im ^'^"^ Kl,,jSt^^, ^Ari^%\.;^ "1^ %-;;# ^^■#' «' -^ ^F*. ife fT*^-'^^ M''a.M:tM ^&;i^mL,^ i'^"-m Mr./^^ :â^ ^^;-"i 3^ / «#■ L^E^^y >i^-é^^^:<^ ^"i r r. /'^: ^^^^^^-P' h^^ l^iN^ ^i^^^ ,-^^^ TRAITÉ DE LA POMME DE TERRE. IMPRIMERIE D'AUGUSTE CARTHELE3IV, Rue des Granda-Auguslins , n» lo. TRAITÉ IIE LA POMME DE TERRE SA CULTURE, SES DIVERS EMPLOIS DANS LES PRÉPARATIONS ALIMENTAIRES, LES ARTS ÉCONOMIQUES, LA FABRICATION DU SIROP, DE l'eAU-ûE-VIE, DE LA POTASSE, ClC. PAR MM. PAYEN et CHEVALLIER. CHEZ THOMINE, LIBRAIRE-ÉDITEUR, RUE DE LA HARPE, N" 78. 1826. tX^ f^4vorf/Ueur ^7 &r7iacuxy. jSous avons l'honneur d'offrir la dédicace de cet ouvrage , au philantrope éclairé , dont les efforts et l'exemple ont conùibué à mettre en usage les utiles produits de la Pomme de Terre. Ses \iiô-èuiiiî€ed cl litii-o(iMiicu\î ey^. <=J^a/ii^rt el t/^. wÂ&vaUer. \^'\ 'lVV\'^,VWl.'fc^Vl^Vlï.\.Wt/V\M.'VW*.W^»A/\/VfcV^VLV^T.fcVÏjV. WVljV\^|j\,VVt PREFACE. L'accueil flatteur que notre premier Mémoire sur les Pommes de Terre a reçu du public, en confirmant le jugement qu'en avait porté la So- ciété Royale d'Agriculture (i), nous a fait désirer de rendre ce travail plus complet; nous avons cm pouvoir y parvenir, en rassemblant les résultats des travaux publiés par plusieurs savans sur cette précieuse plante, en indiquant les meilleurs modes de culture, les engrais à employer, les moyens de reconnaître les proportions de ma- tière nutritive relatives aux sols et aux variétés, les procédés propres à leur conservation, les di- vers emplois dont sont susceptibles les tubercules et les tiges de ce végétal, les préparations alimen- taires que l'on peut en obtenir. (i) Ce 3Iémoire, résultat de recherches stimulées par le programme de cette savante société, a été par elle jugé digne de la médaille d'or. VIII Nous nous sommes proposé, en réimprimant notre Mémoire, d'agrandir le cadre que nous avions d'abord rapproché des bornes d'un pro- gramme , et de rappeler aux cultivateurs toutes les ressources que lui offre une plante qui nous affranchit pour toujours du fléau des disettes. D'anciens préjugés subsistent encore contre l'ali- ment qu'elle fournit; et malgré les efforts de sa- vans illustres, parmi lesquels on peut citer en première ligne lephilantropePARMENTiER et l'agro- nome Cadet-de-Vaux, notre but sera rempli, si nous avons contribué à mettre en honneur chez nous le végétal le plus productif que l'on con- naisse dans le monde. TRAITÉ DE LA POMME DE TERRE. PARAGRAPHE I". Origine, historique , description du Sola7ium tuberosum. vJette plante, nommée vulgaîrement pomme de terre en France, et poiatoe en Angleterre, paraît être originaire de Virginie, l'un des Élats-Unis de l'Amérique. On en trouve à Valparaiso, au Chili , où elle croît avec abondance dans des ravins ; les rapports de plusieurs voyageurs portent à croire que le solanum tuberosum vient spontanément à Monte-Viedo, Cette plante arriva des régions équatoriales en Italie, s'in- troduisit en Allemagne, d'où elle fut transportée en Espagne, et de là en Irlande, puis dans toute l'Angleterre. Vers la fin du 16' siècle , la pomme de terre fut importée d'Italie en France ; on la planla en Franche-Comté d'abord . puis en Bourgogne; mais bientôt un préjugé se répandit contre ces tubercules ; on prélendit qu'ils pouvaient donner la lèpre ; leur usage fut défendu, et l'on cessa de les cultiver. La culture de la pomme de terre fut reprise quelques temps après, mais elle ne servit d'aliment qu'aux malheureux et aux bestiaux ; on lui supposait toujours quelques mauvais effets dans l'écono- mie animale. L'article qui traite de ce tubercule, dans l'En- cyclopédie, en 1765, se termine ainsi : « On reproche, avec i (« ) raison, à la pomme de terre d'être venteuse/ mais qu'est-ce que des vents pour les organes vigoureux des paysans et des manœuvres? » Les préjugés reçus en France contre les pomme? de terres s'étendirent de nos jours , même sur les gens qui faisaient un usage habituel de cet aliment; les Flamands et les Anglais étaient naguère encore en butte à nos sarcasmes, à cause de leur goût pour les pommes de terre, et de la grande consom- mation qu'ils en font. La culture des pommes de terre, en France, est aujourd'hui très-étendue; et sa consommation, déjà très-considérable, est susceptible de s'accroître encore par les divers produits que l'on peut en obtenir. La préparation de ces produits , et le mode de culture du soCanum iuberosum ^ ont donné lieu h des recherches intéres- santes sur lesquelles nous jetterons un coup-d'œil rapide, en signalant l\ l'estime publique les savans qui ont consacré une partie de leur temps à cet objet d'une utilité générale. On doit placer, au premier rang, les travaux de M. Parmen- tier et ceux de M. Cadet-de-Vaux. Ces savans ont consacré une partie de leur existence à faire triompher la vérité sur los faux préjugés, enracinés depuis des siècles^ contre les emplois les plus inléressans de ces tubercules. Ce fut en 1785 , que Parmentier fit le plus d'eOTors pour démontrer les avantages que peuvent offrir les emplois des pommes de terre. Des calamités de toute nature, en l'année 1786, imprimèrent, h la culture de cette plante, un certain élan qui fut encore excité par un stratagème industrieux : on se rappelle que le philantrope Parmenlier fit garder par des gen- darmes un champ planté de pommes de terre, dans la plaine des Sablons, afin de donner l'envie d'en dérober : son but fut atteint. Louis XVI accueillit avec bonté le bouquet si simple que (^ ) lui présenta Parmentier, et qu'il n'avait composé que des fleurs d\i solanum tuberosum. En effet, quel emblème plus flatteur pouvait-il offrir à ce prince que celui de la plus puissanto g;a- ranlie contre la famine? quel moyen plus ingénieux pouvait- on imaginer pour mettre en crédit une plante jusqu'alors dédaignée ? Les courtisans, louiours attentifs h flatter le 2:out du roi, s'empressèrent h Tenvie de cultiver une plante honorée de ses regards. C'est donc à la flatterie que nous devons une partie du bienfait de la culture des pommes de terre. En d'aulres temps, l'essor que prit la culture de la betterave et les succès de nos fabriques de sucre indigène, furent dus à une cause semblable. DESCRIPTION DE L\ PLANTE (l). La pomme de terre est le tubercule d'une plante de la famille des morelles : le solanum tiihcrosiun de Linné; sa racine est vivace, rampante ,* elle offre des tubercules charnus, amylacés, de forme et de grosseur qui diffèrent, selon les sols, les variétés et les soins de la culture. La tige de cette plante s'élève h la hauleurde deuxh trois pieds; elle est herbacée , rameuse, anguleuse, un peu ailée. Ses fleurs sont en grappes; elles ont des couleurs variées : on en a observé des j aimes et des roses; elles sont placées au sommet des rameaux et en opposition avec les feuilles. La corolle est comme éloilée , à cinq tubes planes triangulaires; le sommet de ceux-ci est re- courbé en dessus. Chaque lobe est plus épais à sa partie infé- rieure et moyenne. La corolle a un tube très-court. Les orga- nes sont composés de cinq étamines insérées au sommet du tube ; les filamens sont très-courts; les anthères rapprochées totalement en forme de cône tronqué ; chacune de ces anthères (i) L'excellent ouvrage de M. Ricliard nous a servi à rendre la description de celte plante plus coniplète. 2. (4) a deux loges qui s'ouvrent en un pelit trou situé au sommet , ovaire libre, glabre, un peu conique, oflVant deux légers sillons opposés; il est h deux loges contenant un très-grand nombre de petits ovules attachés à deux Irophospermes sail- lans partant du milieu de la cloison ; le style est plus long que les étamlnes. Il est glabre en forme de cylindre :, et se termine par un stigmate capitulé, glanduleux à deux tubes distincts. Le fruit est une baie céraslforme , d'abord verte , puis jaunâtre , enfin violacée à l'époque de sa parfaite maturité. La pomme de terre est d'origine étrangère : les auteurs l'ont attribuée 5 différents pays; quoi qu'il en soit ce produit est une des meilleures importations qu'on ait pu faire, soit sous le rapport de ses emplois, comme aliment , soit sous celui de ses applicaliona aux arts industriels. La culture du solanum tuberosum est maintenant très- répandue en France, et la plupart des sociétés d'agriculture des départements ont publié des travaux sur la culture de ses différentes variétés. PARAGRAPHE IL Des sols convenables ; préparation de la terre; plantation ; soins pendant la végétation ; récolte. La pomme de terre vient dans presque tous les terrains; ceux qui lui conviennent le mieux sont peu compacts , pas hu- mides , médiocrement fumés et surtout assez profonds. On peut alléger, pour cette culture, les terres trop fortes avec des cendres de houille , des terres sableuses , du fumier de litière à longue paille , etc. Les terres trop sableuses seront améliorées par leur mélange avec de la marne, des argiles plastiques glaiseuses, des anciens dépôts d'égoûls, etc. Tous les fumiers conviennent ; les plus actifs se répandent à la su- perficie , les aulres au fond du labour. ( 5 ) La pianlalion do ces tubercules u lieu ordinairement dans les quinze derniers jours du mois de mars ou les premiers du mois d'avril (suivant !es climats , les terrains et les saisons), sur des terres qui ont porté de l'orge coupé en vert , du trèfle des fèves ou de l'hivernage. On peut obtenir ainsi , dans un sol convenablement amendé et fumé , deux bonnes récoltes dans un an, et faire suivre, avec un succès assuré, la culture du blé , de l'orge ou d'autres céréales. Pour obtenir une récolte abondante en pommes déterre, il faut préparer le sol avec soin: les pratiques suivies en Flan- dre (i) et en Angleterre, fruit d'une longue expérience , sont dignes d'être offertes pour mod^iîes. Nous citerons les deux principales méthodes. On donne successivement deux labours légers destinés îi meublir et aérer la terre ; un troisième, plus profond, sert quel- quefois en même temps à ouvrir les tranchées pour déposer les tubercules et h les recouvrir de terre; mais si le sol est compact , on donnera un quatrième labour. La quantité et la proportion de pommes de terre obtenues, indemnisera suffi- samment des frais que cette dernière façon occasionne. On doit se rappeler que la récolte de ces tubercules peut , en quelques circonstances, remplacer^ pour les hommes et !es animaux des fermes , les céréales qui auraient manqué. Lorsque le teirain est prêt h recevoir les pommes de terre, on ouvre un sillon à la charrue; des femmes ou des enfans suivent le laboureur, en déposant à la main les pomn^es de terre (ordinairement coupées par quartiers , à moins qu'elles ne soient pas beaucoup plus grosses que des noix ) au fond du sillon, et à neuf pouces environ de dislance; le trait de charrue donné immédiatement après celui-ci , sort à déverser la terre sur les tubercules; il ne reçoit pas de plan. Celui que l'on (i) f^oyez l'Agriculture de la Flandre, par M. Cordier, on ne saurait trop rccoaimaQdcr cet ouvracrc aux Méditations de nos cnîtivateurs. (6) donne ensuite, est planté par les femmes ou enfans, de la même façon que le premier, et ainsi de suite jusqu'à ce que toute la surface du champ ait été parcourue de cette manière. Chaque coup de charrue ayant au moins \l\ pouces de large, on voit que les rangées de pommes de terre sont à 28 pouces, au moins , les unes des autres. On passe ensuite la herse et le rouleau, on recommence trois ou quatre jours après, et deux fois encore avant que les pousses paraissent, en sorte que la terre est bien divisée et débarrassée de toutes mauvaises herbes. Lorsque la plupart des jeunes plantes sont sorties de quatre h cinq pouces au dehors de la tcrr,e , on donne un léger la- bour à l'aide d'une charrue à deux déversoirs, et passant ainsi entre toutes les lignes , on opère en même temps un bullage qui rechausse, soutient et fortifie la racine de la plante ; ce labour s'opère quelquefois à la main avec une houe. Le champ se recouvre bientôt d'herbes parasites ; on les enlève par un sarclage ordinaire, que l'on répète plusieurs fois, h des intervalles plus ou moins courts, suivant que l'herbe repousse plus ou moins vite. On ne cesse les sarclages que lorsque les plantes ont pris assez de développement pour om- brager toute la superficie du sel. La plupart des fermiers, en Flandre, font verser à la main une petite quantité d'engrais flamand [gadoue, matière fé- cale humaine ) à chaque pied de pommes de terre, en pre- nant la précaution de ne pas toucher les feuilles ni les tiges,* cette fumure augmente beaucoup la fécondité du terrain , elle double quelquefois le produit. On donne ordinairement deux bultages h la terre avant que les tiges aient acquis tout leur développement. Les po. unies de terre hâtives se récoltent au commencement du mois d'août: la plupart des autres variétés s'arr ichent en octobre. On se sert, pour l'arrachage des pommes de terre, de bêches pleines ou à trois lames , de houes h une ou deux lames, sui- ( 7) vant l'habitude du pays et la nature du terrain. Quel que soit au reste l'outil que l'on emploie, il faut enlever chaque pied avec le plus de terre possible, aiîn d'avoir tout à-la-fois la plus grande parlie des tubercules ; on brise la motte , et des femmes ou des enfans ramassent les pommes de terre; on donne encore deux ou trois coups de bêche ou de houe pour reprendre les tubercules échappés la première fois. On emploie ordinairement, par hectare de terrain, sept à huit heclolitres de pommes de terre, et l'on en récolte , par une bonne culture , de deux cent à trois cent cinquante hec- tolitres. Cette culture est d'une grande importance ; elle seule peut ^ assurer la nourriture du fermier et de ses £;ens contre les ef- * fets des sécheresses , des pluies , de la grêle, des gelées, etc., souvent funestes à tant d'autres récolles. Il résulte des observations de M. Chancey de Lancenoy, déparlement du Rhône, que l'on peut obtenir des avantages marqués en faisant succéiler , dans de bas terrains , la pomme de t^^rre aux seigles , orges et froment, dans les lo- calités où la récolte de ces céréales a lieu vers les mois de juin et juillet. Celte méthode est suivie déjà, dans quelques départemens de la France : il paraît qu'il serait utile de la propager,' \oici quelles sont les précabtions indiquées par M. Chan- cey , et qui doivent être prises pour assurer le succès des plantations tardives. On porre, au printemps les tubercules les plus ^^ros, dans un endroit sec et éclairé; on les élend en une couche assez mince pour qu'ils ne soient, en aucun point, les uns sur les autres. Par ces dispositions, les germes se dégagent aisément, ac- quièrent de la consislanc3, et se colorent en vert : condition utile à toute végétation active. On piaule les tubercules en- tiers, en ayant grand soin de ne pas rompre les tiges, et de re- couvrir très-légèrement celles ci de terre : elles ne tardent (8) pas à se montrer au -dehors, et la végétation se trouve avancée de plusieurs jours. PARAGRAPHE III. Difféi'ens modes de plantation dans la grande culture. Procédés de la petite culture. Le mode de plantation, que nous venons d'indiquer, donne , en général, de très-bons résultats; celui que nous allons décrire est cependant préférable dans plusieurs circonstances ; l'humi- dité des sols , les pluies fréquentes, etc.; il réussit d'ailleurs Irès-bien dans toutes les localités. Après avoir donné h la charrue les deux ou trois premiers labours préparatoires, on trace le sillon qui doit recevoir les tubercules, h deux pieds de la lisière du champ; la plantation se fait de la même manière que nous avons indiquée ; on plante encore, dans le premier, le second et le troisième sillons tracés immédiatement après celui ci ; le quatrième n'est utile que pour recouvrir de terre les tubercules placés dans le troi- sième; on reporte alors la charrue à quatre pieds de là, et l'on ouvre un sillon parallèle aux autres, dans lequel on dépose des pommes de terre, et successivement trois autres reçoivent aussi des tubercules comme les premiers ; un quatrième sert seulement h recouvrir de terre le précédent; on reporte de nouveau la charrue à quatre pieds de distance , et on continue do la même manière jusqu'h ce que tout le champ soit planté. On passe ensuite la herse et le rouleau, puis la charrue, et l'on donne les premiers sarclages, comme nous l'avons dit; mais les bultages se font d'une autre manière. Dès que la plante a acquis environ la moitié de son développement, on commence h la butter, et on pratique la même opération quatre ou cinq fois, à des intervalles plus ou moins rapprochés, suivant les saisons, jusqu'à ce que la fleur soit passée. Voici (9) comment se pratique celle opération , que les premières dis- positions ont eu pour but de faciliter. La terre étant fort ameublie par la charrue , la herse et le rouleau , entre les bandes plantées , il suffit , pour le premier buttage, de relever à la pelle cette terre , en en jetant moitié de chaque côté sur les bandes. Avant le deuxième buttage , on laboure dans les intervalles, on passe la herse et le rouleau afin de bien nétoyer la terre de ses mauvaises herbes, et^la diviser convenablement; il est ensuite très-facile de la relever h la pelle sur les bandes plantées. On voit, par celle méthode, que l'on peut élever un buttage assez haut, sans grands frais de main-d'œuvre; que l'on creuse en même temps des rigoles larges entre les bandes; que ces rigoles sont très-favorables à l'égoutage des terres humides et des eaux pluviales ; si l'on y répand un fumier actif, tel que l'engrais flamand , il contribue puissamment , par les gaz qu'il dégage, à l'alimentation des feuilles , et ne peut gêner la plante; enfin, devenu moins actif, et mélangé avec la terre pour le huilage suivant , il fertilise le sol et active la végéta- tion des racines. Les pommes déterre , cultivées de cette manière, donnent un grand nombre de tubercules qui, généralement, contiennent moins d'eau et une plus forte proportion de matière nutriti- ve que dans les autres cultures. Procédés de la petite culture dans les jardins. La seule préparation que l'on donne habituellement à la terre, con- sisle dans un labour d'un fer et demi de bêche (environ i5 pouces), et cela suffit, parce que la terre, sans cosse travaillée, est toujours très-meuble. Lorsqu'on a une assez grande éten- due de terre à labourer ainsi , la houe est plus prompte et plus économique. Si la terre a besoin d'une fumure, on répand ordinairement le fumier sur le terrain avant le labour, et on l'enterre en labourant ; on peut économiser le fumier, en le plaçant au fond de chaque fosse. ( lo ) Lorsque la terre est disposée , on creuse , d'un seul coup de bêche pour chaque pied , des trous d'environ neuf pouces de profondeur h quinze pouces de distance les uns des autres; on place, dans chacun, deux ou trois quartiers de grosses pommes de terre, ou deux ou trois pelils tubercules entiers , et l'on recouvre avec une partie de la terre retirée du trou; le reste sert plus tard h butter, en sorte qu'à chaque place plantée il reste un creux. Dès que les jeunes pousses se montrent hors de terre, on opère le premier sarclage si les mauvaises herbes sont déjh assez nombreuses. Lorsque les tiges ont six h huit pouces de haut , on donne un binage en rechaussant les pieds ; on réitère cette façon deux ou trois fois, dans le cours de la végétation, en buttant de plus en plus; toutes ces façons doivent êlre regardées comme indispensables pour obtenir des récoltes abondantes. Il paraît que l'on a observé des résultats fort remarquables d'un buttage particulier appliquable aux petites cultures : lorsque les pommes de terre ont déjà poussé des tiges assez fortes au-dessus du buttage ordinaire, on défonce, des deux bouts, des petits barils de cent à deux cents litres; on passe toutes les fanes dans un des bouts, que l'on appuie fortement sur la terre , puis au fur et à mesure que les tiges grandissent, on ajoute de la terre dans le baril , qui finit par se remplir, lorsque les ft^uilles commencent à le déborder. 11 se forme des tubercules dans toute la longueur de ce vase, et l'on assure que l'on obtient plus de quatre fois autant de produit que par un buttage ordinaire. 11 est certain, au reste , que les butta- gcs sont essentiels à la culture des pommes de terre, et que de ces façons dépend surtout la quantité du produit. Cette méthode, que nous n'avons pas répétée ni vu appliquer, pourrait être rendue moins dispendieuse, en substituant aux barils , des paniers défoncés qui , dans les fabriques d'acide sulfurique et celles de soude, sont à-peu-près sans valeur. ( ^» ) PARAGRAPHE IV. Avantages que présente la culture de la pomme de terre ^ comparée avec plusieurs autres. Ainsi que nous l'avons déjà rappelé, c'est un fait constant que la culture de la pomme de terre nous a mis pour toujours hors des atteintes des disettes : quelques données positives feront mieux encore ressortir les avantages de celle culture, et feront connaître dans quels rapports les produits alimen- taires qu'elle procure se trouvent avec ceux de plusieurs autres plantes économiques. Le tableau suivant est extrait de l'agriculture de la Flandre, ouvrage déjà cité. Evaluation de différentes récoltes d\in hectare, calculées sur des prix moyens de dix années. GENRE DE CULTURE. PRODUIT IVET. PRIX MOYEiV. liect. T>i' c i l'i • f Graine iq 2cS ,1 Faille 00 4' ■ni. 1 1 j)i ■ ( Giaine ici 86 lile barbu d hiver .' „ -n -r /-- ^ Paille, o5 6o T,, . ] ., . (■ Graine i5 64 Jile de mars, avril, mai. .' „ -n o / ' ' ^ Paille 20 40 Seigle d'hiver Sucrion (orge d'hiver) f Orge de mars .1 Avoine demars V Pommes de terre 1 Graine Paille 6 , 28 27 r Graine 4i 20 PaiU Graine Paille Graine Paille 34 56 37 29 io 4/ 42 27 42 275 4 00 20 95 4 00 iS 92 4 00 11 66 ô 00 i4 64 2 00 1 2 88 15 f. 4o6 i55 4x6 142 295 ii5 84 600 68 467 540 54 VALEUR TOTAI.K, So I 548 44 64 3 90 ; 409 50 t ^ 279 76 81 s ^ -^ ^ 60 j r , 54 ; ^-'^ '' '^ ^ 526 21 06 \ 84 I ^9^ ^'^ T, 1 8G6 25 ( 12 ) Ce tableau présenlc le produit des récoltes , déduction faite, des semences : en le continuant pour les fèves de mars , colza, cameline, œillette, lin (de gros et de fin), navels, betteraves, tréfile sec, hivernage, tabac, choux-collets, nous aurions vu, qu'à l'exception du lin et du tabac, toutes ces cultures sont bien moins productives que les pommes de terre, et à-peu-près dans le même rapport que les céréales. Or, d'après le rapport ci- dessus, on voit que le produit brut moyen d'un hectare de terre, cultivé en céréales, est de 55o fr. » c. Les frais de culture sont d'environ 4^0 » Le produit net en argent est de i5o » Les pommes de terre donnent unbénéfice bien plus considéra- ble; en eflctle tableau indique un produit brut de 8G6 fr. 25 c. Déduisant les frais de culture 5oo » Il reste un bénéfice net de oGG 20 auquel il conviendrait d'ajouter quelque chose pour la valeur des fanes réduites en fumier ou en cendres , et pour le bon état dans lequel le terrain est laissé après la récolle. Cette diflerence, dans le produit en argent, se retrouve dans la plupart des localités , mais la valeur vénale pourrait n'êlre pas l'expression de la valeur réelle, que l'on doit, avec raison, attribuer h la quantité de substance alimentaire : nous alloniv voir que, sous ce rapport, les pommes de terre ont encore une supériorité plus marquée. Le tableau qui suit nous montre ces relations. Il fut pré- senté par l'un de nous, à la suite d'un mémoire sur l'analyse comparée des Betteraves , lu à la Société Philomatiqiie , le 17 juillet 1825, approuvé depuis et inséré dans son bulletin. ( '^') Tableau des produits comparés entre plusieurs cultures, dans le même terrain. TERRAIN CULTIVÉ (un hectare). PRODUIT TOTAL. SUBSTANCE nutritive sèche. Pommes de terre Topinambours Betteraves jaunes Betteraves rouges Betteraves blanches de Silésie. Blé Navets kilog. 21,000 19,100 28,000 28,000 25,000 hectol. 20 kilog. 18,000 kilog. 5,119 5,839 3,300 3,080 3,022 1,200 i,ii5 Les pommes de terre ont donc donné, en matière nutritive sèche, pour la même surface de terrain, plus de quatre fois davantage que le blé ; sa supériorité , relativement à la nour- riture de l'homme, est donc incontestable; relativement h celle des animaux , si l'on fait la somme des produits réels des autres tubercules et racines présentés ci-dessus , on aura i4,256j prenant le 5' pour obtenir la moyenne , on trouvera 2,85i ; ce n'est guères plus que la moitié des produits des pommes de terre. On obtiendrait un résultat, bien inférieur encore, si l'on prenait l'ensemble de toutes les cultures. La culture de la pomme de terre est donc une de celles qui présentent le plus de bénéfice, et la plus productive, de toutes, relativement à la substance nutritive qu'elle fournit. Il n'enfaut pas tirer la conséquence, toutefois, que le fermier devrait renoncer à cultiver les céréales, etdiminuer de beaucoup l'importance de quelques autres cultures. En économie rurale, le moyen de produire beaucoup est de varier les cultures ; les ( i4 ) frais de transport, soit pour aller vendre , soit pour aller acheter, sont toujours à la charge du fermier; ils diminuent la valeur de ses denrées et augmentent le prix de celles qu'il achète; il a donc intérêt à récoller tout ce qui se consomme chez lui. D'ailleurs il est facile de voir que si, tout d'un coup, une trop grande niasse de pommes de terre se présentait sur les marchés, la valeur en baisserait bienlôt, et les bénéfices présumés ne se réaliseraient plus; on doit donc donner d ; l'ex- tension h la culture de ces précieux tubercules, pour diminuer le prix de la nourriture de toutes les classes peu fortunées, et fournir aux nombreux emplois indiqués dans ce mémoire; mais celte extension utile ne peut avoir lieu que graduellement, et ne doit pas être illimitée. PARAGRAPHE V. • Avantages qui résultent des façons données au terrain et des engrais employés dans la culture du solanum tuberosum. Quelques cultivateurs ont mis en doute que les façons ou les engrais postérieurs à la plantation des pommes de terre pussent indemniser des frais qu'ils occasionnent par l'excédant de produit qu'ils procurent. On remarque même dans beau- coup de contrées où l'agriculture est peu avancée , que les champs de pommes de terre labourés au plus deux fois, et hersés une, avant la plantation, ne reçoivent plus d'autres façons qu'un seul sarclage; souvent on ajoute un binage, et l'on peut dire que, généralement en France, il est rare qu'on les rechausse avant de les butter. Il aurait pu paraître suffisant, pour combattre ces méthodes imparfaites , de citer les méthodes éprouvées par une lon"-ue expériences, en Flandre et en Angleterre : \h une active concurrence rend les cultivateurs industrieux; la concurrence même, dans l'achat des engrais , porte ceux-ci h un prix élevé. ( i5) Nous avons cru toutefois devoir éclairer la question par des essais comparatifs, et la Société Royale d'Agriculture, ne les ayant pas regardés comme inutiles , nous les reproduirons ici. Nous avions divisé une surface d'un terrain bien homogène en deux planches; les premiers labours et le mode de planta- tion furent les mômes ; nous employâmes, pour plan, des tu- bercules égaux , d'une seule variété, pour chaque carré cor- respondant ; enfin , nous nous efforçâmes de mettre les deux planches dans des circonstances semblables; l'une d'elles fut cultivée, l'autre fut abandonnée sans culture. Voici le tableau des résultats obtenus de chacune d'elles : NOMS DES VARIETES. PRODUIT Terrain cultivé. PRODUIT terrain non-cuUivé. DIFIEIIENCE. Patraque blanche. Patraque jaune. . Hollande jaune. . Ilullande rouge. . Violette Rouge , ronde, . . Yitelotte 557 45o 45 0 5j5 027 55o Si- 5oo i5i 45o 35o 25o 5 10 5oo 44o 200 221 45o 206 200 i5o 56o 60 255 i5i 320 210 iSo 97 25o 20S g25 121 120 iGj i4o 91 '9^ KjS 9^0 100 320 On voit, par les résultats qu'offre le tableau précédent, que la culture a une gi\Tnde influence sur la quantité de produit à surface égale ^ et toutes choses égales d'ailleurs, puisqu'en effet le terrain cultivé a produit, pour la plupart des variétés, environ deux fois plus que le terrain resté sans culture , et particulièrement pour la patraque jaune, qui est la variété la plus productive. La différence paye bien plus que les frais , puisqu'en subs- tituant au produit indiqué au paragaphe 4"^» 1^ quantité que l'on aurait obtenue sans culture , ou seulement 107 hectolitres ( '6) et demi, la valeur de la différence, ou 455 fr. 12 cent., est quatre fois plus considérable que le prix des frais de culture excédant ceux des façons ordinaires. Les engrais contribuent à faire obtenir un produit plus con- sidérable , mais il ne nous a pas été possible d'apprécier exac- tement leur importance dans celte culture. Cependant des expériences, que nous avons tentées dans ce but, nous ont donné des résultats que nous croyons devoir consigner ici. Nous choisîmes un terrain calcaire compact ; il fut labouré , hersé d'une manière uniforme sur toute sa surface ; puis divisé en trois parties égales : la première fut cultivée avec les soins convenables, mais sans y mettre d'engrais; la deuxième trailée avec les mêmes soins , avait été recouverte préalablement avec un engrais de charbon animal résidu des raffineries de sucre (i); la troisième, sans engrais, a été abandonnée sans culture après la plantation. Ces terrains , contenant chacun soixanle-dix pieds de pommes de terre, ont donné les résultats suivants : KOMS DES VARIÉTÉS. TEBR.'-IN cultiré. CULTIVÉ avec entrais. INCULTE sans engrais. Patraque blanche. Patraque jaune. . Hollande jauue. . Hollande rouge. . Violette (2). . . . Rouge , ronde. . . Vitelotte kil. 84 â5c- 70 5 00 60 325 70 300 49 >55 71 •. 60 65o kil. 175 670 i3o 64o 70 128 61 25o 68 120 ïoo 705 78 55o kil. 46 700 43 i4o 4» 200 5o » 5i 58o 57 4S9 32 5oo (1) Le charbon animal, après avoir servi au raffinage du sucre, est un très-bon engrais, il a été indiqué et eiuployé avec succès par M, Payea ( Voyez son Mémoire sur les Charbons, chez Audin, libraire à Paris ; prix : 1 fr. ). M. Mallet de la Varenne-Saint-Maur, M. Santerre, etc., en ont déjà depuis long-temps fait usage. (2) La pomme de terre violette n'a as atteint son degré de maturité. ( 17 ) Il résulte, de ces expériences que la culture et les engrais contribuent les uns et les autres h rendre les produits plus abondants; qu'en outre, cette augmentation de produits com- pense, et bien au-delà , la plus forte dépense que l'on fait pour l'obtenir. Il résulte encore des expériences que nous avons faites, ainsi que de celles de M. Dubuc de Rouen , qu'une solution faible d'hydrochlorate de chaux, répandue sur la terre, lorsque les liges ont acquis une partie de leur développement, détermine une végétation plus active et des produits plus considérables ; mais il ne nous a pas été possible de déterminer les proportions les plus utiles de cette solution , parce qu'elles varient suivant la saison et les terrains. Il est du moins certain, que le muriale de chaux, ajouté en trop grande quantité , nuit aux plantes et peut même les faire périr promptement; onjic devra donc en faire usage qu'avec circonspection, et ne pas trop forcer les doses. En ^augmentant d'ailleurs par degrés les proportions employées, et étudiant les effets, pendant plusieurs années, dans des saisons plus ou moins sèches, plus ou moins pluvieuses, on pouna acquérir des données plus certaines sur cette sorte d'engrais (i), PARAGRAPHE VI. Discussion des différents modes de planter les tubercules : entiers , en morceaux, en germes , pelures, graines, etc. Moyens de répandre les bonnes espèces et de proscrire les mauvaises. Nous nous sommes assurés, par des essais comparatifs, qu'il ne pourrait y avoir généralement aucun avantage dans la subs- titution des morceaux, des pelures , des germes, etc., aux ,(i) Le genre d'action que différens sels exercent sur les végétaux n'est pas encore bien connu; on a formé, sur ce sujet, difiérontes hypothèses plus ou moius hasardées ; toutefois, on admet assez généralement que les s^ls déil- 2 ( i8 } luberculcsenliers; les faits que nous avons apportés à l'appui, dans lo Mémoire qui fut honoré des suffrages de la société royale d'Agriculture^ ont été confirmés depuis par des expé- riences renouvellées plusieurs fois. Ces moyens d'économie des tubercules ne sont applicables que dans des temps où les pommes de terre seraient fort rares ; ils auraient plus de succès dans les saisons humides que dans les années sèches : en effet , on conçoit que la plante ne rece- vant pas sa première nourriture d'un tubercule volumineux, et ne pouvant la puiser dans un sol desséché, doit végéter avec peine, pousser de faibles rejetions et donner peu do produits. La conservation des pelures avec les yeux des tubercules, peut être utile pour envoyer au loin, sous un petit volume et un poids peu considérable, les moyens de reproduction des variétés nouvelles. Dans ce cas, on devra emballer les yeux et les pelures dans de la balle d'avoine bien sèche, et les garder jusqu'à la saison convenable à l'abri de l'humidité. H nous est également bien démontré aujourd'hui, que les tubercules coupés en quartiers , comme cela se pratique habi- tuellement, donnent surtout, dans les années sèches^ beau- coup moins de produits que les tubercules entiers ; qu'enfin, les pommes de terre les plus saines et les plus grosses, rapportent généralement les tubercules les plus nombreux et les plus gros ; que ces produits plus abondants indemnisent et bien au delà , des prix plus élevés que coûtent les semenceaux. L'emploi des graines a été reconnu utile , par le célèbre agronome Thouin, pour régénérer les races : ce savant natura- liste conseille de faire des semis avec les graines récollées dans nos climats , afin de faire naître un grand nombre de variétés quesccns , tels que le muriate de cliaux, agissent utilement en attirant l'iiu- niidité de l'atmosphère pour la transmettre aux racines des vigétaux, et que la plupart des autres sels agissant comme excitans des forces végétatives. ( '9 ) appropriées à noire sol, dont !es unes seront inférieures el les autres supérieures aux espèces que nous possédons. Celles que l'on aura choisies , cultivées avec soin , animées de la vigueur des plantes jeunes qui n'ont pas changé de climat , donneront des produits abondants d'une qualité supérieure. Thouin indique le procédé suivant, pour faire ces semis : ramasser les graines du solanmn dans les aniites chaudes oît elles parviennent à leur maturité^ et les semer sur une plan- che de terre bien amendée : on obtiendra, des i' automne de cette 'même année, une multitude de tubercules de la grosseur d'une aveline qui serviront à faire des plantations au prin- temps suivant; ce plant, à la fin de la saison, donnera des récoltes plus abondantes et des qualités préférables à celles quon obtient par la plantatio?i des tubercules des anciennes races. Pour obtenir cet avantage, il suffit de consacrer à ces semis une planche de quelques mètres d'étendue. Le procédé , h l'aide duquel on peut répandre les bonnes espèces, est fort simple; il a été appliqué avec succès par un grand nombre de riches propriétaires; il consiste à payer les ouvriers qu'on emploie: trois quart en argent et un quart en bonnes espèces de pommes de terre. C'est ainsi que M. Dumont, maire de Saint- Ouen, prèsPontoise.a rendu un grand service aux cultivateurs qui ont travaillé pour lui, en répandant parmi eux, et faisant multiplier de bonnes variétés qu'ils n'eussent pas songé à se procurer. Ne pourrait on pas obtenir uî;o amélioration générale dans la culture des bonnes variétés , en • fondant, pour divers déparfemens agricoles, des prix annuels décernés publiquement aux agriculteurs, qui, soit au moyeu de semis bien entendus, soit par le choix des tubercules plantés, auraient présenté les récoltes les plus abondantes des variétés les plus estimées? Nous laissons à nos agronomes phi- lanlropes le soin de déterminer les moyens les plus convena- bles pour stimuler les recherches et rendre les bonnes prati- ques constantes sur cet objet intéressant. 2. ( '^o ) PARAGRAPHE VIT. ' Moyens d'obtenir des pommes de terre précoces dans la grande culture. On doit mettre en réserve, pendant l'automne, les plus gros tubercules, et les planter au printemps; ces tubercules donnent des plantes fortes et vigoureuses, susceptibles de se rcmetlre aisément de ce qu'elles peuvent avoir h souffrir de la gelée ou d'autres intempéries de la saison. Il faut avoir le soin de disposer les tubercules de manière à ce que le germe soit situé vers le haut; la position contraire nuit au dévelop- pement de la tige et par conséquent à la formation des tuber- cules. Lorsque les jeunes plantes viennent h paraître, on peut les recouvrir de paille longue, légère ou de terre molle, pour les garantir de la gelée. PARAGRAPHE VIII. Appréciation de la valeur réelle des différentes sortes de pommes de terre» et méthode à employer pour reconnaître la quantité de matière scche contenue dans ces tubercules. Les rapports qui existent entre les quantités d'eau et de matière sèche contenues dans les diverses variétés , suivant les terrains, etc. , doivent être déterminés par l'expérience, si l'on veut obtenir une donnée exacte sur la valeur réelle de ces tubercules. En effet, la quantité de pommes de terres obtenues en poids dans un arpent de terrain , quoique plus considérable que celle obtenue d'un autre , pourrait ne représenter qu'une valeur excédante illusoire; nous allons en donner ici un exemple : supposons que le poids total des produits d'un ar- pent soit de 9,000 kilog. , et que ce produit soit composé : 1° de matière sèche 0, 32, et 2" d'eau o, 58; qu'un autre ( ^-^ ) produit fl'un arpent soit Ae i5,ooo kilog., mais ne contienne que o, i5 de matière sèche, et o, 85 d'eau, il est bien clair que lo premier résultat «era en apparence moindre que le deuxième, dans la proportion de 9,000 h i5,ooo ou de 100 à 1G6, ou encore n'équivaudra pas aux deux tiers du deuxième produit, tandis que réellement en tenant compte de la ma- tière sèche contenue dans ces deux produits , l'on obtiendra des résultats contraires; en effet, le premier qui semblait moindre , représentant o, 32 , contient réellement en matière solide 2,880 kilog, et le deuxième produit, qui d'après les premières données semblait le plus fort, n'en contient à o, i5 de la totalité que 2,261 kilog. Il en résulte donc que la valeur réelle en raison des poids des principes nutritifs est, en sens inverse, de la valeur apparente , déduite simplement de la quantité totale obtenue. Il nous semble, d'après ces considérations, que la quantité de matière sèche doit servir de mesure pour la valeur relative des pommes de terre, puisque d'ailleurs cent parties en poids de ces tubercules ne contiennent que 1 , 5 au plus de fibres ligneuses qui ne puissent servir à la nutrition. Nous avons fait des recherches sur la quantité de matière nutritive contenue dans diverses variétés plantées sur un même terrain , et toutes les autres circonstances étaient égales d'ail- leurs. ( 12 TABLEAU des proportions de substance nutritive contenues dans plusieurs variétés de pommes de terre. DÉSIGNATION DES VARIÉTÉS. EAU. MATIÈRE SOLIDE. Patraque rouge.. . Palraque blanche Patraque jaune . . . Divergente Bloc Schaw Philadelphie Fruit pain Turlusienne 31ayenraise New- York Jersey 7^ » 69 » C^9 » 74 20 68 R 72 5o 69 » G7 5o G4 80 :5 -> 7a 0 01 » 3i » 25 80 27 5o 3i » 33 5o 35 20 25 » 55 75 28 » En jetant un coup-d'œil sur ce tableau, on voit quelles sont les différences entre les produits solides des différentes variétés; l'on reconnaîtra facilement les variétés les plus productives et par conséquent celles auxquelles il faut donner la préférence dans la grande culture. Les rapports pourraient être modifiés en répétant ces essais dans des terrains différons ; mais il est probable que l'ordre des plus fortes productions ne serait pas interverti, et d'ail- (.3) leurs le ir.oJo d'essai ctiinl facile à suivre , il sera toujours mieux d'obtenir des données epéciales pour chaque localité , el même pour les différentes saisons. Ce n'est toujours que par une grande masse de faits , que l'on peut généraliser quelques résultats. TABLEAU des variétés que l'on rencontre sur le carreau de la halle de Paris, et examen comparatif des (juantltés de inatlcres solides q a elles ont fournies. r DÉSIGNATION DES VARIÉTÉS. EAU. MATIERE SOUDE. Patraque blanche Patraque jaune. . . Hollande jaune. . . Hollande rouge. . . Violette Rouge ronde- . . . . Vitelotte 74 5o 71 » 67 5o 72 » 78 5o 74 ' 79 5o 25 5o 29 n 02 5o 28 » 21 5o 26 » 20 5o Le tableau suivant est le résultat d'essais faits par M. Vau- quelin ; ce célèbre chimiste a constaté les proportions d'eau et de matière solide que les espèces désignées contiennent sur cent parties. (1) Ce tableau et celui qui suit n'ont pu être dressés sur des tubuicules récoltés dans le môme terrain , eu sorte que leurs résultats ne peuvent Cire compares rigoureusement. ( ^) TABLEAU. NOMS. EAU. MATIÈRE SECHE. La léhugine La calicuger La violette franche, . . La violette imbriquée. La Keducy La bleue des forêts. . . La grosse zélandaise. La Bcaulieu 67 n G7 60 68 B G8 » G8 60 G8 Co G9 » 75 » Où » Sa 40 5a I) 52 » 5i 40 5i 40 5i » 25 « Méthode à suivre pour opérer le dessèchement des tubercules que Von vent comparer sous le rapport de leurs parties solides. On prend les variétés de pommes de terre cultivées dans le même terrain et dans les mêmes circonstances, autant que possible, vers la même époque, c'cst-h-dirc au moment de la récolte , on les sépare exactement de toute la terre qui est adhérente à leur superficie. Lorsqu'elles sont ainsi nétoyées, on coupe de chaque variété une quantité égale de tranches en couches minces, on en pèse exactement 100 parties, 100 grammes par exemple, puis on les fait dessécher soit à l'étuve, soit dans tout autre lieu sec et chauffé de 20 à 00 deg. On reconnaît que la dcssicalion est complète lorsqu'après les ( 2^ ) avoir pesées plusieurs fois de suite à des intervalles de trente à quarante minutes, on obtient chaque fois le même poids : les tranches sont alors dures et cassantes, on note les derniers poids obtenus ; ils indiquent directement en grammes le nombre de centièmes de substance sèche contenue dans chaque sorte essayée , et l'on conclut de la perle en poids , la quantité d'eau vaporisée. Si loo grammes d'une variété lais- sent pour résidu sec aô grammes , on en concluera que cette variété contient sur cent parties o, yô d'eau , et o, 25 de ma ■ tière sèche; on compare ensuite entre elles les variétés et leurs rapports entre ces résultais (i). PARAGRAPHE IX. De Cinflucnee du sol sur la quantité de viatîèrc solide contenue dans les pommes de terre. L'humidité et la sécheresse du sol, ainsi que nous avons eu l'occasion de le remarquer dans un grand nombre d'expé- riences, influent sur la composition des végétaux, et donnent lieu à desproduits qui contiennent une proportion d'eau plus ou moins grande, selon que le terrain est plus ou moins humide. Ç>îous allons essayer de démontrer l'exactitude de cette asser- tion , en réunissant dans un tableau les résultats d'expériences faites dans ce but. Ce tableau indique, dans ses trois colonnes, les données numériques obtenues, en comparant les quantités d'eau et de matière solide que contenaient les mêmes variétés plantées en même temps, et réunissant d'ailleurs toutes les autres circonsiances semblables. (i) Le mode de dessication indiqué n'enlève pas la quantité d'eau absolue ; mais cela serait difficile sans altérer la matière végétale , et d'ailleurs la j)ro- portion qui reste, étant la même pour fous les essais, les relations sont suf- iisaniincnt exactes. ( ^G) TABLEAU. NOMS des VARIÉTÉS. TERRAIN MATlfai solide. Patraque blanche.. Patraque jaune Hollande jaune Hollande rougo Violette Rouge ronde Vilclotle : 79 5o n 5o 84 77 84 79 tt 8a 20 5o 52 5o l6 D 25 s iG » TERRAIN THÉS - HUMIDE. 8l » 85 . 76 . 74 5o 86 . 86 5o 87 » MATIÈAE solide. i9 B l5 D 24 » a4 5o 4 • Jh 5o TERRAIN eABtoflWKux. 74 5o 71 » G7 5o 72 . 78 5o 74 » 79 5o MATIIÎUE solide. 25 5o 2y » 5a 5o 28 « 21 5o 2G » 20 5o On voit, en consiiUant les résultats consignés dans ce tableau, (juelle est l'influence du sol, et quel est le choix qu'on doit l'aire lorsqu'on doit culliver ces tubercules dans des terrains plus ou moins secs , plus ou moins humides. Le mode de culture, en sillon creux et rayons élevés, permet à l'eau de s'égoutcr, et améliore les produits obtenus dans les terres humides ( Voyez le § 3° relatif aux différents modes de culture). Nous avons observé que la quantité d'eau qui existe dans les pommes de terre, au mon)ent de la récolle, est plus grande que celle que l'on y rencontre quelques mois après ; nous n'avons pas constaté si celte différence entre la proportion d'eau était causée par les réactions chimiques , ou si ce ])hé- nomène résultait d'une simple évaporation; nous nous pro- posonsd'éclaircir ce fait qui n'est pas sans intérêt. La patraque blanche qui a servi au plant fait pour constater les quantités d'eau différentes ducs à la culture des différens terrains, conte- ( ^7) naît au moment du semis , jS p. oyo d'eau : elle a donné des produits contenant 74-^0, 79 et 81. La patraque jaune, qui contenait 70, a donné 71 , 77- 5o et 85. La Hollande jaune, contenant 69, a donné 67-50, 76 et 84, La Hollande rouge , contenant 71,3 donné 72 , 74 . 77' La Yloletie ,71,3 donné 73 . 84 et 86. La ronde rou<2;G, 82, a donné 71, 79, 86. La vileîotle , 67-60 , a donné 82 et 87. On trouve, dans ces résultats, quelques nombres moindres que ceux indiquant la quantité d'eau contenue avant le semis: cette difierence ne serait-elle pas due à ce que le terrain sur lequel le semis a été formé, était plus humide que la localité dans laquelle nous avons fait nos plantations ? PARAGRAPHE X. De C emploi des fanes vertes , comme fourrage. Ses mauvais effets , moyens de les prévenir. M. Dubuc, pharmacien chimiste de Rouen, a remarqué que les fanes de solanum tuberosum , employées comme fourrage, et données vertes aux bestiaux, causent des accidents plus ou moins graves ; il croit devoir les attribuera un principe vireux conlenu dans les solanées, principe qui y réside tout le temps de leur végétation; il conseille aux cultivateurs d'attendre que l'époque de la floraison soit passée avant de donner ces tiges, et mieux encore , en supposant même que la fleur de ces plantes ne soit pas encore passée , do. les exposer au soleil pendant quelques jours, afin cjo faire volatiser le principe vireux qu'elles recèlent. Cette insolation produit aussi le bon elfel de dessécher les fanes, et l'on sait que beaucoup de plantes, fraîchement coupées, déterminent des maladies chez les animauX; par la trop grande proportion d'eau qu'elles con- ticnjicnt. (28) Il ue sera peut-être pas inutile de rappeler ici que les nour- ritures Irop aqueuses perdent leur insalubrité, lorsque l'on y mêle une petite quantité de sel marin; cette pratique, dont les bons cfFels sont constatés par une ancienne expérience, serait peut-être appliquée avec succès à l'emploi des fanes vertes ou légèrement desséchées. ^ PARAGRAPHE XI. De C incinération des fanes de pommes de terre pour en retirer la potasse. On sait depuis long-temps que l'on peut tirer un parti avantageux des fanes de pommes de terre, en les incinérant pour en obtenir de la potasse. Plusieurs mémoires ont été publiés sur ce sujet, et (juelques- uns ont avancé que cette incinération donnait des produits considérables ; on est allé jusqu'à conseiller de cultiver \c,solanumtuberosum, seulement pour en obtenir de la potasse. M. Vauquelin a reconnu que les résultats avantageux que l'on avait publiés, ne pouvaient pas être obtenus constamment; mais, qu'au contraire, l'in- fluence des saisons et des sols ne permettait souvent d'obtenir que des cendres peu riches en potasse; enfin il a été démontré que les liges de pommes de terre, brûlées h différentes époques de leur végétation , donnent des proportions différentes de carbonate de potasse. On a conseillé de faire plusieurs coupes des fanes de pommes de terre, et au moins deux, en assurant que le produit en tubercules n'eu serait pas moindre; que même il serait plus considérable, et que l'incinération des tiges donne- rait au cultivateur, un grand bénéfice; mais cette pratique a été reconnue vicieuse sous le rapport de la production des tuber- cules : il est bien démontré aujourd'huiqu'en diminuant l'ali- mentation que les feuilles fournissent à la plante , et qu'elles puisent dans l'air, on nuit au développement des tubercules. Un Rîémoire de M. Moll( rat , publié celte année dans les (29) Annales (le Chimie, présente des données nunicti(|ues qui peuvent guider les cullivalenrs sur le degré d'utilité de l'ex- Iraclion de la potasse dans les diverses localités. M. Mollerala fait planter, dans un sol argilo-silicieux, riche d'alluvion et d'engrais , la pomme de terre dite Patraque jaune, une des espèces les plus productives, et l'a fait cultiver avec soin. Voici le tableau des produits de fanage , de salin , de sous carbonate de potasse , à l'époque de chaque coupe , et enfin de tubercules recueillis à la maturité de la plante : le tout calculé sur l'examen réel de trente centiares de terre , et mu! - liplié pour représenter le produit d'un hectare. TABLEAU DES EXPÉRIENCES. i 3o Ui r FANAGE vert. SALIN. a '^ a H n H OBSERVATIONS. kil. kil. kil. kil. 1^ Coupe immédia- tenuMit avant la tloraison. > 55,555 584 212 4,5oo Fanage sec 0, i25 du vert. 2'' Coupe immédia- tement après la tloraison. > 55,555 5ii 190 iG,55o < Comme pour la première coupe. ô" Coupe un mois plus tard. • 55,700 25o 72 5o,7oo < ! Plus de poids com- parativement au fanage vert. Le fanage desséché sur pied , donne 4" Coupe nn mois plus tard. ^ 22,50O 205 60 ;4i,7oo ( encore plus que le précédent com - 1 ' paré au fanage vert. ( 3o ) Les produits d'une cinquième coupe n'ont pas diflerô de ceux de la qualrit'-nic. M. Mollerat n'a point cxaminti ks sels qui accompa2;aent ia potasse. La plante, privée de lanage par la première et la deuxième coupe, a eu le temps de s'en couvrir un peu avant la maturité des tubercules. D'après les expériences ci-dessus , il est évident qu'il n'y aurait pas avantage, comme revenu, à recueillir la potasse d'un champ de pommes de terre dans une simple récolle. Mais il serait possible d'y en trouver, en faisant deux récolles de potasse, dans une année, sur le même sol. Pour cela il fau- drait planter la pomme de terre de bonne heure ; puis après la première coupe, qui doit précéder la floraison, il faudrait retourner la terre et faire une seconde plantation , qui aurait îc lemps de donner son fanage h l'état convenable avant la fin de saison; d'ailleurs il serait inutile , comme il l'a dit , de tenter d'obtenir une récolte de fanage plus abondante sur une tige qui aurait déji» été coupée. M. Mollerat termine cette noie sur la production de la pomme de terre, en disant qu'il a observé que les engrais animaux poussent la végétation de la plante davantage vers le fanage, et que le plaire, mêlé dans le sol, fait produire plus de tubercules. Quel que soit au reste le mode que l'on ait adopté pour la coupe des fanes, et l'époque à laquelle on soit disposé à les in- cinérer, la construction du fourneau et les procédés d'extrac- tion du salin>tde la potasse, seront les mêmes. Nous allons les décrire. Le lessivage des cendres devant produire des solutions qu'il est nécessaire de concentrer, on doit se proposer d'employer les fanes elles-mêmes, comme combustible, pour faire évaporer ces eaux; le fourneau, que l'un de nous a fait construire pour brûler les liges exprimées et sèches de Varundo-saccharifera, (m ) dccril à l'ailicle Basasse, du dictionnaire Technologique, et employé aujourd'hui aux colonies , est Irès-convenable pour cet usage ; la forme des chaudières seules doit être différente, parce qu'ici on est obligé de recueillir les sels au fur et h me- sure qu'ils se précipitent. Les figures i et 2, planche 1", indiquent celte construction par une coupe verticale et une coupe horizontale, h la hau- teur de la maçonnerie sur laquelle portent les chaudières : les mêmes lettres indiquent les mêmes choses dans les deux ligures. A. Maçonnerie en briques. B. Regards ménagés pour enlever les cendres accumulées dans la conduite de la fumée , à l'aide d'un rable. C. D. Ouvraux par lesquels la flamme sort du foyer. E. Espace vide dans lequel les cendres emportées par le courant se déposent. F. Cylindre creux en fonte qui sert de porte au foyer. G. Grille et cendrier du foyer. //. Cheminée dans laquelle se rendent les produits de la combustion. K. Espace vide au bas de la cheminée, dans lequel les cendres entraînées par la combustion et celles que l'on tire par le regard peuvent s'accumuler; on les enlève à l'aide d'une porte K, pratiquée en cet endroit. M. Première chaudière hémisphérique posée au dessus du foyer, dans laquelle on termine le rapprochement du liquide. N . Deuxième chaudière rectangulaire , à bords peu élevés, dans laquelle l'évaporation est commencée. P. Sorte d'écumoire posée sur trois pieds, et suspendue h volonté au moyen des trois triangles E. , d'une chaîne S, et d'une corde T, qui passent sur deux poulies. PJ Même écumoire vue à vol d'oiseau. y. Espace vide dans lequel on tient un approvisionnement do fajies. (32 ) Lorsque l'on veut commencer l'incinération des fanes sèches, on remplit les deux chaudières M et N avec de l'eau ; puis, dès que l'on a une quantité de cendres suffisante , on commence leur lessivage ; on met les solutions qu'il fournit dans les deux chaudières; là , elles se concentrent, et l'on ajoute de nouvelles solutions au fur et à mesure que l'évapo- ration a lieu. Une fois l'opération mise en train , elle continue de la manière suivante : on verse les solutions du lessivage dans la chaudière N ; elles s'y échauffent et commencent à se rapprocher ; on les soutire à l'aide d'une canelle 0, pour alimenter l'évaporalion dans la chaudière M; et lorsqu'après avoir rempli plusieurs fois celle-ci, elle contient, étant toute pleine , une solution assez concentrée pour former pellicule et laisser précipiter du sel, on abaisse dedans l'écumoire P; l'ébuUition enlève le sel et le dépose continuellement dans cette écumoire; on la soulève de lemps en temps, et l'on tire le sel dont elle est chargée h l'dide d'une pelle à main, puis on le met égoûlcr dans une trémie ou un panier. Lorsque la chaudière est à moitié vide, on ôte l'écumoire ; on la remplit et l'on attend que le rapprochement ait amené le liquide au point de précipiter du sel , la chaudière étant pleine , pour plonger de nouveau l'écumoire. Les premiers sels précipités , et recueillis à l'aide de l'écu- moire, contiennent peu de potasse ; on peut même les débar- rasser de la plus grande partie, en les lavant à courte eau. La liqueur de la chaudière devient au contraire de plus en plus riche en alcali, et donne moins de précipité; alors on cesse de se servir de l'écumoire, et l'on opère le rapproche- ment du liquide jusques à siccilé, en ayant le soin de passer fréquemment un ringard acièré dans le fond , pour empêcher qu'il ne s'y forme des croules adhérentes. On obtient ainsi un salin riche en alcali et propre à tous les usages de la potasse ducommerce. Quant aux sels retirés à l'écumoire, ils se composent, poiir ( 33) la plus grande partie, d'hydrochlorate et de sulfate dépotasse, et peuvent être vendus aux salpélriers ou aux fabricans de verre. Il nous reste h parler maintenant du lessivage des cendres. Avant de les traiter, on doit les accumuler au sortir du cen- drier, et les laisser séjournor en tas dans un encaissement en maçonnerie afin que la combustion des dernières parties carbonisées , puisse avoir lieu h l'aide de la température élevée que l'on conserve ainsi. On délaye ensuite ces cendres dans l'eau , en une bouillie claire, et l'on jette ce mélange sur un filtre formé d'un pail- lasson ou d'un châssis tendu de toile claire , mis au fond d'un tonneau ou d'une caisse. Les premières eaux qui s'écoulent de ce filtre sont les plus chargées; on arrose de temps à autre la superficie de la cendre mouillée , et l'on obtient des solutions de moins en moins for- tes, jusqu'à ce que l'épuisement de la cendre soit presque com- plet, et que l'aréomètre plongé dans la solution filtrée n'y in- dique qu'une fraction de degré au-dessus de celui de l'eau pure. On doit s'elTorcer d'obtenir les solutions salines, aussi fortes que possible, pour les rapprocher; on y parvient, en établissant trois filtres , et réservant les solutions faibles de l'un d'eux pour délayer des cendres neuves et commencer le lessivage d'un autre filtre; de même que les salpétriers lessivent leurs terres , les savonniers et les fabricans de sels de soude épuisent les soudes irutes. Les cendres épuisées forment un excellent amendement pour les terres trop fortes; on peut aussi les employer dans les ver- reries h bouteilles , en raison du carbonate et du sulfate de chaux qu'elles recèlent , et d'une petite quantité de sels à base de potasse qu'elles retiennent encore; mais il faut qu'un de ces établissemens soit à proximité du lieu où ce lessivage s'opère , car le peu de valeur des cendres lavées ne leur per- mettrait pas de supporter les frais d'un long transport. 5 ( 34 ) PARAGRAPHE XII. Z)es pommes de. terre dont la maturation est restée incom- plète. Propriétés m,alfaisanles qu'on leur attribue. La famille des solanées comprend plusieurs plantes narco- tiques et vénéneuses; celte oLservalion fit craindre h beau- coup de personnes que les tubercules du solaninn tuherosunt, n'eussent quelqu'action délétère sur l'économie animale ; le préjugé s'en répandit, et peut être compté parmi les obstacles qui s'opposèrent aux progrès de la culture des pommes de terre en France. Des accidens, attribués inconsidérément à l'emploi de ces tubercules dans l'économie domestique , retar- dèrent le moment où ils devaient constituer l'aliment le plus précieux delà classe indigente, et augmenter la diversité des mets qu'enfante le luxe de nos lablts. Cependant l'opinion publique fut éclairée par des essais nombreux , et par degrés, l'on a reconnu que toutes ces craintes, soutenues par des raî- sonnemens spécieux , étaient dénuées de fondement. Il était plus difficile , sans doute , de démontrer à la multi- tude l'innocuité des tubercules qui n'ont pas encore atteint le dernier degré de maturation; car c'est un préjugé, encore accrédité aujourd'hui, que les pommes de terre, cueillies avant leur maturité, sont douées de propriétés malfaisantes. M. Bour- geois, dans un Mémoire qu'il publia sur ce sujet, cita trois faits, desquels il pensa devoir conclure que les pommes de terre , avant leur maturité , sont vénéneuses. Mais un grand nombre de faits positifs prouvent le contraire. Pffaf de Niel et Viborg de Copenhague, ont observé que les pommes de terre contiennent les mêmes substances immé- diates à toutes les périodes de leur végétation ; que les pro- portions seules entre ces principes, sont variables; que le (35 ) principe acre (i), que l'on y Irouvc en très-falblo quantité, est volatil ; qu'il est ôliniiné par ia cuisson , et n'existe que dans l'enveloppe des tubercules; que ce principe ne se rencontre pas en plus grande proportion dans les pommes de terre, avant leur maturité , que dans celle dont la maturation est complète. Outre les opérations analytiques d'où ces savans ont tiré les faits précédons , ils ont constaté par un usage prolongé, qu'ils ont fait eux-mêmes de tubercules arrachés avant l'époque de la maturation , que cet aliment n'avait aucune action délétère. Des observations générales ont d'ailleurs confirmé tous ces résultats de faits pratiques : ne sait-on pas que les habitans de la campagne vont long-temps, avant la récolte, arracher des pommes de terre dont ils font leur principale nourriture? Les annales militaires offrent une foule d'exemples de détache- mens, de garnisons, de corps d'armées même, nourris dans des circonstances difficiles, avec des pommes de terre arrachées à toutes les époques de leur végétation , et cependant aucun accident fâcheux n'estrésulté de l'usage presqu'exclusif de ces tubercules. Nous-mêmes, h plusieurs reprises, nous fîmes préparer et manger h sept ou huit personnes ensemble , des pommes de terre récoltées avant leur maturité , et ces essais, dans les mêmes circonstances que les observations rapportées par M. Bourgeois, n'ont jamais causé le moindre accident. Au reste, et quoiqu'il paraisse parfaitement démontré que les tubercules arrachés avant le temps de la récolte ne sont nullement nuisibles, nous ne saurions trop recommander d'at- (i) Les distillateurs d'eau-de-vie de fécule ont observé, dans les petltcx eaux qu'ils obtiennent à la fin de leurs disïillations une huile essentielle qui était sans doute contenue dans les pommes de terre ; mais en proportion excessi- vement faible, et d'ailleurs on a observé des huiles semblables dans les eaux- de-vio de grains, de marcs, etc., et l'on n'aurait pas pu en conclure que la farine, le pain , les différens vins, etc., sont doués de propriétés délétères, A. ( 3G ) lendre, aulantqne poSvsible, celle époque, el pour cela de se procurer des pommes de terre hâlives par les moyens indiqués plus haut, ou d'employer les procédés do conservaiion que nous donnerons plusloin. Encflcl, les pommes de terre mures ont un goût plus agréable; elles sont plus nourrissantes , con- tiennent beaucoup plus de fécule, d'albumine, et moins d'eau. PARAGRAPHE XIII. Divers moyens de conservation des pommes de terre. Le mode de conservation le plus généralement usité pour ces luborcules, consiste à les mettre à l'abri de la gelée dans des celliers ou des caves; ce moyen réussit assez bien lorsque les pommes de terre ne sont pas amoncelées en grandes masses : dans ce dernier cas, il est à craindre que quelques meurtrissures, ayant désorganisé plusieurs parties, développent une fermentation intestine, el que la chaleur produite, se con- servant dans la masse, y cause une altération plus profonde. On évitera ce danger, en implantant dans le tas des bourrées de branchages secs, qui formeront des sortes de cheminées dans lesquels les gaz et l'air échauffés se dégageront aisément. Lors- que l'on pourra , sans qu'il en coule, disposer de caves et de celliers assez spacieux, on fera bien de diviser toute la quan- tité récoltée en plusieurs las , el de faire passer d'abord dans la consommation ceux qui présenteront plus de chances d'al- léralion , soit d'après les circonstances delà récolte, soit par des causes imprévues. On ne peut pas toujours se procurer des caves et des celliers , cl lorsque l'on en a h sa disposition, il arrive souvent qu'on peut les employer, plus utilement encore, qu'à la conservation des pommes de terre. Un moyen qui a complètement réussi à l'un de nous , pour la conservation d'un approvisionnement assez considérable des betteraves d'une sucrerie, a été appliqué ( ^7 } ave:; un é^al succès i» conserver des pommes de ti-rre : il c»l h- la-fois d'une exécution facile , prompte et économique. Voici en quoi il consiste : dans la partie la plus élevée du champ, et autant que faire se peut, dans un terrain solide, on creuse une fosse rectangulaire de ^jalre pieds etdemi de profondeur, de cinq pieds de largeur , et d'une longueur déterminée par la quantité de tuberculesquel'on veut enfouir. La terre est relevée de chaque côté sur les bords. De cinq en cinq pieds on laisse un mur de séparation en terre ; on lui donne , suivant la soli- dité du sol, une épaisseur assez grande pour qu'il se soutienne spontanément. Par ces dispositions, on a une suite de fosses de cinq pieds carrés sar4pieds 1/2 de profondeur; on en peut pratiquer une ou plusieurs rangées , suivant les dimensions du terrain et la quantité de tubercules h conserver ; on les emplit de pommes de terre jusqu'à la surface du sol, et même à quelques pouces au-dessus; on couvre le tout avec la terre extraite de la fosse, que l'on disposera en pente, de manière à ce que la couche soit épaisse de dix pouces au moins. Toutes les fosses sont suc- cessivement remplies et recouvertes de même ; la terre battue et élevée en monticule porte les eaux pluviales au -dehors du tas, empêche les atteintes de la gelée, enfin la température intérieure ne pouvant s'élever sensiblement, il ne s'établit pas de fermentation. Des rigoles creusées au bas des monticules , et d'autres embranchées perpendiculairement aux premières, dont la pente augmente en s'éloignant des fosses , conduisent^ les eaux à une distance de 7 ou 8 pieds. Lorsque l'on veut employer les tubercules , ainsi mis en réserve, on entame une seule fosse à-la-fois, et les autres n'en souffrent aucunement. Plusieurs autres moyens analogues à celui-ci ont été pro- posés ; nous citerons celui que M. Huzard a indiqué dans les Annales de l'Agriculture française (mai 1824)- ï' consiste h amonceler les pommes de terre en las de forme conique, ;i (38) les recouvrir de paille , puis relever par dessus la terre lout autour du tas ; on forme en même temps au pied de la butte une rigole circulaire dans laquelle les eaux pluviales se ras- semblent , et d'où on facilite leur écoulement par des tran- chées , et dont la pente dirige l'eau au-dehors du tas. Plusieurs modes de conservation ont été basés sur le peu d'altérabilité des substances végétales sèches. M. Parmenlier indique le procédé suivant : on met les tu- bercules dans une chaudière que l'on remplit d'eau ; on perle ce liquide h l'ébullition ; on se hâte de les peler en les reti- rant de la chaudière; on les coupe par tranches minces, on les étend sur des toiles ou des clayonnages d'osier, dans une étuve à courant d'air chaud, ou dans un four après la cuis- son du pain; lorsque les tranches ont acquis le degré de siccité convenable , elles sont dures, demi-transparentes, leur goût n'est pas altéré, et elles sont susceptibles de se conserver fort long-temps dans un grenier ou tout autre endroit sec. On sent que ce moyen n'est guère h la portée que (les gens de la campagne qni peuvent disposer d'un travail manuel peu dispendieux. Dans chaque famille on peut ainsi préparer ure nourriture saine pour toute la mauvaise saison ,• mais pour des spéculations plus élevées , pour fies approvisionnemens plus considérables, il faut des procédés plus manufacturiers; nous en indiquerons de ce genre dans l'un des paragraphes consacrés aux descriptions des préparations alimentaires. Modification du, procède ci-dessus , par Le jyîcnic auteur. On réduit les tubercules en pulpe, à l'aide d'une râpe; on sou- met cette pulpe à l'action graduée d'une presse; lorsque l'on a a'nsi extrait la plus grande quantité possible de jus , on di- vise le marc en petits pains, et l'on expose ceux-ci dans un lieu ; bien aéré; on termine leur dessication à l'éiuve et lorsqu'elle est complète , on les réduit en poudre dans un moulin. On obtient ainsi une farine susceptible de se conserver dans un lieu sec. ( -^9 ) M. le comle deLasteyrie a encore modifié, d'uiio autre ma- nière, le orocédé de Parmentier; il conseille de couper les tu- bercules par tranches peu épaisses; de les jeter dans l'eau, et de les y laisser macérer pendant 24 heures , en ayant soin de vider le liquide ^ et de renouveler l'eau deux fois pendant ce temps ; on attend alors qu'un mouvement de fermentation ait déterminé une écume légère à monter h la surface, et qu'un iïoût légèrement ai^rre se soit manifesté; alors on chanire en- core deux fois l'eau pendant 24 heures (1); on retire les tranches et on les fait égoulter dans des sacs, sous une presse; dès quelles ne laissent plus couler de liquide , on se hàle de les tirer des sacs et de les étendre dans un séchoir , pour enlever promptement le plus d'humidité possible; on peut achever la dessicalion,dans un four dont on a retiré le pain, ou dans une étuve 5 courant d'air. Enfin, aussitôt que la dessicalion est achevée , on porte les tranches de pommes de terre au moulin : elles s'y réduisent en farine avec la plus grande facilité. Celte farine, foulée dans des tonneaux très- secs et bien cerclés, se conserve pendant long-temps. On doit h M. Bonnet une autre mode de conservation des pommes de terre; il consiste h enfermer ces tubercules dans un tonneau bien sec, défoncé préalablement, puis refoncé, avec autant de soin que s'il devait contenir un liquide; il suffit de garder les tonneaux, remplis de cette manière, dans un cellier ou une cave h l'abri de la gelée. L'auteur a observé que la saveur des pommes déterre, ainsi privées du contact de l'air atmosphérique , devient plus su- crée ; que les signes de végétation qu'elles auraient pu déve- lopper avant d'être enfermées, ne paraissent plus à la saison (1) Pour faciliter ces manipulations, on adapte, au vase qui coiUionl les pommes de terre , une canolle qu'il suffit d'ouvrir pour laite couler l'eau ; cette canclle , étant placée à quelques lignes au-dessus du fond, permet de recueillir une petite quantité de fécule qui se dépose. (4o) suivante ; qu'elles ne sont plus même susceplibles de s<îrvir à la reproduction , mais qu'elles sont fort convenables pour la nourriture de l'homme. Lorsqu'on a défoncé un tonneau pour faire un usage journalier des pommes de terre qu'il renferme, il faut avoir la précaution de recouvrir les tubercules d'un linge, et de charger celui-ci de 7 à 8 pouces déballe d'a- voine , chaque fois que l'on a extrait des pommes de terre du tonneau, afin de continuera les priver d'air et d'humidité le plus possible. M. Brulard de Morlaix a reconnu qu'il est facile de conser- ver les pommes de terre, en les étendant sur l'aire d'un gre- nier: il recommande de laisser adhérente à ces tubercules la couche terreuse qu'elles apportent du champ , ayant remar- qué que cette petite quantité de terre , forme, avec l'eau qui transpire lentement au travers des tubercules, une espèce d'enduit qui prévient la germination. M. de Puymaurin a indiqué un moyen fort simple de con- server, dans les fermes, les pommées de terre à l'abri de la gelée ; 11 consiste à établir, sous l'auge des étables et des écu- ries, une cloison longitudinale, ce qui produit une sorte de caisse fort vaste, dans laquelle on jette un peu de paille, et que l'on remplit ensuite avec des pommes de terre. Enfin on cou- vre celles-ci de paille, et l'on ajuste une dernière planche qui défend l'accès de cette espèce de magasin. On lit, dans un joi^rnal étranger, la description d'un pro- cédé analogue à plusieurs de ceux que nous venons de rap- jiorter ; il est employé depuis dix-huit ans en Llvonie et en Courlande 5 nous le relaterons succlnlement : les pommes de terre, soigneusement lavées, sont coupées en petits morceaux; on les met tremper, pendant 24 heures, dans une faible les- sive de cendres ; après cette macération , on les lave avec de l'eau fraîche, à plusieurs reprises , puis on les fait des- sécher complètement à l'éluve. Au sortir de l'étuve, et avant ( 4i ) qu'elles n'aient absorbe de l'humidilé , on les réduit en pou- dre et on les passe au bluttoir, les grabots sont repasses une se- conde fois au moulin (i), en sorte que l'on obtient trois produits qui, suivant M. Lampius , sont généralement dans les propor- tions relatives suivantes , en poids, sur trente parties; lerProduit.Farinelaplusfmeetla plusblanche, 16 j 2™e /f/e^ji. Farine plusgrossièremoinsblanche, 10 / Sn^e Idem. Son ou pellicules concassées. ... 5 75 '' ^^ Perte 20 La farine obtenue la première, est très-convenable pour la confection des potages et de diverses préparafions alimen- taires ; mêlée avec un tiers de son volume de farine de fro- ment, elle constitue un excellent pain ; la farine du deuxième produit forme une nourriture saine , mais plus grossière ; elle convient parfaitement pour alimenter les bestiaux. Le son, traité par les moyens que nous indiquons plus loin, peut être converti en alcool; il s'a}>plique bien aussi à la nourri- ture des bestiaux. Nous pourrions indiquer ici , comme des moyens de con- servation ^ les procédés à l'aide desquels on transforme la pomme de terre en diverses variétés de pâtes sèches, en fécule pulvérulente, et même en sucre et en eau-de-vie; mais nous anticiperions sur les paragraphes suivans , dans lesquels nous avons classés, avec autant de méthode qu'en comportait le sujet , tous les moyens qui nous sont connus, de tirer un parti avantageux de ce précieux tub3rcule. (1) Le moulin indiqué est en fonte; il se compose d'un boisseau et d'une noix canelés. ( 'i- ) PARAGRAPHE XIV. Emplois des pommes de terre gelées. Procédés pour en ex- traire une farine et de Camidon. Plant de pommes de terre gelées. Moyen d'enlever aux pommes de terre le mauvais goût qu elles contractent par la germination. Il arrive souvent, dans la grande comme dans la petite culture, qu'on se laisse surprendre par les intempéries des saisons ; souvent aussi des magasins que l'on ne croyait pas accessibles à la gelée, l'étaient réellement, ou le sont devenus par suite de quelques négligences; quelquefois enfin, les ré- colles très-abondantes ne sont plus proportionnées aux dimen- sions des magasins du cultivateur; il résulte de ces diverses causes, des quantités plus ou moins grandes de pommes de terre attaquées par la gelée ou germées. Pendant long-temps ces tubercules gâtés furent rcjetés comme n'ayant aucune valeur, mais on a rech*ché plus lard les moyens d'en tirer parti. Nous citerons ceux qui sont parvenus h notre connaissance. Le procédé qui nous a le mieux réussi à nous-mêmes, c'est de convertir en pulpe, à l'aide d'une râpe (voyez plus loin la fabrication de la fécule ), tous les tubercules atteints de la gelée sans attendre le dégel , mais seulement après les avoir fait tremper dans l'eau froide qiielques heures avant de les râper; il s'opère alors un dégel partiel qui facilite l'action de la râpe, sacs altérer les tubercules. On obtient ainsi tout autant de fécule que si l'on avait traité les pommes de terre avant la gelée ; et, en effet, ce n'est qu'après le dégel que la con- texture de ces tubercules désorganisés a fait cesser toute force végétative , laissé les principes immédiats contenus dans le jus, réagir les uns sur les autres, et déterminé une fermen- tation putride comme dans toute matière azotée morte ; mais celle fermentation ne peut avoir lieu à la température de la ( 43 ) glace, il faut donc la pri^yenir en travaillant les porames de terre avant le dt^gei. Le moyen que nous venons d'indiquer n'est pas toujours praticable, soit qu'on ait été surpris par le dégel, soit que Ton n'ait pas eu à portée les ustensiles néces- saires pour l'extraction de la fécule. On pourra choisir, parmi les procédés suivans, celui que les circonstances permettront d'employer. M. Clouet a reconnu, par l'expérience, que les pommes de terre gelées peuvent encore fournir de l'amidon ; voici le moyen qu'il a employé pour l'extraire : on fait macérer les pommes de terre dans l'eau; on les écrase sous un pilon , puis on les abandonne à la putréfaction spontanée ; lorsqu'elles ont été suffisamment amollies de cette manière, on les triture de nou- veau, et l'on forme, avec la pcâte ainsi préparée, des pains applatis que l'on expose au soleil ; leur température s'y élève de 5o c^ 56 degrés , et la fécule amilacée se détache sous la forme de grains brillans et comme nacrés ; on réduit le tout en poudre. L'amidon ainsi obtenu est d'une blancheur re- marquable. M. Bertrand a indiqué un moyen facile de tirer parti des porames de terre gelées, et même plus ou moins dégelées; il consiste à faire complètement dégeler ces tubercules, soit à l'air libre, lorsque la température de l'atmosphère le per- met, soit dans un endroit échauffé; puis à les soumettre à l'action d'une forte presse, afin d'en séparer la partie liquéfiée de la portion solide. On recueille l'eau que la pression fait sortir; elle laisse déposer spontanément de la fécule que l'on sépare en décantant le liquide clair surna"-eanf Le marc exprimé est étendu sur des claies, dans une étuve ou dans un four, après que le pain en a été relire; lorsque la dessication est complète, on le réduit en poudre dans un moulin ordinaire; celte sorte de farine peut être mélangée dans la proportion d'un cinquième ou d'un quart avec la farine de froment. ( 4i ) M. Germain a remarqué que des pommes de lerre gelées, abandonnéesen couches minces en plein air, se sont desséchées lentement, sans éprouver une décomposition sensible; qu'elles ont acquis une grande dureté , et ont été réduites en une fa- rine salubre. M. Necker fît la même observation en iS'ii. M. Benjamin Cadet , fils du savant agronome , M. Cadet de Vaux, essaya de faire servir à leur reproduction les pommes de terre atteintes do la gelée : à cet effet il les fit dégeler lentement dans l'eau froide; les porta au pressoir, pour ex- traire l'eau surabondante^ et en fit un plant qu'il cultiva avec les soins ordinaires. Il obtint ainsi des pousses vigoureuses, et assure que le produit n'a pas été moindre que dans les plantations ordinaires ; la seule différence qu'il observa c'est que le tubercule qui avait développé les plantes , communé- ment dit la inère , était difficile 5 retrouver; on ne voyait, à sa place, qu'une pellicule mince qui, desséchée, pesait seule- ment deux ou trois grains. M. Cadet de Vaux a fait sentir de quelle utilité serait un pareil résultat , s'il était constaté par de nouveaux faits. Moyens pour ôter le ma avais goût aux pommes de terre ger- tnèes. On sait que les pommes de terre, dans leur germination, contractent un goût détestable, et qu'en cet état, elles rebu- tent même les bestiaux. On doit h M. liigolay un procédé à l'aide duquel on peut rendre à ces tubercules leur saveur première : on les étend sur des claies , ou sur le sol d'un gre- nier aéréj en évitant, autant que cela est possible, qu'elles se touchent; on les laisse en cet état pendant 6 à 8 jours; au bout de ce temps , les- germes sont desséchés , et les tubercules ont eux-mêmes perdu uncpartiede leur eau de végétation; on en met tremper dans l'eau froide la quantité qui doit être con- sommée; le lendemain, au bout de 12 h i8 heures, on trouve les pommes de terre , qui la veille étaient flétries , gonflées et ayant acquis presque le même volume qu'elles avaient an ( 45 ) moment de l'arrachage. En cet état, soit qu'on les fasse cuire sous la cendre, dans l'eau , ou h la vapeur, avant de les as- saisonner, elles fournissent un aliment sain et d'un goCit agréable On a observé que les pommes de terre, récoltées dans une terre forte, sont peu savoureuses, et même contractent sou- vent à la cuisson un état pâteux, un goût désagréable. M. Ki- o-olay indique un moyen simple de leur donner une saveur agréable; il consiste h couper les tubercules en deux parties, puis h les faire cuire en cet état sous la cendre; il paraît qu'une partie de l'eau de végétation se dissipe en vapeur, et qu'alors l'état pâteux et la saveur fade cessent de se pro- ^luire. PARAGRAPHE XV. Consommation des pommes de terre dans diverses contrées et daiis Paris. Il résulte des documens publiés par M. le comte de Cha- brol, dans ses Recherches statistiques sur la ville de Paris, que la consommation annuelle moyenne des pommes de terre , en 1820 et 1821 , a été de 085,077 hectolitres récollées dans le département de la Seine, sur une superficie de 1787 hectares de terrain; que le produit en nature, comparé à la semence, a été, dans le rapport, de 12,96 h 1 , et qu'en portant le prix de l'hectolitre à 4 fr. , lu valeur totale s'est élevée à 1 ,54i ,5o8 (. Ce produit paraîtra déjà fort important, si l'on se rappelle que la culture du solanum tuberosum ne date que d'un petit nombre d'années, et que les emplois de ses tubercules, à peine connus et généralement encore mal appréciés , sont suscep- tibles d'une grande extension. Nous déduirons, des données ci -dessus, la preuve de ce que nous venons d'avancer : en effet, une seule application ulile a délerminé la consommation ( 46 ) (lo in pins grande partie des 580,577 hectolitres précités (c'est la fabrication de l'eau-de-via de lëcule); il a fallu, pour celte fabrication., environ 225,000 hectolitres de pommes de terre- si l'on déduit cette quantité de la consommation totale, il restera seulement 1 Go, 557 hectolitres qui auront été em- ployés comme comestibles. Pour connaître dans quelle pro- portion ces tubercules ont fourni à la subsistance des habi- tans de Paris , nous le comparerons avec le pain consommé annuellement dans cette capitale. 160,537 hectolitres de pommes de terre, à 94 kilos chaque, pèsent i5o,758 quintaux métriques , qui représentent environ le 5" de leur poids de substance nutritive égale à celle qu'offre le pain ou 5o,i5o quintaux; or, la consommation annuelle du pain dans Paris est d'environ 120,000,000 kilos; la nourriture prise en pommes de terre n'équivaut donc qu'aux 0,0201 ou un peu moins qu'à la quarantième partie de la nourriture fournie par le blé. Il conviendrait d'ajouter à la quantité ci- dessus indiquée des pommes de lerre consommées dans Paris, les pommes de terre de variétés choisies, que l'on pourrait en quelque sorte considérer comme un aliment de luxe relative- ment à son prix élevé. Suivant M. Ghaptal (Chimie appliquée à l'Agriculture), on récolte en France, année moyenne, 19,800,741 liectohtres de pommes de terre, et l'on peut supposer que la proportion dans laquelle on consomme ces tubercules, ne diffère pas beaucoup, d'après nos habitudes actuelles, de celle que nous venons d'établir pour Paris. On jugera de ce qu'il est possible de gagner sur cette con- sommation , en la comparant avec celles que l'on fait des mêmes tubercules , en Flandre et en Angleterre ; on sait en effet que les fermiers flamands, et même la plus grande partie des habilans de la Flandre, font leur principale nourriture de la pomme de terre, pendant huit mois, et que dans le reste de l'année, ce tubercule fait partie de leurs alimens. Dans ce pays. (47) de même que dans la plus grande partie de la Grande-Brela-ne les pommes de terre cuites h l'eau , à la vapeur, ou sous les cendres , suppléent, dans une grande proportion, à la consom- mation du pain. Si l'on se rappelle les avantages qu'offre la culture du solanum tubcrosum sur celle du froment , relati- vement à la quantité de matière nutritive que fournit celte plante à surface égale , on appréciera facilement l'utilité d'étendre le plus possible ses emplois ; on reconnaîtra les puissantes ressources que donnent ces tubercules contre les disettes; on sentira enfm toute l'importance de cette précieuse production, en songeant qu'elle peut assurer l'existence des individus accablés par la misère. Comment, en effet, des mal- heureux pourraient-ils aujourd'hui être exposés h mourir de faim, lorsqu'une valeur de quelques centimes leur procure un ah'ment salubre, qui suffit pour soutenir leur force pendant une journée. PARAGRAPHE XII. Préparations alimentaires de la pomme de terre. Les applications nombreuses des tubercules du solanum tubcrosum, dans l'art culinaire, sont assez généralement connues aujourd'hui , pour que nous puissions nous dispenser d'entrer dans les détails de ces procédés économiques; ce- pendant nous rappellerons quelques données pratiques qui seront utiles à connaître pour faciliter toutes ces opérations. CUISSON D£S POMMES DE TERRE. Rien n'est plus facile, ainsi que chacun le sait, de faire cuu^e des pommes de terre; on emploie cependant plusieurs méthodes qui donneraient toutes les mêmes résultats , si la composition de ces tubercules n'offrait pas de variation ; mais ( 48 ) il n'en est pas ainsi : les pommes de terre venues dans des terrains humides, pendant une saison pluvieuse, contiennent quelquefois une si grande proportion d'eau, que celle-ci suffit pour réduire en pâte toute la fécule : on dit de ces pommes de terre qu'elles ne sont pas farineuses ; cuites à l'eau, leur consistance pâteuse les rend plus difficile.^ à pénétrer par l'assaisonnement que l'on y ajoute; elles conservent un goût fade. On reconnaîtra quelquefois aussi, surtout parmi celles dont la surface sous l'épiderme est colorée en rouge, dont les yeux sont fortement prononcés , des pommes de terre qui ont un goût acre désagréable, dû à un principe volalil; dans ces deux cas, la vapeur fait perdre aux pommes de terre la plus grande partie de leur goût acre, et l'on évite leur forme pâteuse , en les faisant cuire sans eau dans un vase fermé. La figure 6 de la planche 2 indique une sorte de marmite A, pro- pre à cet usage; elle est en fonte peu épaisse, de forme ellip- tique ; son couvercle B de même matière , et que l'on appelle ordinairement une cloche, la recouvre en l'enveloppant sur toute sa hauteur ; et reposant sur un rebord C , la ferme pres- que hermétiquement. Lorsque la marmite est remplie de tu- bercules , on pose le couvercle , on amasse autour des cendres chaudes mêlées de braise incandescente ; la température s'élève graduellement dans l'intérieur de cette marmite , les pommes de terre perdent une partie de leur eau de végéta- tion qui se réduit en vapeur , et entraîne l'huile essentielle qui causait le goût acre ; la vapeur entretient une tempé- rature uniiormc dans toute la masse; la cuisson se fait très- également , et les pommes de terre devenues moins aqueuses ne sont pas réduites en pâte , et ont une saveur plus agréable. Ce mode de cuisson, bien préférable surtout pour les tu- bercules de qualités inférieures,, s'applique avec avantage aussi aux pommes de terre de bonne qualité; il produit enfin les bons cfl'ets de la cuisson sous la cendre des tubercules h nu , ( 49 ) mais évite loul risque de les carboniser plus ou moins profon- dément. Lorsque l'on ne peut pas disposer de la marmite à cloche, dont nous venons de décrire l'usage, on y supplée en partie avec une marmite ordinaire, au fond de laquelle on met un peu d'eau , et que l'on recouvre après l'avoir presque remplie de pommes de terre, avec son couvercle, renversé sens dessus dessous , et appuyé fortement sur un bourrelet de chiffon , à l'aide d'un poids ou d'un pavé; par celle disposition, la va- peur est suffisamment retenue pour élever la température de toute la masse au degré convenable ; elle fait volatiliser une partie de l'eau de végétation et de la substance volatile acre. Enfin lorsque l'on fait cuire les pommes de terre à l'eau , dans des vases découverts ou mal fermés , il faut avoir le soin de plonger complètement les tubercules sous le liquide; car les portions qui en sortiraient seraient refroidies, mal cuites, ou lors même que leur cuisson aurait été complète, elles dur- ciraient par la coagulation de la pâte amylacée* De quelque manière que l'on ait fait cuire les pommes de terre, il faut éviter soigneusement qu'elles refroidissent, lorsque l'on se propose de les diviser et de les mélanger avec divers ingrédiens. Nous verrons plus loin comment on parvient à opérer en grand cette division , sans qu'il y ait le moindre abaissement de température. On pourrait appliquer au même usage de plus pelits appareils semblables; mais, dans l'éco- nomie domestique, on se contente ordinairement de prendre dans la marmite et de broyer aussitôt les pommes de terre une à une , dans un mortier échauffé d'avance avec de l'eau bouil- lante, puis de forcer toute la pâte à passer au travers des trous' d'une passoire. ( 5o ) PARAGRAPHE XVII. Description des ustensiles nécessaires pour la préparation de la pâle, de (a fécule, et des autres produits des pommes de terre. On a suivi diverses méthodes pour réduire les pommes de lerrc en pâte ou en bouillie. D'abord on s'est conlenlé de les faire cuire dans l'eau bouillante , puis de les trilurcr h l'aide de plions , dans des mortiers ou des auges en bois. Ce pro- cédé grossier n'est plus employé aujourd'hui que dans l'éco- nomie domestique, pour de petites opérations. On a substitué généralement à la cuisson dans l'eau, la cuisson à la vapeur. Ce dernier procédé offre sur l'autre des avantages très-marqués. Ce n'est pas, au reste, la cuisson des pon>mes de terre qui offre le plus de difficulté ; en effet, la chaleur les pénètre aisément, et la température de l'eau bouillante, suffit pour les gonfler, faire crever les pellicules faibles de leurs enveloppes, et les rendre très-faciles à écraser. Mais si on laisse la température s'abaisser, une portion de l'amidon dissous se prend en une sorte de gelée consistante, et réunit toutes les parties du tubercule en une masse dure , glis- sante, difficile à écraser. Il faut donc éviter , le plus possible , le refroidissement des pommes de lerrc cultes; pour y parve- nir , on les jette dans une trémie d'où elles passent rapide- ment entre deux cylindres rapprochés, atixquels des roues d'engrenage communiquent des vitesses inégales , et dont les surfaces inférieures sont continuellement nétoyées par deux, racloirs. - On n'obtient pas cependant de ces dispositions le meilleur effet possible : en effet, la pomme de terre, exposée à l'air par une assez grande surface , y perd une grande quantité de chaleur et se durcit; la pâle, qui tombe des cylindres, est phis encore exposée au refroidissement , et ne peut être corn- ( 5i ) plètement délayée dans l'eau que l'on y ajoute ; il nous semble que ces cylindres agiraient plus uiilemcnt renfermés au milieu d'une cuve parfaitement close, dans la partie su- périeure de laquelle les pommes de terre seraient d'abord ex- posées à l'action de la vapeur un peu comprimée; dès que la cuisson serait portée au point convenable , on imprimerait le mouvement aux cylindres, et les tubercules, écrasés sans le moindre refroidissement, se délayeraient sans difficulté et d'une manière plus complète , dans la partie inférieure de la cuve où l'eau de condensation de la vapeur serait h un degré voisin de celui de l'ébullition. Les effets de l'appareil , dont nous venons de donner une idée , n'étant pas assurés par l'expérience , nous n'entrerons pas dans de plus longs détails h son égard. Nous croyons de- voir décrire ici une machine propre à atteindre le même but; elle nous a été communiquée par M. Schwarlz , professeur do technologie suédois, qui a souvent été témoin de ses bons résultais dans la pratique en grand. La figure 5 dj ia V. i"' représente une chaudière à vapeur, munie d'une soupape de sûreté A, d'un tube indicateur B,d'un entonnoir à robinet C , pour être remplie, et d'un ou plusieurs ajustages D à brides, pour émettre la vapeur. Un tuyau E F porle la vapeur dans un cylindre fermé , en bois épais , doublé de cuivre, F G. Ce cylindre, qui représente un tonneau de- bout, est séparé en deux par un diaphragme en fonle II I. perforé, comme une écumoire, de trous coniques. Un agitateur en fer K L, tourne à frottement dans une boîte d'étoupes (stuffcn-box) , adaptée au fond supérieur, et sur un pivot à sa partie inférieure qui porte un moulinet près du fond. Plus haut quatre ailes en fer, perforées de trous elliptiques N N, sont fortement fixées sur la tige de l'agilateur ; a quelques lignes au-dessus du diaphragme une manivelle O P, où un pignon Q, commandé par une roi^e d'engrenage R, permcl- lenl de fiiire tourner cet agilaleur. On introduit les pommes de ( s^ ) terre dans la parlie «ujxh'ieurc du cylindre par une onverlure S; on n'emplit que les huit dixièmes de la capacilé environ , afin de laisser de la place pour le gonflement ; on referme l'ouverture au moyen d'une plaque serrée par des brides , et l'on introduit la vapeur dans le cylindre en ouvrant le robi- net T. Une petite canelle G, placée au haut du cylindre, per- met d'en laisser échapper l'air; on ouvre son robinet, et on ne le referme qu'après avoir laissé sortir une certaine quantité de vapeur, afin d'être assuré que tout l'air est expulsé. Une heure ou une heure et demie après que l'on a commencé à introduire la vapeur, suivant la masse à échauffer, les tubercules doivent être cuits ; on s'en assure en essayant de faire tourner l'agitateur , qui ne doit pas éprouver une trop forte résistance; on continue h imprimer un mouvement de rolalion, et au fur et mesure que les pommes de terre sont écrasées , elles passent au travers des trous du diaphragme, et tombent dans la partie inférieure du cylindre ;là elles sont dé- layées par les quatre ailes fixées sur le prolongement de l'agi- tateur , eV complètement réduites en bouillie. Lorsque toutes les pommes de terre ont été broyées de celle manière, on soutire la bouillie par une large vidange V, et l'on recom- mence une autre opération. M. Schwartz nous a indiqué un ustensile que l'on préfère encore dans son pays à celui que nous venons de décrire ; c'est un cylindre en bois épais , qui représente un tonneau couché, traversé par un axe, et tout hérissé à l'intt^rieur de pointes en fer [f^oj. la fig. i"", PI. 2.); un des bouts de l'axe est creusé d'un trou cylindrique, dans lequel est adapté un lube garni extérieurement d'une boîle d'étoupes; ce tube sert à amener la vapeur dans l'intérieur du cylindre. On emplit ce cylindre aux huit dixièmes de sa capacité, par une ouverture à bride, que l'on tourne ver? la parlie supérieure, et que l'on ferme ensuite. On introduit la vapeur, et lorsque la cuisson est complète, on fiiil tourner le cylindre sur son ( ^n axe; les Uihcrculcï;, en tombanl sur !os pointes , se divisent; et lorsqu'ils sont réduits eu bouillie, on fait arriver l'ouver- ture h brides vers la partie inférieure; on enlève la plaque qui la fermait, et la bouillie tombe dans une cuve disposée h cet effet; on imprime un mouvement de va-et-vient au cylin- dre, afin de faire sortir le plus possible de cette bouillie épaisse ; on referme l'ouverture et l'on recommence l'opération. On voit que par les dispositions ménagées dans les deux appareils que nous venons de décrire , on évite tout refroidis- sement des tubercules après leur cuisson, et qu'ils doivent, par conséquent , être très-facilement réduits en pâle et en bouillie. L'extraction de la fécule de pommes de terre exige que ces tubercules soient divisés le plus possible, mais sans être chauf- fés, puisque la fécule doit être obtenue sans altération; on ne peut donc pas , dans ce cas , les amollir par la cuisson : il faut agir sur la pomme de terre crue, conservant toute sa dureté. Ce problème a beaucoup exercé le génie de nos mécaniciens : ils ont essayé de l'écraser sous des meules , entre des cylindres cannelés; sa contexlure, ferme et élastique, la laissait céder, mais ne permettait pas qu'elle se déchirât suffisamment. On a renoncé h ces moyens pour diriger les recherches vers les inslrumens Iranchans : ces derniers ont eu des succès plus ou moins contestés. Nous ne nous arrêterons pas à les indiquer tous; il suffira que nous décrivions celui dont l'expérience a constaté les avantages et la supériorité. C'est une machine à laquelle le nom de son auteur est resté : on la nomme râpe de Burette. La fig. 3, PI. 2, indique la construction de cette râpe : on voit que toutes les parties du mécanisme sont disposées sur l'assise supérieure d'un bâtis solide en chêne A B C D. Un cylindre E, de deux pieds de diamètre et huit pouces de hauteur, plein , en pierre dure, traversé par un ax3 qui repose sur les deux côtés longs du hâlis , est garni sur toute sa circonférence de ( 54 ) lames tic scies de scpl pouces de long , au nombre do cent vingt-huit, parallèles à l'axe , et séparées par des tasseaux en bois. Les lames et les tasseaux sont fortement fixés sur le cy- lindre , h l'aida de vis en fer qui sont entrées dans deux cercles en plomb, coulés dans des rainures de fa pierre, et tout ce système est maintenu h l'aide de deux cercles de fer qui ser- rent chacune des extrémités des tasseaux et des lames. L'axe du cylindre porte, à l'un de ses bouts, un pignon en fer de seize dents, qui engrenncnt dans celles d'une roue pareillement en fer, entaillée de cent vingt dents; une manivelle, adaptée à chacune des extrémités de l'axe de celte roue, permet à deux hommes de mettre le cylindre en mouvement. On pourrait, dans un plus grand travail, faire mouvoir ces râpes à l'aide d'un manège lire par des chevaux, ou même se procurer la force mécanique au moyen d'une machine h vapeur. Une sorte d'auge en bois F, inclinée, est placée sous le cylindre; elle reçoit la pulpe produite par la râpe , et par sa pente la conduit dans un baquet G ou tout autre récipient analogue. Sur la face antérieure du bâli , et près de la circonférence du cylindre, est ajusté un vola H en bois, mobile sur deux tourillons, et enladié dans le bas, de manière à représenter en creux la forme du cylindre, et à toucher presque celui-ci par sa partie infé- rieure; il reçoit de l'axe du pignon , à l'aide d'un excentrique I et de contre- poids J, qui l'attirent par des cordes K, un mouvement de va-et-vient qui ouvre alterna livement une plus grande entrée aux tubercules , et les presse contre le cylindre dévorateur. L'écartement de ce volet est limité , et par suite l'ouverture qu'il offre aux pommes de terre, par une traverse en bois L, contre laquelle il peut s'appuyer dans son recul. Toutes les parties de cette machine, qui surmontent le bâti, sont recouvertes d'une cage en planches minces Aï N 0, vue en coupe dans la figure. Celte enveloppe , divisée en deux cases par des cloisons , forme , à l'arrière , utu: caisse M N P, ( '^'^ V ilaiis laquelle on })ei>l placev cinquanlc kilos de pommes de terre; l'enfant, qui ordinairement sert la râpe, prend ces tubercules un h un pour les jeter dans l'ouverture N O , d'où ils tombent près du cylindre. Celle ràpc, mue par deux hommes, relayés par un troi- sième, peut réduire en pulpe de a,5oo à 0,000 kilos de pom- mes de terre en douze heures de travail; elle fait plus ou moins d'ouvrage, suivant que les pommes de terre venues dans un terrain plus ou moins humide, ou pendant une saison plus ou moins pluvieuse, oUVent plus ou moins de dureté. Dans tous les cas , la pulpe qu'elle donne est toujours exlrèmcment fiïie, telle qu'il est à désirer de l'obtenir dans un travail en grand. Les réparations h faire à cette râpe sont très -faciles : elles se bornent en général au remplacement et à l'afl'ùtage des lames dentées qui arment le cylindre, et l'on a remarqué que leur disposition rend ces réparations très-faciîes. PARAGRAPHE XVII. Préparations alimentaires oblewies des pommes de terre cuites à la vapeur. Polenta , ^raaa, semoule , farine , terrouen. Si la pomme de terre était d'une conservation aussi faûile que le blé, l'orge, l'avoine et les autres céréales, sa culture beaucoup plus productive , ainsi que nous l'avons vu dans le paragraphe IV, la ferait préférer dans beaucoup de cir- constances ; mais il n'en est pas ainsi : la grande proportion li'cau (de 70 ti 80 centimètres ) que ce tubercule contient, rend son volume trop considérable pour une égale quantité de matière nuUilivc , le dispose h la germination quelques mois après sa récolte , le soumet aux influences de la gelée . hàle souvent une fermenlalion qui amène sa pourritiire. On a senti , dès long temps , ces inconvéniens graves, (jui arrê- (56) laienl le développement de la culture du solamim tuberosam. M. Cadet de Vaux, auquel l'éconcmic domestique est rede- vable «le tant d'ingénieux et d'utiles procédés , indique un moyen simple do conserver les pcumes de lerie , et de ré- duire des trois quarts, environ, leur volume. Il consiste à faire cuire ces tubercules , enlever leur pelure, les émietter et les faire cîesséclicr à l'étuve. Ce procédé , qui donne de bons ré- sultats , faciles à obtenir dans de petites manipulalions , a paru plus difficile lorsque l'on a opéré sur des masses. La di- vision et la dessicalion n'ayant été ni assez promptes , ni complètes , on a perdu d'assez grandes quantités de pommes de terre par une altération spontanée survenue pendant le cours de leur préparation. M. Tcrnaux , dont les vues sont sans cesse dirigées vers des objets d'utilité publique, s'est occupé depuis plusieurs années de la dessication des pommes de terre et de la dessi- calion en grand de plusieurs substances alimentaires qui peu- vent être livrées h bas prix, et sont susceptibles de se conser- ver fort long- temps : nous décrirons les procédés que l'expé- rience lui a fait reconnaître préférables. Les pomnpes de terre sont d'abord lavées à grande eau , soit en les açitant dans un baquet , et décantant le liquide , trouble h plusieurs reprises , soit en les enfermant dans un tonneau tournant sur son axe , à demi plein de pomnies de terre et d'eau. Le mouvement de rotation que l'on imprime à ce tonneau , à l'aide d'une manivelle, occasionne un frotte- ment de tous les tubercules les uns sur les autres ; la terre adhérente à leur superficie s'en détache , on laisse écouler l'eau à plusieurs reprises, et, chaque fois, on en apporte do nouvelle jusqu'à ce que le liquide sorte sans être sensiblement trouble. Les pommes de terre étant ainsi bien ncloyées , on les fyit cuire à la vapeur , à l'aide d'un appareil semblable à celui que nous avons dtcril dans le paragrojùio précé-iciit ( ">7 ) (T. la fig, 5 P. i".) ; si ce n'est que l'agitateur peut être su\)- primé, si l'on veut éplucher les tubercules après leur coctinn, et que , dans le cas où on ne les éplucherait pas , on se con- tenterait (le les diviser , en faisant mouvoir l'agitateur, après avoir extrait toute l'eau de condensation. Epliicliage. Cette opération se pratique à la main assez fa- cilement ; la pellicule qui enveloppe les pommes de terre étant sans adhérence , dès que ces tubercules ont été expo- sés pendant environ trente minutes à la température de la vapeur, au furet à mesure que l'épluchage se fait par trois ou quatre personnes, une autre écrase les pommes de terre , en les frappant légèrement avec une pelle, et les étend sur des nattes de laine, puis les expose à l'air libre, où elles subissent pendant douze heures un premier degré de dessication. On peut , ainsi que nous l'avons dit , éviter l'épluchage des pommes de terre , sans que la qualité des produits que l'on en obtient soit très-sensiblement inférieure ; mais leur nuance e:-.t plus foncée. On passe ensuite la pâte de pommes de terre dans un ver- niîccllotre , afin de la diviser plus également , et de multi- plier les surfaces en contact avec l'air atmosphérique : on Té- len-'l alors sur des châssis tendus de canevas. On porte les châssis chargés d'une couche peu épaisse de celte pâte, légèrement posée, dans l'éluve; des montans en bois, fixés verticalement j munis de tasseaux adaptés hori- zontalement, permettent de superposer h six pouces les uns des autres tous les châssis, en sorte que dans un espace li- mité de quatorze pieds de largeur, dix-huit de longueur, et huit de hauteur, on peut placer trois cents châssis, sur lesquels est étendu le produit de cinq seliers de pommes de terre. La dessication de la pâle de pommes de terres est une des opérations les plus importantes de tout ce travail ; car la pâte, eu l'état humide où elle est mise à l'étuve , se trouve dans les circonstances les plus capables de concourir aux léaclions ( -^s ) sponlanées de ses principes. II faut donc prendre toutes les mesures possibles pour s'opposer h cette Icrinenlalion , pen- dant laquelle la pâte contracte toujours un mauvais goût. Le moyen le plus sur d'y parvenir, c'est de hâter la dcs^sica - tion , et, pour cela , d'élever la température de l'air jusqu'à 60 à 7o« , et de l'entretenir à ce degré , malgré le renouvel- lement continuel qu'il éprouve. L'air chaud est envoyé, dans l'étuve de M. Ternaux, par un calorifère de Desarnodj et l'air, chargé d'eau après avoir circulé dans l'étuve, trouve des is- sues disposée.; autour des murs latéraux, près du carrelage. M. ïernaux a observé que la disposition des trous qui don- nent issue à l'air, chargé de vapeurs , a beaucoup d'influence sur la promptitude de la dessication et la qualité des pro- duits : en cÙgl, ces issues furent d'abord ouvertes à la partie supérieure de l'étuve. Il paraît qu'alors l'air échaufle s'y ren- dait directement par le plus court chemin . et en se mettant en contact avec une petite partie seulement de la surface de la pâle; maintenant lancé dans l'étuve par sa légèreté rela- tive , puis chassé par celui que le même courant fait succéder, et forcé de redescendre pour aller prendre les issues ouvertes par le bas, il se met en contact avec une plus grande quantité de surface humide, et, par conséquent, se charge d'une plus lorte proportion d'eau. En comparant dans les mêmes circons- tances les deux dispositions des issues, M. Ternaux a obtenu , dans une série d'opérations, les résultats moyens suivans: issiii DE l'air humide ET DES VAPECBS. P:ir le haut , Par le bas . CIIAKBO:V DE TEBBE COi-VSOMMÉ. 45o kil. 56y qualité, i44 lijl. jSo ■•i47 040 * qualité. 6:3,170 iS, 100 Fermeiiléc, 59,010 2,4oO MM. Baillel, Bosc, Costaz, de Lasleyiic, chargés par la Société d'Encouragement de constater les résultats^ annoiiC'.'s 1 ( '-".> ) par M. Tcrnaux, ont en efTct déclare, dans leur rapport , que l'avanlage en laveur des dernières dispositions adoptées était, 1° une économie d'un tiers environ sur le combustible; 2° une diminution de prix de moitié dans la durée de la dessicalîon ; 5" une certitude presque complète d'éviter les perles résul- tant de la fermentation de la pâle dans l'étuve. Lorsque la dessicalion de la pâle est terminée , on porîe celte substance, dite polenta , i.u moulin; là , suivant qu'on la moud plus ou moins fin, et qu'on passe le produit dans des lamis ou blutloirs, dont la toile est plus ou moins serrée, ou oblient de la farine, de la semoule ou du gruau. M. Ter- naux donne la préférence aux moulins de Dronsart, pour cette opération. PARAGRAPHE XVIII. Prix coûtant de la Polenta convertie en liTuau ou farin{î de pommes de terre, par les procédés ci-dessus décrits. Gruau ou farine de première qualité. 5 seticrs de pommes de terre de ]Go à i65 kil. cbtquc, a 5 f r i5 f. ooc. l 'io kiî. de houille, dont ' f ^'^- ^"'''1' r"''°r (. 5 00 ' So pour la dessication. S ^ ^ 10 ouvrières pour l'épluchîige 10 00 a ouvriers 4 20 Menus frais 1 5o 1^2 journée de mouture. 1 5o 37 20 Intérêt du capital employé à G o;o 2 24 39 49 1 jour ip de loyer h 800 f. par an, 5 f. 28 c. 1 ooo3 iV. 10 Cj d'ustensiles, dont l'u- ;.. 8 o4 sure comptée à iGoyoparan, 5 ?.6 ) Froduti obtenu, iGoà iGôkil. depolenlacoûtcnt. /iol'.voc. ( ^^'^ ) Le kilo (le polenla on vrac revient donc h..., 5o c. Mais pour qu'il parvienne jusqu'au consomma- teur, il faut ajouter : 1° Le bénéfice brut du fabricant, 60 o;o du capital déboursé 18 2" La remise accordée au marchand en com- mission du-croire, etc., sans avance de sa part, 20 pour cent. , 12 Un kilo, formant 16 potages, revient au con- somujateur, Ji (Jo c. Chaque potage revient donc à moins de 4 centimes, et, au plus, à 5 centimes, en portant la dose au dessus de la quantité sulïisante pour un potage ordinaire. Des potages ainsi préparés n'exigent que l'addition d'ime quantité d'eau d'un demi-litre environ, et une ébullilion d'un quart-d'heure , pour produire unenourriture saine , et, comme on le voit, fort économique ; on peut la rendre plus agréable en y ajoutant un peu de beurre, d'œufs , de légumes , de lait, de sucre ou de bouillon. On n'a pas compté, dans le prix revenant de ces potages, les frais d'emballage ou de mise en paquets, les chances du cré- dit accordé aux marchands, et quelques autres frais généraux difficiles à estimer ; on les a également négligés dans les comptes suivans : Polenta ou gruau de deuxième qualité. 5 sctiors de pommes de terre, à 5 fr 10 f. 00 c. 2 ouvriers pendant une journée 2 00 2 ouvriers, idem 4 2^ J20 kii. de charbon de terre 5 1/2 journée de mouture 1 5o Menus frais 1 5o 29 f. 25 c. (6. ) Report. • . 29 f. y5 c. Intérêt du capital employé, à G pour cent. ... 1 76 01 01 1 jour \]i de loyer, à 800 fr. par an, 5 f. 33 c. 8oo3 fr. 10 c. d'ustensiles, dont l'u- V a f sure est calculée à raison de 1 6 pour cent de leur valeur 5 34 Produit en polenta moulue, deuxième qualité, 200 kil. coûtent 09 68 D'où on voit que le kilo de polenta avec pe- lureSj revient en vrac, à 20 Ajoutant les frais pour parvenir à la consomma- tion , savoir : 1° Bénéfice brut du fabricant, 5o oyo du capital. 10 1" Bénéfice du marchand, du-croire, h 53 0/0.... 10 Un kilo, formant environ 16 potages, revient à 4o Un potage ordinaire revient donc à 2 cent. \\i ou 3 centimes au plus. Les potages, préparés de cette manière, sont aussi nourris- sans , à quelques centièmes près, que ceux dans lesquels entre la polenla exempte de pelure; leur goût seulement est moins fin. On peut leur communiquer une saveur agréable par l'ad- dilion d'un huitième de leur poids de farine d'avoine grillée, connue en Suisse , sous le nom cVAbermuss. 11 est sans doute inutile de rappeler que les prix revenant , fixés ici , sont relatifs à la localité , et qu'ils éprouveraient quelque variation dans des localités dillerentes. Chacun, au reste , pourra faire les corrections que le cours des matières premières, du combustibl-c;, de la main-d'œuvre, etc. , néces . siteront. On peut remarquor que l'épluchage des pommes de terre ( G. ) diminue de dix hnil h vingt centièmes le priuluil ol)lLnu , et auginenle le prix coûtant de moitié, quoique la pellicule qui enveloppe la pomme tle terre ne forme que la centième partie du poids des tubercules et trois on quatre centièmes du produit sec : on ne s'en étonnera pas toulerois si l'on réfléchit qu'en séparant la pelure, on ne peut éviter d'enlever aussi une certaine quantité de la chair , et que le temps employé à cette opération augmente les frais de main-d'œuvre. PARAGRAPHE XIX. rabrication du terouen, et -prix coûtant de cette substance alimentaire. Le nom de teroiien , donné èi une matière nutritive, dont la pâte de pomme' de terre desséchée fornie la base, lire son origine récente des noms Tcrnaux et Saint-Ouen. C'( s! , en cfict , h Saint-Ouen qtie sa pcéparâtion s'est d'abord faite , par les soins de M. Tcrnaux. On fcdjrique le leroucn, en préparant d'abord de la gélatine extraite des os. par la marmite de Papiii ; il suffit , pour c(î.ttè préparation préliminaire, de soumettre dans une chaudière fermée , semblable à la chaudière à vapeur décrite paragra- phe XVI, des os 5 Faction de l'eau chauffée sous la pressïbn de trois atmosphères. En employant des os minces, tels que les déchets des moules de boulons , les tètes de bœuf déchar- nées^ etc., l'exlraction d'environ douze centièmes de leur poids , en gélatine sèche, est opérée dans cette chaudière au bout de trente à quarante minutes ; on retire alors le feu , on décharge graduellement la soupape , afin que la vapeur com- primée s'échappe et conlribuc au refroidissement; on soutire tout le liquide h clair, on le passe dans une chausse , el on lave le marc d os cuils , avec une quantité d'eau qui sert, au lieu d'eau pure, pour une autre opération. ( 65 ) Le liquide, soutiré le premier, est rapproché en cousis- lance sirupeuse, en l'agilanl constamment, pour éviter que ' quelques parties s'attachent et fassent caraméliser. Lorsqu'il est ainsi réduit, il est prêt Ji être employé. On peut éviter la peine de confectionner soi-même la géla- Ime , en achetant celle que l'on trouve toute préparée dans le commerce , et s'assurant de sa bonne qualité ; elle doit être presqu'.nsip.de lorsqu'on la l\ut détremper dans Teau , et sur- tout exempte de mauvais goût; il faut qu'elle soit en outre privée de tout excès d'acide et d'alcali. On remplace par douze kilogrammes de celte gélatine sèche cent kilogrammes d'os • pour s'en servir, on doit la faire détremper pendant trois ou quatre heures dans l'eau froide, et la faire fondre en portant la température à i'ébuliilicn. De quelque manière que l'on ait préparé le sirop gélatineux on 1 .ncorporo avec la polenta moulue, après aN'oir délayé dedans du sel, du pain de viande de l'Ukraine , des carottes des panais cuits et des clous de gérofle. On étend la pâte , qui resuite de tout ce mélange , sur les châssis garnis de canevas • on porte ceux-ci à l'étuve , où la dessication estLientôt opérée' on obtient amsi une sorte de potage au gras desséché, d'une' conservation facile , et que l'on prépare en tous lieux, en le laisant bouilhr pendant quinze minutes, dans un demi-litre deau pour chaque ration, et dont on rend la saveur très- agréable, en y ajoutant la cinquième partie d'un litre de bouillon frais. Voici le compte du prix auquel revient le terouen fabriqué : bœuTdf ""' '^'''' ''^"'^''"^'' P'" vJngt.paires d'os de pied de ,.,'*'■■'■*' 3o f. 00 c. 1 fcil. 0 hectog. de pain de viande de l'Ukraine. 6 oo faire n^r"'"''' "' '''''■'''"""' '"'' '^ ''' '' ' '' ^^^ P"^ ^•'-■-•' doit leur faire p.eferer ceux que nous avons indiqués plus hauE dans ce paragraphe. (64} Report 58 f. 00 c. Légumes G oo Go kil. (le houille, pour la dessicalion et la cuisson 2 5o 10 kil. de sel gris 4 5o Deux journées d'ouvrier 4 5o Quatre journées de femme 4 oo Menus frais i 5o G 1 o') Intérêt du capital employé 5 GG 64 G6 Loyer deux jours, à 8o fr. par an , 4 f. 4o c. ) Ustensiles G55 fr. 85 c, dont l'u- ^.. 4 9^ sure calculée h. iG par loo, 5G c.) G() G2 D'où il faut déduire 5 kil. d'huile extraite des os de pied de bœuf, à 2 f r 10 00 f 9 62 Polenta 110 kil., à 5o centimes 33 00 Le produit est de 109 kilos de lerouen, coûtant.. 92 62 Lekilodeterouen revient donc en vrac, à. o f. GG c.,5 Bénéfice brut du fabricant, 85 pour 100 du capital 55,1 Commission du croire , etc. , du mar chand x 3o,4 Un kilo ou iG pelages ^ coûtent au con- sommateur 1 02 D'où l'on voit , qu'un potage de gruau , ccûto un peu moins qne 10 centimes. (65) PARAGRAPHE XX. Fabrication d\ine polenta allemande. M. Schoenherr, de Dresde, a indiqué la composition d'une sorte de polenta analogue an terouen. Voici comment on la prépare. Après avoir fait cuire à la vapeur des pommes de terre , et les avoir desséchées et moulues par un procédé analogue à celui que nous avons décrit . on en pèse trois cents livres, aux- quelles on ajoute lyo litres de farine de pois, loo livres de farine d'orge germé (drèche des brasseurs) , 45 litres de sel marin , 82 livres et demie de graines de cumin , trois quarts de livre de gingembre pilé (1). On forme de tout ce mélani!;e une pâle homogène en y incorporant i45 livres de gelée de pieds de veau ('2). Enfin on fait dessécher cette pâte en l'éten- dant sur des châssis garnis de canevas , et rangée dans une étuve analogue à celle que nous avons décrite dans le para- graphe XYIJI; on la passe ensuite au moulin pour la réduira en une farine grossière. La polenta de M. Schoenherr revient, en Allemagne, à soixante centimes le kilogramme; elle forme une nourriture très saine et peut se conserver plusieurs années dans des en- droits secs ou dans des tonneaux bien fermés ; on en prépare un polage, à peu de frais, en la délayant dans cinq fois soq poids d'eau, et portant à l'ébullilion , que l'on soutient pen- dant quelques minutes seulement. (1) Ces épices qui conviennent aux Allemands ne seraient probablement pas du goût des Français : on ferait donc bien de les supprimer si l'on usait de cette préparation en France. (2) Cette gelée peut être remplacée par toute autre solution de gélatine , convenablement préparée. Voyez le paragraphe précédent. ( GO) PARAGRAPHE XXî. Emplois de (a farine de ta semoule et du gruau de pommes de terre. Nous avons vi, plus haut, (}ue la moiiUirc de la pomme de terre , séparée à l'aide de lamis de plusieurs grosseurs, don- nail les trois produits cl- dessus. Nous citerons quelques-uns deleuisusages multipliés dans l'économie domestique; on devi- nera facilement tous ceux que nous ne pourrions énumérer ici. Ce n'est pas seulement à la classe peu aisée que la pomme de terre, desséchée avec toute sa substance nutritive, offrira des ressources; elle recevra dans l'art culinaire une foule d'appli- cations qui contribueront à augmenter la diversité des mets et h modifier le goût des préparations connues. Déjà nos habiles cuisiniers ont trouvé moyen d'apprêter des potages savoureux, des entremets délicats , des pâtisseries fines, avec les luber- cules des variétés choisies ; il ne leur sera pas plus difficile de faire servir au luxe de nos tables les produits de la pomme de terre desséchée. La farine, sans aucune précaution particulière, modifiera agréablement le goût des diverses sauces dans lesquelles on emploie la farine ds froment; seule ou mélangée avec cette der- nière, elle entrera dans la composition des pâtisseries com- pactes et légères; elle rendra plus nutritives, et en même temps plus faciles à digérer , les purées de diverses légumi- neuses et les potages auxquels on les ajoute. Légèrement torréfiée au four, cette farine acquiert la sa- veur agréable que l'on reconnaît aux pommes de terre cuites sous la cendre, et prend une couleur dorée qui plaÎL à l'œil. En cet état, elle devient précieuse aux mères et aux nourrices pour préparer, en quelques miuutes , une bouillie nourrissante et légère que l'on n'a pas la crainte de faire trop peu cuire, («7) puisque la snbslancc savoureuse que l'on emploie a déjà siibi une cuisson convenable. Dans une foule d'autres ciixonstances où il importe de préparer promplement des aliniens sains, on reconnaîtra toute l'ulilité de celte farine cuite à l'avance. Délayée simplement dans du bouillon ou du lait bouilli , puis chauflee à l'ébullilion , elle forme un potage nourrissant ou une bouillie qu'une petite quantité de sucre rend savou- reuse. Mélangée en diverses proportions avec le lait , des œufs, du sucre, elle varie les délicats entremets désignés sous les noms de crème , tôt-faits , omelettes soufflées ^ etc. M. Cadct-de-Vaux eut l'idée d'incorporer la farine de po- lenta dans le chocolat , afin de rendre celui-ci plus facile à digérer et plus nourrissant; il trouvait encore à celte addition l'avantage de diminuer le prix du chocolat; et, en effet, la polenta , mélangée dans la proportion d'un quart ou d'un huitième , et coûtant au plus le douzième du prix du chocolat, diminue d'un tiers ou d'un sixième la valeur du composé. Ce mélange offre enfin l'avantage de devenir plus épais avec la même quantité d'eau , et, par conséquent, de permettre d'en employer une moindre proportion. La farine de pommes de terre remplace avec des avantages marqués, surtout dans les années abondantes en ce tubercule , une partie de la farine de froment dans la préparation du pain. Dans celle application on ne saurait cependant exclure la to- talité ni même plus du quart ou du tiers de la farine de blé , sans rendre le pain plus compact. En effet, le gluten qui man- que dans la pomme de terre détermine la formation d'une mul- titude de cellules dans le pain de froment , en engageant dans la pâte une partie des gaz que la fermentation fait dégager. La semoule grillée, outre les usages ci-dessus détaillés, à la plupart desquels elle s'applique comme la farine, sert en- core Il remplacer la chapelure de pain dans tous ses usages; elle a plus de goiit et conserve mieux la fermeté de l'enveloppe croquante qu'elle forme autour de divers mê!s, tels, par oxo:n* 5. ( ^>3 ) pic , que ceux connus sous les noms de côieleltes , moulon braisé, filets en caisses ou au gratin; poulets , pigeons , an- guilles à la tartare ; pieds de cochon aux truffes , à la Sainte- Ménéhould , elc. Ainsi dans l'économie domestique, dans l'art culinaire j au milieu des camps, dans les campagnes, où bien des res- sources manquent, pendant les voyages, etc. , on appréciera toute l'utilité de ces préparations sèches, faciles à conserver et à convertir en alimens sains , avec économie de temps et de combustible. On reconnaîtra sans peine que la dessication des pommes de terre offrant le seul moyen de conserver la sub- stance nutritive tout entière de ces tubercules , est indispen- sable pour faire venir les années abondantes au secours des années peu productives , et nous garantir à jamais des funestes conséquences des disettes. PARAGRAPHE XXII. Emplois directs de la pomme de terre dans Céconomie domestique et dans la préparation du pain. La plupart des usages des tubercules dans les préparations culinaires, sont tellement connus aujourd'hui , qu'il serait à peu près superflu de les rappeler ici. Nous nous proposons d'insister seulement sur des applications économiques de la plus haute importance, relatives à la nourriture des classes peu fortunées. Préparation du pain avec les pommes de terre. On peut employer les tubercules sans les réduire en farine pour faire bi pain. Voici le procédé que M. Fischer , membre de la so- ciété d'agriculture de Moscou , a indiqué. Les expérienceâ que l'on a répétées , en suivant sa méthode , ayant eu un succès complet, nous croyons devoir le rapporter ici : on forme de la pâte avec de la farine de froment , et l'on y ajoute les doses (69) ordinoiies de levain ; le lendemain on fait cuire des pommes de terre, on enlève leur pellicule; et tandis qu'elles sont en- core chaudes, on les divise le plus possible à l'aide d'une râpe en lùle et d'un rouleau ; on les pétrit alors avec de la farine , deux fois leur poids environ; on y ajoute le levain préparé la veille; on laisse lever en favorisant la fermentation par une température douce, puis on divise en pains de la dimension voulue; on laisse encore un mouvement de fermentation se rétablir , puis on enfourne. En l'an 5 de la république, on a publié en France, par ordre supérieur, un procédé analogue à celui-ci , dans lequel on prescrivait l'addition de la farine d'orge; mais celle modi- fication ne peut être utile que lorsqu'elle est commandée par les circonslances. Pour préparer en grand le pain, par l'un des procédés ci- dessus décrits, ou trouverait beaucoup d'avantage à se servir des ustensiles que nous avons décrits dans le paragraphe XVI, à l'aide desquels on réduit, sans beaucoup de main-d'œuvre , les tubercules en une bouilhe homogène. Des essais faits eu Suède, ont démontré que l'on peut incor- porer avantageusement la pomme de terre dans la pâte à faire le pain, en réduisant ces tubercules crus en pulpe fine, à l'aide d'une râpe, ajoutant la pulpe à la farine, et pétrissant le tout avec la quantité d'eau nécessaire pour donner h la pâle la consistance convenable. Un moyen fort simple de remplacer la farine de froment par les pommes de terre , consiste h faire cuire les tubercules au moment d'en faire usage; on les mange en guise de pain , sans autre addition qu'un peu de sel : on ne saurait mettre en doute les avantages de cette méthode , puisque déjà elle est suivie dans plusieurs contrées, non -seulement par les gens peu fortunés , mais encore chez les gens riches , qui , par goût, préfèrent les pommes de terre cuites à l'eau, sous la cendre ou à la vapeur, au pain de froment; on remplace ( 70 ) ainsi une grande partie de celui-ci. C'est en Flandre et en Angleterre que cette coutume est le plus répandue. On doit choisir pour cet usage les pommes de terre des meilleures variétés, telles, par exemple, que la patraque jaune, les vi- teloltes jaunes et rouges , la hollande jaune , etc. On doit sur- tout préférer celles qui sont venues dans un terrain sahleux, et sont le moins aqueuses. PARAGRAPHE XXIII. Mélange économique des pommes de terre dans le beurre , le fromage; moyens de falsifier les graisses en Angleterre. En Allemagne , les gens de la classe ouvrière trouvent moyen d'économiser le beurre qu'ils mangent sur le pain , et de ren- dre cet aliment plus nulrilif , en y incorporant une certaine quantité de pommes de terre. Leur procédé consiste à faire cuire ces tubercules à la vapeur ( P^oj. parc^graphes XVI et XVII) , les éplucher, les réduire en pâle homogène, à l'aide du pilon ou d'un rouleau; les délayer dans la crème destinée h l'aire le beurre , et Lallrc ce mélange dans une; harallc , à la manière accoutumée. Le beurre se rassemble, et on le lave, en le pé- trissant dans l'eau , comme à l'ordinaire ; puis on le sale pour le conserver. L'addilion de la pomme de terre dans le fromage rend celle substance plus nutritive et d'une digestion plus facile; elle est usitée en Saxe , où on l'opère de la manière suivante : lorsque le lait est pris en caillé, et que celui-ci s'est égoulté pendant quelques heures , on épluche des pommes de terre bien cuites, on les divise le plus possible en les pilant dans une passoire en cuivre, cl les forçant ù pas er au travers des trous , et l'on pétrit la pâle de tene , ainsi préparéo, avec le caillé; lorsque le mélange est bien intime, on laisse reposer pendant doux ou trois jours; alors on pétrit de uou- f 71 ) veau loule la niasse, et l'on met dans les formes ordinaires la pâle homogène qui en résulte. Ces préparations, vraiment utiles et économiques, ont donné l'idée d'une fraude qui se pratique, surtout en Angleterre.: elle consiste à introduire , par les moyens ci-dessus indiqués , la pâte de pommes de terre cuite dans les graisses destinées à la fabrication du savon ; et ce sont particulièrement les graisses que les fabricans font recueillir dans les grandes cuisines , qui sont ainsi falsifiées. Ce mélan";e frauduleux cause un srand préjudice dans la fabrication du savon; car non -seulement tout le poids des pommes de terre est payé en pure perle, mais encore la présence de cette matière étrangère rend les solu- tions alcalines visqueuses, et oblige d'employer une plus forte dose de soude ou de potasse. On a quelquefois falsifié de celle manière , en France , la graisse extraite des os. Au reste , pour peu que l'on ait quelque défiance de cette supercherie, il est facile de la découvrir; il suffit, en effet, de maintenir, dans un vase un peu profond , de la graisse à essayer liquéfiée , pen- dant deux heures environ , à l'aide de la chaleur d'un bain- marie : la pomme de terre se dépose pour la plus grande par- tie, et, après le refroidissement, forme une couche distincte au fond du vase. On peut encore découvrir la fraude d'une autre manière: on fait bouillir , pendant un quart d'heure , la graisse dans dix fois son poids d'eau; la plus grande partie de la substance étrangère se dissout ou se dépose; après le refroidissement,, on enlève la graisse à la superficie du liquide, au moyen d'une écumoire; on la fait chauffer seule pour chasser l'eau qu'elle retient; on la laisse refroidir et on la pèse : on oi»iicnî ainsi le poids de la graisse réelle qui était conlenue dans le mélange essayé. ( 72 ) PARAGRAPHE XXIV. Préparation d'une colle de pâte avec les pommes de terre. Plusieurs personnes ont proposé d'employer les pommes (le terre pour préparer une colle de pâte h. meilleur marché que celle que l'on obtient ordinairement avec la farine de fro- ment. M. Cadet-de-Vaux paraît être l'un des premiers qui ait eu celte idée. M. Charles Drury a indiqué, en 181 5, le procédé sinvant : on nétoie les pommes de terre , en les lavant avec beaucoup de soin , sans les peler ; on les réduit en pulpe fine , h l'aide d'une râpe formée d'une feuille de tôle perforée de trous et tournée en demi-cylindre , les bavures en dehors ; on délaye ime livre de cette pulpe dans deux litres et demi d'eau , et l'on porte le mélange .^ l'ébullition , que l'on soutient pendant quel- ques minutes seulement, sans cesser d'agiter la masse, afin d'éviter que quelques parties s'attachent. On retire du feu , et l'on ajoute une demi-once d'alun réduit en poudre fine, que l'on mêle bien exactement en le délayant d'abord dans une petite quantité du liquide. Un boisseau de pommes de terre , traitées de cette manière , produit environ lôo livres de colle. On voit qu'elle coûte bien moins cher que celle de farine; l'auteur assure qu'elle est tout aussi bonne, exempte de mauvaise odeur , susceptible de se conserver, ex- posée h l'air pendant dix à douze jours, sans éprouver d'al- léralion sensible. Cette colle peut êtfe employée utilement par les cartouniers , les relieurs , les papetiers , etc. En supprimant l'addition d'alun , et ajoutant dans la colle , préparée du reste comme ci-dessus , trois ou quatre centièmes de muriatei e chaux, on préparerait un parou propre à l'en- collage de la chaîne des toiles communes, et dont le sel dé- ( r>) Jicjiiescenl empêcherait la dessicalion dos fils. Nous indique- rons plus loin une sorte d'encollage incolore préparé avec la fécule de pommes de terre , et susceptible d'être appliqué , avec avantage , par les tisserands , à la confection des toiles blanches. PARAGRAPHE XXV. Fabrication du vermicelle et du riz de pommes de terre. M. Grenet paraît être le premier qui ait eu l'idée de mettre la pomme de terre sous une forme analogue h celle du vermi- celle et du riz. ♦•Voici en quoi consiste le procédé, à l'aide duquel on peut obtenir ces préparations : On fait cuire les tubercules à la vapeur, de la même ma- nière que pour préparer la polenta (^. les paragraphes XVI et X\ II) ; on les épluche soigneusement; on les place dans des pois que l'on porle aussitôt au four; on les écrase alors «\ l'aide d'un rouleau ou d'une passoire et d'un pilon; on les étend sur des châssis tendus de canevas, dans une étuve, afin de leur enlever l'excès d'eau qu'elles retiennent; on iritroduit alors successivement toute cette pâte dans un cylindre creux, en tôle ou en cuivre A, perforé de trous à sa base et dans toutes ses parois, terminé en entonnoir, et soutenu , 5 sa base supé- rieure, par une rondelle appuyée elle-même sur un trépied ( P'oj. la fîg. 4 de la pi. 5 ). Un levier B , articulant à l'aide d'un tourillon G , h scellement dans le mur, permet de com- primer fortement la pale par un cylindre plein en bois D; celle-ci s'échappe alors en se moulant en fds au travers des irons du cylindre; elle est ainsi reçue dans des caisses plates en fer-blanc; on étale le vermicelle dans ces caisses à l'aide d'une baguette, et on les porte , au fur et à mesure qu'elles sont chargées, dans un four dont on vient de retirer le pain, ou mieux encore , dans une étuve disposée comme celle que ( 74) nous avons décrite paragraphe XVII; on laisse ce vermicelle se dessécher, au point d'être cassant, dur et sonore; il suffît alors de l'enfermer dans des sacs ou des caisses , et de le tenir dans un endroit sec pour s'en servir au besoin. Il est facile de convertir ce vermicelle en une sorte de riz d'un grain égal; il suffit, pour cela, de le concasser à l'aide d'un rouleau , après l'avoir étendu sur une table, et de le pas- ser dans un crible fin qui sépare tout le menu , que l'on peut considérer comme une sorte de semoule ; puis ensuite dans un crible plus gros , qui retient les plus gros fragmens : ceux-ci doivent être mêlés avec d'autre vermicelle , pour être concassés de nouveau; en ajoutant h la pâte une teinture de safran, on donnera la couleur et le goût du vermicelle jaune. On doit , autant que possible , choisir les meilleures espèces de pommes de terre pour la préparation du vermicelle et du riz , afin que la saveur particulière de ces produits , employés dans la confection des potages , soit aussi agréable que celle des pâles du commerce; on voit que par ce moyen on pour- rait, dans l'intérieur d'un ménage, préparer des pâtes très- salubres et économiques pour la consommation journalière. Si l'on voulait donner au vermicelle de pommes de terre toute la ténacité et l'apparence du vermicelle ordinaire, il faudrait ajouter une assez grande quantité de belle farine de froment, de celui deTaganrock, par exemple, qui contient une grande proportion du gluten, capable de donner le liant qui manque h la pâle de pommes de terre; on devrait, de plus , beaucoup travailler la pâte, cl suivre, du reste, les procédés habituellement employés dans cette fabrication. ( 75 ) PARAGRAPHE XXVI. Application de la pomme de terre à la nourriture des chevaux. M. Ribeck de Lindow a donné des détails fort étendus sur les moyens de faire servir la pomme de terre ii la noiirriluro des chevaux. Nous extrayons de cet important travail tous les documens qu'il peut être utile de mettre sous les yeux des agriculteurs, des entrepreneurs de roulage, et de toutes les personnes qui ont un cerlaio nombre de chevaux de traits ou de luxe h nourrir. La pomme de terre ne doit pas être donnée crue aux che- vaux ; en cet état , elle est moins nourrissante , ils la mangent plus difficilement; elle leur irrite le tube intestinal, et des accidens, plus ou moins graves, pourraient en résulter. Les pommes de terre cuites , et surtout au moyen de la va- peur , comme nous l'avons indiqué dans le paragraphe XVI , ont paru de beaucoup préférables : il est d'ailleurs plus facile et plus économique de les préparer ainsi. Lorsque ces tubercules ont été amenés au degré de cuisson convenable , on les étend h l'air pour les faire refroidir un peu ; et , sans attendre que leur température soit abaissée au- dessous de 25 degrés, on les distribue aux chevaux. On en tirera meilleur parti encore , et on les rendra plus faciles à manger par les chevaux, en les triturant dans un mortier, et les forçant, h l'aide d'un pilon, de passer au travers d'un crible en fer et d'une passoire criblée de trous ; si l'on veut même les rendre plus appelantes , on les mélangera, dans cet état, avec un quart, un tiers ou moitié de leur volume de paille ou de foin haché. Les pommes de terre les plus propres à la nourriture des chevaux , sont celle, qui soûl le plus farineuses, qui conlieu- (7M lient le plus de substance sèche ; on peut les reconnaître , soit à leur aspect intérieur, qui doit offrir une substance grenue, en quelque sorte pulvérulente et farineuse ; mais non pas une matière molle , comme gélatineuse ou gluante. Au reste , on s'assurera mieux encore de la valeur réelle de ces tubercules, en déterminant la proportion de matière nutritive sèche qu'elles contiennent; on y parviendra , sans peine , h l'aide des indi- cations que nous avons données dans le paragraphe \III. Suivant M. Ribeck , la quantité de pommes de terre qui est nécessaire pour la nourriture d'un cheval, varie depuis lo jus- qu'à 5o livres par jour; elle dépend de la force de l'animal et du genre de travail qu'on lui fait faire; il paraît, d'après des expériences qui lui sont propres, qu'un cheval, travaillant peu, n'exige guère plus de lo livres de pommes de terres cuites pour sa nourriture journalière ; qu'un cheval de charrue peut consommer, terme moyen, 20 livres de cette substance; un cheval d'une plus forte stature que la commune, 20 livres; enfin, que les chevaux du Mekiembourg mangent jusqu'à 00 livres de ces tubercules en une journée. Au reste, pour guider sur la dose de cette nourriture, que l'on doit donner h un cheval quelconque , M. Ribeck annonce que les pommes de terre peuvent remplacer , au moins moitié de leur poids, de bon fourrage : or , une botle de foin, pesant environ 1 1 livres, serait représentée par 22 livres de ces tu- bercules cuits. Outre les précautions relatives à la conservation des pom- mes de terre, et que nous avons indiquées dans le paragraphe XII, leur application à la nourriture des chevaux nécessite des soins particuliers que nous croyons devoir rappeler ici. Une grande propreté est nécessaire pour éviter que cette nourriture, susceptible de fernienlcr assez promptcment , ne communique un mauvais goût aux vases dans lesquels elle est contenue; et, par suite, aux pommes de terre, récemment préparées, que l'on mettrait dedans; il faut donc éviter de (77) donner une plus grande quanlilé de pommes de terre que le cheval n'en peut manger; il vaut même mieux qu'il en ait moins que la quantité nécessaire, et que le complément soit composé d'avoine , de son , de fourrage sec , etc. ; il est utile de laver la mangeoire chaque fois que l'on y remet une nouvelle quan- tité d'aliment, ou encore donner h boire dans le même vase où l'on met les pommes de terre. Tous les quinze jours, on fera bien de laver l'auge avec de l'eau salée. Quelques inconvéniens peuvent résulter de la nourriture des chevaux avec les pommes de terre : les jeunes chevaux, par exemple, soumis à ce régime, sont sujets, avant de s'y habituer , à éprouver quelques coliques. Ces accidens , qui n'ont aucune suite fâcheuse pour la plupart des individus, s'aggravent chez quelques autres ; on a recours , dans ce cas , à des saignées et plusieurs lavemens, et , en général , la maladie cède bientôt à cette simple médication. Toutes les précautions que nous venons de recommander deviennent inutiles, si l'on substitue à la pomme de terre cuite l'espèce de gruau sec dont nous nvons indiqué la prépa- ration dans le paragraphe XVII. Cette dernière nourriture, qui d'ailleurs offre l'avantage d'une conservation facile , est donc de beaucoup préférable j elle peut même remplacer une grande partie et, au besoin , la totalité du foin et de l'avoine; n'étant pas, comme ce grain, défendu contre l'action de l'estomac, par un dur cortex , elle se digère plus complètement. L'usage de la pomme de terre , comme nourriture des che- vaux , est d'une grande importance pour les fermes situées sur des côtes élevées qui produisent très-peu ou point de four- rage; il permettrait de substituer aux bœufs les chevaux , qui mangent moins et rendent plus de services, surtout en hiver. La question économique de la substitution de la pomme de terre , à la plus grande partie de foin , est facile à résoudre , d'après les données de M. Ribeck et la connaissance des pro- duits comparés d'un terrain cultivé cri pommes de terre ou en ( 7») foiirrogos. En effet , un hectare de bon terrain , l)ien cultivé, rapporte , terme moyen , 275 hectolitres de pommes de terre pesant environ 3o,8oo kiK La même superficie de terre, cultivée avec les mêmes soins, ne produit en divers fourrages secs , tels que trèfle , luzerne , foin , etc. , etc. , que de 5 à 10 mille kilogrammes 5 et terme moyen, 7,600 kilogrammes, représentant, sous le rapport de la matière nutritive , le double de leur poids en pommes de terre , ou . i5,oookiI. La différence en faveur des tubercules du so- /rtWMm est de plus de moitié, ou i.5,8ookil. La même superficie de terrain produirait donc généralement en pommes de terre deux fois autant de nourriture pour les chevaux que si elle était cultivée en divers fourrages. Les avantages de ces tubercules sur l'avoine seraient plus grands encore, ainsi que nous l'avons vu dans le paragraphe IV. PARAGRAPHE XXVIL Nourriture et engraissement de divers bestiaux avec la pomme de ten^e et la farine de ce tubercule. Lorsque Parmentier et M. Cadet-de-Vaux commencèrent leurs nombreux et utiles essais sur les pommes de terre, ces tubercule» , dédaignés des riches et des pauvres , ne servaient pas même de nourriture aux animaux domestiques, si ce n'est au porc lui seul : c'était, pour ce temps, une preuve de plus de la gloutonnerie de cet animal. On donne généralement encore aujourd'hui aux porcs les pommes de terre crues, lavées, coupées par quartiers, et mêlées avec les eaux de lavages des vaisselles, le petit-lait, une partie du caille , du lait de beurre, etc. Cette manière est (79) cependant reconnue moins profitable que celle qui consiste à faire cuire les tubercules clans l'eau ou h la vapeur les écraser grossièrement, les délayer dans les dlfférens liquides e. dessus énumérés. et donner ce mélange encore chaud. De quelque manière que l'on ait nourri un porc, ce n'est pas avec des pommes de terre crues ou cultes que l'on peut engraisser convenablement. On y réussit, au contraire très-b.en en re- duisant les pommes de terre en farine, et délayant celle-c. comme on le fait habiluellement des recoupes, tannes, re- moulages, etc. Ou conçoit que pour cet emploi , û est mutile de séparer, à l'aide de blulteaux ou tamis de diverses gros- seurs, la semoule, le gruau , la farine; d suffit de moudre la pâle de pommes de terre , desséchée par les moyens que nous avons indiqués paragraphe XVII , et de substituer le produit tout entier de cette nourriture aux farines , recoupes , etc. , ordinairement employées. Ici on emploiera la substance nu- iHlive tout entière do la pomme de terre; et 1 on peut voir, dans le paragraphe IV , de combien elle excède la quantité qu'en fournissent les céréales h surface égale de terrain. Enorah du bœuf. - H est Important de choisu- une nour- riture^convenable lorsque l'on veut engraisser des bœufs , afin d'abréc^er le temps où ils sont, pour cet objet, nourris .ans travailler: on les prépare fortblen en leurdonnant même, pendant le temps du travail , les marcs de la pulpe exprimée Ses betteraves dans les fabriques de sucre mdigeue; mais celte pratique ne peut acquérir une grande extension tant nue les fabriques de ce genre ne seront pas plus multipliées. Dans les premiers mois qui suivent l'arrachage des pommes déterre, on peut employer utilen.ont -«/"^^^f ^^,^/;: gralsser les bœufs; mais la conservation de cet ahment ne peut être suffisante pour qu'il serve toute l année ; et, brs- qu'il manque, le gruau de la pomme de terre desséchée, moins coûteux que tous les grains, y supplée avec des avan- la02 ) fiaos , forme des gelées qui conviennent aux personnes dont la poitrine est faible. Il est très-facile de faire cuire la fécule dans le lait ou le bouillon; il suffit, en effets de la délayer, dans ces liquides, à froid , puis de porter ce mélange à l'ébullition , que l'on soutient pendant quelques minutes; il est important de porter la coction à ce point, afin que tous les tégumens , dont chaque grain de fécule est enveloppé , soient crevés , et permettent à la substance intérieure d'être attaquée par les agens de la di- gestion. (Voyez, dans le dernier paragraphe, la contcxlurc physique des fécules observées au microscope ). On vend , dans le commerce , plusieurs fécules extraites de végétaux exotiques, dont on vante beaucoup les propriétés alimentaires, et dont le prix est fort élevé, si on le compare h la valeur de la fécule de pommes de terre; cependant celle-ci n'en diffère que par l'odeur , excessivement légère , que déve- loppe chacune d'elles; souvent même ces fécules, tirées de l'étranger , sont falsifiées , avec l'amidon, des céréales ou des tubercules du solanum tuberosum ; et les personnes qui croient devoir accorder la préférence aux fécules étrangères, ne reconnaissent pas ce mélange. Nous répétons ici fjne l'action de toutes ces fécules, sur l'économie animale, est absolument la même; il serait donc plus raisonnable défaire usage de la fécule qui se vend à meilleur marché. PARAGRAPHE XL. Préparation d'une sorte de tapioka de pomme de terre. On sait que le tapioka, préparé avec la fécule du manioc {jatropha manihot), est réduit, par la chaleur, en une sorte de pâte épaisse que l'on divise en grains informes et que l'on fait dessécher. La coction, dans ce cas, est utile pour faire volatiliser un principe acre, vénéneux, dont la présence ex- (.05) cluerait l'emploi de celle fécule comme substance alimentaire. Ce produit exotique est recherché pour )a préparation des potages délicats, et comme aliment d'une facile digestion; on peut obtenir une substance semblable , et dont le goût diffère h peine avec la fécule des pommes de terre. Le procédé que l'on emploie pour cela est fort analogue à celui d'où résulte le tapioka , et cependant il paraît être du au hasard. En cherchant h faire dessécher, sur le feu, de la fécule humide , que l'on agitait avec une cuillère , on s'aperçut qu'elle s'agglomère en une masse pâteuse, demi-translucide, et qu'en continuant à remuer cette pâte, elle se divise en gru- ncaux informes; qu'enfin ceux-ci, desséchés lentement, of- frent la plus grande analogie avec le tapioka. On vend , dans le commerce , actuellement du tapioka de pommes de terre ainsi préparé; on réduit la fécule humide en pâte , dans une chaudière qui est échauffée graduellement; on la fait grumeler, à l'aide d'une spatule, en grumeaux, les plus petits possible; on étend ceux-ci sur des canevas de toiles, tendus sur des châssis que l'on dispose dans une éluve semblable à celle que nous avons décrite paragraphe XVII; lorsque la dessication est complète, on passe les grumeaux dans un gros tamis en toile métallique , afin de séparer les plus gros mor- ceaux; tout ce qui passe ressemble au tapioka de grosseur inégale. On peut le diviser en plusieurs produits qui ollVcnt chacun moins de variations dans leur grosseur, et soient plus faciles à faire cuire au point convenable, en tamisant ces ■ grumeaux, desséchés successivement, dans deux ou trois tamis graduellement plus serrés. Les plus gros grumeaux , séparés dans le premier tami- sage, peuvent être concassés au moulin, pour en faire du tapioka de différentes grosseurs ou réduit en farine. En réglant, à volonté, la mouture et les tamisages de la fécule cuite et desséchée , on prépare et l'on vend aujour- dhui, dans le commerce, divers produits employés , surtout ( '«4) dans la confection des potages , sous les noms de tapioka , sagou , riz , semoule, gruau ^ salep , etc. , de fécule. Nous ne nous étendrons pas davantage sur ces prépara- tions alimentaires obtenues de la fécule ; la plupart des détails donnés plus haut, relativement à la fabrication et aux emplois de la polenta , pouvant être appliqués h celles-ci , nous ren- verrons au paragraphe X\ II et suivans , où l'on trouvera le complément de ce qui nous resterait à dire ici. PARAGRAPHE XLI. Fabrication du sirop de fécule. La conversion de la fécule en sucre, indiquée d'abord par KirckofT, est restée long-temps un procédé de laboratoire, qu'en vain l'on a espéré porter au degré de perfection , qui était de produire une substance identique avec le sucre des cannes et des betteraves, ou seulement de remplacer ces produits dans leurs principaux emplois. Cependant l'utilité du sirop de pommes de terre est suffisamment établie dans d'autres applications, pour que l'on doive regarder cette nouvelle branche d'industrie comme très-importante, l'une de celles auxquelles la pomme de terre doit sa plus grande consommation. Les procédés de fabrication en grand ont été amenés à un tel état de simplicité et de promptitude, dans une fabrique que l'un de nous a dirigée pendant deux ans avec M. Cartier^ qu'il nous paraît dilTicile d'y apporter aujourd'hui aucune amélioration notable. Nous indiquerons louiefois les modifi- cations que nous croyons avantageuses , après avoir décrit le moyen de saccharification que nous avons employé avec le plus grand succès. ( io5) Fabrication du sirop avec la fccule sèche. Une chaudière en plomb épaîs de deux lignes , A , fig. 2 , pi. 1 , de cinq pieds de diamètre et trois de profondeur, est posée sur un disque bombé B,en lonte de fer, de 12 a i5 lignes d'épaisseur; le foyer est disposé dessous de manière à chauf- fer toute la surface de ce disque; des ouvreaux CG... laissent échapper les produits de la combustion qui se rendent dans la cheminée. Un couvercle D, en bois, solidement assemblé et doublé d'une feuille de cuivre rouge, est posé sur cette chaudière; il offre, près de ses bords, une ouverture E, de 12 à i5 pouces de diamètre ^ et une autre plus petite F , de G pouces de diamètre, recouverte à volonté par un disque mobile G, en bois, doublé de cuivre; un râble H, en bois, est introduit, dans la chaudière, par la grande ouverture. Les choses étant ainsi disposées , on introduit dans la chau- dière 1000 kilogrammes d'eau, que l'on porte à l'ébullition; alors on y ajoute i5 kilogrammes d'acide sulfurique, à 66° préalablement délayé dans 3o kilogrammes d'eau (1). On agite pour répartir également l'acide dans toute la masse, puis en attend que l'ébuUition se manifeste de nouveau; alors, le feu étant en pleine activité j un homme saisit le râble en bois , et commence à agiter toute la masse liquide d'un mouvement circulaire; un ouvrier, ou un enfant , ajoute, par cuillerées d'environ un demi- kilogramme chaque, qu'il verse par le petit trou du couvercle , toute la fécule (de 45o à 5oo kilo- grammes), en ayant le soin de ne pas trop se presser, afin (i) Lorsqu'on verse l'acide concentré clans l'eau , un échauffement plus ou moins considérable a lieu; afin d'éviter qu'il soit trop brusque, on met dans deux sceaux, ou dans un baquet, les 5o kilog. d'eau froide, puis on ajoute peu à peu l'acide, en agitant le liquide avec une spatule en bois. Lorsqu'en- suite on verse ce mélange dans la chaudière qui contient l'eau bouillante, il ne se produit plus aucun effet. ( loG) que la réaction s'opère à chaque addition , que l'ébullilioii ne cesse pas, el que le liquide ne devienne pas épais. L'addilion, ainsi graduée, permet à l'acide d'agir en grande quantité sur une très petite proportion de fécule ii-la-fois; la saccharificalion de chaque portion ajoutée s'opère en un ins- tant ; et, dès que la totalité est délayée dans la chaudière, l'opération est à-pcu-près terminée. Afin cependant d'éviter qu'une petite quantité d'amidon puisse rester inattaquée, et rendre le liquide visqueux, ou soutient encore rébuliition pendant huit ou dix minutes : toute la masse doit être alors diaphane, très-liquide; en en remplissant un verre à boire, on aperçoit à peine une teinte ombrée; on couvre alors la grille du foyer avec du charbon de terre bien mouillé, et o-a laisse la porte du foyer ouverte , afin que l'air froid du dehors , entraîné dans le courant où passaient les produits de la com- bustion ^ refroidisse un peu le fond et les parois de la chau- dière. Dès que l'ébullition a cessé , on commence à ajouter la craie pour saturer l'acide; il en faut h-peu près autant que d acide employé ; mais comme cette substance varie dans sa composition, surtout en raison de l'eau, de l'argile et du sable qu'elle renferme, on ne peut fixer de dosage certain, et il devient utile de reconnaître le degré de saturation , à l'aide d'un papier coloré en bleu, par la teinture du tourne- sol ; tant que le liquide contient un excès d'acide , une goutte , posée sur le papier, le fait virer au rouge; et, dès que tout l'acide est saturé , le liquide ne fait plus virer la couleur bleue du papier; et comme il vaut mieux qu'il y ait un excès de craie , il ne faut cesser d'en ajouter que lorsqu'une goutte du liquide, posée sur une tache rouge du papier tournesol ( Aiite par le liquide acide ) , ou sur un papier tournesol rougi à des- sein et d'avance, ramène la couleur au bleu. L'addilion de la craie ne doit être faite qu'avec beaucoup de précautions , et en très-petite quantité à-la-fois j car l'eller- ( 107) vescence , qui a lieu par le dégagement de l'acide carbonique , que l'acide sulfurique déplace en s'emparant de la chaux , pourrait faire monter en mousse une partie du liquide par- dessus les bords de la chaudière. A. chaque addition de craie , on agite toute la masse, et on attend quelques secondes que l'effervescence ait cessé pour faire une autre addilion. On peut mettre ainsi, à chaque fois, environ un demi-kilogramme de craie. Lorsquon a reconnu , aux caractères que nous avons indi- qués, que la saturation est complète, il faut séparer le sul- fate de chaux non dissous; pour cela on laisse déposer le liquide pendant environ une demi -heure, et, pendant ce temps, on prépare le filtre. Celui-ci se compose d'une caisse rectangulaire , en bois, doublée en plomb d'une ligne d'épais- seur , et percé au fond d'un Irou d'un pouce ou quinze lignes (le diamètre, dans lequel passe un bout de tuyau en plomb , soudé au fond du fdtre ; on pose sur le fond un grillage en bois , formé d'un châssis d'un pouce en tous sens , moins grand que l'intérieur du fdtre ^ et qui reçoit dans des entailles des tringles en bois , écartées de six lignes et épaisses d'un pouce environ. On étend sur le grillage une toile très- claire, quoique forte , et , par-dessus , un drap de laine , connu dans le commerce sous le nom de drap romorantin ; la toile et le drap étant plus larges et plus longs que le grillage , de trois ou quatre pouces en tous sens , on replie les bords et on les serre entre le châssis et les parois en plomb du fdtre. Les choses éîant ainsi disposées , et le liquide déposé dans la chaudière, on emplit un siphon en cuivre avec de l'eau-; puis on le retourne dans la chaudière , et à l'aide d'un en- tounoir à douille sur le côté , et d'un tuyau placé sur le filtre , le liquide, tiré par le siphon , coule dans l'entonnoir , et de là dans le filtre; il passe au travers du ùrap et de la toile, sur lesquels il laisse les parties insolubles qu'il charrie , et se rend enlin dans un réservoir placé sous le filtre. Les premières por- (io8) lions ainsi filtrées sont ordinairement troubles; on peut les reccToîr dans un sceau afin de les rejeter sur le filtre. Lorsque le siphon a ùvt écouler tout le liquide surnageant et atteint le dépôt, celui-ci s'engorge bientôt; on le retire alors ; on enlève tout le dépôt au moyen d'une cuiller large et profonde ; on le met dans des sceaux , puis on le porte sur le fdtre; on rince la chaudière avec un ou deux seaux d'eau , que l'on relire à l'aide de la cuiller et d'une grosse éponge , pour les jeter encore sur le filtre. On remplit alors la chau- dière d'eau , à la hauteur accoutumée; on soulève la croûte de charbon mouillé formée sur le foyer; on ferme la porte , et bientôt le feu s'allume avec activité. Dès que l'eau est pres- que bouillante , on en puise, dans un arrosoir, pour verser, en pluie , sur le marc resté dans le filtre; on remet de l'eau froide dans la chaudière. Si la cheminée de la chaudière est disposée de manière à passer sous un bassin en cuivre mince, comme le montre la figure, celui-ci entretient la température de l'eau que l'on y met h un degré assez élevé pour le lavage du dépôt resté sur la fihre. La chaudière étant remplie de manière h contenir les i ,000 kilogrammes d'eau environ, et celle-ci étant bouillante, on recommence une autre opération, qui se fait comme la pre- mière; on peut aisément achever ainsi cinq cuites dans les vingt-quatre heures, avec des hommes qui se relèvent, en sorte que l'on emploie 2,25o h 2,5oo kilogrammes de fécule sèche. Le liquide filtré est porté dans une chaudière peu profonde, où on le fait évaporer rapidement , jusqu'à ce qu'il soit réduit à-peu-près à la moitié de son volume ; il doit alors marquer, h l'aréomètre de Beaumé, 25 h 28 degrés; ony ajoute du charbon animal le vingtième du poids de la fécule employée; on agite bien toute la masse pendant quelques minutes; on projette dedans du sang battu dans l'eau; on suspend l'agitation; et, ( i«9 ) (lès que l'ébullillon se uianifesle vivement de nouveau, on lire tout le liquide , à l'aide d'un robinet placé au fond de la chau- dière , dans un fdtre semblable à celui que nous avons décrit , plus haut, dans ce paragraphe. Les premières parties du li- quide fillré passent troubles; on les recueille dans un seau ou une large cuiller , et on le reverse sur le filtre; on se hâte de recouvrir ce filtre, ou plutôt on l'a recouvert d'avance, avec des volets en planches, qui sont enveloppés de couver- tures de laine , afin d'éviter un trop grand refroidissement qui , rendant le sirop moins fluide , retarderait la filtration. Lorsque le sirop est presqu'eutièrement écoulé, et que le dépôt , resté sur le filtre , paraît à sec, on arrose celui-ci avec de l'eau chaude, afin d'extraire le sucre qu'il retient; il f\uit verser peu d'eau à-la-fois , et renouveler fréquemment cette addition , jusqu'à ce que le liquide filtré ne marque plus qu'un demi-degré à l'aréomètre. Alors on jette dehors le marc épuisé ; on lave le drap de laine et la toile que l'on remet en place pour une autre clarification. Les eaux faibles du lavage du marc, depuis 4" jusqu'à 1/2 ou 0° , sont réservées pour commencer l'épuisement d'un autre dépôt; on ne les fait évaporer direc- tement que lorsqu'on suspend les travaux , et que , par consé- quent , il n'y aurait plus de marcs à épuiser. PARAGRAPHE XLIL Fabrication du sucre cCamidon avec la fécule humide et la -pâte ou la pulpe de pommes de terre. THÉORIE DE l'opÉUATION. Lorsqu'on prépare, dans le même établissement, le sirop et la fécule , on peut se dispenser de faire dessécher celle-ci , et l'employer telle qu'on l'obtient en dépôt au fond des vases où on la recueille. Il faut la délayer dans son volume d'eau à-peu-près , et l'ajouter dans la chaudière , qui contient le ( »io) mélange bouillant d'eau et d'acide, par portions assez petites pour ne pas arrêter l'ébullilion. On doit de plus avoir soiir d'agiter continuellement la l'écule , délayée dans les inter- valles de temps entre chaque addition; sans cette précaution, la fécule se séparerait du liquide en un dépôt très-consistant que l'on aurait peine à remettre en suspension dans l'eau. Le refroidissement, que chaque addition produit dans la chau- dière, étant plus fort que lorsqu'on fait usage de la fécule desséchée , l'opération est, en général , plus longue à se ter- miner, quoique l'on active le feu le plus possible. On parvien- drait, sans doute, à saccharifier la fécule humide, aussi promptement que la fécule sèche, au moyen de l'appareil à tapeur forcée que nous indiquerons dans le paragraphe suivant. On peut rendre la préparation du sirop d'amidon plus éco- nomique encore, en traitant directement la pomme de terre cuite et réduite en bouillie, et ajoutant cette matière, toute chaude, par cuillerées, dans le mélange bouillant d'eau et d'acide. Le sirop , que l'on obtient en adoptant cette modifi- cation, et suivant, du reste, tout le procédé indiqué dans le paragraphe précédent, contracte un goût désagréable, causé surtout par la réaction de la chaleur et de l'acide sur l'albumine végétale. Ce mauvais goût influe peu sur celui do l'alcool préparé avec ce sirop ; mais il ne permettrait pas d'em- ployer, à d'autres usages indiqués plus loin , le sucre d'amidon. On arrive encore aux mêmes résultats, en substituant , à la fécule , la pulpe de pommes de terre. Ce mode d'opérer est h-peu-près aussi économique que le précédent. Cent parties d'amidon sec , suivant M. Théodore de Saus- sure, produisent iio, i4 de sucre sec; on obtient, par un travail en grand, de loo kilogrammes de fécule sèche (rete- nant toujours une petite quantité d'eau hygrométrique) , ou de i5o kilogrammes de fécule humide, 'dite fcciile verte, i5o kilogrammes de sirop, à 5o degrés Beaumé, qui représen- tent 100 kilogrammes de sucre sec. (■") Si l'on préparait, en grand, du sirop à un degré plus élevé (unfe densité plus grande) que 3o de l'aréomètre Beaumé; qu'on le portât, par exemple, jusqu'à 4^, il pourrait, en cristalli- sant dans les tonneaux où on le mettrait pour l'expédier, briser les fûts par la dilatation que le nouvel arrangement des molé- cules détermine. Cet effet, contraire h celui que l'on observe dans la cristallisation du sucre de canne et de betteraves, est analogue à ce qui se passe dans la solidification de l'eau par la gelée. THÉORIE DE LA. FABRICATION DU SIROP DE FÉCULE. La première partie de cette opération consiste dans la con- version de V amidon en sucre ; la théorie de ce phénomène n'est pas encore bien démontrée. Voici, au reste, ce qu'on sait de plus positif à cet égard: Fourcroy avait reconnu que l'amidon était formé de grains arrondis, que l'on a depuis, mais à tort, supposés être des cristaux anguleux. Tout récemment, M. Raspail a observé (Voyez un extrait de son Mémoire à la fin de ce Traité) que ces grains sont recouverts d'une enveloppe mince, peu alté- Lorsque la fécule est échauffée dans l'eau, les grains se rable, différente de la matière g'o/mncuse qu'elle renferme, etc. dilatent, la substance intérieure se fait jour au travers du tégument, elle se répand dans le liquide; l'acide sulfurique , en augmentant sa fluidité , favorise sa combinaison avec l'oxi- gène et l'hydrogène , dans les proportions qui constituent l'eau , et il en résulte une substance sucrée soluble dans l'eau , à chaud et à froid , des tégumens insolubles disséminés dans le liquide , et l'acide sulfurique reste dissous sans altération. La craie (carbonate de chaux) que l'on ajoute lorsque la saccharification est complète , cède son oxide ( oxide de cal- cium , chaux ) h l'acide sulfurique ; il en résulte du sulfate de chaux, peu soluble, qui se précipite, en grande partie , avec (,,2) l'excès de carbonale de chaux , au fond de la chaudière , et de l'acide carbonique qui se dégage, sous forme gazeuse, en pro- duisant une forte efl'ervescence. En portant le mélange liquide , ensuite le dépôt sur le fdtre , la solution de sucre passe limpide au travers des tissus , entraînant une certaine quantité de sulfate de chaux dissous; la plus grande partie de ce sulfate , les tégumens de l'amidon et l'excès de carbonate de chaux, restent sur le filtre. Ces sub- stances solides retiennent une assez grande quantité de liquide sucré dont on les dépouille au moyen des lavages à l'eau chaude. L'évaporation concentre le sirop, et détermine la précipi- tation de la plus grande partie du sulfate de chaux resté dans la liqueur. Cette précipitation est favorisée par le charbon animal que l'on ajoute, et qui enlève, en même temps, une partie de la matière colorante (i) et une partie du goût nau- séabond du sirop. Enfin l'albumine étendue (sang ou œufs battus) que l'on délaie promplement, se répand dans tout le liquide, se resserre par la coagulation que la chaleur détermine, et agglomère ainsi les parties les plus tenues du charbon animal, en sorte que celles-ci ne peuvent plus , en s'engageant dans l'épaisseur du tissu, obstruer le filtre ni passer au travers, et laissent écouler le sirop limpide. -I — — — — - — — — ■ — (i) La substance colorante paraît être due à la caramélisation d'une petite quantité de sucre d'amidon, par le concours de la chaleur et l'acide. Du moins il est certain que si l'on continue l'ébuUition après l'addition de l'acide sull'u- rique , et avant d'ajouter la craie pour saturer cet acide, la liqueur se colore de plus en plus en jaune fauve, tandis que si l'on se hâte de saturer l'acide dès que la sacchariCcation est opérée , puis de filtrer , on obtient un sirop presque incolore. (i'3) PARAGRAPHE XLIII. Propriétés du sucre de fécule; ses emplois. Si l'on rapproche le sirop de fécule jusqu'à 45 degrés de l'aréomètre Beaumé , à 12 ou 1 5 degrés de température, ce sirop se prendra, par le refroidissement, en une masse grenue, blanche , opaque , sans formes cristallines prononcées. Cette substance est insoluble dans l'alcool ; elle se dissout dans l'eau froide et dans l'eau chaude; sa solution bouillante, marquant 54 degrés , tenue dans un endroit dont la température ne s'é- lève pas au-delà de 10 degrés, dépose lentement une partie de la matière sucrée blanche. La solution, étendue d'une quan- tité d'eau , telle qu'elle marque seulement de 5 à 10 degrés, et mise , à la température de 20 ou 20 degrés , en contact avec de la levure , ne tarde pas à fermenter à produire de l'alcool et à dégager de l'acide carboniquejla température étant entre- tenue au même degré pendant quelques jours, la totalité du sucre se convertit en alcool. Celui-ci est susceptible de se trans- former en acide acétique. Deux fabrications importantes, celles de Ceau-de-vie de fécule et du vinaigre ^ propres aux arts, sont fondées sur ces propriétés du sucre d'amidon. Emploi du sucre et du sirop de fécule. On a , pendant long-temps , cherché les moyens d'obtenir le sucre d'amidon , sous k forme du sucre de cannes , en pains ou en cristaux prononcés j mais toutes les tentatives faites dans ee but ont été infructueuses jusqu'à ce jour; non-seulement la forme, mais encore la saveur beaucoup moins sucrée du sucre d'amidon, n'ont pas permis de le substituer au sucre de Varundosaccliari fera ou des betteraves. Cependant la cupidité a fait de ce sucre un objet de fraude : dciséché et réduit eu poudre , on l'a mélangé , en diverses portions , avec les casso- 8 nades du commerce , <;t l'on est parvenu ainsi à tromper dou- blement l'acheleur, puisqu'on lui vendait plus clier une denrc(î dont l'apparence était plus belle , en raison de !a blancheur du sucre d'amidon; mais dont la qualité était moindre que celle de la cassonade ainsi altérée. Cette fraude fut, au reste, bien- tôt décélée par la différence , facile à reconnaître ^ entre la saveur de la cassonade ordinaire et celle de la cassonade mélangée. L'emploi le plus important en sirop de fécule est dans la fabrication de l'alcool ; nous donnerons , plus loin , des détails sur cctle fabrication : on fait aussi un assez grand usage de ce sirop pour lu préparation du vinaigre blanc, dont nous par- lerons également plus loin. Lorsque l'orge et les autres graines céréales sont h un prix un peu élevé, l'emploi du sirop de fécule présente des avan- tages marqués aux brasseurs. C'est surtout à celte destination que fut appliqué le sirop de pommes de terre que M. Cartier , et l'un de nous, préparèrent pendant plusieurs années. Pour faire entrer le sirop de fécule dans la composition de la bière, il suffit de l'étendre d'eau jusqu'à ce que la solution ne marque pas plus de 5 degrés h l'aréomètre Beaumé , et à 12 ou i5° de température, puis d'employer cette solution pour préparer la décoction de houblon de la môme manière qu'on le fait habituellement avec le moût obtenu par les trempes de l'orge germée. Il est utile, afin de conserver à la bière le goût auquel les consommateurs s'habituent, de sub- stituer d'abord le sirop de fécule seulement à un dixième de l'orge employée ordinairement, puis d'augmenter graduelle- ment la proportion de ce sirop, jusqu'à ce qu'elle ait atteint la moitié de la quantité d'orge. On pourrait, sans doute, lorsque le miel et la mélasse sont chers , substituer à ces substances le sirop de fécule dans la fabrication du pain d'épice, et peut être aussi dans la nourri- ture que l'on donne pendant l'hiver aux mouches à miel. (ïi5) Le sirop de fécule a été appliqué par M. Pnycu , avec succès et une économie marquée à la préparation d'un cirage pour les diaussures. Dans cette opération, que l'on a décrite plus loin, l'acide sulfurique, employé h la sacchariiication, est encore ulile pour réagir sur le noir d'ivoire. PARAGRAPHE XLIV. Emploi des résidus de la fabrication du sirop de pommes de terre. On obtient deux sortes de résidus en préparant le sucre d'amidon par les procédés que nous avons indiqués : l'un se compose de sulfate de chaux pour la plus grande partie , d'un peu de sous-carbonate de chaux , des tégumens de la fécule , et des dernières portions de sirop que les lavages n'ont pi'i enlever ; l'autre est formé de charbon animal , d'albumine , de sulfate de chaux, et d'une petite quantité de solution sucrée rcitée malgré les lavages. Ces deux, résidus , et le second surtout , forment d'excellcns engrais : desséchés spontanément et répandus en petite quan- tité sur les prairies artificielles, ils activent puissamment la végétation. Lorsque, dans la fabrication du sirop, l'on a employé les tubercules cuits et délayés, ou la pulpe tout en- tière, le premier résidu, renfermant une grande partie de Talbumine végétale , constitue un meilleur engrais que celui qui résulte du traitement de la fécule isolée. Dans une locaUté où le charbon animal coûterait très-cher, on pourrait trouver de l'avantage à le faire servir deux fois;' et, pour cela , il suffirait de le calciner au rouge cerise , dans des vases clos , et de le broyer ensuite dans un moulin à farine. Cette sorte de reviviflcation ne rend pas au charbon animal toute sa vertu première; aussi faut-il en employer en- viron un quart An plus que la première fois pour produire le même effet. (u6) PARAGRAPHE XLV. Prùparation d'un cirage pour les chaussures. On fait usage de plusieurs compositions, dites cirages, pour noircir les chaussures et leur donner une sorte de vernis brillant; l'un des cirages qui s'est le plus employé, se prépa- rait avec du noir de fumée, délayé en pâte, avec une pelile quantité d'alcool, puis battue vivement avec des blancs d'œufs; on l'employait en l'étendant en une seule couche sur la chaus- sure , h l'aide d'un pinceau , et le laissant sécher spontanément. Ce cirage, peu coûteux, d'une préparation et d'un usage fa- ciles, oflrait quelques inconvéniens qui l'ont fait abandonner presque généralement : une grande sécheresse le faisait écailler dans tous les plis du cuir; une petite quantité d'eau ou l'humi- dité le détrempaient, et le plus léger frottement suffisait pour le faire détacher. Depuis plusieurs années on a substitué à l'ancien cirage aux œufs une composition à la préparation de laquelle on emploie du noir d'ivoire, de la mélasse, de l'acide sulfurique, de l'acide hydrochlorique ; du vinaigre , de la gomme de pays , do l'huile de lin ou d'olive. Pour lui donner une odeur agréable, on ajoute ordinairement une petite quantité d'une huile essentielle aromatique. En Angleterre et en France, la préparation de ce cirage forme une branche d'industrie assez importante, la force de la machine à vapeur y est appliquée. M. Payen a indiqué , il y a plusieurs années, un procédé économique pour obtenir un cirage semblable; on le trouve décrit dans le 5' volume du Dictionnaire technologique , d'où nous avons extrait les dé- tails qui suivent. Les avantages de ce procédé consistent surtout h remplacer la mélasse et la gomme par la fécule de pommes de terre , ou les tubercules eux-mêmes saccharifiés par l'acide sulfurique. ("7) Voici les ingrédiens qui entrent dans sa composition , et leurs proporlions relatives : Noir d'ivoire (i), 35oo grammes. Fécule sèche. 35oo id. ou i4 kil. de pommes de terre. Acide sulfurique à 66» ou i845 de poids spéciGque, 4^o grammes. Acide hydrochlorique du commerce , 45o grammes. Vinaigre ou acide acétique faible, 1700 grammes. Huile de lin ou d'olives , aoo grammes. On délaie la fécule ou la pomme de terre cuite el écrasée dans de l'eau tiède (à 45 degrés environ) , puis on la verse peu 5 peu , et par petites portions ajoutées successivcmenl , dans l'acide sulfurique étendu de dix fois son poids d'eau , en ayant soin de ne pas arrêter l'ébullilion , et d'agiter conli-' nuellenient tout le liquide. Deux ou trois minutes après que la dernière addition a été faite , l'amidon est complètement sac- charifié; il faut enlever la bassine de dessus le feu, afin d'évi- ter que le sucre formé se caramélise, on laisse refroidir; et, pendant ce temps , on délaie le noir d'ivoire dans l'eau ; on y ajoute peu à peu l'acide muriatique, en remuant avec une spa- tule en bois; on verse ensuite peu à peu toute la liqueur sucrée, acide, ensuite le vinaigre et l'huile d'olives; enfin on complète avec de l'eau le volume de 17 litres , ce qui produit 70 bouteilles de cirage d'un quart de litre chaque. Il faut bien agiter le mélange au moment de le mettre en bouteilles , afin que les parties de densités différentes ne se séparent pas , et secouer vivement, pour la même raison, la bouteille au mo- ment d'en faire usage. Le cirage , que l'on doit expédier au loin , ou qui peut rester long-temps dans les boutiques des marchands , est susceptible d'entrer en fermentation; et la grande quantité d'acide carbo- (1) On Jonuc ce nom dans le commerce au charbon d'os choisis, broyé à l'eau. ( ii8 ) nique , qui se développe pendant la conversion de la mariète sucrée en alcool, détermine par fois , dans les bouteilles , une pression capable de les faire casser, ou, lorsqu'on les dé- bouche, de faire projeter au-dehors une grande partie du cirage devenu mousseux : on se fait aisément une idée de ce que peuvent avoir de désagréable de semblables accidens. Pour les prévenir, il suffit de porter à l'ébullition , soutenue pendant i5 h 20 minutes , les bouteilles bouchées et remplies seulement aux neuf dixièmes de leur capacité. Suivant le pro- cédé de conservation de M. Appert, on atteindrait proba- blement le môme but en mêlant au cirage une petite quantité d'acide sulfureux. La composition dont nous venons de donner la recette , étendue sur le cuir en couches minces, et frottée, encore humide, avec une brosse un peu rude, acquiert une sorte de poli brillant et d'un beau noir; elle adhère fortement au cuir, et n'est pas enlevée par le frottement, même à l'air humide ; elle ne s'écaille pas h l'air sec, même dans les plis des chaussures. L'acide hydrochlorique , employé dans la prépa- ration , forme un sel déliquescent qui, attirant l'humidité de l'air, entretient la souplesse du cuir, et évite l'apparence terne qui résulterait de la présence du sulfate de chaux seul. PARAGRAPHE XLVL Fabrication de Ceau-dc-vte de pom??ies de terre. Depuis long- temps on sait que les pommes de terre cuites , réduites en bouillie et mises à chaud , en contact avec de i'or"-e germée et concassée, sont susceptibles de fermenter et de donner une grande quantité d'alcool. Ces résultats ont été fournis par la pratique de la fabrication en grand de l'eau-de- vie de pommes de terre. La théorie cependant était en défaut pour expliquer ces faits constans; puisqu'en eflet , parmi les ( '<)) principes immédiats que l'analyse chimique est parvenue ii extraire des végétaux , le sucre seul a la propriété de subir la lermcnlation alcoolique, et que , dans la pomme de terre , on n'a pas rencontré celte substance. M. KircholT, chimiste de Saint-Pétersbourg , démonlre que la réaction du gluten sur la fécule convertit celle-ci , h l'aide de la chaleur, en une substance soluble, sucrée, suscep- tible de subir, par son mélange avec la levure, la fermentation alcoolique; dès-lors il fut facile d'expliquer la formation de l'alcool dans l'ojjération des distillateurs de pommes de terre ; on reconnut qu'il se formait d'abord du sucre aux dépens de la fécule , et que la réaction de la levure produit ensuite l'alcofd. Nous donnerons plus loin quelques détails sur cette dernière réaction , sur ses produits et sur les moyens de la favoriser. Saccliarificatlon de la pomme de terre. — Cette opération , qui doit précéder la mise en fermentation , se fait de la ma- nière suivante : Après avoir fait cuire à la vapeur et réduit en bouillie les tubercules, lavez préalablement le tout par les procédés écono- miques que nous avons décrits dans le paragraphe XVI . On dépose cette bouillie, encore toute chaude , à 35 ou 4o de- grés, dans une cuve d'une contenance de j4 hectolitres en- viron, si l'on veut obtenir 12 hectolitres de bouillie disposés à la fermentation : c'est le produit de l\0o kilogrammes de tubercules. On ajoutera à cette bouillie 2 5 kilogrammes d'orge raaltée. On brasse alors fortement ce mélange , à l'aide d'iui rable en bois ; on laisse en repos pendant 20 à 3o minutes ; puis , pendant que deux hommes recommencent à brasser for- tement , on fait arriver un courant d'eau bouillante jusqu'à ce que le mélange soit h une température de 5o 5 55 degrés. On laisse la macération s'opérer spontanément , pendant deux ou trois heures, en tenant la cuve couverte; alors on com- plète le volume total de 12 hectolitres, avec une quantité d'eau nécessaire, à un degré tel que toute la masse soit au { 120 ) degré de température convenable pour la fermentation , c'est- à-dire à 95 degrés environ. On ajoute alors deux litres de levure épaisse , et la plus fraîche possible; la fermentation commence quelques heures après , et continue avec une activité que l'on soutient , en entretenant, dans le lieu où elle s'opère, une température égale, etc. En suivant ce procédé, on ne parvient pas, de prime abord , à saccharifier complètement toute la fécule ; on remarque , en effet , à peine un léger changement dans la saveur devenue seulement un peu plus douce, de la bouillie de pommes de terre , et son aspect reste le même. La saccharification con- tinue 5 s'opérera une température plus basse, eu même temps que les parties, déjà converties en sucre, subissent la fer- mentation alcoolique; aussi la conversion en sucre, et par suite en alcool, restent -elles incomplètes. On trouvera faci- lement la cause qui empêche l'amidon , dans la pomme de terre cuite, d'être promptement attaqué par les agens de la saccharification, en se rappelant que chaque grain de cette fécule est enveloppé d'un tégument solide, que celui-ci résiste, dans les tubercules entiers, à l'action de la chaleur, en raison de l'albumine végétale qui se coagulejet le resserre par la même action du calorique (i). Outre les inconvéniens attachés au procédé , fort simple du reste, que nous venons de décrire, se joignent tous ceux qui, (i) C'est peut-être en dissolvant ou diminuant la cohésion de l'albumine végétale , que la potasse est employée avec uu grand succès par monsieur Sie- incn, de Copenhague, agit utilement dans la préparation de la bouillie des pommes de terre , pour la conversion en alcool. Ce procédé consiste tout simplement dans l'addition d'un milième environ de potasse caustique dans les tubercules cuits , au moment de leur réduction en bouillie : cette addition parait singulièrement favoriser la sacchariBcation et la fermentation alcoolique ; celle-ci est bien plus vive, et produit une grande quantité de levure conve- nable pour les i'ermcntatioDS suivantes , et dont on peut vendre la plus grande partie qni se trouve en excès. ( 1^1 ) comme on le sait , sont inhérens h. la distillation des substances pâteuses. La Société royale d'Agriculture de Paris a reconnu l'importance des modifications apportées à ce procédé par ]M. Dubrunfaut, sans nuire h la simplicité et à l'économie qu'exigent les opérations de l'industrie agricole. Ce sera du Mémoire couronné par cette Société, que nous extrairons les dé- tails de ces modifications indiquées dans le paragraphe sui- vant. PARAGRAPHE XLVII. Saccharification de la pulpe de pommes de terre. Après avoir déchiré les tubercules au moyen de la râpe de Burette, décrite dans le paragraphe XVII, on place cette pulpe sur un lit de paille , maintenu sur un double fond percé de trous, d'une cuve semblable à celles dont les brasseurs font usage pour la trempe de leurs grains. La cuve doit être d'une contenance de huit à neuf hecto- litres , pour que l'on y puisse faire macérer la pulpe d'environ 4oo kilogrammes de tubercules : une partie de l'eau de végé- tation des pommes de terre s'égoutte spontanément; elle se rassemble entre les deux fonds; on la soutire à l'aide d'un robinet. Après une demi-heure ou une heure d'égouttage, on ferme le robinet; deux ouvriers s'arment chacun d'un rable en bois, et brassent fortement toute la masse , tandis que l'on fait arriver un courant d'eau bouillante par-dessus la pulpe. On ajoute ainsi environ 5oo litres d'eau, et toute la masse doit être épaissie en une sorte de gelée que forme l'amidon converti en empois. On ajoute alors environ 25 kilogrammes d'orge germée , réduite en farine , que l'on répartit , le plus également possible, dans toute la masse, en agitant le mé- lange dans tous les sens ; puis on laisse la macération s'opérer pendant trois ou quatre heures, en maintenant la cuve cou-- verte. f 1^2 ) Après celte macération, la plus grande partie de l'empois, converti en substance sucrée , est devenue fluide; on soutire tout le liquide qui peut s'écouler, en filtrant, sur le double fond; on conduit ce liquide dans la cuve à fermentation; on fait couler dans la cuve à double fond environ deux hectolitres d'eau bouillante; on brasse fortement; on laisse en repos pendant un quart-d'heure, et l'on soutire, comme la pre- mière fois, le liquide pour le conduire encore dans la cuve à fermentation. Alors, afin d'achever d'épuiser le marc de pulpe resté sur le fond de la cuve , et de refroidir toute la masse saccharifiée au degré convenable à la fermentation, on continue la filtra- lion en faisant arriver de l'eau froide sur le marc. En opérant de cette manière, on épuise la pulpe de la plus grande quantité du liquide sucré dont elle était imprégnée; il peut cependant être avantageux de rendre son épuisement plus complet; en la soumettant à l'action d'une forte presse, le marc comprimé est plus propre à la nourriture des bestiaux, et l'on lire parti du liquide qui en sort en le joignant au moût et aux eaux de lavages dans la cuve à fermentation. Tous les liquides, réunis et mélangés, doivent marquer environ 5 degrés à l'aréomètre de Beaumé , et la température de ce mélange être à 25 ou 3o degrés. On peut alors mettre en levain en ajoutant environ deux litres de levure fraîche. PARAGRAPHE XLVIIL Saccharlficaiion de la fécule. Cette seconde modification du procédé de M. Dubrunfaut s'opère de la manière suivante : On pèse 8o à 85 kilogrammes de fécule sèche, ou 120 à 127 kilogrammes de fécule égou liée; on met la fécule dans une cuve d'une contenance d'environ 12 hectolitres; on la délaie avec environ deux fois son poids d'eau froide, en ayant soin ( 1^3 ) d'jigiter constamment le mélange, afin d'éviter que la fécule se dépose et devienne bientôt tellement compacte qu'il serait assez pénible de la délayer de nouveau. Pendant que la fécule est ainsi tenue en suspension dans l'eau , à froid , on fait arriver , par un fdet peu abondant, cinq h six cents litres d'eau bouillante. Toute la masse s'épaissit par degrés; et avant que la totalité de l'eau bouillante ait été versée, le mélange a déjà pris l'aspect gélatineux , opalin, que l'on connaît à l'empois d'amidon ; il devient bientôt sensible- ment plus clair. On ajoute alors 20 à 20 kilogrammes d'orge maltée et moulue fine , et l'on brasse bien toute la masse. Lorsque le mélange est opéré , ce qui exige environ dix mi nutes , la liqueur est devenue presque limpide. On laisse en repos pendant trois ou quatre heures ; à cette époque de l'opé- ration , le liquide a contracté un goût sensiblement sucré; on ajoute une quantité d'eau suffisante pour compléter onze cents kilogrammes, et la température de ce moût étant à 22 ou 20 degrés , et sa densité représentée par 5 degrés de l'aréomètre de Beaumé , on y ajoute un litre de bonne levure fraîche, délayé dans quatre litres d'eau froide; on brasse fortement, et on laisse la fermentation se développer, en la favorisant par les soins que nous détaillerons plus loin. Le mode de saccharification que nous venons d'exposer, et celui qui précède, sont bien supérieurs aux anciens procédés de fermentation des tubercules , et même 5 la trempe des pommes de terre cuites à la vapeur : en effet , ils donnent des produits plus abondans sans exiger plus de frais , évitent les dépôts dans la cucurbite , et, par suite, de l'alcool exempt de goût d'empyreume. (.24) PARAGRAPHE XLIX. Fermentation et distillation du moût de pommes de terre. Dans les paragraphes précédens nous avons indiqué plu- sieurs moyens de prédisposer la pomme de terre ou sa fécule à la fermentation ; tous se réduisent à convertir la plus grande partie de l'amidon en substance sucrée. Cette opération préli- minaire est d'une grande importance , puisque la fécule ne peut immédiatement développer la fermentation alcoolique, tandis que le sucre subit directement toutes les périodes de la fermentation qui produit l'alcool. De quelque manière . au reste, que l'on ait saccharilié la pomme de terre ou la fécule , pour mettre le liquide sucré obtenu dans les circonstances les plus favorables à la production de l'alcool , il faut suivre la même marche. On étend d'eau jusqu'à ce que le liquide marque 5 h 6 de- grés à l'aréomètre de Bcaumé; il faut que la température du liquide soit à 22 ou «5 degrés . et celle du lieu où la fermen- tation doit s'opérer, entretenue constamment au même degré ,• de plus, les cuves doivent être garanties par tous les moyens possibles de refroidissemens partiels, et, pour cela, on les enveloppe de chiffons de laine ; on évite qu'il s'établisse des courans d'air dans l'étuve; et pour que l'air atmosphérique ne s'introduise pas en grande masse lorsqu'on entre dans cette pièce , on y place des doubles portes. Aussitôt que l'on a mis la quantité d'eau utile au degré convenable, et que le mélange est opéré à l'aide de quelques coups de rable, on délaie, pour mille à onze cents litres de liquide à fermenter, un litre de levure comprimée, fraîche, dans trois à quatre litres d'eau ; on verse dans la cuve , et l'on brasse fortement pendant quelques minutes ; on pose alors le couvercle que l'on recouvre de laine, et on laisse la fcr- menlation s'établir et suivre toutes les périodes. ( 1^5 ) Bicnlôl lin mouvement tumultueux, résultanl du dégage- ment de l'acide carbonique , se produit dans toute la masse ; il amène , à la superficie , des écumes plus ou moins abondan- tes , suivant que le liquide est plus ou moins visqueux. De temps à autre , on s'assure de l'état de la fermentation, au moyen d'un regard ménagé au couvercle: pendant trois h huit jours , suivant que les conditions indiquées sont plus ou moins bien observées, le dégagement d'acide carbonique a lieu en grande quantité , et l'écume continue a être soulevée ; et dès que le mouvement se ralentit, que l'écume s'affaisse, que le goût sucré du liquide a disparu , la plus grande pro- duction d'alcool est ordinairement développée; il fautsehâlcr de l'extraire au moyen de la distillation , afin d'éviter qu'une fermentation intestine ne donne lieu à la production du vinaigre. Si la cuve est d'une grande dimension, relativement à l'a- lambic, et que la distillation de tout ce qu'elle contient ne puisse être faite en un jour , on doit soutirer tout le liquide dans des barriques sur lesquelles on pose légèrement la bonde ; puis on recharge immédiatement la cuve avec une nouvelle quantité de liquide préparée comme la première fois. Les appareils distillatoires, qui présentent le plus d'avan- tages dans un travail en grand, sont ceux qui fonctionnent d'une manière continue; et, parmi ces derniers, on donne, avec raison , la préférence à ceux que fait construire M. De- rosne , pharmacien de Paris : ils sont susceptibles encore de quelques perfectionnemens; mais donnent déjà de fort bons résultats. La facilité avec laquelle on se procure tous les renseignemens utiles sur la conduite de ces appareils, en s'adressant au cons- tructeur , nous dispense d'en faire une description détaillée. PARAGRAPHE L. Observation nouvelle sur la fécule et sur sa structure. Dans un mémoire sur la fécule , lu à la Société philoma- lique , le G août i825 , RI. Raspail a donné les détails suivans. 1° La fécule est toujours libre dans les cellules des végétaux. Elle se présente au microscope sous la forme de grains ar- rondis, durs, transparcns, et qu'on ne saurait mieux com- parer qu'à des perles de nacre. Ces grains afFectent des formes différentes non-seulement dans des végétaux différens, mais encore dans le même végé- tal ; il en est de même de leur diamètre. Ainsi, en prenant pour micromètre un grain de pollen de froment , on voit que ce grain pourrait se mouvoir librement dans un des plus gros grains de fécule de pomme de terre , tandis que le plus gros grain de fécule de froment atteint à peine la moitié du dia- mètre d'un grain de pollen du même végétal. Les plus gros grains de fécule d'a?*«ni et d'orchis sont loin d'égaler le dia- mètre d'un des plus gros grains de fécule de froment. Le diamètre des grains de fécule augmente même avec l'âge de la plante. Dès que l'iode indique la présence de la fécule dans le périsperme d'un ovaire de blé, les grains sont réduits à leur plus petit diamètre ; mais à mesure que l'ovaire appro- che de la maturité, on y voit successivement paraître des_ grains de six h. sept diamètres différens. Les grains de fécule de froment affectent exclusivement la forme sphérique, qui se remarque encore sur les grains (Vorchis et d'arum, etc. (i) (i) L'ua de nous a remarqué , depuis la publication du mémoire de M. Ras- pail , que les grains de la fécule d'igname sont tous allongés : leur forme a la plus grande analogie avec celle des cocoas de vers à soie. Voyez le n° 5 de la fig. -, planche a. Les grains de fécule de pomme de terre , au contraire re- voient une foule de formes, depuis la sphérique, qui est celle des plus petits, Jusqu'à la forme triangulaire arrondie et plus ou moins irrégulitVe , qui est celle des plus gros. Quand on met la teinture d'iode en contact avec ces grains on les voit passer du carmin au Lieu transparent, de celui-ci an Lieu opaque, selon qu'on augmente les doses d'iode, et cela sans qu'ils changent en rien de leur forme; ils ressem- Llent alors assez Lien à des grains de verre de couleur. Si l'on verse sur ces grains , ainsi coloriés, une soliriion de sous-carLonate de soude ou de potasse, ou Lien de l'ammo- maque, on les décolore complètement, sans qu'ils suLissent le moindre changement dans leurs proportions ni dans leur, ormes. On peut , autant de fois que l'on veut, les colorer par iode et les décolorer par l'alkali ; ils n'en conservent pas moins leur transparence nacrée et leurs formes arrondies. 2" Ces formes toujours simples et isolées . cet élat de liLerlé dans lequel les grains se trouvent toujours les uns à l'é-ard des autres; phénomène, en général , qui exclut toute idée de cristalhsalion; enfin l'inaltéraLilité de ces formes, soit dans la coloration produite par l'iode , soit dans la décoloration pro- duite par l'alkali, tout faisait penser à M. Kaspail qu'il n'y aurait rien d'impossiLle que ces grains participassent de la na- ture d une loule d'autres organes des végétaux; c'est-à-dire que ces grains fussent composés d'un tégument extérieur et dune substance qui y serait renfermée, et qui posséderait à elle seule les propriétés que prend l'amidon dans l'acte de léLullition. Une foule d'expériences , qu'il a entreprises pour pour- suivre cette idée, semLlent en démontrer i'exaclitude , et la manière dont l'auteur les a variées , les met à l'aLri de toutes les causes d'erreur qu'on pourraii imputer aux illusions mi- croscopiques. Si l'on expose sur la pointe d'une lame de couteau de la ( y^^) fécule à la chaleur des charbons incandcscons , et qu'on la relire à l'instant où les premières couches sont carbonisées i pour la jeter sur de l'alcool très-étendu d'eau , placé d'avance sur le porte-objet du microscope, ou peut voir quelquefois un liquide oléagineux sortir d'un grain de fécule; et à la place du ! grain rester un tégument transparent comme le grain , mais plissé, et ne se dessinant plus qu'au simple trait, tandis que le grain non encore vidé se colorait facilement en noir sur le contour. Le porte-objet se couvre bientôt de ces tégumens; et, en leur imprimant un mouvement de rotation, on peut très-bien reconnaître leur forme vésiculeuse. L'iode les colore conmie les grains de fécule , sans qu'ils changent de forme ou de dimension. La fîg. 7 de la planche 2 montre la forme de ces grains : N° 1. Fécule de pomme de terre. N° 2. La même , après que la plus grande partie de la sub- stance intérieure est sortie, et laisse voir les tégumens. N° 3. Fécule d'igname dont tous les grains ont une forme elliptique. N° 4- Fécule de batate semblable 5 celle d'orchis de blé, etc Quand on verse de la fécule dans l'eau chaude , soit avant l'ébullition , soit pendant l'ébullilion , et quand même on con - tinuerait l'ébullilion pendant trois quarts-d'heure , les mêmes tégumens , avec leur forme et leur aspect, se présentent tou- jours sur le porte-objet. Si la fécule a été très-étendue d'eau , afin d'empêcher le liquide de s'épaissir , et que l'on abandonne la solution à elle-même, tous ces tégumens se précipitent sous la forme d'une matière blanche comme la neige , et ou peut les obtenir isolément en les lavant sur un filtre. Si l'on place sur \e porte-objet une goutte d'acide concentré , soit sul- furique , soit nitrique , soit surtout hydro-chlorique , et qu'on y fasse parvenir un grain de fécule , on voit bientôt ce grain disparaître sous un liquide gommeux , blanc et diaphane , I ( > ^ ) ■ l'acide s'épaissit; mais en l'étendant d'une goutte d'eau, on retrouve sur \e porte-objet le tégiament du grain que l'on peut colorer par l'iode de la même manière que le grain lui-même. Quand on fait celle opération plus en grand, on sent qu'il se dégage beaucoup de calorique. Pour que la conversion ait lieu d'une manière complète, il faut avoir soin, par l'agitation , de tenir la fécule, délayée dans un peu d'eau en la versant dans l'acide, surtout dans l'acide sulfurique, afin d'empêcher la formalion des grumeaux; car les grains qui seraient en- veloppés par ces gnuneaux resteraient intacts , ainsi que les grains qu'enveloppent les grumeaux mis dans l'eau bouillante. 3° M. Raspail conclut de l'identité des résultats de ces expé- riences , que l'action de la chaleur seule produit ces phéno- mènes dans les acides cou^nie dans l'eau. La substance que renferment ces tégumcns s'y trouve, à la température ordinaire, à l'état solide ; dilatée par le calorique, ainsi que son tégument , elle s'échappe dans le liquide qui doit lui servir de véhicule. Si elle ne rencontre point ce véhicule, elle casse , mais ne se fond pas entièrement. 4° Les tégumens de la fécule, suivant M. Raspail , se con- servent dans les acides concentrés pendant des mois entiers sans s'y altérer. M. Kaspail pense que la gomme n'est que la substance de l'amidon dépouillée de ses tégumens , et modifiée par le con- tact prolongé avec l'air atmosphérique. On s'était fait, depuis long-temps, d'autres idées sur la fécule amylacée; on la regardait comme formée de rudimens de cristaux plus ou moins prononcés. M. Raspail , dans le Mémoire qu'il a lu à l'Académie royale des Sciences , a indi- qué une forme et une composition différentes de celles admises. Nous avons pensé ne pas nous éloigner de notre sujet en pré- sentant un extrait de cet intéressant Mémoire. ( '3o) PARAGRAPHE II. Culture de la pomme de terre en carré. Ce mode de culture étant pratiqué avec succès en Alle- magne, nous avons cru devoir l'indiquer dans cet ouvra2;e, parce qu'il peut élre ulilement mis en usage par ceux qui s'occupent en grand de la culture de ce tubercule. . MODE DE CL'I.TLUE. On donne au terrain , que l'on veut ensemencer de pommes de Icrre , deux ou trois labours, afin de le rendre meuble; lorsque ces labours sont achevés , on trace des sillons avec la charrue , en les tenant à une distance de deux pieds les uns des autres , et tous'dans le même sens de la pièce de terre ; lorsque ceux-ci sont creusés, on en trace d'autres h la même dislance, mais perpendiculaires aux premiers. Ceux-lh servent à recouvrir la pomme de terre, qu'on place convenablement dans les premiers sillons , et de manièi'e à obtenir une plan- tation en quinconce. Lorsque, par l'acte de la végélation, la tige est parve- nue h. la hauteur de quatre à six pouces , on donne avec la charrue un premier binage, dans le sens des premiers sillons. On a soin, lors de ce labourage, de ne pas recouvrir le plant de terre; ce manque de précaution nuirait à la végéla- tion. Quinze jours ou trois semaines oprès ce premier travail, on donne un second binage en Taisant nasser la charrue dans le sens opposé; enfin, peu de jours avant la floraison, on donne un troisième binage , dans le même sens des premiers sillons. Les plantes se trouvent , par ce mode de culture, éloignées les unes des autres par un espace de deux pieds et demi; la dis- lance de deux pieds seulement serait suffî-anle, si la planlalion ( ''. ) était faite sur des lignes parfaîlement droites et tirées au cor- deau ; mais le temps nécessaire pour prendre l'aiignement serait trop considérable , en a donc de l'avantage à fixer les intervalles à deiix pieds et demi. Les Allemands, qui pratiquent la culture en carré, se servent d'une charrue attelée de deux bœufs ou de deux chevaux, et conduite par un enfant; le mode de labour et le nombre d'animaux de trait doit varier selon que le terrain est plus ou moins meuble , et suivant le pays et les animaux qui sont em- ployés au labourage. PARAGRAPHE LU. Culture de la pomine de terre dans des lieux privés de lumière. (i) L'expérience suivante étant très-intéressante, nous avons cru devoir en faire mention ici. Une personne qui avait un coin de sa cave dont elle ne tirait aucun parti, mêla à du sable de rivière, qui se trouvait dans ce lieu, de la terre, dans les proportions de deux parties de sable et d'une partie de terre ; elle plaça , au mois d'avril , dans ce mélange, des pommes de terre jaunes; ces tuber- cules germèrent prompîement , se développèrent : en novem- bre elles avaient produit des tubercules de grosseur moyenne, leur peau était mince , la pulpe féculente était d'un goût agréable. Ces pommes de terre restèrent, comme on le voit, six mois à végéter , sans culture et sans le concours de la lu- mière. D'après l'auteur, trente-deux tubercules de moyenne grosseur donnèrent un produit évalué approximativement Ji un demi-boisseau. L'auteur a cru pouvoir conclure de cet essai , que nous (i) Cet atlicîe est exfrail d'un joarnn! aHcmand. ( -52 ) n'avons pas répété, que la culture do la pomme de terre pour- rait être pratiquée avec avantage dans les lieux souterrains , et parliculièrement dans ceux qui se trouvent dans les places fortes. PARAGRAPHE LUI. Moyen de sécher Us pommes de terre qui ont été acciden- tellement recouvertes d^eau. Le procédé suivant a été indiqué pour dessécher et conserver les pommes de terre qui auraient été recouvertes d'eau. On place, au fond d'un tonneau, n'ayant aucune mauvaise odeur , une couche de sable sec, de grès , ou mieux encore de cendres ; sur cette couche on en forme une de tubercules , on recouvre celle-ci de cendre. On place de nouveau des tuber- cules, et successivement de la cendre et des pommes de terre; on termine l'arrangement par une dernière couche de cendre. Ce mode d'opérer conserve parfaitement des tubercules qui sans cela n'auraient pu élre gardés : l'ayant essayé compara- tivement , on a observé que les tubercules ainsi conservés purent servir d'aliment, tandis que ceux qui furent dessé- chés à l'air seulement ne purent être employés. PARAGRAPHE LIV. Application de quelques parties de la plante à Cart de la teinture et au nettoiement des étoffes. La pomme de terre , comme nous l'avons démontré , a été appliquée à une foule d'opérations, elle fut aussi le sujet d'ap- plications faites à l'art de la teinture; quoique celles-ci n'aient pas été répélées . on ne doit pas manquer de les l'aire connaîlre ; elles pourront sans doute être le sujet de médita- ( ï55 ) lions et de recherches nombreuses, susceptibles de conduire à de nouvelles découvertes. Emploi de l'eau de végétation pour la teinture en gris, M. Fouques ayant reconnu que du linge qui avait élé lavé chez le savant philantrope Cadet- de-VauK, dans l'eau se parée des tubercules , avait pris une belle couleur grise, chercha , par des expériences directes , à reconnaître si cette eau ne pourrait pas êlre appliquée à donner au fd la même teinte. Dans ce but, M. Fouques fit préparer, au moyen de la râpe , une certaine quantité de pulpe de pomme do terre; lorsqu'elle fut obtenue on la soumit à l'action de la presse, et l'on recueillit le liquide qui en sorlit; ce liquide fut placé dans une bassine et amené h l'ébullition ; on y trempa alors des écheveaux de fil et de coton , on continua pendant quelque temps l'ébulîilion ; on relira ensuite ces écheveaux, dont les fils s'étaient colorés en gris. On soumit le fil ainsi teint à l'action de l'eau de savon , et plusieurs savonnages n'alté- rèrent en rien leur couleur. Apres toutes ces opérations, et lorsqu'ils furent secs , les écheveaux furent présentés h des fa- bricans de nankin français et de calicots : tous furent d'ac- cord sur la beauté de celte teinture; ils en demandèrent la recelte, afin, dirent-ils, de l'utiliser dans leurs fabriques. Couleur donnée par la fleur du solanum. Le procédé suivant est du à un chimiste de Copenhague. Ce chimiste annonça, en 1817, dans les journaux scientifiques , qu'il avait découvert dans la fleur du solanum, une matière susceptible d'être employée en teinture; il indiqua le moyen suivant d'en faire l'application. On coupe le haut do la lige de la pomme de terre lorsque la plante est en fleur; on réduit PD pulpe ces sommités; on enferme cette pulpe dans un sac de ( i34 ) loiie, et on porte à la presse; par la pression on sépare un li- quide que l'on recueille et qu'on laisse déposer. Après que ce liquide est éclairci , on le fait chauffer, et^on y fait tremper de la toile, du fil, du coton et môme du drap, on laisse ma- cérer ces substances pendant 48 heures; au bout de ce temps on relire du bain, on lave et l'on fait sécher. Sui- vant l'auleur, les substances ainsi immergées ont acquis une belle couleur jaune; cette couleur est solide et durable. En les plongeant dans une teinture bleue , elles acquièrent une belle couleur verte qui est d'une solidilé parfaite. De l'emploi de Ceau retirée de la pulpe , pour le nettoyage des étoffes de colon, de laine et de soie. C'est à M. Moris qu'est du l'emploi du liquide contenu dans les pommes de terre, pour nettoyer diverses étoffes, et particu- lièrement les tissus de coton , de laine et de soie. Son procédé d'application a paru assez important à la Société d'encoura- gement de Londres , pour que cette société ait jugé convenable de lui en témoigner sa satisfaction, en lui décernant une ré- compense de quinze guiaées. ' MODE DBPRiPARATlOIN' DE l'eAU DESTINÉE A IV'ETTOYEr. LES TISSUS. On prend des pommes de terre, on les débarrasse le plus possible de la terre qui les recouvre; on les jette ensuite dans un baquet, on les laisse tremper quelques heures; au bout de ce temps on les retire, et avec une brosse on achève de les net- toyer; lorsqu'elles sont ainsi privées de toutes les matières qui les accompagnent et qui pourraient nuire à l'opéralion , on les réduit, au moyen de la râpe , en une pulpe que l'on reçoit sur un tamis placé au-dessus d'un vase contenant une pelile quan- tité d'eau. L'eau contenue dans la pulpe s'échappe en partie par l'action de la pesanteur de la pulpe; elle coule dans le vase ( '35 ) placé au-dessous du tamis. On achève, par la pression , dt; iaii'e sortir l'eau qui est dans la pulpe; on peut ensuite se servir de celle-ci pour on retirer la fécule. On laisse déposer le liquide ; on en sépare la partie solide (la fécule qui s'est précipitée) ; on garde l'eau pour s'en ser- vir comme nous allons l'indiquer. On étend sur une table bien nette, légèrement inclinée et recouverte d'une toile bien propre, l'objet qu'on veut net- toyer; on frotte légèrement celte étoffe avec une éponge qui a été trempée dans le liquide séparé des pommes de terre ; on recommence à plusieurs reprises cet espèce de lavage , et lors- qu'on a terminé on rince les objets lavés dans de l'eau bien claire. On porte ensuite ces objets à sécher : ils sont parfaite- ment propres quand l'opération a été bien conduite. PARAGRAPHE LV. Application de la pomme de terre à la fabrication de la sonde. Tous les auteurs ont démontré que lorsqu'on prépare une lessive avec la soude artificielle , celte lessive peut varier suivant le mode d'opérer: si l'on s'est servi d'eau froide , la solution obtenue ne contenant pas une grande proportion d'hydrosulfate et d'hyposu'fite, peut servir au blanchiment , et être employée sans crainte de -tacher le linge; mais en agis- sant de cette manière on n'obtient pas la plus grande quantité possible de sel de soude. Si au contraire la solution a été prépa- rée à l'aide de la chaler.r , le produit est plus considérable, mais contenant beaucoup d'hydrosulfate etd'hyposuîfite, il ne peut guère être employé sans inconvénient. Le procédé sui- vant, usité dans une des srrandes manufactures de soude de l'Ecosse, a pour but de détruire les hydrosulfates et les hy- posulfites contenues dans le lavage, obtenu à chaud, des soudes faciiccs : il a élé regardé comme m\ perfcclionuement utile, qu il est important de faire connaître, (i) On met, dans une grande chaudière de plomb ( et mieux de fonte), les so'iilions de sous-carbonate de soude qui contien- nent des hydrosulfales et des hyposulfites ( les eaux mères, ou la solution obtenue par la chaleur, de la soude factice ). On ajoute à ces liquides salins, des pommes de terre que l'on a nelloyées au moyen de la brosse et de l'eau; ces tubercules ajoutés dans la proportion de oo livres de pommes de terre pour 1000 livres de sel dissous (a) ; on fait bouillir et évaporer. On ajoute, si l'on veut, pendantl'opéralion, de nouvelles quan- tités de solution et de tubercules ( toujours dans les mêmes proportions); on continue l'évaporation ; pendant celle-ci, les pommes de terre cuisent dans la liqueur, par le degré de tempe-; rature qui est supérieur h celui de l'eau bouillante, puisque la li- queur est chargée de sel, et par le mouvement d'ébullition, elles se divisent; on continue l'évaporation , et sur la fin, lors- que le produit s'épaissit, on brasse fortement la matière, de manière à en faire une masse homogène que l'on agile sans cesse; la matière ne pouvant être desséchée entièrement dans la bassine de plomb qui pourrait se fondre, on porte la masse dans une chaudière de fonte (si on ne l'a pas fait d'abord) ; dans celle-ci on achève de dessécher le produit. La dessi- cation étant terminée , on porte la matière saline sur le sol d'un fourneau à calciner, et l'on chauffe; pendant que la calcinalion s'opère , il y a dégagement de vapeurs épaisses d'hydrosulfate d'ammoniaque (5) , et conversion des hydro- (i) Ce procédé est particulièrement appliqué autraitement des eauxmères, d'où l'on a extrait le sous-carbonate de soude. (2) Ou apprécie, soit par un pèse-sel, soit en faisant évaporer une partie de la liqueur, la quantité de sel qu'elle tient en solution. (3) Ce produit, dans la r/f-nulacture établif en Ecosse, est recueilli; il est ensuite décomposé par i'acide Iiydrochloriquc , et converti en hydro- chlorate d'ammoniaque. {Foyezle Manuel du manufacturier, par M. Pelouze: Taris, 1S25). ( -57 ) sulfates en sel de soude propre au lessivage. Le sel de soude obtenu est mêlé de sulfates et d'hydrochlorates; mais il est exempt d'hydrosulfates et d'hyposulfites. Le produit, ainsi ob- tenu, est une excellente préparation qui peut être livrée au commerce et employée avec avantage dans les blanchisseries. On peut , à défaut de pommes de terre , employer des graines de céréales, ou du son, provenant de ces mêmes graines; mais le bas prix des pommes de terre doit leur faire accorder la préférence. Dans l'opération dont nous venons de rendre compte, en ajoutant des pommes de terre à la solution , on a pour but d'introduire, avec le «el, du charbon divisé: celui-ci se trouve en contact avec l'bydrosulfate , au moment de la combustion. L'acide carbonique qui résulte delà combustion du carbone, s'unit h l'alcali , dégage l'acide hydrosulfurique qui était com- biné avec lui. La matière azotée ayant donné naissance 5 de l'ammoniaque, co produit, en se volatilisant , rencontre l'a- cide hydrosulfurique , s'unit à lui , et donne naissance à de l'hydrosulfale d'ammoniaque, qu'on peut recueillir comme nous l'avons dit (i). Ce travail , mis en pratique par nos fa- bricans de soude , donnerait des sels convenables au blanchi- ment, qui seraient préférables aux soudes que nous tirons encore de l'étranger, et qui enlèvent une partie du numéraire de la France. PARAGRAPHE LVL Usage des pommes de terre contre te scorbut. On sait que l'usage de la pomme de terre fut longtemps regardé on France comme pernicieux, causant des maladies (i) Cette tliêorie est donnée par les auteurs du procédé : est-elle exacte ? { '53) graves cl des accidens lacheux. Celte l'ausse idée , émise sur la pomme de terre, a élé délruile par les faits : l'usage im- mense qu'on en fait chaque jour a prouvé son innocuité; de nouvellcsexpéricncesprouventnon-seulement l'utilité de ce vé- gétal comme aliment, mais encore ils révèlent de nouveaux sujets de ressentir toute la reconnaissance due aux auteurs de sa propagation. La pomme de terre vient d'être indiquée comme nouveau moyen thérapeutique bon à mettre en usage contrôle scorbut. Les marins qui ont voyagé dans les Indes, assurent que lors de leur embarcation , les Indiens ne manquent jamais de s'ap- provisionner de ce tubercule, qui leur sert tout-h-la fois d'ali- ment et de préservatif contre celle horrible maladie. Plusieurs capitaines de navires étrangers ayant eu connaissance de ce fait, se sont empressés de suivre cette méthode, qui leur donna les plus heureux résultats. M. Briffaut de la Garde, officier de marine, engagé par M. J ulta Fontcncllc {i)l\\ivcndrG dans ses voyages des renseignemens à ce sujet, reconnut que les faits avancés étaient exacts; il a interrogé un grand nombre de matelots qui lui ont certifié qu'ils s'étaient délivrés du scor- but, en faisant un long usage des pommes de terre tant soit peu cuites sous la cendre, mangées sans assaisonnement. M. le doc- teur Boché , dans un mémoire inédit sur le scorbut , annonce qu'étant sur mer , et qu'ayant h. traiter plusieurs scorbutiques, il crut devoir céder aux instances qui lui furent faites par plusieurs matelots étrangers, qui lui vantaient les pommes de terre cuites comme un spécifique ; en conséquence il les leur administra; les effets qui en résultèrent furent si salisfai- sans qu'il parvint à guérir, par ce moyen , des matelots chez lesquels l'administration des médicamens les plus accrédités contre cette maladie avaient été inutiles. Cette tentative, faite par M. Boche, mérite sous tous les (i) Qui a bien voulu nous communiquer cet article. ( 1^9 ) rapports, de fixer l'attenlioa des praticiens attachés à la marine; elle doit les engager à répéter des expériences utiles. Elle peut aussi servir d'exemple , et engager les médecins à tenter l'ap- plication de la pomme de terre au traitement du scorbut de terre; maladie qui , selon quelques médecins, n'est pas iden- tique avec le scorbut causé par le séjour fait h. bord des vais- seaux. Des essais nombreux, tentés dans les hôpitaux civils et dans ceux de la marine, pouiraient contribuer à éclairer la ques- tion , en prouvant la vérité ou l'inexactitude des résultats que nous venons d'annoncer , d'après le rapport de gens dignes de foi. PARAGRAPHE LVil. Examen de Ccau de végétation des tubercules. Quelques auteurs ayant annoncé que l'eau contenue dans les tubercules du solanuni était un excellent engrais, l'un de nous s'est joint à M. Dutremblay, pour déterminer, autant que possible, d'une manière exacte, quelle était la quantité ai matière solide contenue dans ce produit végétal , et qui pouvait servir d'engrais. Plusieurs expériences nous conduisirent à reconnaître que le produit liquide contenu dans la pulpe, contenait un dixième de son poids de matière solide. L'eau existant dans les tuber- cules ^ dans des proportions différentes , mais dont la moyenne peut être de 70 pour 0/0 , et le produit, en tubercules, pro- venant d'un hectare étant , terme moyen , de 275 hectolitres , chaque heclolilre pesant i5o liv. , ceC hectare donne un ré- sultat de 4i?25o liv. de tubercules, qui contiennent 28,907 liv. de liquide, renfermant 2490 livres de substance fertilisante , composée de sels et de matière végéto aniraale. ( '4o.) Celle eau , qui contient un engrais bien divisé, et qui peut êlre absorbée facilement par les végétaux, nous semble encore plus propre, à la fertilisation des sols, que l'eau de rouissage du chanvre et du lin , indiquée par sir Humphrey Davy, comme un très -bon engrais. L'eau de végétation des tubercules du soUimim, serait facile à recueillir; les fabricaos de fécule qui la laissent perdre, peuvent la recevoir dans des bassins d'où elle serait enlevée au moyen de tonneaux semblables à ceux destinés à l'arrosement public. Ces tonneaux, remplis de li- quide,pourraient être conduits dans les champs, et l'eau répan- due de manière à arroser le 6ol, soit avant , soit après le semis. Un arrosement semblable serait très- convenable après la coupe des luzernes, des foins, etc. PARAGRAPHE LVIII. De C application du parenchyme à la fabrication de briqucltes- bûches. Un fabricant de fécule, qui ne trouvait pas à se défaire avan- tageusement du /)a?'cwcAj/?je dont il avait relire la fécule, après l'avoir employé comme engrais et en avoir obtenu d'assez bons sullals, conçut l'idée d'en former des briquettes, en le mêlant avec le poussier de charbon de bois, les escarbilles, le pous- sier de charbon de terre : nous lui devons les détails suivans sur ce nouvel emploi du parenchyme, qui lui a parfaitement réussi. Briquettes avec le poussier de charbon de bois. Poussier de cbarlion de bois 5o parties. Parenchyme de pomme de terre humide 5o On fait de ces deux substances un mélange que l'on pélrit au moyeu d'une pelle, et on le réduit par compression et à M4i ) l'aide d'un moule h briquettes , en morceaux ronds ou carrés, que l'on expose sous des angars où ils sèchent. Ces triquetles brûlent parfaitement ; elles laissent une cendre très -chargée d'alcali, qui peut être utilisée avec avantage, pour obtenir du salin bon à employer dans la la- brication du salpêtre , ou à préparer des lessives pour le blau- chîmenl. Briquettes avec le poussier de charbon de terre. Chaibon de terre concassé 5o parties. Argile grasse '° Parenchyme 9° On mêle avec une pelle l'argile , le parenchyme et le char- bon ; on ajoute de l'eau si cela est nécessaire. On fait avec ce mélange des boules informes; on les place sur un moule; on comprime à grands coups de palettes; on sort la brique du moule; on l'expose à l'air sec sous un angar. Ces briques séchées brûlent bien , mais elles ne donnent pas, par la com- bustion , des cendres propres aux mêmes usages que celles ob- tenues du mélange précédent. Ou suit le même mode pour préparer les briquettes avec le parenchyme et les résidus de la combustion du cliarbon de terre. On prend parties égales de parenchyme et à'cscar- bllles; on ajoute une quantité d'eau suffisante; on fait une pâle, on la place sur des moules et l'on comprime fortement. On retire du moule et on fait sécher sous des angars. Ces briquettes, que l'un de nous 'a vu employer comme combustible, donnent un bon feu et laissent dégager beaucoup de chaleur. La cendre obtenue de la combustion, est de même nature que celle obtenue du mélange précédent. Les bûches peuvent être faites de la même manière, avec l'un ou l'autre mélange, mais avec un ïn(?u/e propre à ce genre de préparation. ( 1/4^ ) , PARAGRAPHE LVIX. De remploi des fanes de pommes de terre , soit seules soit mêlées avec d^autres végétaux pour faire des nitricres artificielles. M. Diibuc père , pharmacien à RoueP' , dans le but de se- conder les intentions de M. le baron Malouet, a fait des es- sais qui ont prouvé que les fanes de pommes de terre mêlées d'autres plantes (i) , peuvent servir 5^ préparer des couches propres à la producliou dn salpêtre. M. Dubuc indi'quc lo procédé suivant. On prend 200 parties de fanes de pommes de terre , au mo- ment de la récolle (ou d'autres plantes où l'azote existe en assez grande quantité) ; on les hache grossièrement, on les mêle avec 5oo parties de terre mélangée dans les proportions ci-dessous (2) ; on mêle les plantes hachées avec la terre , et on en forme des couches de dix-huit pouces de hauteur, sur deux pieds et demi de longueur; en commençant la couche par quatre pouces de terre, et terminant de même , on arrose celte couche , afin de lui donner un degré d'humidilé conve- nable ; on abandonne le tout pendant deux mois , sans y tou- cher ; la couche s'affaisse, le mélange se colore en brun , et laisse dégager une odeur fade et désagréable. Au bout de deux mois ^ on retourne la couche , au moyen du louchet , et on l'arrose de nouveau. Six mois après , on re- tourne de nouveau la couche, et on l'arrose; enfin, après quinze mois de travail, on fit l'essai du produit, par le lessivage. (1) Les fanes seules peuvent produire le même résultat. (?) Vieux ciment. 70 parties. Terre de jardin (un peu siliceuse). 160 Plâtras. -r> ( '43 ) On obtint des résultats peu avantageux, mais en laissant en- core la réaction s'opérer dans cette couche pendant onze mois. On obtint , au bout de vingt-six mois, un terreau ayant un goût frais et salpêtre , en tout analogue à celui de la terre contenant des nitrates , et semblable à celle que l'on retire des caves et des lieux bas. D'après le lessivage , M. Dubuc a reconnu que loo livres de plantes employées, donnent en deux ans, par ce procédé, plus de quatre livres de bon salpêtre. Le travail de M. Dubuc , quoique incomplet, puisqu'il n'a pas établi quels senties frais d'exploitation, et l'avantage réel qui en résulte, par la vente du produit, compensé avec les frais de travail, peut cependant donner lieu à de nouveaux essais, qui sans doute tourneront à l'avantage de notre patrie, puisque le nitre nous est encore, pour la plus grande partie, fourni par l'étranger. Le parenchyme, séparé de la fécule, pourrait être employé à former les couches semblables; ce produit étant déjà di visé , ce serait un travail de moins à faire. Il est à désirer que ]M. Dubuc continue ses utiles essais. PARAGRAPHE LX. Préparation du riz de pommes de terre, selon la méthode de 31"'^ Chauveau (i). On prend la pomme de terre, on la lave, on la relire de l'eau , on la met à égoutter, on la coupe par morceaux, que l'on divise en les faisant passer avec force à travers un tamis de laiton, placé au-dessus d'un moule de fer blanc h bords relevés; le tubercule, pressé sur le tamis, tombe, divisé. (i ; Rrcvct 763 , piîbli(,- dans It; tnnic 9 , an iSai. ( '44 ) et blanc comme de la neige, sur le plateau; on emplit celui- ci jusqu'à la hauteur des bords. Le plateau étant rempli , on le porte dans un four, qui doit êlre aussi chaud que pour la cuisson du pain : on connaît que la matière a été assez chaulïee lor.squ'elle se détache des pla- teaux; on la lire alors du four, on la concasse de suite dans lin grand morlier; lorsqu'on l'a obtenue en morceaux h -peu- près de la grosseur d'un macaron , on la porte dans un mou- lin semblable h ceux employés à la moulure du tabac; ces morceaux se divisent inégalement; lorsque la matière a subi la mouture ,on la passe dans diirércns lamis , et on en lire du riz de trois espèces de grosseur, et de la farine de riz. Première grosseur, appelée Riz de pommes de terre. Ce produit peut servir à faire une espèce de riz au gras ou au lait; on emploie, dans ce dernier cas, sept parties de lait et une de riz. Lorsque le lait commence à bouillir , on ajoute le riz; on le laisse cuire pendant 25 à 3o minutes. On peut ensuite le sucrer, l'aromatiser, le glacer, etc. Ce riz peut remplacer le riz ordinaire : il est quelquefois coloré par du safran qu'on y ajoute , en quantité relative au degré de coloration qu'on veut obtenir. Deuxième grosseur, nommée Sagou de pommes de terre. L'emploi de ce sagou, préféré pour les potages, exige huit parties de liquide pour une de sagou de pommes de terre. Il cuit plus rapidement que le riz dont nous venons de parler. Troisième grosseur, nommée Semoule de pommes de terre. La semoule exige neuf parties de liquide pour une partie de semoule ; elle cuit plus facilement encore que les deux es- pèces précédentes. Cette semoule est employée parliculière- (.45) menl pour préparer des bouillies aux cnfans; on y ajoute du sirop de capillaire , elc. Quatrième grosseur. Fleur de riz de pommes de terre. Celte préparation, qui ne diffère en rien des précédentes, [riz, sagou , semoule) , si ce n'est par un degré de finesse plus grand , ne doit pas être confondue avec la fécule de pom- mes de terre ; elle exige dix parties de liquide pour une partie de fleur. On en peut aussi fture des LoiiiîJies pour les enfans. Distillation de Ceau exprimée de la pomme de terre j pour obtenir de l'alcool. Dans un travail que l'un de nous a entrepris avec M. Du- tremblay , on remarqua que la liqueur retirée de la pulpe par expression, était quelquefois sucrée; ce fait ayant paru assez singulier, et ayant été communiqué au professeur de techno- logie , M. Lenormand , celui-ci nous fit connaître le travail suivant, qu'il a tiré d'un ouvrage de M. Millot. On prend la liqueur extraite de la pomme de terre , et qui se trouve dans les baquets placés sous le tamis du moulin Ix. râper et sous la presse ; on sépare ce liquide de la fécule ; on le réunit dans des chaudière.*?, on le fait chauffer , en remuant jusqu'à ce qu'il soit en ébullition ; on jette dans la chaudière vingt gouttes d'acide sulfurique à 06° par chaque quintal de liqueur. La liqueur acquiert une consistance de bouillie; on la porte encore chaude dans des tonneaux fermés de fonds qu'on peut enlever à volonté; ces tonneaux doivent être placés dans un lieu dont la température soit élevée de 12 h i5 dégrés; on ajoute à ce mélange, lorsqu'il est encore chaud, sont ouverts, ce qui doit être fait aussitôt que le condensateur d est assez chaud pour qu'on n'y puisse plus tenir la main. A cette époque, la distillailon conlînue commence , le vin du l'éfrigérant devient tiède à L\ partie supérieure; il s'échauifc plus fortement ti mesure qu'il parcourt les deux divisions du condensateur, et finit par couler, presque bouillant, du tuyau dans la colonne b , où il se trouve en contact immédiat avec les vapeurs qui s'échappent de la chaudière. Le degré 4e tem- pérature qu'il y reçoit , le dépouille , pendant sa chute , des vapeurs alcooliques qu'il contient, et il entraîne avec lui la portion des vapeurs aqueuses qui se sont condensées par le refroidissement qu'il a produit; lorsque l'opération est bien réglée , le liquide , qui arrive dans la chaudière a , ne con- tient plus d'alcool; mais comme il se peut qu'on fasse, par négligence, descendre le vin trop précipitamment, alors il" achève de se dépouiller par l'ébullitiou,, soit dans la chau- dière a , soit dans la chaudière A , et c'est là ce qui constitue j)eut-être le seul avantage de celle-ci. Ce qui arrive dans la première colonne u , se répète dans le reclificateur qui est au-dessus, et à mesure que les vapeurs montent davantage, elles deviennent d'autant plus riches en alcool, puisqu'on effet l'abaissement successif di: tempéraîurc qu'elles subissent, détermine sans cesse la condensation d'une (i5. ) j)ortion des vapeurs aqueuses qu'elles renferment; or les va- peurs aqueuses, en se condensant, échauffent assez le liquide alcoolique qu'elles rencontrent pendant leur ascension , pour produire la volatilisation de cet alcool; il s'ensuit donc que les vapeurs vont toujours en se dépouillant de leur eau , et en s'enrichissant de l'alcool contenu dans le liquide qu'elles ren- contrent. Ces vapeurs une fois parvenues dans le condensateur, l'eau et l'alcool, ne peuvent plus faire entre eux cet échange de calorique qui s'effectuait dans le rectificateur; mais comme, par la disposition des choses , les premières hélices que ces vapeurs parcourent, sont environnées d'un liquide plus chaud que celui qui enveloppe les hélices suivantes , il en résulte en- core que , chemin faisant , elles font toujours des progrès vers une plus grande rectification, en telle sorte qu'une fois arri- vées jusqu'au tube o , elles ne peuvent contenir que de l'al- cool très-déflcgmé , puisqu'elles ont résisté à une moindre température ; c'est en effet ce qui arrive lorsqu'on a eu la pré- caution d'ouvrir les robinets 0,6,7, ^> pour déterminer la rentrée dans le rectificateur, des produits condensés dans les hélices. On conçoit que si, au lieu d'ouvrir tous ces robinets, on Ouvre seulement ceux qui communiquent avec les pre- mières hélices, alors leur j)roduit, qui est le plus aqueux, retournera seul dans le reclificateur, taudis que l'autre s'écou- lera dans le réfrigérant, et ira s'ajouter au résultat de la con- d^usalion des vapeurs les plus alcooliques qui y parviennent. On peut donc , à volonté, au moyen de ce condensateur , obte- nir de l'alcool à tous les degrés , avec plus de facilité même que dans l'appareil d'Edouard Adam , et l'on voit qu'il supplée parfaitement h celle série de vases dont il présente tous les avantages sans en avoir les inconvéniens. L'expérience a dé- montré qu'en général, pour obtenir le degré 5/tl du commerce ( 35" de raréomètre Beaumé) , il fallait fermer les robinets 5., 6, 7, et laisser le numéro 8 ouvert seul; mais on peut at- teindre à un degré plus lort, en diminuant la température du (,55) condensateur, et en laissant tons les robinets ouverts. Il est toujours convenable , dans le principe de l'opération , de chas- ser une certaine quantité de vapeurs, afin de laver les con- duits et entraîner toutes les portions qtii, par leur séjour, pourraient avoir contracté un mauvais goût , et de ne commen- cer à recueillir que quand le produit en est débarrassé. Le robinet n° 9 , sert à vider complètement le condensateur, lorsqu'il est nécessaire de le nettoyer. Les ouvertures uv x, sont également destinées à faciliter le nettoyage de cette même pièce. Les tubes y , t , sont des indicateurs en verre qui servent à apprécier la marche de l'opération, et à reconnaître si le li- quide n'afflue pas en trop grjnde quantité dans la colonne, et s'il n'est pas nécessaire d'en modérer l'écoulement, enfer- mant un peu plus le robinet n° 4> ou s'il faut , au contraire, en augmenter l'arrivée et ralentir le feu , en poussant le re- gistre adapté h la cheminée. L'opérateur dispose à son gré de ces moyens pour régler l'opération, et l'expérience lui ap- prend bientôt h en faire un usage convenable. PARAGRAPHE LXIL Procédés pour enlever aux eaux-de-vlc de pommes de terre leur goût désagréable. Quels que soient la méthode que l'on ait employée dans la préparation du moût de pommes de terre , et les soins que l'on ait pris pendant la fermentation , enfin l'appareil qui ait servi à la distillation, les produits alcooliques obtenus contractent toujours un goût désagréable plus ou moins prononcé. Cet effet paraît tenir à la présence d'une huile essentielle préexis- tante dans les tubercules , et qui accompagne toujours la fé- cule et les autres produits de la pomme de terre. Il est du moins certain que cette huile a été obtenue en quantité no- tnbîe dans la rectification des alcools de fécule; on a même ( 1^! ) éliidié SCS propriétés et reconnu son action Jélélcre sur l'éco- nomie animale [f^ojez le Journal de Chimie médicale, année i825. ) Parmi les divers moyens essayés pour enlever le mauvais goûta l'eau- de- vie de pommes de terre, l'application du chlo- rure de chaux a paru offrir les résultats les plus assurés : il réagit, par le chlore qu'il contient, sur les élémens de l'huile essentielle dont cette altération détruit les propriétés caracté- ristiques. On conçoit que la quantité utile de chlore , et par suite, de chlorure de chaux , doit varier suivant les proportions, elles- mêmes très-variables , d'huiie essentielle contenue dans les eaux-de-vie j de là la difficulté de préciser les doses conve- nables ; on ne peut y parvenir que par des essais sur de petiies quantités de l'eau-de-vie à désinfecter. Ces essais préalables doivent être faits avec toute l'exaclilude possible, carie plus léger excès de chlore laisse h l'eau-de vie un goût tout aussi désagréable que celui que l'on voulait enlever; en général il suffit d'un demi-millième environ du poids de l'eau de-vie, en chlorure de chaux pulvérulent (i) , pour réagir sur l'huile essentielle qu'elle contient. Voici comment on opère : on délaye le chlorure de chaux dans b-peu-près dix lois son volume d'eau, que l'on ajoute d'abord en petite quantité; afin de mieux diviser la poudre, on laisse déposer ce mélange pendant deux ou trois heures; on décante le liquide clair; on verse sur le dépôt une quantité d'eau égale à la première; on agite et on laisse déposer le même temps que la première fois ; on décante encore , et l'on répète une troisième fois cette manipulation. Les liquides clairs réunis sont versés dans l'eau-de-vie de pommes de terre. On (i) Cette dose pourrait encore varier suivant la qualité du chlorure de chaux; il faut donc se procurer ce produit à un titre constant : on en trouve au prix de i f'r. ^oc.le kilogramme^ marquant loo degrés au cliloromètreGay- Lussac, cher MM. Paycn, Ador et BoiHiaire.raubourg Sl-Martiii, no '|o, à l'an>. (,55) Lrasse bien le mélange ; on laisse déposer j)cndant dix ou donze heures; on redislille ensuite , et si l'on n'a pas excédé la pro- portion de chlorure nécessaire , on obtient de l'alcool sans odeur et sans goût désagréables. Dans le cas où , nonobsiant les espériences préliminaires, on aurait excédé la proportion utile de chlorure de chaux , on s'en apercevrait facilement au goût de chlore qui persisterait dans l'eau-de-vie ; il faudrait se garder de la distiller en cet élat; ce que l'on aurait de mieux h faire, ce serait d'ajouter une nouvelle quantité d'eau-de-vie à épurer. Il vaudrait mieux mettre un excès de celle-ci que de laisser un excès de chlore. On pourrait enlever le mauvais goût des eaux-de-vie , en les faisant passer sur un fdlre de charbon en poudre (la braise récente pulvérisée est très-convenable pour cet usage ) , et re- nouvelant celui-ci dès que sou action serait épuisée. Ce moyen, que l'on peut même employer après avoir mêlé le chlorure, réussit bien , mais il devient dispendieux, surtout par la perte en alcool que l'on éprouve dans les transvasemens et par l'im- bibilion du charbon. On évite cependant la plus grande partie de la déperdition, en lavant les marcs dont l'action est épuisée, et ajoutant les eaux de lavage à d'autres eaux-de-vie. PARàGRAPHE LXIII. De C analyse de la pomme de terre. L'analyse de la pomme de terre a été faite par M. Fauque- lin, pour la Société d'Agriculture, et cette analyse a été ré- pélée par ce savant sur diverses variétés, au nombre de quarante-sept. Il chercha d'abord à déterminer quelle était la quantité d'eau contenue dans les tubercules; il reconnut que ce liquide y existait en des proportions différentes; en effet, onze des variétés qui furent examinées, perdirent les 2/0 de leur poids d'eau , dix autres perdirent les 3/4 , six autres perdirent près des 4/5. M. Vauquelin reconnut en outre que ces tubercules contenaient des qiianlilés dillércnlcs d'aniidon, (,56) et (juc les proportions variaient depuis Jy8 de leur poids jusqu'à 1/4 ; mais il observa que tout l'amidon ne pouvait être retiré d« parenchyme, et que celui-ci en retenait toujours une cer- taine proportion qu'il a évaluée des 2/3 aux 5/4. Outre ces produits, ce savant analyste reconnut dans la pomme de terre les substances suivantes; 1° De l'albumine colorée , les 7/1000 du poids du végétal. 2» Du citrato de chaux, les 12/1000. 3'^ De l'asparagine, au moins 1/1000. 4" Une résine amère , aromatique cristalline, 5" Des phosphates de potasse et de chaux. 6'^ Du citrate de potasse. 7° De l'acide citrique. 8° Une matière animale particulière, 4 ou 5/iooo. Nous allons indiquer le mode d'opérer, suivi par M. Vau - quclin , dans l'analyse. Ce procédé peut servir d'exemple pour ceux qui voudraient s'occuper d'un semblable travail. On prive la pomme de terre de toute la substance terreuse qui peut se trouver sur la pellicule; on râpe le tubercule , on exprime fortement la pulpe , on délaye le marc avec une quan- tité d'eau suffisante, on exprime une seconde fois, on répèle le lavage une deuxième fois. On réunit toutes les liqueurs, on les filtre et on les fait bouillir pendant quelque temps. Par l'ébuliition il se forme un coagulum d'albumine que l'on sépare parla fillralion. On lave bien le coagulum, on le fait dessécher, et l'on prend son poids. On fait évaporer la liqueur filtré;î jus- qu'en consistance d'extrait; on délaie ce dernier dans une petite quantité d'eau, afin de ne pas redissoudre le citrate de chaux, que l'on recueille sur un filtre, et qu'on lave avec de l'eau froide jusqu'à ce qu'il ait acquis une couleur blanche; on fait sécher puis on prend son poids. On réunit la liqueur de lavage avec l'autre liqueur d'où l'on a séparé le citrate de chaux ; on étend d'eau , et on précipite par un excès d'acétate de plomb; on laisse déposer, on sépare par décantation le li- quide surnageant- on recueille le précipité sur un filtre; on ( 1^7 ) lave à plusieurs reprises avec de l'eau chaude, et on rael à part le'liquide qui formait l'eau mère du sel de plomb , ainsi que celui qui a servi au lavage. Le précipité formé par l'acétate de plomb (citrate de plomb) , doit être délayé dans de l'eau distillée. On fait passer dans ce mélange un courant d'hydrogène sulfuré; cet acide décompose le sel de plomb, convertit le métal en sulfure , et met à nu l'a- cide citrique ; on filtre la liqueur pour séparer le sulfure , que l'on recueille sur un filtre , et Ton fait évaporer jusqu'en con- sistance siropeuse ; on abandonne ensuite cet acide, pour qu'il puisse prendre une forme cristalline^ on sépare les cristaux, on les met à égoutter et h sécher; on évapore de nouveau les eaux mères , qui fournissent de nouveaux cristaux; lorsque ceux-ci sont secs on prend le poids de cet acide. La liqueur d'où l'on a séparé le citrate de plomb par la filtration , est soumise à l'action d'un courant d'acide hy- dro-sulfurique , on continue à faire passer de cet acide jus- qu'à ce que tout le métal soit précipité, et qu'il y en ait un excès; on filtre alors, on fait évaporer en consistance de sirop, et on abandonne en cet état dans un endroit frais : l'aspara- gine, qui existe dans la liqueur, cristallise; on délaye alors dans de l'eau froide, on décante et on lave avec de petites quantités d'eau l'asparagine , qui forme sédiment , jusqu'à ce qu'elle soit blanche. On prend ensuite la liqueur où avait cris- talisé ce principe, on l'amène en consistance d'extrait, puis on traite à chaud par de l'alcool à 5o°; on filtre et l'on sépare, en faisant évaporer, de l'acétate et du nitrate de potasse. On ob- tient alors la matière végétoanimale séparée de la plus grande partie des principes quiraccompagnaient. Le travail deM. ^ au- quelin a été inséré dans les Annales du Muséum d'histoire na- turelle , pages 241 et suivantes du tome 3°. En traitant le pa- renchyme par d'autres moyens , on peut encore en séparer d'autres produits. FIN. TABLE DES MATIERES Origine , historique, description du solanum tubcrosum. i Des sols convenables; préparation de la terre; plantation; soins pen- dant la végétation; récolle, /j Différens modes de plantation dans la grande ctillure. Procédés de la petite culture ( Foycz aussi pages i5o et i3i ). 8 Avantages que présente la culture de la pomme do terre, comparée avec plusieurs autres. 1 1 Avantages qui résultent des façons données au terrain et des engrais employés dans la culture du sotanum tuiierosuin. i.i Discussion des différens modes de planter les tubercules: entiers, en morceaux, en germes, pelures, graines, etc. Moyens de répandre les bonnes espèces et de proscrire les mauvaises. 17 Moyens d'obtenir des pommes de terre précoces dans la grande culture. 20 Appréciation de la valeur réelle des différentes sortes de pommes de terre, et méthode à employer pour reconnaître la quantité de ma- tière sèche contenue dans ces tubercules. Hîd. De l'influence du sol sur la quantité de matière solide contenue dans les pommes de terre. 3j De l'emploi des fanes vertes comme fourrage. Ses mauvais effets, moyens de les prévenir ( Voyez aussi page 142 ). 27 De l'incinération des fanes de pommes de terre pour en retirer la potasse. a8 Des pommes de terre dont la maturation est restée incomplète. Pro- priétés malfaisantes qu'on leur attribue. "h^ Divers moyens de conservation des pommes de terre. 36 Emploi des pommes de terre gelées. Procédés pour en extraire une farine et de l'amidon. Plant de pommes de terre gelées. Moyen d'enlever aux pommes de terre le mauvais 'goîjt qu'elles contractent par la germination. /2 Consommation des pommes de terre dans] diverses contrées et dans Paris. ^5 Préparations alimentaires de la pomme de terre. An Description des ustcnLiilcs nécessaires pour la préparation de In pâte, de la fécule, et des autres produits des pommes de terre. r,., (1%) Préparations alimcutaires obtenues des pommes de terre cuites à la vapeur. Polenta, gruau, semoule, farine, terrouen. Prix courant de la polenta convertie eu gruau ou farine de pommes de terre, par les procédés ci-dessus décrits. Fabrication du terrouen, et prix coûtant de cette substance alimentaire. Fabrication d'une polenta allemande. Emplois de la farine de la semoule et du gruau de pommes de terre. ( f 01/c: aussi page i48). Emplois directs de la pomme de terre dans l'économie domestique et dans la j)réparation du pain. Mélange économique des pommes de terre dans le beurre, le fromage ; moyens de falsifier les graisses en Angleterre. Préparation d'une colle de pâte avec les pommes de terre. Fabrication du vermicelle et du riz de pommes de terre. Application de la pomme de terre à la nourriture des chevaux. Nourriture et engraissement de divers bestiaux avec la pomme de terre et la farine de ce tubercule. Application des pommes de terre à prévenir les incrustations dans les rhaudières à vapeur. Emploi des pommes de terre dans la maçonnerie. Préparation d'une peinture en détrempe avec la pomme de terre. Préparation faite avec la pomme de terre, proposée pour remplacer le café. Blanchissage à la pomme de terre. Extraction de la fécule des pommes de terre. Emploi de la pulpe épuisée. Emploi de l'eau de végétation des pomijies de terre [Voy. p. iT)?. ). Blanchiment de la fécule par le chlorure de chaux. Préparation des encollages avec la fécule. Propriété nutritive de la fécule ; ses usages dans l'économie do- mestique. Préparation d'une sorte de tapioka de pommes déterre. Fabrication du sirop de fécule. Fabrication du sucre d'amidon avec la fécule humide et lapâte ou la pulpe de pommes de terre. Propriétés du sucre de fécule; ses emplois. Emploi des résidus de la fabrication du sirop de pommes de teire. Préparation d'un cirage pour les chaussures. Fabrication de l'eau-de-vie de pommes de terre. SacchariGcation de la pulpe de pommes de terre. Saccharification de la fécule. Fermentation et distillation du moût de pommes de (erre. Observation nouvelle sur la fécule rt sur sa slinrhire. fia G8 ;2 75 8i «5 86 88 itid. 90 95 9C' 97 99 101 102 1 04. 109 1 iT) 11 '> 116 118 l"! 1 ?. '! ):>6 (.60) Pag« Culture de la pomme de terre en carré- i5o Culture de la pomme de terre dans les lieux privés de lumière. j3i Moyen de sécher les pommes de terre qui ont été accidentellement re- couvertes d'ea-i. 102 Application de quelques parties de la plante à l'art de la teinture et au nettoiement des etoITes. iiid. Application de la pomme de terre à la fabrication de la soude. ij5 Usage des pommes de terre contre le scorbut. 1J7 Examen de l'eau de végétation des tubercules. 1Ô9 De l'application du parenchyme à la fabrication de briquettes-bûches. i^o De l'emploi des fanes do pommes de terre, soit seules soit mêlées à d'autres végétaux, pour faire des nitrières artificielles. 1^2 Préparation du riz de pommes de terre , selon la méthode de madame Chauveau. i45 Distillation du vin de pommes de terre. 1^6 Procédés pour enlever aux eau\-de-vie. de pommes de terre leur goût désagréable. i53 De l'analyse de la pomme de terre. ii>5 FIN DE LA TABLE. %atlt' i/t' /it A>f/i//i<- )/<• à'/re /),:<\eiw r/ /irav,- ^>,lr- /„-/l/,m, ■ r la Fflmme efe ferre fia- / Fig.ô. Fu/./. N.'i \j j 'o >) 0 1. .. A'jO 0 û 0 0 0 0 , ^ -V/ O o 0 o « . . . ^^' .ûe^j^mèel ûra»épar leSl^mc . te Je In Pormne de terre fl .?, DeJ'J-tnf fi O^nti'^por Le ^/,r IJVSTRUCTIOM SUR LA CULTURE ET LES AVANTAGES LÉGUMINEUSES. PARIS. — DE l'imprimerie de L. ROUCHAHD, rue des Petites-Écuries, n^. 47. IIVSTRUCTION SUR LA CULTURE ET LES AVANTAGES DES IFMOTE LEGUMINEUSES^ PUBLIÉE PAR MM. DUBOIS, GELS, VILMORIN, GILBERT, HUZARD, ET PARMENTIER, COMPOSANT LA COMMISSIOIÏ d' AGRICULTURE ET DES ARTS. TROISIEME ÉDITION. A PARIS9 CHEZ MADAME HUZARD, IMPRIMEUR - LIBRAIRE , RUE DE L EPERON, N». 7. 1826 .\ V INSTRUCTION SUR LA CULTURE ET LES AVANTAGES DES PLANTES LÉGUMINEUSES, PUBLIEE PAR LA COMMISSION D AGRICULTURE ET DES ARTS. Par plantes légumineuses , nous entendons seulement celles dont les fleurs sont en forme de papillon et dont les semences sont contenues dans une cosse ou gousse : tels sont les pois , les haricots , les fèves , les pois chiches , les lentilles, les gesses , vesces , etc. Elles peuvent être placées dans la classe des productions les plus utiles ; elles ont le grand avantage de fournir la récolte de leurs graines en peu de temps , et d'offrir la plupart dans ces graines mêmes , avant leur parfaite maturité, une I ( o nourriture agréable et substantielle ; de pouvoir être semées en différentes saisons jusqu'au-delà du solstice d'été, si on borne son désir à les manger tendres ou vertes. Les graines sèches de ces plantes se conservent long -temps , se transportent partout, se pré- parent et s'assaisonnent en peu de temps et à peu de frais. Nous ne nous étendrons pas en particulier sur la culture de toutes les espèces ou variétés de ces plantes , elle est assez généralement connue; notre but est surtout d'exposer les avantages qu'on peut en retirer en les semant , en temps et saisons convenables , dans les terrains qui leur sont propres , et de faire connaître les espèces les pins intéressantes et les principaux soins qu'elles exigent. Il ne sera pas question dans cette Instruction de la manière d'élever les pois dans des serres chaudes ou sous des châssis , notre intention n'étant pas de traiter des cultures de luxe. ARTICLE PREMIER. Des Pois. Dans plusieurs contrées de la France , on nomme pois ce qui est désigné ailleurs sous le nom de haricot. On appelle encore pois cer- (S ) taines espèces de gesse qui s'en rapprochent davantage. Nous traiterons, dans cet article, du véritable pois, c'est-à-dire de cette plante légu- mineuse qui , dans sa gousse , produit des graines toujours de forme plus ou moins arron- die, et bonnes à manger vertes ou sèches j si on les mange vertes , on les connaît plus particu- lièrement sous le nom de petits-pois , de pois sucres. On distingue en général deux sortes de pois , les uns hâtifs y et les autres tardifs. § I-. Pois hâtifs. Les pois hâtifs se divisent en hâtifs de pre- mière classe et en hâtifs de seconde classe. Hâtifs de première classe. En automne , vers la fin de novembre , on commence à semer dans les jardins , sur des plates-bandes abritées et bien exposées , les pois de primeur dont les noms suivent : \^. Le pois de Francfort y dit encore pois michaut de Hollande ; il vient à la hauteur de dix-huit à vingt-quatre pouces , selon le temps et la qualité du terrain j il donne des fleurs tout (4) le lou^ de sa lige et n'a pas besoin d'être pincé; il produit avant les autres et charge beaucoup. 2°. Tje pois baron; il s'élève un peu plus que le précédent ; on le pince ordinairement pour le faire donner plus tôt. 3**. Le petit-pois de Blois; sa hauteur est de quinze à dix - huit pouces : il charge beaucoup; il est presque aussi hâtif que le précédent. Son grain est un peu plus petit et plus lisse. 4°. Le pois michaut ordinaire; c'est l'espèce hâtive la plus anciennement connue. On croit qu'il a fourni plusieurs autres variétés précoces; il s'élève un peu plus que le pois baron. On le pince de même ; il est d'un grand rapport lors- qu'on le sème après l'hiver. Si pendant l'automne , époque indiquée ci- dessus , le temps était défavorable , on ferait les premiers semis de pois plus tard. On les conti- nue ordinairement , aux expositions chaudes , jusqu'au commencement de février. Hâtifs de seconde classe. Dans cette classe , nous distinguons les pois hâtifs un peu plus élevés de ceux qui le sont moins. Ces derniers sont appelés yoou nains. Pois hâtifs un peu plus éleçés. Dans les climats froids ettempérés, c'est à la (5) fin de février qu'on commence à semer des pois dans des terrains découverts ou en plein champ : i*. Les quatre espèces de pois hâtifs dont il vient d'être question ; 2*. Le pois dominé; il s'élève un peu plus que le michaut, auquel il succède j 3°. Le pois laurent , qui monte à la même hauteur , et qui est un peu moins hâtif que le dominé; 4o. La grosse cosse hâtive : ce pois , dont la hauteur est semblable à celle du dominé , a la tige plus forte et la cosse plus renflée ; il est de bonne qualité et d'un grand rapport j 5°. Le clamart y nommé encore carré fin ^ parce que ses grains, se trouvant très-serrés dans leur cosse , sont toujours comprimés : c'est un des plus productifs , et des meilleurs lorsqu'on le mange nouvellement cueilli ; il s'élève moins que les précédens et mûrit après eux. On peut se dispenser de ramer ces espèces ; néanmoins , en les soutenant avec de petites rames ou branches^ elles produiraient davan- tage. Pois hâtifs de seconde classe , appelés nains. Il y a en général deux sortes de pois nains , les uns à parchemin, et les autres sans par- chemin. (6) Les nains à parchemin offrent différentes va- riétés plus ou moins basses, plus ou moins hâ- tives, dont les grains, à leur maturité, sont jau- nâtres ou verts. Outre leur bonne qualité , ils ont le mérite de n'exiger aucune rame , et même de pouvoir être semés en bordures. Les pois nains sans parchemin sont aussi plus ou moins élevés , selon les variétés. Le plus élevé de tous monte à vingt pouces ou envi- ron : quelques rauies le soutiendraient contre les vents et faciliteraient sa fructification. Ses cosses, bien garnies, sont très-nombreuses ; on le mange écossé ou avec sa cosse; il est très-sucré. De quinzaine en quinzaine, ou à des époques plus ou moins rapprochées, on peut semer les différentes espèces de pois , soit de première, soit de seconde classe , dont les noms précèdent , jus- qu'au 25 juillet, dans les climats tempérés, et continuer pendant environ nnmois de plus dans les climats chauds. L'un des grands avantages des espèces dési- gnées est de fructifier dans ces diverses saisons. Les semis qui se font dans les grandes chaleurs se placent en terre substantielle , fraîche , et aux expositions les moins chaudes. C'est le contraire des semis faits avant l'hiver , qui demandent de la terre plus légère et une exposition chaude. Par la même raison, on choisit, pour les derniers (7 ) semis , des terres légères et des expositions qui , en automne , les garantissent des premiers froids. Lorsque le solstice d'été est passé , on ne doit plus compter sur la maturité des pois qu'on sème; mais si l'automne est favorable , on peut espérer d'en récoller de bons à manger en vert , jusqu'à la fin d'octobre. § n. Pois tardifs ou grands pois. Dans les climats tempérés ou un peu froids , on peut semer les différens pois tardifs depuis le commencement de mars jusque vers le i5 juin. Les produits de semis qui se font jusqu'à la mi- mai, parviennent à une maturité parfaite; mais ceux des semis qui se font de la mi-mai à la mi- juin ne peuvent être mangés qu'en vert , parce qu'il n'y a pas assez de temps pour les mûrir. Il est aisé de concevoir que , dans les pays chauds , oii l'hiver étant moins rigoureux , on commence à semer les pois plus tôt, on doit cesser aussi plus tôt d'en semer, parce que le soleil, trop ardent, les brûlerait. On mange à Marseille des petits-pois deux mois avant d'en manger à Paris, où Ton continue d'en manger deux mois plus tard qu'à Marseille. (3) Il y a des pois tardifs à parchemin et d'autres sans parchemin , appelés aussi poids gourmands ou goulus. Parmi les pois tardifs à parchemin , les meil- leures espèces sont : 1°. Le s ans -pare il , ainsi nommé , parce qu'il produit beaucoup et long-temps , et parce que son grain , moelleux en vert, est très-sucré. 2°. Le marlj- : c'est un des plus beaux pois , soit pour son port , soit pour ses cosses assez nombreuses ; il est de bonne qualité . 3o. Le pois carré blanc ; ses cosses sont multipliées et ses grains serrés. Si on le mange tendre , il est fort sucré. 4". Le pois carré , à cul noir. Il a à peu près les mêmes qualités que le précédent ; il est un peu plus tardif. On en prolonge l'ensemencement jusqu'à la fin de mai. On ne le mange guère en sec : c'est un des meilleurs à conserver en vert. 5o. Le pois suisse ; cosse très-grosse et très- longue , mais moinSg garnie, 6o. Les pois uerts; il y en a plusieurs variétés, qui se cultivent principalement pour être récol- tées en maturité et consommées en purée. La plus estimée est le gros carré uert normand , qui charge beaucoup ; il est fort tendre, sa peau est très-fine. On fait cas aussi des pois njerts de Nogent, des pois verts de Picardie et des pois (9) "verts anglais. Ils aiment , le normand surtout, une terre un peu forte , et cependant bien pré- parée. Les pois tardifs , sans parchemin , ne sont pas assez multipliés , soit qu'on les considère pour leur qualité , soit qu'on les considère pour le profit qu'ils donnent. Nous en citerons seulement trois principaux qui ont des sous-variétés. 1°. J^Q pois sans parchemin , à demi- rame; il est très-bon. 2°. \je pois faucille ow corne-de-bélier; ses noms lui viennent de la forme courbée de ses cosses , qui sont nombreuses , larges et longues^ fraîchement cueillies , elles sont tendres et très- sucrées; ce pois s'élève très-haut. 5°. Le pois sans parchemin , àjleur rouge. Il monte plus encore que le précédent. Son grain, de la couleur d'un œil de perdrix , l'a fait nommer pois à œil de perdrix; il varie dans sa fleur, plus ou moins pourprée , et dans sa graine , plus ou moins foncée. Il charge beaucoup ; sa cosse est belle , mais il a une saveur un peu acre. Celte espèce sans parchemin est la seule connue dans plusieurs départemens. Tous ces pois s'élèvent assez haut et doivent être rames, si on veut en tirer un grand produit. Nous ne croyons pas devoir décrire plusieurs autres espèces et variétés de pois , telles que les ( ■») pois couronnés, turcs, lorrains , longue cosse , du Mont-Sala , etc., etc. Nous dirons seule- ment que tous peuvent être semés , comme il a été dit ci - dessus pour les espèces tardives , depuis février jusqu'en mai. Observations générales sur les Pois et sur leur culture en grand. Tous les pois des premiers serais doivent être cliaussés au fur et à mesure qu'ils grandissent. Cette opération se fait toujours lorsque la terre est saine ou sèclie, et il fautavoir l'attention de ne pas enterrer leurs feuilles. Ces premiers plants ont besoin d'être couverts dans les froids rigou- reux : ils ne peuvent supporter que cinq à six degrés de gelée. 11 ne faut pas mettre plusieurs années de suite des pois dans un même terrain. Si on était dans le cas de faire succéder, pendant un certain temps, un semis à un autre de même espèce , il serait absolument nécessaire de rapporter et de mêler de nouvelle terre. Il est plus avantageux de planter ou semer les pois par rayons qu'à la volée. Ils ont plus d'air, ils fructifient mieux, les façons se donnent plus facilement et à moins de frais. Les rayons pour les grandes espèces doivent être espacés au moins de deux pieds. On peut ( «• ) les rapproclier à quinze pouces pour les espèces naines. En semant les pois il faut avoir l'atten- tion de les enterrer avec soin. Outre qu'ils réus- siraient mal en re^nt sur terre , ils seraient exposés à être mangés par les oiseaux. Il est utile de les couvrir d'un et même de deux pouces dans les terres légères j ce qui est facile en les semant par rayons, ou en les semant sur terre pour les enterrer par* un léger labour. Il y a de l'économie à biner avec la petite charrue les rangs espacés j il faut leur donner au moins deux façons. Les pois sans parchemin , plus tendres et plus sucrés que les autres, étant sujets à être man- gés par les oiseaux, on les exposera le moins possible à leur voracité. Toutes les fois qu'on destine un semis de pois pour graine , il faut arracher tous ceux dont la fleur est retardée , ceux qui s'emportent ou qui paraissent devoir dégénérer. Il est nécessaire aussi d'éloigner les diverses variétés qui peuvent fleurir dans le même temps. On doit, autant qu'il est possible , récolter les pois par un beau temps j il y a de grands incon- véniens à les laisser dehors par l'humidité. Leur dessiccation ne saurait être trop rapide. Les semences conservées dans les cosses sont bonnes pendant quatre ou cinq ans. ( 12) La plupart des pois se cultivent en petit, seulement dans des jardins, dans des enclos ou dans quelques portions de champs. A l'approcbe des grandes communes , oi^n voit des cultures plus considérables, parce qu'on les y vend en vert. Un grand nombre de personnes sont occu- pées à les cueillir, les écosser et les débiter. Nous invitons tous les cultivateurs à semer le plus possible de ce légume dans les terrains voisins de leurs habitations. L'année d'après, ils y fe- ront succéder des plantes à racines pivotantes. C'est par une immense multiplication de ces semis en petit, qu'il en résultera une grande production, qui ne peut manquer d'être une ressource pour économiser beaucoup d'autres alimens. 11 n'y a pas de doute qu'on ne pût faire des cultures en grand de toutes les espèces j mais c'est sur-tout le pois vert, n°. 6 (§ II) , qu'on cultive le plus de cette manière , parce qu'il sert à l'approvisionnement de l'hiver. La terre , avant de le semer , doit être labourée deux ou trois fois , si elle est compacte. Dans ce dernier cas , un labour d'hiver est très-utile, et on herse à chaque labour. On emploie quatre boisseaux , mesure de Paris , par arpent de neuf cents toises. On donne deux dents ou tours de herse après les avoir semés j on passe ( ,3 ) ensuite un rouleau , pour rendre le tcrriau égal , rompre les mottes et fixer la terre contre la semence. Au lieu de semer après tous les labours , il est bien plus avantageux de semer sur la terre, avant le dernier labour, et d'enterrer les pois a. la charrue , comme il a été dit précédemment. Dans les pays où il y a encore des pigeons, cette seconde métliode est indispensable. Si l'on calculait le produit des pois récoltés par un ensemencement fait à la volée , avec celui d'un ensemencement fait par rayons à la char- rue, de manière qu'on pût les sarcler, il est cer- tain qu'on retirerait une récolte plus abondante du semis par rayons, et les plantes qu'on y sè- merait après , s'en trouveraient mieux. Aussi conseillons-nous de l'employer toujours à ceux qui ont assez de bras. Mais lorsqu'on en manque, il faut bien consentir à semer à la volée ; dans ce cas , on est dispensé des sarclages. Il n'y a que les chardons à en arracher. On regagne par l'économie des frais de culture , une partie de ce qu'on récolte de moins. L'intervalle des pois semés par rayons se bine en Angleterre avec l'instrument appelé culti- vateur. On le binerait également avec un araire y ou petite charrue. Le pois vert est excellent pour des potages , ( >4 ) avec sa peau ou en purée. Il est très-farineux. Un setier du poids de 240 à 260 livres pour- rait donner plus de 180 livres de farine. Si on se proposait d'en faire du pain , comme ou l'em- ploie de tout temps dans divers départemens , il faudrait , dans ce cas , l'allier avec les | de fro- ment , ou les I de froment et les | d'orge , ou les I de froment et les | de seigle. On trouverait dans tous les pois jaunes les mômes avantages, et notamment dans le pois marlj. Une des qualités qu'on reclierche dans les pois secs est la facilité de cuire , parce qu'elle prouve qu'ils sont tendres et qu'elle épargne du combustible. Cette facilité dépend absolument de la qualité du terrain qui les a produits. Il est certain que des pois récoltés sur un sol compacte et argileux cuisent très -mal et donnent peu de fruit , tandis qu'on récolte beaucoup de graines, et qu'on fait cuire en peu de temps les pois pro- duits dans un terrain neuf, meuble et léger. C'est donc celui qui leur convient le mieux. Il est bon de remarquer que les mêmes pois qu'il est difficile de faire cuire , pourraient , si on les semait dans le terrain qui leur est favorable , donner des produits qui cuiraient bien. Les pois sont sujets à être attaqués par une espèce de gros charançon, appelé mylabre. On ne connaît jusqu'ici aucun moyen de les en pré- ( •&) server. Dans les années et dans les terrains où la végétation est bien soutenue , on en voit moins> Lorsque les pois en sont remplis , aussi- tôt après la récolte , on doit les étendre au soleil; la chaleur les fait sortir; on débarrasse les pois de ceux qui pourraient rester , moyennant un coup de crible. Quoique piqués, ces pois sont bons pour servir de semence dans l'année qui suit leur récolte. ARTICLE II. Des Haricots. L'explication donnée à l'article pois ne doit laisser aucun équivoque dans celui-ci : au sur- plus , c'est du haricot proprement dit que nous allons parler, phaseolus ^vulgaris. On le nomme encore phasole , pois blanc, pois de mai, etc. Cette plante fournit beaucoup plus de variétés que le pois. Il paraît que la France est le pays de l'Europe qui en possède le plus ; chaque contrée a ses espèces et ses variétés. Nous ne nous occuperons que des principales sans nous étendre beaucoup sur leur culture , généralement connue ; une grande partie des haricots s'élè- vent très-haut , à la faveur des rames autour desquelles ils s'entortillent. D'autres restent nains ou en touffes. Comme ces dernières espèces sont les plus hâtives, nous commencerons par elles. ( -G) §. I". Haricots nains. 1°. L'espèce géuéralement connue pour la plus hâtive est le haricot àX\.nain de Hollande. Il s'élève à dix ou douze pouces au plus. Ses cosses , assez belles et assez nombreuses , sont bien garnies. Ce haricot, si on veut le manger en vert, doit être cueilli jeune , pour qu'il soit tendre. Dans sa maturité, il est de fort bon goût; il a peu de parchemin; il est d'un beau blanc et de forme à-peu-près ovale. Une variété dite d' Aryens on , qui lui res- semble beaucoup , est préférée par des jardiniers, qui la regardent comme plus hâtive. 2°. Haricot nain de Laon hâtif y à\l flageo- let. Celte espèce , très-commune , mérite d'être encore plus généralement connue : elle est pres- que aussi hâtive que la précédente. Sa cosse est moins large , mais plus longue et fort tendre en vert. Ce haricot charge beaucoup et long-temps lorsqu'il vient des pluies douces au temps de la fleur, ou lorsqu'on a l'attention de l'arroser. A sa maturité , sa peau est quelquefois un peu ferme, mais il est farineux et de bon goût. S^x forme allongée , presque droite, et quelquefois comprimée aux deux extrémités , annonce son ( '7 ) espèce la plus franche. Lorsque ce haricot prend de la courbure , qu'il s'élargit , il tend à fder , à dégénérer ; sa surface est un peu moins blanche que celle du précédent. 5°. Haricot nain blaiic flagellé. 11 est plus fort en tout, et s'élève plus que les précédens sans cependant filer : il leur succède. Ses cosses sont belles , longues et bien garnies ; elles se conservent tendres jusqu'à ce qu'elles aient ac- quis les deux tiers environ de leur développe- ment. Sa couleur est d'un blanc gris de lin. Il est régulièrement marqué d'un brun noirâtre du côté de l'œil. Il est bon en vert et en sec. 4°. Haricot nain jaune sans parchemin. Il est très-hâtif : ses cosses, généralement courbées, garnies de cinq à six graines , sont nombreuses et tendres jusqu'à l'approche de leur maturité. Le haricot est petit, de forme ovale. C'est une très -bonne espèce, mais sujette à dégénérer. Dans la partie des semis destinée pour la graine, il faut arracher au moment de la fleur tous les pieds qui s'emportent. Si quelques-uns échap- pent, on reconnaîtra leur dégénération, lors de la maturité, par la couleur foncée ou violette des cosses. On les séparera soigneusement ; c'est presque toujours en haricot noir grimpant que cette variété dégénérée se transforme. Il y a une autje variété jaune avec parchemin, mais 2 ( >«) fort hâtive aussi et d'un assez grand rapport. La cosse est moins garnie que celle du pré- cédent. 5^ Haricot nain ojenire de biche. Il devient fort et assez haut ; il est peu sujet à dégénérer. Ses cosses sont nombreuses , belles , bien garnies et tendres: il fournit long-temps. Il est excellent en vert et fort bon sec. Il n'a contre lui que de prendre une couleur terne , en le faisant cuire à l'approche de sa maturité ou lorsqu'il l'a acquise. On en fait de très-bonne purée , qui prend la couleur de café légèrement brûlé. 6°. Haricot suisse refuge ou blanc Jlagcllc de rouge. Il y en a beaucoup de variétés , plus ou moins chargées en couleur , plus ou moins fon- cées. Ceux dont la couleur tire sur le noir sont plus sujets à dégénéi'er. Ces variétés, d'un grand rapport, sont bonnes en vert et en sec : elles ont peu de parchemin. "7°. Haricot suisse gris., nommé encore suisse noir. Le fond de la couleur est d'un blanc gris rayé et maculé , plus ou moins chargé de noir et de brun. Il est assez rare mainlenaut de trou- ver l'espèce vraiment naine ; ce haricot est sujet àfder, à dégénérer. La variété la plus franche est peu chargée en couleur ; la forme de la graine est allongée , assez droite et souvent comprimée aux extrémités. C'est une des bonnes espèces ( -9) à manger en vert et à conserver tendres pour l'hiver. 8°. Haricot nain rouge. La plante est vigou- reuse et charge beaucoup. Elle résiste un peu plus au froid que les autres variétés j ce hari- cot est bon en vert et en sec. Il fait d'excellente purée. Nous porterions au moins à trente espèces ou variétés connues la description des haricots nains , mais cela serait peu utile. On en trouve par-tout : chaque pajs en a de particulières , et leur dénomination varie d'un lieu à l'autre. Nous nous bornons à dire que les haricots nains sont en général plus hâtifs que les haricots à rames j qu'on les confie à la terre un peu plus tôt et beaucoup plus tard , parce que leur précocité fait espérer, ou qu'ils mûriront encore à temps, ou qu'on pourra au moins les récolter en vert , avant que la gelée les surprenne. Nous traite- rons en peu de mots de leur culture, après la description des haricots à rames , attendu que ce . que nous dirions pour les uns devrait être répété pour les autres. S II. Haricots à rames. Le nombre de leurs espèces et variétés est beaucoup plus grand que celui des haricots nains. 2.. ( ^0 ) Nous nous bornerons à la description d'un petit nombre. 1°. Haricot d' Espagne blanc ; il se nomme encore haricot -fève blanc ^ et dans quelques parties du nord de la France haricot de Ca- nada. M. le Berriajs y auteur du nouveau la Quintine , qui a cultivé au-delà de cent es- pèces ou variétés de haricots, regarde celui-ci comme le type ou le père d'une partie des va- riétés de cette famille. Sa tige grêle s'élève très- haut , il fleurit par gros bouquets ; ses fleurs, belles et grandes, sont sujettes à couler dans les climats froids lorsqu'il n'est pas suffisamment espacé , ou quand il ne reçoit pas assez d'eau vers le temps de sa floraison- les cosses sont fort longues , larges et courbées en serpette. Le fruit est gros , renflé , d'un beau blanc. Si l'on consomme en vert les cosses du haut, et si l'on coupe les tiges à un tiers environ de leur hauteur, les nœuds du bas fournissent de nou- velles fleurs , et l'on fait une seconde récolte. Le même efîet a souvent lieu en laissant mûrir les cosses du haut ; mais alors la récolte est moindre. Il y a une variété de- ce haricot à fleur d'un beau rouge ponceau et à fruit violet. Quoiqu'on ne les cultive en général que pour la beauté de leurs fleurs, ils sont bons en vert et ( 2' ) en sec; si leur peau est un peu dure, ils sont très-farineux et de fort bon goût. Dans un bon terrain et dans les climats chauds , leur produit est très-grand ; lorsqu'on destine cette culture à. l'utile , on doit préférer le blanc. 2°. Haricot blanc d'Allemagne, àil haricot à longue cosse , haricot cossé , nommé encore haricot-sabre , à cause sans doute de la longueur et de la forme de ses gousses ; il s'élève très- haut. C'est une des plus belles variétés et des. plus productives. Nous avons la certitude que le haricot blanc d'Espagne fournit quelquefois cette variété. Elle est tendre en vert et bonne dans sa maturité. 3°. Haricot blanc hdtif. Cette variété paraîti être sortie du haricot nain hdtif de Hollande. C'est le plus hâtif des haricots à rames ; il est. d'un bon produit. La plante et le fruit sont moins grands que dans le haricot de Soissons , dont il va être parlé. Cueilli jeune, il est bon en vert. Sec, sa peau est un peu dure. Le haricot est d'un beau blanc. On peut le semer jusqu'au 2q juillet. 4*". Le haricot blanc de Soissons. C'est la qualité du terrain des environs de cette commune et de Noyon qui a établi la réputation méritée de cette espèce. Ses cosses nombreuses sont tou- jours bien garnies. On ne les mange en vert que ( 22 ) prises irès-lendres. Le haricot de Soissons n'est pas aussi gros qu'on le croit généralement ; mangé en sec , il est moelleux et de fort bon goût. Dans le commerce , on vend souvent la variété suivante pour celle de Soissons. 5°. Gros haricot hlajîc de Picardie, nommé encore haricot de Liancourt. La plante est plus grande et le fruit plus gros que dans le haricot de Soissons. Ce haricot, sec, a la peau un peu dure ; mais il est beau et très -productif. 6°. Haricot rond , haricot pois hlanc. Il s'é- lève moins que le soissons; ses cosses, nom- breuses et fort garnies, sont bonnes en vert. Ce haricot, sec, est moelleux , farineux et de fort bon goût. Il est généralement cultivé , et c'est avec raison. Il demande une terre légère ou très- bien divisée. -y". Hay^LCOt hlanc sans parchemin , pré- dhomme hlanc. Après le numéro 3 , c'est l'es- pèce la plus hâtive des haricots à rames. On peut eh semer, pour manger en haricot vert ou fraî- chement écossés , jusqu'au 20 juillet. Ses cosses sont petites, mais elles sont très - multipliées, bien garnies et d'un goût excellent. On les mange jusqu'à l'approche de leur maturité. On mange même en hiver les cosses et les haricots , après les avoir fait sécher ensemble. Ce haricot, très- intéressant , n'est pas assez multiplié j il est aussi ( =^5 ) fort bon en sec. Son fruit est un peu moins hlanc et plus petit que le précédent, avec lequel on le confond quelquefois quand l'un et l'autre sont écossés. 11 y a une variété plus petite encore , très-grenue et de forme irrégiilière. 8". Haricot jaune sans parchemin , pré- dhomme Jaune. Il a toutes les qualités et à-peu- près la forme du numéro 7 , dont il ne diffère que par la couleur et la qualité; il est plus tendre en vert. Ce haricot peut se confondre avec une variété à grain jaune rond , à-peu-près de même forme, dont la cosse a beaucoup de parchemin. 9°. Haricot pois rouge , haricot sans par- chemin rouge. Cette espèce , lente à mûrir, est d'un très-grand rapport en automne. Sa cosse, courbée, est fort tendre et sans lllet, même dans sa presque maturité. Il faut le planter de bonne heure dans la saison, le placer favorablement, et lui donner de très-grandes rames pour en obtenir une récolte complète. 10°. Le haricot rouge. Il s'élève fort haut et charge dans toute sa longueur. Ses cosses sont belles ; il est bon en vert et en sec. Culture des haricots. Tous les haricots demandent une terre meuble ou bien divisée , et amendée, autant qu'il est pos- sible, par des engrais consommés. En fumant, ( 4 ) on peut en mettre plusieurs années de suite dans le même terrain. La bêche ou la houe , toujours employées dans les 'petites cultures, sont les outils préférables pour préparer la terre destinée à recevoir les ha- ricots. Avec ces instrumens, souvent une façon suffit. Lorsqu'on se propose d'en faire de grands semis , et qu'on se sert de la charrue pour labou- rer le terrain , il faut donner trois façons quand le sol est compacte. La première, qui doit être la plus profonde possible , se donne en automne , la seconde à la fin de l'hiver , et la troisième à l'approche des semences , ou immédiatement avant de semer. Tous les haricots nains , ainsi que quelques va- riétés hâtives à rames, se sèment ordinairement , dans les climats froids et dans les climats tempé- rés de la France, depuis la fin d'avril jusqu'à la fin de jallet. Les semis les plus printaniers ne doivent être risqués qu'en petites cultures et dans des terres légères ; il faut couvrir bien légère- ment ces premiers haricots semés. C'est en géné- ral du 10 mai au lo juin que se font les grands ensemencemens. Dans les jardins chauds , à des expositions bien abritées , on peut se permettre de semer quelques planches ou plates-bandes de haricots dès la fin de mars , surtout si on veut s'assujettir à les couvrir toutes les fois que le ( 25 ) temps paraîtra l'exiger. Peu de plantes sont plus sensibles aux gelées que les haricots: ainsi , si on semait plus tôt ou plus tard en proportion de la température des climats, on aurait toujours égard aux gelées , qu'on doit craindre nu printemps comme en automne. On doit couvrir seulement de quelques lignes les premiers semis abrités. Lorsqu'on est à portée d'avoir du terreau de vieille couche , il est avantageux d'en mettre des- sous et un peu par-dessus cette semence. On regarnit les plants d'un peu de terre lorsqu'ils sont bien sortis. Au surplus , nous devons dire qu'il faut absolument que la terre soit échauffée pour que le haricot germe et prospère ; ainsi un sol froid peut exiger quelquefois un mois de re- tard pour le semis dans un même climat. On ne doit plus espérer la maturité des hari- cots semés au commencement de juillet 5 mais c'est alors et environ un mois plus tard qu'on en sème beaucoup pour manger en vert , ou pour confire, ou pour dessécher en vert, après les avoir fait blanchir , afin de les conserver pour l'hiver. On sème les haricots par rayons ou par touffes. La meilleure méthode est de disposer les cul- tures de haricots nains par touffes espacées de dix- huit pouces à deux pieds en tout sens. On pra- tique , de préférence avec la houe , de petites ( 26) fosses profondes d'environ quatre pouces sur une largeur à peu près double; on place au fond de trois à cinq haricots , qui ne doivent pas se toucher sur terre , et on les couvre d'un pouce environ de la terre la plus douce qui vient d'être remuée. Les haricots à rames peuvent aussi se semer par toufics , comme il vient d'être dit. Dans ce cas , on n'en met que trois dans chaque petit bassin. On sème plus souvent les grands haricots par rayons espacés d'environ un pied : alors on les met seul à seul et quelquefois deux à deux , distans de quatre à cinq pouces sur la ligne du rayon. S'il survenait , avant que les haricots fussent sortis de terre , des pluies capables de battre la terre , il faudrait , avec le petit crochet ou une serfouette à deux dents , en diviser la surface , briser la croûte qui s'est formée : sans cette opé- ration , les haricots , dont le germe ne pourrait percer ou percerait difficilement cette croûte , seraient exposés à pourrir. Lorsque les haricots sont bien développés , ou leur donne le premier sarclage , qui consiste à enlever toutes les mauvaises herbes , à biner et rapprocher autour du pied la terre qui reste au bord des petites fosses ou le long des rayons. On pose en même temps des rames aux espèces qui ( =7 ) doivent filer. Pour que cette opération soit bonne, la terre ne doit être ni trop sèclie ni trop hu- mide. On profite des beaux jours qui succèdent à un temps de pluie. On donne un second sarclage lorsque les cosses commencent à se former; il est très-avantageux lorsqu'il peut être fait à la suite d'un temps de pluie, comme nous l'avons dit à l'occasion du premier : au surplus , l'état du terrain et le temps indiquent toujours à l'homme intelligent l'époque favorable; mais , nous le répétons , cette opéra- tion doit tendre toujours à rechausser ou regar- nir le pied des haricots. Si on en découvrait; si on secouait les 'racines , soit avec l'inlrument , soit en arrachant des herbes à la main , on expo- serait la plante à périr. On cueille ordinairement peu de haricots en vert , et quelquefois point sur les espèces qu'on destine à récolter en grains secs; il est cepen- dant profitable de cueillir une partie des pre- mières cosses ; celles qui succèdent en pros- pèrent mieux , et la récolte en sec en est peu ou point diminuée. Si on manquait de rames, ou qu'on n'en eût que de très-petites pour les hari- cots grimpans , il serait plus avantageux de couper les filets à mesure qu'ils poussent , et d'arrêter les plantes à deux ou trois pieds de hau- teur, que de les laisser monter sans rames ou (28) même avec des rames qui n'auraienl que la moi- tié de la hauteur convenable ; car les sommi- tés retomberaient, s'entrelaceraient, et porte- raient aux Heurs une ombre, une privation de lumière qui empêcherait la fructification. Les plus grands haricots exigent des rames de dix à douze pieds. Dans quelques pays où on cultive ces haricots en grand et où les rames sont rares , on casse les montans ou filets avec une baguette un peu flexible ou houssine. Cette baguette, lancée par un mouvement rapide , casse le montant comme le couperait une faux. Si on sème les haricots à rames, en échiquier, par touffes de trois graines , comme nous l'avons dit, espacées de dix-huit pouces à deux pieds y suivant la force et la hauteur des espèces , on peut en disposer ainsi un carré d'une grande éten- due, en les ramant il y aura assez d'air pour leur prospérité ; mais si on les semait par rayons espacés seulement de dix à douze pouces , comme cela se pratique souvent , il faudrait former des planches de trois à quatre rangs , et laisser entre chacune un intervalle d'environ trois pieds et même d'une plus grande largeur, parce qu'alors on pourrait cultiver d'autres plantes basses entre ces planches. Pour conserver les variétés franches dans les ( 29 ) haricots, il faut, comme pour les pois , retran- clier à la floraison toutes les variétés qui tendent à dégénérer. Les cultivateurs jaloux de conser- ver pures les semences des espèces liàtives marquent et récoltent séparément les pieds qui donnent les premiers leurs fleurs. Dans les gran- des espèces , ils doivent , au temps de la récolte , mettre également à part, pour le même usage , les plus belles cosses , qui sont ordinairement aussi les premières mûres. Récolte et conservation des Haricots. Les haricots nains mûrissent plus également que les espèces à rames. Leur maturité s'annonce par les cosses , qui se sèchent et s'entr'ouvrent : alors on arrache les plantes , on les laisse par ja- velles ou par rayons pendant deux ou trois jours au soleil. On les arrange ensuite par bottes, et on les serre dans un lieu bien sec. On cueille les cosses des haricots à rames au fur et à mesure qu'elles mûrissent. Si on voulait attendre une maturité générale , les graines des premières cosses tomberaient et seraient perdues. Près de la maison et pendant plusieurs jours, on fait sé- cher ces récoltes partiellement, et on les place ensuite sur un grenier ou dans un autre lieu bien sec. Les haricots sans parchemin , tardifs , exi- ( 5o ) gent plus de temps et de soins que les autres espèces pour être bien desséchés. Il est toujours avantageux de les laisser dans leur cosse jusqu'à leur emploi. L'humidité est très - nuisible aux haricots mûrs , comme à la plupart des autres graines : il est important de les serrer bien secs. Si le temps y mettait empêchement , on les placerait sur des claies ou planchers dans des lieux secs , ou suspendus par paquets dans des granges, han- gars ou greniers , dont les ouvertures seraient fermées la nuit et par des temps humides. Il ne faut jamais laisser les haricots sur la terre ou sur le carreau , à un rez - de - chaussée humide. On ne doit les battre que lorsqu'on veut en faire usage ou les vendre. Dans leur cosse, ils se conservent bons pour l'ensemencement pen- dant cinq à six ans , et lorsqu'ils sont battus dans l'hiver qui suit leur récolte , ils ne se con- servent que pendant deux ans , encore faut - il qu'ils aient été serrés comme nous l'avons dit , et à l'abri du grand soleil et de l'humidité. Un setier de haricots de Soissons ou de Lian- court, du poids de deux cent quarante-six livres, donne jusqu'à deux cent quinze livres de farine. Ceux qui en veulent faire du pain, l'allient avec 1 de froment , ou avec | de froment et | de seifflp ( 5i ) ARTICLE 111. ^ Des Fèves de marais. Elles sont ainsi nommées , sans doute parce qu'elles se plaisent dans les terrains frais j on les nomme encore grosses fcves, quoiqu'il y en ait de fort petites variétés. C'est sans doute pour les distinguer des haricots , en général plus pe- tits et auxquels , dans beaucoup de pays , on donne le nom Ae, fèves. Nous ne parlerons que des meilleures et des plus productives , et nous commencerons par les plus hâtives. i". Layère naine hdtive. Elle a été apportée en Europe des côtes d'Afrique. Les Anglais la nomment mazagane. Dans sa variété franche, elle devient branchue, en petit buisson et charge beaucoup : elle s'élève , au plus , à un pied, mais elle est fort sujette à dégénérer. Tous les pieds dont les fleurs sont en retard , qui s'em- portent et ne donnent qu'une ou deux tiges , doivent être retranchés dans les plants destinés pour fournir de la graine. 2°. Fève julienne. C'était autrefois la plus hâtive qu'on connût en France. Elle est recom- mandable par sa précocité et son produit. La graine de son espèce franche est serrée dans la cosse , plus petite et un peu plus renflée dans sa 1 -, 2 ) . proportion que la sous-variété de l'espèce ordi- naire , nomraéeye;^'e picarde . 5°. Fhve a)erte. Celle-ci est originaire de la Chine. Sa qualité est bonne et son produit con- sidérable. Dans son port et son produit, elle res- semble à la précédente , à laquelle elle succède. Ses grains restent verts quand ils sont secs. 4-°. Fève à longue cosse. Elle s'élève un peu plus que la julienne et charge davantage. Ses cosses , plus longues que dans toute autre es- pèce, sont bien garnies. Sa qualité est très- bonne, on ne peut trop la multiplier. 5°. Grosse fève ordinaire. Cette espèce est la pkis généralement cultivée. Elle devient plus forte que toutes celles qui viennent d'être dé- crites. Mangée verte, elle est tendre, moelleuse. Son fruit a quelquefois plus d'un pouce de lon- gueur , il est élargi et aplati du côté opposé au germe. Elle fournit la variété connue sous le nom àQ.fève picarde. Celle-ci est moins forte en tout : sa culture est très-étendue dans les ci- devant pays d'Artois et de Flandre. 6°. Grosse fève ronde^ àhefève de Windsor. Sa tige est forte ; ses cosses , plus grosses et plus larges que dans toute autre espèce, ne sont gar- nies que de deux à trois fèves ; mais on retrouve dans la grosseur et la qualité de cette fève de quoi se dédommager du petit nombre de grains (35 ) qu'elle produit. Elle est très-moelleuse j sa saveur est douce , agréable. Elle résiste moins au froid que les autres ; on ne la sème qu'à la fin de l'hiver ou au commencement du printemps. Nous parlerons de la féverole lorsque nous traiterons des fourrages. Au surplus , sa culture est la même à peu près que celles des fèves en plein champ. Observations générales. Toutes les variétés de cette plante demandent en général une terre substantielle , amendée et bien divisée. Celles qu'on sème en automne ou pendant l'hiver doivent être placées de préférence dans des terres douces et légères, parce que, dans ces saisons , où l'on n'a point à craindre les effets de la sécheresse , on les exposerait à périr par la gelée si on les semait en terrain humide. Les semis d'été ne réussissent bien que lorsque cette saison est pluvieuse , ou dans les pays froids : car lorsque l'été est chaud et le terrain sec , les fèves de marais sont sujettes à être attaquées du puceron,, qui infeste les sommités tendres et sou- vent même presque toute la plante. Ainsi , dans les départemens méridionaux, il faut , pour évi- ter cet inconvénient , semer les fèves en au- tomne. 3 (54) Quand on y aperçoit des pucerons , on en- lève toutes les jeunes pousses qui en sont gar- nies. Pour exprimer cette opération , on dit ordinairement /?mcer, châtrer les fèves . Elle est inutile lorsque les plantes sont vigoureuses et sans insectes. Si on la croit nécessaire, on doit la faire pendant la floraison; on coupe tout ce qui est au-dessus des dernières fleurs. Il est avantageux de butter, de chausser les fèves et de détruire toujours les mauvaises herbes qui croissent parmi elles ; leur végétation se sou- tient mieux ; elles en sont plus belles et pro- duisent davantage. Pour conserver les espèces franches , il faut les éloigner , autant qu'il est possible , des autres espèces ou variétés, afin que les poussières séminales ne se communiquent pas. On doit même , lorsque les plantes sont en fleur , arra- cher ou marquer pour être mangées en vert, les fèves qui paraissent dégénérées. Si on n'a besoin que d'une petite quantité pour la semence , on met à part pour cela les plus belles , les pre- mières mûres. Avec ces précautions , on parvient à les conserver pendant bien des années dans leur qualité franche; il est néanmoins avanta- geux de les changer de temps à autre de sol et de climat. ( 55 ) Culture en petit. On sème des fèves en bordures , en plates- bandes, en pleins carrés ou en planches, suivant la saison , la disposition du terrain ou la volonté du cultivateur. Dans tous les cas , elles doivent être espacées de trois à cinq pouces sur la ligne des rayons, et les rangs éloignés de dix à q^uinze pouces, suivant la grosseur de la fève. En au- tomne et en hiver, on les couvre d'un pouce de terre , et d'une double épaisseur environ lors- qu'on sème au printemps ou en été. Dans les pays oii on ne craint pas les gelées, on sème des fèves à terrain découvert et à toute exposition dès le commencement de novembre. On en sème aussi à cette époque dans les pays tempérés et dans les climats froids ; mais c'est alors à des expositions favorables , à l'abri d'un mur, d'une haie ou d'une palissade; on y continue ces semis , quand le temps le permet, jusqu'à la fin de fé- vrier, soit parce que les premiers semis sont ex- posés à périr , soit parce qu'il est avantageux d'avoir des produits qui se succèdent. Aussitôt que les fèves sont levées, on rapproche la terre des jeunes tiges , et cette opération se renouvelle jusqu'à deux fois , à mesure que les plantes s'élèvent. Si la gelée s'annonce d'environ quatre degrés, on couvre avec des cossas de pois, 3.. ( 56) (les feuilles d'arbres , avec de la fougère ou de la grande litière , et on découvre aussitôt que le temps le permet. Vers la fin de février ou com- mencement de mars , on en sème au midi sur des terrains en pente , et quinze jours plus tard on peut en placer en pleins carrés à toute expo- sition. On continue ces semis jusqu'au commen- cement de juillet, mais alors en terrain frais , comme il a été dit déjà. Pour les premiers et pour les derniers semis , on préfère les petites espèces , notamment la naine hâtive^ la julienne et la picarde* C'est toujours en mars ou au commencement d'avril qu'on doit semer toutes les fèves qu'on destine à être récoltées en maturité. Si on coupe , près de terre , la tige des fèves de marais des premières cultures, après avoir cueilli leur produit en vert , ces plantes repous- sent et donnent une seconde récolte assez abon- dante , lorsque le temps est favorable , et qu'on a soin de leur donner les façons convenables. On bine immédiatement après celte opération. Culture en grand. Dans diverses parties du midi et dans presque tout le nord de la France , on voit de grandes cultures de fèves de marais , et les régions du centre n'en offrent que de petites parties : c'est ( 37 ) cependant une production intéressante qu'on devrait d'autant moins négliger, que les grains d'automne lui succèdent avec avantage ou toute autre espèce du printemps. A la fin de l'été ou en automne , on donne au terrain qu'on destine à recevoir des fèves de ma- rais , deux labours à un mois et demi à-peu-près de distance. Le premier doit être le plus profond possible j le second, par lequel on enterre le fu- mier lorsqu'on croit l'engrais nécessaire , sera plus favorable en donnant aux sillons une direc- tion qui croise les premiers. Lorsqu'on n'a plus à craindre l'effet des gelées, on donne une troisième façon , qui doit servir à l'ensemencement. La saison la plus convenable aux grands semis, pour le nord et les parties tempérées , est de la fin de février au commen- cement d'avril ; un peu plus tard dans les terrains frais. Quelques cultivateurs sèment à la volée et en- terrent les fèves par le dernier labour. D'autres sèment à distance inégale dans les sillons , et ils en laissent quelquefois un vacant entre les rangs, afin de leur donner plus d'espace. Mais ces mé- thodes ne sont pas les meilleures; il est infini- ment plus avantageux d'espacer les rangs de fèves de deux pieds au moins : les plantes en de- viennent plus fortes, plus branchues , elles fruc^ ( 38 ) _ tifrent davantage j il y a de l'économie dans la semence , et les façons qu'on peut donner avec l'araire ou avec la houe à cheval , sont moins coûteuses et disposent favorablement le terrain pour les récoltes suivantes. Pour semer de la manière la plus convenable, une personne chargée d'un panier garni de fèves suit le laboureur , et laisse tomber ou place dans le sillon , près de la terre renversée , les fèves à trois , quatre ou cinq pouces de distance , sui- vant la grosseur de l'espèce , et continue ainsi jusqu'au bout du champ. On trace le second et le troisième sillon sans y mettre de semence , et on proportionne leur largeur pour former l'inter- valle convenable ; le quatrième se garnit comme le premier, et on continue de môme. Quelquefois on met deux fèves ensemble ; mais cette précaution est supperflue lorsque la terre est bien ameublie et que le temps paraît favorable à la germination. Si on pratiquait cette méthode , il faudrait arracher le plus faible de ces deux plants, dans le cas où les deux fèves auraient germé. Environ quinze jours après lalevée des plantes, on bine avec l'araire , ou la petite charrue dite cultii^ateiir, que nous avons déjà indiquée. Au bout d'un mois 5 à -peu -près, on renouvelle cette opération , et on donne une troisième et (39 ) dernière façon après un même espace de temps. Dans ces binages, il faut toujours avoir l'atten- tion de renverser la terre contre les plantes. Cette opération, qui rechausse ou butte, assure leur prospérité et promet une récolte abon- dante. Récolte et conservation. Lorsque les fèves sont en maturité , ce qui se remarque facilement par les tiges qui se fanent et les cosses qui prennent une couleur noire, on les coupe tout près de terre ou on les arrache. On les place par rayons ou javelles , et on les retourne pour les faire sécher. Leur dessication est assez lente j il faut , autant qu'il est possible, que la récolte s'en fasse par un beau temps. Lors- qu'elles sont sèches , on les met en bottes , qu'on laisse debout sur le champ pendant quelques jours, si le temps le permet. On les rentre en- suite et on les place en un lieu sec Les fèves conservées sèchement lèvent au bout de trois ans : elles rougissent et noircissent même en vieillissant, mais elles ne sont pas moins propres à la germination. Gardées dans leur cosse, elles s'y conservent bonnes pour la semence pendant cinq ans. Tout le monde connaît l'usage des fèves de marais. On en mange une grande partie jeunes (4o ) et fraîchement écossées, avec l'écorce tendre qui recouvre les deux portions ou lobes du corps farineux. Quand elles ont acquis de la grosseur, on enlève cette écorce , qui est dure et coriace , et dans cet état on les aipipeWeJeyes dérobées ou privées de leur robe. Elles se digèrent alors avec plus de facilité. Les habilans des grandes com- munes ne mangent les fèves de marais que jeunes ou dérobées , soit entières , soit en purée , qui est excellente. Mais on fait dans les vaisseaux un grand emploi des fèves de marais sèches , pour la nourriture des équipages. Il est donc bien impor- tant de les multiplier aux environs des ports de mer. Les Hollandais vendent aux autres nations des fèves de marais jeunes, qu'ils dessèchent. Il nous a paru que c'était l'espèce n°. 5. Aux envois de ces fèv^es, ils joignent dans chaque paquet un peu de sariette, satureia ^vulgaris, IL., qui sert à les assaisonner , et qu'on appelle, pour cette raison, en Allemagne, herbe aux fèves . Beaucoup de Français les dessèchent aussi bien qu'en Hollande. Cet art consiste à les prendre jeunes, à les exposer sur des tamis, pendant long- temps et à plusieurs reprises , au feu d'un four- neau ou dans un four, et à les tenir ensuite bien sèchement dans des papiers qu'on attache à une cheminée. ( 4t ) Un quintal de fèves de marais , réduit en fa- rine , donne quatre-vingt-dix et jusqu'à quatre- vingt-quinze livres. Si on voulait les faire entrer dans la composition du pain , on les allierait avec trois quarts de froment , ou avec trois quarts de seigle, ou avec trois huitièmes de froment et trois huitièmes de seigle , ou avec moitié froment et un quart de seigle , ou avec un quart de fro- ment, un quart de maïs et un quart d'orge, etc. ARTICLE IV. Du Pois chiche. Cette espèce de légumineuse n'a que des rap- ports fort éloignés avec le pois proprement dit. On appelle encore le pois chiche pois cornu , pois pointu, à cause de la forme de sa graine , garvanche ou garavanche , cesseron , seiron , sesésj etc., cicer arietinum , L. Il y a trois variétés de pois chiche , l'une jaune à gros grains , une à grains blanchâtres et petits, et la troisième à grains rougeâtres ; la fleur de cette dernière est couleur de rose , et la fleur des deux autres est blanche. La culture des pois chiches n'est pas assez ré- pandue. Il n'y a en France que quelques-unes des parties méridionales qui la pratiquent. On pour- rait l'y propager davantage et l'étendre dans les (42 ) départeraens tempérés, et même dans ceux du Nord , comme fourrage. Nous nous réservons d'en dire quelque chose dans une instruction sur les plantes à fourrage. Ici, nous les considérons uniquement comme une substance alimentaire pour les hommes. Le pois chiche n'étant parvenu en France que par la communication avec l'Espagne et l'Italie, où il est très-abondant, il réussira d'autant mieux parmi nous , que nous le cultiverons dans des climats plus chauds. C'est spécialement aux ha- bitans de ces climats que nous conseillons de le cultiver plus en grand. L'ensemencement du pois chiche doit se faire immédiatement après celui des fromcns dans les départemens méridionaux , et au printemps dans ceux du milieu du royaume ; on attendra que la terre soit un peu échauffée. Le terrain qu'on destine à être ensemencé en pois chiches , a besoin d'être fumé et labouré comme celui qu'on destine au froment. On lui donne trois façons, s'il est compacte, et deux , s'il est léger. On sème à la volée ou par rayons : dans ce dernier cas , un homme suit la charrue et jette dans la raie les grains j ils sont ensuite recou- verts par la charrue , qui ne trace alors que des sillons peu profonds. On observe, à cet égard, (45 ) les mêmes précautions que pour le pois ordi- naire, pisiini. Lorsqu'on sème à la volée, c'est la herse qui recouvre. Le pois chiche se sème plus clair de moitié au moins que le pois ordinaire , quoique les grains en soient gros : quarante livres ou environ , poids de marc , suffisent pour un arpent de neuf cents toises carrées. Celte plante , quand elle €st à l'aise , se dispose comme un arbrisseau , avec un grand nombre de ramifications. Par conséquent un pied a besoin , pour bien végéter et bien produire , d'un espace au moins de six pouces en tout sens. C'est d'après cette notion qu'il faut en régler l'ensemencement. Ou serfouit ou on bine le terrain de temps en temps s'il y croît beaucoup d'herbes , qui nui- raient aux pois chiches, La récolte se fait quand les gousses sont jaunes et sèches : alors on coupe, on arrache les tiges; on les laisse sécher par petites javelles qu'on re- tourne , et ,on les bat , soit à l'air par un temps sec , soit dans des granges ou sous des hangars. Il ne faut pas battre les pois chiches avant qu'ils soient bien secs , parce qu'on écraserait les grains. Les pois chiches , dans le climat de Paris , n'ont pas une saveur aussi agréable que dans les climats chauds. Là, on les mange en potage. (44) en purée ou cuits entiers , et assaisonnés comme des pois secs ou des lentilles , et on les trouve très-bons. Il est bon de prévenir que souvent ils sont difficiles à cuire ; mais il y a plusieurs moyens d'en faciliter la cuisson : l'un est d'ajouter à l'eau un nouet rempli de cendres; l'autre est de les faire cuire dans une eau qui a déjà ser?i pour cuire des épinards ; la troisième enfin est de les faire tremper la veille dans une eau de bonne qualité, et de ne les exposer sur le feu que le lendemain. On brûle les tiges récoltées à leur maturité ; quelquefois on les donne au bétail comme on lui donne des cosses de pois et de lentilles. ARTICLE V. De la Lentille. On en cultive deux espèces : la première est nommée grosse lentille blonde de Galardon ; la seconde est la petite lentille , d'un brun clair rougeâtre , nommée petite lentille rouge , et ci- deysiiit lentille à la reine. La première fournit une sous-variété plus petite en tout et un peu moins blonde. Leur culture et leur usage sont les mêmes. ( 45 ) ■ Culture. Les lentilles demandent un terrain doux , lé- ger , sablonneux , qui n'a besoin que d'un labour à bras , ou deux à la charrue. Elles ne réussis- sent dans les terres substantielles que lorsque celles-ci sont parfaitement divisées , ameublies. Pour cet effet , il faut deux labours à bras , un avant et l'autre après l'hiver, ou trois ou quatre à la charrue , savoir , un ou deux avant l'hiver , un à la fin de cette saison , et le dernier au temps de l'ensemencement. On sème les lentilles à la volée dans les pays de grande culture ; il vaut mieux les semer par rayons de douze à dix-huit pouces , suivant l'es- pèce , ou par petites touffes , disposées en échi- quier, éloignées en tout sens les unes des autres de dix à quinze pouces ; on met six à huit len- tilles à chaque touffe. En semant par rayons ou par touffes, on détruit facilement les mauvaises herbes par un ou deux binages faits à propos, et par un temps qui ne soit ni trop humide , ni trop sec. Ces façons qu'on peut donner avec la petite charrue à biner , si avantageuse , donnent un produit beaucoup plus considérable, et sont aussi très -favorables aux récoltes qui doivent succéder aux lentilles. Lorsqu'on sème à la volée, on met trente livres (46 ) lie semence, poids de marc, pour l'arpent de neuf cents toises , sans distinction de l'espèce , attendu que les grosses doivent être semées plus clair que les petites. Dans ce cas , après avoir semé, on herse deux ou trois fois pour couvrir la semence et unir la surface du terrain. Si c'est un petit espace , on recouvre avec un râteau. On arrache les mauvaises herbes à la main lorsque le besoin l'exige, et on façonne avec la ser- fouette. En semant par rayons, dix-huit à vingt livres suffisent à l'arpent. Si l'on désirait avoir des lentilles dans une terre forte ou un peu humide, on disposerait le terrain par rayons et en ados élevés de huit à dix pouces. Cette opération se fait en automne un mois après que la terre a été bien labourée. A la fin de l'hiver, on donne sur les ados une légère façon à la bêche ou à la houe , et on retire des rayons enfoncés la terre douce qui peut y être tombée , pour la remettre sur ces ados au temps favorable ; on sème un rang de lentilles sur ces ados, qui doivent avoir douze à quinze pouces de largeur. On sème les lentilles lorsqu'il n'y a plus à craindre l'efFet des gelées , soit à la fin de l'hiver, soit au commencement du printemps , un peu plus tôt ou un peu plus tard , suivant la chaleur du climat et la nature du sol. ( 47 ) La lentille est une des plantes légumineuses qui mûrit le plus promptement. Il faut veiller le temps de sa maturité : si on la laissait trop sécher sur pied, on perdrait beaucoup de grains, à cause de la facilité avec laquelle les cosses s'ou- vrent. Les pigeons sont très-friands des lentilles. Dans les pays où il y a beaucoup de ces oiseaux, on doit les faire veiller vers l'époque de la ma- turité. Lorsque la plante est en partie fanée , que les cosses prennent une couleur d'un gris foncé, jaunâtre, et que quelques-unes parais- sent disposées à s'ouvrir , on les arrache , ou on les coupe à la faucille ou à la faux. Par-tout oii les lentilles ne montent pas haut, on les arrache à la main ; dans les pays oii on les cultive dans les vignes , on les suspend aux échalas. Cette opération étant faite par un beau temps, elles peuvent être sèches en deux jours. On les met ensuite par bottes et on les serre en lieu sec pour les battre au besoin. Si elles prenaient de l'humidité par un trop long séjour sur terre , elles perdraient de cette couleur blonde qui en fait la qualité. Nous observerons que les lentilles, comme les pois , cuisent difficilement , si on les récolte dans des terres humides et compactes : aussi convient- il mieux de les semer dans une terre légère , où elles réussissent toujours bien. ( 48 ) On sait que la lentille donne une nourriture substantielle , saine et agréable , soit qu'on la mange en grain, soit qu'on en fasse des purées. On ne les mange jamais en vert comme les pois ou les fèves. L'eau dans laquelle elles ont été cuites fait une bonne soupe. Un setier de lentilles , du poids de 235 à 240 livres, donne plus de 200 livres de farine. Si on voulait les faire entrer dans la composition du pain , on pourrait les allier , ou avec trois quarts de froment, ou avec trois quarts de seigle, ou avec moitié froment et un quart de seigle , ou avec un quart de froment , un quart de maïs et un quart d'orge , etc. L'insecte nommé mylabre , qui attaque les pois, attaque aussi les lentilles. Vojez ce que nous en avons dit à la fin du premier article de celte Instruction concernant les pois. ARTICLE VL De la Gesse blanche. La gesse est une plante annuelle, qui approche du pois par toutes ses parties, par sa tige , ses feuilles, sa fleur et ses graines. Elle en diffère, parce que ses gousses sont rebordées , ses grains aplatis et tailles en biseau, et sa tige ailée. (49) c'est-à-dire garnie d'une membrane non inter- rompue dans toute sa longueur. On lui donne encore les noms de pois-gesse, pois carré , lentille d'Espagne , lentille car- rée , pois breton y garoute , garousse, etc. Il y a beaucoup d'espèces de gesses , si on y comprend celles qui sont sauvages. On compte parmi ces dernières le maccuson , dont la racine douceâtre est recherchée par les animaux , et sur-tout par les cochons. On a essayé en France de la cultiver pour raméliorer ; en Hollande , on en fait des cultures assez productives , pour en vendre communément dans les marchés. Cette racine n'est pas sans mérite. Les gesses les plus estimées et les seules dont nous nous occupons, sont la gesse blanche , la moyenne et la petite , connues dans les départemens du sud et de l'ouest de la France, où elles réussissent mieux que dans ceux du nord. Il est probable que la moyenne est une variété de la grosse, de sorte qu'on pourrait les réduire à deux , c'est-à- dire , à la grosse et à la petite ; celte dernière est plus employée pour fourrage que pour nourrir les hommes. Nous en traiterons dans les Instruc- tions sur les fourrages. A l'égard de la gesse blanche , on la cultive dans le même terrain et de la même manière que les pois et les lentilles : terre médiocre , 4 ( 5o ) plus ou moins de labours, selon la qualité du sol ; ensemencement à la volée ou mieux par rayons ^ binages, si c'est par rayons j dans tous les cas, récolte par un temps sec , et conservation de la graine dans ses cosses jusqu'au moment du be- soin : tel est à-peu-près ce qui concerne la cul- ture de la gesse. Nous ajouterons seulement que si on veut se- mer la gesse dans un des départemens voisins de Paris, il faut la semer en mars ou avril , et trois boisseaux ou 60 livres ou environ par arpent de 900 toises carrées suffisent pour l'ensemence- ment à la volée , car il n'en faut qu'environ moi- tié par rayons. La gesse se mange en vert et en sec, comme les pois, et fait d'excellente purée. Un setier de gesse de 200 à 240 livres pro- duit de 190 à 200 livres de farine. Si on voulait en faire du pain , il faudrait l'allier ou avec les trois quarts de froment , ou avec les trois quarts de seigle , ou avec moitié de froment et un quart de seigle , ou avec un quart de froment, un quart de maïs et un quart d'orge. ARTICLE VII. De la Vesce blanche. Quoiqu'on la regarde comme une variété de la vesce commune annuelle , elle paraît être une (5i ) espèce. La plante et la semence en sont moins fortes j cultivée isolément, elle ne varie pas. On la nomme mal à propos lentille de Ca- nada. Comme la plupart des autres vesces, elle fait un excellent fourrage ; mais nous n'en par- lons ici que sous le rapport de son grain , qui se mange sec comme les lentilles, soit entier, soit en purée. Aucune semence légumineuse ne fournit une farine plus propre à entrer dans la composition du pain. Un setier , du poids de 240 à 260 liv. , donne au moins 200 liv. de farine. Pour la faire entrer dans le pain , on l'allierait avec deux tiers de froment , ou deux tiers de seigle, ou avec un quart de seigle , un quart de froment et un quart d'orge , etc . La terre qui convient à la lentille est propre à cette espèce de vesce ; elle supporte mieux qu'elle, cependant, une terre substantielle. On la cultive à-peu-près de même et on met une égale quantité de semence; mais, nous le répé- tons , il est infiniment plus avantageux de semer ces sortes de graines par rayons, assez espacés pour les façonner avec la petite charrue , que de les semer à la volée. Il en résulte les grands avantages de l'économie sur la semence , d'un produit plus certain , plus beau et plus considé- rable, et de disposer favorablement la terre à d'autres récoltes. /\ ( (52 ) Cette plante craint moins les fioids que la lentille; dans les départemens méridionaux et même dans les parties tempérées, elle doit être semée à la fin d'août. Le semis étant fait, sui- vant la méthode la plus avantageuse , par rayons, comme nous l'avons dit, on donne avec la petite charrue , ou même à bras , à la fin d^octobre ou commencement de novembre, une façon, faite de manière que la terre soit renversée des deux côtés du rayon, tout près ou contre les jeunes plantes , sans enterrer les sommités. Ce buttage garantit du froid et fortifie les plantes. Au com- mencement d'avril , on renouvelle de la même manière l'opération du binage. Cette seconde façon qui les fait taller , accélère aussi la végéta- tion. Le produit de ces semis d'automne se ré- colte dans la plus belle saison , et c'est encore un grand avantage j car une dessication prompte est nécessaire à cette plante. Lorsque le climat ou le sol ne permettent pas de semer avant l'hiver , on doit le faire à la fin de février ou en mars , et donner en temps con- venable les façons que nous avons indiquées. mm^ ■^m^^, îf:^ SÊS^0i "^0 ^mf '■t^^j^a^ m '# f y ^f^à