^.^/' Digitized by the Internet Archive in 2010 with funding from University of Ottawa Iittp://www.arcliive.org/details/traitdepliysiol08burd TRAITE DE > PHYSIOLOGIE. TOME VIII. PARIS. — IMPRIMERIE DE COSSON , 9 , rue Saint-Germain-des-Pi'és. TRAITÉ DE PHYSIOLOGIE CONSIDÉRÉE COMME SCIENCE D'OBSERVATION , PAR G. F. BURDAGH , PROFESSEUR A l'uHIVERSITÉ DE KOEHIGSBEHG , avec des additions de MM. les professeurs BAER, MEYEN, MEYER, J. MULLER, RATHKE, VALENTIN, WAGNER, Traduit de l'allemand , sur la deuxième édition , PAR A. J. L. JOURDAN, MEMBRE DE t' ACADÉMIE ROYAIE DE MÉDECINE. TOME HUITIÈME. PARIS , CHEZ J.-B. BAILLIÈRE, LIBRAIRE DE l' ACADÉMIE ROYALE DE MÉDECINE , RUE DE t'ÉCOIE-DE-MÉDECINE , 13 Hs. A LONDRES, MEME MAISON, 219, REGENT- STREET. 1837. DE LA PHYSIOLOGIE CONSIDÉRÉE COMME SCIENCE D'OBSERVATION. .- . . : =8 DEUXIÈME SUBDIVISION. DES PRODUITS DE LA VIE VÉGÉTATIVE EN GÉNÉRAI. CHAPITRE PREMIER. Des parties constituantes et propriétés générales des produits de la vie végétative. § 829. Pour arriver à la connaissance de la vie , il est in- dispensable d'analyser les corps organiques , et d'en séparer les parties constituantes. Mais le désir d'épuiser notre sujet ne doit point nous entraîner au-delà du domaine positif de la pure et simple intuition de la nature. L'analyse a des bornes , et à chaque instant nous sommes fondés à demander si le scalpel ou le microscope n'a pas plus de part que la substance organique elle - même aux différences qui frappent nos regards. Car , comme on crée des images fantastiques pour se faire une idée nette des phénomènes , sans pour cela croire que ces images sont des êtres réels , comme les ato- mes . par exemple , ne sont que des espèces de jetons propres à faciliter l'intuition des rapports de quantité , de ^même il est bon , à certains égards , de savoir tout ce qu'on peut faire VIII. 1 2 COHESION DES PARTIES de la siibstancG organique , eL sous quelles formes diverses elle est apte à se produire dans telles ou telles circonstances données , sans que nous soyons d'après cela en droit de pen- ser qu'elle se comporte réellement ainsi dans l'organisme vi- vant. Il ne faut pas nous laisser égarer par Topinion que la connaissance de ce qui nous est caché nous initiera aux mys- tères de la nature , et que nous parviendrons à approfondir la vie en séparant et analysant de plus en plus. Quelque mi- nimes que puissent être les particules, elles ne nous montrent encore que le côté extérieur de la vie, et jamais elles ne nous en dévoilent la cause. C'est en nous plaçant sous ce point de vue que nous allons examiner les parties constituantes et les pro*priétés générales du corps organisé. AUTICLE I. Des parties constituantes mécaniques du corps organique. Les parties constituantes mécaniques , dont nous avons à nous occuper d'abord , peuvent être considérées eu égard à leur cohésion ou à leur configuration. . I. Cohésion des parties constituantes du corps. 1° Nous trouvons en elles tous les degrés possibles de co- hésion , et , sous ce rapport , elles forment une série non in- terrompue, qui s'étend depuis l'émail des dents jusqu'au véri- table gaz, en nous présentant successivement les os, les ongles , les cartilages , les tendons , les muscles , les glandes, les membranes muqueuses , les membranes séreuses , la neu- rioe, le tissu cellulaire , le mucus , la graisse, la bile , la sa- live , les larmes , la sérosité et la vapeur aqueuse. Les extrê- mes de cette série marquent un degré inférieur de vitalité , et confinent aux corps inorganiques. Toute partie solidifiée est une existence repliée sur elle-même , n'ayant plus de ti- tres qu'à la particularité , et peu propre à entrer en conflit avec CONSTITUANTES DU CORPS. O d'autres, à réagir sur elles ; mais , dans tout ce qui a la forme de gaz, l'expansion prédomine à tel point, qu'il n'y a plus de limites propres, que l'existence n'a plus qu'un caractère purement général , et qu'elle est transitoire. Les degrés in- termédiaires de la cohésion annoncent des relations plus multipliées et une vie plus active ; le liquide , qui est plus gé- néral que le solide , et plus particulier que le gaz , devient le moyen d'union entre ce qui a des bornes fixes et ce qui n'a point de limites : c'est donc lui qui sert surtout à l'œuvre de la formation , tandis que le mou , alliant la permanence et la particularisation de la forme avec la mutabilité et l'activité , occupe le plus haut degré de Téchelle , et se trouve mis en réserve pour la vitalité intérieure (§ 660 ). Plus la vie de l'or- ganisme est élevée , plus ces antagonismes ou contrastes sont développés , et plus aussi est grande la diversité de la cohé- sion; de même que la liquidité l'emporte chez l'embryon et la solidité chez le vieillard, de même aussi c'est tantôt l'une et tantôt l'autre qui prédomine dans les organismes inférieurs. 1° 11 faut distinguer de ces divers degrés de la cohésion , indiquant la plus ou moins grande aptitude des parties à se détacher les unes des autres , la faculté qu'elles ont de se déplacer et de revenir ensuite au lieu qu'elles occupaient au- paravant. La compressibilité , ou la faculté de céder à une pression qui s'exerce de tous les côtés à la fois, et l'élasticité, ou celle de s'épandre quand la compression cesse , ne sont fortement prononcées que dans les gaz, parce que l'expansion prédomine en eux ; cette faculté est si faible déjà dans l'eau que , d'après Dalton (1) , une pression de deux atmosphères ne fait pas perdre à ce liquide plus de 0,000046 de son vo- lume. Or, en admettant que le corps humain soit dans le cas de l'eau sous ce rapport, si nous évaluons son volume à quatre mille cinq cents pouces cubes, le poids de deux atmosphères ne le comprimera que d'environ 0,207 pouce cube; il peut donc très -bien supporter la pression de l'atmosphère, qui n'est que de quinze livres et demie à peu près par pouce carré, (1) Bibliothèque universelle de Genève, t. LIV, p. 139, 4 COHÉSION DÈS PARTIES de sorte qu'elle s'élève à vingt-sept mille livres pour sa sur- face entière de douze pieds carrés. L'expansibilité,ou la fa- culté d'acquérir un plus grandvolume par l'action d'une cause mécanique , et de se resserrer ensuite sur soi-même , appar- tient en propre aux parties solides du corps , et dépend sur- tout de l'eau qu'elles contiennent, tandis que le défaut d'ex- pansibilité se rattache principalement à la constitution ter- reuse. Les liqueurs filâmes, et après elles les parties molles , sont susceptibles de s'allonger , c'est-à-dire que leurs extré- mités, leurs surfaces ou leurs bords peuvent s'éloigner les uns des autres , changement dans lequel un diamètre s'agran- dit toujours aux dépens d'un autre. Cette faculté, unie à celle de reprendre ses proportions précédentes , c'est-à-dire à la contractilité , appartient spécialement à la peau , au tissu érectile , par exemple , à la rate (§ 782 , 16°), et ensuite au tissu cellulaire ; elle est moins prononcée dans le tissu mus- culaire , et moins encore dans le tissu scléreux. La contrac- tilité manque lorsque la rigidité est extrême , comme dans l'ivoire , ou la mollesse excessive , comme dans la neurine. A un certain degré de rigidité , l'extensibilité et la contractilité sont favorisées par la gracilité ; ainsi , au dire de Weber, un cheveu peut s'étendre d'un tiers environ de sa longueur , et ' revenir ensuite assez sur lui-même pour ne demeurer que d'un dix-septième plus long qu'il ne l'était auparavant : dans les os , l'expansion et la contraction n'ont lieu que d'une manière insensible et graduelle. Elles y sont plutôt l'effet d'un chan- gement de direction qu'a subi la formation. Lorsque les parties solides n'éprouvent de pression que d'un seul côté , elles fuient et s'étendent dans un autre sens , de manière que l'élasticité , qui paraît ici sous l'aspect de ce qu'on nomme le ressort , n'est à proprement parler qu'une forme de la contractilité. La mollesse , ou l'aptitude à recevoir une impression mécanique , appartient à tous les systèmes plastiques; elle accompagne le ressort dans les muscles, elle existe sans lui dans la neurine. La dureté est propre au tissu osseux et au tissu corné. La flexibilité , ou la possibilité de rapprocher les bouts ou les bords opposés , n'est pas toujours en raison directe de la mollesse ; on la rencontre aussi , avec CONSTITUANTES DU CORPS. D peu de mollesse, dans le tissu scléreux , où elle est portée à un haut degré , et avec une contractililité considérable , non seulement dans les cartilages , mais encore dans les poils et les ongles ; car le diamètre est ici une chose qu'on doit pren- dre aussi en considération. L'inflexibilité ou la rigidité carac- térise les os. 3° Le corps humain est moins pesant , ou même plus léger que l'eau. D'après des expériences faites par Robertson, sur dix hommes , trois avaient la même pesanteur spécifique que l'eau , un était un peu plus lourd , et six étaient plus légers. L'un de ces derniers , du poids de cent quarante-six livres , occupait autant d'espace que quatre mille cinq cents pouces cubes d'eau. Or si, en adoptant les poids et mesures de l'An- gleterre, nous admettons, comme l'ont fait Allen et Pepys (1) , qu'une livre d'eau occupe 28,875 pouces cubes, l'homme du poids de cent quarante-six livres remplissait autantd'espace que cent cinquante-cinq Hvres d'eau , de sorte que sa pesanteur spécifique éiait à celle de cette dernière dans la proportion de 942 ; 1000. Mais, pris chacun à part , tous les solides, les poumons exceptés, à cause de l'air qu'ils contiennent, et tous les liquides du corps humain, à l'exception de la graisse, sont plus pesans que l'eau. Nous allons présenter le tableau des recherches qui ont été faites à ce sujet ;] à l'exception de deux , toutes les indications ont été fournies par Schubler et KapfF (2) , sur des parties humaines , et, quand plusieurs ob- servations se rapportaient à une seule , on a pris la moyenne. Dents 2192 Cartilage 1159 Fémur 1791 Synovie (de Cheval) . . 1099 Os temporal 1613 Tendons 1091 Rocher 1501 Cristallin (Chenevix) . . 1079 Tête du fémur 1267 Thyroïde 1078 Cheveux 1257 Muscles 1073 Ongles , 1191 Cœur 1069 (4) Philos. Tram., 1809, p. 414. (2) Untersuchungen ueher das specifische Gowicht thierischer Suh \ stanzen. Tubinge , 1832 , in-S". 6 CONFIGtlRATION DES PARTIES Aorte 1057 Urine 1022 Peau 1057 Sérosité de l'ovaire. . . 1014 Foie. . . . . . . . . . 1056 — du péritoine ^016 Nerfs ^046 — du péricarde .... 1013 Veine cave. ...... 1045 Pancréas. ... .... 1013 Rein 1040 Parotide 1012 Rate 4037 Sérosité de la plèvre. . 1012 Cerveau 1034 — du cerveau 1007 Bile 1026 Salive (Mitscherlich). . 1007 Sérosité de la tunique Sérosité de l'œil. . . . 1005 vaginale 1024 Graisse 903 Lait . 1024 Poumons 645 II. Configuration des parties constituantes au corps. § 830. La configuration des parties solides les plus simples du corps humain I. A fait naître des opinions fort différentes les unes des au- tres, dont nous devons Texposé à Weber surtout (1). 1° Les anciens, sur les traces desquels marchait encore Reil (2) , admettaient des fibres élémentaires simples , qui , suivant eux , produisaient des lamelles , des tubes , etc. , en s'appliquant les unes contre les autres. Mais c'était là plutôt un essai de construction géométrique que l'expression d'un fait , attendu que beaucoup de parties n'ont pas de struc- ture fibreuse et ne sont point réductibles en fibres. 2° Ruysch avait été conduit par ses belles injections à pen- ser que tous les tissus, quels qu'ils soient, se composaient uniquement de ramifications de vaisseaux sanguins. Mais Al- binus a fait voir qu'entre les réseaux capillaires , quelque ser- rées qu'en puissent être les mailles , il existe des points'dé- pourvus de vaisseaux, qu'on appelle aujourd'hui îles ou îlots de substance. B" On eut ensuite recours au microscope, et, pour rendre (1) Anatomie des Menschen , t. I , p. 128-166. (^)ArcUv,X, 1,43. CONSTITUANTES DU CORPS. 7 accessible à la vue ce qu il y avait de plus délié dan s les parties du corps , on employa d'habitude les grossissemens les plus forts, la lumière la plus vive , de manière qu'on s'exposa aux illusions d'optique. Ainsi Leeuwenlîoek crut entrevoir dans le cerveau, de même qu'à l'épiderme et à la pie-mère , des tubes contournés, ayant 0,00003 ligne de diamètre. Muys pensait en avoir vu de pareils aussi dans des muscles et des tendons. Monro aperçut également des filamens flexueux , peloton- nés comme les conduits séminifères, et ayant 0,0013 ligne de diamètre , d'abord aux extrémités périphériques des nerfs sen- soriels, puis dans le cerveau , les muscles, la peau, les os, les cheveux ; mais, quand il vint à les voir aussi dans la cire , le blanc de baleine , les sels , les métaux monnayés et non monnayés , il se convainquit que ce phénomène était Une pure illusion d'optique (1). Fontana admettait que ces cylindres élémentaires flexueux sont beaucoup plus grêles que les vaisseaux sanguins les plus fins, qu'ils forment le tissu cellulaire, et qu'ils constituent la plus grande partie du corps humain , par exemple les deux tiers des nerfs , les cinq sixièmes des muscles et des tendons. Il présumait que si ces cylindres sont des tubes , leur desti- nation est de servir à la nutrition des parties , peut-être aussi à la vie animale, et il ne renonça même point à son hypothèse lorsque le microscope lui eut fait apercevoir les mêmes formes dans l'épiderme, les ongles et les dents, ainsi que dans des sels , des pierres et des métaux. 4. Les principaux d'entre les anatomistes qui ont étudié le système des vaisseaux lymphatiques, parmi les modernes, et qui ont été assez heureux, dans leurs injections, pour recon- naître que ces vaisseaux laissaient encore , dans certaines par- ties, de l'espace entre eux pour d'autres substances, ont sou- tenu que les filamens déliés qu'ils découvraient à l'aide du microscope , et qui probablement appartiennent à la catégo- (1) Observations on the structure and functions on the nervous' System , p. 67. ° CONFIGURATION DES PARTIES rie des cylindres élémentaires , dont nous venons de parler , étaient des lymphatiques, mais qu'on ne peut parvenir à in- jecter. Ainsi Mascagni prétendait que beaucoup de parties , notam- ment Tépiderme et l'émail des dents , résultent d'un assem- blage de vaisseaux lymphatiques. MaisHumboldt(l) a prouvé que les fibres flexueuses, qu'il a vues aussi dans l'épiderme , étaient tout simplement des inégalités et non des vaisseaux. Cependant Fohmann et Panizza (*) ont tout récemment sou- tenu de nouveau le caractère lymphatique de ces fila- mens microscopiques. Marchant sur leurs traces, Arnold (2) a prétendu que le tissu cellulaire est une substance amorphe , parsemée d'innombrables vaisseaux lymphatiques anastomo- sés mille et mille fois ensemble sous forme de réseaux , et que les parois des vaisseaux sanguins se composent principa- lement de lymphatiques semblables. D'après Berres (3) , les filamens en question sont des vais-»- seaux qui charrient des sucs blancs , communiquent non point avec le système sanguin , mais avec des vésicules , et forment la plus grande partie de la masse des organes dans lesquels on les rencontre. Suivant lui , ils ont 0,0120 à 0,0360 ligne de diamètre dans les parties celluleuses , et communiquent avec des vésicules dont le diamètre s'élève de 0,1200 à 0,1320 ligne. Berres pense d'ailleurs que toute substance animale en général est tubuleuse , pénétrée et formée d'innombrables petits vaisseaux, qui partent de la substance animale primor- diale, ou delà substance vésiculaire, à la manière des conduits glandulaires (4). 5° Treviranus avait également admis (5) des filamens flexueux, (1) Uehér die gereizte Muskel-und Nervenfaser, 1. 1 , p. 156. {*) Osservazioni antropo-sootomico-fisiologicke sulle vasi linfatici , PavielSSO, in-fol., fig. (2) AnatomiscJie und physiologische Untersuchungen ueher das Auge des Mensclien, p. 2. (3) Medicinisclie Jahrhuecher des œsterreichischen Staates , t. XV, p. 246 (4) Ihid., p. 259. (5) f^ermischte Schriften, 1. 1, p. 125, 133. CONSTITUANTES DU CORPS. 9 grêles , transparens , qu'il appelait cylindres élémentaires^ et qu'il considérait , avec des globules d'albumine et un liquide visqueux , comme les parties constituantes communes de tous les tissus, de manière que la proportion des élémens chimiques était pour lui la seule cause de la différence existante entre les les organes et leurs activités vitales. Depuis (1), il n'a plus ac- cordé cette texture qu'au tissu cellulaire , et on se demande si les cylindres élémentaires ne seraient pas tout simplement des filamens de tissu cellulaire. 6° Les découvertes de Trembley sur la texture des Polypes, et celles de WolfF (2) sur le jaune de l'œuf, avaient démontré qu'il y a des granulations ou des globules dans les premiers linéamens de la substance organique. Or, comme le micro- scope en faisait apercevoir également dans les organismes animaux développés, Prochaska admit que ces globules sont les élémens de l'organisation. Déjà Leeuwenhoek, dans ses premières observations, avait cru voir le cerveau , les nerfs , les muscles, les os, l'épiderme et les ongles formés de gros globules égaux entre eux , dont six réunis ensemble égalaient le volume d'un globule du sang. Les frères Wenzel (3) ont aperçu , dans tous les tissus , de petits globules réunis par un tissu cellulaire délicat , mais dif- férens les uns des autres sous le point de vue du volume, par exemple extrêmement petits dans le foie , plus gros dans les reins, et plus gros encore dans la rate; ils présumaient que la différence des tissus tient uniquement à la nature de la sub- stance déposée dans les cellules. Meckel pensait aussi (4) que les parties élémentaires sont des globules et une substance amorphe ( tissu cellulaire ), et que ces parties, constamment associées ensemble , font la base des formes organiques primordiales, c'est-à-dire des fibres et des lames. (d) Weber, Anatomie des Menschen , t. I, p. 136. (2) Theoria generationis , {>. 401. (3) Prodromxis eines JVerlies ueber das Hirn des Menscîien und dèr Tliiere , p. 4. (4) Traité général d'ançitomie compaiée , 1. 1 , P- 16 , 45, 10 CONFIGURATION DES PARTIES Home (1) soutenait que la fibre musculaire est une série de globules du sang sans matière colorante, parce que les muscles qu'on a fait bouillir ou qu'on a tenus en macération pendant une semaine entière , laissent apercevoir des fibres , qui sont composées d'articles oblongs, séparés par des étranglemens peu profonds , et qui se réduisent en globules quand on pro- longe la macération. Enfin Milne Edwards (2) a poussé cette opinion plus loin encore. Le tissu cellulaire lui parut être une masse de cy- lindres fiexueux ; mais , à un grossissement plus fort , chaque cylindre se montrait une série de globules pareils aux noyaux des globules du sang , ou aux granulations du lait et du sang, ayant un trois centième de millimètre = 0,0014 ligne de dia- mètre , et présentant le même volume dans les muscles , les nerfs , les tendons et les membranes séreuses et muqueuses. Suivant lui, ces cylindres sont l'élément général de l'orga- msme , attendu que, de leur situation différente , résultent les formes de lames, de fibres, de vésicules et de tubes. Lorsque je n'étais point encore fort exercé à manier le mi- croscope , dit Gruithuisen (3) , je croyais que les fibres mus- culaires résultaient de globules placés à la suite les uns des autres ; mais lorsque j'eus reconnu que tous les corps sont dans le même cas , je rendis mon hypothèse à l'imagination qui me l'avait suggérée. Weber (4) , Schultze (5) , Muller (6) etRas- pail (7) , considèrent aussi cet aspect globuleux comme une illu- sion d'optique , due au défaut d'homogénéité de la substance, à l'inégalité de la surface, aux alternatives de'rapprochement et d'éloignement de fibres parallèles, produites par l'interfé- rence de la lumière. IL Au total , la plus exacte de toutes les opinions est celle (1) Lectures on comparative anatomy, t. III , p. 153. (2) Répertoire général d'anatomie, t. III, p. 25. (3) Gehlen , Journal fuer die Chemie und Physik , t. VIII, p. 538. (4) Anatomie des Menschen , 1. 1, p. 135 , 186. (5) MikroskopiscJie Untersuchungen ueher Browns Entdeckunff lehen der, selhst im Feuer unzerstœrharer Theilchen in allen Kœrpern , p. 24. (6) Poggendorff , Aimalen der Physik und Chemie', t. CI, p. 549. (7) Nouveau système de chimie organique , p. 208 , 221. CONSTITUANTES DU CORPS. 1 1 de Schultze (1) , qui regarde les tissus comme ne différant pas moins les uns des autres sous le rapport de leurs particules élémentaires que sous celui de leur forme totale. Nous de^ Yons reconnaître, avec Weber (2), qu'une substance amorphe, des granulations , des fibres , des tubes et des lamelles, sont les parties élémentaires du corps humain ; la matière animale peut prendre immédiatement telle ou telle d'entre ces formes de cohésion , et les globules ou les fibrilles ne suffisent point, à eux seuls , pour construire l'organisme. Il n'y a que le suh- stratum immédiat de la vie animale, la neurine et la sub- stance musculaire , qui paraissent conserver partout la même forme de parties élémentaires ; toutes les autres substances en admettent de différentes suivant les régions qu'elles occu- pent. Nous partageons les formes élémentaires en indéterminées et déterminées. 7° Les formes indéterminées se manifestent partout où la substance ne laisse apercevoir aucune forme , du moins ré- gulière; elles appartiennent spécialement aux tissus cellu- laire , scléreux et stratifiés. On les divise en demi-liquides , grenues et compactes. La substance demi-liquide , amorphe , qui adhère à des par- ties élémentaires solides , se reconnaît principalement dans le tissu cellulaire , dans le mucus de Malpighi et entre les glo- bules de la neurine. Elle a pour analogue , chez les végétaux , le cambium , qui est la subsauce ligneuse et corticale encore amorphe , mais au moment de recevoir la forme. De même qu'aux parois"des cellules végétales adhèrent des grains de substances diverses , notamment de matière colo- rante , de substance ligneuse et d'amidon , dont uu certain nombre paraissent se développer en nouvelles cellules par la liquéfaction de leur noyau , de même aussi on trouve, dans le corps animal, des masses solides, réduites en grumeaux ou en granulations irrégulières et mal délimitées. On aperçoit (1) Loc. cit., p. 20. - (2) Loc. cit., p. 137. 12 CONFIGURATION DES PAUTIES ces grumeaux, avec le microscope, dans le tissu cellulaire, parenchymateux surtout, où ils paraissent, sous laformed'îlols de substance , entre les dernières ramifications des vaisseaux capillaires. La substance osseuse affecte la forme de grosses granulations au moment de sa formation première. Enfin la masse compacte , qui n a de forme déterminée que dans son contour extérieur , et en tant qu'elle représente une partie spéciale , mais qui est homogène en elle-même , appar- tient essentiellement aux cartilages , aux os et aux tissus stra- tifiés. 8° Une forme intermédiaire entre celles qui sont indétermi- nées et celles qui sont déterminées, est la forme spongieuse. Ici la masse compacte paraît ramollie , écartée , interrompue par des vides, et retenue par des fibres ou des lamelles, sans configuration régulière. On la trouve dans le tissu cellulaire, dans les organes vasculaires, dans les couches inférieures du système cutané , enfin dans Tintérieur des os et de plu- sieurs tissus stratifiés, tels que les poils, les ongles et Tépi- derme. 9° La forme élémentaire déterminée est sphérique^ fibreuse ou lamelleuse , suivant celle des trois dimensions qui prédo- mine. La forme élémentaire sphérique paraît être propre à la neurine. On l'aperçoit distinctement dans les nerfs d'un ani- mal encore vivant. La forme fibreuse est particulière à tous les muscles et à la plupart des organes scléreux. Elle ne se manifeste que d'une manière incomplète dans le tissu spongieux , et elle est vaguement indiquée dans la substance compacte des os , des cartilages et des tissus cornés. La forme lamelleuse se voit surtout dans le système plas- tique. On la voit paraître d'abord comme lame ou masse étendue uniformément à plat , à la surface supérieure et condensée de la peau et de la membrane muqueuse ; elle se montre aussi en partie dans les enveloppes scléreuses , la cornée transparente , par exemple , où toute formation fibreuse s'éteint ; enfin on la remarque dans les couches des tissus stratifiés. CONSTITUANTES DU CORPS. l3 En Second lieu , elle affecte la forme vésiculalre dans les vésicules séreuses et adipeuses. En troisième lieu', elle produit des tubes dans les enve- loppes de tissu cellulaire et dans la membrane vasculaire commune. III. Les humeurs sécrétées contiennent de la substance so- lide , non seulement à l'état de dissolution parfaite , mais en- core, surtout lorsqu'elles sont très-concentrées, ou qu'elles ont de la tendance à la disgrégation , à l'état de simple suspen- sion i de manière que le microscope fait apercevoir en elles des grumeaux. Ainsi, les végétaux offrent tant des gra- nulations transparentes dans les sucs limpides de leurs cel- lules, que des granulations opaques dans les sucs lactescens. Chez l'homme, comme Fa remarqué Leeuwenhoek le pre- mier (1) , on trouve rarement ou même jamais des grumeaux dans la sérosité du tissu cellulaire et des vésicules séreuses , mais il y en a toujours et beaucoup dans la synovie , le mu- cus , le lait et le sperme , tandis qu'ils sont moins abondans dans la bile , le suc gastrique et le suc intestinal , plus rares et en petit nombre dans l'urine. Ribes (2) et Donné (3) disent même avoir aperçu , dans leurs propres yeux , les globules , l'un de l'humeur lacrymale, l'autre de l'humeur aqueuse. On ne doit pas attacher une grande importance à l'existence de tous ces globules. Cependant il n'est pas prouvé non plus que tous soient des gouttelettes de graisse ou des grumeaux de mucus ; car ils pourraient tout aussi bien devoir naissance à de l'albumine , à de la matière caséeuse , etc. ( Les liquides sécrétoires , même les plus importans, comme le lait , le mucus , la salive , la bile , l'urine et le sperme , n'ont point encore été étudiés au microscope avec tout le soin qui serait nécessaire pour satisfaire, même seulement jusqu'à un certain point, aux exigences de la physiologie. Cependant les observateurs disent avoir aperçu , dans la plupart de ces (1) Haller, Elem. physiotog., t. 11, p. S2. (2) Archives générales, t. XXII, p. 449, (3) Ibid., t. XXIII , p. 113. l4 CONFIGURATION DES PARTIES sécrétions , des globules ou des granules , qu'ils disent être tenus en suspension par un menstrue liquide homogène. Quant à ce qui concerne d'abord le lait , plusieurs obser- vateurs y admettent des globules. L'un de nos anatomistes les plus exacts et les plus instruits , Weber , est tenté aussi de croire à l'existence, dans le lait, de globules particuliers, trànsparens , arrondis , mais d'inégale grosseur , et depuis un tiers jusqu'à moitié plus petits que les globules du sang ; il leur attribue la couleur blanche du lait , et les croit composés de matière caséeuse et de graisse. Cependant il conserve des doutes à cet égard , et pense qu'on peut aussi se ranger à l'opinion de Treviranus, qui ne voit dans les globules du lait que des gouttelettes produites par un mélange de graisse et d'eau. Schultze admet , dans le lait , des globules particuliers, qui , suivant lui , auraient le même volume chez tous les ani- maux. Je ne vois dans ces globules que de simples gouttelettes de graisse , et je pense , d'accord en cela avec les chimistes, que le lait est une dissolution aqueuse d'osmazome , d'une substance analogue à la ptyaline , de sucre de lait , de dift'é- rens sels et de matière caséeuse , mais qu'il tient en suspen- sion de la graisse , qui , par l'effet du repos , se sépare et gagne la surface , où elle produit la crème. J'ai examiné du lait de femme et de Vache au microscope , et je l'ai soumis aussi à quelques réactifs. Les motifs qui me déterminent à en considérer les globules comme , des gouttelettes de graisse, sont les suivans : a. Ils ont une pesanteur spécifique moindre que celle delà partie aqueuse du lait, nagent toujours à la surface, et sont très-serrés les^uns^contre les aulres dans la crème. h. L'ébullition et l'addition de l'eau ne leur font subir ab- solument aucun changement. c. Les acides ne les altèrent pas non plus, tandis que, quand on ajoute de l'éther au lait , ils se confondent sur-le-champ ensemble, et se dissolvent dans ce menstrue. d. Suivant la remarque de Weber , ils ont des contours bien arrêtés , dénotent , par tout leur aspect , la propriété de ré- fracter fortement la lumière, et^ ressemblent parfaitement h, Constituantes du corps. i5 de la graisse ou aux gûultes d'huile avec lesquelles on les compare. Du reste, j'ai trouvé que ces gouttelettes d'huile avaient de^ puis un trois centième jusqu à un millième de ligne de dia- mètre. Je n'ai pas assez bien éludié la salive et Furine pour pou- voir me hasarder à émettre un jugement positif sur le compte de ces humeurs ; mais j'avoue que je n'y ai trouvé de véri- tables globules ni chez Thomme ni chez îes^animaux. Je les regarde , au contraire , comme des dissolutions parfaitement homogènes ; et, suivant moi, les granulations qu'on a pu y rencontrer quelquefois appartenaient , suivant toutes les ap- parences , à du mucus , accidentellement mêlé avec le liquide. 11 y a aussi des gouttelettes de graisse dans la bile ; mais elles y sont bien moins nombreuses que dans la bile , et fort iso- lées les unes des autres. Ce sont elles peut-être qu'on a prises pour des granulations. Je n'ai pas fait une étude approfondie du sperme ; à la vé- rité , j'ai vu les énigmatiques animalcules spermaiiques , mais sans savoir au juste ce que je devais penser d'eux (*). A l'égard du mucus, il contient des globules bien prononcés; mais, comme le fait justement remarquer Weber , on n'aper- çoit ces globules que dans les flocons épais, bleuâtres ou grisâtres , et peu transparens ; on n'en découvre aucun dans la portion transparente. Weber a trouvé leur volume divers, et variant depuis un six-millième jusqu'à un neuf-mille -deux- cent-vingt-huitième de pouce, Schultze a reconnu que ceux du mucus oral et nasal des animaux vertébrés et du jabot des Oiseaux sont toujours ronds ; que leur volume est sensible- ment le même chez les Poissons , les Reptiles , les Oiseaux et les Mammifères; qu'ils sont beaucoup plus petits que les glo- bules du sang dans les trois premières classes, mais que leur (*) Depuis , Wagner a publié une analyse microscopique du sperme , dans laquelle il établit que ce liquide est composé de trois élémens , nn liquide homogène et non grenu , des granules ou globules, et des animal- cules spermaiiques. {Fragmente sur Physiologie der Zeugtmg , verzuG" ^lich zur mih'oslwpisçhen Analyse des Spermas , d836. ) i6 CONFIGURATION DES PARTIES volume surpasse ua peu celui de ces mêmes globules chez les Mammifères. Mes observations m'ont appris que les gra- nulations du mucus diffèrent assez les unes des autres, eu égard au volume et à la consistance , suivant les parties d'où elles proviennent, qu'elles sont très-molles et promptement li- quéfiables chez les Reptiles et dans le jabot des Oiseaux , mais que celles du mucus de la trachée-artère de l'homme ont da- vantage de consistance. Ce dernier m'a offert des granules arrondis, non aussi mous que ceux du pus , grisâtres, avec une surface un peu grenue , nombreux et généralement un peu plus gros que les globules du pus , car la plupart avaient depuis un cent-cinquantième jusqu'à un deux-centième de ligne de diamètre , tandis que d'autres avaient un centième de ligne et quelques uns un trois-centième. Les acides ne dis- solvent pas ces globules ; cependant les acides minéraux les réunissent en une masse grenue. Ils se dissolvent prompte- ment et complètement dans la potasse caustique , donnant ainsi une liqueur transparente et homogène, qui ressemblée l'albumine. L'ammoniaque caustique les dissout avec plus de peine. ) (1) IV. Le volume des plus petites particules n'est rien moins que constant , et l'on ne peut point avoir une pleine et entière confiance dans les mesures microscopiques. Cependant il n'est pas sans intérêt d'avoir au moins une évaluation ap- proximative des rapports de grandeur. 10» A l'égard du volume des corpuscules ronds, nous met- tons en première ligne les indications de Weber (2) , qui est ici l'autorité la plus imposante. Voici quel est, suivant cet anatomiste , le diamètre des parties suivantes , évalué en dix- millièmes de ligne. Vésicules adipeuses 285 à 420 Globules du pus 40 à 80 Granulations du pigment de l'œil. ^ 14 à 73 Granulations de la salive. . . . 40 à 50 ( Globules du sang. . » . . . 23 ) (1) Addition de R. Wagner. (2) Anatomie des Menschen , t. I, p. 458-165. CONSTITUANTES DU CORPS. I7 Granulations du mucus. ... 43 à 20 Globules nerveux ; 44 ù d5 Globules du lait 42 à 15 Globules de la bile , encore moins. Quant aux autres observations , nous allons les réunir dans le tableau suivant : Grains de pigment entiers — ■ écrasés de mucus entiers — •— écrasés entiers Globules du lait nerveux Id. ... du sérum , du lait et du pus Granulations du tissu cellulaire . Diamètre. 25 à 50 5 à 10 23 à 28 8 à 42 40 à 60 30 33 42 à 36 45 5 à 38 Noms des observateurs. Wagner. " Id. Krause. Id. Schultze. Id. Wagner. Barres. Prévost et Dumas. , Krause. VIII. l8 CONFIGURATION DES PARTIES 11° Le diamètre des parties suivantes est également éyalué en dix-millièmes de ligne. Vésicule pulmonaire . . . . , Poil . Canal de sécrétion dans le testicule. dans la substance corticale du rein dans la substance médullaire du rein dans les papilles du rein • . — dans la parotide . Filet nerveux au bord de la rétine . . . . Vaisseau capillaire au système cutané. au cerveau et aux nerfs. . au corps ciliaire .... -^- aux villosités intestinales et àTiris aux vésicules pulmonaires . au testicule au rein à la parotide ..... à la rétine et à la substance grise au tissu cellulaire et aux mem branes séreuses. . . . Filament de tendon musculaire • Id Id Id . . . Filament de tissu cellulaire. . . Id Diamètre. 530àl600 100 à 500 564 195à 220 160 130 99 83 15 30 à 40 23 à 30 180 60 40 30 à 35 44 à 69 30 à 39 12 24 48 à 30 15 à dS 30 9à 14 dO à 12 10 à 20 2à 8 Noms des observateurs. Weber. Muller. Weber. Id. Id. Id. Ehrenberg. Weber. Id. Id. Id. Berres. Weber. Id. Muller. Weber. Berres. Id. Schultze. Krause. Schultze. Krause. Wagner. Id. Krause. CONSTITUANTES DU CORPS. I9 Valentin (1) indique de la manière suivante le'diamèlre des Vaisseaux capillaires en dix-millièmes de pouce de Paris. 0,9 dans le poumon. 4,0 dans le cerveau; ' 1,9 dans le mésentère. 2.3 dans le nerf médian. 2.4 dans la membrane muqueuse du pharynx. 2/7 dans un tendon de Tavant-bras. 2.8 dans la tunique musculeuse de l'intestin grêle. 2.9 dans le corps ciliaire. \i 3,3 dans le biceps brachial et Tépididyme. 3,6 à la peau. 3,8 à la membrane muqueuse du fjros intestin. 4.0 à la membrane séreuse de l'intestin grêle, dans la gaîne aponévrotique du bras et dans la rate. 4. 1 daos une glande lymphatique. 4.2 dans l'iris. 4.3 sous l'ongle. 4.4 dans les villosités du duodénum.' 4.8 dans les lèvres , la membrane de Ruysch et les cryptes muqueuses de la bouche. 4.9 dans la membrane muqueuse de l'intestin grêle. 15 ,0 dans les villosités du chorion. 5,1 dans le foie. 5.4 dans la membrane muqueuse deTestomac."' 5.5 dans les reins. 5.6 dans les villosités de l'intestin grêle. 6.6 dans le placenta. 7,0 dans les corpuscules de Malpighi. ' 7.7 dans la rétine et la langue. 9,3 dans les testicules. (d) Hecker, Literarische Annalen der gesammten Heilkunde, t. XXVIU> p. 282. 20 PARTIES CONSTITUANTES CHIMIQUES ARTICLE II. Des parties constituantes chimiques du corps organique. § 831. Si maintenant nous passons aux parties consitutantes chimiques du corps organique, nous trouvons que ce dernier est composé des mêmes substances que notre planète et ce qui l'entoure. Il n'y a point de matière particulière pour la vie ( § 312) ; mais la vie produit une combinaison spéciale, et en harmonie avec elle-même, des substances élémentaires géné- néralement répandues. Quand nous détruisons celte combi- naison, * I. Nous obtenons d'abord une substance qui diffère encore de la matière inorganique , et qui a besoin de subir une dé- composition ultérieure pour qu'on puisse reconnaître qu'elle doit son origine aux élémens généraux. En effet , cette sub- stance organique est combustible ; elle se réduit en oxy- gène , hydrogène , carbone et azote , du moins la plupart du temps. Pendant l'enfance de la chimie , on se la représentait comme un liquide épais , gluiineux ou collant , ayant de la tendance à prendre la forme solide, qui produisait les parties solides du corps en se combinant avec des matériaux inor- ganiques , notamment avec de la terre. Les travaux des mo- dernes ont appris à distinguer plusieurs formes qu'elle revêt. Ces substances diverses ont plus ou moins d'analogie les unes avec les autres -, il n'y a souvent que de simples différences de quantité dans la manière dont elles se comportent avec les réactifs , et leur caractère spécifique ne sera mis en évidence qu'avec le temps , à force de recherches comparatives. Nous avons déjà fait connaître celles qui sont spéciales, et qui ne se rencontrent que dans certains organes , comme la substance cornée (§ 797, 5°), le pigment noir (§ 813), le sucre de lait (§ 520, 13°), la matière biliaire (§826, 12° ), Tiirée (§827, 7°) et l'acide urique ( § 827 , 8° ). Il ne nous reste plus qu'à indi- quer celles qui sont généralement répandues ; nous les clas- DU CORPS ORGANIQUE. 21 serons de la manière suivante , d'après leur caractère princi" pal , la solubilité : I. Soluble dans l'eau. A. Soluble dans Teau froide , 1. Se coagulant dans l'eau chaude ...... Albumine. 2. Y demeurant dissoute. a. Insoluble dans l'alcool Ptyaline. b. Soluble dans l'alcool. AA. A chaud seulement Matière caséeuse. BB. A chaud et à froid. A. Précipitable par le tannin Osmazome. B. Non précipitable par le tannin. Acide lactique, B. Soluble dans l'eau bouillante seule Gélatine, II. Insoluble dans l'eau. A. Soluble dans l'alcool ou Télher . Graisse. B. Insoluble dans l'alcool et l'éther. \ 1. Soluble dans l'acide acétique Fibrine. 2. Insoluble dans l'acide acétique Mucus. 1° L'albumine , soluble dans l'eau froide , coagulable par la chaleur et l'alcool , précipitable par le tannin , sous la forme d'une masse semblable à de la poix, et par les sels mé- talliques , notamment le deutochlorure de mercure , a été trouvée dans le cerveau et les nerfs , les muscles et les carti- lages ; on l'a rencontrée aussi dans le liquide de toutes les vé- sicules séreuses, dans le suc pancréatique, dans le smegma de la peau, et, bien qu'en proportion extrêmement faible , dans les humeurs muqueuses, 2<* La matière salivaire , ou ptyaUne , autrefois confondue sous l'appellation collective ou de matière extractive ou de mucus , est soluble dans l'eau : elle ne se coagule point à la chaleur , mais l'évaporation lui fait perdre un peu de sa so- lubilité; elle ne se dissout pas dans l'alcool, et n'est précipi- tée ni par les acides ou le tannin , ni par le deutochlorure de mercure , mais elle l'est par l'acétate de plomb et par le ni- trate d'argent. On la trouve dans le foie,' la glande thyroïde, les muscles, les cartilages , le cristallin, de même que dans È2 PARTIES CONSTITUANTES CHIMIQUES le suc gastrique , l'humeur nasale , le smegma cutané , la sueur , le cérumen des oreilles , la salive , le lait et la bile. 3° La matière caséeuse , qu'on rencontre , non seulement dans le lait, mais encore dans le suc pancréatique et la bile, dans le foie , la glande thyroïde et les cartilages , demeure so- luble dans l'eau, après même qu'on Ta desséchée à la chaleur ou précipitée par l'alcool froid. Elle se dissout dans l'alcool bouillant , et se précipite en grande partie par le refroidisse- ment. L'acide acétique la coagule plus aisément que l'albu- mine , et un excès d'acide ne redissout pas aussi aisément son caillot que celui de cette dernière. Ce caillot est soluble dans l'alcool et dans les alcalis , avec lesquels il donne des com- binaisons qui ressemblent à de la gomme et qui sont très-so- lubles. Les sels métalliques et le tannin ne précipitent point la matière caséeuse ; la putréfaction la convertit en oxide ca* séique ou aposépédine; ainsi transformée, elle a perdu de sa solubilité dans l'eau et l'alcool , mais elle se dissout aisé- ment dans l'acide hydrochlorique et les alcalis , sans cepen- dant produire des combinaisons neutres ou des savons avec ces derniers. 4° L'osmazome , appelée aussi extrait de viande , est so- luble dans l'eau et dans l'alcool. Après l'évaporation, elle se présente sous la forme d'un extrait brun rouge , d'odeur aro- matique et de saveur piquante , qui attire l'humidité de l'air et qui fond à la chaleur. Les sels métalliques et le tannin la précipitent sous forme pulvérulente. On la trouve dans le cer- veau et les nerfs , les muscles , les cartilages et le cristallin , le foie et les reins , la rate , la glande thyroïde et le thymus , dans la bile , le lait , la sahve , le suc pancréatique , la sueur, les larmes et l'humeur nasale , quelquefois aussi dans le suc gastrique. 5° L'acide lactique, qu'on rencontre toujours combiné avec de l'osmazome , est sans odeur. 11 a une saveur très-acide , tombe en déliquescence à l'air , se dissout en toutes propor- tions dans l'eau et l'alcool , et n'est point précipité de ces dis- solutions par le tannin. On peut le sublimer sans qu'il subisse de changement notable. Il donne des sels neutres, qui sont solubles dans l'alcool. DU CORPS ORGANIQUE. 23 6" La gélatine, OU la colle, se ramollit dans l'eau chaude', et se dissout dans l'eau bouillante ; elle forme gelée par le Refroidissement. En se desséchant , elle prend l'aspect de la corne , et devient cassante. Après avoir été bouillie à plu- sieurs reprises , elleestunpeusoluble aussi dans l'eau froide. L'alcool ne la dissout pas , et les acides ne la précipitent point. Le tannin la précipite sous la forme de masses cohé- rentes , visqueuses et contractiles , qui sont incapables de su- bir la putréfaction , ni de se dissoudre, soit dans l'eau , soit dans les acides , mais se dissolvent dans les alcalis. Avec les alcalis , elle donne une dissolution qui n'est point savo- neuse, et qui ne précipite pas par les acides. On la trouve dans le tissu cellulaire et les membranes séreuses , les ganglions lymphatiques, la rate, le thymus et le foie, la peau et les membranes muqueuses , les muscles et les tendons , les car- tilages et les os. Elle n'existe point dans les liquides sé- crétés. 7° La graisse est soluble dans l'alcool bouillant et dans l'éther. Le premier la réduit en stéarine et enélaine. Elle brûle avec une flamme vive et fuhgineuse. Les acides, quelques terres et plusieurs oxides métalliques la convertissent en acides , qui , combinés avec ces bases , représentent les com posés salins auxquels on donne le nom de savons. Non seu- lement on trouve la graisse en masses distinctes , comme aussi dans le lait , le smegma cutané , le cérumen des oreilles et la bile , mais encore on en extrait du cerveau et des nerfs , du foie et des reins , de la glande thyroïde et du thymus , de la peau et des tendons, de Tépiderme, des ongles et des poils. 8° Le mucus , qu'on rencontre dans les sécrétions des membranes muqueuses, ainsi que dans la bile, l'urine et la salive , et dans la glande thyroïde , est gluant et visqueux. Il ne se dissout point dans l'eau ; mais il se mêle avec elle, et peut en être ensuite précipité par l'alcool faible , qui ne précipite pas Talbunime. Il ne se coagule point à la chaleur, et se dessèche en une masse translucide , cassante , qui , plongée dans l'eau , l'absorbe et se gonfle. Il n'est point so- luble dans l'acide acétique ; mais il se dissout dans les alca- lis , d'où les acides et le tannin le précipitent. 24 PARTIES CONSTITUANTES CHIMIQUES 9<» La fibrine difiFère de l'albumine coagulée en ce qu'elle a une forte cohésion , et ne peut ni s'écraser ni se briser en fragmens. Très-soluble dans l'acide acétique , elle en est précipitée "par le cyanure de fer et de potassium. Elle se dissout aisément dans l'ammoniaque , et donne ensuite par le deutochlorure de mercure un précipité soluble dans l'acide hydrochlorique concentré. Les sels alcalins , notamment l'hy- drochlorate d'ammoniaque , l'attaquent fortement , la ramol- lissent et la dissolvent en partie. Elle forme la principale par- tie constituante des muscles ; elle paraît en outre constituer la portion insoluble dans l'eau, l'alcool, les acides minéraux étendus et la potasse faible , de la plupart des solides organi- ques, comme le tissu cellulaire , les ganglions vasculaires, le foie et les reins , la peau , la cornée transparente , le cris- tallin et les os. 10" Nous serions satisfaits , pour le présent , si nous con- naissions les différences essentielles de ces substances , les circonstances sous l'influence desquelles elles se transforment les unes dans les autres , et les proportions dans lesquelles elles représentent les diverses parties de l'économie animale ; il nous serait permis alors d'attendre patiemment que nos connaissances fussent plus avancées à l'égard d'autres sub- stances qui se rencontrent avec elles , mais qu'il est moins facile de mettre en évidence. Parmi ces dernières , il faut ranger les substances qui décèlent leur présence dans les ex- halations de l'organisme vivant , ou dans le liquide obtenu en distillant certaines substances, soit par leur odeur , soit par la manière dont elles se comportent avec les réactifs , soit enfin par leur aptitude à subir la putréfaction. Quant à ce qui concerne la couleur , nous savons qu'elle n'est fréquemment déterminée que par l'état mécanique ou chimique de la matière , sans devoir son origine à aucune substance spéciale. Le rapprochement de granulations trans- parentes , comme dans le lait , ou l'imbibition par de l'eau , comme dans les cartilages , produit l'opacité et la blan- cheur ; l'acide hydrochlorique incolore colore l'albumine ou la fibrine également incolore en rouge , en bleu , en brun , en noir ; la plupart des substances végétales dont on se sert DU CORPS ORGANIQUE. 25 dans Tart du teinturier , n'avaient point de couleur dans les plantes elles-mêmes, et elles n'en acquièrent une qu'après avoir été soumises à une certaine action de l'oxygène , dont les changemens font aussi varier leurs teintes ; on ne découvre point de pigment spécial à la face antérieure de l'iris , et les chimistes eux-mêmes conviennent que sa couleur bleue, verte, grise , brune ou noire , dépend d'un mode de réfraction de la lumière qui est déterminé par la structure (1). Si l'on extrait des poils une graisse ayant la même couleur qu'eux, c'est en vain qu'on chercherait une matière colorante particulière, soit daus cette graisse , soit dans les différentes huiles végétales. D'après cela , nous devons considérer comme non prouvée l'existence de pigmens autres que le pigment noir et le cruor : ce dernier colore la peau et le parenchyme des glandes , parce que sa teinte perce à travers les vaisseaux ; mais il im- prègne en outre la substance des muscles. Les physiologistes regardent également comme probléma- tiques et sans importance pour eux les substances que l'on obtient en traitant la matière organique par l'alcool ( comme la résine retirée du foie , du cérumen des oreilles et du suc gastrique), par les alcalis et les terres alcalines (comme l'a- cide butyrique extrait de la sueur], de l'urine et du suc gas- trique ) , par les acides ( comme la leucine obtenue des mus- cles, de la colle, de la laine), ou par la distillation sèche ( fus- cine, créosote , etc. ). II. Les parties constituantes inorganiques immédiates du corps humain , comme de la plupart des corps organiques en général , sont : il° Des alcalis , tantôt purs, tantôt combinés avec des acides. Parmi eux , c'est la soude qui prédomine , qu'on ren- contre en plus grande quantité, et qui est la plus répandue. Il n'y a point d'humeur sécrétée qui n'en contienne , et l'on ci- terait difficilement une partie solide qui n'en donne aussi. La potasse est plus rare et moins abondante. L'ammoniaque se trouve plus rarement encore, et en quantité bien plus faible ; (d) Berzeliiis, Traité de chimie, t. VII, p. 460. â6 PARTIES CONSTITUANTES CHIMIQUES son existence est même souvent problématique ; on la 'signale dans l'Urine , la sueur , l'excrétion pulmonaire et le suc gas- trique. Chez les végétaux , c'est la potasse qui prédomine ; la soude et l'ammoniaque sont plus rares. 12» Parmi les terres , la chaux se place au premier rang. Elle existe dans les os, les dents, les cartilages, les muscles et autres parties solides , de même que dans pres- que tous les liquides. La magnésie se rencontre moins abon- dante , dans les oS;, les dents, les cartilages, les muscles, le cerveau , la glande thyroïde , le suc gastrique , la salive , le lait et l'urine. La plus rare de toutes les terres est la silice, qu'on ne trouve que dans les cheveux , l'urine et peut-être la salive. ^ Dans les plantes , la chaux prédomine moins. Ces êtres renferment delà magnésie, et la silice est plus abondante chez eux que dans le règne animal. Ils offrent quelquefois aussi , mais rarement , de l'alumine. 13° Parmi les métaux , celui qu'on rencontre en plus grande abondance, proportionnellement, quoiqu'il se réduise la plupart du temps à de simples traces, est le fer, qui existe notamment dans le foie , les reins , les cartilages , les os , les poils, lépiderme , le pigment de l'œil, la sueur, le suc gastrique et la bile. Le manganèse se montre , mais réduit à de plus faibles atomes encore , dans les poils et Tépiderme. Les plantes renferment aussi , outre le fer , du manganèse , qui y est plus commua que chez les animaux. On y trouve parfois du cuivre. 14°. Il y a des traces de phosphore dans le cerveau , le foie et la salive ; de soufre dans le cerveau , les cartilages , les poils, l'épiderme , la sueur, la salive , le suc pancréatique, le lait et la bile. 15° Parmi les acides , le premier rang appartient à l'acide hydrochlorique , qu'on rencontre , combiné avec de la soude, dans presque toutes les parties solides et liquides , et qui existe aussi à l'état de liberté dans le suc gastrique. DU CORPS ORGANIQUE. ^7 L'acide phosphorique n'est guère moins répandu; mais on le trouve partout en plus faible quantité. La vapeur des poumons et de la peau contient de l'acide carbonique libre. L'acide sulfurique n'existe que combiné avec des alcalis. Il ne paraît pas démontré qu'on le rencontre ailleurs que dans l'urine. L'acide hydrofluorique a été signalé dans les os et les dents. 16" Enfin il y a de l'eau et de l'air dans toutes les parties solides et liquides. IIL Parmi les principes constituans immédiats ou éloignés des substances organiques, 17» L'azote est le moins répandu ; car il n'existe point dans la graisse , la matière biliaire , le sucre de lait , l'acide lac- tique , non plus que , très-probablement , dans le pigment noir. Parmi les matériaux inorganiques , l'air seul en contient. 18° L'hydrogène se trouve dans toutes les substances or-^ ganiques, mais en petite quantité ; il existe aussi dans l'acide hydrochlorique et dans l'eau. 19° L'oxygène est également répandu partout, et fort abon- dant dans les substances organiques : il entre , de même , dans la composition des alcalis , des terres , des acides et de l'eau. 20° Le carbone constitue , somme totale , la plus grande partie des substances organiques, et il entre en outre dans l'acide carbonique. § 832. Les substances diverses qui existent dans l'orga- nisme, ne sont point séparées les unes des autres, mais unies ensemble. 1° Toutes les parties solides sont rendues humides par des liquides qui y adhèrent ou qu elles renferment , et des sub- stances solides nagent dans les liquides , sous la forme de granulations. Ainsi, à l'exception des tissus stratifiés, qui tiennent de bien près au règne inorganique , chaque tissu particulier est uni avec un ou plusieurs tissus généraux; le tissu cellulaire et les vésicules séreuses avec les vaisseaux , le nerf avec des vaisseaux et du tissu cellulaire , le muscle avec des vaisseaux , du tissu cellulaire et des nerfs. Des trois 28 PARTiES CONSTIT. CHIMIQ. Dû CORPS ORGAN. tissus généraux , c'est le cellulaire qui a le domaine le plus» étendu, et le nerf dont la sphère est le plus restreinte. Mais des groupes entiers de tissus forment par leur réunion les organes composés , dans lesquels se manifestent des direc- tions particulières de l'activité vitale. 2" La substance organique a une sphère d'affinité fort éten- due. Car déjà même à l'état de simple charbon, elle possède une affinité très -forte pour tous les gaz, pour un grand nombre de substances odorantes et colorantes, etc. La soude se com- bine avec l'albumine, le mucus, la matière biliaire, et dé- termine la solubilité de ces substances ; unie à l'acide hydro- chlorique , elle se trouve dans tous les solides et dans tous les liquides; combinée avec l'acide phosphorique , elle se rencontre dans la substance nerveuse , la substance muscu- laire , les ganglions vasculaires , les tissus stratifiés , et à peu près toutes les sécrétions ; unie à Taciçle lactique , elle se voit principalement dans les parties qui contiennent de la graisse , le foie , le thymus , les muscles , le smegma cutané , le cérumen des oreilles , le lait , la bile ; elle est plus rare- ment combinée avec l'acide sulfurique , et sous cette forme elle se rencontre spécialement dans les sécrétions destinées à être portées d'une manière immédiate au dehors , l'urine , la sueur et le lait. Le phosphate calcaire contracte une com- binaison intime avec la substance organique , notamment celle qui a le moins de solubilité , avec la matière cornée , la fi- brine , la gélatine et la matière caséeuse. Le fer s'unit prin- cipalement avec la substance cornée , la gélatine et le pig- ment , le soufre avec l'albumine , le phosphore avec la graisse. UNION DES PARTIES ORGANIQUES. 2^ CHAPITRE II, De V union des parties constituantes de V organisme. ARTICLE I. Du mode d'union des parties constituantes de Vorganisme, § 833. L'union des parties constituantes de [l'organisme peut être ou extérieure et mécanique , lorsque les masses sont simplement siiuées les unes auprès des autres (I, II), ou intérieure et chimique , quand les substances se pénètrent réciproquement ( III, IV). !• TTnîon mécanique» I. La cohésion , ou la réunion de parties'similaires en une masse unique , a pour résultat , lorsqu'elle prédomine , de séparer les unes des autres les masses hétérogènes. Mais c'est seulement d'une manière partielle , et quand il y a un grand contraste entre les degrés de cohésion, qu'on voit se réaliser, dans l'organisme , une séparation de ce genre , en vertu de laquelle, par exemple, l'air fait librement antagonisme aux parois des cavités qui le renferment, ou le liquide sécrétoire à celles des vésicules qui le fournissent ou des conduits qui le transportent. IL L'adhésion , ou la propriété qui fait que des parties hétérogènes se réunissent en une seule masse , sans cesser d'avoir des limites distinctes , prédomine bien plus généra- lement. Elle repose sur une affinité de choses hétérogènes , dont l'effet est de les solliciter à se rapprocher autant que possible , à s'appliquer les unes aux autres de la manière la plus intime , et qui ne parvieiit pas à se réaliser compléte- tement , c'est-à-dire à déterminer une pénétration réciproque. 1° Quant à l'adhésion de parties sohdes hétérogènes , le 5q union des parties organiques. tissu cellulaire , qui est le plus répandu , et en quelque sorte la masse élémentaire du corps organique , a de l'afiQnité ad- hésive pour tous les autres tissus d'un caractère plus spécial. En adhérant à eux, il les enveloppe elles attache avec d'au- tres , auxquels il tient par la face opposée , et en réunissant ainsi toutes les parties de manière à n'en plus faire qu'un seul ensemble , il se ploie à toutes les formes , il permet aux parties de se mouvoir plus ou moins librement les unes sur les autres. Le tissu scléreux, dans lequel l'adhésion doit arriver à un haut degré de solidité, afin de prévenir l'échappement des tissus adhérens , est le seul où elle ne soit point accomplie par du tissu cellulaire : ainsi le cartilage tient immédiate- ment à l'os; de même, le tendon adhère d'une manière immé- diate , d'un côté au muscle et de l'autre au périoste. 2° Le tissu solide a de l'affinité adhésive pour les fluides et notamment pour les liquides , de sorte qu'en raison de la mobilité plus grande dont ces derniers sont doués , il les attire d'une certaine distance ; ce sont eux qui font paraître sa surface humide , qui le rendent glissant , et qui lui per- mettent de se déplacer aisément par rapport à d'autres par- ties. Gomme l'adhésion est une action exercée par des sur- faces, sa force correspond à l'étendue de la surface propor- tionnellement à la masse ; voilà pourquoi les canaux étroits sont ceux auxquels le liquide adhère avec le plus de force , car leur masse est devenue presque entièrement surface^ c'est-à-dire que cette dernière y a acquis toute la prépondé- rance qu'elle est susceptible d'avoir. II. Union chimique. III. L'effet de l'affinité est porté plus loin quand il y a pé- nétration réciproque, c'est-à-dire lorsque deux substances hétérogènes s'unissent ensemble de manière qu'elles ne peu- vent plus être distinguées l'une de l'autre, mais que cepen- dant leur combinaison ne représente point un troisième corps tout nouveau, et conserve la forme d'une des substances constituantes, réunit les qualités des deux parties coinpo- tNlON DES PARTIES ORGANIQUES. 5l santés, et laisse apparaître celles-ci sans changement dès qu'elles viennent à être séparées. Ce qui caractérise l'orga- nisme , c'est que les parties qui le constituent se pénètrent réciproquement avec leurs différentes formes de cohésion ; le gaz contient de la substance liquide et de la substance so- lide , tout comme le liquide renferme de la substance gazeuse et de la substance solide , ou le solide de la substance ga-- zeuse et de la substance liquide , non sous leurs formes par- ticulières , mais sous la sienne propre , et par conséquent en- chaînées ou latentes en lui. La physique mécanique regarde la matière comme absolument impénétrable ; elle croit impossible de concevoir la coexistence de deux matières dans un même espace , et elle soutient en conséquence que la pénétration est purement apparente , qu'elle ne consiste qu'en une agréga- tion, les uns auprès des autres, d'atomes invisibles, dans des vides également invisibles. Mais comme , dans les combinai- sons dont nous parlons , on ne remarque aucune différence de substance , comme on ne voit pas que le solide y présente aucun vide , comme nos sens ne nous y font apercevoir nulle limitation du liquide , la physique empirique admet que des substances auparavant séparées dans l'espace se sont réunies là dans un espace commun , et elle laisse à des recherches ultérieures le soin de déterminer s'il y a ou non contradic- tion entre les données fournies par les sens et les lois ra- tionnelles. 3» Une dissolution , mode de pénétration dans lequel une substance solide est prise par un liquide , ou une substance liquide par une autre gazeuse , a lieu pour tous les fluides sécrétoires. Le dissolvant le plus général de la sub- tance organique est l'eau : mais les alcalis et leurs sels sont les principaux agens qui favorisent ou rendent possible la dissolution , à laquelle les acides paraissent prendre moins de part. A son tour, l'eau détermine , du moins en partie, la dissolution de substances solides dans l'air. Enfin la stéarine est portée à l'état liquide par Télaine , ou la graisse en géné- ral rendue soluble dans l'eau par la saponification. 4* L'imbibition , qui consiste en ce que le liquide est reçu dans un corps doué d'une cohésion supérieure à la sienne , est 32 UNION DES PARTIES ORGANIQUES, commune à toutes les parties solides. Nous désignerons sous le nom d'affinité d'imbibition le rapport entre le liquide et le solide qui détermine ce mode de pénétration. Ainsi le phos- phate calcaire de l'os est imbibé de gélatine, la fibre du muscle l'est de cruor , la substance cornée du poil l'est de graisse , et dans toutes ces parties on n'aperçoit rien absolu- ment d'oii l'on puisse conclure que les deux substances se trouvent l'une à côté de l'autre seulement. 5° Le plus général de tous les modes est l'imbibition par de l'eau. La substance organique a de l'affinité adhésive pour l'eau , et cette affinité est plus forte en elle que dans la plu- part des corps inorganiques. Aussi ne se contente-t-elle pas de s'imbiber lorsqu'elle s'y trouve plongée immédiatement , cas dans lequel, comme l'a fait voir Chevreul , elle peut quel- quefois en absorber une quantité qui dépasse son propre poids du double ; mais encore elle l'attire de l'atmosphère , ou, en d'autres termes, elle exerce une action hygrométrique. Elle enchaîne cette eau de manière à ne plus paraître mouillée; l'albumine , par exemple, quand elle se coagule, admet en elle et rend latente, comme une sorte d'eau de cristallisation, l'eau dans le sein de laquelle elle était dissoute. Mais^ de même que le mucus ou le globule du sang se gonfle dans l'eau , par im- bibition , de même aussi la substance organique en général y augmente de volume , et comme cet accroissement devient surtout manifeste dans les substances sèches et filiformes , qu'il rend plus longues , les poils qui composent les aigrettes des Synantherées , les poils de l'homme et des animaux , ou les filamens de la substance appelée baleine , servent d'hygro- mètres, parce qu'ils s'étendent à proportion de l'eau dont est chargée l'atmosphère , à laquelle ils l'enlèvent. Mais l'eau ne se borne point à augmenter le volume ; elle procure en- core les propriétés mécaniques, la mollesse, la flexibihlé, l'extensibilité et l'élasticité qui caractérisent la substance or- ganique, celle surtout du corps animal ; aussi les tendons et les cartilages, auxquels la dessiccation a fait perdre ces quahtés, les recouvrent-ils dans l'eau , tandis que d'autres liquides , comme l'huile ou l'alcool , ne les leur rendent point. Le de- gré de l'imbibition aqueuse est déterminé par la capacité de UNION DES PARUES ORGANIQUES. 53 la substance organique, par l'affinité adhésive des alentours pour l'eau , par la pression de l'atmosphère et par lu tempé- rature. En effet, les divers'principes constituaus et tissus orga- niques ont une capacité différente pour l'eau, de manière qu'ils en absorbent plus ou moins avant d'atteindre leur point de saturation , et qu'ils la retiennent avec plus ou moins de force : ainsi le tissu cellulaire est celui qui en prend le plus ; le muscle en absorbe moins , le tendon ou le cartilage moins encore , et la fibrine se dessèche plus promptement que l'al- bumine. Les corps qui ont davantage d'affinité pour l'eau l'enlè- vent à la substance organique , comme fait par exemple le papier gris à l'égard de la fibre musculaire : l'atmosphère se met dans une sorte d'équilibre avec le corps organique , sous le rapport de la quantité d'eau , de manière qu'elle en sous- trait à ce corps , quand elle-même est sèche , ce qui n'em- pêche pas qu'à raison de son affinité pour le liquide, celui-ci n'en retienne toujours une certaine quantité lorsque sa masse n'est point trop peu considérable proportionnellement à l'é- tendue de la surface mise en contact avec l'air. Ainsi Rum- ford (d) a trouvé qu'en se desséchant à l'air, le bois de Chêne conservait ordinairement 0,12 de son poids d'eau, et qu'il y en avait encore 0,07 dans du bois de cette espèce qui était cependant au sec depuis plus de cent ans. La pression de l'atmosphère favorise l'imbibition ; de même qu'une ventouse , appliquée sur une plaie empoisonnée , em- pêche l'absorption du venin, qui dépend en grande partie de l'imbibition (§726, 7°), de même aussi la substance orga- nique , placée sous le récipient de la machine pneumatique , s'y dessèche beaucoup plus tôt qu'à l'air , surtout lorsqu'il se trouve à côté d'elle un corps doué d'une grande affinité adhé- sive pour l'eau , tel que la potasse caustique ou le chlorure de calcium. Enfin la chaleur triomphe de l'affinité adhésive et de l'im- bibition , en volatilisant l'eau. 6° Il y a plusieurs corps inorganiques, notamment Teau et (1) Poggendovff , Annalen der Physik und Chemie-, t, XL , p. 16. viii, 3 34 UNION DES PARTIES ORGANIQUES. les terres , qui absorbent de Tair , parfois même en plus grande quanliié que leur propre volume , qui par conséquent le rendent latent et le condensent. De même aussi la substance organique manifeste cette affinité pour l'air a un très-haut degré. Dalton (1) a prouvé de la manière suivante l'existence d'une quantité considérable d'air combiné dans le corps hu- main. Les seuls espaces qui contiennent de l'air libre sont les poumons et l'estomac , ayant une capacité les premiers de cent et l'autre de cinquante pouces cubes ; mais le volume du corps humain est d'environ quatre mille cinq cents pouces cubes ; après en avoir déduit ces cent cinquante pouces cu- bes d'air, il reste quatre mille trois cent cinquante pouces cubes de parties solides et liquides; maintenant, comme celles-ci ont , terme moyen , une pesanteur spécifique de 1050, leur poids, pour le volume indiqué, devrait être égal à celui de quatre mille cinq cent soixante-sept pouces cubes d'eau , c'est-à-dire s'élever à cent soixante et quatre livres ; cepen- dant le poids réel d'un homme vivant du volume en question n'est que de cent quarante-six livres , c'est-à-dire égal à celui de quatre mille quarante-quatre pouces cubes d'eau; par conséquent il faut que , pendant la vie , les parties solides et liquides soient pénétrées d'air, et qu'elles acquièrent ainsi une pesanteur spécifique inférieure à celle qu'elles ont, prises isolément , et après la mort , quand une partie de leur air s'est dégagée. Dalton allègue encore , à l'appui de ce raisonnement , qu'en appliquant la main à l'orifice du récipient d'une machine pneumatique , on sent qu'elle est attirée et qu'elle se gonfle, parce que l'air contenu en elle tend à s'échapper. Mais une preuve immédiate de l'existence d'air que la pression de l'at- mosphère retient dans le corps organique , nous est fournie par le fait que toute partie quelconque de ce corps qu'on place sous le récipient de la pompe aspirante, en laisse échap- per (2). Les sécrétions des membranes muqueuses et des glandes, (1) Bibliothèque universelle de Genève , t. LIV, p. 130. (2) Weber, Anatomie des Menschen, t. I, p. 58. UNION DES PARTIES OUGANIQUES. 35 le mucus , la salive , la bile , l'urine , le lait , sont les produits organiques qui donnent le plus d' air. L'air qui s'en dégage les gonfle à tel point que la bile devient dix et la salive douze fois plus volumineuses qu'elles ne l'étaient auparavant. Il pa- raît ne point être venu du dehors , et s'être mêlé avec les li- quides pendant l'acte même de leur formation , car le lait qu'on vient de tirer en donne beaucoup , et quand on le lui a enlevé, il n'en soutire point d'autre à l'atmosphère dans l'espace de six heures. Comme il ne peut pas manquer d'arriver qu'au milieu des nombreux déplacemens des organes les uns par rapport aux autres , il se forme çà et là des vides , ces espaces sont aussitôt remplis par des vapeurs ou des gaz qui se dégagent des par- ties environnantes, solides ou liquides (§ 709, 6% 7°; 715; 8Î4, I). 7° C'est aussi l'imbibition qui fait que les liquides ne se bor- nent point à pénétrer la substance organique , mais qu'en- core ils la traversent , c'est-à-dire qu'après avoir été mis sur l'une des surfaces d'une partie membraneuse, ils apparais- sent au bout de quelque temps sur la surface opposée , sans qu'il y ait de pores ou de canaux visibles. Cette perméabilité de la substance organique fut démontrée d'abord par Kaaw et Albinus^ admise par Haller(l), mais conjointement avec des pores invisibles , adoptée ensuite par Wolff (2) , mais sans annexion de l'hypothèse des pores , constatée , dans ces der- niers temps, par les expériences nombreuses de Lebkuchner (3) et de Foderà (4), enfin présentée par Dutrochet sous les noms d'endosmose et d' exosmose (*) , et étudiée depuis lors par divers physiciens. Les parties du corps qui paraissent être le plus perméables, après le tissu cellulaire , sont les vaisseaux capillaires et les (1) Elément, physiolog., t. I, p. 35. (2) Abhandlungen ueber die Nutritionskraft , p. 18 , 25. (3) Archives générales , t. VII , p. 424. (4) Recherches expérimentales syr l'absorption et l'exhalation. Paris , 1824, in-S». (*) Mémoires pom* servir à l'histoire anatomique"et physiologique des Végétaux et des animaux , Paris 1837 , 1. 1, p. 1 et suiv.j 36 UNION DES PARTIES OUGANIQUES. membranes séreuses; viemient ensuite les membranes mu- queuses. 8° Peu de temps après que les injections eurent été ima- ginées, on remarqua que les liquides poussés dans les artères transsudaient à travers les vaisseaux capillaires (1). Albinus, entre autres (2), qui avait observé le passage non interrompu du sang des artères dans les veines, demeura convaincu , par cette transsudation en forme de rosée , que les parois des vaisseaux étaient perméables , malgré leur densité. Il est sur- tout très-commun , comme l'a vu par exemple Mascagni, que, quand on injecte un cadavre , la portion liquide s'échappe , andis que la matière colorante qu'elle tenait en suspension demeure dans les vaisseaux. Legallois (3) fait remarquer que les capillaires sont les seuls dans lesquels cette pénétration ait lieu. Kaaw, Haies et Mascagni ont reconnu qu'elle s'opère surtout avec une grande facilité dans les capillaires de la trachée-artère, qu'elle est moins commune dans ceux de l'in- testin, et moins encore dans ceux du tissu cellulaire (4). Les vaisseaux gorgés de sang sur lesquels on applique une dou- ble ligature , ne tardent pas à devenir flasques , et au bout de quelques heures ils ne contiennent plus qu'une petite quan- tité de sang coagulé , comme l'ont observé Mascagni et Séga- las (5). Emmert a vu du sang transsuder dans la cavité des intestins après la ligature d'une veine mésentérique (6). Sui- vant Andral (7), le cyanure de potassium, injecté dans un vais- seau d'un cadavre , apparaît, au bout de quelque temps, à la surface extérieure de celui-ci , et y décèle sa présence par la couleur bleue qu'il fait naître au contact d'une dissolution de sulfate de fer. Une veine de cadavre, qu'on a remplie d'a- (1) Elément, physiolog., t. I, p. 35. (2) Academ. annotationes , t. III , p. 47. (3)0Euvres, t. II, p. 428. (4) Weber, Anatomie des Metischen , t. III , p. 52. (5) Journal de Magendie, t. IV, p. 291. (6) Tuehinijer Blœtler fuer Naturwissenschaften und Arzneikunde , t. I. p. 97. (7) Précis d'anatomie pathologique , t, I , p. 63. UNION DES PARTIES ORGANIQUES. 5'J cide carbonique, trouble l'eau de chaux, selon Lebkuchner (1), non seulement dans le verre où on la plonge, mais même dans l'intérieur d'une autre veine qu'on met en contact avec elle. Foderà (2) a observé , sur des animaux vivans, que quand on injecte de l'extrait de noix vomique dans l'artère carotide embrassée par deux ligatures , l'empoisonnement a lieu au bout de quelque temps , et que les symptômes qui l'annon- cent se manifestent en quatre à dix minutes lorsque, dans une plaie faite à un animal , on introduit un morceau de vaisseau sanguin d'un autre animal, plein d'une dissolution d'extrait de noix vomique , lié aux deux bouts et bien lavé au dehors. 9° Des substances étrangères parviennent également du dehors dans les vaisseaux sanguins. Prochaska (3) prit une artère pleine d'eau pure , et liée aux deux bouts , la plongea dans une dissolution de sel , et trouva , au bout de deux heu- res , que l'eau contenue dans son intérieur avait une salure égale à celle de l'eau du récipient. Foderà a remarqué le même phénomène (4), quand il avait plongé l'artère dans un acide affaibli. Suivant Autenrieth (5), l'acide nitrique qu'on passe légèrement sur une veine, détermine le sang contenu dans ce vaisseau à se former en un caillot de couleur terreuse. Foderà (6), ayant plongé une anse intestinale d'un Lapin vi- vant dans de l'acide sulfurique étendu, trouva, au bout de quelques instans, que le sang contenu dans les vaisseaux avait une couleur noire et était coagulé. Lorsqu'il avait complète- ment isolé une artère ou une veine , en ayant même soin de glisser dessous une petite planchette , et qu'il en frottait la surface libre avec une dissolution d'extrait de noix vomique , les symptômes de l'empoisonnement éclataient , et le sang (1) Loc. cit., p. 436. (2) Rechercties sur l'absorption , p. dO. (3) Bemerkungen ueher den Orgnnismus des menschlichen Kosrpers , p. 52. (4) Loc. cit., p. 9. (5) Handhuch der empirischen Physiologie , t. II , p. 147. (6) Loc. cit., p. 30. 38 UNION DES PARTIES ORGANIQUES. contenu dans le 'vaisseau acquérait une saveur amère (1). Lebkuchner (2) a constaté aussi que le cyanure de potassium', l'ammoniure de cuivre ', l'essence de térébenthine , l'émétine et l'extrait de fausse angusture pénétraient dans le sang des veines à la surface desquelles il étalait légèrement ces sub- stances; il s'en est convaincu, tantôt par l'effet des réactifs, tantôt par l'odeur , ou par la manifestatiou consécutive des phénomènes de l'empoisonnement. 10° Les substances qu'on introduit dans la cavité de vési- cules séreuses , se portent au dehors en traversant les parois de ces dernières. Lebkuchner (3) a fait plusieurs expériences sur le péritoine de Chats vivans , pour établir ce fait. Lors- qu'il avait injecté de la bile de Bœuf, au bout de douze minutes, il trouvait que la face externe du péritoine sa- lissait'le papier et lui communiquait une saveur amère; sept minutes après l'injection de l'encre, il voyait les muscles internes du bas-ventre présenter une teinte noirâtre ; du pa- pier frotté contre la surface externe du péritoine , deux ou trois minutes après l'injection d'une dissolution de chlorure de fer dans la cavité abdominale , bleuissait par le cyanure de potassium, ou prenait cette teinte par le chlorure de fer, si l'injection avait été faite avec du cyanure de potassium; De même, suivant Mayo (4), une heure après avoir versé de l'encre dans la cavité pectorale d'un animal vivant , on trouve les muscles intercostaux internes , le péricarde et la surface du cœur offrant une teinte noirâtre. 11° Les vésicules séreuses ne sont pas moins perméables de dehors en dedans. Lebkuchner (5) a constaté , au moyen des réactifs, que le cyanure de potassium ou Tammoniure de cuivre, mis en contact avec la surface externe dupéritoine, se retrouvait au bout de deux minutes dans la cavité de cette (1^ hoc. cit., p. 9, (2)ioc. cit.,\,. 439. (3) Meckel, Deutsches Archiv , t. IV, p. 518. (4) Outlines of htunan physiology , p. 98. (5) Meckel, Deutsches Archiv , t. IV, p. 519. UNION DES PARTIES ORGANIQUES. 5g membrane , et qu'il ne fallait non plus que trois minutes au réactif pour traverser la plèvre. 12°  regard des membranes muqueuses, Kaaw et autres observateurs avaient déjà prouvé que l'eau traverse les pa- rois de l'estomac (1) et des intestins (2). Quand Mascagni poussait de l'eau dans le canal intestinal ou la vessie urinaire d'un animal qu'il venait de mettre à mort , il en transsudait un peu à la surface extérieure de ces organes , mais les ma- tières colorantes mêlées avec le liquide restaient dans l'inté- rieur. Tiedemann et Gmelin (3) ont trouvé , chez un Cheval auquel ils avaient fait avaler de la teinture d indigo , la mem- brane muqueuse de la moitié supérieure de l'intestin grêle entièrement imbibée de matière colorante ; le tissu cellulaire unissant la tunique muqueuse à la tunique musculaire était également bleu, et tellement même, que l'eau n'enlevait point la couleur. Chez des Lapins, au dire de Lebkuchner, du sulfate de fer ou du cyanure de potassium transsudait en huit minutes de l'intestin au dehors , et en seize minutes du dehors dans Tintestin ; l'ammoniure de cuivre sortait de l'in- testin au bout de quelques heures, et l'encre au bout de trois. Foderà (4) fit sortir de l'abdomen d'un Lapin une anse intestinale longue de plusieurs pouces , la lia aux deux bouts, la détacha du mésentère, la remplit d'une dissolution d'ex- trait de noix vomique , la repoussa dans le ventre , et vit se manifester bientôt après les phénomènes ordinaires de l'empoisonnement. Lorsque MuUer (5), après avoir introduit du cyanure de potassium dans un petit flacon , bouchait l'ori- fice très-étroit de ce dernier avec la vessie urinaire ou le poumon d'une Grenouille , frottait la surface supérieure de la membrane avec un pinceau trempé dans une dissolution de chlorure de fer , et renversait ensuite le flacon , il voyait (1) Hallev, Elément, physiolog., t. VI , p. 162. (2) Ibid., t. YII,T^. 17. (3) Reclierches su-v la route que prennent diverses substances pour pas- ser de l'estomac et du canal intestinal dans le sang , p. 25. (4) Loc. cit., p. 10. (5) Handiuch^der Physiologie ,%. l, p. 233^ 4o UNION DES PARTIES ORGANIQUES la couleur bleue se prononcer à l'extérieur au bout d'une se- conde déjà. Enfin, J. Davy (1) a vu, sur un Chien, immédia- tement après la mort duquel il avait poussé de l'air dans les poumons, cet air pénétrer à la surface de l'organe, en traver- sant la plèvre. 13° D'après les observations faites par Lebkuchner sur des cadavres humains, le cyanure de potassium pénétrait en sept à huit heures de la face interne de la peau à l'externe , et en huit ou neuf heures de la face externe à l'interne ; sur des Lapins morts , la pénétration du dehors en dedans de la peau avait lieu en cinq heures pour le cyanure de potassium , en six pour l'acide sulfurique , en dix pour l'huile de térében- thine et le camphre , en vingt-quatre pour l'acide acétique , en quarante-huit pour l'ammoniure de cuivre. Chez des Lapins et des Chats vivans , sur les parties rasées de la peau des- quels on avait fait des frictions avec l'acétate de plomb , le chlorure de barium , le tartre siibié , le cyanure de potassium , l'acide sulfurique , l'huile camphrée , l'essence de térében- thine , ces substances décelèrent au bout de quelque temps leur présence à la surface inférieure de la peau , ainsi que dans le pannicule adipeux sousjacent et la substance mus- culaire. 14° Selon Lebkuchner , les substances pénètrent avec plus de rapidité encore à travers les membranes scléreuses. Le cyanure de potassium traversa l'aponévrose crurale d'un ca- davre humain en une heure , l'acide hydrochlorique en une demi-heure , le camphre en cinq minutes. Celle d'un Lapin vivant fut traversée en huit minutes par le cyanure de potas- sium. Eble fait remarquer (2) qu'on peut exprimer l'humeur aqueuse de l'œil , de manière à la faire suinter comme une rosée sur la surface extérieure de la cornée transparente. 15° Mayo cite , comme exemples de la perméabilité de la substance musculaire , que la viande qu'on immerge dans de l'eau salée ne tarde pas à s'en imprégner entièrement, et que (4) Philos. Trans. , d823 , p. 507. (2) Ueher den Bau und die Krankheilen der Bindehaut des Aufjes , p. 28,61. UNION DES PARTIES ORGANIQUES. 4* quand on a versé un acide étendu dans le péricarde d'un Chien mort , l'eau chaude qu'on fait couler par une artère coronaire dans l'oreillette droite, paraît acide au bout de quatre ou cinq minutes. 16° Tous ces faits, joints à d'autres qui ont déjà été rap- portés précédemment ( § 461, II, 4°-12°; 634,10°), mettent hors de doute la perméabilité {générale de la substance orga- nique. Elle se manifeste dans des points où l'on ne peut ni démontrer , ni concevoir de voies ouvertes , mêine assez long- tem ps après la mort , et par conséquent sans le moindre concours de l'activité vasculaire. Comme sa rapidité varie suivant les substances sur lesquelles on opère , et qu'en ce qui concerne les liquides organiques, elle n'a guère lieu qu'après la mort (§ 634 ) , il faut qu'elle dépende d'affinités sur lesquelles l'ac- tivité vitale peut exercer de l'influence. L'affinité adhésive du liquide pour le solide , qui détermine une liqueur à se répandre dans des espaces étroits , même contre la loi de la pesanteur ,' et qu'on nomme capillarité, ne peut être considérée quecomme un premier pas fait vers la pé- nétration dans la substance elle-même , c'est dire vers l'imbi- bition ; mais elle n'est point identique avec cette dernière , et moins encore avec la transsudation , ou l'apparition à l'autre surface de la substance. Aussi Dutrochet at-il pu trouver que la faculté de pénétrer à travers une substance organique , ou l'endosmose , est en raison directe de l'ascension dans les tubes capillaires pour les liquides huileux , en raison inverse pour les liqueurs salines , et que l'endosmose croît avec la température, tandis que la capillarité diminue. Lorsqu'un liquide a pénétré ou imbibé une partie organique , en vertu de son affinité, il ne la traverse , ou ne sort de l'autre côté, que quand il est ou pousséducôté par lequel il entre, ou attiré du côté par lequel il sort. Le premier cas peut avoir lieu, indépendamment de toute pression mécanique , lorsqu'il y a , entre les couches diverses de la substance organique , iné- galité sous le point de vue de l'affinité et de la capacité d'im- bibition. Il est plus général et plus certain que la pénétra- tion soit déterminée par une autre substance organique , qui , pour arriver au même degré d'imbibition , soustrait à la sub- 42 UNION DES PARTIES ORGANIQUES. stance déjà imbibée le liquide dont celle-ci s'est emparée % une vessie qui est pleine d'un liquide , et dont les parois sont imbibées de celui-ci , ne le laisse transsuder d'une manière sensible que quand elle se trouve , par sa surface extérieure , en contact avec un corps solide ou liquide , qui attire à lui soit la liqueur qu'elle renferme , soit la substance que cette liqueur tient en dissolution. Si donc une couche du corps or- ganique s'est imbibée d'une dissolution, et que la couche sous-jacente tende à s'imbiber également soit de la dissolution entière, soit seulement du hquide dissolvant, ou bien silaliqueur placée au dessous tend à se charger, soit de la dissolution^ soit de la substance dissoute , il faut ou que le liquide entier, ou qu'une de ses parties passe à l'autre surface de la pre- mière couche. 17° Cette attraction doit être accrue lorsqu'il y a antago- nisme électrique entre le liquide placé au dehors et le liquide placé au dedans de la couche organique ainsi imbibée. Sui- vant Foderà (1), une dissolution de sulfate de fer ou de cya- nure de potassium traversa une vessie en quelques minutes , même en quelques secondes , sous l'influence du galvanisme, tandis que, sans cette dernière, elle ne le faisait qu'en une demi-heure ou une heure et demie. Dans la première expé- rience de ce genre , faite par WoUaslon , un tube de verre , fermé à sa partie inférieure par une vessie , fut empli d'une dissolution saline , dans laquelle plongeait un fil de zinc,, et posé sur une pièce d'argent ; dès que cette dernière se trouva en contact avec le fil^ de zinc , le liquide salin traversa la vessie et parut au dehors. Dans l'expérience que nous avons rapportée ailleurs (§461, 7°), Porret vit l'eau de la moitié du cylindre séparée de l'autre par une membrane tendue , et dans laquelle plongeait le conducteur du pôle négatif d'une pile galvanique, monter tellement, qu'elle dépassa enfin de trois quarts de pouce le niveau de l'autre moitié , mise en rapport avec le pôle positif , quoiqu'elle ne consistât d'abord qu'en quelques gouttes seulement. L'eau qui se trouvait au (1) Loc. cit., p. 22. ]j UNION DES PARTIES ORGANIQUES. (\S pôle positif avait donc passé à travers la membrane animale , parce que Teau qui communiquait avec le pôle négatif l'avait attirée. Maintenant on pourrait expliquer ce phénomène en disant que l'eau était devenue oxygénée au pôle positif et hydrogé- née au pôle négatif. C'est ce que semblent indiquer d'autres expériences , dans lesquelles des acides sont attirés par des bases , à travers une vessie. Ainsi , lorsque Fischer (1) em- plissait en partie d'eau un tube fermé inférieurement par une vessie, sur laquelle reposait un fil de fer, et qu'il mettait ce tube dans un vase contenant une dissolution de sulfate de cuivre , il voyait l'eau monter dans le tube , le fil métallique qu'elle contenait s'oxider, et du cuivre se précipiter dans le vase. La même chose arrivait quand le vase contenait seulement de l'acide sans métal , et l'eau s'élevait d'autant plus dans le tube que le métal formant le fil était électro-positif ou avait de l'affinité pour l'oxygène. Wach (2) a remarqué aussi que quand il prenait deux tubes en partie pleins d'eau et fermés en bas par une vessie , qu'il mettait dans l'un un morceau de zinc , dans l'autre un morceau de cuivre , qu'il les plongeait tous deux dans une dissolution de cuivre , et qu'il faisait commu- niquer les métaux ensemble par le moyen d'un fil d'argent , l'eau montait dans le tube contenant du zinc et baissait dans celui qui contenait du cuivre. Il résulte également des expé- riences de Dutrochet qu'un intestin plongé dans l'eau s'y gonfle s'il contient une dissolution d'alcali, et s'y vide, au contraire ;, s'il renferme un acide ; d'où il suit que l'acide est attiré par l'eau et Teau par l'alcali. Cependant l'antagonisme chimique ne paraît point coïncider ici toujours avec l'antagonisme électrique. Lorsque Foderà (3) emplissait une vessie d'une dissolution de cyanure de po- tassium , la couvrait extérieurement d'un linge trempé dans une dissolution de sulfate de fer, introduisait le conducteur du pôle négatif d'une pile voltaïque dans la vessie , et mettait ce- (1) Poggendorff , ^wwa^ew der Physilt , t. LXXII, p. 303.1 (2) Schweiggei-, Journal fiier Chemie , t. LVIH , p. 33, (3) hoc. cit., p. 22.^ 44 UNION DES PARTIES ORGANIQUES. lui du pôle positif en contact avec le linge, il voyait paraître une couleur bleue dans la vessie^ et c'était le linge qui bleuissait quand il renversait les pôles. De même, quand on a mêlédusuc de violette avec l'eau contenue^^dans deux espaces séparés par une vessie, l'eau qui monte au pôle négatif verdit, et celle qui baisse au pôle positif i rougit , de sorte qu'on ne voit point ici d'eau oxygénée se porter au pôle négatif. 18» Dutrochet a trouvé que la densité proportionnelle exerce de l'influence. L'eau est attirée à travers la vessie par une dissolution de gomme , de sucre ou de sel , et quand les deux liquides tiennent en dissolution la même substance , mais dans des proportions diverses , la dissolution la moins chargée est attirée par celle qui l'est davantage. Aussi Dutrochet ex- pliqua-t-il les phénomènes qui précèdent , en disant que l'eau perd de l'oxygène au pôle positif, qu'elle y devient plus chargée d'hydrogène, que, par conséquent, elle y acquiert une légèreté spécifique plus grande, particularités en raison desquelles elle est attirée par l'eau située au pôle négatif , qui est plus chargée d'oxygène et par conséquent plus dense (*). Cependant la différence de densité paraît ne point être tou- jours déterminante. Suivant Faust (1), une vessie à demi pleine d'air atmosphérique ou de gaz hydrogène , se gonfle dans du gaz acide carbonique , et une autre vessie pleine de ce dernier gaz en perd lorsqu'on la plonge dans de l'air at« mosphérique ou dans du gaz hydrogène. Ici donc c'est le gaz le plus dense qui est attiré par le moins dense. 19° De tous ces faits , il découle qu'en général l'hétérogé- néité de deux liqueurs séparées par une membrane animale les détermine à traverser celte dernière , et que l'attraction est exercée tantôt par le liquide du pôle négatif sur celui du pôle positif , tantôt par la liqueur basique sur celle qui con- tient davantage d'oxygène , tantôt par la plus dense sur celle qui l'est moins. Mais des recherches ultérieures ont appris qu'ici l'attraction n'est point unilatérale , qu'elle est mutuelle , au contraire , et (*) Mémoires sur les végétaux et les animaux , t. II , p. 447. (1) Bulletin des sciences médicales , t. XXV, p. 303. UNION DSS PARTIES ORGANIQUES. 4^ qu'ily a pénétration de part et d'autre, seulement à des degrés divers. Dutrochet, dans des expériences faites avec la pile gal- vanique , a reconnu qu-outre l'adfluxion plus forte vers le pôle négatif, il s'en opérait une aussi en sens inverse; il a trouvé qu'une certaine quantité de la liqueur la plus dense passait également dans celle qui l'était moins , et que quand on avait renfermé du gaz acide carbonique dans une vessie , celle-ci, au bout de quelque temps, avait perdu la plusgrande quantité de son acide, qui s'était échappé dans l'atmosphère, et que ce qu'elle en contenait encore était mêlé avec un peu d'air atmosphérique. Déjà Foderà (1) avait observé que la pé- nétration a lieu des deux côtés simultanément ; lorsqu'il (2) avait empli une anse intestinale d'une dissolution de cyanure de potassium, et mis cette anse dans une capsule contenant une dissolution de chlorure de calcium , il trouvait , quelque temps après, du chlorure de calcium dans l'intestin et du cyanure de potassium dans la capsule ; la même chose avait lieu en opérant avec de l'acide sulfurique et de l'acide hydro- chlorique , avec la teinture de tournesol et l'infusion de noix de galle ; du chlorure de barium ayant été introduit dans la veine pulmonaire d'une Brebis , et du cyanure de potassium dans sa trachée-artère , on retrouva le premier dans les bron- ches et le second dans la veine ; un peu de chaque liquide s'était donc porté vers l'autre. D'après les observations de Graham (3), qui sont d'ailleurs en contradiction avec celles de Faust, la proportion de la pé- nétration réciproque est déterminée , à l'égard des gaz , par la densité : le gaz hydrogène attire , dans le réservoir qui le contient , l'air atmosphérique plus pesant que lui, mais il est attiré lui-même en plus grande quantité par ce dernier, de sorte que le réservoir se vide ; au contraire , l'acide carboni- que, en vertu de sa pesanteur plus considérable , attire da- vantage l'air atmosphérique et s'échappe en moindre quantité (d) Loc. cit.; p. 28. (2) Loc. cit., p. 18. (3) Poggendorff , Aanalen der Physik und Chemie , t, CIV, p, 331. 46 UNION DES PARTIES ORGANIQUES. dans l'atmosphère , de manière que le réservoir devient plus plein qu'il ne Tétait auparavant. Une affinité élective peut aussi s'exercer entre deux liquides qui contiennent des principes constituans divers. D'après Staple (Ij, quand une anse intestinale, pleine d'une dissolu- tion de gomme et de rhabarbarine , était plongée dans de l'eau, il pénétrait de cette dernière dans l'intestin, et de la rha- barbarine passait de l'intestin dans le liquide . Une autre portion d'intestin fut emplie d'une dissolution de sulfate de fer et plon- gée dans de l'eau contenant du cyanure de potassium ; de l'eau seule pénétra dans l'intestin ^ mais le sel de fer sortit en partie de ce dernier et colora l'eau extérieure en bleu. 20« Mais , de quelque côté qu'ait lieu l'attraction la plus forte , ce qu'il y a partout d'essentiel dans ces phénomènes, c'est la tendance des substances hétérogènes à rétablir l'ho- mogénie. Magnus a observé que le liquide le plus dense monte, c'est-à-dire attire, à travers la vessie, le liquide de même composition , mais moins chargé , jusqu'à ce qu il soit parvenu au même degré de concentration, et que quand les deux liqueurs sont également concentrées , mais de composi- tion diverse , la pénétration mutuelle a lieu jusqu'à ce que la nature chimique soit devenue la même de part et d'autre. La pénéirabilité n'appartient exclusivement ni au corps vivant, ni même à la matière inorganique, et on la re- trouve aussi dans le règne inorganique ; des corps poreux , tels que l'ardoise ou des cloches fêlées permettent un échange de substance. Cependant la pénétration ne se rat- tache pas uniquement à des circonstances mécaniques ; le carbonate calcaire ne donne lieu, suivant Dutrochet, à aucun phénomène d'endosmose, malgré sa grande capil- larité. Le même observateur a remarqué que l'albumine ne se mêle point avec l'eau située immédiatement au dessous d'elle, mais que , quand une vessie humide vient d'être interposée entre les deux liquides, le mélange s'effectue bientôt. La (1) Kastner, Jrchiv fuer die gesammte Naturlehre , t. XXI , p, 282. PROPORTION DÈS MATÉRIAUX ORGANIQUES. 4? présence d'une cîoison est donc une condition nécessaire ; il faut que cette cloison ait de rafiînité avec les deux liquides entre lesquels elle est placée , et qu'elle s'en imbibe; lorsque tous deux viennent à se rencontrer en elle, aussitôt on voit s'éveiller la tendance au rétablissement de l'équilibre , sur laquelle reposent les phénomènes de la pénétration. La substance organique est plus pénétrable que la substance inorganique , parce qu'elle a des affinités plus variées ; mais elle ne Vest certainement point au même degré sous toutes ses formes. Si , comme le dit Dutrochet, une dissolution de gélatine emploie quatre fois plus de temps que celle d'albu- mine à traverser la substance organique , on doit conclure de là, comme opinion très -probable, que chaque tissu non seu- lement est susceptible de se laisser pénétrer par d'autres sub- stances en général , mais encore qu'il a , pour chaque espèce particulière de substance , un degré spécial de pénétrabilité. IV. A l'égard de la combinaison chimique , la qualité d'une substance organique est déterminée , non pas seulement par la proportion de ses parties constituantes , mais encore par leur mode d'union. Or ce mode nous est totalement inconnu ; nous ignorons sous quelle forme le fer, le soufre , le phos- phore, etc., sont contenus dans l'organisme vivant. En géné- ral , les principes constituans immédiats paraissent être si in- timement unis ensemble , qu'à cette particularité seule se rattache l'existence de la substance organique ; car nous pou- vons extraire de l'eau , des sels , des terres , de la graisse , de l'osmazomeet de la gélatine, de plusieurs tissus, sans que pour cela ils perdent leur cohérence. AKTICLE II. De la proportion des parties constituantes de T organisme. § 834. Si maintenant nous portons nos regards sur la pro- portion des combinaisons , I. Et que d'abord nous l'examinions d'une manière gé- nérale , 48 PROPORTIONS DES MATÉRIAUX ORGANIQUES. i." Nous reconnaissons qu'elle présente une infinie diver- sité , de sorte qu'il n'y a rien dans l'organisme qui ressemble parfaitement à autre chose. Chaque muscle a sa forme propre et un mode spécial de rapport , tant avec ses tendons qu'avec les os; la saveur diverse de chaque partie charnue d'un ani- mal annonce aussi en elle un mode particulier de composition ; la graisse de l'orbite, des reins, du cœur et de la peau, l'humeur muqueuse des fosses nasales , des poumons , des organes digestifs et de chaque segment du canal intesti- nal, etc., ne présentent pas moins de nuances. De même, on obtient des espèces différentes de gélatine, suivant qu'on opère sur des os , de la peau ou des tendons. L'albumine , la matière caséeuse , etc. , semblent ne pas être moins modifiées sur les divers points de l'économie. Enfin , la même substance varie dans les diverses espèces d'animaux , comme le mucus , la gomme ou les alcaloïdes dans chaque espèce de plante, ce qu'annonce clairement la saveur différente de la chair des di- vers animaux. 2° La substance solide du corps organique renferme des liquides qui lui donnent plus d'expansion qu'elle n'en aurait par elle-même , et le liquide est resserré par son entourage solide dans un espace plus étroit que celui qu'il occuperait s'il était seul. De là résulte la tension mécanique dont nous avons déjà parlé précédemment (§ 735, 2° ; 748, 1°), ou l'é- tal dans lequel les forces antagonistes agissent les unes sur les autres de manière à s'exciter mutuellement, sans pouvoir arriver à se manifester d'une manière pleine et entière. Cet état fait que les parties molles sont plus turgides pendant la vie , parce qu'elles contiennent davantage de liquides, et ceux- ci plus dilatés qu'après la mort, de sorte, par exemple , que nous ne trouvons pas , dans les vivisections , les intestins vides aussi affaissés qu'ils le sont sur le cadavre. En effet, si , pen- dant la vie , toutes les formes de cohésion (§ 829 , l°-3o) co- existent, mais en se pénétrant réciproquement (§ 833), la mort , qui est l'extinction de l'unité vivante (§ 652), sépare les choses qui étaient unies ensemble , ;et réduit chacune à l'état d'isolement. Or , la tension entre solide et li- quide, en sa qualité d'équilibre actif, est ua caractère de la PROPORTION DES MATERIAUX ORGANIQUES. 4q vie et une condilion du déploiement de ses manifestations (§ 748 , 1°) ; quand la cohésion et la contractilité des parties solides s'affaiblissent, les liquides acquièrent la prédomi- nance, ils affluent, ils s^'accumulent , ils troublent l'activité vitale d'une manière ou d'une autre, et lorsque l'expansion des liquides] diminue, les parties molles se resserrent et l'activité vitale baisse. Il existe , entre les parties solides , une tension analogue , qui , par cela même qu'elle consiste en une liaison harmoni- que de forces mécaniques agissant les unes contre les autres , maintient la forme normale. Si ce qui se trouve au dessus presse sur ce qui est au dessous , en vertu des lois de la pe- santeur, l'effet de cette dernière est contrebalancé , tantôt par la cohésion des parties inférieures, qui sont, ou solides, comme la base du crâne , ou fixées sur leur pourtour à des parties solides , comme le fond des cavités pectorale et abdo- minale ; tantôt par la connexion mécanique avec ce qui se trouve au dessus , comme au foie , par exemple , qui pèse sur les intestins, mais que le diaphragme attire vers le haut; quelquefois par la répartition uniforme de la pression , no- tamment sur les parois latérales, à cause de la réplétion de la cavité , comme il arrive , par exemple , à la cavité abdomi- nale , en raison du volume et de l'expansion de son contenu ; ailleurs encore , par le changement de situation , comme on le voit dans les cartilages intervertébraux , qui , lorsqu'on est couché , échappant à la pression des parties supérieures du corps , ne s'étalent plus alors en largeur, ainsi qu'ils le fai- saient sous l'influence de la pesanteur, mais se resserrent sur eux-mêmes , et acquièrent de cette manière plus de hauteur. La contraction des parties contractiles est arrêtée par la tension que leur font éprouver d'autres parties solides; ainsi la peau est distendue par la masse entière du corps , et quand elle éprouve une solution de continuité , elle se resserre sur elle- même , de manière que la plaie devient béante ; la tendance des muscles à se contracter est limitée par leur insertion aux os , et quand ceux-ci , ayant perdu leur rigidité ou leur conti- nuité , par l'effet du ramolUssement ou d'une fracture commi- hutive , n'opposent plus une résistance mécanique convenable, 5ô PROPOIITIÔN DES MATÉPJitîX OÏKÎANIQTJES. le membre perd sa forme normale et la régularité de ses mouvemens , les muscles se contractant alors en raison de leùf force différente , et même tous à la fois , pour ainsi dire eu bloc. iës organes sont à l'état de tension mécanique avec la pa- roi des cavités qui les renferment ; le cerveau fait effort contre le crâne , dans ses mouvemens , et lui donne sa forme normale ; mais il est maintenu aussi par lui dans des limites normaieà , de manière que , quand; le crâne et la dure-mère ont été largement ouverts , il s'échappe au dehors , et produit une végétation en forme de chou-fleur , comme on voit les intestins sortir par une plaie faite aux parois du bas-ventre. En vertu du resserrement qu'elles éprouvent dans les cavités, lorscju' elles sont à l'état turgide, les diverses parties exercent Utie pression les unes sur les autres ( § 726;, 6° ). Eilfin le corps organique est à l'état de tension 'mécanique avec le monde extérieur. La pression de l'atmosphère est en harnionie avec l'organisation^ dont elle maintient les propor- tiorls normales (§ 726, 7°). 3'' Uiié tension pareille a lieu sous le rapport de la compo- sltiion. Les différentes substances ne sont point combmées deut à deux , c'est-à-dire réunies par des antagonismes sirnj3les 5 elles sont combinées plusieurs ensemble, et de ma- nière que chacune d'elles peut exercer l'action chimique qui lui est propre. C'est cette diversité plus grande de principes constituans , favorisée par la différence de densité et de co- hésion dès substances combinées ensemble , qui , jointe à ce que les combinaisons ne vont pas jusqu'au point d'établir un équilibre parfait ou une saturation complète , fait que la sub- stance organique a pour caractère une plus grande aptitude à changer et à se décomposer. Constamment elle est compo- sée de cai-bone, d'hydrogène et d'oxygène ; lorsqu'à ces élé- mens se joint encore l'azOte, la propension à se décomposer , notamment à subir la fermentation putride , augmente. Or il y a certainement tendance du carbone à former de l'acide carbonique avec l'oxygène, de l'hydrogène à produire de l'eau avec l'oxygène , et de l'azote à développer de l'ammoniaque avec l'hydrogène ; mais cette tendance ne se réalise que sur PROPORTION DES MATÉRIAUX ORCANIQtJËS; 5l les limites de l'organisme , dans les excrétions : encore même rie s'y fait-elle sentir que d'une manière imparfaite , car cha- que substance est empêchée parla troisième de contracter avec l'autre une combinaison binaire complète. L'azote se com- porte comme élément positif à l'égard de l'oxygène, négatif par rapport au carbone et à l'hydrogène ; le carbone est po- sitif envers l'oxygène et l'azote , négatif par rapport à l'hy- drogène. 40 Comme les substances sont combinées en des propor- tions diverses et variables , on ne remarque nulle part de proportions stœchiométriques fixes dans la substance organi- que ; et comme les formes organiques , notamment aux de- grés supérieurs de l'échelle , sont telles aussi qu'on ne peut point les déterminer géométriquement , il suit de là que les mathématiques , en général , ne sauraient trouver ici _^aucune applicatioh. II. Maïs , quoique la proportion des substances entre elles ne soit point rigoureuse et invariable , cependant elle n'est pas non plus entièrement vague et ilhmitée. Elle ne suit point une ligne pure et simple , mais occupe , si Ton peut s'expri- mer ainsi , une zone d'une certaine largeur, sans pour cela être totalement dépourvue de limites. De même que , dans chaque espèce d'organisme , nous reconnaissons une taille moyenne , également éloignée des deux extrêmes qui consti- tuent le géantisme et le nanisme , de même aussi nous devrions déduire une proportion moyenne d'élémens de toute une série d'analyses faites sur divers individus d'une mêrïie espèce , et , autant que possible , sur un même indi- vidu ^ à des époques différentes. Mais les chimistes ne nous ont encore fourni que peu ou point de données pour arriver à ce résultat. Nul même d'entre eux n'a eu l'idée d'analyser tous les tissus d'une manière comparative ; chacun ne s'est attaché qu'à telle ou telle partie , prise tantôt sur un animal, tantôt sur un autre , et Berzelius lui-même , qui est cepen- dant celui à qui nous devons le plus d'analyses , a examiné les os et l'urine dans l'espèce humaine , les muscles et la bile dans l'espèce bovine. L'école d'Autenrieth est la seule d'où soit sortie , avec d'autres excellens travaux propres à répan- 52 PROPORTION DES MATÉRIAUX ORGANIQUES. dre du jour sur la chimie, une analyse comparative de plu- seurs organes humains. En effet , Wienholt (1) a opéré pour cela sur le cadavre d'un homme bien portant , qui avait péri par l'action du froid ; cependant il ne réduisit les organes qu'en albumine non coagulée , matière extractive aqueuse , et matière insoluble dans l'eau , qualifiée par lui de fibrine , sans noter les quantités d'extrait alcoolique mêlées avec chacune de ces substances , et sans distinguer ni la matière insoluble dans l'eau, ni les principes constituans inorganiques. Enfin les analyses que divers chimistes ont données ne peu- vent point être mises en regard les unes des autres , chacun ayant suivi une méthode particulière ; or l'exemple de Gme- lin et de Wienholt (2) montre combien une différence , même légère, dans la manière d'opérer, peut en apporter de grandes dans les résultats ; tous deux ont examiné le rein humain à peu près d'après la même méthode, seulement l'un se con- tenta de hacher l'organe et de l'épuiser avec de l'eau sur un linge, tandis que l'autre le pila et l'exprima dans un sac de toile ; or le premier obtint 0,0384 d'albumine et 0,0347 de fibrine, l'autre 0,1250 d'albumine et 0,0208 de fibrine. Dans un tel état de choses, il serait imprudent de fixer d'une manière quelconque les proportions des parties consituantes de la substance organique , et le rapprochement des diverses analyses ne peut conduire à rien de satisfaisant. Nous ne devons cependant point l'omettre ici ( § 835 ) , puisqu'il faut commencer à tirer quelques résultats des observations épar- ses recueillies par les chimistes ; si ces résultats sont inexacts, si même ils sont monstrueux , ils indiquent au moins l'état présent de nos connaissances , et ils pourront faire naître des travaux conçus d'après un meilleur plan. , (1) Tuelinger Blœtter fiier Naturmssemchaften iind Arsneihunde , t. I, p. 354. (2) Ibid., p. 364. PROPORTION DES ÉLlilMENS CHIMIQUES. 55 I. Proportion des principes constituans chimiques. A. Proportion des élémens chimiques. § 835. I. L'antagonisme, qu'on reconnaissait pour le prin- cipe de la chimie , fut cherché pendant long-temps , et sur- tout depuis Sylvius, dans l'acidité etTalcalinité des substances organiques , que l'on avait même classées d'après cette consi- dération. Dans ces derniers temps, Berzelius (1) a posé en principe que les produits sécrémentitiels , comme la bile , le sperme , la salive et le liquide des yeux , sont alcalins , tan- dis que les produits excrémentitiels^ comme l'urine , la trans- piration cutanée , le lait , contiennent de l'acide libre. Beau- coup d'auteurs ont admis cette distinction ; tel est , entre autres , Nauche , qui veut que la vapeur de la peau et la sé- crétion de toutes les membranes muqueuses soient acides. Mais , outre que la division en produits sécrémentitiels et ex- crémentitiels est fort précaire , et que la bile , par exemple , qui est alcaline , ne peut être comptée parmi les liquides sécrémentitiels , beaucoup de faits démontrent que l'alca- linité, la neutralité et l'acidité ne sont point des carac- tères essentiels , et que nous ne pouvons pas juger du ca- ractère chimique d'une substance organique d'après la pro- prité qu'elle possède ou dont elle est privée de rougir ou de verdir le sirop de violette. Dans plus' de cent expériences qu'a faites Schultze (2) , il a trouvé que les assertions de Ber- zelius n'étaient point exactes. 1° Le même liquide est tantôt neutre , tantôt acide ou al- calin. Schultze a trouvé la salive alcaline chez les enfans , neutre ou acide chez les adultes ; Mitscherlich a constaté qu'elle était la plupart du temps neutre , souvent un peu acide , et rarement alcaline hors du temps des repas. D'après Tiedemann et Gmelin , le suc gastrique est neutre ou faible- ment acide à jeun, tandis qu'il a une acidité très-prononcée (1) Schweigger, Journal fuer Chemie, t. X, p. 485. (2) Systematisches Lehrbuch der vergleichenden Anatomie , p. 135 54 PROPORTION DES ÉLÉMENS CHIMIQUES, pendant la digestion. Le suc pancréatique est acide; mais il devient alcalescent durant le cours d'une vivisection. L'urine humaine est presque toujours acide, et cependant on la trouve assez souvent aussi neutre. Schultze a remarqué que la séro- sité du tissu cellulaire était alcaline chez les enfans ou les jeunes gens , et acide chez les personnes âgées , que la bile et le lait des Lapins , la sérosité du péricarde chez les Chiens, et le sperme des Cochons d'Inde, étaient tantôt acides et jan- lôt alcalins , que la synovie et la sérosité péritonéale étaient tantôt neutres et tantôt alcalines. 2° Le même liquide présente des différences dans des points divers du corps. Schultze a trouvé le mucus acide dans la bouche , alcahn dans le nez , le rectum et l'urètre ; la séro- sité alcaline dans la plèvre et - le péricarde , acide dans les muscles et les nerfs ; il lui a même paru que les couches internes du cristallin de la Grenouille étaient acides, et les couches externes alcalines. 3° Le même liquide varie chez des animaux différens. L'u- rine est acide chez les Mammifères carnassiers , alcaline chez les Chevaux et les bêtes bovines. Suivant Schultze , la bile est acide dans les Chats et alcaline dans les Chiens ; la salive et la graisse du Lapin sont acides , celles du Cheval , alca- lines. IL Toute proportion de composition repose sur l'anlago- nismé fondamental d'oxygène et de base. Plus un corps est basique et opposé à l'oxygène^ plus il a de tendance à se combiner avec ce dernier. Cet antagonisme coïncide avec ce- lui de la polarité électrique , de manière que les métaux al- calins occupent le plus haut rang, tant sous le rapport de l'oxi- dabilité que sous celui de la polarité électro-positive. Cette coïncidence s'exprime surtout dans les différens corps d'upç même classe ; ainsi les métaux forment une série dans la- quelle le membre plus oxidable se comporte envers celui qui l'est moins de même qu'un corps animé de l'électricité posi- tive à l'égard de celui qui possède l'électricité négative. Parmi les gaz, l'azote est le moins oxidable et le plus électro- négatif , l'hydrogène le plus oxidable et le plus électro-po- sitif. Mais d'autres circonstances semblent influée et déran- PROPORTION DES ÉLÉMENS CHIMIQUES. 55 ger cette coïncidence parmi les corps qui appartienneiit b, des classes différentes ; ainsi , par exemple , le soufre et 1^ phosphore se comportent comme élément électro-négatif en- vers le silicium et Ter, quoiqu'ils aient infiniment plus d'affi- nité qu'eux pour l'oxygène. Tandis que tous les autres corps sont tantôt positifs et tantôt négatifs à l'égard les uns des autres , ils sont toujours positifs par rapport à l'oxygène et négatifs envers les métaux alcalisables ; l'oxygène est toujours négatif, et le métal alcalisable constamment positif, du jïioins si nous en jugeons d'après nos connaissances actuelles. L'gxy- gène , qui fait décidément antagonisme à toutes les autres substances, est gazeux à l'état de pureté , et parmi les gaz, l'hydrogène est le plusbasique et le plus électro-positif j mais l'eau est la neutralité de tous deux , et elle se montre à plu- sieurs égards le plus neutre de tous les corps. Se fondapf ià- (Jessus , Gay-Lussac et Thénard ont posé en principe , eu égard à la proportion des elémens dans les substances orga- niques, que celles qui contiennent de l'oxygène et de rhy4rQ- gène dans les proportions nécessaires pour produire de l'eau ( = 889 1111)^ sont neutres ou indifférentes , tandis que cçlle^ dans lesquelles l'oxygène se trouve en plus ou en moins grande quantité , doivent être considérées comme n'étant point neu- tres. En conséquence de ce principe , les substances végétales, par exemple, contiennent trois classes, relativement à la pro- portion de leurs éléraens. f Acid.oxaliq. w/ — tartrique ( — acétique «Sucre H < Gomme t Amidon (Résine a J Cire ^ ï Huile d'olive Carbone. Oxygène. 0,2657 0,2405 0,5022 0,4247 0,4225 0,4355 0,7594 0,8179 0,7721 0,7069 0,6932 0,4415 Hydro- gène. 0,0274 0,0663 0,0565 0,5063 0,0690 0,5084 0,0693 0,4968 0,0677 0,13.34 0,1072 0,0554 j 0,1267 0,0945 0,1336 Par conséquent Eau. Excès. 0,2287 0,5524 0,4691 0.5753 0,5777 0,5645 0,1516 0,0630 0,1071 0,5056 oxyg. 0,2071 id. 0,0287 id. 0 0 0 0,0890 hydr. 0,1191 id. 0,1208 id. Ce principe a généralement trouvé peu d'accueil. En effet, 56 PROPORTION DES iÉLEMENS CHIMIQUES. il s'accordait moins avec la théorie électro-chimique, devenue dominante , qu'avec la théorie antiphlogistique , qui semblait devenir surannée : d'ailleurs il ne s'appliquait point partout , en ce qui concerne l'acidité. Cependant il s'en faut de beau- coup que l'acidité exprime complètement le caractère chimi- que ; ainsi , par exemple , le sulfide hydrique doit être consi- déré comme basique , malgré son acidité , parce qu'il résulte de deux substances combustibles , qu'il brûle avec flamme , qu'il est soluble dans l'alcool et les huiles ;, que les acides le décomposent^ et qu'en se combinant avec les alcahs, il produit des sels exerçant une réaction alcaline. Un plus haut degré de combustibilité appelle , par affinité prédisposante , la forme opposée, comme on voit la graisse devenir acide par sa combinaison avec un alcali, [ou le smegma cutané prendre le même caractère quand il est plus développé (§ 821;, V.) Mais la proportion de l'oxygène et de l'hydrogène paraît être la cir- constance la plus importante. Sous ce rapport , on peut classer les matières animales de la manière suivante , d'après les ana- lyses connues jusqu'à ce jour, et dont les résultats sont indi- qués ici en diK-millièmes. PROPORTION DES ELEMENS CHIMIQUES. 57 Substances. Par conséquent Acide urique. Idein . , . Idem . . , Sucre de lait. Idem. . . . Acide lactique. Sublimé. Liquide. Urée Jdem Prout Idem . kodweiss Berzelius Gay-Lussac Idem, et PE- LOUSE Idem '. . Idem. Albumine du sang artériel. du sany Fibrine du sang Idem, Idem.. Gélatine. Idem Blanc d'œuf. . . Sang artériel. . . Cruor artériel . . Matière caséeuse. Idem !,.... Pigment de tests d'Ecrevis- se , de pattes de Pigeon et d'Oie , terme moyen. . . . Muscles , déduction faite des sels Graisse bumaine Choleslérine Idem Cerveau , déduction faite des sels et du phospbore. . . . Ure Peout Pkevost et Dumas BÉRARD MiCHAELIS Prout MiCHAELIS Thomson Gat-Lussac et Thénard Thomson Gat-Lussac et Thénard Id. MiCHAELIS Id. Thomson Gay-Lussac et Thénard Goebel Sass Chevreul Id. Saussure Sass 4ooo 3428 3979 4594 3883 4983 4094 1857 '997 1823 194° 53oi SoSg 5i37 5294 5336 5ooo 4788 5289 5192 5i38 6087 5978 6768 5221 7900 8'5o9 8407 5596 3in 4002 3740 3i82 4665 4233 4340 i556 i556 1759 2009 1993 i555 1700 1570 i68o 1725 2029 2î38 172 701 222 285 200 600 734 56o 695 593 675 989 1080 699 768 725 702 778 754 753 836 724 743 907 ii5o 1142 1768 2667 2285 2081 4806 5383 4457 52 ti 4368 2663 2965 2640 244'+ 2637 3379 1961 «969 2667 2721 2387 2375 23oi II60 I14I 2335 1908 958 3o3 391 1935 2370 2281 5406 6o55 5oi3 586 r 4913 2995 3335 2969 2749 2966 2676 22o5 2214 3ooo 3o6o 2685 2671 z588 i3o4 1283 2626 2146 1077 340 439 2176 - 59 o + 62 + ^ + ^l + 48 4-343 + 619 -f- 65i + 394 + 43q + 428 + 442 + 445 + 452 + 456 + 457 + 549 -f 58o -\- 60 1 -I- 616 + 912 + 1023 +ii5r +1154 + i527 Outre la proportion de l'hydrogène, il faut incontestablement prendre aussi en considération celle des autres substances or- ganiques faisant antagonisme à l'oxygène. Or, si nous les em- brassons dans leur ensemble , nous trouvons* que le sang oc- cupe, à tous égards , le milieu; de sorte qu'il est le point de départ de deux séries offrant, la première une progression de diminution des élémens basiques et d'accroissement de l'oxy- 5| PROPORTION MS ÉLÉMENS CHIMIQUES. gène, l'autre une progression d'accroissement des élémens basiques et de diminution de l'oxygène. Mais le caractère de base ou d'oxygénation est tempéré la plupart du temps par la proportion inyerse de tel ou tel autre élément. Dans la série oxygénée , le dernier rang appartient à l'urée, parce qu'elle contient plus d'oxygène et moins d'hydrogène que le sang , et qu'elle est aussi la substance qui renferme le moins de carbone ; mais , en même temps , elle contient da- vantage d'azote qu'aucune autre substance, ce qui fait qu'elle joue le rôle d'alcaloïde. L'acide urique est oxygéné à un haut degré , parce qu'il renferme très-peu de carbone et moins d'hydrogène qu'aucune autre substance ; cependant l'oxygène n'y est point en proportion telle qu'après avoir saturé l'hy- drogène et produit ainsi de l'eau, il puisse encore convertir le carbone en acide carbonique ; la quantité d'azote est très- considérable aussi. L'acide lactique et le sucre de lait sont les substances dans lesquelles il y a le plus d'oxygène, sans azote, avec moins de carbone et d'hydrogène que dans le sang; ce sont donc eux qui représentent le caractère oxygéné de la manière la plus pure, quoique l'oxygène n'y prédomine point sur r hydrogène. La gélatine appartient à la série basique , en vertu de la quantité d'hydrogèr^e qu'elle renferme ; mais elle s'y place au dernier échelon , at|;endu qu'elle contient plus d'oxygène que le sang , avec moins de carbone et d'azote, ce qui fait qu'elle se comporte davantage comme substance neutre ou indiffé- rente- On peut en dire autant du blanc d'œuf , avec cette dif- férence qu'outre l'hydrogène , le carbone prédomine davan- tage ^ci. La matière caséeuse est basique à un plus haut de- gré; car elle contient peu d'oxygène, avec beaucoup de carbone et d'azote ; mais elle est en même temps moins riche ji'hydrpgène. L'oxygène va toujours en diminuant dans le pig- ment, la graisse et la cholestérine , tandis que l'hydrogène et le carbone s'y accroissent proportionnellement ; ce dernier même y atteint son maximum ; cependant l'azote manque. Le cerveau est basique à un haut degré: car il contient peu d'oxygène , peu de carbone , et plus d'hydrogène^ qu'aucupp autre substance ; cependant il reiiferme moins que la moyenne PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMEDIATS. 5;g^ d'azote, Mai§ le muscle présente le caractère' basique clan^ sai plus grande pureté, puisque tous les élén^ens basiques y sont en plus grande proportion que dans le sang , et qu'il contient aussi un peu moins d'oxygène que le cerveau; maisceq^'\ tempère sa nature basique , c'est que ses proportions ue^dé- passent pas de beaucoup celles du sang, et n'arrivent po^nt au maximum, comme le font , dans d'autres substances, quel- ques unes d'entre elles prises isolément. Ainsi, généralement parlant, le caractère basique préçjoi-s mine dans la substance animale , mais tempéré tant par l'oxy- gène que contient cette dernière que par les proportions des formes basiques qui se trouvent à difîerens degrés d'inten- sité. La matière biliaire et l'urée se comportent manifesterpent comme alcaloïdes, tandis que les autres matériaux immé- diats de la substance animale jouent proportionnellement da- vantage le rôle de matières indifférentes neutres. B. Proportion des matériaux immédiats. § 826. Quant aux matériaux immédiats , les tables suivantes ofFriront le rapprochement des quantités fournies par les ana- lyses dont il a déjà été parlé plus haut (§ 781-828 ) et p£^r celles de Wienholt (1). Pour faciliter les comparaisons, ces quantités ont été réduites en dix-millièmes de la substance. Quelque colonnes contiennent une série A pour les cas dans lesquels les matières inorganiques de la substance analyséa sont entrées en ligne de compte, et une série B pour ceux dans lesquels, ces matières ayant été séparées , on en a fait la dé- duction. En ce qui concerne les parties solides , nous avons surtout pris pour base les analyses de Wienholt ; d'autres , qui s'en écartent, ont été mises entre parenthèses. Les pro- portions du sang sont déterminées d'après la moyenne des trois analyses indiquées plus haut ( § 684 ), et celles des sé- crétions séreuses d'après la moyenne des analyses que nous (1) Tnehinger Blœtter fuer Nahirwissenscliafien und Arzneikunde i t, I,p. 364." 6o PROPORTION DES MA.TÉRIAtJX IMMÉDIATS. avons également rapportées ailleurs ( § 814). Par sérosité de l'œil, il faut entendre l'humeur aqueuse et le corps vitré pris ensemble en terme moyen ; de même, sérosité cérébrale ex- prime la sécrétion séreuse du cerveau et de la moelle épinière; sérosité pectorale, celle de la plèvre et du péricarde; séro- sité abdominale , celle du péritoine. Par estomac , nous n'en- tendons que la membrane villeuse de cet organe. Dans la première série , la quantité de la substance est in- diquée après l'extraction de l'eau et d'autres susbtances sus- ceptibles de se volatiliser. La quatrième série contient l'albu- mine et les matières extractives , comme solubles dans l'eau , la graisse^ le mucus, la fibrine et l'albumine coagulée, comme insolubles dans cemenstrue. Parmi les substances solubles dans l'alcool de la cinquième série, la division A contient , outre l'osmazome , la matière caséeuse et la graisse , les chlorures et les laclates ; les indications de Wienholt , faites d'après la proportion dans les organes secs , ont été réduites à l'état frais ; ce qui est insoluble dans l'alcool ^comprend l'albumine , la matière salivaire, la gélatine, le mucus et la fibrine. La sixième série embrasse, parmi les substances solubles, l'osma- zome et la matière caséeuse mêlée avec elle ; parmi les inso- lubles, la fibrine, l'albumine coagulée et le mucus. La sep- tième série renferme, d'un côté l'albumine, de l'autre la ptya- line , la matière caséeuse , l'osmazome et la gélatine. PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMÉDIATS, 6l I. Substances fixes. 9630 Smegma cutané. 9000 Dent. 8700 Os. 4500 Cartilage articulaire. (4435 Foie. Braconnât): 4200 Cristallin. 3896 Peau. (3821 Foie. Frommherz et Gugert). (3400 Peau. i)e7î*s). 3000 Thymus. 2904 Nerf optique. 2680 Sang. 2660 Foie. ( 2296 Cœur. Braconnât ). 2283 Muscle. Berzelius ). 2179 Muscle. 2110 Cerveau. Denis. 2042 Tissu cellulaire. 2041 Cœur. 2041 Rate. 2000 Cerveau. Fauqueîm. 1954 Synovie. 1736 Rein. 1700 Poumon. 3333 Estomac. 1292 Pancréas. 1135 Testicule. 1000 Sperme. 956 Bile. 872 Suc pancréatique. 710 Rétine. 670 Urine. 663 Humeur nasale. 632 Excrétion pulmo- naire. 572 Sérosité abdominale. 447 thoracique. 175 de l'œil. 168 Salive. 164 Suc gastrique. 150 Sérosité cérébrale. 140 Sueur. 100 Larmes. 30 Vapeur pulmonaire. 6!2 PRÔÊOR-ti'ON CES StÀtE^lAUX IMMÉDIATS. IL :iiL Substances organiques. Substances inorganiques. 7260 Smegma cutané. 4450 Cartilage articulaire. 4338 Foie. Braconnât. 4160? Cartilage costal. 2780 Os. 2250 Cœur. 2212 Sang. 2185 Muscle. Berzelius. 2000 Dent. Pepys. 1638 Synovie. 1335 Cerveau. Vauquelin. . 904 Bile. 800 Suc pancréatique. 600 Sperme. 600 Excrétion pulmonaire. 598 Humeur nasale. 485 Urine. 458 Sérosité abdominale. 375 — thoracique. 300 ? Sable cérébral. 124 Salive. 100? Email. Berzelius. 69 Sérosité cérébrale. 46 de l'œil. 9800 Email. Berzelius. 8004 Email. Pepijs. 7700 Sable cérébral. 7000 Dent. Pepys. 5920 Os. 2370 Smegma cutané.' 665 Cerveau. Vàuqiielin, 400 Sperme. 340 Cartilage costal. 316 Synovie. 185 Urine. 129 Sérosité de l'œil. 114 abdominale. III Sang. 98 Muscles i Berzelius. 97 Foie. Braconnât. 81 Sérosité cérébrale. ' 72 thoracique. 72 Suc pancréatique. 65 Humeur nasale. 52 Bile. 50 Cartilage articulaire. 44 Salive. 46 Cœur. Braconnot. 32 Excrétion pulmonaire. I^îàdPÔfeTION DES MATÉRIAUX iMli^DlÀtS. 63 IV. Substances Sohibles dans l'eau. Insolubles dans Teau. A.'Eà général. 3960 Grîstalliii.^ ( 2860 Peau ). ( 27.24 Foie ). 2524 Nerf optique. 2389 Foie. 2165 Thymus. 1833 Rate. 1575 Muscles. 1458 Rein. 1214 Poumon. il66 Cœur. 1136 Pancréas. 1041 Estomac. 927 Testicule. 870 Cerveau. Denis. 854 Peau. 625 Rétine. 334 Tissu cellulaire, 118 Suc gastrique. 97 Salive. 96 Sueur. 3042 Peau. 1708 Tissu cellulaire. 1240 Cerveau. (10Q7 Foie). 875 Cœur. 835 Thymus. 604 Muscles. (540 Peau). 486 Poumon. 440 Nerf optique. 292 Estomac. 278 Rein. 271 Foie. 240 Cristallin. 208 Rate. 208 Testicule. 156 Pancréas. 85 Rétine. 71 Salive. 46 Suc gastrique. 44 Sueur. B. Organiques. 4840 Smegma cutané. 2128 Foie. 21 56 Sang, 874 Bile. 812 Cerveau. Fauquelin. 605 Muscles. 482 Urine. 430 Cœur. 65 Humeur nasale. 2420 Smegma cutané. 2210 Foie. 1820 Cœur. 1580 Muscles. 533 Humeur nasale. 523 Cerveau. 86 Sang. 30 Bile. 3 Urine. 64 PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMÉDIATS. V. Substances. Solubles dans l'alcool. Insolubles dans l'alcool. A.. En général. 4380 Cerveau. Denis. 3960 Cristallin. 4064 Foie. 3577 Peau. 350 Rein. 2830 Thymus. 344 Pancréas. 1846 Muscles. 333 Muscles. 1836 Tissu cellulaire. 319 Peau. 4823 Rate. 287 Cœur. 4754 Cœur. 275 Estomac. 1596 Foie. 240 Cristallin. 4478 Poumon. 230 Testicule. 1386 Rein. 222 Poumon. 4058 Estomac. 248 Rate. 905 Testicule. 206 Tissu cellulaire. 848 Pancréas. 170 Thymus. 730 Cerveau. 107 Sueur. 625 Rétine. 90 Suc gastrique. 95 Salive. 85 Rétine. 74 Suc gastrique. 73 Salive. 33 Sueur. B. Organiques. 3680 Smegma cutané. 3580 Smegma cutané. 808 Foie. 3530 Foie. 635 Cerveau. 2157 Sang. 495 Muscles. 2093 Cœur.! 471 Urine. 4090 Muscles. 457 Cœur. 830 Bile. 76 Sang. 700 Cerveau. 74 Bile. 568 Humeur nasale. 72 Sérosité thoracique. 488 Urine. 45 abdominale. 413 Sérosité abdominah 31 cérébrale. 303 thoracique. 30 Humeur nasale. 38 cérébrale. PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMÉDIATS. 65 VI. Substances. Solubles dans l'eau et l'alcool. Insolubles dans l'eau et l'alcool. A. En général. 240 Cristallin. 165 Thymus. 66 Suc gastrique, 50 Sueur. 44 Salive. 800 Thymus. 240 Cristallin. 42 Salive. 6 Suc gastrique. 3 Sueur. B. Organiques. 1260 Smegma cutané. 492 Foie. 180 Muscles. 171 Urine. 157 Cœur. 112 Cerveau. 74 Bile. 72 Sérosité thoracique. 45 abdominale. 31 cérébrale. 30 Humeur nasale. 17 Sang. 1894 Foie. 1820 Cœur. 1580 Muscles. 533 Humeur nasale. 30 Bile. 27 Sang. 3 Urine. VIIL ê6 PROPORTION DES MATERIAUX IMMEDIATS. VIï. Substances. MUilMmimii I II 1,1 Coagulables par la chaleur. Demeurant sous forme d'extrait par la chaleur. A. -Avec une partie A. Déduction faite d'une d'osmasome. partie d'osmasome. 2260 Foie. 1093 Pancréas. 1430 Rate. 711 Peau. 1259 Muscles. 403 Rate. 1250 Rein. ' 333 Cœur. 1051 Poumon. 316 Muscles. 841 Estomac. 251 Tissu cellulaire. 833 Cœur. 216 Testicule. 711 Testicule. 208 Rein. 143 Peau. 200 Estomac. 83 Tissu cellulaire. 163 Poumon. 43 Pancréas. 129 Foie. B. Pure. B. Entière. 2420 Smegma cutané. 2660 Pqau. Denis. :i4i4 Sang. 2420 Smegma cutané; 2207 Nerf optique. 765 Thymus. 1636 Foie. Braconnot. 492 Foie. Braconnât. J400 Tliymus. 432 Muscles. Wienholt. 1172 Muscles, TFienhoU. 385 Berzelius. 730 Cerveau. Denis. 317 Nerf optique. 700 Vauquelin. 157 Cœur. Braconnot. 392 Sérosité abdominale. 140 Cerveau. Denis. 293 thoracique. 112 Cerveau. Vauquelin. 273 Cœur. Braconnot. 82 Sérosité thoracique. 220 Muscles. Berzelius. 66 abdominale. 200 Peau. Denis. 38' de l'œil. 35 Sérosité cérébrale. 34 _ cérébrale. 8 — de l'œil. 23 Sang. PROPORTION DES MATERIAUX IMMEDIATS. 67 VIII. Matière salivairé. A. Dans toute la ^substance. 68. Suc gastrique. 53. Salive. 30. Sueur. B. Dans la substance organique. 1160. Smegma cutané. 38. Sérosité de l'oeil. 35. Humeur nasale. 21. Sérosité abdominale. 14. Sang. 10. Sérosité thoracique. 3, cérébrale. 1. Urine. IX. Graisse. A. Dans toute la substance. 1240. Cerveau. Denis. 440. Nerf optique. 5. Thymus. B. Dans la substance organique. 2420, Smegma cutané. 523. Cerveau. F^auquelin. 316. Foie. 59. Sang. X. - Mucus. A. Dans toute la substance. 42. Salive. 6. Suc gastrique. 3. Sueur. B. Dans la substance organique. 533. Humeur nasale. 30. Bile. 3. Urine. 0. Sang. XI. Fibrine, A. Dans la substance organique. 1820. Cœur. Braconnot. 1580. Muscles. Berzelius. 27. Sang. 68 PROPORTION DES MATJÉRIAUX IMMÉDIATS. XII. xm. Alcalis et sels neutres. Chlorures. 264. Cartilage costal. 72. Sérosité cérébrale. 246. Synovie. 60. Urine. 175. Urine. 56. Humeur nasale. !I40. Dent. Berzelius. 51. Foie. 120. Os. Berzelius. 32. Sérosité abdominale. 114. Sérosité abdominale. 20. Excrétion pulmonaire. 90. Muscles. 18. Salive. 85. Sang. 12. Cœur. 72. Sérosité cérébrale. 65. Humeur nasale. 59. Foie. 52. Bile. 46. Cœur. 44. Salive. 27. Excrétion pulmonaire. XIV. XV. Alcali pur ou carbonate. Substances terreuses et métalliques. 71. Synovie. 9800. Email. 41. Bile. 7700. Sable cérébral. 20. Sang. 7000. Dent. 16. Salive. 6000. Os. 9. Humeur nasale. 2370. Smegma cutané. 76. Cartilage costal. 70. Synovie. ' -'f-^ 38. Foie. ( > 26. Sang. 10. Urine. 8. Muscles. 5. Excrétion pulmonaire. 2. Salive. En prenant pour base ces indications , nous allons donner quelques proportions des substances les unes à l'égard des autres, dans l'unique vue également d'arriver, autant que possible , à quelques notions préliminaires qui engagent à faire d'ultérieures recherches dans le même sens , et afin d'offrir des points de comparaison pour les résultats des analyses qui pourraient être tentées désormais. PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMÉDIATS. 69 XVI. XVII. Proportion des substances inorga- niques fixes aux substances or- ganiques. Proportion des substances insolu- bles dans l'eau à celles qui sont solubles. = 1 : dans = 1 0,01. Email. 0,03. Sable cérébral. 0,28. Dent. 0,35. Sérosité de l'œil. 0,46. Os. 0,85. Sérosité cérébrale. 1,50. Sperme. 2.00. Cerveau. 2,50. Salive. 2,62. Urine. 3,07. Smegma cutané. 4.01. Sérosité abdominale. 5,18. Synovie. 5,20. Sérosité thoracique. 9,20. Humeur nasale. 41,11. Suc pancréatique. 12,23. Cartilage costal. 17,38. Bile. 18,75. Excrétion pulmonaire. 19,92. Sang. 22,29. Muscles. 44,72. Foie. 48,91. Cœur. 85,00. Cartilage articulaire. dans A. En général. Tissu cellulaire.^ Peau. Denis. 0,19 0,24 0,70. Cerveau. 1,33 Cœur. 1,36. Salive. 2,18. Sueur. (2,48. Foie. Frommherz et Gugert. ) 2,49. Poumon. 2,56. Suc gastrique. 2.59. Thymus. 2.60. Muscles. 3,56 Estomac. 4,45. Testicule. 5,24. Rein. (5,29. Peau. Denis. ) 5,73. Nerf optique. 7,28. Pancréas. 7,35. 'Rétine.' 8,81.'Foie., 8,81. Rate. 16,50. Cristallin. B. Organiques. 0,12. Humeur nasale. 0,23. Cœur. 0,39. Muscles. 0,96. Foie. 1,55. Cerveau. 2,00. Smegma cutané. 24, 72. 'Sang. , 29,13. :Bile. 160,66. Urine. 70 PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMÉDIATS. XVIII. XIX. Proportion des substances solubles Proportion des substances soli dans l'alcool à celles qui sont dans l'eau et l'alcool à cel insolubles. qui sont insolubles. = 1 ' dans = i: A. En général. A. En général. 0,30. Sueur. 0,04. Sueur. 0,52. Cerveau. 0,12. Suc gastrique. 0,82. Suc gastrique. 0,95. Salive. 1,30. Salive. 1,00. Cristallin. 4,50. Foie. 4,84. Thymus. 2,46. Pancréas. B. Organiques. 3,84, Estomac. 6,02. Urine. 3,93. Testicule. 0,40. Bile. 3,96. Rein. 1,58. Sang. 5,54. Muscles. 3,85. Foie.' 6,11. Cœur. 10,11. Muscles.' 6,65. Poumon. 11,59. Cœur.: 7,35. Rétine. 17,76. Humeur nasale.' 8,36. Rate. (■'' 8,91. Tissu cellulaire. 11,21. Peau. 16,50. Cristallin. 16,64. Thymus.' B. Organiques. 0,97. Smegma cutané. 1,10. Cerveau. 1,22. Sérosité cérébrale. 2,85. Urine. ^ 4,20. Sérosité thoracique. 4,36. Foie. 9,17. Sérosité abdominale. 10,20. Muscles., ,11,21. Bile. 13,33. Cœur. 18,93. Humeur nasale. a8,o5. Sang, dans PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMÉDIATS. XX. XXI. 71 Proportion (des matières extractives A. A l'albumine contenant de l'osmazome . Proportion de l'albumine A. Au reste des substances solides. dans = = 1: 0,03 Pancréas. 0,20 Peau. 0,33 Tissu cellulaire. 2,60 Cœur. 3,29 Testicule. 3,52 Rate. 3,98 Muscles. 4.20 Estomac. 6,00 Rein. 6,44 Poumon. 17,51 Foie. B, A l'albumine pure. =i il ^ ' dans 0,07 Peau. Denis. 0,21 Sérosité de l'œil. 0^51 Muscles. Berzelius. 1,00 Smegma cutané., 1,02 Sérosité cérébrale. 1,73 Cœur. ., 1,83 Thymus. 2,71 Muscles. JVienhoU. 3,32 Foie. Braconnât. '3,57 Sérosité thoracique. 5.21 Cerveau. Denis. 5;,93 Sérosité abdominale. 6,25 Cerveau. Vauqiielin. 6,96 Nerf optique.; 104,94 Sang. 1 t . dans 0,04 Rétine. 0,09 Foie. 0,17 Cristallin. 0,34 Nerf optique. 0,38 Rein. 0,42 Rate. 0,58 Estomac. 0,59 Testicule. ; 0,61 Poumons. 0,73 Muscles. 1,14 Thymus. 1,33 Cœur. 1,89 Cerveau. 16,00 Peau. Denis. 23,60 Tissu cellulaire, 26,24 Peau. 29,04 Pancréas. B. Aux autres substances organiques. = 1 : dans 0,16 Sérosité abdominale. 0,27 thoracique. 0,90 Cerveau. 0,97 Sérosité cérébrale. 1,65 Foie. 2,00 Smegma cutané. 2,00 Sang. 2,62 Synovie. 4,75 Sérosité de l'œil. 7,24 Cœur. 8,93 Muscles. 'J2 PROPORTION DES MATERIAUX IMMEDIATS. XXII. XXIII. Proportion des matières extractives Proportion de la matière salivaire A. ^ua; autres substances A. Aux autres substances solides. dans = = i: 0,18 Pancréas. 0,37 Peau. Denis. 2,9 Thymus. 4.0 Rate. 4,4 Peau. 4,4 Testicule. 5.1 Cœur. : 5,6 Estomac. 5,8 Muscles. 7,1 Tissu cellulaire. 7,3 Rein. 8.3 Nerf optique. 9.4 Poumon. 10,3 Cristallin. 14,0 Cerveau. 19,0 Foie. B. Aux autres substances organiques. = 1 : dans 0,02 Urine. 0,03 Bile. 0,21 Sérosité de l'œil. 1,02 cérébrale. 2,0 Smegma cutané. 3.5 Sérosité thoracique. 4.6 Muscles. 5,9 Sérosité abdominale. 7,8 Foie. 9,2 Humeur nasale. 10,9 Cerveau. 13,0 Cœur. 70,35 Sang. 1 I , dans 1,4 Suc gastrique. 2,1 Salive. 3,6 Sueur. 31,3 Cristallin. B. Aux autres substances organiques. = 1 1 dans 0,2 Sérosité de l'œil. 5,2 Smegma cutané. 16,0 Humeur nasale. 20,8 Sérosité abominale. 22,0 cérébrale. 36,5 thoracique. 157,0 Sang. . PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMÉDIATS. 73 XXIV. Proportion du mucus XXV.' Proportion de l'osmazome A. Au reste des substances solides. A. Au reste des substances solides. — 1 ', dans 3,0 Salive. 26,3 Suc gastrique. 45,6 Sueur. B. Au reste des substances organiques. = 1 : dans , 0,12 Humeur nasale. 29,1 Bile.l 160,6 Urine. XXVI. Proportion de la fibrine aux autres substances organiques. = 1 • dans 0,23 Cœur. Braconnât. 0,38 Muscles. Berzelius. 80,92 Sang. = 1 : dans 16, .5 Cristallin. 19,6 Thymus. B. Au reste des substances organiques. = 1 ; dans 1,8 Urine. 3,8 Sérosité cérébrale. 4,2 thoracique. 4,7 Smegma cutané. 7,7 Foie. 9,1 Sérosité abdominale. 10,9 Cerveau. 11.1 Muscles. 11.2 Bile. 13.3 Cœur. 18,9 Humeur nasale. 129,1 Sang. 74 PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMÉDIATS. XXVIL XXVIII. Proportion de la graisse A. Aux autres substances so- lides. = 1 : dans 0,7 Cerveau. 5,7 Nerf optique. 599,0 Thymus. B. -Aux autres substances or- ganiques. ^ = 1 : dans 1,5 Cerveau. ? 2,0 Smegma cutané. 12,8 Foie. 364 Sang. Proportion des alcalis et sels neutres aux [parties constituantes organi- ques. = 1 : 'dans 0,9 Sérosité cérébrale. 2.6 Salive. 2.7 Urine. 4,0 Sérosité abdominale. 6,6 Synovie. 9,2 Humeur nasale. 17,3 Bile. 22,2 Excrétion pulmonaire. 24,2 Muscles. 26,0 Sang. 48,9 Cœur. 73,5 Foie. XXIX. Proportion des chlorates aux autres sels. == 1 : dans 0,0 Sérosité cérébrale: 0,1 Foie. 0,1 Humeur nasale.' 0,3 Excrétion pulmonaire.] 1,5 Salive. 1,8 Urine. 2,5 Sérosité abdominale. 2,8 Coeur. PROPOUTION DES MATERIAUX IMMEDIATS. 75 XXX. XXXI. Proportion de l'alcali pur ou carbo- Proportion des substances terreuses naté aux sels neutres. et métalliques aux matériaux or- ganiques. = 1 : 1.2 Bile. 2,8 Salive. 3,4 Synovie. 4.3 Sang. 7,2 Humeur nasale. dans = 1 * dans 0,1 Émail, 0,2 Dent. 0,4 Os. Denis. 1,0 Smegma cutané. 23.4 Synovie. 48.5 Urine. 60,0 Salive. 85,0 Sang. 114,1 Foie. 273,1 Muscles. Xa,A.I1. Proportion des substances terreuses et métalliques aux alcalis et aux sels neutres = 1 : dans 0,01 Dent. 0,02 Os. ; 1,5 Foie. : ;! 3,2 Sang. . 3.4 Cartilage costal. 3.5 Synovie. 5,*4 Excrétion pulmonaire; ' 7,5 Muscles. ' 8,0 Sérosité cérébrale. 17,0 Urine. 23,0 Salive. 76 PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMÉDIATS. 1° D'après le tableau précédent (I) , l'eau , avec les sub- stances susceptibles de se volatiliser à une douce chaleur, s'é- lève de 0,0370 à 0,9970. D'après Hamberger (d), il y en avait, chez les bêtes bovines, 0,6971 dans le pancréas , 0,7192 dans le foie, 0,7340 dans les glandes salivaires , 0,7850 dans les reins, 0,7930 dans les glandes mésentériques, 0,7971 dans le cœur, 0, 8100 dans la moelle allongée, 0,8508 dans la sub- stance corticale du cerveau; chez le Chien, 0,7640 dans les glandes salivaires , 0,7696 dans le foie , 0,7910 dans les reins, 0,8096 dans la substance corticale du cerveau, 0,8108 dans le cœur, 0,8400 dans les testicules; chez le Cochon (2), 0,5885 dans la peau , 0,7270 dans la moelle allongée , 0,7332 dans les glandes salivaires, 0,7564 dans le foie, 0,7825 dans la substance corticale du cerveau , 0,7836 dans le cœur. La quanthé de ce liquide s'élevait dans l'aorte à 0,6568, selon Hamberger, dans les muscles à 0,8125, d'après Geoffroy, dans les intestins à 0,8333, suivant Keil. Ghevreul(3) a trouvé que la perte , par la dessiccation dans le vide , sans emploi d'une chaleur élevée , était de 0,495 pour le tissu élastique jaune, 0,500 pour des tendons épais, 0,567 pour des tendons grêles, 0,740 pour les cartilages de l'oreille, 0,768 pour les ligamens , 0,807 pour la fibrine , 0,864 pour l'albumine coa- gulée. On peut admettre, d'après cela, que l'eau, dans le corps humain, s'élève à environ 0,6667, ou à plus de cent livres , et que sa proportion aux autres substances est de 2 1 1. Un cadavre, du poids de cent vingt livres, que Chaussier fit mettre dans un four , ne pesait plus que douze livres après la dessiccation, et avait perdu par conséquent 0,9000 de sa masse; mais on ne peut douter qu'ici l'emploi d'une chaleur trop forte n'ait déterminé des décompositions, et qu'avec l'eau ne se soient volatilisées d'autres substances en quantité considérable. Cet effet a lieu également , et d'une manière bien plus prononcée encore, dans les cadavres qui se sont desséchés (1) Haller, Elément, physioloy, , t. II , p . 478, (2) TJzc^., t. VJir,p. 255. (3) Considérations générales sur l'analyse organique et ses applications , p. 108. PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMÉDIATS. 'J^ peu à peu d'eux-mêmes , c'est-à-dire dans les momies natu- relles : un corps de cette espèce , qui , à juger d'après sa taille,' avait dû peser plus de cent quatre-vingts livres pendant la vie , n'en pesait plus que quinze , au dire de Senac (1) , et avait éprouvé par conséquent une perte de 0,9166. La quantité d'eau existante dans les plantes n'est pas moins considérable. D'après les recherches faites par des personnes attachées aux administrations forestières (2) , la dessiccation fait perdre au bois de Chêne 0,342, au Hêtre 0,390, à l'Orme 0,419, au Tilleul 0,475, à l'Aune 0,482, au Peuplier 0,500 et au Saule 0,507. L'eau des feuilles s'élève, suivant Schubler et NeufFer (3) , dans les arbres et les arbrisseaux depuis 0,64 jusqu'à 0,65, etraretnent 0,70, dans'la plupart des plantes her- bacées de^0,65 à 0,80, dans les plantes grasses de 0,90 à 0,95, enfin dans les algues jusqu'à 0,98. C'est l'eau qui donne à l'organisme animal ses propriétés mécaniques , par exemple , au cartilage sa flexibilité , à l'os sa solidité. C'est elle qui procure l'aptitude à se décomposer, à subir des changemens de composition , et qui permet à la putréfaction de s'emparer des corps morts. C'est à sa faveur que beaucoup de substances diverses s'introduisent dans le corps , où les gaz spécialement ne pénètrent que par les par- ties humectées. Enfin le caractère de neutralité qu'elle porte à tous égards, fait qu'elle modère les antagonismes entre les diverses parties et leurs activités; sa diminution entraîne une tension pénible , un accroissement du conflit vital , une exas- pération des forces vitales , tandis que son excès efface les con- trastes , cause une détente générale , et relâche l'économie, tant sous le rapport matériel que sous le point de vue dyna- mique. 2° Suivant Dalton , les organes respiratoires et digestifs contiennent environ cent cinquante pouces cubes d'air non combiné. Ainsi, après déduction faite de cette quantité, les parties solides et liquides d'un corps humain dont le volume (1) Traité de la structure du cœur, t. II , p. iM.% (2) Neujahrsgesclienlt fuer Jagdsliehliaher, 1794 , p, 69. (3) Untersuchungen uebsr die Temperaturverœnderungen der f^e(j'e(a" hilien, p. 24. ^8 PROPORTION DES MATÉRIAUX IMMÉDIATS. s'élève à quatre mille cinq cents pouces cubes , ont un vo- lume de quatre mille trois cent cinquante pouces cubes , et comme leur pesanteur spécifique moyenne est de 1050, elles devraient , sous ce volume , peser autant que quatre mille cinq cent soixante - sept pouces cubes d'eau, c'est-à-dire cent soixante-quatre livres. Cependant un homme placé dans ces circonstances ne pesait que cent quarante-six livres, c'est- à-dire autant que quatre mille quarante- quatre pouces cubes d'eau ; il devait donc , outre la quantité d'air énoncée plus haut, s'en trouver encore près de cinq cents pouces cubes dans les organes respiratoires et digestifs ; par là , suivant Dalton, la pesanteur spécifique du corps humain devient égale ou même inférieure à celle de l'eau. Rumford a trouvé dans du bois de Peuplier 0,2^9 de sub- stance solide, 0,2188 d'eau et 0,5383 d'air; dans du bois de Chêne 0,3935 de substance solide, 0,3612 d'eau et 0,2453 d'air. 3° Les substances inorganiques fixes prédominent sur les matières organiques , d'un côté dans les os , les dents et le sable de la glande pinéale , de l'autre dans les sécrétions sé- reuses du cerveau et de l'œil ; il y a prédominance de terre pour le premier cas , et de sel neutre pour le second. Le cer- veau et peut-être aussi le sperme renferment une quantité proportionnelle considérable de principes constituans inorga- niques, surtout en raison du phosphore qui s'y trouve. La prédominance des matières organiques est très-marquée dans les muscles et le cœur ; cependant Hatchett assure (1) avoir obtenu des muscles à l'état sec 0,2:160 de charbon et 0,0512 de cendres, de l'albumine sèche 0,1490 seulement de char- bon et 0,0225 de cendres, enfin de la gélatine 0,1120 de char- bon et 0,0330 de cendres. Dans tous les cas, nous voyons que la proportion des substances organiques aux matériaux inor- ganiques ne correspond point à l'échelle de la vitahté. 4° Le cœur et les muscles ont une quantité considérable de substances insolubles dans l'eau , à cause de leur fibrine ; la (1) Crell, Chemische Annalen, 480i, t. Il, p. 466. PROPORTION BES MATERIAUX IMMÉDIATS. 79 peau et le tissu cellulaire, en raison de cette même substance ou de l'albumine coagulée ; le cerveau et peut-être aussi le foie, à cause de leur graisse; l'humeur nasale et la salive , à cause de leur mucus. Les parties solubles dans l'eau prédo- minent surtout dans le cristallin , la bile et l'urine. 5° Les matériaux solubles dans Faîcool l'emportent sur ceux que ce menstrue ne dissout point dans le smegma cutané, la sueur et le cerveau; l'inverse a lieu, parmi les parties solides , surtout dans la peau , le cristallin , le thymus , le cœur et les muscles. 9° Les matières organiques insolubles dans l'eau et l'al- cool manquent entièrement dans le cerveau , les sécrétions sé- reuses et le smegma cutané ; le cœur, les muscles et l'hu- meur nasale sont les produits dans lesquels elles prédominent le plus. T Les matières extractives sont plus abondances , propor- tionnellement à l'albumine , dans le pancréas , la peau , le tissu cellulaire , le cœur et les muscles, tandis que le cerveau, les nerfs et le foie sont les parties dans lesquelles prédomine le plus d'albumine. La première proportion a lieu dans les sécrétions séreuses du, cerveau et de l'œil , la seconde dans celles de la poitrine et du bas-ventre. 8° Comparée à la totalité de la substance organique , l'al- bumine est prédominante dans le cerveau et le foie; la peau, le cœur, les muscles et le pancréas sont les parties qui en con- tiennent le moins. 9" L'inverse a lieu pour les substances extractives. 10° La matière salivaire n'est nulle part plus abondante que dans le suc gastrique, la sérosité de l'œil , la salive et le smegma cutané, plus rare que dans les sécrétions séreuses du ventre , du cerveau et de la poitrine. Quant aux autres proportions, il serait bien moins possible en- core qu'à l'égard des précédentes , de les ramènera des pro- positions générales, tant qu'elles ne seront pas connues d'une manière plus complète et plus exacte. So PROPORTION DES DIVERS TISSUS. ' II. Proportions des principes constîtuans mécaniques. § 837. Les proportions respectives des divers tissus n'ont point encore non plus été étudiées d'une manière satisfai- sante. do Si nous en jugeons d'après certains faits isolés , la pro- portion des diverses parties d'un corps humain pesant cent soixante livres , serait à peu près celle qui suit : Livres I>«x-millièmes Livres. ^y j.Qj,pg Muscles, tissu scléreux et tissu cellulaire. 60 37500 Système vasculaire, avec sang et lymphe. Z1 20000 Os et cartilages 26 16250 Système glandulaire (avec réservoirs et conduits excréteurs ) . 8 5200 Peau 7 4375 Système nerveux 6 3750 Canal digestif 6 3750 Poumons 4 2500 Ganglions vasculaires 1 625 Graisse 8 5000 Sécrétions des membranes muqueuses . 1 1/4 782 Sécrétions des vésicules séreuses. ... 4/2 312 Sécrétions glandulaires 1/4 156 2"» La proportion de la substance solide d'un organe à la quantité de sang que cet organe admet en lui , se connaît d'après l'étendue des espaces compris entre les dernières ra- mifications vasculaires , ou de ce qu'on appelle les îles de substance (§ 759). Il s'agit moins ici du nombre et du volume des artères qui se rendent à un organe , que de la proportion de leurs vaisseaux capillaires. Ainsi une quantité considérable de sang se porte au cervaeu par quatre troncs artériels ; mais sa substance ne reçoit que des vaisseaux capillaires grêles et peu nombreux , de sorte qu'au total elle est peu ri- che de sang. Les quatre artères thyroïdiennes ont un calibre bien supérieur à celui de l'artère splénique ; mais celle-ci ne PROPORTION DES DIVERS TISSUS. 8l devient point aussi grêle qu'elles dans ses ramifications les plus déliées , de sorte que la rate est beaucoup plus riche en sang que la glande thyroïde. Les enveloppes scléreuses reçoivent un assez grand nombre d'artères, qui y forment un réseau, mais qui envoient la plupart de leurs ramuscules ter- minaux dans les parties enveloppées , de sorte qu'il ne reste aux enveloppes scléreuses elles-mêmes que fort peu de vais- seaux capillaires qui leur appartiennent en propre. D'après Weber (1), les îles de substance, dans les vésicules adipeu- ses , sont huit à dix fois plus grandes que le diamètre des vaisseaux capillaires qu'elles renferment ; dans la substance nerveuse , elles sont quatre à dix fois plus longues et quatre à dix fois plus larges ; dans la peau et la membrane muqueuse, souvent trois à quatre fois seulement plus grandes , ou de même diamètre, et parfois plus petites, que les vaisseaux ca- pillaires. Berres (2) a, le premier, essayé de déterminer, d'une manière exacte, le diamètre des derniers vaisseaux capillaires et des îles de substance comprises entre eux ; nous donnons les résultats dans la table suivante , oîi la division A se rapporte à ce qu'on appelle les anses vasculaires , c'est-à- dire aux vaisseaux capillaires qui sont d'un côté afférens ou artériels et de l'autre eflerens ou veineux , et la division B aux réseaux vasculaires proprement dits. (1) Anatomie des Menschen , t. III , p. 45. (2) Medicinische Jahrbuecher des œsterreicMschen Staates , t. XIV, et XV. VIII. 82 PROPORTION DES DIVERS TISSUS. A. Papilles cutanées . . Substance rénale. . . Papilles fongiformes de la langue. . . . Iris, au bord de la pupille Villosités intestinales. B. Choroïde^ face in- terne ' . . Substance interne des poumons Foie Muscle de l'œil d'un enfant Surface de la sub- stance pulmonaire. Nerf Iris , à sa face posté- rieure Gros intestin. . . . • Tunique musculeuse de l'intestin d'un enfant Tissu scîéreux. . , . Substance grise du cerveau et sub- stance ganglion- naire Parotide Peau . Rétine Vésicules séreuses. . Diamètre en dix- millièmes de pouce Des vaisseaux capillaires. 6 4-5 7—9 5 5—8 3 7—8 1 5—7 5—6 4-5 1 2 7—8 1—2 2-3 Des îles de substance, 6—7 5 2—3 8—9 2 1/2 2 13 15 15—30 9— i4 22—26 6 13 45—70 10—22 [largeur 31 llongueur 65 Proportion des vaisseaux "[ capillaires à l'égard des îles de substance.' =i: 0,16 0,40- ■0,50 0,50 0,77- 1,00 —0,85 1,62—1,00 0,66- 1,12- 1,25 •1,00 -1,14 2,00 1,85—2,60 2,50— 3,75- 3,00 6,00 4,50—7,00 5,50—6,50 6,00 6,50 6/12-8,75 10,00—11,00 10,33—15,50 21,66—32,50 3" Enfin, nous devons chercher aussi à déterminer, d'une manière approximative , la proportion des liquides sécrétés PROPORTION DES DIVERS TISSUS. 85 par un homme dans l'espace de vingt-quatre lieures. La voici évaluée en partie par robservatlou immédiate , et en partie par approximation. Vapem' aqueuse à la peau. . , . 28,70 onces. — dans les poumons. 18,30, ensemble 47 onces. Gaz ^acide carbonique dans les poumons 48,28 Gaz acide carbonique à la peau. 0,72, ensemble 49 Urine 40 Sucs gastrique et intestinal 31 Bile 10 Salive 10 Suc pancréatique 2 Sérosité vésiculaire 2 Larmes et mucus nasal 1 D'après cela , la sécrétion s'élèverait , en vingt - quatre heures , à douze livres , par conséquent à soixante - quatre grains par minute , et à près d'un grain pendant chaque pul- sation. Il n'est pas même possible d'établir aucune conjecture à l'égard de la quantité de parties solides qui sont déposées par la nutrition ; mais , en examinant la manière dont le sang se forme, nous verrons comment sont réparées les pertes qu'entraînent h nutrition et les sécrétions. 84 FORMATION DES PRODUITS ORGANIQUES. SECONDE DIVISION. Ds i,& FonmAuxon t3^s proqttits m&ti:biei.3 se la vie VÉQSTATUVS, PREMIERE SUBDIVISION. DES PHÉNOMÈNES DE lA FORMATION DES PRODUITS MATÉRIELS DE l' ORGANISME. CHAPITRE PREMIER. De la formation des produits tnatériels de l'organisme eu égard à leur quantité. § 838. Pour apprendre à connaître le mode , les causes et l'essence de la formation organique , nous avons à considérer, sous le point de vue des causes qui les déterminent, les phéno- mènes que cette formation présente , et , en premier lieu , les changemens que la sécrétion et la nutrition sont susceptibles d'éprouver, eu égard à leur quantité. Présentant un si grand nombre de faces , l'organisme peut se trouver placé au milieu des circonstances les plus variées , et souvent même dans des conditions simultanées qui entraînent des effets inverses. Il résulte d'un état de choses si complexe , qu'une influence ac- tuelle ne donne pas toujours lieu aux phénomènes qui lui ap- partiennent en propre , et cette particularité , jointe à celle du chan;;einent continuel qui constitue l'essence même de la vie (§ 844 , ï"), fait que nos connaissances à l'égard des causes qui amènent telles ou telles variations dans le travail de la plasticité n'ont pas l'évidence et la précision mathématique qui distinguent les faits relatifs à la physique des corps inor- ganiques. Ce n'est point là cependant un motif qui doive nous les faire négliger, puisque , nulle part dans la vie, où l'idéal perce partout à travers le matériel , nous ne rencontrons cette imperturbable uniformité au milieu de laquelle seule le cal- cul parvient à déployer librement sa puissance. CIRCONSTANCES EXTÉRIEURES INFLUENTES. 85 ARTICLE I. Des circonstances extérieures qui influent sur la quantité des produits matériels de l'organisme. Plusieurs circonstances extérieures influent sur la quantité des produits matériels de l'organisme. 1° Dans le nombre , il en est de mécaniques. Une pression modérée accroît l'activité plastique. Lorsqu'on s'éveillant d'une manière brusque, on éprouve aux yeux un sentiment désagréable de sécheresse , qui porte à s'y frotter, l'humeur lacrymale est bientôt sécrétée en plus grande abon- dance (1). Les frictions faites à la peau rendent la transpiration plus active. L'épiderme s'épaissit et devient calleux au bout des doigts chez les joueurs d'instrumens à corde, aux mains chez les ouvriers qui exécutent de rudes travaux , à la plante des pieds chez les personnes qui marchent beaucoup , parce que la peau en réapplique sans cesse de nouvelles couches à celles qui déjà existent. Une pression trop forte , surtout lorsqu'elle ne résulte pas d'un mouvement actif, mais qu'elle est passive et continue , diminue l'activité plastique ; ainsi l'application d'une plaque de plomb diminue la sécrétion dans les tumeurs connues sous le nom de ganglions , et un ban- dage fortement serré réprime la pullulatlon des pseudomor- phoses. La pression habituelle et avec frottement d'un ban- dage ou du lit amincit l'épiderme , en détermine la résorption, de sorte que la peau , mise à nu et continuant d'être affectée de la même manière , sécrète à l'instar d'une membrane mu- queuse. Du reste, la sécrétion diminue lorsque la surface de sécrétion vient à être diminuée par une compression exercée sur un organe ; ce phénomène a été observé, entre autres, par Breschet et Edwards (2) , sur les poumons , que le poids de (1) Beaux , Physiologie de la glande lacrymale , Paris 1819, in-8!', p. 5. (2) Répertoire général d'anatomie et de pliysjoiogie pathologiques, t. II, p. 95. B6 CIRCONSTANCES EXtÉRIEURES INFLUENTES. l'atmosphère oblige de s'affaisser après l'ouverture de la cavité pectorale. 2° Des impressions qui , soit à cause de leur hétérogénéité en général , soit parce qu'elles ont un caractère spécial , ex- citent l'activité vitale et portent ainsi le nom de stimulus , augmentent la sécrétion des surfaces du système cutané avec lesquelles elles sont mises en contact. La peau épanche une sécrétion liquide sous l'épiderme après l'application d'un vé- sicatoire , d'un sinapisme , etc. Le tabac ou toute autre sub- stance acre , et même des corps indifférens , par exemple du sucre en poudre , qu'on introduit dans la cavité nasale , déter- minent une sécrétion abondante de mucosités. Les vapeurs acres , telles que celles du chlore , agissent de la même ma- nière sur la membrane muqueuse des poumons. Chez les ani- maux qui n'ont pas pris de nourriture depuis long -temps , l'estomac est fort peu humecté ; un caillou qu'on leur fait avaler, suffit, d'après Magendie et Tiedemann , pour provo- quer un épanchement de suc gastrique , dont les éponges qu'on introduit dans leur estomac se trouvent entièrement imbibées au bout de quelque temps (1). Tout aliment quel- conque produit le même résultat (2). Le pain sec ne tarde pas à être imprégné des liquides sécrétés par les parois de l'esto- mac , à la surface duquel Leuret et Lassaigne ont vu le suc gastrique suinter sous leurs yeux après l'application de sub- stances douées d'une puissance irritante toute spéciale, comme des vomitifs ou des purgatifs. Lorsque , chez un sujet atteint de procidence du rectum , on projette du jalap ou du nitre en poudre sur l'intestin , le suc intestinal suinté aussitôt d'une innombrable quantité de pores (3). On a vu le galvanisme ap- pliqué au gros intestin sorti de la cavité abdominale et ouvert par la suppuration , accroître tellement la sécrétion de ce suc, qu'il coulait par grosses gouttes (4). De même , chez les ani- (1) Leuret et Lassaigne , Recherches physiologiques et chimiques pour servir à l'histoire de la digestion , p. 111. (2i Prochaska , Physioloyie oder Lehre vo?i der Natur des Menschen , p. 401. (3) Haller, Elément, phijsiolog., t. Il, p. 440. (^j) Ilumboldt, Ueber die yereizte MusheUmid Nervenfaser, 1. 1, p. 337. INFIUENCE DES MltlEUX AMBIAN8. 87 maux , quand on met du vinaigre ou toute autre substance en contact avec la face interne de leur tube intestinal , ii survient aussitôt une sécrétion copieuse (1), Les lavemens de vinaigre ou d'eau salée, et les purgatifs salins, résineux, ou acres, n'a- gissent point autrement chez l'homme. Les corps étrangers , bougies ou pessaires, qu'on introduit dans l'urètre ouïe vagin, les hquides irritans qu'on injecte dans ces conduits , y déter- minent un accroissement de la sécrétion muqueuse. ^ I. Influence des milieux ambians. § 839. 1<> Les deux milieux dans lesquels vivent les corps organisés , ont de l'affinité l'un avec l'autre, de manière qu'ils s'attirent mutuellement , et que , dans l'état naturel , ils sont toujours combinés ensemble ; l'air contient un peu d'eau , 'et l'eau un peu d'air. Mais c'est l'atmosphère qui, en sa qualité de milieu universel , exerce la plus forte attraction : aussi le séjour dans l'air détermine-t-il aux surfaces organiques une excrétion plus abondante , notamment de vapeur aqueuse et de gaz , dont le résultat est de rendre le corps plus léger et plus sec. L'eau n'enlève de la sécrétion aqueuse à la peau qu'autant que cette sécrétion est chargée de substances orga- niques , et en effet toute eau dans laquelle un animal a vécu tient des matières animales en dissolution (2) ; mais ce dont elle s'empare ainsi est proportionnellement peu considérable» même en ce qui concerne les gaz ; ainsi , par exemple , Aber- nethy (3) a trouvé que la peau exhalait une fois plus d'acide carbonique à lair que sous l'eau. Gomme cette dernière sous- trait moins , la substance organique devient plus riche en hu- meurs aqueuses, surtout en sérosité interstitielle ; de là résulte que les_^aflimaux aériens ont un corps plus sec que les ani- (1) Leuret et Lassaigne , loc. cit., p. 141. (2) Treviranus , Die Erscheimmgen und Gesetze des organischen Le- 5ens,t.I, p. 309. (3) Chiriirgische v,nd physiologische Fersuche , p. 117. 88 INFLUENCE DES MILIEUX AMBIANS. maux aquatiques , ce dont on peut se convaincre en compa- rant les Insectes aux Mollusques , ou les Oiseaux aux Pois- sons. A l'air , la peau se charge davantage de résidus basi- ques des sécrétions volatiles , de smegma et de pigment j tandis que , sous ce rapport , celle des animaux aériens a plus de ressemblance avec une membrane muqueuse , et les autres sécrétions elles-mêmes sont plus mucilagineuses , car les membranes muqueuses fournissent plus de mucus chez les Mammifères que chez les Oiseaux. En s' emparant plus avidement que l'eau du carbone et de l'hydrogène , l'atmosphère met obstacle à la production de la graisse ; parmi les Oiseaux , ceux qui ont le plus d'embon- point sont les Palmipèdes , de même que , parmi les Mammi- fères , ce sont les Amphibies et les Cétacés ; car , par exemple, une Baleine du poids de soixante-et-dix tonneaux (cent soixante-six mille livres) en donne trente de lard (1). L'air qui pénètre tout le corps des Oiseaux consomme la moelle qui s'était d'abord sécrétée dans leurs os : de même , chez les Mammifères, le tissu spongieux des os qui contiennent de l'air, notamment celui du frontal, de l'ethmoide , dit sphénoïde et de l'apophyse mastoide , est dépourvu de moelle. 2° L'atmosphère déploie d'autant mieux l'énergie qui lui appartient en propre , qu'elle est plus sèche , et son action a d'autant plus d'analogie avec celle de l'eau , qu'elle contient davantage d'humidité. Elle agit sur la transpiration des plantes. Un pied d'Heîian- thus annmis, qui exhalait trois onces d'eau, en douze heures de nuit , par un temps sec , n'en donnait point quand il y avait de la rosée. Dans un laps de temps de six à vingt et une heures, des Grenouilles perdaient , terme moyen , 0,0023 du poids de leur corps quand l'hygromètre était à cent degrés , et 0,0178 , au contraire, quand il marquait de cinquante-quatre à cinquante-huit degrés (2). La transpiration horaire des Lé- (1) Scovesby , Tagebuch einer Reise nach den JVallfischfang , p. 489. (2) Edwards , De l'influence des agens physiques sur la vue, p. 592, INFLUENCE DES MILIEUX AMBIANS. 89 zards pendant trente-six heures, s'éleva, terme moyen à 0,0003 du poids de leur corps par un temps humide , et à 0,0053 par îin temps sec (1), La perte moyenne que la tran- spiration et les excrétions alvines firent éprouver , par heure, à des Cochons d'Inde, fut de 0,0013 du poids de leur corps dans l'air humide , et de 0,0023 dans l'air sec (2) ; celle des Moineaux fut de 0,0062 dans le premier cas et de 0,0979 dans le second (3). D'après ces observations, l'état hygromé- trique de l'atmosphère paraît exercer une plus grande in- fluence sur les Oiseaux et les Reptiles que sur les Mammi- fères. Il en est de même pour l'exhalation de gaz acide carboni- que. Ainsi , par exemple , les Insectes qui se tiennent dans des lieux élevés exhalent davantage de ce gaz que ceux qui vivent dans des endroits obscurs et humides (4). Au con- traire , suivant la remarque faite par Lorry , entre autres , la sécrétion de la graisse est plus abondante dans l'air humide que dans l'air sec. L'air chargé de vapeur favorise la forma- tion du mucus, et, d'après les observations de Girou(5), l'al- longement des poils. Les polypes des membranes muqueuses et autres pseudomorphoses analogues augmentent ou dimi- nuent en proportion de l'humidité de l'atmosphère (6). 3° Lorsque l'air est écarté de la surface par un entourage de corps solideset secs, la transpiration diminue. Des Grenouilles qui avaient été ensevelies dans du sable éprouvèrent, durant un laps de trente-six à quarante-deux jours, une diminution jour- nalière moyenne de 0,0024 du poids de leurs corps, tandis que leur perte s'élevait à 0 ,0068 quand on les laissait à l'air (7). Si le ii)lbid.,^.6iO. (2) Ibid., p. 641. • (3) Ibid., p. 642. (4) Sorg , Disquisitiones physiologicœ circa respirationem insectorum et vermiwm , p. 162. (5) Répertoire général d'anatomie et ^de physiologie pathologiques , t. VI, p. 10. (6) Cruveilhier, Essai sur l'anatomie pathologique en général , t. I, p. 391. (7) Edwards, De l'influence des'agens physiques sur^^la vie, p. 583. ^gO INFLUENCE DES MILIEUX AMBIANS. Corps solide qui couvre la peau n'est point apte à absorber la vapeur , si c'est , par exemple , du taffetas ciré , cette vapeur se condense et prend la forme liquide , de sorte qu'on serait tenté de croire que la transpiration a été accrue. 4° Lorsque l'air jouit d'une tranquillité parfaite, de ma- nière à ce que ce soit toujours la même couche qui demeure en contact avec la peau , il ne tarde pas à se charger telle- ment de vapeur qu'il ne peut plus en prendre davantage , de sorte que la transpiration diminue . Celle-ci augmente , au contraire , quand l'agitation de l'atmosphère fait que la sur- face du corps est continuellement mise en contact avec de nouvelles couches d'air sec et apte à pomper l'eau. Des Gre- nouilles placées à l'embrasure d'une fenêtre fermée éprou- vèrent , en six heures, une perte dont la moyenne par heure s'élevait à 0,0167 du poids de leur corps , tandis que celle d'autres Grenouilles placées à l'embrasure d'une fenêtre ou- verte , fut de 0,0520 (1) ; des Lézards transpirèrent, dans le premier cas , 0,0041 , et dans le second 0,0087 (2). Quand l'air était calme et en même temps saturé d'humidité, la tran- spiration se trouvait réduite à son minimum, c'est-à-dire qu'elle devenait cinq à dix fois moins considérable que dans rairsecetenmouvement(3). Aussi Edwards a-t-il reconnu (4) qu'il ne s'opérait de transpiration uniforme que quand il sus- pendait les animaux dans des vases couverts par le haut , de manière que la vapeur pût se dissiper facilement dans l'at- mosphère , sans être portée au-delà de ses Umites ordinaires par le mouvement de l'air. 5° La pression du milieu dans lequel l'organisme vit, lui impose, comme à tout autre corps, certaines limites par lesquelles il est maintenu dans l'état approprié à sa nature. Ainsi la pression de l'atmosphère borne la pénétration du sang dans les vaisseaux capillaires ; la peau de l'embryon est aussi rouge qu'une membrane muqueuse ; mais , après la (1) Ihid., p. 590. (2) Ihid., p. 608. (3) Ibid., p. 93. (4) ïbid., p. 91. INFLUENCE DES MILIEUX AMBIANS. 9I naissance , elle ne tarde point à pâlir sous Tinfluence de l'àir, et la membrane muqueuse du rectum ou vagin , dans les cas de prolapsus, devient aussi pâle que la peau. Dans de l'air raréfié , le sang qui afflue vers la périphérie acquiert la pré- pondérance sur celui que renferment les vaisseaux ; aussi la circulation devient-elle accélérée sur les hautes montagnes , où Ton voit fréquemment survenir des hémorrhagies dans les points couverts d'un épiderme mince , de même que , quand la pression atmosphérique vient à être supprimée, par exem- ple , au moyen d'une ventouse , il se manifeste une con^es- tionlocale qui peut aller jusqu'à faire naître unehémorrliagie. Lorsqu'on exprime ou qu'on attire d'une manière quelconque l'air contenu dans des conduits excréteurs de glandes, la sé- crétion devient plus abondante , phénomène qu'on observe , par exemple , dans l'action de traire les Vaches , ou quand on suce sa salive ; le malade observé par Mitscherlich (i) obtenait, parce dernier moyen, une quantité de salive qui, après la séparation du mucus, était encore six fois plus con- sidérable que celle du liquide rendu pendant le même laps de temps par la fistule ouverte à l'extérieur de la joue. Comme tous les corps exhalent davantage dans la machine pneumatique, dont l'action est le meilleur moyen qu'on puisse employer pour dessécher les substances organiques , de même aussi la transpiration cutanée augmente dans l'air raréfié. Des Grenouilles transpiraient, par heure, terme moyen, 0 ,0020 du poids de leur corps à l'air, €t 0,0076 sous le récipient de la machine pneumatique (2). Sur les hautes montagnes , l'accroissement de la respiration détermine la soif, et l'oppression qu'on y éprouve semble tenir , en par- tie du moins , au dessèchement des poumons ; car la gêne di- minue ou cesse lorsque l'air se charge d'humidité (3). Une pression plus forte du milieu diminue aussi l'exhalation du gaz acide carbonique. Abernethy a remarqué que sa main fournissait plus d'une fois autant de ce gaz dans l'air que (l)Ilust, Magasin fuer die gesammte Heilkunde , t. XXXVIII, p. 502. (2) Edwards , loc. cit., p, 584. (3) Jbid., p. 4&3. 92 INFLUENCE DES .MUIEUX AMBIANS. SOUS le mercure (1). Prout dit aussi (2) que la quantité du gaz acide carbonique expiré augmente quand le baromètre est bas. Cependant cet effet est plus vague dans le cas d'une raréfaction très-considérable de l'air , parce qu'alors la respi - ration en général se trouve dérangée, et qu'il pénètre moins de gaz oxygène dans les poumons. Ainsi, d'après Legallois (3), une jeune Chien expirait par minute 1,61 pouce cube de gaz acide carbonique à la pression ordinaire de l'atmosphère, et 1,66 dans l'air raréfié ; des Cochons d'Inde (4), qui en don- naient 0,401 pouce cube par minute dans la première de ces deux circonstances , en fournirent 0,420 dans la seconde ; au contraire , la proportion entre cette exhalation à la pression ordinaire et celle dans l'air raréfié fut , chez un Lapin, de 0^70 : 0,65 pouce cube (5) , chez un autre de 0,84 : 0,57 (6), chez un troisième de 1,10 '. 1,02 (7), et chez un Chat de 0,80 : 0,77 (8). Des Poissons que l'on tire rapidement des profondeurs de la mer se gonflent autant à l'air , suivant Configliachi (9) , que s'ils avaient été mis sous le récipient de la machine pneu- matique , et quand on pratique une incision à leur peau , l'air s'en échappe bruyamment ; leur vessie natatoire aug- mente de volume, au point de faire souvent sortir l'estomac par la bouche. Ce phénomène tient à ce que l'air qui se trou- vait comprimé au fond des eaux, éprouve une expansion su- bite à l'air ; en effet , d'après Biot (10) , la masse de l'eau , à une profondeur de cent mètres , exerce une pression dix fois plus forte que celle de l'atmosphère, de manière qu'en ajou-:- tant cette dernière , le Poisson s'y trouve soumis au poids de (1) Chirurgische und physiologische Versuclie , p. dll-H7. (2) Gmelin, Handbuch der theoretischen Chemie , t. II, p. 1521. (3) Œuvres , t. II , p. 65 , n° 1. (4) iôîd., p. 66,no2. (5) Ihid., p. 63, n" 3. (6) Ihid., p. 63, DP 5. (7) Ihid., p. 63, nos. (8) Ihid., p. 63, n»?. (9) Schweigger, Journal fuer Chemie , 1. 1 , p. 458. (lO)Poggendorff, Annalen der Physik,t. XXVI , p. 467. INFLUENCE DES MltlEUX AMBIANS. 9^ onze atmosphères, et que , quand on* l'amène tout d'un coup à la surface , l'air qu'il renferme acquiert un volume dix fois plus considérable qu'auparavant. Cependant on peut se demander si cette diminution brus- que de la pression n'aurait point aussi pour résultat d'ac- croître tout à coup la sécrétion de gaz. Biot (1) a trouvé d'autant plus de gaz oxygène dans la vessie natatoire , que la profondeur à laquelle le Poisson avait été péché était plus grande; ce réservoir en contenait 0,29 chez les Poissons qui vivent non loin de la surface , et 0 ,70 chez ceux qui habitent à plus de cinquante mètres (2). ConfigUachi (3) et Delaroche (4) ont fait des observations analogues. Or l'air mêlé avec l'eau de la mer ne contient , à la profondeur de deux cents toises, que 0,265 d'oxygène , selon Delaroche (5), et 0,08 seulement, selon Biot (6). La prédominance de l'oxygène sur l'azote, dans la vessie natatoire , ne peut donc se rattacher qu'au mode de la sécrétion. Mais il demeure incertain encore si la sécrétion plus abondante de gaz oxygène avait eu lieu déjà au fond de la mer, ou si elle ne s'est effectuée qu'à la sortie de l'eau et par la soustraction soudaine de la pression à laquelle le corps avait été soumis jusqu'alors. 7° La chaleur exerce une action évaporative , et favorise ainsi la sécrétion vaporeuse de la surface , surtout au milieu d'un air sec , en mouvement et raréfié. Martin (7) , après s'ê- tre exposé à un grand froid , expira sept onces d'eau , dans l'espace d'une heure , à la chaleur d'un poêle. La transpira- tion moyenne par heure des Grenouilles dans de l'air saturé d'humidité fut de 0,0060 à zéro , de 0,0070 à dix degrés", de 0,0135 à vingt, et de 0,0449 à quarante (8). Celle difFé- (1) Schweigger, Journal fuer Chemie , 1. 1 , p. 232. {2)Ibid., t. I,p. 123. (3) Ibid., p. 146. (4) Annales du Muséum , t. XIV, p. 214. (5) Ihii., p. 255. (6) Poggendorff , Annalen der Physik , t. XXVI , p. 474. (7) Abhandlungen der SchwediscJien Akademie , t. XJu , p. 200, {S) Edwards, loc, cit., p. 593. 94 INFLUENCE DES MILIEUX AMBIANS. , rence de la température" s'est manifestée aussi chez des In sectes (1). Mais, à part la transpiration aqueuse , et indépendamment d'elle, la chaleur accroît la sécrétion par la peau d'autres sub- stances qui se volatilisent avec la vapeur aqueuse , ou qui , unies à l'eau liquide , constituent la sueur. Cette dernière a lieu quand un mauvais conducteur de la chaleur , par exem- ple dutafFetas ciré, ou un air chaud et saturé d'humidité, comme celui d'un bain de vapeur, empêche le dégagement du calori- que et de la vapeur aqueuse, et, en pareil cas , la quantité de la sécrétion cutanée peut être moins considérable que quand il y a seulement dégagement de cette sécrétion sous forme de vapeur. Si l'air échauffé contient des vapeurs qui aient de l'affinité pour l'eau, comme celle de l'alcool^ la sécrétion augmente plus qu'en toute autre circonstance ,' parce qu'alors non seulement il se dégage d'autres substances , mais encore la quantité de l'eau devient plus grande. Le froid , associé à l'humidité et au re- pos de l'air , diminue la sécrétion cutanée tout entière ; au contraire , quand l'air est sec et en mouvement , il ne fait que supprimer la sécrétion d'autres substances, et la transpi- ration aqueuse peut alors dépasser ses limites normales. Voilà pourquoi le refroidissement produit par un courant d'air détermine un sentiment de pesanteur , de lassitude et en gé- néral de malaise, qui ressemble à celui qu'on éprouve après la suppression d'une sécrétion, jusqu'à ce qu'il survienne un état inflammatoire local , catarrhe ou rhumatisme , qui peut être considéré en quelque sorte comme une crise. Il pa- raît, d'après cela, que des substances organiques (matière salivaireet osmazome) se volatilisent avec la vapeur d'eau à la température ordinaire, mais qu'elles sont retenues pendant le froid , et qu'au contraire quand la température s'élève beaucoup, elles se manifestent dans la sueur, unies à l'eau li- quide^ à des alcalis et à des acides. Cet effet de la chaleur n'entraîne nullement la nécessité d'admettre des organes sudo- (1) Rengger, Physioîogischc Vntersuchungen ueler die thierische Haushaltunçj der Insehten , p. 39. INFLUENCE DES MILIEUX AMBIANS. 95 rifères spéciaux ; mais s'il venait à se confirmer que les fila- mens étudiés par Purkinje-( § 797, 20° ; 821, 2°), et que Bres- chet considère comme des canaux sudorifères ou hydro- phores (*), existent chez tous les animaux qui suent^ et man- quent chez tous ceux qui ne suent point , nous aurions à les considérer comme des organes analogues aux follicules sé- bacés , dont ils différeraient seulement en ce que les sub- stances organiques qu'ils mêleraient avec l'eau auraient acquis un caractère moins spécial. L'exhalation du gaz carbonique par la peau est plus abon- dante, selon CoUard de Martigny (1), à la chaleur qu'au froid. Lamême chose a lieu, d'après Chevillot(2), pour celle de ce gaz dans les organes digestifs , et aussi , suivant Treviranus (3) , pour la quantitéde celui qu'entraîne l'expiration; car une Abeille exhala près de trois fois autant d'acide carbonique à vingt- trois degrés qu'à onze. Cependant Delaroche (4) pense que cet effet de la chaleur est moins prononcé chez les animaux à sang chaud , et si l'on peut ajouter foi à l'observation faite par Crawford , que des Cochons d'Inde expiraient moins d'acide carbonique qu'à l'ordinaire au froid , la différence tiendrait peut-être à ce que l'air raréfié par la chaleur contient moins d'oxygène. Du reste, Edvs^ards a reconnu (5) que l'expiration d'azote est plus abondante à la chaleur , et Cheviilot, que la quantité de gaz hydrogène qui s'exhale dans l'estomac et l'in- testin est plus considérable chez les sujets jeunes que chez les personnes avancées en âge. En outre , une température élevée augmente plusieurs sécrétions basiques , notamment celles du smegma cutané , du pigment et de la bile , ainsi que l'éclat des animaux phosphorescens , tandis que le froid détermine une sécrétion plus abondante de sucs muqueux. 7" L'effet le plus général de la lumière est d'accroître la (*) Nouvelles recherches sur la structure de la peau , p. 26. ' (1) Journal de Magendie, t. X, p. 166. (2) Journal de chimie médicale , t. V, p. 601. (3) Zeitschrift fuer Physiologie , t. IV, p. 28. (4) Nouveau Bulletin de la Société philonvitique , t. III , p. 331. (5) Loc. cit., p. 423. g6 INFLUENCE Ï)ES MILIEUX AMBIANS. formation du pigment. Les couleurs des corps organisés ont leur siège 'principalement aux parties périphériques. Chez beaucoup de végétaux, les feuilles et les fleurs n'acquièrent un coloris plus intense que quand elles sont sorties des bour- geons. De même , chez l'homme et les animaux , la teinte permanente de la peau ne se développe qu'après la naissance de l'embryon (§ 534, 8°). Chez les Nègres, la couche exté- rieure du mucus de Malpighi est plus foncée que l'interne (1). Les plantes qui croissent dans des cavités souterraines , les Poissons qui vivent à de grandes profondeurs ou dans la vase , les Reptiles qui se^tiennent dans l'obscurité , comme le Protée et la Sirène , ont peu de pigment. Les couleurs les plus vives se voient surtout chez les animaux aériens , les Insectes et les Oiseaux, et spécialement chez ceux d'entre eux qui vivent le plus à l'air et à la lumière. Les régions de la peau exposées à lumière ont en général une teinte plus foncée : ainsi , chez l'homme , les cheveux sont plus bruns que les poils du corps; chez les animaux , le dosa une teinte plus foncée et plus vive , et dans les Pleuronectes , chez lesquelles l'antagonisme du. dos et du ventre s'est effacé , le côté latéral tourné vers le haut est coloré , tandis que l'autre est blanc. Chez les Oiseaux, les plumes couvertes par d'autres sont moins colorées. Les plantes qui croissent à l'ombre , perdent les couleurs qu'elles offrent au grand air , et s'étiolent. Les Souris qu'on tient dans des caves obscures, font souvent des petits blancs (2). En Abyssinie et en Mauritanie , les femmes , qui vivent constam- ment dans l'intérieur des maisons , sont aussi blanches que les Européennes , tandis que les hommes ont le teint fort ba- sané (3). De même, les taches de rousseur se manifestent sur les régions de la peau exposées à l'action de la lumière , et sont dues surtout à la vive impression des rayons du soleil. (1) Sœnimen-ing , Ueher die kcerporliche f^erschiedenheit des Neijers vom Europœer, p. 46. (2) Heusinger, Untersuchungen ueher die ajiomale Kohlen-und Pijj- menthildunij in dem mensclilichen Koirper, p. 36. (3) Voigt, Die Farben dur onjanischen Kœrper, p. 43. INFLUENCE DES MILIEUX AMBIANS. gn Les Lampyres luisent d'autant plus, d'après Macaire (1) que la lumière du jour a agi davantage sur eux , quoique , sui- vant la remarque faite par Todd (2), ils ne perdent point leur éclat lorsqu'on les tient renfermés dans un lieu obscur pen- dant la journée. Tous les pigmens organiques ont un caractère basique pré- dominant , qui est surtout de nature carboneuse. Ceux des végétaux sont plus ou moins résineux , et leur développement à la lumière s'accompagne d'une formation de substances ba- siques, résineuses ou huileuses, et aromatiques. Comme la lumière exerce une action desoxidante sur les corps inorga- niques , qu'elle détermine la manifestation en eux du carac- tère toasique , et que par cela même elle leur communique fort souvent une couleur plus foncée, de même son influence sur les corps organisés est également chimique ; seulement cette influence n'agit point ici d'une manière immédiate, et ne fait que déterminer l'activité plastique à déposer dans les cou- ches interstitielles de la périphérie une plus grande quan- tité de substance carbonée provenant du suc vital ; car les couleurs pâlissent à la lumière chez les animaux et les végé- taux frappés de mort. Par antagonisme , la formation de sub- stances riches en carbone diminue dans l'intérieur : il se pro- duit plus de graisse dans l'obscurité , comme on peut s'en convaincre sur les animaux mis à l'engrais. Le Guacharo , Oiseau nocturne granivore de l'Amérique /est excessivement gras , parce qu'il vit dans robscurité , au milieu de cavernes souterraines (3), et les Oiseaux de nuit de l'Europe ne sont maigres qu'en raison du peu de produit de leur chasse. La peau de l'homme paraît dégager davantage de gaz dans le bain, sous l'influence de la lumière solaire. Cette influence s'exerce d'une manière plus sensible chez les végétaux, dont elle accroît la transpiration aqueuse. Si VHelianthus et diverses autres plantes tournent avec le soleil , c'est , suivant Haies (1) Froriep , Notizen , t. I , p. 33. C-i) Ihid., t. XV, p. 4. (3) HuiuboUU, Rcise in die Mquinoctiuhjefjenden , t. II, p. HQ. VlUe -J g8 INFLUENCE DES MltlEUX AMBIANS. parce que celle de leurs faces qui regarde cet astre transpire davantage , et subit par cela même une torsion. La lumière exerce une action particulière sur les végé- taux, eu égard à la sécrétion gazeuse. La plante, comparée à l'animal, est plus chargée d'oxygène, et notamment plus riche en acide carbonique, qu'elle attire dans son intérieur, pour lui servir de nourriture : la lumière accroît la vitalité des tiges et des feuilles, de manière que ces parties décomposent l'acide carbonique existant en elles, exhalent du gaz oxygène, etretiennent du carbone, pour en faire la base de leur tissu, eu même temps qu'elles attirent aussi de l'acide carbonique du mi- lieu ambiant. On ne doit voir là qu'une opération chimique, puis- que , même dans les corps inorganiques , la lumière détache l'oxygène de ses combinaisons et le volatilise. Mais cette opé- ration est accomplie par l'activité vitale; les feuilles mortes, fanées, devenues rouges en automne , ou complètement écra- sées, ne donnent jamais de gaz oxygène , dont il ne se dégagé non plus que fort peu des plantes malades. La quantité de l'acide carbonique est le régulateur du travail; celui-ci n'a point lieu quand l'eau pompée par les racines et le milieu qui entoure le reste de la plante sont dépouillés de tout acide carbonique; il augmente, au contraire, lorsque l'air ou l'eau qui enveloppe le végétal contient une plus grande quantité de ce gaz qu'à l'ordinaire, sans cependant en être trop chargé. La conséquence de l'exhalation du gaz oxygène est la mise en liberté du carbone , qui concourt à la production de la chlorophylle, à l'accroissemsnt des parties solides et à l'aug- mentation du poids de la plante. Il résulte des expériences de Saussure que l'accroissement du poids d'une plante , qui était de cinq grains à l'air libre , s'éleva à douze grains dans un air chargé d'acide carbonique et exposé aux rayons du soleil, tandis qu'à l'ombre il se réduisit à trois grains. La simple lumière diffuse suffit pour produire cet effet sur la vé- gétation; mais il n'y a que l'action immédiate des rayons solaires qui l'accroisse assez pour qu'on puisse remarquer une augmentation de la quantité d'oxygène dans le milieu ambiant. Du reste, il paraît, d'après les observations de Gilby, que, chez les plantes comme chez les corps iuorgani- INFLUENCE DES MILIEUX AMBTANS. 99 ques , le rayon violet a p^us de pouvoir que le rayon rouge pour mettre en liberté le gaz oxygène (1). 8° Les variations périodiques dans l'iiygrométricité, la densité , la température et rilluminalionde l'atmosphère , avec lesquelles s'accorde le type de la vie (§ 594, 3°) , font que la marche des sécrétions change également aux diverses époques du jour et de Tannée. La transpiration des végétaux est beaucoup moins considérable durant la nuit que pendant le Jour -, celle d'un Helianfhus anmms , par exemple , s'éleva , pendant douze heures de jour , à vingt onces , et ne fut que de trois onces pendant le même laps de temps, par une nuit sèche. La même chose a lieu pour la transpiration des ani- maux et de l'homme , qui atteint son maximum avant midi (§ 606, 5°). On peut en dire autant, quoiqu'à un moindre degré , de la sécrétion urinaire ; suivant des observations con- tinuées pendant une année , il y eut par heure , terme moyen, d,567 onces de transpiration pendant le jour, et 1,725 d'u- rine , dans le premier cas, et 1,432 dans le second (2). D'a- près Collardde Martigny (3), c'est le matin que la peau exhale le plus de gaz. Prout (4) assure aussi que l'expiration de gaz acide carbonique est plus abondante le matin , qu'elle atteint son maximum vers midi , qu'ensuite elle diminue jusqu'après minuit, époque de son minimum, en sorte que, décent pouces cubes d'air introduits dans les poumons par l'inspiration , on expire pendant la nuit 0,033, et dans le milieu de la journée 0,040 pouce cube de gaz acide carbonique, dont, au dire de Saussure, l'atmosphère contient habituellement une plus grande quantité durant la nuit que pendant la journée ( § 606, 8°). 9o En été, la transpiration, l'expiration de gaz acide car- bonique , la formation du pigment et la sécrétion de la bile sont plus abondantes ; c'est , au contraire , Ja sécrétion de l'u- rine, des liquides séreux, du mucus et de la graisse, qui pré- (1) Annales de chimie , t. XVII , p. 65. (2) Meckel , Deufsches Archiv , t. VII , p. 362. (3) Journal de Magendie , t. X , p. 166. (4) Schweigger, Journal fuer Chemie , t. XV, p. 147. 100 INFLUENCE DES MILIEUX AMBIANS. domine en hiver (§ 619, 4°, 6°). D'après les observations de Keil , on peut évaluer la quantité moyenne , par heure , de la transpiration à 1,383 once , et de Turine à 1,488 once^ depuis le mois de mai jusqu'en octobre , celle de la première à 1,197 et celle de la seconde à J,668, depuis novembre jusqu'en avril. Chossat (1) dit que l'urine l'emporte un peu sur la boisson au solstice d'hiver, mais qu'elle n'en représente que les trois quarts en été. C'est au printemps que les feuilles des plantes transpirent le plus , et en automne qu'elles exhalent le moins ; la perspiration d'un arbre qui reste toujours vert , par exemple d'un laurier, est aussi considérable pendant un seul jour d'été que durant tout un mois d'hiver. L'acide carboni- que expiré par des Moineaux s'élevait, par heure, terme moyen , à 5,4144 pouces cubes au mois de mai , par une température de vingt degrés, à 7,7220 en juin, par la même température, à 4,9012 en" octobre, par une température de quinze degrés, et à 6,0866 en novembre, par la même tem- pérature (2); chez des Grenouilles, la quantité moyenne de ce gaz, en vingt-quatre heures , était de 2,9288 pouces cubes , au mois de juin , à vingt-sept degrés ; de 1,4364 , en juillet , à dix-huit degrés; et de 1,3638, en octobre, à quatorze de- grés (3). Suivant Configliachi (4), la vessie natatoire des Pois- sons contient moins de gaz oxygène en été qu'en automne. 10** Le climat exerce une influence analogue sur les sé- crétions. En général , c'est dans les pays chauds que les vé- gétaux et les animaux brillent des couleurs les plus vives et les plus éclatantes. Des animaux qui ont le pelage brun jau- nâtre , gris noirâtre ou rouge dans les zones tempérées , sont blancs ou d'un gris cendré dans les contrées reculées vers le nord; tel est le cas des Écureuils et de l'Ours. D'autres, comme l'Hermine , l'Isatis et le Lièvre blanc , y acquièrent ce poil aux approches de l'hiver, non par l'effet d'une mue, mais par un grisonnement semblable à celui que détermine (1-) Journal de Magendie , t. V, p. 192. (2) Edwards , De l'influence des agens physiques sur la vie , p. 645. (3) IHd., p. 648, (4) Scliweigger, Journal fuer Chemie , t. I, p. 145. INFtUENCE DES SUBST. INTROD. DU DEHORS. 101 Tâjje (1), ce qui prouve que le type de la vie s'accorde plutôt avec celui des phénomènes cosmiques , qu'il n'est réglé par lui. Il est bien connu aussi que la peau et les cheveux de l'homme sont en général plus foncés en couleur dans les pays chauds q.ue dans les climats froids. L'influence du climat sur la transpiration ressort déjà de la différence (§ 836, 3°) qu'on remarque entre les résultats des observations faites sous des latitudes diverses^ par Sanctorius en Italie , Lining dans la Caroline du sud , Dodart , Boissier et Séguin en France , Keil et Stark en Angleterre. La sécrétion de l'urine est moins abondante dans les climats chauds , et celle de la bile , au contraire, plus copieuse. Les animaux des pays chauds ont la peau couverte de poils rares , ou même entièrement rase , tandis que ceux des contrées froides ont un pelage épais, et qui double même , à rapproche de l'hiver, par la crue de nou- veaux poils. Iî> Influence des matières introduites dans l'économie. § 840. L'organisme produit ses solides et ses liquides par sa propre force et avec des matériaux tirés de son propre suc vital. Mais comme il reçoit du monde extérieur les principes conslituans de son suc vital , la quantité de la nutrition et de la sécrétion est déterminée en partie par celle des substances admises du dehors. A. Influence de la quantité des substances introduites du dehors. I. La quantité de la masse organique varie continuellement pendant la vie , de manière que le même homme , d'un âge moyen , pèse tantôt plus et tantôt moins , et que son augmen- tation de poids pendant l'âge d'accroissement , ou sa diminu- tion durant celle de décroissement , n'ont pas lieu d'une ma- nière uniforme , mais présentent des oscillations. Cependant ces fluctuations , qui tiennent à l'essence même de la vie , (1) Froriep , Nutizen, t. XV, p. 167. 302 INFIUENCE DES SUBSTANCES INTRODUITES sont trop peu considérables pour que la masse de l'organisme ne demeure point , somme totale , la même à peu près ; car elles le ramènent toujours à la moyenne qui lui est propre. La membrane muqueuse bipolaire (§ 790) et la peau (§ 791) sont les portes par lesquelles entrent et sortent les substances, aux voies de sortie desquelles il faut encore adjoindre le sys- tème urinaire. Nous arrivons à connaître le rapport entre l'in- gestion et l'éjection, en comparant le poids des aliraens jour- naliers et des déjeclions journalières, tant fécales qu'urinaires, avec celui du corps au commencement et à la fin de la jour- née ; la différence que nous trouvons après avoir défalqué l'urine et les matières excrémentitielles, est mise sur le compte de la transpiration cutanée et de la perspiration pulmonaire , ce qui, sans être rigoureux, est cependant juste au fond, puisque l'absorption par la peau et les poumons , qu'on fait entrer en ligne de compte , se réduit à peu de chose, et que l'ingestion et l'éjection de gaz se compensent à peu près l'une l'autre. Yoici quel a été, d'après des observations de ce genre (1), la proportion moyenne des substances ingérées et évacuées, en les évaluant par onces : Observations. Keil. Sanctorius. Boissier. Hartmann. Lining. Robinson jeune. Robinson l'ancien. Gorter. Rye. > Évacuations. 2 H w O § ^ fi ai '2. n i-i ffi- B ^ ■ 9S ra n o £Ji S s O co m Ç3 38 75 31 5 60 32 2 'A 4 60 33 22 5 80 46 28 6 117 54 59 4 86 46 35 5 1/2 58 27 1/2 28 3 1/2 91 49 36 8 96 59 39 5 tri 74 60 60 80 117 861/2 59 93 103 (1) Haller, Elément, physiolog., t. V, P- 62. DU DEHORS. 103 Quand la quantité des alimens baisse \ on voit d'abord di- minuer sensiblement celles des sécrétions qui se rapportent à la future conservation de soi-même (graisse), à la procréation (sperme et lait) et à la ré{J;éné^ation (pus), puis les autres sé- crétions et la nutrition elle-même , en même temps que l'or- ganisme résorbe ce qu'il avait déjà produit et absorbe avec plus d'avidité dans l'atmosphère. Dans l'état anormal, il est possible qu'une sécrétion continue d'être abondante , malgré l'abstinence prolongée d' alimens , lorsque d'autres sécrétions se trouvent plus ou moins restreintes , que la quantité des substances absorbées par la peau et les poumons dépasse la règle ordinaire, qu'une prédominance de l'activité sensiiive réduit la mutation des substances à des proportions plus exiguës, et que, du reste, le corps maigrit. Ainsi Kieser a vu une fille hystérique , que des spasmes continuels au pliaryn^ et une répugnance insurmontable pour les alimens et les bois-» sons , firent rester soixante-huit jours sans nourriture d'aucune espèce ; cette personne rendit journellement depuis deux jus- qu'à dix-huit onces, ou, terme moyen, quatre onces d'urine con^ tenant 0,06 de matières solides, c'est-a-dire pendant la période entière dix- sept livres d'urine, avec une livre de matières sohdes; mais elle maigrit beaucoup; son urine était acide, elle ne passait point aisément à la putiéfaction , et donnait , par Févaporation, un extrait contenant de lacide lactique libre. De même , T urine d'un aliéné qui n'avait ni bu ni mangé de- puis dix-huit jours, offrit à Lassaigne (1) tous les principes constituans de l'urine humaine normale , seulement avec up peu moins d'eau qu'à 1 ordinaire. IL Si nous cherchons à connaître le rapport de la sécrétion à l'ingestion dans chaque organe , nous ne trouvons presque aucun renseignement à légard de l'action du système cu- tané. Edwards a seulement remarqué que, quand des Gre- nouilles avaient éprouvé une perte considérable dé poids par l'évaporation à l'air, l'eau dans laquelle on les plongeait, et qu'elles absorbaient , les faisait augmenter de poids jusqu'à un (1) Journal de chimie médicale, 1. 1, p. 173. 104 INFLUENCE DES SUBSTANCES INTRODUITES certain point , mais qu'ensuite elles perdaient cet accroisse- ment par la sécrétion cutanée. Senebier a observé que , dans les plantes, l'eau pompée est à l'eau exhalée comme 3 à 2 , ou , en d'autres termes , qu'un tiers de l'eau absorbée reste dans le végétal , pour servir à son accroissement, et que les deux autres tiers s'exhalent dans l'air (1). III. Considérée d'une manière générale , la quantité d'air expirée correspond à celle qui a été inspirée. 1° Cependant ce rapport n'est point immuable ; car il y a des momens où tantôt l'absorption, tantôt la sécrétion', est plus forte, elles fluctuations peuvent se compenser. On a observé, dans la plupart des cas, que l'air expiré offrait un volume inférieur à celui de l'air inspiré , que par conséquent il y avait, eu égard au volume, plus d'air absorbé que d'air exhalé. La différence s'est élevée , par exemple , suivant Hum- phry Davy (2), après une seule inspiration de cent quarante- et un pouces cubes , à deux pouces cubes~0,014 , après une de cent pouces cubes, à 1,3 pouce cube=:0,013, et, terme moyen, à 0,3 pouce cube=0,023 , sur treize pouces cubes ; d'après Pfaff à 0,027, selon Henderson à 0,011 par minute. Des phénomènes analogues ont été remarqués chez les animaux , tant à l'égard de la respiration seule , par Col- lard de Martigny, que sous le point de vue de l'exhalation cutanée et de la perspiration pulmonaire prises ensemble , par la plupart des observateurs. Allen et Pepys (3) se sont convaincus que l'air expiré par l'homme dans l'espace de dix minutes a environ 0,008 de moins en volume que ce- lui qui a été inspiré ; mais ils attribuaient cette différence à ce qu'on expire avec plus de force au commencement qu'à la fin de l'expérience , de sorte qu'ils admettaient égalité entre l'air expiré et l'air inspiré. Mais cette hypothèse est réfutée par les observations recueillies sur des animaux entièrement ren- (1) De CandoUe , Physiologie végétale , t. I , p. 114. (2) Physiologisch-cliemisclie Untersuchuni/eii ueler das ^thmen , p. 100. (3) P/wïo*. Traws., 1808, p. 253. DU DEHORS. I05 fermes dans les réservoirs servant à l'expérience. Trevira- nus (J), tout en soutenant que le volume demeure presque tou- jours le même chez les animaux , convient cependant qu'il^'y a , dans beaucoup de cas, moins d'air expiré que d'air inspiré ; mais il explique cette particularité en disant que les animaux avalent une certaine quantité d'air, qui passe dans leurs orga- nes digestifs. Or, cette déglutition , admise seulement comme chose possible , n'est point démontrée , et elle était impossible dans les expériences de Collard de Martigny, qui faisait respi- rer les animaux par le moyen de petits tubes introduits dans la trachée , ce qui n'empêchait pas que l'air expiré fût infé- rieur à l'air inspiré. Nous devons donc reconnaître que, dans la règle , l'organisme reçoit par les poumons un volume de gaz supérieur à celui qu'il expulse. La différence est plus considérable encore qu'on ne le dit lorsqu'on mesurant l'air expiré on ne fait point entrer en ligne de compte , non seule- ment que la chaleur du sang pulmonaire lui a communiqué une plus grande expansion , mais encore qu'il est chargé de l'exhalation aqueuse des poumons. Mais ce n'est point de l'é- tat d'expansion , ou du volume , qu'il s'agit ici , c'est seule- ment de la masse ; or, comme un volume de gaz acide carboni- que est égal en poids à 1,382 volume de gaz oxygène, ou à 1,558 volume de gaz azote , il résulte de là que , dans la règle, les poumons rendent tout autant et même un peu plus qu'ils ne reçoivent. Mais les choses vont rarement jusqu'au point que le volume de l'air expiré dépasse celui de l'air inspiré , comme l'annoncent , par exemple , Allen et Pepys (2), qui disent avoir observé, chez un homme, une différence de 0,003, dont ils cherchent à donner l'explication en admettant que le sujet n'a- vait point fait une assez forte expiration au commencement de l'expérience. Le fait a été observé plusieurs fois, notamment par Despretz , sur des animaux renfermés entiers , ce qui prouve que l'explication des physiologistes anglais ne vaut rien. 1° Quant à la proportion entre le gaz oxygène absorbé et (1) Zeiischrift fuer Physiologie , t. IV, p. 31. (2) Loc, cit., p. 236. I06 INFrtJENCE DES SUBSTANCES INTRODUITES le gaz acide carbonique expiré , Allen et Pepys prétendent que le volume est égal de part et d'autre , tant chez les Oi- seaux et les Mammifères , que même chez l'homme , où ils l'estimaient, pour vingt-quatre heures , à 39534 pouces cubes anglais (1), d'après quoi l'oxygène absorbé s'élèverait à treize mille grains , et l'acide carbonique expiré à dix-huit mille. Mais d'autres observateurs s'accordent à dire que la propor- tion entre les deux gaz varie considérablement, et que le plus souvent le volume du gaz acide carbonique expiré est inférieur à celui du gaz oxygène qui a disparu de l'atmosphère. Ainsi, par exemple , Bostock (2) et Delarive (3) admettaient, comme règle, qu'en vingt -quatre heures l'homme expire vingt-deux pieds cubes d'acide carbonique, et en absorbe vingt-cinq à vingt-six de gaz oxygène , de manière que le rap- port entre le volume du premier et celui du second est de 1 ', 1,13 ou 1,18. Legallois, après des expériences qui avaient duré trois heures, a trouvé la proportion, terme moyeu, de 1 '. 1,20 chez lès Lapins, Il 1,26 chez les Cochons d'Inde ,1 '. 1,32 chez les Chats, 1 '. 1,58 chez les Chiens ; il ajoute que, dans le cas d'une respiration unique, le volume des deux gaz est le même, et que plusieurs respirations successives sont nécessaires pour amener le résultat précité , qui lient à la résorption d'une certaine quantité d'acide carbonique ; mais cette assertion est réfutée par les expériences dont nous par- lerons bientôt (3°, 4°), et dans lesquelles la même proportion a été observée lorsqu'on renouvelait l'air à chaque respiration. Humboldt et Provençal ont trouvé la proportion du volume d'eau de 1 *. 1,25 au moins, et quelquefois aussi de 1 1 2, chez les Poissons , de 1 ^ 1,50 chez les Grenouilles. Suivant Trevi- ranus(4), elle est souvent de 1 I 3 chez les animaux à sang froid. Edwards (5) a observé une diminution considérable de l'air dans lequel il avait renfermé dilférens animaux ; mais il (1) Loc. cit., p. 265. (2) f^ersuch ueher das Atliemliolen , p. 113. (3) Annales de chimie , t. XV, p. 103. (4) Zeitschrift fucr Physiologie , t. IV, p. 35. (5) Loc. cit., p, 410. DU DEHORS. 107 a trouvé en même temps que le volume du gaz acide carbo-. nique expiré était à celui du gaz oxygène absorbé comme 1 .* 0,21 jusqu'à 0,52, chez les Mammifères, les Oiseaux et les Grenouilles , et je ne conçois pas à quoi peut tenir la dif- férence qu'on remarque entre ce résultat et celui d'autres ^ob- servations. 3" Les observateurs qui croyaient avoir trouvé qu'outre le gaz oxygène il y a aussi de Tazoïe atmosphérique absorbé, avaient remarqué que le volume du gaz acide carbonique ex- piré était plus faible. Lorsque H. Davy inspirait cent qua- rante et un pouces cubes d'air, il expirait cinq pouces cubes = 2,907 grains de gaz acide carbonique, et absorbait deux pouces cubes = 0,744 grain d'azote, plus cinq pouces cubes 2,103 grains d'oxygène , en tout sept pouces cubes = 2,847 grains; quand il n'inspirait que treize pouces cubes d'air, l'acide carbonique expiré s'élevait à 1,1 pouce cube = 0,639 grains, et le gaz absorbé à 1,4 pouce cube = 0,541 grain , savoir : 0,2 pouce cube =0,037 grain d'azote, et 1,2 pouce cube — 0,504 grain de gaz oxygène ; la sécrétion était donc à l'absorption , sous le rapport du volume , dans le pre- mier cas .', 1 '. 1,40, et dans le second II 1 l 1,27, sous ce- lui de la masse, dans le premier l', il 0,979 , dans le second Il i l 0,846. Henderson (1) expira en quatre minutes 39,7 pouces cubes d'acide carbonique , tandis qu'il absorbait 52,0 pouces cubes de gaz oxygène et 17,7 de gaz azote, en tout 69,7 pouces cubes de gaz , ce qui donne , sous le rapport du volume, une proportion de 1 ! 1,75. Les Tanches observées par Provençal et Humboldt (2), donnèrent ensemble 372,4 centimètres cubes de gaz acide carbonique , tandis qu'elles enlevaient à l'air 734 centimètres cubes d'oxygène et 396,3 d'azote , en tout 1110,3 centimètres cubes, de manière que la proportion de l'exhalation à l'absorption, quant au volume , était de 1 : 2,98. 4'' Parmi les observateurs qui ont regardé une exhalation (1) Pogg^ndorif , Annalen der Physik , t. XIX , p. 422. (2) Méra. de la Société d'Arcueil , t. II , p. 378. 108 INFLUENCE DES SUBSTANCES INTRODUITES de gaz azote comme normale , on distingue Treviranus (1) , qui a remarqué , presque sans exception, une exhalation égale à l'absorption ; car , suivant lui , le gaz expiré contient tou- jours un volume d'azote compensant ce qui manque à l'acide carbonique de l'expiration pour équivaloir à l'oxygène ab- sorbé. Berthollet (2) a fait dix expériences sur des Cochons d'Inde et des Lapins-, dans six cas, les gaz acide carbonique et azote expirés égalaient le gaz oxygène absorbé , et dans quatre ils lui étaient inférieurs ; pris en masse , l'air expiré par des Co- chons d'Inde avait acquis en volume 37,10 pouces cubes d'a- cide carbonique et 15,02 d'azote, en tout 52,12 pouces cubes, et perdu 61,66 de gaz oxygène; l'air expiré par des Lapins avait acquis 56,85 d'acide carbonique et 18,15 d'azote, en- semble 75 pouces cubes, sur une perte de 72, 8i de gaz oxygène ; la proportion entre la sécrétion et l'absorption , eu égard au volume , était donc , dans ce dernier cas, de 1 0,97, et dans l'autre de 1 : 99. Les expériences de Despretz (3) ont donné les résultats suivans , la durée étant calculée en minutes , et la quantité des gaz en litres : (d) Zeitschrift fuer Physiologie , t. IV, p. 7-22. (2) Mém. de la Société d'Arcueil, t. II, p. 461.1 (3) Annales de chimie et de physique , t. XXYI , p. 351. DU DEHORS. 109 Exhalation. 0 - w n .■.-; S a- 93 M B 95 Proportion. 3. ^- Azote. 3 0 114 2,558 1,066 3,624 C6- 3,299 3 Cochons d'Inde. 1:0,910 3 Pijoeons. 92 2,452 0,740 3,162 3,186 1-1,007 1 Lapin. 96 3,076 0,829 3,905 4,056 i:i,038 1 Chien. 91 3,768 1,373 5,141 5,584 i:i,086 1 Hibou. 85 1,601 0,727 2,328 2,626 1:1,128 1 Chat. 95 •2,060 0,524 2,584 2,930 11,133 1 jeune Chien. 102 2,777 0,765 3,542 4,168 1:1, 176 2 jeunes Chiens. 102 4,018 0,097 5,115 6,233 l'l,218 6 jeunes Lapins. 125 2,955 0,432 3,387 4,173 1: 1,232 Chez les huit Lapins auxquels CoUard de Martigny (1) fit respirer, pendant neuf à quinze minutes , de l'air frais , au moyen d'un petit tube introduit dans la trachée-artère , la proportion fut comme il suit : Exhalation -^ Oxygène Proportion. Acide Azote. Ensemble. absorbé. carbonique. Premier. 0,374 0,067 0,441 0,411 l'0,93 Second. 0,301 0,063 0,364 0,379 1-1,04 Troisième. 0,288 0,031 0,319 0,395 1:1,23 Quatrième. 0,311 0,021 0,332 0,427 d:i,28 Cinquième. 0,279 0,059 0,338 0,450 1-1,33 Sixième. 0,198 0,032 0,230 0,499 1:2,16 Septième. 0,239 0,038 0,277 0,607 1:2,19 Huitième. 0,193 0,010 0,203 0,470 1.2,31 (1) Journal de Magendie , t. X , p. 153 1)150 INFLUENCE DES SUBSTANCES INTRODUITES IV. L'admission d'alimens dans le corps 5° Augmente la sécrétion gazeuse des organes respira- toires. Spallanzani (1) est le premier qui ait appelé Tattention sur cette circonstance; il remarqua, par exemple, que la quantité d'acide carbonique exhalé , chez un Limaçon qui n'avait pas pris de nourriture depuis un laps de temps assez long , était à celle du même animal , après qu'il avait mangé, comme '1!1,53, tandis que la quantité d'oxygène absorbé était la même dans les deux cas. Sorg a trouvé également (2) qu'a- près avoir pris des alimens en abondance , les Insectes exha- laient beaucoup d'acide carbonique, tandis qu'ils en donnaient fort peu lorsque la nourriture venait à leur manquer. Suivant Jurine , l'homme expire aussi plus d'acide carbonique après le repas qu'en tout autre temps. Spallanzani (3) a observé une exhalation de gaz azote chez des Limaçons , surtout lorsqu'ils avaient mangé beaucoup et avec avidité. Les observations de Collard de Martigny qui viennent d'être citées (4°) se rap- portent à l'influence exercée par la nourriture. En effet , le temps écoulé entre le commencement de l'expérience et le dernier repas était, pour les cinq premiers Lapins , d'une heure à une heure et demie , pour le sixième de six heures , pour le septième de trois , et pour le dernier de huit. D'après cela , les poumons exhalent plus et absorbent moins pendant " la digestion que quand elle est terminée. Terme moyen, l'a- cide carbonique expiré s'élevait chez les cinq premiers La- pins à 0,3106, chez les 4rois derniers à 0,2100, et l'azote à 0,0482 chez les premiers , 0,00266 chez les autres; l'expira- tion après la digestion était donc à celle avant l'acte diges- tif, comme 1;1,47 sous le rapport de l'acide carbonique, et comme i:i,81 sous celui de l'azote, en sorte que la diffé- rence était plus grande pour le premier de ces gaz que pour le second. Une longue abstinence d'alimens , par exemple , (4) Recherches sur la respiration , p. 218. (2) Disquisitiones physioloyicce circa respii'atiotiem inseciorum et ver'- mium , p. 164. (3) Loc. cit., p. 231. DU DEHORS. lit un jeûne de vingt-et-une heures, diminue l'expiration d'acide carbonique^ selon Prout (1). 6° La diminution de la transpiration cutanée par le jeûne (2) ne devient sensible que quand l'abstinence dure au-delà de lingt-quatre heures (3). 7° Les boissons augmentent la sécrétion urinaire, et sou- yent , avec une rapidité telle, que ce phénomène a été consi^ déré comme une preuve à l'appui de l'existence des préten- dues voies urinaires occultes , car on pensait qu'il était abso- lument impossible à un liquide de parvenir avec tant de promptitude , par les voies connues , des organes de la di- gestion dans le sang , et de celui-ci dans l'urine. Mais nous voyons des phénomènes analogues à la peau : il arrive sou- vent que la sueur se déclare peu d'instans après qu'on a pris une boisson chaude , et personne ne s'imaginera que c'est la boisson même contenue dans l'estomac, qui transsude à la surface de l'organe cutané ; évidemment la sécrétion liquide de la peau n'a été qu'accrue par l'influence de la chaleur hu- mide^. La plupart du temps ceux qui viennent de boire beau- coup rendent bientôt après l'urine qui se trouvait dans leur vessie , mais uniquement parce que cette humeur descend des reins en plus grande quantité. Sœmmerring et d'autres ob- servateurs, Corpet, par exemple (4), ont remarqué dans l'exstrophie de la vessie , que l'urine suintait des orifices des uretères peu de minutes après que l'individu avait bu , ou que , si déjà elle coulait goutte à goutte, bientôt on la voyait sortir par jet (§ 866, 1°). B. Influence de la qualité des substances introduites du dehors, § 841. La qualité des substances qui sont admises dans l'intérieur de l'organisme , ou qui entrent en contact immé- diat avec lui, exerce aussi de l'influence sur la quantité de diverses sécrétions. (1) Schweiggev, Journal fuer Chemie , t. XV, p. 61. . (2) Haller, Elément, physiolog., t. V, p. 72. (3) Reil , ArcUv, t. VII, p. 364. (4) Sieboldt, Journal fuer Geburtshuelfe ,%, XH) P> 309. 112 INFLUENCE DES SUBSTANCES INTRODUITES 1. INPLTIENCE DES SUBSTANCES GAZEtlSES. Ce qu'il nous intéresse le plus de connaître , c'est l'effet que les différentes espèces de gaz produisent sur la sécrétion gazeuse de la peau et des poumons ; car, outre qu'on peut ici prendre des mesures exactes , et par conséquent donner un haut degré de précision à l'observation , les rapports entre l'ingestion et l'éjection dans un même organe s'y manifestent avec une évidence que l'on chercherait en vain ailleurs. I. Étudions d'abord les effets du gaz acide carbonique. 1° Ce gaz, lorsqu'il est pur , détermine , tant que la vie con- tinue, une inversion complète des phénomènes de la respira- tion ; l'organisme s'empare de lui, et exhale du gaz oxygène et du gaz azote. Nysten (1) aspira l'air des poumons d'un Chien au moyen d'une seringue , et fit respirer à cet animal mille cinquante-six centimètres cubes d'acide carbonique ; lorsque le Chien fut asphyxié , au bout de deux minutes, il trouva que 346,08 centimètres cubes de gaz acide carbonique avaient été absorbés, qu'il en avait été exhalé , au contraire , 9,86 de gaz oxygène et 266,22 de gaz azote , ensemble 276,08, et qu'en conséquence l'ingestion dépassait l'éjection de soixante- dix centimètres cubes. Abernethy (2) tint sa main, pendant neuf heures , dans un vase plein de gaz acide carbonique , sur une cuve à mercure ; ce laps de temps écoulé, le gaz avait perdu plus de la moitié de son volume , et ce qui en restait contenait une quantité considérable d'azote. 2" Legallois (3) enferma des animaux, pendant deux à trois heures , dans un appareil dont la capacité était de deux mille trois cent trente-et-un pouces cubes , et qui contenait de l'air atmosphérique mêlé avec 0,21 à 0,47 de gaz acide carbonique. Dans quatre expériences de ce genre, l'acide car- bonique du dernier mélange 'se trouva diminué , par l'absorp- tion , d'environ 0,007 à 0,153, et il n'y en eut que deux dans (1) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques, p. 224, (2) Chiriircjische und physioloyische Fersuche , p. 120. (3) OEuvres, t. II,p.C3-6G. toU DEHORS. 1 l3 lesquelles sa quantité fut accrue, mais d'une manière insigni- fiante, par l'exhalation ; en effet, un jeune Chien, qui du reste expirait par minute 1,61 pouces cubes d'acide carbonique dans l'air atmosphérique, exhala 0,94 de ce gaz, et un au- tre 0,51. 3" Si l'on inspire de nouveau l'air qu'on a expiré et que par conséquent on a chargé d'acide carbonique , les poumons sécrètent moins de ce dernier. Davy (1) respira pendant près d'une minute , et en dix-neuf fois consécutives, cent soixante- et-un pouces cubes du même air ; ses poumons exhalèrent pendant ce temps 15,8 pouces cubes d'acide carbonique , ce qui faisait 0,8 à chaque respiration , tandis que , dans l'air frais (2), il rendait à chaque respiration 1,1 pouce cube , et , pendant le cours d'une minute , ving-six à vingt-huit pouces cubes d'acide carbonique. D'après Allen et Pepys (3) , dans deux cas, où trois cents pouces cubes d'air furent inspirés et expirés à plusieurs reprises , le gaz acide carbonique s'éleva, en trois minutes, à 26,48 et 27,55 pouces cubes, tandis qu'en cas de respiration d'air renouvelé chaque fois (4), sa quantité était de 26,5 pouces cubes dans une seule minute. Des sujets bien portans auxquels Nyslen (5) fit inspirer de l'air frais par le nez , et qui expiraient dans une vessie par la bouche, ren- dirent en une demi-minute cent trente-deux à cent soixante centimètres cubes d'acide carbonique ; mais quand ils réins- piraient l'air déjà expiré par eux (6) , l'acide carbonique ex- halé pendant le même laps de temps ne s'élevait que de soixante -quinze à cent vingt centimètres cubes. On observe la même chose à l'égard de l'exhalation cuta- née et pulmonaire , lorsqu'on tient des animaux pendant un laps de temps plus ou moins long dans de l'air enfermé. La quantité d'acide carbonique exhalée par de jeunes Chiens (1) Phijsiologisch'chemische Unterstichungen ueher das Athmen , p, 104. (2) llid., p. 402. (3) Philos. Trans., 1808 , p. 260. (4) Ibid., p. 255. (5) Recherches de pliysiologie et de chimie pathologiques , p. 190.^ (6) IHd., p. 203. Il4 INFLUENCE DES SUBSTANCES INTRODUITES qu'Edwards (1) avait enfermés pendant deux heures, s'élevait à7,43 centilitres par heure ; elle était de 3,57 chez d'autres]que le même observateur avait tenus en expérience pendant cinq heures ; de 6,18 centimètres cubes chez les Tanches que Humboldt et Provençal (2) observèrent pendant cinq heures, et de 1,64 seulement chez celles qu'ils laissèrent pendant dix- sept heures dans l'eau enfermée ; de 0,060 chez les Gre- nouilles que Treviranus (3) renferma pendant cinq heures trois quarts ; de 0,021 chez d'autres dont l'emprisonnement avait duré dix-sept heures; de 0,100 chez des, Apis lapidaria renfermées pendant quatre heures (4), et de 0,018 pouces cu- bes chez d'autres dont la réclusion se prolongea pendant vingt-quatre heures. Il suit de là que la quantité du gaz acide carbonique expiré correspond au volume de l'air dans lequel la respiration a lieu ou qu'on inspire. Lorsque Davy (5) in- spirait cent quarante et un pouces d'air avec effort , il expi- rait cinq pouces cubes d'acide carbonique , tandis qu'après une inspiration de treize pouces cubes d'air , la quantité de l'acide expiré ne dépassait pas 1,1 pouce cube. Henderson (6) fixpirait par minute près de dix pouces cubes d'acide car- bonique, lorsqu'il avait respiré pendant quatre minutes six cents pouces cubes d'air, et un peu moins de seize , quand sa respiration s'était exercée pendant quatre minutes et demie sur mille pouces cubes d'air. Suivant Allen et Pepys (7) , des Cochons d'Inde tenus en expérience pendant vingt-cinq mi- nutes, expirèrent par minute 0,62 d'acide carbonique dans trois cent dix. pouces cubes d'air atmosphérique , tandis qu'a- près avoir été renfermés une heure dans mille pouces cubes d'air , ils avaient expiré 0,88 de ce gaz par minute. Nysten, Legallois, Allen et Pepys présumaient qu'une (1) De l'influence des agens physiques sur la vie , p. 410. (2) Mémoires de la Société d'Arcueil , t. II , p. 378. (3) Zeitschrift fuer Physiologie , t. IV, p. 21. (4) Ibid., p. 7. (5)Xoc. cit., p. 400. (6) Poggendorff, Annalen der Physik, t. XIX, p. 422. (7) Philos, Trans., 1809, p. 416. DU DEHORS. Il5 partie de l'acide carbonique expiré se trouve résorbée lors- que le même air vient à être respiré plusieurs fois de suite. Cette conjecture n'a de probabilité que quand , après une respiration prolongée du même air , on trouve une quantité absolue d'acide carbonique moindre que celle qui s'observe d'ordinaire au bout d'un laps de temps beaucoup plus court. Du reste , Treviranus (1) a remarqué que des Limaçons conti- nuaient d'exhaler de l'acide carbonique après même avoir absorbé tout le gaz oxygène de l'air dans lequel ils avaient été renfermés. IL Passons maintenant aux effets du gaz oxygène. 1° On pourrait présumer , d'après l'action stimulante de ce gaz, qu'un animal à qui l'on fait respirer de l'oxygène ex- pire davantage d'acide carbonique que quand sa respiration a lieu dans l'air atmosphérique , et on devrait même le sup- poser d'après la théorie que Lavoisier avait proposée pour ex- pliquer la formation de ce dernier acide. C'est effectivement ce qui découle des expériences de Spallanzani sur les Lima- çons (2), et de celles d'Allen et Pepys (3) sur l'homme et le Cochon d'Inde. Un homme respira pendant neuf minutes vingt secondes un mélange de 0,975 de gaz oxygène et 0,025 d'azote ; l'acide carbonique expiré s'élevait à 351,23 pouces cubes , c'est-à-dire à 37,629 pouces cubes par minute. Un autre , ayant respiré le même mélange pendant sept minutes et vinjit-cinq secondes, expira 390,78 pouces cubes d'acide carbonique, ce qui fait 53,498 pouce& cubes par minute. L'acide carbonique expiré pendant une minute par un Cochon d'Inde s'élevait depuis 0,60 jusqu'à 0,68 pouces cubes quand l'animal respirait dans l'air atmosphérique, et de 1,11 à 1,48 pouce cube lorsque sa respiration avait lieu dans du gaz oxygène. Mais les mêmes observateurs (4) ont trouvé , dans d'autres expériences faites depuis , qu'un Pigeon donnait par minute (1) Zeitschrift fuer Physiologie , t. IV, p. 30. (2) Reclierches sur la respiration , p. 165. (3) PJdlos. Trans., 1808, p. 268; 1809 , p. 404- (4) J6R, 1829, p. 280. Il6 INFLUENCE Î)ES SCBSTANCES INTRODUITES 0,518 d'acide carbonique dans l'air atmosphérique , tandis qu'il n'en expirait que 0,295 à 0,353 pouce cube dans le gaz oxygène. On peut , à ce qu'il paraît , rapprocher de ce résultat celui de deux expériences faites auparavant parNysten (1). Un Chien, du poids de quarante-neuf mille deux cent soixante grains , fut débarrassé avec une seringue de l'air que ses poumons pouvaient renfermer , et on lui adapta aux voies aériennes une vessie contenant un mélange de 0,77 oxygène et 0,23 azote ; lorsqu'il fut asphyxié , après avoir respiré ce gaz pen- dant trente minutes , on trouva que la vessie et les poumons contenaient ensemble 29,10 centimètres cubes=l,626 pouce cube d'acide carbonique , ce qui ferait pour vingt-quatre heures 78,048 pouces cubes=45,389 grains, par conséquent une proportion, à l'égard du poids du corps, de 1 °. 1094, ce qui est énormément peu d'après les observations rapportées plus haut ( § 818 , III ). Nysten fit respirer à un autre Chien , traité de la même manière , un mélange de 0,97 de gaz oxy- gène et 0,03 de gaz azote ; au bout de douze minutes, il y avait déjà dans la vessie et les poumons réunis 165,90 centimètres cubes=10, 272 pouces cubes d'acide carbonique, ce qui fait 51,360 pouces cubes par heure , proportion fort éloignée de celle qui est normale , si on la compare aux observations que Legallois et Despretz ont recueillies sur des Chiens. Enfin Davy (2) a tenté |des expériences analogues. Après une expiration prolongée et faite avec effort , il respira' pen- dant une demi-minute, et par sept inspirations très-longues et profondes , cent deux pouces cubes de gaz oxygène ; il expira 5,9 pouces cubes d'acide carbonique , tandis qu'après une seule inspiration ordinaire de cent pouces cubes d'air atmo- sphérique , la quantité d'acide carbonique qu'il expirait s'é- levait à 4,5 pouces cubes. Dans un autre cas, où il avait in- spiré cent soixante-deux pouces cubes d'un mélange de 0,821 d'oxygène et 0,1'79 d'azote , sans forcer sa respiration , il ex- pira , en deux minutes , vingt-et-un pouces cubes d'acide car- Ci) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques , p. 248. (2) Physiologisch-chemische Untersuchungen uelier das ^thmen, p, 107' DU DEHORS. 117 bonique , tandis que , dans les circonstances ordinaires , ce- lui-ci s'élevait à cinquante-deux pouces cubes pendant le même laps de temps. Une Souris , plongée dans treize pouces cubes et demi d'un gaz composé de 0,77 oxygène et 0,23 azote, expira, en soixante-quinze minutes, 1,7 pouce cube d'acide carbonique , tandis qu'une autre, dans quinze pouces cubes et demi d'air atmosphérique, donna, en cinquante minutes, 2,1 pouces cubes de cet acide. 6° Jurine a remarqué le premier qu'il expirait de l'azote quand il inspirait du gaz oxygène. L'idée qui se présentait naturellement à l'esprit était que cet azote pouvait provenir d'une certaine quantité de l'air atmosphérique précédemment introduit dans les poumons. C'est l'explication à laquelle Davy eut recours lorsqu'après avoir inspiré un mélange de soixante-et- dix-huit pouces cubes d'oxygène et vingt-quatre d'azote , il trouva, dans le gaz expiré , *d^S pouces cubes d'azote en plus ; et en admet- tant , comme probable , que les poumons retiennent , dans la respiration ordinaire , trente-deux pouces cubes d'air, con- tenant 11,8 pouces cubes d'azote, il supposa même que 1,4 pouce cube de ce dernier gaz avait été absorbé pendant l'ex- périence. Allen et Pepys(l) ont observé qu'après la respiration, pro- longée pendant neuf minutes et vingt secondes , d'un mélange de 3178,50 pouces cubes d'oxygène et 81,60 d'azote , ce der- nier était accru d'environ i 10,08 pouces cubes; ils admirent que celte quantité provenait de l'air atmosphérique préalable- ment inspiré , et calculèrent d'après cela qu'avant l'expé- rience il restait dans les poumons cent'quarante-et-un pouces cubes d'air, consistant en 118,44 pouces cubes d'azote et 22,56 d'oxygène. Dans une expérience faite plus tard , et dont le résultat fut qu'après avoir inspiré pendant sept minutes et demie un mé- lange de 3334,5 pouces cubes de gaz oxygène et 85,5 pouces cubes de gaz azote , la quantité de celui-ci fut accrue de 117,6 pouces cubes, ils calculèrent que les poumons (1) Philos. Trans., 1808 , p. 268. il8 INFIUENCE MS SUBSTANCES INTRODUITES avaient contenu, avant l'expérience, deux cent vingt-six pouces cubes d'air , composé de i89,84 pouces cubes d'azote et '36,16 d'oxygène. Ils remarquèrent, en outre , que les huit cent douze pouces cubes d'air expiré pendant les deux premières minutes contenaient cent dix-huit pouces cubes d'azote, par conséquent quatre-vingt-dix-huit de plus qu'il n'en avait été inspiré, tandis que les deux mille cinq cent cinquante pouces d'air expirés pendant les cinq minutes et demie suivantes contenaient 145,1 pouces cubes d'azote, c'est-à-dire 79,6 seulement de plus qu'il n'en avait été inspi- ré ; et comme la portion d'air expirée en dernier lieu conte- nait encore 0,03 d'azote de plus qu'il n'en avait été inspiré dans une égale quantité d'air , il leur parut certain qu'un demi-quart d'heure ne suffisait pas pour que l'air précédem- ment inspiré sortît tout entier des dernières ramifications de Farbre bronchique. Dans une autre expérience , où un homme inspira pendant treize minutes 2561,28 pouces cubes de gaz oxygène, mêlé avec 106,72 pouces cubes d'azote , et expira 211,80 pouces cubes de ce dernier gaz , ils examinèrent les dix portions d'air expirées dans des périodes d'une minute et dix-huit se- condes. La première contenait 51,24 pouces cubes d'azote , la seconde 32,34, la troisième 23^97, la quatrième 20,61, la cinquième 16,10-, les cinq dernières en contenaient en- semble 67,54 , tandis qu'il y en avait 144 dans les cinq pre- mières. Quoique ces expériences parussent confirmer que le gaz azote expiré n'était qu'un résidu de l'air atmosphérique préa- lablement inspiré , cependant l'hypothèse se trouva ébranlée par cette autre circonstance qu'on ne pouvait évaluer qu'à cent huit pouces cubes la quantité d'air qui demeure dans les poumons d'un homme après l'expiration (1). En outre (2), comme un Cochon d'Inde , respirant dans mille soixante pouces cubes d'un gaz composé de 962,6 d'oxygène et 97,4 d'azote , expira , en soixante et douze minutes , cinquante (1) Loc. cit., p, 411. (2) Loc. cit., p. 415. Dtf DEHORS. 119 pouces cubes d'azote de plus qu'il (n'en avait inspiré, ce qui faisait au-delà du volume de son corps entier ; comme aussi un autre Cochon d'Inde, ayant un volume de [trente-trois pouces cubes , expira , en soixante et onze minutes , dans un gaz pareil au précédent, 34,2 pouces cubes d'azote de plus qu'il n'en avait inspiré , il devint évident qu'une quantité con- dérable d'azote est sécrétée toutes les fois que la respiratioii s'accomplit dans un mélange gazeux contenant moins d'azote et davantage d'oxygène qu'il n'y en a dans l'air atmosphé- rique. Nysten (1) est arrivé au même résultat par une autre voie. Il aspira , au moyen d'une seringue , l'air contenu dans les poumons de deux Chiens , et fit ensuite respirer à ces ani- maux , à l'aide d'un tube , de l'air riche en oxygène , qui se trouvait renfermé dans une vessie ; la vessie et les poumons contenaient , chez l'un, au bout de trente minutes , 186^86 pouces cubeSj'et chez l'autre, après treize minutes, 178 pouces cubes d'azote de plus qu'il n'y en avait auparavant. Vingt années plus tard , Allen et Pepys (2) trouvèrent la confirmation de cette opinion sur des Pigeons ; ils reconnurent en même temps que l'inspiration d'un air riche en oxygène n'est pas toujours suivie d'abord de l'expiration d'une plus grande quantité de gaz azote , et qu'au contraire il y a un peu de ce gaz absorbé au commencement. En effet , un mélange de 245,59 pouces cubes d'oxygène et 61,41 d'azote contenait 90,11 pouces cubes de ce dernier après qu'un Pigeon y eut été enfermé pendant soixante et douze minutes ; mais , durant les vmgt-deux premières minutes, il avait perdu 9,97 pouces cubes de gaz azote , dont , au contraire , il avait acquis treize pouces cubes dans les vingt-sept minutes suivantes, et 9,16 pouces cubes dans les vingt-trois dernières. Un mélange semblable , dans lequel un Pigeon vécut soixante et dix minutes , perdit 12,80 pouces cubes d'azote pendant les premières vingt minutes, puis en acquit 6,14 durant les vingt suivantes, et 15,43 pendant les trente dernières , en tout 21,57 pouces (1) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques , p. 247. (2) Philos. Trans., 1829 , p, 280. 120 INFLUEKCE DES SUBSTANCES INTRODUITES cubes. La proportion entre l'absorption et l'exhalation du gaz azote ne s'est donc pas montrée moins fluctuante dans ce cas que dans d'autres, III. Davy (1) a obtenu les résultats suivans de la respiration du gaz oxide d'azote. Le gaz contenait , en pouces cubes f Avant la 1" expérience Après Avant la 2" expérience Après 100 29 179,50 88,75 1,58 25,70 1,975 29,000 Oxygène 0,42 4,d0 0,525 5,000 Acide carbo- nique. 0 3,2 0 6,25 Ainsi, dans la première expérience /sept respirations, en une demi-minute , avaient produit une expiration de 24,12 pouces cubes d'azote, 3,68 d'oxygène et 3,2 d'acide carbo- nique ; dans la seconde , huit expirations , en quarante se- condes, avaient produit 27,025 pouces cubes d'azote, 4,475 d'oxygène et 5,25 d'acide carbonique. On pourrait croire que l'azote et l'oxygène expirés provenaient de l'air resté dans les voies aériennes après une expiration complète ; alors cet air aurait été composé , dans la première expérience , d'azote 0,868 et oxygène 0,132 ; dans la seconde, d'azote 0,858 et oxygène 0,142. Mais Davy (2) a trouvé, par un calcul plus exact , qu'il s'était réellement produit douze à quatorze pouces cubes de gaz azote dans le cours de chaque expérience , et comme ce gaz ne pouvait tirer sa source du gaz oxide d'à- èote , qui ne se décompose qu'à la chaleur rouge , il admit , comme chose probable, que l'introduction du gaz oxide d'azote dans le sang, sursature le corps d'azote , et que cet excès est éliminé par la sécrétion qui a lieu dans les poumons. D'après Abernethy (3), l'exhalation d'acide carbonique par (1) Physiologisch-chemische Untersuchiinrien ueher das Athmen , p. {X)Ihid., p. 83. (3) Chirurgische und physiologische f^ersuchc , p. d24. p. 64. DU DEHORS. 121 la peau, "" dans le gaz oxide d'azote, était double de celle qu'on remarque dans l'air atmosphérique. IV. Nous avons aussi à examiner l'influence du gaz azote pur, 6° Spallanzani a observé le premier , sur des Vers et des Limaçons, qu'il s'exhale de l'acide carbonique dans ce gaz (1). Humboldt et Provençal ont fait la même remarque sur des Poissons. Coutanceau (2) et Nysten , après avoir fait une ex- piration profonde , inspirèrent de l'azote contenu dans une vessie , et l'expirèrent par le nez ; lorsqu'après quatre respi- rations semblables , chacune de cinquante pouces cubes , ils crurent avoir chassé tout l'acide carbonique qui pouvait res- ter dans les poumons par l'effet de la respiration antérieure , ils inspirèrent une cinquième fois dans la vessie , et y expiré - rent ensuite ; alors ils y trouvèrent 0,07 à 0,08 , c'est-à-dire 3,5 à 4 pouces cubes d'acide carbonique. Ayant obtenu le même résultat chaque fois qu'ils répétaient l'expérience , ils demeurèrent convaincus que l'inspiration du gaz azote aug- mente , plutôt qu'elle ne diminue , la sécrétion de l'acide car- bonique dans les poumons. Déjà Spallanzani avait remarqué que des Limaçons exha- laient 0,05 à 0,10 d'acide carbonique dans le gaz azote , pen- dant l'espace de huit heures , tandis qu'ils n'en donnaient que 0,04 à 0,07 dans l'air atmosphérique. Un Chien auquel Nysten (3) fît respirer mille trente-huit centimètres cubes de gaz azote , après lui avoir vidé les pou- mons , expira , en trois minutes et demie , 43,26 centimètres cubes = 2,417 pouces cubes d'acide carbonique , ce qui don- nerait 41,450 pouces cubes par heure. ' Collard de Martigny prit quatorze Grenouilles (4) , leur comprima la poitrine et l'abdomen dans de l'eau distillée , afin de chasser autant que possible l'air des poumons , leur ouvrit la bouche , et les mit sous une cloche contenant du gaz azote ; (d) Recherches sur la respiration , p. 65 , 347. (2) Révision des nouvelles doctrines chimico-physiologiques , p. 295. (3) Recherches de phj'siologie et de chimie pathologiques , p. 226 , (4) Journal de Magendie, t. X, p. 121. 122 iNFItfENCE Ï)ES SUBSTANCES iNTROÏtTlITES en douze heures seize minutes, elles exhalèrent 11,97 centi- litres d'acide carbonique ^ ce qui ferait 0,1295 pouce cube dans l'espace de vingt-quatre heures ; mais elles donnèrent , pendant la première heure et demie 0,85, pendant la septième et la huitième heures 0,31 centilitre seulement, de sorte que l'exhalation d'acide carbonique fut d'abord plus considérable que dans l'air atmosphérique et finit par devenir moindre. De sept animaux , Lapins , Chats, Chiens et Cochons d'Inde, que Legallois (1) introduisit dans un mélange de gaz azote et d'air atmosphérique , six expirèrent moins , et un davantage d'acide carbonique , qu'ils ne le faisaient, durant le même laps de temps , dans l'air atmosphérique. Abernethy (2) a observé que sa main exhalait plus d'acide carbonique dans le gaz azote que dans l'air atmosphérique. 7° Après avoir respiré de l'azote pur, Coutanceau et Nysten ont toujours trouvé , dans l'air qu'ils expiraient , 0,04 à 0,05 (2 à 2,5 pouces cubes) d'oxygène; Nysten en a remarqué 10,815 centimètres cubes (0,60 pouce cube) dans l'air ex- piré par un Chien, pendant trois minutes et demie. Cepen- dant on avait eu soin, dans le second cas, d'aspirer le contenu des poumons avec une seringue , et dans le premier d'inspirer et expirer quatre fois de suite de l'azote , pour débarrasser , autant que possible , les voies aériennes de tout l'air qui avait été respiré précédemment. VI. On a étudié aussi les effets du gaz hydrogène. 8° Spallanzani , Provençal et Humboîdt ont observé que l'inspiration de ce gaz est suivie aussi d'une expiration d'a- cide carbonique. Dans les expériences de Davy (3), qui avait consommé cent quarante-deux pouces cubes d'hydrogène en deux inspirations profondes, chaque expiration donna 1,50 pouce cube d'acide carbonique ; la quantité de ce dernier fut de 0,80 pouce cube après six longues inspirations;, ayant con- sommé cent quatre-vingt-deux pouces cubes d'hydrogène en (1) Œuvres , t. II , p. 63-66. (2) Chirurgische und physiologische Versuche , p, 418. (3) Physiologisch - chemische Untersuchungen ueher das AtJimen, p. 72,74,77. DU DEHORS. 125 «ne demi-minute^ et de 0,57 pouce cuJDe après sept inspira- lions rapides de cent deux pouces cubes de gaz dans le même laps de temps. Ici donc encore la respiration d'un gaz étran- ger à l'atmosphère parut être suivie d'une expiration d'acide carbonique plus abondante au commencement qu'à la fin de l'expérience. Un Cochon d'Inde qu'Ailen et Pepys (1) plongèrent dans im mélange de gaz hydrogène , de gaz oxygène et d'air atmo- sphérique , expira en soixante et une minute et demie 60,20 pouces cubes d'acide carbonique, c'est-à-dire 0,979 pouce cube par minute. Un autre donna, en quarante-cinq minutes, 53,96 pouces cubes, ce qui fait par minute , terme moyen , 1,19 pouce cube ; mais la quantité de l'acide carbonique fut de 1,0S3 pendant le premier quart d'heure , de 1,250 pendant le second , et de 1,00 durant le troisième. L'acide carbonique avait donc été expiré ici en p!us grande quantité que dans l'air atmosphérique. La même chose eut lieu avec un Pigeon(2), qui, dans un mélange semblable , expira en vingt-six mi- nutes 17,62 pouces cubes d'acide carbonique, c'est à-dire 40,661 pouces cubes par heure. Un Chien , auquel Nysten (3) avait pompé l'air des poumons et fait respirer ensuite du gaz hydrogène , expira en trois mi- nutes et demie 10,66 pouces cubes d'acide carbonique. Edwards (4) a observé l'exhalation de gaz acide carboni- que après la respiration du gaz hydrogène , sur des Limaçons , des Poissons, des Grenouilles et des Chats nouveau-nés. Des Grenouilles donnèrent, en huit heures et demie , 2,97 centi- litres de cet acide, ce qui fait par heure 0,194 pouce cube, plus par conséquent qu'il ne s'en produit dans l'air atmo- sphérique ; des Limaçons (5) en exhalèrent , dans l'espace de quarante-huit heures , un volume à peu près égal au leur, c'est-à-dire 2,79 centilitres , ce qui donne 0,729 pouce cube (1) Philos. Trans., 1809 , p. 421. {1)lhid., J829, p. 284. (3) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques , p. 225. (4) De l'influence des agens extérieurs sur la vie , p. 443. (5) Ibid., p. 450. 1^4 INFIUENCE DES SUBSTANCES INTRODUITES pour vingt - quatre heures , ou également plus que dans Tair atmosphérique ; des Chats nouveau-nés (1), enfin , four- nirent , en vingt minutes , 1,96 centilitres , ce qui ne fait que 3,286 pouces cubes par heure. D'après Abernethy (2), la peau humaine exhale de l'acide carbonique dans le gaz hydrogène. 9° En faisant les expériences que nous avons rapportées, Davy a trouvé , dans l'air qu'il expirait après sept courtes inspirations de gaz hydrogène , 3,7 pouces cubes d'oxygène et 17,3 d'azote ; après deux inspirations profondes, 4,5 pouces cubes^d'oxygène et 18,8 d'azote ; après six inspirations lon- gues, 4,6 pouces cubes d'oxygène et 21,0 d'azote ; l'air ex- piré n'excédait en général que d'un à deux pouces cubes ce- lui qui avait été inspiré. Davy ne douta pas que ces gaz ne fussent le résidu de l'air atmosphérique qui avait été inspiré auparavant, et il calcula , d'après cela , que les poumons con- tiennent ordinairement trente-six à quarante pouces cubes d'air qui , réduit à la température habituelle de l'atmosphère, consisterait en vingt à vingt-quatre pouces cubes d'azote, quatre à six d'oxygène , et quatre à cinq d'acide carbonique. Allen et Pepys ont envisagé les choses sous un autre point de vue. Ils mirent un Cochon d'Inde (3) dans un air composé de 0,714 ( 582,624 pouces cubes ) d'hydrogène , 0,220 ( 179,520 pouces cubes) d'oxygène et 0,066 (53,856 pouces cubes) d'azote; au bout de quarante-cinq minutes, cef air contenait 159,040 pouces cubes d'azote. L'animal avait donc exhalé 105, 184 pouces cubes d'azote, ce qui fait, terme moyen, 2,337 par minute ; mais il en avait donné pendant le premier quart d'heure 96 pouces cubes, ou 6,4 par minute, et dans les treize minutes suivantes 9,5 pouces cubes seulement, ou 0,7 par minute ; dans les dix-sept dernières, 0,316 pouce cube d'azote avait été , au contraire , réabsorbé. De là il résultait, d'abord que l'azote expiré dans un air charîïé d'hydrogène ne peut pas provenir du seul air resté dans les voies aériennes à la (i) Ibid., p. /i55. (2) ChirurgiscJie vnd physmlogiscJie Vcrsuche , p. 125. (3) Philos. Trans., 1809 , p. 422. DU DEHORS. 125 suite de la respiration antérieure, et qu'il est sécrété pour la plus grande partie ; en second lieu, que^la proportion moindre de ce gaz dans l'air expiré après que l'expérience a duré un certain laps de temps , dépend de la diminution de la sécré- tion ; enfin que la sécrétion et l'ingestion , considérées d'une manière générale , se correspondent l'une l'autre , puisque l'azote et l'acide carbonique expirés , pris ensemble , repré- sentaient , à très-peu de chose près , l'oxygène et l'hydrogène absorbés. De même , un Pigeon (1) , mis dans un mélange de 147,73 pouces cubes d'hydrogène, 51,53 d'oxygène et 51,74 d'a- zote, expira, en vingt-six minutes, 35,23 pouces cubes d'azote et 17,Q2 d'acide carbonique, ensemble 62,85 pouces cubes, tandis qu'il avait absorbé 34,58 d'hydrogène et 17,38 d'oxy- gène , ensemble 52,86 pouces cubes. Le Chien auquel Nyslen fit respirer mille cinquante-six cen- timètres cubes de gaz hydrogène , après lui avoir vidé les poumons , exhala en trois minutes et demie 950,40 pouces cubes d'azole et 10,56 d'acide carbonique , tandis qu'il absorba 960.96 pouces cubes de gaz hydrogène. Suivant Edwards (2), des Grenouilles expirèrent aussi dans le gaz hydrogène une quantité d'azote excédant de beaucoup leur propre volume , et absorbèrent une quantité non moins considérable d'hydrogène. 2. INFLUENCE DES SCBSIAHCES SOLIDES ET LIQUIDES. § 842. Les alimens et autres substances liquides ou solides qui entrent en contact immédiat avec l'organisme , ou pénè- trent dans son intérieur , sollicitent avec plus d'énergie telle ou telle formation, en raison de leurs qualités particulières, soit parce qu'ils fournissent spécialement les matériaux qui lui sont nécessaires , soit parce qu'ils sont en harmonie plus parfaite avec celle des directions de l'activité vitale sous la (l)ioc. ctï.,1829,p. 284. (2) De l'influence des agens physiques sur la vie, p. 462. ■ 1 26 INFLUENCE DÉS SUBSTANCES INTRODUITES dépendance de laquelle elle se trouve placée. Il est possible, et même assez vraisemblable , que certaines substances favo- risent ou restreignent la nutrition des muscles , du système nerveux, etc. ; mais nous manquons de données positives à ce sujet. L'influence que les alimens exercent sur les sécrétions est plus évidente; parmi les faits qui s'y rapportent, nous nous contenterons de citer ici les suivans. 1° D'après Prouî (1) , la quantité d'acide carbonique que l'homme expulse dans une expiration, n'est diminuée par au- cune substance plus que par les boissons spiritueuses, même lorsqu'elles sont prises en aussi faible proportion que possible, et surtout quand l'individu est à jeun. Mais il reste encore à examiner si ce phénomène ne tiendrait pas uniquement à ce que la circulation et la respiration sont alors accélérées, de manière qu'une seule respiration ne durerait pas assez long- temps pour qu'une quantité normale d'acide carbonique pût passer du sang dans l'air, auquel cas le déficit serait couvert par l'accroissement du nombre tî-is respirations. L'aperçu donné précédemment ( § 818, III ) confirme la remarque, faite par Allen et Pepys, que les animaux herbi- vores n'exhalent pas plus d'acide carbonique que les animaux carnivores. Lassaigne et Yvart(2) ont trouvé aussi que les Souris expiraient la même quantité de cet acide , soit qu'on les nourrît de substances azotées, soit qu'on leur donnât des aUmens non azotés. Des Cochons d'Inde , au contraire , don- naient plus d'acide carbonique avec la nourriture azotée qu'a- vec des alimens non azotés ; dans le premier cas , ils absor- baient aussi davantage d'oxygène , mais dans l'un et l'autre la quantité d'acide carbonique exhalée était égale à la moitié de celle de l'oxygène absorbé. D'un autre côté, Dulong assure que l'exhalation d'acide carbonique , comparée à l'absorption d'oxygène , est moindre chez les carnivores que chez les herg bivores , et cette proposition paraît être exacte , en la consi- dérant d'une manière générale. Ainsi , par exemple , dans les expériences de Legallois , la proportion de l'acide carbonique (i ) Schweigger, Journal fuer Chemie , t. XV, p. 62, (2) Journal de chimie médicale , t. IX , p. 274.j DU DEHORS. 1 27 exhalé à l'oxygène absorbé était , terme moyen , chez les La- pins de 1 ; 1,20, et chez les Cochons d'Inde de 1 I 1,26; mais elle était dans les Chats de 1 °. 1,32, et dans les Chiens de 1 : 1,58. Selon Edwards (1), elle a été de \ :i0,25 chez les jeunes Cochons d'Inde, et de 1 » 0,47 chez les jeunes' Chiens. D'après CoUard de Martigny (2) , la peau exhale davantage d'azote chez les hommes qui prennent beaucoup de nourri- ture , animale surtout , et plus d'acide carbonique chez ceux qui mangent peu , notamment lorsque leurs ahmens consistent en végétaux. Le terme moyen de neuf observations a été , pour la proportion de l'acide carbonique à l'azote, dans le gaz cutané, 1 ; 2,963 chez les mangeurs de viande, 1 \ 0,744 chez les personnes vivant de maigre. D'après cela, il est surprenant de voir Despretz (3) sou- tenir que l'exhalation d'azote est plus considérable chez les animaux herbivores que chez les carnivores ; cette assertion n'est point confirmée par la comparaison des observations qui ont été rapportées précédemment ( § 819 ). Treviranus (4) fait remarquer qu'on rencontre quelquefois une expiration plus abondante en azote qu'en acide carbo- nique , et cela surtout chez les animaux qui vivent de sub- stances animales ou azotées, mais que le prénomène n'ob- serve aussi chez des animaux herbivores. Au rapport de Lassaigne et d'Yvart (5) , des Souris et des Cochons d'Inde expiraient toujours la même quantité d'azote ( 0,007 à 0,008 de la quantité contenue dans Fair inspiré ) , qu'ils eussent pris des alimens azotés ou une nourriture non azotée. 2o La transpiration cutanée et pulmonaire est accrue par les boissons aqueuses en général. L'eau froide elle-même , que l'on boit quand on a chaud à l'extérieur, par exemple dans le lit , porte à la sueur ; mais les boissons chaudes, char- gées de substances aromatiques ou d'alcool , amènent surtout (1) De l'influence des agens physiques sur la vie, p. 410, 413. (2) Journal de Magendie, t. X, p. 167. (3) Annales de chimie, t. XXVI, p. 361. (4) Zeitschrifù fuer Physiologie , t. IV, p. 33. (5) Journal de chimie médicale , t, IX , p. 274, 128 INFLUENCE DES SUBSTANCES INTRODUITES ce résultat d'une manière très-prononcée. L'asa fœtida , l'o- pium , l'ammoniaque , le soufre , les préparations antimo- niales, etc., accroissent également la transpiration, sans le concours de l'eau. 3° D'après les observations faites par Mitscherlich (1) sur une parotide qui s'ouvrait à l'extérieur par une ouverture fistuleuse , la sécrétion salivaire est surtout accrue par les substances sèches, puis par les substances irritantes ; elle l'est moins par les corps non stimulans , moins encore par les ali- mens mous et faciles à mâcher. La salive sécrétée pendant le déjeuner , le dîner et le souper s'élevait à 74,804 grammes pour les alimens durs, 71,523 pour les substances irritantes , 62,070 pour les corps non stimulans, 46,248 pour les alimens mous. Le tabac, la pimprenelle, la pyrèthre, augmentent la la sécrétion salivaire quand on les mâche ; le mercure fait couler la salive avec profusion , par quelque voie qu'on l'in- troduise dans le corps. 4" La sécrétion lacrymale est activée par la fumée et autres vapeurs acres. 5° Les boissons , surtout celles qui sont aqueuses et con- tiennent beaucoup d'acide carbonique , accroissent la sécré- tion urinaire , que les vins forts et l'eau-de-vie rendent , au contraire , moins abondante. Cette sécrétion est augmentée aussi par la nourriture végétale , et diminuée par les alimens tirés du règne animal. D'après Gaertner (2), elle s'élevait, par jour , à cinquante onces sous l'influence des alimens végé- taux, à quarante -trois sous celle des substances animales, et à quarante-huit sous celle d'une nouriture mixte. Magendie(3) rapporte qu'un homme qui n'avait mangé que des pommes de terre pendant quinze jours fut pris d'une sorte de diabète. Les animaux carnivores urinent moins, généralement parlant, que les herbivores. Le genièvre , la scille , le colchique , la digitale pjourprée, etc., favorisent la sécrétion urinaire. Séga- (d) Rust , Magazin fuer die gesammte Heilkunde , t. XXXVIII , p. 504. (2)IVeil, ArcUv, t. II, p. 484. (3) Diciionnaire de médecine et de chirurgie pratiques , art, Qv^vuaxs. , t. IX, p. 248. DU DEHORS. 129 las (1) a observé que cette sécrétion était plus abondante après une injection d'urée dans les veines d'un Chien ; il employa la même substance (2) dans un cas de diabète sucré , et la vit accroître un peu la quantité de l'urine, mais sans que celle-ci contînt d'urée. .Wienholt (3) dit, au contraire, qu'un Lapin auquel on avait fait prendre de l'urée , rendit de l'urine moins copieuse , mais plus chargée. 6° La sécrétion biliaire est accrue par les substances grasses, les alimens tirés du règne animal , les résines et les épices ; elle est diminuée, au contraire , par les acides végétaux. Schultz (4) a remarqué, sur desXhiens , que la bile coulaifen plus grande quantité dans l'intestin quand ils avaient pris de la nourriture animale que lorsqu'ils avaient mangé des végétaux. Beau- mont (5) a vu la bile refluer dans l'estomac humain par l'u- sage prolongé d' alimens gras. 7° Les alimens gras rendent la formation du pigment plus abondante ; une nourriture aqueuse et féculente la diminue. 8° Toutes choses égales d'ailleurs , il se forme plus de graisse sous l'influence de la nourriture végétale que sous celle des alimens provenant du règne animal. 9° Les alimens gras et les substances farineuses non fer- mentées excitent une sécrétion muqueuse plus abondante que les substances épicées et salées. 10" La sécrétion du sperme est activée par les substances azotées , les œufs , etc. , diminuée par les acides et le cam- phre. . 11" Celle du lait devient plus abondante par l'effet non seu- lement de substances riches en principes alibiles , comme la bouillie et la bière , mais encore de substances légèrement aromatiques , telles que l'anis et le fenouil. L'association de ces (1) Jôuvnal de Magendie , t. II , p. 359. (2) lUd., t. IV, p. 355. (3) Tubinger Blcettei' fuer Naturwissênsthaften ilnd Arzneilmmde , t. I,p. 345. (4) De alimentorum concoctione , p. 68. (5) Neue f^crsuche und BeohacJitunyen ueher den Maijensaft und die ■Physiologie der f^erdauung , p. 63. yiii. Q l56 INFLUENCE DU SANG. deux qualités , qu'on rencontre par exemple dans le café au lait , produit le même eifet. Parraentier et Deyeux (i) ont ob- servé un fait qui prouve combien est grande l'influence de rhabitude ; lorsqu'ils donnaient à une certaine Vache des ali- mens autres que ceux auxquels elle avait été accoutumée , son lait était moins abondant pendant plusieurs jours , quoique la nouvelle nourriture fût plus riche que l'autre en matériaux nutritifs. 12° On peut jusqu'à un certain point ranger ici les inflam- mations que diverses substances , par quelque voie qu'elles pénètrent dans l'économie , déterminent dans les organes sé- crétoires, en vertu d'une action spécifique ; par exemple , l'ar- senic dans la membrane muqueuse de l'estomac et de l'intes- tin, le mercure dans les glandes salivaires, l'émétique dans les poumons , le chromate de potasse dans la conjonctive , le manganèse dans le foie. ABTICLE II. Des cireonsîances intérieures qui influent sur la quantité des produits matériels de Vorganisme. !• Influence des conditions matérielles de l'organisme. §. 843. Parmi les circonstances intérieures qui influent sur la quantité des produits organiques, se rangent d'abord les conditions matérielles de l'organisme. A. Influence du sang. I. Le premier rang, parmi ces conditions, appartient au sang. 1" La quantité du sang détermine celle de la nutrition et de la sécrétion. A une hématose trop copieuse correspond aussi (d) Précis d'expériences et d'observations sur les différentes espèces de lait , p. d38. mFttENCE DU SANG. l3t une formation organique luxuriante. C'est en vertu de cette connexion qu'on peut combattre l'hypertrophie , par exemple celle du cœur, par les saignées ou la diète. Dans les cas de congestion prolongée et d'état inflammatoire chronique , les membranes s'épaississent et les organes acquièrent plus de volume, en même temps que les vaisseaux sont dilatés et gorgés de sang. Quand les vaisseaux sanguins diminuent de calibre , les organes auxquels ils sont destinés à porter le sang tombent dans l'atrophie. Lorsqu'on a beaucoup accru la masse du sang, chez les animaux , soit par transfusion , soit par infusion , il survient des sécrétions plus abondantes par la peau, les poumons, les reins et l'intestin ; de même, la sé- crétion augmente dans un organe vers lequel a lieu l'alïïux de sang qui précède ou suit une hémorrhagie , par exemple l'é- coulement menstruel ou le flux hémorrhoïdal. 2" Toutes les fois que la masse du sang devient moins con- sidérable , l'expiration de gaz acide carbonique diminue éga- lement. D'après Jurine (1), l'acide carbonique n'entrait que pour 0,06 dans l'air expiré par un homme qui venait d'être saigné , tandis qu'auparavant elle était de 0,08. 3° C'est au moment oii la masse du sang se trouve accrue par l'abord du chyle , environ quatre à huit heures après le repas , que la transpiration est le plus abondante _, comme l'a remarqué Sanctorius. Les personnes pléthoriques sont celles qui ont le plus de disposition à la sueur. Dans les transfusions trop abondantes , on voit les animaux se couvrir d'une forte sueur (2). 4" La plénitude excessive des vaisseaux sanguins détermine quelquefois , en accroissant la sécrétion séreuse , une hydro- pisie aiguë , qui cède à des émissions sanguines. Une accumu- lation locale du sang produit des effets analogues. Quand une veine a été liée (3) , ou qu'elle s'est oblitérée par le fait de (1) Piappovt de l'air avec les êtres orgasisés , p. 274, (2) Sclieel, Die Transfusion des Blutes und Einspritzung der Arzneien in die Adern , t. II , p. 41. — Dieffenbach , Die Transfusion des Blutes und die Infusion der Arzneien in die. Blutijefœsse , p. 27, (3) Foderà , Recherches expérimentales sur l'absorplion et l'exhalation p. 15. l32 INFLUENCE î)t SANG. l'inflammation (1) , le sang qui s'accumule dans les parties situées au dessous , y fait naître un gonflement œdémateux. Dans la strangulation et l'empoisonnement par des substances narcotiques, le sang s'accumule en plus grande quantité dans l'œil,, et la sécrétion de l'humeur aqueuse devient alors tel- lement abondante, que la cornée fait une saillie considérable en avant, et que le globe oculaire semble avoir été gonflé. La section du nerf de la dixième paire cérébrale trouble le re- tour du sang venant des poumons , en sorte que les vaisseaux pulmonaires demeurent gorgés de ce liquide , et que les bronches se remplissent d'un liquide muqueux sécrété en surabondance. 5° La formation de la graisse augmente souvent à un point considérable après la suppression d'évacuations sanguines habituelles, par exemple du flux hémorrhoidal. La même chose arrive à l'époque où cesse la menstruation. 6"» Quoique ce soit principalement sur les sécrétions com- munes ou générales que porte ainsi l'influence des change- mens survenus dans la quantité du sang, cependant Foderà (2) a remarqué que la sécrétion glandulaire s'en ressentait aussi : en effet , la salive devenait plus abondante après la ligature de la veine jugulaire. 7° Le sang a besoin de séjourner quelque temps dans les vaisseaux "_ capillaires pour faire un échange de matériaux avec les parties qui l'entourent et réaliser des formations. Prout a remarqué (3) que la quantité de l'acide carbonique expiré ne correspond point à la fréquence du pouls. Si la nu- trition s'arrête danslasynoque, et que les sécrétions diminuent pendant la chaleur de la fièvre, nous pouvons attribuer, en partie, ce phénomène à l'accélération anormale de la circula- tion , qui ne permet point au sang de rester assez long-temps dans les vaisseaux capillaires pour opérer la formation et la déposition organiques d'après les proportions normales, quoi- (4) Gendrin , Histoire anatomique des inflammations , t. IT , p. 27. (2) Recherches expérimentales sur l'absorption et l'exhalation, p. 16. (3) Schweigger, Journal fiwr Chemie , t. XV, p. 71. i INFLUENCE DE LA RESPIRATION. l33 que la'priiicipale cause en soit la prédominance de ractivité sur le côté purement matériel (§ 756 , 3«). B. Influence de la digestion , de V assimilation et de la respiration. II. Lorsque la digestion et l'assimilation sont abondantes , mais incomplètes , le sang se produit bien en grande quan- tité , mais sa composition n'est pas parfaitement développée , et la nutrition se lait mal. La respiration , qui contribue tant aux qualités du sang , n'est point non plus sans influence sur la quantité des produits matériels de Forganisme. 8° L'imperfection permanente de la respiration témoigne surtout ses effets sur la formation organique par l'action qu'elle exerce sur les dernières phalanges des doigts et des orteils; dans ces parties, qui sont placées à la plus grande distance possible des poumons , la nature artérieuse du sang , primordialement déjà incomplète , paraît tellement épuisée, qu'il se manifeste des formations non ordinaires. La cyano- pathie, qui dépend presque toujours d'une disposition anor- male du système vasculaire , entraîne assez généralement à sa suite que la dernière plialange des doigts surpasse les autres en largeur, en même temps que la peau de cette partie prend une teinte plus foncée , et que les ongles paraissent d'un bleu noirâtre, à cause du sang noir dont la couleur perce à travers leur épaisseur. Pigeaux dit avoir observé ce phénomène cent soixante-sept fois chez deux cents phlhisiques, et cinq ou six fois chez des malades atteints de tubercules pulmonaires. Il l'attribue à ce que la nature incomplètement artérieuse du sang fait naître un gonflement œdémateux du bout des doigts , qui repousse les ongles , et change la direction de leurs ra- cines, au point que leur bord libre se renverse. Cependant on ne remarque pas, en pareil cas, une situation oblique de l'ongle entier semblable à celle qu'admet cet observateur. Du reste , c'est principalement la nutrition des muscles qui souffre dans la maladie bleue , de même que dans la plithisie pulmonaire.] ■l34 INFLUENCE DU MÉCANISME DE l'oRGANISATION. :, 9° Lorsque la respiration est moins vive , et que le sang a un caractère plus veineux, il se sécrète une plus grande quantité de bile, de graisse et de pigment. L'hypertrophie du foie et la polycholie sont fréquentes dims les contrées maré- cageuses. La formation de la graisse est favorisée par le sé- jour dans un air renfermé et humide , comme aussi par tout ce qui augmente la vénosité : les animaux aquatiques ont plus d'embonpoint que les animaux aériens ; chez les Phoques et les Cétacés , le sang est veineux à un haut degré , et la pro- duction de la graisse fort abondante : il ne se dépose point de graisse dans les poumons , et , quand Tair pénètre dans les os des Oiseaux , la moelle disparaît de ces organes. Lorsque la vénosité prédomine , la peau a une couleur plus foncée , non seulement parce que le sang noir perce à travers son tissu , comme chez les sujets affectés de cyanopathie, mais encore parce que le pigment est sécrété en plus grande abondance. De même aussi on voit quelquefois la peau brunir pendant la grossesse , à cause des limites plus étroites dans lesquelles la respiration se trouve alors resserrée (§ 347, 3°). 10° Il paraît que toutes les sécrétions diminuent dans l'as- phyxie lente. Bichat (1) a vu , chez des animaux dont il avait ouvert la vessie urinaire et coupé les conduits déférons , après avoir pratiqué la section de la symphyse pubienne , la sécré- tion s'arrêter aussitôt que la respiration venait à s'interrompre. Plusieurs Chiens , qu'il avait suffoqués lentement pendant le travail de la digestion , lui ont oflert beaucoup moins de bile qu'à l'ordinaire dans les conduits biliaires et dans l'intestin. Tout porte à croire que la transpiration s'arrête aussi dans l'asphyxie , et que c'est là une des causes qui font qu'en pareil cas le cadavre se refroidit plus tard. C. Influence des dispositions mécaniques de l'organisme. IIL Une autre circonstance matérielle se rattache aux dis- positions mécaniques des organes qui , résultant de l'activité (1) Recherches sur la vie et la mort, p. 281. INFLUENCE DU MÉCANISME DE l'oRGANISATION. i35 vitale , et notamment de Factivité plastique , réagissent aussi sur la plasticité. H" Ici se range d'abord la cohésion des organes. La sécrétion finit par s'éteindre dans des organes condensés et endurcis , tandis qu'elle devient abondante outre mesure dans des organes relâchés. La sueur suppose un certain relâ- chement de la peau : supprimée par l'accroissement de tension qui a lieu pendant l'inflammation ou la fièvre , elle est rappelée par l'emploi des acides végétaux , des sels neutres , de l'eau froide , en un mot par tout ce qui fait cesser cette tension ex- trême. Les hommes d'une complexion molle et lâche suent da- vantage que ceux dont la fibre est rigide. De même, chez \eà végétaux , la transpiration est en raison , non pas tant de la quantité d'eau qu'ils contiennent, que de la mollesse de leur tissu et de l'étendue de leur surface comparée à leur masse (§8d6, 1°). Les Reptiles nus, tels que Grenouilles, Sala- mandres et Tritons , se dépouillent, en été , toutes les semaines au moins, selon Blumenbach (1), de l'épiderme mince et pres- que entièrement muqueux qui les recouvre , tandis que l'é- piderme plus compacte d'autres animaux ne se renouvelle que tous les ans. 12° La compression ou l'expansion qu'une partie organique éprouve lorsqu'elle-même , les parties voisines ou les organes liés avec. elle subissent un changement de situation ou de volume, par l'effet du mouvement, de l'accroissement, de la réplétion , ou de toute autre cause , exerce aussi de Tin- fluence sur son activité plastique. Quant à ce qui concerne d'abord le mouvement, qui alter- nativement détermine une compression et la fait cesser, sa puissance se fait sentir d'une manière spéciale sur la sécrétion des organes respiratoires. Le mouvement par lequel l'air chargé d'acide carbonique est chassé des poumons , pour faire place à de l'air frais et dépourvu de cet acide , est une con- dition de la sécrétion normale du gaz acide carbonique , avec laquelle il ne fait même qu'un en réalité. C'est donc,' d'un (1) Kleine Sehriften , p. 113. l36 INFtEENCE DU MECANISME DE L'ORGANISATION. côté, la profondeur de la respiration ou la perfection des mouvemens respiratoires , et , de l'autre , le nombre de ces derniers , qui délerminent la quantité de l'acide carbonique expiré, comme le prouvent les observations d'Allen et de Pepys (1). Quand un homme ne peut pas faire d'inspirations profondes, soit parce que ses poumons sont malades, soit parce qu'il est atteint d'ascite , etc. , la quantité d'acide carbonique expirée chaque fois par lui est moins considérable qu'elle ne l'était quand il jouissait de la santé ; mais , comme il respire plus souvent , la fréquence des respirations compense le déficit de chacune d'elles (2). La sécrétion salivaire est celle ensuite sur laquelle le mouvement exerce le plus d'influence. Les mouvemens de la mâchoire et la pression qu'exercent les muscles voisins des glandes salivaires', accroissent l'abondance de la salive ; on a même vu une éponge humide, substituée à la parotide, sur un cadavre , fournir un peu de liquide pendant les mouvemens de la mâchoire (3). Il suffit d'ouvrir la bouche pour qu'un peu de salive jaillisse des glandes maxillaires , et ce liquide coule en plus grande quantité dans la bouche lorsqu'on mâche du papier, qu'on parle ou qu'on chante , comme aussi lorsque les muscles qui s'insèrent aux mâchoires éprouvent des con- tractions spasmodiques. D'après les observations de Mitscher- lich (4) , l'écoulement qui avait lieu par une fistule salivaire cessait pendant le repos absolu ; dès que le sujet parlait, tous- sait, ou exécutait un mouvement quelconque de la mâchoire , on voyait en peu de minutes couler plusieurs gouttes de sa- live. C'est à ces circonstances qu'il faut attribuer en partie que la parotide donnait seulement douze grains de salive (5) en neuf heures de sommeil, pendant la nuit (§ 839 , 8°). (1) Philos. Trans., 1808 , p. 259. (2)Nyslen, Recherches de physiologie et de chimie pathologiques, p. 213. (3) Leuvet et Lassaigne , Eecherches physiologiques et chimiques pour servir à l'histoire de la digestion , p. 35. (4)Rast, Maijaziii fuor die (jesammte HeilhV'ndo , t. XXXVIII, p. 497. (5) Ihid., p. 499. INFLUENCE DU MÉCANISME DE l'oRGANISATION. l5'J La sécrétion lacrymale est également favorisée par les mouvemens des paupières et du globe de l'œil ; aussi diminue- t-elle pendant le repos de la nuit , de manière que , le matin , l'œil est plus sec , avec de la chassie amassée et desséchée dans les coins. Pendant l'inspiration, le foie est comprimé par le dia- phragme , ce qui fait , comme Leuret et Lassaigne l'ont vu dans leurs vivisections (1), qu'il envoie une plus grande quantité de Me à l'intestin. Mais , tandis que la pression accroît la sécrétion des or- ganes sécrétoires , elle détermine l'accumulation des liquides sécrétés dans les conduits excréteurs, lorsque son action porte sur ces derniers ; si elle vient ensuite à cesser, l'écou- lement augmente , et fort souvent aussi la sécrétion elle-même. Ainsi , la vésicule biliaire ne s'emplit que quand l'estomac est vide , et , en faisant le vide dans les conduits excréteurs , on attire la salive dans la bouche, ou le lait hors des glandes mammaires. Une compression modérée , et qui ne persiste pas d'une manière uniforme, augmente la nutrition; le péritoine qui constitue les sacs herniaires , acquiert plus d'épaisseur, et la même chose arrive à la tunique vaginale , dans l'hydrocèle. Plusforte et plus soutenue, la compression limite, au contraire, la nutrition. Le testicule s'atrophie par l'effet de la pression qu'exerce sur lui la sérosité accumulée dans la tunique vagi- nale , et le foie par celle que déterminent les côtes déviées de dehors en dedans ; les points du crâne sur lesquels porte l'action d'un fongus de la dure-mère , ou ceux de la colonne vertébrale qui ressentent les battemens d'un anévrysme, se détruisent , parce que la nutrition est arrêtée , ce qui n'em- pêche pas la résorption de continuer. 13° La sécrétion du suc gastrique paraît être diminuée par une distension trop considérable de l'estomac. La nutrition des muscles est déterminée par le degré d'extension qu'ils éprou- vent de la part de leurs antagonistes et des os auxquels eux- mêmes s'insèrent ; elle se trouble quand la tension devient (1) Loc. cit., p. 103. l38 INFLUENCE DE t'ÉTAT DE LA VIE. trop faible , par exemple dans les cas de pieds-bots ou de déviation de la colonne vertébrale. D'après Beale, les os crois- sent plus rapidement que les muscles , et entretiennent la nu- trition de ces derniers par la tension modérée qu'ils leur font subir , mais ils les empêchent de se développer d'une manière complète et d'acquérir de la force , quand eux-mêmes crois- sent avec trop de rapidité. II. Influence de l'état Ae la vie. § 844* Passons maintenant à l'aciivité vitale elle-même^ comme circonstance déterminante de cliangemens qui sur- viennent dans la quantité de la formation organique. 1" Le premier fait qui s'offre à nous , c'est que, dans l'état ïiormal, la vie ne se manifeste pas d'une manière toujours uniforme, et qu'indépendamment de toute influence extérieure, par le seul fait du type de périodicité qui lui appartient en propre, la quantité de sa production varie continuellement. Nous en avons surtout la preuve dans les sécrétions de la peau et des poumons , puisque ce sont celles-là qu'on peut évaluer avec le plus de précision. Or , Haller (1) avait déjà remarqué que la transpiration est fort abondante chez certains sujets , sans qu'on aperçoive aucune circonstance à laquelle cette profusion puisse être rapportée , ni la moindre influence exer- cée par elle sur la santé. Edwards (2) a trouvé, chez les Rep- tiles , des Oiseaux et des Mammifères , que , toutes choses égales d'ailleurs à l'égard des circonstances extérieures , la transpiration augmentait et diminuait d'une manière irrégu- lière pendant les heures qui se succédaient. D'après les ob- servations recueillies par CoUard de Martigny , la sécrétion gazeuse de la peau cesse fréquemment sans qu'on puisse aper- cevoir la cause de cette interruption (3). Prout(4) a reconnu aussi qu'à l'instar de tous les phénomènes vitaux, l'expiration (1) Elément, physiolog., t. Y, p. 89. (2) De l'influence des agens physiques sur la vie , p. 87. (3) Journal de Magendle , t. X , p. 165. (4) SchweJgger, Journal fuerjChemie , t, XV, p. 73. INFIUENCE DE l'ÉTAT DE lA VIE. i5q du gaz acide carbonique présente des alternatives d'augmen- tation et de diminution qui ne correspondent qu'en partie à la périodicité diurne. 2° Mais ces différences, renfermées dans de courtes périodes, se compensent également sans cause extérieure , de sorte quQ si l'on juge la vie par des périodes d'une certaine étendue , en négligeant les progrès de l'âge, qui embrassent des périodes plus longues encore, elle se manifeste d'une manière égale et uniforme. Tous ceux qui ont observé la transpiration de l'homme sont arrivés à ce résultat. Edwards a également re- marqué , sur des Grenouilles , que la quantité de la transpi- ration variait beaucoup, en la considérant heure par heure, mais qu'elle devenait plus uniforme déjà lorsqu'on embrassait des périodes de trois à neuf heures. Si , d'après Prout (1) , l'expiration du gaz acide carbonique était pendant un certain laps de temps plus abondante qu'à l'ordinaire , elle redeve- nait plus faible d'une égale quantité dans la période suivante, et vice versa. Ainsi, par exemple, lorsqu'elle avait aug- menté au point que son maximum , qui était ordinairement de 0,0400 de l'air inspiré, s'élevait vers le milieu du jour à 0,0490, elle n'était plus que de 0,0370 deux jours après. 3" Ces deux particularités sont les élémens de la maladie et de laguérison ; la formation , fluctuante entre son maximum et son minimum , peut , sous l'influence de circonstances favo- rables , se fixer de l'un ou de l'autre côté, de manière que l'excès ou l'insuffisance porte le trouble dans l'harmonie de la vie; mais celle-ci peut reprendre ensuite le dessus, et ame- ner la guérison par compensation. A. Influence de Vètat général de la vie. § 845. I. L'état général de la vie r Entraîne , généralement parlant , une augmentation de la formation organique , entre laquelle et lui il y a correspon- dance. Dans les cas de débilité générale , la nutrition et la sé- (1) ioe. cit., p. 517. l4o INFttJENCE DE l'ÉTAT DE LA VIE. crétioa diminuent ; le sujet maigrit , le corps devient plus sec, les poils tombent. Prout assure (d) que l'expiration de gaz carbonique est diminuée aussi par une alimentation chétive , par un traitement mercuriel , et en général par tout ce qui déprime l'activité vitale. L'affaissement de la cornée transpa- rente chez les moribonds tient à ce que l'humeur aqueuse de l'œil ne répare plus la perte qu'elle fait par l'évaporation. Les couleurs de la plupart des feuilles et des fleurs , comme celles d'un grand nombre d'animaux de toutes les classes, pâlissent ou disparaissent après la mort ; que le pigment soit de nature volatile , ou que l'action de l'air détermine un chan- gement de composition chimique qui entraîne la destruction de la couleur , toujours est-il que cette dernière doit sa du- rée à la vie , avec l'intensité de laquelle on la voit croître et décroître. Par un temps chaud, l'évaporation d'une surface d'eau est à celle d'une égale surface de prairie en pleine vé- gétation, comme 1 I 3, tandis que, quand la végétation baisse, la proportion est 1 l 0,88 (2). 2° Mais l'activité vitale portée trop haut entre en opposition avec la formation matérielle , et la restreint ou la supprime. Ainsi , dans les fièvres , la synoque surtout , les sécrétions sont moins abondantes à l'époque du maximum de la mala- die , et le sujet éprouve un amaigrissement rapide ; mais la tendance à la compensation ( § 844 , 2° ) fait que la vitalité s'exalte ensuite dans un organe sécrétoire', cet organe attire une plus grande quantité de sang, il devient plus plein et plus chaud , il fournit un liquide plus copieux et plus chargé ; l'acte de plasticité vivante qui s'accomplit ainsi, l'effet résultant d'une activité qui se déploie librement au dehors , et qui se mani- feste dans un produit matériel, déterminent une détente salu- taire , apaisent le tumulte des activités organiques luttant les unes contre les autres ; et comme les substances normales ou anormales qui avaient été retenues jusqu'alors viennent à être évacuées, la sécrétion critique rétablit l'équilibre. Plus tard, (1) Loc. cit., t. XXVIII, p. 223. (2) Neufl'er, UntcrsuchwKjcn iieher die Temperaturveraenderunu e7i der f^e5S INFLUENCE DE l'ÉTAT m lA tIE. de vue de la sécrétion aqueuse, comme à l'égard de leur voi- sinage du diaphragme , de leur duplicité , enfin de la réunion des branches par un tronc impair situé sur la ligne médiane ; mais les reins envoient leur produit vers le bas , et sont en rapport avec des organes de pure éjection , tandis que les poumons se portent vers le haut , et fixent leur tronc à l'or- gane d'ingestion; de même aussi les premiers fournissent une sécrétion liquide , chargée de substances grossières , terreuses surtout, acidifiées et azotées, au lieu que la sé- crétion des poumons est aqueuse et imprégnée de substances plus volatiles , spécialement d'acide carbonique. Les reins sont plus volumineux, comparés au corps, chez les ani- maux aquatiques que chez les animaux qui vivent exclusive- ment dans l'air ; parmi les Mammifères , chez les Amphibies et les Cétacés ; parmi les Oiseaux , chez les Echassiers et les Palmipèdes. Il arrive souvent , lorsque les poumons sont en suppuration, qu'on trouve les reins plus développés que de coutume (4), et la pellicule grasse qu'on aperçoit alors sur l'urine , annonce que , dans cette maladre, ils sécrètent da- vantage de carbone, afin de suppléer les poumons. L'uriné a coutume aussi d'être trouble et fétide dans la cyanopathie. Coindet assure que les malades atteints du diabète sucré ex-^ pirent moins de carbone et davantage d'azote ; or l'urine con- tient un excès du premier de ces deux principes , tandis que l'autre y manque ; et comme l'expiration du gaz acide carbo- nique diminue partout pendant la nuit , c'est aussi à cette époque de la journée que l'urine est le plus chargée de su- cre. Du reste , il arrive fréquemment que les poumons des diabétiques soient remplis de tubercules atteints de phleg ■ masie ou en suppuration. La péripneumonie se juge souvent par des urines sédimenteuses , et l'hémoptysie par un pisse- mentde sang. Une sécrétion d'urine trop peu abondante est la cause de l'asthme, chez beaucoup de vieillards, ou com- munique une odeur urineuse à l'haleine , comme l'a observé Berihold. dl" L'urine , sécrétion excrémentitielle et chargée d'a- (1) Meckel, Handhuch der putholoyischen Anatomie , t. I, p. 613, INFLUENCE DE L'ÉTAT DE lA VIE. iSg 2ote , fait antagonisme à la sécrétion aqueuse du canal intes- tinal , qui est destinée à l'assimilation et à la résorption. Elle devient plus abondante dans la constipation , et plus rare dans la diarrhée. Sa suppression détermine quelquefois la manifestation d'une diarrhée séreuse. 12" Elle fait également antagonisme à la sécrétion séreuse, tant interslilielle que vésiculaire. L'hydropisie succède fré- quemment à la diminution de la sécrétion urinaire; elle est toujours accompagnée d'une excrétion peu abondante d'urine, et l'un des moyens les plus sûrs de la guérir est d'activer la sécrétion de ce dernier liquide. Galvani (1) a vu la ligature des uretères , chez des Oiseaux , être suivie d'un dépôt de naaiière calcaire sur des membranes séreuses. VII. Parmi les sécrélions chargées de carbone , 13° Celles des poumons et du foie sont opposées l'une à l'autre par un antagonisme de polarité , attendu que l'organe pulmonaire expulse le carbone sous forme ', inorganique , à l'état de gaz et immédiatement , taudis que le foie le dépose dans ks organes digestifs sous forme concrète , à l'état de combinaison organique et comme moyen d'assimilation. Nous trouvons les organes aériens et les organes biliaires consen- suellement plus développés chez les Oiseaux que chez les Mammifères. Cependant le foie est plus volumineux aussi , proportion gardée , chez les Oiseaux aquatiques , les Phoques et les Cétacés, que chez les animaux aériens de ces deux clas- ses. En général, d'ailleurs, plus on descend l'échelle animale, plus la sécrétion biliaire devient prédominante , et plus la respiration perd de son importance (2) ; tout comme nous voyons , chez l'homme, le foie être en raison inverse des pou- mons , à tous les âges de la vie , depuis l'état embryonnaire ( § 439 , 8° ; 532, 535 , 550 , 2°, 8° ; 555 , 4° ; 556, 1° ; 584 , 1°; 587, 8°). Toutes les fois que la respiration est troublée, par exemple dans la cyanopathie , le foie a plus de dévelop- pement ; il est souvent , chez les phthisiques , fort gros et (1) Tiedemann , Zoologie , t. II , p. 553. (2);^Tiedemann et Cmelin , Recherches expérimentales sur la digestion, MI, p. 60. i6o INFLUENCE DE L*ÉTAT DÎÎ LA VIE. chargé de graisse , tel qu'on le trouve chez les Oiseaux aqua- tiques; il acquiert également plus de volume dans les con- trées marécageuses , où l'on expire moins de gaz acide car- bonique , et les maladies de cet organe , comme aussi les fiè- vres intermittentes , se voient plus fréquemment dans ces ré- gions , tandis que les tubercules pulmonaires y sont plus rares. 14** Le carbone combiné avec de l'oxygène , qu'on expire, fait antagonisme au carbone combiné avec de l'hydrogène , qui se dépose dans l'organisme sous la forme de graisse. Loi'sque la respiration acquiert plus d'énergie , il se produit moins de graisse. Les animaux qui vivent dans l'eau ou dans les marécages sont plus gras que ceux qui se tiennent à l'air libre ou sur les montagnes. La femme a plus d'embonpoint que l'homme , et l'enfant que le jeune homme. dô" L'acide carbonique volatilisé dans la respiration fait antagonisme au carbone fixé dans le pigment. Lorsque la quantité expirée d'acide carbonique est moins considérable , comme dans les contrées chaudes et marécageuses , ou chez les personnes atteintes de tubercules pulmonaires , la peau a une couleur plus foncée, et des taches hépatiques ou même la jaunisse se voient fréquemment. 16° La bile renferme , comme la graisse , du carbone en excès ; mais elle est excréiiienlitielle , elle a une composition chimique plus complexe, et elle est prédisposée à prendre le caractère résineux. Il est ordinaire d'observer une forma- tion excessive de graisse dans diverses maladies du foie , no- tamment dans sa suppuration et ses autres désorganisations ; les personnes qui sécrètent beaucoup de bile sont ordinai- rement maigres , et les diarrhées bilieuses font maigrir avec promptitude; la sécrétion de la bile est en général co- pieuse dans le marasme, ce qui entraîne un appétit plus vif ; enfin , lorsque le foie lui-même est très-gras , la bile est plus aqueuse. 17° La bile fait également antagonisme au pigment cutané. La peau a presque toujours une teinte brunâtre chez les per- sonnes dont la sécrétion biliaire est abondante. Les taches hépatiques anaonceut une loaladie de l'organe dont elles por- À INFLUENCE DE l'ÉTAT DE LA VIE. l6l tent le nom. Lorsque la production et l'écoulement de la bile ont lieu en trop grande quantité , ou subissent quelque trouble , on voit survenir la jaunisse , et Lorry rapporte des observations d'hommes dont la peau était alternativement jaune et blanche , suivant qu'ils étaient à jeun ou qu'ils avaient pris de la nourriture. Dans les maladies profondes du foie, les tégumens extérieurs passent du jaune à une teinte verdâtre ou noirâtre. 18° La graisse produite dans des vésicules et susceptible de se transformer en d'autres substances organiques, fait antagonisme au pigment interstitiel , dépôt plus chargé de carbone et qui n'est point propre à la réassimilation. La peau est plusi foncée chez les personnes maigres , plus blanche chez celles qui ont de l'embonpoint (1) ; les animaux des contrées polaires sont gras et peu colorés; il se dépose quelquefois, chez les Poissons et les Oiseaux , autour des membranes sé- reuses et du périoste , un pigment qui , chez d'autres animaux, est remplacé par de la graisse (2) ; lorsque la formation du pigment devient plus abondante , dans l'ictère et le mélaena , le malade maigrit d'une manière rapide. La {graisse déposée à l'intérieur se comporte presque tou- jours d'une manière consensuelle avec le smegma cutané sé- crété à la superficie du corps. La peau est luisante chez les personnes grasses , et râpeuse chez les sujets maigres ; et, si les productions connues sous le nom de comedones sont plus communes chez ces dernières , cet effet paraît tenir à ce que la sécrétion des follicules cutanés est plutôt albumineuse que grasse. 19° Les tissus cornés en général , et les poils en particulier,' ont beaucoup d'affinité avec la graisse , le pigment et le smegma cutané ; aussi font-ils déjà, par leur forme organique^ antagonisme à ces sécrétions , tandis que le caractère de sub- stance carbonée s'efface en même temps davantage en eux. (1) Sœmraerriiîg , Ueher die kœrperliche f^erscTiiedenheit des Negers vom Europccer, p. 4S. (2) Heusingèr, Ueler die anomale Kohlen-und PiijmentenhUdxmg in dem meiischliclicn Kœrper, p, 21. VIII. i I l62 INFLUENCE DE l'ÉTAT DE Là. VIE. D'après les vues de Heussnger (1) , les poils doivent naissance à des grains de pigment , et ta formation du pigment doit êlre considérée comme une formation pileuse arrêtée (2). On re- marque , comme phénomènes consensuels , qu'il pousse sou- vent des poils sur des taches brunes ou jaunes, et que les albinos ont des poils très-fins et secs. C'est par un effet d'an- tagonisme que la formation pileuse est peu développée chez les Nègres , qu'ils ont la barbe clairsemée , et le reste du corps à peu près glabre , de même que , dans les Poules dites négresses , qui ont ia peau noire , les plumes sont développées d'une manière incomplète (3) , et qu'en général , chez les Oi- seaux , il n'y a de colorées que les parties nues du corps , toutes celles qui sont chargées de plumes étant incolores. Chez les Mammifères aussi, la peau est presque toujours in- colore sous un pelage long , tandis que , quand les poils sont courts ou qu'ils manquent totalement , comme chez les Elé- phans et les Cétacés , elle est riche en pigment, qui, chez les Chevaux grisonnans , s'amasse aussi dans les parties nues (4). 20° Quoique les poils aient coutume de plonger leurs ra- cines dans la graisse , on en trouve cependant sur des points du corps où il n'y a point de graisse , tels que le scrotum , les paupières, le cartilage de l'oreille et celui du nez, tandis que les fesses et les mollets , parties si chargées de graisse, sont peu ou point velues. D'un autre côté , on rencontre des productions simultanées de graisse et de poils dans certaines tumeurs des ovaires ; les loupes de naissance sont ordinaire- ment couvertes de poils (5), et le corps entier est très -velu dans les cas d'embonpoint excessif (6); d'un autre côté, c'est surtout chez les hommes gras qu'on observe la calvitie , et Eble a remarqué qu'il y avait toujours plus de graisse (1) Loc. cit., p. 25, (2) Meckel , £>cuts£hes ArcUv , t. VII , p. 415. (3) lîeiisinger, loc. cit., p. 26. (4) Fïoi'iep , Notizcn , t. XV, p. 166. (5) Ilensinger, loc. cit., p. 62. (6) Meckel , Handhuch der patholoc/ischen Anatomie , t. ï j p. SS?. INFLUENCE DE l'ÉTAT DE tA VIE. j65 qu'à l'ordinaire dans les régions de la peau d'où les poils s'étaient détachés (1). 21" Le sang menstruel , char{]é de carbone , et le sperme , éminemment basique , l'ont antagonisme aussi aux sécrétions carbonées , surtout à celle de la graisse (§ 663 , I -, 584, 2°) , comme produit de la tendance à la conservation individuelle : aussi le corps adipeux des Insectes , dans lequel tous les or- ganes sécréloires prenaient auparavant leurs racines , dis- paraît-il à l'époque du développement des organes de la gé- nération. Ils font également antagonisme au smegma cutané (§ 247, 4° ) et au pigment (§ 247, 3°) ; en effet, avant l'ap- parition des menstrues , ou lorsqu'elles s'arrêtent pendant h grossesse (§ 347, 3°), ou après leur cessation totale , on voit les taches de rousseur devenir plus prononcées, et parfois s'en manifester d'autres jaunes^ brunes ou noires (2). Enfin, ils font antagonisme aux poi!s (§ 563, ii° ) , qui , entre aur- très , croissent avec plus de force pendant les dérangemens ou à la cessation du flux menstruel. VIII. Il y a aussi un rapport de consensus ou d'antagonisme .entre la formation carbonée et une autre formation basique, ou moins carbonée, ou plus indifférente,;' 22° Un rapport de ce genre existe entre la bile carbonée et l'urine azotée et chargée d'eau. On a trouvé, après l'ex- tirpation des reins , le foie gorgé de sang et la bile fort abon- dante. Simon , ayant lié le conduit biliaire , chez des Oiseaux , rencontra beaucoup de substance ^erte déposée dans le cloa- que. Coindet fait remarquer que , dans l'hépatite , l'urine contient, au lieu d'urée, une substance qui ressemble à la matière bihaire. Le foie et les reins paraissent être quelquefois confondus ensemble chez les Acéphales (3), ce qui fait penser à Meckel (4) qu'il n'est pas hors de vraisemblance que les canaux existant chez les Insectes , auxquels on donnait autre- (1) Die Lehre von den Haaren in der gesamniten organischen Natur, t. II , p. 76. (2) Heusinger, loc. cit., p. 50.] (3) Meckel , Handluch der pathotogîschen Anatùmiê ^ 1. 1 , p, d83. (4) ArcUv fuer Anatomie ^ 1826 , p. 27* l64 INFLUENCE DE LEÎAT DE LA VlË. fois le nom de conduits biliaires, et que les modernes appel- lent urinaires , remplissent à la fois les deux fonctions. 23° Lorsqu'il survient des maladies bilieuses ou une in- flammation du foie , à la suite d'un refroidissement , surtout en automne, on doit en accuser la suppression de l'excrétion d'acide carbonique, et sans doute aussi de celle d'eau. 24° Si l'hydropisie est plus commune chez les sujets atteints de maladies du loie que chez d'autres, il faut s'en prendre principalement , sans pour cela nier l'influence des causes mécaniques, à l'antagonisme qui, après la suppression de la formation des substances carbonées, imprime une activité plus grande à la sécrétion séreuse. C'est ainsi également qu'il est commun de voir, dans les cas de formation incomplète de la bile , les sujets , surtout quand ils sont à jeun , vomir sans effort , et comme par une sorte de regorgement , une quan- tité considérable de suc gastrique insipide. 25° Le même antagonisme se prononce entre la formation de la graisse et la sécrétion séreuse ; s'il est ordinaire que de la graisse se dépose à la surface des membranes séreuses , et notamment des vésicules synoviales , on fen trouve moins chez les personnes atteintes de leucophlegmatie , et celle qui se voit chez les hydropiques ressemble à un liquide jaunâtre^ transparent, gélatineux. 26° Si l'on maigrit en été , tandis que l'on engraisse en hiver, si les Alouettes, les Grives, etc., prennent de l'em- bonpoint en vingt-quatre heures par un temps nébuleux et humide, puis maigrissent lorsque l'atmosphère devient chaude et s'éclaircit, ce sont là des effets du rapport existant entre la formation de la graisse et la transpiration, notamment l'exhalation d'acide carbonique ; ainsi , l'on ne trouve pas de graisse sous la peau des Crapauds et des Grenouilles , parce qu'elle transpire et qu'elle exhale de l'acide carbonique avec une égale énergie. 27° Ces deux fonctions de la peau paraissent être intéres- sées aussi , eu égard à leur relation avec la formation du pigment , dans les phénomènes qui consistent en ce que les ]Sègrcs suent peu, en ce qu'il ne paraît point de sueur sur les taches de rousseur ou les taches hépatiques , en ce que la di- INFttJENCE DE l'ÉTAT DE LA VIE. l65 minution de l'activité de la peau , chez les personnes âgées , s'accompagne fréquemment de taches grises, jaunes ou brunes, principalement aux mains et aux pieds (1). 28° La diminution de la sécrétion urinaire , qui a lieu la plupart du temps dans l'ictère , annonce un rapport d'anta- gonisme entre la formation du pigment et l'activité des reins. IX. L'antagonisme entre la formation des parties solides et des parties liquides se manifeste surtout dans les rapports entre les tissus stratifiés et la sécrétion cutanée. Cette der- nière est si abondante chez les Batraciens et certains Poissons, qu'à peine la peau arrive-t-elle à se couvrir d'un épidémie, et , chez les Mammifères , l'accroissement des poils est limité par une transpiration trop abondante , favorisée au contraire par la diminution de cette exhalation (2). Mais , en général , nous remarquons que la nutrition languit quand la sécrétion dépasse ses bornes normales , et que les parties hypertrophiées sont pour la plupart fort sèches. X. L'estomac et le poumon , tous deux organes de la for- mation du sang, mais de telle sorte que l'un la commence et l'autre l'achève, tiennent ensemble par les liens du consensus ; il résulte de là que l'expiration du gaz acide carbonique de- vient plus abondante lorsque le suc gastrique est sécrété en plus grande quantité (§ 840, 5°), que Finflammalion se ma- nifeste simultanément dans les deux organes , et que , chez la plupart des phthisiques , on trouve des traces de phlegmasie et des ulcérations dans le canal intestinal. XL On découvre, dans la série animale, comme Ta surtout démontré Heusinger (3) , un antagonisme entre les organes aériens (peau et poumon) , d'un côté , et les deux plus grosses glandes (foie et reins), de l'autre côté; de sorte qu'à un degré inférieur d'organisation, et notamment chez les, ani- maux qui vivent dans l'eau, réjection de substance animale a lieu sous une forme plus combustible, celle de bile et d'urine , (1) Heusinger, loc. cit., p. 49. (2^ Eble , Die Lelire von den Haaren in der gesammten organischen Natur, t. II, p. 123. (3) Zeitschrift fuer die organische Pliysik , 1. 1 , p. 163, l65 INFLUENCE DE t'ilAt DE là. VIE. tandis qu'à im degré supérieur, et principalement chez les animaux qui vivent dans l'air, elle s'opère sous une forme plus comburée , celle de vapeur aqueuse et d'acide carbonique. Ainsi le foie et les reins prédominent chez les Mollusques , la peau et les organes respiratoires chez les animaux articulés ; le premier rapport s'observe également chez les Poissons et les Reptiles , le second chez les Oiseaux et les Mammifères. De même , parmi les animaux à sang chaud , ceux qui vivent dans l'eau, ou auprès d'elle, ont un foie et 4es reins plus volumineux , au lieu que la peau et les poumons sont plus développés chez ceux qui vivent à l'air libre. XII. Les tissus inférieurs se déposent consensuelîement autour des tissus supérieurs ; mais on rencontre aussi un rapport d'antagonisme entre ces deux ordres de tissus. 29° Le tissu cellulaire , comme premier produit plastique , celui qui présente le moins de caractères spéciaux, fait an- tagonisme à tous les tissus particuliers qu'il entoure , et pullule lorsque ceux-ci s'effacent. La formation du tissu cellulaire re- double d'activité lorsque celle des tissus les plus importans est faible , de sorte que ce tissu constitue la plus grande partie de la masse des Mollusques acéphales. Par contre, l'accroisse- jtnent de l'activité du tissu cellulaire, sous l'influence d'un séton entre autres , diminue celle d'organes nobles , par exemple du poumon. Le même rapport existe entre la sécré- tion séreuse et les formations supérieures ; elle augmente lorsque l'activité vitale baisse (§ 845 , 3°) , et quand la nutri- tion se fait d'une manière incomplète dans un organe ; c'est ainsi que le vide occasioné par l'atrophie du cerveau se rem- plit de sérosité. 30° La graisse se dépose autour des muscles , mais d'autant plus qu'ils sont moins actifs , et ^ dans les cas d'atrophie de ces organes , elle s'accumule en grandes masses entre leurs fibres , comme le cœur entre autres en fournit un exemple (1). Les muscles sont faibles chez les personnes chargées d'em- bonpoint. Après la castration , on a vu le scrotum plein de (1) Andral, Précis d'aiiatomic pathologique , 1. 11^ p. 287, 317. INFIUENCE DE L'ÉTAT DE LA VIE. 167 graisse (1) , et le vide laissé pnr Textirpation de la rate a été trouvé occupé par une masse adipeuse (2). Haller cite déjà des faits de ce genre (3). 31° Les tissus stratifiés ont de l'affinité avec les muscles; ainsi le tissu épidermatique des animaux sans vertèbres , qui donne attache à des muscles, représente un squelette cutané, un dermatosquelette ; ainsi Tépilhélium du robuste estomac des Oiseaux carnivores s'épaissit et devient calleux. Des par- ties analogues aux poils servent d'organes de locomotion chez des animaux inférieurs ; les Mammifères n'ont le poil long et fourni que dans les points oùii existe des muscles cutanés, où. surtout s'insèrent ces muscles ; aussi n'en voit-on chez l'homme qu'au dessus du muscle occipito- frontal, des muscles palpé- braux et du peaucier, le reste du corps étant dépourvu de muscles sous-cutanés et manquant également de poils bien développés. Le Hérisson et le Porc-épic, chez lesquels les muscles de la peau sont très-vigoureux , ont leurs poils con- vertis en piquans. On trouve des muscles robustes à la cri- nière et à la queue du Cheval , ainsi qu'à la queue du Paon (4). Les poils manquent dans les régions du corps où la peau possède une grande sensibilité , telles que le creux des mains et le gland. Ils croissent davantage lorsque le système ner- veux est moins développé ; chez les hémicéphales , non seu- lement les cheveux forment une éf aisse couronne autour de la base du crâne , comme si , en l'absence de la calotte , l'or- ganisme voulait les reproduire en même quantité que dans l'état normal, mais encore il pousse quelquefois aussi des poils sur le corps entier, notamment sur le dos , les hanches et les bras (5). (1) Jansen , Pinguedinis animalis consideratio physiologica et patholo- gica, p. 80. (2)Schmidt, Commentatio de pathologia lienis , p. 52. (3) Elément, physiolog., t. I, p. 40. (4) Répertoire général d'anatomie et de physiologie pathologiques, t. VI, p. 4. (5) Meckel , Himdbucli der patholoyischen Anatoviie , t. I, p. 496 , 232. l68 INFLUENCE DE l'ÉTAT DE lA VIE. 32° Le cerveau s'entoure de tissu scléreux ; aussi la' voûte de la dure-mère et du crâne manqne-t-elle , avec les hémi- sphères, chez les hémicéphales. Mais, de même que Fem- bryon a un cerveau très-volumineux et un crâne très-mince, relativement parlant, de même aussi la masse du cerveau augmente dans le rachitisme , où le tissu des os se développe d'une manière incomplète et demeure mou , tandis que , quand cet organe s'atrophie , comme dans Tidiotisme , le crâne ac- quiert plus d'épaisseur. Chez les Carnassiers, les Solipèdes, les grands Ruminans et les Pachydermes, le cerveau est petit, la masse osseuse du crâne , au contraire , forte et épaisse , tandis que , chez les Rongeurs , le crâne est plus mince et le cerveau plus volumineux. .33° Les sujets qui portent des doigts ou des orteils surnu- méraires offrent souvent des vices de conformation par arrêt de développement dans des organes supérieurs, comme bec- de-lièvre, cyclopie,spina-bifida,atrésie de l'anus, etc. (l).Au contraire , chez les hémicéphales , la face est forte et massive, et les sujets à tête monstrueuse ou à ventre énorme ont les membres réduits à de simples moignons (2). XIIL Enfin un rapport de polarité se manifeste entre les or- ganes les plus éloignés les uns des autres , notamment entre les parties qui occupent les extrémités supérieure et inférieure du corps. Si l'inflammation des parotides provoque une phleg- masie sympathique des testicules ; si la salivation se déclare après la suppression des règles , de la sécrétion urinaire , de la sueur des pieds, ou après un refroidissement des extrémités inférieures ; si le larynx se développe et la barbe pousse , chez l'homme , à l'époque de la puberté ; si la sécrétion de la conjonctive oculaire augmente simultanément avec celle du canal intestinal pendant le travail de la digestion ; si la sécrétion du suc gastrique et intestinal diminue dans les flux muqueux abondans des paupières (3) ; s'il est très-com- ' (i) Meckel , loc. cit., t. II , p. 38. (2) Ibid., 1. 1 , p. 754. (3) Eble, Ueher den Bau und die Kranliheiten der Bindehaut des Auges , p. 51, INFLUENCE DE l'ÉTAT DE tA VIE. 169 ïùnn que les capsules surrénales manquent , ou que les reins et les organes génitaux soient développés à un point extra- ordinaire chez les hémicéphales et les acéphales ; si à la pe- titesse du cerveau correspond une plus grande longueur de la moelle épinière ; si le nombre des vertèbres coccygiennes dimi- nue quand le crâne devient plus étroit ; si, enfin, chez les divers individus et les différentes races , les rapports particuliers de forme entre le crâne et le bassin se correspondent d'une manière générale , comme l'a démontré Weber ; ce sont là autant de faits qu'on ne peut expliquer qu'au moyen de la loi générale qui veut que la polarité relative à la dimension en longueur , dont on aperçoit déjà les effets lors de la forma- tion primordiale (§ 459, II) , conserve aussi plus tard son influence , et qu'elle donne lieu alors à des phénomènes tantôt de consensus et tantôt d'antagonisme. I J). Influetice de la vie animale. § 847. L'activité animale , qui est la forme de la vie dirigée vers l'immatérialité , vers le dynanisme pur , fait par cela même antagonisme à l'activité plastique , qui a pour tendance la productionmatérielle.Aussi remarquons-nous, entre ces deux directions de la vie, des rapports analogues à ceux qui existent entre les diverses activités plastiques comparées les unes avec lesautres(§ 846).La vie animale tient de la manière la plus intime à la vie plastique , qui est son support , son substratum ; elle exerce sur elle une influence déterminante , non pas toujours, il est vrai , par consensus, mais souvent aussi par antagonisme. Cependant il n'est pas rare non plus qu'elle vienne à subir elle-même des changemens, sans exercer une telle influence. I. 1" Après la section des ganglions cervicaux supérieurs , sur des Chiens :, Petit (1) a observé que l'œil perdait son éclat, devenait terne, et se remplissait de larmes , que sa conjon-c- tive s'enflammait , et qu'il se rapetissait peu à peu , par la di- minution de volume de l'humeur aqueuse et du corps vitré ; (1) Hist. de l'Académie des sciences , 1727, p. 6-19. 170 INFLUENCE DE L'ÉTAT DE lA VIE. la sécrétion des glandes de Meibomius diminuait également. Dans un cas(l), les deux yeux souffrirent de la même ma- nière , quoique le nerf n'eût été coupé que d'un seul côté ; mais , dans certains autres , les phénomènes ne furent que pas- sagers (2) , et les yeux reprirent , au bout de quelques se- maines , leur éclat et leur volume accoutumés. Arnemann , ayant coupé , sur des Chiens , le nerf grand sympathique , avec celui de la paire vague , au cou , remar- qua également un accroissement des larmes , et un trouble de la cornée transparente (3) , avec inflammation de la conjonc- tive et augmentation de la sécrétion muqueuse (4). Une fois même (5), il sur\int à la cornée un abcès dont Touverture en- traîna la procidence de l'iris et la chute du cristallin dans la chambre antérieure. Mais, dans plusieurs cas, notamment lorsque l'expérimentateur avait enlevé aux deux nerfs un lam- beau long de cinq (6), six (7) ou huit (8) lignes, Toeil rentra dans ses conditions normales au bout de quelques mois. Cruikshank (9) a aussi observé le trouble et l'inflammation de l'œil après la même opération. Dupuy (10) enleva le ganglion cervical supérieur à des Che- vaux ; il vit ensuite la conjonctive devenir rouge , et la pu- pille se contracter. D'après Mayer (11) la hgature du grand sympathique au cou entraîne le trouble de la nutrition de l'œil et une inflamma- tion superficielle , qui , lorsqu'on a lié en même temps le nerf pneumo - gastrique , s'étend jusque dans l'intérieur du (1) Ihid., p. 8. Ci.)Ibid.,T^.%, 10,12. (3) Fersuche ueher die Régénération an hhenden Jhieren, p. 67. ^ (4)i6irf.,p. 85,87, 89,97. (5) Ibid., p. 70. (6) Ibid., p. 94. (7) Ihid., p. 102. {S)Ibid.,j).99. (9)Keil, ArcMv, t. II, p. 59, 61. (10) Meckel , Deutsches Archiv , t. IV, p. 105. (11) Grœfe et "Walther, Journal fiier Chimnjie und Jicgenheilkunde , t. X. INFLUENCE DE t'ÉTAT t>E LA VIE. 171 globe oculaire ; si la ligature a embrassé aussi Tartère caro- tide , une fausse membrane s'étend , à la face antérieure de l'iris, sur la pupille, et la cornée transparente entre plus tard en suppuration. Si Dupuy a vu les membres , surtout ceux de derrière , maigrir et devenir œdémateux , après l'enlèvement des gan- glions cervicaux supérieurs, il est fort possible que ce phé- nomène fût purement accidentel. Du reste, Magendie(l)a également observé l'inflammation de l'œil et l' obscurcissement de la cornée transparente après la section de la cinquième paire des nerfs cérébraux. Lorsque le nerf optique est paraiysé depuis long-temps , on trouve l'œil atrophié , le corps vitré aqueux et d'un brun rougeâtre ; les vaisseaux de la conjonctive et de la choroïde sont variqueux. 2° Les membres paralysés maigrissent ordinairement. Ce phénomène n'a cependant pas lieu toujours. Dans tous les cas, il n'y a qu'affaiblissement , et non abolition complète de la nutrition et de la sécrétion. Monro (2) , ayant coupé le nerf crural d'une Grenouille , trouva , un an après , que la cuisse n'était point amaigrie 5 étant venu alors à briser le fémur , il ne s'en produisit pas moins un cal normal. Stannius (3) , en pratiquant la section des nerfs cruraux sur des Grenouilles^ eut soin de détruire aussi la partie postérieure de la moelle épinière ; la nutrition du membre n'en souffrit point. Arne- mann (4) a observé de même sur des Mammifères , et ces re- marques ont été confirmées depuis par Arnold (5) , qu'après la section des nerfs rachidiens d'un membre , celui-ci maigrit d'abord , mais que l'amaigrissement ne se soutient pas , quoi- que les artères ne reçoivent aucun filet du grand sympatlii- (1) Journal de physiologie expérimentale , t. IV, p. 176 , 302. (2) Observations on the structure and functions ofthe nervous System, p. 83. (3) Medicinische Zeitung , t. I , n" 12. (4) Versxiclis ueber die Re'jcncration an, lehenden Thiero , p, 262, 267. (5) Der Kopfiheil des veactaiiren Nervensystems heim Mensclien , p. 4S7. 172 INFItlENCE DE t ETAT DE lA VIE. que. Krimer (4) a vu de la lymphe coagulable s'épancher et une cicatrice se former dans des plaies faites à des membres dont elles avaient divisé tous les nerfs. Chez des Lapins , aux- quels Mayo (2) avait coupé la cinquième paire de nerfs céré- braux , une dent incisive , dont il avait brisé aussi la couronne, ne tarda point à recouvrer sa longueur normale. 3° Dupuy (3) a remarqué , sur des Chevaux auxquels il avait lié ou coupé la paire vague, que le fourrage restait sec dans l'estomac. Chez des Lapins , soumis à la même opéra- tion par Brodie (4) , l'empoisonnement par l'arsenic , de quel- que manière qu'il eût lieu , n'accroissait plus , comme aupa- ravant , la sécrétion de l'estomac et de l'intestin , mais déter- minait une inflammation considérable. Dans d'autres cas , cependant , l'opération ne troubla point la sécrétion des organes digestifs. Ainsi Blainville trouva , chez des Poules et des Pigeons auxquels il l'avait fait subir , le jabot plein d'un liquide rougeâlre et fortement acide. Breschet a reconnu , sur des Chiens , des Chevaux , des Pigeons , . des Canards et des Hirondelles , que la formation du chyme était retardée ou restreinte , mais non supprimée (5). Leuret et Lassaigne (6) ont rencontré , neuf heures après , la quantité ordinaire de suc gastrique dans l'estomac des Chevaux. Celui des Lapins a offert à Mayer (7) , au bout de cinquante heures, du chyme acidulé et en partie frais; le même observateur a également trouvé l'estomac de Chats et de Chiens dans l'état normal. Arnemann (8) assure que , chez les Chiens qui survi- vaient à la section de la paire vague et du grand sympathique, il se manifestait constamment, quelques jours après l'opéra- tion , une diarrhée qui durait plusieurs mois ; or , comme les (1) Pliysiologische UntersucTiungen , p. 169. (2) Outlines of human physiology , p. 90. (3) Loc. cit., p. 408. (4) Meckel , Deutsches Archiv , 1. 1 , p. 428. (5) Archives générales de médecine , t. II, p. 491. (6) Recherches physiologiques et chimiques pour servir à l'histoire de la digestion , p. 134. (7) Zeitschrift fuer Physiologie, t. II, p. 73, 78. (8) f^ersucîie ueber die Jîege?ieration an lehenden Thiere , p. 262. ', INFLUENCE DE tETAT DE LA VIE. I73 déjections n'étaient pas fort abondantes, cette diarrhée tenait sans doute principalement à la diminution de l'absorption , bien qu'elle dût être aussi rapportée en partie à l'accroisse- ment de la sécrétion intestinale. Du reste, la section de ces nerfs détermine ordinairement, dans l'estomac et les bronches , un état inflammatoire , qui s'accompagne quelquefois d'un accroissement de la sécrétion muqueuse , ou d'un épanchement de sérosité , comme l'ont remarque surtout Lej^allois et Wilson Philipp. 4° La sécrétion des glandes salivaires diminuait , mais ne se supprimait point après la ligature ou la section des nerfs de ces organes, pratiquée par Nuck. Mayo (1) coupa les nerfs des reins et lia les uretères d'un Chien ; au bout d'une heure et demie , il trouva les bassinets et la portion des uretères située au dessus de la ligature , pleins d'urine. II. Dans l'état anormal du cerveau et de la moelle épi- nière , 5" La nutrition tantôt subit une altération fondée ou sur le consensus ou sur l'antagonisme , et tantôt n'éprouve aucun changement. L'amaigrissement est de règle dans l'hydrocé- phale chronique : on le voit plus rarement dans les plaies , la suppuration , le ramollissement , l'induration et les pseudo- morphoses du cerveau (2). Dans la phlhisie dorsale , les mem- bres maigrissent, en même temps que la moelle épinière diminue de volume. Il arrive souvent, lorsque la formation du cerveau est incomplète, en particulier dans Ihémicéphalie, qu'on trouve le foie, la rate , les reins , etc., fort petits ; mais presque toujours il y a beaucoup de tissu cellulaire et de graisse , et la peau est très-développée , ainsi que les mus- cles ; souvent aussi le cœur et les membres ont beaucoup de volume. De même , on voit fréquemment le corps maigre chez ceux qui exercent beaucoup leurs facultés cérébrales , et fort bien nourri chez les sujets d'une intelligence bornée. 6° Si la peau est sèche et froide dans la commotion céré- brale , sèche et chaude dans l'encéphahte , si , lorsque l'état (1) Loc. cit., p. 93. (2) Eurdacli, f^om Bmie des Gehirns, t. III , p. 65. 1^4 INFLUENCE DE l'ÉïAT DE Lk VIE. du malade s'améliore , on voit sm'venir une sueur générale , ou même une éruption cutanée , ce ne sont là que des effets de l'état général de la vie. Mais il se présente des cas aussi où l'organe central de la sensibilité déploie une influence spéciale. Home (1) a observé, chez un homme dont la moelle épinière avait été détruite par un coup de feu , à la hauteur de la sixième vertèbre dorsale , que la peau ne transpirait qu'au dessus de la plaie , et qu'elle ne fournissait point de transpiration au dessous. Roque (2) a vu , au contraire , après une commotion cérébrale , les cheveux grisonner du côté droit, le visage maigrir, et la tête, ainsi que le cou et la poitrine, se couvrir de sueur ; celle-ci, exactement limitée par la ligne médiane du corps , augmentait pendant les repas , et sous l'empire des affections déprimantes , mais diminuait dans le lit, lorsque la chaleur y déterminait une transpiration générale. 7" Brodie (3) a trouvé que l'expiration du gaz acide carbo- nique est indépendante de l'activité cérébrale. Des Lapins qu'il avait fait périr au moyen du woorara ou de l'acide hydro- cyanique , donnèrent , par la respiration artificielle , tout autant de ce gaz qu'en fournissait la respiration d'autres La- pins vivans , savoir vingt- cinq à vingt-huil pouces cubes dans l'espace d'une demi-heure. 8° Au contraire , chez des Lapins auxquels on avait coupé la tête , et dont on avait eu soin ensuite d'entretenir la respi- ration , pendant des heures entières , par des moyens artifi- ciels, il ne s'effectua plus aucune sécrétion urinaire (4). Naveau (5) et Krimer (6) disent aussi que cette sécrétion n'a plus lieu chez les animaux dont on entretient la respi- ration par des moyens artificiels après avoir détruit la moelle allongée ou la portion cervicale de la moelle épinière , tandis qu'elle persiste après la section de cette dernière sur (1) Meckel , Deutsches ArcUv , t. III , p. 118. (2) Gerson, Maijazin , t. VII, p. 416. (3) Poggendorff , Annalen der Fhysik , t. XLVI , p. 87. (4) Reil, ArcUv., t. XII , p. 139. (5) Experimetita quœdam circa urinœ secretionem , p. 24. (6) Physioloijischo Untersuclmngen , p. 21-28. INFLUENCE DE l'ÉTAT DE lA. VIE. l']^ un autre point, ou après l'ablation du cerveau. Ils concluent de là que cette sécrétion dépend de la moelle alloni^ée et de la portion cervicale de la moelle épinière, quoiqu'il soit plus probable que c'est seulement la respiration excitée par ces organes qui exerce une influence directe sur la production de l'urine. Gamage (1) a trouvé , dans ses expériences, que la sécrétion urinaire est tout-à-fait indépendante du cerveau , et si les anomalies de la moelle épinière influent non seulement sur rémission , mais encore sur la formation de l'urine , quel- ques faits établissent aussi que celles des reins réagissent à leur tour sur les fonctions de la moelle épinière. 9° Une sympathie particulière avec le foie nous est dévoi- lée par les symptômes bilieux qui se manifestent dans les plaies de tête , ainsi que dans l'inflammation et la suppura- lion du cerveau déterminées par des causes internes (2). On doit attacher moins d'importance à l'accroissement des sécré- tions salivaire et lacrymale , qui a été observée quelquefois dans le typhus, l'hypochondrie, l'hystérie et autres anomalies de la sensibilité. III. Enfin , l'activité de l'âme et surtout l'état du moral exercent une influence notable sur les sécrétions. 10° Allen et Pepys ont remarqué que les animaux exha- laient une plus grande quantité de gaz acide carbonique lors- qu'ils étaient éveillés et dispos que quand le sommeil les ac- cablait. De même , d'après les observations de Prout (3) , celte exhalation est accrue par les émotions hilariantes, tandis que la tristesse , l'inquiétude , le bâillement et la gêne de la respiration la diminuent. 11° La joie et la colère augmentent également la transpi- ration, que diminuent, au contraire, la tristesse, la peur,'^Ia douleur et l'anxiété (4). Les aliénés ont presque tous la peau sèche, et suent difficilement; souvent aussi leurs cheveux sont gris , arides et fendus à l'extrémité. (1) Medicinisch~cîiirurgische Zeitung , 4818 ,t. Il, "p. 242, (2) Burdach , f^oin Baue des Geliirns , t. III , p. 72. (3) Schweigger, Journal fuer Chemie , t. XV, p. 60 , 64. (4) Haller, Elément, pliysiolo^., t. YI , p. 71 , 75 , 77. 1^6 INFLUENCE DE l'ÉTAT DE LA VIE. 12° Les émotions excitantes augmentent la sécrétion du pigment , tandis que celles d'un caractère opposé la dimi- nuent. Ce sont les cheveux qui perdent leur couleur dans ce dernier cas. On a des exemples d'hommes qui ont blanchi su- bitement à la mort de personnes qu'ils chérissaient , à l'an- nonce d'une condamnation capitale , dans un danger immi- nent , à la perte de leur liberté , au renversement de leurs espérances, ou après de grands excès (1). Un homme qui avait craint long-temps pour ses jours , ne se vit pas plus tôt sauvé, qu'il tomba aussitôt en syncope; son teint, de brun qu'il était, avait pris une couleur blanche; cependant il br.unit au bout de deux années, lorsqu'il eut recouvré ses forces ; mais ses cheveux , qui avaient blanchi aussi , ne chan- gèrent plus (2). 13° Nous avons vu qu'à l'époque du rut, chez les animaux , diverses sortes de smegma cutané sont sécrétées en plus grande abondance, et répandent une forte odeur (§ 247, 4°). De même , chez les animaux qui ont les cryptes de la peau très-développées (§ 821), l'activité de ces organes s'accroît par l'influence de l'inquiétude. Tantôt on ne s'en aperçoit qu'à une odeur particulière qui s'exhale alors , comme par exemple , chez les Marmottes , les Serpens , les Salamandres, les Punaises j etc., qu'on tourmente et irrite; tantôt on voit la liqueur sécrétée jaillir , et alors s'introduire dans la plaie que l'animal fait à son ennemi , comme chez les Vipères, les Scorpions , les Abeilles , les Fourmis , ou servir seulement à écarter cet ennemi, comme chez les Crapauds, les Cloportes, les Chenilles , ou enfin avoir pour usage de troubler l'eau et de soustraire ainsi l'animal lui-même aux poursuites, comme chez les Seiches et le Mollusque de la Pourpre. j 4° La formation de la graisse est favorisée par le repos de l'ame , la tranquillité morale , la sérénité de l'esprit , et di- minuée par les passions fortes , surtout lorsqu'elles manquent (1) Eble , Die Lelire von den Haaren in der gesammten organischen Natur, t. II, p. 315. (2) Heusinger, Untersuchungen ueler die anomale Kohlen'Und Pig- rnenlhilduiKj in dem mmschlîchcn Kcerpor, p. 39. INFIUENCE DE I ÉTAT DE LA VIE. I77 leur but. Un sommeil prolongé , même rimbécillité et l'idio- lisme, peuvent la rendre plus abondante. 15° Les émotions déprimantes , la crainte et la frayeur, provoquent fréquemment une diarrhée soudaine , tant parce qu'elles activent la sécrétion du suc intestinal , que parce qu'elles affaiblissent l'intestin et le frappent d'une sorte de paralysie. Les soucis et le chagrin déterminent des écoule- mens muqueux , surtout chez les femmes, parce qu'ils relâ- chent l'économie entière, 16° Mitscherlich (1) a vu diverses affections morales , le dégoût et le désir d'un aliment , faire couler la salive en plus grande abondance par une fistule parolidienne. Il suffit de voir un mets appétissant , d'en sentir l'odeur, ou même seule- ment d'y penser vivement , pour que la salive afflue davan- tage à la bouche , et Magendie l'a vue , en pareil cas , s'é- lancer au loin sous la forme d'un jet (2). Le souvenir d'une saveur désagréable produit le même effet ; car dès que nous voyons ^quelqu'un mordre dans un citron, notre bouche se remplit aussitôt de salive. Eberle (3) se procurait la quantité de salive dont il avait besoin pour ses expériences , en son- geant à un acide ; en peu de minutes, il obtenait ainsi depuis une demi-once jusqu'à une once de ce liquide. La sécré- tion salivaire est plus abondante aussi pendant la colère et chez les personnes qui éprouvent des désirs vénériens. Elle diminue, au contraire , sous l'empire de la peur et delà crainte , de manière que la bouche se dessèche et la parole devient difficile. Au rapport d'Annesley, lorsqu'un vol domes- tique a été commis, les jongleurs indiens, réunissent toutes les personnes de la maison , leur donnent du riz cuit à mâ- cher, et le leur font ensuite cracher sur une feuille; celui que le voleur a mâché ne contient point de salive. 17° Toutes les fois que le moral vient à être ébranlé par la tristesse , la douleur, la compassion ou la joie , la sécré- (1) Rust , Magasin fuer die gesammte Heilkunde , t. XXXVIII , p. 497. (2) Précis élémentaire de pliysiologie , t. II, p. 52. (3) Physiologie der f^erdauung nach F'ersiichen aiif natuerlichem vnd TtvevHlichem We l';;8 INFLUENCE DE l'ÉTAT DE LA VIE. tion lacrymale augmente jusqu'au point de produire le lar- moiemont, qui est précédé de congestion vers l'œil, de rougeur à la conjonctive et d'un sentiment de tension dans ces parties. Si la tristesse avait oppressé la poitrine , serré le larynx , fait battre le cœur d'une manière spasmodique, et rendu la région épisgastrique douloureuse , les pleurs agis- sent comme une sorte de crise, qui fait cesser cet état de ten- sion et soulage le moral. 18° La joie paraît n'influer sur la sécrétion biliaire que parce qu'elle agit sur toutes les opérations de la vie ; elle favorise la digestion , et guérit parfois la jaunisse. La crainte et la frayeur déterminent quelquefois l'amertume de la bouche, le dégoût, des vomissemens bilieux, une diarrhée bilieuse , la jaunisse ou l'érysipèle. Les soucis , la tristesse , le dépit , la contrariété diminuent toutes les actions vitales, par conséquent aussi celle du foie , de manière qu'ils occasionent la constipation , la perte de l'appétit, le développement des gaz intestinaux , l'amertume de la bouche , la coloration de la peau en jaune sale ou terreux , l'induration du foie et la for- mation des calculs biliaires. L'envie et la jalousie s'annoncent aussi par la teinte sale ou jaunâtre qu'elles font prendre à la peau. Au contraire, les élans de la colère accroissent l'activité du foie et augmentent la sécrétion de la bile ; si la colère est très-violente , elle amène des vomissemens ou une diar- rhée de matière bilieuse , des douleurs à la région hépati- que, l'amertume de la bouche, la fièvre bilieuse j la jaunisse, l'érysipèle. 19° Nous avons déjà fait connaître , en traçant l'histoire dé la vie ( § 565 , 1°), comment le moral et l'imagination influent sur l'activité plastique des différens organes génitaux. IV. Le mouvement volontaire du corps entier 20° Exerce de l'influence sur la quantité d'acide carboni- que exhalée. Treviranus a trouvé (1), chez les animaux sans vertèbres, que ceux qui se meuvent le plus sont ceux qui exhalent la plus grande quantité de cet acide , et ceux qui se meuvent (1) Zeitschrift fuer die Physiologie , t. IV, p. 29. INFLUENCE DE L ETAT DE lA VIE. I79 le rridins, ceux aussi dont le corps en fournit le moins. C'est à cela sans doute qu'il tient qUe cette sécrétion soit , généralement parlant et proportion gardée , plus considéra- ble chez les petits Mammifères et Oiseaux que chez les gros. Prout (1) a reconnu que l'expiration de l'acide carboni- que est accrue, chez l'homme, par un mouvement modéré , tel que celui de la marche , tandis qu'un mouvement conti- nué jusqu'à la fatigue la diminue, et qu'un mouvement vio- lent l'affaiblit dès l'origine , ou du moins après lui avoir fait subir un accroissement qui dure à peine quelques instans. Collard de Martigny (2j a constaté aussi qu'un fort mouve- ment diminue ou supprime même tout-à-fait la sécrétion ga- zeuse de la peau. 21° Keil, Home et Rye avaient déjà remarqué que l'exer- cice accroît la transpiration (3). Celle de la main s'élevait à quarante -huit grains par heure, lorsque Cruikshank s'était promené lentement pendant quelques heures , tandis qu'au- paravant elle ne dépassait pas trente grains. Martin transpi- rait six à huit onces par heure , quand il ramait; mais, lors- qu'il portait un fardeau , sa transpiration s'élevait à peine à une once pendant le même laps de temps , et elle n'arrivait à deux que durant le repos qu'il prenait plus tard (4); de manière qu'ici également un effort disproportionné semblait mettre des bornes à la sécrétion. 22° La formation de la graisse est diminuée par un mou- vement qui exige des efforts et fatigue; le repos le favorise, au contraire , de sorte qu'il n'est pas rare même que des con- damnés à mort engraissent en prison (5). Le bétail s'engraisse plus aisément dans une étable resserrée. 23° L'exercice semble favoriser la sécrétion de la bile , et en même temps mettre des bornes à l'accroissement du foie. Cet organe est en général plus petit chez les hommes vifs et (1) Schweigger, Journal fuer Chemie , t. XV, p. 60. (2) Journal de Magendie , t. X , p. 465. (3)Haller, Elément, physioloy., t. V, p. 69. (4) Ahhandlungen der Schwedischen Académie , t. XL, p. 498. (5) Haller, Elément, physiolog., t. I, p. 39. l80 QUAIITÉ DES FORMATIONS ORGANIQUES. très-remuans , que chez ceux qui mènent un genre de vie sé- dentaire. De même aussi ^ chez les animaux, son volume re- latif est en raison inverse de l'énergie des mouvemens (1). 24° Si l'urine est sécrétée en plus grande abondance par les personnes sédentaires, i! paraît que cet effet tient unique- ment à ce qu'alors la transpiration est plus faible. CHAPITRE II. De la formation des produits matériels de l'organisme eu égard à leurs qualités. § 848. Les formations organiques varient, dans l'état nor- mal , non pas seulement sous le rapport de la quantité , mais encore sous le point de vue de la qualité. La vie en générât n'étant jamais semblable à elle-même , ses produits , la salive, le suc gastrique, l'urine, etc., n'ont jamais non plus la même constitution. Il y a anomalie , eu égard à la qualité , quand l'é- cart qui a lieu d'un côté n'est point compensé par un autre ccarf "ailleurs , de manière à rétablir l'équilibre et l'espèce de terme moyen nécessaire au maintien de l'organisme, par conséquent lorsqu'un changement s'éloigne trop du caractère fondamental d'une formation , ou n'est point compensé^ par un changement consécutif en sens inverse , et devient per- manent. L La formation organique subit un changement de qualité, 1° Soit lorsque la matière s'introduit en telle profusion dans l'organisme , qu'elle ne peut point être dominée par lui , ou quand , au contraire , l'organisme en reçoit trop peu , et que la matérialité n'a pas assez de puissance ; soit lorsque la vie est trop peu énergique pour se développer d'une manière har- monique sous toutes ses formes , et notamment pour accom- plir une formation complète du sang , ou quand, au contraire, la vie a trop d'activité et fait une trop grande consommation. 2° Quand les influences extérieures, telles que l'air et la (1) Treviranus , Die jErscheimmgen und Gesetse des onjanischen Le- hens, t. I,p. 337. QUALITÉ DES FORMATIONS ORGANIQUES. l8l nourriture , ne sont point appropriées à la nature de l'orga- nisme , et que des subsiances hétérogènes, inconvenantes, entrent en contact avec ce dernier , ou que l'activité vitale a trop de mobilité et de versatilité pour pouvoir maintenir son type. 3° Lorsque la vie ne suit qu'une seule direction , qu'une espèce de substance ou d'excitation agit trop souvent ou d'une manière continue , qu'une des actions vitales devient prépon- dérante sur les autres , comme l'animalité sur la plasticité , l'ingestion sur la sécrétion, la sécrétion sur l'éjection, et vice versa ^ ou qu'une action , une impression s'éloigne trop de ce qui est habituel. 4° Lorsque l'excitation ou l'activité qui survient ne cor- respond point à l'état présent de la vie , que par exemple on prend de la nourriture après s'être échauffé , après avoir mis la vie du sang en émoi , ou qu'on se fatigue l'esprit pendant le travail de la digestion , etc. 6" On parle d'une transpiration insensible. Mais tout ce qui concerne laformation est insensible, puisque ce travail n'arrive point à notre conscience, et qu'étant purement moléculaire , il ne peut non plus tomber sous aucun de nos sens. Les activi- tés plastiques , et le côté de la vie animale soustrait à notre conscience , sont mis, tant par les mutations normales de la vie , que par leur enchaînement mutuel , leur précédent mode et les impressions antérieures , dans des états divers , eu égard à la quantité et à la qualité , dont la connaissance n'arrive point jusqu'à nous ; aussi , quand nous entreprenons des actions ou laissons agir sur nous des influences qui ne sont rien moins que nuisibles par elles-mêmes , mais qui , par suite du rapport de polarité existant entre les diverses acti- vités vitales , suspendent tout à coup une formation en plein exercice , ou la font sortir de ses conditions normales , il peut se produire , sans que nous nous en apercevions , le germe d'une dégénérescence qui , si les mêmes activités vitales in- tempestives viennent à rentrer souvent en jeu , ou si des cir- constances favorables éclatent , se développe en une anomalie considérable , dont l'origine nous demeure inconnue. Ainsi , dans la plupart des cas de maladies , nous ne connaissons que l82 QUALITÉ DES FORMiTIONS ORGANIQUES, les branches et les fruits du travail morbide , et nous ne pouvons hasarder que des conjectures à l'égard de ses ra- cines. Peu satisfait d'un pareil résultat , plus d'un homme désespère du pouvoir de l'intelligence , et cherche à résoudre l'énigme par ce qu'on peut appeler la négation de toute intelli- gence, en admettant qu'un mauvais génie a soufflé sur un indi- vidu ou sur le genre humain, que Thumanité tombe malade par l'effet du péché originel , ou par celui du développement de l'esprit , ou enfin par l'une et l'autre de ces deux causes con- fondues en une seule, et que toute maladie individuelle n'est que la manifestation de celle qui a été transmise en héritage par les aïeux et les ancêtres. Mais ni la superstition ni le faux esprit ne sauraient nous être ici d'aucun secours. Nous voyons quel- quefois, chez des hommes qui jouissent d'une parfaite santé et dont le genre de vie n'offre rien d'extraordinaire , survenir les plus grands écarts de l'état normal des choses, par exemple l'urine renfermer du bleu de Prusse (§ 868, 5°), ou répandre des lueurs phosphoriques (868 ,S°); comme la santé continue de ne recevoir aucune atteinte, nous sommes bien certains que l'économie se débarrasse de ces substances anormales ; mais il ne nous est pas donné de dire par quelles circonstances elles ont été engendrées. Rien ne nous empêche d'admettre la possibilité que des combinaisons particulières d'activités plas- tiques , dépendantes d'influences qui sont demeurées inaper- çues , ont développé du cyanogène , pour l'associer ensuite à du potassium et à du fer , ou dégagé le phosphore des sels dans lesquels il se trouvait enchaîné. Mais ce qu'il importe, c'est de contempler tous les phénomènes, dussions-nous n'entrevoir la cause que d'un seul d'entre eux , et nous trouver réduits, quant aux autres, à leur imaginer une cause avec le secours de l'analogie. II. Le changement de qualité de la formation organique re- pose ou sur un état général, ou sur un état local. 6° La diathèse , ou l'état général de la vie qui cause ce changement de qualité , consiste en un écart du type de la formation , et elle a , non pas toujours , il est vrai , mais fré- quemment, sa base matérielle dans la constitution du sang, puiva^t que tel ou tel caractère ou principe constituant du QUALITÉ DES FORMATIONS ORGANIQUES. j83 sang prédomine, on peut admettre quatre diathèses de ce li- quide ; l'artérieuse ou phlogistique , produite par une assimi- lation énergique et un excilement intense, dans laquelle la fi- brine est très-développée , le cruor très-vermeil , le sang riche, sa marche puissante et son action vivement stimulante; la veineuse, déterminée par Finsuffisance de Texcitement vital et de l'élimmaiion , qui a pour caractères un sang noir et épais , une circulation languissante , un renouvellement lent des ma- tériaux , une prédominance de formations carbonées ; la sé- reuse, qui dépend d'une assimilation faible ou d'une consonft- mation trop grande, s'annonce par un sang pauvre, ténu, pâle , par une exubérance de formations inférieures , telles que tissu cellulaire et sérosité , et entraîne à sa suite la lai^-- gueur ou la pesanteur des manifestations de la vie ; enfin Va\- bumineuse , provenant d'une assimilation abondante , mais incomplète , et qui se dénote par un sang vermeil , visqueux, mais pauvre en fibrine , et qui est accompagnée de tendance aux pseudomorphoses , notamment aux exanthèmes et ay??.. parasites. Outre ces quatre formes principales , il y a encore d'autres diathèses , d'où dépendent des espèces particulières de chan- gemens relatifs à la qualité des produits organiques (§ 867 , III ; 872 ,14°). Mais les productions locales de la diathèse en général ne sont pas seulement les manifestations ou les sym- ptômes de cette diathèse; elles en sont aussi, en partie, les effets salutaires ou les crises. Effectivement , comme l'ano- malie se fixe dans un point spécial , et s'incorpore dans un prQr» duit déterminé , l'état général de la vie se trouve amélioj^ par là , et dès lors il n'y a plus , comme auparavant , surÇXÇÎ- tation ou dépression des activités organiques. 7° La source de tous les changemens considérables dans la quafité des formations locales , et par conséquent le prototype de ces changemens en général, est l'inflammation (§ 762 ,7°); car des modifications dans les proportions des matériaux con- stituans(§ 849-853), un changement dans le caractère des sécrétions (§ 854-855) et des tissus organiques (§858), l'ho- mœoplastique (§ 859) , la régénération (§ 860-864) , la dé- générescence des liquides (§ 868) et celle des solides (§ 869- l84 QUALITÉ DES FORMATIONS ORGANIQUES. 872) peuvent en être les résultats. Comme modification du travail organique arrivant à se manifester , l'inflammation est une exaltation de la vie du sang dans un organe , avec chan- gement dans la direction de l'activité plastique. Le sang afflue en plus grande abondance vers l'organe enflammé , il y adhère , il y perd en partie la forme discrète de ses globules ; le tissu enflammé est pénétré d'un liquide plastique épanché, qui ne tarde pas à prendre une consistance gélatineuse ; il l'est aussi en partie de sang extravasé , ou au moins de la portion colorée du sang ; les vaisseaux capillaires , lorsqu'on les exa- mine à la loupe , paraissent distendus par du sang et entourés d'un liquide extravasé , qui y adhère ; on ne peut point les injecter après la mort , de même qu'il est impossible d'intro- duire de l'air dans les cellules du tissu , ni d'en faire sortir le caillot par des lavages répétés. Du reste , une inflammation complètement développée n'est point toujours nécessaire pour imprimer une nouvelle direction à la formation , et il suffit souvent d'une simple tendance à l'état phlegmasique. Les changemens relatifs à la qualité, que subissent les pro- duits organiques , sont ou homologues, c'est-à-dire revêtus d'un caractère conforme à celui de l'organisme (§ 849-864), ou hétérologues(§ 865-874). On partage les premiers en ceux qui amènent la production de parties déjà existantes (§ 849-858), et en ceux qui amènent la production de parties nouvelles (§859-864). Mais, parmi les changemens qui surviennent dans des parties déjà existantes, les uns consistent en ce que ces par- ties subissent des modifications dans la proportion de leurs matériaux constituans (§ 849-853), les autres en ce qu'elles acquièrent la constitution et les caractères d'une autre partie (§854-858). PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES, l85 ARTICLE I. Des produits matériels homologues de Vorganisme, I. Changemens homologues dans des parties déjà existantes. A. Modifications de la proportion des matériaux constituans, 4. VARIATIONS DES PKOPORTIOWS DE i'eAIT. § 849. La proportion de l'eau aux principes solides , I. Dans les sécrétions, 1° Varie suivant les âges. Les humeurs sont plus aqueuses au début de la vie , durant les progrès de laquelle elles vont toujours en se concentrant ( § 533 , 9" ; 535 , 6° ; 540 , 1° ; 550, 5°; 556, 2°; 584, 1« ; 587, 7% 11° ; 588, 7° ). Il en est de même pour celles dont la sécrétion commence pendant le cours seulement de la vie , comme par exemple les liquides séminaux, qui sont moins parfaits à l'époque de la puberté (§ 567, 3°, 4°). Enfin cette particularité se reproduit , à cha- que nouvelle grossesse , dans le lait , qui , d'abord séreux ou aqueux (§ 349), se charge autant que possible de principes alibiles à l'époque de la parturition, et va ensuite en s' atté- nuant peu à peu (§ 533 , 6° , 9° ). Lassaigne (1) a trouvé , dans le lait de Vache , 0,78 d'eau quelques jours avant le vêlage , 0^79 quatre jours après, 0,82 au sixième jour, 0,89 au vingtième , et 0,91 au trentième. 2° Le contenu des sécrétions change d'une manière pério- dique , c'est-à-dire d'après les époques de la journée (§606 , 5°). Cependant ces mutations ne sont point les mêmes chez tous les individus. Gregory a observé , trois fois par jour , pendant trois semaines, la pesanteur spécifique de l'urine de deux hommes bien portans , et il a trouvé qu'elle était , terme moyen , chez l'un de 1023 le matin , 1026 à midi , 1030 le (1) Journal de chimie médicale , t. VIII , p. d43. l86 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. soir, tandis que, chez l'autre, elle était de 10261e matin, 1024 à midi et 1023 le soir. L'urine sécrétée pendant la nuit, chez la plupart des Vaches^ est plus aqueuse, tandis que celle qu'on obtient le soir de ces animaux est plus saturée. 3° Plus un liquide sécrétoire séjourne long-temps dans l'organe qui le produit, ou dans son réservoir, ou à la surface du corps , plus aussi il devient concentré , parce que les par- ties aqueuses sont résorbées ou volatilisées. Le suc muqueux, par exemple celui de la caviié nasale, est d'abord très-coulantj mais il ne tarde pas à se convertir en un mucus épais ; voilà pourquoi , lorsque la vésicule biliaire est obstruée par des calculs, on y trouve un mucus épais, en quelque sorte gélati- tineux et condensé en masses qui ressemblent à du blanc d'œuf (1). La même chose arrive au smegma cutané ; le cé- rumen des oreilles , par exemple , est liquide , d'un jaune pâle et d'une saveur douce , au moment de sa sécrétion (2) ; mais, peu à peu , il s'épaissit, acquiert une couleur jaune fon- cée, et prend une saveur amère ; il finit même par deve- nir très-dur. Lorsque l'humeur lacrymale demeure long- temps à la surface de la conjonctive ou dans le sac lacrymal , elle s'épaissit et devient insoluble (3). Mitscherlich (4) a trouvé que la pesanteur spécifique de la salive était d'autant plus considérable que l'individu avait été plus long-temps sans prendre de nourriture , et que par conséquent le liquide avait séjourné davantage dans la glande. La bile , telle qu'elle des- cend du foie , est coulante, d'un jaunâtre clair et peu amère ; elle s'épaissit dans la vésicule , y acquiert de Tamertume , et y prend une teinte verdâtre. Schultz (5) a trouvé que cçlle, qui existait dans la vésicule d'un Bœuf, peu après que cet ani- mal avait pris de la nourriture , et qui par conséquent venait de s'y accumuler , offrait une pesanteur spécifique de 1026 , (1) "Voigtel , Handbuch der pathologis chen Anatomie , t. III , p. 87. (2) Haller, Elément, physiolog., t. II, p. 448. (3) Schveger, Fluidorum corporis animalis chemiœ nosologicœ spéci- men, p. 37. (4) Rust , Magazin fuer die gesammte Heilkunde , t. XXXYIH) ?• 507. (5) De alimentorum concoctione , p. 69. PRODUITS MATERIELS HOMOLOGUES. |§^ jBt qu'elle exigeait 0,0416 à 0,0025 de vinîijgre pour |a satm:'^- tion de son alcali , tandis que lu bile d'un Bœuf à jeup qyait une pesanteur spécifique de 1030 , et demandait 0,1250 de vi- naigre pour être saturée. De même aussi, le sperme et rurjç^e, se concentrent dans leurs réservoirs. 4° A la particularité précédente se rattache celle que la concentration d'un liquide est en raison inverse de sa quantité et de la fréquence de son évacuation. Le lait devient aqueux lorsque l'enfont tette trop , le sperme quand l'éjaculation s§ répète trop souvent , l'urine dans le diabète. Suivant Tiede- mann et Gmelin(l), la pesanteur spécifique de la salive était de 1004 chez un fumeur; Mitscherlicli(2) l'a trouvée de 1006 à 1008 chez un homme bien portant qui ne fumait pas , et de 1001 (3) daps, un cas de salivation hystérique, où la quantité de liquide évacuée chaque jour dépassait deux liyres. Nasse assure (4) que la sérosité devient de plus en plus liquide et pauvre en parties constituantes solidifiables à mesure que l'hy- dropisie fait des progrès. 6° Un liquide peut cependant s'épaissir d'une manière anor- male lorsqu'il se trouve arrêté dans les canaux de sécrétion. Ce cas a lieu surtout pour la bile, quand le défaut d'exercice, des passions déprimantes, etc., ralentissent la circulation dans la veine porte, et affail3lissent l'activité vitale du foie. En pa- reille circonstance, on trouve quelquefois la bile épaisse, visqueuse et foncée en couleur , comme du goudron , ou même sèche , solide , semblable à du jus de réglisse , et rem- plissant les conduits biliaires ou la vésicule du fiel , sans que d'ailleurs elle ait perdu sa solubilité dans l'eau. 6° Lorsque l'organe sécrétoire vient à être stimulé , il sé- crète un liquide plus chargé , même dans les cas ou ce der- nier est plus abondant que de coutume. Ainsi, d'après Mit- scherlich, la pesanteur spécifique de la salive sécrétée pen- dant le dîner , était de 100743 pour les alimens n^pus , de (1) Recherches sur la digestion , 1. 1 , p. 5. (2) £oc. czi., p. 50G. {Z)lhid., t. XL, p. 29. (4) Mteckel, Deutsches Archiv, t. II, p. 132. l88 PRODUITS MATERIELS HOMOLOGUES. 100746 pour les substances non excitantes, de 1007S0 pour les matières dures, et de 100790 pour les mets stimulans. 7° Quelque chose d'analogue a lieu dansTinflammation. Un mucus épais est sécrété vers la fin des phlegmasiesde la mem- brane muqueuse, par exemple des yeux, du nez ou des bronches. Dans les inflammations des membranes séreuses , leur sécrétion devient plus riche en matériaux organiques , de sorte qu'elle en contient depuis 0,03 jusqu'à 0,08, et même plus tard 0,12 (1), et que fréquemment alors, par exemple dans l'arachnoïdiie, elle acquiert une consistance gélatineuse. Tandis que la sueur ne renferme, selon Anselmino , que 0,0050 à 0,0140 de substances fixes, la sérosité contenue dans l'ampoule qu'avait fait naître un vésicatoire en contenait,. suivantBrandesetlleimann 0,0601, d'aprèsBostock (2) 0,0714, selon Margueron (3) 0,2200. Chevallier en a trouvé 0,2250 dans celle d'une phlyctène gangreneuse. 8° Lorsque les organes sécrétoires , par exemple le foie ou les reins , sont frappés d'induration , il arrive fort souvent que leur sécrétion est pâle et aqueuse. 9° L'état du sang exerce une notable influence sur l'urine. Quatre à huit heures après le repas, lorsque le sang est le plus riche en substances solides , parce qu'il vient de rece- voir le chyle de nouvelle formation , l'urine est également plus saturée qu'à toute autre époque de la journée ; quand , au contraire , on a beaucoup bu , sans manger , elle est claire comme de l'eau, sans odeur, et presque sans saveur. Nys- ten a trouvé dans la première , qu'on appelle urine du sang, 0,0392 de contenu solide, et dans la seconde, ou l'urine de la boisson, 0,0054 seulement (4). Suivant Rouelle, l'urine rendue immédiatement après le repas est souvent très-char- gée d'eau. 10° La nourriture détermine la qualité du sang , et par là aussi celle de l'urine , non seulement en vertu de sa quantité , (1) Gendiin , Histoire anatomiqiie des inOammalions , t. II , p. 493. (2) Gmelin , Handluch der tlieoretischen Chemie , t. II , p. 1394. (3) John, Chemische Tabeilen des Thierreichs , p. 30. (4) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques , p. 246. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 1 89 mais encore à raison de sa qualité. Le contenu solide de cette humeur excrémentiiielle augmente à la suite d'un repas plus copieux, et surtout après l'usage d'alimens lires du règne ani- mal (J). Suivant Chossat (2), il s'élevait, par once, à neuf grains après du pain, à dix après des légumes avec des œufs, à treize après des œufs, à quatorze après de la viande avec des légumes, à dix-sept après de la viande seule. Du reste, son augmentation se manifeste plus rapidement ( trois heures après le repas ) quand on a mangé de la viande que lorsqu'on a fait usage d'une nourriture végétale (3) , parce que la pre- mière se digère et s'assimile d'une manière plus rapide, et que les portions assimilées sont appliquées plus tôt au service des sécrétions. De même, l'urine des animaux carnivores est plus chargée que celle des herbivores ; d'après Hieronymi (4), celle du Lion, du Tigre et du Léopard, avec une pesanteur spécifique de 1059 à 1076, contenait 0,154 de parties solides, tandis qu'il n'y en avait que 0,060 dans celle de Cheval, dont la pesanteur spécifique variait de 1030 à 1050. L'influence de la qualité des alimens sur la nature d'autres sécrétions ressort du fait bien connu que les Vers à soie nour- ris avec les feuilles de mûrier qui ont poussé dans un terrain sec, donnent une soie plus forte que ceux dont la nourriture a été fournie par des arbres élevés dans un sol humide. 11° Lorsque le sang a une constitution anormale , celle des sécrétions change également. Ainsi, par exemple, la bile est coulante et aqueuse dans la chlorose, l'hydropisie , le ra- chitisme, et eu général dans la diathèse séreuse. 12° L'état du système vasculaire et de l'activité générale de la vie exerce également de l'influence. Pendant les premières périodes de la fièvre et le froid fébrile, les sécrétions sont ou supprimées ou aqueuses, ce qui leur a fait donner l'épithète de crues; dans la crise, oii la vitalité accrue des organes sé- créioires tend à rétablir l'équilibre détruit, elles deviennent (î) Journal de Magendie, t. V, p. 190. (2) Ihid., p. 84. (3) Ihid., p. 147. (4) Berzelius , Traité de ctiimie , t. YII, p. 394. igù PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. plu§ saturées, et sont appelées ciiiies. L'urihè, (|ui ùiipàraî ianl était pâle ou d'iin rouge vif, se charge alors davantage et sètroiible ; le suc nluqueùx, de clair et limpide qu'il était, de- vient épais, mais moins visqueux; la sueur, qui n'existait pas, ou qui était rare et aqueuse , coule abondamment et s'é- paissit un peu, surtout chez les goutteux. 13° Lorsque l'activité vitale est déprimée, les sécrétions soiit souvent un peu épaisses et visqueuses , probablement parce que les parois relâchées des vaisseaux et des conduits peuvent alors laisser passer davantage de substances organi- ques que dans l'étdt normal. Ainsi, dans les fièvres malignes, et peu de temps avant la mort, la peau se couvre d'une sueur froide et gluante , en même lerïips que la salive devient vis- queuse et Thumidilé buccale glutineuse. Dans lés cas d'ato- nie et de paresse des viscères abdominaux , le suc gastrique et le suc intestinal se convertissent en ce qu'on nomme la pi- tuite vitrée , dont l'évacuation allège les symptômes de la ma- ladie. Les sujets affectés d'atonie des poumons crachent des ittucoâités collantes et qui S'attachent partout. Dans le rachi- tisme , le tronc est souvent tuméfié par une grande quantité de sérosité visqueuse et gélatineuse accumulée dans le péri- toine. 14° L'urine devient pâle et aqueuse par l'effet d'un état spasmodiqUe, dans la crainte, la frayeur, Tépilepsie , etc. Le même effet a lieti dans un bain froid , oii sa pesanteur spé- cifique descend jusqu'à 1004 , suivant Chossat (1). 15° D'après le même observateur (2) , la quantité des sub- i^tèfnces solides contenues dans l'urine diminue pendant les iriouvemens du corps , mais augmente ensuite durant le repos. IL Quant à ce qui concerne la proportion de l'eau dans les parties solides , c'est au début de la vie qu'elle est le plus considérable. A partir de ce moment , elle ne cesse plus d'al- ler en diminuant , de sorte que le corps du vieillard se fait remarquer par sa sécheresse , sa rigidité et sa fragilité ( § 685, 1° 588, 9° ). Du reste, la substance du corps est plus hu- (1) Journal de Magendie , t. V, p. 195. (2) IHd., p. 182. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. tj^i midé et plus lâche sous rinfliience d'une nourriture abon- dante et fade , d'une atmosphère humide , d'une transpiration faible, de l'inaction physique et du calme moral. La proportion de l'eau diminue, au contraire, et le corps devient plus sec, sous l'empire d'une nourriture sèche et épicée , d'un air sec, d'un climat âpre , d'une forte consommation, d'efforts mus- culaires violens et d'émotions morales fréquentes. 2. VARIATIONS DANS lE DEGRÉ d' UNION DES PRINCIPES CONStlTtTANS. § 850. La manière plus ou moins solide doiit les principes constituans sont enchaînés I. Donne aux sécrétions un aspect limpide ou trouble. Si l'union est forte et la combinaison intime , le liquide est clair, même alors qu'il contient une quantité extraordinaire de sub- stances solides , de manière qu'on ne peut tirer de son appa- rence aucune induction certaine par rapport à son degré de concentration. Il est trouble quand les matériaux constituans ne sont point unis de manière à représenter un composé ho- rhogènë , sans cependant être assez libres pour pouvoir se sé- parer , de sorte qu'ils prennent en quelque sorte un terme moyen et demeurent en suspension. Il arrive quelquefois qu'on trouve la synovie trouble dans la goutte, et la sérosité dans l'hydropisie et l'inflammation chronique des membranes sé- reuses. Mais on rencontre principalement cet état dans l'u- rine , où il lient surtout à l'insuffisance des matériaux acides. 1° Tandis que l'urine contenue dans le bassinet est hmpide, celle qu'on exprime de la substance des reins est trouble. Il paraît donc que la combinaison des principes constituans de ce liquida devient plus intime à mesure qu'il parcourt les con- duits urinifères de la substance médullaire , dont le calibre va toujours en diminuant. 2° Chez les Mammifères carnivores, l'urine est acide, claire et fort odorante ; elle forme un dépôt lorsqu'on la laisse tran- quille, et passe promptement à la putréfaction. Celle des her- bivores, les Ruminans en particulier, est alcaline, visqueuse, moins encline à se putréfier , et rendue trouble par les sels 192 PRODUITS MATÉRIELS HOMOIOGUES. terreux qui y prédominent (1). Celle de l'Éléphant et du Rhi- nocéros fait effervescence avec les acides , qui l'éclaircissent , suivant Vogel (2). 3° L'urine paraît ne point arriver, quand Tanimal exécute des mouvemens violens, à l'intimité de combinaison qu'elle offre en temps ordinaire. Celle des Chevaux est ordinairement claire tant qu'on les tient à l'écurie, et trouble lorsqu'ils ont été échauffés par la course (3). 4° Au point culminant des fièvres et des inflammations , l'urine est limpide et d'un rouge vif; toutes les fois , au con- traire , que l'assimilation se fait mal , que l'hématose s'ac- complit d'une manière imparfaite , et qu'il y a atonie , ce li- quide est trouble, et il ne s'éclaircit même pas après avoir formé un dépôt. L'urine est épaissse, argileuse, semblable à celle desruminans , ou jumenteuse, dans les fièvres gastriques et putrides, lactescente ou semblable à du petit-lait et muci- lagineuse dans les scrofules et l'hydropisie. IL Une séparation a lieu quand le liquide est trop chargé de substances peu solubles , ou ne contient point assez de celles qui servent d'intermédiaire à la dissolution. Il paraît que le premier cas a lieu dans l'inflammation des organes sé- crétoires , puisque alors on voit quelquefois par exemple la sérosité vésiculaire déposer des flocons^ la synovie_ donner im précipité visqueux, ou le suc mucus se partager en un li- quide limpide et des grumeaux de mucus. Dans une saliva- tion survenue sans cause appréciable , que de Buch (4) a ob- servée , la salive produisait un sédiment dès qu'elle se refroi- dissait. Ce phénomène tenait incontestablement à ce qu'elle renfermait une quantité extraordinaire d'albumine et point d'alcali ; mais peut-être se rattachait-il aussi en partie à la prédominance des sels calcaires; car la salive réagissait à la manière des acides , la potasse caustique empêchait la forma- (d) Reil , ^rcMv , t. II , p. 474. — Froviep , Notize^i , t. XIII , p. 443. (2) Beizelins , Traité de chimie , t. VII, p. Sgo. (3) Blaiiiville, Couisde pliysiologie générale, t. III, p. 465. (4) Schever, Mlijumeincs Jour/nd dcr Chemie , l, V, p. 440. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES, IqS tion du précipité, et redissolvait celui qui s'était déjà produit ; l'acide oxalique en déterminait un fort abondant. Il est plus commun d'observer, même dans l'état normal , la séparation des matériaux de l'urine , d'où résultent des pellicules, des flocons, un nuage ou énéorème, et un sédiment. 5° Une pellicule reflétant les couleurs de l'iris se forme quelquefois à la surface de l'urine , dans les maladies com- somptives. Elle est produite par du phosphate ammoniaco- magnésien qui , n'étant soluble qu'à la faveur d'un acide libre, se sépare dès que l'urine devient alcalescente. 6° Des flocons blancs , qui gagnent peu à peu le fond du vase , consistent soit en mucus (comme dans le catarrhe vésical, soit en une substance albumineuse (comme dans beaucoup de maladies , chroniques surtout , qui sont accompagnées d'un trouble de l'assimilation) et du phosphate ammoniaco-magné- sien , avec un peu de phosphate calcaire , circonstance dans laquelle l'urine devient épaisse et alcalescente. 7° Un petit nuage qui se forme à la surface , s'atFaisse peu à peu , reste pendant quelque temps suspendu au milieu du liquide , enfin gagne le fond du vase et s'y résout en un sé- diment , apparaît surtout pendant la crise des fièvres , et doit naissance à des matériaux insolubles divers , qu'un peu de mucus aglomère ensemble et tient en suspension pendant un certain laps de temps. S» L'urine d'un homme bien portant, lorsqu'elle est abon- dante en principes conslituans susceptibles de prendre la forme solide (§ 849 , 9°), produit , en se refroidissant, un sé- diment , qui est d'abord gris , devient ensuite d'un rouge- pàle, prend la forme de paillettes cristallines en se desséchant, et consiste principalement en acide urique. Ce sédiment aug- mente sous l'influence du régime animal , des mouvemens violens , des chaleurs de l'été , des troubles de la digestion et des veilles nocturnes ; la sueur et la diarrhée le diminuent par antagonisme (1). Il manque dans les fièvres pendant la pre- mière période , paraît plus tard, mais avec lenteur seulement, (l)Reil, ArcMv, t. II, p. 172, 184. YIU, l3 194 PRODtlTS MATERIELS HOMOLOGUES. et devient fort abondant durant la crise , après toutefois s'être montré d'abord sous la forme d'un énéorème. 9° Le sédiment pulvérulent est la plupart du temps d'un rouge brun {grisâtre , ou d'un rouge briqueté , dans les fièvres, surtout gastriques , comme aussi dans les affections chroni- ques du bas-venlre , et principalement dans la diathèse ar- thritique. Il se compose spécialement d'urates et de mucus; d'après Nysten(4), d'acide urique, de mucus et de phos- phate calcaire ; suivant Prout (2) , d'urates et de purpurates d'ammoniaque et de soude, mêlés quelquefois avec des phos- phates , ou même avec de l'acide nitrique ; selon Wetzler (3), d'urate de soude, avec des phosphates de chaux et de magné- sie ; suivant Frommherz et Gugert (4) , d'urate de soude , d'acide urique , de mucus et d'une matière extractive rose , qui est soluble dans l'alcool. iO" Les diverses nuances du rouge ne paraissent point an- noncer de différences essentielles dans la composition ; toutes les fois qu'on les observe , il y a des urales. Le précipité rose est composé , suivant Scheele , d'acide urique, avec un peu de phosphate calcaire; selon Proust, d'a- cide rosacique , c'est-à-dire d'urate d'ammoniaque ; d'après Prout (5) , on le rencontre dans l'hydropisie , la fièvre hecti- que et les maladies chroniques du bas ventre , pariiculière- ment du foie, et il se compose d'urate et de purpurate d'ammo- niaque , sans matière colorante de l'urine. Brande (6) , qui l'a observé aussi chez les sujets atteints de maladies du foie , chez les ivrognes de profession , et dans les maladies inflam- matoires , le dit produit par un mélange d'acide urique avec des phosphates. Un sédiment jaune ou châtain se voit quelquefois, au dire de (1) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques , p. 23S. (2) Traité de la gravelle, p. 30 , 413. (3) Beitrœge zur Kenntniss des menschlichen Harns und der Enstehung der Harnsteine, p. 19. (/i) Schweigger, Journal fuer CJiemie , t. L , p. 200. (5) Traité de la gravelle , p. 473. (6) Meckel , Deutsches ArcUv , X, IV, p. 601. PRODUITS MATÉRIELS HOMOtOGTJES. IqS Prout (1)^ dans l'urine des personnes bien portantes , après quelque erreur de régime ; il est constitué par de l'urale d'am- moniaque, mêlé ordinairement avec des phosphates, ou même avec de l'urate de soude. Un sédiment brun , déposé par l'urine de plithisiques , d'hydropiques et de malades atteints d'affections chroniques du foie , se composait , d'après le même observateur , d'u- rate et de purpurale d'ammoniaque (2). Wetzier a trouvé qu'un sédiment de cette teinte consistait en urate de sou- de (3). Une poudre d'un jaune rongeâtre, précipitée par l'u- rine d'un malade affecté de fièvre nerveuse lente , était com- posée, suivant Frommherz et Gugert (4), d'acide urique , avec peu de matière colorante et de mucus. 11° Un sédiment blanc et pulvérulent, dans l'urine, se compose principalement de sels terreux. On le rencontre sur- tout , d'après Brande (5) , dans es cas où lu digestion a été troublée par des écarts de régime, notamment après l'usage des alimens farineux , chez les personnes qui ont pris une grande quantité de remèdes alcalins , et lorsque la sécrétion biliaire s'exécute d'une manière irrégulière. Prout y a trouvé du phosphate calcaire, avec un peu de phosphate ammoniaco- magnésien, et l'urine avait une grande tendance à tomber en putréfaction (6). Frommherz et Gugert (7) ont obtenu les mê- mes résultats. 12° Le sédiment cristallin , qui constitue la gravelle pro- prement dite, est la plupart du temps rouge et grenu. Ordi- nairement il se produit dans l'intérieur même des voies urinai- res. Il est composé d'acide urique presque pur, qui n'a pu rester dissous dans l'urine à cause de sa grande abondance, ou qui en a été précipité par un acide plus fort (phosphori- que, suif urique, nitrique ou carbonique , libre). (4) Traité de la gravelle , p. 167. (2) Ibid., p. 470. (3) Loc. cit., p. 49, (4) Loc. cit., p. 203. (5) Mecltel , Deutsches Archiv , t. IV, p. 597. (6) Traité de la gi-avelle , p. 168. (7) Loc, cit., p. 205, 196 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. J3° Des paillettes blanches, brillantes, cristallines, se précipitent quelquefois de l'urine , pendant qu'elle se refroi- dit; celle-ci contient alors beaucoup d'urée, elle devient un peu alcalescente , et passe à la putréfaction. Suivant Prout , ces paillettes doivent naissance à du phosphate ammoniaco- magnésien. Outre ce sel, Guéranger (1) y a trouvé aussi du phosphate d'ammoniaque , du phosphate de chaux et de la si- lice , avec des traces d'acide urique et de matière organique. 14° Les grains d'un verd noirâtre , qui s'observent assez rarement, sont dus, suivant Prout , à de l'oxalate calcaire. 3. VARIATIONS DANS lE CARACTÈRE ACIDE OU AlCAtlN DES SÉCRÉTIONS. § 851. Si la nature acide ou alcaline d'un liquide sécré- toire est trop peu constante pour que nous puissions la consi- dérer comme un caractère essentiel (§ 835 , I), il importe de rechercher quelle est la cause à laquelle se rattachent ces ■variations. Mais nos connaissances à leur égard sont fort im- parfaites , surtout en ce qui concerne les états morbides dans lesquels les sécrétions exercent des réactions acides ou alca- lines ; car, d'un côté , on s'est plus attaché à la forme de la maladie qu'à ce qui en constituait l'essence , et , d'un autre côté, on n'a eu aucun égard, ni à ses périodes , ni aux in- fluences auxquelles l'économie se trouve alors soumise. D'ail- leurs, l'acidité et l'alcalescence des humeurs varient tellement, et chez les divers individus , et chez un même sujet, en des temps différons , sans qu'on aperçoive aucun changement no- table dans les circonstances , qu'il est fort difficile de découvrir la cause déterminante , et que , dans beaucoup de cas , nous sommes réduits à faire provisoirement dépendre ces varia- tions du caractère d'oscillation qui domine partout dans la vie. Ainsi , par exemple , Balley (2) a trouvé , chez une fille at- teinte de phthisie commençante , que l'urine était souvent d'une neutralité parfaite, et dans la même journée qu'il lui arri- (1), Journal de chimie médicale , t. VI , p. 131. (2) Fioriep , Notizen, t. XXV, p. 14. , PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. I97 vaîtquelquefois d'acquérir une acidité extrême. Nous ne devons donc point être surpris des contradictions que nous remar- quons entre les assertions des auteurs qui ont voulu parler de l'état d'une sécrétion , dans une maladie quelconque , après s'être contentés d'en observer une seule fois les produits. De toutes les opinions , la moins fondée est celle de Donné , qui a prétendu que les sécrétions, en général, avaient un carac- tère d'acidité dans les inflammations. I. La sérosité devient fortement alcaline par l'inflamma- tion de ses organes sécrétoires (1). Tel est aussi le caractère de celle que contiennent les ampoules provoquées par les vé- sicatoires ; elle verdit les couleurs bleues végétales, et Mar- gueron y a trouvé 0,0100 de soude libre. II. Dans l'inflammation des membranes muqueuses , le mu- cus exerce également des réactions alcalines, selon Nau- che (2). Gendrin n'admet d'exception à cet égard que pour le suc gastrique et le suc intestinal (0). Fourcroy et Vauquelin n'ont trouvé le mucus nasal alcalin, dans le coryza, qu'au début de la maladie. III. Le suc gastrique 1" N'avait été trouvé acide, par Spallanzani(4), que chez les oiseaux herbivores, et , sur lui-même , qu'après qu'il avait fait usage d'alimens lires du règne végétal. Mais Carminati a reconnu que ce suc l'est également chez les animaux carnas- siers, qu'il l'est fréquemment chez lesRuminans, et toujours chez les Veaux. Brugnatclli l'a trouvé acide chez les carnivo- res, comme chez les herbivores, à l'exception toutefois de celui qui existait dans la panse. Werner (5) a remarqué, chez lesRuminans, que le suc du bonnet et du feuillet est peu acide, mais que celui de la caillette l'est fortement. Schultze (6), Leuret et Lassaigne (7) ont trouvé le suc gastrique constam- (1) Gendrin , Histoire anatomique des inflammations, t. II, p. 493, (2) Meckel, Deutsclies Archiv , t. IV, p. 157, {i)Loc.cit., t, 11, p. 505. (4) Expériences sur la digestion , p. 696. (5) Scherer, Allgemeines Journal der Chemie , t. VIII, p. 29. (6) Systematisches Handbuch der vergleichenden Anatomie , p. 135. (7) Recherches physiologiques et chimiques pour seçvir à l'histoire de la digestion , p. 114» 198 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. ment acide dans les quatre classes d'animaux vertébrés et chez l'homme. Le suc gastrique que Montègre (l) vomissait le matin , à jeun , était la plupart du temps acide. Le suc in- testinal a été également trouvé acide , surtout dans le eœcum (2). L'un et l'autre suc rougissent les couleurs bleues végétales etoxident même les métaux, en vertu de l'acide li- bre qu'ils contiennent. Suivant Brugnalelli, le suc gastrique de la Chouetie dissolvait le fer, le cuivre etl'étain , et en plus grande quantité dans l'iniérieur de Teslomac que hors de ce viscère. Les matières fécales d'un homme devinrent bleues après qu'il eut avalé du, cuivre, et noires après qu'il eut introduit du fer dans ses organes digestifs. Le fer qui a été avalé porte des traces d'oxidation à sa sortie , comme l'a ob- servé, entre autres , Fox (3). Un homme ayant pris du mer- cure métallique, Moscati(4) trouva, dans ses déjections, une quantité considérable de ce métal, réduit à l'état d'oxidule et de poudre noire. Du mercure qu'on avait mis dans la panse d'un Veau , au moment où il venait d'être tué , était également converti presque en entier en oxidule , au bout de douze heures. 2* L'acide qui produit ces effets paraît n'être pas tou- jours le même. L'acide hydrochlorique est celui qu'on a ren- contré le p'us souvent. Déjà Scopoli et Brugnatelli avaient re- marqué que le nitrate d'argent donne un précipité de chlorure dans le suc gastrique de Corneille. Piout (5) a tiouvé de l'a- cide hydrochlorique libre chez l'Homme, le Lapin, le Lièvre, les Veaux , les Chevaux et les Chiens ; Children (6) , Dungli- son (7) et Silliman (8) chez l'Homme ; Tiedemann et Gmelin (9) (1) Expériences sur la digestion dans l'homme , p. 20 , 22 , 28 , 31 , 33. (2) Tiedemann et Giuelin , Recherches expérimentales sur la digestion , t,I,p.474. (3) Froriep , Notizen, t. XXXVII, p. 208, (4) Ilufeland , Neues Journal der auslœndischen medicvnisch-cMrur^ gischen Literatur, t. VIII, cah. II , p. 78. (5) Philos. Trans., 1824, p. 49. (6) Ibid., p. 54. (7) Beaumont , Neue F'ersuche und Beohachtungen uçber dén Magensaft •und die Physiologie der Ferdanung , p. 49. (8) Ibid., p. 51. (9) Recherches expérimentales sur la digestion , t. I , p. 166. PRODUITS MATÉRIEtS HOMOtOGUES. I99 chez les Chevaux et les Chiens. L'acide lactique ou l'acide acétique a été vu quelquefois par Tiedemann et Gmelin , sur- tout chez les animaux vertébrés inférieurs ; par Dunglison , chez l'Homme. Leuret et Lassaigne (1) l'ont rencontré d'une manière constante. Treviranus (i) admettait que c'est lui qui prédomine. Enfin Montègre croyait à sa présence (3) , quoi- qu'il n'eût pu l'obtenir par la distillation. Tiedemann et Gme- lin ont remarqué parfois des traces d'acide butyrique chez les Chevaux , etProut (4) a trouvé de l'acide carbonique chez un Pigeon. On a cru découvrir aussi des acides fixes ; Macquart et Vauquelin admettaient l'acide phospliorique , et Prout a quelquefois rencontré , sinon cet acide, du moins un autre qui lui ressemble ; Treviranus (5) présumait , d'après les ex- périences de Brugnatelli, corroborées encore par d'auires observations , que le suc gastrique renferme aussi de l'acide hydrofluorique. Enfin Schultz (6) dit avoir trouvé que l'acide des animaux carnivores est fixe et non susceptible de passer à la distillation ; que celui des Chevaux est fixe, quand ces animaux ont mangé du foin, et volatil quand ils ont pris de l'a- voine; que celui des Ruminans est volatil dans la panse et fixe dans la caillette ; que partout où il est fixe , on peut le vola- tiliser et le distiller, en le neutralisant avec du carbonate de potasse, puis ajoutant de l'acide phosphorique , et que cet acide volatil libre n'est autre que l'acide acétique , attendu que l'acide hydrochlorique qu'on rencontre est toujours com- biné et neutralisé, 3° Spallanzani pensait que l'acide du suc gastrique pro- vient des substances végétales qui ont été introduites dans l'estomac. Brugnatelli a léfuté cette hypothèse par ses obser- vations sur des animaux carnivores , et soutenu que l'acide est indépendant de la nourriture, parce qu'il le retrouva chez un (1) Recherches physiologiques et chimiques pour servir à l'histoire, de la digestion , p. 417. (2) Biologie , t. VI, p. 358. (3) hoc, cit., p. 45. (4) Schweigger, Journal fuer Chemie , t. XXVIII , p.' 226. (5) Lac. cit., p. 360. (6) De alimentorum concoctione , p. 47, 97. 200 PRODUITS MATÉRIEL^ HOMOLOGUES. Chat nourri de végétaux pendant dix jours , tout aussi bien que quand l'animal n'avait pris que des alimens de nature animale. Comme le suc fjaslrique est tantôt acide, tantôt, surtout chez les personnes à jeun , neutre ou alcalin (§ 820, 3»), ce fait devait conduire à d'autres explications. Ainsi Prout admit que le suc gastrique , neutre en tout autre temps, devient acide au commencement de la digestion. Tiedemann et Gmelin (1) établirent , par leurs recherches, que cette modification dépend d'une exaltation de l'activité vitale de l'estomac ; le suc gastrique de Chiens qui n'avaient rien mangé depuis quinze heures avait une saveur faiblement alcaline et des réactions légèrement acides , et le suc intesti- nal ne contenait pas la moindre trace d'acide ; mais ces deux sucs étaient manifestement acides chez des Chiens dans l'estomac desquels on introduisait des cailloux siliceux ou des pierres calcaires, après les avoir laissés dix-huit, trente- six ou quarante heures sans nourriture (2) ; la réaction acide était très-forte lorsqu'on avait forcé ces animaux d'avaler du poivre (3). Celte opinion s'accorde avec d'autres expériences , d'après lesquelles l'alcalescence ou l'acidité de différens liquides dé- pend de l'état vital des organes chargés de les sécréter. Beau- mont (4) s'est convaincu , par des observations continuées pendant plusieurs années sur l'homme vivant, que le suc gastrique est neutre" quand l'estomac se trouve vide et non stimulé, mais qu'il devient acide dès que des alimens pénè- trent dans ce viscère , ou qu'on l'irrite d'une manière mécani- que , par exemple , en y introduisant une canule de gomme élastique. Eberle (5) a obtenu un résultat semblable ; il assure en même temps (6) que quand l'estomac vient à être rempli de (1) Eecherches expérimentales sur la digestion , t, I , p. 163- (2) Ibid.,p.M. (3) Ibid., p. 99. (4) Neue Versuclie und Bcohachtungen ueher den Magensaft , p. 69. (5) Physiologie dcr V erdav.unjj nacli l^ersuchen auf natuerlichén und Jiuenstlichcm Wegc , p, 44 , 47. (6) Ibid., p. 445. « PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 201 substances difficiles à dij^érer ou indigestes , par exemple , de foin chez un Veau qui tette , ou de fibrine chez un Pigeon , le suc gastrique acquiert d'abord une acidité bien prononcée, mais que, quand le séjour de ces substances se prolonge, il devient neutre , qu'il finit même par acquérir de l'alcales- cence , et que cette qualité alcaline se manifeste également lorsque l'animal a été renfermé pendant longtemps ou livré aux tourmens de la vivisection. Aussi Eberle (1) attribue-t-il l'acidité du suc gastrique et du suc intestinal à l'influence des nerfs, sans d'ailleurs alléguer d'argumens suffisans à l'appui de cette hypothèse, contre laquelle s'élèvent les observations, rapportées plus haut (§ 847, 3°), d'animaux dont l'estomac sécrétait du suc gastrique acide après la section des nerfs pneumogastriques. Montègre (2) a proposé une théorie plus obscure. Il pense que les alimens deviennent acides en vertu d'une action indé- finissable de l'estomac , et qu'ils communiquent celte acidité à la salive avalée , laquelle , suivant lui, est identique avec le suc gastrique. Schultz (3) prétend également que l'acide se développe dans les alimens seuls , l'organisme opposant des forces chi- miques à leur caractère chimique , afin de détruire la combi- naison des substances dont ils sont composés. Dans son opinion^ le chyme devient acide de cette manière par l'action de la sa- live neutre ou alcaline , et il acquiert (4) une activité d'au- tant plus prononcée que les alimens introduits dans l'estomac sont plus nourrissans et plus faciles à digérer ; mais il ajoute que l'acide développé de cette manière pénètre le tissu de l'estomac , en sorte que ce dernier conserve son acidité même après avoir été lavé , comme l'atteste la propriété qu'il pos- sède alors de faire coaguler le lait. Schultz s'appuie principa- lement sur ce dernier phénomène , parce qu'il a remarqué que le siic gastrique et la salive coagulaient le lait, même (1)/Wi.,p. 343. (2) Lnc. cit., p. 44. (3)Zoc. cit., p. dOl. (4) Loc. cit., p. 97. âOa PRODUITS MATERIELS HOMOLOGUES. quand ils exerçaient des réactions alcalines (1), effet qu'il compare à la dissolution des alimens (2) ; mais, de même que la coagulation de l'albumine ne peut point être considérée comme une acidification , quoiqu'elle soit susceptible d'être déterminée par des acides, de mêaie aussi on ne peut dire que celle dulait consiste en une acidification, puisqu'elle est égale- ment provoquée par diverses substances végétales neutres (§520, 4"), SchuUz (3) coniesle l'exactitude des expériences de Tiedemann et Gmelin , et prétend que l'acide trouvé par ces observateurs ne provenait pas de l'irritation de l'estomac causée par des cailloux avalés, mais dépendait d'une cer- taine quantité de chyme à laquelle ils n'avaient point fait d'attention , de sorte que, suivant lui, des Chiens qui n'a- vaient rien pris depuis vingt-quatre heures , n'auraient point encore été à jeun. Ce sont là des assertions arbitraires, qui ne peuvent renverser les résultats d'observations faites avec soin. D'ailleurs , c'est précisément dans l'appendice cœcal , où ja- mais il ne pénètre de chyme, que l'acidité du suc intestinal est le plus prononcée, parce que l'acide n'y peut point être neutralisé par la bile (4), et ce seul fait suffirait pour renver- ser de fond en comble la théorie de Schultz. 40 Nulle part une prédominance d'acide ne se manifeste avec tant de facilité , aussi fréquemment, et à un si haut de- gré, que dans le suc gastrique. Les personnes qui ont la di- gestion languissante , éprouvent des rapports acides lors- qu'elles mangent beaucoup de pain et d'autres substances vé- gétales , comme aussi lorsqu'elles font usa{,^e de la graisse , qui passe alors au rance. Cette acidité des premières voies s'observe souvent chez les enfans qui font leurs dents , ou qui sont atteints de scrofules , chez les femmes enceintes et hys- tériques, chez les hypochondriaques , chez ceux qui ont le foie ou la rate malade. Elle est portée quelquefois à un tel point que , dans les vomissemens , le suc gastrique brèle la gorge (1) Loc. cit., p. 54. (2) Loc. cit., p. 402. (3) Loc. cit., p. 99, (4) Gmelin , Handbuch der theoretischen Chemie , t. II , p. 151S. ' PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 2o5 comme pourrait le faire un acide minéral fort, agace les dents, fait effervescence avec le carbonate calcaire et oxide les métaux. IV. La sueur a été trouvée fréquemment acide, par exem- ple chez les femmes en couches , où Ion voit , surtout d'a- 'près Anselmino (1), s'accroître la quantité de l'acide acétique ou de l'acide lactique , dans les scrofules , le rachitisme , la miliaire et autres affections exanthématiques. Elle a été vue présentant le caractère ammoniacal pendant la crise de cer- taines fièvres, et , d'après Anselmino (2), durant un accès de podagre. Cependant Nauche (3) a émis une assertion trop va- gue en disant que son acidité augmente dans le rhumatisme , et diminue dans les affections nerveuses, qu'elle devient même alcaline dans ce dernier cas ; car Gaertner (4) a remarqué que la sueur crilique des fièvres rhumatismales, comme aussi celle de la fièvre de lait et de la rougeole, ne réagissait point à la manière des acides, et d'un autre côté on observe quel- quefois des sueurs acides dans les spasmes. Suivant Eberle (5), le papier de tournesol, appliqué sur la peau, quand elle avait, ou été frottée jusqu'au point de devenir rouge, ou enflammée par l'action d'un vésicatoire, rougissait plus qu'en toute autre circonstance ; lorsque le vésicatoire avait commencé à faire naître des ampoules, le papier bleu ne rougissait plus, et la liqueur contenue dans la phlyciène se comportait à la ma- nière des acides. Cependant il ne faudrait pas conclure de cette expérience que la sécrétion cutanée devient plus acide sous l'influence d'une irritation modérée , et alcaline quand l'irritation est portée plus loin (6) ; car la sérosité contenue dans les ampoules de vésicatoire est alcaline en vertu d'une transformation du sang (§ 854) qui a lieu quand l'activité vi- tale de l'organe cutané se trouve non pas épuisée par la surexcitation, mais véritablement accrue et exaltée. (1) Zeitschrift fuer Physiologie , t. II, p. 323. (2) Lac. cit., p. 330. (3) Meckel, Deutsches Archiv , t. IV, p. 157. (4) Reil, Archiv, t. II , p. 180. (5) Physiologie der l^erdauung /^, 48. (6) Ibid., p. 146. 204 PRODUITS MATÉRIELS BOMOIOGUES. V. La salive 5° Est ordinairement alcaline chez la plupart des hommes , mais elle a le caractère acide chez quelques individus. Celle qui s'écoulait d'une fistule parotidienne , et dont Mitscher- lich (1) a étudié les changemens avec soin, était acide la plu- part du temps , mais devenait fortement alcaline pendant le boire et le manger : dès la première bouchée , la réaction acide faisait place à la réaction alcaline , à laquelle il n'arrivait que parfois de durer encore quelque temps après le repas. L'observation antérieurement faite par Schultze (2) que , quand on active la sécrétion de la salive en chatouillant le pala is , ce liquide devient , chez beaucoup d'hommes , alca- lin, d'acide ou neutre qu'il était jusqu'alors, semble égale- ment annoncer que Talcalescence est le résultat d'une exal- tation de l'activité vitale des organes chargés de le sécréter. Du reste , il est possible qu'on n'ait quelquefois considéré la salive comme un corps neutre , que parce qu'on n'employait point un réactif assez sensible. Ainsi Eberle assure (3) que quand ce liquide ne bleuissait pas le papier de tournesol rouge, il verdissait fortement et sur-le-champ du papier rougi avec le suc d'airelle. 6° La salive est parfois très acide dans l'hypochondrie et l'hystérie. Fiedler (4) prétend que celle d'un Chien enragé oxidait le cuivre et faisait effervescence avec l'ammoniaque. VL Le lait est alcalin lorsque sa sécrétion commence , et l'acide lactique Hbre ne s'y développe que quand lui-même devient plus parfait. D'après Lassaigne (6), celui des Vaches est encore alcalin quarante jours avant le vêlage ; mais six jours plus tard il est un peu acide , et il le devient fortement lorsque l'animal a mis bas. Hermbstsedt (6) prétend qu'il n'y (1) Bust, Magasin fuer die gesammte Heilkunde , t. XXVIII, p. 506. (2) Systematischcs Lehrhiich der vergleichetideti Ânatomie , p. d35. (3) Physiologie der f^erdauung nach Versuclien auf natuerlichen und Knentlichen J-Vege , p. 31. (4) Schreger, Fluidorum corporis animalis chemiœ nosologicœ spéci- men , p. 42. (5) Journal de chimie médicale, t. VIII, p. 143, (6) John , ChcmiscJie Tahellen des Thierreichs , p. 92. PRODUITS MATERIELS HOMOLOGUES* 503 a que le lait du matin qui réagisse à la manière des acides ^ de sorte que Tacidité se développerait par l'effet du séjour prolongé dans la téline. yil. L'urine, 7° Considérée d'une manière générale , contient d'autant plus d'acide libre , qu'elle est plus saturée. Balley a remar- qué (1) que presque toujours l'urine acide avait une pesan- teur spécifique supérieure à celle de l'urine neutre. Aussi l'urine de la digestion rougit-elle plus fortement le tournesol que celle de la boisson (2); celle qu'on rend le matin, que celle qu'on évacue avant le dîner ( § 606, 5°); celle des vieil- lards que celle des enfans ( § 535, 6°; 540 , 1"; 550, 5°; 587, 11°), comme Ggertner(3), entre autres, s'en est convaincu. 8° Ce liquide a coutume d'être alcalin chez les animaux herbivores; il l'était également chez des Chiens, quand ces animaux avaient été soumis pendant quelque temps à un ré- gime non azoté (4). 9° Brodie (5), Home (6) et Hankel ont observé que l'urine contenait de l'ammoniaque libre après les lésions ou les com- motions de la moelle épinière. Naveau (7) dit, au contraire , l'avoir trouvée fortement acide, chez des Chiens et des Lapins, après la section de la moelle épinière à la région dorsale ou lombaire , de même qu'après les irritations mécaniques ou galvaniques des nerfs grand sympathique et pneumo-gastri- que , ou des nerfs rénaux , et alcaline après la section de ces nerfs. 10° On l'a trouvée alcaline dans plusieurs circonstances , lorsque le suc gastrique acide était sécrété en plus grande quantité , notamment dans les scrofules et les maladies ver- (1) Fvoriep , NotUen , t. XXV, p. 14. (2)Nysten, Recherches de physiologie et de chimie pathologiques, î). 249. (3) Reil , JrcUv , t. II , p. 178 , 183. (4) Dictionnaire de médecine et de chirurgie pratiques , art. Geavelik , par M. Magendie , t. IX , p. 242 (5) Gerson , Magazin des auslœndischen Literatur, t. IV, p. S4S. (6) Ihid., t. XV, p. 108. ^7) Expérimenta quœdant circa urinœ sfcretionem > p. 24-32. 206 PRODUITS MATÉRIELS HOMOÈOGUES. mineuses (1), dans le vomissement chronique qui provient de la migraine ou d'un squirrhe à l'estomac (2), et dans d'autres maladies où la salive et le suc gastrique contenaient beaucoup d'acide libre (3). On a observé aussi son alcalescence dans l'hydropisie (4), la jaunisse et la suppuration (5), ou diverses maladies des voies urinaires (6), ainsi que dans les maladies putrides , suivant Parmentier et Orfila(7). Berthollet a fait sur lui-même la remarque, confirmée par Nysten (8) et parNau- che (9), que l'urine perd son acidité quelque temps avant l'invasion d'un accès de goutte, qu'elle la recouvre pendant l'accès même, et qu'elle devient même alors beaucoup plus acide qu'elle ne l'est dans l'état de parfaite santé. De même aussi, dans les fièvres, elle est d'abord moins acide; mais, plus tard , elle acquiert une acidité très-prononcée , surtout lorsqu'elle prend le caractère critique. On Ta trouvée fort acide particulièrement dans la synoque elles inflammations, la péritonite, par exemple (10). ^ 4. VARIATIONS DANS lA ÎROPORTIOU DES SEtS. § 852. La proportion des principes constituans salins varie, I. Dans l'urine , 1° En raison de la nourriture. Suivant "Rouelle et Coindet, l'urine des Mammifères herbivores contient , au lieu de phos- phates, des carbonates. Les phosphates ne se rencontrent que chez les Mammifères carnivores, et manquent chez ceux qu'on a nourris pendant quelque temps avec des substances (d) Mectel , Deutsches Archiv , 1. 11 , p. 180. (2) Scliweigger, Journal fuer Chemie , t. L , p. 205. (3) Gmelin , Handbuch der theoretischen Chemie , t. II, p, 4398. (4) Nysten , Eecherches de ptijsiologie et de chimie pathologiques ï p. 256. (5) Mecltel , Deutsches Archiv , t. IV,"p. 457. (6) Nysten, loc. cit., p. 244. (7) Blain\ille, Cours de physiologie générale, t. III, p. 493. (8) Loc. cit., p. 244. (9) Meckel, Deutsches Archiv, t. IV, p. 157. (10) Nysten , loc. cit., p. 252. PRODUITS MATÉRIEIS HOMOLOGUES. 2O7 non azotées (1). Ils sont toujours accompngnés d'un acide libre, tandis que l'urine qui renl^rme des carbonates est al^ caîesceiite. 2° L'urine alcaline des animaux herbivores, notamment des bêtes bovines d'après Rouelle , des Chevaux et des Cha- meaux selon Chevreul , des Lapins , des Cochons d'Inde et des Castors suivant Vauquelin , des Rhinocéros selon Vogel ^ dépose du carbonate de chaux et du carbonate de ma{»nésie. Lorsque l'urine humaine est trop peu charjjée d'acide, tantôt elle ne contient point du tout de phosphates terreux, comme il arrive, par exemple, selon BerthoUet, avant un accès de goutte , qui fait disparaître l'acide libre , tantôt l'ammoniaquCj qui se dégat^e de l'urée en excès, la rend alcahne ou neutre, et fait précipiter des phosphates calcaire et ammoniaco-ma- gnésien , parce que l'ammoniaque s'empare de l'acide phos- phorique excédant, par l'intermédiaire duquel ces deux sels étaient maintenus en dissolution. Les dépôts de ce genre (§850, 11°, J3°) ont lieu fréquemment, selon Prout, à la suite d'émotions déprimantes. On dit qu'ils se composent prin- cipalement de phosphate calcaire après les commotions de la moelle épinière, ou dans les cas d'affection sympathique des reins par suhe de la présence d'un corps étranger dans la vessie ou l'urètre , et qu'ils contiennent surtout du phosphate ammoniaco-magnésien chez les individus qui ont fait un grand usage d'acides végétaux. D'ailleurs, ils sont accompagnés, sui- vant Prout, d'une mauvaise digestion, de douleurs dans les reins , d'amaigrissement et de faiblesse générale. 3° L'urine émise pendant un accès de spasme est , comme celle de la boisson, plus pauvre en parties constituantes so- lides et par conséquent en sels ; mais Nysten prétend que la diminution porte principalement sur les chlorures et les phosphates alcalins , moins sur les sulfates et les sels ter- reux (2). Du reste, la proportion des sels relativement à la masse des matériaux solides est plus considérable dans l'u- (d) Magendie, Dictionnaire de méd. et de chinirg. prat., t. IX, p. 242. (2) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques', p, 250, 2e8 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. rine de îa boisson (1) que dans celle de la digestion , ou , pour employer d'autres termes, elle est, comparativement à cette dernière, plus pauvre en substances organiques qu'en sels. RoUo prétendait que, dans les affections spasmodiques , l'u- rine est dépouillée de tous principes organiques , et ne con- tient plus que des sels (2). 4° Chez une femme qui était atteinte d'une maladie du bas- ventre , Peschier (3) a trouvé le chlorure de sodium remplacé par du chlorure de potassium , même après la guérison. 5» L'urine a des rapports avec la formation des os , sous le point de vue des parties terreuses qu'elle contient. Suivant Fourcroy et Vauquelin , le phosphate de magnésie qui s'in- troduit dans le corps de l'homme , avec les alimens , est éli- miné par la voie de la sécrétion urinaire , et ne se dépose qu'en petite quantité dans les os , tandis que , chez les ani- maux carnivores , il est proportionnellement plus abondant dans les os, et manque dans l'urine. On dit aussi que. l'urine des enfans ne contient pas de phosphate calcaire pendant la période de l'ossification , non plus que celle des femmes du- rant la lactation , au lieu que le lait de ces dernières en ren- ferme. On assure également qu'elle est riche en sels terreux dans le rachitisme et l'ostéomalacie. IL Les os 6° Des animaux herbivores contiennent , d'après les obser; vations de Barros (4) , un peu plus de sels terreux , mais sur- tout beaucoup plus de carbonate calcaire et moins de phos- phate de chaux que ceux des animaux carnivores. 7° La quantité des substances terreuses ne s'élevait qu'à 0,2460 , dans un cas de rachitisme , selon Davy (5). Bostock l'a trouvée, dans un ramollissement général des os, de 0,2025, savoir, 0,1360 de phosphate calcaire, 0,0470 de sulfate cal- caire, 0,0113 de carbonate calcaire, et 0,0082 de phosphate (1) Recherches de physiol. et de chimie pathol., p. 246. (2) Beizelius, Traité de chimie, t. VII, p. 405, (3) Journal de chimie médicale , p. 234, (4) Ibid., t. IV, p.«289. (5) Wcber, Anatomie des Menschen , 1. 1 , p. 316 ^ PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 20^ magnésien (1). Bergemann a également constaté une diminu- tion des sels terreux dans les os des goutteux (2). III. La salive , au dire de Textor (3) , contient plus de sels et moins de substances organiques pendant la colère qu'en toute autre circonstance. Eberle (4) assure que l'acide hydro- sulfocyanique y est alors plus abondant qu'à l'ordinaire , et que c'est pour cela qu'elle prend une teinte violette foncée par le chlorure de fer. On a quelquefois trouvé , à la suite d'ophthalmies , des cristaux de sels que l'humeur lacrymale avait déposés sur les paupières (5), et rencontré des sels terreux dans la sueur critique qui se manifeste après les accès de goutte. Laroche (6) a vu , chez une femme portant des reliquats de syphilis , une suppression des règles être suivie de l'apparition à la peau d'une matière grenue, d'apparence sablonneuse , qui se liquéfiait au bout de quelques heures , et dont l'excrétion cessa dès que le flux menstruel fut rétabli. Les cristaux salins qu'Angeli avait retirés d'un ulcère dont les orteils d'un vieux goutteux étaient demeurés atteints par suite de la gangrène , lui donnèrent 0,81 de chlorure de potassium , 0,10 de chlorure de magnésium , 0,05 d'un sel de potasse produit par un acide végétal , et 0,04 de substance organi- que (7) ; la salive de ce malade déposait aussi un sel com- posé des mêmes principes, dans des proportions un peu différentes. Denis a trouvé , dans l'enduit muqueux dont la langue se couvre chez les personnes dont la digestion est dérangée , 0,500 de mucus modifié, 0,347 de phosphate calcaire , et 0,087 de carbonate de chaux (8). (1) Schweigger, Journal fuev Chernie , t. XXII , p. 434. ^ (2)/6ii., t. LIÎ, p. 4Ô6. (3) Schreger, Fluidorum corporis animalis chemiœ nosologîcce speci-^ men , p. 40. (4) Physiologie der F'erdauung , p. 36, (5) Haller, Elément, physiolog., t. V, p. â25. (6) Gerson , Magasin der auslosndisehen Literatuf, t. IV, p. 94, (7)76îrf., t.I,p. 153, (8) Journal de chimie médicale , t II, p. 340. i Ville l4 510 PRODUITS MATERIELS HOMOLOGUES. ^. VARÏATIOgS DANS lA PROPORTION DES PRINCIPES CONSTITCANS ORGANIQUES. § 853. Quant à ce qui concerne la proportion des principes constituans organiques , les uns à l'égard des autres , I. La quantité de l'albumine augmente , dans les liquides aqueux , lorsque les organes qui les sécrètent viennent à être atteints d'inflammation. IL 1° Dans l'inflammation des membranes muqueuses, quand elle est parvenue à un haut degré d'intensité , le suc rnuqueux devient coulant et clair, par la prédominance de l'eau et des substances susceptibles d'être dissoutes par elle ; mais , à un moindre degré , comme aussi vers la fin des phleg- masies , ou lorsqu'elles sont passées à l'état chronique , la surabondance du principe rnuqueux produit une mucosité visqaeuse , dont les granulations transparentes et irrégulières se voient très-bien au microscope. 2° Dans l'inflammation des reins et surtout de la vessie urinaire (ce qu'on appelle le catarrhe vésical), l'urine con- tient plus de mucus qu'à l'ordinaire , de manière qu'elle de- vient blanchâtre et trouble , et qu'il s'y forme un sédiment floconneux , visqueux , filant entre les doigts. IIL La quantité du pigment 3° Augmente dans le mucus par l'effet de l'inflammation, en sorte que ce mucus devient jaune ou vert. 4° Les sécrétions séreuses acquièrent cette couleur dans l'hydropisie chronique , les maladies du foie et le scorbut , et elles deviennent blanches lorsqu'elles contiennent davantage de mucus , d'albumine ou de graisse. 5° L'urine est d'un rouge intense pendant la chaleur de la fièvre et dans les inflammations , d'un jaune rouge foncé dans le rhumatisme aigu, très-brune dans la goutte chronique, pâle dans les afl'ections spasmodiques. Elle est foncée en couleur chez les anima^ux carnivores, et d'ugp Jointe pâle chez les herbivores. > , 6" Le lait des Vaches qui paissent des herbes aromatiques et juteuses, donne un beurre jaune ; celles qu'on nourrit de PRODUITS MATERIELS HOMOLOGUES. 211 paille , de foin OU de son, fournissent du beurre blanc (1). IV. Le smegma cutané paraît contenir davantaj^e d'élaine chez les bêles bovines pendant les chaleurs de Tété; il ré- sulte de là que la sueur de ces animaux devient grasse alors , mais qu'en même temps leur suif est plus ferme qu'en hiver, parce qu'il renferme une proportion plus considérable de stéarine (2). ' V. Le lait 7° Des Vaches contient , suivant Lassaigne (3) , de la soude libre et de l'albumine jusqu'à six. semaines avant que l'animal mette bas ; quinze jours environ avant cette époque , la soude libre disparaît, et à l'albumine se joignent de la matière ca- séeuse, du sucre de lait et de Tacide lactique, qui n'existaient point auparavant. Ces substances continuant toujours de se trouver dans le lait, l'albumine disparaît quelques jours après le vêlage , et ensuite on voit diminuer la quantité du beurre,. qui avait été très-considérable jusque-là. 8° Lorsqu'on donne à une Chienne des alimens tirés dyi règne végétal, son lait devient plus abondant, semblable a celui de Chèvre , plus acidulé , plus coagulable , tandis qu'une nourriture animale le rend plus rare , plus alcalin et moins facile à coaguler. VL Dans une salivation qui dépendait d'un état anormal de l'activité nerveuse, Mitscherlich (4) a trouvé la matière sa- livaire beaucoup moins abondante que de coutume; mais le liquide contenait un peu plus de matière extractive soluble dans l'eau et l'alcool aqueux, et insoluble dans l'alcool pur. Eberle (5) croyait avoir remarqué que plus il songeait for- tement aux acides, afin d'accroître la sécrétion de sa salive, plus celle-ci devenait pesante spécifiquement , plus aussi elle était claire et peu filante, plus, par conséquent, la ptyaline y augmentait et le mucus y diminuait de proportion.] (4) Paniientier et Deyeux , Expériences et observations sur les diffé- tentes espèce de lait , p. 51. 52. (2) Froriep , NoHzen , t. VIII , p. 7. (3) Journal de chimie médicale , t. VIII , p. 143. (4) Rust , Magazin fuer die gesammte Heilkunde , t. XL , p. 29, 0) Physiologie der f^erdauung , p. 32. 2t2 PRODUITS MATÉRIELS ItOMOtOGÎJEâ. VII. De même que pendant l'enfance ( § 533, 9° ), la bile côîi tient moins de substance biliaire dans l'atrophie , l'induration et la dégénérescence adipeuse du foie, suivant Thénard, Che- vallier a trouvé que la proportion du picromel à tous les autres principes constituans solides était de 1 '. 1,88 chez un sujet atteint de fièvre bilieuse , de 1 ; 2,40 chez un phthisique, de 1 *. 6,66 chez un syphilitique ; il n'a découvert que des traces de cette substance dans la bile d'une personne attaquée de fièvre putride. VIII. L'urée et l'acide urique ont mie grande affinité l'un pour l'autre , et doivent être considérés comme des modifica- tions d'une seule et même substance : aussi tantôt leur quan- tité varie-t-elle simultanément, de manière, par exemple, que l'urine des enfans contient moins d'urée, et de l'acide urobenzoïque au lieu d'acide urique ( § 535 , 6° ), tantôt les variations de l'une de ces substances ne correspondent-elles point à celles de l'autre , ou l'une d'elles prend-elle la place de i' autre. 9" Nous en trouvons la preuve directe dans leurs propor- tions respectives chez les divers animaux ( §827, 15°, 16°). Parmi les Mammifères , les carnivores sont ceux dont l'urine contient le plus d'urée ; il y en a moins chez l'homme , et moins encore chez les herbivores , tandis que l'acide urique manque entièrement chez ces derniers, et qu'il est moins abon- dant chez les carnivores que chez l'homme ; l'urée et l'acide urique existent chez les Oiseaux herbivores et les Batraciens, tandis qu'on trouve de l'acide urique sans urée chez les autres Oiseaux et Reptiles, ainsi que chez les Poissons et les ani- maux sans vertèbres. 10° 11 est évident que la nourriture exerce une grande in- fluence sur ces modifications. Lorsque des Mammifères car- nivores avaient été nourris avec des substances non azotées , leur urine ne contenait plus d'acide urique au bout de trois semaines ou d'un mois (1). L'acide urique se dépose de l'hu- rine humaine sous la forme de petits grains cristallins rouges, lorsqu'il se produit en trop grande quantité, ou qu'un autre (1) Magendie, art. Grwellb , Dicl. de méd. etdechir.,t, IX, p. 241, PRODUITS MATERIELS HOMOLOGUES. 210 acide libre vient à le précipiter. Wollaston fut le premier qui attribua la gravelle d'acide urique à une nourriture animale trop abondante 5 à la vérité Camper avait déjà remarqué que les calculs urinaires étaient devenus moins communs en Hol- lande depuis qu'on avait commencé d'y manger moins de viande. Schultens a confirmé l'exactitude de ce résultat; il a trouvé que l'urine devient plus rare après trois jours de ré- gime animal exclusif ( § 842, 5° ), et qu'elle contient alors près du double de l'acide urique qu'on y rencontre chez les per- sonnes qui font usage d'une nourriture mixte. Magendie (l) a mieux démontré encore que l'acide urique est augmenté par la bonne chère , par l'habitude des jouissances de la table, et surtout par l'usage d'une nourriture trop animale. Il fait remarquer que quand une personne habituellement sobre a mangé beaucoup en un jour de fête , son urine du lendemain contient davantage d'acide urique, et il cite l'exemple d'un homme qui fut sujet à la gravelle tant qu'il jouit de l'aisance , mais qu'un revers de fortune débarrassa de cette maladie, à laquelle il redevint sujet après avoir rétabli ses affaires. 11° Prout (1) a remarqué que ce qui augmente la propor- tion de l'acide urique n est pas tant la grande quantité d'une nourriture saine , notamment de la viande , du pain et du pud- ding, mais bien plutôt tout ce qui porte le désordre dans la digestion , en particulier les efforts de corps ou d'esprit aus- sitôt après avoir mangé, ou même le simple dérangement des heures de repas. Il a reconnu que l'apparition de la gravelle est en général précédée d'accidens gastriques, et qu'un trai- tement propre à rétablir la régularité des digestions est le meilleur moyen de combattre cette affection. Il pense enfin que si les affections déprimantes contribuent à la production d'un excès d'acide urique (2) , c'est probablement à cause du désordre qu'elles occasionent dans la digestion. 12° Un genre de vie sédentaire favorise la production de la gravelle , soit de la même manière , soit aussi , comme l'ad- (1) Magendie , art. Gravelle , Dict. de méd. et de chir., t. IX, p. 246* (2) Traité de la gravelle, p. 100, 101, 102. ]| (3) Ibid., p. 110. 2l4 PRODUITS MATÉRIELS HOMOtOGtÉS. met Magfendie (1), parce que le défaut de mouvement dimi- nue le renouvellement des matériaux dans les muscles et le dépôt de la fibrine azotée dans ces organes , de sorte qu'if résulte de là un excès d'azote. Mais Prout prétend que trop de fatigue est une circonstance favorable à la manifestatiori de la gravelle. 13° L'urée est plus abondante, Tacide urique plus rare et h gravelle moins commune pendant l'été ;, selon Goindet (2) , et dans les climats chauds, suivant Davy (3). Or, comme la transpiration est ordinairement troublée avant que la gravelle apparaisse, il paraît d'après cela que la sécrétion aqueuse de la peau peut entrer en antagonisme avec celle de l'acide urique. 14° Suivant Nysten (4) , la différence entre l'urine de la boisson et celle de la digestion est surtout très-considérable en ce qui concerne l'acide urique ( = 1 ; 16 ) , un peu moins forte eu égard à l'urée (= 1 ! 13 ) , et moindre encore sous le rapport des sels terreux ( = 1 ;; 5 ) et des sels neutres ( = 1 t 4 ). Si l'on compare l'urine de la digestion à celle de l'état spasmodique, on trouve que ce sont les sels neutres qui ont le plus diminué dans cette dernière ( = 1 1 11 ), aprè^ quoi viennent l'urée ( = 1 ; 6 ), l'acide urique ( = 1 ; 4 ) et les sels terreux. 15° Dans le diabète, la quantité de l'urée et de l'acide urique diminue , de sorte que Bostock (5) , par exemple, n'a point trouvé 0,01 de ces deux substances prises ensemble. Bar- ruel (6) a rencontré, dans cette maladie, de l'urée sans acide urique; Chevallier n'a pu apercevoir l'urée (7), et Chevreul n'a observé que de l'urée dans un cas , tandis qu'il n'y avait que de l'acide urique dans les autres (8). ^ (1) Recherches sur la gravelle , p. 26. (2) Froriep , NoHzen , t. XIII , p. 133. (3) Gerson , Magasin der auslœndischen Literatur, t. III , p. 479. (4) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques , p. 426. (5) Gnielin, Handhuch der theoretischen Chemie , t. II, p. 1416. (6) Journal de chimie médicale , t. V, p. 12. (1) lhid.,]f.ii. (8) Blainville, Cours de physiologie générale, t, III, p. 190. 1 PRODUITS MATÉRIEtS HOMOIOGUES. 31 5 16" La diminution de l'urée a été remarquée dans l'hépatite par Rose et Henry (1), dans l'hydropisie parNyslen, dans la fièvre putride par Orfila (2). Cette diminution coïncidait avec un accroissement de la proportion d'acide urique dans un cas de fièvre nerveuse lente observé par Frommherz et Gu- gert (3), et dans la phîhisie pulmonaire (4). 17° Frommherz et Gugert (5) ont vu l'acide urique manquer avant un accès de goutte , et reparaître pendant la crise ; l'é- pais sédiment qui se produit alors consiste en sels formés par cet acide (6). Les mêmes observateurs l'ont vainement cher- ché dans l'urine rendue par un homme atteint de catarrhe vé- sical. 18° 11 en ont trouvé la quantité diminuée, tandis qu'au con- traire celle de l'urée était extraordinairement considérable ^ dans un cas de vomissement chronique , et Henry (7) a ob- servé le même état de choses dans un violent rhumatisme. Nysten a vu la proportion de l'urée augmenter dans une pé- ritonite (8). Prout (9) a quelquefois observé cet accroissement^ sans trouble notable de la santé , chez les hommes de moyen âge, qui avaient été auparavant adonnés à l'onanisme; l'urine était la plupart du temps abondante , pâle et sans sels;. elle se décomposait avec une grande facilité , et ne tardait pas à de- venir alcaline. B. Mutation du caractère de la formation. % 854. La transformation consiste en ce qu'une formation prend un caractère qui ne lui appartient pas à proprement parler , mais qui n'est cependant point étranger à l'organisme. (1) Meckel , Deutsches Arcliiv , t. II , p. 642. (2) Blainville, Cours de physiologie générale, t. III, p. 193. (3) Schweigger, Journal fuer Chemie , t. L , p. 205. (4) Heusinger, Zeitschrift fuer die organische Physik , t. I ^ p, d59. i (5) Loc. cit., p. 266. (6) Wetzler, Beitrœge zur Kenntniss des menschlichen Harns", p. 20, (7) Journal de chimie médicale , t. V, p. 205. (8) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques , p. 253. (9) Recherches sur la gTavelIe , p. 100. 2l6 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. Comme chaque partie porte en elle le caractère de la sub- stance organique en général , offrant seulement des modifica- tions et des proportions spéciales , lorsque ces proportions viennent à changer, elle se rapproche du caractère d'une autre partie , de manière que la transformation se rapproche des différentes formes sous lesquelles peuvent apparaître les simples changemens dans les proportions respectives des ma- tériaux constituans ( § 849-853 ) , et qu'elle se confond jus- qu'à un certain point avec eux. Mais cette transformation elle-même se manifeste sous deux aspects différens. Tantôt , en effet, la partie admet en elle , mais d'une manière qui ne correspond point à sa nature , des substances provenant du sang et qui n'ont subi aucun chan- gement, de manière que , par ce mélange avec des substances générales , elle perd son caractère propre et spécial ; tantôt elle devient semblable à une autre partie qui procède du sang. Pour abréger, nous désignerons ces deux ordres de phé- nomènes sous le nom de transformation hématique (§ 854, 855) et de transformation plasmatique (§ 856 , 858). ' 1. TRANSFORMATION HÉMATIQUE, Dans la transformation hématique, tantôt certains principes constituans du sang passent dans les sécrétions ordinaires sans éprouver le moindre changement, tantôt ils n'y parvien- nent qu'après avoir pris une autre forme et constitué une sécrétion spéciale , celle du pus ( § 855 ).\ a. Passage de matériaux inaltérés diL sang dans les sécrétions. A l'égard du premier cas , le passage anormal de matériaux du sang dans les produits sécrétoires peut ou dépendre d'une exaltation de la vie du sang dont les effets se font sentir jus- que dans la sécrétion , ou tenir à ce que l'affaiblissement de l'activité vitale de ce liquide ne lui permet pas de se séparer complètement en ses diverses formes , de manière qu'il s'é- chappe en nature à travers les parois relâchées. PRODUITS MATERIELS HOMOLOGUES. HllJ I. Ainsi , d'un côté , la sécrétion de la peau devient albu- mineuse par reffet d'une exaltation de la vie, comme il arrive, d'après Anselmino (1) dans les sueurs critiques des fièvres rhumatismales ; d'un autre côté , la bile , le lait , etc. , admet? tent de l'albumine quand les matériaux constitutifs de ces sécrétions ne se sont point développés. C'est dans l'urine qu'on a le plus souvent constaté la présence de l'albumine; elle s'y dépose quelquefois d'elle-même par le seul fait du repos , ou se coagule par l'ébuUition , ou enfin se précipite soit par l'ad- dition du deutochlorure de mercure ou de l'infusion de noix de galle , soit , lorsqu'elle est fort abondante , par celle de l'alun ou de l'acide nitrique. 1° Nysten (2) a trouvé , dans une péritonite , l'urine d'un rouge foncé , claire , acide, et riche tant en albumine qu'en urée. Henry (3) a rencontré , dans celle qu'avait rendue un malade atteint de rhumatisme violent , de l'albumine , .avec beaucoup d'urée, de l'acide rosacique et peu d'acide urique. Suivant Berzelius (4) , ce liquide contient de l'albumine dans les fièvres parvenues à leur plus haut degré. Ainsi , dans tous ces cas , l'excitation de l'activité vitale fait qu'un des maté- riaux constituans du sang se mêle avec le produit sécrétoire proprement dit sans avoir subi aucune modification, • i 2° Dans d'autres circonstances , ce phénomène est le ré- sultat d'une faiblesse pour ainsi dire paralytique, en vertu de laquelle l'albumine prend la place de l'urée, qui diminue ou même disparaît tout-à-fait. Ainsi l'urine de Chiens aux- quels Krimer (5) et Naveau (6) avaient coupé soit les nerfs des reins , soit le grand sympathique et la paire vague , et mis ces nerfs en communication avec une forte pile voltaïque , conte- nait beaucoup d'albumine et de cruor, avec peu d'acide uri- que et d'urée. Celle d'un homme qui avait éprouvé une (1) Zeitschrift faer Physiologie , t. II, p. 330. (2) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques', p. 252. (3) Journal de chimie médicale , t. V, p. 205. (4) Traité de chimie , t. VII , p. 402. (5) Physiolojjische Untersuchungen, p. 35, 43. (6) Expérimenta qtmiam, circa urina: sccretionem , p. 16, ZIa 2îb PRODtJltS MÀÏERIÈIS HOMÔtOGtES. commotion de là moelle épiniêre , offrit à Hankel (1) de l'al- bumine , peu d'urée et point d'acide urique (*). 3° L'urine à été trouvée albiuuineuse dans diverses mala- dies chroniqnes, et même souvent dans des cas de simple in- commodité. Elle était alors j3â!e oti trouble , opaline et blan- châtre; elle contenait peu oti point d'acide libre, tardait peu à devenir alcaline et putride , avait moins de pesanteur spéci- fîciiie qu'à rdidîriàiré ( depuis dOll jusqu'à d014), et cdhtë- liàit gëhéraierhent peu ou point d'urée , ou , comme l'ont ob- servé Èraiide (2) et Barruel (4) , renfermait de l'urée , mais point d'acide urique. Oii a remai-qué cet état datis les désor • dres de la digestion (4) , le vomissement et la diarrhée chro- niques (5), la maladie vermineuse , les scrofules, la maladie ihërcUrielle (6) , l'hépatite chronique (7) , rhydrojîisië (é) , le didbète (9) et la fièvre hectique (lOj. Suivant Prout, les refi-oi- dissemens et les afléclions tiiorales contribuent à le développer. La cause locale paraît être un affaiblissement de l'activité des feins , joint à une augmentation de l'afflux du sang vers ces drgaries. Christison, Bright etGregoryont trouvé l'albumine accumulée , sous la forme d'une substance grenue jaunâtre , dàhÉ les conduits urinifères et même dans les paquets vascu- laires arrondis des reins. Les moyens qui ont le mieux réussi (i) Medicinisclie Zeitung , t. III, p. 89. (*) Voyez OUivier, Traité des maladies de U moelle épiniêre , 3«édit., Paris , 4837 , t. I , p. 142. (2) Meckel , Deiitsches Jrchiv , t. I , p. 303. (3) Journal de chimie médicale , t. V, p. 14. (4) Prout, Traité de la gravelle , p. 58. (5) Savimlung auserlesener Ahliandlungen , t. XL , p. 164, — Journal de chimie médicale, t. VI, p. 41. (6) Prout, Traité de la gravelle, p. 70. — Journal de chimie médi- cale , t. I , p. 179. (7) Berzelius , Traité de chimie , t. VII , p. 403. (8) Meckel , Deutsciics Arcliiv , 1. 1 , p. 303 , 305. — Nystèn , Recherclies de physiologie et de chimie pathologiques , p. 256. — Samnilung auser- lesener Abliandlunijen , t. XL , p. 163. (9) Journal de chimie médicale, t. V, p. 7, 11, 12. — Blainville, Cours de physiologie générale , t. III , p. 90. (10) Berzelius, Traité de chimie , t. VII, p. 403. PRODUITS MATERIELS HOMOIOGtIES. Zig a (jregfory pour faire cesser la maladie, sont les émissions sanguines locales à la région lombaire et l'emploi simultané de substances exerçant une acf îon stimulante spëcialè sur les reins (4) ; il attribue la présence de l'albumine à ce cjue le sé- rum du sang transsude en nature à travers les parois de l'or- gane , parce qu'il n'est pas rare que l'urine contienne aussi du cruor (2);" mais, en même temps, il fait remarquer (3) que l'état albumineux de ce liquide s'observe fréquemment dans des circonstances où i! y a prédisposition générale aux exsudations d'albumine , c'est-à-dire diathèse albumineuse. tJn trouble de l'assimilation paraît être la cause générale de cette anomalie. Suivant Prout (à) , l'albumine contenue dans l'urine ressemble plus souvent à celle du chyle qu'à celle du sang. Christison et Gregory disent que le sérum présente alors une teinte laiteuse et une pesanteur spécifique moindre que celle qu'il a ordinairement. Nous devons donc présumer que, le sang , chargé de substances qui ne sont point encore suf- fisamment assimilées, s'en débarrasse, comme de matériaux étrangers, en les poussant à travers le tissu relâché des reins. IL Du cruor se mêle avec les produits des sécrétions dans les inflammations pures parvenues à leur plus haut point d'in- tensité , par exemple celles des poumons ou des reins , dans divers cas où il y a diminution de l'activité vitale, atonie des organes sécrétoires et constitution anormale du sang , circon- stances sous l'empire desquelles on voit la sérosité devenir rougeâtre , brunâtre , bleue ou noirâtre , dans Thydropisie , le mucus intestinal rougeâtre ou brunâtre dans le flux dit hé- patique , Turine rouge et épaisse dans le scorbut. Wells (5) a observé, dans une hydropisie survenue à la suite de la scar- latine , que l'urine était rendue rouge et semblable à de la- "vure de viande par du cruor qui se déposait pendant le repos et se coagulait à la chaleur de l'ébullition. Peschier (6), dans (1) Semmlung auserlesener AbJiandlungen , t. XL , p. 168, ' (2)iîi£^.,p. 191. (3) Ihid., p. 171. (4) Traité de la gravelle , p. 68. (5) Meckel , Deutsches Jrchiv , t. I , p. 306. (6) Journal de chimie médicale , t. VII , p. 410. 22a PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. un cas analogue , l'a vue offrir un sédiment brun , contenant du cruor, de l'albumine et beaucoup d'urée, et devenir sem- blable à du vin rouge tourné pendant la convalescence. Il y a des cas où le mélange du cruor avec les produits sé- crétoires se rattache , comme la prédisposition héréditaire aux hémorrhagies , à une diathèse individuelle qu'on ne sau- rait expliquer. Aussi on a vu un jeune homme qui , toutes les fois qu'il se livrait à des mouvemens violens , éprouvait une sueur sanguinolente sous le bras (1) ; or il est rare que la sueur contienne du cruor, et ce phénomène n'a guère lieu que dans des maladies extrêmement graves , le scorbut par exemple. III. Dans les inflammations , au lieu de sérosité , il se se i crête un liquide semblable au véritable sérum du sang (§ 688), c'est-à-dire contenant , non seulement de l'albumine , mais encore de la fibrine, et qu'on appelle lymphe plastique ou coagulable , mais qu'il est plus convenable de nommer liquide plastique, afin d'éviter toute confusion. Suivant le siège de l'inflammation, ce liquide s'épanche soit sur une surface libre, soit dans un parenchyme ; il sort goutte à goutte , sous forme liquide ; limpide d'abord , ou du moins translucide , il ne tarde pas à devenir gélatineux , blanc , gris, ou jaunâtre, et enfin à se solidifier. Une fois coagulé^ il se dissout dans la po- tasse avec moins de promptitude que l'albumine , mais plus rapidement que la fibrine. Cette sécrétion , qu'on a coutume de désigner sous le nom d'exsudation , peut à peine être sé- parée du parenchyme enflammé , et on ne l'observe dans toute sa pureté qu'aux surfaces libres. 4° C'est à la surface des membranes séreuses qu'elle se manifeste le plus fréquemment. Lorsque Gendrin avait en- flammé ces membranes par des injections irritantes (2), il voyait d'abord se déposer une couche d'un blanc grisâtre et visqueuse, qu'il parvenait à dissoudre dans l'eau à l'aide de la trituration , mais qui , par les progrès de Tinflammaiion , devenait plus épaisse , plus visqueuse , plus dense , et sem- (1) Voigtel , Handhnch dcr pathologischen Anatomie , 1. 1 , p. 70.] (2) Histoire aiiatomique des ioflammations , t. II , p. 493. PRObCÎTS MATÉRIELS ÎIOMÔLOGUES. 521 blable à de ralbumine demi-coagulée , tandis que le liquide épanché dans la cavité séreuse déposait encore 0,03 de flocons. A la suite d'une péritonite chronique, la sérosité abdominale, de couleur verdâtre , avait déposé , sous la forme de flocons mous et d'un jaune grisâtre , une matière qui se condensait dans l'alcool , tout en conservant un peu d'élasticité , et se réduisait , entre les doigts , en une matière pulpeuse un peu grasse au toucher (1), On a vu aussi la sérosité extraite par la ponction , dans un cas d'ascite , se coaguler d'elle-même (2). ô^^Gendrin dit (3) que , dans l'inflammation des membranes muqueuses , le suc muqueux devient riche en albumine , et contient un peu de fibrine. 6° Le liquide sécrété sous l'épiderme par la peau enflam- mée à la suite d'une brûlure ou de l'application, soit des cantharides, soit de quelque autre substance acre, acquiert la même nature , lorsque , la phlegmasie persistant , il fait un long séjour dans la phlyctène non ouverte (4). Margueron l'a vu se coaguler à l'air en une pellicule , qui n'était point so- luble dans l'eau et les acides , mais qui se dissolvait dans les alcalis (5). 1° Suivant Prout (6), l'albumine est accompagnée , dans l'u- rine , d'une certaine quantité de fibrine , quelquefois assez abondante pour que l'urine se prenne en un véritable caillot, b. Passage de matériaux altérés du sang dans tes sécrétions. § 855. La sérosité interstitielle répandue dans le corps en- tier, peut éprouver, à la suite de l'inflammation, et par son mélange avec des matériaux modifiés du sang , une transfor- mation telle, qu'elle perde entièrement sa forme normale, et (i) Hist. anat. des inflammations , t. II, p. 49é. (2) Schreger, Pluidorum corporis animalis chemi0 [noSotogicoB specû, men, p. 23. (3) Loc. cit., p, 519. (4) Cendrin, loc. cit., p. 500. (5) Bulletin de la Société philomatique , 1. 1 , p. 2&, (6) Traité de la graveUe, p. 61 , 62, 63. 2'22 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. qu'elle se manifeste sous une forme nouvelle , constituant ainsi ce qu'on nomme le pus. I. Le pus est un liquide opaque, blanc, tirant quelquefois sur le jaunâtre ou le verdâtre , un peu épais , semblable à de la crème , non filant entre les doigts , d'une saveur fade et douceâtre , qui exhale une odeur particulière à la chaleur, et dont la pesanteur spécifique varie de 1031 à 1033 suivant Pearson (1). Quand on l'examine au microscope , on s'aperçoit qu'il est composé de granulations et d'un liquide incolore ; plus il est blanc et épais, plus ces granulations sont abon- dantes. Elles sont blanchâtres, translucides, ponctuées ou comme granulées à la surface , suivant Gruilliuisen (2) , du reste, sphériques, et , à ce que prétend Gendrin (3) , un peu aplaties. Leur volume excède celui des globules du sang. Weber leur assigne un diamètre de 0,0039 à 0,0079 ligne,, bien supérieur à celui des globules du lait et du sang (4). Home (5) dit aussi ces globules plus gros que ceux du chyle. Selon Weber, ils ressemblent beaucoup à ceux de la salive , mais sont plus nombreux, et ont une pesanteur spécifique plus considérable. Prévost et Dumas (6) assurent que ceux qu'ils ont trouvés dans le sinus frontal d'un Mulet n'avaient que 0,0015 ligne de diamètre , comme ceux du lait et du chyle. Gruithuisen (7) a remarqué que leur volume variait suivant les individus , mais qu'il ne présentait aucune différence sur un même individu, ce qui ne doit s'entendre sans doute que du pus parfaitement normal. D'ailleurs, leur forme plus ré- gulière les dislingue des globules qu'on découvre dans plu- sieurs liquides sécrétés , notamment dans le mucus. Mais , assez fréque,iDmMt, le pus contient aussi des flocons et de§ fibres. ■ ^;:M'v (1) Meckel , Deutsches Arcldv , t. II , p. 503. (2) ]S aturhistorische Untersuchxutg ueler den Unterschied zwischen Eiter und Schleim. , p. 2. (3) Histoire anatomique des inflammations , t. II, p. 489. (4) Anatomie des Mensclien, t. I , p. 163. (5) Sammlung auserlesener Ahhandlun»■<., p. 509i PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 2 25 4" Avec la dissolution de potasse , le pus forme un liquide gélatineux , filant , insoluble dans l'eau , ce que Grasmeyer (1) considère comme un caractère distinctif. Lorsqu'on le broie avec de la chaux vive ou de la potasse caustique , il dégage une légère odeur ammoniacale. 5° Les acides étendus le coagulent; concentrés, ils le dis- solvent , et Feau le précipite de la dissolution. 6<* La dissolution d' hydrochlorate d'ammoniaque l'épaissit et le rend gélatineux , sans cependant le coaguler, puisqu'il reprend son apparence première par l'addition de l'eau. Hunter pense que cet effet se rattache principalement à la sérosité du pus. IIL Quant à la nature du pus : 7° Eu égard au point de vue chimique, ce liquide paraît conte* nir les matériaux essentiels du sang sous une forme particulière. La sérosité du pus, qui contient principalement l'albumine et l'osmazome , ressemble au sérum du sang ; mais elle en dif- fère par la propriété qu'a le sel ammoniac de l'épaissir. Les granulations, qui sont plus nombreuses et ont une forme mieux arrêtée dans le pus que dans d'autres sécrétions , et qui pa- raissent lui être essentielles, rappellent le cruor, avec lequel la cendre rougeâtre et ferrugineuse est un rapport de plus ; mais elles ne se dissolvent point dans l'eau, et Pearson (2) assure qu'elles se maintiennent même lorsqu'on fait bouillir la liqueur, ou qu'on la coagule par l'alcool , les acides et le nitrate d'argent. Le mode de formation du pus semble indi- quer que la portion insoluble dans l'eau se compose de fi- brine. Les parties constituantes organiques de cette humeur sont, d'après Grasmeyer (3), de la fibrine (lymphe) et de l'albumine (portion visqueuse de la sérosité) ; selon Jordan (4), de la fibrine , de l'albumine et du mucus ; suivant Gendrin (o) , j(l) Ahhandlung vont JSiterund den'Mitteln , îhti von CiUen Cèhnlîchen FeucJdigkeiten su unterscheiden , p. 59. (2) Loc. cit., p. 509. (3) Loc. cit., p, 45 , 55. (4) Loc. cit., p. 205. (5) Loc. cit., p. 4 t. XVI , p. 310. (3) Loc. cit., p. 479. 2^4 PRODUITS MATÉRIELS HOMOIOGUES. tée'par le fer rouge , sur une Grenouille , que certains vaîs^ seaux capillaires contenaient des globules d'un rouge grisâtre, et d'autres des globules d'un jaune grisâtre , de manière (1) que le pus semblait être formé dans ces vaisseaux. D'un autre côté, il a remarqué aussi (2) que, quand on a enflammé un fort vaisseau capillaire par une injection irritante , qu'ensuite on l'a empli de sang et lié sur deux points , le liquide intro- duit dans son intérieur se coagule , puis se décolore et se convertit en pus couche par couche ; que ce change- ment a lieu plus rapidement quand on opère sur du sang veineux qu'en expérimentant sur du sang artériel; et (3^ que du sang étranger^ injecté dans le tissu cellulaire , se con- vertit également en pus lorsqu'on excite une inflammation dans ce tissu , en y passant un selon. Boerhaave attribuait trop généralement la suppuration à i'épanchement du sang et à l'altération qu'il subit ensuite ; mais Hunter ne l'a réfuté , sous ce point de vue , qu'en dé- montrant que , dans le cas d'extravasation du sang , il ne se produit de pus qu'autant que Tinflammaiion vient à se déve- lopper , et qu'alors on trouve toujours quelque peu de sang de reste avec le produit de la suppuration. En effet , le pus qu'on a rencontré , même assez souvent , dans le centre d'un caillot de sang (4), paraît n'avoir dû sa formation qu'aune mé-' tamorphose de ce dernier liquide. 18° Le Hquide plastique épanché dans le tissu peut égale- ment se convertir en pus lorsque l'inflammation continue. Grasmeyer (5) allègue en faveur de cette opinion que le pre- mier pus d'un abcès est mêlé avec des caillots qui ne sont point encore convertis en pus (6). Gendrin reconnaît égale- ment le fait (7) ; car il a trouvé , au pourtour d'un point en (l)ioc, cit., p. 482. (2) Loc. cit., p. 471. (3) Loc. cit., p. 484. (4)Andral, Précis d'anatomie Jïathologique , t. I, p. 400; t. II, . 336, 429. (5) Loc. cit., p. 27. (6) Loc. cit., p. 39 , (7) Loc, cit., p. 471. j PRODUITS MATÉRIELS HOMOIOGUES. s55 suppuration, un caillot gélatiniforme , parsemé de granula- tions , plus en dedans un caillot louche par places , près du centre une masse jaune grisâtre , mêlée de globules du sang d'un gris rougeâtre , enfin au centre , entre les fibres du tissu, une substance plus distincte de ce tissu , plus liquide , d'un blanc jaunâtre , et contenant des globules véritables de pus. VII. Si du pus peut se former avec des caillots de sang ou de liquide coagulable, l'analogie ne permet pas de douter qu'il ne puisse en naître aussi de parties organiques. Mais il saute aux yeux que , dans une inflammation violente et qui envahit pendant long-temps les parties profondes d'un or- gane , surtout quand le pus prolonge son contact avec le tissu, ce dernier'est plus ou moins consommé ou détruit par la sup- puration. En pareil cas, la destruction de la couche superfi- cielle d'une membrane fait que l'écoulement purulent dégé- nère en ulcère ; l'abcès et l'ulcère creusent plus ou moins le tissu ; dans l'abcès , la peau superposée est amincie et comme rongée à sa face interne, jusqu'à ce qu'elle crève ; le pus se fraie des voies partout , il produit des clapiers , il sort d'une cavité et passe dans une autre ; enfin le parenchyme entier d'un organe disparaît , et le rein , par exemple , se convertit en une simple poche pleine de pus. De même, la suppuration finit par détacher une partie du corps , en consumant la sub- stance qui l'y unissait ; des parties frappées de mort se trou- vent éliminées ainsi , et il n'est pas rare de voir le pus mêlé avec des parcelles d'os ou des lambeaux de parties molles. Hunter soutenait un paradoxe en niant la résolution des par- ties soHdes en pus ; il se fondait sur ce que la suppuration peut durer long-temps sans entraîner de destruction , et sur ce que des tendons , des fragmens d'os, etc., frappés de mort, peuvent demeurer un long laps de temps baignés de pus sans s'y dissoudre ; mais ces faits ne prouvaient qu'une chose , c'est que le pus n'est pas toujours produitpar des parties mortes. Aussi Hunter lui-même restreignit-il sa règle, en ajoutant que le pus attaque seulement les parties environnantes, sans agir sur la surface qui l'a formé , tout comme les larmes acres rougis- sent les joues sans enflammer les voies lacrymales. Cependant on adopte assez généralement, de nos jours, l'opimon que la 236 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. destruction des parties solides, dans Tinflammation, tient uni- quement à ce que le contact du pus les frappe de mort ou d'a- trophie , et en détermine ainsi la résorption. Mais , outre que la résorption suppose une dissolution ou une liquéfaction du tissu solide , le liquide produit de cette manière se mêlera plutôt au pus qu'il ne sera résorbé. Les faits suivans sont favo- rables à l'hypothèse de la conversion des parties solides en pus. 19» Les parties tombées en suppuration ne sont pas simple- ment atrophiées ; elles subissent un mode particulier de ra- mollissement , leur tissu éprouve un changement , et devient même en partie semblable au pus ; ainsi la peau prend un as- pect lardacé , et se réduit promptement en bouillie par l'effet de la macération ; les muscles forment une masse homogène, non fibreuse , d'un jaune rougeâtre ou d'un gris blanchâtre , après avoir commencé par se ramollir et se décolorer ; l'os devient friable , d'un gris brunâtre , et laisse apercevoir des dentelures ou des lamelles , qui ne sont pas toujours de sim- ples [résidus de la texture normale , et doivent en partie naissance à une formation nouvelle. 20° Le pus a une nature correspondante à la qualité de l'organe qui suppure. S'il offre une teinte jaunâtre ou brunâtre dans le foie , s'il est aqueux et salé dans les reins , rougeâtre et d'odeur phosphoreuse aux testicules, ces phénomènes peu- vent tenir à une certaine quantité de produits sécrétoires mêlés avec lui ; mais il est épais et d'un jaune verdâtre dans les muscles, liquide et semblable à du petit-lait dans le tissu scléreux , aqueux dans les os , dont la suppuration est , en outre , grise, avec des points noirs , chargée de phosphate calcaire et apte à noircir l'argent, 't 21<» Des pseudomorphoses privées de vaisseaux , notamment les tubercules , se ramollissent du dedans au dehors , et se convertissent en une masse pultacée , qui , sans le moindre doute, diffère spccilîquement du pus des tissus normaux, mais néanmoins participe aux propriétés générales de ce pro- duit. 22° Le pus n'est point un dissolvant chimique de parties folides , mais une surface vivante _ qui suppure a une puis- PRODUITS MATÉRIELS ttOMÔlôebÉS. sS^ sance énorme pour ramollir et consommer lu substance orga- nique. Home mit un gros de viande dans une plaie en pleine suppuration; au bout de vingt-quatre heures, elle était molle et réduite en bouillie , sans avoir diminué de poids ; mais au. bout de cinq jours, elle avait perdu trente-huit grains, sans; offrir la moindre trace de suppuration , tandis qu'un pareill morceau de viande , plongé dans une dissolution de géla- tine, perdit vingt-deux grains en vingt-quatre heures et vingts- six seulement en cinq jours ; un autre morceau , mis dans du pus retiré d'un abcès , était déjà pourri au bout de vingt- quatre heures , et entièrement dissous le quatrième jour. Suivant Dieffenbach (1) , les lambeaux de peau que l'on dé- tache dans les essais d'autoplastie , se résolvent quelquefois- en pus, au point qu'il n'en reste plus que l'épiderme , et, d'a- près les observations de Dœrner , les pièces de cartilage qui ne sont plus unies au corps , deviennent grenues et friables- sur les points qui suppurent. Dans ces phénomènes , comm© dans beaucoup d'autres , l'organisme fait preuve d'une fa- culté assimilatrice , en vertu de laquelle il métamorphose eÊ décompose la matière organique ; mais il est peu vraisenM blable que la surface suppurante assimile et absorbe , à la manière des organes digestifs , et tout porte à croire qu'elle exerce plutôt une assimilation , ou , si l'on aime mieux , une infection correspondante à sa nature spécifique , puisqu' après avoir métamorphosé la substance organique, elle l'emploie à la confection du pus. Grasmeyer (2) admettait déjà cette sorte d'assimilation , et considérait la première goutte de pus qui s'est formée dans un abcès comme un ferment à la fa- veur duquel tout le liquide plastique épanché aux alentours devient pus. Enfin Kaltenbrunner (3) donne aussi comme un résultat de ses observations microscopiques que , dans l'inflammation très- violente , le parenchyme entier se résout en nombreux flo- « (1) Chîrurgzsche ErfahrUngen , hesondefs uehêr die Tf^iederherstellun^ Aèrstosrter Theile des mensclilichen Kœrpers , t. II, p. 169. (2) Lnc. cit., p. 47. (3) Répeitoiie général/i'anatomie , t. IV, p. 220. S3S PRODUITS MATÉRIELS HOMOtOGUES. cons, très-déliés; d'une couleur sale, et qu ainsi le pus se forme des débris devenus libres de l'orffane. [[2. TRANSFORMATIOÏÏ ïlASMATIQtJE. § 856. La transformation plasmatique porte tantôt sur la sécrétion et tantôt sur la nutrition (§ 858) . a. Métastase. "^ Dans le premier cas , une sécrétion apparaît sur un point où elle ne se trouve pas dans l'état normal. Cette anomalie relative au lieu de formation {error loci) ^ et que nous pou- vons appeler métastase , concerne d'abord les sécrétions dé- pourvues de caractère particulier, qui s'effectuent, dans plu- sieurs régions du corps, sans appareil sécrétoire spécial. Elle tient la plupart du temps à ce que les matériaux d'une sécré- tion existent en trop grande abondance , ou à ce que l'activité plastique se dirige avec trop d'énergie vers leur production , de sorte que l'appareil ordinaire devient insuffisant. Elle peut cependant aussi dépendre de ce que la diminution d'activité ! de ce dernier y donne lieu par un phénomène d'antagonisme. j I. Nous signalerons d'abord le pigment noir, qui , normale- i ment , se trouve à la choroïde , sur quelques points du cer- ! veau , en général dans le tissu du poumon , souvent aux poils, et chez le Nègre au tissu muqueux de Malpighi ; mais , on le rencontre par anomalie dans les régions les plus diverses , quoiqu'on soit néanmoins dans le doute de savoir s'il s'agit alors d'un véritable pigment sécrété , ou seulement d'un dé- pôt de cruor devenu plus foncé en couleur, et plus ou moins modifié. C'est là en réalité un degré intermédiaire entre la transformation hématique ( § 855 , Il ) et la transformation plasmatique. i° En ce qui concerne les liquides sécrétés , le cruor prend incontestablement la plus grande part à leur coujfeur noire. Cette teinte noire a été observée dans l'urine , particulière- ment chez les sujets atteints d'affections chroniques du système de la veine-porte , du foie ou de la rate , quelquefois au mi- PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. zZq lieu de circonstances où il y avait défaut d'urée et d'acide uri- que ; et on l'attribue là en partie à une substance paniculière, appelé acide mélanique par Prout , et mélanourine par Bra- connot. Le suc gastrique des malades affectés de la fièvre jaune ou d'ulcères malins à l'estomac , Ta offerte aussi , donnant à la matière des vomissemens , qui d'ailleurs étaient acidulés , iitte couleur brune, analogue à celle du chocolat. Lassaigne(l) a séparé cette matière , par lafiltration , en un liquide rouge brunâtre , semblable à du sang dégénéré , et en un sédiment noirâtre , ayant de l'analogie avec le cruor. Elle a été pré- sentée également par les matières fécales dans la mélancolie, et surtout dans le mélsena , où elle dépend évidemment de cruor -îTiêlé avec les excrémens ; par la bile , dans la mélan- colie et la manie (2); par la sueur, dans le scorbut ; par la sé- crétion des vésicules séreuses , même par l'humeur aqueuse de l'œil (3) et le liquide des vésicules ovariennes (4). 2° Les parties solides de toute espèce peuvent offrir un pîp-- inent noir, tantôt combiné avec le tissu de manière à n'en pouvoir être séparé , ou infiltré et produisant des points, des siries , des taches ; tantôt* sous la forme de ce qu'on nomme des méîanoses , c'est-à-dire en masses liquides , pultacées ou solides , grumeleuses ou lamellées, qui sont tantôt renfermées dans des vésicules , tantôt disposées par couches entre les tis^-' sus , souvent aussi accompagnées de pseudomorphoses d'un tnauvais caractère , quoique , par elles-mêmes , elles n'exer- cent aucune action destructive sur les parties environnantes. La substance des méîanoses est privée d'odeur; elle n'a que peu de saveur;, salit les doigts , se mêle avec l'eau et l'alcool , passe assez tard à la putréfaction , et se charbonne en ré- pandant une odeur empyreumatique. C'est un pigment car- boné , que Breschet met de niveau avec le pigment noir nor- mal (5), mais qui se trouve combiné avec des matériaux du (1) Journal de chimie médicale , t. Il , p. 413. ' (2) Voigtel, Handhuch der pathologisc]ie?i Anatomie , t, lll, p, 80, (3)/6tc^., t. II, p. 110. {iyjbid., t. m, p. 537. (5) Répertoiie d'analomie , 1. 1 , p. BIL 24o PRODUITS MATÉRIELS HONOLOGUES sang. Lassaigne (1) y a rencontré , outre la matière colorante noirâtre , qui donnait une dissolution rougeâtre avec l'acide sulfurique étendu et le carbonate de potasse , de la fibrine co- lorée , un peu d'albumine , des sels alcalins et terreux et de Toxide de fer. Barruel (2) y a reconnu du cruor et de la fi- brine modifiée , de la graisse , du phosphate de chaux et du fer ; Laugier (3), du cruor, de la fibrine , de la stéarine , une substance gélatiniforme , des sels et du fer ; Foy (4) 0,3100 de pigment, 0,1500 d'albumine, 0,0625 de fibrine, 0,1875 d'eau, 0,1600 de sels terreux et de fer, 0^1050 de sels alca- lins , et 0,0250 de carbonate de soude. Les vaisseaux san- guins ayant été vus quelquefois , au voisinage des parties atteintes de mélanose, dilatés et remplis également de matière noire , on est fondé à considérer cette anomalie comme étant locale et dépendant d'une dégénérescence du sang devenu stagnant ; mais d'autres circonstances , celle entre autres que les Chevaux blancs , chez lesquels la peau ne sécrète point de pigment , sont les plus sujets aux mélanoses , autorisent aussi à penser que cette anomalie se rattache à une surabon- dance de carbone dans l'organisme.: IL Les membranes séreuses et le tissu cellulaire sous-ja- cent renferment quelquefois , surtout après l'inflammation , des gaz emprisonnés , que les circonstances ne permettent de rapporter, ni à de l'air qui aurait pénétré du dehors, ni à la décomposition , et qui ne peut qu'avoir été sécrété (5). Ces amas de matières gazeuses ont été observés dans la cavité thoracique , ou sous la plèvre , après la pleurésie (0), dans la cavité abdominale ou sous le péritoine , dans la péritonite (7) et le marasme (8). III. De la graisse dans l'urine , qui , presque toujours alors ^ (i) Répertoire d'anatomie , 1. 1, p. 366. (2) Ibid., p. 370. (3) Journal de chimie médicale , t. III , p. â61. (4) Andral , Précis d'anatomie pathologique , 1. 1 , p. 457. (5) Gendrin , Histoire anatomique des inflanmiations , t. I , p. 61. (6) Laennec, Traité de l'auscultation médiate, t. II, p. 549. (7) Gendrin, Histoire anatomique des inflammations, t. I, p. 435. (8) Andral , Précis d'anatomie pathologique , t. Il, p. 175. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 21^1 est lactescente , et contient de l'albumine , avec peu d'urée et d'acide urique , a été observée , entre autres, par Cheval- lier (1), chez un syphilitique qui subissait le traitement mer- curiel , par Blondeau (2), après une diarrhée catarrhale , par Chevreul (3) , dans une autre maladie. Bizzio a trouvé une graisse semblable à du beurre dans l'urine d'une femme qui se portait bien (4). 4° Les déjections alvines sont quelquefois accompagnées de masses graisseuses qui ne peuvent point provenir des ali- mens. Un vieillard rendait de la graisse par les selles et par l'urine. On observe parfois , notamment chez les bêtes bo- vines , une diarrhée graisseuse , qui s'accompagne d'une éma- ciation rapide (5). Home (6) a vu un enfant frappé d'atrophie , qui rendait tous les quinze jours quelques onces d'une graisse jaune liquide et solidifîable au froid. On a vu quelquefois des déjections de bile alterner avec d'autres de graisse, et l'on a observé des évacuations graisseuses dans un cas d'ictère in- tense , où l'orifice du conduit biliaire se trouvait obhtéré , de manière que la sécrétion de la graisse avait eu lieu dans l'in- testin , par antagonisme avec celle de la bile , qui n'existait point. 5° Des sueurs grasses ont été vues dans des fièvres hecti- ques et putrides. IV. Ce qu'il est plus commun d'observer, c'est que, dans la diathèse séreuse portée à un haut degré , la sérosité prenne la place d'autres sécrétions , par exemple , celle de la moelle, ainsi que Hall , entre autres , en a rencontré un cas (7). § 857. Chaque sécrétion spéciale I. Peut , comme l'avait déjà dit Haller (8), s'accomplir dans un autre organe quelconque , soit lorsque son organe propre (1) Journal de chimie médicale , 1. 1 , p. 179. (2) J6i£i.,t.VI, p. 41. (3) Ibid., t. II , p. 333. (4) Schweigger, Journal fuer Chemie , t. XL, p. 246. (5) Haller, Elevient. physiolog., t. Vil, p. 47. (6) Lectures on comparative anatomy, t. I , p. 471. (7) Sammlung auserlesener ^bhandlunyen , t. XII , p. 20. (8) Elément, physiolog., t. II, p. 369. viii, i6 243 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. est devenu ïncapabie d'agir, soit quand les matériaux destinés à ia produire sont trop abondans dans le sang. C'est donc la sympathie dans le premier cas , l'antagonisme dans le se- cond , qui détermine ces phénomènes. Si la tendance de la \ie à une certaine formation spéciale est exagérée et prédo- minante, elle s'empare d'autres organes encore, parce que son appareil spécial ne lui suffit pas , et ces organes agissent alors de concert avec celui-ci ; mais si l'appareil propre est tombé dans l'inaction par une cause quelconque , sa fonction est transportée à un autre organe , qui alors agit par antago- nisme et accomplit une sécrétion devant tenir lieu de celle qui ne peut pomt s'effectuer. Il ne faut nous faire de ce phé- nomène ni une idée purement matérielle ni une idée pure- ment dynamique ; dans le cas de métastase sympathique , il est bien rare qu'on parvienne à démontrer la surabondance dans le sang d'une substance destinée à être sécrétée, et la plupart du temps on n'aperçoit que la prédominance de la tendance à une certaine sécrétion ; de même, la métastase par anta^jonisme n'est point une métastase dans le sens littéral , c'est-à dire une transmigration mécanique, car on ne rencon- tre jamais le produit sécrétoire en route , et l'on ne trouve point, entre l'organe dans lequel il disparaît et celui où il re- devient évident , de voies patentes , correspondantes à la loi de la pesanteur. Mais , en reconnaissant que ce qu'il y a d'es- sentiel ici est un transport de l'activité, en vertuM'une ten- dance à des formations spéciales qui afjpartiennent à l'orga- nisme considéré d'une manière générale , nous ne devons point perdre de vue le côté matériel du phénomène. Dans le cas de métastase sympathique, une surabondance des maté- riaux d'une sécrétion est quelquefois plus que vraisemblable , et la sécrétion qui a lieu par antagonisme est tantôt une véri- table production de l'organe remplaçant celui dont l'action manque , tantôt seulement une élimination d'un liquide qui avait été résorbé dans l'atelier primordial de sa formation , et s'était mêlé avec le sang à titre de substance étrangère. La sécrétion qui se manifeste ailleurs qu'où elle devrait siéger ressemble davantage, dans le dernier cas, à celle qui prend naissance au milieu de son foyer proprement dit, tandis PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. s45 qu'elle n'a que de l'analogie avec celle-ci dans le premier cas. Ainsi, de même qu'il arrive souvent à l'inflammation sans nul produit matériel de cesser sur un point et d'aller éclater sur un autre, de même, après la suppression d'une suppuration , une autre partie peut s'enflammer par antagonisme et produire du pus à la suite de ce nouvel état ; mais il est possible aussi que le pus soit résorbé et qu'un autre organe ne fasse que l'éliminer, soit quand il est sécrété en trop grande abondance , comme dans la phthisie pulmonaire , où l'urine dépose beaucoup de pus , et dans les abcès du foie, où les crachats contiennent du pus, sans qu'ici les poumons et là les reins aient subi le moindre trouble appréciable dans leur activité vitale, soit quand un abcès , dans lequel la fluctuation se faisait déjà sen- tir, disparaît tout-à-coup et fait place à une fièvre violente , qui elle-même cesse bientôt après qu'il a paru du pus sur un autre point. En pareil cas, on a trouvé , tantôt que les veines parlant des surfaces en suppuration contenaient du pus (1) , tantôt que le pus métastatique ressemblait parfaitement à ce- lui qui primordialement s'était formé dans un autre endroit (2). IL Nous avons déjà dit(§ 169, l°)que, quand le flux menstruel vient à se supprimer, on voit quelquefois paraître à sa place des hémorrhagies par la peau , ou par la mem- brane muqueuse, ou par des organes de sécrétions glandu- laires. Un grand nombre d'observations , réunies par Voigtel (3) , prouvent; qu'une sécrétion de lait a été vue ailleurs qu'aux mamelles. 1° Elle a été observée à la peau de l'ombilic par Ghomel et Jaeger, aux aînés par Otto et Nicolaï , aux cuisses par Puzos , Mursinna et Schmucker, au dos par Dehaen, à la surface d'un ulcère qui avait succédé à une fracture par Schurig. ^u 1° Elle a eu lieu par l'estomac suivant Nuck et Puzos, par l'intestin d'après Storch , Smellie et White , par la membrane muqueuse des parties génitales selon Schurig. (1) Andral , Précis d'anatomie pathologique , t. I , p. 400. (2) Zeitschrift fuer Physiologie , t. I , p. 299. (3) Handbuch der pathologiscJien Anatomie , t. I, p, 583. â44 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGtJES. 3° Peu, Tissot et Berend l'ont vue accomplie par les reins. Petroz (1) a connu une femme dans les seins de laquelle il ne se produisit point de lait , à la suite d'un accouchement labo- rieux , dont la mort de l'enfant avait été la suite ; mais elle eut des urines blanches, avec des flocons qui paraissaient être de la matière caséeuse. Cette même substance se montra, d'a- près Caballe (2) , dans l'urine lactescente d'une fille qui se portait fort bien , et selon Wurzer (3) , avec de l'acide ben- zoïque et peu d'urée , dans celle d'un homme dont les glandes mammaires s'étaient tuméfiées auparavant sous l'influence d'une toux catarrhale. Gomme la possibilité de la sécrétion du lait dans les glandes mammaires de l'homme est démontrée (§ 622, 11°), on conçoit que ce liquide puisse aussi, par TefFet d'une anomalie, se produire chez lui sur d'autres points du corps. Ainsi , KoUer a observé un jeune homme qui , après diverses affections , fut atteint , au scrotum , dont le volume était considérable , et à la cuisse , de vésicules jaunâtres sé- crétant en grande quantité un liquide blanchâtre , d'odeur spermatique, dans lequel Lœwig trouva 0,0164 de beurre , 0,0203 de matière caséeuse , 0,0315 de sucre de lait, et 0,0086 de sels alcalins et terreux. 40 Dans une'péritonite survenue à la suite d'une suppres- sion de la sécrétion du lait , le péritoine sécréta un liquide tellement chargé d'albumine qu'il avait l'apparence du lait , et que même il contenait quelquefois réellement du beurre et du sucre de lait (4). III. Nous avons établi , comme chose vraisemblable (§ 114 , II ) , que les vésicules séminales peuvent sécréter une liqueur analogue à de la semence. Martin (5) a observé une sécrétion particulière de la peau , ayant des rapports avec la formation du sperme , chez un jeune homme qui , après avoir rendu par l'anus une liqueur (d) Journal de chimie médicale , t. IV, p. 56. (2) Gehlen , Journal fuer die Chamie , t. V, p. 65S. (3) Scliweigger, Journal fuer Chemic , t. IV, p. 489, (4) Schreger, Fluidorum corpons animalis cJiemiœ tioédloijicoé spcci- meu , p. 52. (5) Reil , ^rcÂ/(^ t. IV, p. 201. i PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. s/jB séminale mucilagineuse , nacrée et excoriant la peau , fut at- teint de croûtes blanchâtres au creux des mains , d'où une poussière fine et blanche se détachait, au milieu d'un prurit agréable. Le malin, quand ce jeune homme avait pris son re- pas et aperçu des femmes qui lui plaisaient , ses mains deve- naient le siège d'une chaleur agréable , que le frottement exal- tait jusqu'à la rendre brûlante, après quoi survenait une syn- cope voluptueuse , à laquelle les organes génitaux ne pre- naient aucune part ; si parfois il survenait des érections et une émission de sperme par les selles , ces phénomènes ces- saient d'avoir lieu aux mains. IV. La bile s'annonce partout par sa couleur jaune. A la vé- rité, nous ne pouvons point lui attribuer toutes les colorations en jaune, par exemple celle qui se voit quelquefois aux mem- branes séreuses et aux nerfs , et que Lobstein a désignée sous le nom de kirronose ; une pareille conclusion n'est point per- mise , tant qu'elle ne repose pas sur les données de l'analyse chimique , ou au moins sur la nature des désordres de l'acti- vité vitale. D'un autre côté , la bile a de l'affinité , sous le rapport de sa couleur, tant avec le cruor qu'avec le pigment carboné , et les dégénérescences qu'elle éprouve , soit dans la vésicule biliaire , soit lorsqu'elle se dépose sur d'autres points , sont fréquemment accompagnées d'une altération cor- respondante du sang et d'une formation exagérée de pigment ; en ef[et, la jaunisse peut passer au vert et au noir après de violentes affections morales , et l'on voit , dans le typhus bi- lieux, la bile devenir noire et poisseuse, la peau d'un jaune foncé, la sécrétion de la langue et des gencives bruneet noire. Mais nous dérivons avec assurance la jaunisse d'une sécré- tion hors du foie des matières caractéristiques de la bile , lorsque nous avons préalablement reconnu de toute évidence un changement dans l'organe hépatique. Cette sécrétion peut d'abord être sympathique ; tantôt alors la bile préparée dans le foie , trouvant un obstacle à son écoulement , est résorbée et déposée dans un autre organe sécrétoire; ainsi, par exem- ple (1) , Simon a vu , chez des Pigeons , un dépôt de matière (1) Froriep , Notizen , t. XII , p. 7. Z^6 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. verte s'effectuer dans le cloaque dix à vingt heures après la ligature des conduits biliaires ; tantôt une diathèse bilieuse fait que de la bile est à la fois produite par le foie et par d'autres organes, comme dans l'ictère, qui, après une violente commo- tion morale , se déclare si rapidement, accompagné de vomis- semens bilieux et d'une diarrhée de même caractère , qu'on ne saurait absolument l'attribuer à la résorption. Il s'opère de même une nouvelle formation de bile dans l'autre mode de productionde l'ictère , celui par antagonisme , lorsque l'action du foie est supprimée , cas dans lequel cet organe a été trouvé tantôt hypertrophié et atteint de dégénérescence , comme celui dont parle StoU , qui , avec un poids de vingt livres , était squirrheux et stéatomateux , ou comme un autre pesant vingt-six livres et ressemblant à du vieux lard , qu'a observé Hautesierk (1) , tantôt resserré sur lui-même , et pas plus gros qu'unrein, comme Ta vu Riolan, ou n'ayant que la largeur et l'épaisseur de la main, avec la dureté du cuir^ ce dont Boerhaave a rapporté un exemple (2). 5° Chez les personnes frappées de jaunisse , la peau , la membrane muqueuse (3) , les parties vasculaires (4) , le pan- créas (5) , les ganglions lymphatiques (6) , les membranes se reuses (7) , le cerveau (8) , le tissu scléreux (9) , les carti- lages (10) , les os (ll);etmême les cheveux (12), ont leur sub- stance pénétrée des principes colorans de la bile, et si l'on il'a point encore remarqué ce phénomène sur d'autres organes , peut-être doit-on s'en prendre uniquement à leur couleur , qui est déterminée par le sang. D'après cela , il paraît que (1) Voigtel , Handèuch der patholûgischen Anatomie , t. III, p. 14. . (2) Ibid., p. 16. (3)/ifrf.,t. II, p. 84,551. (4)/5^■c^.,p. 12, 96,100. (5)/62;£^.,t. I,p. 552. (6) Ihid., p. 527. (7) Ibid'., t. Il , p. 223 , 334. (8)ii7;(i.,t. 1, p. 589. (9)/Wti., t. II, p. 95. (XQ)md.,t.l, p. 360. (ll)/6ic^.,p. 219. (12) Ibid., p. 91. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 247 tous les points du système des vaisseaux capillaires sont aptes à produire des matériaux de la bile avec le sang, et que ces matériaux peuvent être ensuite déposés dans le parenchyme des organes. Or la question se présente tout naturellement de savoir si d'autres substances sécrétoires ne seraient point dans le même cas , et si ce n'est pas seulement à ce qu'elles ne possèdent point une couleur aussi saillante que la bile qu'il faut s'en prendre de ce que nous ne les découvrons pas. Du reste, la cholestérine a été trouvée aussi dans des tuber- cules et des squirrhes (1) , par Chevallier dans une tumeur ré- nale , par Gaventou dans une tumeur qui s'était développée à la gencive, par Lassaigne dans une tumeur cérébrale , et par Lauth dans un kyste attaché à l'ovaire (2). 6» La sécrétion des membranes séreuses , par exemple, de la plèvre (3) et du péritoine (4) , est très-souvent teinte en jaune dans l'ictère. Dans un cas de ce genre , Braconnot y a constaté , par l'analyse chimique (5) , la présence des maté- riaux caractéristiques de la bile. Chez un Chien à qui l'on avait lié le conduit biliaire , toutes les membranes muqueuses présentaient une teinte jaunâtre au bout de quatre jours , et le péritoine contenait une sérosité d'un jaune rougeâtre foncé (6). 7° A l'égard de la sécrétion du système cutané , on remar- que , dans l'ictère , une sueur jaune qui teint le linge , et il est commun que les malades atteints de fièvres bilieuses ex- pectorent des crachats jaunes , dans lequels l'analyse chimi- que a fait reconnaître de la bile à Fourcfoy (7). Un homme dont le foie induré et stéatomaleux pesait dix-huit livres , et chez lequel les conduits biliaires furent trouvés absolument (1) Andral , Précis d'anatomie pathologique , 1. 1, p. 352. (2) Journal de chimie médicale, t. YIII, p. 537, 541. (3) Voigtel , Handhuch der patholoyischen Anatomie , t. II , p. 462. (4) Ihid., p. 334. (5) Journal de chimie médicale , t. III , p. 480. (6) Tiederaann et Gmelin , Recherches expérimentales sur la digestion, t. II, p. 12. (7) Schreger, loc, cit., p. 32. ^48 PRODUITS MATÉRIELS HOMOIOGUES. imperméables , offrait, au rapport d'Eberle (1), un écoulement de cérumen alternant avec la jaunisse. 8" On a trouvé , dans la jaunisse , le suc pancréatique jaune (2) , et, à la suite d'une vive émotion morale , le lait jaune , presque vert et amer (3). . 9° L'urine devient brune , avec un sédiment brun , dans l'hydropisie qui se rattache à une maladie du foie ; jaune et alcaline, dans la fièvre bilieuse ; d'un rouge brun , avant la crise , dans les maladies inflammatoires de l'organe hépatique, d'un jaune foncé dans la polycholie ; elle a une couleur oran- gée et teint le linge en jaune dans l'ictère. Les analyses chi- miques faites par Fourcroy et Vauquelin, Clarion, Nysten (4), Orfila et Braconnot (5), ont démontré, en pareille occasion, la présence dans l'urine des principes constituans caractéristi- ques de la bile. Tiedemann et Gmehn (6) ont également re- connu , sur des Chiens , quelques jours après la ligature du conduit biliaire, que l'urine était d'un jaune foncé et contenait de la matière biliaire. V. L'urine ou les substances qui la caractérisent peuvent être sécrétées par le tissu cellulaire, les membranes muqueuses, les glandes salivaires , lacrymales et mammaires , les testicu- les et le foie. De nombreuses observations l'attestent; Haller en avait déjà réuni quelques unes (7) , et Nysten (8) en a pré- senté d'autres. Mais ces parties accomplissent une production d'urine , soit , lorsque la sécrétion normale est^ arrêtée dans les reins (10% 11", 12°), soit quand son produit ne peut point arriver au dehors (13°). 10° Richerand avait trouvé qu'on peut extirper l'un des reins à des Chiens , sans que l'opération les fasse périr, et qu'iln'y avait que l'ablation simultanée des deux organes qui (d) Physiologie der Verdauung , p. 185. (2) Voigtel , Handbuch der pathologischen Anatomic , t. T , p. 552, (3) Ibid., p. 580. (4) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques , p. 261 (5) Journal de chimie médicale , t. III , p. 480. (6) Recherches sur la digestion , t. II , p. 7. (7) Elément, physioloy,, t. II , p. 370. -.., (8) Loc. cit., p. 265. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 249 entraînât la mort au bout de quelques jours. Prévost et Du- mas (1) ont pu d'autant mieux observer les effets de cette mu- tilation, qu'ils ont laissé quinze jours s'écouler entre les deux extirpations. Au bout de trois jours, il survenait un vomisse- ment de masses brunes , avec d'abondantes évacuations alvi- nes , liquides et brunes ; les ventricules du cerveau contenaient une once de sérosité claire , le foie était enflammé , et la bile avait une teinte debrunverdâtre. Comhaire a remarqué, après une opération de ce j^enre , des vomissemens d'un liquide clair, ayant l'odeur de l'urine , et un épanchement de sérosité dans la cavité abdominale. Mayer (2) a répété l'expérience jusqu'à dix fois sur des Cochons d'Inde ; le résultat fut que le péritoine , le péricarde , la plèvre , les ventricules du cerveau, l'estomac et l'urine sécrétèrent un liquide brun, exhalant l'odeur de l'urine ; que les larmes prirent la même odeur ; que la vésicule biliaire se trouva contenir un liquide brun , de sa- veur alcaline, et non semblable à la bile ; enfin que les testi- cules, les épididymes , les canaux déférons et les vésicules séminales regorgeaient d'un liquide parfaitement semblable à de l'urine. 11° Chirac et Helvetius (3) ont lié les artères rénales à des Chiens , et remarqué ensuite que ces animaux rendaient de l'u- rine par le vomissement. Des Lapins auxquels Westrumb (4) avait lié les artères rénales , éprouvèrent , au bout de dix heu- res , des évacuations alvines liquides. 12° On remarque des sécrétions analogues dans des cir- constances où tout prouve que les reins agissent trop peu. En ouvrant le cadavre d'une femme , qui , pendant sa vie , exha- lait une insupportable odeur urineuse, Wrisberg trouva qu'il n'existait.' qu'un seul rein , et que cet organe était fort petit , ainsi que la vessie urinaire. Il est très-commun que la trans- piration ait une odeur d'urine chez les hydropiques (5) ; Nys- (1) Froriep , Notizen , t. Il , p. 230. (2) Zeitschrift fuer Physiologie , t. II, p. 270. (3) Haller, Elément, physiolog., t. II, p. 370. (4) Meckel, Deutsches Archiv. , t. VII, p. 528. (5) Nyslen, Recherches de physiologie et de chimie pathologiques, p. 275. aSo PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. ten a reconou le principe colorant de Turine (1) dans la séro- sité extraite par la ponction, quoiqu'il n'ait pu apercevoir aucune trace d'urée. Leniina observé , dans un cas d' œdème des membres inférieurs , que le liquide fourni par des mou- chetures faites à la cuisse répandait une odeur urineuse, que le malade vomit de l'urine pure pendant quatre jours , et qu'à la suite de déjections alvines mucilagineuses l'urine reprit sa voie normale. Dans ce qu'on appelle l'anourie des enfans , état caractérisé par un écoulement peu abondant d'urine fon-- cée en couleur, acre et fort odorante , il survient à la peau des vésicules qui , lorsqu'on les crève , laissent échapper une liqueur brûlante et d'odeur urineuse. Dans de pareilles cir- constances , chez certains vieillards , l'excrétion pulmonaire prend la même odeur. Les sueurs visqueuses et critiqnes qui succèdent à un accès de goutte , laissent quelquefois sur la peau , des urates et des phosphates, affectant la forme d'une poudre légère et brillante. Meckel (2) a observé un jeune homme chez lequel l'urine coulait en petite quantité et for- mait un sédiment copieux ; un liquide ayant la couleur et l'o- deur de l'urine était sécrété en si grande abondance, sous les aisselles , que la chemise et les vétemens s'en trouvaient im- bibés jour et nuit ; cet écoulement devenait plus abondant encore toutes les fois que le sujet buvait^ et il cessa lorsque l'urine se mit à couler en plus grande quantité. 13° Des accidens analogues se manifestent, en cas d'obsta- cle à l'élimination de l'urine , quand ce liquide vient à être résorbé. Ainsi on a observé un vomissement journalier d'urine dans un cas où l'urètre avait été obUtéré par suite d'une bles- sure (3). Dans une autre circonstance, après une rétention d'urine qui avait duré dix jours , et qui dépendait d'un gonfle- ment de la prostate , Wrisberg trouva la vessie tellement di- latée , qu'elle contenait dix livres d'urine ; la sérosité du pé- ricarde et des vésicules du cerveau exhalait l'odeur de ce li- (1) Nysten , loc. cit., p. 2S5. (2) Nova expérimenta et ohservationes de flnibus venarum ac vasorum lymphaticorum in ductus visceruque excretoria, corpoHs humani , p. 67. (3) Nyslen, loc. cit., p. 266. PRODUITS MATÉRIELS HOBIOLOGUES. 25 1 quide. On a vu, chez des malades auxquels des calculs vésicaux empêchaient de rendre leur urine, un liquide analogue à celte sécrélion s'échapper par le voriûssement (1) ou par les selles (2). Une fille était née sans anus ni parties génitales extérieures 5 cependant elle se portait fort bien encore à Tâge de quinze ans; l'urine s'échappait par les mamelons , et les matières fé- cales sortaient par le vomissement. 14° Dans d'autres cas , la sécrétion de l'urine dans les reins paraît avoir cessé par suite d'un obstacle à ce que ce liquide fût portée au dehors ; car les sécrétions supplétives augmentaient ou diminuaient suivant que rémission était plus ou moins abon- dante. Boerhaave rapporte le fait d'un homme qui perdit la fa- culté d'uriner, après s'être retenu volontairement pendant vingt-quatre heures; le sixième jour, sa sueur et son haleine avaient l'odeur de l'urine , et à l'ouverture du corps , on trouva dans les ventricules cérébraux un liquide analogue à cette dernière (3). Une fille, observée par Zeviani (4), reçut aux parties génitales un coup de couteau dont la plaie demeura ouverte pendant plusieurs années ; peu à peu , Turine devint de plus en plus rare , de manière qu'on fut obligé de recou- rir aux sondes durant quatre années, au bout desquelles l'instrument lui-même n'amena plus rien au dehors; il survint alors une hydropisie , avec des sueurs d'odeur urineuse , et enfin des vomissemens, qui se renouvelèrent chaque jour pendant trente-trois années ; à l'ouverture du cadavre , on trouva les reins désorganisés ; ils contenaient un liquide fé- tide et analogue à l'urine ; Turetère droit était oblitéré, et le gauche tellement rétréci qu'on pouvait à peine y injecter un peu d'eau ; la vessie n'excédait pas le volume d'un œuf de Pigeon. 15° Dans un état que l'on désigne sous le nom d'hystérie , où le désordre de la sensibilité dérange entièrement le cours de la vie , qui souvent s'écarte du type normal de la (l)'Nysten, Zoc ci^., p. 267. (2) lUd., p. 275. {%) Ihid.,^. 276. (4) /6iâ!., p. 270. 252 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. manière la plus bizarre, la formation de l'urine peut se por- ter des reins sur un autre organe , et y être ramenée par une irritation exercée sur les voies urinaires au moyen du cathé- térisme. Nysten (1) rapporte plusieurs cas de vomissemens uri- neux chez des femmes hystériques , et lui-même (2) a observé une femme qui, à la suite d'une émotion morale , fut prise de diarrhée , puis d'ischurie , ensuite d'une hydropisie générale, et enfin de vomissemens prolongés pendant quinze jours ; elle rendait journellement vingt litres d'un liquide citrin , ayant l'odeur de l'urine et contenant de l'urée , avec lequel n'é- taient jamais mêlés d'alimens, même lorsque l'évacuation avait lieu peu de temps après le repas. Une autre femme éprouva une commotion cérébrale , à la suite de laquelle ses règles furent remplacées par un vomissement de sang ; plus tard, elle fut atteinte aussi d'une fistule à l'anus ; alors les excrémens et les liquides qu'elle prenait en lavemens étaient vomis également , mais précédés d'un liquide que l'analysé chimique démontra être de l'urine parfaite ; l'emploi d'un ca- théter et l'opération de la fistule firent reprendre à la sécré- tion urinaire et aux déjections alvines leur route normale (3). Hirsch (4) a observé une femme hystérique , dont les règles coulaient alternativement par l'anus , les poumons , la racine des ongles, les paupières, les oreilles, le cuir chevelu, les seins et le creux de l'aisselle ; quand on passait un jour sans la sonder, elle vomissait un liquide , que Dulk a reconnu être de l'urine, puis des excrémens et les substances qu'on lui avait administrées sous forme de lavemens. Des cas analogues de vomissement d'urine chez des femmes qui furent guéries par l'emploi du cathéter, ont été rapportés par Osiander (5) et Malago (6). (4) Loc. cit., p. 266-269. (2) Loc. cit., p. 278. / (3) Loc. cit., p. 280. (4) Kœhler, Dissertatio de vomitu urinœ vesicalis , p. 12. (5) Medicitiisch-chirur(jische Zeitung , 1810, t. lU, p. 191. (6) Ihid., 1819 , 1. 1 , p. 112. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 2 53 Kœnjg (1) et Senter (2) en ont observé d'autres, dans les- quels des femmes rendaient l'urine tantôt par le vomissement, tantôt par les selles. Enfin Arnold (3) cite l'histoire d'une fille, atteinte d'un prolapsus de la matrice , chez laquelle le flux des menstrues et ensuite celui de l'urine s'arrêtèrent ; pendant deux ans et demi, il fallut recourir au cathéter pour vider la vessie ; mais, l'opération ayant été négligée trois jours de suite, l'urine s'échappa par la peau de la région inguinale , puis, durant plusieurs heures, paf l'oreille droite, qui fut alors frappée de surdité, ensuite par l'oreille gauche , par le mamelon, par l'ombilic , et enfin de temps en temps par le vomissement. 16° Les auteurs rapportent des cas dans lesquels il sortait, par les voies normales, de l'urine qui n'avait pu être sécrétée par les reins , soit parce que ces organes étaient impropres à remplir un tel office , soit parce qu'il n'existait aucune com- munication entre eux et la vessie, de manière que nous sommes forcés d'admettre , avec Roose (4) et Plagge (5), que la vessie peut quelquefois sécréter de l'urine, indépendamment des reins. Les ouvertures des cadavres ont constaté des désorga- nisations complètes de ces derniers organes chez des sujets qui avaient continué d'uriner pendant toute leur vie. Ainsi Browne Cheston (6) a trouvé , chez un jeune garçon qui urinait tantôt d'une manière involontaire, tantôt avec beaucoup de difficulté, les deux reins convertis en des sacs pleins de pus. Oberteuf- fer (7) a vu l'un de ces organes aussi dur qu'une pierre , son bassinet plein de pus, les conduits de Bellini détruits, et l'autre rein effiacé , sans qu'il en restât aucune trace , non plus que de son uretère. Dans un cas observé par Stœrck (8), la sub- (1) Nysten , Recherches de physiologie et de chimie pathologiques , p. 272. (2) Froriep , Notisen , t. XXI , p. 299, (3) Archives générales , t. XVl , p. 590. (4) Physiologische Untersuchungen , p. 80. (5) Meckel, Deutsches Archiv , t. VII, p. 429. (6) Voigtel , Handhuch der'patholo'jisc'hcn AnatOihie , t. III , p, 486. (7)7/!.i^., p. 187. (8) iàirf,, p. 194. a54 PRODUITS MATÉRIELS HOMOIOGCES. stance du rein était détruite, et il ne restait plus de toute la'glande qu'un simple sac membraneux. Chez un homme qui avait toujours rendu de Turine pâle et aqueuse, mais sans jamais éprouver aucun symptôme d'ischurie , les deux reins , au rapport de Conradi (i) , ne consistaient plus qu'en deux vésicules pleines d'eau , et les uretères étaient tel- lement resserrés sur eux-mêmes, qu'à peine aurait-on pu y faire pénétrer une soie de cochon. Horst (2) a trouvé , chez une femme dont la sécrétion urinaire n'avait jamais été in- terrompue jusqu'au moment de sa mort , les reins effacés ea totalité , et remplacés par une multitude d'amas informes de graisse , qui contenaient beaucoup de liquide sanieux dans leur milieu; les commencemens des uretères flottaient librement dans cette masse adipeuse. Chez un homme qui avait rendu de l'urine , tantôt claire comme de l'eau , tantôt citrine et de couleur foncée , et parfois aussi lactescente , Ficker (3) ren- contra, au lieu des reins et des capsules surrénales, une simple substance dissoute et peu grenue , sans nul vestige des ure- tères. Au dire d'Autenrieth (4), les uretères d'un Chat par- taient de la vessie en se ramifiant , et disparaissaient dans le péritoine, sans communiquer avec les reins; cependant l'a^ nimal avait évacué de l'urine. Quelques Cochons d'Inde uri- nèrent également vingl-quatre heures encore après que Mayer leur eut extirpé les reins (5). Hauton (0) a trouvé de l'urine dans la vessie de Chiens auxquels il avait lié les uretères, et qu'il avait fait boire ensuite ; ce phénomène lui paraissait dé- montrer l'existence de voies urinaires occultes , mais il s'ex- plique par une sécrétion supplétive de la vessie urinaire. 17° Au nombre des métastases de quelques uns des prin- cipes constituans de l'urine se rangent encore les nodosités arthritiques. L'espèce de goulte dans laquelle ces tubercules apparaissent , se manifeste au milieu des mêmes circonstances (1) Voigtel , Handhucli der pathologischeii Anatomie , t . III , p. 497. (2) Hufeland , Journal der praktischen Heilkunde , t. XXXV, p. 85. (3) Htirley, Neue Jahrbuecher der deutscheii Medicin , t. IV, cah. II. (4) Handbuch der Physioloijie , t. II , p. 340. (5) Zeitschrifi fuer Physioloyie , t. H, p. 273 , 275. (6) Philos. Trans., !l670 , p. 2049. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 255 que celles qui accroissent la formation de l'acide urique ( § 853, 10°, 4'P, 42° ); pendant les souffrances générales qu'elle dé- termine , il y a certaines époques où Ton ne rencontre point d'acide urique dans l'urine ( § 851, 10° ) ; bientôt après sur- vient, au voisinage des articulations, un état inflammatoire qui constitue ce que l'on appelle un accès de goutte. Dans cet état, plus ou moins accompagné de fièvre, l'organisme se dé- barrasse de l'acide urique qu'il a produit en abondance et qui se trouvait retenu en lui ; il en foit passer une partie dans l'urine , et en dépose une autre , soit aux alentours des arti- culations dont la phlegmasie s'était emparée, soit dans le tissu cellulaire et les capsules articulaires, où l'acide s'endurcit en une masse solide , d'un blanc jaunâtre , la plupart du temps douée d'un éclat gras, et spongieuse ou compacte. Wollaston , Tonnant, Pearson , Vogel , Jseger , Fourcroy et Vauquelin ont trouvé , dans les concrétions arthritiques, une petite quantité de substance organique , et de l'acide urique libre ou combmé, soit avec de la soude, soit avec de lachaux (1). D'après une analyse faite par Laugier (2j, les parties consti- tuantes étaient 0,2 d'acide urique, 0,2 d'urate de soude, 0,1 d'urate de chaux, 0,2 de chlorure de sodium, 0,1 de matière organique et 0,1 d'eau (*). Les nodosités des goutteux con- tiennent quelquefois des terres seulement , sans acide urique ; car John en cite (3) dans lesquelles on trouva 0,281 de phos- phate et 0,125 de carbonate calcaires, 0,031 de phosphate, de carbonate et de sulfate de soude, et 0,563 de matière or- ganique, avec de l'eau et de la graisse. Mais comme ces sub- tances appartiennent également à l'urine, nous devons con- sidérer les concrétions arthritiques en général comme des dépôts des matériaux peu solubles de l'urine dans le tissu cel- lulaire et dans des vésicules séreuses. On ne peut point les (4) Jolin , Chemisclie TabeUen des lliierreichs , p. 59. (2) Journal de chimie médicale , t. I , p. 6. (*) L'analyse des matières arthritiques observées et figurées par J. Cru- veilhier , a été faite par E. Barruel j elles ont fourni un mélange d'urate de soude et de phosphate de chaux , le dernier sel en plus grande portion, Yoyez Anatomie ■pathologique du corps humain _, par J. Cruveilhier, 4= liv., in-f°, fig. color. (3) Meckel , Deutsches Archiv , t. 1 , 513. 256 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. mettre au nombre des concrétions pierreuses ( § 874 , I ) ; car elles ne sont point libres, mais intimement unies avec les parties environnantes , elles sont soumises à l'influence de la vie , et elles peuvent repasser à l'état liquide , puis être ou résorbées ou éliminées par la suppuration. -] b. Transsubstantiation. § 858. La transformation homologue des parties solides , ou la conversion d'un tissu en un autre , porte plus spéciale- ment le nom de transformation ; mais celui de transsubstantia- tion (1) la désigne mieux et d'une manière plus précise. . Elle consiste en ce que la nutrition d'une partie s'écarte de son caractère normal sous le point de vue de la matière, et en ce qu'à la place des parties constituantes , qui ont été résor- bées , il se dépose des substances qui normalement appartien- nent à des parties d'une autre espèce. Elle se rapproche de la formation de nouvelles parties homologues, dont, en négligeant la manière dont elle se produit , on parvient difficilement à la distinguer quand la nouvelle formation a refoulé et fait dis- paraître celles qui jusqu'alors avaient existé. Nous pouvons la considérer comme une homœoplastie moléculaire , c'est- à-dire comme une formation qui ne répond pas au lieu où elle s'opère, ^qui ne se manifeste pas , ainsi que l'homœoplastie proprement dite ( § 859 ), sous une forme spéciale et sous les dehors d'une masse particulière, mais se rapporte uniquement à la substance , et remplit les vides produits par la déforma- tion normale insensible. On peut partager la transsubstantation en régressive et pro- gressive. * Transsubstantiation régressive. I. La transsubstantiation régressive détermine le ramollisse- ment et la conversion d'un tissu spécial en un autre qui a des caractères plus généraux. l» Une partie peut , soit par dépression de sa vitalité, inac- (4) Vettcr, Jjiliorismcn ans der jmthûlocjischen Anatomie , p, 67. PRODUITS MATÉRIEIS HOMOIOGDES. zS'J tion et atrophie , soit à la suite de l'inflammation , perdre son caractère spécifique, être ramenée à la condition de la masse générale ou commune , et se trouver ainsi convertie en tissu cellulaire. Ce changement a lieu, dans des muscles par exem- ple, lorsqu'une tumeur vient à les distendre, dans des glandes, dans des gianglions lymphatiques (1) , aux extrémités des artères oblitérées, aux bouts des nerfs ou des tendons qui ont été coupés (2). Il y a également certains états pathologiques dans lesquels ces derniers paraissent tellement ramollis , que leur tissu cellulaire parenchymateux devient plus manifeste. Cette métamorphose peut reposer en partie sur une simple atrophie, les parties élémentaires spéciales , par exemple, la substance musculaire ou nerveuse, ayant été résorbées, de manière qu'il ne reste plus que les enveloppes celluleuses , avec le tissu cellulaire parenchymateux. 2° Des muscles soumis à la volonté se transforment en graisse lorsqu'ils sont demeurés pendant long-temps dans l'inaction, que ce soit d'ailleurs par l'effet d'un défaut de conformation, comme il arrive dans le pied-bot par exemple (3) , ou par suite d'une paralysie (4), d'une inflammation chronique, avec carie (5) , d'une ankylose , d'anciens ulcères , de luxations ou de fractures qui n'ont point été guéries (6). Les fibres musculaires deviennent d'abord blanchâtres ; elles donnent un liquide graisseux quand on les comprime, et finissent par disparaître, de manière que le muscle entier se trouve con- verti en une masse d'apparence lardacée. On pense généralement aujourd'hui que la substance mus- culaire ne se convertit point elle-même en graisse , et qu'elle est seulement refoulée par celle-ci. Cette hypothèse ne se (1) Cruveilhier, Essai sur l'anatomie pathologique en général, t. I, p. 141. (2) Andral, Précis d'anatomie pathologique, 1. 1, p. 240. (3) Vetter, Aphorismen aus dei' pathologischen Anatomie , p. 69. (4) Bannigsertner, Beohaclitmnjen veher die Nerv/fii und das Blut in ilirem ijesunden vnd kranliliafLeti Zxintande , p. 190. (6) MedicinisclieJahrbuecher des œsterreicMschen Staates , t. VII, p. 8'J. (6) Cruveilhier, Essai sur l'anatomie pathologique en général, t. I, p. 186. VIII. 17 2 58 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. rapproche de la vérité qu'en ce sens que toute transformation du genre de celle dont nous parlons suppose une résorption de la substance normale. Au reste , la graisse diffère ici de celle qui se dépose ordi- nairement autour des muscles , et elle ressemble davantage à l'adipocire. D'après Cruveilhier (d) , un muscle qui avait subi cette espèce de transformation, contenait 0J59 d'eau, 0,092 d'une substance analogue à de la viande bouillie, 0,003 de gélatine ou d'extrait aqueux, et 0,746 de graisse, consistant elle-même en 0,667 de stéarine, 0,076 d'élaïne et 0,003 d'adipocire. Le cœur a été trouvé converti en graisse , et à tel point qu'il n'y avait plus d'intactes que les couches musculaires les plus intérieures (2). On a observé , dans des cas rares , une transformation ana- logue du pancréas, des glandes mammaires, des reins et même des os ; ces derniers étaient alors réduits à une couche mince de substance compacte , circonscrivant une cavité médullaire énorme (3). 11 est plus fréquent de voir, notamment chez les phthisi- ques, et parfois aussi, selon Mérat (4), dans les hydropisies, le foie imprégné de graisse , ou transformé en une masse graisseuse , il est alors volumineux , d'un jaune pâle , blanc et fragile ; la bile contient peu de substance biliaire , et se compose presque uniquement d'albumine, Vauquelin a trouvé dans un foie ainsi dégénéré 0,19 de parenchyme , 0^36 d'eau et 0,45 de graisse ordinaire. Dans un autre cas, où le cha- grin avait été la principale cause de la maladie , Frommherz et Gugeit (5) ont reconnu que le foie pesait douze livres ; il était blanc et sans nul vestige de sa texture normale ; il se composait principalement de graisse et d'albumine non coa- gulée , avec peu d'osmazome , de matière caséeuse , de ma- (4) Loc. cit., p. 4893 (2) Loc. cit., p. 184. (3) Loc. cit., p. 493. (4) Mémoires de la Société médicale d'Emulation, t. VI, p, 402. (5) Schweigger, Journal fuer Chemie , t. L , p, 86. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 269 tière salivaire , de fibrine , de chlorure de sodium et de phos- phate calcaire, sans choléslérine , acide gras , ni résine bi- liaire. Mais il arrive quelquefois que le foie contient de la cholestérine en masses isolées, grises ou blanches [1). 3° On sait, d'après les observations de Trembley, que quand on retourne un Polype à bras , comme un doigt de gant, la substance extérieure se convertit en surface digérante, sa surface acquérant des granulations plus volumineuses et co- lorées, comme celles qui caractérisaient auparavant cette der- nière. Mais on conçoit qu'une pareille transformation ne peut avoir lieu qu'à un bien faible degré dans des organismes su- périeurs. Cependant il n'est pas rare qu'une portion de peau prenne en quelque sorte le caractère d'une membrane mu- queuse lorsqu'elle forme habituellement une cavité contenant de l'air. Ainsi Hebréard (2) a vu, chez un idiot qui tenait constamment les genoux fléchis, la peau du jarret rougeûlre, sans excoriations , molle et sécrétant de la mucosité. Lorsque Dieflenbach (3) avait fabriqué un nouveau prépuce par le renversement en dedans de la peau extérieure, cette expan- sion devenait rouge et humide, comme un prépuce naturel , et fournissait une sécrétion analogue. ** Transsubstantiation progressive. IL La transsubstantiation progressive a pour caractère tan- tôt la condensation, tantôt l'admission d'un caractère plus spécial. 4° Du tissu cellulaire peut se transformer en une mem- brane muqueuse. La paroi d'un ulcère , en général , ressemble à une mem- brane muqueuse , par son tissu spongieux et riche en vais- seaux. Cette analogie devient plus prononcée lorsque la sup- puration dure long-temps , et dans les trajets fistuleux , (d) Andral, Précis d'anatomie palliologique , t. II, p. 597. (2) Nouvelle bibliothèque médicale, 1S29, t. II, p. 201. (3) Chirurgische Erfahrungen besonders ueher die fViederîierstellunQ zerstœrter Theile des mensçhlichen Jioerpers, 1. 1, p. 62. ^ 260 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. comme l'a surtout démontré Villermé (1). En effet, la couche qui fournit le pus se délimite peu à peu de plus en plus , de manière qu'on peut la détacher des tissus sous-jacens , sous la forme d'une membrane spéciale; d'abord rouge, inégale, Teloutée ou tuberculeuse , elle devient graduellement pâle et lisse , cesse de suppurer, sécrète du mucus (2), perd la sen- sibilité qu'elle témoignait au passage de l'urine ou des matières fécales, acquiert un épithelium au voisinage de la peau extérieure , de manière qu'en cet endroit une pi- qûre d'insecte y fait naître une ampoule (3), et devient par là semblable à un conduit excréteur. 5° La membrane muqueuse du rectum , du vagin et de la matrice , renversée et retournée , prend les apparences de la peau extérieure par le contact de l'air atmosphérique ; la rougeur diminue, la sécrétion muqueuse cesse, l'humidité s'efface, l'épithelium s'épaissit, et la sensibilité à tout contact étranger s'émousse. Mais les parties du système de la mem- brane muqueuse situées à une plus grande profondeur ne sont point susceptibles d'une pareille transformation, même lorsqu'elles parviennent à l'extérieur et entrent en contact immédiat avec l'atmosphère , par exemple dans le cas d'anus contre nature ou d'extroversion de la vessie. 6" Une transformation en substance scléreuse s'observe fréquemment dans le tissu cellulaire (4). Ce tissu s'accu- mule d'abord en plus grandes masses , qui ensuite se serrent de plus en plus les unes contre les autres et se confondent ensemble. Cette transformation en substance scléreuse s'observe aussi dans les vaisseaux oblitérés , dans les cartilages mis à découvert , quelquefois dans les vésicules séreuses , la glande thyroïde et les testicules (5). Elle a lieu également dans les fibres musculaires avoisinant les luxations et les fractures (1) Meckel, Deutschcs Archiv, t. 11^ p. 471. (2) Amiral , Précis d'anatoniie palliologique , 1. 1 , p. 259, (3) Mt'Ckel, Deutxches Archiv , t. II, p. 476. (4) Amiral, Précis d'aiialoiiiie pathologique, t. I, p.' 267. (5) Béclai'd , Additions à l'analoniie générale de Bicliat , p. iSi. PRODUITS MATÉIIIELS HOMOLOGUES. 261 non {juéries , qui , après avoir subi celle métamorphose , re- présentent des li{}amens capsulaires. Elle se voit encore à Textrémilé des muscles dans les moignons d'amputation (1), et aux parties musculaires qui avoisinent des os cariés , ou qui garnissent des régions du corps condamnées depuis long- temps à rinaction , soit par la paralysie , soit par une tout autre cause (2). 7° Le tissu cellulaire subit une transformation cartilagi- neuse aux alentours d'une tumeur blanche des articulations et dans l'éléphantiasis. La même chose arrive à la membrane muqueuse, par exemple à celle de l'urètre ou de la vésicule biliaire. Il est commun de voir des points réellement conver- tis en cartilage à la surface des membranes séreuses, par exemple à la tunique vaginale dans les hydrocèles anciennes, au péritoine dans les hernies invétérées , à la capsule périto- néale du foie , et au péricarde. On en remarque aussi à celle des enveloppes scléreuses, par exemple au périoste lors- qu'une tête d'os luxée roule sur lui , et à la capsule qui en- toure la rate ou les reins. Enfin on voit fréquemment se con- vertir en cartilage des connexions scléreuses, comme par exemple les tendons des colonnes charnues du cœur, et celui du plantaire grêle à l'endroit où il frotte contre le pé- roné (3). 8° Une véritable transformation en substance osseuse s'observe quelquefois dans des cartilages , des muscles et le tissu scléreux, tandis que quand des ossifications se mani- festent en d'autres parties , on reste dans le doute de sa- voir si ce n'est point une pseudomorphose osseuse qui a re- foulé la substance normale (§ 859 , I). Les déviations de la colonne vertébrale entraînent ordinairement l'ossification des cartilages intervertébraux. De tous les cartilages , ceux qui s'ossifient le plus fréquemment , sans cause locale , sont ceux du larynx , des côtes et du sternum. Toutes les fois (1) Cru\eilhier, Essai sur l'anatoniie pathologique et générale , t. I , p. 371. (2) Andral , Précis d'anatomie pathologique , t. I , p. 274. (3) IHd., p. 290. 262 PRODUITS MATÉRIEIS HOMOLOGUES. qu'une pareille iranslormalion s'est opérée, on trouve les vaisseaux plus développés. Après les fractures, il survient, dans le périoste, ainsi que dans les muscles, les tendons et le tissu cellulaire des alentours , une ossification passa- gère , le cal provisoire ( § 862 , 8°), phénomène que Kœler, entre autres (1) , avait déjà observé : les muscles deviennent grisâtres, imbibés d'un liquide visqueux; ils se convertissent en tendons , puis en cartilages , enfin ils s'ossifient en partie , et quand la fracture est consolidée , ils reprennent leur tex- ture normale. Quand les fragmens osseux clievauclient l'un sur l'autre, de manière à ne pouvoir se réunir ensemble , cette ossification, au lieu de rester provisoire , devient quel- quefois permanente. Des observations recueillies dans ces derniers temps ont appris que les jeunes soldats sont fré- quemment atteints d'une inflammation des muscles grand pectoral , biceps brachial et deltoïde , causée par le choc du fusil pendant les manœuvres de l'exercice ; quand on cûn- linue de les soumettre au maniement de l'arme , les fibres musculaires deviennent tendineuses , puis cartilagineuses , enfin osseuses , mais les parties ossifiées demeurent encore séparées de la peau par une couche de fibres musculaires. Il est rare que des parties musculaires s'ossifient , sans cause appréciable, par l'effet d'une diathèse spéciale ; Rogers l'a cependant vu (2) chez un jeune garçon. On rencontre sou- vent des ossifications dans des ligamens ou des tendons , au périoste , à la dure-mère , et dans d'autres enveloppes scléreuses. Ainsi , lorsque les tendons sont exposés à de rudes frottemens , il se produit dans leur intérieur des os particu- liers, appelés sésamoides , comme celui qu'on observe quel- quefois au tendon du muscle biceps brachial des chevaux. II. Formatiou de parties nouvelles homologues. § 859, La formation de parties nouvelles homologues re- (1) E.vperimeiita circa reyeuerationem ossium, Gœltingue , 1786 , p. 46,80. (2) Froriep, Notizen, t. XL , p. 302. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 263 pose sur un changement qualitatif survenu dans le travail de la plasticité , qui , au lieu de se borner à maintenir ce qui existe dans Torganisme déjà développé , produit de nouvelles parties organiques. Elle se manil^ste sous deux formes différentes , qui con- stituent. Tune rhomœoplastie , et l'autre la régénération (§860). A. Homœoplastie. L'homœoplastie (1) est une augmentation anormale des parties organiques. Ses produits sont des pseudomorphoses , mais homologues, ou, comme les appelait Meckel (2), des ré- pétitions de parties normales. La plupart du temps occasionées par de simples circon- stances locales, ces pseudomorphoses dépendent rarement d'une dialhèse , et bien plus rarement encore d'une véritable dyscrasie (§ 867). Elles ne sont pas non plus hostiles par elles-mêmes à la vie. Seulement, lorsqu'elles acquièrent un volume considérable , elles exercent sur les parties voisines une pression qui en détermine l'atrophie. Mais elles peuvent dégénérer , et se convertir en formations hétérologues. Originairement elles sont ou des parties celluleuses(l-lll), ou des tissus stratifiés (IV) ; les pseudomorphoses membra- niformes(Y) ou scléreuses (VI) ne sont que secondaires, et tiennent à une métamorphose de celles qui avaient d'abord le caractère celluleux. 1. FSEtIDOMOEFHOSES CELLTILErSES. a. 'Néoplasme. I. Parmi les pseudomorphoses qui appartiennent au sys- tème du tissu cellulaire , se range d'abord la masse organi- que commune ou générale , qui constitue le tissu fondamental 0) Lobstein , Traité d'anatomie pathologique , t. I , p. 293. (2) Handhuch der pathologischen Anatomie , t. IIÏ, p. 118. 264 PRODUITS MATÉRIELS HOMÔLOGUESr de toutes les formations nouvelles , qui a de l'analogie avec la masse organique primordiale (§ 417, 1°), et à laquelle nous donnerons le nom de néoplasme , afin d'avoir un terme gé- néral pour la désigner. 1° Le néoplasme doit naissance à la solidification du liquide plastique (§ 854, III) épanché par suite d'une inflammation plus ou moins développée (§ 848, 7°). Il est blanc ou grisâtre , mou et amorphe. Au microscope , on y découvre de petits glo- bules, dans un liquide gélatiniforme. Tantôt il ne se développe pas davantage , et il est expulsé en cet état , comme dans les aphthes -.tantôt il se condense encore, et prend, suivant la forme des parties entourantes , celle de cordons ou de membranes , qui s'organisent , acquièrent des vaisseaux , se développent en tissu cellulaire , s'enflamment , suppurent , et peuvent de- venir tendineux , cartilagineux , osseux ; tantôt enfin il se dé- veloppe en parties régénérées , et entre ainsi dans l'organi- sation (§861). Aux formes qui se rapprochent de celle d'un cordon se rapportent les concrétions qu'on rencontre dans le système vasculaire (2°) ; et à celles qui s'étalent en membranes, les fausses membranes qu'on voit se développer aux vésicules séreuses ( 3° ) , aux membranes muqueuses ( 4° ) et à la peau (5°). 2° Des néoplasmes en forme de cordons, contractant une adhérence intime avec la membrane vasculaire commune, présentant fréquemment dans leur intérieur des vaisseaux de formation nouvelle , et devenant souvent tendineux , parfois même cartilagineux et osseux , se rencontrent dans le cœur , ainsi que dans les artères et les veines. 3° De toutes les parties du corps , la surface interne des membranes séreuses , notamment de la plèvre , est celle où l'on rencontre le plus souvent des néoplasmes , qui , dans bien des cas , y acquièrent un grand développement. Ils y pro- duisent tantôt une couche mince , adhérente et lisse à la sur- face, qui ressemble elle-même à une membrane séreuse, tantôt une couche à surface inégale et tuberculeuse , comme par exemple dans le péricarde. Ici ils constituent des couches superposées , de manière qu'on peut les séparer en plusieurs PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 265 feuillets ; là ils représentent un tissu lâche et réiicuîé de la- melles et' de filamens ; ailleurs , ils prennent l'apparence de cordons ou de ligamens, surtout dans la cavité abdominale ; quelquefois enfin ils sont détachés , et nagent , sous la forme de flocons , au milieu du liquide séreux. 4° Il se forme des néoplasmes au dessous des membranes muqueuses qui ont un épithelium distinct , par exemple dans la cavité de la bouche. Il s'en produit à la surface libre des autres. La sécrétion muqueuse qui a lieu au dessous d'eux les détache , soit seuls , soit avec l'épilhelium dans le premier cas, surtout lorsque l'inflammation tombe, et ils sont alors expulsés , soit sous la forme de lambeaux , quand ils ont peu d'étendue ou qu'ils s'enlèvent par parties , soit sous celle de tubes, lorsqu'ils occupent tout le pourtour d'un point du canal de membrane muqueuse. Ces tubes , ceux par exemple qui sortent de l'intestin , présentent quelquefois des embranche- mens qui n,e peuvent point avoir été produits dans les canaux de sécrétion abouchés avec la membrane muqueuse, mais paraissent être nés du néoplasme lui-même ; en effet , Uhl a distingué jusqu'à trois membranes superposées sur de pareils tubes (1). 5° A la peau , il se manifeste , soit au dessous de l'épider- me , comme après les brûlures par des liquides bouillans , soit dans les points dépouillés de leur épiderme et suppurans , comme après l'emploi prolongé des épispastiques , une mem- brane d'un blanc jaunâtre , molle , facile à détacher , et qui souvent se reproduit lorsqu'on l'enlève. 6° La composition chimique de ces produits paraît varier suivant l'organe qui leur a servi de sol , mais principalement d'après le degré de développement auquel eux-mêmes sont arrivés. Schwilgué a trouvé de l'albumine et Bretonneau de la fi- brine (2) dans les fausses membranes expectorées par des enfans atteints du croup. Celles qui s'étaient produites sur la surface de membranes (1) Dissertatio de fseudangomorphosi in tuho intestinali,-ç. 20 , 34. (2) Andral , Précis d'anatomie pathologique , t. II , p. 484. 266 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. muqueuses ont présenté à Lassaigne (1) et à Laugier (2) de l'albumine en partie liquide et en partie coagulée, de la fi- brine et de la graisse susceptible d'être extraite par l'alcool. Barruel a reconnu qu'elles étaient plus solubles dans la po- tasse caustique que la fibrine, et moins que l'albumine , et qu'en général elles ressemblaient moins à celle-ci qu'à celle- là, de manière qu'on pourrait les considérer comme une forme incomplète de la fibrine. Enfin les fausses membranes développées dans le canal in- testinal n'ont présenté à Uhl ni albumine ni fibrine, attendu que l'acide acétique n'en dissolvait rien , et que la dissolu- lion dans la potasse caustique n'était point troublée par l'acide hydrochlorique ; mais il y a rencontré de la gélatine, que la teinture de noix de galle précipitait de la dissolution tant aqueuse qu'alcaline. 7» Le néoplasme opère l'adhésion de deux surfaces situées en face l'une de l'autre , quand il est le produit soit de toutes deux , soit d'une seule , mais qu'alors il s'est trouvé en con- tact avec l'autre surface également frappée d'inflammation. C'est aux vésicules séreuses qu'il est le plus commun de ren- contrer ces sortes d'adhérences , et comme elles y sont tirail- lées par le mouvement des parties accollées, elles y parais- sent sous la forme tantôt d'une couche cellulo-membraneuse , tantôt de cordons ou de filamens. L'une des parois adhère à l'autre , comme par exemple celles d'une capsule synoviale , ce qui produit une fausse ankylose ; ou bien la portion pa- riétale se confond avec la portion recouvrante , comme le cœur avec le péricarde, le testicule avec la tunique vagi- nale (dans la cure radicale de l'hydrocèle), les poumons avec la cage thoracique ou le diaphragme , le foie avec le dia- phragme ou la paroi abdominale ; ou enfin l'une des parties recouvrantes s'unit avec l'autre , comme aux intestins , qui se trouvent fréquemment convertis parla en un peloton inex- tricable. Le périoste d'une pièce d'os brisée et chevauchante se confond avec celui de la portion d'os avec laquelle l'autre est entrée en contact. (1) Journal de chimie médicale , 1. 1 , p. 69 j t. IV, p. 475. (2)/6i(^., t, lll,p. 419. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 267 La même chose arrive aux membranes muqueuses. La pau- pière se soucie avec le «lobe de l'œil. Des ulcères aux lèvres réduisent la bouche à ne plus êlre qu'un petil trou , et si l'on agrandit cette ouverture pnr une incision, la bouche se ré- trécit de nouveau, parce que les surfaces en contact l'une avec l'autre sont dépourvues d'épilhelium. Aussi Dieffen- bach (!) n'est-il parvenu, en pareil cas, à obtenir une dilata- lion permanente qu'en excisant un lambeau de peau sur les côtés du trou et faisant cicatriser avec les bords de la plaie la portion de membrane muqueuse qui avait conservé son épi- thelium. On voit aussi d"es régions diverses de la peau , par exemple aux doigts, se souder ensemble lorsqu'à la suite de brûlures elles sont maintenues en contact mutuel. Le même phénomène peut avoir lieu chez l'embryon , quand l'épiderme ne s'est point encore développé: ainsi, Seerig, par exemple, a vu le talon adhérent au mont de Vénus (2). Une porlion de la peau d'un embryon peut également alors contracter adhérence avec la portion correspondante des tégumens d'un autre em- bryon (§ 45 , 3°). Du reste , les organes les plus divers sont susceptibles aussi d'adhérer ensemble , par exemple la membrane muqueuse de la trompe utérine à l'enveloppe péritonéale de l'ovaire , les nerfs à du tissu scléreux , etc. Il suffit pour cela d'une cer- taine assimilation déterminée par l'inflammation , et la suppu- ration n'est pas toujours nécessaire (3). 8° Le néoplasme peut aussi déterminer la coalition de par- ties organiques provenant d'un tout autre point de l'économie, ce dont Haller avait déjà rapporté des exemples (4). Les con- ditions d'une accrélion semblable de lambeaux détachés de la peau consistent principalement, d'après DielFenbach (5), en ce qu'il n'y ait point une trop grande quantité de sang , que (i) Chintrgischo Erfalirun'jen, lesonders vehëY die TViederlierstelhirig zerslœrler Theile des menschlichen Koerpers , t. I, p. 41. (2) Ueher angeboine JVerwachsuntj der Finijer und Zehen,icnd Nehen-^ zalil derselhen , ji. 8. (3) Seeiig , loc, cit., p. a. (4) Eleinent. physiolojj., t. VIII, p. 163. (3) Chirurgische Erfahrungen , t. II , p. 163 , 178, 568 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. l'état 'spasmodique (9°) ait cessé dans le lambeau cutané, que le lambeau ne saigne plus , enfin que la surface elle- même de la plaie ne donne plus de sang, mais laisse seulement suinter un liquide limpide , dont la plasticité ne tarde pas à se mettre en évidence. 9° Lorsqu'on a cerné un lambeau de peau par une incision circulaire, il devient , selon Dieffenbach (1) , d'une pâleur ca- davéreuse , avant même qu'on Tait détaché ; cette pâleur ne tient point aune perte de sang, dont à peine, en effet, il s'est écoulé quelques gouttes , mais elle est le résultat d'un état spasmodique des vaisseaux capillaires, que l'on peut consi- dérer comme une rigidité cadavérique partielle (§ 635), et qui a pour effet de refouler le sang dans les vaisseaux d'u ' plus grand calibre , situés plus profondément (2). Quelques minutes après la séparation complète , la pâleur diminue un peu , parce qu'il pénètre une certaine quantité de sang dans les vaisseaux capillaires superficiels ; les bords laissent suin- ter d'abord du sang de couleur foncée , puis du sang séreux, et enfin de la sérosité. Si alors , avant que les bords du lam- beau se dessèchent et que la vie partielle s'éteigne en lui, on l'assujettit sur une surface tout récemment dépouillée de sa peau , il demeure pendant quelque temps pâle et affaissé ; mais , dès que l'inflammation se développe à la plaie et dans les alentours , il devient lui même le siège d'une turgescence, qui rend son épiderme lisse et brillant (3). Lorsque l'inflammation diminue, le lambeau cesse d'être tuméfié. Cependant la vitalité ne s'y maintient pas long-temps en général , et il est détruit ensuite par la suppuration ou par la gangrène (4). Il n'y a qu'un petit nombre de cas dans les- quels l'adhésion définitive ait lieu , ce qui arrive particuliè- rement lorsGu'avant de détacher le lambeau, on a exalté la ■vitalité en lui par la fustigation, la pression, des frictions spi- rilueuses ou des applications épispastiques (5). C'est de cette (1) Ihid., p. 172. (2) Dieffenbacti , Ueher den organischen Ersatz, p. 24. (3) Ihid., p. 26. (4) Diefl'enbacli , Chirunjische Erfahrungen , t. II, p. 169. i (5) lOid., t. I , p. 5. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 269 manière que Bunger (1) est parvenu à faire reprendre, sur l'emplacement du nez , chez une femme qui en était privée , un lambeau détaché depuis une heure et demie de la cuisse, qu'il avait flagellée avec une courroie avant l'opération; dès le troisième jour, ce lambeau avait perdu sa pâleur cadavé- reuse : il était rouge et gonflé ; au quatrième jour, il tenait déjà solidement. Baronio (2) extirpa, de chaque côté des lombes d'une Brebis , un lambeau de peau long de trois pouces et large de deux, substitua ces deux lambeaux l'un à l'autre, et les trouva recollés tous deux au bout de onze jours. Il détacha deux lambeaux semblables , et , après les avoir laissés pendant dix-huit minutes étalés sur une assiette , il les réap- pliqua sur les plaies opposées à celles dont chacun d'eux provenait; huit jours après, ils étaient adhérons. Enfin, il excisa deux lambeaux de peau , avec du tissu cellulaire et des fibres musculaires , les laissa pendant une heure sur la table , et les réappliqua sur les plaies ; l'un d'eux reprit , mais l'autre se dessécha et tomba. Des expériences analogues ont été faites aussi par Wiesmann (3). 10° Pour restaurer un nez mutilé , Tagliacozzi (*) proposait d'exciser ce qui pouvait' en rester encore sur les bords , de détacher un lambeau de la peau du bras , en ayant soin seu- lement de ménager un petit pédicule , de le fixer sur les bords de la plaie nasale, en attachant le bras à la tête, et, une fois les surfaces devenues bien adhérentes, de rendre la li- berté au bras , en coupant le pont. Celte opération a fréquem- ment été faite de nos jours, et avec un plein succès Ç*). Mais, comme l'obligation qu'elle impose de tenir le bras élevé pen- dant long-temps est irès-génanle , on a donné la préférence (1) Froriep , Noiizen , t. IV, p. 255. (2) Ueher animalische PlcsLik , p 33. (3) De coaliiu partivm a relinuo corpore /prorsus disjunctarvm , p. 40. (*) V. Gliirurgie clinique de Montpellier , par Delpech, 1S2S , t. II , p. 221. — Mémoire sur la Rliinoplastie, par J. Lisfranc (Mém. de l'Acad. roy. de Méd., Paris , 1S32, t. II, p. d45). — Considérations snV la Rhino- plastie , par Ariial (Jo'.u-nal aniv. hebdoir. de Médecine , Paris , 1S32 , t. VII et VIII). — Art. PaiiNOPiAS tie , p^ir P. F. Blandiu , dans le Dict. de Médecine et de chirnrgie pratiques , t. XIV, p. 370. (**) De curtorum chirurijid per insitionem , cdente Troscliel, Berolini, 1831 , in-S" , fis-. ^^0 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. au mode de rbinoplasiie usité parmi les Mahrattes, et qui consiste à tailler dans la peau du front un lambeau, à la partie inférieure duquel on ménage un étroit pédicule , descendant jusqu'à la racine du nez ; on retourne ce lambeau , et on le fixe aux bords rafraîchis de la caverne nasale. L'essentiel, dans les deux méthodes, est que la partie que l'on trans- plante tienne encore au sol natal par une petite languette qui lui permette d'en tirer de la nourriture jusqu'à ce qu'elle ait contracté des connexions organiques avec son nouvel empla- cement , époque à laquelle on peut couper le pont (1). D'après Dieffenbach (2), lorsqu'on taille le lambeau, la rougeur qu'acquiert le pont et la pulsation qu'on aperçoit dans les artérioles cutanées annoncent que le sang s'y porte en plus grande abondance; le lambeau lui-même pâlit, et se couvre quelquefois de taches bleues ou de sugillations produites par du sang stagnant , et presque semblables à celles qu'on voit sur les cadavres. 11° Des tissus stratifiés, transplantés sur des points cor- respondans du corps d'un autre individu , peuvent également se consolider et contracter une connexion organique à la fa- veur du néoplasme. Une dent, implantée dans l'alvéole d'une autre dent qui vient d'être arrachée, se solidifie dans la mâchoire , phénomène que Hunter présume devoir être at- tribué à une adhérence organique; car, bien que des dénis prises sur un cadavre puissent demeurer pendant des années entières implantées dans les mâchoires , elles deviennent d'un blanc de craie et entièrement opaques , tandis que celles qui ont été prises à des sujets vivans conservent leur aspect vivant et leur substance translucide : ces dernières acquièrent même quelquefois des taches analogues à celles qui ont coutume d'annoncer la carie commençante. Dieffenbach (3) a vu des poils transplantés s'enraciner d'une manière solide, etDzondi est parvenu à consolider des cils dans une paupière inférieure artificielle, pratiquée avec la peau de la joue. Suivant Dief- (1) Dieffenbach , Ueher den onjaniscken Ersatz , p. 22. (2) Chirurijische Erfalirviinjen, t. 11 , p. 174. (3) Diss. de reyeneratione et tninsplantatione , p. 48. PRODUITS MATERIELS HOMOLOGUES. 27 l fenbach (1) , de li ès-jeunes plumes , dont l'étendard était encore en partie renfermé dans la gaine cornée , et dont les vaisseaux sanguins intérieurs n'étaient point encore frappés de mort, prirent racine dans de petites plaies faites à la peau de Mammifères et d'Oiseaux. Wiesmann (2), s'étant trans- planté dans la peau du bras une plume tirée de la tète d'une Poule , éprouva de la douleur et une petite perte de san« lors- qu'il l'arracha un mois après. Hunter a vu les éperons qu'il avait excisés à des Coqs , continuer de croître sur les pattes de très-jeunes Poulets. 12° La partie provenant d'un autre individu peut contracter aussi des adhérences organiques avec un point tout-à-fait différent de son siège primitif. Ainsi Hunter a transplanté les testicules d'un Coq dans la cavité abdominale d'une jeune Poule. Duhamel (3) a reconnu que la crête des Coqs était un sol qui convenait surtout pour ces sortes de transplantations ; Féperon d'un jeune Coq , de la grosseur d'un grain de che- nevis, inséré dans une plaie faite au sommet de la crête d'un autre Coq , y prit un accroissement tel que , six mois après , il avait un demi-pouce de long , et qu'au bout de trois ou quatre années, il représentait une corne longue de quatre pouces, dont la base offrait une cavité articulaire reçue par une apo- physe du crâne, avec laquelle elle se trouvait unie par une capsule articulaire ; celte corne était composée d'une gaine cornée et d'une broche osseuse , qui tenait au crâne par un ligament étendu vers le bec , quelquefois par d'autres dirigés vers les orbites ou vers l'occiput. Hunter et Baronio ont répété ces expériences avec succès. Hunter implanta une dent qu'il venait d'arracher à un homme bien portant , dans une plaie faite à la crête d'un Coq : au bout de quelques mois, il tua l'animal , injecta les vaisseaux , ramollit la dent par l'immersion dans un acide, et la coupa en long, ainsi que la crête; il re- connut alors que les vaisseaux de cette dent étaient injectés , et que sa surface extérieure communiquait également de tous côtés avec la crête par des productions vasculaires. {^) Chirurgische Erfahnmgen , t. II, p. 154. (2) Loc. cit., p. 32. (3) Hist. de l'Académie des sciences , 1746 , p. 350. 272 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. Baronio (1) dit même avoir vu l'aile d'un Serin et le bout de la queue d'un Chat contracter adhérence avec la crête d'ua Coq. Du reste , les expériences de Trembley nous apprennent que deux Polypes à bras se collaient ensemble lorsqu'on les appliquait l'un à l'autre , soit par leur su! face extérieure, soit par leur surface intérieure , après les avoir retournés ; quand on introduisait un de ces animaux dans un autre, sans l'avoir retourné , de manière à mettre en contact des surfaces hété- rogènes, le Polype interne se faisait jour à travers l'externe (*). b. Vaisseaux accidentels. II. On trouve souvent dans le néoplasme , comme dans les pseudomorphoses hétérologues , des vaisseaux , qui doivent être , ainsi que lui , de formation nouvelle. StoU , J. Hunter, Home , Sœmmerring , Monro , Chaussier, Turner et autres , ont aperçu , dans les fausses membranes développées à la surface de membranes séreuses , des vais- seaux sanguins, tantôt encore remplis de sang, tantôt in- jectés. Béclard (2) en a injecté avec du mercure , qui ne dé- celaient point leur présence par une couleur rouge. Schrœder a également injecté des vaisseaux lymphatiques dans ces productions (3). Guersent a vu des vaisseaux sanguins dans les fausses membranes dont le croup détermine le développement (4). Ribes (5) , Lobstein (6) et Planlin (7) en ont également observé dans le néoplasme en forme de cordon qui s'était développé dans des vaisseaux sanguins. 13° Ce ne sont point des prolongemens de vaisseaux ap- (1) Loc. cit., p. 25. C) Mémoire pour servir à l'histoire d'un genre de Polypes d'eau douce à bras en forme de cornes , Leyde , 4744 , in-4'' , fig. (2) Additions à l'aiiatomie générale de Bichat , p. 124. (3) Olservalioncs anaiomico-patholoijicœ et practici argumenti , p. 43. (4) Andral , Précis d'.inalomie paliiologiqiie , t. I , p. 488. (5) Ibid., t. II, p. 407. (G) Trailé d'aiialomie patliologiqiie , t. I , p. 299. ^7) 1-rovicp , Noiizen , t, aXXVI, p. 211. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 2^3 partenant primordialement aux organes limitrophes ; ils n'en- trent en connexion avec ces derniers qu'un certain laps de temps après s'être produits (§ 864, 6°). Home, Béclard , Breschet (1) et Eérard (2) ont vu des vaisseaux de ce genre qui ne communiquaient point avec le reste du système vas- culaire. d4o Ces vaisseaux se forment quelquefois avec une grande rapidité. Chez un homme qui était mort vingt-neuf heures après avoir subi l'opération de la hernie étranglée. Home (3) les trouva si développés, dans le néoplasme couvrant la portion d'intestin qui avait été comprimée , qu'il parvint à les injecter. Schrœder (4) n'a pu faire pénétrer l'injection dans ceux de fausses membranes qui nageaient encore au milieu de la sérosité , sans avoir contracté d'union avec la surface correspondante ; mais , à l'aide de la loupe , il dé- couvrit, dans une de ces productions, qui était encore molle et gélatineuse , des vaisseaux ayant depuis un trentième jus - qu'à un vingtième du diamètre . d'un cheveu , et paraissant se terminer en cul-de-sac. 15» Hunter avait déjà remarqué , ce qui a été confirmé par des recherches plus récentes (5) , qu'avant la formation des vaisseaux, il apparaît quelques petites taches de sang rouge au milieu du néoplasme. Nous avons besoin de nouvelles obser- vations pour savoir si ce sang s'est épanché du système vas- culaire , ou s'il s'est reproduit aux dépens du liquide plas- tique. Mais le sol proprement dit de la nouvelle formation vasculaire est le néoplasme produit par l'inflammation et par l'épanchement de liquide plastique qui dépend de cette der- nière. On est moins certain que de nouveaux vaisseaux puis- sent naître, sans phlegmasie, dans du sang épanché et coa- gulé. Certains faits sembleraient l'indiquer ; ainsi Home (6) a (1) Dictionnaire de médecine , t. V, p. 244. (2) Archives générales, t. X , p. 380. (3) Lectures on comparative anatomy , t. III, p. 16. (4) Loc. cit.. p. 20. (5) Andrnl, Précis d'anatomie pathologique , t. I, p. 477. (6) Lectures on comparative anatomy ^ t. XII, p, 45, Vin. lê ^74 PRODUITS MATÉRIELS HOMOIOGUES. VU , chez un Lapin mis à mort quarante-huit heures après la biessure d'une petite branche de Tarière mésentérique , et dont on avait injecté Taorte , que le sang épanché était en grande partie résorbé , et qu'il n'en restait plus qu'un petit caillot adhérent au péritoine et parsemé de vaisseaux injectés.. Cependant il n'est pas possible de distinguer rigoureuse- ment un simple caillot de sang plus ou moins décoloré d'un néoplasme qui a été produit par l'inflammation. De même que , dans les vaisseaux coupés en travers , ce n'est point le caillot de sang représentant le thrombus , mais le liquide plas- tique exhalé par la paroi enflammée, qui opère la cicatrisation ( § 862 , 3° ) ; ainsi le sang épanché hors de sa carrière et coagulé, semble n'être partout qu'une masse privée de vie (§ 750), que l'organisme fait rentrer dans sa sphère en la fluidifiant et la résorbant. Si le caillot produisait en lui des vaisseaux aptes à vivre , et se remettait par là en connexion vivante avec l'organisme , on ne pourrait au moins pas conce- voir la chose autrement que par l'influence d'une inflammation développée aux alentours. L'opinion de Home (1) , que les vaisseaux du néoplasme et du sang extravasé se développent de la même manière que ceux du sang coagulé hors du corps , c'est-à-dire au moyen de canaux que le gaz acide carbonique fraierait en se dégageant (§ 699, 5°) , cette opinion est ab- solument insoutenable. 16° Le sang qui commence à couler dans le néoplasme et à s'y créer une carrière , acquiert bientôt une paroi propre , qui est d'abord mince et délicate (2) , mais qui devient peu à peu plus épaisse et plus dense. Home (3) examina un caillot trouvé auprès d'une artère qui avait été blessée un mois au- paravant pendant la ponction faite à une hydrocèle, et il trouva les vaisseaux produits dans ses parois tellement déve- loppés qu'il put les enlever. Les vaisseaux de nouvelle formation sont droits pour la plu- part , ou du moins décrivent peu de flexuosités. En général , (1) Xoc. cit.,'p.9; t. V, p.lOO. (2) Lobstein , Traité d'anatomie pathologique, 1. 1, p. 298, (3) Loc, cit., t. III , p. 17. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 21^5 ils se ramifient peu, et, suivant la remarque de Gendrin , leurs ramifications se dirigent spécialement vers l'organe avec lequel le néoplasme se met en connexion. Il n'est pas rare , selon Meckel (1) , de les voir se diviser à leurs deux extré- mités , de manière qu'ils représentent , comme le système de la veine porte , un tronc ramifié à ses deux bouts. Ces parti- cularités annoncent que le sang a été mis en mouvement par la force attractive des parties organiques environnantes. Souvent les vaisseaux sont , comme les lymphatiques des membres, réunis par paquets (2). La plupart du temps, ils ont un calibre supérieur à celui des vaisseaux primordiaux avec lesquels ils contractent union. c. Kystes, ni. Par kyste , nous entendons des vésicules analogues aux membranes séreuses , closes , et sécrétant par leur face in- terne , qui est lisse. Ces vésicules ressemblent parfaitement , quant à la texture et au produit sécrétoire , aux membranes séreuses proprement dites ; mais elles sont également suscep- tibles et de transformation homologue (V,V1) et de dégé- nérescence hétérologue ( § 871 ). Il est même possible qu'elles doivent quelquefois naissance à une métamorphose du tissu cellulaire ; mais elles paraissent tirer plus fréquemment leur origine du néoplasme , et leur forme discrète ne nous permet pas de les ranger ailleurs que dans le cadre de l'homœo- plastie. On en connaît de plusieurs espèces. 17» La première espèce comprend les kystes séreux , hy- gromes ou hydatides. Les kystes séreux sont implantés dans le tissu, ou épars sur la surface d'un organe , auquel ils tiennent soit par toute leur périphérie , soit par un pédicule livrant passage à un vaisseau, lis ont quelquefois un volume considérable , et alors ils pro- duisent ce qu'on appelle les hydropisies enkystées. Leur paroi (1) Handbuch der pathologiscJien Anatomie , t. III, p. 3. (2) Lobstein, Traité d'anatomie pathologique, 1. 1, p. 298. 276 iPRODUlTS MATÉRIELS HOMOLOGUES. est mince et transparente , et l'on y aperçoit rarement des vaisseaux sanguins ramifiés. Leur surface interne est lisse, mais parfois aussi un peu inégale et grenue. Le liquide qu'ils renferment est, en général, limpide et clair comme de Teau, mais quelquefois aussi trouble et filant. Souvent il se forme dans leur intérieur de nouveaux kystes, au dedans desquels il s'en produit également d'autres. Dans beaucoup de circon- stances, ils se rattachent à une dialhèse séreuse (§ 848, 6°). On les observe quelquefois dans les cas de développement incomplet des organes , par exemple chez les hémicéphales , de même que , quand ils acquièrent une masse considérable , ils peuvent refouler le tissu normal , au point de le faire dis- paraître , et de ne plus laisser à sa place qu'un amas de vési- cules. Suivant Collard de Martigny (4) la paroi des hydatides est composée d'albumine non coagulée, d'une graisse susceptible d'être extraite par l'alcool bouillant, de tissu cellulaire inso- luble dans l'eau et l'alcool , et d'une substance analogue au mucus : cette dernière est molle et transparente ; elle res- semble à du mucus ou à de la gélatine ; par la dessiccation , elle devient transparente et cassante; mais l'immersion lui rend ses propriétés primitives ; elle se putréfie avec une len- teur extrême dans l'eau ; les acides minéraux la dissolvent complètement, et la potasse peu ; elle est insoluble dans l'acide acétique , l'ammoniaque , l'alcool et l'eau ; la noix de galle , l'acétate de plomb et le deutochlorure de mercure ne la pré- cipitent point. Collard de Martigny a trouvé dans la liqueur d'hydatides 0,9650 d'eau, 0,0290 d'albumine et 0,0060 de sels; Gœ- beU2) 0,9846 d'eau, 0,0004 d'albumine, 0,0024 de mucus, et 0,0126 de carbonate de soude , de chlorure de sodium, de sulfate de potasse et de phosphate calcaire ; Marcet (3) 0,9640 d'eau, 9,0273 de mucus, avec une trace d'albumine, 0,0087 de chlorure de sodium , de sulfate de soude , de phosphate calcaire et de fer. (1) Journal de chimie médicale , t. III , p. 375 ; t. V, p. 120. (2) Beizelius, Traité de chimie , t. VII, p. 641. (3) Gmelin, Ha,ndbucli der theoretischen Chemie, t. II, p. 1393, PRODUITS MATERIELS HOMOIOGtJES. 277 Morin a trouvé , dans le liquide d'une hydropisie enkystée du bas-ventre (1), 0,9706 d'eau, 0,0104 d'albumine, 0,0052 de cholestérine , 0,0012 d'osmazome , 0,0126 de chlorure de sodium , avec des traces de phosphate de soude. 18° Des kystes synoviaux , à parois plus épaisses , et con- tenant un liquide d'une certaine consistance, se produisent , d'après Villermé (2), lorsque des parties diverses sont expo- sées à la pression et au frottement dans les mouvemens qu'elles exécutent les unes sur les autres. Ainsi , Béclard en a trouvé , dans les pieds bots , aux endroits sur lesquels porte le poids du corps. Brodie assure que , dans la cyphose , on en découvre entre la peau et les apophyses épineuses. Il s'en dé- veloppe entre la peau et le bout de l'os , après les amputa- tions, etc. 2. FSEITSOMOBFHOSES SIBATIflEES. IV. Parmi les tissus stratifiés , ceux qui se développent le plus fréquemment sur des points oîi il n'y en a pas dans l'é- tat normal, sont les poils; les dents se voient plus rarement; mais on trouve quelquefois les uns et les autres ensemble. Ces tissus se voient surtout dans les organes génitaux (3) , notamment les ovaires, quelquefois aussi les trompes de Fal- lope ou la matrice (§45, III), rarement les testicules. La plupart du temps , ils ont leur siège dans des kystes , qui sont plus ou moins métamorphosés, et qui peuvent se présen- ter dans les régions les plus diverses du corps. Ainsi , par exemple , Gordon (4) a trouvé un kyste semblable , contenant des os de mâchoire , des dents , des poils et de la graisse , dans le médiastin antérieur, où il reposait sur le sternum. Les tissus stratifiés plongent leurs racines dans les différentes pro- (1) Journal de chimie médicale , 1. 1 , p. 276. (2) Bulletin de la Société médicale d'Emulation , 1821. (3) Meckel, Deutsches Archiv , t. I,p. 561. (4) Andral, Précis d'anatomie pathologique, t. II, p. 717. — Cruveiliher, Anatomie pathologique du corps humain , XVIIP livraison , in-folio, a représenté en trois planches plusieurs kjstes de l'ovaire et de l'utérus. tàjS PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. ductions de ces kystes , les poils dans les masses adipeuses ou dans la paroi chargée de graisse et devenue semblable à la peau , les dents presque toujours dans des parties cartila- gineuse ou osseuses , qui sont ou des métamorphoses de la paroi , ou des productions spéciales , développées en pièces osseuses pourvues d'alvéoles. Ainsi un kyste de l'ovaire , examiné par Ploucquet (1) , contenait des cellules pleines , les unes d'un liquide mucilagineux , d'os et de dents , les au- tres de graisse solide et de poils. Regnaud (2) a trouvé |^un kyste séreux revêtu d'une vésicule osseuse , et celle-ci cou- verte de graisse, avec une membrane rouge, humide et grasse, dans laquelle étaient implantés des poils. C'est principalement sur les membranes muqueuses qu'on rencontre des tissus stratifiés sans kyste , par exemple des dents sous la langue et dans l'estomac (3), des poils à la con- jonctive , aux lèvres de la vulve , au pharynx, à l'intestin , à la vésicule biliaire , à la vessie urinaire (4). 19° Ces tissus semblent se développer toujours dans des follicules , comme leurs congénères normaux. On trouve généralement les poils garnis de racines norma- les , et les dents encore renfermées dans des follicules isolés , Bleins d'un liquide gélatiniforme. Les poils demeurent quel- quefois courts ; mais parfois aussi ils acquièrent jusqu'à vingt pouces de long (5). Ils ressemblent aux cheveux pour la tex- ture ; ainsi les kystes des Brebis contiennent de la laine , ceux des Vaches de la bourre , ceux des Oiseaux des plumes (6). Cependant ils diffèrent quelquefois aussi des cheveux ; car, par exemple , un kyste cartilagineux qu'on trouva implanté sur le mésentère d'une Négresse, renfermait de la graisse, avec des cheveux droits, blonds et rouges (7); il n'est pas rare (1) Reil , Jrchiv , t. Yll , p. 257. (2) Andral, loc cit., t. II, p. 714. (3) Lobstein , Traité d'anatomie pathologique, t. I, p. 343. (4) Meckel , Deutsches Jrchiv , t. I, p. 519. (5) Ihid., p. 534. (6) Ihii., p. 527. (7) Andral , loc cit,, t. II , p. 712. - •- *^.; PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 279 non plus de voir à la fois des cheveux rouges , bruns et noirs dans un même kyste (1). Les dents se développent , comme les dents normales , à partir de la couronne , et acquièrent aussi la plupart du temps une forme normale. Ordinairement il s'en produit simultané- ment de deux ordres , quelquefois même des trois à la fois , et rarement d'un seul (2). Mais, dans certains cas , elles n'ont point de forme régulière ; parmi les trois cents dents conte- nues dans le kyste dont nous avons déjà parlée Ploucquet (3) trouva la majeure partie d'entre elles conformées comme celles de l'espèce humaine ; mais beaucoup aussi s'éloignaient notablement de ces dernières , et il y avait en outre quelques petits grains isolés d'émail dans des pièces de cartilage. 20° Les poils et les dents ainsi produits tombent, de ma- nière qu'ils demeurent libres dans les kystes , et qu'ils sé- journent dans les canaux formés par les membranes mu- queuses , ou sont amenés par eux au dehors. Ainsi Cruveilhier (4) a remarqué une émission de poils par l'anus. On s'est également convaincu que l'urine entraîne quelquefois, avec un sédiment de phosphate calcaire et de phosphate ammoniaco-magnésien , des poils qui sont plus fins que d'autres , d'un gris cendré ou diversement colorés , et qui ont depuis une ligne jusqu'à un pouce et demi de long. Des poils analogues ont été trouvés aussi dans des calculs uri- naires (5). 3. PSSnSOMOKPHOSES MÏIMBRAniFORMES. V. Des vésicules séreuses produites par homœoplastie peuvent, au moyen d'une transformation progressive, arriver à représenter des tumeurs enkystées , et acquérir quelque (4) Meckel, Deutsches Archiv , t. I, p. 534. (2) Ihid., p. 551. (3) Reil, Archiv, t. YII, p. 259. (4) Essai sur l'anatomie patliologique en général, t. II , p. 177. (5) Journal de Magendie , t. VI , p. 2U9. — Heusinger, Zeitschriftfuer die organische Fh>jsik, t. II , p. 584. — Magendie, ^ar^. Gbayelle, Dict, 4§ niédeçiae et de chirurgie pratiques , t. IX , p, 251. a8o PRODUITS MATÉUIELS HOMOLOGUES. analogie avec la peau ou avec la membrane muqueuse. Alors, tantôt elles fournissent le sol dans lequel des poils implantent leurs racines , tantôt elles sécrètent un liquide analogue au smegma cutané , de sorte aussi qu'on les a considérées comme des follicules sébacés ayant acquis de plus grandes dimen- sions. 4. PSEUDOMORPHOSES SCLÉKErSES. VI. Il est plus commun de rencontrer la conversion en tissu scléreux de parties celluleuses qui ont été produites par homœoplastie. 21" Des kystes séreux , et des tumeurs séreuses enkystées déterminées par eux , se recouvrent fréquemment d'une cou- che scléreuse à l'extérieur. En outre , on rencontre souvent , dans du tissu cellulaire atmosphérique ou parenchymatéux , des masses scléreuses , qui tantôt renferment du tissu cellu- laire lamelleux et tantôt sont complètement compactes. 22° Des cartilages se développent , soit dans le paren- chyme, par exemple , de la matrice, de la glande thyroïde, des poumons, etc., soit dans la paroi de vésicules séreuses primordiales ou accidentelles, par exemple, des vésicules synoviales, qu'ils renversent quelquefois de dehors en dedans, et finissent même par crever, de manière qu'on les rencontre libres dans les cavités articulaires. 23° Des granulations ou des plaques osseuses se dévelop- pent , tant dans des parties celluleuses , tendineuses ou carti- lagineuses accidentelles , que dans des tissus primordiaux de toute espèce. Le plus ordinairement on les rencontre entre la membrane vasculaire commune et la tunique fibreuse des ar- tères , notamment dans les points sur lesquels porte davan- tage l'effort du sang, comme à la crosse de l'aorte et à sa bi- furcation au bas de la colonne vertébrale. On remarque d'abord des petites taches blanchâtres, qui se développent en- suite en plaques successivement cartilagineuses et osseuses. Lorsqu'elles se forment à la paroi de veines, de vésicules sé- reuses ou de membranes muqueuses , spécialement dans la mati^ice, elles pénètrent quelquefois dans les cavités, par PRODUITS MATÉRIEIS HOMOLOGUES. 28 1 renversement de ces membranes , distendent celles-ci au point de ne plus paraître tenir qu'à de grêles pédicules , ou se détachent et deviennent libres , de manière qu'elles pren- nent Taspect de concrétions. Elles peuvent aussi naître à la surface d'organes glandulaires, et croître vers l'intérieur, en refoulant le tissu normal. La substance osseuse accidentelle contenue dans un kyste se composait , d'après Laugier (1) , de phosphate calcaire 0,040 et carbonate de chaux 0,080, avec 0,680 de gélatine. Wiggers (2) a trouvé celle qu'on avait découverte dans un placenta, formée de phosphate calcaire 0,437, carbonate de chaux 0,032 , fibrine, avec un peu de graisse , de gélatine et d'albumine 0,461, et eau 0,070 ; Gmelin (3), dans une ossifi- cation de la veine spermatique , phosphate calcaire 0,355 , carbonate de chaux 0,155, et matière organique 0,275 , le reste étant de la perte ; Brande , dans une artère ossifiée , 0,655 de phosphate calcaire, et 0,345 de matière organique ; Masuyer, dans des troncs vasculaires et le cœur, phosphate de chaux 0,584, acide urique 0,166, et matière organique 0,250; Walchner, dans le cœur, phosphate de chaux 0,505, carbonate de chaux 0,231, et matière organique 0,257 ; Pe- troz et Robinet (4) , dans le péricarde , phosphate de chaux 0,653, carbonate de chaux 0,065, chlorure de sodium et sulfate de soude 0,040 , matière organique 0,242. B. Régénération. 1. BÉGÉKÉSATIOH SIMFI.E. § 860. La régénération a pour effet , tantôt de reproduire les parties organiques qui ont été perdues , tantôt seulement de les compléter (§ 861). (1) Journal de chimie médicale , t. I , p. 269. (2) Schweigger, Journal fuer Cliemie , t. LXVI , p. 217. (3) Handbuch der theoretischen Chemie , t. II , p. 1362. (4) Ihid., p. 1364. èSâ PKODriTS HATÉRIEES HOMOLOGUES. a. Régénération supplétive, I. La reproduction de parties entières est , pour quelques fines d'entre elles, un phénomène normal et périodique. Nous avons déjà parlé précédemment de la régénération des tissus stratifiés (§ 617) ; il nous suffira d'ajouter ici Texposé des phénomènes qui accompagnent le renouvellement des poils et des bois, en prenant pour guide , Heusinger (1) à l'é- gard des premiers, Berthold (2) par rapport aux seconds ; pour ce qui concerne la formation des plumes , nous pouvons ren- voyer aux détails dans lesquels nous sommes déjà entrés (§ 426 , S-). 1» Lorsque les Mammifères muent, les poils tombent après que leur bulbe a pâli et disparu , tandis qu'il s'est produit , à côté de lui et dans le même foUicule , un petit globule noir j qui se développe ensuite en un nouveau poil. Après avoir arraché un poil des moustaches d'un Chien , on remarqua d'a- bord que la substance charnue contenue dans le follicule était gonflée et très-imprégnée de sang; mais, au bout de quel- ques jours, on y voyait paraître une masse noirâtre et friable, s'élevant depuis le fond du follicule jusqu'à son miUeu ; cinq jours après , au lieu de cette masse , on apercevait un poil long d'une ligne , dont le bulbe reposait immédiatement sur le fond du follicule , et dont la tige sortait plus tard de ce der- nier. 2° Au moment où le bois des Cerfs doit changer, on remar- que d'abord à l'apophyse frontale qui en constitue la partie permanente , à ce qu'on appelle vulgairement la tête de l'ani- mal , du gonflement , de la chaleur et une exaltation de la sen- sibilité cutanée ; les artères sont dilatées en cet endroit ; le bois tombe ensuite ; la tête , mise à nu , paraît rouge et char- nue , et laisse suinter du sang et de la sérosité , dont la dessic- cation produit une croûte, qui se détache au bout de huit à dix jours (§ 663 ,11), après que de nouvelle peau s'est formée (1) Meckel , Deutsches ArcUv , t. VII, p. 557. (?) Beitrwse zur 4natomie j Zoologie und Physiologie, p. 42. ■ PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 283 au dessous et s'est réunie avec les tégumens environnans. Cette nouvelle peau est d'abord très-mince ; mais , peu à peu^ elle devient plus solide et plus épaisse , acquiert de gros et nombreux vaisseaux sanguins , développe une multitude de grands follicules sébacés , avec des poils courts et mous , et sécrète continuellement du smegma cutané en abondance ; ses artères sont accompagnées par des branches de la cinquième et de la septième paires de nerfs cérébraux, qui diffèrent des nerfs permanens par un diamètre plus considérable et une consistance moins grande. Entre cette peau et l'apophyse frontale , se forme le nouveau bois , dont le premier germe part de l'apophyse , mais dont l'accroissement résulte pres- que uniquement de la peau , qui , en effet , ne cesse de croître elle-même, et au dessous de laquelle se forme un périoste, d'abord mince , puis blanc , épais et couvert de granulations à sa face interne. Le jeune bois est une masse très-molle , composée en grande partie de vaisseaux sanguins , qui nais- sent , les uns de l'apophyse frontale , les autres de la peau , et qui sont accompagnés de nerfs. C'est à son extrémité que la peau a le plus de mollesse , qu'elle est le plus sensible^ et qu'elle possède le plus de vaisseaux ; ces derniers y forment une espèce de tourbillon , c'est-à-dire qu'ils se rendent de tous les côtés vers un centre commun , et ils s'enfoncent dans le bois , dont leurs ramifications parcourent longitudinalement la substance jusque près de la base , en lui fournissant la plus grande partie du sang qu'il reçoit. Peu à peu l'un de ces tourbillons vasculaires se partage en deux ou plusieurs , et au-dessous de chacun il se forme une nouvelle dentelure , ce qui se répète jusqu'à ce que le bois ait acquis sa forme com- plète. D'abord les vaisseaux déposent de la chaux sur la masse qui les entoure , et quand celle-ci est ossifiée , ils finissent par s'ossifier eux-mêmes. Cette ossification procède des ra- mifications les plus grêles vers les branches , par conséquent, de dedans en dehors et de haut en bas ; dans la substance in- térieure ou médullaire , les vaisseaux , une fois ossifiés , con- servent encore un peu de sang, qui se dessèche, et qui, plus tard , quand on les coupe , produit des points rouges sur la surface de la tranche; la substance extérieure ou corticale et 284 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGtJES. la partie voisine de l'apophyse frontale sont les points qui acquièrent le plus de densité , parce que l'ossification s'y est opérée en dernier lieu , et qu'en conséquence la nutrition y a duré plus long-temps. Enfin lorsque le périoste lui-même est ossifié , la peau meurt de la pointe vers la base ; elle ne re- çoit plus de sang , se dessèche et tombe ; le périoste ossifié sous-jacent reste, constituant une couche d'un tiers de ligne d'épaisseur, et il a une teinte brune , due au sang qui s'est desséché dans les vaisseaux ossifiés. Un bois long de trente-six pouces, et du poids de quinze livres, se développa dans l'es- pace de dix semaines , en sorte que , terme moyen , il s'était produit chaque jour une masse longue d'un pouce et demi et pesant près d'un quarteron. IL Les animaux inférieurs, après avoir perdu accidentelle- ment des parties entières de leur corps , réparent celte perte d'une manière complète. 3° Dans les Hydres, chaque partie de la masse du corps peut être remplacée, d'après les observations de Trembley , Gœze , Baker et autres (1), de manière que chaque morceau repro- duit un animal entier, qu'on ait coupé le Polype primitif, soit en travers , soit en long , ou qu'on l'ait divisé en plusieurs la- nières. Les observations qu'on rapporte de multiplication ana- logue dans les Actinies , paraissent mériter moins de con- fiance. 4° Chez les Annelides , la régénération n'a lieu qu'après une section transversale. Le Ver répare sa portion céphali- que ou sa portion caudale , après l'avoir perdue ; lorsque cette portion a un certain volume , elle continue de vivre , et ré- pare quelquefois également ce qui lui manque. Il peut même arriver qu'un animal partagé en plusieurs segmens devienne autant d'animaux qu'on a fait de tronçons. Dugès (2) a vu , dans les Planaires , chaque segment devenir un animal nou- veau , lors même qu'il ne faisait qu'un huitième ou un neu- (4) Treviranus , Biologie , t. III , p. 518. (2) Annales des sciences naturelles , t, XV, p. d89. PRODUITS MATÉRIELS HOMOIOGtES. 2^5 vîème de l'animal entier. Suivant Bonnet et Rœsel (1) , les Naïdes reproduisent la tête et la queue , jusqu'à douze fois de suite , quand on enlève la nouvelle partie à mesure qu'elle se forme ; une Naide divisée en six segmens longitudinaux et plus , devenait un nombre égal d'individus nouveaux , pourvu que chaque tronçon eût au moins une ligne et demie de long. Lorsque des Vers de terre avaient été coupés en travers , chaque moitié reproduisait ce qui lui manquait , d'après les observations de Bonnet et de Spallanzani (2); de la surface de la plaie s'élève un petit bourrelet blanc, qui grossit peu à peu , ne tarde pas à acquérir des anneaux étroits , serrés les uns contre les autres , et renferme des prolongemens du cor- don ganglionnaire , du canal digestif et du système vasculaire sanguin. Sangiovanni (3) a fait des observations analogues ; il se formait à chaque moitié de nouveaux anneaux, qui étaient d'abord transparens et devenaient peu à peu opaques. Dugès n'a pu observer, sur le Ver de terre , que la reproduction de l'extrémité antérieure ou de l'extrémité postérieure, après qu'il en avait fait la section. 5*> La reproduction d'un segment perdu du corps, avec tous ses viscères, sans multiplication des individus, ni régé- ration des parties qui manquent au segment , a lieu chez les Echinodermes et les Mollusques. Une Astérie reproduit l'un des rayons de son corps, quand il lui a été arraché. Schseffer a vu des Limaces régénérer la tête (4) ou l'abdomen (5), dont il avait pratiqué la section. Spallanzani (6), Treviranus (7) et autres ont observé fréquemment la reproduction de la tête des Limaçons , quoiqu'elle n'ait point eu lieu dans un grand nombre de leurs expériences. H est presque inutile de dire que des parties qui font office de membres chez ces animaux , (d) Eggers , Von der TViedererzeugung , p. 37. (2) Fi'ograinme ou précis d'un ouvrage sur les reproductions animales , .13. (3) Medicinisch-chirurgische Zeitung , 4824, t. II , p. 93. (4) Er stère und fernere Versuche mit Schnechen , p, 11. (5) Ihid., p. 16. (6) Loc. cit., p. 62. (7) Biologie, t. llï, p. 513. i3S6 PRODUITS MATÉRIELS HOMOIOGUES. les tentacules des Limaçons, les bras des Céphalopodes, les trompes des Planaires, etc., sont susceptibles de se régénérer. 6° Mais, à un degré plus élevé de l'échelle , des organes appartenant à, la périphérie animale , des membres et parfois des appareils sensoriels sont les seules parties qui puissent se reproduire. Les larves des Blattes et des Capricornes ré^ génèrent leurs antennes d'après Heineken (1), et les Libel- lules leurs pattes suivant Gœze (2). Ce phénomène a lieu plus fréquemment chez les Crustacés et les Arachnides. 'Quand l'Ecrevisse a perdu une patte, la plaie se remplit, d'après Réaumur (3), d'une pellicule grenue et rougeâtre, qui, au bout de quatre ou cinq jours , fait une saillie d'abord sphé- rique , puis conique , se déchire ensuite , et laisse passer la patte ; celle-ci est molle encore , mais elle ne tarde pas à se couvrir d'un test solide. Les serres et les antennes se repro- produisent de la même manière. Les Crustacés, les Cloportes, les Araignées , reproduisent tantôt les antennes et tantôt les pattes. D'après les expériences de Broussonet (4) , sur des Pois- sons , il se produisit, à la place d'une nageoire coupée, un renflement, d'où naquit un prolongement membraneux, d'a- bord épais, mais qui devint plus mince en prenant plus de développement, et qui, au bout de trois mois, contenait des rudimens cartilagineux de rayons : ces deux rayons acqui- rent plus de longueur en s'amincissant , et, vers le huitième mois, la nageoire était complètement reproduite. Mais c'est surtout chez les Salamandres que la régénéra- tion se montre féconde. Spallanzani a vu (5) quelques uns de ces animaux reproduire la queue, avec toutes ses parties ( moelle épinière , nerfs , vertèbres , muscles , vaisseaux et peau); d'autres (6), les ^quatre pattes, avec leurs quatre- (d) Froriep , Notisen , t. XXVIII , p. 196. (2) Treviranus , Biologie, t. III, p. 515. (3) Hist. de l'Académie des sciences, 1712, p. 226. {/i)Ihid.,n86, p. 686. (5) Loc. cit., p. 69. (6) Loc, cit., p. 85. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 387 vingt-dix-huît os ; d'autres encore (1) régénérèrent en trois mois leur queue et leurs quatre pattes ; il y en eut enfin qui reproduisirent la mâchoire inférieure , avec ses muscles , ses vaisseaux et ses dents. D'après Rudolphi, le nerf de la patte régénérée était tellement semblable à celui de la por- tion demeurée intacte , qu'on ne pouvait apercevoir entre eux aucune ligne de démarcation. Blumenbach a vu (2), comme Bonnet, l'œil se reproduire dans l'espace d'une année, lors- que le nerf optique avait été ménagé , et qu'il était resté une portion des membranes oculaires dans le fond de l'orbite. Ayant coupé la branchie d'une larve de Triton , Steinbuch aperçut , au second jour , une vésicule limpide comme de l'eau , qui s'allongea peu à peu en cylindre , et dans laquelle, au bout de quelques jours déjà, on distinguait des traces d'or-» ganisation et de circulation. Spallanzani (3) a observé la régé- nération complète d'une portion de la queue dans des têtards de Grenouilles. Les pattes se reproduisirent également chez de jeunes Grenouilles et Crapauds, mais beaucoup plus tard et avec plus de lenteur que chez les Salamandres (*). On a quelquefois observé, chez les Lézards, la régénération par- tielle de la queue , mais sans ossification des vertèbres. IIL Chez l'homme et les animaux à sang chaud, il n'y a que les tissus stratifiés qui se régénèrent. On a bien prétendu que des os entiers, par exemple une clavicule (4) , s'étaient re- produits-, mais il était toujours resté quelque portion de l'an- cien os , ou du moins de son périoste , de sorte qu'il n'y avait pas eu régénération proprement dite , mais seulement res- tauration, comme dans le cas de nécrose ( § 862, 14° ). 7° Quand l'épiderme de l'homme vient à se détacher , soit par grands lambeaux , comme à la suite d'une scarlatine in- tense^ soit par écailles furfuracées , ou sous la forme de phlyc- tènes, comme dans d'autres inflammations érysipélaieuses , il (!) Lw. cit., p, 93. (2) KUine Schriften , p, 129. ^ (3) Loc. cit., p. 36. O Comparez Duméril, Histoire des Reptiles, 1. 1, p. 206-210. (4) Froriep , Notizon , t. XXVII , p. 472. 288 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. s'en forme un nouveau au dessous de celui qui va tomber. Dans d'autres cas , la peau , dépoiiillée de son enveloppe protectrice , sécrète un liquide clair comme de l'eau , qui ne tarde pas à s'épaissir et à se transformer en épiderme. Mais quand la surface supérieure de la peau a été détruite , il ne se produit que de minces lamelles, qui se détachent fréquem- ment, jusqu'à]ce qu'enfin survienne un épiderme permanent, mais parfaitement lisse. 8° Après la chute d'un onj^^le , il se forme, sur les papilles du repli cutané de la racine, une lamelle étroite, mince, molle et blanchâtre , qui s'allonge peu à peu par des additions suc- cessives, et qui lorsqu'elle a pris une certaine longueur, se couvre en dessous de nouvelles couches , sécrétées par les papilles sous-jacentes , qui en accroissent l'épaisseur. Des cas dans lesquels un ongle s'est reproduit au bout de la seconde ou même de la première phalange , après la perle de la troi- sième ou de la seconde , ont été observés par Tulpius , Or- mansey et Ansiaux (1) , de même que par Blumenbach (2) , Vogel (3) et Jahn (4) ; ces ongles sont presque toujours fort imparfaits. 9» Il est très-commun de voir une nouvelle pousse de che- veux remplacer ceux dont la chute a été déterminée , entre autres, par une fièvre aiguë. 10° Lorsqu'à la place d'une portion morte de mâchoire , une autre s'est reproduite , il naît aussi dans cette dernière de nouvelles dents , qui supposent par conséquent de nou- veaux germes dentaires (5). Quand Oudet (6) avait arraché les incisives à un Lapin , d'autres les remplaçaient bientôt , pourvu que les germes n'eussent point été intéressés. 11* Cocteau, Leroy (7) et Middlemore (8) ont vu quelquefois (1) Pauli , Commentatio physiologico-chirurgica de vulnerihus sanan- dw,p. 98. (2) Ueher den Bildungstrieh , p. 98. (3) Handhuch der pathologischen Anatomie , 1. 1, p. 86. (4) Die Naturheilkraft inihren Aeiisseruiiijen und tVirkungen , p. 89. (5) Meckel, Handhuch der patholoyischen AnOitomie , t. III, p. 83. (6) Journal de Magendie, t. III, p. 5. (7) Ihid., t. VII , p. 30. (S) Fi-oriep , Notisen , t. XXXIV, p. 302. Ï'RÔDUITS MATERIELS HOMOLOGUES. 2^^ le cristallin se reproduire, chez des Mammifères auxquels ils l'avaient extrait, quand la partie postérieure de la capsule était demeurée intacte. Mayer (1), ayant enlevé le cristallin à un Lapin, trouva la capsule ramollie au bout de sept jours; le septième jour , elle contenait le rudiment d'un nouveau cris- tallin ; au bout de sept semaines, ce dernier était presque aussi volumineux que l'ancien, et, au bout de quatre mois, il avait des dimensions plus grandes ; mais , dès l'origine , il présen- tait une forme annulaire , attendu que la substance cristalline ne s'était pas reproduite dans l'endroit correspondant à l'in- cision de la capsule. Vrolik (2) a également observé, chez l'homme, une régénération incomplète du cristallin, après l'opération de la cataracte par abaissement. b. Régénération complétive. § 861. La régénération complétive , celle qui se borne à produire de la masse organique , est plus ou moins accompa- gnée de transformation. Cependant nous n'examinerons ce dernier cas que plus tard ( § 863, 864 ) , et ici nous ne passe- rons en revue que les formes les plus simples , après quoi nous considérerons le phénomène dans les divers tissus en par- ticulier ( § 862 ). * Régénération complétive en général. La régénération complétive est le rétablissement de la con- tinuité par la formation de nouvelle substance organique. Elle a lieu soit par réunion ( I ), soit par granulation ( II ). Dans la réunion, ou la reprise de parties qui ont été sim- plement séparées, le rétablissement de la continuité est le phé- nomène le plus saillant ; car la substance organique de nouvelle formation, servant de lien, ne constitue qu'une couche mince qui devient plus ou moins semblable au reste du tissu. (-l) Graefe' et Walther, Journal fuer Chirurgie und Âtiyenheilkunde , t. XVII , p. 531. ^2) iWd., t. XYIII. YIII. 19 290 PRODUITS MATERIELS HOMOLOGUES. t Réunion immédiate. • Dans la granulation , la formation de substance nouvelle frappe davantage les yeux, quoique cette substance ne serve non plus qu'à combler un vide existant. I. La réunion , ou la coalition immédiate de surfaces divi- sées , s'effectue de la même manière , et sous les mêmes con- ditions , que l'adhésion ( § 859, 7° ) et la coadnation ( § 859, 8°-12° ). Il faut donc , pour qu'elle ait lieu , que les surfaces soient mises d'une manière permanente en contact mutuel, après qu'elles ont cessé de saigner , et tandis qu'elles lais- sent suinter un liquide clair et limpide {\). Ce liquide de- vient plastique, et, dans l'espace de vingt-quatre heures, il se convertit en un néoplasme pultacé et blanchâtre, au mi- lieu duquel on aperçoit, au bout de quarante-huit heures, des points et des stries de sang ; au bout de soixante-et-douze , il est plus ferme et parsemé de vaisseaux sanguins bien dis- tincts; au bout de six jours, il est complètement solide. Il ar- rive parfois qu'on ne peut plus reconnaître ce néoplasme au bout de quelque temps, parce qu'il s'est converti en un tissu entièrement semblable aux surfaces divisées. 1° Lorsque la plaie n'est point bornée à une fente superfi- cielle , et qu'elle a totalement séparé du corps des parties proéminentes de la périphérie , telles que des doigts ou des lambeaux de l'oreille et du nez , ces parties peuvent repren- dre, pourvu qu'en temps utile (§ 859, 8°) on les maintienne en contact permanent avec la surface d'où elles ont été déta- chées. Wiesmann (2) a rapporté une série d'observations at- testant la réalité du phénomène. Comme il est arrivé souvent que la réapplication n'a point été faite sur-le-champ , et qu'on n'y a songé qu'au bout d'une heure , ou même d'une demi- heure, le succès a pris de là en quelque sorte un vernis de merveilleux , tandis que , d'après les remarques de Dieffen- (1) Dieffenbach , Ueher den or(janischen Ersatz , p. 24. — L. J. Sanson, De la réunion immédiate des plaies , de ses avantages et de ses inconvé- niens , Paris , d834 , in 8". (2) De coalitu partium a reliquo corpore prorstis disjunctarum, p, 10-19. PRODUITS MATERIELS HOMOLOGUES. 29 1 bacli (1) , ce délai était précisément , sinon une condition in- dispensable , du moins une circonstance favorable. Lenhos- sek (2) a observé la reprise d'une phalange onguéale , Bal- four (3) celle de trois bouts de doigts, Schopper (4) celle de deux phalangines, Braun (5) celle d'un doigt entier. Des ob- servations analogues ont été faites par Marley (6), Lario (7), Houlton (8), etc. Dieffenbach (9) a fait reprendre le bout du nez d'un Lapin, après l'avoir coupé ; mais l'opération ne lui a guère réussi , chez l'homme (10), que quand il s'agissait de lambeaux tenant encore à la peau , quelque grêle que fût d'ailleurs le pédi- cule. Il paraît même qu'on est parvenu à faire reprendre le bout de la langue, quoiqu'il ne fût plus attaché que par une languette de la largeur d'un fétu de paille (11). %" Les tissus stratifiés produits par des follicules peuvent aussi prendre racine , quand leurs vaisseaux ont encore vie. Wiesmann (12) arracha une dent à un Chien , enleva le sang qui. la couvrait, absorba également celui qui remplissait l'al- véole , et remit l'os en place ; sept semaines après, l'animal ayant été tué, l'injection démontra dans cette dent un vaisseau qui était en pleine communication avec le système vascu- laire. Il arrive souvent aux dentistes d'extraire des dents dou- loureuses , de limer les parties cariées et de remettre en place l'os , qui recouvre bientôt sa fixité première (13). Wiesmann (1) Chirurgische Erfahrungen , besonders ueher die JViederherstellung zerstoerter Theile des menschlichen Kœrpers , t. I, p. 5. (2) Medicinische Jahrbuecher des œsterreichischen Staates , t* VI , cah. II , p. 432. (3 ) Medicinisch-cliirurgische Zeitung , 181 5 , t. I , p. 54. (4) Froriep, Notizen , t. XXXVIII, p. 270. (5) Rust, Magazin fuer die gesammte Heilkunde , t. XIV, p. 412. (6) Gerson , Magazin der auslœndischen Literalur, t. I, p. 388. (7) Ibid., t. V, p. 303. (8)/6^d., t.XI,p.349. (9) Chirurgische Erfahrungen , t. Il , p. 164. (10) Ibid., p. 167. (41) Dieffenbach, Ueber den organischen Ersatz, p. 23. (12^ Loc. cit., p. 4. (13) Dieffenbach, Chirurgische erfahrungen, t. II, p. 159. ZQH PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. a également vu reprendre des plumes qu il avait arrachées à des Oiseaux et réintroduites aussitôt dans le vide laissé par leur extraction (1). 3° La staphyloraphie opère la réunion non seulement des parties latérales du voile du palais qui avaient été séparées accidentellement , mais encore de celles qu'un vice primor- dial de conformation avait empêchées de s'accoller ensemble (§431,1°; 438, 9°). 4° Les lèvres d'une plaie faite , soit à la membrane mu- queuse de l'estomac ou de l'intestin , soit à des vésicules sé- reuses ou à des enveloppes scléreuses , ne peuvent souvent point se réunir, à cause du diamètre trop peu considérable de ces parties membraneuses, et elles contractent alors adhérence avec des organes voisins. De même, des parties de tissus dif- férens peuvent se souder ensemble ; ainsi , Flourens a vu (2), après la section d'un nerf cérébral et d'un nerf rachidien, l'ex- trémité inférieure de l'un se réunir avec le bout supérieur de l'autre ; Huuter a trouvé , vingt-quatre heures après une opé- ration de trépan , le néoplasme de la dure-mère si intimement uni avec celui de la peau , qu'il fut impossible de les séparer sans effort et sans causer d'hémorrhagie. tt Formation de bourgeons charnus. IL La granulation est un néoplasme sous forme de petites élévations riches en sang , qui se développe aux surfaces li- mitantes , prend peu à peu les caractères d'un tissu particu- lier, plus ou moins correspondant au sol qui lui a donné nais- sance, et remplit le vide existant. Elle a lieu par conséquent à la surface des plaies dont les lèvres ne sont point en contact l'une avec l'autre , c'est-à-dire , d'un côté, toutes les fois que la plaie ou la suppuration a entraîné une perte de substance et produit un vide , d'un autre côté, lorsqu'après une simple solution de continuité, les lèvres de la plaie se sont écartées l'une de l'autre, ou n'ont pu se réunir soit parce qu'il s'est (1) Loc. cit., p. 31. (2) Annales des sciences «atiu'eUes , t. XIIX , p. 113. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 2q5 épanché du san}y,soit parce qu'il s'est sécrété du pus entre elles. Ainsi la paroi d'un abcès ne produit des granulations , ou, comme on dit vulgairement, des bourgeons charnus, que quand elle a été ouverte , et que l'évacuation du pus l'a con- vertie en une surface limitante. De même, lorsque le sang ou le liquide séreux épanché sur une plaie s'est desséché en une croûte , il se forme sous cette dernière un néoplasme repré- sentant une couche simple et lisse , tandis que, quand il ne se produit pas de croûte, on voit apparaître des bourgeons char- nus. Le néoplasme, qui n'est point enfermé ici entre deux surfaces , se développe avec plus de liberté et arrive à une forme plus élevée , ayant pour caractères une plus grande abondance de vaisseaux sanguins, une activité plastique plus énergique, et des productions tuberculeuses qui imitent jusqu'à un certain point des bourgeons. 5° Les bourgeons charnus , comme tout néoplasme quel- conque, proviennent d'un liquide plastique sécrété. Ainsi, par exemple , Hunter a souvent observé , à la surface d'ul- cères, une substance blanche, formée par ce liquide, qui le lendemain était pleine de vaisseaux et saignait au moindre con- tact; la surface dénudée d'un os , qu'il avait raclée, se trouva couverte, le second jour, d'une substance d'un blanc bleuâ- tre , qui , au troisième jour, s'était convertie en bourgeons charnus remplis de vaisseaux. De même , après l'ouverture des abcès , on voit s'épancher un liquide clair, qui se coagule en une substance blanchâtre , dans laquelle , l'inflammation venant à croître et l'épanchement à cesser, il se forme des vaisseaux sanguins , bientôt suivis de granulations saillantes et vasculaires. Dans les plaies , la formation des bourgeons charnus commence ordinairement du troisième au cinquième jour. 6° Sur quelque tissu que les bourgeons charnus se dévelop- pent, ils ont toujours la même forme, celle d'une surf^ace inégale , d'un rouge clair, et parsemée de petites élévations arrondies, irrégulières. Ces élévations consistent en une masse homogène et dense ; on ne peut point les insuffler par le tissu cellulaire voisin , et lorsqu'on introduit de l'air dans leur intérieur même , elles se soulèvent en entier, au lieu de pro- S94 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. duire des cellules distinctes (1). Mais cette substance est pai*- courue par des vaisseaux sanguins plus nombreux que dafis aucune autre partie organique quelconque , et dont la paroi est si mince, qu'il suftît d'y toucher, même très-léj^èrement , pour déterminer une hémorrhagie. D'après Pauli (2), chaque bourgeon a, non pas une artère centrale propre, mais un ré- seau de vaisseaux. Hunier attribue la couleur ronge claire à ce que le sang coule trop rapidement pour pouvoir deveiiil' veineux ; car les bourgeons charnus développés aux extrémi- tés inférieures deviennent d'un rouge foncé chez les person- nes qui restent long-temps debout , les jeunes vaisseaux n'é- tant point assez forts pour supporter le poids de la colonne de liquide qui pèse sur eux , et qui par conséquent stagne alors dans leur intérieur. Après la mort, les bourgeons sont pâles, affaissés , et forment une couche molle , facile à déchi- rer, qui tient par des liens très-faibles à la surface sous-ja- cente, fortement enflammée (3). Pendant la vie, ils sont doués d'une sensibilité vive et d'une force absorbante très- énergi- que , de manière que les poisons mis en contact avec eux ma- nifestent avec une extrême rapidité leur action sur l'économie entière. 70 Leur multiplication tient à ce qu'il s'en forme de nou- veaux entre ceux qui s'étaient développés dans la profondeur du vide ; il en pousse aussi d'autres sur ceux qui avaient paru les premiers. Lorsqu'ils viennent à se rencontrer, ils se con- fondent ensemble, leurs vaisseaux s'anastomosent, et leur circulation devient commune ; quand ils occupent de larges surfaces , ils forment, avant de se réunir tous ensemble, plu- sieurs amas distincts , ou îles , tant dans le milieu que sur le bord. A la périphérie, ils contractent adhérence avec les alen- tours , et la ligne de démarcation demeure presque toujours un peu plus élevée ou plus ferme. (i) Pauli , Commentatio physioîo'jico-chirurgica de vulneribus sanandis, p. 64. (2) Ibid., p. 63. (3) Cruveilhier, Essai sur l'anatomie pathologique en général, t, II, p. 156. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. sgS 8* Enfin ils se condensent, s'affaissent, deviennent plus petits, plus pâles , plus fermes et plus secs , parce que, parmi leurs vaisseaux, les uns se rapetissent, et les autres dispa- raissent. Ils se convertissent alors en une substance plus ou inoins analogue à leur sol natal , et qui constitue la cicatrice. Cette cicatrisation part presque toujours de la circonférence, et s'étend peu à peu vers le centre. 9" L'opinion que les bourgeons charnus ne sont point un produit nouveau , et que la disparition du vide ne tient qu'à un déplacement des parues entourantes demeurées intactes , fut admise à une époque où l'on n'avait que des notions fort incomplètes sur la régénération , et nous la passerions sous silence si l'on n'avait pas cherché dans ces derniers temps à la remettre en honneur. Ainsi MuUer (1) admet , d'après Bres- diet, Wallher et autres, que, pendant la cicatrisation des plaies qui suppurent , les bords et le fond ne font qu'être poussés les uns vers les autres par l'accroissement des par- ticules organisées ; que la substance déjà organisée sur ces points croît par intussusception et se distend ; que les bour- geons charnus sont seulement des élévations riches en vais- seaux sanguins et sécrétant du pus ; qu'il ne se produit point de nouveaux vaisseaux dans l'exsudation ; que le pus lui-même n'est point susceptible de s'organiser ; enfin que la suppuration et l'exsudation de matière organisable sont deux phénomènes qui s'excluent mutuellement. Mais les faits établissent sans réplique que la formation des bourgeons charnus , comme tout autre travail quelconque de cicatrisation, est précédée d'une sécrétion de liquide plastique , que ce liquide acquiert de la consistance , qu'il passe à l'état solide , et que des vaisseaux se développent en lui. Un bourgeon charnu est l'analogue du petit tubercule par lequel commence la régénération des membres chez les animaux inférieurs; il n'a pas la moindre analogie avec le tissu qui lui sert de sol natal , et partout il est le même , qu'on l'observe à la peau ou au tissu cellulaire , aiux nerfs, aux muscles, aux tendons, aux os. On ne peut concevoir une augmentation de l'accroissement intérieur au (1) Handhuch der Physiologie des Mensclien, 1. 1 , p, 386, 3^6 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. dessous d'une surface enflammée qui sécrète du pus , et eût-il même lieu, on ne saurait le considérer comme la cause de l'effacement du vide , puisqu'il se trouve là une substance facile à distinguer du tissu primordial. Quant au rapport existant entre la production du pus et l'exsudation de matière organisable, il est inverse absolument de ce qu'a voulu le dépeindre Muller. 10° La formation de bourgeons charnus et la suppuration sont ordinairement associées ensemble ; mais il n'y a point entre elles connexion nécessaire , rapport de cause à effet. Les bourgeons charnus ne peuvent point être considérés comme l'organe qui sécrète le pus ; ce dernier provient de la surface enflammée sous-jacente , traverse les bourgeons, et se dépose à leur surface , de même que , dans les écoulemens purulens (§ 855, d2°) , il suinte à travers Tépithehum , qu'on trouve effectivement imbibé de pus lorsqu'on y pratique une incision. Aussi n'est-ce , la plupart du temps , que quand la suppuration a déjà commencé qu'on voit se produire des bour- geons charnus. Suivant la remarque faite entre autres par Hunter, le développement de ces derniers la suit ordinairement de près, mais parfois aussi il n'a lieu que beaucoup plus tard, et Cruveilhier (1) parai t n'avoir émis qu'une assertion gratuite en soutenant que le liquide puriforme qui se manifeste quelques jours avant la granulation n'est point du véritable pus ; car on pourrait dire , dans le sens opposé , que la substance rouge qu'on voit quelquefois se développer avant la suppuration ne conslituepasde véritables bourgeons charnus. Mais, lors- que les deux formations ont lieu simultanément , il y a aussi un rapport intime entre elles : toutes deux changent en même temps de qualité , et quand les bourgeons charnus commen- cent à se condenser pour produire la cicatrice , le pus sécrété par les bords acquiert également davantage de consistance , de manière que la charpie dont on se sert pour les pansemens devient adhérente au pourtour seulement de l'ulcère. Peut- être ce rapport intime tient-il à ce que le liquide sécrété se sépare en deux parties, l'une plastique et apte à prendre (1) Essai sur Tanatomie pathologique en général, t. II, p. 153, PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 297 forme , les bourf^eons charnus , l'autre privée de cette apti- tude, mais qui reste attachée à la jeune substance, le pus. En effet , le pus produit par le liquide plastique est fortement chargé de substances organiques ; il est doux dans son état normal , et Ton ne peut point le considérer comme une ma- tière excrémentilielle provenant d'une décomposition com- plète de la substance organique (§ 835, 8°). La substance nouvelle qui se forme prospère au milieu de ce pus , parce qu'il constitue un liquide ayant de l'aflûnité avec elle et lui ser- vant pour ainsi dire d'enveloppe nidulante; on sait effectivement qu'il ne se produit pas de bourgeons charnus quand le pus est trop abondant ou qu'on l'essuie avec trop de soin. Il est donc très-possible que même une partie de sa substance passe dans la nouvelle formation ; lorsque Home (1) mettait à nu une surface suppurante chargée de bourgeons charnus , il la voyait se couvrir en dix minutes d'une pellicule mince , ce qui n'arrivait point quand il avait balayé le pus avec de l'eau chaude ; s'il arrosait cette même surface avec une dissolution de sel ammoniac, qui opère la condensation du pus (§ 855^ 6"), la pellicule paraissait presque instantanément. ** Régénération complétive dans les divers tissus. § 862. A l'égard de la régénération des divers tissus en particulier, I. Et d'abord de celle du tissu cellulaire, 1° C'est dans le tissu cellulaire atmosphérique que la réunion s'opère de la manière la plus facile et la plus prompte. Des corps étrangers peuvent cheminer à travers ce tissu, soit par leur propre pesanteur, soit par la pression des parties envi- ronnantes , et la route qu'ils fraient ainsi se referme aussitôt derrière eux. Quand ce tissu s'est reproduit sur un point , après avoir été détruit , il est la plupart du temps pius dense et moins extensible qu'auparavant ; à la surface des moignons, (1) Mec\e\, Deutsches Archiv , t. V, p. 383. 298 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. il devient presque scléreux (1), parce qu'il y remplace l'en- veloppe aponévrotîque. Dans les organes où le néoplasme ne prend pas les caractères du tissu normal , il n'acquiert que celui d'un tissu cellulaire condensé. 2° Les lèvres béantes d'une blessure faite à une membrane séreuse contractent adhérence avec les surfaces voisines , de rnanière que la plaie se ferme ; mais quelquefois il se forme en même temps, sur ces surfaces, un néoplasme qui, par exemple , après l'excision d'un lambeau de la tunique vagi- nale , remplit le vide existant sur l'albuginée du testicule , et y produit une membrane celluleuse mince, dont les bords s'unissent à ceux de l'incision (2). Si la membrane séreuse est fixée , comme à la paroi de la poitrine ou du bas-ventre , de manière que la plaie ne puisse point bâiller, il s'opère aussi Une réunion immédiate. Du reste , on a vu , après l'exarli- culation, des bourgeons charnus se développer sur la mem- brane synoviale de rarliculation. 3" Kallenbrunner (3) a remarqué qu'après la section par- tielle d'un vaisseau sanguin, le sang accourt de tous côtés vers la plaie ; puis il passe devant , en suivant son cours nor- mal, à peu près comme dans le cas de section complète (§ 761 , 1° ). Le sang rejeté hors du courant devient stagnant à l'extérieur du vaisseau , et forme un caillot, qui bouche la plaie , sans contracter d'adhérences intimes avec les parois. Mais le vaisseau s'enflamme , et , au bout d'environ douze heures, il sécrète un Uquide plastique , qui, presque toujours , se condense en un néoplasme membraneux et opaque ; cette membrane ferme la plaie et se soude aux parties voisines , pendant que le caillot de sang disparaît par résorption. Les plaies des artères ne guérissent que quand elles con- sistent en piqûres ou divisions longitudinales ; cependant des plaies transversales peuvent guérir aussi lorsqu'elles n'inté- (1) Van Hoovn , Dissertatio de Us quœ , in partilus memlri , jprœsertim osseis , amputatione vulneratis , notanda sunt , p. 22. (2) Pauli , Comvientatio physioloijico-chirurgica de vulneribus sanandis, p. 114. (3) Heusinger, Zeùschrift fuer die organische Physikj t. I, p. 309. — Expérimenta circa statum sanguinis et vasorum in inflammatione , p. 2. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. iî^gj ressent pas plus d'un quart du diamêlrë de l'artère. Ebel (4) èH â tu utie de ce genre qui , chez un Chien , était fermée àii bout de dix-sept jours. Les plaies des veines guérissent avec plus de facilité et de promptitude ; on les trouve cicatrisées de vingt-quatre à qua- rante-huit heures après une saignée. La cicatrice a le même aspect que la membrane vasculaire commune ; elle est dense , blanchâtre , et se perd à Texlérieur dans le tissu cellulaire ambiant. Les vaisseaux entièrement coupés en travers s'oblitèrent (§863,7"). 4" Le tissu éreclile , par exemple celui qui existe dans la paroi de la matrice , se cicatrise très-promptement. Mayer (2) a même observé la régénération de la rate qu'il avait extirpée ; mais il n'a point fait connaître les circonstances particulières de ce phénomène. IL Au système cutané , 5° La réunion des incisions faîtes à la peau s'opère d'une manière prompte , et souvent dans le court espace de vingt- quatre heures. Des lambeaux de peau détachés reprennent même avec facilité. Baronio (3) a vu un charlatan qui, pour démontrer la puissance du baume traumatique qu'il débitait, s'excisa un lambeau de peau au côté interne du bras , et le montra, huit jours après, parfaitement repris. Les bourgeons charnus s'affaissent pendant la cicatrisation , et laissent presque toujours un enfoncement. En même temps, leur surface se resserre et attire circulairement les bords de la peau intacte , avec lesquels elle contracte adhérence , de manière que la cicatrice devient inférieure en étendue à celle qu'avait la plaie , et qu'elle se met quelquefois de niveau avec le reste des tégumens , ou même s'élève au dessus d'eux. Il n'est pas rare que cette constriction s'opère d'une misnièfe inégale , de sorte que des portions de peau pénètrent dans la cicatrice , à l'instar de dentelures ; cet effet a lieu surtout après (1) Dissertaiio' de natura me die a trie e , sieuH arterice vulneratœ et ligatœ fuerint , p. 18. (2, Froriep , Notizen, t. XXXIV, p. 165. (3) Veber animalische Plastik , p. 30. 300 PRODUITS MATÉRIEtS HOMOLOGUES. les brûlures, cas dans lequel la rétraction est plus considé- rable qu'en toute autre circonstance. Il résulte de là que les portions de peau qui tiennent peu aux organes sous-jacenls se déplacent ; que , par exemple , une paupière normale se reploie en dedans , ou qu'une autre renversée , et dont les cils étaient dirigés vers le globe de l'œil, reprend sa situation normale. La portion de peau nouvellement produite est plus mioce , d'abord molle , rouge et riche en vaisseaux , puis pâle , dense et scléreuse , lisse à la surface , sans mucus de Malpiglii , papilles , follicules sébacés, ni poils , luisante , tendue et sèche. Elle ne présente que des poils follets, grêles et rares, elle ne sue ni ne rougit , comme le reste de la peau , quand le corps s'échauffe , et il est rare que les exanthèmes s'étendent sur elle. L'épiderme , qui était d'abord blanchâtre et pultacé, et qui s'était produit, à partir de la périphérie , sous la forme de filamens brillans, adhère solidement aux parties sous- jacentes, à cause de l'absence du mucus de Malpighi. La peau reproduite tient avec non moins de force aux organes qu'elle recouvre, parce qu'il ne s'est point développé au dessous d'elle de tissu cellulaire lâche et contenant de la graisse. Cependant , lorsque les circonstances sont favorables, et surtout quand elle siège sur de la substance musculaire et sur des parties qui reçoivent beaucoup de vaisseaux, elle acquiert avec le temps un plus haut degré de développement, elle devient plus épaisse, son tissu cesse d'être aussi con- densé, elle se met de niveau avec le reste de la peau, elle prend un aspect qui ressemble davantage à celui de cette dernière , et elle se couvre de poils qui , à la vérité , sont parfois plus courts et d'une teinte plus pâle ; en même temps elle devient plus mobile , parce qu'il se développe au dessous d'elle un tissu cellulaire plus lâche. Cependant elle ne prend jamais entièrement la teinte naturelle de la peau, et, si les cicatrices des Nègres noircissent quelquefois par les progrès du temps, il est à présumer qu'alors la destruction avait été limitée à la couche superficielle des tégumens. Berthold as- sure que les points oi^i l'on a pratiqué l'extirpation des taches de rousseur, demeurent blancs. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUÉS. Soi 6" La réunion s'opère d'une manière prompte aux mem- branes muqueuses. Elle est favorisée, en partie , dans l'opé- ration de la taille entre autres , par la contraction de la couche musculaire , qui rapproche les lèvres de la plaie. Les plaies larges et béantes , par exemple aux intestins, se ferment par l'adhérence de leurs bords avec les parties voisines. Ici , comme à la peau , il se produit d'abord une cicatrice blan- châtre , dense et lisse , qui peut cependant aussi se développer davantage , acquérir des vaisseaux sanguins plus nombreux', et se convertir en membrane muqueuse (1). Ainsi les ulcères de la bouche , et particulièrement des amygdales , guérissent souvent sans laisser de cicatrice appréciable. Trolliet (2) as- sure même qu'une portion régénérée d'intestin acquiert avec le temps des villosités. 7° Une réunion s'opère dans des glandes, en cas même d'une perte considérable de substance ; les surfaces de la plaie sont mises en contact l'une avec l'autre par la pression des parties en- tourantes sur la substance glandulaire molle.Staudenmeyer(3) a trouvé, sur des Chats et des Chiens, au foie desquels ilavait pratiqué des incisions , ou chez lesquels il avait enlevé à cet organe un lambeau de la longueur du doigt , qu'au bout d'un mois la glande était parfaitement guérie, sans qu'on pût aper- cevoir aucune trace de substance intermédiaire. Dans d'autres cas, le néoplasme unissant affectait la forme d'un tissu blan- châtre , dense et comme scléreux. Ainsi Pauli (4) a reconnu qu'une glande parotide dont il avait excisé une portion , était réunie'par une cicatrice dense et ferme, qui tenait aussi d'une manière solide aux parties environnantes. Les dépressions à fond blanchâtre, dense et d'aspect scléreux , qu'on a quel- quefois trouvées au foie, aux reins, etc., sur des cadavres humains , étaient peut-être des cicatrices produites de cette manière. ' (1) Andral , Précis d'anatomie pathologique , 1. 1 , p. 253. (2) John , Die Nàturheilhraft in ihren Aeusserungen und Wirliungen , p. 88. * (3) Dissertatio sistens collectanea circa reproductionem , p. 23. (4) CommentatiofliijsioloijicQcliiriirtjica de vulnerihis sanandis , p. 113, 302 PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. III. Système animal. 8° Les plaies faites aux muscles par des instrumens tran- çhans se cicatrisent lorsque leurs surfaces sont mises en con- tact l'une avec l'autre. Après les amputations, les extrémités des muscles contractent adhérence avec les os , de manière que ces organes peuvent mouvoir le membre (1). On peut aussi faire reprendre des lambeaux excisés, en les réappliquant sur la surface de laquelle ils ont été détachés , ainsi que Wies- mann(2) l'a observé sur de jeunesPoulels et sur desGrenouilles. S'il y a des vides ^ il se produit des bourgeons charnus, qui dès le commencen^ent font corps avec les fibres musculaires , dont on ne parvient même point à les séparer par la macé- ration (3). La cicatrice qui résulte de là se fait remarquer, dans le principe , par la quantité extraordinaire de vaisseaux qui la parcourent, par sa rougeur et par sa mollesse; ensuite elle Revient d'un blanc jaunâtre , dense , ferme , coriace et comme scléreuse ; il est rare, et ce phénomène n'a jamais lieu qu'au bout de plusieurs mois , qu'il se développe en, elle des fibres irrégulières, non semblables aux fibres musculaires, incapables de se mouvoir, et insensibles tant à l'action du galvanisme qu'à d'autres stimulations. 9° Quand un nerf a été coupé en travers, les bouts s'en- flamment et se gonflent, surtout le supérieur; ils sécrètent ensuite du liquide plastique , qui les réunit au bout de quel- ques jours, prend peu à peu de la solidité, ne tarde point à acquérir des vaisseaux , et forme la plupart du temps un ren- flement. Si l'on a extirpé à un nerf un lambeau long de plusieurs^ li^es , les deux extrémités renflées se réunissent quelque- fois, malgré la distance qui résulte de là entre elles, par un cordon qui ressemble à un nerf, si ce n'est qu'il est plus mince. Mais , parfois aussi , les bouts ne font qu'envoyer à la rencontre l'un de l'autre des prolongemens coniques de quelques hgnes, (1) Van Hoorn , Dissertatio de Us quœ , in partibus memhri , prœsertim osseis , amputatione vulneratis notanda , sunt , p. 26. (2) De coalittipartium a reliquo corpore prorsus disjunctarum, p. 49, 52. (3) Van Hoorn , loc. cit., p. 24. PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. 3o3 qui n'arrivent point à se rencontrer, comme l'ont observé entre autres Fontana et Meyer (1). La substance de nouvelle forma- tion est d'un gris clair ou d'un blanc rougeâtre , d'une con- sistance tendineuse et sans fibres nerveuses , ce que démon- trent surtout les recherches faites à cet égard par Arnemann (2), Cruikshank (3), Treviranus (4) , Breschet (5) et Pauli (6). Fon- tana a cru y apercevoir des filamens nerveux dans quelques cas ; Meyer (7) en a vu aussi , après avoir plongé les nerfs dans de l'acide nitrique. PrevosL (8) , ayant examiné un nerf d'un Chat nouveau-né , deux mois après en avoir pratiqué la section , reconnut des filamens qui allaient d'un bout à l'autre , à travers la substance de nouvelle formation , mais qui étaient isolés pour la plupart, et non réunis en faisceaux. Tiedemann enleva un lamÎDcau de dix à douze lignes de long au nerf de la patte antérieure d'un Cliien (9); vingt-et-un mois après , il découvrit un faisceau ayant l'aspect de la sub- stance nerveuse , mais que l'acide nitrique fumant ne détrui- sait pas. Si, au milieu de ces observations contradictoires, nous pre- nons pour guide l'analogie , tout ce qu'il nous est permis d'ad- mettre , c'est que le néoplasme , qui a partout de la tendance à devenir semblable au tissu qu'il doit remplacer sans arri- ver entièrement au but dans les organes supérieurs, peut de même ici se développer en filamens , qui ne sont pas pour cela de véritables filets nerveux. L'acide nitrique attaque bien le névrilème avant d'agir sur la substance nerveuse ; mais celle-ci n'y est point insoluble, elle ne fait que s'y dissoudre avec difficulté , comme il arrive aussi au tissu scléreux. Mais (1) Reil , JrcJiiv, t. Il , p. 456. (2) Versuche veber die Reijeneration an lelenden Thieren, p, 185-271.' (3) Reil , JrcMv , t. II , p. 63. (4) Biologie, t. III, p. 498. (5) Dictionnaire de médecine, t. V, p. 271. (6) Commentatio physiologico -chinirgica de vulneribus sanandis , . 31 , 109. (7) Xoc. czY., p. 458. (8) Annales des sciences naturelles , t. X , p. 168. (9) Zeitsclwift fuer Physiologie , t. IV, p. 73. 3o4 tÊODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. le rétablissement de la sensibilité et de la motilité au dessous du point régénéré ne prouve pas non plus qu'il se soit produit de la véritable substance nerveuse , ainsi que l'établiront les dis- cussions dans lesquelles nous entrerons à l'égard de l'activité dont jouit le système nerveux. lO" Une réunion peut avoir lieu aux organes centraux delà sensibilité. Flourens (1) l'y a observée, chez les Oiseaux, aux lobes cérébraux, au cervelet et aux tubercules quadrijumeaux, desquels il avait pratiqué une incision profonde , ou dont il avait fendu la moelle épinière , soit en long , soit en travers. La moelle épinière d'un Chien, qu'Arnemann(2) avaitcoupée en travers , était réunie , au bout d'un mois , par une masse rouge, informe, ayant la dureté du cartilage , et par du tissu cellulaire. Le même observateur (3) a vu, sur des Chiens , des plaies Considérables au cerveau se remplir d'une substance de formation nouvelle , qui tenait au moyen d'un tissu cellu- laire délicat, qui était lâche, molle, jaunâtre, et plus semblable à la substance cérébrale grise qu'à la blanche, et qui présentait quelquefois à sa surface la forme de circonvolutions. Pauli (4) enleva vingt-neuf grains de substance cérébrale à un Chien; au boutde quatre mois, le vide était rempli par une sub- stance plus blanche et plus ferme, dans laquelle les circonvolu- tions etles sillons s'apercevaient d'une manière moins distincte. Flourens a également vu , chez les Oiseaux , des plaies de ce genre se remplir par granulation. On a observé aussi , chez l'homme , après des plaies de tête , la régénération de la sub- stance cérébrale par granulation (5) . Lorsque du pus épanché dans cette substance a disparu par le fait de l'absorption, il se produit quelquefois , dans le vide laissé par lui, une substance jaunâtre et assez ferme , ou un tissu jaune et lamelleux , im- bibé d'humidité. (1) Annales des sciences naturelles , t. XIII, p. 413. (2) Versuche ueber die Régénération an lebenden Thieren , p. 84. ' (3) Ihid., p. 487. (4) Commentatio'physiolo t. IH , p. 35. SsS PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. voulu faire servir le phénomène lui-même d'appui à l'hypo- thèse. Mais cette dernière n'est pas la seule qui se présente à l'esprit, et elle ne le satisfait^ pas non plus dans tous les cas. Il 'est évident que, quand on réunit les surfaces d'une plaie , les deux bouts de tous les vaisseaux qui avaient été divisés ne sauraient se retrouver ; il n'est pas possible non plus que chaque bout de vaisseau d'une partie détachée du corps rencontre précisément , dans la surface à laquelle on applique cette j partie , celui qui s'accorde avec lui quant au calibre" et sous tous les* autres rapports. Loin de là, les extrémités des 'vaisseaux s'éloignent par rétraction des deux surfaces de la plaie , le sang devient stagnant dans leur intérieur, et il forme un caillot qui en bouche l'orifice , tan- dis que la sérosité séparée de ce caillot suinte à travers l'ou- verture. Mais les surfaces de la plaie s'enflamment , et elles sécrètent un liquide plastique , qui s'organise en néoplas- me ; l'activité vitale se trouve dès lors accrue ; donc , comme partout où la vitalité s'est exaltée (§ 762), le sang doit affluer en plus grande abondance , pénétrer le bouchon , ou le li- quéfier, ou le repousser, et se frayer aisément une route dans le néoplasme , qui est encore gélaliniforme. Comme le sang arrive de tous les côtés vers les points qui sont enflam- més ( § 762, 7»), les vaisseaux, tant artériels que veineux, des deux surfaces de la plaie doivent s'ouvrir de cette manière ; mais le mouvement rétrograde est bientôt vaincu par le mou- vement direct ou progressif (§ 726 , 1°). Le petit courant de sang , qui est isolé et qui n'a point de direction , est attiré par le courant plus fort (§ 739, 1°; 761, 1°); le sang qui sort acquiert , tant par la relation de périphérie et de centre (§763, 2°), que parla force à tergo (§723), une direc- tion correspondante à sa nature fartérieuse ou veineuse; enfin celui qui sort d'un bout artériel supérieur rencontre plus d'obstacle, à la surface correspondante de la plaie, dans les bouts veineux inférieurs , qui sont pleins et afférens , qu'il n'en trouve dans les bouts artériels J inférieurs , qui sont moins remplis et eflerens ; il prend donc sa roule parj| ces derniers , tout comme le sang trouve plus de facilité à passer PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. SsQ d'une exlrémité veineuse inférieure dans une extrémité vei- neuse supérieure placée vis-à-vis de lui. De cette manière , il s'établit une circulation réciproque , parce que, si ce ne sont pas les mêmes vaisseaux qui se réunissent, ce sont au moins des vaisseaux de même espèce. Les vaisseaux de nouvelle formation qui se sont dévelop- pés au milieu d'un néoplasme produit , sans blessure , par l'inflammation , s'abouchent au bout de quelque temps avec les vaisseaux primitifs des organes avoisinans , et ce phéno- mène a lieu non pas seulement dans des vaisseaux capillaires, auxquels on pourrait contester une paroi propre, mais en- core dans des vaisseaux sanguins manifestement membraneux et dans des vaisseaux lymphatiques pourvus de valvules (§ 859, 16°). Nous ne pouvons non plus l'expliquer qu'en admettant que les courans nés dans le néoplasme et les cou- rans contenus dans les vaisseaux primordiaux se sont mu- tuellement attirés, de manière que la paroi des vaisseaux primitifs , ramollie par l'inflammation , a dû finir, sous l'in- fluence de cet effort continuel , par être résorbée et perforée. Ici également , lorsque le néoplasme s'est étendu sous forme de fausse membrane entre deux organes adossés l'un à l'autre , c'est entre les vaisseaux homonymes que s'établit la communication, ainsi que Schrœder l'a démontré par ses in- jections : en effet , les artères d'un organe communiquent avec celles de l'autre à travers le néoplasme , et il en arrive autant aux veines; il n'y a qu'un très-petit nombre d'artères qui se continuent avec des veines dans l'intérieur du néo- plasme lui-même , parce que ce dernier ne présente qu'une très-petite quantité de substance réclamant la nutrition. Il peut également arriver de la même manière qu'au mi- lieu du néoplasme formant virole autour d'une artère embras- sée par une ligature , se développe un vaisseau dont les deux bouts aillent s'aboucher dans cette dernière , l'un au dessus , l'autre au dessous de la ligature , et qui devienne ainsi une collatérale de nouvelle production , par le moyen de laquelle l'artère continue de recevoir du sang, malgré le lien qui l'entoure et l'obstrue. Dans les premiers momens, lorsque le néoplasme est encore visible , on ne saurait méconnaître ce 35o PRODUITS MATÉRIELS HOMOLOGUES. mode de formation; ainsi Home (1), quarante-huit heures après avoir blesse une petite branche de l'artère mésentérique d'ùH Lapin , injecta par l'aorte les vaisseaux qui s'étaient produits dans le caillot appliqué au péritoine , et qui , sur trois ou quatre points ;, communiquaient avec les artères. Plus tard , le néoplasme disparaît , soit parce qu'il est résorbé , soit parce qu'il se transforme en tissu cellulaire , de manière qu'on peut rester dans le doute de savoir si le vaisseau latéral est dé nouvelle formation , ou s'il existait primitivement. Mau- noir (2) a trouvé , sur un Renard à la carotide duquel avaient été appliquées plusieurs mois auparavant deux ligatures, eritre lesquelles on avait coupé le vaisseau, que les deux bouts, distans l'un de l'autre de plus d'un pouce , étaient réunis ensemble par un vaisseau large d'une demi-ligne, allant directement de l'un à l'autre, et s'abouchant non point sur les côtés de l'artère , mais avec les orifices mêmes , de sorte qu'il méritait plutôt le nom de carotide complémentaire que celui d'artère collatérale , et que , de toute évidence , il n'avait pu exister primordialement. Parry (3) a vu , dans un cas analogue , sur un Bélier, naître du bout inférieur de la carotide , et de sa surface terminale , cinq vaisseaux qui , sans donner de branches aux parties voisines , montaient vers le bout supérieur, dans la surface terminale duquel deux d'entre eux s'abouchaient , tandis que les trois autres s'ou- vraient immédiatement au dessus, dans sa paroi latérale.Mayer, Ebel (4) et Schœnberg (5) ont fait des observations analo- gues, sur plusieurs Mammifères, après la section de l'ar- tère carotide. Dans quelques uns de ces cas , les vaisseaux unissans étaient évidemment de formation nouvelle, puis- (1) Lectures on comparative aimtomij , t. III', p. 15 , pi. V. (2) Mémoires physiologiques et pratiques sur Fanévrysnie et la ligature dss artères, p. 107. (3) Experimentaluntersuchungen ueher die Naturtirsaclien und F'er- schiedenheiten des arteriœsen Puises, p. 142. (4) Dissertatio de natura medicatrice , sicubi arteriœ vulneratœ et ligatœ fuerint , p. 43. (5) Memorie sul restaiilimento délia circolazione nella legatWO, O anche recisione dei tronchi délie arterio , p. 8, PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. 35i qu'ils partaient non de la paroi latérale , mais de l'extrémité terminale du moignon, et qu'ils ne fournissaient point de ra- mifications ; or la carotide ne possède absolument aucune collatérale qui; soit ainsi indivise. Dans d'autres cas, où le vaisseau unissant était très-flexueux et s'anastomosait, non pas seulement avec les moignons, mais encore avec les branches de la carotide, notamment avec les artères thyroïdiennes, la formation nouvelle pouvait être plus douteuse. Aussi Zhu- ber (1) prétend-il avoir vu , dans une expérience de ce genre, que les bouts artériels n'étaient mis en communication l'un avec l'autre que par des branches primordiales qui avaient acquis plus de volume. Mais ce fait ne prouve pas que les vaisseaux de communication dont on ne peut démontrer les analogues dans l'état primordial et normal , ne soient point le résultat d'une formation nouvelle. AETICLE II. Des produits matériels hétérûlogues de Porganisme. I. Mélange de substances étrangères. § 865. Parmi les formations hétérologues, dans lesquelles un solide ou un liquide acquiert un caractère qui ne corres- pond nullement à l'organisme , aucune ne se rapproche plus de l'état normal que celles qui résultent du mélange de sub- stances étrangères admises dans le sang. En effet, il n'y a ici qu'une circonstance extérieure d'aliénation, et comme la sub- stance étrangère qui a pénétré dans l'économie est éliminée immédiatement avec le liquide sécrété, ou déposée soit dans un produit sécrétoire , soit dans une partie organique , l'or- ganisme en général , ou tout au moins le sang , se trouve débarrassé d'elle. Ce mélange nous apparaît donc comme une manifestation de la tendance inhérente à l'organisme, eu (1) Neue F'ersuche an Thieren und deren Resultate ueber die pFie' dererseugung der Ârterien, p. %7. 332 PRODUITS MATERIELS HÉTÉROLOGUES. vertu de laquelle il cherche , par son activité plastique , à maintenir son caractère propre , et à éloigner entièrement de son domaine tout ce qui peut lui être étranger, ou du moins à l'expulser de son suc vital. Les principaux faits qui nous sont connus à l'égard de cette élimination ont été réunis par Gmelin (1). ' I. Beaucoup de substances admises par les organes diges- tifs sont chassées du corps par la transpiration cutanée. Le soufre , administré à lintérieur, s'exhale à l'état de sulfîde hy- drique , qui noircit l'argent que le malade porte sur lui. Le mercure, pris en grande quantité, s'échappe également par la peau , puisqu'il produit un amalgame superficiel avec l'argent mis en contact prolongé avec cet organe (2). Cantu (3) a retrouvé aussi , dans la perspiraiion cutanée , l'iode et l'iodure de potassium qui avaient été pris à l'inté- rieur. D'après Balley (4) , la transpiration dénote , par son odeur particulière, qu'une personne a fait usage de la valé- riane ou de l'asa fœtida. Suivant Cuvier , Duméril et Breschet, la peau exhale l'odeur de l'alcool chez les sujets qui sont morts à l'état d'ivresse. Les ognons et l'ail communiquent la leur à la transpiration cutanée et pulmonaire. Dans quelques cas rares on a observé des sueurs jaunes chez des personnes qui avaient pris beaucoup de rhubarbe. IL Le lait admet très-souvent, et avec une grande promp- titude, des matériaux provenant de substances introduites dans les organes digestifs. Celui des Vaches nourries avec le feuillage du mais a une saveur douce et sucrée ; le chou lui en communique une moins agréable et un peu acre ; la fane de pomme de terre le rend insipide , et le BoUtus bo- vinuslui donne un goût détestable (5). Parmentier et Deyeux disent que les substances dont l'animal a été nourri se recon- (4) Handhiich der thcoretischen Chemia , t. Il, p. 1535. (2) Reil , Jrchiv , t. VIII , p. 237. (3) Bulletin des sciences médicales, t, VI, p. 164. (4) Journal de Magendie, t. XI, p. 16. (5) Pavnienliei- eî Deyeux , Précis d'expériences et observations sur les difi'érentes espèces de lait, p. 13 et 14. rBôbUÎTâ MATÉRiEtS iiÉTÉROLOGtJEÔ, ^35 naissent plus distinctement dans les produits volatils qui passent à la distillation (1). De même , le lait des femmes qui ont pris de l'absinthe ou de l'anis contracte la saveur de ces végétaux, et l'ail lui communique son odeur (2). Quand les Vaches ont été nourries avec de la paille d'orge mûre^ qui contient beau- coup de matière extractive amère, la crème et le beurre qu'on tire de leur lait ont une saveur amère, d'après Hermbstœdt (3). Si ces animaux mangent des plantes contenant une substance analogue à l'indigo , comme ÏAnchusa ojjicina/is , VEquise- tum arvense , les Mercurialis perennis etannua, etc., leur lait a bien sa couleur naturelle immédiatement après la traite , mais il devient bleu après la séparation de la crème , de même que l'indigo ne bleuit non plus qu'en absorbant de l'oxygène pendant la fermentation. Cette matière colorante ne passe point dans le beurre et le fromage; elle demeure dans le petit- lait, dont on peut la séparer par la filtration (4). S'il s'est trouvé des racines de garance ou de Galium rubioïdes parmi le fourrage, le lait acquiert une teinte rouge , qui se commu- nique^au beurre. Celui-ci est rendu jaune aussi par le curcuma, Cantu a vu les réactifs indiquer la présence de l'iode dans- le lait de femmes qui avaient fait usage de cette substance. Enfin le lait manifeste aussi les propriétés des médicamens introduits dans l'économie. Du mercure , des purgatifs , des narcotiques, ou autres substances, qu'on fait prendre à la mère, exercent leur action spécifique sur l'enfant qu'elle nour- rit de son sein , et ce qui prouve qu'alors la substance étran- gère passe également dans le sang de ce dernier , c'est que , quand la mère a mangé des asperges , l'urine de son nourris- son exhale l'odeur particulière que ce légume communiqua à la sécrétion rénale. m. Wœhler (5) et Stehberger (6) ont soumis l'urine à une- (1) Ibid., p. 17. (2) Ibid., p. 140. (3) Erdmana, Journal fuer technischd und œkonomisehé Chemio t. XVII , p. 11. (4) liic^., p. 1. (5) Zeitschrifi fuer Physiologie , t, I , p. 128. (6)/6wi.,t>II,p.49. " " S54 PRODUITS MATERIELS HÉTÉROLOGCES. série de recherches , dirigées toutes dans le but spécial de connaître les substances étrangères qui peuvent s'y intro- duire. i° Parmi celles qui passent par la voie des organes diges- tifs , on distingue d'abord des terres. La silice qu'on y a ren- contrée , provient très-probablement de l'eau prise en bois- son (1). Cantu, Guibourt (2) et Woehler (3) y ont trouvé de l'iode; Woehler et Garnet, du soufre et du sulfure de potassium , Fodéré (4) de l'arsenic, RhGdius(5), Jourdan (6) et Cantu (7) du mercure; Focke, Carminati, Tiedemann et Gmelin (8> du fer. Parmi les sels , Wollaston (9) , Marcet (10) , Tiedemann et Gmelin (11) , Seller et Ficinus (12), Woehler (13), Wetzler et autres, y ont rencontré du cyanure de potassium et du cya- nure de fer et de potassium. Tiedemann et Gmelin (14), Sœm- merring et Vogel, du sulfo-cyanure de potassium; Lister (15) du sulfate de magnésie ; Morichini (16), du sulfate de potasse OU de soude ; Renard , Rollo , Darvi^in , Woehler , du nitrate M potasse ; Tiedemann et Gmehn , du borax et du chlorure (1) Berzelius , Traité de chimie , t. VII , p. 369. (2) Journal de chimie médicale , t. VIII , p. 460. • (^) Zeitschrift fuer Physiologie , t. I , p. 128. (4) Christison, Alhandlung ueher die Gifte , in Bezug auf gerichtUçhf Arzneikunde , p. 290., '(5) Reil , ArcUv , t. VIII , p. 237. (6) Christison , loc. cit., p. 407. (7) Schweigger, Journal fuer Cliemie , t. XLIII, p. 296. (8) Recherches sur la route que prennent diverses substances pour pas-^ ser de l'estomac dans le sang , p. 54. (9) Poggendorff, Annalen der Physik , t. XLIII , p. 80. (10)/5z(^.,p. 81. (11) Recherches sur la route que prennent diverses substances pour pas-« ser de l'estomac dans le sang , p. 12. (12) Zeitschrift fuer JSatur-und Heilliunde , 1. 1 , p. 370. ,.384. (13) Zeitschrift fuer Physiologie , 1. 1 , p. 135. (14) Recherches sur la route que prennent diverses substances pour paS'? ser de l'estomac dans le sang, p. 54 , (15) Meckel , Deutschqs Archiv , t. III , p. 471. (16) Ihid., p. 467. PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROIOGUES. 355 de bariuin; Woehler, du chlorure de potassium; Gilbert Blane, du nitrate de potasse ;Woelher, d'autres sels produits par des acides vépétaux (1); Mascaf^ni (2),Brande (3) et Bos- tock, du carbonate de potasse; Morichini (4) et Woehler (5), de Tacide citrique et autres acides végétaux; Reil, Emmert, Vauquelin (6) et Woehler , de Tacide gallique et du tannin. Wœhler (7) a vu des personnes qui faisaient simultanément usage de la rhubarbe et de préparations martiales , rendre une urine noire. Le passage des substances narcotiques dans le produit de la sécrétion rénale est attesté par les récits de quelques voya- geurs , qui rapportent que les Kamtschadales et les Koriaikes s'enivrent en buvant l'urine de ceux d'entre leurs compatriotes qui se sont procuré l'ivresse en mangeant deVJtgaricus mtcs' carius. L'urine s'empare aussi de diverses matières colorantes qui ont été introduites dans les voies digestives. La gomme gutte lui donne une couleur jaune , au dire de Tiedemann et Gme- lin (8). Ces mêmes physiologistes, Home et W^estrumb, assu- rent que la rhubarbe lui en communique une jaune, qui passe au rouge par l'addition des alcalis. Elle devient d'un bleu ver- dâlre par la teinture d'indigo, selon Tiedemann et Gmelin, Seiler et Ficinus ; rouge par les betteraves, d'après Gruithui- sen ; rougeâtre par les baies d'airelle, les merises et les mûres, suivant Wœhler, qui ajoute que cette teinte passe au rouge foncé par l'addition des acides , et au verdâtre par celle des alcalis. D'après Parmenlier et Deyeux, les alcalis la rendent rouge chez les animaux qui ont pris de la garance. Elle de- vient rouge par le bois de Gampêche, suivant Percival, jaune 0) toc. cit., p. MS. Cl) Poggendorff , Annalen der Physik, t. L , p. 19S.^ (3) Ibid., p. 187. (4) Meckel , Deutsches Archiv , t. III , p. 467. (5) Loc. cit., p. 438. (6) Berzelius , Traité de chimie , t. VII , p. 400. (7) Loc. cit., p. 141. (8)_Recherches sur la route que prennent diverses substances pour pas- ser de l'estomac dans le sang , p. 37. 356 PRODUITS MATÉRIELS liÉTÉROtOGtJES. par l'usagée de la chélidoine, et d'un rouge foncé par celui des baies de sureau. Après l'ingestion de certaines substances, l'urine acquiert une odeur particulière. L'essence de térébenthine et l'huile de genièvre lui communiquent celle de la \iolette ; la valé- riane et lecastoreum, celle de la myrrhe; la pensée, celle de l'urine de chat. Tout le monde connaît l'odeur désagréable que lui font prendre les asperges. D'après Morichini (1), l'urine contient de [la gélatine et de Tosmazome quand on a pris du bouillon le matin , à jeun , et, du mucus, lorsqu'à la même époque on a avalé des bois- sons mucilagineuses, qu'on sait d'ailleurs exercer une influence salutaire dans les inflammations des voies urinaires. Brande a trouvé aussi beaucoup d'acide carbonique dans l'urine après l'usage des boissons fortement chargées de cet acide (2) , et Bachetoni (3) a vu, dans une fièvre nerveuse, l'huile d'amandes douces , qui avait été donnée à l'intérieur , s'échapper par cette voie. 2" Plusieurs de'ces substances paraissent aussi dans l'urine après avoir été employées en frictions à la peau , comme l'es- sence de térébenthine , ou introduites dans le tissu cellulaire sous-cutané , comme le cyanure de potassium , ou injectées dans un ulcère , d'après Seiler et Ficinus (4). 3° Après avoir été injectés dans la trachée artère, les principes colorans de l'indigo et du safran et le cyanure de potassium et de fer ont été retrouvés dans l'urine , d'après les obser- vations de Mayer (5), de Seiler et de Ficinus (6). 4° Il en a été de même pour ce dernier sel , selon Magen- die, Emmertet Hœring, quand il avait été introduit dans la cavité de membranes séreuses. On a également observé, après avoir injecté du sang dans le crâne d'animaux, que , quand (1) Meckel , Deutsches Archiv , t. III , p. 467. (2)/ii(i., t. IV, p. 598. {^)ihid., t. m, p. 471. (4) Loc. cit., p. 382. - (5) Meckel, Deutsches Archivai. III, p. 498. (G) ioc, cîV,, p. 387. PRODUITS MATÉRIELS IIÉtÉROLOGUES. 337 ce liquide avait été absorbé , il en sortait une certaine quan- tité par l'urine (1). 5° Il passe aussi par l'urine des liquides qui ont été injectés dans les veines ; du sang , d'après Maguani (2) , du pus selon Gaspard (3) , du lait suivant Mayer (4) , du cyanure de potas- sium et de fer selon Magendie (5). IV. Les poumons exhalent des substances 6" Qui ont été introduites dans le canal intestinal , comme du camphre , de l'alcool , du musc , des huiles essentielles , d'après Tiedemann et Gmelin, Seiler etFicinus, et probable- ment aussi, selon jWœhler^ (6) , de l'acide carbonique pro- venant des boissons qui contiennent de ce gaz; 7° Qui ont été injectées dans des sacs séreux , comme de l'eau-de -vie camphrée dans la cavité abdominale , ou une dis- solution huileuse de phosphore dans la cavité thoracique, sui- vant Magendie (7) ; 8° Ou enfin qui ont été absorbées par la peau ; ainsi l'ha- leine a l'odeur de l'ail quand cette substance a été appliquée sur la peau. 9° Des gaz introduits dans le sang sont expirés, même lors- que leur quantité est peu considérable (8), par exemple l'air atmosphérique (9), le gaz hydrogène (10) et l'hydrogène sul- furé (11). Tietzel (12) a observé, après une transfusion trop co- (1) Burdach, Vom Baue des Gehîrns , i. III, p. 9. (2) Scheel, Die Transfusion des Blutes und Einspritzung der Arzneîen in die Adern , t. II , p. Id. (3) Journal de Magendie, t. II, p. 7. (4) Zeitschrift fucr Physioloijie , t. III , p. 83. (5) Précis élémentaire , t. II , p. 380, (6) Loc. cit., p. 302. (7) Nouveau bulletin des sciences de la Société philomatique, t. Il, p. 254. (8) Nysten, Recherches de physiologie et RODt]ITS MATÉRIELS HÉTÉHOLOGUES. SSg Ûi» Le goût de l'huile de goudron et de celle de Cajeput s'est fait sentir à des personnes chez lesquelles ces substances avaient été versées goutte à goutte sur la tête , ou employées en frictionsà la plante des pieds. En général aussi, on éprouvé un goût métallique dans la bouche après les frictions mercu- rielles , et celles avec la pommade soufrée communiquent une odeur de gaz hydrogène sulfuré aux vents qui sortent par Tanus. Lorsque Bichat avait disséqué des cadavres en putréfaction , dans une salle close , en respirant Tair du dehors par le moyen d'un tube communiquant avec l'extérieur , les vents qu'il rendait parle bas exhalaient la même odeur cadavéreuse que quand il avait respiré l'air chargé d'émanations putrides. Lebkuchner a trouvé que les matières fécales exerçaient une réaction acide après des frictions avec l'acide sulfurique étendu- 42° Du cyanure de potassium et de fer que Seiler et Fi- cinus (1) avaient injecté dans la trachée-artère , se retrouva dans la bile. 13° Les mêmes observateurs y ont rencontré aussi ce sel (2), de même que Tiedemann et Gmelin (3) , après l'avoir intro- duit dans l'estomac. VI. Les substances étrangères peuvent aussi être déposées, avec les sécrétions internes , dans des espaces clos, après avoir été introduites par les organes digestil^. Ainsi , du cya- îiufé de potassium et de fer passa dans la sérosité du péri- carde, selon Tiedemann et Gmelin, du mercure dans Fhu- metir aqueuse de l'œil , suivant Sybel (4). La graisse change de couleur en raison des alimens dont on fait usage ; les Re- noncules la rendent jaune chez les Vaches , et les Fucus verte chez les Tortues (5). VIL Enfin il y a aussi quelques substances qui passent dans (1) Loc. cit., p. S87. (2) Loc. cit., p. 370. (3) Recherches sur la route que prennent diverses substances pour pas- ser de l'estoriiac dans le sang, p. 44. (4) Reil , JrcJiit , t. V, p. 369. (5) Heusinger, System der Histologie , p. 134. 34© PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROIOGUES. des parties solides. La chair des Grives donne la diarrhée quand ces Oiseaux ont mangé des baies de nerprun , [celle des Oies qu'on a nourries des poisson a un goût d'huile à brûler , et celle des Chiens est savoureuse dans les îles de la mer du Sud , oii on les alimente avec du froment. La cou- leur des poils ou des plumes peut être déterminée par le genre de nourriture ; le poisson donne aux plumes blanches de l'Oie une teinte aurore , qui se perd promptement lors- qu'on fait prendre d'autres alimens à cet animal (1) ; les Chardonnerets qu'on nourrit de chenevis prennent une cou- leur plus foncée ; les Zibelines deviennent noires dans les fo- rêts de sapins, et bleuâtres dans celles de peupliers (2). Les os des animaux qu'on nourrit de garance , ou , suivant Gib- son (3) , de bois de Campêche, prennent peu à peu une teinte rouge , qui/ait place à leur couleur naturelle quand la nour- riture vient à changer. Westrumb a trouvé le cyanure de po- tassium dans des membranes séreuses , des membranes mu- queuses , les reins et les glandes salivaires (§ 866 , 4°). Al- bers (4) et quelques autres observateurs ont reconnu que la peau prenait souvent une teinte de bleu foncé ou noirâtre chez les personnes qui usaient pendant long-temps du nitrate d'argent ; il arrive même quelquefois que la conjonctive et la membrane muqueuse de la cavité orale (5) participent à cette coloration , qui dure assez souvent pendant plusieurs années. Enfin , Fricke (6) a trouvé du mercure dans les os de sujets qui avaient pris des préparations mercurielles à l'intérieur , observation que d'autres avaient déjà faite avant lui (7). Hu- nefeld etXacarterie (8) ont également rencontré ce métal dans des pseudomorphoses. (1) Naumann , Naturgeschichte der Fœgel DeutscTilands , 1. 1 , p. 420. (2) Heusinger, Untersuchungen ueber die anomale Kohlen-und Pig^ mentbildung in dem menschlichen Kœrper, p. 41. (3) Meckel , Deutsches Archiv , t. IV, p. 482. (4) Savimlung auserlesener Ahhandlungen , t. XXVI, p. 361. (5) Ihid., p. 368. (6) Horn , Neues Archiv fuer medicinische Erfahrung , 4826 , p. 499. (7) Cluislison , loc. cit., p. 407. (8) Schweigger, Journal fuer Chemie > t, L , p. 213, PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGDES. S^I !i VIII. Les faits rapportés jusqu'ici ont été recueillis sur des hommes et des animaux à sang chaud. Des phénomènes ana- logues ont lieu chez les animaux inférieurs. Ainsi , par exemple , Jacobson (1) a reconnu que le cyanure de 'potas- sium et de fer était absorbé par la surface du corps des Li- maçons , qu'il était éliminé du sang de ces animaux par leurs poumons, leurs reins et surtout leur foie, mais que, quand l'expulsion n'avait pas lieu d'une manière prompte , il se dé- posait aussi en partie dans les tissus solides. IX. Les observations de Haies et deSchubler (2) nous ap- prennent que les substances étrangères absorbées par les racines des plantes , sont expulsées par les tiges et surtout par les feuilles, mais qu'elles ne se déposent point dans les fruits. § 866. Si maintenant nous considérons ce qui a lieu pen- dant l'élimination de substances étrangères , I. Notre attention doit se porter d'abord sur l'époque à la- quelle ces substances apparaissent dans les sécrétions. d° Quant à ce qui concerne les substances admises par les organes digestifs , Parmentier et Deyeux (3) disent que le lait présentait l'odeur du porreau , de l'ail et de l'ognon , trois jours après que les Vaches gavaient été nourries avec les feuilles de ces plantes , et qu'il rougissait six jours seulement aprèsl'usage de la garance (4), tandis que, suivant Young , ce dernier phénomène avait lieu au bout de vingt-quatre heures, lorsqu'un jour entier s'était écoulé sans que l'animal reçût au?- cune espèce de nourriture : quand ensuite on repassait à d'autres alimens, le lait conservait encore sa teinte rouge pendant sept à huit jours. D'après cela , il paraît que ce pig- ment ne se fraie qu'avec beaucoup de lenteur une route à travers l'organisme. Cependant Gibson (5) assure qu'il parut, dans les os de jeunes Pigeons , vingt-quatre heures déjà après (1) Bulletin des sciences médicales, t. XXII, p. 331. (2) Schwelgger, Journal fuer Cliemie , t. L , p. 54. (3) Précis d'expériences et observations sur les différentes espèces de lait, p. 141 et 142. (li)Ibid.,-^. 143. (5) Meckel , ficutsches 4rc1iiv , t. lY, p.^482. 54â PRODUITS MATÉRIELS HiTÉROIOGUES. qu'on eut commencé à leur donner de la garance , et Steh- berger l'a vu se manifester au bout de vingt minutes seule- ment dans l'urine humaine. Or comme le lait semble possé- der la réceptivité spécifique à un degré tout particulier ( § 843 , 6» ) , on est en droit de présumer que les pigmens qu'il reçoit si tard , par exemple celui de la garance , sont des substances qui n'ont qu'un rapport îrès-éloigné avec son propre caractère. Stehberger (1) , ayant rencontré un jeune garçon atteint d'exstrophie de lu vessie , chez lequel on pouvait observer, d'une manière immédiate , le suintement de l'urine par les uretères, fit sur lui une série d'observations relatives à l'ap- parition dans ce liquide de différentes substances qui avaient été introduites par la voie de l'estomac. La coloration de l'urine par la teinture d'indigo se manifesta au bout de quinze mi- nutes , et dura cinq heures ; celle par la garance , la rhu- barbe , le bois de Campêche , les baies d'airelle et les meri- ses , eut lieu au bout de vingt à quarante-cinq minutes , acquit son plus haut degré au bout d'une à deux heures , et dura une heure pour les cerises , neuf heures pour la rhubarbe ; celle par la pulpe de casse parut au bout de cinquante-cinq minutes , et persista pendant vingt-quatre heures ; celle par les baies de sureau devint manifeste au bout de soixante-et- quinze minutes seulement, et dura quatre heures. L'acide galli- que pur ne se prononça qu'au bout de vingt minutes ^atteignit son point culminant au bout de deux heures, et disparut après onze heures. La coloration par la busserole devint manifeste en quarante-cinq minutes , parvint au maximum en deux heures , et s'effaça au bout de sept heures. Le cyanure de potassium et de fer ne devint apparent qu'au bout d'une heure , et en dura quatre seulement. Krimer (2) etNaveau (3) ont trouvé, dans l'urine, le cyanure de potassium au bout de quatorze minutes, la rhubarbe après quinze, et le fer après (1) Zeitschrift fuer Physioloijie , t. ÏI , p. 49. (2) Physioloijie Uniersuchungen , p. 9. (3) Expérimenta quœdam circa urinm secrotionetn , p. 12. PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. 343 trente. Westrumb (1) prit , le matin , à jeun , une once de teinture de rhubarbe , avec de l'eau de Seltz , et trouva , au bout de cinq minutes , que son urine présentait , à un faible degré , il est vrai , les réactions caractéristiques de la rhur barbe ; ces réactions étaient fortes au bout d'un quart d'heure , et de nouveau assez faibles au bout d'une heure ; l'essence de térébenthine et le cyanure de potassium et de fer parurent dans l'urine après vingt minutes. Wetzler y a retrouvé ce dernier sel au bout de dix minutes déjà ; sa présence dans l'urine se manifestait pendant vingt -quatre heures, quand la dose avait été d'un à six grains, et durant trois jours lorsqu'elle avait été portée à un gros. Brande (2) a observé que l'urine sortait alcaline six minutes déjà après la prise de deux gros de carbonate de soude (*). Après des injections faites dans l'estomac de Lapins , Na- veau (3) a retrouvé , au bout de seize à vingt minutes , la rhu- barbe et le cyanure de potassium dans l'urine. Westrumb (4) a reconnu des traces de rhubarbe au bout de cinq minutes, et des vestiges de cyanure de potassium et de fer après deux minutes seulement. 2° Breschet et Milne Edwards (5), ayant injecté de l'eau- de-vie camphrée dans la cavité abdominale de Chiens , ont reconnu que l'haleine exhalait l'odeur de l'alcool au bout de trois minutes et demie , et celle du camphre au bout de six minutes ; cette dernière persistait pendant une heure entière. 3° Chez le je(me garçon porteur d'une exstrophie de la vessie , que Stehberger a observé , l'urine exhalait l'odeur de la violette un quart d'heure après que le sujet avait flairé l'essence de térébenthine , et vingt-cinq minutes après qu'oa (1) Meckel , Deutsches Jrchiv , t, VII , p. 538. (2) Poggendorff , Jnnalen der Physik , t. L , p. 187, C) Consultez à ce sujet un mémoire de Darcet dans les Annales de chimie, t. XXXI ; Considérations chimiques sur diverses concrétions du corps humain, par Laugler ( Mém. de l'Acad. roy. de Méd., 1. 1, p. 394 ) , et l'ouvrage de Chevallier intitulé Essai sur la dissolution de la gravelle et des calculs de la vessie , Paris, 1837, in-S". (3) Loc. cit., p. 12. (4)ioc. cîV., p, 539. (5) Répert. gén d'anat. et de physiol. pathologiques , t. II , p. 95, 544 PRODUITS matériels] HÉTÉROtOGUËS. lui en avait fait des frictions sur la peau. Quand Mayer (1) avait injecté un mélange de teinture d'indigo et de teinture de safran dans la trachée-artère de Lapins , l'urine était ^déjà verte au bout de huit minutes. 4° Hering (2) injecta du cyanure de potassium et de fer dans les veines de Chevaux, et observa combien de temps ce sel sé- journait dans le sang, combien aussi lien mettait à se déposer dans les différens tissus. Les réactions du sang annonçant la pré- sence du cyanure diminuèrent au bout de deux minutes (3) , même déjà de quarante secondes (4), et cessèrent dans un laps de quinze minutes (5) à cinq heures (6); par conséquent, l'élimination commença dès la première minute , et fut ter- minée en peu d'heures. Dans un cas (7) où le sang ne mon- trait plus aucune trace de cyanure de potassium et de fer au bout de huit heures, Hering retrouva encore, au bout de deux jours , dans l'urine , le sel qu'il lui avait été impossible de découvrir dans le sang , uniquement peut-être à cause de sa trop petite quantité. Les membranes séreuses et les reins fu- rent les premiers organes dans lesquels il se manifesta ; les reins en contenaient , souvent au bout d'une minute , soit seulement dans leur substance corticale , soit en même temps dans la substance tubulaire , mais toujours en dernier lieu dans le bassinet; les' membranes séreuses en offraient des traces au bout de deux à quinze minutes , d'abord dans le péricarde , puis dans la plèvre , ensuite ' dans le péritoine , enfin dans les capsules synoviales , d'où résulte , par consé- quent, une succession correspondante à l'éloignement du cœur (S). Il se montrait aux membranes muqueuses au bout de quelques minutes; d'abord il n'apparaissait que dans le tissu cellulaire unissant celte membrane à la tunique mus- (4) Meckel , Deutschcs Archiv , t. III , p. 498. i^\ y.p/t'.txr'h.rift fuer Plivsiolodie . t. III . D. 8 (4) Meckel , Deutschcs Archiv , t. Il (2) Zeitschrift fuer Physiologie , t. (3) Ibid., p. 95. III , p. 86. yo) xuvu,., y. ^«. (4) Ihid,, p. 114. (5) Ihid., p. 92. (6) lUd., p. 112. (7) Ihid., p. 95. : (S) im., p, m. " PRODUITS MATÉRIELS HETERO tOGUES. 345 culeuse, et le mucus n'en offrait aucune trace (1). Il se ma- nifestait en premier lieu dans la moitié droite de l'estomac , puis dans l'intestin , ensuite dans les poumons , plus tard dans les voies urinaires , enfin dans les parties génitales. Jamais on n'en voyait de vestiges bien sensibles sur les points où l'épithélium est le plus développé , tels que la cavité orale , l'œsophage et la moitié gauche de l'estomac (2). On le recon- naissait sans peine dans les glandes salivaires , mais non dans les organes d'une couleur foncée. Lorsqu'au bout de cinq heures il avait disparu du sang , on ne pouvait également plus le retrouver au bout de vingt-quatre heures dans les parties solides (3). Suivant Breschet et Edwards _, l'huile de térébenthine injec- tée dans l'artère crurale de Chiens, ne tardait point à impré- gner l'haleine de son odeur. II. La rapidité avec laquelle l'urine coule en plus grande abondance après l'usage de quelques boissons (§810, 7"; 832, 5°), avait fait naître l'idée que certaines substances pourraient bien passer immédiatement des organes digestifs dans les voies urinaires sans traverser le sang. Cette hypothèse de voies oc- cultes avait en sa faveur les observations qui ont été rappor- tées précédemment (§ 857, 16°), et la remarque, faite par Wol- laston (4), que le cyanure de potassium et de fer, quatre heures après avoir été pris, ne se retrouvait plus dans le sang tiré par la saignée, tandis qu'il se montrait clairement dans l'urine. Mais il résulte des faits recueillis par Hering, qu'à cette époque le sel pouvait fort bien ne plus exister dans le sang , ou du moins n'y être qu'en trop faible quantité pour qu'il fût possible de constater sa présence. Il arrive souvent à la substance vivante d'envelopper les substances étrangères qui viennent à être mêlées avec elle , au point de les rendre méconnaissables , et ceci est vrai même des sécrétions ; le lait des Vaches qu'on % nourries de porreaux ou d'ognons , n'a point encore d'odeur il) Ibid., p. 105. (2) Ibid., p. 423. (3) Ibid., p. 42. (4) Poggendorff , Anmlen der Phjsik, t. XLIII, p. 80. 44^ PRODUITS MATÉRIELS H]ÉTÉROrOGUES. au moment où il sort du pis ; c'est seulement après sa sortie qu'il en développe une, qui devient de plus en plus pronon- cée (1) ; et quand on a fait manger du safran aux Vaches , il n'offre pas de couleur jaune , laquelle se manifeste seulement dans le beurre qu'on en obtient (2). Au reste, des observation? qui seront rapportées plus tard ont démontré l'existence dan§ le sang de ces substances étrangères introduites par la voie des organes digestifs , qu'on n'a jamais pu découvrir dans le tissu cellulaire interposé entre l'estomac ou 1 intestin et les reins ou la vessie , tandis qu'elles se montrent dans l'urine ejfe le sang (3). Le passage de substances étrangères de la cavité abdomi^ nale dans la perspiralion pulmonaire (2°), et des poumons dans l'urine (3°), n'est pas moins rapide que celui de l'esto^ mac dans cette dernière, et tous ces phénomènes deviennent moins surprenans lorsqu'on a égard à la rapidité plus grande encore avec laquelle s'effectue l'élimination des matériaux étrangers parvenus dans le sang (4°). Enfin , quand Westrumb (4) avait lié les artères rénales e| injecté de l'infusion de rhubarbe ou de la dissolution de cya-' nure de potassium dans l'estomac, ces substances se mon-' traient dans le sang , ainsi que dans le canal intestinal , la yate et le foie , mais non dans l'urine , ni dans les reins ; lors^ qu'il avait lié l'artère rénale droite et l'uretère gauche , il trouvait ces substances dans le rein gauche et dans l'urine de son uretère , mais non dans le rein droit, ni dans la vessie ; quand les artères rénales étaient demeurées intactes (5), il constatait leur présence dans l'urine suintant goutte à goutte des uretères coupés en travers. Par conséquent , il n'est plus douteux que les substances (4) Parmentier et Deyeux , Précis d'expériences et observations sur le» différentes espèces de lait , p. 142. (2) Ibid.,^. 147. (3) Tiedeniann et Gmelin , Recherches siiï la route que prennent di- verses substances pour passer de l'eslomac dans le sangj 24, 38. (4) Meckel , Deutsches Archiv , t. VII , p. 528. (5) IUd„ p. 539. PRODUITS MATÉRIEIS HÉTÉROLOGUES. 347 étrangères qui s'échappent du corps avec les liquides sécré- tés proviennent conslamment du sang. Thilow a injecté des lymphatiques rénaux par le canal tlioracique; mais il a incontestablement commis une erreur en regardant cette di- rection comme normale , et en admettant que des substances peuvent la suivre pour parvenir des organes digestifs aux reins sans passer par le sang. III. L'admission de substances étrangères dans le sang et leur élimination dépendent en partie de circonstances acci- dentelles, comme la quantité de ces substances et Tétat mo- mentané de la vie , en partie aussi du rapport particulier de chacune d'elles avec des organes déterminés et avec cer- taines activités vitales , rapport qu'on ne parviendrait à dér- couvrir que si Ton possédait un nombre d'observations su* périeur à celui dont nous pouvons disposer en ce moment. 5° Quelques substances admises avec les alimens ne se retrouvent point dans les sécrétions et dans les tissus orga- niques , soit parce qu'elles ont été décomposées et métamor- phosées dans les organes digestifs , soit parce qu'elles sont sorties avec les matières fécales sans subir aucun changement. Ainsi, par exemple, d'après Gibson (1), le curcuma s'é- chappe avec les excrémens , qu'il teint en vert , et ne passe ni dans les os ni dans aucune autre partie ; de même , les parties acides, amères et aromatiques de l'oseille, de la chicorée , de la sauge , de la lavande et du thym parais- sent être détruites par la digestion , et ne se trouvent point dans le lait (2); de même enfin les principes colorans du tour- nesol, de lacochenille, du henné et du vert de vessie ne pa- raissent ni dans l'urine , ni dans le sang ou le chyle (3). 6° Les substances étrangères n'ont été retrouvées que dans quelques tissus , et jamais dans tous. Ainsi , par exemple , le cyanure de potassium a passé dans la bile et l'urine , et non (1) Mecke , Deutsclies Archiv., t. IV, p. 482. (2) Parmentier et Deyeiix , Précis d'observations et expériences sur les différentes espèces de lait , p. 440. (3) Tiedemann et Gnielin , Recherches sur la route que prennent di- verses substances pour passer de l'estomac dans l'intestin , p. 401. 548 PRODUITS Matériels hétékologues. dans la sérosité du péricarde (1), ou dans la salive et dans le liquide des ampoules déterminées par les cantharides (2) ; l'essence de térébenthine ne s'est montrée que dans l'urine, et non dans d'autres sécrétions (3) ; l'eau n'est sortie du sang que par l'exhalation pulmonaire lorsqu'elle était pure , et par l'urine seule quand on y avait ajouté un peu de nitre (4). Somme totale, ce que nous savons jusqu'à présent se réduit à ce que les substances volatiles , les gaz , l'éther, l'alcool , le camphre, le musc, etc., sortent surtout par les poumons et la peau ; les substances fixes , au contraire , comme matières résineuses, extractives, etc., par l'urine; et que certains pigmens se déposent de préférence dans les os. En ce qui concerne ces derniers, nous voyons que l'affinité chimi- que prend part au phénomène ; la matière colorante de la garance a de l'affinité pour le phosphate de chaux, et se combine avec ce sel en le précipitant de sa dissolution , de même qu'après avoir été introduite dans les organes digestifs d'un animal , elle se dépose dans les os. Il est possible aussi que l'action spécifique de certaines substances sur des or- ganes déterminés ( § 842 ) se rattache à cette circonstance purement matérielle. Cependant nous ne sommes point par là autorisés à admettre que toute affection spécifique d'un organe dépend d'un dépôt de certaines substances , et que ce dépôt lui-même tient toujours à l'affinité chimique; car le rapport dynamique de la vie est plus puissant que son rap- port matériel, et présente de nombreuses modifications. Ainsi, par exemple, on n'a jamais rencontré aucune matière étrangère déposée dans la substance du cerveau, de la moelle épinière et des nerfs , et , quand il s'en trouve une répandue dans le sang en général , on ne voit pas pourquoi c'est précisément sur l'activité jitale de ces organes qu'elle agit d'une manière^spécifique. (1) Ibid., p. 45. (2) Poggendorff , Annalen der Physik , t. XLIII , p. 81. ' (3) Tiedemann et Gmelin, loc. cit., p... (4) Nouveau Bulletin des sciences de la Société philomatique , t. II," p. 254. PRODUITS MATÉRIELS tlETÉROLOGUES. 34^ IV, Les influences qui s'exercent sur l'élimination 7° Nous prouvent combien est grande la part qu'on doit attribuera l'activité nerveuse, qu'on ne peut considérer que comme un phénomène purement dynamique , à moins de vou- loir se perdre en vaines hypothèses. Lorsque Krimer (1) et Naveau (2) avaient coupé les nerfs des reins ou ceux de la paire vague , la rhubarbe introduite dans l'estomac ne passait point dans l'urine. Westrumb (3) trancha la moelle épinière immédiatement auprès de la tête, entretint la respiration par des moyens artificiels , et injecta ensuite de la rhubarbe ou du cyanure de potassium dans l'estomac ; au bout d'une heure ou d'une heure et demie , il retrouva ces substances dans le foie , la rate et les poumons , ainsi que dans les deux sub- stances des reins, mais non dans l'urine.' Lammerer (4) avait déjà fait auparavant des observations semblables. Ainsi l'unité dynamique à laquelle préside le système nerveux paraît être une condition essentielle pour que l'organisme puisse se dé- barrasser de substances étrangères. 8° D'un autre côté , les circonstances matérielles ne sont point sans influence. Lorsque Breschet et Edwards (5) ou- vraient la poitrine à des Chiens , de manière que les poumons s'affaissassent par la pression de l'atmosphère , et qu'on fût obligé d'entretenir la respiration par des moyens artificiels , l'eau-de-vie camphrée injectée dans la cavité abdominale ne se montrait qu'au bout d'une heure , encore même très-fai- blement, dans l'exhalation pulmonaire ; tandis qu'elle se ma- nifestait d'une manière à la fois prompte et intense dans une ventouse appliquée sur un muscle du bas-ventre mis à dé- couvert ; de sorte qu'une raréfaction de l'air, semblable à celle qui a lieu dans l'inspiration normale, semblait être une con- dition de cette élimination. L'essence de térébenthine injectée dans le sang se montrait au péritoine, comme à la bouche, (1) Physiologiseke Untersuchungen , p. 16. (2) Expérimenta quœdam circa urinœ secretionem , p. 16 , 20. (3) Meckel , Deutsches Jrchiv , t. VII , p. 532. (4)/6id.,p. 536. (5) Répevtoive général d'anatomie! et de physiologie pathologiques, t. II, p. 95. 55o PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. tandis que l'haleine seule en décelait la présence lorsque la poitrine était demeurée intacte. Enfin , après rinjection d'une dissolution huileuse de phosphore , une \apeur blanche s'é- chappait des poumons, mais non d'un muscle abdominal cou- vert d'une ventouse, attendu que l'huile introduite par lé système de la veine cave stagnait dans les poumons , et rie passait point de là dans le système aortique (§ 744, 7°). V. Nous avons quelques données sur la nature chimique des substances étrangères après leur élimination, comparée à ce qu'était leur composition primordiale ; à la vérité , elles sont insuffisantes pour nous instruire des métamorphoses que ces substances éprouvent dans les différentes stations qu'elles font en traversant l'organisme. 9° Quelques substances paraissent désoxidées. Le mercure , donné intérieurement à l'état d'oxide , a été trouvé réduit dans i'urine d'après Jourdan , dans les os selon d'autres : Woehlei* a retrouvé le cyanure ferrico-px)tassique à l'état de cyanure ferroso-potassique dans l'urine , réduction qu'il avait déjà éprouvée dans le canal intestinal. Le tarîraîe de nickel et de potasse s'est rencontré à l'état de sulfure de nickel dans l'urine. 10" D'autres substances sont oxidées. Suivant Magendiè, lé phosphore injecté , dissous dans l'huile, est expiré en va- peurs blanches, qui sont de l'acide phosphoreux. Woehler dit que le sulfure de potassium se représente presque toujours à l'état de sulfate de potasse dans i'urine. 11" Le soufre sort par la peau à l'état de sulfide hydrique; par l'urine , d'après Woehler, à celui de sulfide hydrique et de sulfate. L'iode est combiné, dans l'urine, avec du sulfide hydrique et des alcalis. 12" Les sels produits par des acides végétaux sont convertis en carbonates , de manière que l'urine qui les contient exerce une réaction alcaline , qu'elle présente également après l'in- troduction de l'acide succinique. 13° L'acide tartrique et l'acide oxalique sont combinés, dans l'urine , avec de la chaux ; les matières colorantes des baies d'airelle et des merises le sont avec l'acide urique, Produits MATÉRiEts hétérologues. 35 i II. Dégénérescence. I. 4*» La dégénérescence consiste dans l'admission , par le fait du travail plastique , d'un caractère hélérologue , ou en- tièrement étranger à l'organisme normal. C'est un changement de composition dépendant de circonstances vitales anormales, ce qui la distingue du cas dont nous venons de faire l'examen , et où il s'agissait d'un mélange , d'une simple accession de substances étrangères introduites du dehors. Mais la vie ne peut point s'aliéner d'une manière absolue , de manière qu'on voit toujours percer, à travers la dégénérescence , une acti- vité vitale qui est normale en elle-même , et dont l'anomalie se rapporte uniquement soit au degré qu'elle affecte , soit a l'espèce ou à l'âge de l'individu chez lequel on la remarque. Ainsi l'éloignement de l'état normal sous le point de vue de la proportion des principes constîtuans ( § 849-853 ) , ou l'é- change du caractère propre d'une formation contre celui qui appartient à une autre (§ 854-850), peut être porté au point que la partie semble être devenue totalement étrangère à l'organisme en général. Mais, tant qu'il ne nous sera pas possible de démontrer partout ces circonstances^ nous devrons nous contenter d'étudier les phénomènes de la dégénérescence qui en est le produit. 2* La direction anormale que la vie a prise tend à se consolider. Ainsi la dégénérescence s'étend autour d'elle ; la partie qui l'a subie communique son caractère à celles qui l'entourent^, se les assimile et les infecte. De cette manière, la dégénérescence , qui était d'abord purement locale , s'é- tend peu à peu , et ses envahissemens progressifs font qu'elle finit par devenir générale. Mais la substance dégénérée , quand elle est transmise à un individu sain , détermine en lui une dégénérescence analogue. n. Parmi les causes principales de la dégénérescence , 3° Il faut ranger la proportion anormale entre l'ingestion et l'éjection. Lorsque la substance organique ne se renou- velle point sans cesse , quand elle n'est pas continuellement remplacée par de nouveaux matériaux , elle dégénère, Si le§ 352 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGDES. alimens et Teau pour boisson manquent , l'urine acquiert de l'âcreté et de la fétidité, l'haleine prend une odeur désagréa- ble , le lait et la salive deviennent acres , et il se développe des ulcères scorbutiques dans la bouche (i). Si les voies di- gestives sont surchargées de matières alimentaires, auxquelles elles ne puissent faire subir une assimilation convenable , il résulte de là un développement incomplet des matériaux con- stituans du sang , qui entraîne à sa suite , dans les tissus , une dégénérescence de nature scrofuleuse , par exemple. Mais , alors même que les matériaux du sang ont toutes les qualités requises , si l'éjection n'est point proportionnée à leur quantité , on voit survenir des dégénérescences d' une autre nature, l'arthritique par exemple. La seule suppression d'une excrétion suffit aussi pour produire des effets analo- gues ; ainsi le lait des femmes qui éprouvent une rétention d'urine est très-préjudiciable aux enfans qu'elles nourrissent^ et les animaux auxquels on a extirpé les reins périssent en présentant tous les symptômes d'une fièvre putride , comme il arrive également aux hommes chez lesquels la sécrétion urinaire a été complètement supprimée. 4° Des influences étrangères qui ne sont point en harmo- nie avec l'organisme , peuvent également devenir une cause de dégénérescence. Ici se rangent, outre les alimens de mauvaise qualité et l'air chargé d'émanations de corps orga- nisés, les matières excrétées par d'autres individus , même sains. De même qu'un sang étranger, de bonne qualité d'ail- leurs , ne saurait entretenir la vie , et qu'il est capable de l'anéantir (§ 743 , 6'' -8°), ainsi le contact d'une sécrétion étrangère exerce fréquemment une influence nuisible. H ar- rive souvent qu'après avoir bu dans le même verre qu'une autre personne bien portante cependant , on est atteint d'une inflammation et d'une éruption de boutons aux lèvres. L'acte vénérien , accompli avec une femme qui est dans sa période menstruelle , entraîne fréquemment des acciJens inflamma- toires à la verge (§ 174, 3"), et si l'on en croit Lepelletier ("2), (1) Haller, Elément, physiolog., t. VI, p. 167. (2) Physiologie médicale et philosophique, t. L, p. 37S. PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. 353 les loupes sur lesquelles on applique des compresses imbibées de sang menstruel , passent promptement à l'inflammation et à la suppuration. Dans la polyandrie , il survient aux parties génitales des flux muqueux et des ulcères (§ 252 ), qui sont peut-être déterminés par le mélange des spermes provenant d'individus difFérens, et ce n'est point une conjecture dénuée de vraisemblance que celle qui attribue le développement de certaines maladies spéciales au rapprochement d'hommes appartenant à des races différentes. Cette influence sur une vie étrangère devient plus pronon- cée encore lorsqu'il existe déjà une dégénérescence morbide. Le contact d'une sécrétion scrofuleuse ne saurait amener une diathèse semblable ; mais il peut occasioner des accidens lo- caux, tels qu'éruptions, indurations et ulcères. La sueur des goutteux a une action plus pénétrante, et la syphilis se propage par l'intermédiaire du mucus et du pus ; dans le charbon _, c'est surtout le contact, du sang qui détermine une inflammation gangreneuse et le typhus putride. 5° Une exaltation outre mesure de l'activité vitale et un ex- citement considérable dans un état inflammatoire entraînent la dégénérescence des sécrétions. Quand on applique des sub- stances irritantes sur des ulcères , la surface de ces derniers fournit un pus ichoreux. Lorsque Humboldt(l) mettait des pla- ques de zinc et d'argent sur des régions de la peau dénudées de leur épiderme au moyen d'un vésicatoire, ces surfaces don- naient une sérosité rougeâtre qui, en coulant sur la peau saine, y produisait des stries enflammées livides, dont la durée s'éten- dait à plusieurs heures ; et , en trempant le doigt dans ce li- quide , on pouvait tracer sur la peau des figures rouges , qui persistaient également des heures entières. D'un autre côté , l'épuisement de la force vitale par des efforts violons , des évacuations abondantes ou des maladies graves , peut aussi donner lieu à des dégénérescences. 6" Enfin il faut placer ici divers états anormaux de la vie animale. Les affections déprimantes de l'âme favorisent le dévelop- {1} Uober die goreizfè, Mmhel-Md ^ervenfasev, t. T;, p. E24.. 354 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUÈS. petnent d'une dialhèse putride, et entraînent la dégéneration du pus en ichor. De même qu'on observe quelquefois des vomissemens de bile acre et verte dans les accès d'hystérie et dans le mal de tête, de même on en voit aussi survenir, et souvent avec une rapidité extrême , chez des hommes bien portans qui viennent de se livrer à un violent accès de co- lère. Il est hors de vraisemblance que toute la bile vomie ait été produite dans un si court espace de temps , et il n'est pas moins improbable que la bile déjà formée ait été décompo- sée par l'influence directe de l'affection ; nous devons donc présumer que la bile anormale sécrétée pendant la révolu- tion causée par la colère , a communiqué ses qualités à celle qui existait déjà dans les voies biliaires. L'influence de ce genre d'émotion sur le lait et la salive est attestée par des faits positifs ; on a vu des enfans qui avaient pris le sein immédiatement après un accès de colère de leur mère, être atteints tout à coup de convulsions et périr ; on a aussi des exemples de tétanos mortel provoqué par là mor- sure d'hommes en fureur. L'excès et le défaut de mouvement peuvent également prendre part à la manifestation de dégénérescences. II. La diathèse des dégénérescences, ou la dyscrasie, revêt quelques formes principales , dont les unes (7° , 8°) condui- sent immédiatement à la décomposition de la substance orga- nique , tandis que d'autres (9', iO", 11°) amènent ce résultat surtout par des pseudomorphoses. 7° La dyscrasie putride, qui se manifeste principalement dans le typhus et le scorbut , a pour caractère une diminutioû de la cohésion et de l'aQinité chimique dans le sang et dans les différentes parties qui en émanent , avec une prédomi- nance de carbone, accompagnée de congestions passives, d'inflammation , d'hémorrhagies , et surtout d'une forte dé- pression de la vie animale. 6^ La dyscrasie colliqualive se rattache à l'impuissance de retenir les diverses substances dans un état permanent, à cause de la prédominance de la fluidifîcation , en sorte que de l'albumine, de la graisse et d'autres matières organiques, plus OU moins décomposées , s'échapperjit par des flux mu- PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. 555 queux , par des sueurs , par l'urine ou par la suppuration de parties solides. 9° Dans la dyscrasie scrofuleuse , la formation du^sang est demeurée à un degré inférieur, parce que Tassimilation et la respiration s'exécutent d'une manière incomplète : il se forme moins de fibrine et de sels terreux ; l'albumine prédo- mine, quoiqu'elle-même soit imparfaitement développée; l'acide a également la prépondérance ; la coagulation est fré- quente , mais faible , et repasse bientôt à la fluidification ; le système cutané est spécialement affecté, ainsi que les ganglions lymphatiques. 10» La dyscrasie arthritique , causée par une diminution absolue de l'éjection, ou par son insuffisance proportionnelle- ment à l'ingestion , se caractérise par une surabondance de substances azotées et une tendance très-prononcée aux coa- gulations ; elle est accompagnée par la pléthore'des organes abdominaux , et elle affecte principalement le système sclé- reux. Il" La dyscrasie syphilitique , produite par l'ingestion d'une substance dégénérée d'une manière spéciale , traîne à sa suite, par des formations luxuriantes^ une destriiciion qui jette de profondes racines dans l'organisme. Etant née de rapports qui ont trait à la procréation , elle a pour point de départ la production , mais une production telle qu'elle est en même temps la dissolution de l'organisme individuel. On peut donc dire d'elle , plus encore que d'autres dégénéres- cences, quelle n'est que favorisée par l'augmentation des substances plastiques et l'excitation de l'activité plastique , et que les restrictions apportées à sa formation se bornent à la resserrer dans des bornes plus étroites. Du reste , elle a pour siège principal le système cutané et le tissu scléreux. Le pus syphilitique, analysé par Chevallier, contenait partout de l'albumine, du chlorure de potassium, du chl-orure de so- dium et un sulfate ; le pus provenant des lèvres de la vulve et d'un bubon était alcalin , et contenait de l'osmazome et de l'ammoniaque ; celui des glandes de l'aisselle était neutre et ressemblait à celui du bubon , en ce qu'il contenait de la gélatine et de la graisse, 556 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. III. Toute dyscrasie a son type propre de formation, qui s'exprime tant dans l'ensemble de l'aspect que dans la na- ture et la constitution des diverses parties. Ainsi Rust a par- faitement démontré qu'elle influe sur les qualités extérieures des urines. L'ulcère scorbutique est' plat, avec un fond bleuâtre ; ses bourgeons charnus sont mous , spongieux et luxurians ; ils sécrètent un pus ténu , fétide et sanguinolent ; ses bords sont bleuâtres , boursouflés et lâches ; les parties qui l'entourent sont œdématiées et d'un rouge bleuâtre: il guérit du centre à la circonférence , par la formation d'îles , qui grandissent peu à peu. L'ulcère scrofuleux a un fond pâle et lardacé , un pus caséeux et grumeleux, ou aqueux et acre , des bords très-disposés à se renverser en dedans , et un pourtour d'un rouge sale. L'ulcère arthritique est fort étendu , avec un fond rouge-brun et lisse comme une glace , des bords durs et renflés, un pourtour brunâtre et vari- queux , un pus ténu et acre. L'ulcère syphilitique a un fond lardacé , un pus abondant et particulier, qui , après s'être séché sur le linge, ressemble à du suif demi-fondu; ses bords sont élevés, blancs et renversés en dehors; son pourtour est rouge ; il guérit par l'exsiccation de sa surface entière. Suivant que tel ou telle dyscrasie prédomine , l'ophlbalmie présente un aspect spécial , et la sécrétion de la conjonctive change , ainsi que celle des glandes voisines. Le tissu lui- même des os cariés semble prendre une forme particulière dans chaque espèce de dyscrasie. A. Dégénérescence des liquides. § 868. Il arrive fort souvent que la dégénérescence des li- quides se reconnaît seulement I. D'après les effets qu'elle produit sur l'organisme. 1° La transpiration acquiert , dans certains états de la vie , par exemple chez les femmes en couches, une odeur spécifique, qu'avec un peu d'attention on reconnaît sans peine dans des cas analogues , et dont on ne peut donner qu'une idée fort in- complète en ayant recours à des comparaisons. Il lui arrive PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROtOGUES. 35^ fréquemment d'avoir une odeur cadavéreuse dans les fièvres putrides intenses, marécageuse dans certaines maladies chro- niques , peu de temps avant la mort , d'œufs pourris dans le scorbut , de bière aigre dans les scrofules , de musc dans la jaunisse , de souris dans les sécrétions qui accompagnent l'inflammation du cerveau (1). Les diverses éruptions cutanées s'annoncent par une odeur spéciale , qui souvent , par exemple dans la petite-vérole , précède l'exanthème. Heim (2) la compare , dans la scarla- tine, à celle qui se fait sentir à quelque distance d'une cage renfermant des Lions, des Tigres ou autres bêtes féro- ces ; il la considère comme le seul caractère certain et constant de cette maladie. On dit que , dans la rougeole , l'odeur est d'abord douceâtre , semblable à celle des plumes arrachées du corps d'une Oie mise à mort depuis peu, et que , plus tard, elle devient aigrelette (3). Elle ressemble dans la gale à celle du moisi , dans les dartres à celle du bois pourri ou du cuir brûlé , dans la teigne à celle de l'urine des Chats ou du lait aigre et gâté , dans la pel- lagre à celle du pain moisi. Du reste , on rencontre aussi des sueurs fétides aux pieds chez des sujets qui se portent bien , notamment chez ceux qui sont sujets aux accès de goutte (4). 2° Il n'est pas rare que les liquides sécrétés soient acres , c'est-à-dire dégénérés au point d'enflammer la peau , de l'ex- corier et même d" attaquer les métaux. Ainsi la sécrétion sé- reuse ou puriforme est acre et excoriative dans le scorbut , les scrofules , la goutte , les dartres , etc. On a vu la surface du cœur attaquée par la sérosité du péricarde (5) , et l'on a trouvé l'humeur aqueuse de l'œil si acre , qu'elle oxidait l'a- cier poli (6). Dans le coryza et l'ophthalmie scrofuleuse , le (1) Burdach , i^om Baue des Gehirns , t. III , p. 75. (2) Hufeland, Journal der praktischeti Heilkunde, t. XXXIV, cah. III, p. 69, (3) Ihid., p. 95. (4) Kœler, Disscrtatio de odore per cutem spirante , p. 2i. (5) Voigtel, Handbuch der patholotjischen Anatomie, t. II, p. 227, (Ç) Ihid., p. 110. 558 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. SUC muqueux qui découle du nez excorie la peau. Une femme vomissait périodiquement du suc gastrique renfermant un acide non volatil , à la présence duquel ce suc devait d'excorier la. gorge et la langue , et de dissoudre l'argent et autres mé^ taux (1). La bile peut aussi dégénérer à tel point qu'elle atta- que l'estomac dans le vomissement , produise des accidens analogues à ceux de l'empoisonnement , fasse effervescence avec les carbonates (2) , et tue les animaux chez lesquels on l'introduit soit dans l'estomac , soit dans une plaie (3). Dans les fièvres inflammatoires , l'hépatite , mais surtout la né- phrite , l'urine détermine souvent une sensation d'ardeur au col delà vessie et le long de l'urètre, effet qu'elle produit également lorsqu'elle contient de l'urée en trop grande abon- dance (4). Quand une crise s'opère par l'urine , le malade éprouve une sensation douloureuse sur le trajet des uretères, des envies pressantes d'uriner , et du prurit au gland. IL II se produit quelquefois , dans le corps humain , des substances végétales neutres ou acides. L'acide oxalique se rencontre dans certains calculs urinai- res. Bonhomme l'a observé aussi dans une urine lactescente. On l'a trouvé remplaçant l'acide phosphorique , et combiné avec de la chaux, dans le rachitisme , dans diverses maladies de peau , suivant Prout (5) , et, selon Brugnatelli, dans la sa- live de personnes atteintes du marasme. Prout assure que la sueur et d autres sécrétions contiennent de l'acide acétique dans la fièvre hectique. On a trouvé la sueur , la salive et le cérumen des oreilles ayant une saveur douce dans différentes espèces de marasme. Mais c'est surtout dans l'urine que la présence du sucre a été bien constatée. L'existence du sucre , jointe à l'accroissement en quantité de la sécrétion urinaire, constitue une forme parti- cuUère de maladie , qu'on désigne sous le nom de diabète (1) Gerson, Mayazinder auslœndischen Literatur, t. VIII, p. 394. (2) Voigtel, Handbuch der pathologischen Anatomie , t. II, p. 466, (3) llid., p. 499. (4) Prout , Traité de la gravelle , p. 48. (5) Froriep , Notizen , t. XXXI , p. 245. PRODUITS MATERIELS HETEROLOGUES. ODQ sucré ; mais elle peut aussi se présenter , comme phénomène subordonné , dans d'autres états morbides ; car Chevallier , par exemple (1) , l'a observée dans la syphihs , pendant le cours du traitement mercuriel. Une diminution de la sécréiion fournie par la peau et les membranes muqueuses , l'amaigris- sement , l'épuisement général des forces qui se manifeste surtout dans les facultés intellectuelles et les fonctions géni- tales , enfin la fièvre hectique , accompagnent la^ maladie , quand elle est parvenue à un certain degré, 3° L'urine est alors pâle , ou trouble et blanchâtre. Elle n'a point d'odeur, ou en exhale une qui rappelle celle soit du lait , soit du petit-lait. Elle a une saveur douce , mais quel- quefois dissimulée , d'après Barruel (2) , par celle des sels qui accompagnent le sucre. Elle contient peu ou point d'a- cide libre , et passe à la fermentation alcoolique , puis |>ien- tôt à la fermentation acide. Le sucre qu'on en retire ressem- ble à celui de raisin ; il cristallise quelquefois , suivant Heury (3) , et se compose, selon Prout (4), de carbone 0,3999-, oxygène 0,5335 , hydrogène 0,6666 , de sorte qu'il contient autant de ce dernier principe que l'urée , mais le double des 4eux autres. On trouve dans l'urine des diabétiques beaucoup moins d'urée et d'acide urique que dans l'état normal; quelque- fois même ces deux substances, ou du moins l'une d'entre elles, n'y existent point. Henry (5) a remarqué que l'urée se décom- posait alors plus facilement qu'en toute autre circonstance, et qu'une faible chaleur sufiisaitpour qu'elle donnât de l'ammo- niaque. Fréquemment aussi on rencontre de l'albumine ; mais, d'après Thénard, cette substance n'apparaît qu'à l'époque de la guérison , quand la quantité du sucre a diminué. Dans un cas Oibservé par Meissner (6), l'urine contenait 0,9148d'eau, 0,0707 de sucre , avec des sels, 0,0137 de matière salivaire, avec (d ) Journal de chimie médicale , 1. 1 , p. 179. (2) Ibid., t. V, p. 12. (3) Meckel , Deutsches Archiv , t. II , p. 664. (4) Ihid., t. IV, p. 140. (5) Loc, cit.j p, 658. (6) Gmelin , Handbuch der theoretischen Chemie j t. II , p. 1416, 360 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. des sels, 0,0004 d'urée, d'acide lactique et de chloruré de calcium , et 0,0004 de mucus , de phosphate calcaire et de fer. 4» D'après les recherches de Wollaston (1), de Nicolas et Guedeville (2), de Henry (3), de Prout, de Vauquelin etdeSé- galas (4) , le sang ne contient pas de sucre dans le diabète sucré. Comme , en outre , il résulte des observations de Mo- richini (5) que le sucre ne passe point dans l'urine , chez les personnes bien portantes , en quelque quantité qu'elles le mangent , comme aussi le même phénomène a lieu dans le cas de diabète insipide, puisque l'urine dun sujet atteint de cette affection , auquel Chevallier (6) fit prendre vingt-huit onces de sucre en deux jours , ne contenait aucune trace de cette substance , nous sommes forcés d'admettre que le sucre dia- bétique est un produit sécrétoire. Mais Nicolas et Guedeville assurent que le sang contient alors moins de fibrine qu'à l'or- dinaire , quoique la quantité d'albumine y demeure la même. Or, comme un dérangement de la digestion , et même aussi , d'après Coindet (7) , un trouble de la respiration , précèdent en général l'apparition du diabète sucré ; comme la sécrétion biliaire est la plupart du temps diminuée dans cette mala- die (8) , et quune nourriture exclusivement animale est le re- mède le plus efficace qu'on puisse employer contre elle , ou tout au moins une condition de la guérison , nous sommes fondés à penser que l'assimilation s'opère alors d'une manière incomplète , qu'elle produit trop de substance carbonée et trop peu de substance azotée , et que telle est la véritable cause du diabète sucré : il n'y a qu'un petit nombre de cas dans lesquels on ait trouvé les reins affectés, pâles et flasques. III. On a observé ^quelquefois des sécrétions bleues , par (1) Philos. Transact., 4811 , p, 96. (2) Gehlen , Journal fuer Chemie , t. I , p. 355. (3) Meckel , Deutsches ArcMv , t. II , p. 664. (4) Journal de Magendie , t. IV, p. 355. (5) Meckel , Deutsches Archiv , t. III , p. 467. (6) Journal de chimie médicale , t. V, p. 11. (7) Froriep , Notizen , t. XIII, p. 133. (8) Meckel , Deutsches Archiv , t. II , p. 642. PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. 56 1 exemple , chez un épileptique'qui ,''dans chaque accès de sa maladie , éprouvait une sueur bleue du côté droit (1); chez un jeune homme dont la moitié |»^auche du scrotum était tou- jours couverte d'une couche sèche de matière bleue , malgré le soin qu'il prenait chaque jour de se laver (2); enfin, d'après Cloquet, chez un enfant atteint d'entérite. 5° Dans quelques uns de ces cas on a découvert du cyanure de fer ; Reisel en a trouvé dans les crachats d'un malade affecté de pneumonie chronique ; Dolxe , Mogi et Julia Fontenelle, dans la sueur d'une personne sujette à des accidens nerveux; Brugnatelli dans l'urine d'hydropiques , où il était accom- pagné d'albumine et de très-peu d'urée ; Itard , [dans l'hépa- tite ; Julia Fontenelle (3) , chez un jeune garçon qui avait bu de l'encre ; Mojon , chez une fille qui avait fait usage de pré- parations martiales ; Cantin (4) , avec du sucre, chez une jeune fille bien portante et dont le régime n'offrait absolument rien d'extraordinaire. 6° Braconnot , en examinant l'urine bleue d'une fille qui était atteinte de cardialgie, et d'un homme qui avait aussi des vomissemens bleus, et dont l'urine contenait une graisse pois- seuse, sans acide urique, a découvert une matière colorante particulière , qui , de même que l'indigo , donnait une disso- lution verte avec l'alcool , qui rougissait par les acides , et à laquelle il a imposé le nom de cyanourine. Granier et Delens ont trouvé une substance analogue , qui ressemblait aux ma- tières colorantes végétales. Le sédiment d'une urine bleue , que Spangenberg (5) a analysé , contenait 0,4680 d'acide urique, 0,2909 de cyanourine, 0,1819 de phosphate calcaire et magnésien , et 0,0592 de mucus. Enfin Billard a observé , chez une fille , des sueurs à la par- tie supérieure du corps , et des vomissemens de sang , avec un pigment bleu , qui ne contenait pas de fer , et n'était point non plus de la cyanourine. (1) Voigtel , Handhuch der pathologischen Anatomie , 1. 1 , p. 70. (2) Ihid., t. m, p. 336. (3) Journal de chimie médicale , t. I , p. 330. (4)iHd., t. IX, p. 104. (5) Schweigger, Journal fuer Chemie , t. XLVII, p. 487. ^62 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROIOGUES. IV. On trouve dans les calculs urinaires deux subtances particulières , dont l'une a été appelée oxide cystique par WoUaston , et l'autre oxide xanthlque par Marcel. La pre- mière , ou cystine , est neutre , cristalline , peu soluble dans jFeau , ïifiais très-soluble tant dans les acides que dans les alcalis. L'autre se rapproche de l'acide urique , mais elle est encore moins soluble que lui. Les chimistes ont signalé aussi dans certaines urines , des acides divers, dont quelques uns au moins sont probléma- tiques , et qui d'ailleurs n'offrent aucun intérêt pour la phy- g|iologie. Tels sont les acides rosacique, purpurique, érythri- que et mélanique. V. De l'acide caséique a été trouvé, dans un liquide mêlé de cruor dégénéré qu'avaieut vomi des malades atteints d'affec- tion chronique de l'estomac , par Lassaigne (1) et Collard de Martigny {%). VL Use développe quelquefois des substances inflammables dans le corps humain. S*" De l'urine phosphorescente a été rendue par des per- sonnes qui jouissaient d'une santé parfaite, et qui n'avaient jamais éprouvé la moindre sensation extraordinaire dans les voies urinaires. Jurine (3) a vu trois fois, pendant le cours d'un hiver , sa propre urine sortir lumineuse de l'urètre , briller pendant une demi-minute , comme un ver luisant , sur des planches qui la recevaient, et diminuer ensuite d'éclat. Guyton- Morveau a observé le même phénomène , également en hiver; mais ici l'urine ne commençait à luire que quand elle frappait la muraille (4); Driessen (5) l'a remarqué trois fois, en au- tomne , en hiver et au printemps ; la phosphorescence com- mençait dès que l'urine coulait, et durait deux à trois minutes. Esser (6) l'a vu, après s'être échauffé et fatigué à la pyorae,- (1) Journal de chimie médicale , t. II , p. 412. (2) Ibid., t. llï, p. 321. (3) Poggendorfï, Annalen, t. XLIX , p. 291. (4) Ihid., p. 293. (5)iWd., t. LIX/p. 262. (6) Kastner, JrcMv fuer die gesammfe Neiturlehre , t. VIU , p. 415. PRODUITS MATÉRIEtS HÉlÉROLOGUES. 363 ï^ac^e pendant l'hiver ; l'urioe ne brillait qu'en tombant à terre. Kastner (l)ra observé aussi sur un jeune homme. L'urine n'est point phosphorescente chez les personnes qui ont pris du phosphore à l'intérieur; elle ne le devient pas non plus quand on y l'ait digérer du phosphore. Guyton-Mor- veau présume que le phénomène tient à du gaz azote phos- phore , qui s'oxide facilement et répand des lueurs en absor- bant l'oxygène de l'air. Driessen admet que l'acide phospho- rique de l'urine est désoxidé par le carbone de l'urée , et que son phosphore se combine ensuite avec l'azote de cette der- nière. Du reste , il a remarqué que , vers l'époque où son urine brillait , elle était toujours trouble et lactescente , avec un dépôt de phosphate calcaire , la plupart du temps sans acide libre, quelquefois douée d'une odeur ammoniacale, t Suivant Kastner , celte désoxygénation de l'acide phospho- rique s'opère principalement à la suite d'un violent exercice, et rend aussi la sueur phosphorescente. Henckel rapporte qu'un homme d'un tempérament sanguin, après avoir beau- coup dansé, fut pris d'une sueur abondante, accompagnée d'un grand malaise ; en se déshabillant , il vit son corps répandre une lumière phosphorique , qui laissait des lâches d'un jaune, rouge sur le linge. Hermbstaedt parle égalenient de sueurs lumineuses , qui exhalaient l'odeur du phosphore. 9° Moscati rapporte (2) qu'au moment où un accoucheur introduisait la main dans la matrice d'une femme en mal d'en-^ fant , il s'échappa un gaz , qui , venant à rencontrer la lumière tenue par un aide , prit feu en détonant ; ce gaz provenait vraisemblablement d'un commencement de décomposition du fœtus. Mais il paraît qu'on doit regarder comme un produit sécrétoire le gaz que Bally (3) observa chez un jeune homme, qui, après avoir éprouvé des douleurs dans différentes ré- gions du corps , avec un gonflenient et une coloration en noir Lorsque l'inflammation s'étend aux couches profondes de la peau , le liquide sécrété se convertit en pus, qui, après s'élre desséché avec l'épiderme , est rejeté à l'état de croûte. Au nombre des exanthèmes qui , d'après leur nature , arrivent à ce degré de développement, on compte la petite-vérole', qui produit d'abord de petits tubercules , lesquels deviennent des vésicules celluleuses , dont le liquide séreux se trouble , puis se convertit en un pus épais , jaune verdàtre , après quoi il se produit une croûte dure , brune et luisante. D'autres exanthèmes , qui ne sécrètent ordinairement que de la séro- sité , peuvent arriver jusqu'à la suppuration , lorsqu'ils pé- nètrent plus avant dans la peau ; si alors ils ont le caractère chronique , de nouveau pus se reproduit sans cesse sous les croûtes , à mesure qu'il s'en forme , et l'exanthème représente des ulcères. 6° Dans les exanthèmes qui ont pour siège les follicules dé la peau , la suppuration , en se mêlant avec le smegma cu- tané , devient épaisse , visqueuse , et acquiert une odeur re- poussante , comme il arrive dans la teigne humide , où , en se condensant par l'action de la chaleur ei de l'air, la matière colle ensemble les cheveux , qui tombent ensuite ; les ongles sont fréquemment attaqués aussi dans ce cas. 7° D'autres exanthèmes , situés profondément, et produisant une matière cornée anormale , entraînent une dégénérescence du tissu de la peau et des parties épidermiques. Ainsi, dans la lèpre et ses différentes formes , la peau s'épaissit , acquiert la dureté de la corne , et devient sèche , ridée , fendillée ; les ongles s'épaississent et tombent. Les dartres qui ont jeté des racines profondes rendent également la peau plus épaisse , sèche , cassante , rude et sillonnée: IV. Enfin il faut ranger aussi parmi les exanthèmes les néoplasmes qui apparaissent au système cutané. 8° Les aphthes naissent , sous la forme de petites vésicules , à la surface de la membrane muqueuse, dont la sécrétion s'épaissit en une fausse membrane molle , qui demeure in- complète; puis, après le détachement de l'épithélium, il se produit encore une masse caséeuse analogue. Pes pseudomembranes incomplètes, etanalogues aux pré-? 584 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROIOGUES. cédentes , se développent dans le muguet , sans avoir été pré- cédées de vésicules ; leur production a lieu au dessus ou même au dessous de l'épithélium de la membrane muqueuse enflammée. 9° Le furoncle est une tumeur inflammatoire qui a ses ra- cines dans le tissu cellulaire sous-cutané , qui se soulève en pointe, et qui est nettement circonscrite. Son noyau, appelé bourbillon, est un néoplasme conique, d'un blanc jaunâtre, ferme et élastique , homogène dans sa substance , par la pré- sence duquel l'inflammation qui Va. produit se trouve entre- tenue, comme elle le serait par un corps étranger. Il se dé- tache peu à peu du tissu cellulaire, et finit par être expulsé avec le pus. L'anthrax est un furoncle plus considérable , avec plusieurs bourbillons, après l'expulsion desquels le tissu cutané paraît semblable à une éponge pleine de pus. V. Les exanthèmes sont des pseudomorphoses manifestées à la surface terminale de l'organisme et déposées à l'extérieur, de manière que, par eux, une substance hétérologue se trouve éliminée. Ils supposent toujours l'existence d'une ma- tière qui ne correspond point au caractère de l'organisme , et dont ils débarrassent l'économie animale. Ils peuvent dé- pendre d'un état anormal de l'organe cutané , consistant en ce que des substances étrangères ont pénétré dans le^tissu de cet organe , ou en ce que des substances anormales se sont développées en lui par l'efl'et d'un trouble survenu dans sou activité normale. Mais, bien plus fréquemment, ils ont pour cause une diathèse tenant à ce que des substances étrangères venues du dehors , ou des substances excrémentilielles re- tenues dans le corps , ou enfin des matières anormales pro- duites par un trouble quelconque du travail de la plasticité , se sont répandues dans la masse organique. Tantôt alors l'exanthème, est purement symptomatique , il n'a point d'in- fluence allégeante sur la maladie, ou s'il se prolonge trop, il porte préjudice à la vie , il l'épuisé, parce que la dyscrasie est trop considérable pour qu'il puisse y porter remède. Tantôt il est palliatif, c'est-à-dire qu'il débarrasse l'organisme des^substaaces anormojes dont [la production _ continue^ §ans PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. 385 interruption, et prévient ainsi les résultats funestes d'une activité plastique anormale, sans pouvoir cependant faire cesser cette dernière elle-même. Tantôt enfin il est critique, lorsqu'avec le produit anormal s'éteint aussi la production anormale. Partout où l'exanthème se rattache aune diathèse, sa suppression entraîne des inconvéniens plus ou moins graves; car elle donne lieu soit à des inflammations , soit à des hé- téroplasmes, ou s'il ne survient aucune formation suscep- tible de frapper les sens , on voit éclater des désordres dans la vie animale. 10° Des substances étrangères qui pénètrent immédiatement dans la peau, provoquent des exanthèmes. Après les frictions faites avec la pommade stibiée , des pustules qui se remplis- sent d'un liquide jaune naissent non seulement sur la partie qui a reçu l'impression du sel , mais encore sur des points éloignés. L'action de la substance étrangère devient plus prononcée encore lorsqu'elle est parvenue dans l'organisme par d'autres voies. Les préparations mercurielles prises à fortes doses dé- terminent des taches d'un rouge intense , qui se desquament , ou de tubercules semblables à ceux de l'urticaire , ou des vésicules transparentes , pleines d'un liquide acre et exhalant une odeur particulière. Fourcroy a trouvé du mercure cou- lant dans un exanthème qui avait été occasioné par l'inspi- ration de vapeurs mercurielles. Il survient fréquemment, dans les empoisonnemens par l'arsenic , une éruption cutanée qui ressemble à la rougeole , ou à la miliaire , ou à la petite- vérole (1). On observe plus rarement ce phénomène sous l'in- fluence des acides ; cependant l'acide oxalique produit des taches rondes et d'un rouge foncé. Les eaux minérales sulfu- reuses et le soufre à haute dose font souvent apparaître des éruptions miliaires. Certaines Moules provoquent, chez ceux qui les mangent, un exanthème ortie ou miliaire (2), et l'on a vu des vésicules analogues à celles du pemphigus se déve- (1) Chvistison , A Treatise on Poisons , Edimhtrgh , 1832 , p. 223. (2) Uid., p. 55 VIII, 25 386 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. lopper après l'usage du Caîtha palustris (l). Le baume de Copahu, l'essence de térébenthine, etc., suscitent aussi par- fois des exanthèmes. 11° Chez les sujets qui regorgent de santé , et qui produi- sent une trop grande abondance de sucs , mais sans para- chever l'assimilation , de manière que le sang porte encore jusqu'à un certain point le caractère du chyle , il survient des furoncles , des croûtes de lait, la teigne , etc. 12° Les dérangemens de la digestion entraînent souvent des phlyctènes à la bouche et des aphthes ; ceux de la sécré- tion biliaire , l'érysipèle et le pemphigus. Des alimens insa- lubres, un air impur, froid, humide et chargé de vapeurs, déterminent des exanthèmes chroniques, en portant le trouble dans la formation du sang. 13" La diminution des excrétions agit de la même manière. Le psydracia et le pemphigus des vieillards dépendent pres- que toujours du trop peu d'abondance de la sécrétion uri- naire. 14° Les dyscrasies spéciales, les scrofules , la syphilis, le scorbut , la goutte , se manifestent en partie par des exan- thèmes. La décomposition qui accompagne le typhus entraîne le développement de la miliaire , des pétéchies et de l'an- thrax. 15° Enfin , des exanthèmes doivent naissance à la conta- gion. Leur produit, quand il a été admis dans un organisme sain , y détermine la dialhèse qui leur est propre , et en même temps une assimilation de substances normales , d'où résulte que celles-ci prennent le même caractère que lui , qu'il se multiplie par conséquent, et qu'il devient la semence servant à la propagation de l'exanthème. Chez les individus qui n'ont point de réceptivité pour lui, il demeure tout-à-fait sans action , ou ne détermine qu'un dérangement passager de la santé , sans donner lieu aux phénomènes caractéristiques de la dialhèse exanlhémalique. 16° En efl'et , tout exanthème qui ne se rattache point à la (!) Rusl , Magasin fuer die (jesammte Heilkunde, t. XX, p. 451. PRODUITS MATÉRIELS IlÉlÉROtOGUES. 58'J pénétralion de substances élrangères (10°), a sa diathèse propre, qui est passagère dans ceux d'espèce aiguë , per- manente dans ceux de nature chronique , et qui imprime son caractère spécial aux états morbides généraux, par exemple à l'inflammation et à la suppuration. La manière dont une diathèse exanthématique peut devenir une dyscrasie qui se manifeste par les formes les plus variées de la dégénéres- cence, se voit d'après l'exemple de la syphilis, qui apparut d'abord en Europe sous les dehors d'un exanthème ^ et qui conserve encore plus ou moins ce caractère aujourd'hui. La spécialité de la diathèse exanthématique se révèle princi- palement dans les affections cutanées qui ont pris racine chez l'espèce humaine , et qui attaquent en général chaque homme , mais une fois seulement pendant le cours de sa vie , de sorte qu'on pourrait presque les considérer comme des degrés normaux de développement, puisque la réceptivité pour elles est générale , mais anéantie par la production de l'exanthème. En effet, dans chacun de ces exanthèmes, une sphère particulière des organes plastiques, notamment de la membrane muqueuse , prend part à l'affection de la peau. La scarlatine siège à la surface la plus extérieure de cette der- nière, et se rapporte principalement à son exhalation aqueuse ; mais elle s'accompagne d'une inflammation de la partie ini- tiale de l'appareil digestif, qui est l'organe de l'ingestion de l'eau, et, parmi les maladies consécutives qu'elle traîne à sa suite , la principale est une formation anormale de sérosité dans le tissu cellulaire. La rougeole affecte la peau , comme organe sécrétant des gaz , et intéresse surtout l'activité vas- cul aire proprement dite de cet organe ; mais il s'y joint un état catarrhal ; elle est très-sujette à changer de siège et à faire naître ainsi des inflammations dans les organes internes, notamment dans les poumons , qui sont aussi ceux sur lesquels portent de préférence les maladies consécutives. La petite- vérole pénètre plus profondément dans l'organe cutané ; son principe contagieux est moins volatil et plus incorporé dans le pus , elle est moins variable , moins sujette à se supprimer ; mais elle affecte sympathiquement le canal intestinal tout en- tier, et traîne à sa suite des désordres de l'assimilation en- 588 PRODUITS MATÉRIEIS HÉTÉROLOGUES. tière , spécialement des productions anormales dans le sys- tème scléreux. VI. A l'égard de la composition chimique , Nauche (1) pré- tend que le liquide des exanthèmes aigus est alcalin , et celui des dartres acide. Heidenreich (2) a trouvé , comme Schœn- lein , qu'il y avait des réactions alcalines dans la scarlatine et l'érysipèle , acides dans la miliaire et la rougeole. Nous avons besoin d'observations ultérieures qui nous apprennent si ces phénomènes sont constans. 17° ^Le pus variolique contient , d'après Tremollière (3) , de la fibrine , du mucus , du chlorure de sodium , du sulfate de potasse et du phosphate de chaux ; mais on y trouve , en outre , du cyanure de sodium , quand la maladie est compli- quée avec des pétéchies. Lassaigne a obtenu des croûtes va- rioliques (4) ,0,700 de résidu insoluble , consistant en épi- derme et albumine coagulée, 0,150 d'albumine soluble, 0,112 d'une matière analogue à l'osmazome, 0,013 de matière grasse, 0,025 de chlorure de potassium , de chlorure de sodium, de phosphate de soude et de phosphate de chaux ; dans le cas de complication avec des pétéchies , il y avait davantage de ma- tière grasse et de substance analogue à l'osmazome , et moins des autres substances. 18° Sacco (5) assure que le vaccin est neutre ; il contient des globules oblongs , qui , même dans le vaccin desséché et ra- molli ensuite par l'eau froide , montrent une sorte de mouve- ment vermiforme. La chaleur et l'alcool le coagulent , et lui font perdre , ainsi que les acides et les alcalis , sa propriété contagieuse. 19° La sérosité des pustules psoriques ne diffère du sérum, d'après Marguer on (6), que parce qu'elle contient une pro- portion plus considérable d'albumine. (1) Meckel , Deutsches Archiv , t. IV, p. 158. (2) Hufeland, Journal der praktischen Heilkunde , 1833 , t. III, p. 98 (3) Journal de chimie médicale , t. IV, p. 489. {k)Ihid., t. VIII, p. 736. (5) Poggendorff, Annalen , t. XLIV, p. 51. (6) John, Chemische Tabellen des Thierreichs , p. 44. PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. Z8q 20° Le liquide de la teigne contient de l'albumine et beau- coup de gélatine, d'après Thénaid et Chevillot. Morin(l) y si- gnale , en outre , de l'osmazome , de la graisse , de l'acétate d'ammoniaque , du chlorure de sodium, et une trace de phos- phate et de sulfate calcaires. 21° Vauquelin a trouvé dans les squames des dartres de l'a- cide libre , de l'albumine, du mucus , du chlorure de sodium, du sulfate de soude et du phosphate de chaux. 22° Le liquide de la plique polonaise contient un savon am- moniacal , et , d'après Vauquelin , de la substance cornée noa encore endurcie. b. Productions hétérologues qui se séparent de Vorganisme, " § 873. Aux exanthèmes se rattachent d'autres produits hé- térologues qui se séparent également de l'organisme , mais qui diffèrent d'eux en ce que leur séparation est la cause de la formation hétérologue , et non pas la conséquence de cette même formation , comme il arrive pour ceux dont nous avons parlé dans le paragraphe précédent. Dans l'exanthème, l'or- ganisme produit par sécrétion des pseudomorphoses , qu'il repousse hors de lui , simultanément avec une matière hétéro- logue ; ici , au contraire , la vie générale ou d'ensemble ayant perdu une partie de son influence , la matière organique se dé- veloppe en corps solides étrangers , qui se maintiennent et subsistent malgré leur contact avec l'organisme , et sans que ce soit une condition essentielle qu'il y ait continuité entre eux^et lui. Là l'organisme se débarrasse d'une matière qui ne lui correspond point ; ici la matière devient infidèle à l'orga- nisme , et se détache de lui , soit que , par héterogénie , elle se développe en êtres vivans particuliers , les parasites , soit qu'elle produise seulement des masses inertes et soustraites à l'influence de l'activité vivante , les concrétions ( § 874). (1) Gmelin, Handhuch der theoretischen Chemie , t. II, p. 1399. 590 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. * Parasites. Une grande vivacité de l'activité plastique , mais sans éner- gie suffisante pour soumettre ses produits à l'unité de l'orga- nisme , et une surabondance de matière organique , mais qui n'a point atteint le degré convenable d'élaboration, telles sont les conditions les plus générales de la production des pa- rasites , que l'on distingue en Entozoaires ( § 16 ) et Epizoai- res(§17,I). Les parasites se forment des liquides sécrétés en contact avec la surface organique ; on rencontre très-rarement quel- ques Entozoaires dans des sinuosités de vaisseaux sanguins. Le système cutané , dont la faculté plastique est si active , et qui en même temps constitue la limite de l'organisme, est leur principal siège. En effet , tous les Epizoaires se trouvent sur la peau ; quant aux Entozoaires , ils vivent pour la plupart à la surface de la membrane muqueuse ; peu d'entre eux habitent soit dans le tissu cellulaire atmosphérique ou parenchymateux, soit dans des vésicules séreuses. La cavité abdominale, comme foyer proprement dit de la vie matérielle et plastique, est aussi la région du corps qui recèle le plus grand nombre d'En- tozoaires. Les parasites ne peuvent point accomplir entièrement leur séparation. Ils s'élèvent bien à une vie propre , mais non à l'indépendance , et demeurent soumis à l'organisme dont la substance les a engendrés. En attirant les humeurs , par l'irri- tation qu'ils déterminent, sur le point où ils reposent, ils y trouvent leur nourriture, semblables en cela aux excrois- sances ( § 870 ) , qu'on a aussi nommées pour cette raison des tumeurs parasites. Ils peuvent donc , comme les exanthèmes , tantôt débarrasser l'organisme de substances superflues, et notanîment de celles qui ne sauraient servir à sa conserva- tion , tantôt lui soustraire la matière nécessaire au maintien de son intégrité , et par conséquent l'épuiser. Nous trouvons une transition de l'exanthème à la forma- tion des parasites dans la production des cirons de la gale (§ 17 , 1°). Le règne végétal nous oiTre aussi un chaînon in- PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. Sqi termédiaire entre ces deux-là dans les Coniomycètes ento- pliytes , qu'on observe particulièrement sur les plantes à feuilles délicates, herbacées, sur celles qui transpirent beau- coup (1) et que la fertilité du sol surcharge de matière plasti- que , dans les parties jeunes et remplies de sucs (2) , et dont la formation est favorisée par l'humidité de l'air,, par une sé- cheresse prolongée , par des changemens brusques de temps, par le manque d'air et de lumière , en un mot par tout ce qui trouble la respiration végétale (3). Le liquide accumulé en pareilles circonstances s'épaissit peu à peu et finit par se con- vertir en une masse compacte , colorée , qui distend l'épi- derme ,1e soulève sous la forme de vésicules, et se résout en granulations pulvérulentes; ces granulations, appelées spo- ridies, se dispersent à la rupture des vésicules (4], et, quand elles tombent sur d'autres plantes, paraissent se propager, si toutefois elles rencontrent un concours de circonstances favo- rables (5). Celles de ces formations qui ont leur siège sur des parties végétales vertes revêtent des formes diverses , suivant qu elles sont ou uniquement couvertes par fépiderme de la plante , ou renfermées en outre dans une enveloppe spéciale ; elles représentent deux séries parallèles de développement , car les sporidies , simples au plus bas degré , acquièrent un support qui , d'abjord parfaitement homogène avec elles , s'en distingue ensuite jusqu'à un certain point, rejette les spori- dies parvenues à maturité, et paraît enfin diversement ramifié ; mais les sporidies elles-mêmes se développent en une double sphère, et deviennent multiloculaires. Unger, qui a très-bien peint les deux séries (6) , fait ressortir aussi l'analogie qui existe entre ces sortes de formations et les exanthèmes (7). Cependant elles ne s'accordent pas en tous points avec ces (1) Unger, Die Exanthème der Pflanzen und einige mit diesen yer- wandte Krankheiten der Gewœchse, p, 139. (2) Loc. cit., p. 145. ^3) Loc. cit., p. 152. , (4) Loc. cit., p. 159. (5) Loe.'cit., p. 333. (6) Loe.'cit., p. 262-304. (7) Loc. cit., p. 395. Sga PRODUITS matériels HÉTÉROLOGUES, derniers , et ce qui leur donne' de l'intérêt à nos yeux , c'est précisément qu'ayant le caractère de chaînons intermédiaires, elles nous mettent sur la voie de saisir l'unité essentielle des différentes espèces de formation. Elles diffèrent des exan- thèmes en ce qu'elles acquièrent une forme et une segmen- tation organiques spéciales , et ressemblent aux parasites en ce qu'elles végètent sur l'organisme qui leur sert de souche. Nous pourrions dire que ce sont des exanthèmes qui , avant de se détacher et de tomber, passent à la forme organique et de- viennent des parasites , en vertu de l'exubérance de force plastique qui fait le caractère de la vie végétale. Comme pa- rasites produits dans l'intérieur du corps végétal , elles res- semblent aux Entozoaires , et sont des Entophytes ; mais , attendu qu'elles percent au dehors, en se développant, celte circonstance les rapproche des exanthèmes. Enfin, comme elles végètent à la surface sous forme organique , elles ont de l'a- nalogie avec les Épizoaires , et sont des Épiphytes. Nous pou- vons les considérer comme les analogues d'Entozoaires , qui , parce que les viscères manquent et la vie extérieure prédo- mine chez les végétaux , font irruption à la surface , dé même que les exanthèmes ; nous pouvons aussi les regarder comme analogues des Épizoaires , en ce sens que , parve- nues à la surface et cherchant la lumière, elles attirent des sucs de l'organisme souche. Les moisissures bornées à l'intérieur du corps végétal , qu'Unger désigne sous le nom de Protomyces (!)_, sont également des sporidies provenant de la résolution d'un renflement produit par une masse de sucs dégénérés , mais elles ne percent pas jusqu'à l'exté- rieur, et signalent ainsi un degré de développement analogue à celui d'oii résultent les Entozoaires. Enfin si la translation sur d'autres' plantes est suivie d'une production de champi- gnons analogues, nous pouvons voir dans ce phénomène une sorte d'infection, ou une homogénie , ou une identité des deux phénomènes n'ayant point encore acquis une forme qui les distingue l'un de l'autre. (4) Loc, cit., p. 340. PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. 393 ** Concrétions. § 874. Les concrétions sont des masses solides et sans vie , qui se précipitent d'un liquide organique , soit quand celui-ci présente une anomalie dans sa composition , notamment lors- que la prédominance de quelque principe constituant, ou l'existence d'une diathèse, lui donne une tendance à se dé- composer, favorisée par la lenteur du renouvellement des matériaux ou du mouvement, soit quand la présence acci- dentelle d'un corps étranger qui, a de l'affinité pour tel ou tel principe constituant , le détermine à se séparer des autres. Elles se produisent la plupart du temps par des dépôts suc- cessifs , qui forment assez souvent des couches concentriques autour d'un noyau ; mais quelques unes aussi portent le ca- chet de la cristallisation. Leur forme extérieure est acciden- telle , et dépend de celle des parties environnantes. Lorsque plusieurs concrétions sont serrées les unes contre les autres, elles présentent des surfaces planes, tandis qu'à l'état d'iso- lement, elles sont en général plus ou moins arrondies. Quel- quefois elles semblent contracter des connexions avec l'orga- nisme , soit qu'elles repoussent la paroi des cavités qui les renferment , et produisent ainsi des poches dont l'orifice se rétrécit ensuite , ou même s'oblitère , soit qu'il se dépose au- tour d'elles une couche de substance organique , qui finit par se développer en un kyste complet. Nous distinguons les concrétions en communes et spéciales, t Concrétions communes. Les concrétions communes sont celles qui "dépendent d'une prédominance de la matière inorganique répandue dans l'or- ganisme entier , le phosphate calcaire. En effet, elles ont pres- que toujours ce sel pour base ; mais la substance organique qui en lie les molécules varie suivant les parties dans les- quelles on les rencontre. Ce qui les distingue surtout du tissu osseux (§859, 23° ), c'est qu'elles n'ont point de texture or- ganique. 594 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROIOGUES. I. Il est rare que des concrétions de ce genre se forment à la peau, et quand elles s'y produisent, la constitution normale du smegma cutané, fait que le lien des molécules terreuses consiste presque toujours en une substance grasse. 1° Les sueurs calcaires ou sablonneuses qu'on a observées chez des goutteux et des sujets atteints d'affection calcu- leuse (1), consistaient probablement en urates. Cependant oii a rencontré aussi quelques cas dans lesquels des phosphates étaient sécrétés par la peau ( § 852, III ). Hofmann (2) rap- porte qu'une surface suppurante à l'abdomen sécrétait conti- nuellement des concrétions brillantes , d'un blanc jaunâtre , qui étaient composées de phosphate calcaire et d'une matière solide, cristalline. 2° Suivant Wurzer (3), le phosphate de'chaux était combiné avec de la substance organique dans une concrétion trouvée sous le prépuce , et avec du mucus , outre 0,09 de matière grasse, dans une autre qui s'était développée derrière la cou- ronne du gland. Dans les deux cas , on découvrit aussi des traces de chlorure de sodium , ou de soude pure , et de fer. II. Il se forme souvent des concrétions de ce genre au commencement des membranes muqueuses ; le ciment est alors du mucus condensé et en partie aussi de la matière sa- livaire. 3° Le tartre des dents est le résidu du mucus jaune ou ver- dâtre que le liquide sécrété dans l'intérieur de la bouche laisse précipiter sur la surface des dents , lorsqu'il y prolonge son séjour. Aussi se dépose-t-il principalement du côté sur lequel on se tient couché pendant la nuit, et s'accumule-t-il en grandes masses lorsque l'ouverture de la bouche a été réduite à un petit trou par des ulcères (4). A l'analyse chimique, il fournit, selon Berzelius (5) , 0,790 de phosphate calcaire et de magnésie, 0,125 de mucus, 0,075 de matière organique (1) Voigtel, Handhuch der pathoïogischen Anatomie , t. I, p. 69. (2) John , Chemischc Tabellcn des Thierreichs , p. 47. (3) Kastner, Archiv fuer die ijesammte Naturlehre , t. VIU, p. 296. (4) Dieffenbach , Chirurgische Erfahrutigen , t. I, p. 41. (5) Berzelius, Traité de chimie , t. "VII, p. 164. PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. SgS soluble dans l'acide hydrochlorique , et 0,010 de matière sa- livaire; suivant Vauquelin et Laugier (1), 0,660 de phosphate calcaire , 0,090 de carbonate de chaux, 0,034 de phosphate de magnésie et de fer, 0,130 de mncus , 0,016 de matière or- ganique soluble dans l'acide hydrochlorique, et 0,070 d'eau. 4" L'enduit blanchâtre dont la langue se couvre dans la dyspepsie a été analysé par Denis (2) , qui y a trouvé 0,347 de phosphate calcaire, 0,087 de carbonate de chaux en cris- taux, 0,500 de mucus etO, 066 d'eau. 5° On rencontre quelquefois, dans les anfractuosilés des amygdales , des concrétions d'un blanc grisâtre ou brunes , et la plupart du temps inégales. Celles que Laugier a analy- sées consistaient (3) en 0,500 de phosphate calcaire , 0,125 de carbonate de chaux, 0,125 d'un mucus de mauvaise odeur, et 0,250 d'eau. Une autre analyse faite par Regnard(4) s'ac- corde avec celle-là; seulement le carbonate calcaire était prépondérant. 6° Geiger (6) a trouvé , dans une concrétion expulsée par le nez , 0,467 de phosphate de chaux , 0,217 de carbonate cal- caire, 0,083 de carbonate de magnésie, avec des traces de carbonate de soude et de chlorure de sodium , et 0,233 de mucus, de fibrine, d'osmazome et de graisse. 7" Une concrétion laryngienne contenait, d'après Pré- vel (6) , 0,604 de phosphate calcaire, 0,121 de magnésie, et 0,275 de matière organique , avec une trace dégraisse. IIL II n'est pas rare de rencontrer des concrétions dans l'intérieur des membranes muqueuses bipolaires. 8° Fréquemment , il s'échappe des poumons , par les efforts de la toux, des concrétions grises ou rougeâtres, qui blan- chissent par la dessiccation , et qui se sont formées dans les ramifications des bronches elles-mêmes, ou qui y sont venues (1) Schweigger, Journal fxier Chemie, t. XLVI, p. 371. (2) Journal de chimie médicale , t. II , p. 340. (3) Ibid., p. 105. (4) Ibid., p. 284. (5) Gmelin , Handlucli der theoretischen Chemie , t. II, p. 1397. (6) Journal de chimie médicale , t. II , p. 279. 596 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. du parenchyme pulmonaire. Fourcroy, Nœring , Thomson , John et Rœring (1) y ont trouvé du phosphate de chaux , Crumpton, du carbonate calcaire, Lassaigne (2) et Pearson (3) du phosphate et du carbonate de chaux ; après l'extraction de ces sels , la concrétion conserva la forme et le volume qu'elle avait auparavant. Brandes y a rencontré du phosphate et du carbonate de chaux , du carbonate de magnésie , du chlorure de sodium , du mucus et de Talbumine ; Prével (4), 0,606 de phosphate calcaire, 0,120 de phosphate et de carbonate de magnésie , 0,274 de matière organique et d'eau ; Henry (5) , tantôt du phosphate et du carbonate de chaux, tantôt en outre du phosphate ammoniaco-magnésien , que WoUaston a re- connu aussi constituer à lui seul la croûte d'une concrétion de ce genre. 9° Les concrétions qu'on trouve dans le canal digestif peu- vent avoir été amenées par les glandes qui s'y abouchent, ou s'être formées aux dépens soit des produits sécrétoires de ces glandes, soit des alimens et de leurs résidus. Elles ont sou- vent pour noyau une petite pièce d'os , un noyau de cerise , un paquet de fibres végétales , et autres objets semblables. Chez les Chevaux qui ont été nourris avec du son , les con- crétions intestinales consistent principalement en phosphate de magnésie , sel dont le son contient une grande quantité. En général, elles sont friables et spongieuses, et se composent de fibres entrelacées, comme feutrées , avec de la substance ter- reuse dans les interstices (6). Celles que Thénard etVauque- lin (7) ont analysées, contenaient de l'adipocire et de la ré- sine , et pouvaient fort bien être provenues dufoie. Marcet (8) a trouvé dans une autre du phosphate calcaire et du phos- phate ammoniaco-magnésien; Thomson, du phosphate de (1) John , Chemische Tabellen des TTiierreichs , p. 47. (2) Meckel, Deutsches Archiv , t. V, p. 235. (3)/Ji(^.,t. VI,p. 323. (4) Journal de chimie médicale, t. II, p. 279. (5) Gmelin , Handhuch der theoretischen Chemie , t. II, p. 1S70. (6) Wtc\é\. , Deutsches Archiv, 1. 1, p. 454. (7) John , loc. cit., p. 50. (8) Meckel , Deutsches Archiv , 1. 1 , p. 460. PRODUITS MATÉRIÉtS HÉTÉROLOGDES. Sq^ chaux , du chlorure de sodium , du sulfate de chaux , de l'al- bumine et de la matière extractive ; Robiquet (1), 0,30 de phosphate calcaire, 0,60 d'une graisse analogue à la cétine , 0,10 de substance organique et d'eau; Lassaigne (2), 0,04 de phosphate calcaire, 0,01 de chlorure de sodium, 0,74 de graisse, et 0,21 d'une substance analogue à la fibrine; Bonis (3), 0,10 de phosphate calcaire, de silice, de chlorure de sodium et de sulfate de soude, 0,88 d'une matière par- ticulière, ressemblant au ligneux, et 0,02 de mucus et de résine. Une concrétion trouvée dans l'intestin d'une Pleuro- necte se composait entièrement de phosphates calcaire et magnésien, d'après Yauquelin (4). IV. Parmi les canaux de sécrétion et les conduits excréteurs de glandes , 10° Ceux des glandes salivaires sont ceux dans lesquels on rencontre le plus fréquemment des concrétions. L'analyse de ces dernières a fourni , suivant Fourcroy, Wollaston , Thom- son et Chaptal (o) , du phosphate calcaire et de la matière or- ganique ; d'après Wurzer (6), 0,599 de phosphate calcaire , 0,128 de carbonate de chaux, et 0,273 de matière organique ; selon Lecanu (7), 0,75 de phosphate calcaire et 0,20 de car- bonate de chaux, avec 0,05 de matière organique; suivant Bosson (8) , 0,55 de phosphate calcaire, 0,15 de carbonate de chaux, 0,01 de magnésie, 0,02 d'oxide de fer, 0,25 de ma- tière organique, et 0,02 d'eau; d'après Gœbel (9), 0,817 de phosphate calcaire, 0,014 de carbonate de chaux, 0,016 de fer et d'eau , avec une trace de carbonate de magnésie, 0,100 de matière salivaire , avec des sulfates , du chlorure de cal- cium , du sulfocyanure de sodium et du fer, 0,025 de graisse , (1) Ihid., p. 463. (2) Journal de chimie médicale , 1. 1 , p. 119. (3) nid. , t. V, p. 62S. (4) Meckel, Dentsches Archiv , t. IV, p. 606. (5) John, Loc. cit., p. 46. (6) Schweigger, Journal fiter Chemie , t. LTI, p. 129. (7) Graelin, loc. cit., t. II, p. 1399. (8) Journal de chimie médicale , t. Y, p. 59J. (9 Schweigger, Journal fuer Cliemie , t. LX, p. 407. 398 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. 0,017 d'osmazome, et 0,011 de mucus. Chez les Mammifères herbivores , les concrétions salivaires contiennent plus de car bonate que de phosphate calcaire ; la proportion de celui-ci à celui-là était, chez les Chevaux suivantLassaigne(l), de 0,03 à 0,84 ou 0,86, selon Henry (2), de 0,04 à 0,85, chez les Anes, d'après Caventou , de 0,04 à 0,91 , et selon Laugier (3), de 0,05 à 0,91. Du reste, Lassaigne(4) a trouvé, chez une Va- che , un grain d'avoine servant de noyau à wn calcul salivaire. 1J° Des concrétions delà glande lacrymale se composaient, d'après Fourcroy (5) , de phosphate calcaire et d'une matière analogue à la gélatine. 12° Des calculs pancréatiques contenaient, d'après Col- lins (6) , du phosphate, et selon WoUaston , du carbonate cal- caire. 13° D'autres, rencontrés dans les vésicules séminales, étaient, d'après Collard de Martigny (7), bruns, demi-trans- parens et à cassure vitreuse. Ils contenaient des chlorures de calcium et de potassium , des sulfates de chaux et de potasse, beaucoup de mucus d'une espèce particulière, et une trace d'albumine. V. On a trouvé des concrétions dans le parenchyme 14° De glandes vasculaires. L'une d'entre elles contenait , dans la rate , selon Henry (8), du phosphate calcaire seule- ment ; dans la glande thyroïde , suivant Prout , 0,61 de phos- phate calcaire , 0,04 de carbonate de chaux , avec des traces de phosphate et de carbonate de magnésie , et 0,35 de ma- tière organique et d'eau; dans les glandes bronchiques, d'a- près John (9), du phosphate et du carbonate calcaires , avec de la matière organique , et , à ce qu'il parut , une trace d'a- cide urique. (1) Heusinger, Zeitschrift fuer die organische Physik, t. II, p. 582. (2) Beizelius , Traité de chimie , t. VII , p. 465. (3) Journal de chimie médicale , t. I , p. 405. (4) Meckel, Deutsches Archiv , t. V, p. 234. (5) John , loc. cit., p. 46, (6) Ihid., p. 47. \ (7) Journal de chimie médicale, t. Il, p. 433. (8) Gmelin , Handluch der theoretischen Chemie , t. II, p. 1370. (9) Meckel , Deutsches Archiv , t. VI , p. 600. PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROIOGUES. Spg 45° On rencontre , dans le tissu des poumons, des concré- tions d'apparence crayeuse, quelquefois coexistantes avec des tubercules , et assez souvent aussi entourées de kystes cartilagineux ou osseux. 16° Des calculs trouvés dans le parenchyme du foie 'se composaient , d'après Wurzer (1) , de carbonate calcaire et d'un peu de matière organique. 17° Des concrétions prostatiques contenaient , selon Wol- laston (2), du phosphate calcaire, suivant Thénard, 0,87 de phosphate calcaire , avec une trace de carbonate de chaux et 0,13 de substance or^janique ; d'après Lassaigne (3), 0,845 de phosphate calcaire , 0,005 de carbonate de chaux et 0,150 de mucus. 17° Des concrétions granuleuses provenant des tumeurs auxquelles on donne le nom de ganglions, contenaient, d'a^ près Prout (4), 0,61 de phosphate calcaire, 0,04 de carbo*- nate , avec des traces de magnésie , et 0,35 de substance or- ganique. VI. Enfin on trouve aussi des concrétions pierreuses dans les veines ; elles sont tantôt libres dans ces vaisseaux , et tan- tôt engagées dans leurs parois ; quelquefois elles font saillie dans leur intérieur, supportées par des prolongemens en forme de pédicules de la membrane vasculaire commune. Gmeîin (5) y a rencontré du phosphate et du carbonate cal- caires , des traces d'acide hydrochlorique , d'acide sulfurique , d'acide phosphorique et de fer, et de la matière organique. tt Concrétions spéciales. Les calculs urinaires et les calculs biliaires sont des con- crétions spéciales qui doivent naissance aux produits sécré- (1) John, Chemische Tabellen des Thierreichs , p. 48. (2) Ibid., p. 50. (3) Journal de chimie médicale , t. IV, p. 126. (4) Meckel , Deutsches Archiv, t. YI , p. 323. (5) Ibid,, t. IV, p. 215. 400 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. toires particuliers des deux organes glandulaires les plus vo- lumineux. VIL Les reins éliminent une quantité considérable de substances qui ont été engendrées dans l'organisme, ou qui sont les débris de la décomposition des alimens , et qui con- sistent en matières azotées et oxygénées , '.terres , sels et acides ( § 827 ) ; ils sont , en outre , le principal émonctoire par lequel s'échappent les substances inassimilables de cette nature qui ont pénétré dans l'organisme ( § 865 , III ). Aussi deviennent-ils le siège de concrétions plus fréquemment qu'aucun autre organe. L'urine , qui se compose d'un grand nombre de substances diverses , en partie peu solubles , qui a beaucoup de tendance à se décomposer, et dont les princi- pes constituans sont très-sujets à varier sous le point de vue de leurs proportions respectives , donne souvent naissance à des calculs dans l'intérieur même de la vessie , mais constam- ment elle] accroît par de nouveaux précipités ceux qui des- cendent des reins dans ce réservoir ; elle en produit même jusque dans l'urètre. Un corps étranger quelconque , acci- dentellement parvenu dans la vessie , suffit pour occasioner une concrétion, dont il forme le noyau, et Henry (1), par exem- ple , a remarqué que , parmi cent quatre-vingt-sept calculs urinaires , il s'en trouvait deux dont l'origine se rattachait à une cause de ce genre. Un caillot de sang extra vase ou un grumeau de mucus peut également devenir le noyau d'une pierre. La diversité des substances qui se rencontrent , soit tou- jours , soit quelquefois , dans l'urine , fait que la composition des calculs urinaires varie beaucoup. Gmelin porte à trente- et-une le nombre de celles qui s'y rencontrent (2), et dont il serait facile d'étendre encore la liste. Mais un calcul peut, en outre, ne point être homogène; sur mille d'entre ces concré- tions, il s'en trouve , suivant Wood (3), quatre cent cinquante^ deux qui contiennent plusieurs substances , et parmi les cinq (l)iJid.,t. VI,p. 356. (2) Handhuch der iheoretischon Chemie , t. II , p. 1423. (3) Froriep , Notiscn , t. XII , p. 235. PRODUITS MATÉRIELS HÉtÉROLOGUES. 4^1 cent quarante-huit autres, qu'il regardait comme simples, la matière proprement dite de la concrétion était accompagnée d'une matière organique servant à en lier les particules en- semble. En ne comptant pas non plus cette dernière sub- stance , Yelloly (1) a trouvé^ sur mille calculs urinaires , qua- tre cents vingt-deux pierres d'une seule substance , trois cent soixante-et-dix-sept de deux , cent soixante-et-trois de trois , et trente-huit de quatre. Quand les calculs urinaires se sont formés à des époques différentes, et par intervalles, ils offrent des couches distinc- tes. Mais souvent aussi ils sont homogènes et compactes, même lorsqu'ils contiennent plusieurs substances diverses. Les substances qu'on y rencontre le plus fréquemment sont des matières organiques communes ou générales (19°), l'acide urique (20''-22°), Toxalale de chaux (23°) et les phosphates terreux (24°); les autres (25°-27°) sont plus rares et plus sub- ordonnées. 19° Tout calcul urinaire renferme , comme ciment , une matière organique , qui peut cependant n'y exister qu'en très-petite quantité et ne point frapper le sens de la vue. Cette substance est surtout apparente lorsque la concrétion se compose de petits grains réunis ensemble , et ordinairement elle ne consiste qu'en mucus. Peut-être la sécrétion , soit d'un mucus plus abondant ou plus épais , soit même d'un li- quide plastique , par la membrane muqueuse un peu en- flammée du bassinet des reins ou du reste des voies urinaires, est-elle fréquemment la cause qui fait que les principes con- stituans peu solubles de l'urine produisent des concrétions en s'attachant à ce liquide visqueux. Ce qu'il y a de certain , c'est que de véritables caillots forment fréquemment le noyau des calculs urinaires. Sur mille de ces derniers, il s'en est trouvé seize , d'après Henry, qui offraient une cavité dans leur mi- lieu , et les parois de cette excavation présentent assez sou- vent encore du mucus desséché , débris du caillot qui a servi de noyau (2). Dans d'autres cas, celui ci consiste en un cail- (1) PUtos, Trans,, 1830. (2) Journal de chimie médicale , 1. 1 , p. 456. viir. 402 PRODUITS MAT:ÉRlEr-S HÉlÉROLOGtES. lot de sang rouge , ou en une masse fibrine concrète. Quel- quefois aussi les calculs sont enduits de sang coagulé. L'urée s'y rencontre rarement et toujours en petite quantité. D'après l'odeur qu'ils exhalent quand on les broie , et la couleur brunâtre qu'ils offrent, on conclut qu'ils renferment une sub- stance odorante et une matière colorante [particulières à l'u- TÎne. On y a parfois aussi trouvé de l'albumine ou de l'osma- zome , et, suivant Barruel(l), de la graisse. 20° L'acide urique, soit pur ou combiné avec de l'ammonia- que, soit uni à de l'oxalateouà du phosphate calcaire, est la sub- stance que l'on rencontre le plus ordinairement dans les cal- culs urinaires. Sur mille calculs, il y en avait, d'après Wood, huit cent quarante-quatre dans lesquels cet acide entrait , et même , suivant Henry, huit cent quarante-cinq dont il formait le noyau. Ainsi le développement des concrétions urinaires dé- pend en grande partie d'une production trop abondante d'a- cide urique , occasionée elle-même par une nourriture suc- culente , en particulier par les alimens tirés du règne animal (§ 853, 10"), par les désordres de la digestion (§ 853 , 11°), par le défaut de mouvement (§ 853, 12°), et par l'insuffisance de la transpiration (§ 853 , 13°). On explique par- là pourquoi l'affection calculeuse est beaucoup plus rare chez les femmes que chez les hommes, dans la proportion de 1°23, selon Prout ; pourquoi , d'après Yelloly, elle est moins commune parmi les haÎDitans des campagnes que parmi ceux des villes, et rare surtout chez les pauvres irlandais, ainsi que dans l'ar- mée russe ; pourquoi^, au dire de Coindet (2), elle se présente moins fréquemment dans les pays chauds ; pourauoi enfin , comme l'assure Magendie (3) , elle survient quelquefois chez les sujets qui ont été obligés de rester couchés pendant long- temps , par exemple , après une fracture. Mais l'acide urique peut aussi se précipiter lorsque l'alcali qui le tenait dissous vient à manquer dans l'urine , ou à lui être enlevé par un autre acide ; aussi se produit-il des calculs (d)/6id., t. VII,p 488. (2) Froiiep , Notizen, t. XIII , p. 433. (3) Dictionnaire de méd. et de chirurg. pratiques , art. Graveue , t. IX, p. 249. PRODUITS MATÉTIIELS ÎIÉTÉROtOGtES. 4^5 urinaires quand il se forme trop d'acide dans l'organisme , ou que les alimens y en introduisent une trop grande quantité ; ,c'pst ce qui explique pourquoi ils sont plus communs, tant dans les pays où l'on boit beaucoup de vin acide et de bière aigre , que chez les enfans ; car, d'après les évaluations de ,Çrout,la moitié des calculeux n'ont point atteint l'âge de la puberté. L'usage interne des alcalis est salutaire, en ce qu'il prévient une nouvelle précipitation d'acide urique, et jempêche ainsi les pierres de grossir, sans que d'ailleurs celles-ci puissent être dissoutes par eux , attendu que les al- ,ealis ne tardent pas à se convertir en carbonates dans l'orga- nisme , et perdent ainsi leur faculté dissolvante. L'air de la mer paraît être contraire à la formation des calculs urinaires. Hutchinson a remarqué que , dans un laps de seize années , depuis dSOO jusqu'en 1816 , il ne s'était présenté que huit calculeux sur cent soixante trois mille matelots anglais, et que les hôpitaux de la marine n'offraient qu'un seul calculeux sur dix-sept mille deux cents malades , tandis que la propor- tion était d'un sur quatre cents dans les hôpitaux civils; il a Keconnq , en outre , que , durant les treize années suivantes , les hôpitaux de la marine n'offrirent aucun sujet atteint de la pierre , sur vingt-et-un mille neuf cent dix malades qui y fu- rent admis. Julia Fontenelle (1) assure aussi que les calculs .urinaires sont fort rares sur les côtes d'Espagne et de France, particulièrement sur les bords de la Méditerranée , et il pré- sume qu'on doit en chercher la cause dans l'acide hydrochlo- rique et le chlorure de sodium dont l'air de la mer est impré- giié. Cependant il arrive fréquemment aussi qu'on ne peut assigner aucune cause à la maladie , et qu'elle dépend d'une diathèse évidemment héréditaire, dont on ne saurait donner L'explication (2). 21° Les calculs compgsés d'acide urique pur sont les plus communs de tous. Sur mille pierres urinaires, il s'en est trouvé deux cent cinquante dans ce cas selon Fourcroy et Vauque- lin,. trois cent trente-six suivant Wood, trois cent cinquante- (1) Journal de chimie médicale, l. VIII, p, HS, {2} ProiU , Traité de la gravelle , p. IS^, 4o4 PRODUITS MATÉRIELS HÉTÉROLOGUES. sept d'après Proiit. Yelloly dit que,' sur mille calculs, quatre cent neuf avaient leur noyau , et trois cent quatorze leur écorce, d'acide urique pur. Ces sortes de concrétions se dé- veloppent principalement dans les reins , et servent ensuite de noyaux à d'autres calculs ; cependant l'acide urique peut aussi se précipiter dans la vessie , et constituer la couche ex- térieure. Les pierres qu'il produit sont jaunes ou d'un roujje brun, et généralement lisses à la surface; elles se composent de couches concentriques, et présentent en général une texture cristalline imparfaite dans leur cassure. Elles se dissolvent entièrement dans la potasse causticfue , et Ton peut précipi- ter l'acide urique de cette dissolution par le moyen de l'acide hydrochlorique étendu. 22° L'urate d'ammoniaque a été rencontré,'d'après Yelloly, sur mille calculs , dans le noyau de trois cent quatre-vingt- six, et dans les couches extérieures de cent quatre-vingt- treize. Les pierres entièrement formées de ce sel se voient rarement ; elles sont d'un gris verdâtre ou d'un jaune de cire, lisses ou tuberculeuses à la surface, formées de couches con- centriques , terreuses et à grain fin dans leur cassure ; elles se dissolvent dans la potasse , en laissant dégager de l'am- moniaque. > 23° L'oxalate de chaux constituait le noyau dans quatre- vingt-onze cas sur mille, d'après Henry. Suivant Yelloly ,'il formait le noyau dans cent trente-trois cas, et les couches dans cent soixante-et-douze ; Prout Ta trouvé constituant la pierre entière dans cent trente-sept cas ; mais, selon Wood, ce phénomène n'avait eu lieu que dans quarante-deux cas, tandis que, dans trois cent quatre-vingt-trois, le sel figurait parmi les principes constituans du calcul. Prout assure que l'oxalate de chaux s'observe souvent par couches qui alternent avec d'autres d'acide urique. Les pierres qu'il produit, et qui, d'après Wetzler (1), se voient principalement pendant l'en- fance , sont moriformes, mais parfois aussi lisses à la surface , d'un gris foncé ou noirâtre , incomplètement lamelleuses, dures (1) Beitrœge zur Kênntniss dés meilschUcJi&n Hapis iind der Entste-= hu7ig der Harnsteine , p. 55. PRODUITS MATÉRIELS HÉtÉROLOGUES, 4<55 et susceptibles de prendre le poli. Elles se dissolvent diffi- cilement dans l'acide jhydrochlorique étendu, et laissent de la chaux pure quand on les traite au chalumeau. 24° Des phosphates terreux se précipitent de l'urine lors- qu'elle devient alcaline et que la production d'acide diminue. Sur mille calculs , il y en avait cent trente-deux phosphatiques, selon Wood, et deux cent quarante-cinq d'après Prout. Henry prétend que les phosphates ne constituaient le noyau que dans vingt-et-un cas. Ils forment plus particulièrement les couches extérieures , surtout dans les calculs vésicaux et dans ceux qui se sont développés à la surface d'un corps étranger. D'après Yelloly, sur mille pierres , il y en avait cinquante- neuf dont le noyau était de phosphate aramoniaco-magné- sien , et deux cent neuf dont ce sel constituait les couches extérieures. Les calculs qu'il i produit sont blanchâtres, la plupart du temps doués d'un éclat micacé , parsemés de cristaux lamelleux , cassans et friables ; mais parfois aussi ils sont durs et ont une texture cristalline. Ils donnent, avec les acides étendus , une dissolution qui précipite par l'ammo- niaque. Au chalumeau, ilsdégagent de l'ammoniaque et entrent ensuite en fusion. Le phosphate de chaux est plus rare , surtout comme noyau^ D'après Yelloly, sur mille cas , il s'est offert treize fois dans le noyau , et quatre-vingt-huit dans les couches extérieures. Il forme des calculs d'un brun pâle, lisses, feuilletés, très- solubles dans l'acide hydrochlorique , et qui n'entrent point en fusion au chalumeau. 25° Sur mille pierres , il y en eut dix-neuf , selon Wood , et quatre seulement d'après Prout , qui contenaient de l'oxide cystique ; Henry en signale , dans ce nombre , seize où il formait uniquement le noyau. Ces calculs sont d'un blanc jau- nâtre et cristallisés] d'une manière confuse ; ils se dissolvent dans les alcalis, ainsi que dans l'acide hydrochlorique étendu, et répandent une odeur particulière quand on les traite au chalumeau. 26° Les calculs de carbonate calcaire sont rares chez l'homme , mais communs chez les Mammifères herbivores. Ils 4^6 PRObtJITS MAÏÉRIEtS HiTÉROlOeCES. sont bfancs, friables, et se dissolvent avec effèrvescetrce àsam les acides. 27° Le silice, Foxide xanthique, te chlorure de sodium, l'hydrochlorate d'ammoniaque , etc. , se rencontrent rare- ment, et toujours comme matériaux subordonnés. VIII. Les calculs biliaires se forment dans divers états mor- bides du foie , principalement pendant la seconde moitié de la vie , chez les sujets qui mèneni une vie sédentaire ^ qui éprouvent beaucoup de contrariétés, quelquefois après des in- flammations du foie , et presque toujours lorsqu'il ^e produit de la graisse en grande abondance. Les bêtes bovines y sont sujettes en hiver , lorsqu'elles ne prennent point d'exercice et que les alimens frais leur manquent. Le plus communément ils naissent dans le vésicule du fiel ; mais quelquefois aussi ils se développent dans les canaux biliaires, d'où ils passent soit dans la substance du foie , à la faveur d'une ouverture provo- quée par la suppuration , soit dans le canal intestinal , en sui- vant le trajet des voles biliaires. Ils sont d'un jaune blanchâtre, bruns ou noirs , et Ton remarque, dans leur intérieur , tantôt des couches concentriques, taniôt des stries rayonnantes du centre vers la circonférence. Leurs principes constituans les plus ordinaires et prédominans sont une substance grasse et une matière colorante. 28° La substance grasse est celle qu'on rencontre le plus fréquemment; quelquefois môme on ne trouve qu'elle; mais la plupart du temps elle est mêlée avec la matière colorante, ou déposée auprès d'elle, et forme depuis 0^65 jusqu'à 0,93 du calcul. Autrefois on la regardait comme analogue à l'adi- pocire ou au blanc de baleine ; aujourd'hui on la considère comme de la cholestérine modifiée. Elle se présente en la- melles bhmches, demi-transparentes, brillantes, grasses art loucher. C est elle qui donne aux calculs bihaires leiir appa- rence cristalline et radiée. Elle est fusible au feu et inflam- mable, soluble dans l'alcool bouillant, l'éther, les huiles grasses et les huiles essentielles, insoluble dans les acides et les alcalis. Elle constitue les plus gros calculs biliaires. Il n'est pas rare qu'en même temps le foie ait subi la dégéné- rescence graisseuse , et que la bile soit d'un blanc jaunâtre. ESSENCE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 4^7 29° La matière colorante est jaune, brune ou noire, compacte, insoluble dans les huiles, soluble dans les acides, dans les alcalis , et en partie aussi dans l'alcool bouillant ; elle brûle sans flamme et sans commencer par entrer en fusion. 30° Indépendamment de ces deux substances , on a trouvé de la bile , tantôt imbibant le calcul entier , tantôt épaissie et constituant le noyau. On a rencontré aussi du picromel , de Fosmazome , du mucus , de la graisse , du carbonate et du phosphate de chaux , du phosphate ammoniaco-magnésien , de la silice et du manganèse. DEUXIÈME SUBDIVISION. DÉ X'ÉSSENCE DE lA FORMATION DES PRODUITS MATÉRIEIS DE L'ORGAHISME. § 875. Nous devons commencer par avouer qu'il nous est impossible de plonjïer nos regards dans tous les détails de la formation , c'est-à-dire de l'activité à laquelle les différentes parties constituantes , liquides et solides, de l'organisme, sont redevables de leur existence. En conséquence, si nous voulons acquérir une idée nette, tant du sujet en lui-même que de notre savoir à son égard, soumettre réellement à nos moyens d'investigation la portion de ce vaste domaine sur laquelle il nous est permis de marcher d'un pas ferme , et nous procu- rer au moins une image générale de ce qu'il ne nous est per- mis que d'apercevoir dans le lointain , il est indispensable de suivre une méthode analytique et de bien distinguer les uns des autres^ les divers problèmes qui se présentent à résoudre. 4o8 MODALITÉ DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. CHAPITRE PREMIER. J)ç la modalité de la, formation des produits matériels de l'organisme. ARTICLE I. Des matériaux su?" lesquels s'exerce la jormalion organique. Le premier pas à faire est de bien arrêter nos idées rela- tivement aux matériaux sur lesquels s'exerce la plasticité or- ganique. I. L'organisme subit continuellement des pertes ( § 816, 2°), puisqu'il abandonne une partie de sa matière au monde exté- rieur. Il ne demeure donc semblable à lui-même, ou iden- tique , qu'à la condition de se produire lui-même , c'est-à- dire d'admettre en lui des matières étrangères , de les assi- miler, et de les convertir en sa propre substance. Cette con- version n'a point lieu par une sorte de coup de baguette ; elle s'opère peu à peu et d'une manière graduelle. La sub- stance alimentaire introduite dans le corps ne peut point de- venir immédiatement un tissu particulier ; il faut qu'elle com- mence par prendre le caractère de l'organisme en général , car les diverses parties , tant solides que liquides , sont des spécialités qui supposent quelque chose en général. Or cette substance plastique générale est le suc vital (§ 660 , 3° ), qui, lorsqu'il est renfermé dans des espaces spéciaux , représente un liquide particulier, auquel on donne le nom de sang ( § 661, 1 ). Toutes les substances extérieures sont, directe- ment ou indirectement , incorporées au sang , de sorte que c'est le sang seul qui peut fournir de quoi réparer la perte matérielle éprouvée par l'économie vivante. L'organisme forme , avec ces substances , son sang , qui est sa propre sub- stance générale , celle qui renferme en elle la possibilité de toutes les formes spéciales susceptibles d'être revêtues par MODALITÉ DE tX PLASTICITE ORGANIQUE. 4^9 elle, qui unit ensemble les différentes substances, et main- tient les diverses forces en rapport les unes avec les autres , celle enfin qui se répand partout, et qui représente le tout sous le point de vue matériel. C'est avec le sang seul que l'or- ganisme produit les parties existantes dans des espaces parti- culiers et douées de propriétés spéciales , qui appartiennent à son essence, et qui retournent ensuite dans le monde extérieur. Les faits suivans fourniront la preuve immédiate de ces asser- tions. 1" La quantité du sang diminue continuellement, et elle ne se maintient la même que parce que les substances admises dans l'organisme réparent les pertes qu'elle éprouve. Après une abstinence prolongée d'alimens^ on trouve fort peu de sang dans les vaisseaux (1). 2* La différence qui existe entre le sang des veines et celui des artères (§ 751) prouve que ce liquide subit une trans- formation dans les vaisseaux capillaires; et ce qui démontre que cette transformation est intimement liée à l'activité plas- tique , c'est qu'il y a des faits attestant qu'elle est moins con- sidérable , qu'elle se réduit même , pour ainsi dire , à rien , lorsque la nutrition et la sécrétion cessent de s'accomplir (§756). 3° La nutrition et la sécrétion sont abondantes ou rares suivant qu'il y a une quantité suffisante ou insuffisante de sang (§843). 4° Après des changemens considérables dans l'activité plas- tique , il survient un état correspondant du sang ; ce liquide prend un caractère plus aqueux lorsque les reins ont été ex- tirpés , ou quand une cause quelconque diminue soit la sé- crétion rénale , soit la transpiration cutanée ; au contraire , il contient moins d'eau et il est plus épais qu'à l'ordinaire lors- que les évacuations aqueuses sont plus copieuses que de coutume , par exemple après de fortes sueurs , dans la diarrhée et le choléra , ou quand la nutrition , qui est une sécrétion de (1) Haller, Elément, phi/siolog., t. II , p. 48; t. VI, p. 166; t. VIII, P. II , p. 61. 4lO MODALITÉ DE lA PIASTICITÉ ORGANIQUE. substances solides , languit , comme dans la fièvre inflamma- toire (4). 5° La quantité du sang dans les divers organes correspond au degré de leur activité plastique. Les tissus stratifiés sont vides de sang et inaptes à se former eux-mêmes ; les parties animales et scléreuses qui ne font que se nourrir reçoivent , généralement parlant, peu de sang, ou présentent, entre leurs vaisseaux capillaires , des îles de substance plus gran- des que celles qu'on découvre dans les organes appartenant au système cutané , qui non seulement se nourrissent , mais encore produisent des liquides particuliers. 6' Quand la quantité du sang augmente dans un organe , l'activité plastique y devient aussi plus énergique. A des branches artérielles plus développées correspond une nutri- tion plus active ; la difficulté même du retour du sang par les veines détermine une sécrétion plus abondante ( § 843 , 4°, 6°) ; car la station rend la suppuration plus copieuse dans les ulcères aux extrémités inférieures. Si l'artère d'un or- gane vient à être comprimée , de manière qu'elle amène moins de sang , la nutrition de cet organe diminue aussi , et l'ex- tinction de l'activité plastique , par exemple, aux dents ( § 543, 2«; 551, 1°), ou dans le bois du Cerf (§ 860, 2°), comme aussi la disparition normale d'un organe, du thymus, par exemple ( § 641 , 16° ) , et l'atrophie anormale , commencent toujours par une diminution de l'afflux du sang. 7° Enfin , l'activité plastique cesse dans un organe dont les artères ont été liées ou coupées. Westrumb (2) a vu , ce qui avait déjà été observé avant lui par Astruc , et l'a été égale- ment depuis par Krimer, qu'après la ligature des artères ré- nales , il ne se sécrète plus d'urine , et que les vaisseaux du bas-ventre regorgent de sang. IL Mais nous ne pouvons nous dispenser de rapporter ici quelques opinions dissidentes, d'après lesquelles certaines (1) Haller, Elément, physiolog., t. II, p. 48; t. VI, p. 166 i t VIII, P. II, p. 61. (2) Hecker, Literarische AnnaUn der gesammten Heilhunde > X, XYUIf p. 283. MODALITÉ DE LA. PLASTICITÉ ORGANIQUE. ^IV sécrétions seraient dues à des substances étrangères qui fra- verseraîent le corps en évitant le système sanguin ( 8") , à des- combinaisons entre des matières étrangères et la substance organique qui s'opéreraient sur la surface de Forganisme ( ^o-lO" ) , à du sang en train de se produire ( 11* ) , ou même^ en partie à la substance des organes (12°). S" Divers physiologistes ont prétendu qu'en certaines eîf- constances, l'urine représente simplement la boisson, qui ^ sans passer dans le sang, se rendrait de t' estomac aux or- ganes urinaires (2). Il faudrait alors ou que la boisson transsudât de restomao et pénétrât ensuite dans les voies urinaires , ou que les vais- seaux lymphatiques la prissent dans le premier de ces vis- cères, pour aller la déposer dans la vessie. Mais les deux hypothèses sont contraires à ce que nous savons de la ma-» nière dont s'accomplit le travail organique ; toute commu- nication par simple imbibition entre des organes éloignés est impossible, et les vaisseaux lymphatiques ne peuvent déposer leur contenu ailleurs que dans les veines. S'il fallait que la boisson sortît du corps sans pénétrer dans le sang, l'intestin serait la roule qu'elle aurait tout naturellement à suivre , et l'on ne voit pas ce qui rendrait nécessaire l'existence de voies spéciales. Mais les phénomènes sur lesquels repose l'hypothèse des voies urinaires occultes ont été suffisam^ ment expliqués ailleurs (§ 840, 7°; 857, 16°; 866, 1», 40, II). 9° Parmi les théories d'après lesquelles certaines sécrétions dépendraient de ce que la substance de l'organisme se mêle , à sa surface , avec des substances étrangères , on doit placer d'abord celle qui concerne le gaz acide carbonique et l'eau expirés. Comme Lavoisier avait démontré que l'acide carbo- nique et l'eau résultent d'une combinaison entre l'oxygène de l'air atmosphérique d'une part , le carbone et l'hydrogène de l'autre , comme aussi l'observation lui avait appris que , pen- dant la respiration , l'air atmosphérique perd du gaz oxygène (1) Meckel , Deutsches Archiv , t. Vil, p. 528. (2) Haller, Elément, physiolog., t. VII , p. 378. 4l2 MODALITÉ DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. et se charge de gaz acide carbonique et de vapeur aqueuse , il était naturel qu'il considérât la respiration comme un acte de combustion. Les substances expirées n'étaient plus alors des sécrétions , mais des combinaisons effectuées , dans l'inté- rieur des voies aériennes , entre l'oxygène atmosphérique et le carbone et l'hydrogène du sang. Il y avait surtout de la hardiesse à dire que de l'eau se produit par combustion , à la température ordinaire , dans un fluide qui , comme le sang , contient 0,7 d'eau à l'état liquide. Lavoisier n'établit cette hypothèse que parce que , d'après ses calculs , la respiration soustrait à l'atmosphère plus d'oxygène qu'il n'en faut pour produire l'acide carbonique expiré , et parce qu'il se dégage plus de chaleur, dans l'organisme, que n'en pourrait déve- lopper la quantité d'acide carbonique qui se forme. Mais , en laissant de côté la question de l'exactitude des calculs , l'hy- pothèse repose sur l'opinion préconçue qu'il ne passe point d'oxygène de l'atmosphère dans le sang des veines pulmo- naires , et que la chaleur organique est produite par l'acte de Combustion qui a lieu dans les poumons. Or nous démontre- rons plus tard que cette opinion ne soutient point l'examen. Spallanzani regardait déjà comme vraisemblable que l'a- cide carbonique existe tout formé dans^ le sang , et que la respiration se borne , quant à lui , à l'éliminer (1) ; Nasse (2) et Collard de Martigny (3) ont depuis allé{;u6 des faits à l'appui de cette théorie , qui cependant n'est point encore , à beaucoup près , généralement adoptée. Les motifs qui mili- tent en sa faveur, dans le même temps qu'ils combattent celle de Lavoisier, sont les suivans : a. On ne saurait admettre qu'à une température aussi peu élevée que celle de la respiration , surtout chez les animaux à sang froid , l'oxygène^atmosphérique puisse déterminer, dans un liquide , une combustion assez vive pour produire , en si peu de temps, une quantité d'eau (§ 816 , 4°) et d'acide car- bonique (§ 818) telle que celle qui sort des poumons pen- (1) Mémoires sur la respiration , p. 2S9. (2) Meckel , Deutschcs Arçhiv , t. II , p. 195. (3) Journal de Magendie , t. X , p. 132. MOiDALlTÉ DE LA PLASTICITE ORGANIQUE. 4*5 danl l'expiration. Quoiqu'on sache , comme l'a démontré Rumford surtout, que du charbon peut former de l'acide carbonique à une température beaucoup plus basse que celle qui est nécessaire pour déterminer une combustion susceptible de frapper la vue , ce phénomène n'a lieu alors qu'avec une lenteur extrême, et d'une manière tout-à-fait insensible. h. D'après la théorie de Lavoisier, quand la respiration est incomplète, il devrait, au lieu de gaz acide carbonique, se produire du gaz oxide de carbone. Si Thydrogène et le car- bone du sang s'oxygénaient au contact de J'almosphère , l'a- cidification de son soufre et de son azote , par conséquent une formation de gaz acide sulfureux et de gaz nitreux , de- vraient être possibles aussi ; et , si l'hydrogène peut se com- biner avec l'oxygène de l'atmosphère , il devrait pouvoir se combiner également avec son azote , et donner ainsi naissance à de l'ammoniaque. Mais, dans nulle circonstance, l'air expiré ne contient aucun de ces gaz ; on n'y trouve jamais que de l'acide carbonique et de l'eau. c. Il résulterait de la théorie de Lavoisier qu'il ne passe point d'oxygène dans le sang des veines pulmonaires; mais il est démontré ( § 751 , 11° ; 878, 3°) que le sang artériel con- tient plus d'oxygène qu'on n'en découvre dans le sang veineux. d. Le sang renferme 0,7 d'eau (§ 683 , 1°) ; à sa sortie des vaisseaux , il exhale une vapeur qui est visible par un temps froid, se dessèche, et ne perd guère que de l'eau par la dessiccation. La quantité de ce liquide qu'il renferme varie suivant que les sécrétions aqueuses sont abondantes ou ra- res (4°). H n'est pas moins certain que le sang contient de l'acide carbonique. Outre les observateurs cités précédemment (§ 669 , 1° ; 683 , 2° ) , H. Davy , Brande , Scudamore , Krimer, Berthold , Reid Clanny et Vogel (1) , Hunefeld (2) , Nasse (3) , Hoffmann (4) et Hornbeck (5), s'en sont convaincus. Si, (1) Schweigger, Journal fuer Chemie , t. XL , p. 399. (2) Physiologisclie Chemie des menschlicken Organismus , 1. 1, p. 242. (3) Meckel , Deutsches JrcUv , t. II , p. 442. (4) Froriep , Notizen , t. XXXVIII , p. 253. (5) Dissertatio de sanguine , p. 26. - - 4r4 MObAtlTÉ DE LA PLASTICITE ORGANIQUE. comme l'ont remarqué Stromeyer (!) , Muller (2) , Mitscher- lich , Gmelin et Tiedemann (3) , il n'exhale point d'acide car- bonique quand on le chauffe ou lorsqu'on le place sous le récipient de la machine pneumatique, ce phénomène lient uniquement à ce que les gaz en général y adhèrent avec force , ainsi que l'a démontré Hoffmann (4) entre autres ; en effet , Muller a reconnu que , même après avoir été chargé de gaz acide carbonique par des moyens artificiels, il n'en laissait point dégager dans le vide. Mais on met ce gaz en liberté quand, à l'exemple de Hunefeld, de Mitscherlicb , etc., on verse un acide fort dans le sang , ou lorsqu'en imitant le pro- cédé de Nasse et de Hoffmann ^ on agite ce dernier avec du gaz hydrogène. Du reste, l'acide carbonique mis en liberté lorsque le sang commence à se décomposer, a donné lieu, pendant l'épidémie du choléra, de prétendre que ce liquide contient , dans l'état normal , un acide hbre. e. Cette adhésion de l'acide carbonique au sang est vain- cue pendant la respiration. Ce qui le prouve , c'est que les gaz poussés dans les veines sortent par l'expiration (§865,9°). Nyston (5) a remarqué aussi que l'air expiré par des animaux auxquels il avait fait respirer du gaz azote , contenait 0,01 d'hydrogène, ou 0,08 d'oxygène, ou 0,14 d'acide carboui- ^U€, suivant qu'il avait injecté l'un ou l'autre de ces gaz dans le sang. De même, une infusion d'eau augmente les sé- crétions aqueuses (§ 265 , I). Wedemeyer (6) , ayant injecté quatre-vingts livres d'eau dans les veines d'un Cheval , vit survenir un écoulement de mucus aqueux par la bouche et le nez , une diarrhée séreuse , et un épanchement de^douze livres de sérosité sanguinolente dans la cavité abdominale. f. Le sang veineux contient, proportionnellement, plus d'eau que le sang artériel (§ 751, 10") , parce que la uutrition (4) Schweigger, Journal fuer Chemie, t. LXIV, p. 105. (2) Handhuch der Physioloijie , t. I , p. 312. (3) Zeitschrift fuer Physiologie , t. V, p. 3. {k) Lac. cit., p. 252. (5) Recherches de physiologie et de chimie pathologiques , p. 146. (6) Unterstichungenueber den Kreislaufdes jBluies , ^, ^H, SrODAIITÉ DE lA PIASTICITÉ ORGANÎOUE. ^l^ a enlevé à ce dernier davantage de parties solides. Mais le sang artériel contient moins d'acide carbonique que le sang veineux (§751, 41°; 878, 3°); il faut donc que cet acide ait été éliminé dans les poumons. Reid Glanny a obtenu 0,1152 de gaz acide carbonique du sang veineux , et 0,0025 seule- ment du sang artériel. D'après Mitscherlich (1), le premier contenait 0,0012 et le second 0,0008 seulement d'acide car- bonique; et dans l'espace de trois semaines (2), le sang vei- neux n'absorba que 1,11 de son volume du gaz acide carbo- nique dans lequel il avait été plongé , tandis que le sang ar- tériel en prit 1,40. En agitant du sang veineux avec du gaz hydrogène, Hoffmann obtenait du gaz acide carbonique, tandis que le sang artériel , traité de la même manière , dé- gageait du gaz oxygène. Collard de Martigny (3) a trouvé, chez des animaux qui avaient respiré librement qu'il y avait une fois autant d'acide carbonique dans le sang veineux que dans le sang artériel; mais, quand l'expulsion de cet acide avait été empêchée par la ligature de la trachée- artère, le sang artériel en contenait tout autant que le sang veineux. g. La quantité d'eau et de gaz acide carbonique expirés n'est point en rapport invariable avec la consommation de l'oxygène atmosphérique. Elle augmente dans l'air raréfié et chaud, qui contient moins d'oxygène (§ 839, 5°, 6°), et, quand on respire du gaz oxygène pur, on expire ordinaire- mont moins de gaz acide earbonique. h. Il s'exhale également de l'eau (§812, 814) et du gaz acide carbonique (§ 817, III), dans des espaces clos où l'oxygène atmosphérique ne peut pénétrer. Toutes les fois que la respiration éprouve une gêne prolongée (4), notam- ment lorsque les bronches sont obstruées par du mucus , du pus ou des concrétions (5), les extrémités en cul- de-sac We ces conduits , les vésicules pulmonaires , se distendent au (1) Zeitschrift fuer Physiologie , t. V, p, dO. (2) Ibid., p. 6. (3) Journal de Magendie , t. X , p. 127. (4) Laennec , Traité de l'auscultation médiate , 1. 1 , p. 234. (5) Andral , Précis d'anatomie pathologique , t. II , p. 498. 4l6 MODALITÉ DE LA PLASTICITÉ OÎKÎANIQUE. point d'acquérir un volume égal à celui de noyaux de ceri- ses, parce que le gaz acide carbonique exhalé ne trouve point d'issue. e. De l'acide carbonique est également expiré dans des gaz qui ne contiennent point d'oxygène , tels que l'azote et l'hy- xlrogène (§ 841 , 6°, 8°) ; cet acide ne saurait avoir été pro- duit par l'oxygène préalablement inspiré , et être demeuré dans les poumons , puisque , même après qu'on a eu soin de pomper tout ce qui pouvait être contenu dans l'organe pul- monaire, il continue de s'exhaler, et que, si l'expérience dure long-temps , il se dégage en assez grande quantité pour dépasser le volume des poumons , celui même de l'animal en- tier. 10° Suivant Home (1), la graisse ne serait pas le produit d'une sécrétion -, sa formation aurait lieu dans le gros intes- tin , indépendamment du concours de l'activité vitale ; elle serait extraite du chyme par l'influence de la bile et de la chaleur, et passerait ensuite dans le sang, qui la déposerait aux divers endroits où on la rencontre ; elle serait donc un produit de la digestion formé simultanément avec le chyle. Mais , outre qu'un tel mode de formation d'un produit si composé a contre lui l'analogie et l'expérience , l'absence de la graisse dans le chyle s'élève aussi contre l'hypothèse de Home , dont les argumens ne sont rien moins que concluans. En effet, l'analogie qu'il prétend exister entre les excrémens et l'adipocire est fort éloignée , et , de même que la surface grasse d'un muscle mis en digestion dans de la bile et aban- donné ensuite à la putréfaction, on doit la rapporter en grande partie à de la cholestérine. Si les matières fécales d'un Canard , retenues pendant sept jours dans le cœcum , puis dissoutes dans de l'acide nitrique , ont laissé de l'huile se sé- parer quand on versa de l'eau dans la liqueur, nous pouvons répondre que de la graisse se produit pendant la décompo- sition que l'acide nitrique fait subir à plusieurs matières ani- males. Si les animaux hibernans, dont le gros intestin est long , ont en même temps beaucoup de graisse , il faut en (1) Lectures on comparative anatomy, 1. 1 , p. 476, MODALITÉ DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 4*7 chercher la cause dans la nourriture végétale , avec laquelle ces deux circonstances coïncident presque toujours. Si les maladies du gros intestin entraînent l'amaigrissement, l'éma- ciation s'observe aussi dans d'autres maladies où le gros in- testin n'offre rien d'anormal. Le principal argument de Home est celui qu'il tire de l'ambre gris et des déjections grasses qu'on rencontre quelquefois chez l'homme ( § 856 , 4°) ; mais c'est émettre une pure conjecture que d'attribuer l'expulsion de ces substances grasses uniquement à ce qu'elles n'ont pu être absorbées par les vaisseaux lymphatiques devenus inac- tifs ; l'ambre gris est une concrétion de cholestérine analogue aux calculs biliaires (§ 874, 28°), et la graisse que les hom- mes rendent dans l'état de maladie peut , quand elle ne pro- vient pas d'une décomposition de la bile , avoir été sécrétée du sang de l'intestin, tout comme elle l'est de celui des reins et delà peau (§856, 3°, 5°). 11° Nous avons déjà démontré précédemment (§ 522, S») que l'opinion suivant laquelle le lait n'émane point du sang , mais consiste en du chyle même , n'était point soutenable. 12° L'extrême opposé de l'opinion suivant laquelle des sé- crétions se produisent à la surface de l'organe , par l'acces- sion de substances étrangères , est celle dont les partisans prétendent que les matériaux en sont fournis par la substance sohde des organes sécrétoires. Le sang, dit Dœllinger (1), pa- raît bien être la source principale des liquides sécrétés; mais on ne doit pas croire qu'il en soit la seule et unique ; car rien ne nous empêche de penser que ces Hquides tirent leur ori- gine des parties molles. La sécrétion serait, d'après cela, un mode de mutation de la matière opposé à la nutrition (2), et ses matériaux seraient les parties constituantes essentielles des organes sécrétoires (3) , c'est-à-dire la matière animale , ou ce qu'on appelle communément le tissu muqueux (4), le le sang (5) et la moelle nerveuse ; car on peut concevoir qu'ea (1) Ji^as ist Ahsondenmg^ und wie geschieht sieP p. 79. (2) Loc. cit., p. 33 , 89. (3) Loc. cit., p. 35. (4) Loc. cit., p. 45. (5) Loc. cit., p. 52. VIII. S7 4l8 MODALITÉ DE LA PLASTICITÉ OTlGANIQtJE. se résolvant et se régénérant, les filamens nerveux eux-mêmes contribuent à la production d'un liquide qui se sépare de l'or- ganisme , ce qui cependant n'expliquerait pas le phénomène proprement dit de la sécrétion , et n'établirait pas non plus qu'il dépend du '^système nerveux (1). Cette hypothèse origi- nale ne repose sur autre chose que sur sa possibilité; les parties qui vivent par intussusception , ne se maintenant que par le renouvellement de leurs matériaux, doivent subir une fluidification partielle , et la substance fluidifiée de l'organe sécrétoire peut apparaître comme séciétion. Mais a. Cette théorie n'est point nécessaire pour expliquer les différens actes de la formation organique. La substance flui- difiée peut être déposée dans les interstices du tissu , prise par les vaisseaux lymphatiques , conduite dans le sang , et éliminée par la sécrétion. Ce cas doit évidemment avoir lieu dans les organes non sécrétoires ; donc il s'applique aussi , suivant toute vraisemblance, à ceux qui sécrètent, et l'on peut alléguer ici en sa faveur non seulement l'abondance des vaisseaux lymphatiques qui existent dans ces derniers orga- nes , mais encore des faits immédiats , que nous rapporterons en traitant de la formation du sang. Autrement nous serions obligés de considérer comme sécrétoires des organes qui ne fournissent aucun liquide particulier émané de leur tissu ; et en effet il fut un temps où l'on prétendait que le cerveau , les nerfs, etc., sont des glandes ; car quelles sont les hypothèses physiologiques qui n'ont point trouvé de fauteurs? Or s'éloi- gner ainsi de toute idée nette et fixe , c'est ouvrir largement la porte à l'arbitraire et à l'erreur. b. L'hypothèse de Dœllinger rapporte cependant , en der- nière analyse, les sécrétions au sang; seulement elle prend pour cela une voie détournée , qui nous paraît inutile et même à peine praticable. Ainsi Eberle (2) dit que le mucus , la matière salivaire et l'osmazome du suc gastrique ne sont autre chose que la membrane muqueuse de l'estomac liquéfiée par l'eau , (1) Loc. cit. ,1^1 76. (2) Physiologie der Ferdauu7ig nacKJ^ersuchen auf natuerlichen vmA livenstlichen IVeye, p. 447. MODALITÉ DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 4'9 les sels et les acides du sang el du système nerveux. Mais comme cette membrane demeure toujours semblable à elle- même , malgré la continuité de la sécrétion du suc gastrique, il faudrait supposer qu à chaque moment le sang dépose en elle autant de mucus , de matière salivaire et d'osmazome qu'elle en perd par la sécrétion. Or il est inconcevable que ces substances , au lieu de produire directement le suc gastri- que , en s'unissant avec de Teau , des sels et des acides , com- mencent par se séparer de ces autres matériaux et s'organi- sent en une membrane muqueuse , pour, bientôt après, con- tracter de nouveau la même combinaison et se résoudre en suc gastrique. c. Si la théorie en question était fondée , un organe sécré- toire devrait diminuer de masse toutes les fois que la sécré- tion tendrait à augmenter, et s'accroître dans le cas contraire. Or l'expérience nous apprend que l'inverse précisément a lieu; les organes sécrétoires dont la fonction devient plus ac- tive se nourrissent mieux , et la diminution de leur sécrétion suit pas à pas leur atrophie. Il est donc bien plus naturel d'admettre que les sécrétions émanent du sang, comme les organes. Les motifs qui mili- tent en faveur de cette manière de voir, et qui sont déduits tant de l'accord qu'on remarque entre l'organe sécrctoire et son produit ( § 883 , 1° ), que des circonstances relatives à la conservation des organes par leurs propres efforts (§ 876), de- mandent à être examinés conjointement avec les objets aux- quels ils se rapportent. ARTICLE II. De la manière dont s'effectue \la formation organique^ § 876. La manière dont's'effectue la formation organique peut être envisagée sous trois points de vue , général, méca- nique el chimique. 420 MODAtïTÉ DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. X. Accomplissement de la formation en général. SI nous considérons d'abord l'accomplissement de la forma- tion organique d'une manière purement générale, I. Nous trouvons qu elle est continue. En effet , elle est une manifestation de la vie (§ 845) ; celle-ci consiste en une série non interrompue d'activités , et toute activité vitale, comme nous le démontrerons ailleurs , s'accompagne d'une décompo- sition des organes ; donc la formation elle-même , vue dans tout son ensemble , doit durer toujours, bien qu'en certains momens et sur certains points , elle puisse descendre à un mi- nimum d'énergie. Ce qui distingue la formation organique de la formation inorganique , c'est précisément qu'elle est con- tinue , tandis que celle - ci est transitoire et momentanée (§ 473 , 90). 1° Cette pérennité de la formation s'annonce d'une manière manifeste dans les liquides sécrétés qui parviennent au dehors. De même que le corps perd à chaque minute de son poids par la transpiration (§ 816, II) , ainsi le liquide sécrété par les glandes suinte continuellement , et les canaux de sécrétion , comme les membranes muqueuses bipolaires , sont constam- ment humides à leur surface, de manière que, quand on a bien essuyé cette dernière , elle ne tarde pas à se couvrir de nou- velle humidité. Quoique les organes génitaux ne produisent leurs sécrétions spéciales , telles que le sperme et le lait , qu'à de certaines périodes , ils n'en sécrètent pas moins con- tinuellement , à titre de canaux formés par des membranes muqueuses , un liquide qui les humecte , et qui , lorsqu'il ne s'échappe point en coulant, s'évapore ou est résorbé. 2° On peut considérer comme tenant le milieu entre les or- ganes et les liquides aboutissant au dehors , les sécrétions in- terstitielles et vésiculaires déposées dans des espaces clos; car, ne faisant qu'un tout avec leurs parois, elles entrent dans la constitution de l'organisme , et ne peuvent quitter que par résorption le lieu où elles ont été produites. Tandis qu'à ce degré la sécrétion marche encore avec assez de rapidité dans la série neutre, séreuse (§ 814, I), elle suit un cours lent MODALITÉ DE lA PIASTICIXÉ ORGANIQUE. 4^1 dans la série basique ;, carbonée; ici les produits sont plus persistans , et les seuls phénomènes qui nous annoncent que leur formation s'opère d'une manière continue , c'est que la quantité de la graisse varie suivant diverses circonstances (§842,8°;843, 5», 9^846,15°, 17%21°;847, 19% 22»; 856 , III ; 858 , 2° ; 865 , V ) ; c'est qu'elle disparaît dans les maladies et reparaît après la guérison ; c'est que le pigment augmente ou diminue aussi selon les différons états de la vie (§ 839 , 7° ; 842 , 7° ; 843 , 9° ; 846 , 16° , 18° , 22° ; 847 , 12°î 856 , I ; 865 , VI). 3° Comme un haut degré de cohésion diminue la variabilité en général , de même les organes sont ce qu'il y a de stable dans la vie -, leur formation a bien lieu sans discontinuité , mais avec une lenteur extrême ; elle ne s'accomplit pas dans les masses , mais dans les molécules. Aussi , à l'instar de tous les mouvemens d'une grande lenteur , s'exécute-t-elle d'une manière totalement insensible ; elle ne se révèle que par ses produits , et soit pendant le cours normal , soit dans les cir- constances anormales de la vie , les organes changent de sub- stance, de forme ou de volume ^ disparaissent même en partie, et ne maintiennent leur existence qu'à la condition de jouir d'une vitahlé convenable et de recevoir la quantité de sang nécessaire. Mais il règne de grandes différences entre les or- ganes sous le rapport de la facilité et de la promptitude avec lesquelles le renouvellement des matériaux et la formation s'exécutent en eux. Les muscles maigrissent beaucoup et ra- pidement lorsque le sang afflue moins vers leur tissu et que l'activité plastique diminue en eux , tandis que , dans les cir- constances contraires , ils augmentent plus vite qu'aucun autre tissu ; au contraire , le cerveau et les nerfs peuvent bien être atteints d'atrophie ou subir une transformation ; mais ils con- servent leur volunje intact au milieu d'un marasme général , de manière que ce fait seul suffirait pour rendre fort invrai- semblable que leur consommation pût servir d'aliment à au- cune sécrétion ( § 875, 12°). Nous remarquons une différence analogue dans le système scléreux ; tandis qu'on voit fré- quemment survenir des changemens considérables dans le volume , la forme et la substance des os ( § 844 , 12° ; 862 , 14°; 422 MODALITÉ DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 863 , 2° , 7° ; 805 , VII ; 870 , 7°) , ceux qui s'opèrent dans les tissus tendineux et cartilagineux sont et plus rares et moins prononcés. IL En examinant au microscope un oTgane qui jouit encore de l'activité vitale dans toute sa plénitude , nous ne pouvons apercevoir la plus légère augmentation ou diminution de la substance qui forme son tissu. Tous les phénomènes quanti- tatifs et qualificatifs de formation (§ 838-874), les change- mens homologues et hétérologues , les pseudomorphoses et les régénérations, ont également lieu d'une manière insensible, et nous ne parvenons à les apprécier que dans les résultats. D'après cela, nous ne pouvons point admettre que le liquide sécrété , qu'on voit sourdre sans interruption, soit la substance liquéfiée de l'organe sécrétoire , et que cet organe se repro^- duise tout aussi promptement qu'il se détruit, sans que nous soyons en état de nous en apercevoir ; il est impossible de croire que les organes disparaissent et reparaissent par un coup de baguette , qu'entre nos doigts et sous nos yeux les vieux matériaux s'échappent et soient remplacés par d'autres nouveaux. Un tel rajeunissement momentané des organes est une hypothèse qui répugne au simple bon sens , et nous pen- sons que Dœllinger s'est servi d'une hyperbole en disant (1) que ce qui fait maintenant partie du cerveau pourra dans une heure appartenir au cœur , ou ce qui constitue aujourd'hui la masse des os se mouvoir demain comme chair. En vertu même de sa continuité , la formation organique est insensible et mo- léculaire, c'est-à-dire qu'elle s'accomplit dans des particules infiniment petites. 4° L'hypothèse d'une destruction 'et d'une révivification momentanées des parties solides ne compte en sa faveur qu'une circonstance, sur laquelle insiste suilout Eberle (2) : c'est que les organes résistent , pendant la vie , à des influences qui détruisent leur substance après la mort. Ainsi l'estomac est attaqué par l'acide du suc gastrique sur le cadavre (§86i^, 8°), tandis qu'il ne l'est point sensiblement chez (1) Was ist Ahsondenmg F p, 43. (2) Physioloyie der f^erdmiung , p, 713.J MODALITÉ DE tA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 423 l'homme vivant , et la meilleure manière, en apparence , d'ex- pliquer ce phénomène consiste à admettre que la dissolution a lieu , dans l'un et l'autre cas , d'après les lois de la chimie , mais que la reproduction est proportionnée à la destruction pendant la vie , et qu'il n'y a pas de réalité dans la prétendue persistance de l'organe. Effectivement, c'est au fond ne donner aucune explication que d'attribuer ce phénomène et tous ceux du même genre à une résistance que la force vitale oppose- rait aux forces chimiques ; car cette résistance ne saurait être immédiate , et elle ne pourrait s'accomplir qu'au moyen de dispositions matérielles particulières ; or la connaissance de ces dispositions est précisément le problème qu'il s'agit de ré- soudre. Cependant il nous est possible d'avoir recours à des explications moins hasardées que l'hypothèse d'une destruction et d'une révivification soudaines. D'abord , à jeun , l'estomac ne contient point de suc gastrique acide ; cet acide n'apparaît qu'au moment de l'introduction d'alimens , qui l'absorbent , rétendent , l'enveloppent et le détournent des parois stoma- cales. Mais ceci ne suffît point encore , puisque l'estomac mort peut être dissous par le suc gastrique , alors même qu'il con- tient des alimens. Rathke (1) , par exemple , a remarqué assez souvent , chez des Poissons dont l'estomac avait été gorgé d'alimens , que , peu d'heures après la mort , même par un temps froid , et sans nul indice de putréfaction commençante, cet organe était déchiré par l'effet d'un ramollissement ^ et qu'une partie de son contenu avait passé dans lu cavité abdo- ininale. Mais la résistance vivante contre la force chimique du suc gastrique acide devient explicable si nous admettons que ce suc est produit par la décomposition d'un liquide con- tenu dans les interstices du tissu de l'estomac , où l'afflux continuel de nouveau liquide interstitiel ne lui permet pas de séjourner (§ 877 , 12°) ; s'il lui arrive , étant parvenu dans la cavité stomacale , de réagir sur les parois du viscère, le liquide non décomposé dont cette irritation redouble l'allluence l'em- pêche de pénétrer dans le tissu, ou du moins enveloppe son acide à tel point, qu'il ne peut en opérer la dissolution.Du reste, (1) Beitrœge sur Geschichte der Thierwelt, t. II , p. 47. 424 MODALITÉ t>E Ik PLASTICITÉ ORGANIQUE. il est possible aussi que le suc gastrique abandonne son alcali en traversant la paroi deTestomac, et que ce soit là seulement ce qui fait qu'il arrive acide dans la cavité. Nous nous expli- quons de la même manière comment des liquides devenus acres par dégénérescence , tels que les larmes , la bile , l'u- rine, n'enflamment et n'excorient point les glandes dans les- quelles ils sont sécrétés , mais produisent cet effet sur d'autres régions du système cutané avec lesquelles ils entrent en con- tact ; car ils ont fort bien pu n'acquérir d'âcrelé qu'à la sortie de leurs glandes. 5» Nous concevons de même comment la substance vivante résiste mieux que la substance morte aux influences chimi- ques extérieures : les expériences de Pommer (1), par exemple, nous apprennent qu'une quantité d'acide oxalique qui n'a point attaqué l'estomac pendant la vie , commence à le dissoudre après la mort, et qu'une heure s'écoule avant qu elle en ait imbibé le tissu de manière à rougir le papier de tournesol mis en contact avec la face externe du viscère. Ici la vitalité s'est opposée , non seulement à l'admission dans les vaisseaux lym- phatiques , mais encore à Tirabibition , et si le premier effet était un résultat de la constriction , l'autre a dû certainement dépendre en grande partie de Tafflux plus considérable du liquide interstitiel , qui a diminué dans le même temps la ten- dance du tissu à s'imbiber d'un liquide étranger. 6° Mais l'estomac résiste plus aussi aux influences mécani- ques pendant la vie qu'après la mort. Rathke a observé que l'estomac des Pleuronectes et des Blennies , quand on l'avait bourré de petites coquilles de Moules , et distendu au plus haut point , cédait après la mort au moindre mouvement de ces corps tranchans, tandis que, pendant la vie, il n'avait éprouvé de leur part aucune lésion. De même , les Méduses , malgré leur mollesse gélatiniforme, digèrent , sans se blesser, des animaux pourvus de cuirasses épineuses ; l'estomac des Oiseaux broie des morceaux de verre et courbe des clous de fer sans en ressentir la moindre atteinte- Nous ne pouvons point admettre ici qu'il y a perforation et guérison soudaines, (1) Salzb. medic, chir. Zeitung , 4828; t. II, p. 235. MODALITÉ DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE, 42^ puisqu'on sait que les plaies de l'estomac ne se cicatrisent qu'avec lenteur. Nous ne trouvons pas non plus que la con- traction vivante ait assez accru la cohésion pour permettre de résister à de pareilles violences. Il ne nous est donc possible d'expliquer le phénomène qu'à l'aide d'un mode particulier de mouvement qui fait que l'estomac échappe jusqu'à un cer-s tain point aux corps capables de le blesser , et nous devons par conséquent reconnaître que la tendance à la conservation de soi-même , qui se manifeste comme force vivante de ré- sistance à des causes nuisibles de différentes sortes , se réalise par des dispositions organiques diverses. II. Mécanisme de l'accomplissement de la formation. § 877. Èa ce qui concerne les moyens mécaniques servant à l'accomplissement de la formation , ou les voies par les- quelles les substances arrivent du sang au lieu de leur desti- nation , I. Nous devons reconnaître, avec Albinus (1), Wolff (2), Plat- ner (3), Mascagni, Prochaska(4), Autenrieth (5), Dutrochet(6) et autres, qu'il y a passage des liquides à travers des parois solides. En effet : 1* Nous ne voyons pas d'autres voies , puisque le système des vaisseaux sanguins forme un cercle clos de toutes parts , sans ouvertures béantes ( § 700, 702 ). 2° La perméabilité est essentielle à l'organisme ( § 833, 16° ), puisqu'elle représente , dans la matière, l'unité qui la carac- térise, de manière qu'ici tout se pénètre réciproquement ( § 833, I ). Or nous devons admettre que cette propriété joue aussi un rôle essentiel dans la formation. (1) Academicarum annotationum libri octo , t. III , p. 47, (2) AbJiandlungen ueher die Nutritionskraft , p. 8. (3) Quœstionum physiologicarum libri duo , p, 208. (4) Bemerl/iun'jen iieber den Organismus des menschlichen Kcerpers, p. 87, 102. (5) Handhuch der empirischen Physiologie , t. II , p. 137. (6> Mémoire pour servir à l'histoire anatomique et physiologique des végétaux et des animaux , Pavis , 1837 , t. II , p. 467.| 42G MODALITÉ DE tA PLASTICITÉ ORGANIQUE* 3° Les formations n'émanent que du sanj]^ contenu dans des vaisseaux, et non du sang épanché (§774, 8=»), Les vaisseaux sanguins eux-mêmes sont nourris , non par le sang qui se trouve en contact immédiat avec eux , mais par des vaisseaux propres, qui pénètrent dans leurs parois, jusqu'entre la tunique fibreuse et la membrane vascuîaire commune. Le li- quide plastique qui s'épanche dans les blessures, ne vient pas des vaisseaux sanguins divisés, puisqu'il n'apparaît point aussi- tôt après la lésion , et ne se montre que quand rinflammalion est survenue ; il n'est pas non plus, suivant la remarque de Thomson (1) , plus abondant au voisinage des vaisseaux cou- pés que sur d'autres points , et il se sécrète même dans ceux où il n'y a point eu solution de continuité. Le sang épanché entre les surfaces d'une plaie empêche la réunion , qui ne s'effectue que quand il a été en partie résorbé , en partie mé- tamorphosé par les parois enflammées et le liquide plastique qu'elles sécrètent. Les mêmes réflexions sont applicables aux caillots de sang collés au cœur, qui coniiennent, dans leur milieu, du pus ou des productions cartilagineuses et osseuses ; et les excroissances verruqueuses ou globuleuses qu'on dé- couvre quelquefois dans le cœur , ne sont pas , comme le dit Laënnec, des caillots de sang adhérens , mais, comme le pen- sent Burns, Testa etKeyssig, des produits de la sécrétion in- flammatoire. Lorsqu'une pseudomorphose naît de sang épan- ché , sa production n'a point lieu d'une manière immédiate ; le sang se coagule , et reste dans cet état , constituant ainsi le noyau de la formation anormale , ou se dissout , se convertit en substance animale générale, et seulement alors s'of^ ganise. IL A l'égard de la nutrition en particulier , 4° La substance solide des parties qui vivent par infussus- ceplion se trouve hors du système sanguin. Dans les injections qui ont le mieux réussi, il reste, entre les vaisseaux capillaires les plus déliés, des espaces plus ou moins larges , où la matière injectée ne pénètre point, et lorsqu'on examine au microscope des parties vivantes transparentes , on aperçoit non moins dis- <1) Froriq», NoHuen, t. XXXVI, p. 493. MODALITÉ DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 427 tinctement ces îles de substance , à travers lesquelles il ne coule point de sang. Muller (1) fait remarquer , en outre , que les vaisseaux capillaires ne peuvent point se répandre sur les fibres primitives des muscles et des nerfs, parce qu'ils ont un calibre supérieur au leur. La direction des branches vascu- laires ne répond pas exactement à la forme des organes ; par exemple , l'adhésion congéniale des doigts et des orteils s'é- lend quelquefois aux muscles, aux tendons et aux os, quoique les vaisseaux et les nerfs soient dans l'état normal (2). 5° Les tissus stratifiés ne possèdent point de vaisseaux , et de même que les substances du dehors peuvent les pénétrer , puisque les matières colorantes teignentl'épiderme, les ongles, les poils , les dénis, et que ces dernières s'imbibent d'acides au point de faire naître la sensation particulière qu'on désigne sous le nom d'agacement, de même aussi ces tissus s'imprè- gnent de liquides provenant de ceux qui vivent par intus-* susception. Nous en avons la preuve dans la couleur blanc de lait que les dents prennent chez les phthisiques, dans la carie^ qui ne les attaque plus quand elles sont mortes, et dans la consolidation qu'on observe quelquefois des morceaux qui en ont été détachés. Les ongles paraissent être imbibés de smegma cutané ; on peut se convaincre, chez certains individus surtout, qu'ils sont plus brillans dans l'état de sanlé parfaite , et que la moindre incommodité les dépouille de leur éclat. Le poil , sans avoir ni canaux à rinlérieur , ni pores à la surface, exhale et dépose de la matière onctueuse ; quand il blanchit , ce qui arrive quelquefois d'une manière subite, le pigment dont il était pénétré se retire. Enfin le cristallin , qui ne tient à sa capsule ni par du tissu cellulaire , ni par des vaisseaux, éprouve néan- moins un renouvellement de substance , croît et change de forme; il lui arrive quelquefois de devenir opaque, puis de reprendre sa transparence. Ce mode de nutrition est aussi celui des pseudomorphoses qui ne reçoivent pas de sang' dans leur substance , et où les injections les plus délicates n'arri- (1) Handbuch der Physiologie , t. I, p. 343. (2) Seerig , Ueler anyeborne Ferwachsung der Finger tind Zehen, p. 4. 428 MODAIITÉ DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. vent que jusqu'à la surface ou aux parties environnantes (1). 6" Il doit donc sortir des vaisseaux un liquide différent du sang , qui baigne les organes et leurs parties élémentaires , s'attache à eux , les imbibe , et y dépose des substances ca- pables de servir à leur nutrition. Nous donnerons à ce liquide le nom de suc plastique. Wolff (1) et Prochaska (2) le suppo- saient à l'état de vapeur, et Treviranus (3) le croyait muqueux. C'est ce liquide incolore qui tantôt entoure un tissu , comme l'humeur de Morgagni , suc plastique du cristallin (4) , tan- tôt remplit des interstices des tissus ( § 812 ) , ou imbibe ceux-ci ( § 833, 6° ). C'est lui qui, formé en plus grande abondance par la force médicatrice de la nature , devient le véritable baume à la faveur duquel guérissent les plaies , et qui , se chargeant d'une plus grande quantité de substances solides lorsque l'inflammation exalte la plasticité, représente le liquide plastique ( 854 , 4° ) par la production duquel débute toute homœoplastie ( §859), toute régénération (§860-861). Or nous avons vu (§469, l^^que les organes eux-mêmes tirent leur première origine, non pas du sang, mais d'une masse or- ganique primordiale. C'est donc maintenant une proposition gé- nérale fondée sur l'observation, que les organes ne procèdent point immédiatement du sang. Ils naissent et se nourrissent, chez les animaux privés de sang (661, II ) , d'un suc plastique interstitiel produit par l'assimilation de substances étrangères ; et , dans l'embryon des animaux placés à un plus haut degré de l'échelle, ils proviennent de la masse organique primordiale, sécrétée par l'organisme maternel et métamorphosée par as- similation. Le sang lui-même naît de cette masse primordiale par un développement d'ordre supérieur (§466, 1° ), et pour (1) Prochaska , Bemerkungen ueher den Organismus des menschlichen Kœrpers , p. dl7. (2) Ahhandlungen ueLer die Nutritionskraft , p. 8. (3) Bemerkungen ueber den Organismus des menschlichen Kœrpers, p. 102. (i) Die Erscheinungen und Gesetze des organischen Lehens , t. I, p. 401. (5) Sœmmerring , Beolachtungen uebev die organischen P^erwnderungen im'Auge nach Staaroperationen , p. 47. MODALITÉ DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. ^2^ être propre à la nutrition , il doit perdre son caractère parti- culier , il doit redevenir semblable à la masse organique pri- mordiale ; en un mot, il doit revêtir la forme de suc plastique^ soustrait à l'influence du cœur et à la puissance du courant sanguin. En effet, nous trouvons, chez les Insectes, que le sang est borné au cœur pulsaiif et à deux vaisseaux qui suivent tous les contours du corps sans se ramifier , de manière que la plus grande partie de la masse du corps est exsangue, et ne contient que du suc plastique. Du reste, ce dernier sert d'intermédiaire non seulement à la formation, mais encore à la déformation des tissus organiques, et même aussi au com- mencement de la sécrétion. Lucse (1) donne le nom de cellule nutritive à chaque île de substance , considérée par lui comme une espèce de vésicule celluleuse pleine d'une masse amorphe ; il admet en outre (2) des cellules de suc qui , formées d'un tissu cellulaire très- délicat , entourent les cellules nutritives , leur amènent des substances plastiques provenant des artères, et leur enlèvent des matériaux décomposés, pour les transmettre dans les vaisseaux lymphatiques. En agissant ainsi , il a rattaché , sans motifs suffisans , les phénomènes de la nutrition à des organes particuliers , dont on ne saurait donner la démonstration. 7" Wilbrand (3) prétend que si les organes étaient placés en dehors de la circulation , on ne pourrait expliquer leur nutrition. Mais comme la nutrition consiste en un échange intérieur de substance , et non en des additions extérieures . il doit y avoir toujours imbibition , et quand bien même une partie organique se trouverait au milieu du sang, tous ses atomes ne pourraient cependant être en contact avec lui. Les objections que Henszler (4) élève contre l'accom- (1) Grundzuege der Lehre ton den reproductive», Lelensihcetigkeiten des menschlichen Individuums , p. 135. (2) /èR, p. 139,297. (3) Erlœuterung der Lehre vom Kreislaufe in den mit Blut versehenen Thiere , p. 41. (4) Neue Lehreji im Gehiete der physiologischen Anatomie wnd der Physiologie des Me?ischen , p. 6o-7Q, 430 MODALITÉ DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. plissement de la nutrition par perméabilité, ne possèdent nôtt plusaucmie force probante. I! prétend que ce qui s'échappe- rait à travers les parois ne pourrait point être du sang, ce que nous accordons; mais il ajoute que ce ne pourrait être ni de la vapeur ni du sérum ; d'un côté, que des vapeurs ne sauraient produire des organes solides, qu'elles devraient déjà trans- suder des troncs , qu'elles ne pourraient point se dégager des vaisseaux qui sont pleins de sang, qu'elles troubleraient la transparence de l'œil, qu'elles rendraient inutiles les vasa ■vasorum^ et qu'elles donneraient un chaos de substances dis- parates, au milieu duquel chaque organe ne parviendrait point à reconnaître ce qui est approprié à sa nature; d'un autre coté , que le sérum ne contient ni globules du sang , qui sont cependant la chose essentielle dans l'acte de la nutrition, ni fibrine , de laquelle se produisent les parties fibreuses. Mais , outre que nous ne considérons le suc plastique , ni comme une vapeur ni comme du sérum, la vapeur du sang con- tient certainement aussi des parties conslituantes organiques qui peuvent se séparer sous forme sohde ( § 667, 2° ) ; il est infini- ment plus facile à la vapeur de traverser les parois minces des vaisseaux capillaires que les parois épaisses des troncs vasculaires ; l'eau s'évapore à travers une vessie qui en est pleine ; toutes les vapeurs ne sont point visibles et capables de brouiller la vue ; les vasa vasorum sont disposés de ma- nière à laisser transsuder de la vapeur ; chaque organe peut, en vertu d'une affinité élective, attirer à lui celles des sub- stances qui lui conviennent dans un liquide de nature com- plexe ; et quant à ce qui concerne le suc plastique liquide , il peut , tout comme la sérosité du sang ( § 689 ) et le liquide plastique ( § 854 , 4° ) , contenir de la fibrine et des globules du sang dissous. III. Dœllinger (1) croit possible, et par conséquent réel, que les sécrétions sortent du sang par des voies diverses , qu'elles proviennent du sang épanché à l'extrémité des vais- seaux , comme dans les membranes séreuses et muqueuses , de la continuation des artères avec {les canaux de sécrétion , <1) Was isfjibsonderung ? p. 60; MODAIITÉ DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. lyS% comme dans les reins , enfin de vaisseaux clos , par transsu- daiion (^). 8° Quant au premier point , il n'y a point , dans l'organisme parfait , de courans sanguins qui soient libres et sans pa- rois (2). Les vaisseaux des organes sécrétoires ont des parois bien distinctes (3). Nulle formation ne procède immédiate- ment du sang épanché (3°). 9° Kaan (4) regardait les filamens qui vont de la :peau à l'épiderme ( § 797, 20°) comme les dernières extrémités des artères, s'ouvrant dans les pores de l'épiderme, et Bichat encore les considérait comme des vaisseaux exhalans. Cruikshank (5) voyait en eux des organes de la transpira- tion , et les pores d'où sort la sueur (6) étaient à ses yeux les ouvertures des follicules sébacés. Eichhorn (7) a laissé in- décise la question de savoir si ces canaux , appelés par lui sudorifères , sont la continuation des artères , ou s'ils se ter- minent dans des cellules de la peau. Enfin Purkinje a démon- tré qu'ils ont un fond en cul-de-sac. D'après cela , la sueur pénètre à travers la paroi du fond de ces canaux , et de celte manière , lorsque l'on commence à suer, elle sort des fossettes de la peau sous une forme qui permet à l'œil de l'apercevoir; Il est permis de douter que toute la sueur, qui couvre uni- formément le corps entier, tandis qu'on ne rencontre pas partout les fossettes en égale abondance , suive uniquement celte route. Mais si elle traverse la paroi des canaux su- dorifères , elle peut tout aussi bien traverser l'épiderme, comme le fait évidemment la vapeur. Cruikshank (8) , pour établir l'imperméabilité de l'épiderme , se fonde sur ce que, quand cette membrane a été distendue en forme d'ampoule (1) lUd., p. 56. (2) Perspiratio dicta Hippocratis per universum corpus anatomice illus- trata , p, 172. (3) Muller, De glandularum secernentium structura penitiori , p. 112, (4) Perspiratio dicta Hippocratis , etc., p. 172. (5) Ahhandlung ueber die unmerliliche Ausduenstung , p. 18. (6) Ibid., p. 4. (7) Meckel , ArcMv fuer Anatomie , 1826 , p. 445. (8) Loc, cit., p. 11, 4^2 MODALITÉ DE lA Ï>LASTICITÉ ORCfANIQtJE. par l'action du feu ou d'un vésicatoire , elle ne laisse point échapper le liquide accumulé au dessous d'elle , et que la peau morte se dessèche bien plus lentement quand elle est couverte de son épiderme , que lorsqu'on l'en dépouille. Les liquides injectés dans les artères ne suintent point à travers Tépiderme , mais s'épanchent dessous (1) ; on ne peut point faire passer du mercure à travers l'épiderme détaché du corps ; un tube rempli d'extrait de noix vomique , introduit dans les parties molles d'un animal , n'empoisonnait pas quand il était bouché avec de l'épiderme , mais détermi- nait l'empoisonnement lorsqu'on l'avait clos avec de la peau couverte d' épiderme , et avec bien plus de rapidité encore quand on s'était servi de peau dénudée (2). Mais , quoique l'épiderme restreigne la transpiration , qu'il ne laisse passer ni les masses de sérosité^ accumulées au dessous de lui, ni les liquides injectés , et qu'après avoir été détaché du corps, il mette obstacle à la pénétration des liquides, nous ne pouvons cependant point le considérer comme absolu- ment impénétrable , puisque , sous les cataplasmes et par l'effet de l'immersion dans l'eau chaude , il s'imbibe d'outre en outre , et se distend par là au point de se plisser. Nous ne pouvons donc nous empêcher d'admettre que , quand il est en connexion organique avec la peau , il se laisse tra- verser, dans les circonstances propres à déterminer la transpiration ( § 878, 2°, 882), par le fluide qui fait effort vers lui en quantité insensible. Le cuir lui-même ne s'oppose point à l'exhalation. Cruikshank (3), ayant plongé dans une bouteille sa main couverte d'un gand de peau de daim , y trouva , au bout d'une heure, vingt-quatre grains d'un liquide clair; le pied enveloppé d'une botte dont le cuir était sec et raide , ayant été mis aussi dans le verre , les parois de celui-ci se trouvèrent, au bout d'une heure, chargées de quelques gout- telettes de liquide. (1) Weber, Anatomie des MenscJien , 1. 1 , p. 489. (2) Gendvin , Histoire anatomique des inflammations , 1. 1 , p. 407. (3) Loc. cit., p. 5G. MODALITÉ DE lA PIASTICITÉ ORGANIQUE. 4^^ Leuret et Lassaigne (1) ont vu à la loupe , sur des animaux vivans , le suc intestinal sortir par des ouvertures larges de 0,2 millimètre , entourées d'un rebord mince , et qu'ils ne pouvaient plus apercevoir après la mort. Beaumont (2) a re- connu , sur un homme vivant , que le suc gastrique s'épanchait également de petits points , qu'il regardait comme les orifices de conduits excrétoires. Mais , d'après Weber (3), on observe aussi des phénomènes analogues sur le canal intestinal mort, lorsqu'on a injecté de l'eau tiède dans les artères ou les veines, et ces ouvertures ne sont incontestablement que des follicules mucipares , ou des points amincis de la membrane muqueuse, qui laissent passer le liquide avec plus de facilité que tous les autres. Il est prouvé que les vaisseaux sanguins ne se continuent point avec les canaux de sécrétion ( § 786 , 3° ) ; on peut le conclure de l'histoire de la formation des glandes , du foie, par exemple (§ 439), où, suivant MuUer (4), les vaisseaux sanguins marchent d'abord, non point sur les parois mêmes des conduits biliaires , mais entre leurs ramifi- cations. 10° Nous ne pouvons donc considérer comme l'intermé- diaire de la sécrétion que la perméabilité qui appartient à la substance organique en général , mais plus spécialement aux vaisseaux capillaires d'un côté , au tissu cellulaire , aux vési- cules séreuses et au système cutané de l'autre (§ 833, 8°-16''). Ainsi les cellules des plantes sont closes , et cependant quel- ques unes d'entre elles , celles , par exemple, auxquelles on donne le nom de poils , exhalent les liquides gras , onctueux, caustiques ou acides , qui ont été sécrétés dans leur intérieur. La structure essentielle des organes sécrétoires saute encore aux yeux chez les Insectes , où les canaux de sécrétion , qui ne sont point liés ensemble par un parenchyme , se terminent (1) Recherches physiologiques et chimiques pour servir à l'histoire de la digestion , p. 69. (2) Neue Versiiche und Beohachtungen ueber den Magensaft und die Physiologie der Verdauung , p. 12. (3) Anatomie des Menschen , 1. 1 , p. 423. (4) De glandularum secernentiitm structura penitiori , p. 82. VIII, 28 434 MODALITÉ DE LA, PLASTICITÉ ORGANIQUE. en cul-de-sac et sont entourés par du suc plastique non con- tenu dans des vaisseaux. Lorsque E.enû;ger (1) avait injecté de Feau dans l'intestin d'un Insecte , en la poussant par la bou- che, il trouvait ensuite le liquide sécrété dans les vaisseaux uri- Baires plus aqueux que de coutume. L'essentiel d'un organe sécrétoire est donc une couche de substance organ-que , q i, d'un côté, soit en contact avec du suc plastique , et , de l'autre , présente une surface libre. Lorsque le système vasculaire a pris plus de développement, la première de ces surfaces est unie avec lui d'une manière étroite, et présente des vaisseaux capillaires, qui non seule- ment surpassent en diamètre ceux des organps non sécré^ toires , mais encore se ramifient davantage et forment un ré- seau plus serré. Mais constamment l'organe sécrétoire est étendu en surface , qu'il affecte d'ailleurs la forme d'une vési- cule close , d'un canal simple ou ramifié , d'une fossette ^ ou enfin d'une enveloppe extérieure. Aussi toute substance or- ganique, os, tendon, muscle, nerf, se transforme- t-elle en un organe sécrétoire, dès que ses liens sont rompus, et qu'elle-même devient une surface libre. C'est une circonstance tout-à-fait secondaire que le produit sécrété parvienne immédiatement au lieu de sa destination , ou y soit amené par des canaux. Bichat a établi une distinction inconvenante en disant qu'il n'y a sécrétion que dans ce der- nier cas , et donnant le nom d'exhalation à ce qui s'opère dans l'autre. 11° Le passage des vaisseaux sanguins aux surfaces sécré- toires , qu'on observe dans les injections et dans beaucoup d'hémorrhagies , n'a lieu également que par pénétration. Les cadavres des personnes qui ont succombé à une perte de sang par les poumons , le canal intestinal , ou la matrice , ne pré- sentent souvent aucune déchirure de vaisseaux, même après qu'on a fait macérer ces organes et quand on les examine à la loupe. Or, comme les hémorrhagies sont propres aux orga- nes sécrétoires , notamment au système de la membrane mu- (1) Physiologische Untersuchungen ueber die thierischo Haushaltunçf der lnsekten,T^.2i, MODAIITÉ DE lA PIASTICITÉ ORGANIQUE. 4^^ queuse , comme il leur arrive souvent , lorsqu'elles s'arrêtent dans un orgdne , d'éclater tout-à-coup dans un autre, comme elles peuvent provenir, 'sans nulle lésion mécanique , de ce que la sécrétion est sollicitée avec trop de force , puisqu'on voit l'action de téter Ou de traire faire sortir du sang des glandes mammaires quand le lait manque , ou qu'il arrive quelquefois au sang de suinter en gouttelettes à la surface des plaies produites par les vésicaloires (Ij, comme enfin il s'est trouvé des cas , rares à la vérité , où le sang a transsudé d'un sac anévrysmatique dans la cavité pectorale et causé ainsi la mort (2), on ne peut douter que , dans toutes ces cir- constances , il n'y ait pénétration des parois. Les mêmes réflexions sont applicables à l'exhalation , Sur le cadavre , des liquides injectés dans les vaisseaux san- guins (3). Cette exhalation ne s'observe qu'aux organes sécré- toires (4); elle est surtout commune aux vésicules séreuses et aux membranes muqueuses bipolaires; mais on la voit aussi dans des canaux de sécrétion , des conduits excréteurs et des réservoirs , et elle ne s'accomplit jamais avec plus de facilité que quand la sécrétion avait été accrwe pendant la vie par l'effet de l'orgasme (5). Si l'eau chaude est de tous les li- quides celui qui transsudé le plus facilement ainsi , tandis que les parties grossières, par exemple, les matières colorantes qu'elle charrie, demeurent dans les vaisseaux, c'est là un fait qui s'accorde parfaitement avec les phénomènes généraux de l'imbibition. Lorsque les injections ont bien réussi, le pas- sage a lieu des vaisseaux capillaires dans les culs- de sac des canaux de sécrétion, et si Muller (d) a remarqué, sur le foie , que le liquide passait mieux dans les troncs , cet effet tenait sans doute à ce que les branches les plus déliées retenaient encore une certaine quantité de leur contenu primordial , ou (1) Mémoires de la Société médicale d'émxilation , t. VII, p. 35, (2)7Sz^.,p. 32. (3) Alhinus, Jcademic. annotation., t. III, p. 47. (4) Weber, Anatomie des Metischen, t. I, p. 55. (5) Gendrin , Histoire anatomique des inflammations , t. II , p. 230. (6) Loc, cit,, p. 83. 436 MODALITÉ DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE, à ce que l'air qui s'y était accumulé ne pouvait s'en échapper. 12" Le suc plastique épanché des vaisseaux capillaires dans le tissu (6°), pénètre la substance de l'organe sécrétoire pour apparaître à la surface libre , trajet pendant lequel il se trans- forme en sécrétion proprement dite. Voilà pourquoi l'on par- vient encore , après la mort , à exprimer du tissu d'un organe sécrétoire , spécialement de celui des membranes muqueuses , un liquide analogue à la sécrétion normale , mais non identi- que avec elle ; ainsi Spallanzani obtenait, en comprimant les parois de l'estomac , un liquide différent du suc gastrique en ce qu'il était plus coulant et dépourvu de saveur. Lorsque Hering (1) retrouvait , au bout de quelques minutes , dans les divers organes sécrétoires , le cyanure de potassium et de fer qu'il avait injecté dans le' sang , ce sel était en voie de sécrétion , et il avait commencé par imbiber le tissu des or- ganes. Dœllinger (2) regarde comme faisant partie du tissu des organes l'eau qui les imbibe , de manière , et ce sont là ses propres expressions , que , quand elle s'évapore , ces orga- nes perdent une certaine quantité de leur substance et sacri- fient une partie de leur existence. Jusque-là sa théorie (§ 875, 12°) est d'accord avec nos vues ; cependant nous serions peu disposés à compter comme appartenant à la substance d'un corps le liquide dont il est imbibé, et à admettre qu'un fil de laine , trempé dans l'huile par un bout , perd une partie de sa substance lorsque l'huile découle goutte à goutte par l'au- tre bout pendant librement hors du vase. Suivant Treviranus (3), les organes sécrétoires puisent la matière de leur sécrétion en partie dans le tissu cellulaire, et en partie dans le sang ; cependant ce dernier cas ne pourrait être admis , jusqu'à un certain point, qu'autant que, la sécré- tion s'opérant en grande abondance et avec beaucoup de cé- lérité , le suc plastique contenu dans le tissu serait insuffisant, (1) Zeitschrift fner Physiologie , t. III, p. 86. (2) f'Vas ist AhsonderuiKj P p. 65. (3) Die Erscheinungen und Gcsetze des oryanischen Lehens , t. li p. 320 , 326. MODAIITÉ DE tA PIASTICtTÉ OUGANIQTJE. 4^7 et qu'il faudrait , pour subvenir aux besoins , que de nouveau suc se hâtât de transsuder du sang à travers les parois. Quant à Lucae , si par les organes auxquels il donnait le nom de cellules du suc (6°) , nous entendons le parenchyme en général, nous pouvons nous ranger à son opinion (1) , que les substances sécrétoires sorties des vaisseaux capillaires sont métamorphosées ici en Hquides particuliers. 13° Une sécrétion s'accomplit dans tout le trajet des canaux sécrétoires formés par la membrane muqueuse ; mais , comme les culs-de-sac , parfois dilatés en manière de vésicules , sont les parties initiales de ces canaux , c'est là aussi principale- ment que la sécrétion commence , et ce qui s'y est produit ne fîiit que se développer ou se perfectionner dans le reste du trajet. Nous devons donc combattre l'opinion de MuUer (2), que les culs-de-sac ont des usages absolument identiques avec ceux du reste de la surface des canaux de sécrétion. En effet : a. Si la sécrétion est accomplie par l'imbibition de la pa- roi , elle doit aussi être plus forte là où cette paroi représente une demi-sphère creuse , que dans les points où elle forme un simple canal. h. Ce n'est point la quantité , mais le degré de développe- ment ou de perfection de la sécrétion , qui est en raison di- recte de la longueur d'un conduit sécrétoire , et l'abondance de la sécrétion correspond davantage au nombre des culs-de- sac. Ainsi les conduits urinifères sont infiniment plus courts, mais plus nombreux^ que les conduits séminifères. c. Le phénomène est surtout très-prononcé dans l'ovaire des animaux sans vertèbres ( § 62) , où chaque œuf paraît à l'état de rudiment dans le cul-de-sac , et se développe de plus en plus à mesure qu'il parcourt la longueur du canal (*). (1) Grundsuege der Lehre von den reproductiven Lehensthwtigheitefft des menschlichen Individuums , p. 331. (2) Loc. cit., p. 421. ODuU'ochet (Mémoires pour servir à l'iiistoire anatomique et physio- logique des végétaux et des animaux, t. II, p. 444) a reconnu, sur les Pucerons, que cliacune des dix branches dont se compose l'ovaire contient des fœtus d'autant plus développés qu'ils sont plus voisins de l'oviducte , 458 MODÂtlTÉ^DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. Strauss (1) a aussi remarqué , dans d'autres organes sécré- toires des Insectes , que les extrémités vésiculeuses ont tou- jours des parois plus épaisses , et sécrètent davantage de li- quide. . d. Gomme la sécrétion diminue d'autant plus, dans le trajet de l'appareil sécrétoire, qu'on s'éloigne davantage de la glande, que, par exemple, en ce qui concerne les reins, elle s'affai- blit successivement dans les bassinets, les uretères, la vessie et l'urètre, elle doit aussi être déjà plus faible dans les ca- naux de la glande elle-même qu'à leur point initial. De même, la respiration se réduit à peu de chose dans les bronches et leurs ramifications , dont les extrémités vésiculeuses en sont le siège proprement dit. 14° On peut se convaincre que la sécrétion, une fois formée, éprouve ensuite un perfectionnement ou une métamorphose, en examinant le suc muqueux ( § 820, 1) et le smegma cutané ( § 821, 1° ), notamment le cérumen des oreilles; en effet, ces liquides s'épaississent à la surface. De même, le pus perd graduellement sa limpidité et acquiert peu à peu des globules (§855, VI). Il est facile aussi de s'en procurer la cqiï- Yiction par l'étude de toutes les sécrétions qui séjournent pendant un certain laps de temps dans des réservoirs ( § 112, 1»; 826, 2°; 827, 3° ). Partout le liquide sécrété se çop- centre de plus en plus à la surface qui le produit ( § 849, 3°, 5° ). Or, comme l'urine aussi subit un changement dans l'intérieur même des reins ( § 850, 1° ), nous devons admettre que les sécrétions en général se perfectionnent par la prolongation de leur contact avec la surlace organique qui les forme ou les conduit, soit que l'influence de la paroi vivante apporte des modifications dans leur composition chimique , soit qu'il en disparaisse une partie parTeiret de l'évaporation ou de la ré- sorption, soit enfin que de nouvelles sécrétions viennent se joindre à elles. et que les plus rapprochés du cul-de-sac ne sont que de petites niasses globuleuses semblables à des œufs. (1) Considérations générales sur Fanatoniie des animaux articulés, p. 252. MODAtlTÉ DE M PLASTICITÉ ORGANIQUE. 4^9 En effet, toutes les sécrétions qui parviennent au dehors se mêlent ensemble , le gaz avec la vapeur , la transpiration de la peau avec le smegma cutané , les larmes avec le suc muqueux de la conjonctive et de la cavité nasale , la salive , la bile et le suc pancréatique , tant les uns avec les autres , qu'avec le suc muqueux des organes digestifs , le sperme avec l'humeur prostatique. Dans les glandes elles-mêmes, à me- sure que les canaux de sécrétion s'éloignent de leurs extré- mités en cul-de-sac, et que leurs racines se réunissent pour produire des troncs, ils paraissent perdre leur caractère de spécialité, et former du suc muqueux, qui se mêle avec la sécrétion primitive. Partout donc la formation continue tant que le produit demeure en contact avec Torganisme. IV. La nutrition et la sécrétion sont les deux formes sous lesquelles se présente tout ce qui émane d'un seul et même liquide , le suc plastique ( 6°, 12° ) , par l'apparition duquel débute toute formation quelconque. Dans la nutrition, le suc plastique est organisé ou méta- morphosé en parties organiquessolides. La formation s'arrête là dans le système scléreux , où l'activité vitale est trop faible, la quantité de sang trop peu considérable , et la cohésion trop forte pour qu'il puisse se manifester d'autre produit que la substance de ce tissu. Elle ne va pas plus loin non plus dans les organes immédiats de la vie animale , où la vie atteint soa point culminant , où l'activité dynamique prédomine sur l'ac-* tivité plastique. Biais, en même temps qu'elle, il y a défor- mation ou destruction , en réparation de laquelle le suc plas-^ tique se trouve consommé. Les par i?s cons'Jtuées par lesysr tème du tissu cellulaire et par le système cutané sont les or- ganes plastiques , c'est-à-dire ceux de la propre substance des- quels s'en produit encore une autre , qui est repoussée hors de leur tissu , et qui se dépose à leur surface libre ( 10° ). Ainsi la sécrétion a les caractères d'un superflu de la nutri- tion. La première chose est que l'organe lui-même se nour» risse ; quand le besoin de sa propre conservation est satisfait, il sécrète ; les organes plastiques de la procréation , les tes- ticules , les ovaires, la matrice et les glandes mammaires, en fournissent la preuve. Or , comme la sécrétion émane aussi 44o MODALITÉ DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. du SUC plastique contenu dans le tissu interstitiel de l'organe sécrétoire , elle peut devoir naissance à la portion de ce suc qui reste après la nutrition accomplie, et que le tissu déjà saturé ne peut plus admettre dans sa substance. Mais la sé- crétion a des rapports plus généraux_avec la vie, elle est le but proprement dit de l'existence des organes dans lesquels elle s'exécute , et dont l'extension sous forme de larges surfaces annonce déjà qu'ils ne sont que des points de transition. Aussi peut-il y avoir des momens où le suc plastique , sans contri- buer en rien à la nutrition, passe en grande partie, ou même en totalité, au service de la sécrétion , surtout quand celle-ci est'plus abondante qu'à l'ordinaire', de manière qu'alors la nutrition et la sécrétion prédominent chacune à son tour. Ce- pendant il est possible aussi que les deux actes s'accomplis- sent simultanément, et s'appellent l'un l'autre, de sorte qu'au moment où les substances qui tendent à acquérir une cohésion plus forte prennent la forme solide , celles dans lesquelles l'expansion a le dessus passent à un état de fluidité plus grande, ou que l'organe sécrétoire admette dans son tissu les principes constituans du suc plastique qui sont susceptibles d'assimilation , et repousse ceux auxquels manque cette apti- tude. Ce qui semble annoncer qu'il y a réellement différence entre les matériaux de la nutrition et ceux de la sécrétion , c'est que les poumons et le foie , organes qui exercent leur action sécrétoire sur le sang veineux, reçoivent en même temps, par de petites branches du système aortique, du sang artériel, qui sert principalement à leur nutrition ( § 743, II ). Il est évident qu'une connexion intime existe entre les deux formes de la formation plastique , sous le point de vue de la manière dont elles s'accomplissent, et l'on ne saurait alléguer contre ce rapprochement qu'au lieu de marcher toujours de concert, elles se montrent quelquefois antagonistes l'une de l'autre, à tel point que, quand la formation de liquide devient trop pré- dominante, elle entraîne la fonte de l'organe lui-même , et qu'au contraire, lorsque la formation de solide l'emporte, le suc plastique tout entier se solidifie. MODALITÉ BE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 44 i III. Côté chimique de la formation organique. § 878. La formation est un acte chimique , une création de corps nouveaux aux dépens d'un autre corps antérieur , et par suite d'un, changement opéré dans le mode de combinai- son des principes constituans. Mais c'est le sang qui doit perdre son indépendance et subir une décomposition , pour que les parties organiques et les sécrétions puissent se produire. Qu'il ne fasse que se résoudre en ses matériaux immédiats , ou que ceux-ci eux-mêmes se réduisent à leurs élémens , qui alors entrent dans de nouvelles combinaisons, toujours est-il que ce liquide doit cesser d'être lui-même ; car les substances même qui ont de l'analogie avec celles qu'on y rencontre nesontnuUe part identiques avec ces dernières, et présentent sur chaque point des modifications spéciales. Comme les phénomènes chimiques en général sont accom- pagnés d'un antagonisme de polarité électrique , dont ils pa- raissent même dépendre , comme un antagonisme électrique repose sur un défaut de similitude., non pas seulement dans la substance , mais encore dans les simples particularités de coliésion , de forme et de limitation, et qu'en conséquence les conditions indispensables à sa manifestation sont très-multi- pliées dans l'organisme , comme enfin une tension électrique trop faible pour déterminer des commotions ou autres phé- nomènes semblables , peut cependant produire des change- mens de composition , nous sommes contraints d'admettre que les forces électriques entrent en jeu aussi dans la formation organique. Mais l'acte lui-même ne devient pas pour cela plus accessible à notre intelligence , et nous devons avouer que tout ce qu'on enseigne à son égard n'a pas même l'équivoque caractère de la probabilité. Dans un pareil état de choses, tout ce que nous avons à faire, c'est d'établir une distinction entre les points qui sont réellement clairs , ceux sur lesquels ne tombe qu'un demi-jour douteux , et ceux enfin que couvre une^obscurité profonde. I. Nous remarquons d'abord que les dispositions mécani- 4J2 MODAtlTÉ DE lA PIASTICITÉ ORGANIQUE. ques les plus générales du lieu dans lequel s'accomplit la for- mation, exercent de l'influence sur cette dernière. 1° Le sang se partage , dans les vaisseaux capillaires , en d'innombrables petits courans, dont la plupart n'admettent qu'une seule série de globules du sang (§725), et sont dix mille fois plus grêles que le courant aortique. Il pénètre dans îin espace plus vaste, éprouve plus d'expansion, acquiert plus de surface, et prend par là plus de tendance à la séparation de ses parties constituantes ; car toute substance quelconque se décompose d'autant plus facilement , et se résout avec d'au- tant plus de facilité eu formes diverses de cohésion,;qu'elle pré- sente davantage de surface , proportionnellement à sa masse. En outre, les vaisseaux capillaires ont une paroi plus mince , plus pénétrable , et le sang y entre plus directement en con- flit , tant avec la substance organique qu'avec le monde exté- rieur , de manière qu'il lui est plus facile de recevoir les im- pressions de ce qui se trouve hors de lui , puisque , ne pou- vant point se mettre en contact immédiat avec lui, il s'en est rapproché autant que possible. A mesure que le système vas- culaire se ramifie , sa capacité augmente , et la rapidité de la marche du sang diminue ; ce liquide coule plus lentement , plus tranquillement, dans les vaisseaux capillaires, et il y'sé- journe assez long-temps pour pouvoir subir une transforma- tion chimique ( § 711, 3°; 726, 4°). Ces particularités sont plus prononcées que partout ailleurs aux organes sécrétoires, dans les vaisseaux capillaires réticulés desquels le sang se rapproche de la surface libre autant qu'il lui est permis de le faire, et coule pendant plus long-temps au dessous d'elle. 2° La pression de la colonne du sang tend à opérer une transsudation à travers les vaisseaux capillaires que la contre- pression de l'atmosphère restreint dans certaines limites. De même que l'action plus puissante du piston de la seringue dé- termine les liquides injectés à s'échapper des vaisseaux ca- pillaires , de même aussi les sécrétions deviennent plus abon- dantes lorsque le contenu du système vasculaire est accru , soit par une formation de sang plus riche, soit par une injec- tion d'eau , ou quand le sang d'une partie éprouve de la peine H revenir par les veines; en effet, une compression exercée MODAtlTÉ DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 44 5. sur les veines détermine un épanchement de sérosité. Magen- die a vu la sécrétion séreuse du cerveau et de la moelle épi- nière augmenter pendant les efforts violens d'un animal , et l'on sait que les ulcères aux jambes fournissent une suppu- ration plus abondante lorsqu'on se tient debout. De même aussi, la sécrétion s'accroît lorsque, par la succion ou de toute autre manière , on diminue ou supprime la pression de l'at- mosphère , qui agit en sens contraire de celle du sang. II, Les changemens que Ig sang éprouve dans la nutrition et la sécrétion !•> Doivent ressortir pour nous d'une comparaison établie entre le sang veineux et le sang artériel. Mais outre qu'ici les observations se contredisent fréquemment , à cause des va- riations que l'état de la vie subit à chaque instant (§ 752, III), la formation est une action moléculaire (§ 876 , II), par con- séquent aussi le changement que le sang éprouve au contact momentané des organes à travers lesquels il coule, est trop peu considérable pour que nous puissions en acquérir une pleine etentière connaissance. La seule chose qui semble être claire, c'est qu'en parcourant les vaisseaux capillaires, le sang abandonne ceux de ses matériaux qui sont le plus dé- composables, et contient ensuite davantage de substances combinées (§ 752, 7°), qu'il perd une certaine quantité de ses matériaux propres , le cruor et la fibrine , et qu'ensuite il renferme, proportion gardée, davantage d'albumine, de sels et d'eau (§ 752, 8°), qu'enfin il perd de l'oxygène et de l'a- zote, et devient proportionnellement plus riche en carbone. On en pourra juger d'après la table suivante , dont les élé- mens ont été fournis par les recherches de Michaelis (§ 751,11°), de Macaire et de Marcet (1) : (1) Annales de physique et de chimie , t. LI, p. 382, 444 MODALITÉ DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. Oxygène . Azote . . Carbone . Hydrogène MiCHAEIIS. Sang artériel. 0,23744 0,16801 0,51921 0,07533 Sang veineux. 0,23405 0,16721 0,52108 0,07766 Macaire et Marcet. Sang artériel. 0,263 0,163 0,502 0,066 Sang veineux. o,2n 0 162 0,557 0,064 40 On doit comparer aussi le sang , tel qu'il est dans l'état normal, avec ce qu'il devient sous l'influence d'un jeûne prolongé , circonstance pendant laquelle les pertes que lui a fait éprouver la non-interruption de la nutrition et de la sécrétion , ont été réparées seulement par les matériaux ré- sorbés dans son propre organisme, et non par des substances alimentaires introduites du dehors. Suivant GoUard de Mar- tigny (1) , un Lapin , épuisé de sang , donnait , en grammes , quand il avait Sang. Albumine et Cruor. Fibrine. Eau et Sels. 576 381 135 50=0,0857 41=0,1083 15=0,1159 10=0,0168 4=0,0109 4=0,0082 516=0,8975 336=0,8808 119=0,8759 Été nourri comme à l'ordinaire. Jeûné cinq jours Jeûné onze jours Ainsi, c'était principalement sur la fibrine qu'avait porté la perte du sang , par l'effet de l'abstinence ; l'eau et les sels avaient moins diminué , l'albumine et le cruor moins encore, de manière que leur quantité relative avait même augmenté , ce qui ne doit vraisemblablement être attribué qu'à la seule albumine. (1) Blainville, Cours de physiologie générale , 1. 1 , p. 279. MODALITÉ DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 44 ^ 5" Enfin il faudrait avoir égard aussi à l'état du sang après des sécrétions excessives. D'après Reid Clanny, dans le cho- léfo^JM le vomissement et la diarrhée avaient entraîné une grande quantité d'eau , avec de l'albumine et des sels , la proportion des parties constituantes du sang à celle de ces mêmes parties chez un sujet en santé était, pour les sels, de 0 : 14,00 ; pour l'albumine , de 1 : 3,90 ; pour la fibrine , de 1 : 3,00 ; pour l'eau, de 1 ; 1,17 ; pour l'acide carbonique, de 1 : 0,48 ; pour le cruor, de 1 : 0,23. III. Si les recherches semblables à celles qui viennent d'être rapportées (3°, 4°, 5") se multipliaient , l'histoire de la partie chimique du travail de la plasticité aurait une base plus so- lide que celle sur laquelle elle repose aujourd'hui. Cependant nous sommes obligés de nous en tenir aux probabilités , et d'abord nous allons considérer les matériaux immédiats du sang comme matière servant à la formation. C» Nous avons déjà combattu précédemment ( § 666, 676 , 3» ; 687 , 2° ; 689 ) l'opinion que les globules du sang , dans leur état naturel , sont composés de deux parties distinctes , un noyau incolore et une enveloppe rouge , et que les noyaux sortent des vaisseaux capillaires pour aller former, soit tous les tissus , comme semble l'admettre Edwards , soit les fi- bres musculaires, comme le prétend Home (l),ou la sub- stance nerveuse , comme le pense Ehrenberg (2). Nous ajou- terons ici d'autres argumens encore contre cette théorie mécanique de la nutrition. a. Les substances ne sortent point du sang par des pores susceptibles de laisser passer des solides , mais par une im- bibition qui ne fait place qu'à des liquides ; et comme les glo- bules du sang ne traversent pas le filtre de papier, ils ne peuvent point non plus passer à travers les parois des vais- seaux capillaires. Ces derniers ayant , dans le cerveau , un diamètre inférieur à celui des vaisseaux capillaires eux- mêmes , ils devraient avoir, pour livrer passage à des globules (1) Lectures on comparative anatomy, t. V, p. 100. ^2) Poggendorff , Amalm, t. CIV, p. 451. 44^ MODALITÉ DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. du sang, des ouvertures dont le diamètre égalât le leur même. h. Comme les globules du pus ne se forment évidemment qu'après la sortie des vaisseaux , de même aussi les globules qu'on trouve dans d'autres sécrétions et tissus ne peuvent non plus se produire qu'à l'endroit où la substance est dé- posée. c. La forme et le volume des globules du sang ne corres- pondent point à ceux des tissus ; ces globules ont la forme de lentilles ou de disques , tandis qu'on ne trouve dans les tissus que des globules (1) , ou des grumeaux irréguliers, moins bien délimités (2). D'après MuUer (3), les globules du sang de la Grenouille sont cinq à huit fois plus gros que les fibres pri- mitives des nerfs , ceux du Lapin deux fois , et ceux du Chat trois fois plus volumineux que les fibres nerveuses les plus déliées. d. Si les globules du sang déposaient leurs enveloppes co- lorées dans la nutrition , ces enveloppes devraient se retrou- ver, sans noyau , dans le sang veineux , et l'on n'en découvre aucune trace. En repoussant cette théorie mécanique de la nutrition , et l'hypothèse qu'on en a déduite, de l'existence d'orifices béans aux vaisseaux capillaires (4) , nous croyons , avec Dœllin- ger (5) , Denis (6) , Heusinger (7) , Kaltenbrunner, Koch (8) , Baumgsertner (9) et Wagner (10) , que les globules du sang (4) Treviraflus, Verviischte Schriften, 1. 1, p. 121. (2) Scudamore , Versuch ueher das Blut , p. 18. (3)Poggendoiff, Annalen, t. CI, p. 549. (4) Henzsler, Neue Lehren im Gebiete der pliysiologischen^Anatomie , p. 135. (5) JVas ist Ahsonderung ? p. 54. (6) Recherches expérimentales sur le sang humain , considéré à l'état sain , p. 317. (7) Untersuchungen ueher die anomale Kohlen-und jPiE tA RASTICITÉ ORGANIQUE. complètement imbibé , le courant ique l'absorption avait fait naître continue , et agit comme force à ter go; de sorte que, tandis que la face tournée vers le suc plastique attire de nou- veau liquide , la surface libre en laisse échapper. Ainsi l'eau dans laquelle on a placé un intestin vide , pénètre non seule- ment dans son tissu, mais encore dans sa cavité (1). Incon- testablement, le vide qui s'opère à la surface sécrétoire libre, et la pression qui a lieu du côté opposé , contribuent au phé- nomène. Lorsque des parties organiques s'éloignent l'une de l'autre et produisent ainsi des vides , des cellules ou des vé- sicules closes , la pression du sang doit déterminer ainsi une sécrétion dans ces dernières , et quelque chose de plus ou moins semblable se passe sur toute l'étendue du système cu- tané. Ainsi le bois qui se gonfle d'humidité chasse la gommô au dehors, et la dépose à la surface de récorce(2). II. Mais, dans toute formation organique, l'attraction, considérée sous le point de vue de l'espace, n'est que le côté extérieur, en quelque sorte l'introduction, d'un acte dont l'essence et le complément consistent en une métamor- phose du sang. La nutrition repose donc aussi sur ce que chaque organe s'approprie par transformation les matériaux constituans du sang correspondans à sa nature , el, quoique l'ingénieux WolfF ait ouvert , relativement à la doctrine de la formation organique , la carrière qu'il faudra désormais suivre dans tous les temps , cependant il nia cette assimilation (3) ; mais c'est le siècle où il vivait qu'on doit accuser de ce que , sous ce point de vue , il sut si mal interpréter la nature. 6° C'est une propriété générale de tous les corps de faire naître dans d'autres un état analogue au leur, et de chercher à les rendre semblables à eux-mêmes sous le rapport de l'acti- vité, ou, en d'autres termes, à se les assimiler. En considé- rant un tel état comme chose , on donne à cette assimilation le nom de communication ou de propagation. Le son se pro- (1) Diitrocliet , L'agent immédiat du mouvement vital , p. 120. (2)|De Candolle, Physiologie végclaic , t. I, p. 16. (3) Loc. cit., p. 45. CAUSE DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE.^ 471 page, parce que chaque couche d'air provoque , dans celle qui vient immédiatement après elle , une vibration semblable à celle qu'elle-même éprouve ; la propagation de la lumière et de la chaleur n'est également qu'une excitation du même état dans des parties de la matière situées sur les limites les unes des autres ; c'est de la même manière que l'aimant fait passer le fer ordinaire à l'état magnétique, ou qu'un corps électrique excite, non seulement dans les corps indifférens, mais très-disposés à recevoir l'excitation électrique , c'est-à- dire dans ceux qu'on nomme conducteurs, mais encore dans des corps électrisés, et animés d'une polarité contraire , quand ces derniers sont plus faibles , l'électricité qui lui appartient à lui-même. Cette tendance d'un état à se propager et à se multiplier, qui fait qu'un acte dont l'accomplissement pré- sentait d'abord des difficultés , s'exécute de plus en plus ai- sément une fois qu'il a commencé , se manifeste aussi à l'é- gard de l'adhésion , puisqu'on voit les liquides monter plus facilement dans un tube capillaire , lorsqu'il a été préalable- ment mouillé. La même assimilation a lieu dans les changemens de cohésion. Le solide favorise la solidification du liquide : les premiers cristaux paraissent sur la paroi du vase qui ren- ferme la liqueur, et eux-mêmes deviennent ensuite les points d'appui d'une nouvelle cristallisation ; ainsi , par exemple , d'après Mitscherlich, lorsque du soufre fondu se refroidit, les parties qui passent à l'état solide partent du vase pour s'étendre à travers la masse encore liquide sous la forme de rayons , d'où naissent ensuite de nouveaux rayons. Quelque chose d'analogue a lieu dans les précipités vaporeux; lors- qu'un très-petit nuage se montre par un temps serein, on voit souvent une multitude de nuages semblables paraître en peu de minutes. Mais l'assimilation ne porte pas seulement sur le degré de la cohésion ; elle s'applique aussi au mode particu- lier de la configuration; une liqueur saline cristallise plus aisément sur un cristal du même sel que sur un autre corps , et, quand l'eau est voisine du terme de la congélation, il suffit d'en toucher la surface avec une aiguille de glace , pour la déterminer sur-le-champ à se congeler. Lorsque , dans une dissolution de deux sels, on plonge un cristal de l'un de ces 473 CAUSE DE Ï,A PIASTICITE ORGANIQUE, sels, la masse entière, ou du moins sa plus grande partie, cristallise sous la forme de ce sel. L'assimilation ne se manifeste pas moins évidemment dans les opérations chimiques ; cer- tains corps sont difficiles à enflammer , mais ils brûlent avec rapidité dès qu'ils ont pris feu sur un point : de même , toute oxydation une fois commencée accroît l'affinité pour l'oxy- gène, comme toute hydrogénation qui a débuté augmente celle pour l'hydrogène. 7" La substance organique ne saurait être exclue de cette assimilation. Un corps difficile à mettre en fermentation fer- mente d'une manière rapide dès que le travail intestin a été excité en lui par le contact d'un corps fermentant : le ferment provoque le même acte de décomposition que celui qui s'ac- complit en lui. Une fois que la coagulation du sang a commencé, elle continue comme par fermentation ; lorsque ^Schrœder (1) l'avait retardée par une addition de bile, s'il venait à ajouter un petit morceau de caillot frais , le sang se trouvait coagulé un quart d'heure après , tandis que , sans cette addition , il ne Tétait qu'au bout de trois heures. Un corps étranger dans la vessie attire à lui l'acide urique ou d'autres substances de Turine, les précipite et se couvre continuellement de couches nouvelles de ces matériaux. Dès que de la cholestérine'S'est séparée dans la vésicule biUaire , ce noyau en attire sans cesse de nouvelle de la bile. 8° Dans la vie plastique, la propagation va jusqu'à l'assimila- tion proprement dite , puisque chaque déploiement d'activité s'y accompagne d'une formation , et que l'éveil d'une activité pareille entraîne aussi une formation semblable , mais qui , étant intérieure et moléculaire, se soustrait à l'observation im- médiate , et ne se révèle que par son produit , la substance métamorphosée. Ainsi le liquide plastique épanché est d'abord le même partout; mais il se modifie ensuite diversement, et prend le caractère des parties environnantes , de celles dont il doit réparer les pertes (§ 861 , 6" , 7°). En vertu de cette assi- milation poussée au point de provoquer une transformation, les débris d'une partie suppléent à la perte que sa substance a (1) Observationès i^natomico-'pathologici et practici argumenti, p. 47, CACSB Dï JLA riASTICITÊ ORGANIQUE. 47^ éprouvée ; de la peau neuve se forme bien sur une surface mus- culaire ; mais sa production est bien plus facile et plus com- plète immédiatement aux bords de l'ancienne peau. Lespseu- domorphoses ont la plupart du temps , comme le fait remar- quer Schrœder (1) , une certaine analogie avec le sol sur le- quel elles croissent , ou avec les parties normales voisines, et, par exemple, elles sont fréquemment cartilagineuses aux alen- tours des articulations. Lorsque l'une d'elles a été occasionée par une compression ou par un coup , elle se maintient et croît peu à peu, souvent jusqu'à un volume énorme, en s'as- similant les substances normales , et les convertissant en sa substance squirrheuse, stéatomateuse , etc. Si, après l'extir- pation de télangiectasies , de lipomes , de polypes , de squir- rhes , etc., il reste un peu de la substance anormale en con- nexion avec le reste de l'organisme , la pseudomorphose se reproduit de la même manière. Voilà comment la suppuration (§ 863, 22") et toute dégénérescence quelconque (§ 867,2°) se propagent à partir du point oii elles ont pris naissance . Voilà comment aussi s'accomplit l'infection , la substance anormalement produite déterminant la production d'une sub- stance semblable dans un autre individu ; Forbes s'étant blessé au doigt en disséquant un tubercule , il s'y développa un tubercule (2) : lorsque Gunther (3) avait injecté du pus dans les veines d'animaux , ce liquide s'arrêtait dans les ra- mifications les plus déliées de l'artère pulmonaire (§ 744, VI), «t autour de ces stases se produisait de nouveau pus , tantôt de bonne qualité , tantôt ichoreux, suivant la nature de celui qui avait servi à l'injection. 9° Ce n'est donc point un phénomène isolé , mais un phé- nomène reposant sur la loi générale de l'assimilation , que celui qui consiste en ce que les tissus organiques convertissent, dans l'acte de la nutrition , les matériaux constituans du sang en leur propre nature. Comme l'intestin assimile à l'organisme en général les alimens parvenus dans son intérieur et les ti-ans- (i)loc. cit., p. 35. (2) Froriep , Notisen, t. XXXVIÏ , p. 288. (3) Rnst, Magasin fuer die gesammfe Heilktindf) fi Xt-II > p. 351. 474 CkVSi DE th. PIASTICITÉ ORGANIQUE. forme'en chyle , mais que le sang métamorphose le chyle en sa propre substance , de même aussi les organes s'assimilent le sang, àTégard duquel ils se comportent ainsi que lui-même se cornporte par rapport au monde extérieur. Ils ne peuvent point attirer ce qui leur ressemble parfaitement , mais seule- ment ce qui a de Falfinité avec eux , et ils ne trouvent cette substance affine que dans le sang. Car leurs principes con- stituans s'y rencontrent soit à l'état liquide , et nous savons qu'une même substance manifeste une polarité électrique op- posée suivant qu'elle est liquide ou solide, soit dans un autre état de combinaison chimique , soit enfin tout formés et sus- ceptibles de recevoir une forme quelconque , tandis que l'or- gane ne les attire qu'autant que lui-même vieillit, se décompose et se déforme. Pendant les inflammations , l'assimilation du sang dans les organes est troublée , ce qui favorise leur dégé- nérescence et la formation d'hétéroplasmes. 10° Il est concevable , il est même vraisemblable , si l'on en juge d'après des phénomènes analogues (8°), que le liquide contenu dans un canal de sécrétion peut s'assimiler de la même manière les principes constituans du sang , et continuer ainsi la sécrétion une fois commencée. Cependant cette explication ne suffit point , puisqu'il arrive quelquefois dans le cours de la vie que de nouvelles sécrétions s'établissent , et que d'an- ciennes s'interrompent, pour reprendre plus tard. Mais comme la paroi de l'organe sécrétoire métamorphose une partie du suc plastique en l'assimilant à sa propre substance, elle peut aussi convertir le reste en une sécrétion qui suinte de son tissu. Ainsi l'histoire de la vie embryonnaire (§ 461 , 465) nous a déjà offert l'exemple d'une transforma- tion des substances pendant leur passage à travers la sub- stance organique. III. Comme des antagonismes électriques se manifestent dans les phénomènes chimiques en général , ils ne peuvent pas non plus demeurer sans jouer un rôle dans cette méta- morphose des matériaux du sang. dl" Un rapport électro-magnétique peut avoir de l'influence sur la solidification dans la nutrition. D'après Hansteen , une dissolution-d'argent donne des cristaux plus complets et plus CAUSE DE lA Ï?LASTICITÉ ORGANIQUE. 47^ nombreux dans la branche boréale d'un lube recourbé qui occupe le méridien magnétique , que dans la branche australe, ouque quand les deux branches sont tournées de Test à Touest; suivant Ure , lorsqu'on met une dissolution saline en rapport avec la pile voltaïque , la cristallisation commence au pôle né- gatif, parce que l'excès d'alcali qui se produit sur ce point l'y favorise ; selon Fischer (1) , lorsqu'après avoir bouché l'un des bouts d'un cylindre de verre avec une vessie , on emplit ce tube d'une dissolution de sel métallique ;, et qu'on le pose sur une plaque d'un métal avec lequel le métal dissous se com- porte comme élément électro-positif , ce dernier se précipite sur les deux faces de la vessie , le métal positif attirait à lui l'acide négatif. Nous trouvons ici, comme dans beaucoup d'autres circonstances , un accord général entre la formatioa organique et les phénomènes de l'électricité , qui nous auto- rise à admettre que les oppositions électriques entrent en jeu aussi dans cette formation (*). Le sang tiré de la veine ne subit (1) Poggendorff , Annalen, t. LXXII, p. 289. (*) Berzelius vient d'émeUre à ce sujet ( Jalireshertclit ueler die Fort- scliritte der physischen JVissenscliaften , 15« année, p. 23?) des idéeS que nous croyons devoir reproduire textuellement , à cause de leur im- portance : « Lorsque , dans la nature inorganique , de nouvelles combi- naisons se produisent par l'action de plusieurs coi-ps les uns sur les autres , cet effet tient à ce qu'il se manifeste alors une tendance à la combinaison; les corps doués de fortes affinités s'unissent ensemble , comme le font également, de leur côté, les corps doués d'affinités plus faibles, que ceux-là ont abandonnés. Jusqu'en 1800 , on ne soupçonna pas qu'outie le degré d'affinité, il pût entrer là en jeu autre chose que la chaleur et parfois la lu- mière. Mais on découvrit l'influence de l'électricité, et bientôt on trouva que les relations électriques et chimiques étaient une seule et même chose, que l'affinité élective n'était qu'un résultat de relations électri- ques opposées , accrues par la chaleur et la lumière. Nous n'avions donc encore d'autre moyen d'expliquer la production de nouvelles combinaisons qu'en disant qu'elles concernent des corps dans lesquels les relations élec- triques pouvaient être mieux neutralisées par l'échange mutuel des prin- cipes constituans. En voulant appliquer l'expérience acquise dans le règne inorganique à l'étude des phénomènes chimiques qui ont lieu dans la na- ture vivante , nous trouvions qu'il se produit dans les organes des corps de la nature la plus variée , dont les matériaux sont fournis par une seule liqueur ou dissolution , qui circule avec plus ou moins de lenteur dans les vaisseaux. Ceci est vrai surtout des animaux , chez lesquels on 47^ CAUSE DE LA PIASTICITÉ ORGANIQUE- pas, dans le cercle de la pile voltaïque, d'autre changement chimique que celui qui tient à l'action de l'acide développé au voit des Vaisseaux recevoir du sang sans interruption aucune dans la co- lonne, et fournir du lait, de la bile, de l'urine, etc., sans l'accession d'aucun autre liquide qui puisse y déterminer des décompositions doubles. Evidemment il se passe là quelque chose dont la nature inorganique ne nous avait point encore donné la clef. Kirchhof vint , et découvrit que i'amidon , dissous , à une certaine température , dans des acides étendus , se convertit d'abord en gomme , puis en sucre de raisin. Nous devions être portés à chercher ce que l'acide avait enlevé à l'amidon, pour que le reste de celui-ci pût donner naissance à du sucre; mais il ne se dégage aucun gaz , rien ne se combine avec l'acide , dont on peut retrouver, par le moyen des bases , toute la quantité qu'on a employée , et la liqueur ne contient que du sucre , pesant même plus que l'amidon mis en expérience. £a chose n'était pas moins énigraatique pour nous qu'une séci'étion chez les corps vivans. Thénard découvrit ensuite un liquide dont les principes constiluans ne sont unis ensemble que par une force très-faible , l'eau oxygénée; ces élémens restent combinés sous l'influence des acides; mais celle des alcalis suscite en eux une tendance à se séparer, et provoque ainsi une sorte de fermentation lente , dont les résultats sont qu'il se dégage du gaz oxygène et qu'il reste de l'eau. Mais la décomposition n'est pas déterminée uniquement par les corps solubles dans l'eau oxygénée : elle l'est aussi par des corps solides , tant inorganiques, le manganèse, l'argent, le platine et l'or, qu'organiques, la fibrine du sang. Le corps qui l'excite ne le fait point en prenant part lui-même à de nouvelles combi- naisons , car aucun changement n'arrive en lui. Il agit donc en vertu d'une force inhérente, dont la nature ne nous est point encore connue , quoiqu'elle révèle son existence de cette manière. » Peu avant la découverte de Thénard , H. Davy avait observé nn phé- nomène dont la liaison avec celui qui précède ne fut point aperçue de suite. Il avait trouvé que du platine échauffé jusqu'à une certaine tem- pérature avait la propriété , mis en contact avec un mélange d'air atmo- sphérique et de vapeur d'alcool ou d'éther, d'entretenir la combustion de cette vapeur, mais que l'or et l'ai'gent ne possédaient pas la même pro- priété. Bientôt après , E. Davy découvrit une préparation de platine , qu'on reconnut plus tard être du platine métallique très-divisé , et qui , à la température ordinaire de l'air, a la propriété , quand on l'imbibe d'al- cool, de devenir rouge par l'inflammation de ce dernier, ou, quand l'alcool est étendu d'eau , de le convertir en acide acétique. Vint alors la découverte de Dœbereiner, qui couronna en quelque sorte les précédentes, savoir, que l'éponge de platine possède la propriété d'enflammer le gaz hydrogène à l'air, propriété qu'examinèrent ensuite Dulong et Thénard , dont les recherches ont appris qu'elle appartient à plusieurs corps simples et composés , mais à des degrés si différons , que , tandis qa'elle se déploie CAUSE DE LA tLASTICIÎÉ ÔïlGANIQlJÈ. 4.77 pôle positif , et de l'alcali mis en évidence au pôle négatif , de manière que l'albumine se coagule au pôle positif, mais quel- même bien au dessous du point de congélation dans le platine , l'iridium et autres métaux compagnons du platine , elle exige une température élevée pour l'or, plus élevée encore pour l'argent , et d'au moins trois cents degrés pour le verre. Dès lors, cette propriété n'était plus un phé- nomène isolé et exceptionnel : elle se présentait comme une propriété générale, appartenant aux corps à des degrés divers. Il devint donc pos- sible de faire des applications du phénomène. On avait remarqué , par exemple , que la conversion du sucre en acide carbonique et en alcool , telle qu'elle a lieu dans la fermentation , par l'influence d'un corps inso- luble , appelé ferment , et qui peut être remplacé , quoiqu'avec moins d'efficacité , par de la fibrine animale , de l'albumine végétale coagulée , du fromage et autres substances analogues , ne saurait être expliquée par une action chimique entre le sucre et le ferment , comparable à ce qui se passe dans les doubles décompositions. Mais , en comparant ce phénomène avec ceux qui sont connus dans la nature inorganique , on trouva qu'il ne ressemble à aucun autant qu'à la décomposition de l'eau oxygénée par l'influence du platine , de l'argent ou de la fibrine : il était donc très- naturel de présumer une action analogue à celle du ferment (Traité de chimie , t. YI , p. 413 , 414). Mais on ne s'était encore souvenu d'aucun cas qui fût comparable à l'action des alcalis sur l'eau oxygénée , c'est-à- dire de cette influence inexplicable qu'un corps dissous exerce sur un autre contenu dans la même dissolution. On ne citait point encore comme exemple la conversion de l'amidon en sucre par l'influence de l'acide sul- furique \ mais la découverte de la diastase et de son action analogue, quoi- qu'infiniment plus puissante, sur l'amidon, appela l'attention de ce côté. Ce furent surtout les ingénieuses recherches de Mitscherlich sur la formation de l'éther, qui y conduisirent. Parmi les nombreuses conjectures imagi- nées pour expliquer la conversion de l'alcool en éther par l'influence de l'acide sulfurique, figurait celle d'après laquelle l'avidité de cet acide pour l'eau est la cause de l'éthérification , l'acide enlevant à l'alcool (composé d'un atome d'éthérine, et de deux atomes d'eau), un atome d'eau , et produisant de l'éther par la combinaison de l'autre atome d'eau avec celui d'éthérine. Cette explication est simple , belle , et par- faitement en harmonie avec ce que nous savons de Tinfluence des corps les uns sur les autres par le fait de l'affinité. Une circonstance néanmoins restait équivoque , celle de savoir pourquoi d'autres corps , qui ne sont pas acides et qui ont de l'avidité pour l'eau , ne peuvent point produire le même phénomène. Si c'était le degré d'affinité pour l'eau qui déterminât le chafflgement des principes constituans de l'alcool , la potasse et la soude, le chlorure de calcium , la chaux anhydre et autres devraient produire *• l'éther, ce qui n'a jamais lieu. » Mitscherlich fit voiy alors que l'acide sulfurique, à un certain degré 478 CAUSE DE Là. PLASTICITÉ ORGANIQUE. quefois aussi au pôle négatif , peut-être à cause de la chaleur qui [s'y dégage (§ 673, 3°; 677, i°). L'observation remar- de dilution et de température , possède la propriété , quand on y ajoute de l'alcool en telle proportion que le rafraîchissement qui résulte de là fasse précisément disparaître l'excès de chaleur ajouté par réchauffement , de convertir cet alcool en éther et en eau , qui , la température étant Lien supérieure au degré d'éhullition de l'eau , s'échappent ensemble du mé- lange , et dont le poids réuni , après le refroidissement du produit, égale exactement celui de l'alcool employé. Le mode de préparation, et l'émis- sion simultanée de l'eau et de l'éther, étaient déjà connus avant les ex- périences de Mitscherlich ; mais personne avant lui n'avait entrevu les conséquences qui découlent de là. Il fit voir qu'à cette température l'acide sulfurjque exerce sur l'alcool la même force que les alcalis sur l'eau oxy- génée ; car on ne pouvait point l'expliquer par une affinité pour l'eau , puisque l'eau s'échappe avec l'éther. Il en vint donc à conclure que l'ac- tion de l'acide sulfurique et de la diastase sur l'amidon, dans la conversion de ce dernier en sucre , est de même nature. » Il est donc prouvé que beaucoup de corps , tant simples que composés , tant solides que dissous , ont la propriété d'exercer sur des corps composés une influence tout-à-fait différente de l'affinité chimique ordinaire, en vertu de laquelle ils déterminent les élémens de ces corps à s'unir en- semble dans d'autres proportions , sans qu'eux-mêmes prennent néces- sairement part au phénomène par leurs propres principes constituans , quoique ce dernier effet puisse avoir lieu quelquefois. » Cette nouvelle force , qui appartient à la nature tant inorganique qu'organique , et de laquelle résultent des phénomènes chimiques , doit sans doute être plus répandue qu'on ne l'a pensé jusqu'à présent , et sa nature nous est encore inconnue; Quand je l'appelle une force nouvelle , je n'entends point dire qu'elle est indépendante des relations électro- chimiques de la matière; loin de là, je ne puis que présumer qu'elle en est un mode particulier de manifestation. Cependant , aussi long-temps que les connexions mutuelles entre elle et ces relations nous seront in- connues , il y aura de l'avantage à la considérer provisoirement comme une force à part , et à lui imposer un nom. Je propose donc de l'appeler force catahj tique, et de nommex catalyse le genre de décomposition qu'elle détermine , comme on appelle analyse la séparation des principes consti- tuans des corps au moyen de l'affinité chimique ordinaire. La force ca- talytique paraît consister proprement en ce que des corps ont , par le seul fait de leur présence et non par leur affinité , la puissance d'éveiller des affinités sommeillantes à cette température ; de sorte que, dans un corps composé, les élémens se réunissent en d'autres proportions, telles*qu'il résulte de là une neutralisation électro-chimique plus grande. Ces corps agissent alors de la même manière que la chaleur, et l'on peut se demander si ua degré inégal de force catalytique dans des corps divers peut déter-. CAUSE DE LA PLSSTICITÉ ORGANIQUE. 479 quable faite par Dutrochet(l) qu'une émulsion de jaune d'œuf, dans laquelle sont plongés les conducteurs d'une pile galva- nique , forme une onde alcaline transparente au pôle négatif , et une onde acide moins translucide au pôle positif, et que les deux ondes , attirées l'une vers l'autre , produisent au point de contact un strie de substance solide, conduira peut-être à des résultats plus intéressans encore ; mais Muller (2) a fait voir qu'il était prématuré de considérer cette languette d'al- bumine coagulée comme une fibre musculaire (*). 12° L'analogie de la sécrétion avec les phénomènes galva- niques a été reconnue, entre autres par Gruithuisen (3), , Prochaska (4) , Treviranus (5) , Wollaston (6) , Home (7), etc. Comme le galvanisme réduit un liquide composé en ses par- ties constituantes opposées , et que ces parties se réunissent aux deux pôles , alors même que le liquide occupe un espace coupé en deux par un diaphragme membraneux ; comme une décomposition analogue a lieu lorsque l'un des pôles de la pile miner, E LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 627 le globe oculaire, de même qu'au pourtour de l'œil se for- ment d'un côié le liquide lacrymal et de l'autre la chassie palpébrale, de même aussi qu'au liquide séreux contenu dans l'intérieur de l'organe auditif s'oppose le cérumen du conduit externe. 12" En général, les oppositions des divers organes ( § 780-797) et des différentes sécrétions (§ 809-828), co«îme aussi les rapports de sympathie et d'antagonisme qui existent entre eux sous le point de vue de la formation, nous annoncent une scis- sion en formes diversifiées ayant pour point de départ le sang. II. Réalité d'un développement du sang. La réalité de ce développement devient plus évidente en- core lorsque nous considérons sous un point de vue général les phénomènes de la régénération et ceux qui s'en rappro- chent. § 888. De même que nul mouvement ne trahit, à la surface d'un lac, le courant qui y amène et en fait sortir une masse d'eau très -faible eu égard à la sienne, de même aussi la for- mation organique , considérée comme conservation de ce qui déjà existe , est insensible et par conséquent insaisissable , puisqu'à chaque instant des p;)rtiçules infiniment petites de la substance organique se détachent et font place à d'autres ( § 8; 6). Nous sommes donc obligés , pour en connaître l'es- sence , de porter nos regards sur les phénomènes divers de celte formation , et principalement sur ceux qui accompagnent la production de pat lies nouvelles homologues. I. Mais la formation de parties nouvelles homologues, qui se manileste tantôt comme homœoplastie ( § 859 ) , tantôt comme régénération (§86U), ressemble à la génération, quant à son essence. En effet: d° Elle est identique avec elle. Toute propagation a lieu par homœoplastie , que celie-ci consiste soit en une formation surabondante de substance organique , c'est-à-dire en un accroissement qui amène une scission (§ 21-24) , soit en une production de germes spéciaux (§ 25), de gemmes (§ 27-29), 628 CAUSE DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. de propagules et de spores éparses (§ 30-36) , de spores ag- glomérées (§ 38-42 ) ou d'œufs(§ 43-45). De même, la mem- brane nidulante ou caduque , qui , lorsqu'elle ne reçoit pas le produit de l'ovaire (§344, 12°), sort quelquefois avec le sang menstruel ( § 45 , 4° ) , porte évidemment le caractère d'un néoplasme ou d'une fausse membrane (§ 859, I). La propagation a lieu par reproduction dans les organismes in- férieurs , où le morcellement d'un individu est une multipli- cation des individus (§ 860, 3° , 4°). Enfin l'hétérogénie des organismes inférieurs est aussi une reproduction dans d'autres corps vivans (§16, 17,873). 2° La formation de parties nouvelles homologues crée des parties semblables à celles qui avaient été produites primor- dialement par la génération, du tissu cellulaire, des vaisseaux, des vésicules séreuses , des tissus cutanés , scléreux et stra- tifiés (§ 859). La régénération, comme l'indique son nom, est réellement une génération répétée d'une partie perdue ou morte, non seulement quant au produit^ qui ressemble à celui qu'il remplace , mais encqre quant au mode de production , puisque la nouvelle partie apparaît d'abord comme masse or- ganique primordiale et indifférente, le vaisseau sanguin comme petit courant creusé au milieu de cette masse , l'os comme cartilage , le cartilage comme gelée , le membre comme bourgeon^ l'iris comme demi-anneau, etc. La régéné- ration périodique appelle à l'existence , avec un renouvelle- ment de vigueur vitale , des parties animées du feu de la jeu- nesse (§ 617, IV), représente , dans la mue de l'épiderme , une répétition de l'éclosion qui a lieu au sortir de l'œuf (§ 617 , 6°), et se rattache d'une manière intime à la force procréatrice (§ 617, V). IL La régénération est une manifestation de la forme mé- dicatrice de la nature. 3° Mais cette force médicatrice ne se manifeste pas seule- ment par la restauration des parties perdues ( § 860 ) et par la réparation des pertes subies par celles qui ont été mutilées (§ 861); elle se révèle encore de plusieurs autres manières très-diverses. Elle détermine une assimilation des substances étrangères , en tant qu'elles en sont susceptibles (§859, 11» , CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE, 629 12°), OU une élimination soit de ces substances (§872, 40o), soit des produits morbides (§872, ll°-15o) , et de tout ce qui est devenu étranger à l'organisme , de tout ce qui a été frappé de mort (§863, II), élimination qu'elle accomplit parfois après avoir donné naissance à de nouveaux canaux ( § 854, II). Elle enveloppe souvent les substances étrangè- res , de manière à les empêcher de nuire ( § 864 , 3" ) ; ainsi nous avons vu que , quand la parturition est impossible , elle frappe le fruit de mort (482 , 6° ) , l'absorbe ( § 482 , 7° ) , en amène les débris au dehors par des voies nouvelles qu'elle fraie (§482, 8°), ou les couvre d'une enveloppe isolante (§482, 10°). Elle se déploie en provoquant une sécrétion dans un tout autre organe lorsque celui qui devrait l'accomplir ne le peut (§ 857). Elle se manifeste dans tous les changemens des activités vitales et des formations qui ont le caractère de crises. En un mot , elle rétablit l'état dans lequel l'organisme peut vivre , mettre ses forces en jeu , et atteindre à son but. 4° Mais il nous est impossible de croire que celte force médicatrice soit une force spéciale , mise en réserve pour les cas de nécessité , dont l'action ne se déploie que pendant les maladies , et qui reste complètement inerte dans l'état de santé. En effet, lorsque nous y regardons de plus près, nous voyons qu'elle n'est qu'une branche d'une force qui règne pendant toute la vie et qui ne s'éteint jamais. Chez l'homme en santé , les substances étrangères introduites dans le sang sont éliminées du corps (§ 865) , l'éjection se proportionne exac- tement à l'ingestion (§ 840), l'inégalité résultante des varia- tions dans les quantités des différentes sécrétions s'efface, d'elle-même (§ 844, 2° ) , l'équilibre se rétablit par les efforts combinés de la sympathie et de l'antagonisme (§ 846, 4°), et de cette manière la vie se manifeste partout comme con- servation de soi-même et par soi-même. Mais la force médi- catrice de la nature n'est autre chose que la manifestation de cette conservation de soi-même dans des cas où la vie court des dangers, soit partiellement, soit en totalité ; la force con- stamment active ne fait alors que déployer une plus grande énergie, nécessaire pour triompher de l'obstacle que ren^ contre sa marche imiforme et tranquille. Ainsi la femme g,ué« vin. 54 53o CAUSE DE tA PtASTICÏTÉ: ORGANIQUE. rit du fruit qu'elle porte dans son sein en vertu de la force conservatrice qui réside en elle ( § 480 ) ; ce n'est point une force spéciale et étrangère qui accomplit raccouchement , mais une exaltation des forces primitivement inhérentes a l'organisme (§ 4S3, 484), et ce que cette exaltation fait cesser n'est point un état anormal , mais un état qui compro- mettrait l'existence delà femme s'il se prolongeait (§482, 5°)* De même, la régénération ne diffère pas essentiellement de la nutrition. Le pli ou l'enfoncement que la peau présente sur le dos de la dernière phalange des doigts produit conti' nuellement de la substance cornée, soit que celle-ci s'appli- que, en forme de nouvelle couche, à un ongle déjà existant , soit que , l'ongle ayant été détruit, elle en reproduise un au- tre. La nutrition et la régénération se confondent aussi dans leurs produits ; par exemple , lorsque la moelle et la mem^ brane médullaire d'un os long ont été détruites , et que par suite la diaphyse a été frappée de mort , l'épiphyse se main- tient à l'état de vie, parce qu'elle est plus riche en vaisseaux propres , et elle se soude ensuite avec la diaphyse régénérée , de manière que, même après qu'on a extrait la terreau moyen de l'acide hydrochlorique , la base cartilagineuse restante forme un tout continu. La régénération est une nutrition devenue sensible parce qu'elle s'exerce sur des masses et se déploie librement : la nutrition est une régénération de particules élémentaires in- finiment petites dans une partie donnée , et précisément parce qu'elle a lieu sans interruption , elle ne frappe aucun de nos sens. IIL Si la formation organique (nutrition et sécrétion) est identique, quant à l'essence, avec la régénération , et celle-ci avec la génération, la formation doit aussi reposer sur la même basequecettedernière. En effet, ce qui précisément distingue l'organisme des corps inorganiques, c'estla pérennité de son ac- tivité ( §473,9°); cette activité s'éveille à l'époque de la pro- création , et dure tant que l'organisme subsiste ; celui-ci n'est complet ni dans l'œuf ni à aucune époque de sa vie, et conti- nuellement il marche vers un but auquel il n'arrive jamais (§ 474 , 2° ). La nutrition est donc la continuation delà forma- CAUSÉ DE lA PÏ-ASTICITÉ ORGANIQUE. 53 1 tioà qui commence au moment de la génération ; elle est même une génération, puisqu'elle crée des parties vivantes , et elle ne diffère de la procréation proprement dite que parce que la vie qu'elle appelle à l'existence n'est point une vie nouvelle et individuelle, mais la suite immédiate de celle qui existait déjà, et que la matière organique qu'elle produit a les mêmes qua- lités que celles de l'organisme générateur dont elle vient à faire immédiatement partie. Les deux modes de formation dans l'organisme se comportent, à l'égard de l'individu, comme les deux modes de production d'organismes (§ 719) par rapport à l'espèce ; dans la nutrition, ainsi que dans l'ho- mogénie ou la propagation , ce qui existe déjà est maintenu par la formation de nouvelles parties élémentaires; mais, dans l'homœoplastie , comme dans l'hétérogénie ou la génération spontanée , la nature produit de toutes pièces , en sorte qu'ici sa puissance créatrice se manifeste dans tout son éclat. § 889. Puisque l'essence du développement de la vie de- vient accessible à nos regards dans l'hétérogénie , c'est aussi dans la formation de parties nouvelles homologues, et notam- ment dans la régénération , que nous devons chercher des no- tions à regard de la formation organique en général. I. La régénération 1* N'appartient qu'aux êtres qui occupent les échelons in- férieurs de la vie. Tout ce qui est parvenu à un certain degré de perfection , a pris un caractère prononcé de spécialité , et s'est élevé au dernier terme de la formation, persiste et se maintient , sans pouvoir renaître , tandis que ce qui est infé- rieur se reproduit partout. Ainsi les êtres organisés supérieurs ne se conservent que par propagation , et il n'y a que les derniers de tous qu'on voye renaître parhétérogénie. Au plus bas échelon , les organes génitaux eux-mêmes tombent après avoir rempli leur office , et se reproduisent quand leur pré- sence devient de nouveau nécessaire (§ 143); à un degré un peu plus élevé , le même organe répète sans cesse ses forma- tions (§ 145 ) , et ce n'est qu'aux degrés supérieurs que l'ate- lier primordialement donné ne produit qu'une seule fois (§ 146). De même, la reproduction appartient surtout aux organismes et aux organes inférieurs ; elle s'efface de plus en 532 CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. plus dans ceux d'un ordre supérieur , où la pérennité de la vie s'est développée davantage (§ 473 ,9°). 2" Nous avons distingué deux sortes de régénération ( § 860, 861 ), qu'il ne faut pasjuger de la même manière^ car, en les confondant ensemble, on arépandu beaucoup d'obscurité sur l'histoire de la nutrition. La régénération supplétive com- plète l'individu , et reproduit des parties complexes , dissimi- laires ; la régénération complétive répare la masse organique, reproduit ce qu'il y a de simple et d'élémentaire dans l'orga- nisme. La régénération supplétive est un phénomène qui'Trappe davantage les yeux , une activité qui se déploie surtout dans le sens de l'étendue, qui exige aussi plus de temps, mais qui appartient aux êtres inférieurs. Elle a lieu quand la force plastique primordiale conserve encore la forme qu'elle avait dans le principe et se déploie d'une manière illimitée, lorsque, comme dans l'embryon , elle peut produire continuellement du nouveau , parce que la vie végétative est moins gênée , la vie animale moins développée , l'unité moins prononcée , la concentration à l'intérieur moins sensible. On l'observe en con- séquence partout oii l'accroissement lui-même ne s'accomplit que par addition, par formation adjonctive. La régénération complétive , au contraire , appartient à un degré plus élevé , où la formation est limitée par une concen- tration plus grande de l'organisme , mais se fait remarquer spécialement par son intensité ; quand le système nerveux est devenu prédominant, lorsque l'accroissement n'a plus lieu que par le dedans, et résulte d'un développement intérieur. Ce mode de régénération n'appartient point aux végétaux; jamais une feuille qui a été lésée ne se reproduit; si l'on trouble l'accroissement d'une jeune plante , le premier jet se dessèche, et ceux qui paraissent ensuite n'ont pas la même forme que lui , sont par conséquent tels qu'ils se seraient dé- veloppés sans cette circonstance ; si l'on enlève une languette de l'écorce d'un arbre , on voit seulement les bords de la plaie se rapprocher , par suite de l'extension que l'écorce prend sur le côié en continuant de croître ; quand on enlève de l'aubier ou un bourgeon, il s'opère une régénération, mais CAUSE i)E LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 535 seulement Tannée suivante (1) ; de même , lorsqu'on délach« l'épiderme, le parenchyme sous-jacent se dessèche, et se couvre d'une croûte , mais celle-ci n'acquiert jamais l'organi- salion de l'épiderme (2). Quand Réaumur (3) n'avait brisé qu'une ou deux articula- tions d'une patte de devant des Écrevisses , le membre ne ré- parait pas celte perte, tandis qu'il se reproduisait après avoir été enlevé tout entier ou jusqu'à la dernière articulation. MaccuUoch et Heinecken (4) ont vu que les Crabes dont on coupait ou fendait en long le tarse ou l'article terminal d'une patte , rejetaient bientôt la patte entière, à la place de laquelle s'en reproduisait une nouvelle. Suivant Spallanzani (5), un doigt ne se regénère pas plus vite qu'une patte entière chez les Salamandres , et Dieffenbach a remarqué qu'il est infini- ment plus rare , chez ces animaux , de voir une plaie se cica- triser, qu'un membre se reproduire. Chez l'homme et les animaux à sang chaud , la régénération supplétive demeure bornée aux tissus stratifiés , et ceux qui vivent par intussus- ception ne sont susceptibles que de la régénération complé- tive. Tandis qu'il est très-commun que des vésicules séreuses ou des tissus scléreux et cartilagineux se produisent par ho- mœoplastie anormale ( § 859, III, 2°, 22° ), ces parties ne se régénèrent point d'une manière complète. II. Parmi les différens tissus , 3° Les plus simples de tous se produisent plus facilement par homœoplaslie , et se régénèrent plus complètement , que ceux qui ont une organisation complexe et spéciale. Ainsi, chez homme, la régénération complète est bornée aux deux extrêmes du système hislologique , le tissu cellulaire et les vaisseaux, les os et les tissus stratifiés. Chez les animaux, la partie antérieure du corps, qui a une vie plus animale et des organes plus particuliers , se régénère moins facilement que (1) Schweigger, Handhuch der NaturgescJiichte der skelettlosen ungç^ gliederten Tliiere , p. 71. (2) Treviranus , f^ermischte Schriften , t. IV, p. 73. (3) Mém. de l'Acad. des sciences , 4712 , p. 225. (4) Froriep , ISoHsen , t. XXYIII , p. 182. (5) Sur les reproductions animales , p. 682. 554 CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE, la postérieure. Lorsque Trembley coupait un Polype à bras en travers, la portion orale reproduisait le corps en vingt- quatre heures , tandis que rorifice buccal et les bras se dé- veloppaient bien plus tard sur le lambeau postérieur (1). Spal- lanzani a reconnu, chez les Vers de terre coupés en deux, qu'il était plus facile à la partie antérieure de reproduire une queue, qu'à la postérieure de> recouvrer une tète. Sangio-- vanni (2) a constaté également qu'en huit mois il s'était formé vingt-cinq anneaux à l'extrémité postérieure du bout cépha' lique et cinq seulement à l'extrémité antérieure du bout cau- dal. Broussonet assure aussi que les Poissons reproduisent plus promptement la nageoire caudale que les ventrales et les pectorales. Si , chez les Salamandres mutilées , les pattes de derrière se régénèrent plus vite que celles de devant (3), c'est là un phénomène en harmonie parfaite avec l'ordre dans lequel ont lieu les développemens primordiaux ( § 397, 11° ). Du reste , la régénération est plus facile dans les pseudo-' morphoses que dans les tissus normaux , ce qui tient en par- tie à ce qu'elles occupent un rang moins élevé dans l'échelle des formations. 4° Une autre circonstance à laquelle on doit avoir égard , c'est le degré de force plastique qui appartient à l'organe, en raison de sa nature. Les organes riches en vaisseaux répa- rent plus aisément leurs pertes, et fournissent un sol plus riche pour les transplantations; en effet, l'éperon des Coqs, trans- planté dans la crête , y devient plus grand qu'aux tarses. Nulle part les pseudomorphoses ne sont si fréquentes , si di- versifiées et si amplement développées , que dans la cavité abdominale , surtout au voisinage des organes génitaux. Ces derniers organes possèdent, en effet, un haut degré de vita- lité ( § 564, 1" ) et de force plastique , correspondant au ca- ractère de la sexualité. Dans ceux du sexe féminin, la forma- tion des parties nouvelles homologues prédomine , comme souvenir de la monogénie ; on rencontre fréquemment des pseudomorphoses , des liydatides surtout , dans les, ovaires , (1) Eggevs , f^on der TVtedererzeuyunçj , p. 47. (2) Fioriep , Notizen , t. VII, p. 230. (3) Spallanzani, loc. cit,, p. 81. CAUSE DE t\ PIASTICITÉ ORGANIQUE. 535 et c'est là presque exclusivement qu'on trouve les plus élevées de" toutes en orf^anisation , les poils et les dents (§ 45, III) (*) j à la face interne de la matrice se développent tantôt des fausses membranes ( § 45, 4=» ), tantôt des polypes et autres pullula- lions ; des pseudomorphoses scléreuses ou osseuses se pro- duisent dans la substance de cet organe ; les verrues aux doigts sont souvent les effets de la masturbation ( § 563, 7° ). Dans les organes génitaux du sexe masculin, c'est la régénération qui a le dessus; Dieffenbach (1) fait remarquer que le scrotum possède une faculté reproductive très-prononcée; j'ai vu^ chez un homme de soixante-huit ans , du reste fort robuste j toute la peau du scrotum , qui avait été détruite par la gan- grène, se régénérer , avec les poils. Kahleis (2) rapporte qu'un jeune homme, à la suite du typhus, perdit par la gangrène le gland entier et un pouce et demi de la verge , à l'excep- tion de l'urètre ; au bout de cinq semaines , les parties étaient reproduites , et il s'était formé une espèce de gland. 6° Les parties qui servent au mécanisme montrent fréquem- ment des phénomènes d'homœoplastie. Il n'est pas rare que les vésicules synoviales s'agrandissent ou se multiplient ainsi. Le tissu scléreux et le tissu cartilagineux se manifestent sou- vent par homœoplastie et transformation ( § 858 , 6° , 7° ) mais ils n'ont qu'un faible pouvoir de^ régénération , parce qu'ils sont peu riches en vaisseaux et que leur conflit avec le reste de l'organisme ne dépasse pas des limites fort étroites. Le tissu osseux , qui reçoit davantage de vaisseaux , et qui par conséquent prend une part plus active à la vie totale , est plus alTeclé aussi par les diathèses de la formation ; la par- tie moyenne des os longs a une substance plus compacte et des vaisseaux en moins grand nombre ; ses relations avec l'or- ganisme sont moins étendues ; aussi lui arrive-t-il fréquem- ment d'être frappée de mort , d'être repoussée en masse de O M. Cruveilhier a décrit et figuré divers cas de kystes pileux et den? tifères des ovaires. Voyez son Anatoinie pathologique du corps Iiuraain , XVIIP livrais. , et planches 3,4,5.1 (1) Chiruryische Erfahrungen, besonders ueher die iViederhersUllun^ serstœrter Theile , t. II, p. 171. {%) Meckel , Deutsclies Archiv , t. V, p. 211. ^36 CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. l'économie et de se régénérer , tandis que les portions arti- culaires , dont la substance est plus lâche et plus parsemée? de vaisseaux , ont des connexions plus intimes avec d'autres parties et une vitalité plus prononcée, de manière aussi qu'elles ne possèdent qu'une régénération supplétive , c'est-à-dire une nutrition ; la nécrose paraît donc être une transition , une sorte de degré intermédiaire entre la nutrition et la génération ( § 887, 4° ) ; majs la haute faculté régénératrice, par laquelle l'os difière de toutes les autres: parties qui vivent par intus- susception, paraît tenir encore à ce qu'il se produit tardive- ment, à ce qu'il entre en dernier lieu dans le cercle de la vie , de sorte qu'il lui arrive très-fréquemment aussi de se pro- duire par transformation ( § 858 , 8° ) et par homœoplastie ( § 859, 23" ). Les tissus stratifiés ont partout l'aptitude à être remplacés, et si plusieurs animaux articulés, par exemple les Crabes , les Araignées , les Grillons , perdent et repro- duisent facilement leurs pattes , ce phénomène tient peut-être à ce que le tissu stratifié, qui remplit ici le rôle de squelette, forme une partie essentielle des membres. 6° Chez les animaux inférieurs, lorsqu'il y a régénération de membres ou de parties du corps, les nerfs et les muscles se reproduisent d'une manière complète. Cependant le point central du système nerveux , l'anneau ganglionnaire , n'est point susceptible , même ici , de régé- nération. L'examen attentif de préparations faites par Spal- lanzani a démontré que cet anneau était demeuré intact sur des Limaçons qui avaient reproduit leur tête (1). Suivant Tie- demann (2) , les Astéries régénèrent souvent les rayons de leur corps qui viennent à être brisés ; mais il faut alors que la rupture ait lieu à une certaine distance de l'orifice buccal, parce que la lésion de l'anneau ganglionnaire fait périr l'ani- mal. La guérison des plaies du cerveau par régénération com- plétive a lieu bien plus lentement, chez les Mammifères, que celle d'autres plaies (3). (1) Schweigger, Handbuch der Naturgescliiclite der slielettlosen unget- gliederten Thiere , p. 685. (2) Meckel, Deutsches Archiv , t. I , p. 172. (3) Arnemann, Vetsuche ueler das Gehim und Ruechenmark , p. 488, CAUSE DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 557 La sulDStance musculaire paraît ne pas pouvoir plus se ré- générer que la substance nerveuse chez les animaux de la classe des Mammifères : elle ne se reproduit point après avoir été blessée , quoique , suivant Breschet (1), le néoplasme qui se développe entre les bouts des fibres de muscles transver- salement coupés paraisse plus rapidement et renferme plus de vaisseaux sanguins que celui qui se produit dans d'autres tissus. Leo-Wolff (2) a trouvé , dans de fausses membranes du péricarde et de la plèvre, des faisceaux fibreux qui , soumis aux réactifs chimiques (3) , se comportaient comme de la fi- brine ; mais on demeura dans le doute de savoir si c'étaient des caillots fibrineux ou des fibres musculaires organisées. On pourrait concevoir, en effet, que des fibres musculaires plastiques se produisissent par un phénomène d'homœoplas- tie , puisqu'on en découvre dans le cas d'hypertrophie de certaines membranes muqueuses qui n'en offrent pas dans l'état de santé , par exemple à la surface de la vésicule bi- liaire (4) ; cependant il n'y a point non plus certitude ici que l'état anormal ne se soit pas borné uniquement à les rendre plus apparentes, parce qu'elles ont été mieux nourries. Pendant le jeûne et l'amaigrissement, le diamètre des fibres semble chan- ger plus que leur nombre , dans les muscles soumis à l'em- pire de la volonté. III. La force diverse de l'homœoplastie 7» Est déterminée par le caractère particulier des espèces. Chez les Polypes nus , dont la masse du corps est homo- gène , et chez lesquels l'organisation ne s'exprime que dans la masse totale, la force plastique est inépuisable en fait de régénération complétive ou supplétive ( § 860 , 3° ), d'adhé- sion ( § 859 , 7°) et de transformation ( § 858). Les Cestoides et les Annélides n'ont point de centre com- (1) Dictionnaire de médecine , t. V, p. 276. (2) Tractatus anatomico-pathologicus , sistens duas ohservationes de formatione fihrarum, muscularium in pericardio atque in pleura olvia.' rum, p. 8, 18. (3) Ihid., p. 18. (4) Andial, Précis d'anatomie pathologique, t, II, p. 609. 558 CACSE DE lA PtASTICITÉ ORGANIQUE. mun ; chaque segment du corps renferme les organes néces- saires au maintien de sa vie et jouit d'une vie propre, de ma- nière que la circulation continue encore dans chaque segment séparé du corps d'un Lombric (1), par exemple , ce qui rend la régénération possible. Il y a bien un centre commun chez les Radiaires , mais les viscères plastiques sont multipliés dans les rayons , de ma- nière que ceux-ci ont l'aptitude à se reproduire. Chez les Crustacés, les systèmes vasculaire et glandulaire sont plus développés , la vie animale moins énergique , et la régénération plus puissante que chez les Insectes. Elle l'est également davantage chez les animaux aquatiques, dont le corps renferme plus d'humidité , que chez les animaux aé- riens , par exemple plus chez les Yers aquatiques que chez les Vers de terre. La régénération complétive des tissus par inflammation, suppuration et granulation, semble appartenir exclusivement aux Mammifères; dans les autres classes d'animaux verté- brés , elle n'exige point un aussi grand développement de forces : il lui suffit d'une simple congestion , suivie d'une sé- crétion de liquide plastique , comme Arnemann (2), Dieffen- bach (3) et Meding (4), l'ont observé chez les Oiseaux , oii ce phénomène paraît tenir à la plus grande abondance de la fi- brine dans le sang ( § 670 , 1°). 8° Plus l'individu est jeune , plus aussi la force plastique primordiale conserve encore d'énergie , parce que la forma- tion est moins fixée et le développement des différences moins épuisé. Aussi la régénération est-elle proportionnelle^ lïient plus facile chez les larves, qui , sous le point de vue de leur essence , sont de véritables embryons ( § 326 , 4°) ; les Insectes reproduisent leurs antennes à l'état de larve , mais (1) Spallanzani , Précis d'un ouvrage sur les reproductions animales , p. 16. (2) Fersuche ueher das Gehirn iind Rueclienmark , p. 68 , 70 , 73. i (3) Dissertatio de rege7ierutione et transplantatioiie , p. 21. — Chirur- fjische Erfahruncjen , lesonders ueher die TViederherstellun^ zerstœrter Theile, t. II , p. 186. (4) Rust, Magasin fuer die ijesammte Heilkunde, t. ^XXIU } Pi 94. CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. BSg non à^l'état parfait ; plus un têtard de Grenouille est jeuuq , plus sa queue se régénère promptement , après avoir été cou- pée ; les jeunes Salamandres reproduisent leurs pattes d'une manière plus rapide et plus complète que celles qui sont avancées en âge (1) ; les Araignées régénèrent les pattes qu'on leur enlève tant qu'elles muent ou renouvellent leur éclosion (§ 617, 5°), c'est-à-dire aussi long-temp§ qu'elles m sont point encore parvenues à l'âge adulte (2). 9° La régénération exige santé, excitation médiocre, nour-- riture abondante , de bonne qualité , et chaleur modérée, Les plaies ne guérissent pas aussi bien lorsque la vie animale est fortement stimulée et la sensibilité plus vive qu'à rordinairç, La même chose arrive quand l'activité plastique se déploie d'une manière spéciale dans une autre direction ; en effet, lea fractures ont plus de peine à se consolider pendant la gros- sesse , et la formation du cal n'a souvent heu qu'après l'ac- couchement. IV. Dans la régénération , 10<* La vie se concentre suivant cette direction, comme elle le fait dans la génération ( § 247, 11° ; 325, 7° ; 346, 5° j 347, 4°; 495, 1°), dans la métamorphose des Insectes (§ 380), et dans tout travail un peu vif de développement (§ 644, 4°) ; la vie animale se retire alors sur l'arrière-plan, parce qu'elle ne prend point de part à l'opération , et l'activité plastique faiblit dans d'autres organes -, occupée de créer, elle surveille moins la conservation , et la régénération s'accomplit aux dé-^ pens de la nutrition. Un Limaçon auquel on a coupé la tête se retire dans sa coquille , la ferme comme pendant le sommeil d'hiver, et en sort amaigri lorsqu'il a reproduit une nouvelle tête (3). Le même amaigrissement , causé par la régénéra- tion, se remarque chez les Vers de terre, suivant Bonnet, chez les Polypes à bras , d'après Blumenbaçh (4) , etc. C'est à (1) Spallanzani , Précis d'un ouvrage sur les reproductions animales , p. 81. (2) Froriep , NoHsen , t. XXVIII , p. 193. (3) Eggers , f^oîi der Wiodererzewjung , p. 46. (4) Ueber dçn Bilduiujstrieh , p. 92. 54o CAUSE DE LA. PLASTICITÉ ORGANIQUE. la même cause qu'il tient que , pendant la guérison des plaies avec perte de substance , les parties environnantes diminuent de volume. 11" De même que , pendant la régénération périodique , la vie est absorbée par la formation d'une partie nouvelle (§ 617, 4°), et s'exalte dans le tissu d'où procède cette der- nière ( § 617, III) , de même que tout développement consi- dérable dans l'organisme commence par un état d'excitation (§ 644, 4°), de même aussi, toutes les fois qu'il y a régéné- ration à la suite d'une lésion accidentelle , l'activité vitale ac- quiert un surcroît d'énergie , qu'elle manifeste tantôt seule- ment par un état de congestion , et tantôt par une véritable inflammation (7°). Chez les Mammifères , l'inflammation , plus ou -moins développée , est la cause et le foyer de toute for- mation nouvelle , un acte de procréation, une exaltation de la vie au-delà des bornes en dedans desquelles elle doit rester pour ne faire que maintenir ce qui subsiste. Ainsi elle sur- vient dans toute blessure , et quand des ulcères ne veulent point se cicatriser, quand ils exhalent un pus ichoreux , et qu'ils ont leurs bords renversés, endurcis, on les met en voie de guérison par des scarifications, qui excitent l'inflammation. Une exaltation de l'excitabilité , semblable à celle qui sur- vient par exemple à la suite d'une perte de sang , peut favo- riser le travail régénérateur. Piorry a vu , chez des Chiens , les plaies guérir avec une grande rapidité après des soustrac- tions considérables de sang. V. La partie nouvellement produite 12° Est d'abord douée d'une vitalité très-active et d'une grande réceptivité pour les impressions. Elle se développe aussi avec bien plus de rapidité que celle qu'elle remplace ne l'avait fait pendant le cours de la vie embryonnaire ; nous en trouvons un exemple dans le cal des fractures , qui s'ossifie bien plus promptement que l'os normal. Le néoplasme a des vaisseaux capillaires d'un plus gros calibre, il reçoit beaucoup de sang, il est extrêmement sensible, et il a une grande propen- sion à absorber des substances étrangères. Lorsqu'on mêle de la garance avec la nourriture des animaux , la substance os- seuse nouvellement produite se teint plus rapidement et ac- CAUSE DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 54 1 quiert une couleur plus foncée que les anciens os : Kœler (j), Troja et Meding (2) Tont remarqué. Les expériences de Dieflenbach (3) , attestent également que les lambeaux' de peau transplantés ont une vitalité très-active et une récepti- vité fort grande ; quand on les blesse , ils donnent plus de sang que les autres portions de la peau, même lorsqu'ils ont une teinte pâle et paraissent presque exsangues , et le sang qu'ils fournissent d'abord est plus clair et plus liquide que celui qui coule d'autres blessures ; après la cessation de Thé- morrhagie, la plaie sécrète pendant quelques jours un liquide limpide comme de l'eau , puis elle donne du pus très-coulant , qui bientôt produit à l'air une croûte sous laquelle la plaie guérit dans un laps de temps moitié plus court que celui qu'exige une autre , et en ne produisant que des bourgeons charnus à peine sensibles. De même , un nez artificiel prati- que par les procédés de la rhinoplastie , bleuit sur-le-champ au froid, et s'y couvre fort souventde phlyctènes; mais celles- ci guérissent avec beaucoup de promptitude. 13° Peu à peu l'activité vitale diminue dans la partie nou- vellement produite, les vaisseaux qui s'y étaient développés se resserrent et meurent en partie , de sorte que la cicatrice reçoit moins de sang qu'il n'en arrivait au tissu primordial. 14" Ce qui s'est produit avec trop de précipitation ne tarde pas à disparaître. Le bouchon de sang (§ 862 , 3°), et le cal provisoire (§ 862, 8°), ressemblent à des avortons; mais ils sont les analogues des organes transitoires de l'embryon (§ 477, 2°), qui servent d'intermédiaire au développement de l'organisation destinée à persister. Les portions de peau pro- duites par régénération rejettent souvent leur épiderme à plusieurs reprises, avant qu'il s'en forme un permanent; Van Hoorn (1) assure que cette desquamation continue pen- dant toute la vie sur les moignons des membres amputés, (1) Ewperimenta circa regeneratiotiem ossium, p. 39. (2) Riist , Muyazin fiier die gesammte Heilkunde , t. XXXIII , p. 88. (3) Cldrur'jische Erfahrungen , besondcrs ueher die JViederherstellung zerstœrter Theile , t. II , p. 185. ; (4) Dissertatio de iis quœ in partihus membri , pircBsertim osseis , amputation e vulneratis, notanda sunt, p. 23. S4â CAUSE M lu fLASTiCIÏÉ ÔRGANÏQtJÊé alot*s même que nulle pression ne contribue à la défejpminéï^ (*) Il arrive fréquemment aussi aux parties qui ont été réunies ou transplantées de se dépouiller de leur couche superfi- cielle ; l'épiderme et l'ongle se détachent au bout de huit à quinze jours des phalanges onguéales reprises, ainsi que Marley (1) et Schopper (2) Tont observé. DiefFenbach (3) as- sure que les lambeaux de peau dont on a déterminé l'agglu- tination s'affaissent quand l'inflammation tombe , et changent d'épiderme : s'ils avaient été entièrement détachés de leur siège primitif , c'est-à-dire sans attention de ménager une espèce de pont, la couche superficielle de la peau tombé fréquemment, et ensuite se reproduit (4). Walther a remar- qué , sur une pièce osseuse qu'on avait détachée à l'aide du trépan et remise ensuite en place , que , pendant la reprise , lé feuillet extérieur périssait , puis se détachait , après quoi il s'élevait du diploé une granulation de nouvelle substance os- seuse. 15° Il arrive fréquemment que les parties reproduites n'ont point la même force de résistance que celles qu'elles ont rem- placées ; les cicatrices sont sujettes à se rouvrir sous l'influence de l'inflammation , et de passer à la suppuration ; lorsqu'il s'établit une dyscrasie , la substance osseuse régénérée devient fragile la première , et la fracture qui l'avait précédée se re- produit. § 890. L'organisme prend naissance primordialement par l'activité vivante qui, se déployant dans une masse indifférente^ y détermine un antagonisme de polarité , et y provoque le dé- veloppement des formes diverses , qui réalisent un type dé- terminé (§ 474). C) Ce phénomène n'a pas lieu dans les amputations à lambeau ; mais il paraît être constant à la suite des amputations circulaires. Je l'ai observé un très-grand nombre de fois, quinze, dix-huit et vingt ans après l'opération , et jamais je n'ai vu le contraire. (1) Gerson , Maijazin des auslœndischen Literatur der gesammten Heilkunde,t. I, p. 388. (2) Froriep , Notizen , t. XXVIII , p. 270. (3) Chirurgische Erfahrungen , besonders ueber die TViederherstelluiig zerstœrter Theile , t. II , p. 479. (4) Dieffenbach , Ueber den organischen Ersatz, p. 27« CAUSE Ï)Ê LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 545 I. De même , nous voyons 1* La reproduction débuter par la formation d'un suc plas- tique , qui se sépare ensuite en liquide et en solide. Le néo- plasme , soit qu'il représente une simple couche, ou une fausse membrane , soit qu'il figure une surface terminale tubercu- leuse , ou des bourgeons charnus , commence par être homo- gène dans toutes les régions de l'économie , et le même à la peau, dans les muscles, anx os, etc. Il n'a point encore de tissu particulier ni de forme organique déterminée , et il n'acquiert que peu à peu une configuration et des caractères spéciaux. Il ressemble donc à la masse organique primordiale, et l'on peut , avec Eggers (1) , le considérer comme la mem- brane proligère de la partie qui va se régénérer. Mais , dans la nutrition, le suc plastique (§ 877, 6°) se comporte comme la masse organique primordiale dans la génération et comme le liquide plastique dans la régénération ; répandu au milieu du tissu des organes , il prend la forme des diverses parties élémentaires dont ce tissu est composé. 2» Une vie plus énergique prédomine dans le germe des organismes supérieurs , et y développe une plus grande va- riété de formations solides et liquides. Ainsi , lorsque la plasti- cité a plus de force et qu'elle est emprisonnée dans des bornes moins étroites , la reproduction , tant supplétive que complé- tive, fait naître des parties plus diversifiées et plus com- plexes ; on peut s'en convaincre en étudiant ce qui arrive dans les ovaires parmi les organes ( § 889 , 4° ) , chez les Polypes parmi les animaux sans vertèbres, et chez les Salamandres parmi les animaux vertébrés (§ 889 , 7*'). De même, la nutri- tion, qui marche d'un pas égal avec la déformation, suit un cours plus rapide dans certaines parties , les muscles par exemple , et plus lent dans d'autres , telles que les nerfs (§ »76 , 3°). De même aussi , quelques sécrétions, comme l'u- rine, sont plus abondantes que d'autres ;, la bile par exemple. II. La régénération tend au rétablissement du type parti- culier de l'organisme. 3° Elle donne les mêmes parties que la formation primor- (1) ^ow der fFiedererzeugu?ig , p. 13. 544 CAUSE DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. diale , que celle qui a été mise en exercice par la procréation. Ainsi, par exemple , chez les animaux inférieurs, elle repro- duit les muscles et les nerfs, les os et les ligamens, etc., tels qu'ils étaient auparavant. Cependant il arrive souvent aussi que cette tendance ne se réalise point d'une manière com- plète. Tantôt les parties nouvellement produites sont plus pe- tites, par exemple plus grêles chez le Ver de terre (1); tantôt elles n'ont point une forme parfaitement normale , et par exemple, latête des Limaçons se reproduitTréquemment d'une manière incomplète ou monstrueuse (2) ; quelquefois le tissu est différent , et celui qui existait a été remplacé par un autre affine , la substance musculaire par du tissu scléreux , ou le cartilage par des os. Ailleurs, la substance diffère au moins de l'ancienne à certains égards ; dans la formation du cal , par exemple , le carlihtge provisoire ressemble plus à un fibro- cartilage qu'à un cartilage d'os , et le cal 'définitif lui-même ne rappelle point parfaitement l'os normal sous le rapport des proportions respectives de ses principes constituans, puisque les sels organiques y sont tantôt plus et tantôt moins abondans , faits dont le premier a été observé par Gauthier (3), et l'autre par Lassaigne (4). On juge , d'après ces phénomè- nes , que la force plastique primordiale ne s'éteint point pen- dant la durée de la vie, qu'elle est l'agent essentiel de la nutrition , mais qu'en accomplissant cette fonction , elle est aidée par la formation primitivement produite , de manière à pouvoir alors réaliser son type d'une manière plus parfaite. 4» La matière n'est que l'accident de l'organisme , dont l'activité est, au contraire , la substance (§ 473, 10°). De là résulte que , dans la régénération , il s'agit moins de la resti- tution matérielle , que du rétablissement des dispositions et des formes normales , en sorte qu'un tissu peut très-bien rem- placer , sous le point de vue purement mécanique , un autre (1) Eggers, loc. cit., p. 39. (2) Spallanzani , Précis d'un ouvrage sur les reproductions animales, p. 64. (3) Brescliet , Quelques recherches historiques et expérimentales sur la formation du cal , p. Si. <4} Journal de chimie médicale, t. lY, p. 336. CAUSE DE LA ÉLASTICITÉ ORGANIQUE. 54 5 lissu qui a de l'affinité avec lui , et auquel il ressemble quant à la cohésion. Le polype des membranes muqueuses est moins anormal dans sa matière que dans sa forme ; mais une cica- trice qui date de la première enfance persiste pendant toute la vie, malgré le renouvellement continuel de la substance, et croît même en proportion des autres parties (1). Le travail de la régénération rétablit souvent la [forme normale d'une manière inattendue ; lorsqu'après l'extraction de la cataracte, la lèvre supérieure de la cornée transparente fait saillie , et s'accolle par son bord interne au bord externe de la lèvre in- férieure , les deux lèvres se ramollissent plus tard , puis se gonflent , et quand la tuméfaction disparaît , la cicatrice se trouve parfaitement de niveau (2). 5° La régénération , comme , en général , la conservation de soi-même , a principalement pour but un état , et ne s'exerce sur des substances que pour réaliser cet état. Aussi la force médicatrjce de la nature se manifeste-t-elle sous les formes les plus diversifiées, par des changemens dans la quantité et la qualité des sécrétions , par l'inflammation , la suppuration, la gangrène, des spasmes, etc. Mais toutes ces crises ont cela de commun qu'elles rétablissent l'équilibre troublé, et qu'elles maintiennent le type primordial de la vie. § 891. Comme le type n'a rien de matériel , comme il est purement idéal , 1. 11 prédomine dans la totalité de l'organisme (§475, 11°), et toute formation organique dans un espace quelconque dé- pend du besoin et de l'influence du tout(§ 478, 5°). Lesdifle- rentes pseudomorphoses nous en fournissent suffisamment la preuve. Il peut se former un extérieur sans intérieur qui lui cor- responde , des os de membres sans muscles, nerfs, ni moelle épinière, des rudimens d'os pelviens sans colonne vertébrale, ou d'os crâniens sans cerveau, des nerfs rachidiens sans moelle épinière , des glandes lacrymales sans œil , une sclé- (1) Autenrieth , Handbuch der empirisehen menschlichen Physiologie , t. II, p. 181. (2) eil, ^rc/itr, t. IV, p.474. ^ vm, 55 ^4^ CAUSE DE lA PLASTICITÉ ORGANIQUE. TOtique , avec un corps vitré et un cristallin , sans rétine ni choroïde (d). La périphérie peut se produire sans base ; on voit des doigts à un avant-bras sans bras , ou à un bras sans avant-bras ; on rencontre une main à l'omoplate , sans bras ni avant-bras (2). Tandis qu'un organe antérieur sous le point de vue du déve- loppement, comme le foie^ manque, il peut y en avoir d'autres dont la formation date d'une époque postérieure , par exemple des reins ou des organes génitaux. Il peut ne se former que quelques parties d'un système plastique, une vessie sans reins, ou des reins sans vessie (3). 2° La régénération ne part pas tant de la partie qui doit être complétée que de l'organisme entier , qui veut se ré- tablir dans son intégrité. Lorsque des parties qui reçoivent peu de sang , des tendons par exemple , viennent à être bles- sées , les parties environnantes , qui sont plus riches en vais- seaux, sécrètent du hquide plastique. Après une ligature qui a coupé les membranes internes d'une artère , ce liquide est fourni , suivant Breschet (4), non seulement parla face interne et la paroi du vaisseau , mais encore par tous les tissus d'a- lentour. On en trouverait difîicilement une preuve plus con- vaincante que celle qui est donnée par les fractures ; car le liquide producteur du cal ne vient point uniquement du pé- rioste, de la membrane médullaire et du diploé, mais tire pncore sa source des parties voisines , muscles , tissu cellu- laire , etc. (5), de manière que la régénération s'accomplit même sur un os qu'on a privé de son périoste et de sa mem- brane médullaire (6) ; Meding (7) a trouvé , au bout de quinze (1) Meckel, Handbuch der patlioîogischen Anatomie, t. I, p. 173, 393, (2) JMrf.,p. 154,745. (3) Tiedeniann , Anatomie der kopflosen Missyelurten > p, 77, (4) Dictionnaire de médecine , t. V, p. 255. (5) Archives générales, t. XXVII, p. 323. — Charmeil, Recherches sur les métastases, p. 372. • (6) Charmeil, Recherches sur les métastases, p. 358. (7) Visser tatio de reyeneratioiie ossium jter expérimenta illustrata, p. 27. CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 547 jours, le linge dont il avait enveloppé unes dépouillé de son périoste, couvert d'une couche cartilagineuse molle. 3° Dans les fractures , celles surtout qui ont été accompa- gnées de grands délabremens , la tendance à l'ossification est tellement prononcée, qu'elle se réalise dans les parties molles environnantes. Kœler (1) avait déjà vu les muscles gonflés par de la substance cartilagineuse et même osseuse , de sorte qu'ils paraissaient presque ossifiés quand on les coupait en travers; suivant Cruveilhier (2), ils deviennent grisâtres, com- pactes , et semblables à du tissu cellulaire imbibé d'albumine, puis cartilagineux et en partie osseux ; mais , après la guéri- son de la fracture, ils reprennent leur constitution normale. Meding (3) , Gharmeil (4) et autres ont observé les mêmes phénomènes. Suivant Troja , les tendons et les ligamens s'im- prègnent aussi d'un liquide gélatineux. 4° La formation des tissus ne dépend point d'un sol dé- terminé : l'organisme les produit également sur des points différens ; ainsi , par exemple , après la perte de la dernière phalange , un ongle renaît au bout d'une autre phalange du doigt. Comme le type embrasse un certain nombre de forma- tions , lorsqu'elles viennent à manquer sur un point , il les ré- tablit sur un autre , par redoublement de production ; quand un Limaçon, auquel on coupe les cornes, n'en régénère qu'une seule, celle-là porte deux yeux, et lorsqu'il s'en reproduit deux, mais que l'une d'elles est dépourvue d'œil , l'autre en contient deux (5). Les cicatrices de la peau demeurent glabres chez l'homme ; mais les poils des parties environnantes deviennent plus nombreux ou acquièrent plus de longueur. 'Gomme le vertex manque chez les hémicéphales ^ les cheveux dont il devrait être garni se concentrent au bord de la base du crâne, et y forment une épaisse couronne. 6° La constitution d'une partie régénérée correspond à l'état (1) Expérimenta circa regenerationem ossium , p. 64 , 80. (2) Essai sur l'anatoinie pathologique en général, p. 48. (S) Loc. cit.. p. 47. (4) jLoc. czï., p. 32S. ^5) Eggevs , Fon der IFiedererzcugtmg , p, 48, 548 CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. de la vie au moment de sa production , et diffère de celle de la partie qui doit être remplacée , lorsque l'organisme a fait des progrès dans la série de ses développemens. Le bois des Cerfs nous en présente un remarquable exemple (§ 617 , 7°|; 645, 2°); il se régénère chaque année, mais ce n'est qu'au point culminant de la vie qu'il ressemble à celui de l'année précédente , tandis que , d'année en année , il de- vient plus fort et plus rameux pendant la jeunesse , plus court et plus simple dans l'âge avancé , à moins que , du- rant cette dernière période d'affaissement de la vie , il ne persiste jusqu'à la mort (1). De même , la queue ré- générée d'un têtard de Grenouille présente des vaisseaux en plus grand nombre et plus flexueux que ceux de la queue qu'on a coupée , parce que le développement de l'animal a fait des progrès dans l'intervalle (2). II. L'unité de l'organisme (§ 475, 2°) s'exprime sous tous les points de vue, dans la conformation symétrique comme dans la formation de l'individualité , dans l'engrenement ré- ciproque des différentes substances (§ 833) comme dans celui des diverses activités et des divers âges de la vie ( § 647, 4»), etc. 6» En vertu de cette unité , le néoplasme crée , dans l'in- térieur de sa propre substance , des vaisseaux qui s'ajustent au système vasculaire primordialement formé , et de cette manière il se met en connexion avec tout l'ensemble de l'or- ganisme (§ 859, II). Si , pendant la régénération de la queue d'un têtard de Grenouille , l'aorte ne s'étend d'abord que jus- qu'à la surface de la plaie , où elle se continue , par des branches , avec la veine cave , mais qu'ensuite elle s'enfonce peu à peu dans le nouveau produit (3) , nous ne voyons-là qu'une répétition de l'acte primitif de formation, pendant le- quel le courant sanguin pénètre de plus en plus profondé- ment dans les organes , qui commencent par être dépourvus (1) Berthold , Beitrœge sur Anatomie , p. 78. (2) Spallanzani , Programme d'un ouvrage sur les reproductions ani- males , p. 39, (3) iiîc?., p. 37. CAtJSE DE tA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 549 de vaisseaux. Les parties transplantées contractent des con- nexions vasculaîres avec le nouveau sol qu'elles ont acquis (§ 863, 6°], et, en y plongeant leurs racines, elles en prennent aussi peu à peu le caractère. Dieffenbach (1) dit bien que chaque poil qu'on transplante conserve sa couleur et ses au- tres propriétés , que , par exemple , les blancs ne changent point de teinte chez des sujets jeunes (2); mais il en est autre- ment pour les lambeaux de peau. Lorsqu'on s'est servi d'un morceau de la peau de la tête pour former un nouveau nez (3), il y pousse bien encore des cheveux pendant l'in- flammation, mais, une fois que ces productions sont tombées, à la chute de l'épiderme (§ 889, 14°), elles ne se renouvellent plus , ou du moins deviennent très-clairsemées. Si l'on prati- que une incision sur la limite entre le lambeau récemment accoUé et l'ancienne peau , la plaie guérit rarement par ré- union immédiate , mais presque toujours par une lente sup- puration , car la vitalité est trop différente entre les deux lè- vres , et le bord de l'ancienne peau fournit du pus normal , tandis que celui du lambeau transplanté donne un liquide visqueux, qui n'a pas beaucoup de consistance (4). Ce n'est que peu à peu qu'on voit le lambeau prendre part aux états gé- néraux de la vie ; un^ nez fabriqué depuis six mois déjà de- meura blanc , à l'invasion d'une jaunisse , pendant que le reste de la peau offrait une teinte jaune foncée (5). La puis- sance de la totalité de l'organisme s'est montrée de la manière la plus évidente dans les expériences faites par Hunter -, des ergots de Poulette , transplantés sur les jambes de jeunes Coqs , devinrent aussi grands que des^ éperons de Coq , tandis que des ergots de Coq insérés sur les jambes de Poulettes , n'acquirent qu'en trois ou quatre ans les dimen- sions qu'ils présentaient déjà au bout de la première année (1) Chirurgische Erfahrungen , hesonders ueber die TViederherstellung zerstcerter Theile , t. II, p. 155. (2) Dissertatio de re gêner atione et transplant atione , p. 48. (3) Chirurgische Erfahrungen , t. II, p. 179. (4)/62cZ.,p. 186. (,5)Jhid., p. 13?. 55o CAUSE DE tA PLASTICITÉ ORGANIQUE. chez les mâles. Les pseudomorphoses qui n'ont point de Vais- seaux sanguins dans leur intérieur, se soustraient par là à la domination de l'ensembie de l'organisme , deviennent plus indépendantes , plus rebelles à la guérison , et ont de la ten- dance à subir une dégénérescence qui porte préjudice à la vie. 7° Au sang , qui est la partie matérielle et mobile de l'or- ganisme , celle qui , variant à chaque instant , se déploie en une infinie diversité de variations , fait antagonisme le sys- tème nerveux , dans l'activité purement dynamique duquel se réalisent l'unité de l'organisme et la domination du tout (§ 774, 3°, 6°). Aussi l'activité nerveuse , indépendamment de son influence commune sur la quantité delà formation, qu'elle déploie tantôt sous les dehors de la sympathie et tantôt sous ceux de l'antagonisme (§ 847, I) , en acquiert-elle aussi une toute spéciale sur la qualité de cette même formation, qu'elle détermine au point de la mettre dans la nécessité de se pro- duire partout d'une manière qui soit en harmonie avec le tout. De là vient que la section des nerfs , les lésions de la moelle épinière et les tortures de la vivisection amènent à leur suite l'alcalescence du suc gastrique (§ 820, 3°), du suc pan- créatique (§ 823, 3") et de l'urine (§ 851, 9°), non parce que l'activité nerveuse engendre de l'acide, mais parce qu'en Haut toutes les parties les unes avec les autres , elle maintient là constitution normale de chaque sécrétion , de même qu'elle paraît accroître aussi la nature alcaline de la salive (§ 851, 5°). Aussi a-t-on vu qu'après la lésion de la moelle épinière ou la section des nerfs , l'urine contenait moins d'urée et d'acide urique , remplacés alors par de falburaine (§ 854, 2°), et que les substances étrangères introduites dans l'économie ne s'é- chappaient pas non plus par les couloirs des reins (§ 866, 7°). Aussi l'hystérie peut-elle survenir quand l'urine, est sécrétée non dans les reins , mais dans d'autres organes (§ 857, 15"). L'activité nerveuse paraît donc être ce qui régularise la sécrétion et la nutrition , ce qui les retient dans leurs bornes normales , la condition enfin qui ne peut diminuer sans que le sang devienne plus apte encore à se décomposer, sans que les formations dégénèrent. Du reste , cette influence qu'elle CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 55 1 exerce lui procure aussi une action sur l'irritabilité spécifique des organes ; après la section des nerfs de la dixième paire cérébrale , l'injection des vomitifs dans les veines produisait moins d'inflammation dans l'estomac et les poumons qu'avant l'opération (1), et, après celle de la cinquième paire, les plus forts irritans externes ne pouvaient déterminer une ophthalmie , quoique plus] tard il en survînt une d'elle- même. § 892, II. La cause de la formation est donc idéale." 1° De même que la formation première ( § 474 ,6°), toute formation ultérieure est calculée dans des vues d'avenir, et fait face plutôt à un besoin futur qu'à un besoin présent. Aussi la restauration précède-t-elle quelquefois la perte ; l'é- piderme , par exemple , ne tombe que quand il s'en est re- produit un autre au dessous de lui. Il se peut même que ce soit la reproduction qui détermine la perte , comme nous le voyons entre autres dans le renouvellement du bois des Cerfs." Nous reconnaissons aussi cette espèce de prévision dans le rapport existant entre la sécrétion et l'ingestion. La sécrétion, comme décomposition du sang , correspond à la formation de ce liquide (§ 885, 7°); mais elle augmente, à chaque inges- tion , avant même que le sang ait reçu les substances nou- velles ; car la salive et la bile sont sécrétées en plus grande abondance , l'une pendant qu'on mange , l'autre pendant qu'on digère , indépendamment de la stimulation locale des organes. De même , la sueur devient abondante, ou l'urine coule en grande quantité , immédiatement après qu'on a bu. 2° Si les diverses formations sont le résultat d'une scission du sang en deux membres ayant entre eux un antagonisme de polarité , et du développement de ce liquide en des oppo- sitions variées , qui s'y trouvent contenues en puissance , cha- cune d'elles est donnée en même temps que les autres et par elles , de manière non seulement qu'elles apparaissent en harmonie les unes avec les autres , mais encore qu'elles s'ac^ compagnent d'une décomposition uniforme du sang , à la- quelle correspond une reproduction- continuelles de ce li- (1) Journal de Magendie, t. IV, p. 176.J 55a CAUSE DE LA. PLASTICITÉ ORGANIQUE, quide. Le sang n'éprouve donc point de perte unilatérale ; tandis qu'il cède ici une suJjstance , il en abandonne une au- tre ailleurs, par l'eflet du même acte, de sorte que l'ensem- ble des formations tend à maintenir en lui , malgré les muta- tions continuelles de la matière, et cette proportion eu égard aux principes conslituans, et ces qualités qui le rendent apte à exercer une influence excitatrice et vivifiante sur toutes les parties de l'organisme (§ 746, II). II. La nutrition tend évidemment à des buts qui sont at- teints surtout par un concours réuni d'efforts. 3° Chaque organe a sa destination propre , qui est en har- monie avec celle de tous les autres , et la vie se manifeste dans ses directions variées par tout l'ensemble des différons organes , tant parce qu'elle les produit en harmonie naturelle les uns avec les autres, que parce qu'elle fait naître en eux des activités diverses et qui toutes s'accordent ensemble. Ainsi la consistance, la contractilité, l'élasticité, le nombre, la situation, la connexion , etc., de chaque partie sont préci- sément tels que l'exige la fonction , et celle-ci à son tour est telle précisément que l'organisme en a besoin. Les différons or- ganes accommodent leur forme extérieure à celle des parties qui les entourent ; les poumons, par exemple, s'excavent du côté de la face convexe du diaphragme, et le foie s'arrondit du côté de la face concave du même muscle. Ils croissent en parfaite harmonie ensemble , et chacun d'eux empêche l'au- tre de prendre un accroissement qui serait contraire à son but ; ainsi, chez les Rongeurs, les dents d'une mâchoire s'op- posent à l'allongement de celles de l'autre mâchoire , en sorte que,quand l'une vient à manquer, sa correspondante acquiert une longueur qui la rend incapable de servir à la mastica- tion (1). La subordination à un but spécial se manifeste même dans les organes servant au mécanisme , de manière à se montrer en quelque sorte un moyen de remédier à une dis- position défavorable ou de mettre à l'abri des déplacemens ; ainsi , par exemple , le muscle accessoire du long fléchisseur commun des orteils imprime aux contractions de ce dernier (1) Andial , Précis d'anatomie pathologique , t. II , p. %6Q. CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 553 la direction qu'elles doivent avoir, et les tendons des mus- cles péroniers sont préservés par une gaine spéciale de dé- rangemens qui seraient presque inévitables sans elle. 4° L'harmonie de l'organisation avec le monde extérieur n'est pas moins évidente. Ainsi la destination à vivre d'a- limens provenant du règne animal ou du règne végétal s'ex- prime , chez les diverses espèces d'animaux , par une ana- logie frappante dans la conformation , non seulement des organes digestifs , mais encore des mâchoires et de tout le système osseux et musculaire. L'épilhelium de l'estomac est extrêmement délicat chez les Mammifères carnivores , ferme chez les herbivores, tels que les Ruminans, plus ferme en- core chez les granivores , comme les Chevaux , et à demi car- tilagineux chez les Oiseaux granivores , qui n'exercent pas la mastication. Home (1) fait remarquer qu'à nourriture égale, des animaux voisins les uns des autres ont un gros intestin ou plus court ou plus long, suivant que le sol natal leur fournit des alimens plus ou moins abondans ; que cet intestin a vingt pieds seulement chez l'Eléphant qui habite les fertiles con- trées de l'Asie, et quarante-deux au contraire chez le Dro- madaire des déserts de l'Arabie , un pied chez le Casoar de Java , et quarante-cinq chez l'Autruche africaine , de ma- nière qu'entre la végétation d'un pays et l'appareil digestif des animaux qui l'habitent , il y a harmonie sous le point de vue du développement. De même, l'énorme masse de graisse qui résulte nécessairement du concours des circonstances au milieu desquelles vit la Baleine (§ 843, 5°, 9°; 846 , 15°, 27°), peut fort bien aussi être indispensable à cet animal pour lui procurer la faculté de se maintenir à la surface de l'eau (2). L'harmonie entre l'organisation et le monde extérieur se prononce mieux encore dans les formations périodiques. Les Gastéropodes à coquille ne produisent la substance cornée ou calcaire destinée à^former l'opercule, qu'à l'approche de la mauvaise saison , avant de tomber dans le sommeil d'hiver (§ 610 , 7°). Le pelage d'hiver des Mammifères se développe (1) Lectures on comparative anatomy , t. I, p. 470. (2) Ibid., p. 471. 554 CAUSE bE Ik PLASTICITÉ ORGANIQUE. avant l'apparition du foid ( § 617, 11» ), et correspond à la na- ture du climat (§ 617, 10°). III. Les sécrétions 5" Contribuent plus puissamment que la nutrition à main- tenir la constitution normale du sang. Nous ne pouvons pas les distinguer en récrémentitielles et excrémentilielles , et tout ce qu'on est en droit de faire , c'est d'examiner chacune d'elles sous ces deux points de vue. Il nous est moins permis encore d'établir aucune relation entre cette double destina- tion et leur nature basique ou oxygénée ( § 835 , I). D'abord les sécrétions déposées dans des espaces clos (§ 812-815), savoir la sérosité, le pigment et la graisse, contribuent, comme les parties solides par leur nutrition, à débarrasser le sang de certaines substances; nous avons vu, en effet , que les sub- stances étrangères introduites du dehors se déposent aussi bien dans celles-là (§ 864, V) que dans celle-ci (§ 865, VI). Et quand ces sécrétions viennent à être résorbées, elles peuvent, comme les substances provenant de la décomposition des organes, subir en partie une transformation telle qu'elles ne passent dans le sang qu'à titre de substances excrémentitielles , pour être re- jetées au dehors. C'est ainsi que, chez les végétaux, des huiles grasses et essentielles , des résines, des baumes, sont déposées aussi à l'intérieur, quoique ces substances ne puis- sent contribuer en rien à l'accroissement et à la prospérité des plantes, que par conséquent elles n'aient point un carac- tère récrémentitiel. Les sécrétions déposées à la surface de la membrane muqueuse bipolaire servent aux fonctions de cette membrane , et sont en partie résorbées , en partie re- jëtées au dehors ; une portion de la salive s'évapore ou sort par la sputation ; l'humeur lacrymale s'échappe sous forme tant vaporeuse que liquide ; le mucus intestinal et la bile sont entraînés avec les matières fécales ; mais il n'est pas prouvé que l'absorption n'en fasse point rentrer une partie dans l'é- conomie-, on n'a pas encore calculé si, dans l'état normal, une certaine quantité de suc pancréatique , gastrique et in- testinal, ne s'échappaitpoint du corps. L'éj ection nous apparaît aussi pure que possible dans les organes urinaires et génitaux; cependant, là même, il y a évidemment résorption, par exem- CAUSE DE tA.°PtASTICITÉ OïlGANIOttE. 555 pie dans la vessie. Elle se présente aussi à un grand degré de pureté dans la peau et les poumons, à l'égard du smegma cu- tané , de la transpiration et de l'exhalation des gaz. De l'hydrogène et de l'oxygène sont entraînés hors du corps; par toutes les excrétions ; du carbone l'est principalement par la bile et par les gaz expirés; de l'azote l'est aussi par l'urine. Si nous admettons que l'homme rend quarante onces d'urine par jour (§ 827, 1°), que ce hquide contient , d'après l'évaluation de Berzelius (1), 0,0310 d'urée et 0,0010 d'acide urique, enfin que l'azote s'élève à 0,4G65 dans l'urée selon Prout, et à 0,37076 dans l'acide urique suivant Kodweis , il résulterait de là que l'urine entraîne deux cent soixante-et-seize grains d'azote dans l'espace de vingt-quatre heures. Berzelius (2) admet dans la bile 0,08 de matière biliaire, qui, d'après Thomson , contient 0,5453 de carbone : or si la sécrétion journalière de la bile s'élève à huit onces , elle entraînerait trois cent sept grains de matière bihaire , et avec elle cent soixante-et-sept grains de carbone , qui , joints à la quantité de cette substance éliminée par l'expiration (§ 819, 1° ) , fe- raient en tout six mille six cent cinquante grains de carbone. Maintenant, si nous supposons, comme on pourrait l'admettre d'après les observations qui ont été rapportées précédem- ment (§ 819 , 1°), qu'avec huit volumes de gaz acide carbo- nique il en sort un de gaz azote par l'expiration , que par con - séquent cette fonction enlève en vingt-quatre heures qua- rante mille trois cent vingt pouces cubes de gaz acide carbo- nique et cinq mille quarante de gaz azote , nous aurions , pour ce dernier, dix-huit cent soixante-et-dix-sept grains, et avec les deux cent soixante-et-seize entraînés par l'urine , un total de deux mille cent "cinquante-et-trois grains d'azote , dont la proportion, eu égard aux six mille six cent cinquante grains de carbone éliminés par l'expiration et la sécrétion biliaire , serait de 1 ; 3,08. Or c'est là précisément la propor- tion de l'azote au carbone dans le sang artériel , tant d'après Michaëlis, que suivant Macaire et Marcet (§ 878, 3°). Je (1) Traité de chimie, t. VII , p. 392. (2) Ihid., p. 189. 556 CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE* donne ce calcul sans avoir la moindre prétention de soutenir Texactitude numérique des données sur lesquelles il repose , et uniquement comme un exemple montrant que la formation, considérée en bloc , soustrait au sang les substances dans la même proportion qu'elles s'y trouvent contenues. Ce calcul fait voir que quand une substance se dégage, une autre aussi est mise en liberté dans une proportion correspondante , et qu'ainsi toutes les variations qui peuvent survenir dans le tra- vail de la nutrition et de la sécrétion n'empêchent pas le sang de conserver sa constitution propre , eu égard à la propor- tion de ses principes constituans , ni par conséquent de se maintenir en possession des qualités qu'il doit nécessairement avoir pour entretenir la vie. 6° Plusieurs sécrétions, notamment la salive, les sucs gas- trique , intestinal et pancréatique , la bile , et probablement aussi les liquides interstitiels des ganglions vasculaires, ser- vent à la formation du sang. 7» Les sécrétions ont toutes plus ou moins des usages mé- caniques , et servent à maintenir l'indépendance des parties solides , en les empêchant de se confondre ensemble. La sé- rosité interstitielle , la sérosité vésiculaire et la graisse doivent surtout être prises en considération sous ce rapport , puis- qu'elles facilitent les changemens de situation des parties , et que, dans les vésicules sensorielles, elles entretiennent la ten- sion des parties molles ; le mucus protège la surface sécré- toire et favorise les mouvemens qui s'y accomplissent ; l'hu- meur lacrymale concourt à la transparence et à la mobilité de l'œil, etc. 8° Les sécrétions à la surface ou dans l'intérieur des organes sensoriels servent aux sensations d'une manière en partie mé- canique et en partie chimique. 90 Les sécrétions des divers organes appartenant au sys- tème génital sont destinées à la conservation de l'espèce. iO° Enfin quelques sécrétions réagissent immédiatement sur l'état de la vie. La bile ne se borne pas à rendre plus vif le mouvement du canal intestinal avec lequel elle entre en contact; elle influe encore sur l'économie entière, et jusque sur le caractère , comme on peut s'en convaincre quand^ elle CAUSE DE LA. PLASTICITÉ ORGANIQUE. 55'^ est sécrétée en trop grande ou en trop petite quantité ; les effets de la castration nous prouvent combien est puissante Tinfluence que l'activité et le produit des testicules et des ovaires exercent sur l'organisme et sur la direction de la vie entière. § 893. 1. Les circonstances de la formation montrent qu'il y a diversité du type i° Dans les différentes espèces d'êtres organisés. Cette diversité s'exprime d'abord dans l'ensemble de la forme. Gliez les animaux inférieurs et les végétaux en général, on trouve une forme extérieure particulière et déterminée , sans organes internes spéciaux , sans même aucune diversité de tissu , attendu qu'il est dans l'essence de l'organisme d'ex- primer ce qui le caractérise par la forme générale surtout, quoique les spécialités ne demeurent pas non plus étrangères à cette expression. La forme totale indique bien d'une ma- nière générale la destination à un mode de vie déterminé ; mais les indications qu'elle donne à cet égard ne sont point absolues; le but de cette spécialisation n'est point exclusive- ment dans la vie de l'espèce considérée isolément, mais dans la variété des formes sous lesquelles la création organique peut se déployer. De même , il n'y a point correspondance parfaite entre la forme des organes et la forme totale du corps , non plus qu'entre celle des tissus et la configuration des organes ( § 475, 11° ). Ainsi le volume des animalcules spermatiques ( § 84 , 9° ) , des globules du sang ( § 664, 7°) , des vésicules adipeuses ( § 800, 1° ), etc., ne correspond nul- lement à celui du corps. Les vaisseaux sanguins de la cho- roïde n'ont point un diamètre proportionnel à la grosseur de l'œil; car, d'après Sœmmerring (1), ceux des Salamandres aquatiques, par exemple, l'emportent en calibre sur ceux de l'œil du Bœuf, qui cependant est cent fois plus gros que celui des Tritons ; le même phénomène s'observe aussi dans d'autres organes. Chaque espèce animale a un type particulier pour la distribution des vaisseaux dans la choroïde (2) , comme (1) Denkschrifien dor Akademie zu Muennehon , t. VII , p. 9, (2) Ihià., p. 41. 558 CAUSÉ DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. dans les autres parties de réconomie ; on en peut dire autant des ramifications des canaux de sécrétion , et de la configura- tion des organes secrétaires , par exemple de la division du foie en un plus ou moins grand nombre de lobes , sans qu'il nous soit donné de reconnaître là aucun rapport avec une autre formation, aucune relation avec une particularité de la sécrétion , ni avec une activité vitale quelconque. Les divers tissus stratifiés sont supplétifs les uns des autres , ou même du tissu scléreux, chez différens animaux. Et cependant, au milieu de cette variété en apparence sans but , nous décou- vrons toujours l'harmonie qui règne dans l'organisme ; les pétales d'une corolle, les barbules d'une plume de Paon, quand on les examine isolément , semblent n'offrir que des couleurs jetées d'une manière confuse et pour ainsi dire au hasard ; mais, par leur réunion, ces diverses parties'produisent un dessin régulier dont nous ne voyons pas l'utilité pour la vie particulière , de sorte que nous sommes obligés de l'aller chercher dans une loi plus générale. 2° Chaque individu , à son tour , possède en propre un type de vie. Ce type est primordial , et il a été fourni tant par les circonstances particulières de la procréation de l'individu ( § 301-307 ) , que par la puissance de l'espèce , qui tend également à la diversité ( § 646 , 7° ) ; cependant il est en partie aussi acquis par l'habitude , de manière , par exemple, que l'exercice des organes rend la nutrition plus active ( § 845, 7° ) , qu'une sécrétion fréquemment ou continuelle- ment provoquée par des circonstances particulières devient enfin habituelle ( § 845, 4° ) , que des alimens inaccoutumés diminuent la sécrétion du lait ( § 842, 11"), et que la sécré- tion urinaire elle-même devient anormale par l'effet de repas pris à des heures non consacrées par l'habilude (§ 853, 9° )^ II. Le type individuel est une modification du type de l'es- pèce , qu'on désigne sous les noms de variété de conforma- tion^ complexion , etc. Mais l'anomalie est un écart du type de l'espèce, du sexe et de l'âge, poussé au point que les fonc- tions ne correspondent pas parfaitement à ce type , ou du moins peuvent être dérangées par l'aberration qu'il a subie. ïlUe ne diffère donc^de la variété que sous le point de jue de CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 559 la quantité ; la taille des géans et des nains est anormale , mais on ne peut point fixer en pouces ou en lignes les limites qui ^la séparent de la variété ; quand un rameau vasculaire s'éloigne de sa condition ordinaire de volume , de situation et de direction , il y a variété ; les mêmes phénomènes con- stituent une anomalie dans les troncs ; dans une branche , ils tiennent le milieu entre l'anomalie et la variété. Mais la maladie est une lutte de la vie individuelle avec elle-même , dans laquelle le libre exercice et l'harmonie des fonctions sont troublés. L'anomalie, même portée au 'plus haut degré, comme par exemple dans le cas d'absence des membres ou de coalition de deux individus , n'est donc point encore une maladie , et ne peut être qu'un élément de maladie. Elle n'est point non plus étrangère à la vie en général; seulement un état de choses qui constitue une anomalie chez un individu , est nor- mal à un autre âge , dans un autre sexe , ou chez une autre espèce. 3° Le rapport quantitatif des formations (§ 838) est sou- mis à la variété pendant le cours de la vie. Ainsi, par exemple, l'atrophie , la flétrissure et la disparition des branchies cer- vicales, des corps de^Woltï, des vaisseaux ombilicaux , du canal artériel, des dents de lait, du thymus, etc., sont des phénomènes normaux, de manière que, quand cette atrophie n'arrive point, il y a état anormal. 4° Pendant son cours , la vie change de direction ( § 648 ) d'une manière normale , et la même direction peut être anor- male quand elle se présente en temps inopportun (§ 845, 4" ). Des changemens qualitatifs accompagnent la vie pendant toute sa durée ( § 848). La transformation que les organes subissent dans leur substance ( § 858 ) , par exemple celle du cartilage en os , ou du thymus en tissu cellulaire, appartient à la méta- morphose normale qui s'accomplit durant le cours de la vie, et à la diversité que le type présente dans la série animale, où l'on voit une partie offrir^ à tel échelon , une texture qui , ail- leurs, appartient à un organe différent ; ainsi , par exemple , l'épiderme n'est ici qu'un épithélium à peine discernable, tandis que là il prend la forme d'un véritable squelette osseux j la peau de certains animaux ressemble à une membrane^mu ; 56ô CAUSE DE LA PLASTICITÉ OR(ÎANIQUË. queuse, et chez d'autres la membrane muqueuse se rapproche de la peau par la formation d'un pigment , l'épaisseur de l'é- piderme, le développement de points cornés et de poils ; chez certains Poissons, le foie est chargé de graisse, ce qui consti- tue un état anormal chez les Mammifères. Toute exaltation ou modification du travail normal de la formation , comme dentition, développement de la puberté et fécondation, s'ac- compagne d'un état inflammatoire , qui , lorsque les phéno- mènes suivent une marche trop rapide et tumultueuse , peut dégénérer en véritable inflammation. 5° La formation de nouvelles parties homologues ( § 859 ) est l'acte normal de l'accroissement réduit à un plus faible degré , ramené à un échelon où la vie intérieure n'a point assez de puissance pour accomplir un perfectionnement in- terne, et où l'activité vitale se déploie davantage à l'exté- rieur : l'individu augmente, mais non les organes; car ceux-ci, en se formant , ont atteint les limites de leur développement, de sorte qu'ils ne peuvent plus se perfectionner, et les pro- grès ultérieurs de la vie ne portent pas à une plus haute puis- sance ce qui déjà existe, mais ne font que le multiplier. Ce phénomène est caractéristique pour les plantes , qui ne dis- continuent jamais de produire des parties nouvelles ; on l'ob- serve aussi dans les Sertulaires et les Coraux , chez" lesquels les troncs meurent et poussent sans cesse de nouveaux reje- tons; on le voit encore chez plusieurs Annélides et Isopodes, où le nombre des segmens du corps s'accroît peu à peu. A un degré plus élevé de l'échelle animale, ce n'est plus le nombre des organes, mais celui de leurs parties élémentaires, qui augmente par le fait de l'accroissement ; les organes gros- sissent de dedans en dehors , ils se rajeunissent incessam- ment, ils se maintiennent par suite de la rénovation continuelle des substances qui entrent dans leur composition , et les nou- velles parties qui surviennent sont des pseudomorphoses, entre lesquelles et les parties normales il existe encore plus ou moins d'analogie. Les pullulaiions ( § 870 ) qu'on observe dans le corps humain , sont analogues à des tissus normaux chez certains animaux; les télangiectasiesse rapprochent des tissus éreciiles (§ Û83 ), les lipomes des coussins de graisse, CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 56 1 les condylomes des crêtes de coq, etc., jusqu'à la cuirasse des Oryctéropes et aux cornes des Ruminans. Les concrétions sont normales , sur un point ( § 811 ), anormales sur un autre (§ 874 ); car, par exemple, le sable de la glande pinéale, qui est normal chez l'homme, ne s'observe que par ano- malie chez certains animaux, tels que les Chevaux (1), Des Entozoaires vivent , chez beaucoup d'animaux , dans presque tous les individus sans exception , à la santé desquels ils ne portent aucune atteinte , de sorte que nous pouvons les considérer comme une disposition normale , dont le but est de consommer la matière animale superflue , et que , sous ce rapport , ils sont comparables aux bêtes carnassières , qui purgent la terre des charognes. Les Epizoaires des enfans paraissent servira peu près aux mêmes usages. Les Vers cys- tiques s'engendrent, comme le fait l'œuf, dans une vésicule de l'ovaire , et se propagent à la manière du Volvox. 6° La déhiscence et la reproduction ont lieu d'une manière normale dans la déchirure des vésicules de l'ovaire et la for- mation des corps jaunes ( § 300 , 2° ). Les végétaux se dépouil-; lent périodiquement de leurs organes respiratoires et génitaux (§ 609); de même, chez les animaux inférieurs^ une partie du corps de la mère est rejetée au dehors pour produire le nidamentum (§ 343, 15°), et le part s'accomplit au moyen d'une déchirure (§ 483). Les tissus stratifiés sont rejetés pé- riodiquement , opération à laquelle la volonté prend plus ou moins départ (§ 617) , et une séparation périodique du sque- lette cutané, sans^ qu'il cesse pour cela d'y avoir toujours continuité entre le produit ancien et le produit nouveau , a lieu chez le Nautile et la Spirule , où l'animal , lorsqu'il s'accroît , sort de sa coquille hémisphérique, s'en forme une nouvelle plus grande , qui s'accolle à l'ancienne , et ainsi de suite , de manière que la coquille entière se compose d'une série de chambres dont la capacité va toujours en augmentant. Enfin , plusieurs animaux articulés, notamment certains Décapodes et quelques Arachnides , abandonnent volontairement une de leurs pattes , pour se soustraire à un danger immineat , ou (1) Journal de chimie médicale , t. IV, p. 475. VIII. 36 ê§% GAUSl^ m LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. pour se débarrasser d'un membre endommagé , dont la lésion ne saurait être réparée, mais qui peut très-bien se reproduire en entier, comme Réaumur (1) l'avait déjà observé. Ainsi , Heinecken (2) a remarqué que les Crabes abandonnent leur patte , sans témoigner de douleur , quand on en retient le segment terminal, ou qu'on coupe l'ariiculation médiane, et, s'ils ne le font pas au moment même , ils ne tardent guère à rejeter un fardeau désormais inutile ; mais (3) quand on écrase la patte d'une Araignée , en tenant l'animal de manière à l'enl- pécher de se mouvoir , il enfonce ensuite le moignon dans Sa toile , et l'arrache en pesant sur cette dernière. Il paraît y avoir ici une différence eu égard au degré d'importance des membres pour l'animal ; les Grillons et les Sauterelles perdent facilement les pattes qui leur servent à sauter , mais non leurs pattes ambulatoires , les Crabes n'abandonnent pas aussi faci- lement leurs pinces que les autres pattes , et la même chose a lieu, chez les Araignées chasseuses, pour la première paire de pattes ) avec laquelle elles saisissent leur proie (4). On ignore encore à quoi il tient que les Holothuries , dès qu'on les saisit, vomissent tout leur canal intestinal , au milieu de contractions répétées du corps. 7" La putréfaction, qui est normale après la mort , se mon- tre , dans la gangrène , modifiée par l'influence de la vie qui anime encore le reste de l'organisme ; aussi est-elle (§ 869, 7°), comme la putréfaction (§ 637 , II) , tantôt humide et tantôt sèche ; mais la gangrène sèche appartient à la catégorie des phénomènes normaux de la vie ; car c'est elle qui détermine la chute du cordon ombilical. III. Quant aux particularités que présentent les anomalies, S° Leur manifestation se rattache, tantôt à des circonstances débilitantes , en vertu desquelles la vie a perdu son point d'ap- pui , de manière que la domination de l'unité faiblit dans l'or- ganisme , et que le sang devient plus susceptible de se dé- (1) Méni. de l'Acad. des sciences , 1712 , p. 228. (2) Froriep , Notizcn , t. XXYTII , p. 482. (3) Ihid., p. 19/1. ^4) Jhid., p. 198. CAtJgE DE LA PEASTICIÎÉ ORGANIOUS* 563 composer , tantôt à une production trop abondante de masse, qui se soustrait à l'empire de la force régulatrice , etc. Ce- pendant il ne nous arrive que trop souvent d'être obligés de nous en tenir à constater qu'il y a état anormal du type indi- viduel et idiosyncrasie plastique , à embrasser l'ensemble des phénomènes de cet état anormal , sans pouvoir nous élever à la cause de laquelle il dépend ; c'est ce qui a lieu pour les al- binos, les personnes sujettes aux hémorrhagies (§ 854, II) , les hommes dont la peau est couverte de piquans semblables à ceux du Porc-épic (§ 870, 8°), l'ossification des muscles (§ 858, 8° ) , divers changemens dans les qualités des sécré- tions (§ 848, S*"), etc. Dans d'autres cas, la cause est évidente, mais on ne comprend pas la manière dont elle agit , ce qui arrive , par exemple , à l'égard de la forme particulière que la dernière phalange des doigts affecte dans la maladie bleue (§ 843, 8"). Ailleurs encore , ce qui provoque des forma^ionS anormales nous frappe bien par ses qualités et ses effets, mais nous ignorons quelle en est la substance (§ 867, 11» ; 871, IV, 872, VI). 9° Le type de formation particulier à diverses dyscrasies et à certaines diathèses , par exemple à la rhumatismale , à la catarrliale, à Vhémorrhoïdale, etc. (§867,111), est également une sorte de cryptographie , dont l'observateur attentif deviné le sens, à l'aide d'autres phénomènes analogues, mais sans pouvoir comprendre la valeur des caractères eux-mêmes. C'est ainsi seulement que nous jugeons , d'après la forme d'tine ci'- câtrice, si elle s'est produite à la suite d'une coupure, d'une brûlure ou d'un ulcère syphilitique, scrofuleux, etc. Demême» ce qu'il y a de particulier dans les divers exanthèmes tient plus à la différence du type de formation qu'à celle du siège. iO° La manière d'agir de diverses diathèses qui se rencon- trent ensemble chez un même organisme se manifeste surtout dans les exanthèmes. Tantôt les deux diathèses déploient si- multanément le mode d'action propre à chacune d'elles, comme par exemple la variole chez un sujet atteint de la syphilis ; tantôt elles se modifient l'une l'autre, et en produisent une troisième , comme on voit des dartres prendre un caractère scrofuleux, arthritique ou syphilitique; parfois enfin Vuae 564 CAUSE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. d'elles étouffe Tautre par antagonisme, et la gale, par exemple, disparaît pendant la scarlatine , pour reparaître après (1). IV. Le rapport de l'anomalie à la normalité se manifeste 11° Dans un antagonisme analogue. La pseudomorphose s'é- tablit souvent lorsque la formation normale ne peut point avoir lieu, notamment quand la faculté procréatrice de la femme n'entre pas en jeu ( § 45, 6° ) , et , de son côté , elle diminue la nutrition , comme le fait la régénération (§ 889, 10°). 12° La formation anormale , surtout lorsqu'elle est primor- diale, et par conséquent fondue avec l'existence de l'individu, tend à se maintenir. Lorsqu'on divise chez un enfant les ad- hérences congéniales établies entre ses doigts , ceux-ci se re- collent presque toujours , même après la cicatrisation complète des plaies , parce que la peau de leurs parties latérales ne croît pas dans la même proportion qu'eux , de manière que la fente conserve la longueur que les doigts avaient à l'époque de l'opération (2). Bromfield, consulté pour un enfant qui avait un pouce double , excisa le plus petit ; mais il en vit bientôt reparaître un second , qui , même après avoir été désarticulé, fut plusieurs fois de suite encore remplacé par d'autres. 13° Même au plus haut degré de l'anomalie , on voit en- core le type de formation de l'espèce percer à travers la dif- formité complète de l'individu. Il n'est pas rare que la masse spongieuse qui tient la place du cerveau chez les hémicé- phales , offre la forme totale de cet organe , une scissure lon- gitudinale pour les hémisphères , une autre transversale pour les lobes antérieurs et postérieurs, enfin des circonvolutions à la surface. Gomme les parties régénérées sont moins du- rables que les parties primordiales (§ 889, 15°), les pseu- domorphoses développées pendant le cours de la vie se main- tiennent moins que les productions normales ; il est plus facile de les détruire par l'action des caustiques; une abstinence prolongée les fait diminuer promptement , au point même de les effacer en entier, de manière que le type normal peut (d) Rayer, Traité des malad. de lapeaiu 2= éd., Paris, 1835, 1. 1, p. 457. (2) Seerig, Ueher angehorne P^erwachsung der Finger und Zehen , und ISekensaU derselbeîi , p. 16; CAtlSE Ï>E tA PIASTÏCITÉ ORGANIQUE. 565 reprendre ses droits. Lorsqu'on n'ouvre un abcès ^survenu dans une dyscrasie que quand celle-ci est éteinte et le type normal rétabli, on obtient un ulcère simple, tandis que, quand l'ouverture a lieu plus tôt , l'ulcère prend le caractère de la dyscrasie. 14° De même que, pour ce qui concerne l'espèce , la na- ture revient de l'extraordinaire à l'ordinaire (§ 304) , de même aussi , dans l'individu , la domination du type , ou la force médicatrice de la nature, tendant à la conservation de soi- même , se manifeste en faisant naître , au milieu de circon- stances anormales , des conditions qui sont en harmonie avec l'activité vitale et la formation (§ 888, 3°). Ainsi, par exem- ple, lorsqu'une artère a été blessée, l'hémorrhâgie s'arrête par le fait de la syncope qui survient , et pendant laquelle un caillot de sang peut plus facilement boucher la plaie ; quand un vaisseau est devenu imperméable , les anastomoses se di- latent (§ 713 ,4°); sur les points qui, par suite d'une lésion quelconque , sont exposés à être comprimés , il se forme des vésicules séreuses qui suppriment les effets de cette com- pression (§ 859 , 18°) ; la tête de l'humérus, sortie de la cavité cotyloïde , se creuse une nouvelle cavité articulaire dans les os pelviens, et les bouts d'un os fracturé , quand ils n'ont pu se réunir, finissent par s'articuler ensemble (§ 864, 2°). Du- hamel (1) a trouvé que les éperons transplantés sur la crête des Coqs , acquéraient des ligamens et des articulations par- tout où ils en avaient besoin, et il fait remarquer que , même dans les monstruosités , l'organisation est disposée aussi har- moniquement que l'état des choses le permet. Il n'est pas moins évident que la faculté régénératrice correspond surtout aux besoins de l'organisme et à ses rap- ports avec le monde extérieur. Les parties qui s'allongent beaucoup, comme les rayons des Etoiles de mer, les pattes des Araignées, etc., et qui sont fort exposées à être lésées, possèdent cette faculté à un plus haut degré que d'autres. Suivant Réaumur (2) , la patte d'une Ecrevisse ne se reproduit (1) Mém. de l'Acad, des sciences , 1746 , p. 352. (2) Ihid., 1712 , p. 226. 566 ESSENCE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. jamais avec plus de facilité que quand on l'a brisée de ma-^ nière à ménager le dernier article qui l'unit au tronc ; or c'est là précisément que la fracture s'opère lorsqu'elle a lieu par l'effet du hasard ; les pattes de derrière se régénèrent plus rarement et avec plus de lenteur, mais ne se brisent pus non plus avec tant de facilité , et la queue , qui présente plus de solidité encore , ne se reproduit pas. Si Spallanzani a reconnu, sur les Vers de terre , que la tête , partie nécessaire à la suS'. ception des alimens , se régénère plus vite que la région postérieure du corps , Broussonet (1) a constaté , chez les Poissons , que la régénération des nageoires s'accomplit dans UQ ordre en harmonie avec le besoin que l'animal éprouve de ces organes ; elle a lieu d'abord à la queue , puis à la poi- trine ou au ventre , enfin au dos , dont la nageoire n'avait point encore de rayons bien sensibles au bout de sept mois ; mais , si une nageoire ne se reproduit pas, celles qui restent la suppléent. Enfin, de même que l'organisation détermine l'adoption d'un genre de vie en harmonie avec elle , de même aussi le genre de vie la modifie jusqu'à un certain point , et elle s'y accommode. La capacité de l'estomac augmente ou diminue suivant qu'on prend plus ou moins d' alimens ; on a vu ce vis- cère devenir plus petit chez des Brebis qui n'avaient été nourries qu'avec du pain. Après avoir nourri une Chouette avec de la farine, Menestries (2) trouva que l'estomac se rapprochait de celui des Oiseaux carnivores : il avait un épi- thélium plus ferme, la sécrétion biliaire était plus abondante, et le foie plus volumineux. CHAPITRE m. Résume des considérations sur l'essence des produits matériels de l'organisme. § 894. Dans les considérations auxquelles nous nous sommes livrés jusqu'ici , nous avons procédé de la surface à l'intérieur, (l)iWi.,4786, p. 687. {2)Isis, 4832, t. II, p. ■145. ESSENCE DE tA PLASTICITÉ ORGANIQUE, 56^ du côté mécanique de la formation (§ 877) à son côté cln^ mique (§ 878) , de celui-ci à la cause d'où elle dépend, de ce qui est placé en dehors du sanjj (§ 881) à ce qui se trouve dans le sang lui même (§ 885) , de l'atmosphère (§ 882) au)^ organes (§ 883), enfin du sang (§ 886) à ce qui agit en lui et par lui (§ 890-8 J2). Il nous reste maintenant à chercher les résultats générauK qui découlent de cet examen. 1° Nulle théorie mécanique ou chimique ne suffit pour expliquer la formation organique. Il faut invoquer quelque chose de supérieur, non pas un deïis ex machina , mais mi deus ex vitâ; non l'hypothèse d'une substance éthérée , d'ua ressort transcendantal , mais l'intuition d'une force naturelle créatrice, partout la même , et par conséquent légitime. L'idé^ de l'organisme , pour se réaliser, produit une multitude de parties diverses , qui portent en elles le caractère du îout » et; qui concourent à un but commun. Nous donnons à cet idéal le nom de principe vital ; mais , tout en le reconnaissant , U faut bien nous garder de nous le figurer isolé dans son es- sence et dans ses effets. En effet , si nous le considérons comme un principe particulier, qui n'a point son pareil, nous ne faisons par là qu'exprimer un fait, savoir que l'existence or- ganique diffère de l'existence inorganique; mais, quand nou| reconnaissons l'univers pour l'organisme absolu , pour la ré-^ vélation de /infini dans le fini , et l'être organisé pour un reflet de l'univers (§ 476), nous établissons ainsi, entre le témoignage de nos sens et nos intuitions rationnelles, une unité qui nous permet d'agir dans le sens de notre nature spiri- tuelle. En second lieu , si nous nous contentons de dire qu'ua principe de vie , considéré lui-même comme une chose isolée^ est la cause des phénomènes de la formation , sans pénétreç plus avant dans cette dernière , nous coupons le nœud , au lieu de le défaire ; car le principe de la vie agit par des moyens matériels , et notre problème est de savoir quels sont ces moyens. La régénération d'un conduit excréteur détruit, le rétablissement du canal intestinal qui s'accomplit de lui-même, après qu'une portion considérable de cet organe s'est déta- chée , la substitution à un os dissous d'un os nouveau ayant les mêjEues connexions avec les muscles et les ligamens , l'a* 568 ESSENCE t>E lA PIASTICITÉ ORGANlQlîE. bouchement d'extrémités closes de vaisseaux, etc., sont,' quand on envisage ces phénomènes en eux-mêmes , des mi- racles du principe vital ; mais , de même que tous les miracles se fondent dans le seul qui existe réellement , le grand mi- racle de la nature , de même aussi nous trouvons que ces phénomènes surprenans de la formation sont accomplis par les activités communes de l'organisme, par l'attraction du sang et la sécrétion d'un liquide plastique, par l'absorption et l'adhésion , etc. Notre problème doit donc être de chercher à nous procurer ainsi une connaissance plus approfondie du travail de la formation. 2° La formation organique est un développement de diffé- rences dans une chose qui n'en présentait pas, un déploiement d'antagonismes qui vont toujours en se multipliant , qui ne cessent jamais d'en produire de nouveaux , de manière que chaque point du corps organique a ses caractères spéciaux , qu'une seule et même substance présente des modifications particulières dans chaque organe (§834, 1°), et que le même tissu prend partout un autre caractère : la peau devient, à l'œil , transparente et susceptible de laisser passer la lu- mière, à l'oreille , tendue et apte à transmettre les vibrations sonores, au bout des doigts, molle et spongieuse, pour admet- tre les impressions tactiles : les artères perdent leur tunique fibreuse dans le cerveau , et en acquièrent une plus forte dans les muscles ; les os , comme parties périphériques , se dé- ploient sous cette forme autour de l'organe central de la sen- sibilité ; mais , dans les membres , qui sont eux-mêmes pu- rement périphériques , ils servent de noyau , et partout ils diffèrent eu égard aux proportions de leurs principes con- stituans. 3° Ce qui est formé favorise la production de formations ultérieures. Une -fois les formations produites par le fait d'un développement primordial , la force attractive que la partie exerce sur la substance plastique entre en jeu , s'oppose à la force répulsive du sang , et facilite ainsi la formation. Une dissolution saline cristallise par la sépanition du sel dissous et du dissolvant ; mais les cristaux déjà développés favorisent la production de nouveaux cristaux. De même, une pseudo- ESSENCE DE LA PlASTfCiTÉ OïlGANTQtE. 669 morphose née de matériaux du sanfj extravasés se maintient et croît ensuite en attirant de ce liquide les substances qui ont de l'afGniié avec elle : de même enfin, les diverses forma- tions normales rendent plus facile , par le seul fait de leur existence, leur développement ultérieur aux dépens du sang. Ce qui subsiste , ce qui a déjà une certaine composition , une certaine forme , n'agit pas comme cause , mais comme auxi- liaire , eu égard à la forme et à la composition qui doivent encore être acquises ; c'est en quelque sorte le lit dans le- quel un torrent continue de couler, bien qu'il l'ait creusé lui- même. Mais la conservation n'étant qu'une production conti- nuée , elle exige un déploiement de force infiniment moins grand que la production primordiale. Si la force plastique a été assez puissante , au début de la vie , pour engendrer même les organes les plus nobles, il ne lui reste plus ensuite que l'énergie nécessaire pour reproduire des parties d'un rang su- balterne. 4° La conservation est en même temps formation. La force créatrice qui donna l'existence à l'organisme , agit sans in- terruption (§ 888) ; ses matériaux sont le sang ( § 875), qui tend, en raison de son caractère chimique (§ 885, 4° ), à se dé- composer, et, en vertu de sa constitution mécanique (§ 885, 6°), à repousser une partie de sa masse. Lorsque la vie suit tran- quillement son cours , les effets de cette force créatrice sont moins appréciables (§ 876), et, pour ce qui concerne les for- mations supérieures, elle a besoin de l'appui des parties pri- mordiales, qui, par suite d'une affinité spécifique, attirent du sang les substances que ce liquide a d'ailleurs par lui- même de la tendance à déployer (§ 881, I; 883 , 8°). Aux surfaces terminales de l'organisme , la peau et la membrane muqueuse bipolaire , et à celles de ses diverses parties , c'est- à-dire dans tout le système du tissu cellulaire , apparaissent principalement des matériaux immédiats et pour la plupart solubles du sang , de l'eau , de l'albumine , de la matière ex- tractive', de la graisse, des gaz, des sels; la formation y prend le caractère d'une opération chimique ordinaire (§ 883 , 1 ") ; car d'un côté l'atmosphère attire les substances qui ont de l'affinité avec lui (§ 882) , et de l'autre la pression de la co- ^70 ESSENCE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. lonne sanguine chasse ces substances dans des espaces inté- irieurs qui sont vides. Le sang peut engager une partie de se§ patériaux immédiats ou médiats dans de nouvelles combi- naisons , et produire de cette manière des substances spé- ciales ( § 885 , 9° ) , qu'aussitôt il repousse comme mélange^ étrangers, à travers divers organes indistinctement (§857); mais , dans le cours normal de la vie , ces substances particu- lières sont produites pendant le passage à travers le tissu des organes du suc plastique émané du sang , parce qu'au mo^ ment où le tissu entre en contact avec ce suc , il lui fait subip une métamorphose , et s'en approprie une partie , tandis qu'ij^ repousse l'autre (§ 881, II). Plus la profondeur à laquelle, cetie opération s'accomplit dans l'intérieur de l'organisme est considérable , plus le contact est multiplié , et plus aussi la piétamorphose est grande , plus le produit acquiert de carac- tères spéciaux ( § 883 , 1° ). Les différentes parties organiques sont des déploiemens du sang ; ce qui était réuni et jusqu'à un certain point équilibré dans ce dernier, se montre en elles isolé et animé d'une direction plus prononcée dans tel ou tel sens (§ 885 , 5°) , de sorte que, prises ensemble, elles repré- sentent la proportion des substances , telle qu'elle existe dans le sang (§ 892, 5"). Maintenant, comme une formation isolée quelconque est dominée par le tout ( § 891 ) , sa direction est (Jéterminée aussi par la totalité des autres (§ 885,8°); \e sang, en arrivant à un organe , est préparé à la formatioft qui doit s'y accomplir par les changemens qu'il a éprouvé^ auparavant (§ 886), et une partie en appelle une autre, parce qu'elle trouvera en elle son antagonisme ( § 887), 5° Il y a une relation organique entre l'organisme et le Hionde extérieur : l'un et l'autre sont tels que l'exige leur conflit mutuel. L'atmosphère se comporte comme un organe envers le sang; elle le maintient dans sa constitution normale, en lui retirant par attraction des substances ( gaz et eau ) , (§882) , comme pourrrait le faire un organe (§ 883), et le retenant dans ses Hmites (§ 878 ,2°), comme le font égale- ment les organes ( § 892, 3° ). De son côté, l'organisme prend une forme en harmonie avec le monde extérieur, et savitaUté, s'accommode d'elle-même aux circonstances, tant dans l'pri-! ESSENCE DE LA PLASTICITÉ ORGANIQUE. 67! gine ( § 892;, 4°) que par la suite (§ 893 , 14° ) ; l'épiderme de la paume des mains et de la plante des pieds s'épaissit déjà chez l'embryon , pour résister aux efl'orts que la marche et l'action des corps étrangers exerceront bientôt sur lui ; de même , pendant la vie extra-utérine , toute compression lui fait subir un changement analogue sur d'autres points ; des articulations se forn^ent prirnordialenaent pour le mouvement, et plus tard le mouvement en fait naître aussi entre deux os , qu'un état anormal met en contact l'un avec l'autre. Brow^n n'attribuait l'étal de la vie qu'à l'action des stimulans ; Hel- vetius prétendait que l'individualité morale est le résultat de l'éducation , ç'est-à-dira de l'ensemble des impressions ; La- Hiarck voulait que l'organisation fût déterminée par le genre de vie : dans toutes ces théories on n'avait eu égard qu'à un seul côté de la vie , et l'on avait méconnu l'indépendance de son type. 6° Enfin , toute formation anormale étant étrangère , non à la vie en général , mais seulement à l'espèce , au sexe ou à l'âge de l'individu (§893, II), nous avons encore là une preuve qu'il n'y a que les difl'érentes formes et directions d'une seule et même vie qui se représentent tant dans les di- verses espèces d'êtres organisés, que chez les deux sexes ( I 203 ) et aux différens âges ( § 647 ), FIN DU EVniÈWE VOLUME. TABLE DU HUITIÈME VOLUME. Seconde subdivision. Des produits de la vie végétative en général. I Chapitre !•''. Des parties constituantes et propriétés générales des produits de la vie végétative. ib. Article I*'. Des parties constituantes mécaniques du corps organique. 2 I. Cohésion des parties constituantes du corps. ib. II. Configuration des parties constituantes du corps. 6 Article II. Des parties constituantes chimiques du corps organique. 20 Chapitre II. De l'union des parties constituantes de l'organisme. 29 Article I". Du mode d'union des parties consti- tuantes de l'organisme. ib, I. Union mécanique. ib. II. Union chimique* 3o Article II. Des proportions des parties consti- tuantes de l'organisme. 4? I. Proportion des principes constituans chimiques. 53 A. Proportion des élémens chimiques. ib. B. Proportion des matériaux immédiats. Sg II. Proportion des principes constituans mécani- ques. 80 TABLE. 575 Seconde division. De la formation des produits matériels de la vie végétative. 84 Première subdivision. Des phénomènes de la formation des produits matériels de l'organisme. ib. Chapitre I*"^. De la formation des produits matériels de l'organisme , eu égard à leur quantité. ïb, Arlicle I^'. Des circonstances extérieures qui influent sur la quantité des produits matériels del'organisme. 85 I. Influence des milieux ambians. 87 II. Phfluence des matières introduites dans l'éco- nomie, loi A. Influence de la quantité des substances in- troduites du dehors. ib. B. Influence de la qualité des substances in- troduites du dehors. m 1. Influence des substances gazeuses. 112 2. Influence des substances solides et liquides. I25 Arlicle II. Des circonstances intérieures qui influent sur la quantité des produits matériels de l'organisme. 1 3o I. Influence des conditions matérielles de l'orga- nisme, ib, A. Influence du sang. H, B. Influence de la digestion, de rasslmilation et de la respiration. i33 G. Influence des dispositions mécaniques de l'organisme. 1 34 II. Influence de l'état de la vie. i38 A. Influence de l'état général de la vie. iSg B. Influence de l'état local de la vie. i44 G. Influence de l'activité plastique. i47 D. Influence de la vie animale. . 169 Chapitre II. De la formation des produits matériels de l'organisme , eu égard à leurs qualités. 1 80 §^4 TÀBtÊ. Atiîcîé ï". Beà ^produits tiiatériels homologués de l'organisme. l85 î. Chahgemens homologues dans des parties déjà existantes. ib. Ai Modifications de la proportion des matériau^ constiluans. ib. I. Variations des proportions de l'eau. ib. a. Variations dans le degré d'union des prin- cipes constituans. 191 3. Variations dans le caractère a^ide ou al- calin des sécrétions. 196 4. Variations dans les proportions des sels. 206 5. Variations dans la proportion des prin- cipes constituans organiques. 210 B. Mutation du caractère de la fo;pmalion. 2ï5 1. Transformation hématique. 2i6 a« Passage des matériaux inaltérés du sang dans les sécrétions. ib. h. Passage des matériaux altérés du sang dans les sécrétions. 221 2. Transformation plasmatique. 238 a. Métastase, ib. b. Transsubstantiation. 256 * Transsubstantiation régressive. ib. ** Transsubstantiation progressive. 259 II. Formation de parties nouvelles homologues. 262 / A. Homœopaihie. 263 1. Pseudomorphoses celluleuses. ib. a. Néoplasme. ib. h. Vaisseaux accidentels. 272 c. Kystes, 276 2. Pseudomorphoses stratifiées. 277 3. Pseudomorphoses membraniformes. 279 4. Pseudomorphoses scléreuses. 280 TABLE. 576 B. Régénération, ^ 281 1. Régénération simple, Ib, a. Régénération supplétive. 282 b. Régénération complétive. 289 * Régénération complétive en général. ib. •\- Réunion immédiate. 290 •}■•{- Formation de bourgeons charnus. 292 ** Régénération complétive dans les divers tissus. 297 2. Régénération complexe. 3io a. Limitation. 3n b. Communication. 3i8 Article II. Des produits matériels hétérologues de l'organisme. 33 1 I. Mélange de substances étrangères. z^* II. Dégénérescence. 35i A. Dégénérescence des liquides. 356 B. Dégénérescence des parties solides. 365 1 . Changemens hétérologues dans des parties déjà existantes. 366 2. Formation de parties nouvelles hétéro- logues. 370 a. Pseudomorphoses hétérologues. 371 ^ Excroissances. ' iè. •]• Pullula lions. ib. -}"j- Hétéroplasraes. 374 '^'^ Exanthèmes. 38o b. Productions hétérologues qui se sépa- rent de l'organisme. SSg * Parasites. Sgo '^* Concrétions. 393 ■\ Concrétions communes. ib. ff Concrétions spéciales. Sgg 676 TABLE. Deuxième subdivision. De l'essence de la formation des produits matériels de l'organisme. ^o'] Chapitre P'. De la modalité de la formation des pro- duits matériels de l'organisme. 4^8 Article I". Des matériaux sur lesquels s'exerce la formation organique. iif. Article II. De la manière dont s'effectue la forma- tion organique. 419 ♦ I. Accomplissement de la formation en général. ^20 II. Mécanisme de l'accomplissement de la for- mation. 4^5 III. Côté chimique de la formation organique. 44* Chapitre II. De la cause de la formation des produits matériels de l'organisme. 4^4 Article I*'. De la formation organique par attraction exercée sur le sang. 4^7 I. Attraction exercée du dehors sur le sang. 4^ ' II. Attraction exercée du dedans sur le sang. l\S6 À. Attraction par les organes plastiques. ib. B. Attraction par les nerfs. 49^ Article II. De la formation organique par dévelop- pement du sang. 5o2 I. Possibilité d'un développement du sang. ià. A. Circonstances générales. ï^. B. Circonstances particulières. 5i4 1. Qualités du sang. i^- 2. Qualités des produits organiques. 524 II. Réalité d'un développement du sang. 527 Chapitre III. Résumé des considérations sur l'essence de la formation des produits matériels de l'organisme. 566 FIN DE h\ TABLE DU HUITIEME VOLUME.