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BAILLIÈRE er FILS 65, RUE DE LA RÉPUBLIQUE RUE HAUTEFEUILLE, 19 GENÈVE er BALE, HENR1:I GEORG 1881 L ÉTUDES VABIATIONS MALACOLOGIQUES PARTIE CENTRALE DU BASSIN DU RHONE DE L'ESPÈCE ET DES VARIÉTÉS MALACOLOGIQUES De l'individu malacologique. — Formation des espèces, genres, familles, classes, ete. — Type de l'espèce. — Variétés. — Nécessité de la donnée de l'espèce. — Degré de fixité dans l'espè- ce et dans la variété. — Races.— Dénominations malacologiques, nomenclature, — Envahis- sement de l'individualité spécifique dans la méthode. — Mulliplicité des espèces, ses dangers. — Nécessité de créer des espèces nouvelles. — Abus de Ja donnée de l'espèce. — Des varia- tions individuelles. — Leurs influence; sur l'espèce et la variélé. — Plan général de l'ouvrage, Après avoir énuméré comme nous l'avons fait dans le vo- lume précédent la succession des différentes formes ma- lacologiques si variées et si multiples de notre région, il importe de chercher à nous rendre compte du rang que chacune d'elles doit occuper dans la méthode, c’est-à-dire dans la classification zoologique et rationnelle des êtres. Etant donnée telle ou telle coquille autour de laquelle vien- D) VARIATIONS MALACOLOGIQUES nent naturellement se grouper les formes les plus affines, quelie importance faudra-t-il accorder à ces différentes ma- nières d’être les plus voisines d'un mème type donné? En d'autres termes, que faudra-t-il entendre par type, espèce, race, variété, sous-variété, individu, ete.? Chacune de ces appellations ont cours dans les sciences zoologiques, et sont d'un commerce journalier. Et pourtant les naturalistes sont loin d'attribuer la même valeur à chacun de ces termes. Qu'est-ce que l'espèce ? qu'entend-on par va- riété ? rien n'est plus difficile à définir, et bien hardi serait celui qui prétendrait à pareille heure imposer sa définition. Nous possédons tous une donnée relative sur la signification de ces mots, nous savons à peu près ce qu'ils représentent d’après une sorte de convention tacite entre Îles naturalistes, mais personne n'ose encore les définir d’une facon rigoureuse et absolue. Nous n'avons pas, quant à nous, la prétention: de l'essayer à notre tour. Mais qu'il nous soit simplement permis d'exposer en quelques mots l'idée conventionnelle qu'il convient d'attacher en malacologie à chacun de ces lermes si souvent en usage. Tout moliusque, comme tout être dans la nature, quel que soit son mode de manifestation, normal ou anormal, sous quelque forme qu'il se présente, quelles que soient enfin ses conditions biologiques, du moment qu'il existe, a sa place dans l’ordre naturel des choses et constitue nécessairement une éadividualité. S'il est unique dans sa manière d’être, si aucun autre invididu ne lui ressembie que par des traits trop éloignés, s'il est en quelque sorte exceptionnel, anormal, il devient l’objet d’un cas spécial dit tératologique qui le range en dehors des autres êtres de la création. Sa connaissance nécessitera dès lors des études toutes spéciales. Mais si, au contraire, autour de celte individualité viennent se grouper d'autres individualités aussi semblables entre elles que pos- DU BASSIN DU RHONE 3 sible, soit dans la génération actuelle, soit dans les géné- rations passées ou futures, leur ensemble constiluera ce que l'on nomme le plus ordinairement une espèce. Et comme dans la nature il n'existe pas deux êtres on deux choses ma- thématiquement identiques l’une à l'autre, il s'ensuivra néces- sairement qu'il y aura loujours une différence, quelque légère qu'elle soit, entre les individus appartenant à une même es- pèce ; ces différences nous les avons appelées différences endi- viduelles : ce sont elles qui permettent de distinguer tout être donné de l'être qui lui est le plus directement sem: blable. Si maintenant on rapproche l'espèce ainsi déterminée d'au- tres espèces présentant entre elles un nombre suffisantde ca- ractères communs, on donnera à la réunion de ces espèces le nom de genre. Venant enfin à grouper les genres les plus voi- sins suivant certaines lois conventionnelles, basées chacune sur différents éléments d’affinités plus ou moins directes, on formera successivement les familles, les classes, les or- dres, les embranchements, etc. On comprend d’après cela tout le côté aléatoire que peuvent présenter les méthodes de classi- figation; mais aussi donnera-t-on naturellement la préférence à celles dont les différentes subdivisions sont reliées par des caractères généraux pouvant s'appliquer à la pluralité des individus, et cela à quelque règne de la nature qu'ils appar- uennent. Lorsque le naturaliste crée une espèce, il a nécessairement en vue un certain nombre d'individus affectant une manière d'être spéciale, appartenant à un pays particulier et vivant dans un temps déterminé. Ces êtres seuls, ainsi spécifiés, constituent le {ype de l'espèce. Qu'il soit rare ou commun, que ses formes soient fixes ou non, qu'il s'applique à une géné. ralité ou à une exception, comme il importe d'avoir une base ou un point de départ parfaitement défini, le type sera tou  VARTATIONS MALACOLOGIQUES jours l'objeetif primitif du naturaliste qui l'a dénommé, le seul qui aura été mis en vue par son premier descripteur. Mais ces m°mes individus, par suite de considérations que nous n'avons pas à envisager ici, peuvent avoir vécu dans des temps différents, ou se trouver dans des milieux dissem blables, avec des conditions biologiques variables. Leurs formes individuelles seront-elles pour cela absolument im - muables ? Elles se modifieront au contraire suivant certaines données que nous essayerons d'établir, et qui engendreront à leur tour des formes nouvelles plus ou moins différentes du type primitif. Sous l'influence de ces variations portant soit sur l’individualité soit sur l'espèce ou une parlie de l'espèce, les variétés prendront naissance et pourront être générales, locales, accidentelles ou même individuelles. Suivant que ces modifications dans le type auront été plus ou moins pro- fondes, ces variétés pourront être passagères ou héréditaires ; de même elles pourront à un moment donné prendre un caractère de fixité définitive si les causes premières qui les imposent restent constantes, ou se soumettre aux lois de l'atavisme, si ces causes viennent à disparaitre. Il y aura done un certain degré de fixité dans la variété comme dans l'espèce, tant qu'elles seront appelées l’une et l’autre à se perpétuer dans un milieu qui sera devenu fixe ; de même encore elles pourront toutes les deux se modifier si les conditions ou les circonstances viennent également à se modifier. L'idée de l'espèce, du genre, de la variété, est done es- sentiellement fictive et conventionnelle. Si l'individualité s'applique à des êtres réels, pondérables ou manifestes, l'es- pèce, le genre et toutes les divisions qui en découlent s’appli - quent au contraire à ce que l’on peut appeler par opposition des êtres de raison. Il ne convient done pas de dire avec Buffon que « les espèces sont les seuls êtres de la nature, ou que DU BASSIN DU RHONE 5 les individus sont les ombres dont l'espèce est le corps » (1), puisque l'espèce n’est en somme que le résultat d’une collec. tivité d'individus susceptibles de comporter dans leur ensem. ble certaines variations qui se traduisent par des variétés dans l'espèce même. D'après certaines théories philosophiques, l'espèce n’exis - terait pas; les êtres s’enchainant les uns aux autres par une sorte de loi de continuité, il n’est pas rationnel de les grouper, de les classer, précisément parce qu'ils dérivent in- sensiblement les uns des autres. En admettant que cela soit vrai. et nous n'avons pas à le chercher ici, la donnée même fictive de l'espèce est d’une nécessité absolue au point de vue de la classification scienti, lique des êtres, car sans elle, il n’est pas possible de nous rendre compte de cet enchainement, quelque continu qu'il soit dans sa succession. | Enfin, l’action de l'homme venant, volontairement ou non, s'interposer au milieu des éléments naturels, pour donner lieu à un déplacement ou à une acclimatation de certains êtres, on a dû, pour l'anthropologie comme pour quelques branches spéciales de la zootechnie, faire usage d’une appellation nou- velle. Aux êtres qui dérivent d’une même souche commune, Mais qui par suite de leurs déplacements géographiques ont Subi des variations relativement peu importantes dans leur ensemble, mais qui semblent héréditaires, on adonné le nom de race. Nous n'avons pas à nous étendre sur cette spécifica- tion particulière à certains êtres, les malacologistes n’en faisant pas usage, du moins jusqu'à présent. Telle est dans son ensemble la donnée générale des clas- sifications en histoire naturelle avec leurs différents voca- bles, Il reste maintenant à désigner d’une facon suffisamment (1) Butfôn, Histoire naturelle générale el particulière, édit. de Imprimerie royale, t. I D. j:5 © XILE, p, 1x. 6 VARIATIONS MALACOLOGIQUES précise chaque individu pour le différencier de ses sembla : bles. Nomina si neseis, perit el cognitio rerum, à dit Linne. Mais donner un nom propre à tous les êtres, serait chose inu- tile ; passe encore pour l’hamme, et les animaux domestiques dont il importe de distinguer l’individualité ; mais en histoire naturelle on se borne à dénommer non plus l'individu, mais seulement l'espèce à laquelle il appartient. D'après certaines conventions admises par les naturalistes, pour éviter toute confusion dans les désignations, on emploie actuellement le système binaire selon lequel on joint au nom de l'espèce celui du genre, tous les deux étant donnés en latin, Enfin, comme malheureusement dans la science plus d'une fois le même être a été désigné sous des noms diffé- rents, parfois peu scientifiques, on est convenu de ne pas re- monter au delà des appellations antérieures à 1758, date de la publication de la 10° édition de Linné. En outre, il est admis que l’on devra toujours adopter de préférence le nom le plus anciennement donné. Quant à la variété, on la distin- guera de l'espèce par un simple qualificatif, rappelant autant que possible sa manière d'être particulière. D'après ce que nous venons de voir, l'espèce telle qu'on l'envisage le plus ordinairement n'a pas une fixité absolue, puisqu'elle est susceptible de donner lieu à des modifications que l’on nomme des variétés. Il est aujourd’hui bien peu de naturalistes qui n'admettent, à côté de l'espèce, quelle qu’en soit la multiplicité, une ou plusieurs variétés. De même, la variété étant reconnue, ses caractères pouvant êlre plus ou moins héréditaires, on peut supposer de sa part un degré de lixité relatif. Si donc dans la variété les caractères sont fixes, pourquoi ne deviendrait-elle pas espèce à son tour? alors, où com- mence la variété, où l’espèce finit-elle, et quel est, d'autre part, le degré de fixité de chacune d’elles ? ce sont là autant de- DU BASSIN DU RHONE 7 problèmes dont bien des hommes de science ont cherché la solution, et que l'état des connaissances philosophiques de l'histoire naturelle ne nous permet pas de résoudre. Les plus forts ont fait école en échafaudant de longues thèses plus théoriques que pratiques sur chacane de ces questions ; les plus érudits ont apporté de nombreux faits scientifiques qui semblent souvent se contredire sans éclairer définitivement la question ; les plus prudents s'abstiennent de toute diseus - sion et poursuivent leurs patientes recherches, estimant toute solution définitive encore prématurée. Laissons donc de côté Loutes ces questions philosophiques qui depuis un demi-siècle ont soulevé de si brillants orages scientifiques, pour rentrer dans l'exposé des simples faits, tels que nous les constatons dans la nature. Tout être ayant droit à une appellation scientifique basée sur la donnée de l'espèce, il importe de se rendre compte du degré d'envahissement de l’individualité spécifique dans la méthode. Si l’on fait jouer à l'espèce un rôle trop restreint, si les limites de ses variations sont trop bornées, on arrive forcément à Ia création d’un nombre en quelque sorte indéfini de termes nouveaux dont la nomenelature plus ou moins com- plexe constitue une difficulté matérielle de plus apportée à l'étude de l’histoire naturelle. Si, au contraire, l'espèce est conçue dans de trop larges limites, la connaissance des êtres tend à se perdre dans les difficultés inextricables de variétés ou de sous-variétés sans nombre. Faudra-t-il attribuer à l'espèce une fixité absolue, immuable, hors de laquelle toute modification, soit naturelle, soit arti- licielle, devra nécessairement recevoir une dénomination spéciale? c’est alors refuser de reconnaitre les grandes lois qui enchainent toutes choses dans la nature, et qui donnent à son ensemble cette admirable et parfaite harmonie dont la cause première est l'adaptation des êtres avec les milieux 8 VARIATIONS MALACOLOGIQUES dans lesquels ils sont appelés à vivre. En un mot, c'est trai- ter l’histoire naturelle comme une science positive et l’en- chainer sous des lois abstraites ou mathématiques. Si l’on admet au contraire que toute forme donnée peut indéfiniment se modifier sous l'influence de causes agissantes diverses, quel eriterium aurons-nous dans les méthodes et dans Îles classifications pour ranger les êtres, les grouper, les ordon- nancer, enfin mème pour les distinguer les uns des autres el les reconnaitre ? Sans mettre en doute les lois d’enchainement et de suc- cession dans la nature, il faut cependant admettre qu'il existe un certain nombre d'êtres créés sur le même plan, se distin- guant des autres par des caractères qui leur sont propres, autrement on est condamné à ne plus voir que d’innombra - bles variétés parfois rattachées à un type souventinconnu, passant des unes aux autres sans limites comme sans lois, et au milieu desquelles se perd la notion de l'espèce. Tels sont les différents écueils entre lesquels doit naviguer le naturaliste ; et l’on comprend combien il est difficile parfois de les éviter. Comme en pareille matière il n’y a aucune loi formelle, comme tout est laissé à l'arbitraire et à la conven- üon,il en résulte non seulement une divergence forcée entre les différentes manières de voir des naturalistes, mais encore : une confusion malheureusement des plus préjudiciables pour l'étude des sciences naturelles en général, et pour celle de la malacologie en particulier. Actuellement, dans les études malacologiques, la tendance se porte vers la multiplicité des espèces. Bien souvent, sans se préoccuper de l'idée de fixité ou de variabilité générale, le naturaliste inexpérimenté trouve des espèces nouvelles dans toute différenciation, même très minime, observée entre deux formes voisines. Là où la nature s’est bornée à modifier un type déjà existant, il voit une forme différente, et convertit DU BASSIN DU RHONE 9 dans son zèle trop ardent la variété en espèce. Nous ne par- lerons pas ici du naturaliste imprudent qui, par simple satis- faction d'un amour-propre bien mal placé, s’attribue une paternité illicite, en créant à tout propos et sans discernement des noms nouveaux. C’est ce que l'on nomme l'amour du mil, el, depuis quelques années, pareil amour a fait trop one école. Enfin ne faut-il pas encore, sinon blâämer, au moins sévère- ment critiquer ceux qui, sur la vue d’un échantillon unique, voire même d'un fragment d'échantillon, bâtissent aussitôt non seulement une espèce, mais même un genre nouveau, Sans s'inquiéter de savoir si leur individu n'est pas un simple cas lératologique? du moment qu'il diffère des autres indi - vidus déjà dénommés, il lui faut un nom spécial. C'est surtout aux paléontologues que pareille critique s'adresse. Combien d'appellations nouvelles, reconnues plus tard comme erro- nées, n’ont élé basées que sur la vue d'une dent de mammi- fére plus où moins roulée, d'une empreinte mal définie ou d'un fragment de coquille! Ceux-là seuls qui ont eu dans leur vie à débrouiller quelque aride synonymie d'espèces ou de genres, même les plus connus, savent quelle sage pru- dence il faut recommander à ces fabricants d'espèces qui aiment mieux forger un nouveau noi que de s'exposer à de trop laborieuses recherches, qui souvent les édifierate t sur le peu de validité de leur création. Que dirons -nous de ces faiseurs d'espèces qui se bornent, après avoirinventé une appellation, à en donner une descrip- lion des plus sommaires, dans un latin plus qu'équivoque, sans figurer les espèces, sans montrer les rapports et les dif- fCrences qui peuvent exister avec les types les plus voisins ? [ls publient bien vite ces prétendues diagnoses dans quelque revue Lechnique de la province, et ils appellent cela prendre date ! Plus tard, quand de nouvelles recherches ou des études VAR, MAL. T.- II, >. 10 VARIATIONS MALACOLOGIQUES plus approfondies ont permis de mieux connaitre cette espèce, on s'aperçoit bien souvent qu’elle était déjà décrite, ou qu’elle ne présente plus qu’une simple variation d’un type plus an- ciennement connu. Il est trop tard pour effacer ce premier nom donné à la légère, et pareille manière d’agirn'aura eu pour effet que d’avilir la science et d'égarer les vrais naturalistes. Enfin, parmi les paléontologues, il est toute une école dont les travaux ont été jadis très préjudiciables dans les études conchyliologiques. Il fut un temps où l’on n'admettait pas qu’une forme, ayant vécu dans les terrains tertiaires, put encore avoir son analogue aujourd'hui. À chaque révolution géologique du globe devait correspondre l'existence d’un monde zoologique nouveau. C'était là une idée certainement séduisante, que celle d’une sorte de classement méthodique et mathématique de la zoologie et de la géologie. Mais, on le reconnait aujourd’hui, avec des changements géologi- ques qui ne sont plus des révolutions, mais bien des modi- fications presque toujours lentes et continues, il y a toujours eu un enchainement constant des êtres entre chaque période géologique. Un certain nombre de ces êtres ont pu se con- server d’une période à l'autre, soit en restant sensiblement les mêmes, soit en présentant des modifications qui ne dépas- sent pas les limites admises pour les variétés. C’est ainsi qu'aujourd'hui on admet qu'à l'époque de la formation de certains dépôts pliocènes marins d'Italie, il y avait parfois plus de 40 pour 100 des espèces malacologiques qui se sont con- servées jusqu'à nos jours. Certes nous ne prétendons pas que chaque jour ne puisse amener la découverte non seulement de formes nouvelles, mais encore d'espèces et de genres inconnus. Oser le nier serait mettre en doute la loi du progrès et méconnaitre le ré- sultat des incessantes investigations des naturalistes. Bien au contraire, nous estimons que toutes nos sciences sont en- DU BASSIN DU RHONE 11 core dans l'enfance, qu’elles n’ont nullement dit leur dernier mot, que même nous en avons à peine les premières notions. Mais faudra-t-il pour cela mettre au rang d'espèce toute forme nouvelle ou qui jusqu'alors n'était considérée que comme simple variété? C'est ici que notre réserve com- mence, et nous espérons démontrer plus loin que, si dans bien des cas l'on a donné à certains mollusques, et à bon droit, des appellations parfaitement judicieuses, dans d’au- tres cas on à incontestablement abusé de la valeur rela - live attribuée au mot espèce, pour gratifier de ce titre le résultat de simples variations locales, accidentelles où pas- sagères. Pour donner une idée de l'extension de l'espèce dans le domaine malacologique, citons ici quelques exemples. La partie de la conchyliologie francaise qui a pour objet l'étude des mollusques terrestres et fluviatiles, est de création bien ré- cente. Moins d’un siècle nous sépare des premiers travaux publiés par l'illustre auteur de l'Histoire des mollusques de France. Si, en 1805, Draparnaud a pu distinguer pour ce seul pays neuf Clausilies, nous voyons Moquin-Tandon, en 1855, porter ce nombre à quatorze, alors que M. l'abbé Dupuy, à peu près à la même époque, en admet vingt espèces. Aujourd’hui, dans une récente monographie, M. Bourguignat, le savantau- teur qui a enrichi les sciences malacologiques de si belles pu- blications, sans méconnaitre toutefois la notion de la variété, admet quatre-vingt-huit espèces. Parmi les Succinées, cinq espèces seulement étaient citées par Moquin-Fandon. Dans une monographie des plus conscieneieuses, M. le D' Baudon a cru devoir élever ce nombre à quinze, tandis que M. Bour- guignat, dans sa seule collection, en compte jusqu'à trente. Lorsque, il y a vingt-cinq ans, des auteurs comme Moquin- Tandon ou M. l'abbé Dupuy s'oceupaient de décrire la mala- cologie francaise, ils avaient en main déjà assez de matériaux 12 VARIATIONS MALACOLOGIQUES pour étudier la valeur, comme variété ou comme espèce, de telle ou telle coquille. Aujourd'hui, grâce à l'élan donné par ces premiers maitres, ON à pu découvrir, après de nouvelles recherches, des formes encore rares ou jusqu'alors méconnues ou même totalement inconnues, qui avaient droit à prendre rang parmi les espèces. Quelques naturalistes, après des voyages sans nombre, des études constantes, des travaux in - cessants, ont pu se créer des collections incomparables, recélant des formes réellement nouvelles, au milieu d'in - nombrables variétés de types déjà connus. Aussi est-ce avec preuves en main et en parfaite connaissance de cause qu'ils ont pu ajouter plus d'une page au livre de la science tracé par d'habiles devanciers. Mais faudra-t-il donner un nom spécifique nouveau à toute forme malacologique nouvelle? faut-il grossir encore et sans cesse et toujours le trop volumineux dictionnaire de la no- menclature scientifique ? N’est-il pas temps enfin de chercher à rentrer dans une voie plus rationnelle el surtout plus profi- table à ceux qui viendront après nous, en travaillant à apla- nir les difficultés sans nombre occasionnées par une confu - sion des espèces due à leur trop grande multiplicité ? Ne doit- on pas s’elforcer de mettre un peu de clarté et de méthode dans ce dédale scientifique , en rattachant ces prétendues espèces mal connues, mal définies, à un certain nombre de types spécifiques plus restrein{s, mais mieux étudiés, autour desquels viendront se grouper, à titre de variétés, toutes les formes voisines qui en dérivent? Nous n’avons pas la préten- tion d'accomplir une pareille tâche bien au dessus de nos forces. Mais nous espérons simplement montrer qu'une sem- blable manière de voir est non seulement compatible avec les données actuelles de la malacologie, mais qu'elle n'est en somme que la représentation la plus exacte des faits qui se passent dans la nature. TOR TINTIN DU BASSIN DU RHONE 13 L'homme, en soumettant à des influences aujourd'hui bien définies certains êtres, animaux ou végétaux, peut, comme nous le savons, donner naissance à des produits nouveaux. Nous en avons l'exemple chaque jour dans l'élevage et l'accouplement fécondé de certaines races qu: l'on arrive à reproduire avec une certitude presque absolue, par des croisements habilement ménagés. Ces formes nouvelles, quoique parfois très différentes des formes ancestrales, ne constituent cependant pas des espèces nouvelles. Ce ne sont que des modifications plus ou moins fixes, plus ou moins préfondes dans la manière d’être d’un ou de plusieurs types donnés. Ce que l’homme peut obtenir artificiellement, la nature doit pouvoir, elle aussi, le produire à son tour. Pour arriver aux mêmes fins, elle a sans doute à sa disposition des moyens plus lents, moins intelligents peut-être, mais tout à fait similaires. Pourquoi dès lors prétendre donner un nom nouveau à ces produits de la nature, alors qu'il est reconnu que ceux obtenus par l'homme se rattachent à des forines déjaexistantes ? Et ce qui est vrai pour les plantes ou pour les animaux domestiques, l’est tout aussi bien pour nos mol- lusques. Du reste, une pareille multiplicité dans les noms donnés à nos mollusques n'est-elle pas le propre d’une science encore mal définie et qui parait chercher sa voie ? Jetons un coup d'œil sur les ouvrages classiques les plus récents, sur les monogra- phies les plus complètes, sur les traités généraux les mieux accrédités, et nous serons frappés en voyant combien est longue déjà la triste nomenclature de la synonymie de chaque espèce. Est-il, parmi les mollusques décrits il y a plus de vingt ans, une seule coquille qui n'ait pas reçu déjà plu- sieurs noms différents? Nous admettons bien qu'avec l’ac- croissement nécessaire du nombre des espèces, on soit ob- ligé, à un moment donné, de scinder les genres pour Îles . d 14 VARIATIONS MALACOLOGIQUES grouper suivant des lois nouvelles. Nous comprenons très bien par exemple que Draparnaud ait séparé les Limnées des Hélices, avec lesquelles Linné les avait confondues, ou des Buccins, comme l’admettait Müller. Mais ilest certain que si la plupart de ces prétendues espèces nouvelles avaient été créées avec moins de précipitation et une connaissance de cause plus approfondie, nous ne serions pas exposés à dé- brouiller ces interminables synonymies, causes incessantes de tant d'erreurs, objet de désaccords constants entre les malacologistes. Il faut bien le reconnaitre, actuellement le désarroi Le plus complet semble régner chez les deseripteurs d'espèces, par suite du peu d'entente qui existe sur la validité de telle ou telle forme. Pour les uns, certaines coquilles qui leur parais- sent nouvelles ne seront plus que de simples variétés pour les autres. Telle forme, qui semble commune en France, sera traitée comme espèce alors que les malacologistes étran- sers n’en feront qu'une variété parce qu’elle est rare dans leur pays. Là-dessus, on crée encore, on crée lLoujours, sans sou- vent s’astreindre à comparer les formes que l'on a sous la main avec le type classique admis par tous. Que dirait done aujourd'hui Bertrand qui, en 1743, s'é- criait : «€ On est obligé, dans l’oryctologie comme dans la bo= tanique, de rassembler une multitude de synonymes par lesquels les différents auteurs se sont plu à embarrasser la science naturelle ; c’est la partie dégoutante du travail, elle est cependant nécessaire (1) ». Jusqu'à présent, notre rôle s’est borné à relever avec les données les plus récentes de la malacologie toutes les formes que nous avons pu observer dans notre région. Nous avons laissé, provisoirement au moins, le titre d'espèce à toutes les (1) Bertraid, 1743. Dictionnaire universel des fossiles propres el des fossiles accidentels, art. Bélemaile, vol. 1, p. 65. DU BASSIN DU RHONE 15 coquilles qui avaient été ainsi dénommées par nos devanciers, nous réservant d'étudier, à propos de chacune d'elles, toutes les variations où modifications qu’elles ont pu nous présenter, en ayant soin de distinguer autant que possible les variations générales ou variétés, les variations individuelles et les cas tératologiques simples ou complexes constituant les anoma - lies et les monstruosités. Il nous reste maintenant à chercher une appréciation sinon définitive, du moins aussi exacte que possible, de ces différents éléments de notre faune malacolo- gique. Devra-t-on, comme on l’a fait jusqu’à présent, maintenir au rang d'espèce toute forme ne comportant que de légères différenciations avec des types plus anciennement connus ? où faudra-t-il se borner à admettre seulement un nombre restreint d'espèces, sauf à distinguer un plus où moins grand nombre de variétés ? | Iest certain que, sinous parvenons à démontrer que telle ou telle prétendue espèce n’est en somme que le résultat local ou passager d'une variation qu'aura pu subir une autre espèce plus anciennement connue, par suite de certaines in fluences que nous aurons à étudier, cette nouvelle espèce ne sera incontestablement qu'une variété de la première. Si d’un simple cas particulier ces observations peuvent s'étendre et s'appliquer à une plus grande généralité, nous arriverons ainsi à prouver l'abus qui a pu être fait de la notion de l'espèce, en rendant aux différentes manières d’être de nos mollusques la véritable valeur qu'ils doivent avoir dans la classification. Nous aurons donc à examiner quels sont les agents que la nature peut mettre en œuvre pour obtenir telle ou telle mo- dification dans la forme des êtres. En d'autres termes, nous aurons à étudier l'influence des milieux sur les développe- ments des êtres malacologiques. Mais si ces milieux étaient absolument constants, leurs influences restant les mêmes et 16 VARIATIONS MALACOLOGIQUES toutes choses étant égales d’ailleurs, il y aurait incontesta- blement une fixité absolue dans la reproduction des êtres. fl n’en est pas toujours ainsi, même pour les mollusques. Si quelques-uns, vivant en colonie dans un milieu donné, n'ont subi aucune modification el conservent le caractère de fixité nécessaire au type, il en est d’autres qui, en se déplaçant, ont été appelés à vivre dans des milieux différents, et qui alors ont pu se modifier. Ces déplacements des mollusques, quelque lents qu'ils puissent paraitre, n'en sont pas moins certains. Soit que, par suite du développement de leur colo- nie leur accroissement en nombre devienne tel qu'ils aient besoin de chercher plus loin une nourriture désormais in- suffisante, soit qu'ils aient à fuir les attaques d’un ennemi, soit enfin que l'homme lui-même, par suite de causes invo- lontaires, occasionne des déplacements, il est incontestable que les mollusques peuvent, à un moment donné, changer de conditions d'habitat, Dès lors. soumis à de nouvelles in- fluences, vivant ainsi dans des milieux différents, ils éprou - vent nécessairement des modifications qui seront en rapport avec ces nouvelles données. Toutes ces influences, quoique plusieurs puissent agir à la fois, n'ont pas une action manifeste immédiate ; leurs effets, s'ils sont continus et incessants, n'en sont pas moins Cm- preints d'une réelle lenteur. Si les études malacologiques sont de date bien récente et ne nous permettent pas de com- parer les formes actuelles aux formes des siècles derniers, il nous reste cependant un puissant erilerium dont nous ne manquerons pas de faire usage. Les temps géologiques, c’est- à-dire toute période dans laquelle la nature des milieux a été essentiellement différente de celle dont nous sommes actuel - lement les témoins, ont eu déjà une forme comparable à la nôtre. La période, quaternaire qui remonte à un nombre de siècles que l’histoire ne saurait apprécier, renfermait une, DU BASSIN DU RHONE 17 faune malacologique à laquelle la faune actuelle a dû emprun- ter ses premiers éléments. Il importera donc de comparer avec soin la faune actuelle avec la faune quaternaire, soit dans son ensemble, soit dans ses détails, pour étudier les changements et les modifications qui ont pu se produire dans ces deux faunes similaires, vivant dans des temps et dans des mi- lieux différents. Enfin notre faune locale n'a pas tous ses éléments absolu- ment cantonnés dans notre région. Si nous sommes voisins d'un centre géologique plus ancien, qui estpeut être un centre d'origine, nous retrouvons dans d’autres régions une partie de celte même faune qui a pu émigrer et se déplacer pour s’allier à la faune particulière d'autres centres de dispersion. Il y aura donc tout intérêt pour notre étude à examiner si ces formes qui vivent aujourd'hui loin de nous ont conservé leur identité avec nos formes locales. L'influence des milieux dans lesquels les mollusques sont appelés à vivre est toujours très complexe ; les manifesla- tions de cette influence, quoique se produisant presque tou- jours avec un certain ensemble, appartiennent à plusieurs ordres d'idées. Avec les influences physiques, nous aurons à étudier les effets possibles de la chaleur, de la lumière, de l'électricité: avec les influences chimiques, nous devrons tenir compte de la composition des milieux, tels que l'air, le sol et l'eau. Les influences géologiques feront varier la nature du sol sur lequel rampent les mollusques terrestres, vu la vase dans le sein de laquelle s’enfouissent les mollusques aquatiques. Les influences climatériques où géographiques joueront un rôle important avec les variations hygrométriques et météo- rologiques propres soit à l'altitude, soit au déplacement 260 - graphique. L'influence physiologique portera sur la nourri- ture, l'activité, la facilité des déplacements. Enfin l'influence 18 VARIATIONS MALACOLOGIQUES mécanique pourra engendrer les cas tératologiques que nous devrons étudier d'une facon toute particulière. Mais comme presque toujours ces influences se combinent suivant certaines affinités réciproques pour agir avec simul- {anéité, afin d'éviter des redites inutiles, nous serons dans la nécessité de les grouper suivant leurs affinités d'actions, et nous n’aurons plus à examiner que les modifications qu’elles peuvent faire éprouver à nos mollusques dans leur dispersion céographique, dans leurs centres d'habitat ou dans les temps géologiques. Après avoir ainsi étudié les causes dans ce qu’elles ont de plus général, nous aurons à rechercher les effets qu’elles ont pu produire. Envisageant alors soit l'ensemble du mollus - que, soit chacune des parties de son individu, nous exami- nerons quelles modifications totales ou partielles ils peuvent éprouver. Ces modifications ou variations, si elles portent sur l'ensemble de la coquille, sur son galbe, seront des moditica- tions générales; si au contraire elles n’ont agi que sur une partie de son individu, nous les appellerons modifications locales. En étudiant séparément les variations de chacune des parties de la coquille, nous jugerons mieux de l'importance qu'il faut accorder à la fixité des caractères spécifiques basés précisément sur la manière d'être de chacun de ces éléments, et qui servent à établir les diagnoses propres aux genres, aux espèces et même aux variétés. Tel est, dans son ensemble, le programme que nous nous sommes {tracé et que nous nous proposons de développer dans les différents chapitres qui vont suivre, quoique dans un ordre un peu différent. Il ne nous restera, après l'avoir remoli de notre mieux, qu'à chercher quelles conclusions on peut en déduire non seulement pour la faune locale, mais encore d'une manière plus générale pour l'étude de la malacologie. Il CONSIDÉ3ATIONS GÉNÉRALES SUR LA FAUNE DE LA PARTIE CENTRALE DU BASSIN DU RHONE Total des espèces et des variétés admises dans la faune de la partie centrale du bassin du Rhône, — Tableaux des espèces, genres, familles, ete. — Etudes des genres au point de vue de l'extension donnée à l'espèce dans chacun d'eux — Examen crilique des travaux pub'iés su” li faune malacolozique de la région. — Publicitions de MW. Bourguignat, Dumont, de Morlllet, Albin Gras, Grognot, ete. — Lacunes à combler das l'étude de li faune locale. Dans la première partie de ce travail, nous avons passé en revue toutes les formes malacologiques connues jusqu'à ce jour dans notre région. Si quelques-unes de ces formes ont des caractères suffisamment nets et précis pour être admises par tous les conchyliologistes, il en est d'autres plus litigieu- ses ou moins connues, qui ne sont au contraire, pour quel- ques naturalistes, que de simples variétés dérivant d'un type déjà dénommé, tandis que pour d'autres elles doivent être élevées au rang d'espèces. Enfin, il existe encore un petit nombre de coquilles ne se rattachant directement à aucune forme déjà dénommée, et que nous avons eu à signaler pour la première fois. Nous avons donc conservé comme telles toutes les espèces ou prétendues espèces que l’on à eru de- voir distinguer dans notre faune, sans nous arrêter à leur va - lidité, nous bornant à montrer les rapports et différences qui pouvaient exister avec les formes les plus voisines, 20 VARIATIONS MALACOLOGIQUES A propos de chacune de ces espèces, nous avons cherché à montrer les principales modifications où variations qu'elles pouvaient présenter. Lorsque ces modifications ne paraissaient porter que sur quelques échantillons isolés, nous les avons indiquées comme varialions individuelles ; mais quand au contraire elles semblaient s'appliquer à un certain nombre d'individus, nous les avons signalées à titre de variétés. Enfin, pour quelques espèces seulement, nous avons eu à citer des cas lératologiques tantôt simples, sous le nom d'anomalies, tantôt plus complexes, appelés monslruosités. Mais toutes ces espèces, comme on à pu le remarquer, sont loin d’avoir la méme valeur au point de vue des variations qu’elles sont susceptibles de comporter. S'il en est chez lesquelles nous avons eu à constater un grand nombre de variétés, d'autres au contraire ne nous ont absolument présenté qu'un type exempt, jusqu'à présent du moins, de toutes modifications conslitutionnelles dans la coquille. En général, etnous aurons à revenir plus tard sur cette donnée, ce sont les espèces les plus communes, celles dont la dispersion géographique est la plus considérable, en un mot, celles qui sont le mieux connues, qui nous ont offert le plus grand nombre de va - riétés ; au contraire, les espèces nouvelles, rares, et sou - vent celles qui sont les plus contestées, paraitraient avoir une plus grande fixité dans leurs caractères, et ne nous ont donné que des variations purement individuelles. Si maintenant nous cherchons à grouper et à répartir tou- tes ces espèces, suivant les classifications malacologiques les plus généralement admises, nous obtiendrons le tableau suivant, qui résume le nombre d'espèces applicables à chaque genre, el le nombre de genres propres à chaque famille : DU BASSIN DU RHONE Limacidæ | PULMONACEA GASTEROPODA INOPERCULAT A Colimacidæ Aur:cu'idæ Limnæidæ PULMONOBRANCHIAT Arcylidæ Cyclostomidæ | ULMON CEA Paludinidæ GASTEROPODA OPERCULATA BFANCHIATA Meianideæ ‘'otl ssiceridie | Vidvatidiæ | Nepiti idiv \ Ation. Geomalacus. Limax. Milax. Testacella, . Vitrina. . = Succinea. Hyalinia. Helix. Pulimus. Chondrus. ne Cæcilianella. Clausilia, . Balia. PUPASS 0 Vertigo. . | Carychium = Planorbis. Physa. Limnæa . | Ancylus. Cyclostoma . Pornatias. Acme. Vivipara. Bythinia. Amnicola Paludinella . Belgrandia. . Hydrobia. Lartetia. Locardia. | Moitessieria. | Valvata.. | Neritina, 21 nn — D © CG À oc M ©) © > NN 29 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Sphæridæ ( Sphærium. . Aa l PiSidium su. ANNE CRE SG Re n Uiiloséess 2 Ma SN ES RE LAMELLIDANCUIATA } Urionidæ Margaritana. Sa ee NOR AROAONIAS VE 2 SE NME Psondanondontas: te 2 ON EE Dreissenidæ | DPEISSONA NS 0 de CR ES ST La faune de la partie centrale du bassin du Rhône com- prend donc, d’après ce tableau, un total de trois cent qua- rante-quatre espèces réparties dans quarante-quatre genres, dont deux cent quatre- vingt-deux Gastéropodes ou Acéphalés, et soixante-deux Lamellibranches ou Acéphalés. Chacun de ces “enres renferme ainsi un nombre d'espèces fort variable. Comme dans nos études nous avons mis en œuvre les travaux de différents auteurs et des monographies écrites à des épo- ques plus ou moins récentes, il peut s ensuivre que tel genre, étudié avec plus de détails, ait été conçu au point de vue de l'espèce dans des termes différents d'un genre voisin encore laissé dans l'oubli. L'espèce n’a donc pas recu le même degré d'extensiondans chacun de ces genres, tels que nous les avons admis. Ainsi par exemple, le genre Vitrina n’a pas été, jusqu'à présent du moins, l’objet d'études spéciales; M. labbé Du- puy (1) n'en admet, pour la France, que cinq espèces, el Moquin-Tandon (2)six. Le genre Clausihia, étudié d’une facon toute particulière par M. Bourguignat (3), a été au contraire considérablement démembré. Si M. l'abbé Dupuy, pour la France seulement, signale vingt espèces, Moquin-Tandon, pour la France el la Corse, n’en cite que quatorze ; Landis que M. Bourguignat, pour notre seul continent, admet quatre- vingt-six espèces Il s'ensuit done que, avec de pareilles données, il est pour ainsi dire impossible,de présenter un (4) Duyuy,1847-1851. His'oire naturelle des Mollusques, p. 54. DU BASSIN DU RHONE 23 ensemble exact ou même proportionnel de chaque genre par rapport à la faune générale de notre pays. Tel genre, mieux étudié ou chez lequel la notion de l'espèce aura été comprise d'une facon différente, paraitra forcément plus développé que tel autre. Nous devons donc le reconnaitre, la nécessité d'un travail général conçu sur un plan d'ensemble se fait sentir pour l'étude de la faune malacologique francaise. Espérons qu'il sera donné aux savants auteurs de ces monographies si bien détaillées de nous faire connaitre un jour l'état exact des richesses malacologiques de notre pays. Il importe, avant d'aller plus loin, de jeter un rapide coup d'œil sur la manière dont a pu être comprise, dans ce travail, cette notion de l'es- pèce à propos de chaque genre que nous avons admis. Nous élablirons de cette manière la justification d’une faune assez riche aux yeux de bien des naturalistes, trop pauvre encore pour beaucoup d’autres. Le genre Arion, créé en 1821 par Ferussac (1), nous a donné un total de huit espèces. Pour les classer, nous avons suivi le travail de M. J. Mabille (2). Dans cette savante publication, l'auteur admet vingt- deux espèces pour la seule faune continentale française. Dans ce nombre, il comprend toutes les espèces que nous avons citées, mais fait rentrer dans son Arion rufus les Arion albus et À. melanocephalus admis par Moquin -Tandon (3), Dumont et Mortillet (4), Kreg- linger (5), ete. M. J. Mabille à subdivisé ce genre en trois groupes : le groupe des Lochea Moquin-Tandon, comprend nos Arion empüricorum, A. albus, À. ater, À. campestris, À. subfusceus et À. melanocephalus ; le groupe des Carinella, J. ARION. (1) Ferussac, 1821. Tab. syst. anim. moll., p.15. (2) J. Mabille, 4870. D's Limaciens de Franre, in Annales de malacologie, L I. fasce.2. (3) Moquin-Tandon, 1855. ist. moll , 1, p. 12 ct 17. (4) Dumont et Mortillet, 1854. Catal. crit. et malre., p.16. (5) Kreg'inger, 1870. System. Verzeich. Deulschl binnen Mollusken, p. 14 et 17. 4 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Mabille, renferme l’Arion Dupuyanus; enfin le groupe des Prolepsis, Moquin-Tandon, contient seulement l'Arion hor- tensis. Dans un travail plus récent (1), M. Westerlund a con- sidérablement simplifié le genre Arion. Get auteur en effet n'admet plus que trois espèces : 1° l'ion empiricorum, auquel il rattache, à titre de variété ou de synonymie, Îles Arion aler, À. rufus, À. aibus, A. melanocephalus, A. cam- pestris, ete.; 2° l’Arion subfuscus, ayant pour synonyme les Arion fuscus et À. Dupuyanus ; 3° Y'Arion hortensis. Geowizicus, — Ce genre, créé en 1846 par Allmann (2), pour des Arion dont le bouclier très antérieur recouvre une limacelle imparfaile, ne nous a encore donné qu'une seule espèce, le Geomalacus Bourguignali ; mais il est probable que de nouvelles recherches amèneront la découverte d’autres espèces de ce genre qui jusqu'à présent, d'après M. J:Ma- bille, comprenait, en 1870, six espèces pour la faune fran- çaise ; depuis cette époque, M. le docteur Jousseaume a ajou- té une septième forme, le Geomalacus Bayani. Limax. — Ce genre, plus complet que les précédents, ren - ferme neuf espèces, dontune, le Zimax alpinus, est considérée conme très douteuse. Toutes ces formes sont admises parmi; les vingt espèces françaises citées par M. J. Mabille, sauf le Limax lineatus de MM. Dumont et Mortillet, qu'il fait rentrer, ainsi que M. Kreglinger, dans le Limax cinereo niger. Dans ce genre, M. J. Mabille admet quatre groupes basés sur les affinités naturelles et la répartition géographique des indivi- dus. Dans le groupe À, Agreslina, nous trouvons les Limax ayreslis et L. sylvalicus. Dans le groupe B, Cinereana, les Limax erythrus, L. cinereo-niger, L. linealus, L. helveticus, (1, Westerlund, 1876. Fauna Europea molluscorum extramarinorum prodromus. (2) Allmann, 1846. Ann. and, mag. nat. hist., vol, XNIT, p. 297. DU BASSIN DU RHONE 25 L. cinereus, L. eubaltus; enfin, dans le groupe D, Deshayesiana, le Limax variegatus. KrynieriLeus — Nous ne connaissons dans notre région qu'une seule espèce du genre Xrynickillus créée, en 1851, par Kaleniezenko (1) pour des Limax dont le bouclier a sa partie antérieure libre, non adhérente et mobile. M. Bourguignat en signale cinquante-deux espèces en Europe (2). Mizax. — Ce nom a été créé par Gray, en 1855 (3), pour des Limax dont le bouclier granuleux est divisé en deux par une ligne indicatrice de la limacelle, en même temps que Moquin -Tandon proposait le nom d’'Amalia (4). La première de ces dénominations ayant été plus généralement adoptée par les auteurs français, nous avons cru devoir la conserver. M. Bourguignat porte à environ trente-quatre le nombre des Milaux européens ; nous n’en avons indiqué que deux seule- ment dans la faune régionale de notre contrée, toutes deux admises par M. J. Mabille et la plupart des auteurs, soit sous celte même dénomination générique, soit sous d’autres noms. TEsTAcELLA. — Si le genre Parmacella fait défaut dans nos O Tr pays, pour se retrouver un peu plus au sud, le genre Teslu- cela est représenté par une seule espèce, le Tesluce!'t haliolidea. Ge genre, autrefois restreint à un nombre d'espè- ces fort limité, parait très développé aujourd'hui; M. Bour- guignat en signale trente -trois en Europe, et dans le seul département des Pyrénées. Orientales, M. Paul Massot (5) en lrouve six espèces. (1) Kaleniezensko, 1851. Bull. Soc. Moscou, p. 215. (2) Bourguignat, 1877. Descr. de deux nouteawx genres algériens, ele., p. 17. (3) Gray, 1853. Cat. of. pulm. or air-brealh. moll., p. 174. (#) Moquin-Tandon, 1855. Hist. mol!. France, I, p. 19. () P. Massot, 1872, Enuwm. noll. terr. et fluv. des Pyrénées-Orient., in Soc, ayric..p. 44. VAR: MAL, T2 IR 9 20 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Vrrmina. — Ce genre présente plus de difficultés pour le classement et la nomenclature des espèces. Une bonne mo- nographie des Vitrina fait encore défaut; cependant nous avons reconnu cinq formes principales ou espèces admises toutes les cinq en 1876 par M. Westerlund (1). MM. Dumont et de Mortillet (2) ont signalé six espèces pour la Savoie; mais il estincontestablement reconnu par la plupart des au- teurs que le Vitrina beryllina de C. Pfeiffer doit être consi- déré comme une variété du Vitrina pellucida. SuceinEa. — Nous sommes ici en présence de deux mono- graphies toutes les deux récemment écrites sur ce même genre; la première, celle de M. le docteur A. Baudon, publiée en 1877 (3), accompagnée de deux suppléments, porte à quinze le nombre des Succinées françaises; la seconde, celle de M. Bourguignat (4), publiée en juillet 1877, compte lrente Suecinées de France dans sa seule collection. D'après ces sa- vants auteurs, il faudrait admettre dix espèces de Succinées pour notre région, sans parler d’un nombre plus grand en- core de variétés souvent fort difficiles à distinguer, et qui éta- blissent, il faut bien l'avouer, de véritables passages d’une espèce à l’autre. C’est ainsi par exemple, que les var. gigan- tea, propinqua, opaca, ventricosa du Succinea Pfeifferi de M. Baudon sont regardés comme des variétés de même nom du Succinea pulris par M. Bourguignat. M. Bourguignat divise sestrente Succinées françaises en six groupes : 1° groupe de laCharpentieri, comprenant nos Succi- nea Charpentiert, et S. acrambleia ; 2° groupe de la putris, ren- fermant nos Succinea putris, S. Mortilleti, S. Pfeifferi et S. elegans ; 3° et 4° groupes de la debilis et de la bullina, non (1) Westerlund, 1876. Fauna Europea, p. 15. (2) Dumont et Mortillet, 1354. Jist. Moll. Savoie, p. 204 ; — 1856. Calal. CHUL: PAS (3) Baudon, 1877. Monographie des Suecinées françaises, in Journ. de Conch., t. XXN et ENVI: (+) Bourguignat, juillet, 1877. Aperçu sur les espè:es françaises du genre Succineu., DU BASSIN DU RHONE 2 représentés dans notre région; 5° groupe de l’oblonga, ren- fermant nos Succinea Fagotiana et S. oblonga ; 6° groupe de l'arenaria, avec nos Succinea a'enaria et S. humilis. Comme on le voit, M. Bourguignat base sa classification sur le galbe général de la coquille, en rapprochant les unes des autres les formes les plus affines. M. le docteur Baudon n’admetl que trois groupes, ceux de la putris, de l'elegans et de l'oblonga. Non seulement ilse sert dans son mode de groupement des caractères généraux de la coquille, mais encore il fait intervenir l'état de la màchoire de l'animal ; celle-ci est cornée dans le premier type; cornéo- membraneuse dans le second et simplement membraneuse dans le troisième. Hyazinia. —— Avec M. Westerlund, nous avons conservé la dénomination de Hyalinia, créée en 1837 (4) par Agassiz pour les Colünacidæ aux formes plates etbrillantes, de préférence au nom de Zonites, qui s'applique plus particulièrement aux es- pèces du groupe des anciens /elix algirus, H. verticillus, ete... et sous lequel Moquin-Tandon a confondu les Hyalinia, les vrais Zoniles et les Leucochroa. Nous avons indiqué dans ce genre vingt-sepl espèces. Déjà MM. Dumont et de Mortillet avaient reconnu pour la Savoie treize de ces espèces. M.Bour- guignat, dans différentes publications que nous avons citées dans nos synonyies a ajouté les Hyalinia septentrionalis, H. subnitens, H. Dumontiana, H. pseudohydatinr et H. sub- lerranea. Nous avons adjoint les Æ. Blauneri, 1. Dutailly- ana, H. nitidosa, H. contracta, H. subrimata, reconnus par plusieurs auteurs des plus autorisés, et qui ne figuraient pas dans les premiers de ces travaux. M. Westerlund n'ad- met dans son prodrome que quatorze de nos espèces et consi- dère comme variétés où comme synonymes Les Æyalinia sep- (1) Agassiz, 1837. In Charpentier, Suisse, p. 13. 28 VARIATIONS MALACOLOGIQUES tentrionalis, H. pilatica, H. subnilens, H. Dutaillyana, H. ra- diatula, H. viridula, H. Dumontiana, H. sublerranea, etc. Étant données les mœurs et les habitudes des mollusques de ce genre, on comprend que nécessairement notre faune alpestre ou subalpestre devait être riche en Hyaliua; mais il faut bien reconnaitre que plusieurs de ces formes sont très voi - _sines et souvent bien difficiles à séparer; citons plus particu- lièrement celles des groupes du Hyalimia nilens et du {. radiatula. A la rigueur, nous aurions pu distraire de ec genre le Hyalinia fulva, dont la forme conique diffère essentielle- ment de celle des autres Æyalinia, pour le faire rentrer dans le genre ou sous-genre Conulus de Fitzinger, ou Pelasia de Beck. Mais avec MM. Bourguignat, Kreglinger, Sandberger, Westerlund, etc., nous nous sommes borné à le placer à la suite des Hyalinies. | En dehors des formes ou espèces connues appartenant à ce genre, nous avons donné la description de deux formes nou- velles récoltées dans notre région, et ne se rapportant exac- tement à aucune des espèces signalées ou décrites jusqu'à ce jour. Malheureusement elles sont représentées par un trop pelit nombre d'individus pour que nous nous croyions suffi- samiment aulorisé à leur donner des noms nouveaux. Enfin nous remarquerons que dans notre région les vérila- bles Zonites, comme le Zonites algirus et les Leucochroa, coinme le Leucochroa candidissüna, font complètement défaut, pourn'apparaitre qu'au delà de nos limites sud, mais déjà dans la vallée du Rhône. Herix. — Ayant ainsi distrait de l’ancien genre Helix de Linné, les Hyalinia, il nous reste encore à citer soixante et onze espèces. Nous avons adopté en principe la classification du prodrome de M. Westerlund. Cet auteur n’admet, pour la faune d'Europe que lrois cent quarante-deux espèces sub- DU BASSIN DU RHONE 29 divisées en dix-huit sous-genres. Scize de cessous genres sont représentés dans notre faune. M. Bourguignat (1), beaucoup plus prodigue, connait dans le système européen environ trois mille espèces dans lesquelles on à fait une infinité de coupes sous-génériques qu'il évalue au moins à quatre-vingt-dix. Nous diviserons nos soixante et onze Hélices en dix-neuf groupe ou sous-genres ainsi repartis : 1° Le groupe des Patula, Held (2), nous a donné quatre es- pèces, loutes les quatre admises dans le prodrome:; c’est le groupe des Delomphalus de Moquin-Tandon auquel on a ad - joint l’Aelix rupestris, que cet auteur plaçait dans les Hygro- manes avec les Helix limbala, IH. fruticum, ete. 2° Les Acanthinula, Beck (3), ne renfermentqu'une seule es- pèce de notre région, l’Helix aculeata, rangée par Moquin- Tandon dans le groupe des Fruticola. 3° Les Trigonostoma, Fitzinger(4), comprennent deux es- pèces, les Helix obvoluta, et H. holoserica : ce sous-genre également admis par Moquin-Tandon pour ces deux epèces n'a pas été reconnu par M. Kreglinger(5), quia préféré la dé- nomination plus générale mais postérieure de Held, celle de Gonostoma (6). 4 Les Triodopsis, Rafinesque (7), ne renferment qu’une seule espèce, l'Helix personata. Nousne comprenons pas pour- quoi Moquin-Tandon à adopté pour ce sous-genre la déno- mination de Helicodonta créée par Ferussac en 1822, alors que celle de Rafinesque qu'il donne en synonymie comme ayant été créée par Beck, lui est naturellement antérieure. (1) Bourguignat, 1877. Descrip. de deux nouveaux genres algériens, ete.,p. 23. (2) Held, 1837. In Isis von Oken, p. 916. 13, Beck, 1846. Zn verhandt. versamml. Ærzt. in Kiel., p.122. (4) Filzinger, 1833. Syst. Verzeichn., p.97. (5) Kreglinger, 1870. Syst. Verzeich. Deutschl., p, 62. (6) He:d, 1837. In Isis von Oken, p. M5. (7) Rafinesque, 1819. Zn Journ. de Physique, vol. LXXXVIIT, p. 425. 30 VARIATIONS MALACOLOGIQUES 5° Les Vailonia, Risso (1), comprennent deux espèces, les Helix pulchella et H. costata admises par M. Westerlund, et que quelques auteurs, comme Moquin-Tandon, Kreglin- ger, etc., ont cru devoir réunir en une seule. C’est le sous - genre Lucena Hartmann (2) employé par Moquin-Tandon pour ces mêmes coquilles, mais non celui d’'Oken, qui se rapporte aux Succinées (3). 6° Les Pelasia; cette dénomination, eréée par Beck (4) et restreinte au seul /elix bidens, est adoptée par la plupart des auteurs. 1° Les Trichia, Hartmann(5), renferment dix-sept espèces de notre région; plusieurs de cesespèces ne sont point admises par M. Westerlund; telles sont les Helix phorochælia, I. cir- cinnata, H. clandestina, H, montana, . sub 1ontana, H. gra- lianopolitana, H. Bourniana, qu'il considère comme syno- nyines ou variétés d’autres espèces. Parmi celles-ci, les Helix phorochætia, H. Bourniuna, et H. submontana, ont été ré - cemment introduits dans la faune française par MM. Bourgui- gnat et Mabille, tandis que les autres sont envisagés par bien des auteurs comme des variétés plus ou moins bien définies du groupe des /elix hispida et IT. rufescens. Nous les avons admises à titre d'espèces, avec l'autorité de MM. Dumont et Mortillet (6), Bourguignat (7), etc.; dans ce même groupe nous avons cité l'Aelix depilata qui nous semble bien mieux placé près des /lelix hispida et H. cobresina que partout ail- leurs ; enfin nousenavons distrait les Helix gatbella et H. la- vardulæ, qui ont incontestablement plus de rapport avec l’'Helix carthusiana et loutes les formes de ce même groupe, (1) Risso, 1826. Hist. nat. Eur. merid., IN, p. 101. (2) Hartmann, 1821. Syst, Gasterop., p. 54. (3) Oken, 1815. Lehrb. Nat., TU, p. 314-312. (4) Beck, 1837. Index molluscorum, p. A. (5) Hartmann, 48921. Syst. Gasterop., p. 195 (6) Du nont et Mortillet, 1856. Catal. crit. et malacost., p 45 et suiv. (7) Boirguignat, 4862, Malacol, du lac des Quatre-Cantons, p'e5ret26: DU BASSIN DU RHONE 31 qu'avec n'importe quelle espèce du groupe des véritables Trichia. Nous avons conservé ce terme sous-générique de Trichiu de préférence au nom de Zenobia, Gray (1), admis par Moquin Tandon pour un certain nombre de ces mémes espèces, mais qui fait confusion avec la même dénomination donnée par Risso à un genre de crustacés isopodes. 8° Les Monacha, Hartmann (2), ne renferment dans nos con- trées que deux espèces ; l’Helix incarnala admis par tous les auteurs, mais rangé par Moquin-Tandon parmi les Æygro- manes avec les Helix fruticum, H. rupestris, ete., et l'Helix Juriniana, espèce peu commune créée par M. Bourguignat et qui jusqu'a présent parait propre à notre région. 9° Les Carthusianasont au nombre de huit ; une seule de ces espèces, l'Helix carthusianua, est citée par M. Westerlund et ad - mise dans ce groupe par tous les auteurs. Deux autres, créées par Risso, les Aelix cemenella et I. rubella sont envisagées comme variétés de l’Helix cantiana, ou mème confondues avec lui dansbien des synonymies. Trois autres, comme les //elix diurna et H. Putoniana, sont nouvelles, mais deux ont été déjà dénommées par MM. Bourguignat et J. Mabille, tandis que la dernière,connue par unnombretroprestreint d'échantillons, mais admise cependant comme espèce nouvelle par M. Bour- guignat, n’a pas encore reçu de dénomination spécifique. Enfin nous avons cru devoir placer dans ce même groupe à la suite de l’Helix carthusiana, les Helix glabella et H. lavandula dont les affinités pour un pareil groupe sont incontes- tables. 10° Les Eulota, Hartmann (3), comprennent seulement pour notre région les Helix fruticum et H. strigella, espèces ad- (1) Gray, 1821, Nat. arrang. Moll., in Med, Repos., XN, p. 239. (2) Hartmann, 1821. Syst. Gasterop., p. 173. (3) Hartmann, 1821, Syst. Gasterop., p. 179. 92 __ VARIATIONS MALACOLOGIQUES mises par tous les auteurs, mais la première est rangée par Moquin-Tandon dans ses Hygromanes, et la seconde dans ces Zenobia. 11° Les Campylæu, Beck (1), contiennent cinq des espèces les plus importantes de notre région, espèces en quelque sorte caractéristique de la faune alpestre et subalpestre; toutes les cinq figurent à ce titre dans le prodrome. Moquin-Tandon avait classé les JLelix alpina, H. glacialis etH. Fontenitli dans le groupe des Helicella, avec les Hélice striées, comme l'avait du reste déjà fait Dumont (2); quant à l'Helix zonala qu'il parait confondre, du moins partiellement, avec l'Helix fœtens, il le range dans les Chilostoma de Fitzinger (3). La classifica- tion du prodrome nous parait infiniment plus logique que celle de Moquin-Tandon, et les différentes espèces qu'elle renferme ont bien certainement plus d'affinités entre elles, soit comme forme, soit comme habitat, que celles admises par Moquin-Tandon. 12° Les Chilotremu, Leach (4), ne comprennent qu'une seule espèce, l'Aelix lapicidu, rangé par Moquin-Tandon dans les Vortex d'Oken (pars, non Beck) (5) et par Kreglinger à la fin de ses Campylæa (6). 13° Les Arianta, Leach (7), comprennent deux espèces, les Helix arbustorum et H. Repellini ; la seconde de ces espè- ces, contestée par plusieurs auteurs, a été admise par Charpen - lier. C’est une forme tout à fait locale, rare et peu connue. Mais si l’on reconnait comme l'a fait M. P. Fagot (8), qu'il faut séparer de l’Helix arbustorum les Helix canigonensis Boubée, (1) Beck, 1837. Index molluscorum, p. 24 (pars). (2) Dumont, 1850. Monographie des Hélices striées. (3) Fitzinger, 1833. Syst. Verzeichn., p. 98. (4) Leach, 1831. Brit. Moll., p. 106 (ex Turton). (5) Oken, 1815. Lehrb. nat., IL, p. 313 (n. Beek). (6) Kreglinger, 1870. Syst. Verzeich. Deutscht., p. 113. (7) Leach, 1831, Brit. Moll., p. 86 (ex Turton). (8) Fagot, 1879: Ja Soc. Hist. nat. Toulouse, p. 232. DU BASSIN DU RHONE 39 et I. Xatarti, Farines, on nous accordera bien la même fa- veur pour une forme plus différente encore du type, comme l'est l'Helix Repellini. 14° Les Xerophila, Held (1), tels que les envisage M. Wes - terlund dans son prodrome, comprendraient seize de nos espè- ces, savoir: Helix pisana, H. ericetorum, H. cricelella, IH, va- riabilis, H. hneata, H. fasciolata, H. costulata, I. heripen- sis, H. diniensis, H. gesocribatensis, H. caperata H. inter - secta, H. unifasciata, H. gratiosa, IL. trochoides et I. acuta. Pareil groupement ne nous semble pas logique, et nous ne saurions rapprocher l’Helix pisana del. costulata et de VIT. acula; nous avons donc divisé ce groupe en qualre autres groupes ; les Xerophila, les Siriata, les Theba et les Cochli- cella. Les Xerophila, Held (pars), comprennent nos Helix pisana, H. ericetorum, H. ericetella, H. variabilis et IT. li- neala. Dans ce nombre les Helix ericetorum et I. ericelella font seuls, à proprement parler, partie de notre faune, les autres espèces n'ayant été qu'accidentellement introduites. 15° Les Sériata forment un autre groupe bien distinct, dans lequel nous rangeons les véritables /elices striées de la plupart des auteurs, toutes coquilles de petite taille et d’un galbe particulier : Helix fasciolata, H. costulata, I. heripensis, IL. diniensis, H. gesocribatensis, H.caperata, H.unifasciata, H. gratiosa, et toutesleurs variétés ou formes dérivées. Ce groupe est un de ceux dont les espèces ont été les plus contestées; ainsi M. Westerlund n'admet parmi ces formes que les Helix striata, H. candidula (H. unifasciata), H. rugosiusculu, I. caperata, H. diniensis, H. intersecta: nous avons ajouté à ces types les Helix heripensis admis par M. Mabille, Helir costulata par M. Drouët et bien des auteurs, enfin l’Helix ge- socribatensis, forme inédite dénommée par M. Bourguignat. (1)Held, 1837, Jn Isis vw, Oken, p. 911-913. 34 VARIATIONS MALACOLOUGIQUES 16°Les Theba, Risso (1), ne renferment parmi les espèces de notre région que l'Helix trochoides ; nous avons envisagé ce groupe comme l'a fait Moquin-Tandon (2). 16° Les Cochlicellu, Risso (3), renferment des coquilles de forme toute particulière, très allongées ; nous n'avons trouvé dans notre région qu'une seule espèce, l’Helir acuta. Nous ferons observer que les Thebu et les Cochlicella ne figurent qu'accidentellement dans la faune de notre région. Ce sont des formes méridionales qui vivent normalement dans le sud de la vallée du Rhône au bora de la mer. 17° Les Tuchea, Leach (4), formentle quinzième sous -genre de M. Westerlund ; il comprend nos Helix nemoralis, H. hor- lensis, H.sylvalica et H. subaustriaca; les trois premières de ces espèces avaient déjà été considérées par Deshayes comme descendant d'une forme unique ; quelques auteurs commen - cent à réunir ensemble les deux premières; enfin la dernière vient tout récemment d'être signalée par M. Bourguignat. 15° Le groupe des Macularia, ou seizième sous-genre de M. Westerlund, n’a point de représentant dans notre région; le dix-septième, celui des Zberus, Montfort, ne renferme qu'une seule espèce admise par tous les auteurs, l'AHelix mu- ralis, qui apparait sur la limite sud de la partie centrale du bassin du Rhône. Celte mème espèce était rangée par Mo- quin-Tandon dans les Ofala de Schumacher (5). 19° Les Helicogent, Ferussac (6), forment le dernier et dix-huitième sous-genre des Helix du prodrome de M. Wes- terlund. I ne comprend que les ÆHelix aspersa et H. ponulia, formes admises par tous les auteurs. (li Risso, 4826. JList. nul. Eur. merid., U IN, p. 67, 73 (pars). (2) Moquin-Tandon, 1855. ist. Moll. France, UK, p. 268. (3) Risso, 1826. Hist. nat, Eur. merid., L. AN, p. 77. (4) Leach, 1831. Brit. Moll., p. 84 (ex Turton). (5) Schumacher, 1827. Essai system. test, p. 191. (#) Ferussac, 1822: Tabl. syst., p. 34. DU BASSIN DU RHONE 35 Comme on a pu le voir dans ce qui précède, nous avons été relativement très sobre dans l'admission des espèces nouvelles ; à part les dénominations déjà publiées par les au- teurs qui se sont occupés de notre faune, nous n'avons cité que trois noms nouveaux ou inédits, ceux des Helix diurna, IH. Putoniana el EH. gesocribalensis, qui nous ont été donnés par leurs auteurs; nous nous sommes borné à faire pres- sentir une ou deux espèces nouvelles, mais sans leur don- ner encore de noms nouveaux, n'ayant pas en main assez de matériaux pour établir d'une manière sûre et certaine leur histoire. Devra-t-on plus tard admettre définitivement comme espèces loutes les formes que nous avons indiquées ? c'est ce dont nous doutons ; et nous pensons que plus d’un de ces noms devra passer au rang de variété, sinon comme l'a déjà fait Moquin Tandon, au moins comme l'ont admis plus ré- cemment d'autres auleurs jouissant d'une égale autorité par leurs éludes, comme par le rang qu'ils occupent dans la science. Buciuus.— Dans le genre Bulimus, créé dès 1777 par Sco- poli (1), nous n'avons eu à signaler que trois espèces seule - ment appartenant aux véritables Bulimes, ce sont les Buli- mus montanus, B. obscurus et B. delrilus ; les formes sui - vantes, autrefois classées dans le même cenre, doivent dé- sormais être rangées dans les Chondrus, conme l'a proposé M. Bourguignat (2). Dans le genre Bulimus, Moquin-Tandon avait compris les Azeca, les Ferussacia, les Cæcilianella et les Rumina. Le premier el le dernier de ces genres font défaut dans nos régions, tandis que les deux autres y sont représentés. À ce propos nous ferons observer qu'il est assez singulier de ne pas trouver dans notre bassin le genre Azecu, (1) Scopoli, 1777. Fntrod. a hist. nat., p. 392. (2) Bourguignat, 1877. Descr, de deux nour. g’ures algériens, el”., re 24. 36 VARIATIONS MALACOLOGIQUES qui habite, comme l’a montré M. P. Fagot (1), le Nord, l'Est et le Midi de la France, et que quelques auteurs ont indiqué tout autour de nous, dans les Vosges (Joba), la Côte-d'Or (Barbié), le Puy-de-Dôme (Lecoq), ete. Espérons que de nou- velles recherches viendront combler cette lacune. Caonprus. — Ayant admis cette séparation proposée par Cuvier (2) pourles Bulimes dentés el applicable aux nombreu- ses formes de l'Europe ou de l'Asie occidentale, nousn'avons eu à signaler que deux types bien connus, les Chondrus tri- dens etChondrus quadridens. De pareilles formes deviennent beaucoup plus abondantes dans les régions méditerranéennes et asiatiques, puisque M. Bourguignat en admet près de deux cents espèces. Ferussacra. — Ce genre créé par Risso (4) a été l’objet de plusieurs études importantes de M. Bourguignat (4); nous ne trouvons dans notre région que trois espèces, les Ferussacia Subcylindrica, F. acicula et une forme encore inédite, dési- gnée par M. Bourguignat sous le nom de Ferussacia Locurdi, qui n'avait été observée par cet auteur que dans la Lombar- die, et dont nous avons provisoirement donné une descrip- tion sommaire. CÆCILIANELLA. — Ce genre créé par M. Bourguignat (5) constituerait d'après lui une famille spéciale, celle des Cæcti- lianellidæ, qu'il elasse dans sa nomenelature entre les Heli- cidæ et les Glandinidæ (6). Cette manière de voir.avait du (1) P. Fagot, 14876. Monogr. des espèce. franç. du genre A seca. (2) Cuvier, 1817. Règne animal, NH, p. 408 (pars) et 2: édit., 1830, (3) Risso, 1826. Hist. nat. Eur. merid., t. IV, p. 80. (4) Bourguignat, 1836. Zn Amen. malue., vol. 1, p. 197 ; — 1861. Étude synonym. Moll. Alpes Maritimes, (5 Bourguignat, 1877. Descr. de deux nouv. genres algériens, ete., p. 24. (6) Bourguignat, 4856. Zn Aménités malac., vol. I, p. 210. DU BASSIN DU RHONE 97 reste été déjà adoptée en partie du moins par quelques au- teurs, puisque nous voyons M. Kreglinger (1) elasser le genre Cœæcilianella après les Vertigo sous la rubrique de subfamille cæcilianella. M. Westerlund, réunissant au contraire les Cæ- cilianella avec les Azeca et les Ferussacia, en fait un sous- genre Cochlicopa (2). Nous citons d’après M. Bourguignat trois espèces seule- ment sur cinquante qui, d'après lui, seraient connues dans l'Europe, le nord de l’Afrique et l'Asie occidentale. CLausizra (3). — Dans son Histoire des Clausihies de France, vivantes où fossiles, M. Bourguignat (4) a cité pour la seule faune française quatre-vingl-six Clausilies, dont un grand nombre sont nouvelles. Suivant les données de cet ouvrage plein de science et d’érudition nous avons pu indiquer pour notre région le nombre considérable de vingt-neuf espèces, c’est-à-dire plus que Moquin-Tandon et M. l'abbé Dupuy n’en admetlaient pour toute la faune française. Dans ce nombre, les espèces suivantes sont cilées pour la première fois, et si elles sont accompagnées d’une diagnose très complète et très détaillée, du moins elles n’ont pas encore été figurées ; ce sont: Clausilia Montgermonti, CL. silanica, Cl. micropleuros, Cl. earina, Cl. curthusiana, Cl. sabaudina, CL. ylora, CI. Du- puyana, Cl. micralracta, Cl. nantuacina, CL. belonidea, CI. dilophia. Nous devons avouer que ce genre a été développé par M. Bourguignat d'une façon toute particulière, et que les autres genres malacologiques, à part Les Succinées, les Lima- ces el les Paludines, ne sont plus en proportion comparable. Avec de pareilles données nous comprenons sans peine que l’on puisse arriver au prodigieux total de huit mille cent cin- (1) Kreglinger, 4870. Syst. Verzeichn. Deutsciul., p. 218, (2) Wes'erlund, 1876. Fauna Europea, p, 153. (3) Draparnaud, 1805. Hist. Moli. France, p. 24, 29 el 68. (*) Bourguignat, 1876-1877. In An.sciences nal., vol. LV et V. 98 VARIATIONS MALACOLOGIQUES quante-sept espèces pour la faune européenne, chiffre donné par M. Bourguignat à la fin de sa Clussificalion des familles et des genres de mollusques vivants terrestres el [luviatiles du sys- tème européen. Bazia. -— M. Bourguignat (1) a rétabli l'histoire de ce genre appelé successivement Balæa, Balea et Balia. Faut-il le faire dériver d’une étymologie grecque (Bzuc:, moucheté, tacheté), ou d'une étymologie latine (balea, barque)? c'est ce que nous ignorons, ne connaissant pas la pensée première de Leach lorsqu'il créa le nom de Balæa en 1829. L’étymo- logie grecque nous parait cependant plus logique et plus plausible ; aussi l’acceptons-nous avec M. Bourguignat. Nous n’avons eu à citer dans ce genre que deux espèces, toutes deux admises par l'auteur de la monographie que nous ve- nons d'indiquer, mais dont une, le Balia Deshayesiana, est si- onalée par quelques auteurs comme variété ou même comme synonyme du Balia perversa. Pupa. (2) — Tel que nous l'avons envisagé, ce genre contiendrait dix-neuf espèces. Dans sa classification, M. Bour- guignat (3) a subdivisé ce mème genre en quatre autres genres : les Pupa comprenant presque toutes les espèces du groupe des Torquilla : les Orcula pour la série des espèces du groupe des Pupa dolium, P. doliolum, ete.; les Ennea non représentés dans notre région ; et enfin les Pupilla ren- fermant tous les pelits Pupas du groupe des Pupa muscorun, P. cylindracea, ete. Parmi nos dix-neuf Pupas, il y en a quinze qui sont admis au rang d'espèces par Moquin-Tan- don etM. l'abbé Dupuy; les autres, c’est-à-dire : Pupa bigor- (1) Bourguignat, 1860. Ameniles malacol., vol. I, p. 66. (2) Lamarck, 1801. Syst, anim. sans vert., p. 88. (3) Bourguignat, 1877. Descr, de deux nouv. genres algériens, ete., p. 29. DU BASSIN DU RHONE 39 riensis, P. hordeum, P. Semproni el P. bigranala ont été considérés comme espèces par M. de Mortillet, et par de Charpentier, Pätel, Rossmässler, etc. Verrico, — Ce genre créé par Müller (1) ne nous à donné que neuf espèces. Il a été scindé en deux par M. Bourgui- gnat,qui classe dans le genre Vertigo les très petites espèces globuleuses du groupe du Vertigo pygmæa, et range dans le genre Jsthmia les formes allongees, telles que les Ver/igo columella, V. inornata, V. muscorwm, ete. Toutes nos espe - ces, à part le Vertigo Shuttleworthiana qui, croyons nous, n'a pas encore élé signalé en France, sont admises comme espèces par Moquin-Tandon. Canvenium (2). La famille des Awriculidæ n'est repre - sentée dans notre région que par un seul genre, celui des Carychium ; ce n’est qu’en se rapprochant du littoral médi - terranéen que nous rencontrons le genre Alexia (3). Nous n'avons reconnu jusqu'à ce jour que deux Carychium, tous les deux admis comme espèces par M. Bourguignat dans l'é- tude qu'il a faite de ce genre (4). PLanorsis (5). — Nous avons eilé pour ce genre quinze es. pêèces ; dans ce nombre, Moquin -Tandon et M. l'abbé Dupuy admettent onze de nos espèces ; les quatre autres, Planorbis submarginatus, Pl dubius, PT. Crosseanus et PL. imbricatus ont été reconnus par M. Bourguignat ainsi que par plusieurs auteurs. M. Bourguignat (6) a cru devoir séparer des véritables (1) Müller, 1774. Verm. terr. et fluv. hist., KI, p. 425. (2) Müller, 1774. Vexin. terr. et fluv. hist, II, p. 24. (3) Leach, 1820. Syn. ofthe Moll. of Great-Britain, p. 97 (publié en 1852 par Gray). (4) Bourguignat, 1860, Aménilés malacol., vol il, p. 39. (5) Guettard, 1756. Zn mém, Acad, se. Paris, p. 151. (6) Bourguignat, 1877, Descr. de deux nou. genres algériens, etc., p. 85 40 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Planorbes les espèces dont la coquille est segmentée à l’inté- rieur par de petites lamelles régulièrement espacées ; ce genre porterait le nom de Segmentina proposé déja par Fle- mine (1). À ce nouveau genre qui ne comprend que quatre espèces européennes appartiendrait notre Planorbis nitidus. La plupart des auteurs modernes, tout en admettant cette distinction parmi les Planorbes, se sont bornés à l’envisager simplement à titre de coupe sous-générique. Puysa (2). — Aux trois Physa de notre région cités par la plupart des auteurs, nous avons ajouté le Physa Tasler créé par M Bourguignal pour une forme de la Bretagne. Il est même probable qu'une étude plus suivie de ce genre amènera la découverte de formes ou peut-être même d'espèces nou- velles. Liuxæa. — Le genre Limnœæa (3) nous a présenté les plus grandes difficultés pour son classement ; il est incontestable qu'une bonne monographie de ce genre reste encore à faire ; mais c’est bien certainement un travail très délicat, car la plupart de ces formes sont tellement variables par elles- mêmes que l’on est exposé soit à multiplier indéfiniment les noms nouveaux, soit à les simplifier largement, comme l’a fait Moquin-Tandon. Dans la première partie de notre tra- vail nous avons cité dix-huit espèces. Dans ce nombre, il n’a en à que sept qui sont admises par Moquin-Tandon ; ce sont : Lunnœu auricularia, L. limosa, L. peregra, L. stagnalis, L. truncatula, L. palustris et L. glabra ; à part le Limnæa clophila plus récemment créé par M. Bourguignat, il considère soil comme synonymes, soit comme variétés, les autres es- (1) Fleming, 1828. List. of Brit. anim., p. 279. (2) Draparnaud, 1801, T'abi. Moll. France, p. 31 et 52. (31 Bruguière, 1791. Enrycl. mélh., vers, p. 954. DU BASSIN DU RHONE Al pèces que nous signalons. Plusieurs auteurs les ont cepen - dant admises comme des espèces bien définies; ainsi par exemple le Limæna canalis, est maintenu par MM. l'abbé Dupuy (1) et Graells (2), le L. marginata par MM. P. Mas- sot (3) et Graells, le L. fragilis par Patel et Schauffuss (4), le L. fontinalis, par Zelebor (5), le L. frigidus, par M. de Mor- üllet (6), le £. entermedia, par MM. Bourguignat, Graells, Brusina, Zelebor, etc. Nous n'avons donc ajouté aucune es- pèce nouvelle, et si l’on admet quatre-vingt-six espèces de Clausilies pour la France, on peut bien admettre également un peu plus que les huit espèces de Limnées reconnues par Mo- quin-Tandon. ANcyLus (7). — Notre tâche était bien plus facile pour ce genre, grâce aux travaux de nos devanciers. Nos cinq espèces sont toutes admises par M. Bourguignat dans son Étude sy- nonynaique sur le genre Ancylus (8), quatre appartiennent au sous-genre des Ancylastrum, et le cinquième, l'Ancylus la- cuslris, se rapporte au sous-genre Velletia. Nous avons entiè- rement suivi ce travail, pour nos espèces comme pour nos variétés, nous bornant à conserver l’ancien nom d'Ancylus capuloides de Jan. Enfin plusieurs auteurs considéraient ce genre comme faisant partie de la famille des Linnœærdæ; avec M. Bourguignat nous l'avons maintenu à part dans la famille des Ancylidæ, laissant dans les véritables Limnæidæ nos genres Planorbis, Physa et Limnœu. (4) Dupuy, 1849. ist. Moll, France, p. 482. (2) Graells, 1846, Catal, Moll. Esprna, p. 11. (3) P. Massot, 1872. Zn Soc, agric. Perp., p. 109. (4) Patel et Schauffus, 1869. Molluscorum systema et catal., p' 91: (3) Zelebor, 1851. Syst. Verzeichn. Œster., p. 118. (6) De Mortllet, 1860. Revwe savoisienne, n° de décembre. (7) Geoffroy, 1767. Cog. Paris, p.122. (8) Bourguignat, 1862. Les Spicilèges malacologiques, p. 139. VAR. MAL. T. II, rs 42 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Cycrosroma (1). — Le genre Cyclostoma nous a donné deux espèces, les Cyclostoma elegans et C. lufetianum. Nous en avons distrait, contrairement à ce qu'avait fait Moquin-Tan- don, le genre Pomatias, que tous les auteurs classent à part. La famille des Cyclostomidæ a donné lieu à une monogra- phie spéciale de M. J. Mabille (2); dans ce travail, l’auteur signale en France six espèces pour le genre Cyclos'oma ; illes divise en deux groupes ZLœvigalæ et Sulcalæ suivant la manière d’être extérieure de leur test; les deux espèces de notre région appartiennent au deuxième groupe. Pomarias (3). — Les Pomatias sont plus nombreux comme espèces dans le Midi de la France que dans nos régions al- pestres et subalpestres. Dans sa note sur les Cyclostomidæ, travail qui résume les recherches de ses devanciers et notam- ment ls études de Saint-Simon sur les Pomatias, M. J: Mabille admet pour la France seize espèces de ce genre, subdivisées en Obscurali, Striolati, Patuli, Maculati. Nous n’en avons compté que trois espèces; deux, les Pomatias apricus et P. septemspüiralhs, sont admises par tous les auteurs, et la troi- sième, le Pomatias sabaudinus, a été créée par M. Bourguignat pour une forme locale. Les Pomalias upricus, et P. sabau- dinus rentrent dans le groupe des Obscurati, tandis que le Pomatias septemspiralis appartient à celui des Maculati. I est fort probable que des études locales plus suivies amè- neront la découverte de formes nouvelles pour notre région. AcuE (4). — Nous avons laissé à M. le marquis de Folin le soin d'étudier nos 4eme ; c'est donc d’après lui que nousavons cité trois espèces distinctes dans notre région. Une monogra - (1) Draparnaud, 4804. Tabl. Moll., p. 30 et 37. (2) J. Mubille, 1875. In Revue et magasin de zoologie. (3) Studer, 1789. Faunul. Helvet., in Coxe Trav. Switz., III, p. 433. (4) Hartmann, 4824. Syst, Gaster., in Sturm's Fauna, VI (Heft V,, p. 87. DU BASSIN DU RHONE 43 phie faite par cet auteur est actuellement sous presse, et jettera sans doute une lumière nouvelle sur les espèces et les synonymies de ee genre si souvent mal interprété. Vivipara (1). — La grande famille des Paludinidées ne pou- aitêtre étudiée sans lesecours destravaux de Paladilhe ; aussi avons-nous cru devoir nous en rapporter presque exclusive- ment à son Étude monographique sur les paludinidées fran- çaises (2). Dans le genre ’iviparu nous avons parlé de deux espèces seulement; ce genre, autrefois réduit à un petit nombre d'espèces, a été l’objet d’études nouvelles et récentes de la part de M. Bourguignat (3) qui admet aujourd'hui dans le système européen une quarantaine d'espèces réparties dans sept groupes. Les deux espèces de notre faune appar- üennent aux groupes Lacustrina et Fasciatina. ByTHinrA (4). — Des quatre espèces signalées par Paladilhe une seule, jusqu’à présent du moins, parait devoir appartenir à notre faune, c'est le Bythinia tentaculata; toutes les autres de taille plus petite semblent faire défaut dans nos contrées. AmsicoLA (5). —Ce genre, créé par Gould pour des Bythinies aux formes courtes et globuleuses de l'Amérique, a été, pen- dant longtemps en France confondu avec les Bythinies ou les Hydrobies; il compte aujourd’hui plus de sept espèces; nous n’en avons jusqu’à ce jour reconnu, dans nos régions qu'une seule espèce l’Amnicola similis, mais nous tenons pour certain qu'une étude plus approfondie de la faune des lacs et des étangs permettra de signaler de nouvelles formes, (4) Lamarck, 1809. Phil. zool., I, p. 320 (vivipare). (2) Paladilhe, 1870. 1a Annales de mulacologie, vol. E. (3) Bourguignat, mai 1880. Recensement des Vivipara du système européen. (4) Gray, 1821. Nuit. arrang. Moll., in méd. repos., XV, p. 239 (Bithinia). (3) Gould et Haldemann, 1841. In Gould, Rep, invert. Massach., p. 228. 44 VARIATIONS MALACOLOGIQUES PazuniNezra(1).— Cette dénomination générique appliquée à des petites Paludines d’eau douce aux formes globuleuses ou cylindroïdes, mais non coniques, comprend aujourd'hui un nombre considérable d'espèces qui tend encore à s’accroitre par des découvertes incessantes ; comme ce sont le plus sou- vent des formes localisées dans des sources, des fontaines, de petites pièces d’eau, on comprend quelvaste champ pareille étude peut offrir aux malacologistes. Nous n'avons cité que huit espèces, dont deux nouvelles, ou qui du moins, ne nous paraissent pas se rapporter exactement aux formes décrites jusqu à ce jour. Peut-être pourrait-on les considérer comme de simples variétés d'espèces déjà connues ; mais dans le genre Paludinella, parmi les vingt-quatre espèces admises etdécrites par Paladilhe nous ne voyons pas figurer une seule variété ; toute forme nouvelle ou différente de ses congénères est im- médiatement élevée au rang d'espèce. Dans tous les eàs, pour l’une au moins de nos coquilles, le nombre d'individus connus est encore trop restreint pour que l'on soit réellement en droit de se prononcer sur le rang qu'ils doivent occuper dans la série malacologique. BeLGRaNDIA. — Créé par M. Bourguignat (2) pour de petites Paludines caractérisées par la présence de gibbosités creusées à l'intérieur, ce genre qui compte déjà plus de douze espèces en France, ne nous à donné qu'une seule espèce, la plus commune et la plus dispersee, le Belgrandia vitrea. Hyprosra. — Ce genre qui comprend aujourd'hui les petites Paludines de forme cylindroïde à spire allongée et acuminée, est plus pauvre en France que les précédents; nous n’en avons trouvé que deux espèces, les Hydrobia Charpyi et H. (1) L. Pfeiffer, 4841. In Wiegm. arch, X, p. 227. (2) Bourguigna$, 1869. Cat. Moll. Paris à l'époque qu ler, p. 13 et -uiv. ! DU BASSIN DU RHONE 45 peracuta. C’est sous cette mème appellation créée par Hart- mann (1) que M. l'abbé Dupuy avait classé toutes ses petites Paludines. Larreria. — Le Lartetia diaphana est dans notre contrée le véritable représentant des Melanidæ. C'est du reste une coquille fort rare que l’on ne trouve que dans les allu- vions du Rhône, et dont on ne connait pas encore le vérita- ble habitat. Ce genre créé par M. Bourguignat (2) pour de petites Paludines cylindroïdes dont l'ouverture affecte une forme toute particulière, n’a eucore donné que cinq espèces vivantes. Locarpra. — Ce genre créé par M. de Folin (3) est carac- térisé par la forme conique et allongée de la coquille, avec des tours fortement détachés et une ouverture qui descend bien au-dessous de la base du dernier tour. Il n’a encore donné qu'une seule espèce, le Locardia apocrypha, dont l'habitat réel nous est inconnu, et qui, provisoirement du moins, peut prendre place à la suite des Lartetia dans la famille des Me- lanidc. MoiTessieria. — C est pour la première fois qu'on cite dans nos régions ce genre créé par M. Bourguignat en 1863 (4); ces petites coquilles, véritables pygmées malacologiques, paraissent jusqu’à présent localisées dans le Midi de la France ; nous n’en connaissons qu'une seule espèce probablement nouvelle. Le genre Moilessieria à été contesté par plusieurs auteurs. Pour M. Dubreuil (5), il faudrait en faire rentrer les (1) Hartmann, 1821. Zn Sturm’'s Fauna Deutschl., NI. (5 Heft), p. 46. (2) Bourguignat, 1869. Cat. Moll. Paris à l'époque quatern., p. 15 el suiv. (3) Le Folin, 1880. Journ. de Conchyl.,t. XX VIII, p. 235. (4) Bourguignat, 1863. Monographie du genre Moitessieria. (5) Dubreuil, 4869, Ao/lusques terrestres et fluviatiles de l'Héraull. # édit. 46 VARTATIONS MATACOLOGIQUES espèces dans le genre 4eme, tandis que pour M. le docteur Kobelt (1) ce seraient des Hydrobies. Vazvara (2). — La faune des Valvées est très riche et très variée dans notre région; nous avons eu à citer six espèces. De ce nombre, trois seulement, les Valvata piscinalis, V. mi- nuta et V.cristata, étaient admises par Moquin -Tandon et par M. l'abbé Dupuy. M. Boureuignat (3) a démontré qu'il fallait ajouter à la faune francaise les Valvata contorta, V. obtusa et V. alpestris que bien des auteurs ne reconnaissaient qu'à titre de variétés du Valvata piscinalis. NeriTiNA. — L'ancien genre Neritina de Lamarck (4) dont nous avons conservé l'appellation, a été subdivisé en deux genres par M. Bourguignat (5): le genre Theodoxia (Theo- doxis), de Denis de Montfort (6), s'applique aux Néritines d'eau douce, et le genre Gaillardolia, Bourguignat, comprenant les Néritines marines ou des eaux saumâtres. Pendant long- temps l'on n’a admis qu’une seule espèce de Neritina d’eau douce, pour la France, et aujourd'hui encore quelques auteurs le comprennent ainsi. Cependant, dès 1892 (7), C Recluz admettait déjà sept espèces ; depuis on a ajouté à cette liste quelques formes nouvelles. Nous n'avons cité qu’une seule espèce, le Neritina fluviatilis. SPHÆKIUM (8). — Avec les Sphœærium commence la classe des Acéphales ou Lamellibranches Nous en avons admis neuf (1) Kobelt, 4871. Catalog der im curopaischen Faunnengebiet lebenden Binnenconch. (2) Müller, 1774. Verm. terr. el fluv. hist., IT, p. 198. (3) Bourguigrat, 4864, Malacol. d'A ix-les- Bains, p. 68 el suiv. (4) Lamarck, 1822. Animaux sins vert., vol. VI, 2° part., p. 182. (5) Bourguignat, 1877. Desrr. de deux nouv. genres algériens, etc., p. 49. (6) Denys de Montfort, 4810. Conch. syst., vOI. IT, p. 310. (7) G. Recluz, 1882, Recens. des Néritines de la Fr. ront., in Journ, Conch.,t.1I, p. 282. (8) Scopoli, 1777. Introd. ad Hist, nat., p. 297. < DU BASSIN DU RHONE A7 espèces. Dans sa Monographie des espèces françaises du genre Sphærium (1), M. Bourguignat a cité également neuf espè- ces. Sept des nôtres seulement s'y retrouvent et appar- tiennent au sous-genre Sphæriastrum. Mais si nous avons cité comme espèces les Sphœærium rivale et Sph. nucleum, c’est qu'ils avaient été, déjà avant nous, considérés au même ti- tre par MM. l'abbé Dupuy (2), Morelet (3), Zelebor (4), etc. Pisiprum (5). — Pour les Pisidies, nous nous sommes reporté à la savante monographie de M. le docteur Baudon (6) et nous avons cité six des espèces qu'il a admises. Mais ici nous nous croyons en droit de répéter ce que nous avons déjà dit à propos des Paludinella ; l'étude de ces peti- Les espèces aquatiques ne sera complète que lorsque l’on aura pu étudier à fond la faune des lacs, des étangs, des fontaines et des sources de toute la région. Uno (7). — Les différents travaux sur les Unios et les Ano - dontes de la France sont déjà un peu anciens, et depuis leur publication, la science a fait bien des progrès. Ence moment, MM. Bourguignat et Drouët préparent, chacun de leur côté, une étude nouvelle de la famille si difficile des Nayades d'Eu- rope. Nous avons signalé dans le genre Unio, vingt-quatre espèces. Nous sommes loin, comme on le voit, des dix seules espèces de Moquin-Tandon; déjà M. l'abbé Dupuy avait mul- tiplié ce nombre des Unios et admettait vingt-deux espèces pour toute la France (8). Plusieurs des espèces de notre liste figurent pour la première fois dans la faune francaise, mais (1) Bourguignat, 1854. Z1 Mém. Soc. sc. physiques et nat. de Bordeaux, t. I. (2) Dupuy, 1854. Hist. Moll, France, p. 668. (3) Morelet, 14845. Descr, Moll. terr. et fluv. Portugal, p. 97. (4) Zelebor, 1851. Syst. Verzeichn. Erzher. Œster.,p. 21. (5) C. Pfeiffer, 14821. Deutschl. Moll., 1, p. 17 et 423 (6) Baudon, 1857. Essai monogr. sur les Pisidies françaises. (7) Philippsson, 1788. Dissert, hist. nat. syslem., etc., p. 16. (8) Dupuy, 1852 Hist. Moll. de France, p. 626 et suiv. 18 VARIATIONS MALACOLOGIQUES nous ne citons qu'une seule forme réellement nouvelle, créée récemment par M. Drouët, l’Unio subtilis. I y aura sans doute lieu d'ajouter plus tard de nouveaux noms à cette première liste. MarGariTana. — Le genre Margaritana a été démembré des Unio par Schumacher (1). Ilne nous a donné qu'une es- pèce bien connue, du reste, le Margaritana margaritifera. PseupaxononTa. — M. Bourguignat a démembré ce genre nouveau en 1877 (2) des Anodontes ; il renferme des coquil- les n'ayant qu’une seule dent cardinale exiguë et lamellifor- me sur chaque valve; le plus souvent les dents sont atro- phiées, ou bien sont rejetées au dessus de l'impression anté- rieure sous la forme d'une légère saillie allongée. Ce genre ne nous a donné jusqu'à présent qu'une seule espèce voisine du Pseudanodonta complanata, mais pourtant différente par plus d’un caractères. ANODONTA. — Le genre Anodonta (3) nous a fourni vingt espèces, et encore nous eussions sans doute pu en ajouter quelques-unes, s’il nous avait été possible d'attendre la fin de la publication du travail que M. Bourguignat vient d’en- treprendre sur les Nayades d'Europe (4). Dans son premier fascicule, M. Bourguignat nous dit qu’il a été amené à recon- naitre environ cent cinquante espèces ou formes stables pour ce genre. Plusieurs des espèces que nous indiquons portent déjà les dénominations données par cet auteur, et nous renvoyons à cet ouvrage pour y puiser les descriptions détaillées. (1) Schumacher, 4817. Essai nouv. syst. hab, vers teslacès, p. 123. (2) Bourguignat, 1877. Descr. de deux nou. genres algériens, etc., p. 55. (3) Cuvier, 1817. Tableau élém. d'hist, naturelle. (4) Bourguignat, 1880. Matériaux pour servir à l'histoire des mollusques acéphales., DU BASSIN DU RHONE 49 Dreissena.— Enfin dans legenre Dreissena (1) nous n'avons signalé que la seule espèce connue jusqu'à ce jour en France, le Dreissena polymorpha. Comme on a pu le voir par ce qui précède, nous n'avons fait que citerles espèces des auteurs les plus modernes et les plus autorisés, nous rapportant autant que possible aux étu- des ou aux monographies les plus récentes, et à celles qui font foi ou autorité dans la science. Si nous avons ajouté à ce catalogue quelques coquilles nouvelles, du moins l’a- vons-nous fait avec la plus grande circonspection, nous bor- nant, pour le moment, à indiquer ces formes, sauf à en donner plus tard les diagnoses complètes, lorsque la découverte de nouveaux matériaux nous aura mieux fixé sur le rang qu’el- les doivent occuper dans l'échelle zoologique. Le total de 344 espèces pour la faune de la partie centrale du bassin du Rhône n'a donc rien de bien exagéré, puisqu'il repose sur des bases fournies par les documents les plus ré- cents, établies par les auteurs les plus connus. Mais il y a mieux.Nous affirmons que cette faune est pius riche encore que nous ne le supposons, et que de nouvelles recherches doi- vent grossir un jour un pareil total. Il nous sera facile de le prouver. Nous jetterons, pour cela, un rapide coup d'œil sur les études malacologiques dont notre région a été l'objet, et nous constaterons sans peine qu’elles n’ont pu embrasser que des stations en nombre relativement fort restreint pour un aussi vaste ensemble (2). Les régions alpestres et subalpestres de la Savoie et de la Haute-Savoie ont donné lieu à plusieurs publications fort importantes de MM. Bourguignat, Dumont et de Mortillet. M. Bourguignat a étudié d’une façon toute spéciale les envi- (4) Van Beneden, 4835. Bull. acad. Bruxelles, p. 27 et 44. (2) A la fin de ce volume nous avons donné le résumé bibliographique des principaux travaux écrits sur notre région. 50 VARIATIONS MALACOLOGIQUES rons d'Aix-les-Bains (1), et dans cette seule contrée, il a trouvé cent quinze espèces, dont trois sont nouvelles, et pa - raissent jusqu’à présent localisées dans cette station, ce sont : Helix Juriniana, Cœcilianella uniplicata et Pomatias sabau- dinus. Neuf espèces jusqu'alorsp araissaient étrangères à la faune francaise, etsont citées pour la première fois : Zonites pilaticus, Planorbis Crosseanus, PI. dubius, Valvata contorta, V. obtusa, V. alpestris, Unio amnicus, U. «ter, U. Sanderi. Plus tard, dans son étude sur les Clausilies (2), M. Bour- guignat ajoute à cette même station les espèces suivantes : Clausilia sabaudina, CL. lincolala, CL. mucida, CI. dilophia, CI. Tettelbachiana. D'une façon générale, MM. Dumont et de Mortillet ontétu- dié la Savoie et la Haute-Savoie dans deux travaux très re- marquables. Dans le premier (5), ils signalent : 5 Arions dont la synonymie est assez confuse ; 11 Limax, parmi lesquels se trouve une espèce noüvelle, le Limaæx lineatus, un Krynickillus et deux Milax; a Testacella, dont un Teslacella ovum inconnu, signalé probablement par erreur dans le catalogue de Jurine ; 8 Vitrina, dont deux espèces, les Vitrina ylacialis et V. oblonga, ont été eitées par Collet (4); 15 Helix, comprenant onze Hyalinia. Cet ouvrage, conçu sur un plan très vaste, écrit avec un soin de détails tout particulier, est malheureusement resté inachevé. S'il renferme quelques erreurs facilement recti- fiables, il n'en contient pas moins des données très précises sur l'habitat des mollusques, sur leur distribution géogra- phique non seulement dans les différents bassins de la Sa- voie et de la Haute-Savoie, mais encore en dehors de ces (1) Bourguignat, 1864, Malacolngie d'Aix-les-Bains. 2) Bourguignat, 1877-78, Histoire (les Clausilies de France viv. et foss. 3) Dumont et Mortillet, 1852-1854, Mollusques de la Savoie et du Léman 4) Collet, 1853, Mouliers, Brides, Sulins, Guide en Tarantaise. ( { ( DU BASSIN DU RIONE G 4 régions, enfin sur la description des espèces el de leurs va- riétés locales. Dans leur second ouvrage (1), MM. Dumont et de Mortillet ont indiqué quatre-vingt-huit espèces réparties dans les sept genres suivants: Aion, Limax, Vitrina, Succinea, Helix, Achalinu et Bulimus. Dans ce total figurent comme espèces nouvelles les SuccineaCharpentieri, S. Droueti et Helix flavo- virens. La plupart des autres espèces étaient déjà connues dans la faune francaise. Ge travail comme le précédent n’a pas été terminé ; mais on y trouve de précieuses indications, notamment sur l'habitat des Hélix, dont la répartition géographique est toujours suivie de la dispersion suivant les altitudes. Plusieurs variétés nou- velles et locales y sont signalées pour la première fois; et comme les auteurs étaient en relation avec de Charpentier, qui a créé dans la faune franco-suisse des environs de Ge- nève plusieurs types ou variétés importantes, nous retrouvons là des documents très précieux pour les études malacologi - ques. Plus tard, en 1860-1862, M. de Mortillet (2), dans un opus - cule plein d'humour et de patriotisme, a pu ajouter à la liste de la faune de son pays, les Limnæa frigidu et L. corrosa. Dans l'Isère, quoique la faune soit aussi variée, les publi- cations malacologiques ontété moins nombreuses encore. Le seul travail que nous possédions sur ce département remonte à quarante ans. En 1840, Albin Gras, sous le titre de Descrip- lion des mollusques fluviatiles et terrestres du département de l'Isère, décrivit cent quarante-sept espèces réparties dans vingt-trois genres. Cet ouvrage est accompagné de six planches bien dessinées (1) Dumont et de Mortillet, 1856. Catalogue critique et malacostatique des Mosllusques de Savoie et du bassin du Léman. (2) G. de Mortillet, 4860-1862, Annexion à ln faune malacologique de France, 52 VARIATIONS MALACOLOGIQUES où sont représentées toutes les espèces Malheureusement dans cette liste plusieurs formes sont indiquées comme ap- partenant à des régions autres que l'Isère, et en outre plu- sieurs d'entre elles sont entachées d'erreurs graves dans leurs déterminations. C’est ainsi que l’auteur cite : Æelix ru- gostuscula, Michaud, dans les Alpes du côté de Gap; Helix variabilis, Draparnaud, environs de Grenoble ; /lelix cornea Draparnaud, du Midi; Clausilia papillaris, Draparnaud, de Montélimar; Clausilia plicata, Draparnaud, du mont Jura, des Vosges ; Pupa bipicata, Michaud, de Lyon; Pupa inor- “alta, Michaud, de Lyon ; Vertigo nana, Michaud, de Lyon; Vertigo pusilla, Michaud, département ? Cyclostoma sulcatum, Draparnaud, du Midi; Planorbis compressus, Michaud, de Lyon; Physa acuta, Draparnaud, de Lyon ; Limnæa leucos- toma, Michaud, de l'Ardèche; Ancylus sinuosus, Brard, de Lyon; Paludina vivipara, de Lyon et l’ile-Barbe; Palxdina diaphana, Michaud, de Lyon, dans les alluvions du Rhône : Paludina abbreviata, Michaud, de Lyon, dans les alluvions du Rhône ; Paludina bulimoideu, Michaud, dans les alluvions du Rhône, etc. Si Albin Gras a indiqué autant d'espèces de Lyon dans son catalogue de l'Isère, c'est sans doute parce qu'il fat une époque où le Rhône servait de limites aux deux départements, et qu'une partie même de ce qui constitue aujourd'hui la ville de Lyon, était alors comprise dans le département de l'Isère. Malgré ses erreurs et ses im- perfections, l'ouvrage d’Albin Gras est toujours bon à consul- ter. Mais on voit que le nombre de localités qu'il indique est fort restreint : à part les coquilles communes que l’on trouve partout, il n’a surtout indiqué que les espèces qui avoisinent Grenoble. Mais il est une autre partie de ce même département qui a été l'objet d'une monographie toute spéciale et des plus cons- ciencieuses. M. Bourguignal revenant surles publications fort DU BASSIN DU RHONE ES | incomplètes de ses devanciers, a publié la malacologie de laGrande-Chartreuse. Dans cette région, l’auteur cite quatre- vingts espèces, dont six nouvelles décrites et figurées avec un soin tout particulier : Arion Dupuyanus, Limax erythrus, EL. eubalius, Zonites Dumontianus, Helix phorochætia, H. Bour- niana; toutes les autres étaient déjà connues et pour la plupart faisaient partie de la faune française. Le département de Saône-et-Loire n’a encore donné lieu qu'à une seule publication. Grognot ainé, en 1853, a publié un catalogue très sommaire (1); dans ce département si vaste, aux éléments si variés, il n’a pu citer à peine qu’une centaine d'espèces, dont aucune n’est nouvelle. Préoccupé par des tableaux de classification fort intéressants du reste, ila négligé les variétés. Quant aux localités, il se borne à des généralités déplorables et dont on ne saurait tirer au - cun parti pour une étude comme celle qui nous occupe. Si Lyon a été habité par des malacologistes comme les Sionnest, les Michaud, les Devilliers, les Lafond, les Foudras, les Terver et bien d’autres, ses environs seuls ont été jus- qu'à présent l’objet de recherches malacologiques suivies. Mais l'étude générale du département est encore à faire à ce point de vue. Sur les indications de Terver, et en adoptant le plan suivi par Moquin-Tandon nous avons indiqué (2) dans notre Malacologie lyonnaise cent quarante-quatre espèces, sans compter un grand nombre de variétés. Mais à cette époque notre champ d'étude ne s’étendait pas au delà des environs immédiats de Lyon, y compris le massif du Mont-d’Or lyon- nais. Depuis lors, il faut bien le dire, grâce à d’incessantes recherches, grâce aussi à la collaboration d'un trop petit (4) Grognot ainé, 1867. Mollusques testasé* ({l vi utiles el terrestres) du déprrtement de Saône-et-Loire, ow qui y sont déposés par ‘ex rivières qui s'y rendent, avec des tableaux Synopliques, br. in-8°, 22 pages. (2/4. Locard, 1877. Aalucologie lyonnaise, ox description des mollusques lerrestres et aqu tiques des envie ons de Lyon, d'après la Collection A.-P. Terver. 54 VARIATIUONS MALACOLOGIQUES nombre de collectionneurs de nos amis, nous avons pu 2rossir cette liste et accroitre considérablement le nombre des es- pèces comme celui des variétés. Enfin, pour compléter cette revue géographique de notre région, il nous faut reconnaitre qu'il na rien été publié de particulier sur les départements de PAin et de la Loire. Nous espérons cependant être avant peu en mesure de cons- tituer un catalogue des mollusques du département de l'Ain ; mais jusqu'à ce jour, à part les indications que l’on peut puiser dans les ouvrages généraux de Draparnaud, de Mo- quin-Tandon, de MM. l'abbé Dupuy et H.Drouët, aucune don- née malacologique spéciale n'existait pour ces régions. Si dans ce travail nous avons pu donner sur l'habitat des mollusques quelques indications nouvelles, faible contribu- tion apportée à celles de nos devanciers, on voit sans peine combien nous sommes encore loin de connaitre d’une façon même suffisante la malacologie de notre région. Dans les deux seules régions qui ont été étudiées en détail, celles de la Grande-Chartreuse et des environs d’Aix-les-Bains, M. Bourguignal a pu signaler quatorze espèces nouvelles. A quel total n’arriverions-nous pas si toutes les autres régions de la partie centrale du bassin du Rhône étaient étudiées avec le mème soin! que de nouveautés sont recélées sans doute dans nos montagnes du Lyonnais, du Beaujolais, le massif du Pilat, le Bugey, le Vercors, etc., etc.! que de cours d’eau, de ruisseaux, de lacs, de marais dont la faune nous est encore inconnue ! On voit donc d’après cela combien nous sommes au-dessous de la vérité lorsque nous assignons un total de trois cent quarante-quatre espèces pour la faune de notre région, et l'on comprendra sans peine combien nous sommes loin de con= naitre le dernier mot des ressources malacologiques de notre pays. DU BASSIN DU RHONE 55 Dans cette étude sur les Variations malacologiques, nous avons cru devoir nous borner à puiser la plus grande partie de nos exemples dans une contrée bien localisée de la France. Après ce que nous venons de dire, on saisira mieux sans doute quel est le mobile qui nous a guidé dans notre choix. C’est qu’en effet, il n’est point de région en France qui pour une étendue aussi faible présente une faune aussi riche et aussi variée, et que malgré les lacunes que nous venons de constater, il n’en est aucune qui ait été l’objet d'autant d'études de détails. Gette faune nous étant plus particulièrement fa- milière, devait nécessairement présenter plus de garanties possibles pour arriver sûrement à notre but. Mais si nous par- venons à l’atteindre en nous restreignant à nos faibles limites, quelle puissance auraient nos arguments si nous pouvions les étendre au delà de notre région, non seulement à la France entière, mais encore à toute la faune de l'Europe! IT RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE ET OROGRAPHIQUE DE LA FAUNE Situation géographique et orographique générale. — Les variations dans la faune suivant la longilu le et la latitude sont à peu près nulles. — Différences suivant l'altitude. — Division ‘le l'aititule eu trois zones. — Tableau de la répartition de la faune suivant les trois zones d'altitude. — Considératioas sur cette répartition. — Faune propre à chaque zone. -— Faune co nmune aux trois zones. — Résumé et conclusion. Les mollusques, comme tous les autres êtres de la création, peuvent avoir un habitat différent propre à chaque espèce ou variété, et répondant plus particulièrement à leurs besoins biologiques. En dehors de la division toute naturelle des mollusques, en mollusque terrestres et mollusques aquati- ques, ou pulmonés et pulmobranches, branchifères et lamel- libranches, il est d'autres divisions basées sur les notions géographiques, qu'il importe d'établir lorsque l'on veut étu- dier la faune d'un pays. C’est qu’en effet les éléments de toute faune varient en général non seulement suivant la latitude du lieu, mais plus encore suivant leur répartition en alti- tude. Si telle espèce peut vivre depuis les plaines basses et les vallées jusqu'aux sommités des montagnes, il en est d'autres qui ont dù localiser leur habitat dans des régions don- nées, les unes préférant les basses altitudes, les autres se DU BASSIN DU RIIONE 7! (2 14 plaisant au contraire dans les régions froides des sites alpestres. | Dans la partie centrale du bassin du Rhône, les variations dans la faune dues à la différence de latitude ou de longitude des points extrèmes ne sont pas considérables, par suite des limites que nous nous sommes imposées. Nous ne parlons pas ici, bien entendu, des espèces normalement méridionales, par exemple, qui par l'effet de causes que nous aurons à apprécier plus loin sont venues faire accidentellement souche dans nos pays. Il ne s'agit pour le moment que des espèces à habitat normal, régulier, constant. Or les différences climatériques à altitudes égales sont évidemment à peu près similaires dans le département du Rhône et tous Les départements limitrophes. L'étude de la végétation nous le prouve, et nous savons notamment qu'il faut descendre au delà de Valence pour retrouver dans la vallée du Rhône une faune réellement différente dans ses caractères généraux, de celle qui vit dans nos régions; ce quise passe pour le monde bota- nique a également lieu chez les mollusques, et nous ne croyons pas qu'il soit réellement possible d'établir une dif- férenciation générale dans la faune de nos pays, si l’on veut se baser uniquement sur les différences géographiques altitudes similaires. à Si nous examinons la situation géographique de la partie centrale du bassin du Rhône par rapport au reste de Ja France, nous voyons de suite que cette contrée est en quel- que sorte un centre géographique servant de trait d'union entre le Nord et le Sud. Chacune de ces régions ayant sa faune propre, Lyon et ses environs devront participer de ces deux faunes. Par la vallée du Rhône, notre région communi- quera directement avec la faune méridionale et méditerra- néenne, tandis que par la vallée de la Saône et les canaux qui y aboutissent elle se reliera avec la faune septentrionale. VAR MAD CT ITS 5 D8 VARIATIONS MALACOLOGIQUES De là sans doute cette richesse et cette variété que l’on re- trouve d'une facon si marquée dans les différentes branches de l’histoire naturelle. Or que doit il arriver lorsque les éléments de ces faunes différentes seront amenés dans nos régions? quelques-uns sans doute pourront s’acclimater et faire souche tout en res- tant dans le nouveau milieu où ils ont éte entrainés ; mais le plus souvent, les formes appartenant à la faune septentrio- nale tendront à remonter vers les hauteurs pour retrouver avec une différence d'altitude des milieux semblables à ceux qu'ils ont perdus par leur changement de latitude. Au con- traire, les espèces méridionales resteront dans les vallées, recherchant de préférence les parties chaudes et basses qui leur rappelleront le pays qu’elles ont quitté. De cette facon les mollusque provenant d'origines différentes finiront peut-être par retrouver des ‘conditions climatériques sinon identiques, du moins similaires à celles de leur habitat pri- mitif. C'est par ces considérations que peut s'expliquer dans nos régions la présence, ou mieux, la réunion sur une même liste d'espèces qui, dans d'autres pays, vivent dans des conditions toutes différentes. Si au contraire nous comparons les faunes malacologiques appartenant à des altitudes différentes, nous observerons sou- vent, même dans un aréa géographique restreint, des diffe- rences considérables et en quelque sorte proportionnelles aux différences de cotes d'altitude. C’est qu'en effet, nous passons ici, avec un changement d'altitude, à des conditions biologiques bien plus différentes qu'avec le changement de latitude ou de longitude le plus grand possible dans les li- mites de nos régions. Quelques centaines de mètres suff- sent pour nous transporter du régime chaud ou tempéré de nos vallées aux rigueurs climatériques des sommets alpestres. S'il est bien reconnu aujourd'hui que dans nos pays, au delà DU BASSIN DU RHONE 59 de 2,500 à 2,809 mètres d'altitude, la vie n’est plus possible pour les mollusques, il est du moins entre ces points extrêmes des phases intermédiaires. Et en effet, si la faune est riche et variée dans certaines parties de la région des plaines, elle devient de plus en plus rare à mesure que l’on s'élève dans les régions montagneuses, pour s’éteindre et disparaitre tout à fait, lorsque l’on arrive à la limite inférieure des neiges éternelles. Quant on s'éloigne du centre le plus favorable aux bonnes conditions vitales des êtres, là où tout concourt à la fois pour leur développement comme pour leur prospé- rité, ces conditions se modifient en même temps que les milieux viennent à changer; avec l'élévation en altitude, la température devient plus froide, la végétation plus pauvre, l'air plus rare, toutes causes nécessaires aussi bien à la vitalité des mollusques qu'à celle de tous les autres êtres de l'échelle zoologique. Ilne faudrait pas croire cependant que la limite de la vi- talité des êtres, basée sur l’altitude, est absolument la même pour tout le globe. Cette limite, bien au contraire, varie suivant les pays. Si dans les Alpes toute faune semble dispa- raitre entre 2,900 et 2,800 mètres, nous voyons, dans les Pyrénées, l'Helix carascalensis persister au Pic du Midi, à 2,877 mètres, tandis qu'au Pérou, M. Morelet cite vinet-six espèces de mollusques entre2,500 et 3,000 métres;d'Orbigny prétend même que les Bulimus culminensis et B. nivalis vi- vent jusqu'à 5,000 mètres d'altitude ! Comme on le voit par ces exemples, pour assigner une limite à la vie organique d’après l’altitude, ilimporte de tenir compte dela situation géographique du lieu. Notre région, telle que nous l'avons envisagée, se prête plus que bien d’autres à l’étude de ce genre de dispersion. C'est qu’en effet, en allant de la vallée du Rhône aux sommets al- pestres, nous passons sur uneétendus de 109 à 150 kilomè - 60 VARIATIONS MALACOLOGIQUES tres, d'une altitude de 160 mètres à une altitude de 4,800 mètres. Or il est bien certain, et nous allons le voir plus loin, que toutes nos espèces malacologiques ne sont pas uni- formément dispersées sur cette partie du versant des Alpes. IL importera donc de nous rendre compte de ce mode de dis- persion de nos coquilles, suivant les différences d’altitudes. Aux environs de Lyon, comme l’a si bien fait observer no - tre ami, M. le docteur Magnin (1), les variations altitudina- les se font sentir dans des limites si étroites qu’elles ne dé- terminent quede légères modifications aussi bien dans la flore que dans la faune malacologiques. « Si, partant des bords du Rhône, dit cet auteur, dont la cote à Lyon est à 160 mè- tres, nous nous élevons successivement, nous rencontrons d'abord les collines du Bas-Dauphiné dont l'altitude moyen - ne e:t de 300 mètres etenfin le Mont-d'Or, dont les plus hauts sommets dépassent à peine 620 mètres. Il faut sortir de nos limites pour rencontrer dans les monts du Lyonnais une zone se maintenant entre 800 et 900 mètres, n’atteignant 1,000 mètres qu'au mont Roucivre, au-dessus de Tarare. » Et ce - pendant dans de pareilles limites, on trouve déjà des diffé- rences dans la faune malacologique; si nous voyons sur les sommets du Mont-d'Or, la plupart des mèmes formes qui vi- ventau pied de ce massif, elles y sont à un degré de fréquence ou ile rareté tout différent; en outre, étant donnée une même espèce, susceptible d’affecter différentes formes cons- tiltuant des variétés, nous pouvons, dans un rayon aussi res- treint, observer déjà des différences sur la manière d'être de cette espèce, suivant l'altitude où on l’observe. Mais si, étendant nos observations, nous embrassons l'en - semble de la partie centrale du bassin du Rhône, nous cons- laterons des différences bien plus sensibles dans le m ode de (1) A. Magnin, 1879, Recherches sur La géographie botanique du Lyonnais, fase. E,:p.23. DU BASSIN DU RHONE 6 répartilion de la faune. Au point de vue orographique géné- al, nous observerons une similitude dans la répartition de Ja faune malacologique des plaines basses, des bas plateaux et des vallées ; les grandes vallées du Rhône, de la Saône, de l’Ain, de l'Isère et de leurs affluents non torrentiels, les pla- teaux de la Bresse et du Dauphiné, les rivages oules bords des lacs de Genève, du Bourget, etc., auront une faune sinon ab- solument identique, du moins parfaitement comparable, En nous élevant à une plus grande altitude, dans les montagnes du Lyonnais, du Beaujolais, du massif du Pilat, et, de l'autre côté de la vallée du Rhône et de la Saône, le long des contre- forts des Alpes, depuis le Jura jusque dans le Bas-Dauphiné, nous rencontrons une faune affectant un faciès différent de la faune précédente, ayant non seulement des variétés distine- tes, mais encore des espèces propres qui ne descendent pas au delà de certaines limites altitudinales. Enfin, dans les hautes régions alpestres, jusqu'aux dernières limites où la vie zoologique est possible, on constatera l'existence d'une troisième faune plus différente encore de la première, ct toujours distincte de la seconde. Au point de vue plus spécial qui nous occupe, c’est-à-dire au point de vue des variations malacologiques, ces localisa - tions alütudinales de plusieurs formes, espèces ou variétés, sont de la plus grande importance, car si plus tard, nous éta- blissons qu'à un moment donné, certains mollusques avec leur manière d'être propre à telle ou telle zone, peuvent se déplacer et vivre dans des conditions d'altitude nouvelles, il importera de voir si en se déplacant, leurs formes n’ont point subi de modifications. Enfin, si nous voulons comparer, par exemple, la faune quaternaire contemporaine de l'extension des glaciers des Alpes à la faune actuelle, c'est évidemment dans la zone la plus élevée que nous devrons chercher les es- pèces qui vivent actuellement dans les conditions les plus 62 VARIATIONS MALACOLOGIQUES similaires à celles qui existaient lors de la formation de ces dépôts géologiques. Plusieurs modes de divisions ont été proposés pour la ré- partition des mollusques suivant laltitude. Presque tous sont basés sur les données de la végétation locale. Nous ad- mettrons pour notre région trois zones seulement ayant leur faune propre et spéciale : 1° Faune des plaines basses et des vallées. — Nous com- prenons dans ce premier groupe la faune de toute la région ne dépassant pas une altitude de 500 mètres. Les vallées basses ont en général une allitude variant entre 160 et 500 mètres ; leur température moyenne s'écarte peu de 12°,5; elles encadrent des plaines et des plateaux dont l'altitude ne dépasse pas 500 mètres. Sur ces plateaux la température moyenné peut s’abaisser de trois degrés. Rapportée au règne végétal, c’est la zone de la vigne et du châtaignier. 2° Faune subalpestre. — Cette seconde division réunira les espèces vivant entre 590 et 1000 mètres d'altitude ; c’est la zone des chaines secondaires des montagnes du Lyonnais et du Beaujolais, des contreforts du Pilat et de toute la chaine subalpestre. Ici, la température dans les régions les plus basses, ne dépasse pas une moyenne de 9°. Pour les bota- nistes, c’est la zone des pins et des forêts. 3° Faune alpeslre. — Enfin, toute faune vivant à une altitude supérieure à 1000 mètres constituera ce que nus avons désigné sous le nom de faune alpestre. C'est là succes sivement la zone des hètres, des sapins, des rhododendrons et enfin des hautes prairies qui S'observent entre 1.890 ct 2,000 mètres. Au delà de ces limites la végétation devient de plus en plus pauvre à mesure que l'on se rapproche de la limite des neiges éternelles. Pareilles divisions n'ont rien d'absolu ; on comprend en effet que dans une vallée profonde orientée de l'est à l'ouest DU BASSIN DU R{HONE 63 les mollusques qui vivront sur la pente exposée au nord n'at- teindront pas les mêmes limites que sur la pente qui recoit directement les rayons solaires ; ces divisions sont nécessaire - ment subordonnées à l'orientation du lieu, de telle sorte que tel mollusque qui, par exemple, ne dépasse pas 450 mètres d'altitude dans une station donnée, pourra s'élever jusqu'à 500 et même 550 mètres dans une autre station où les con- ditions propres à son développement seront plus favorables. Dans le tableau suivant, nous indiquerons le mode de ré- parlilion des differentes espèces de notre faune d’après ces trois Zones, en spécifiant le degré de rareté ou de fréquence, moyen propre à chacune de ces espèces (1). RÉPARTITION DE LA FAUNE MALACOLOGIQUE DE LA PARTIE CENTRALE DU BASSIN DU RIONE SUIVANT L'ALTITUDE FAUNE DES PLAINES] FAUNE FAUNE DÉSIGNATION DES ESPÈCES Late BASSESET |. a e SUBALPESTR,| ALPESTRE DES VALLÉES Aion empiricorum, Ferussac. à". ce € ac RE Ro NÉS TOME NL » ar r LU OS NIUE ME PTE NC NA » ar Tr — LL CONMPESUTIS, JMADIIIC EN » ar » — subfuscus, Draparnaud, . . ac c r — melanocephalus, Faure-Biguet. . » 7 ar ON AOMIOENSIS LEETUSSAC NE UN Ne cc C ar — Lupuyanus, Bourguignat. . . » » ar Geomaiacus Bouryuignati, J. Mabille. . » 7 » Limas ogrestissLinné un, te à» cc Ce » — sylcaticus, Draparnaud. . . . » ac ar (1) S'gnes conventionnels : ce, très commun : —e, commun; ac, a3SeZ COMMUN ; — 47, ASSCZ rare; 7, rare; — 97, Lrès-rare, 64 VARIATIONS MALACOLOGIQUES 2 FAUNE DES PLAINES! FAUNE FAUNE DÉSIGNATION DES ESPÈCES NÉcR neo 7 [SUBALPEST. | ALPESTRE DES VALLÉES Limax erythrus, Bourguignat.. . . . » » r — cinereo-niger, Wolf. . . . . » ac ar — helveticus, Bourguignat. en » r 2 — CINCTEUS, IISIET CN CO C ac 4 — eubalius, Bourguignat. . . . » » CE — variegatus, Draparnaud. . . . ac ï D — MW GIpinUS AFErUSSAC. UN EE » 2 » Krynickillus bruneus, Draparnaud. . . » ar La Milax marginatus, Müller. . . ,. ,. . ar 2 ? — gagates, Draparnaud. - . . . ar » 2 Testacella haliotidea, Draparnaud. . . ar tr » Vitrina pellucida, Müller. … . . : . ac (e ar — major, Ferussac père. . , . . » c Ro 2 ARNUIUTIS USIUTEr M ar ar — diaphana, Draparnaud. . . . » DAS, ChAPDENTIEr PNR » » SUCCiNEQ pUtrIS, LINE RENE cc ar Le — Charpentieri, Dum. et Mort. . ac » » — Mortilleti, Eourguignat. . . . ar » ». — Pfeifferi, Rossmassler. . . . c ar rr OI CIE TANS RISSD. 2.0 ON 2 DATE vr » » — acrambleia, Mabille. . , , . ar D ai — Fagotiana, Bourguignat, . . . te » » — oblonga, Draparnaud. . . . . ar ar tp — arenaria, Bouchard-Chantereaux. r 7 rr — ‘hunulis, Drouëts : 5,2. v » » Hyalinia lucida, Draparnaud. . . . . ac îP » — Septentrionalis, Bourguignat. . 7 ar ar — Blauneri, Shuttleworth. . . . r r » ocean, Müller our Cr ar ar r UN pilatica, Bourguignat.. 0. 0% Fe » » IC DR OMS UT RO » ar “ OUR OT et LS ES ONE vr » » rule, Miler. LL 1e » r » nn TER NNIICAUT Ed TS ac ac te DU BASSIN DU RHONE 65 FAUNE DES PLAINES] FAUNE HSSE ere ES ESPÈCES DÉSIGNATION DES ESPECE BASSESET |SUBALFEST. ALPESTRE DES VALLÉES Hyalinia subnitens, Bourguignat. . . . » y » — Dutaillyana, J, Mabille . . . T r » MN AUAG, MIE ES 7e e ac » — nitidosa, Ferussac., . 5, 0 ar v » — nitidula, Draparnaud. . . . . ar ar r TO UICIUIGN AITEr Re » ar ac — Petronella, Charpentier. . . . » 5 r — viridula, Menke. . . . . . » » r — Dumontiana, Bourguignat. , . » r r — hydatina, Rossmassler (( DESRRS » Me » — pseudohydatina, Bourguignat. . Fr r » — crystallina, Müller. . . . . ac ac ar DC NOD OT Mie eee cel Y 5 » — subterranea, Bourguignat, . . » 7 D — contracta, Westerlund. ,. . . vr » » — subrimata, Reinhardt. . . . v » » mr 0 diophane; Siider EE 0). c e ac D LICE MUIIer 0 0. SA ar ar Fe Helig rotundata, Müller. . . - . : c ce ar — Wruderata, SUHEr. 1.1, 2 » r r PU DESUNISS SU CC NUS ac ar r DUO, ADTAPANMAUT CU r » » — COUCOU, MNUIIET. MONTE ar r » —? Vobrolute Müller. 500, ar c ac — holoserica, Studer. . | .”. » vr vr —MpersonaiatEamarck à: Le vr ac ac N cpulchella Müller, 0e, LS c ar ar COS UT MU IEEE TE ac ac ar —— sn bidens, Chemmilz.. 0 NE, » Fr » — villosa, Studer... . . SAS » 2 ac — _ phorochætia, Bourguignat. . . » ac (1) Nous rapportons autant que possible à leur altitude probable, les espèces trouvées mortes dans les alluvions. 66 VARIATIONS MALACOLOGIQUES FAUNE . DES PLAINES] FAUNE HURE à d Hl FQRF DR N DÉSIGNATION L'ES ESPECES lasser ee DES VALLÉES Helix montana, Studer. . + + «+ +. : » 246 ac — submontana, J. Mabille. . . . » Tr » a AO TAGT ES QULUCIRMREENENOEN ve ar » — tylypta, P.Fagotn re pe 1x2 0e ar 179 » CINE DONNE EE » » » —hispnia, Linné. 0 0. LL. . ce C ar — gratianopolitana, Rambur. 5 ‘ » » — depilata, Draparnaud. . . + . » C ac — Bourniana, Bourguignat. . . » » ar — COTES IN AIIEN SR » rr vr — liberta, Westerlund. y » Dr » — Hiebeara, Drapirnaud. 27. 0 0 ac ac » SC ICe DID A DANTAUTSE EE r FF » NN MOMENT ON ce TN M » r ae — cinctella, Draparnaud. + ar » » — ACUNNAIT, IMULIEr, CC ar ar à — Juriniana, Bourguignat . . . » r URSS M CEMENELERANISSO Ne NERO TR » » nn ele INR ac Ne à Fr » D M CUTINUSTONC,-MUIIEr. cc c » —- glabella, Dranarnaud. . ae r are » — lavandulæ, Bourguignat. .… . , r » » — diurna, Bourguiguat. , . . . me » » — Putoniana, J. Mabille . . . Fr » » — nov. form.. ON Cara Ge » » —. fruticum, Müller. °. . . . c ar » — strigella, Draparnaud, . . . . ar Q ac — ralnina, Faure-Biguet, & … .: : » » C — D placiauis; Thomas, SU 2 » » ar — Fontenilli, Michaud. . , . . » ac C SONT, SUUUOL OS » » ar CD IETeRS, SIRET TER » » ar = LODICIUC, LINNÉ-N MU OL, ( ac ar — UPOUSTONUIN LINE NC Tr) ce a2 — Kepellini, Charpentier. . . . ï » » DU BASSIN DU RHONE 67 FAUNE ! DES PLAINES] FAUNE FAUNE DÉSIGNATION DES ESPÈCES PASSES ET | eyBALPEST. | ALPESTRE DES VALLÉES He pisand,; Müller. 00 4 1 4 à Tr » » nr M CTCELONUNUS IUT cc ac fe — .ericetella, Jousseaume. . +. . ar » » — variabilis, Draparnaud. . . ., nr » » = ineGD ONU. + ET Se : vT » » — fasciolata, Poiret. . . . . . (a ac » — gesocribatensis, Bourguignat. . vT » » — heripensis, J. Mabille. . . . . ar nr » —1NCrNSECLA, MICRAUT. 7 ar » » —_ CADENGUO, MONIEU RS ar » » — (HINTENSIS, RAMDUrT. ar v » — costulata, Ziegler. . . . . . r Ga » UT IUIS CUT POINT OS Œ ac ar =" pratiosa;, Siuder. . Li .: 1 vr r » — trochoïdes, Poiret. . . . . . TT » » a CUT ONIUIIer CEA Ce Tr » » — MU RCHMONAUS ALINNE TT cc @ » = ROMtENSIS UNIUNIEPS St 414: C ce » — sylvatica, Draparnaud. , . . . r GE (3 — subaustriara, Bourguignat. . . T mr » AUTOS, CNRS ONE LED A " » » US ETS CENTER ER ce ac » VON OINNE NE ee - CC ar » Bulimus montanus, Draparnand, . . . vr ac ar —OUSCURUS NIUE EN NU, ac ar r = Ldetritus, Aer. | . : , ac Ce r Chondrus tridens, Muller. .… + . 1, ace ar rr CUITS NUIT EN ar r Tr Ferussaciu subcylindrica, Linné. . . . ac ar r — collina, Drovët. . . . . . ar r » — Locardi, Bourguignat. . . . . vr » » Cæcilianella aci-ula, Müller. . , . . ac cr » — Liesvillei, Bourguignat. . . .| » » — uniplicatr, Bourguignat, . . . 7 » » Clausilia Montyermonti, Bourguignat. . » r » 68 VARIATIONS MALACOLOGIQUES FAUNE DES PLAINES] FAUNE FAUNE DÉSIGNATION DES ESPÈCES BA SR ET RE STAR DES VALLÉES ÿ Clausilia silanica, Bourguignat. . . . » fe » — laminata, Montagu. . . . . ac @ ar — fimbriata, ZLiegler. … . . . » ar ar, — punclata, Michaud. . . . . 1ù » 2 — ventricosa, Draparnaud. . . . » ar ar — micropleuros, Bourguignat . . » r 2 — earina,Bourguignat. . . . . r ar » — carthusiana, Bourguignat. . . » r » = Rolphu; Leachio 00, ac ar ct — sabaudina, Bourguignat. . , . r » À — ÿ Uineolata, Hell. 0e nn ac ar À — mucida, Ziegler. . .. . . . Tr r 273 — plicatula, Draparnaud, . . . » ar Le —. ylora, Bourguignat. . , . . » » 4 — dubia; Draparnaud. . . . . . ar ar » — Dupuyana, Bourguignat. . . . » » ar — " gallica, \Bouretienat ME ar ac 1 — ‘Reboudi; Dupuy. : : : 2, ar » D nn CCTUCIQI: SIUdET EE AC OUR ES r » » — Micratracta, Bourguignat, , . » ar ar — Migricans, Pultney. . . . . ar 1 à — Nanñluacina, Bourguignat.. . . & r S + ICreRUlAIGSRiss0 LE CN LS » » r — belonidea, Bourguignat. : » 7 » — dilophila, Bourguignat. . . . vr » » OU Do nuIGeSlutérs EN PRRE ce e ar Te - Corynôdes, UHelda." + r r Tr — Tettelbachiana, Rossmassler. . ns - ; Balia perversa, Linné. NE UrAN ac » » — Deshayesiana, Bourguignat. . . " r » Pupa quinquedentata, Born. MES rr » » — megacheilos, Cristofori et Jan. . | yr » » — bigorriensis, Charpentier. , . » » vr — avenacea, Bruguière. ae, ar ac 5 — Farinesi, des Moulins. . . . ñ ar » DU BASSIN DU RHONE 69 FANE DES PLAINES FAUNE FAUNE à si \ ES : EC DÉSIGNATION DES ESPÈCES Dao A CN EN RE DES VALLÉES TS Pupa hordeum, Studer. . + + + + : F » » — frumentum, Draparnaud: . . c " » — ,secale, Draparnaud. . + +: :. ar fi vr — granum, Draparnaud. . + + : ar » » — polyodon, Draparnaud. . +. . r » » — maultidentata, Olivi. + . . . ar » » — biplicata, Michaud. . + + : La » » doi, DrApATRAUT EN ac fr Fr — dohiolum, Bruguière. . . : . ar rr » — umbilicata, Draparnaud. . . . ac (AA » — Semproni, Charpentier. . . . ar 7 » = USCONUITOALINNE cc ac ) — bigranata, Rossmassler. SAUCES ar » » — triphicata, Studer. +. + . . .. r Fr HAN Vertigo muscorum, Draparraud, . . c » » NOTE, MICHAUC. NU rr » » — edentula, Draparnaud. . . . vr » » MO UINSIANG, DUPUY vr » » — pygmæa, Draparnaud. + . . ac 7 Tr — Shuttleworthiana, Charpentier . r » » — antivertigo, Draparnaud. . . . ac À » — plicata, À. Müller. «+ . . . ar » » — pusilla, Müller. + . - *. . ar » » Carychium minimum, Müller. + . + + ar r » — D 'INITCNIALUN, RISSO. ne ee ac 12 vr Pitrorbisouqus, NUE ME ON ar » » — fontanus, Lightfoot . . . « . ar » » — complanatus, Linné, . . . . ac r » — submarginatus, Cristof. et Jan. . cc » » — CATINALUS NUIeL C » » — dubius, Hartmann. . . . . . v » » — vortex, Linné, . . . + + . ac » » holundains, Pairet, + .!: 22 ‘ae SL » — 0 SDITOTDIS, LUMÉ. 7 … + à, . ar » » — UCYISIOLUS, LINNE UN ar » » 70 VARIATIONS MALACOLOGIQUES FAUN4 : CES PIAINES| FAUNE FAUNE DÉSIGNATION DES ESPÈCES n SUBALPEST.| ALPESTRE DES VALLÉES Planorbis inbricatus, Müller. . . . . ie sm? D — CONtTOrTUS, Linné. . VS LENS ac » ? Matos NALIER. At AS ce 2h Ë % d — Crosscanus, Pourguignat. . . . r » » —_ CONNCUS) LIDNC. ce ce (Q » » Pliysa fontinalis, Ninnésn + ns « 0: ar » » — “Taslei, Bourguignat. + re à è — acuta, Draparnaud. . . . . . ac 2 ? — lypnorum, Linné. . . . . . ar if Limnæa auricularia, Linné. . . . . cc r à OI NAT AR CE ac Le 4 TION INDÉ cc 0 2 — ONINOUSAS LUTTER ar à ae — margina'a, Michaud. . . . . ar ci = rain NUE à 016 © & C r » —"frigidu; Charpentier. 0:70 » 7 Le — corrosa; Dumont et Mortillet, . . » Ë À — intermedia, Ferussac. - … ac » » — truncatula, Müller, . . . . (4 uw r nn CONUUS, GMElN ERP C & 2 = MOGIUSITIS MUNIE, 5 VO OUE CON": ct : — | SCINAUS TAN EL 0.0 0 cc ë — Vurgida, Hartmann". 2 r à à — elophila, Bourguignat.. . . . ar à À — raphidia, Bourguignat. . . . » Fr x NC ras, LINE. 2e. 0 r 2 2 — glabra, Müller... "LU rr » » Ancylus simplex, Buc'Hoz. . . . , . ac » » — niparius, Desmarest. au ac » à En CAPUIOUIES STATS AR OU c » » — ÿibbosus, Bourguignat. . , . tr » » = ideusUns DIne le UD ER ar rr » Cyclostoma elegans, Müiler. ‘ : cc ar » — lutetianum, Bourguignat. . . . Fr » » Pomatirs apricus, Meusson. . . DU BASSIN DU RHONE 71 RE FAUNE DES l'LAINES FAUNE FAUNE DÉSIGNATION DES ESPÈCES F ae BASSES ET | SUBALPEST.| ALPESTRE DES VALLÉES Pomatias sabaudinus, Bourguignat. . » ar » — seplemspirulis, Razoumowski. c ac » Aoine nolia,\l..Pleiler 40. 0 x Fr » » — Dupuyi, laladilhe. . … . . ar ») » — lineata, Draparnaud. . . . ac r » Vivipara communis, Moquin-Tandon. . rr » » — fasciata, Müller. DS CS cc » » Bythinia tentäiculata, Linné. . . . ce r » Amnicola similis, Draparnaud. . . . r » » Paludinella viridis, Poiret. . , . . r » » — brevis, Draparnaud. . . . vr » » NN OEIL MONTRE Vr » » — bulimoidea, Michaud. . . . Y) » » — abbreviata, NIChAUT. SO F » » — tlurriculata, Paladilhe ; vy » » — gupoides, Paladilhe (1). . . ’ \ à LOU NOIR RE EU vr n à Belgrandia vitrea, Draparnaud. . . 7e » . Hydrobiu Charpyi, Paladilhe. . . . Ds 4 » A EMA CUL TP AlaIIRe EE vr » | Lartetia Ciaphanä, Michaud. . . . # \ : Locardiu apocrypha, de Folin. . . . ee ÿ à Moïtessieria nov. form... . « . . Fr 5 $ Valvata contorta, Menke. . . . . ac » » — piscinalis, Müller. . : . . c » » UD US SUR SC Es ar » » —iuipestris, Blaunerit. ar » » — Mminuta, Draparnaud. , . . ri » » NCIS ÉAiG, MU ar » » Neritina fluviatilis, Linné. . , . . ce » » Spliærium rivicola, Leach. . + . ac » » — Rickholtiü, Normand . . , ) » » (1) Très commune à Thoiry, inconnu aileurs, T2 VARIATIONS MALACOLOGIQUES se FAUNE DES PLAINES FAUNE FAUNE DÉSIGNATION DES ESPÈCES BASES ETS SR ERER Es DES VALLÉES PT ne ee te ARE Splærium Terverianum, Dupuy. *« :. Fr » » _— Brochoniinum, Bourguignat. . cc » » — corneum, Linné. « + «+ + va » » — rivale, Draparnaud. « « + © ar » » — nuclieum, SIA ac v » — ovale, Bourguignat. . . . + + rr » » D 'Jacustres Miller. UN Ne ar » ÿ Pisidium pusillum, Gmelin. + , + . ar r » — mnitidum, Jenyns. «+ + + + ar » » — (Gassiesianum, Dupuy 2 10 à r » » _ CASCETIANUM POI. «ac ar » = HINNICUN, MULIer. ac » » — Henslowanum, Sheppard. +. . r » » Unio sinuatus, Lawarck. . . . . . ar » » — rhomboïdeus, Schroter. . . . cc PI » —— subtetragonus, Michaud. . : r » » — Draparnaldi, Deshayes. .: . . r » » — Barraudi, Bonhomme (1). . . ar » » — Phiippi, Dupuy. + . « ar » » MN OETS NIISSON RTC ON T Tr » » — crassus, Philippsson. . . , . ar » » — batavus, Nilsson. . . . . . cc » » — squamosus, de Charpentier. . . rr » » — 0 CIANICUSSIAAMATERS ee vr » » — ANTNUSS LL ANMAICK CNE TS ar » » — amnicus, Ziegler. MTS ATEN ar » » — reniformis, Schmidt. . . . r? » » — Sanderi, Villa. 0 fe » » — corrosus, Nilla. . MR CS PU: » » — subtilis, Drouét. ë Fr » » — elongatulus, Müblfeld. Ka Tr » » — Requieni, Michaud. . . . . ac » » (1) Assez commun dans Île Menthon, inconnu ailleurs; il en est de même pour Lx plupart des formes suivantes. “ DU BASSIN DU RHONE 75 FAUNE « ; DES PLAINES| FAUNE FAUNE DÉSIGNATION DES ESPECES A BASSES ET | SUBALPEST. | ALPESTRE DESVALLÉES ne tune Uni PR OUSSADUDUT RC CO NC vr » » AT ON PANTAUTEAU NN ce » » — : platyrhynchoideus, Dupuy. . . vr » » — pictorum,Linné. . . . . . Tr » » TRIAL PDIIDDSSON EEE Fr » » Margaritana margaritifer«, Hinné tune r Fr » Pseudanodonta nov. form.. . . . . r » ) Anodonta eucypha, Bourguignat. . . . r » » — acyrta, Bourguignat. . . . . F » » = cygne, LANDE NO 7. 0: « cc » » — Locardi, Bourguignat. . . ‘© . ar » » — Forchammeri, Môrch. . . . ar » » — OCNATIT (SCNNOTER- 2 CN CN ac » » — L'yonderosa, PIEITET EN UNS OT v » » — Dupuyi, Ray et Drouët. . . . ar » » — tumida, Bourguignat. . . . . F » » — Rossmäüssleriana, Dupuy. . , ar » » — oblonga, Millet... . . . . :. r » » = GTA OO ONE NN à » » — Malletrs Rayset/DrOUéL r » » 0 DISCULOITS INIISSOD STE NUS ac » » — Servaini, Bourguignat. . . . . fe » » — illuviosa, Bourguignat. . , . av » » — GROTTES EC EN e » » — niycteriana, Bourguignat. . . . r | ) » — parvulu, DROLE ME UE nr 1 » » — alpestris, Charpentier. … .… : . JF » » Dreissena polymorpha, Pallas. . , . CC » » De pareilles données, il est facile de le comprendre, n’ont rien d'absolu. Ce ne sont que des indications générales pro- tant sur un ensemble de faits, et représentant la moyenne VAR. MAL. T, II. 6 74 VARIATIONS MALACOLOGIQUES d'un grand nombre d'observations. Il arrive souvent en effet que telle espèce peut être très commune en un point donné, pour devenir très rare sur tout aulre point dans la même zone d'altitude. De même, ilest des coquilles comme les Succinea Fagotiana, Paludinella pupoides, Unio Barraudi, Unio ater, etc., qui sont plus ou moins communes dans une station, tandis qu’elles n’ont jamais été trouvées ailleurs ; c’est là le propre des colonies qui vivent cantonnées sur un point donné sans se disperser au loin. Quoi qu'il en soit, on peut retirer de l'examen de ce tableau certaines observations qu'il importe de relever. Si nous faisons le total de la faune de chaque zone, en te- nant compte de la faune aquatique, nous arriverons aux ré- sultats suivants : MOLLUSQUES TERRESTRES AQUATIQUES TOTAL Faune des plaines basses et des vallées. . . 155 126 281 FaUnerSUDAlDeS TE CEE 139 19 158 Faune AIDESTE CE TT Re 85 2 87 Faune commune aux deux zones inférieures . 97 17 DAME Faune commune aux deux zones supérieures. 70 1 71 Faune commune aux trois zones. . . . 46 1 47 Nous voyons d'abord, d’une manière générale, que la faune totale, terrestre et aquatique décroit en proportion de l’alti- tude. On comprend en effet qu'à mesure que l'altitude aug mente, les conditions biologiques deviennent de plus en plus difficiles aussi bien pour les végétaux que pour les animaux, et que dès lors, il est tout naturel de voir le maximum de la faune concentré là où les conditions vitales sont les plus favorables au développement des êtres. Mais en même temps, comme nous le verrons plus loin, à mesure que l'altitude augmente, les colonies des régions hautes, tout en étant aussi riches, tout en renfermant le même nombre d'individus que celles des régions basses, sont beaucoup plus DU BASSIN DU RHONE 75 dispersées el éloignées les unes des autres, de telle sorte qu’en définitive, et toutes proportions gardées, on peut affir- mer que le nombre des espèces comme celui des individus décroit à mesure que l'altitude augmente. La composition de la faune de chaque zone varie dans des proportions analogues ; nous voyons que le nombre des es- pèces aquatiques décroit avec l'altitude. C’est qu'en effet, dans la zone des plaines basses et des vallées figurent nos grands cours d'eaux, fleuves et rivières, les plus grands lacs, etun nombre ensidérable de petits ruisselets, de mares et de marais richement peuplés de mollusques ; chacun de ces élé- ments apporte son contigent à la faune locale; tandis que dans les zones supérieures , sinous trouvons encore des lacs, des étangs, des sources et mème quelques ruisseaux, eur nombre est beaucoup moindre, et leur faune par suite même de lalti- tude est notablement moins riche que celle des régions basses. D'autre part, si le nombre des espèces aquatiques diminue avec l'altitude, celui des mollusques nus ou partiellement nus parait au contraire s’accroitre. C’est ainsi que nous voyons les Arions, les Limaces, les Vitrines vivre plus facilement, plus communément à des altitudes élevées. Ce fait, très re- marquable et qui peut paraitre anormal au premier abord, recevra plus loin son explication. On a pu voir enfin dans ce tableau que si quelques espèces en nombre restreint vivent à toutes les altitudes, la plupart sont au contraire cantonnées dans des limites plus étroites ; en même temps il existe des espèces propres à chaque zone et qui ne passent pas dans les zones voisines. Il importe de relever ces listes, qui nous donneront la faune propre ou caractéristique de chaque zone. VARIATIONS MALACOLOGIQUES 1° LISTE DES ESPÈCES SPÉCIALES A LA FAUNE DES PLAINES BASSES ET DES VALLÉES Milax gagates. Draparnaud. . . . . . . . ar Succinea Charpentieri, Dumont et Mortllet. . . ac — Mortilleti, Bourguignat.. . . . . . ar =. elelanss RISS0: Le à Le Ce TER — Fagotiana, Bourguignat. ,. . . . . r 1 Aofiinilis DEOUÉER, AAC UPS RS PRIE Hyalinia pilatica, Bourguignat. : . +. == 09, NOV:-form (EUX IYDES). AS RON TT — Contracia, ON ESIeTIUNd. CE TT — subrimnia, ReEMhArAL. EEE NET Heliz pugmæeu, Drpamnaud, 2 PORN PRNT — _ gratianopolitana, Rambur. . . . . . = s cctlelle) Draparnaud MEN ARERCRan — lavandule, Bourgdignatme Cr. = si cémenelen RISSOS PAS NI RE = Tubes RISSO: LME RER E —- Gurne, BourSmienal MESSE ONE — Putoriand, J'Mabille REP ENERT == MOU.JON Ne UN OU RER REET =) “hepellint, (Charpentier RP EE RIEnNT = scpisana; Müller: ep NE TER —" “eéricelella; Jousseaume SON ER =. DATNiAbUtS, DrApAraud ORNE SP TT — Minedia, ON". 2, NON OMR Te — gesocribatensis, Bourguignat. . . . . rr Vi intersecté, Michaud NN —\ Caperala, Montagus 5 SEM ONERENEn = CUUTOChONeS POELE — acuta, Müller. PL LL CS MOI TENUE AR - 7j Ferussacia nov. form. . . . RS OT Cœæcilianella Liesvillei, Bourguignat. . . . . r — Wniplicita, Bourguignat. Clausilia punctata, Michaud. . . DU BASSIN DU RHONE Clausilia sabaudina, Bourguignat. Reboudi, Dupuy. . . CHOLET ET RUE ET dilophin, Bourguignat. . . . Balis perversa, Linné, . . . . Pupa quinquedentata, Born. . . — _—_ a | megacheilos , Cristofori et Jan. hordetmStuders cer, granum, Draparnaud. . polyodo:, Draparnaud. . mullidentita, Olivi. ; bipicata Michaud RMS 0e bigranata, Ro 2 ce Z nSSnarg|n 4 ls? SE e] Æ [ee] << Z D 7 « D = =) = & C Æ =) A Q A = a Arion empiricorum, Fer... , C: » » » » 5 = Giro One ONE AIN » » » » » — albus, NET MS Sue a) )) )) ) » » — campestris,J. Mab. .| &r » » » » 5 = subfuscus, Drap. CO ac » » »» » » — Mmelanocephalus,F.-B.| 4r » » » » ÿ — hortensis, Ferussac. .| ce » » » » » — Dupuyanus, Bourg. .| ac » » » » » Geomalacus Bourguignati,M.| y » » » » » Limax agrestis, Linné. . . | ce ) » ) » ar = Sylvaticus, Drap. . .| «c )) » » » » CPAS Bourse. 2 CN » » » » » — cinereo-niger, Wolf..| «c » » » » ) — helveticus, Bourg. . r » » » » » miCinereus, Laster..: | ac » » » » ar — eubalius, Bourg. . .| ar » » ) » ) — variegatus,Drap.. .| ar » ) ) » ) — alpinus? Ferussac, .| ? » » ) » » Krynichillus bruneus, Drap.| r » » ) ) ) Milax marginatus, Müller. | » » ) ) ) nn —…_JAGOCS, Drap. | 7 » » ) ) ) Testacella haliotidea, Drap. .| ar ) ) ar ) Vitrina pellucida, Müller. .| «ec » » ) ) ar — Major, Ferussac. . ac ) ) ) ) ar — Annularis, Studer. .| ar » » ) ) ) — diaphana, Drap. . «| » » » » ) ) — mnivalis, Charpe 1 » » ) ) » Succinea putris, Linné. . .| € » r ) au — Charpentieri, Dum. .| «ac » » » » » — Mortilleti, Bourg.. .| 7 » » ) ) ) 204 VARIATIONS MALACOLOGIQUES = FAUNE QUATERNAIRE à = | E= ee 2 ë D = n\m ze = ne G A # ug|££S LISTE DES ESPÈCES 4 |z£si#aésl= 2 lSEe223% = = = NI EE Z ARTE = IREE Succinea Pfeifferi, Ross. .| © » » » ac «ce — elegans,Risso.. + .| 77 » ) » na » — acrambleia, Mab.. .| 7 SE » » » » — F'agotiana, Bourg. *+| 7 » » » r » — oblonga;, Draps | "an ec ce r fe C — arenaria, Bouch. . eu » » » » » — Lehumilis, Drouël.… ( 1 » » » » » Hyalinia lucida, Drap. ac » » F r 2e — septentrionalis, B. ar » » » JE » = Plaunerr, Shui 7 » » » » ar — cellaria, Müller. . ac » » » » ar — pilatica, Bourg. . AT » » » » » — glabra, Studer. . ar » » » » 2 — nov. form. . + à » » » » DS Gare NEEDS r » » » » » — nitens, Michaud. . ar » » » er » — | subnitens, Bourg. » -|ur ) » NL TL < —= Dutaillyana, . Mab.. fe » » » S à == nitida, Müller... . ac ) )) ») “Le ac — outidosa, Ferussac. .| ar » » » r » | ar — nitidula, Drap. . ar » » » » ar — radiatula, Alder. . ar » » » » r — Petronella, Charp. r » » » » » — viridula, Menke: © GE » » » » » — Dumontiana, Bourg. v » » » » 5) — hydatina, Rossm.. . T » » » \ » — pseudohydatina, D. | sr » » » rT » — crystallina, Müller. .| «ec » » j 4e ac O0 ICRA © Le nr » » » » » — sublerranea, Bourg. .| # » S s < — contracta, Westerl. Vr » » 5 S | == subrimata, Reinh. 0 » S F : S — diaphana, Siuder. ac » S ; « _. — . fulva, Müller, . . ac » » S Fr mr Helix rotundata, Müller. . c » ar ar Un ne DU BASSIN DU RIICNE 205 5 es FAUNE QUATERNAIRE | 5 (Le ee EE Nr) e NOPMIÈEE LISTE DES ESPÈCES EEE SE EN _ RCA MN PE DEA ENT E SAET = 1 RS PEER NREEAESE LS AEe re) 5 = À e > < un eV = = à a = à Helix ruderata, Studer.. .| ar » » » » r = rupestris, Studer, al ac » » » » ar DU OIMET DTA 7 » » » » » — aculeata, Müller. . .| 4r » » » » y — obvoluta, Müller. . .| 4e » » ar r ce — oloserica, Studer. .| » » » » » —— personala, Lamarck. . ar » » ») » ” » — pulchella, Müller... .| © » ar ar ar ac COS NIUE I 7 » » FF ÎE ar — bidens;Chemnitz. . .| y» » » » » mn — villosa, Studer. . .| ar » » » » ac — phorochætia, Bourg. | r » » » » » — montana, Studer . .| ac » » » » ar — submontana, Mab. .| yr » » SL » » — circinnata, Studer. .| ar » » » » ar — glypta, P. Fagot. . .| ar » » » r r — clandestina, Born. | # » » » » » —. hispida, Linné. , .| ce ac ar ac ac c — gratianopolitana, R.| + » » » » » — lepilata Drap... |" Gr » » » DR r — Bourniana, Bourg. .| # » » » » » — cobresina, v. Alten. | y » » » » 7 — liberta, Westerl. . vr » » » )) » — plebeia, Drap. . . .| ac » » » ar PE — SENICEG, Drap... | » » » » FL — cihiata, Venetz.. . | rr » » » » » mHOcinE/elQ Draps UT. » » » » » — incarnala, Müller. .| «ar » » » ) ar — Juriniana, Bourg. .| r » » » » » — cemencelea, Risso. . .| #r » » » » » = UDELIRS RISSO NC » » » » » — carthusiana, Müller. .| ce y y » vr ac == glabellu, Dre DESRES à Pre » » )» » » — lavandulæ, Bourg. .| y» » » » » » — diurne, Bourg. Co VE )) ») ) » ) 206 VARIATIONS MALACOLOGIQUES LISTE DES ESPÈCES Helix Putoniana, Mab. nov. form. . « fruticum, Müller. . strigella, Drap. alpina,F.-Big.. glacialis, Thomas. . Fontenilli, Michaud. zonata, Studer. fœtens, Studer. lapicida, Linné. arbustorum, Linné. Repellini, Charp. pisana, Müller. ericetorun, Müller. ericetella, Jouss. vartiabilis, Drap. lineata, Olivi. . fasciolata, Poiret. . gesocribatensis, B. heripensis, Mab. intersecta, Michaud. caperata, Montagu. diniensis , Rambur. costulata, Ziegler. unifasciata, Poiret. gratiosa, Studer. trochoides, Poiret. . acuta, Müller. nemoralis, Linné. hortensis, Müller. . sylvatica, Drap. subaustriaca, Bourg. muralis, Müller. aspersa, Müller. pomatia, Linné. . ACTUELLE FAUNE { LENM DU MONT-D'OR | FAUNE QUATERNAIRE EE sel an 2 À = AN £ un Li à 2ESS|ESlSEz Cle > A A ES YU SNA A A A » » » » » ») » ac ar » ar ar » » ) » ») » ) )) » » ») » » » ) 1 » cc Ÿ ar » » » » >) » 1e » ar » » Vu ») » » ») » » » ar ar » » » » » EE » » ») ac v ar » » » » " » ») » ar » ») » » )) » )) » » »)) 74 «ac » (8 ar » » ec )) » » » » » )) ») » )) )) ? FAUNE QUATI RNAIRE x h 5 ar «C ÉTRANGÈRE x DU BASSIN DU RHONE 207 = FAUNE QUATERNAIRE x = eh ge = Een e Lee se LISTE /DES'ESPÈCES < SES zEd = £ SRE (2) memes als Ve S'EURS = 7 SO NEO NON MEN SE = PR = & | << va Cia ne | "à Bulimus montanus, Drap. .| ar » » 7 Le) ar — ‘ obscurus, Müller, . .| ac » » NN OT ar —. detritus, Müller. . .| ac » 7 a » 1P Chondrus tridens, Müller.. .| ac r ar ar ar ar — quadridens, Müller. .| ar » » É » r Ferussacia subcylindrica, L..| ac » T ar | ac (AS CC COUTA, DTOUEt NT » US) ar De — Locardi, Bourg. | 0 rr ) » » )) ) Cæcilianella acicula, Müller. .| ac » RU IRSE , r = Lesbien boure. 0.7 » ) D RE » = uniplicaia, Bourg. | 7 » » » ) » Clausilia Montgermonti, B. | rr » » » » » SLUNICU, BOUTE- 07 » » » » » — laminata, Montagu. .| ac » ) » an ar — fimbriata, ZLiegler. | ar » OA NS 10e HS » — punctata, Michaud. .| + » » S til ) —_ 'ÉCIUTAICOSG, Drap. » » » » ar — micropleuros, Bourg.| r » » » » » CADET » » » » » — carthusiana, Bourg. .| » » » » » — Rolphü, Leach. + .| “ar » » 5 » r — sabaudina, Bourg. .| + » » » » » — lincolata, Held, . . ar » » » » » D NUCIUT, ZIeLlen nr » » » ) » — plicatula, Drap. . .| ar » » ) ) ay — ylora, Bourg. . . | r » » SE NES: » 0 TuUDia, Drap". "| 07 » » » | » r — Dupuyana, Bourg. .| +» » » » » » — gallica, Bourg.. . .| ar » SATA IS ES » » —" Reboudi; Dupuy. + .| + » » » » » —_CTUCiUlT, SUUTET. | 7 » » » » » == micratracta, Bourg. .| + » » » » » — nigricans,Pultney. .! ac » » » » » — nantuacina, Bourg. .| +» » ) A QE » — crenulat«, RISS0. . |) rx )) » | ) » | ) 208 VARIATIONS MALACOLOGIQUES bd ” = FAUNE QUATERNAIRE EL —— SNS AUS Eu de LISTE DES ESPÈCES A se Se Me INMENIRERE 2,225 SNS Clausilia belonidea, Bourg. r » » » » — dilophila, Bourg. . .| r » » » » — parvula, Studer. «+ .| © ae ar ar ar —, corynodes, Held. «+ .| r » » » » — T'ettelbachiana, R. | 7» » » » » Balia perversa, Linné. Are » » » » — Deshayesiana, Bourg | 7 » D) » Pupa quinquedentata, Born.| rr » » » » — megacheilos, Cris .| rr » D'UN » — bigorriensis, Charp. pr » DE | RE) » LEA CET DURS Ne) | TTC » » » » — Farinesi, des Moul. .| 7 » » » » NOTE SUITE) » AD » — frumentum, Drap. .| ac » sr | » | + — SeCALE ADrADe EN -e ar » » » » gran, DID TION ar » » » » —— polyodon, Drap. + |. ar » » » » — multidentata, Olivi. .| > ) Doha » — biplicata, Michaud. . vr » » » » Do Drap Cle » » » (QE — doom BRUN Er » DO RES » —"umMmUoUIcAta, Drap... |" Te » » » » — Sempron, Charp.. :| r » ER PO » LL muscorum, Linné. .|uc e ar ac ar — bigranatu, Rossm. 2 » » » » — triplicata, Studer.. TE » ren » "E Vertigo muscorum, Drap . ac ) ) » » — inornata, Michaud. .| yr 56 DURS DA ANNE) — edentula, Drap. rer MOI AE DE Ne — Moulinsiana, Dup. rr » D Lt A CE — pygmæa, Drap. . ar » » » | » — Shuttleworthiana,Ch.| #r D AN EN Le | » — antivertigo, Drap. .| ac SE LOU AU D | Y — plicata, À. Müller. .| ar » » | » | » = pusilla, Muller ar » » | » | » FAUNE QUATERNAIRE ÉTRANGÈRE DU BASSIN DU RHONE 209 É FAUNE QUATERNAIRE e | ee LISTE DES ESPÈCES He hs Bees u |SsSS2s|s 2 02° |*36 = LE) Free 00e ES = a a Carychium minimum, Müller.| 4y » » » | pr» r — tridentatum, Risso. .| «ec » » » » "a Planorbis nitidus, Müller. .| a«r » » » Pt rr — fontanus, Lightfoot. - cp » » » j" vr — complanatus,Linné. .| cc » NP ES ac c — submarginatus, Cr. .| © » J » F ac — carinatus, Müller... .| 4&e » » » ar ac — dubius, Hartmann... . T » », » ar » — Lyorfex, Linné. 7. Le | Lac » » » ar ar — rotundatus, Poiret. .| a: » » » ac ar — spirorbis, Linné. . a) » » » » V — cristatus,Linné. . ar » » sn » v — imbricatus, M. , v » » » ? — contortus, Linné. . ac » » » ar ar —_ GiOUS MUIIET c » » » ar ac — Crosseanus, Bourg. rr » T7 » ac » — corneus,Linné.. : c » ) » » ar Physa fontinalis, Linné. . «1 » » » » ar CL SIeL BOUT Le 7°) » » » » » — acut«, Drap. ac » » » » ») — hypnorum, Linné.. ar » ) » ar r Limnæa auricularia, Linné,. ce » ar » ce € = canalis, Villa. Ve ac » » » » » imosdelinnesere ce » » » ar «ae — fontinalis, Studer. . ar » » » » » — margina'a, Mich.. ar » » » » » — peregra, Müller. . C » » » a: » — frigida, Charp. . r » SU EN » » — corrosa, Dum Mor.. pie » OMR TES c » — intermedia, Fer. . ac » » DNAIOIORUT » — truncatula, Müller, c » ar » | ar ( — COTUUS, GMElIN..…. ac DU et UE » — palustris, Müller. . Ce D RUE) » ce ( — stagnalis,Linné. . ar » PTE ci au — turgida, Hartmann. r » » » » » 240 VARIATIONS MALACOLOGIQUES = FAUNE QUATERNAIRE ï AR 0 = = = : F £ C2) = 2 a É z 2 ë LISDE DES ESPECES z CAR ÈS z À BE = see = SR NN La A a = Limnæa elophila, Bourg + .| » » DAMES » — raphidia, Bourg. . .| »r » » » » » — fragilis, Linné. . . v » » ? » » — glabra, Müller. : .| y» » » » » Ancylus simplexæ, Buc'Hoz. .| %e » » » » y — riparius, Desm. + .| «ec » » » » y — \'capuloides, Jan. "| 4e » » » » ? — gibbosus, Bourg. . .| y » » » » » = lues, Jainné | » » » ar » Cyclostoma elegans, Müler. | ar » C r ac — lutetianum, Bourg. .| y » » » » v Pomatias apricus, Mous.. .| «&r » » » » S — sabaudinus, Bourg. | r » » » » DS 2 P SepDieMSDITE lis Re IG » » » » fl Acme polita, L. Pfeiffer. . .| rr » » » » LT —"1'Dupuyr, Paladilhe.". 1er » » » » » RO AD CNE ) » » » » Vivipara communis, Moq. | rr » » » » » — fasciata, Müller. . .| © » » » » r Bythinia tentaculata, Linné..| ce » a » CC GE Amnicola similis, Drap. . | r » » » v 7e Paludinella viridis, Poiret. .| 7 » » » » » DCS DRAP CE ETS » » » » » = Me JO UE Lane » » » » » — bulimoidea, Mich.. .| #rr » » » » » DUREE CC NICE ET » » » » » — jurriculata, Palad. .| 7rr » » » D I) — pupoides, Palad. . | r » » » » » —" MANU NS Mo TRE » » » » » Belgrandia vitrea, Drap... .| 7 » » » » » Hydrobia Charpyi, Palad. .| 7r » » » » » = peracuta, Palad:. 2 |5,77 » » » » » Lartetia ciaphana, Mich. .| r » » » » » Locardia apocrypha, Folin. .| rr » » » » » Moitessieria nov. form. . | rr » » » » » DU BASSIN DU RHONE LISTE DES ESPÈCES Valvata contorta, Menke.. piscinalis, Müller. . obtusa, Studer. « . alpestris, Blauner. . minuta, Drap. . + cristata, Müller. . Neritina fluviatilis, Linné. Sphærium rivicola, Leach. Rickholtü, Norm. . T'erverianum, D. Brochonianum, B. corneum, Linné. . PIVAIC; Drap... nucleum, Studer. . ovale, Bourguignat. lacustre, Müller. . Pisidium pusillum, Gm. . nitidum, Jenyns. . Gassiesianum, Dup. casertanum, Poli.. ammnicum, Müller. . Henslowanum, Sn. Unio sinuatus, Lamarck. . rhomboideus, Sch. subtetragonus, Mich. Draparnaldi, Des. Barraudi, Bonh. . Philippi, Dupuy. . GET ANISSONL EN Se crassus, Philip. . batarus, Nilsson. . squamosus , Charp. mancus, Lamarck.. nanus, Lamarck, . amnicus, Zisgler. . D ” FAUNE ACTUELLI ar L:HM DU MONT-D'OR LYONNAIS FAUNE QUATERNAIRE [ea] TR ri ee cs © > SN arlEese DR EEE KA ES [SES |= Z|- TN A É YU 5 = =) QUES >» À = < & m2 & < e] A = = Es [=] Gif » )) ») » » F » ) » » » v. )) » )) )) » r » ) » ) » Je ») ) » » » ar » » » )) » ar » » » » » 7 ) )) » » » je » ») » )) » 4 » ») ÿ) » » ar » » » » 5° Fr » ») ») » » 72 » » » » »« #jN » ») » » )) îF » » » » » (TC )) )) ») )) à ar » » » » ds ar ) )) ) ) » «ac ) » » » v 7" ) » » )» » ar » » » » » {re » » » » » ar ) » » » ») F )) )) » » » 1 » » » » » Va ») » » » » ac » )) ») » » 24 » ) » | » » (7 » ») )} | » » | (a ») D » » » fe ») » » ») »» [h » » » ») ») 7e )) )) » ) » CC » » » )) » 344 li 22 JD NIUEST 125 DU BASSIN DU RIONE 213 Avant de prétendre tirer des conclusions de Pétude de ce tableau, il importe de faire comprendre la valeur des signes de fréquence que nous avons cru pouvoir admettre ; ces si- gnes n’ont rien d'absolu ; ils donnent simplement une idée relative de l’ensemble des faits observés non sur un point donné, mais bien plutôt sur toute la région. Telle espèce en effet peut-être très commune dans une certaine station et ne se rencontrer nulle part ailleurs; de même telle autre co- quille ne se récolle que par échantillons isolés, mais existe ou à existé dans toute la région. Nos signes s'appliquent donc plutôt au quantum des échantillons par rapport à toute la faune. Il ressort de l'examen de ce tableau que si la faune actuelle comprend trois cent quarante-quatre espèces, la faune qua- ternaire locale n’en a jamais compté jusqu'à présent du moins que quatre-vingt-quatorze. Il y aurait done eu depuis la fin de l’époque quaternaire deux cent cinquante espèces nou- velles introduites dans notre faune. Nous voyons, en outre, que le nombre des espèces actuel- les qui vivaient à l'époque quaternaire a toujours été en croissant ; or, nous savons également d'autre part que le nombre des espèces éteintes, différentes, de celles qui vivent de nos jours, à élé inversement en décroissant à mesure que l’on se rapproche de la période actuelle ; il s'ensuit né- cessairement que depuis le commencement de l'époque qua- ternaire la similitude entre les différentes faunes éteintes et la faune actuelle à toujours été en croissant. Si maintenant, faisant abstraction du petit nombre de formes éteintes spé- ciales, nous cherchons à voir le mouvement progressif des lormes terrestres par rapport aux faunes aquatiques, nous aurons le tableau suivant : DA 1° VARIATIONS MALACOLOGIQUES GASTÉROPODES LAMELLI- FAUNES TERRESTR ES | AQUATIQUES BRANCHES æ {Lehm du Mont-d'Or lyonnais. . . 11 » » ÈS | Lehm du plateau bressan. . . . 1 Ni 5 » a SE £S | Lebm dn/Danphinés ps 2 A 29 » » = PA TG ES AAEUSITES he Dre 4S 20 9 Faune quaternaire étrangère. . . . +. . 80 31 FAUNE ACTUELS ve Moose eine RER RS 315 67 62 Ainsi la faune terrestre et la faune aquatique prises sépa- rément ont toujours été en croissant ; mais en outre, comme nous l'avons annoncé, la faune terrestre s’est développée bien plus rapidement que la faune aquatique; c’est qu'en effet, par suite mème de la nature des phénomènes géologiques qui ont présidé à la faune quaternaire, l’état physique des mi- lieux aquatiques s'est prêté bien plus difficilement au déve- loppement des formes malacologiques que ces milieux terres- tres. Les espèces fossiles les plus anciennes sont, en général, de petite taille, aux formes simples, peu changeantes ; elles répondent à une faune froide; les premières apparues sont peu nombreuses, la faune passe par une sorte de gradua- tion successive et progressive avant d'arriver à son état défi- nilif. Les formes aquatiques qui faisaient défaut au commen- cement de la période quaternaire locale, deviennent plus fréquentes à la fin, mais les grandes espèces aquatiques, les Anodontes et la plupart des Unios font défaut dans nos régions. On comprend, en effet, que les eaux provenant de la fonte des glaciers devaient être trop froides pour recéler ces coquilles, puis ensuite elles ont dû être trop torren- lielles, trop rapides pour permettre le développement des grandes formes. À l'époque des dépôts des argiles lacustres DU BASSIN DU RIONE D] VA des vallées du Rhône et de la Saône, il devait y avoir de nombreux marais où pouvaient vivre sans doute déjà un certain nombre d'espèces aquatiques, mais qui, sans cesse agités parun régime d’eaux dont l'équilibre était souvent rom- pu par de nouvelles fantes de neiges et de glaces, ne pou- vait donner asile aux grands bivalves. Nous observerons plus loin également que dans toute la période quaternaire, auss; bien en France qu'à l'étranger, les grandes espèces ont tou- jours été rares, tandis qu'au contraire elles étaient plus com- munes et méme abondantes lors des dépôts tertiaires. Les éléments de la faune quaternaire ne sont pas restés identiques à eux-mêmes à travers ces modifications clima- tériques. D'une part nous voyons dans notre région plusieurs espèces qui vivaient à cette époque ne plus figurer dans la faune actuelle ; tels sont les Helix neyronensis, H. Locardian«, Linnæa gerlandiana, Planorbis Arcelini, Valvata Arcelini, ete. En même temps, la plupart des espèces communes aux deux faunes anciennes et modernes ont subi des modifications plus ou moins importantes. Nous avons signalé déjà celle de l'Helix arbustorum;nous indiquerons également les Succinea putris var. Falsania, Succinea oblonça var. Ragnebertensis, Helix hispida var. Falsania et var. calcica, Bulimus montanus var. Terverianus, Planorbis rotundatus var. rhodanicus, ete., dont les formes ont disparu avec l'époque quaternaire. Mais en même temps l'étude attentive des espèces persistantes nous à montré certaines modifications de détails insuffisantes pour en faire des variétés, mais qui dénotent indubitable- ment une tendance de transformation dans quelques parties de la coquille. Nous les avons relatées avec tous les détails que peut comporter pareil sujet dans un travail spécial (1); nous nous dispenserons d'y revenir. (1) A. Locard, 1879, Description de La faune mair-oligique des lerrain: quulternaires des environs de Lyon. 216 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Parmi les éléments nouveaux de la faune contemporaine moderne, éléments dontnous ne trouvons aucune trace directe dans la faune quaternaire, figurent un grand nombre d'espèces qui sont aujourd'hui beaucoup plus communes dans d’autres régions. Ainsi, si nous trouvons dans la partie centrale du bassin du Rhône les Helix variabilis, H. pisana, I. trochoides, Pupa megacheilos, P.quinquedentata, ete., 1 faut bien remar- quer que ces mêmes formes n'ont jamais été signalées à l'état fossile, et qu'elles appartiennent plus particulièrement à la partie sud du bassin du Rhône, c’est-à-dire à larégion méditer- ranéenne. En d’autres termes, si nous comparons, d'une part, la faune actuelle lyonnaise avce la faune quaternaire et, d'au- tre part, la faune actuelle méditerranéenne avec des faunes également quaternaires, nous voyons qu'il v a dans le premier rapprochement beaucoup plus de traits communs que dans le second. La faune lyonnaise descend done bien de Ia faune quaternaire de la même région, tandis que la faune mediter- ranéenne présente une bien plus grande différence avec cette faune ancestrale. Quelle serait donc l'origine de cette faune? Quoique ce sujet sorte un peu de notre cadre, nous devons reconnaitre qu'il est probable que cette faune à dû emprunter une parlie de ses éléments à la faune quaternaire alpestre, centre d'origine le plus proche, mais que ces mêmes formes ayant émigré vers un milieu plus différent encore que celui où s'est cantonnée la faune Iyonnaise, les modifications qu'elles onteu à subir ont été plus nombreuses, plus énergi- ques ; elles ont dès lors amené destransformations plus com- plètes et plus profondes dans celle nouvelle faune. Nous venons de dire que toutes les (formes quaternaires étaient simples. Il importe de mieux défiuir notre pensée; lorsqu'un genre est encore peu développé, qu'il ne comprend qu'un pelit nombre d'espèces soit parce que son centre de dispersion n'est pas éteniu, soit parce que ses colonies ne “ DU BASSIN DU RHONE 217 comportent qu'un petit nombre d'individus, ses formes sont simples. Les premières Paludines connues, les plus ancien- nes, tout en étant de taille assez forte, ont les tours arrondis au profil peu compliqué, avec une ornementation peu com- plexe ; plus tard, à l'époque pliocène, ce même genre prend une grande extension. Les espèces se transforment, se mulli- plient et nous trouvons à la place de formes simples, des formes plus où moins complexes, à tours carénés, couverts de cordons, aux galbes plus ou moins étranges; puisle même genre à l’époque quaternaire s’atténue d’une facon considé- rable ; ces formes complexes disparaissent, et la faune euro- péenne ne comporte plus qu’un nombre très restreint d'espe - ces aux formes redevenues simples. A l’époque quaternaire, nous ne voyons aucune faune complexe ; toutes présentent un réel cachet de simplicité ; les Helix nemoralis et H. hortensis n'ont per exemple qu un petit nombre de bandes; nous ne voyons pas encore apparaitre ces ornementations élégantes, ces sous-variétés considéra- bles que nous avons énumérées dans la première partie de cet ouvrage. Presque toujours la mème espèce, quelque nombreux qu’en soient les échantillons, ne comporte qu'un nombre très restreint de variétés. Les Limnées, par exem- ple, sont déjà très communes à l'époque des dépôts des argiles lacustres, et cependant les formes de chaque espèce ont un certain degré de régularité, de fixité, de constance, qu'elles perdront avec l'époque actuelle, En même temps, les grandes formes sont rares; dans nos pays, pas d'Aelix aspersa ni dif. pomalia;; les Succinées, les Clausilies et les Pupas, sont tous de petite taille. Le Planorbis corneus, les grands Limnœæa slagnalis, L. corvus, L. auricularia, le Sphæ- rium rivicola manquent encore à la faune ou sont représen- tés par des individus aux formes exiouës. Mais de ce que les formes d’un groupe spécifique ou géné- VAR. MAL. T, II, F 12 218 VARIATIONS MALACOLOGIQUES rique donné sont plus ou moins complexes, il ne faudrait pas en conclure que le temps pendant lequel ces formes se sont modifiées a été nécessairement plus ou moins long. En un mot, nous ne pensons pas que l’on soit en droit de pré- tendre que telle période géologique riche en formes malaco- logiques très mouvementées ait élé nécessairement d'une du- rée plus longue que telle autre période caractérisée par des formes plus simples. En effet, ces modifications dans l’ornementation, tout en élant bien certainement tributaires de la notion du temps, dépendent, croyons-nous, plus encore de l’état des milieux. Nous savons, en effet, que plusune même forme se multiplie, plus elle tend à donner naissance à des variétés. La multipli- cité de l'individu entrainant nécessairement un déplacement de quelques sujets, ceux-ci peuvent par cela même être sou - mis à des modifications qui ne seraient point survenues avec une faible production dans l'espèce. En outre, les lois de sé - lection ont une action plus puissantelorsqu’elles agissent sur un grand nombre d'êtres procédant d’une mème espèce, mais portant avec eux les caractères propres à l'individualité. Il suffit done qu'un milieu soit propice au développement des individus d'une espèce donnée pour quil en résulte une multiplicité de formes d'autant plus riches et d'autant plus variées, que le temps pendant lequel ces conditions seront restées les mêmes aura été de plas longue durée. En résumé la faune quaternaire de nos pays, tout en étant une faune ancestrale par rapport à la faune actuelle, a eu son Caractère propre, Spécial, particulier, qui re saurait être confondu avec celui de la faune actuelle. Ce caractère diffe- reptiel repose surtout sur la simplicité des formes, sur l'or- nementation, ou le petit nombre des espèces, enfin sur l'ab- sence ou tout au moins le pelit nombre de variétés. Ce que nous venons de dire pour notre région s'applique, du reste, DU BASSIN DU RHONE 219 à tous les autres dépôls quaternaires dont on à pu étudier la faune. Quoique caractérisés par des formes malacologiques différentes, ces dépôts présentent partout le même caraelère transitoire, tout en conservant une analogie plus grande avec la faune locale actuelle qu'avec les autres faunes antérieures déposées soit dans le même pays, soit dans toute autre stalion. Ce même tableau nous à montré que si dans notre faune actuelle, il y avait déjà quatre-vingt-sept espèces qui ont véeu à l’époque quaternaire dans nos pays, il y a en avait en totalité cent vingt-cinq qui existaient dans d’autres régions à des époques diverses. Pour compléter l'histoire généalooi- que de notre faune, nous avons pensé qu'il serait intéressant de chercher l’origine non seulement en France, mais même à l'étranger, de chacune de nos espèces; c’est ce que nous avons essayé de faire dans le tableau suivant. Mellant en œuvre lestravaux de MM.Bell, Bourguignat À. Braun, S. Cles- sin, Mousson, Prestwich, Sandberger, ete., qui se sont occupés de la malacologie fossile, nous avons cherché à suivre d'une manière générale l’histoire de nos coquilles à l’époque ter- tiaire et quaternaire, en Angleterre, en Allemagne, en Suisse, en Autriche, ete. ; n'ayant nullement la prétention de con - troler les déterminations de ces savants auleurs, nous les admellons telles qu'ils Les ont proposées. Nous avons ainsi dressé la liste des espèces malacologiques de notre région dont l'antériorité à l'état fossile avait été constatée par ces différents auteurs, et pour chacune d'elles, nous avons indi- qué dans quels pays et à quels niveaux géologiques on les avait recueillies. 22 VARIATIONS MALACOLOGIQUES r r TABLEAU GÉNÉALOGIQUE DES ESPÈCES ACTU LPLIOCÈNE PLIOCÈNE PLIOCÈNE PLYISTOCÈXE INFÉBI | INFER. | MOYEN SUPÉRIEUR # | 1. HORIZON MES} 4e | : E DE MOSBAN SE Mere CINE 5 DE Eu | LISTE DES ESPECES |5-2| 2 Pete) 4e | eNESteS PEAR 5 5 = PL D SUN = ! Limax cinereus, Lister. . . . » » » » » » » = agrestis, ALiNNÉ. 0 ) » » » _ » » Milax marginatus, Müller. » » » ES AE, » » Testacella haliotidea, Draparn. . » ) » ) » » » Vitrina pellucida, Müller... . . » » « » » » » _ diaphan«, Draparnaud. . ) » » » » » » M ANGIOT, NE ENUSSAC LEA » » » » » » » Succinea pulris, Linné. . . . » ) — » | — —— » — Pfeifferi, Rossmässler. | » » » » | » — » —— Cle TOns RISSO EN » » » ) » » » — oblonga, Draparnaud. . » )) == » » = —— Hyalinia lucida, Draparnaud. Ù ») » » » » » » — septentrionalis, Bourg. . » » ) » » » » — cellaria, Müller. . . . » » » » ) » » — glabra,Studer. + + . » » SNA » » » ALES NIChAUd EE -0RE » ) » | » | » » » — subnitens, Bourguignit.. » » » » | » » » D Yan NI EMAD » » » DENT ae. » » ACT NIET ESS » » » » » _ = CN IOSQ HEUSSAC. ) » ) » » ss » — nitidula, Draparnaud. . » » » » » A2 » ALT IEs AIACLE NON » » » » » 5 » — crysolina Muller Men » » » » _ » — subterranea, Bourg. . ) » » » » » » = diaphan«, SIUTET TS » » )) » » » » — fulva, Müller. - . . » ) » » » == —_ Helix rotundata, Müller. . . . » » » » » _ » = ruderats SUTer- NC » » » » » — — » » — » — pygmæa, Draparnaud. . » » D Li 221 DU RHONE DU BASSIN PARTIE CENTRALE DU BASSIN DU RHONE RE RSS Em —._. _ . +..+ 1 PLEISTOCENE SUPERIEUR PLEISTOCÈNE MOYEN | ANOYS V1 JA LH ANONU AG SAATIVA SI SAUILSAIV'I SATIOUV LA SHNXUVN MO RTE 2 2 | 2 | | | | A LIST CS | _ Re SR SRE » ————————————————————————————————... IMGOIV,Œ SINAIAU SIOdA4 | ————————————————— "TT TT aNNOS V1 44 5 ; SAIIVS LA SHHIAVUN PER ES À) RSS 2e ER TN SEE LEA TP PU Si PR CO At te NP PT M Se STIMVUI-SUMAIU ne TR EE AR EE IE SHLUVI-NOIUT VHAOI —————————————————————.—————…———————.—…—— 7 ——— —————_—————————__—_—————p AISATIS AQ LA AONIUAUL A4 ANL-YTVYH SOS RUE | 2 & | | à | SUR | PERLE | À | PES SSI | EE. . AINHOTV | EN RE ES Sn LS ml MS I 4 Là HON VU | AE A A | | 2 A | | SMS CRE | A À AR 2 2 | 2 | 2 | A A assins ANOIILAV HAVIVANATIY (INYVN-LI-ANIAS) 41199 V1 A4 SIL = 2° A Au = 2 DR CS RL N R | Ru | re | ET | A | 2 | A ne ne en Ce STEEL SSP ESS RE DE. | EI FES À ae 2e a RE Coton UE ES Eau eo ne ANT 0 MSA 0 a ——p—Z2Z SIUVA A4 SNOUIANXH SIq VILALUVTI LA VIANYUNIAHI Y SIOdA( 222 A ———a——————————aLELEaLEE PLEISTOCÈNE INFÉI VARIATIONS MALACOLOGIQUES LISTE DES ESPÈCES Helix EMA et 51 NE obvoluta Müller. . personata, Lamarck.. pulchella, Müller. costata, Müller. . . bidens, Chemnitz. . DAlOS A SUR. > montana, Studer. . circinnata, Studer. . GUVDEL ALU NE hispida, Linné. . . depilata, Draparnaud. plebeia, Draparnaud. sericea, Draparnaud. incarnata, Müller. . carthusiana, Müller. fruticum, Müller. . strigella, Draparnaud, lapicida, Linné. . . arbustorum, Linné. pisana, Müller. . . ericetorum, Müller. . variabilis, Draparnaud. lineata, Olivi. . costulata, Ziegler. , unifasciata, Poiret. . fasciolata, Poiret. . capgerata, Montagu. . acuta, Müller. . nemoralis, Linné. hortensis, Müller, PLIOCÈNE | PLIOCÈNE INFER. MOYEN n 2e = 24 #1] r- = £ = eA =] & À A ol = < = SC ei = AUDE PRE +R (JE) — E Re À SE : = © 2 A A )) » » » » » » —_— » » » » » » » » » » » » » — » » » » » » » » » » » » » » 7 » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » PLIOCENE SUPÉRIEUR © = Ex 2 & S Æ ZE æ) Oo 10 EE] 1 a <8 An | SR DNS mn 7 < EE |4be Æ MPrn "a = < z À © [2] [=] FOREST-BED D'ANCLETERR E HORIZON DES DE MOSBà, I] 2: | 54 = em | = h < » » A — » » » — » — » » » » » » » » » — » » » 402)) » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » ANOYS VI Au LA ANOHU na S4HATIVA SAQ SAULSNOVA SATIOUV IA SINUVN 223 AN491V,A SLNHOAU SLOdHG , » ANKHOS F1 44 SAIUVS LA SUHIAVUI “ » » » » ») » ») » » » ») » ») » )) )) » SIANVFUI-SUTAIU LA SHLUVI-YOIUNN UAMOI PLEISTOCENE SUPERIEUR HISALS 44 LA HONIUNIL AA SANL-MIVU » » » » » ») » » » ») » » » .)) ») ») ») » » » » » ) ) ») » ») )) ») ») )) )) » ») ) )) AIT Ke à » » » » » » » » » ») » ») ») » » » » » » )) )} » » D) AONVAA » ») » » » » y» » » ») » » » )) » DU BASSIN DU RHONE » » ») ») ») » assaut JA ANOTALAV £ MOYEN » » » cs ANIVNATIY ») » » » » ») » » » » » » » » ») » » » » ») » » » ») ») » » » » » » ») ») » ») » » PLEISTOCEN (INUVN-LA-ANIAS) ATI49 VI AA SANL » SIUVA aa SKNOUIAXNA SH VILALUVTI LA V'ANVUNIAA V SLOdHG auaanarr ya M) SE » » » » » » » » ») » » » » » » ») » » » » » » » » » » »» » » » » » » » » » » » » » » » » 224 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Helix sylvatica, Draparnaud. . — aspersa, Müller. + . — pomatia, Linné. . Bulimus montanus, Drapar. . — obscurus, Müller. . — detritus, Müller. . . Chondrus tridens, Müller. . — guadridens, Müller. Cæcilianella acicula, Müller. . Clausilia laminata, Montagu. — ventricosa, Draparnaud — Rolphi, Leach out — plicatula, Draparnaud. — dubia, Draparnaud. . — higricans, Pultney. . —\Nparvula,: Studer. 2. Pupi frumentum, Draparnaud. — secale, Draparnaud. . — gyranum, Draparnaud. — dolium, Draparnaud. — doliolum, Bruguière. — Musc.rum, Linné. . Vertigo muscorum, Draparnaud — inornata, Michaud. . — edentula, Draparnaud, — antivertigo, Draparnaud — plicata, À. Müller. . . Ferussacia subcylindrica, Linné. — umbilicata, Draparnaud. — PygMmæa, Draparnaud. . — Shutlleworthiana, Char. MOLLASSE D'EAU DOUCE DU LYONNAS ULIOCÈNE | l'LIOCÈNE MOYEN INFER. ET DU DAUPIINE RED-CRAG D'ANCLETERRE PLIOCENE SUPÉRIEUR © = - SNS = : & © = c£ … Ur EL ss] NULS Le | Se à SR Sr >= = | LaEe E CA PER © < a z À O = A » » | ») » » » » » » » » » )) » | » » | » | )) | » ) » » | » | » ) ) | » ) )) )) » » D) D) » » » ») )) » ») » )) » ») ) )) | )) )) )) » » » » » » ») » » » ») » » FOREST-BED D ANGLETERRE HORIZON DES SAB} DE MOSBACH = PLEISTOCÈNE INFÉR EL 2 © : s.|.3 14 < «| Tres == » ) | » » >| » » ) _ _— » » ) ». » » » 2 » ». » » » » » » » » V! — — » » » ) » » »1 Enr — ») » » »1 — —— » ») » D» » » )» » » » » » Dal ») » DE » »» »n — » Dh) » » 29 =— — » » » » —— » » —= » » = » l » » » » 225 DU RHONE DU BASSIN PS SR EE EE ENE SUPERIEUR PLEISTOC 1 PLIISTOCENE MOYEN na SAATIVA SHQ SHULSAIVI SHTIOUV LA SANUVU SINTIAU SLOd44 » » » » » » » » » » » » » » » » » » » ) » )) » » » » » » » » » ‘» » » » » )) ») » » » » » » » ») » 1 ) )) » » » ANWNNOS V1 4q HUAIIV, | SAIUVS LA SHAIAVUI | » » » )) » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » ——————————— ———……—— SIIMVUN-SUAHAIU LA AULHVS-MOIUX HIMOTI » = R = À = À = = | » D) » » | EE] AISATIS 44 LA AONIMAUL AG ANL-MIVM TUAIIV | = À HONVUA = R » | » = » | » » » » 2 )») | ») ») » )) » » ») = 2 » ») » » » A » » = 2 » » » À » = 2 » » = 2 » = R » » )) ») ») ) » » » » ») » » » » » » » » » ) » » » ») » ») » » » » » » » » » » » » » » TIHAL-LOSS HISSAU LA AIDUALNOV assIns | » » ) ) » » ») ») » » AX )VHATIY (IXUVK-LA-ANIIS) 41939 VA 44 SHnL ») » ) » » » » ) ») » » » » ) » » » ) » )) )] » ») ) » » » ») » » » » » » » ) » » » ») » » » » » » ) » aa SNOWIANE saa | VILHLUVT LA YIANVUITAT V SLOdIG SIAVa » » » » » » » D] » » » ) » » » » ») » » » » » » » » » 226 VARIATIONS MALACOLOGIQUES LISTE DES ESPÈCES Vertigo pusilla, Müller, . Carychium minimum, Müller. tridentatum, Risso. . Planorbis nitidus, Müller. . fontanus, Lightf. . complanatus, Linné. carinatus, Müller. . submarginatus, Crist Corte Lines rotundatus, Poiret, . spirorbis, Linné. . cristatus, Linné. imbricatus, Müller. . contortus, Linné. . albus, Müller. . . corneus, Linné. . Physa fontinalis, Linné. . . hypnorum. . . . Limnæa auricularia, Linné. canalis, Villa. . limosa, Linné. . . peregra, Müller. . . truncatula, Müller. . palustris, Müller. . stagnalis, Linné,. fragilis, Linné. . Ancylus simplex, Buchoz. . lacustris, Linné,. . Cyclostoma elegans, Müller. . lutetiainum, Bourg. . Pomatias septemspirale, Bourg. PLIOCENE INFÉR. ET DU DAUPHINÉ MOLLASSE D'EAU DOUCE DU LYONNAIS » » PLIOCÈNE MOYEN RED-CRAG D'ANGLETERRE » » (ITALIE) PLIOCENE SUPÉRIEUR © E 4 © = << Q 5 & £ Le] etes se Es > © < A QE 21E ne 4 À Oo a A » ») — » » » » » » ») » )» ») » » » » » » ») — » » ) » » » » » » == » » » » » » » » » » » » — » » D » » ») h » » » » » » » » » » » PLEISTOCÈNE INFÉRII FOREST-BED D'ANGLETERRE » » HORIZON DES S& Z = É cé = 5 a < » » » » » » ») ») == » » » » » » » ) » » » = » —— » == » — » = » = » » » » » — » » » — » » » » » —— » — » » é _— » D] ) >) » DE MOSBAQL 227 DU RHONE DU BASSIN ENE SOPÉRIEUR PLEISTOC HNOYS VI A4 LA ANOHU 0€ S4ATIVA SH SHHLSNOVI SATIOUV LA SANYVN » » » » HINAIAV,O SLNADAU SLOdAG ANWOS VI 4a SAIAIVS LA SUAIAVUI » » ») » » » SIAMVUI-SUHATU LA SHLUVA-MHOIHT HAMOI » » » » » » » » » » » » » » » » » » AIS4IIS 4Q LA HONIUQHL AG SAAL-HIVAH » » » » » »» » » » )) » » » « ISTOCENE MOYEN K n IBILE AIUAITV » » » » » TONYUA ») » » » » THAL-LUSS Assins assaut LA AHNIHLNAY » » ANIVAWATIV » » » » » » » » ») » » » » » » » » » » » >) » » » » » » » » » » » » ») » » » » » » » » » » » » » » » (ANUVN-LH-ANIAS) 417149 VI 44 SL » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » ») » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » ) » » » » » ») » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » ) SINVA HU SNOUIANH SAQ VILALUVI LA VIANVU9TINT V SLUdHG . (OWAaKaLUNA) » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » 228 VARIATIONS MALACOLOGIQUES mm PL OCÉNE PLIOCENE | PLIOCÈNE PLEIST » CÈNE INFÉRIEUI INFER, | MOYEN SUPÉRIEUR ; £ HORIZON DES SABE| PR E DE MOSBACH RTE < : 224 SN SE 2 PR 2 ai 2 2 = Due = 2 = LISTE DES ESPECES CNE RER NS ES GES See SE NIRNE SRE = 2 5 A IE © A ANUS 2 A z E 5 » » » » » » » — alpestris, Blauner. . . : » S » » » » » — Mminuta, Draparnaud. . ; 5 S » » » » ») a cristata, Müller. . . ° ) » — )) » — »31 4) Neritina fluviatilis, Linné. . . : » ) » » ue » » Sphærium rivicola, Leach. . . ; ÿ | S ee. “ Si CONNeNTr ALINNE UE ) » eE! » 5 AS » »i — nucleum, Studer,. . . ÿ NS » » SA » » » ) — lacustre, Müller. . . ; SALE EDS » » » » »i Pisidium pusillum, Gmelin., . » 5 » » » » » ») — nitidum, Jenyns,. CMS » » » » » » » » COSENTAUTN: POI. ? » » » » » » » — amnicum, Müller. . , » » = » — sue » —- — Henslowianum, Shexp » » » » » es » » Unio littoralis, Cuvier. . , . » » » » = = » » — batavus, Nilsson. se » ») ») »)) )) — » » — M pictorum, Linné. » » » » ) — » » — tumidus, Retzius. +. . » » » » » » » » Anodonta cygnæa, Linné. . . » » » » » » 229 DU BASSIN DU RHONE HNOYS VE HU LA INONMN Aa SYATIVA SI Es SAHLSAIVT SA Mv LA | FR | | | | | SIXUVH —————————————————————.—.——————————————————_—_—— ») )) HIMAD'LV,0 CLNTIAU ELOdA SUPÉRIEUR ANNOS VT 4a SATIAVS LA SUTIAFUI . » )) » ) » )) ») » )) » ——_—_—————————_——_—_—_—_—— STINVUI-SUAAIU ISTOCÈN 14 CIS A RE ES ET ROSE Rec ( En DETTE ae! SHLUVAI-HOUT UAMO [21 —_———_—_——_— ——]—————————…—————————_—_—_—_———_—_—_ ____—_—— … a H'SHIIS A0 14 À ET Re in HONIYOTL AA SIAL-NTYA RER ER DO. due MR DRE EE EP E SR TIUAITIV CNRS ON SR TN RE RS ER RSR RS RE RS RER DER SR SR RSR SE HONVULT IE TITAL LOUSS MOYEN JA = 2 2 2 2 = Z ABUNINLAV = s ANOYNATIV PT MES RE = = = A AA PLEISTCCENI (AXUVIN-LA-ANIAS) AATAD VI HA SAAL )) )) » a ————————…—…—…—…—…—…— … …—…—…—…——…——…————————————————————————————_—____————_—_—_—— ——_—____— _——.. SUVd HA SNOHIANH SAU MIALUVI LA 2 2 le Use = À <| Aiee lSe VIAXVAUYTHI Y SIOIA | » ———————_—_—_—_—_]————_—]—]_]_]_ ———_— eo, (OUTINTLUHAAM) | | F 230 VARIATIONS MALACOLOGIQUES D'après ce tableau, nous voyons que les éléments les plus anciens de la faune de la partie centrale du bassin du Rhône, vivaient à l’époque pliocène, dans des dépôts de cette même région ; petit à petit cette faune s’est accrue, et en résumé, nous constatons que sur un total de cent trente-sept espèces existant à l’état fossile et faisant partie de notre faune, ces éléments ont été empruntés aux différents horizons géolo- giques de la manière suivante : Plone ANTIQUE 4 espèces. — TGS SN CAT D — — SPORE NRA EN QUES DOTE M CC NE = EDrespeces. Pleisiocène inférieur. .. . . . . . 49 espèces. —— ONE IN OL CN DROITE + OP SUDEREUL 2e PONS RES TOTAL. + 5.2, 1010 ee MAT eSNeUes: I y a done eu un mouvement progressif pendant la période pliocène ; puis c'est surtout pendant le pleistocène inférieur que se sont manifestées la plupart des espèces qui devaient survivre; depuis ce moment il y a eu une sorte de décroissance dans le quantum d'adaptation spécifique, ou tout au moins la faune a-t-elle présenté un moins grand nombre de formes nouvelles. Ce n'est alors que depuis la fin de la période quaternaire que sont apparues les deux cents et quelques espè- ces complémentaires qui sont particulières à la période ac- tuelle. Cette succession dans l’ordre ou le nombre des espèces nou- velles propres à chaque période est en parfaite concordance avec l’ensemble des phénomènes géologiques. La température DU BASSIN DU RHONE 231 qui était très élevée au commencement de l’époque pliocène, est allée en diminuant jusqu’à l’époque glaciaire ; peu d’es- pèces du pliocène inférieur ont done pu s’acclimater et sup- porter des variations climatériques aussi radicales que celles quise sont produites pendant ces deux périodes. Au commen- cement de l’époque quaternaire, la température des milieux où vivaient les différentes faunes malacologiques a dü être sensiblement analogue à celle qui existe actuellement dans nos pays; c’est alors que le plus grand nombre d’espèces s’est manifesté ; mais à mesure que les glaciers prenaient de plus en plus d'extension, une partie de cette faune à du battre en retraite, et un petit nombre seulement de formes nouvelles ont dù vivre dans un pareil milieu. Plus tard enfin à l'époque quaternaire, au moment de la fonte de ces gla- ciers, alors que la température de nos régions reprenail son équilibre définitif, quelques espèces nouvelles ont fait leur apparition et se sont adaptées définitivement aux nouvelles conditions biologiques. Enfin, ce tableau nous montre également le grand rôle qu a joué dans notre faune cet élément malacologique quater- naire, dont le centre d’origine est localisé autour du massif alpestre, non seulement en France, mais en Allemagne, en Suisse et en Autriche. En outre, la plupart des espèces qui \ivaient à celle époque ont été en quelque sorte les têtes de groupes autour desquelles sont venues à notreépoque se ran- ser de nombreuses formes, espèces ou variélés, qui sont bien le résultat de modifications définitives ou accidentelles subies par ces espèces vraiment Lypiques et ancestrales. Aux formes primitives simples ont succédé des formes plus com- plexes ; chaque type déplacé dans des milieux différents à donné lieu à des variétés nouvelles d'autant moins sembla- bles aux types que le milieu nouveau différait du milieu an - cien; ces variétés se sont fixées el ont formé des espèces ; 292 VARIATIONS MALACOLOGIQUES plus tard enfin, dans ces groupes fixes des membres de la colonie ont émigré, et de nouvelles variétés se sont encorc formées. C'est ainsi que quelques espèces simples, qui ont survécu à la succession des phénomènes géologiques, ont pu graduellement donner naissance à des formes différentes de ces types ancestraux et engendrer des formes de plus en plus complexes, en passant par tous les intermédiaires, par tous les chainons jusqu’à la forme moderne, telle qu'il nous est donné de l’observer aujourd'hui. VIN DES CENTRES D’APPARITION Localisation des faunes.— Espèces sédentaires.— Espèces cosmopolites.— Centres d'apparition ou centres spécifiques.— Division de la faune européenne en trois centres généraux. — Centres locaux. -—— 11 existe peu de varittés dans les centres d'apparition. — Origine des centres oO d'apparition.— Leur succession dans les temps géologiques, — Deux faunes locales différentes peuvent avoir la même origine. — Une faune locale peut présenter un mélange de prusieurs faunes régionales. — Faune des iles. — Caractères des faunes locales. — Modifications que peuvent subir les centres d'apparition. — Influence des milieux sur les centres d'apparition — Origine des centres d'apparition. — Centre d'apparilion dans Ja faune lyonnaise. Nous avons vu précédemment que les espèces fossiles étaient pour la plupart géographiquement localisées, et que si elles étaient plus ou moins abondantes dans un point donné, il arrivait souvent qu'on ne les retrouvait pas dans d'autres pays, au même horizon géologique. Un tel fait parait plus sensible dans les dépôts anciens, tandis qu'au contraire dans les dépôts récents on voit déjà que certaines espèces se sont dispersées davantage, puisqu'on les retrouve dans des pays souvent mème déjà fort éloignés les uns des autres. Ce que nous venons de dire pour la faune éteinte est tout aussi vrai pour les faunes vivantes : s'ilexiste des coquilles en quelque sorte cosmopolites, ilen est d’autres plus sédentaires dont l’aréa de dispersion est des plus restreints. Si par exem- ple les Helix pulchella et H, hortensis vivent à la fois sur l'an - VAR. MAL, Te Il: 1G 294 VARIATIONS MALACOLOGIQUES cien et le nouveau continent, nous voyons, au contraire, les Helix alpina et H. Repellini exclusivement cantonnés dans notre région. On arriverait done, d’après celte donnée, à di- viser les mollusques en espèces sédentaires et espèces cos- mopolites suivant qu'elles sont plus ou moins localisées. Quant aux causes de ces déplacements, nous croyons les avoir suffisammentindiquées dans notre chapitre relatif aux migra- tions malacologiques. Lorsque l'on étudie la faune européenne, on est frappé de. ces phénomènes de localisation de certaines espèces, et l’on arrive à constater qu'il existe de véritables régions géographi- ques dans lesquelles se sont développées un certain nombre de formes propres à cette région et qui, jusqu’à présent, n’en ont pas dépassé les limites, tandis qu'il en est d'autres où la faune perd ce caractère particulier et ne présente plus qu'une réunion de certaines formes plus ou moins cosmopolites em- pruntées aux régions voisines. On donne le nom de centre d'apparition où centre spéafi- que aux pays où chaque forme a pris naissance, là où elle est plus anciennement connue, et d'où elle est parlie avant d'ac- complir ses migrations. Tantôt cette forme exécutera toutes ses évolutions sur le mème point et ne sera observée nulle part ailleurs ; elle rentrera alors dans le cas des espèces sédentaires disparaissant à un moment donné, comme cela parait avoir eu lieu pour tant de formes anciennes aujourd’hui éteintes. Tan- tôt, au contraire, partant de son centre d'apparition, elle se dispersera plus ou moins rapidement dans des milieux souvent fort différents de son milieu primitif, etrentrera ainsi dans la classe des espèces cosmopolites. Autrefois ces mêmes centres étaient nommés centres d’origine ; nous verrons plus loin pour quels motifs nous avons cru devoir renoncer à cette appella- tion qui ne répond pas d'une façon exacte à: scientifiques. nos données DU BASSIN DU RHONE 239 Ces centres d'apparition ont existé de tout temps, aussi bien à notre époque que pendant les périodes géologiques anciennes ou récentes. Aussi, pour étudier les phases de cer- taines espèces devons-nous parfois rechercher bien loin ce centre de première apparition. Tel est par exemple le cas de l'Helix pomatiu si répandu aujourd’hui dans notre région ; nous ne le voyons pas figurer dans lafaune quaternaire de nos pays, landis qu’au contraire, il existe déjà dans les dépôts du pleis- tocène moyen de Cannstadt et de Burgtonna. Il faudrait donc en conclure que le centre d’origine de cette espèce remonte à l’époque quaternaire et qu'il était situé en Allemagne, à moins que de nouvelles données géologiques viennent con- tredire ce que nous savons jusqu à présent. La généalogie des espèces qui vivaient dans les temps géo logiques, telle que nous l’avons établie dans le chapitre précé- dent, nous permet de trouver au moins à titre provisoire le centre d'apparition de quelques-unes de ces espèces. Mais il n’en est plus de même, lorsque nous avons affaire aux for - mes nombreuses qui n’ont pris naissance qu’à notre époque. Or il est intéressant de rechercher l'origine de ces espèces et de savoir si réellement elles ont été créées dans notre région, de facon à en compléter l'histoire. Si le plus grand nombre de nos espèces proviennent de centres éloignés, il est proba- ble qu’elles auront subi en émigrant loin de ce centre primitif des modifications d'autant plus grandes que les conditions nouvelles de leur habitat seront différentes. Si, au contraire, notre région constitue elle-même un centre d'apparition au moins pour certaines espèces, celles-ci n'ayant pas eu à se déplacer, vivant toujours dans un milieu similaire, n'auront à subir aucune variation et resteront constantes dans jeur manière d'être. Il importera donc de comparer notre faune locale à celle des autres pays qui ont des éléments communs avec celte faune. 236 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Pareille question pour être entièrement résolue supposerait des données géologiques el paléontologiques plus complètes que celles que nous possédons. Nous pouvons jusqu'à un certain point juger et discuter quelques-uns des faits relatifs à la faune actuelle ; mais comme cette faune emprunte une partie de ses éléments à la faune quaternaire, et que celle- ci comme nous l'avons vu s’enchaine à son tour aux faunes géologiquement antérieures, il s'ensuit que pour prétendre traiter à fond cette question de l’origine des centres d'appari- tion, il faudrait connaitre au moins aussi bien l’histoire des faunes précédentes que celle de la faune actuelle. Quoi qu'il en soit, nous allons essayer de tracer cette histoire à laquelle se rattache d’une facon si directe l'étude des variations mala- cologiques. M. Bourguignat, l’éminent malacologiste, est Le premier qui se soit occupé de cette question de l'origine des faunes ter- restres et fluviatiles de l’Europe ; suivant cet auteur (1), il existe entre le 35e et le 46° degré de latitude nord une zone qu'il nomme zone de création, qui coïncide avec une série de chaines de montagnes s'étendant de locéan Atlantique à la mer Caspienne en Asie. Au nord de cette zene,les espèces, répandues dans les vastes régions centrales et septentrionales de l'Europe, descendent de la zone centrale de création, tan- dis qu'au sud chaque espèce se trouve localisée et demeure invariable dans son habitat. Partant de ce principe, M. Bour- guignat constate dans cette zone l'existence de trois centres de création : 1° Centre hispanique, s'étendant en Espagne depuis les Pyrénées jusqu'au sud du Maroc, et comprenant en outre l'Algérie et la Tunisie ; 2° Centre alpique, parlant des Alpes françaises et se pro- (4) Bourguignat, Matacologie de l'Algérie, 1864, vol, II, p. 366, DU BASSIN DU RHONE D | longeant en suivant les chaines de montagnes à l’est jusqu’au Bosphore et à la mer Noire, et au sud jusqu'aux extrémités des péninsules italique et hellénique ; 3° Centre taurique, comprenant les régions occidentales de l’'Anatolie, et se poursuivant le long de la chaine Taurique, jusqu’à la mer Caspienne, la Perse, en se projetant au nord jusqu'au Caucase et à l'extrémité sud seulement de la Cri- mée, au midi, jusqu'aux iles de Crète et de Chypre et aux derniers contreforts du Liban en Palestine. «Ainsi, dit M. Bourguignat, trois grands centres placés les uns à la suite des autres, depuis l'océan Atlantique jusqu'à la mer Caspienne ; au sud, sur une ligne presque égale- ment parallèle, une série de contrées sans faune, s’éten- dant de l'océan Pacifique aux premiers contreforts du pla - teau central de l'Asie ; enfin, au nord, une suite de vastes ré- gions plates ou montueuses, de l'Océan à l'Oural à l’est, et au nord jusqu'à l'extrême pointe septentrionale de Ja Nor- wège, où tous les mollusques sont des espèces descendues des hautes chaines de la zone de création. «Orle centre hispanique n’a rayonné, ou, autrement dit, n’a faitsentir son influence que jusqu'aux rives de la Garonne, et encore; le centre alpique, seul, a fourni toutes les espè- ces de l'Europe; quant au centre taurique, son rayonnement a été presque nul, par la raison bien simple que les eaux de la mer Noire ont, detout temps, mis obstacle à son dévelop- nement vers les contrées septentrionales. « Si l’on prend en effet toutes les faunes de l'Europe, du nord et du centre, qui certes sont nombreuses, et que l’on ait la patience de rapprocher, de comparer, en un mot, d’é- tudier avec intelligence les espèces qui s'y trouvent décrites ou signalées, l’on verra qu'il est impossible de découvrir dans ces régions une forme qui ne soit pas une forme de création alpique. Nous ne disons pas une espèce, qu'on veuille bien 298 VARIATIONS MALACOLOGIQUES le remarquer, attendu qu'ilse peut, et cela est, qu'une espèce descendue des contrées montueuses ait, depuis tant de siècles, en se retrouvant dans des milieux différents, subi certaines influences modilicatrices. Or ces influences ont dù ‘amener chez elle quelques variations, qui ont pris, à la suite des siècles, assez de constance et de fixité pour constituer ce qu’on appelle actuellement une espèce. « I résulte de tout ceci ce fait étonnant que toute l'Europe de l’ouest à l'est, des Pyrénées à l'Oural, du midi à partir de la zone de création jusqu'aux mers Boréales, ne possède pas de faune propre et speciale, mais seulement une faune acci- dentelle, provenant des hautes chaines de montagnes qui, sauf quelques interruptions et quelques sinuosités, partage notre continent de l'océan Atlantique à l'Asie. « [résulte encore cet autre fait d’une bien grande impor- tance, c’est qu'au midi de cette zone chaque pays possède une faune spéciale, que les espèces sont particulières à telle ou telle contrée, en un mot, qu'aucun être, sauf de rares exceptions déterminées par des lois constantes, ne peul vivre indifféremment d’une région dans une autre ». D'après ce qui précède, notre faune de la partie centrale du bassin du Rhône appartiendrait done au centre alpique. Mais en dehors de ces grands centres qui constituent en quelque sorte un premier régime dans {a distribution de la faune européenne, il existe un grand nombre de centressecon- daires tout aussi nettement caractérisés ; ce sont comme des ilots dispersés dans les différents centres, jouissant chacun de caractères particuliers, tout en se rattachant par leurs carac- tères généraux à la zone dont ils font partie. Lorsque nous comparons la faune des environs de Lyon avec celle du sud de la vallée du Rhône dans la partie qui avoisine lelittoral méditerranéen, nous voyons bien qu'il existe de partel d'autre un certain nombre d'espèces communes “ DU BASSIN DU RHONE 239 que nous ne retrouvons pas dans la faune qui est plus au nord ou plus à l’est dans la mème vallée ; tels sont par exem- ple : Helix acuta, H. hr'ochoides, H. cemenelea, 1. rubella, H. pisana, I. variabilis, Pupa quinquedentala. P. megacheilos, Clausilia crenulala; mais d'autre part, nous observons dans la faune des Alpes, dans la partie voisine de [a Grande-Char- treuse, les Arion Dupuyanus, Limax eubalius, L. erythrus, Hyalinia Dumontiana, Helix Fontenilli, H. alpina, H. phoro- chœtia, H. Bourniana, Clausilia carthusiana, qui ne parais- sent pas vivre dans d’autres localités, de même qu'au sud de la vallée, nous trouvons les Helix vermiculata, H. terrestris, I. trochilus, H. laula, H. lineata, H. maritima, Clausilia virgata, Cl. solida, qui n’ont pas encore remonté plus haut dans la vallée du Rhône, Il y a donc là deux régions géo- graphiques dont les faunes malacologiques présentent des ca - ractères différentiels distincts. Ce sont deux centres d'appari- {ion secondaires. En comparant ainsi les faunes de tous les pays on arrive à constater l'existence d’un très grand nombre de centres plus ou moins distinets ayant entre eux à la fois des caractères communset différentiels. C’est surtout dans les régions mon- tagneuses que l’on trouvera le plus grand nombre de ces centres. Si leurs faunes ont un certain nombre d'espèces communes avec celles des plaines veisines, elles ont en outre presque toujours quelques formes qui leur sont propres et auxquelles la faune emprunte son cachet particulier. Ces formes spéciales vivent à de grandes hauteurs et sont pres- que toujours localisées. Tels sont dans les Alpes francaises les Helix glacialis, H. alpina, H. Fontenilli, tandis que dans les Alpes lombardes,il existe d’autres Campylées caractéristiques; de même dans les Pyrénées, nous trouvons les Helix ca- rascalensis, H. nubigena, H. canigonensis, ete. On est en droit de dire d’une facon générale que tout centre montagneux 240 VARIATIONS MALACOLOGIQUES dont l'altitude dépasse de 1.000 à 1.200 mètres, a sa faune propre, qui peut procéder en partie de la faune des régions basses voisines, mais qui diffère bien certainement de tout autre centre montagneux situé dans des conditions similaires. À de pareilles hauteurs, les conditions biologiques sont parti- culières et varient peu, de telle sorte qu'il y a adaptation parfaite des espèces qui y vivent, et presque toujours celles - ci offrent un petit nombre de variétés; on peut les rame- ner où les comparer à celles des milieux similaires, mais distincts, comme l’AHelix arbuslorum des sommets alpestres peut être rapproché des Helix Xalarti et H. canigonensis ; mais on trouvera toujours entre ces formes des différences importantes. La première conelusion que nous tirerons de ces faits, c'est le rapprochement qui existe entre le petit nombre des variétés de ces espèces ainsi localisées et celui des espèces fossiles. Ces deux faunes présentent une certaine régularité, une réelle constance dans le galbe de leur coquille, soit parec qu’elles ont de part et d'autre vécu dans un milieu qui, ne s'étant pas modifié lui-même, n'a pas entrainé la création de variations nécessaires de la part desindividus, soit parce que la durée de leur existence depuis leur première apparition n'a pas été suffisante pour permettre à ces modifications de se produire. Il n’en est pas moins démontré que leurs formes gardent un eachet de régularité que n’ont pas la plupart des espèces qui vivent dans les plaines basses et les vallées. Les formes spécifiques sédentaires sont plus fixes, plus régulières, plus constantes que celles qui sont cosmopolites. F faut donc en conclure nécessairementque les déplacements malacologi- ques sont évidemment une cause continuelle de modifications ou de variations dans les formes primitives ou ancestrales. Ya-t-il donc eu d’après cela des centres spéciaux et dif- férents d'origine et de création? Faudra-t-il reconnaitre DU BASSIN DU RHONE 241 qu'il existe de par le monde un certain nombre de points privilégiés dans lesquels des formes malacologiques spéciales ont pris spontanément naissance, tandis que quelques-unes seulement ont émigré pour se propager dans un milieu géo- graphique donné? Ou bien faut-il admettre, au contraire, que toules ces espèces locales ne sont que les résultats de modi- fications successives, lentes, continues, d'espèces plusancien- nes, obéissant aux influences climatériques ou aux condi- tions du modus vivendi, pour s'adapter petit à petit à la nature des milieux où elles sont appelées à vivre ? Tel est l’état de la question. Nous n'avons pas la prétention de la résoudre d'une manière complète, absolue, définitive ; mais nous espé- rons au moins jeter quelque lumière sur certains points encore mal connus. De même qu’en paléontologie il fut un temps où l’on ad- mettait des créations successives renouvelées à chaque période géologique nouvelle, de même aussi quelques malacologis- tes voudraient admettre l'existence de centres de crealion distincts. Mais si aujourd hui la plupart des géologues et des paléontologistes reconnaissent que dans les temps anciens les formes se sont succédé les unes aux autres sans interrup - tion, de même aussi dirons-nous que ces centres actuels de création ne sont en somme que le résultat de la localisation de certaines formes existant plus anciennement et qui se sont adaptées à leur nouveau milieu. Si nous constatons aujour- d'hui l'existence de centres géographiques dont la faune renferme des éléments particuliers différents des centres voisins, nous eslimons que ces formes nouvelles ne sont que l'effet de la modification éprouvée par des formes plus ancien- nes aujourd'hui disparues, ou vivant sur d’autres points gcologiquement séparés du premier. D'après cela ces centres spécifiques ne sont plus des cen- tres de création, mais bien des centres d'apparition. Les 242 VARIATIONS MALACOLOGIQUES formes spéciales, particulières qui s’y trouvent n’y ont pas été créées spontanément à un moment donné, elles sont, au contraire, le résultat des modifications qu'ont éprouvées d’au- tres formes persistantes, disparues ou dispersées, mais dans tous les cas géographiquement séparées de ce centre. C’est ce que nous allons essayer d'établir par suite de considérations basées sur l’étude même de ces centres. Nous constatons d’abord que ces centres d'apparition ont existé de tout temps, et que leur existence s’est manifestée dans les temps géologiques exactement de la même manière que de nos jours. Du moment qu'il est reconnu que les faunes se sont modifiées lentement, graduellement pendant la longue succession des périodes géologiques, on admet nécessaire- ment que chaque faune dite nouvelle n’est en somme que le résultat des modifications éprouvées par une faune ancestrale. Lorsqu'à l'époque plioeène la grande faune des marnes d'eau douce du Lyonnais et du Dauphiné s'est manifestée. toute notre région a bien montré les caractères d'un vérita- ble centre d'apparition ; c'était la premiere fois que des for- mes semblables se présentaient, et dans les pays environ- nants la faune terrestre et d’eau douce renfermait des élé- ments tout différents. Mais plus tard, ce centre est bouleversé, et toute la faune semble disparaitre. Cependant qu’arrive-t-il? Quelques espèces comme l’Helix lapicida, le Planorbis com - planalus, le Bythinia tentuculata, ete., restent dans le pays, y font souche et se perpétuent jusqu'à nos jours à travers une succession de faunes différentes de la faune ancestrale et de la faune actuelle ; d’autres espèces subissent un mou- vement de rétrogradation, et nous en retrouvons les trace; dans la faune actuelle du nord de l'Amérique. Cet ancien centre d'apparition dont nous pouvons suivre en quelque sorte les phases successives s’est donc modifié; il s’est effacé à son tour pour faire place à de nouvelles faunes. DU BASSIN DU RHONE 243 Plus tard dans ce même pays, un nouveau centre d’appa- rition semble se manifester. Les conditions biologiques nou- velles sont entièrement différentes des anciennes, aussi la faune qui apparait ne ressemble-t-elle en rien dans son en- semble à celle qui la précédée dans les mêmes stations. C’est alors que nous voyons pour la premiére fois des formes nouvelles et locales aujourd’hui disparues comme les Æelix neyronensis, H. Locardiana, Limnœæa Gerlandiana, Planorbis Arcelini, ete. Il y a donc eu dans la même station une suc- cession de centres d'apparition se produisant, après une dis- persion d'espèces déjà existantes. Le centre nouveaua hérité de quelques formes du centre ancien: quelques unes des espèces sédentaires du premier centre d'apparition sont devenues des espèces cosmopolites pour le second, et lorsqu’est arrivée la faune actuelle, répondant à son tour à un nouveau centre d’ap- parition avec ses formes spéciales, elle a également hérité des espèces cosmopolites des centres anciens. Dans cette succession quelques formes ont disparu, d’autres se sont modifiées ou ont émigré, tandis que quelques-unes sont res- tées en place, soit en s’adaptant sans subirde changement dans leur allure, soit aussi en subissant à leur tour des modifica - tions plus ou moins profondes. Il n'existe, du reste, aucun centre malacologique absolument autonomique, c’est-à-dire ay ant des espèces exclusivement spéciales à ce centre. Même dans les pays les plus éloignés des continents, on retrouve toujours à côté de formes spéciales, des formes qui se rattachent à d’autres formes appartenant à des centres Voisins. Ce qui a eu lieu pour les centres d'apparition des temps géologiques a encore lieu de nos jours, et toutes les obser - vations que l’on peut en tirer s'appliquent aussi bien aux centres éteints qu'aux centres aëtuels. Examinons mainte- nant ce qui se passe dans ces centres d'apparition, et les 244 VARIATIONS MALACOLOGIQUES conclusions que nous en tirerons seront tout aussi bien appli- cables aux centres disparus qu'aux centres actuels. Deux faunes locales, tout en présentant des caractères dif- férentiels suffisants, peuvent avoir la mème origine. De même qu'inversement, camme l'a dit M. Bourguignat, « le centre de création de chaque espèce est simple et non multiple ». On comprend en effet qu'à une époque donnée la faune d’un centre de création venant à se disperser partiellement, el ses éléments arrivant à se fixer dans un milieu différent, des modifications se produiront nécessairement au moins chez quelques espèces et donneront lieu à des formes typiques nouvelles, propres à chaque centre nouveau. Ces formes dérivées d’une même souche auront toujours certains liens communs, mais n’en constitueront pas moins des espèces dif- férentes dont quelques-unes finiront par acquérir un degré de fixité tel qu’elles garderont leurs caractères spécifiques sans se confondre avec les formes voisines des autres centres. Nous citerons comme exemple l’histoire des modifications successives de l'Hchix nemoralis, reconstruite par M. Bour - guignat (1). Ce savant auteur, ayant trouvé dans la caverne de Vence dans les Alpes-Maritimes des {felix nemoralis, observa qu’elles étaient associées à des ossements de Cuons, c’est-à- dire d'animaux spéciaux à l'Himalaya. Or quelques-unes de ces Hélices présentaient encore les caractères primitifs du type asiatique. « Ainsi, dit M. Bourguignat, j'ai recueilli des nemoralis ayant encore un aspect d'atrolabiata, de Pallasi ou de repanda d'Asie; puis d'autres possédant, à un moindre degré, le caractère oriental ; enfin d’autres finissant par arri- vér peu à peu à présenter le type actuel, si connu de tous les malacologistes. L’ancêtre de la forme nemoralis a done (1) BourGUIGNAT, 1868. Note complémentaire sur diverses espèces de moilusques et de mam- mifères découvertes dans une caverne près de Vence. DU BASSIN DU RHONE 245 du exister ou existe peut-être encore au plateau central de l'Asie. Lorsque cette espèce a commencé son acclimatation d'Orient en Occident, elle s’est modifiée peu à peu en : Ilelix Pallasi, Dubois, — forme de Géorgie ; — atrolabiata, Krynicki, — Caucase, Taurus; — repanda, Dubois, — Caucase, Taurus; — leucoranea, Mousson, — — — stauropolitana, Schmidt, — — — vindobonensis, C. Pfeifler (H., austriaca Mühlfeldt), — Taurus, Balkans, jusqu'aux Alpes Tyroliennes. — sylvatica, Draparnaud, — Alpes Italiennes, Suisses et Françaises ; — nemoralis, Limnæus, — Europe occidentale ; — _ hortensis, Müller, — — Si nous prenons séparément quelques-unes de ces formes, nous voyons par exemple que les cinq premières font partie de la faune caractéristique du centre caucasique, tandis que la sixième est propre au centre autrichien, la septième au centre alpique ; et cependant on voit par cette sorte d'échelle que toutes ces formes se tiennent les unes aux autres et qu'elles dérivent d’une même origine. Nous sommes done en droit d'en conclure que les espèces typiques de deux faunes locales peuvent descendre d'une mème souche commune. Une faune locale peut présenter un mélange de plusieurs faunes régionales non voisines. Pareille loi n’est qu'un sim- ple résultat des migrations rapides ou accidentelles de cer- taines formes. Il y a peu d'espèces communes par exemple entre la faune du Finistère et celle des Basses Pyrénées, et cependant dans ces deux stations si éloignées l’une de autre nous voyons une espèce spéciale, caractéristique, l'Helix quimperiana qui ne se trouve que dans ces deux stations. Notre faune nous a présenté plusieurs exemples de ce genre. 246 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Nous y avons retrouvé les Helix acuta, H. trochoides, 11. pisana, qui sont propres aux centres maritimes de la Médi- terranée ou de l'Océan et qui n’habitent pas les régions intermédiaires ; de même aussi nous y avons recueilli Île Ferussaccia Locardi qui n’avait été observé que dans l'Italie septentrionale, ou le Linnæa raphidia connu seulement en Dalmatie. Mais, comme nous l’avons dit, nous ne pouvons expliquer ces sortes d'anomalies dans les faunes que par des déplacements brusques, soit naturels, soit artificiels, accom- gnés parfois de l’acclimatation de ces espèces, acclimatation souvent suivie de modifications dans le galbe des coquilles. Les faunes des iles sont plus particulièrement des faunes locales. Celles qui ont été reliées à des continents à des époques peu lointaines, ont pu participer au développement progressif de la faune continentale; mais celles qui ont émergé à des époques antérieures aux dépôts tertiaires ont toujours une faune renfermant un plus grand nombre d’es- pèces particulières. Souvent les navires se chargent d’appor- ter les espèces des continents ; c’est ainsi, par exemple, qu'aux iles Madèresnous voyonsles Arionater, Limax agreslis, Testacella haliotidea, Hyalinia cellaria, H. crystallina, Helix pisana, H. rotundata, Pupa umbilicata, Balea perversu, etc. Ilest plus que probable que toutes ces formes aujourd'hui acclimatées sont d'importation très récente ; si l'on énumère la faune de ces iles, il faudra bien en tenir compte, mais on devra aussi ne les considérer que comme non typiques, quoi- qu elles ne se trouvent pas dans les centres malacologiques les plus voisins de ces iles ayant eux aussi leur faune propre. En général, la faune desiles renferme un grand nombre d'espèces spéciales, mais lorsqu'on arrive à les connaitre suffisamment, on remarque qu'elles se tiennent d'assez près. Quoiqu'elles soient bien différentes de celles des centres continentaux les plus voisins, on peut cependant arriver à les relier à d’autres DU BASSIN DU RHONE 247 espèces existant déjà sur d’autres continents. Pareil fait avait été déjà formulé par le D; P. Fischer (1): « Dans une même ile, on trouve quelques types de forme et une foule de mo- difications de ces types ». Ainsi en Corse, le groupe de l'Helix Raspaill Payraudeau à déjà donné les Helix insularis Crosse et Debeaux, 1. Roma - gnoli Dutailly, 4. viltalacciaca 3. Mabille, Æ. omphalophora Dutailly, Æ. cyrniaca Dutailly, 1. Revelieri Debeaux, etc. Ces formes, jusqu’à présent du moins, paraissent spéciales à l'ile de Corse. Mais elles se relient aux formes continentales d'Italie, de Sicile et de Dalmatie, par les Helix selosa Liegler, H. Salderiana Ziegler, A. Lefeburiana Ferussac, /. selipila Liegler, H. acropachia 3. Mabille, H. aggerivaga 4. Mabille, H, macrostoma v. Müblfeldt, etc. Il en est de même de la plu- part des autres formes plus ou moins typiques ou caractéris - tiques. Les faunes locales doivent en général leurs caractères propres, distinetifs, à l'influence émanant d'un centre d’ori- gine quaternaire quelconque plus ou moins modifié. Nous avons vu dans le chapitre précédent, que dans ces temps géo- logiques, lorsque les époques avaient une durée suffisante, permettant à la faune de se développer dans un milieu cons- tant, si l’époque suivante ne succédait à la précédente qu'avec une certaine lenteur, en d'autres termes si les évolutions géo- logiques s’effectuaient graduellement, la nouvelle faune avait le temps de conserver une partie des éléments de la faune primitive, soit sur [a même place, soit à la suite d’un mouve- ment migratoire. C'est ce que nous voyons de nos jours, lorsque nous comparons la faune actuelle avec la faune qua- ternaire qui la précède ; si la faune quaternaire à perdu un cer- tain nombre de ses formes, la faune actuelle a hérité de 80 079 (1) FiscuEr, 1856. De l'influence des iles sur les espèces, Zn Journ., Conch, vol. V, p. 35. 248 VARIATIONS MALACOLOGIQUES des espèces quaternaires. Mais si toutes les formes actuelles qui existaient à cette époque n'ont pas vécu dans la localité même où nous les observons aujourd'hui, elles n’en ont pas moins fait partie à ce moment d’un centre d'origine bien défini qui s’est ensuite déplacé en apportant des modifications notables dans le galbe de certaines espèces. C’est ainsi qu'avec les données actuelles de la paléontologie, il faudrait recher- cher dans les dépôts de l’époque du pleistocène inférieur du centre alpique l’origine de la faune actuelle ; ce centre s’est déplacé graduellement de l'Orient à l'Occident et du Nord au Sud; puis il a longtemps séjourné à la fin de l’époque qua- ternaire dans nos pays, avant de donner définitivement nais- sance à la faune actuelle de la partie centrale du bassin du Rhône. Les centres d'origine anciens, étant nécessairement soumis aux influences géologiques, ont dù, comme nous venons de le voir, se déplacer progressivement pour que ces éléments puissent autant que possible se retrouver dans un milieu équivalant à celui qu'ils venaient de quitter. De là ces mou- vements généraux dans les faunes dont nous retrouvons à chaque instant les preuves dans les études géologiques. Nous avons vu que les premiers éléments spécifiques de notre faune remontaient jusqu'aux terrains les plus anciens du plio- cène ; ces formes, comme le Planorois carinatus, Bythinia tentaculala, Helix lapicida, etce., ont pu vivre en place, dans notre pays depuis cette époque jusqu’à nos jours, puisque nous en retrouvons les traces dans toute la succession des terrains. Mais il existe, au contraire, un certain nombre d’es- pèces que nous n'avons jamaistrouvées à l’état fossile dans nos dépôts géologiques, et qui, tout en faisant partie de la faune locale actuelle, se retrouvent dans des faunes antérieures dans d’autres pays. Tels sont entre autres les Viliina major, V. pellucida, Succinea Pfeiffer, Hyalinia cellaria, 1. utidosa, DU BASSIN DU RHONE 249 H. nitidula, H. radiatula, Helix ruderata, H. rupestris, H. villosu, H. montana, H. cobresina, H. incarnata, Clausilia ven- trieosa, Cl. Rolphi, Pupa avenaceu, P. secale, P. dolium, P. doliolum, ete. Il est possible que de nouvelles recherches nous fassent un jour découvrir quelques-unes de ces espè- ces dans les dépôts quaternaires de notre bassin ; mais dans tous les cas, nous n’en constaterons pas moins dès au- jourd’hui que, si elles ont vécu dans nos pays, elles ont élé en bien moins grand nombre que dans leur vrai centre d’ori- gine. [l nous parait plus logique de dire qu’estimant nos re- cherches sur la faune quaternaire locale comme suffisam- ment avancées, nous reconnaissons qu’un grand nombre de formes qui vivent actuellement, n’ont pas fait partie de cette faune quaternaire locale, alors qu’elles existaient à la même époque dans d’autres pays. Elles ont done appartenu à des centres d’origine qui se sont déplacés à la fin de l’époque quaternaire devant les modifications climatériques produites par la succession des phénomènes géologiques. Aujourd'hui les centres d'apparition ne paraissent pas de- voir se modifier ouse déplacer: il n’y a du reste aucune rai- son pour qu’il en soit autrement. Tant. que dureront les phé- nomènes actuels, tant qu'aucune modification ne sera apportée dans le régime des choses existantes, ces faunes locales n'é- tant point troublées dans leur développement, continueront à se reproduire avec leur mème régularité sans rien changer à leur manière d’être. Mais si, par suite de nouvelles pertur- bations, l’état des choses venait encore à être modifié, ces launes, ayant à rechercher des conditions biologiques ana- logues à celles dans lesquelles elles se sont développées, se déplaceraient nécessairement, tout en se modifiant graduel- lement suivant des données nouvelles. Chez les mollusques aquatiques, surtout ceux qui vivent dans les rivières et les cours d'eaux, le déplacement des cen - VAR. MAL.T. Il. 17 250 VARIATIONS MALACOLOGIQUES tres d'origine s'effectue avec une bien plus grande facilité que chez les mollusques terrestres. On comprend, en elfet, que les jeunes individus sont facilement entrainés par la vitesse du courant; et quoiqu'ils soient exposés à trouver dans ce déplacement des milieux différents de ceux qui les ont vus naitre, leur acclimatation se fait, malgré cela, rapidement ; mais aussi, comme les formes de leurs coquilles sont plus simples, les modifications éprouvées par ces coquilles se traduiront par de légères différences à peine appréciables ; tandis que chez les mollusques terrestres des modifications équivalentes amèneront dans le galbe général de la coquille, ou tout au moins dans certaines parties, des variations beau- coup plus graves, et donneront facilement lieu à des variétés, et peut-être mème à des espèces nouvelles. Comme exemple de facilité de déplacement du centre d’origine chez les mol- lusques aquatiques, nous citerons le Dreissena polymorpha, localisé jadis sur les bords du Volga, dont le déplacement s'est effectué depuis peu d'années à travers tous les fleuves et les cours d'eaux de l'Europe. | Ce voisinage des cours d'eaux peut avoir une grande in- fluence sur le déplacement des centres d’origine des mollus - ques, même pour ceux qui sont exclusivement terrestres. Nous l'avons vu déjà à propos des migrations de certaines espèces, qui, venant à tomber dans l'eau, sont entrainées plus loin et font souche dans des milieux différents de leur habitat primitif. A la fin de l’époque quaternaire, lorsque les glaciers ont du battre en retraite, de grandes quantités d'eaux se sont écoulées suivant les pentes de nos collines. Que ce soit là le déluge biblique ou un déluge géologique, il n’en est pas moins positivement reconnu qu'à ce moment des eaux douces ont recouvert une grande partie du sol. C'est alors qu'ont dû s'opérer les grands déplacements des centres d'origine ; c'est à ce moment que les faunes quaternaires lo- DU BASSIN DU RHONE DEA | calisées ont dû être bouleversées et transportées loin de leurs milieux primitifs. Quelques espèces ontsurvéeu, qui vivaient sur les cimes des montagnes élevées, et celles-là seules ont donné naissance aux centres actuels d'apparition. I est done probable queles espèces typiques cantonnées surtout, comme nous l'avons dit, sur les sommets, à une allitude supérieure à 1,000 ou 1,200 mètres, vivaient déjà sur ces mêmes som - mets depuis fort longtemps, derniers débris d’une faune fos- sile qui nous est inconnue; les déluges quaternaires les ont forcément respectées, et nous les trouvons encore aujourd'hui cantonnées et localisées sur leurs sommets jusqu'à ce qu'une révolution géologique soit assez puissante pour les en faire descendre et les confondre avec une autre faune ou les faire à jamais disparaitre. C’est ainsi que nous ratlachons à une même forme ances- trale, les Helix canigonensis, H. Xatarti, qui vivent dans les Pyrénées avec les Helix arbustorum et H. Repellini, qui habi- tent les Alpes. Toutes ces formes voisines mais différentes dérivent d’une même souche ancestrale commune; mais aujourd’hui elles sont entièrement séparées; elles constituent les formes caractéristiques de deux centres d'apparition nou- veaux, puisqu'entre ces deux stations on ne retrouve actuel - lement aucune forme qui permette de les relier entre elles. De même aussi les Æelix alpina, H. Fontenilli, H. qglacialis, ont dû à un moment donné se relier aux autres Campylés des cimes alpestres de fa Suisse et de l'Italie. Les centres d'apparition dont les limites sont bornées, soit par de hautes montagnes, soit par la mer, ne peuvent pas avoir surl’ensemble dela faune uneinfluence aussi considéra- ble que s'ils avaient devant eux un champ complètement libre. Cest le cas, par exemple, du centre hispanique : borné de chaque côté par l'Océan ou par la Méditerranée, au nord par la grande chaine pyrénéenne, il à dû s'étendre sur tout 202 VARIATIONS MALACOLOGIQUES le littoral africain plutôt que sur la France. Mais si, au con- traire, ces centres sont découpés par de longues et profondes vallées, on conçoit que, par les cours d’eaux mêmes, il se présente un mode de migration plus facile, plus prompt, qui entraine une rapide dispersion des espèces. Enfin l'influence maritime agit encore d’une autre façon, elle donne à toute la région une sorte d'équilibre climatolo- gique qui permet et facilite l'acclimatation des espèces. Nous voyons, en effet, que sur tout le littoral méditerranéen un grand nombre d'espèces typiques ont pu se propager et s’éten- dre sur un espace de pays considérable ; de mème aussi sur la côte occidentale européenne, grâce à l’action du gulf-stream, une sorte d'unification climatérique, mais qui ne se fait sentir que sur peu d'étendue en longitude, a permis aux mêmes espèces de se répandre et de se développer sur une grande partie de ce littoral. C’est ce qui nous explique que-bien des espèces du littoral du golfe de Gascogne ou même du littoral méditerranéen peuvent se retrouver sur les côtes du Nord- Ouest de la France. Ce voisinage maritime, comme nous l’exposerons du reste plus loin, en amenant un équilibre elimatérique des milieux, agit sur les mollusques physiologiquement ; aussi voyons - nous toujours les faunes maritimes avec une grande exten- sion sur tout le littoral, mais sans s'étendre au delà. Le voisinage fluviatile agit, au contraire, mécaniquement en favorisant le déplacement des mollusques ; aussi c’est le long des vallées que les faunes terrestres sont, en général, les plus riches et les plus variées; c’est Ià également que l'on trouve le plus grand nombre de variétés pour une même espèce donnée. Quel rôle notre faune joue-t-elle dans ces centres d'appari- tion? Notre région, nous l'avons dit, a présenté dans les temps géologiques à plusieurs reprises les caractères les plus DU BASSIN DU RHONE 255 précis d’un centre d'apparition, notamment au commence- ment de l’époque pliocène, et pendantles dépôts quaternaires. Aujourd’hui, elle fait partie du grand centre alpique général de M. Bourguignat, qui est peut-être le plus riche et le plus fécond en espèces aux formes nouvelles. Ce centre qui pro- cède de la faune quaternaire a eu son berceau dans les dépôts pleistocènes de Cannstadt, de Burgtonna, etc., dans l’Allema- one du Nord; une partie de ces faunes à leur tour se sont dispersées à la fin de l'époque quaternaire, sans doute sous l'influence de la rétrocession des glaciers, tandis que dans ce grand bassin malacologique de nombreux centres locaux se sont constitués ; c’est ainsi qu'a dù se former notre centre alpestre local avec sa faune particulière, ses formes spécia- les, tandis que nos plaines et nos vallées gardaient l’em - preinte de la faune quaternaire. Plus tard encore, sous l'influence de déplacements acciden- tels, une sorte de fusion s’est opérée entre notre centre local et celui de la partie sud de la vallée du Rhône ; mais ce mé- lange des deux faunes n’a eu lieu que dans la vallée même, sans étendre plus haut ses ramifications. Telle est en somme l’histoire de notre faune, elle renfer- me donc trois éléments distincts. Un élément spécifique an- cien, datant de l’époque quaternaire, répandu dans les régions basses et ayant son origine dans le centre de l'Europe; un élément spécifique nouveau, constitutant un centre d’appa- rilion local dans les sommets alpestres, mais dont les formes se relient toutefois à d’autres formes montagnardes des cimes de la Suisse et de l'Italie septentrionale : enfin un élément accidentel emprunté récemment à la faune du littoral médi- terranéen, toujours cantonné dans les plaines et les vallées. IX CENTRES DE DISPERSION Les centres d'apparition deviennent plus tard des centres de dispersion. — Régions malaco- logiques. — Comparaison de la faune Iÿonnaise avec Ia faune d'Europe. — Tableaux. — Corrélations eutre la faune lyonnaise et chacune des cinq grandes faunes régionales de PEurope. — Influence des littoraux marilimes sur les dispersions, soit comme point d'a- boulissement des grands cours d'eau, soit à cause de la régularité du climat, — Facilité de dispersion variable chez les mollusques.— Les petites espèces sont celles qui se sont le pius dispersées. — Continuité dans la dispersion. — Espèces boreales sporadiques. — Tableau de l'aréa géographique extraeuropéen des espèces malacologiques de la partie centrale du bassin du Rhône. Nous venons de voir que les faunes malacologiques se composent en général de deux éléments, l’un sédentaire, l'autre cosmopolite. Ces formes sédentaires donnent aux centres d'apparition leurs cachets respectifs, basés sur les caractères de ces espèces ainsi localisées. Mais plus tard, ces centres venant à se transformer ou à disparaitre, les formes primitivement sédentaires disparaissent ou se déplacent et passent au rang d'espèce cosmopolite, soit directement, soit à la suite de modifications dans leurs caractères. Les centres d'apparition deviennent à leur tour des centres de dispersion. La faune de la partie centrale du bassin du Rhône renfer- me un grand nombre d'espèces plus ou moins cosmopolites que l’on retrouve dans la faune européenne. Dans ce chapi- ‘ DU BASSIN DU RHONE 259 tre, nous nous proposons de mettre en parallèle les éléments de la faune de notre région avec ceux des autres grands centres européens. Nous ferons ainsi ressortir les espèces sédentaires appartenant au centre local des espèces cosmopolites qui étendent plus ou moins loin leurs ramili- cations. Les divisions géographiques ou politiques ne répondent pas aux modes de dispersion des mollusques. Aussi, pour les étudier, serons-nous obligé d'établir une division spé - ciale qui embrassera des étendues de pays fort variables, mais cependant situées dans des conditions climatériques cénérales offrant une certaine analogie. À ces divisions nous donnerons le nom de régions malacologiques. Plusieurs modes de divisions malacologiques ont été pro- posés pour la répartition continentale des mollusques Dans un récent travail de l’un des auteurs les plus autorisés sur la distribution géographique des espèces, M. le D' Kobelt (f) divise le territoire de la faune européenne en quatre zones parallèles : 1° la province arctique boréale ; 2° la province 20 germanique ; 3° la province alpique ; 4° la province médi-- terranéenne. Ce mode de répartition comprend des contrées dont les faunes sont cependant bien différentes ; c’est ainsi que dans la province germanique par exemple, M. Kobelt fait entrer les faunes de la Scandinavie, de la Russie centrale, de l'Allemagne, du Nord de la France et de l'Angleterre. M. le D' P. Fischer (2) a proposé un autre mode de réparti- Lion qui nous semble plus rationnel et qui réunit des contrées mieux comparables. Nous adopterons ce niode de répartition qui comprend cinq zones ou régions différentes, non plus (1) Kobelt, 1877. « Zu Sate und Berichtigungen zu meinem Catalog der im Europaischen Fau- nenzebiete lebenden Binnenconchylien», tn Jahrbucher der deustch. Malue. Gesellseh., Nol.I\. (2) Fischer, 1876. Faune malacol, de la vallée de Caulerets, suivie d'une élude Sur la répartition des mollusques dans les Pyrénées, in Jowrn, de Conch., \. XNIV, p: ol: 256 VARIATIONS MALACOLOGIQUES groupées parallèlement, mais bien suivant leurs affinités malacologiques réciproques. 1° Région septentrionale ou germanique. — Cette région comprend les bassins de l'océan boréal, de la Baltique et de la mer du Nord; elle embrasse la Russie du Nord enropéenne, la Scandinavie, Le Danemark, toute l'Allemagne du Nord, la Hol- lande et la Belgique, enfin la partie septentrionale et orientale des iles Britanniques. Le nombre des espèces caractéristiques de cette faune est peu considérable ; elles sont surtout bo- réales; nous citerons : Arion limacopus Westerlund, Limax norvegicus West., Helix lamellata Jeffreys, H. harpa Say, H. Schrenki Midd., H. colliniana Bourg., Clausilia Nilssoni West., CE. œæmula West, Cl. connectens West., Pupa costulata Nilsson, P. gravida West., Limnæa atlenuala Say, Planorbis discus Parreys, Valvata frigida West., Hydrobia Stein v. Martens, etc. 2° Région occidentale ou atlantique. — Cette région, de moins grande étendue que la première, occupe la partie oc- cidentale de l'Europe, depuis lIslande jusqu'au midi du Portugal ; c’est surtout dans le sud, notamment en Portugal. que résident les formes les plus typiques, tandis que les formes communes s'étendent sur tout le littoral. Parmi les espèces caractéristiques, nous citerons : Parmacella Valen- ciennest Webb. et Ben., Geomalacus maculosus Müll., Arion fuligineus Morelet, Helix Buvinieri Michaud, Æ. Brigantina Mingo, 1. cistorum Morelet, 1. quimperiana Ferussac, Pupa anglica Pot. et Mich., P. Baillensi Dupuy, Bulimus Pringi Pfeiffer, Clausilia Porlensis Pfeiffer, CL. subuliformis Kuster, Pomatias Hidalgoi Grosse, Nenia Pauli 3. Mabille, etc. 3° Région méridionale ou circumméditerranéenne. — Elle a pour centre la mer Méditerranée, et pour limites les terri- toires continentaux qui l'entourent, depuis l'Espagne jusqu'en Syrie de l’est à l’ouest, du Midi de la France jusqu'en Algérie “ DU BASSIN DU RIHONE 257 en allant du nord au sud. À cette région se rattachent donc le Sud et l'Est de l'Espagne, le Midi de la France, toute l'Ita- lie, la Corse, la Sardaigne et la Sicile, la Dalmatie, l'Albanie, l'Epire, la Macédoine, la Grèce, la Thrace, la Syrie etle Nord de l'Afrique. Les types les plus caractéristiques sont : Leuco- chroa candidissima Draparnaud, Helix flavida Ziegler, . lens Ferussac, H. Anconœ Issel, H. olivieri Ferussac, H. neglecta Drap., H.cretica Feruss., H. apicina Lamarck, À. profuga Schmidt, À. terrestris Pennant, H. aperta Born, Rumina de- collata Linné, Clausilia pi ceala Biegler, Cl. leucostigma Zie- oler, CI. bidens Linné, etc. 4. Région centrale ou pontique. — Cette région comprend les pays qui ont pour centre la mer Noire et la mer d’Azof. Ce sont l'Autriche, la Hongrie, la Transylvanie, la Serbie, la Valachie, la Bulgarie, la Crimée, le Sud de la Russie d'Europe et le Nord de la Turquie d'Asie. Comme espèces caractéristi- ques de cette zone nous citerons Helix solaria Menke, H. Hau/- feni Schmidt, H. umbrosa Partsch, H. filicina Schmidt, 1. leu- cozona Liegler, Æ. transylvanica Liegler, H. banatica Partsch, H. faustina Ziegler, H. trizona ZLiegler, H. vindobonensis Pfeiffer, Clausilia curniolica F. Schmidt, C{. dacica Fried., CL. ornata Ziegler, Zospeum spelœum Rossm.,Z.lautum Frauenf. Z. obesum Schmidt, etc. 9. Région orientale ou caspique. — Cette dernière région a pour centre [a mer Caspienne ; elle est composée des bassins de l'Oural, du Volga, du Téreck, du :Kour et de l’Araxe son af- fluent. La Transeaucasie et une partie du littoral caspique de la Perse appartiennent également à cette région. Les espèces typiques sont : yalinia mingrelica Mousson, H. Duboisi Charp., Helix Buchi Dubois, H. aristata Krynicki, H. circas- sica Charpentier, Æ. Eichwatdi Pfeiffer, H. atrolabiataKrynicki> Bulimus Nogelli Roth, Chondrus Duboisi Mousson, Pupa cau- casica Bayer, Clausilia somchetica Pfeiffer, Cl. Sieversi Pfeiffer, 258 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Physa Gerhurdi Parreyss, Paludina Duboisiana Mousson, Ne- ritina hiturata Eichwald, etc. Ces cinq régions embrassent, comme on a pule voir, toute l'Europe et même une partie de l'Afrique et de l'Asie. On ne peut, en effet, distraire de la faune géographiquement euro - péenne certaines espèces de l'Algérie ou de la Transcaucasic. M. Bourguignat (1), dans sa Malacologie de l'Algérie, a cite 85 espèces qui sont communes à la faune algérienne et à la faune française ; de même M. Mousson indique dans la faune de la Russie méridionale et asiatique plus de quarante-cinc espèces appartenant à la faune du centre de l’Europe (2). Comme le fait observer M. le D' P. Fischer, cette faune euro- péenne n’est qu'une portion de la grande province Paléareti - que de Sclater, formée par le Nord de l'Asie, l’Europe, tout le périmètre de la Méditerranée y compris le nord de l'Afrique et l’ouest de l'Asie. Celte province est caractérisée par la pré- sence des genres Testacella, Daudebardia, Geomalacus, Par- macella, Zospeum, Pomalias, ele. Ces grandes faunes régionales, s'appliquant à des contrées d'une étendue considérable, comprennent nécessairement chacune tout un régime de faunes secondaires moins impor- lantes, moins générales, surtout plus localisées, qui constli- tuent les faunes sous-régionales ou locales. Tel est le cas de notre faune qui, tout en ayant des espèces communes avec d’autres faunes, a aussi un certain nombre d'espèces spé- ciales au pays. Lorsque ces faunes locales s'écartent un peu de celles des régions assignées dans les cinq grandes divisions que nous venons de tracer, et c'est précisément notre cas, l'étude de ces faunes devient encore plus intéressante, car ! (1) Bourguignat, 1870. Malacologie de l'Algérie. (2) Mousson, 1873, In Journ. de conch. t. XXI, p. 192 — 1876. Loc. cit, 1. XXIV, 24. DU BASSIN DU RHONE 259 elle permet parfois de voir de quelle facon les faunes locales se sont constituées. | Mais en dehors des espèces ainsi localisées, soit dans cha- cune de ces régions, soit mème communes à tous les cinq ou à plusieurs d’entre elles, il est un certain nombre de mol- lusques que nous retrouvons en dehors de ces divisions, et qui vivent en même temps en Europe, dans le Nord de l'Asie, jusqu’en Amérique, et mème dans quelques iles africaines. Ces formes dont nous parlerons plus loin, malgré leur exces- sive dispersion ne sortent pas de l'hémisphère boréal; M. le D' P. Fischer les désigne sous le nom d'espèces boréales spo- radiques. Dans le tableau suivant, nous avons comparé la faune lo - cale de la partie centrale du bassin du Rhône avec celle des cinq grandes régions malacologiques ainsi établies, classant à part les espèces boréales sporadiques. Pour établir cette répartilion nous nous somines plus par- ticulièrement reporté aux travaux des auteurs suivants ; pour la faune septentrionale : Colbeau, Hanley, Jeffreys, Kreg- linger, Westerlund; pour la faune occidentale : Bourguignat, Dupuy, Jeffreys, Moquin-Tandon, Morelet; pour la faune mé- ridionale : Bourguignat, Brusina, Hidalgo, Paulucci, Wester- lund et Blane ; pour la faune centrale : Bielz, Kobelt, Kreglin- ger; enfin pour la faune occidentale : Bourguignat, Kobel!, Mousson, elc. 260 VARIATIONS MALACOLOGIQUES TABLEAU COMPARATIF DE LA FAUNE DE LA PARTIE CENTRALE DU BASSIN DU RHONE AVEC LES DIFFÉRENTES FAUNES RÉGIONALES DE L'EUROPE ESPÈCES RÉGIONALES LISTE DES ESPÈCES BOREALES de la partie centrale SPORADIQUES DU BASSIN DU RHÔNE GERMANIQUES ATLANTIQUES CIRCUMMÉD | - TERRANÉENNES PONTIQUES ESPÈCES Arion empiricorum, Fer. . —Muuter, LiInnés le; — albus, Müller. . . — campestris,J. Mab. — subfuscus, Drap. . — mMmelanocephalus,F.-B. — hortensis, Ferussac. — Dupuyanus, Bourg. . Geomalacus Bourguignati,M. Limax agrestis, Linné.. . — sylvaticus, Drap. . . — Lerythrus, Bourg.» — cinereo-niger, Wolf.. — helveticus, Bourg... — cinereus, Lister. — eubalius, Bourg. =Vvarienaius, Drap. 00 — alpinus? Ferussac. Krynickillus bruneus, Drap. Milax marginatus, Müller. . ROUES Drap. Testacella haliotidea, Drap. . Vitrina pellucida, Müller. . — major, Ferussac. . — annularis, Studer. — diaphana, Drap. — nivalis, Charp.. Succinea putris, Linné. — Charpentieri, Dum. . — Mortilleti, Bourg. . DU BASSIN LISTE DES ESPÈCES de la partie centrale DU BASSIN DU RHÔNE Succinea P feifferi, Rossm. elegans, Risso.. . acrambleia, Mab.. F'agotiana, Bourg. oblonga, Drap. . arenaria, Bouch. . humilis, Drouët. . Hyalinia lucida, Drap. septentrionalis, B. Blauneri, Shutt. . cellaria, Müller. . pilatica, Bourg. . glabra, Studer. . nov. form. « + alliaria, Müller. . nitens, Michaud. . subnitens, Bourg. , Dutaillyana, T. Mab.. nitida, Müller.. . nitidosa, Ferussac. nitidula, Drap. . radiatula, Alder. . Petronella, Charp. viridula, Menke. . Dumontiana, Bourg. hydatina, Rossm.. pseudohydatina, B. crystallina, Müller. subterranea, Bourg. . contracta, Westerl. Subrimata, Reinh. diaphana, Sluder. fulva, Müller. . . Helix rotundata, Müiler. . ruderata, Studer, . ESPÈCES BOREALES SPORADIQUES DU RIIONE GERMANIQUES ESPÈCES RÉGIONALES en ee "1 0 —— ATLANTIQUES CIRCUMMÉDI- TERRANÉENNES PONTIQUES ——_—— = CASPIQUES 262 VARIATIONS MALACOLOGIQUES 5 7 ESPÈCES RÉGIONALES LISTES SPECESUTS EU ere PO ou É É a 2 ë de la partie centrale Au > > EE 5 5 SAN NENMEN A EN EAU DU BASSIN DU RHÔNE SE 2 S SE Z g = = Ê = € Ex O A [&] < Le} ë a | Helix rupestris, Studer. «+ .| ? nat EE AN 0 FE » — pygmæa, Drap. + «| — = » ER 6 2 AE » = hb'aeuleuta, Müller." 10e) ns — = — » — obvoluta, Müller. . .| ? a == PR ) » — holoserica, Studer. .l ? » » FE » » — personata, Lamarck. .| ? » » a FF. » — pulchella, Müller. . .! — SR mu HV INA —= — costata, Müller. . . 2 Eu ae a FR » — bidens,Chemnitz. . .! ? = » Ke) Men » — villosa, Studer. . CA = » FL A RE) » — _ phorochætia, Bourg. . » » » DR EUESO) » — montana, Studer. .| a » è » » — submontana, Mab. . » pr » & » » —\circinnata, NStUGEr: en À » 4 » » — glypta, P. Fagot. . . » » » ss — » — clandestina, Born. .| » » » nait » —. hispida, Linné. . .| — ro — TA ee VAE DOME — gratianopolitana, R.| » » » » » IN depilata, Drap re 0 = » : = » — Bourniana, Bourg. .| » » » » » » — cobresina, v. Alten. .! » Tr » » — » — dliberta, Westerl. . . » — » » » » — plebeia, Drap. + . . » » » » » » — SETICCO DEAD eee » 2 = = 2e = CIO, NENEIZ, certe » » » NA » » Lu CINCICUG, Drap... |) » » Der » » — incarnala, Müller. .|\ » — » au _ » — Juriniana, Bourg. . » » » » » » — cemenelea, Risso. . . » » » vi) » — yrubella, Risso.. . . » » AUDE LE AE PAIE) » — carthusiana, Müller. .| — — _— — ne » — glabella,Drap.. . . » » » » » » — lavandulæ, Bourg. . » » » » » » — diurna,Bourg.. . : E » » » » » — Putoniana, Mab.. .|j » » » » « » LISTE DES ESPÊCES DU BASSIN de la partie centrale DU BASSIN DU RHÔNE Helix nov. form. . fruticum, Müller. . LStrigella, Drap. - alpina,F.-Big.. . glacialis, Thomas. . Fontenilli, Michaud. zonata, Studer. . fœtens, Studer. . lapicida, Linné. . arbustorum, Linné. Repellini, Charp. . pisana, Müller. . ericetorumr, Müller. ericetella, Jouss. . variabilis, Drap. . lineata, Olivi. . . fasciolata, Poiret. . gesocribatensis, B. heripensis, Mab. . intersecta, Michaud. caperata, Montagu. diniensis, Rambur. costulata, Ziegler. unifasciata, Poiret. gratiosa, Studer. . trochoides, Poiret. . acuta, Müller. - . nemoralis, Linné. hortensis, Müller, . sylcatica, Drap. subaustriaca, Bourg. muralis, Müller. . aspersa, Müller. . pomatia, Linné. Dulimus montanus, Drap. S ÿ] ES BOREALE SPORADIQUES ESPE( » DU RHONE ESPÈCES RÉGIONALES a TERRANÉENNES | 13 2 … ES =) =) Se } = TNT = = S a] æ El e) < © ) » » — » = — | )) eo » | » » » » » » » » » » — » » Se — — ) » » = » = TE » » = » RE ar » — » = — » » » » » » » » — = » == == » » » Le » 2L. » er = » » — » » == » — == » » Fr » » ne » » = a » PONTIQUES CASPIQUES 264 VARIATIONS MALACOLOGIQUES 5 à ESPÈCES RÉGIONALES ÉTSDEMDSNESPAGES | 2 2) CTP RIRE 2 = = Es 8 & 2 a de la partie centrale pue =; = ë & 2, D : ES | < SUN SAINS = DU BASSIN DU RHÔNE A & £ È £ £ A 2 a Le) “< Le E Bulimus obscurus, Müller. .| » — _ a, ne à — detritus, Müller. . .| » » » M 5 Chondrus tridens, Müller.. .| » » » pu nèx. Es — quadridens, Müller. . » » » = _ » Ferussacia subcylindrica, L..| — = — _ — Le COLIN. tDIDUELS- » » » » » » — Locardi, Bourg. : » » » — » » Cæcilianella acicula, Müller. = — = == — — Liesvillei, Bourg. . » ) — » » » — uniplicata, Bourg. » » » » » » Clausilia Montgermonti, B. » » » » » » — silanica, Bourg. . » » » » » » — laminata, Montagu. » — » — — » — fimbriata, Ziegler. » » » — » » — punctata, Michaud. » » » — » » — ventricosa, Drap. . . » — » = — » — micropleuros, Bourg.| » » » » » » — earina, Bourg. . . . » » » » » » — carthusiana, Bourg. » » » » » » — Rolphi, Leach. . » — » 2 » » — sabaudina, Bourg. » » » » » » — lineolata, Held. . » » » ue » » — mucida, Liegler. . » » » » — » — plicatula, Drap. + » — » _ — » — ylora, Bourg. . . » » » » » » — dubia, Drap. . . » _ » = — » — Dupuyana, Bourg. » » » » » » — gallica, Bourg.. +. » » » » » ?) — Reboudi, Dupuy. . » » » » » » — cruciata, Studer. . » » » = » » — Mmicratracta, Bourg. » » » » » » — nigricans, Pultney. » — » — » » — nantuacina, Bourg. » » » SRE Re » — crenulata, Risso. » » RE » » — belonidea, Bourg. DEL 20e) SE » » DU BASSIN DU RHONE LISTE DES ESPECES de la partie centrale DU BASSIN DU RHÔNE Cla usilia dilophila, Bourg. parvula, Studer. . corynodes, Held. . . Tettelbachiana, R. . Balia perversa, Linné. . . Deshayesiana, Bourg Pupa quinquedentata, Born. megacheilos, Cris. bigorriensis, Charp. . avenacea, Brug. . Farinesi, des Moul. . hordeuin, Studer. . frumentum, Drap. secale, Drap. . . grarum, Drap. . polyodon, Drap. . multidentata, Olivi. . biplicata, Michaud. . dolium, Drap. . . . doliolum, Brug. . umbilicata, Drap. . Semproni, Charp.. muscorum, Linné. . bigranata, Rossm. triplicata, Studer. . Vertigo muscorum, Drap . inornata, Michaud. edentula, Drap. Moulinsiana, Dup. pPygmæa, Drap. . Shuttleworthiana, Ch. antivertigo, Drap. plicata, A. Müller. . pusilla, Müller. . . Carychium minimum, Müller. VAR. MAL. T. I, ESPÈCES BO4ÉALE SPORADIQUES ESPÈCES RÉGIONALES ER "ee an n | A a [es a a un | n =] ==) a Z = : rä| Es =] EN = = Z E 5 ce ei = Z TA + = < 2 4 Z n = = 1 FE = < re] = EN (= 2 © S < © EE » » » » » —= » — » » » » » — » » » ) — » — —— — » » | » » — » » » » — » » » » lo » » » )) — ») » —— » —_— » » » » ——- » » » » » » » ») )) — » » > ») — » ») » » — )) » » ) — » » ») ») — )) »» » » » » » ») » — == ») = ») — = )) » » | —— )) » = = — » | » » )) = » » » — ») » =, EE | == HS ) » )) | » )» ») — ») _— ») )) — » — » » — » —— Te ) 2 ») | » )) » TE EG GE né = )) Ta » | — — » = ») — — » { € —— — , — — ) LISTE DES ESPÈCES VARIATIONS MALACOLOGIQUES de la partie centrale DU BASSIN DU RHÔNE Carychium tridentatum, Risso. Planorbis nitidus, Müller. fontanus, Lightfoot. complanatus, Linné. submarginatus, Cr. carinatus, Müller. . dubius, Hartmann. . vortex, Linné. . . rotundatus, Poiret. spirorbis, Linné. . cristatus, Linné. . imbricatus, M. : contortus, Linné. . albus, Müller. + . Crosseanus, Bourg. corneus, Linné. . + Physa fontinalis, Linné. . Taslei, Bourg. . aCuLa Drap hypnorum, Linné.. Limnæa auricularia, Linné. . canalis, Villa. . . limosa, Linné. . . fontinalis, Studer. . marginata, Mich.. peregra, Müller. . frigida, Charp. . corrosa, Dum. Mor. intermedia, Fer. . truncatula, Müller, corvus, Gmelin.. . palustris, Müller. . stagnalis,Linné. . turgida, Hartmann. elophila, Bourg. . ESPÈCES BORÉALE SPORATIQUES GERMANIQUES ESPÈCES RÉGIONALES ©" ,. CIRCUMMED!- TERRAN£ÉENNES PONTIQUES » CASPIQUES » » » » DU BASSIN DU RHONE Es ESPÈCES RÉGIONALES ; A) ee LA LISTE DES ESPECES = 2, > PNR 2 VENTE: de la partie centrale ee £ a 2 5 Z é é ns | 2% = HET = DU BASSIN DU RHÔNE a E ÈÊ < ONE Z Z a = Ex ic a (] Zi ue on Limnæa raplidia, Bourg. . » » » SE » » OURS TINNE AN » » » = » » — : glabra, Müller. 2) — — Pa » » Ancylus simplex, Buc'Hoz. .| — » — = — » OO IPUIUUS, Des. » » » =: » » — CCOpPUlOIUES) Jan. ne » » » _ » » UT OSUS ABOUTE- EE » » — LE » » — lacustris, Linné. . . » » — = == » Cyclostoma elegans, Müller. .| » — es eu Pa 5 — lutetianum, Bourg. . » ) » » » » Pomatias apricus, Meus.. .| » » » » » » — sabaudinus, Bourg. . » » » » » » — septemspiralis, R. » ne == — ‘» » Acme polita, L. Pfeiffer. . .| » mi » —_ » » — Dupuyi, Paladilhe. » 2: » » » » — dneata, Drap. … . . ) Pa — — » )) Vivipara communis, Moq . » SG » == — » js Aata, MUüler: "07. à TE = — » » Bythinia tentaculata, Linné. .| — == — — » Amnicola similis, Drap. . . » — » » » —= Paludinella viridis, Poiret. .| » es » » » » a VOUS DIAD EE » » » = » » — MODO IL ES le » ») ) » » » — bulimoidea, Mich.. » » » = » » —. abbreviata, Mich. . . » » » — » » — turriculata, Palad. . ) » » » » » nm UNOides , Palad.…. » » » » » » nn 00 OM EN Ne: » » » S » ; Belgrandia vitrea, Drap. . » — » » » » Hydrobia Charpyi, Palad. .| » » » » Ù » ar ANS d'NÉCILNS » » » » » » Lartetia Ciaphana, Mich. . ) » » » » » Locardia apocrypha, Folin. » — » » : » » Moitessieria nov. form. . » » » » » » — Contorta, Menkc. . . » » » — ) » 68 VARIATIONS MALACOLOGIQUES a) = fe ESPÈCES RÉGIONALES BIS ESPÈCES, | 8 Es nn Es Er un de la partie centrale à El > 3, = É s £ 2 & £ = £ © © DU BASSIN DU RHÔNE SUR AP AR 5 Be 73 Ex HE Es S 2 © < Le} = Valvata piscinalis, Müller. | — _ — _ _ » — (OUtUSG, SUUUEL- 2... 07-10) » » » — » — alpestris, Blauner.. . » » » » = » — mainuta, Drap. . . . » — = — _ » — cristata, Müller. . .| — — — — == » Neritina fluviatilis, Linné. .| » — == — = » Sphærium rivicola, Leach. . » — — » » » —]NcknolUs NOM. …- » » » » » » — Terverianum, D. . » » — » » » — Brochonianum, B. .| » — — » » » — corneum, Linné. . . » » » | — — » — rivale, Drap. .+ . . » » » » » » — nucleum, Studer, . .| » » » — Se ce — ovale,Bourguignat.. .| » » at — » » — lacustre, Müller. . .| — — — — — » Pisidium pusillum, Gm. . | — = a = — » — nitidum, Jenyns. . . » — » == » » — Gassiesianum, Dup. .| » » » » » .» — casertanum, Poli.. . » EE ŒuE — » » — amnicum, Müller. . .| — — En — —= — — Henslowanum, Sh. . » = » » » » Unio sinuatus, Lamarck. . . » » » — » » — yrhomboideus, Sch. . » » == » » » _ subtetragonus, Mich. . » » » » » » — Draparnaldi, Des. . » » 2 » » » — Barraudi, Bonh.. . » » » — » » — Philippi, Dupuy. . | » » — » » » OCT, CNIISSON UT. » — » » — » — NCASSUS, CNDIIID 0e » — » — — » — batarus, Nilsson. . . » — —— — —— _— — sSquamosus, Charp. » » » » » Es OU TIONCUS ANAL » » » » » » — RANUSNL IMAC" » » » » ») » RC INNICUS ALICCIer 1-0 — » » » » — reniformis, Schm. .| » » » » ni DU BASSIN DU RHONE LISTE DES ESPÈCES de la partie centrale DU BASSIN DU RHÔNE Unio Sanderi, Villa. . corrosus, Villa. . subtilis, Drouët. . elongatulus, Mübif. Requieni, Mich. . Roussii, Dupuy. . Turtont, Payr. platyrhynchoideus, D. pictorum, Linné. . tumidus, Phlip. . Margaritana margaritif., L. Pseudanodonta nov. form. . Anodonta eucypha, Bourg. acyrta, Bourg. . . cygnæa, Linné. . Locardi, Bourg. . Forchammeri, Môür. arenaria, Schrôüter. ponderosa, Pfeifrer. Dupuyi, Ray et D. tumida, Bourg. . Rossmässleriana, D. . oblonga, Millet. . rostrata, Kokeil. . Milleti, Ray et D. ,, piscinalis, Nilsson. Servaini, Bourg. . illuviosa, Bourg anatina, Linné. ,. nycteriana, Bourg. parvula, Drouët. . alpestris,Charp. . . Dreissena polymorpha, Pal. . DENT ET QE LL PTS ETES Le Trac als AE SO EE ES RU BORÉALES ESPÈCES ES - J U SPORADIQ ESPÈCES RÉGIONALES a ——" ——— PP, 2 SE EURE 2 SON FER EAIES ma = = E à © S < Z 5 Z E a = pl ES Z un is = £ € S S (2) < O es) » ») — » » » » — » » » » » » » » » == » » » » Et » » » » » » » » » » » ») » » == — » = Lie “es = » > » EP ne —— » _— » ares » » » » » » » —— » » » )) » » » » » = < es > » » » » )) » —— » » » )] ns Es a — » —— » — » » » » ne ») » » » — » ») » — » » » ) » ») » » » » — )) » » » » » » = » = = » » ») » » » » » » » » == = — » » » » » » » » » »» » » » » » » » as — Æ — » 270 VARIATIONS MALACOLOGIQUES La localisation de ces faunes n’a rien d'absolu ; les limites danslesquelles ellessont cantonnées sontnécessairementassez larges et souvent même nous en voyons les éléments se méler entre eux. Ainsi, la faune septentrionale se mêle à la faune occidentale en Irlande et en Angleterre, quoiqu'à la rigueur dans cette contrée la chaine des monts Cheviot et du Wes- sen puisse servir de ligne de séparation entre les deux area ; en France, les collines de lArtois et des Ardennes n'empê- chent pas les formes septentrionales de venir jusque dans le bassin de la Seine; de mème qu’en Allemagne et en Suisse quelques -unes de ces espèces s’avancent assez au sud par les vallées de l'Elbe, du Wéser et du Rhin. Quant à la Russie, nous ne Connaisons pas assez la faune de sa partie centrale pour savoir si les collines de la Pologne ou les monts Valdaï ont servi d'obstacles aux formes septentrionales. Quoi qu'il en soit, la comparaison générale de notre faune avec les différentes faunes de l'Europe nous conduit aux ré- sultats suivants : MOLLUSQUES FAUNES RL OO TERRESTRES | AQUATIQUES | A ES GO ne RARE ee | Te TE PERS Faune:lSOnnaiSe te nr ENR MAL PE OS 129 344 | boréales sporadiques. es 2e 34—16%| 22—17%| 56—160 A\Peenmaniques 0 UN | SN 97—45 G1—47 | 15<—46 Æ h Æ = : 9Q pur, D] © ) atlantiques. : = 68—31 49—38 |117—24 = cicumméditerranéennes AP: £ ss | 186—63 7457 | 210—51 &f pontiques. . E 5 | 75—35 | 48-33 | 11834 Caspiques se a NUE PU STATS 12—9 30—8 On voit ainsi, comme cela était facile à prévoir, que notre faune participe surtout de la faune circumméditerra- DU BASSIN DU RHONE 071 néenne et de la faune germanique, tandis que ses affinités avec les faunes atlantiques et pontiques sont beaucoup moin- dres; mais un fait fort remarquable, c’est que son affinité pour ces deux faunes prises séparément est sensiblement la même. En outre, on remarquera que l'élément terrestre par rapport à l'élément aquatique est à peu près le même pour les diffé - rentes faunes Notre région, sur trois eent quarante-quatre espèces, pos- sède environ cent cinquante-huit espèces qui appartiennent à la grande région septentrionale ; dans ce nombre quelques espèces seulement sont exclusivement communes à ces deux régions, comme Aron melanocephalus, Krynickillus bruneus, Hyalinia viridula, H. subterranea, H. montana, H. villosa, IT. submontanu, H. liberla, Paludinella viridis, Belgrandia vitrea, Unio amnicus, ete. Mais on remarque que la plupart de ces espèces n’appartiennent en quelque sorte qu'incidemment à la faune de la région septentrionale ; ce sont souvent des for- mes propres à un centre d'apparition mixte situé entre la région septentrionale et la région méridionale ; à ce groupe appartiennentles Helix villosa, H. montana, IT. circinnalu, ete. Notre faune, procédant surtout de la faune quaternaire du centre de l'Europe, a gardé une grande partie de ses carac- tères et lorsque après l'époque quaternaire, la faune euro- péenne moderne s’est constituée, alors que les espèces spé- ciales du Nord de l'Europe se sont développées, il n'y a eu aucune raison pour que notre faune locale s’associàt aux élé- ments nouveaux de la faune septentrionale. Plus tard les relations commerciales, les apports par les voies navigables ct les chemins de fer ont éte assez restreints pour que nous ne voyions qu'un petit nombre d'espèces de ces pays être ap- portées jasque dans notre région, comme cela a pu avoir lieu pour les espèces de la région méditerranéenne, Quelques rares « formes aquatiques seulement, parmi les bivalves, sont sans 202. VARIATIONS MALACOLOGIQUES doute parvenues à s’acelimater de proche en proche jusque dans nos cours d'eaux. Du reste, il est à remarquer qu’au point de vue climatérique c'est avec cette région que notre pays, du moins pour les régions basses des plaines et des vallées, présenterait le plus de différences. Quant aux som- mets alpestres, qui offriraient au contraire, une grande ana- logie climatérique avec celle des régions septentrionales, nous avons vu dans le chapitre précédent que c'était surtout sur les hauteurs dépassant de 1,009à 1,200 mètres que l’on trou- vait ordinairement les faunes spéciales propres aux centres d'apparition. C’est ce qui nous explique pourquoi avec une pareille similitude des milieux on trouve une si grande dif- férence dans la composition des faunes. La région malacologique occidentale ne nous a donné que cent dix-sept espèces communes avec la faune actuelle de la partie centrale du bassin du Rhône. Cette région, nous l’a- vons vu,-est des plus localisées; en outre, quoique s’étendant sur une grande partie de la France, elle a peu de rapport avec notre région ; toute la chaine des Cévennes, tout le pla - teau central nous en sépare, et déjà même rien qu’en France, nous voyons dans cette partie un certain nombre d'espèces typiques qui ne se retrouvent pas ailleurs, comme : elix psalurochætia Bourguignat, 1. Quimperiana Ferussac, Æ. pli- lota Bourguignat, Æ. Danieli Bourguignat, /£. ponentina More - let, Clausilia armoricu Bourguignat, C{. druidica Bourguignat, Nenia PauliS. Mabille, Pupa loroisiana Bourguignat, Planor- bis stelmachætius Bourguignat, etc. Toute cette faune litto- rale partant du nord de l’irlande pour aller jusqu'au cap Saint-Vincent au sud du Portugal, est soumise à une même influence, celle du gulf-stream, qui vient tempérer les con- ditions climatériques, de telle facon que dans le Nord de la France, par exemple, on retrouve sur les côtes, une partie de la flore et de la faune des régions Sud; au point de vue ’ DU BASSIN DU RHONE A malacologique, nous voyons sur les côtes de la Bretagne une partie des espèces maritimes du Sud de la France non seule- ment du golfe de Gascogne, mais encore du bassin médi- terranéen, comme les Helix acuta Müller, H. lineata Olivi, HT. submarilima des Moulins, Æ. pisana Müller, H. variabilis Dra- parnaud, ete. Elles y vivent non pas accidentellement, mais normalement, constituant des colonies tout aussi nombreu- ses d'un côté que de l’autre. La région méridionale est celle qui a le plus de rapport avec la faune de nos pays; nous avons compté 210 espèces communes à ces deux faunes. Plusieurs d’entre elles ne se trouvent que dans ces milieux; telles sont par exemple: Vitrina major Fer., V.annularis Venetz, V. diaphana Drap. V. nivalis Charpentier, Succinea elegans Risso, Hyalinia pseudohydatina Bourguignat, H. holoserica Studer, . circin - nata Studer, H. clandestina Born, H. ciliala Venetz, H. cinc- tella Drap., H. cemenelea Risso, H. rubella Studer, À. zonata Studer, À. fœtens, H. trochoides Poire , Ferussucia Locardi Bourg., Clausilia fimbriata Liegler, . punctata Mich., CL. lineolata Held, CI. crenulata Risso, Pupa quinquedentata Born, P. megacheilos, P. Farinesi des Moulins, P. granum Drap., FÈ polyodon Drap., P. multidentata Olivi, Carychium tridentatum Risso, Ancylus riparius des Moul., À. capuloides Jan, Unio Barraudi Bonhomme, U. sandrii Villa, ete. De ce nombre, quel- ques espèces encore sont plus particulièrement propres aux centres alpestres voisins du nôtre, du Valais, de l'Engadine, de la Vénétie ou du Piémont. Mais la plus grande partie appar- tiennent à la faune de la France méridionale et sont canton- nées dans la partie sud de la vallée du Rhône. Grand nombre de ces espèces se retrouvent dans la faune de l'Autriche et de la Turquie : c’est qu’en effet, la région occidentale de ces pays, séparés parles Alpes illyriques ou les Balkans, a bien plus d'affinité avec la faune de l'Italie qu'avec celle du reste de 274 VARIATIONS MALACOLOGIQUES l'Autriche ou de la Turquie ; l'influence maritime est la même et par la Vénétie la faune italienne communique directement et sans grands obstacles avec la Dalmatie et l'Albanie jusque dans la Morée. Quant à la faune septen- trionale africaine, elle tient de très près, comme nous l'avons vu, à la faune qui est située de l’autre côté du bassin mé- diterranéen. C'est par le Sud de lEspagne, par Gibraltar que l'union de ces deux faunes s'opère après avoir suivi les côtes de l'Espagne le long des monts Ibériques et de la Sierra Nevada. Les grandes iles de la Méditerranée, tout en ayant chacune en certain nombre d'espèces spéciales qui en font des cen- tres secondaires d'apparition, se relient aux continents les plus voisins par un certain nombre d'espèces communes ; ainsi dans les iles Baléares, la faune terrestre se compose de soixante-douze espèces, parmi lesquelles nous comptons les Limax majoricensis Heynemann, Helix Graellsiana Pfeiffer, ballearica Ziegler, H. Ebusitana Hidalgo, Æ. newka Dohrn, H. majoricensis Dohrn et Heynemann, 1. caro Dohrn et Heynemann, A. cardoncæ Hidalgo, H. Prietoi Hidalgo, . Pol- lenzensis Hidalgo, H. Homeyeri Dohrn etHeyn., H. Nyeli Mi- ire, H. Boissyi Terver, Alexa baleurica Dohrn, soit 14espèces spéciales à ce pays, tandis qu'il existe 43 espèces qui vivent en même temps dans le Sud de la France, et cependant c'est encore avec la faune continentale espagnole que cette faune a le plus d’analogie, puisqu'elles ont 58 espèces connues dans ce pays (1). Il en est de même des faunes de la Corse et la Sardaigne, qui, tout en ayant peut-être un plus grand nombre de formes spéciales à cause de leur plus grande étendue, ont cependant une analogie remarquable avec la (1) Hidalgo, 1878. Catalogue des mollusques terrestres des iles Baléares, în Journ. de Conch., vol. XXVI &. 215. DU BASSIN DU RHONE 275 faune continentale. M°° la marquise Paulucei a rattaché à la faune italienne la faune de ces iles (1). Plus récemment encore MM. Agard Westerlrrd et Hippo- lvte Blanc, dans un aperçu sur la faune malacologique de la Grèce en y comprenant l'Épire et la Thessalie (2) ont signalé trente-huit espèces qui se retrouvent dans notre bassin. On voit done par là que l’analogie de la partie centrale du bassin de Rhône avec la grande faune circumméditerranéenne s'étend fort loin, presque jusqu'à son extrémité, dans des pays où les conditions climatériques générales semblent pourtant bien différentes des nôtres. La faune de la région malacologique centrale a une dis- persion géographique très remarquable. Tout en étant loca- lisée autour de la mer Noire et de la mer d’Azof, elle s’est étendue à l’ouest par la vallée du Danube et ses affluents, franchissant la chaine des Carpathes à travers la Transylvanie, la Hongrie et la Servie, sans pouvoir au sud dépasser Îles Balkans. De mène à l’est, elle s’est localisée sur les bords de la mer Noire, sur les flancs nord et sud du Caucase, sans trop se mèler à la faune occidentale qui se développe de chaque côté de ces mêmes montagnes sur les bords de la mer Caspienne. Si cette faune centrale contient cent dix - huit espèces communes avec la faune de la région lyonnaise, ce sont surtout des espèces qui vivaient à l'époque quater- aire. Les régions du Wurtemberg, de la Bavière, du bassin de Vienne qui constituaient alors un centre d'apparition sont devenues à leur tour un centre de dispersion; par le nord el par les vallées des Alpes, ces espèces se sont fondues avec les nôtres, tandis qu'une partie émigrait avec la fonte (1) M. Paulueci, 1878, AZatériaux pour servir à l'étude de la faune malacologique, terres- tre et fluvialile de l'Italie et de ses îles. (2) A. Westerlund et H. Blanc, 1879. AperÇu sur la faune malacologique de la Grèce, in- clus l'Épire et la Thessalie. ATH D) VARIATIONS MALACOLOGIQUES des glaciers dans la vallée du Danube, pour se disperser en- suite autour du littoral de la mer Noire. Cette faune se relie done par la Suisse et par l'Allemagne à la faune septentrio- nale avec laquelle elle a plus d’analogie encore qu'avec la faune méridionale ; c'est qu’en effet elle est séparée de cette dernière faune par de hautes chaines de montagnes, tandis qu'elle se relie à la première par de nombreuses vallées ou des cols moins élevés. Enfin, la faune occidentale oucaspique n’a plus que trente espèces communes avec notre faune locale; ce sont surtout des espèces cosmopolites. Ce groupe extrême dans la grande faune eurepéenne tient pourtant d'assez près au reste de la faune. Comme ie fait observer M. Mousson (1), sur cent cin- quante etune espèces observées dans la Transcaucasie, il yen a seulement soixante-trois qui sont spéciales à cette région, tandis que les autres se relient, soit à la faune du Sud de la Russie, soit à celle de la Turquie d'Asie. On voit par ce qui précède l'influence que les littoraux ma- ritimes ont eue sur la dispersion des espèces malacologiques. C'est surtout le long des côtes que cette dispersion s’est effectuée ; si quelques espèces ont émigré en ne s’écartant pas des régions centrales, comme les Helix villosa, H. mon- tana, H. submontana, etc., non seulement le nombre en est. très restreint, mais encore elles semblent conserver par leurs caractères de localisation les données d'une faune d’appari- tion relativement récente. Cette dispersion le long de rivages maritimes nous parait fort bien s’expliquer par deux considérations spéciales. La pre- mière tient à ce que c’est sur ces régions qu'aboutissent né- cessairement tous les fleuves après avoir recu leurs différents affluents. Or, à la fin de l’époque pleistocène, lorsque les (4) Mousson, 1873-76. Coquilles recueillies par M. le D' Siever dans les contrées transcauca- siques, in Journ. Conch., vol. XXE, p. 195 et vol. XXIV, p. 24. DU BASSIN DU RHONE D PA grands centres d’apparitions quaternaires sont devenus à leur tour des centres de dispersion, les eaux provenant de la fonte des glaciers ont dû entrainer, suivant les lignes orographiques tracées aujourd'hui par nos grands fleuves, toute une partie de la faune ; ces éléments malacologiques ont été déposés plus facilement dans les alluvions des delta, des barres, des anses qui se forment aux embouchures des fleuves plutôt que sur leurs bords. Tel est le rôle qu'ont du jouer relativement aux dépôts quaternaires du centre de l'Europe, le Rhône, le Rhin, 1 Elbe, le Danube, etc. Is ont été en quelque sorte les véhicules directs des espèces ter- restres et fluvialiles qui, à ce moment, paraissaient localisées depuis les Cévennes jusqu'aux Carpathes. Mais, si l'histoire quaternaire de cette région nous est plus familière, nous savons aussi que ces mêmes phénomènes glaciaires se sont présentés non seulement dans toute l'Europe, mais encore jusque dans l'Amérique. Ce sont donc probablement les mé- mes causes qui ont occasionné ce déplacement dans les fau - nes et qui ont amené ce mode d'aréa géographique dont nous venons de parler. Une fois charrié au bord de la mer par les fleuves, le mol- lusque qui a pu s'acclimater dans ce nouvel habitat, a ren- contré sur tout le rivage une sorte d'équilibre de température des plus favorables à son développement. Ne pouvant pas s'étendre au delà des limites tracées par l'élément maritimes, il s’est propagé de proche en proche sur le littoral, trouvant ainsi des conditions climatériques.aussi semblables que pos- sible. Nous avons vu que dans le nord de la France sur les côtes du Finistère on retrouvait une partie de cette même faune du littoral méditerranéen; de mème aussi, sur les côtes de la Scandinavie, sur tout le littoral méditerranéen, pon- tique ou caspique, trouverons-nous cette mème communaute relative dans la distribution géographique des espèces. 278 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Tous les genres de mollusques ne paraissent pas avoir au même degré cette facilité de dispersion. Il suffira pour nous en rendre compte de jeter un coup d'œil sur le tableau que nous avons donné. On remarquera d'abord que certains gen- res comme les Arions, les Limax, les Succinées, les Clausilies, présentent un plus grand nombre d'espèces propres à la faune locale. IL faut tenir compte de ce fait, c’est que ces genres ont été l’objet de monographies spéciales, d'études particu- lières dans lesquelles le nombre des espèces a été singulière- meataugmenté, tandis que les monographies des Hélices, des Bulimes, des Pupas, des Vertigos, restent encore à faire d'a- près la mème échelle, car les auteurs qui s’en sont occupés, n'ont pas encore poussé aussi loin la subdivision des espèces que dans les genres dont nous venons de parler. Quoi qu’il en soit, el toutes proportions gardées, on remar- quera que dans l’ensemble ce sont les genres ou les espèces dontles coquilles sont de plus petite taille, qai ont l’aréa géo- graphique le plus étendu ; ce sont également celles que l’on trouve le plus souvent dans les alluvions des fleuves, ce qui prouve bien encore le grand rôle des cours d'eaux dans la dispersion des mollusques. Parmi les formes terrestres, nous voyons les petites Hélices, Æ. rotundata, H. ruderata, H. ru- pestris, H. pygmæa, H. aculeata, H. putchella, H. laspida, ete., les Ferussacia subcylindrica, Cæcilianella acicula, Pupa müs - corum et la plupart des Vertigos bien plus répandus que les autres mollusques de grande taille. De même parmi les mol- lusques aquatiques, les Planorbes, les Limnées, les Bythinies sont proportionnellement plus communs dans toute l'Europe que les grands Unios ou les Anodontes. Si nous nous reportons à ce que nous avons dit relativement aux migrations des mollusques, nous remarquerons que ce sont précisément ces mêmes petites espèces qui ont le plus de chance d'être dé- placées ou transportées au loin par les différents agents na- DU BASSIN DU RIONE 279 turels que nous avons signalés comme étant capables d’effec - tuer ces transports. Actuellement ces déplacements continuent, et s'ils n'accu- sent pas de modifications bien sensibles dans l’état des espè- ces malacologiques, du moins ils contribuent certainement à la création de variétés nouvelles. Ces migrations involon- taires chez les mollusques ont toujours lieu, et nous avons déjà eu l'occasion de parler de cette fusion des centres de dispersion. C’est ainsi que dans notre faune locale nous pouvons aujourd'hui constater la présence d’un certain nom- bre de formes propres à la faune de la région méditerra- néenne, et il est à croire que ce mélange des faunes s’ac- centuera encore par la suite des temps, jusqu'à ce que de nouvelles évolutions climatériques viennent à se produire. Quant aux causes premières qui président à la localisa. tion ou à la répartition de ces faunes en provinces naturelles, elles sont sans doute fort complexes, et, il faut bien l'avouer, encore trop peu connues pour que nous puissions les dis - cuter. MM. Kirby, Swainson, E. Forbes, Woodward, Kobelt et bien d’autres se sont tour à tour occupés d’une pareille question, mais sans toutefois la résoudre complètement. Le cadre que nous nous sommes tracé est du reste trop étroit pour que nous puissions nous étendre davantage sur cette donnée. Dans le tableau suivant, nous avons elassé à part sous le nom d'espèces boréales sporadiques un certain nombre de formes dont la dispersion s'étend au delà de la faune euro- péenne. La propagation successive de ces espèces est certai- nement très curieuse: dans le tableau suivant nous avons indiqué laréa géographique en dehors de l'Europe des es- pèces qui vivent dans notre région. 280 VARIATIONS MALACOLOGIQUES TABLEAU DONNANT L'ARÉA GÉOGRAPHIQUE EXTRA-EUROPÉEN DES ESPÈCES MALACOLOGIQUES DE LA PARTIE CENTRALE DU BASSIN DU RHONE ASIE AFRIQUE |£= PÉSIRENDES ESPÈCES Tr onnee MOTS si £Sl&l En » — crystollina, Müller. Eu Les) » » » SL ES ee » V0) fulvas Müller. en EN RD bi » Helix rotundata, Linné. . . .| » | » | » | » | » | —| » | — » —. “yruderata,Studer.. NN |) pu) » — pyyMEA, Draparnaud. , | » » DD EE | » _— pulchella, Müller. + |») = |) )— 1405 Du TS 1 CAL DU ONE ER ES RER PES Re RAA RSS \ — sericea, Draparnaud. ul" No 0) En 0) MEN) ES) » — carthusiana, Müller. - ||» || D» > No » — DisanaMuüulier. 1-0 ENS En 5 = ihortensis Müitler 0) ON ED AN ON NES == 1 SaspersaiMUller ORDRE ETS) A PRENONS Es (1) Middendorff, 1851. Sibirische Reise, vol. If, part. L. Crosse el Fischer, 1879, Faune malaco- gique du lac Baikal, ën Journ. deconch.; t. XXNII, p. 145. (2) L. von Sehrenck, 1854-1556. Reisen und Forschungen in Amur-Land, zweil. Band (3) Mol'endorff, 1875. Jahrbücher des Deulschenmalahk. Gesellsch., p. 21%. (4) Koblelt, 1876. Die geographische Verbreilung des Binnen-Mollusken. (b) E. von Martens, 1875. Sitzung des Gesells. Naturf. Freunder Berlin. DU BASSIN DU RHONE LISTE DES ESPÈCES du BASSIN DU RHONE Ferussacia subcylindrica. L. . Cæcilianella acicula, Müller. . Pupa umbilicata, Draparnaud. . — muscorum, Linné. . . Vertigo edentula, Draparnaud. — Moulinsiana, Draparn. — pygmæa, Draparnaud. . — antivertigo, Draparnaud. Carychium mininrum, Müller. Planorbis nitidus, Müller. . . — complanatus, Linné. . AUTO NtCC ANNE Ne — contortus, Linné. . — albus, Müller. , . . Physa acuta, Draparnaud. . . —— hypnorum, Linné. . . Limnæa auricularia, Linné. . — UMOSAN LINE... É mm VCTCUT A MUIlIer ES — truncatula, Müller. . Er DAS UTIS MUIlEL 0. SG OUS EINNE ue Ancylus simplex, Buc-Hoz. . Bythinia tentaculata, Linné. . Valvata piscinalis, Müller. . . nOCTISTA A EMULE. 0 Sphæriun calyculatum, Drapar. Pisidium pusillum, Gmel. — amnicum, Müller. Anodonta cellensis, Gmel, — anatina, Linné. . (6,7 et8) Boog Watson, 1876. Note sur les coquilles {errestres communes à Madère et — SIBÉRIE » » tres contrées ; 2x Journ.de conch., XXIV, p. 217. (9) Kobell, 1876. Die geographische Verbreitung der Mollusker. (10) Binney., 1874. The lerrestrial air-breating mollusks of the United States and cents terrilories. VAR. MAL. T. II. ASIE TIBET YARKAND » » AFR EC AT a. MADÈRES ») CANARIES D) » 1 IQUE 55 ! nl CE on TN Er œ ul MIEALE = | un mil 10) » } D) » rt » DAIEODONIRES » » » ) » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » » DA) » DAEDRIES » » » DAMON » » » DRIDNIES) ») » » DM) » D) » » —— » » DS DIRES » » » » ) » DARCOS D | » | » » » » » » » » » » à d’au- ad)ja- 1 282 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Ainsi, d’après ces données, nous voyons qu’un assez grand nombre des espèces de la faune de la région septentrionale s’étendau nord de l'Asie dans la Sibérie, au nord de la Chine dans la province de Chili; quelques-unes vont à l’est jusque dans le territoire de l'Amour; d'après le D' Kobelt, l'Helix costala se retrouverait même au Japon; au sud, neuf de ces formes passent la chaine des monts Célestes pour se répandre dans le Turkestan, pendant que quelques-unes franchissent les montagnes du Tibet pour descendre jusqu’à Kachemir. En Afrique, nous retrouvons les éléments dela faune européenne, notamment dans les iles qui sont à l’ouest : les Acores, l'ile Madère, les Canaries, les iles du Cap-Vert et jusqu'à Sainte-Hélène ; mais dans cette région, plusieurs de ces formes ont été récoltées à l’état subfossile; d’autres, comme nous l'apprend le Rév. Boog Watson, ont été appor - tées avec des chargements venant d'Europe et sont con- finées sur quelques points seulement, comme les Testacella haliotidea, Helix aspersa, H. rotunduata. Cette dispersion dans les iles est certainement un fait très curieux non seulement au point de vue de l’acclimatation des espèces, mais encore sous le rapport de leur grande extension. Comme le fait ob- server cet auteur, il est fort probable que si quelques espè- ces font partie de la faune normale du pays, un grand nom- bre d’autres y ont été apportées à différentes époques. Enfin nous voyons dans les États-Unis dix de nos espèces qui s'y sont acclimatées, et entre autres deux de taille assez forte, comme les Helix hortensis et H. aspersa. H faudrait à cette liste ajouter encore le Bulimus decollatus. En 1872, M. Jeffreys (1) portait à vingt-trois le nombre des mollus- ques terrestres européens répandus dans l'État de Massachu- (1) Jeffreys, 1878. The molusca of Europe compared with those of Eastern North-Americ in Ann. and Meg. of, Nat. hist. DU BASSIN DU RHONE 283 setts. M. Binney, comme on le voit, a considérablement réduit ce nombre. Presque toutes ces formes sont d'impor- tation récente ; mais il serait difficile de retrouver exacte- ment la véritable date de leur importation ; le seul fait certain, c’est que pour la plupart elles sont parfaitement ac- climatées dans leur nouvel habitat et qu'elles s'y reproduisent absolument comme en Europe. Enfin nous devons faire observer que plus d’une de ces déterminations sont litigieuses, ou mieux le plus souvent elles dépendent du sens que l’on donne à l'extension de l’espèce. Ainsi, pour MM. Crosse et Fischer, la plupart des es- pèces d’eau douce citées dans le lac Baïkal avec des noms qui appartiennent à nos espècesde la région lyonnaise seraient douteuses ; bien souvent ces formes exotiques, tout en étant voisines de formes déjà connues, en sont cependant différentes précisément parce qu’elles ont recu un commencement de modifications dû au changement d'habitat. Mais quoi qu'il en soit, le nombre de ces formes cosmopolites n’en est pas moins considérable. X VARIATIONS GÉNÉRALES DES MOLLUSQUES Définition des variations. — Variations générales. — Variations partielles. — Variations indi- viduelles. — Variétés. — Variations chez l'animal. — Variations dans le test, — Variations généra'es chez les jeunes individus. — Recherches du type spécifique. — Variations généra- les chez les coquilles adultes. — Variations chez les différentes familles des Gastéropodes et des Lamellibranches. — Variations dans la coloration, dans l’odeur, etc. — Développement des mollusques. — Accouplements adultérins. Nous entendons par variation toute modification, de quel- que nature qu’elle soit, apportée dans une partie quelconque de l'être malacologique, s'appliquant à un ou plusieurs indi- vidus. Lorsqu'un individu isolé présente des modifications qui le font différer du type ou du reste des autres membres de Ja colonie, si cette rodification est de faible importance, «Ile constitue une varialion individuelle, variation inhérente à tous les êtres de la création, mais toujours de moins en moins importante ou même distincte à mesure que l’on des- cend l’échelle zoologique des êtres. Si la variation constatée daps un être unique est de nature plus importante, si elle constitue un caractère bien tranché par rapport aux carac- tères similaires des êtres de même forme, c’est alors une &no- malie ou une monstruosilé, suivant l'intensité de la différen- ciation. DU BASSIN DU RIIONE 985 Les variations chez les mollusques peuvent ou bien porter sur l'ensemble de l'individu, sur son galbe général, en un mot sur toute sa manière d'être, où bien n'affecter qu'une portion de son individu; dans le premier cas, nous aurons des variations générales, tandis que dans le second, ce seront des varialions parlielles. Nous aurons à étudier séparément ces deux modes de variation. Mais si ces variations s'appliquent non plus à des individus isolés, mais bien à un certain nombre de ses congénères, sien outreelles ont une tendance à se généraliser et surtout à se perpétuer avec ces mêmes caractères par la reproduction, elles constitueront alors des variétés. La variété peut être basée sur un ensemble plus ou moins considérable de carac tères du type modifié. mais un seul suffit, s’il est nettement établi, s'il présente une réelle différenciation avec le type, et s’il tend à se reproduire. La variation, nous l'avons dit, peut ne s'appliquer qu’à une partie de la colonie. Supposons en elfet, une colonie de création nouvelle; les modifications qui se produisent chez ses individus pourront n’affecter qu’un certain nombre d’entre eux, ceux qui sont par leur nature les plus aptes à cette nouvelle adaptation; les autres succomberont petit à petit, à moins que leurs descendants ne se modifient à leur tour ; en un mot il se produit dans la colonie une véritable sélection nalurelle, toujours lente, mais progressive. C'est ce que nous avons maintes fois observé, par exemple, dans les colonies de l'Helix arbustorum, dont les ancêtres progéni- teurs viennent faire souche sur les bords du Rhône aux environs de Lyon. Cuvier, dans son étude des êtres, avait observé qu'il existe deux sortes de caractères (1); les uns, caractères dominants, (1) Cuvier, 1822, Règne animal, introduction, p. 8 et suiv. 286 VARIATIONS MALACOLOGIQUES exercent sur l’ensemble de l'être une influence plus marquée, tandis que les autres, caractères subordonnés, ont une plus faible importance en ce sens qu'ils s'appliquent moins à l’en- semble de l'individu. Nos variations générales portent sur les caractères dominants, tandis que nos variations accidentelles se manifestent plus particulièrement avec les caractères su- bordonnés. Mais il est bien certain que si ces caractères subordonnés pris isolément ou individuellement n’ont qu’une importance secondaire, ils rentrent dans la première caté- gorie, lorsque plusieurs d’entre eux viennent à s’accentuer ou bien lorsque leurs modifications portent sur une pius grande généralité d'individus. Pour écrire une étude complète des variations des mo! lusques, il faudrait nécessairement suivre les modifications de l’être tout entier, c’est-à-dire de l’animal et de sa co- quille, àtous les âges, dans toutes les conditions biologiques ou physiologiques où il peut se trouver, et cela dans des temps différents. Les recherches paléontologiques surtout doivent être mises en cause, car c'est bien certainement par elles que l’on arrivera à comparer des êtres qui ont le plus de chance d'avoir vécu dans des milieux dissemblables. On comprend combien est vaste pareil champ d'étude, et quelles difficultés il peut présenter. L'étude de l'animal lui-même est déjà beaucoup plus com- plexe que celle de sa coquille. Ses caractères d’abord sont moins précis et beaucoup plus multiples. En outre, si les collectionneurs récoltent des mollusques pour orner leurs collections des innombrables variétés que peuvent présenter les coquilles, ils renoncent à garder le corps mou de l'animal dont la conservation ne saurait être faite que dans un liquide spécial nécessitant dès lors une préparation toute particu - lière. Aussi, si nous nous croyons en mesure de pouvoir si- gnaler quelques faits relatifs aux modifications que peuvent DU BASSIN DU RHONE 287 présenterles coquilles des mollusques, nous serons beaucoup plus pauvre en observations faites sur l'animal Iui-même. Est-ce à dire pour cela qu'il y ait plus de fixité dans les caractères spécifiques de l'animal? Certes non, et l’on com- prend aisément la solidarité nécessaire qui existe entre deux choses aussi corrélatives l’une de l'autre que le mollus- que mou et la coquille qui lui sert d’ossature. Il est bien certain qu'un grand nombre des variations observées dans la coquille s'appliquent tout aussi bien à l’animal qui vit avec elle. Lorsque nous parlerons d’une espèce dont la coquille est tantôt petite, tantôt grosse, déprimée ou surélevée, il va sans dire que l'animal lui-même participera à chacune de ces manières d'être, et que les proportions de ses différents organes subiront des variations identiques. Il en est de même lorsqu'il s’agit de la coloration; si la coquille normalement foncée, devient plus pâle, plus décolorée, l'animal en gé- néral suit la mème loi de décoloration. Mais en dehors de cela, il peut exister chez le mollusque des modifications inhérentes à lui-même, et que le scalpel seul peut déceler ; celles-ci sont beaucoup plus difficiles à observer, et les quelques cas qui sont à notre connaissance rentrent plutôt dans le chapitre des anomalies ou des monstruosités que dans celui des variations générales propres à toute une co- lonie. L'étude et la comparaison des jeunes individus ne doivent pas être négligées, car ce n’est bien souvent qu'à partir d’un certain âge seulement que les mollusques peuvent présenter des différences réellement apparentes, constituant des types suffisamment distincts. L'étude microscopique de l'embryon, le développement de l'animal et de sa coquille dans les pre- miers temps de sa vie réelle nous montrent souvent une iden- tité presque complète chez des formes qui seront ensuite différentes, et cela pendant une durée variable suivant 288 VARIATIONS MALACOLOGIQUES les espèces. Ce n'est que plus tard, à partir d'un moment donné que les caractères distinctifs où mieux spécifiques commencent à apparaitre pour se développer et se fixer ensuite d’une facon défimitive pour lêtre qui les implique. Enfin, ce n’est qu'une fois qu’il est arrivé à l’âge adulte que l’on peut dire qu'il est revêtu de tous ses caractères définitifs qui ne se moditieront plus du moins dans sa propre coquille, sans constituer une anomalie ou une monstruosité. Faut-il rappeler ici l'étude comparative faite par Haeckel sur les germes à embryons de quatre craniotes, l’homme, le chien, la poule et la tortue, considérés à différents degrés relatifs de la vie fœtale (1) ? Les rapprochements faits pour des êtres plus tard si différents seront nécessairement plus grands encore, lorsqu'il s'agira de formes aussivoisines que peuvent l'être les mollusques d’une même famille. Ce n'est donc pas dans l'œuf qu'il faut chercher des caractères de différenciation chez les mollusques ; bien souvent même ïls sont presque inappréciables, avant que l'individu ne soit adulte. Que de fois n'est-il pas arrivé de confondre des Hyalinies, des Hy- drobies, des Vitrines, même des Helix dont la coquille n'était pas encore revêtue de tous ses caractères spécifiques ! Ne sait-on pas très bien d’ailleurs que tant qu'elles sont jeunes, les coquilles des Hyalinies et de quelques Hélices ressem- blent à celles des Vitrines, et celle des Pupas à celles des Hélices. Souvent aussi plusieurs caractères essentiels n’appa- raissent qu'à partir d'un certain âge; ainsi Charles des Moulins nous apprend (2) que chez le petit Paludinella bica- rinala de la rivière de Couze dans la Dordogne, les très jeu- nes individus ne présentent point de carènes, tant qu'ils sont réduits aux premiers tours, et que celles-ci n’apparais- (1) Haeckcel, 1874. Histoire de la création, pl. II et III. (2) Des Moulins, 1845. Actes de la Soc, Linn. de Bordeaux, t. II, p, 27. DU BASSIN DU RHONE 289 sent que sur les derniers. Combien de coquilles notamment chez les Hélices sont au contraire carénées ou subcarénées, tant qu’elles sont jeunes, pour devenir arrondies lorsqu'elles sont adultes ! De même aussi ce n’est guère sur les individus qui ne sont pas adultes que l'on peut apercevoir la vérita- ble couleur de la coquille, parce qu'elle se recouvre par- fois très promptement d’un encroûtement mince, opaque, coloré, qui masque la coloration normale. Et pourtant il importerait de pouvoir déterminer spécifique- ment des coquilles appartenant à des mollusques encore jeu- nes; ce sontincontestablement les plus communes et les plus abondantes. Dès que la pluie commence à tomber, ce sont les jeunes mollusques qui sortent les premiers; plus vifs, plus alertes, plus hardis, ils rampent avec plus de vitesse, et bien souvent on en récolte un cent avant de rencontrer un seul individu réellement adulte ; nous voyons cela tous les jours pour les Helix hispida, H. plebeia, Cyclostoma elegans, etc. Mais pareil fait est plus frappant encore dans les études pa- léontologiques. Si les coquilles trop jeunes ne se sont pas conservées par suite de leur peu d'épaisseur, et partant, de leur peu de résistance, bien souvent les coquilles adultes et par conséquent plus grosses ont eu plus de chance pour se briser; seules les coquilles de taille moyenne, mais non adul- tes nous restent, et c'est sur le vu de ces individus qu’une détermination, déjà si difficile lorsque les échantillons sont complets, doit être faite. Bien souvent dans nos recherches sur les faunes quaternaires, nous avons eu la preuve de ce que nous avançons, et si nous l’avouons ici, c’est que plus d'une fois nous nous sommes trouvé en présence de difficul- tés sinon insurmontables, du moins bien sérieuses pour obtenir quelque certitude dans nos déterminations. Enfin, il est facile de se rendre compte des différences qui existent entre la coquille de différents âges d’un même 290 VARIATIONS MALACOLOGIQUES mollusque pour voir par quelle série de modifications cette même coquille peut passer avant d'arriver à son galbe typique définitif. On peut avancer sans trop de hardiesse, qu'avant d'arriver à l'âge adulte, tous les caractères de la coquille ont subi des modifications. L’aceroissement ne se fait pas sui- vant des lois rigoureusement proportionnelles, et l'animal, qu'il descende d’un ovipare ou d’un vivipare, n’est point à sa naissance une réduction minuscule absolument semblable du galbe qu'il affectera plus tard, lorsqu'il aura atteint tout son développement. Dans un jeune Æelir par exemple, la spire est déprimée, la coquille globuleuse, le dernier tour proportionneilement plus développé, bien souvent subcaréné; l'ombilic n'a point encore revêtu tous ses caractères, ceux si précieux de l'ouverture font défaut, enfin les flammes ou les bandes qui doivent faire l’'ornement de son enveloppe exté- rieure sont encore imparfaites ou mal tracées. Mais petit à pe- tit, à mesure qu'il grandit, toutes ces proportions se modifient; la spire s'élève, les tours sont mieux tracés, les sutures s'’accusent avec plus de vigueur, le nombre detours s’accroit, le dernier tour prend son vrai profil, et l'ouverture se revêt de son péristome dont le développement peut modifier la forme apparente de l’ombilic ou de la base de la spire. Combien diffèrent, lorsqu'elles sont jeunes ou adultes, les coquilles du Rumina decollatu, des Parmacella, etc.! C'est à tel point que plus d'un naturaliste a fait pour de jeunes individus in- complètement étudiés, non seulement des espèces nouvelles, mais même des genres nouveaux. Moquin-Tandon, dans son Histoire générale des mollusques, a parfaitement suivi et résumé le développement des jeunes gastéropodes et acéphales (1). Nous n'avons pas besoin dy revenir, il suffit de jeter un coup d'œil sur ces pages pour se (1) Moquin-Tandon, 1855, vol. 1, p. 263 el suiv, DU BASSIN DU RHONE 291 convaincre de toutes les modifications qui se produisent chez le jeune mollusque, avant qu’il atteigne l’âge adulte. Aussi avons-nous hâte d'arriver à l’étude des variations que pré- sentent ces mêmes êtres, lorsqu'ils atteignent tout leur dé- veloppement, c'est-à-dire lorsqu'ils sont aptes à donner au naturaliste les caractères d'une diagnose qui servira à les déterminer, à les classer, à les faire rentrer dans la méthode zoologique. Ces variations peuvent porter, soit sur l’ensemble de la coquille, soit sur une partie ‘seulement. Nous aurons donc à examiner successivement les variations générales et les variations locales ou particulières, mais l’une ou l’autre de ces variations, du moment qu'elle présente un caractère précis, bien défini, bien reconnu, peut à elle seule consti- tuer ce que l’on nomme une variété. Ainsi, il est incontes- table que si nous rencontrons une colonie dans laquelle tous les mollusques ont une taille naturellement plus petite que celle de ce que l'on nomme le type, les êtres de la colonie, ainsi modifiés dans leur ensemble, constitueront une variété minor.De mème, si le caractère type d'une coquille est d’avoir une coloration blanche et que nous trouvions toute une co- lonie ayant une coloration différente, rouge par exemple, tous les autres caractères restant absolument les mêmes, nous n'en aurons pas moins une variété rufula. Mais pour distinguer les variétés, résultat des variations, il faut se rapporter à ce que l’on est convenu d'appeler le {ype. Le type est une chose conventionnelle, car rien ne prouve que ce soit de lui qu'aient dérivé toutes les variétés que l'on à pu établir. Mais comme en soinme, il faut se rapporter à une base bien définie, nous rappellerons que le {ype représente la forme que l’auteur a eue pour objectif lorsque pour la première fois il en a donné la description. Souvent lorsqu'un auteur est en présence de plusieurs échantillons présentant entre 292 VARIATIONS MALACOLOGIQUES eux de légères différences, ilappelle type l'échantillon le plus commun, donnant le nom de variétés aux modifications plus ou moins fréquentes qui s’y rattachent. Mais s'il n'a pas signalé lui-même des variétés, si la forme décrite pour la première fois parait rare relativement à des modifications qui en dérivent, reconnues comme communes ou abondantes dans un tout autre pays, il faut quand même, pour éviter toute chance de confusion, admettre comme type la forme envisagée peur tel par l’auteur qui le premier a donné un nom à l'échantillon. Dans la première partie de ce travail, nous avons eu à rechercher quel était le véritable type du Zimnæa stagnalis. Nous avons dù pour cela nous reporter aux écrits de Linné, aux figures qu'il indique, et prendre pour type la coquille qu’il devait ainsi avoir considérée lorsqu'il a créé cette es- pèce, plutôt que toute autre forme rare ou commune, dont les caractères généraux ou particuliers pouvaient prêter à la confusion ou à l'ambiguïté. Nousciterons encore un autre exemple. L'Helix arbustorum Linné, présente une série de formes des plus variées ; mais lorsque Linné a donné ce nom d'arbustorum à un individu du genre Helix, il a eu en vue plus particulièrement une de ces formes ayant cerlains caractères et vivant dans un pays donné ; c'est là le type de l’Helix arbustorum ; et toute forme différente de ce type primitif, qu’elle soit vivante ou fossile, suédoise ou française, pourra donner autant de variations ou de variétés relativement à ce type, du moment qu'elle s’ap- plique à un cerlain nombre d'individus. Il faut donc, toutes les fois que l’on veut étudier les variations des mollusques, se reporter au type primitif, sans quoi l’on s’exposerait à prendre pour type une simple variété ; et telle forme qui sera typique pour les auteurs suédois ou danois deviendrait une simple variété pour les auteurs français ou italiens, s’il existe DU BASSIN DU RHONE 293 des différences de formes entre les échantillons de ces diffé- renis pays. Linné, Müller, Draparnaud sont, surtout parmi les natura- listes anciens, ceux qui ont décrit le plus d'espèces; c’est à eux surtout qu'il faut se reporter ; aussi l'étude approfondie de leurs ouvrages est-elle de toute première nécessité; mais il faudrait encore pouvoir comparer de près, de visu, nos échantillons avec les types de leurs collections ; malheureu- sement cette donnée nous manque, et nous n'avons pas même en France la consolation de posséder les types des Lamarck et des Draparnaud! Grâce à M. Michaud, le digne continua- teur de l'œuvre de Draparnaud, nous avons eu entre les mains quelques bons types bien authentiques de nos espèces francaises. Par l'intermédiaire de dévoués correspondants, nous avons pu également nous procurer bon nombre de formes suédoises et danoises dont les analogues avaient servi à Linné comme à Müller, ainsi que la plupart des autres types suisses ou anglais. C’est done avec une certaine confiance, nous oserons presque dire avec quelque certitude, que nous avons pu étudier bon nombre de nos variations locales, en les rapportant pour la plupart aux types primitifs de leurs auteurs. Les variations générales portent, avons-nous dit, sur Ven semble des caractères du mollusque; elles s'appliquent à la fois à plusieurs parties de son individu; ce sont celles qui frappent à première vue l’œil du naturaliste, comme modi- fiant d’une facon plus ou moins complète, la manière d'être générale de l'individu. Ce sont incontestablement les varia- lions les plus nombreuses. Dans ce genre, il faut nécessaire- ent comprendre, outre les variations de coloration géné- rale, toutes les modifications dans la hauteur ou dans le dia- mètre des coquilles, car le volume et, par conséquent, le walbe général sont fonctions de ces dimensions. Il est, en 294 VARIATIONS MALACOLOGIQUES effet, assez rare de voir des coquilles ne différant absolument que par l’une de leurs dimensions, sans que le galbe en soit naturellement modifié ; cependant ce cas peut se présenter. Chez quelques Hélices aux formes déjà déprimées, la hauteur totale peut changer sans que, pour cecla, l'allure générale paraisse changée. De même dans les Unios, la longueur peut seule varier sans qu'il en résulte une modification bien com- plète dans l’ensemble des caractères de la coquille. Mais le plus ordinairement tout changèment dans les mesures d'un type donne lieu à des variations faciles à constater. Le galbe d'une coquille représente donc à la fois le caractère individuel de l'être et le caractère général de l'espèce. Il participe de l'individu en ce sens qu'il porte en lui l'empreinte person- nelle de cette individualité, de même que par les généralités de ses formes, il se rattache à l'espèce. Dans un travail plein d’une certaine hardiesse et d'une réelle originalité, le révérend Moseley a observé que l’on pouvait considérer la surface de toule coquille turbinée ou discoïde, comme engendrée par la révolution, autour d’un axe fixe qui est précisément l’axe de la coquille, du périmètre d’une figure géométrique qui, demeurant toujours géométriquement sem- blable à elle-même, augmenterait en dimensions d’une ma- nière continue (1). Nous admettrons que chaque espèce est engendrée par une figure géométrique différente donnantlieu à un galbe spécial, mais que, pour chaque sujet, il y a licu de tenir compte d'un certain coefficient variable qui repré- sente précisément la variation individuelle propre à chaque espèce. Lorsque ce coefficient est applicable à plusieurs indi- vidus, il constitue la variété: quelques exemples nous fe- ront encore mieux comprendre. L'Helix nemoralis du Mont-d'Or lyonnais se présente Lou- (1) Moseley, 1838. Trans, phil. Soc. roy. Lond., 2° partie, p. 35. DU BASSIN DU RHONE 295 jours sous une forme et une taille données; si nous le com- parons aux ffelix nemoralis que l'on rencontre dans les Pyré- nées-Orientales, à la Tour de Carat par exemple, nous voyons que ceux-ci sont à peu près moitié moins gros; là le diamètre et la hauteur ont changé en proportions comparables, et le galbe s’est modilié. Rapprochons l’Helix strigella des environs de Lyon, de celui du Bugey, nous constaterons bien vite que le premier est beaucoup plus gros que le second, quoique tous ses caractères, en dehors de ceux fournis par la taille, soient absolument les mêmes; si donc le premier est sem- blable au type, le second constituera nécessairement une va- riété minor, pour peu que cette modification présente quel- ques caractères de constance et de généralité. Ces modifications dans la taille, et partant dans le galbe, peuvent avoir des causes bien différentes ; mais c’est surtout aux questions d'habitat et de nourriture qu'il faut les rappor- ter. Le plus souvent le même type, comme nous l'avons déjà dit précédemment, est plus fort, mieux développé dans le Midi que dans le Nord, dans les régions basses que dans les endroits élevés. On voit dès lors que pour peu qu'un type ait une extension géographique un peu considérable, on a plus de chances pour voir son galbe. subir des modifica- tions générales, en quelque sorte proportionnelles. Or, com- me bon nombre des espèces de Linné et de Müiler ont leurs types pris en Suède et en Danemark, c’est-à-dire dans le Nord, et qu'on les retrouve en France, en Italie et même en Algé- rie, on comprend combien ces types peuvent présenter de variations générales, sans même tenir compte des variations particulières portant plus spécialement sur telle ou telle partie de leur coquille. Il suffit, pour s’en rendre compte, de jeter les yeux sur une série de coquilles des Helix pomatia ou 1. aspersa, par exemple, provenant de divers pays ou récoltés à des altitudes différentes, pour être convaincu de: 296 VARIATIONS MALACOLOGIQUES suite des modifications générales qui peuvent survenir dans un même type donné. L’Helix aspersa des environs de Lyon mesure ordinairement de 30 à 32 millim. de hauteur et de 35 à 40 millim. de diamètre maximum ; aux environs de Paris, à Lagny, nous avons observé une colonie d'individus relativement nains, et qui quoique adultes et parfaitement constitués, ne mesuraient que 21 milim. de hauteur pour 25 de diamètre ; c’est done bien une véritable var. minor, puis- que ses individus offrent tous les autres caractères de l'espèce type et qu'ils se reproduisent normalement sous un volume à peu près quatre fois moindre. On trouve encore des diffé- rences plus sensibles, lorsque l’on compare les Leüchocroa candidissimu de la Provence avec ceux de l'Algérie. Un des meilleurs exemples que nous puissions citer est celui de l'Helix arbuslorum, espèce commune de nos pays, bien locale, bien typique et qui présente comme taille des variations considérables. Dans une même station, une co- lonie peut présenter des modifications notables ; ainsi, à Saint-Fons, au sud de Lyon, sur les bords du Rhône, des échantillons tous bien adultes appartenant à Ja même colonie nous ont donné les différences suivantes : Diamètre maximum... a 000070022002 1220 Hauteurtotale 2214 2 40% es 20 OO a rene On voit par cet exemple combien dans une même colonie le galbe général des coquilles d’une mème espèce peut varier : tantôt les proportions du diamètre par rapport à la hauteur restant les mêmes, ces éléments décroissent progressive- ment; tantôt au contraire la hauteur totale restant constante, le diamètre seui diminue. Ces variations ne sont encore qu'individuelles, car elles n'affectent pas toute la colonie ; mais plus tard, il est probable qu'à la suite d'un effet de ‘ DU BASSIN DU RHONE 297 sélection naturelle, ces caractères finiront par prendre une certaine fixité, et la forme dominante imprimera son cachet définitif à toute la colonie. Une pareille divergence dans le galbe est ici parfaitement explicable. Si nous avons insisté sur ce fait, c'est qu'il nous a paru se généraliser: toutes les fois qu'une forme n’est pas dans son véritable milieu, qu’elle a été déplacée de son habi- (at normal et que son acclimatation n’est pas encore régu- liérement accomplie, c’est pour nous un exemple de co- lonie en voie de transformation. Nous avons déjà dit dans un autre chapitre que les Helix arbustorum des régions du haut Rhône étaient amenés dans nos pays par les eaux du fleuve et qu'ils tendaient à se fixer sur ses bords. Leur acclimatation régulière est accomplie de fait, mais les indivi- dus provenant probablement de stations différentes n’ont pas encore donné à leurs descendants cette régularité de forme que l’on trouve toujours dans des espèces complètement acclimatées et de longue date ; il se fait encore dans ces colonies un travail de sélection, de classement, dans ces indi- vidus de taille si différente, qui n’eüt pas été nécessaire si leurs ancêtres avaient appartenu avant leur migration à une colonie de mème nature s’établissant dans un milieu sembla- ble. Ces différenciations de taille ou de galbe peuvent par- fois varier dans des proportions considérables. Nous citerons iéi quelques exemples, l’un pris dans notre seule région, l’autre plus général s'appliquant à la faune de toute la France. Nous avons dit que la véritable altitude normale de l’Helix arbustorum était entre 300 et 800 mètres. C’est là que nous prendrons le type, et si nous comparons nos échantillons avec ceux de la Suède, nous remarquerons qu'ils ont abso- lument les mêmes dimensions. Voyons ce que devient ce même Helix arbustorum, lorsqu'il descend dans la région VAR. MAL. T. I. 20 298 VARIATIONS MALACOLOGIQUES des plaines basses et des vallées, ou qu'il s'élève dans les régions alpestres. Transporté dans la région des plaines basses et des vallées, l'Helix arbuslorum trouvant là des conditions exceptionnellement favorables à son développe- ment, devient rapidement plus gros et plus fort ; sa taille aug- mente dans de singulières proportions , son diamètre atteint facilement 25 millimètres, et sa hauteur de 18 à 20 mil- limètres ; en même temps, ayant à redouter davantage l'in- fluence des rayons calorifiques qui peuvent lui faire perdre un peu de l’humidité nécessaire à sa constitution normale, sa coquille devient plus solide, plus forte, plus épaisse, tandis que sa coloration prend des tons plus noirs ou plus foncés. Siau contraire nous cherchons l’Helix arbustorum dans les hauts sommets «les Alpes, à 2000 ou même 3000 mètres, nous ne rencontrons plus que des individus revêtus d’une coquille de petite taille, de forme un peu conique, élevée, mesurant 15 millimètres de diamètre, pour 12 à 13 de hauteur ; ne pouvant plus perdre autant de chaleur, sa co- quille est plus mince, plus fragile, sa coloration beaucoup plus pâle ; c’est une forme tout autre, et si l’on mettait pour la première fois entre les mains du naturaliste le plus exercé ces deux types extrêmes, il en ferait bien certainement et sans hésiter deux espèces différentes; et pourtant, avec un peud’attention etquelques recherches, on arrive à suivre tou- tes ces modifications nécessaires depuis la forme la plus grosse jusqu’à la plus petite en passant par tous les intermédiaires. Le second exemple que nous voulons citer est celui de l'étude des Helix hortensis et H. nemoralis. Si pour Deshayes (1) les Helix nemoralis, H. hortensis et IH. sylvatica ne cons- tituent qu’une seule et même espèce susceptible d’affecter différents modes de variations, pour d’autres auteurs ce sont (4) Deshayes, in Lamnrch, Animaux vertébrés, 2° édit., {. VIII p. 55, note. DU BASSIN DU RHONE 299 des formes parfaitement distinctes, entre lesquelles on peut même intercaler d’autres espèces parfaitement définies. Déjà Gray (1), avait établi les différences anatomiques qui exis- tent entre les Aelix hortensis et IH. nemoralis. H est incontes- , . table que si nous comparons dans notre région les pelites Hélices des montagnes du Beaujolais avec celles du Mont- d'Or lyonnais par exemple, nous n'hésiterons pas en voyant la taille si mignonne des premiers, avec leur péristome blanc, leur bord columellaire légèrement arrondi, à les classer dans les Helix hortensis, tandis que les autres de taille plus forte, avec le péristome noir, la tache ombilicale bien aceusée, le bord columellaire presque droit, seront sans aucun doute des Heiix nemoralis ; lune et l’autre de ces déterminations ne laisseront subsister aucun doute. Mais comment devrons- nous classer certaines formes intermédiaires entre celles-ci, et dont le péristome est tantôt noir, tantôt blanc, avec ou sans tache ombilicale, avec le bord columellaire presque droit? Faudra-t-il d'autre part maintenir dans les Æelix ne- moralis, ces formes mignonnes d'Aelix dont la taille est toute petite et qui ont le péristome noir avec une tache plus ou moins apparente à l’ombilic? Faudrait-il, inversement, ranger dans les Helix horlensis, ces énormes échantillons pyrénéens dont le péristome est complètement blanc, qui n'ont pas la moindre apparence de tache ombilicale, et dont le bord columellaire est tout à fait semblable à celui des plus petites comme des moyennes formes ? Nous ne le pensons pas, et nous sommes porté à croire qu'Helix nemoralis et H. hortensis ne constituent qu'une seule ét même espèce, présentant des manières d'être différentes suivant les loca- lités, les altitudes, les milieux en un mot, etqui variant lout comme le fait l'Aelix aroustorum. À la var. alpicola de cette (1) Gray, 1825. On The analomical difference between ÆZelix horlensis and Heli c mem a- lis, in Ann. phil., 2° série, p.153. 300 VARIATIONS MALACOLOGIQUES dernière espèce répond l'/elix hortensis, tandis que T'Helir nemoralis, Var. major, correspond également de son côté à la var. Anajor de l’Helix arbustorum. Dans une de nos plan- ches, nous avons fait représenter une série des plus va- riées des /lelix hortensis et H. nemoralis de notre collection, en empruntant ces éléments autant que possible à notre région. Ces dessins sont faits avec la plus scrupuleuse exac- titude ; mais malheureusement ils ne font pas aussi bien ressortir que la vue même des échantillons ces colossales différences de proportions. Où finit l'Helix hortensis ? où com- mence l’Helix nemoralis ? ce sont parfois des limites bien délicates à tracer ; en outre, d'après le galbe de ces échan- tillons, il en est quelques-uns, comme ceux des fig. 3 et #, qui se rapprochent de l'Helix subaustriaca, Sans en avoir exacte- ment tous les caractères. On reconnaitra qu'entre les formes extrèmes des Helix hortensis du Jura et les Jetix nemoralis des Pyrénées-Orientales, qui devraient tous les deux avec leur péristome blanc être classés dans les Helix hortensis, il y a place pour une innombrable série de variétés intermé- diaires. Cette planche, en mème temps, montre quelques formes intéressantes, soit comme tendance à une exagération d’élé- vation de la spire, soit, au contraire, comme tendance à un affaissement. Or nous avons choisi surtout dans ces exem- ples des formes générales s'appliquant à des ensembles d'in- dividus, à des colonies, tandis que nous avons fait représen- ter sur nos autres planches des échantillons aux formes plus accentuées sans doute, mais qui sont exceptionnellement individuelles et constituent de véritables anomalies; ces formes normales si différentes les unes des autres constituent en quelque sorte un nombre indéfini de variétés ; si nous tenons compte de l’ornementation de la coquille, de sa cou- leur, du nombre et de la disposition des bandes, on peut se ren- DU BASSIN DU RHONE 301 dre compte de quelle multiplicité de variétés et de sous-varié- tés il existe dans cette espèce si commune et si répandue. Dans le monde aquatique, les variations générales dans la coquille sont encore plus accentuées que chez les mollusques terrestres, déjà le docteur Kobelt (1) à noté pareil sujet à propos des Limnées du groupe du Limnæa stagnalis. Nous y reviendrons en prenant de nouveaux exemples dans notre région. Dans le Bugey, aux environs de Belley, il existe tout un régime de petits lacs, de marais, d’étangs circonscrits dans des limites assez restreintes et qui presque tous ren- ferment, entre autres mollusques, des Limnœæa staçgnalis ou du moins des coquilles appartenant à des formes de ce groupe. Quoique ces étangs soient tres rapprochés, on est presque en droit de dire que chaque pièce d’eau a ses formes spécia- les. Pour montrer ce polymorphisme, nous avons pensé à réunir dans un même tableau les mesures linéaires prises sur un certain nombre d'échantillons, tous bien adultes, et en nombre tel quil est facile avec de pareilles données de reconstituer la coquille, mieux encore que ne pourrait la représenter un dessin. = Z Z £ EDS UE EE RENE DIMENSIONS DES COQUILLES | 2 | 23 |£<|<4|<2|<28|4s SI NNTDCNbES ES AE = A A ma = = ea) A ta =) à = A Hauteur totale. 65-63164-61156-50155-56149-49/46-45/44-48 Diamètre maximum. 2/-30130-32128-28129-31127-28 25-26 /23-924 Hauteur de la spire. 35-36134-32/31-27/28-25 [24 24 /23-99 1923-99 Diamètre de la spire. 21-20/22-22119-18/20-20|19-18 18-18 15-15 Longueur de l'ouverture. 33-3!135-34130-28130-33127-26,26-26,25-94 Largeur maxim. de l'ouverture. |18-17,21-22/19-:0/18-18115-16/16-17116-17 Largeur de l'ouv, au pli colum. [15-14 16-15 14-16/16-16/14-1615-16/12-13 Dist. de l'axe au bas de l'ouv. 6-6 | 9-9 |10-9 | 3-5 | 2-2 | 5-4 | 5-4 Dist. de l'axe au bord gauche. 6-2 | 5-4 | 4-5 | 3-2 | 2-2 | 2-9 | 3-9 (1) Kobelt, 1871. Malako-zoologisch Blätter, p. 108, pl. 1-HI. 302 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Voici de quelles manières ces mesures ont été prises. Ce sont, nous l'avons dit, des mesures linéaires levées au com- pas, à la facon des sculpteurs lorsqu'ils font une mise au point : Lo La hauteur totale représente la distance du sommet de la spire au point le plus bas de la courbure inférieure de l'ouverture. 2° Le diamètre maximun est pris entre deux lignes parallèles à l'axe et tangentes aux deux flancs du der- nier tour, l'axe étant placé horizontalement, et l'ouverture étanten dessus. 3° La hauteur de la spire est mesurée depuis le sommet de la coquille jusqu'à l'angle supérieur gauche de l'ouverture. 4° Le diamètre de la spire est mesuré comme le diamètre maximum, mais immédiatement au-dessus de l’ou- verture. 9° La longueur de l'ouverture représente la dimen- sion maximum de cette ouverture prise parallèlememt au grand axe de la coquille. 6° La largeur maximum de l'ou- verture est prise perpendiculairement à la longueur, entre deux lignes parallèles tangentes aux bords extrêmes droitet gauche de l'ouverture. 7° La largeur de l'ouverture au pli columellaire est prise parallèlement à la largeur maximum, mais mesurée, au pointde saillie maximum du pli columellaire. 8° La distance de l’axe au bas de l'ouverture représente la hauteur de courbure inférieure du bas de l'ouverture par rapport au grand axe linéaire de la coquille. 9° Enfin, la dis- tance de l’axe au bord gauche représente la longueur com prise entre le grand axe linéaire de la coquille et l'extrémité de la courbure de l'ouverture dans son bord gauche. C'est sur cette dernière dimension que M. Bourguignat fait reposer l’un des caractères distinctifs du Limnæa stagnalis. On comprend qu'avec de pareilles données il est très facile de se rendre compte de nos coquilles; or on sait combien un simple changement d’un ou de deux millim. peut avoir d'influence sur le galbe d'une coquille ; si l'on observe notre tableau, on remarquera que pour des coquilles de même 2 DU BASSIN DU RHONE 303 taille, c’est-à-dire de mème longueur et de même diamètre, les dimensions de l'ouverture soit par rapport à la hauteur totale, soit par rapport au reste de [a coquille, varient dans des proportions considérables. En outre, la forme de cette ouverture, et surtout la forme de la partie inférieure donnée par les distances par rapport à l'axe, sont particulièrement des plus variables, de telle sorte que nos coquilles, souvent dans une même pièce d’eau comme dans le rnarais du Bac par exemple, affectent tantôt les caractères du Limnæa stagnalis, tantôt ceux du Limnæa elophila. L'étude des milieux dans lesquels vivent ces coquilles n’a cependant pas pu nous éclairer sur l’origine ou mieux sur la cause de ces variations. Voici, du reste, d’après les docu- ments qu'a bien voulu nous fournir M. A. Falsan, le régime de ces différentes pièces d'eaux ; nous avons mis à la suite ce qui a rapport au régime malacologique. Marais du Bac. — Altitude 230 mètres. Blachère située au nord de Belley, à l’est de la route de Rossillon à Lyon. Marais ayant assez d'eau, l'hiver,pour alimenter la glacière de Belley; très peu d’eau l'été. Rien de particulier sur la flore. Sous- sol: boue glaciaire sur mollasse marine. — Limnæa stagnalis très nombreux et de très grande taille ; galbe général étroit el élancé ; forme de l'ouverture très variable, Lac de Chaillou. — Altitude 350 mètres. Au inidi du Molard de Montbreyzieu; lac mesurant 200 mètres de long sur 150 mètres de large, peu profond. Fond peu vaseux; sur les bords marécages très peu étendus; nombreux affleurements de rochers secs et arides; tout autour, peu de végétation, plantes salicicoles. Sous-sol : boue glaciaire sur crélacé inférieur. L'été, les eaux de ce lac sans écoulement doivent atteindre une température assez élevée ; de nombreux rep- tiles habitent les crevasses des rochers voisins.— Limnées de 304 VARIATIONS MALACOLOGIQUES grande taille, d’un galbe plus court, plus ramassé, passant au Limncæa elophila. Marais du Loup. — Altitude 278 m. au sud du petit séminaire de Belley; petite prairie marécageuse oceupant le fond d’un pli de terrain ; peu d’eau, presqu'à sec l'été. Sous- sol : boue glaciaire sur mollasse marine. Limnées, assez com- munes, galbe un peu élevé, mais surtout caractérisées par la forme tombante de l'ouverture; aussi le bord inférieur descend au-dessous du grand axe linéaire de la coquille bien plus que dans toutes les autres coquilles de la région ; pareille forme est héréditaire et se retrouve chez tous les échantillons. Lac de Barre. — Altitude 243 m. au pied du flane nord de la montagne de Parves. Longueur 700 m. ; largeur 200 m.; très profond vers le sud, avec escarpements jurassiques.Les bords sur trois côtés sont couverts d’une flore aquatique et maréca- geuse très abondante ; la couche de vase est alors très puis- sante. Sous-sol : boue glaciaire sur terrain jurassique supé- rieur ; dans les eaux, beaux et bons poissons. Limnées, assez nombreuses, au galbe court et ramassé de taille moyenne, au test épais et solide, passant au Limnæa elophila ; a hauteur de la spire est à peu près égale à la moitié de la hauteur totale, tandis qu'elle était notablement plus grande dans les formes précédentes. Lac Bertrand. — Altitude 300 m.; situé au débouché d’une vallée qui s'ouvre au-dessus des marais de Lavours. Lon- gueur 700 m., largeur 400 m. Entouré de collines couvertes de taillis et de rochers polis par les anciens glaciers. Sur les bords, petites prairies marécageuses, jones, blaches, etc. ; bords peu profonds. Sous-sol : boue glaciaire sur jurassique moyen. Nombreux poissons. Coquilles assez analogues à celles de la station précédente, mais d’une laille plus petite, avec l'ouverture plus régulière; c’est encore une forme pas - sant au Linnœæa elophila. DU BASSIN DU RHONE 305 Lac d’ Ambléon. — Altitude 705 m., longueur 400 m., lar- geur 200, situé à l'entrée d'un col quitraverse toute la chaine du Molard de Don, depuis le cirque de Belley, jusqu'à la vallée du Rhône. Fond vaseux. Un grand nombre de sapins sont ensevelis sous les eaux plongeant leur tête vers le milieu du lac, et depuis longtemps cependant les sapins ne végè- tent plus dans cette partie du Bugey. Sur les bords, petites prairies marécageuses. Eaux profondes vers le milieu. Sous- sol : boue glaciaire sur jurassique supérieur. — Limnées de taille assez petite, d’un galbe court, ramassé, à spire courte, plus petite que toute l'ouverture ; test assez mince ; forme intermédiaire entre le Limnæa stagnalis et le Limnæa elophila. Marais de Brognin. — Altitude, 376 m., marais très élen - dus occupant, sur une longueur de 4 kilomètres, le fond d'une vallée allant depuis Brognin jusqu'à Collomieu, et parcourue par le bif d'Agneus. Flore marécageuse ; eaux peu profondes; Sous-sol : boue glaciaire sur lPoolithe inférieure. — Limnées de petite taille, d’un galbe assez élevé, à spire plus grande que la moitié de la hauteur totale ; cette forme se rapproche davantage du Limnœu slagnalis que du Limnæu elophila. En résumé, on voit que dans toute cette région si riche en Limnées du groupe du Linnæa stagnalis les formes de coquil- les varient suivant les milieux ; mais s’il est facile de constater le fait, il nous est impossible d’en trouver la cause; certes ces milieux présentent des différences physiques notables ; quels sont au milieu de ces agents si divers ceux qui prési- dent à telle ou telle modification dans la coquille, c'est ce que nous ne saurions dire. Mais il ressort de cette étude, que des colonies voisines peuvent prendre des caractères différents suivant la nature des milieux dans lesquels elles sont appelées à vivre, à . . 0 » . . Chez les Lamellibranches, ces variations sont tout aussibien 306 VARIATIONS MALACOLOGIQUES marquées que chez les Gastéropodes, et ont donné lieu à de fausses interprétations spécifiques. M. Bourguignat, à propos du Sphæriun corneum(1), nous en donne un exemple des plus curieux. « Aussitôt, dit-il, qu'un mollusque présente dans sa forme extérieure des modifications dues à son habitat, à ses mœurs ou à Loute autre cause, l’on peut êlre sûr que loutes ces diverses formes recevront un nom, et qu'elles seront toutes élevées au rang d'espèces ; et cela provient de ce que, lorsqu'on crée ces sortes d'espèces, l’on ne prend pour base que des échantillons extrèmes quant au faciès, sans avoir au- cune considération pour les formes intermédiaires. C’est ce qui a eu lieu pour le Sphærium corneum. Aussi, en suivant ce principe, les auteurs ont-ils été amenés à élever cette Sphérie au rang d'espèce, lorsqu'elle présente les formes que nous allons indiquer : «1° Sommet très obtus, peu saillant, valves peu renflées, bords tranchants (T'ellinacornea de Linnæus, Cyclas corneade Dupuy, Cyclasrivalis de la plupart des nos conchyliologues). — 2° sommets obtus, proéminents, valves peurenflées (Cyclas rivalis de Dupuy, tandis que c’est la Cyclas cornea d'un grand nombre de naturalistes de province). — 3° Sommets très proéminents, recourbés; coquille d’une taille plus grande, plus ventrue que la variété précédente, bords également tran- chants (Cyclas lumidus de Ziegler, Cyclas Isocardioides de M. Normand). — 4° Sommets très obtus; coquille gonflée au dernier point, à bords non tranchants (Cyclas nucleus de Studer). — 5° Sommets peu proéminents, crochets aigus, coquille de taille moindre, assez aplatie; habite ordinaire- ment les eaux vaseuses (c'est alors la Cyclas lacustris de Draparnaud (non Müller), suivant quelques auteurs, de l'Ouest et du Sud de la France). » L | (4) Bourguignat, 4854. Monographie du genre Sphærium, p. 80. DU BASSIN DU RHONE 307 Jusqu'ici nous avons limité nos exemples aux seules for- mes françaises ; mais si nous sorlions pour un moment du ca- dre que nous nous sommes tracé, que d'exemples de modifica- tions générales n’aurions-nous pas à signaler en comparant des formes malacologiques prises dans différentes stations! Nous bornerons nos exemples à celui de formes bien connues se rattachant à une espèce de notre pays. L’Helix pomatia est une forme propre à une grande partie du Nord de l'Europe ; elle devient plus rare dans le Sud de la France, et disparait en Espagne, en Italie, en Turquie et dans le Sud de la Russie. Mais dans ces mêmes pays, on retrouve cependant des for- mes tout à fait similaires élevées au rang d'espèces; ainsi en Crimée, dans le Sud de la Russie et le Caucase, c’est l’Æelix Taurica Krynicki; en Italie et dans la Turquie d'Europe, c'est l'Helix lucorum, Linné ; dans les Abruzzes, c’est l’'Helix stra- minea Briganti : dans la Dalmatie, la Russie méridionale, la Turquie ete., c'est enfin l'Helix ligata, Müller. Toutes ces for- mes sont certainement fort voisines de notre Helix pomatia; mais si, tout en restant dans ce type, l'on veut admettre des modifications d'un degré plus élevé, nous aurons alors les {elix mahumetana Olivier, de Constantinople, l'Afelix onixiomicra Bourguignat, du Monténégro. Poussant encore plus loin ces modifications, nous aurons alors toute une série de formes encore voisines de notre Hlelix pomatia, mais de taille plus petite et d’allures plus différentes que les formes que nous venons de signaler. Ce que nous venons de dire pour l’Helix pomatia, nous pourrions le dire encore et lout aussi bien pour un grand nombre d'autres formes dont les modifications générales ont donné lieu à des créalions spécifiques particulières et pro- pres à des différences d'habitat. Nous admettons parfaitement que toute espèce mise dans un milieu différent de son centre d'habitat prinitif soit modifiée plus ou moins profondément ; 308 VARIATIONS MALACOLOGIQUES nous croyons mème avoir suffisamment démontré que dans bien des cas il devait en être ainsi. Par conséquent rien ne nous surprend en voyant dans d'autres pays notre Helix pomalia affecter une forme un peu différente de celle de nos régions; mais faudra-t-il pour cela lui donner un nom nou- veau? En ce cas, il est tout aussi logique de démembrer en espèces nouvelles la plupart des elix nemoralis où H. hor- {ensis représentés dans notre planche V, car certainement il y a entre ces différentes formes dérivant d’un même type autant de différences qu'entre les Æelix pomatia, H. taurica, H. straminea, H. lucorum, H. ligala, ete. On peut objecter que toutes nos Hélices sont cantonnées dans un pays assez peu étendu, tandis que les autres répondent chacune à un habitat politique différent; nous nous répondrons que ces divisions politiques n'ont rien à voir avec la malacologie, ct qu'il y à une différence climatérique tout aussi grande entre l'habitat jurassien et pyrénéen propres à nos formes extrêmes du groupe de l'Aelix nemoralis, qu'entre les habitats de n'importe quelle forme dérivée de l'Helix pomalia. En résumé, il n'y a done pas un équilibre normal dans la valeur spécifique des formes malacologiques. Les variétés générales dans le galbe ont tantôt donné lieu à des espèces nouvelles, comme dans le groupe de l'Helix pomatia, tantôt à de simples variétés comme dans le groupe des Helix aspersa et 1. nemoralis ou horlensis. Quoi qu'il en soit, il importe de nous rendre compte de limportance de ces modifications générales chez les différents genres que nous avons signalés dans notre région. Chez les Arion etles Limax, rien n’est aussi variable que leur coquille rudimentaire. Les granules des Arion, tantôt plus ou moins gros, plus ou moins durs, plus ou moins résis- tants, nous montrent les premières variations qui peuvent exister dans le corps lestacé du mollusque réduit à son état le DU BASSIN DU RHONE 909 plus rudimentaire. Pour les Limaces d'une mème espèce don- née, il est facile le se rendre tout aussi bien compte des mo- difications que peuvent présenter les limacelles. Il suffit pour cela de prendre les œufs d'une même portée, de les faire éclore et élever ensemble en donnant à ces jeunes limaces la mème nourriture, et lorsqu'elles seront adultes, on verra combien peuvent différer en poids et en volume leur lima- celle. Nous sommes ainsi arrivé à constater que ce poids peut varier dans les proportions d’un cinquième, tandis que les dimensions suivent à peu près leurs mêmes lois. Mais on comprend que si l’on prive de calcaire toute une par- tie de la colonie, ces individus ne trouvent plus la matière nécessaire à la constitution de leur limacelle, et tout en ayant extérieurement à peu près les mêmes dimensions, leur coquille intérieure sera bien plus petite et bien plus légère que celle d'individus qui auront vécu sur un sol calcaire. Les Testacelles ont des coquilles qui tiennent trop à celles des limaces pour ne pas participer de la même facon aux variations générales des mollusques. Les T'estacella haliotidea, à âge égal peuvent avoir des coquilles plus ou moins grosses suivant les milieux où on les observe, mais il ne nous a pas paru qu'il en soit de même chez les Vitrines ; cette petite coquille mince et fragile semble plutôt soumise à des modifi- cations partielles plutôt qu’à des variations générales portant sur tout leur ensemble. Les variations générales chez les Succinées sont des plus nanifestes ; par suite de leur forme élancée, lors mème que le diamètre varie dans les mêmes proportions que la hauteur, la coquille prend aussitôt une apparence plus élancée. Chez plusieurs espèces, nous avons observé des variations non seulement dans la coloration générale de la coquille, mais encore dans la taille. Dans ce genre, ce sont les espèces les plus communes comme les Succinea pultris et S. Pfeifferi 310 VARIATIONS MALACOLOGIQUES qui nous ont présenté le plus de variations. Ce sont préci - sément ces sortes de modifications qui ont causé ces diver- gences dans l'interprétation spécifique des variétés de cer- tains types. mieux encore que l'existence de variations por- tant sur des caractères spéciaux à telle ou telle partie de la coquille. Chez les Hyalinies, la plupart des auteurs ont cherché à multiplier les espèces plus encore que chez les Hélices. Dans ce genre, on admet à peine quelques variétés, et encore por- tent-elles plutôt sur la coloration du test que sur l'ensemble de la. coquille. Et cependant même en se restreignant aux types les plus anciens, à ceux seulement admis par Moquin- Tandon et par M. l'abbé Dupuy, on constate que bien sou- vent il existe moins de différences entre quelques-unes de ces espèces qu'entre certaines variétés du genre Helix. Si Moquin-Tandon a réuni par exemple à l’Æelix conspurcata de Draparnaud les Helix rugosiuseula, H. candidula, H. striuta, H. striatula, H. costulula, qui ont cependant des caractères différents, comme nous l'avons vu dans la première partie de ce travail, nous ne comprenons pas qu'il n'ait pas réuni pour ces mêmes motifs, le Hyalinia lucida au H. cellaria, ou le Hyalinia crystallina, au H. diaphana. H n'v a bien certaine- ment pas plus de dissemblance entre ces différentes Hyalinies qu'entre les Hélices que nous venons de citer. Cependant il existe dans ces formes même aussi multipliées qu'on le fail aujourd'hui au point de vue spécifique un certain nombre de variétés ; nous en avons notamment signalé chez les Hyali- nia lucida, H. Blauneri, H. cellaria, H. diuphana, ete. Chez les Hélices, les variations générales donnent lieu à une moins granite déformation apparente de la coquille, par suite même de sa forme plus ou moins globuleuse. Aussi ce seront surtout des variétés 74707 Où minor que nous au - rons le plus souvent à distinguer. Nous en avons indiqué un DU BASSIN DU RHONE Si grand nombre, parmi les espèces propres à la faune de la partie centrale du bassin du Rhône. Mais il est certaines es - pèces spéciales sur lesquelles ces variations générales ont plus de portée que sur d’autres ; nous allons les passer rapi- dement en revue. L'Helix lapicida affecte les mêmes variations que Felix arbustorum, dont nous avons déjà parlé. Il est notablement plus petit dans le Nord que dans le Sud; déjà dans nos con- trées, il ne présente pas encore la belle taille que nous lui trouverons dans les Pyrénées-Orientales par exemple. En même temps, si nous le récoltons à une certaine altitude, même dans des pays calcaires, il devient beaucoup plus petit, tous ses autres caractères étant exactement les mêmes. L'Helix sylvalica suit la même loi. Dans la Drôme, par exemple, à Saint-Nazaire, les échantillons sont de toute beauté; ils atteignent jusqu'à 18.50 millimètres de hauteur pour 26.50 millimètres de diamètre, c’est la var. major ; mais si nous remontons dans les parties montagneuses du Jura ou des Alpes, sa taille est plus petite, son galbe plus ra- massé ; la hauteur n’est plus que 11.00 pour un diamètre de 15.75 ; le type même de Draparnaud passe à l’état de var. minor. L’Helix aspersa, dont l'extension géographique est plus grande, offre encore plus de variations. Dans nos pays, son galbe se modifie peu, sa taille est à peu près la même, quelle que soit l'altitude où on l’observe ; mais nous n'avons jamais rencontré ces petites variétés si élégantes et si mignonnes que l’on trouve parfois en colonies aux environs’de Paris. Chez l'Helix carthusiana, les différenciations locales sont peut-être plus frappantes encore; aussi Draparnaud avait-il fait de la var. minor une espèce nouvelle admise après lui par plusieurs auteurs, lHelix carthusianella. Aujourd’hui les malacologistes sont d'accord pour n’envisager cette préten- 912 VARIATIONS MALACOLOGIQUES due espèce qu'à titre de variété. Mais s’il en est ainsi, pour être logique, combien n'est-il pas d'espèces qu'il fau- drait tout aussi bien faire rentrer à titre de var. minor ? L'He- lix cœlata rie serait-il pas une var. minor de l’Helix circin- nala? et ne faudrait-il pas rapprocher au même titre les Helix fruticum et strigella ? Enfin, poussant la compa- raison plus loin, ne pourrait-on pas voir un rapprochement semblable pour les Æelix Fontenilli et H. alpina, etc.Nous savons bien que pour ces deux dernières formes, par exemple, il existe des différences mème chez l'animal ; les savants tra- vaux de M. Bourguignat l'ont décelé, mais dans la coquille, y a-t-il réellement beaucoup plus de différences qu'entre les Helix carthusiana Müller et A. carthusiancella Draparnaud, ou entre les Helix arbustorum Linné et H. alpicola Ziegler? Il faut bien observer que ces formes ne vivent pas à la même altitude, qu'elles sont localisées dans une partie restreinte des Alpes, ct que leurs colonies sont aujourd'hui bien distinctes. Voilà certes des rapprochements que tout le monde est bien lenté de faire. Mais l'expérience qui fera passer l’une de ces formes à l’autre est encore à tenter, et le temps comme les conditions propices et similaires sont choses souvent difficiles à réaliser ! Et l’Helix carascaleasis ? n'est-ce point le repré- sentant pyrénéen de notre Helix ulpina ? A-t-on tenté d’ac- climater cette dernière forme dans les Pyrénées, de faire vivre la première dans les Alpes ? Que deviendraient alors ces for- mes par l’acelimatlation ? quelles résullats donneraient-elles par la reproduction ? Autant de problèmes à résoudre, Nous n'en sommes donc encore qu'aux conjectures ; mais en atten- dant que quelque dévoué naturaliste tente ces expériences, nous nous bornons, sinon à signaler, du moins à rappeler ces rapprochements si naturels dans les formes voisines d’un mème groupe. Dans le groupe de certaines Hélices méridionales, les varia-: DU BASSIN DU RIIONE re tions générales sont tout aussi grandes que dans les Hélices de nos contrées. Il nous suffira de rappeler les phases innom- brables par lesquelles peut passer l’Helix variabilis si heu- reusement dénommé ; il est, en effet, peu de coquilles dont le galbe peut présenter autant de variations; mais au moins, pour ce type, les malacologistes ont laissé aux modifications de ses formes un champ assez vaste, et le nombre des préten- dues espèces nouvelles que l’on est venu greffer 'sur lui depuis Draparnand est relativeme"t fort restreint. Nous n'en dirons pas autant des Hélices du groupe de l'Helix cricetorum, autour duquel nous voyons se ranger les Helix neglecta Draparnaud, H. arenosa Ziegler, H. candi- cans Ziegler, 1. obuia Ziegler, H. erica da Costa, I. cespi- Lun Drap., H. Terveri Michaud, Æ. cisalpina Crist. et Jan. etc., il est bien certain qu'avec une grande habitude et de bons termes de comparaison, on pourra toujours arriver à séparer ces différentes formes; mais il est incontestable qu'il existe certains types de coquilles appartenant à ce groupe dont le galbe est tel qu'ils pourront être rangés par les meilleurs naturalistes sous des dénominations différen- tes. C'esi qu’en effet dans ce groupe les caractères particu - liers assignés à chaque espèce ou prétendue espèce sont re- lativement de minime importance, et qu'il faut tenir surtout compte du galbe général, lequel est essentiellement variable. Du reste, toutes ces formes ne sont bien réellement détermi- nables que pour des coquilles parfaitement adultes : il est de toute impossibilité de séparer un Helix Terveri, par exemple, des autres {lelix de mème groupe tant que sa coquille n'a pas encore alteint son développement absolu. Tout ce que nous venons de dire s applique aussi bien aux Helix des aroupes de l'A. maritime Draparnaud, A. terrestris Pennant, Æ. acuta Müller, etc., toutes formes bien typiques mais susceptibles de variations dans leur galbe et dont on a VAR. MAL. T Il, 21 314 VARIATIONS MALACOLOGIQUES démembré un plus ou moins grand nombre de formes réelle- ment secondaires. Pourra-t-on exactement préciser par exemple les limites de l'Helix terrestris et de l’Helix trochilus Poiret? Cela nous semble douleux, et pourtant en ne pre- nant que des formes extrèmes, on distinguera toujours bien facilement ces deux galbes si différents. Chez les Bulimes comme chez les Ferussacies, on retrouve les mèmes variations dans la forme générale de la coquille ; toutefois il faut reconnaitre que les malacologistes ont été moins prodigues d'espèces nouvelles,surtout chezles Bulimes . Pourtant ceux-ci pouvaient présenter bien des modifications. Peu de coquilles par exemple sont aussi variables dans leur galbe que le Bulimus montanus ; nous en avons fait figurer deux formes bien distinctes. Pour nos Ferussacies locales, il ne pourrait y avoir d'hésitation qu'à propos du Ferussacia collinu Drouët, dont la taille mignonne peut se confondre avec des variétés minor du Ferussacia subcylindricu. Quant aux Ferussacies méridionales, leurs différenciations sont basées sur des caractères particuliers dont nous parlerons plus loin. | Chez les Clausilies, le galbe général n’est plus un caractère d'aussi grande importance que dans ces genres précédents. Les caractères particuliers basés sur la disposition des plis aperturaux, des rides extérieures du test, de la forme de l'ouverture ou de la disposition de l'ombilie sont trop spéci- fiques pour que les naturalistes qui se sont occupés de l'étude de cette famille n'aient pas eu surtout en vue dans leurs classements l'intervention de pareils caractères. Les Pupas et les Vertigos sembieraient devoir à ce même point de vue se rapprocher des Clausilies ; il est cependant certaines formes qui présentent des variations générales très marquées . Tels sont par exemple les Pupa dolium et P. doliolum. On peut affirmer sans crainte, au moins pour notre 4 DU BASSIN DU RHONE 319 région, que chaque colonie de ces Pupas a son galbe spécial. Les caractères particuliers restent constants, ou du moins varient peu, tandis que la forme générale de ces coquilles change suivant les stations parfois même les plus rappro- chées. Chez les Limnées comme en général chez toutes les co- quilles de forme un peu allongée, les variations générales sont des mieux marquées ; aussi plus d’un naturaliste a-t-il éprouvé de bien grandes difficultés pour classer telle ou telle coquille; c'est dans ce genre surtout que l'on retrouve les formes intermédiaires ou de passage, tenant par leurs carac- tères généraux à la fois à deux formes voisines, mais spécifi- quement distinctes. Faudra-t-il, comme nous l'avons indiqué dans la première partie de ce travail, admettre toutes les espèces créées par les auteurs, ou devra-t-on, à l'exemple de Moquin-Tandon et de MM. Kreolinger, Kobelt, S. Clessin, ete., faire rentrer la plupart de ces formes sous le vocable de variétés? Nous sommes bien convaineu qu'il est certaines formes considérées comme espèces qui ne sont que les ré- sultats de modifications passagères de tel ou tel type donné. Le Limnæa slagqualis par exemple, élevé dans de certai- nes conditions, devient le Limnæa elophila, tandis que le Limnœæa turgida n’est qu'une forme intermédiaire entre ces deux types extrèmes. Si l'on arrive à admettre le démembre - ment des formesqui peuventètre groupées autour du Limnæu stagnalis, à quel prodigieux total d'espèces n'arrivera-t-on pas lorsqu'on en fera tout autant pour les formes si mul- tiples et si variées des Limnœa limosa ei L. auricularia? On peut dire aujourd'hui que chaque marais, chaque étang, chaque pièce d’eau, a sa forme de Limnées qui lui est propre : devra-t-on pour cela créer autant d'espèces pour des diffé- rences appréciables pourtant dans le galbe des coquilles qui s'y produisent ? 316 VARIATIONS MALACOLOGIQUES - Chez les Paludinidæ, ces variations générales ont donné lieu à des créations d'espèces fort nombreuses. Siles Vivi- pares actuelles sont peu nombreuses comme espèces, nous avons vu qu'à la fin de l’époque miocène, il en existait un très grand nombre dans les dépôts appelés néogènes par les Autrichiens. Il a dû se passer pour ce genre ce qui se passe de nos jours toutes les fois qu’un genre atteint son maximum de développement : les formes se multiplient et varient sui- vantles stations. S'il ya eu uncertain nombre de types par- faitement définis, très nettement caractérisés par une orne- mentation spéciale, particulière, on trouve aussi, lorsque l'on étudie un grand nombre de ces types, des formes de passage qui sont très difficiles à classer et à déterminer. Nous faisons ici appel aux paléontologistes éminents de France et d’Au- triche, entre les mains desquels ont passé tant de coquilles, et nous sommes certain d'avance que tous reconnaitront que s’il existe des formes typiques extrèmes, on trouve aussi des formes intermédiaires plus ou moins bien définies qui peuvent selon les idées de chacun être rapprochées de tel ou tel type. | Les petites Paludines dont on a tant multiplié les espèces depuis quelques années deviennent encore plus difficiles à déterminer; là bien souvent les caractères spéciaux, parti- culiers, portant sur une partie de la coquiile semblent faire défaut, et l'œil le plus exercé s'expose à des déterminations doutenses. Paladilhe lui-même, l'auteur de cette multiplicité de noms chez les petites Paludinelles, avouait un jour à un de ses amis qu'il avait tant fait d'espèces dans cette famille qu'il ne pouvait plus s’y reconnaitre. C’est qu’en effet, de mème que les milieux ont une grande influence sur les va- riations générales que peuvent présenter les Limnées par exemple, de même aussi peuvent-ils exercer les actions modificatrices sur ces petites coquilles dont les formes géné- DU BASSIN DU RHONE S à Ni rales ne sont pas mieux définies, et chez lesquelles les formes accidentelles souvent caractéristiques font défaut. A-t-on essayé, par exemple, d'élever des Paludinella brevis dans une source où vivait le Paludinella saxatilis et réciproque - ment? Nous doutons fort qu'au bout de quelques générations, chaque type ait conservé d’une manière absolue ses caractè- res, et sinous avons pu dans notre aquarium modifier d'une facon aussi radicale des grosses Limnées comme les Limnæu slagnalis ou L. elophila, nous nous demandons quels résul- tats donneraient de petites Paludinelles ou des Hydrobies. Tout ce que nous venons de dire au sujet des Gastéropodes s'applique tout aussi bien aux Lamellibranches. Eux aussi sont sujets à des variations générales. Mais il est une diffi- culté dans les termes de la comparaison dontil faut avoir bien soin de tenir compte; nous voulons parler de l’âge relatif des individus. On peut être exposé, faute de soins tout parti- culiers, à comparer des individus d’âges différents et dont l'examen pourrait donner des résultats erronés. Mais en éta- blissant la comparaison entre un grand nombre de types d'une même colonie, on a toute chance pour écarter pareille cause d'erreur. Ceci étant admis, on se rendra facilement compte des in- nombrables variations que présentent certaines coquilles ; chez les grandes Anodontes, par exemple, on passe d’une forme à l’autre avec la plus grande facilité ; chez les Unio, il est souvent bien difficile de séparer certaines variétés de l'Unio pictorum Lin. de l'U. Requieni, Michaud; enfin, chez les Sphærtum et les Pisidium les caractères basés sur le galbe seul. seraient insuffisants, et l'on à recours aux diagnoses fournies par l'examen des charnières. Mais dans toutes ces formes, on comprend quelle peut être l'influence du milieu sur le développement de la coquille. Pour n'en citer qu'un exemple, nous dirons que dans les losnes qui avoisinent la 318 VARIATIONS MALACOIOGIQUES Saône et qui en sont séparées par des digues plus ou moins submersibles, les Unio piclorum notamment atteignent une taille beaucoup plus forte que ceux qui sont dans le lit même de la rivière; c'est sans doute parce qu'ils sont dans un milieu plus tranquille, moins remué, dont le fond, plus va- seux, peut être moins changeant. Ainsi donc, la plupart des mollusques terrestres et aqua - tiques sont sujets à des modifications générales dans leur allure comme dans leur galbe. Ces modifications générales se traduisent plus particulièrement par des variations dans la taille, indépendantes des cas isolés de nanisme ou de géantisme. De là des variétés major, minor, intermedia, etc. chez un grand nombre d'espèces ; quelques -unes de ces va- riétés sont nettement définies et paraissent jusqu'à présent du moins tout à fait propres à certaines colonies, tandis que d'autres se rattachent au type par des formes intermédiaires ou de passage. | A côté des variations générales dans le galbe des mollus- ques, nous devons placer les variations générales dans la coloration, puisqu'elles aussi s'appliquent à la totalité de l'être. I ne faudrait pas attacher une trop grande importance à la coloration des coquilles des mollusques; mais malgré cela, c’est un avantage que l'étude des êtres vivants donne sur celle des êtres fossiles. Après la mort de l'animal, la colo- ration s’atténue; dans nos collections, ses couleurs se per- dent; la collection Sionnest qui datait de soixante-dix ans, élait décolorée comme si elleavait été exposée au soleil, quoi- qu’elle fût au contraire précieusement à l'abri. Nous avons vu en effet que telle ou telle espèce pouvait se présenter sous des colorations différentes; or presque toujours il existe une certaine corrélation entre la coloration de la coquille et celle de son animal. Les animaux à couleur plus foncée sont ceux qui ont en général des coquilles plus colorées ; celte loi “ DU BASSIN DU RHONE 319 n’a rien d’absolu, mais elle parait cependant présenter une certaine régularité. Dans nos régions, les animaux de l'AHelix arbuslorum des environs de Lyon, dont la coquille est très foncée, sont eux-mêmes presque noirs ; ils sont au contraire beaucoup plus pâles comme leur coquille à mesure que l’on s'élève dans les régions alpestres. En général les mollusques qui vivent dans les contrées les plus chaudes ont une coquille plus colorée que ceux qui vivent dans des régions plus froi- des. Il suffira pour s’en convaincre de jeter un coup d'œil sur la faune terrestre des pays chauds et de Ia comparer avec la nôtre, puis avec celle des régions arctiques. Quelle en est la cause ? est-ce un simple effet de l’action solaire, de la chaleur ou de lalumière, ou faut-il plutôt y voirle résultat d’une cause prévue, celle d'une moins grande déperdition de calorique et partant d'humidité à travers un test coloré qu'à travers un test plus pàle ? c’est à cette dernière hypothèse que nous nous rattacherons. Dans une même espèce, la couleur d'une coquille peut varier singulièrement, Faut-il citer l’Aelix nemoralis dontnous connaissons des variétés monochromes jaune, fauve, rose, lilas, olivätre ou mème blanche? Il est à remarquer que tou- jours ce sont les mollusques des régions basses des plaines et des vallées qui ont leur coquille le plus chaudement colorée, c'est ce que l'on observe non seulement pour les mollusques testacés, mais encore pour les Arions et les Limaces. En outre, certains milieux eux-mêmes colorés peuvent avoir une influence chimique ou mécanique qui se tradnit sur la coquille. Nous avons observé dans les eaux de la Saône au sud de Lyon des Bythinia tentaculata vivant au-dessous du débouché de l'égout collecteur et qui avaient pris une colo- ralion brune toute différente de celle de leurs congénères vi- vant à quelques mètres au-dessus. il faut dire qu'à ces eaux étaient mêlées des eaux de teinture vivement colorées en 220 VARIATIONS MALACOLOGIQUES noir, et quela coloration de nos coquilles n’était nullement superficielle, mais bien inhérente à tout l'être. Nous en avons élevé dans notre aquarium, après les avoir soigneusement lavés et brossés, et nous leur avons toujours vu conserver leur coloration. Leurs enfants ont hérité de cette même teinte, mais nous ignorons encore ce que donneront les gé- nérations suivantes. Nous citerons également le Paludinellu rubiginosa qui, vivant dans des sources ferrugineuses de l'Ariège, a gardé cette coloration particulière à laquelle il doit son nom. Le même fait a lieu pour les lamellibranches ; ils conser- vent malgré la diversité des espèces un certain fond coloré propre au milieu où ils vivent. Ainsi, les Unios du Menthon dans le département de l'Ain, ont toutes une coloration plus rougetre que celles des autres ruisseaux; il existe donc une influence réelle entre la nature des milieux et la coloration des mollusques, influence qui peut, jusqu'à un certain point, en faire varier ou modifier la coloration. A côté de la question de coloration, il convient de placer celle de l'odeur qui peut être propre à certain mollusque. On a prétendu que les Hyalinies répandaient une odeur alliacée. Ce fait peut être plus où moins vrai pour certaines espèces comme le Hyalinia alliaris par exemple, mais il est loin de s'étendre àtout le genre. Nous n'avons jamais observé la moindre odeur chez les Hyaliniu lucida et IH. cellaria de nos pays, et Terver [ui-même nous a avoué qu'il fallait apporter une forte dose de bonne volonté pour trouver une odeur d'ail dans le Hyalinia alliaria du Pilat. Cette odeur particulière à quelques Hyalinies peut être un fait parfai ement véridique pour d'autres pays ; mais il est au moins douteux pour le no- tre. Quelques Campylées jouissent également d'une propriété semblable ; les Aelix fœtens, H. zonatx, ete., exhaleraient une odeur plus ou moins forte, mais aussi bien souvent à DU BASSIN DU RHONE 921 peine sensible. Pareille donnée, sans cependant être un caractère particulier propre à certaines espèces, montre une fois de plus la variabilité qui existe dans tous les éléments spécifiques de ces êtres. Le mode d’accroissement des mollusques est souvent une cause de variations dans leur galbe. Nous ne reviendrons pas ici sur la façon dont a lieu, au point de vue physiologique, ce mode d'accroissement; cette intéressante question nous entrainerait trop loin, quoique pourtant ce soit en quelque sorte la base première, eu mieux, la source des modilications que doivent éprouver les coquilles. Mais nous prendrons le mollusque au moment où il est constitué normalement, c'est-à-dire lorsqu'il sort de son œuf s'il est ovipare, ou lors- qu'il est expulsé de l'ovaire s'il est vivipare. Suivant les con- ditions biologiques où il se trouve, ce mollusque pourra se développer plus ou moins rapidement, de même que ce déve- loppement pourra être régulier et progressif ou subir des temps d'arrêt, loutes causes qui peuvent plus tard avoir une notable influence sur le faciès de la coquille. Si le mollusque se trouve dans les mêmes conditions que celles qui ont accompagné le développement de ses auteurs, comme en général ilen a recu la même dose de vitalité, il croitra de la même manière, et lorsqu'il sera arrivé à l’âge adulte, il sera incontestablement semblable à eux. Mais si ces mêmes individus par une cause quelconque sont déplacés, il peut se faire que le nouveau milieu favorise plus où moins leur accroissement, ce qui nécessairement amènera une différen- ciation avec les êtres progénileurs. Il est inutile, croyons- nous, d'insister davantage sur un pareil point; les faits qui en découlent sont suffisamment connus pour que nous n’ayons pas besoin de nous y arrèter. Toute éducation des mollusques faite en dehors des conditions naturelles et normales donne presque toujours des êtres plus où moins différents, du mo- 3-2 VARIATIONS MALACOLOGIQUES ment que l'on fait varier les causes qui peuvent influer sur leur développement. Mais ce qui peut surtout modifier les caractères de cer- laines espèces, ce sont les temps d'arrêt dans leur croissance, c'est à ce fait sans doute qu'il faut attribuer cette excessive variabililé des formes aquatiques qu'elles puisent dans des milieux à éléments eux-mêmes variables. On voit, en effet, bien souvent des marais, des étangs, des ruisseaux, qui possèdent tout un monde malacologique se dessécher com- plètement pendant la saison des chaleurs, ou à la suite d’un abaissement de niveau dans les réservoirs communiquant avec eux; dès que l’eau vient à manquer, toutes les coquilles s’'enfoncent plus ou moins profondément dans la vase, et là elles subissent forcément un temps d'arrêt dans leur déve- loppement; ce temps d'arrêt peut être fort long, toute la durée de la saison, et subsister mème une année dépasser entière. Lorsque les eaux reviennent, les mollusques sortent de leur demeure, et, avec le secours d'éléments reconsti- tuants, ils reprennent leur développement. Mais auront-ils plus tard la même forme que s'ils avaient été tout le temps dans des conditions normales et régulières? Nous pouvons dire que non. Deux mares ayant toutes les deux des Limnæa stagnalis, L. limosa, Physa acuta et Planorbis carinatus, mais dont l'une d'elles étaient à peu près régulièrement privée d’eau pen- dant les grandes chaleurs, présentaient des différences dans la forme des éléments communs aux deux faunes; dans la mare qui restait toujours pleine d’eau, les mollusques étaient grands, forts, sans anomalie ; dans celle, au contraire, qui était parfois privée d’eau, les mêmes espèces de mollusques étaient de taille plus petite, à test plus épais, plus coloré, et souvent nous y avons observé des individus anormaux. Nous estimons done qu’il faut attribuer à des données similaires cette extrè- DU BASSIN DU RHONE D me variabilité de formes des mollusques aquatiques, variabi- lité bien plus grande chez ces espèces que chez les mollus- ques terrestres, dont rien n'arrête en général le développe ment. | Ces irrégularités dans l'accroissement sont des plus mani- festes chez les bivalves ; chez ces mollusques l'accroissement, comme on le sait, se fait suivant des zones concentiques et parallèles traduites par des irrégularités dans la surface externe du test. Si l’on observe souvent dans le test des bandes transversales de coloration différente, tantôt larges, tantôt étroites, ou des parties alternativement lisses ou ru- gueuses, alors le mollusque s’est tour à tour trouvé dans des conditions plus ou moins favorables à son déveleppement, et ces mêmes conditions ont pu favoriser ou entraver Île travail de la sécrétion calcaire de la coquille. De pareils faits sont tout aussi fréquents chez les petites coquilles que chez les grosses, chez les Pisidies ou les Anodontes ; c'est que tou- tes en effet, sont soumises aux mêmes influences qui se tra- duisent à un moment donné d'une manière similaire sur la coquille. Nous aurons, du reste, occasion de revenir sur ce sujet lorsque nous nous occuperons de la tératologie mala- cologique. Le mode d’accroissement du test chez les Gastéropodes terrestres ou aquatiques se fait de la même facon, et cepen- dant, les operculés aquatiques ont une coquille nécessaire- ment plus grande que celle des acéphales terrestres, puis- qu'en outre du volume qui doit être occupé par leur corps, il existe dans la coquille un vide destiné à la chambre à air. Le révérend H. Moseley a fait à ce sujet de curieuses observa- tions (1). Il arrive à constater «que la chambre de la coquille aqualique s’accroit non seulement comme la coquille terres- (1) Moseley, 1838. Trans phil. Soc, royale de Londres, p. 351. DE VARIATIONS MALACOLOGIQUES tre, de manière à pouvoir contenir le volume de plus en plus grand du mollusque, mais de manière à ce qu'une portion de plus en plus grande de son volume puisse rester inoceu pée. Or la capacité de la coquille et les dimensions de l'animal commencent ensemble, et elles augmentent ainsi en rapport constant ; le volume total de l'animal est done soumis à un rapport constant avec la capacité entière et plus grande de la coquille, dans les coquilles aquatiques ; dans les coquilles terrestres, le rapport de l’animal est probablement égal à celui de la coquille. » (1) Cette loi n’est pas absolument vraie, car certains Gastéropodes qui possèdent un opercule épais, calcaire, comme l’Helix pomatia, par exemple, se réservent bien, lors de la construction de cet opercule, une chambre à air; nous savons même que, suivant la rigueur de la sai- son, ce même mollusque, pour mieux s'abriter, peut se cons- truire un second et même plusieurs autres opercules protec- teurs. 5 Enfin il est une cause de variations au sujet de laquelle peu d'expériences bien décisives encore ont été faites, el qui, cependant, serait bien certainement applicable aux varia- tions d'un grand nombre d'espèces. Nous voulons parler des accouplements entre des individus appartenant à des espèces différentes, et donnant lieu à des métis. Lorsque l’on accouple des variétés distinctes d’une même espèce, on peut oblenir, comme nous allons le voir, de nouveaux produits; mais qu'adviendra-t-il si l’on obtient des produits de la réunion féconde de deux espèces différentes ? Il y a encore bien à faire dans celte voie; nous avons à ce sujet tenté quelques expé- riences, mais nos résultats ne sont pas encore assez Con- cluants pour pouvoir être présentés. | Nous rappellerons ici d'abord l'expérience faite par M. Gas- (1) Hugard, 1842. In An, sciences nat., 9° sér., t. XVIT, p. 107. DU BASSIN DU RHONE Ju sies sur le Rumina decollata (1). Un individu de cette espèce provenant d'Oran a été d’abord conservé isolé de tout autre sujet pendant une période de dix-huit mois ; mis en rapport avec des individus des environs d'Agen, ces animaux s'ac- couplent, et leur produit présente quelques caractères de coloration propre à la race africaine, notamment la teinte violacée des téguments de la partie supérieure du corps, la couleur jaune du disque podal, les linéoles blanchàtres sur un fond fauve obscur de la coquille, etc. Devenus adultes, ces individus ont un test plus épais que le type européen et leur péristome devient calleux. Plus tard, la forme de l'ouverture se modifie encore, elle devient sinueuse à sa partiesupérieure, et forme en ce point une sorte d'entaille, bordée par une callosité dentiforme très marquée. Ces produits de l’hybrydation tendent donc à constituer une nouvelle et véritable race, attendu que jamais on n'a signalé en France des Rumina decollala à ouverture denti- forme. Maisil reste à savoir si cette race une foiscréée, et ses individus se reproduisant entre eux, ces nouveaux caractè- res prendront une fixité parfaite, ou bien si par suite des lois de l'atavisme, la forme dominante ancestrale ne finira pas par subsister seule à la place de ce mélange des carac- tères propres à deux types différents d'une méme espèce. C'est sans doute ce que M. Gassies nous apprendra plus tard. Lorsqu'il s’agit d'espèces différentes, les accouplements ont été souvent observés, mais on ne connait pas le résultat. Nous citerons plusieurs exemples de ce genre, dans l’espé- rance que ces indications puisées de différents côtés servi- ront de bases au naturaliste qui voudrait entreprendre ces intéressantes expériences. (1) Uassies, 1879, Note sur des métis de Rumäina decollata,in Actes de la Soc. Linnéenne de Bordeaux, t. XXXIII, 326 VARIATIONS MALACOLOGIQUES M. Gassies, dans son tableau des mollusques de l’Agénais (1), nous dit ceci : « J'ai vu quelques accouplements forcés avec les Hélices variables et Pisana. Lorsque le tonnerre grondait, j'enfermais un Bulime tronqué avec une de ces Hélices sous un couvercle en gaze métallique; l'électricité aidant, les ani- maux se recherchaient bientôt, se fuyaient pour revenir encore, leurs désirs fortement excités les portaient enfin à s accoupler. Je n'ai point vu de Bulimes pondre et dévelop- per autre chose que des individus de leur espèce, mais les Helices produisaient des variétés de coloration et de forme qui s'écartaient un peu de leur type, sans avoir le faciès des Bulimes ». Comme le fait observer M. Gassies dans un autre travail (2), les individus soumis à l'expérience, n'avaient pas été préalablement fécondés par des individus de mème es- pèce. Quant au produit obtenu en accouplant des Helix pi- sana avec des Helix variabilis, « les individus qui naquirent m'offrirent cette particularité : les Helix pisana furent comple- tementalbines et les Helix variabilis, au contraire, très foncées en couleur ; cependant l'individu noir du premier, élait fas- cié comme d'habitude ». Dans l'accouplement des Helix avec les Bulimes, M. Gassies observe : « Mes Hélices seules m of- frirent des varialions de formes. Sur une quarantaine de couples séparés, Bulimes et Hélices, plusieurs produisirent des individus presque scalaires, tendant à s’allonger à l’in- sertion suturale, et à s'élever pyramidalement ; d’autres affectaient la forme conique, et la majorité ressemblaient complètement au type qui les avait créés. » Parmi les accouplements observés chez les Hélices, ce mème auteur cite l’accouplement de l’Helix aspersa avec (1) Gassies, 1852. Observations de M. Gnssies sur une notede M. Lecoq, relalive aux accouplements adultérins chez quelques mollusques terrestres, in Journ. de conch., vol. II, p 107. (2) Gassies, 1849. Tableau des mollusques de l'Agénais, p. 107. DU BASSIN DU RHONE SPA l’'Helix nemoralis et l'Helix vermiculala, et celui de l'Helix nemorulis avec l'Helix hortensis ; moins heureux que lui, nous devons avouer que nous n'avons pas encore pu obtenir ce dernier résultat. M. Lecoq (1) a observé dans le Gard plus de vingt accouplements du Clausilia papillaris Drap., et du Pupa cinerea Drap., (Pupa quinquedentala Born), mas sans constater la nature du produit. À Paris, dans le jar-- din du Luxembourg, il a été également témoin d’un accou - plement d'Helix nemoralis avec un Helix aspersa. De Char- pentier dit également (2) : «Des observations suivies, faites avec tout le soin possible, nous ont prouvé que les Hélices désignées sous les noms de A. nemoralis et H. hortensis, sont de simples variétés d’une même espèce, M. Rossmässler les a mème vues accouplées. » Nous citerons pour notre part l'accouplement des Succinea putris el S. Pfcifferi que nous avons plusieurs fois observé sur les bords de la Saône, celui d’un 4rion empüricorum avec un Limax cinereus, enfin celui d'un Limnœæa limosa avec un Linnæa peregra, sans par- ler de celui des Limnœæa stagnalis et L. elophilu. Dans ces trois cas l’acte de la copulation a été accompli, mais y a-t-il eu fécondation, c'est ce que nous ne saurions dire, n'ayant pas pu conserver suffisamment longtemps les mollusques. Plus récemment encore, M. le marquis de Folin a pu ac- coupler des Hélices assez différentes, mais appartenant au même groupe des campylées, les Helix planospira et H. seli - pila. « En comparant les hybrides à leurs parents, M. de Folin remarque qu'ils se rapprochent de l'Helix planospira par la dépression de la spire, qui est exactement la spire, par la semi-convexité des premiers tours qui rend la suture assez profonde, par la série des zones foncées et claires qui se re- (4) Lecoq, 1855. Note sur les accouplements adulterins de quelques espèces de mollusques, in Journ. de Conch. vol. I, p. 245. (2) De Charpentier, 1837. Catalogue des Mollusques de la Suisse, p. 7. 328 VARIATIONS MALACOLOGIQUES marquent vers le haut du dernier tour ; le métis tient de l'Helix setipila par la présence de nombreux poils courts et rigides ; il diffère de la première Helix, qui est toujours lisse et parfaitement glabre, par la texture du test et surtout parce qu'il est, comme on vient de le dire, hérissé de poils ; de la seconde, en ce que ces poils sont beaucoup plus courts et n'ont guère que le quart de la longueur de ceux de l'Helix setipila. Le descendant a d’ailleurs des caractères qui lui sont propres; ainsi son test parait plus fin, moins rugueux que celui des ascendants, ses stries longitudinales sont beaucaup moins fortes, moins proéminentes; la texture même du test _semble différente ; il est strié dans le sens de la spire par une série de petits sillons rapprochés les uns des autres et cou- rant assez régulièrement le long de cette spire, caractère qu'on ne retrouve ni sur l’'Hclix planospira, ni sur l'Helix selipila. (1) » Ces accouplements entre espèces différentes ont également lieu chez les coquilles marines. M. Thompson (2) a vu plu- sieurs cas d’accouplements adultérins entre les Liltorina rudis et le L. obtusata ; de mème M. E. Sauvage (3) a signalé l'union des Zillorina rudis et L. lillorea. En résumé, il y a là tout un champ d'expérience qui reste encore à explorer. Les accouplements adultérins entre mol- lusques ont lieu, le fait est certain, mais d'abord cet aceou- plement est-il fécond, surtout lorsqu'il s’agit de deux formes aussi différentes que celles des Helix aspersa et 1. nemora- lis? puis ensuite quel est le degré de fixité du produit obtenu ? Quant à l’accouplement de deux formes aussi voi- sines que certaines variétés des Limnæa limosa et L. peregra, (1) De Folin, 1879. Feuille des jeunes naturalistes, n° de février. (2) Thompson, 1852. Ann. and. mag. of nat. hist., p. 76. (3) Sauvage, 1873. Note sur l’accouplement des Ziltorina rudis et Lillorea, în Journ. de Conch., vol. XXI, p. 122. DU BASSIN DU RIIONE 329 ou des Succinea putris et S. Pfeifferi, nous supposons bien qu'il donne lieu à une de ces nombreuses formes de passage si difficiles à définir et qui n’ont qu'une fixité relative. Mais un des éléments qu'il importe de bien observer dans ces sor- tes d’accouplements, c’est la parfaite virginité des sujets ; on sait très bien que les mollusques s’accouplent avant le com- plet achèvement de leur coquille ; il importe done, pour faire des expériences concluantes, de prendre des individus qui, au sortir de l'œuf, auront été parfaitement isolés, et qui n’au- ront jamais de rapports qu'avec le sujet sur lequel on veut expérimenter. Nous poursuivons ces essais, et nous espérons pouvoir, peut-être, un jour, jeter un peu de lumière sur cette inté- ressante question, qui, sans aucun doute, sera la solution de bien des problèmes encore non résolus dans la question des variations malacologiques et de la fixité des espèces actuel- lement admises. VAR. MAL. 7 I, 10 tÙ 7 XI VARIATIONS PARTIELLES DES MOLLUSQUES Variations partielles chez les Gastéropodes. — Test, — Epiderme, poils, écailles, — Spire. — Tours de spire. — Columelle. — Ouverture. — Péristome. — Ombilic.— Sommet. — Carène. — Suture. — Accidents aperturaux, dents, plis, gouttières, callum, bourrelet, opercule, épi- phragme, clausilium. — Coloration et ornementation. — Variations partielles chez les lamel- libranches, — Contour des valves. — Sinus. — Sommet. — Charnière. — Impressions mus- culaires. — Nacre. — Strics. — Coloration dermale, — Poils, etc. Les variations partielles où locales des mollusques sont celles qui portent seulement sur une partie de leur individu. Comme pour les variations générales, si elles ne se manifes- tent que sur un être unique, elles peuvent constituer des variations individuelles ou des cas tératologiques, suivant leur degré d'intensité. Ce sont au contraire de véritables variétés si elles s'appliquent de la même manière à un certain nom- bre d'êtres de mème espèce. | Ces variations partielles peuvent se manifester soit sur l'animal, soit sur la coquille elle-mème; c'est ordinairement dans ce dernier cas qu'elles sontle plus apparentes chez les mollusques qui n’appartiennentpas à la famille des Limacéens: comme c'est surtout en se basant sur les caractères fournis par la coquille que se font les déterminations, il importera DU BASSIN DU RHONE 30 donc d'étudier toutes les modifications que celle-ci peut éprouver. Nous aurons ainsi dans ce chapitre à passer suc- cessivement en revue les différentes parties de la coquille des mollusques pour nous rendre compte des variations que chacune de ces parties peut présenter. Nous occupant plus spécialement dans ce travail de l'étude du test chez les mollusques, qui seul survit après la fossilisa- Lion, nous avons dû nécessairement négliger les variations que peuvent subir les Limacéens. Dans cette famille, le test est réduit à l’état plus ou moins rudimentaire, de telle sorte que les caractères spécifiques portent alors exelusivement sur l'animal. Ces caractères sont basés sur les différen- ciations extérieures des individus, telles que leur taille, leur coloration, la disposition relative de leurs organes externes, la manière d’être de leur cuirasse, ete. Nous n’entrerons pas ici dans plus de détails sur les variations des mollusques de cette famille ; leur étude n’ajouterait aucune argumenta- Uion nouvelle et nous entrainerait nécessairement à pour- suivre ces mêmes recherches pour l'animal lui-même de toutes les autres familles. Du reste, dans la première partie de ce travail, nous eslimons nous être suffisamment étendu sur les varialions que peuvent présenter les nombreuses espéces admises dans chacun des genres de cette famille. Tesr. « La coquille, dit M. Milne Edwards (1), est un produit épidermique lamelleux, qui, dans la majorité des cas, se développe à la surface libre du manteau, et quin’est recouvert que par une couche mince d'épiderme ordinaire en continuité avec celle dont les parties adjacentes et molles du système eulané sont revèêtues. » Il faut donc étudier dans toute coquille son test et son épiderme. L'étude du test, depuis sa formation jusqu'à son complet (1) Milne Fdwaris, 1874. Leson sur La physiol JC; NI NS np. [43 JE VARIATIONS MALACOLOGIQUES épanouissement, a donné lieu à des travaux fort renarqua - bles; nous ne reviendrons pas sur ce sujet, malgré ‘tout l'intérêt qu'il présente, n'ayant malheureusement pas un tribut suffisant à apporter aux recherches des Delacroix, Carpenter, Bowerbank, Moquin-Tandon, Milne Edwards, etc. Bornons-nous à rappeler que l’on admet aujourd'hui que le tissu conchyliogène des mollusques est untissu épidermique dont les utricules se remplissent de carbonate de chaux. De là une certaine variabilité dans sa composition chimique. Et, en effet, dans les jeunes individus, comme dans les co - quilles minces et transparentes, la proportion de carbonate de chaux sera moins considérable, en faveur d'une augmentation de poids de la matière organique. Suivant done que lon fera l’analyse d'une coquille d'Helix nemoralis soit jeune, soit adulte, prise dans une station élevée, c'est-à-dire avec une coquille mince ou recueillie dans les régions basses et par conséquent avec une coquille épaisse, on aura pour l'analyse chimique du test une composition différente. L'influence même des milieux où vitle mollusque peut se traduire éga- lement par une différence de composition chimique; en effet, nous savons que les gastéropodes fluviatiles renfer- ment moins de carbonate de chaux que les gastéropodes ter- restres. Quant à la matière organique propre aux mollusques, la conchylioline de M. Frémy, sa proportion peut également varier chez les individus de la mème espèce, suivant leur âge comme suivant leur plus ou moins de vitalité. Enfin, les différentes parties de la coquille d’un mème individu peu- vent renfermer des proportions différentes de malières ani- males ou calcaires. Delacroix a trouvé que l'épiphragme de l'Helix pomatia contenait environ trois fois autant de matiè- res animales que la coquille elle-même. Il reste donc bien démontre par tout ce qui précède que la nature mème du test des mollusques est de composition “ DU BASSIN DU RIIONE dd chimique variable. Il en est ainsi de sa constitution physique. L'étude microscopique de ce même test, faite à l'aide de plaques minces, nous montre, comme on devait s y allendre, une disposition cellulaire, ou mieux, utriculaire variant non seulement suivant les espèces, mais encore suivant les indi- vidus et d’après la partie de la coquille où est faite l'observa- tion. Ces questions fort curieuses sont faciles à suivre, et l’on peut prendre sur la coquille d'un même Helix pomatia assez d'éprouvettes microscopiques pour se rendre un compte exact des variations de la texture de ce test. Le test, du reste, peut se manifester de différentes facons chez les mollusques : chez les Arionidæ, Arion, Baudonia, Geomulacus, il est réduit à de simples granulations calcaires toujours internes; chez les Limacidæ, Letourneuxia, Paliz- zoha, Limux, Mabillia, Krynickillus, Millax, ces granulations se soudent et donnent naissanee à une limacelle ou coquille interne. Avec les Parmacella, la coquille commence à ap- paraitre extérieurement, tandis que toute une partie à l’é- tat de Limacelle reste cachée sous la cuirasse. Les Tes- lacellidæ, Testacella, Libania, Daudebardia, ont la coquille tout à fait externe, mais encore rudimentaire ; elle s’agrandit chez les flelix arionidæ, Isselia et Helix aricn, et acquiert un développement normal et complet avec les Helicidæ. Mais là encore, la coquille suit une certaine loi dans ses proportions relatives par rapport à l'animal. Dans le genre Vifrina, elle ne peut contenir qu incomplètement l'animal; tandis que dans le genre Alleryu, nous voyons encore une partie em- bryonnaire du test engagé dans les plis du manteau de l’a- nimal. Les Succinées le renferment exactement, et ce n’est qu'avec les Hyalinia, Zonites, Leucochroa et Helix que l'animal peut se retirer dans sa coquille pour en clore l'ouverture. Quant à l'épiderme qui recouvre le test proprement dit, et auquel on donne parfois lenom fort impropre de drap marin, 334 VARIATIONS MALACOLOGIQUES il peut former, à la surface de la coquille, des prolongements représentant des rides, des écailles ou des poils. Avant de parler de ces accidents épidermiques, nous devons dire quel- ques mots de différentes manières d'être extérieures du fest des coquilles. Épaisseur du test. —Sile test des coquilles est déjà, comme nous l'avons vu, d’une composition chimique et d’un état physique variables, son aspect extérieur, à l’œil nu est tout cussi sujet à modifications. Dans les coquilles rudimentaires comme les granulations calcaires des Arions ou les lima- celles des Limaces, nous avons déjà vu que leur faciès, leur galbe en un mot, pouvait présenter non pas tant des varia- tions spécifiques que des variations individuelles des plus prononcées. Le mème fait se reproduit dans les coquilles parfaites. Il est certaines coquilles appartenant à la même espèce, et qui sont tendres, minces ou épaisses, transparen- tes ou opaques suivant la nature des milieux où elles ont vécu. D'une facon générale, les coquilles des mollusques à grande dispersion en altitude sont plus minces dans les régions élevées que dans les plaines basses et les vallées. Nous croyons en avoir donné l'explication en faisant interve- nir des considérations purement physiques. Le fait par lui- même est indéniable, et les exemples que nous pourrions citer sont des plus nombreux. Nous verrons dans unautre chapitre l'influence de la com- position chimique du sol sur le développement des mollus- ques en général. Cette influence se fait nécessairement sentir sur le test. Il est parfaitement reconnu que tous les motlusques qui vivent sur un sol calcaire ont leur test plus ort, plus épais, plus pesant que ceux qui vivent sur le sol siliceux. Mais parfois aussi dans une même colonie, on trouve des individus chez lesquels le développement testacé a pris une proportion anormale; c’est presque alors une véritable DU BASSIN DU RIIONE 335 anomalie. Le docteur Baudon a cité une variété ponderosa de l'Aelix pomaiia dont le poids de la coquille seule atteignait de 14 à 15 grammes alors que les exemplaires ordinaires ne dépassaient pas de 5 à 10 grammes. Dans la première partie de ce travail nous avons signalé un individu de la collection de M. Gabillot qui pesait 25 grammes; mais ici, c'est plutôt une anomalie qu'une variété. Il existerait même des indi- vidus plus gigantesques encore ; M. le docteur Jousseaume cite un H. pomalia dont la hauteur est de 68 millim., le dia- mètre maximum de 607 et qui pèse 92 grammes (1). Le test chez la même espèce peut être tantôt complètement opaque, tantôt au contraire subopaque et même transparent. Nous observons notamment ce fait chez les Æ. hortensis et H. nemoralis de quelques stations alpestres généralement à d'assez grandes altitudes. Le même fait s'observe dans les Vosges. « J'en ai trouvé (Helix hortensis), dit M. Collin (2), à plus de {000 mètres de hauteur dans les montagnes près de Saint-Maurice ; ces dernières se rapportent à l'Helix Sauveur J. Colbeau. » L'Helix ericelorum des Voirons près Genève, qui vit à côté des sources, vers les sapins, est mince, presque entièement corne, tandis que celui des lieux secs, c'est-à-dire qui vit dans un milieu normal, est à test plus épais et com- plètement opaque. Bouchard-Chantereaux (3) a constaté que chez les mollus-- ques ovipares, l'épaisseur du test de la coquille est propor- tionnelle à celle de l'œuf; l'enveloppe de l'œuf est solide, épaisse, résistante chez les Helix pomatia, H. aspersa, H. ne- moralis, dont le test de la coquille présente les mèmes con- ditions, tandis qu'elle est mince, translucide, peu résistante chez les Helix carthusiana, H. revelala, ete. De même aussi, (1) Jousseaume, 1875. Faune malac. des environs de Paris, 6° arlicle, p. 8. (2) J. Collin. 1874, Ann. Soc. malac. de Belgique, t. IX p. xxIx. (3) Bouchard-Chantereaux, 1839. In Ann. sciences naturelles, 2° série, t. XF, p. 302, 336 VARIATIONS MALACOLOGIQUES quand on voitdiminuer l'épaisseur du test d'une coquille or- dinairement solide, l'épaisseur de l'enveloppe des œufs di- minue dans les mêmes proportions. Un fait assez fréquent chez l'Helix hortensis et dont nous ne saisissons pas la cause, c’est l'existence dans la même co quille d’une partie opaque associée à une partie transparente. Dans cette espèce, le test est ordinairement plus mince et plus translucide que chez l'{Zelix nemoralis ; mais nous ob- servons que chez certains individus, la partie supérieure de la coquille est beaucoup moins transparente que la partie inférieure ; celle-ci se présente sous un aspect corné dans les variétés colorées en jaune ; les deux parties ainsi définies sont nettement séparées par une ligne ordinairement infé- rieure à la bande médiane. Si l’on regarde l'intérieur de la coquille par le dessous, on pourra facilement distinguer les tours de la spire, tandis qu’en regardant par dessus, on ne distinguera absolument rien. La question de translucidité des coquilles est encore plus variable chez les espèces aquatiques. Il s’agit ici, bien en- tendu, des coquilles qui auront été débarrassées de tout en- croùtement minéral ou végétal qui peut masquer la manière d'être réelle du test. Nous voyons en effet bien des Limnées subsistant dans des milieux très voisins les uns des autres, mais de nature variée, se présenter sous des aspects tout différents. Telle colonie de Limnœæa limosu, L. peregra, L. pa- lustris, ete., aura toujours sa coquille mince et transparente, tandis que dans une colonie voisine les individus auront ab- solument la même forme et seront au contraire à peine trans- lucides. On peut, du reste, dans cet état de translucidité ou de transparence, trouver tous les degrés possibles. Mais il faut remarquer qu'à la longue les mollusques perdent un peu de leur transparence. Nous avons observé, par exemple, que des ‘ DU BASSIN DU RHONE 331 mollusques recueillis et préparés dans les meilleures condi- tions avec tous les soins possibles, il y a près d'un siècle, étaient loin d’avoir conservé cette transparence qu'ils de- vaient avoir primitivement. Nous savons, hélas! parfaitement que dans nos collections les mieux entretenues, les coquilles s’altèrent rapidement. Il est probable que le tissu épidermi- que du test, qui renferme plus de matière animale dans ses utricules que le testlui-mème,doit se décomposer à la longue et finir par s’altérer. Dans la fossilisation la matière organi- que à tout à fait disparu, mais entre ces deux états il y en a d'intermédiaires par lesquels la coquille passe et pendant lesquels elle perd peu à peu de ses caractères physiques et chimiques. Test strié. — La plupart du temps, le test des coquilles est recouvert de stries plus ou moins rapprochées, plus ou moins fortes, plus ou moins nombreuses. De là autant de manières d’être différentes du test. Ces stries sont tantôt spirales et suivent le mouvement des tours de spire de Ja coquille, tantôt longitudinales ou transversales ; tantôt enfin les deux régimes arrivant à s’entre-croiser, la coquille parait alors tressillée ou réticulée. Ces stries sont propres au test lui-même, et sont indépendantes des rides qui peuvent exister sur l'épiderme de la coquille ; nous les observons en- core après la fossilisalion, c'est-à-dire après la disparition tomplète non seulement de l’épiderme, mais mème de toute matière organique. C'est done là un caractère très impor- tant chez les mollusques et dont on tire un parti précieux dans la diagnose des espèces. Maisil arrive souvent que ces stries ont une importance très variable dans une même espèce donnée, suivant la manière d’être des mollusques. L'étude exclusive des stries, considérée comme caractère distinetif des espèces chez les Felix, a pu conduire certains naturalistes dans une fausse voie. Nous voyons, par exemple, 398 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Dumont, dans une monographie des Hélices striées (1), en arriver à grouper avec les Helix striala, H. rugosiuscula, les I. imaritima, H. pyramidala, H. conoidea, H. Terveri, IL. va- riabilis, H. cespilum, ete. Certes, la présence ou la manière d'être des stries a une grande importance, mais il faut bien se garder de lui faire jouer un pareil rôle. L'étude microscopique du test nous montre d'abord que toutes les parties d'une coquille striée n’ont pas des stries aussi prononcées. Chez les Helix, c’est ordinairement le dernier tour qui est le plus profondément buriné; mais Ja partie correspondant à la fin de l'accroissement de la premie- re annce est souvent marquée par des stries plus accentuées suivant ou précédant une partie lisse du test qui correspond à l'ancienne ouverture sans péristome de la coquille. Les stries longitudinales se confondent du reste souvent avec les stries d’accroissement ; il est donc tout naturel qu’elles soient mieux accentuées dans cette partie de la coquille. Parfois, comme chez les Hyalinies, les stries sont plus marquées en dessus de la coquille qu'en dessous. Souvent aussi, à leur point d'insertion avec la ligne suturale, les stries forment de pelits bourrelets plus où moins saillants et irré- guliers. C’est ordinairement vers l'ombilic que les stries sont le moins aceusées. C'est ceque nous observons, par exemple, d'une façon très précise dans l'Helix muralis Müller, dont les stries longitudinales très marquées, ondulées, subégales, sont de moins en moins fortes à mesure que l'on va de la ligne suturale du dernier tour vers l’ombilic, ou plutôt vers l'emplacement de l’ombilic. Dans les Hyalinies comme dans les Hélices, plusieurs grou- pes sont basés sur la nature des stries de la coquille. Dans la première partie de ce travail, nous avons indiqué avec détail (1) Dumont, 1850, Monographie des Hélices striées. DU BASSIN DU RHONE 399 les différentes espèces ou prétendues espèces de Hyalinies ca- ractérisées par la présence de ces stries, constituant des for- mes incantestablement très voisines les unes des autres dont plusieurs ne sont sans doute que des manières d’être plus ou moins alpestres d'un type primitif donné : tels sont les {yali- nia radiatulu, H. petronella, Æ. viridula el H. Dumontiuna, etc. Ces types, surtout les trois premiers, ont été souvent confondus, et nous voyons, en effet, que leurs différences spécifiques reposent sur de bien faibles éléments ; quant aux stries caractéristiques du premier, nous avons montré (1) combien elles variaient dans leur manière d’être non seule- ment suivant les colonies, mais encore suivant les individus. Parmi les Hélices, le groupe si important de l’Helis striala est un de ceux qui se font le plus remarquer par la nature de ses stries. Sans chercher à rapprocher les Helix intersecta, H. conspurcala, H. rugosiuscula, ete., caractérisés surtout par la forme, le nombre ou l'intensité de leurs stries, joints à certaines autres données spécifiques basées sur la taille, la di - mension de l’ombilie ou la forme de l'ouverture, nous obser - vons que dans une seule et mème espèce, la nature ou la manifestation de ces stries peut varier d'une facon considé- raple. Ainsi dans l'Aelix inlersecla Mich. par exemple, si nous voyons des échantillons dont les stries sont nettement mar- quées, quoique fines et peu saillantes, nous rencontrons des individus et même des colonies vivant dans des conditions différentes chez lesquelles ces stries sont de beaucoup plus atténuées, à peine marquées et visibles à l'œil nu, tandis que d'autres ont au contraire ces mêmes stries plus fortes, plus saillantes, surtout à la partie supérieure du dernier tour. Ces stries vues à la loupe sont, tantôt plus ou moins rapprochées, tantôt plus ou moins fines, et s’il fallait baser sur ce caractère (4) Vol. I, p. 58. 340 VARIATIONS MALACOLOGIQUES des variétés ou sous-variétés le nombre en serait en quel- que sorte indéfini. La même chose s'observe pour les Helix rugosiuscula, H. conspurcala, H. diniensis, etc.; toutes ces espèces en un mot sont striées, leurs stries présentent nor- malement un certain ensemble de caractères assez précis, mais sans fixité absolue. Dans les Clausilies, si l'enveloppe testacée est lisse ou ri- dée, le test lui-même participe pour sa part à cette manière d'être. Si l’on enlève l’épiderme à une Clausilie ridée, nous voyons ces rides apparaitre encore sur le test/; elles existent également dans les coquilles fossiles des Clausilia plicula Drap., CI. pumila Liegler, Cl. plicatula Drap., CL. ventricosa Drap., CI. fiiograna ZLiegler, etc., des terrains quaternaires. Les auteurs qui ont le plus multiplié les espèces de Clausi- lies admettent cependant l'existence de certaines variétés basées sur la manière d'être de ces stries ou rides. Adolf Schmidt (1), par exemple, a reconnu et figuré plusieurs varié - tés chez lesquelles ces rides diffèrent du type. M. Bourgui- gnat, dans sa Monographie des quatre-vingt-huit Clausi- lies de France, reconnait également plusieurs variétés de Clausilies différant par la forme des stries ; telles sont : Clau - silia solida Drap., var. ce, dont le test est plus vigoureuse - ment strié; Cl. punctala Michaud, var. b, saorgiensis à stries plus robustes; Cl. Rolphii Leach, var. b, Tapeina, pourvue de costulations plus robustes, plus épaisses, un peu obliques, et surtout plus écartées; Cl. lineolata Hed, var. b, basileensis, avec des stries un peu plus fines ; CZ. Fagotianu Bourg., var. b, nunor, avec des costulations un peu moins fortes, ete. Chez les Limnées, dont quelques-unes sont ordinairement à test martelé, il existe parfois des stries ou costulations (1) A. Schmidt, 1857, Die IKricehen Gruppen der europäischen Clausilia. ss PC | DU BASSIN DU RHONE J41 parfaitement aceusécs. Nous avons récolté sur les bords du lac du Bourget dans les alluvions un grand Zimnæa corvus chez lequel les stries réunies en faisceaux réguliers for- maient de véritables costulations s'étendant en spirale régu- lière sur toule la coquille. Nous avons indiqué également une var. shiata du Limnœæa palustris, caractérisé par la présence de stries régulières, bien marquées recouvrant la surface entière de la coquille. Chez les Cyclostomes, les stries les plus apparentes sont transversales, mais la coquille peut être plus ou moins profondément burinée. M. J. Mabille (1), se basant sur cette donnée, a divisé les Cyclostomes français en lœvigalæ ou es - pèce à test lisse et brillant et sulcatæ ou espèce à test terne et fortement strié. Chez les deux espèces à test lisse, Cyclos- toma Bourguignati et C. asteum, les stries existent cepen- dant, mais elles sont tres fines, tres serrées, visibles seule - ment à la loupe. Pour les espèces à test strié, ces stries sont, au contraire, de plus en plus marquées depuis le Cy- clostoma elegans jusqu'au Cyclostoma sulealuin du Midi de la France. Enfin, comme exemple du double régime de stries longi- tudinales et transversales, nous citerons le genre Ancyle. Dans certaines espèces de ce genre, nous voyons en effet figurer un premier régime de stries longitudinales rayonnan- tes partant du sommet, ordinairement fines, subégales, plus ou moins apparentes et même quelquefois nulles, recoupées par un second régime de stries circulaires ordinairement plus fines et moins visibles à l'œil nu. L'existence ou la prédominance de ces stries a pu donner lieu à la eréation d'espèces nouvelles admises par quelques auteurs avec ce litre dans la méthode, ou simplement rangées par d'autres sous (4) 3. Mabille, 1855, D2s espèces de la famille des cyclostomidæ, In Revue et mag. de Zoolo- gie, 342 VARIATIONS MALACOLOGIQUES le nom de variétés. C’est ainsi, par exemple, que lAncylus coslatus de Ferussac, admis par A. et B. Villa, Requien, J. Jay, Mortillet, Baudon, de Cessac, elc., et caractérisé par des stries fortement marquées, quelquefois même grossièrement ébauchées, ne serait pour M. Bourguignat qu'une variété de l'Ancylus simplex (Lepas simplex Buc'Hoz). De même aussi l'Aneylus striatus Porro, admis sous cetle même désignation par MM. Dupuy, de Mortillet, Millet, Grateloup et Raulin, elc., et caractérisé par l'existence de petites stries fines ct radiées, assez régulières, ne serait, d'après ce même auteur, qu'une autre variété du mème Ancylus simplex. La même espèce d'Ancyle serait done susceptible d'affecter plusieurs manières d'être relativement à l'état du double régime de stries qui ornent sa surface. Les coquilles des Lamellibranches sont également plus ou moins profondément striées chezles Unios et les Anodontes. Les stries normales tendent à se confondre avec les stries d'accroissement de la coquille. Chez Ics Pisidies et les Sphéries, elles sont parfois fortement marquées. Tel est le cas du Pisidium amnicum Jenyns, dont les stries sont accen- tuées de facon à dessiner à la surface de la coquille de véri- tables côtes régulières. Là encore nous observons certaines varialions dans la manière d'être de ces côtes pour une même espèce, puisque M. le docteur Baudon dans son Essai mono- eraphique sur les Pisidies francaises, a indiqué pour le Pusi- dium amnicum les var. clongalu, avec des stries plus fortes queleLype, var. shrivlalum avec des sillons profonds, var. /æ- viusculum avec des stries plus superficielles, var. nilidula sans stries apparentes, ele. En outre les échantillons de cha- eune de ces variélés, quelque nombreuse qu'elles soient, peu- vent affecter une manière d'être individuelle différente, tout en étant voisine de celle des individus du mème groupe. Test martelé. —Le test des mollusques, au lieu d’être lisse DU BASSIN DU RHONE 343 ou strié, peut affecter une manière d’être toute particulière spécifiquement propre à certaines Limnées et qui leur donne l'apparence qu'elles pourraient avoir si on les avait sou - mises à un martelage; la surface extérieure est couverte d'une série de petits méplats disposés les uns à côté des autres, parfois avec une certaine régularité simulant une forme spirale. Ce martelage est plus fréquent chez le Limnœa palustris que chez les autres Limnées ; nous l’avons cependant observé chez les Limnœæu auricularia Linné, var. collisa, L. sta- gnalis Linné et H. truncatula Müller, var. malleata. La présence de ces méplats n’est qu'un caractère accidentel ; il nous à paru cependant propre à certaines colonies; nous l'avons vu se reproduire pendant deux ou trois générations avec la même régularité, le même faciès; mais ces échantil- lons transportés dans un autre milieu ont donné des petits complètements privés de toute trace de martelage. Cette manière d'être de la coquille n’a done qu'un degré de fixité relatif, puisque par l'éducation nous avons pu faire disparai- tre ce caractère qui paraissait cependant avoir une certaine constance. Il faut du reste bien remarquer que même chez le Limnæa palustris, espèce dont le test est le plus souvent martelé, ce même test parait au contraire strié chez certaines colonies, comme celui des autres mollusques. | Quelle peutètre la cause d’une pareille structure du test ? Nous l'ignorons encore; cependant nous croyons avoir ob- servé qu'elle se manifestait plus volontiers chez les coquil- les vivant dans des eaux un peu profondes et surtout mou- vementées. Ce mode de structure n'est dureste pas exclusif aux Limnées; nous l'avons également observé chez le Vivi- para fasciala vivant dans les eaux du Rhône. Test costulé. — Parfois chez quelques espèces, le mar- telage prend un caraclère de régularité tout particulier qui J44 VARIATIONS MALACOLOGIQUES se traduit sous forme de véritables costulations longitudi - nales fort curieuses, qui modifient totalement l’aspeet de la coquille. Pareil fait s’observe surtout chez les Limnées. Le docteur Kobelt (1) a déjà décrit et figuré une variété ainsi or- nementée de Limnæa auricularia. Nous avons signalé une dis- position tout à fait similaire chez un Limnœæa corvus recueilli dans les alluvions du lac du Bourget. Test mamelonné. — M. Bourguignat le premier a fait con- naitre la maniere d’être du test des Moitessiéries. « Le test d'une Moitessiérie, dit-il, est en effet, toujours plus où moins malléé, c'est-à-dire couvert de renfoncements analogues à ceux qu’on remarque sur les dés à coudre. Ces malléations, exami- nées à des grossissements de quatre à cinq cents, paraissent, suivant leurs dispositions, octogones, tétragones ou arrondies. Au centre de chacune de ces malléations octogones, comme chez la Rolandia, par exemple, se trouve un léger mamelon à point central imitant l'éminence alvéolaire d'un petit poil des plus cadues (2). » Cette curieuse disposition du test parait jusqu'à présent propre à ce seul genre. Varices. — Enfin le test des Gastéropodes peut, chez cer- taines espèces, prendre des gibbosités allongées, creuses à l'intérieur, disposées dans le sens des stries d’accroissement sur le dernier tour de la spire, et formant par leur saillie de véritables varices ; le plus ordinairement elles occupent toute la hauteur du tour de spire. Ge caractère, sans être absolu, parait cependant propre au genre Belgrandia créé par M. Bour - guignat, pour certaines Paludines (3). Comme l’a fait observer Paladilhe, les espèces qui présentent le caractère Belgrandien le plus prononcé (Belgrandia gibba et B. marginata) sont (1) Kobelt, 1870. « In Kenntniss unterer Limnæen aus der Gruppe Gulnaria », in Malak. Blütler, p. 152, pl. I, f: 92: (2) Bourguiguat, 1863. Monographie du nouveau genre français, Moitessieria, p. 8 (3) Bourguignat, 1870, Cat. moll. terr. el fluv. env.de Paris, p. 18 et seq. DU BASSIN DU RIIONE 345 celles qui se rapprochent le plus du littoral méditerranéen ; ils’ensuivrait que l'influence maritime semble tout au moins favorable au développement de ces caractères (1). Le nombre de ces varices n’est point absolu pour chaque espèce ; ainsi le Belgrandia Simoniana Paladilhe, peut en avoir de une à quatre et même quelquefois davantage, etc. De même leur position n’a pas toujours une fixité absolue; nous les voyons, en effet, chez le Belgrandia vitrea de nos régions, être plus ou moins voisines de l'ouverture suivant les échan- tillons. On peut rapprocher des varices la gibbosilé cervicale des Clausilies. Dans cette famille, le dernier tour de la coquille présente parfois, en dehors, une saillie allongée, plus ou moins arquée qui borde l’ombilic. Chez les espèces canalieu- lées à la base de l’ouverture, cette gibbosité cervicale corres- pond ordinairement au sinus inférieur. Elle est plus ou moins saillante suivant les espèces, et parait plissée mème chez les formes dont les autres tours sont lisses. Les modifications qu'elle peut éprouver donnent naissance à des variétés par- ticulières. Tel est le cas de la var, œcura admise par M. Bour- guignat (2) pour son Clausilia micropleuros qui est plus par- ticulièrement caractérisée par son arête cervicale un peu plus longue et moins gibbeuse. Encroutement du test. — Chez un certain nombre de mol- lusques terrestres et aquatiques, le test est parfois recouvert d'un encroutement qui masque plus ou moins complètement certains caractères. Cet encroûtement est presque constant chez certaines espèces, comme le Limnæa limosa par exemple. Parmiles Succinées, nous voyons souvent la coquille Succinea oblonga couverte par un encroütement terreux. Le muceus abondant sécrété par l'animal attache et empâte des parcelles (1) Paladilhe, 1870, Etude monographique sur les Patudincaces française, p.55. (2) Bourguignat, 1877. Hist. Claus. France, 2° art., p. 27. VAR. MAL. TIf. 29 330 VARIATIONS MALACOLOGIQUES terrcuses qui se fixent et adhérent assez fortement sur la coquille; ce fait est propre à certaines colonies seulement, car si nous en avons vu quelques-unes ainsi défigurées, nous en avons observé d’autres chez lesquelles la coquille était parfaitement nette et propre. Les Arions et les Limaces ne seraient pas exempts de cet encroutement; mais jiei il serait purement passager. Puton prétend (1) que lorsque la Limace, le matin, a la carène de sa queue couverte de terre, d'herbe ou de feuille sèche, les cullivateurs regardent ce fait comme un indice de change - ment de temps ; douée d’une sensibilité extrême, par un ins- tinel particulier, la Limace, en prévision de la pluie, sécréte- ait une plus grande quantité de mueus après lequel vien - draient se fixer les détritus qu'elle rencontre sur son passage. Chez les mollusques aquatiques la cause de l'encroûtement est tout autre: il faut l’attribuer à la présence de conferves qui se fixent sur la coquille et s’y développent d’une ‘facon normale et régulière; avec ces conferves sont souvent asso - ciés des débris terreux qui rendent l’encroûtement plus épais ; il peut ainsi se faire de véritables dépôts presque exclusivement calcaires qui atteignent de grandes épaisseurs ; c'est ce qui a lieu dans les eaux vaseuses par exemple. Nous avons vu des Unio batavus de la Marne avoir jusqu à deux millimètres d'épaisseur de concrétion calcaire sur chaque valve dans la partie qui était enfoncée dans la vase. La présence des végétaux parasitaires n'empêche pas le développement de la coquille; tors deux croissent en même temps; mais sa coloration peut être totalement masquée par ces végétaux. Que de Limnées par exemple paraissent vertes ou noirâtres à l'extérieur, avee une opacité absolue, et qui reprennent ensuite leur couleur et leur transparence lors - (1) Puton, 1847. Essui sur les mollusques des Vosges, p. 8: DU BASSIN DU RHONE 347 qu'on les a délivrées de leur encroûtement passager ! C’est en nettoyant un Limnœæa stagnalis, dont le test était entièrement couvert par une épaisse végétation que notre ami M. Roy a trouvé un cas d’albinisme des mieux caractérisés. La plupart des petites Paludinées sontégalement dans ce cas, de tellesorte qu'il est bien difficile de se rendre un compte exact du degré de transparence de la coquille, et surtout de sa véritable coloration. Bien souvent, en effet, ces encroùtements laissent à l'épiderme, mème après qu’on l'en a débarrassé, une fausse couleur qui n’est plus celle de la véritable coquille. On peut observer ce fait chez les Bythinia tentaculala par exemple. les jeunes individus ou ceux qui sont toujours entretenus propres n’ont plus la même coloration que les autres échan- tillons de la même portée qui, après avoir été maintenus avec leur encroütement, en sont débarrassés à un moment donné. Épinerme. — On donne le nom d'épiderme à la partie organique quirecouvre le test des mollusques. C’est ordinai- rement une pellicule mince de nature variable, qui disparait facilement après la mort de l’animal ou par toute action chi- mique ou mécanique un peu énergique. Nous avons déjà vu que chez certains mollusques, les som- mets étaient parfois érodés ; dans ce cas, l’épiderme qui doit recouvrir la coquille a disparu; dans toutes ses parties exté- rieures, le testse montre à nu, et perd alors le vernis brillant que lui donne l’épiderme. Il y a quelques années, nous avons observé à Saint-Cha- mond dans la Loire toute une colonie d’Helix hortensis dont l'épiderme était partiellement ou totalement enlevé ; les co- quilles, quoique préparées avec le plus grand soin, étaient fort laides ; nous avons cru devoir attribuer cette corrosion partielle de la coquille à ce fait que la colonie d'AHelix horten-- sis avait élu domicile dans un jardin dont toutes les bordures 348 VARIATIONS MALACOLOGIQUES étaient plantées d'oscille; l'acide oxalique était sans doute la cause de cette désorganisalion, car des échantillons obser- vés non loin de là, mais ne vivant pas sur de l’oseille, ne présentaient pas cette particularité. Parfois la perte de l’épiderme peut être le résultat d'une maladie; nous avons vu quelques Helix nemoralis dont la coquille était privée d’épiderme, et dont le péristome était pàle et peu coloré ; l'animal paraissait souffreteux et avait perdu un peu de son activité naturelle. En général, la perte de l’épiderme est une question d'âge ; les vieilles coquilles qui ont été plus souvent exposées à des changements hygro- métriques un peu brusques sont celles dont l'épiderme tom- bera ou s'exfoliera le plus facilement. Les espèces ou même les coquilles des colonies qui ne quittent pas les endroits boisés et couverts conserveront toujours mieux leur épider- me que celles qui peuvent être exposées à un moment donné aux infiuences des rayons solaires, trop ardents, produisant une dilatation brusque de cet épiderme et tendant ainsi à le détruire. La perte de l’épiderme chez les Helix, notamment chez les Helix nemoralis, modifie singulièérement la coloration géné- rale du test. Les variétés fauves deviennent roses par la dé- cortication, les variétés jaunes deviennent, au contraire, blanchâtres. Il importe donc toujours dans l'étude des variétés et sous-variétés de cette espèce, de tenir un compte exact de l'état de la coquille. L’épaisseur de l’épiderme est très variable ; chez certaines espèces, il est plus épais que chez certaines autres vivant dans les mêmes conditions. Ainsi chez l'Helix arbuslorum des bords du Rhône, il est notablement plus épais que ehez l'Helix ne- moralis qui vit avec lui dans la même station. En outre, une mème forme peut présenter également des variations dans l'épaisseur de son épiderme ; en général, les coquilles des DU BASSIN DU RIONE 349 régions basses ont l'épiderme plus épais que celles de mème espèce qui vivent à de hautes régions. Enfin, si l'on doit trouver des variétés transparentes dans cette mème coquille, comme chez les Helix hortensis, H. nemoralis, etc., ces der- ners qui vivent dans ce cas, comme nous l'avons dit, à des al- titudes plusélevées, auront un épiderme beaucoup plus mince. L’épiderme n’est pas toujours lisse et uni, il peut donner naissance, par suile d'un développement tout spécial, à des poils, des écailles, des papilles ou des rides. Nous allons pas- ser rapidement en revue chacun de ces accidents. Poils.— D'après Moquin-Tandon (1), les poils des mollus- ques sont portés par une petite dilatation plus solide, pune- tiforme, qui persiste le plus souvent après leurs chutes. Nous avons vu cette disposilion décrite avec détail chez les Hoites- sieria par M. Bourguignat. En général, les poils sont disposés en quinconces ; ils sont facilement cadues ; ordinairement ils sont grêles, cylindriques ou subulés, pointus, un peu re- courbés, légèrement luisants ; leur couleur est du roux fau- ve ou jaunàtre analogue à celle de l’épiderme. Lorsqu'ils sont longs comme chez l'ex villosa, ils sont flexueux ; d'autres fois, comme dans l'Aelix holoserica, ils deviennent soyeux. En vieillissant les poils tombent et l'aspect extérieur de la coquille parait ainsi modifié ; souvent un attouchement un peu énergique les fait tomber, comme ehez l'Helix hispida. Enfin, il existe des variétés ou des races qui sont normale- ment caduques. Charpentier a signalé une variété depilata de l'Helix villusa de la Suisse; inversement Moquin-Tandon a cité sous le nom de var. pallida une variété de l'Helix obvo- lula Müller, qui est plus velue que le type ; enfin pour l'AHelix inontana, nous avons signalé, d'après MM. Dumont et de Mor- tillet, les var. glabra et hispida. (1) Moquin-Tandon, 1856. ÆHist. Moll., t. II, p. 292. 390 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Plusieurs fois nous avons observé aux environs de Lyon des Helix hispidacomplèlement glabres ; était- ce un fait acei - dentel ou normal, nous ne saurions le dire. En général, les espèces normalement villeuses ont leurs poils plus longs ct mieux fournis aux altitudes basses qu'aux grandes allitudes. On observe également la présence des poils chez quelques rares Planorbes: le Planorbis stelmachætius Bourg. (1), a sa carène garnie de poils raides, très cadues et qui ne ressem- blent en rien aux membranes épidermiques des autres côtes longitudinales ; en même temps les côtes qui se rapprochent de la carène sont de plus en plus hispides. Le Planorbis cor- neus, lorsqu'il est jeune, est également couvert d'un léger du- vet; lorsque la spire se trouve pubescente, c’est alors le Planorbis similis Müller ; lorsqu'elle est dénudée et que le duvet est tombé, c'est alors l'Helix nana Pennant (2). Enfin plusieurs espèces, notamment chez les Hélices, ont des poils tant qu'elles sont jeunes, et qui tombent avant mème que la coquille soit complètement adulte. Écailles. — Chez quelques Gastéropodes, on observe un épiderme imbriqué ; ces écailles ne sont guère visibles qu’à la loupe ; elles paraissent disposées suivant une certaine symé- trie plus où moins régulière analogue à celles des poils ; elles affectent comme eux plutôt la disposition en quinconce, Quantà leur forme, elle peut être très variable ; on en observe d'arrondies, de demi-arrondies ou de triangulaires. Elles pa- raissent formées à la facon des poils par une expansion de l'épiderme, et sont facilement eaduques. La coquille de l'AHetix ciliata, dit Moquin-Tandon, se fait remarquer par trois sortes d'expansions écailleuses : celles du dessus, peu élevées, très larges et très obtuses ; celles du dessous, plus saillantes, demi-rondes, déjà un peu aiguës, et celles de la carène en- (4) Bourguignat, 1860. Matac. terr. et [luv. de la Bret., p. 139, pl. 2, fig. 10-13. 2) Bourguignat, 1860. Ameonilé: maa?., L. 1H, p. 196. DU BASSIN DT RHONE JO core plus grandes, triangulaires, subulées, très pointues, un peu recourbées el formant une rangée de cils obliques assez raides. Papilles. — Chez quelques Clausilies, il existe avec la ïi- gne suturale un développement épidermique, mince, étroit, peu saillant, faiblement coloré, disposé de distance en dis- lance avec une certaine régularité, auquel on a donné le nom de papilles. La présence ou absence de ces papilles a servi à Moquin-Tandon pour classer ses Clausilies de France. C'est, croyons-nous, le seul auteur qui ait fait usage de caractères aussi peu fixes dans une classification des mollusques. Ces papilles en effet n’ont pas toujours la même régularité ni la ménie importance chez telle espèce donnée ; si leur nombre est à peu près toujours le même, il n'en est pas toujours ainsi lorsqu'il s’agit de leur dimension ; c’est du moins ce que l'on peut observer notamment chez le Eluusilia bidens du Midi de la France. | Rides. — Les rides sont formées par une sorte de plisse- ment normal et régulier de l’épiderme chez certains Gasté- ropodes ordinairement de petite taille. Souvent, comme chez les Pomalies, par exemple, elles correspondent à des stries existant déjà sur le test, et qu'elles ne font que ren- forcer. Certains pays semblent plus particulièrement pro- pres à leur développement ; tel serait, d’après M. P. Massot (1), le cas des Pyrénées-Orientales. D’après cet auteur, «les Pu- pas, les Pomatias sont presque tous stries ; sur quelques uns, les stries sont tellement accentuées, et même si en relief, qu ils sont pour ainsi dire côtelés. Certaines espèces présen - tent un développement et un relèvement épidermique très curieux, facile à constater. Je l'ai observé à l’état rudimen- taire sur l'Amnicola similis, et il est si complet sur un Ver/i- j% (4) P. Ma-sot, 1872. Ziumera'ion des mollusqu's des l'yrénées-Orientales, p. 35 3952 VARIATIONS MALACOLOGIQUES go anliverligo, que malgré mon peu de tendance à créer des espèces nouvelles, je n'ai pas résisté au plaisir de lui donner le nom de mon excellent confrère et ami le docteur Baudon. M. de Saint-Simon, à qui j'avais remis des Pomatias désignés avec doute comme des Pomutias patulus, les a décrits, à cause des côtes marquées et espacées dont ils sont ornés, sous le nom de Pomalias Bourquignati. » Ainsi done, voici dans Ja nomenclature malacologique des espèces nouvelles créées par suite du plus ou moins de déve- loppement des rides épidermiques. Ces rides peuvent se ma- nifester de plusieurs manières. Chez quelques Hélices, ou chez les Pomaties, l’épiderme sur des points sensiblement équidistants s’accwmule et se relève pour donner lieu à des côtes longitudinales rectilignes ou annulaires, réguliè- res, symétriques, qui impriment à la coquille un faciès tout particulier. Tel est, par exemple, le cas des Hélices du grou- pe de l'Helix pygmæa, VHelix costata, ete. D'autres fois, comme chez l'Helix aculeata, la partie centra - le de la ride se relève et se prolonge pour donner naissance à un développement aigu d'un aspect tout particulier. Enfin, comme chez le Planorbis tmbricatus, ces mêmes rides peu- vent affecter une forme annulaire, lamelliforme, avec un relèvement acutiforme dans la partie centrale correspondant à la carène. Chez les Ancyles, nous retrouvons encore des rides sous deux aspects différents. « On observe, dit Moquin-Tandon, dans les Ancyles, deux sortes de rides, des rides très fines, serrées, dont l’ensemble represente comme une suile de stries extrèmement rapprochées, et des rides éievées comme de petites côtes placées à une certaine distance les unes des autres... Lorsqu'on examine des Ancyles fluviatiles très jeunes, onremarque que les rides sont inégales ; on en trouve assez régulièrement une forte et deux ou trois fines. DU BASSIN DU RHONE 309 Avec l’âge, dans ce type et dans la plupart des variétés, ces rides deviennent à peu près égales; dans quelques va- riétés, elles s’oblitèrent à peu près uniformément ; mais dans d’autres, Les grosses rides augmentent peu à peu et finissent par former des côtes très analogues à celles de l'A. costula- tus (1). » Si l’on admet que certains pays peuvent exercer une influence quelconque sur le développement de l'épiderme des mollusques, ne devra-t-on pas reconnaitre que les pré- tendues espèces nouvelles ne sont que des manières d’être locales différentes de celles déjà connues ? Faudra-t-il notam - ment admettre, comme espèces réellement nouvelles, le Vertigo Baudoni qui diffère du Vertigo anlivertigo « surtout par des côtes saillantes ou relèvements et expansions épi- dermiques espacés et distribués d'une manière régulière » ? C'est vraiment attacher à la notion distinctive de l'espèce une bien minime importance, puisqu'il suffit d’une influence locale pour la faire varier et la modifier ainsi! Spire. — Dans les mollusques Gastéropodes, la spire est un des éléments diagnostiques qui peuvent présenter le plus de variations. Du plus ou moins grand allongement de la spire dépend la hauteur totale du sujet; on comprend dès lors que toute modification dans ce sens se raltache ainsi directement aux variations générales que nous avons à examiner. Mais pour mieux faire ressortir encore les variatious locales résul-- tant des modifications de la spire, nous passerons rapidement en revue quelques exemples puisés dans les limites que nous nous sommes tracées. Chez les Testacelles, quoique la coquille soit encore rela- tivement rudimentaire, nous voyons la spire présenter déjà des caractères très variables : tantôt son sommet est aigu, (2) Moquin-Tandon, 1855. Hist. moll , II, p. 487. 35 4 VARIATIONS MALACOLOGIQUES tantôt il est mamelonné. Chez les Vitrines, elle est à peine saillante et se confond dans la courbure générale .de la coquille, Mais chez les Succinées, elle joue un rôle plus im- portant et de sa forme dépendront plusieurs appellations spécifiques. Il suffit, en effet, de jeter un coup d’œil sur les travaux de MM. Baudon(!) et Bourguionat (2) qui, chacun de leur côté, se sont occupés de l'étude des Succinées francaises, pour pouvoir juger de l'influence de la forme de la spire dans les différentes espèces ou variétés établies pour ce genre. Les Hyalinies ont en général la spire peu saillante, ct cependant pour certaines espèces, la hauteur totale devient un caractère comparatif important. Tel est par exemple le cas des Hyalüiia lucida et H. cellaria. Dans ces deux types, la hauteur de l'axe mesuré depuis le sommet jusqu'à la nais - sance de lombihe est sensiblement la même, tandis que si lon prend la hauteur lotale de chaque coquille, on a des termes de comparaison différents, résultant de la disposition tecliforme de l’une d'elles, précisément à cause de la plus grande hauteur de la spire. C'est en se basant sur les données fournies par la hauteur de la spire, le nombre et la forme des tours de celle spire, que M. Bourguignat vient de démembrer du Hyalinia fuloa son I. callopistica(3) dont le type se trouve aux environs de Lyon. Les Leucochrou du Sud de la France sont également de formes très variables relativement à la hauteur de la spire, el ces varialions nous ont toujours paru se manifester non seulement chez des colonies différentes, mais encore bien souvent dans la même colonie. Du-reste, tous les caractères econd aires tenant de plus ou moins près à la spire, comme (1) Baudon, 1877. Monographie des Sucsinées françuises. (2) Bourgnignat, 1877. Aperçu sur les espèces françrises du genre Surcinea. (3, Buurguignat, 18S0. Zu Servain, £lude sur LS Jlluvques rocueillis ex E*nrqne ctea Porlugal,p 80. DU BASSIN DU RHONE 01) le mode d’enroulement des tours, leur galbe, etc., sont de nature très variable dans tous les individus de ce genre. C'est en se basant sur les caractères fournis par la spire que plusieurs auteurs ont établi leurs classifications des Hélices. Si L. Pfeiffer est parti de la forme du péristome pour établir son tableau de classification des Hélices, Ferussac, Deshayes, Moquin-Tandon et bien d'autres se sont, en partie, servis des caractères basés sur la hauteur de la spire, quipeut donner aux Hélices des formes aplaties, déprimées, globu- leuses,coniques ou turriculées, suivant la disposition de cette spire alliée à la forme des tours. C’est qu’en effet dans ce genre, les variations de cette spire sont en général parfaitement marquées. Prenons comme termes extrêmes les Helix acutaet Helix obvolula, c'est-à-dire des Hélices ayant la première une spire exceptionnellement acuminée et la seconde une spire rentrante, on peut entre ces deux limites intercaler toute une série de formes passant de l'une à l’autre par des variations graduées. Ainsi si nous partons de l'Helix obvoluta, qui est le type français à spire la moins haute, nous passons à l’AHelix holoserica, dont la spire commence à s'élever un peu au-dessus du plan supérieur du dernier tour; puis de là, à toute une série de formes très déprimées, plus ou moins plates, parmi lesquelles nous trou- vonsles/elix pygmeæa, H.ruderata, H.rotundata, H. lenticula, H. lapicidu, ete., et toutes leurs dérivées. C'est le groupe des Helix à spire aplatie. Ensuite viennent les coquilles à spire déprimée, c’est-à-dire à forme un peu plus élevée, comme les Helix cornea, H. fœtens, H. carthusiäna, H. alpina, H. neglecta, H. ericetorum, etc. La spire s'élève encore, Les for - mes globuleuses font leur apparition; tels sont les Helix ar- bustorum, H. nemoralis, H. sylvatica, H. variablis, H. pisanu, H. aspersa, I pomatia, ete. La spire s'élevant de plus en plus, la coquille prend une forme conique et nous avons les 356 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Helix bidens, H. depilata, H. pyramida, H. terrestris, H. tro- choides, H. conoidea, ete. Enfin, la spire est tout à fait acu- minée, et nous arrivons à des formes de passage entre les Helix et les Bulimus avec les Helix barbara et H. acuta. En dehors de ces variations génériques dans le genre Helix ilen est d'autres tout à fait spécifiques qu'il importe de noter. Outre les formes spécifiques voisines les unes des autres et caractérisées surtout par le plus ou moins de hauteur de la spire, il existe des variations bien marquées chez les indivi - dus appartenant à une même espèce donnée. Chez l'Helix ñnemoralis par exemple, nous voyons des colonies avec une tendance à l’acuité où mieux à l'élévation de la spire, tandis que d'autres, au contraire, ont celte spire surbaissée. Les Helix nemoralis du pare d'Aix-les-Bains nous ont particu- lièrement semblé présenter cette dernière manière d'être. Ces variations dans la hauteur de la spire ont donné nais- sance à un certain nombre de variétés ; nous n'avons pas la prétention de les indiquer toutes; nous signalerons comme exemple de spires plus déprimées ou moins conoïdes que le type, les variétés suivantes : | Helix bidens, Chem.— Var.b(Menke), menkeana (M.-Tand.). — unidentala, Drap. — Var. b (Menke), var. depressula (Moq.-Tand.) — hispida, Lin. — var. c (Menke), minor (Moq.-Tand.). — alpina, Faure-Big. — var. Reybaudia (Moq.-Tand.). — pisana, Müller. — var. depressa (Requien). — variabilis, Drap. — var. depr'essa (Requien). Parmi les Helix à spire plus conique ou plus surélevée que le type, nous indiquerons : Helix arbustorum, Lin. — var. b (Ferussac), var. alpicola (Moq.-Tand.). DU BASSIN DU RHONE 391 Helix arbustorum, Lin. — var. Baylei (Lecoq). —— nemoralis, Lin. — var. acumanala (Baudon). — serpentina, Fer. — var. minor (Requien). — pomalia, Lin. — var. acuminala (Baudon). — aspersa, Mül. — var.b (Picard), conoidlea (M.-Tand.). — hispida, Lin. — var. conica (Baudon). — limbala, Drap. — var. trochoides (Moq -Tand.). — apicina, Lamarck. — var. Reqineni (Moq.-Tand.). — alpina, Faure-Big. — var. Clarinvalia (Moq.-Tand.). — cericelorum, Müller. — var. Charpentieri(M.-Tand.). — _ cricelorum, Müller. — var. pyramidata (Moq.-Tand.). — pisana, Müll. — var. globosior (Shuttlew.). — _lerrestris, Penn. — var. trochoides (Moq.-Tand.). Dans ce même genre Helix, les formes de passage sont assez multipliées. Il existe en effet un grand nombre de types très voisins les uns des autres par leurs caractères gé- néraux, ne différant souvent que par la disposition de la spire. Ainsi, par exemple, les Felix obvoluta et H. holoserica sont certainement très voisins, mais chez le premier, la forme est essentiellement planorbique, la spire atteint le imi- nimum de hauteur, les tours sont rentrants par rapport au sommet, tandis que dans le second, la spire commence à s'élever légèrement, le sommet apparait un peu au-dessus du plan supérieur du dernier tour. Dans le groupe de l’/Zelix ericetorum, on passe de cette forme déprimée à grand ombi- lice aux formes plus élevées des Hetix cespitum, H. Terveri, ete. On passe également de l'Helix ferrestris Pennant à l'Hc- lix trochilus, de l'Helix trochoides à l'Helix conoïdea, de V He- lix barbara à l'Helix acutu, ete., par des modifications succes- sives dans la hauteur de la spire, entrainant nécessairement la modification des parties adjacentes. Enfin, nous trouvons encore dans la faune européenne, mais alors hors de France, 998 VARIATIONS MALACOLOGIQUES une disposition toute particulière de la spire ; comme chez les Planorbes, quelques Hélices de la Lombardie ont leurs tours tout à fait embrassants, avec un double ombilie ;: C. Porro a proposé pour cette forine particulière la dénom ina- tion générique de drepanostoma. Nous avons fait représenter pour les Bulimes un exemple de variations dans le mode d'enroulement. Les fig. 17 et 18 de notre planche IE se rapportent toutes les deux à des Bu- limus montanus de notre région ; mais on peut voir la diffé- rence qui existe dans le mode d’enroulement de leur spire : dans l’un, cette spire s'enroule d’abord rapidement et le der- nier tour devient ensuite plus large; chez l’autre, ce dévelop- pement est plus régulier et le dernier tour a moins de hau- teur par rapport aux autres. Cet exemple très net et très précis se reproduit dans un grand nombre de coquilles ; mais il est surtout frappant chez les espèces turriculées et fusi- formes dont il modifie davantage le galbe et le profil. Chez les Chondrus, notamment chez les Chondrus fridens etCh. quadridens la spire peut être plus ou moins ailongée ; de là des var. major et minor parfaitement distinctes résul- tant précisément” de cel allongement de la spire. Quant aux autres variétés que nous avons signalées, elles proviennent plutôt d’un renflement de la coquille, puisque le galbe change sans que la hauteur totale soit modifiée. Les Cæcilianelles et surtout les Ferussacies peuvent éga- lement présenter des variations fort intéressantes dans le mode d’enroulement des tours de spire. M. Bourguignat (1), en élevant plusieurs de ces formes au rang d'espèce, s’est précisement servi des caractères que peut présenter non seulement la spire en général, mais le plus ou moins de développement de l’avant-dernier tour. (1) Bourguignat, 1860. Mulacologie terrestre du château ü’1f, p. 48, pl. Il. DU BASSIN DU RHONE 029 Il en est de même pour les Clausilies: la hauteur de la spire et le nombre des tours varient non seulement d'une espèce à l’autre dans un groupe donné, mais encore dans une même espèce. Tel est, par exemple, le Clausilia solida Draparnaud dont le type, d’après M. Bourguignat, a de 14 à 15 millimètres de hauteur et pour lequel il admet les var. b (Clausilia hetersstropha Risso), de forme plus obtuse, var.c (Clausilia Mofellana, Parreyss) de taille plus haute, var. d (Clausilia Macluriana, Risso) de taille plus petite, el var. e (ininor) de taille plus petite encore. Nous pourrions égale- ment citer les Clausiha laminala Montagne, Cl. punclata Mi- chaud, Cl. Rolphii Leach, CI. mucidu Liegler, C. plicala Dra - parnaud, CL. gallica Bourguignat, elce., chez lesquels la hauteur de la spire peut se modifier de façon à présenter plusieurs variétés toutes parfaitement distinctes du type. Les Planorbes avec leur forme toute spéciale peuvent éga- lement présenter des variations dans la spire ; mais celles-ci se traduisent alors par un nombre de tours variable. Dans un même groupe, ce nombre varie souvent d’une facon notable, mais il arrive aussi qu'il peut être plus ou moins grand dans une même espèce. C'est ainsi que nous voyons le Planorbis Perezii Graëlls avec tantôt sept, tantôt huit tours ; le Planor- bis seplemgyralus Ziegler, en a six ou huit; le Planorbis conlortus Müller en a également de six à huit et ainsi de suite. Mais ces variations dans la spire sont encore plus particu- lièrement manifestes chez les Limnées. Nous ne parlerons pas ici de certaines formes anormales, telles que la courbure de l'extrémité de la spire, qui semblent cependant héréditaires dans certaines colonies. Dans ce genre, en effet, la forme et la hauteur de la spire jouent un très grand rôle non seule- ment dans la spécification, mais encore dans la classification. Quelques auteurs ont classé les Limnées d’après la hauteur de la spire, qui peut être très courte (Limnæaglutinosa Müller), 360 VARIATIONS MALACOLOGIQUES médiocre (Limnæa limosa Linné), ou allongée (Limnæa s{a- gnalis Linné). Dans un même groupe on sépare les espèces par le rapport de la hauteur de louverture à la hauteur de la spire. En outre, dans un même groupe, les formes voi- sines admises parfois comme simples variétés sont spécifiées par le plus ou moins de saillie de la spire. Tel est le cas par exemple, des formes rattachées au Limnæa auricularia. Suivant que la spire est courte, très courte, extrêmement courte, ou rudimentaire, on aura les Lirnœæa canalis Villa, Linnœæa acronica Studer, Lunnæa Hartmanni Studer, Limnæa Monnardi Hartmann. Mais il faut dire que dans ce groupe, en même temps que la spire va en s'affaissant, l'ouverture va en s’élargissant, ce qui contribue également à modifier le faciès général de la coquille. Dans un autre groupe, celui du Limnæa palustris, nous voyons la hauteur totale varier de 10 à 25 millimètres, par un allongement plus ou moins grand de la spire, les autres caractères n'étant pas sensible- ment modifiés. C’est ainsi que du type de Limnæa palustris on passe au Limnœæa corvus qui n'en diffère que par une taille sensiblement plus grande et par une coloration diffe- rente. Ce même Limnæa corvus peut à son tour subir de no- tables modifications däns son allure, par suite du mode d’en- roulement de la spire; suivant le plus ou moins de rapiaité d'enroulement des Lours, on aura les deux formes fossiles que nous avons signalées dans un autre travail (1). Enfin, cette même spire peut avoir un nombre de tours plus ou moins variable ; dans le Limnœæa stagnalis il varie, d'après Moquin- Tandon, de 5 à 8, et de 7 à 9 dans le Linmnœæa glabra. Les Physes tiennent un peu des Limnées sous le rapport des variations de la spire, et les individus de nos pays nous ont, à ce point de vue, présenté quelques faits intéressants. (1) A. Locard, 1880, Mouv. recherches sur les argiles lasustres, p. 30. DU BASSIN DU RHONE 36 Si nous comparons par exemple nos Physa fontinalis avec ceux de la Suède, nous voyons que les premiers ont la spire moins allongée que les seconds; inversement nos Physa acula ont au contraire une tendance à avoir la spire plus allongée, plus élancée que ceux du bassin de Paris ou même du reste de la France. Dans notre planche IF, nous avons fait figurer divers types de Physes dont l’enroulement de Ia spire est bien différent ; les figures 30 et 31 se rapportent à deux Physa hypnorum dont les premiers tours s'enroulent plus où moins rapidement, tandis que les figures 32 et 33 représentent deux Physa acuta d'un galbe très différent par suite du plus ou moins d’acuité de la spire. Si nous considérons les Paludinidæ telles qu'elles ont été classées par Paladilhe, nous voyons que ce savant auteur s'est servi de la forme plus où moins allongée de la spire pour établir ses différents groupes. Ainsi par exemple, pour classer les vingt-quatre Paludinella de France, il est parti de la forme subglobuleuse, ventrue, du Paludinellu viridis Poiret, pour arriver à la forme cylindroïde du Paludinella pupoides Paladilhe, de nos régions. De même pour les Bel- grandia a passé de la forme ovoidéo-conique à spire médiocre du Belgrandia Simoniana Paladilhe, à la forme conoïdéo- cylindracée à spire allongée du Belgrandia marginata Mi- chaud. Dans chacun des différents genres de la famille des Paludinidées la spire varie de forme et de hauteur ; mais dans une même espèce le nombre des tours varie également : Bythina tentaculala Linné, de 5 à 7 ; Amanicola similis de 4 à 9; Paludinella brevis Draparnaud, de 3 à 4; Belgrandia mar- ginala Michaud, de 5 à 6; Hydrobia Charpyt Paladilhe, de 6 1/2à 7; Paludestrina pr'ocerula Paladilhe, de 7 à 8, etc. Le genre Valvata est encore un de ceux dont les espèces peuvent présenter entre elles une grande différence relative- ment à la spire. C'est qu'en effet, les malacologistes sont au- VAR. MAL. TH. 24 362 VARIATIONS MALACOLOGIQUES jourd’hui d'accord pour ranger sous la même désignauon générique des formes coniques ou globuleuses comme celles du Valvata piscinalis Müller avec des formes déprimées ou planorbiques comme celle du Valvala cristala Müller. Pour ce dernier groupe, Fitzinger avait bien proposé la dénomination de Gyrorbis et Schlütter celle de Planella, mais ces coupes génériques n’ont pas élé admises. El reste donc reconnu que la hauteur de Ia spire peut varier dans des proportions consi- dérables chez les Valvées; mais en dehors de cette donnée première, nous voyons que dans un même groupe celte spire peut présenter des modifications très intéressantes. Dans sa Malacologie d'Aix-les- Bains, M. Bourguignat a représenté la série des Valvala alpestris Blauner, V. piscinalis Ferussae, V. oblusa Brard et V. contorta Menke. Il est très curieux de suivre les passages de ces différentes formes des unes aux autres ; nous voulons bien admettre qu'elles sont toutes parfaitement distinetes en général, mais il faut reconnai- tre aussi que dans la nature on trouve des formes intermé- diaires, ou de passage entre chacun de ces types bien définis, et qu'avec un peu de recherches, on arrive à élablir une série presque continue passant de la forme à spire bien déprimée du Valvala alpestris à la forme de spire élancée du Valvata contorta. C'est qu'en effet, dans ce groupe tous les caractères marchent ensemble ; à mesure que la spire s'élève, l’ombilie se rétrécit, tandis que le dernier tour s’affaisse el l'ouverture s'allonge ; la progression des modifications de chaque carac - ière est constante et régulière. En voyant une pareille plan- che, on ne peut que regrelter que toute la malacologie ne soit pas représentée avec autant de fidélité et d’exactitude, et sous un jour aussi net et aussi précis. Tours De spiRe. — Comme nous l'avons déjà fait observer, il existe une corrélation forcée entre les variations de la spire et celles de toutes les parties de la coquille qui s’y DU BASSIN DU RHONE 263 raltachent. C'est ainsi que nous avons vu le nombre des tours de la spire varier plus où moins dans certaines espèces, de même que leur hauteur proportionnelle sera en raison directe de l'élévation de la spire. Mais nous voulons parler ici des variations que subissent les tours de spire dans leur développement. Ce développement n'est pas toujours régulier et constant. Chez quelques mollusques, le dernier tour notamment prend vers l'ouverture un accroissement consi - dérable en quelque sorte anormal; la volute, représentée par la projection horizontale de la ligne suturale n’est pas toujours régulière, et bien souvent il existe une sorte de ren- flement exagéré dans le développement du dernier tour de la coquille. Le développement du dernier tour chez les Suecinées a donné lieu à des variations qui ont été diversement interpré - tées par les auteurs. Si nous mettons en rapport les travaux de MM. Baudon et Bourguignat sur les Succinées francaises, nous voyons d'abord que bien des formes, citées à simple titre de variétés par M. Baudon, sont érigées au rang d'espè- ces par M. Bourguignat. C'est là une simple question d'inter- prétalion à laquelle nous ne nous attachons pas pour le mo- ment. Mais il existe certaines variétés dues en grande partie au plus ou moins de développement du dernier tour et qui ont été rangées par ces deux savants auleurs sous des déno- minations spéciliques différentes. Ainsi les var. gigantea, propinqua, opaca et ventricosa créées par M. Baudon pour le Succinea Pfeifferi Rossmassler, sont rapportées au Succinea pulris Linné, par M. Bourguignat; de pareilles divergences sont bien faites pour montrer combien ces variations dans la forme des mollusques peuvent donner lieu à des interpré- tations différentes, puisque voilà des variétés qui peuvent ètre rattachées à Lel ou tel type; ce sont nécessairement des formes intermédiaires ou de passage. 364 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Chez les Hyalinies, il existe un type dans lequel la spire prend à son extrémité un accroissement considérable; c’est le Hyalinia nilens Gmelin.Ce serait en quelque sorte une excep- tion dans le genre, si M. Bourguignat n'avait pas observé une forme intermédiaire le Æyalinia subnilens, qui a une grande partie des caractères du Hyalinia nilens, mais dont le dernier tour, moins brusquement développé, rattache en quelque sorte cette forme exceptionnelle aux autres Hyalinies. Les Hélices ont la spire en général plus régulièrement enroulée que les Hyalinies, du moins nous ne voyons pas dans cette famille des écarts aussi grands dans le rapport du développement du dernier tour aux tours précédents. Maïs il n'en est plus de mème lorsqu'il s’agit de la position de ce dernier tour par rapport à la verticale, où par rapport à l'om- bilie. Nous voyons, en effet, bien souvent chez une même espèce de nombreux individus présenter entre eux des varia- tions très notables, suivant la posilion de ce dernier tour; ce sont alors des variations purementindividuelles, ne cons- tituant pas des variétés. C’estsurtout dans le groupe des Héli - ces striées que ces variations dans l'attitude du dernier tour sont le plus sensibles. Dans ce groupe,il existe en effet un très grand nombre de formes fort voisines les unes des autres basées sur la dispo - sition et le mode de développement du dernier tour. De son mode d'enroulement dépendra le faciès général de la coquille ; mais en outre les caractères de lombilie seront for- cément solidaires du plus ou moins de rapidité d'évolution des derniers tours. L'Helix diniensis par exemple, qui vit dans nos pays, est notamment caractérisé par le rapide dé- veloppement de l'extrémité du dernier tour; comme chez le Hyalinia nitens, cette portion de la coquille s'épanouit diffé - remment des autres tours, et l'allure de la coquille se trouve ainsi modilice. DU BASSIN DU RHONE 365 Parmi les grandes Ferussacies du Midi de la France, on observe également de curieuses variations dans le mode d'en- roulement des tours de spire. Cet enroulement nest pas régulier, et par suite mème du galbe allongé de la coquille, l'hélice tracée par la lignesuturale affecte une forme plus ou moins variable. M. Bourguignat a parfaitement présenté ces différentes manières d'être de la spire des Ferussucia folli- culi Gronovius, F. Gronoviana Risso, F. regularis Bourg, F. Vescoi, Bourge., F. amauronia Bourg., F. amblya Bourg, et À, Forbesi Bourg. (1). C'est surtout chez le Ferussacia Ves- eoi que les tours de spire s'enroulent avec le plus d'irrégu- larité à mesure qu'ils se rapprochent de l'ouverture. Les Clausilies, les Pupas, le Vertigos, et en général les coquilles fortement turriculées sont celles chez lesquelles le nombre de tours de la spire semble le plus varier. Ainsi par- miles Clausilies de notre région , nous citerons par exemple les Clausilia laminata, CL. fimbirata, Cl. punclate, dont le nombre des tours varie de onze à douze, et le Clausilia ru- gosa, CI. crennulata, dont le nombre des tours passe de douze à treize. Chez les Pupas et les Vertigos l'écart peut devenir plus grand encore et cela toujours dans la même colonie. I n'est point rare notamment de trouver des Pupa muscorum bien adultes, n'ayant que six tours de spire, et vivant avec d'autres individus qui eu ont huit. Les Pianorbes nous donnent un exemple tout à fail simi- laire à celui que nous avons signalé à propos des Hyalinies. Nous voulons parler des Planorbis abus Müller et PE. Cros - seanus Bourguignat. Un des caractères du Planorbis albus réside dans l'eccroissement rapide des tours s'élargissant de plus en plus à mesure qu'ils se rapprochent de l'ouverture. Le Planorbis Crosseanus, bien souvent confondu avee lui, tout (4) Bourguignat, 1800. Malacologie terrestre de l'ile du château d'If, p. 18 et seq., pl. IT. 366 VARIATIONS MALACOLOGIQUES en présentant une grande analogie comme taille et comme galbe général est au contraire caractérisé par ses tours de spire à croissance régulière et proportionnelle; mais en même temps cette différenciation dans le développement des tours à amené une modification Caas la forme de l'ouverture ; l'espèce dont le dernier tour est élargi a pris une forme ovale-déprimée, tandis que l’autre à conservé une forme arrondie non dilatée. Chez les Limnées, le nombre des tours serait variable sui- vant certaines données d'habitat. M. le docteur Brot (1) a observé que les Limnæa stagnalis vivant à une profondeur de 50 mètres dans les eaux du lac de Genève n'avaient que quatre tours de spire, tandis qu'en général les formes types en ont cinq. « J'ai, du reste, déjà observé, dit-il, cette matu- rité précoce, devancant le développement complet des tours de spire chez quelques Limnées auriculaires naines, vivant dans des condilions peu favorables, comme par exemple dans des eaux froides, des sources de montagne. » Les Paludinidæ, en général, sont loin de présenter chez la même espèce une parfaite régularité dans la forme des tours. Dans les Bythinies, le Bythinia tentaculuta Leach pré- sente notamment de grandes variations non seulement entre des colonies différentes, mais même entre les individus d'une même colonie. Sans parler de la var. producla qui peut affec - ter les formes les plus différentes, nous voyons, dans le type méme, des individus dont les tours de spire ont des propor- lions relatives très différentes. Chez presque toutes Îles Paludinella, Hydrobia, Lartetia, Belgrandia, ete., il en est à peu près de mème. Un des caractères distinctifs repose sur la proporlion relative des tours les uns par rapport aux au- (4) Brot, 1874. In Forel, Matériaux pour servir à l'étude de la farie profonle du lac Léman, Bull. Soc. vaud., vol. X'IT, p. 110. DU BASSIN DU RHONE 367 tres ; or il est facile de voir que dans une série d'individus de la même source, de même taille, de même âge, l’avant-der- nier {our est loin d’avoir exactement les mêmes proportions relatives par rapport aux autres tours. Nous avons examiné plus de deux cents Paludinella pupoides de Thoiry dans le département de l'Ain, et nous avons vu combien ces propor- tions variaient. Du reste, cela explique parfaitement les diffi - cullés qu'éprouve toujours tout naturaliste qui veut classer ces petites coquilles dont on à, depuis quelques années, par trop multiplié les espèces. C'est à ce même ordre de variations qu'il faut rattacher la plupart des variétés globuleuses chez les mollusques Gasté- ropodes. Ces variétés sont très nombreuses ; il en est quel- ques-unes qui sont considérées tantôt comme simples varié - tés, tantôt comme espèces. Tel est le cas du Succinea putris, var. subglobosa Baudon, que M. Bourguignat fait rentrer dans le Succinea Charpentieri Dumont et Mortillet. Nous indi- querons également les variétés suivantes : Helix limbata, Drap. — var. trochoides (Moquin-Tandon). — pisana, Müller. — var. globosior (Shuttleworth). — nemoralis, Lin. — var. globulosa (Baudon). Rumina decollata, Lin. — var. turricula (Moq.-Tand.). Physa fontinalis, Lin. — var. inflala (Moq.-Tand.). — acuta, Drap. — var. ventricosa (Moq.-Tand.). — acuta, Drap. — var. gibbosa (Moq.-Tand.). — acula, Drap. — var. castanea Moq.-Tand.). Limnæa truncatula, Müller.— var. ventricosa(Moq.-Tand.). Peludinella viridis, Poiret. — var. inflala (Moq.-Tand.). Bylhinia tentaculata, Lin. — var. ventricosa (Menke). . Truncalure de la Spirale. — Nous ne pouvons passer ici sous silence le singulier phénomène de la truncature de l'ex- 368 VARIATIONS MALACOLOGIQUES trémité de la spire chez quelques coquilles. S'il est ancrmal pour la plupart des formes, il devient au contraire, un carac- tère constant pour d’autres. Tel est le cas bien connu du Rumina decollata du Midi de la France. M. Gassies (1) a suivi le développement de ce curieux Gastéropode depuis l’accou- plement jusqu’à l’état adulte et a pu étudier les conditions dans lesquelles se faisait la truncature du dernier tour de la spire. Dans nos anomalies, nous signalerons le mème fait chez quelques Clausilies ; enfin, rappelons ici les curieuses observations de M. Lataste (2)sur l’Helix aspersa scalaire, dont le sommet s’est tronqué à la facon de celui du Rumina decol- lala. COLUMELLE. — La columelle chez les testacés est l'axe ecn- tral autour duquel s’enroulent les tours de la spire. Elle peut être droite, arquée, sinueuse ou torse. On comprend en ou- tre que sa hauteur varie suivant la hauteur de la spire. La columelle est spirale ou subspirale chez les Vitrines, les Suc- cinées, les Hélices, les Paludines, ete. ; elle est torse chez les Physes.et les Limnées ; droite, chez les Bulimes. Sa base est souvent plissée comme chez les Limnées ; mais parfois aussi, il existe sur la columelle des lames spirales qui l'ac- compagnent; tel est le cas des Clausilies et des Carychies. Enfin chez les Nérites, elle forme un bord dilalé, sepliforme et tranchant. M. le docteur Baudon, en étudiant la columelle des Vitri- nes, à signalé une nouvelle disposition à laquelle il a donné le nom de Lamelle falciforme (3), qui diffère suivant les es- pèces. « Dans la coquille des Vitrines, la columelle est solide, oblique, spirale, courte, très large, arquée à son insertion et (1) Gassies, 1847. Essai sur le Bulime trouqué, in Actes Soc. Linn. Bordeaux, tome XV. (2) Lataste, 1876. Sur les troncatures successives d'un Æelix aspersa en forme de corne u’abondance, in Journ. de conch., tome XXIV, p.242. (3) Baudon, 1862. Nouveau catalogue des mollusques de l'Oise, p. 14. DU BASSIN DU RIONE 39 tourne en dedans avec le test. Au dehors, elle se déjette au devant de l’ombilie qu'elle masque souvent en totalité. A partir de sa torsion, on remarque une surface plane, cou- pée obliquement, suivant le bord inférieur et disparaissant entièrement avee lui. Celle lamelle qui, tout en faisant par - tie de la coquille, semble en être une portion bien limitée, forme un angle avec la marge ». Comme Île fait observer ce savant auteur, l'examen de cette partie de la coquille peut done aider à la détermination des Vitrines. Chez les Clausilies, la columelle est subspirale; en outre, elle est ordinairement garnie de deux lames parallèles qui s’'enroulent tout autour d'elle, formant en quelque sorte rai- nure : dans l'espace laissé libre vient s'engager le Clausilium. L'étude des caractères de la columelle a, du reste, plu- sieurs fois servi pour le groupement des espèces. Moquin- Tandon, dans son genre Bulimus, qui comprend les Chon- drus, Azeca, Ferussacix et Cæcilianella, a mis en avant les caractères donnés par les différentes manières d’être de la truncature de la base de la columelle. Dans les Limnées, on a toujours tenu compte de la forme et de la position du pli co- lumellaire dans toute bonne diagnose spécifique; ce pli en effet, est de forme très variable dans une même espèce. Nous voyons que, pourle Linnœæa elophila, M. Bourguignat l’a pris pour un de ses caractères prédominants ; de même M. Gassies a formé son Limnæa t'encaleonis pour une coquille du groupe du Limnæa limosa dont la € olumelle forme un angle presque droit à son origine. OuverTure. — Les caractères fournis par l'ouverture des coquilles sont des plus précieux pour leur bonne classifica - tion. Mais cette ouverture étant en corrélation directe avec la forme du dernier tour, les modifications que celui ei pourra éprouver devront nécessairement se manifester dans cette 370 VARIATIONS MALACOLOGIQUES partie du test. Avant de parler des caractères particuliers ou accidentels de l'ouverture, comme le péristome, les plis ou lamelles, les bourrelets, les dents, ete., nous nous occuperons d'abord des variations dans la fornie même de cette ouverture. Les Testacelles, avec leur coquille encore assez mal défi - nie, mais dont l'ouverture est presque aussi grande que la coquille elle-même, présentent dans cette partie des varia- tions considérables : à taille égale, l'ouverture de la coquille d'une Testacelle peut être plus ou moins longue ou plus ou moins large, etirrégulièrement arrondie. On ne saurait baser des caractères spécifiques bien précis sur sa forme ou sur ses dimensions. Il n’en est plus de même chez les Vitrines ; la taille et la forme de l'ouverture deviennent, au contraire, un des élé- ments de classification. Suivant que le bord columellaire est aplati on non aplati, on aura les sous-genres fyalina et Helicolimax. En outre, dans la classification des espèces, on a soin de tenir compte des dimensions relatives de cette même ouverture par rapport au diamètre maximum de la coquille, Chez les Succinées, la dimension et la forme de l'ouverture sont en rapport direct avee le développement du dernier tour. M. le docteur Baudon a établi dans les Succinées de France trois groupes basés sur la forme de la coquille et celle de son ouverture. Le groupe du Succinea pulris pour des coquilles globuleuses ayant une ouverture grande et ova- laire ; le groupe du Succinea elegans pour des coquilles allongées, avec ouverture élancée, plus étroite; enfin le groupe du Suceincaoblonga pour des coquilles assez ventrues dont l'ouverture arrondie dépasse à peine la moitié de la hauteur totale. Dans un mème groupe, la forme de l'ouver-- ture se modifie : on aura, suivant M. le docteur Baudon, des variétés comme Succinea pulris, Var. subqglobosa, H. Pascal, Drouelia Moquin-Tandon, Charpentieri Dumont et Mortillet DU BASSIN DU RHONE Ro à Ferussina Moriin-Tandon, olivulu Baudon, limnoidea Picard, dont plusieurs ontété élevées au rang]d espèces par M. Bour- guignat. Enfin, dans un même type, admis par ces deux sa- vants malacologistes, la forme de l'ouverture peut également présenter des variations non seulement propres à ce type, pinis encore à toutes les variétés et sous-variétés qui sont reconnues. Le genre Leucochroa nous fournit un intéressant exemple de modification dans l'ouverture. Dans certaines colonies avant l'ombilic perforé ou couvert, l'ouverture est plus étroite que dans le type. De là la var. microstoma Menke. Dans les Hyalinies, la forme de l'ouverture dépend essen- tiellement de celle du dernier tour, et suivant qu'il est plus ou moins dilaté, plus ou moins tombant, ete., l'ouverture sera plus où moins allongée et plus où moins oblique. Ce caractère d'obliquilé auquel on fait jouer un grand rôle dans la diagnose de certaines espèces comme celles des Hyalinia lucida, H. cellaria, H. alliacea, ete., n'a cependant pas toute la valeur qu’on lui attache, car il est, en effet, sujet à modi- fication ainsi qu'il est facile de s'en rendre compte. Lorsque Île mollusque se trouve dans des conditions biologiques qui lui permettent un rapide accroissement, l'abondance même de la matière calcaire rend son dernier tour plus tombant; sa section est plus large, et par conséquent l'ouverture tend à ètre un peu plus oblique. Si, au contraire, son aecroisse- ment s’est fait avec une certaine lenteur, s'il n’a pas eu à sa disposition tout le calcaire dont il avait besoin, la section de son dernier tour sera plus faible, il sera moins tombant, et par conséquent l'ouverture sera moins oblique. Et en effet, si lon compareles Hyalinia lucida élevés sur des calcaires à ceux élevés sur le granit, par exemple, on verra que les derniers ont leurs coquilles plus minces et en même temps que leur ouverture est proportionnellement moins large et JT VARIATIONS MALACOLOGIQUES moins oblique que chez les premiers. Enfin, chez les Aya- linia cryslallina Müller, la tendance à l'obliquité semble encore plus prononcée chez certaines colonies, qui tendent à former un passage entre ce type et le Æyalhinia hydalina, Rossmassler dont l'ouverture est nettement plus oblique et moins resserrée. Chez les Helices, les Bulimes, les Clausilies, les Pupas, les Vertigos, les caractères de louverlure sont trop intimement liés à ceux des différents accidents aperturaux pour que nous ne soyons pas porté à en examiner les variations en même temps que nous étudierons celles de cesnombreux aceidents. Mais, d'une facon générale nous constaterons que l'ouverture dans une méme espèce donnée peut présenter des caractères très différents; il suffira pour s’en convaincre de jeter un coup d'œil sur notre planche d'Afelix nemoralis (pl. V.) pour voir quelles variétés d’'aspecls celle ouverture peut présenter tout en conservant cependant cerlains caractères spéciaux propres à l'espèce dont la diagnose aura été basée sur cette même forme. Dans les Limnées, la forme de l'ouverture est essentielle- ment variable. Nous avons vu à propos des variations de la spire la corrélation directe qui existait entre cette hauteur et celle de l'ouverture pour la classification des différentes espè- ces du genre Zimncæu. Mais dans un même groupe, combien cette forme ne peut-elle pas se modifier ! Dans le groupe des Limnæa auricularia, H. limosa, H. stagnalis quelle multi- plicité de galbes n'a-t-on pas! Nous voulons bien admettre que toutes les formes rangées autour du Limnæa auricularia ont à la fois des caractères spécifiques basés sur la forme de l’ouverture et sur celle de la spire. Mais, étant donné le Limnæa limosa \ype, peut-on affirmer que toutes les coquilles de même àge, de deux colonies différentes ont absolument la même ouverture? nous en doutons, et nous voyons là au ‘ DU BASSIN DU RIIONE 319 contraire une excessive variation dépendant sans doute à Ja fois et de la nature des eaux et de la nourriture de l'animal, Si l’on prend des œufs de Limnæa limosa et qu'on les élève dans des eaux autres que celles de leurs ancêtres, avec des plantes différentes, on aura certainement dans celte nouvelle colonie des êtres dont la forme de l'ouverture différera de celle de leurs ancètres. Enfin, en faisant accoupler des Lunnœæa limosa des deux colonies aux formes différentes, on aura encore une troisième colonie dont les caractères aper- turaux différeront de ceux des deux premiers. Nous ne pré- tendons point qu'ils auront par la suite une fixité absolue, nos expériences n'ont pas été poussées assez loin pour nous en rendre compte; il est même probable, d'après les lois de latavisme,que les descendants de la nouvelle colonie finiront par rentrer dans le type dominant de l’une des deux pre- mières; mais il n’en reste pas moins démontré que la forme de l'ouverture aura puse modifier. En résumé, les modifications les plus grandes dans la forme de l'ouverture ont surtout lieu chez les coquilles dont cette ouverture n’est point cerclée par un péristome, comme les Vitrines, les Succinées, les Hyalinies, les Limnées, ete. La secrétion ealeaire qui vient en quelque sorte couronner le développement complet de la coquille par la formation du péristome, des dents, des bourrelets, se traduit ici chez les mollusques aquatiques par un épanouissement plus ou moins marqué de la région aperturale. De là une variabilité néces- saire résultant des conditions biologiques des mollusques, variabilité d'autant plus considérable qu'ils auront leur ouverlure normalement plus grande. Pour terminer ce qui est relatif aux caractères de louver- Lure, 1} nous reste à dire quelques mots au sujet de certaines dispostions particulières propres à quelques genres spéciaux récemmeut créés par M. Bourguignat. Tels sont les Lartetia 074 VARIATIONS MALACOLOGIQUES et les Paladithia. Dans les Larlelia, la partie inférieure de l'ouverture est plus avancée que la partie supérieure; le bord externe dilaté et arqué est projeté en avant, de telle sorte qu'entre cette dilatation et le point d'insertion se trouve une partie de ce bord plus ou moins concave, comme canalicu- lée et qui ressemble à la concavité supérieure du bord externe des Paladilhia. Dans ce genre, l'ouverture a sa base projetée en avant et dépassant le bord supérieur; ie bord externe est excessivement arqué et projeté en avant; enfin, il existe à la partie supérieure de l'ouverture une fente pleuor- tomoïdale échancrant plus ou moins fortement la partie supérieure du bord externe et formant saillie sur les derniers tours. C’est en se basant en grande partie sur ces caractères que l’on est arrivé à spécifier sept Paladilhia vivant en France, et cinq Lartetia. Malheureusement le nombre des échantillons rapportés à chaque espèce est fort restreint el les formes de passage n’ont pas été suffisamment étudiées. PÉRISTOME. — La forme et la nature du péristome com- plètent chez les mollusques les caractères fournis par lou - verture. Ce péristome peut être : simple, continu, disjoint, évasé, réfléchi, bordé ou marginé ; de là autant de manières d'être propres ou spéciales à telles ou telles espèces, sujettes elles-rièmes à des modifications ou des variations que nous allons étudier. Les Vitrines, les Succinées, les Hyalinies, ont leur péris- tome mince, tranchant et désuni. Chez les Hélices, au con- traire, la nature de ce péristome est très variable, et c’est en se basant sur les caractères qu'il peut fournir que le docteur Pfeiffer a établi sa classification des Hélices. Dans ce genre, il estun premier fait général propre à toutes les Hélices ornées d'un péristome plus ou moins développé chez le type; c’est celui de la variabilité dans les caractères fournis par ce DU BASSIN DU MIONE 315 même péristome. Ainsi l’Aelix pomalia Lype a son péristome interrompu, mais évasé et épaissi. Si l'on observe le péris- tome de cette même Helice suivant qu'elle vit dans des mi- lieux calcaires ou graniliques, on remarquera bien facile- ment que les Helix pomaliu des pays caleaires, situés dans les régions basses des plaines et des vallées de nos pays ont à âge égal et taille proportionnelle, le peristome beaucoup plus large, beaucoup plus épais, beaucoup plas développé que les mêmes Helix vivant dans les pays granitiques ou à des altitudes plus élevées. Il y a donc là un premier fait général dénonçant la variabilité des caractères du péristome. Ce fait s'applique à toutes les coquilles susceptibles d'avoir un péristome normalement bien développé. Le développement du péristome peut être en corrélation avec le plus ou moins de grandeur de l'ombilic, dans cer- taines coquilles, le board columellaire venant en partie re- couvrir cet ombilic; mais nous nous réservons de traiter ce sujet à propos de l'étude de l'ombilic. La forme ou mieux le développement du péristome peut varier chez certaines espèces. En effet, par sa nature même, le péristome peut être continu où interrompu suivant qu'il est plus ou moins développé; s’il est interrompu à son point de contact avec l'avant-dernier tour, il peut former un callum dont l'importance sera en raison directe avec l'épaisseur de la coquille et surtout avec le plus ou moins d'importance de la matière calcaire sécrétable. Chez l'Helix cornea Draparnaud le péristome est nettement interrompu dans le type, mais sur une faible longueur; chez l'Helix Desmoulensis Farines, forme très voisine, mais cependant facile à distinguer, ce même péristome est tantôt subcontinu, tantôt continu. I y à passage entre Ja disposition du péristome de ces deux types eux-mêmes voisins. Les /lelix coslata et Helix pulchella de Müller sont également deux formes qui doivent être placées 376 VARIATIONS MALACOLOGIQUES l'une à côté de l’autre dans la méthode; le péristome, chez l’une comme chez l’autre, peut être continu où subeontinu ; en outre, dans l'Helix costata, il est plus tranchant, moins émoussé, que dans l’Helix pulchella. Mais là où nous trouvons plus de variations encore, à pro- pos du péristome des Helix, e est dans la coloration. Un des caractères de l’Aelix nemoralis réside dans la coloration noire du péristome. Quelques auteurs mème se sont basés, pour séparer l'Helix nemoralis de Helix horlensis, sur la différence de coloration du péristome; normalementil doit être noir chez l'Helix nemoralis et blane chez l’AHelix horlensis. Ce fait est loin d'ètre exact, car nous trouvons aujourd'hui bien des colonies d'Hélices ayant tous les autres caractères de l'Helix nemoralis et dont le péristome est complètement blane, avec absence totale de toute tache ombilicale colorée ; de mème qu'il existe des Helix se rapportant absolument à l'Helix hortensis et dont le péristome est parfaitement noir. Aux environs mêmes de Lyon, à la Mulatière, il existait autrefois toute une colonie de gros Helix nemoralis var. libellula avec le péristome blanc; à la tour de Carat, dans les Pyrénées- Orientales, on trouve d'énormes Âelix nemoralis avec le péristome blanc; nous avons figuré dans notre planche V, plusieurs de ces types. Réciproquement dans des colonies d'Ilelix hortensis observées aux Ardillats, dans les montagnes beaujolaises, ou sur les bords du Rhône aux environs de Lyon, nous trouvons les var. Alderia, Moulinsia, Debeauxia, Mayeria, Sarratia, Barnesia, Forestia, Morletia, Reclusian«, Kokleia, incarnala, Baudonia, ele. qui ont les unes le péris- lome toujours noir, les autres tantôt blane, lantôt noir, tout en vivant parfaitement ensemble. On serait donc fortement induit en erreur si l'on était réduit à ce caractère pour dis- tinguer les espèces. Ce changement de coloration dansle périslome existe éga- DU BASSIN DU RHONE UT. lement chez des Hélices d’autres’groupes : l'Aelix fruticum de nos pays a parfois son péristome et le commencement de son ouverture colorés en rose ou en violet rose, alors que le reste de la coquille est de couleur fauve plus pâle. L'Helix pisana du Midi a son péristome d'un beau rose, mais à me- sure que l'on remonte en altitude, on observe que cette colo- ration tend à perdre de son intensilé dans les colonies accli- matées normalement. Les Helix pisana trouvés à Lyon avaient leur péristome presque blanc; ceux des environs de Paris sont loin d’être d'un rose aussi vif que ceux du Midi de la France. Chez l'Helix pomatia, le péristome est souvent d'un beau rose, mais on n'observe d'ordinaire cette coloration que dans les échantillons méridionaux ou dans ceux qui vivent dans les régions des plaines basses et des vallées, et jamais ou du moins très rarement dans les indi- vidus recueillis à de grandes altitudes. Enfin, fail assez singulier, ce mème péristome à colora- tion variable peut être affecté dans certains cas de bichro- misme. Telle est la var. bimarqginata établie par Picard pour des HHelix nemoralis à péristome d’un brun plus ou moins fon- cé extérieurement et blanc intérieurement. Ce bichromisme existe également chez l'Helix hortensis ; il n'est pas rare chez les coquilles à péristome brun; il devient presque normal chez l'Helix syluatice. Dans quelques Hélices, on observe sur le bord inférieur du péristome une petite saillie ou protubérance qui se traduit plus tard chez les Limnées par un pli plus çu moins prononcé sur le bord columellaire. La position de ce pli, son intensité, sa forme même, peuvent avoir leur importance dans la séparation des espèces. Ainsi, l'un des caractères du Lim- næa slagnalis Linné et du ZL. elophila Bourguignat reside précisément dans la position de ce pli. Nous observons que chez les Limnées le pli du bord columellaire varie avec les E VAR. MAL. T (f. 2) 378 VARIATIONS MALACOLOGIQUES individus et qu'il ne prend réellement ses caractères définitifs que lorsque la coquille devient adulte. Jusque-là on ne peut réellement pas lui attribuerla moindre fixité. Ilest, du reste, d'autant plus variable qu'il sera plus fort, plus marqué, mieux accusé, une fois que la coquille aura atteint son déve- loppement. complet. Le galbe du péristome joue un grand rôle dans la classifi- cation des Pomaties. Sa forme générale évasée est tout à fait caractéristique ; mais elle est sujette à variations. Nous avons dans notre région plusieurs exemples de ce genre. Le Pomatias apricus de la Grande -Chartreuse a donné à M. Bour- guignat une variété caractérisée par un épaississement el une plus grande dilatation du péristome. Le Pomatias seplemspi- ralis a tantôt son péristome uni, évasé el simple, tantôt éga- lement évasé, mais cerclé en dedans par un second bourrelet péristoméal. Cette singulière modification aperturale rentre - rait presque dans le cas des anomalies. Elle existerait égale- ment d'après Moquin -Tandon, chez le Pomatias patulus des environs de Toulon et de Montpellier. ‘Ouen. — Les mollusques Gastéropodes peuvent être ombiliqués, perforés ou imperforés, suivant la manière d’être des derniers tours de la spire près du bord columellaire. On comprend sans peine la valeur de semblables caractères dans toute classification des coquilles ; et cependant, malgré leur importance, ces caractères ne jouissent pas, comme nous allons le voir, d'une fixité absolue. Dans le genre Hyalinia, les caractères spécifiques des dif- férentes espèces, ainsi que nous l'avons déjà fait observer, sont extrèmement rapprochés ; la plupart des coquilles ayant un galbe général plus ou moins similaire, on a dù nécessai- rement, pour établir des diagnoses suffisantes, réunir tous les éléments différentiels possibles. L'un d'eux, des plus essen - DU BASSIN DU RHONE 319 tiels, repose sur les dimensions de lombilic ; et en effet, on passe dans celte famille de coquilles ayant un large ombilic comme le Ayalinia nilens, à d’autres coquilles, comme le Hyalinia diaphana, chez lesquelles cet ombilic est nul ou à peu près nul. En même temps la forme même du dernier tour dans sa partie inférieure avoisinant l’ombilic est sujette à modifications. Lorsque l'ombilie est très ouvert, on peul apercevoir une partie de l’avant- dernier tour ; sa forme alors est moins régu- lière ; c’est ce que nous observons chez les coquilles dont le dernier tour est plus ou moins brusquement développé à mesure qu il se rapproche de l'ouverture. D’autres fois, lors- que l’ombilie est de taille très petite, sa forme est plus régu - lière ; souvent en même temps, le dessous de la coquille est plus bombé, et ce nouveau caractère le fait paraitre plus profond. Enfin dans certains cas, l’ombilie devient de plus en plus étroit, l'enroulement des tours de spire se fait avec plus de régularité, en même temps ils sont plus embrassants en dessous, et l'ombilie, tendant à devenir de plus en plus petit, finit par être nul. Chez certaines Hyalinies les caractères fournis par l'ombilie peuvent varier. Mais le nombre en est restreint. Nous rappel- lerons que M. le docteur Baudon a signalé une var. umbili- cala du Hyalinia nilidu « si largement ouvert que l’on aper- çoit l'enroulement des tours de spire jusqu'au sommet » (1). Le Leucochroa candidissüna nous donne un excellent exem - ple des modifications que les caractères de l'ombilie peuvent éprouver chez une même espèce. Nous voyons en elfel cette coquille tantôt perforée, (antôt avec un ombilie couvert; ec sont les deux var. umbilicala et teclu de Menke. Mais outre ces deux Lypes extrêmes, on trouve des formes intermédiaires de (1) Baudon, 1862, Nouv, catal. de: moll, de l'Oise, p. 17. 380 VARIATIONS MALACOLOGIQUES toute taille chez lesquelles l'ombilie est plus ou moins recou- vert. Dans ce cas, il est plutôt masqué par un développement du bord columellaire que par le développement du dernier tour. On ne doit done pas d’après cela avoir une confiance absolue dans la fixité des caractères fournis par l’ombilic. Supposons pour un instant qu'un paléontologiste trouve pour la première fois dans un dépôt sédimentaire un ou deux échantillons analogues à la var. wmbilicala du Leucochroa candidissihina jusqu'alors inconnu à la science. Vite il fait une espèce nouvelle, et combien de fois cela n'est-il pas arrivé ! il crée un type caractérisé par la forme subearénée du dernier tour et par la présence d'un ombilie. Vienne ensuite un nou- veau géologue qui découvre dans une autre région la var. lecta du Leucochrou candidissima aveeses tours plus arrondis : il y a cent contre un à parier qu'il s'empressera de faire bien vite une espèce nouvelle en démontrant tous les caractères différentiels qui existent entre ces deux lypes. Hélas ! que d'espèces ou prétendues espèces tertiaires el quaternaires sont dans ce cas ! Que de noms nouveaux ont été donnes à la seule vue d’un ou deux caractères de différenciation tout au plus bons à faire des variétés nouvelles ! | Chez les Hélices, la présence ou l'absence de lombilic est un caractère qui est toujours pris en considération dans Ja détermination des espèces. Admellra-t-on, par exemple, l'Helix unidens de Ziesler comme une espèce distinelte de l'Helix unidentata de Draparnaud? 1 faudra dans ce eas se baser surtout sur la différence de taille, petite chez l'Helrx madens, jointe à un ombilic un peu plus large. Mais cela peul-il constituer des caractères suflisints pour établir une espèce nouvelle plutôt qu'une simple variété ? L'Helix arbustorum 1ype possède un ombilie très étroit et très oblique ; mais, chez certains individus de notre région, nous voyons cel ombilic tantôt complète nent recouvert par DU BASSIN DU RHONE 3 | le développement du péristome vers la columelle, tantôt, au contraire, un peu découvert, et cela aussi bien chez les individus de grande taille que chez ceux de la var. alpicolu. Dans les formes les plus voisines que quelques auteurs n’ad mettent qu'à titre de variétés, comme l'Ielix Repellini Ch:r- pentier, ce même ombilictend encore à se découvrir davantage et modilie ainsi les caractères diagnostiques de la coquille. Les espèces qui ont le péristomce très développé, ou plus ou moins fortement réfléchi, rentrent dans la catégorie des mol- lusques à ombilic variable. Ainsi l'Helix lapicida avee son péristome à la fois continu et réfléchi peut présenter des variations assez notables dans les dimensions apparentes de son ombilic. On comprend, en effet, que les variations mêmes du péristome qui masque toujours un peu l'ombilie peuvent nécessairement infliger à celui-ci une apparence variant en raison de son développement. Il en est de même de l'Helix ponalia dont l’ombilie quoique très petit est plus ou moins apparent suivant l’élat de développement du péris- tome. Il est tout un groupe d'Hélices chez lesquelles la dimen - sion de l’ombilit joue un rôle des plus importants ; nous vou- lons parler des Hélices du groupe de l'AHelix hispida.Wexiste, en effel, un grand nombre d'espèces vivantes ou fossiles établies autour de ce Lype linnéen et dont un des caractères les.plus essentiels repose sur la dimension et la forme de l’ombilic. Le type extrème de la série parait êlre à ce point de vue l’Helix plebeia dont l'ombilie est très petit. Mais entre ces deux limites il y a place pour une foule d'intermédiaires. Et cependant, l'Aelix hispida type, pris dans des localités différentes, ou dans des stations d'altitudes variées peut avoir des formes d’ombilic différentes ; tantôt il est plus ou moins large, plus ou moins profond, tantôt il laisse voir une portion plus où moins grande de l'avant dernier-tour. 382 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Chez les Hélices striées de nos pays, l'ombilic a également son ouverture variable, non seulement dans des individus de colonies différentes, mais encore chez des échantillons de même taille et de même âge d'une colonie donnée. Dans les Hélices du groupe de l'Helix ericetorum, carac - térisées par un ombilic large et découvert, nous voyons en- core des espèces très voisines différcaées les unes des autres par les dimensions de leur ombilic, alors que chacun de ces différents types peut lui-mème varier suivant les milieux où ils se trouvent. Enfin, chez les Valvées, nous avons déjà vu qu’en allant des formes surbaissées du Valvata alpestris aux formes élevées du Valvala contorla on passait par des galbes intermédiaires pour lesquels la plupart des caractères diagnostiques de la coquille allaient en éprouvant des modifications propor- tionnelles à celles de la hauteur. C’est ainsi que dans ces diffé- rents types l'ombilic, large d’abord chez l'espèce la plus basse, devient au contraire de plus en plus étroit à mesure que le galbe s’éleve. Sommer. — Chez les mollusques gastéropodes, le sommet représente le développement des premiers tours de la co- quille. Avec l’âge, l'apparence ou la nature même de ce sommet peut se modifier. Rappelons d'abord que parmi nos espèces méridionales, il enest une chez laquelle l'ablation de ce sommet a lieu normalement au bout d'un certain temps. Le Rumina decollati, tandis qu'il est jeune conserve son sommet; mais à mesure qu'il grandit, l'extrémité du tortil- lon se sépare des derniers tours; une lame de matière cal- caire ferme la coquille au point où elle sera ensuite brisée par l'animal lui-même; il conserve ainsi de quatre à six tours de spire, tandis que s'il les avait tous gardés, il en aurait de quatorze à seize. Ce mème caractère se retrouve DU BASSIN DU RHONE 383 dans tous les animaux d'une famille de mollusques amphibies vivant le long des côtes au niveau du balancement des marées el qui ont toujours leur sommet brisé; c'estle genre Trunca- lella de Risso (1). M. Gassies a également signalé un certain nombre d'espèces ayant le sommet tronqué : Pirena spinosa, Melan‘aamarula, Cerithiun fluviatilis, Melania truncatula, Melania atra, ete.; toutes ces formes ont une ablation plus ou moins complète du sommet de la spire sans qu'il paraisse en résulter le moindre inconvénient pour animal. Chez les Vitrines et chez les Hyalinies bien souvent le som- met s'excorie avee l'âge ; il perd son épiderme et ressemble alors à une coquille morte. Les Hélices présentent aussi parfois ce phénomène ; nous avons vu des Helix «rbustorum et des Helix nemoralis de cou- leur très foncée, presque noire, prendre une coloration jaune ou grise à leurs premiers tours à mesure qu'ils avançaient en âge. Ce phénomène ne doit cependant pas être un résultat d'usure, puisque lorsque l'usure réelle par frottement a lieu sur les Hélices, c’est le dernier tour qui est nécessaire le plus exposé. Il arrive quelquefois que les Clausilies ont leur sommet tronqué absolument comme celui du Rumina decollata; elles n’ont nullement l'air d'être gènées dans leur démarche; mais pareil fait n'est pas normal, et il est bien certainement le résultat d'un aceident ; nous avons constaté ce fait chez deux Clausilia laminata et sur un seul Clausilia plicala. Dans le genre Ancylus, la forne et la manière d'être du sommet joue un rôle tout spécial qui a été étudié avec un soin particulier par M. Bourguignat (2;. 11 peut d'abord être (1) Risso, 1876. ist. nat. Eur. mérid., |. IV, p. 124, (2) Bourguignat, 1861. Etude synonymique sur les mo lusqu?s des Alpes-Maritimes. — es Spicilèges maïacol: gi ques, p. 146, 384 VARIATIONS MALACOLOGIQUES dextre ou sénestre suivant les espèces, de là deux divisions dans le genre. Mais, en outre, il existe au sommet même une dépression plus ou moins apparente à laquelle ce savant observateur a donné le nom de dépression apicale. Celle dé- pression peut être arrondie ou elliptique; en outre, sa posi- tion est variable ; elle peut ètre 1° à l'extrémité du sommet et regarder la base du bord postérieur; 2° un peu au-dessus de la pointe du sommet, et regarder plus ou moins obliquementle ciel ; 3° mème position surle côté droit du sommet; 4° même position sur le côté gauche. Nous ne mettrons pas en doute l'existence de la dépression apicale chez les Ancyles, mais il faut bien reconnaitre que son observation est souvent difficile ; ces caractères chez quelques individus peuvent être précis, mais bien souvent il est presque impossible de dire si sa forme est absolument cireulaire ou elliptique. Enfin, elle nous a paru présenter encore beaucoup moins de fixité dans sa direction, chez les Ancyles d'une même colonie. CARËNE. — [lexiste un certain nombre de mollusques chez lesquels le dernier tour, au lieu d'être arrondi, présente une carène plus ou moins saillante, et plus où moins persistante. Plusieurs Hélices, qui lorsqu'elles sont adultes ont leur der- nier tour parfaitement arrondi, ont au contraire ce même tour subcaréné lorsqu'elles sont encore jeunes ; c'est là, du reste, un caractères spécilique à ajouter à celui de la formation du péristome, pour reconnaitre si elles sont, ou non, arri- vées à leur état parfait de développenent. Souvent cette ca- rène persiste et prend un caractère de fixité plus ou moins absolu. Chez le Leucochroa candidissimu, alors q vil est arrivé à l'élat parfaitement adulle, il peut néanmoins exister une DU BASSIN DU RHONE 389 apparence de fausse carène très visible qui modifie le faciès général de la coquille, et lui donne un aspect de variabilité très prononcé. Parmi les Hélices qui sont nettement carénées, il en est quelques unes chez lesquelles cette carène peut être plus ou moins émoussée ; ainsi il n’est pas rare de rencontrer des /elix rolundata dont le dernier tour est un peu arrondi, de même que l’on voit des Æelix ruderata de nos pays conser- vant une fausse carène; ces deux formes pourtant normale- ment différentes tendent ainsi à se rapprocher. L'Helix fusciolu- la conserve aussi parfois, lors même qu'ilest adulte, une appa- rence de fausse carène ; nous avons vu des échantillons ayant alteint tout leur développement conserver sur leur dernier tour la trace de la fausse carène qu'ils portaient lorsqu'ils étaient encore jeunes. Nous citerons un autre exemple assez eurieux ; les Helix, incarnala, et H. limbata de Draparnaud sont spécifiquement bien distinets ; leur habitat normal, en outre, est différent; et cependant nous avons vu des indivi dus présenter des caractères communs aux deux types. Nous avons reçu de Montmorency près Paris des Helix incarnate appartenant à une seule et mème colonie, et dent le der- nier tour avait une carène très obtuse comme celle de l'/Le - lis limbala; la zone blanchâtre carénale et confuse du type normal élait remplacée par une bande blanche, mate, très distincte, comme celle de l{elix limbata.De mème, les Helix limbata du Midi transportés et acclimatés dans le Nord, ten dent à perdre, du moins pour certaines colonies, les caractères basés sur leur carène; leur dernier tour s'arrondit, la bande carénale s'atténue, et ils passent ainsi à l'Aelix incarnata. I ne reste plus alors, pour les spécifier, que les caractères basés sur la forme de l'ouverture, lesquels sont loin d'avoir une fixité absolue. On a, du reste, souvent confondu ces deux formes. Ainsi des Moulins, Grateloup et M. Gassies ont cité l’Helix incarnata dans la faune de la Gironde; suivant 386 VARIATIONS MALACOLOGIQUES M. P. Fagot (L), ils auraient pris pour l'Helix incarnala une forme de l'Helix limbata qui s’en rapproche par plusieurs caractères. Certains Planorbes sont fortement carénés, et la position de leur carène, malgré le peu d'épaisseur ou mieux de hauteur de la coquille, peut se modifier. Parmi les Planorbes fortement carénés, nous observons les Planorbis complanalus Linné, PI. carinalus Müller, et Pl. submarginalus Cristofori et Jan. Ces trois formes diffèrent surtout par la position de leur carène; elle est centrale où médiane chez le Planorbis carinalus, inférieure chez le PI. complanatus et intermédiaire chez le PI. submarginalus. S'il existe entre les Planorbis cari- nulus et Pl. complanalus, quelques caractères spécifiques qui permeltent de les distinguer, ceux qui séparent les Plunor- bis complanatus et PI. submarginatus sont déjà moins tran - chés; aussi bien souvent arrive-t-il que l'on trouve des Planorbis complanalus chez lesquels la carène par suite d'un peu de renflement dans la partie inférieure des tours n’est pas aussi marginale que le type le comporte. Il y a entre ces deux derniers types des formes de passage très nom- breuses de telle sorte qu'il est parfois bien difficile de dire où commence le Planorbis submarginalus et où finit le Planrorbis complanatus. Dans d'autres groupes très voisins, à carène aiguë où émoussée, nous observons les mêmes variations dans la position de la carène. Les Planorbis vortex et PI. ro- lundatus possèdent, les premiers une carène très aiguë, les seconds, une carène subobtuse ; mais nous avons montré dans la première partie de ce travail que la carène dans ces deux formes pouvait avoir une position très variable, tantôt centrale, tantôt inférieure ou submédiane, tout à fait analo- (1) P, Fagot, 1879, Notes sur le cata'ogue les mIlusques de la rég'on de Touluuse, p. 8, not”, DU BASSIN DU RHONE 357 gue à celle des Plunorbis carinatus, PL. complanatus et PL. submarginatus. Enfin, chez quelques Paludinidées, on retrouve des lignes carénales, comme il en existait autrefois chez plusieurs formes de ce groupe, mais alors de bien plus grande taille ; tel est le casdes Paludinella bicarinata, dont les derniers tours sont ornés d'une double carène ; mais il est à remarquer que dans ce type, la carène n'apparait qu'à partir d’un certain age, et que tant que le mollusque est jeune, elle n’est pas encore visible (1). D'autres fois au contraire, nous voyons dans celte même famille la carène apparaitre dans les premiers âges pour disparaitre ensuite. Le Vivipara contecta, quandil est jeune, possède une carène très prononcée qui disparait casuiteà mesure que la coquille croit, C'est en se basant sur ce caractère si passager qu'a été créé le Paiudina Moquini (2). De même qu'il existe, comme nous venons de le consta- er, un certain nombre de mollusques chez lesquels une carène peut apparaitre à un moment donné et persister en- suite, de même aussi, certains types normalement carénés peuvent avoir, par suite de variations, celte même carène plus ou moins atténuée. En étudiant la tératologie malacolo- logique, nous verrons que pareil fait peut avoir lieu chez des individus isolés ; mais dans quelques cas il s'applique à toute une collection d'individus et constitue une véritable variété, C'est ce qui arrive par exemple chez l'Helix lapicida. M. Bau- don (3) a signalé une var. convexa de cette coquille vivant dans l'Oise et dont la forme est plus connexe atténuée avec une carène. Enfin, chez de rares coquilles, qui, en cela, rappellent certaines formes éleintes de la faune tertiaire, on trouve sur (4) Des Moulins, 1845. Actes dela Soc. Linn. de Bordeaux, t. IT, p. 17. (2) Roumeguère, 185$. ExL. Mum. académie de Toulouse, EP PALEE fE (3) Baudoa, 1807. Nouveau catal, des mollnsques de l'Oise, p. 19. 385 VARIATIONS MALACOLOGIQUES la spire plusieurs lignes carénales plus ou moins saillantes. Si ce caractère est très nettement accusé dans le genre Pyrgulu il est très rare chez les autres mollusques. MM. de Folin et Bérillon ont cependant décrit sous le nom de Valvata crislata var. ornula, des échantillons du Sud-Ouest de la France dont le dernier tour de la spire est orné de cordons spiraux assez saillants et asssz rapprochés les uns des autres (1). SuTurE. — La suture ou ligne suturale représente chez les mollusques gastéropodes la ligne de contact des différents tours de la spire ; tantôt celle ligne est profondément mar- quée, tantôt elle est, au contraire, à peine indiquée ; parfois enfin, elle est accompagnée d’une sorte de méplat caractéris- tique dans certaines espèces ou même dans certains genres. En général, suivant que les tours de la spire seront plus ou moins arrondis, la sulure sera plus où moins profonde. Elle est done par sa nature même soumise en quelque sorte aux variations des tours de spire. Or, comme les variétés résul- tant du plus ou moins de saillie des tours de spire sont très nombreuses, puisqu'elles constituent un des principaux caractères personnels ou individuels des coquilles, on com- prend que dès lors la suture doit, dans sa profondeur, pré- senter elle aussi de nombreuses variations. Dans les Vitrines, on se sert des caractères de [a suture pour distinguer les espèces ; la spire Ctant peu saillante dans ce genre, la suture suivant les espèces est plus ou moins profonde ou apparente. Chez les Hyalinies, il arrive parfois que même pour des formes bien nettement définies, la suture est plus ou moins profonde. Dans la plupart des Hélices de nos pays, la suture ne présente plus que des variations indi- (4) De Folin et Bérillon, 1877. Contrib. à la faune malac., 2° fase, p.16. DU BASSIN DU RHONE 389 viduelles, sujettes elles aussi à divers genres d'anomalies dont nous parlerons plus loin. Quant au méplat qui accompagne la ligne suturale, nous le voyons déjà chez quelques grandes Ferussacies:; mais il devient plus apparent et en quelque sorte caractéristique dans les genres Paladilhia. Suivant les espèces, ce méplat est {.ntôt large, tantôt étroit, horizontal ou relevé. Malheu- reusement dans ces pelites coquilles, le nombre des échan- tillons que l'on peut comparer est relativement trop restreint pour que l'on puisse affirmer d’une manière positive si ces caractères ne sont point eux aussi sujets à variations. ACCIDENTS APERTURAUX. — Un caractère propre à cer- laines espèces et même à certains genres de Gastéropodes réside dans la disposition intérieure de l'ouverture: si le plus ordinairement cette ouverture est lisse, elle peut aussi parfois être ornée de dents, ou comme chez les Pupas, les Vertigos et les Clausilies, ou avoir tout un régime de plis disposés suivant certaines lois. Dents. — Les dents ne sont ea quelque sorte qu'un déve- ioppement du péristome ou du callum des Gastéropodes. Leur forme peut varier suivant les espèces. Chez l'Helix cobresina Alten, il n'existe qu'une dent unique formée sur le péristome : celte dent est double avec la même disposition chez l’Helix bidens Chemnilz; mais chez l'Aelix depilata les dents sont remplacées par une simple eallosité où surélévalion péristo- méale. Les Helix obvoluta Müller et I. holoserica Studer, n'ont pas à proprement parler des dents dans l'ouverture ; ce sont des expansio 1s péristoméales plus où moins saillantes qui lui donnent cette forme de trèfle si caratéristique.Enfin l’'Helix per- sonula Lamarck affecte une disposition spéciale: le péristome donne naissance à deux dents saillantes, subégales, pointues, tandis que de son côté le callum se relève en forme de dent 390 VARIATIONS MALACOLOGIQUES étroite et mince, mais très saillante. Ces dispositions denti- formes sont en général assez rares chez les Hélices francaises ; mais elles deviennent beaucoup plus fréquentes dans les espèces exotiques. Leurs caractères n’ont pas une fixité abso - lue, puisque nous avons déjà pu citer dans la première partie de ce travail un certain nombre de varialions basées sur leur plus ou moins de saillie. Les Succinées ne sont point exemptes de la disposition tuberculeuse ou dentiforme de l'ouverture. M. le docteur Baudon a signalé (1) une variété rare de Succinea putris dont la callosité épaissie porte un tubercule très saillant ; ces indi- vidus constituent une véritable colonie dans l'Oise, et tous portent ce même caractère à des degrés différents. Parmi les Bulimes, nous voyons les espèces du genre Chondrus caractérisées par la présence de dents aperturales; les Chondrus lridens el Ch. quadridens de nos pays doivent avoir, comme leur rom l'indique, trois ou quatre dents à l’ou- verlure. Ainsi que nous l'avons vu, il n’en est pas toujours exactement ainsi. Parfois, en effet, ces dents s’atrophient, et sont remplacées par de simples protubérances plus ou moins épaisses et saillantes. | Certaines Ferussacies ont également des dents ou tout au moins de petites protubérances formées par un développement du callum; c’est ce que M. de Folin a observe dans une variété de Ferussacia subcylindricu des environs de Bayonne (2). Ces dents sont plus saillantes chez les espèces exotiques. Les Alexia, les Azeca, les Carychium, ont également leur ouverture ornée de protubérances saillantes formant dents, et développées les unes sur le péristome, les autres sur le callum de la coquille ; mais toujours dans les individus (1)Baudon, 1877. Monogr. dés Suce. françaises. (2) De Folin et Bérillon, 1877. Contribution à la faune malacologique de la région extrême lu Sud-Oucst de la France, 2° fase., p. 15, pl. I, f.6: DU BASSIN DU RHONE 991 appartenant aux trop nombreuses espèces formées dans ces divers genres, on observe une certaine irrégularité dans la place, la taille ou la forme de ces différentes sortes de dents. Le genre Balia, par son galbe, forme en quelque sorte un passage entre les Pupas et les Clausilies ; il n°y a ni clausi- lium ni plis columellaires, mais on observe dans un certain nombre d'espèces de ce genre une légère saillie tuberculeuse formant dent, et développée sur lecallum. Tels sont les Balia perversa Linné, B. pyrenuica Bourguignat, B. Rayiana Bourg., de France. La présence de la dent aperturale n’est point un caractère d'une fixtité absolue; on peut rencontrer des Balia perversa qui en sont dénués ou chez lesquels cette saillie est plus où moins atrophiée, et mème complètement absente ; elle est alors remplacée simplement par un épais- sissement blanchâtre de la partie supérieure du eallum. Certains Pupas possèdent également des dents logées dans l'ouverture. Nous citerons ici le Pupa muscorum de Linné dont le type porte das son ouverture une saillie dentiforme émergéc. Parfois cette saillie s’atrophie sans que les autres caractères de l'espèce soient modifiés; on a alors la var. edentula, lrès commune dans toutes nos régions. Parfois, au contraire une nouvelle callosité palatale dentiforme vient s'ajouter et la forme de la coquille restant la même on a, d'après Rossmassler, une espèce nouvelle, le Pupa bigranata. Dans ce mème groupe une nouvelle dent venant à paraitre, une autre espèce est séparée du type, c'est le Pupa triphcata de Studer; enfin sur le callum interne, une double dent peut se produire, l'ouverture sera quadridentée et l’on arrive ainsi au Pupa Loroisiana Bourg. de la Bretagne (1) ; mais nous devons reconnaitre que pour ces deux dernières (1) Bourguign:t, 1866 Aalaz. ter, el /luv. de la Bretagn”, p. 65, pl. H, f. 7-9. Be De VARIATIONS MALACOLOGIQUES espèces les caractères extérieurs de la coquille sont un peu modifiés. Plis. — Les Clausilies, les Pupas, les Vertigos, ainsi que les différents genres qui en ont élé démembrés peuvent avoir dans l'ouverture des plis caractéristiques qui jouent un rôle des plus importants dans la spécification des coquilles. Souvent deux formes voisines ont un galbe général simi- laire, mais d'une ornementalion aperturale différente, et quoique J'on n'ait pu établir des caractères distinctifs pour leurs animaux, on en a cependant fait deux espèces. Et pourtant, comme nous allons le voir, la présence, le nombre et la forme de ces plis n'ont rien d'absolu. Dans les Clausilies il peut y avoir différentes sortes de plis: 1° Le pli pariélal ou lamelle supérieure est situé dans le haut de la coquille près de la gouitière dent il forme un des parois. 2° Le pli lamelluire ou lamelle inférieure est placé obliquement et vient appuyer son bord inférieur près du péristome tandis que le bordsupérieur tend a être émergé; il est tantôt simple, tantôt bifide ou même rameux suivant qu'il se bifurque en un plus ou moins grand nombre de branches. 3° Les plis enterla- mellaires sont élagés entre le péristome et la partie supérieure du plicolumellaire à la gauche du pli pariélal. 4 Le pl sous - columellaire estimmédiatement logé au-dessous du pli colu- mellaire à sa base la plusinférieure, près du péristome. 5° Les plis palalaux, sont situés entre le péristome et la partie infé- rieure du pli columellaire; ils sont toujours un peu émergés 6° Le pli lunellé, pli toujours émergé, est situé au fond de l'ouverture, paraissant parfois à travers la coquille sous la forme d'une ligne blanchâtre. | Toutes les Clausilies sont caractérisées par le nombre ou la disposition de ces plis aperturaux. Mais il est facile de mon- trer que la mème espèce peut présenter des variations dans l'arrangement de ces plis. Le Clausilia mucida Ziegler, 1ype, DU BASSIN DU RHONE . 393 possède tantôt trois, tantôt quatre plis interlamellaires ; on trouve également une var. edentula chez laquelle ces mêmes plis font défaut; il existe aussi une var. edentula admise par M. Bourguignat pour le Clausilia plicala de Draparnaud; il cite encore une var. mucrunæxis du Clausilia Dupuyana caractérisée par la présence d'un petit pli palatal supérieur : les var.catenala et occidentalis du Clausiliu laminata Montagu ont le pli pariétal différent du veritable Lvpe; enfin chez le Clausilia punclalu Michaud, on trouve une var. saorgrensis avec denticulations aperturales plus fortes; etc. Chez les Pupas et les Vertigos, le régime des plis est moins compliqué, niais tout aussi variable; on ne distingue plus que trois régimes de plis ; les plis supérieurs, les plis columel- laires et les p'is palataux. En étudiant le Pupa secale, nous avons vu combien le nombre et la disposition de ces différents plis étaient susceptibles de variations pour une seule et même espèce; pareil exemple est suffisamment probant pour qu'il soit inutile d'insister davantage sur ce sujet. Nous retrouvons encore des plis, ou tout au moins un sys- tème ornementaire subapertural analogue, dans le genre Planorbula créé par Haldeman (1). Ce genre, voisin des Plu- norbes et qui ne parait jusqu'à présent représenté qu'en Auérique eten Égypte, est caractérisé par la présence de six ou sept plis denticulaires très saillants, situés près de l’ou- verlure de la coquille, sur le bord pariétal comme sur le bord palatal. Goullière. — On donne le nom de goultière chez tes Clau- silies à un pelit espace libre de la partie supérieure de l'ou- verlure, situé entre le bord externe de la coquille et le pli pariélal. Le pli pariétal pouvant, dans une mème espèce, va- ricr de longueur et de grosseur, il s'ensuit tout naturellement (4) Haldeman, 1840. Mon. of the Limniades, elc., of Norlh-America, p. 2. VAR. MAL. III. 26 394 VARIATIONS MALACOLOGIQUES que les dimensions de la gouttière doivent éprouver des mo- difications inverses. On retrouve une disposition similaire chez quelques Hélices ; ainsi chez l’elix Rangiana dont l'ou- verture est si mouvementée, la partie supérieure de cette ouverture située au-dessus de la carène correspond à une vé- ritable gouttière; Fextrémité de la carène, au point où elle se rencontre avec le péristome, représente le pli parietal qui doit en limiter un des bords. Callum. — On donne le nom de callum au développement testacé qui se produit chez quelques mollusques gastéro- podes, dans l'ouverture de la coquille, sur le bord columel- laire. C’est en quelque sorte le prolongement du péristome sur ce bord. Toutes les espèces n'ont point de callum, mais la plupart ont, à celle mème place, un léger accroissement d'épaisseur dont il importe de tenir compte. Chez quelques Hélices, ce callum peut être plus ou moins apparent. L'Helix arbustorum Linné, par exemple, n'a qu'un callum très mince à peine visible chez les grands échantil- lons ; mais nous trouvons cet accident accusé d'une façon beaucoup plus sensible dans certaines variétés à test plus épais, plus solide, et de coloration plus foncée ; il disparait, au contraire, dans les variétés alpestres de petite taille. Par - fois, ce callum prend un développement considérable et se manifeste sous forme de dent ou de lamelle dentaire. Tel est le cas, comine nous l'avons fait observer, de l'Helix personala Lamarck. Souvent il vient compléter le péristome, surtout lorsqu'il est subcontinu ; d’autres fois, enfin, il se traduit par une simple décoloration de la coquille, comme par exemple, chez l'Helix aspersa ; dans cette espèce, suivant les colonies et aussi suivant les individus, il est tantôt nul, tantôt simple- ment manifesté par une sorte de voile d’un blanc laiteux qui masque en cet endroit la coloration normale de la coquille. Les Clausilies ontaussi une sorte de cullum, mais qui n'est - DU BASSIN DU RIONE 395 plus silué au bord de la coquille; il apparait à l'intérieur de l'ouverture de certaines espèces sous la forme d’une bande blanchâtre disposée transversalement, visible surtout par transparence et quelquefois extérieurement. C'est ainsi que l’on distinguera le Clausilia funbriata Ziegler de nos régions, du Clausilia laminata Montagu, surtout par la présence dans cette première forme d'un callum palatal presque parallèle au péristome, manifesté à l'extérieur sous la forme d'un large bourrelet jaunàtre non saillant. La présence ou l'absence de ce callum qui constitue un des caractères distinctifs de deux espèces bien voisines peut aussi ne servir qu'à séparer des variétés. M. Bourguignat (1) à établi une var. garbetica du Clausilia pyrenaica Charpentier, quise distingue par l’absen- ce presque absolue de la callosité palatale ; de même la var. rupestris du Clausilia obtusa G. Pfeiffer, est caractérisée par la manière d'être toute spéciale de son callum. Nous le retrouvons également chez quelques Limnées. Le Limnæa marginata Michaud, possède en effet, outre un bour- relel intérieur qui accompagne le péristome, un callum bien marqué qui s'étend sur le bord columellaire; dans cette forme, ce callum est beaucoup plus accusé que dans toutes les autres coquilles du groupe du Limnœæa peregru. Chez cer- taines variétés du Limnæa truncatula, ce eallum parait très développé; nous l’observons surtout dans les variétés dont le péristome est accompagné d’un bourrelet. Dès lors on comprend que si l'épaississement du péristome n’est point un caractère absolu, s'il peut être sujet à variations sui- vant la facon dont il est accentué, le callum qui n'est, en somme, qu'une sorte de prolongement de ce bourrelet sur le bord columellaire devra suivre la mème loi. Il est à remar- quer que le développement du callum se fait en mème (4) Bourguigaat, 13577, list. Claus. de France, èn Ann, 8°. nul Non de, 396 VARIATIONS MALACOLOGIQUES temps que celui du bourrelet péristoméal ; à ce moment l'ani- mal sécrète un surcroit de matière testacée qui vient se fixer à droite et à gauche de la coquille, mais qui se traduit sous une forme différente suivant les points où il se dépose. Bourrelet. — Le bourrelet est un développement testacé, normal, régulier, qui accompagne et souligne l'extérieur du péristome chez certains Gastéropodes. Il n'apparait jamais qu'après le développement complet du mollusque, lorsqu'il est adulte. Tantôt ce bourrelet est simple, continu ou dis- continu ; tantôt, au contraire, il porte une sorte de renfle- ment pouvant donner naissance à des saillies dentiformes. Nous avons déjà parlé des dents aperturales; il nous reste à nous occuper ici du ‘bourrelet simple. Dans les Hélices, plusieurs groupes sont caractérisés par la présence ou par l'absence du bourrelet; dans certains cas, c'est même un caractère précieux pour diagnostiquer quel- ques formes douteuses. Ainsi, dans le groupe de l'/elix his- pidu Linné, nous observons les formes suivantes du bourre- let: Helix sericea Draparnaud, bourrelet intérieur blanc et mince; Helix hispida Linné, bourrelet intérieur roussà- tre bien accentué; Helix plebeia Draparnaud, bourrelet inté- rieur fauve ou blanchâtre, peu accusé; Helix axonana Mabille, demi-bourrelet intérieur, ete. Mais dans une même espèce, nous voyons souvent la taille et la coloration de ce même bourrelet se modifier. Ainsi, chez l'AHelix hspida, il parait moins saillant, moins complet, moins coloré dans les indivi- dus recueillis à une certaine altitude que dans ceux des ré- gions basses des plaines et des vallées; la var. graliosa Stu - der de l'Helix unifusciala, cité dans l'Oise par M. Baudon (1), possède un bourrelet intérieur plus épais que dans le type. Suivant l’âge des individus, il peul ètre plus où moins déve- (4) Baudon, 1862, Nouveau catalogue des mollusques de l'Oise, p. 25. DU BASSIN DU RIONE 397 loppé; il perd done parfois un peu de son importance pour la bonne détermination de certaines formes. Quelques Limnées ontégalement un bourrelet péristoméal ; c'est le cas, par exemple, du Lonnœæa lruncatula Müller ; mais encore dans celte coquille, le bourrelet n'a pas ‘ne fixité absolue; les var. magor, minor, ventricosa, de Moquin - Tandon, par exemple, seraient dénuées du bourrelet inté- rieur; et cependant on rencontre parfois quelques colonies se rattachant aux var. minor et venlricosu qui marquent une tendance à avoir ce caractère plus où moins accentué ; mais alors c’est presque toujours chez des coquilles plus épaisses, plus testacées en quelque sorte, que ne l'est en général le véritable type. Lainelles. — Le Planorbis xitidus Müller présente une par- ticularité digne de remarque: à l'intérieur de la coquille, on observe des lamelles disposées par trois, d'espace en espace: [a première placée intérieurement sur l'avant-dernier tour, les deux autres, sur la paroi opposée du dernier tour, en haut et en bas. Elles sont sinueuseset blanchâtres; la lamelle intérieure parait fortement courbée, saillante vers le milieu, atténuée aux extrémités, tranchante au bord libre. C'est en quelque sorte une réminiscence des chambres cloisonnces des Nautiles. Fleming (1) a démembré du genre Planorbis le genre Segientinu basé sur la présence de ces lamelles internes. Nous n'avons en France que cette seule espèce. D'après M. Bourguignat (2), il existerait en tout quatre espèces de ce genre. On retrouve chez d’autres mollusques une tendance analo - gue. M. Bourguignat a signalé pour la première fois cette très curieuse disposition chez le jeune Pupa wmbilicala (3); nous (1) Fleming, 1828. ist, of Brit. Anim., p. 279. (2) Bourguignat, 1877. Descr. de deux nouv. genres algériens, ele., p. 38. (3) Bourguig:at, 4860. Ma/acologie terrestre du château d’If, p. 27. 98 VARIATIONS MALACOLOGIQUES ne saurions eiter un meilleur exemple &es variations que peuvent présenter certains mollusques avant d'arriver à l'é- tat de complet développement. « Lorsque cette coquille, dit M. Bourguignal, ne possède encore que deux tours de spire, le test est aplati, comprimé, légèrement ombiliqué; la convexité de l’avant-dernier tour est ornée, vers son milieu, de même que l'axe columellaire, d'une lamelle spirale très forte. Lorsqu'elle est arrivée à son cinquième Lour, les caractères se modifient. Le test commence à prendre une forme lurriculée; le dernier tour est subcaréné, lombilie est plus étroit; les deux lamelles spirales situées sur la columeile et sur la convexité médiane de l'avant-dernier tour subsistent toujours; seulement un des caracteres les plus curieux vient se joindre à ceux-là ; ce sont trois petites lamelles placées à égale distance les unes des autres sur la base intérieure du dernier tour. Ces trois lames blanches, transversales, crétacées, très saillantes, simulent parfaitement des séparations identiques à celles que l’on remarque chez le Planorbis nilidus et qui ont motivé la création du genre segmertinu. À partir de ce cinquième tour, les caractères se perdent; les lamelles spirales et les lamelles transversales s'atrophient, se résolvent. Enfin, lorsque le test est parvenu à son entier développement, c’est-à-dire à son septième ou huitième tour, ilne reste plus aucune trace de ces caractères. » OPERCULE. — L'opercule est une sorte de porte ou cloison mobile attachée au pied de l'animal de certains Gastéropodes terrestres ou aquatiques dits operculés, et pouvant à un mo- ment donné elore complèlement son ouverture. Tantôt l'o- percule vient simplement s'appliquer à l'entrée de l'orilice comme chez les Cyclostomes, lantôt, au contraire, il s’enfon- ce plus où moins profondément dans la coquille en prenant une position de plus en plus oblique à mesure qu'il s'éloi- gne du péristome, et qu'ils'engage dans un passage à section L2 DU BASSIN DU RHONE 399 de plus en plus conique : telest le cas d’un certain nombre de petites Paludinelles. La nature de l’opercule est très variable; il peut être sub - Lestacé, corné ou testacé. L’opercule est calcaire chez les Cyclostomes et les Bythinies, corne chez les Pomaties, les Acmées, les Vivipares, les Valvées, etc., enfin, subtestacé chez les Amnicoles, les Palulinelles, les Hydrobies, les Palu- destrines, les Belgrandies, ete. D'après leur structure, Moquin- Tandon (1) les a classés en : {° patelliformes, qui offrent des stries concentriques, comme chez le Bythinia tentaculala, 2° cochléiformes, qui présentent une strie spirale, comme chez le Valvata piscinalis, 3° flabelliformes, qui ont des stries divergentes un peu arquées, partant d'un angle et arrivant au bord le plus grand, comme chez le Veritina fluviatilis. Les deux premiers, indépendamment des stries concentriques ou de la strie spirale qui les caractérisent, présentent quelque - fois des lignes rayonnantes. L'accroisssement de l’opereule s'effectue suivant certaines données loutes spéciales très bien observées par le révérend Moseley (2). À mesure que l'animal avance dans la construc- tion de si coquille, il augmente graduellement son opercule, de manière à pouvoir l'ajuster exactement dans l'intérieur de l'ouverture. Cette augmentation n'a pas lieu en même temps sur toute la périphérie, mais bien souvent sur un seul bord ; cest en quelque sorte un accroissement spiraliforme, qui tient de la nature même de la coquille, et dont on peut lire les progrès sur la volute qui reste tracée à la paroi intérieure de cet opercule. Laforme de l’opercule est très variable; il s'adapte à celle de l'ouverture des mollusques el en représente assez exacte- ment la coupe. Ghez les Nérites, celte cloison porte en outre (1) Moquin-Tandon, 1856. Æist. Moll., L. I, p. 289. (2) Moseley, 1838. Trans. phil. roy. Suc. London, 2° part., p. 351. 400 VARIATIONS MALACOLOGIQUES une petite apophyse latérale qui s'agrafe ave: la columelle. Mais un des caractères les plus saillants des opercules ré- side dans la position du nucléus au point dont partent les stries, quelle que soit leur direction. Chez les Pomaties et les Valvées, ce nucléus est central, tandis qu'il est excentre chez les Cyclostomes, les Vivipares, les Bythinies, les Amni- coles, les Paludinelles, les Hydrobies, etc. Dans une même espèce donnée, les caractères fournis par le nucléus ne sont point d’une fixité absolue. Nous les voyons varier, mais sans qu'ils constituent pour cela des variétés nettement définies. Ce ne sont à proprement parler que des variations accidentelles ou individuelles. Nous pou- vons ainsi, chez divers échantillons d’une même colonie ou de colonies différentes, observer que le nucléus n’est point absolument à la mème place, que l'épaisseur de l'opercule va- rie, que les stries de sa surface extérieure sont plus ou moins marquées, ete., mais toujours ces variations présentent un caractère d’individualité plutôt qu'un caractère propre à un certain ensemble d'individus. Nous croyons cependant avoir observé que chez deux co - lonies d'une même espèce vivant dans des eaux plus ou moins froides, plus ou moins vives, l’opercule Île plus épais oule plus strié se rencontrait de préférence dans la colonie habitant les eaux les plus froides et les plus courantes. Mais nous n'avons pas vu de différence bien marquée pour des opercules de coquilles fixées dans des eaux courant sur un dépôt calcaire ou granitique, ou des Cyclostomes campant sur un sol de nature chimiquement différente, comme cela a lieu pour les épijhhragmes. Épiphragme. — On donne le nom d'épiphragine à la eloi- son sécrétée parles mollusques céphalés et destinée à clore, à un moment donné, leur ouverture. A l'inverse de l'opercule, l’épiphragme n’adhère pas au corps de l'animal; il est com- DU BASSIN DU RHONE 401 plètement indépendant. Sa nature comme sa composilion chimique sont des plus variables ; il peut être membraneux, papyracé, crélacé ou calcaire. Quelle que soit sa manière d'être, il renferme toujours une plus grande proportion de matière animale que le test du mollusque qui l'a séerété. Il est membraneux chez les Vitrines et chez quelques Hyali- nies, comme les Æ. nitidu, H. lucidu, ete. : il est papyracé chez les Suecinées ; ilest crétacé chezles Leucochrou, et chez un certain nombre d'Hélices, /1. lenticulu, H. pomatia, H. aperla, ete. Enfinilest parfois incomplet et réduit àde simples linéoles, comme chez les Hyalinia olivetorum, H. ecllariu, IL. cristallina, ete. Sa position dans l'ouverture est très varia- ble : tantôt il affleure le péristome et présente une section bombée, comme chez les Helix pomatia, H. aperta, ete. ; lanlôt, au contraire, il s'enfonce plus ou moins profondé- ment dans l'intérieur de la coquille, comme chez le Leuco- chroa candidissimu. | A la fin de la saison estivale, chaque moilusque épiphragmé construit sa cloison aperlurale avant d'hiverner. Mais en dehors de cet épiphragme normal les mêmes mollusques peuvent avoir un autre épiphragme plus mince qui n’est en quelque sorte que journalier; ce n'est à proprement parler qu'une couche de mucus solidifié. Souvent aussi, derrière l'épiphragme hivernal, on rencontre un ou plusieurs autres Cpiphragmes plus minces laissant entre eux des cloisons d'air qui protègent l'animal contre les intempéries. On en a compté jusqu à six chez l'Helix aspersa et sept chez l'Helix serpentin«. 3 Quelques céphalés aquatiques ont également la faculté de sécréter un épiphragme. Tel est le cas des Planorbis rotun- datus, Pl. vortex, PL. complanatus. Pareille disposition leur permet de passer un certain temps hors de l'eau, et d'attendre ainsi enfoncés dans la vase desseéchée, Le retour de la saison 402 VARIATIONS MALACOLOGIQUES pluviale (1). Il se passe quelque chose d’analogue chez les Limnées : lorsqu'elles s'apercoivent que l’eau dans laquelle elles vivent va leur manquer, et qu'elles ne peuvent s'enterrer dans la vase, elles cherchent à se fixer contre des corps épousant plus ou moins bien la forme de leur ouverture, puis elles séerètent alors un peu de mucus qui, en séchant, rend les bords de la coquille plus adhérents à ce corps, et empêche ainsi toute déperdition d'humidité. Plusieurs causes peuvent, dans une même espèce, faire varier la manière d’être de l’épiphragme. Lorsque le mollus- que rencontre un corps convenablement conformé contre le- quel il puisse faire adhérer son ouverture, il sécrète d'abord une mince cloison qui sert à le fixer contre ce corps ; si les temps sont peu rigoureux il se contentera de cette fermeture ainsi improvisée; mais s'il survient au contraire un froid hiver, il battra en relraite dans l'intérieur de sa coquille en bàâtissant une ou plusieurs cloisons solides avee chambre d'air. De même que nous avons vu la nature du test changer suivant la nourriture de l'animal, de méme aussi la nature de l’épiphragme changera dans une même espèce donnée ; l'épiphragme hivernal suit en proportion d'épaisseur la même loi que le test; les {elix pomalia à coquille mince ont égale- ment répiphragme mince; celles, au contraire, qui ont le test épais ont leur épiphragme plus solide. Clausilium. — La pièce operculaire des Clausilies affecte une forme et une disposition toute spéciale qui prend Ie nom de clausilium. C'est une lame spatuliforme mince, nacrée, brillante, infléchi en forme d'S, ct logée dans le dernier tour de la coquille. Cette curieuse pièce est assez connue par les nombreux mémoires auxquels elle à donné lieu pour que nous n’ayons (A) P. Fischer, 1853. Journal de conchyliologie, p. 397. DU BASSIN DU RHONE A03 rien à ajouter à d'aussi savantes études. Nous n'avons, du reste, observé aucune corrélation bien directe entre la ma- nière d'être de la coquille etcelle de son clausilium. Bornons - nous à rappeler que M. Bourguignal à décrit sous le nom de Clausilia Mongermonti (1) une coquille qui ressemble à s’y méprendre, pour la taille, le coloris et l'apparence, à celle du Pupa cinerea, mais qui diffère, par la présence du elausi- lium caractéristique, du genre Clausilia. I existe en Transy- lvanie toute une famille dont les coquilles ont l'apparence extérieure des Clausilies, mais qui sont cependant privées du clausilium ; ce sont les Tumesa. COLORATION LOCALE. — Sous celte désignation, nous comprenons tous les accidents normaux de la coloration. Lorsque nous nous sommes occupé des variations générales, nous avons vu que la coloration de la coquille pouvait, sui - vant certaines données, se modifier. Mais en dehors de cette première observation, il est un grand nombre de Gastéropodes qui sont ornés de bandes, de taches, de flammes, lesquelles constituent ce que nous appelons les accidents normaux de la coloration locale. Ce sont ces différents modes locaux qu'il nous resle à passer en revue. En outre de ces manifestations colorées de la partie exté - rieure des coquilles, il faut tenir compte des caractères fournis par la coloration de la partie interne de l'ouverture. Celle-ci peut varier notablement dans la même espèce. Telle coquille par exemple a son péristome, ou miëux, la portion avoisinante etintérieure du péristome, colorée d'une certaine facon alors que telle autre de la même espèce porte des cou- leurs différentes. Nous avons vu que l'AHelix frulicum nous avait présenté une variété dont l'intérieur de l'ouverture était rose. L'Helix pisana du Midi a cette même coloration rosée (1) Bourguignat, 4877, Hist, Claus, de France, in Ann, se, nat., p. 5. 404 VARIATIONS MALACOLOGIQUES dans l'ouverture, mais àamesure que l'on s'écarte de la région méridionale qui est son véritable habitat normal, cette coloration diminue au point de s'atténuer presque totale- ment. L'Alelix carthusiana à donné plusieurs variations de ce genre; tels sont les cas de la var. rufilabris dont Jeffreys a fait son Zelir rufilabris, et dela var. «lbolabiula à péristome blane. Quelques Limnées, notammentles Linnæa palustris et L. stagnalis, ont également l'intérieur de l'ouverture coloré en rose ou lilas. M. Baudon a cité une var. roseolabiala de ce dernier type, dans l'Oise (1). D'autre part, nous avons vu également en parlant du pé- ristome que, dans la même espèce, il pouvait y avoir plu - sieurs manières d'être non seulement comme forme, mais encore comme coloration. Tel est le cas par exemple des Helix nemoralis et H. hortensis où nons trouvons ce péristome tantôt noir, tantôt blanc dans la même sous-variété; il peut même, dans certains cas, être affecté de bichromisme. Enfin un autre caractère de variabilité de la coloration aperturale réside dans la tache ombilicale. Cette tache, qui parait êlre un des caractères de l’Helix nemoralis, disparait complètement dans cerlaines variétés ou sous -variétés. Bandes. — Les bandes ornementales des mollusques gas- Léropodes peuvent être continues, discontinues ou réduites à de simples points, flammulées, soudées, opaques ou trans- parentes. Ces différentes manières d’être peuvent s observer chez la même espèce, ct parfois chez la même variété; elles ne constituent plus alors que de simples sous-variétés; tel est le cas des Æelix nemoralis, I. horlensis, H. sylvatica, etc. Les bandes continues sont les plus communes; leur nom- bre peut varier; chez l'Helix nemoralis, certaines variétés n’en ont qu'une, tandis que d'autres en ont cinq; accidentel- (1) M. de Mortiilet prétend que les individus de Corse et de Sardaigne ont l'ouverture à peine colorée, Etude dr l'espèce, p.48 DU BASSIN DU RIIONE 405 lement ou très rarement on peul en compter six etmème sept. Ces bandes sont, en général, colorées et plus foncées que l'en - semble de la coquille ; elles tranchent sur un fond plus pâle. Parfois ces bandes se soudent entre elles suivant un nombre considérable de combinaisons ; mais il est à remarquer que les sous-variétés résultant de la soudure des bandes sont beaucoup moins considérables que le chiffre mathématique de combinaisons qui pourraient résulterdu nombre des sou- dures passibles de ces cinq bandes. Il en est quelques-unes qui sont beaucoup plus communes que d’autres. Et en effet, un tel caractère est héréditaire dans les colonies. D'une facon générale dans un pays donné, on trouve soit des Hélices à bandes simples, soit des Hélices monochromes, soit des Hélices à bandes ponctuées flammulées, soit enfin des Hé- lices à bandes soudées ; dans la colonie, il existera bien des exceptions, mais il est incontestable que le plus grand en- semble se rapportera à l’un de ces types. Nous l'avons ob- servé maintes fois pour les trois espèces si communes que nous avons citées plus haut. Certaines variétés sont infiniment plus rares que d'autres ; telles sont par exemple toutes celles qui se rapprochent des formules 120/00, 100/00 et 020/00; c'est qu'effectivement les bandes 3, 4 et 5 ont plus de lendance à ètre marquées que les bandes 1 et 2. Charles des Moulins à observé (1) chez l'Helix nemoralis que la rareté dans les variétés de cette espèce augmente en raison directe du nombre des bandes quand il est pair, et en raison inverse de ce mème nombre quandil est impair; ainsi la variété à deux bandes est la plus commune de celles à nombre pair; la variété à cinq bandes est au contraire la plus répandue de celles à nombre impair. Pareil fait aurait été également observé en Suisse : (4) Des Moulins, 1845. Catal. des moliusques de la Gironde, în Actes Soc. hist nat. Bordeaux, vol, I, p. 46. 406 VARIATIONS MALACOLOGIQUES il nous semble vrai lorsqu'il s'agit de l'ensemble des Âelix nemoralis d'une assez grande étendue de pays; mais il n’est pas applicable lorsqu'il s'agit de l'étude d'un pelit nombre de colonies. Si pour certaines espèces on veut arriver à établir netle- ment un nombre plus ou moins considérable de sous- variétés basées sur la disposition ornementale des bandes, il en est d'autres pour lesquelles celte disposition est tellement varia - ble qu'une telle classification n’est plus possible. Tel est le cas de l'Helix pisana. On doit alors se borner à grouper les formes ornementales les plus voisines, sans prétendre essayer de les distinguer loutes, comme cela est possible pour l'Aelix nemoralis, etc. Dans cerlains cas, el toujours dans des colonies, il arrive parfois que les bandes sont de couleur plus pâle que le fond même de la coquille; elles peuvent ainsi devenir trans- parentes alurs que Île reste du test est opaque. Souvent en méme lemps, si cela a lieu pour des Helix nemoralis, le péris- tome est blanc ; l'animal lui-mème est plus pàle. On le dirait alteint d'une affection chlorotique. Pareil phénomène semble plus fréquent pour cette espèce dans les colonies méridiona- les que dans celles du Nord de la France. Les bandes ponciuées ou fiammulées sont produites par une série d'interruplions plus ou moins nombreuses dans la continuité de la bande, où par un élargissement irrégulier de cette mème bande ; la coloration des bords de la bande, sur un côté au moins, tend à se fondre avec celle du reste du test. C'est ce que nous observons si fréquemment chez l'Helix Sylvalica ; comme en mème Lemps plusieurs bandes peuvent se souder, on peul avoir ainsi une large bande continue en dessous et flammulée en dessus. De mème qu'ilne faut attacher qu'une importance relative aux modifications générales de la coloration, de même aussi DU BASSIN DU RIONE 107 ne doit-on baser aucun caractère spécifique sur les variations de colorations locales. ILexiste mème à ce point de vue une certaine confusion à propos des variélés el sous variétés. Nous avons vu que pour les Æelix horlensis, I. nemorulis el H. sylvatica, les variations dues à la coloralion ne consli- tuaient que des sous-variétés, puisqu'elles pouvaient s'appli- quer à toutes les variétés maycr, minor, ele. Mais en ce cas on adimettra à titre de variétés toutes les coquilles qui peu- vent constituer les var. fasciita, coalita, inlerrupla, lurida, punclella, unicolor,ete., comme Fa fait Moquin-Fandon. Toute coquille de grande taille, et dont les bandes seront soudées devra donc appartenir à la fois aux var. muüjor et coulita. Pareille difficulté n'a pas lieu pour les autres espèces dont les manières d’être sont moins variées ; mais il est évi- dent que si l'on veultenir un compte bien exact de toutes les manières d’être d'une espèce donnée, il vaudra mieux en- visager comme variétés les manières d'être générales, lais- sant aux sous-variétés les manières d’être locales. Quant à la représentation du type, elle est bien diflicile à saisir. Le type de l'Aelix fruticum parait ètre dénué de ban des; la présence des bandes, des taches ou des points, semble constituer autant de variétés; est ce parce que la forme sans bande est plus commune que les autres? Non, car il est des colonies où le type fascié, par exemple, parait dominer. Mais alors quel sera le type de l'Helix nemoralis ? Sera-ce la co- quille à cinq bandes ou celle qui est monochrome ? Moquin- Tandon dans ses diagnoses à pris pour type de l'Helix ne- moralis la coquille à cinq bandes distinctes, et pourtant dans bien des colonies elle est beaucoup plus rare que toutes les autres dispositions ornementales. Nous pourrions 1iei multi- plier les exemples en citant les Helix vermiculata, EE. lactea, H. splendida, Bulimus delrilus, ete., ele. I n'y a donc à cet égard aucune règle absolument fixe, puisque l’on ne saurait 408 VARIATIONS MALACOLOGIQUES se baser sur le nombre des individus affectant telle ou telle disposition ornementale. Le type au point de vue de la eolo- ration ou de l’'ornementation, devient donc une chose pure- ment conventionnelle, puisqu'il peut varier suivant les pays et suivant les colonies. VARIATIONS LOCALES DES LAMELLIBRANCHES. — L'organisation Lestacée des Lamellibranches présente tout un ordre de varia- üons portant, comme pour les acéphalés, sur les différentes parties de la coquille. Si les deux valves sont symétriques, chacun d'elles à des caractères particuliers résultant de leur mode d'attache réciproque ; nous aurons donc à exami- ner successivement et séparément chacune des parties diffé - rentes de la coquille. Contour DES VALVEs. — Les deux valves des coquilles des Lamellibranches ont leurs contours ou bords délimités et dénommés suivant leur position relative. Adoptant pour posi- tion normale de la coquille celle dans laquelle les erochets ou points d'altache des valves sont en haut, et où le côté le plus court est à gauche, nous distinguerons les quatre bords de la coquille par les noms de bord dorsal ou su- périeur, bord ventral ou inférieur, bord céphalique ou anté- rieur et bord anal ou bord postérieur. En général le côté antérieur varie peu; il est toujours arrondi, mais le côte postérieur est, au contraire, très variable ; il estlantôt court, lantôt allongé ou rostré. En associant la position relative des différents côtés d'une coquille, on a des formestrès différentes que les malacologistes s'efforcent de définir par une dési- gnalion plus ou moins heureuse et qui peint la manière d'être ou mieux la section la plus grande d'une valve. Telles sont les expressions de coquille arrondie, oblongue, allongée, sublronquée, subtétragone, réniforme, rostrée, etc., em- DU BASSIN DU RHONE 409 ployées pour définir des Unios ou des Anodontes. C’est surtout chez les Anodontes que les caractères distinctifs des différents bords sont mis en cause pour la séparation des espèces. Quelques exemples nous feront mieux comprendre. Les bords supérieurs ou inférieurs peuvent être à peu près parallèles chez lAnodonta cygnœa, Linné; le bord inférieur devient plus arrondi chez l'Anodonta arenaria Schrôter. Le bord supérieur est arqué chez les Anodonta coarciala, Potiez et Michaud, À. rostrala Dupuy, À. scal- diana, Dupuy ; c’est au contraire le bord inférieur qui est arqué chez les 4. piscinalis, Nilsson et A. Grateloupeana Gassies. Les À. Rossmussleriana et A. subponderosu Dupuy, ont leur bord supérieur non anguleux à sa jonction avec le bord antérieur ; de même chez 4. Dupuyi Ray et Drouët, le bord inférieur est brusquement relevé à son extrémité posté- rieure. Suivant que les bords inférieurs et supérieurs sont plus ou moins allongés, on aura des coquilles plus ou moins rostrées. Les Anodonta Rayi, À. courclata, A. scaldiana, A. Millet, ont le rostre court en arrière, tandis que les À. tntermedia et A.rostrala l'ont allongé du même côté. Le bord inférieur peut être droit ou sinueux; nous le voyons en effet s’inflé- chir en dedans chez les Margarilana margaritifera, Unio sinualus, etc. En outre, si nous cherchons à établir une sorte de symétrie dans les bivalves par rapport à une ligne médiane idéale, nous aurons des formes équilatérales, sub - équilatérales ou inéquilatérales, suivant que les moitics de chaque valve seront semblables ou dissemblables. Les Pisidies et les Sphæries bien plus que les Anodontes et sur- tout que les Unios ont une tendance à avoir une symétrie plus complète. La présence du sinus chez certains Lamellibranches n'est pas un caractère absolu. Il existe parfois chez des indi- VAR. MAL: °T if. 21 410 VARIATIONS MALACOLOGIQUES vidus dont le type en est privé. M. le docteur Baudon (1) a récolté dans l’ancien étang de Fillerval (Oise), desséché aujourd'hui, une grande quantité de Sphærium corneum, ayant un sillon médian et une sinuosité du bord marginal, à côté d’autres individus parfaitement typiques. Il cite égale - ment à Égypte, près de Mouy (Oise), dans le ruisseau de l'allée des Soupirs, des Unio balavus et U. Requieni présen - tant également la sinuosité palléale. Comme nous Île dirons plus loin, cette sinuosité peut être le résultat d’une maladie ayant pour siège le manteau de l’animal et se manifestant par un ralentissement local dans la sécrétion des bords de la coquille. Ces caractères n'ont point une fixité absolue, et pour revenir à notre premier exemple, nous observons qu'il n'est pas toujours facile de séparer les Anodonla cygnæa et A, arenaria. Souvent dans une même colonie, les caractères basés sur la direction, la forme, la manière d'être, les cou- leurs des coquilles varient. À plus forte raison retrouverons- nous les mêmes difficultés, lorsqu'ils’agira de colonies élevées dans des milieux différents. Pour les Unios, les malacologis- tes ne se fient pas absolument aux caractères fournis par la forme des valves, ils ont recours à la diagnose donnée par les crochets; mais pour les Anodontes, ce précieux caractère fait défaut, et l’on en est réduit en grande partie à séparer les différentes espèces de ce genre pour les seules données que peuvent présenter la position relative des différents bords; delà peut-être cette grande multiplicité d'espèces dans ce genre Anodonte, multiplicité qui serait plus grande encore pour les Unios et les Pisidies, si l’on ne devait les classer que d’après les mêmes caractères. Sommet. — Le sommet est la partie plus ou moins mé- diane du bord supérieur, où viennent converger les stries ou (4) Baudon, 1853. In Journ. de Conch.t. IV, p 279. DU BASSIN DU RIHONE 411 les lignes d’accroissement. Il peut être plus où moins arqué suivant le bombement des valves ; chez quelques Pisidies e Sphæries, il peut être caliculé ou appendieulé ; de même chez les Anodontes et surtout chez les Unios, il peut être dénué de son épiderme, et paraitre rongé ou excorié. Dans le genre Dreissena, il s'allonge en pointe et prend une disposition toute particulière. Le faciès du sommet peut donner quelques indications assez précieuses, d’après sa manière d’être chez quelques Anodontes et plus particulièrement chez les Unios. Suivant les espèces, il est lisse ou rugueux; ces rugosilés peuvent être plus où moins saillantes et affecter un certain caractère de régularité sous forme de lignes ondulées où même angu- leuses ; quelquefois aussi, ces rides se présentent sous forme de nœuds ou de tubereules plus où moins saillants. Les Unio tumidus et ÜU. sinualus ont ordinairement leurs sommets lisses; cependant chez de vieux échantillons, ces mêmes sommets peuvent paraitre excoriés, mais ils ne porteront pas de rugosilés. Les Unio alter Nilsson et ÜU. crassus Retzius auront presque toujours leurs sommets dénudés ou décorti- qués, de mème que Les Unio rhomboideus Schrüter, et U. Ho- quiniunus Dupuy, auront ces mêmes sommets ridés ou mème tubereulés. La décortication s'étend parfois sur une plus grande partie de la coquille et produit alors un véritable état patho- logique. Nous en reparlons avec plus de détails dans le ch a _pitre de la tératologie malacologique. Chez les Pisidies et les Sphæries, la nature caliculée ou appendiculée n'est pas un caractère spécifique absolu ; il n’est bon tout au plus qu’à distinguer certaines variétés d'une même espèce donnée, Ainsi, M. le docteur Baudon (1) fait rentrer dans une variété du Pisidium caserlanuin Poli, le Pisidium caliculum de M. l'abb (1) Baudon, 1862. Nouv. catal, moll. Oise, p. 43, 412 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Dupuy (1852), qui a sessommets fortement caliculés, à côté de la var. planulatu dont les sommets sont à peine saillants ; de mème, il cite une var. inappendiculata du Pisidium Hens- lowanum. Et cependant c’est en se basant sur la forme de ces mêmes sommets que M. l'abbé Dupuy a établi la elassifi - cation des Snhæries et des Pisidies. On donne le nom de corcelel à l’espace situé en avant des deux sommets et celui de lunule à celui qui est situé en arrière. Les crochets peuvent être placés diversement par rapport à l'axe de symétrie de la coquille, de là différentes manières d’être du corcelet ou de la lunule. On comprend en effet que si dans une même espèce donnée la position du crochet, varie, les dimensions réciproques de la lunule et du corcelet varieront inversement. CHARNIÈRE. — La charnière des Lamellibranches co mprend un certain nombre d'organes au moyen desquels les deux valves peuvent être maintenues ouvertes ou fermées tout en restant solidaires. Ce mécanisme se produit au moyen de dents et de ligaments disposés de facon différente suivant les genres et les espèces. Le ligament est composé de trois cou- ches superposées; la première ou épiderme est mince, cornée, ransparente, presque exclusivement composée de matière animale ; la seconde ou cortex est plus épaisse, plus solide, plus résistante; en séchant elle devient dure et cassante, tout en conservant son aspect corne ; la troisième, enfin, ou faisceaux nacrés, donne du corps et de l'élasticité à tout l’ensemble ; ce sont des fibres résistantes, un peu élastiques d'un blanc laiteux. Le ligament peut être interne ou externe. Il est externe chez les Pisidium Henslowanum Sheppart, Sphærium rivicolu Leach; il est interne chez les Pisidium ca - sertanum Poli, Sphærium solidum Normand, ete. Cette position du ligament peut donc avoir une certaine influence dans les DU BASSIN DU RHONE 413 classifications, et nous voyons que M. Bourguignat s’en est servi pour grouper les Sphæries françaises se rattachant aux Sphæriastrum (1). Les dents sont de formes très variables ; tantôt ce sont des saillies ou protubérances arrondies ou tubereulées, tar:tôt ce sont de simples lames étroites plus où moins allongées. Celles qui sont placées près des sommets se nomment dents cardinales ; ce sont les plus courtes et les plus saillantes ; les autres de forme plus allongée prennent le nom de dents laté- rales ou dents longitudinales. Les dents d’une valve s'emboi- tent dans une cavité de forme similaire creusée dans l’autre valve. Les dents cardinales sont souvent de formes très variables ; elles font défaut chez les Anodontes; chez les Unios, elles sont tantôt épaisses, tantôt comprimées, coniques ou plates, presque toujours crénelées; la dent postérieure de la valve droite est développée en lame saillante et allongée, s’emboi- tant dans la valve gauche entre deux lamelles plus étroites et plus allongées. Chez les Margaritana, cette mème dent postérieure est réduite à un simple bourrelet. Les Sphæries et les Pisidies ont leurs dents cardinales plus ou moinssaillantes, affectant parfois la disposition d'un V renversé. Les dents latérales, toujours beaucoup plus dévoloppées, ont des dispositions différentes suivant les genres ; chez les Unios, elles sont situées derrière les dents cardinales, tandis que chez les Sphæries et les Pisidies il en existe en avant el en arrière. Dans ce cas, comme l’a fait observer M. Bourgui- gnat, chacun d'elles se dilate suivant une saillie plus ou moins dentiforme. C'est en se basant sur les caractères fournis par les dents que cerlains auteurs ont pu arriver à classer les Ünios et les (1) Bourguignat, 1854. HMonogr. des esp. franç. du genre Sphæriwm, p 10. 4124 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Pisidies. Moquin-Tandon à divisé ses Unios en coquilles à lamelles à peine comprimées, épaisses, et coquilles à lamelles très comprimées, minces. De même M. le docteur Baudon, pour grouper ses Pisidies, a dû réunir les caractères fournis à la fois par les dents cardinales et par les dents latérales. Nous n’entrerons pas iei dans le détail de l’agencement des dents, relatif non seulement à chaque genre, mais encore à chaque espèce; pareille donnée, malgré son intérêt, nous entrainerait trop loin. Nous nous bornerons à faire remar- quer que ces caractères n’ont pas une fixité absolue, et qu'ils sont insuffisants par eux-mêmes, puisque pour les Unios comme pour les Pisidies il faut encore y joindre les données fournies par le galbe de la coquille, sa coloration, etc., et que malgré cela, l’aceord est loin de subsister dans les déter- minations spécifiques de certaines espèces. D'une manière générale, lorsque l’on étudie la forme et les caractères particuliers des dents chez certains Unionidés, on est amené à constater que les individus d'une même famille ont leurs dents plus ou moins prononcées suivant l'habitat. C'est ainsi que M. Bourguignat (1), à propos de son nouveau genre Pseudanodonta, reconnait que « à mesure que l'on suit la filiation des espèces du centre de l'Asie jusqu’à nos pays, l’on voit la dent cardinale d’abord forte et tuberenleuse dimi- nuer peu à peu, s'allonger, puis devenir presque à rien chez les formes les plus occidentales ». IMPRESSIONS MuscuLAiRes. — Le point d'attache des muscles addueteurs est marqué dans l'intérieur des valves par une cavité plus ou moins profonde que l'on désigne sous le nom d'émpression musculaire. Suivant leur position relative, on distingue les impressions musculaires antérieures et posté- rieures. L'âge souvent les rend plus profondes ou mieux 1 Bourguiznat 1877. Description de deux nouveaux genres algériens, ete., p. 55. DU BASSIN DU RHONE 415 marquées ; mais en même temps leur manière d’être dépend bien certainement du plus ou moins de vitalité du mollusque. Sous les noms de fosses et fosselles quelques auteurs dési- onent les impressions laissées par les muscles rétracteurs abdominaux. Enfin, l'impression linéaire tracée par le bord du manteau se nomme impression palléale. Chez les Lamellibranches d’eau douce, ces impressions ont une importance beaucoup moins considérable que chez les mollusques marins ; leurs caractères sont moins nets, moins précis, et en général les malacologistes leur attachent une importance moins grande qu'à ceux fournis par les caractères extérieurs de la coquille ou par la charnière. Nacre. — On donne ce nom à la matière testacée qui tapisse l'intérieur des valves des lamellibranches ; sa com - position chimique est variable ; en général elle renferme une proportion de matière organique plus grande que celle du test des mollusques gastéropodes, mais aussi plus faible que celle de leur opercule. Son épaisseur est très variable : chez quelques espèces, une fois arrivées à l’état adulte, elle ne s'accroit pas, le développement et l'accroisse nent se font sui- vant une sorte de rayonnement en surface ; chez d’autres au contraire, il y aen même temps épaississement de la coquille. Ainsi par exemple l'Axsodonta arenaria quand il est adulte s’accroit sans que son épaisseur change sensiblement, tandis que l’Anodonta ventricosa GC, Pfeilfer, en vieillissant, peut devenir de plus en plus épais. En outre, l'épaisseur de la nacre n'est point la même dans toute la coquille. Indépendamment des érosions plus ou moins profondes du test et qui peuventen diminuer l'épaisseur d'une façon en quelque sorte mécanique, on remarque, comme l’a fait très judicieusement observer M. H. Drouët (1), que la (4) I. Drouët, 1552, Etude sur les Anodontes de l'Aube, Rev. et Mag. de zool..,n° 7, p. 2. 416 VARIATIONS MALACOLOGIQUES matière nacrée est toujours plus épaisse à la partie de la co- quille qui donne issue au pied de laminal. « Cette cireons - tance, dit cet auteur, s'explique aisément, si l'on considère que cette région du test est appelée à protéger des organes fondamentaux et souvent délicats: l’orifice buccal, les appendices labiaux, l'ovaire, l'oviducte, etc. ». Son épais- seur varie chez une même espèce non seulement avec l’âge, mais encore avec la nature des milieux. Il en estde même de sa coloration. M. Gassies nous montre, par exemple, que la nacre de l’'Unio Requieni Michaud de la Garonne à Agen est d’une belle couleur saumon doré; prise dans le Rhône cette mème espèce n'a plus qu'un ton d'un blanc laiteuxirisé. L'Unio pia- nensisFarines du ruisseau de Pia dans les Pyrénées-Orientales a sa nacre Couleur chair, tandis que l'Unio lilloralis, qui en diffère si peu, a l’intérieur de ses valves d'un blanc nacré. Le genre Margarilana est caractérisé par l'abondance de sa matière nacrée se traduisant parfois sous forme de perles libres ou adhérentes; mais toutes les rivières de France sont loin de donner des coquilles perlières de même valeur. Autrefois les eaux de la Valogne dans les Vosges avaient à ce point de vue une réputation toute particulière ; Puton nous apprend combien ces perles étaient recherchées jadis ; elles ne se trouvent pas, du reste, dans les coquilles les plus gros- ses niles plus régulières, mais bien plutôt chez celles qui sont mal venues el raboteuses. Si ces perles, ou tout au moins le développement de la matière nacrée abonde dans les rivières des Vosges, il devient beaucoup moindre dans les coquilles des cours d'eau du plateau central. Du reste, le Marguritana margaritifera n'a pas le monopole exclusif de la production perlière parmi nos mollusques fluviatiles de France. On peut trouver également des perles chez plusieurs Unios; tels sont par exemple les Unio sinualus, U. littoralis, U. pictorum, U. tumidus, etc. DU BASSIN DU RHONE 417 SrRies. — Si quelques Lamellibranches ont la surface extérieure de leur test complètement lisse comme les Unios ou les Anodontes, sauf pourtant parfois la partie avoisinante des sommets, il en est d’autres comme les Sphæries et les Pisidies’ qui sont ornés de stries ou de côtes plus où moins accentuées. Ces côtes, lorsqu'elles sont un peu fortes, comme dans le Sphærium rivicola ou le Pisidium amnicum, ne sont pas le seul résultat d'un plissement épidermique ; nous les re- retrouvons encore sur le test lui-même après sa décortication. Dans d'autres espèces, les stries sont beaucoup plus fines, moins régulières et se confondent avec les stries d'accroisse - ment. Elles ne constituent pas un caractère spécifique par- fait ; plusieurs variétés notamment chezles Pisidies sont basées sur l'existence, l’absence ou la manière d'être de ces stries. C’est ainsi par exemple que M. le docteur Baudon admet (1) les var. sériata du Pisidium pusillum, var. alligata du P. Gas- siesianum, var. cinerea du P. caserlanum, var. striolatum du P. amnicum, ete. qui ont des stries plus accentuées que le type, tandis que la var. nilidula du P. amnicum a ces mê- mes stries plus obsolètes. COLORATION DERMALE. — Les variations que nous avons citées à propos de la coloration des Gastéropodes s’observent également chez les Lamellibranches. I n'est pas rare; en effet, de voir dans une mème colonie d’Anodontes ou d'Unios, la coloration des coquilles se modifier individuellement; tel est le cas, par exemple, de l'Unio pictorum. Mais, il est un autre mode d'ornementation colorée qui est encore plus particulièrement variable, Un certain nombre de Lamellibran- ches sont ornés de flammes ou de rayons; dans une même espèce, et dans) la même colonie, ces flammes peuvent se (1) Baudon, 1857, Essai mon. Pisidies, p. 12 418 VARIATIONS MALACOLOGIQUES manifester sous divers aspects. C'est ainsi que nous trouvons dans les eaux de la Saône avec le type de l’Unio pictorum, les var. radiatus, coquilles jaunâtres avec des rayons verts par- tant des sommets, mêlées à la var. flavescens, dont le fond est de même couleur, mais sans rayons. Porcs. — Il existerait sur le test de certaines Pisidies de véritables poils, qu'il ne faut pas confondre avec le dévelop- pement de quelques végétaux adhérents à la surface des val- ves, Normand les a signalés sur son Pisidium incertum, et le docteur Baudon a confirmé leur existence. « Ils sont, dit-il, très courts, un peu raides et distancés sans grande régu - larité ». Telles sont, en résumé, les principales variations que la coquille des mollusques est susceptible de subir dans ses différents éléments ; nous n'avons peut-être pas insisté au- tant que cela eùt été nécessaire sur toutes Îles innombrables modifications que chacune de ces parties peut subir; mais dans la première partie de ce travail, nous croyons avoir suffisamment indiqué à propos de chaque espèce les varia - tions générales, partielles ou locales qu’elle peut subir. [nous reste maintenant à examiner quelles peuvent être les causes qui engendrent ces modifieations. XI INFLUENCES DES MILIEUX SUR LES VARIATIONS Différentes manières d'être des influences. — JInfluences physiques. — Choix de l'habitat. — Orographie, — Altitude, —- Vents. — Humidité, — Phénomènes météorologiques. — Tempé- rature. — Coloration. — Fossi'isalion. — Znfluences chimiques. — Influence du sol. — Sols calcaires et sols siliceux. — Se's de fer, Chlorure de sodium, Sels minéraux divers. — Minéra - lsation. — Zaifluences mecaniques. — Déplacement des mollusques. — Hibernalion, — Profondeur des eaux. — Mouvements des eaux.— Végélalion. — Densité des milieux. — Zn- fluences physiologiques, — Lumière. — Nourrilure.— Jéûne — Privation d'air. — Exemp'es d'inflaences combinées d'après la nature des milieux. Après avoir constaté l'existence de variations, soit géné - rales, soit partielles chez les mollusques, ilimporte de recher- cher quelles peuvent être les causes de ces variations. Pareille question est pleine de difficultés, car s'il nous est encore assez facile de constater les effets, nous sommes loin d'en connaitre les causes. Les modifications qui se présentent chez les mollusques sont produites sous des influences très diverses, agissant tantôt simultanément, tantôt seules, mais empruntant toujours leurs éléments à des sources les plus variées. Nous les diviserons en quatre catégories: influences physiques, chimiques, mécaniques et physiologiques, dont nous examinerons successivement les différents effets. 420 VARIATIONS MALACOLOGIQUES INFLUENCES PHYSIQUES. — L'habitat du mollusque n'est nullement chose arbitraire de sa part; ear il est éclectique à sa manière ; tout en ayant à se soustraire à des ennemis plus puissants que lui, et sans cesse acharnés après leur proie, il lui est nécessaire de chercher un gite qui lui permette de pourvoir à ses propres besoins. Il doit done se plaire davan- tage dans tel ou tel milieu qui lui parait devoir être le plus favorable non seulement à son développement et à son exis- tence personnelle, mais encore à celle de ses descendants. Aussi voit-on dans [a nature certains pays, certaines con- trées, ou régions souvent même fort restreintes, dans les - quels les mollusques terrestres et aquatiques pullulent, tandis qu'il en est d’autres, tout à côté. où ces mêmes mollus- ques font complètement défaut. Il convient done d'examiner quelle peut être la cause de cette sorte de répartilion ou de localisation des faunes malacologiques, en examinant avec soin les conditions qui sont le plus propices au déve- loppement de ces êtres. Nous constaterons en même temps que suivant la nature de ces milieux, les mellusques peuvent subir certaines variations dans leur manière d’être. La constitution orographique du sol, de même que sa constitution géologique, ont une influence considérable sur le développement des mollusques. Si quelques espèces rares se plaisent exelusivement dans la région des grandes plaines ou sur les plateaux, le plus grand nombre préfère, au con- traire, les contrées un peu montagneuses ; là, en effet, le mollusque est plus à l'abri de l'action du vent qu'il redoute sans cesse, parce qu'il tend à lui enlever cette humidité si nécessaire à sa propre existence. Les coteaux mieux boisés lui procurent de l’ombrage et de la fraicheur, tandis que la plaine plus exposée aux rayons solaires ne convient qu'aux espèces dont la coquille est assez solide et colorée pour pro- téger de l'évaporation le corps de l'animal qu'elle renferme. DU BASSIN DU RHONE 421 Enfin, sur la montagne, les espèces malacologiques peuvent tout à leur aise se disperser et se répartir suivant l'altitude qui leur convient le mieux. Celles qui recherchent une chaude humidité resteront dans le bas, vers la vallée, tandis que celles qui n’ont rien à redouter des rigueurs du froid pour- ront s'élever sur les hauteurs jusque vers les dernicres limi- tes où la vie animale et végétale est encore possible. Si donc telle espèce propre à un milieu donné, et dont l'extension géographique est restreinte se trouve à un mo- ment déplacée par une cause quelconque, elle sera nécessai- rement appelée à subir des modifications d'autant plus gran- des que ce nouveau milieu où elle a pu s'acclimater différera de celui qu’elle vient d'abandonner. Nous avons vu déjà pour l’Helix arbustorum quelles différences il v avait entre les indi- vidus vivant à des altitudes différentes. Dans cette espèce, en effet, la taille décroit, la coloration pâlit, l'épaisseur du test diminue à mesure que l'altitude de l'habitat augmente ; nous rappellerons également que presque toutes les espèces dont l’aréa géographique est un peu étendu ont des formes varia - bles suivant qu'on les observe à des allitudes différentes. Nous estimons ainsi que la plupart des variétés minor ap - partiennent à des colonies vivant dans des régions plus éle- vées, à tempéralure plus froide que celles où vit le type lui-même, et à plus forte raison que les variétés de granile taille. Si nous comparons la nature du test des espèces qui vivent dans les plaines basses ou sur les plateaux avec celles des régions plus élevées, nous observerons que les premières ont toujours ce test notablement plus épais et plus coloré que celui des secondes. La plupart des espèces s'élevant à plus de 1000 ou 1200 mètres sont de couleur pâle, presque blanche ; si elles ont encore quelques traces de coloration, celle-ci est localisée vers l'ouverture, comme chez les /elix 4272 VARIATIONS MALACOLOGIQUES alpina et 1. Fontenilli ; au contraire, les espèces vivant au- dessous de 500 mètres ont loujours leur test plus chaudement coloré, et si elles sont ornées de bandes ou de flammes, cel- les-ci sont d'un plus vif éclat que l'ornementalion des espèces des grandes altitudes. Le test lui-mème est tout différent, et suit Ia même loi. Dans la faune alpestre, en dehors des Arions et des Limaces, nous trouvons surtout parmi les Héli- ces des mollusques d'une forme spéciale appartenant à la famille des Campylées; ce sont des coquilles de grande taille, mais à test relativement peu épais; avec elles vivent d'autres espèces plus pelites, comme les Vifrina nivalis, Hyalinia pe- tronella, I, viridula, Helix phorochætia, IH. Beurniana, ete., à test mince et fragile. C’est à l'aide de considérations pu- rement physiques que nous pouvons interpréter de pareils faits qui semblent contraires à toute donnée connue. Une des conditions vilales indispensables à la conserva- tion de l'être chez le mollusque, c’est la présence d’une cer- laine quantité d'humidité dont il ne saurait se départir sans ètre gravement compromis. Il ne redoutera pas les intempé- ries, pouvant jusqu'à an certain point s'abriter du froid ou de la chaleur en s’enfouissant dans le sol; mais ce qu’il craint surtout, c'est toute cause possible d’évaporation de sa matière aqueuse. Si done sa coquille est solide, épaisse, colorée et opaque, elle laissera passer une moins grande quantité de rayons Calorifiques,etle mollusque conservera ainsi plus faci- lement cctte dose de liquide indispensable à sa vitalité ; dans les régions élevées, il est moins exposé à de pareils inconvé- nients, dès lors sa coquille est à la fois plus pâle, plus mince, plus transparente; mais si ce même mollusque est appelé à vivre dans des régions plus basses, une transformation devient nécessaire pour qu'il puisse s'adapler à ce nouveau milieu. Nous avons constaté ces phénomènes d'adaptation pour notre région; nous les voyons encore d’une manière plus + DU BASSIN DU RHONE 423 générale, lorsque nous comparons notre faune malacologique terrestre avec celle des pays chauds; chez nous le test des coquilles est relativement peu solide, mince, plus ou moins transparent, peu de coquilles sont colorées ; là-bas, au con- traire, les formes similaires sont épaisses, résistantes, opa- ques et présentent les couleurs les plus riches et les plus brillantes. Si nous examinons les espèces de nos pays dont l'aréa géographique est tel qu’elles puissent vivre à la fois dans des allitudes extrèmes, nous observons que les types des régions hautes, comme ceux qui vivent dans les pays septentrionaux diffèrent notablement de ceux des régions basses ou qui sont répartis dans des contrées plus chaudes. [y a done là, dans la question orogtaphique, une influence notable non seule - ment sur la manière d'être des mollusques, mais encore sur les variations qu'une même espèce peut présenter, lors- qu’elle se trouve dans des conditions orographiques diffé - rentes. Un des effets du changement d'altitude pour les mollus- ques serait, suivant M. Reclus, un allongement de la spire. Suivant cet observateur, l'Helix pomalit, par exemple, ac- querrait une spire plus conique dans les montagnes de lAu- vergne que dans la plaine ; de même, l'elix aspersa, àmesure qu'il s'elève en altitude dans le Midi de l'Europe, prendrait une forme plus élancée. La raréfaction de l'air des monta- gnes serait une cause de pareils changements. Nous obser- vons le même phénomène dans notre région. Aux environs de Lyon, l'Helix pomalia atteint son maximum de dévelop pement; c'est là ce que l’on nomme le véritable escargot de Bourgogne; mais à mesure que l'on se rapproche des Alpes, il devient plus petit et plus coloré; à Grenoble, sa taille est déjà moindre, et sa couleur plus pâle; pour que les échantillons soient un peu volumineux, il faut qu'ils se 124 VARIATIONS MALACOLOGIQUES trouvent dans des conditions orographiques particulièrement favorables qui lui rappellent sa véritable patrie. En même temps, comme il existe une corrélation néces - saire entre le relief du sol et la plupart des phénomènes mé- téorologiques, les faunes et les formes malacologiques seront également surbordonnées à cette nouvelle influence. On a observé dans beaucoup de pays que suivant la direction des chaines de montagnes ou des cours d'eaux, il s’établissait dans l'atmosphère de véritables courants entrainant les orages suivant cerlaines lignes que l’on peut tracer à l'avance. C’est ainsi que dans nos pays, il existe certaines régions qui recçoi- vent annuellement une quantité d’eau plus considérable que les régions voisines. Fournet, qui s'était beaucoup occupé des questions météorologiques intéressant le bassin du Rhône, avail tracé, pour les environs de Lyon, une carte des orages, c'est-à-dire une carle indiquant quelles sont les par - ties de la contrée qui sont les plus exposées à recevoir an- nuellement une quantité d'eau plus considérable. Or, comme précisément les mollusques terrestres, sauf cependant un très petit nombre d'espèces, recherchent l'humidité, on peut dire que pour notre contrée, la carte des orages de Fournet est en quelque sorte la carte des centres malacologiques de notre région. Nous en avons-eu la preuve en maintes occa- sions, et pareille donnée théorique se trouve être parfaitement confirmée par l'étude pratique des faits. Puisque l'humidité est chose nécessaire, même indispen - sable au mollusque, sa plus ou moins grande abondance peut avoir une influence sur son développement. Nous observons d'abord que la plupart des espèces qui peuvent vivre dans les lieux secs et arides sont toujours de taille plus petite que celles qui se plaisent, au contraire, dans les endroits hu mi- des; nous en avons la preuve dans les Succinées, les Hélices, les Bulimes, elc. Les années sèches sont contraires aux mol- DU BASSIN DU RHONE 425 lusques ; craignant cette sécheresse, ils s'enfouissent dans le sol et laissent passer le temps des amours sans s'être aussi souvent rapprochés que si la saison avait été propice. Si au contraire le printemps est pluvieux, on voit à l'automne une nombreuse progénilure qui, l’année suivante, sera apte à son tour à se reproduire. En outre, on a observé que l'électricité avait une influence considérable sur la reproduction des mollusques. On sait en cellet que lorsque le temps est orageux, les mollusques se recherchent davantage pour se rapprocher. Il n'y aurait donc rien de surprenant à ce que dans les régions plus partieuliè - rement soumises à l’action électrique qui se dégage au mo- ment des orages, la reproduction soit plus fréquente ou même encore plus féconde. Les variations atmosphériques influent du reste d'une manière notable sur le développement des jeunes individus et plus encore sur la durée du temps qui s'écoule entre la ponte et l'éclosion. Bouchard-Chantereaux a observé que des œufs pondus dans les mois de mai ou de juin éelosent ordi- nairement du 15° au 20° jour après la ponte, tandis que d'autres provenant d'individus appartenant à la même espè - ce, mais alors pondus en octobre ou novembre mettent deux ou trois fois autant de temps avant d'éclore (1). I en est de même du développement et de la croissance des jeunes individus; ceux qui naissent avant la saison des chaleurs se développeront plus vite que ceux qui viennent au monde à l'approche de l'hiver; mais en outre, suivant la nature du temps, s'il est à la fois chaud et humide, l'accroissement se fera plus rapidement que s'il est sec ou froid. Nous avons vu des Aelix nemoralis où H. aspersa croitre de près de dix (4) Bouchard Chantercaux, 4839. Sur les mœurs de mollusques,in Ann, sc. nat., 2° série XI, p. 303. VAR. MAL. TI. 28 426 VARIATIONS MALACOLOGIQUES millimètres en quinze jours, par des temps qui leur étaient favorables, alors qu'avant ou après celle’ croissance, la tem- pérature étant trop fraiche ou trop sèche, ils ne peuvent pas se développer. M. le docteur P. Fischer a observé dans le Midi de la France pareil fait encore plus accentué ; l’élé de 1858 ayant été lrès sec, les jeunes Hélices, au mois d'août, étaient encore très petites; mais à la suite des pluies abon- dantes, les coquilles des Helix variabilis, H. pisana, H. as- persa prirent dans l’espace de quatre à cinqjours un acerois- sement de plus d’un centimètre (1). Une preuve de l'influence de la sécheresse sur les mollus- ques réside dans les procédés employés par les jardiniers pour se débarrasser de tels ennemis; on sait que pour proté- ser les jeunes pousses contre ces terribles destructeurs, il suffit de les entourer.à distance d'un cerele de plâtre, de chaux ou de paille coupée en petits morceaux ; le plàtre ou la chaux forment avec le mucus sécrété par l'animal un en- duit dont il ne peut se débarrasser ; il exsude alors une plus abondante quantité de ce mueus et finit souvent par mourir sur place; les brins de paille agissent mécaniquement de la même maniere, en forçant le mollusque à sécréter un excès de mucus pour se débarrasser de ces petites brindilles qui s'attachent à son corps. L'humidité et la sécheresse paraissent avoir une influence des plus considérables sur les variations des mollusques. Ainsi, on remarque que lorsqu'il existe une série d'années seches et froides, les mollusques sont de taille plus petite que ceux qui se développent durant une série d'années pluvieuses ; c'est qu'en effet, pendant Les années sèches et froides, le mollusque hiverne plus longtemps, il sort moins, prend (1) P. Fischer, 1858. Note sur la rapidité du développement des coquilles, In Journ. de Con°h., t. NII, p. 63 DU BASSIN DU RHONE 497 moins de nourriture, et dès lors ne s’assimile pas autant. Sa taille reste donc stationnaire, et lorsque vient le moment propice à sortir de son état léthargique, il n’a plus la possi- bilité de rattraper le temps perdu. Quelque étrange que puisse paraitre une semblable observation, nous dirons à son appui que les grands marchands d’escargots sont les premiers qui en ont fait la constatation, et nous ne saurions mettre en doute leur parfaite compétence appuyée, du reste, sur la logique des faits. En outre, nous observerons que c'est sous l’action d’une trop grande sécheresse que les vieux mollusques tendent à perdre l’épiderme qui recouvre leur coquille. De même aussi c'est pour moins en redouter les effets que, l'hiver comme l'été, ils peuvent construire un ou plusieurs diaphragmes masquant leur ouverture et leur permettant d'hiverner, ou mieux, d'attendre des temps meilleurs sans avoir à redouter la moindre déperdition pendant leur état en quelque sorte léthargique. Ainsi enfermés, ils peuvent rester de longs mois sans prendre de nourriture, ne consommant rien, mais ne produisant rien non plus, toujours aptes à reprendre leur existence normale à un moment donné lorsque des conditions favorables à leur résurrection viennent à se manifester. Au point de vue de l'humidité, les mollusques sont de véritables hygromètres ; ils sont susceptibles d'absorber une quantité d’eau qui est en rapport avec leur organisation. Dans les chaleurs de l'été, il suffit d'une d’une grosse pluie ei d’un repas pour remplir leur coquille auparavant presque vide (1). C'est l’humidite du matin sous forme d’une abondante rosée, plus encore que la fraicheur qui les sollicite à sortir de la retraite où ils se tiennent cachés. (1) P. Fischer, 1861. De la respiration chez les Gastéropo les pulmonés terrestres. Zn Journ. Conch. vol. IX, p. 401. 428 VARIATIONS MALACOLOGIQUES La température a une influence considérable sur les mol- lusques. Bien souvent c’est elle qui limite l’aréa géographi- que de certaines formes, de même qu'elle préside à son extension plus ou moins grande suivant l'altitude. Si elle cst douce, tempérée, elle favorise le développement des mollus- ques, de même que si elle devient extrème dans un sens ou dans l’autre, elle en ralentit ou même en arrête la croissance. Telle espèce vivant dans les régions du Nord deviendra bien plus grande si elle parvient à s’acelimater dans des pays plus chauds; pour s’en convaincre, il suffira de jeterles yeux sur le tableau suivant; nous avons relevé dans l'ouvrage de Moquin-Tandon (1) et dans celui de M. Bourguignat (2) les dimensions normales de quelques mollusques qui vivent soit en France, même dans les provinces méditerranéennes, soit en Alsérie: ces dimensions s'appliquent non pas à des variétés nujor où minor qui peuvent alors atteindre des dimensions encore plus exagérées, mais bien aux formes ordinaires propres à ces deux régions. k Vectt : MOLLUSQUES DE FRANCE MOLLUSQUES D'ALGÉRIE LISTE DES ESPÈCES DAT RIRE IN Teen RSS Ess Hauteur | Diamètre | Hauteur | Diamètre Leucochroa candidissima, Drap. . .| 10-15 12-22 10-30 12-35 Helix aspersa, Müller. . . . . .| 25-40 | 24-45 | -5-45 | 24-48 — vermiculata, Müller. . . . .| 16-97 | 22-30 | 16-28 | 24-35 = \Mactea Muller: ER NE PAR EDP AS OET 17-25 | 30-45 — melanostoma, Drap.. . . .| 25-30 | 22-30 | 34-36 | 32-33 cute MUIer Me OS 4-6 12-20 5-8 Limnæa auricularia, Liané. . . .| 20-25 17-20) | 20-30 | 18-28 Physa coRMONGDrAPR ES EN EE NT IR 6-8 10-12 8-9 0 On voit, d'après cela, que quelques espèces peuvent croitre du simple au double en hauteur comme en diamètre, suivant (1) Moquin-Tandon, 1855, Histoire des mollusques, I. (2) Bourguignat, 1870, Malacologie de l'Algérie. DU BASSIN DU RHONE 429 qu'elles vivent en France ou en Algérie, e’est-à dire suivant qu'elles sont soumisesà une influence de températures diffé- rentes. Si l'on transporte les espèces d Algérie en France, elles ne conservent pas leur grande taille, et au bout de peu de temps elles finissent par se confondre avee nos espèces françaises. Un de nos amis ayant élevé dans le Midi des indi- vidus de grande taille du Leucochrou candidissima, a vu, dès le seconde généralion, ses échantillons diminuer de propor- ion d'une facon notable, pour n’atteindre plus que les dimen - sions des gros individus du Midi de la France. Chez les mollusques aquatiques, la température exerce également une influence considérable sur leurs manières d’être. Quelques-uns peuvent vivre dans des eaux chaudes à 30 degrés, tandis qu'il en est d'autres que l’on ne ren- contre que sous la glace. Mais alors des modifications parti- culières président à ces différences si notables dans l'habitat. Nous avons déjà dit précédemment que d’après le docteur Brot, certaines Limnées du groupe du Linmnæa auricularia qui vivaient dans les eaux froides des montagnes n'avaient sou - vent que quatre tours de spire au lieu de cinq. Faut-il rap- peler ici toutes les espèces ou variétés portant la spécifica- tion de {hermalis où thermale? Le Limncæu peregra, suivant qu'il vit dans les eaux froides, souvent même couvertes de glaces dans les régions élevées des Alpes ou dans les eaux chaudes des Vosges, a recu les noms de Limnæa frigida (1) ou de Zimnœæu thermalis (2); et pourtant ces deux formes se rattachent facilement au type normal de l'espèce. Une variété de l’Ancylas sunplex à test petit, très élégamment striolé, vit dans les torrents des montagnes, tantôt dans les eaux très froides des Vosges (var. rupicola), tantôt dans les eaux très (1) Limnæa frigida, Mortillet, 1866. Revue savoisienne. (2) Limnæa thermalis, Puton, 1847. Essai sur les mollusques, p. 57. 430 VARIATIONS MALACOLOGIQUES chaudes des Pyrénées (var. {hermalis) (1). De même aussi le Pisidium casertanum des sources d'Évaux dans la Creuse ou de Bagnères de Bigorre, dont M. l’abbé Dupuy a fait son Pisi- dium thermale (2), diffère du type par son test plus mince, plus fragile, plus chétif. Parfois aussi, et il est bon de le noter, ces différences de température sont sans influence sur la coquille. M. H. Drouët a trouvé dans une fontaine aux eaux froides à Mouy, dans l'Oise, une forme de Limnée absolument identique à celle des eaux de Chaude-Fontaine dans les Vosges (5). Citons également un fait qui nous est personnel : ayant récolté dans les losnes voisines du Rhône aux eaux vaseuses et peu profondes des Vivipara fasciata, nous voulümes les élever dans notre aquarium pour en suivre la génération ; quoique le fond de leur nouvel habitat fût aussi semblable que possible à celui qu'ils venaient de quitter, nous ne pûmes à plusieurs reprises parvenir à les élever; l'idée nous vint un jour que l’eau qui alimentait notre aquarium et qui était également puisée dans le Rhône était trop fraiche; après l’a- voirramenée à une température plus douce, nous avons pu tout à notre aise élever et conserver ces mollusques. Les mollusques terrestres semblent redouter le froid plus que les mollusques aquatiques; du moins il leur est plus facile de se protéger pendant les rigueurs de la froide saison, soit en s’enfonçant plus ou moins profondément en terre, soit en mullipliant leur opercule de facon à former dans leur ouverture des chambres d'air. Dans les grands hiversles mol- lusques aquatiques sont souvent pris dans les glaces, et ce- pendant ils ne paraissent pas souffrir d’un trop long séjour dans untel milieu. Après le rude hiver de 1880, nous avons (1) Bourguignat, 1862. Les spicilèges malacologiques, p. 160. (2) Dupuy, 1849. Histoire des mollusques, p. 106, f. (3) H. Drouët, 1855. Mollusques de la France continentale, p, 47. DU BASSIN DU RHONE 451 vu au printemps des mollusques en parfait état dans des bas- sins dont les eaux avaient été totalement gelées pendant plu - sieurs jours (1). En général, les mollusques aquatiques recherchent peu les caux froides ; quelques Limnées seules peuvent supporter ces basses températures. M. Bourguignat vient de signaler, com - me vivant dans les eaux glacées, les espèces suivantes : Limnæa nivalis Bourg., des lacs du mont Viso et du col de Fenestre; L. islandica Bourg., de Reikiavik et d'Ornendor- Fiord, en Irlande ; L. Thorshavnensis Bourg., des iles Féroë ; L. gissericola Beck, de Reikiavik; L. nubigena Bourg., des sommets du mont Viso; L. Puloni Bourg., des Vosges; el L. Langsdorffi Bourg., de Saint-Martin de Lantosque (2). C'est également le degré de température qui sollicite le mollusque à tomber dans son état léthargique, et comme la ‘durée de cet état a nécessairement une influence sur son développement, on comprend le rôle que joue pareil agent sur la faune malacologique de chaque pays. Gaspard à observé (3) qu'une température de +20 à 25° Réaumur en hiver et de-+39 degrés en été avait pour effet d'engourdir les mollusques en agissant sur la respiration. C’est done proba- blement à ces limites que le mollusque se dispose à hiverner. I ne peut résister à une température supérieure à+42 degrés Réaumur et meurt rapidement lorsqu'on l'y soumet. La lumière, elle aussi, peut dans certains cas exercer une influence plus ou moins active sur le développement des mol- lusques. On sait aujourd’hui que les divers rayons colorés de la lumière solaire ont une action particulière sur la nutri- (1) Vide Joly, Note sur des Anoldonta cygnæt et des Paludina vivipara qui ont résisté à la congélation, in Ann. sv. nal , 3° série,t. IF, 1845, p. 35. (2) Bourguiguat, 4880. D'seriplion de quelques espèces nouvelles de mollusques terrestres et fluviatiles de Saint-Martin de Lantosque (Alpes-Maritimes), p. 7. (3) Gaspard, 1822. Zn Magendie, Journ. physiol, 11, p. 295, 432 VARIATIONS MALACOLOGIQUES tion des végétaux et sur le développement des animaux. M. Yung à fait à ce sujet des expériences fort curieuses sur les œufs du Limnœu stagnalis. Les œufs, aussitôt après leur fécondation, ont été placés dans des vases plongeant dans des solutions colorées ; toutes les autres conditions étaient les mê- mes, les œufs étaient éclairés par des rayons violets, bleus, verts, jaunes, rouges et blancs. En outre, un vase spécial fut tenu dans l'obscurité. Il résulte de ces expériences que la lumière violette active d'une manière très remarquable les animaux mis en expérience; elle est bientôt suivie sous ce rapport, par la lumière bleue, puis par la jaune et la blanche. Les lumières rouge et verte paraissent nuisibles, en ce sens que l’on n’a jamais pu obtenir le développement complet des œufs sous ces couleurs. Enfin, l'obscurité, contrairement aux résultats obtenus par MM. Higginbottom et Mac Donnell, n'empêcherait pas le développement, mais aurait pour effet de le retarder. On comprend, d’après ces expériences, quelles influences peuvent avoir les milieux naturels dans lesquels vivent les mollusques, suivant qu'ils sont découverts ou om- bragés ; les eaux si souvent couvertes de plantes vertes, cornme les lentilles, par exemple, devraient être moins favorables au développement des mollusques que celles qui laissent traverser les rayons lumineux. L'électricité semble jouer un rôle, et même un rôle assez important dans la vie du mollusque. On sait que l’accouple - ment des mollusques à toujours lieu plus volontiers pendant les temps orageux ; tous ceux qui ont élevé des mollusques ont pu facilement observer que lorsque le temps est chargé d'électricité, ceux-ci se recherchent pour se rapprocher; il il yaura done plus de chance de procréation etde multipliea - tion des mollusques dans les années orageuses que dans cel- (1) Figuier, 1880. L'année scientifique, p.396. DU BASSIN DU RHONE 433 les où les conditions météorologiques resteront normales. Dans notre chapitre relatif à la lératologie, nous parlerons encore du rôle de l'électricité dans la formation des indivi - dus dont la coquille est inverse. Nous devons enfin ranger dans la catégorie des influences physiques les phénomènes qui se passent dans la coquille lorsqu'elle est abandonnée à elle-même après la mort de l'ani - mal: les dernières traces du cadavre sont rapidement enlevées par des insectes de toute nature; sous l'influence de l'humi- dité, l'épiderme qui recouvre la coquille se dilate, et aux premières sécheresses, ilse fendille et tombe en peu de temps; plus tard les agents atmosphériques agissent sur le carbo- nate de chaux de la coquille et en désagrègent la surface ; il se produit une sorte d’exfoliation qui réduit de plus en plus l'épaisseur du test jusqu'au jour où ces éléments finissent par retourner dans le sol d'où ils ont été primitivement en- levés. Mais si la coquille est protégée par de la terre ou de Îa vase, elle se conserve bien mieux dans son enfouissement. Nous n'avons pas à expliquer ici quelles peuvent être les causes de celenfouissement ; mais la plupart du temps, c'est sous l'influence de courants d'eaux entrainant à la fois les mollusques et les substances sédimentaires. Si ces eaux ren- ferment, en outre, d’autres substances tenues en dissolution, comme par exemple du carbonate de chaux, par suite d'un excès d'acide carbonique ou par Paction d'une température élevée, il y aura sédimentalion complète, c'est-à dire forma- tion d'un calcaire, lorsque ce carbonate de chaux viendra à se précipiter ; dès lors le mollusque sera emprisonné: dans la päle calcaire. D'autres fois il se formera un simple dépôt mé- canique comprenant à la fois les mollusques et les substances diverses tenues eu suspension dans l'eau, 134 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Ainsi conservés les mollusques fossilisés perdront peu à peu toules traces de la matière organique quiles composail ; ils deviendront alors plus légers, plus blancs, plus poreux ; mais il peut se faire que d’autres substances chimiques, fer, silice, ete., viennent à leur tour modifier les éléments cal- caires du fossile, soil par imprégnalion, soit même par subs- titulion. Alors le fossile revélira celte apparence métallique particulière que nous lui voyons dans certains dépôts géolo- giques. INFLUENCES CHIMIQUES. — L'influence ces éléments chimi - ques sur les mollusques peut se démontrer de bien des ma nières. Mollusques terrestres où aqualiques subissent à un haut degré pareille influence, qui se traduit d'abord par l'abondance ou la rareté des formes aussi bien que par des varialions soit dans le galbe général de la coquille, soit dans quelques-unes de ses parties. La constitution minéralogique du sol a une extrême in- fluence sur la manière d'être des mollusques. Pour édifier sa coquille, l'animal a besoin d'emprunter à la nature les élé- ments calcaires et phosphatés quilui sont nécessaires, aussi trouvera-t-on toujours beaucoup plus de mollusques non seulement comme espèces, mais encore comme nombre dans les pays calcaires plutôt que dans les pays granitiques. L'étude régionale de la France, ou même, sans aller si loin, l'observation locale de nos pays le démontre d'une facon absolue. Sur tous nos terrains sédimentaires, les mollusques deviennent nombreux et se reproduisent avec rapidité, avec une coquille solide, épaisse, bien constituée, tandis que lors- que la nature géologique vient à changer et que l'élément siliceux se substitue à l'élément calcaire, les mollusques deviennent plus rares, plus dispersés, et leur coquille et moins solide , moins résistante, parfois même plus trans- DU BASSIN DU RHONE 435 parente. Il est facile, du reste, de faire cette expérience en déposant Ia moitié des œufs d'une même portée d'Hélice sur un sol calcaire et l'autre moitié sur un sol siliceux; les pre- miers se développeront dans des conditions normales et régulières de rapidité et de croissance, tandis que les au- tres, s'ils n’ont absolument que de la silice pour se constituer, dépériront rapidement, ou resteront petits etrétrécis, s'ils ne peuvent disposer que de trop rares éléments calcaires. En Corse, où la faune malacologique est des plus riches, on observe cette différence d'allures dans le test des mollusques d'une même espèce d'une colonie à l’autre. Telle forme, par exemple, aura des colonies nombreuses, dont les individus seront forts, bien développés, à test solide et résistant, parce qu'elles vivent sur des calcaires tertiaires, tandis que tout près de là, la même espèce vivant sur les granites ou les euphotides ne sera plus représentée que par derares sujels, au lest mince, fragile, presque transparent, terminé par un péristome à peine développé ; tantôt ces derniers atteignent en grosseur tout leur développement et la coquille n’en est que plus fra- gile, tantôt au contraire les cas de nanisme deviendront héréditaires et persisteront seuls dans ce monde presque dépeuplé. Pareil fait n’a rien que de très normal, el il se présente dans la nature toutes les fois que l'être à besoin de puiser avee son alimentation des matières minérales chimique- ment définies. Nous savons que certaines plantes recher- chent les sols calcaires, tandis que d'autres préfèrent les terrains siliceux ; faut-il rappeler l’histoire de ce naturaliste qui eût pu passer aux siècles derniers pour un sorcier, parce que rien qu’en brisant des œufs de poules, il savait dire dans quels pays elles avaient véeu? Les œufs à coquille mince provenaient de la montagne dont le sol élait granitique, tan- dis que ceux dont la coquille était épaisse étaient nés dans 436 VARIATIONS MALACOLOGIQUES la plaine dont le sol était calcaire. Nous observons, du reste, la même chose pour les œufs des mollusques, et nous l'avons plusieurs fois constaté pour des œufs des Arions, des Limaces ou des Hélices, qui peuvent vivre dans les pays calcaires ou granitiques. La faune des roches primordiales est fort restreinte dans nos pays ; les espèces que l'on y observe le plus souvent sont les suivantes : Arion empiricorum, Ferussac. Balia perversa, Linné. Vitrina major, Ferussac. Limnæa palustris, Müller. Hyalinia crysta'lina, Müller. — peregra, Müller. Helix rotundala, Müller. Ancylus simplex, Buc'Hoz. — lapicida, Linné. Sphærium corneum, Linné. — hortensis, Müller. Margaritana margaritifera, L. Un fait qui tend bien encore à prouver combien les mol- lusques recherchent l'élément calcaire, e’est qu'on les voit toujours de préférence ramper sur les vieux murs en ruines aux parois décrépies et rongées par le temps, plutôt que sur les murs fraichement construits. Dans ces vieux murs, en elfel, l’action chimique et mécanique des agents atmosphé- riques s’est chargée de préparer la pâture de nos mollusques en broyant et triturant à l’état de fine poussière les éléments superficiels de la pierre; le mollusque peut alors absorber avec plus de facilité ces parcelles ainsi mises à sa portée, tout en trouvant dans les vieux végétaux souvent décomposés qui croissent sur ces pierres, une nourriture parfaitement appropriée à ses propres besoins. La même chose se reproduit également à propos des mollus- ques aquatiques. Les ruisseaux dont le lit renferme des élé- ments calcaires ont toujours une faune plus riche et plus variée que ceux dont le fond est, au contraire, composé d'é- lements siliceux en plus grande abondance; et si parfois on DU BASSIN DU RHONE 437 rencontre des eaux privées de tout mollusque, comme cela a lieu quelquefois, c'est que bien certainement elles ne rou- lent que sur un sol absolument privé de tout élément miné- ralogique renfermant du carbonate où du phosphate de chaux. En élevant dans un aquarium des mollusques et en leur donpant un fond tantôt calcaire, tantôt siliceux, on ar- rive ainsi à modifier le galbe de ces mollusques. Nous avons fait pareille expérience sur des Linnæa stagnalis; et si Ja faune ancestrale élevée sur un sol calcaire était de grande et belie taille, ses descendants, privés au contraire de cet élé- ment, sinon d’une manière absolue, du moins en quantité suffisante, ne sont plus que des êtres pelits et rachitiques en quelque sorte atrophiés dans leurs développements. Les sels de fer doivent avoir une influence sur les mollus- ques terrestres, du moins l'étude de la paléontologie, comme nous allons le voir, tendrait à le prouver; nous n'avons ce - pendant pas de preuves positives de ce fait à citer à l'égard des Gastéropodes actuels; nous n'avons pas observé que les Gastéropodes vivant dans le voisinage des mines de fer aient un faciès différent de celui de leurs voisins rampant sur un sol purement calcaire. Cependant nous avons plusieurs fois remarqué que les Ancyles recherchaient de préférence les cailloux ferrugineux où manganésés pour s'y fixer, et que si dans une pierre, il y avait une veine minérale de semblable nature, € élail toujours sur cette veine que ces petites coquil- les se fixaient de préférence. La présence des sels de cuivre semble, au contraire, émi- nemment funeste aux mollusques. Plusieurs ruisseaux en Corse, qui renfermaient des mollusques de différentes natu- res ont vu leur faune s’éteindre en peu de temps, du moment qu'une exploitation euprifère envoyait ses eaux de carrière dans ces ruisseaux. Dans les montagnes du Beaujolais, où il existe encore de rares travaux d'exploitation de galène, nous 438 VARIATIONS MALACOLOGIQUES n'avons pas trouvé une seule coquille dans les ruisseaux voisins, précisément par suite de ce fait que les filons de ga - lène sont, dans leur toit ou leur mur, associés à quelques filonaux cuprifères. La composition chimique de l'air est sans influence sur le mollusque terrestre ; du reste, le milieu dans lequel il vit, se meut et se déplace, varie peu sur un point donné; l'air ne se modifie qu'à mesure que l'altitude change; pourvu que cet air soit à un degré hygrométique qui lui convient, cela lui suffit. Si deux colonies voisines, à une même al- litude, ont des différences dans leur manière d'être, ce n'est point à la nature de l'air qu’elles respirent qu'il faudra l'attribuer. Mais pour le mollusque aquatique qui est con- damné à ne pas sortir du milieu dans lequel il est appelé à vivre, comme ce milieu peut être de composition chimique très variable, il n'en est plus de même, et il doit forcément ètre soumis à son influence. L'eau de deux sources voisines peut avoir une composition chimique différente, soit parce qu'elle sort de niveaux géologiques différents, soit par suite de toute autre cause que nous n'avons pas à rechercher. Si dans ces deux sources on retrouve les mèmes espèces, on peut ètre certain d'avance que ces espèces se présenteront sous des galbes différents. De pareils faits sont très fréquents dans la nature et se reproduisent à chaque pas. Aux environs de Lyon, où la composition pétrographique du sol change si souvent, on peut dire que chaque source a sa forme particu- lière de Limnæu limosi. Et si l'on transporte d'un bassin dans un autre, telle forme donnée d'une Limnée, on la verra bientôt se modifier pour s'adapter aux conditions imposées par le nouveau milieu dans lequel on la fait vivre. Pour les mollusques aquatiques, il en est qui préfèrent certaines natures d'eaux; les eaux Lempérées, peu chargées de principes calcaires ou minéraux et qui tiennent en sus- DU BASSIN DU RHONE 439 pension des détritus végétaux ou-qui donnent naissance aux légers tissus des conferves, seront habitées par les mollus- ques de préférence aux eaux trop fraiches, trop pures, rou- lant sur un sol siliceux et se refusant au développement de la vie végétale. Aussi les eaux marécageuses qui en général remplissent ces premières conditions sont-elles riches en espèces, et chaque espèce y est elle représentée par d'abon- dantes colonies. La qualité des eaux a une influence considérable sur la manière d'être des mollusques. M. le D' Baudon cite à cet égard l'exemple suivant: & J'ai remarqué à Brivois (Oise), sur des coteaux entièrement calcaires et très arides, presque au sommel, une source dont l’eau avait un niveau de 6 à 8 centimètres, et dont le fond était tapissé par une très mince couche dun limon léger. Le Pisidium casertanum qui s'y trouve est petit; son test est mince, mais régulièrement con- formé ; à trois cents pas plus loin, surune mème pente, le fon du sol est encore calcaire ; seulement, un dépôtde terre végétale garnie de plantes, arrosé par des pleurs, recou- vre la surface. Au milieu des trous peu profonds de ce terrain, constamment rempli d'eau, j'ai récoltéle Pésidium casertanum gros, ventru, fortement strié, à test épais, solide. Il est de toute évidence que ces eaux étant chargées de sels calcaires el, tout à la fois, de débris végétaux tenus en dissolution, donnent à l'animal une nourrilure suceulente qui manquait aux individus de la source voisine » QU: La présence de certains sels minéraux lenus en dissolution dans les eaux n’est point un obstacle au développement des mollusques. Les sels de fer notamment paraissent même leur être favorables. S'ils sont en trop grande abondance, leur test peut s'encroûter d’une enveloppe minérale qui peut nuire (1) Baudon, 1857. Monograhie des Pisidies, p. 14. 440 VARIATIONS MALACOLOGIQUES peut-être au développement de la coquille, mais à laquelle l'animal semble parfaitement accoutumé. Tel est le cas du Paludinella rubiginosa Paladihle, qui vit dans les sources ferrugineuses d'Audinae près de Saint-Giron dans l'Ariège, des Belgrandia Bigorriensis et Hydrobia paludeslrinoides de Paladilhe, des sources ferrugineuses des environs de Bigorre dans les Hautes-Pyrénées. M. le docteur Baudon a observé le mème fait pour les Pisidies. « Les sels de fer tenus en sus- pension ou en dissolution, dit-il, n'empêchent pas la Pisidic de vivre. On en pêche quelquefois par milliers dans une purée semi-liquide dont le sel ferrugineux compose la presque tota- lité. Seulement les individus deviennent très rarement de forte taille; et ce n’est pas la privation du liquide qui met arrêt à leur développement, car j'ai vu des Pisidies vivant dans des fossés à fonds très ferrugineux, toujours bien pleins d'eau et à peu près aussi rachiliques que ceux de Ja purée d'hydroxyde de fer » (1). | Le chlorure de sodium n'est point un poison pour les mollusques vivant dans les eaux douces, lorsqu'il existe à petite dose. Nous voyons plusieurs espèces finir par s’aceli- mater dans des milieux légèrement saumätres. Nous citerons en exempleles mollusques du genre Paludestrina, aujourd'hui définitivement rangés dans les mollusques d’eau douce et qui cependant ne se plaisent que dans les eaux saumätres. Si actuellement on est parvenu à reconnaitre dans ce genre le prodigieux total de vingt-huit espèces (2), c'est sans doute à cause de ce fait, que ces mollusques vivant dans des eaux dont le degré de salure ou la composition chimique est diffe- rente, pareille influence aura eu pour effet d'agir sur le test de l'animal de façon à le modifier. Il est fâcheux qu'en mème (4) Baadon, 1857. Monographie des Pisidies, p. 1557. (2! J. Mabille, 1877. Catalogue de Paludestrines des côles de France, in Revue el mag. de zoologie. DU BASSIN DU RHONE 441 temps que l’on signalait ces espèces nouvelles, on n'ait pas également donné une analyse chimique des eaux dans Îles- quelles elles vivaient, car très probablement la différence de composition des milieux aurait pu suflire pour expliquer la diversité des formes malacologiques observées. On trouve aussi des Anodontes et des Unios, notamment dans les eaux peu salées au bord de la mer. Le fait avait été déjà cité par de Blainville (1) ; M. H. Drouët l'a confirmé (2) en indiquant l’'Anodonta piscinalis dans les eaux du lac mer de Haarlem en Hollande. Nous avons vu en Corse l'Unio Turtoni de Payraudeau vivre à l'embouchure de la Solenzara, là où les eaux ont déjà une saveur salée parfaitement mar- quée; nous n'avons pas observé que les individus pêchés dans ces conditions fussent différents comme taille ou com- me forme de ceux qui vivaient exclusivement dans les eaux douces. Rappelons encore que dans les eaux saumâtres du lac de Tibériade, notre savant ami, M. le docteur L. Lortet a pêché cinq espèces d'Unios vivant à des profondeurs diffé- rentes avec des Mélanies et des Melanopsis. Chez les mollusques terrestres, ce même sel agirait d’une autre façon, et finirait par attaquer l'épiderme des coquilles ; sous l'influence de la chaleur et de l'humidité, celui-ci finit par tomber et la coquille prend cet aspect terne et pâle qui lui est propre en pareil cas. M. Letourneux a observé que chez les Helix aspersa et 1. nemoralis qui vivent dans les dunes des Sables-d'Olonnes, pareil fait se produisait d'une façon régu- lière (3). Cependant nous devons dire que bien des espèces terrestres vivent au bord de la mer sans pour cela être privées de leur épiderme. Il y aurait donc dans la station citée par (1) De Blaïniille, 4895. AZanuel de mulacologie, p. 17. (2) H. Drouét, 1852. Revue et migasin de zoologie, août, p. 6, note. (3; Letourneux, 1879. Catalogue des mollusques terrestres et fluviatiles récoltés dans le dé- parlement de la Vendée, p. 58. VAR. MAL. TI. 29 447 VARIATIONS MALACOLOGIQUES M. Letourneux une autre eause qui, combinée avec l'action du sel marin, agirait efficacement au point de vue de la décor- tication superficielle des coquilles. Certains sues végétaux peuvent avoir une influence déter- minée sur le test des mollusques. Nous avons attribué à l'acide oxalique la décortication de certaines Hélices vivant sous les feuilles de loseille des jardins. M. Bourguignat rapporte la décoloration de l’Arion albus à l'influence de l'acidité déga- gée par certaines essences d'arbres (1). L'action des agents chimiques sur les mollusques n’est du reste point chose nouvelle : depuis longtemps elle avait préoceupé minéralogistes et géologues. Aussi rappellerons- nous ici les remarquables expériences faites en 1816 par Beudant (2), expériences qui n’ont jamais été reprises sur une aussi vaste échelle. Après avoir récolté un nombre suffi- sant d'individus appartenant à des genres différents, il les divise en deux portions égales, l’une destinée aux expérien- ces, l’autre conservée dans l’eau de Seine, de façon à servir de terme de comparaison. Il observe d’abord que tout mollus- que d’eau douce plongé dans l'eau salée au même degré que l’eau de mer, ou dans des eaux chargées d'acide carbo- nique ou d'acides minéraux en très pelite quantité, ou même de 0,02 de sulfate de fer, périssait rapidement ; mais si au contraire, on cherche à acclimater progressivement les mêmes mollusques dans des milieux aux degrés de salure croissants, on peut obtenir leur acclimatation. « J'ai d'abord rempli les vases d’eau dans laquelle j'avais fait dissoudre un grain de sel par litre, c’est-à-dire environ 0,0011 (ce qui n'était pas sensible au nitrate d'argent). J'ai employé de cette (4) Bourguignat, 1862. Spicilèges malacologiques, p. 18. (2) Beudant, 1816. Memoire sur la possibilité de faire vivre des mollusques fluviatiles dans les eaux salées el des mollusques marins dans les eaux douces, considérées sous le rapport de la géologie, Zn Journal de physique, 1. LXXXIIT, p. 268. DU BASSIN DU RHONE 443 eau pendant plusieurs jours, en la renouvelant souvent ; j'ai ensuite augmenté la quantité de sel, d’abord d’un grain tous les deux jours, puis d’un grain tous les jours, et enfin de trois grains par jour. Par toutes ces additions successives, le liquide s’est trouvé, à la fin de septembre, renfermer 0.04 de sel. Mes NOMBRE DES INDIVIDUS|NOMBRE DES INDIYIDUS NO MS DES ESPECES individus au {5 juillet au 15 octobre placés dans OBSERVATIONS IChaque se NE TE D TUE TRE SOUMISES À L'EXPÉRIENCE | 4 Sume) ds lésmsrun ts ie" nee or eue VOLE Limnæa stagnalis. . , .| 30 21 23 16 13 — auricularia. . .| 30 19 17 14 11 en DALUSENIS. 0... T0 33 O7 22 19 Physa fontinalis. . . .| 50 28 27 17 21 Planorbis corneus.. : .| 30 22 19 15 13 — carinatus. . .| 5 34 31 19 16 — DORE Tr 00 37 39 26 22 Ancylus lacustris. . . .| 50 39 33 28 25 Paludina vivipara.. . .| 30 23 2% 21 11 — tentaculata. | 50 35 3 al 17 —— DUUUS DADNIE | E GO 42 39 27 30 Nerita fluviatilis. . «| 50 37 31 26 9 Urio mctorum. ti 00-920 17 13 8 O {ücpuis 28 (1) dnodonta cygnæa. . . .| 15 11 10 7 0 — 31 Cuclasitornensu UNI EO 82 25 18 9 — 21 En procédant de cette manière, j'ai complètement babitué la plupart des mollusques de nos eaux douces à vivre dans l'eau salée, où ils ne présentaient plus aucune apparence de malaise ; plusieurs même s’y sont accouplés, mais à la vérité, dans un temps où le liquide renfermait beaucoup moins de sel qu’au mois de septembre. Pour mettre une certaine exac- tilude dans l'expérience, j'ai noté soigneusement la quantité (1) C'est-à-dire que le dernier individu est mort depuis 28 jours. 444 VARIATIONS MALACOLOGIQUES d'individus de chaque espèce qui sont morts, d’une part, dans l'eau douce, de l’autre, dans l’eau salée; c'est d’après Ia comparaison des résultats que j'ai pu juger les différences que je vais rapporter ». On voit, d'après ce tableau, que la plupart des mollusques d'eaux douces peuvent s’acclimater dans des eaux d’un degré de salure différent, et cela dans un espace de temps relative- ment très court. Malheureusement, si Beudant a si bien constaté le degré de vitalité de ces espèces dans leur nouveau milieu, il ne dit point de quelle manière s'est effectué leur dé- veloppement. D'après des expériences que nous avons faites, expériences fort incomplètes, nous devons l'avouer, nous avons toujours observé qu'il y avait un ralentissement na- turel dans le développement du mollusque condamné à vivre dans des eaux mème légèrement salées. Mais nous ignorons encore à quel degré de salure il convient de s'arrêter dans son acclimatation pour ne point en empécher la reproduction. Cette influence de la composition chimique du sol ou des eaux sur les mollusques ne s'est pas fait seulement sentir à notre époque. Les temps géologiques avec leur succession de faunes siriches etsi variées en portent encore nécessaire- ment l'empreinte. Tel horizon géologique aujourd'hui bien défini par sa faune se retrouve dans un autre pays avec une faune similaire ayant un faciès pétrographique différent. Ici, nous aurons desindividus de grande taille, bien développés ; là, au contraire ces espèces seront toutes de dimension plus petite. Tantôt les coquilles minéralisées seront exclusivement calcaires ; tantôt, au contraire, elles seront transformées en produits siliceux ou ferrugineux, auxquels s'associent le soufre ou le phosphore. Telle est par exemple dans l’étage bajocien la faune du Cal- vados comparée à celle des environs de Lyon. En Normandie, les fossiles, tous calcaires, sont emballés dans une roche de + DU BASSIN DU RHONE 445 sédiment également calcaire, mais renfermant, en outre, une certaine quantité de principes ferrugineux à l'état d'oxydes, sous forme d’oolithes; aux envions de Lyon, nous retrouvons le même horizon géologique dans une formation appelée cire. Mais ici les fossiles sont entièrement siliceux et ren- fermés dans une roche calcaire contenant encore une légère proportion de silice. Les Amonites ParkinsoniSow. 4. Blag- deni Sow., À. Martinsiü d'Orb., À. oolithicus Sow.. Melania scalariformis Desh., Cerithiinn echinatum de Buch, Pecten saturnus d'Orb., Lüunnœæu proboscidea Sow., Terebratula sphe- roidalis Sow., etc., qui sont communs à ces deux horizons, s'y présentent sous un faciès tout différent; en Normandie, ces coquilles calcaires sont de toute taille et les especes acquièrent tout le développement dont elles sont suscepti - bles, tandis qu'aux environs de Lyon, ces mêmes fossiles sili- ceux sont, au contraire, de très petites dimensions, tout en conservant exactement leurs caractères spécifiques. Nous ne saurions attribuer pareille différence qu'à ce fait que les fos- siles du ciret ont dù vivre dans des eaux tenant une certaine quantité de silice en suspension qui, sans nuire à leur multi- plication, à cependant empêché leur développement, tandis que dans le Calvados ces mêmes espèces se trouvaient dans un milieu normal où rien n’a pu entraver leur croissance. Les fossiles ferrugineux sont nombreux; mais nous remar- querons qu'en général ceux qui appartiennent aux dépôts d'oxydes de fer sont tous de belle taille, comme par exemple dans les mines de fer de la Verpillière dans l'Isère, de Privas dans l'Ardèche, ete. Mais si, au contraire, ces mêmes espèces ou des espèces similaires ont été transformées en pyrites de fer, leur taille est presque toujours beaucoup plus restreinte; Lel est le cas des fossiles des marnes liassiques ou oxfordien- nes du Lyonnais, de la Bourgogne, etc. Il est à présumer que la présence des sulfures dans les eaux où vivaient ces coquil- 446 VARIATIONS MALACOLOGIQUES les a dû notablement nuire à leur développement en agissant comme la silice. | On trouve, du reste, une preuve évidente de cette adapta- tion aux milieux dans les recurrences géologiques des fossi- les. IL arrive souvent, en effet, d'observer dans une série alternante de roches de composition différente, que le même fossile n’existe absolument que dans l’une de ces roches, alors qu'il fait absolument défaut dans les autres : toutes les fois que ce milieu propice luia permis de vivre, il s’y est rapide- ment développé, tandis que quand les conditions chimiques du milieu sont venues à changer, il a disparu subitement. M. Contejean cite, dans cet ordre d'idées, les Astartes, qui forment de véritables lumachelles dans les lits calcaires alternant avec des argiles grossières plus ou moins chargées de sables et de calcaires, et montrant une succession plus de vingt fois répétée dans le Jura (1). Nous ne parlerons pas ici des anomalies qui peuvent résulter d'une influence chimique due à la composition des eaux; nous nous réservons de traiter pareil sujet dans notre chapitre relatif à la tératologie malacologique. C’est qu’en effet, l'action de certains sels peut agir sur des individus isolés, avant d'agir sur la colonie entière; et si une modifica- tion générale doit, un jour, en être le résultat, elle commence par se produire sur quelques sujets, constituant de simples cas tératologiques individuels avant d’être héréditaire et de prendre dès lors un degré de fixité. Mais il importe, précisé- ment à cause de cette raison, d'observer que ces influences chimiques peuvent, à un moment donné, amener des modifi- cations dans l'individu malacologique, modifications qui, pas- sagères d'abord, seront susceptibles d'acquérir une fixité dé- finitive si les conditions des milieux s’y prêtent suffisamment. (1) Contejean, 1874. Éléments de géologie, p. 453. DU BASSIN DU RHONE 447 [INFLUENCES MÉCANIQUES. — Les influences mécaniques sont moins nombreuses que les influences chimiques et physiques ; si celles-ci agissent directement sur Île mollusque pour amener quelques modifications, celles-là, au contraire, ne sont en quelque sorte que des causes indirectes produisant ensuite des effets communs. Du reste, en nous occupant des migrations malacologiques, nous avons été appelé à parler de ces agissements mécaniques occasionnant d'abord un dé- placement involontaire du mollusque qui, transporté ainsi dans ce milieu différent, aura à en subir les influences chi - miques et physiques. Tels sont les elfets des eaux, du vent, des animaux eux-mêmes ou de l’homme dontl’action mécani- que s’exerçant sur les mollusques pour en amener la dis- persion, les expose ensuite à de nouvelles influences direc- tes ou indirectes. Mais en dehors de ces actions mécaniques ayant pour premier effet un déplacement migratoire, il en est d'autres qui s'exercent directement sur le mollusque, et que nous allons passer en revue. On voit souvent des marais, des étangs, même de petits ruisseaux, dans lesquels le niveau de l'eau baisse notablement pendant les périodes de sécheresse ; dans ce cas, le monde aquatique qui les habite se trouve nécessairement soumis à de nouvelles influences ; mais sou- vent aussi ces mêmes pièces d’eau sont mises complètement à sec pendant un lemps plus ou moins long; si plus tard l'eau y revient, on voit aussitôt les mollusques reparailre comme s'ils n'avaient rien perdu de leur vitalité. Que s'est-il done passé? À mesure que le niveau de l'eau baissait, les mollusques, Limnées, Physes, Planorbes et mème les Bival- ves, se sont enfouis dans la vase d'autant plus profondément que la sécheresse tendait à devenir de plus en plus grande ; là, les animaux se sont retirés dans le fond de leur coquille ; quelques-uns même se sont fabriqué un diaphragme pro- 418 VARIATIONS MALACOLOGIQUES tecteur, tandis que d’autres se contentaient de fermer le plus hermétiquement possible leur opercule; tant que la séche- resse a duré, les mollusques n’ont subi aucune pertes ; ils sont restés dans une sorte d'état léthargique; quand l'eau est revenue, ils ont pu reprendre leurancienne activité. Cette hibernation des mollusques à lieu normalement l'hiver, mais dans les pays chauds, elle se manifeste aussi l'été; il y à estivation ; dans ce cas comme dans l’autre les phénomènes sontles mèmes ; mollusques terrestres ou aquatiques peuvent y être tous deux assujettis. Cette durée de l’état léthargique pour les mollusques aquatiques peut être longue sans que certaines espèces aient par trop à en souffrir; nous avons vu des Limnæa stagnalis qui sont restés deux ans dans un marais desséché, et qui ont ensuite retrouvé toute leur vitalité. Souvent ces dessèche- ments sont périodiques et se reproduisent régulièrement chaque année. Mais si nous comparons les coquilles des ani- maux soumis à un pareil régime trop fréquemment répété, nous observerons bien vite que jamais ces coquilles n'attei- gnent de grandes dimensions ; elles sont ordinairement de pe- tite taille, aux formes trapues, courtes, ramassées, tandis que leurs congénères vivant dans un milieu normalet régulier, dans des stations parfois très voisines sont, au contraire, de grande taille et parfaitement normales. Nous observons, en outre, que la plupart du temps les coquilles des espèces expo - sées à ces sortes de dessiccation temporaire sont plus épaisses et surtout plus colorées que celles qui vivent continuelle- ment dans l’eau. Chez les Bivalves ces alternatives de sécheresse et d’humi- dité peuvent également amener des modifications dans la co- quille. M. le docteur Baudon a observé que chez le Pisidium pulchellum la taille est modifiée par un niveau d'eau plus ou moins élevé comme aussi par la qualité du liquide ; les indi- DU BASSIN DU RHONE 1419 vidus sont plus petits lorsque les lieux qu'ils habitent sont exposés aux dessèchements et comblés insensiblement par du limon ; les plus beaux échantillons, au contraire, vivent au fond des fosses dont le niveau ne subit pas de modifica - tions (1). Il est à remarquer que plusieurs espèces aquatiques peu- vent vivre un certain temps hors de l’eau; chez les Lim nées par exemple, nous voyons parfois les Limnæa limosa, L. auricularia, L. truncatula, et surtout L. peregra se prome- ner sur les plantes fraiches ou sur la terre humide. Dans notre aquarium le Zimnæa peregra se plait souvent hors de l'eau. Il peut, dans la nature, rester plus de quinze jours, sur les plantes fraiches et humides, avant de retourner dans son véritable élément ; parfois mème il dépose ses œufs sur les parois de vase un peu au-dessus du niveau de l'eau. La profondeur du liquide dans lequel vivent les mollus- ques peut exercer sur eux une influence considérable. Nous savons que dans la mer la faune des eaux profondes diffère déjà notablement de la faune des eaux superficielles ; sans rappeler les nombreuses découvertes récemment faites à ce sujet, nous nous borncrons à dire que chaque zone aquatique d'altitude différente a sa faune propre, tout aussi bien que chaque zone terrestre. Dans les eaux douces ces faunes pro- fondes sont moins connues ; nous voyons cependant quel- ques rares Unios au test épais vivre de préférence dans de tels milieux. De mème aussi peut-on y rencontrer quelques autres mollusques de petite taille, des Valvées, des Limnées ou des Pisidies. Les mollusques qui vivent près de la surface de l'eau sont en général plus exposés à la lumiere; ils subissent l'action des eaux en mouvement, et sont soumis d'une facon directe (4) Baudon, 1853. Réflexions sur les l'isidies, Ia Journ. de Conch., t. IV, p. 394. 450 VARIATIONS MALACOLOGIQUES aux modifications de température que leur milieu peut \ éprouver, En outre, ils n’ont à luiter que contre de faibles pressions. À ces niveaux, la végétalion est particulièrement riche et abondante, de telle sorte qu'ils peuvent trouver toutes conditions des plus favorables à ce point de vue, pour leur développement. Dans les eaux profondes, à partir de 30 à 40 mètres les mollusques sont soumis à des influences toutes différentes ; la pression qui s'exerce sur eux devient considérable ; leur milieu plus tranquille, agité seulement par de rares courants, reçoit à peine l'action de la lumiere, et la température y est à peu près constante ; le monde végétal y est moins riche et partant la nourriture moins variée. Aussi le monde malacologique des eaux profondes est-il infini- ment plus pauvre que celui des eaux superlicielles. M. le professeur Forel, qui a fait une étude spéciale de la faune profonde du lac de Genève (1), a pu récolter à des pro- fondeurs variant de 25 à 300 mètres des Pisidies qui ont été étudiées par M. S. Clessin. Ce savant auteur a constaté que le nombre des espèces qui vivaient dans ces ccnditions était fort restreint; mais en outre, ces espèces, au nombre de cinq seulement, se distinguent de leurs congénères par leurs crochets arrondis et proportionnellement très larges, par leur taille exiguë, et par la simplification considérable du méca- nisme de leur charnière; l’une de ces espèces même, le Pisidium urinalor, ne présente qu'une seule dent latérale à chaque charnière. Comme le fait observer l'auteur (2), ces mollusques « n’ont pas besoin de dépenser de la force muscu- laire pour résister aux mouvements de l'eau ; ils doivent, en conséquence, présenter un échange organique moins consi- (4) Forel, 1874-36. Matériaux pour servir à l’élude de la faune profonde du lac Léman, in Bull. Soc. vaudoise des sciences naturelles. (2) S. Clessin, 1876. Les Pisidium de la faune profonde des lacs suisses, în Bull. Soc. vau- doise, vol. XIV. DU BASSIN DU RHONE 451 dérable ; ils ont besoin d'une source de nourriture moins grande ; avec une alimentation plus pauvre, ils sont cepen - dant en état de subvenir au peu de fonctions physiologiques moins surexcilées que si elles devaient agir dans un milieu plus agité ». Les mollusques aquatiques recherchent, comme nous le sa- vons, les eaux au sein desquelles se développe une végéta- tion riche et variée; mais si par une cause quelconque cette végétation devient par trop envahissante, si elle prend une extension par trop considérable, elle entravera la circulation des mollusques et les empêchera de venir aussi facilement puiser à la surface de l'eau l'air nécessaire à leur respiration. Une action mécanique s’exercera sur eux, qui aura pour effet d'empêcher leur développement et de favoriser les espèces aux formes allongées plutôt que celles qui sont, au contraire, arrondies ; on comprend, en effet, que les formes coniques des petites Limnées seront plus aptes à vaincre la résistance opposée par la végétation que les Planorbes, lorsque l'un et l’autre voudront venir à la surface de l'eau pour respi- rer. Celle action mécanique de la végétation observée par MM. Louis Piré et van den Broeck a surtout pour effet de pro- duire des individus scalaires. Nous y reviendrons done à propos de cette affection tératologique. Un autre genre d'action mécanique serait exercé sur ies mollusques aquatiques par les eaux constamment mises en mouvement. Tel est, par exemple, le cas des Limnées du lac de Constance observées par M. S. Clessin. Ces coquilles ont été étudiées par M. le marquis de Folin, qui constate qu'elles « conservent leur forme générale, tout en perdant un peu de leur régularité dans leur formation; cela s'apercoit surtout par quelques points brusqués dans leurs courbes qui ne sont plus aussi pures, et ces écarts dans les lignes en impri- 452 VARIATIONS MALACOLOGIQUES ment nécessairement aux contours et font soupconner, l’état des lieux étant connu, qu'ils ont bien pu être produits par l'effet de mouvements également brusques. On peut croire que l'agitation des eaux imprime à l'animal des soubresauts, des saccades, qui peuvent écarter le manteau de sa position normale, et qu'il ne se maintient au travail de la sécrétion que par des contractions, des efforts nerveux qui nuisent au fonctionnement régulier de l'opération ; que ces efforts ne réussissent pas toujours à éviler des interruptions dans Île contact, et que la reprise ne peut être fort souvent qu'in- correcte » (1). Cette action mécanique des eaux en mouvement a pour effet direct ure réduction notable dans la taille des mollus- ques, et une grande diminution dans le quantum d'individus. Nous en avons eu un exemple frappant dans le monde mala- cologique des eaux de la Saône à Lyon. Autrefois ces eaux étaient fort calmes, et n'étaient troublées que par le passage de quelques bateaux à fonds plats, ou par la descente des radeaux Alors on pouvait trouver dans Lyon même, sur les bords de la rivière, de nombreuses et belles Anodontes, des Unios, des Sphæries, ete., sans compter toute une collection de Gastéropodes ; plus tard, après la construction des quais, est venue l'introduction des grands bateaux à vapeur, puis l’organisation du service si actif des petits bateaux -mouches ; depuis, ces eaux sont en quelque sorte continuellement en mouvement; les Anodontes ont disparu, c’est à peine si l’on retrouve quelques rares Unios, et l’on ne récolte plus que des individus dont le pied, pouvant fortement adhérer aux ro- chers ou aux pierres, permet au mollusque d’être balancé sans crainte par cette agitation des eaux. Les seules espèces qui ont survéeu sont toutes de petite taille, aux formes (1) De Folin, 1879, Quelques mots de plus sur les anomalies des Limnées d'Osségor, in Bull. Soc. de Borda, DU BASSIN DU RHONE 453 ramassées, visoureuses, bien établies en un mot pour résis- ler à celle sorte de lutte incessante contre l'agitation des eaux. C'est problablement à cette même influeuce qu'il faut rattacher certaines dispositions particulières du lest des mollusques aquatiques. Quoique nous n’ayons pas encore sur ce fait des données absolues, nous pensons que le test marlelé que l’on observe chez certaines Limnées, chez le Vivipara fasciata etc., peut être attribué à l'action des eaux en mouvement. Nous avons, en effet, observé que cette particularité se présentait plus fréquemment chez les mollus- ques vivant dans des eaux un peu profondes et souvent mouvementées, comme celles des grands lacs et des cours d'eaux. Enfin, la densité des milieux exercerait une influence considérable sur le développement des mollusques. Cette théorie toute nouvelle a été récemment proposée par M. le marquis de Folin pour expliquer les singulières anomalies observées dans les mollusques du lac d'Osségor. Suivant cet auteur (1), l'excès de pression produit par une augmentation de densité de liquide surcharge nécessairemént les bran- chies et les empèche d'exercer librement leur jeu ; les vais- seaux capillaires se resserrant, perdent une partie de leurs propriétés ; l'absorption de l’oxygène n'est plus aussi complète, devient même insulfisante. Dès lors, l'acte de la respiralion s effectuant dans de mauvaises conditions, le resle de l'organisme doil nécessairement s’en ressentir. Cette explication fort ingénieuse est, en elfet, parfaitement plausi- ble; si dans le lac d Osségor on a constaté d'abord une sorte de dépérissement, de rachitisme des espèces, il peut parfaite - (4) De Foliu, 1879. Faune lacustre de l'ancien luc d'Ossegor, p. 12. 454 VARIATIONS MALACOLOGIQUES ment être attribué à une pareille cause, puisque ce lac d’eau douce a été en communication avec les eaux de la mer; il est probable qu’à la longue, ces formes curieuses repro - duites par M. le marquis de Folin auraient fini par se sélecter, et que quelques types dominants seuls auraient persisté avec des caractères plus nettement définis. INFLUENCES PHYSIOLOGIQUES. — Les influences physiolo gi - gues sont de nature très variée et se traduisent chez les mol- lusques de diverses manières: le plus ordinairement, elles portent d’abord sur l'animal lui-même, après l'avoir affecté de différentes facons, nous en voyons ensuite quelquefois la manifestation sur la coquille elle-même. Les animaux qui sont condamnés à vivre dans les profon- deurs du sol, loin de l'action de la lumière, finissent par subir une atrophie complète du système oculaire. On a cité dans ce genre parmi les mammifères, le Spalax, et on a trouvé des ètres privés de la vue parmi les poissons, les reptiles, les insectes. Les rares mollusques qui vivent dans de semblables conditions ne devaient pas faire exception; aussi voyons- nous deux genres européens renfermant chacun un assez grand nombre d'espèces, dont les animaux vivent sous terre ct qui sont, par cela même, complètement aveugles. Telles sont les espèces du genre Zospeum, qui vivent dans les immenses cavernes de la Carniole, et dans notre région les Cæcilianelles. Chez ces mollusques, il est maintenant reconnu qu'il y a atrophie des organes visuels, comme chez les autres animaux qui vivent dansles mêmes conditions. Les mollusques appartenant à ce dernier genre nous intéressent davantage, puisque nous avons signalé la présence de plu- sieurs espèces dans notre région ; ils vivent continuellement sous terre, dans les cavernes, dans les tombeaux, se nourris- DU BASSIN DU RHONE 455 sent exclusivement de détritus végétaux ou de petits eryp- togames (1). Leur coquille est toujours faiblement colorée. Un autre effet physiologique qui se traduit chez les mollus- ques d’une facon assez nette, c’est l’action de la lumière. Déjà l'on a remarqué que la plupart des êtres, végétaux ou ani- maux, lorsqu'ils sont privés de lumière, finissent par s’étioler et devenir de couleur plus pâle. Nous ne prétendons pas ce - pendant que ce soit là la cause absolue et générale de tous les cas d'albinisme, mais nous estimons que de pareils faits ont pu y contribuer. Quoi qu'il en soit, il est certain que lorsque l'on élève des mollusques terrestres ou aquatiques à l'abri de la lumière, l'animal est toujours de couleur plus pâle que ses congénères élevés dans des conditions normales , de même aussi la coquille se développe moins bien, sa coloration est moins vive que celle des autres individus de même espèce. On peut objecter à ces faits les riches couleurs qui ornent les coquilles marines des eaux profondes; mais à cela nous répondrons d'abord que ces coquilles vivant dans un milieu tout différent de celles dont nous nous occupons peuvent être soumises à des données particulières, et qu'ensuite les par- ties de la coquille qui sont le plus souvent masquées par le manteau de l'animal et qui dès lors sont moins exposées à l’action de la lumière, celles-là sont toujours plus pàles ou moins chaudement colorées. Une des influences les plus manifestes de l'habitat sur la manière d'être des mollusques à pour cause première la na- ture de la végétation qui sert à son alimentation. Le mollus- que, en effet, ne se nourrit pas indifféremment de toutes les plantes ou de toutes sortes de détritus; il sait choisir ce qui (1) Buurguignat, 1856. Aménités malacologiques, vol. [, p. 210. 456 VARIATIONS MALACOLOGIQUES lui convient le mieux, car il en est toujours quelques-unes qu'il préfère. Il suffit de constater les dégâts qu'il cause dans certaines parties d’un jardin potager, pour reconnaitre ses goûts et ses préférences. Il choisira les plantes tendres, les jeunes pousses, aux sucs doux et aqueux, plutôt que les essences un peu fortes ; il dévorera les feuilles de la laitue ou de la romaine avant de loucher aux jeunes pousses de l'artichaud ou du céleri; de mème s'il ne se nourril que de détritus végétaux, on le trouvera plus volontiers sur les essences de bois tendres, du pin ou du sapin, plutôt que sur celles du chêne ou même du châtaigner. Dans les marais et les élangs, on voit encore les mollusques préférer certai - nes plantes à d'autres, et dans notre aquarium ec n’est que lorsqu'ils n’ont rien à manger qu'ils s’attaquent aux confer- ves plus coriaces après avoir dévoré les feuilles de la salade ou les lentilles d'eau dont ils sont si friands. Nous avons vu précédemment que certaines variélés de mollusques affectionnaient plus partieulièérement des plantes dont les sucs étaient doués de principes plus ou moins actifs. Sil est un certain nombre de plantes sur lesquelles il est rare de voir les Gastéropodes, en revanche, on voit souvent ceux-ci dévorer des végétaux qui sécrètent des toxiques sou- vent violents; c’est ainsi qu'au Mont-d'Or nous trouvons sou- vent les Helix hispida et H plebeiu sur les feuilles d'orties sans paraitre redouter l'action irritante de leur contact. Au Pilat nous avons récolté le mème Aelix hispida sur les feuilles de l’aconit. Enfin, M. Recluz (1) a observé que les limaciens rongeaient impunément certains champignons des plus vénéneux comme les Agaricus muscorius et Ag. phal- loites (1). À ce point de vue, les amateurs de mollusques font donc acte de réelle prudence en laissant jeuner long- (1) Recluz, 1841. Observations sur le goût des limaces pourles champignons, Zn Rev, zool.,p.307. « DU BASSIN DU RHONE 457 temps les escargots ou même Îles limaces avant de les con- sommer. Tout changement de nourriture aura donc sur le mollusque une influence manifeste. S'il préfère certaines plantes à d'au tres, ce n’est pas par goût, mais bien parce que ces plantes conviennent mieux à ses propres besoins. Il est incontesta- ble qu'en principe, ces animaux doivent rechercher les en- droits couverts et retirés où ils sont plus à l'abri de toute poursuite comme de toute attaque; el pourtant nous Îles trouvons toujours dans les jardins, dans les lieux cultivés, en plus grande abondance qu'au fond des bois les plus sauvages et les moins fréquentés. C'est qu’en effet, dans le jardin, mal- gré la guerre incessante que l'homme lui déclare, malgré la présence de nombreux oiseaux qui peuvent mieux les voir que lorsqu'ils sont cachés sous les bois, ils trouvent toujours celte abondante nourriture arrosée chaque jour par la main même qui veut les détruire. Chez les mollusques terrestres une abondance de nourri- ture se traduira par un développement rapide et régulier ; toutes les autres conditions physiologiques concordant à une bonne harmonie, l'animal, comme sa coquille, croitra sans secousse, progressivement et acquerra tout son déve- loppement normal. Chez les mollusques aquatiques, pareille manière se traduira par des formes régulières, par des cro- chets saillants, par des sommets proéminents (1). Mais la privation de nourriture ou une irrégularité dans l’alimenta- tion, aura pour effet une croissances accadée, par secousse ; le test sera plus ou moins allongé dans certaines parties chez les Bivalves, tandis que d’autres seront atténuées ou atro- phiées ; les stries d'accroissement seront fortes, saillantes, irrégulières ; chez les Gastéropodes la spire n'aura pas toute (4) Baudon, 1853. Réflexions sur les Pisidies, in Journ. de Conch., 1, IV, p. 394. VAR. MAL. T. ll. 30 À58 VARIATIONS MALACOLOGIQUES sa régularité, et les tours seront irrégulièrement développés. Le jeûne peut parfois étre de longue durée chez les mol- lusques; nous avons conservé pendant trois mois des PJa- norbis carinatus dans de l’eau très pure sans aucune alimen- tation ; l'animal se retirait au fond de sa coquille après s'être fixé contre les parois du vase, et restait dans cet élat comme s'il s'agissait d’une véritable hibernation. On sait que cet état peut, pour certains mollusques, durer plus de six mois; pen- dant ce temps, la circulation et la respiration se ralentissent et deviennent presque nulles. C’est dans ces mêmes conditions que se trouvent les mollusques qui sont privés de nourri- ture. Nous avons vu que quand les eaux viennent à baisser ou à disparaitre dans une mare, Îles mollusques s'enfoncent dans le sol en attendant le retour périodique de l'humidité, retour qui peut ne s'effectuer qu'après de longs mois; pen- dant ce temps, le mollusque tombe dans une sorte de léthar- sie; de mème aussi les moliusques terrestres, lorsqu'ils sont privés de nourriture, se ferment dans leur coquille à l’aide de leur épiphragme et peuvent vivre ainsi pendant fort longtemps. R Nous avons déjà précédemment cité le fait rapporté par M. le baron Aucapitaine d'Aelix lactea d'Algérie resté pendant près de quatre années dans un état de léthargie (1). Un autre exemple aussi curieux est celui qui a été observé parle docteur Baird (2). Un échantillon de lHelix deserlorum provenant d'Égypte et fixé sur une tablette dans le Bristish Museum le 25 mars 1846, fut en quelque sorte ressuscité le 7 mars 1850, après avoir été plongé dans l’eau tiède. Woodward cite éga- lement, d'après le révérend W. 0. Newnham (3) une moule d'étang envoyée à M. Gray en Australie après avoir été plus {1} Aucapitaine. 1864. Séance du # novembre, (2) Baird, 1850. Ann. o/ nal. Hist., p. 85. (3) Woodvard, 1870. Manuel de Conchyliologie, p.14. DU BASSIN DU RHONE 459 d'un an hors de l’eau. En général les animaux adultes, dont la coquille a reçu son complet développement supportent mieux ces jeunes prolongés ou ces hibernations que les jeunes individus ; quand on leur présente une nourriture suffisante après une privation momentanée, ils dévorent avec une in- croyable activité; l'animal reprend alors bientôt toute sa vi- gueur, et un accroissement rapide se manifeste dans la coquille. | Un des effets du jeune trop prolongé peut avoir pour action directe un changement complet dans le mode de nourriture de certains mollusques. Les Linnœæa stagnalis et L. auricu- laria sont herbivores, et cependant lorsqu'ils sont soumis à un jeüne suffisamment long, ils dévorent non seulement leurs propres œufs, mais encore le cadavre de leur sembla- blable, Ayant mis dans un aquarium plusieurs individus de ces deux Limnées, sans aucune nourriture, nous fümes très surpris de voir un matin un Limnœæa auricularia fort ma- lade la veille, et dont la coquille était renversée au fond de l'aquarium, complètement dévoré par les autres Limnées il ne restait plus qu'une coquille parfaitement propre ; en même temps les autres Limnées qui, par suite du jeune, sem- blaient être plongées dans un état léthargique, avaient repris toute leur activité qu’un nouveau jeûne seul a pu leur enlever. On sait également que le Zoniles algirus, lorsqu'il n'a plus de nourriture animale à sa disposition, se contente parfaitement d’une alimentation végétale. Nous rapellerons cependant que dans la nature, les mollus- ques d’une même espèce recherchent presque toujours les mêmes plantes, et qu’il en est parmi celles-ci qui convien- nent mieux que d’autres à leur alimentation. C’est ainsi que nous avons observé sur les bords de la Saône au nord de Lyon une colonie de Succinea P{eifferi vivant sur des euphor- bes, et dont les sujets étaient plus gros, plus forts, de taille 460 VARIATIONS MALACOLOGIQUES plus vigoureuse que ceux d'une colonie voisine qui vivait sur des saules. La privation d'air incommode moins les mollusques que la privation de nourriture. Spallanzani (1) et après lui, Boyle et Derham, ont constaté qu'un séjour de vingt heures sous le vide de la machine pneumatique ne les incommodail point, et qu'il fallait prolonger pareil état pendant deux ou trois ours pour amener ia mort. Nous savons aussi que lorsqu'on plonge pendant vingt-quatre heures dans l’eau purgée d’air des Limaciens, ils reviennent ensuite parfaitement à la vie (2) ; mais au delà de ce tempsils meurent; alors leurs corps s’al- longent, les mâchoires se serrent et paraissent sous le mufle, et souvent aussi les organes de la génération sortent en de- hors du corps. Faut-il ranger dans ce mème ordre d'idées ce fait curieux observé par Bouchard-Chantereaux : « J'ai conservé, dit-il, pendant plusieurs années des œufs de la plupart des Lima- cinées de notre pays; ils étaient tellement desséchés que leur forme globuleuse ou ovoïde, entièrement disparue, était réduile à une simple peau friable entre les doigls; une heure d'humidité leur suffisait cependant pour qu'ils prissent leur forme et leur élasticité primitive ; et si par une nou- velle dessiccation je n'arrêtais pas le développement de lem- bryon, l'epoque arrivée, ils éclosaient comme ceux sur lesquels je n'avais point fait semblable expérience » (3). Nous ne savons pas si les mollusques issus d'un pareil état de choses étaient devenus ensuite absolument semblables à leurs congénères ; Bouchard-Chantereaux ne nous l’apprend pas ; (1) Spalanzani, 1803. Memoire posthume sur la respiration. (2) P. Fischer, 4853. Des phénomènes qui accompazuent l'immersion des mollusques terres- tres, in Act, soc. Liv. Bordeaux. (3) Bouchard-Chautercaux, 1879. Sur les mœurs des mollusques, èn Ann. Sciences nai. 2. série, t. XI, p. 803. DU BASSIN DU RHONE 461 il eût été intéressant de savoir si le mollusque ne s'était point ensuite ressenti, dans son développement, de ce ralen- tissement forcé qui a précédé l’éclosion. Telles sont en résumé les principales influences qui peu- vent être la cause de variations chez les mollusques ; mais il en cest une que nous ne saurions faire rentrer dans aucune des quatre catégories que nous venons de passer en revue et qui pourtant est des plus importantes. Nous voulons par- ler de la notion du temps, premier élément de toutes modili- cations zoologiques. Le temps, en effet, préside à toutes ces variations; c'est de lui que dépend en grande partie le plus ou moins de fixité dechacune des transformations que subira l'être en général ; c’est grâce à lui qu’elles peuvent s’accom- plir dans leur succession avant d'acquérir ce cachet de fixité, dernier terme d’une période transitoire. Aussi doit-on en tenir compte d’une façon toute spéciale. Si nous arrivons souvent d’une manière assez rapide àmodifier artificiellement l'espèce malacologique, ces mêmes modifications, outout au moins des modifications similaires n’auront lieu dans la nature qu'avec une grande lenteur que nous ne pouvons souvent pas nous mêmes apprécier. Puis, avant qu'il nous soit don- né de constater que telle variation nouvelle vient d'obtenir un degré positif de fixité, et que par les lois de l'atavisme elle ne s’efface pas devant les caractères prépondérants de la forme ancestrale, il faut souvent une durée de temps bien grande qui échappe aux observations laborieuses de plusieurs générations successives. Que dirons nous donc, lorsqu'il faudra, aux données historiques, ajouter celles des temps qui ont précédé la venue de l’homme sur la terre ? Si pendant la succession des périodes géologiques, il s'est ac- complichezles êtres des modifications, ou des transformations successives, en nombre presque illimité, c’est qu'un temps 462 VARIATIONS MALACOLOGIQUES dont la durée dépasse les bornes de notre imagination est venu en aide aux influences de toutes natures qui se combi- naient entre elles pour changer la manière d'être d'une orga- nisation de plus en plus complexe. De pareilles données ne sont plus du domaine du naturaliste ; elles rentrent dans l’or- dre philosophique, et ni la pratique ni l'expérience ne peuven1 en préciser les limites. Toutes les influences, nous l'avons dit, n’agissent pas iso- lément, elles se réunissent sous diverses formes pour opérer plus activement et donner lieu à une solution plus rapide comme aussi plus complète. Ainsi on remarque d’une manière générale que la forme des lours de spire se modifie chez une même espèce suivant l’état des lieux; elle tend à s’arrondir sous les climats humides et se surbaisse dans les régions plus sèches ; la spire elle-même s’affaisse à mesure que l'altitude augmente; enfin, sous l'influence de la sécheresse et de la chaleur, la surface du test tend à se rider et à devenir plus ou moins raboteuse. Mais pour mieux faire comprendre l’action complexe de ces différentes influences de milieux agissant de concert, nous voulons en donner iei quelques exemples pui- sés chez des Gastéropodes et chez les Lamellibranches. M. le docteur Baudon, le savant observateur des Pisidies et des Succinées, a pu assister à la transformation de deux formes différentes connues sous les noms de Pisidium pul- chellum Jenyns et P. cinereum Alder. Après avoir soigneu : sement indiqué dans quelles conditions vivait le Pisidium pulchellum, M. Baudon ajoute : « Je pèchais souvent dans le réservoir, j y lavais ma passoire afin de séparer les Pisidies d'avec la bourbe, et les jeunes de ces mollusques se trou- vaient entrainés par le courant, puis étaient déposés dans des creux voisins abrités par des plantes, et dont le liquide à niveau très bas, se trouvait cependant renouvelé souvent. A la fin du mois d'octobre 1852, j'avais scruté soigneusement + DU BASSIN DU RHONE 468 ces dernières flaques sans rien y rencontrer que d'assez jeu: nes Pisidium pulchellum, et le 15 mars 1853, quelle n'est pas ma surprise en ramenant de ces mêmes creux quelques Pisidium cinereum Alder, bien caractérisés, de taille moyen - ne, quoique adultes ! Je suis certain, d'après mes recherches minutieuses et réitérées, que le Pisidium cinereum, n'existe pas aux alentours, ni même fort loin delà Ne suis-je donc pas en droit de supposer que mes Pisidium pulchellum, ame- nés à la suite de mes tamisages ou par l'écoulement des eaux voisines, ont trouvé une existence surabondante dans ces flaques abritées, elles sont devenues, par la taille et la forme, des Pisidium cinereum. Ne pourrait-on conclure de là, à juste titre, que le Pisidium cinereum n’est qu'une variété du pulchellum et qu'il ne faut qu'une circonstance particu- lière dans son existence pour amener ce résultat (1) ? » Voilà done un premier exemple qui nous montre bien comment une espèce donnée, classée et reconnue par les naturalistes, n’est en somme que le résultat des modi- fications même rapides que peut subir une autre espèce déjà existante. On pourrait objecter à cela, comme le fait observer du reste M. Baudon, que des oiseaux, en s'appro- chant du réservoir, ont pu apporter avec eux des germes du Pisidium cinereum puisés dans d'autres lieux, et que ces ger-- mes ainsi déposés se sont ensuite développés. « Mais alors, ajoute-t-il, comment expliquer un développement de taille aussi rapide chez un animal qui met un certain temps à s'ac- croitre, puisque quatre mois avant, j'explorai ces mêmes fla ques,et n'y rencontrai qu'un petit nombre de Pisidium pul- chellum,non adultes, que je laissai, puisqu'avec ces Pisidium cinereum recueillis aujourd'hui, j'ai encore vu de rares Pisi- dium pulchellum, dont quelques parties présentaient déjà l’as- (1) Baudon, 4853. Réflexions sur les Pisidics, in Journ. d2 Conch., vol. IV, p. 396, 2464 VARIATIONS MALACOLOGIQUES pect de l’autre espèce et attendaient un temps plus éloigné pour acquérir leur développement le plus complet ? »_ Le second exemple de modification d'espèces existantes que nous voulons citer, résulte d'expériences faites dans no- tre aquarium sur les Limnæa stügnalis Linné, L. elophila Bourguignat, et ZL. {urgida Hartmann. Ayant recueilli un certain nombre d'individus jeunes provenant d'une colonie dont le type est représenté pl. IV, fig. 33, nous les avons transportés dans notre aquarium. Ces échantillons une fois adultes et observés dans leur milieu normal, appartenaient au Limnæa stagnalis par la forme élancée de leur spire, par le galbe même de chaque tour; mais il est à remarquer que le bas du bord columellaire n’était pas aussi dévié que dans les véritables Limnæa stagnalis ; par ce dernier caractère seulementils se rapprochaient des Limnœæa elophila. Cette co- lonie vivait dans les fossés du pare de la Tète-d'Or à Lyon, dans des eaux au niveau à peu près constant, avec une nourrilure, suffisante sans doute, mais peu variée, sur un fond vaseux de nature complexe; ajoutons enfin que tous les êtres de celte colonie, jeunes etadultes, étaient bien conformes au type que nous avons fait representer avec la plus scrupuleuse exactitude. Ces jeunes individus, transportés dans notre aquarium, ont trouvé là un milieu différent; l'eau y est à une température plus régulière, plus constante, ne s’abaissant jamais au-des - sous de 10 à 12 degrés, ne s'élevant pas au-dessus de 15 à 18 degrés, diminuant à peine pendant la nuit, ne s'échauffant pas sous les ardeurs solaires; la nourriture y est abondante et variée, feuilles tendres de salade, lentilles d’eau, conferves, elc ; enfin, lefondest composédesable exclusivementecalcaire. En somme, nos Limnées setrouvent dans unnmiilieudifférent de celui où elles ont vécu jusqu'alors Devenues adultes, leurs caractères ne sont plus les mêmes, leur forme devient courte, DU BASSIN DU RIONE 465 ramassée, le dernier tour de la spire est beaucoup plus carré, le bas du bord columellaire s'infléchit, le Limnæu sta - gnalis prend un nouveau faciès. Mais si l'on étudie Ja coquille avec un peu d'attention, on vait que celte transfor- mation s'est effectuée depuis le moment où elle a changé de milieu ; sous l'influence de cette nourriture plus abondante, cet accroissement est marqué à son début par une sorte de renflement visible sur la spire, et c'est à partir de ce moment que ces caractères se sont modifiés. Nous avons pu élever pendant trois générations successives ces individus, et les petits-enfants de la Limnée figurée pl. IV, fig. 33, sont représentés par la fig. 22 de la pl. HE. On voit quelle transformation complète notre type a subie pendant ces deux générations; la spire, jadis allongée comme celle du Limnæu stagnalis, est devenue courte comme celle du Limnæa elophila ; comme dans cette dernière espèce les tours, autre- fois arrondis, ont pris une forme beaucoup plus carrée, sur- tout le dernier; enfin, le bord columellaire, qui était pri- mitivement celui d'un Linmœæa elophila, est devenu con- forme à celui du Linnœæa stugnulis. Or, cette forme singulière n'est pas le résullat d'un fait anormal, car nous l'avons vue se reproduire sur un certain nombre d'individus. Nous avons done ainsi vu nos Limnées passer par les différentes phases des Limnæa slagnalis, L. turgida et L. clophila. W faudrait done en conclure que ces trois formes ne sont en définitive que le résultat des modifications que la forme ancestrale, c'est-à-dire le Limnæu slagnalis, peut éprouver lorsque l'on vient à modifier, suivant certaines données, ses conditions normales d'existence. Ce sont, non point des espèces nou- velles, mais simplement des manières d'être différentes d'un type commun susceptible de se modifier et de s'adapter d a- près la nature même des milieux où il est appelé à vivre. Ces modifications dans les Limnées du groupe de la s{agnalis 466 VARIATIONS MALACOLOGIQUES ont été observées par plusieurs auteurs, et nous voyons deson côté M. le D' Kobelt (1) nous montrer lestransfornalions qu à pu subir le Limnæa stagnalis lorsqu'on le change de milieu. Pour lui, les formes simples vivent dansles milieux les plus purs, et les formes du Limnæa elophila prennent naissance ou vivent de préférence dans les eaux vaseuses. Faudra-t-il conclure de ces faits que toutes les formes différentes que nous trouvons dans un pays donné sont le résultat d'une adaptation de formes préexistantes? nous ne le prétendons pas. Lorsque, par exemple, nous rencontrons dans les eaux du lac de Silan, dans le département de l'Ain, le Lünnœæa ra- phidia, eonnu seulement dans les cours d'eau de Ia Dalmate, nous ne pouvons affirmer s'il y a eu là une modification du Linmnoœa stagnalis, ou si plutôt quelque oiseau n’a pas apporté avec lui les germes fécondés de ce type. Mais nous reconnais - sons par voie expérimentale que certaines formes, élevées au rang d'espèces, peuventètlre obtenues par la transformation encore inconsciente d'autres espèces non moins connues. Nous disons encore inconsciente, car si nous pouvons cons- tater le résultat des modifications éprouvées par la coquille, ilne nous est pas possible de dire quelle en a été d'une ma- nière absolue la cause efficiente. En général, ces influences dues à l'habitat sont plus ou moins marquées chez certaines espèces. Dans un précédent chapitre nous avons montré comment la faune pouvait se ré- partir suivant ses conditions d'habitat ; dans la liste que nous avons donnée à cette occasion, on à pu voir que s'il existait un certain nombre de lÿpes qui ne vivent que dans un mi- lieu biea défini, il en existait un grand nombre d'autres qui peuvent vivre dans des conditions bien différentes; or nous avons remarqué ce fait, que les types dont l'habitat est cons- { 4) Kobelt, 1871, Malako:oologische Blälter, p 108. DU BASSIN DU RIONE 467 tant sont ceux dont les modifications, soit générales, soit accidentelles, étaient les moins nombreuses ; landis qu’au contraire, ceux qui pouvaient se placer dans les milieux les plus dissemblables, étaient précisément ceux qui étaient le plus sujets aux variations de toute nature. Nous citeruns comme exemple, d'un côté, les Planorbis fontanus et PI. nitidus que l'on ne rencontre jamais que dans des sources ou des fontaines aux eaux claires, limpides, froides et transpa- rentes, dont le galbe général, la taille, même les caractères subordonnés varient fort peu, tandis que les Limnæaauricu - laria et L. limosu que nous trouvons à peu près partout dans les conditions souvent les plus opposées, sont sujets aux plus grandes variations. Chez les mollusques aquatiques, l'influence des milieux se fait directement sentir et d'une facon plus énergique que chez les mollusques terrestres. Si nous rencontrons des formes si voisines les unes des autres, des types d'un polymorphisme si désolant quirendent le elassement et la détermination spé - cifique sidifliciles, c'est,croyons-nous, à cause de la diversité des milieux dans lesquels ces mollusques sont appelés à vi- vre. Outre les différences qui existent dans la nature du lit de chaque cours d'eau, nature qui peut varier elle-même plu- sieurs fois dans son cours, qu'y a-t-il de plus dissemblable que la composition chimique de ces eaux ? Si, par exemple, on analyse les eaux du Rhône à leur sortie du lac de Genève, ou après qu'elles ont recu leseaux boueuses de l'Arve, de l'Ain ou de laSaône, quelle différence ne trouvera-t-on pas dans la nalure de ces eaux ! Aussi, les espèces qui vivent dans telle ou telle partie du fleuve sont-elles différentes de celles qui s'y rencontrent plus loin. Mais ces différences sont plus gran- des encore lorsque l’on compare entre elles les eaux des marais, des élangs, des ruisseaux, des sources, des flaques d'eau elles mêmes. La nature du fond change, la quantité de 468 VARIATIONS MALACOLOGIQUES matières organiques tenues en suspension n'est plus la même, les éléments chimiques différent également ; tout, en un mot, contribue à donner à ces eaux une composition différente ; aussi ne sera-t-il pas surprenant de voir les mêmes espèces se modifier suivant qu’elles seront appelées à vivre dans tels ou tels milieux dont elles doivent emprunter les éléments nécessaires à leur propre constitution. Faut-il rappeler ces formes variées el multiples qui vien- nent se grouper autour des Linmnœæa auwriculüria, EL. linosa, L. peregra, Planorbis marginatus et linnombrable série des pelites Paludinées, sans compter toutes les espèces ou pré- tendues espèces qui en dérivent? Ne serons-nous donc pas en droit de dire que chaque cours d’eau, chaque fontaine, chaque souree possède en quelque sorte sa forme spéciale de petites Paludinées? Mais aussi, ne peut on pas admettre que le plus grand nombre de ces formes, secondaires ou acces- soires, né sont que le résultat de modifications subies par d'autres formes préexistantes ? Y a-t-il donc réellement plus de différence entre quelques-unes des Paludinelles de Pala- dilhe qu'entre la variété a/picola de V'Helix arbustorum et le type lui-même, ou entre les L'mnœæa stagnalis et L. elophila ? Et pourtant, ilest des auteurs qui admeltent comme espèces des formes qui se sont modifiées parce qu'elles vivaient dans des milieux dissemblables, alors que d'autres formes, éche- lonnées à des altitudes différentes, n’engendrent plus que de simples variétés. Ces influences ont agi à toutes les époques, et plus encore autrefois qu'aujourd'hui, puisque lors des transformations climatériques produites dans nos pays, les faunes ont élé soumises à des successions de milieux bien plus différents entre eux que ceux qui s'observent aujourd'hui dans une même région. De là, par la sélection naturelle, la création de formes aflines qui, tout en conservant des caractères tirés DU BASSIN DU RHONE 169 de la forme primitive, en différent cependant par un assez grand nombre de points pour donner lieu à des espèces nou- velles. Nous avons déjà cité, d’après M. Bourguignat, les dif- férentes transformations de l'Helix nemoralis depuis le départ de sa forme souche du grand plateau central de l'Asie jus - qu'à l'extrémité de l'Europe occidentale. Ce même auteur nous montre également le Hylinia glabra des Alpes suisses et françaises devenant successivement le Hylinia subglabra en Vendée et en Bretagne, et le fyalinia alliarii en Angle- terre. Ces formes nouvelles, ajoute M. Bourguignat (1), « bien que dérivant du glabra,sont pourtant des espèces dis- tinctes, parce que leurs caractères restent constants et inva- riables, et ces caractères resteront tels tant que l'air qu'ils respirent ne sera ni plus froid ni plus chaud, ni plus humide, tant que le sol sur lequel ils rampent ne viendra pas produire une alimentation différente. » 11 nous serait facile de multi- plier de tels exemples ; il suffirait pour cela de rapprocher les formes affines, et de suivre leur déplacement géographique. Ainsi done, une fois la fixité obtenue par la succession de plusieurs générations, les caractères de l'espèce resteront constants tant qu'aucune modilicalion essentielle ne se pro - duira dans l’état des milieux. Mais lorsqu'une des données agissantes viendra à varier, le mollusque, sous cette influence nouvelle, pourra éprouver des modifications d'autant plus grandes, d'autant plus profondes, que les inilieux eux-mêmes seront davantage modifiés. Alors, de l'espèce naitront des variétés de fixité relalive, jusqu’à ce qu'à leur tour, et tou- jours en vertu de ces mêmes lois de sélection, elles arrivent, soit à un type nouveau et complètement fixe, soit à un re- tour à la forme primitive. Mais, dira-t-on, avec de pareilles données pourquoi n’ar- (1) Bourguig rat, 1858, du Moitisser, Hist. malac, du départ. &> l'Hérault, p.101. 470 VARIATIONS MALACOLOGIQUES rive-t-on pas à un polymorphisme complet, absolu? Comment existe-t-il encore des formes que l'on peut distinguer, des variétés que l’on peut classer, des espèces que l’on peut dé- terminer ? C’est qu’au milieu de cette multiplicité de causes cfficientes qui se réunissent pour modifier l'être, il en est. qui se combattent les unes les autres et finissent par appor- ter un certain équilibre dans les perturbations que chacune d'elles occasionnerait si elle agissait seule. Les formes acci- dentelles, les modifications purement individuelles finissent toujours par céder devant des lois plus générales, s'appliquant à l'ensemble de la colonie; les formes dominantes seules subsistent et tendent à se perpétuer. Avec leurs déplacements lents, leurs habitudes sédentaires, les mollusques arrivent à s'adapter complètement avec les milieux où ils ont élu domicile. De là cette fixité relative se propageant et se per- pétuant dans la colonie, sauf à subir plus tard peut-être de nouvelles modifications siles conditions de l'habitat viennent encore à leur tour à se modifier, XIII TÉRATOLOGIE MALACOLOGIQUE De la térétologie chez les mollusques. — Anomalies, — Monstruosilés. — Corrosion du test. — Fractures du test chez les coqui les non adultes. — Fractures du test chez les coquilles adul- tes. — Fractures du test avec lésion de l'animal. — Discontinuité dans les tours de la spire. — Etrauglement dans les tours de Li spire. — Détachement du péristome. — Canaliculation suturale. — Hypertrophie. — Hypersecrétion aperturale. — Colorations ac-identelles, —Atro - phie. - Hypertrophie. — Anomalie de coloration du test, — Auomalie de coloration dermale, — Scalarisme et pseudoscalarisme. — Rac ourcissement de la spire. — Déviation de l'axe, — Anomalies ombilicales. — Anomalies daus la structure superficielle. — Accidents locaux. — Inversions. — Dextrorsité et sinistrorsilé. — Dicéphalie, La tératologie a pour objet l'étude des individus qui pré- sentent des caractères différents et particuliers tels, qu'ils constituent, par cela mème, soit des anomalies, soit des monstruosités. Sans que la cause de la plupart des cas téra- tologiques simples ou complexes soit encore connue, il est arrivé plusieurs fois que quelques-uns de ces cas ont été considérés soit comme des espèces nouvelles, soit comme des variélés de types déjà existants. Il importe donc de les étudier plus spécialement à ce point de vue, et de faire voir que les cas isolés, anormaux, auxquels sont sujets tous les êtres de la nature, ne sont, en définitive, que des formes maladives, irrégulières , passagères, dont il ne faut tenir compte que dans le cas où par l'hérédité, elles viendraient à 472 VARIATIONS MALACOLOGIQUES transmettre à leurs descendants une partie de ces caractères. Dans cette hypothèse seulement, les variations tératologi- ques, agissant à la longue sur le type, finiraient par le mo- difier progressivement, de façon à donner lieu plus tard à des formes nouvelles présentant les caractères de fixité propres à l'espèce. Les cas tératologiques sont très fréquents chez les mol- lusques, et nousavons pu en observer un assez grand nom- bre dans notre région. Ils portent sur l’animal et sur sa co- quille; mais, ainsi que nous l'avons fait observer à propos de l'étude des variations en général, de mêème-qu'il est fort difficile de faire des observations sur le mollusque lui-même, de même aussi ne counaissons-nous qu'un nombre de cas fort restreints de monstruosités ou d'anomalies portant ex- clusivement sur la partie animale de l'être, tandis que par l'étude des collections si riches et si nombreuses qui ont été faites dans notre région. nous avons pu constater l'existence d'un assez grand nombre de cas tératologiques dans l’enve- loppe testacée des mollusques, c’est-à dire dans la coquille. Avant d'aborder la question, nous tenons à faire observer le fait suivant, dont nous ne trouvons pas lexplication, et sur lequel nous appelons lattention des naturalistes. Les cas tératologiques sont bien plus fréquents chez les espèces con- tinentales, terrestres et aquatiques que chez les espèces marines. Chez ces dernières, on peut trouver des modifica- tions générales, comme dans la taille ou la coloration par exemple, suivant que l'on observe ces mêmes espèces dans telle ou telle région, mais les cas d'anomalies et de mons- truosités sont relativement rares. Chez les mollusques con- tinentaux, le nombre des espèces présentant des cas téra- tologiques est notablement plus considérable chez les mol- lusques terrestres que chez les mollusques aquatiques. Il est probable qu'il y là une influence des milieux toute particu- DU BASSIN DU RHONE 475 lière qui s'exerce plus facilement, plus fréquemment chez les mollusques terrestres que chez les mollusques aquati- ques. Ainsi par exemple on verra plus loin qu'il existe un grand nombre de nos espèces terrestres dont la coquille normalement dextre devient sénestre accidentellement. Ce cas est bien plus rare chez les mollusques aquatiques, soit d’eau douce, soit d'eau salée. I existe bien chez ces derniers un certain nombre de formes qui sont tantôt dextres, tantôt sénestres, mais nous voyons ces mêmes cas se présenter chez des espèces lerrestres exotiques. Peu d'auteurs se sont occupés d'une manière particulière de la tératologie des mollusques. Geoffroy-Saint-Hilaire, Virey, de Blainville, Moquin-Tandon, etlc., ont traité la ques- tion à un point de vue plus ou moins général; mais Carlo Porro (1) pour les Gastéropodes, Picard (2) pour les Unios, C.Roumeguère (3) pour les mollusques du Midi de la France, sont à peu près les seuls auteurs qni aient un peu appro- fondi la question. Nous nous proposons, dans ce travail, de reprendre les études du grand malacologisle italien si pré- maturément enlevé à la science, en cherchant à compléter ses données, et en y faisant rentrer les cas tératologiques que peuvent présenter les Lamellibranches. Mais il importe, avant d'aller plus loin, de définir d’une facon précise ce que l’on entend par anomalies et par monstruosités. Tonte déviation du type spécifique, a dit Geoffroy-Saint- Iilaire (4), ou en d’autres termes, toute particularité organi- que que présente un individu comparé à la grande majorité (1) Carlo Porto, 1879 Studii su lalun°’ variazioni offèr!e dei Molluschi fluvialili e ler- restri &« conchiglie univalve. (2) Picard, 1840. Mémoire sur les déviations dans le genre Unio, în Jem. soc. Linn. du Nord. (3) Roumeguère, 1858. Des anomalies des mollusques et en particulier des anomalies observées chez les mollusques des environs de Toulouse. (4) Geoffroy Saint-Hilaire, 1837. Histoire générale et particulière des anomalies de l'or- ganisation chez l'homme el Les animaux. VAR. MAL. T. II. a1 474 VARIATIONS MALACOLOGIQUES des individus de son espèce, de son àge, de son sexe, consli- tue ce qu'on peut appeler une anomalie, c’est-à-dire un cas tératologique. Gette définition, incontestablement la plus générale et la plus complète, fait rentrer dans le cadre des accidents tératologiques tout sujet qui, par suite d’une cause quelconque, naturelle ou artificielle, interne ou externe, continue ou passagère, le fait différencier en quoi que ce soit du type normal auquel se rattachent ses congénères. Mais ces cas tératologiques, sans en chercher la cause première, peuvent être simples ou complexes, si l'on ne con- sidère que l'effet résultant. De là une classification première suivant le degré de la déviation. Les cas tératologiques sim- ples ont reçu le nom d'Hémitérie etles cas complexes, ceux que d'Aéterotaxie et de Monstruosilé. Les Hémiléries ont des anomalies simples, légères, peu graves, n’affectant pas d'une facon radicale le système anatomique, et ne ‘constituant en somme que des variétés ou sous-variétés capables de 8e reproduire et de se perpétuer dans l'espèce. Si ce genre d’ano- malie s'élève d’un degré, tout en restant une Hémitérie, il constitue un vice de conformation si par son développe- ment il met obstacle à l’accomplissement d’une ou de plu-. sieurs fonctions. Dans la première partie de ce travail, ce sont ces modifications dans l'espèce que nous avons désignées dans nos descriptions sous le terme général d'Anomalies. Les Hétérotaxies sont des accidents tératologiques complexes, donnant lieu à des modifications anatomiques considérables, mais qui ne constituent cependant pas un obstacle à l'accom- plissement normal de toute fonction. Les Hétérotaxies pro- cèdent le plus ordinairement d'une inversion des organes se traduisant par un changement dans le mode normal d’'en- roulement des mollusques Gastéropodes, ou par un dépla- cement symétrique dans la coquille des Lamellibranches, Enfin, les Monstruosilés sont les résultats de déviations DU BASSIN DU RINONE 475 plus complexes, internes ou externes, troublant l'ordre nor mal de la constitution anatomique par une complication spé- ciale dans un ou plusieurs organes; de pareils cas en mala- cologie se traduisent toujours par des modifications plus ou moins apparentes dans l'animal. Ces définitions, telles que les avait comprises Geoffroy Saint-Hilaire, s'appliquent surtout à ce qui concerne l'animal lui-même. Mais, comme chez les mollusques l'ouverture, ou plutôt la coquille, joue un rôle des plus importants par rap- port au faciès général de l'être, les Hétérotaxies doivent ren - (rer dans le cas des Monstruosités. C'est ce que nous avons admis dans la première partie de cet ouvrage. Et, en elfet, une inversion des organes chez le mollusque, entraine en méme temps une inversion dans le sens de l'enroulement de la coquille, de telle sorte que son faciès est entièrement change; c'est une déviation aussi complète que possible ; c'est par conséquent une véritable Monstruosilé. En résumé, nous avons classé dans les Anomalies toutes les déviations simples du type constituant, soit des cas assez généraux pour donner lieu à des variétés ou sous-variéles définies, comme l'albinisme, le mélanisme, ele., soit des vices de conformation individuelle, tels qu'une érosion de la co- quille, une disjonction des tours de spire, un aplatissement des tours, etc. De même, nous avons appelé Monstruosite, toute modification complexe dans la coquille, tels que chan- gement de direction dans le mode d'enroulement ou inver- sion, les cas de scalarité, etc. Ces divisions, appliquées d'une facon générale par Geof- froy Saint-Hilaire à toute l'échelle zoologique, ont été plus tard restreintes aux études des anomalies des Gastéropodes, par Carlo Porro. Il divise ses Variazioni en deux groupes qu'il nomme modifications ou anomalies, suivant qu’elles sont oc- casionnées par des agents étrangers ou par des causes ex- 476 VARIATIONS MALACOLOGIQUES ternes. Nous ne saurions mieux faire que de retracer ici une traduction de son tableau systématique qui ne comprend pas moins dé vingt cas particuliers et bien définis auxquels se rattachent, non seulement la plupart des cas tératologiques des mollusques Gastéropodes comme l'avait compris Carlo Porro, mais encore les anomalies et monsiruosilés des La- mellibranches. Nous le faisons d'autant plus volontiers, qu'il est maintenant assez difficile de se procurer le travail déjà un peu ancien de cet auteur. ; { Simple corrosion de la coquille. Avec action | SC Simple fracture. \ jeune Sn localisée : s 85 de la coquille | adalte Die > . . [Ep | Lésions de l'animal. FEU : : m Æ«æ\ Avec action ee rs ; : e prolongée au Discontinuilé des tours de spire. 2 £f dela du point } Détachement du péristome. er] lésé Canaliculation. = Surexcitation vitale. L 2) Colorations accidentelles. = 2 Dans une partie \ atrophie S = | de la coquille | hypertrophie « | X Dans la coloration | purement dermale Fr u a G ‘ar n nf! 1 ip « D 8 = Sue ou l'ornementation | inhérents au test Li TANT E ay © = « x ue a & [= variété de la spire | dépression EU Dans le diamètre de la spire. 2 Dans la structure superficielle. A Dans les accidents Penn e } hétérotaxie { inversion générale. | pes comp. { monstruosité | dicéphalie Nous avons cru devoir adopter dans ce travail le mode de division établi pour les cas tératologiques dans ce tableau. Nous nous bornerons à rappeler que nous avons appelé Mons- lruosités les cas d’allongements exceplionnels de la spire, d'in- versions générales et de dicéphalie, tous les autres cas consli - tuant des Anomalies plus ou moins complexes. Nous exami- nerons chacun de ces cas en prenant des exemples dans les faunes de notre région. DU BASSIN DU RHONE A Quant aux causes générales de ces accidents tératologi- ques, il faudrait les rechercher pour chaque cas particulier. Presque toujours elles ont pour origine une exagération des différentes influences qui peuvent agir sur les mollusques pour engendrer des variétés dans leur manière d'être. Aussi, tout ce que nous avons dit dans le chapitre précédent, relati- vement aux influences des milieux, s'applique tout aussi bien, comme nous allons le voir, pour la plupart des cas téralo - logiques. Souvent aussi, il faut rechercher dans des causes purement accidentelles ou de passage, l'origine d'une forme anormale, ou mème d’une monstruosité ne s'appliquant plus alors qu'à un seul individu. 1. Corrosion pu Tasr.--Chez un certain nombre de mol- lusques, mais surtout chez les mollusques aquatiques, on observe que le test est plus ou moins corrodé. Les espèces à Lest le plus épais, comme cerlaines Unios par exemple, sont celles qui présentent les érosions les plus profondes ; mois tant que l'animal vit, elles n'arrivent jamais jusqu'à l'attein- dre : ilreste toujours pour le protéger une mince couche de nacre, parfois même presque pellieulaire, qui le préserve du coniact de l'air et de l'eau. Ces érosions sont de diverses natures : parfois elles agissent seulement sur l'épiderme de la coquille et le font disparaitre par places. Nous avons signalé des Jielix hortensis dont le test paraissait couvert de taches blanchâtres résultant de la disparition locale de l'épiderme ; nous avons cru devoir attribuer ce fait à l'action corrosive de l'acide oxalique, nos Hélices vivant en colonies nombreuses près de plates bandes d’oseille sous lesquelles elles se ca - chaient. Parfois, au contraire, ces érosions du test sont beaucoup plus profondes et se présentent alors sous forme de plaques plus ou moins grandes, irrégulières, apparaissant sur toutes 478 VARIATIONS MALACOLOGIQUES les parties du test, tantôt localisées sur le sommet de la co- quille, tantôt se manifestant sous forme desillons irréguliers, profonds, à bords bien définis. Les érosions générales du test s'observent surtout chez les Bivalves, et plus particulièrement chez les Unios. Toutes les espèces de ce genre peuvent ètre corrodées, mais il en est qui le sont plus fréquemment que d’autres. Ainsi, les Unio crassus, U. aler, U. Moquinianus, etc., sont plus souvent corrodées que les U. pictorum et U. Requieni. On serait presque en droit de dire que les formes les plus épaisses sont ordinairement les plus corrodées. Ces érosions générales sont ordinairement plus apparentes vers les sommets; ceux- ci sont en quelque sorte décorliqués. Dans certains cours d’eau, surtout ceux qui sont un peu rapides et dont le fond es! sablonneux plutôtque vaseux, presque toutesles coquilles, méme les jeunes, présentent ces phénomènes de décortiea- lion. La corrosion des sommets s’observe également chez les Gastéropodes ; nous citerons le cas assez fréquent des Helir villosa, H. circinnala, ete. dont le sommet est comme dé- nudé ; l'épiderme disparait avee l’âge dans celte partie de la coquille qui prend alors un air de caducité. Nous voyons ce même fait chez les Limnées du groupe des Limnœæa limosa, L. peregra et L. slagnalis ainsi que chez les Nerilina fluvia- tilis, Vivipara [asciala, etc. Enfin, nous observons également, soit chez les Bivalves comme les Unios, soit chez les Gastéropodes comme les Limnées, que la surface extérieure du test peut être recou- verte de sillons irréguliers, parfois assez profonds qui se diri- gent dans tous les sens, mais presque sans ramificalion; par- fois ce sont de simples creux de forme irrégulière, mais alors non sillonnés et toujours à bords presque droits. Ces sillons ou ces creux peuvent exister, soit sur des parties saines de DU BASSIN DU RIIONE 479 la coquille, soit sur des parties largement corrodées et plus volontiers vers le sommet des Bivalves. Différentes explications ont été données pour interpréter ces érosions du test. Pour M. Gassies (1), pareil phénomène serait du à l'action d'un petit myriapode aquatique qui ronge - rait la coquille en se cachant dans le sillon. De même aussi, l’éelosion des embryons de Bivalves ou de Néritines dont les œufs auraient été déposés sur les valves des coquilles, pour - raitdéterminer uneexcoriation du test. Selon M. P.Fischer (2), les mollusques eux-mêmes, privés de calcaire, finiraient par ronger le test d'autres mollusques pour y prendre la quantité de matière nécessaire à la formation comme à l'en- tretien deleur propre coquille. Des expériences faites à ce su- jet sur des Limnées par ce savant naturaliste, paraitraient confirmer ce fait. Aussi n'hésiterons-nous pas à admettre cette explication pour le cas des corrosions générales ou par places chez ces mollusques. Mais nous conserverons quel- ques doutes sur la probabilité de cette explication lorsqu'il s'agit des sillons ou des creux réguliers souvent si profonds qui existent chez certains mollusques. Quoique l'on ne con- naisse pas encore ce myriapode cité par M. Gassies, nous croyons volontiers qu'un animal seul, agissant à la facon de certains myriapodes marins, peut délerminer ces sillons si nets des mollusques aquatiques. Celle idée de l'érosion du test des coquilles par un animal n'est, du reste, pas nouvelle. Brard (3) l'attribuait à un ver Bouillet (4) y voyait l'action d'un insecte. Plusieurs auteurs ont admis l'intervention d'un parasite, mais personne encore na pu le voir nile décrire. (1) Gassies, 1849. Tableau mélodique et descriptif des mollusques de l'Agénuis, p. 467. (2) P Fischer, 1852. Note sur l'érosion du têt chez quelques coquilles fluviatiles univalves, in Journ. de Conch., 1, II, p. 303. (3) Brard, 4815. Historre des coquilles, p. 135. A (4) Bouillet, 1836. Cuta'ogue «les mo'lusques de 'Auve rgne, p. CS. 480 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Ces érosions du test ne doivent pas être envisagées com- me un caractère ; chez les Unios, par exemple, pareil fait ne présente aucune fixité; de mème que quelques formes ont plus souvent leurs sommets décortiqués que d’autres, de même aussi celte décortication parait-elle plus fréquente dans certains cours d'eaux que dans d’autres; de même aussi, dans un même cours d'eau donné voit-on en certains points des colonies entières fortement corrodées, tandis que plus loin en amont ou en aval, on trouve les mêmes espèces parfaitement saines. La Chalaronne dans l'Ain. la Drée et l'Arroux dans Saône- et-Loire nous ont souvent présenté des coquilles corrodées, tandis que d’autres affluents roulant sur un même lit nous ont donné les mêmes espèces parfaitement saines; ce fait est encore une des raisons qui nous fontsupposer l’interven- tion d'un animal parasite venant ronger les coquilles de cer - taines colonies, tandis que des colonies voisines en sont exemptes. Chez les Limnées on s'est servi bien à tort de ce caractère d'érosion des coquilles pour les diagnostiquer. Si certaines formes sont plus souvent sujettes à ces sortes d’érosions, il en est d’autres qui peuvent les présenter ou non, indistinc- tement. Buvignier, en définissantle Limnœæu truncala (1) des environs de Verdun, fait entrer ces caractères d’érosion dans sa diagnose (passim decorticata). De mème dansnotre région, M. de Mortillet (2) a décrit un Linmnæzx corrosa dont la spire est « généralement toute rongée et la coquille parfois horri- blement déformée par des corrosions se trouvant sur divers points, surtout vers la partie columellaire et ombilicale ». Mais on trouve également des Limnæa stagnalis dont le test est normalement lisse, brillant et uni, qui sont, dans cer- (1) Buvignier, 1833. Description d'une nouvelle espèce de Limnée, (2) Mortillet, 1860. Annexion à la faune malucologique de France, p. 6. DU BASSIN DU RHONE 481 laines colonies, complètement corrodés. Ordinairement les Limnées qui présentent celle particularité appartiennent à des colonies qui sont exposées à passer un certain temps presque à sec, enfouigs dans la vase ; en outre presque tou - jours elles ont leur test plus ou moins encrouté de matières terreuses ou cryplogamiques, tantôt brunes, tantôt ocreuses; mais nous n'avons jamais observé Ces érosions dans des colonies de Limnées vivant dans des conditions normales. Nous estimons donc que ces phénomènes de décortication, chez les Gastéropodes comme chez les Bivalves, sont pure- ment accidentels, et constituent une réelle anomalie, non pas purement individuelle, puisqu'elle peut atteindre toute la colonie; cette anomalie peut en quelque sorte devenir héré- ditaire, puisque les descendants seront soumis aux mêmes influences que leurs ancètres, Ces érosions chez les coquilles des eaux dormantes ou des eaux qui se dessechent pendant l'été peuvent avoir une cause mécanique bien définie. Certains cryptogames aquali- ques des genres Chætophora, Balrachospermum déposent sur le test leurs germes entourés d'un encroùtement calcaire. Ainsi que l’a fait observer M. le docteur Fischer, dans le moindre fendillement de l'épiderme amené par la chaleur, il se glisse des germes de ces petites plantes, qui en se déve- loppant, le font éclater et produisent des érosions irréguliè- res souvent considérables (1). 2° FRACTURES DN TEST CHEZ LES COQUILLES NON ADULTES. — Les Mollusques lorsqu'ils sont jeunes et que leurs coquilles sont plus fragiles et plus délicates, sont souvent sujets à des fractures plus ou moins profondes qui se traduisent ensuite sur le test de diverses manières ; le coup de bec d'un oiseau (1) P. Fischer, 1852, Note sur l'érosion du test, etc., in Soc. Linn. Bordeaux, p. 309. 482 VARIATIONS MALACOLOGIQUES qui cherche à briser la coquille pour prendre l'animal, la chute d'une branche d'arbre ou de tout autre corps, l'intervention même de l'homme ou le pas d'un animal peuvent occasion- ner ces lésions dans la coquille. Mais si l'animal n'a pas été blessé, il séerète rapidement une nouvelle quantité de matiè- re calcaire et se hâte de réparer le mal causé à sa demeure. Ces réparations se font souvent avee une extrême rapidité ; deux ou trois jours quelquefois suffisent pour recoller mème assez solidement les parties brisées de la coquille; si plus (lard, lorsque l'animal est devenu adulte, on observe celte mème coquille, on remarquera qu'à l'intérieur il ne reste au- cune liace de la fracture, pas la moindre solution de conli- nuité, tandis qu à l'extérieur, il subsistera des renflements, des brisures, parfois très singulières. Nous avons fail figurer pl. [, fig. £et 5, un {felix aspersa qui avait dù subir un acci- dent de ce genre, et qui s'était refait toute une portion du dernier tour; à l'intérieur, la coquille était lisse et normale, tandis qu'à l'extérieur, il subsistait une différence de niveau considérable entré la parlie ancienne de la coquille et la parlie nouvelle. | Nous nous sommes livré à ce sujet à quelques expérien - ces assez curieuses qu'il est bon de citer, et qui prouvent de quelles facilités sont doués les mollusques pour refaire mème assez rapidement les parties de leur test qui ont été brisées ou détériorées. Nos expériences ont ssrlout porté sur de jeunes individus de l'Helix aspersa des environs de Lyon, espèce forte el robuste, bien capable de résister à ces sortes de mulilations. Dans un jeune individu, nous avons fait pratiquer à l’aide d'une lime triangulaire appelée tiers -point une fente longitu - dinale de près de 2 centimètres de longueur recoupée par une série de fentes transversales plus petites ; ces fentes traver- saient la coquille de facon à arriver jusque contre l'animal. DU BASSIN DU RHONE 483 Au bout de six à huit jours l'animal avait sécrété une certaine quantité de matière testacée nouvelle masquant ces fentes à l'intérieur; quand les coquilles sont devenues adultes, les fentes se sont agrandies à l'extérieur, tandis que dans la co- quille il n’en subsistait d'autres traces que celle d’une colo- ralion un peu plus foncée de la nacre. Dans un autre individu, on a pratiqué à l’aide du même instrument plusieurs fentes longitudinales; puis au-dessus on a fixé un corps étranger, un Chondrus tridenxs par exemple: comme dans l'expérience précédente, l'animal a sécrété in- lérieurement une nouvelle quantité de matière nacrée, qu' est venue former autour du Chondrus comme une cloison, mais de telle façon qu'il est toujours resté apparent à l'exté- rieur de la coquille, tandis qu’à l'intérieur la cloison nouvelle s'étend sur une assez large portion de la coquille, de facon à former une saillie non pas brusque, mais à bords dégra-- dants, de telle sorte que l'animal ne paraissait nullement géné dans ses mouvements. Nous n'avons pu oblenir de saillies brusques dans l'in- térieur de la coquille par suite de l'intervention de corps étrangers, que lorsque ces corps étaient situés dans le voisi- nase du péristome. Ainsi, ayant découpé sur le dernier tour une partie de la coquille en forme de fer à cheval large de 15 à 18 millimèlres, et dont la partie arrondie élait placée près du péristome, nous avons fait infléchir à l'intérieur de la coquille cette partie du fer à cheval en introduisant entre elle et le reste de la coquille un gravier haut de 2 muilli- mètres. Quand l'animal est devenu adulte, nous avons cons- Laté que la matière testacée qu'il avait sécrélée à l'intérieur faisait suile aux parois normales, tandis que dans la partie voisine du péristome il avait laissé subsister la saillie formée par la partie rentrée de sa propre coquille. Enfin, dans ce mème ordre d'idées, si l'on fait traverser de 484 * VARIATIONS MAL\CCLOCIQUES part en part la coquille par un corps étranger placé de telle facon qu'il ne blesse pas l'animal, mais qu'il se contente de le gèner plus ou moins dans ses mouvements lorsqu'il se retire dans sa coquille, on observe encore que la sécrélion calcaire est d'autant plus abondante et que la blessure s’avance plus profondément à l'intérieur de la coquille ; l'animal cher- che d'autant mieux à la masquerqu'elle est plus loin du péris tome. : Dans une autre expérience, après avoir enlevé proprement sur deux /elix aspersa une surface de la coquille équiva- lente à environ un centimètre carré, nous avons raltaché ces deux coquiiles, de facon à forcer les deux mollusques à vivre ensemble. Tous deux sont devenus adultes, et à la facon des fameux frères siamois, en vivant de conserve, parfailement soudés à l’un à l'autre. Mais chose assez singulière, dans plusieurs groupes ainsi formés, un seul individu paraissait s'être chargé de faire la réparation commune aux deux de- meures. Avant ainsi accolé un Helix aspersa avee un Helix nemoralis, tous deux, jeunes au moment de l'opération, sont ensuile devenus parfaitement adultes, et il ne reste entre eux danses parties mises en contact qu'une mince et unique cloison presque lransparente, sécrétée par le plus robuste. Ces mutilations n’empéchent pas, comme on le voit, le péristome et ses parties accessoires de se former quand l'ani- mal devient adulle; nous nous en sommes assuré par l’ex- périence suivante. Un jeune Jelix aspersa à eu son dernier tour détaché à la suture sur une longueur de près de 2 cen- limèlres, puis le sommet ayant élé brisé, ona introduit dans la fente la coquille d'un Helix ñemoralis de telle facon que sa coquille senroulait en sens inverse, ou que les deux ouvertures étaient en opposition suivant un même diamètre. L'animal soumis à ce régime a paru d'abord souffrir un peu; puis il a repris de la vigueur, et s’est développé à la fois dans . DU BASSIN DU RHONE 185 les deux coquilles; le torlillon s'est logé dans le sommet de l'Aclix nemoralis, tandis que lAelix aspersa suivait son dé- veloppement normal. Une fois adulles, nous avons pu voir que non-seulement les deux coquilles étaient parfaitement soudées, mais même que le léger callum particulier à l'Helix aspersa S'élait formé sur l'Helix nemorals de telle facon que la partie du péristome voisin de la columelle s’étendait à la fois sur les deux coquilles. Dans cet exemple, le péristome n'élait pas gèné dans son développement, eb ila pu arriver à son état normal une fois que la coquille à atteint l’âge adulte. Mais il n’en est plus de. mème lorsque l’on veut lui imposer certaines modificalions qui lendent à le dénaturer; alors il se développe mal, et ne forme plus ce bourrelet caractéristique qui termine la coquille à son ouverture chez l'Alelix aspersa. Nous nous en sommes assuré de la manière suivante. Dans l'intérieur de la coquille bivalve d'un Venus verrucosa de la Méditerranée , nous avons introduit une coquille jeune de l’/Lelix aspersa, et nous avons maintenu un écartement constant entre les deux valves bällantes. En devenant adulte, notre Gastéropode s'est trouvé pressé; aussi n'a-t-il pas acquis lout son développe- ment; mais si nous étudions le péristome, nous voyons quele bord columellaire est normal, parce qu'il n’était pas géné dans son développement par les valves du Lamellibranche ; dans la partie bâillante, le péristome s’est traduit par un dévelop - pement du test irrégulier, rugueux, boursouflé à l'extérieur. lisse comme toujours à l'intérieur, mais mince, {ranchan!, quoique solide; enfin dans les parties qui se sont trouvées en contact avec les deux valves de la Vénus, il s'est formé un dépôt lestacé qui fait corps avec la nacre du Bivalve. et tel que lon ne distingue plus de solution de continuité entre Les bords de l'ouverture du Gastéropode et Ia partie en ontact des deux valves du Lamellibranche. Les deux matiè 486 VARIATIONS MALACOLOGIQUES res nacréc ou leslacée se sont confondues, et cependant l'une était celle d'un Gastéropode terrestre, tandis que l'au - tre appartenait à un Lamellibranche marin ! R C'est à ce mème ordre d'expériences qu'il faut rattacher les curieuses monstruosilés artificielles qui ont eu cours à un moment donné dans les éludes malacologiques. En 1853, Petit de la Saussaye figurait dans le journal de Conchyliologie (1) un Limnæa staqnilis dans l'intérieur du - quel était logé un {elix aspersa. Depuis, MM. Gassies (2) et Caillaud (3) ont indiqué la facon dont il fallait procéder pour obtenir de pareils résultats. Nous ne reviendrons pas sur ces singulières expériences, faciles à réfuter, et qui ne sont, à l'instar du fameux rat à trompe fabriqué par nos zouaves, qu'un objet de curiosité; elles prouvent cependant la facilité qu'ont les mollusques de pouvoir sécréler à un moment donné une certaine quantité de matière testacée pour réparer leur coquille lorsqu'elle à été brisée. Ce quenous venons de dire pour les Gastéropodes s’ appli- que parfaitement aux Lamellibranches ; on trouve, en effet, parfois des Unios ou plus volontiers des Anodontes dont la coquille, lorsqu'elle était mince, a recu des fractures plus ou moins graves dont elle porte les cicatrices; l'animal a ré - paré sa demeure, mais il reste des traces plus ou moins profondes de l'accident. Ici, comme le mollusque n’a pas à sorlir de sa coquille, la réparation qu'il lui fait subir est tout aussi apparente à l’intérieur qu'à l'extérieur ; l'intérieur est bien couvert de nacre, mais on y voit une saillie qui ne pa- rait pas gèner le mollusque plus que quand des perles sont (1) Pelit dé la Saussaye, 185$. Note sur une coquile ayant en mé.ne temps l'apparence d'un tlélice et d'une Limnée, x Journ. de Concn., vol, IV, p. 409. (2) Gassies, 1838. No'e sur la préleudue introduelion d'un mollusque dans la coquille d'un autre. tn Journ. de Couch,, vol. NEIL, p. 44. (3) Caillaud, 1858. Des monstruosités chez divérs mollusques, è% Journ. de Conch., L&. NI, p- 226. DU BASSIN DU RHONE AS7 logées, soit sur la coquille, soit dans son manteau. Nous avons vu une Anodonte dont les deux valves portaient des traces de deux brisuressymétriques, situées l’une au-dessus de l’autre, faites sans doute par la pince d'un crustacé; la coquille étant ensuite devenue plus grande, on y voyait, à l'extérieur, deux cavités assez profondes répondant à deux saillies intérieures qui devaient, en cet endroit, comprimer le manteau. La réparation du test ne se fait donc pas chez les Lamellibranches de la même facon que chez les Gastéropodes, puisque chez ces derniers, leur grand soin consiste à faire disparaitre ou à atténuer loute saillie quipouvait occuper un trop grand espace dans l'intérieur de leur coquille. Enfin, lorsque la brisure a lieu sur le bord des valves il y a ralentissement dans l'accroissement général jusqu’à ce que cette partie soit réparée ; mais malgré cela, quand l'ac- eroissement général reprend son cours normal, il subsiste loujours, au pointlésé, une trace de l'accident primitif, de telle facon, que lorsque la coquille a acquis tout son développe- ment, il s'est formé dans cette partie un sillon dans le sens des stries d'accroissement, sillon qui sera d'autant plus grand, d'autant plus prononcé que la blessure aura été plus profonde. Si, dans un Unio piclorum ou U. Kequieni, on détache de la partie inférieure des bords quelques fragments de la coquille limités par des stries d’accroissement, on aura plus tard un individu à bords sinueux comme l'Unio sinuatus par exemple. Un cas fort curieux de fracture avec pénétration, est celui qui est produit par deux coquilles accolées pendant l'hiber- nation. Souvent les Hélices, surtout lorsqu'elles sont déjà malades où qu'elles ne sont pas en élat-de sécréter un épi- phragme, se fixent l'une contre l'autre et s'accolent bouche à bouche. Deux Hélices hibernant de celte façon, s'accolèrent de telle sorte que l'une était fixée sur le bord droit etl'avant- dernier tour de l'autre ; la première étant morte sans cesser 488 VARIATIONS MALACOLOGIQUES d être adhérente, la seconde a continué à se développer sans se débarrasser de sa compagne, et leurs deux Lesls se sont en- tièrement entrelaces: devenu adulte, son bourrelet s’est formé, mais sans que le bord droit püt rejoindre la columelle, par suite de la présence de la coquille étrangère; elle fut ainsi obligée de se servir d’une partie de lautre coquille en qualité de columelle en la recouvrant d'une mince callo- sité (1). On peut expérimentalement obtenir le mème résultat. Il suffit, comme nous l'avons fait, de fixer près de l'ouverture d'une coquille encore jeune une autre coquille dépourvue de son animal, de telle facon que le péristome de la coquille vi- vante soit en contact, vers la suture, avec Ia coquille morte. A mesure que la première croitra, il y aura pénétration plus ou moins profonde des deux tests l’un dans Fautre, avec une soudure intime des deux coquilles. 32 FRACTURES DU TEST CHEZ LES COQUILLES ADULTES. — Lors - que des fractures ont lieu chez des coquilles adultes, deux cas peuvent se présenter : où bien ces fractures portent sur Île péristome ou toute autre partie de l'ouverture, ou bien elles sont faites sur une portion quelconque du reste de la co- quille. Dans ce dernier cas, l'animal se hâte de réparer l’ac- cident comme nouslavons vu faire lorsqu'il était plus jeune : mais s’il est vieux déjà, il ne sécrétera plus qu'une mince pellicule suffisamment capable de cacher sa blessure à l'inté- rieur; celle réparation, si elle a lieu à l'automne, se fera au détriment de lopercule, et si des froids un peu vifs survien - nent, l'animal mal protégé ne tardera pas à périr. En géné- ral, siles blessures dans les coquilles, même les plus com- plexes, présentent peu de gravité lorsque l'animal est jeune Mélanges de Conchyliologie, 4 Actes Soc, Lin. de Bordeaux, L. XX, pl. #4, fig. 373. DU BASSIN DU RIONE 489 etqu il peul, sans s'épuiser, sécréter une assez grande quan - tité de matière testacée, il n’en est plus de même une fois qu'il est adulte et qu'il a acquis tout son développement ; à ce moment, de pareils accidents prennent aussitôt un c:- ractère de gravité tout spécial qui peut entrainer la mort. Mais lorsque les fractures s'exercent dans les jarties voi- sines de l'ouverture, on dirait que l'animal, même adulte, retrouve une nouvelle vigueur pour réparer le préjudice qui lui est occasionné. On en a la preuve dans l'expérience sui- vante: si l’on enlève une proportion égale de test, dans l’ou- verture d'un Helix aspersa de manière à léser le péristome, et dans l'avant-dernier tour par exemple, on observera que le mollusque sécrète tout d'abord une couche mince qui le pro - tégera dans celle dernière partie de la coquille ; mais plus lard, la quantité de matière sécrétée à l'ouverture sera en somme plus considérable que celle qui aura été fixée sur l'a - vant dernier tour. C'est qu'en effet, ce qu'il importe au mol- lusque, c'est d'avoir d'abord son corps à l'abri du contact de l'air, mais surtout de pouvoir se servir de lextrémité du dernier Lour pour s'y loger à son aise, s'y retirer assez pro- fondément et se clore avec sou diaphragme ou son opereule. Quand on enlève à un Gastéropode adulle et à ouverture simple son péristome, il reforme bientôt un nouveau péri- stome, mais celui ei n'est jamais aussi nellement forme que le premier; bien souvent le second péristome n'est plus qu'un simple bourrelet plus ou moins épais, lisse à l'intérieur, mais rugueux, irrégulier, comme boursouflé à l'extérieur; tantôt son bord extrème s'infléchil et se recourbe à l'extérieur en forme d'entonnair, tantôt au contraire il reste droit et coupant comme celui d'un Zonite où d'une Hvalinie. Chez un /lelix aspersi adulte, ayant, par conséquent, se: péristome parfaitement formé, nous avons détaché à 6 milli - mètres de ce péristome une bande de près de 3 centimètres VAR. MAL. T, NH. 32 490 VARIATIONS MALACOLOGIQUES de longueur-et sur toute la hauteur de ce dernier tour; toute une partie de l'animal s'est ainsi trouvée mise à nu; au bout de trois semaines environ, il a formé un nouveau péris- tome là où la coquille avait été sectionnée, abandonnant ainsi la couronne du test de 6 millimètres de largeur formée par l'ancien péristome, et sans accroitre sa coquille de plus de 4 à 5 millimètres. Ce nouveau péristome ainsi formé en arrière du premier est intérieurement tout à fait semblable à l’ancien, mais extérieurement il est rugueux et faiblement coloré. Cette possibilité chez les Gastéropodes de refaire une seconde fois leur péristome avec tous les caractères apertu- raux nous explique jusqu'à un certain point ce curieux phé - monène dont nous parlerons plus loin et que Carlo Porro à désigné sous le nom de sopra eccilazione di vita. | Dans les Gastéropodes dont l'ouverture est plus ou moins complexe, comme celle des Pupas ou des Clausilies, on voit ces mollusques arriver à se reconstituer une ouverture nou- velle lorsque la première a été brisée. Nous en avons figuré deux exemples dans notre planche IV. | Les figures 4, 5 et 6 représentent un Pupa frumentum qui, étant devenu adulte, a eu son ouverture brisée par un acci- dent dont la cause nous est inconnue; ilélait bien adulte à ce moment, les restes de l’ancienne ouverture avoisinant le bord columellaire nous le prouvent; il est cependant par- venu à se reconstituer une ouverture complète avec toute son ornementation. Nous avons un second exemple d’un pareil fait dans les figures 7 et 8 qui représentent un Pupa muscorum dont l'ouverture brisée une première fois a été non pas restaurée, mais reconstruile en arrière; on voit en- core sur le dernier tour des traces de l’ancienne paroi aperturale. Ces deux échantillons ont élé récoltés aux en- virons de Lyon dansles alluvions du Rhône. DU BASSIN DU RHONE A9] On doit rattacher à ce mème ordre de phénomènes l'abla- tion du sommet chez certaines espèces. Si c’est un fait nor - mal chez le Rumina decollata du Midi de la France, c'est au contraire un fait purement accidentel pour les mollusques de notre région. Nous avons observé à diverses reprises pareille ablation chez des Clausilies : le sommet détaché était remplacé par une cloison tout à fait semblable à celle du Rumina decolluta. Le faciès général de la coquille était singulièrement modifié, mais les individus n'avaient nulle- ment l'air de souffrir d’une pareille abiation. 4° FRACTURES DU TEST AVEC LÉSION DE L'ANIMAL. — Lorsque la fracture de la coquille est accompagnée de lésion chez l'animal, si la lésion est grave, l'animal meurt au bout d’un temps plus ou moins considérable; sielle est légère, il peut se produire des cas très variés suivant le point blessé comme suivant le degré de gravité de la blessure. Mais, quoi qu’il en soit, il en résulte toujours une sorte de rachitisme dans l'a- nimal comme dans la coquille. Celle-ci est reconstruite avec plus de difficulté, car le mollusque malade perd aussitôt de sa force; pour être en élat de sécréter à un moment donné une abondante quantité de matière testacée, ilest condamné nécessairement à se nourrir plus que d'habitude ; dès lors si les orgañes de la digestion sont un peu lésés, il éprouvera une difficulté nouvelle pour réparer les dégâts causés à sa co- quille ; il ne sécrélera plus qu'une couche mince, souvent simplement épidermique qui mettra son corps à l'abri de l'air, en attendant qu'il ait repris des forces nouvelles, et qu'il soit redevenu apte à sécréter une nouvelle dose de matière cal- caire, plus abondante que la première. En général quand on rencontre des coquilles fortement détériorées, mais ayant encore leur animal à l'intérieur, il est très probable que, lors de l'accident, celui-ci a dû subir 492 VARIATIONS MALACOLOGIQUES quelques lésions plus ou moins graves ; aussi v a-t-il presque toujours non seulement réparation incomplète de la coquille, mais encore traces d'un rachitisme général bien évident. Un fait digne de remarque, c’est que lorsqu'une coquille a élé partiellement brisée, et que des fragments du test sont entrés dans les plaies du mollusque, celui-ci, avant de son- ger à sécréler son nouveau test, commence par se débarras- ser des fragments qui l'incommodent; quelques éléments restent encore parfois à la surface du corps du mollusque, et sont englobés dans la sécrétion, de telle sorte que l’on retrouve, dans le nouveau test, des morceaux de l’ancien qui forment comme une mosaïque. Nous avons vu, chez un Helix nemoralis, un fragment du test portant une bande qui était soudée au reste de la coquille, de telle facon que la bande du petit morceau était perpendiculaire à la direction des ancien- nes bandes. Nous avons observé un Helix pomalia qui avait été en partie écrasé, rejeter en moins de vingt-quatre heures des fragments de son test logés perpendiculairement dans ses chairs, et les garder ensuite englobés dans sa nouvelle sécrétion testacée. 50 ÉTRANGLEMENT DANS LES TOURS DE SPIRE. — Il arrive par - fois qu’à la suite d’un accident ayant occasionné une lésion grave dans le test des Gastéropodes tarriculés pendant le développeinent des premiers tours, une atrophie partielle est produite à ce moment sur le tour de spire lésé; plus tard, le mollusque continuant à se développer normalement, il sub- sistera, au point où a eu lieu la blessure, un étranglement plus ou moins complet. Pareil faitse voit surtout chez les Clausi- lies; nous l'avons vu également chez le Ruwmina decollata et chez quelques Pupas. Par suite de cet étranglement local, la coquille n’atteint jamais une longueur totale aussi grande que ses congénères; en outre, si la blessure a été peu profonde, DU BASSIN DU RHONE 493 sans que l’étranglement soittrès prononcé, il en résultera ce- pendant une modification dans Île faciès général du galbe de la coquille. Quant à l'animal, il ne parait pas devoir conser- ver de traces bien apparentes de ee genre d'accident. 6° DiSCONTINUITÉ DANS LES TOURS DE spiRe. — Ce genre da- nomalie est assez rare si l'on s’en tient à la stricte valeur du titretelqu'ilaété posé par Carlo Porro. Mais on en voit beau- coup d'exemples, quand on l’associe à d’autres accidents no tamment à la scalariformité des coquilles. C'est ordinairement chez les Planorbes qu'on l'observe. Il peut arriver, en effet, qu'une portion de tour soit détachée du tour précédent sur une plus ou moins grande longueur, de façon à laisser un "vide apparent entre les deux tours. Nous avons vu ce fait une seule fois dans notre région, chez un Planorbis vortex. L'avant-dernier tour laissait un vide entre le tour précédent sans qu'il y ait ni surélévation de la spire ni d'autre ano- malie apparente sur la coquille. Mais si l'on admet en mème temps un déplacement de l'axe de la spire, ou une modification dans sa hauteur, on aura alors un champ d'anomalies beaucoup plus vaste. Nous en avons un exemple dans les figures 10 et 11 de notre plan- che IV; à la suite d’une lésion sans doute, dans la coquille, une partie des tours de laspire d’un Planorbis complanalus à été déjetée ; dès lors il y a eu discontinuité dans les tours, et un vide s'est produit entre deux tours conséeutifs. 7° DÉTACHEMENT DU PÉRISTOME. — Le mème fait peut n'avoir lieu qu’à l'extrémité des tours de spire, près de l'ouverture ; dans ce cas, le péristome se détache de la coquille ; pareille anomalie peut constituer une variélé, lorsqu'elle n'est pas passée à un degré trop avancé qui serait alors purement -ndividuel. L'Helix lapicida par exemple présente des colo- 494 VARIATIONS MALACOLOGIQUES nies chez lesquelles le péristome est plus ou moins déve- loppé de telle facon que dans certains cas, il finit par faire saillie et par se détacher plus nettement sur l’avant-dernier tour. Nous avons également observé ce mème fait chez le petit Helix pulchella. Mais d’autres fois, l'anomalie est plus complexe et revêt un caractère non héréditaire. Tel est le cas d’un Planorbis complanatus représenté planche IV, figure 14. Dans cet indi- vidu, les tours sont mal enroulés sur une partie de la spire, et perdent leur caractère de régularité; en même temps, sur le dernier tour, la carène s’émousse et est à peine sensi- ble; enfin, une portion de ce même tour se détache complète- ment de la spire, et se développe tangentiellement. 8° CANALICULATION SUTURALE. — Cette singulière anomalie qui a été observée par Carlo Porro chez quelques Hélices se rattache sans aueun doute aux anomalies précédentes. Chez les Hélices, le mode d’enroulement de la spire ne permet pas au dernier tour de se détacher aussi facilement des tours précé- dents que chez les Planorbes ; en ce cas, le décollement n’est que partiel, et l'animal séerète alors une certaine quantité de malière Lestacée qui remplit le vide laissé par les deux tours, mais qui laisse au dehors une sorte de canal plus ou moins profond qui accompagne la suture. Pareil fait doit se pro- duire lorsque la coquille couvrant un individu encore jeune a subi un écrasement dans le sens même de l’axe collumel- laire; les tours tendent alors à se détacher, et le mollusque cherche à rendre à sa coquille la forme primitive qu'elle de- vait avoir. Nous avons observé plusieurs cas d'une pareille anomalie chez l'Helix aspersa ; ils avaient tous été recueillis par M. Roy dans son jardin ; nous avons cherché à les obtenir artilicielle- ment en détachant le dernier tour de plusieurs {elix aspersu « DU BASSIN DU RHONE A95 vers la suture, mais sans obtenir de résultats comparables à ceux qui étaient observés dans la nature. Les figures 6 et 7 de la planche FE représentent un des échautillons trouvés par M. Roy; c’est celui qui avait la canaliculation la plus pro- fonde. Un autre échantillon était moins profondément creusé, mais le sillon régnait sur deux tours de la spire. Ilest à remarquer que le reste de la spire dans tous ces échantillons était parfaitement normal; l'anomalie ne se manifestail qu'à partir d’un point donné, très net et très visible. Nous avons observé également ce même phénomène soit chez des Helix nemoralis, soit chez des Helix pomaltia; nous devons ajouter que ces individus ne présentaient pas Ce carac- tère de canaliculation à un degré aussi avancé que l’Helix as- persa que nous avons fait figurer. L'Aelix pomatia provenait de la région sans doute, et avait été trouvé chez un de ces mar - chands de la ville qui font le commerce des escargots; quant à l'Helix nemoralis, il appartenait à la var. Polia, et avait été récolté à l'Horme près de Saint-Chamond dans le département de la Loire. Enfin, en dehors de notre région, nous avons éga- lement constaté l'existence d'une semblable anomalie chez un Helix lapicida de la forêt de Villers- Cotterets dans le dépar- tement de l’Aisne. 9° HypersÉcRÉTION APERTURALE. — Carlo Porro a intitulé ce genre d'anomalie sopra ecciluzione di vila (1); sous la dénomi- nation assez étrange de surexcilation vitale, de Blainville (2) a signalé certaines anomalies enles attribuant « à une surexci- tation dans les forces vitales déterminée par quelque cireons - tance locale ». Porro avait done adopté cette même expression. On observe, en effet, notamment chez les Hélices, qu'une fois la coquille complètement adulte et arrivée à son maximum de (4, Carlo Porro, 1839, Studii s. talune variazioni, p. 19 (2) De Blainville, 1825, Munuel de malacologie 496 VARIATIONS MALACOLOGIQUES développement normal, de nouveaux organes aperluraux sont sécrélés une seconde fois. Nous avons représenté planche [F, fig. 28 et 29 en échantillon de l'Helix nemoralis présentant une double ouverture parfaitement nette. La plus ancienne était déjà complète avec un péristome normal ; plus tard le mollusque à sécrété une seconde ouverture emboitée dans la première, sans solutions de continuité à l’intérieur, mais, bien distincte à l'extérieur; dans cette seconde ouverture, il existe un nouveau péristome normal et complet, mais cependant un peu moins bien développé que le premier. Enfin, la partie extérieure du test comprise entre les deux péristomes, tout. en ayant une coloration jaune un peu plus pâle que le reste de la coquille, présente une surface rugueuse et irrégulière, assez analogue à la prolongation de l'ouverture de la var. Chilembia de l'Helix Ehrenberqi. Carlo Porro avait signalé ce genre d’anomalie chez les Helix nemoralis et H. albopustu- lata ; nous en voyons encore un exemple chez l’Helix lapicida des Pyrénées-Orientales figuré par M. Paul Massot(l), et chez un Helix nemoralis des environs de Genève (2). Nous l'avons observé, en outre, chez un Helir aspersa récolté à Lagny dans le département de Seine-et-Marne. Dans ce dernier échantillon, la seconde ouverture ne dépasse pas le niveau de la première; c'est en quelque sorte un rétrécissement de l'ouverture normale disposé de telle facon que les deux ou- vertures sont parfaitement distinctes, en ce sens qu'elles lais- sent un vide notable entre elles. Quelquefois, dans les coquilles qui sont munies à l’inté— ricur de la paroi aperturale d'un bourrelet normal, on obser- ve l'existence d’un double bourrelet. C'est précisément ce (4) Paul Massot, 1872. Énumération des mollusques terrestres et fluviatiles vicants du deyartement des Pyrenées-Orientales, fig 8. (2) Carlo Porro, 133%, Note sur des coquilles univalves à double bourrelet anormal, in Rer, Je znol. Soc. Cuviérienne, p. 220. DU BASSIN DU RHONE 497 cas que de Blainville avait signalé. Nous n'en connaissons qu'un seul exemple observé dans notre région, c'est celui d'un Helix carthusiunu des environs de Lyon, lequel avait ea dessous du bourrelet blane, qui souligne le péristome, une seconde ligne blanche, un peu saillante dans sa partie mé- diane, et simulant un bourrelet naissant; à l'extérieur on n'observe rien d’anormal ; l'anomalie porte exclusivement sur ce caractère apertural interne. Enfin on peut observer des individus chez lesquels le pro- lnngement apertural à peine apparent à l'extérieur se traduit intérieurement par l'existence de deux bourrelets distants l'un de l'autre; nous possédons dans notre collection un Ilelix pisana de Bonifaccio dontles deux bourrelets intérieurs sont distants de près d'un centimètre ; à l'extérieur, la nou- velle portion du dernier tour fait exactement suite à l'an- cien, mais ce tour est devenu plus tombant et donne à la co- quille une fausse apparence de subscalariformité. Un autre mode d'hypersécrétion aperturale s'observe parfois chez les Clausilies et chez les Pupas, et a été signalé et dé- crit déjà par plusieurs auteurs (1). Nous en avons eu entre les mains un bon spécimen récolté à Hauteville (Ain), par notre ami M. Coutagne. L'indiviu appartenait à une colonie de Clausilia Tettelbachiana Rossmassler. L'ouverture norma- le est régulière; elle a atteint à peu près complètement son développement; mais au-dessus d'elle, sur l'avant-dernier tour, l'animal a sécrété une nouvelle ouverture dont une des parois est tangente à l’un des bords, tandis que le test lui-même de la coquille constitue l'autre bord de l'ouverture. La paroi externe de ceite nouvelle ouverture est couverte (4) Nous citerons notamment : C. Porro, 1839. Note sur des coquilles urvalves à boucls appartenant au genre Ciausilia, in Rev. Sor, Cuvierienne, p. 72. Moquin-Tandon, 1855. Hist. mo'l., 4, p. 323, p'. NX:V,f. 19. De l'Hôpital, 1859. Catal. des mol!. de Caen, p. 27, ir Bul. Soc. Lin. de Norm.,1t.AN, nl. ME, f. 3.4. 498 VARIATIONS MALACOLOGIQUES de rides, et sa couleur est plus pâle ; elle ala plus grande ana. logie comme constitution avec la seconde ouverture anorma- lement sécrétée chez les Hélices. Quant à la cause, il faut peut-être, comme le dit Moquin-Tandon, admettre que l’ani- mal, en se retirant brusquement dans sa coquille, entraine des parcelles de corps solides qui dérangent l'ajustement du clausilium et l'empêchent de jouer. L'animal ainsi enfermé dans sa demeure est condamné, s’il veut vivre, à se pratiquer au plus vite une nouvelle ouverture, dont il complétera l’en- trée par une disposition presque identique à la première, Mais de quelle manière l'animal s'y prend-il pour percer sa coquille, c'est ce que Moquin-Tandon ni aucun auteur n'a pu décrire. Peut-être alors serait-il plus plausible d'attribuer ce genre d'anomalie à l'existence d'une ouverture faite dans la coquille par un agent étranger; dans ce cas, l'animal, n'ayant plus à se servir de son clausilium dans les conditions habituelles, sécrète une quantité de matière calcaire suffisante pour lransformer la perforation accidentelle de sa coquille en ouverlure normale. Cette explication nous semble d'au- tant plus plausible que dans les deux seuls échantillons que nous avons eus entre les mains, la perforation nouvelle n’af- fectait pas une régularité parfaite, et qu’en outre, les bords de louverture nouvelle n'émergeaient de la coquille que d’un seul côté. Enfin d’après les figurations données par les auteurs, et d'après les échantillons que nous avons vus, la seconde ouverture présentait les positions les plus variées, les plus différentes, quels que soient les sens d'enroulement de la coquille. Nous donnerons comme preuve de celle manière de voir l'expérience suivante. Après avoir bouché artificiellement l'ouverture de plusieurs Clausilia laminala et CL. parvulu, nous n'avons vu aucun individu percer dans sa coquille une nouvelle ouverture comme le prétend Moquin-Tandon. Au DU BASSIN DU RHONE 499 contraire, si nous pratiquons à l’aide d'une pointe un petit trou dans une partie quelconque de l’avant-deinier tour de ces mêmes espèces, nous voyons aussitôt l'animal aban- donner l'ouverture normale pour se servir de l'ouverture ar- ificielle et sécréter bien vite assez de matière testacée pour former les parois de cette nouvelle ouverture. Ajoutons que notre expérience a tout aussi bien réussi soit en bouchant l'ancienne ouverture, soit même en la laissant complètement libre. Enfin, parmi les hypersécrétions aperturales, nous devons également ranger les développements anormaux de toutes les parties de l'ouverture, bord columellaire, péristome, callum, etc. C’est surtout dans le développement du callum chez cer- taines espèces que l’on observe le plus d'anomalies; chez quelques Hélices, par exemple, il peut se former dans cet endroit de la coquille un véritable amas de matière testacée qui modifie ainsi le faciès général et normal de l'individu, et qui s'applique non plus à un individu isolé, mais bien à toute une colonie. 10. CozorarTions accineNTELLes. — Ce genre d'anomalie rentre dans le eas précédent ; c'est en quelque sorte le résul- tat d’une surexcitation des forces, traduite par un excès ou un épanchement de matière colorante, formant alors tache accidentelle sur la coquille. De pareils exemples sont ordi- nairement rares. Ils ont, du reste, presque toujours leur siège extérieur près de l'ouverture, ne se manifestant que quand la coquille est complètement formée, et qu'elle à at- teint tout son développement normal. Nous ne connaissons qu'un très petit nombre d'exemples de ce genre d'anomalie pris dans notre région. Nous citerons un /lelix arbustorum récolté à la Grande-Chartreuse, et faisant partie de la collection de notre ami M. Gabillot. Dans 500 VARIATIONS MALACOLOGIQUES cet échantillon la bande médiane colorée en brun se termine près de l'ouverture par une large tache qui s'étend surtout en dessous de la bande, tout le long du péristome, et parait assez nettement délimitée dans son contour. Nous avons observé quelques cas analogues chez plusieurs Helix hortensis provenant d'une colonie acclimatée sur les bords du Rhône entre Saint-Fons et Feyzin au sud de Lyon : les bandes qui ornent la coquille s’'épanouissent en forme de taches brunes plus ou moins foncées vers le péristome. Du reste, on voit souvent chez les Helix hortensis ou H. nems- ralis dont les bandes sont un peu larges plusieurs où même toutes ces bandes se souder dans la partie voisine du péris tome. Tous les échantillons chez lesquels nous avons cons- taté pareille anomalie étaient parfaitement constitués, tous étaient de belletaille, el vivaient dans les meilleures conditions pour leur bon développement ; un tel genre d'anomalie serait done probablement le fait d’une sorte de surexcitation vitale dans le mollasque; au moment où il forme son péristome, il a encore à dépenser une trop grande quantité de matière colorante, et celle-ci se reprend dans tout le tissu dermal de la coquille qui avoisine l'ouverture. Chez l’Helir nemoralis, notamment chez les individus se rattachant à la sous-variété custanea, on observe près de l’ou- verture el le long de la ligne suturale une disposition anor- male dans la coloration qui est assez singulière; souvent la couleur brune du test s'arrête d'une facon très nette avant l'extrémité de l'ouverture, de telle sorte qu’à l'extérieur de la coquille figure une bande d'un jaune plus ou moins foncé à la suite de la partie brune, el précédant le péristome égale- ment brun ou noir; de même, vers la suture il subsiste un mince liséré clair très net, visible sur tous les tours. Mais parfois aussi une disposition inverse peut se présenter ; la bande verticale jaune qui précède le péristome est alors rem - DU BASSIN DU RHONE 50! placée par une bande beaucoup plus foncée, presque noire, qui se détache nettement du reste de la coquille. Nous avons observé ce fait chez des Ælix nemoralis récoltés sur les bords du lac de Silan dans le département de l'Ain. [ne faudrait pas confondre ce genre d'anomalie avec Îles laches nornales qui se manifestent chez certaines variétés, des Helixc lapicilr, HE syloutica, 1 pisaua, ete. Si dans le premier Cas, c'est une véritable hypersécrétion de la matière colorante, dans le second c’est, au contraire, une répartilion normale de la coloration qui, au lieu de se produire suivant des lignes ou des bandes continues, se manifeste sous for- me de traits interrompus, de flamnes plus ou moins allon - gées, mais affectant cependant un certain degré de régularité. Nous rangerons dans la même catégorie d'anomalies, celle qui consiste à présenter dans une même coquille normale- ment monochrome une double coloration. Nous possédons dans cet ordre d'idées des échantillons d'Helix nemoralis dont les trois à quatre premiers Lours sont roses ou jaunes et qui par conséquent, appartiennent aux var. rubella et libellula, et dont le reste des Lours cst de plus en plus foncé, de telle sorte que le dernier notamment appartient à la v‘r. caslanea la plus foncée et la mieux caractérisée. 11° Arnopnie. — Chezles mollusques, on peut observer, soit des cas d'atrophie générale de l'organisme, soit des cas partiels d'atrophie portant sur une partie quelconque de ce mème organisme. L'atrophie générale se traduit ordinaire- ment par un rachitisme qui engendre d'abord des varié - tés de petite taille, puis des formes anormales simples pou- vant ensuite dégénérer en vérilables monstruosités. Le ra- cailisme affecte en premier lieu l'animal, qui, bientôt affaibli, sécrète moins de matière Lestacéc, ou la sécrèle avec une irré- gularilé notoire telle, qu'elle devient la cause d'accidents lo - 502 VARIATIONS MALACOLOGIQUES caux. C’est à une sorte de rachitisme de ce genre qu'il faut at- tribuer ces formes atrophiées si curieuses constatées par M. de Folin dans le lac d'Osségor (1). Nous n'avons pas observé dans notre région des phénomènes de ce genre, appliqués sur une aussi vaste échelle, mais nous sommes en mesure d'indiquer un cerlain nombre d'exemples d’atrophies localisées sur quel- ques parties de la coquille. Une des manifestations les plus fréquentes d'atrophie dans la coquille des mollusques réside dans un changement de la forme des tours de spire ; les formes arrondies deviennent plus ou moins carénées, tandis que les formes carénées per- dent peu à peu ce caractère ; de là des manifestations plus ou moins anormales qu'il faudrait bien se garder d'envisager sous le titre de variétés alors que ce sont de véritables cas tératologiques. Nous avons indiqué, parmi les Hélices caré- nées, des formes anormales chez les Helix lapicida et H. ro- tundata : tels sont les cas représentés par les figures 13, 14, 17, de la planche IL, relative à l'Helix lapicida; dans ces exemples, outre une tendance à la scalariformité, on observe que les tours de la spire perdent leur caractère d'acuité, et sont plus ou moins arrondis: la figure 19 de la même plan- che représente un Helix rotundala qui est dans le même cas. Les exemples inverses sont moins nombreux; nous avons parlé d'Helix incarnala prenant la carène de l’Hehx cinctella ct présentant ainsi une réelle similitude de forme avec celle dernière espèce; mais nous citerons parmi les Limnées un bel exemple d’atrophie, représenté planche I, fig. 23. C'est un Limnœu elophila recueilli par notre savant ami M. Raoul Tournouër dans une mare, à Bourg en Bresse. Cet échantillon porte sur le dernier tour une carène très neltement accusée qui modifie considérablement le profil normal de ce tour, (4) De Folin 1879. Faune lacuslre du lac d'Ossegor. DU BASSIN DU RHONE 503 ainsi que celui de l'ouverture. Un cas à peu près semblable avait été déjà observé par M. J. Purves chez un Limnæa limo- sa; la figuration donnée par cet auteur nous montre, en effet chez cette coquille, une carène située de la même façon et à la même place sur le dernier tour de la spire (1). Chez les Lamellibranches, l’atrophie se remarque assez souvent dans l'inégal développement du bord inférieur des valves ; il se formera alors des échancrures plus ou moins prononcées donnant à la coquille un aspect réniforme ; sui- vant que l’atrophie est plus ou moins complète, le sinus infé- rieur est plus ou moins profond. On peut dire d'une façon générale que toutes les Unios, par exemple, peuvent présen - ter ce sinus plus ou moins profond. Parfois cet accident de- vient héréditaire el s'applique alors à toute la colonie (2); par- fois aussi, il ne se manifeste que lorsque le mollusque de- vient vieux; ce développement testacé se porte alors plus volontiers aux extrémités de la coquille, et il en résulte la présence d’un sinus quelquefois mème très profond. Parfois aussi, il arrive chez ces mèmes mollusques que dents ou lamelles sont transformées en totalité ou en partie d'une manière analogue à celle du ligament. Picard (5) avait désigné ce genre d'anomalie sous le nom de maladie du liga- ment ou rachilisme. « Getle maladie, dit-il, attaque principa- lement le système osseux de la charnière, ronge ou transfor- me les dents et fréquemment fait dévier la coquille de sa forme normale. Elle coïncide souvent avec la maladie per- lière qu’elle provoque sans doute quelquefois ». (1) J. Furves, 1877, Note sur une anomalie de la Limnæa limosa, in Bull, Soc. malacol. de Belgique, p. XLVIH. (2) C'est ainsi que d'après M. le docteur Baudon, le Pisidium sinualum Bourguignat ne serait qu'une difformité du Pisidium casertanum, consistant en une sinuosité inférieur e qui lui donne en effet l'aspect de l'Unio sinuatus Baudon, 1853. Observation sur La valeur du Pisi- dium sinuatum Bourg., in Journ. de Conch., p. 277, et Mo iographie des Pisrdies, p. 34, 1857. ; (3; Picard, 1840. Mémoire sur les déviations dans le genre Unio, in Soc. Linnéenne du Nord de la France, \OI, 1, p. 349. o0f VARIATIONS MALACOLOGIQUES Lorsque l’atrophie est poussée à un degré moins avancé, elle peut devenir, jusqu à un certain point, héréditaire. Aussi nous nous demandons si cerlaines formes subcarénées, par exem- ple, ne sont pas le résultat d’une atrophie héréditaire. Tel serait le cas du L'nacæa elophila entre autres. Il diffère du Lype notamment par la forme moins arrondie de ses tours et par un redressement du bord columellaire; or, ces deux caractères peuvent parfaitement être le résultat d’une cause de rachitisue. D'autre part ilest à remarquer que cette forme habite presque toujours des eaux moins pures, moins claires que le Limnœæa stagnalis Lype ; il peut done très bien se faire que celle dernière forme, appelée à vivre dans un milieu moins favorable à son développement, s'est atrophiée, et que le résullat de celte atrophie à pu devenir héréditaire et con- server un degré de fixité suffisant pour se reproduire norma - lement, et constituer une forme distincte du type. | Pareille théorie est vérifiée par la pratique; la figure 22 de la même planche nous montre ce que sont devenus les des- cendants des individus figurés dans la planche IV; ils sonit petits, les tours de la snire sont plus carrés, mais, en revan- che, le caractère d'inflexion du bord columellaire s'est, au contraire, accentué par rapport à ce qu'il ctait dans le type primiuf., Or, comme nous l'avons expliqué, ces formes ont éle élevées dans des milieux différents, qui ont pu, par leur na- Lure, occasionner ces modifications aussi complexes du type primiuf. Ne sommes-nous donc pas en droit de nous deman- der sibien des formes aujourd'hui qualifites du titre d'espèces ne sont pas en somine autre chose que le résullat de la plus ou moins grande fixité de quelques cas anormaux provenant d'une atrophie ou d'une hypertrophie locale ou partielle. 12° Hyrenrrorme. — Les exemples d'hypertrophie chez I: mollusques paraissent plus nombreux et plus fréquents que “ DU BASSIN DU RHONE 05 ceux d'atrophie. Du reste, il peut arriver que chez le même mollusque on ait à la fois des exemples de ces deux anomalies comme s'étant produites à des époques différentes de son développement. Pendant le premier àge il peut y avoir d'abord atrophie, puis les conditions des milieux venant à se modi- fier, comme cela arrive si souvent, à l'atrophie succède l’hy- pertrophie. De là des anomalies fort complexes se traduisant par des accidents locaux, des exubérances de test, des bour- souflements, etc., sur des coquilles de taille plus petite que le type. L'hypersécrétion aperturale dont nous avons déjà parlé, peut à la rigueur rentrer dans le cas des hypertrophies générales ; nous observerons cependant que ce premier genre d’anomalie est toujours localisé dans une même partie de la coquille d’un gastéropode, et qu'il n'affecte jamais qu'un seul individu à la fois dans une même colonie, tandis que l'hyper- trophie telle que nous la comprenons, peut s'appliquer à importe quelle partie de la coquille, et qu'en outre, comme nous allons le voir, elle peut devenir héréditaire. Parmi les Hélices, les quelques exemples que nous avons à signaler dans notre région sont les suivants : Les figures 20 et 21 de la planche Il représentent un Helix frutieum qui porte sur le dernier tour un sillon creusé à l'in- térieur et faisant saillie à l'extérieur, loge sur la partie supé- rieure du dernier et de l'avant-dernier tour; ce sillon est d'une parfaite régularilé, et il va en s'alténuant jusqu'à son ex- trémité ; le reste de la coquille est parfaitement normal. Quelle peut être la cause d’une pareille anomalie? nous ne saurions le dire. Peut-être faut-il l’atiribuer à la présence d'un corps élranger qui sera venu se fixer entre l'animal et sa coquille alors qu’il était encore jeune: ne pouvant s'en débarrasser, il aura sécrété tout autour sa malière testacée, en conservant, jusqu'à l'accomplissement de son complet développement, l'habitude de sécréter son est d'une façon irrégulière. VAR. MAL. T. Hi. 33 506 VARIATIONS MALACOLOGIQUES On peut également faire rentrer, dans des cas d'hyper- trophies, les anomalies figurées dans la même planche sous les numéros 26 et 27; ce sont deux Helix nemoralis aux for- mes extra globuleuses, dont le dernier tour à pris un déve- loppement considérable relativement aux aulres tours. À ce même litre il faudraitadmettre dans cette catégorie toutes les formes ou variélés se distinguant du type par leurs dimen- tions exceptionnelles; tel serait le cas par exemple des Helix arbustorum et H. pomatia dont nous avons donné les dimen- sions dans la première partie de ce travail. Chez les mollusques aquatiques, comme nous l'avons dit, les exemples d’hypertrophies sont plus fréquents. Les figures 18et 19 de la planche IV nous présentent un cas d'hypertro- phie de l'ouverture se manifestant chez toute une colonie de Planorbis carinatus des environs de Lyon. Les individus sont d’une belle taille, et très normalement constitués ; mais leur ouverture se projette fortement en avant et en dehors comme les bords d’un entonnoir. Nous voyons ce même phénomène dans une colonie de PAysa acula vivant non loin de la précédente; là encore, l'ouverture est anormalement développée et largement projetée en avant, sans que le reste de la coquille présente Ia moindre anomalie. Mais à coté de ces anomalies qui peuvent constituer des variétés, puisqu'elles s'appliquent régulièrement à toute une colonie et qu'elles semblent même héréditaires, il en est d'autres qui sont alors absolument individuelles. Dans Ja mème mare qui reufermait les Physes (fig. 25, pl. HD M. Roy a trouvé des individus présentant des gibbosités plus ou moins nombreuses, mais n affectant toujours que le der- nier tour; tantôt, comme fig. 34, pl. IV, c’est le dernier tour tout entier qui est fortement renfié, tantôt ce ne sont que des varices locales, simples où doubles comme celles des figures 26 à 29 de la pl. IF; dans ce cas le dernier tour, surtout DU BASSIN DU RHONE 507 dans la partie voisine de l’ouverture, présente des anomalies alors que la coquille est parfaitement normale. Chez les Limnées, nous avons observé plusieurs cas analo- gues ; M. de Fréminville nous a envoyé une série de Zimnæa peregra pèchés dans une pièce d'eau de son pare, et qui tous présentaient une saillie plus ou moins marquée sur le dernier tour, comme celle de la figure 24 de la planche HF. Un autre cas chez le Limnœæa limosa nous a présenté une hypertro- phie des premiers tours de la spire, celle-ci, comme on peut le voir pl. IV, fig. 30, a son sommet comme mucroné,; il y aeu une abondante sécrétion de matière calcaire lors de la formation des premiers tours, et toute la coquille, quoique plus normale ensuite, s’en est un peu ressentie dans l’achè- vement de son développement. Mais c'est surtout chez le Limnæa auricularia que ces affections sont plus fréquentes, et surtout plus variées dans leur mode de manifestation. Nous en avons fait représenter pl. IV quatre exemples qui résument à peu près les cas plus communs. Dans lafig. 23, l'ouverture prend un développement considérable, mais l'accroissement se fait avec régularité, et si la coquille a son ouverture plus grande que le {ype, elle n’a encore rien de bien anormal. Dans les fig. 24 et 25, il y a eu un arrêt dans le développement aperlural, puis reprise brusque et rapide, mais alors le dépôt de la matière testacée s’est effectué suivant une direction presque à angle droit avec la ligne spirale du dernier tour. Dans les fig. 26 et 27, ce développement s’est fait avec une certaine irrégularité ; il s’est produit comme un boursoufle- ment dans la paroi aperturale. Enfin, dans les fig. 28 et 29, la sécrétion s'est continuée, quoique la coquille ait atteint tout son développement; alors la paroi aperturale externe est revenue sur elle-même , de facon à former comme un cro- chet parfaitement régulier, sans qu'il y ait le moindre arrêt dans le développement de la coquille. b08 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Chez les Planorbes, nous avans également constaté quel- ques cas d'hypertrophie. L'an d'eux que nous n'avons pas pu faire représenter, et que nous avons constaté plusieurs fois chez le Planorbis vortex, consiste en une surabondance de sécrétion de la matière testacée telle que les tours ne peu- vent plus s’enlacer dans un mème plan; tout en conservant une parfaite régularité, l’un des côtés de la coquille présente une surface régulièrement concave, tandis que l'autre est régulièrement convexe. Enfin, chez quelques autres individus et plus particulièrement chez le Planorbis corneus, on peut observer la formation de gibbosités sur le dernier tour, com- me dans la fig. 22, pl. IV; quelquefois aussi, mais bien plus rarement, ces mêmes gibbosités se retrouvent sur les tours précédents. Quelle peut être la cause de semblables anomalies? toute influence physique, chimique ou mécanique ou même physio- logique peut les engendrer; nous estimons que la nature des milieux dans lesquels ces mollusques sont appelés à vivre peut avoir sur leur manière d’être une influence considérable. Tant que le milieu est normal ou que ses conditions ne dépassent pas certaines limites propres à l'état biologique naturel des êtres, il ne fait qu’exercer une influence géné- rale traduite par des variations de même nature sur chaque individu ; de là naissent des variétés plus ou moins différentes du type; mais lorsque ces conditions sont déplacées, lorsque ces influences s’exercent avec une intensité exceptionnelle, il en résulte une série de déviations individuelles du type, pro- pres chacune au degré d'aptitude particulier à chaque être. De là ces manifestations tératologiques dont les caractères sont entièrement individuels, et que l’on observe dans certains milieux où la plupart des êtres en sont affectés. Mais lorsque dans un même milieu, il n’y a qu'un seulindi- vidu d’anormal, c'est qu’alors des influences physiologiques DU BASSIN DU RHONE 509 personnelles se sont prêtées à ce développement anormal et seules ont été mises en jeu. Cette individualité, n'étant plus qu'une exception, n'aura qu'une influence très passagtre sur le reste de la colonie, et la cause qui a pu l’engendrer n'af- fectant pas les autres sujets, l'état normal des choses repren- dra son cours après la disparition de cetêtre. Mais il arrive souvent que dans le même milieu, on trouve un certain nombre d'individus appartenant à une même colo- nie el qui présentent des difformités, alors que les autres sujets sont parfaitement normaux. Pareil exemple est assez fréquent ; on remarquera alors que le degré d'anomalie, tout en étant plus ou moins intense, tendra à se manifester presque toujours de la même facon. Tels sont les cas des exemples représentés pl. HE, fig. 24 et 25, pl. IV, fig. 18. L'hypertro- phie est plus ou moins accentuée suivant les sujets, mais tous ceux qui en sont atteints le sont à peu près sur la même partie de leur organisme. C’est qu'en pareil cas, la colonie est alors en voie de transformation; si la cause qui détermine pareille anomalie est maintenue, il se formera par hérédité une variété nouvelle portant ces caractères définitifs ; si, au contraire, comme cela a lieu le plus souvent, la cause vient à cesser ou à s'atténuer, ces formes anormales tendront à disparaitre et la colonie reprendra son premier faciès. Ne pouvons-nous pas rapprocherles accidents hypertrophi- ques observés sur les Physes représentées fig. 26-29 dans la planche IT, des gibbosités normales de certaines Belgran- dies ? Si les causes qui ont produit ces saillies chez nos Physa acuta prenaient un caractère de fixité, il est bien probable que ces accidents deviendraient normaux, réguliers, cons- tants chez toutes nos Physes, et on ne manquerait pas de von là un caractère assez important pour faire non seulement une espèce nouvelle, mais même encore un genre nouveau. Malheureusement hätons -nous de le dire, la mare où ces 10 VARIATIONS MALACOLOGIQUES curieux échantillons ont été récoltés a été mise presque à sec l'an dernier, et nous ne savons encore ce qu'il sera advenu de notre colonie. Mais quoi qu'il en soit, on ne doit pas moins être frappé du rapprochement que nous venons d'essayer d'établir entre deux accidents, l’un, considéré com- me normal et caractéristique d'un genre, l’autre, traité encore de simple cas tératologique. 13° ANOMALIES DE COLORATION DU TEST. — Le type de cha- que espèce doit avoir sa coloration spéciale, propre, caracté - ristique, autour duquel peuvent se ranger un grand nombre de variétés. En outre, chez un certain nombre d'espèces, il existe des ornementations plus ou moins complexes, basées sur le mode de groupement ou d’agencement de bandes, de lignes, de flammes ou de taches. Mais ces différentes variétés étant admises et reconnues, il peut se faire que, par suite de l’état épidermique de la coquille, leur manière d’être soit modifiée; ainsi bien des coquilles des Helix nemoralis ou H. hortensis qui paraissent d’un fauve plus ou moins teinté, deviennent roses quand l'épiderme est très mince ou lorsqu'il disparait ; d’autres variétés d’un jaune bien vif, sont presque blanches lorsque cet épiderme fait défaut. De là autant d'anomalies dues à l'état de l’épiderme qui enveloppe le test. Il ne faudrait done pas se hàter de signaler une variété nouvelle sur la vue d’un seul échantillon présentant une coloration différente de celle du reste de la colonie, avant de bien s'as- surer que tous les êtres de cette colonie ont leur épiderme similaire. Mais il arrive parfois que dans des colonies dont les carac- teres sont bien délinis relativement à l’ornementation, il se- trouve des individus manifestant une coloration ou une orne- mentation anormale. Tel est par exemple le cas des /elix nemoralis présentant six ou mème sept bandes. Les indivi- “ DU BASSIN DU RHONE 5 dus à cinq bandes sont les plus fréquents, ils forment une variété bien définie, peut-être même est ce là le type de l'espèce. Mais les individus ornés de plus de cinq bandes cons- tituent une véritable anomalie; en effet, lorsqu'on les exa- mine de près, on remarque toujours que la bande supplé- mentaire n’est ni aussi large ni aussi régulièrement espacée que les autres ; presque toujours elle parait détachée d'une autre bande assez large dont elle est très voisine. Les cas d'Helix nemoralis à six bandes sont fort rares ; nous n’en avons observé qu'un petit nombre dans notre région (1). Mais les anomalies de coloration les plus fréquentes sont celles qui ont rapport à l’albinisme et au mélanisme. L’albi- nisme ou leucose, beaucoup plus fréquent que le mélanisme, peut être ou général ou individuel. Dans le premier cas il peut s'appliquer à toute une colonie, dont les êtres se repro- duisent avec ces caractères constants et constituent de véri - tables variétés; dans notre région nous citerons les espèces suivantes qui nous ont présenté des variétés normalement albines : Arion albus, Helix aspersa. Krynickillus brunneus. — pomalia. Succinea Pfeiffer. Bulimus montanus. —- oblonga. — obscurus. Hyalinia lucida. Chondrus tridens. 2 nitida. Clausilia fimbriata. Helix rotundata. Pupa dolium. — ruderata. — MUSCOrUmM. — wvillosa. Physa acuta. _— montana. Planorbis albus. — plebeia. . — submarginatus. — lapicida. Pomatias septemspiralis. — fasciolata. Sphærium corneum. — sylvatica. (1) I existerait une anomalie de ce genre chez l'Heliæ pomatia. M, le D' Baudon a signalé dans l'Oise un individu de cette espèce orné de septhandes (Nouv. catal. moll. de l'Oisr, p. 51). 512 VARIATIONS MALACOLOGIQUES On remarque d'après cette liste que les cas d'albinisme sont bien plus fréquents chez les Gastéropodes terrestres que chez les Gastéropodes aquatiques et les Lamellibranches ; cela tient évidemment à la nature du milieu. Souvent du reste, les individus qui sont affectés de cette particularité ont leur test recouvert d’un encroütement plus ou moins grand qui masque la coloration pâle de la coquille; M. le doc- teur Baudon avait déjà signalé ce fait à propos des Planorbis corneus des bois d'Angy dans l'Oise (1); nous l’avons observé chez des Limnœæa stagnalis et Bythinia tentaculala. Certaines contrées sont plus sujettes que d’autres à l'albinisme. Il y a prédominance à l’albinisme dans les pays très chauds dépour- vus d'humidité, où dans les pays très froids. L'albinisme, au contraire, devient rare là où la chaleur est combinée à l’hu- midité (2). Nous avons vu du reste cette tendance générale à l'albinisme chez les mollusques de la faune alpestre, en at- tribuant celte manière d'être à des causes purement physiques. Les cas d’albinisme individuels sont plus rares et rentrent presque toujours dans la catégorie des anomalies que nous étudierons dans le paragraphe suivant. Quant à la cause de l’albinisme, elle réside dans l'absence originelle, normale, ou dans le défaut d'action de la couche pigmentaire. Parfois aussi, c’est l'effet de la vieillesse qui produit une décoloration lente dans le test du mollusque. Nous avons signalé chez l'Helix aspersa une anomalie de coloration fort curieuse qui se rattache jusqu’à un certain point à l’albinisme, et qui parait héréditaire. M. le docteur Baudon a signalé ce même type dans l'Oise sous le nom de var. lulea (3); là ces individus toujours rares, vivaient tous (1) Ba = don, 1859. Cas d'albinisme et de monstruosité scalaire du Planorbis corné, in Jourw de Conch., t. VII, p. 310. (2) G. Porro, 1842. Essai d’un arrangement de plusieurs mollusques du genre Helix, se on les lois de leurs variations spécifiques, in Revue zoolog. de la Soc, cuviérienne, p. 3. (3) Baudon, 1862. Nouveau catalogue des m luiques du département de l'Oise, p. 20. DU BASSIN DU RHONE Ma sur les feuilles de l'Urtica urens. Moquin-Tandon aurait éga- lement retrouvé en Corse une variété analogue. Terver l'avait reeue de Tarascon, d'Arles, de Grasseet de Rome. Les indivi- dus des environs de Lyon vivaient dans un jardin et parais- saient avoir une nourriture assez variée. Nous ne voyons pas à quelle cause il faut attribuer pareille anomalie, mais quoi qu'il en soit, il est certainement très curieux d'observer ce même cas dans des stations aussi éloignées. Le mélanisme résulte, au contraire, d'une surabondance de production de matière pigmentaire ; les cas isolés sont rares; mais NOUS avons pu Citer quelques exemples de mé- lanisme général. Les colonies d'Aelix arbustorum qui se sont ivées dans les régions basses des plaines et des vallées sont toutes normalement affeelées d’un mélanisme constitution - nel relativement au type ancestral, qui est beaucoup plus pâle et moins chaudement coloré. Le mélanisme, à l'inverse de l'albinisme, parait plus fré- quent chez les mollusques aqualiques. On l'observe assez souvent notamment chez les Limnæa peregra, L. corvus, L. palustris, L. stagnalis, ete. La coquille, privée même de tout encroûtement, garde un ton foncé, presque noir qui lui est réellement propre.llne faudrait pas confondre le mélanisme constitutionnel avec ce que nous appellerons le mélanisme accidentel ; il arrive parfois en effet que par suite de l'encroù- tement du test la coquille parait noire, ou tout au moins fortement colorée ; il est possible du reste que la nature mème de cet encroùtement finisse par s'élendre sur la coquille dont le test absorbe une partie des matières colorantes orga- niques qui sont à sa surface. C’est ainsi que nous avons vu des Bythinies complètement teintes dans les eaux de la Saône à Lyon. 14° ANOMALIES DE COLORATION DERMALE. — Les exemples 514 VARIATIONS MALACOLOGIQUES d'anomalies dans la coloration du tissu dermique sont beau- coup moins fréquents que ceux des anomalies affectant la coquille. Quelques-unes s'appliquent à toute une colonie, ct c'est là le cas Le plus général; on voit alors tous les animaux, indépendamment de la coquille, revêtir une teinte plus foncée ou plus claire que le type. En général, les espèces des régions basses, observées à une altitude plus élevée, ont leur colora- tion dermale plus päle; inversement les mollusques vivant normalement dans les régions élevées, et qui sont acclimatés dans les régions basses, affectentune coloration plus foncée. Mais on observe également des cas plus anormaux d’albinisme et de nigrisme individuel ; nous citerons dans cet ordre d'i- dées les espèces suivantes : Helix aspersa, animal grisàtre, un peu jaunàtre en dessus, presque blanc en dessous ; la coquille est également un peu plus pèle, mais de taille normale et sans la moindre ano- imalie. Clausilia laminata, animal d'un gris jaunâtre très pâle ; la coquille conforme au type est, au contraire, chaudement colorée. 15° ALLONGEMENT DE LA SPIRE, SCALARISME.— Î] arrive par- fois que sous l’influence de causes encore mal définies la spire des mollusques Gastéropodes s’allonge de telle facon que ces tours s'élagent les uns au-dessus des autres ; la coquille de - vient alors scalariforme. Nous distinguerons deux manières d’être dans la scalariformité. Lorsque la spire est allongée et que tous les tours restent dans une position relativement normale, la coquille est dite subscalaire ; telles sont, par exemple, les formes de l'Helix aspersa représenté fig. 1 et 5 dans la planche I ; parfois aussi, les premiers tours peuvent être dans leur véritable position, tandis que les derniers, sur DU BASSIN DU RHONE 515 une plus ou moins grande longueur, s'affaissent et donnent encore à la coquille une apparence subscalariforme. Mais lors- que les tours sont complètement étagés, comme dans les fig. 10, 11et 12 de la même planche, la coquille est alors dite scalaire. Dans ce cas, les tours peuvent être Jointifs comme ceux des figures que nous venons de signaler où complète- ment séparés comme ceux des fig. 16 et {7 de la planche IV. Le nombre des espèces subscalaires que nous avons observées dans notre région est assez considérable; nous signalerons plus particulièrement les espèces suivantes: Succinea Pfeifferi, Rossmässler. — acrambleiu, J. Mabille. Hyalinia nitidula, Draparnaud. — cristallina, Müller. Helix rotundata, Linné; pl. I, fig. 19, et pl. IL, fig. 8. — depilata, Draparnaud. — pulchellu, Müller. — hispida, Linné; pl. I, fig. 7-8, et pl. HE, fig. 10. — plebeia, Drap.; pl. If, fig. 4-6. — cinctella, Drap. ; pl. IL, fig. 18. — carthusiana, Müller ; pl. I, fig. 9, — alpina, Faure -Biguet. — lapicida, Linné ; pl. IF, fig. 11-14 et 17. — arbustorum, Linné. — ericetorum, Müller; pl. IF, fig. 1-3. — fasciolata, Poiret; pl. If, fig. 10. — heripensis, Mabille ; pl. IL, fig. 9. — nemoralis, Linné; pl. IE, fig. 26. — aspersa, Linné; pl. 1, fig. { -3. — pomalia, Linné. Clausilia nigricans, Pultney. Chondrus tridens, Müller; pl. IV, fig. 1. — quadridens, Müller; pl. HE, fig. 20. Pupa secale, Draparnaud ; pl. HE, fig, 21. Planorbis complanatus, Linné. — Submarginatus, Müller; pl. I, fig. 34-35. 516 VARIATIONS MALACOLOGIQUES Planorbis albus, Müller. — vortex, Linné. — rotundatus, Poire ; pl. IV, fig. 20-21. — corneus, Linné; pl. I, fig. 40. Limnæa intermedia, Ferussac. — truncatula, Müller. Valvata cristata, Müller. Neritina fluviatilis, Linné; pl. IV, fig. 35. Quelques-unes de ces formes attirent notre attention d'une manière plus particulière. En général la tendance à la scalari- formité est plus prononcée chez les Hélices que chez tout autre mollusque; on outre, il est des espèces qui, sans être communes ou plus abondantes que d'autres, ont cette ten- dance plus accentuée; tel est le cas des Hélices du groupe de l'Helix fasciolata ; souvent, en effet, dans ce groupe, on voit les tours s'élager les uns au-dessus des autres, ou le dernier tours'incliner brusquement vers l'ombilie à partir d'une fai- ble longueur avant l'ouverture. Si la sealarité n'est pas héréditaire en ce sens qu'elle constitue une véritable mons- truosité, la subsealarité, quand elle n'est pas un fait purement occasionnel parait tendre à se propager; or, bien des fois on a basé des caractères spécifiques chez les Hélices sur la posi - lion qu occupe le dernier tour par rapport aux autres, surtout suivant son plus ou moins d’'inflexion dans la partie infé- rieure; les caractères généraux de la coquille peuvent, en effet, varier d'une facon considérable suivant la position qu'occupera ce dernier; de là dépendent leur hauteur totale et le diamètre maximun de la coquille, les dimensions de l’ombilic, la forme de l'ouverture, ete. Il importe donc d'at- tacher la plus grande importance à se bien rendre compte si dans une coquille le mode de disposition du dernier tour n'est pas un fait résultant d'une tendance à la subsealari- formité plutot qu'une chose acquise normalement par DU BASSIN DU RIONE Dt7 l'hérédité et qui a passé de simple accident au rang de fait constitutionnel. Les figures de l’Helix aspersa représentées pl. [, fig. 1 à3 et celle de l'Helix nemoralis de la pl. IE fig. 26 et 27, sont en cela fort remarquables; elles ont une forme très allongée, et assez régulière ({); nous observerons que si bien souvent la forme scalaire n'apparait qu'à partir d’un certain moment dans le mole d’enroulement des coquilles, il n’en est point de méme chez ces trois individus ; leur forme particulière est en quelque sorte régulière, el ne résulte pas d’un accident. Que serait-il advenu s'ils avaient pu se reproduire entre eux? il est fort probable que leurs descendants, au moins pendant quelques générations, auraient hérité de leurs caracttres, el certes, c'eüt été bien le cas de faire une espèce nouvelle; combien n'en a-t-on pas fait qui différaient moins que celles- là des types voisins! Bien souvent avec la subscalarité il se développe d'au- tres anomalies ; les caractères propres au dernier tour se per- dent ou s’atlénuent; nous en voyons des exemples chez les Helix lapicida pl. H, fig. 13, 14 et 17, ou chez l'Helix rolun- data fig. 19 de la mème planche; pareil fait n'a rien d'anor - mal; on comprend, en effet, qu'en s'élevant la forme du der- nier tour, si elle avait une tendance à êlre carénée, doit forcément s'arrondir, puisque l'angle aigu de la carène s'ouvre davanlage à mesure que la hauteur totale de la coquille s'aceroit. Chez les coquilles allongées comme les Bulimus, Chon- drus, Clausilia, ete., on retrouve également des exemples de scalariformité ; mais ils sont plus rares que chez les Hélices. Cependant quelques-unes de ces formes, tout en s'allon- 4) M. P. Fischer a figuré une anomalie s'milaire chez un individu de la même espèce récolté aux cuvirons de Bordeaux (Note sur une mons