aux tensions qu'elles avaient à supporter; mais je ne dois pas oublier de dire que ce diamètre a dû croître très-faiblement avec la tension, et que la valeur de cet accroissement doit diminuer insensiblement, comme la valeur de m, à me- sure que la tension s'élève, c'est-à-dire à mesure que le maximum de distension du tube est près d'être atteint. C'est peut-être en partie à cela qu'il faut attribuer les variations dans la valeur de m. C'est ce qu'on pour- rait prouver par des expériences faites avec des tubes rigides. Ces expé- riences, je n'ai pas eu le loisir de les faire, car elles n'avaient que des rap- ports très-éloignés avec le sujet dont je m'occupe. Il me suffit d'avoir établi, dans cette première série d'expériences faites sur un seul tube pourvu d'un embranchement oblique de petit calibre, quelques propositions importantes pour la solution de la question que je me suis posée. Il ressort en effet, de tout ce que je viens de dire, que le phénomène et la formule d'hydraulique sur lesquels s'appuie Briicke, pour penser que l'écoulement se fait chez les Crocodiliens de gauche à droite dans l'anastomose, doivent recevoir une interprétation et une forme différentes de celles que Briicke leur attribue. Nous avons vu en effet que les propositions de Briicke sont trop générales, et que si, pour le cas actuel, lorsqu'il s'agit de tensions inférieures à 2 cen- timètres, l'influence de la direction de l'angle est d'autant plus grande que la tension est plus faible, au-dessus de 2 centimètres au contraire, c'est-à- dire à 3, 4, 5 centimètres, l'influence de l'angle s'efface de plus en plus et l'écoulement se fait également bien, quel que soit le sens du courant par rapport à l'embranchement. Or, si l'on examine précisément quelles sont Ips conditionsdans lesquelles se trouvent les aortes chez les Crocodiliens, on remarque d'un côté une aorte droite dont on peut, par analogie et eu égard aux parois du ventricule gauche, supposer la tension égale au moins à 5 ou 6 centimètres, et pour laquelle l'influence défavorable de l'angle de l'a- nastomose disparaît sous l'influence de cette pression élevée ; tandis que ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE 395 l'aorte gauche, dont on ne peut considérer la tension comme supérieure à 1 ou 2 centimètres au plus, perd par cela même le bénéfice de l'insertion à angle obtus de l'anastomose. Cette première série d'expériences ne permet pas assurément de supposer que le sang passe toujours de l'aorte droite dans la gauche, comme le veulent Bischoff et Brucke; les expériences de la seconde série vont me permettre de préciser les limites dans lesquelles est possible ce courant de droite à gauche. Dans la seconde .«'érie d'expériences, j'établissais pour chacun des deux fla- cons réservoirs et des deux tubes une pression et un écoulement constants; puis je faisais varier la différence de tension manométrique des deux tubes, tantôt en élevant ou abaissant la colonne d'eau de l'un des flacons réservoirs, et tantôt en fermant plus ou moins le robinet inférieur d'écou- lement de l'un ou l'autre des deux tubes. Pour constaterdans les deux cas le moment où le liquide de l'un des tubes pénétrait dans l'autre quand l'anasto- mose était dirigée, soit de haut en bas, soit de bas en haut, par rapport au premier tube, j'avais recours au moyen suivant: Je plaçais dans le flacon cor- respondant au premier tube une certaine quantité de cristaux de bichro- mate de potasse destinés à se dissoudre pendant l'écoulement et à fournir une solution suffisamment colorée de ce sel. Quand l'opération commen- çait, je faisais varier successivement, soit la hauteur de la colonne, soit l'orifice du robinet inférieur, et je recueillais à chaque fois dans un verre à expérience du liquide qui s'écoulait du tube correspondant au flacon d'eau pure. Je traitais le liquide recueilli par une solution d'acétate de plomb, qui donnait un précipité blanc de carbonate de plomb lorsque le liquide du tubo coloré n'avait pas pénétre par l'anastomose dans l'autre tube, ou un préci- pité jaune de chromate de plomb dans le cas contraire. Je ne puis rapporter ici les résultats détaillés des nombreuses expé- riences que j'ai faites dans ces conditions: je me borne à donner le tableau d'une série de ces expériences, en ajoutant que les résultats que j'ai obtenus n'ont pas différé de ceux que je rapporte ici. Je préviens le lecteur que, pour simplifier les désignations, je continue à appeler aorte gauche le tubo avec lequel l'anastomose forme un angle aigu vers l'orifice terminal, et aorte droite celui avec lequel elle forme un angle obtus dans la même direction . 396 PHILOSOPHIE NATURELLE Dans l'expùriencc suivante, j'ai établi des [)rc.ssions hydrostatiques assez élevées, et égales ou à peu près égales dans les deux aortes, .l'ai ensuite, au moyen des robinets inférieurs, fait varier simultanément la vitesse d'é- coulement dans les deux aortes de ^, de |, de |, etc., en prenant pour point fixe l'aorte à liquide incolore. Pour chaque vitesse de cette aorte, j'ai établi, en agissant sur le robinet del'aorte colorée, desdifférences de tension mano- métrique d'un demi-millimètre, de l™", de 2, etc., de manière à constater quelle était pour telle ou telle vitesse la différence de tension nécessaire pour que du liquide coloré passât de l'aorte colorée dans l'aorte incolore à tra- vers l'anastomose. Le tableau suivant (pag. 397j résume ces résultats. Le tableau ci-après (pag 398) renferme les résultats obtenus après avoir renversé de haut en bas les tubes, de manière à ce que leurs anciens orifices d'écoulement fussent devenus leurs orifices d'abouchement au flacon, et vice versa. Par suite de cette opération, le même tube que précédemment, et par suite le même orifice du tube anastomotique, se trouve en rapport avec le flacon coloré. Mais comme le sens de l'anastomose a été changé par le renversement du tube, l'ancienne aorte droite joue le rôle d'aorte gauche, et vice versa. Il ressort clairement de ces tableaux que, la pression hydrostatique res- tant la même, l'influence de l'angle d'insertion de l'anastomose s'efface à mesure que la vitesse diminue, c'est-à-dire à mesure que la tension s'élève, dette influence devient par conséquent do moins en moins défavorable à l'aorte droite, et de moins en moins aussi favorable à l'aorte gauche. Ces résultats sont parfaitement en harmonie avec ceux que j'ai déjà obtenus en expérimentant sur un seul tube. lisse relient aux mêmes causes, et trou- vent une explication identique. S'il est donc vrai, comme le prétend Briicke, que le sang d'un vaisseau analogue à l'aorte gauche des Grocodiliens puisse passer dans laorte droite par une anastomose oblique, quoique la tension de l'aorte gauche soit infé- rieure à celle de la droite , il est démontré également parles expériences précédentes qu'il peut exister des conditions de pression, do vitesse, etc.. telles, que l'influence de l'angle d'insertion de l'anastomcse se trouve singu- lièrement aU'aiblie et tout au moins diminuée, primée par l'influence de la ROLE DE I.ANASTOMOSE ARDOMIXALE *""" t3 ■O rt ;o S "^ S m '3 o TS "-â O. •2* :- 1 O aj ^ -o -a « ■3 M :2 — â.i 5 o* 3 O 3 « 'S « > ■a: J m a. o = c 3 3 O a. C « ^ C 4) "^ 0) "^ c o g ai •o 0? O '5 .H" ■ _; ■-> 3 3 g 2 z :- — c z c; Eh H "S o •-> ci c 3 •o*-^ 3 "■ ■3 ■O _ « c « c i -o 3 - .„ ~ "O C C g • i a <^ £ ts /- o > à c o3 ■° 3 fc-> 3 3 • 12 " 'p ^ 4» S ^ ^ *^ -3 s J3 'p TS'S 'p 'o '5 1 ■ë S. s 1 Si! «Si -5 O |l •S o •5 ai ■3 o c S 3 o o rj 3 rt ■a c c: S rt > 6 s 8" Z m - U a; — [X. X S g o t 1 1 3 > i2 il o : 1 3 ai îï o -a > •2 1 3 1 s > 3. 1 a. i S r- ■-•S ^ "«•o - ■J E J2 d V S S * c S "3 ai ^ S E ■ë i -a J1 tr «; ' %" ■g ë "^ -a Cl-S ^ 3 :3 3 w 3 >• *l u te & 1 1 rt _,- 3 S 1 05_ in 1 — fcft ys E- o > — CD ■3 ^' c lO •1! ro i! (>^ C ■<''i-'3 ^ o < s J'o ~ S E - o. "^ 398 PHILOSOPHIK NATUREIJ.E, a «= z; H H > Si — ^ ^— o m « lU b 114 ^ 1 1 ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE. 399 tension. Il s'agit actuellement de voir si les aortes des Crocodiliens ne sont pointdansces conditions-là, soit d'une manière continue, soit par moments. Analysons les conditions dans lesquelles se trouvent ces deux vaisseaux. L'aorte droite des Crocodiliens, dépendant du ventricule gauche, doit re- cevoir des contractions puissantes d(3 ce'ventricule une tension assez élevée, et qu'on peut par analogie évaluer à 5 ou 6 centimètres au moins dans les conditions ordinaires. De plus, quant à la vitesse du cours du sang, ce vais- seau, qui se distribue particulièrement aux parois internes et aux membres, se trouve dans des conditions défavorables, puisqu'il aboutit k un système de petits vaisseaux relativement peu dilatables et soumis à des compres- sions presque incessantes. L'aorte gauche, au contraire, émane du ventricule droit, dont les parois, plus faibles de moitié au moins que celles du ventricule gauche, ne sont pas propres à lui procurer une tension élevée. Mais, de plus, la pression du ven- tricule droit, déjà^bien inférieure par elle-même â celle du ventricule gauche, se divise en deux parts, dont la plus considérable se dépense pour l'artère pulmonaire, et dont la plus faible est destinée à pousser le sang dans l'aorte gauche. La part réservée à ce dernier vaisseau est d'autant plus faible que, comme nous le savons, l'orifice de ce vaisseau s'aplatit dès le début de la systole et se ferme bientôt après. A ces considérations, il faut ajouter que les vaisseaux viscéraux qui dépendent de l'aorte gauche for- ment un département largement ouvert, susceptible d'une dilatation consi- dérable, presque soustrait aux compressions, offrant peu de résistance, et par conséquent très-favorablement disposé pour la rapidité du cours du sang. Dans de semblables conditions, l'analogie ne permet d'attribuer à l'aorte gauche pendant la systole qu'une tension faible et bien inférieure à celle de l'aorte droite. Ainsi donc, d'une part pour l'aorte droite, pression cardiaque élevée et vitesse faible ; et d'autre part pour l'aorte gauche, pression cardiaque faible et vitesse considérable : voilà des conditions dont les effets, appré- ciés à la lumière des précédentes expériences, permettent d'affirmer que la direction de l'anastomose a perdu presque toute influence favorable ou défavorable à l'une des deux aortes, et que, dans les conditions ordinaires de la vie aérienne, il doit se produire un écoulement continu, quoique 400 PHILOSOPHIE NATURELLE. d'intensité variable, de l'aorte droite dans la gauche pendant tout le temps de la systole ventriculaire. Il reste à rechercher ce qui se passe pendant la diastole. C'est ce que je désire faire en même temps que je vais analyser les diverses phases du cours du sang pendant la systole. Pour cela, supposons d'abord les artères viscérales contractées, tandis que les artères pariétales dépendant de l'aorte droite sont plus ou moins dilatées. La tension dans les deux aortes étant faible et sensiblement égale avant le début de la systole, un jet de sang rapide et de très-courte durée peut passer de l'aorte gauche dans la droite par l'anastomose, dès la première impulsion de la systole. Mais cet écoulement cesse presque immédiatement, parce que la tension s'élève rapidement dans l'aorte droite. Le sang est retenu dans l'aorte gauche, dont la tension s'abaisse peu, attendu que les artères fournies par elle sont contractées et n'accueillent que peu de sang. Néanmoins, la tension de l'aorte gauche étant toujours de beaucoup plus faible que celle de la droite, une certaine quantité de sang passe de cette dernière dans la première à travers l'anastomose. Dès que la diastole cardiaque commence, et par conséquent pendant la systole aortique, la diUerence de tension des deux aortes s'efface rapidement par le passage du sang de la droite dans la gauche à travers le foramen de Pannizza. La tension des deux aortes s'abaissant considérablement, l'influence del'obh- quité de l'anastomose se fait de plus en plus sentir, et, dès que les tensions aortiques cessent de présenter une grande différence, une petite quantité de sang peut passer à travers l'anastomose de l'aorte gauche dans la droite ; mais cette quantité est faible parce que le cours du sang se ralentit rapidement dans les aortes vers la fin de la diastole, et l'écoulement anaslomotique peut même cesser entièrement vers la fin de la diastole. La systole cardiaque suivante trouvant les deux aortes douées de tensions à peu prés égales et donnant une nouvelle impulsion au sang de ces vais- seaux, produit, comme nous l'avons vu dès le début, un jet de sang très-court de l'aorte gauche dans la droite, c'est-à-dire une augmentation très-courte de l'écoulement dans ce sens, et ainsi de suite. Ainsi donc, dans ces conditions, il se fait dans l'anastomose un faible écoulement de gauche à droite pendant une partie de la diastole. Cet écou- ROLE DE L' ANASTOMOSE ABDOMINALE. 401 ement s'affaiblit considérablement sur la fin de la diastole et forme un jet de sang rapide et court au début de la systole. Après ce premier jet de gauche à droite, dont la durée est presque instantanée, la différence de ten- sion s'accenluant très-rapidement entre les deux aortes au profit de la droiti% un courant d'une intensité croissante s'établit de l'aorte droite à la gauche; ce courant atteint sou maximum à la fin de la systole, et décroît très-rapidement dès que la diastole commence. La courbe inférieure delà PI. XVIII, fig. 6, représente graphiquement ces diverses phases de la cir- culation anastomolique pendant l'état de contraction des artères viscérales qui dépendent de l'aorte gauche. Los parties de la courbe placées au-dessus de la hgne horizontale correspondent au courant de droite à gauche, et celles qui sont au-dessous représentent le courant dans le sens contraire. La longueur de ligne 1 correspond à la systole, la longueur 2 à la diastole. Ce qui se passe dans l'anastomose tandis que les vaisseaux viscéraux sont largement dilatés et font un appel considérable de sang peut être plus facilement et plus sûrement conçu que pour le cas précédent. Avant le début de la systole, ainsi que nous le verrons bientôt, la tension est deveuue sensiblement égale dans les deux aortes, et de plus cette tension s'est abaissée parce que, les branches de l'aorte gauche étant trés-dilatées, l'aorte droite lui a beaucoup fourni par le foramen de Pannizza. On suit en effet, parles expériences de Ludwig, Cyon, etc., combien la paralysie des vaisseaux des viscères abdominaux peut abaisser la tension cardiaque et aortique. Quand la systole cardiaque commence, les artères viscérales appelant beaucoup de sang, il ne peut y avoir écoulement de gauche à droite dans l'anastomose. Gela est encore moins possible pendant le reste de la systole, alors que la tension de l'aorte droite augmente fortement et que la tension de la gauche s'affaiblit d'une manière considérable. Dès le début de la systole, l'aorte droite acquiert très-rapidement sur l'aorte gauche une grande supériorité de tension, puisque l'aorte gauche reçoit, sous la faible pression du ventricule droit et pendant un temps limité, du sang qui s'écoule facilement dans les artères viscérales paralysées. Dans ces conditions et dès le début de la systole, du sang passera par l'anastomose de l'aorte droite dans la gauche et viendra s'ajouter au sang de celle dernière pour fournira la circulation très-aclive des vaisseaux viscéraux. Ce courant 51' 40Î PHILOSOPHIE N'ATURELLIv rétrograde augmente jusqu'à la fin de la systole ventriculaire. parce que la difî'érence de tension des deux aortes augmente aussi; mais son accrois- sement est plus rapide encore à partir du moment où l'orifice de l'aorte gauche s'est aplati et fermé. Dès que la diastole commence, un courant s'établit à travers le foramen de Pannizza, d'autant plus abondant que la tension aortique gauche est très- faible ; l'excès de tension de l'aorte droite diminue donc, et d'autant plus rapidement dès le début que la différence de tension est plus grande. La tension de l'aorte droite s'abaissant, l'écoulement de droite à gauche par l'anastomose se ralentit proportionnellement, et vers la fin de la diastole la tension se trouve notablement abaissée dans les deux aortes. Or, nous avons vu que l'influence de la direction de l'anastomose était d'autant plus prononcée que la tension dans les vaùsseaux était plus faible. Il suffira donc que dans ces conditions la différence de tension des deux vaisseaux se soit convenablement affaiblie pour que tout courant cesse dans l'anastomose, et il en est probablement ainsi jusqu'à la fin de la diastole, car alors, la tension sanguine étant très-basse et le cours du sang dans les aortes s'étant fortement ralenti, il est même à présumer que les parois épaisses et contrac- tiles de l'anastomose sont revenues sur elles-mêmes et que la lumière en est pour ainsi dire effacée. Au début de la systole, ce vaisseau communi- cant est de nouveau ouvert et dilaté par le sang qui passe de droite à gauche, et ainsi de suite. Ainsi donc, pendant que les artères viscérales sont dilatées, il y a dès le début de la systole courant rapidement croissant jusqu'à la fin de la sys- tole, de l'aorte droite vers la gauche à travers l'anastomose. Ce courant dé- croît ensuite dès le début de la diastole, d'abord très-rapidement etensuite de plus en plus lentement, jusqu'au moment où, sous une faible pression aortique, la différence de tension s'affaiblissant, il y a interruption du cours du sang dans ce vaisseau et peut-être même disparition de sa lumière. Celle-ci reparait dès le début de la systole suivante, et ainsi de suite. La courbe supérieure de la. fig. 6 (PI. XVIII) représente schématiquementces variations successives dans l'intensité du courant de droite à gauche. On peut la comparer à la courbe inférieure, sur laquelle j'ai déjà attiré l'atten- tion. ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE. 40Î La courbe supérieure représente le courant qui se fait de droite à gauche pendant l'état de dilatation des artères viscérales. Elle indique un courant plus intense et uniquement de droite à gauche. La courbe inférieure repré- sente le courant qui se fait tantôt de droite à gauche et tantôt de gauche à droite, quand les vaisseaux du système chylopoïétique sont contractés. Il est inutile d'insister sur ce point que, la contraction des artères péri- phériques coïncidant normalement avec la paralysie des artères viscérales, et vice versa, c'est une raison de plus pour que les phénomènes aient lieu comme je viens de l'exposer. Je dois ajouter que chez les Crocodiliens comme chez les Chéloniens, et plus encore que chez les Gheloniens, il doit se trouver de nombreux moments où toute circulation est interrompue dans l'anastomose, et oii ce vaisseau est plus ou moins revenu sur lui- même. En effet, quoique les tensions aortiques chez les Crocodiliens pré- sentent entre elles par moment des différences supérieures à celles que l'on trouve chez les Chéloniens, il ne faut point oublier que le calibre très- réduit de l'anastomose et l'acuité excessive de son angle d'insertion sur l'aorte droite créent des obstacles plus grands à l'établissement d'un courant dans sa cavité. Aussi les états intermédiaires de dilatation et de contraction des vais- seaux, soit périphériques, soit viscéraux, étals que nous savons être les plus fréquents et que nous avons vus chez les Chéloniens ne devoir per- mettre (jue des oscillations plus ou moins légères au sang renfermé dans l'anastomose, ces états intermédiaires, dis-je, accompagnés d'un abaisse- ment dans la tension des aortes, ne sont plus capables chez les Crocodiliens de produire l'écartement des parois du petit vaisseau anastomotique et de donner naissance à un courant dans son intérieur. Si les vaisseaux viscé- raux sont modérément ou partiellement dilatés, en effet, la tension de l'aorte gauche, qui est par cela même diminuée, ne sera plus suffisante pour faire pénétrer du sung dans l'anastomose ; et d'ancre part la tension de l'aorte droite, diminuée aussi, soit[-ar une légère dilatation des vaisseaux périphé- riques, soit par l'accroissement de l'apport qu'elle fournit à la gauche par le trou de Pannizza, la tension, dis-je, de l'aorte droite ne sera plus suffi- sante pour vaincre la résistance que lui oppose sous une faible tension le mode d'insertion extrêmement oblique et rétrograde du ramuscule anasto- 404 PIIILOSOPIIIK NATURKLLK. inotique. En considérant donc : l" le parallélisme des deux aortes au point où elles sont reliées par l'anastomose; 2" la continuation directe de l'axe de l'aorte droite avec, l'axe de l'aorte abdominale, et de l'axe de l'aorte gauche avec le tronc d'où naissent les artères viscérales, et par conséquent la tendance du sang de chacune dos deux aortes à passer dans le vaisseau qui eu est la continuation effective et pour le volume et [)0ur la direction : 4° le calibre très-étroit du vaisseau anastoraotiquc ; 4» son obliquité exces- sive par rapport aux aortes et le sens de cette obliquité qui diminue les chances d'écoulement de l'aorte dont la tension est la plus forte vers celle dont la tension est la plus faible; 5° si de plus on ajoute à cela l'analyse patiente que je viens de faire des phénomènes de la circulation dans l'anas- tomose, on arrivera nécessairement à ces conclusions : 1° que pendant la respiration à l'air libre, il y a des moments où, par suite de l'établissement normal et régulier de variations assez considérables dans la tension des deux aortes, un courant s'établit normalement presijue toujours de l'aorte droite vers la gauche, et seulement pendant de courts moments dans le sens contraire ; '2" mais ijue dans les conditions les plus ordinaires et les plus fréquentes de la circulation, tandis que l'animal respire à l'air libre, le rôle de l'anastomose doit être peu considérable. Ce vaisseau est alors simplement le siège de quelques oscillations, soit dans un sens, soit dans l'autre, suivant les circonstances, et il doit enfin, dans bien des cas, se trouver tout à fait fermé et revenu sur lui-même. C'est ainsi, ce me semble, que doit être considérée cette question de la circulation dans l'anastomose, qui avait reçu des solutions si différentes : Pannizza croyant que le courant y était toujours dirigé de l'aorte droite vers la gauche; Bischofî, Owen et Milne-Edwards croyant au contraire que le sang passait toujours de l'aorte gauche vers la droite; Briicke inclinant fortement vers cette opinion, tout en admettant des changements dans le sens de l'intensité du courant suivant le moment de l'action du cœur, suivant l'état de plénitude ou de vacuité de l'intestin ; et enfin Poëlman croyant que le mélange des deux sangs à travers l'anastomose, possible dans certaines circonstances, doit être insigni/idiit quand la fonction cir- culatoire s'exécute normalr ment . 11 résulte de là et de ce que nous avons HOLE DE LANASTOMOSE ABDOMINALE. 105 dit précédemment sur la circulalion à travers le foramen de Paiinizza, que c'est principalement au niveau de ce foramen que se fait le passage du sang artériel de l'aorte droite dans la gauche, qui a déjà reçu du sang veineux, et que, contrairement à l'opinion généralement admise, le sang qui se rend aux membres postérieurs et à la queue ne diffère que bien faiblement de celui (jui est destiné à la tète et aux membres antérieurs. Cette proposition, vraie pour les Crocodiliens, s'applique également à des degrés divers aux autres Reptiles, aux Cliéloniens surtout et moins aux Ophidiens et aux Sauriens. ARTICLE. II. — Pkndant la submersion. Après avoir déterminé le rôle de l'aorte gauche et de l'anastomose abdominale chez les Reptiles, quand l'animal respire librement, il me reste à étudier ce rôle quand l'animal n'est point à l'air libre et se trouve sous l'eau, ce qui arrive fréquemment pour certains Reptiles. On sait combien les Reptiles en général, et quelques-uns en particulier, étonnent par la durée du séjour (ju'ils peuvent faire sous l'eau sans venir respirer à la surface. Chacun a vu des Couleuvres occupées à chercher leur proie, rester tranquillement sous l'eau pendant un temps relativement très-long. J'ai fait à cet égard quelques expiirieucos sur divers Reptiles. J'ai placé et maintenu à plusieurs reprises sous l'eau des Tortues, soit mauresques, soit bourbeuses, pendant une demi-heure, trois quarts d'heure, une heure et plus à la température de 15" à 20", sans produire chez eUes des phéno- mènes bien prononcés d'asphyxie. J'ai également mis sous une cloche pleine d'eau des Lézards gris des murailles, à la température extérieure de 14° environ: je les ai trouvés, après une heure et même deux de séjour, légèrement engourdis, mais capables de revenir à la vie. Chez un jeune Ca'iman j'ai obtenu des résultats analogues. Alaintenu au fond d'un baquet, il a pu y rester pendant une demi-heure sans donner le moindre signe d'asphyxie ; quand je lui rendais la liberté, il revenait à la surface de l'eau, où il avait toute son activité comme s'il n'eût pas été privé de la respi- ration pendant im temps assez long. Je n'ai pas poussé plus loin cette expérience, désirant conserver cet animal pour d'autres recherches. Toutes 406 PHILOSOPHIE NATURELLE les expériences précédentes ont été faites à une période avancée du prin- temps, et alors que ces animaux étaient tous sortis de la léthargie hibernale. Les renseignements sur les Grocodiliens que j'ai pu obtenir de personnes ayant vécu dans les régions tropicales, ou que j'ai recueillis dans les récils publiés par les voyageurs, me prouvent du reste que ces animaux sont susceptibles de faire volontairement sous l'eau des séjours de plusieurs heures. Je me bornerai à citer l'observation d'un naturaliste américain des plus distingués qui a particulièrement étudié l'histoire naturelle du Croco- dile. M. Bennett Dowler ' dit (jue le Crocodile peut vivre plusieurs jours sous l'eau privé de la respiration pulmonaire, tandis qu'il ne survit pas plus d'une heure à la ligature de la trachée. Nous verrons que cette con- tradiction n'est qu'apparente. Pour le momonl, nous nous bornons à insis- ter sur ce point, connu depuis longtemps, que tous les Reptiles sont bien supérieurs aux Oiseaux et aux iMammifères même les plus favorisés à cet égard, pour la durée du séjour qu'ils sont susceptibles de faire sous l'eau sans signe de gène et sans trouble apparent dans leur manière d'être. On sait en effet, et les expériences de M. Bert l'ont prouvé, que les Oiseaux plongeurs les plus favorisés meurent après une submersion dont la durée varie à peu prés de 4 à 15 minutes. La Baleine blessée ne reste pas plus de 30 minutes sous l'eau , et parmi les Mammifères plongeurs, l'Hippopo- tame peut rester de 15 à 30 minutes sans respirer, ainsi que l'a constaté Cratiolet. Malgré la supériorité remarquable que possèdent ces Oiseaux et Mammifères plongeurs sur les espèces de ces deux classes qui ont l'habi- tude de vivre constamment au milieu de l'air, on ne peut nier qu'il n'y ait encore fort loin do cette résistance à l'asphyxie par submersion, à celle que présentent les Reptiles, et dont j'ai cité quelques exemples. Il faut recon- naître même que la distance est telle qu'on peut admettre à priori que les conditions- physiologiques qui sont capables d'exphquer la résistance spéciale des Mammifères et Oiseaux plongeurs aux causes d'asphyxie, de- viennent tout à fait insuffisantes pour rendre compte des habitudes amphi- biennes des Reptiles. A ces conditions physiologiques, si elles existent chez les Reptiles, doivent s'en joindre d'autres que je me propose de recher- cher ici. ■• New-Orleans iited. and surg. Journal, novembre 1860. ROI.E DE L'ANASTOMOSE ABDOMINAr,E. 407 J'ai, au début de ce chapitre, étudié expérimentalement les conséquences de l'interruption de la respiration aérienne sur la circulation pulmonaire. Nous avons vu que le défaut d'artérialisation du sang des capillaires pul- monaires entraînait un embarras considérable et même un arrêt du cours du sang dans les veines pulmonaires, et par conséquent une accumulation rapidement croissante du sang veineux dans les cavités droites du cœur et dans tout le système veineux général. Il est évident que la rapidité avec laquelle se produisent dans ce cas la gène profonde et les perturbations considérables, prouve que ce n'est jias tant aux troubles de la nutrition des tissus qu'il faut la rapporter, qu'à la distension excessive des cavités droites du cœur et des grosses veines, et surtout qu'à l'accumulation du sang veineux dans tous les organes, mais particulièrement dans les centres nerveux encéphaliques et médullaires. Il est clair que si, par quelque dis- position nouvelle, cet effet brusque, immédiat et presque foudroyant de l'arrêt de la circulation pulmonaire pouvait être supprimé ou fortement ralenti chez les Reptiles, ces animaux se trouveraient dans des conditions très-favorables à la prolongation du séjour sous l'eau. L'hypothèse que je viens d'émettre est effectivement réalisée, ainsi que nous le verrons après avoir examiné les opinions diverses qu'on a mises en avant pour expliquer le retard apporté chez les Reptiles à l'apparition des phénomènes graves d'asphyxie. Il est une opinion sur laquelle je tiens d'autant plus à m'arrêter qu'étant de vieille date, elle a été souvent reproduite et en particulier soutenue avec talent, il y a quelques années, par M. .Tacquart, dans son travail sur le cœur de la Tortue franche : je veux parler du rôle de la respiration cutanée des Reptiles. Cette opinion, dont il faut, je crois, chercher l'origine dans cette erreur de classification qui réunissait sous le titre commun de Reptiles les Batraciens etles Reptiles proprement dits, se trouve formulée par M. .Tacquart .dans des termes que je désire rapporter textuellement : « Les poumons des Reptiles, dit-il, semblent constitués d'une manière incomplète pour transformer le sang veineux en sang artériel par l'action de l'air contenu dans leur cavité sur les vaisseaux de leur tissu Chez tous les Reptiles, il semble que le sang apporté par les veines des différentes parties du corps ait besoin de subir en route, à la surface de la peau, certaine éla- 408 l'IlII.OSOl'IllK NATliHKLl.E. boralioii préparatoire, avant d'arriver dans l'inlérieur du poumon, de manière que la tâche impossible à remplir par le poumon seul soil allégée par un certain nombre d'appareils d'hématose qui lui viennent en aide. C'est ainsi que l'on comprend que, même chez les Ikptiles écaiUcux, l'air agisse à ^rai'ers la peau sur le sang veineux, et qu'on est porté à admettre chez eux une respiration cutanée. Eiï effet, si l'on ne peut guère supposer que la substance cornée qui forme la partie moyenne des écailles à peu près impénétrables puisse se laisser imprégner par le gaz au milieu duquel elles sont plongées, en revanche il n'en est pas ainsi pour une partie de leur face profonde et des intervalles qui les séparent ; les téguments y paraissent plus minces. C'est surtout chez les Serpents morts au moment où ils allaient changer de peau que l'on trouve une telle vascularité partout, même dans l'épaisseur de la base des écailles, qu'on n'est pas éloigné d'admettre une certaine action de l'air, même à travers l'épaisseur de l'enveloppe ex- terne Comme nous l'avons dit, le ventricule gauche des Ophidiens est beaucoup plus grand que le droit ; il a des parois quatre ou cinq fois plus épaisses que lui ; il s'ensuit que le sang artériel est lancé avec une plus grande force d'impulsion que le sang veineux, qu'il doit refouler ce sang, et .se mêler à lui en quantité notable dans le ventricule droit à travers la fente interventriculaire ; de là, il est envoyé aux poumons par l'artère pul- monaire. La nature semble donc avoir eu pour but d'artérialiser en partie à l'avance le -sang veineux, afin de venir en aide aux poumons, et de le pré- parer en quelque sorte à l'hématose pulmonaire. Alors on peut compren- dre pourquoi la cloison interventriculaire est incomplète, et pourquoi le ventricule droit et le gauche communiquent entre eux par une large fente. Cette modification dans la loi de l'unité de plan, au lieu de nous paraître un oubli , une imperfection, est rapportée avec raison à une haute pré- voyance, à un dessin arrêté d'avance par la sagesse du Créateur. » S'il était vrai que les Reptiles fussent ainsi organisés de manière à ce qno la respiration cutanée pût jouer un rôle aussi important dans l'accom- plissement de l'hénialose, on serait en droit de considérer l'enveloppe cutanée comme devenant dans un milieu aquatique l'organe principal de la respiration, et comme ])ermettant ainsi à l'animal de séjourner long- temps sous l'eau sans venir respirer l'air à la surface. Mais la théorie que ROLE DE I/ANASTOMOSE ABDOMINALE. 409 je viens de faire connaître est réellement inacceptable. S'il est une classe d'animaux chez lesquels la respiration cutanée paraisse réduite à de mi- nimes proportions, c'est certainement la classe des Reptiles. Pour certains d'entre eux en particulier, il serait plus que paradoxal de soutenir la réalité d'une pareille fonction. Les Chéloniens, par exemple, recouverts partout d'une carapace osseuse et écailleuse, ou d'un derme dur et peu vasculaire pourvu d'un épidémie épais et corné, peuvent-ils être considérés comme doués d'une riche respiration cutanée? Ne peut-on pas en dire autant des Crocodiliens, des Sauriens, des Ophidiens ? Il y a là une erreur manifeste provenant d'une assimilation regrettable des Reptiles écailleux et des Ba- traciens, dont la peau est nue. Les notions contenues dans plusieurs des chapitres précédents ne per- mettent du reste d'accepter ni les déductions physiologiques de M. Jac- quart, ni ses considérations philosophiques sur la loi de l'unité de plan et eur la finalité. Si M. Jacquart pense que le ventricule gauche des Ophi- diens est beaucoup plus grand que le droit, c'est, comme nous l'avons vu, parce qu'il attribue à tort au ventricule gauche une portion des cavités cardiaques (vestibule de l'aorte gauche et portion auriculaire du ventri- cule droit) que nous avons démontrée appartenir en réalité au ventricule droit. Nous savons également que le sang artériel du ventricule gauche n'est point envoyé au poumon par l'artère pulmonaire, puisque nous avons vu le vestibule pulmonaire se fermer avant que cette pénétration pût avoir lieu, de telle sorte que l'artère pulmonaire ne reçoit que du sang veineux. Enfin, nous ne pouvons considérer la communication des deux ventricules chez les Reptiles comme une modification de l'unité de plan, pas plus que comme un oubli et une imperfection, puisque les considérations sur les- quelles je me suis étendu à propos des transformations successives du cœur dans la série zoogénique ont clairement démontré, je l'espère, que le cœur des Reptiles, loin de présenter des dispositions anormales difficiles à expliquer, et de constituer une sorte de déviation, une inter- ruption ou un anneau bizarre dans la chaîne des Vertébrés, ne représente au contraire qu'un chaînon très-naturel de ces transformations progres- sives qui. conduisent si régulièrement des Vertébrés inférieurs aux Verté- brés les plus élevés. 52* ■ilO PlUl.dSOPIIIl-: NATIIURLI.K Si la respiration cutanée, chez les Reptiles, ne peut être considérée comme assez active pour suppléer clGcacemcnt pendant la vie aquatique à l'insuffisance de la respiration pulmonaire, il faut chercher ailleurs la raison de la facilité avec laquelle ces animaux supportent un séjour pro- longé sous l'eau. M. Paul Berl, dans ses Leçons sur la physiologie delà respiration', s'efforce d'établir que ce n'est point dans des dispositions anatoiûiques qu'il faut rechercher la cause de ce phénomène, pas plus que celle de la résistance des Mammifères nouveau-nés à l'asphyxie. Pour lui, cette particularité provient au fond d'une plus grande résistance vitale des éléments des tissus, résistance qui a pour effet d'exiger une moindre con- sommation d'oxygène. Ce fait ne peut point être nié, et les expériences de M. Bert, comme celles qui les avaient précédées, ont clairement établi que les muscles des Vertébrés à sang froid respirent d'une manière moins active au contact de l'air que ne le font les muscles des Vertébrés à sang chaud. Néanmoins les différences que les animaux des deux catégories présen- tent à cet égard ne sont point suffisantes pour rendre entièrement compte du haut degré de résistance à l'asphyxie que l'on constate chez les Reptiles. Voici en effet quelques résultats obtenus par M. Bert sur des fragments de muscles laissés dans une éprouvette remplie d'air à la température de 10 à 1 1 degrés. Après vingt-deux heures, l'analyse du gaz montre que : 100 gr. de muscles de Coq ont absorbé (121''', 0 d'oxyg. et exhalé 54cc,6 de GO^. 100 gr. de muscles de Grsnouille ont absorbé. 42 ,5 — — 36 ,6 — Voici un autre exemple relatif aux Poissons; l'expérience a été faite un autre jour, et sa durée a été différente. 100 gr. de muscles de Moineau ont absorbé. . 100':'= d'oxyg. et exhalé 53'=': de GO'. iOO gc. de musdes ûe Cypriniis jeses ontabs.. 90 — — 25 — Troisième exemple : 180 gr. de muscles de Rat ont absorbé 24'='=, 6 d'oxyg. et exhalé 24'='= de GO'* 100 gr. de muscles de petit. Garpes ontabs... 18 — — 13 — 100 gr. de muscles d'Escargots ont absorbé. . . 18 — — 14 — A l'énoncé de ces expériences, M. Bert ajoute les réflexions suivantes : « Les différences, pour être notables et s'être toujours présentées dans le ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE. 411 même sens dans d'autres expériences dont il serait oiseux d'énumérer les résultats, n'ont pas été aussi grandes qu'on aurait pu s'y attendre. Les muscles des poissons surtout paraissent consommer beaucoup d'oxygène. Il faut sans doute tenir compte, dans ces expériences, de ce fait que les mus- cles d'animaux à sang froid, ainsi coupés en fragments, se contractent pen- dant longtemps, ce qui doit activer les échanges gazeux. Quoi qu'il en soit, j'ai toujours trouvé que les muscles de Vertébrés à sang froid respirent d'une manière moins active au contact de l'air que ne le font les mus- cles de Vertébrés à sang chaud. Mais entre ceux-ci, des différences tout aussi considérables ont pu être reconnues. » Voilà des résultats qu'il est bon d'enregistrer, car ils permettent d'étabhr que la lenteur habituelle des phénomènes respiratoires élémentaires des tissus chez les liepliles , quoique réelle dans une certaine mesure, n'est point assez prononcée pour rendre compte de la résistance de ces animaux à l'asphyxie. Cette lenteur est certainement une des causes de ce fait, un des éléments delà solution du problème ; mais, quelque regret que j'aie de me trouver en contradiction avec un savant aussi autorisé que M. Bert, je pense qu'il y a d'autres éléments tout aussi importants, et je dois m'apphquer à les déterminer pour les grouper en un faisceau rationnel. Je désire d'abord appeler l'attention sur des faits encore non expliqués, et qui peuvent apporter ici quelque lumière. On a pu observer chez les Reptiles, soit nus, soit écailleux, des ralentissements accidentels dans les échanges nutritifs , si grands et si prolongés qu'on peut presque les considérer comme de véritables suspensions de ces échanges. On connaît déjà les expériences faites sur des Crapauds conservés vivants pendant plu- sieurs mois dans des enveloppes de plâtre qui ne permettaient avec l'air extérieur que des échanges presque insignifiants. Mais voici des faits extrêmement curieux et qui méritent d'être soumis aux réflexions des phy- siologistes. Ils sont dus à des observateurs sérieux et distingués. Le pro- fesseur Riddel rapporte dans New Orléans médical and. surgic. Journal, le fait suivant très-remarquable de résistance vitale. Ma Amphi.uma tridacty- lum, pesant quatre ou cinq livres et ayant trois pieds de longueur, fut gardé vingt-huit mois sans nourriture dans un vase étroit, où l'eau bourbeuse du 4lî f>llII.OSOPllIE NATURELLl':. Mississipi qui le recouvrait est resiée deux ibis sans èlre renouvelée pen- dant plusieurs mois ( une fois quatre mois et une autre fois huit mois). Il était très-actif après les vingt-huit mois déjeune. On n'a pas noté la perte de poids. L'auteur annonce aussi avoir vu des Serpents à sonnettes vivre dix-huit mois sans aliments. M. Bennett Dowler rapporte dans le même journal (janvier 1859) le fait assurément très-singulier d'un AUigator qui, après une hibernation de si.x mois , pendant laquelle il n'avait pris qu'une seule fois une faible quantité d'aliments, avait considérablement augmenté de volume, grâce à un dépôt abondant de graisse. Les faits de cet ordre, qui auraient pu certainement être multipliés si les observateurs avaient dirigé leur attention dé ce côté, peuvent autoriser à reconnaître chez les Reptiles une faculté de ralentissement des combustions et des phénomènes chimiques de la vie qui équivaut presque à une sus- pension complète. La flamme delà vie ne s'éteint point, mais elle se mo- dère et se rapetisse proportionnellement aux ressources de combustible qui lui sont fournies. Et, qu'on le remarque bien, cette atténuation des phé- nomènes d'échange n'est point le fait de la température et de l'hiberna- tion, puisqu'il s'agit de périodes de dix-huit et de vingt-huit mois, qui comprennent un et même deux étés. Il faut donc reconnaître que chez les Batraciens et chez les Reptiles les échanges nutritifs et respiratoires sont susceptibles de modifications, de variations d'activité qui n'ont rien de comparable avec ce que nous observons chez les Vertébrés supérieurs. Tandis que, chez ces derniers, le défaut de nourriture ou d'air ne produit qu'une faible diminution dans l'activité des échanges, de telle sorte que le combustible et le comburant s'épuisent rapidement, et la mort survient ; chez les Reptiles, au contraire, en dehors même des conditions de tempé- rature, il s'établit aussitôt une proportion remarquable entre la dépense et la provision, de telle sorte que cette dernière, toujours ménagée et ne per- dant qu'une fraction Irés-petite d'elle-même, peut fournir pendant longtemps à la conservation de la vie. Il est facile de comprendre la lumière que les considérations précédentes sont susceptibles de jeter sur la question qui nous occupe maintenant. Il est clair, en effet, que si l'activité des combustions respiratoires chez ces animaux se proportionne régulièrement à chaque instant à la provision d'air ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE. 413 respirable qu'ils ont à leur disposition; il est clair, dis-je, que leur séjour sous l'eau sans phénomènes d'asphyxie s'exphque naturellement. Cette explication est du reste d'autant plus acceptable que la conformation de l'appareil respiratoire chez les Reptiles présente des particularités remar- (juablesqui en font chez tous, mais chez quelques-uns plus spécialement, un véritable réservoir d'air. On sait en effet que les poumons des Reptiles peuvent être considérés d'une manière générale comme constitués [)ar une poche de dimensions relativement très-grandes et dont les parois présen- tent des replis ou saillies circonscrivant de grands espaces polygonaux, tan- dis que la partie centrale de la poche forme un vaste espace libre dans lequel est renfermé de l'air. Cet air, se trouvant sans contact direct avec les parois vascularisées du poumon, constitue par cela même une réserve de gaz respirable. Les couches superficielles de l'air contenu dans le pou- mon, recevant seules l'acide carbonique du sang, se mêlent incessamment à la masse centrale de l'air; d'où il résulte que l'air pulmonaire n'atteint que très-lentement le degré de saturation par l'acide carbonique, qui est incompatible avec le maintien de la vie. La disposition générale que je viens de signaler dans l'appareil pulmo- naire des Reptiles atteint un très-haut degré de perfectionnement chez certains d'entre eux. C'est ainsi que, chez les Caméléons, les poumons pré- sentent sur leur bord une série de grands diverticulums en doigts de gant, et que, chez les Serpents, le poumon forme une poche très-allongée et très- vaste, atteignant presque l'extrémité postérieure de la région abdominale, et dont la partie antérieure peut seule être considérée dans une étendue restreinte comme organe respiratoire; tandis que tout le reste, constitué par des parois entièrement lisses et presque sans vaisseaux, ne peut être regardé que comme un vaste réservoir d'air respirable '. ' M. Jacquart, dans le Mémoire cité plus haut, se demande si cette vaste arrière-cavité du poumon ne peut point être considérée comme un organe d'incubation. Il y a à cela plusieurs objections à faire: cet organe existe aussi développé chez le mâle que chez la femelle, et chez les Vivipares que chez les Ovipares ; et l'on ne comprend pas du reste ea quoi une massf, d'air, à 30» par exemple, renfermée dans une poche et n'ayant avec les œufs que des relations médiates, serait un meilleur organe d'incubation qa'uue masse liquide ou solide de même forme et ayant la même température. 414 PHILOSOPHIE NATURELLE. Il est bon d'ajouler ù toutes ces considérations que les Reptiles ont los narines pourvues de sphincters dont l'occlusion s'oppose à la sortie de l'air introduit dans les poumons, et que ces auiuiaux ont le soin de remplir d'air leur appareil respiratoire avant de plonger. Ce dernier point est éta- bli par les expériences de M. Bert et parcelles que j'ai pu faire moi-même sur divers Reptiles, et en particulier sur un jeune Caïman. J'ai constam- ment vu dans ce cas l'animal plongé sous l'eau laisser, par intervalles éloi- gnés, échapper une ou deux bulles de gaz, ce qui prouvait bien qu'il avait eu le soin d'en inspirer avant la submersion. 11 n'est donc pas douteux que les Reptiles no soient convenablement constitués pour faire une provision d'air considérable; et tout semble prouver qu'ils sont susceptibles de ne la dépenser que très-lentement. Cette lenteur provenant naturellement de l'activité propre de leurs tissus peut être encore considérablement accrue par la diminution de la dépense de mouvement; et il faut ajouter que sous ce rapport encore les Reptiles qui usent de la vie aquatique s'arrangent de manière à réduire cette dé- pense au minimum. Aussi les voit-on sous l'eau rester entièrement immo- biles lorsqu'ils veulent y prolonger leur séjour, ou ne faire que des mou- vements lents et limités. Si on les oblige à se mouvoir rapidement, ils ne tardent pas à venir à la surface, pour y puiser de nouvelles provisions d'oxygène et pour se débarrasser de l'acide carbonique. Voilà des considérations qui sont d'un grand secours pour expliquer cette résistance remarquable des Reptiles aux dangers de la submersion. Mais elles ne sont point les seules, et il me reste à mettre en relief le rôle im- portant que jouent dans ces phénomènes les dispositions de l'appareil cen- tral de la circulation qui sont propres à la classe des Reptiles. Nous avons, au début de la dernière partie de ce travail, établi sur de nombreuses expé- riences que, contrairement à l'opinion de Briicke, chez les Reptiles comme chez les Vertébrés supérieurs, la gène ou l'interruption de l'hématose pulmonaire produisaient un embarras ou un arrêt de la circulation pulmo- naire. 11 est évident que chez les Mammifères et les Oiseaux cet arrêt a pour conséquences immédiates la distension excessive des cavités droites du cœur et des grosses veines qui y aboutissent, et l'accumulation de sang veineux ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINALE. 'iir> dans les centres nerveux encéphalo-racbidiens. Il n'est pas douteux que ces derniers phénomènes ne soient la vraie cause des accidents rapides et graves qui suivent de très-prés l'interruption de la respiration chez ces animaux, et qui rendent chez eux l'asphyxie si promptemenl menaçante et mortelle. Cette gène poignante, cette angoisse et cette lourde tension céré- brale, qui dégénèrent rapidement en éblouissements et en convulsions, sont évidemment les conséquences immédiates do cette congestion veineuse du centre circulatoire, et surtout des centres nerveux. On peut facilement s'en convaincre en faisant l'expérience sur soi-même. C'est donc plutôt à ces résultats, mécaniques pour ainsi dire, de l'arrêt delà respiration, qu'aux phénomènes intimes et élémentaires de l'asphyxie des tissus, que sont dues la rapidité et la gravité des symptômes de l'as- phyxie. Si donc ces résultats mécaniques pouvaient être supprimés, il y aurait nécessairement un retard et un ralentissement marqués dans l'appa- rition et dans l'aggravation de ces symptômes. Or les Reptiles se trouvent précisément dans ces conditions exceptionnelles et favorables. L'aorte gauche, naissant du ventricule droit, est éminemment propre .à débarrasser ce ventricule de l'excès de sang veineux que l'artère pulmonaire n'a pu recevoir; et même, chez les Reptiles à ventricules communicants, une par- tie de ce sang noir peut passer dans l'aorte droite quand l'arrêt completde la circulation pulmonaire rejette vers les aortes tout le sang veineux qui arrive des diverses parties de l'animal. On conçoit que l'aorte gauche peut d'autant plus remplir ce rôle de soupape de sûreté qu'elle aboutit à un département vasculaire très-vaste et très-dilatable, et que par l'anastomose abdominale elle peut déverser dans l'aorte abdominale l'excès de sang qui ne pourrait être reçu par les vaisseaux viscéraux. Le rôle de l'anastomose abdominale, dans cet état des fonctions respira- toires, ne doit point être identique chez les Grocodiliens et chez les Reptiles à ventricules communicants. Parmi ces derniers, chez les Ghéloniens du premier sous-type, c'est-à-dire à anastomose longue et étroite, l'orifice qui met en communication les deux ventricules devient libre dès le début delà systole, par suite du relèvement des valvules auriculo-ventriculaires. Il permet par conséquent au sang de l'un des ventricules de pénétrer dans l'autre, et dans tous les cas l'équilibre de tension s'établira immédiatement A16 PHll.nSOI'lHK N.\TURRI,1,K entre ces deux cavités. Si donc, comme cela doit avoir lieu pendant la gène de la respiration, le ventricule droit reçoit un excès de sang veineux tandis que le gauche ne reçoit (|u"une quantité insuffisante de sang artériel, le premier efl'et de la systole sera de projeter du sang veineux du ventri- cule droit vers le ventricule gauche incomplètement distendu et dans les deux orifices aortiques. Si, dans ces circonstances, le système artériel vis- céral se trouve, comme il est permis de le supposer, dans un état de para- lysie réflexe, il est évident qu'au début de la systole le sang de l'aorte gauche tendra à pénétrer à la fois dans ce système viscéral et dans l'anas- tomose. Cette double pénétration durera plus longtemps que dans les con- ditions de la vie aérienne, parce que l'aplatissement de l'oritice de l'aorte gauche aura lieu plus tard qu'à l'ordinaire, à cause même de l'excès de sang qui distend les ventricules, et qui ne peut s'écouler par l'artère pul- monaire. Quand cet aplatissement aura lieu, la tension sanguine aura diminué, au point que la circulation se sera bien ralentie et aura peut-être même cessé dans l'anastomose. Il faut remarquer aussi que, quand les petits troncs qui reliaient chez l'embryon la portion basilaire des artères pulmonaires aux crosses aortiques persistent chez l'adulte, comme cela a lie;i pour quelques Tortues, ces vaisseaux anastomotiques constituent un canal de dégorgement pour les artères pulmonaires, quand la circulation pulmonaire est embarrassée. Chez les Chéloniens du second sous-type, chez les Ophidiens et les Sau- riens, où l'aorte gauche s'abouche largement avec la droite, on peut aisé- ment comprendre qu'il y a aussi, dans ces circonstances, dès le début de la systole, écoulement plus ou moins prolongé de l'aorte gauche dans l'aorte abdominale. Pour comprendre ce qu'il y a de spécial à chacun de ces cas particuhers, il suffit de tenir compte du point où s'insèrent les artères vis- cérales, soit sur l'aorte gauche, comme chez les Chéloniens du premier soustype, soit sur l'aorte abdominale, comme chez les Sauriens et surtout les Ophidiens. Ainsi donc, chez les Reptiles à ventricules communicants, il est probable que lorsqu'un certain degré d'asphyxie commence à se produire, il y a dans l'anastomose abdominale passage du sang de l'aorte gauche dans la droite pendant les premiers temps de la systole, et absence de toute circu- ROLE DE L'ANASTOMOSE ABDOMINAI;E. 417 lation pendant le reste cUi temps. La durée et l'intensité de ce courant à travers l'anastomose sont, on le comprend, proportionnées à l'intensité du défaut d'hématose. Plus la circulation pulmonaire est embarrassée, plus aussi est considérable la congestion des cavités cardiaques droites, et par conséquent aussi la quantité de sang que reçoit directement l'aorte gauche avant l'aplatissement de son orifice. Chez les Crocodiliens. dont les ventricules sont complètement séparés les conditions physiologiques sont différentes. Quand l'un de ces animaux plonge au fond de l'eau pour y faire un séjour plus ou moins prolongé, au début la provision d'air renfermée dans le poumon pourvoit à une hé- matose suffisante et d'autant plus facilement que les phénomènes de com- bustion et d'échange subissent, par suite de l'immobilité et par suite aussi d'une certaine faculté que j'ai signalée sans en préciser la nature, subis- sent, dis-je, un ralentissement presque voisin de la supension. Pendant toute cette période, la circulation cardiaque, très-ralentie, s'accomplit comme à l'air libre et sans modification de son mécanisme. Mais à me- i^ure que l'air pulmonaire se charge d'acide carbonique et que la circulation pulmonaire devient moins facile, la tension augmente dans les cavités droites du cœur et diminue dans les cavités gauches. Pendant un certain temps, la tension du ventricule gauche et de l'aorte droite qui en naît reste encore supérieure à celle du ventricule droit et de l'aorte gauche. Tant que cette supériorité subsiste d'une manière notable, le sang rouge con- tinue de passer de l'aorte droite dans la gauche parleforamen de Pannizza et par l'anastomose. Mais ce courant diminue d'intensité et de durée à me- sure que la tension de l'aorte gauche se rapproche de celle de la droite. Un moment vient où, l'aorte gauche ayant une tension peu inférieure à celle de la droite, tout courant cesse dans l'anastomose ; mais, le phéno- mène d'asphy.xies'accentuant, la tension du ventricule droit tend à devenir supérieure à celle du ventricule gauche. A ce moment, le sang noir passe de l'aorte gauche dans la droite à travers le foramen de Pannizza et h travers l'anastomose. Je fais observer que j'ai toujours considéré dans cette analyse le système vasculaire viscéral comme dilaté et capable de recevoir une grande quan- tité de sang. Ce n'est point là, comme je l'ai déjà dit plus haut, une sup- 53* il8 l'IIILOSOI'HlE NATUHKI.LE. jiosilion piiromcni gratiiile, dnpuis que les expériences de Liidwig et do Cyon nous ont démontré l'influence de ces nerfs sensitifs du cœur, dont l'excitation, soit directe, soit, comme dans le cas actuel, par un excès de distension des cavités cardiaques, produisait aussitôt une paralysie réflexe des nerfs splanchniques et un abaissement notable de la tension vascu- laire. On voit clairement que, en vertu du mécanisme que je viens d'exposer, les accidents précoces et rapides de l'asphyxie sont supprimés chez les Reptiles. Mais les phénomènes de l'asphyxie proprement dite, c'est-à-dire de l'asphyxie des tissus, ne s'en produisent pas moins, ils sont seulement tré.s-tardifs et très-lents dans leur apparition ; ils ont lieu cependant et ils obligent l'animal à venir faire provision d'air respirable, sous peine de succomber. Il me semble possible de déterminer le moment précis où l'animal commence à éprouver cette gène, ce trouble, qui l'engagent à venir à la surface : c'est lorsque la tension sanguine du ventricule gauche s'est assez abaissée pour que du sang noir passe de l'aorte gauche dans la droite à travers le foramen de Pannizza, et vienne par conséquent se distribuer aux centres nerveux encéphaliques. Ces organes si sensibles, si délicats, si impressionnables, et dont l'activité nutritive est si grande, sont alorspéniblement affectés ; leur nutrition est viciée, leurs fonctions troublées, et l'animal doit éprouver dans tout son être une perturbation et une gène qui éveillent son instinct de conservation et le poussent à revenir à l'air. Chez les Reptiles à ventricules communicants, pareils phénomènes se pro- duisent quand la loge artérielle recevant très-peu de sang rouge, c'est principalement le sang noir en excès de la loge veineuse qui fournil à l'aorte droite et à ses rameaux céphaliques. OISEAUX ET MAMMIFERES PLONGEURS. CHAPITRE III DES OISEAUX ET DES MAMMIFÈRES PLONGEURS. Je viens d'exposer longuement les causes qui nous permettent d'expli- quer le séjour prolongé sous l'eau que peuvent supporter à divers degrés les Reptiles proprement dits. Je désire maintenant examiner en quelques mots s'il y a quelque chose de commun entre ces causes et les conditions qui permettent à quelques Mammifères et Oiseaux dits plongeurs de pro- longer leur séjour sous l'eau, quoique toujours dans des limites inûni- ment plus restreintes que pour les Reptiles. Les Oiseaux et les Mammifères se trouvent pour plusieurs raisons dans de mauvaises conditions sous le rapport du plonger. D'une part, l'activité des échanges nutritifs réclame une grande activité des combustions respi- ratoires ; celle-ci exige à son tour une structure très-décomposée et très- cloisonnée du poumon, et par conséquent un défaut de provision possible d'air respirable. D'autre part, le ventricule droit n'ofl'rant pour issue au sang veineux quel'arlère pulmonaire, il se forme, dèsle début del'asphyxie, dans les cavités cardiaques droites et dans les veines des centres nerveux, une accumulation toujours croissante de sang dont nous connaissons les funestes conséquences. Ainsi : 1° activité de la dépense d'oxygène; 2" défaut de provision de cet élément; 3" congestion veineuse intense du cœur et des centres nerveux : voilà les conditions dans lesquelles se trouvent placés les Vertébrés supérieurs ordinaires pendant la submersion. Ceux qui parmi eux ont la faculté de prolonger d'une quantité toujours assez faible leur séjour sous l'eau, le doivent à des atténuations apportées à l'une de ces trois conditions défavorables. Ainsi, ces animaux diminuent instinctivement l'ac'àvité de la dépense, en restant sous l'eau dans une im- mobilité relative. Quant au défaut de provision d'oxygène, ils y suppléent ■'i20 IMIII.OSOI'IIIIO NATURELLE. dans une très-faible mesure, il esl vrai, en faisant avant de plonger une ou plusieurs grandes inspirations. Mais ce n'est l;i évidemment qu'un cor- rectif très-insulïisant, et la provision ainsi faite doit être promplement épuisée. Aussi M. Beri pense-t-il que ces animaux possèdent un autre réservoir d'oxygène plus important, plus considérable. D'après un certain nombre d'expériences comparatives faites sur le Poulet et le (lanard, M. lîert conclut (ju'un Canard a environ d'un tiers à la moitié plus de sang qu'un Poulet, et que même la proportion du principe le plus important à considérer au point de vue des affinités pour l'oxygène, c'ftst-cà-dire de l'hémoglobuline, est plus considérable encore. « Voici donc enûn trouvé, dit M. Bert, ce réservoir d'oxygène dans lequel le Canard peut pendant longtemps puiser, à l'aide duquel il peut résister à l'asphyxie. Ce réservoir, c'est son sang. » Cette richesse relative du sang chez le Canard n'est pas un fait isolé parmi les animaux plongeurs. « Les pêcheurs, les voyageurs, les anatomistes, ajoute M. Bert, ont tous remarqué l'énorme quantité de sang que contiennent les Phoques, les Marsouins, les Baleines. Il est à regretter qu'on n'ait jamais fait de pesées exactes. Mais Burdach a pu dire avec raison : ils ont une énorme quantité de sang môme dans le tissu adipeux, et en quelque point de leur coi'ps qu'on fasse une entaille, il s'écoule comme d'une poche. C'est à cette grande quantité de sang, à ce magasin d'oxygène combiné, que j'attribue la plus grande part dans leur résistance à l'asphyxie Sans doute aussi les dispositions anatomiques les grands sinus sanguins, les sphincters vasculaires, doivent jouer un rôle dans l'explication de cette faculté remarquable. Il faut en dire autant de la puissance du diaphragme, de l'existence de sphincters nasaux, qui permet- tent de maintenir l'air sans effort; mais ce rôle est secondaire, ces disposi- tions ne constituent que des perfectionnements harmoniques La raison principale est plus intime, elle touche de plus près aux condi- tions essentielles de l'être , que ne le font ces simples mécanismes ana- tomiques. » Tout en reconnaissant ce qu'il y a d'ingénieux dans ces vues de M. Bert, il m'est impossible de les admettre sans faire quelques réserves. Mes réserves sont basées sur l'insufËsance des données expérimentales qui servent d'appui à cette opinion. Un petit nombre d'expériences compara- OISEAUX ET MAMMIFÈRES PLONGEURS. «1 tives, faites uniquement sur des Canards et des Poulets, ne sauraient établir une proposition générale s'étendant à tous les Mammifères et Oiseaux plongeurs. Rien ne prouve iin.os()i'ini; n ATUftKLLi;. (42o,8'i) une différence de chaleur moyenne do 4", 08, différence que M. Martins trouve avec raison étonnante dans un ordre d'animaux si sem- blables sous le point de vue de la conformation et des habitudes. Des différences moins considérables, mais pourtant de fù 2°, ont été également trouvées par M. Martins entre deux Palmipèdes d'espèces très-voisines l'une de l'autre, vivant dans le même climat, ayant une nourriture semblable, et vêtus aussi chaudement ' . Si de pareilles différences se rencontrent pour les températures moyennes d'Oiseaux si voisins sous tous les rapports , il est tout au moins permis de se demander si des différences notables entre les quantités relatives de sang ne peuvent pas exister aussi entre des espèces voisines. Il y aurait même lieu de rechercher si les différences de tem- pérature ne sont point liées à des différences correspondantes dans la quantité de sang, et si l'élévation de la température n'est point la consé- quence de la plus grande étendue du foyer et de la plus grande quan- tité de combustible. Mais en donnant même aux différences dans la quantité de sang, chez le Poulet et chez le Canard, signalées par M. Bert, la signification que cet observateur leur donne lui-même, il est juste de faire remarquer que ces dif- férences ne suffisent point pour expliquer les inégalités de résistance à la sub- mersion. Il résulte en effet des expériences de M. Bert que la moyenne du rapport du poids du sang au poids total du corps est, pour le Canard de pf, et pour le Poulet de —; et que la moyenne du rapport du poids du caillot sec au poids total du corps est, pour le Canard de ~^, et pour le Poulet de ~. On voit par là que dans les deux cas le poids relatif du sang ou du caillot sec du Canard n'atteint pas le double de ce même poids chez le Poulet. Or il est facile de se convaincre que ce rapport est bien inférieur à celui de la résistance à la submersion dans ces deux espèces, puisque, d'après les expériences mêmes de M. Bert, la moyenne de la résis- tance du Canard est de 11 minutes 17 secondes, tandis que chez le Poulet cette moyenne n'est que de 3 minutes 31 secondes, c'est-à-dire un peu plus de trois fois moindre. Mais ce défaut de proportion entre la quantité ' BrowQ-Séquard ; Note sur la basse température de quelques Palmipèdes longipennes. 'Juurn. de la Phi/sioL, puy. 45. 1858.) OISEAUX ET MAMMIFÈRES PLONGEURS. il^ relative du sang et la résistance q, l'asphyxie, défaut qui ressort clairement de l'examen des moyennes, devient encore plus éclatant quand on compare entre eux les résultats particuliers des expériences en question. C'est ainsi que si nous prenons les nombres particuliers qui expriment les rapports du poids du sang an poids du corps dans les deux espèces, nous trouvons pour le Canard des nombres tels que j^, ~, /j, qui sont peu éloignés (eô il y a même identité pour l'un d'entre eux) de quelques-uns des nombres tels que ^, ^, trouvés chez le Poulet; tandis que, pour les quantités de temps que les animaux de ces espèces résistent à la submersion, nous ne trouvons pas de rapprochements semblables. Les limites extrêmes sous ce rapport sont, pour le Poulet de 3 minutes à 4 minutes 40 secondes, et pour le Canard de 7 minutes à 15 minutes; de sorte qu'il y a toujours pour le moins une dilîérence de près du double entre les deux. Après une semblable discussion des faits, je me sens autorisé à dire que, sans le nouvel appui d'expériences multipliées et portant sur de nombreux sujets appartenant tantôt à la même espèce, tantôt à des espèces différentes, tantôt à des groupes rapprochés ou éloignés, on ne saurait accepter sans réserve les conclusions de M. Bert, et jusqu'à plus ample informé je per- siste à attacher une grande importance aux dispositions anatomiques dont ce zoologiste très-distingué fait peut-être trop bon marché. Quelques mots sur le mécanisme général de ces dispositions anatomiques contribueront à appuyer l'opinion que je viens démettre. Toutes ces dispo- sitions ont pour but de s'opposer, dans une certaine limite, à la congestion veineuse des centres nerveux. Elles atteignent ce but par plusieurs moyens. Le plus général consiste dans une dilatation considérable des troncs veineux qui ramènent le sang.à l'oreillette droite, et particulièrement de la veine cave inférieure. Ces dilatations portent surtout sur l'oreillette droite, la veine cave inférieure, les veines hépatiques, le système porte, les veines ihaques, diaphragmatiques, etc., et transforment ces portions du système veineux en de vastes lacs sanguins capables, à un moment donné, de contenir presque tout le sang veineux du corps. Ce premier mode d'emmagasine- ment du sang veineux est déjà un moyen efficace de soustraire le cœur et les centres nerveux à une congestion sanguine rapide et excessive. Cette 424 IMIILOSOPHrK NATUHELM'l dernière est momcnUinéuionl diminuée: elle augmente ensuite lenlemeiil. et la pression ne se communique que faiblement par l'oreillette droite à la veine cave supérieure cl aux centres nerveux. C'est là la disposition que l'on rcmar(iuo chez les Palmipèdes plongeurs, elle y est très-accentuée ; et quand on examine une bonne injection du système veineux de cesani maux, on est étonné des dimensions exagérées des veines hépatiques, des l)rancheset du tronc de la veine porte et des veines abdominales en géné- ral. C'est là ce que bien des observateurs ont constaté, et ce que m'ont démontré de nombreuses préparations faites sur les Oiseaux palmipèdes de nos côtes. Chez quelques animaux, ces dispositions vascu'.aires présentent un per- fectionnement remarquable qui localise la congestion et la tension sanguine dans la portion abdominale et les affluents de la veine cave inférieure, de telle sorte que le cœur, le poumon et les centres nerveux supérieurs sont en partie soustraits à l'accroissement de tension qui se produit dans la portion postérieure du système veineux général. Ce perfectionnement, qui se trouve chez quelques Mammifères plongeurs, tels que le Phoque, la Loutre, l'Hippopotame, etc., consiste dans un sphincter musculaire qui entoure et peut oblitérer la veine cave inférieure dans le point où elle tra- verse le diaphragme. Comme ce sphincter est une dépendance des fibres musculaires du diaphragme, on comprend aisément comment la contraction énergique de ce muscle, au moment où l'animal va plonger, crée pour celui-ci des conditions très-favorables, c'est-à-dire à la fois un état d'in- .spiration extrême et une oblitération de la veine cave inférieure. On ne peut douter de l'action puissante de ce sphincter sur la veine cave inférieure, quand on compare le calibre de ce vaisseau au-dessus et au-dessous de lui. Chez la Loutre, par exemple, ainsi qu'on peut le voir sur une préparation que j'ai déposée au Musée de la Faculté de médecine, tandis que la veine cave au-dessus du sphincter présente un diamètre égal à celui de ce vais- seau sur un Chien de même taille, la veine cave au-dessous du sphincter forme aussitôt un vaste lac dont le diamètre est certainement cinq fois plus considérable, et dans lequel viennent aboutir quatre ou cinq veines hépa- tiques, dont chacune a un cajibre supérieur à celui de la veine cave au- dessus du sphincter diaphragmatique. De plus, la veine cave au-dessous OISEAUX ET MAMMIKKRES PLONdEUHS. 425 du foie, les veines iliaques, les veines rénales elle système porte, ont un calibre relativement très-grand. Cet ensemble de dilatations forme donc un système capable d'être, à un moiuenl donné, séparé supérieurement du cœur et des veines caves supérieures, et de retenir le sang veineux loin du cœur, du poumon et du cerveau. Il ne faudrait pourtant pas croire que l'isolement de ce système inférieur soit complet, et que la tension sanguine des parties inférieures ne puisse pas, maigre la contraction du spbincter, être transmise aux parties supé- rieures. Si les veines azygos qui font communiquer ces deux départements du système veineux sont elles-mêmes oblitérées par la contraction du dia- jibragme, il ne faut pas oublier que dans le canal vertébral lui-même se trouvent des sinus veineux plexiformes qui établissent des communications entre le département supérieur et le département inférieur. Mais, comme la voie qu'ils forment est en définitive indirecte et détournée, et comme ces sinus sont eux-mêmes très-dilatables et capables de recevoir beaucoup de sang avant d'avoir atteint une tension considérable, il arrive que ce n'est que lentement et à la longue que la veine cave supérieure partage la tension de la veine cave inférieure; et ce retard est sufOsanl pour ralentir et atténuer la congestion veineuse des centres nerveux. Enfin, cbez un Mammifère plongeur des plus étonnants sous le rapport delà résistance à la submersion, puisqu'il peut rester 15 minutes sousl'eau, l'Hippopotame, Gratiolet ' a découvert, indépendamment des dispositions anatomiques précédentes, un perfectionnement de plus, consistant dans un mécanisme fort curieux, permettant à l'animal d'oblitérer à volonté ses artères carotides au niveau de l'os hyo'i'de. Cet habile zoologiste interprèle d'une manière très-ingénieuse les avantages de cette particularité du sys- tème vasculaire de l'Hippopotame. Sans reproduire ici le texte même de sou interprétation, je dois pourtant en donner un court aperçu. Le sang, revenant au cœur des parties postérieures du corps, est retenu dans les dilatations de la veine cave par le sphincter diaphragmatique. Le sang revenant par la veine cave supérieure arrive au cœur, traverse le poumon, et, passant par le ventricule gauche, est lancé dans l'aorte. Ce sang, envoyé ' Gratiolet; Recherches sur l hippopulaine. publiées par Alix. Paris, t8G7. 'i-Jfi i'Illl.OSni'lllK NATIIHEI.I;!';. (l;ms toiiLos les réi^ions, va on partie; sViiiiiiauasinor dans la voino cave inférieure, ilc telle sorte que chaque contraction du co'nr iliminvie l'iniiui- nence de la congestion des centres nerveux, (le résultat est d'autant plus sûrement atteint que la compression ])Ossible des carotides diminue la quantité de sang artériel qui arrive à la chaîne des réseaux admirables crâniens et orbitaires. Mais il résulte de tout cela que la quantité de san^ qui est envoyée vers le poumon est de plus en plus petite. «Or, dit Gratiolet, plus la quantité de sang qui parcourt le cercle delà circulation pulmonaire sera petite, plus son mouvement se ralentira, moins la provision d'air ren- fermée dans le poumon sera viciée par l'exhalation de l'acide carbonique; la flamme se fait donc plus vite, si je puis ainsi dire, pour vivre plus long- temps dans une atmosphère limitée. » Tout en acceptant ce que peut avoir de vrai cette théorie si ingénieuse, je dois pourtant faire quehjues réserves sur l'importance que lui attribue (Iratiolet. Il n'est pas tout à fait exact de dire, avec l'auteur, que «une partie du sang venu exclusivement de la veine cave supérieure passera dans les réseaux qui dépendent de la veine cave inférieure et ne reviendra point au cœur; qu'il s'ajoulera à la masse du sang emprisonné dans les reines abdominales, et que ce sera en conséquence une nouvelle quantité de sang enlevée à la circulation j)ulmonaire. » 11 ne faut point oublier en effet que, commeje l'ai fait remarquer plus haut, les sinus veineux intra etpéri- vertébraux peuvent ramener dans la veine cave supérieure une partie du sang de la veine cave inférieure, et que ce reflux doit être d'autant plus considérable que la tension est augmentée dans la veine cave inférieure et tend à s'abaisser dans la supérieure. L'étude que je viens de faire des i;onditions dans lesquelles se trouvent les Oiseaux et les Mammifères plongeurs me paraît de nature h établir l'importance des dispositions analomiques qui se retrouvent toujours à di- vers degrés chez ces animaux. Elles ont en effet toutes pour but de s'op- poser à cette congestion veineuse des centres nerveux que nous savons être la cause capitale et immédiate des accidents rapides et foudroyants de l'as- phyxie. Ces dispositions atteignent ce but à des degrés divers sans doute; mais nous devons reconnaître qu'elles sont bien inférieures, à cet égard, à celles que nous avons signalées chez les Reptiles. OISEAUX ET MAMMIFÈRES PLONGEURS. VH Tandis, en effet, que chez les Mammifères l'obstacle à la congestion vei- neuse des centres nerveux n'est en définitive ({u'incomplet et devient de moins en moins efficace à partir du début de ras[»hy\ie ; chez les lieptiles, au contraire, une soupape de sûreté (aorte gauche) est constamment ou- verte au sang noir, qui tendrait à congestionner les centres nerveux, et le cercle circulatoire peut conserver indéfiniment dans toutes ses parties une tension moyenne conciliable avec le maintien des fonctions. La cause des accidents précoces est supprimée, et il no reste (jue la cause, du reste très-lente et très-tardive chez ces animaux, de l'asphyxie des tissus. ■528 l'HILOSOI'llli-: NATURELLE. CHAPITRE IV DES TYPES DE CIRCULATION DANS LA SÉRIE DES VERTÉBRÉS Le mouieuL ec^l venu luaiiitenaut de classer les formes qu'affecte l'appa- reil de la circulation dans la série des Vertébrés, cl les rapports de ces formes avec la vie dans les différents milieux aérien ou aquatique. Les considérations qui précédent nous aideront singulièreiaent à remplir cette dernière partie de notre proj^ramme. Ce sera ià du reste comme la conclu- sion de notre travad. On a jus(iu'à |)ruseiit reconnu que l'appareil circulatoire des Vertébrés affectait trois formes principales : 1" L'une d'elles est caractérisée par l'existence d'un cœur composé de deux cavités seulement et ne recevant que du sang veineux. Elle appar- tient essentiellement ù la classe des Poissons. 2° La seconde se reconnaît cà l'existence d'un cœur à trois cavités, sa- voir : deux oreillettes, et un ventricule où le sang artériel et le sang vei- neux viennent se mêler pour être distribués ensuite dans les artères de la grande et de la petite circulation. Ce mode de constitution appartient exclu- sivement aux Batraciens et aux Reptiles. 3" Enfin, le troisième type diffère des deux précédents par l'existence de quatre cavités cardiaques, la séparation complète entre la portion arté- rielle et la portion veineuse du cœur, l'indépendance des vaisseaux qui naissent des deux ventricules, d'où résulte que tout mélange entre le sang rouge et le sang noir e.st complètement impossible. Cette forme est propre aux Oiseaux et aux Mammifères. Les différences qui caractérisent ces trois types ont donné lieu aux dé- nominations suivantes : 1" Vertébrés à circulation simple pour les froissons; ■2.° Vertébrés à circulation double et incomplète pour les Batraciens et les DKS TYPES DE CIRCULATION 'i'29 Reptiles: et 3° Vertébrés à circulation tloi/.hlc et complète pour les Mammi- fères et les Oiseaux ' . Considérée d'un point de vue très-général, cette classification embrasse certainement les diverses formes que revêt la fonction circulatoire chez les Vertébrés; mais il y a pourtant lieu de se demander s'il ne conviendrait pas de modifier, à la lumière des notions nouvelles, la caractéristique du second groupe, qui'comprend les Batraciens et les Reptiles. Tout ce qui précède dans ce travail ne permet pas d'accepter comme caractéristique générale du cœur desRep'àies, d'avoir un ventricule où, le sang artériel et le sang veineux viennent se mêler, pour être distribués ensuite dansles artères de la grande et de la petite circulation: cette propositiou se trouve d'une part en contradiction avec les résultats de mes recherches sur le groupe tout entier des Reptiles, et tendrait d'autre part à exclure de ce groupe des familles entières qui lui appartiennent pourtant à juste titre. Nous savons en effet que si le sang artériel et le sang veineux se mêlent plus ou moins dans le ventricule, ce mélange n'a pas lieu pour la masse du sang, comme pourrait le laisser croire la proposition que je discute, mais seule- ment pour les couches voisines de ces deux espèces de sang. Nous savons également que ce n'est pas un mélange des deux sangs qui se distribue dansles vaisseaux des deux circulations, mais que les vaisseaux de la petite circulation ne reçoivent que du sang noir, et que, si un ou deux des vais- seaux de la grande circulation reçoivent au début du sang noir ou du sang mixte, ils reçoivent aussito^t; le sang rouge qui est arrivé au ciEur. J'ajoute enfin qu'on ne peut certainement considérer aucun des caractères énoncés ci-dessus comme appartenant aux Crocodiliens , et que par conséquent cet ordre tout entier se trouve par cela même exclu de ce groupe des Vertébrés, auquel se rapporte le second type de l'appareil de la circulation. Il faut donc caractériser autrement ce second type, et je crois qu'il con- vient de dire qu'il se reconnaît à l'existence d'un cœur à trois ou (juatre cavités, savoir: deux oreillettes et un ventricule (Batraciens), ou deux ven- tricules dont la séparation est plus ou moins complète (Reptiles). Dans ce cœur, la circulation s'accomplit de telle manière que la petite circulation ne • Voir Milne-Edwards ; Leçons sur la phys. cl l'anal, ramy., tom. III, pag. 314. ISJS. 430 PHILOSOPHIE N ATlJliELLIv i'eçoil(|uo(lu sang veineux, el quel;! gninde roroil. outre luullo sangai'léricl, une (juautilé variable de sang uiixle dont le mélange s'est produit, ou dans le ventricule (Batraciens et Reptiles à ventricules communicants), ou au- dessus de l'origine des deux aortes (Crocodiliens). En un mot, ce qu'a de vraiment caractéristique ce groupe, ce qui l'empêche d'être confondu avec aucun des deux autres, c'est le passage, dans un des vaisseaux de la grande circulation ou dans les deux, d'une quantité plus ou moins limitée de sang mixte. Aucun des deux autres groupes ne présente un pareil phénomène, et tous les Vertébrés qui appartiennent au groupe dont il s'agit le présen- tent à un degré quelconque. Ce second type, qui a donné lieu à tant d interprétations diverses, pré- sente plusieurs sous-types importants qui constituent, comme nous l'avons vu, une chatae presque ininterrompue conduisant des Poissons aux Ver- tébrés supérieurs, .le n'ai pas à revenir sur ce point ; je liens seulement à étudier ces sous-types au point de vue des relations de plus en plus crois- santes du sang artériel imr avec le cœur, et de l'introduction progressive de la vie aérienne dans la nature. Si on laisse de côté le Lepidosiren, qui est un animal de transition fort remarquable, et quelques Poissons intéressants, tels que le Polyptere du Nil et le Guchia du Gange, chez lesquels la vessie natatoire a quelque tendance à devenir un organe pulmonaire, on peut dire que les Batraciens représentent, dans la faune actuelle, le premier effort fait par la nature pour passer de la vie aquatique (unique lors de l'apparition du régne animal) à la vie aérienne. A cet égard même, les Batraciens représentent deux pé- riodes ou deux degrés de cet effort. Les Pérennibranches constituent un pre- mier degré dans lequel, la vie aquatique étant fondamentale et habituelle, la vie aérienne est devenue possible dans une certaine limite, et pour ainsi dire se surajoute, se superpose à l'autre, sans devenir suffisante par elle-même. L'apparition d'un organe pulmonaire encore peu développé, mais pourtant capable d'un certain rôle, co'incidant avec la conserva- tion des branchies ou houppes cutanées res;)iratoires, et avec l'absence pour la peau de tout revêtement écailleux inperméable à l'air, caractérisent ce premier degré de passage à. la vie aérienne. Les Balraci eus abranches DES TYPES DE CIRCULATION. 431 représentent dans leurs premières phases de développement une forme exactement identique à celle des Batraciens pérennibranches. Mais la dis- parition des branchies, le maintien du caractère nu de la peau, et un déve- loppement plus prononcé de l'organe pulmonaire, changent les conditions de la vie. La vie aérienne est devenue fondamentale, et c'est la vie aqua- tique qui n'est possible que dans cei'laines limites, et vient se surajouter, se superposer à l'autre. Cette vie vraiment araphibienne, cette suppléance possible pendant un temps prolongé du poumon et de la peau comme organes respiratoires, sont rendues possibles par la disposition même de l'appareil de la circulation. La cavité ventriculaire, étant unique, recueille le sang hématose, d'où qu'il arrive: du poumon ou do la peau; et de plus, cette unité ventriculaire s'op- pose à toute congestion veineuse grave et à tout embarras de la circula- tion, puisque dans tous les cas une issue, soit pulmonaire, soit aortique, est laissée au sang reçu par le ventricule. Mais il existe de plus chez quelques Batraciens, soit pérennibranches, soit abranches, des relations très-remarquables entre les artères pulmo- naires et les artères du système cutané, relations qui sont éminemment fa- vorables au balancement fonctionnel de ces deux organes respiratoires, et à l'établissement de compensations très-utiles dans la distribution du sang. C'est ainsi que, comme nous l'avons vu chez la Grenouille et chez le Cra- paud, l'artère pulmonaire de chaque côté se divise en deux branches dont l'une est destinée au poumou, et dont l'autre va former un réseau vascu- laire dans la peau de la tête et du tronc chez la Grenouille, dans la peau de la région cervicale seulement chez le Crapaud. Chez l'Axolotl, les arcs aor- tiquesde la quatrième paire se bifurquent pour aller, d'une part s'anasto- moser avec les racines de l'aorte, d'autre part se distribuer aux poumons et constituer les artères pulmonaires. Chez le Protée, chez le Siren lacertina, il y a également des relations très-grandes entre le système artériel pulmo- naire et le système artériel branchial ou général. On comprend facilement les effets de cette disposition ; la circulation s'active là ou l'hématose de- vient possible, peau ou poumon, et le sang est ainsi détourné des voies où la circulation pourrait être embarrassée par le défaut même d'hématose. Les Batraciens présentent donc ce fait remarquable de pouvoir, à des degrés un i:î2 PUILOSOPHII': NATIJRKLLK. peu divers il est vrai, s'adapter à une vie tantôt aquati(jiie et tantôt aérienne. L'un et l'autre de ces deux milieux, l'air et l'eau, paraissent être pour eux un milieu normal ; et c'est sans faire violence à leur vie physiologique qu'ils peuvent alternativement adopter l'un ou l'autre milieu. C'est là le premier essai de vie aérienne, mais avec conservation plus ou moins grande do la vie aquatique. Les Reptiles à ventricules commimicants représentent un degré de plus dans cet essai de vie aérienne. Chez eux, en etTet, la vie aérienne se perfec- tionne, mais la vie aquatique s'affaiblit et diminue; l'organe respiratoire cutané disparait presque enliérenienl, et la surface pulmonaire se multiplie par un cloisonnement moins incomplet. Il reste, comme condition anato- mique favorable à un séjour prolongé sous l'eau, la possibilité du passage dn sang du ventricule droit dans le gauche par la fente du ventricule, et la permanence de l'aorte gauche et de son anastomose abdominale. Ce sont là, comme nous l'avons vu, des conditions propres à supprimer les embarras dans la circulation veineuse, qui pourraient provenird'un obstacle à la circulation pulmonaire. Les Crocodiliens, enfin, représentent le troisième et dernier degré dans celte série de transformations dont l'ensemble constitue le second type. Ici la communication intervenlriculaire proprement dite est supprimée. Mais l'existence de l'aorte gauche, qui dépend du ventricule droit, le foramen de Pannizza et l'anastomose abdominale, quoique très-réduite, fournissent au sang du ventricule droit un écoulement suffisant, même quand la cir- culation de l'artère pulmonaire est embarrassée parsuite du défaut d'héma- tose. D'une autre part, le poumon s'est encore perfectionné, et la vie aérienne a pris plus d'importance et plus d'activité. Enfin, si, sortant de ce second type si remarquable, nous passons au troi- sièmetype, qui renfermeles Vertébrés supérieurs, nous rencontrons d'une parties Mammifères et de l'autre les Oiseaux, qui présentent des points de contact avec le sous-type des Crocodiliens, chacun d'entre eux. leur ressem- blant par quelques points de l'organisation. Mais, pour ce qui regarde l'ap- pareil circulatoire et ses rapports avec le milieu dans lequel vit l'animal, il faut dire que, malgré certaines ressemblances très-remarquables entre la constitution des chambres du cœur, des valvules et de certains vaisseaux DES TYPES DE CIRCULATION. 433 chez les Oiseaux et chez les Crocodiliens. il y a au fond une filiation peut- être plus étroite entre le cœur des Crocodiliens et celui des Mammifères qu'entre ce premier et celui des Oiseaux. Je sais bien que telle n'est pas l'opinion des zoologistes: mais la lumière que j'espère avoir portée sur les rapports qui relient ces organes entre eux me permet d'affirmer que le cœur des Oiseaux est, auprès de celui des Mammifères, le résultat d'une transformation plus radicale du cœur des Crocodiliens, et représente le plus haut degré de perfectionnement de cet organe au point de vue de la vie aérienne. En effet, tandis que chez les Mammifères nous avons retrouvé une aorte gauche et une aorte droite, incomplète il est vrai, communiquant entre elles par un vaste foramen de Pannizza ; chez les Oiseaux, l'aorte gauche, c'est-à-dire la soupape de sûreté contre l'arrêt de la circulation pulmo- naire, s'est entièrement effacée et n'a laissé aucune trace. Je conviens que les rapports de l'aorte droite et de ses branches, qui représentent si bien chez les Oiseaux l'aorte droite des Crocodiliens, je conviens, dis-je, que ces rapports établissent certainement entre les uns et les autres de ces ani- maux des relations exLrémeraent intéressantes. Mais, au point de vue du perfectionnement de la vie aérienne, il n'est pas douteux que la disparition complète de l'aorte gauche n'annonce chez les Oiseaux une préparation à la vie aérienne plus précoce et plus radicale que chez les Mammifères. Je dois et je puis maintenant m'elever contre des notions déjà anciennes, et que l'on retrouve encore sous la plume des zoologistes les plus émi- nents. On dit eu effet que, dans l'organisation des Reptiles, la nature a cherché à réaliser le mélange des deux sangs, et à remplir les canaux ar- tériels, soit pulmonaires, soit aortiques, d'un sang plus ou moins mixte. C'est là une notion fausse et contre laquelle il est de mon devoir de pro- tester. Tout ce que j'ai pu dire sur les Reptiles, dans ce travail, piouve en effet que, dans cette substitution progressive de la vie aérienne à la vie aquatique que nous venons d'étudier, les communications possibles entre le système à sang noir et le système à sang rouge, soit dans le cœur lui- même, soit dans les vaisseaux, portent les indices évidents de progrès vers une séparation complète, et ne sont conservées que comme des dispositions 55* •'i.Ti I'I1I1.()S(M'IIII-: N'ATI'IIKI.I,!:, indispensables pour mcnagcr la li'aiisilii)n ilc la vie a(jual,i(pie à la vie aérienne. La nature n'a point recherché chez les Reptiles le mélange des deux sangs, car, s'il en était ainsi, les Reptiles seraient inférieurs aux Pois- sons, ce qui ne peut être raisonnablement admis. Elle n'a point recherclic ce mélange, mais elle l'a subi comme compensation à un avantage plus grand, savoir: la possibilité de la vie aérienne au sein même d'un orga- nisme primitivement constitue pour la vie aquatique. La preuve que la nature a subi et non point rec/ierclic ce mélange, c'est qu'elle a tâché de le restreindre de plus en plus et de le réduire aux plus faibles proportions. Pour cela, elle a employé ces moyens, aussi ingénieux que variés, que nous avons longuement étudiés dans ce travail ; les deux sangs ont été mis en contact plutôt que mélangés et confondus. Ils se touchent et peu- vent se mêler par leur tranches voisines; mais les masses restent distinctes et reçoivent des destinations difï'érentes. Bientôt, à mesure qu'on s'élève, les points de contact des deux sangs diminuent, se restreignent en nom- bre et en étendue, jusqu'à ce qu'ils s'effacent entièrement et que la sépa- ration devienne complète chez les Vertébrés supérieurs. Toutes ces considérations établissent entre les Oiseaux et les Mammifères jjlongeurs d'une part, et les Reptiles et Âmphibiens d'autre part, des diffé- rences dans les conditions d'organisation qui doivent frapper l'esprit du lecteur, et que je résumerai ainsi: (]hez les Oiseaux et les Mammifères plongeurs, il y a sous l'eau inter- ruption brusque et plus ou moins complète des conditions iiormalci et né- cessaires de la vie. Chez les Reptiles, il y a sous l'eau modification et altération ralentie des conditions de la vie. Chez les Amphibies proprement dits (Batraciens), il y a sous l'eau in- troduction de conditions différentes, mais normales et régulières, de la vie. Ici se terminent les considérations générales que j'ai tenu à placer à la fin de ce travail. Je n'ignore pas que dans le cours de ces trop longues pages je me suis .souvent exposé à des longueurs et à des répétitions dont le lecteur aura raison de se plaindre; mais j'espère qu'il voudra bien me les pardonner, eu égard à la difliculté même du sujet, et en récompense OKS TYPES l)K CIHCULATION. M5 des etforls que j'ai faite ]ionr être clair. L'inlérét même des questions que j'ai abordées m'a entraîné plus loin que je ne m'étais d'abord proposé d'aller. D'autres pourront s'en plaindre; mais, pour moi, je ne saurais être trop reconnaissant pour les heures de calme et d'oubli que je dois à ces recherches scientifiques. Au milieu des tristesses et des épreuves que Dieu n'a point épargnées à notre temps, il m'a été permis, en écrivant ces pages, de me transporter dans un monde plus pur et plus serein, et d'oublier parfois les misères humaines. FIN. EXPLICATION DES PLANCHES Nota bene. — L'ouvrage actuel ayant dû d'abord être publié sous la forme in-octavo, les plan- ches I et II d'une part, et les planches III et IV de l'autre, qui avaient été tirées dans ce l'ormat, ne forment plus que deux planches du format in-quarto, qui a été définitivement adopté. La première planche de ce travail comprend donc les planches I et II, et la seconde comprend les planches III et IV. PLANCHES I et II (réunies). PLANCHE l. FiG. 1 . Cœur de Crapaud. Ventricule et bulbe ouvert à l'état frais , fortement grossi. A Masse charnue postérieure avec ses colonnes irradiées et ses aréoles affaissées. Au-dessus de .1 , portion vestibulaire du ventricule. M Portion auriculaire du ventricule. B, C Demi-cloison en spirale du bulbe séparant les deux rampes, la rampe aortique à droite, et la rampe pulmonaire à gauche. D Valvule postérieure de la rampe aortique liée à l'extrémité anté- rieure de la cloison. E Cloison de l'espace ou chambre inter-aortique. E' Orifice des troncs carotico-linguaux. F Grosse aortique gauche. G Tronc cai'Otico-Iingual gauche. H Artère pulmonaire gauche. FiG. 2. Cœur de Crapaud injecté au suif et traité par l'essence de térébenthine. Le ventricule a été coupé suivant un plan vertical et transversal. Les colonnes et les vacuoles de la face postérieure se voient fort bien. Le bulbe et les aortes ont été ouverts par une section antérieure (for- tement grossi). A Vacuoles veineuses projetant le sang noir dans la rampe ptilmo- naire. .i38 KXIM.ICATUIN DF.S l'LANC.IlKS. /; V.iriiolos arlériolles iirojelaiit 1<^ sang rouge ihnis la rampe aor- tiquo. C Colonne ou masse oharnuo poslérieurc. D Boid inférieur de la cloison in ter-auriculaire. FiG. 3. Bulbe, et vaisseaux qui en naissent, chez im Crapaud (un peu plus que grandeur naturelle). a Artèi'e pulmonaii-o droite. b Aorte droite. c Artère carotico-hnguale avec la glande carotide. i Artère hyoïdienne naissant de l'aorte. e Section des trois vaisseaux adossés. d Section de ces trois vaisseaux vue de l'ace. Fir,. 4. Les trois troncs vasculaires gauches très-grossis chez un Crapaud. La crosse aortique est ouverte, pour montrer la valvule semi-lunaire qu'elle renferme. (Empruntée à Brûcke, loc. cit.) Injection au suif traitée par l'essence de térébenthine. / Canal carotico-lingual. 2 Canal aortique ouvert. 3 Canal pulmonaire. a Glande carotide. (■ Artère carotide. / Artère linguale. n Aorte. V Valvule dans la crosse aortiijiie. r Artère cutanée respiratoire. p Atère pulmonaire. Fir,. 5. Cî.nal aortique d'une Grenouille ouvert à l'état frais i'très-grossi). a Artère pulmonaire béante. b Aorte. c Canal carotico-lingual affaissé. . d Artère hyoïdienne retournée comme un doigt de gant. FiG. 6. Fibres musculaires mixtes du bulbe vues an microscope. ■;XI'I. [CATION DE?. PLANCHES. PLANCHE II. Fir,. 1. Cœur de Tortue careUe conservé depuis longtemps dans l'ali-ool, durci et ratatiné (grandeur naturelle). A Crosse aortique droite. B Aorte gauche. C Aorte jjulmonaire gauche. D Fausse-cloison et sa lèvre, loge pulmonaire. E Noyau cartilagineux de la lèvre de la fausse-cloison. F Fente placée entre la face postéi'ieure de la lèvre et la masse charnue postérieure, et faisant coramuniiiuer la loge pulmo- naire avec les vestibules aortiques. G Coupe de la masse charnue postérieure et surtout du faisceau droit commun. H, I Oreillettes. Fifi. 2. Le même cœur ouvert postérieurement par une coupe transversale de la paroi ventriculaire postérieure. A Aorte droite fendue inférieuremeut et dont le calibre, aplati par la pression des parties voisines, paraît moindre qu'il ne l'est réellement B Aorte gauche. C Artèi'e pulmonaire. D Saillie postérieure de l'angle de la lèvre de la fausse-cloison. E Couche fibreuse épaisse placée au-dessous des orifices aortiques, et d'où naissent les faisceau.K obliques gauches antérieurs. F Tissu aréolaire et colonnes de la loge artérielle. // Tube valvulaire auriculo-ventriculaire. K Faisceau flbreu.x qui unit la pointe du cœur au péricarde. PLANCHE III et IV (réunies). PLANCHE m. FiG. 1. Cœur de Ka»:a?i«s arenartiw (graudeur doublée]. A Aorte droite. B Aorte gauche. C Artère pulmonaire gauche. D Fausse-cloison et loge pulmonaire E Lèvre de la fausse-cloison. 440 EXI'MCMION DKS PLANCHES. G Faisceau droit coiuiiuni. / Oreillette. FiG. -2. Cœur de Iguann dclicalis.sinia. Daud. idoiiblo de la grandeur naturelle). • .-i Aorte droite ouverte par une l'eu le dont le bord est caché par l'aorte gauche. B Aorte gauche. C Artère pulmonaire. D Loge pulmonaire. E Fausse-cloisou. H Section de la base de la l'ausse-cloison. G Masse charnue postérieure. / Coupe du faisceau commun droit. L Faisceaux obliques gauches. PLANCHE IV. Fi(i. 1. Cœur de Corbeau. Ventricule droit ouvert. .4 Crosse de l'aorte. .4' Tronc brachio-céphalique droit A" Tronc brachio-céphalique gauche. (.' Artère pulmonaire ouverte. On n'aperçoit que deu.x valvules sig- mo'ides, la troisième étant cachée par le bord antérieur de la section. E Faisceau droit commun. F Grande valvule charnue. D Sa languette charnue externe. A' Cicatrice de l'aorte gauche au-dessous et en arrière de la saillie de l'aorte droite. M Faisceaux rayonnants de la paroi interventriculaii-e. Fuï. 2. Cœur de jeune, fœtus de Veau (grossi trois fois). A Aorte. C Loge et infundibulum pulmonaire. M Fausse-cloison. Â' Lèvre de la fausse-cloison. F Fragment de la valvule auriculo-venlriculaire externe. L Premiers faisceaux rayonnants antérieur et postérieur. F' Papille musculaire de la valvule auriculo-ventriculaire. EXPIJCATTON DES PLANCHES. PLANCHE V. Fus. 1. Cœur de Bothrops lancculalxs (nii pou moins que le double de graudeur naturelle) . A Aorte droite. B Aorte gauche. C Artère pulmonaire. G,I Masse postérieure du ventricule et taisceauv droits. N Fausse-cloisou et loge pulmonaire. E Angle formé par la fausse-cloison et sa lèvre. H Tente intervestibulaire. FiG. 2. Cœur defioa conslriclor (de grandeur naturelle'. A Aorte droite. B Aorte gauche. C Artère pulmonaire. N Fausse-cloison. E Sa lèvre. F Faisceau droit antérieur. G Faisceau droit postérieur. H Fibres commissurantes. L, M Oreillettes. FiG . 3, Même cœur. Ventricule gauche ouvert par le bord gauche. A, B, C, L, M, comme précédemment. 0 Faisceaux rayonnants antérieurs. P Faisceaux rayonnants postérieurs. X Angle saillant postérieur de la fausse-cloison. T Valvule auriculo-ventriculaire ou demi-tente gauche. R Orifice auriculo-ventriculaire caché par une membrane fibreuse S qui tapisse la partie externe de l'orifice et d'où dépend la pe- tite valvule auriculo-ventriculaire externe. Fifi. 4. Même cœur. La fausse-cloisou a été sectionnée, et la partie postérieure des ventricules a été détachée et soulevée. A, B, C, comme précédemment. A Orifice de l'aorte droite avec ses deux valvules antérieure et pos- térieure. B' Orifice de l'aorte gauche avec ses deux valvules antérieure et pos- térieure (entre les deux est la l'ente inter-aortique. dont les bords ont été largement écartés). 56' 44-2 KXI'MC.ATION DKS l'I.A.NCHHS. O iViigle postérieur saillaiil. lonué par la fausse-cloison ut sa lèvre, et séparant les deux ventricules uortiques. E Lèvre de la fausse-cloison. L'orilice de l'artère pulnionaii'e est caché par la fausse-cloison. T Tente valvulaire auriculo-ventriculairo. .1/ Corne antéi'ieure de la demi-tente droite. iV Corne postérieure de la demi-tente droite. Elle s'insère plus bas que la corne antérieure, et a dos relations avec les faisceaux obliques gauches postérieurs. S Coupe de la fausse-cloison. /*, ft Coupe des faisceaux i-ayouiiaiits antérieurs et postérieurs entre-croisés, et formant le rudiment de la cloison interventri- culaire. PLANCHE VL Fii;. 1. Cœur de Cheloiiin inidas (moitié de la grandeur naturelle). B Aorte gauche. C Aorte pulmonaire. B' Orifice de l'aorte gauche. 0 Noyau fibreux de la masse ventriculairc i)Ostérieure. 7{ Faisceau droit antérieur. / Faisceau droit postérieur et fibres communicantes. S Faisceaux obliques gauches. U Fausse -cloison, loge pulmonaire, angle de la fausse-cloison et de sa lèvre. K Lèvre de la fausse-cloison. A' Bulbe artériel ou demi-anneau bulbaire. Fiu. 2. Cœur d'une autre Clielonia inidas (moitié de la grandeur naturelle). La fausse-cloison a été coupée au niveau de sa base et relevée avec la paroi antérieure du ventricule droit. .4, B, C, X, U, K, I, R, 0, S, comme précédemment. L Tente inter-aortique. E Saillie fibreuse de l'angle postérieur de la fausse-cloison et apo- physe postérieure du noyau cartilagineux. Rudiment de la cloison interveslibulaire. P Demi-tente droite, ou valvule auriculo-ventrioulaire droite in- terne. 0 Valvule auriculo-ventriculaire droite externe. Y Faisceaux rayonnants postérieurs. i EXPLICATION DES ['LANGUES PLANCHE VII. Cœur de Crocodiius lucius (de grandeur naturelle;. Fir,. 1. Ventricule droit. A Aorte droite. B Aorte gauche. C Artère pulmonaire. Ces trois vaisseaux accolés forment par leur ensemble le cône artériel. E Noyau cartilagineu.x. Q Apophyse antérieure et droite de ce noyau. E' Apophyse postérieure ou inter-aortique de ce noyau. T Foramen de Pannizza mis à nu par la section de la valvule sigmoïde interne de l'aorte gauche. On voit derrière le per- tuis la valvule sigmoïde interne de l'aorte droite. R Demi-ellipse externe, fibreuse, cartilagineuse ou osseuse de l'ori- fice de l'aorte gauche. V Angle postérieur du vestibule de l'aorte gauche. H Orifice auriculo-veutriculaire. P Valvule fibro-musculaire do l'orifice auriculo-veutriculaire. S Faisceaux obliques gauches. S' Valvule musculaire auriculo-veutriculaire. A' Faisceau de la fausse-cloison. Z Premier faisceau rayonnant antérieur. Y Premier faisceau rayonnant postérieur. X Cravate bulbaire. FiG. 2. Même cœur. Ventricule gauche ouvert. H Oreillette gauche. / Orifice auriculo-veutriculaire. A Orifice de l'aorte droite. B Valvule auriculo-veutriculaire interne. C Valvule auriculo-veutriculaire externe. M M' M" Faisceaux rayonnants antérieurs. N N' N" Faisceaux rayonnants postérieurs. R Fibres circulaires des parois ventriculaires. •544 RXPMCATION DUS PLANCHES. PLANCHE VIll. ¥iù. 1. Cœur de Crocodilus lucius (de grandeur natnrellcy. Mêmes indications que pour la /?. V. pulmonaire normale du lobe inférieur. 6 V. pulmonaire anormale du lobe moyen. 7 V. pulmonaire anormale du lobe supérieur. 8 Artère pulmonaire. 9 Veine cave inférieiu'e . iO Veine cave supérieure. yy Veine sous-clavière gauche. i2 Veine sous-clavière droite. 15 Veine jugulaire droite. 14 Une ramification bronchique. 15 Lobe moyen montrant une veine pulmonaire anormale s'abou- chant dans la veine cave supérieure. FiG. 7. Cœur de Tortue mauresque de forte taille (de grandeur naturelle). Injecté au suif et lavé dans l'essence. Vu de la face postérieui'e de la région des oreillettes. Une coupe a été faite sur le sinus eu avant de l'embouchure de la veine cave inférieure, et le morceau a été rabattu. 452 EXPLICATION OKS PLANCHES. 1 Veine cave supérieure gauclie. 2 Veine cave supérieure droite. 5 Veine cave inlérieuri'. 4 Veine hépatique. 6 Orifice du sinus des veines caves et ses dou.\ valvules. 51 Portion transversale de la cloison du sinus. 7' Portion antéro-postérieure de cette cloison. l'P' Artères pulmonaires. Fie». 7 (bis). Partie centrale de la pièce précédente. La cloison du sinus >S' a été ouverte par une fenètr(! i}ui permet de pénétrer dans le sinus pulmo- naire et de voir : 8 La valvule de l'orifice pulmonaire. 9 L'orifice du sinus pulmonaire dans l'oreillette gauche. Fict. 8. Cœur de fœtus de 7 mois et demi environ. Injecté au suif et lavé. Portion auriculaire ( grandeur naturelle). Vu [)ar le côté gauche. 1 Orifice commun des veines pulmonaires gauches. 2 Orifice commun des veines pulmonaires droites. 3 Artère pulmonaire droite. 4 Aorte, crosse. 5 Veine cave supérieure. » 6 Auricule gauche. 7 Artère pulmonaire gauche 8 Canal artériel. 9 Tronc brachio-céphalique. 40 Veine coronaire. 11 Vestiges de la veine cave supérieure gauche. 12 Partie-sinus de l'oreillette gauche. 15 Veine de la face postérieure des ventricules. PLANCHE XV. Série de figures schématiques destinées à démontrer dans la série : le mode de constitution des oreillettes , la fusion progressive du sinus veineu.x avec les auricules , les relations des faisceaux musculaires des auricules, le mode de formation do la cloison des oreillettes, et la constitution du système des veines pulmonaires . Fia. 0. Oreillettes et sinus chez un Poisson. FiG. 1. Oreillettes et sinus chez le Crapaud. EXPLICATION DES l'EANCHES 453 1 Cloison des auricules. 3 Cloison du sinus. Fm. '2. Coupe à un niveau inférieur à celui de la précédente fuj. La gouttière 3 s'est transportée obliquement de gauche à droite. Fict. 3. Coupe réelle d'un cœur de Tortue mauresque injecté et lavé. i Cloison des auricules. Portion antérieure. 2 Cloison des auricules. Portion postérieure. .5 Portion antéro-postérieure de la cloison du sinus. 4 Valvule interne de l'ôrifice des veines caves. .î Orifice du sinus pulmonaire dans l'auricule gauche et valvule de ce sinus. 6 Valvule externe de l'orifice des veines caves. 7 Limite entre l'auricule droite et la portion de sinus incorporée. 8 Orifice de la veine cave supérieure gauche dans le sinus. 8' Saillie de l'embouchure de la veine cave supérieure droite. 8" Veine cave supérieui-e gauche coupée obliquement. 9 Veine cave inférieure. iO Portion transversale de la cloison qui sépare le sinus des veines pulmonaires de la veine cave supérieure gauche. ■/■/ Sinus pulmonaire. FiG. 4. Même cœur. Coupe à quelques millimètres plus haut. Mêmes indications. ii Veines pulmonaires. FiG. 5. Coupe d'un cœur d'Oiseau. Mêmes indications que /îy. 3. 45. Valvule externe de la veine cave inférieure reportée en arrière. FiG 6. Coupe d'un cœur de Lapin. Mêmes indications. FiG. 7. Coupe d'un cœur de Chien. Mêmes indications. 3 a. Valvule du trou ovale. 5 b. Bande antéro-postérieure de la cloison du sinus. FiG. 8. Coupe d'un cœur de Fœtus humain de 6 à 7 mois. Mêmes indications. FiG. 9. Disposition idéale des faisceaux musculaires des auricules, l'orifice du sinus veineux étant censé placé symétriquement par rapport aux faces antérieure et postérieure. 454 KXI'LICATION l)i;S PLANCHES. Fio. 10. Moditicalion de cette disposition quand l'oriflce du siaus veineux est porté sur la i'ace postérieure, connue cela a lieu dans presque tous les cas. FiG. 1 1 . Moditications de cotte disposition et dn la situation des auriculcs quand le sinus sintroiluit comme un coin on arrière des auriculcs. Fir,. 12. Dessin schématiqui; du système veineu.x central de l'embryon et du fœtus. S. Siuus veineux. 1,1' Veines pulmonaires. 2,2' Veines cardinales ou caves antérieures. 4,4' Veines cardinales postérieures ou azygos. 9,9' Canaux de Guvier. S,3' Veines sus-hépatiques. 6,6' Veines ombilicales. 7,7' Veines hépatiques, branches delà veine porte. 8,8' Deux veines caves inférieures rudimentaires ? 10 Tronc commun des veines omphalo-mesentériques dabord, plus tard des veines ombilicales, et enûn partie supérieure de la veine cave inférieure. Fir,. 13. Modifications successives, et perte de symétrie des vaisseaux de la fig. 12. Mêmes indications. 0 Angle aigu formé par la veine cave inférieure et la veine cave supérieure gauche. 8' Veine cave inférieure gauche atrophiée et disparue. PLANCHE XVI. Série de figures schémati(jues propres à démontrer les relations de la portion vestibulaire avec la portion auriculaire des ventricules, le mode de constitu- tion de la cloison des ventricules, et les homologies des valvules auriculo-ven- triculaires. Fifi. 1. Coupe de la base d'un ventricule de Poisson (Squalidés, Scombéridés, etc.). Fir,. 1 (bis). Cœur de Poisson avec rapports différents de l'orifice auriculo-ven- triculaire et de l'oriflce aortique (Rajidés, etc.). FiG. 2. Cœur de Batracien (Crapaud, Salamandre). FiG. 3. Cœur de Tortue mauresque. EXPLKiATlON DES PLANCHEvS. 450 4 Demi- tente gauche. 4' Valvule externe auriculo-ventriculaire sanche. 5 Demi-tente droite. .5* Valvule externe auriculo-ventriculaire droite. •■ 9 Masse postérieure du ventricule an niveau de la partie supérieure du ventricule. Les lignes pointées indiquent l'étendue des cavités venlriculaires. Fis. 3 (bis). Cœur de Python. Mêmes indications. FiG. 4. Cœur de Crocodile. S Valvule musculo-memhraneuse. 5' Noyau fibreux. S'^ Valvule musculaire. Mêmes indications pour le reste. FiG. 5. Cœur d'Oiseau. La cloison intervestibulaire qui contourne l'oriflce aor- tique est marquée par un trait plus fort. 5 Languette antérieure de la valvule. S^ Valvule musculaire. S' Languette du bord inférieur de la valvule. 44' Parties interne et externe de la valvule mitrale. FiG. 5 (bis). Cœur d'Oiseau (Coq). Rapports précis des orifices et des valvules. FiG. 6. Cœur de Mammifères (Mouton, Veau). Mêmes indications. S Pointe antérieure de la valvule tricuspide. <î- Valve externe. 5' Pointe externe. S' Valve interne. FiG. G (bis). Cœur de Mammifère. Coupe exacte des cavités ventriculaires immédiatement au-dessous des orifices. FiG. 7. Coupe schématique suivant un plan vertical et transversal d'un cœur de Tortue. Pour montrer la distance des plans de la cloison interventri- culaire et de la cloison intervestibulaire. 2 Cloison interventriculaire rudimentaire, continuée idéalement par une ligne pointée qui montre que cette cloison est la con- tinuation exacte du plan de la cloison in ter-auriculaire. 456 EXPLICATION DES PLANCHES. 3 Cloison intervestibulaire. 4 Demi-tente gauche. ■i' Valvule externe gauche. S- Demi-tente droite. 5' Valvule externe droite. 6 Ligne ponctuée montrant lalongneur et le trajet que devrait avoir la cloison intervestibulaire 5 pour atteindre la cloison inter- ventriculaire 2. 7 Aorte droite. 8 Aorte gauche. 10 Tente inter-aortique. Fu;. 8. Coupe schématique semblable d'un cœur de Crocodile. Les deux cloi- sons se sont rapprochées et réunies. Mêmes indications. yo Foramen de Pannizza. FiG. 8 (bis). Coupe en arrière des orifices artériels. Pour montrer que la cloison interventriculaire 5 n'est point insérée à la face inférieure des valvules au-dessous de la cloison inter-auriculaire, mais à la face inférieure de la valvule membraneuse de l'orifice auriculo-ventriculaire droit. Mêmes indications. FiG. 9. Coupe horizontale des ventricules d'un Serpent Python un peu au-des- sous des orifices aortiques et auriculo-ventriculaires. La figm-e repré- sente la face supérieure de la coupe. .1 Orifice de l'artère pulmonaire, et loge pulmonaire. B Orifice de l'aorte gauche qui devrait être caché derrière la lèvre ■• de la cloison. OP Faisceaux rayonnants antérieur et postérieur, coupés au-des- sous du point de leur union . M Fausse-cloison, sa lèvre, une languette qui la fait adhérer à la face postérieure du ventricule. H Demi-tente droite. S Demi-tente gauche. K Valvule externe de l'orifice auriculo-ventriculaire gauche. NN' Masse charnue postérieure du ventricule quiembrasse le bord et la lèvre de la fausse-cloison, et qui limite avecelle la fente qui fait communiquer le vestibule pulmonaire avec les ves- tibules aortiques. EXPLICATION llKS PLAXCIIKS. 4ai l'LANCHE XVir.' Fir,. I. 2, 2 /(/.s-, 2 ter, :5. 4 i-l ô. Série de dessins propies à niontror le mode de i-oDstitation des cavités ven- Iriculaires et à détei'minei- les lioniolnyies veiitriculaires dans la série des Ver- tébrés. Les parties appartenant au venli^icide gauche sont dessinées en rouge ; es parties appartenant au venti'icule di'oit sont dessinées en bleu. L'aorte gau- che, qui reçoit du sang ronge et qui pourtant appartient au ventricule droit, est dessinée avec un double trait, bleu à I extérieur, rouge à l'intérieur. Le trajet réel ou supposé de la cloison intervostibulaire est mar(ju('' par des points noirs. La cloison interveutrimilaire l'ormée par les faisceaux rayonnants est marquée par des traits verts. FiG. 1. Crapaud. FiG. 2, Tortue mauresque. Fifi. 2 (bis). Serpent Python. Fia. 2 {1er). Fig. tleslinée à représenter les ventricules selon les idées de M. Jacquart. Fig. 3. Crocodile. Fie. 4. Oiseau. Fig. 5. Mammifère. Les fig. 6 à 9 {bis) sont destinées à représenter le mode de développement et les transformations du système aortique chez les Vertébrés. Fig. 6 (empruntée à Rathke). Aortes chez les serpents : 1 Veine pulmonaire ; 2 Aorte gauche ; 3 Aorte droite. Fig. 7 (empruntée à RathkeL Aortesdes Oiseaux, mêmes indications que/i^. 0. FiG. 7 [bis) {inihil. Aorte des Oiseaux d'après mes vues. Fig. 7. Aorte droite des Oiseaux et ses deux troncs brachio-céphaliques. L'aorte gauche a disparu; elle est marquée par des points. Fig. 8. Aortes des Crocodiliens . Fig. 8 {bis). Les deux aortes des Crocodiliens et foramen de Pannizza. Fig. 9. Mammifères. Les deux aortes n'ont qu'un tronc commun. Fig. 9 [bis). Les deux aortes des Mammifères confondues en un seul tronc. 58* ■558 lAI'l.lC.VTIOX KKS I>1..\N(',I1KS F/orifice des aortesdaiis le venlriculo droil s'est oblllrn' ; il iw reste que l'orifice dans le ventricule gauche, (irand loramen de Panuizza. PLANCHE XVII l. FiG. 1. Aortes descendantes dune Tortue caouane et leur anastomose. Diamè- tres reproduits exactement de grandeur naturelle. Une fenêtre a été pratiquée sur l'aorte gauche. .4 Aorte droite. B Aorte gauche. 0 Orifice de communication des deu.x aortes. / Rétrécissement de l'aorte droite devenant aorte abdominale. F Aorte abdominale. //Renflement supérieur de loriginc du ti-onc cœliaque. E Tronc cœliaque, C Artère mésentérique. FiG. "2. Aortes et anastomose abdominale d'une Tortue mauresque. Bonne in- jection. a Aorte droite. b Aorte gauche. c Artère mésentérique. e Artère stomachique. g Artère du cardia. d Anastomose, trop large d'un lieissur le dessin. /' Aorte abdominale. FiG. 2 (bis). Mêmes parties avant l'injection. Anastomose trop large. FiCt. 3. Oreillettes et vaisseaux d'un Python de grandeur naturelle vus par la l'ace postérieure. Bonne injection. A Artère pulmonaire et ses deux branches inégales. B Aorte gauche allant s'aboucher inférieurement dans la droite. B' Aorte droite. ce Artères carotides communes gauche et droite. La gauche est un peu plus grosse. D Artère vertébrale donnant, comme l'aorte droite descendante, naissance à des artères intercostales impaires. H Aorte abdominale. P Ventricule. L Veine cave supérieure droite. EXPLICATION DES PLANCHES. -iaS M Veine cave supérieure gauche. N Veine cave inférieure. Fia. 4 (empruntée à Rathke) . Cœur et une partie des vaisseaux d'un Crocodilus vulgaris. a Ventricules du cœur vus parla face antérieure. 66' Oreillettes gauche et droite. ce' Portions ascendantes des deux aortes. d Sinus de l'aorte droite ou tronc très-court d'où naissent les deux artères anonymes . ee' Artères anonymes. /"Carotide subverlébrale . gg' Artères collatérales du cou. hh' Artères sous-clavières. W Artères mammaires internes. kk' Artères vertébrales communes. Il' Troncs veineu.x antérieurs, ou veines caves antérieures droite et gauche. mm' Carotides communes. nn' Arcs formés parles artères infra-maxillaires, et recevant les ar- tères collatérales du cou. oo' Artères axillaires. FiG. 5. Courbes servant à indiquer graphiquement la différence qu'il y a entre les Chéloniensel les Grocodilieus, euéj;ard aux rapports des tensions des deux aortes. Fir,. 6. Courbes destinées à figurer le sens et l'intensité du courant dans l'a- nastomose abdominale des Crocodilieus, suivant tel ou tel état du sys- tème vasculaire. Fk;. 7. Figure théorique dos deux aortes des GrocoJilieus et de leur anastomose oblique. Le courant va de A à B. et de C h I). f°(f' Angles formés par l'anastomose avec chacune des deux aortes, du côté vers lef[uel se dirige le liquide dans ces deux vaisseaux. FIN DE L EXPLICATION DES PI.ANCHE.S. TABLE DES MATIÈRES Intuoduction • VII PREMIÈRE PARTIE. — Analouiie hI l'hysiologie du cœur dans la série des Vertébrés ■ I LIVRE I. Des ventricules et des troues artériels dans la série des Vertébrés 4 Ghap. I. — Amphibiens 4 Chap. II. — Reptiles à ventricules communicants 39 Art. 1 . — Ghéloniens 39 Art. 2. — Ophidiens 72 Art. '.]. — Sauriens 74 Chap. IIL — Reptiles à ventricules séparés. - Crocodiliens 78 Chap. IV. — Oiseaux 124 Chap. V. — Mammifères 135 LIVRE IL — Oreillettes. Forme, structure, composition et transforma- tions dans la série des Vertébrés 141 Chap. I. — Poissons 142 Chap. IL — .\mphibieus 146 Chap. III. — Reptiles 152 Chap. IV. — Oiseaux 1 63 Chap. V. — Mammifères 174 Chap. VI. — Considérations générales sur les oreillettes 187 Ari. 1. — Cloison des oreillettes et trou de Botal 187 Art. 2. — Origine et séparation des veines pulmonaires 199 DEUXIÈME PARTIE. - Philosophie natui'(3lle 223 LIVRE I. — Transformations successives du cœur dans la série des Vertébrés 223 Chap. 1 . — Passage du ca:'ur de^ Poisson au cœiu' d'Amphibien 224 CiiAP. II. — Passage du ciwar d'Amphiliien au c(jeur de Reptile à ven- tricules communicants ;'27 •le? TAIil,K DES MATIIORES. CnAP. III. — Passage ilu rn'ur ilo H(;j)Lil(' à vontricules romauinioants au cœur de Grocodiliou 236 Ghap. IV. — Passage du i-œur de Crocodilieu on (-(pur d'Oisoau 2r)3 Chap. V. -- Passage du cœur d'Oiseau au cœur de Mammifère 2.S8 Ghap. VI. — Transformations du système aortique dans la série des Vertébrés 263 LIVRE II. — Déterminalion des ventricules chez les Reptiles h ventri- cules communicants 277 LIVRE III. — Lois générales de la constilutiou du cœur dans la série des Vertébrés 293 LIVRE IV. — Du parallélisme entre les divers états du cœur dans la série zoogénique et dans la série embryogénique *. 301 LIVRE V. — Le cœur et le Transformisme 318 LIVRE VI. — Des types de la circulation dans la série des Vertébrés 332 Ghap. I. — Influence de la respiration sur la circulation 333 An. I . — Animaux à sang chaud 333 Art. 2 . — Animaux à sang froid 349 Chap. II. — Du rôle de l'anastomose abdominale des Reptiles. ...... 359 An 1 . — Pendant la respiration à l'air libre 359 Art 3. — Pendant la submersion 405 Ghap. III. — Des Oiseaux etdes Mammifères plongeurs 419 Ghap. III. Des types de circulation 428 FIN DE LA TABLE DES MATIERES, Vu et approuvé Paris, le 28 mai 1873. Le Doyen de la Faculté, MILNE-EDWARDS. Vu cl permis d'imprimer Paris, le 29 mai 1873. Le Vice-Recteur de l'Académie de Paris. A. MOURIER. SECONDE THÈSE. l'iiui'OsrnoNs données pau i,a fa(;[:lté. I. — Question de Zonlngie. Des places que doivent occuper, dans une classificaliDu zoologique natu- relle, les divers animaux rangés par Cuvier dans l'eiubranchemenL des Zoophytes. II. — Question de Rot;niique. Reproduction dans les Algues el utilité des caractères qu'un eu tire pour la classification de ces végétaux. III. — Question de Géologie. Du terrain Crétacé dans le sud-est de la France ; sa limite d'avec le terrain jurassique. Vu et approuvé, Paris, le 28 mai 1873. Le Doyen de la Faculté des sciences, MILNE-EDWARDS. Permis d'imprimer. Le Vice-Recteur de l'Académie de Paris. A. MOUUIER. MonlpeUier. — Typogr. Boehm «t KiLS. rv\ Fis I lia Blêmi FikMantp' l'L I. ]'iH.2 \'\'-. W H l'iu.;; J M^»*"'""wi% V\ _^-^_ •J!^. ], PI.V. Fié :.. Fl,i. 4-. .itk.Sodm SiFihMonlpelher. fe < ■H PL JX Fié,. 1 Fié. 2 A ^ÊSÊk r — « ^"- i^ -M Fié. 5 Fi^. 4- P A Formant t:Au: ^ >^ ^ =^-f^.^J^5?-^^^^t -L ^ i \ J «an ■on •on ^i^ S te; r No DOHDRE 349. THÈSES l'HESENïEES A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE PARIS OBTENIR I.E GKADR DE DOCTEUR ftS-SCIENCES NATURELLES M. ARMAND S4BATIER Professeur-Agrégé (Seclion d'Aiialoraie et Plijsiologicl et ancien Chef des Tr;ivaux Aiiatomii]ues de la Faculté de iniîdecine de Montpellier ; Membre de l'Académie des Sciences el Lettres de Montpellier; Lauréat et Memlirc correspondant de la Société analomique de Paris; Chevalier de la Légion d'Honneur. Irc THÈSE. — Études sur le Cixuk et l\ CiRct!L,vTioN centrale dans la série des Vertébrés. 2'"'-' THËSEl. — Propositio.vs de Zoologie, de Rotamqie et de Géologie données par la le M Juin 18';3 devant la Commission d'Examen. MM. MILNB EDWARDS, Présidai DUCHARTRE HÉBERT, Exaiiiinateiirs. II0NTPELL[EU TYPOGRAPHIE ET LITHOGIJAPHIE BOEHM ET FILS IMPIUMEIWIS DE LACAnÉMIK IIKS .-JCIENCE-! ET LETTRES DE LA HEVIR 1>ES SCIENCES NATCBELLES ; ÉDITEIRS Dl ligNTPELLIEH MÉDICAL 187;-! f^-; Ji / 1 . f*f*'^S^' -J'' 1 ^ MONTPELIJEÎi' — TYI'OGRAPHIE BOEHM ET F!LS,