I T R A I T T £• D E LAME ET DE LA CONNOISSANCS: DES BÊTES. OV A ? R E' s AVOIR, démontré laJpiritHdliré Je t'ame de i'homms ton expliqu e par la feule machine, la actions lespluifurfrtnantes des animaux , fuivAnt lesfrincifei de De/cartes. Par A. D*»*** A M S T E R D A M, Chez G E O R G E G A I. L K Ti f.iî^ le Keyfers Grafr. M. Dc. irxxxxi PREFACE. CE u X qui ne cherchent que la yioiiveauté dans- les livres feront ajftirément fatisfaits de laleCturedece-. hy-cy. Je crois qu'il n'y a jamais eu qu^un Auteur Efpagnoldans lejîeclepajfe , qui ait traité exprejfement de- cette matiereiHfa îtièmefait a'vec tant de brièveté' ù" de- eonfiijion que quoy qu'il ait le premier avance que les Bètes_ ?ie co7inoiJJent point du tout. Une nom a pourtant pas dé- couvert les raifons çj^ les * ij PREFACE. principes d'oîi cette ^vérité de- 'Voit eftre déduite. Nous en avons Pobliga' tion à ^cfcartes : /uj'jeul, en nous aprenant à connoi- tre la nature de nojîre arne-, nous a marqué le caraCfe-^ re véritable qui nous diftin- guoit des Bejtes , & qui nous rendoit d'une condition infi- ni?nent plus relevée : néan- moins iln^'apasfaitluy 7nej- me l'aplication de fes princi- pes à cette vérité enparticu- lier 5 Un* a pas mefme répon- du a plufieurs chofes qu'oîi pouvoit luy objecîer ^ ô" en» jinihCapas touche le s fuit es dd'ûgereujes , ô" les confe- quences ridicules de l'opinion contraire a laficnne : de là PREFACE. *vient que cette vérité n*eft pas chez lîiy dans tout le jour ou elle devrait eftre. Il eft vray que le ^ere 'hardies dans le livre qu^il a composé de la connoillàncc àç,s Bêres, rapporte avec beaucoup de force & d'élé- gance^ quelques-unes des rai- jons dont^efcartes oufesfe- ^ateurs fe font fervis pour appuyer leur fentiment : il y répond mefme d'une manière dfez, foihle^ ô'foit ou par iîîjputjfance , ou pour canfe , les (blutions qtCil apporte laiffent dans leur catter les obje liions qu'il s' étoit fai- tes. Neanmoi'ds les raifons qu'il a tâché de réfuter ne * iij PREFACE. ■folit pas fujfifantes pour efta- •hlir cette 'vérité : on ne fa- VGÏtpas tirée de ces 'verita- àlescaiifcs-i &. accompagnée des circonfiances qui la relè- vent , elle mérite pourtant bien à caufedefon important -ce 5 que pour l'appuyer on mette e7i œuvre tout ce qui ■peut luy effreen quelque f a- < on favorable. ' La connoijfance de cette ■queftion eft abfolument ne- -cejfaire poitr la parfaite in- telligence de la Pkïlofcpbie: car fuît qu'on fe range du -coftc des PJjîlufophes qn^on appelle nouveaux^ ou qu'a- vec le grand nombre ér la foule 071 fe tienne attache à la \Fkilof1ph2e des /Î7icte7is à^ PRÉFACÉ. pnncipdlement a-cetie d^Arl^ ftote ^ on eft obligé de s'enin^ firîiireàfond. •: Ce devoir eft indifpenfa^ lèle d l* égard des premiers far ialiaifon efiroiteyque ce point particulier a avec les princi-^ pauxfondemens de leur Me- taphyjïque & de leur ^hi/Ji- que -i cy les autres doivent Men fe donner la peine de 'comprendre Peftat d'une dif- ficulté qu'ils ne fnanquent ■jamais déformer contre leurs ■ adverfaires . On s' eft perfîiadé fur ces veuës qu'on pourroit peut-ê- tre oip/iger le public en luy fatfant part de cet écrit : f Auteur ne V avait d'abord fait que pour f on inftruGion */^5/ PREFACE. jftirtiadieré O'fotir déchar- ger fa mémoire de la plnf- fart des ckofes qu'il eon- ti€):t & qtii luy eftoient ve- nu es dans l'efprtt à diverfes fois qu'il avGit médité fur cette matière. 'De plus comme on a veu qu'il pourroît contribuer en quelque façon pour faire fen^ ■}ir les véritables raifons qui prouvent la fpiritualité à* l'nnmort alite de l'ame , on s'eji refolu fans peine àmet- tre au jour une chofe quifem* ble avoir im rapport ejfen- ticl avec la principale étude de l'homme. En effet c^eft une chofe farprenante de voir que les hommes emploient tant de PREFACE. foins ô' de veilles à des ye- therches inutiles àt crimi- nelles , ô' qu'ils croupiffe'ût cependant dans une profonde ignorance de ce qu'ils font Combien degenseftimez très- habiles ont confumé toute leur vie pour entendre ou pour faire entendre aux au^ très Tlaute , Ovide , ou 'P^- trone , fans jamais s' appli- quer à la co7ifideration de leur être. IJ étude de nous mefmes ■eft la plus importante de ton* tes i ô" la morale qui doit nom occuper durant toute U vie n'efi appuyée que fur cet- te connoifance. Car com- ment pouvoir régler 7iospaf- Jions fans les connoiftre , fi ^ iiiij P R E F A C E. ^rous n^avo7is auparavant pc- 77 être dans la nature de nofire a7?/e^ dans celle de nojhe i:orj?s , & dans la manière dont il a plà à l'Auteur d'unir ces deux fuhjianccs piiifque les paillons ne font que de s fuit es de cette union? Nous pourrons encore ÇfWins vous bien comporter à l' égard de s autres hommes^ fi nous ne fç avons pas nous conduire 7îous mcvies : mais ce qui eft de plus déplorable •jîous ne ff aurions ejlre in- ftruits de ce que nous de- vons a TDieu , ni le connot" tre autant qu'il^ en eft be^ foin-i fi nous ignorons ce que noffs fo/nmes y & nous n'en PREFACE. ferons jamais informez qm -nous n'ayons découvert la véritable différence qu'il y a entre nos âmes & celles des Befles : car avant cela^ ou les élevant jufqu* à nousy ou nous abaiffant jufques à elles y nous ignorons ab- folument la nature de la. plus noble partie de nous, fnefmes. On ne pe?7fe pas qu'il y ait des efprits affez foibles pour fe fcandalizer de voit réfuter les raifons dont om fe fert dans les principes d'Ariftote pour prouver la fpiritualité de l'ame ^ car en premier lieu cette met ha- ■de efl pratiquée par t(*v^ ^ Vf PREFACE. ceux qui traittent de Thi- ■lofophte ûîi de Théologie i lefquels pour t ordinaire s 'ava7it que de prouver f im- mortalité de Pa7ne , ou mef- me l*exiftence de 'Dieu , re'< futent les raifons dont les autres fe fervertt pour ce- la. En fécond lieu ^ l* 071 fou- tient publiquement dansplur fleurs célèbres Univerjttez ^ que fon n^ a point de démon- •Jhation de la fpiritualttcde l'ame : ainfi dans ce fenti- ment on peut nier raifon- nablement tantes les preu- njes qu'on apporte de cette vérité : par coiifeqnent la propojïtion générale qui af- PREFACE, •fttre que Von ne peut pas t^- montrer la fpiritualité de Vante eft plus forte que celle qui foûtient fimplement que Us feiils argnmens tirez des principes eVAriJlote ne la démontrent pas y pttifqîCen me/me temps on tache a ap- puyer par là une rai/on que l*on croit demonftrative avec beaucoup defujet. On ne veut pas eftre caution de la vérité de tous les exemples que l'on ex- plique : car il importe fort peu qu'ils foient faux ou véritables -i les principes qui auront fervi pour rendre raifon des uns efiant tou- jours propres pour expliquer PREFACE. les autres , poiirveu qu*on les ^ppliqîie à propos. Toute^ fois on n^en a point i?iventé a plaijîr , mais on les a crûs fort facilement fur le raport d'autriiy. % ^- ^k ^ -^T^ ^!^. ^ ^ «-l'tT» r\'i."» r^':^ rit» »i'(i^ •;';.* «i';<5? çcîa? çc»;^ ÇK^ ç&iîP (ï-»? ATT ROBATIOK des 1) odeurs. J*Ay leu le livre qui porte pour titre de l'Ame des Bê- tes 5 &€ dans lequel je n'ay rien trouvé qui ne foit trcs- conforme aux vcritez de la -Religion Catholique & à la .pureté des mœurs. C'eft le témoignage que j'ay pu por- ter après en avoir fait une lechir.e trcs-exacle. Fait à Paris le huitième Juillet mil fix cens foixante & fèize. J. Du Chaila Do^çuY çn Théologie» T*Ay îeu avec attention Se plaifir cet ouvrage intitulé de l'Amv des Bêtes , dans le- quel j'ay remarqué une pe* netration d'eiprit & une for- ce de raifbnnement capable de détromper , ou du moins de faire douter les curieux fur quantité de préjugez &: de principes qu'on a coutu- me de nous inculquer dans ïaPhilofophie ordinaire : fur tout puis qu'il ne contient rien d'oppofé à lafoy , ni aux bonnes mœurs. A Lyon ce 3. Juin 16^6. F. FELIX "^VYdeS, Etienne , Prichr des Car' mes de Lyon, ^ Douleur en Tl^eologie. ^ ^ i? • s ^ i? s • ^ TABLE DE CE QUI EST contenu dans ce Livre fuivant l'ordre des Cha- pitres. Chap.I. I A^ ^ maf^ J^]J vaife me- thvde qu'on a obfeV' vée en traitant de cette maticre, pag. I. Ch a p . II. 'Z>^ la nature de la penfee^i^ qu'elle nous eft elairement con- nue, pag. d. Ch A p.III. ^c la nàtnrç de ce TA BLE. ^ "^ \juî pehfe eu Tio^h, '^ que fon ejfence conjîfie dans la penfee. p. 1 3 Chap IV. "De ladiftïnmon de l'Ame & du corps ^ô" que cequipenfe 7îc péiit être étendu. 'p.v2 o. •Chap. V. Oii l'on montre la. me fine 'vente d'une au- tre façon. p. 26 -Chap. VI. Qii Von fait voir lafaujfetPde l'opinion de la plus-fart des "Phi* lofophes^ touchant la nature de l'ame. p . 3 3 Cha p. Yll.Confhnationdu fentiment que Von t, avancé touchant la na- ture de l'ame par des raifons tirées de S. Au- ^nftm, p. 44 DES CHAPITRES. JCÙa p . VIII. Où l'on démon- tre que Pâme desBètes. ne connoît pas. -p, y^ Qwh'^Y^. Autre preuve^ que les Bêtes ne connoïjj'erk pas tirée de lapitifjance de T>ieK. P- 5^ Chap. X. O// ronmontre U foihlejfe de la reponfe du ^ere Cardias à la raifon précédente, p.- 60 -Ch a p .XI . Autre raifon de la même -vérité tirée delà bonté de T^ieu . p • 7 3 «Ghap. XII. ^lue la reponfe des Epicuriens aux rai- fons précédentes intro- dîiit le Tyrrkonifme: é' ■larefutation dequelques autres réponfes. ^.77 vCïi.XIII.O///'^;? répond aux TABLE raifons du T. Tarâiet^ alléguées dans f on Li- èvre de la connoiffaii- ce des Bêtes, p. 87. Ch a p . XIV. Oîi l'onfaitvoir qu'il eft impojjible de donner aucune diffé- rence entre nos âmes & celles desBètes dans V opinion comune p. 1 04, Chap. Xy. T>es machines admirables que les hom- mes ont faites, p- 1 3 f Chap. XVI. T>es opérations merveilletifes que nous faifons independem- ment de l'ame. p. 14.2 Chap. XVII. i.Ladefcrip- tion de quelques parties principales d'un animal. 2 . T)e la Circulation du DES CHAPITRES. fang. 3. 2)f f lu fleurs autres avions, p. ifo Chap. XVm. Ou l'on ex- plique la difcïplïne des Arùmaux. p. 173 Chap, XIX. "De Vinftina des Animaux, p. 177 Chap. XX. Ue la nature des pajjions dans les hommes & de ce qu'elles ont de commun avec celles desBeftes.'p. ipi Chap. XXI. Oii l'on donne l'explication de quel- ques avions furprenan- tes des Animaux.^. 203 Ch A p . XXII. T>e lafagaci- té des Animaux . p. 2 1 2 Chap. XXIII. "îD^j" connoif- fancesquinousmanquent fur cette matière, p. 2 2 8 T A B L E €h AP. XXIV. Explication éf réfutation dufenti- 7?ient dts^ erïpateticie7ts ■ fur ce fun-t. p. 2;^ Ch A p . XXV. Reponfe à une objection conJiderable\ p. 248 Ch A p . XX VI.^^ la Uaifon^ qu'il y a entre l'organe de l'oïiie & celuy de la parole. p. 2 5*3 Chap. XXVII. "Du^rand nombre des chofes auf" quelles nous avons lege- reinent attribue de la connoiijance. p. 262 Chap. XXVIII: êluehues antoritezqui faijortfen t cette do^rtne. p . 2 €^ L A M E DES BETES CHAPITRE I, 'De la, raaHvaife méthode qn on .< oh fer V ce en trait tant de cette matière, LA queftion que l'on examine dans ce Traité efl très -propre • pour faire connoître la force que les préjugez ont fur nous, & le pen- chant naturel qui le rencontre dans A i De l'Ame dans tous les hommes à décider avec précipitation des matières les plus difficiles 6c les plus éloignées de la portée de leur efprit. Peu de pcrfonncsont douté jufqucs àprefcnt, que les Bêtes n'culTcntune ame capable de connoilîhnce 2c fem- blôble à la nôtre en beaucoup de cho- {cs, quoy que de tous les jugemcns que les hommes ont porte par préoc- cupation, il n'y en eut aucun qui de- mandât un plus long examen & une étude plus fcricufe. Ce défaut n'ell p.rs feulement com- mun à tous les ignorans qui jugent ordinairement ians connoiflance > mais ce qui eft de plus eRonnant , ceux mcfmc qui paflcnt dans le mon- de pour fçavans ; foit qu'ils le foient en effet, foit que leur profelTion 8c leur employ obligent le public de les croire tels , n'ont pas eu alTez de for- ce d'cfprit pour fufpcndrc leur juge- ment un fcul moment, mais ellant emportez par le torrent de la multi- tude &. par la violence des préjugez, ils ont prononcé hautement qu'A étoit ablurdc de douter que les Bétcs ne connulTent pa;, &. que la lumière luturcllc nous dcmontroit qu'elles vo voient iei Bètti. f Voyoîcnt. qu'elles cntendoîent, & ■qu'elles imaginoient comme nous. Cependant on peut affûrcr qu'en- tre CCS derniers ii y ena tres-pcuqui aycnt examiné cette matière à fond. Les'lumicres qui font abfolumentne- ceflaîres pour ce fujet manquent i plufîeurs, ôc lors qu'il s'en trouve quelq ues-uns qui les pofTedent toutes, îa mauvaife méthode , dont ils fc fer- vent en cette occalion pour découvrir ia vérité, rend toutes ces connoiflan- ces inutiles. La plus-part des autheurs qui ont traitté de la nature de l'ame des Bê- tes, n'ont jamais mis en queftion, & «lies ne connoUlbient pas, mais fup- pofant comme indubitable qu'elles a- voicnt des connoiflances , les uns fc Ibrtt feulement occupez à vouloir prouver qu'elles raifonnoient, &que leur ame étoit entièrement femblable à la nôtre, comme plufieurs des an- ciens j Se les autres n'ont tâché qu'i donner quelque différence entre les hommes ôc les Bêtes, Se à nous di» ftinguer d'avec elles. On ne doit pas s'étonner après cela fi cette manière de raifonner fi peu -jufte a rôpimdu de Ja confufion 6c de 4 jDe iAvit lobfcuritc dans toute cette maticrci car donnant d'abord uneauthoriteab- foluë aux préjugez, on n'cll jamaîs entre en déhance d'aucun de ces jugc- mens anticipez que nous avons faits dans l'entance , dans lefquels nous nous fomnics affermis autant de t'ois «que nous les avons réitérez. Se qu'un long ulagc nous a rendus li fa- miliers , que nous croyons que la, Tiaturc nous les a di Les penfées font des operatU ons t dt r exifience de/quelles on eji cer- tAtn immédiatement par elles mefmes d'abord qu'on les /t , eft à l'épreuve de toute la rigueur de l'école. Il eft encore tres-aflïïré que nous, connoillbns la nature de chaque pen- fée en particulier : car , n'eft-ce pas. connoiftre une chofc , que de pou- voir la diftinguer de toute autre , fans qu'il {bit polVible de nous tromper v or cela nous arrive à l'égard des pen- fees, puilqu'iln'eft perionnequi n'a- Toiie q^u'il fçait aulfi-bien qu'un iko^ A.vi timent de chaleur n'cft pas un fenti- ment de froid, de lumière, de Ton, 2cc. comme il connôit qu'un trian- gle n'ert pas un quarré. Avons nous' jamais confondu une penfee d'amour avec -une penfée de haine , ou avec un jugement? 8c quoy-que la caufc, ou l'objet de cette haine, ou de cet amour, Sec. nous ibient quelquefois inconnus, en connoifTons-nous moins la penfée d'amour ou de haine , &c- & lailfons-nous de fentir la différen- ce qu'il y a entre elle 2c toutes nos- autres penfces ? li-bien qu'il me fem- ble certain que nous femmes pleine- ment inflruits , non feulement de la nature de la penfee en gênerai, mais encore de celle de chaque pcnféc en particulier, ce qu'on appelle dansl'é- côle , connoître Itgenrt iy la di^trtnct,- Si quelqu'un après cela nous de- martdoit de quelle couleur eft la pen- fee? fi elle elt dure, molle, longue, large, quarréc? &c. il auroit moins^ de raifon , que fi après avoir démon- te une montre qui ne ht que marquer les heures, 8c avoir aHeuré que c'eft une machine qui ne fait que mar- quer les heures, il nous demandoir > vummcnt nous f*;avons qu'elle ne pen^ dts Bêtes. Xf fè pofnt ? qu'elle ne chante point ? 8cc* Car nous n'aurions pas d'autre ré- ponfe à faire , li cen'eftque nous n'y avons rien veu de tout cela après l'a-» voir bien confiderée, & qu'ainfî nous ibmmes certains qu'elle n'a que ce que nous y avons découvert. De mel^ me 6c avec plus de ruifbnnous avons^ fujet d'afleurer que nous connoiflfon, la 'penfée , 8c que toute fà nature efl: contenue dans ce que nous en avons dit : car quoy-qu'elle nous foit beau- c^oup plus prcfente que la montre,nous' n'y avons pourtant veu que ce qu'oa vient d'avancer & qu'un chacun fçait aflez par fa propre expérience. ■ CHAPITRE III. De la, nature de ce qui fenfe eii noHSt&quefonejfenceconJtjie dans la penfée. Apres avoir fuffifamment explî-. que la nature de la penfée, il femble que l'on n'ait qu'un pas à fair» pour découvrir la nature du principe qui penfc en nous. Et pour ce fujet je vois q,u'un«, »4 ^t fAmf penfée en particulier ( un doute pat exemple , ou un jugement ) n'cll qu'une façon ou manière d'être, fi bien qu'il faut neceflairemcnt qu'elle foit attachée s quelque être qu'elle détermine 5c qu'elle modifie : car il eft abfolument impofTible de conce- voir une vifion , un jugement, un doute, &c. fans concevoir en mefme temps quelque chofe qui voye, qui juge, & qui doute : d'où ileft clair que ce qui penfe en nous eft un être ©u une fubftance qui a le pouvoir de pcnfer de toutes les façons diftcren- tes que nous expérimentons: car e'oft par la feule expérience qu'on peut les connoîtrc toutes. J'ay dit être ou fubflancc, parce que c'efi la mef- mc chofe , n'ayant aucune idée , ou ne connoifTant rien qui ne fubfirte par fby-mcfme, ce que l'on appelle- être ou fub/lance, ou qui ne déter- mine iir ne faflè être les fubftanccs d'une certaine manière, 8c c'cll ce qu'on appelle façon ou manière d'être. Enfuite quand je confidcre qu'on appelle l'eflencc ou la nature d'une cnofe, ce qui s'offre le premier à l'ct prit quand on cherche à la connoî- tpc, &par le moyen dequoy l'on de» des B4tes, \f couvre toutes les autres proprietez., qui n'en doivent être que des fuites & des dependcnces, je n'ay pas beau- coup de peine à conclurre que la na- ture de ce qui penfe cttmoy confiée dans la feule faculté de penfertcar il efl manifeftc que je ne veux, que parce que j'ay la faculté de pcnfer » je ne connois que pour la même rai- fbn, je ne vois, je n'admire. Sec. que par cela feul , ou, ce qui revient au même, mon amour, mes con- noifTances, mes defirs, mes admi- rations ne ibnt que des fuites de ma penfée. AinlilapenJfee edant ce qui fepre* fente le premier à l'arae quand elle cherche à fe connoître, & tout ce que nous y découvrons avec certitu- de n'étant que des fuites decette pen- fée, l'on peut afleurer que toute la nature de ce qui penfe en nous , con- fifte dans la penfée : car n'eft-il pas certain , que 4. unitez prifes cnfem- ble font reffence du nombre de 4. parce que c'eft ce qui s'ofire le pre- mier à l'efprit , 8c dont toutes les proprietez qui conviennent â ce nom- bre font des fuites, puifqu'il n'eft le tiers de 12» ^ue parce q^u'ii contient rS De VAmr 4. unitez, il n'ell la racine de 1^. 3ue pour la même raifbn, il n'elllcs eux tiers de 6. que pour cela.il n'a Yncnre raifba à huit, qucfixàdoure, que pour ce fujct : 8c amfi d'une in- finité d'autres proprietez. Pro.pofons encore cette vérité dans un autre exemple. L'on aura afFcu- rement découvert la nature de l'eau en difant qu'elle eftcompofce de pe- tites parties lonf>;ues, pliantes 8c fort polies, qui gliilcnt les unes contre les autres, 8c qui fc meurent en tout ^cns. fi l'on ne remarque aucune proi' prière dans l'eau, qui ncfoit unefuli' te de ce que l'on vient de dire ; per- fonne apparemment ne le contcrtcra. L'eau donc en premier lieu nerc- fifte pas au toucher , mais elle luy ccdc facilement , parce que fes par'- ties qui font déjà en mouvement (c fcparent fany peine, 8c quittent aifé- ment une place qu'elles fonttoûjours- cn difpofition d'abandonner. En fécond lieu cette liqueur eftfa^ cilement réduite en vapeurs par une chaleur médiocre, parce que fcs par- tics recevant plus d'agitation qu'il n'en faut pour ne faire quegliflerles unes fiiT les autres* elles- doivent ne» de} Bêtes. ' tj ceïïàîrementfc méfier avec léî' parties de l'air, afin de pouvoir continuer le mouvement qu'elles ont acquis de nouveau. En troifiénve lieu, ct% vapeurs re- prenant ailement leur première for- me > car le moindre froid diminuant la grande agitation qu'elles ont , leur ôte la force de fe tenir écartées les u- nes des autres , fi bien que fe rapro- chant peu a peu elles s'amafl'ent plu- fieurs enfemble, & forment de cette manière quelque chofe de fenilble, comme une goûte que ià pefànteur fait tomber à terre. En quatrième lieu , Peau difîbut certains corps durs , tels que font le fcl, le fucre< Sec. parce que fes par- ties pliantes 6c polies s'infinuant avec facilité à travers les pores decescorpî» comme autant de petits coins , elles écartent 8c détachent leurs parties*» autour defquellcs elles fe roulent, Se les entraînent par ce moyen. En cinquième lieu, TeaunedifTout pas toute forte de corps, car fes par- ties font bien fouvent trop groflieres pour pouvoir paflçr à travers les po- rcs de ces corps , qui les oût beau- coup ferrCjK. •^9 De TJmt En fixieme lieu, l'eau fe durcît ea glace pendant l'hiver à caufe que 1« froid de cette faifbn fait perdre à cet- te liqueur prefque tout le mouvement oui l'entretcnoit dans fa fluidité ; de la vient que fcs parties ne continuant plus de gliller les unes fur les autres demeurent en repos Se compofcnt ua corps dur. En feptiêmc lieu^ on fe fert de l'eau pour ôter toute forte détaches» car les parties gliflânt facilement par tout entraînent fans peine ce qui fc rencontre dans leur paflage : elle n'cft pourtant d'aucun ufagc pour les ta- ches d'huile 5: la plupart de celles .des liqueurs grafîes. parce qucleurs parties Iirancnuès s'étaut enrrelaflees avec les parties des corps lurlefquels elles font tombées , l'eau oui ne fait que glifla- ne fçauroit les dégager, ôc les enlever. En dernier lieu , l'eau dç la mer eft douce dans les fontaines, parce que ics parties pliantes gliffènt facilement dans toute forte de pores dont les fi- nuofîtez arrêtent les parties roidesôc inflexibles du fel qui eiloieat mellées avec l'eau. L'on pourroit cacore Mpli port à l'étendue ( pour éviter toute difpute ) me viennent en penfée, tz d'autre part li je prcQs garde que tout ce que je connois avec clarté dans le corps eft une fuite dé l'étendue, je conclus fans peine que la matière elt une fubltancc éréndué , en longueur, largeur, 6c profondeur ; de forte que je vois que fon eilence coniille dans l'étendue, ou dans l'exigence de l'é- tendue *. Coniiderant enfuitccc qui convient * ExigentMtxttnfionii. des T>ètes^. it ^-i la matiwe à caufe de iba efTcnce, ,c'cil-à-ciire, à caul'e de l'étenduëi je .trouve qu'elle eft impénétrable 2c di- wfible f qu'elle a une diipofition à tou- te forte de figures. Se qu'elle cft ca- pable de mouvement , de repos 5c •de toute forte d'arrangement de par- ties : ii-bien que quand je ne porte point mal à propos mon jugement au delà de maconnoifTance, me renfer- .mant dans mes idées claires & dillin- ctes, il n'y a rien à l'ame prés, que je coni^oîve plusdillinctementqu'urve fubllance étendue dans fes trois di- menfions, impénétrable, divifible, 8c par confequent figurable, propre au mouvement, Se aw repos, 5c dont les parties font capables de toute for- te de differeus arrangcmens. De forte que je forme deux idées très claires, & très diiîerentes pour- tant, l'une d'une fubftançc qui penfc, cell à dire qui aperçoit, qui juge , qui doute , qui railonne , qui oit, qjiodore, qui voit> qui touche Se qui soute, qui imagine, qui admire, qui veut, qui aime, qui fait, qui dchre, qui? de lajoye, delalrifleire. de la douleur, 5eVJ[mt qu'on peut apercevoir qu'elle leur convient en examinant en melme temps la durée, l'erprit £c le corps : ti il eft certain que nous cefTcrions d'en avoir la même idée, fi après a- voir coofideré la nature de l'ei'prit , celle du corps, &c celle de la durée en mcfmc temps, nous pouvions di- re que le corps ou l'ei'prit ne peu- vent point avoir de durée. De mefme ii la pcnféc étoit une fa^on d'élire commune à l'eipriiScaa corps, nous verrions qu'elle peut con- venir à l'un 8c à l'autre, 2c nous cellc- rionsd'en avoir la même idée d'abord «jue nous voudrions le nier : or ccVx n'iirriye pas puilque de quelque côia qu'on envifage la pcnlce, il eft im- polTible de pouvoir jamais découvrir de quelle fa^on elle peut cilre dans la matière iC'ir que l'imagination s'é» puile pour donner aux parties d'un corps tel mouvement, telle figure > tel arrangement Se telle grolTcur que l'on voudra, la matière en fera-t'ellc Kîoins matière ? 8c comment cll-il concevable qu'une pcnfce pullVc rc- fultcr de tout cela ? Qu'on épure ua corps, qu'on le dccratlb, & qu'on. le iubtiliic autant qu'il fcrapofliblc, en. des IBéres- 5 J fera-t'il moins coips, 5c cette fubii- Hté qu'il anraaqciile eft-ce autre cho- fe qu'une divilion de fes parties ? lefquelles pour petites qu'elle? foienr, quand melhie on les eût divilees juf- ques à les rendre indivilîb!c3, ellca feront toûjou-rsaulTi-bien matière que les plus lourde? mafles , & ilfera auffi; impofTible à l'efprit humain de con- cevoir que ces parties ainlifubtiliiees puillent pcnfer comme celles d'ans grandeur prodigieuie, car elles ne laifTeront pas d'être aufli-bien éten- dues , impénétrables 8c capables de mouvement 2c de repos que les plus grofles: Se pour moy je n'aurois pas plus de peine à concevoir que la ter- re toute entière peut penfer comme le plus délicat 8c le moins groflîerde tous les atomes, puis qu'entre ce!le-li £c celle- cy il n'y a d'autre différence qu'en ce que la terre aplus d'étendue, qu'elle a peut-eftrc une figure diffé- rente, & plus ou moins «Je mouve- ment j voilà toute la diverlîté qu'on peut trouver entre ce qu'on appelle corps greffier , pefant , terreftre » matériel, 8cc. Et ce qu'on- nomme eoTps volatil, délicat, fubtil , Z<. ea ua mot degftgé de la maùere , ce qui ^ iiij 5* T>el\ent que des prcjugez de nôtre cn- la-.'.cci dans laquelle îious n'avonsja- gc de l'exillencc des corps , que par 1 impreiTion qu'ils failbicnt i'ur nos uns , ôc comme dans cet âge nous ne jugions que par leur rapport , on u'a attribué d'autre nature au.\ corps que d'être vilibles, refonnans, odori- Icrans , lavoureux 2c palpables ; tel- lement que ceux qui ont fait une im- prclVion plusconlidcrablc iiir Ic", yeux ou fur les iens du toucher principa. (ement , nous ont fait juger qu'ils tiloient plus corps & plus matcricls (pour le direainlij que les autres: ceux au contraire qui à caul'e de leur pctitc'lîe, n'ebnmloicnt pas IblViTam- mcut les organes de nos l'cns pourfe îaire leatir ont pall'e chez pou^ pour (lesÉêfes. j^ rîen . de là vient que fi un Corps ». après s'cftre fait apperccvoir par quel- qu'un de nos fens a efté enfuite û fort divifé qu'il n'ait plus fait fur nous aucune impreffion notable , nous avons dit pour lors qu'il avoit efté dégagé de la matière , n'ofant pas tout-a-fait afleurer qu'il fût devenu rien, ce qui nous pafle. II ne fera pas hors de propos que nous reconnoiffions dans un autre exemple la vérité de ce que nous avons dit touchant les façons d'eftre communes : prenons po\ir ce fujet l'union, qui n'eil autre chofe qu'une manière d'être qui rend deux fub- ftances infêparables & capables des mefmes déterminations. Il eft certain que l'union prife dans ce fens peut convenir aux elprits 2c aux corps : car on ne fçauroit con- fiderer la nature de deux cfprits , 5v. celle de deux corps, qu'on ne voye premièrement que les corps ellant des fjbftances étendues , pourront eftre en repos les uns auprès des autres , & tellement entrelaffez à raifbn de leurs figures branchdes Se embarraf- fantes , qu'ils feront infeparables , ?c fuivront tous deux les mêmes defar- B V j4 De l'Ame minations. Secondement fi l'on re- garde deux cfprits on connoîtra qu'é- tant capables d'amour , ils en pour- ront concevoir mutuellement l'un pour l'autre, de forte que la volonté de l'un fera toujours conforme à cel- le de l'autre , Scieurs connoiiïanccs (e découvriront réciproquement, ce z. leur vérité me paroit û nature-Ile à- l'efprit qu'à peine comprendrois- je qu'on les eut pià révoquer en doute ^ û je ne fçavois l'empire que les {éi\6 prennent fur nous depuis noflre en- fance -. car les ténèbres qu'ils répan- dent fur la raifon l'attachent (i forï à l'imagination , qu'il cil: difficile d'en- revenir, k de s'accoutumer à conce- voir les chofesqui ne font poiatiiv-i" ginables, & qu'il eft plus ditficife d'i- maginer que d'oUir dqs couleurs . grande habitude que nous avons „ de penfer aux fubftanccs corporel- „ les, 8c d'imaginer, nous fait cher- „ cher les mêmes chofes dans l'ame, t Lucretius. * Non enim uUo modo aut long» i- /lut lata anima , c^c. Corporea ijia fimt ut mihi videtur t ^ de confue- tudine eorporum fie animam qu*rimt*tv^ Auguft. de quamitate anims cap. }. jS" I>eVAmê CHAPITRE VI. Oh r on fait voir lafoibîejjedel'o' pinion de la pltts-part des Philo- fophes toHchant la nature de l'ante^ QUand on vent raironner de la nature de quelque chofe , & marquer fon caraftere véritable, il eft hors de doute qu'il faut que ce qu'on aura aporté pour fon eirence nous Icrve à en découvrir les proprietcz. ou du moins qu'après avoir aquis d'ailleurs la connoillance de i'es pro- prietcz , on puiffe voir la liaifon & la dépendance ncccffaire qu'elles ont avec l'cirencc qu'on a donne à cette thofe, puilqu'ciles n'en font que des faites. Faifons l'application de cette vé- rité > & voyons en quoy la plus-part des Philolbpcs font confulcr la na- ture de l^efprit ? c'ert à eAre ptnetra- ble par fa nature, ou à eûrc /Vww;»/*- ùel j l'efprit donc félon eux eft une ilibilaace naturellement pcoctrabk ou- des 'Bit ff', 59' immatérielle, &c'eft cette prétendue penetrabilité ou cette immatérialité qui fait que l'elprit cfl elprit, & qu'il eft d'un ordi-e fuperieur à la matiè- re. Sans m'amufer à faire voir qu'ê- tre penetrable n'eft peut-être pas une plus grande perfection qu'être impé- nétrable, 8c qu'être immatériel con- vient auffi-bien au néant comme à Tefprit ; voyons fi Ton pourra dédui- re de cette effence connue, la moin- dre des chofesquel'oneûafleuré que les efprits pcfiedent. Suppofé par exemple qu'on ne le fçeutpas, ofe- roit-on dire un efprit eft penetrable, dono il pourra apercevoir les ob- jets (fuppléezlémefme d'immatériel) il pourra ou porter ou fufpendre fbn jugement, il aura le pouvoir de s'u- nir de volonté à certains objets qui luy auront paru convenables, ou de a'éloig.ner de ceux qui luy fêmbleront nuifibles ; £cc. l'on ne penfc pas que perfonne voulut l'alfûrer. Mais du moins apre's que l'expé- rience nous a fait connoîtrc que ces proprietez conviennent aux efprits , peut-on voir la HaifonnecelTaire qu'il y a entre une fubflaoïce penetrable o*i 40 De l'Ame iramatcrîellc, & connoître, douter^ vouloir? &c. ces chofes ont li peu de raport enfemble , que l'on ne croit pas que jamais perfonneait eu la pen- sée de l'afTeurer , quoy qu'on ait dit des chofes bien extraordinaires d'a- bord qu'on a abandonné les lumières de la raifbn 8c les idées claires que nous avons des chofes, pour fuivre les préjugez gelé caprice: jufques là mê- me qu'il s'en eft trouve qui ont trai- té fort au long , & avec appareil , s'il pouvoit y avoir une matière fpiri^ tuellc, pour moy j'aimerois autant demander û le nombre de ^. peut être ccluy de 6. ou fi un triangle peut avoir 4. cotez. Il n'eft rien qui fafle mieux voir la faufTeté des principes de la Philofophie d'Ariftote , que ces fortes de queftions qu'on y fait à tout moment, 5c pour lefquelleson trouve toujours le pour 8cle contre. Les deux définitions qxie nous a- vons données de l'efprit £c du corps font très claires, elles ne renferment rien que nous ne concevions fort di- ftinélement : mais dés- que l'on vou- dra les changer, 8c attacher à l'idée de l'ame quelque eflcnduë, ou à celle du corps quelque penféç, l'oa tonv des Bêtes. 41 bera dans des difficultez in fur m on ta- bles, 6c dans des ténèbres que les lu- mières de refprit humain ne peuvent jamais diflîper : car on fe trouvera obligé de dire que l'ame eft indiviii- ble quoy qu'étendue par tout le corps ?c appliquée à toutes fes parties, il faudra foullenir qu'elle eft toute dans ■tout' le corps 6c toute dans chaque partie, que quand nous croiiïbns elle s'allonge julques à cette nouvelle par- tie, que nôtre corps aquiert:on fera encore contraint de dire que l'ame qui eftoit par fa fubftance ôc par fon eJlendué dans l'œil, qui y fentoit, oc qui y voyoit, ceiTed'yeftre lors qu'on arrache cette partie, fans que pour- tant elle fe retire en aucun autre lieii*. mais que devient-elle donc? Elle cejfe d'rftre là fans être détruite (^ Jans fe retirer aiÙetirs^ Je fuis pcrfuadé qu'il n'y a riea dans la foy qui foit plus inconcevable. Se qui ait plus befoin de cette aveu- gle, mais raifonnable foûmiflîon qu'el- le exige d-e nôtre raifon laquelle dans ces occafions doit recevoir le joug avec plaifirî mais dans les chofes qui font de fon reflTort elle ne peut 6c ne doit en aucune façon fouffrir qu'oa 4t He l'Ame luy fane violence & qu'on la tienne captive & cnchaince, lors mefme qu'elle dcvroit commander 8c donner là loy. Mais qu'arrivcra-t-il fi l'on fait penfcr le corps , premièrement on alTûrcra unechofe mconcevable, 5c ii faudra en fécond lieu faire des pen- fecs divifiblcs, figurées, &c. la moi- tié, le quart d'une connoiflancc , la vingtième partie d'une volonté. les trois quarts d'un jugement, un de- ilr rond, unepenfeede triflefTequar- réc , une perception triangulaire c'eft de là apparemment qu'on dit des pen- féescreufes. Si l'on veut être de bonne foyl'on confcflcra que pour tirer des confe- qucnces fi oppofécs au bon fens, les principes qui les contiennent doivent eftre bien éloignez de la vérité . le penchant auflTi que nous avons d'ima- giner toutes chofcs, doit ertre vio- knt pour nous ôter prcfquc tout-à- fait la liberté de nos jugemens, & nous attacher malgré nous à la. matière Se à l'étendue. Saint Auguftin a fort bien conniî cette vérité dans fcs confeflîons , où- des Bêtes 4^ „ il dir.* J'ay tourné mon attention „ fur la nature de l'ame, mais la ftiuf- ,,16 opinion oià j'eftois touchant l'ef- >> fence des efprits me dcroboit la veuë ,, de la vérité: elle avoit beau fe pre-- ;, fenter à moy avec éclat & avec évi- ,,dence, je retirois ma penfée de la 3, coniideration des chofesrpirituelles ,, pour ne la porter que fur des traits 6c ,, des couleurs , 6c quelque chofe de jjgroffier & de palpable ; mais parce j,que je ne pouvois apercevoir aucu- ,,ne de ces chofes dans mon efprit, „ je m'imaginois qu'opnepouvoitpas les connoiflre. Combien y a-t-ii de gens qui font dans la même erreur où faint Augu- ftin confcfTe qu'il a efté ? les mêmes raifons q^uil'avoient trompé feduifent * Converti me ad animi natureim,^ tun me finebaî falfa opinio quam de fpi- ritualibicf Imbebam 'vertim cernere , ô» irruebat in oculos meos ipfa ziUveri ^ a- vertebam palfitantem mentem ab incor- poreâre fidlmtamenta ^ colores (^ tu- mentes magnitudines , (3* 5^''* ^^ pote- tam eavidereinanimoptitabam me non fojfe videreanimnm meum. Aug. lib. 4». coafeff. c. if. 44 ^f l'yîms encore la plupart du monde; maisce qui n'a fait que l 'abufcr pour un temps accompagne le plus grand nombre des Philofophrs jufques dans le tom- beau. CHAPITRE VII. Confirmation du fentimcnt cjuel'on a avance touchant la nature de l'ame par des raijons tirées de S. y^Hguflin, CE grand Docteur quî raifonnoit fans prévention , en ciludiant ce que c'cft que lame, découvre qu'el- le eft une chofequifc cherche : ^ car , ,, dit-il, lame qui fc cherche, fe „ cherche par tout ce qu'elle cil , & ne * Cum enim qu£rit mens qui J fit mens, profecio ncrit quodipf.i fit mens, quifc ib- f.im qu&rit, nec aliundc fe qn£.rit quàm Ce ipfà : cum er^o quirnUemfe nozrt ,fc nti- que norit ô^ omne quo.l nozit totâ novtt y atquehiitotam fenoiit : ^ji forte parte in"JsntÀ nmfe tôt am qus.rat,nuia, tamtn fe totâ, qu&rit , totufibi fr&flo eft: nihil e- m}nfibifeipfjiprs.fc-ntii*t ejj'epotcjl. Au^. lib. de fpiritu Se anima. des Bêtes. 4$' va pas avec une moitié de foy même,, à la découverte de l'autre , ainll ne fe ,, cherchant que parce qu'elle s'y de-,, termine, c'efi: adiré qu'elle le veut, ,, ôc parce qu'elle a la faculté d'apercé-,, voir, il s'enfuit que toute fa nature ,t conlîùe à apercevoir & à vouloir. Mais ce qui nous trompe ordinai- rement en cecy, eft que î'arae ayant été occupée dés nôtre naiiTance à la confideratiou des êtres; extérieurs, 8c n'y ayant rien vu qui ne fût diffé- rent d'elle même , nôtre efprit a con- traélé une habitude pernicieufc de chercher tout hors de (by même. 6c l'amené s'eft trouvée remplie que des objets extérieurs ; de là vient que quand elle a voulu fe connoître , elle eft fortie au dehors, 5c s'eft attribué la nature de la plus-part des chofes qu'elle y avoit veuès par fes fens : ainfi elle s'eft faite. d'eau avec Tha- ïes, de feu avec Heraclite , Demo- crite , Hyparque , 8c les Stoïciens : elle a fait entrer le feu §c l'eau dans fa compoiîtion avec Hypocrate, la terre 8c l'eau avec Xenophanes, la terre 2c le feu avec Parmenides j elle s'eft paîtrie des quatre élemens avec Empcdocle, de iang avec Crifias; el- le s'eft creuë corporelle avec S. Atha- 4'» De r Ame nafc, S. Bafile & Mcthodius, 8c en- fin elle s'cft faulTomcnt perfuadee avccTcrrullicn qu'elle ne fcroit rien £i elle n'ctoit corporelle , Sec. Si au contraire nôtre clprit avoit confidcré qu'il ne connoit ce qui crt au dehors que par Iby-mefme, 5c Îiu'ainf) il eull diftingue fa connoif- ancc d'avec Ibn objets nous n'au- rions eu aucune peine de voir que la connoifTance apartcnoit unique- ment à nôtre amc, mais que l'ob- jet étoit au dehors ; fi-bicn que nous aurions vu que toute h nature de nôtre elprit ne conlifte qu'à connoî- tre 8c qu'à vouloir, ou pour mieux dire qu'à penfcr. S, Auguftin dans un autre endroit méditant fur la nature de l'amc rai- jifonne ainli : f l'ame, dit il, croit ,> & s'imagine eflre de l'air, du feu, ,>un vent iubtil 2c délicat répandu par t Cum ergomtns a'éremfeputaty a'értm intelligerepttat ,fe tawen intelligere fcit, aèrem autttn fe ejjc non fcit fe^l^Mt.ityfe- cernat quûA put at , cernât (^uod fit ^ hocti remaneat , exinitiocap lo. lib. lo.dc Trinitatc. Jes Bètex'. 47 ï.tout lo corps : elle penfe êfre * un tijfu d'atomes extraordinairement ronds ^ mobiles : f une fuhftance peneîra- ble , l'acte premier du corps organique qui a la "vje en fuiffance. Qu'elle fe dépoiiillc, (pourfuit-il) detoutes ces „ choies qu'elle s'attribue fauflement , ,, 8c que refprrt n'incorpore pas dans „ l'idée de luy-mefme, ce qu'il croit „Sc CQ qu'il s'imagine feulement d'ê- „ tre , mais dont il peut pourtant dou- „ ter 8c qu'il ne voit pas avec clarté ,,luy apartenir, après cela que l'ef- ,,prit ne tienne pour foy-mcfmcque „ ce qu'il ert afluré d'elh-e 8c dont il „ luy cft impoflible de douter , 8c ,, l'ame aura trouve pour lors tout ce ,, qu'elle eft 8c tout ce en quoy con- ,, fille fa nature ; li-bicn quepuifqua nous pouvons au moins douter qu'e?- k foit étendue, penetrable, ronde, l'aéte premier du corps , 8cc. Il s'en- fuit que nôtre ame ne fera aucune de ces chofes, mais au contraire fçachant d'une manière lî certaine qu'il luy eft abfolument impoflible d'en douter, qu'elle veut, qu'elle connoit, te ea * Epie. Lucret. t Scholaftici, Ariûotel. 4S De l'Ame un mot quelle penfc , il cft évident que toute fa nature conlille dans la pcnlée. Car enfin il cft trcs-iailonnablc de dire que l'efprit, qui z la Faculté de connoître ce qui ell hors de luy> n'a rien en foy qu'il nevoye très claire- ment , puifque la feule raiion pour laquelle il n'aperçoit pas tous les ob- jets extérieurs , cil: qu'eftant au de- hors & dift'erens de luy-mcfme , il faut ncceiïaircment , afin que l'ame penfe à eux, qu'ils fe prefentent à elle , ou par eux mêmes , ou par leurs idées qui en font comme les tableaux , de là vient la ncccfTité de ces efpeces intentionclles que l'é- cole a inventées : * or iln'cft rien de fi prcfent à l'ame que l'ame mefme i qu'etl-il donc befoin d'cfpece , de portrait , ou de tableau , qui tienne la place d'un objet abfcnt, puifque nôtre amc a le pouv'oir de connoîirc 8c de pénétrer dans la nature des cho- fcs du dehors, pourvcu qu'elles luy ibient prefcntcs ? à plus forte raifon * Nihilenim tttmnovitmens -, quàm iJ quoiifibiprsjlo eft i nec m.igU inenti ejuicquampr&jiocji.qnàm itfa fibi, Au- gull. lib. de fpiritulkaQiiiu. ne des Bêtis. 4 j ne s' éloignant jamais d'cîîe mcfmc, devra-t-ellc connoîcre tout ce qu'elle eft, 8c par conlequent ne renfermer dans fa nature que les chofes qu'elle remarque clairement 8c certainement dans for-même, 6c en exclurre celles dont elle a le moindre doute : or elle peut douter de tout, excepté de fa pen- fée j donc . 8cc. Ce feul raifonnement démontre que l'ame n'eft autre chofc qu'une fub- ftance qui petife , laquelle ne fait Se ne reçoit rien que par fes volontez Se par fes connoiilances ; fi-bien qu'on ne fera plus en peine de diltinguer les facultez qui apartiennent au corps de celles qui font propres à l'ame > l'on n'aura plus recours à la faculté de di- gérer & de cuire les alimens, les fa- eultez de faire battre le cœur, de nourrir, de faire croître , 8c une in- finité d'autres prodL"'^ions d'une ig- norance orgueilleufc n'auront plus de lieu. Carneferoit-ce pas unecho- fe étonnante que l'ame éclairée 8c clairvoyante au dehors, fut aveugle au dedans ? que l'efprit connût 8c mefurâtlcs mouvemens desCieuxSc desAftres, 8c qu'il ne fçeût pas qu'il fait battre le c«ur, comme on prc- C fo De V Ame tend dans l'opinion des Pcripatcticiens «jui attribuent ce battement à la fa- culté pullifique de l'amc : enfin que l'amc toute intelligente qu'elle c{\ ne fçùt elle même rien de ce qu'elle fait faire? Il efl; impolVible de concevoir que nous commandions au cœur de battre fans le Tçavoir, ou que i ame le faire mouvoir à Ibninfçû, & qu'en y penfant melme ?.vec application el- le n'en puirtc rieo découvrir. 11 faudroit qu'il y eut des abîmes bien profonds 8c des recoins bien ca- che/, dant l'cfpritjpour faire en forte que toutes ces prétendue:, faculrez fuiFent inaccelTibles à les lumières. Ne feroit ce point que l'ctenduo de l'amc, quand nous la cherchons, fe réduit en un point imperceptible f 3u'clle quitte fh figtire Se fa gran- cur pour fe dérober à nôtre péné- tration à laquelle les plus petites par- ties d'un ciron n'échapcnt pas? Plus on penfc à ces chofcs plus on eft convaincu de la vérité de ce que l'onadit ; néanmoins pour ne rien ou« blier fur ce fujet, portons pour un moment la veuèfurrame d'un de ces vers que l'on divife en tant de parties Se qui ne Uiflcntpas de fc remuer encore its ^rtts'. jj Il eft certain que fi la matière pen- (c, ce que l'on appelle ame dans ces petits animaux penle aufli, 8c eft di- vilible ; car outre l'expérience qui le' fait voir, il eft impoiïible de conce- voir une fubftance matérielle , lon- gue, brge, profonde, qui pourtant ne ibit pas divilîble , cela parte l'et prit de 1 homme , quoy qu'en difent les Epicuriens. L'ame donc de <:e ver eft divifî- ble : fuppofons que dans le tempry qu'il a quelque fenfiment ou qu'il imagine quelque chofe, on le coupe en deux , coupera-t-on aufti ce fen- timent ou cette imagination ? poitl* moy je neJefçaurois comprendre. ■ ' Outre cela cette ame quandce ver eft divifé fait encore mouvoirôc fcn- tîr chaque partie, de m.cmc qu'elle faifoit tout l'animal, û bien qu'on doit necelTairement avoir divife cette ame fenfitive, laquelle après cettedi- vifion ne fentira plus quelà moitié" de ce qu'elle fentoit étant toute ca-- tiere, 8c ainlî toujours en diminuant' à mefure qu'on la divifera. ^ L'on ne peut pas dire qucl'amede ec ver fente autant qu'elle faifoit a." raat qu'on l'eut coupée , car fi ccl« C ij cftoitvray elle fcroit aufli entière que li elle n'avoit pas elle divilëe, ce qui cft beaucoup plus noble & plus in- comprehcnliblc, qu'erre toute dans le tout 2c toute dans chaque partie, comme l'on veut que foit l'amc rai- fonnablcicar cette amc du ver fcroit non feulement toute dans le corps Se toute dans chaque partie avant la divi- fîon , mais encore après, ce qui ne convient qu'à l'exillcnce facramenta- le du corps adorable de Jesus- G H fi I s T dans l'Eucharillie. De plus quand ce petit animal eft encore tout entier, lonamcqui pco- Icpeut fedircà ellemefme, c'cftinoy qui penfc maintenant, qui vois du rou- ge, qui touche quelque chofc de chaud , êcc. Lors qu'on l'a coupé en deux ce qui aperccvoit dans luy ne manque pas de fentir cette diviiion, & chaque moitié doit dire en fuite, nioy qui ne fuis plus que la moitié de ce que j'ccois un moment aupa- ravant, moy qui fuis en partie icy 2c en partie là , en un mot moy qui fuit fcparéc de moy-même. Ne faut-il pas avoiicr qu'il y a peu de myftercs qui approchent de l'incomprehcnfibilité de celuy-là? Ce moy cfl quelque cho- de! Bêtes'. f J le de fi indivifible, que nous ne pou- vons point , quelque effort que nous fafllons, le concevoir ni étendu, nï divifible*.8cqu'eft-cc que ce moy, fi ce n'ert l'ame qui fe parle & qui s'in- terroge elle même? CHAPITRE VIII. Oh l'on démontre cjue Came des' Bètes ne çonnoit fas. SUppoforti prefentement comme une chofe très - claire que nous avons l'idée de deux fubilances , dont l'une penfe & l'autre eft étendue, lef- quellcs font tout-à fait différentes, & n'ont prefque rien de commua que d'être des fubftances , fi-bien que ce qui penfe en moy ne peut eftre éten- du, ni ce qui eft étendu penfer. Di- fbns en fuite que nous appelions ame ou efprit ce qui penfe. Se donnons le nom de corps ou de matière à ce qui eft étendu. Après cela confîderant que la Foy nous enfeigne qu'il n'y a aucun prin- cipe immortel 3c par confequcnt fpi- Ciij f'4 De l'^mt rituel dans les Bërcs, Se qur [a raf- fbn nous a convaincu que tout ce qui pcnfe elt efprit , ou { pour ne pa» fai- re une queliion de nom) quctoutce tjui pcnle conllituc une fubftance en- tièrement ditrcrentc du corps, nous ronclurrons évidemment qu'il n'y a rien qui penfe dans les animaux. Et *orame Je mot d'ime cft fort cqur- roque, & qu'on l'a pris au moins en trois fens difîercns. Pi-emicrement pour ce qui eft dans nous le principe de la penfée. 2. Pour ce qui fait que l'on fe. nourrit & que l'on croît, j. Pour la caufe detousiesmouvemcns» ibit volontaires, fok invelomatrcs ► (Çui font en nous j je détache îc mot d'ame de ces deux derniers fens, & le déterminant à ne fignificr que ce 3ui eft le principe de nos pcnlées.je is qu'il n'y a point d'ame dans le» Bêtes , c'eft-à-dire qu'elle» n'ont aucun principe qui counoiflc. Cette proportion parott d'abord un paradoxe à la plus -part des gens qui ne jugent >lcs choies que par les ap- parences, pour fe délivrer de la pci- ae d'examiner les matières, &dcre- llfter à la force £c à la violence des piejugcz j cela fera que j'auray une i^s "Bêtes 't ff foule de difficulrez à refbudre, car dans cette queftion principalement chacun ie mêle d'en propofer , 5c il n'eft pas un ignorant qui ne prétende avoir poulie un homme à bout iil'oQ ne luy fait comprendre la caufe de quelque aftion des Bêtes qu'il aura creuc iîiex'pliquahle ians connoilTance: mais ce qui cù digne de remarque , ces perfonnes tout ignorantes qu'elles font de l'Anaromie , des Mechaniques, de la Phyiîquc, 2c de la Metaphyû- que, veulent qu'on les fatisfaflè d'a- bord fans parler d'aucune de ces cho- fes , & font les plaifans li toft qu'ont parle d'efprits animaux, de nerfs, de mufcles , de fibres , Sec. Néanmoins avant que d'entrer dans les difficultez & avant que les refoudre nous appuyerons noftre fentiment de quelques autres raifons , après quoy nous réfuterons les réponfes que l'on donne à nos preuves, paflant en fuite dans les confequences facheufes de l'o- pinion contraire, pour expliquer apr«s cela les actions les plus remr.rG\iables des brutes, qui femblent le plus dé- pendre d'une ame qui connoit, & en- fin nous confirmerons par q^uelques authoritez de grand poids tout ce «lue nous aurons avancé. C iiij. S6 De PAmt C H A P I T R E IX. Autre preuve , que les Bêtes ne connotjfent pas , tire'e de la pHiJfance de Dieu. IL eft certain en premier lieu q«e- nous devons reconnoure dans Dieu le pouvoir de produire au moins tou- tes les chofes dont l'idée ne renferme pas avec évidence l'être 8c le non être en même tcmps,c'en-à-dirc,qui (pour parler dans les termes de l'école) n'im- pliquent pas contradiftion. En fécond lieu je ne pcnfe pas qu'on puifle avancer aucune raifon qui nous pcrfuade que Dieu ne peut pas faire •un corps tour-à fait fcmbbbleàceluy d'un fingepar exemple, qui fe meu- ve , & qui fafTe tout ce que nous re- niarquon": de plus furprenant dans les iinges , par la feule dilpoiîtion de fes orgviesi 6c par la force des refTorts qui entreront dans la compohtion de h machine dcfon corps. En troifiémclicu , fi Dieu lepeut» il s'cafuivra qu'il l'a fait , première-- des Bêtes. 57 ment parce qu'il ne fait rien fans ne- ceirité, c'elH ce qui fait que la plus -part fe perfua^ dent fauûement qu'on ne fait qu'a- percevoir. Ou fera pourtant convaincu du ocm- des Se te s'. €^ traire , fi l'on examine ce qui nous arrive quandnou5 doutons. Lorsque je regarde le iolerl par exemple, 6c que la veuè que j'en ay me le rcpre- iènte dans le mouvementr- cela me fait juger qu'il fe meut, & fi d'ail- leurs je fais reflexion que iuppofé que je me mûiVe avec la terre, je le ver- rois de mefme manière , encore bien qu'il fuft arrêté, comme il arrive à ceux qui s'eftant embarquez croient de voir fuir le rivage à mefure qu'ils s'en é- loignent 5 pour lors je m'abftiens déju- ger, & ne donnant aucun confente- ment je iufpens toute forte d'aclion. Que il l'on fuppolbit que je n'euflè- point d'autre moyen quelaveuèpour découvrir fi le foleilfemeut, ou bien- fi c'ert la terre, ou qu'après avoir ex- aminé la chofe autant qu'il me feroit polfible, je vifTe des railbns égales de part 8c d'autre, mon ame cefleroit à la vérité de s'agiter & d'aprofondir davantage cette matière, je ne con- felîérois pas pourtant que la terre fe meut, ou qu'elle eft en repos, au con- traire je retiendrois mon aveu 8c mon confemement : ce qui fait voir que- toute forte de jugement eft une ac- tK>» vtritubk dei'ame^arla^nelie mm ^4 I>f f-^tne ajjurons , ou }iou4 ntùns que les chofrt font, ou ne font pat. Apres cela com- me les êtres ont du rapport à l'ame , non leulement en ce qu'ils peuvent en cflre connus, mais encore en ce que quelques-uns d'entr'eux luy font convenables, 6c Ibnt capables de nous pcrfedionner , l'efprit après avoir aperçu cette convenance en juge, c'cft à dire, avoiiequeceschofes luy ibnt utiles, 3c en fuite ordinairement il les aime, 2c fe porte vers elles pnr une féconde a£lion. On a appelle volonté, la force que l'ame /i de fe porter vers les objits qu'elle a jugé convent-iblcs : Et l'on a nommé entendement , cette fa- culte lie l'urne par laquelle elle afitioit ^ juge tunt (le ce que Us objets font en eux-mêmes i que dt ce qu'ils foht à no- tre égard, c'cll-à-dire, tant de lave- rite, que de la bonté des choies. Si l'on s'eftoit arrête là , il n'y au- roiteu point d'inconvénient', caries définitions de nom font arbitraires: mais cette divifion d'entendement ^'c de volonté a donné occalion à quel- ques Philofophcs de dilîingucr clFe- «Ttivcmcnt ces deux facultezde l'ame, qu'iJs ont appclléc le tronc, duquel l'en- . tcuderacat & la volonté foat comme . des Bêtei. 6f deux branches : ils ont encore donné des rameaux à ces branches , comme font le fens commun, la phantaifîe, l'appetit fenfible , le raifonnable > &c. Pour éviter cette erreur ne par- lons ni d'entendement, ni de volon- té: retenons le feul mot d'ame, 2c il eft aflTûré que nous developerons cette queftion que les feules façons de par- ler embrouillent : comme quand on dit que l'entendement éclaire la vo- lonté qui eft aveugle, que la volon- té commande à l'entendement, &c. car commander eft un terme de rela- tion , 8c perfonne ne fe commandant à foy-mefme , il eft certain que ce langage nous incline à croire que ces deux Jracultez &nt deux choies diffé- rentes. L'ame donc aperçoit les chofcs, Ê'eft à dire , elle en a des idées , des notions ou des connoifîances , car c'eft le même, enfuite elle en juge fur le raport 8c fur l'infpe£tion de ces idées, & quand il arrive que les êtres ne font pas efifedHvement en eux-mêmes , comme nous l'afTeurons , pour lors nous nous trompons. Nôtre expérience nous convainc €6 De Vulme que nous pouvons porternôtre juge** ment iur des chofcs que nous ne con- noiflons pas plcinennent : ainli dans l'exemple que j'ay déjà propofc, où l'on ne voit point évidemment, com- me je le fuppofe , que la terre le meu- ve, ou qu'elle foit en repos, je ne m'ahftiens pas pour cela d'en juger fit dédire, la terre ne fe meut point, quov que je n'en aye pas d'idée cUire Jt diftinae. Cette mefrac expérience nous af^ feure que tx>us pouvons nous em- pefcher de juger dans les occafions où nous ne voyons pas bien clairc- Jnent j û-bien que nous fconmes li- bres dans quelques-urîs de nos juge- mens , fi l'on entend par ce mot de liberté le pouvoir d'agir d'une cer>- taine façon ; comme Je juger que is^ terre fe meut, & de s'empêcher d'a- gir, comme de fufpjcndre ion juge- ment , ou d'agir d'une manière con- traire comme de juger que la terre ne fe meut pas. L'expérience nous fart voir auflk que nous n'avons pas cette liberté à l'égard des chofes que nous connoiC ions çUiremcat Se dxfhDCtenacnt , car its'Betts. €y âpre? avoir porté la veue * que nous avons de a. fur celle de 4. je ne puis m'empêcher de juger que le nombre de 2. eft la moitié de 4. Si je coniidere en-iuite que jen'ay rien , que je n'aye receu de Dieu 3 que c'eft luy qui m'a fait ce que je fuis-, 6c qui m'a donné la faculté d'a- percevoir êc celle de juger, je feray forcé d'avoiicr , que je ne puis pas TOC tromper dans les jugemens que je porte fur les chofes qui me font clairement connues : car comme dans ces occafions, je ne puis pas fufpen- idre mon jugement, Se m'abfteair de croire que les chofes font cîe Ta ma- nière que mes idées me les reprefen- tent, il s'enfuivroit que ce feroitDieu luy même qui m'auroit a^tt^cM i l'éi;- reur, Scqu'ainfi cefêroit luy qui me troraperoit , 8c à qui par confequent mes erreurs devroient eflre impu- tées : or k connoifTance que j'ay de Ci. bonté m'empefcKe d'avoir ce fen- timent : d'où je conclus que je ne me trompe jamais quand je ne juge que de chofes dont j'ay des idées clai- res & diftinfbes. Non feulement je fuis convaincu de cette vérité quand je pcnfe à la * Sh^L l'idée* éB De l'Ame bonté de Dieu , mais encore lors que jo coniidcrc qu'il ne p«ut pas porter témoignage, &c intcrpofcrlon autho- rité pour nous pcrfuader Se nous taire accroire une f aufleté i ce qui leroit en luy une iinpcrfeétion d'autant plus grande que c'en eft une parmy nous : or il eft alTeuré que les idées 6c les notions que nous avons des chofcs nous viennent immédiatement de Dieu, puifquc ces idées nous repre- fentent que ces chofes font d'une cer- taine façon ; donc il eft leur que fi elles étoient faulTes , c'eft à dire fi leurs objets étoient autrement qu'el- les ne nous les font voir, Dicumcn- tiroit en cette occafion. Car les idées qui nous reprefenteroient les êtres autrement qu'ils ne font , venant de luy , s'addreflant dirc£tement à nous. & nous rcprefcntant les chofes , ii faut avoiicr que ce font fes paroles &-les fignes dont ilfe fertpour nous informer de la nature de ces chofes & de la manière dont il les conçoit, puifqu'il fçaittout : fi-bicn que com- me c'eft Dieu qui nous afléure que i. & 1. font 4. par exemple, 8c qu'il ne peut pas porter témoignage dune chofc qui n'cft pas , nous dcvoni des Bêtes. 6^ être convaincus que i. 8c 2. font 4. & ainli de toutes les autres idées clai- res 8c évidentes. Quand je penfe que mon ame n'a- perçoit pas tout, 8c qu'elle n'eft pas intinie dans fes connoilTances , mais qu'elle peut juger des chofcs qu'elle ne connoit pas, comme ailïïrer par exemple que la terre eft en repos , quoi que les idées qu'elle en a ne le hij tallent pas voir, je connois que fi je me trompe très fbuvent dans les ren- contres , où mon ame ne fe règle pas lurfes connoiffances claires 8c évi- dentes , mais où elle va phis loin , quoj qu'elle puiffe s'arrefter , je connois dis-je, que les erreurs où je tombe pour lors ne doivent eftre attribuées qu'à moy feul , 8c nullement à Dieu qui dans ces occafions ne m'afleure de rien ; ainfi l'erreur à mon égard ell une véritable privation qui conlî- fte dans le mauvais ufage que je fais de ma liberté, c'eftàdire, en ce que j'agis 8c je juge quand il ne faudroit pas le faiie, fi bien que c'cftàmoy^ qui m'y détermine 8c qui m'y porte de naoy-mefmelorsqueje pourrois biea m'en empeicher, fur qui tout le blâ-. me de cette aâioa > ou pour mieux 70 DefAmt dire toute Terreur doit tomber. Sï je veux maintenant appcUer en- tendement, l'iimequaaJ elle ne fait qn» recevoir , que cannoiftrc , oh qit'aper- /•fx^o/r, qui font de termes fjnoymcs: ôc volonté, famé en r.tnt qu' elle agit t foit en jugeant de ce que les chofetfont ^ OH en elles mêmes , ou a [en égard, foit *n fe portant ter s celles qu'elle m jugées convenables à fa nature; je diray que l'entendement ne fc trompe jamais, inais que c'eft la feule volonté qui ayant plus d'cftenduè que luy , va plus loin Se fe trompe en jugeant des chofes que l'entendement n'a pas apcr- ccuës. Sçachant donc que Dieu ne peut pv tromper ; & f^achant les rencon- tres aufquelles il ferait véritable de dire qu'il me tromperoit ; voyoas, fi au cas que les Bâtes n'cuflent point d'ame.l erreur où tombent ceux qui fc perfuadent le contraire dcvroit luy dire imputée. Il eft aiîùré par ce qu'on vient de dire , qu'il nous tromperoit li nous connoiilions clairement que les Bétes ont une ame , après nous être dé- pouillez de tous nos préjugez , & avoir icrieufemeot examine U choie ; or' Jet Bêtes'. jt cjiii pourra fe flatter d'avoir cette con- fioin'ance ? au contraire quel eft le Philoibphe qui n'avoiie qu'il eft très- difficile de comprendre , 8c xneùne inconcevable , comment la matière peut penfer, & comment de quelque choie infenfibleilfcfait quelque cho-i fe qui fente? L'unique lien qui re- tient tous les Philoibphes dans le fen- timent commun, n'ell-ce pas la peine qu'ils ont d'expliquer toutes les ac* tions des Bêtes par la feule mechani- que ? & cette difficulté ne provient- elle pas en partie du peu de lumiè- re qu'ils ont dans cette fcience , 8c dans l'anatomie, dans lefquelles plus on eft verfé moins a-t-on de peine n fe convaincre de la vérité que je foûtiens ? Outre que quand même l'on n'expli- queroit pas par la feule machine du corps tous les mouvemens des Bêtes, cette infuffifance pourroit-clle nous faire douter d'une vérité déjà connue par fes principes ?& ne devrions nous pas au contraire penfer que cette ig- noranceneprovient que{decelleoù nous fommes de tous les tuy aux infenfîbles. & de tous les refTorts innombrables dont la machine du corps des Bêtes 71 TieVAme cft compofêe ? comme quand nous ne pourrions pas donner des caufe» lènlibles de toutes les proprictcz de l'aymant . icroit-ce avec raifon que nous aurions recours à des fa- cultez a ttr actrices , direcirices , Q>c. que le bons fens ne peut goûter, & qui ne Ibnt que des produélions de l'ignorance des hommes Pau contrai- re n'aurions nous pas iujet de dire que nôtre ignorance naît de celle où nous fommes, touchant la grolleur, la figure Se l'arrangement des parties Aoxv: l'aymant cil compofé. comme auflj touchant la difpolition que les corps, dont l'univers ell fait, ont les uns à l'égard des autres? des 'Bête:. 7^ CHAPITRE. XL jifftrt raifon de U me me veri-. te tirée àe la bonté de Dieti. QUand nous ne confiderons que la puiflancc infinie de Dieu, 8c l'empire abiblu qu'il a fur toutes les chofcs aufquelles il luy plait de don- ner l'eftre , nous comprenons afîer facilement qu'elles dépendent de luy ■d'une telle manière qu'il ne manque jamais de railbu pour en difpofer con- formément à £x divine volonté telle qu'elle puiiTe eftre; de forte que dans cette vcuè, nous concevons qu'il peut .produire des creatui-es qui connoif- fent , 8c quelque pures :ju'elles for- "tent de fes mains, feront néanmoins aflujetiesàla mort Se à un grand nom- bre de douleurs, Se de fouliVances que leurs fautes n'auront jamais méritées. Mais lors que dctournans noilre at- tention de ce domaine fouverain 5c ÂQ cette puilTance infinie nous b por- toQo fur U bonté iucomprekcnlîblc D ■74 De r Ame de Dieu, nous chancelons 8c nous n«a- vons pas des ferres allez fortes pour nous tenir dans noflre premier iènti- ment : car enfin cft-il croyable que Dieu fi bon & fi julle puilVe ne vou- loir donner u quelques uns de fes ou- vrages que la mifere en partage, fans que les fouftrances aufquellcs ils font condamnez puilfent leur fcrvir pour mériter un état plus heureux 8c tran- quille? Il eft confiant que fi les Bêtes con- noiffent , elles font dans cet état , mi- ferables , expofees à desdouleurstres cruelles Scfujettes mal-heureufement à la mort, fans qu'elles ayent jamais meriré cette condition déplorable, 8c fans avoir attire la haine 8c l'indigna- tion de leur créateur par la moindre defobeVtrance. S'il n'ed: pas afTuré par les princi- pes de Saint Auguftin (comme quel- ques fçavans prétendent qu'il l'eft ) que Dieuncpourroirpas faire l'hom- me , ni aucune autre créature con- noifTante fujctte comme nous à ce grand nombre de foibleffes 8c d'in- lirniitcz . qu'en punition de quelque 'crime Se de quelque dcfordre. 11 me lemblc au moins évidcat qu'il n'en des Bit es, ^|- ^tîitrroit pas faire une , fcns qu'elle fût capable d'une béatitude 6c d'une félicité naturelle, qui fût la iîn £c le terme bien-heureux de toutes fes pei- nes. & dans laquelle Dieu fe décou- vrit à elle luffifamment pour en eirre aimé fur toutes chofes avec une joye très feniible , tellement que cette con- noiffance 6c cet amour duraient pen- -dant toute l'éternité , dans laquelle par une protection particulière de Dieu , cette créature eût eflé exemp- te de toutes les miferes aufquelies fa nature femble l'aifujettir. Mais pour les Bêtes nous fommes obligez d'avouer qu'elles fouflfrent fans l'avoir mérité, 6c fans aucune c/perance de fortir jamais di-" l'état mal-heureux où elles font, iîcen'ell par la perte la plus épouvantable qu'on puiffe concevoir , c'eft à dire par l'a- neantilTement. Eft-ilbien poflVolequc leur ame miferable, toute innocente qu'elle eft, refîénte des douleurs très cuifantes, 6c n'ait point d'autre jour pour les voir finir que celuy auquel elle cefTera d'être, ce qui eflle com- ble de tous les mal-heurs? De plus il eft inconcevable que îDiçu puillb créer une fubftance ^a- I>0 7^ T>e TAme pable dfc (O/inoîtrc 8c d'aimer que pour s'en f.iire connoitrc & aimer; ïi bien que ii les animaux lonc capa- bles de connoiirance& d'amour, nous devons dire que Dieu les tourne in- ceflammcnt vers luy pour s'en faire aimer , & pour s'en faire connoîtrc. ce qui IcniSle avoir des fuites ua peu fâcheufe^. Enfin quel droit cft-ceque nous arons -nous autres hommes fur le; Bêtes. pour îes mal-traitcr Scpour difpofer fouve- raineme.nt , comme nous t^aifons , de leur vie Scde leur mort? n'eft-cc pac une cruauté bien grande de les tour- menter fans fujct , ik de les priver bien ibuvent des plailirs innocens qu'el- les font capables dégoûter? On peut répondre que l'homme eft le Roy des animaux, qu'il en peut difpofcrcom- me bon luy femule , & que Dieu luy a donné ce droit. 11 eft vray que J'homme innocent en étoit le fou- verain légitime, mais nous en fom- mes les tyrans, iS: l'innocence que BOUS avons perdue nous prive du jufte pouvoir que nous avions fur toutes les créatures fenlibles .- ainfi je ne vois pas des raifons qui puif- îént juftificr nôtre conduite a regar4 4e5 Bctcs^ {Je de quelque coté que {fes Ts'ètei. 'tj jf'ehvirâee la choie, foit de celuy de' Dieu , Toit du nôtre, je trouve par' fout de nouveaux fajers de m'after-- mir dans ma penfée, &: de me pei'-- fuader que les Bètes n'ent point d'atne. CHAPITRE XII. Ofte la réponfe des Epicuriens' anx raifûKs précédentes intro->- duit le Pyrrhomfme : ç^ la rc-^ fiitation de quelques antres ré-'- fonfes, LEs Epicuriens qui croient que les animaux connoiflent , fe tirent fa- cilement d'affaire en difant qu'à I^ vérité on ne peut pas concevoir que" là matière penie. Se que de q"uelque ehofe d'infenfible , il s'en fafl'e quel- que chofe de fenfible : mais pour- tant quoy que Cela les pafTe , les Bê- tes (à leur avis) ne laiffent pas de' connoître, ?c la matière de penler. Cette défaite efl: aifée, 8c de cette façon les plus grandes difficultez s'é- vanoiiifTent d'abord & perdent toute' leur force. De forte qu'un Peripare» D iij. 7^ DePyîme ticien qu'on prcncrafurJaproduAîoit ir.ipofi'ible des formes iubflantiellcs matérielles, avouera (comme il clt vray) qu'il ne i'çait pas comment ce- la fe peut faire ; mais que néanmoins la choie arrive. Un opiniâtre auquel on voudra prouver l'cxiftence d'un principe commun dans tous les êtres jnatericls, en difant que rien ne le fait de rien naturellement , Se que quelque chofe ne devient jamais rien, confeflera qu'il ne conçoit pas que par les forces de la nature uae chofc puille cftre faite de rien : mais il ne laifl'erapas de foûtenir que cela arri- ve, quoy qu'il ne le puille pas conce- voir. Enfin li l'on reçoit ce principe^ nous n'avons plus de certitude dans la. fcience humaine, les Pyrrhoniens ont gagné. 2c il n'eft point de propo- fition lî éloignée du bon fens, que l'on ne puiflc impunément foûtenir . laraifon de cela elt que comme nous ne jugeons des chofcs que par les idées claires & dillin(Slesque nous en avons, nosjugemcns nepeuvcnt pal- ier pour faux ou pour véritables, qu'entant qu'ils font contraires ou conformes à ces idées, carparexem- pie, pourquoy cH-ce que nous difons fies Séfesl f^' que le fout eft plus grand que la par- tie, lî ce n'eft parce que nous le voyons évidemment dans les idées que nous avons du tout & de la partie, £c qu'il eft impolFible de concevoir qu'un tout puifle être moindre que fa partie? Je fçay que l'on dira qu'il efl: faci-- Je de prouver cette dernière propofir' tion par la contradi(ftion qui s'enfui-- vroit 11 elle n'étoit pas véritable. Je veux qu'elle renferme une con^ tradition, mais pourquoydifons. nous qu'on ne doit pas admettre deux pro- pofitions contradiâoires ? on ne fçau- roit répondre autre chofe, lîcen'eft, parce-que nous ne pouvons pas con- cevoir que cela fe puilfe faire : donc nous aîfeurons qu'une cHofe efir impoflîble quad nous ne pouvons pas comprendre qu'elle puiffe être; 5c ce principe eftant renversé, il n'y a plus- aucune certitude : or par l'aveu des Gaffendiftes nous ne concevons pas que la matière puiffe penfer, au con- traire celafuppofé elle feroit en même temps corps 8c efprit, ce qui impli- que contradiiSlion : donc il faut avouer, ou qu'il eft impoflîble d'être affûre de quelque chofe, ou que la matière ne peut penfer, ni par confequent les e iiij. Sn Tn l'Ame Bctc- connoître: car enfin quel Geo- mc^re s'cii-il jnmais avilë delbîitenir que le trianjjie eût une certaine pio- rrierc que l'on rcmarqiûr, bien que Ton ne peut pas concevoir comment cite pourroit cotivenir à cette figure : au contraire à cauie feulement qu'on ne pourroit pr.s voir qu'elle convient au triangle nous dirions qu'il ne l'-i point. Car fj le5 êtres ont une infi* rite de raports que nous ignorons, cela arrive parce que nous n'enavon'? aucune idée ; mais quand d'une part nous connoifibnsuncproprieté. 8c de l'autre une fablkncc. il faut, fi elle convient à ccite fu'o/l.ince . que noua rapcixc'.'ions, puifque le fcul moyen que nous avons pour juger qu'un certain attribut ne fe trouve pas dans une fubilancc, clt lors qu'en les exa- minant cnfcmblc , nous ne voyons au- cun raport de l'un à lautre. Le Pero Pard'.es dit encore que c'ell une cli'jfe indigne de la fagelVe de Dieu d'avoir donné des yeux , des oreilles , un naz > une langue, 8cc. aux animaux pour ne leur Icrvir que de parade, 8c que ce fcroir mal juger de la providence admirable Se de I> fjgcilc profonde de l'ouvrier,, de le pcffiiader qu'il n'ait employé tant, d'induftrie & rani: de juilelTe dans la, formation des organes de leurs fens , que pour un vain ornement i fi bien, cju'il ne femble pas moins certain que lès Bêtes voyent & entendent, qu'il l'efl; qu'ellço ont des yeux 6c des oreil- les : car à'quoy bon cette iiruéture admirable de l'œil, ces tuniques &c ces humeurs difpofées luivant foutes les règles de l'optique pour lâforma-- tion de la vifion , fi: ce n'eu pour faire que les brutes. vifTent pàj: les yçux comme nous , entcndiilent de mefme par les oreilles, dontja com-; p.oi:tion n'efl pas moins divine que celle des yeux. Il n'efl; pas moins faux de dire que lès fens extérieurs, dans les Bêtes ne iêrvent que de parade, fuprofe qu'elles,- ne connollfent point,, qu'il le feroit^ d'afieurer que le relfort d'une mon^,' tre ou les contrepoids d'une ii'orloge',- ne font que des ornemcns extérieurs Se inutiles à cette machine, car com- me au contraire ces parties font des plus effenticlles i! la montre & àl'hor-; loge, de même les fens exterieuîâ- foqt de.^ organes tres-ncceflâirèspour^' r«ûii-eti€n o<-la vie dan^ les àniciauîc^ ■ puifque c'eft par leur moyen que les objets extérieurs agiflcnt fur leur cer- veau. Se le déterminent à s'cnapro- cher , ou à s'en éloigner , fuivant qu'ils font utiles ou nuilibles. Mais quoy repliquera-t-on , les Bêtes ont des yeux Se ne voyent point, des oreilles Se n'entendent point. Sec. L'on ne dit pas abiolument celar parce que ces mots, voir, ouïr Se les autres, font fort équivoques; fi- bicn que l'on dillingue quatre fignî- fïcations différentes dans lefquellcs on a pris ce mot de fcnrir : ce qu'iK faut bien remarquer pour la fuite. ' ' Premièrement ce mot de vifion dan$i le premier fens ne lignine autre cho-" fê que la peinture de l'objet qui fe fait fur la rétine, i. L'on prend ce mot pour ce qui eft tranfmis dans le cerveau à l'occafon de divers ébran- lemens que l'objet fuiv.lnt fa diffé- rence a imprime fur les filets de la rétine. 3. On le prend pour les mou- vemens qui peuvent cftre excitez dan» le corps à l'occafion d'un cours que les efprits animaux peuvent prendre en divcrfes parties, fuivant les en- ou qui a la moin- dre teinture des principes fur lelquels cette opinion cft établie n'aura ja« nais la moindre penlee de former cette rcponi'e, car il s'agit de fçavoir là dans les animaux il y a quelque cho- ie de femblablc a ce que noftrc expé- rience nous faic éprouver. Si bien q«e je ne vois pas qu'il puifle tom- ber dans l'efprit d'un homme unpea iailbnnable , d'appréhender que l'oa dife un jour , que tout fe fait dans Thomme par pure mechaniquc com- me dans les Bêtes > puilque ce l'eroit la mefmc choie que d'all'eurer que iUiomme ne pcnfc point, ce qu'on. des ïïêtêf. gy ûc dira jamais fans penlcr, $c partant qu'on ne pourra jamais dire. Si l'on içavoit encore qu'avant non:? être mis en peine de chercher s'il y avott des Bêtes au monde , nous avons' reconnu en nous l'exiftence de deux fubllances dilïerentes, l'une deiquel- les nous avons appellee efprir, ScTau-- tre corps ; 6c que nous avons efté convaincus que toute la nature de l'efprit coniiitoit à penier, & toute- colle de la matière à eftre étendue: fibien que quand nous fommes for- tis en fuite hors de nous-mefmes,: fçachant d'ailleurs qu'il n'y avoit au- cun principe, l'pii-ituel dans le corps des Bêtes , nous avons conclu fana peine qu'il n'y avoit aufli aucune pcn- lëe , puifque tout ce qui penfe elî cfprit : 8c nous avons.été d'autant plus confirmez dans ce fentimentj qu'ayant examiné tout ce qui fe palfoit dans les brutes, nous n'y avons rien veu qui ne pût être produit par le fexil corps j deforte que quand-même nous neuflions pas Iceu que les Bêtes na pouvoient aucunement penfer, nous eulTions néanmoins dit que puifque tout ce qu'elles font , pouvoit être • uoe fuite de la Iculemaciiiae deleurfi BS T^e l'Ame corps, il ne fa'.Ioit pas recoxirir fans nccciritë à une penfee, de l'exiftcn- ce de laquelle rien ne nous adùroit. Il me fcnible que ceux qui fçaveni tout ce qu'on vient de dire, ou tou- chant l'état de h qucllion, ou tou- chant nôtre fentiment, n'ont pas le moindre fujet de craindre que l'on pouiTe un jourlachofe julques à nier l'amcde l'homme : &il faut afleure- ment que ce procédé parte d'un cfpric de calomnie qui tâche de rendre une opinion fufpccfte 6c odieufc , lorsqu'il ne peut pas l'affoiblir par la force du raifonnement , qui cft la fejale voye- légitime de combatre un fentiment en bonne Philofophie. Il eft confiant enfin que f\ l'on ne fçait ni l'état de la quellion , ni nô- tre fentiment, on eft obligé d'avoiier que c'eft être bien téméraire que d'o- fcr décider d'un point que l'on n'en- tend pas , 8c dont il ci\ par confc- quent difficile de parler fans dire bien des choies contre la raifon Se contrô- le feas commun. Jts Bêtii. tj CHAPITRE XIII. Oh l'on répond atix raifonsdnpe^ re Par die s , aile ^né es dans fon' Livre de la connoiflance des Bétes. LE Père Pardies dans fon traite' de la connoilTance des Bêtes établit pour fondement de toutes les raifons qu'il avance Se de toutes les répon- fes qu'il donne aux objecftions qu'il s'étoit faites, qu'il y a deux fortes de connoiflances , les unes fpirituelles 6c les autres matérielles. 11 dit que les premières renferment , non feulement la perception de leur objet, mais qu'el- les font encore que nous nous aper- cevons de cette même perception ; tellement que chaque connoifTance fpirituelle ell eirentiellement reflexive^ fur elle mefme. Les matérielles au contraire , dit--, il, ne renferment aucune reflexion > fur elles mêmes, 8c nous ne pouvons point quand nou- en avons de cette' iaxtc, nous rendre conte de ce que W De P'Ame nous faifbns, ny même fçavoir que nous les ayons. Pour ne tomber dans aucune équi- voque touchant le mot de refléchir > il eft bon de fçavoir que nous pou-» vons quelquefois réfléchir fur ce que nous faifons, 6c pour lors h premiè- re pcnfce que nous avons fe fait non feulement apercevoir , mais une fé- conde prenant i.1 première pour ob- jet , il arrive que nous connoitîbna- beaucoup mieux fa nature par cette fnfpccflion rcùciée, d'autant que cet- te pre^miiere connoiffance rcndoit prin- cipalement fon objetpjeicnt à l'amc^ & par làiefaifantfentir avertiflbit de" fa prefcnce : mais cette féconde quij n'.i d'autre objet que la première,'» nous la fait voir aufli vivcinent qufc^ ia première faifoit voir fon objet ;i ainli il ne faut pas croire quechaqilc' penfe'e ibit fuivie d'une fccontle qu^,^ la fafl"e connaître , car ccire-cy devroit ' en avoir une troiheme , & la cHofc leroit à l'infini ; mais nous alfeurons feulement .ellant convaincus parnof- tre propre expérience , que toute pen--. lîe fe fait fentiràTamc, iwn parau-- cup retour verit:iblc fur elle menue, jiuiâ diicûcmcnt Se iinmedl^icciacASt tiès liêies. f 9 par ih ieule prcjfcnce : ainfl quand je rois, ma vifion fait fentir qu'elle eft» fans qu'il {bit befoin d'autre chofc . & chacun peut beaucoup mieux en cflre convaincu en fe confultant foy- melme , que par toutes les paroles qui dans des matières aulfi lîmplesSc aulll délicates que ce'ies-cy ne fervent bien fouvent qu'à lès obfcurcir. Apor- tons néanmoins quelques unes des raifbns qui peuvent nous confirmer dans ce fentiment» En premier lieu, pour affûrerque nous avons des connoiflances fenli* blés Se des déterminations qui en fonc des fuites, il femble évident que nous devrions en avoir quelque expérien- ce , ce qui néanmoins ne fe peut pas • car il ell de la nature de ces penfées matérielles que nous ne nous aperce- vions pas de les voir quand elles font en nous; d'où il eft certain que no* ftre expérience ne nous peut donner aucun témoignage de l'exiftcnce do ces prétendues perceptions feniibles,. puifque fi nous les fentions, elles fe- roient par elle? mêmes fpirituelles. En iecond lieu , ces peni'ées (ont- tout-à-fait inutiles pour l'éclaircifie^ méat des difficultés qu'on veut de- ç* "DelAmt mC'ler par leur moyen, car à quoy ll-rvcnt-elles pour rendre railbn de la juilerTcdes mouvemens que nous f;\i- ibns pour nous empêcher de tomber en marchant fur une planche un pea étroite ? ces mouvemens Ibnt ména- gez avec plus d'artifice que li la plus lîne mechanique avojteule foin de les diriger : nôtre ame toutefois n'y a point de part , & toutes ces actions ii bien fuivies.&c qui ont une liaifon il neceflaire avec leur fin , prévien- nent toujours les lumières de nôtre entendement , 8c n'attendent jamais \cz ordres de la volonté. On prétend néanmoins que nous ayons pour lors de ces connoifTances & de ces déterminations qu'on ap- pelle l"enlîbles> mais il n'eftpas diffi- cile de voir qu'elles ne font propres à rien dans de femblables rencontres, •ar elles ne nous découvrent pas le danger que nous courons de tomber: ce n'eft point dans la veuc d'éviter ce danger que nous faifons jultement tout ce qui peut nous en garentir ; ces penfces infenfiblesnenous apren-r nent pas qu'en éloignant certaines par- ties de noftre corps de fon centre de gcfamcur, £c les portant duc6tc-op« Jts Bêtes. ci pofeà celuy vers lecue! nous penchons, nous nous retiendrons en équilibre; ce centre meime , & le lieu où il cft, nous font tout-a-fait inconnus, fi bien que fuppofant mefmecesconnoiifan- ces matérielles, la difficulté demeu- re au moins aulTi grande qu'elle eftoit auparavant : car il s'agit toujours d'ex- pliquer pourquoy dans l'ignorance où nous fommes de toutes les chofes dont je viens de parler, nous ne bif- fons pas de faire des aftions qui ont une 11 grande proportion gc un ra- port fi jufte avec le befoin que nous avons d'éloigner tout le corps du cô- té vers lequel il penche pour nous garder de tomber ; c'eftoit pourtant cette difficulté qu'il faloit dénouer , en nous faifant voir que par le moyen des ces penfécs matérielles on pou- voit la refoudre ; mais bien loin delà, elle conferve toute fa force, & il eft impoflîble de la déveloper fans re- courir à la machine du corps. En troifiémelieu cette doctrine ne donne aux Bétes que de ces penfécs. fenlîbles que l'on a fans le fçavoir, de forte qu'il eft vray de dire qu'en f râpant rudement un chien, on luy caufe une grande douleur qu'il ac:; ^1 Del'ylme relient pourtant pasjôccemefmcanh- ma! après avoir demeuré trois jours fans manger a une raim demei'urea fans qu'il s'en aperçoive , ni qu'il en fciche rien , non plus que de ce qui fe pafle dans les chiens qui font à cens lieiies de luv. C'eft unechofe afiTircmentplaifan- tc de voir qu'on nous objetle l'amour qu'un chien a pour fon mairtre , les cmprcflemens qu'il témoigne à le trouver, & les carciles qu'il luy fait après l'avoir heureuiement rencon- tre : êc qu'après cela l'on Toit obligé de foûtenir que ce chien a de l'amour làns i'entir qu'il en ait, 5c qu'il eft emprelle , qu'il careflc , &c. quoy qu'il n'en fçache rien du tour. Psut- on concevoir que cet animal foit por- té à courir vers fon maître par une connoifl'ance véritable qu'il a de luy, far: fçavoirqu'ilapercoit fon maître, & lans qu'il éprouve en mel'me temps la force de la détermination qui la porte vers luy? comment peut-il dé- mêler cet homme de cent autres qui luy rclVemblent fans apercevoir qu'il le voit, & allùrcr intérieurement, c'ell celuy-làccnon pas un autre qu'il £duc aller carcifer : ce comment tù» des Bêtes. ^j Te tout cela i'aus l^avoir qu'on lé fait? Un agneau qui aperçoit fa merc à dix pas de luy, ou qui voit cent au- tres brebis plus pros ou plus loin, peut- il avoir alors le rnefmefentiment que nous , Se être déterminé en vertu de cette viiion à aller vers elle plutôt qu'ailleurs fans s'afîurer qu'il faut al- ler de tel coté 5c non pas d'un autre, à telle diûance.Sc en tel lieu où eftU brebis fa mère? ôc peut-il former tous ces Jugcmens, qu'il voit la mè- re > en te] lieu , 6c à telle dillance , &c. car comment la reconnoi lire par- my tant d'autres, 8c aller à elle plu- tôt qu'à aucune autre brebis, fans -dire mentalement : oiiy , c'eft celle ^ue je cherche, &cc. 8c comment le ilire fans le fentir 2c s'appercevoir qu'on le dit ? 11 eft tres-afluré qu'on ne trouve -rien de femblable dans nous , 8c il n'y a perfonne qui ne foit très-bien per- iuadé qu'il nefcnt jamais de douleur fans le fçavoir : c'eit à dire qu'il n'eu fent jamais fans en fentir : car n'eft- il pas vray que tout homme fol ou fage , fçavant ou ignorant affurcra toujours qu'il n'a aucune douleur dés le moment qu'il ne s'apcrccvm pas d'en avoir ? & quelle lubtilitc d'efprit nous fera comprendre que nous puilVions avoir un Icntiment de Ibif fans fcntir que nous avons foif ? par quelle force d'imagina- ion , ou par quelle élcvarion de génie concevrons-nous qu'il eft poffu ble que nous avons de l'amour , de la haine, de la joye, de la trillefTe» desdelirs, Sec. que nous ayons dis- ^e, ou quelqu'autre animal que ce foit, toutes ces pallions actuellement, lans.nous en apercevoir & fentir que nous aimons , que nous haïflbns* &c. il n'eft aflurément point de pro- pofirion , quelque oppofee qu'elle pa- roilTe à la lumière naturelle , à qui nous ne donnions les mains plus fa- cilement qu'à aucune de celles que l'on vient d'avancer. La railbn de cela eft que la dou- leur , la foif, la faim, &c. Et tou- rtes les pallions ne prcfentent propre- ment à l'ame aucun objet différent £ij «.oo De PAme puilque nous foûteaonsl'exijftencc de bien de chofcs qui nous pafl'ent , com- me la divilibiliié de la macicrc à l'in- finy , 6cc. car tout ainil qu'un hom- me quiauroit ctcnourry toute fa vie dans, les mines, voyant un cachet imprimé fur de la cire , ne pourroit pas concevoir ce qu'il y a dans le mé- tal qui le rend capable d'imprimer ces ngurcs fur un morceau de circ^ quoy qu'il ne doutât pomt qu'il n'y eût quelque chofc de matériel qui fk cet effet , de la 2ncfmc façon nous ne devons pas douter de l'ame con- roiOantc des bûtes , démontrée par ies effets, quoy que nous en ignorions la nature. Ceux qui auront lu ce qui précè- de cecy, verront affcz que l'on n'a point fuppofe, mais prouve que Dieu j)ouvoit faire des animaux tout-à- fait icmblablcs à ceux que nous voyons , <]ui n'euffent dans eux aucune ame capable de connoiftrc , après quoy l'on a fait voir qu'il l'avoitfait, puii- qu'il l'avoit pu faire. Or il n'en cil pas de mefmc dans lafiippofition qu'on nous objcâequi cil manifeflcmcnt fauffc, puifqu'cU le renferme l'cxillcncc d'une chofc des Bêtes. tr>t in'c<încevable , fçavoir l'ame connoif' fànte 8c matérielle des Bêtes dont nous ne fçaurions avoir d'idée qui noua là rcprefcntc. Cette fuppofition efl outre cela plus difficile, car h producflion de ce pré- tendu principe qui pcnfe dans les ani- maux, eft quelque chofc de plus ca- ché Se de plus myfterieux que les myfteres meimei Ibn union en fuite avec la matière, la manière dont il agit fur le corps , fa divifibilité , ou fon indivifîbilité , font de* difficul- tez infurmontables, dont onfe char- ge dans cette hypothefe. En dernier lieu elle eft moins iimple, car outre tous les organes de la machine des Bêtes & leur arrangement merveil- leux, il faut ajouter cette forme con- noiiTmte pour grofllr par fon enïre- mife le nombre des difficultez que cette matière renferme. On voit aflez par tout ce qu'on vient de dire, que noftre fenîimcnr n'eft point une fuppofition, & que l'opinion contraire ne conllfte qus dans une hypothefe que l'on nefçau- roit ni concevoir ni Ibûtenir de quel- que codé qu'on la tourne. Pour ce qui regarde l'exemple di; E iij 'loi Del'j4me mouvemenr, on n'a jamais avance qu'il ne fût quelque thofc de corpo- rel qui furvint de nouveau aux corps en particulier qui commencent à elîre mus, maiscemouvemcnr eft une fa- çon d'être que l'on conçoit tres-clai- remcnt dans la matière Se qu'on ju- gcroit mcfme pouvoir !uy convenir, quand on n'en auroit jamais vu dans aucun corps, au lieu que cette amc prétendue des animaux eft une fub- ilance dont nous ne concevons point le raport qu'elle peut avoir à la matiè- re, Qu la matière à elle. Quant à l'ouvrier qui travaille aux mines s'il a tant foitpeu de fens com- mun , il verra fort bien, première- ment, que le métal tout dur qu'il cil f»eut recevoir ditTerentcs figures par e moyen des parties qu'on en peut enlever, ou par celles qu'on peut en- foncer, de forte que fçachant en fé- cond lieu que la cire eil molle, il com- prendra ailément que li l'on applique une pièce de rnetal qui foit figurée fur delacire, quelques parties de te- luy-là avançant plus en dehors que quelques autres, ce fera une necelfi- té qu'elles pénètrent plus avant dans telle- cy, Se que de cette fà(^on lacire des Bêtes loj reçoive !cs cnfoncemens Se les éléva- tions qui font dans la pièce de nictah en quov conliflelagravcure: car tout ce qui vient d être dit peut-être fa- cilement connu par l'hommedes mi- nes quoy qu'on ne le fuppol'e pas grand connoiffeur , puifque ce ne font que des fuites de la dureté du meta! & de la moUcffe de la cire qu'il con- noir. iMais l'ame des animaux eil au de- là de toute imagination, &il eftim- polfible que l'on déduife de l'idée que nous avons d'une fubilance matériel- le qu'elle puifle penfer : outre que nul rafinementde Metaphylique n'ex- pliquera jamais ce qui rend cette ame des Bêtes, qui n'eft compofée d'au- cune matière, pas même du plus petit de tous les atomes, ce qui eft,dis-je, qui la rend matérielle , puifqu'elleeft un être 8c une fubflance qui n'a pas un grain de matière. £iii/' I04 I>t l'Ame CHAPITRE XIV. Oft r on fait voir qttil ejl impof- fible de donner aHCune dtjferen^ ce entre nos âmes cr celles des Bctes d^ins l'opinton commune, FAifbns voir maintenant qu'on ne fçauroit prouver en aucune façon dans l'opinion contraire, qu'il y ait de la différence entre nôtre ame 8c celles des Bêtes, & que ft l'on fuppofe que la leur foit matérielle Se fujettc à U jTiort, la nôtre fera de mefme condi- tion , où que fi l'on veut foûtenir que la nôtre cft fpirituelle & immortelle relie des animaux participera à ces deux avantages. La marque la plus ordinaire & la plus commune que l'on aporte de la diverfirc de nos âmes d'avec celles des Bêtes, eft la raifon que l'on fuppolè que nou: avonî 8c qu'elles n'ont pas; voyons la bonté de cette preuve. Premièrement raifonner n'eft en nousqu'unc imperfection 6c une mar- que fcndble du peu d'étendue dcuos destéte:, lof lumières 8c des bornes étroites de nô- tre entendement : car plus noftre in- telligence fera vafte , moins railbnne- rons-nous:de forte que les Bêtes pour- roient avoir une ame dont les connoif- fances eftant en aufli grand nombre que les nôtres , n'auroicnt pas be- ibin de raifonner r Se verroient d'une feule vûë 8c par un feul regard tout ce que nous avons befoin de décou- vrir par le raiibnnement. Secondement, raifonner eft parve- nir à la connoiffance d'une chofc in- connue parle moyen d'une chofe con- nue, en lorte que la dernière nous fer- ve de miroir pour reprefenter lapre» miere, ou de degré pour monter juf- ques à elle, ouplûtoftdelunetted'a- proche pour la mettre à la portée dt nôtre efprir: or il eft afleuré que les Bétes font bien fouvent cela , éc pour le prouver. On raporte que le mulet d'un fàu- nier, qui eftoit obligé depafTertous les jours une petite rivière, bronchx un jour dedans lors qu'il étoit char» gédefel, lequel étant mouillé fon- dit le long du chemin & diminua pai- ce moyen le fardeau du mulet» qui s'apcrcevant avec phifir de ce fouli- E V to6 De r Ame gement n'en perdu pas le foovcnir, car le lendemain fans nulle necelVite il fc coucha de Ton plein gré au milieu de la rivière pour mouiller derechef le fcl qu'il portoit , & ie décharger d'u- ne bonne partie de fon poids. S'il n'y a pas là du railbnnement l'homme n'en eut jamais ; car en pre- mier lieu le Mulet bronche dans l'eau, mouille le fel qu'il porte, &: n'en cft plus fi chargé: voilà ce qu'il connoit 6c ce dont il eft afleurcpar l'experiencci mais la rufée Bête ne s'arreile pas là» 8c jugeant par ce qu'elle fçait, de ce qu'elle ne fçaitpas, elle raifonneain- il: Toutes les fois qu'on employé une mefme caufe neceflaire dans les mê- mes circonflances elle doit produire le mefme effet i donc puil'que le fel moiiillc fe refout en eau ik ne pefe plus tant > fi je le trempe derechef dans l'eau en me couchant dans la rivière, comme la piemierc fois, le même ef- fet devra s'enfuivre, 5c j'en feray fou- lage :li bien qu'il découvre par ce qu'il fçait ce qui luy doit arriver, 8c voit une chofe inconnue par une con- nue. Cet exemple dans toutes fcs circonftances cft inexplicable par une ame , fans dire qu'elle railbnne > mais desBêtts. tàj parce que l'on pourroit révoquer en doute ce fiiit , prenons en un-aulrc plus familier Se incontcltable. Un chien do chafTequi mange une perdrix au lieu de la porter au chaf- Icur qui la tuée, eft bien battu pour ce fujet j mais le lendemain en pareil- le occaiion le fage chien porte fidel- Icment la perdrix à fon maître Tans y avoir touché, quoy que la tenta- tion ait efté grande, l'objet prefent 8c ia puilTance bien dilpofée : Il faut en vérité que cette ame ait un grand empire ilir les appétits , 8c qu'elle fè poflede entièrement pour s'empêcher dans ces rencontres de luivre fon pen- chant naturel, auquel elle nefçauroit s'oppofer fans raifonner ainfi : Je fus hier battu pour avoir mangé un oi- feau femblable , lors qu'on vouloit que je n'y touchafle point, donc je feray encore battu fi je fais la mefme cho- fci ii bien qu'il vaut mieux fe priver du plaillr de manger cette perdrix, que de s'expoferàla douleur quceau- feroientles coups de bâton que je ne puis éviter fi je mange aujourd'huy celle-cy : tellement qu'il découvre ce qu'il ignore par le moyen de ce qu'il fçait. Onpafîe une infinité d'au- E vj io8 De l'Ame très exemples qui fuffiroient pour faire un gros volume , car chaciin en peut faire mille expériences tou* les jours. Quelques-uns avoiieront que les Bê- tes railbnnent dans les cas particu- liers, 6c déterminez, mais ils diront que leur raifonnement ne s'élève ja- mais aux chofes univerfellcs 8c déta- chées des circonftances individuelles: & c'ell une ièconde preuve de l'avan- tage que nous avons fur les Bêtes aufauelles on n'attribué aucune con- noiflance générale. Premièrement, je ne conçois pas comment on pourra faire voir parla jnoindre raifon pofitivc , la vérité de cette llippolition, qu'on peut nier auflî facilement qu'elle a été légèrement avancée. En fécond lieu, pourquoy eft-ce qu'un agneau qui n'a jamais vu le loup, fuit auH'i bien à la veuë d'un grand que d'un petit, 8c d'un roux que d'un brun , ii ce n'eft parce qu'il a une idée univcrfelle du loup en gê- nerai, qui lesreprefcnte tous, &qui le détermine à la fuite à la prefcnce de chaque loup en particulier? C'eft Ign iollin^ qui le tïi( fuir dira quel" des Bêtes toj que ignorant, carleplus fimple pay- lan n'eft jamais court là-defTus , ôc a toujours la mefmc réponle prête : mais de bonne- foy qu'efl-ce que ctt inftinft ? i\ l'on veut dire quelque cho- fe de clair & que tout le monde en- tende, il en faudra revenir à la ma- chine. En troifiéme lieu , la première fofs qu'un chien s'eft aproché trop prés du feu, il s'eft brûlé, la deuxième de mefme 8c la troifiérae aufll ; mais cet animal remarquant que tous les corps femblables au feu faifoient le meime, il a tiré cette confequence iiniverfelle : donc tous les feux font chauds 6c brûlent : ce qui a fait qu'il ae s'eft plus aproché d'aucun feu dans h fui^e de fa vie. Voilà juftement de quelle manière on prétend dans l'école que nous for- mons les connoifîances générales que nous avons êc qui font les fondemens de routes nos fciences. En dernier lieu on raporte contrenô^ tre fentiment un fait qui démontre que les Bêtes ont àes idées générales, le voicy. Un homme qui avoit un Elé- phant fort bien drefle luy commanda c'efl cet univcrfel quo on appelle cfpecc dans l'ecôle. des Bêtes. in En effet quoy que cet éléphant ait remarqué les circonftances particu- lières qui failoientque ces deux eaux n'eftoient pas une feule eau. il afalu pourtant qu'il vît aufl'icc qui lesren- doit femblables Tune à l'autre, com- me leur liquidité i tellement qu'il a formé une idée générale de cette qua- lité de l'eau : car s'il n'avoir aperçeu dans la liquidité de la première eau le raport qu'elle avoit avec celle du puis, il n'eut jamais efté déterminé a aller puifer de cette dernière, vers laquelle il n'eft allé que parce que la connoiflant femblable à l'autre, il a jugé qu'elle couleroit tout de même il le chaudron eftoit percé. 11 eft donc très-certain que fi les Bêtes connoiflent, elle font pourvues de raiibn Se forment aufli bien que nous des notions générales , quoy que peut-eftre elles ne perdent pas le temps à rêver fur l'univerfel à parte rei , ou fur les analogues : ce n'e/l pas un grand mal-heur pour elles d'eftre d'ac- cord fur ces matières 8c de s'occuper à des chofes plus folides que celles-là, qu'il eft toujours beaucoup mieux de n'avoir jamais fçcuës , que de les avoir aprifes pour 4' ' Voilà ce que l'on appelle parmy nous comparer les moyens avec la fin : car pourquoy cette Belle ne mon- te-t-clle pas d'abord fur la table d'un plein faut ; ce moyen eft plus firoplc / iii 'Bètfs'. 1 1 5 il eft prefent, 2c ne demande aucun détour 5 pourquoy, dis-je, ne s'en fert- il pas, iî ce n'eft parce que les ayant examinez tous deux, il voit que ce- luy qu'il choifit eft le plus propre 8c le plus affûré , 8c pour ce fujet il le préfère fagement à l'autre. La quatrième raifon qu'on avance pour nous élever au deflus des Bêtes, ell que nous fommes libres , 8c qu'il eft en noArc pouvoir de diïpofer de nosa(ftions comme il nous pîait , lés Beftes au contraire ne fuivent que des déterminations étrangères , elles ne peuvent jamais s'empêcher d^agTr quand quelque penchant naturel les a pouflces ; c'efl: d'elles qu'on peut dire avec vérité aguntur non agunt : en un mot leurs âmes font fi attachées a là matière 8c en dépendent fi fort , qu'il faut qu'elles (oient toujours pouflëes par quelque caufe étrangère qui faf- fe imprefiTion fur leur corps- 8c qui applique leur ame à l'aétion. Pour faire voir la fauffeté de cette raifon, je me fers d'un fait qu'on raporte contre nous 8c qui à mon fens eft demonftratit pour prouver que l'amcdes Bêtes eft libre. On nous op- p»fc qu'il efl impoflible d'expliquer |t4 T>eTAme par la feule mechaniquc les fincncs dont les chats fc fervent pour prendre les iburi.;. \h ne vont jamais mieiix à cette chaiïe que lors qu'ils ibnt plei- nement rallafiez ; Scce n'cit point U faim qui les y porte , au contraire c'eft de gaycté de coeur & par diver- tifTcmcnt qu'ils vont à cette efpecc d'aflaut. On remarque qu'ils le pla- cent en un endroit de la chambre où ils ne puiiïent pas être aperceus des fouris, iur lefquclles ils n'ont garde de courir d'abord qu'elles commen- cent de paroître; mais s'oppofant fa-i gement au mouvement que cet objet excite en eux, ils tiennent ferme pour attendre que la fouris fc foit allez écarlée de fon trou pour n'y pouvoir pas arriver avant qu'elle ait été prife ; ainfî d'abord qu'ils jugent qu'elles ea ibtlt aflez éloignées, ils ne manquent pas de les atraper, Se de s'en joiicr çn fuite bien fouvent. De bonne foy les chats font d'é- tranges Bêtes, ils font apparemment inllruits en bonne école, <;< l'on a grand loin de les rendre fçavans en cette guerre. Un chat donc ne chaf- {e aux Iburis que quand il n'a nulle- ment befoin Ue manger j 2c par coa- des Bétes- 1 1 j" fcquent c'efl de luy-mêmc qu'il s'y détermine. Se Ion ame fe porte fans cftre poufiee par quelque caufe étran- gère à aller prendre le plaiiir de la chafîe. Cet animal choiAt cette ocu- pation entre mille autres qu'il pour- roit prendre avec plus de facilité, li bien que fon ame eft libre dans ces rencontres : il va enfuitc fe tapir en un coin de peur d'être aperçu. Pourquoy dans ce coin plutôt que dans tout au- tre endroit? n'efl-ce pas par fa propre volonté qu'il le choillt ? lafourislbrt en fuite de fon trou Se ne s'en écarte que tres-peu, mais le chat ruie de- meure immobile Sx. refifle fortement à l'impreflion que lafouris fait fur luy, qui le pouffe Se l'attire à elle, fon ame qui fe poflede , arrefte tous ces mou- vemens, & attend l'occafion favora- ble pour fe déterminer à courir fur fà proye, qui ne fçauroit s'écarter du lieu de fa retraite autant que le chat le fouhaitte, qu'elle ne foit prife. Si l'on n'appelle pas tout cela eilre libre à agir 8c à fe déterminer de fon fond, nous ne le fommespas aufll. Enfin , ou ce chat dans cette occa- fion,&: par confequent toutes les autre; Belles dans de pareilles rencontres fe 1 1 i Df ryfwr dctcrminrnt d'elles-mêmes 5c agifTcnf par choix & avec difcerncment , ou bien leurs amcs ont bcfoin d'être tou- jours poufTccs & aplicjuees à l'aéVion par qT.ie!quc csufc étrangère j fi elles ont ce premier avantage elles font li- bres, capables de bien S: de mal , dt mérite ?<: de démérite, de punition & de recompenfe : il n'y a pas de l'a- parcnce que perfbnne aime aficz les Bctes pour foûtcnir cette opinion. Si au contraire elles font dans le dernier état i'ay ce que je prétends, carcom- mc dans toutes leurs aâions que l'on raportc contre nous il n'y a de difficul- té qu'a donner des caufcs qui remuent les refTors de la machine pour la met- tre en mouvement, ou, ce qui revient au même , qui déterminent les efprits animaux à prendre leurs cours dans les nerfs & delà dans les mufclcsne- ccfTaires pour exciter Icsmouvemcn* Jans trou- ble & fans rébellion. Trouve-t-on par- mi nous une prévoyance égale à cel- le des fourmis ? en un mot le necei- faire ne manque jamais aux Bêtes, :& elles ne fe mettent nullement en ?peine du fuperflu, en cela plus heu- -reufes que nous , de pou\'oir metu- -rer leurs defirs à-leursbefoin>. Pour- •quoy nous vantons nous de nos pa- lais magnifiques, £c denos repas fomp- itueux, qui ne font que des marques vilîbles de la corruption de nôtre na- ture,8cd'aderéglerhent de nos delîrs? -Les animaux vivant fans ambition, êc cela fait une partie de leur bon^ ■heur , ils font fans avarice, & c'eâ ■en quoy conlifte cette tranquillité, & ce repos agréable dont ils joUiffenti •les Bêtes goûtent les plailir^ de la vie (fans peine, faus Crimée Se fan-i reraors; acniÎQ icuraroe modère ïe:^ pafiioai;. ttt De PAme règle Ces fouhaicsôc les proportionne à la necelTité 2c au befoin de la natu- re ; ce qui dcvroit bien plutôt don- ner lieu de leur porter envie, que de tirer des fujcts de vanité de ce qui n'eft qu'un témoignage de nôtre toi- blcfle> & d'un delbrdre dont il tau- ^roit rougir dehonte^ de confulicn. En fécond lieu quand nous accor- derions qu'il y a une grande dift'eren- ce entre nos âmes & celles des ani- maux , pourroit-on conclurre de là <|ue les nôtres font fpirituelles & les leurs matcriellesPnullemenr, purce que nous femmes certains qu'il y a divers degrcz de nobleiïe 5c de perfection entre les efprirs 6c entre les âmes ma- térielles > fi bien qu'il fe peut toujours faire, ou que nos âmes foient matc- liellcs comme celles des animaux , ou ^ue ces dernières foient (pirituellc* comme celles des hommes :carladil- tance qu'il y a de Dieu à nous eft in- concevable , & plus grande infiniment «jue celle qui elt de nous aux Bctcs. cela n'empêche pourtant pas que nous ne Ibyons dcse(prits Se luy auflî , (Deu4 jpirttus rjl^.i ) donc cette prétendue différence entre nos âmes 8c celles ilesBcte« ne moaucra jamais que ccL* îles Bêtes. îij Its-cy nefoient auflTi-bien fpirituellcs que les nôtres , mais leur efprit fera moins grand , moins vafle 6c moins éclairé. En troifîéme lieu, fi quelqu'un vou- loit aflùrer que nôtre ame eft matériel- le comme la leur, il n'auroit qu'à dire qu'elle eft un peu moins engagée dans la matière, qu'elle eft plus fubtilifée 2c plus épurée ; car la différence qui fe rencontre entre un homme ftupidc & un linge, nefemble pas fi grande, que celle qu'il y a entre ce dernier & un ver de terre j donc, fi l'inéga- lité de perfieétion qui eft entre ce» deux Bêtes n'empêche pas que leurs âmes ne foient toutes deux materiel- lesjcelle qu'il y a entre nous & les Bêtes ne fera pas que les nôtres ne le foient auffi. Cette réponfe pourroit eftrc confirmée par le fentiment de laSor- bonne* 6c de toute l'école de S. Tho- mas , qui croient que la différence qui fe trouve entre les efprits des hommes ne provient que de celle de leurs âmes. En dernier lieu, ne peut-on pas répondre arec beaucoup de vraj- * Si quis dixerit anitnam luà* itnii I7î« Ghrtjit ejje ^aHaUfn,error. Fij j-i^. De l'Ame icmblancff , que toute lidiverfitéqirt le trouve entre nos avftions Se celles des animaux , ne vient que de celle qui •cft entre les organes de leurs corps 8c ceux des nôtres, ôcque fi l'araed'un •ilnge le trouvoit dans le -corps d'un iiomme, &l'erprit de celuy-cy dans le corps deccluy-là, nous ne le pour- rions nullement reconnoître ? car ii'eft-ce pas une vérité confiante que le changement fcul qui arrive aux or- ganes du corps caufe une étrange di- îverfité dans les opérations du même ionimc? 11 y a plus de différence entre un en- fant qui ne vient que de naîtreScle mê- me lors qu'il eft devenu grand quant auxaflionsqui dépendent de l'ame, qu'il n'yenaentre un homme 8c une Bct-e -. 2c n'ell-il pas vray que fi l'cxpc- riencc ne nous le faiibit voir tous les jours , -on auroit de la peine à fe pcrfua- dcr qu'un tics-habile homme, Ariftote par excmp!e,eût été dans l'enfance in- -tapablc même des aftions que fait .un perdreau qui vient d'éclorre ? 5i l'on coniidere qu'un lapin ou un autre animal l'auvage ne fonge qu'à hoiie , qu'à manger , qu'à dorrtiir Jes Béih. rîf & qu'à (Courir, on trouvera qu'un fin- gc a infiniment plus d'efpnt , & que les penfees font plus raifonnables Se> les oublia toutes deux dans là vieilleffe. Si un fort petit nombre de pores dans le cerv^eau vien- nent malheureulement à être bouchez- p.ar quelque humeur un peu trop grof- ùerc , nous tombons dans une apop.le-^ F iij ii6 D» VAmt yÀc, fans fentimcnt , Tans mouvemenf , te femblables plutôt à une mafic do chair informe qu'à une Béte viv.inte. Platon & un Iroquois fe refTemblent moins qu'un apoplèdiique 2t un fia» gc. Prefcntement fi quelque partifan de la naetcmpl'ycofe vouloit loûtcnir que toute la différence qu'il y a en- tre les opérations des hommes 8c ccU ks des Bêtes ne provient que de cel- le qui eft entre leurs corps , mais que d'ailleurs leurs âmes font égales: je ne vois pas ce qu'on pourroit ré- pondre aux r.iifons que l'on vient d'a- ▼anccr 8c qu'il feroit même aifé de propofer d'une manière plus forte ôc plus prcfl'unte. La fixiéme r.ii^bn par laquelle oft veut prouvei" que nos âmes font plus aobles que celles des Bêtes eft que nous voyons qu'elles font toujours attachées à la terre 2c à !t matière fans qu'elles aycnt jamais en vcuë d'autres plaifirs que ceux qui leur viennent par les fens : elles ne prcfe. tent point l'honnête au delcdiable; on ne voit pas qu'elles fc dépouillent de leurs propres intérêts en faveur d'au- uujr > jamai&lcs. aoimaiu aefe foot ab«' Jts Bêtes. iij ftenus d'aucun bien fenfible par princi- pe d'honnefteté; ont-ils mortifié quel- que-fois leurs fens ? s'expofent-ils à mille dangers ?fouffrent-ils mille tra- vaux & mille fatigues pour aquerir de la gloire & fe faire un beau nom dans le monde? bien loin de là, dit-on , les Bêtes ne courent qu'à ce qui touche les fens ; elles ne font emûës que par Us les objets qui peuvent contribuer quel- que chofe à la confenution de leurs corps, ou à les chatouiller par des plai- firs qui en dépendent. Remarquons eu premier lieu, que c'eft l'homme enyvré de foi-même qiii parle de la forte, mais s'il vouloit fe fai- re jullice . Se remonter ave' un efprit defînrereflejufquesàlafourre de tou- tes ces aétions que nous nommons hé- roïques, il la trouveroit étrangement corrompue, 8c démeureroit convaincu que le feul amour propre eft la fource de tout ce que nous faifons qui femble en partie le moins. Le plus grand fecret que nous ayons eft de nous cacher à. nous-mêmes, 8c de déguifer fi bien les motifs qui nous font agir, que nous ne puifTions les remarquer Qu'avec peine 8c démêler les réels- £( les v«mables d'entre les faux& F iiii uO Dtf rAtfte les appartns.Bienfouventcc quenouji croyons n'avoir été fait que par un- mouvement d'honnétcré n'cft qu'un' rahnemcnt ât l'amour propre, qui japorte tout à loy ,& qui ne cherche jamais mieux l'utile 6c le deled:able, que quand elle lemble Ics-fuïr en ap- parence. En fécond lieu paflTons cck, 8c ac- cordons à noftre orgueil tout ce qu'il' demande : li les Bêtes font aulfi vai- nes que nous, elles pourront avec au- tant de fujet s'attribuer les mefmcs. avantages: car ell-il rien deliloiiable que la fidélité des chiens qui s'expo» lent à recevoir mille coups plutôt que de trahir leurs maifires, qui prcient vjgoureufement leur dcucnlc, &fc mettent en devoir de mourir plutôt que de les abandonner? afl'curcment ils quittent pour lors le bien fenfible pour- s'attacher au ieul honnête , 6c l'on ne conçoit pas , i'\ les chiens ont une ame i 3uel motif de plaifir elle peut avoir ans ces rencontres perilleufes. N'en a- t-on pas vu dont les uns font morts de faim fur les corps deleurmaîtrcstucz,. 6c dont les autres le font jettezdansla ruer pour les foûtcnir au dcflbs de l'caiijSc empêcher qu'ils ne coulaflent à. 4ei Bêtes. n^ fond ? qu'y a-t-il de pl-us honnefte ciué ce que font prefque tous les ani- maux, pourladéfenfe, pourlanour- riiure.Sc pour l'éducation deleurs pe- tits, jufques à fc priver bien fouvent 4'alimens pour leur en fournir? dans quelle veuc pourroit-ce être , & par quel motif le fcroient-ils?airùremenC le plailir n'y entre pas ; car s'ils aban- donnoicnt leurs petits d'abord qu'ils l'ont nez, ou écios , ils s e'pargneroient beaucoup de peine, f-c joiiiroient de beaucoup de commoditez que ce foia leur dérobe. C'cft- l'inftinifl, #fra encore quel- qu'un, que i'Aurheurdc la nature leur adonné pour la confervation de l'efpe- ce par la multiplication des individus: voilà ce qu'on peut appeller parler fans s'entendre : carde bonne foy qu'eft-ce quecet inftindl ? e(l-ceunmode, un accident, une fubliance,ain efprit , un corpsrefl- ce quelcjue choie qui loit dif- férent de cette ame.ou non ? Il ce n'eft rien de différent, la difficulté fubfifîe toujours; fic'elf quelque autre choie, cenepcutrieneftre qiré ladifpoiition des organes &: l'harmonie d«s parties qui compofent leurs corps. Enfin, difent-ils, les Bêtes n^ s'é*- Fv r5o HtVuimt lèvent jamais à b connoiflance àe% cfprits, comme les hommes: or pour connoiftrc un efprit il en faut être un i donc nos âmes , qui y penfent bien fouvent, font fpirituelles & dif- férentes par confcquentdcs amcsma- tcriellcs des animaux. Premièrement , c'eft fuppofcr qu'il y ait des efprits , ce qu'on prétend qu'ils ne peuvent pas prouver, & par conlcqucnt c'cft fuppofer la qucf-'. tion. Secondement qui nous a afl"euré que les Bétes ne connoiiTent point les ef- prits, fuppofé qu'il y en ait? Un per- roquet nous a-t-il dit quelquefois, MefTieurs les hommes, vous avez cet avantage fur nous autres Bêtes que vous connoiflcz les efprits > & nous ne les connoiiïbns pas? Troifiémement , la plus-part des Philofophes n'affeurent-ils pas que nous ne fçavons pas pofitivement oc ^uc c'cft qu'être efprit, & que nous me connoiflbns rien que fous la forme du corps ? * ce qui eft une preuve écla- tante de i'aveuglement ou nous plon- gent nos préjugez, furlcfqucls on ne l^uroit faire trop de reflexion. * ïtrrmdtmrtrHm c$rj^ortaruPi>^ Caïf en vérité cette taçott de con- fiderer les chofes eft un étrange ren« verrcment d'ordre , 8c l'on ne doit point s'eronncr fi quand on en cft là* on ne peut jamais attribuer aux efprits que ce qui apartient aux corps , puit qu'on les conlidere feulement comme s'ils elloient effedlivement corporels. ( per modum rerum corporearum : ) Se tout ainli qu'en regardant un trian- gle fur le pié d'unquarré (per modum Î\uadrat't , ) on ne luy donneroit que es propriétés du quarré & nulle àcs- fîennes, qu'on ne peut voir que dan» fon idée, & non pas dans celle du quar- ré , de mefme il ne faut pas s'éton- ner il par cette manière de chercher la vérité l'on n'a jamais pu découvrir h véritable nature de l'efprit , & fi l'on n'a marqué l'ame qu'au coin di* corps i comme un peintre, qui vou- droit tirer le Roy d'Efpagne fur le portrait du »Roy de France , ne donneroit à fa copie que les trais qui feroient dans l'original 6c feroit ua tableau du Roy d'Efpagne qui repre- fenteroitleRoy de France, fans qu'il eût aucune reftemolance avec ce pre- mier, ficcn'eftpeut-eftre par hasard» aiiiil^ à bien plus forte '-aifon il arrive* F vj 1^1! DePAm»- Fa que tant que nous confiderercms les crprits fur les idées que nous avon*^ tics corps , nous ferons des efprits cor- porels, ou plutôt nousnelesconnoî- trons qu'aux couleurs Se aux enfeisTies du coyp<^. Mais ce qui eft encore tort llirprcnant e.1 . qu'après n'avoir donné auxelpriisqucdes attributs corporels qui ne içauroient les dillinguer des corps, Se fcaclianr d'aillea: s qu'ils ea dévoient être diiferens par quelque choie, on le contente de dire que nos amcs font ininf.atcrielles, qu qu'elles r se font pas maierielles: 6c quand on ilcmandecn quor connftelcurnature>. ceft à n ctre pas mitcricHes répond on,, ikl'eipritn» peut aller plus loin. Le.: Poète Epicurien n'en a jamais dit da- vantage,. ignoTAttir enim qiu (it iM- iurA auiou. Ksfire ame ejî an dtlà de touU^ ç, cennoijf.mce . f. JE.lLc c^tuconnoit tant , igporefon tjjtnct^ L'ejlrit.a i'effr:t rnipne cjl MO fro'- fondfecre! , Il fe totieke , il fefent , fans ffa-voir' et qu'il ?*?. Et ne ik;aii-(n pasauffi-bîen ce^ '^uc c'cit qucé/»/«, en dil'ant, oluri- fiï ce. qu: n'cil pM& un moulin .,2: dtsBêtti. î^yf v^nt^Csn" cette intelligence qu'on nous doniiedel'cfpritne nous apprend que- ce qu'il n'elt pas, 5c nullement ce qu'il elt. En un mot pour reponfc' gênera' e à - t-outes les preuves qu'on apporte pour démontrer la ipiritualité de nos âmes danslelentimcnt d'Ariftote ôcdeGaf^- fcndi, l'on peut dire que puifqu'il n'y a rien dans l'entendement quinedoi-- vefaconnoiflance à ce que nouscon- noifTons par les lens , & comme par ceux-cy nous n'apercevons rien qui ne- £oit matériel, il s'enfuit que nôtre ame île produit aucune action où le corpS' n'ait quelque part, ce qui eft même- parmy eux un icntiment généralement;, receu : car ils avouetft tous que l'ef- Çïit n'agit jamais fans le- corps, 8c qu'il faut que noilre ame dans toute» tes fpeculations fe tourne vers le cer- veau C fpectduntem oportet f^eculari phama/maîa , ) pour confiderer les- ijnages qui y ibnt peintes. Nôtre en- tendement à leur aviS'ne forme ja-- nwis d'idée fpirituellc que fur une co- pie matérielle que Ix phantaifie luy prcfenterfi bien que durant cette vie L'efprit de l'homme eft li fort engagé, dans la matiere.qu'il dépendd'clle daiu çouus ftti operatioos» - ^34 -^* l'Ame Or cette doftrine détruit entière- ment toutes les preuves de l'im- mortalité de l'ame : car comme la force d'agir des êtres créez n'eft qu'u- ne fuite de leur entncc, & que l'on doit rail'onner de leur nature comme l'on fait de leur force d'agir, il s'en- fuit qu'une chofe qui fera dépendan- te de la matière dans toutes fes opéra- tions en dépendra neceffairement dans fon exiftence, 8c par confequent elle fera de même condition i & puis qu'elle n'agit que dependcmment des organes'du corps,ellc ne doit auffi exi- Her que dependcmment de ces mêmes organes dans leur fentiment,fuivant un- àe leurs a: ces merveilleufes machine» pneumatiques 6c hydrauliques. N'efti ce pas une marque bien vifible de VeC- prit de l'homme que de joiier des in- ftrumcns? nulle Befle n'a pu encore l'apprendre, cependant par le moyen de l'eau on fait joiier des chanfons fur les orgues, on peut même y mettre les parties d'une mufique fort harmonieu- leicclaeftfurprenantSc femble exiger plus de connoifTance que les opérations Ut plus indullrieufes des animaux S i'4© DeTl/tme pciilbns aprcs cclaquc le feu , I^îr',* 5t l'eau entrent en jeu dans la machi- ne du corps d'une Bcftc, 2cc[u'i!sfont ménagez avec un artifice infini. La cauli qui fait que peribnnc ne croit qu'une horloge par exemple , ou quelqu'autrede nos machines ait une ame, vient en partie de ce que nous en découvrons tout l'artifice i & e;l partie de ce que nous neleurvoyons rien faire pour leur confervation fie pour leur bien particulier, mais fcur ment pour nos ufages: car une mon- tre ne marque pas les heures pourle beibin qu'elle en a ,mais bien loin de U. elle s'ufe & fe démonte en le fai- iànt. Dans les ouvrages s de n'avoir recours qu'à l'habi- leté de 1-homme pour expliquer l'ar- tifice , Scia jufcefre des mouvement 4' une horloge. Tellement que s'ilfe pouvoittroa- rer un ouvrier affez habile pour faire ixne machine quinefc mcutiquepour ■fe conferver, une montre par exem- ple , qui fe montât en fonnant les heu- res, Se qui réparât, en les marquant, la perte d'une partie de la matière ^ont fes roiies feroient compoiees , qu'on peut fuppoferfediillper conti- ;nuellement, je m'afTure que bien de gens feroient difpofez à luy attribuer .une ame qui voilleioit à fa coufci"- 14^ De r Ame CHAPITRE XVL Des opérations merveilleufes quf HOUsfaiJoHS independemment de Car/u. SOuvcnons-nousfurtout de ne rictt attribuer a l'ame que ce qu'elle Kicfme l'çaurabien luy appartenir- II efl certain en premier lieu que quand nous lommcs en danger de tomber , nous faiions beaucoup de choies merveilleufcs pour noui en empêcher : car quand tout le corps penche trop d un côte, nous en éloig- nons d'abord les bras, ou la tcltc, pour faire une efpece d'équilibre, 6c les niouvemens que nous excitons dans CCS occalionslbnt li à propos, que le mcchanirte leplus éclaire n'ypourroit rien ajouter : tout cela pourtant fe fait fans y penfer. ôc il eft évident que nous {aurions donné !du nez terre avant que nour elbe déterminez d'a- gir en y penfant. En fccond lieu, quand par malheur nous ne laiiîbnspas de tomber malgré tout cet artifice, aous retirons d'à- bord le bras que nous avions écarté, & nous le portons devant la teftc. D'où vient cette précaution ? eft-ce que nous raifonnons dans ce moment , & que fçachant que cette partie eft la plus importante & la plus neccflaire a la vie, nous prenons la rcfolution d'en expofer une qui ne l'eft pas tant, f)our mettre à couvert celle là ? nul- cment nous n'y penfons point du tout, & nous y fongerions mefme en vaia dans ces rencontres , puiique l'on fc feroit cafle la telle avant que l'on eût pourvu à fa feureté en délibérant. En troifiéme lieu , combien peu de gens ont fait reflexion à la diver- ixté furprenante des mouvemens qui font; neccflaires pour la parole ? il en faut plus de vingt diÉferens pour pro- noncer un f'^ul mot : car fans conter ceux qui fervent à pouffer l'air des poulmons jufques dans la bouche, nous avons befoin tantôt d'ouvrir la bouche en écartant les lèvres , tantôt de la fermer en rond en les apro- chant, il faut hauffer, baiffer, plier & mouvoir la langue de cent façons * Sec. nôtre ame néanmoins n'a nul- * Voyez, là deffus Ledifcoursphyû^ que de la Parole de Mr.de Cordemoj. '^"'44 Ttèl'Ame ■îe part à tous ce* mouvemens , |& chacun expérimente afTcz . qu'en Vou- *Iant parler il ne fonge qu'aux paro- •Ics qu'il veut proférer. En quatrième lieu , dans les cho- ies que nous fçavons par cœur, nous ■n'avons qu'à nous déterminer a la pro- nonciation du premier mot, après quoy l'efprit s'apliquant à toute autre •cliore, l'on parle quelque-toit une . 'demy-heure , 8c l'on le trouve au bout d'un dilcours affea long fans le •f^iavoir. Que l'on cherche quelque chofe d'aufll merveilleux oc d'au (H •bien fuivi dans les Belles, 8c l'onfcru long-temps à le trouver. En cinquième lieu combien voit-on tous les jours de gens qui fe lèvent en dormant, 6c qui font quantité d'ac- tions furprenantes ? -L'on dit qu'un Boucher ie levoit toutes les nuits au •plus fort de Ton iommeil , & ulloit dans ibn écurie tuer des moutons & les préparer pour eltre vendus le len- demain : on ne trouvera jamais rien de li étonnant d.*vns les brutes. En lîxiemc lieu , que ne taiibns- ■ nous point par habitude? Un maître xle Juth après avoir commencé une 'pieccj la continue & l'achève, ta. des Bêtes. Xif fengeant à toute autre chofc : com- bien de di vers mouvemens faut-il pour cela? combien de cordes diifercntes cil-il belbin de pincer? Biea de gens après s'eilre misàtable mangent iàu* y pcnfer. La plus-part- de ceux qui ont une grande habitude à danfer, n'ont pas beloin de fonger à tous les mou\ c- mcns qu'il faut faire pour cela ,^ le ieul {on du violon les détermine oC règle leurs pas; Ci bien qu'ellant apU- quez à toute autre peniee , ils ne Liinent pas d'appuyer fur la poiive du pied, ou fur le talon , quand il ell nccellaire de glilîcr, de couper» de plier le gcnoiiil, d'aUer à droite, à gauche, d'avancer, de reculer, de tourner, .&c. fans que leur amc ait aucune part à lu determ;<:a:ion ce tous ces mouvemens li réglez ce li bien fuivis. Pour écrire mefme , comlrien de fortes d'agitations dilfcrentes don- p.on;-nous à la main ? perfonne n'y pcnfc pourtant , li ce ce u'ell ceux qui aprenentàlc faire: car foiigeons- nousàtourncr la plume en rond pour lin (? , à n'achever le to;;r qu'à demy pour un c , à tirer trois lignes y'unc G ï4<î De P Ame ccrraine longueur & dans une cer- tair.e diftance Se à les unir en Tuitc par le haut pour un /» ? fie ainiî de toutes les autres lettres- Il cft alVùré que û nous avions belbin de penfer à tout cela nous demeurerions un quart d'heure pour écrire une ligne : routes ces choies donc ne dépendent que de la difpofuion des organes , 6c l'ame n'y intervient aucunement. Si nous voulions conlîdcrer ce qui fe pifl'e pour la formation du corps d'un enfant dans le ventre de fa me- r2, nous tomberions fans doute d'ac- cord que tout ce qui nous furprcnd dans les Bcflcs n'elt rien en compa- raifon de l'artifice inimitable que ren- ferme en foy la machine du corps de l'homme. Car qu'y a-t-il de plus mervcilroK que la diipofition&î'ar- ■rangcment de fcs paitiei, ces os dif- tribucz avec tant d'indulhic pour être trommc les fondemens & les colom- r.cs fur qui tout l'édifice de l'homme devoit eue appuyé, les veines 8c les artères rcpanducs dans le corps pour y porter la nourriture , la vie 8c I^ chaleur en niémc temps ; les nerfs, les mufcles , les tendons, les veines Jjiftccsjcs veines lymphaùques.tant des "Bête s'. I4y d'autres tiiyiux infenfiMes, tant de iclervoirs ditterens, tant de glandes i en un mot un million de parties que l'anatomie nefcauroitdccouvrir , que les yeux ne Içauroicnt apercevoir. Se que l'imagination même quelque vaf- te qu'elle ibit ne peut jamais crabraf- ier, uneiîomach, unfbye,unerate, des reins , de petits baflînets dans ces reins , de petits filions qui mènent ù ces baiFinets afin que le fangpuilfe s'y filtrer oc s'y décharger des fero- fitez fuperfluës qu'il contient i un dia- phragme, des poulmons, un cœur, deux cavitez dans ce cceur , celle, qui contient le fang le moins fpiri- tucux 8i le moins boiiillant, plus min- ce &c moins épaifle que l'autre , le* enflions admirables de toutes ces parties dont la moindre a àts ufaget' pai'ticuliers Se ne peut êire ou dépla- cée ou corrompue fans un dérègle- ment confîderable de toute la ma- chine ? Sec. On n'auroit jamais fait fî l'on vouloit entrer dans ce détail, les maîtres de l'art y ont travaillé tou- te leur vie Se n'en' font pas venus à bout : Le cerveau fuffit pour occu- per les veilles Se les méditations de tout ce qu'il y 9. d'hommes dans le G i) 143 De i' Ame niondefans qu'ils puifTcnt bien dc/**- lopcr i'œconomie, le nombre Jk IVmv.- ploy de toutes les parties dont il eit compofc. Les yeux feuls font des chefs- d'cjeuvres que Ton ne peut .if- fez admirer : coirimc ce font les fe- ne/lres dans le lant^age de Ciccron, ]>ar lefque'iles 1 amc Jcvoit s'inltruirc de ce qui fe palfoit au dehor?, !;i nature n'a rien oublié de tout ce qui devoit crtrc employé pour 1,1 forriu- t;on d'une partie li neceifiire : ces tuniques 8c CCS humeurs y font difpo- fées quant à leur fituation , à leur (i- gure , & à leur confiftance avec un li grand artifice qu'il cft impodJble .à'y apoiter le plus petit changement fans détruire tout l'ordre de la vi- ilon. Il cd conllant cependant qu'aucu- ne ame n'a foHiic ni les yeux, ni au- cune autre partie du corps de l'hom- me : Car que ce divin ouvrage s'a- chève, ou par les feules loi.vdu mou- vemen- , comnîr l'a pretcnJu Def- cartes & comme ti a commence de rexplitjucr, foit que nous fuyons en abrégé dans les u-ufs que quelque? liou veaux Philofophcs pictcndentqua itos nicres ont d.ms la matrice, Se des Bêtfs 1 49 ^■e!!es ne fiRcnt que les couver 6c les faire éclore en devclopant leurs par- ties pendant les neuf mois qu'elles' portent l'enfant , comme il arrive à- une poule à l'égard d'un poulet ; foit enSn , comme veut l'école, que ce f portes qài s'ou- vrant du dedans au dehors permet- tent au iàng qui fc dilate en s'échau- fant d'entrer dans ua tuyau, qu'on- appelle artère pulmonaire j laquelle- le conduit dans les poulm.ons où l'air qui les remplit par la reipiration fert- à refroidir ce lang qui fortoit tropj échaufé du cœur, ou lui vaut quel- ques autres il s'y échaufe davantage. Far le moyen des parties nitreufesqus- air luy fournit, ou bien il le purgs' & fe décharge dans cet air des par- ties impures Scfuligineufes qu'il con- tenoit, comme la fumée fe décharge de la fuye en montant par le tuyau de fa cheminée : enfin quelque chan-- gement qu'il y reçoive, l'expérience nous montre que les poulmons s'af- foibliilant . loifoue l'air dont ils font ■ : t-4. De tAme pleins vient à en fortir , ils poufTeot le iang qu'ils contenoicnt vers le ven- tricule gauche du cœur, par un ca- nal nomme veine pulmonaire , où d'a- bord qu'il eft tombé , il s'échauffe 6c fc rarcfie derechef, deux portes qui font a l'entrée de cette veine fe ferment 8c ne permettent pas qu'il forte de ce colle là, pendant que trois autres valvules qui font à l'entrée d'un ruyau qu'on nomme aorte ou grande artère , s'ouvrent tellement que ce fang qui fe raréfie en s'échaufant en- tre dans ccnc artcrc , de laquelle il ne peut plus fortir, pour revenir au cœur, parce que les valvules qui en permettent l'ilTué ne s'ouvrent que du dedans au dehors. L'aorte d'abord à la fortic de la ca- vité giiuche dJcceurfedivife en deux branches , 1 une qui va en haut & qu'on appelle tronc ùiperieur de l'aor- te , bç iautre qui defccnd dans les parties balfcsSc le courbe un peu dans cette fcparation : ces deux branches it fubdivifant en une infinité de petits fameau:: portent le iang dans toutes les parties du corpr, d'où iî cfV rap- porté par les veines dans le ventri- cule drbir , du il s'épuileroit dans peu de temps, Se la mort fuivroit de prés cet épuifemcnt : mais il arrive que lors qn'il pafle le long de l'cftomach dans les artères qu'on appelle gaftri- ques , ce qu'il contient de parties tranchantes , 2c de 'a nature à peu prcs de celles dont le vinaigre eft compo- fë , trouvent là des porcs qui leur font proportionnez par Icfquels elles entreiit dans l'eflomach, ou elles pi- quent 8c ébranlent un nerf qui fait une cfpccc de couronne à fon orifi- ce lupericur. Il cil facile de voir que l'ébranle- ment de ce nerf eft d'abord conti- nué jufqucs au cerveau, ( car on ne fçauroit remuer un des bouts d'une corde tendue que l'autre bout ne le foit aufTi) ce qui le fait ouvrir dans, des endroits par oij les efprits ani-j maux venant à paflcr , coulent en abondance dans les niufcles des jam- bes, qu'ils enflent, de mefme que 1 air enfle un balon : c'cft pourquoy ils fc racourcilfcnt en s'élargiflant , & tirent à eux la partie où ils vonc (les ^ètef. i/^y at)OUtîr par un tendon qui y eft at- ■ taché : or chaque mufclcenayantun autre qui luy eft oppofé 5c qu'on ap- pelle antagonifte , il arrive que les efprits animaux eftant déterminez par le changement que le mouvement de ce premier excire dans le cerveau , à couler dans fon antagonifte , où il y a des valvules de cij^munication de l'un à l'autre, ils ouvrent le paf- fage aux efprits qui font danslemuf- €4c qui s'eft mû le premier, & les font entrer dans celuy-cy, ihferment en mefme temps l'ilTuë à ceux qui defcendent du cerveau dans ce der- nier : de là vient qu'il s'aeourcit à mefure qu'il s'enfle, 5c que le pre- mier s'alongc à mefure qu'il fe de- fenfle , 8c l'on juge facilement que ficela arrive fuccenîvement, le corps doit, eftre tranfporté d'un lieu en un-- autre : or toutes les fois que ce chien aura faim ( en prenant ce mot pour ' le fcul mouvement qui fe fait dans l'cftomach 8c en fuite dans le cerveau ) il fera necelTairement tranfporté de côté 8c d'autre. Si vous ajoutez à ce- la que plus cet animal manquera d'ai.- liînens, plus de parties acides entro-f îont dans l'cftomach , le fang en coa« iôo De l'Ame tÈnaiit davantage . car par les fré- quentes circulations elles fe dcvelo- pent Si s'éguilent en heurtant les unes contre les autres, vous trouverez que la" f^im de cet automate doit aug- menter à mcfure qu'if aura plus do beibin d'alimccs, ce qu'il fera qu'il fera plus fortement difpofe à cilre meu versdifferçns endroits, 8c à en aller chercher. Siippofbns après cela que ce chien trouve du pain dans foi> chemin, i[ e:! certain par leraport qu'il y a en- tic luy Se tous les corps quiluy peu- vent être utiles j que î'imprclVionque cet aliment fera fur fcs yeux en ébran- lant les filets des nerfs optiques, doit eilrc portée dans le cerveau , où eliè fera des ouvertures qui donneront pal' ùgc aux cfprits anhnaux pour cou- ler dans les mufcles dont l'aftion doit aprochcr le chien du pain , d'abord Iqu'i! fera arrivé prés de cet aliment les rayons qui continuent d'agir fur le cerveau par les yeux , le trouvant un peu différemment difpofe par le changement de figure de l'ceil qui s'alongc à melure que l'objet cft plus proche, ou les particules qui s'cxha- JcQt du p^in entrant dans le nc£ avec des 'Bêtes'. 361 lair de la refpiration plus abondam- ment qu'auparavant, obligent lese.C prits d'entrer dans les mufcles qui ièrvcnt à remuer les mâchoires &. à avaler les alimens. Vous comprendrez - aifément que ce mouvement des mâchoires pref- fant les glandes qui contiennent Ja falive & qu'on appelle pour ce lujet falivalcs , elle eft exprimée dans le palais où fe mêlant avec ce pain elle fert à en faire la. première diflblu- tion. Ce que je viens de dire ne paroî- tra pas difficile , fi outre le raport .qu'a cet automate avec tous les au^ très corps qui l'environnent, on re- marque aufll qu'il y a une tresgraxi- de harmonie entre toutes les parties dont il eft compofë, qui fait que lo cerveau s'ouvre fia propos pour pro- curer à ce chien. toutes les chofes dont il a befoin pourfon entretien. , Il pourroit arriver que cet animal ne trouvant rien fiar Ion chemin fe détournât pour entrer dans quelque maifon voifine où il y auroit de la vian- de , parce que les petites parties qui s'en exhalent continuellement par rimpreiîxonq^u' elles feront fur fon ncxf rôi De l'Ame olfatit & en fuite dans le cerveau, le dilpofcront à entrer où cil h vian- de plutôt qu'ailleurs, & comme une elpece de corde le tireront de ce cô- té là. Si nous confiderons en fuite ce que devient ce pain, nous le trouverons mêlé dans l'eftomach avec quelque ref- tc des alimens precedcns, qui eftant demeurez engagez dans les plis de fa membrane intérieure fe {ont aigris ôc fervent avec le fuc acide , dont j'ay parlé, à exciter une douce fer- mentation , par laquelle les viandes commencent à être digérées & ré- duites en uncefpece de chrême grilâ- tre qu'on appelle chyle. Cette vérité peut être confirmée par l'exemple de mille liqueur? qu'on a dans la chymic & qui boiiillonncnt d'abord qu'on les mêle cnfcmble. Le diaohragme fe hauïïhnt & fc baillant fucceffivcment dins chaque refpiration , prclTcreftomach qui cl\ au deflbus, Se oblige le chyle à cou- ler dans les inteftins qui n'en font qu'une continuation, la même pref- llon exprime la bile , qui eft dans la vciîculc du fie!, dans le boyau ap^- pelle <^W(^f;7«w ou clic excite une nou- des Bêtes'. 1 6^ vcîle fermentation en fe mêlant avec le chyle, par le moven de laquelle ce lue nourricier achevé de fe démê- ler des parties groffieres dont il eftoif encore charge, après quoy les plus^ fubtiles gliiïcnt & s'infînuent dans un nombre mfîni de petites veines i dont' les branches viennent aboutir aux in-- teilins, 6c defquels le mouvement vcrmiculaire exprime Se fait couler vers le fondement les parties groffie- res 8c terreftres qui n'avoient pas pu pafier par les pores qui mènent aux veines Ia£lées , ces veines par diffe- rens conduits portent le chyle juf- ques dans la veirre cave, oii circu- lant avec le fang il en aquiert la for- me infenfiblement : 8c c'eft par ce moyen que les parties de cette li- queur, qui fervent à la nourriture §c à la formation des efprits animaux font reparées : fi bien que de cette façon cet automate peut fubfifter quelque temps. Lors que les fonflions continuelles où les efprits anirnaux font employez en auront diffipéune grande quantité, en forte que le fang ne foit plus capa- ble d'en fournir fuffifamment pour tenir les parois des ventricules du cer» 1^4 "De l'Ame veau écartées & les file; s des nerfs t*(i- diis, cellci-là s'affaiiTcront infailliblc- incnt, &: ceux-cys'entrelafTcront , ce qui fera que lès objets extérieurs ne pourront plus rranfmettre leur aélion dans le cerveau , & ce chien dormi- ra pour lors jufqucs à ce qu'il Ce foit formé de nouveaux efprits animaux, qui le mettent dans l'eflat précèdent qu'on nomme veille. Tout ce que je viens de dire cd fort clair. Se la plus-part de ceux qui font tant foit peu verfez.dins l'anato- mie en font convaincus, fi bien que pour toutes les a(flions que je viens d'^expliqucr , qui regardent la digc- Hion & la nourriture, i4 ne fautfup- pofer aucune pcnfce, comme nôtre expérience en fait foy , ces chofés lè Faifint dans nous fans que nôtre vo- lonté puiflcrempccheroulecomman^ dcr. Prcfentcmcnt fi nous confidc- rons la divcrfré de tous ces mouvc- niens, leur ordre, Icu." juJ^effc, la diïpofition admirable e: l'arrange^ ment merveilleux des parties qui y concourent, la fabordiaation qu'elles ont entre elles , 6c lé fecours mutuel qu'elles fe donnent. SI nous exami- HOC8 en fuite comment ce paioaçAc des Bifeil i6^ mâché , avalé , changé en chyle , poutV fe dans les inteftins, purifié, lubtili- fé & conduit juiquss dans le cœur pour erre converti enfang&cenhu en chair, aiTeurément nous aurons des grands Hijets d'éronnement, & il nous ne developons afTcz bien la manicre àont -toutes ces chofes i'efont, 2c que nôtre expérience ne nous convain- quît pas que nôtre ame n'y a mille part, on ne manqueroit point d'at- rribuer le tout à un principe connoif- lant qui fceut les parties du corps qui ont beibin de nourriture, ce qui ne .leur en envoyât précifement que cel- le qui leur etl: propre, qui feparât quand il le faudroit le luHtil d'avec le groflier, qui fit filtrer îcfangdansîes reins pour en tirer les ferolltez, qui portât dans le cerveau les parties les plus fubtiles pour en former des el- prits animaux, quitarl'àt, qui divi- fvit &: qui convertit en chyle les alimens dansl'eftoniach, qui les fit defcendrc dans les inteilins, 5c ne là.palTerdans les veines bclécs pour être portez au coîur, qui le fit bouillonner un cer- tain temps, 8c n'en laiflût entrer 6c fortir qu'une certaine quintité à la lois, qui bouchât £c ouvrît exaile- \ 6û De\ l'Ame meut les pafTages dcllinez ù cet ùfa^ ge, & qui fit enfin revenir le chyle converty en fang des extrémité/, du -corps dans le cœur pour s'y échauf- fer dereclicF & continuer à vivifier toutes les parties du corps. EfFedlivement la conlidcration de toutes ces a(Stions conduites avec tant d'indurtrie, 6c ménagées avec un li grand artifice par la leule harmonie des parties qui compofent cet automa- te fiartiftement formé , 6c dont tous les refTorts font difpofc^ avec tant do f)'mmetrie , qu'on ne peut rien con- cevoir de mieux penfc 6c de plus dé- licatement travaillé, cette conùdera- tion , dis-je, ne nous pcrfuade-t-clle pas que puis qu'il n'elî belbin d'au- cune ame pour toutes ces chofes , il n'en faut aucune aufll pour tous les autres mouvcmcnsque fiitce chien, qui en vérité nefcmblont pasdeman- ocr plus de connoilfance que ceux que je viens d'expliquer? Mais la caufe pour laquelle nous nous dcfabufons plus fa- cilement à l'égard de certains mourc- mensqu'à l'égard de certains autres, cil que les allions dont je viens de par- ler, ne font pour la plus-part accom- pagnées dans nous d'aucune penf^e^ des ne f es. \6f celles au coniraire dont on parlera immédiatement après ne font jamais dans nous pour l'ordinaire, fanseftre devancées , accompagnées, ou fuivi es de quelque penfée, ce qui nous dif- pofc Se nous porte à croire que com- me les mouvemens font dans les Bêtes, les penlees y font auflî comme dans nous. Il eft à propos, avant que de paf- fer outre , de nous rendre la difpo- iition du corps familière , 8c pour eftre plus perfaadez que c'eft une vé- ritable machine, nous pouvons com- parer le corps de noftre chien à des orgues, car nous trouverons d'abord que les poulmons en font les fouf- nets. le cœur Se les artères carotide^ & cervicales tiennent lieu de porte- vent , les nerfs Se les mufcles font les tuyaux, le diaphragme tient la pla- ce de celuy qui remue les foufHets Jk les fait remplir d'air, les objets ex- térieurs peuvent fervir d'organifte; car fuivant les touches dift'erentes qu'ils remuent , c'efl-à dire, fuivant les ditîerens nerfs fur lefquels ils font imprclTion , ils font ouvrir diverfes foùpapcs, à fçavoir divers poresd:'.ns ,ie coi'vc^u, par où lèvent, c'eft- à-^ 1^5 DtrAitie dire les cfprits animaux venant à cou- ler dans des tuyaux ou des nerfs dit- fcrcns, Ci'citent des Ions ou des mou- vemens divers. On peut encore trouver un fécond organirtc dans cet animal , lljavoir les efprits animaux qui étant capa- bles d'être diverfihcz en mille ma- nières, fuivant la dirt'crcnce du lang tiont ils auront elle formez, peuvent enluite fuivant leur grolTcur, Icurfi- ^^ure, leur mouvement, leur grande eu petite quantité > entrer diftcrem- mcnt dans le cerveau , s'ouvrir di- vers pores, & coulant dans certains mufcles caufer plufieurs mouvemens dans ce chien, dont on ne remarque- ra au dehors au ;une caufe apparen- te , comme il arrive dans les or- gue? de Vcrfailles, qui fcnsoiganijle joiicnt diflcrentes clianlbns , luivant que l'eau cil ditiforem ment ménagée. Il faut encore remarquer avec loin, £c nous en rcirou venir dans la luitc, que le cerveau étant d'une fuhlian- ee molle, cil capable par coiilcqucnt de recevoir Se de retenir les impiell fions que les objets estciieursy tont, lefquclles ne confident peut ôtrcque d^Qs la facilité, que les j)orui du Xi-P» des Bêtes. vé^ rcau . qui ont été ouvers par leur moyen, conlérvent à s'ouvrir de la melme manière, ou d'eu^- mêmes, ou par le cours fortuit des efprits animaux, comme il arrive à un li- vre qu'on a ouvert plufieurs fois dans le mefme endroit : ou bien ces im- prelîlons ne font autre chofe que les traces 8c les vefliges que les efprits animaux laifTent entre les fibres du cerveau en abaifl'ant les poils qui fonc herifléz par delîlis, de mefme qu'un homme qui pafTe dans un pre cou- vert d'herbe fait une efpece de l'en-. tier qui dure quelque temps. Se qu'il peut mefme ii fort frayer qu'il ne s'effacera plus j outre qu'on aura plus de facilité à y pafler la féconde fois que la première , Se la troilieme que la féconde, & ainlî de fuite. Maintenant lî nous confiderons le grand nombre d impreflions Se la pro- digieufe q^unticé dje traces qui doi- vent eftre dans le chien dont nous parlons, pour peu qu'il ait dejaveu» nous ne nous étonnerons plus s'il fait plufieurs démarches qui lemblent -indifférentes Se defquelles nous pen- fons qu'il n'y peut avoir d'autres cau- its qui puilicnc le déterminer qu'une H ame : car comme une infinité de ctu- ics peuvent concourir à ce que le cerveau s'ouvre dans les mefmes en- droits où il l'a cfté il ia preiencc des objets , il faudra que ce chien faflc les mefmes chofes qu'il avoit faites à leur prefence. De plus les pores ne s'ouvrant pas toujours de la mel- me manière, ou ceux qui sont voi- iîns ^'ouvrant en mefme temps , les efprits animaux y couleront , ou avec plus ou avec moins de force , ou plu5 ou moins abondamment, & de cette forte pénétrant plus ou moins avant dans la fubflancc ducerveau , ils iront aboutir dans des nerfs ou des muf- cles diffcrcns, Scainlî ils produiront des mouvcmcns dont on ne pourra .donner aucune caule precife 8c dé- terminée j car comme vous voyez, ils n'en auront d'autre que le feulha- zard , 8c comme ces choies peuvent être variées d'une infinité de façons^ ces mouvcmens pourront varier de ^Tiefmc. Enfuite il faut bien remarquer que quand deux obiets agiilbnt enfcm- ble , leurs traces s'unifient ordinai- rement , c'eft à db-c que les efprits anifnau^ qui paj l'imprclVion de ces des 'Bêtti» '1 7 f deux objets ont coulé entre difïerea- res fibres du cerveau , pcyar aller en- Tuite enfler divers mufcles, venant à Xe croifer dans leur route fe mêlent & n'ont plus qu'un courant, qui ne •va aboutir qu'à un des deux endroits où les efprits euffent coulé fans cette jonclion. Il s'enfuit de là première- ment qu'il n'en refulteraqueles niou- vemens qu'excitoit l'objet , dont l'im- preflîon qui eftoicla plus forte apre- valû ; fecondement il n'arrivera au- cun mouvement de ceux qui eul- fent été produits par radtion de l'ob- jet le plus foible. oui dans la fuite, quoy qu'il foit feu!, ne fçauroitagir fur le cerveau fans exciter les mou- vemens qui accompagnent l'attion de celuy dont les tracer ont elle con- fondues avec les ficnnes. Cette jonc- tion d'efpece (appelions ainiî doref- navant ces traces confondues) fe fait aulTi très- fou vent , non feulement quand les efprits animaux fe croifcnt dans leurs chemins , mais encore lors qu'ils coulent affez prés les uns des antres ; car l'un de ces deux courans ébranlant en paflant les parties voi- iînes de Ion lict , il oblige fans dou- te l'autre aie mouvoir du mefmec»» H ii §7^ He l'Ame te . pour peu d'ohrtacle qu'il rencon- tre dans Ton chemin , li bien quet^lil- fnnt vers l'endroit où <"e meut Icpre- mier , par la facilite qu'il y trouve caufée pir la fecoufle des parties qui font entredeux, cc> deux efpcces s'u- nifient. Cette jonftion arrive en troi- sième Hcii quand les objets qui agill lent en melme temps ne caufent des impicllion> différentes , que parce qu'ils ouvrent diverfementles mêmes pores , comme lors que celuy des deux qui agit avec plus de force les ou- vre davantage Se oblige par ce moyen tine plus grande quantité d'efprits ani- maux à y palTcr , ces efprits auront infailliblement la force de pénétrer plus avant ou plus en droite ligne dans la fubftance du cerveau & feront conduits dans d'autres mufcles, que ceux où le pouls fera l'objet qui atti- ra le plus foiblcment , car comme il fera une moindre ouverture, les efprits defccndronten moindre quan- tité ou avec une détermination dif- férente , de là vient qu'ils iront entier differens mufcles, mais d'abord que ces deux objets af^iront en mefmc temps, il ert vilible que le plus fort ■l'emportera, £c que de leurs dcuxcf- iti'Bêtts. 175 pcces il ne s'en fera qu'une. Cetic }onétion peut arriver de beaucoup d'autres manières, qu'il leroit iuper- flu de dire. CHAPITRE XVIIL 0)i l'on explique la dijcipline des Anintiitix, SUppofé ce que Ton vient de dire dans le chapitre précèdent, je ne vois rien de fl facile à expliquer que ce qu'on appelle la difcipline des ani- maux: car fi je voulois prefèntement dreffer ce chien à fe tenir fur ces deux pieds de derrière, je ne ferois que l'ar- refter moy-mefme quelque temps dans cette fituation , pour procurer aux efprits animaux un paflage libre êc aifë dans ces parties , 2c afin que les pores quileslaifientéchaper aquiû fent une grande facilité à s'ouvrir tou- jours delamefme manière: outre ce- laquand cet animal iroit changer de pofture, je le menacerois d'un bâton, de forte que fon cerveau eftant natu- rellement dilpofé pour s'ouvrir à cette H iij J74 ^' /'-.^w« Ttfiie aux endroits qu'il faut peur le faire arrêter, êcl'empccher de s'avan- cer vers le bâton, il n'y aura pas lieu de s'étonner s'il demeure ferme dans cette alïietie, tellement que li je réi- tère pliifieurs fois la même chofe , cette habitude deviendra fi forte qu'il s'y tiendra- après cela de lay-mcf- me- Si l'on vouloit enfuitc le faire dan- ièr au fon du violon, on n'auroir, quand il fe tient ainfi debout, qu'à marcher devant lui en lui prefentant du pain, carilfcroit dilpoféà s'apro- cher de cet aliment 8c aie fuivre; que fi en même temps l'on faiijoucr du violon, l'cfpece du fondecet in- iirumeni 8c celle du pain fe joindront fi bien qu'après que l'on aura réitéré plulleurs fois la mefme chofe, Icfeul Ion du violon Icra capable de faire dan- ier ce chien. Si je le voulois drefTer à la chuflc , je m'y prcndrois à peu prés de la même manière, car le bat» tant quand il courroit fur la perdrix dés qu'il l'auroitveuè, l'efpccedecet oifeau 8c celle des coups que je kiy donnerois s'uniroicnt fans doute; li bien qu'après que j'aurois réitéré la mciine chofe pluûeurs fois , la pcr- des Bêtes. r'/j* drix feroit fur luy la mefme împreiT- fion que le bâtcn i 6c comme il s'arrê- te en voyant le bâton , de même il de- meureroit ferme à la veiië de la perdrix au lieu de courir deHus. Les autres moyens dont on fe fert dans ces ren- contres reviennent à peu prés aumê- mej&ainfi il ne faut pas s'étonner fi les chiens qui naifient de deux autres qui font couchans, chaflent fans être dreffez, puifqu'ils ont bien fouvent' dans le cerveau les mefmes traces qu'a- voientleur père & leur n>ere, de la mefme manière que les enfans naif- fent bien fouvent avec des difpoiitions aux maladies dont leurs parens ont eflé atteins. Si je veux outre cela que ce chien faute quand je prononceray le pom. du Roy de France, Se qu'il aboyé ea entendant celuy du Roy d'Efjjagnej je tiendray un bâton tarft fbit peu élevé de terre 8c couché horizonta- lement , Se en fuite quand il aura bien faim je luy prefenteray du pairr au delà du bâton en prononçant en mef- me temps les paroles à l'occafion def- quelles je fouhaitteray qu'il faute : il eft clair qu'etlant oblige de paflerpar dcflus le bâton pour venir manger H iiij tj<6 De Ame le pain , il fautera dans cette rencon- tre, de là vient que cts deux cfpe- ces s'unifl'ant , après qu'on aura ♦ait la mefme chofe plulieurs fois , ce thien fautera en luiteauflî bien poux les feules paroles , qu'if fauloit à la f>rcfence du pain ; fi au contraire je .e bats en prononçant le nom du Roy d'Elpagnc, il eft leur qu'il aboyera, te qu'il fera en fuite toutes les fois qu'on prononcera les mefmcs mots. Je ne m'amule pas à raporrer en détail toutes les autres manières d'inf- truire les belles, car quiconque aura conceu ce que je viensdedire, n'au- ra nulle peine à comprendre la rai- Ion de ce qui arrive dans toutes les autres occallonsi de Ibrte que pour expliquer en quoy confiée la dilci- pline des animaux, il ne fera pasnc- cefiaire de recourir a une anie coa- DoifTante. des B ire s. ifj CHAPITRE XIX. De nnfiinSi des Animaux. ONdevelopera fans peine ce qu'ont appelle inlliiivt dans les animauxv c'eft à dire certaines actions que tou- te une eipece de Belles font natu- rellement » d'abord qu'on aura re- marqué que cet inftinA fe raporte toujours exa£lement à leur confer- va:ion , car on verra delà qu'il ne peut conlîfter que dans la difpolltioi» particulière de leur cerveau quand elles nailfent : ainli un agneau fuit k loup, parce que la veue de cette bête détermine les efprits animaux à produire ce mouvement par l'œ- conomie naturelle du cerveau de l'ag- neau , car il ne fe pouvoit rien or- donner de mieux pour fa conferva- tion , îk; de toutes les difpolîtions que fon cerveau pouvoit avoir du Créa- teur , celle d'avoir des fibres qui s'é- cartalïènt facilement pour laiffercou* kr les efprits animaux dans les muf- clci q^ii fervent à l'éloigner -du loup , »78 Dt^Ame eftoir la plus propre & la plus con- venable que l'authcur de la nature pûrt luy donner. Les fourmis en été font pouflees par la chaleur du folcil à fortir des fourmillieres, les grains qu'elles trou- vent par l'impreflion qu'ils font fur «lies les déterminant à les prendre 8c à leur ofter en fuite le germe : Se lors qu'on dit que ces petits animaux en uftint ainfî pour empêcher que leble ne fe corrompe en pouffant un épi, on doit entendre la mefmechofe que quand on aflure que l'éguille d'une montre fe meut fort lentement pour demeurer précifement une heure à parcourir l'cfpace qu'il y a d'un chif- fre à l'autre . & s'accorder par ce moyen avec lefolëil: car comme cet- te façon de parler ne nous porte pas à croire que cette éguilîc agifle par connoifîbnce, mais que nous préten- dons feulement dire qu'cUea elle ain- fi difpofoc par l'horloger ; de mefme dans les fourmis nous ne devons pen- icr à autre chofe fmon qu'elles font tout ce que nous voyons, parce que l'ouvrier qui les a produites lesadil'^i. jKoXée"; de cette forte. Il a'eâ rien ajoute locat de & mer» des 'Skes7 i jÇf véilleux que ce que font les abeilles, car premièrement elles choififlent un Roy qu'elles accompagnent par tout : * 0» omjies Circtindant fi-emittt den/o , jiipant que fréquentes. Elles ont pour luy une vénération qui va jurques à l'excez. FrAterea regem. non fie JEgyftus ^ ingens Lydia , ner pcf^uli farthorum , aut" Meilui Hydi^lpis .1 Obfer'vant, . Elles vivent en commun êc leurs ru- ches font comme uoepetitevilie-qu'el- les gouvernent avec une trcs-graude ' police ; . tonfortia tecîn UriÙF hnbent , mugnifque agi' tant fub legibus étvum. Les charges 8c les offices font admi- rablement bien départis chez elles, les unes ont foin de pourvoir aux vi- vres , les autres bâtifTent les petites cellules , celles-là élèvent les petits, & celles- cy font fentinelle aux por- tes ; quelques autres obfervenr la dit ppiition ^e l'air pour prefager le beaia ^'Virgil 4. Georgjcor. H- y] . f8o De VAme temps 8cla pluyc, plufieurs reçoivent' les fardeaux des pourvoyeulbs , 8c quelques autresont loind'aJminillrer lajurtice, & de chafTer celles qui veu- lent vivre dans l'oilivcté: Namque altA -viclm mvigilant , çj» fœdere paiio Zxcrcentur ngrii : pars intra feptA domorum Narcijjî lachrymam ^ lentum de cortice gluten Trima f avis ponunt funditmlna , ^c. m alu , Jpem gentis , adtdtos Educunt fœtus , Qrc. Sunt ^uibm Ad portas xecidit CU' fiodta forti , Inque vicem Jpeculantur iiquof y Attt nsibtla cet II , Aut entra accipiunt "jen'untum , aut ngmine facto Jgnavum fucos pecus à prtfepibta arctnt , Qr>c. > grandAiis oppida curd, lEt munirt^ favos çj» déJaîa fingt- re icéîa. Elles ne manquent pas de charité en- vers les morts dont elles font les ob- •fcqucs avec des pleurs t<. des lar- des Bêtes. * i8x tum corfiora luce caren- tùm Exportant teclis, ^ tri/iia funertt ducunt. Quelques-fais quand il s'agit de procéder à Pelcâion d'un Roy la dii- lènfion Te met parmy elles, 8c il fe forme d'abord deux partis , qui ne- refpirent que le fang & le carnage» on les entend fbnner de la trompet- te, on les voit aïïenibler 8c former des efcadrons , elles éguifent leurs petites épées, 8c vont après cda pré- parées à tout événement à la tente de leur Roy, de là elles défient leur cnnemy au combat , avec un coura- ge qui leur fait méprifer la vie 8c al- kr au devant d'une mort glorieufe. ^ "VOX Auditur fraEtos fonttus imitât ei tu^ barum ; Tum trépidai, inter fe^o'éunt fennif- que corufcant , Spiculaque exacuunt rofiris , ap- tantque laftrtos , Et circa regem , atojue tpfa ad f r de là vient que l'impreflTion qu'il fait iur elles, ou parles yeux, ou par les oreilles, ou par les narines , ou par quelque cho- ie d'analogique , les oblige à faire tout ~ ce qu'elles font à fon égard. Elles font déterminées par le fuc des fleurs qu'elles ont fuccées , par h prc- fencc de leurs compagnes, Se princi- palement par les dii'politions naturel- les de leur cerveau , à bâtir de peti- tes cellules, qui font toujours exago- aes & rangée* de la même façon, fi bien que cette uniformité dans leur œaniert d'agir dans laquelle on obfer- ve toujours le même ordre, la même régularité & les mefmes circonllanccs , nous perfuade qu'elles n'ont pis plus debcfoind'uacame connoiffantepour conduire tous les mouvemens queje viens de reporter; ^u'ua ubxe pcu^ des Bé tes. 185 poufler des feiiilles 8c des fleurs au printemps avec un artifice incompa- rable, pour produire des fruits en été ou en automne qui contiennent pour la plus-part en abrégé 8c en racourci tout l'arbre dont ils font fortis, 8c pour fe repofer enfin tout l'hiver com- me dans un long. Tommeil, afin dere- prendre des forces 8c de la vigueur; pour recommencer leur travail au printemps fuivant. Mais , dira t-on , ces difFerens em» plois que les abeilles partagent entre elles ne partent-ils point d'une con- noifTance? Je réponds que non : les plus vieilles ont foin , pour ainfi di- re, du dedans de iamaifon, parce que la foibleife de l'âge faifantqueles ef- prits 8c le fang, ou quelque chofe qui en tient la place , manquant de cha- leur nelesporteplus à fortir de leurs ruches pour aller à la provifion , mais au contraire cette difpofition les rend propres à bâtir leurs cellules, ainfi que le printemps difpofe les arbres à pouf- fer des fleurs l'été,l'automnedes fruits, - t^ l'hiver à fe repofer. Le foin qu'elles ont d'eafeveiir les morts hors de leurs ruches provient de " k raa.uvaifc odeur q^ui s'en exhale» U«>- T&4 ^' P^f»e quelle détermine celles qui font en vie aux mouvemens necelTaires pourcpt efFet , comme une plus grande ou une plus petite chaleur du foleil oblige les fruits à meurir plutôt ou plus tard : car pourquoy eft-ce qu'une montre fbnne le réveil à l'heure que l'on veut, li ce n'efl: parce qu'on l'a montée d'une cer- taine façon ; il n'eft donc pas bcfoin de chercher dans les abeilles une caufc diftcrcntc de l'organilation que l'Au- îhcur delà nature leur a donnée. Cette fage prévoyance & cette pré- caution mcrueilleufe qu'elles ont de ne manger en hiver que très peu 6c dans la dernière extrémité, pour ne manquer jamais tout-à fait d'alimens , vient de la rigueur de la faifon qui di- minué le mouvement du fang , bouche les pores du corps Ik fait que la tranfpi- rationn'eftantpas fi grande, peu de chofc fuffit pour réparer ce qui fe diiTi- pe continuellement. Maisquoy, enfin dira quelqu'un cette juftice qu'elles rendent fi bien, cette oifiveté punie fi rigoureufement, ces loix obfcrvecs avec tant d'exadf itu.- dc , tout cela ne-part-il pas de quelque intelligence ? Tout cela part véritable»- dent d'une intelligence , mais q^ulcil des Bitts: t^f dans l'ouvrier & non pas dans l'ouvra- ge : car les abeiiles chafTent les bour- dons qui mangent fans travailler , par- ce que ceux-cy ne leur relTemblent pasôcen font mefme beaucoup diffe- rens , fi bien que l'imprcibon qu'ils font fur elles les porte au mouvement qu'il faut pourcefujet, de la mefme façon qu'un aymant en repouflTe un au- tre quand il luy eft prefentë d'un cer- tain côté. Les combats qu'elles fe livrent, la mort qu'elles fouffrent, 8c l'ardeur qu'elles font paroître dans leur travail quand leur Roi les vilite, ces fondlions dis-je, viennent u.roccafion de dsux mâles qui fe rencontrent dans un et- fain ; car fuivant leur différent tempé- rament ou la diverfité de leurs deux Roys , elles font excitées les unes à fui- vre celui-cy & les autres celui-là, de la même manière que nous voyons tous les jours entre les hommes , les uns ai- mer une pcrfonne que les autres haif- fentjce qui ne part pas immédiatement del'amejmais des impreflîons différen- tes que la mefme perfonne fait dans deux cerveaux différemment difpofez. Et comme nous expérimentons nous mefmes quelebruitd un tambour ex- î86 De VAnti eite dans nous independemmene de l'amc certains mouvemens qui nou$ portent à des a(fkions hardies , de mê- me dans les abeilles, le bruit que l'on excite dans ces rencontres pour les raiTembler les oblige à produire tous ces mouvemens que nous faifonsen nous bâtant. Quand leur Roy fait fa vifite, la difpofition qu'il introduit \c 5c fatiâfaifante , qui l'obligerai confentirà toutes les déterminations tjue les efprits. ont de'jafuivies, 8c qui iont lî avantage ufes pour entretenir le corps en bon état : les efprits animaux que le fang fournira , étant de mefme nature que les premiers, fortifieront la difpoluion où eft le cerveau , 6c con- îerveront par conlcquent dans l'ame ce feirtimcnt agréable , qu'on appelle des Bêîef', ii)f- -Apres cela quiconque confîderera ouepar la force de l'union qui attache Tamc Scie corps , toutes ks fois qu'u- ne penfée &: un mouvement ie trou- vent joints enfemhle naturellement, ils ne le quittent plus, .& l'un n'arrive jamais fansl'autre , quiconque , dis-je, aura celaprefent à î'efprit verra d'a- bord pourquoy cet enfant, dont nous parlons, étant devenu homme n'a ja- mais de joye par quelle caufe que ce foir que les efprits animaux ne pren- nent le même cours qu'ilsontprisla première fois qu'il a ete touché de cet- te paflîon, 2c qu'ainfi ilne fente dan^' tout le corps une douce-chaleur, une élévation de pouls , &c. ^i bien qu'il eil ailé de voir & important de remar- quer que tous ces mouvemens ae dépendent aucunement de l'ame Se qu'ils arriveroient tout de même quand elle n'y feroit pas. Enfuite fil'on luppofe qu'un fuc très-propre pour être converti en fang vient à paffer par le cœur de cet enfant les efprits qui ea feront tirez feront ouvrir le cerveau aux endroits propres à leur don ner pal- {age dans les parties qui conduifent le chyle au cœur, pour y en faire couler 4avantage, or cette abondance d'ei- içjlJ De F Ame pritsdanj ces parties les échauffera iaiis doute, Se le chyle qui entre en plus grande quanMtc dans le cœur y cauiànt une plus forte ebullition augmentera Ja grandeur du pouls, les clprits cjui monteront fans ceffe dans le cerveau l'entretiendront dans la dilpolition où il fera , & le chyle fejournant tres-peu dans l'eftonjachScdans les autres con- duits qui le portent au corur , l'appétit augmentera. Une ame outre cela ne fçiuroit élire unie à ce cerveau fans cilrc avertie de la bonté du chylcpar l'imprcffion que Icsefpritsy font, 8c fins qu'elle s'uniffe de voîontéà cefuc, .&confcnte par confequcnt à toutes les choies qui peuvent Icrrir à le faire continuer de -pafler par le cœur pour .-cftre changé enfang , 8c devenir par- -tiedu corps. Ainfi après ce que l'on a dit plus haut, cet homme n'aura plus aucune penfee d'amour dans tout le cours de fa vie, quelque objet qu'H puifle avoir, que les elprits ne pren- nent les mêmes routes, £c que l'on n'obferve dans le corps toutes les al- térations que l'on vient de rapporter nu fujet de l'amour, ce que l'expé- rience confirme tous les jours. Si au contraire ic ccr^^;- reçoit par Jss veines laôées un fuc trop grofficr gc p^us propre à éteindre qu'à nourrir h" chaleur naturelle, alors par fe rapport ■8c la fubordinarion merveilleufe des f'anies pour la confervation de tout e corps, Jcsefprits qui fe formeront ouvriront des pores dans le cerveau , par où venant à couler ils iront ctrccii' •les tuyaux par lefquels-ie chyle eft poufleau cœur, ce qui fera beaucoup diminuer l'appetitjils defcendront aui- jfi en partie dans les nerfs qui vont a- boutir à la rate 6c à la veficule du ^tV pour exprimer vers le cœur à la place du chyle le fue qu'elles ccntiennrçnt , il arrivera de là par la différence de ces deux liqueurs que quand la bile, qui eft très- inflammable, y entrera, ellcs'é-' chauffera extraordinairemcnt , ce qui fera fentir une chaleur acre&fâcheu- ft , & caufera une élévation confide- rable dans le pouls . Le fuc que la ra- té envoyé paflantenfuite, le pouls di- minuera beaucoup 8c la froideur fuc- ^edera parce que cette liqueurn'eftpas propre à fe raréfier. Les efprits qui fe formeront du mélange de ces deux liqueurs entretiendront dans le cer- veau la difpofif ion que les prcccdens y a4Fokn> intnxhike, & imeamcyctan*:' liij itjB DefA/ne unie s'appcrcevra infailliblement àh mauvais lue que l'cftomach fournit au cctrur, ôc elle s'en fcparera de volon- té, fouhaittant tout ce qui peut em- pêcher qu'il n'en vienne plus de ce câ- télà, cequinelervirapas peu à forti- fier le cerveau dans la difpolition où. il eft , de forte qu'après cela dans tout le cours de la vie cet enfant devenu horrl- me ne concevra jamais de haine pour quoy que ce foit, que les efprits ne prennent la mefme route , &. que le corps ne fouffrc les mêmes change- ir.ens que l'on vient de dire: ce que l'expérience confirme , 6c pourtaot comme tout le monde voit, l'amc n'y a point de part. Déplus, filefangqui circule dans ce corps ne fuffit pas pour fournir à tous cesbefoins, lenerfdelapairc va- gue dont on a parlé , qui s'implante au cœur n'étant pas fi fort ébranle&c moins d'efprits montant au cerveau > il en defcenJi a moins aufl'i dans le ccrur , i) bien que ces orifices fe rétréciront, fa chaleur s'affoiblira , & le pouls auffi par confequent , tellement que fi une amefc trouve unie à ce corps, e/lant informée du mauvais état ou il eft par i'impreflion que le cerveau recevra, cW d'es Hèter. - -rp'g^ le en aura fans doute une penfée fâ- eheufe, Scrcfientira autour du cœuï* comme des gla(;on5 qui le gèlent , Se des liens qui fe ferrent. Lamêmedio- fe arrivera danstoutes fes autres pen- fées detriftefle. L'on n'avertit pas icy- que tous ces mouvemens ne dépen- dent que deladirpolltion des parties du corps, cela eft trop clair. ' S'il arrive après que cet enfant fcrar né, que quelque objet ou utile ou nui- fible à fbn corps agifTe fur fon cerveau , il le fera fans doute ouvrir dans des en- droits par où les efprits animaux cou- leront dans les mufcles de la pluiparf des parties qui fervent aux mouve- mens par lefquels le corps efl: tranfpor- té d'un lieu en un autre, ils defcendronc auflî dans le cœur , pour en élargir les orifices & faire que le fung rentrant plus abondamment foarnifle plus grande quantité d'efprits animaux pour eftre employez aux actions ne- ceflairespours'approchGroupours'c- loigner de cet objet, &l'ame qui fera dans ce corps voulant être unie à cet objet, ouenêtreplusfeparée, difpo-i fera encore mieux les efprits animau:^ à- couler où ils alloient auparavant; Ce que l'on vient de dire eil fivray I iUj i«a jye l'Amie que même ouand nous fouhaittons quelque choie pour lapofTciïion de la- quelle les mouvemens du corps ne fer- vent de rien, nous ne laiflbns pas dt nous fentir forteracnt dilpofezànous mouvoir, 8c il faut faire cfifort pour a'tn erapelcher. On n'aura aucune peine mainte- nant à dirtinguer dans les pafTions ce ^uifetient du côté del'amed'aivcc ce qui le tient du côté du corps, car on yiîrra clairement que ces penfécs con- f ufcs que nous avons de joye, d'amour, de haine, de triftcflé 2c dedcfir, rc font que pouffer 5c incliner l'amc à conl'entir aux aétions aul'quelles les mouvemensdes cl'prits ont dii'pofelc corps , Jei'quels ne lailferoient pas d'ar- river, quand mefiue nous n'aurions aucune ame ■■, fi bien que nous pouvons ailcurer ^c ce qui elldefoncôten'eft pas la caulc des mouvemens qui ac- compagnent lespaffions, mais qu'au contraire ce font les agitations diffé- rentes àçs efprits qui caufent ces pcn- iees d.ins l'ame : en forte que ii l'on ne veut les envii'agcr que du côté du corps on pourra les définir des impreffions du cerveau qui fc raportent toujours au bicu du corps, «aufecs , foxtiiiccs itsBétei. 20 r 3centreteni:ës par le mouvement des efprits : Se en cefcns on peut les at- tribuer auxBêtC5. La)oye, par exemple, dans les ani- maux n'eft qu'une impreflîon du cer- veau caurée par le mouvement des e{^ prits, lorfque leur corps eft biendif- pofé. La triftefle au contraire eft unedtff-' pofition intraduite dans le cerveau par les efprits animaux quand lefarig^ ne pafîe pas afl'ez abondamment par ie cœur. L'amour eft un ébranlementdu cer-' veau par les efpritG animaux, à l'oc- eafion d'un fuc loiiable qui vient de l'cftomach. La haine eft une impreflîon pro-^' duitc par le mouvement des efprita à Toccafion du mauvais chyle qui fc mêle avec le ^^^rig. Le dcfîr eniin n'eft qu'ime di^'o^ fition introduire dans le cerveau par l'aélion des objets qui font en état: ^ nuire ou d'être utiles aux Bêtes. Ne peut-on pas dire auflî que Pad '- miration dans elles n'eft autre choie que la difpofition qu'un objet rare fc extraordinaire produit dans leur' cerveau , par ie moyen de laqufillV'' I ^ îoi Bel'Atm prcfque tous les cfprits font deter». minez à couler dans les organes, par où cet objet a agi , & à abandonner de cette façon les autres parties? Si l'on fait enfuite reflexfon que le rire eft caufé quand les poulmons étant vuides d'air , quelque paflloa d'amour ou de joye venant à poufl'er dans le ventricule droit du cœur plus de fang qu'a l'ordinaire, il s'y échauf- fe davantage, & entrant enfuite dans les poulmons avec beaucoup plus de force & d'abondance , l'air qu'ils con- tiennent cft obligé d'en fortir avec impetuofité , de là vient qu'en paf- fant par le fiflct & s'y froilTant , i^ produit un fon inarticulé qui fait par- tie du rire; outre cela la communi- cation qu'il y a entre les mufcles du- diaphragme, de la poitrine & du vi- fige, fait que le mouvement violent de CCS premiers en excite un dans ces derniers, Se c'eft en cela que con- firte l'autre partie du rire. Je conçois prefentement que le» linges riroat quelquefois quand ils auront de la joye ou de l'amour , &c^ ou ce qui cft le mcfme, quand q^uel-» que objet, dont l'imprelîion fera Icoi* bkble^ ou unie à celle de leurs paffion.^, agira fur eux : à quoy il ei\ impor-. tant de faire une grande reflexion . car c'eft par cette jondlion d'efpece* dont on a parlé que certains objets, qui femblent n'avoir aucun raporc avec les Bétes pour leur nuire ou pour leur eftre utiles , excitent pourtant dans elles les melmes mouvemensqua ceux qui font capables de l'un de ces deux effets, d'abord que leurs efpe- ces font liées : ce qu'il faut avoir tou- jours prefent à l'efprit dans la fuite. CHAPITRE XXÎ. Ou l'on donne r explication de. quelques avions Jurprenaritci- dei animaux » - PErfonne n'aura plus de fujet da s'étonner de ce que le chien dons on a parlé careffe fon maître 8c fe couche doucement à fes pieds en lo flattant avec fa queue, d'abord qu'on aura confideré que le pain eft un ob- jçt ^i luy donne du deflr , quand 104 DeVAmt il ne fait que le voir, qi'.i luy don-* - 4ke de l'amour quand il l'a rnangé Se- convcrty en chyle, 8c qui luy caufc enfin de la joye quand il eft change en fang : car fi après cela l'on fait reflexion que fon maiftre luy en a donne fort Ibuvenr, 8c qu'ainii leurs deux efpcces fe font unies , qu'il l'a outre cela flatté bien de fois : c'eft à dire excite dans luy certains mou- vemens conformes & proportionnez à tenir fon corps dans une bonne diC- pofition , l'on verra que la veuè de Ion maiflre doit faire naiftre dans cet animal tous les mouvement qu'il tait en l'approchant , qui ne font que d;s fuites de defir , d'amour 2c de L'on fera tout-à-fait confirme dans cette penfée quand on aura pris gar- de que nous nous fentons poufTe» à fai- re les mômes choie,' ou d'aprochantes: à l'égard des perfonnes pour qui nous avons de Pamiiié, £<: qu'il faut quelque foisfe faite violence pour s'en empê- cher, 8c néanmoins cela ne part pas des ëmo'tions de l'ame , mais leulcment de l'impulfion aveugle 8c du mou- vemcot des cfpxitt animaux , çosA-: des Bêtes. ^^f me chacun en peut dire le témoin, pour peu de peine qu'il veuille pren- dre à le confulter fby-même. Enfuire il fera facile de concevoir que l'adïion de certains objets extra- ordinaires , faifant dans le cerveau desBertes lesmefmesimpreflionsquc dans le nôtre, excitera dans elles tous les mouvemens qui accompagnent 8c qui fuivent en de femblables rencon- tres cette furprife foudaine del'ame, que nous appelions admiration , fi bien que nous verrons pour lors les animaux interdits, fans mouvement» les yeux beaucoup ouverts, 6c enfin avec les fignes qui accompagnent dans nous l'admiration prile comme une pfnfée. De là on inférera aifément que les Beftes s'éloigneront des objets qui leur feront contraires, 8c qui par con- fequent leur donneront de la crainte ou leur feront peur, fur tout quand on aura conlideré que nous fommes difpofezàfuir à la prcfence des cho- fes dont nous avons peur , t' que c'eft avec bien de la peine quelque- fois que nous nous en empcfchons : ce qui dcnaoBtre que l'on eft porte ■ 2X)6- De l'Ame à la fuite par la diipofuion prcfentd du corps 6c nullement par la volon- té de l'ame. Car combien y a-t-il de femmes qui ne peuvent fouftrir avec fermeté la veuë d'une fouri^, ou cel- le d'une épée? cela fait voir toujours que ces mouvemcns font excitez en elles independcmment de leur cfprir. Cette vérité eft encore tres-fcn(ii. ble dans les enfans, qui n'ayant pas alTez de force d'efpnt pour relîiler aux impuHîons &. aux mouvemens des efprits animaux par des volontcz contraires, s'y laifî'ent toujours en» traîner, tellement que tous les ob- jets qui leur donnent de la crainte-, les font fuir, frémir, ou plçurer. Je ne fcray point furpris fi un chien me mord lorlcjue je marche fur fà patte , quand j'auray fait reflexion que bien de gens lèvent la main Se donnent un foufflet , ou quelque coup lemblable à ceux qui les ont frap» pcz. £c que jo prendray garde qu'el- les font cela fans y pcnfer, par une impullion nçceiïaire , fans connoif- lance 8c fans détermination de la vo- lonté, ce qui fait que ces allions oc fout pas crirainclics. de: Bête t. zQj Si l'on vouloir arrelter tant foit peu fa penfée fur la diveriité des mouve- niens que les paluoTis excitent dans nous, iur leur opiniâtreté, Se fur la peine que noflre efpritade s'yoppo- fer, il îeroit aifé de comprendre que ces agitations doivent eftre plus gran- des, plus compofées 8c plus diverfe« dans les Beftes , q ui n'ont aucune ame pour les faire ceifer par des volontés oppofées, 8c en s'appliquant à des ob- jets differens. L'on pourjoit enfuite concevoir fans peine que le grand amour qu'un chien peut avoir pour fon maître le difpofe- ra fortement à ne point s'en écarter, par la facilité que les- efprits animaux auront à couler dans les mufclesqui fervent à l'arrefter auprès de luy, à cau- fe que les pores qui leur donnent ce pafiage feront ouverts extraordinaire- ment , 8c les conduits fort grands 8c bien frayez. Ajoutez à cela, que la glande pineale à force d'avoir eflé fou- vent tournée vers ces traces > s'y pan» chera d'elle même, 8c n'en pourra eftre retirée qu'avec peine, ce qui fe- ra que les efprits animaux qui vien- dront de nouveau du cœur feront dé- terminez à prendre la mefxne routQ M8 De r Ame que ceux qui étoicnr déjà danslccer- Tcau jtellcment que l'action du fuc aci- de de l'eftomach ne fera pas fuffifanrc pour obliger les efprits à prendre un mouvement différent ^ & enccb on trouvera la railbn pour laquelle un chien pouH-afelaifTer mourir de faim fur le corps de fon maître tué. Les finges aiment heaucouoles fi- gues, & l'on raported'un qu'il avort beaucoup d'amour pour une perfonne qui luy endonnoit fouvent , ma>3cét komme lui en ayant prcfenté on jour qui eftoient gaftées le ringc en mangea deux ou trois, 8c enfuirc fc retira, concevant autant d'avcrfion pour luy qu'il avoit eu auparavant d'amour (prenant ces termes, aimoit , amour, averfion , ficc. dans le fens que nous leur avons donné) c'eft à dire que comme auparavant il s'aprochoit faci- lement de cette perfonne, qu'ilyde- ineuroir de même, & faifoit en la Toyant certains petits mouvcmens qui dans nour font des lignes naturels de noftre aflfeftion , il fit enfuite tout le contraire. Pourtrouver la raifbn de toutes ces aôions, nons n'avons qu'à prendre gu=d« qup l'amour de ce il T)gc envers- des Bêtes. lo^.- cét hommene provenoi-t que des fi- gues qu'il iui donnoit, ce qui avoit- fait que les efpecesdc cette perfonoc^ & celles de ce fruit s'eftoient unies : car il s'enfuit de là, que fi l'on fuppo- fc qu'il lui en aitprefenté de gâtées , que ces animaux haïfîent naturelle- xnent, nous verrons que la mefme • raifon qui i'avoit fait aimer, aurachan- gécet amour en haine , 6c nous cefTe- Tons d'attribuer ces effets à quelque " connoiffance. L'on eft pleinement convaincu de ce que je viens de dire , quand on con- fidere qu'encore que les mouvemens qui nous donnent la perception de ccr- ttwK objets, foieni joints à ceux qui caufent certaines paffions , ils peuvent néanmoins en être feparez par un feul a6te contraire , Se à plus forte railon parplufieurs: ainfi nous voyons que fi les perfonnes qui aiment certaines viandes, tellement que leurveuëfbit jointe avec le defir d'en manger, 6c la faveur qu'elles excitent aveclapaffion delajoye, fi ces gens-là, dis-je, trou- vent par hazard quelque chofe de fort fàle parmy , leur furprife eft fi gran- de 6c elle change fi fort la dilpofition de leur cerveau , qu'au lieu qu'aupara- aie De l'jimi vant l'imprefTion que faifoit la veuï DU le fou venir de céc aliment difpo» foit les efpiirs animaux aux mouve- mens qui excitent le df iir , après cette rencontre clic ne produira que les inouvemens qui caufent l'averfion. C'eil à dire qu'autrefois l'a-conomie du cerveau étoit telle que l'afflion de cet objet faifoit couler les efprits ani- maux dans les nerfs qui conduifent au cœur 8c aux autres parties oii ils vont durantlapafnondudelir , maisenrui»- te cette viande ayant agy conjointe- ment aveccequi s'y eft trouvé dem6. lé> & cette dernière chofc faifantdans Je cerveau une imprefiionqui conduit Jes efprits animau^f dans les parties nc- ceffaires , pour exciter les mouvemcns 3ui font joints avec î'averlion, il fiu- ra danslafuite quelaperfonne à qui cela eft arriré ait de l'averfion pour cette viande : que l'on aplique ceci au fmge, Scl'on feraperfuadcdc ce que j'ay avancé à fon occalîon. L'on paflefous filencc l'explication d'une inrinité d'adlions approchantes de celle-cy , parce que ce détail traî- neroit en une longueur cnnuycufe , 8c quiconque tachera de démêler exadte- jueat daus les pallions ce qui fc tieac dti'Bètéi. '2ïa ducoflé de l'ame d'avec ce qui apar- tient au corps , il n'aura nullepeineà concevoir la plus- part des chofes les plus furprenantes que font lesb'étes, car il connoîtra que ce n'eft pas la volonté de fuir qui cft caufe que nous fuyons dans la peur , puifque nous nous Tentons fouvent pouffez à la fuite malgré nous. Nous verrons facilement la raifbn pour laquelle un chien que l'on bat crie fi fort, fans qu'il foit befoin qu'il fente de la douleur, c'eflàdire qu'il ait une penfée affligeante à l'occaiîon des coups qu'on luy donne , fî nous prenons garde qu'il nous eft très-dif- ficile de reffentir une douleur violeir- te fans pouffer quelques grands crisii qui ne font point caufez par cette penfée de douleur, mais au contrai- re par la difpofition qu'un mal de dents, par exemple introduit dans le cerveau. Car ceux qui ont le moins de force d'efprit , c'efl à dire ceux qui Ibnt le moins oppofez aux cours des efprits animaux par des volontez contraires , ne manquent jamais de fe lamenter dans de ferablabies ren?j coatrcs. *ri Dt l'Ajni CHAPITRE XXIL De UfagÂcitrdes minimaux» SI nous paGTons maintenant à l'cs- plication de ce qu'on appelle I& iigacité des animaux, elle ne nous fcmblera plus li obfcure , & les dé^ marches que nous venoni de faire nous conduiront infailliblement i la découverte de ce qu'il y a de plus dif- ficile en cela. Un cheval que l'on pique des deux «perons, &. qui court à toute bride» ie trouvant liir le bord d'un préci- pice s'arrelle tout court, fans qu'il foit poHlble de le faire avancer. Af- fûrément , dira t-on , cette fufpen- lioa ne part pas de la machine feule, dont les rciïbrt; eflant une fois de* bandez, ils doivent toujours aller en «rant. Ne pourrois-je pas demander à mon tour, qui eft-ce qui détermine i'ame de ce cheval à s'arrêter ainlî? cft-ce qu'elle mcfure pir f» penfée la profoodeur de ce précipice, îc quel- des Bêttf. 2 vj le cft afTùrée de fe ble Ter en avan- çant encore un pas ? je crois qu'oa Tera fort cmbarrairé pour expliquer cela en fuivant d'autres principes que Icsnoftres, fuivant lefquels nous al- lons tâcher de les developer. Si l'on fe reflbuvicnt de ce que j-'ay dit plus haut, que l'ouvrier de ce cheval eft le mefine que ccluy de : tous les autres corps contre lefquels il peut eftre porté , & qu'une des ,vcuës que ce divin artiûn a eues en le faiûnt, a elle que les impreffions que les diflFercns objets feroicnt fur luy ferapportaflcntàfa confervation , on n'aura nulle peine à concevoir que l'action par laquelle les corps qui font au bas de ce précipice agillcnt fur les yeux de ce chev J , font ou- vrir fon cerveau aux endroits qui permettent aux efprits animaux de defcendre dans les mufcles propres pour l'arrefter. Mais repondra quel- qu'un , ces corps faifant la melaie impreiTion que s'ils n'eftoient qu'à quatre pas, h diftance où ils font ne doit point faire arreiler ce cheval fur le bord de ce précipice. Cette re- T>onfe fuppofc faux : car: fi elle ellok boiuic nous_o'aperccïrions pasUpro-. I 3î4 DtP^me fondeur du précipice 8c la diflanceùc* objets qui font au bas : de forte qu'il cil aflTiré que leur manière d'agir eft en quelque façon différente, car les payons qui en font réfléchis viennent avec une autre difpofirion dans les yeux , qui de leur codé changent de ligure ^ s'aplatifTcnt dans ces occa- iîons, fi bien que toutes ces chofes caulent necelTai rement dans le cer- veau des mouvemens , qui obligent les cfprits animaux à couler dans les mufcles pour les gonfler d'une ma- nière propre à arrefter cet animal i & comme de mille difpofitions divcr- fès que fon cerveau pouvoit avoir, il n'en eft aucune qui foit plus avan- tageufe & plus conforme à fon en- tretien que celle «|ue je viens démar- quer, elle doit s'y trouver, 8c Tac-- tion des objets qui feront aulfi éloig- nez 8c dans une femblable fituation à fon égard , doivent produire les ctîets que l'on vient de dire. L'on croit que perfonne ne s'avi- fera de demander pourquoy cette ma- chine n'ed pas toujours mcue en lig- ne droite, qui eft la plus fimple, 8c . pourquoy elle s'en détourne fi fou- vent, Sec. h l'on fçait que fuivant iles Sétei. i\f les divers mufcles qui font gonflez , Scluivant qu'ils le font différemment, lesmouvemens des Bêtes doivent être ou droits ou détournez, iï bien que cette adlion des mufcles dépendant. du cours dci efprirs animaux , £c ce- luy-cy quelquefois , ou de leur dif- férence , ou de celle des traces qui font dhns le cerveau, ou bien de l'ac- tion des objetidu dehors, leurs mou- vemeps par confequent doivent eftre variez d'une infinité de manières par- ce que les caufes dont ils dépendent peuvent varier en autant de façons : en un mot ces détours fe font dans les Bêtes de la mefme manière que dans nous, à la détermination prés. On raporte comme une raifon tres- forte de l'exiftence de l'ame des Bêtes, gu'un renard ayant été blefle dange- xeuferaentpardeschafleurs, contrefit le mort pour les détourner par cette feinte du delTein où ils étoient d'ache. ver de le tuer, cela luy reiilTit, car le ;:royant mort on le fit emporter par un valet ■■> mais le fin renard qui n'étoit qu'un mort volontaire reiTulcite par Le xhemin , & voulant tirer vengeance ,de l'outrage qu'il avoir receu , il mor- dit cruoUemcnt celuy qui le poxtoit. •aTe l'Ame ncj-n.itiirc! aux animaux de rn6me ^fpcce, le bruit qu'il Fait parmy les broflailles c\?cillc ccluyqui domioit; ^nfuitc raboyement des chiens qui ne ibnt pas loin , leur vcuc ou leur odeur le déterminent à prendre la fui- te ; 6c le premier qui ne peut plus ■courir Se qui fe trouve cpuifc d'el- prits animaux eft porte par l'imprel- *ion de cegite, ik par celle des prctits coi-pî qui ibnt exhalez du lièvre qui dormoic , à prendre cette place , & U s'y coucher plutôt qu'à quelque pas plus loin, où fa lalVitude l'auroirccn- ti-aint de le faire, il ne faut pas être beaucoup éclaire pour pratiquer tou- tes ces choies. Le chat aiuT; dont on a pa:lé va à la chaHc des louris quand il n'a nul- kment bcfoin de manger, parce que ies efprits animaux qui le forment deralimcns lors que la digclHon com- mence à fe faire, Ce le fuc acide oui •ébranle ic nerf de l'ciîomach, le dé- terminent à ces mouvcmens , auxquels je pcnfe qu'il cft plus fortement por- té quand il r. bcfoin démanger. Il fe poRe enfuite dans le lieu \a p\\xs fombre de la chambre , parce y a plus grand nombre de petiis cor- des Zétes. 5. i <> pwfcules qui s'exh.ilent continuelle^ ment des fouris : car la lumière n'y eltant pas li grande, ni la chaleur , par coniequeiit ils n'ont pas erté 11 tort diiripez. Lors que la fouris ne s'efl: pas beau- coup écartée du lieu de fa reti-aite., le chat ne bouge point x.ie fa place, parce que rimprcfîlon qu'elle fait fur luy n'eft pas encore adez confidera- ble pour le faire mouvoir , mais fi el- le s'en aproche un peu en s'écartanc de fon trou, les écoulcmcns qui en fortent devenant plus forts, leur ac- tion furie chat elt plus forte aulfi. & lufîît pour l'obliger à courii- fur la. fouris. De mefme le chien ne faute pas d'un plein faut fur la table, parce que les petites parties quife feparent con- tinuellernent de la viande ie répan- dant tout autour , & n'ayant pas af- fez de force pour pouffer le chien à un fi grand mouvement qu'il le fau- droit pour monter tout d'un coup fur la table , ils en ont a'Tez néan- moins pour le déterminer à fe mou- voir vers la viande i la chaife qui eft à collé caufe un ébranlement dans {q5 yeux par les ravons de lumière qui Kij ^2* ©^ VArnt >:n j-cflechifTent, & dans fes narines par ces petits corps qu'elle renvcyc vers luy , qui l'oblige à inonrcr def- ius. 2c de là llir b table. Mais pourquoy, tiira-t-on, s'il n'y avoir point dcchai- j'c tourncroit-il tout autour pour en chercher une? c'elî parce que l'odeur d: la viande qui le répand également jar tout, le po.uilb 5c le traîne pour ;i:nfî dire , tout à l'entour , te l'iin- prelllon que la vcuë & l'odeur de la viande font dans fon cerveau conti- 1 uant toujours ouvrent davanta^^c Tes j^orespar Iclqucls , comme il palle un jilusgrand nombre d'ciprits animaux, i\z ont entin alfezde force pour le fai- re fauter d'un plein faut fur la table. .Le ciulet dont onaraporrél hifîoi- rc ou la fable , Çc couche le lende- ;i;iain dans la rivière, parce que l'ac- lion de la froideur de l'eau Se celle des jayons qu'elle rcflecliit font unies ^vec le cours que les cfprits animaux ont pris quand il a bronche dedans U T^remipre fois ; & comme cette chute Juy a aportc du foulagcnicnt, il cft ^ prefumer que le lendemain l'imprcf- iloc que l'eau fit fur luv lors qu'il y xnrra , jobligea les cfprits animaux •'■' couler de la nicfiuc manière S: veijs ie^ Bêtes. iiF les mefmes parties que le jour prcce- dent , car cette forte lie mouvementé;' d'éporciirc dans l'eau luy avant efté uti- le, luy donna de l'amour pour tout ce* qui l'avoit caufée, ce qui fut caufe' qu'il continua defe la procurer. Au contraire quand on l'eut char- gé de laine, le poids de fon fardeaj augmenta d'abord qu'il fe fut couché dans la rivière , i3 bien que cela lu/ eftant nuiiible , il conceut de la hai- ne pour le mouvement qu'il fuifoiîf dans cette occafion, £c fon cerveau' fut fortement dilpofé à faire couler^ les efprits animaux d'un autre coflé,; S< à effacer peu à peu Tes premiere:>- traces , c'etl à dire , à la veuë & 4 l'attouchement de l'eau poufTer les cfprirs animaux dans les mufcles pro-' près pour avancer , & non pourfe cou- cher dedans comme auparavant i ce qu'en effet ilcelTa de faire après deux!' ou trois fois, parce que les efprits- animaux prirent inienfîblement des.' routes différentes. Si Ton a bien conceu l'exemple que" j'ay aporté de ce qui arrivoit à ceux'^ qui trouvoient quelque choie de fort" {aie dans une viande qu'ils aimoient'' bsÀUCoup ( de ce qui leur arrivoiç» K- iij î 1 i T>f tAme dis je , à l'égard du Icul corps ) & ce que j'ay dit outre cela des pafi'ions 2v de la jonétion des efpeces, on don- nera fans peine dans ma penfec tou- chant ce que je dis du mulet, mais il efl:befoin d'avoir ceschofes prefcn- tcs à l'éTprit 6c de les cnvifager tou- tes à La fois. Le conte de l'Eléphant n'eft guè- re plus difficile, car il ne va chez le cluudronnicr , quand on luy donna un chaudron , que parce qu'on l'y a mené plulicurs fois ; de forte que les traces que le chaudron a laiflces dans fon cerveau , fe font unies avec le cours que prenoient les cfprits ani- maux en coulant dans les paitics qui fervent aux mouvcmens necellaiics pour aller chez cet artifan , c'eft à di- re (pour expliquer derechef ma pcn« fée) que la veuè , l'odeur & l'attou- chement du chaudron ont fait cou- ler les efprits animaux par certains pores du cerveau , par lefquels ceux qui dévoient fervir pour faire mou- voir cet Eléphant vers le chaudron- nier (car je fuppofc qu'on l'y menoit en mcfme temps ) ont aulTi pafTé les trouvant dcja ouverts , tellement qu'ils ont continue de produite les dfs Belles. îiîf- tcace."? du chaudron julques dans les mufclcii necellaîres pour le mouvoir vers le lieu où Ton le condaifoit,- Ajoullcz à eela t]u'onapeut-elcre dit quelques paroles en meftue temps qui cxprinioient la volonté de Ton- maître , ddU|uelle3 l'impreillon s'eâ unie avec les traces précédentes, 8c de là vient qu'il ne faut pas s'éton- ner , fi quand ou Kiy prclentc un chau- dron , (k que Ton dit les mefmcs pa- roles , U le porte au chaudronnier, puiique les pores qui font ouverts par les imprelîloas que toutes ces chofss- font dans le cerveau conduilcnt les- efprits animaux aux endroits qu'il faut pour cet eiïet. - Le chaudron ertant raccommodé, r Eléphant revient , ce qui ne" fur- prendra perfonne quand on aura pris garde que la première fois qu'on l'a mené chez cet ouvrier, on l'a oblip-é de revenir : aind û s'en retourne par la mefmeraiionqu'il y eft allé. Enluite fon maiftre mec de l'eau dans le chaudron , qui eftant encore ^rcé, coule: après quoy l' Eléphant: ayant efté battu 8c renvoyé au Chau- «ironnier , à fon retouj il va puifer de l'eau qu'il met dans le chaudroa^ K iiij 41+ 'DifAmt & voyant cju'il ne coule plus, ii j'en revient : cette dernière circonllancc peut eftre arrivée par une infinité cic câufès, ou parce qu il avoit foif. ou parce que ne paflànt pas bien loin de J'eau . l'odeur & la vcué de cette It- ^ueur le detcrmincrerït dans cette con- joniTturc à s'en aprocher , &c. puis il en met dans le chaudron, ce qu'il avoit fait peut-cftre mille fois, il ver- ie cnfuitc cette eau , parce que fou mailhe ayant fait la même chofc, ces deux dernicrestracesfe font unies «nlcmbie , iî bien que la veue de cette dernière eau l'oblige de faire la mcC- ne chofc que fbn maître avoit faite avec la première. On avoit accoutumé dans une mai- Ibn de mettre de la viande dans une armoire , à la ferrure de laquelle on laifToit fouvent la clef après l'avoir ferm.ée, deux chats qu'on nourriflort ià dedms ne manquaient pas quelque temps après de venir ouvrir cette up- moire , en s'attachant l'un au defius 8c l'autre au delfous de la clef, £c la f-iw iànt ainfi tourner j cela fait ils ne s'a- niufoientpasà prendre la viande qu'ils cherchoient , mai: ils fe cachoient d'à»- hûz^ Tous cette mc^iic Armoire peut if s È^tej. xif ' qfii'er fi quelqu'un les avoitapcrceus ;■ ils revenoient dans quelque temps j. 8c- voyant avec la patte li l'aiTnoiie étoit ouverte , ils montoient dedans- au -cas qu'elle le tût, & prenoient la> viande ; que hl'onavoic fermé à deux tours , ils s'attachoient encore à lackf' l'unaudelfus 5c l'autre audeflbus,Sc la failant tourner une- féconde fois ib- achcvoienî d'ouvrir, 8c s'alloient en- fuite cacher dans le même endroit eu'auparavant, où aprésavoir demeu- ré plus long-temps, ils revenoient^. ou vroicnt l'armoire Se mangçoieat ce. ^ui eftoit-dedans. Si l'on vou'oit obliger un Péripate-^ ticien d'expliquer ces chofes par Je moyen d'une ame, fans raiibnnemenî, . fansdeliber^nionik fans liberté, il elî évident qu'il n'*!! viendroi: jamais à-' bout, &C l'on a lujet d'efire ertcnné' d'oiiir raporter ces exemples comme des demonftrationsde l'exil^ence d u- ne ame dans lesEeftcs,. quand on fait r^exion qu'il eîl incomparablemcpt- plus diriicile d'en rendre raifon dans. hiiiT fenriment .sela ne provient que de ce qu'on fe contente drc pouvoir^ dir-s en gênerai c'erd'ame fans jamais dclceadtfc dans le pâniculier , IX fxûi n^ De rAfnr examiner de quelle manière cette ame fait tant de choies. L'on peut doncdireque l'odeur de cette viande fe répandant par route la chambre &; plus loin encore, fait mouvoir les chats vers le lieu où c\~ \qc'X :. £c comme cette odeur eft plus torte prés larmoirc qu'ailleurs, elle les oblige à grimper le long de l'ar- moire, où ils trouvent la clet à leur palVâgc, & s'y attachant l'un au dcf- lus , l'autre au dclTous, parce qu'ils ne peuvent pas s'arrcrer tous deux au .nefiTje Heu , il eft faciledc voir que cette fituation des chats tait tourner ].i clet" & ouvrir la porte, le mouve- rnent de la clef en les fecoiiant les épouvante (ce mot pris feulement' pour ce qui arrive dans le corps) c'cft à. dire les fait fuir. Se fe cacher fous Tarmoire pluftoft qu'autre part, par- ce que l'odeur de la viande qui y eft plus forte les y oblige , la mefmc odeur agiflant toujours les fait aprocher de- rechef du garde -manger qu'ils cf- ikyent d'ouvrir. M.tis potirquoy , dira-t-on , ne fau- tenr-ils pas cette fois là contre la clef ? r'eft parce que les traces qu'elle a lail- Icesdans leur cerveau ouand ils l'onc. (tesSêtts. 117 faite tourner , at qui les ont fait fuir , font encore fort haie lies , ôc cette veiië les determincroit pluftot à s'en éloigner qu'à s'en aprocher, mais les eorpufcules quife feparcntde la vian- de les retiennent . Se ayant infenll- blement plus de force que l'aâion delaclef, les obligent à mouvoir un» patte avec laquelle ils ouvrent tout- a-fait l'armoire : cette ouverture don-- nant pafiaec à une plus grande quan-r titédepetitesparticsqui s'exhalent ce la viande,&: en mefme temps les rayons qui commencent à tomber deffus ie reflechlifant fur les yeux àcs chats, ils font pouffez par toutes ces caufes à fauter dans l'.irmoire 6c à prendre ia viande. Que s'il arrive qu'en aprochnnt I2 ptitte de la porte, ilsneiapuiffentpas ouvrir, à caufe qu'elle eft fermée à deux tpurs, pour lors l'odeiu- de la viande continuant d'agir fur leur cer- veau devient toujours plus forte , Se les oblige enfin malgré l'impreflîon con- traire que la veuë de la clef fait fur eux, à aprocher davantage de la- viande ea^ s'elançant vers la clef ; à laquelle fe pre- nant , ibiuy font faire un fécond tour n«iles épouvante plus qu'à. la preniie- K vj îi8 Dtl'.fme refois, parce que les vertiges de leuf première peur ne font pas entièrement effacez, 8c cela les détermine à dc- jneurer cachez plus long-temps, ils re- viennent cnfuite Se prcnent la vian- de comme on a dit auparavant. Qaoyquc je ne pcnfe pas qu'on fuille raporter aucune luite d'an a raporté des exemples, 8c avoir examine en àé-, tailles imprcifions difterentes • que pouvoient faire fur eux- les moyens dont on s'cfl: ferv.y pour les inftruire, la liaifon que les traces qu'ils gra» voient dans leur cerveau avoient en- femble , la relation de ces efpeces à diysr^i objets Sc.à diyexfcs |)arties^ du l-^o De rJmt corps ; en un mot, il faut moins vîte, pourquoy èlK: s'arreflo quelque-fois , ?c d'autres- elle ne garde aucune mef'jre dansfej mouvcmcns, fi l'on ne fçavoit l'im- preffion que la fccherclTcou l'humili- fé dé l'air, fa chaleur ou fa froideui* peuvent faire fur cette macîrine-. ou /t ce lî demoûtant on ne pouroirpasdé» des Bêtes. 2^ t couvrir l'e défaut de la partie qui caule ce dereglement:ainfi on ne devroit pas s'cftonner quand même nous demeu- rerions fans réponfe à l'égard de quel- que aftion des Bêtes, puifque tout le monde avoue que nous fçavons très- peu le raport particulier que les corps extérieurs ont avec elles , car quand on fuppoferoit que nous connoiffons aflez ce que c'eRque dupain, de l'air, de l'eau, Sec. cela ne fuffiroitpas, 8c il faudroit encore avoir découvert de qu'elle façon toutes ces choies peu- vent agir fur leur cerveau, de quelle, manière elles fe mêlent avec le fang , lafigure, le mouvement, la quantité êc la grofTeur des efprits animaux qui en font formez , en quel temps cc dans quelles circonftances toutes ces chofes font propres ou nuifiblesà l'entretiea dcleurvie, il faudroit fçavoir auvray la diflference infcnfible qui fe trouve entre les fibres de leur cerveau, la manière dont les vertiges des objets s'y impriment, celle don!: ils s'yconler- vent , l'ordre des fibres entre elles , l'o- rigine, ladiftribulion, laliaifonSch fympathie des nerfs. Sec. carquoy que nous voyons la différence groffiere& fenfible qu' il y a entre un linge & un S.J2 XltTAmt elcphant, nous ignorons pouitinr !a> plus elVcnticlleiklapIus utile à nollrc iujet r^avoircettediverllre impercep- tible ?t*Ame doit effrayer un ci'pricdont la lumiè- re n'elt pas entièrement cftcinte par le nombre de Tes erreurs: car quel en- tendement peut concevoir qu'un cftre créé piiilîe faire quelque choie Je rien, 5c que ce qui n'a point de penfee, ni n'en i'çiuroii" avoir , ia puidc donner? que cette didance infinie qui elt en- tre le néant ik. Tertre, comme parle Saint Thomas, ou plutôt que cette diipolîtion inconcevable puilTe ellrc "Ciralée par ime puillànce finie & qui n'a rien de foy? comment eft-ce que lesinfcéles , qui Te forment de la pour- riture, peuvent avoir une ame qui doit eftre produite non feulement de rien , maisaulVi par quelque chofe qui ne connoit pas & qui en doit élire la caufc principale dans leur langage , comme les efprirsfcminaux des hom- mes, ou des autres Belles, qui font infcnfibles, ou comme j'ay Icu dans quelques uns, un infeftc vague * oc indéterminé, qui n'exille qu'en idée Jîc dans le relie de ccluy qui le dit ? il faut en ce cas là que quelque chofe donne ce qu'elle n'a pas, que les cfprits icminaux . le folcil , ou cettegrenoiiil- desBètfi. i^^ le en l'air cc idéale doanent la faculté de connoîrre cju'ilc; n'ont point, 8c qu'ainii non feulement quelque lub- fî:mcefoit faite de lien , mais encore par le rien ou par foy- même. Se qu'u- ne cp.ufe donne ce qu'elle n'a pas : Il l'on admet cela, toutes les raifons de l'e.xiftence de Dieu font vaines, car la matière aura elle faite de rien, o; par le rien ou par foy-méme , nos âmes auifi, Scainfide tout le refte. Ces confequences font terribles, 8c des fuites de cette nature devroient épouvanter ceux qui en foûtiennent ks principes , Se les retirer de la léthar- gie Se de l'aiToupifTement où les préju- gez ont jette leur raifon. Tout ce qui a eflé avancé, dira-t-cm, feroit véritable , li l'on foûtenoit le fcntiment d'Epicure, qui croit que la matière première n'elt autre chofe que des atomes indiviiibies d'un nom- bre indéfini de toute forte de figurer, ou celuydeDefcartes, qui ayant vou- lu faire une phylique géométrique, a crû que la matière ne conlii^oit que d.ms la longueur 8c la protondeur i maijdansleientiment qui eft genera- Icm.entreceude tout le monde, ioii- veou par taai de grandi hoiiimcs*^- ^40 ^" l'Orne piiyé par l'aurorité detanttle lt;avan«" d.xns touslcî lîecics , & enlcigné par AriTcotc , dont le nom ieul vaut mieux qu'une demonftration , 5c dont une Iculc pcnfée ert: prctcrableàtoutc l'é- kgante lubtilitc de Gaflendi 5c au« rêveries bien fuivics 5c bien imagi- cées de Dclcartcs : Car cet auteur fait tout , ç^ fans nôtre Arijiote , La r/ii/cn ne "jott goutte (^ h bon- fens r^dotte. Dans cette opinion , dis je, il n'en vapas ainfi, puifcjue la matière pre- mière n'cll qu'une puillance toute pure, fans aucun atfte quel qu'ilibit. Car comme il y a unadtc toutpur, te un cftre qui n'a nul vuide 5c nul- le capacité, icavoir Dieu, il ell rai- fonnable qu'il y ait un être tout vui- de 5c depoiiilledc toute Ibrtede per- fections, fçavoir une pure puiflan- , ee, qui n'ed, comme dit le Philo- fophe , ni quiddiic, ni qualité, ni quantité , qui n'ait pas mcfmc l'c- sillcncc'.mais qui foit capable de rece- voir toutes ces chofcs , 5c de faire un compofc par foy 5c non par acci- dent avec les formes qu'on en tirera par eduûion , lefquellcs font des fub- des 'Bêtes'. lAï. ■ilances iocompletes , tirées deiapuil- fance de la matière , foùtenuëi par -elle, 8c deftinées de la nature à faire uncompoféfubftantiel avec elles tel- lement qu'après avoir fuppofe tou- tes CCS chofes , il n'eft pas difficile de répondre à tout ce qu'on a objec- té , en difant que l'ame des Beftes fup- pofe toujours un fujet qui la reçoive & qui lafoûtienne, ce qui fait qu'el- le n'eftpas créée, 8c il faut avoir l'ef- -prit bien bouché pour n'admirer pas la profondeur Se la fubtilité dt cette xloctrine. De bonne foy il faut avoiier que -cette profondeur eil fi grande, que l'efprit n'y peut pénétrer, 8c que la. jaifon quelque éclairée qu'elle foit, n'en fçaiiroit dilTiper les ténèbres, car cet amas confus de mots vuides -de fens 8c de fignifïcatian ne reveil- le aucune idée dans l'efprit , 8c ne luy fait rien concevoir : outre ceu les difficultez qui ont elle propofées fubfiftent dans toute leur force , 8c • on auroit lieu de pouffer ces chofe3 bien plus loin , puifque cette matic- , enfansdans la croyance que les Bè- >, tes n'ont point d'amc qui connoif- „fe ? tout ce q^u'ils- voyent faire iî *Mr. Bernicr, t. fart. dtl'Abrtgi de GaJjènJt. tDcfcartcs, GafTendû :f desBttcs, 349^ ',,femblableàce qu'ils expérimentent ,, en eux- mefmes ,&c à ce qu'ils voycnt ,5 dans les autres hommes ne les j.convaincra-t-il pas toujours ducon- ,> traire ? ce pencliant & cette pro- j.penlion fi grande eue nous avons p^ j, croire que les animaux cornioiflcnl, • ,,n'elVce pas un ligne certain que j. c'eft la nature elle mefme qui nous ,, le dit , & qui nous in'truit into'ieu- ,, rement de cette vérité? Il n'eft pas difficile de répondre qu'une. vérité pour eftre nouvelle 8c inoiiie n'en elt uas mains veritéj on en a beaucoup découvert de nos jours qu'on avoir ignorées dans les fiecles- paHéz , qui n'en ibnt pas mioins ve- ritez pour cela, & auiquelles on n"a. pas manque de reprocher c'aborct- leur nouveauté, 8c d'oppoiér le icn- tîment commun qu'elles contrcdi- loient. Quoy que l'opinion de Co- pernic touchant le mouvemicnt de la terre ne fût pas nouvei'e,,on n'a pa- laiiTé de dire les mêmes chofès contre luy que celles qu'on vient de nous ob- jefler :. on. l'a traité d aborJ d'extra- vagant & de ridicule, 6c toufle mon- de luyaditquc e'ertok aller manifeC temcDt contre l'aspcriencc qui nous L- v- ifo Be VAme fait voir que la terre cft immobile Se cjue le foleil fe meut : malgré tout cela néanmoins le temps a fait meu- rir cette opinion ; l'on commence à s'y accoutumer Se à dire hautement * qu'il n'y a que la feule autorité de l'Ecriture , à laquelle elle femble fai- re un peu de violence , qui luy foit contraire. Quand on a commencé de foûte- nir, 6c même quand on veut encore dire qu'il n'y a pas dans le feu une cha- leur lemblablc, au fentiment qu'il nous a caufé, que les couleurs ne font rien du côté des corps colorez que le différent arrangement des parties qui font fur leurs fuperficics, qu'il n'y a en effet ni blanc ni rouge ni noir, que les fons ne font rien hors de nous, que les ondulations 2c les froiffemens de l'air, que la douceur du fucre, ou l'a- mertume de Tabfynte ne confiflcnt que dans une certaine figure Se un ccr- iain mouvement des parties d^ ces •corps, que la lumière du folcil n'eil qu'un nombre innombrable de petits Atomes qui fe feparent continuelle- * P. de Chàlcs*»/^»/?. m/tthematien. desBttes. ifr ment du corps du foleil, 8c fe répan- dant dans l'immenfe étendue des eieux, viennent jufques à nous. En- fin , quand on a voulu ailûi-er que l'o- deur d'une rofe ou celle du mufc n'é- toit autre chofe que les parties fulphu- reufes qui s'en exhaloient à tout mo- ment , on a d'abord oppofé à cela la perfuafion différente , où tout le mon- de eft généralement, 5c cette convi- âion intérieure que nous avons du contraire ; on a dit qu'il ne faloic qu'ouvrir les yeux poui* voir la blan- cheur des lis Se la rougeur de l'écar- }ate, qu'en approchant la main du feu on ne pou voit s'empêcher d'en fentir la chaleur , que la lumière du fo - leil efloit du moins auffi claire que le jour, 8c que cette doélrine n'elloit bonne que dans les Quinze-vingts^na- t-on pas dit qu'il feroit impoffible de perfuader jamais aux enfans que la douceur qu'ils Tentent en mangeant du fucre n'crt pas dans cet aliment, ni la blancheur qu'ils voyent en -regardant du lait, dans cette liqueii r ? Et en efïet il eu très vray que nos préjugez font iî forts, Sclacouftume de raporter nos icntùnew aux objets qui nous les font i-vj : zfi Deî'uime avoir fi invétérée , que ceux même, qui font convaincus du contraire ont delà peine à s'empêcher de le taire^ Et n'cft-il pas certain c]u'il n'eft per- fonne qui nefe fcote., pour ainfi di- re, poufle par la nature à croire que I^oleil n'a pas plus d'un pic de diamè- tre, lorsqu'il regarde cet alhc.quoy. qu'il ait d'ailleurs des demonflrations du contraire? Les jugcmcQs que tout le monde, fait to-ucnant les qualité?, fenlîble* femblent bien plus naturels & plus in- time? que ceux quc^nous formons touchant lame des Bêtes i toutcstois on ne lailTepas de fe dëlabufer inferw fiblement , & les quaiitez fenfiblcs que la nature même femble foûtenir, commencent d'être abandonnées. On peut dire la mefmc chofe de l'ame des Bêtes , bien de gens font reve- nus de leur erreur, & cette opinion que l'on veut faire paffer pour fi ex- traordinaire fc fi oppofce au bon fcns cil déjà commune dans toute lEuro- pe. Enfin, pour finir là où j'ay com- mencé, une opinion n'en cil pas moins véritable pour ellrc particulicro ou. «ouvcllc , i>c li faut cfl riulofopiùc dhBétes^ ifj; combatre feulement par raifon. Je reprends l'explication que j'avois in- terrompue. €.H A P 1 T R E XXVI. De la liaifon cjutl y a entre l'or^ qane de L'ouie ^ celny de la parole IL efl: importan-t pourne rien laiiTer à defîrer lur cefujet d'examiner la lidlbn merveillcufe qu'il y a entre l'or- gane de l'oiiie 5c celuy de la parole.. Nous fbmmes convaincus par nous mefmesdela grande facilité que nous avonsàprononcer-lcsmotsde la mef» me manière qu'ils ont efté proferez : ce li'eft guère que par ce moyen que l'on apprend à chanter : un maiftrede mufique nous aver.tlroit cent fois de haufferoud'abaiffer la voix d'un oaxle dsuxtoni, nous ne le ferions jamais à propos, mais il n'a qu'à le faire luy- même, Scnous l'imitons d'abord : c'eil jjour cette raii^n que ceux qui naillent Éïurdifont muets Lscelfuirement, gaxv if 4 He l'Ame ce que ne pouvant entendre aucune parole , ils n'en peuvent prononcer au- cune ; c'cfl pour cela aurt'i que ceux qui n'ont point d'orcil!cs, comme Tondit, font incapables d'aprendre à chanter» car plus onaTorcille fine 2c délicate, plus on l'aprend vite Se fa- cilement. Il fe peut faire que cette connexion neconiifteen autre chofe qu'en ce que le nerf qui va aboutir au tympan de l'o- reille jette quelque ramification dans les mufcles des parties qui fervent à former la voix, 8c en ce que ce nert prend fon origine d'un endroit du cer- veau tout voilin de celuy qui doit s'ou- vrir pour laiiïer couler les efpiits ani- maux dans les organes qui fervent à la formation delà parole. Après cela fi l'on confidere que la voix du côté de l'air ne conilfle que dans certaines ondulations qu'il reçoit quand on parle, lefquclles fe répandant jufqucs à cette peau tendue dans le fond de l'oreille , appelîce tympnn , l'e- branlentfi bien, que cet ébranlement ?;uieft porté jufques dans le cerveau , ait non ièulement naître un fentimenc dcfon dans les hommes, matspcutcni core deternaiaer les cfpncs animaux à - des Bêies. iff entrer dans les nerfs qui fervent a for- mer la voix, à y entrer, dis-je, avec des iecoufles ik des tremblemensfem- Klablcsàceux que l'air a porté jufques dans l'oreille , d'où nous lerons dil'po- fczàlespouflerde la mefme manière qu'il l'a efté par la perfonne dont nous avons oiii la voix , & de prononcer en- fuite les mêmes fons &: de la même manière. Ces chofes , qu'on peut voir ailleurs très-bien déduites, * eftant ainfi ex- pliquées , il eil facile de comprendre que les bêtes dans lefquelles les nerfs qui fervent à la formation du fon, fe- ront dilpofez comme il faut pour laif- fer couler les efprits animaux dans l'or- dre neceffaire pour proférer une paro- le, feront capables d'aprcndre à en pro- noncer : car à force de leur en dire on frayera fi fort les canaux, &: l'on impri- mera des traces fi profondes, que les efprits couleront de la manière qu'il faut pour former les paroles qu'ils au- ront entendues , ce qui fe rencontre dans les perroquets & dans quelques autres. Il faut remarquer icy, pour * Dans M. deCordemoy, DifeoM!*-^ f^yfilH e de U Parole.. ■■ ^ i/fS- De l'yîme eAre convaincu qucc'eftlipure m?- chaniquc qui le Tait , qu'ils ne pronon- cent que les paroles qu'on leur a en- feignees 5c dans le même ordre. 11 arrive aullî bien fouvcnt que dans le temps qu'ils oiu faim , on leur aprend à demander de la viande, dc> Ibrteque l'efpece delà faim s'unillant avec celles des paroles qu'on leur dit, route? les fois que le nerfde l'cllomac. cftëbranléparlcfuc acide quiy eft, ce mouvement les fak parler, 5c deman- der de la viande. ^l»is expedivit ffiftaco fuum TicAjque docuit verbst ncjh.t- conari ? iklagijier artis , in£ertiqtte /.ir- Venter , neg/ttas artifex fec^ui- vecfj. Et pourcrre certain que cen'cft pas- par connoifiancc qu'ils le font, c'cfl que l'on pourroit uufli bien leur apren- dre quand lis ont befoin de manger , à. dire qu'ils ne veulent point de viande, commcun les drefl'e pour co deman- der. Pliiûsurs Belles au contraire font in- capables d'aprcndrc-à parler , à uufa JeiBheK 2/7 defadirtribution ,delafifuation, 8c de l'origine difFerente des nerfs qui fer- vent à former la voix : car cela fait qu3 les efprits animaux n'y entrant pas avec la merme difpofition Se les mef- mes tremblemens qu'ils ont receus dans le cerveau par les nerfs auditifs, oupcut-ertre , parce que ces derniers eflant incapables de porter dans le cer- veau de fecoufles femblables à celles que la parole de l'homme y excite, les Befles où ces difpofitions fe rencon- trent ne peuvent prononcer aucun? parole» La proportion & leraportqui eft en- tt e les nerfs de la voix& le mouvemenC des efprits, ijue caufent les cris des animaux de même efpece , fait qu'ils fes apprennent tres-facilemcnt lors qu'ils font encore petits , de leur père & de leur mère qui enproduifcnt fou vent de femblables. Et comme ils ont apris à poufler ces cris dans letems qu'ils avoientfaim, Scque leur père Scieur mère leur don- noisnt à manger , il ne faut pas s'éton^ ner s'ils crient toutes les fois qu'ils ont faim , ou s'ils s'aprochent de ceux qui crient, comme ils s'aprocheroient des alimens qui leur font propres Se utiles; Îf8 De lAm» Je ne vois rien en cela que de fort claiv moyenanrqu'on ait toujours prel'enr à l'clprit l'union ik la liaifon des traces qui fe fait dans cette occalîon. Si nous faifons encore reflexion qu'outre cette connexion des nerfs de l'oreille avec ceux qui fervent à la paro- le, il pourroit yen avoir une femblable entre les nerfs optiques 3c ceux qui defcendent vers quelques autres par- ties du corps, nous comprendrons ians peine que i\ une pareille difpoftion f« rencontroit dans les linges elle les ren- droit capables de nous imiter dans la 'phis-part des mouvcmens extérieurs que nous excitons à leur prefence ; car Timprelfion que ces mouvemens fe- roient dans leur cerveau determineroit les efprits animaux à couler dans des mufcles propres à produire des mou- vemens femblables aux nollrcs, la deli- catefTedelcursfibres, leur facilité à fc plier entoutfens.Sc le cours règle des efprits animaux dans leur cerveau con» tribueroient beaucoup à rendre ces ef- prits fufceptibles de toutes les déter- minations qu'on leur donneroit. On Icra entièrement perfuadé de cette conjefture quand on aura pris garde que la mefme chofe fe reocontrc dfsBêtesl 4fp à peu prés en nous, non feulement à l'égard de la parole, mais encore pour toutes les autres allions que nous voyons faire, lefquelles nouaibrnmes' tres-difpofezàimiter, 8c que nous imi- terions tres-fouvcnt fi noftre ame par fes penfées ne donnoit toujours quel- que cours aux efprits animaux, qui les empefohedefuivreles foibles impref- fions qu'ils reçoivent du dehors , pour exciter des mouvement femblables à ceux que nous avons veus. On a une expérience fenfible de ce • cjue jedis, car quand quelqu'un bâille en compagnie, tous ceux qui ne font pas appliquez à quelque chofe, 8c qui ne penfent (comme l'on dit ) à rien, ne manquent pas de bâiller aufli : pour- quoy donc ne croirons nous pas que ce qui nous arrive à l'égard des mouve- fnens que l'on fait en bâillant , arrive aux finges qui n'ont aucune penfée pour les attacher ailleurs dans toutes les autres adions que nous faifons en leur prefence. Cecy fervirapour expliquer ce que j'ay dit de l'Eléphant , dans lequel une difpofîtion femblable fe trouvant , ce qu'il vit faire à fon maiftre lors qu'il mit de l'eau dans le chaudron , i'obli» JSô T>e PAme gea de faire la mclhie chofeàlavcuS de celle du puirs. Tout ce que l'on a dit jufques icy pour re:e fAme r.oiis voulons dire. Ce qui ell unr preuve bien grande du penchant que •nous avons d'attribuer de la penfce à toutes chofes , tantôt plus . tantôt TP.oinî, fuivantleplusou le moins de rapport qu'elles ont avec ce que nous faiibns. Et n'cft-ce pas cette habitude pernicieufe qui a obligé quelques Phi- îofophes * à donner du lentimcnt à toutes chofes pour s'éloigner de tout ce qui pouvoit les détruire fie pour s'approcher de ce qui leur ciloit pro- pre. 11 eft important que nous méditions *ia peu fur cela, pour achever de nous -convaincre que la principale raifon qui nous fait donner une ameau.x Bctcs, ne vient que de ce qu'elle^ font de cer- taines allions qui font bien fouvent dans nous unies à quelque pcnfée ; mais cette raifon ceffcra , 5c: nôtre pré- occupation aulll , d'abord que nous aurons pris garde à bien démêler ce qui eft de l'ame d'avec ce qui cil du corps. Ainfl n'cft-il pas trés-veritab!e , que C\ nous n'avions jamais eu de nourri- turc, & que par confcquent le fcnti- *Campanelh&c. defenfu nruro. des L^ft. ^5f ïKcnt de faim , ou de foifnenous eul- £Ènt jamais porté à chercher des ali- mens, premiercnîent nous n'aurions jamais eu aucune penlee degoull, le- condement on ne ie fût jamais aviie de dire que les Bêtes avoient de penlees à l'occaiion des imprell'ions que font (ùr elles les aliraeus dont elles ic noar- rillent ? Si lors qu'on nous pique nous étions fimplement excitez à jetter quelque cry fans en reffentir aucune douleur, comme il arrive aux orgues quand oit en abaille les touches , n'eil-iî pas con- fiant que les cris que les Bêtes pouffent çuand on les bleffe ne nous auroient jamais porté à croire qu'elles connoif^ fent, non plus que les mouvemenS dilTcrens de deux aimans, fuivunt la iituation qu'on leur donne ? Que l'on conlldere donc , après avoir penfé ferieufement à cecy que les penféesdefaim> defoif, de dou- leur, &c. ne font pas la caufe des mouvemens que nous faifons quand nous les relTentons mais , que c'eil l'impreiTjon du cerveau qui nous don- ne ces penfccs , laquelle nous difpo- fe toute feule à ces mouvemens, Hz nous ferons cnticreraent convaincu». M iCS De P Ame L'on finiroiticy li dan? les afFaire» de la railbn tout le monde écoutoit la raifon i mais comme il eft certains aveugles que la feule autorité con- duit i il taut encore tâcher de les con- vaincre, en leur faifant voir qucnol- tre lentinient eft ccluy de Samt Au- gallixi, que Saint Thomas l'a llippoië pour expliquer l'indulkic des Belles, & qu'il eilt-ormcl dans la Sainte Efcri- rure. CHAPITRE XXVIII. Ouelqtics autcritez, ^Ht fnvorïfcni cette àoUnne, SAint Auguftin dans le vingt-troi/îç. me chapitre du Livre de l'elprit Se de lame , dit , ^ y^i^ptUe ef^rtt cor- "^ Spiritum corportum -voco aè'remvel pot ii< signer» , qniprofuifu^ilitateiide' ri non poiejl , ^ corpora interiîts vegetiUi' do 'vi-ufficat , qtt£(lam autem vnijicat tnittitm (^ nonfenftficAt , fient .trbores ©• herbas cj> Mir^erfx m tirra germinan- t! r , n:ixda77i autcmfenfjicAt (^xe^ttat, JicHt omnia bruta nnmhilt.i. (les Bêtes, z6-r iporeî , dt l'air eu du feu que fa fnhtUité dtrobeamtn 'veuë, (^p Fjlm tes capables des premiers àcgrcz dé fentiment, que nous leur avons accor- de ? fî bien que pour définir les efprits animaux je n'employerois pas d'autre» termes que ceux de Saint Augurtin. Il dit encore dans le quatrième Cha- pitre de la connoiHance de la vérita- ble vie : * L'î vie des Béia dépend des tjprits qui ne font faits que d'atr (^ du f'ing de l'an'mfil , ces petits corps n* Iniffent pas d'efire capables de fttuiment f^ de mémoire , mats nullement de ptn- fée , fi Lien que la mort du corps Us dif- Jipe (^Its fait évanouir en l'air. On ne peut pas mieux définir les rfprits animaux , car dans le fcntr- mcnt commun cène font que liplufi pure & la plus fubtilc partie du lang avec lequel quelques parties d'air ic mêlent quand nous refpirons. On vient de montrer en quel fens les eC- prits animaux eftoicnt fcnfibles , 8t pour eflrc convaincus que Saint Au- guftia ne leur attribue que le pro- * Vïra brutorum tft Jpiritm vi/alk eonjlanr de père (y> fangaine animalis , Jed ftnfibtas , memoriam habens , inttl- teclu carcns ,cum:arntmori(ns t inaërt $z.antfceni. des B'éies. 2»^^ mîer ?c le fécond degré de feiitiment , on n'a qu'à voir dans le trente-hui- tième Chapitre du même livre , où diflinguant comme nous la faculté de fentirdel'ame, -' inùnem Aïcinms , etiarn p.nïma. himinis-' ili»^s ^Hiaiîda eji ? Aifif. M i:j 27* Dtf f:^mt nous perfttaJera que i\ime de l'homfnt ejl lie même ? Dieu noss eu prefcrve. Quelques Philofophcs de ce temps ne font pas 11 modérez. Se leurem^ portement cilli dcraiionnable. qu'ils fbûtiennent avec chaleur qu'il y aurv il grand raport entre nos âmes 8c cel- les des Bêtes , qu'on n'en i'çauroit priver ces dernières, qu'on n'en prive en melme temps les hommes i ce c)ai eft alTûrement le comble ou de l'ii^norance ou de la malice. Saint Thomas dans la première fc-. coude, queftion ij. article i. en parlant du choix s'obje£te , que la pru- dence convient aux Bctes. Elles thoi-' itjlint , dit-il r des mcyenstres- propres <* leurs fins : car cruelle inJuJirie ne rr- tnarque-t-m point en ce c^u' elles font % comme dans les abeilles , dans les araigr nées} g5>r. Il raporte cnfuite l'excnir pie des chiens de chaHc qui courant après un cerf , & rencontrant trois chemins, en vont flairer deux, & pafîent en Tuite dans le troifiéme ians l'examiner. Voicy la réponfc qu'il donne en gênerai à toutes les fiired'cs des Bctes. ' Le ffnuvement eft dans U corps ma ** Ad y Jicenduay ^HoJfcKt dicîtuw d*s Bêtes. if^ pitr le moteur , ^ ainfi laforcede celuy qui meut fe mauifefie dans le mobile ; qu'on remarque bien ces termes. Il pourfuit auifi ; ^ c'efi peur ce fujet que dam toutes les chofes meués par quel- que être raifonnable ., on xioit reluire l'ordre delà raifonqui meut , quoy que les chofes qui font meues par un moteur Ti^ifonnable n'i-^yent en tUcs auctm prin- cipe de ratfon. Car c'ejî ainft qu'unt flèche i!X au but par la direction de et" luyqui l'a décochée , comme fi elleavoit dit la raifon pour fe régler dans fonmou-t vemen , c5» lamefme chofe parott dans les mcMvemcns des horloges, ^ en un mot dans tous les ouvrages qui partent de l'indufirie^-de l' artifice des hommes. Vous voyez donc que Saint Tho- ia 3 . Phvfîc motu4 eft actm mohilU 4 moienteiCP ideo virtiumoientis appartû ta motu mobilis , propter hoc ia omnibus qu£ movenittr à, ratione cpparet or de ra^ tionii moientii , licet ipfa quA ratione raoventur ratiùnern non habeant 3 fie tnim fagitta directe tendit ad f.gnum ex motione fagiîtantis , ac fi ipfa ratio- nem haberet dirigent tm : O' idem appa- retinm.iibtu horclogicrum > ^omnium iageniorum hamanorum quA artefiunt^. M iilj lyf r>f l'Ame inas afTure que dans les mouvcmens les plus réglez que nous remarquons dans les ouvrages de quelque efti-c intel- ligent , nous y devons voir toûjourj un ordre 5c une raifon qui nous falfent connoiftre que le principe de ces ac- tions, ou Partifin des corps dans qui elles ie rencontrent, eft raifonnable. Mais nous ne devons nullement infé- rer , quelques bien ordonnées que foient ces opérations qu'elles partent immédiatement d'un principe qui ait la raifon: il tait luy-même tout de fuite l'aplicntion de cette comparaiibn. * Et comme nous r.:^oricns tout ce qu'ily/tJeflusmerveiHrux H^ntles ou- vrages des hommes àViiiJttjîrJe de leurs ouvriers , atnjî tout ce qtie nuis z'oyons de plu* furfren:tnt d.xns les chofçf natu~ TtUes doit efire ramoné à C artifice infi- * Sicutautem cempurnntur artifici/t' liaadarîem humanam , it.iccmparan- tur onmia naturali^ ad artem divinam , (3i> ex hoc confinait quod ex operibui kru- torum (inimalium Apparent quétdam f.i- g.icitacesin hriitis , in quanthm habent incltnationem natunletn ad quofdam or- dinatijjimos procejf»} , ut pote à fttmntti titît or^ifUics. des Jiétès. '%rf nJ^ de leur divin arti fan ; ^de là il ar- rive que les aBicns des Bêtes femblent tfojir.^uer quelque fenetraticn ^ quelque induftrie , entant qu'elles cnt un certain penchant ^ une dij^cdticn k certaines démarches très 6ien ordonnées , trts-juf- tes ^ tres-conformes à Uurs fins;mitis cela vient de ce que le divin ouvrier les •/» réglées Qi> ordonnées de la fi-rte. Il n'eft pas neceffaire de rien ajou- ter à cette réponfe, elle eft évidente 'd'elle mefme, 6c S. Thomas a aflcz déclaré que les machines que font les hommes, un horloge, par exemple, marquoitparlajuftelTedefes mouve- mens, de l'intelligence 6c de la rai- fbn qu'on ncdevoit reconnorftre que dans l'artifan, 8c nullement dans l'ou- 'vrage : de même quand nous remar-- quons de certaines actions dans les Bêtes qui font fî à propos, & qui fc fuivent (ibien : orJinatijJimosfroceJfus , nous voyons qu'il y a de la raifon ea cela : mais c'eft feulement dans l'ou- vrier qu'il faut la chercher, ut'^aie k fummà arte ordinatos. C'eft ce divirl ouvrier qui les a ainfi réglées, 8c qui a tellement difpofé toutes chofes dans les Bêtes, queces adtions doivent s'y rencontrer neceflkiremcnt, S. Tûo- ^■f^ /DefAme mas achevé àinii cet article tout de flii- te. * Et foar cf fujtt ojHelciues nHtmaM>: font appeliez, Jim ^. ru/ez, , ijuây qu'tl tt'yait en eux asuunprincipt de