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Carte d'orientation. — Extrait de la carte cantonaJ
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COtîÛIR lîIOIAl D'ESCOMPTE
DE PARIS
Société Anonyme, Capital 150 millions de francs entièrement versés
SIÈGE SOCIAL : 14, rue Bergère | SUCCURSALK : 2, place de l'Opéra
Président du Conseil d'Administration: M. MERCET, o. ^ Directeur général, Administrateur: M. Alexis ROSTAND, O.iJ^
OPERATIONS DU COMPTOIR NATIONAL
Escompte
Le Comptoir National escompte le papier de commerce sur Paris, la Province et l'Etranger.
Le Comptoir Natioî^al est le seul Etablissement français qui ait des Agences aux Indes Anglaises, en Australie, en Améri({ue, à Madagascar, et qui puisse délivrer, pour ces contrées, des lettre.- de crédit ou de recommandation auprès de ses propres Agence.=;. Il a aussi des Succursales dans les principales villes de France, ainsi qu'à Londres, Liverpool, Manchester (Voir page 4).
Recouvrements
Le Comptoir National se charge de l'encaissçment des effets sur Paris, la France, les Colonies et l'Etranger, à des conditions qui sont déterminées dans un tarif adressé à toute personne qui en fait la demande.
Dépôts à Vue
Le Comptoir National reçoit en compte de dépôt, des fonds qui sont constamment à la disposition des déposants. Il leur en sert un intérêt actuellement fixé à 3>2 %• Un carnet de chèques est délivré, sur sa demande, à chaque titulaire de compte.
Dépôts à Écliéance fixe
Le Comptoir National reçoit des fonds à échéance fixe. L'intérêt de ces dépôts est actuellement fixé :
De 6 mois jusqu'à! an, 2 % - 1 De 18 mois jusqu'à 2 ans 3 % De 1 an jusqu'à 18 mois 21/2 % | A 2 ans et au delà, . 3 1/2 %
Les bons sont à ordre ou au porteur, au choix du Déposant. Les intérêts sont représentés par des Bons d'intérêts également à ordre ou au porteur, payables semestriellement ou annuellement, suivant les convenances du Déposant.
Renseignements sur les Valeurs
Le Comptoir National possède un service d'Etudes financières chargéspécialement d'étudier toutes les affaires industrielles, com- merciales et iinancières, françaises et étrangères, cotées et non cotées, qui peuvent attirer l'attention des clients du Comptoir Na- tional qui sont ainsi constamment renseignés sur l'origine et la marche des affaires qui les intéressent.
_ 2 —
Avances sur Titres
Le Comptoir National consent des avances sur les Rentes Françaises et Etrangères, sur les Obligations de Chemins de fer, les valeurs émises par l'État, les villes, les départements, etc.
Délivrance de Chèques, Envois de Fonds
Le Comptoir National délivre, contre provision préalable, des chèques ou des mandats sur la France ou l'Etranger.
Il se charge de transmettre des ordres de paiement par corres- pondance et par télégraphe.
Prêts Hypothécaires Maritimes
Le Comptoir National a organisé un service spécial pour les prêts hypothécaires sur navires français ou francisés. Les demandes de prêt peuvent être adressées indifféremment, au Siège social, ou à l'une quelconque des Agences du Comptoir National, en France ou à l'Etranger.
Location de Coffres-Forts
Le Comptoir National met à la disposition du public, pour la garde des valeurs, papiers, bijoux, etc., des coffres-forts entiers ou des compartiments de coffres-forts, au Siège social, 14, rue Dergère, à la Succursale, 2, place de l'Opéra, à l'Agence A^ 147^ boulevard Saint-Germain, et dans les principales Agences.
TARIF DE LOCATION
MODELES
N» 1
N«3
N« 3
N°4 j
iCoffre-fortentier
DlMExNSIONS
Hauteur Largeur Profond.
0-25 0-65
2-25
0-25 0-65 0-65
1-30
0-50 0-50 0"55
0-50
PRIX
Un Mois
Trois
Mois
100
Six Mois Un An
25 » 40 » 50 »
40
60
100
400
Une clef spéciale unique est remise à chaque locataire. — La combinaison est faite et changée à son gré par le locataire. — Le locataire peut seul ouvrir son coffre.
Une serre spéciale est affectée aux caisses, malles, etc., pouvant contenir de l'argenterie, des objets précieux, dentelles, etc.
Villes d'Eaux, Stations Balnéaires
Le Comptoir National a des Agences dans les principales Villes d'Eaux : Nice, Cannes, Vichy, Dieppe, TrouviUe-Deauville, Dax, Royat, leMont-Dore, Bagnères-de-Luchon ; de sorte que les Etran- gers, les Touristes, des Baigneurs peuvent continuer à s'occuper d'^iiffaires y)endant leur villégiature. ,
Un service d'informations télégraphiques les tient continuellement aw courant des nouvelles politiques et financières.
— 8 — Ordres de Bours*
Le Comptoir National se charge d'exécuter gratuitement, c'est- à-dire sur simple remboursemenl des frais réclamés par les Agents de change, les ordres de Bourse que ses clients lui adressent et dont la couverture lui est faite. Il se charge de l'exécution des ordres d'achats et de ventes sur toutes les autres places en France et à l'Etranger, moyennant commission et frais ae transport dés titres.
Valeurs de Placement
Le Comptoir National délivre sur simple demande ei sans aucuiis frais des Obligations des Chemins de fer de Paris-Lyon-Méditer- ranée, de l'Est, d'Oi-léans, du Midi, aux mêmes cours que ceux auxquels les délivrent les Compagnies elles-mêmes.
Il délivre immédiatement à ses guichets les Obligations Ville de Paris, du Crédit Foncier, etc.
Dépôt de Titres
Le Comptoir National reçoit en dépôt les titres de toute nature, français ou étrangers, nominatifs ou au porteur, contre un très modique droit de garde. Les Actions et Parts de Fondateur du Comptoir National sont exemptées du droit de garde.
Les titres déposés au Comptoir National peuvent être retirés de 2 heures à 4 heures, le jour même de la demande du retrait.
Dépôts de Titres dans les Agences
Le Comptoir National reçoit également en dépôt dans ses Agences Etrangères, à Londres notamment^ les titres et valeurs qu'on peut avoir hors de France. — Les Agences, organisées pour recevoir les dépots de titres, encaissent les coupons, dont le montant est payé, sur la demande des déposants, dans l'un des sièges du Comptoir National, en France ou à l'Etranger.
Garanties contre les Risques de Remboursement des Titres au pair
IjC Comptoir National se charge de garantir contre les risques de remboursemenl, les titres cotés au-dessus du pair. Une Notice contenant les différentes natures de valeurs auxquelles le Comptoir National peut donner cette garantie est envoyée sur demande.
Lettres de Crédit pour Voyages
Le Comptoir National délivre des lettres de crédit sur tous pays, ainsi que des lettres de crédit circulaires payables dans le monde entier.
Le Comptoir National a organisé à sa Succursale, 2, place de l'Opéra (rez-de-chaussée), un service spécial pour les Voyageurs et le paiement des lettres de crédit émises sur ses Caisses (salons de lecture et de correspondance, service de réception des lettres des accréd tés, cabine téléphonique, boîte postale, etc.).
SUCCURSALi:, BUREAUX & AGENCES
SUCCURSALE : 2, place de l'Opéra, Paris.
Bureaux de
A - Boulevard St-Germain, 147 B - Rue (le Rivoli, 108 C - Quai (le la Kapée, 2 D - Rue Rambuleau, 11 E - Rueïurbigo, 16 F - Place de la République, 2i G - Rue de Flandre, 24 H - Rue du 4-SepleQibre, 2. I - Boulevard Mag^enta, 84 K - Bout. Richard-Lenoir, 0 2 L - Rue de Clichy, 86
Quartier dans Paris ^
M - Av. Kléber (Passy), 87
N - Ave'.iue Mac-Mahon, :^5
0 - Boul. Montparnasse, 71
p - Faubourg St-Anloine, 27
R - Boulevard Saint-Michel, 53
S - Rue Pascal, 2
T - Avenue de Villiers, 1
U - Avenue des Champs-Elysées, 40
V - Avenue d'Orléans, 85 X - Rue du Commerce, 69 (Grenelle >
Y - Faubourg Saiot-Honoré, 124
Bureaux de Banlieue
Enghien-les-Bains,47, Grande-Rue 1 Levallois-Perret,3, Place de la République ASNIÈRES, 8, rue de Paris [ Charenton, 50, rue de Paris
Neuilly-sur-Seine, 92, Avenue de Neuilly.
Agences |
en France |
||
Abbeville |
Castres |
Issoire |
Périgueux |
Agen |
Cavaillon |
Jarnac |
Perpignan |
Aix-en-Provence |
Celle |
Lézignan |
Reims |
Alais |
Chagny |
Libourue |
Remiremoiil |
Amiens |
Chalon-s-Saône |
Lille |
Roanne |
Angoulême |
Cliâleaurenard |
Limoges |
Roubaix |
Arles |
Clermonl-Ferrand |
Lyon |
Rouen |
Avignon |
Cognac |
Maoosque |
Royat |
Bagnères-dc-Liuiion |
Condé-s-Nûireau |
Mans (lei |
Sainl-Cliamoiid |
Bagnols-s-Cèze |
Dax |
Marseille |
Saint-Dié |
Beau Caire |
Dieppe |
Mazamel |
Saint-Elienne |
Beaune |
Dijon |
Mont-de--Mar>;\n |
Salon |
Belfort |
Dunkerque |
Mont-Doie (li't |
Toulouse |
Bergerac |
Elbeuf |
Montpellier |
Tourcoing |
Béziers |
Epinal |
Nancy |
Trouville-Deauville |
Bordeaux |
Ferlé-Macé (la) |
Nantes |
Vichy |
Bourboule (la» |
Firminy |
Narbonne |
Villefranche-s-Saône |
Gaen |
Fiers |
Nice |
Villeneuve-s-Lot |
Calais |
Fray |
Nimes |
Vire |
Cannes |
Havre (le) |
Orange |
|
Carcassonne |
Hazebrouck |
Orléans |
|
Agences à |
l'Étranger |
||
Londres |
Melbourne |
Tunis |
Majunga |
Liverpool |
Sydney |
Sousse |
Tamatavt |
Manchester Bombay Calcutta |
San-Francisco New-Orléans |
Sfax Gabès Tanger |
Tananarivi Diégo-Suarcï |
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Ardouin-Dumazet
31«me Série
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PARIS
Bei\gei\-Lev^ault & C^\ Éditeurs
Voyage en France
OUVRAGES DU MÊME AUTEUR
L'Europe centrale et ses réseaux d'Etat. — Un volume ia-i2. 3 fr. 50 c.
(Berger-Levraiilt et C'".)
L'Armée et la Flotte en 1895. — Grandes manœuvres des "Vosges. — L'expé- dition de Madagascar. — Manœuvres navales. — Un volume in-12, avec nombreuses cartes. 5 fr. (Berger-Levrault et C'".)
L'Armée et la Flotte en 1894. — Manœuvres navales. — Manœuvres de Heauee. — Manœuvres de forteresse. — Un volume in-12, illustrations de Paul LÉONNEC, nombreux croquis et cartes. 5 fr. (Berger-Levrault et C'».)
L'Armée navale en 1893. — L'Escadre russe en Provence. — La Défense
de la Corse. — Un volume in-12, avec 27 croquis ou vues et une carte de la Corse. 5 fr. (Berger-Levrault et C'«.) Au Régiment — En Escadre. — Préface de M. Mézières, de l'Académie fran- çaise. 1894. Un volume grand in-8, avec 350 photographies instantanées de M. Paul Gers. 16 fr. (Berger-Levrault et C'«.)
Le Colonel Bourras. Suivi du Rapport sur les Opérations du
corps franc des Vosges du colonel bourras. 1892. Brochure in-12, avec un
portrait et couvei-ture illustrée. (Berger-Levrault et C'«.) Épuisé. Le Nord de la France en 1789. — Flandre. — Artois. — Hainaut. — Un
volume in-12. (Maurice Dreyfous.) La Frontière du Nord et les défenses belges de la Meuse. — Un volume in-8.
(Beaudoin.) Une Armée dans les neiges, journal d'un volontaire du corps franc des
Vosges. — Un volume in-8 illustré. (Rouam.) Études algériennes. — Un volume in-8. (Guillaumin et C'«.)
Les Grandes Manœuvres de 1882 à 1892. — Un volume in-12 par année.
(Baudoin et Rouam.)
Voyage en France. Ouvrage couronné par l'Académie française (prix Montyon et prix Narcisse Michaut en 1901, décerné à l'auteur du meilleur ouvrage de littéra- ture française), par la Société des gens de lettres, par la Société de géographie de Paris et par la Société de géographie commerciale. Série d'élégants volumes in-12, avec cartes et croquis dans le texte, brochés à 3 fr.SOc. et reliés en percaline à 4 fr.
1" SÉRIE : Le Morvan, le Val de Loire
et le Perche. 2" SÉRIE : Des Alpes mancelles à la Loire
maritime. 3« SÉRIE : Les Iles de l'Atlantique :
I. D'Areachon (île aux Oiseaux) à Belle-Isle.
4" SÉRIE : Les Iles de l'Atlantique :
II. D'Hoëdie à Ouessant. 5« SÉRIE : Les Iles françaises de la
Manche ; Bret:igne péninsulaire. 6' SÉRIE : Normandie (sauf le pays de
Bray et Dieppe). 7» SÉRIE : Région lyonnaise, Lyon, monts
du Lyonnais et du Forez. 8« SÉRIE : Le Rliône du Léman à la mer, Dombes, Valromey et Bugey, Bas- Dauphiné, Savoie rhodanienne, La Camargue. 9" SÉRIE : Bas-Dauphiné : Viennois, Grai- sivaudan, Oisans, Diois et Valenti- nois. 10° SÉRIE : Les Alpes du Léman à la Du-
rance. Nos chasseurs alpins. 11" SÉRIE : Forez, Vivarais septentrional,
Tricastin et Comtat-Venaissin. 12» SÉRIE : Alpes de Provence et Alpes Maritimes.
13" SÉRIE : La Provence maritime.
14" SÉRIE : La Corse.
15" SÉRIE : Les Charentes et la Plaine
poitevine. 16" SÉRIE : De Vendée en Beauce. 17" SÉRIE : Littoral du pays de Caux,
Vexin, Basse-Picardie. 18" SÉRIE : Région du Nord : I. Flandre
et littoral du Nord. 19" SÉRIE : Région du Nord : II. Artois,
Cambrésis et Hainaut. 20" SÉRIE : Haute -Picardie, Champagne
rémoise et Ardennes. 21" SÉRIE : Haute-Champagne, Bassc-Lor-
22" SÉRIE 23" SÉRIE 24" SÉRIE 25" SÉRIE 26" SÉRIE 27" SÉRIE
Plateau lorrain et Vosges. Plaine comtoise et Jura. Haute-Boui-gogne. Basse-Bourgogne et Sénonais. Berry et Poitou oriental. Bourbonnais, Haute-Marche. 28" SÉRIE : Limousin. 29" SÉRIE : Bordelais et Périgord. 30" SÉRIE : Gascogne. 31" SÉRIE : Agenais , Lom^gne et Bas-
Quercy. 32" Série: Haut-Quercy, Haute- Auvergne. 33" SÉRIE : Basse-Auvergne. Sous presse : 34" Série : Velay, Vivarais méridional, Gévaudan. — 35» Série : Rouergue et Albigeois. — 36" Série : Les Céveunes méridionales. — 37° SÉRIE : Le golfe du Lion. — 38" Série : Haut-Languedoc.
En préparation : 39" Série : Pyrénées, partie orientale. — 40" Série : Pyrénées, partie occidentale. — 41" Série et suivantes : Paris et l'Ile-de-France.
Le prospectus détaillé de la collection est envoyé sur demande.
V
ARDOUIN - DUM AZET
Voyage en France
31= SÉRIE
Agenais — Lomagne — Bas=Quercy
AGENAIS LOMAGNE GAURE
FEZENZAGUET FEZENSAC EAUZAN CONDOMOIS
BAS-QUERCY RIVIERE-VERDUN
(Déparlements de Lot-et-Garonne et de Tarn-et-Garonne^
nord du déparlement du Gers, sud du département du Lotj
parties de la Gironde et de la Haute-Garonne.)
Avec 22 cartes ou croquis
BERGER-LEVRAULT & G^ ÉDITEURS
PARIS
O, EUE DES BEAUX-ARTS
NANCY
18, RUE DBS QLAC]
1903
Tous droite réservés
9
CARTE D'ENSEMBLE DE LA 31^ SERIE
Série
Issigeacp
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Seyches ,■.,,■■.■' M.onflannuin^ ^ ^
'r\/~T\ "''Casûllônnès
Série
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Houilles ^ ^Lavardac^Œjc-^On--" ■ i < /y.^o.^/ ^^^Ç>fi ^ ^^-.^
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Nogppof^ . . Vicjezëas'àc-.j- q' ""■ Jegun
Wleurance;
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30? Série
Jou5 /es croquis sans indications spéciales compris dans ce volume sont extraits de la carte d'état-major au ilSoooo^.
VOYAGE EN FRANGE
LA PLAIAE DE LA GARONNE
En amont de La Réole. — La plaine de Garonne. — Meilhan. — Le sorgho à balai. — Les gavaches de Sainte-Bazeille. — Marmande. — Une affiche électorale. — Le Mas-d'Agenais. — Tonneins et la culture du tabac. — Comment on prépare le sol . — Formantes administratives. — La récolte et le manocage.
Marmande. Juin.
La Réole ' est comme une porte barrant ou assurant le passage entre deux contrées fort dis- tinctes. Depuis Bordeaux, on a suivi la Garonne au sein d'une vallée bien dessinée et, tout à coup, on voit les collines riveraines s'écarter : la vallée se fait plaine, large, verte, plantureuse ; le fleuve y déroule en méandres ses ondes rapides et
I. ag» série du Voyage en France, chapitre XIL
VOYAGE EN FRANCE. XXXI.
2 VOYAGE EN FRANGE.
claires. Il est de plus beaux cadres pour un grand cours d'eau, il n'est guère de campagnes aussi somptueuses. Jusqu'au delà d'Agen, sur près de loooob hectares, cette large bande de fécondes terres alluviales présente un des plus opulents tableaux rustiques que puisse offrir notre pays.
La Garonne frôle rarement la base des col- lines : quand une de ses boucles vient y toucher elle ne s'attarde pas, aussitôt le large courant revient au milieu de la plaine. Ainsi le fleuve vient heurter la côte abrupte qui porte Meilhan, petite bourgade dominée par des ruines féodales. Si la colline est peu élevée, la pente est si raide que le paysage prend de la grandeur. « Qui voit Meilhan n'est pas dedans », disait un proverbe, par allusion à la puissance de la forteresse.
Le canal latéral est établi sur la berge même de la Garonne. Le bourg domine donc à la fois le cours d'eau déserté par la navigation — sauf à la descente — et la voie artificielle revenue à la vie depuis que l'État, en reprenant l'exploita- tion, a supprimé les taxes de péage. Un brusque méandre enserre les campagnes du bourg de Jusix, fameuses pour leur fertiUté dans ce pays si fertile. Champs de tabac, de maïs, de sorgho à balais, prairies pacagées par un admirable
LA PLAINE DE LA GARONNE. 3
bétail de race garonnaise sont un perpétuel en- chantement pour le promeneur épris des choses rustiques.
Échelle au ijS'iOOOO'
Peu de villages au bord de la Garonne, dont les fureurs ont trop souvent amené des ruines ; les habitations sont plus nombreuses sur les hau- teurs. Là, sans inquiétude, de johs centres con-
4 VOYAGE EN FRANCE.
templent le sinueux ruban des eaux étincelantes tracé au milieu des vertes campagnes. L'un d'eux, Marcellus, dont le château a grand carac- tère, possède une petite industrie inattendue en un tel milieu : on y fait des boutons de nacre.
Un pont franchit le fleuve au village de Cou- thures, entouré de champs de sorgho. Les tiges et les panicules sont utilisés sur place à la fabri- cation des balais, industrie fort active aux bords de la Garonne '. La route va rejoindre à Sainte- Bazeilles les voies maîtresses de la vallée : che- min de fer de Cette et chaussée de Toulouse.
Le bourg où se fait la jonction est fort heu- reusement situé, dans la plaine de cultures coupées de joualles et dominée par des pentes couvertes de vignes. Une flèche dentelée s'élance au-dessus du clocher de l'église, charmant édi- fice de la Renaissance. L'humble ville ne touche pas à la Garonne, mais un ruisseau la borde, fait de sources, qui sont peut-être dues à des infiltrations ; il porte ensuite ses vives eaux à la petite rivière descendue des collines de Cambes et de Puisserampion, couvertes de vergers de pruniers.
Sainte-Bazeille, appelée aussi Sainte-Bazeille-
Voyez pages i8o et suivantes (Grisolles).
LA PLAINE DE LA GARONNE. O
en-Bazadais, appartenait à la région gasconne de Bazas, Très vieille ville, elle fut ruinée parles guerres et les épidémies. Dans les premières an- nées du XVI* siècle, le roi de Navarre, seigneur d'Albret, la repeupla avec le reste du pays gui lui appartenait jusgu'au Drot, en faisant appel à des colons du nord : Saintongeais, Poitevins, Angevins. Ces nouveaux venus, dont l'allure et le langage à'oil ressemblaient si peu à ceux des Gascons plus petits, plus vifs et gais, reçurent des populations méridionales le nom de gava- ches. Le nombre en fut considérable, puisgue, du Drot à la Dordogne, toute une région, dont le centre paraît être Gastelmoron-sur-Drot, a reçu le nom fort expressif de Gavacherie. Même au- jourd'hui, après cing siècles, les gavaches ont gardé leur accent traînant et une partie des expressions des pays à'oil. Ils ne se sont pas mêlés à leurs voisins, on les reconnaît à leur sta- ture plus forte, leurs traits plus lymphatigues, leurs cheveux lisses ; les femmes, les jeunes filles surtout, n'ont plus la joliesse et les yeux vifs des Gasconnes et des Agenaises.
La ville principale de la vallée, Marmande, n'a pas été peuplée par cet élément, car elle n'appartenait pas à l'Albret ; comme le reste de la Guyenne, elle était à la Couronne depuis l'ex-
6 VOYAGE EN FRANCE.
pulsion des Anglais. Un des rois d'Angleterre, Richard Cœur de Lion, la fonda sur l'emplace- ment d'une ville détruite ; c'est une bastide comme tant d'autres cités de la contrée, mais elle n'a gardé l'aspect régulier de ces villes neuves que dans sa partie orientale ; ailleurs, elle s'est agrandie avec moins de géométrie et a fini par remplir un demi-cercle dans une ceinture de remparts aujourd'hui disparus; en i8i4j ces murs jouèrent un rôle dans la lutte contre l'ar- mée de Wellington. Huit cents soldats qui avaient perdu leurs régiments s'y groupèrent et, malgré la restauration de Louis XVIII, y tinrent pendant un mois contre une division anglaise.
Les murailles qui permirent cette résistance héroïque et désespérée sont tombées ; sur leur emplacement est un large boulevard où les cafés et les hôtels mettent beaucoup d'animation, aux abords de la gare surtout. La démolition a donné de l'air à cette vieille cité, jadis habitée par une bourgeoisie opulente. Ces promenades et les deux rues principales, se coupant en croix, sont plus vivantes qu'on ne le supposerait d'après le chiffre de la population : 7 000 âmes à peine dans l'agglomération \ ^^lais les autres voies
I. La commune comprend 9878 habitants.
LA PLAINE DE LA GARONNE. 7
sont étroites et mal alignées, malgré la régula- rité du plan ; les maisons sont en pauvres maté- riaux.
L'église, en dépit des mutilations, est un inté- ressant édifice dont certaines parties remontent au xn' siècle. Le cloître, de la Renaissance, doit son charme à sa dégradation même ; ses arceaux, supportés par des pilastres à chapi- teaux, ont été envahis par la végétation arbus- tive. Il ouvre sur une terrasse plantée d'arbres et dominant la vallée verdoyante. Lorsque Mar- mande fut rebâtie par les Anglais, la Garonne baignait le pied de cette terrasse et formait ainsi le fossé de la place. Le fleuve s'est éloigné dans la plaine et décrit une grande courbe pour venir toucher encore un angle de la ville, avant de reprendre son cours solitaire entre les sau- laies et les prés : c'est là que le pont suspendu a été jeté. L'ancien lit du fleuve est oblitéré, mais un petit affluent, le Trec, s'est tracé un sillon dans ces terres alluviales et remplace la Garonne au-dessous de Marmande où il finit. Cette rivière est fort poissonneuse, à en juger par le nombre de pêcheurs qui la bordent au- jourd'hui.
Le pont et l'égHse constituent à peu près toute la partie monumentale de la ville. La sous-pré-
8 VOYAGE EN FRANCE.
fecture occupe un petit hôtel précédé d\ine cour plantée de magnolias et voisine d'une chapelle de la Renaissance.
Marmande est commerçante. Une affiche élec- torale me donne une idée de son activité écono- mique. « Citoyens, dit un candidat dont un ad- versaire a lacéré la signature, vous vendez mal vos vins, vos prunes, votre blé »
C'est tout ce qui reste, l'auteur de la procla- mation devait sans doute promettre que les blés de la plaine, les pruniers des collines, les beaux vignobles des aimables coteaux de Beaupuy et de Virazeil connaîtraient une nouvelle ère de splendeur s'il était élu. Il n'a pas abordé la question des bouilleurs de cru, sans doute parce qu'il y a beau temps que l'eau-de-vie de Mar- mande, jadis réputée et obtenue surtout dans la vallée du Trec, ne se distille plus ou ne se dis- tille guère. Le trafic des fruits et primeurs, celui des prunes d'Agen, ont remplacé cette industrie rurale.
En amont de Marmande, la plaine est couverte d'une multitude d'habitations isolées dépendant de petits centres communaux composés à peine de l'église et d'une poignée de maisons. Seul Fauillet a quelque apparence de bourg, mais il
LA PL.AJNE DE LA GARONNE. 9
se dresse sur un léger ressaut de la féconde plaine dont le ruisseau du Tolzat baigne le pied. Les groupes d'habitations les plus considérables sont demeurés sur les collines ; ils étaient à la fois hors des atteintes du fleuve en furie et un peu à l'abri des bandes armées. Ces belles hau- teurs, bien dessinées et découpées sur la rive droite en falaise régulière, ont offert leurs escar- - pements comme protection ; les cités riveraines de la Garonne sont nées plus tard et se sont accrues à mesure que les guerres devenaient moins fréquentes. Les Romains choisirent pour site d'une de leurs villes le plateau étendu entre l'Avance et la Garonne. Des ruines ont été re- connues sur de vastes espaces, près desquels la mignonne bourgade du Mas-d'Agenais occupe un bien étroit territoire, entre le fleuve et une forêt de chênes. On ne semble pas avoir iden- tifié la cité romaine, mais les débris retrouvés et ceux employés dans la construction de l'église en disent la splendeur.
De cette terrasse, la vue est superbe sur la plaine, en ce moment jaunissante, mais que je vis en mai dans toute sa splendeur. Les mois- sons sont coupées de joualles de vignes d'un aspect parfois singulier ; en guise d'échalas, on se sert de rameaux de saules qui souvent émet-
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tent des pousses vertes et deviennent un petit arbre auquel le sarment s'enroule. Le labour est fait par des bœufs d'un pelage fauve, doux et brillant ; ces animaux accentuent le caractère rustique et paisible du tableau.
A rautre extrémité de la plaine, les collines, plus mouvementées et hautes, sont tapissées de vignes ; à leur pied, les pruniers forment des plantations régulières, les cerisiers aussi sont nombreux; beaucoup de bosquets de petits ar- bres parsèment ces campagnes heureuses. En août, les maïs montrent leurs panicules ; le tabac aux grandes feuilles d'un vert magnifique couvre de vastes champs, auxquels on ne reproche que Talignement trop absolu. L'herbe à Nicot, comme on l'appela jadis, est ici dans son habitat pré- féré, nulle part en France elle ne montre autant de puissance de végétation.
Le tabac est cultivé de longue date dans la val- lée de la Garonne, les premiers essais de planta- tions en grand ont été faits autour de Tonneins et de Clairac; aujourd'hui encore ces deux villes, puis Aiguillon et Port-Sainte-Marie, sont au centre des principales cultures ; mais on plante partout le tabac sur les deux rives du fleuve et du Lot.
Tonneins est le cœur de cette production ; de
LA PLAINE DE LA GARONNE. Il
tous temps, ses tabacs furent célèbres, de bonne Iieure une manufacture y fut installée ; celle-ci est aujourd'hui une des plus considérables de France, sans elle la petite ville retomberait à l'état de pauvre bourg ; une grande partie de la population y est employée, des femmes surtout. La ville n'a guère d'aspect, sauf sur une prome- nade et au bord du fleuve. Composée jadis de deux cités jumelles que fît détruire Louis XIII, elle a ressuscité sur le même plan. Jusqu'aux premières années du siècle, on la disait com- posée de deux « bourgs ». Aujourd'hui, la fu- sion est faite, mais l'aspect général reste celui d'une médiocre bourgade ^ Sur le fleuve, la ville couronne des falaises d'un grès grossier, jaunâtre, veiné de rouge ; de hautes maisons s'étagent sur ces parois et constituent un en- semble assez pittoresque.
Le climat est tiède, si doux qu'un jardin de l'avenue de la gare présente au passant un oli- vier et un myrte croissant en pleine terre. Ce quartier n'est pas sans élégance, il possède de jolies constructions.
Comme tous les centres de cette plaine, Ton-
1. Population totale 68oa habitants, agglomérée 463o ; il y a décadence, car on compta plus de 8000 âmes à Tonneins.
12 VOYAGE EN FRANCE.
neiiis fait un grand commerce de prunes et de pruneaux ; elle fabrique des sandales ou espa- drilles, des machines agricoles, des poids et me- sures, mais sa principale industrie reste toujours le tabac. Les produits de sa manufacture ont de la réputation, au point que la plupart des bu- reaux de tabac de la ville font des expéditions à une clientèle du dehors.
Autour de Tonneins, de chaque côté du fleuve, les champs de tabac couvrent de grands espaces, ils seraient continus s'il ne fallait assurer l'asso- lement. Cette plaine alluviale n'est pas seule- ment favorable au tabac par sa fertilité, elle l'est aussi parce qu'elle est dans la zone du globe où la plante se plaît le mieux ; on a remarqué que l'espace compris entre le [\2^ et le 4^^ degré de latitude lui est le plus favorable. « Or cette zone, fait observer M. Heuzé % comprend le Maryland et la Virginie, le Lot et le Lot-et-Garonne, con- trées où la chaleur est assez élevée pour que les plantes puissent mûrir avant les froids d'au- tomne et fournir des tabacs corsés et ayant une odeur pénétrante et agréable. » Des deux dé- partements, le Lot est celui qui donne les feuilles les plus appréciées ; le Lot-et-Garonne l'emporte
Les plantes indasirielles. (Librairie de la maison rustique.)
LA PLALNE DE LA GARONNE. l3
pour la surface consacrée à la culture. Celle-ci occupe 3419 hectares, tandis que le Lot en a 2 100 seulement, mais les terrains propices n'existent dans le haut Quercy que sur le bord des rivières, les plateaux sont des causses arides.
Le Lot-et-Garonne, la vallée de la Garonne surtout, vient en tête des départements pour le nombre d'hectares en tabac, suivi de près par la Dordogne avec 3 3oo hectares. Par contre la valeur moyenne du quintal est de 106 fr. 54 c. dans le Lot et seulement 99 fr. 70 c. dans le Lot-et-Garonne ; à ce point de vue, ce départe- ment est légèrement dépassé par la Côte-d'Or et le Nord, où le prix du quintal est de 100 fr.
Ces trois départements limitrophes : Dordo- gne, Lot et Lot-et-Garonne, font plus de tabac que les vingt autres autorisés à cette culture. En 1900, ils avaient couvert ensemble 9819 hec- tares et la France entière 17673 hectares. Si l'on ajoute à ces chiffres les i 396 hectares de la Gironde, on voit que la province de Guyenne est de beaucoup le plus grand pourvoyeur de nos manufactures nationales.
C'est une véritable source de bien-être pour les populations du Sud-Ouest. Sans le tabac et la culture fruitière, la dépopulation, si consi-
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dérable déjà, serait autrement navrante. Et pourtant elle est excessive.
Mais le tabac est d'un excellent et sûr revenu ; aussi, en dépit des règlements compliqués et sé- vères dont il est l'objet, le nombre des planteurs s'accroît-il sans cesse.
Les habitants des contrées où cette culture est inconnue ne s'imaginent guère une régle- mentation aussi étroite, avant-goût de ce que donnerait le communisme s'il était jamais appli- qué. Il n'est peut-être pas sans intérêt de si- gnaler à grands traits comment se fait une récolte entourée de prescriptions si minutieuses.
En dehors des départements autorisés d'une façon définitive ou à titre d'essai à planter du tabac, nul ne peut songer utiliser ainsi son terrain. Encore le cultivateur doit-il être fermier ou propriétaire dans une des communes dont le préfet a fait publier la liste.
Ceci n'est que le point de départ : Chaque planteur ne peut, travailler moins de vingt ares. 11 est obligé de faire une déclaration en produisant un certificat de solvabilité ; il ne cultivera en tabac que les pièces de terre dé- clarées et en couvrira au moins les quatre cin- quièmes ; la récolte faite, il livre à la régie tout
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le tabac recueilli et cela dans un magasin qui lui est indiqué. Ce n'est pas tout, le plan- teur doit autoriser l'accès de son habitation : maison, magasin, séchoir, aux employés do la régie, depuis le lever jusqu'au coucher du soleil.
Des pénalités très sévères sont édictées contre ceux qui auront enfreint ce règlement. La moin- dre est le retrait du permis de culture. Cette dernière mesure peut s'appliquer en outre à tous ceux qui ont été pris en fraude ou en con- travention, ou qui, pendant trois années, auront produit des tabacs de qualités inférieures. Par là, on entend des récoltes dont le prix moyen serait de lo p. loo au-dessous du prix moyen général.
Ce n'est pas fini, et même on ne fait que com- mencer! Dès les ^emis, le cultivateur est sous la surveillance de la régie : l'exposition des plan- ches, la façon de les garantir du froid, la quan- tité de semence, l'assainissement du sol, tout est soumis à l'inspection.
Enfin, en mai ou en juin, suivant le départe- ment, on commence à planter, mais à des dates administrativement fixées selon le climat : dans le Lot, il faut avoir terminé avant le lo juin, dans le Lot-et-Garonne avant le 25. Si la saison
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a été mauvaise, une autorisation du préfet est nécessaire pour prolonger le délai.
On ne plante pas la quantité que l'on veut, le nombre de pieds est rigoureusement fixé, et cela varie fort. Tandis que le Nord et le Pas-de- Calais, par exemple, peuvent disposer 4o ooo plants par hectare, les deux départements du Ouercy ne peuvent en mettre que loooo. 11 y a cependant une tolérance permettant un cin- quième en plus ou un cinquième en moins. Si la régie n'intervient pas dans la préparation du sol et dans la répartition de l'engrais, la dispo- sition même de la plantation est minutieusement réglée : il faut la faire en quinconce, au cor- deau, il ne doit y avoir aucune lacune dans les rangées. Il faut remplacer les pieds mal confor- més ou qui ont péri au début, mais quand le premier inventaire des plants a été fait, toute replantation est interdite. En cas de contraven- tion, les pieds ajoutés sont détruits par les soins de la régie.
Quant aux porte-graines, les planteurs ne peu- vent en avoir plus de 26 par 10 000 pieds de tabac.
Je passe sur les labours et le buttage, qui se poursuivent jusqu'au mois de septembre, pour revenir aux formalités de la régie.
LA PLAINE DE LA GARONNE. I7
La première est l'inventaire ; il a lieu en juillet, les plantations sont mesurées de façon à con- naître par une simple opération d'arithmétique le nombre des pieds contenus sur les surfaces régulières. Ceux qui sont dans des pointes sont comptés plant par plant. Au cas où il y aurait un excédent, soit sur l'étendue de terre décla- rée, soit sur le nombre de tiges, le planteur est puni d'une amende de 26 fr. par pied d'excédent.
Voici un moment le cultivateur tranquille, mais bientôt il lui faut écimer la plante, c'est- à-dire couper le sommet de la tige. La date de cette opération est fixée par arrêtés préfec- toraux. Dans le Quercy, on doit avoir terminé le i5 août. L'écimage a non seulement pour but de donner de la vigueur à la plante, mais aussi de maintenir à celle-ci le nombre de feuilles ré- glementaires. Dans le Nord, on peut laisser de six à dix feuilles, dans le Lot et le Lot-et-Ga- ronne, le maximum est de neuf. Je passe sur d'autres prescriptions concernant l'enlèvement des feuilles basses et sur Tébourgeonnement des jets latéraux que le cultivateur est obligé d'en- fouir au pied de la plante.
Trois à quatre semaines avant la maturité, les employés de la régie viennent s'assurer que ces travaux ont été faits et procèdent au recen-
VOTAGE EN FRANCE. — XXXI.
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sèment des feuilles : on tire dans une direction quelconque du champ une ligne comprenant 100,200 ou 3oo pieds au plus. Sur cette ligne on compte les feuilles d'un certain nombre de plan- tes. La moyenne obtenue est multijdiée par le nombre total des pieds de tabac.
En Quercy, la récolte se fait de bonne heure, dès le 25 août, trois mois après la plantation, un mois avant le moment où la récolte se fera dans le Nord. La cueillette n'a pas lieu en même temps sur toutes les feuilles d'un pied, elles sont détachées au fur et à mesure que l'on en reconnaît la maturité ; dans la Guyenne, celle-ci est assez régulière pour qu'on puisse couper les tiges au lieu de cueillir partiellement.
Les feuilles détachées de la plante sont dessé- chées après avoir été disposées en guirlandes, la tige étant enfilée par une ficelle à Faide d'une grosse aiguille. Ces guirlandes sont ensuite mises à la pente, c'est-à-dire placées dans des séchoirs ou dans des hangars ; quand il s'agit de tiges, les pieds sont suspendus, la partie supérieure en bas, aux chevrons des greniers ou aux poutres des hangars. La dessiccation de- mande beaucoup de soins et d'attention. Enfin, quand le tabac est arrivé au degré de siccité voulu, on effeuille les tiges et on les dispose,
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selon la qualité, la couleur, la grandeur et la lar- geur, en tas qui sont au nombre de huit : dans chaque tas, on prend ensuite un nombre de feuilles déterminé par l'administration et Ton en forme des })etits paquets ou nianoques. La nia- noque, en Ouercy, comprend seulement vingt feuilles. Cela s'appelle le manocage.
Les manoques sont placées en tas et compri- mées par des planches, de façon à faire subir au tabac une sorte de fermentation qui lui donne plus de teinte et de parfum. Il faut un mois ou six semaines. Pendant tout ce temps, il importe d'éviter une trop grande chaleur. Le thermo- mètre permet de ne pas laisser dépasser trente degrés.
Enfin, le moment est venu où le planteur va livrer ses manoques. Il les réunit en balles com- prenant un nombre déterminé de ces petits paquets : 200 en Périgord, 260 en Ouercy. Un arrêté du préfet donne la date à laquelle les pro- ducteurs devront se rendre aux magasins : dans le Lot et le Lot-et-Garonne, cette date est entre le I*' et le 3o janvier. Des règlements disent comment doit être chargé le tabac. Aux maga- sins a lieu un classement qui permettra d'établir les prix à allouer ; mais quand cela est fini, le planteur touche immédiatement son argent. La
20 VOYAGE EN FRANCE.
base est très variable, on la fixe selon que le tabac est de surchoix, de première, deuxième ou troisième qualité ou non marchand.
Gomme on le voit, la culture du tabac repré- sente une sujétion constante pour le planteur, mais les avantages en sont tels que celui-ci ac- cepte facilement ce contrôle de Pautorité et nombre de départements demandent à leur tour à pouvoir participer à cette culture.
II
LA VALLEE DU DROT
Le vallon du Trec. — Les pruniers et les chenilles fileuses. — Autour de Seyches. — Lauzun et son duché. — La Sauvetat. — Eymet. — En Périgord. — Au long du Drot. — Duras. — Monségur. — En Gavacherie. — Gastelmoron-d'AIbret . — De Monségur à La Réole.
La Réole. Juin.
La campagne de Marmande est vraiment su- perbe en ce moment; les moissons n'ayant pas encore mûri font des nappes de moire verte entre les vergers, les vignes, les champs de ta- bac et le maïs. La route qui conduit de la ville à la vallée du Trec donne une idée de richesse extrême ; partout, entre les cultures, se mon- trent des maisons vastes et riantes ; elles s'éta- gent dans les vignes, entre les arbres fruitiers, sur les pentes et la crête de collines bien décou- pées. Il y a déjà des pruniers; Tarbre favori de TAgenais devient surtout abondant vers Virazeil.
Hélas ! l'aspect de ces pruneraies est navrant cette année. Une invasion de chenilles fileuses a
2 2 VOYAGE EN FRANCE.
détruit la récolte : feuilles, bourgeons, fruits, tout a été dévoré par ces insectes répugnants, qui recouvrent troncs et branches d'un enduit blanchâtre. Le mal n'était pas inattendu, depuis trois ans on était prévenu de son apparition, mais, comme toujours, on ne s'est pas précautionné contre le fléau. Le remède, d'ailleurs, n'était pas nettement indiqué ; cette année seulement, une formule a été trouvée ; je pourrai, me dit-on, voir le résultat du traitement dans la vallée du Lot, où parfois l'on a fait montre d'initiative.
Mais ici, sur toute la route que je viens de parcourir au long du Trec et du Drot, c'est sinis- tre, cette richesse perdue, non seulement pour l'année 1902, mais pour l'an qui vient, car les bourgeons à fruits sont dévorés. Les fiîeuses ne se sont pas uniquement attaquées aux planta- tions de pruniers d'ente, tout ce qui est de la fa- mille prunier a été atteint ; les prunelliers des haies eux-mêmes sont envahis. Les buissons qu'ils forment semblent de loin couverts de neige ou de givre sale. Et cela est lugubre, au milieu de ce vallon si vert et frais, au sein duqueLse suivent tant de hameaux heureux.
Près d'un de ces groupes d'habitations, la Ga- zelle, se dresse une sorte de pignon surmonté d'un campanile, dernier débris d'une chapelle.
24 VOYAGE EN FRANCE.
Plus loin, le petit bourg de Seyches groupe une poignée de maisons autour de son église, bâtisse grise. On est ici en pleines pruneraies : pentes, petits plateaux, vallons étroits sont couverts de plantations régulières. Chaque habitation pos- sède une annexe basse, dont le toit est un pro- longement du toit principal qu'il semble conduire presque jusqu'à terre ; là se fait la transforma- tion de la prune en pruneau. Hélas ! les fours ne s'allumeront guère cette année.
La moindre commune a ses marchands de prunes ou tout au moins des acheteurs dans le village voisin. Seyches en possède, mais cet humble chef-lieu de canton ne fait pas un com- merce comparable à celui d'un bourg de ses en- virons: Saint-Barthélémy, situé au cœur d'une vaste région agricole.
Plus considérable encore pour les transactions est Miramont, bastide régulière entourant de son boulevard, formant caiTé, les îlots de maisons dessinés 'par six rues qui se coupent à angle droit. Au cœur de la ville, centre le plus peuplé de la contrée, s'élancent une haute flèche de pierre et le grand comble de l'église ; sur une place est la statue de M. de Martignac, le mi- nistre de la Restauration. Le commerce est plus actif dans cette petite cité que dans le bourg de
LA VALLÉE DU DROT. 20
Lauzun, qui doit à son ancienne prééminence seigneuriale comme capitale du duché-pairie de Lauzun d'avoir été choisi pour chef- lieu du canton.
Lauzun n'a pas le plan régulier de Miramont, c'est une vieille bourgade possédant encore le château d'où s'élança vers son étrange carrière le futur époux secret de la grande Mademoiselle : le comte, puis duc de Lauzun. Les chemins de fer laissent à l'écart la féodale bourgade, tandis que Miramont, située près du point de jonction des lignes de Bordeaux et d'Angoulême, voit encore accroître son activité. Jadis, quand le Drot était maintenu en bon état, elle utilisait cette voie de navigation à laquelle sa petite rivière de Dour- dène amène des eaux d'un vert laiteux.
La jonction des chemins de fer se fait au con- fluent, en face d'une bastide, la Sauvetat, qui n'eut pas la fortune de Miramont ; il y a bien peu de maisons au long des rues dominées par la tour carrée d'une vieille église, flanquée de pi- nacles à chaque angle. Ce n'est qu'un point de rencontre des voies, la gare où la formation des trains pour Bordeaux a lieu est au delà, à Eymet, chef-lieu de canton de la Dordogne, à la tête de la navigation officielle du Drot.
Encore une bastide, Eymet. On connaît sa date
20 VOYAGE EN FRANCE.
de naissance. En 1271, on traça les deux grandes rues en croix traversées par des voies plus pe- tites aboutissant à une enceinte fortifiée. Celle-ci a disparu pour faire place à des boulevards au- jourd'hui ombreux. La ville eut le bon goût de conserver sa place centrale avec ses arcades irrégulières : les unes ogivales, à grande ouver- ture, d'autres également gothiques, mais étroites et hautes ; certaines sont en anse de panier, cer- taines sont de simples galeries de charpente. Au milieu, une pompe est fixée sur un puits surmonté d'une sorte de tour octogonale. Cet ensemble est d'un effet singulier, archaïque et charmant. Les ruelles qui aboutissent là et sur les deux rues sont étroites, leurs maisons sont égayées par des espaliers couvrant les façades, des ar- bres débordent sur les murs des jardins.
Plus heureuse que d'autres bastides, Eymet garde quelques édifices ; le château n'a pas com- plètement disparu, il en reste un donjon à mâ- chicoulis revêtu de lierre et un pan de muraille auquel une tourelle en poivrière s'accote fière- ment encore. Ces débris ont été aménagés avec goût, un jardin fleuri de roses et abrité par un grand laurier précède l'entrée. En face, une colonne surmontée d'une croix a été érigée en l'honneur des bienfaiteurs de la ville ; près de là,
LA VALLEE DU DROT. 27
devant une église moderne, un arbre de la liberté abrite une de ces statues de la République mou- lées en si grand nombre pour le centenaire de la Révolution.
Des roses et des vignes à la plupart des fa- çades, des maisons en charpente à ressaut, le Drot roulant des eaux glauques au sein de prai- ries, sous les aulnes au feuillage sombre, com- plètent ce riant décor urbain.
Eymet est un centre pour le commerce des prunes, comme me le révèle à Tentrée une en- seigne : « Plus de chenilles ! » mais elle y joint celui des comestibles et d^ conserves. C'est le Périgord ici, dès les premiers pas dans cette province on trouve les spécialités culinaires qui ont fait le renom du pays des truffes.
La région du prunier s'étend assez loin encore vers la Dordogne ; un autre petit centre péri- gourdin, Issigeac, possède des foires aux prunes. La limite de la grande culture de cet arbre est déjà sur le versant qui regarde Bergerac. Les pruneraies diminuent ou cessent lorsque com- mence le fameux vignoble de Monbazillac^
Le chemin de fer ne quitte le Drot, au delà
I . Pour la région de Bergerac et les vins de Monbazillac vi 29e série du Voyage en France, chapitre XV.
la 2C
28 VOYAGE EN FRANCE.
d'Eymet, qu'à la station de Falgueyrat, d'où se détachera un embranchement sur Villeneuve-sur- Lot, depuis longtemps projeté, continuation de la ligne actuelle de Bordeaux à Eymet, par la- quelle l'Entre-deux-Mers et le cœur de l'Agenais se relient à la métropole du sud-ouest. Elle tra- verse une région qui dépendait de l'Albret et dont le repeuplement par des émigrants de pro- vinces de langue d'oil a fait naître le mot de « Gavacherie ».
En route pour la Gavacherie. Le chemin de fer me conduit à Duras d'où j'irai parcourir ce petit pays. A la Sauvetat, le train s'aiguille sur la voie de Bordeaux et le voilà descendant au long du Drot, dans une aimable vallée où les maisons éparpillées sur les pentes et parmi les cultures du fond mettent beaucoup de vie et de gaîté. Peu de villages, et menus, si menus ! C'est que les habitants ont voulu être au milieu de leur pruneraie afin de pouvoir plus tôt récolter et transporter leurs fruits. Moustier n'a même pas de centre, l'église à haute flèche de pierre se dresse, isolée, au flanc d'un coteau. Sur l'autre rive du Drot, Allemans est un joli bourg, bien groupé entre les prairies, les vignes et les pru- neraies. Plus loin, sur une sorte de promontoire,
LA VALLÉE DU DROT. 20
l'église de Monteton se dresse au sommet de la butte.
Le Drot erre dans les prés et reçoit des ruis- selets affluents ; l'un d'eux naît dans les collines où se dresse le féodal Puyguilhem, village chef- lieu de baronnie, dont le futur duc de Lauzun portait le titre quand il apparut à la cour et, par sa belle mine, s'attira les faveurs de Louis XIV. Un autre village au nom sonore, Pardaillan, borde le ruisseau et s'entoure de pruniers. Tous ces arbres doivent faire un décor merveilleux au printemps, quand ils sont couverts de leur floraison de neige. En ce moment, ils sont blancs encore, mais de la lépreuse blancheur due à la soie des chenilles qui ont dévoré leurs feuilles.
Le Drot est une bien pauvre rivière, sinueuse, sans mouvement apparent, ses eaux d'un vert blanchâtre s'en vont entre des berges revêtues d'arbres et de taillis. Ce paysage serait très pla- cide sans l'allure belliqueuse de la petite ville de Duras, assise sur une colline escarpée au confluent de la Dourdèze. Minuscule, la cité qui devint le siège du duché de Duras, constitué en faveur de la famille de Durfort, mais son château couronné par une tour à galerie, ses remparts, son église lui donnent une grandeur
3o VOYAGE EN FRANGE.
d'aspect inattendue. Le plan n'a pas la régula- rité de celui des bastides voisines, mais une place à arcades révèle une ancienneté aussi grande, plusieurs maisons intéressantes disent que Duras eut plus d'importance jadis.
De la ville, on jouit d'une vue étendue et su- perbe sur la vallée du Drot et les collines qui s'étendent jusqu'à la Garonne. Les environs ont des cultures très variées; beaucoup de jardinage, les prés s'encadrent d'ormes, de chênes et de peupliers. Les champs sont l'objet de soins assi- dus, même voici des pruniers sans chenilles et couverts de beaux fruits.
Le département de Lot-et-Garonne finit ici ; de l'autre côté du Drot, c'est la Gironde, la limite est formée plus loin par le ruisseau de Dousset. Celui-ci atteint le Drot au-dessous d'un coteau rocheux surmonté par l'église de Dieu- livol dont la façade est un pignon aigu percé de trois ouvertures. Sur l'autre rive du Drot, une bourgade de mine plus belliqueuse encore que Duras, Monségur, couronne mieux sa colline et l'église dresse une belle flèche au-dessus des toits.
La rivière vient lécher la base de cette espèce de falaise ; elle est navigable ici ; elle l'est même depuis Eymet, d'une façon purement nominale,
LA VALLÉE DU DROT. 3l
les écluses qui soutenaient le plan d'eau étant dans un tel état de vétusté que l'on ne peut s'en servir. A partir de Duras seulement le passage des bateaux est possible, sinon facile. Toute la voie, qui fut aménagée par une compagnie, est dans un médiocre état. Aussi le cours d'eau de 100 kilomètres, dont 64 sont classés comme na- vigables, ne figure-t-il dans la statistique de 1899 que pour i4 676 tonnes, transportées par 495 bateaux. Malgré ce rôle, c'est une bien pe- tite rivière.
De sa terrasse Monségur domine le Drot et découvre de grands horizons sur trois des dé- partements de l'ancienne Guyenne, les cantons girondins de Monségur et de Pellegrue surtout, qui sont la contrée particulièrement appelée Gavacherie. Dans le petit vallon du Ségur, où le chemin de fer s'insinue un instant pour aller traverser l'Entre-deux-Mers', un village, Gastel- moron-d'Albret, fut presque entièrement peuplé par les Gavaches. Mais la colonie a dû beaucoup se disperser, Gastelmoron, qui eut rang de ville et dont les remparts croulants disent encore l'importance, conserve une centaine d'habitants
1. Sur l'Entre-deux-Mers voyez le chapitre XII de la 29" série.
32 VOYAGE EN FRANCE.
à peine. Son surnom d'Albret' rappelle que les princes de cette famille poussaient leurs do- maines jusqu'au Drot. Le peu de surface de son territoire, 6 hectares, montre que ce fut une créa- tion du souverain, puisque les habitants n'ont de terrains de culture que sur le territoire de leurs voisins. Le château et l'espace compris entre les remparts constituèrent la paroisse devenue la plus petite commune de France, peut-être.
Aujourd'hui, Gastelmoron a perdu toute in- fluence, Monségur l'a remplacé comme centre de cette partie du pays. Elle aussi est une bas- tide, dont l'aspect a été défiguré. Aux arcades de la place on a substitué une galerie soutenue par des colonnes, ce qui donne plus d'air et de lu- mière aux boutiques. Au milieu de l'espace jadis nu, s'élève une grande halle de fer et de verre, dénaturant encore le caractère archaïque.
J'ai pris place sur le siège de la diligence de La Réole. Elle s'en est allée à grand bruit de grelots sur une route en pente longeant de vieux remparts qui semblent avoir été entaillés dans le roc; en quelques secondes nous voici dans la
I. Sur la partie du duché d'Albrct comprise sur la rive gauche de la Garonne, voyez la So^ série du Voyage en France, cha- pitre VII.
LA VALLÉE DU DROT. 33
vallée au pied des coteaux. Ici moins de pruniers; s'il en est encore, c'est en plantations de plus en plus espacées.
La vallée est bien belle au-dessous de Mon- ségur. La variété et la richesse des cultures sont extrêmes; cela me rappelle la Touraine, avec plus d'opulence peut-être. Au bord de la rivière qui se tord en courts méandres, la flèche de Coulures pointe dans les arbres; en face, sur un coteau dominant le Drot et le ruisseau de Saint-Sulpice, se dressent les puissantes raines du château de Roquebrune ou de Gudleragues.
Roquebrune, c'est deux ou trois maisons au- tour de l'église ; l'une d'elles, vaste, construite en gros moellons équarris, possède encore des fenêtres à meneaux.
La route de La Réole quitte la vallée du Drot et s'élève entre les vignes, sur un plateau cultivé en céréales. Peu de hameaux, l'un d'eux, Saint- Hilaire, chef-lieu d'une commune, se compose d'un château moderne et d'une église à pignon entourée d'auvents formant galerie. Cet embryon de village est sur la ligne de faîte entre la Ga- ronne et le Drot. De ce point, la vue s'étend sur les deux vallées et, bien par delà, sur un pays immense. Les landes apparaissent, sombres, se perdant en des. lointains infinis. La vallée de la
VOYAGE E>- FRANCE. — XXXI. 3
34 VOYAGE EN FRANCE.
Garonne s'entrouvre sous nos pieds, verte, lumi- neuse, parsemée d'une infinité de maisons blan- ches, avec son fleuve étincelant dessinant ses grands contours au milieu de la verdure.
Le tableau s'eiïace, nous descendons dans un court vallon, la route se fait rue, Téquipage s'ar- rête sur une vaste place, tranquille aujourd'hui. C'est La Réole'.
29^ série du Voyage en France, page 18g.
III
LES LANDES DE LOT-ET-GARONNE
La vallée de l'Avance. — Casteljaloux et ses usines. — Les pertes et les sources de l'Avance. — Dans les pinèdes. — Les Lugues.
— Houeillès. — La foire de Pelbusoc. — La Grande Lande.
— Le val de l'Estampon.
Sos. Mai.
Dans Tespèce de longue et régulière muraille dessinée par les collines de la rive gauche de la Garonne, les rivières et ruisseaux de l'inté- rieur trouvent issue par des sortes de fissures très étroites, de loin on ne pourrait deviner qu'il y a là des vallons, tant l'ensemble est massif. Une seule coupure paraît donner accès vers le sud, elle s'ouvre en face même de Marmande et livre passage à l'Avance, petite rivière venue des landes, dont le cours et le débit sont remarqua- blement réguliers.
Une grande route et le chemin de fer de Mont- de-Marsan pénètrent dans ce large pli bordé de collines aux pentes raides que dominent des hameaux et des villages. Pas de gros centres, les
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habitations s'éparpillent sur les hauteurs ; le seul méritant le titre de bourg, Bouglon, est de belliqueuse allure sur son promontoire domi- nant de plus de cent mètres le confluent de l'Ar- genton et de l'A^'ance, mais à peine groupe-t-il cent habitants dans ses rues étroites et courtes ^ Des abords de ce minuscule chef-lieu, la vue est immense et superbe sur la riante vallée et le plateau boisé du Mas-d'A gênais. Au sud, sur l'autre rive, une colline plus élevée encore porte Téghse romane de la bastide de Castel-Amou- roux. De ce côté, le massif des collines est très accidenté et atteint près de i8o mètres au-dessus de la mer. Joli pays, verdoyant et bien cultivé, qui vient finir sur une ligne étrangement régu- lière, à la marge des forêts de pins et de chénes- lièges des landes agenaises.
A l'entrée de cette région si nettement tran- chée, au point de bifurcation de nombreux che- mins ou routes, s'étale largement une petite ville qui sera le dernier centre de plus de i 5oo âmes jusqu'à l'Adour. C'est l'active Gastelja- loux-, une des cités principales de l'Albret féo- dal, qui a dû à l'industrie d'échapper à la déca-
1. 584 liabitanls daiis la commune.
2. 3G22 habilaiils don: 2576 agglomérés.
LES LANDES DE LOT-ET-GARONNE. 87
dence des bourgades rurales. Chose curieuse, cette industrie, se rattachant étroitement à la chimie, est de celles que l'on ne s'attendrait pas à trouver dans les landes : la production des bougies et du savon. Elle est très ancienne d'ail-
leurs, car l'usine remonte à 1829 et n'a pas cessé de s'accroître; une description du Lot-et- Garonne publiée en 18 10 mentionne déjà cette fabrication. Le reboisement des landes % jadis
1, La conquête des landes par le pin maritime a été exposée avec tant de détails dans la 2<j^ et surtout dans la 3oe série du
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nues, a fait naître d'autres industries ; le trai- tement de la résine, sa transformation en es- sence de térébenthine se font dans plusieurs usines, la paille de seigle récoltée dans les clai- rières des landes est transformée en enveloppes de bouteilles et en nattes pour les châssis et les serres. Aussi la population a-t-elle doublé depuis cinquante ans, elle dépasse aujourd'hui 3 600 âmes. Par contre, l'industrie métallurgi- que, autrefois active sur le territoire, aux forges de Neuffons, a disparu, emportant sans doute à jamais l'espoir que l'on avait à Casteljaloux de faire canaliser jusqu'à la Garonne la petite rivière de l'Avance.
La ville possède un caractère bien particulier, grâce aux grands auvents qui projettent parfois les toits à trois mètres sur la rue. On pourrait se croire dans une de ces régions des Alpes où les toitures avancées préservent de la neige amon- celée en corniche ; mais comme il ne saurait être question de neige en ce doux pays de Gascogne, il faut sans doute y voir une précaution contre le soleil. L'usage s'en perd d'ailleurs, les maisons nouvelles en pierre blanche ou crépies n'otfrent
Voyage en France, qu'il ne sera question ici que de ce qui a trait au Lot-et-Garonne. Pour <:'etle élude spéciale, nous renvoyons le lecteur aux séries précitées.
LES LAiNDES DE LOT-ET-GARONNE. Sg
pas ces grands appendices. Si les demeures mo- dernes donnent à la ville un caractère prospère, elles n'ont pas la physionomie pittoresque des anciennes, accrue par la carcasse de poutrelles brunies.
Dans les petites rues on trouve davantage de ces vieilles demeures, quelques-unes, bien que dégradées et rongées, ont encore la grâce et la noblesse du xvn^ siècle ; l'une d'elles, ancienne maison religieuse, possède un cloître, d'un style simple mais élégant encore. De toutes ces habi- tations nobles, la plus curieuse, la plus vétusté aussi est l'ancien hôtel de Xaintrailles. Un af- faissement l'a déjeté, en disloquant les meneaux des fenêtres, les intempéries ont rongé les mé- daillons délicatement sculptés qui ornaient la façade et dont il reste à peine des linéaments, charmants encore.
Peu de monuments ; l'église est un édifice ogival aux puissants contreforts que le goût du xvni" siècle a fait doter d'une riche façade de style jésuite.
Du Gasteljaloux féodal — Castel-Gelos, Cas- tel-Geloux — il reste quelques pauvres débris du château et des remparts. La partie la plus riante de la petite cité est un mail ombreux, en ter- rasse, dominant l'Avance et ayant vue sur de
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belles collines très vertes, un peu embrumées aujourd'hui par la fumée des usines. Des sour- ces minérales jaillissent aux abords de la ville, mais elles n'ont pas fait naître d'établissement.
L'Avance est la gaîté de ces campagnes, il est peu de petites rivières plus abondantes et claires. C'est qu'elle vient à peine de naître ou p^itôt de renaître par d'abondantes fon- taines. La lande qui recouvre ailleurs des masses énormes de sable repose ici sur des assises cal- caires perforées de cavités. Dans cette direction, toutes les eaux landaises s'infiltrent dans le sable et vont rejoindre ces rés^rvoir^s mystérieux.
Les sources sont à deux kilomètres en amont de la ville, dans un beau site forestier de chênes et de pins. Neuf évents donnent issue aux eaux, d'où le nom de Neuffons. Les fontaines réunies faisaient mouvoir les forges, elles actionnent au- jourd'hui une papeterie et une partie des scie- ries qui débitent le bois des landes voisines. Une des sources, sortie d'une excavation appe- lée la Grotte des Fées, attend encore les explo- rateurs de naïades'.
I. Depuis ma vssile à Casteljaloux, M. Martel, à qui l'on doit la découverte de tant de (|rottes et d'abîmes, a tenté de pénétrer ce mystère. Sur l'invitation de INI Malbec, maire de Monchir-
LES LANDES DE LOT-ET-GARONNE. l\l
Neufîons, par son beau réservoir et ses arbres, est un site charmant. En amont, on retrouve l'Avance, mais remplie seulement à l'époque des grandes pluies, sous le nom de Riou Rouge. La rivière s'était perdue deux kilomètres plus haut, près de la Taillade. Telle qu'on la voit à ce hameau avant l'infiltration, elle ne ressemble guère à la masse d'eau qui arrose Gasteljaloux. Les fontaines ont d'autres aliments que les flots disparus ; tous les ruisseaux qui sourdent de la lande et arrivent à la limite du terrain cal- caire se perdent ainsi et viennent sourdre à Neuffons.
Ce point de soudure entre le désert et les ri- ches campagnes de l'Agenais offre un charmant paysage forestier. C'est la lande, possédant même de petites dunes, formées par les vents à l'époque où, la région n'étant pas boisée, les bourrasques venues de l'Océan ne trouvaient aucun obstacle. Le pin n'est pas encore maître
d'Agenais, il est allé avec celui-ci et M. Marboulin à la Tailhade, où se perd l'Avance, a coloré le ruisseau à la fluorescine et reconnu par l'examen des eaux de sources que l'on ne s'était pas trompé quant à leur origine. Il a ensuite visité les neuf résur- gences et, pénétrant dans la grotte, a pu remonter pendant deux cents mètres. Cette expédition semble avoir fait reconnaître que toutes les eaux ne sourdent pas à Neuffons, beaucoup se per- draient, mais on pourrait les obliger à suivre le courant principal.
42 VOYAGE EN FRANCE.
incontesté du terrain, il est mélangé au chêne cultivé en taillis. Des ruisseaux clairs, les neuf fontSj avivent la végétation. Le chêne-taillis, couvert d'énormes galles, est presque atteint en hauteur par de vigoureux genêts dont la fleur d'or est la gaîté de ces solitudes. Çà et là, quel- ques arbres échappés à la cognée sont devenus superbes et rappellent la beauté de nos sylves du nord.
Ainsi que dans les Grandes Landes, le pin est soumis au résinage. Ces arbres sillonnés de plaies, les chênes soumis à l'écorçage forment comme une salle de torture végétale : les chênes sont écorcés sur pied, ce qui donne aux taillis un aspect étrange ; dans la pénombre, les bran- ches semblent saignantes.
Des abords de la route on voit rarement des habitations ; les demeures des résiniers sont per- dues dans les bois, et les cultures de seigle sont en de lointaines clairières ; les plus proches sont autour du petit village de Pindères, assis à l'écart sur un des ruisseaux absorbés dans les sables.
La forêt est belle par les chênes parfois énormes qui se dressent au milieu des pins. Dans ce paysage sylvestre est le hameau de Pom- pogne, tout menu autour de sa vieille église
LES LANDES DE LOT-ET-GARONNE. 4 3
romane. On se fait si bien à cette solitude, on s'attend si peu à trouver un vrai village, que l'apparition du bourg d'Houeillès est une sur- prise. C'est une longue rue formée par la grande route, sur laquelle s'alignent des maisons à larges toits plats contrastant avec les murs de poutrelles et de torchis des métairies couvertes en chaume ; partout, même dans les bois, le nombre des constructions neuves révèle que le pin a amené le bien-être. On réserve chaume et torchis pour les servitudes de l'exploitation ru- rale.
Ces métairies, au milieu de clairières où on- dulent les seigles, où les châtaigniers mettent leurs frondaisons puissantes, sont plus nom- breuses aux abords d'Houeillès. Le bourg, mal- gré sa population agglomérée de 35o habitants seulement, le reste étant réparti sur un vaste territoire, est animé par le commerce et l'indus- trie, grâce à la forêt qui alimente des chantiers de bois et donne un trafic considérable à la gare, beaucoup de traverses de chêne surtout.
Évidemment, le tableau des landes tracé par les vieux auteurs était exagéré, le nombre et les dimensions des chênes prouvent que les bois étaient déjà étendus avant les plantations de pins maritimes. Il faut aller au delà d'Houeillès
44 VOYAGE EX FRANCE.
pour trouver le désert. Les communes qui cons- tituent le canton sont assez peuplées ; elles for- maient dans l'ancien Albret une subdivision ap- pelée les Lugues et eurent de bonne heure quelque importance. L'église du chef-lieu est un intéressant édifice de la première époque gothique, méritant une visite par sa porte forti- fiée, couronnée de mâchicoulis. Dans cette ré- gion, sorte de marche entre l' Albret, Etat indé- pendant, et la Guyenne, on trouve plus d'un exemple d'églises ainsi organisées pour la dé- fensive : leurs fenêtres, très hautes et étroites, ne sont guère que des meurtrières. Beaucoup de ces édifices ont d'heureux détails. Au sein le plus profond des landes, le village de Durance possède une chapelle appelée Grange de Du- rance qui est, dit-on, une merveille ; plus de 600 figures, représentant de pieux personnages ou des légendes, y sont peintes avec toute la grâce de l'art ogival.
La lande change peu à peu d'aspect. Au delà de Houeillès, le chêne-liège, rare encore, se mêle aux chênes à feuilles caduques dont la grosseur est faite pour surprendre. Il est de beaux groupes de ces arbres sur les bords d'un ruisseau clair, coulant entre les aulnes sur un
LES LAIDES DE LOT-ET-GARONNE. 4^
lit de sable d'or fauve. Gç preste cours d'eau, c'est le Giron naissant, la future et active rivière des landes bazadaises^
J'ai dû prendre le train à Houeillès pour vi- siter le reste des landes de l'Albret jusqu'à Roquefort. La seule inspection de la carte n'en- courage guère à circuler pédestrement sur ce j)lateau de bruyères parsemé de pignadars aux contours étranges, bandes longues parfois de deux lieues, alternant avec des massifs troués de clairières. Le train allant à une modeste al- lure en cette contrée où les stations desservent seulement des métairies perdues dans les bois, on juge suffisamment du paysage par la fenêtre du wagon.
Donc, en route par les landes. Peu à peu les chênes disparaissent, ou servent uniquement à ombrager les abords des métairies auxquels ils donnent des mails d'une majesté royale. Ainsi, près de la station de Tour-Neuve, la grande ferme de Pont-Moyne possède de superbes om- brages sous lesquels s'étend une pelouse velou- tée. A côté de la gare, deux ou trois maisons, une ample bâtisse assez curieuse par son étage
1. Sur le Giron et son ilollage, voyez la 299 série du Voyage en France, chapitre XIII, cl la So^ série, chapitre I^r.
46 VOYAGE EN FRANCE.
en encorbellement et un château. Une fabrique d'essence de térébenthine est installée près de la voie et traite les résines recueillies dans les vastes pignadars de la commune d'Allans. La forêt a peu de profondeur; vers le sud, on trouve encore la lande rase de bruyère. Au milieu de ce désert surgit une croupe allongée, sans doute dune continentale, appelée Pelbusoc, sur la- quelle passe la limite des départements de Lot- et-Garonne et des Landes. Ce point commande de vastes horizons ; il devait être le principal accident du paysage avant la conquête par le pin, aussi est-il devenu un lieu de rendez-vous. Chaque année, le i6 juillet, il s'y tient une foire sur un emplacement signalé par la carte d'Etat- major, cette réunion est plus active encore au- jourd'hui, grâce au chemin de fer.
Le tapis de bruyère naine apparaît à chaque instant, entre les longues et étroites pinèdes. Le paysage s'entrouvre tout à coup, prodigieuse- ment, par une des dernières grandes surfaces dénudées du pays landais. Il y a ici une ligne d'horizon de près de 12 kilomètres sans un arbre, sans autre accident de terrain que les toits rouges et bas des bergeries. Toute cette zone appartient au département des Landes, la barre à peine distincte des forêts de pins qui
LES L\>DES DE LOT-ET-GAROX.NE. l\J
bordent ce désert est la limite de la Gironde. On est donc à la ligne de partage des landes entre les trois départements.
Le Lot-et-Garonne est le moins doté de ces terrains jadis stériles ; il n'en possède pas plus de 65 000 à 70000 hectares, chiffre presque insigni- fiant auprès de ses voisins. Comme ceux-ci, il s'est efforcé de gagner les landes par des plan- tations, mais il ne s'est pas borné au pin, il a accru l'étendue de ses forêts de chênes-lièges, point de départ de la florissante industrie de Mézin et de Lavardac dont je parlerai bientôt ^
Le train pénètre dans le département des Landes, au point où le territoire de Lot-et-Ga- ronne forme une sorte d'enclave triangulaire. En vue de la lande qui semble sans fin, d'une solitude et d'une tristesse infinie, une pignadar abrite une métairie dotée du nom ironique de Plaisance ; encore les pins lui cachent-ils le morne plateau. Mais une gare a été élevée sur la partie non boisée et l'on se i)rend de compassion pour les employés exilés ici.
Les bois recommencent bientôt, dans une zone où le plateau se plisse en de nombreux ravins,
I Chapitre VI.
48 VOYAGE EN FRANCE.
OÙ des ruisseaux clairs se forment dans les sa- bles. Comme partout où la lande possède des eaux courantes, la végétation est plus belle, les chênes, qui paraissent de nouveau, révèlent que cette contrée est depuis longtemps sylvaine. Ces arbres entourent des champs de seigle, les mai- sons moins rares, clairsemées encore, possèdent des prairies et des vergers. La vie, il est vrai, ne se montre que sur le bord de ces ruisseaux par- courant des embryons de vallées ; dès qu'on les a quittés on retrouve la solitude des pins et des bruyères.
Sur les bords du ruisseau de Houil, la station de Bourriat-Bergonce fera sans doute naître un petit centre ; déjà un grand commerce de bois s'opère à la gare ; bientôt le chemin de fer de Bazas y amènera les trains de Bordeaux et l'on poursuit la Ugne vers Gabarret et Eauze, en attendant le prolongement sur Auch. Ce croise- ment de voies ferrées aura pour effet d'amener une population sur ce point. En attendant, la gare ne dessert que de pauvres hameaux bâtis au bord de ruisselets allant accroître la Douze.
Le pays s'ad^aisse de plus en plus : à Houeillès on était à i46 mètres au-dessus de la mer; à la gare forestière de Retjons-Lugaut on est à 85. C'est un confluent de ruisseaux et de ra-
LES LANDES DE LOT-ET-GARONNE. ^9
\ iiis profondément creusés dans la lande, quatre branches s'y réunissent pour grossir l'Estampon.
On ne devine pas le voisinage des habitations. Lugaut n'est qu'une église ; Retjons est à l'écart dans les bois.
Le train court encore sous les pins, traverse des clairières et s'arrête en face d'un site inat- tendu : une petite ville, Roquefort, assise sur un roc escarpé, entre l'Estampon abondant, noir et rapide, et la Douze aux eaux souillées d'ar- gile, qui impose son nom au cours d'eau ainsi formé ^
I. Sur Roquefort et la région jusqu'à Mont-de-Marsan, voyez la 3oe série du Voyage en France, chapitres VIII et IX.
VOYAGE E.\ FRANCE.
IV
LA CAPITALE DU (( BEARNAIS )>
La vallée de la Baise. — La bastide de Vianne. — Lavardac. — Navigation de la Baise. — Ateliers de bouchonniers. — Le Pont- dc-Bordes. — Le moulin de Barbaste. — Barbaste — Nérac — La promenade de la Garenne.
^ Nérac. Juillet.
A peine a-t-on traversé la Garonne coulant au milieu de l'opulente plaine de Port-Sainte- Marie, et voici un paysage inattendu, on pour- rait se croire à cent lieues de ces campagnes de cultures. Des arbres au feuillage luisant et crispé, aux troncs boursouflés, d'une teinte li- vide, apparaissent au flanc des collines : ce sont des chenes-lièges. L'effet en est étrange après le parcours des verg.^rs, des champs de maïs et de tabac.
Ces végétaux sont en quelque sorte des senti- nelles, ils ne forment pas encore de nappe con- tinue, ni même de groupes, la forêt des suriers est plus loin. La vigne, le maïs, le tabac domi-
LA CAPITALE DU « BEARNAIS )) , 5l
lient toujours dans ce couloir étroit et riant où la Baïse mène ses eaux peu limpides, retenues par les barrages écluses. A l'entrée du val est le village de Feugarolles. Sur les coteaux, deux châteaux, qui durent avoir de la splendeur, sont encore entourés des douves défensives. L'un d'eux porte le nom sonore de Trenqueléon. De ce côté, la forme des mots eux-mêmes a plus de couleur : voici, dressé sur une colline. Mont- gaillard, plus loin, c'est Xaintrailles dont la sei- gneurie appartint au brave Poton, le dévoué compagnon de Jeanne d'Arc.
Au fond du val, bordée par la Baïse, la bas- tide de Vianne a conservé son aspect du passé. Il y avait là un village, Villelongue, qui fut remplacé par une ville entourée d'une enceinte régulière.
Depuis 1284, ces remparts flanqués de tours sont restés debout ; ce serait une petite Avignon gasconne, si les murailles n'étaient découronnées, percées de portes ou de fenêtres closes de volets. Le mur de ville est devenu partie intégrante d'habitations. Quatre portes donnent accès dans cette minuscule cité, le soir elles offrent un cu- rieux contraste par leur tracé archaïque et les lampes électriques qui brillent à la voûte. Ce centre, comme toutes les communes voisines.
02 VOYAGE EX FRANCE.
est en partie peuplé de bouchonniers travaillant les lièges du pays et d'Afrique.
En amont, la vallée se resserre, devient pres- que une petite gorge au fond de laquelle la Baïse coule, sombre, entre des pentes hérissées de rochers. Un moment ce val s'entrouvre, au con- fluent de la Gélise, sous une terrasse qui porte une autre bastide, Lavardac, dégagée de ses remparts et devenue grandissante grâce à la plantation des landes, à l'exploitation des bois et au travail du liège. Les vignobles des envi- rons donnent un vin transformé en eau-de-vie d'Armagnac; de nombreuses maisons en font le commerce.
La ville proprement dite, la bastide, petite, mais propre et riante, se prolonge par des cons- tructions neuves formant faubourg. Les rues étroites sont bordées de maisonnettes aux con- trevents gris. Au pied d'une haute berge, très abrupte, la Baïse forme un bassin animé. La- vardac est le port d'attache et le siège social de la Société générale des remorqueurs de la Baïse qui possède une trentaine de bateaux, dont deux transporteurs à vapeur.
La navigation est active, le port de Lavardac a constaté en 1900 le débarquement, T'embar-
LA CAPITALE DU (( BEARNAIS )) . 53
qiKMnent et le passage de près de 5o ooo tonnes
%%\ ^t^/v A-$U
de marchandises ^ Bien des rivières, dotées d'un
I. En 1901, il y eut 45 852 tonnes seulement dont 26 826 à la remonte et zg 626 à la desrente. Cette diminution est due à Fin-
54 VOYAGE EN FRANGE.
débit autrement puissant que l'indigente Baïse, peuvent en envier l'animation.
Du haut du pont de trois arches jeté sur la vallée, on jouit de cette activité du petit port. Poteaux de mines et madriers apportés des fo- rêts ou des scieries, fûts de vin et d'eau-de-vie sont embarqués sur les grands chalands ou les bateaux à vapeur porteurs. Les ballots de liège et les sacs de bouchons figurent aussi dans ce fret que le canal et la Garonne vont répartir dans tout le Midi, à Bordeaux surtout.
Deux quartiers constituent Lavardac, le plus actif est la route de Nérac bordée d'habita- tions et d\isines jusqu'à la Baïse et à Barbaste, en traversant la G élise. Cette voie a remplacé l'antique chaussée romaine, appelée laTénarèze, qui a donné son nom à la région vinicole de r Armagnac d'Eauzan. Là se trouvent les prin- cipales manufactures de bouchons, d'autres sont à Barbaste qui est, en somme, un faubourg de Lavardac ^ Cette jonction entre les deux com- munes se nomme le Pont-de-Bordes.
Les grands bâtiments qui s'y échelonnent sont des manufactures de bouchons, de semelles et
suffisance de la récolte en blé du Condomois et du Fezensac qui alimentent en partie la grande minoterie de Vianne
1. Population de Lavardac, 2 545 habitants; de Barbaste, 1898.
LA CAPITALE DU (( BEARNAIS ». 55
d'autres objets en liège. Les fabricants sont une quinzaine : Barbaste en a quatre ou cinq, il en est d'autres à Feugarolles, Thouars, Xaintrailles et Yianne. Xaintrailles joint à cette industrie celle de la tonnellerie.
Une odeur de liège assez écœurante flotte dans Fair : parfum de liège bouilli, senteur plus acre des débris de liège brûlés dans les foyers pour amollir les plaques à travailler. La rivière est souvent couverte d'une poussière jaunâtre pro- venant des résidus de la fabrication dans les usines hydrauliques.
Cependant Lavardac n'est pas le centre prin- cipal de la bouchonnerie, les ateliers sont plus nombreux à Mézin où la variété des articles est plus grande aussi. C'est là que j'irai étudier cette intéressante source d'activité, vie d'une région de France que l'on s'attendrait à trouver misérable.
Non seulement celle-ci doit au liège une grande prospérité, mais elle est vraiment charmante. Tout ce pays de Nérac est d'une grâce exempte de morbidesse. C'est riant avec une légère allure beUiqueuse due à la forme des collines et à la disposition des centres habités. On comprend en le parcourant la prédilection de Henri IV et des Albrets et Bourbons, ses ancêtres, pour ce coin
56 VOYAGE EN FRANCE.
de leur Gascogne, où la vie dut être aimable, joyeuse et facile, comme en témoignent tant de castels encore debout.
Pont-de-Bordes est une avenue ombreuse, très fraîche, que l'odeur du liège calciné me gâte un peu ; cependant les foyers en plein vent sont amusants, on y brûle des copeaux prove- nant de la fabrication des bouchons ; devant le chaud amas de braise on voit les planches de liège s'amollir; de grands disques ayant 60 cen- timètres de diamètre sont ainsi dressés : une fois refroidis sous presse ils conserveront leur recti- tude. Cet emploi des déchets comme combustible est fait pour surprendre, car ils trouvent main- tenant un débouché dans de nombreux usages : le liège en poudre est la base du linoléum et d'une sorte de brique très légère. Même on en peut tirer un gaz d'un pouvoir éclairant plus considérable que celui du gaz de houille. Pen- dant quelque temps, la ville de Nérac, située entre Lavardac et Mézin et elle-même siège de fabriques, s'éclaira avec le gaz des copeaux de liège. Elle le ferait encore peut-être s'il n'avait fallu des emplacements trop vastes pour emma- gasiner les matières premières.
Je ne reste pas longtemps à contempler ces
LA CAPITALE DU « BEARNAIS ». 5"]
foyers rappelant les ateliers des hommes primi- tifs, le moulin de Barbaste m'attire davantage; c'est lui, plus que le liège et les bouchons, que je suis venu voir. Ce moulin n'est pas sur la Baïse, mais sur son affluent la Gélise, coulant à 200 mètres à peine de la rivière maîtresse, au pied de la colline de Barbaste. Je le connais de réputation depuis bien longtemps, car il se rat- tache à l'un? des scènes les plus populaires de la vie du bon roi Henri.
En 1696, ce prince faisait le siège de La Fère ; il s'était avancé sur la contrescarpe pour exa- miner les défenses de la place, quand il s'enten- dit interpeller en pur gascon par un soldat de service sur le rempart :
— Mo II nié de las tons de Barbaste ^ prends garde à la gâte que ha gatoua !
Cela voulait dire : « Meunier de la tour de Barbaste, prends garde à la chatte qui va faire des petits ! »
Le mot gâte se traduit par chatte, mais gâte a aussi la signification de mine. Le roi comprit l'avis et se retira en hâte ; un instant après une explosion avait lieu à l'endroit même où il se tenait.
Les tours de Barbaste étaient un des domaines des ducs d'AIbret, Henri IV aimait à ajouter à
58 VOYAGE EN FRANCE.
ses titres celui de meunier des tours de Barbaste; on a même des lettres dans lesquelles il signe de cette qualité plaisante.
Le moulin, le voici : enjambant à demi la Gélise qui tombe bruyamment de son barrage, il s'appuie à un corps de logis flanqué de quatre tours carrées dont une est elle-même accotée d'une échauguette à mâchicoulis. Devant cette petite forteresse on a construit une maison à pavillons, de style vaguement Renaissance ; la porte à fronton triangulaire est surmontée d'un buste de Henri IV. Dans une pelouse en pente, voisine de l'habitation, est un énorme tronc de chêne, apporté des Landes; il a plusieurs mètres de circonférence.
Une élégante passerelle suspendue jetée au- dessus du barrage relie le moulin à une autre usine mue par la Gélise, c'est une bouchonnerie mécanique. En aval, un vieux pont ogival, n'ayant pour parapet qu'une barrière de fer et sur lequel passa souvent le Béarnais, fait com- muniquer le moulin avec Barbaste. L'ensemble du site est très curieux ; les quatre tours si minces, coiffées de toits aigus, lui donnent quelque chose de pimpant et de fier.
Barbaste est un joli centre, animé par une population remarquablement spirituelle et vive
LA CAPITALE DU « BEARNAIS )) . 69
(rallure. Les ouvrières qui sortent des ateliers de bouchonnerie sont coquettement vêtues. Le bourg a été transformé par le tracé de la route nouvelle. Elle traverse la Gélise sur un nouveau pont, d'où le décor du moulin est superbe. Il y a là un coin d'un charme indicible, qui semble condenser les beautés intimes de notre cher pays de France. La Baïse, franchie parla grande arche d'un viaduc, forme elle aussi un paysage riant et doux, s'il a moins de grandeur. La vue s'étend sur les jolies collines de Xaintrailles et de Montgaillard. Au sommet de la plus rappro- chée se montre l'église d'Estussan, dont le cam- panile triangulaire percé de quatre ouvertures est d'un singulier effet.
Pendant que je rentre à Lavardac, les ateliers se vident; c'est l'heure de la sortie, ouvriers coiffés du béret, ouvrières vêtues de couleurs fraîches et gaies retournent à la ville ; une fusée de rires monte sous les grands arbres.
A l'hôtel on me sert à bon compte un dîner plantureux. Au dessert, l'hôtesse m'apporte de l'eau-de-vie bizarre et exquise, une bouteille de vieil Armagnac dans laquelle est une grosse poire duchesse ! Comment est-elle entrée là-de- dans? je renonce à comprendre, mais l'on m'ap-
6o VOYAGE EN FRANCE.
prend que le fruit, aussitôt formé et dégagé des branches adventices, a été mis dans une bou- teille avec sa tige, tout en restant attaché à l'arbre : il a grossi de la sorte: à la maturité, on a coupé la branche, la poire est restée, on a rempli la bouteille avec de l'eau-de-vie à laquelle le fruit a donné son parfum. Quand il n'y a plus d'armagnac on en ajoute d'autre. Cette singu- lière préparation se fait à Labastide-d' Armagnac, non seulement avec des poires, mais aussi avec des pêches et des raisins.
Ayant reçu cette leçon de prestidigitation horticole, je me suis mis en route pour Nérac. A la gare j'assistais au chargement d'une quan- tité de sacs et de paquets de bouchons. La cu- riosité me prend de lire les étiquettes : les envois sont pour tous les coins de la France ; ces noms de petites villes visitées il y a des années parfois m'emmènent bien loin de Lavardac et de la Gas- cogne. Voici un sac pour Chaumont-en-Vexin, et il me semble respirer la saine odeur de fruits à cidre tombés dans les pommages.
Ce doit être un plaisir d'être homme d'équipe à Lavardac. Les employés de la gare soulèvent sans peine d'énormes fardeaux. Quels hercules, ces petits Gascons ! Mais les ballots ne con- tiennent que du liège, on peut porter sans trop
LA CAPITALE DU « BÉARNALS )) . 6l
de peine un mètre cube de bouchons, les brouettes et les « diables » se chargent de véri- tables pyramides de caissettes. Auguste, l'écuyer du cirque, pourrait ici prendre les poses de Samson qui réjouissent tant son public !
Le trajet est court de Lavardac à Nérac, quelques minutes au long de la vallée de la Baïse, et voici le hall clair et élégant de la gare où se bifurquent les lignes de Riscle et de Mont- de-Marsan.
Un boulevard que ne borde encore aucune maison conduit à un grand mail planté de beaux arbres. Au delà, s'étend une seconde ligne de larges boulevards, appelée les avenues d'Albret. La route de Mézin y aboutit en face d'une statue de Henri IV, donnée à la ville par le comte Dijon.
A noiisté Henri — A notre Henri — dit l'ins- cription gasconne. Cette familière et tendre ap- pellation ne semble pas inspirer beaucoup de respect à la marmaille de l'endroit, les marches du piédestal sont couvertes de cailloux et de tes- sons de bouteille. Cette négligence surprend, car la ville est aimable et bien tenue, les rues sont propres. Une troisième ligne de boulevards rappelle le tracé circulaire des fortifications qui
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enceignaient la capitale favorite des rois de Navarre. La partie la plus large porte le nom de cours Victor-Hugo. Une double rangée de bancs forme des banquettes presque ininterrompues offrant un asile aux flâneurs.
Sauf dans les rues commerçantes bordées de boutiques, la plupart des maisons sont envelop- pées de verdure et de fleurs, roses, vigne ou jasmin. Les vieux murs sont fleuris de muffliers, de giroflées et de valériane. Ces plantes amies des ruines croissent aussi sur les débris de rem- parts surmontés de. vieilles bâtisses qui dominent sur la rive droite le chenal étroit de la Baïse. Un pont dont l'arche centrale est ogivale franchit la rivière et, par d'étroites rues, entre de vieilles et curieuses maisons, conduit au cœur du Petit- Nérac, faubourg qui, mieux que la ville propre, a gardé la physionomie du passé. Des logis à galeries, des tanneries, des séchoirs à mottes font un pittoresque décor de ces bords de rivière sur laquelle passent de grands chalands. Au fond, la belle arche en anse de panier du pont neuf complète le tableau. De la partie haute du Petit-Nérac, étagée sur les rochers, on a une vue charmante: la ville en amphithéâtre, les coteaux aux pentes douces, la Baïse sinueuse et les ponts. Ce quartier possède une église moderne, heu-
LA CAPITALE DU « BEARNAIS )) . 63
reiix pastiche du xm* siècle, dont l'intérieur har- monieux inspirerait autant de vénération que les vieux temples, sans les couleurs trop crues du chemin de croix.
Combien ce charmant édifice — devant lequel est le modeste hôtel qu'habitait Sully — est su- périeur à l'église du Grand-Nérac, lourd édifice d'un style ultra-classique, dont la nef unique finit en cul de four ! C'est une inconcevable erreur de Louit, le grand architecte auquel on doit le théâtre de Bordeaux.
Nérac possède une chose admirable : sa Ga- renne, ancien parc du château des rois de Na- varre. Peu de villes ont une promenade compa- rable à ces bords de la Baïse couverts de grands chênes et de vieux ormes, où la roche apparaît sous un manteau de pervenche et de mousse. Des sources sourdent, leurs eaux captées emplis- sent des vasques, alimentent des fontaines gra- cieusement ornées.
Une de ces fontaines sort d'une grotte et forme un petit bassin au milieu duquel est un rocher enveloppé de plantes aquatiques ; sur le marbre est sculpté le corps d'une jeune fille morte noyée. C'est la légende de Fleurette, la jolie jardinière qui se serait suicidée par désespoir de l'abandon du roi. Nul n'a songé à souiller ou
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balafrer la nudité marmoréenne de l'imaye, et c'est à l'honneur de la population.
La Baïse, si dolente en apparence, a ses fu- reurs ; on a indiqué sur les murs d'un petit édi- fice la trace des inondations qui élevèrent le niveau de plusieurs mètres.
Au bord de la grande avenue est une gra- cieuse fontaine élevée en l'honneur du dauphin. L'inscription de cet édicule est assez curieuse :
Quatorze sénatevrs du siège de TEdit de Gvienne, sovbz Tautorité du davphin François, ont fait enclore les très cliastes ondes de ceste claire fontaine, dans le monument de ce gentil ovvrage, de pevr qu'alcvn par l'envye des fontaines voysines ne covpat ses veines, dcstovrnant sa sovrce, ne trovblat son covrant, ne sovillat sa sitvation et ses détovrs.
Rvisselez toviours, petites ondelettes, esbattez-vous, eavx délicates, et administrez droit et ivstice à tovtes les autres fontaines ! Que vostre flot argentin sorte incessam- ment! que vostre mobilité crespelée savtelle! que vostre dovx mvrmvre siffle ! que vostre liqveur vitrée novs adov- cisse, et sovbz l'ombre de l'enfant héroïque, notre pro- tecteur, d'un covrs perpétuel avec une récréation arrov- sante, toviovrs relvisante, éteignez la soif des citoyens de Nérac.
C'est un peu long et emphatique; cependant, sous l'ombrage puissant de ces arbres dont l'un, le plus rapproché, a été planté de la main du roi Henri, on est ému au lieu de sourire. Comme
LA CAPITALE DU « BEARNAIS ». 65
ces évocations aux pures ondes des fontaines nous ramènent loin, bien loin dans le passé î Cette époque du roi Henri avec ses luîtes de re- ligion et ses tristesses avait au moins des heures d'apaisement et de poésie. Et ce n'est pas sans tristesse que l'on songe à nos heures moroses. D'autres sources, puis, au fond, les belles ruines féodales du château de Nazareth accrois- sent l'attrait de celte Garenne où j'ai longtemps erré, jusqu'au moment où les pi emières lumières s'allumaient dans la ville, vers les pauvres restes du château des rois de Navarre dont on devine à peine la splendeur passée.
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI.
LES BOUGHONNIERS DE MEZIN
L'industrie de Nérac. — Les bouchonniers. — Les forêts de chênes- lièges ou siiriers. — La culture des suriers. — Le commerce du liège. — Le pas de Gascogne. — Au bord de la Gélise. — La forêt. — Mézin et les ateliers de liégeurs. — Sos. — L'école d'agriculture et de viticulture de Saint-Pau.
Sos. Juillet.
Nérac n'est pas seulement une jolie ville, c'est encore un centre de commerce fort actif, où les eaux-de-vie de l'Armagnac viennent en partie s'entreposer ' ; plusieurs industries se rappor- tant à la distillerie des vins et à la culture de la vigne ont installé des ateliers dans cette partie vivante de l'Albret. La brasserie et la produc- tion des engrais occupent également beaucoup de bras. Le commerce agricole a une part im- portante dans le mouvement des affaires. Gomme
I. Sur la production des eaux-de-vie d'Armagnac, voyez la 3o« série du Voyage en France, notamment le chapitre XX, et, dans le présent volume, le chapitre Vil.
LES BOUCHONNIERS DE MÉZIN. 67
toute bonne ville gasconne, Nérac met en œuvre les volailles engraissées au maïs pour la fabri- cation de conserves et de pâtés. Les terrines de Nérac ont la faveur des gastronomes.
La fabrication des bouchons n'a pas pris à Nérac une importance comparable à celle des établissements de Lavardac et de Mézin, cepen- dant on y rencontre quelques ateliers, la cons- truction et la réparation des machines à tra- vailler le liège se font surtout dans la ville. Mais pour les centres bouchonniers, les campagnes du Condomois ou des Landes, Nérac est le centre d'attraction. Jadis favorisées par la Baïse navigable, les affaires ont été accrues depuis la construction des chemins de fer, la ligne de Mont-de-Marsan notamment, qui pénètre ou frôle la grande forêt de chênes-lièges, dont elle recueille les bois et les écorces.
Ces mots « forêt de chênes-lièges » ne sont pas d'une exactitude absolue. Il n'y a pas de futaies exclusivement composées de ces arbres, ils sont mélangés aux pins maritimes, surtout dans la zone forestière conquise à la suite des travaux de M. Chambrelent \ Mais à mesure que les pins parviennent à l'âge d'être exploités
I. 3o^ série du Voyage en France, chapitres II et III à VII.
bO VOYAGE EN FRANCE.
ils disparaissent et laissent le chêne maître du sol.
Je ne reviendrai pas sur ce que j'ai dit dans mon précédent volume, relativement à la cul- ture de cet arbre précieux; il faut cependant rap- peler que le chêne-liège des Landes n'est pas considéré par les botanistes comme le véritable chêne-liège, ce dernier croît autour de la mer méridionale, en Provence, en Roussillon, en Espagne, au Maroc, en Algérie et en Tunisie. L'autre se plaît sur les rivages plus humides de l'Océan, on le trouve en abondance en Portugal et sur les côtes atlantiques du Maroc. Plus rus- tique que son frère méditerranéen, il en diffère par son mode de végétation et sa plus grande résistance au froid. A part cela il faut l'œil du botaniste pour distinguer un arbre de l'autre par l'examen de la cupule du gland.
Quoi qu'il en soit, on a fait du chêne-liège des Landes une espèce à part. Comme il se plaît sur la mer d'Occident, on l'a nommé Quercus occidentalis. Dans les Landes, les bûcherons et les liégeurs lui donnent le nom de surier.
En Lot-et-Garonne, le cadastre évalue à 1 7 846 hectares la surface occupée par les pins et à 5 698 hectares celle des surèdes, c'est moins que dans le département des Landes où l'on
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Les communes marquées D sont celles où l'on signale le chêne-liège. Les chiffi-es indiquent les surfaces constatées par le cadastre (en hectares).
Les parties de la forêt grisaillées r^^* sont les principales surèdes ou futaies de chênes-lièges occidentaux (suriers).
68 VOYAGE EN FRANCE.
ils disparaissent et laissent le chêne maître du sol.
Je ne reviendrai pas sur ce que j'ai dit dans mon précédent volume, relativement à la cul- ture de cet arbre précieux; il faut cependant rap- peler que le cliêne-liège des Landes n'est pas considéré par les botanistes comme le véritable chêne-liège, ce dernier croît autour de la mer méridionale, en Provence, en Roussillon, en Espagne, au Maroc, en Algérie et en Tunisie. L'autre se plaît sur les rivages plus humides de l'Océan, on le trouve en abondance en Portugal et sur les côtes atlantiques du Maroc. Plus rus- tique que son frère méditerranéen, il en diffère par son mode de végétation et sa plus grande résistance au froid. A part cela il faut l'œil du botaniste pour distinguer un arbre' de l'autre par l'examen de la cupule du gland.
Quoi qu'il en soit, on a fait du chêne-liège des Landes une espèce à part. Gomme il se plaît sur la mer d'Occident, on l'a nommé Quercus occidentalis . Dans les Landes, les bûcherons et les liégeurs lui donnent le nom de siirier.
En Lot-et-Garonne, le cadastre évalue à 1 7 846 hectares la surface occupée par les pins et à 5 598 hectares celle des surèdes, c'est moins que dans le département des Landes où l'on
Échelle au ijSW 000'. LE CHÈNE-LIÈGE EX LOT-ET-GARONNE.
Les communes marquées n sont celles où l'on signale le chène-liége. Les chifli-es indiquent les surfaces constatées par le cadastre (en hectares).
Les parties de la foret grisaillées "^^ sont les principales surèdes ou futaies de chénes-liéges occidentaux (suriers).
70 VOYAGE EN FRANCE.
compte i3ooo hectares de chênes-lièges, bien peu de chose auprès des 82 700 hectares du dé- partement du Var^ Mais pendant longtemps la forêt de la région de Nérac passa pour la plus importante de France :
Quelques chênes-lièges, disait Abel Hugo vers i835, existent épars (sic) dans l'Esterel, en Provence et dans les Pyrénées-Orientales ; la forêt du Maransin dans les Landes est formée d'arbres de cette espèce ; mais la forêt qui fournit la majeure partie du liège nécessaire à la con- sommation de la France se trouve dans le département de Lot-et-GaronnC;, sur la rive gauche de la Gélise, où elle occupe un espace de huit lieues carrées.
A cette époque les statistiques révélaient à Nérac, Barbaste et Mézin 70 fabriques de bouchons occupant 700 ouvriers et livrant i3o 000 quintaux métriques de bouchons et de liège façonné.
Les richesses de la France étaient donc fort imparfaitement connues, car la forêt de liège du pays de Nérac ne pouvait être la plus grande, mais les forêts des Maures et de l'Esterel n'avaient pas encore été explorées, elles étaient inexploitées faute de moyens de transport, tan-
1. Sur l'industrie du liège dans le Var, voyez la iS^ série du Voyage en France, la Provence maritime.
LES BOUCHONNIERS DE MEZIN. 7I
dis que les Landes, voisines de Bordeaux, grand port et grand centre de consommation^ avaient pu développer l'exploitation. Dans les Maures, au contraire, on n'utilisait pas le liège, les ar- bres servaient à faire du charbon ; leurs pousses, rongées par les moutons et les chèvres, ne pou- vaient se développer ; à peine tirait-on un peu de liège pour les usages de la marine ou pour tailler des bouchons vendus à la foire de Beau- caire ; mais quand l'industrie eut pris son essor et que le liège reçut de si nombreuses applica- tions, la Provence commença à préserver ses forêts : depuis i84o, elle- est entrée en lice et dépasse de beaucoup le Lot-et-Garonne.
Cependant l'emploi du liège s'est répandu si prodigieusement que le pays de Nérac, loin de souffrir de la concurrence, a accru ses ateliers ; ne trouvant pas assez de matières premières pour ceux-ci, il doit s'adresser au dehors, à l'Algérie surtout. Qu'est cependant la produc- tion française auprès de celle des autres pays ! D'après M. Lamey ^ les contrées où l'on récolte le liège fournissent environ 687 000 quintaux métriques de liège préparé. Sur cette quantité, près de la moitié est livrée par le Portugal
I. Le Chène-liège. Paris, Berger-LcATault et C*e.
"72 VOYAGE EN FRANCE.
(275000), l'Espagne vient ensuite avec i4oooo, la France donne 60 000 quintaux, l'Algérie 88000, la Tunisie 10 000; soit 1 58 000 pour l'en- semble des pays français. Quant à l'Italie, sa part de 10 000 quintaux est infime.
En admettant le prix de o fr. 65 c. le kilo- gramme pour les lièges préparés — non ouvrés encore — le Portugal fournit au commerce du monde pour 17875000 fr. de liège, l'Espagne 9100000 fr., la France et ses possessions de l'Afrique du Nord 10 270 000 fr. L'Italie n'atteint pas un million.
Nos lièges français sont en grande partie con- sommés sur place, tandis que le Portugal et l'Espagne font de l'exportation; ce sont eux surtout qui alimentent l'Angleterre, l'Amérique, l'Allemagne et les pays du Nord. Nous semblons avoir une part dérisoire dans ce commerce ; en réalité, notre lot est considérable puisque nous livrons à l'étranger des millions de bouteilles de vins, de liqueurs et d'eau-de-vie bouchées avec nos lièges. On a calculé que la Champagne seule absorbe tous les ans i5ooo quintaux de bouchons. Étant donnés les déchets, c'est la dixième partie au moins de ce que le Portugal peut fournir avec son énorme production de liège non ouvré.
LES BOUCHONNIERS DE MÉZIN. 78
Dans le Lot-et-Garonne, la zone des suriers est toujours sur la rive gauche de la Gélise, comme le constatait Abel Hugo; elle comprend toute la grande région boisée qui va finir vers les landes d'Houeillès, mais le chêne-liège se fait de moins en moins nombreux à mesure que l'on s'éloigne de la rivière.
Les chênes-lièges, par les soins dont ils ont été l'objet, ont fini par constituer des massifs particuliers au sein de la grande forêt landaise et le cadastre a pu en constater l'étendue dans 21 communes. C'est à l'aide des chiffres commu- niqués par l'actif directeur de l'école d'agricul- ture de Saint-Pau que j'ai pu établir la carte des surèdes de Lot-et-Garonne en indiquant aussi les communes dotées de chênes-lièges mais non recensées par le cadastre.
Ces étendues s'accroîtraient sans doute, n'était la concurrence d'autres régions liégeiises, mais celles-ci, qui ne possèdent pas de lièges aussi fins, d'une teinte aussi régulière, ont remédié à cette infériorité par des procédés de blanchiment et de soufrage qui permettent à leurs produits de lutter contre ceux de la Gélise et amènent la réduction actuelle dans l'étendue des surèdes à Barbaste, Lisse, Poudenas, Réaup, Sos, etc.
L'exploitation de ces arbres remontant à une
74 VOYAGE EN FRANCE.
époque assez lointaine, on constate le maintien de méthodes commerciales peu en rapport avec les données précises de nos jours, c'est ainsi que la base des transactions est encore sur bien des points le pas de Gascogne, mesure variant selon la qualité. Le meilleur liège marchand est vendu d'après un cube d'une largeur de o'^'",925 et une hauteur de 26 planches sur le devant, 28 sur le derrière et les débris intercalés. Pour les lièges de qualité moindre on met 3o ou 82 plan- ches devant, 38 derrière.
Déjà gênant par ces mesures arbitraires, le pas de Gascogne l'est bien davantage par la facilité offerte à la fraude. Le maître tireur , c'est-à-dire bûcheron qui détache ou tire le liège, s'entend souvent avec l'acheteur au détriment du ven- deur. Le pas qui devrait peser 260 kilogrammes se trouve alors en avoir 3oo. Aussi s'eff*orce- t-on de faire adopter la vente au poids. Un des principaux propriétaires de forêts, M. Cap- grand-Mothes, directeur de l'école pratique d'agriculture de Saint-Pau, est parvenu à impo- ser ce système. L'emploi de plus en plus grand des lièges d'Algérie, toujours vendus au poids, amènera sans doute une révolution plus com- plète. M. de Montesquiou, dans une communi- cation faite il y a vingt ans au comice agricole
LES BOUCHONNIERS DE MEZIN. 76
de Nérac, évaluait à 4o fr. pour uu pas le béné- fice réalisé par la vente à la pesée.
Ce ne sont pas seulement les procédés de vente et d'achat qui doivent être transformés, l'exploi- tation elle-même a besoin d'être conduite dans un esprit de progrès. Le traitement des arbres est jusqu'ici assez barbare. Lorsque ceux-ci ont atteint une dimension permettant de les démas- clery c'est-à-dire d'enlever la première écorce ou liège mâle, qui n'a aucune valeur, il faut attendre plusieurs années, neuf, dix ou douze ans, avant de pouvoir récolter le liège marchand. Celui-ci se présente souvent avec une surface boursouflée ou crevassée qui réduit fort l'épaisseur utile. Il importe donc d'obliger l'écorce ou siiher à croître régulièrement, sous une surface lisse. M. Cap- grand-Mothes a résolu le problème avec élé- gance. Une fois le démasclage opéré, on replace sur la plaie le canon de liège mâle enlevé en fermant hermétiquement les points de suture à l'aide de carton et on lie le canon au moyen de fils de fer. Si l'on a bien exactement rappliqué l'écorce, le liège qui se reforme en dessous est absolument lisse; au lieu des croûtes, des canne- lures et des boursouflures on obtient une sorte de pellicule.
Le succès de l'inventeur dans son domaine de
76 VOYAGE EN FRANCE.
Saint-Pau où il possède 10 000 pieds de suriers a été grand, mais il n'en a pas été de même dans les Maures et l'Esterel où le chêne-liège proprement dit n'a pu supporter le régime dont se trouvait bien le chêne occidental ou surier.
Nérac est séparée de la forêt par la péninsule de collines qui s'étend entre la Baïse et la Gélise. Le chemin de fer et une route y conduisent à travers une jolie campagne offrant bientôt des vues sur la vallée de cette dernière rivière ; du sommet des coteaux on voit très bien la délimi- tation précise du pays de cultures et de la région forestière. D'un côté de la Gélise des cultures fraîches et des vignes, de l'autre la sylve pro- fonde : pins d'un vert sombre, suriers tout roux en cette saison par la profusion de pousses nou- velles qui prolongent chaque rameau.
Dans une clairière, le village de Lisse montre la belle tour de son château. Un autre castel, Hordosse, au confluent de la Gélise et de l'Au- zoue, appartint à du Bartas qui l'habita long- temps et y écrivit une partie de ses œuvres.
La forêt, de chaque côté de Lisse, aboutit à la Gélise même, ses arbres se reflètent parfois dans l'étroit courant. Les pins gemmés, les tail- lis de chênes écorcés pour la tannerie et les su-
LES BOUCHONNIERS DE MEZIN. 77
riers constituent le peuplement. Ces arbres croissent en plein sol landais, c'est-à-dire dans le sable reposant sur Talios. Aussitôt la Gélise franchie on aperçoit la roche perçant sous une terre fauve et l'on trouve les cultures. Dans cette zone fertile, le village d'Andiran est en partie
peuplé de liégeiirs; on y fait surtout les encriers légers en usage dans beaucoup d'écoles.
Aux abords de Mézin, la culture a quelque peu fait reculer la forêt, la rive gauche de la Gé- lise offre une large bande de champs, de vignes et de vergers que la petite ville contemple du haut de sa colline.
Des remparts enveloppaient jadis Mézin^ ils ont disparu depuis longtemps, laissant çà et là quelques débris, et sont remplacés par des bon-
•yS VOYAGE EN FRANCE.
levards dont un, montant de la vallée, est bordé d'arbres superbes. Dès que l'on pénètre dans les rues, on est saisi par la senteur spéciale du liège, exaspérée souvent par l'ébullition ou la combustion. C'est plus frappant encore qu'à Pont-de-Bordes, car toutes les maisons sont des ateliers ou des usines consacrées au travail du liège. Dans chaque famille, père, mère, en- fants sont occupés à la fabrication des bou- chons, des semelles ou d'une foule d'autres objets. La commune renferme près de 3 ooo ha- bitants, dont 2 000 environ dans la ville elle- même, et il y a dans les ateliers urbains ou de la banlieue i ooo ouvriers qui se livrent à cette industrie '.
La ville est simple, dans les limites de ses murailles détruites et qu'elle n'a pas dépassées ; mais l'enceinte est remplacée par une rangée de maisons se rattachant aux anciennes portes, dont il reste les côtés. Sauf la rue principale, de mé- diocre largeur déjà, il n'y a que des ruelles étroites, montueuses, pavées d'une façon inégale à l'aide de grosses pierres. Sur une place dont un des côtés encore entouré d'arcades révèle que
I. Mézin compte ii usines, 35 fabricants patentés, 7 marchands de liège et 3 marchands de bouchons en gros.
LES BOUCHONNIERS DE MEZIN. 79
Mézin fut une bastide, est l'unique monument de la ville, l'église, fort bel édifice ; l'abside romane est une merveille de grâce robuste et sobre. Les fenêtres entourées d'ornements d'une grande pureté offrent des arcatures retombant sur des colonnes aux chapiteaux fleuris. De chaque côté du chœur s'ouvre une chapelle gra- cieuse. La nef est ogivale.
A côté de l'église s'étend une terrasse d'où l'on contemple de vastes horizons : la riante val- lée de la Gélise, les campagnes bien cultivées du Gabardan et du Gondomois, et surtout les espaces infinis des landes plantées de pins et de chênes-lièges. Sur cette petite place, Mézin a érigé le buste du général Tartas.
A mon arrivée, Mézin semblait endormie, aucun bruit ne se faisait entendre. Sans le par- fum sui generis du liège et les bouchons étalés sur des claies à côté des portes, rien n'aurait ré- vélé l'industrie de la petite ville. C'était le repas; chaque jour, de midi et demi à deux heures, le calme se fait ainsi. Maintenant les rues se sont animées, hommes et femmes vont aux ate- liers où a lieu le travail en commun pendant que toutes les portes et les fenêtres ouvertes laissent apercevoir l'atelier familial. Je suis
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cordialement admis dans les maisons où je de- mande à assister au travail. A domicile, on ne fait guère que le bouchon, la machine, si expé- ditive et simple, a peu à peu supplanté la pro- duction à la main. Celle-ci est préférée pour les qualités supérieures, quand Touvrier doit tirer de son carré de liège un bouchon sans défaut, n'ayant aucune partie mauvaise. Avec la machine, le bouchon rigoureusement calibré est fait sans tenir compte des parties crevassées ou dures.
A la main un bon ouvrier ne fait guère plus de 800 à I 000 bouchons par jour, tandis que la machine en livre 4 ooo- On est donc arrivé à quadrupler la production, même davantage car certaines machines peuvent faire jusqu'à 7 000 pièces. Cependant la consommation s'accroît si régulièrement que le nombre des bouchonniers ne diminue pas; bien au contraire, on n'a jamais fait autant de bouchons à Mézin.
D'après les ouvriers que j'interroge, le salaire est d'environ 2 fr. 5o c. à 3 fr. par jour. Les plus habiles peuvent arriver à gagner de 18 à 20 fr. par semaine. C'est modeste, comparé aux gains d'autres industries, mais l'existence est facile dans ce pays au climat si doux que les jardins possèdent des oliviers, cultivés comme arbres d'ornement .
LES BOUCHONNIERS DE MÉZIN. 8l
On ne fait pas seulement le bouchon ordinaire à Mézin ; on prépare tous les articles demandés par certaines industries, la pharmacie, les pro- duits chimiques, etc. Afin de ne rien perdre de leur clientèle, certains fabricants ont même créé la production de bouchons en bois, en verre et autres matières. On fait les semelles et les talon- nettes, les rondelles, les viroles, les cubes, les poignées de bicyclettes, des objets pour la pas- sementerie, que sais-je encore ; partout dans la ville et dans les usines hydrauliques, le liège change de forme.
Aussi n'a-t-on pu suffisamment trouver de liège dans la forêt. Celle-ci donne à peine la vingtième partie de la matière première des usi- nes de Lot-et-Garonne. Mézin est devenu un important client pour TAlgérie et l'Espagne. On tire de ces pays, me dit-on, 3 ooo balles par année. La balle de liège en planches est d'en- viron 70 à 80 kilogrammes. Ce serait donc près de 25oooo kilogrammes que Mezin seul irait chercher au dehors.
La perte au travail est énorme, M. Lamey l'évalue à 65 p. 100. Aussi cherche-t-on à utiliser les déchets. On les emploie à la fabrication des briques de liège en mélangeant des débris gros- sièrement moulus avec de la chaux. Ces briques
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI. G
Ô2 VOYAGE EN FR,\NCE.
ont un débouché assuré dans beaucoup d'indus- tries, grâce à leur légèreté et à leur incombusti- bilité. D'autres usines agglomèrent ces résidus pour de nombreux emplois industriels. Un fabri- cant produit des bouées de sauvetage. En un mol, rien n'est perdu de ces détritus jadis en- combrants.
Plus de trente maisons figurent aux annuaires pour la seule fabrication des bouchons ; il en est d'autres dans les villages voisins, notamment à Poudenas, village bâti à l'issue d'un court val- lon descendu de la forêt. Le travail industriel du liège finit là, mais l'exploitation de la forêt se poursuit plus loin encore, jusqu'à la petite ville de Sos, le dernier centre un peu considérable de Lot-et-Garonne dans la direction des Landes.
Sos est dans la région que l'on peut appeler Armagnac, car elle a beaucoup de vignes et produit des eaux-de-vie. Une petite industrie née de la forêt y persiste, la tabletterie. C'est une ancienne ville, située sur la chaussée ro- maine dite Ténarèze ; on croit qu'elle aurait succédé à la capitale de la tribu gauloise des Sosiates. C'était jadis et c'est encore mainte- nant le point de ravitaillement pour les habi- tants des Landes, les premières pinèdes sont de l'autre côté d'un des vallons entre lesquels la
LES BOUCHONNIERS DE MEZIN. 83
ville est bâtie, vallon bien cultivé au fond duquel le village de Meylan est à demi entouré par la forêt de pins et de chênes-lièges. Dans une clai- rière voisine, le château de Saint-Pau a été amé- nagé par M. Capgrand-Mothes en école pratique d'agriculture pour le département ; elle offre cette particularité de posséder une chaire de syl- viculture où l'on étudie particulièrement la cul- ture du chêne-liège et du pin. Une partie de la forêt, autour de l'école, est un admirable champ d'expérience, conduit depuis bien des années avec une science remarquable.
VI
LOMAGNE DU GERS, GAURE ET FEZENZAGUET
Entre Agen et Lectoure. — Le pays de Brulhois. — Layrac. — Astaffort. — En Lomagne. — Lectoure. — La maison du ma- réchal Lannes. — Fleurance et le pays de Gaure. — En Fezen- zaguet : Mauvezin et INIonfort.
Auch. Août.
Pour les divers pays composant l'Armagnac, Agen est le nœud des communications avec Paris et le centre de la France. Si Bordeaux et Toulouse sont les centres d'attraction, où va se fondre une émigration si active, ils ne détermi- nent pas le principal courant d'affaires ; encore le mouvement sur Bordeaux emprunte-t-il tou- jours l'Agenais, c'est à Agen ou à Port-Sainte- Marie que se t'ait le transit des marchandises et des voyageurs. La ligne en construction ou étu- diée de Bazas à Auch modifiera peu le cou- rant.
La vallée du Gers, moins importante que celle de la Baise, moins riche aussi, n'étant pas
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autant centrale, a cependant bénéficié la pre- mière des voies ferrées, grâce à l'attraction du chef-lieu et à la situation d'Agen sur la roule de Paris, mais les relations du département ont été sacrifiées, puisque les deux principales villes, Condom et Auch, ne sont pas unies par des rails. Les chemins de fer à petit écartement feront cesser cette situation en complétant les amélio- rations que doivent réaliser les lignes d'Eauze à Auch et Lannemezan et de Gastelsarrasin à Gi- mont^
Cette ligne maîtresse, d'Agen à Auch et à Tarbes, est jusqu'ici la seule qui desserve la Lomagne, vaste région étendue depuis la ligne de faîte entre Baïse et Gers, et la Garonne, vers Gastelsarrasin et Verdun. Bien que la Lomagne ait perdu de bonne heure son autonomie en de- venant simple province de l'Armagnac, son nom a prévalu pour les petites villes de Lavit-de-Lo- magne et Beaumont-de-Lomagne, en Tarn-et- Garonne. Au point de vue agricole et dans le langage courant, elle a encore une existence
I. Le Conseil rjéiiéral du Gers est saisi d'un projet de chemins de fer secondaires comprenant un premier réseau de 288 kilomè- tres, lignes de : Gazaubon à Estang et Nogaro ; Thermes d'Ar- magnac à Marciac, Plaisance et Mirande ; Condom à Mirande ; Valence à Castéra-Verduzan ; Auch à Tournecoupes, Sérempuy à Mauvezin, Cologne et Cadours, Gimont à Saramon et Lombez.
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propre, on dit la Lomagne comme on dit l'Ar- magnac ^
La Lomagne commence sur la rive gauche de la Garonne, après le massif qui constitue le canton de Laplume. Celui-ci était bien de l'Ar- magnac cependant, dont il constituait une divi- sion sous le nom de Brulhois. Par ce dernier l'Armagnac confinait au grand fleuve du Sud- Ouest qui le séparait de la Guyenne. Le Gers et FAuvignon formaient les autres limites.
Donc c'est en Brulhois que me conduisait le train par lequel j'ai gagné la petite ville de Lay- rac, à travers cette riante et plantureuse cam- pagne garonnaise qui fit l'admiration d'Arthur Young. Layrac est une mignonne ville qui a perdu son titre plutôt honorifique de Capitale du pays, un instant porté par elle, alors que sa rivale, bourg moins populeux, Laplume, deve- nait chef-lieu d'un canton. Une belle église ro- mane domine par sa tour octogonale l'amphi- théâtre des toils bruns. Au pied coule le Gers ; l'administration a fait à la pauvre rivière la flat- terie de la considérer comme navigable pendant la demi-lieue qui la sépare encore de la Ga-
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I. Pour la portion de ce petit pays dévolue au Tarn-et-Garonne, voyez le chapitre XIV.
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roniie, mais on y chercherait vainement un ba- teau de transport.
Layrac est dans une situation charmante, des abords on jouit d'une vue étendue sur la vallée de la Garonne et les collines de FAgenais, si nettement et bizarrement découpées. Mais, en amont, la vallée se ferme et devient le large cou- loir qu'elle sera jusqu'au pied de la terrasse de Lannemezan. Les collines basses, admirable- ment cultivées, sont encore en partie couvertes de vignes dont beaucoup issues de plantations récentes. Les céréales sont superbes ; comme sur l'autre versant de la Garonne, la culture de Toignon couvre de grands espaces.
Au sommet d'une colline. Fais se signale par une pittoresque église ayant pour façade un pi- gnon triangulaire ; le clocher est un simple pan de mur très élevé, percé de niches où sont les cloches. De ce coteau, la vue s'étend sur la vallée, belle surtout par l'inexprimable richesse de ses campagnes, car les formes sont trop molles pour donner du caractère au paysage.
Du côté opposé, le pays — le Brulhois — dé- coupé par de nombreux vallons, n'est pas moins heureux d'aspect, mais les villages sont rares et menus. Beaucoup ne groupent pas cent habi- tants autour de l'église, Marmont-Pachas en a
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propre, on dit la Lomagne comme on dit l'Ar- magnac ^
La Lomagne commence sur la rive gauche de la Garonne, après le massif qui constitue le canton de Laplume. Celui-ci était bien de l'Ar- magnac cependant, dont il constituait une divi- sion sous le nom de Brulhois. Par ce dernier l'Armagnac confinait au grand fleuve du Sud- Ouest qui le séparait de la Guyenne. Le Gers et TAuvignon formaient les autres limites.
Donc c'est en Brulhois que me conduisait le train par lequel j'ai gagné la petite ville de Lay- rac, à travers cette riante et plantureuse cam- pagne garonnaise qui fit l'admiration d'Arthur Young. Layrac est une mignonne ville qui a perdu son titre plutôt honorifique de capitale du pays, un instant porté par elle, alors que sa rivale, bourg moins populeux, Laplume, deve- nait chef-lieu d'un canton. Une belle église ro- mane domine par sa tour octogonale l'amphi- théâtre des toits bruns. Au pied coule le Gers ; l'administration a fait à la pauvre rivière la flat- terie de la considérer comme navigable pendant la demi-lieue qui la sépare encore de la Ga-
I. Pour la portion de ce petit pays dévolue au Tarn-et-Garonne, voyez le chapitre XIV.
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ronne, mais on y chercherait vainement un ba- teau de transport.
Layrac est dans une situation charmante, des abords on jouit d'une vue étendue sur la vaHée de la Garonne et les collines de TAgenais, si nettement et bizarrement découpées. Mais, en amont, la vallée se ferme et devient le large cou- loir qu'elle sera jusqu'au pied de la terrasse de Lannemezan. Les collines basses, admirable- ment cultivées, sont encore en partie couvertes de vignes dont beaucoup issues de plantations récentes. Les céréales sont superbes ; comme sur l'autre versant de la Garonne, la culture de l'oignon couvre de grands espaces.
Au sommet d'une colline. Fais se signale par une pittoresque église ayant pour façade un pi- gnon triangulaire ; le clocher est un simple pan de mur très élevé, percé de niches où sont les cloches. De ce coteau, la vue s'étend sur la vallée, belle surtout par l'inexprimable richesse de ses campagnes, car les formes sont trop molles pour donner du caractère au paysage.
Du côté opposé, le pays — le Brulhois — dé- coupé par de nombreux vallons, n'est pas moins heureux d'aspect, mais les villages sont rares et menus. Beaucoup ne groupent pas cent habi- tants autour de l'église, Marmont-Pachas en a
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seulement i4 au centre sur les 189 de la com- mune et le bourg principal, Laplume, chef-lieu du canton, en renferme 4iO) un peu plus du quart de sa population totale. Aussi n'y a-t-il guère de commerce dans cette zone, sinon celui des produits agricoles. Tous les cours d'eau qui y naissent ont une origine commune sur les lianes d'une haute colline se terminant par une cime escarpée d'où l'on commande d'immenses horizons. Là, très lier d'aspect, est Laplume ; ce fut sans doute la forteresse qui maîtrisait ce pays si profondément découpé.
Le Brulhois finit au Gers, au-dessous d'Astaf- fort, bourg de Lomagne dont l'aspect contraste avec l'opulence des campagnes voisines ; la pau- vreté des matériaux de construction explique l'aspect assez triste de ce centre, point d'attrac- tion pour une partie de la Lomagne, vers Mira- doux, pauvre petite bastide, jadis forteresse importante.
Astaffort marque la limite de Lot-et-Garonne ; à moins d'une lieue on est dans le département du Gers. La rivière qui donne son nom à ce der- nier ne s'est pas accrue depuis Auch, elle n'est guère plus large et abondante que la Bièvre en amont de Paris et cependant elle a déjà parcouru 167 kilomètres! Sur ses rives la vie est active
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en ce moment, on procède au battage et à l'éclaircissage du maïs. Derrière les bœufs qui conduisent lentement la houe, des femmes achè- vent le travail.
Raides sur la rive droite, les pentes sont douces du côté de l'occident ; cependant un mamelon surgit, haut, de belle forme, couronné par le village de Lagarde-Finarçon entourant une mince flèche d'église. En face, sur un ro- cher à pic de la rive droite, Gastex-Lectourois semble s'affaisser, tant ses maisons sont basses. Le fond de la vallée s'est évasé, le Gers se traîne, sinueux, entre des prés encadrés d'aulnes, de peupliers et d'ormes. Des bœufs mènent les ma- chines faucheuses, spectacle qui surprendrait bien nos cultivateurs du Nord, habitués au tra- vail rapide de leurs chevaux.
Sur une colline une ville apparaît, très fière dans sa ceinture de remparts dominant de haut des pentes raides, elle dresse la masse puissante d'une cathédrale aux tours rongées par les ans. Ce fut un évêché, en effet, jusqu'à la Révolution, cette Lectoure, capitale de la Lomagne ; son évêque partageait avec le roi le titre de seigneur de la ville. Longtemps aussi, elle a été la capi- tale de l'Armagnac et sa forteresse la plus puis- sante. La prise de la ville par l'armée de Louis XI
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fut en quelque sorte le glas de la féodalité. De- puis ce grand drame historique, Lectoure a peu à peu perdu toute importance, la suppression de son évéché activa la décadence que le phylloxéra a encore accrue. La dépopulation est plus active que dans les autres villes du Gers. Il y eut près de 7 000 habitants au commencement du siècle, on n'en comptait plus que 6 ooo avant la guerre
et le dernier recensement n'en signale pas 4 ooo ' ! r/est donc une commune en décadence.
Lectoure a conservé belliqueuse mine. Si les rues sont d'un calme profond, la principale, large, bordée de belles maisons, garde l'aspect des petites métropoles d'autrefois. La cathédrale, les édifices et les promenades qui l'avoisinent
I. Exactement 4 49o, dont 2 Sgi agglomérés.
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ibrment un ensemble charmant. Cette église, œuvre de l'époque ogivale, est belle, par le chœur surtout dont la voûte élancée est soutenue par des colonnes engagées, ornées de chapiteaux sobrement fouillés. Autour, rayonnent neuf cha- pelles, charmantes par leurs nervures et leurs clés de voûte. L'une d'elles renferme la sépul- ture d'un Narbonne Pelet, évêque de Lectoure.
L'évêché avoisine l'église. Acquis par le maré- chal Lannes, le plus illustre des Lectourois, il a été donné à la ville par la maréchale. Ce palais est devenu l'hôtel de ville et la sous-préfecture, il renferme aussi un musée dont la curiosité principale est une galerie de portraits de géné- raux de la Révolution et de l'Empire, nés dans cette petite contrée de Lomagne.
Au chevet de la cathédrale, une partie des an- ciennes fortifications a été plantée d'arbres; c'est le Bastion. Un kiosque pour la musique, des pelouses, la statue de Lannes ornent cette en- trée de la ville. Le futur maréchal et duc de Montebello, dont l'origine était des plus humbles, travailla moyennant six sous par jour au com- blement des fossés et à la plantation de ce mail que son effigie orne maintenant.
Lannes est né dans une étroite voie, la rue Montebello, reliant la grande rue au rempart.
92 VOYAGE EN FRANCE.
La maison, que ne signale aucune inscription, est une pauvre bâtisse de poutrelles, aujour- d'hui occupée par un menuisier; elle a perdu son aspect d'autrefois : on y a percé une fenêtre et placardé une devanture de boutique. Le père de Lannes était garçon d'écurie.
Près de là, quelques vieilles maisons bordent des ruelles aboutissant au rempart qui domine la vallée ; deux chapelles attirent l'attention par leurs porches sculptés.
Du Bastion la vue est fort étendue, merveil- leuse même lorsque le temps clair permet de contempler la chaîne des Pyrénées dessinant ses monts bleuâtres, couronnés de^ neige. Au premier plan, sur une colline, se profde Ter- raube; dans la vallée les toits de Fleurance cou- vrent un grand espace ; plus loin Auch se révèle par les hautes tours de sa cathédrale. Le pays semble un sinueux et verdoyant plateau, tant sont uniformes par l'altitude les sommets des rides parallèles entre lesquelles se creusent les vallées nombreuses. Peu de villages, à peine çà et là un clocher se dressant au sein des damiers réguliers de culture. Les métairies elles-mêmes sont rares et se confondent par leurs toits rou- ges avec le sol rougeâtre de la Lomagne. Mais tout ce pays est riche. On attribue la fertilité
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du sol à sa nature calcaire, contrastant avec les argiles ou boulbènes de l'Armagnac.
Cette fertilité n'a pourtant pas empêché le pays d'être déserté et, partant, de s'appauvrir. Toutes les campagnes jusqu'à Saint-Clar, une des dernières bastides que l'on ait édifiées, sont en voie de décroissance. Lectoure a fort souffert de cette émigration, cependant elle distille en- core un peu d'eau-de-vie et fait un grand com- merce de volailles, ressource suprême de l'agri- culture en Armagnac.
Si belle est la vallée dans ces campagnes fraîches, que j'ai voulu la voir dans son inti- mité en faisant à pied la route de Lectoure à Fleurance, superbe chaussée due à M. d'Etigny. Ce chemin descend par une grande courbe jus- qu'au Gers, en offrant de belles échappées sur cette rivière et l'étroit vallon où s'écoule le flot indigent de la Lauze. Cela me rappelle Angou- lème % avec moins de majesté toutefois, car bien petite est la ville qui se dresse là-haut sur l'abrupte colline. Pour rejoindre la chaussée j'ai suivi une rue passant devant la fontaine de Fon- télie qui sourd au pied des anciens remparts,
I. \b^ série du Voyage en France.
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SOUS une voûte qu'éclairent deux grandes ogives portées par une colonne basse à chapiteaux. Une grille de fer sépare le bassin alimenté par trois sources de l'espèce de préau très profond où sont les robinets. Le futur maréchal Lannes vint souvent jouer dans cette sorte de fosse et boire à la fontaine.
Au bas de la côte, l'antique chapelle de Saint- Gény attire l'attention, son élégant pignon a été bizarrement flanqué de deux tourelles coiffées d'ardoises, comme les imaginerait quelque bour- geois parisien, rêvant d'une villa à Asnières. Près de là, jolie chute du Gers sur un barrage, ses eaux louches refluent sous les arbres et don- nent la vie à un moulin. Sur la rive gauche, les pentes, très douces, semblent une plaine ; sur l'autre les coteaux montrent un front de ces ro- chers calcaires dont la présence dans le sol a valu aux terres arables le nom de peyriisquets. Les maisons qui les couvrent ont des toits bas et plats. En dehors de ces métairies isolées ou des demeures des brassiers — travailleurs ruraux — pas un hameau.. Aucun village ne borde la route de 1 1 kilomètres formant une avenue superbe mais solitaire. Pendant 6 kilomètres le couvert est formé d'ormes de belle venue, plus loin ce sont des peupliers pyramidaux. Quelques mé-
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tairies, très espacées, montrent, à l'écart de la route, leur façade de pisé ou de terre^crue. Fière- ment campée sur une colline, apparaît la flèche grêle de Castelnau-d'Arbieu. Sur l'autre versant, ce village domine la vallée de l'Auroue. Un hameau voisin, Urdens, couvre un promontoire.
Cette région, non moins fraîche que la Loma- gne, est encore un petit pays : le Gaure. De bonne heure, il se donna à la couronne de France ; un des comtes d'Albret à qui il avait été cédé ne put en devenir maître qu'en prenant et saccageant la capitale, Fleurance, qui voulait seulement dépendre du roi.
Dans le Gaure, s'étendent de belles cultures. Du hameau d'Aurrenque à Castelnau, de jolis coteaux, bien dessinés, sont surtout couverts de froment. Les vignes sont rares, il y a peu de maïs, quelques champs de fèves rompent l'uni- formité.
Sur la route je rencontre un troupeau de ces chèvres des Pyrénées que nous voyons dans les villes. Le chèvrier me raconte qu'il est descendu des monts, il y a bien des années, avec son père, s'est plu dans le pays et y est resté. Il voulut aller à Paris, lui aussi, moduler sur son instrument en menant des chèvres de porte en porte, mais la nostalgie de Fleurance le prit, il
"psrrri
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y revint ; il fait pacager ses bêtes, vend ses fro- mages et s'estime heureux.
Près d'un beau parc entourant la vaste de- meure d'Olympe, un vignoble reconstitué, dont les sarments sont d'une belle venue, montre ce que pourra donner la vigne traitée d'après les mé- thodes modernes. La campagne est plus riante, les habitations rurales sont charmantes parfois, on devine l'approche d'une ville. Les prés en- tourés d'arbres, la route, qui retrouve la bor- dure de grands ormeaux, forment une sorte de Bocage si touffu que l'église de Fleurance, nettement aperçue de Lectoure, est maintenant masquée, la ville semble bien lointaine. Enfin, à un coude de la route, l'avenue offre en perspective un mur blanc, c'est la première mai- son de Fleurance.
A l'entrée de la ville une croix se dresse sur un piédestal entouré d'une barrière, monument commémoratif dû à la ferveur catholique d'une dame Colomez ; elle la fit ériger en 1898, pour rappeler que le 22 novembre i586 « les fleuran- tins ont défait les huguenots de toute la contrée alliés contre leur ville ».
Fleurance est une des plus grandes parmi les bastides du Gers. Mais elle a gardé peu de logis remontant à sa création ; le grand désastre de
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i465, quand la ville fut mise àsacpar Jeand'AI- bret, a dû détruire beaucoup de constructions du Moyen Age. Les rues sont larges, les maisons, en majeure partie construites en torchis ou en adobes, c'est-à-dire en briques crues, sont plates et sans caractère, La grande place, entourée d'ar- cades, a été occupée au centre par des halles sur voûte. Tout autour, beaucoup de cafés, l'un d'eux est une « réunion à^ ajîcionados y) . La passion des courses de taureaux s'étend jusqu'ici.
L'église est un remarquable mais lourd édi- fice du xiv^ siècle. Dans l'énorme façade ogivale sont creusées de belles niches sculptées. Pour y pénétrer il faut descendre au parvis par des de- grés ; par des degrés encore on accède dans la nef; la voûte, d'un aspect mystérieux et sombre, est soutenue par de puissantes colonnes d'où les nervures s'épanouissent comme les branches d'un palmier.
Près de la gare, aux abords d'un petit jardin anglais finissant à un abreuvoir orné d'une île de rocaille, un grand champ de foire révèle le rôle économique de Fleurance. La ville est un centre commercial autrement actif que Lectoure, son chef-lieu d'arrondissement ; si la popula- tion de la commune est moins élevée que dans celui-ci, le nombre des habitants agglomérés
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VOYAGE EN FRANCE. XXXI.
gÔ VOYAGE EN FRANCE.
y revint ; il fait pacager ses bêtes, vend ses fro- mages et s'estime heureux.
Près d'un beau parc entourant la vaste de- meure d'Olympe, un vignoble reconstitué, dont les sarments sont d'une belle venue, montre ce que pourra donner la vigne traitée d'après les mé- thodes modernes. La campagne est plus riante, les habitations rurales sont charmantes parfois, on devine l'approche d'une ville. Les prés en- tourés d'arbres, la route, qui retrouve la bor- dure de grands ormeaux, forment une sorte de Bocage si touffu que l'église de Fleurance, nettement aperçue de Lectoure, est maintenant masquée, la ville semble bien lointaine. Enfin, à un coude de la route, l'avenue offre en perspective un mur blanc, c'est la première mai- son de Fleurance.
A Feutrée de la ville une croix se dresse sur un piédestal entouré d'une barrière, monument commémorât if dû à la ferveur cathohque d'une dame Colomez ; elle la fit ériger en 1898, pour rappeler que le 22 novembre 1086 « les fleuran- tins ont défait les huguenots de toute la contrée alliés contre leur ville ».
Fleurance est une des plus grandes parmi les bastides du Gers. Mais elle a gardé peu de logis remontant à sa création ; le grand désastre de
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i465, quand la ville fut mise à sac par Jean d'AI- bret, a dû détruire beaucoup de constructions du Moyen Acje. Les rues sont larges, les maisons, en majeure partie construites en torchis ou en adobes, c'est-à-dire en briques crues, sont plates et sans caractère. La grande place, entourée d'ar- cades, a été occupée au centre par des halles sur voûte. Tout autour, beaucoup de cafés, l'un d'eux est une « réunion Ôl aficionados y) . La passion des courses de taureaux s'étend jusqu'ici.
L'église est un remarquable mais lourd édi- fice du xiv^ siècle. Dans l'énorme façade ogivale sont creusées de belles niches sculptées. Pour y pénétrer il faut descendre au parvis par des de- grés ; par des degrés encore on accède dans la nef; la voûte, d'un aspect mystérieux et sombre, est soutenue par de puissantes colonnes d'où les nervures s'épanouissent comme les branches d'un palmier.
Près de la gare, aux abords d'un petit jardin anglais finissant à un abreuvoir orné d'une île de rocaille, un grand champ de foire révèle le rôle économique de Fleurance. La ville est un centre commercial autrement actif que Lectoure, son chef-lieu d'arrondissement ; si la popula- tion de la commune est moins élevée que dans celui-ci, le nombre des habitants agglomérés
VOYAGE EN FRANCE. XXXI.
gS VOYAGE EN FRANCE.
est plus considérable ^ De très nombreux ma- gasins et des fabriques de chaussures donnent de l'activité.
Fleurance est encore le rendez-vous de tout ce pays de Gaure dont elle fut la capitale. Une longue et belle route s'en va par les pentes douces de la commune de Sainte -Radegonde
dans la partie du canton de Valence qui dé- pendait du comté. Les deux plus gros centres, dans cette direction, sont de fort petits bourgs entourés de riches campagnes, la Sauvetat et Saint-Puy. Ce dernier n'a pas 35o habitants agglomérés et c'est encore le plus peuplé dans
I . Population totale 4 102 habitants, municipale agglomérée 3 243. Il y a cependant décroissance là aussi, Fleurance a compté 4 5oo habitants.
LOMAGNE DU GERS, GAURE ET FEZENZAGUET. QQ
cette vaste zone d'entre Gers et Baïse ; or, la commune a près de i 200 âmes, c'est dire com- bien les habitations sont disséminées.
Du côté opposé, Fleurance est le débouché pour le canton de Mauvezin et une partie de celui de Cologne ; ce dernier bourg, capitale du petit pays de Gimoës, est une bastide, comme l'indique son nom emprunté à l'iVllemagne. La région de Mauvezin a également un nom parti- culier, c'est le Fezenzaguet, dont l'Arrats est la rivière centrale. La vallée étroite est bordée de collines bien découpées donnant parfois beau- coup de grandeur au paysage. Mauvezin, centre administratif et commercial, fut la capitale, il s'étend au fond du val. Plus pittoresque est la bastide de Monfort qui vit naître du Bartas et couvre un promontoire abrupt au-dessus du val- lon de l'Orbe. Un village moins peuplé. Tourne- coupe, garde avec autant de fierté les confins du Fezenzaguet et de la Lomagne. Mais Mauvezin était mieux située pour avoir l'influence militaire et économique. Les quartiers hauts de cette bourgade dominent à la fois l'Arrats et la Gi- mone. Les deux longs cours d'eau semblent vouloir se réunir ici, mais, en butant contre la colline de Mauvezin, ils sont comme touchés par une force répulsive. Ils étaient à moins de deux
100 VOYAGE EN FRANCE.
kilomètres l'un de l'autre, leurs embouchures dans la Garonne seront séparées par six lieues. Après l'achèvement des chemins de fer à voie étroite, c'est vers Auch que le Fezenzaguet diri- gera surtout ses relations, au détriment de Fleu- rance, gare la plus rapprochée dans la direction de Paris.
De Fleurance à Auch on continue à remonter la vallée du Gers, offrant toujours le même spec- tacle de richesse agricole. Beaucoup de toits rouges dans les campagnes. Quelques clochers se montrent : Céran, et, au fond d'un vallon, Goutz. La bastide avortée de Pis mêle son nom venu de la Pise italienne à ceux très français, fleurant le Moyen Age, de Miramont, Puységur, Roquefort, Mirepoix, Puycasquier. Ces noms indiquent bien des points culminants. Puységur couronne une butte. Roquefort a conservé un donjon flanqué d'une tourelle, Arcamont est dominé par une vieille tour à rouge toiture. Sur un mamelon isolé, le donjon, l'église et le village de Roque- laure complètent le décor des abords d'Auch'. Le tableau était plus pittoresque encore lorsque des moulins à vent occupaient toutes les croupes.
1. Sur Auch, voyez la So^ série du Voyage en France, cha- pitre XVIII.
VII
L'Adour et l'Arros. — Thermes-d'Armagnac. — Aignan. — No- garo et le bas Armagnac. — La Douze et le Midour. — Eauze.
— La bourse aux eaux-de-vie. — Les distillateurs d'Armagnac.
— Lannepax. — En Fezensac. — Vic-Fezensac.
Monlréal-du-Gers. Août.
Les bords de TAdour, dans la plaine de Bi- gorre, ne montrent guère de détails heureux, leurs villages de torchis, d'adobes et de cailloux jurent avec la richesse végétale qui les entoure. Cependant, tout à l'heure, au passage, Tarsac m'a montré une tour carrée, en pierre fauve, couronnée par un hourd en bois et donnant un peu de caractère à cette rive du fleuve.
L'Adour vient de se doubler par l'appoint de l'Arros, mais il n'a fait que récupérer en partie les eaux qu'il donna par le canal d'Alaric. La jonction a lieu au sein de prairies encadrées de grands arbres. Sur une colline, dominant à dis- tance le confluent, se dresse le château de Ther-
102 VOYAGE EN FRANGE.
mes-d' Armagnac, entouré de débris de murailles; au-dessus d'un corps de logis flanqué d'une tou- relle se dresse la haute masse du donjon.
Thermes gardait un des chemins allant de l'Adour à l'intérieur de l'Armagnac ; la forteresse n'est plus aujourd'hui qu'une beauté du paysage, elle est comme enveloppée dans les vignes qui couvrent la côte. Partout, on replante; quand on a franchi l'étroite colline et atteint la longue vallée où le Mi don, qui s'appelle ici Midour, traîne ses naissantes eaux, on est en plein vi- gnoble. Ces plantations, faites avec beaucoup de soins, entourent le village de Fustérouau et s'étendent non seulement sur les pentes, mais aussi dans le fond du val. Les anciennes vignes sont tenues basses sans échalas, les nouvelles sont disposées sur des lignes de fil de fer. Mal- gré ces efforts, l'étendue du vignoble est bien faible en comparaison d'autrefois.
Pour ces campagnes, le centre est le bourg d'Aignan, groupé à une croisée de chemins do- minant la Ribérette ; ce ruisseau, particulière- ment pauvre dans ce pays de rivières indigentes, est appelé parfois Midou du Nord, c'est une des deux branches de la rivière. Aignan commande de loin le pays, sa tour ruinée en fait un des points saillants de l'horizon, dernier vestige du
LE FEZENSAG ET l'eaUZAN. Io3
primitif château des comtes d'Armagnac dont Aignan fut la capitale au début de leur autorité. Ces débris remontent au x* siècle, bien anté- rieurs par conséquent à l'église, bel édifice ogi- val du XIV* siècle.
Aignan joue un rôle modeste dans l'activité de ce pays voué à la viticulture et à la produc- tion des eaux-de-vie. Sa part est à peu près réduite à la transformation des lies de vin en cristaux de tartre, industrie fort répandue dans cette contrée du bas armagnac. Le bourg est humble, mais peuplé, en comparaison des vil- lages parfois constitués seulement par l'église. Dans ce pays de viticulture, le vigneron tenait à habiter au milieu de ses vignes, aussi chaque centre communal n'a-t-il qu'une poignée de maisons.
Cependant, au cœur de cette région aux habi- tations éparpillées, plus de 2 000 habitants se groupent à Nogaro, ville régulière, fondée à la fm du XI* siècle et qui n'avait pas cessé de se développer jusqu'à l'invasion du phylloxéra. En- core celui-ci n'ayant pas eu autant d'influence que sur la région d'Auch et de Lectoure, la dé- population a été faible. Cela tient à la fertilité extrême du sol et au peu de prise offerte au fléau. Mais si la culture est patiente, si le métayer s'ef-
I04 VOYAGE EN FRANCE. '
force de tirer parti du sol, c'est selon de vieilles méthodes ; avec un peu d'esprit de progrès on ferait ici un des plus merveilleux terroirs de la France entière. Cependant la toiiya, c'est-à-dire la lande pâture, est encore considérée comme devant être le pivot d'une exploitation rurale bien conduite.
La culture de la vigne échappe à ces reproches, elle est poussée avec beaucoup d'attention. On le doit aux qualités particulières des eaux-de-vie obtenues dans les cantons de Nogaro et de Cazau- bon, où les crus sont les plus réputés de l'Ar- magnac. Ce bas Armagnac a dû le grand élan vers la distillation à la guerre de l'indépendance américaine, pendant laquelle le commerce des liqueurs fortes se développa beaucoup. Aujour- d'hui encore, Nogaro est un centre considérable pour les eaux-de-vie, plusieurs maisons se sont installées afin de recueillir la production du vi- gnoble, étalé en nappe continue autour de la ville.
Les vignes atteignent le bord du Midou qui vient d'arroser de belles prairies, si l'on peut employer ce mot arroser pour le passage d'un ruisseau aussi indigent et louche. Plus nom- breuses encore sont les vignes sur les coteaux de Sainte-Christie-d'Armagnac et dont la Douze
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ou Doulouze occupe l'autre versant. Mais bien souvent il y a des pans de landes dans les par- ties élevées de ces rides entre les rivières. Si l'on ne connaissait la coutume des touyas, on ne s'expliquerait pas de tels terrains perdus à côté de riches cultures.
La saison est pluvieuse, et pourtant la Douze est en ce moment sans eau, bien qu'elle soit luxueusement franchie par deux ponts sous le bourg amphithéâtral de Manciet, entouré de jar- dins et de vignes et auquel donnent accès des routes plantées de grands ormes. Manciet, qui fut une ville importante, est sur le bord d'un plateau ' presque désert s'étendant jusqu'à la GéHse et que des landes couvrent çà et là. Un étang miroite, reflétant la ramure des châtaigniers. En appro- chant de la vallée de la GéHse, on retrouve des cultures plus nombreuses, des métairies et une petite ville apparaît : Eauze, la plus vénérable des cités de l'Armagnac. C'était la capitale de la Novempopulanie et, avant Auch, le siège de l'évcché. Les invasions barbares en avaient fait un amas de ruines près desquelles une ville se reforma lentement, mais combien petite auprès de l'antique Elusa des Ibères et des Romains !
Elusa était entre le site actuel d'Eauze et la Gélise, à peu près sur l'emplacement de la voie
I06 VOYAGE EN FRANCE.
ferrée et de la gare. Le quartier se nomme encore Cieutat ou la Cité. 11 ne reste rien d'apparent des monuments qui en faisaient une des villes riches des Gaules. Par les objets découverts et l'étendue de la zone où ils ont été recueillis, on peut cependant reconnaître la grande surface de cette capitale. Il fallut la création d'une abbaye, cinq siècles après la ruine, pour qu'Eauze na- quît, reprenant à peu près le nom de sa devan- cière.
Mais combien exiguë ! La ligne d'un boule- vard presque circulaire indiquant l'emplacement des murailles du Moyen Age donne à peine 5oo mètres de diamètre à la ville. Celle-ci est groupée autour d'une église gothique dont la voûte est d'une belle envolée. Des maisons à galeries de charpentes ou à arcades entourent l'édifice, l'une d'elles est charmante par ses poutres en bois sculpté : un hôtel particulier est à demi masqué par une grille couverte de roses ; beaucoup de fleurs, beaucoup de plantes vertes devant les habitations et sur l'appui des fenêtres des vieilles maisons à ressaut qui bordent les ruelles. Au long du boulevard de ceinture de beaux jardins apportent la gaîté. Là sont les arènes pour les courses de taureaux.
Eauze a donné son nom à l'un des petits pays
LE FEZENSAC ET L EAUZAN. IO7
de TArmagnac, TEauzan^ qui comprend son can- ton et une partie de celui de Montréal, mais un autre nom a prévalu, au moins pour la désigna- tion du cru des eaux-de-vie : la Tënarèze. Cette région viticole, sans donner des produits aussi fins que ceux du bas armagnac, est supérieure au haut armagnac ou pays de Gondom. La si- tuation intermédiaire avait fait d'Eauze le prin- cipal marché des eaux-de-vie d'Armagnac. Au- jourd'hui encore, une véritable bourse se tient le jeudi autour de l'église, chaque distillateur ou bouilleur de cru apporte ses échantillons que viennent déguster les négociants ou commission- naires de Nérac, Condom, Agen, Auch, Vic- Fezensac, etc. Un moment, quand le vignoble de Cognac fut dévasté, les commerçants charen- tais étaient nombreux au marché d'Eauze. Ils viennent moins aujourd'hui. On attribue leur abstention aux nouveaux droits sur les eaux-de- vie ; peut-être y faut-il voir plutôt les effets de la reconstitution du vignoble à Cognac et dans sa région ^
Quelles que soient les causes du malaise, il est
1. On dit Eauze en parlant de la ville et le pays se nomme Auzan, d'oii Castelnau-d'Auzan.
2. Sur Cognac voyez une étude complète dans la iS*^ série du Voyage en France.
I08 VOYAGE EN FRANCE.
grand dans la Ténarèze aussi, de là cet abandon des campagnes, la ruine des propriétaires qui n'ont pu faire face aux charges des emprunts et le découragement des métayers. Les systèmes défectueux de culture ne permettent pas d'ob- tenir de rendements suffisants, même ces rende- ments diminuent. Dans la monographie des Landes agricoles que j'ai souvent citée % M. Duf- fourc-Bazin évaluait le prix de travail à la char- rue à 170 fr. l'hectare; le revenu brut atteignait 38o litres d'eau-de-vie à 62 degrés, valant 38o fr. En déduisant l'impôt et l'intérêt du capital fon- cier, on obtenait net 170 fr. ; mais la production est tombée, le revenu net n'a pas même atteint 160 fr. ; à ce taux le vigneron propriétaire ne peut vivre. La situation, disait M. Duffourc- Bazin en 1892, est plus grave encore dans les départements voisins — dont le Gers — que dans les Landes.
La distillation des vins a lieu surtout pour les cépages àt folle-blanche ^ les vins àe piquepouls étant vendus au commerce pour le coupage ou dans les Charcutes pour remédier à l'insuffisance de la récolte locale, en vue de la transformation en cognac. Les principales exploitations ont des
I. Dans la 3o^ série du Voyage en France.
LE FEZENSAG ET L EAUZAN. I OQ
appareils fixes, mais ce matériel coûteux est de plus en plus remplacé par des alambics ambu- lants conduits par deux hommes exerçant unique- ment la profession de distillateurs, auxquels le vigneron ou un brassier vient en aide. Ces alam- bics nécessitent un certain capital, car ils coûtent de 6000 à 7000 fr. Dans quelques domaines il y a des alambics moins puissants, fabriqués dans le pays, notamment à Eauze et à Vic-Fezensac.
Jadis la campagne de distillation était régu- lière, elle commençait vers le i*^'' novembre et se terminait du i*' au i5 février, mais depuis que les eaux-de-vie artificielles ont pris une partie du marché et que la facilité des transports permet d'expédier les vins en nature, on distille surtout lorsque ces derniers n'ont pu trouver acquéreurs.
A Texposition de 1889, l'armagnac fut très remarqué, le rapporteur du jury établissait ainsi la répartition des crus :
Le bas armagnac qui donne les produits su- périeurs comprend dans le Gers les cantons de Cazaubon et Nogaro, dans les Landes une partie de celui de Gabarret; ses eaux-de-vie ont une saveur agréable et subtile, avec de la finesse et du moelleux.
Celles de la Ténarèze « sont encore fines de goût », mais avec un peu moins de délicatesse,
IIO VOYAGE EN FRANCE.
leur zone comprend le canton d'Eauze, la partie ouest du canton de Montréal et la partie de Lot- et-Garonne s'étendant des limites du Gers à Sos.
Dans le haut armagnac, « les eaux-de-vie par- ticipent des mêmes qualités, mais à un degré inférieur; elles ont moins de sève et moins de corps ». On les récolte dans la partie est du can- ton de Montréal et dans l'ensemble des cantons de Condom, Valence, Vic-Fezensac, Jegun et partie de ceux de Montesquiou et d'Aignan.
Ces eaux-de-vie d'Armagnac ont un bouquet particulier, mais ne possèdent pas « le fondu, le parfum et la distinction » des produit charentais. Les vins d'Armagnac envoyés dans les Charentes pour la distillation ne donnent du cognac que par les soins apportés et grâce à un mélange de vieilles *eaux-de-vie du cru.
Le haut armagnac commence assez loin d'Eauze vers l'est, avec le canton de Vic-Fezen- sac qui conserve le nom de l'ancien pays dont Vie fut la cité maîtresse. Ce Fezensac compre- nait au début de la féodalité tout ce que nous appelons aujourd'hui Armagnac, l'Armagnac pro- pre n'en est qu'un démembrement. De lambeaux en lambeaux, formant d'autres petits Etats féo- daux, le Fezensac en est arrivé à comprendre seulement les cantons de Vie et de Montes-
III
quiou. En 1777, l'illustre famille qui porte ce der- nier nom obtint d'y ajouter celui du petit pays.
Aucun chemin de fer ne traverse encore le Fezensac, mais on doit commencer, en igoS, la construction de la ligne d'Eauze à Auch, dont la station principale sera Vie. Actuellement, cette active petite ville en est encore aux diligences qui la relient à Eauze, Auch, Condom, Nogaro et Mouchan, station la plus proche.
D'Eauze, la route du Fezensac suit à distance la Gélise, à travers une contrée où les villages sont rares, mais qu'animent de nombreuses mai- sons de vignerons. Chacune d'entre elles est une petite usine à distiller les vins. Noulens fait un commerce d'eau-de-vie, Ramouzens attend le chemin de fer pour développer l'établissement thermal de la source du Moura. Plus loin, sur un petit plateau étalé entre l'Izaute et l'Auzoue — ou la Lauzoue — une bastide restée embryon- naire rappelle à la fois l'ancien état du pays et sa vieille histoire : Lannepax, la Lande de la Paix ; ce nom serait dû à une paix conclue dans la lande entre les Elusates et le général romain Crassus.
D'Eauze à Vic-Fezensac, sur 22 kilomètres d'une route sinueuse, on parcourt ou longe quatre vallées; la dernière est celle de la Losse,
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très longue rivière — 1 26 kilomètres — mais fort indigente, car elle ne reçoit pas une goutte d'eau de la Neste, malgré les instantes demandes des riverains. Dans ce couloir étroit, fond de prai- ries aux pentes tapissées de vignes, est Vic- Fezensac, un des principaux centres de popula- tion pour ce département où les villes sont petites ^
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Celle-ci n'a pas le tracé régulier des bastides, ses rues sont rarement alignées, mais les cons- tructions révèlent l'aisance. Vie est un marché très actif où viennent s'emmagasiner une grande partie des vins et eaux-de-vie de l'Armagnac. La fabrication des alambics, la production des
I. Sur 8280 habitants de la commune il en est près de 2 5oo dans la cité elle-même.
LE FEZENSAC ET L EAUZAN. Il3
cendres gravelées et des cristaux de tartre se rattachent intimement à cette industrie de la distillation, de même que le travail des vis de pressoirs et des machines agricoles.
A ces industries Vie a ajouté depuis quelques années la confection des chaussures et la fabri- cation des formes nécessaires à cette dernière. Les commerçants centralisent les plumes, les duvets, la laine, les tartres recueillis dans le Fezensac et jusque dans le canton de Jegun, dont le chef-lieu, bastide placée sur un mon- ticule, est un centre rural, aux foires très sui- vies. La Baïse, ayant Saint-Jean-Poutge comme port supérieur, supplée pour les gros transports à l'absence de voies ferrées.
Le Fezensac n'offre pas de paysages plus va- riés que les autres petits pays qui Tavoisinent, mais quelques belles ruines relèvent parfois la monotonie de ces paysages. La plus remarquable, Lavardens, dont on voit de loin la silhouette, n'est plus en Fezensac, elle appartient à l'Arma- gnac propre.
Retour à Eauze, le soir. Du sommet des rides parallèles, la vue est merveilleuse sur les Pyré- nées lointaines.
Au matin le ciel est si pur, la lumière si douce
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI. 8
Il4 VOYAGE EN FRANGE.
que je renonce à prendre le chemin de fer et gagne à pied Montréal. D'Eauze la route des- cend dans le vallon verdoyant de la Gélise, rem- pli de beaux jardins. La rivière, qui deviendra vivante dans le pays de Nérac, est encore fossé sinueux dont les eaux immobiles sont fleuries de nénuphars. Au-dessus, le plateau est couvert de cultures entremêlées de vignes. Les fondateurs de bastides avaient essayé d'y créer une ville ; elle n'a pu prospérer et, au lieu d'être la rivale d'Eauze, est restée un petit village, mais Bre- tagne-d* Armagnac a conservé sa place centrale avec des maisons à galerie. L'église est un char- mant édifice à une seule nef; sur les colonnes engagées, ornées de chapiteaux, viennent se poser de fines nervures supportant la voûte en berceau. Plusieurs rues de Bretagne sont de- meurées à l'état de large chemin, telles que les tracèrent les géomètres du Moyen Age.
Le site fut choisi avec goût, sous la ville avortée se creuse le joli val de rizaute, dominé par l'égHse moderne de Gazeneuve. Les vignes tapissent les pentes, la petite vallée off're de profondes pers- pectives.
Après la Gélise, autre plateau étendu jusqu'à l'Auzoue, d'où l'on a une vue charmante sur Bretagne, bien assis sur sa colline. A l'écart du
LE FEZENSAC ET l'eaUZAN. Ii5
chemin sont les belles ruines du château de La- mothe-Gondrin capricieusement tapissées de lierre. Des abords on jouit d'une vue immense sur de belles campagnes, on lit comme sur une carte en relief la configuration en vallées paral- lèles. Peu de villages, le groupe de population le plus important est Gondrin, dont les toits rouges surgissent de la verdure au sommet d'un coteau.
Enfin voici, là-bas, loin encore, Montréal, bas- tide formée d'une rangée de maisons aux toits de teinte ardente étalée sur l'arête d'un coteau et dominée par une vaste église à contreforts. Le site est un promontoire rocheux au pied duquel l'Auzoue semble endormie sous les nymphéas. La crête est si étroite que l'église et quelques maisons ont dû s'installer sur de hauts murs en terrasses ; Montréal, très petit bourg % doit à cette situation un caractère de grandeur accrue par la haute masse de l'église, percée de fenêtres ogivales et dont le (Cocher, tour carrée, rappelle ceux des églises espagnoles.
Montréal, mont royal, fut créé en I255, mais il ne s'est pas développé. Son industrie est nulle et son importance commerciale plus faible que
[. 555 habitants, la commune entière en a 2 062.
Il6 VOYAGE EN FRANCE.
celle d'une commune de son canton, Gastelnau- d'Auzan, centre pour les eaux-de-vie.
Montréal, si abandonné soit-il, si morose quand on parcourt ses longues rues parallèles, n'en est pas moins un des grands paysages de l'Armagnac, lorsqu'on le voit du fond de sa vallée ou des collines voisines.
VIII
LE GONDOMOIS
Gondrin. — Laressingle. — La vallée de la Losse. — Gondom.
— Le commerce des eaux-de-vie. — La na\'igation de la Baise.
— Valence et Beaiicaire, — En descendant la Baise. — Mon- crabeau, pays des hâbleurs.
Nérac. Août.
Profondément découpé, le pays, à partir de la vallée de la Lauzoue, offre des sites plus fiers pour l'assiette des bourgades. Gondrin a non moins grand aspect que Montréal, sur ses hautes collines aux pentes couvertes de vignes. Enve- loppé de grands arbres, dominé par une grosse tour d'église flanquée d'une tourelle à flèche aiguë, le bourg donne beaucoup d'allure au paysage. La vue s'étend sur d'immenses hori- zons, jusqu'aux Pyrénées et aux Landes. Les campagnes voisines avaient jadis beaucoup de vignes, elles ont disparu en grande partie, rem- placées par les céréales ou laissées en friches. C'est pitié de traverser ce pays ravagé.
Il8 VOYAGE EN FRANGE.
La route de Condom le parcourt, par des pen- tes douces elle descend vers la Losse, bien peu accrue depuis Miélan et Vic-Fezensac ! Aucune source ne lui a apporté un tribut; cependant, aux temps géologiques, elle a fermement modelé sa rive droite. Les coteaux de Laressingle dont elle frange la base sont abrupts et formaient une situation militaire très forte ; les évêques de Condom, plus soldats que prélats, avaient cons- truit là une puissante forteresse, assez vaste pour contenir un village. Elle est ruinée, mais, hautaine encore; les habitants, trop à l'étroit, ont appuyé des maisons contre le rempart, où ils ont percé des fenêtres. Au milieu de l'en- ceinte se dresse le château ; la chapelle, de- meurée intacte, sert d'église à cette petite pa- roisse.
Des collines avoisinantes on découvre de grands espaces : d'un côté la vallée de la Losse se creuse profonde, de l'autre les pentes fuient doucement jusqu'à la Baïse, dont Condom oc- cupe la rive droite escarpée. La vallée est très large, verte, lumineuse entre des coteaux de mé- diocre élévation. Peu de villages, mais beau- coup de maisons isolées. Condom est le centre et la beauté du paysage ; au-dessus de la ville se dresse la cathédrale, sa tour carrée et la flè-
LE CONDOMOIS. IIQ
che d'une autre église semblent surgir des toits d'un rouge ardent.
Condom a ce qui manque aux villes du Gers, une rivière ou plutôt l'apparence d'une rivière, car la Baïse ne serait rien sans l'apport des eaux de la Neste amenées par le canal % et même semblerait un ruisseau si elle n'était rete- nue par les barrages écluses. En la transformant en voie de navigation on lui a donné la profon- deur d'eau qui fait illusion sur la masse réelle du flot. A Condom, le lit a été assez élargi pour qu'un port ait été établi en amont d'un déversoir qu'alimente le bief d'un moulin. A peine un ou deux bateaux aujourd'hui, cependant la naviga- tion est plus active qu'on ne pourrait le supposer en un pays de médiocre industrie. Faible en amont de la ville où la rivière ne dessert aucun centre populeux et n'aurait même aucun trafic sans Vic-Fezensac, voisin de Saint-Jean-Poutge, elle prend de l'essor en aval. Une compagnie de transports créée pour effectuer un service régu- lier avec Bordeaux possède une flotte de 22 em- barcations ayant un tonnage total de 2 182 tonnes; dans ce nombre sont deux vapeurs, l'un, à hélice
I. Sur le canal de la Neste et l'alimentation des rivières des- cendues du plateau de Lannemezan, voyez dans la ^o^ série le chapitre XVI.
120 VOYAGE EN FRANCE.
à 100 chevaux de force, l'autre, à roues à Tar- rière, à 26 chevaux. En dépit des chemins de fer, cette navigation persiste, même elle accroît encore '. Dans Tensemble la rivière a un mou- vement moyen, né sur la voie, de plus de 6000 tonnes.
La ville s'élève sur une sorte de terrasse do-
minant la Baïse, d'étroites petites rues, une enveloppe de beaux boulevards, quelques mo- numents intéressants, telle est cette ville- qui eut quelque temps Bossuet pour évêque. Des
1. Mouvement en aval de Gondom, du port aux limites de Lot- et-Garonne, i44oo tonnes en 1900 et 17181 en 1901. En amont, de Saint-Jean-Poutge à Gondom, G 908 tonnes en 1900 et 7999 en 1901.
2. 6678 liabitanls, dont 4^*50 de population municipale agglo- mérée.
LE CONDOMOIS. 121
édifices intéressants y retiennent un instant le visiteur. L'ancienne cathédrale, de proportions moyennes, est charmante, sa nef en berceau aux multiples nervures, aux clés de votjte sculptées ou dorées, ses élégantes chapelles latérales, ses grandes fenêtres en ogive, est une belle œuvre de la Renaissance. De nos jours on a entouré le chœur d'une galerie ajourée, en terre cuite, de style flamboyant, ornée de nombreuses statues de saints ; elle rapetisse peut-être légèrement l'édifice mais sans nuire à l'elîet imposant de cette belle nef. Sur un des côtés une porte laté- rale, admirablement fouillée, s'ouvre entre des maisons.
L'hôtel de ville est installé dans un cloître ogival, où les nervures semblent supporter la floraison des clés de voûte délicatement ouvra- gées. De belles portes sculptées donnent accès dans l'édifice. En parcourant la ville on rencontre quelques nobles maisons ou hôtels. Un de ces logis remonte à l'époque romane. Les boule- vards, dans la partie où ne s'est point portée la vie bourgeoise, ont conservé des pans de rem- parts dans lesquels des habitations ont établi leur façade. L'ancien évêché est devenu le Palais de Justice.
Au long du cours Scipion-Dupleix, ainsi
122 VOYAGE EN FRANCE.
nommé d'un historien local, sont de jolies habi- tations entourées de jardins dont la végétation presque méridionale dit la douceur du climat. Ce cours aboutit à une terrasse ombragée d'où l'on découvre la sinueuse et étroite Baïse et le faubourg de la gare renfermant les magasins et les chais à eau-de-vie. De cette promenade, j'ai eu, ce matin, la vue des Pyrénées, se détachant très nettement sur le ciel. La chaîne donne une grande splendeur à l'Armagnac en formant toile de fond à ce décor un peu monotone des longues croupes parallèles. Au centre du panorama, un grand massif neigeux, celui de Gavarnie, sans doute, se dresse avec une incomparable splendeur.
Bien que Condom possède peu de vignobles aujourd'hui, ce n'en est pas moins le centre principal pour le commerce des eaux-de-vie, nombreux sont les commerçants et les commis- sionnaires. La navigation de la Baïse en fait éga- lement un entrepôt pour les transactions en blés et farines. La rivière lui apporte les produits des cantons de Vie et de Valence.
A défaut de chemin de fer, cette dernière ville communique par voie d'eau pour ses gros trans- ports avec la vallée de la Garonne. Commerce assez faible d'ailleurs, car Valence est sans in-
LE CONDOMOIS. 123
dustrie et la commune entière ne possède pas I 4oo âmes. La minuscule cité produit grand effet cependant, par sa situation au sommet d'une colline à demi entourée par l'Auloue et la Baïse qui s'unissent à ses pieds. Des murs crou- lants révèlent le passé guerrier de cette place dont le rôle militaire a pris fin avec Richelieu, grand destructeur de castels et de bicoques for- tifiées. Du haut de son coteau. Valence contem- ple de johes campagnes entourées de châteaux anciens. Sur la Baïse est la petite bastide de Beaucaire, sur l'Auloue sont les thermes de Cas- tera-Verduzan auxquels il manque un chemin de fer pour se développer.
En aval de Condom, la Baïse erre dans un pays plus accidenté, les bords de la rivière rap- pellent par la grâce et l'heureuse disposition des cultures et des bois certains vallons de Touraine. La vigne y reparaît, timidement encore, mais ces plantations nouvelles sont bien tenues, des pépinières de plants américains témoignent que l'élan est donné. Le maïs n'a plus le rôle pré- pondérant qu'il jouait au sud et que l'on re- trouve dans le val de la Garonne. Les blés, les avoines, les plantes sarclées couvrent pen- tes et plateaux. Dans ce verdoyant terroir, de
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belles maisons aux allures de château animent le paysage.
Les villages sont très espacés. En descendant la rivière on fait 1 1 kilomètres avant de rencon- trer un groupe d'habitations. Là est le bourg de Moncrabeau, il appartient au département du Lot-et-Garonne, mais fît partie du Gondomois comme Nérac et sa région ; les cantons de Nérac et de Francescas sont un démembrement de l'an- cien petit pays \
Moncrabeau couvre une colline légèrement ar- rondie, projetée en promontoire. Le clocher est un singulier triangle de maçonnerie donnant vaguement l'idée de quelque amer pour la navi- gation maritime. Dans ce mur les baies où les cloches sont suspendues semblent des orbites.
Moncrabeau, dont le nom sonne si bien la Gascogne, serait le village où la hâblerie gas- conne l'emporte sur les autres centres de la pro- vince. 11 y eut là une sorte d'Académie de hâ- bleurs dont les recueils d'anas ont conservé le souvenir. Nous nous délectons moins que nos pères à ces plaisanteries, aussi Moncrabeau est- il oublié, cependant les vieux auteurs attribuent
I. Le Gondomois comprenait les cantons actuels de Condom et Valence (Gers), de Nérac et Francescas (Lot-et-Garonne).
LE CONDOMOIS. 120
à Moncrabeau une célébrité européenne ! Abel Hugo a raconté ainsi, dans sa France pittores- que, les origines de cette réputation.
Au commencement du siècle dernier, quelques anciens militaires, quelques propriétaires, se réunissaient sous la halle pour y parler des affaires du temps. Là comme dans toutes les réunions de gens oisifs, celui qui apportait les nouvelles les plus extraordinaires et qui les débitait avec le plus d'assurance était toujours le mieux accueilli. Un des habitués avait surtout acquis une grande réputation. Mais un homme d'esprit, qui n'était pas sa dupe, imagina de donner à Moncrabeau le titre de c: chef-lieu de la diète « générale de tous les menteurs, hâbleurs, craqueurs, nou- « vellistes, gens désœuvrés et bourgeois sans occupa- « tion ». — Pour inaugurer cette institution, il rédigea des lettres patentes dans lesquelles on accorde à tous les agrégés « le droit de mentir en tous lieux sans porter préjudice à autre qu'à la vérité dont tous les membres de la respectable diète font la profession d'être ennemis ju- rés, etc., etc. ». L'imprimerie répandit partout ces brevets. On en adressa à toutes les personnes qu'on jugea dignes de figurer à la diète. C'est ainsi que depuis plus d'un siècle le nom de Moncrabeau rappelle l'idée de l'exagé- ration et du mensonge, quoique ce défaut ne soit pas plus commun sur les rives de la Baïse que sur celles de la Garonne ou de tout autre fleuve de la France.
Au reste, les habitants de Moncrabeau se prêtent gaie- ment à la plaisanterie. Quand un étranger vient les» visiter, ils le conduisent sous la halle, le font asseoir avec céré- monie sur la pierre dite de la vérité et lui délivrent solen- nellement des lettres patentes de bourgeois de Moncrabeau.
En face de Moncrabeau, le château de Charrin
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donne de la grandeur au paysage, grâce à ses hautes toitures, à ses murs fauves, à ses fenêtres à croisillons. Maintenant, sur les deux rives de la rivière, jusqu'à Nérac, les belles demeures se pressent, moins opulentes que les châteaux de la Loire, mais aimables pourtant et ayant noble apparence. Quand on connaît l'histoire de ce coin de France et le rôle de Nérac comme capi- tale des roitelets de Navarre, il semble que ces gentilshommières étaient un diminutif des palais de Touraine et de l'Orléanais, comme le royaume des sires d'Albret était un diminutif du royaume de France.
Une belle végétation entoure ces nobles logis; beaucoup de vignes bien soignées tapissent les pentes. Cela est de plus en plus riant à mesure que l'on approche de la petite ville. Voici les ruines du château de Nazareth, l'ombreuse Ga- renne, orgueil de Nérac, puis enfin l'aimable ville dont le futur Henri IV avait fait sa joyeuse rési- dence.
IX
LE PAYS DES PRUNES
Clairac et ses marchés. — Au long du Lot. — La Parade. — Castelmoron. — L'orme tortillard. — Monclar et Sainte-Li- vrade. — La culture du prunier. — Robe de sergent et prune d'ente. — Le commerce des pruneaux. — La cueillette et la cuisson. — Villeneuve-sur-Lot : la ville.
Villeneuve-sur-Lot. Mai.
En quittant Tonneins pour la vallée du Lot, j'ai remonté un vallon très frais, admirablement cultivé jusqu'au sommet de collines bien décou- pées, aux formes nettes. De la crête une vue merveilleuse m'attendait. Certes la vallée de la Garonne est riche, pourtant il me semble qu'en voici une plus opulente encore. Entre les belles collines s'étale un large plan de cultures, ou plutôt de vergers, coupés d'étroites lignes de céréales et de rangées de vignes; au milieu, étincelant et calme, le Lot déroule de grands replis, allant frôler les hauteurs sur lesquelles bourgs et villages sont crânement campés. Au-
128 VOYAGE EN FRANGE.
dessous de la colline qui me permet de découvrir ces immenses et superbes horizons, une petite ville aux toits plats, de tuile brune, semble sourire entre les pruniers et les figuiers, se mire dans la grande rivière et se prolonge sur l'autre rive par un faubourg. Cette mignonne cité se nomme Glairac, c'est un des centres les plus vivants de la riche vallée, à laquelle la culture du prunier et celle des petits pois ont restitué la richesse détruite par le phylloxéra.
Avant le fléau, Clairac possédait sur ses col- lines un beau vignoble dont les raisins, traités comme ceux de Sauternes et de Monbazillac % c'est-à-dire récoltés lorsqu'ils étaient recouverts d'une pourriture spéciale, produisaient un vin liquoreux réputé, ou vin pourri. Il en reste peu aujourd'hui. De même la préparation de la figue séchée, « supérieure à celle de Marseille », d'a- près les vieux auteurs, n'est plus qu'un souvenir.
Le petit pois, dont je décrirai la culture et le commerce en parlant de Villeneuve, a pris la place de ces productions; chaque mardi, pen- dant la saison, il se tient à Glairac, dans l'après- midi, un marché important pour ce légume, expédié à Paris et à Bordeaux. Puis on fait un
âge série du Voyage en France, chapitres II, XIII et XV.
LE PAYS DES PRUNES. I29
peu d'eau-de-vie et surtout on cultive le prunier d'ente. Ce serait même ici que la culture de la prune et sa transformation en pruneau auraient commencé, au milieu du siècle dernier, sous rinitiative des moines d'une abbaye voisine.
Ces produits agricoles plus que les ateliers de chapeaux de paille et de feutre, restes d'une in- dustrie jadis florissante, font le bien-être de la petite ville assise au pied des coteaux qui vont rejoindre le confluent du Lot et de la Garonne vers Nicole et Aiguillon, hauteurs ttès raides, bien exposées au soleil, couvertes de pruniers réguUèrement plantés dans les vignobles et les champs de céréales.
Un chemin longe le Lot, large et vert, parfois bordé de grands roseaux ou cannes de Provence. Les maisons des champs possèdent presque toutes un figuier à la grande ramure couvrant la cour ou ombrageant la façade. On va ainsi dans une campagne splendide, jusqu'à un pro- montoire au sommet duquel le bourg de Lapa- rade, belliqueusement campé comme il convient à un tel nom, domine des horizons immenses. Malgré sa situation, ses allures de forteresse, son tracé rappelant les bastides, il semble que Laparade n'ait point d'histoire. Le village com- mande un des plus beaux panoramas de France.
VOYAGE EN FRANCE.
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Il était trop haut perché et trop strictement guerrier pour avoir une influence administrative, celle-ci a été dévolue à la petite ville de Castel- moron, mieux placée pour le commerce à un coude du Lot, au pied d'une crête abrupte et étroite, reste d'un plateau érodé par les cata- clysmes géologiques et qui a laissé çà et là des collines en forme de table portée par la roche dressée en falaises. Ces hauteurs décrivent un petit bassin à l'entrée duquel s'étend Castelmo- ron, dans une véritable foret de pruniers. Plaine, bords du Lot, cirque entre les collines, pentes, tables suprêmes tout est enveloppé par ces arbres, il y en a tant que la culture proprement dite semble l'accessoire dans cette région de pruniculture. Entre les vergers le Lot, large et tranquille, décrit majestueusement des sinuosi- tés parfois brusques. La rivière accroît la beauté du paysage et lui donne un caractère roman- tique par les moulins monumentaux appuyés aux barrages écluses.
Castelmoron a des allures de petite ville, c'est un centre commerçant où les négociants en prunes sont nombreux. Une source minérale abondante, appelée Fonfrède, est exploitée. Les villages voisins sont également de grands pro- ducteurs de prunes; quelques-uns, comme le
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Temple et Fongrave, conservent une petite in- dustrie curieuse, celle des ormes nommés tor- tillards à cause de leurs loupes qui les rendent difformes et dues à une maladie appelée brous- sin. Ces bois ont une valeur marchande consi- dérable, ils sont précieux pour tous les emplois nécessitant une grande résistance; ainsi la vieille artillerie les employait pour ses affûts. La zone de répartition de cet arbre s'étend bien au delà de Gastelmoron vers Monbahus, près de Mira- mont ; le hameau de Verdégas, dans la commune de Brugnac, était jadis le principal centre de commerce pour les tortillards. Si l'artillerie n'u- tilise plus guère ces loupes, le charronnage con- tinue à en employer de grandes quantités.
Les ormes, encore nombreux, disparaissent en quelque sorte dans la nappe continue des pruniers: on fait des lieues et des lieues, on peut aller jusqu'au delà du Drot sans cesser de ren- contrer ces arbres qui semblent la seule produc- tion des parties hautes de l'Agenais. Ils enve- loppent complètement le joli bourg de Monclar- d'Agenais dont les coteaux et les petits vallons sont parsemés d'une multitude de maisons où se fait la préparation de la prune. Cependant il y a du bétail : on me signale à Monclar une industrie bien inattendue, celle du lait stérilisé.
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Monclar couvre le sommet d'un beau massif de hauteurs, d'où la vue est belle ; plus fier encore d'aspect est Montastruc , petit village campé , tel un manoir féodal, sur un piton dressé entre deux vallées.
Toute cette région accidentée est riante et fertile, mais elle n'a pas l'incomparable opu- lence de la plaine du Lot, dont on découvre une vaste étendue du haut des coteaux de Monclar. La route qui unit ce bourg à la petite ville de Sainte-Livrade est un éblouissement par sa ri- chesse agricole. Si le prunier domine toujours, les intervalles entre ses rangées sont l'objet d'une culture intensive : joualles de vignes, céréales, fèves, petits pois, pommes de terre, même encore un peu de chanvre rappelant l'époque où Agen et Tonneins avaient une florissante industrie tex- tile ^ Au milieu de cette splendeur, presque au bord du Lot, est ce que l'on pourrait appeler la capitale de la pruniculture, la vieille petite cité de Sainte-Livrade. Si Villeneuve-sur-Lot est le centre principal pour ce commerce, Sainte-Li- vrade est comme le cœur du pays de production.
I. Le Lot-et-Garonne a encore consacré loi hectares à la cul- ture du chanvre en 1900.
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La bourgade qui a gardé la forme circulaire, due à son enceinte fortifiée aujourd'hui disparue, se groupe autour d'une église que surmonte une tour haute et singulière. Nombreux sont les ma- gasins où les paysans apportent les pruneaux. Un autre centre, Casseneuil, situé en amont sur la rive droite du Lot, est également un grand rendez-vous d'affaires pour les producteurs. Une des maisons, signalée par M. Baltet, le savant horticulteur de Troyes, achèterait chaque année pour quatre millions de francs de prunes. Ces fruits confits sont une des marchandises qui maintiennent un peu de navigation sur le Lot; on les embarque à destination de Bordeaux % grand entrepôt et centre de répartition pour la prune d'ente.
Ghasseneuil, où l'on a fait naître Louis le Dé- bonnaire, qui serait né en réalité à Ghasseneuil de la Charente, ou peut-être à Chassenon, autre bourg charcutais possédant des ruines gallo-ro- maines, est donc un centre florissant. Il se groupe autour d'une belle église du xiii® siècle, au pied de collines revêtues de pruniers, comme la large plaine du Lot. Jusqu'à Sainte-Livrade d'un côté.
I. En ïQOO, Bordeaux avait exporlé 189 855 quintaux de prunes sèches. L'année suivante il n'y en eut que 87 625, mais cela tint au faible rendement de la récolte.
LE PAYS DES PRUNES. l35
jusqu'à Villeneuve de l'autre, on est sans cesse à l'ombre de ces petits arbres, nappe de neige au printemps, vergers couverts de fruits rosés dès les premiers jours d'août.
En dépit du nom de prunes d'Agen donné aux fruits récoltés dans l'Agenais, la prune n'est point produite autour du chef-lieu de Lot-et- Garonne , ou du moins c'est à l'état d'excep- tion; le véritable habitat de ces fruits, dont les qualités supérieures sont un aliment de grand luxe, est sur les bords du Lot et du Drot et dans le pavs accidenté qui sépare les deux vallées. La variété servant à préparer le pruneau est surtout la prune robe de sergent ou prune (fente, qui a fait disparaître les autres espèces, notamment la prune de roi. La prune d'ente a été décrite bien souvent, la définition la plus pré- cise est celle de M. le docteur Auricoste, deLau- zun: « Ce fruit oblong, renflé vers le milieu, violet-rouge d'un côté, violet-rose de l'autre, est couvert d'une peau parsemée de très petits points, tantôt blancs, tantôt noirs. La chair est jaune, éminemment sucrée, d'un parfum relevé, que la dessiccation développe d'une manière évidente. Le noyau ovale, aplati, obtus est adhérent à la chair par quelques points latéraux. »
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Tel est le fruit qui alimente à peu près exclu- sivement cette branche de commerce en Age- nais, trafic considérable car on l'évalue en moyenne à 5oo ooo ou 600 000 quintaux, valant de 18 à 20 millions ^ En i8i5 on estimait la production à i million et demi. C'est dire quel a été le progrès.
La plantation du prunier est faite à l'aide de rejetons pris au pied des arbres en plein rap- port; les jeunes plants sont tous greffés. A par- tir de six ans le prunier commence à produire, mais il n'est en pleine valeur que vers la dix-hui- tième ou la vingtième année. Alors chaque arbre donne en moyenne 6 kilogrammes de prunes, on en a vu livrer jusqu'à 5o kilogrammes à l'heureux pruniculteur. Pour établir la produc- tion moyenne de l'hectare, on a trouvé des règles qui fixent, au minimum, le nombre de quintaux au vingtième du nombre des arbres. D'après Le Prunier, de M. Bruguière, on obtient à l'hec- tare 864 kilogrammes valant 6x8 fr. 4o c, si l'on espace les arbres de huit en huit mètres; quand
I. La statistique de 1900, époque de faible rendement, donne 876677 quintaux métriques, valant 11 676 871 fr. A cela il con- viendrait d'ajouter plus de 100 000 quintaux produits par les départements limitrophes : Gironde, Tarn-et-Garonne et Dor- dogne.
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récartement est porté à dix mètres, le rende- ment n'est plus que de 36o fr.
La cueillette est entourée de soins minutieux. Si la prune tombe sur un sol trop dur elle se fen- dra et la qualité du pruneau sera bien amoindrie, aussi a-t-on soin d'ameublir la terre au moment de la maturité, ou de répandre une couche de paille sous chaque arbre. On attend que la prune tombe d'elle-même, l'arbre n'est secoué « comme un prunier » que dans les derniers jours, on ramasse tout d'un coup les fruits restants.
Les prunes sont déposées aussitôt sur des claies et exposées pendant deux jours au soleil, pour subir leflétrissage, qui les prive d'une par- tie de leur eau et leur permet de mieux résister au « saisissement » que leur procurera la mise au four ou à l'étuve. Pour activer ce flétrissage beaucoup de propriétaires mettent les claies au four le soir, afin de profiter de la chaleur qui reste dans l'appareil.
Vient alors la cuisson. C'est une opération délicate ; il ne faut pas moins de trois exposi- tions au four, à des températures de plus en plus élevées. Les deux premières ont pour but de faire évaporer l'eau. Le fruit subit d'abord une chaleur de 45 à 5o degrés, puis, après six heures de séjour, il est exposé à l'air; on se garde
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bien d'y toucher tant qu'il est chaud, cette faute compromettrait tout, la prune deviendrait gluti- neiise et resterait molle. Mais une fois le refroi- dissement opéré, on retourne les fruits. Alors a lieu la seconde cuisson, à 70 degrés au plus et, de nouveau, un refroidissement.
Voici la prune en état de subir les hautes températures : 80, 90, 100 degrés, un peu plus parfois. C'est maintenant qu'il faut veiller, éviter l'excès de chaleur ! Mais si l'on a bien opéré, on obtient le pruneau de choix, noir et brillant. « Ce degré de préparation est parfait, dit M. Bru- guière, lorsque le fruit présente une peau ferme et luisante, lorsqu'il laisse sentir sous la pression du doigt une chair tout à fait malléable et élas- tique, lorsque enfin l'amande enfermée dans le noyau est suffisamment cuite. »
Ce procédé, l'ancien, est encore en usage dans la plupart des exploitations rurales, mais pour éviter une partie de ces manipulations longues et coûteuses et épargner le combustible, on a imaginé des étuves où la chaleur est plus scien- tifiquement répartie, où l'on peut manipuler les claies et, par suite, réduire considérablement le prix de revient. Les années de grande abondance surtout, Tétuve rend d'énormes services, aussi son emploi est-il de plus en plus répandu.
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Il faut alors procéder au triage par grosseur, opération plutôt faite par les commerçants qui centralisent les fruits apportés sur les marchés ou dans les « foires aux prunes ». Le mouve- ment de ces réunions est colossal. A Villeneuve- sur-Lot on a vu jusqu'à 5oo ooo kilogrammes de pruneaux apportés. en un seul jour. Les autres marchés principaux sont : Sainte-Livrade, Gan- con, Castillonnès, Villeréal, Miramont, Eymet, Duras, Castelmoron-sur-Lot et Issigeac.
Dans ces villes, la prune qui avait déjà subi un choix chez le producteur pour atteindre un prix plus élevé, est encore manipulée, des ma- chines ingénieuses répartissent chaque grosseur. Jadis il y avait dix qualités, depuis \e fretin dont il fallait plus de 126 pour faire une livre, jusqu'à V impériale-jleiir dont l\o à 45 pesaient les 5oo grammes, en passant par une série de « rames », de choix et de surchoix. Aujourd'hui on se con- tente de neuf grosseurs désignées par un numéro : la plus petite, n° i, compte de 90 à 96 pruneaux à la livre, la plus grosse, n° 9, en a 38 à 4o.
Maintenant, comment arrive- t-on à donner aux prunes cet aplatissement artistique qui nous émerveille dans les caisses, incitant à la gour- mandise, chez les épiciers? Il y a un petit coup de main : on les fait passer entre deux cylindres
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de caoutchouc qui les aplatissent, on les dispose ensuite dans les caisses où une machine appelée paqueuse les presse et donne la forme absolu- ment plate à la rangée supérieure. Quand on n'a pas de paqueuse, on presse le couvercle sous les pieds. Enfin, pour les envois lointains, le procédé Appert permet de conserver longtemps les pru- neaux dans des récipients en métal hermétique- ment clos^
Ces opérations ont lieu en grand à Villeneuve- sur-Lot, ville maîtresse pour le commerce de la région, devenue de nos jours un des plus grands marchés agricoles de France, située à un coude du Lot et reliée à Sainte-Livrade par une route absolument droite et par le chemin de fer, non moins rigidement tracé. Il y a là dix kilomètres à travers une des plus somptueuses campagnes de France.
Non seulement marché agricole, mais aussi ville rurale, cette commune de près de i4ooo habitants ^ n'en compte que 7 000 dans ce qui
1. L'époque à laquelle j'ai visité l'Agenais n'était pas celle des prunes ; je me suis fait expliquer ces opérations et, surtout, ai suivi Le Prunier, intéressant volume de M. Bruguière (Paris, chez Masson).
2. Exactement 18594.
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fut l'enceinte et les faubourgs d'une des plus grandes bastides du Sud-Ouest. Le reste est dis- séminé sur un vaste territoire de 9 3i2 hectares, où la population vit par la culture du sol. Ville- neuve ressemble à Libourne% mais elle est plus animée, en cette saison du moins où le commerce des petits pois attire des centaines de paysans. Elle a aussi gardé son aspect du moyen âge. A en juger par l'exiguïté de la place centrale, les fondateurs ne comptaient pas faire naître une ville bien populeuse, mais la bastide eut au con- traire de belles destinées. Cette place est d'un caractère délicieusement archaïque par les « cou- verts » qui l'entourent. Des rues animées y abou- tissent, sur lesquelles s'ouvrent des ruelles étroites, semblables à celles d'Eymet^ avec leurs petites maisons construites en carcasses de pou- trelles ou de briques plates, mal cuites, que les vents ont rongées en y creusant de véritables sillons. L'irrégularité de ces constructions, les surplombs, les vignes qui tapissent les façades, tout cela donne à Villeneuve un cachet parti- culier que viennent accroître des portes de ville percées sous de hautes tours.
1. 29e série du Voyage en France, chapitre I^r.
2. Pages 25 et suivantes.
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Dans ces rues passe une foule active, de phy- sionomie avenante et fine ; les femmes ont une grâce et une souplesse remarquables. Même dans ce pays d'Agenais où l'élément féminin offre un type séduisant, la ville est réputée pour l'art avec lequel ses femmes arrangent le mouchoir qui leur sert de coiffure.
De larges boulevards plantés de platanes ont remplacé les remparts ; ils viennent aboutir au Lot en deux lignes à demi circulaires, envelop- pant chacune une des rives; la belle rivière par- tage la cité en deux quartiers inégaux, un pont très élevé la franchit sur une grande arche appuyée à des arcs plus étroits. Ce pont, les portes de ville, l'éghse, le monumental hospice Saint-Cyr donnent à Villeneuve un caractère pittoresque. Le Lot, avec son vaste moulin et ses hautes berges où des eaux calcaires ont modelé des draperies, est la partie principale du décor citadin.
Du haut du pont la vue est charmante, la ri- vière écume sur un barrage, une colline régu- lière forme fond de tableau, tapissée de cultures sur lesquelles tranchent les lignes des prune- raies.
Sur l'un des boulevards est la statue de Ber- nard-Palissy. Le grand artiste est né dans l'ar-
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rondissement, à la Gapelle-Biron. Devant l'hôtel de ville on a placé le buste d'Armand Daubasse, poète quercinois né à Moissac et mort à Ville- neuve, dont les poésies ont été recueillies. Ce brave « peignier » en cornes ne savait cependant ni lire ni écrire.
LES PETITS POIS DE VILLENEUVE
A travers Villeneuvc-sur-Lot . — Les peigniers en corne. — L'em- ballage des petits pois. — Au marché. — Les fabriques de con- serves. — La culture des pois. — Machines à écosser. — Les pruneaux. — Autour de Villeneuve.
Castelnaud. Mai.
Peignier en corne Ce métier d'Armand
Daubasse existe encore à Villeneuve. Le travail de la corne s'y est maintenu et a sans doute fait naître la production des boutons de nacre \ Les deux industries occupent une demi-douzaine d'ateliers, mais leur chiffre d'affaires est bien peu de chose auprès de celui représenté par le commerce des pruneaux et des primeurs, notam- ment des petits pois.
A l'heure où j'arrivai hier dans la ville, la
I. Je ne reviendrai pas ici siu* la fabrication du peigne. J'ai lon- guement parlé de cette industrie, à propos d'Oyonnax (Ain), dans la 8^ série du Voyage en France, et d'Ézy, Bois-le-Roi et Le Lhabit (Eure), dans la 6^ série. Je la signale encore à la Bastide-sur- l'Hers et Rivel (Ariège et Aude), 38^ série
LES PETITS POIS DE VILLENEUVE. l45
rue principale, sur la rive gauche, montrait beau- coup d'activité. Des femmes installées sur les trottoirs cousaient des sacs que l'on pesait près d'elles sur une bascule. Je m'étais approché et avais constaté que l'on emballait des petits pois. En me voyant intéressé par ce travail, une des ouvrières m'avait dit :
— Ça vous amuse de voir tant de petits pois; si vous étiez matinal, vous en verriez bien plus encore, quand on les apporte aux fabriques de conserves.
Gela me remit en mémoire le propos d'un ami occupant une grande situation dans l'adminis- tration des postes. Je lui faisais part de mon regret de ne pouvoir parcourir l'Agenais à la saison des prunes, et il me répondait :
— Des prunes ! moins curieux que les petits pois. Tous les ans nos bureaux de Bordeaux doivent envoyer des télégraphistes de renfort à Villeneuve-sur-Lot. Tenez, ils y sont encore, ils resteront tant qu^il y aura des pois nécessi- tant des dépêches avec les commissionnaires de Paris.
Au point du jour, ce matin, j'étais dans la longue avenue formée par la route de Monflan- quin, où sont les principales fabriques de con- serves. Dès 4 heures je voyais affluer les voi-
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tures, chars à bancs conduits par des chevaux rapides ou des ânes galopant avec entrain; ces véhicules, très légers, sont chargés de sacs, ils portent de loo à 3oo kilogrammes. De petits propriétaires ayant une faible récolte et de- meurant à proximité apportent leur sac sur une brouette. Chaque usine possède un grand hall dans lequel les pois sont amenés et pesés, d'autres bascules fonctionnent sur le trottoir. Lorsque la fabrique a reçu tout ce qu'elle peut traiter dans la journée, elle ferme ses portes, les retardataires vont alors rejoindre les autres pro- ducteurs au marché.
Celui-ci se tient sur le boulevard, entre la statue de Bernard Palissy et l'hospice. Sans cesse arrivent les voitures avec leur chargement. Les animaux sont dételés et emmenés à l'écurie. Vers 6 heures s'ouvre le marché. Les ache- teurs sont tous des commissionnaires pour Pa- ris et les grandes villes de l'intérieur ou les agents des principales maisons parisiennes. Les affaires se traitent vite, car il y a un cours éta- bli chaque jour, selon l'abondance de la récolte.
Aujourd'hui, me dit-on, il y a peu de mar- chands, un violent orage a éclaté la veille et empêché la cueillette ; aussi la foule, qui me semble grande pourtant, est-elle peu de chose
LES PETITS POIS DE VILLENEUVE. \[\']
auprès de celle des autres jours : alors, le bou- levard, jusqu'au Lot, est rempli de voitures.
J'ai voulu avoir des renseignements et tout naturellement stiis allé dans une usine, la plus considérable. J'avais eu jadis des rapports avec les chefs de la maison et je crus pouvoir m'en targuer. Cela ne me servit de rien, j'eus un ac- cueil plutôt froid, même bourru de la part du directeur. Je n'aurais pas supposé que le paci- fique petit pois pût rendre les gens aussi disgra- cieux !
Heureusement, il est d'autres usines à Ville- neuve ; quelqu'un à qui je contais ma déconvenue me conseilla d'aller voir M. LafTargue, président du tribunal de commerce, fabricant de conserves, commerçant en prune d'ente. J'eus vite oublié l'accueil discourtois que je venais d'éprouver. Non seulement M. LafTargue me montra ses ate- liers, mais il a bien voulu me documenter sur cette industrie nouvelle qui ramène la fortune dans l'Agenais.
Tout cela est récent : depuis vingt ou vingt- cinq ans seulement la culture des petits pois a pris de l'importance ; l'industrie des conserves est bien moins ancienne encore.
On a d'abord voulu utiliser les terrains d'où la vigne avait disparu, en faisant le pois de primeur,
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il s'est trouvé que le sol et le climat lui conve- naient à merveille. Les commissionnaires de Paris n'ont pas tardé à connaître le chemin de Villeneuve ; ils ont acheté avec tant d'entrain que toute la campagne s'est mise à planter des pois pour satisfaire aux demandes. Aujourd'hui, pendant la saison, chaque jour voit arriver 70000 à 80000 kilogrammes. En 1898, la gare de Villeneuve expédia jusqu'à cinquante wagons de pois par jour; ce chiffre a encore été dé- passé'.
Encore faudrait-il ajouter à la vente sur le marché les achats directs faits par les expédi- teurs ayant boutique et possédant leurs fournis- seurs attitrés. Ceux-là envoient directement les pois à leurs correspondants par toute la France. Comme la courte saison du petit pois ne saurait suffire pour couvrir leurs frais généraux et don- ner un bénéfice, ils ont demandé d'autres pro- duits aux paysans ; sous leur impulsion sont nées les cultures d'asperges, de tomates et de hari-
I. La Statistique agricole de la France pour igoi évalue à /jSiio quintaux métriques, valant looSiio fr., la production du Lot-et-Garonne en pois, le prix moyen étant de 21 fr. 90 c. On avait consacré 2 690 hectares à cette culture, le rendement moyen étant de 17 quintaux 86 à l'hectare. A ce point de vue, le départe- ment venait, pour la valeiu", après Se;ne-et-Oise (1389710 fr.) et le Nord (i3i475o fr.).
LES PETITS POIS DE VILLENEUVE. 1 49
cols verts, la plantation en grand des pêchers, celle des amandiers dont on cueille le fruit encore frais. Toutes ces cultures ont fait tache d'huile et s'étendent loin, même Monflanquin envoie des pois à Villeneuve. Sainte-Livrade est devenu un centre secondaire et a ses fabriques de con- serves. Clairac, trop loin de Villeneuve, possède un marché spécial chaque après-midi.
— Les affaires sont tellement actives que notre bureau de télégraphe reçoit du renfort de Bor- deaux, du i^^ mai au 6 juin, époque la plus fé- brile.
— C'est ce qtie l'on m'a dit à Bordeaux.
— Mais on ne vous a pas dit que ces employés reviendront en août, à Tépoque des haricots verts et des prunes ! 11 y a donc une recrudescence d'activité qui se prolonge longtemps.
Revenons aux petits pois. La gare de Ville- neuve n'en expédie pas moins de vingt-cinq wagons par jour à l'époque où les envois n'ont pas encore toute leur importance ; en pleine sai- son on atteint aujourd'hui soixante. La culture qui alimente le marché a lieu dans un rayon de 4o kilomètres, ou, encore, dans un carré de 5o à 60 kilomètres de côté. La ville est devenue en quelque sorte le régulateur des prix pour cette denrée, car toutes les usines à conserves de
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France sont solidaires pour les cours. Celte si- tuation s'affirme chaque jour davantage, le pois de Villeneuve passe pour plus sucré et meilleur que celui de l'Ouest. Peut-être a-t-on gâché les prix, on a été jusqu'à payer 22 tr. les 100 kilo- grammes. La moyenne pour les conserves oscille entre i4 à 20 fr.
Aussi le cultivateur connaît-il une ère de pros- périté qu'il ne pouvait espérer. Tel qui acheta un terrain de i 000 fr. y récolte de 3 000 à 4 000 fr. de pois par saison. Mais on a utilisé tous les moyens d'accroître le rendement, le sol est absolument jardiné, les engrais chimiques, superphosphates surtout, sont régulièrement employés. C'est ainsi que les revenus bruts de 2 000, 2 5oo, même 3 000 fr. par hectare ont pu être atteints.
La cueillette nécessite beaucoup de bras, une femme ne pouvant guère ramasser plus de 5o ki- logrammes par jour.
La fabrication des conserves ne commence à fonctionner que lorsque Paris, ayant les pois de sa banlieue, n'a plus à s'adresser au dehors. Les prix baissent alors et l'industrie peut être ali- mentée. Actuellement, Villeneuve possède sept usines ; elles emploient peu d'ouvrières, quatre
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cents personnes au plus. Mais cela lient aux ma- chines qui ont permis d'écosser avec une rapi- dité prodigieuse. Chez M. LafTargue, la machine à écosser que je vois fonctionner rend loooo ki- logrammes de pois par jour; pour obtenir un tel travail à la main, il faudrait bien des dou- zaines d'ouvrières.
Le reste de l'opération n'est pas moins sim- ple, c'est la conserve par le procédé Appert : le pois, mis en boîte que l'on soude, est soumis à l'ébullilion. La fabrication des boîtes de fer- blanc est une industrie importante. Une maison parisienne, qui a des ateliers dans toutes les villes où l'on produit des conserves, occupe cin- quante ouvriers dans sa succursale de Ville- neuve. La fabrication des caisses n'est pas moins active ; bois de peuplier du pays et bois de pin tiré des Landes sont mis en œuvre pour les emballages.
La même activité se présente au moment où les haricots verts peuvent être mis en boîte. Mais on n'a pas de machine, l'homme ingénieux qui enlèvera mécaniquement le fil de ce légume ne s'est pas révélé encore.
L'industrie française des conserves a sur ses concurrentes de l'étranger l'avantage du climat, qui permet de livrer de bonne heure, mais nos
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L'AGENAiS
(Département de Lot-et-Garonne)
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rivaux s'outillent. En Belgique, une maison de Malines possède dix machines à écosser.
La prune reste cependant la base du commerce (le Villeneuve-sur-Lot, centre le plus considé- rable d'achats, de préparation et d'expédition. Elle y entretient toute une série d'industries annexes et de commerces : caisses, tonneaux, papier, boîtes de fer-blanc, bocaux. On aura une idée de l'activité de Villeneuve par le chiffre des expéditions : elles atteignent, pour le chemin de fer seulement, dix wagons par jour pendant trois mois. Le Lot participe pour une grande part aux transports, par cette voie les caisses de prunes sont dirigées sur Bordeaux, port d'embarque- ment de ces produits. L'époque de grande acti- vité va du i5 septembre au mois d'avril, elle atteint son maximum en octobre et novembre.
Cette production, qui répand les millions dans une partie de l'Agenais en somme peu étendue, est menacée par les ravages des chenilles et con- currencée par l'étranger. Les principaux pays pro- ducteurs sont, en Europe, la Bosnie et la Serbie, en Amérique la Californie. La réputation de la prune d'Agen est telle que les concurrents s'abri- tent derrière ce nom pour écouler leurs produits. Les Américains vendent les leurs comme prunes
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françaises, les Serbes, plus audacieux, les livrent comme prunes d'Acjen, ils en envoient sous ce nom en France même ^ Jusqu'à présent le danger n'est pas grand, mais il peut le devenir. La Ser- bie expédierait chaque année 226 millions de ki- logrammes, d'après un journal d'agriculture, mais les chiffres officiels de 1887 donnent pour la Serbie 4i 296 700 kilogrammes ; la Bosnie expor- terait 4o millions. Leurs prunes, de plus en plus soignées, arrivent à lutter avec les nôtres, qui gardent cependant encore la supériorité de goût. Ces deux pays ont l'avantage de posséder à leurs portes, par le Danube, les immenses marchés d'Autriche-Hongrie, d'Allemagne et de Russie. La concurrence de l'Amérique n'est pas moins menaçante, elle est plus scientifique surtout: les Américains sont venus chez nous chercher nos arbres, copier nos emballages, nos machines à trier et emballer, ils vendent meilleur marché.
Plus grand pour la France est le danger des chenilles. J'ai dit comment les plantations ont été
I. En 1901, la France a importé 499099 kilogrammes de pru- naux valant 299417 fr. Sur ce chiffre l'Autriche-Honçirie, dont les ports et les douanes terrestres servent à la Serbie, figure pour 394602 kilogrammes et les États-Unis pour 67180 kilogrammes. Cette importation est peu de chose auprès de nos exportations qui ont atteint g 565 84o kilogrammes et une valeur de 7652672 fr.
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atteintes cette année ^ (1902); l'an prochain en- core la récolte sera compromise. Ôr, ce fléau revient tous les dix ans et ses effets se font sen- tir pendant quatre années ! On est enfin en pos- session d'un remède dû au très habile professeur d'agriculture, M. de l'Ecluse ; c'est un mélange de nicotine, d'alcool dénaturé et de carbonate de soude. Le prix du traitement ne dépasse pas par prunier sept centimes. On vaporise le li- quide sur l'arbre dans les premiers jours de mai; les feuilles ne sont plus mangeables et la chenille qui vient d'éclore meurt d'inanition. Ce remède, radical contre la chenille fileuse, doit l'être aussi contre la chenille verte : s'il est appliqué par tous on peut arriver à détruire complètement cette malfaisante engeance qui fait perdre vingt millions par an au Lot-et-Ga- ronne pendant la durée de l'invasion. Le prix de l'application, déjà faible, est encore abaissé de 5o p. 100 : l'on remplace la nicotine par l'aloès.
Villeneuve-sur-Lot est le centre du mouvement contre ce fléau ; en effet, la ville, par son genre d'affaires, doit chercher à empêcher les éclosions
1. Voyez pages 21 et suiAanles
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de chenilles. Chaque retour de ces bestioles cause à son commerce des pertes énormes. Ce trafic est considérable, les recettes de la gare de Villeneuve-sur-Lot se sont élevées en igoi à 565 000 fr., bien qu'aucun embranchement ne se détache de la ligne. Le Lot prend part au mouvement dans une proportion assez considé- rable. Une compagnie locale fait un service sur Bordeaux avec une flotte de cinq bateaux, dont un à vapeur.
L'activité économique explique l'animation de Villeneuve. Une course dans ses campagnes fait mieux comprendre encore la prospérité de cette jolie ville qui a su garder l'aspect du passé, tout en se transformant, autour de la cité primitive, au point d'avoir Tallure d'un grand centre. Lors- qu'on va par ces champs sur la colline escarpée où se dresse le petit village de Pujols, fier encore dans l'enceinte de murailles d'une cité désertée, on a un des plus beaux spectacles de richesse rurale que puisse offrir notre pays. En ce mo- ment c'est superbe, toute la plaine et les pentes d'harmonieuses collines montrent les vergers de pruniers et d'amandiers montant jusqu'aux crêtes encore couvertes d'un manteau de bois. Les pois commencent à jaunir, mais la verdure tendre des haricots naissants dessine des da-
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miers. Là-bas, vers Penne, le paysage s'embellit encore; des collines bien taillées ont des allures de camp romain, aucun pays ne devait mieux solliciter les fondateurs de forteresses.
Cette richesse se montre partout. L'ancienne abbaye d'Eysses, devenue maison centrale et en- tourée d'une haute muraille, est enveloppée de belles cultures. Un pan de donjon est tout ce qui reste de la maison primitive.
La route de Monflanquin passe devant la pri- son et traverse longtemps le territoire de Ville- neuve, au milieu des pruneraies, des luzernes, des petits pois et des céréales. Les maisons ru- rales, très nombreuses, sont entourées d'un jar- din planté de figuiers, de lauriers et de pêchers. On commence à arracher les petits pois en cette fin de mai ; le sol ne reposera plus, aussitôt retourné à la bêche il sera replanté en haricots.
Le pays s'élève peu à peu, bientôt la vue est très étendue sur la vallée du Lot, profonde, en- cadrée de collines admirablement verdoyantes, couvertes de vergers réguliers de pruniers. A un tournant de la route, la vue devient immense sur un pays plat en apparence mais creusé de vallons. Au premier plan, la butte colossale qui porte Monflanquin semble commander à toute la contrée. Au fond sont deux monticules, l'un
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butte déserte, l'autre portant les constructions superbes de Biron, berceau de la famille ducale de ce nom.
Au pied d'une côte la flèche de pierre de Sainte-Radegonde, aiguille blanche, semble sur- gir de la verdure. Sainte-Radegonde n'est point un village, mais une paroisse groupant la multi- tude de maisons isolées appartenant à la vaste commune de Villeneuve-sur-Lot. Plus loin, sur une colline, apparaît Castelnaud, village d'une éclatante blancheur.
XI
LE HAUT AGENAIS
Au bord de la Lède. — La culture des fèves — Monflanquin. — ViUeréal. — Les campagnes du haut Agenais. — Monsempron et Libos. — Fumel et ses forges. — Les carrières de i'Alle- mance.
Fumel. Juii
La région de FAgenais, dans laquelle on pé- nètre après avoir traversé la petite rivière de Lède, n'offre pas des collines aussi nettement découpées que la vallée inférieure du Lot, mais le massif n'en est pas moins très élevé, s'il est plus confus. Une infinité de vallons le partagent et le plissent. Les villages et les bourgs sont bâtis sur les points culminants et conservent Tuie allure guerrière et fière qui ne laisserait pas supposer leur faible population. Ce sont pour la plupart d'anciennes bastides. Castelnaud-de- (irattecombe couvre une croupe où l'on extrait de la pierre meulière. Un autre village, Saint- Pastour, qui possède une belle église, est plus fièrement campé encore. Le bourg le plus popn-
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leux, Gancoii, est lui-même situé au point culmi- nant d'un massif strié d'une multitude de ravins et de combes qui deviendront des affluents du Lot, du Drot et de la Lède.
Cette dernière rivière est un faible cours d'eau, mais elle constitue par la longueur de sa vallée une région bien à part, dont la ville de Monflan- quin est le cœur. Elle semble immobile tant sont lentes ses eaux glauques sous le coteau de la Sauvetat. Le versant sud est raide, en partie boisé, l'autre est un verger de pruniers. Beau- coup de petits pois dans les champs, mais plus encore de fèves. Ces légumineuses sont la base de la nourriture en cette saison; il n'est guère de repas sans soupe aux fèves, même dans les meil- leurs hôtels des villes ; assaisonnée avec la graisse d'oie et de canard, c'est la garbure de Gascogne.
Si les villages, ou plutôt les centres commu- naux, sont peu nombreux, les hameaux de quel- ques maisons parsèment les collines, beaucoup ont des églises, petites et simples comme celle très ancienne de Gorconat dont le pignon trian- gulaire apparaît sur un éperon de roche calcaire appartenant à la formation géologique du Péri- gord voisin. Des abords de l'humble temple, on découvre un vaste plateau couvert de pruniers,
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sur lequel se dressent des coteaux isolés en forme de dômes ou de tables. D'ici le paysage de Monflanquin se précise, le mamelon couvert de toits rouges n'est pas sans grandeur, mais il manque au sommet la tour féodale ou la flèche d'église qui ferait un beau site. Sur les rives de la Lède, la campagne est encore d'une grande richesse. Le prunier n'est plus Farbre dominant, des haies de grands chênes enclosent les champs et les prés. Beaucoup de belles maisons bour- geoises, quelques châteaux sur le flanc des col- lines ; le fond, sous le coteau qui porte Calvi- niac, est une fraîche solitude.
La route traverse la riviérette et s'élève par des pentes douces au sein des pruneraies rede- venues nombreuses; en joualles sont des vignes, d'étroites bandes de blé et de maïs. Jusqu'à Lacaussade c'est comme une forêt de pruniers, à peine trouée par quelques toits de métairies. Les horizons grandissent à mesure que l'on s'élève, mais les campagnes restent solitaires : peu de hameaux; à peine, très loin, quelques groupes de maisons laissant deviner un village. Seul Gancon apparaît, sur sa petite montagne. Monflanquin est bien la dominatrice de ce pays.
Voici l'antique bastide, de belle mine vrai- ment, ainsi juchée sur des murailles qui furent
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sans doute des remparts et dont les parois abritent des jardins plantés de grenadiers et de figuiers ; ces arbres s'accrochent aux pierres et forment une tapisserie belle de forme, de des- sins et de teintes. A l'entrée de ces jardins s'étend un mail. Un des arbres a cette inscrip- tion : Défense de peser la prune sur la rouie.
Les jours de marché, l'abondance des fruits est telle que vendeurs et acheteurs, débordant de la promenade, envahissaient la chaussée et empêchaient la circulation des voitures.
Les hôtels et les auberges principales sont ici, sur la grande route longeant la base de l'en- ceinte, car la ville est peu accessible, sa pi-inci- palevoie est montueuse et les petites rues trans- versales sont trop étroites. Le site choisi par Alphonse de Poitiers, pour sa ville neuve, milieu du xm^ siècle, était excellent pour une forte- resse, mais il se prête assez mal aux exigences de la vie moderne, c'est pourquoi celle-ci se porte aux abords. Aussi la cité a-t-elle gardé sa physio- nomie, elle possède encore sa place à galeries de formes variées : plein cintre, ogive, charpente sur colonnes. A l'un des angles un pavillon est supporté par une voûte gothique dont les ner- vures s'unissent par une clé de voûte sculptée.
L'église a plutôt l'air d'une fortification, on
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n'en devine le caractère religieux que par le portail, sobre mais beau, grâce à son faisceau de colonnetles. Une tour carrée qui ne dépasse pas les combles de la nef flanque Fédifice. A l'intérieur, de minces colonnes s'élancent en gerbes de nervures donnant beaucoup d'élé- gance à la voûte de briques.
Cette église est au point culminant de la col- line, sur une plate-forme où l'on a également construit l'école et d'où se découvrent des vues immenses sur un paysage d'une grandeur pleine de majesté, s'il est simple de lignes. Au fond, le château de Biron, groupant ses tours et ses rem- parts massifs sur sa butte, est comme un édifice de rêve, un Mont Saint-Michel terrestre émer- geant des plateaux boisés du Périgord.
Du côté du nord, où le souffle des vents âpres a empêché les habitants de se porter, la butte de Monflanquin a gardé son aspect primitif. Des pruniers revêtent la pente raide, sous le boule- vard ou plutôt la terrasse circulaire qui a rem- placé les remparts plantés d'ormes centenaires. La vallée de la Lède apparaît toute moirée de moissons ondulantes dans lesquelles s'alignent les pruniers; vus de si haut, comme d'un à-pic, on dirait des arbres sortis de la main d'un tour- neur de la Forêt Noire.
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Le coteau est un rocher calcaire facile à cou- per; aussi le chemin de ronde fut-il entaillé dans la pierre. Il offre sans cesse de nouvelles vues. Du côté de Cancon, la campagne est parsemée de belles demeures d'autrefois ou de villas mo- dernes. Tous les coteaux sont d'un vert doux relevé par des rangées de pruniers dont les quinconces s'étendent à l'infini. Vers le sud et le sud-est se prolongent encore les campagnes mouchetées de petits arbres; au fond, des col- lines plus hautes doivent beaucoup de majesté à leurs formes nettes et à leur isolement.
Dans la ville, où je pénètre de nouveau, il y a encore des maisons à ressaut, donnant l'idée de ce que dut être la bastide à son origine ; deux ou trois tronçons de rues voûtées complètent l'illusion.
Depuis un instant le ciel s'est obscurci, un vent violent accourt, chasse les nuées, siffle dans les arbres de la terrasse, le panorama soudain s'efface. Par ce triste temps remplaçant la lu- mière éclatante de tout à l'heure il me faut gagner Villeréal. J'avais retenu ma place en diligence sur le siège à côté du cocher, mais devant cette bourrasque je dois m'enfermer dans la voiture.
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les vitres sont violemment secouées par la tem- pête et cinglées par la pluie. Combien m'a paru longue cette course sur un plateau ondulé, où je devinais à peine la silhouette des pruniers inflexiblement alignés dans les champs !
A Villeréal, les petites rues sont changées en lorrents. J'erre avec mélancolie par ces voies cou- pées au cordeau ; la place centrale avec ses ar- cades offre un abri. Que de générations ont passé sous ces voûtes, depuis le lointain xni^ siècle qui vit naître Villeréal — ville royale !
C'est une des plus régulières parmi les bas- tides de l'Agenais ; dans son enceinte presque circulaire, elle ne s'est pas modifiée depuis ses origines ; l'église naquit avec la cité elle-même.
Toujours la pluie, faisant abandonner mon projet de gagner Castillonnès, autre bastide de plus fière allure, car elle commande la vallée du Drot du haut de sa colline.
Jusqu'à Monflanquin, et fort au delà sur la route de Fumel, encore la bourrasque. Cepen- dant l'averse est moins dense, on peut distinguer une campagne bien cultivée où la roche perce sur nombre de points. La pierre exploitée en car- rière a permis de donner aux constructions une beauté robuste qui s'harmonise avec les lignes
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du paysage. Les centres de population sont de minces hameaux, malgré leur rang de com- munes. Les habitations isolées sont nombreuses; chacune a son figuier, cet arbre semble le génie domestique du foyer; le jardinet est clos de haies de lauriers-tins et de rosiers du Bengale.
Cela est charmant, d'autant plus que le ciel, jusqu'alors maussade, s'éclaire enfin, voici une trouée dans les nuages, un pan bleu de firma- ment et, soudain, le rideau sombre se déchire, le grand soleil apparaît. Je n'ai fait qu'un bond pour aller retrouver le cocher sur son siège. La voiture court en ce moment entre les pruniers, très vigoureux, formant coi^me un verger inin- terrompu divisé par des joualles et de petits champs de blé.
En regardant la carte, je suis surpris de tou- jours monter et je croyais suivre la vallée de la Lède. On m'avait dit pourtant que la voi- ture passait par Montagnac et Salles, d'où je pourrais gagner en peu de temps La Gapelle- Biron et Biron, tout en visitant les gorges de Gavaudun. Le cocher devine la cause de ma surprise :
— Ah ! vous vouliez peut-être aller à Gavau- dun ! Un curieux pays où l'on vient beaucoup : de Villeneuve, d'Agen, de Montauban. G'est
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qu'il y en a des rochers, des gorges, des ca- vernes, et un château en ruines ! Maintenant je n'y passe qu'un jour sur deux. Les gens de La- caussade ont voulu avoir leur part de la voiture, on a divisé la poire avec Montagnac !
— Alors nous allons à Lacaussade ?
— Oui, si vous voulez ensuite gagner Gavau- dun, ça vous allonge de plus de deux lieues et vous ne serez pas à La Gapelle-Biron avant la nuit, à Biron avant demain.
Je m'étais bien promis cependant de voir La Gapelle où naquit Bernard Palissy et Biron qui conserve si fi ère tournure féodale. Hélas ! c'est près d'un jour perdu et j'ai rendez-vous à Agen demain matin.
Il faut faire contre fortune bon cœur. Allons donc par Lacaussade. Voici le bois de ce nom, belle chênaie croissant sur le rocher et envelop- pant le château, puis le village, tout menu, avec son église très humble, n'ayant qu'une cloche à son pignon. Maintenant s'étendent des champs de céréales coupés de pruniers et entremêlés de petits carrés de gesse, de vignes en joualles^ de fèves. Le sol est de peu d'épaisseur, la roche perce souvent, on se croirait sur un causse. De là, sans doute, vient ce nom de Lacaussade? Des petits bois de chênes apparaissent, où déjà l'on
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récolte des truffes, si abondantes dans le Péri- gprd tout proche.
Une colline rappelant par sa forme la mon- tagne de Laon surgit au-dessus du plateau. Un moulin à vent la couronne, mais aucune autre construction ne s'y montre; pourtant un village, Monségur, s'abrite sur l'autre versant. Les pentes étaient jadis couvertes de vignes, le phylloxéra les a détruites, un gazon ras et des genévriers se sont emparés du terrain. L'aspect est misé- rable, les pruniers eux-mêmes paraissent rabou- gris. Les maisons isolées sont petites, sans dé- pendances, car, le bétail étant rare, il n'est pas besoin d'étables. Gela contraste avec la pureté des lignes du paysage ; l'hémicycle décrit par la colline a de l'allure. Dans les parties où la terre est plus épaisse il y a pourtant quelques belles fermes.
Le chemin atteint une sorte de col d'où l'on jouit d'une vue superbe sur ce confm de trois provinces : Périgord, Agenais et Quercy; on do- mine de haut la vallée du Lot, bordée par une rangée de collines de forme trapézoïdale. Le ha- meau de Monségur, maintenant visible, con- temple ces admirables horizons. Il est blotti au pied d'une petite falaise de roches blanches portant les ruines d'un château. Au fond du
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paysacje montent les fnmées noires des forges de Funiel.
La roule descend. Sur ce versant abrité des vents du nord, la végétation a changé. Le gené- vrier est remplacé par un arbuste à feuilles lui- santes, aux jeunes pousses d'un vert tendre, aux élégantes grappes de baies rouges. C'est le sumac, si commun dans tout le bas Ouercy et l'Albigeois, bien que l'emploi de cette plante in- digène par les corroyeurs ait beaucoup diminué depuis que l'on tire le sumac des bords de la Méditerranée, de Sicile surtout. Il forme des touffes buissonnantes sur ces terroirs calcaires où la terre arable est de faible épaisseur. C'est le seul végétal de taille un peu élevée, autour du village de Condezaygues. Certains mamelons sont absolument nus, mais les plis sont frais, des vignes et des pruniers enveloppent le vil- lage : une poignée de maisons. A mesure que l'on descend, la richesse renaît, la végétation est belle en cette terre rouge. Sur un ressaut voici Monsempron, petit groupe d'habitations de coquette allure, une d'elles flanquée d'une tou- relle. L'église romane est un bel édifice, inté- ressant dans beaucoup de ses parties.
Monsempron a donné son nom à la gare de jonction établie au confluent de l'AUemance et
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du Lot, en y ajoutant celui de son hameau, Libos. C'est bien long à dire, Monsempron-Libos, et l'usage a prévalu de dire Libos tout court ; d'ailleurs le hameau seul a profité de cette excel- lente situation ; le chemin de fer le fait accroître et Monsempron reste dédaigné sur sa colline. Peut-être eût-il mieux valu donner à la station d'embranchement le nom de la ville voisine, Fumel, située à 2 000 mètres de là et consti- tuant, grâce à ses forges, un petit groupe fort vivant.
Un charmant chemin privé, gracieusement ouvert au public, va de la gare de Libos à Fu- mel en évitant la traversée du village. Il des- cend dans le vallon très vert où l'Allemance grossie par la pluie violente de la nuit et du matin roule des eaux rougies par le sol ocreux et ferrugineux qu'elle a traversé. Toute cette vallée est un gisement de fer, et le pays avoisi- nant aussi. La Capelle-Biron, Gavaudun et Salles dans la vallée de la Lède, Blanquefort dans un vallon aboutissant à l'Allemance, Saint-Front et Cuzorn au bord de cette dernière rivière, puis Fumel possèdent des minières. L'exploitation est morcelée; chacune de ces carrières de fer à ciel ouvert occupe un nombre restreint d'où-
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vriers; il y a 66 minières et elles ont occupé seulement 162 hommes en 1901. Encore le tra- vail a-t-il été temporaire et intermittent'. En gare de Cuzorn, où Ton vient charger le minerai sur wagons, celui-ci vaut environ 5 fr. la tonne. Les propriétaires eux-mêmes ou des tâcherons extraient ce minerai au moyen de tranchées plus ou moins profondes, « très irrégulières dit Tin- génieur des mines dans son rapport au conseil général ; le minerai forme des lentilles verti- cales le plus souvent peu étendues, dans une argile presque toujours compacte. Ces lentilles, en général d'un volume restreint, ne sont guère exploitées que sur leurs affleurements, et les travaux sont arrêtés dès qu'ils atteignent une faible profondeur, de sorte que les exploitations se déplacent fréquemment. )>
On est arrivé aujourd'hui à travailler d'une façon moins barbare, le développement de la production ayant amené à conduire les re- cherches dans des conditions rationnelles.
Ce n'est pas la seule richesse minérale de cette vallée de FAllemance, elle fournit encore à Fumel la castine nécessaire aux hauts four-
I. La production s'accroît cependant grâce au voisinage des usines de Fumel. Elle a atteint 46606 tonnes en 1901, et n'était que de 89881 en igoo.
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neaux, on l'extrait à côté même des usines ! Dans le haut du vallon, Sauveterre a de belles carrières de calcaire transformé en chaux hy- draulique et ciment dans plusieurs usines ; le même village possède des carrières de sable pour moulage et une usine de produits chimiques. Fumel fabrique aussi des chaux et des ciments ^
L'AUemance est donc une rivière active. Avant d'atteindre le Lot, ses eaux rouges font mouvoir la roue moussue d'un moulin enveloppé dans une exubérante végétation. Le chemin ac- cède ensuite au fond du val, d'où Monsempron apparaît dans toute sa beauté, la haute abside ogivale de l'église, la tour carrée, très élevée, cou- verte d'un toit bas, forment un charmant décor.
Au pied d'un coteau, au bord du Lot, sont les usines de Fumel, précédant la ville. Hauts four- neaux et cheminées fumantes sont une note bien inattendue dans ce paysage tranquille, en une contrée d'où la métallurgie, si active jadis, a dis- paru. Fumel non seulement n'a pas périclité, mais il prospère chaque jour. L'usine avait été créée par la Compagnie des chemins de 1er d'Or-
I. Production des carrières en igoi : 24187 mètres cubes de castine; 7887 mètres cubes de calcaire pour chaux, hydraulique; 6008 mètres cubes de calcaire à ciment; 120 mètres cubes de terre pour ocres.
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léans qui l'a rétrocédée à une compagnie en 1874, comme elle rétrocéda Decazeville. En 1897 ^^^^ produisait seulement 19089 tonnes de fonte en première fusion, d'année en année la quantité a doublé; en 1901 on obtint 3o444 tonnes de fonte en première fusion et 9646 de fonte moulée en deuxième fusion. Les hauts fourneaux avaient employé 4^ 270 tonnes de minerai de l'Allemance sur une quantité totale de 46 606. La production augmente encore, car ce petit centre ne se ressent nullement de la crise métallurgique. L'établisse- ment a pour objet la fabrication des coussinets, plaques tournantes pour chemins de fer et tram- ways, des tuyaux et grosses pièces de fonderie.
Fumel est bien placé d'ailleurs, non seule- ment le minerai et la castine sont à proximité mais le Lot est navigable jusqu'à l'entrée du bassin houiller de Decazeville et un chemin de fer le relie aux charbonnages par Cahors et Gap- denac.
L'usine borde la rivière, la ville est plus loin, sur une colline que surmonte l'église gothique non encore achevée ; la tour attend son cou- ronnement et sa flèche, les hautes fenêtres ogi- vales, d'un bel élancement, sont masquées par des briques.
Le vieux bourg est à l'écart, sur la pente, re-
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<jardant la rivière. Les rues y sont étroites, bor- dées de maisons de poutrelles en encorbelle- ment. Ce sont de tristes logis aux murs lépreux, que masque mal un espalier de vignes, le sol est de terre battue; la ville moderne est formée par la grande route bordée de belles maisons, de cafés et d'hôtels. Fumel eut un rang important dans la province et, de bonne heure, fut dotée d'une charte ; ses coutumes étaient souvent citées dans la jurisprudence.
La commune de Fumel a acquis une des plus belles et puissantes ruines féodales de France : le château de Bonaguil, d'une allure massive ; il passe pour la première forteresse construite en vue de résister à l'artillerie. Bonaguil est trop loin pour que je puisse le visiter ce soir : deux lieues.
La nuit vient, le soleil est déjà masqué par les collines. D'une terrasse avoisinant l'église, le paysage est d'une beauté captivante. On domine la large et profonde vallée ; au milieu erre le Lot, entre les berges rocheuses qu'il érode. Le barrage écluse établi devant l'usine fait refluer les eaux. Un pont suspendu d'une seule travée tend son tablier léger sur la nappe tranquille. Au delà, une route blanche s'en va à travers la plaine complantée de pruniers.
XII
AGEN ET SES CAMPAGNES
Les vieilles forteresses. — Tournon-d'Agenais et Penne-d'Age- nais. — Le vallon de la Marse. — • Agen. — Le poète Jas- min. — Le commerce d'Agen. — Richesses agricoles. — Au long de la Garonne. — Port-Saint-Marie. — Aiguillon. — Nicole et ses abricotiers.
Nicole. Juin.
Si l'Agenais est un pays de collines modestes par l'altitude, bien des contrées où les accidents du sol sont déjà des monts peuvent envier la fière allure de ces coteaux, leurs pentes raides, leurs cimes nettement découpées, les tables ré- gulières qu'elles forment et d'où l'on découvre des horizons si merveilleux par leur profondeur, leur transparence et leur splendeur rustique. L'homme a accru cette beauté en campant ses bourgades sur les sommets, bastides féodales qui semblent encore appeler au combat les croisés de Montfort, les conquérants anglais ou la che- valerie de la France du Nord, travaillant à son insu à l'unité de la patrie.
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Et cependant quels pauvres bourgs on trouve en atteignant ces altières silhouettes de cités ! Tournon-d'Agenais groupe à peine 35o habitants sur sa colline surgissant au-dessus du val étroit où colile le Boudouyssou et semble plus citadine que bien des villes populeuses, lorsqu'on l'aper- çoit des campagnes lointaines. Et Penne, hardie et glorieuse? étagée à la pointe d'une longue et étroite crête dominant de 170 mètres le Lot qui, brusquement, tourne vers Villeneuve pour aller gagner la Garonne, elle est superbe la lillipu- tienne bourgade; pourtant il lui reste peu de chose du château que les armées se disputèrent pendant quatre cents ans. Le territoire est très étendu, 4 670 hectares ; ses hameaux sont par- fois plus populeux que des communes, ainsi Port-de-Penne assis au pied du coteau, sur le bord de la rivière et qui fut pour la forteresse une tête de pont non moins bien défendue. De la ville aujourd'hui si chétive, après avoir été puis- sante, on découvre un panorama immense sur la vallée du Lot et les campagnes lointaines du Quercy. La colline est tapissée de pruniers et de vignes, partout on voit des vergers. Au prin- temps, quand tous ces arbres fleuris semblent couvrir l'Agenais de leur neige, le spectacle est inoubliable.
VOYAGE EX FRANCE. — XXXI. 12
l'jS VOYAGE EN FRANCE.
Ce matin, j'ai demandé à déjeuner dans une auberge au pied de la ville : il n'y avait qu'une soupe aux fèves. On m'en a servi une énorme terrine. Cela était parfumé et onctueux; ce potage cuit avec des abatis d'oie en confit expli- quait la faveur dont la garbure jouit dans tout If Midi. J'avais pour compagnons de table des ouvriers terrassiers ; quand ils ont eu fini, ils ont versé dans l'assiette un grand verre de vin et ont bu à même avec un air de satisfaction béate. Je me suis borné à tremper les lèvres dans le verre ; la mine de ces braves gens m'a révélé que je commettais une infraction au code de ci- vilité. Pendant ce temps l'hôte déjeunait d'une goiissée^, c'est-à-dire d'un morceau de pain frotté d'ail. Pour ce solide lest du matin on m'a de- mandé quatre sous.
De Port-de-Penne à Agen, c'est une succes- sion d'heureux tableaux; les maisons isolées ta- pissent le flanc des collines et le fond du val. Une multitude de plis sillonnent les pentes, s'ouvrant parfois assez pour montrer quelque hameau assis au pied de ces tables régulières ou petits plateaux qui semblent les vestiges d'une plaine érodée par les eaux. Ainsi se blottit Aura- dou dont pointe l'humble flèche ; ainsi Haute-
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fage, grand site, grâce à sa puissante tour flan- quée d'une tourelle, et arc-boutée de puissants contreforts, gracieuse par les détails fleuris de la Renaissance. Ce débris d'un château des évêques d'Agen est aujourd'hui le clocher de l'humble église. De ce donjon on domine la conque très verte d'un vallon creusé dans le coteau capri- cieusement entaillé dont la table est un puissant promontoire .projeté par le plateau de Laroque- Timbaut.
Le chemin suit cette étroite arête pour gagner Laroque. Sans cesse on a vue sur ce pays extra- ordinairement découpé et vallonné, où les cata- clysmes géologiques ont multiplié les ravins, tandis que les parties non é vidées forment en perspective une plaine d'une horizontalité pres- que absolue. Sur une des parties intactes les plus vastes, Laroque-Timbaut commande l'ou- verture de deux combes. Le petit bourg fut aussi une forteresse, il eut un rôle militaire. De vagues linéaments de murailles rappellent ce passé. Par- tout, on trouve d'anciennes cités fortes. Quand, parvenu à l'extrémité orientale du plateau de Laroque, on voit se creuser la vallée de la Petite Séoune, un autre village, Beauville, se montre à la pointe d'un coteau, belliqueux d'allure par ses débris de murailles. Ce fut encore une
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bastide, dont le plan est trop vaste pour la population actuelle de ce mince chef-lieu de canton.
Toutes les pentes vont désormais à la Garonne ; routes et chemins de fer se dirigent vers la vieille cité d'Agen. On atteint la ville en suivant les vallons étroits où coulent de claires eaux; l'un d'eux, qui suit la voie ferrée, va s'ouvrir sur la plaine de la Garonne, à Agen même, entre les collines raides aux pentes entaillées par des combes, et finissant à pic au-dessus de la capi- tale de la contrée.
Agen occupe un beau site, au bord de la Ga- ronne ; le fleuve vient frôler le pied de ces hau- teurs allongées en nombreux vallons découpés dans le plateau avec une régularité plus frap- pante encore que sur les bords du Lot. Ces pa- rois géométriques portèrent la cité primitive qui, dès les premiers temps historiques, descendit vers le rivage. La plus rapprochée de la ville, le co- teau de l'Ermitage, offre une vue curieuse sur cette masse de toits de tuiles d'un rouge éteint, trouée par quelques artères neuves ou des ave- nues plantées d'arbres. La Garonne, franchie par le canal latéral sur un pont-aqueduc superbe, les voies ferrées, les grandes routes qui s'élan-
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cent à travers la merveilleuse plaine, composent un tableau captivant.
L'intérieur de la ville ne répond pas à cet as- pect. En dépit des percées modernes, c'est un dédale de petites rues étroites pavées de cailloux aigus, aux maisons sans caractère. Aux abords
mêmes de la gare, on entre dans les quartiers anciens, auxquels la vénérable cathédrale Saint- Caprais, dont Tabside romane est de lignes si pures, enlève de leur vulgarité. Devant l'église se tient en plein vent un marché de primeurs. Les rues environnantes ont beaucoup de maga- sins ; quelques-uns se livrent exclusivement au
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commerce des pruneaux. Si Agen n'est pas pour ce produit un centre comparable à Villeneuve et à Sainte-Livrade, il n'en a pas moins imposé son nom à la « prune d'Agen ». Aussi a-t-on créé l'expédition des pruneaux en caisses. Aux villes de production le commerce en gros, à Agen l'en- voi au dehors par colis postaux.
Quelques maisons à arcades donnent un peu de pittoresque au large boyau appelé place du marché ; sous ces galeries sont des boutiques et des magasins fort achalandés encore, malgré la concurrence des installations plus modernes et luxueuses du boulevard de la République, artère neuve aux constructions de pierre blanche qui coupe la ville perpendiculairement à la Garonne. Un autre boulevard, récemment ouvert dans l'axe de la gare, achève de transformer Agen en appor- tant l'air et la lumière dans ces ruelles irré- gulières. Déjà un quartier plus riant avait été fondé près de la Garonne, aux abords d'une promenade fameuse dans le Midi, le Gravier^ mail de grands arbres et de petits parterres sur lequel se tient une foire attirant la foule de toute la région. Le boulevard de la République abou- tit à l'entrée de ces allées touffues, sur un carre- four orné de la statue de Jasmin. Le poète age- nais que l'on s'attendrait à trouver en costume
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de coifïeur, se montre sous les espèces d'un monsieur très bien ; il a l'habit à la française avec la croix de la Légion d'honneur et des favoris de magistrat. C'est le Jasmin des der- nières années, quand la célébrité fut devenue éclatante grâce à Charles Nodier, à Lamartine et à Sainte-Beuve. L'inscription française dit:
AU GRAND POÈTE JASMIN
L'épithète n'est pas excessive; cet enfant du peuple sut retrouver la source pure de l'éternelle poésie. On a bien fait cependant de lui donner son effigie de bonne heure, aujourd'hui on ne songerait guère à un tel hommage. Jasmin est devenu un classique de langue morte ; même à Agen on ne le lit guère, on ne le chante plus. Le papier imprimé, journal à un sou, écrit en français, a plus de lecteurs et de fidèles, car il répond aux préoccupations presque exclusives de nos jours : la politique et les querelles loca- les. Oui donc s'intéresse maintenant aux per- sonnages d'idylle et d'élégie qu'anima Jasmin et qui émurent les pays de langue d'oc ? Déjà, en pleine gloire vivante de Jasmin, on avait dit de son idiome, traité de patois : « Le patois est une langue qui a eu des malheurs. » Et le patois âge-
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nais rénové, remis au rang des langues par le perruquier-poète, a le malheur très grand de ne pas servir pour satisfaire à la fringale de nou- velles politiques dont sont agités les bords de la Garonne, plus encore que le reste de la France.
La statue du poète est voisine de la boutique où Jasmin habita et qu'un autre coiffeur occupe encore, sur le cours Voltaire planté de grands arbres. Tout près, les superbes platanes du Gra- vier répandent leur ombre fraîche. Une passe- relle franchit la Garonne. Du tablier on a de belles vues sur le fleuve traversé en amont par un pont de pierre aux grandes ouvertures, en aval par le pont-canal dont les sept arches se poursuivent au-dessus des prairies par d'autres arceaux. Ouvrage grandiose, ses belles lignes rappellent les œuvres les plus magistrales de l'art romain. Le fleuve est désert; sauf les barques qui vont s'approvisionner de sables et de graviers versés par de grandes dragues, il n'y a guère de bateaux. Depuis que l'État a repris possession du canal, la Garonne est de plus en plus abandonnée par la navigation.
A la fin de l'ancien régime, Agen avait déjà tenté de se transformer. Les évêques élevèrent un joli palais devenu aujourd'hui la préfecture, ce devait être le noyau d'un quartier neuf. On
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a achevé le plan en construisant un palais de Justice rompant un peu avec la banalité habi- tuelle à ce genre d'édifices. Un square sur le- quel se dresse le monument élevé aux morts de l'année terrible, un cours planté de beaux arbres, donnent à cette partie d'Agen un peu de grandeur. En pénétrant dans l'intérieur de la ville on retrouve les rues étroites et banales.
Peu d'édifices à signaler dans cette cité irré- gulière mais vivante. Agen, malgré sa popula- tion relativement faible % est un des centres de commerce les plus considérables du Midi. On pourrait dire qu'elle vit par les transactions, rindustrie est de médiocre importance depuis que sa manufacture de toile à voile a disparu comme ont disparu les corderies de la vallée. Cette usine alimentait la vieille marine, on y comptait trois cents métiers et six cents ou- vriers ; les corderies, jusqu'à Tonneins, occu- paient huit cents personnes. Aujourd'hui le rôle industriel d'Agen se borne à la fabrication des balais de sorgho, des colles et des engrais chi- miques produits dans les usines du Passage.
C'est un grand marché agricole, pour la vente
I. 22482 habitants en 1901 ; près de 26000 avec Le Passage, sur la rive gauche.
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des oies et autres volailles, pour Pognon abon- damment cultivé aux environs. Malgré le voi- sinage de Toulouse et de Bordeaux, Agen a su se faire une large place dans les affaires de gros. Ses maisons de denrées coloniales, de tis- sus, de drogueries, de quincaillerie, etc., rayon- nent sur toute une vaste région à l'aide d'une petite armée de voyageurs de commerce. Aussi la place a-t-elle un bon rang dans la liste des succursales de la Banque de France, elle est dans la première moitié, avant sa voisine Péri- gueux pourtant plus populeuse, avant Montau- ban, Cahors et d'autres cités plus industrielles ou considérables : Montluçon, Poitiers, Avignon et Versailles ^
Le commerce est donc le principal élément de vie d'x\gen, ses représentants constituent au- jourd'hui la véritable aristocratie de la ville, dé- daignant tout ce qui n'est pas les affaires. Un grand agriculteur de la région m'en témoignait quelque dépit :
« L'agriculture, me disait-il, est non seule- ment la richesse du sol, mais aussi la richesse
I. La succursale d'Agen, dont dépend le bureau auxiliaire de Villeneuve, était au 58^ rang sur 126 en 1901 pour le chiffre des opérations s'élevant à 3o 194 100 fr. Elle est descendue au 69^ en 1902, année où les prunes manquèrent.
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de la ville, intermédiaire pour la vente de toutes ces denrées que donne abondamment l'Agenais : prunes, primeurs en légumes, pêches, abricots, tomates, ognons, sorgho à balais, etc. Cepen- dant le commerce croirait déroger en s'intéres- sant à nos efforts. Et que serait-il, le négoce d'Agen, si le revenu superbe de la terre ne per- mettait au ])aysan de dépenser sans compter ! »
Les chemins de fer ont beaucoup d'activité. De même la navigation à Taide du canal latéral. Le port d'Agen et celui du Passage, qui est en somme une annexe, eurent, en 190 1, un mouve- ment de 40000 tonnes, chargées ou débarquées.
Une course à travers les campagnes de l'Age- nais explique cette prospérité. Le tableau que j'ai déjà tracé de la plaine de la Garonne vers Marmande et Tonneins se retrouve partout, plus saisissant encore peut-être entre Agen et l'em- bouchure du Lot. De toutes les grandes vallées françaises, celle-ci, après le Graisivaudan toute- fois, réunit le mieux la beauté des lignes à la splendeur de la végétation. On ne saurait trou- ver pentes plus luxuriantes que celles des ro- cheuses collines qui dominent la ville et se pro- longent jusqu'à Nicole, incessamment coupées par des vallons non moins riches d'aspect. Les arbres fruitiers, les champs d'artichauts, les
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champs cFognons d'une verdure bleutée envelop- pant les villages : Golayrac et Saint-Hilaire dans la plaine, Lusirjnan juché sur ses rochers. Ces hauteurs aux pentes raides sont de véritables espaliers exposés au soleil du Midi et protégeant eux-mêmes la plaine verte sillonnée de joualles. La vigne domine dans ces fonds et va jusqu'à la Garonne, coulant entre les saules d'un gris azuré.
L'homme a accru la grandeur du paysage par les efforts pour préserver ses pénates des gens de guerre. Clermont-Dessous en est une des beau- tés; des débris de tours et de remparts, l'église elle-même semblable à une forteresse, l'enceinte devenue soutènement pour les jardins en ter- rasse, commandent la Garonne et le ruisseau descendu par un beau val des campagnes de Prayssas. Dans tous ces vallons, sur toutes ces collines sont des pruniers, chaque village est un centre pour l'achat des prunes.
La reine du paysage est la petite ville de Port-Sainte-Marie, un des joyaux de la Garonne quand on la voit au passage ou lorsqu'on la do- mine du haut de son abrupte colline. Ce n'est guère qu'une rue coupée de ruelles étroites et resserrée entre le fleuve et le rocher, mais les antiques maisons de poutrelles et de briques
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projetées en ressaut, les églises, dont une est en ruine, composent un de ces tableaux auxquels on a coutume de donner le nom de décor d'opéra- comique. Jamais décor n'approcha de ceci par la couleur et le caprice. Ces bâtisses de poutres brunes et de briques de teinte ardente, les vignes qui grimpent aux façades, les fenêtres de l'étage si rapprochées de son vis-à-vis que l'on peut se donner la main de l'un à l'autre, ont de la vie, grâce au ciel doux et à cette population enjouée.
Gomme ses voisines, Port-Sainte-Marie doit sa vitalité, contrastant si fort avec le site ar- chaïque, à l'exploitation des vergers. Pendant la saison on ne fait qu'emballer des fruits, clouer des caisses, expédier des paniers. Des magasins sont exclusivement consacrés à la vente des em- ballages, des ficelles, des papiers à jour pou: garnir les caissettes.
Plus actifs encore, peut-être, sont, à l'embou- chure du Lot, Aiguillon et Nicole. Aiguillon, vieille ville bâtie sur des assises romaines et conservant autour d'elle des édifices, intéres- sants encore, d'un lointain passé. Sauf le site et quelques pans de muraille, il ne reste rien de la forteresse qui joua un si grand rôle, et peu de chose du luxueux château que fît construire le
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duc d'Aiguillon à la veille de la Révolution et dont s'émerveilla Arthur Young.
A l'époque où celui-ci la visita, Aiguillon était au cœur d'une grande culture de chanvre. Cette plante couvre bien peu d'espace aujourd'hui ! Le sol divisé en domaines exigus, appelés carte- rées, fournit surtout des tomates expédiées en primeurs.
Le Lot borde la petite ville et, presque aussi- tôt, va atteindre la Garonne après avoir décrit une boucle harmonieuse devant la colline au pied de laquelle Nicole s'étend en une rue for- mant arc de cercle. Les campagnes sont parmi les plus riches du somptueux pays; Nicole est le centre de production pour l'abricot et le raisin de chasselas. La colline, franchement tournée vers le sud et très raide, reçoit et garde long- temps les rayons du soleil, ce qui lui permet de voir mûrir les fruits de bonne heure et de pren- dre part à l'alimentation de Paris et de Bordeaux en succulentes primeurs.
Ici les vergers. Sur l'autre rive de la Garonne, le maïs, le sorgho, le tabac surtout enveloppent la riante villette de Damazan assise sur une ter- rasse que longe le canal. Damazan est une bas- tide, demeurée intacte avec sa place centrale entourée d'arcades et son plan, carré parfait. Si
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elle a perdu son enceinte flanquée de tours, elle est pittoresque encore ; en dépit des siècles c'est une des petites cités de l'A gênais qui rappellent le mieux l'époque où seigneurs et abbaves faisaient surgir des villes et. y réunis- saient les populations jusqu'alors éparpillées dans d'infimes hameaux ou dispersées par les longues guerres.
XIII
LE BAS OUERGY
L'Aveugle de Castelcaiier. — Le canal latéral. — La Séoune. — Puymirol. — En Tarn-et-Garonne. — Valence-d'Agenais. — Auvillars. — Saint-Nicolas-de-la-Grave. — Moissac. — Du bas Ouercv au Ouercv-Blanc.
Moissac. Juin.
Si Villeneuve-sur-Lot a ses petits pois, Ageii possède Tognon. Toute sa campagne est con- sacrée à ce légume dont les champs de teinte bleuâtre alternent avec les céréales d'un Acrt doux. En amont d'Agen ces cultures couvrent une belle plaine, entre la Garonne et les collines étrangement découpées de Bon- Encontre qui présentent une suite de fronts escarpés sembla- bles à des murailles. Un de ces promontoires porte une statue de la Vierge. Sur un autre, massif isolé semblable à un oppidum antique, est un hameau, popularisé par le poème de Jasmin : l'Aveugle de Castelcaiier.
« Du pied de cette haute montagne, où se
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dresse Castelculier, dans la saison où le pom- mier, le prunier et l'amandier blanchissaient dans les campagnes, voici le chant qu'on en- tendit un mercredi matin, veille de Saint- Jo- seph :
Les chemins devraient fleurir, Tant belle épousée va sortir ; Devraient fleurir, devraient gréner. Tant belle épousée va passer. »
Ce nom sonore de Castelculier évoque donc surtout la poésie populaire. De village il n'en est pas : c'est trois ou quatre maisons blotties sous des ruines féodales. La population de la commune se presse plus bas, près de la Séoune et du canal latéral, au bourg de Grandfonds étalé au milieu de cultures plus riches encore. C'est comme du jardinage : les blés couvrent des bandes exiguës et étroites, on devine qu'ils sont là pour l'assolement et seront remplacés bientôt par les melons, les ognons, les carottes et autres plantes potagères.
Le canal coule à travers cette plaine. Le mot est juste, car la rivière artificielle est si bien ali- mentée que le courant est sensible. Les berges sont plantées de mûriers dont la vigueur prouve que le ver à soie pourrait être élevé ici, comme
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il Test en Tarn-et-Garoiine ^ Sur le flot tranquille que le remblai tient au-dessus de la plaine, passent les lourdes gabares dont le nombre s'est fort accru depuis le i^"" juillet 1898, date de la reprise par l'Etat du canal concédé à la compa- gnie du Midi. En 1897, le trafic était seulement de 171 779 tonnes. Il s'élevait jusqu'à 817 61 5 en 1900 pour descendre à 271 565 en 1901, par suite de la crise viticole. Mais l'ascension reprend. De nombreux types d'embarcations : barques, coutrillons, sapines, postes, bateaux, vapeurs circulent désormais sur la voie navigable ; 2 277 franchirent en 1900 l'écluse d'Agen, près de 2 800 furent enregistrés à Moissac. Et cette bande d'eau est redevenue une des gaîtés du paysage, grâce à l'animation qu'elle répand. Elle a été établie avec quelque souci du pitto- resque, les ponts qui la franchissent sont le plus souvent des tabliers suspendus rattachés à des culées en forme de bornes et bordés de parapets peints en vert.
Au pied de Gastelculier le canal traverse la
I. Le Lot-et-Garonne figure cependant parmi les 27 départe- ments séricicoles en 1900, mais il n'a que deux sériciculteurs sur les 186214 de la France entière. Ces éleveurs ont obtenu 43 kilogrammes de cocons. Seul l'Indre-et-Loire est inférieur, avec un sériciculteur ayant produit 21 kilogrammes.
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Séoune sur un pont-aqueduc, de lignes sobres et décoratives. La petite rivière descend des parties hautes du Ouercy-Blanc et s'accroît peu à peu d'autres sources et ruisselets venus par de nombreux vallons creusés dans le plateau qui porte Bourq-de-Visa. Peu d'eau, malgré la lon- gueur du cours, mais une vallée aimable par la forme des collines, sans cesse coupées d'ouver- tures de vaux, de combes et de ravins. On trouve moins de ces bastides si communes en Agenais ; Bourg-de-Visa, la principale agglomération dans le haut de la vallée, est un petit bourg encore entouré de débris de remparts. Au bord* même de ce long sillon, Castel-Sagrat et Montjoy ont aussi fière mine; plus bas, Puymirol, grand site commandant le confluent de plusieurs branches, est une bastide édifiée en 1246, sur une colline isolée, forteresse naturelle aux puissants escar- pements. Dans la vallée de la Petite Séoune, qui aboutit dans le beau bassin de Puymirol, une autre bastide, la Sauvetat-de-Savères, borde le ruisseau ; elle est restée infime.
Ces petits centres n'ont pas l'aspect riant des bourgs de la grande vallée garonnaise, parcou- rue paresseusement par son fleuve rapide, rou- lant entre les saules nains d'un gris bleu. Les cultures finissent à cette bordure, égayées au-
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tour des villages par les arbres fruitiers : pru- niers, pommiers, abricotiers et amandiers. Le sorgho à balais est la plante dominante.
Après Lafox les collines se rapprochent de la Garonne, laissant à peine une étroite bordure pour la route, la voie ferrée et le canal, qui s'en vont côte à côte au long du grand cours d'eau. Sur chaque rive les habitations se pressent, là- bas celles de Sauveterre, Saint-Nicolas-de-la-Ba- lerme et Saint-Sixte, ici Saint- Jean-de-Thurac. A Saint-Nicolas, un élégant pont suspendu tra- verse le courant où le village mire ses jolies maison*. En face une falaise de roches jaunâtres couronne de raides pentes. De là-haut la vue est bien belle sur l'immense plaine garonnaise et, vers le sud, les collines de Lomagne découpées par les vallées descendues de Lannemezan. Les jours clairs on voit les Pyrénées neigeuses se profiler sur le ciel.
Plus loin les collines s'écartent, mais elles sont raides encore, l'une d'elles porte le village de Clermont-Dessus, tout pimpant avec ses toits rouges, ses terrasses grises, une grande maison à allure de château et le pignon triangulaire de l'église. Il domine la plaine où se balancent les grands panicules de sorgho, et le gros bourg de la Magistère allongé au Ijord du fleuve. Cler-
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iiiont est encore de Lot-et-Garonne, mais son actif voisin appartient à Tarn-et-Garonne.
Au cœur de la plaine est la première ville de ce nouvel organisme administratif, Valence- d'Agen, une bastide populeuse, régulièrement étalée sur la grande route et aujourd'hui agran- die en prolongement des voies du Moyen Age ; celles-ci, bordées de maisons blanches, attei- gnent la voie ferrée. Une église neuve dresse sa flèche au-dessus de la ville et complète le dé- cor, avec le château de Gastels assis sur une colline dominant la Bargelonne.
Valence est un rendez-vous pour les cultiva- teurs de la Lomagne, de l'Agenais et du bas Ouercy, les marchés sont animés par un bétail nombreux, embarqué à la gare. Le commerce de la volaille, celui des plumes et duvets y sont fort actifs. Avant le triomphe des plumes en fer, c'était un des points où la plume d'oie était transformée à l'usage des scribes. Cette indus- trie n'a pas complètement disparu, mais les appréteurs ont dû ajouter d'autres branches à leur fabrication, ils préparent les plumes pour la parure féminine.
Les fondateurs de Valence avaient tracé leur bastide loin de la Garonne ; de nos jours on a compensé ce désavantage par le canal latéral, il
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longe la ville et forme un port actif. Canal et chemin de fer enserrent ainsi Valence dont ils ont accru le rôle de débouché pour la longue vallée de la Bargelonne.
De hautes collines forment promontoire au confluent. A la pointe, Goudourville se groupe autour de la masse grise d'un château dont le pavillon principal est couronné de mâchicoulis. Les pentes étaient jadis tapissées de vignes dans lesquelles les bourgeois de Valence avaient cons- truit des vide-bouteilles. Le phylloxéra est venu, bien peu de ceps ont résisté, et les petits ré- duits de vignerons font un étrange effet au mi- lieu des blés et des luzernes qui ont remplacé les pampres. Dans la plaine où Pommevic dresse sa lourde tour, on retrouve encore l'opulence agreste de l'Agenais ; jusqu'à la Garonne les cé- réales, le maïs, le sorgho couvrent les alluvions fertiles.
Sur le fleuve, le village d'Espalais fait face à une mignonne ville amphithéâtrale regardant les belles campagnes de Valence. C'est Auvillar, une des bastides de la Lomagne. Les ruines de ses fortifications, une ample église et, vers le bord du fleuve, une élégante chapelle font de cette antique bourgade un des beaux décors du fleuve, ici rejeté vers les collines de Gas-
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cogne, après avoir quitté celles du Quercy à Malause.
La Garonne est large parfois, mais à demi sauvage. Des bancs de gravier encombrent son lit, des fourrés et des bois d'arbres aquatiques la bordent. Au milieu de grandes plantations de peupliers, elle reçoit le Tarn, en apparence aussi puissant, mais roulant moins d'eau dans un cours plus calme.
En aval du confluent, où les collines querci- noises baigneraient leur base dans la Garonne si canal et chemin de fer n'avaient entaillé ces co- teaux pour se frayer passage, un pont suspendu d'une extrême légèreté franchit route, rails, canal et fleuve en jetant en trois travées son tablier oscillant. Il se prolonge par une route tracée droite à travers la plaine jusqu'à une bastide construite au sein de luxuriantes cultures : Saint- Nicolas -de -la -Grave , grosse commune mais humble ville ^; elle a gardé son plan régulier, dé- bordé par des faubourgs bâtis au long des routes et des chemins ruraux. Au cœur est l'église ro- mane. Il ne reste des défenses que les débris du château construit par Richard Cœur de Lion.
De plus fière mine sont d'autres bourgs bâtis
I. Population totale, 2^42 ; agglomérée, i 19g.
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à l'extrémité de la plaine, sur Ja terrasse formée par les hauteurs de Lomagne ; Caumout, Cas- telmayran durent être aussi fondées d'un seul jet, celle-ci sur l'emplacement d\m oppidum gaulois. Des pentes qu'elles occupent, on jouit d'une vue très ample sur la plaine verdoyante au cœur de laquelle est Saint-Nicolas, sur la Garonne errant solitaire et les deux villes de Moissac et Castelsarrazin, si voisines et toutes les deux chefs-lieux d'un arrondissement. Castel- sarrazin est une bastide régulière à l'écart des deux fleuves, Moissac une vieille cité allongée entre le Tarn et les collines.
Le Tarn, cependant, n'est pas la vie pour Moissac, la ville semble bouder sa belle rivière; les eaux qui l'animent sont celles du canal, étroit ruban contenu entre des quais de pierre. Cité calme, presque morose, en partie construite en briques et, par cet aspect, sorte de vestibule du pays toulousain, Moissac serait insignifiante sans le merveilleux ensemble monumental cons- titué par son église et son cloître. Encore l'église n'a-t-elle guère à présenter que son porche, la nef offrant surtout de l'intérêt aux architectes et aux archéologues par les caractères particuliers de sa construction.
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Le porche est une pure merveille à laquelle des monographies nombreuses ont été consa- crées. 11 serait difficile de le décrire en quelques lignes. Rarement l'art roman a déployé autant de souplesse, de variété et de richesse d'orne- mentation. Le linteau, qui repose sur deux pié- droits et un trumeau, est décoré de rosaces rap-
pelant les plus beaux morceaux de la sculpture antique. Au-dessus le tympan, entouré d'un arc à cintre brisé, est peuplé de personnages.
Quant au cloître, c'est un des plus beaux que nous possédions ; peut-être est-il comparable à Saint-Trophime, la merveille d'Arles. Il est d'une conservation bien rare. Les arcades en ogive reposent alternativement sur une colonnettc
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isolée et sur deux colonnettes accouplées, sur- montées de chapiteaux admirablement fouillés. Aux angles et au milieu de chaque galerie, un pilier carré offrant sur une face une figure d'apôlre, rompt l'uniformité de la colonnade. Entre les arcades, une ouverture en forme de losange donne de la lumière et accroît la légè- reté de la muraille qui supporte le toit de tuiles moussues projeté en auvent. La cour intérieure est plantée d'arbres entourés de parterres fleu- ris; cette verdure et ces fleurs augmentent l'im- pression de paix que fait éprouver l'admirable retraite monastique. La haute tour de l'église ferme un des côtés de l'horizon, tandis que, de l'autre, le ciel bleu du Midi accentue la splen- deur idéale du cloître.
Sauf cela, que voir à Moissac? Le sous-préfet habite un charmant hôtel du siècle dernier, le théâtre est entouré d'arcades de briques, hautes et claires, formant halle. Çà et là quelque belle demeure d'autrefois; puis une très vieille église Saint-Martin, qui aurait été construite bien avant l'an mil.
La colline qui domine la petite ville est cou- verte de pavillons coquets, maisons de repos dans les vignes avant que le phylloxéra ait ra- vagé la contrée.
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Pas d'industrie spéciale, mais un commerce assez considérable de produits agricoles. Les campagnes récoltent beaucoup de prunes, sé- chées comme dans la région du Lot. Même la prune de Moissac est une marque réputée. Les vergers fournissent aussi à l'exportation des abri- cots, des cerises, des pommes, recherchés sur les marchés de Paris. Toutes les collines exposées au midi sont couvertes d'arbres fruitiers. Les maisons d'expédition recueillent également les œufs et les volailles, produits en abondance dans cette région du maïs.
L'arrondissement de Moissac, pour la plus grande part, c'est le bas Ouercy, région de val- lées parallèles descendues des abords des caus- ses de Gahors et de Limogne et qui viennent aboutir, avec une sorte de rythme, à la plaine de la Garonne entre Moissac et Valence. Cela rap- pellerait un peu, en sens inverse et en petit, l'éventail des rivières descendues du plateau de Lannemezan, mais ici les sources des ruisseaux s'écartent et les embouchures se rapprochent. Cette succession de vallons, offrant d'incessantes montées et descentes, n'a pas permis de doter le pays de voie ferrée ; il est donc peu accessible, d'autant plus que la contrée, malgré son éten-
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due, n'a aucun bourg dont la population agglo- mérée atteigne i ooo habitants. Lauzerte etMon- taigut-de-Ouercy, chefs-lieux de canton, sont de petits bourgs devant uniquement rang de ville à leur ancienne situation de places fortes et au rôle administratif qu'elles eurent sous l'ancien régime. 11 en est de même dans la partie supé- rieure des vallées, à laquelle on a donné le nom de Ouercy-Blanc à cause de la nature de ses roches, délitées en poussière couvrant le pay- sage à l'époque des sécheresses. Gastelnau-de- Montratier et Montcuq, malgré leur fier aspect, sont aussi de médiocres bourgades.
C'est pourquoi les projets de chemin de fer pour relier Cahors à Moissac ne se sont pas réa- lisés jusqu'ici ; les études se poursuivent, rame- nant les plans primitifs à la construction d'une ligne à voie étroite. Celle-ci desservira un terri- toire qui fut un des grands domaines seigneu- riaux du Midi, aux temps féodaux, le pays de Durfort, berceau de Tillustre famille de Durfort de Duras. Il existe encore une commune de ce nom, mais il n'y a ni bourg, ni village, ni ha- meau; la commune de Durfort, malgré sa popu- lation de I 120 habitants, ne possède nulle part une agglomération.
Il en est de même pour toute la contrée, sauf
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Cazes-Moiidenard qui groupe près de 5oo âmes, les communes, dans la vallée de la Grande Bar- (juelonne, ne sont que le groupement admi- nistratif d'une multitude d'habitations rurales éparpillées. Par contre la vallée de la Petite Barguelonne, parcourue de bonne heure par une route reliant Cahors à la vallée de la Garonne vers Valence, a été jalonnée de petites for- teresses dont Lauzerte fut la plus importante. Cette minuscule ville occupe le sommet d'une colline isolée entre le Lendou et la Petite Bar- guelonne. Elle a crâne allure encore; ses restes de fortifications, son isolement, son élévation à 80 mètres au-dessus du fond des vallées, l'es- carpement de sa colline en font un beau site dont on est très fier dans le >Ioissagais.
Les hauteurs, bien découpées, avaient sur leurs pointes avancées des châteaux ou des bas- tides ; celles-ci, n'ayant pas eu la bonne fortune de se développer, sont demeurées de pauvres villages. Mais comme les noms sont sonores ! C'est Montagudet couvrant un promontoire ; Monbarla, deux ou trois maisons sur une aire aplanie au sommet d'un coteau ; Miramont, vrai village dont le nom dit assez le site dominant et les vues grandioses offertes sur les campagnes.
Plus hàu{, dans le Ouercy-BIanc, près de la
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bordure du causse où naissent les indigents ruisseaux qui forment les pauvres riviérettes de Barguelonne et de Séoune, les bourgades n'ont pas un aspect moins guerrier. Montcuq couvre une colline dominant de loo mètres la Petite Braguelonne et se serre étroitement autour du donjon de son ancien château. Ici le pays est extraordinairement plissé ; de longs vallons, très rapprochés l'un de l'autre, partent du causse, leurs côtés se frangent par une multitude de ravins. Le causse lui-même n'offre pas la table régulière qu'il présente du côté de Limogne. A ces approches de Gahors, il est fragmenté par des sillons sans nombre, couloirs secs érodés dans la roche blanche.
XIV
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN
Le vignoble de Tarn-et-Garonne. — Castelsarrazin. — Noms de rues. — En Lomagne. — Lavit-de-Lomagne. — Beaumont-de- Lomagne. — L'élevage des chevaux. — Montech. — Le ma réchal Pérignon. — ■ Verdun. — ■ La Rivière Verdun. — Gri- solles. — Culture du sorgho. — La fabrication des balais.
Grisolles. Juin.
La plaine de la Garonne, si vaste déjà dans l'Agenais, devient immense dans cette région du Ouercy à travers laquelle erre le Tarn que vient grossir 1 Aveyron. Pays aux lignes fuyantes, où les vieilles provinces ne purent se tracer de limites précises, le Languedoc y pénétrait comme un coin entre le Ouercy, subdivision de la Guyenne, et la Lomagne, pays gascon. Le département de Tarn-et-Garonne, région artifi- cielle si mal équilibrée, établi par la volonté de Napoléon à l'aide de lambeaux pris aux voisins, ne fit en somme que perpétuer l'ancien état de choses. Les chemins de fer donnent désormais
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une unité réelle à cet organisme factice, depuis que Montauban est devenu un des grands points de jonction du réseau. Cette situation est due à l'ouverture de la ligne nouvelle de Limoges à Gahors et Montauban, qui se poursuit jusqu'à Toulouse par les rails de la Compagnie du Midi, et relie directement Paris à la Garonne.
Cette plaine, devenue un des points de ren- contre des grandes voies de communication, n'est guère moins riche que celle de l'Agenais, mais son opulence n'apparaît pas aussi bien aux yeux. Il n'y a pas les bordures de collines, les vergers et l'extrême variété des cultures. Maïs, blés, vignes, sorgho couvrent à l'infini l'immense ter- roir. Depuis le confluent de l'Aveyron et du Tarn jusqu'à Castelsarrazin, c'est une nappe de vignes presque ininterrompue autour de Laville- dieu. Le phylloxéra est passé là, mais on re- plante avec ardeur, les jeunes vignes sont pleines de promesses. Le Tarn-et-Garonne est un des départements où la reconstitution a été poussée avec le plus d'activité. On peut dire que le vi- gnoble de Lavilledieu, principalement, est en entier rétabli. Les vins rouges de cette zone sont excellents. « Ils ont une belle couleur, du spiri- tueux et un bon goût. »
Les pampres s'étendent jusqu'aux abords de
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI
2 10 VOYAGE EN FRANCE.
Caslelsarrazin, bastide languedocienne établie ass«z loin de la Garonne, mais devenue port de navigation intérieure grâce au canal latéral qui la longe. Le chemin de fer la dessert aussi par le grand détour capricieux qu'a fait naître le désir de relier ensemble les trois villes princi- pales de Tarn-et-Garonne : Moissac, Castelsar- razin et Montauban.
Le canal, à défaut du fleuve, est la gaieté de la petite ville autour de laquelle errent de pau- vres ruisseaux indigents dont un, l'Azine, aurait fait naître le nom de Castel-sur-Azine. Les habi- tants préfèrent une origine moins prosaïque, ils se croient sur l'emplacement d'un camp arabe : Castelsarrazin. En réalité, ce nom apparaît seu- lement au xm'' siècle, il supplantait Villelongue, un village sans doute, remplacé par la régulière bastide actuelle.
Entre des allées de tilleuls, en ce moment fleu- ris, s'étend un grand bassin où les bateaux sont peu nombreux désormais ; l'activité de la navi- (jation pour la ville est faible, ce n'est qu'un lieu de passage.
D'autres avenues enveloppent Castelsarrazin, couvrant Je site des remparts et des fossés au- jourd'hui disparus. Une partie de ces allées établies sur la terrasse regardant la Garonne
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN. 2 11
possède des arbres superbes. C'est la prome- nade du Château. Un de ces végétaux, entouré d'une grille, est vénéré comme arbre de la Li- berté. Les noms de voies publiques indiquent le civisme des habitants : il y a le boulevard du Dix-Août, le boulevard du Vingt-deux-Sep- tembre et la rue de la Raison. Si l'on pénètre dans l'intérieur par les petites voies tracées au cordeau, on trouve d'autres vocables inattendus. J'ai relevé les rues du Devoir, de la Tempérance, de l'Union, de la Justice et de la Fraternité ; la place de la Réunion, les rues de l'Avenir, de la Discrétion et de la Vertu, la place du Progrès et le boulevard du Ouatre-Septembre. C'est à croire que les âmes d'Honoré d'Urfé et de M. de Robes- pierre planaient au-dessus du conseil municipal lorsque l'on baptisa les voies pubhques. Il reste encore une rue Neuve-des-Capucins, sans doute parce qu'il ne restait plus de vertus à honorer.
L'avenue de la gare porte un nom de circons- tance, c'est le faubourg du Progrès.
Peu de monuments dans la ville, dont la po- pulation est d'ailleurs en majorité rurale, c'est- à-dire répandue sur le territoire environnante Sur la promenade du Château est la lourde
I. Population totale, 7808; agglomérée au chef- lieu, 3 SgA*
212 VOYAGE EN FRANCE.
église Saint- Jean riche en stalles sculptées; l'église Saint-Sauveur, qui marque la fin de la période romane, possède une tour octogonale en briques. L'église ruinée des Carmes, devenue la prison, garde une tour rouge aux gargouilles de pierre et, parmi les bâtiments conservés, le tombeau de Lamothe Canilhac, gouverneur de la Louisiane, qui fonda la ville américaine de Détroit, bastide elle aussi, mais autrement flo- rissante que Castelsarrazin'.
Cependant cette dernière s'est accrue. La Compagnie française des métaux y exploite une de ses usines pour le laminage du cuivre, la })roduction du maillechort et du laiton, la fabri- cation du papier d'étain. Les établissements sont hors de la ville, assez loin pour que Castel- sarrazin n'ait pas perdu son aspect de calme, ils bordent le canal par lequel lui viennent les char- bons et une partie des matières premières.
A cela se borne l'activité manufacturière de Castelsarrazin, grand marché agricole dont les foires sont très fréquentées. Le dernier jeudi de juillet il s'y tient une foire aux chiens. Cette contrée est une de celles où l'on chasse le plus; la ville compte plusieurs expéditeurs de gibier.
I. Détroit comptait 286704 habitants en 1900.
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2î3
Une industrie assez répandue est celle des oise- leurs qui font des hécatombes d'oiseaux de pas- sage et dont Emile Pouvillon a dit l'existence
ôntech
Échelle au ij 3-20 000:
de bohème dans son Jean de Jeanne , roman qui rend si bien la vie monotone de ces plaines quercinoises, sans autre beauté que leur courte splendeur printanière.
L'élevage et l'engraissement des oies et des
2l4 VOYAGE EN FRANCE.
canards, qui tient ici une si grande place dans l'industrie rurale, sont pour Castelsarrazin une autre source de profit, toutes les contrées voi- sines y amènent leurs produits de basse-cour.
Quand le chemin de fer de Beaumont sera achevé et poursuivi jusqu'à Gimont, la partie la plus riche de la Lomagne trouvera son débouché naturel dans la ville languedocienne.
Le territoire de la commune est énorme, il ne couvre pas moins de 7 602 hectares et s'étend jusqu'au confluent du Tarn et de la Garonne. Aussi les hameaux sont-ils nombreux sur ce vaste espace. L'un d'eux, Gandalou, qui com- prend trois ou quatre maisons, une église et une école, occupe le site d'un ancien camp dont Torigine remonterait aux Vandales dit-on, mais qui est vraisemblablement gaulois. Des talus de quatre à huit mètres de hauteur, entourés de fossés encore apparents sur un point, suppor- taient la plate-forme servant aujourd'hui d'as- siette au hameau. Un chemin à travers les vignes conduit au château de Leriet bâti sur une haute butte, sans doute artificielle elle aussi. De là on découvre tout le grand vignoble vers Labastide- (lu-Temple, Albefeuille et Lavilledieu.
La commune s'étend jusqu'à la Garonne qui
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sépare cette presqu'île languedocienne d'entre le Tarn et le fleuve, du vert pays de Loinagne dont une partie a été arrachée au Gers pour contri- buer à donner rang de chef-lieu à Montauban. Deux des rivières du plateau de Lannemezan drainent leurs eaux en Lomagne : l'Arrats et la Gimone. Entre elles, d'autres ruisseaux ont creusé leurs vallons dans cette base du grand cône de déjections pyrénéennes ^ : ruisseau Pro- fond d'Auvillar, Cameson, ruisseau d'Ayroux, Sère ; puis en amont de la Gimone la Tessonno et le Lambon. Le terrain délimité par le faîte où prennent naissance ces ruisseaux constitue la Lomagne de Tarn-et-Garonne. Le bord du fleuve, de chaque côté de Verdun, a pris le nom de Rivière comme tant de rivages fluviaux dans le Midi : c'est la Rivière Verdun.
La Lomagne est un pays purement agricole, produisant d'excellents vins autour d'Auvillar et davantage livrée à la grande culture dans l'in- térieur. Les communes y sont plus nombreuses que dans la plaine garonnaise, les habitants se groupent volontiers autour de l'église et de la mairie. Tous ces petits centres de population
I. Sur le plateau de Lannemezan, les rivières qui y naissent et leur alimentation par la Neste, voyez la 3o^ série du Voynge en France, chapitre XVI.
2l6 VOYAGE EN FRANCE.
sont au sommet des collines, sauf sur la Gimone dont la vallée, plus large, parcourue par une grande route, est bordée de villages.
Peu de prairies, les cours d'eau étant trop faibles pour l'irrigation et souvent à sec pendant l'été. liCs principaux n'auraient même qu'un fond vaseux, si on ne leur amenait une part du débit recueilli dans la Neste par le canal d'ali- mentation des rivières du Gers.
Le plus long de ces fossés, la Sère, n'a presque pas d'habitations sur ses bords, depuis Gastel- mayran dont il longe la terrasse, jusqu'au pied de la haute croupe qui porte Lavit-de-Lomagne. Ge fut ici la capitale de la Lomagne, à l'origine de l'époque féodale, avant que Lectoure fut deve- nue la forteresse et la ville maîtresse de la con- trée ^ Lavit est encore un centre assez populeux mais dont toute l'importance est due à son rang de chef-lieu de canton, à ses marchés et à ses foires. La ville principale de cette région est Beaumont-de-Lomagne, plus au sud, dans la vallée de la Gimone.
Grosse agglomération pour le pays : près de 3 ooo âmes sur une population de 3 782, c'est-à-
I. Sur Lectoure et la partie de la Lomagne appartenant au département du Gers, voyez le chapitre VI, page 85.
L03IAGNE Eï RIVIERE VERDUN. 217
dire de peu inférieure au centre urbain de Cas- telsarrazin, Beaumont est une baslide fort régu- lière, mais seules les rues allant de l'est à Fouest sont rectilignes, les autres suivent la légère in- flexion courbe donnée par le rempart qui flan- qua la nouvelle cité. Le fondateur, Eustache de Beaumarchès, qui agissait pour le compte du roi, avait conçu un plan encore plus régulier par le nombre des parcelles que par le tracé. Il voulut mille maisons avec mille jardins d'un arpent chacun. Mille arpents devaient être con- sacrés à la vigne. A cette date de 1279, on rêvait donc d'une grande ville. Les espérances ne se réalisèrent point, mais Beaumont n'en est pas moins une des bastides qui ont le mieux pros- péré. Cependant la population a décru, il y avait jadis plus de 4 5oo âmes. La perte du vignoble a été cause de cette déchéance ; au- jourd'hui la replantation fait des progrès et les belles campagnes de la Gimone reprennent leur aspect de prospérité.
La place centrale de Beaumont a partiellement conservé son aspect d'autrefois, elle garde quel- ques-unes des arcades qui l'encadraient. Au centre est une vaste halle où se font d'actifs échanges. L'église est un bel édifice des xiv^ et XV* siècles.
2l8 VOYAGE EN FRANCE.
Centre de commerce que le chemin de fer de Castelsarrazin développera encore, Beaumont- de-Lomaçjne a peu d'industries, pourtant un ate- lier y produit des fouets et des cravaches. Les plus importantes affaires ont pour objet la vente du gibier et surtout des volailles qui abondent dans toute la Lomagne. La campagne voisine est un pays d'élevage de chevaux excellents, dont un officier des haras a dit, dans un rapport au préfet : « Le cheval de Beaumont est le meilleur des chevaux de cavalerie, il est en général étoffé, près de terre ; il accuse du sang et s'il a la force qui lui permet de porter du poids, il a la trempe et la vigueur qui en font un remar- quable cheval de service sur route. » Aussi les remontes font-elles tous leurs efforts pour con- server cette variété précieuse, et empêcher les éleveurs d'en altérer la pureté en allant chercher des pouliches dans les Pyrénées : « La produc- tion de leur pays vaut cependant mieux que celle qu'ils vont chercher au loin à grands frais. »
La ville de Beaumont s'efforce de développer l'élevage, elle possède une société de courses et a créé ime foire spéciale pour la vente des pou- lains et des mulets.
La route nationale d'Auch à Montauban relie
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN. 2I9
Beaumont au chef-lieu. Après avoir suivi la vallée de la Gimoiie, elle quitte la rivière pour s'élever sur les hauteurs qui bordent la Garonne et dont les pentes forment le pays de Rivière Verdun. Du point culminant, au-dessus de Bourret, la vue est immense sur la plaine que parcourent Garonne, Tarn et Aveyron. Au pied de la côte, le fleuve se tord entre des prés et des planta- tions réguhères de peupliers.
C'est un cours d'eau sauvage, la navigation v devient de plus en plus rare depuis que le canal latéral est exonéré des droits prélevés autrefois par la compagnie fermière. Aussi la vie s'est-elle portée au cœur de la plaine, où la rivière artiii- cielle amène non seulement l'animation de la batellerie, mais encore la force motrice. Grâce à l'alimentation abondante due à la Garonne qui lui verse 6887 litres par seconde, à Toulouse, le canal peut en outre fournir des eaux d'irriga- tion.. Dans la plaine du Tarn-et-Garonne, 36 pri- ses d'eau donnent à l'agriculture i3o litres 5 par seconde ^ Les usagers paient une redevance de trente francs par litre et par an.
La force motrice est d'un revenu plus consi-
I. Haute-Garonne : 87 prises, 887 litres 5; Lot-et-Garonne : 7 prises, 18 litres i ; Gironde : 3 prises, 46 litres.
2 20 VOYAGE EN FRANCE.
dérable pour l'Etat. Sur toute l'étendue du canal il y a vingt usines dont les redevances attei- gnent ensemble 80612 ir. Le Tarn-et-Garonne, à lui seul, en compte cinq pour lesquelles les usiniers versent en chiffre rond 3oooo fr. Mais on pourrait utiliser autrement la force hydrau- lique ! Le mouvement se fait, d'ailleurs ; il y a de nombreuses demandes. Le canal qui donne déjà la force pour élever les eaux d'alimenta- tion d'Agen ne sert qu'à deux usines d'électri- cité; il pourrait éclairer toute la vallée.
La plus considérable des usines du canal est la grande papeterie de Montech, près de la petite ville régulière de ce nom qui dresse une belle flèche d'église au milieu de la plaine monotone en partie occupée par une forêt de I 327 hectares. Cette manufacture a donné un grand développement à la navigation. Grâce à elle le port de Montech est, après Agen, le plus important du canal; il a un mouvement total dé- passant 20 000 tonnes. Les houilles, les bois, les pâtes à papier nécessaires à l'usine comptent dans ce chiffre pour près de i5 000 tonnes. En dehors de cette industrie, Montech renferme plusieurs fabriques de sandales, c'est-à-dire d'espadrilles, et se livre à la curieuse production des boutons et des fleurs d'orangers pour ornements de mariage.
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN. 22 1
Dans cette partie de la plaine, il y a peu de hameaux ou d'habitations isolées. Contrairement à l'usage des populations vers Castelsarrazin, les habitants se groupent plutôt en gros bourgs ; ainsi Escatalens, un des centres de l'élevage des chevaux dans la plaine, et Finhan, qui possède le château de Pérignon appartenant encore à la famille du glorieux vainqueur de Peyrestortes et de Figuères, le futur maréchal d'Empire, devenu marquis à la Restauration. Pérignon est né près d'ici, dans la bastide haute-garonnaise de Grenade.
Sur l'autre rive de la Garonne, coulant soli- taire entre les grandes plantations de peupliers, le bourg de Mas-Grenier, construit sur un plan de bastide, est une ancienne ville monacale, le Mas-Grenier ou Mas-Garnier, qui posséda jus- qu'à la Révolution une abbaye de bénédictins. Il n'en reste que de pauvres débris ; l'église a disparu, celle du bourg est un remarquable édi- fice moderne.
Ici les collines de Lomagne, qui bordaient le fleuve depuis l'embouchure de laSère, s'écartent peu à peu. La Garonne, au lieu de frôler le pied de hauteurs, erre à travers la plaine, au milieu de cultures superbes dans lesquelles domine le sorgho. Sur la rive gauche, la plaine se nomme
222 VOYAGE EN FRANCE.
pays de Rivière Verdun, du nom d'une petite ville bâtie sur une sorte de terrasse qu'une levée protèije contre les fureurs du fleuve. La Garonne qui baignait jadis la ville coule maintenant un peu au delà, l'ancien thalweg a été planté d'ar- bres comme toutes les laisses de la Garonne dans cette partie de son cours.
Verdun, une des plus banalement régulières des bastides de la contrée, est formée de deux longues rues parallèles coupées en croix par la route de Dieupentale, mais de nouveaux quar- tiers ont débordé de ce plan bien aligné et mon- trent quelque caprice à suivre des routes et des chemins plus sinueux. Verdun, qui fut une cité forte, a encore une ancienne porte de ville.
Aucune industrie, la Rivière Verdun est un pays purement agricole. Son chef-lieu n'a même pas, comme Grisolles, petite ville qui, de l'autre côté, borde le canal, la mise en œuvre des pani- cules de sorgho à balais dont les champs couvrent partout de si grandes étendues. Elle est trop à l'écart de la grande circulation représentée par le chemin de fer et le canal. Ses relations avec le reste du département ont lieu par Dieupen- tale qui possède la gare et un port très animé '.
I. Mouvement (en 1901), 6809 tonnes.
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN. 2 23
D'ailleurs, toute cette région est déjà dans la sphère d'attraction de Toulouse. Elle regarde vers la grande cité garonnaise plus que vers Montauban.
De Verdun à Grisolles, un chemin court à tra- vers les champs de sorgho et de maïs. On est ici dans le principal habitat de ces cultures qui restent prépondérantes jusqu'aux premiers vi- gnobles de l'Aude. Le département de Tarn-et- Garonne ne participe à la production du sorgho que dans cette plaine, et l'étendue totale est faible, mais nulle part les champs ne sont plus rapprochés.
Le produit principal est la sommité, c'est-à- dire le panicule porte-graines qui sert à faire les balais lorsque la graine a été recueillie. La semence sert à l'engraissement des volailles, les tiges sont employées comme litière et comme combustible. Semé en mai, le sorgho se récolte en septembre, les sommités sont mises à sécher dans un grenier ou sous un hangar pendant quinze jours avant de procéder à l'égrenage ; celui-ci doit être fait avec beaucoup de soin pour ne pas endommager les pédicelles. Les ouvriers l'effectuent en raclant le panicule avec un couteau en bois. Il ne faudrait pas moins de 260 veillées à un homme pour égrener la récolte d'un hectare.
2 24 VOYAGE EN FRANGE.
Au bord de la Garonne, cette plante donne 45 à 5o hectolitres de graines pesant 64 kilo- f [ranimes à l'hectolitre et valant six à sept francs. Les panicules donnent en poids de i 000 à i 5oo kilogrammes et sont vendues de vingt à trente francs les cent kilogrammes ^
Les panicules égrenées et bien sèches sont mises en bottes et portées aux fabriques de Gri- solles qui ont peu à peu remplacé la production à domicile. Grisolles faisait autrefois de la cou- tellerie, elle possède encore un atelier pour cette fabrication. Ce grand bourg, aux maisons soigneusement blanchies, n'a guère d'autre édi- fice qu'une vaste église moderne et des halles en fer. Les environs se livrent à l'élevage du cheval; chaque année, des courses ont lieu sur un hippodrome très fréquenté.
Dans la plupart des habitations on travaille aux balais, mais les femmes préfèrent l'emploi à l'atelier, aussi se dispute-t-on les places dans les huit ou dix manufactures de Grisolles. A certaines heures, le passage des ouvrières qui apportent les balais finis ou vont rendre les ma- tières premières donne beaucoup d'animation.
I. Cette culture est confondue dans les statistiques décennales avec le millet. Dans les départements garonnais elle couvre : Haute- Garonne, ^78 hectares ; Lot-et-Garonne, 421 ; Tarn-et-Garonne, 347-
LOMAGNE ET RIVIERE VERDUN. 220
L'usine livre le sorgho simplement fixé autour du manche par des fils de fer disposés à l'aide d'une machine. L'ouvrière achève à domicile. Elle place le balai ébauché dans une sorte de mâchoire en fer qui maintient les brins dans la forme voulue, l'objet est aplati à l'aide d'un martinet de bois dont le mouvement est donné par le pied.
Ensuite, avec une forte aiguille et de la ficelle de couleur, l'ouvrière, armée d'un fort bracelet de cuir se prolongeant jusqu'à la main, procède à la couture. Cela ne va pas sans effort ; il faut trois ligatures pour faire un balai.
L'objet n'est pas à point, il doit être ébarbé par une section nette, c'est encore l'œuvre de l'usine, où la machine procède avec rapidité. Il y a six principaux établissements à Grisolles, le plus grand occupe quatre-vingts personnes pour la préparation et le finissage. Les manches em- ployés sont tirés des landes ou des bords mêmes de la Garonne, dont les peupliers servent à cet usage.
VOYAGE E>- FKANCE. XXXI. 15
XV
LA RIVIERE MONT ALBANAISE
Le pays de la brique. — Montauban. — Industrie de la soie. — Lafrançaise. — La Rivière du Tarn. — Villebrumier. — Entrée en Haute-Garonne. — Villemur et ses usines. — Le vignoble de Villaudric et de Fronton. — Pompignan et son château.
Montauban. Juillet.
Depuis que Montauban est le point de pas- sage pour les voyageurs allant de Paris aux Pyrénées par Toulouse, c'est la porte d'entrée du pays de la brique, autrefois ouverte dans l'Albigeois. Le voyageur a traversé des villes de pierre blanche dans le Berri, puis les cités de robuste granit du Limousin et, de nouveau, les calcaires vers la Dordogne et le Lot. Soudain, lorsqu'on a franchi l'Aveyron, c'est un autre inonde par la culture, les habitations, l'aspect général de toutes choses. En dépit de l'his- toire qui fit de Montauban une ville du Ouercy, c'est bien ici la région toulousaine, le pays de « terrefort » où le sol est d'argile et de marne
LA RIVIERE MONTALBANAISE. 227
mêlées aux cailloux roulés par le fleuve de Garonne.
Montauban elle-même est par excellence la cité de la brique, une brique d'un ton rosé, lisse, de peu d'épaisseur, se prêtant à merveille à l'ar-
chitecture, autrement noble et gaie à l'œil que la brique informe et rugueuse des villes du Nord comme Roubaix et Lille. Puis, sous ce ciel heureux, loin des brumes et des fumées, elle garde un ton délicatement chaud. Aussi les édi- fices ne prennent-ils pas l'aspect sévère qu'ils ont déjà, par exemple, vers Albi. Le pont de Montauban a été construit de i3o3 à i3i6, et
228 VOYAGE EN FRANCE.
pourtant les six siècles ne lui ont laissé aucune empreinte, sinon celle qu'il doit à son style ar- chaïque, à ses arches en ogive et à ses avant- becs.
Du parapet, la ville a de l'allure ; de grands édifices de brique, un amphithéâtre de toits en pente douce, les berges très hautes du Tarn, les maisons de la rive gauche ou Ville -Bourbon dressées sur ces falaises ou descendant jusqu'au flot, composent un site dont on se souvient. A l'entrée de la vieille cité, le débouché du pont est encadré par la Bourse et l'Hôtel de Ville où sont les musées. Ces édifices n'ont pas de grandes prétentions architecturales, mais la brique lisse, les lignes sévères , les sobres ornements leur donnent quelque beauté. Et, se souvenant qu'In- gres est de Montauban, on se prend à penser que cette netteté des formes architecturales, frappant ses yeux dès l'enfance, est peut-être pour quelque chose dans la précision du dessin chez le grand peintre montalbanais.
Dans l'axe du pont, un monument aux morts pour la patrie précède un square exigu, bordé de belles maisons modernes en brique avec des cordons de pierre blanche ; au fond est l'église Saint- Jacques, montrant au visiteur venu du Nord le premier spécimen de ces beaux clo-
LA RIVIERE MONT ALBANAISE. 229
chers octogones, marque du pays toulousain ; une haute flèche couronne la tour.
Derrière cette éghse s'étend la place Natio- nale, principale curiosité de Montauban. Elle est sur le plan de tant de places centrales dans les bastides de la région, mais elle a été bâtie au XVII* siècle et garde la marque de cette époque ; les maisons, hautes de trois étages et d'aspect monumental, sont portées sur des arcades. Aux quatre angles aboutissent des rues dont l'entrée est signalée par des porches formant arcs de triomphe. L'ensemble est majestueux mais sé- vère, à cause de la teinte de la brique et de l'uni- formité de l'architecture.
Autour de Ja place, les rues sont étroites comme dans la plupart des villes du Midi, mais propres et animées. Peu de monuments, à peine faut-il citer le beffroi appelé la Grande Horloge.
En dehors de ces vieilles artères une courte rue neuve longe l'insignifiante cathédrale, d'un lourd style classique, bâtie en pierre, dont la sacristie renferme une des œuvres capitales d'In- gres : le Vœii de Louis XIII.
L'ancien Montauban finissait là, des boule- vards et des allées marquent l'emplacement des remparts contre lesquels vint se briser l'armée royale commandée par Louis XIII en personne.
23o VOYAGE EN FRANCE.
Au delà s'étend fort loin, jusqu'au chemin de fer de Lexos qui si longtemps relia Montauban à Paris, un immense quartier neuf aux longues voies régulières dont les principales aboutissent à un rond-point voisin de la gare. Celle-ci a pris le nom de « Ville Nouvelle ». C'est une station de médiocre activité, la gare principale est de l'autre côté du Tarn, au faubourg de Ville-Bour- bon.
Derrière la cathédrale, la préfecture, précédée d'un square, est le point le plus vivant de la ville ; sur cette petite place et les allées de Mor- tarieu qui l'avoisinent sont les cafés élégants, le kiosque à musique, la promenade où il est de bon ton de se rendre. Dès neuf heures du soir, le reste de la ville est endormi, ici il y a foule.
Les allées de Mortarieu se prolongeaient par les allées des Carmes sur la haute terrasse au- dessous de laquelle coule la petite rivière du Tescou. On a voulu élargir la promenade, en la faisant porter sur un grand mur de brique qui aurait dominé un joli jardin public planté d'ar- bres méridionaux — il y a un olivier — mais le mur s'est écroulé, entraînant l'esplanade. Et il reste un désert de gravats au milieu duquel fait triste figure le monument d'Ingres par Etex. Il reproduit en bronze la fameuse Apothéose
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 23 I
d'Homère dont tous les personnages se mon- trent en demi-relief. Au centre de cet hémicycle est la statue du peintre. Le tout, entouré d'im- mondices et de débris. L'abandon est provisoire, me dit-on, on nettoiera quand on aura établi la terrasse.
Malgré les persécutions qui suivirent la ré- vocation de l'édit de Nantes, Montauban est restée une sorte de petite Genève. Les protes- tants y sont nombreux et influents, une des deux facultés de théologie de la religion ré- formée y est installée. Un séminaire pour les futurs pasteurs y complète un petit foyer d'études.
La ville doit à Ingres le développement de son musée qui serait bien pauvre sans les dons du peintre. La bibliothèque est riche. Il y a là un certain réveil de vie intellectuelle, plusieurs litté- rateurs du Quercy sont parvenus à la notoriété en restant fidèles à la province et à sa petite capitale, sans aller vivre à Paris.
Mais l'industrie est languissante, Montauban n'a pas profité de sa situation aux bords du Tarn navigable, de l'Aveyron qui l'est un peu et de la Garonne dont le canal latéral décuple la va- leur. On lui a donné un embranchement pour fa
232 VOYAGE EN FRANCE.
relier à ce canal, mais son port vient bien après celni de Montech, nn peu avant Dieapentale et Moissac'.
L'activité commerciale est due aujourd'hui aux produits du sol. Montauban est devenue un grand expéditeur de primeurs et de fruits, de raisins chasselas et de pêches surtout, elle envoie en quantité les gibiers et la volaille. Ses rivières font mouvoir les roues de grandes minoteries. Jadis elle était au rang des producteurs de soie, pour les bas notamment; il ne lui est resté que l'industrie , considérable encore , des tamis à bluter les farines. Plusieurs filatures y moulinent les soies provenant de cocons récoltés dans la région et trois usines utilisent ces fils pour tisser la gaze à bluter.
On fait encore un peu de sériciculture en Tarn- et-Garonne, sur les bords de l'Aveyron et du Tarn et dans le département voisin, le Tarn, où la vallée de l'Agout, vers Lavaur, possède d'assez nombreux mûriers. Le nombre d'éleveurs en 1900 fut de 289, peu de chose évidemment auprès des 186914 de la France, mais ils ont fourni à la consommation 7 SgS kilogrammes de cocons frais. Les deux cantons de Montauban sont ceux
I. En 1901 le mouvemenl a été de 8860 tonnes.
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 2 33
qui se livrent le plus à cet élevage ; d'après une enquête de i884, le poids de cocons par hectare était de o,45, tandis que ses voisins étaient bien au-dessous *. Il est certain que ces pauvres ré- coltes ne peuvent suffire aux besoins de Tindus- trie locale ; Montauban doit s'adresser aux Cé- vennes et à rExtrême-Orient.
D'autres petites industries existent dans la ville : comme toute la région elle fait des san- dales ; la fabrication du peigne paraît avoir essaimé de Villeneuve-sur-Lot, celle des cha- peaux de paille est venue de Caussade, mais sans posséder l'importance qu'elle a atteinte dans cette dernière ville. Jadis Montauban fai- sait un commerce considérable de sumac, il reste une seule maison pour la vente de cette plante à tannin.
En somme, l'importance de Montauban pour le mouvement des affaires est moins grand qu'à Agen, malgré une population plus nombreuse^. Aussi la succursale de la Banque de France ne vient-elle qu'au quatre-vingt-onzième rang
1. Caussade, o,oog ; Villebrumier, 0,08; Villemiir (Haute-Ga- ronne) ; 0,01 ; Toulouse, 0,08.
2. Population totale, 3o5o6; garnison, écoles, séminaires, etc., 5527. Il reste, de population municipale agglomérée, 17201. Plus de 7 000 habitants sont donc répartis dans les campagnes.
2 34 VOYAGE EN FRANCE.
pour le chiffre des affaires', après Le Puv, après nombre de villes bien moins populeuses, no- tamment, dans la région, Narbonne, Mazamet et Mont-de-Marsan.
Peu de villes, peu de gros bourgs dans les campagnes voisines. En aval, quand le Tarn a reçu l'Aveyron, le plus gros centre avant Mois- sac, Lafrançaise, est une commune de plus de
3 000 âmes, mais celles-ci réparties dans les ha- meaux et les bordes ou métairies ; il n'y en a pas mille dans le bourg, très vivant par le com- merce, grâce à sa situation à Tissue de la plaine, sur les premières pentes du Ouercy accidenté. La petite ville occupe une terrasse abrupte domi- nant le Tarn à plus de cent mètres, en vue de l'immensité de la plaine, des campagnes de la Lomagne, des Pyrénées et de la grande perspec- tive ouverte sur Toulouse par la Garonne. Cette bastide, construite vers 1270, n'a pas débordé son plan régulier. C'est le lieu de rendez-vous pour une grande partie du Ouercy par ses mar- chés et foires. Une de celles-ci, tenue le 29 sep- tembre, jour de Saint-Michel, est consacrée à la vente des chiens ; le 19 octobre a lieu une foire
I. 18662.300 fr. en igoi.
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 2.35
aux chevaux. La coquette industrie des fleurs artificielles s'est implantée à Lafrançaise.
Cette partie des environs de Montauban est peu accessible pour le visiteur, il n'y a guère d'autres moyens de communication que des voitures postales circulant surtout la nuit. Par contre, la vallée du Tarn, en amont, est desservie par une ligne de fer importante se dirigeant sur Castres, Mazamet et Bédarieux, et longeant la grande rivière jusqu'au confluent de l'Agout, qu'elle remonte ensuite.
La vallée du Tarn est plus belle que la plaine de Garonne, grâce aux collines qui viennent tomber à pic au bord du flot. A l'endroit où l'embranchement du canal latéral atteint le Tarn, les barrages qui soutiennent le plan d'eau donnent à la rivière la majesté d'un fleuve. Les deux rives sont couvertes d'arbres fruitiers, les mûriers, en très grand nombre, sont d'une belle vigueur; les pruniers, cerisiers, pêchers abon- dent, on cultive beaucoup le noisetier. Souvent quelque grand pin parasol ombrage une mé- tairie et donne de la majesté à ce paysage un peu monotone.
Cultures extrêmement variées. Blés et maïs d'abord, haricots, fèves, petits pois, beaucoup
236 VOYAGE EN FRANCE.
de vignes, surtout sur les coteaux de la rive droite. Chaque ferme a son pigeonnier, dont la l'orme particulière est la caractéristique du pays montalbanais. Ce sont de hautes tours carrées, construites en briques crues, enduites de chaux; le bas sert de magasin, la partie supérieure offre un toit en crémaillère, c'est-à-dire un toit inférieur occupant la moitié de la largeur, un autre plus élevé couvrant l'autre moitié. Entre les deux est le gîte des pigeons, où les oiseaux ont accès par de nombreux trous régulièrement disposés. Ces pittoresques constructions dépas- sent en hauteur les autres parties de la ferme. Celle-ci est généralement construite soit en pisé, soit en briques crues, la brique cuite est réser- vée pour l'encadrement des portes et des fenê- tres. Un enduit de teinte claire masque ces pau- vres matériaux, mais il s'écaille souvent et cela donnerait une allure lépreuse si le soleil, la lu- mière, l'opulence des cultures, quelques espa- liers vigoureux n'imprimaient au contraire de la beauté et de la couleur à toutes choses.
La coquetterie est réservée pour le colombier, souvent peint de couleur tendre, soigneusement crépi et badigeonné quand la demeure familiale reste nue sous son grand toit plat.
Tel est ce pays de la Rivière, comme on appelle
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 287
les rives du Tarn et de rAveyron, tandis que le massif de collines entre les deux cours d'eau se nomme le Ramier. Cette Rivière redevient pays vignoble ; vers Rressols et Gorbarieu on a beaucoup replanté. Les villages des ribiérencs se suivent au long du Tarn. Labastide-Saint-Pierre V mire une jolie église moderne; avec les pins parasols de la campagne, elle donne de Tallure au paysage. Reyniès est bâti à un passage de la rivière, Orgueil s'éparpille à l'écart. Tous ces villages fournissent des ouvrières à la grande fabrique de pâtes alimentaires de Villemur. Un train de marchandises partant le matin de Mon- tauban possède quelques wagons de troisième classe qui recueillent femmes et jeunes filles. Je Fai pris jusqu'à Nohic, pour gagner Villebrumier.
Nohic est un vieux village, dont l'église, bâtie à l'écart, est à la fois sinistre et charmante, sui- vant l'heure; toute menue, très vétusté, elle dresse un haut pignon de briques que les siècles ont décoloré. Le Tarn coule à une demi-lieue de là, au pied d'une terrasse qui porte cette partie du Ramier derrière laquelle le Tescou s'est creusé une vallée régulière et profonde.
Au bord même de la rivière, la bastide de Villebrumier, toute petite, mais d'une parfaite régularité, s'abrite dans une sorte de pli formé
238 VOYAGE EN FRANCE.
par la côte régulière. Ce n'est guère qu'un vil- lage, le dernier du Tarn-et-Garonne en remon- tant le Tarn ; à i 800 mètres à peine commence la Haute-Garonne.
Un chemin rural longe le Tarn, apaisé sous les barrages de navigation retenant ses eaux d'un vert sombre, que la moindre pluie tombée dans le Rouergue changera en flots rouges. Il aboutit à Villemur^ une bastide encore, mais mieux développée que Villebrumier, grâce à l'industrie et à sa position à un important pas- sage de la rivière.
Cette petite ville eut jadis une population de plus de 5 000 âmes, descendue à 4 000 aujour- d'hui ; la dépopulation a surtout frappé la partie rurale. Elle offre sur le Tarn un pittoresque décor, par ses hautes maisons de briques rouges portées sur des voûtes ou des terrasses, leurs galeries en surplomb, les balcons, les toits irré- guliers. La rivière, retenue par un barrage, fait mouvoir une grande usine sur la rive gauche ; de l'autre côté elle actionne un curieux moulin en forme d'abside, revêtu d'une haute toiture. La grande usine est une des plus puissantes fabriques de pâtes alimentaires de France, elle occupe six cents ouvrières venant pour la plu- part des campagnes voisines. Des fabriques de
LA RIVIÈRE MONT ALBANAISE. 289
gluten, des papeteries, une fabrique de carton- iiarjes, une autre pour la confection des mesures en bois et une soufflerie de poils complètent l'ensemble de manufactures qui a fait accroître Villemur.
L'intérieur de la ville est de médiocre intérêt, les rues étroites n'ofl'rent pas de constructions ayant quelque apparence, l'église est son unique monument. Le Tarn seul lui donne quelque attrait, il est la vie par ses grandes usines, la lumière électrique qu'il fournit et la navigation. Un joli quai ombragé le borde en amont.
Rien, cependant, ne retient longtemps ici, je m'en vais donc à Grisolles, à travers la plaine qui donnait les vins jadis célèbres de Fronton et de Villaudric que l'on commence à produire de nouveau.
Aussitôt le Tarn franchi et le petit quartier ouvrier de la gare traversé , on est en pleines cultures, le hameau de Magnanac est entouré de moissons blondes ; peu à peu elles semblent sub- mergées dans le vignoble de plus en plus étendu. Vignes basses à ceps noueux, divisées en larges rangées à travers lesquelles les bœufs au pelage d'un roux tendre conduisent la charrue ; les animaux sont accouplés par un joug très long.
2 4o VOYAGE EN FRANCE.
permettant de passer au-dessus des ceps sans les effleurer.
Villaudric apparaît, sa flèche blanche pointant très haut ; plus loin, Vacquiers dresse une autre flèche très effdée au-dessus d'un mamelon su- perbe.
Le chemin, par ses fossés et son étroit trottoir, sert de pacage aux oisons que des vieilles femmes ou des fillettes conduisent ; ces bestioles au duvet jaune sont en nombre invraisemblable. A chaque instant on en voit sortir des fermes aux grandes arcades, aux hangars dont les toits plats sont soutenus par des piliers, aux grands pigeonniers isolés. Cet ensemble évoque l'idée de la plaine lombarde.
Les fermes sont aussi des celliers, car la vigne est souvent maîtresse absolue du sol. Tous les vieux plants ne sont pas morts. Le produit est assez abondant pour qu'un seul acquéreur de Paris ait pu dernièrement faire un marché de plusieurs milliers d'hectolitres. Toute cette par- tie de la plaine est une argile grise très com- pacte que recouvre la nappe de ceps. Il n'y a de grande végétation qu'aux abords des hameaux et des fermes où les arbres fruitiers sont nom- breux et variés : pruniers, pêchers, coignassiers et noisetiers.
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 24 1
Sur le bord d'une terrasse ravinée est bâti Villaudric ; dans les constructions neuves les briques crues font place aux briques cuites alter- nant par assises avec les cailloux roulés. Dans son ensemble, ce pauvre bourg terreux est d'as- pect vétusté, on ne sait pas ici faire des murs de pisé comme autour de Lyon où l'on édifie avec la terre des bâtiments de plusieurs étages laissant une impression de force.
Beaucoup de maisons sont abandonnées, le phylloxéra ayant sévi. Cependant Villaudric reste fameux par ses vins. A Toulouse et dans tout le Lauraguais, le villaudric est la bouteille fine que l'on sert le plus volontiers. Ce cru et celui de Fronton son voisin sont les meilleurs de la Haute- Garonne; ils ont « plus de finesse, de délicatesse et de bouquet )> que les excellents vins de Tarn- et-Garonne.
Lorsque M. Rendu publiait son Ampélographie française. Fronton avait 1 827 hectares de vignes, Villaudric 525. Peut-être l'étendue est-elle en- core égale, car on a beaucoup reconstitué et le vignoble dépasse fort la surface en céréales. De Villaudric à Fronton on est sans cesse au milieu de ces rangées de ceps.
Fronton est un grand bourg construit en bri- ques crues, partie au long d'une grande route,
VOYAGE EN FRANCE. XXXI. 16
242 VOYAGE EN FRANCE.
partie autour d'une église dont le clocher est une haute tour carrée sans caractère. Les enca- drements de briques rouges des ouvertures, le badigeon, les grands auvents donnent un peu de pittoresque. Le commerce est assez actif, grâce à la vigne. De nombreux commission- naires en vins y ont leurs bureaux.
De la vigne, toujours de la vigne. La campagne en est monotone car on ne trouve plus ici les grandes fermes flanquées de leurs pigeonniers. Au bord du talus de la route croissent des cistes, que je ne m'attendais guère à trouver sur ce plateau si éloigné de la Méditerranée. Il faut atteindre le versant de la Garonne pour revoir les céréales.
De cette terrasse la vue est immense : d'un côté sur le versant du Tarn que je viens de par- courir, de l'autre sur la Rivière garonnaise semée de fermes et de hameaux ; le lleuve se devine à une large zone d'arbres qui en dessine les sinuo- sités. Au delà, Grenade montre son damier ré- gulier de maisons ; vers le sud, Toulouse dresse ses tours et ses flèches émergeant d'une brume légère '. Au pied de la côte s'étend Grisolles ; la
I. Sur Toulouse et Grenade, voyez la 38" série du Voyage en France.
LA RIVIÈRE MONTALBANAISE. 243
flèche élégante et svelte de son église surgit au-dessus des fauves toits plats. Dans un groupe d'arbres, le château de Fontanas apparaît, flan- qué d'une mince tourelle. A la sortie de la petite ville, le canal trace un étincelant sillon dans la plaine.
Un sentier entre les moissons conduit à Pom- pignan, de là on a sans cesse sous les yeux la plaine immense et les pentes molles entre les- quelles s'ouvrent, très évasés, la vallée de la Save et des vallons latéraux. De grands fenouils et des genêts en fleurs mêlent leurs odeurs péné- trantes. Voici Pompignan, village modeste qui semble écrasé sous la masse de son château, édifice de brique conçu dans le style classique. Cette belle demeure fut celle de Lefranc de Pompignan, qui dut une célébrité durable à son ode à J.-B. Rousseau. Ce magistrat, qui avait titre de marquis, fit reconstruire l'église, il vou- lut y être inhumé : c'est un temple assez simple, dressant au pied de la colline une tour carrée, en brique, couronnée de balustres.
Le village est entouré de champs de céréales d'une extrême vigueur. Arthur Young, en 1787, s'émerveillait de cette richesse agricole de « Pom- pinion » où il dîna au « Grand-Soleil, auberge excellente )>. La Beauce n'offre pas de blés et
2 44 VOYAGE EN FRANCE.
d'avoines comparables à ceux-ci. Mais les do- maines sont de peu d'étendue, pans de verdure aux teintes variées sur lesquels tranchent des guérets rougeâtres.
Tout à l'heure couvert, le temps s'est éclairci, le paysage s'agrandit, on voit peu à peu se dessiner le rideau merveilleux des Pyrénées bleuâtres, festonnées de neige.
A l'entrée du village un bruit gai de battoirs et d'eau jaillissante. Une fontaine tombe dans un bassin abrité par un toit de charpente. A côté sont les communs du château, drapés de lierre, encadrant une grille qui permet d'apercevoir des pelouses, de grands arbres, des corbeilles de roses. Gela semble un rêve, après les mono- tones étendues des vignes de Fronton. Le châ- teau couvre une haute terrasse de brique om- bragée de tilleuls et domine le village aux toits de tuiles projetés en auvents. Bien des maisons abandonnées, ruines navrantes car la brique crue s'est délitée sous la pluie. Pompignan, jadis animé par le roulage, a bien perdu avec le canal et le chemin de fer qui passent à ses pieds sans lui laisser voyageur ou trafic.
Près de l'église la mairie-école est précédée d'une allée fleurie de roses ; un vieux pigeon- nier, qui fut peut-être le colombier féodal du
LA. RIVIÈRE MONTALBANAISE. 245
marquis de Pompigiian, complète le site tran- quille.
Au long du canal bordé d'ormes et de frênes, coulant à la marge de la plaine couverte de maïs et de sorgho, le chemin de halage conduit à Gri- solles. Le sorgho est en champs réguliers ou en lignes encadrant le maïs. Celui-ci montre déjà ses panicules et ses épis ; le sorgho, plus haut et mince, n'a encore qu'une tige garnie d'un feuillage rubané et flottant.
XVI
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU OUERCY
Au bord de l'Aveyron. — Les pèches de l'Honor de Gos — Une ville gauloise disparue. — Real ville et le vallon de la Lère. — La fabrication des chapeaux de paille, son origine, ses dévelop- pements. — Les usines de Gaussade. — Quelques mots sur la production des tresses. — La ville de Gaussade. — Sur le causse. — Septfonds.
Septfonds. Juillet.
Ce n'est pas seulement la Garonne et le Tarn qui parcourent l'immense plaine montalbanaise, r.Vveyron la borne vers le nord et ses rives ne sont pas la partie la moins riche et la moins fertile du superbe terroir. L'abri du massif quercinois crée une zone privilégiée par la douceur du cli- mat; le sol, meilleur, se prête mieux aux cultures maraîchères; là s'alimente le commerce de pri- meurs de Montauban, en voie de progression constante. La course à travers cette partie de la plaine, par la route de Cahors, offre plus de gaîté, grâce aux arbres et aux belles maisons rurales ayant toutes le classique pigeonnier.
Sous l'écran des collines, véritable espalier
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 2 47
au soleil du midi, les pentes de rAveyron sont plus belles encore. On y récolte la superbe pêche à noyau non adhérent, appelée l'Honor de Cos et plus connue dans le commerce comme pêche de Montauban. Le fruit est gros, dur, à chair jaune. Son nom singulier d'Honor de Cos est celui d'une commune couvrant le sommet des collines et les pentes de riants vallons où sont disséminées les habitations rurales, car il n'y a pas de village, malgré la population de plus de I 200 âmes. Quant à Cos, c'est un hameau occu- pant une abrupte terrasse des bords de TAvey- ron, il a succédé à la cité gauloise de Cosa, longtemps florissante par le commerce et dé- truite sans doute par les barbares. Une autre commune, Picquecos, en garde également le sou- venir. Cos n'est pas même une commune, il dépend de Lamothe-Capdeville.
Si les hauteurs et leurs vallons bien exposés au soleil sont le domaine des arbres fruitiers, les bords de la rivière offrent d'admirables cultures de blé, de maïs, de luzerne, de pommes de terre. Vers Albias les deux rives sont d'une extrême opulence. Elle a frappé des Anglais, fabricants de conserves en quête de matières premières pour leurs chers pickles ; ils ont proposé aux habitants de Cayrac de se livrer à la culture des cornichons.
248 VOYAGE EN FRANCE.
jusqu'alors confinée autour de Toulouse. Les Gayracois ont accepté, les essais se font avec assez de succès jusqu'à présent, peut-être va-t-il se créer là une de ces spécialités de cultures de plus en plus nombreuses dans notre pays.
Le choix de Gayrac s'explique : la fertilité du sol est extrême, les collines abritent des vents du nord, la Lère et TAveyron arrosent ce terroir. Il est peu de coins plus favorisés en France que les bords inférieurs de la belle rivière venue des causses et où les poissons se jouent en foule.
A l'entrée de la petite vallée de la Lère, la bastide de Réalville s'étend au pied d'un coteau planté d'arbres fruitiers. Au-dessous, la rivié- rette coule entre les prés et les cultures. Le site était admirablement choisi pour une ville, mais le centre d'attractions reste à Gaussade et s'y maintient d'autant plus que celle-ci est deve- nue une cité industrielle très vivante, dont le nombre d'habitants, après avoir fléchi, s'est re- levé à mesure que la population ouvrière était davantage attirée. Gas bien rare dans ce pays purement agricole où chaque dénombrement constate une navrante décroissance ^
I. De 3747 habitants le nombre s'est élevé en moins de dix ans à 4 5o8, dont 8017 de population agglomérée.
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 249
Cette activité est due à la confection des cha- peaux de paille, née dans une petite ville du voisinage, Septfonds, où elle se maintient encore, très vivante. On a pu en retrouver l'origine. D'après un article d'un journal de Montauban', elle remonterait à 1798; les premiers essais seraient dus à une bergère nommée Pétronille Cantecor, qui imagina de tresser de la paille de seigle ou des brins de jonc, puis de coudre les tresses pour en faire des chapeaux. Elle réussit, créa un petit commerce et fut bientôt obligée de former des élèves. De Septfonds, on alla ven- dre à Gaussadcj puis à Montauban et jusqu'à Toulouse. Les rustiques coiffures confectionnées dans les veillées de Septfonds se répandaient peu à peu ; après les champs de foire du Quercy, du Rouergue et du Languedoc, elles allèrent plus loin encore. Les fabricants de chapeaux de Lyon et du Dauphiné eurent vent de cette con- currence, mais, bien avisés, ils profitèrent de cette main-d'œuvre à bon marché pour s'appro- visionner à Septfonds des tresses nécessaires à leur industrie.
Déjà la petite ville isolée sur le premier gra-
I. Résumé par M. Gébelin dans le Bulletin de la Société de géographie de Bordeaux.
2 Do VOYAGE EN FRANCE.
din des causses commençait à livrer des pro- duits moins rudimentaires. Pélronille Cantecor dirigeait toujours sa maison, devenue impor- tante à partir de i83o; à côté, d'autres étaient nées. On ne se borna pas à produire la tresse : puisque le Dauphiné faisait des chapeaux de meilleur goût, plus élégant, on irait chercher des ouvriers là-bas. Ainsi fut fait. En pleine crise politique, en 1849, on voyait enfin Septfonds entrer en lice pour les articles de choix.
Quelques années encore furent nécessaires pour passer du petit atelier à l'usine, il fallut l'époque de prospérité dont les deux termes furent la guerre de Grimée et la guerre du Mexique pour faire pénétrer l'usage du chapeau de paille, objet de faible durée, parmi les gens habitués de tous temps au chapeau de feutre, presque inusable. Le règne des machines com- mençait, machines à coudre les tresses, machines pour la mise en forme, etc. L'ouvrière la plus ac- tive pouvait à peine faire dix chapeaux par jour, la machine à coudre permit d'en faire quatre à ciiu{ fois plus. La machine elle-même se perfec- tionne sans cesse^ d'abord mue par le pied de l'ouvrière, elle a reçu le concours de la vapeur; à son tour l'électricité pénètre dans la fabrication.
Il vint un moment où, malgré ses accroisse-
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 25 1
ments successifs', Septfonds ne put suffire aux demandes. Alors l'industrie se porta à Caussade. Elle eut des capitaux et put faire grand. L'impor- tateur de la fabrication, M. Rey, est aujourd'hui à la tête de la production, il est maire de la ville et a reçu la croix de la Légion d'honneur des mains de M. le président Carnot pour le développement qu'il a su donner à ce groupe de fabriques.
Cet exode n'a pas suffi, pour trouver la main- d'œuvre, d'autres maisons sont allées s'installer à Montauban, à Réalville, à Servanac, à Saint- Antonin.
Mais quel changement ! La bonne vieille tresse de paille de seigle, faite à la veillée dans les métairies du causse, n'est plus ! Du moins, on en fait si peu que cela est à peine à signaler. Pour leurs matières premières, Caussade et Sept- fonds ont surtout recours à la Chine et au Japon, à l'Italie, la Suisse et la Belgique. La Chine fournit la tresse usuelle, celle dont l'emploi est classique ; le Japon envoie des pailles mieux travaillées, destinées au bel article de fantaisie ; l'Italie fournit les tresses les plus fines, la Bel-
I. Septfonds n'avait pas plus de 800 habitants quand l'industrie y naquit; en 1861, au début de l'emploi des machines, le nombre s'élevait à 1 2o3 ; vingt ans après, à i 869 ; au dernier recense- ment, 1901, il est de 2 871.
2 52 VOYAGE EN FRANCE.
gique produit entre Liège et Maëstricht une tresse légère destinée à former le dessous de bord des chapeaux. Enfin la tresse du pays, dite de Toulouse, produite dans le Lot-et-Ga- ronne, le Tarn-et-Garonne et le Lot, entre pour une faible part dans la confection des chapeaux, elle est très ordinaire et « moins avantageuse » que celle de l'extrême Orient.
Il y a quelques années encore, nous étions tri- butaires de l'Angleterre pour l'approvisionnement en tresses de Chine et du Japon ; celles-ci allaient s'entreposer, se faire teindre et blanchir dans la ville de Luton qui est le Gaussade anglais, d'où elles revenaient en France grevées des droits et bénéfices des intermédiaires. Les commerçants du groupe lyonnais ont fait des efforts pour atti- rer directement ces produits. Aujourd'hui la France reçoit par Marseille une quantité de tresses de Chine supérieure à celle que nous fournit l'An- gleterre. Il est hors de doute que nous arriverons à nous débarrasser du tribut en créant des ate- liers de blanchissage, de teinture et d'apprêt ^
Les deux petites villes du Ouercy n'ont pas
I. Voici, d'après la statistique de igoi, la quantité de tresses de paille tirées de l'étranqer par la France : Chine, 669 680 kilo- grammes ; Angleterre, 675 885 ; Italie, 343 662 ; Suisse, 255 643 ; Japon, g5 i33 ; Belgique, 64 334; Allemagne, 19962.
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 2 53
encore d'agents en Chine, elles font leurs achats par l'intermédiaire de commissionnaires, cepen- dant l'importance de leur production permettrait des relations directes avec ces pays lointains dont elles tirent leurs « cantons », du nom du port principal de provenance. La valeur des affaires atteint, dans le groupe, de cinq à six millions de francs. On compte une quarantaine de fabriques. Septfonds seul en a vingt-deux, dont quatre très importantes. Caussade n'en compte que quatre, mais égales à Septfonds tout entier pour la quan- tité de produits. On fait dans les deux villes de 4 000 à 5 000 chapeaux par jour ; la gare de Caussade, qui sert en même temps à Septfonds, envoie i5oooo caisses dans l'année pour toutes les directions, France, colonies et étranger.
Je visite Caussade pendant la morte saison. M. Rey fds, qui a bien voulu se faire mon guide, me dit que le travail s'est ralenti depuis le commencement de juillet et cessera bientôt pour reprendre seulement en septembre et oc- tobre. Tous les commerçants en chapeaux de paille sont approvisionnés maintenant, et la mode pour l'an prochain n'est pas encore dessinée. On profite de ce chômage pour préparer les modes nouvelles et faire les collections de voyage qui ne comprennent pas moins de 200 types en
2 54 VOYAGE EN FRANCE.
moyenne. Avec les débouchés sans cesse ouverts dans les pays ensoleillés, le chômage diminue peu à peu ; déjà certaines années laissent à peine le mois d'août pour fermer les ateliers et pro- céder aux réparations. Si je n'assiste pas à la grande fièvre du travail, les ateliers de MM. Rey ont encore beaucoup d'ouvrières; entre leurs mains se déroulent les blanches tresses qui prennent rapidement la forme plus ou moins précise d'un chapeau. Ce rudiment sorti de la machine se nomme cloche.
Gaussade et Septfonds possèdent 2 000 ma- chines de divers systèmes pour la couture.
En quittant les ateliers de couture, les cloches vont auxatehers de dressage. Jadis le travail de mise en forme, qui donne au chapeau son aspect définitif et sa rigidité, se faisait à la main, il était très pénible. Depuis 1866, époque 011 la machine à coudre fit également son apparition, le dres- sage est fait par des presses hydrauliques; les deux centres en comptent 200. Le chapeau est disposé sur un moule en métal chaufTé au gaz, sur lequel la presse vient appuyer. Chaque fabri- que produit elle-même son gaz.
Les machines sont très ingénieuses ; parmi les plus récentes il en est qui font des coutures invi- sibles et donnent aux chapeaux ainsi préparés
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 2 55
l'aspect des chapeaux tressés de toutes pièces dans rAmérique centrale, ou des chapeaux rem- maillés fournis par la Toscane.
Tout en ayant sa forme et sa rigidité, le cha- peau n'est pas achevé; il faut mettre la coiffe qui est tissée et préparée au Put, la garniture de cuir, le ruban, le galon de bordure s'il y a lieu. Tout cela nécessite encore beaucoup de femmes aux ateliers ou à domicile, les hommes sont uni- quement occupés au dressage.
Pendant que je note ces particularités, mon aimable guide me montre une multitude de cha- peaux dont la commande est récente et qu'il faut envoyer en hâte : ils sont destinés aux em- ployés d'octroi de Paris, à qui l'on veut adoucir les rigueurs de cet été caniculaire. Dans un autre atelier, j'assiste au travail délicat du dressage des chapeaux de rotin. Les cloches de cet ar- ticle de luxe arrivent àCaussade dans les caisses qui ont transporté à Java des allumettes de Suède.
A Caussade la main-d'œuvre est payée à façon ou à la journée. Les salaires varient de 2fr. 5oc. à 4fr- pour les hommes, de i fr. 5oc. à 3 fr. pour les femmes. Ce sont des chiffres modestes, mais dans ce doux pays où la vie est facile, ils repré- sentent une somme bien plus élevée qu'ils ne le
2 56 VOYAGE EN FRANXE.
feraient dans le Nord. Sauf le chômage annuel régulier, de plus en plus restreint, survenant d'ailleurs à une époque de l'année où il y a moins de privations, le travail est constant, grâce à l'intelligence des industriels qui ont su ouvrir des débouchés et sont parvenus à chasser les concurrents étrangers du marché français. De ces rivaux, les plus dangereux étaient les An- glais, qui ont dans leur ville de Luton, en Bed- fordshire, la manufacture la plus considérable du monde pour la fabrication du chapeau de paille el surtout pour la préparation, le blanchissage et la teinture des tresses. Cette ville de 35ooo âmes possède plus de loo usines ou grands ateliers. Un tel centre est assuré d'énormes débouchés par l'étendue du domaine colonial britannique. En Suisse, la petite cité argovienne de Wohlen est le cœur de la production, nous lui achetons des tresses pour une somme considérable; la Toscane, où l'on fait directement la tresse avec la paille du pays, est moins une concurrente pour nous qu'une des sources d'alimentation pour les produits de quaUté supérieure'. L'Allemagne, qui
I. J'ai déjà parlé de la fabrication des chapeaux de paille dans diverses séries du Voyage en France : 'j^ (Saint-Symphorien-siu"- Coise), chap. IX; cf (Saint-Georges-d'Esperanche), chap. II; 22^ (Nancy), chap. VII.
LES CHAPEAUX DE PAILLE DU QUERCY. 2D7
possède ses principaux établissements à Lin- denberg en Bavière et à Dresde, et la Belgique ne sont plus considérées par nous comme des rivaux dangereux.
En France deux autres groupes de chapellerie de paille : Nancy et la région lyonnaise avec ses ateliers de Lyon, Saint-Symphorien-sur-Coise, Saint-Georges-d'Espéranche et Grenoble, cons- tituent les grands points de fabrication, ils ont ce qui manque à la contrée de Caussade : les usines de teinture et de blanchiment.
Cette intéressante industrie a été favorisée par notre régime douanier qui, considérant la tresse comme une matière première indispen- sable, ne la frappe pas, et, par contre, impose des droits élevés aux produits fabriqués. Cette législation favorable a fait cesser l'invasion du marché français par les chapeaux anglais et alle- mands.
La ville de Caussade est avenante, grâce aux boulevards ombreux qui l'enveloppent, à son jardin public, aux belles constructions de cette ceinture gagnée sur l'emplacement des fortifica- tions. A l'intérieur, c'est une vieille cité aux rues sinueuses, bordées de hautes et sévères cons- tructions de brique. Au cœur, l'église recons-
VOYAGE EN FRANCE. XXXI. 17
2 58 VOYAGE EN FRANCE.
truite a gardé de l'édifice primitif une belle tour octogonale de style toulousain. D'une construc- tion massive entourée de créneaux s'élance cette tour à trois étages, de hautes fenêtres jume- lées se répètent sur chacun des huit pans. Au- dessus se dresse une belle flèche à crochets. Il n'y a pas d'autre monument, à moins de donner ce nom à l'ample maison bourgeoise qu'habita M. de Maleville.
Gaussade est un petit centre agricole assez vivant, grâce à de riches campagnes qui élèvent beaucoup de volailles dont la qualité est renom- mée. Bâtie au pied du causse, dont elle a pris le nom et qui, appelé causse de Saint-Antonin ou de Gaylus, est l'extrémité du causse de Li- niogne, elle doit à ce sol calcaire d'être déjà un producteur de truffes.
La rivière de Lère forme pour ainsi dire la bordure du causse et le sépare du pays strié de vallées appelé le Ouercy-Blanc en laissant à l'écart sur le plateau la petite ville de Septfonds encore plus exclusivement vouée que Gaussade à la fabrication du chapeau de paille. Une route absolument droite réunit les deux villes, sépa- rées par 7 kilomètres; elle s'élève insensiblement depuis Gaussade, située à iio mètres, jusque
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sur le causse, à 198, d'où elle descend dans le bassin de Septfonds.
De grands platanes font de cette large voie une majestueuse avenue. De chaque côté le sol, d'une terre rouge, offre le même aspect de ri- chesse agricole que les plaines du Tarn et de l'Avejron, cependant les maisons rurales sont
moins vastes; à peine çà et là quelques grandes fermes flanquées du haut pigeonnier sur lequel les oiseaux roucoulent.
Les habitations font partie de la commune de Monteils, qui ne possède aucun village et dont le territoire forme comme le perron, aux pentes douces, du causse. Les vues deviennent gran- dioses, on voit surgir des collines portant à leur
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sommet d'antiques bourgades féodales conser- vant un I)e]li({ueux aspect. Montalzat, bastide du xm* siècle, coiffe une de ces collines, à 3oo mètres d'altitude, et commande d'immenses ho- rizons sur le bas Ouercy, le Ouercy-Blanc et l'.Vgenais. Ces bourgs ainsi juchés sur des som- mets semblent encore en sentinelles, bien que depuis des siècles la paix se soit faite dans ce pays que tant de sang arrosa. Leurs noms ré- vèlent ce caractère dominateur : Montpezat, Montalzat, Mirabel...
Le causse devient rocheux à mesure qu'on y accède, des blocs ou des dalles calcaires servent de limites aux champs. Si l'on construit encore un peu en briques crues, comme dans la plaine, la plupart des maisons sont en gros moellons et les hangars sont soutenus par des piliers de pierre brute. Sur la dalle rocheuse, la terre est assez épaisse, les bœufs retournent cette glèbe rougeâtre. Les espèces ici se mêlent : la race garonnaise montre encore ses attelages d'ani- maux à la robe claire, d'autres . attelages sont composés de bœufs de Salers à la puissante ossature, au pelage sombre. Dans les enclos beaucoup de poulains et de jeunes mulets, dont on fait l'élevage.
Le hameau de Dardenne borde la route, un
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pigeonnier surmonté d'une flèche d'ardoises sem- blable à celle d'une église se dresse au bord de la route dont c'est ici le point culminant. Une grande cuvette se creuse, sorte d'affaissement du causse; au fond apparaît Septfonds, derrière laquelle le terrain se relève en une pente ver- doyante rayée par le ruban blanc des routes.
Le causse s'étend à l'est, plateau ondulé jus- qu'aux petits monts qui bordent l'Aveyron vers Saint-Antonin ; du côté opposé Puylaroque, Montalzat et Montpezat semblent avoir grandi.
Voici Septfonds, grand damier de rues régu- lières étalées dans le verdoyant bassin. C'est une bastide, œuvre de ce grand bâtisseur de villes qui avait nom Alphonse de Poitiers. Le plan gé- néral est celui d'un triangle dont un des côtés limite la ville. Le fondateur avait choisi le site occupé par une abbaye dont l'église est devenue celle de la cité nouvelle.
Septfonds conserve sa régularité et ses rues tracées au cordeau. Les vieilles habitations de poutrelles et de torchis se profilant en ressaut, ont presque toutes disparu. Le bien-être amené par l'industrie a fait construire des demeures de pierre, , plus confortables, mais aux façades plates et monotones. Des fils électriques vont partout, apportant la lumière et la force. Le
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courant, produit par une chute de la Lère, est conduit jusqu'à Caussade.
Sur les portes quelques vieilles femmes font encore la paillole, tresse de paille fine et flexible du causse ; c'est avec la production de Puy- laroque, de Lalbenque et de Cayliis le vestige d'un travail jadis général dans la contrée.
De grandes bâtisses abritent les ateliers, les fenêtres ouvertes laissent apercevoir les ou- vrières, femmes et jeunes filles, qui cousent la tresse, placent les rubans et les coiffes aux cha- peaux. Quelques-uns de ces établissements sont vastes, mais la plupart, de modestes dimen- sions, donnent peu l'aspect industriel. Les cons- tructions nouvelles répondent mieux aux besoins d'hygiène, les ouvertures sont de grandes baies par lesquelles pénètrent à flots l'air et la lumière. Jusque dans la campagne, au long des chemins et des routes, entre les prés et les vignes, on rencontre ces ateliers et l'on aperçoit les ouvriers travaillant au dressage des chapeaux.
XVII
LES GORGES DE l'aVEYRON
La gare de Lexos. — Au long de l'Aveyron. — Les rochers du causse . — Saint-Antonin. — Le plus vieil hôtel de ville de France. — La vallée de la Bonnette. — Les phosphates du Tarn-et-Garonne. — Gouffre de la Goule. — Caylus. — Sur le causse. — En descendant l'AvejTon. — Penne et Bruniquel. — Montricoux et Négrepelisse.
Montauban. Juillet.
On sait combien certaines gares de la Com- pagnie d'Orléans sont amples et coquettes. Par un souci bien rare chez les ingénieurs, ceux-ci ont pensé que les chemins de fer, pour être mo- dernes et utilitaires, pouvaient cependant avoir un caractère architectural. De même que les ingénieurs militaires d'autrefois, les d'Argen- court et les Vauban, ne dédaignaient pas d'ap- porter des préoccupations d'art dans leur plan, de même quelques-uns des constructeurs de ce réseau ont su créer des œuvres charmantes. La ligne de Vendôme est à ce point de vue une
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chose unique. Mais çà et là, sur le réseau, d'au- tres jolies stations ont été édifiées.
Celle de Lexos est un petit bijou, d'autant plus surprenant qu'il se trouve en pleine soli- tude. Il n'y a pas de commune de Lexos, mais un hameau de quelques feux dépendant de la commune de Varen en Tarn-et-Garonne et bâti au bord de l'Aveyron, dont la rive gauche est dans le département du Tarn. Le chemin de fer de Paris à Toulouse par Gapdenac abandonne la rivière pour aller dans le sud, laissant à l'écart la ville de Montauban. Afin de relier celle-ci à Paris, on a construit un embranchement au long de l'Aveyron. Longtemps importante, cette ligne est fort secondaire depuis qu'une voie moins accidentée et plus directe conduit de Limoges à Cahors et à Montauban.
Quand fut construite cette ligne de l'Aveyron, on ne prévoyait guère la création d'une rivale outillée pour les grands trains, et Lexos sem- blait destinée à rester une des importantes bifur- cations du réseau, c'est pourquoi la gare fut non seulement ample, mais monumentale aussi par la beauté des proportions et des lignes et l'heu- reux mélange de la pierre et de la brique.
Maintenant l'aimable édifice est endormi ; voici plusieurs fois que le hasard de mes courses
LES GORGES DE l'aVEYRON. 265
m'amène à Lexos et je suis toujours seul au buffet devenu hôtel. Peut-être, quand cette su- perbe région du Quercy, de la Marche du Rouergue et du haut Albigeois sera mieux con- nue, Lexos deviendra-t-il centre pour le tou- risme. Le chemin de fer, entre Lexos et Montri- coux, vaut à lui seul une visite.
Plusieurs vallées s'ouvrent sur ce point, tou- tes belles, mais diversement. La plus longue, celle du Gérou, apporte à l'Aveyron les eaux nées autour de la noire Carmaux et qui ont coulé au pied de l'amphithéâtrale Cordes ' ; en amont la Baye, un peu plus bas la Seye, descen- dues au fond de couloirs creusés dans le causse de Limogne. Mais le vrai joyau du pays, une des merveilles du Midi, c'est la vallée de l'Avey- ron elle-même, dans cette courte partie de son cours où la rivière sépare le Quercy de l'Albi- geois.
Combien cette contrée diffère de la plaine montalbanaise, pourtant si proche ! Les collines, très hautes, rapprochées, sont en partie cou- vertes de châtaigniers, ces arbres alternent avec les cultures et les prairies. Peu à peu ces pe- tits monts s'escarpent encore, le rocher appa-
I. 35e série du Voyage en France.
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raît près de Fenavrols, hameau commandé par les restes d'une forteresse : tour et corniche de mâchicoulis. Au bord de l'Aveyron, une cons- truction vitrée porte une inscription : Fenayrols- les-Bains. Il y a ici quatre sources d'eaux froides, sulfatées calciques mises récemment en exploi- tation : Bombouzole n°^ i et 2, l'Église et Ville- neuve.
Dans cette gorge où les beaux matériaux abondent, les constructions ont de l'élégance et de la couleur; près de Teussac un colombier de belle allure se mire dans la rivière, lente et pro- fonde, assombrie par les hautes roches de la rive gauche. Sur la rive droite, jusqu'à Saint-Anto- nin, il y a beaucoup de vignes, bien tenues, sur- tout dans la partie reconstituée.
Les rochers rappellent les murailles des grands causses ; par leurs formes et leur hardiesse ils ont fait naître la légende. L'un d'eux, le roc Dansaïre, passait autrefois pour le rendez-vous des sorcières qui venaient y danser au clair de la lune. Plus loin ces parois s'escarpent encore, les plus belles se nomment les rochers d'An- glars, leur crête domine de 260 mètres les bords de la rivière et la petite ville de Saint- An- tonin, assise au confluent de la Bonnette et de TAvevron.
LES GORGES DE l'aVEYRON. 267
Un pont du xni^ siècle, qui a perdu une grande partie de son caractère par suite de son élar- gissement, franchit rAveyron et conduit dans cette ancienne petite ville, si curieuse et pitto- resque, qu'il faudrait préserver avec soin de toute transformation. Sauf les moulins à phos- phate installés sur la rivière, rien n'est venu en- core en troubler l'aspect archaïque. Saint-An- tonin n'eût-elle que ses maisons gothiques ou romanes, ses portes sculptées, ses ruelles aux perspectives imprévues qu'elle serait chère aux Français épris des vieilles choses de la patrie. Mais elle a mieux encore : la doyenne de nos maisons communes, une habitation noble cons- truite vers iioo et aménagée en 1269 pour ser- vir d'hôtel de ville. Depuis lors, elle n'a pas cessé d'être le lieu de réunion pour les élus de la cité. Dans le cours de tant de siècles elle avait subi bien des outrages, mais elle restait robuste avec ses arcades où l'arc brisé s'es- seyait, ses fenêtres romanes divisées par d'élé- gantes colonnettes aux chapiteaux révélant la verve et l'énergie d'une belle époque d'art. Au premier étage, une rangée de colonnettes est disposée en claire-voie séparée en trois parties par deux piliers. La grande salle est éclairée par les fenêtres qui, dans chaque travée, occupent
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les intervalles entre les colonnettes. Un beffroi carré flanque le vénérable édifice auquel Viollet- le-Duc, grand restaurateur s'il en fut, a rendu son caractère : plus peut-être qu'il eût convenu, disent certains archéologues.
Ce joyau semble insuffisamment respecté, des affiches souillent les murs et les frêles colonne? sont reliées par des fils de fer destinés à supporter des lampions aux jours de réjouissance publique.
La partie de la ville située aux abords de la rivière abonde en vieilles maisons de briques enchâssées dans la carcasse de charpente ; sou- vent les portes ogivales sont timbrées d'écus- sons disant que Saint-Antonin fut un séjour de gentilshommes. Dans des ruelles étroites, pau- vrement habitées aujourd'hui, on trouve aussi des vestiges d'un passé plus opulent; de grandes fenêtres à meneaux ont été murées par économie de vitres, on n'y a gardé qu'un jour rare.
11 manque à ce tableau une église d'autrefois; celle qui dresse aujourd'hui une belle flèche est un diminutif de cathédrale gothique à trois nefs ; si l'œuvre est intéressante , il lui manque ce parfum du passé dont le reste de la cité est im- prégné.
Non seulement Saint-Antonin a conservé l'as- pect du vieux temps, mais elle a même des in-
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dustries dont le nom est toute une évocation d'antiques coutumes. On y fait des serges, des cadis et des bourrats.
Pour préparer ces tissus servant encore à habiller les habitants des causses et de l'Albi- geois voisins, Saint-Antonin a ses fdatures, ses marchands de laine et des teintureries. La con- fection des sangles et des surfaix qui occupe tant de bras à Penne s'y est également implan- tée. Enfin, pendant quelque temps, on put croire qu'un vent de fortune soufflait sur le pays avec la découverte des phosphates sur le causse. Ces roches étaient broyées dans les usines échelon- nées sur la Bonnette et l'Aveyron. On en extrait encore, mais bien des poches sont épuisées. Même en 1901 la production fut nulle. « La seule carrière exploitée l'année précédente a été abandonnée à la suite de travaux de prospection n'ayant donné aucun résultat » dit l'ingénieur des mines dans son rapport au conseil général. Peut-être les recherches seraient-elles plus ac- tives sans la concurrence des phosphates d'Al- gérie et de Tunisie.
Les poches qui contenaient la phospliorite se trouvent au nord-ouest de Saint-Antonin, sur la partie du causse étendue entre Septfonds et Caylus. Bien que les exploitations soient mortes
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OU plutôt endormies j'ai voulu mettre le pied sur le causse, déjà parcouru jusqu'à Septfonds. On peut l'atteindre directement en suivant la route qui, dès Saint-Antonin, s'élève sur les hautes parois de cette sorte de canon au fond duquel se tord l'Aveyron, mais j'ai préféré remonter jusqu'à Gaylus par la vallée de la Bon- nette.
La route forme autour de Saint-Antonin un large boulevard planté d'ormes puissants et touffus et se prolonge sous les platanes au long de la riviérette aux eaux vives, à chaque instant retenues par des barrages destinés à faire mou- voir les moulins à phosphate qui s'échelonnent jusqu'à Gaylus. Il y en a six sur ce parcours de 12 kilomètres, trois autres fonctionnaient à Saint-Antonin même et l'on en comptait trois sur l'Aveyron, un en amont, deux en aval. En ce moment ces usines n'ont plus à broyer les phosphates rougeâtres dont la poussière a ma- culé les murs.
Les retenues de la Bonnette animent le pay- sage par leurs petites cascades. La vallée est profonde, bien encadrée ; parfois les pentes se dressent en fauves falaises. La vigne couvre de nouveau les coteaux ; tout cela est très méri- dional d'aspect. Dans une sorte de cirque, le
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vieux petit château de Monge, très défiguré, conserve deux tourelles carrées.
Par un vallon tortueux et encaissé, une autre rivière atteiut la Bonnette et vient faire mouvoir les roues d'une scierie et d'une tannerie qui forment le hameau du Martinet. Ce petit cours d'eau sort d'une abondante source appelée la Goule, issue d'un des mystérieux abîmes qui criblent le causse. L'eau est d'une admirable transparence ; à certaines époques, le gouffre dégurgite des flots troubles, sans doute après quelque violent orage autour de Septfonds.
En amont, la vallée devient fort belle. Sur la rive gauche, elle se plisse en d'admirables combes séparées par des collines bien décou- pées projetées en promontoires; au sommet et sur les pentes sont des maisons blanches et le vieux château de Malterre aménagé pour l'exis- tence moderne; au fond se suivent les moulins à phosphate, sous leur couche de poussière ocreuse. Tout cela large, riant, lumineux, en- touré d'une intense verdure. Des hameaux se ju- chent très haut, ainsi celui de Joanny qui couvre un rocher à 875 mètres d'altitude, dominé lui- même par le signal de Saint-Rome qui en a Sgi.
Sur l'arête du causse il y a beaucoup de mai- sons, cette vallée est couTcrte de constructions.
272 VOYAGE EN FRANCE.
dont beaucoup fort anciennes. Ainsi, sur la rive gauche, le vieux caslel de Gos, fort rébarbatif avec ses murailles et ses tours noirâtres avoi- sinant une chapelle.
Soudain apparaît Caylus, dominé par un pan fauve de donjon ruiné, dressé sur un rocher isolé, et un château neuf ou trop restauré. La ville occupe le fond d'un cirque encadré par les parois du causse ; les toits bruns s'éparpillent en amphithéâtre. Au milieu s'élance la flèche de l'église.
La bourgade est exiguë et simple. La vie est toute sur la route de Septfonds qui décrit une grande boucle pour s'élever sur le causse, là sont les auberges et nombre de boutiques. L'in- térieur est plus curieux, l'église possède un joli chœur et de hautes verrières ; en face est une maison gothique ornée de médaillons sculptés. Sur la place, dont un des côtés a une galerie d'arcades ogivales, de vieilles halles en lourdes et massives charpentes reposent sur des piliers de pierre. Près de là, une maison gothique con- serve une jolie porte.
Une boutique annonce par une pancarte de la bijouterie de Livron. J'entre pour faire quel- que acquisition d'objets que je suppose avoir un cachet local. On m'offre des médailles, des croix,
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des chapelets, souvenirs d'un pèlerinage àNotre- ])ame-de-Livron, chapelle construite en i3o2 et, depuis lors, lieu de réunion des fidèles. Le petit édifice a été construit près d'une des abon- dantes sources issues d'un abîme au pied du causse, non loin du vieux village de la Capelle- Livron, intéressant par ses ruines féodales et son église romane. Toute cette vallée supé- rieure de la Bonnette abonde en sites singuliers ; un habitant de Gaylus m'en parle avec enthou- siasme ; il voudrait me conduire à Saint-Projet où la petite rivière, un moment perdue dans les profondeurs du causse, au sein d'un cirque su- perbe, reparaît par une abondante source jail- lissant du rocher. Près de là est une grotte pro- fonde où l'on pénètre en barque.
Mais il faudrait des mois pour voir toutes ces merveilles naturelles dont le causse de Limogne est couvert ; innombrables sont les abîmes, les avens, les igues où se perdent les eaux. Je pré- fère gravir les pentes du causse par la route de Gaussade tracée en corniche au flanc du vaste cirque qui encadre Caylus : rochers percés de grottes, empanachés de figuiers noueux, tapissés de buis, parfumés par le chèvrefeuille dérou- lant ses lianes fleuries.
En montant on a sans cesse la petite ville
VOYAGE EN FRANCE. XXXI.
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SOUS les yeux, on devine comment elle s'est for- mée autour de cette roche isolée qui porta la forteresse des comtes de Gaylus et que l'on dé- figure aujourd'hui en l'entaillant à la mine. Le fond du cirque, d'un dessin géométrique, doit beaucoup de gaîté aux vignes peuplées de pa- villons de forme souvent pittoresque. Les ter- rasses cultivées et les assises rocheuses font comme une succession de gradins.
Voici le causse. La vue est bornée, car des bois masquent Septfonds. Il y a de belles cultures entre ces taillis, riches en truffes. Le causse de Limogne, ici du moins, ne répond pas à la des- cription classique. Il y a une couche profonde d'un sol fertile où les céréales viennent bien. Ils ne sont pas rares, assure-t-on, les paysans dont la propriété rapporte soixante sacs de blé. Beaucoup d'avoine, quelques vignes, des prés naturels ou artificiels. « On voit des gens, me dit un brave homme avec qui je redescends à Gaylus, qui font 100, 200 quintaux de foin, même 5oo. » Cela n'empêche pas l'habitant du causse de parler avec un peu d'envie des ré- coltes en vin des bourgeois de Saint-Antonin. Ceux-ci ont beaucoup replanté, le succès est venu : en 1901 on a obtenu autour de la ville 3 000 barriques de 220 litres.
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« Si seulement on retrouvait des phospha- tes ! » Mais la « prospection », comme l'on dit maintenant, est peu fructueuse, les poches si- tuées à Albertas, près d'Audubert, ont bien été vidées.
Retour à Saint-Antonin, arrêt avant d'entrer en ville pour contempler un cirque de roches en avant duquel se dresse une immense pyramide rougeâtre. Il y a bien des choses à voir encore ici : la grotte du Capucin, les ruines du château de la Valette où naquit le grand-maître de Malte qui fonda la ville de la Valette, et de grands rochers, et des igues et des dolmens... !
Plus intéressante est la vallée que je des- cends en chemin de fer jusqu'à Penne. La ligne, tantôt longeant l'Aveyron, tantôt coupant les boucles par des tunnels, longe ou troue les immenses rochers de ce couloir du causse. Ceux de la rive droite sont fantastiques, tant ils sont dentelés et colorés. Parfois le défdé est si étroit, que la rivière a trois ou quatre mètres à peine de largeur : ici elle se précipite entre des ro- ches, là elle sommeille, puis les parois s'écartent un instant, dessinant le joli bassin de Gazais : un pont, un banc de sable bordé de laveuses qui rient au passage du train. De nouveau les
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parois se rapprochent, moins farouches toute- fois. L'Aveyron s'est foré un lit dans la roche et continue son œuvre ; pendant les crues il va laver les bords de sa vallée où il a mis à nu la pierre lisse et blanche.
Les à-pic recommencent, percés de cavernes ; le chemin de fer les longe en suivant toutes les boucles de la rivière. Un immense rocher sur- plombe le chemin de fer ; le voici dépassé et l'on voit s'entr'ouvrir un bassin verdoyant com- mandé par les étranges ruines du château de Penne, murailles rouges dressées sur un rocher de même teinte semblable à une lame de cou- teau. Au-dessous, à mi-hauteur, s'allonge le bourg de Penne. Son clocher est une tour à mâchicoulis.
Le site est plus saisissant d'en bas, vu au pas- sage. J'ai une déception en montant à ce village de si grandiose allure ; il est d'une absolue placi- dité, la population se voue à la fabrication des sangles. Cependant on est frappé par la situa- tion formidable de la forteresse, encore belli- queuse malgré son état de ruine ; le château était comme suspendu sur la vallée et par delà l'Aveyron semblait menacer le causse aux pa- rois percées de grottes.
La vallée est moins grandiose, au lieu des ro-
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ches à pic ce sont, jusqu'à Bruniquel, de raides pentes revêtues de broussailles. Jadis il y avait beaucoup de vie ; des forges et des fonderies exploitaient le minerai du pays, longtemps elles furent actives, on faisait des rails et des pièces de wagon. Les usines n'ont pu résister à la con- currence des établissements placés à proximité de la houille et de minerais plus riches.
Le village de Bruniquel, qui avait donné son nom aux forges, constitue un des grands sites de la vallée. Sur de hautes roches fauves dres- sées entre l'Aveyron et la Vère débouchant d'une gorge profonde et verte, apparaît un vieux château semblable à quelque palais de légende par ses terrasses, ses viaducs, ses galeries, sa tourelle aiguë. Le château a deux faces, l'une farouche, l'autre riante. Le village, très ancien lui aussi, possède de vieilles maisons intéres- santes et offre des vues superbes sur les deux vallées. Le site est plus aimable que Penne, mais la forteresse n'a pas une assiette si puis- sante, aussi les seigneurs de Bruniquel qui au- raient voulu posséder leur voisine avaient-ils pris pour devise :
RIEN SANS PEINE (Pcnnc).
Désormais la vallée de l'Aveyron perd de sa
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sauvagerie, les pentes s'abaissent et s'émoussenl, le roc disparaît souvent sous de maigres taillis. Voici Montricoux, sentinelle placée à l'issue du cours héroïque de la rivière. Le bourg possède un de ces clochers octogones caractéristiques du pays toulousain, un reste de donjon, une tour, des débris de remparts. Jadis il farllait for- cer ce passage pour pénétrer dans la vallée.
Et maintenant c'est la plaine, il n'y a plus sur le chemin de Montauban que la minuscule ville deNégrepelisse, reste d'une bastide souvent sac- cagée et brûlée. Ses maisons, très basses, s'ali- gnent autour d'une église à flèche dentelée. Sur la plaine les collines viennent mourir en pentes douces mêlant leurs vergers à ceux des terres basses coupées de joualles de vignes et de ran- gées de figuiers et de pruniers. Les grands pigeonniers se dressent de nouveau près des mai- sons. Là-bas on aperçoit les édifices de Mon- tauban.
XVIII
LES CINGLES DU LOT
De Fumel à Cahors. — Les cinqles. — Ruines d'Orgueil. — Du- ravel et ses mines. — Puy-l'Évèque. — La patrie du maréchal Bessières. — Castelfranc. — Luzech. — Le tabac dans le Lof. — Mercuès et son château. — Cahors. — La vieille ville. — Les monuments.
Cahors. Juin.
Si la vallée du Lot, au lieu de servir à des relations locales, avait la bonne fortune de relier de grandes cités et d'être parcourue par la foule des voyageurs, elle serait célèbre entre toutes. Elle renferme de grands paysages et possède la grâce, dans sa partie inférieure, à travers le Quercv, comme elle est superbement farouche dans Fabîme creusé au sein du Rouergue. Même pour le touriste qui répugne aux grandes mar- ches, le passage au long de cette vallée creusée en pleine table des causses et emplie d'une végé- tation luxuriante, laisse le plus éblouissant sou- venir. Placez ces paysages à l'étranger, ils seront célèbres, chez nous on les ignore.
2 8o VOYAGE EN FRANCE.
Cette partie du cours de la grande rivière entre Capdenac et Fumel n'est pas moins riche que celle de TAgenais ; étroite, elle offre sans cesse de nouveaux tableaux. Le Lot a une direc- tion bien régulière de l'orient à l'occident, mais il poursuit son cours avec lenteur et caprice, dessinant des boucles d'une harmonie singulière, méandres auxquels les riverains de la Dordogne ont donné le nom de cingles, expression qui ne s'applique pas moins bien au beau cours d'eau de Gahors, ville emprisonnée dans un de ces plis. Il y a un moulin du Cingle à Puy-l'Evêque.
Cette région finit à Fumel ', où l'embouchure de la petite rivière de Thèze, descendue du beau val que domine l'antique bastide de Montcabrier, marque l'entrée de l'Agenais.
Dans ce grandiose couloir du Lot, la rivière va capricieusement de l'une à l'autre pente,t ici serrée de près par la montagne, de l'autre bordée par une petite plaine aux riches cultures. A Fu- mel elle rasait le pied du rocher qui porte la ville ; aussitôt qu'on a franchi la Thèze on pé- nètre au sein d'une étroite et belle plaine, tandis que la rive opposée, jusqu'alors basse, se hérisse en raides parois.
I. Sur Fumel, voyez page 171,
LES CINGLES DU LOT. 28 1
Dans la partie plane, des champs de tabac, du maïs, des vignes qui prolongent leurs nappes jusque sur les pentes douces égayées de hameaux et de bordesj c'est-à-dire de maisons rurales iso- lées. Quelques châtaigniers dressent leur tronc puissant, couronné d'une vaste ramnre ; beau- coup de cultures de primeurs autour des habi- tations.
Sur la rive gauche, au-dessus de la falaise, se montrent des substrnctions occupant le fond d'une grande boucle du Lot. Ruines de la ville d'Orgueil, dit la carte d'Etat-major qui donne à cette sorte de plate-forme le plan régulier d'une bastide exiguë. Les livres que j'ai feuilletés en route ne disent rien sur cette cité disparue dont la situation était superbe. Deux villages, Sotu- rac etTouzac, ont hérité d'Orgueil. Près du pont qui franchit le Lot est un hameau dont l'église romane, moderne, est simple et charmante avec son élégant pignon-campanile. De l'autre côté du Lot, Touzac se groupe autour d'un clocher lourdement coiffé d'un dôme. Les eaux du Lot, transparentes et vertes, plongent du sommet d'un barrage concave ; la rivière achève de dé- crire un de ses cingles les plus réguliers autour de la péninsule de Touzac, petite plaine d'une fertilité extrême, divisée en champs étroits où
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croissent les blés, les maïs et les harieols, sépa- rés par des cordons ou joiialles de vigne.
Plus loin c'est la boucle rythmique dessinée autour du bourg de Duravel assis dans une si- tuation charmante, au creux d'un beau cirque de verdure. Ce fut une ville forte, héritière d'une cité romaine et dont l'église romane est une des plus anciennes du Quercy. Un château flanqué de tours accroît la beauté de ce paysage.
Duravel redevient le centre d'une importante exploitation de minerai de fer. Jadis traité sur place, en des hauts fourneaux aujourd'hui dis- paruSj ce minerai « liydroxydé oolithique » est maintenant un des éléments de prospérité de Fumel dont il partage le développement. Depuis cinq ans la production ne cesse de s'accroître. En 1897, l'extraction atteignait 6600 tonnes; en 1901 elle en fournissait 21 774, toutes diri- gées sur Fumel, sauf 891 tonnes expédiées aux usines du Saut-du-Tarn, à Saint-Juéry. En outre on a eu l'idée d'exploiter les scories des an- ciennes forges, qui traitaient le minerai d'une façon si barbare que l'on peut de nouveau en- voyer ces résidus aux hauts fourneaux et en reti- rer du métal en quantité fort appréciable; Fumel en a reçu 3 799 tonnes en 1901. Les minières ne sont pas de grandes exploitations, chaque gise-
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ment est mis en valeur par un bien petit nombre d'ouvriers puisqu'il y a 42 de ces exploitations et 123 travailleurs seulement. Ces gîtes sont ré- partis sur toutes les hauteurs de la rive droite jusqu'aux abords de Puy-l'Evêque, dont la gare expédie une grande partie de la production.
A mesure que l'on avance dans la vallée, les sites deviennent plus grandioses, ce n'est plus seulement la richesse des cultures qui attire l'at- tention, mais l'allure des collines, leur élévation, les villages bien campés sur ces hauteurs, une fière tour carrée. Plus loin apparaît la bour- gade de Puy-l'Evêque assise sur l'isthme d'un grand cingle dont la longueur est de six kilo- mètres et demi alors que l'intervalle à Puy-l'Evê- que est de sept cents mètres à peine. C'était une excellente situation pour une ville forte ; aussi, de bonne heure, y eut-il des défenses; les évêques de Cahors, grands seigneurs ecclésias- tiques, puissants comme des barons , y possé- daient un château auquel ils donnèrent leur nom. Il en subsiste encore le donjon carré, appuyé sur des contreforts. Le tableau est superbe, les mai- sons grises collées au flanc du roc, le donjon, de hauts pavillons, des tourelles donnent une appa- rence guerrière à cette cité désormais humble et pacifique. Il est peu de paysage citadin plus sai-
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sissant que celui de la bourgade élarjée, dorée par le soleil et frôlée par le Lot que franchissent un pont du chemin de fer et un pont suspendu.
Ce méandre est d'autant plus singulier que la péninsule tient à peine aux collines, un ruisseau le coupe comme un fossé et fait mouvoir une usine qui a pris le nom du contour : le moulin du Cingle.
C'est maintenant la partie la plus curieuse de cette rivière aux sinuosités presque géométri- ques. La route côtoie le Lot en face du grand cingle de la Gardelle occupé à la pointe par le village de Pescadoire, c'est-à-dire de \di pêcherie; elle coupe ensuite une autre boucle en traver- sant le riche village de Prayssac qui semble sur- gir des prairies et des cultures et s'étale large- ment autour d'une église à haute flèche. Sur la place de ce petit bourg se dresse la statue de Bes- sières : le futur duc d'Istries naquit à Prayssac.
L'intérieur de ce cingle est couvert de mai- sons isolées, construites au milieu de cultures ombragées de noyers; il est étroit et allongé; son voisin, occupé par la commune d'Anglars, a une courbure d'une circonférence presque par- faite, comme tracée au compas. En face d'An- glars, au débouché du vallon du Vert, Castel- franc offre le plan des bastides, c'est une
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ancienne cité qui dépendit des évêqiies de Ca- hors. Elle étale ses ruelles dans le vallon étroit où le Vert tombe d'un barrage. Sur l'autre rive du Lot, Anglars n'est pas moins pittoresque, grâce à son château couronné de mâchicoulis. Du côté de Castelfranc, ce sont des pentes raides, revêtues de chênes, en face la plaine s'élève légèrement, tapissée de vignes que des plantations nouvelles accroissent.
La vallée, tout à l'heure illuminée par un ar- dent soleil, s'est soudain obscurcie, de lourds nuages masquent l'arête du causse, des éclairs les sillonnent, une pluie diluvienne s'abat. En quelques minutes tous les plis deviennent des torrents apportant au Lot des flots troubles, à peine ai-je eu le temps de me réfugier dans une maison de Mirandol. Mais l'ouragan s'en va aussi rapidement qu'il est venu. Pendant que je poursuis la route tracée au-dessus du chemin de fer dominant lui-même le Lot, j'ai le merveilleux spectacle d'un immense arc-en-ciel appuyé sur les deux rebords de la vallée et dessiné sur le fond des nuées, d'un noir d'encre, qui portent maintenant l'averse sur Gahors.
Sous un ciel radieux, par un vivifiant soleil j'atteins Luzech, petite ville assise sur le plus rétréci des isthmes du Lot. Il y a juste place
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pour celte bourgade de sept cents âmes à peine dans la langue de roc, large de cent quatre-vingts mètres, que la rivière n'a pu percer; du point où elle atteint la ville pour revenir sur l'autre face elle décrit un ovale allongé de cinq kilomètres. Pour éviter ce long détour aux bateaux, les ingé- nieurs ont coupé l'obstacle et transformé en île l'intérieur du cingle; la dérivation partage Lu- zech en deux parties.
Luzech fut de bonne heure une situation mili- taire; sur la colline à laquelle se rattache l'isthme sont des retranchements d'origine gauloise, bien distincts encore, où quelques archéologues ont voulu placer la fameuse Uxellodunum que l'on croit avoir occupé le sommet du puy d'Issolu'. Ce réduit antique serait l'oppidum de Vlmpernal. Plus tard une ville se forma sur l'isthme même, sous la protection d'un château dont le donjon est encore debout avec des portions de remparts.
La presqu'île et les coteaux qui l'entourent sont plantés de vignes et ombragés de noyers. Noix et vins sont désormais les principaux objets de commerce. Le plus important vignoble est sur la rive gauche, il entoure Saint-Vincent-rive- d'Olt, rappelant la forme Oit au lieu de Lot, en
I. Voyez 32^ série du Voyage en France, chapitre IV.
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usage dans la partie supérieure du bassin et qui semble bien être le nom de la rivière.
En amont, les collines, plus abruptes, portent d'un côté le causse de Gahors et, vers le nord, un autre petit causse étrangement criblé de dé- pressions. Ces parois sont très raides à l'endroit où elles dominent le cingle de Parnac, sans végétation sinon de maigres broussailles; les sentiers qui les gravissent ressemblent par leur pente et leur tracé à ceux des hautes mon- tagnes. L'intérieur des cingles contraste par leur opulence végétale et l'état luxuriant du vignoble avec ces côtes stériles. Les rangées de ceps tran- chent sur le sol rougeâtre. Beaucoup de tabac aussi, la vallée du Lot est un des plus grands producteurs de France pour cette culture ; le département vient aussitôt après ses voisins du Lot-et-Garonne et de la Dordogne pour l'éten- due occupée, mais les dépasse pour la valeur des feuilles. Le tabac du Lot est le meilleur de France ; en 1900 la Régie le payait 106 fr. 54 c. le quintal, alors que le prix moyen était de 99 fr. 70 c. dans le Lot-et-Garonne et de 80 fr. dans I9. Dordogne \
I. En 1901 le prix moyen, pour le Lot, était de io6 fr. 3o c. (Sur la culture du tabac, voyez chapitre 1^^.^
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VOYAGE EN FRANCE.
La course a été longue depuis Fumel ; je n'ai pas le courage de l'achever jusqu'à Cahors, tant l'orage a rendu boueux les chemins; j'ai ter- miné l'étape en chemin de fer depuis l'arrêt de Parnac. Le paysage s'aperçoit bien par les portières du wagon. Voici, en face d'un cin- gle très brusque et court, Douelle qui groupe ses maisons blanches autour de l'église; il occupe une terrasse rocheuse dont le bord porte un petit château à haut pavillon; un ruisseau traverse le village, grossi par la pluie, il tombe en cascatelles. Le chemin de fer franchit le Lot sur un beau viaduc de brique rouge , court au sein de vignobles en vue de châteaux cam- pés sur des croupes ou des arêtes. Au loin, une falaise du Lot est couronnée par un autre château, celui de Mercuès, très vaste, bientôt masqué à la vue et que l'on revoit enfin, fort beau malgré les traces trop apparentes d'une restauration. Elle a grand air, cette résidence des anciens évêques de Gahors, redevenue maison épiscopale. Le site est un des plus intéressants de la vallée ; en face de Mercuès, dans un cingle, le village de Pradines couvre un rocher, les ruines d'un château ont été occupées par des habita- tions qui s'y sont comme incrustées. Au-dessus du chemin de fer de la vallée, la grande ligne
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de Paris court sur de hautes arcades. Tout cela constitue une de ces « fabriques » chères aux peintres d'autrefois. Les deux voies ferrées su- perposées suivent un moment le Lot, puis leurs rails s'unissent pour aller trouer l'enceinte gallo-
JaCé
romaine de Gahors et pénétrer sous le hall de la gare.
Gahors n'occupe pas seulement l'isthme d'un cingle comme les petites villes de sa vallée, elle remplit une de ces péninsules du Lot et se trouve ainsi entourée d'eau sur presque toutes ses faces. La ligne intérieure des quais, d'une
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extrémité à l'autre du rempart antique, a près de cinq kilomètres, la plupart de nos grandes villes n'ont pas un tel développement au long de leur rivière. Le site est comparable à celui de Besançon, mais les hauteurs qui l'enferment ne sont pas des montagnes et la cité est infiniment moins populeuse, il y a i4ooo âmes seulement dans la commune de Gahors, aussi l'intérieur de la presqu'île n'est-il pas entièrement rempli par les habitations, celles-ci se pressent seulement à l'est où les vieux quartiers sont formés de rues étroites et sombres. Dans l'autre partie, séparée de la première par le large boulevard Gambetta, les habitations s'espacent sur des rues neuves encore imparfaitement bâties ; même elles ne vont pas jusqu'au Lot, ces bords de la rivière restent déserts.
Gahors est une des plus antiques cités des Gaules, elle en fut aussi une des plus florissantes et sa prospérité s'est prolongée jusqu'au milieu du xviii* siècle, époque où son Université fut supprimée. Déjà elle avait subi un grave désastre quand elle perdit l'espèce de monopole qu'elle exerçait pour le commerce des vins dont elle fut l'entrepôt obligé jusqu'à l'avènement de Henri IV. Le bon roi lui fit payer cher son attachement à la Ligue.
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Le phylloxéra, en ruinant son riche et célèbre vignoble de « vins noirs », l'a empêchée de re- prendre l'importance que semblerait aujourd'hui lui assurer sa situation à un important croise- ment de voies ferrées. Cependant elle n'a guère l'aspect d'une ville déchue ; comme pour la plu- part des villes du Midi où la population vit vo- lontiers au dehors il suffît d'un large cours bien ombragé pour que toute la vie se porte là et donne l'illusion d'une grande cité.. A Cahors cette voie maîtresse parcourt entièrement la ville, passe au front des promenades et des principaux édifices. C'est le boulevard Gam- betta, sur lequel se dresse le monument du grand tribun, fils de Cahors. Pour lui faire place on a relégué dans les cours de la préfecture les effigies de deux autres quercinois illustres, qui méritaient mieux pourtant : Murât et Bessières.
Le contraste est grand de ce boulevard large, ombreux, vivant et de la vieille ville qu'il borde. Là sont des ruelles sans lumière, souvent voû- tées. La rue de l'Université qui conserve le sou- venir d'una institution glorieuse, florissante pen- dant plus de quatre siècles, est une suite de porches obscurs, la rue des Boulevards est une ruelle sordide ! Si l'on ne répugne pas à s'aven- turer dans ces corridors puants, on est surpris
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de découvrir des hôtels d'une architecture par- fois exquise^ des fenêtres ouvragées comme des châsses. Voici une porte en bois sculpté, don- nant accès dans une cour au fond de laquelle se dresse une tour éclairée par quatre étages de fenêtres à meneaux.
La plus large de ces artères du vieux Cahors, bien étroite encore, la rue Nationale, possède elle aussi d'anciens logis percés de belles fenê- tres. Les voies qui y aboutissent ont si peu de largeur que l'on peut atteindre les murs de cha- que côté en étendant les bras. Ces venelles sont moins tristes vers le Lot, autour de la char- mante et vénérable église Saint-Urcisse qu'avoi- sinent de très vieilles bâtisses de brique et de torchis.
Au cœur de l'antique cité est la cathédrale, plus semblable à une forteresse qu'à une église, mais dont certaines parties, la porte du Nord surtout, sont de pures merveilles. L'intérieur produit un effet étrange par la largeur et la nu- dité de sa nef blanchie à la chaux et recouverte de vastes coupoles. Le chœur est aussi orné et peint que la nef est nue.
En montant au point culminant de la ville, on trouve encore de nombreux édifices publics ou particuliers révélant un passé de splendeur. Sur
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la place des Petites-Boucheries est une inté- ressante maison de 1642; une immonde impasse conduit à l'hôtel Pelegri dont la tour est un joyau de la Renaissance — navrant d'abandon.
De ce côté, le quai du Lot s'étend au pied d'un rocher couronné par la tour sévère dite le Palais du Roi, édifice défiguré pour servir de prison. Un vieux pont franchit la rivière, on l'appelle le pont Neuf depuis sa construction au xiv' siècle ! Par son tablier étroit, sa forme en dos d'âne et ses arches ogivales, il complète ce décor du moyen âge, accru par l'aspect gothique des mai- sons.
Au sommet du coteau, où le boulevard abou- tit d'un côté à la place Thiers, de l'autre à la place Lafayette, reste debout le palais féodal construit par le pape Jean XXII, né à Cahors; seule la tour carrée encore couronnée de cré- neaux a gardé quelque caractère.
La place Lafayette est au point culminant de la ville. Un monument élevé aux enfants du Lot morts pour la patrie en occupe le centre ; il fut inauguré par un discours de Gambetta qui fit passer un frémissement dans la foule accourue. J'étais des auditeurs; aujourd'hui, sur cette es- planade solitaire où l'on n'entend d'autre bruit que le son du clairon s'élevant de la caserne voi-
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sine, je retrouve en moi l'impression profonde laissée par la parole ardente de l'homme en qui la patrie un moment s'incarna.
Quel contraste entre ces souvenirs et le calme paysage contemplé de cette terrasse dominant le Lot, vert et indolent î La rivière coule au pied de collines raides, aux formes nettes, cassure du causse; l'ourlet des prairies l'encadre, semé de maisons blanches. Un château féodal domine un hameau. Ces coteaux sont blancs et âpres depuis que le phylloxéra a détruit la vigne qui les recou- vrait. Sur ce sol, qui est à peine une pellicule de calcaire décomposé, sous laquelle on trouve aussitôt la roche vive, on n'a pu replanter encore. Le vignoble de Cahors renaît seulement dans les terres profondes. Mais il est loin d'avoir recon- quis tout l'espace perdu. Jadis il couvrait 24 000 hectares sur les deux rives du Lot, de Duravel à Gajarc. Qu'en reste-t-il aujourd'hui? Au temps (le la grande prospérité, la production principale était celle des vins noirs destinés surtout au cou- page des vins par le commerce de Bordeaux. Ces vins jouissaient d'une grande réputation, ils sont de ceux dont Henri IV parlait volontiers.
Non loin de la place Lafayette, les faubourgs s'annoncent par un charmant pavillon, ancien
I.ES CINGLES DU LOT. 29;)
corps de garde, appelé la Barbacane. Plus loin on rencontre le rempart qui fermait la boucle du Lot et délimitait avec la rivière le vaste espace occupé par la ville. Ces fortifications, œuvre du XIV* siècle, ont encore grande mine.
Ce n'est pas le seul édifice militaire du moyen âge que conserve la capitale du Ouercy; un des ponts du Lot, dit de Valentré, est un des plus curieux édifices de ce genre que le moyen âge nous ait laissés. Avec ses avant-becs, les hautes portes ouvertes dans les tours qui enjambent le tablier, et que couronnent des guettes à mâchi- coulis, le pont est une évocation saisissante du passé. Il conduit au pied du causse, près du gouffre d'où jaillit la fontaine abondante de Di- vonne dont le nom fut longtemps porté par la cité des Cadurques. La source a perdu sa beauté, une usine la masque, elle emploie les eaux à faire mouvoir ses roues.
Cette manufacture est un des très rares éta- blissements industriels de Cahors, la cité vit surtout par son rang de chef-lieu de départe- ment et son rôle de marché pour la vallée du Lot et le causse. Elle fait l'expédition des fruits et des primeurs, fabrique des pâtés de foie gras, centralise une partie de la production en noix et en truffes de sa région. Tout cela ne détermine
296 VOYAGE EN FRANCE.
pas un grand mouvement d'affaires. La succur- sale de la Banque de France est au 122* rang sur 126; des chefs-lieux bien moins peuplés: Foix, Vesoul, Digne et Privas, viennent avant Gahors ^
La seule usine considérable est la manufac- ture nationale où sont transformés les meilleurs tabacs de France.
[. Montant des opérations en 1902 : 4 578 900 fr.
XIX
LE GAUSSE DE LIMOGNE
En Quercy-Blanc. — Montpezat, INIolières, Gastelnau-Montratier et Monteux. — Sur le causse de Limogne. — Les phosphates et les truffes. — Lalbenque. — Bach. — Limogne. — Les marchés de Concots. — Aspects du causse. — Descente à Cahors.
Gahors. Juillet.
Quand on a traversé le causse, de Saint-An- tonin ou de Caylus à Caussade, le pays entre cette ville et Montcuq frappe par sa variété d'as- pect et de production. Autant le causse était plat et monotone, autant cette zone du Ouercy-Blanc est accidentée. Là naissent une foule de ruis- seaux qui se creusent de longues vallées paral- lèles entre de belles collines, striées elles-mêmes d'innombrables ravins et de courts vallons. Si l'abondance des sources répondait à la multi- tude des ruisseaux tracés sur les cartes, il n'y aurait pas en France de pays plus frais et mer- veilleusement arrosé. Malheureusement, tous ces suintements réunis au fond d'une vallée par-
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fois très longue ne font guère qu'un ruisseau in- digent et languissant.
Mais le sol est fertile ; malgré la rareté des eaux courantes, il se couvre d'une végétation vigoureuse. Entre Caussade et Montpezat on traverse beaucoup de prairies encadrées d'ar- bres ; les pentes sont couvertes de vignes, de fèves, de champs d'ails. Le prunier d'ente repa- raît et forme de beaux vergers. Par l'ouver- ture des vallons ou du sommet des côtes, sem- blent surgir les féodales bourgades : ici près de la route la fière Montalzat ; là-bas Puylaroque plus hardi encore. Un des massifs les plus ca- ractéristiques porte la vieille bastide de Mont- pezat trônant au-dessus de vallons dont le plus important voit former le ruisseau de Lembous. Les pentes sont couvertes de champs de fèves et de vignes, leur vin est réputé dans le Quercy.
Si Montpezat est de bien médiocre étendue, ses débris de défenses et une belle église du XIV* siècle renfermant beaucoup de richesses artistiques la rendent attrayante. H y a notam- ment de curieuses tapisseries.
La route se tient presque sans cesse sur les crêtes entre le Lemboul et le Lemboulas, jalon- nés par les églises de la Salvetat et d'Espanel, pour aller traverser le bourg de Molières, autre
LE CAUSSE DE LIMOGNE. 299
bastide, moins hardiment campée, mais com- mandant encore de beaux horizons. Ces longues et étroites vallées que Ton domine sont terres de cultures et de vergers ; vers leur naissance l'aspect caussenard du pays s'affirme peu à peu. Les bois de chênes où l'on récolte la truffe sont de plus en plus nombreux. Causse fertile, celui- ci, ne rappelant guère les rocailleuses surfaces du Sauveterre et du Méjean \
Les chênaies sont entourées de cultures de cé- réales et les habitations sont nombreuses, grises et tristes sous le grand soleil, malgré les véran- das et les perrons décelant quelque souci de confort.
Le chemin de fer s'élève sur le causse par de grandes courbes, la route monte plus droit, touchant à la têle d'une partie des vallons qui viennent se creuser dans ce vaste plateau. Peu de villages, les chefs-lieux de communes sont des hameaux d'une dizaine de feux à peine ; pour trouver des agglomérations de quelques centaines d'âmes il faut aller loin dans ces vallées. Là, au-dessus de la Lutte , Castelnau-de-Mon- tratier est encore pimpante dans les débris de son corselet de pierre qui couvrait une pointe de
I. 34^ série du Voyage en France.
3 00 VOYAGE EN FRANCE.
colline escarpée, au-dessus de la petite Bargue- lonne, aux pentes couvertes de pruniers d'ente. Montcuq n'est pas moins belliqueuse d'aspect; cette ancienne cité batailleuse a conservé le don- jon de son château.
Ces petites forteresses contre lesquelles vin- rent se buter les armées jusqu'à la dernière grande lutte intérieure, quand Richelieu et Louis XIII cherchèrent à écraser le protestan- tisme guerrier, ne sont point du causse. Celui-ci ne possède aucun centre méritant le nom de ville. La plus grande agglomération, Lalbenque, est un bourg très étalé, entre les bois de chênes mis en exploitation réglée pour la récolte des truffes. Ces chênaies l'emportent en étendue sur le sol arable : bien traitées, elles assurent un revenu supérieur à celui des céréales.
Ces bois ne donnent pas beaucoup de beauté au paysage. Ils encadrent les champs pierreux entourant les grises métairies ou bordes. Des affaissements où s'infiltrent les eaux de pluie, des cloups où se perdent de courts ruisseaux, des mares que l'on a baptisées lacs, telle est la campagne entre Lalbenque et Bach.
Bach, au sein d'une vaste clairière, plateau percé de cloups, fut le grand marché de truffes du Lot avant que la plantation de chênes truf-
LE CAUSSE DE LIMOGNE. 3oi
fiers autour de Martel eût donné la prépondé- rance à cette ville. Aujourd'hui encore, on ré- colte en quantité ce succulent cryptogame dans toutes les communes des cantons de Limogne et de Lalbenque.
Le pays avait une autre source de fortune : les phosphates, signalés sur tant de points et en telle abondance apparente que l'on put croire les dépôts inépuisables ^ Ce précieux minéral remplit des poches à la surface même du causse où leur recherche a développé chez les carriers un flair tout particulier. Les gisements sont le plus souvent décelés par un affaissement du sol, mais parfois on les devine à des indices dont la constatation rappelle la fameuse perspicacité des Apaches. La terre remuée par les taupes, la fouille des chiens et des truies à la découverte des truffes révèlent la richesse cachée sous le gazon.
La découverte des phosphates du Quercy re- monte à i865, elle est due à M. Poumarède, mais l'exploitation ne s'est développée que de
I. Le phosphate de chaux a été reconnu dans le Lot à Arcam- bal (traces), Bach, Beaiu-egard, Bouziès, Cabrerets (traces). Con- çois, Crégols, Escanips, Esclauzels, Gréalous, Larnagol, Limogne, Lugagnac, Marcilhac-sur-Célé, Puyjourdes, Saillac, Saint-Cirq-la- Popie (traces), Saint-Jean-de-Laur, Saint-Martin-Labouval, Va- raire et Vaylats.
302 VOYAGE EN FRANCE.
nos jours. Cette matière se présentait sous forme de concrétions. « Souvent, dit M. Risler, le phos- phate a une structure rubanée qui rappelle la calcédoine, quelquefois la marne est composée de boules arrondies ou de morceaux cylindri- ques qui se séparent facilement en couches con- centriques. Sa cassure fraîche a Téclat de la porcelaine ou de Tivoire. La couleur est blanche, jaune-rougeàtre ou brune, quelquefois bleuâtre ou noire. »
Parfois, au milieu des matières associées au phosphate, on trouvait des ossements de mam- mifères, si nombreux que l'on a doiné à ces couches le nom de nougat d'os. Mais cela est un souvenir, tous les gîtes connus sont épuisés, sauf c:ux de Larnagol et de Cajarc.
La route de Montauban à Figeac parcourt cette curieuse et morose région où l'homme parut de bonne heure, à en juger par le nombre considérable de dolmens et de tombelles qui parsèment le causse. Elle traverse les maisons très éparpillées de Varaire et, s'élevant sans cesse, atteint le bourg de Limogne, qui a donné son nom au plateau. Cet important carrefour de routes aurait fait naître un centre plus vivant si le causse n'avait été aussi peu peuplé. Mais
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l'espace est mesuré aux cultures, parmi toutes ces chênaies et ces cloups sans nombre qui per- forent le causse. La récolte des truffes, si elle répand le bien-être, nécessite de grands terrains et ne demande pas de très nombreux travail- leurs. Pendant l'hiver, depuis la dernière se- maine de novembre jusqu'en mars, il y a beau- coup d'activité pour ce commerce spécial, les foires et les marchés voient accourir les négo- ciants en truffes.
Il y a d'ailleurs une tendance marquée au progrès, l'élevage du mouton, jadis empirique, a beaucoup été modifié. Suivant l'exemple des éleveurs du causse de Gramat% les propriétaires et les fermiers procèdent à une sélection atten- tive de leurs troupeaux. Des reproducteurs tirés de la contrée de Gramat ont amené un sang nouveau, les bêtes se prêtent mieux à l'engrais- sement, donnent une laine plus abondante et iine. Une grande part de ce changement est due au comice agricole de Concots qui, sous le nom de Comice des bas plateaux du Quercy, encou- rage l'élevage par de nombreux prix annuels ^ « L'émulation est féconde, dit un rapport au con- seil général. Grâce à des encouragements, il y a
I 32^ série du Voyaffe en France, chapitre V.
So/j. VOYAGE EN FRANCE.
des progrès sensibles. L'élan est donné, il suffit de l'entretenir et de le généraliser. »
Goncots, où se tiennent ces fêtes agricoles, est un bourg sur la route de Gahors, dans une clairière au milieu de grandes truffières, à une croisée de chemins; au centre, une vieille tour a été transformée en beffroi. C'est un lieu de ren- dez-vous pour les habitants des hameaux et des métairies épars entre les bois. Ses marchés sont peut-être plus considérables encore que ceux de Limogne, les truffes y abondent ; les fabri- cants de conserves s'y alimentent en gibier et en volailles. Les bergeries y envoient ces exquis fromages de brebis dont le causse est fier. Enfin ses gisements de phosphate alimentent la gare de Saint-Martin-Labouval, par laquelle se fait la plus grande part du trafic du causse de Limogne.
Celui-ci est particulièrement sévère entre Concots et Lalbenque, où les villages gris sont entourés de bois et de champs sans fraîcheur, car l'eau vive manque sur cette table de pierre et les imperceptibles mares baptisées lacs n'ont même pas l'étendue des pauvres « lavognes » des causses de Sauv.eterre et du Larzac ^
I. Sur le causse de Sauveterre, voyez la 34*^ série du Voyage en France; sur le Larzac la 35^ série.
LE CAUSSE DE LIMOGNE. 3o5
Pourtant cela est riche et riant, comparé aux solitudes des autres causses ! Les centres d'ha- bitation, si clairsemés, ont eu quelque impor- tance ; ainsi Escamps, encore dominé par la tour d'un château féodal.
On ne se borne pas à récolter les truffes dans les chênaies naturelles, partout on plante de nouveaux bois^, très vigoureux, bien alignés, contrastant avec les arbres élagués semblables à des mâts contre lesquels on aurait planté du feuillage. En dehors de ces reboisements, le causse est d'une belle aridité; il est certaines pentes où, sauf une nappe de graminée rougeâ- tre, rien ne croît ; quand on la voit horizonta- ement, cette plante légère donne l'illusion d'une mousse rose et moirée. Les talus des chemins, ceux plus accentués du chemin de fer, montrent le sous-sol de roche blanche à peine recouvert d'une pellicule de terre. Mais les creux sont mieux partagés, il y a une couche assez épaisse pour permettre des plantations. Le revenu assuré du chêne devrait être un aiguillon pour les pro- priétaires. Etant donnés les bénéfices amenés par la truffe, les parties restées découvertes
I. J'ai longuement parlé de la trufficulture dans la So^ série du Voyage en France, chapitre XVIII, je me borne donc à signaler ici les particularités propres aux causses du Lot.
VOYAGE E>- FRANCE. XXXI. 20
3o6 VOYAGE EN FRANCE.
sur le causse semblent le produit d'une aber- ration.
A Gieurac se creuse un vallon sec très pro- fond, descendant au Lot vers Arcambal; près du hameau de Cayran, aux maisons de pierre grise, un autre ravin descend à Cahors. De là, par l'ouverture du val d'Arcambal, on découvre la grande vallée profonde et le plateau qui con- tinue le causse de Gramat.
La route et la voie ferrée vont droit à Cahors, grand rendez-vous de la contrée. Au pli où elles descendent aboutissent de nombreux ravins sans eau, prenant très souvent naissance dans un cirque régulier. La roche semble plus stérile que jamais; pourtant, grâce au voisinage de la ville, on a tiré parti de tous les coins où il y a un peu de terre ; la vigne qui avait disparu se montre de nouveau ; mais il y a bien de ces an- ciens vignobles envahis par la nappe odorante de la lavande et que Ton reconnaît seulement par les murs écroulés des clôtures et des ter- rasses. Les fonds de ravins ont parfois la pau- vre verdure des chênes étêtés.
Ce paysage est surtout caractéristique à l'en- droit où aboutissent les chemins de l'Hospitalet et de Labastide-Marnhac. L'aridité y est extrême et le nom de Sept-Ponts donné à une halte de
LE CAUSSE DE LIMOGNE. SO']
la voie ferrée semblerait une ironie si Ton ne voyait les ravines nombreuses franchies par la route. De hautes croupes calcaires réverbèrent implacablement les rayons du soleil ; à peine quelques chênes rabougris se dressant au-dessus des touffes de lavande. Le fond du val montre comme lit de torrent une dalle blanche, polie par les eaux d'averses. Cette partie du plateau de Limogne porte dans le langage du pays le nom de causse de Gahors.
A mesure que l'on approche de la ville, la végétation se montre ; le fond du vallon a été enrichi par les terres qu'amenèrent les pluies d'orages, un beau plan de culture s'étend de chaque côté du thalweg. Des pans de vigne jeune et vigoureuse font présager une prochaine reconquête par les cépages de Cahors. Ces plan- tations sont égayées par les petites maisonnettes semblables aux mazets de Nîmes, où les bour- geois cadurciens viennent passer leur dimanche.
Soudain la ville apparaît, très pittoresque par la masse de ses toits rouges d'où surgit sa lourde cathédrale au dôme d'ardoise ; les tours, les ruines, puis le pont de Valentré d'un si saisis- sant effet, constituent un superbe décor.
XX
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET OUERCY
Le Lot de Cahors à Capdenac. — Arcambal. — Le vallon du Vers et l'oppidum de MOTsens. — La font Polémie. — • Saint-Géry. — Saint-Cirq-Lapopie. — Les phosphates de Larnagol. — Cajarc.
— Gouffres de l'Oule et de Lantouy. — Rouergue et Ouercy.
— En vue de Capdenac.
Capdenac. Juillet.
Les chemins de fer sont une belle chose, infi- niment précieuse, mais ils ont tué ce qui eut été un des charmes du pays de France : la navi- (jation à vapeur sur les grandes rivières. On n'éprouve nulle part autant de regret que dans ces longues et belles vallées du bassin girondin : Dordogne, Lot, Tarn, où la visite du pays sur une embarcation un peu rapide serait la plus merveilleuse des excursions. Mais il faut être millionnaire, c'est-à-dire avoir un yacht à soi, pour se donner ce plaisir, à moins de faire comme ces deux Anglais, mes voisins de chambre au buffet de Capdenac, qui remontent le Lot sur un bateau de toile démontable, et se proposent de
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET OUERCY. SOQ
visiter ainsi tous ceux de nos cours d'eau capa- bles de recevoir leur frêle esquif.
De telles joies me sont interdites. Tout au plus puis-je flâner un peu, quittant parfois le train pour faire à pied une partie du chemin, et mon- ter de nouveau en wagon quand la fatigue se fait éprouver. Quant à faire le trajet sur un des chalands qui naviguent sur le Lot, ce serait folie. Ils sont peu nombreux et mettent bien des jours à se haler de bief en bief !
La belle rivière est plus abandonnée encore, depuis que les rails sont continus des abords du bassin houiller de Decazeville à l'embouchure du Lot dans la Garonne, sur 262 des 297 kilo- mètres classés comme navigables. Pourtant le mouvement n'a pas complètement cessé, même on constate avec quelque surprise une augmen- tation de tonnage. En 1900 il avait circulé I 638 bateaux sur l'ensemble de la rivière, avec un chargement de 4^ 5o6 tonnes; en 1901 il n'y en eut que i 5o5, mais portant 54 679 tonnes. Cet accroissement de i3 p. 100 est dû au trans- port des houilles dans le cours supérieur, entre Bouquiès et Larroque-Bouilhac, et à celui des bois. Ces marchandises, les minerais de fer et les denrées agricoles sont les principaux élé- ments de trafic.
3 10 VOYAGE EN FRANCE.
Mais entre Cahors et Capdenac, pendant quinze lieues, je n'ai pas rencontré un bateau et n'en ai pas vu un seul amarré aux quais de Cahors.
Le Lot, cependant, semblait réservé à plus d'avenir, c'est une des rivières dont la direction et l'abondance relative faisaient une des artères vitales du réseau. Aussi des plans extraordi- naires furent-ils élaborés pour réunir le Lot à la Dordogne. On devait remonter l'Alzou, « établir le point de partage à l'hôpital Beaulieu près de Rocamadour, traverser le Celé sur un pont de 100 mètres de hauteur et de i ooo mètres de longueur, et ensuite, par une galerie souterraine d'environ 5o ooo mètres (sic), atteindre le Lot à Capdenac ». 11 faut sans doute lire 5 ooo mètres pour ce tunnel ; même réduit à ces proportions, le projet ainsi décrit par Abel Hugo n'en est pas moins extravagant. Où aurait-on pris l'eau pour alimenter le canal sur ce causse de Gramat cri- blé comme une gigantesque écumoire par les cloups, gouffres sans nombre !
Si je signale cette conception étrange c'est pour montrer combien on connaissait peu cette région il y a soixante ans. Le nom même de causse n'est pas encore signalé, on se bornait à dire « de vastes plateaux calcaires » .
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET QUERCY. 3ll
Après avoir franchi le Lot, la ligne de Cap- denac commence à suivre la rivière dont elle épousera fidèlement les contours. Voici le pitto- resque tableau de Gahors étage au bord de la rivière, avec ses ponts et ses ruines, ensuite le curieux paysage de couloirs entre les causses, où la végétation est d'autant plus opulente que les tables supérieures sont plus arides ; au pied d'une de ces falaises est le château de Larroque, encore féodal d'aspect, et le village assis à l'en- trée d'un vallon, en face de roches couronnées par des ruines et une chapelle. Plus loin, dans un bassin dont la fraîcheur fait mieux ressortir la teinte grise des roches, La Madeleine égrène ses maisons couvertes de toits d'un rouge très sombre. A l'écart de ce village de teinte fanée, un hameau tout blanc entoure l'église, toute blanche.
Le Lot, grâce aux barrages accolés d'écluses dont les portes s'ouvrent rarement, montre un flot très ample. Les eaux d'un vert profond que les pluies transformeront en coulée d'ocre, étin- cellent entre des cultures luxuriantes où le blé et le tabac tiennent la plus grande place.
A l'issue du vallon sec descendu de Cieurac, au débouché de la route de Limogne, le village d'Arcambal possède un château, curieux assem-
3 12 VOYAGE EN FRANCE.
blage de grandes bâtisses et de tours, portées sur une terrasse tapissée de lierre. Au-dessus, le causse offre quelques-uns de ces igues ou abîmes, au fond desquels on a trouvé des grottes et de petits lacs. Sur l'autre rive du Lot, à Sa- vanac, une grande construction grise conservant des traces d'ogive fut une église.
La vallée se resserre, souvent les parois de rochers viennent plonger dans l'eau verte ; ces roches se dressent de plus en plus hautes, leurs escarpements sont superbes de forme et de cou- leur. Les chênes verts les enveloppent parfois de leur ramure arrondie. Au Cazoul, ces falaises hautes et blanches constituent un décor tou- jours changeant, qui devient grandiose près de Biars, dont la jolie chapelle romane a été trop restaurée. Un rocher qui oblige le Lot à dé- crire un cingle est surmonté d'une immense croix.
Dans un vallon profond, sous des roches trans- formées jadis en habitation par des murs mon- tant jusqu'au toit de l'encorbellement, est le vil- lage de Vers; calciné par le soleil, ses toits roux enveloppés de végétation^ il se blottit autour de son église de briques et de pierre blanche coif- fée d'une flèche d'ardoise.
Le roc offre des traces du travail humain, des
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET OUERCY. 3l3
tranchées le sillonnent, là passaient les eaux de la font Polémie que les Romains amenèrent à Gahors pour alimenter la cité. Cette puissante source se déverse aujourd'hui en entier dans la petite rivière du Vers qui se creuse un sillon ré- gulier et profond au sein du causse de Gramat. Les falaises sont très belles dans cette gorge et furent de bonne heure mises à profit comme fortification naturelle, la route qui remonte la petite rivière offre sans cesse de beaux tableaux dont le plus célèbre est formé par la citadelle naturelle de Mursens (ou Murcens) que les Gau- lois renforcèrent à l'aide d'une muraille de plus de six kilomètres de développement. Les traces de cette enceinte sont très apparentes encore, aux yeux des archéologues du moins, car le sim- ple touriste ne les devine guère. Malgré toutes les recherches on n'a pu identifier cet oppidum ; en désespoir de cause, quelques savants ont voulu y voir Uxellodunum. Le plateau est sup- porté par de vertigineux à~pic dont l'un montre à mi-hauteur une cavité appelée le roc de Gorp ou d'Aucor. Les légendes les plus singulières circulaient sur cette fente inaccessible dans la- quelle on voit cependant une traverse de bois qui servit d'appui à un toit. Les habitants y si- gnalaient une statue de guerrier gardant un
3l4 VOYAGE EN FRANCE.
antre où était un veau d'or. M. Martel y est par- venu à l'aide d'échelles de corde et a reconnu que cet ancien abri n'avait rien de terrible ou de mystérieux; il se termine par une sorte de cheminée qui pourrait bien aboutir à quelque igue aujourd'hui fermée du plateau de Mursens. En amont de ce site antique, le Vers coule, plus profondément encaissé encore, au sein du plateau ondulé, très découpé, qui constitue le canton de Lauzès et où de belles cultures, no- tamment du tabac, se montrent entre des rochers souvent admirables de forme. Même dans les par- ties les plus arides en apparence on peut arriver à créer des terres d'un bon rapport. L'énergie du travailleur produit des merveilles. En 1894 le jury du concours régional signalait un pro- priétaire, M. Paillet, qui avait transformé en beau domaine de cultures et de vignes un pan de causse de 20 hectares. Ces landes rocheuses étaient auparavant incapables de faire vivre une famille ; mais tous dans la ferme se sont mis à l'œuvre, les cinq filles de M. Paillet travaillent comme des hommes, « exécutant avec habileté tous les travaux agricoles sans exception ». La commission faisait rappel d'un prix accordé à M. Paillet dix années auparavant et accordait une médaille de bronze et cinquante francs à
LE LOT ENTRE ROLIERGUE ET QUERCY. 3l5
chacune de ses cinq filles « pour s'être si in- telligemment livrées à ce travail des champs, source première de la fortune et de la moralité publique ». Le rapport disait à ce sujet : « Le cultivateur est toujours riche, qui a beaucoup d'enfants le dispensant de l'emploi des bras mercenaires. »
Malgré ses roches, le causse est peuplé autour de Lauzès ; il y a de nombreuses maisons dans cette partie accidentée de l'immense table de pierre. Pour le retrouver dans toute sa solitude il faut aller de Lauzès à Saint-Géry, par les pistes rocailleuses qui mènent au bord du grand escarpement percé de grottes aux ouvertures circulaires, sous lequel se blottit un petit bourg doté d'une gracieuse église romane moderne. Saint-Géry est le chef-lieu d'un canton partagé entre les causses de Gramat et de Limogne. Sur ce dernier, autour d'Esclauzels, il possède de beaux bois de chênes truffiers confinant à ceux de Concots.
Le site a non seulement de la grandeur, mais de la grâce. En face de Saint-Géry, le hameau de Pasturac étage ses maisons au pied de fa- laises blanches ; son église dépasse la cime des grands peupliers d'Italie formant rideau au bord de la rivière. Les grandes parois, rouges du côté
3l6 VOYAGE EN FRANGE.
Opposé au soleil, blanches sur Tautre rive, l'in- tense verdure du fond, les eaux écumant sur un barrage, les hameaux blottis autour de leur église constituent un tableau d'une réelle splen- deur. Et le décor se continue, toujours chan- geant ; les immenses rochers blancs suivent harmonieusement les courbes du Lot dans lequel ils baignent le pied. Parfois ils font place à des pentes revêtues de taillis ou, comme aux Mas- suries, à de petits bassins cultivés ou tapissés de vignes. Plus loin les parois du causse se rap- prochent, la route a dû les trouer en tunnel dans un site égayé par un manteau de chênes verts.
Dans un pli du Lot, Bouziès possède de hauts pigeonniers carrés qui lui donnent l'aspect d'une vieille cité forte chargée de garder cette gorge où route, chemin de fer, chemin de halage ont dû être frayés par des encorbellements ou des tunnels. Là aboutit le Celé, délimitant avec le Lot une péninsule étroite et longue que défen- dait jadis le château fort de Gonduché, bâtisse d'aspect sinistre, percée de fenêtres à meneaux. Le Gelé, moins large que le Lot, est abondant et clair. Son flot serait plus considérable encore si une partie n'avait été bue plus haut par des fissures de son lit qui se prolongent jusqu'au
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LE LOT ENTRE ROUERGUE ET OUERCY. Ô I ^
Lot, OÙ les eaux perdues reparaissent en sour ces de fond.
De chaque côté, le causse est revêtu de tail-
lis de chênes qui fournissent en quantité des écorces pour la tannerie, chênes verts et chênes à feuillage caduc sont également utilisés.
3l8 VOYAGE EN FRANCE.
Un détour amène au plus grandiose des paysages de la vallée, le rocher qui porte le bourg de Saint-Girq-Lapopie. Ici l'homme a complété l'œuvre de la nature. Au sommet des rochers puissamment colorés, Tample vaisseau de l'église, dont le clocher carré est flanqué d'une tourelle, semble flotter dans les airs; tout autour, de vieilles maisons bordent l'abîme, des ruines de forteresse complètent la splendeur du site. Par sa beauté altière, l'antique ville forte garde encore son prestige, mais elle renferme à peine la population d'un village ; la culture de la vigne et les travaux de boissellerie sont les pacifiques occupations des habitants.
Au pied de Saint-Girq, le Lot borde une pe- tite plaine très verte. Plus loin, à l'entrée d'un vallon, Crégols mire dans la rivière une jolie église et un vieux château.
Le rythme est régulier de ces étroits et de ces bassins d'une luxuriante végétation. Dans l'un d'eux est Saint-Martin-Labouval dont la gare est le lien entre Concots et Limogne et le reste du pays. Là viennent s'embarquer les phosphates des (( causses du Quercy », comme l'annonce au passant la grande inscription peinte sur un en- trepôt. D'autres dépôts de ces engrais naturels sont à Cénevières, encore un beau site. Le rocher
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET QUERCY. SlQ
projeté en encorbellement est couvert par un grand château dont les parties anciennes remon- tent, dit-on, à Waïfre, duc d'Aquitaine; encore habité aujourd'hui, il conserve de belles tapisse- ries. Un ruisseau né d'une grande fontaine dans la paroi du causse y fait mouvoir les roues d'un moulin à phosphate.
C'est ici la région la plus riche à ce point de vue, la seule du Lot où l'on continue l'extraction. Larnagol, à la courbure d'un cingle, possède les gisements les plus considérables de phospho- rite; une des carrières en contenait, dit-on, plus de 3o 000 mètres cubes ^
Larnagol, à la racine du cingle, et Calvignac ont des rochers rouges à pic, couronnés de maisons d'un grand effet; vu de loin, ce passage dans lequel le Lot déplie harmonieusement ses méandres est d'un effet fantastique. Ces parois abruptes s'entr'ouvrent en vallons très riches qui alimentent en fruits, en truffes, en primeurs une partie du marché de Paris.
Pour échapper à cette prison de roches, le chemin de fer franchit le Lot, troue les pénin-
I. En 1 901, on a extrait du phosphate au lieu dit Druilles, près de Larnagol, et aux Prajous, près de Gajarc. La production des carrières a été de 7000 tonnes. En 1886, le Lot avait produit 26 000 tonnes, valant 847 800 fr.
320 VOYAGE EN FRANCE.
suies par des tunnels, coupe la base des col- lines en mettant à jour des cavernes jusqu'alors ignorées. La route a préféré se tenir sur le flanc de ce soutènement du causse, elle domine de haut la rivière et souvent n'a pu s'asseoir qu'à l'aide de murs cyclopéens.
Ce passage est une belle entrée pour la petite ville de Cajarc, assise au bord du Lot, dans un grand hémicycle de verdure et de roches, en face du village de Salvagnac, première commune de l'Aveyron sur la rive gauche de la rivière. Cajarc est singulièrement disposée. Elle a pour noyau une vieille église au clocher d'ardoises percé de mansardes, entourée d'une rangée circulaire de maisons entre lesquelles s'insinuent d'étroites et sombres ruelles ; mais les fossés et les remparts sont tombés, un large boulevard bien ombragé les a remplacés, des constructions plus amples bordent le côté extérieur à la ville primitive.
Cajarc est un petit centre commerçant possé- dant des entrepôts de phosphates. Il est connu des géologues par quelques curiosités naturel- les. Sur son territoire, au pied de cette partie du- causse d'entre Lot et Celé à laquelle elle donna son nom, jaillit une abondante fontaine tombant en cascade et dont les eaux sont tel- lement chargées de calcaire qu'un énorme amas
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET QUERGY. 321
de tuf s'est formé sous la chute. Plus curieux
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encore, plus célèbres aussi sont les gouffres de rOule et de Lantouy.
VOYAGE EN FRA>-CE. XXXI.
21
32 2 VOYAGE EN FRANCE.
Ce dernier dorme toute Tannée naissance à une source, tandis que l'abîme circulaire de TOule ne déverse de l'eau qu'après les longues pluies; alors le ruisseau va rejoindre l'autre bassin. Le Lantouy est un entonnoir plein d'une eau d'un bleu laiteux, ouvert dans un ravin pro- fond du causse de Limogne formant limite entre les départements de l'Aveyron et du Lot; son courant rejoint la grande rivière à un kilomètre plus loin. Longtemps ce gouffre passa pour in- sondable, les habitants prétendant que l'on n'avait jamais pu trouver le fond. Gomme tou- jours, il a fallu renoncer à la légende : M. Martel et ses ardents collaborateurs, bravant la menace d'être entraînés par un tourbillon, se lancèrent à l'aide d'un canot Berthon sur ce lac lilliputien, large de lo mètres et long de i5. On reconnut alors une profondeur maxima de 8 mètres et l'on distingua nettement un fond de sable, vase, gra- vier et herbes aquatiques !
Au-dessus du gouffre sont les ruines d'un an- cien monastère, renversé, dit la légende, pour punir les nonnes de .s'être livrées à un accès d'anthropophagie sur un jeune enfant. Depuis lors, chaque année, le jour de la Saint-Jean, on entend les cloches du couvent maudit retentir au fond de l'abîme. Un prêtre du diocèse.
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET QUERCY. 32.3
M. l'abbé Gary, a raconté Taventure dans une poésie patoise :
Per Sen Jan, qiion méjonet sono, Dempei, d'un aire triste et lont, D'elcouben l'on aou lo compono, Per Sen Jan, quon méjonet sono, 01 foun ploiira coumo un efon.
A la Saint-Jean quand minuit sonne, — Depuis d'un air triste et lent, — On entend la cloche du couvent, — A la Saint-Jean, quand minuit sonne, — Au fond pleurer comme un enfant.
Cajarc est à la marge du Rouergue ; si son causse est une dépendance de celui de Grainat, les rochers en face font partie du causse de Li- mogne, sous le nom de causse de Villefranche. Désormais, jusqu'à Capdenac le Lot sépare les deux départements comme il séparait les deux provinces ; le ruisseau de Lantouy forme une autre limite. Salvagnac est le premier promon- toire de ce causse; son château à mâchicoulis et son église semblent surveiller l'ancienne fron- tière.
Des deux côtés, surtout vers Gadrieu, les ro- chers sont immenses. A Saujac ils obligent la ri- vière à un grand détour, à Montbrun ils Jui font décrire un cingle élégant maîtrisé par les belles ruines d'un donjon et de remparts sous lesquelles
324 VOYAGE EN FRANCE.
les maisons du village semblent collées à la paroi calcaire. On se demande comment les ha- bitants peuvent rejoindre leurs demeures bâties à pic sur des strates successives disposées en encorbellement. L'église paraît juchée au som- met d'un escalier dont les marches seraient alternativement des maisons et des rochers cou- verts de figuiers. La route ne parvient à traver- ser le défilé qu'en se frayant passage par des tunnels, comme Ta fait le chemin de fer.
En Rouergue, sur un rocher verdoyant se dresse la belle masse du château de Campoulan, entourée d'une galerie à mâchicoulis. Un autre château de moins fier aspect précède Ambeyrac, gracieusement assis à l'entrée d'un val dominé au fond par l'église de Montsalès. Ce rivage offre beaucoup de grandeur : un petit plateau, le causse de Laroque, se termine sur le Lot par de hautes et vertes parois sous lesquelles se blottit l'église de Laroque, semblable à une forteresse. Les édifices et les ruines se suivent. En Ouercy <c'est le château délabré de Saint-Pierre ; en Rouergue, les ruines de Balaguier et des maisons de teinte fauve couronnent un rocher tapissé de verdure.
Au delà, si le paysage est toujours saisissant par les formes et la couleur, il n'a plus autant
LE LOT ENTRE ROUERGUE ET QUERCY. 325
de hardiesse. Les pentes sont plus douces et plus vertes, la roche rouge est enveloppée de cultures et de bois. Les villages eux-mêmes n'ofïrent pas l'aspect grisâtre qu'ils avaient plus bas ; ils se juchent à mi-côte, sur des ressauts. Au fond du val sont de beaux massifs de noyers et de châtai- gniers; près des crêtes les vignobles se touchent. Une grande route venant de Figeac franchit le Lot au hameau de la Madeleine et, par de grandes sinuosités, va s'élever sur le causse de Villefranche. Elle dut être animée jadis, mais aujourd'hui le chemin de fer a bien restreint son utilité, car il y a ici un des principaux nœuds de voies ferrées du Midi, au pied du formidable ro- cher de Capdenac portant une vieille cité à demi ruinée, sous laquelle est née la jeune et vivante bourgade de Gapdenac-Gare \
I. Sur Capdenac et la région du Quercy, entre le Lot et la Dordofjne, voyez la 32« série du Voyage en France.
INDEX ALPHABÉTIQUE
DBS KOÏS DE LIEUI ET DES PRINCIPALES CULTBRES ET INDUSTRIES
Pour f.ciliter les recherches, les noms des départements sont dési- gnés pair des lettres majuscules, les chapitres concernant un dépar- tement sont indiqués par des chiffres romains.
Les noms de provinces, petits pays de l'ancienne France, régions naturelles et colonies sont en caractères gras.
Les chiffres gras indiquent les parties du volume plus spécialement consacrées à la description des sites ou des centres d'habitation.
Les industries et les cultures sont désignées par des lettres italiques.
Toutes les autres indications, noms de lieux, de montagnes, de pays étrangers, sont en caractères ordinaires.
Pour les départements, se référer au nom de chacun, à sa place al]»hahélique.
Adour (fleuve), 36, loi. Agenais (chap. I, II, IX à
XII), 84, S6, 207, 208, 260,
280. Agen (Lot-et-Garonne), 2, 85,
107, i32, 178, 180 à 187,
192, 194, 219, 287. Agout (rivière), 282, 235. Aignan (Gers), 102, iio. Aiguillon (Lot-et-Garonne), 10,
i29, 189, 190. Alaric (canal d'}, 101. Albefeuillc (Tarn-et-Garonne),
214. Alliertas (Tarn - et - Garonne),
275. Albi (Tarn), 227.
Albias (Tarn-et-Garonne), 347. Albigeois, 170, 226, 265,269- Albret (pays d'), 5, 37 à 83. Algérie, 68, 71, 72, 74, 81,
269. Allemagne (empire d'), 72, i55,
202, 206. AlJemance (rivière), 170, 171,
172, 178, 174. AUemans (Lot-et-Garonne), 28. Allons (Lot-et-Garonne), 46. Alzau (rivière), 3 10. Amandier (^culture de /'), 149. Ambeyrac (Aveyron), 824. Amérique, 72, i54. Amérique centrale, 255. Andiran (Lot-et-Garonne), 77. Anglars (Lot), 284, 285. Angleterre (royaume), 72, 202.
328
INDEX ALPHABETIQUE.
Angoulème (Charente), 98. Arcambal (Lot), 3oi, 3o6, 3ii. Argenton (ruisseau), 36. Arles (Bouches - du - Rhône),
201. Armagnac, S.-?, 54, 84 à 86, 89, 93, 102, io4, 112, ii3,
116. Armagnac (Bas-), 107, 109. Armagnac (Haut-), 107, 110. Arrats (rivière), 99, 21 5. Armagnac (voir Eaux-de-vie). Arros (rivière), loi. Asperges {culture d'), i48. AstafTort (Lot-et-Garonne),
88. Auch (Gers), 48, 85, 88, 92,
100, io3, 107, m. AUDE (département de 1'), 228. Audubert (Tarn- et- Garonne),
275. Auloue (rivière), 128. Auradou (Lot - et - Garonne),
178. Auroue (rivière), 95. Aurrenque (Gers), g5. Autriche-Hongrie, i55. Auvignon (rivière), 86. Auvillar (Tarn -et- Garonne),
198, 2l5. Auzoue ou Lauzoue (rivière),
76, m, ii5, 117. Ayancé (rivière), 9, 35 à t[X. AYEYRON (département de 1'),
322 à 325, Aveyron (rivière), 207, 208,
219, 226, 281, 282, 284, 287,
246,247,248,259,261,264
à 278.
j Avignon (Vaucluse), 186. Ayroux (ruisseau d*), 21 5. Azine (ruisseau), 210.
Bach (Lot), 3oo, 3oi.
Baise (rivière), 5i, 52, 61,64,
67, 76, 84, 85, 99, ii3, 118
à 126. Balaguier (Aveyron), 325. Balais de sorgho, 4, i85, 223
à 225. Banque de France, 186, 288,
284, 296. Barbaste (Lot-et-Garonne), 54,
55, 57 à 59, 78. Bargelonne (rivière), 197, 198,
206. Bas-Armagnac (vogez Arma- gnac [Bas-]). Bas-Quercy, 197 à 206, 260. Banville ( Lot - et - Garonne ),
179- Bavière (royaume de), 257. Bay (rivière), 265. Bazas (Gironde), 5. Beaucaire (Gers), 128. Beaumont-de-Lomagne (Tarn-
et- Garonne), 85, 216 à
219. Beaupuy (Lot-et-Garonne), 8. Beauregard (Lot), 3oi. Bedfordshire (comté d'Angk-
terre), 256. Belgique, i54, 25i, a52, 257. Bergerac (Dordogne), 27. Berri, 226. Besançon (Doubs), 290.
INDEX ALPHABETIQUE.
329
Biars(Lot), Si-î.
Bièvre (rivière de Paris), 88.
Bigorre, 101.
Biron (Dordogne), i5g, 1O4,
167, 168. Blanquefort (Lot-et-Garonne),
171. Boites de fer-blanc, i5i. Bonagiiil (ruines de) [Lot-et- Garonne], 175. Bon - Encontre ( Lot - et - Ga -
rpnne), 199. Bonnette (rivière), aôj, 270,
271, 273. Bordeaux (Gironde), 1,84,119,
128, i34, 145, i54, i57, 186,
190. Bosnie(province autrichienne),
i54. Bouchons {fdbr. de), 55, 67
à 83. Boudouyssou (rivière), 177. Bougies, 37.
Bouquiès (Aveyron), 309. Bourg -de -Visa (Tarn -et -Ga- ronne), 195. Bourriat-Bergonce (gare de)
[Landes], 48. Bouziès (Lot), 3oi, 3i6. Bressols (Tarn -et -Garonne),
237. Bretagne-d'Armagnac (Gers),
ii4, ii5. Brugnac ( Lot - et - Garonne ),
i3i. Brulhois (pays de ), 8G à
88. Bruniquel (Tarn-et-Garonne),
277.
Cabrerets (Lot), 3oi.
Cadours (Haute-Garonne), 85.
Cadrieu (Lot), 323.
Cahors (Lot), 174, âo4, 2o5, 206, 290 à 296, 3oG, 3io, 3i I, 3i3.
Caisses d'euiballage, i5i.
Cajar (Lot), 294, 3o2, 3 18, 320, 325.
Californie, i54.
Calvignac (Lot), 319.
Camcson (riyère), 21 5.
Gampoulan (Aveyron), 324.
Canal latéral à la Garonne, 54, 193, 194, 198,219,231,235, 245.
Cancon (Lot-et-Garonne), 139, 161, 162, i65.
Capdenac - Gare ( Aveyron ), 174, 325.
Capdenac (Lot), 280, 3io, 323, 325.
Gapelle - Biron ( Lot - et -Ga- ronne), 143, 167, 168, 171.
Capelle - Livron (la) [Tarn-et- Garonne], 273.
Carmaux (Tarn), 265.
Cartonnages, 239.
Castel-Amouroux (Lot-et-Ga- ronne), 36.
Castelculier (Lot-et-Garonne), 192.
Castelfranc (Lot), 285.
Casteljaloux (Lot-et-Garonne), 36 à 40.
Castelmayran (Tarn - et - Ga - ronne), 200, 216.
33o
INDEX ALPHABETIQUE.
Gaslelmoron-sur-Drot ou d'Al- bret (Gironde), 5, 31, 32.
Castelmoron-siir-Lot (Lot-et- Garonne), i3o, i3i, 189.
Castelnau-d'Arbieu (Gers), 95.
Caslelnaii-d'Auzan (Gers), 107, 116.
-Castelnaud - de - Grattecanibe (Lot-el-Garonne), 109, 160.
Gastelnau-de-Montratier (Lot), 299, 3oo.
Caslel - Sagrat (Tarn -et -Ga- ronne), 195.
Gastels (cbâteau de) [Tarn-et- Garonne], 197.
Castelsarrazin (Tarn -et -Ga- ronne), 200, 208, 210 à 214, 220.
Castéra-Verduzan (Gers), 85, 128.
Castex-Lectourois (Gers), 89.
C^astillonnës (Lot-et-Garonne), 189, iGG.
Caumont (Tarn- et -Garonne), 200.
Crfiussale (Tarn-et-Garonne), 288, 2/18, 249, 251 à 258, 297, 298.
Causse de Gabors, 208, 206, 287, 295, 807.
Gausse de Gramat, 3oG, 3io, 3i5, 828.
Causse de Laroque, 824.
Causse de Limogne, 208, 206, 258, 265, 274, 297, 299, 807, 8i5, 823.
Causse Méjean, 299.
Causse de Saint-Antonin ou de Caylus, 258, 269, 274, 297.
Ciusse de Sauveterre, 299, 3o4.
Causse de Villefranche, 828, 825.
Causse du Larzac, 804.
Cayhis (Tarn-et-Garonne), 262, 270, 272 à 274, 297.
Cayrac ( Tarn-et-Garonne), 248.
Cayran (Lot), 3o6.
Gazais (Tarn-et-Garonne), 276.
Cazaubon (Gers), 85, io4, 109.
Cazeneuve (Gers), ii4-
(-azes-Mondenard (Tarn-et-Ga- ronne), 204.
Cazoul (le) [Lot], 812.
Celé (rivière), 810, 820.
Cénevières (Lot), 3 18.
Céran (Gers), 100.
Cérou (rivière), 265,
Cévennes, 233.
Chanvre (culture du), 182, 190.
Chapeaux de feutre, 129.
Chapeaux de paille, 129, 288, 249 à 262.
Charentes (région des), 108, 1 10.
Charrin (.-bateau de) [Lot-et- Garonne], 125.
Chasselas (raisin), 190.
Cbasseneuil (Charente), i34,
Cbasseneuil (Lot-el-Garonne), i34.
Cbassenon (Cbarente), i34.
Cbaumont-en-Vexin (Oise), 60.
Chaussu/'es, 98, ii3.
Chène-li^ge, 4A» 4?» 5o, O7 à 83.
Cheval {élevage du), 218.
Chine (empire de la), 25i, 252.
INDEX ALPHABETIQUE.
33 I
Cieurac (Lot), 3o6, 3ii.
Cieulat ( faubourg d'Eauze ) , loG.
Cingle (moulin du) [Lot], 280.
Ciron (rivière), A5.
Clairac(Lot-et-Garonne), 128, 129.
Clermont-Dcssous (Lot-et-Ga- ronne), 188.
Clermonl-Dessus (Lot-et-Ga- ronne), 197.
Cognac (Gers), 107.
Colayrac ( Lot - et - Garonne ), 188.
Colles, 180.
Cologne (Gers), 85, 99.
Concots (Lot), 3oi, 3o3, 3oA,
■ 3i5, 3i8.
Condezaygues (Lot-et-Garon- ne), 170.
Condom (Gers), 85, 107, iio, III, 118 à 123.
Condomois (pays de), 54, 67, 79, 117 à 126.
Conduché (Lotj, 3 16.
Corbarieu (Tarn-et-Garonne), 237.
Corderie, i85.
Cordes (Tarn), 260.
Cornichons {culture des), 248.
Cos (Tarn-et-Garonne), 247.
COTE-D'OR (département de la), i3.
Coutellerie, 224.
Coutures (Gironde), 33.
Crégols (Lot), 3oi, 3i8.
Cuivre {laminage du), 212.
Cuzorn (Lot-et-Garonne), 171, 172.
Damazan (Lot-et-Garonne),
190, 191. Danube (fleuve), i55. Dardenne (Tarn-et-Garonne),
260. Dauphiné, 249, 25o. Decazeville (Aveyron), 174,
309. Détroit (États-Unis), 212. Dieulivol (Gironde), 3o. Dieupentale (Tarn-et-Garonne),
222, 232.
Digne (Basses- Alpes), 29G. Divonne (source de) [Lot],
295. DORDOGNE (département
de la), i3, 25 à 27, i3G,
287. Dordogne (rivière), 5, 226, 280,
3o8, 3io. Doueile (Lot), 288. Dourdène (rivière), 25. Dourdèze (rivière), 29. Dousset (ruisseau dej, 3o. Douze ou Doulouze (rivière),
48, 49, io4, io5. Drot (rivière), 5, 22, 25 à 33,
i3i, i35, 161, 166. Durance ( Lot - et - Garonne ) ,
44. Duras (Lot-et-Garonne), 28,
29, 30, 3i, 139. Duravel (Lot), 282, 294. Durfort ( Tarn - et - Garonne ),
204. Dresde (Saxe royale), 207. Druilles (Les) [Lot], 3 18.
332
INDEX ALPHABETIQUE.
Eaux-de-vie, 8, Ss, 69, 66, q3, 102, 107 à 110, 112.
Eaux minérales, m, i23, i3o, 266.
Eauzan (pays d'), 54, 105 à 116.
Eauze (Gers), 48, 105 à 111,
^ 114.
École d'agriculture de Saint- Pau (Lot-et-Garonne), 74, 83.
Engrais chimiques, i85.
Entre-Deux-Mers, 28, 3i.
Escamps (Lot), 3oi, 3o5.
Escatalens (Tarn-et-Garonne), 221.
Esclauzels (Lot), 3oi, 3i5.
Espadrilles (voir Sandales).
Espagne (royaume d'), 68, 71, 81.
Espalais (Tarn-et-Garonne), 198.
Espanel (Tarn-et-Garonne), 298.
Essence de térébenthine, 46.
Estampon (rivière), 49-
Estang (Gers), 85.
Esterel, 70.
Estussan (Lot-et-Garonne), Sg.
États-Unis, i55.
Eymet (Dordogne), 25 à 27, 3o, iSg, i4i-
Eysses (Lot-et-Garonne), i58.
Falgueyrat (Dordogne), 28. Fas (Lot-et-Garonne), 87.
Fauillet (Lot-et-Garonne).
Feneyrols-les-Bains (Tarn-et- Garonne), 266.
Fère (La) [Aisne], 67.
Feugarolles (Lot-et-Garonne), 5i, 55.
Fezensac (pays de), 54, 110 à 113.
Fezenzaguet (pays de), 99.
Figue (culture de la), 128.
Figuëres (Espagne), 221.
Finhan (Tarn-et-Garonne), 22 1 .
Fleurance ( Gers ), 92 , gS à 100.
Foire aux chiens, 212, 234-
Foix (Ariège), 296.
Fonfrède (source de), i3o.
Fongrave (Lot-et-Garonne), i3i.
Fontanas (château de) [Tarn- et-Garonne], 243.
Fontélie (fontaine de) [Gers], 93.
Font-Polémie (source) [Lot], 3i3.
Formes pour chaussures, 11 3.
Fromage, 3o4.
Fronton (Haute-Garonne), 239, 241, 242, 244-
Fumel (Lot-et-Garonne), 171 à 175, 280.
Fustérouan (Gers), 102.
Gabardan (pays de), 79. Gabarret (Landes), 48, 109. Gandalou (Tarn-et-Garonne), 214.
INDEX ALPHABETIQUE.
333
Gardclle (la) [Lotj, 284. Garonne (fleuve), i à 20, 35,
39, 5o, 54, 85, 86, 87, 100,
129, 177, 180 à 199, 2o5,
207, 2i4, 219, 221, 222, 2»7,
•>3i, 234, 242, 246, 309. Gascogne (chap. III à VI). Gaure (pays de), 96 à 100. Gavacherie (pays de la), 5,
28, 3i. Gavarnie (Hautes- Pyrénées),
122. Gavaudun (Lot-et-Garonne),
167, 168, 171. Gazelle (la) [Lot-et-Garonne],
22. Gélise (rivière), 52, 54, 58,
59> 73, 76, 77. 79. io5, m,
114. GERS (département du), 88 à
126, 2l5, Gers (rivière), 84 à 100. Gimoës (pays de), 99. Gimone (rivière), 99, 21 5, 216,
219. Gimont (Gers), 85, 214. GIRONDE (département de
la), i3, 3o à 34, 47, i36,
219. Gondrin (Gers), ii5, 117. Goudourville (Tarn-et-Garon-
ne), 198. Goutz (Gers), 100. Gramat (Lot), 3o3. Grandfonds (Lot-et-Garonne),
193. Grand-Nérac (quartier de Né-
rac), 63. Gréalous (Lot), 3oi.
Grenade-sur-Garonne (Haute- Garonne), 242.
Grenoble (Isère), 257.
Grésivaudan, 187.
Grisolles (Tarn- et- Garonne), 222, 223, 224, 225, 242, 245.
Guilleragues (château de) [Gi- ronde], 33.
Guyenne (chap. I, II, VII à XX), 86.
Haricots verts {récolte des), i48, 149. '
Haut-Armagnac {voyez -\i'ma- gnac [Haut-]).
Hautefage (Lot-et-Garonne), 178, 179.
HAUTE-GARONNE (départe- ment de la), 219, 224, 238 à 243.
Honor-de-Cos (1') [Tarn-et-Ga- ronne], 247.
Hôpital Beaulieu (Lot), 3io.
Hordosse (château de) [Lot-et- Garonne], 76.
Hospitalet (L') [Lot], 3o6.
Houeillès (Lot-et-Garonne), 43, 44, 48, 73.
Houil (ruisseau de), 48.
îssigeac (Dordogne), 27, 139. Issolud (puy d'), 286. Italie (royaume d'j, 72, 25 1. Izaute (rivière), m, ii4-
334
INDEX ALPHABETIQUE.
Japon (empire du), 25i, 262. Jasmin (le poète), 182 à 184,
192, 193. Java (île de), 255. Jegim (Gers), iio, ii3. Joanny (Tarn-et-Garonne), 271 . Jiisix (Lot-et-Garonne), 2.
Labastide- d'Armagnac (Lan- des), 60.
Labastide-du-Temple (Tarn-el- Garonne), 2iA-
Labastide-Marnhac (Lot), 3o6.
Labastide -Saint -Pierre (Tsrn- et-Garonne), 237,
Lacapelle Biron Çuoir Capelle- Biron).
Lacaussade (Lot-et-Garonne), 168.
Lafox (Lot-et-Garonne), 197.
Lafrançaise (Tarn-et-Garonne), 234, 235.
Lagarde-Finarçon (Gers), 89.
Lait stérilisé, i3i.
Laiton, 212.
Lalbenque(Lot), 262, 3oo, 3oi, 3o4.
Lamothe-Capdeville (Tarn-et- Garonne), 247.
Lamothe-Gondrin (château de) [Gers], iio.
Landes, 37 à 49, 67, 117, i5x.
LANDES (département des), 47 à 49, 68, 70, 71.
Languedoc, 207 à 214,
249. Lannemezan (plateau de),
87, 196, 203, 2l5. Lannepax (Gers), m. ,
Lantouy (gouffre de) [Lot], 32 1,
322, 323.
Laon (Aisne), 169.
Laparade ( Lot-et-Garorme ), 129, i3o.
Laplume (Lot-et-Garonne), 86, 88.
Larnagol (Lot), 3oi, 3o2, 3o3, 3o4, 319.
Laroque - Bouilhac ( Ave\Ton ), 309.
Laroque-Timbaut (Lot-et-Ga- ronne), 179.
Laroque-Toirac (Lot), 324-
Larroque (château de) [Lot], 3ii.
Larzac (causse du), 3o4.
Lauze (rivière), 93.
Lauzerte (Tarn-et-Garonne),
204, 205.
Lauzès (Lot), 3i4, 3i5. Lauzoue (rivière) [voir Au-
zoue]. Lauzun ( Lot - et - Garonne ) ,
25. Lavardac (Lot-et-Garonne), 47,
52 à 56, 60, 67. Lavardens (ruines de) [Gers],
ii3. Lavaur (Tarn), 232. Lavilledieu (Tai'n-el-Garonne),
208, 214. Lavi t-de-Lomagne ( Tarn-et-Gr.-
ronne), 85, 216.
INDEX ALPHABETIQUE.
335
Layrac (Lot-et-Garonne), 86,
87, Lectoure (Gers), 89 à 94,
96, 97, io3, 216. Lède (rivière), 161, 162, 167,
171. I^embon (rivière), 210. I.eniboul (rivière), 298. Lembous (ruisseau), 298. I^cmboulas (rivière), 298. Lencou (rivière), 2o5. IJ?re (rivière), 248, 258, 262. Leriet (château de) [Tarn-et-
Garonne], 214. Lexos (Tarn-et-Garonne), 264,
2G5. Libos (Lot-et-Garonne), 171. Liboume (Gironde), i4i. Liège (Belgique), 202. Liège {exploitation et prépa- ration du), 02, 55 à 59,
66 à 83. Lille (Nord), 227. Lirnogne (Lot), 3oi, 3 18. Limousin, 226. Lindenberg (Bavière), 207. Linoléum, 56. Lisse (Lot-et-Garonne), 73,
76. Li\Ton (Tarn-et-Garonne), 272,
273. Lomagne, 84 à 96, 196,
197, 198, 200, 207, 215 à
219, 234. J-.ombez (Gers), 85. Losse (rivière), 118. LOT (département du) [chap.
XVIII à XX], 12, i3, 10, 19,
Lot (rivière), 22, 127 à 159,. i6g à 178, 180, 189, 2o3, 226, 278 à 296, 308 à 325.
LOT-ET-GARONNE (départe- ment du) [chap. I à XIII], iio, 124 à 191, 219, 224,
252, 287.
Louisiane (Etats-Unis), 212. Loule (gouffre) [uoir Ouïe]. Lugagnac (Lot), 3oi. Lugaut (Landes), 49- Lllg-lies (pays des), 44. Lusignan (Lot-et-Garonne),.
188. Luton (Angleterre), 252. Lutte (ruisseau), 299. Luzech (Lot), 285, 286. Lyon (Rhône), 241, 249.
M
Madeleine (la) [Lot], 3ii.
Madeleine (la), commune de Faycelles (Lot), 325.
Mfiëstricht (Hollande), 252.
Magistère (la) [Tarn-et-Garon- ne], 197.
Magnanac ( Haute - Garonne ), 239.
Maillechort, 212.
Malines (Belgique), i54.
Malterre (château de) [Tarn- et-Garonne], 271.
Manciet (Gers), io5.
Maransin, 70.
Marcellus (Lot-et-Garonne), 4-
Marche duRouergue, 265.
Marciac (Gers), 85.
Marcilhac-sur-Célé (Lot), 3oi.
33Ô
INDEX ALPHABETIQUE.
Marrnande (Lot-el-Garonne), 5 à 8, 21, 35, 187.
Marmont- Pachas (Lot-et-Ga- ronne), 87, 88.
Maroc (empire du), 68.
Marseille (Bouches-du-Rhône), 262.
Martel (Lot), 3oi.
Martinet (Le) [Tarn-et-Garon- ne], 271.
Maryland (États-Unis), 12.
Mas-d'Agenais (Lot-et-Garon- ne), 9, 36.
Massuries (Les) [Lot], 3i6.
Maures (pays des), 70, 71.
Mauvezin (Gers), 85, 99.
Mazainet (Tarn), 234.
Méditerranée, 170.
Meilhan (Lot-et-Garonne), 2.
Mercuès (Lot), 288.
Mesures en bois, 239.
Métallurgie, 38, 173, 174, 277.
Meylan (Lot-et-Garonne), 83.
Mézin (Lot-et-Garonne), 47 > 55, 56, 67, 77 à 82.
Midou ou Midour (rivière), 102, 104.
Miélan (Gers), 118.
Mines de fer, 172, 174, 282.
Min-jterie, 54, 232.
Mirabel(Tarn-et-Garonnc), 260, 261.
Miradoux (Gers), 88.
Miramont (Gers), 100.
Miramont (Lot-et-Garonne), 24, 25, i3i, 139.
Miramont (Tarn -et -Garonne),
205.
Mirande (Gers), 85. Mirandol (Lot), 285. Mirepoix (Gers), 100. Moissac ( Tarn - et - Garonne ), 143, 194, 200 à 203, 204,
210, 232.
Molières (Tarn- et- Garonne),
298, 299. Monbahus (Lot-et-Garonne),
i3i. Monbarla (Tarn- et- Garonne),
205.
Monbazillac (Dordogne), 27, 128.
Monclar-d'Agenais (Lot-et-Ga- ronne), 4o, i3i, i32.
Moacrabeau (Gers), 124 à 126.
Monfort-du-Gers (Gers), 99.
Monge (château de) [Tarn-et- Garonne], 271.
Monségur (Gironde), 30, 31, 32, 33.
Monségur (Lot-et-Garonne), 169.
Monsempron (Lot-et-Garonne), 170, 171.
Monsempron-Libos (gare de), 170, 171, 173.
Montagnac (Lot-et-Garonne), 167.
Montagudet (Tarn-et-Garonne), 2o5.
Montaigu-de-Quercy (Tarn-et- Garonne), 204-
Montalzat (Tarn-et-Garonne), 260, 261, 298.
Montastruc (Lot-et-Garonne),
l32.
INDEX ALPHABETIQUE.
337
Montauban (Tarn-et-Garonne), 186,208, 210, 215,223,228 à 234, 247, 249, 25i, 264,
^Montbrun (Lot), 323. Montcabrier (Lot), 280. Montcuq ( Lot ) , 206 , 297 ,
3oo. Mont-de-Marsan (Landes), ?.34. Montech (Tarn-et-Garonne),
220, 232.
3*Ionteils (Tarn-et-Garonne),
209. Montesquiou (Gers), iio, m. Monteton (Lot-et-Garonne),
29. Montflanquin (Lot-et-Garon- ne), 149, 161, 162 à 166. Montgaillard (Lot-et-Garonne),
5i, 59. ^lontjoy (Tarn-et-Garonne),
195. ^lontluçon (Allier), 186. Montpezat (Tarn-et-Garonne),
260, 298. Monfréal-du-Gers (Gers), 107,
110, 115, 116, 117. 3Ionlricoux (Tarn-et-Garonne),
278. Montsalès (Aveyron), 324. Mouchan (Gers), m. Moura (Gers), m. Moustier ( Lot - et - Garonne ) ,
28. Mouton (^élevage du), 3o3. Miircens ou Mursens (Lot), 3i3,
3i4. Mûrier (^culture du), 193,
232.
N
Nancy (Meurthe- et -Moselle), 206, 267.
Narbonne (Aude), 234.
Navigation Jluviale, 3o, 02 à 54, 119, 120, i34, 107, 187, 309.
Nazareth (château de) [Lot-ot- Garonne], 65, 126.
Négrepelisse (Tarn-et-Garon- ne), 278.
Nérac (Lot-et-Garonne), 56, 61 à 65, 76, 107, ii4, 126.
Neuffons (Lot-et-Garonne), 38, 40.
Nicole (Lot-et-Garonne), 129, 187, 189, 190.
Nîmes (Gard), 807.
Nogaro (Gers), 85, io3, io4, 109, III.
Nohic (Tarn-et-Garonne), 287.
NORD (département du), i3, 16.
Notre-Dame-de-Livron (Tarn- et-Garonne), 273.
Noulens (Gers), m.
Ognon {culture de /'), 192. Oiseleurs, 218.
Oit (nom ancien du Lot), 287. Orbe (niisseau), 99. Orgueil (ruines d') [Lot], 281- Orgueil (Tarn-et-Garonne), 287. Orléanais, 126. Ormes tortillards, i3i. Ouïe (gouffre de 1') [Lot], 821, 822, 828.
VOYAGE EN FRANCE. — XXXI.
338
INDEX ALPHABÉTIQUE.
Papeterie, 220, 289.
Papier d'étain, 212.
Pardaillan (Lot-et-Garonne), 29.
Parnac (Lot), 287, 288.
PAS-DE-CALAIS (département du), 16.
Passage - d'Agen (Le) [Lot-et- Garonne], i85, 186.
Pastiirac (Lot), 3i5.
Pâtes alimentaires, 287, 288.
Pécher (culture du), 149, 247.
Peignes de corne, i48, 144? 233.
Pelbusoc (Landes et Lot-et-Ga- ronne), 46.
Pellegrue (Gironde), 3i.
Penne -d'Agenais, i58, 177, 178.
Penne-d'Albigeois (Tarn), 269, 276, 277.
Pérignon (château de) [Tarn- et-Garonne], 221.
Périgord, 19, 25 à 27, 161, 164, 169.
Périgueux (Dordogne), 186.
Pescadoire (Lot), 284.
Petit-Nérac (quartier de Nérac), 63.
Petite-Barguelonne ( Tarn -et - Garonne), 2o5, 800.
Petite-Léonne (rivière), 179, 195.
PejTcstortes (P^Ténées- Orien- tales), 221.
Phosphate de chaux, 269, 270, 275, 801, 8o4, 3i8, 820.
Picc[uecos (Tarn-et-Garonne), 247.
Pis (Gers), 100.
Pise (Italie), 100.
Plaisance (Gers), 85.
Plaisance (Landes), 47-
Plateau de Lannemezan (voyez Lannemezan).
Plumes d'oie, 197.
Pois (petits) [culture des], 128, i4i, 145 à 154.
Poitiers (Vienne), 186.
Polémie (fontaine) [Lot], 8i3.
Pommevic (Tarn-ct-Garonne)y 198.
Pompignan (Tarn-et-Garonne), 243 à 245.
Pompogne (Lot -en -Garonne), 48.
Pont-de-Bordes (Lot-et-Garon- ne), 54, 56, 78.
Pont-Moyne (ferme de) [Lot- et-Garonne], 45.
Port-de-Penne (Lot-et-Garon- ne), 177, 178.
Port-Sainte-lNIarie (Lot-et-Ga- ronne), 10, 5o, 84, 188.
Portugal (royaume de), 68. 71,
Poudenas (Lot-et-Garonne), 78,
82. Pradines (Lot), 288. Prajous (Les) [Lot], 3i8. Prayssac (Lot), 284. Primeurs, 246, 247. Privas (Ardèche), 296. Provence, 68, 70, 71. Prunes et pruneaux, 27, 134
à 140, 182, 208.
INDEX ALPHABETIQUE.
Pruniers (culture des), 21, 22,
29, 134 à 140. Pnjols (Lot-et-Garonne), 157. Puycasquier (Gers), 100. Puvguilhem (Dordogne), 2g. Puvjourdes (Lot), 3oi. Puylaroque (Tarn-et-Garonne),
261, 262, 298. Puy (Le) [Haute-Loire], 284,
255. Piiy-1'Évêque (Lot), 288. Puymirol (Lot-et-Garonne),
195. Puységur (Gers), 100. Pyrénées (chaîne des), 92,
118, 117, 122,196,218,226,
284. PYRÉNÉES - ORIENTALES
(département des), 70.
Quercy (chap. XIII à XX),
17, 18, ig, i6g, 177. Quercy-Blanc, ig5, 204,
258, 260, 2g7.
Raisin {culture du), igo. Ramier (pays du), 287. Ramouzens (Gers), m. Réalville (Tarn-et-Garonne),
248, 25l. Réaup (Lot-et-Garonne), 78. Regnics (Tarn-et-Gai'onne),
287. Rcole (La) [Gironde], i, 84. Retjons (Landes), 4g-
339
Retjons-Lugaul (gare de) [Lan- des], 48. Ribérette (ruisseau), 102. Rivière -Montalbanaise,
228 à 245. Riviére-Verdun (pays de),
219 à 223. Rocamadour (Lot), 3 10. Roc-Dansaire (Tarn-et-Garon- ne), 266. Roc-de-Gorp ou d'Aucor (Lot),
3i8. Rochers-d'Anglars (Tarn-et-Ga- ronne), 266. Roquebrune (château de) [Gi- ronde], 33. Roquefort (Gers), 100. Roquefort (Landes), 4g- Roubaix (Nord), 227. Rouergue, 288, 24g, 27g,
322 à 325. Roussillon, 08. Ruisseau-Profond, 21 5. Russie (empire de), i55.
Saillac (Lot), 801.
Saint-Antonin (Tarn-et-Garou- ne), 261, 266 à 270, 275.
Saint-Barthélémy (Lot-et-Ga- ronne), 24.
Sainte-Bazeille (Lot-et-Garon- ne), 4) 5.
Sainte - Christie - d'Armagnac (Gers), 104.
Saint-Girq-Lapopie (Lot), 3oi, 3i8.
Saint-CIar (Gers), 98.
34o
INDEX ALPHABETIQUE.
Sainl-Front (Lot-et-Ciai-onne),
171. Sainl-Gény (chapelle) [Gers],
Saint - Georges - d'Espéranche (Isère), 2.56, 257.
Sainl-Géry (Lot), 3i5.
Saint-Hilaire (Gironde), 33.
Sainl-Hilaire (Lot-et-Garonne), 188.
Saint-Jean-de-Laur (Lot), 3oi.
Saint- Jcan-de-Thurac (Lot-et- Garonne), 196.
Saint-Jean-Poutge (Gers), 11 3, 119, 120.
Sainl-Juéry (Tarn), 282.
Sainte - Livrade (Lot-et-Ga- ronne), i32, 139, i/|0, 1/19, 182. .
Saint-Martin- Labouval (Lot), 201, 3o4, 3i8.
Saint - Nicolas - de - la- Balerme (Lot-et-Garonne), 196.
Saint - Nicolas - de - la - Grave (Tarn-et-Garonne), 199, 200.
Saint-Pastour (Lot-et-Garon- ne), 160.
Saint-Pau ( Lot-et-Garonne ),73, ih, 76, 83.
Saint-Pierre (château de) [Lot],
32/i.
Saint-Projet (Tarn-et-Garon- ne), 273.
Saint-Puy (Gers), 98.
Sainte-Radegonde (Gers), 98.
Sainte-Radegonde (Lot-et-Ga- ronne), iDg.
Saint-Rome (signal de) [Tarn- et-Garonne], 271.
Saint-Sixte (Lot-et-Garonne), 196.
Saint-Sulpice (ruisseau de), 33.
Saint - SA'mphorien - sur- Coise (Rhône), 256, 267.
Saint-Vincent-Rive-d'Olt, 287.
Salles (Lot-et-Garonne), 167, 171.
Salvagnac (AvejTOn), 320, 323.
Salvetat (près Montpezat) [Tarn-et-Garonne], 298.
Sandales ou espadrilles, 12.
Sangles, 276.
Saramon (Gers), 85.
Saujac (Aveyron), 323.
Saut-du-Tarn (Tarn), 282.
Sauternes (Gironde), 128.
Sa uvelat (La) [Lot-et-Garonne], 25, 28.
Sauvetat-de - Savères ( Lot-et- Garonne), 195.
Sauvetat-du-Drot (La) [Gers], 98.
Sauvetat-sur-Lëde (La) [Lot-et- Garonne], 161.
Sauveterre (Lot-et-Garonne), 196.
Sauveterre-la-Lémance ( Lot-et- Garonne), 173.
Savanac (Lot), 3 12.
Savon, 37.
SEINE-ET-OISE (département de), i48.
Séoune (rivière), 193, igS, 206.
Septlbnds (Tarn -et- Garonne), 249, 250, 25i, 253, 254, 258 à 262, 269, 270, 274.
Sept-Ponts (Lot), 307.
INDEX ALPHABETIQUE.
34 I
Serbie ( royaume de ) , i54 ,
i55. SL're (ruisseau), 216, 251. Serempuy (Gers), 85. Sériciculture, 194, 282, 233. Sen-anac (Tarn -et - Garonne),
25l.
Seyches (Lot-et-Garonne), 24.
Seye (rivière), 265.
Sicile (île de), 170.
Soie {industrie de la), 532,
233. Sorgho {culture du), 4, 222 à
225, 245. Sos (Lot-et-Garonne), 72, 82,
83, iio. Solurac (Lot), 281. Soufflerie de poils, 239. Suisse, 201, 256. Sumac, 170, 233.
Tabac (culture du), 10, 12 à 20, 287.
Tabletterie, 82.
Tailhade (La) [Lot-et-Garon- ne], 4i'
Tamis à bluter, 2Z2.
TARN (département du), 264, 3o8.
Tarn (rivière), 199, 200, 207, 208, 2i5, 219, 228 à 241, 246, 259.
TARN-ET-GARONNE (dépar- tement de) [chap. XIII à XIX], 85, i36, 194.
Tarsac (Gers), loi.
Tartres, ii3.
Temple (Le) [Lot-et-Garonne],
i3i. Ténaréze (voie romaine et
pays de), 54, 59, 82, 107,
108, 109. Térébenthine (voir Essence de). Terraube (Gers), 92. Terrines de Nèrac, 67. Tescûu (rivière), 237. Tessonne (rivière), 21 5. Teussac (Tarn -et -Garonne),
266. Thermes - d'Armagnac (Gers),
85, 101, 102. Thèze (nvière)y 280, Thouars (Lot-et-Garonne), 55. Toile à voile, i85. Tolzat (ruisseau), 9. Tomates {culture de), i48. Touneins ( Lot - et - Garonne ),
10 à 12, 127, i32, i85,
187. Tortillards (voyez Ormes). Toscane (province d'Italie), 255,
256. Toulouse (Haute-Garonne), 84,
18G, 223, 226, 233, 234, 241,
242. Tour aine, 33, 126. Tournecoupe (Gers), 85, 99. Tour-N^uve (Lot-et-Garonne),
45. Tournon-d'Agenais (Lot-et-Ga- ronne), 177. Touzac (Lot), 281. Trec (rivière), 7, 8, 21, 22. Trenqueléon (château de), 5i. Truffes, 3oi, 3o4, 3o5. Tunisie, 68, 72, 269
342
INDEX ALPHABETIQUE.
Urdens (Gers), go. Uxellodimum (cité gauloise), 286, 3i3.
Vacquiers (Haute- Garonne),
240. Valence-d'Agen (Tarn -et -Ga- ronne), 197, 198, 2o3, 2o5. Valence-sur-Baise (Gers), 85
. 98, iio, 122.
Valenlré (pont de) à Gahors, 295, 807.
Valette (château de la) [Tarn- et-Garonne], 270.
Valette (La) [île de Malte], 270.
VAR (département du), 70.
Varaire (Lot), Soi, 802.
Varen (Tarn-et-Garonne), 2G4
Vaylats (Lot), 801.
Verdégas (Lot-et-Garonne), i3i.
Verdun-sur-Garonne (Tarn-et- Garonne), 222, 228.
Vère (rivière), 277-
Vers (Lot), 812.
Vers (rivière), 818.
Versailles (Seine-et-Oise), 186,
Vert (rivière), 284, 280.
Vesoul (Haute-Saône), 296.
Vianne (Lot-et-Garonne), 5i, 54, 55.
Vic-Fezensac (Gers), 107, 109, iio, 111 à 115, 118, 119, 122. Villaudric ( Haute - Garonne ),-
289, 240, 241. Ville - Bourbon ( faubourg de
Montauban), 228. Villebrumier (Tarn-et-Garon- ne), 233, 237, 238. Villemur (Haute-Garonne), "idS,
287, 238, 239. Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Ga- ronne), i35, 189, 140 à 158, 177, 182, 186, 192, 233. Ville - Nouvelle ( faubourg de
Montauban), 280. Villeréal (Lot-et-Garonne), 189,
165, 166. Vins noirs, 291. Virazeil (Lot-et-Garonne), 8,
21. Virginie (États-Unis), 12. Viticulture, 107 à 110, 128, 239 à 243, 274, 291,294, 807.
W
Wohlen (Suisse), 256.
Xaintrailles (Lot-et-Garonne),
01, 00, 09.
TABLE DES CARTES
Carte d'ensemble (en face du titre).
Vallée de la Garonne entre Marmande et Tonneins, 3.
Entre la Garonne et le Drot, 28.
Environs de Gasteljaloux, 87.
La Baise de VianneàNérac, 53.
Le chêne-liège en Lot-et-Ga- ronne, 69.
Environs de Mézin, 77,
Lectoure, 90.
Fleurance, 98.
Vic-Fezensac, 112.
Condom, 120.
Le coude du Lot entre Sainte- LivTade et Villeneuve -sur- Lot, i33.
L'Agenais (feuille double), 162
et i53. Agen, 181. Moissac, 201. Confluents de la Garonne et
du Tarn, du Tarn et de l'Avey-
ron (Bas-Ouercy), 209. La Lomagne de Tarn-et-Ga-
ronne, 218. Montauban, 227. Caussade et Septfonds, 25g. Le Cingle de Cahors, 289. Confluent du Lot et du Celé,
319. Le Lot à Cajarc, gouff'res de
rOule et de Lantouy, 821.
TABLE DES MATIERES
I. — La plaine de la Garonne.
Pages, En amont de La Réole. — La plaine de Garonne. — xMeilhan. — Le sorgho à balai. — Les gavaches de Sainte-Bazeille. — Mar- mande. — Une affiche électorale. — Le Mas-d'Agenais. — Ton- neins et la culture du tabac. — Comment on prépare le sol. — Formalités administratives. — La récolte et le manocage. . . i
II. — La vallée du Drot.
Le vallon du Trec. — Les pruniers et les chenilles fileuses. — Autour de Seyches. — Lauzun et son duché. — La Sauvetat. — Eymet. — En Périgord. — Au long du Drot. — Duras. — Monségur. — En Gavacherie. — Castelmoron-d'.Ubret. — De Monségur à La Réole 21
III. — Les landes de Lot-et-Garonne.
La vallée de l'Avance. — Casteljaloux et ses usines. — Les pertes et les sources de l'Avance. — Dans les pinèdes. — Les Lugues. — Houeillès. — La foire de Pelbusoc. — La Grande Lande. — Le val de l'Estampon 35
IV. — La capitale du « Béarnais ».
La vallée de la Baïse. — La bastide de Vianne. — Lavardac. — Navigation de la Baïse. — Ateliers de bouchonniers. — Le Pont- de-Bordes. — Le moulin de Barbaste. — Barbaste. — Nérac. — La promenade de la Garenne 5o
346 TABLE DES MATIERES.
V. — Les bouchonniers de Mézin.
Pages.
L'industrie de Nérac. — Les bouchonniers. — Les forêts de chê- nes-lièges ou siiriers. — La culture des suriers. — Le com- merce du liège. — Le pas de Gascogne. — Au bord de la Gé- lise. — La forêt. — Mézin et les ateliers de liégeurs. — Sos. — L'école d'agriculture et de viticulture de Saint-Pau 66
VI. — Lomagne du Gers, Gaure et Fezenzaguet.
Entre Agen et Lectoure. — Le pays de Brulhois. — Layrac. — Astaffort. — En Lomagne. — Lectoure. — La maison du maré- chal Lannes. — Fleurance et le pays de Gaure. — En Fezen- zaguet : Mauzevin et Montfort Sfj
VII. — Le Fezensac et l'Eauzan.
L'Adour et l'Arros. — Thermes-d' Armagnac. — Aignan. — No- garo et le Bas-Armagnac. — La Douze et le Midour. — Eauze.
— La bourse aux eaux-de-vie. — Les distillateurs d'Arma- gnac. — Lannepax. — En Fezensac. — Vic-Fezensac loi
VIII. — Le Condomois.
Gondrin. — Laressingle. — La vallée de la Losse. — Condom.
— Le commerce des eaux-de-vie. — La navigation de la Baïse.
— Valence et Beaucaire. — En descendant la Baïse. — Moncrabeau, pays des hâbleurs 117
IX. — Le pays des prunes.
Clairac et ses marchés. — Au long du Loi. — La Parade. — Cas- telmoron. — L'orme tortillai'd. — Monclar et Sainte- Livrade.
— La culture du prunier. — Robe de sergent et prune d'ente.
— Le commerce des pruneaux. — Le cueillette et la cuisson.
— Villeneuve-sur-Lot : la ville 127
X. — Les petits pois de Villeneuve.
A travers Villeneuve-sur-Lot.— Les peigniers en corne. — L'em- ballage des petits pois. — Au marché. — Les fabriques de con- serves. — La culture des pois. — Machines à écosser. — Les pruneaux. — Autour de Villeneuve i i44
TABLE DES MATIERES. 347
XI. — Le Haut Agenais.
Pages. Au bord de la Lède. — La culture des fèves. — Monflanquin. — Villeréal. — Les campagnes du haut Agenais. — Monsempron et Libos. — Fumeletses forges. — Les carrières de l'Allemance. i6o
XII. — Agen et ses campagnes.
Les vieilles forteresses. — Tournon-d'Agenais et Penne-d'Age- nais. — Le vallon de la Marse. — Agen. — Le poète Jasmin.
— Le commerce d'Agen. — Richesses agricoles. — Au long de la Garonne. — Pont-Saint-Marie. — Aiguillon. — Nicole et ses abricotiers 176
XIII. — Le Bas-Quercy.
L'Aveugle de CastelcuUer. — Le canal latéral. — La Séoune. — Puymirol. — En Tarn-et-Garonne. — Valence-d'Agenais. — Auvillars. — Saint-Nicolas-de-la-Grave. — Moissac. — Du Bas- Quercy en Quercy-Blinc 192
XIV. — LoMAGNE ET Rivière- Verdun.
Le vignoble de Tara-et-Garonne. — Castelsarrazin. — Noms de rues. — En Lomagne. — Lavit-de-Lomagne. — Beaumont-de- Lomagne. — L'élevage des chevaux. — Montech. — Le maré- chal Pérignon. — Verdun. — La Rivière-Verdun. — Grisolles.
— Culture du sorgho. — La fabrication des balais 207
XV. — La Rivière Montalbanaise.
Le pays de la brique. — Montauban. — Lidustrie de la soie. — Lafrançaise. — La Rivière du Tarn. — Villebrumier. — Entrée en Haute-Garonne. — Villemur et ses usines. — Le vignoble de Villaudi'ic et de Fronton. — Pompignan et son château. . 226
XVI. — Les chapeaux de paille du Quercy.
Au bord de l'Aveyron. — Les pêches de l'Honor-de-Cos. — Une ville gauloise disparue. — Réalville et le vallon de la Lère. — La fabrication des chapeaux de paille, son origine, ses déve- loppements. — Les usines de Gaussade. — Quelques mots sur la production des tresses. — La ville de Gaussade. — Sur le causse, — Septfonds 24G
348 TABLE DES MATIERES.
XVII. — Les gorges de l'Aveyron.
Pages. La gare de Lexos. — Au long de l'Aveyron. — Les rochers du causse. — Saint-Antonin. — Le plus vieil hôtel de ville de France. — La vallée de la Bonnette. — Les phosphates de Tarn-et-Garonne. — Gouffre de la Goule. — Caylus. — Sur le causse. — En descendant l'Aveyron. — Penne et Bruniquel.
— Montricoux et Négrepelisse 263
XVIII. — Les cingles du Lot.
De Fumel à Cahors. — Les cingles. — Ruines d'Orgueil. — Du- ravel et ses mines. — Puy-l'Évêque. — La patrie du maréchal Bessières. — Caslelfranc. — Luzech. — Le tabac dans le Lot.
— Mercuès et son château. — Cahors. — La vieille ville. —
Les monuments 279
XIX. — Le causse de Limogne.
En Quercy-Blanc. — Montpezat, Molières, Gastelnau-Montratier etMonteux. — Sur le causse de Limogne. — Les phosphates et les truffes. — Lalbenque. — Bach. — Limogne. — Les mar- chés de Concots. — Aspects du causse. — Descente à Cahors. 297
XX. — Le Lot entre Rouergue et Quergy.
Le Lot de Cahors à Capdenac. — Arcambal. — Le vallon du Vers et l'oppidum de Mursens. — La font Polémie. — Saint- Géry. — Saint-Cirq-Lapopie. — Les phosphates de Larnagol.
— Cajarc. — Gouffres de l'Oule et de Lantouy — Rouergue
et (Juercy. — En vue de Capdenac 3o8
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a) Pendant les périodes ci-après indiquées de chaque année, il est délivré au départ de toute gare ou halte des quatre premières catégories du réseau du Midi, aux Familles d'au moins trois personnes payant place entière et voyageant en- semble, des billets d'aller et retour de famille de l^e, 2« et 3" classe, pour toute gare ou halte des quatre premières catégories distantes d'au moins 125 kilo- mètres de la gare de départ.
lo Pour les vacances de Pâques, du samedi, veille de la fête des Rameaux, au lundi de Pâques (inclus). La durée ne peut être prolongée.
2° Pour les grandes vacances, du 15 juillet (inclus) au 1er octobre (inclus). La durée des billets délivrés pendant cette période peut être prolongée moyennant paiemeut d'un supplément de 10 p. 100 du prix total du billet.
Le prix s'obtient en ajoutant au prix de quatre billets simples ordinaires le prix d'un de ces billets pour chaque membre de la famille en plus de deux.
b) Il peut être délivré au chef de famille titulaire d'un billet de famille, et en même temps que ce billet, une carte d'identité sur la présentation de laquelle il sera admis à voyager isolément à moitié prix du tarif général, pendant la durée de la villégiature de la famille, entre le lieu de départ et le lieu de destination mentionnés sur le billet.
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2o Le parcours aller et retour, entre le point de départ et le point de contact avec le circuit ci-(lessns.
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Itinéraire C.
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lo Le parcours circulaire ci-après défini :
Limoges-Bénédictins, Meymac, Eygurande, La Bourboule (Bains de La Bour- boule), Le Mont-Dore (Bains du Mont-Doie), Boyat (Baius de Royat), Clermont-Fer- rand, Largnac, Vic-sur-Cère, Arvant, Figeac, Rodez, Decazeville, Bocamadour (Padirac et Miers), Brive, Limoges (par Saint-Yrieix ou par Uzerche);
2° Le parcours aller et retour, entre le point de départ et le point de contact avec le circuit ci-dessus.
Le point de contact avec le circuit ci-dessus est Limoges-BénédiCtins, pour les points de dépari Poitiers et Angoulême; Brive, pour les points de départ Bordeaux et Péri- gueux ; Capdenac, pour les points d« départ Agen, Montauban et Toulouse.
La durée de validité de ces billets (30 jours) peut être prolongée d'ime, deux ou trois périodes successives de 10 jours, moyennant le paiement d'un supplément égal à 10 p. 100 du prix du billet.
CHEMIN DE FER D'ORLÉANS
VOYAGES DANS LES PYRENEES
Tarif G.V. n" 105 (Orléansj La (Compagnie d'Orléans délivre toute l'auaée des Billets d'excursions comporiant les trois itinéraires ci-après, permettant de visiter le Centre de la France et les stations bal- néaires des Pyrénées et du golfe de Gascogne.
Itr Itinéraire. Paris, Bordeaux, Arcachon, Mont-de-Marsan, Tarbes, Bagnères-de-Bigorre, Montréjeau, Bagnéres-de-Luchon, Pierrefitte-Nestalas, Pau, Bayonne, Bordeaux, Paris.
2,'= Itinéraire. Paris, Bordeaux, Arcachon, Mont-de-Marsan, Tarbes, Pierrefitte-Nestalas, Bagnéres-de-Bigorre, Bagnères-de-Luchon, Toulouse, Paris {via Montauban-Cahors- Limoges ou vid Figeac- Limoges).
3e Itinéraire. Paris, Bordeaux, Arcachon, Dax, Bayonne, Pau, Pierrefitte-Nestalas, Bagnè- res-de-Bigorre, Bagnères-de-Luchon, Toulouse, Paris {via Moniauban-Cahors-Li- moges ou via Figeac-Linioges).
Durée de ijalidité : 30 jours (non compris le jour du départ). Prix des billets : Iro classe : 163 fr. 50 c. ; — 2e classe : 122 fr. 50 c. La durée de validité de ce» billets peut être prolongée d'une, deux ou trois périodes successives de 10 jours, moyennant le paiement, pour chaque période, d'un supplément égal à 10 p. 100 despiix ci-dessus.
BILLETS POUR PARCOURS SUPPLÉMENTAIRES
non compris dans les itinéraires des billets des voyages circulaires ci-deaans.
Il est délivré de toute station des réseaux de l'Orléans et du Midi, pour unn autre station
de ces réseaux située sur l'itinéraire des billets d'excursion, ou inversement, des billets
d'aller et retour de ire et de 2^; classe, avec réduction de 25 p. 100 en Irc classe et de
20 p. 100 en 2<; classe sur le double du prix ordinaire des places.
PUBLICATIONS
ÉDITÉES PAR LES SOINS DE LA COMPAGNIE d'ORLÉANS Et mises en vente dans ses gares.
Le Liivret-Guide illustré de la Compagnie d'Orléans {Notices, Vues, Tarifs, Horaires) est mis eu vente au prix de 30 centimes.
lo a Paris : dans les bureaux de quartier et dans les gares d'Austerlitz, Pont-Saint- Michel, Quai d'Orsay, Luxembourg, Port-Royal et Denferl;
2o en Province : dans les gares et principales stations.
Les publications ci-apres, éditées par les soins de la Compagnie d'Orléans, sont mises en vente dans toutes les bibliothèques des gares de son réseau au prix de 25 centimes :
Le Cantal. — Le Berry (au pays de George Sand). — De la Loire aux Pyrénées — La Bretagne. — La Touraine. — Les Gorges du Tarn. — Poitou-Angoumois. ^ Excursions en France.
LA FRANCE EN CHEMIN DE FER (Itinéraires géographiques).
De Paris à Tours. — De Tours à Nantes. — De Nantes à Landerneau, et embran- chements. — D'Orléans a Limoges. — De Limoges à Clermont-Ferrand, avec em- branchement de Laqueuille à La Bourboule et au Mont-Dore. — De Saint-Denis-près- Martel à Arvant (ligne du Cantal). — De Tours à Angoulème. — D'Angoulème à Bordeaux.
Premières livraisons d'une collection qui sera continuée.
Pour recevoir franco ces publications, ajouter à la lettre de demande 0 fr. 60 pour le Livret-Guide, Q fr. 35 pour chacune des autres brochures et 0 fr. 30 pour chacun des iti- néraires géographiques.
La Compagnie d'Orléans a organisé dans le grand hall de la gare de Paris-Quai d'Orsay une Exposition permanente d'environ 1 600 vues artistiques (peintures, eaux-fortes, litho- graphies, photographies), représentant les sites, monuments et villes des régions desservies par son réseau.
BERGER-LEVRAULT & C'S LIBRAIRES-EDITEURS
PARIS, 5, rue des Beaux-Arts. — 18, rue des Glacis, NANCY.
Un Chef d'état-major sous la Révolution. Le général de Billy, d'après sa correspondance et ses papiers, par le lieutenant Lottin. kjoi. L'n vo- lume in-8, avec un portrait et une carte, broché, 5 l'r.
Carnet d'étapes du dragon Marquant. Démarches et actions de l'ar- mée du Centre pendant la campagne de 1792. Publié d'après le ma- nuscrit original, par G. Vallkk et a. i^ariset. 1898. Un volume in-12 de 318 pages, avec une carte, broché 3 fr. 50 c.
Un Général de l'Armée d'Italie. Sérurier (1742-1819), d'après les Archives de France et d'Italie, par Louis Tuetey. 1899. Un volume in-8 de 392 pages, avec portraits, gravures et cartes, liroché 5 i'r.
Le Général Le Grand, baron de Mercey (1755-1828). Mémoires et souvenirs (Valmy, Landau, Malines, Novi, Clialon, Tournus, Màcon), par < ".h. RÉMOiND. Un volume in-i 2, avec portraK, broché 3 i'r. 50 e.
Le Général Auguste Colbert (1793-1809), traditions et souvenirs tou- chant sa vie et son temps, par le mai'quis de cIolbert-Ghabanais. 3^ édition. 1888. Trois volumes in-i 2, brochés 12 i'r.
Le Général Curély. Itinéraire d'un cavalier léger de la Grande-Armée (1193-1815). Publié d'après un manuscrit authentique, par le général Ch. Thoumas. 1887. l^'i volume in-12 de 440 pages, avec portrait et fac- similé 3 Ir. 50 c.
Souvenirs et campagnes d'un vieux soldat du premier Empire (1803-1814), par le commandant Parquin. Avec une introduction par A. Aubier. Nouvelle édition. 1908. Vn volume in-8, avec un portrait, bro- ché 6 fr.
Lasalle. D'Essling à "Wagram. Correspondance recueilhe et pubhée avec notes biographiques par A. Robinet de Cléry. 1892. Beau volume in-8, avec 1.3 gravures, une carte et un tableau généalogique, l^roché 5 fr.
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Les Grands Cavaliers du premier Empire. Notices biographiques, par le général Cli. Thoumas :
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Grands Artilleurs. Drouot, Sénarmont, Éblé, par le capitaine Maurice (jiKOD DE l'Ain. Ouvrage couronné par l'Académie française. 1894. Beau volume in-8 de 4f>5 pages, avec 4 portraits, broché ......... 8 fi\
L'Espionnage militaire sous Napoléon I". Cb. Scbulmeister, par Paul MuLLER. 1896. Un volume in-12, broché 3 fr.
Le Général Bourbaki, par le commandant Grandin. 1897. Un volume in-8 de 3oj pages, avec portrait et autogra|)he, broché 5 fr.
Lettres du Maréchal Bosquet (1830-1858). 1894. Un volume in-8 de 408 pages, avec portrait en héhogravure, ijroché 5 fr.
Souvenirs de la guerre de Crimée (1854-1856), par le général Fay, ancien aide de camp du maréchal Boscjuet. 2^ édition. 1889. (Couronné par l'Académie française.) Volume in-8, avec une planche et 3 cartes, br. 6 li'.
Français et Russes. Moscou et Sévastopol, 1812-1854, par Alfred Rambaud. b" édition. 1892. Un volume in-12, couverture illustrée 3 fr. 50 c.
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Ardouin-Dumazet
Volumes in-12 d'environ 4oo pages, avec cartes et croquis Chaque volume, broché, 3fr. 50 — Élégamment relié, ^fr.
.. , . ^ Viennent de paraître :
6\}^ série. Gascogne.
^*" série. Agenaîs, Lomagne et Bas-Quercv. 32' série. Haut-Quercy et Haute-Auvergne. 33^ série. Basse-Auvergne.
Ces quatre nouveaux volumes succédant si rapidement à trois autres dont nous annoncions il y a peu de temps la publiration, montrent avec quelle ardeur et quelle persévérance M. Ardouii.-Du.uazet poursuit 1 œuvre considérable qu'il a entreprise, œuvre sans précèdent et sans équivalent dans aucune littérature.
Cet immense travail touche à sa fin; cinq autres Yolumes, en effet, sont livrés à l'imprimerie, et l'auteur achève en ce moment les deux séries consacrées aux Pyrénées. Quarante volumes seront donc publiés à la fin de 1903 ; il ne restera plus à terminer que les volumes con- sacrés à Paris et à l'Ile-de-France. Notre pays possédera alors l'étude la plus complète, la plus documentée et la plus vivante qui lui ait en- core été consacrée.
Ce qui donne au Voyage en France d'Ardouin-Dumazet son in- térêt le plus vif, c'est qu'il est l'œuvre personnelle d'un unique écri- vain qui a bien réellement vu les paysages, les villes, les industries qu'il décrit. D'autres ouvrages portant un titre semblable ont été pu- bliés ; ils étaient ou des compilations ou l'œuvre d'auteurs divers manquant forcément de l'unité de vues et de points de comparaisons. M. Ardouin-Dumazet, au contraire, est allé à travers toute la France, consacrant quinze années à cette exploration. Il a pu dresser un ta- bleau très précis de notre patrie, en même temps que très animé, en dire toutes les beautés, toutes les sources d'activité. Aucun livre n'est plus propre à faire aimer davantage la terre française.
Les quatre volumes que nous présentons aujourd'hui ont trait à des contrées bien diverses. Entre les Landes de Gascogne et les monts d'Auvergne aucun point de comparaison ne semble pouvoir s'établir ; et pourtant, quand on aura lu ces livres, on verra quelles affinités mystérieuses unissent les branches de la grande famille française. La conquête de la lande par la forêt, la création en Auvergne d'une race de bétail moulée pour ainsi dire sur le sol lui-même, sont des œuvres tout à l'honneur de notre peuple et que nous exalterions sans doute si elles étaient étrangères.
La Gascogne, telle qu'elle est envisagée dans la 30' série du Voyage en France, ne comprend pas la partie pyrénéenne de la province, et l'étendue du volume a nécessité le retrait des chapitres consacrés au nord du département du Gers et au sud du Lot-et-Garonne ; on les retrouvera dans la 31* série. Mais le livre n'en a pas moins une unité parfaite; la plus grande partie est consacrée à la région des Landes, à ce désert des vieux géographes qui est devenu en moins de cinquante ans un des pays les plus riches et les plus florissants de France. Même après Edmond About qui a raconté cette conquête
sous la trame du roman dans Maître Pierre, M. Ardouin-Dumazet a su rendre vivante l'œuvre merveilleuse du reboisement d'une contrée misérable.
Cette histoire de la forêt landaise, celle des Dunes, sont des pages qu'il faut lire si l'on veut bien comprendre ia vaillance propre à cette race française, calomniée surtout par elle-même, par ceux de ses enfants qu'hypnotise si étrangement ce qu'ont fait les autres.
C'est la vie de la lande régénérée, l'existence de ses résiniers, ses paysages sylvestres, ses lacs solitaires, ses rivières claires que M. Ar- douin-Dumazet nous décrit avec un charme pénétrant. De là il nous conduit à travers les forêts de chêne-liège du Marensin et de la Ma- rennes, dans la Chalosse couverte de maïs et de vignes, en vue des Pyrénées neigeuses; puis, au moment de pénétrer dans l'étonnant éventail de rivières descendues du plateau de Lannemezan, il nous conduit sur ces hautes terres, raconte comment ces cours d'eau se sont formés, comment le génie humain a complété l'œuvre de la na- ture en allant chercher dans le gave de Neste les eaux des neiges pyrénéennes pour alimenter quinze de ces rivières trop pauvrement dotées. Alors au long de l'Adour, de la Baise, du Gers et des autres vallées, c'est la visite des petits pays qui se partagèrent la province gasconne, Marsan, Gabardan, Tursan. Pardiac, Astarac, Armagnac et tant d'autres encore î
La 31° série est consacrée à l'Agenais, à la Lomagne et au Bas-
Quercy, région heureuse où la Garonne reçoit ses grands affluents venus des Cévennes : Lot et Tarn ; où elle hume les rivières descen- dues de Lannemezan avec l'aumône que leur fait la Neste, pays rural, même par ses industries. M. Ardouin-Dumazet dit la splendeur rustique de la plaine garonnaise, la culture du tabac, l'exploitation du chêne- liège autour de la charmante cité de Nérac, le travail des bouchonniers à Mézin et sur les rives de la Gélise. De là il nous fait visiter les pays de Lomagne et de Gaure, l'Eauzan, le Fezensac et le Condomois, mi- nuscules provinces ayant conservé leur individualité malgré l'excessive centralisation moderne.
Voici maintenant le pays des prunes avec ses vieilles et historiques « bastides », les vergers somptueux, le fiévreux commerce des petits pois à Villeneuve-sur-Lot, les grands paysages de l'Agenais, leurs fières ruines féodales. Ensuite Agen et les souvenirs de Jasmin, les
bords de la Garonne vers la Lomagne et le pays de Rivière, l'élégante Montaiiban et sa plaine d'une richesse merveilleuse.
Et de nouveau les grands paysages, avec les gorges de TAveyron, les causses de Caylus et de Limogne, les actives cités de Gaussade et de Septfonds où tout le monde travaille à la confection des chapeaux de paille. Le volume se termine par la description de la vallée moyenne du Lot, remontée de Fumel à Capdenac, région de sites superbes, eaux pures, grandes falaises- de roches, vives fontaines, antiques et fières petites cités dont Cahors est la reine.
A la partie la plus âpre, mais la plus curieuse aussi de ce Quercy est consacrée la 32® série: Haut- Quercy — H au te- Auvergne. C'est la région des avens, des gouffres, des pertes de rivières, des sources mystérieuses et puissantes. La vallée du Celé et les abimes de la Braunhie, les plateaux de Gourdon couverts de noyers, l'admi- rable vallée de la Dordogne parcourue des confins du Périgord jusqu'à ceux de l'Auvergne et du Limousin. Martel et son causse, Souillac et le charmant bassin de Saint-Céré où naquit Canrobert, le Puy d'Issolu où se déroula un des grands drames de la conquête des Gaules par César. Plus haut Gra mat et son causse creusé de gouffres, le site inou- bliable de RocamaJour, et Padirac avec ses galeries de stalactites et sa rivière souterraine, une des merveilles de la France.
Soudain le décor change, aux calcaires Assurés, excavés, découpés, dressés en falaises, succèdent les granits de formes moins nettes, mais entassés en montagnes autrement élevées. Nous y pénétrons par le pauvre Ségala entouré par le Gelé arrosant la riante vallée de Maurs et la gorge splendide où la Gère bondit entre les roches. C'est la Haute-Auvergne autour des formidables débris de son volcan. M. Ar- douin-Dumazet s'y attarde volontiers, 11 nous intéresse à Aurillac, le grand centre de la contrée, nous fait pénétrer dans les paysages de la Cliàtaigneraie, dont il dit la mélancolie. Puis voici encore le Lot vers Entraigues où il reçoit la Truyère, les sévères plateaux de la Viadène, et cette solitude étonnante et sublime des gorges du Lot entre Entraigues, Estaing et Espalion.
Nous abordons la haute montagne : l'Aubrac aux pelouses sans fin, peuplées d'un bétail innombrable; ses lacs, le triste plateau de la Margeride étendu à ses pieds. Vers le nord la haute vallée de la Gère si riante et fraîche, le massif du Cantal, la belhqueuse Saint-Flour sur
sa montagne, le viaduc de Garabit, la maussade Planèze et la curieuse Ghaudesaigues dont les habitants se chautïent avec les euux thermales qui abondent et sonî même utilisées à la cuisine.
Achevant le tour da massif cantalien, M, Ardouin-Dnmazet visite le Gézallier et ses hauts pâturages avant de descendre vers les petites villes d'Allanche, de Marcenat et de Gondat, peuplées de colporteurs dont il nous dit les curieuses mœurs commerciales. C'est de là qu'il atteint Mauriac pour faire l'ascension du Puy-Mary, montagne autour de laquelle rayonnent tant de vallées, et visiter la pittoresque Salers, cœur de l'Auvergne pastorale.
La 33« série acl'.ève la description de cette belle province par la Basse-Auvergne, c'est-à-dire la partie du pays de Gombrailles dé- volue à la Creuse, tout le déparlement du Puy-de-Dôme et le nord de celui de la Haute-Loire. Peu de pays ont été plus décrits que ceux-là, surtout les massifs des monts Dôme et des monts Dore. L'auteur du Voyage en France a su pourtant découvrir des choses nouvelles. Après George Sand il sait nous dépeindre cette Gombrailles dont Ghambon est le joyau. La Limagne, que tant d'écrivains ont chantée depuis Sidoine Apollinaire, est révélée dans toute sa richesse agreste. A Riom la cité parlementaire, l'active Clermont, la ville momiflée de Montferrand, M. Ardouin-Dumazet commence la visite des monts phlé- gréens. Il nous conduit au sommet du Puy-de-Dôme, en suivant la chaîne de volcans jadis hideux mais transformés par les jeunes forêts, dans les champs de lave de Yolvic ; au bord de la Dordogne naissante où la foule se presse à la Bourboule et au mont Dore. De là, suivant la Dordogne encore ton*ent, nous allons visiter les landes de Bourg- Lastic devenues camp d'instruction, la vallée sauvage du Chavanon, les orgues de Bort d'où les horizons sont si grandioses, et les nappes de basalte que domine Latour-d'Auvergne.
Alors c'est l'ascension du Sancy, la visite aux lacs qui entourent ce géant de l'Auvergne, du lac Pavin à Besse-en-Chandesse ; la visite de tout ce massif superbe du mont Dore et la descente au long des couzes qui conduisent à Issoire par les ruines gigantesques de Murols.
Ici nous trouvons l'Allier. L'infatigable voyageur en parcourt les rives, depuis Monistrol jusqu'aux contins du Bourbonnais, les quittant parfois pour monter sur la Margeride sauvage ou sur les petits monts du Devès. Le patriote qui nous avait fait visiter jadis Alésia et le sile
— G —
d'Uxollodunum nous fait accomplir le pèlerinage de Gergovie et re- trouvei' les traces de Vercingétorix.
A la fin du voluaie nous avons quitté l'Allier pour la Dore, après avoir visité Pont-du-Château et ses mines d'asphaite, la vénérable Billom, Lezoux et ses riches campagnes. Et nous voici dans le Livra- dois, vers OUiergues enfoncé dans son cirque, et l'industrieuse Ambert. Là sont nos plus vieilles papeteries de France dans les vallons soli- taires ouverts au pied des monts du Forez. Plus loin, voici les pre- mières dentellières, sur le plateau glacé de la Chaise-Dieu où se dresse nne des plus merveilleuses églises abbatiales. Par cette haute et morne plaine, en traversant Craponne, nous gagnons la vallée de la Loire pour prendre pied sur la rive droite du fleuve, dans ce pays vellave auquel sera consacrée la plus grande partie de la 34' série.
Ceci n'est qu'une sèche ènumération des principaux chapitres de ces volumes, qui n'auront pas moins de succès que leurs prédéces- seurs. Comme eux ils se recommandent par la vivacité des descrip- tions, le pittoresque obtenu sans être cherché et les qualités littéraires qui rendent attrayants cet ouvrage énorme cependant.
Aussi les récompenses n'ont pas manqué au Voyage en France. L'Académie française par deux fois, la Société des gens de lettres jugeant un de ses pairs, la Société de géographie et la Société de géographie commerciale de Paris ont couronné l'œuvre. Celte dernière lui a décerné la médaille de France dès le vingtième volume, et son rapporteur disait :
Il y a donc encore des coins insuffisamment connus en France ? Posez cette question devant M. Ardouin-Dumazet ! Il vous répo?i- dra en vous montrant les volumes déjà parus de son u Voyage en France », Œuvre encore inachevée, sans doute; mais fallait-il atte/idre encore, après vingt volumes, pour récompenser l'œuvre ? Aucun de nous ne l'a pensé.
L'auteur nous entraine de ptrovince en jirovince, de ville en ville, d'usine en usine. C'est ua tour de France, effectué avec le compagnon le plus aimable, le plus instruit, le plus débrouillard, le plus insa- tiablement curieux qui se puisse imaginer. M. Ardouin-Dumazet en- tend étudier de près, voir, toucher, comprendre ce qu'il décrit, ce qui fait qu'une fois en jmssession de son sujet, il l'expose avec une aisance extrême, avec le talent de se faire lire jusqu'au bout.
Lu plume est alerte, sans prétention ; pas de ptl^CL^éoloyie ; des
monceaux de faits et de chiffres, dressés jwur l'édification du lecteur par les voies les plus courtes. Pays, mœurs, production industrielle, agriculture, conditions du travail, dans chaque localité, tout est passé en revue avec intelligence et sincérité. Uauteur nous appartient sur- tout par le côté économique et commercial. On sent que l'on a en lui sur ce terrain un guide à qui l'on peut se fier.
L'un de nous a dit que l'œuvre de M. Ardouin-Dumazet était ce qui avait été publié de plus agréable et de plus complet en ce genre sur la France depuis le célèbre voyage d'Arthur ïoung à la fin du xvin° siècle. Les préoccupations de l'auteur moderne sont inoins ex- clusivement ag?'icoles que celles de son prédécesseur, et Arthur Young parcourait lentement nos campagnes sur une jument grise, tandis que M. Ardouin-Dumazet use de tous les moyens de locomotion.
Notre auteur a été soldat avant d'être écrivain. Franc-tireur en i870, il combattit à Dijon, à Nuits, à Yesoul ; il s'engagea en 1872 dans un régiment de ligne, passa de là aux tirailleurs algériens, forma une Société de géographie à Tlemcen, fut élu membre de la Société de géographie de Bordeaux et membre correspondant de notre Société. Il était alors caporal. Le suivre dans les nombreuses péri- péties de sa carrière m'entraînerait trop loin. Il s'est fait lui-même, il a été un écrivain d'une fécondité extraordinaire, il a enfin composé une belle œuvre sur notre pays : nous lui avons donné la médaille de France.
Ce que la Société de géographie commerciale a pensé du Voyage en France, la Société de géographie de Paris l'avait dit en lui attri- huant le prix Félix Fournier.
M. Ardouin-Dumazet s'effoi'ça donc de faire une étude sérieuse très documentée et très au courant, en s'appuyant non pas seulement sur ce qui avait été écrit avant lui, mais en allant sur place, en consul- tant les industriels, les commerçants, les propriétaires, tous ceux, en un mot, qui étaient en état de lui fournir des renseignements vécus. On sent tout ce qu'il faut d'esprit critique et d'indépendance pour 7ie pas se laisser influencer, pour négliger les querelles locales, les amours -propres froissés et ne retenir de ces informations, souvent oiseuses et interminables, que le trait décisif et l'argument qui porte. Ce n'est plus ici le sec et fastidieux résumé d'un auteur qui abrège des documents officiels, c'est l'impartial exposé d'efforts personnels encore tout vibrants de la lutte, et cela donne au style, avec une trame solide, une intensité de vie, une propriété d'expression qui sont la caractéristique même de cet ouvrage.
Pour tous, le nom d'Àrdouin-Dumazet et le Voyage en France sout désormais iQ^éparables. Nous avons cité déjà le mot de ce pro- fesseur d'une de nos grandes Universités, disant qu'il voyait là pour la première fois « une géographie nationale vraiment digne de ce nom, autant sous le rapport des recherches nouvelles et inattendues, que de la méthode d'exposition, et qui laisse bien loin derrière elle tout ce qui a été tenté dans ce genre ; — en un mot, une œuvre mo- derne dans la meilleure acception du terme ».
Le succès du Voyage en France est d'autant plus frappant, que l'auteur, tout à son œuvre et à ses travaux spéciaux d'écrivain militaire, n'a pas recherché le bruit autour de sa remarquable crëik- tion. Les distinctions et les encouragements dont elle a été l'objet lui sont venus sans qu'il les ait sollicités. Cet ensemble de livres consa- crés à un même sujet, qu'à bon droit on peut appeler une bibliothèque nationale et qui constitue un des plus considérables labeurs de ce temps, s'est imposé par sa seule valeur.
Nous ne saurions trop insister sur ce point. Ce n'est pas une géographie duns le sens étroit de ce mot. C'est encore une œuvre littéraire et historique, d'une portée considérable. L'Académie fran- çaise, appelée pour la seconde fois à couronner le Voyage en France, a tenu à bien marquer son sentiment à cet égard, en lui attribuant le prix Narcisse xMichaut, qu'elle décorne tous les deux ans à l'auteur du meilleur ouvrage de littérature française.
Volumes parus :
l'o Série: LE MORVAN, LE VAL DE LOIRE, LE PERCHE. — Le flottage en Morvan — les bûcherons du Nivernais — au pays des nourrices — le Nivernais industriel — le Nivernais pastoral — une usine nationale (Guérigny) — Gien et la Puisaye — la Sologne — paysages solognots
— les colons de Sologne — la Sologne berrichonne — le safran en Gâtinais — Orléans — les roses d'Olivet — les troglodytes du Vendô- mois — les vignes du val de Loire — la capitale des tanneurs • — la Champagne tourangelle — Rabelais, guide en Touraine — la réglisse
— la Touraine industrielle — Mettray — le Perche — le percheron en Amérique — le Grand-Perche — les forêts du Perche — la vallée delà Sarthe — ce que deviennent les hêtres — la Flèche et le payslléchois.
— 370 pages avec 19 cartes ou croquis.
2« Série: DES ALPES MANCELLES A LA LOIRE MARITIME. — Les Alpes lîiancelles — le pavé de Paris — la Ghanipag-ae mancelle — Sablé et ses marbres — Laval et Port-du-Salut — chez les Chouans — dans la Mayenne — l'agriculture dans le Bas-Maine — aiguilles et épingles — le point d'Alençon — le Camembert — Fiers — la Suisse normande — Angers et les ardoisières — ardoises et primeurs — le guignolet et le vin d'Anjou — Saumur — la bijouterie religieuse — le Bocage vendéen
— sur la Loire, d'Angers à Nantes — Grand-Jouan — Clisson et les lacs de l'Erdre — le lac de Grand-Lieu — la Loire, de Nantes à Paim- bœuf. — 356 pages avec 24 cartes,
(Ces deux volumes ont été couronnés par l'Académie française dès leur apparition; les 23 suivants ont obtenu une nouvelle et haute récompense.)
3» SÉRIE : LES ILES DE L'ATLANTIQUE. — 1. D'Arcachon à Belle-Isle.
— L'île aux Oiseaux — la Seudre et les îles de Marennes — l'île d'Ole- ron — île d'Aix — île Madame et Brouage — île de Ré — île d'Yen
— île de Noirmoutier — de l'île de Bouin à Saint-Nazaire — archipel de la Grande-Brière — île Dumet et la presqu'île du Croisic — Belle- Isle-en-Mer. — 318 pages avec 19 cartes.
4« Série: LES ILES DE L'ATLANTIQUE. —II. D^Hoerfic à Owma/i^. — Ile d'Houat -- La Charte des îles bretonnes — île d'Hoëdic— le Morbihan et la presqu'île de Rhuys — île aux Moines — petites îles du Morbihan
— îles d'Ars et d'Ilur — île de Groix — île Chevalier et île Tudy — archipel des Glénans — la ville close de Concarneau — île de Sein
— île de Molène et îlots de l'archipel d'Ouessant — l'île d'Ouessant — îles de la rade de Brest. — 322 pages avec 25 cartes.
5« SÉRIE : ILES FRANÇAISES DE LA MANCHE ET BRETAGNE PÉNINSULAIRE.
— Les îles de l'Aber-Vrac'h — île de Siec — île de Batz — Morlaix et son archipel — les Sept-lles — île Grande (Énès Meur) et son archipel
— archipel de Saint-Gildas — les îles d'Er — archipel de Bréhat — le Goëllo et le Penthièvre — au berceau de la Tour-d'Auvergne — en Cornouailles — au pays de Brizeux — Bretagne celtique, Bretagne française — Mi-Voie et Brocéliande — de Vitré au mont Saint-Michel — la Hollande de Normandie — Saint-Malo, la Rance et Dinan — Gran- ville, les Chausey et les Minquiers. — 407 pages avec 29 cartes.
6« Série: COTENTIN, BASSE-NORMANDIE, PAYS D'AUGE, HAUTE-NORMAN- OIE, PAYS DE CAUX. — Une ville de chaudronniers — les Vaux-de-Vire
— la Déroute et les lignes de Carentan — le duché de Coigny — la Hougue — Cherbourg et la Hague — Bayeux et le Bessin — la campa- gne de Caen — la foire de Guibray — du Bocage à la mer — le lit- toral du Calvados — la vallée d'Auge — en Lieuvin — Trouville et la Côte-de-Gràce — Je marais Yernier et la Rislo — Évreux et le Saint- André — tringlots et enfants de troupe — les draps d'Elbe uf — de
0^
v^
^o\;age en j^rance
VOLUMES PARUS
Morvan, Val de Loire et Perche.
Des Alpes mancelles à. la Loire maritime.
Les Iles de l'Atlantique : I. lïÂreachon à Selle-hU.
— II. D'Ho'édlc à Ouessant.
Iles de la Manche et Bretagne.
Normandie.
La Région lyonnaise.
Le Rhône, du Léman à la mer.
Bas-Dauphiné.
Les Alpes, du Léman à la Durance.
Forez, Vivarais, Tricasliu, Comtat-Venalssln.
Alpes de Provence et Alpes maritimes.
Région marseillaise et Côte d'Azur.
I>a Corse.
Charentes et Plaine Poitevine.
De Vendée en Beauce.
Vexin, Picardie et pays de Caux.
Nord : I- tlandre et Littoral.
IVord: n. Artois, Cambréiia «t Hainaut.
Haute-Picardie, Champagne rémoise et Ardenncs^
Haute-Champagne; Basse-Lorraine.
Plateau lorrain et Vosges.
Plaine Comtoise et Jura.
Haute-Bourgogne.
Basse-Bourgogne et Senonais.
Berry et Poitou oriental.
Bourbonnais et Haute-Marche.
Basse-Marche et Limousin.
Bordelais et Pérlgord.
Gascogne.
Agenals, Lomagne et Bas-Quercy.
Ilaut-Quercy, Haute-Auvergne.
Basse-Auvergne.
SOUS PRESSE :
34. Velay, Vivarais méridional, Gévaudan.
35. Rouergue et Albigeois.
36. Cévennes méridionales. -, 87. Golfe du Lion. ^
38. Haut-Languedoc .
> EN PRÉPARATION : \
39. Pyrénées (Partie orientale). — (Départements des Pyrénées-Orlent.iles, Aude, Arlége A''. Pyrénées (Partie occidentale). — (Départements des Hautes et Uasses-Pyréné<;s ) 4i-j;i. Paris et l'Ile-de-France.
— 12 —
l'Avre à Ja Risle — de la Risle à l'Aiidelle — Rouen. — le royaume d'Yvetot — !e Mascaret — le Havre. — 455 pages avec 30 cartes.
7« Série: LA RÉGION LYONNAISE: LYON, MONTS DU LYONNAIS ET DU FOREZ. — Lyon — rôle social de Lyon — a travers Lyon — la Groix- Kousse et Vaise — du Gourguillon au mont d'Or — la plaine du Dau- phiné — Vienne et le pays des cerises — le mont Pilât — les monts du Lyonnais — de Vichy a Thiers — de TLiiers à Pierre-sur-Haute — Montbrison, la plaine du Forez et Saint-Galmier — les monts de Tarare
— le col des Sauvages et Thizy — Cours et Roanne — le berceau de Félix Faure — la diligence des Écharmeaux — le Beaujolais et la foire de Montmerle — Teinturiers et tireurs d'or. — 34-i pages, 19 cartes.
8° Série: LE RHONE DU LÉMAN A LA MER : DOMBES, VALROMEY ET BUGEY, BAS-DAUPHINE, SAVOIE RHODANIENNE, LA CAMARGUE. —Eu Dombes
— la Bresse et le Bugey — la corne et le celluloïd — Saint-Claude et ses pipes — la Valserine et la perte du Rhône — le Vairomey et Belley — les lacs du Bas-Bugey — les Balmes viennoises — l'île de Grémieu — la Hollande du Dauphinô — du lac d'Âiguebeleite au lac du Bourget — le lac d'Annecy — Albertville et l'Arly — les horlogers de Cluses — le Rhône de Bellegarde à Seyssel — les défilés de Pierre-Chàtel — Yillebois et le Sault du Rhône — le Rhône, de Lyon à Valence — le Rhône, de Valence à la mer — en Camargue — les Saintes-Maries-de-la-Mer — les vignobles et les troupeaux. — 325 pages avec 22 cartes.
9« Série: BAS-DAUPHINÉ : VIENNOIS, GRAISIVAUDAN, OISANS, DIOIS ET VALENT INOIS. — Le lac de Paladru et la Fure — du Rhône à la Morge
— la noix de Grenoble — Voiron et la Chartreuse — Grenoble — de Grenoble à la Mure — la Mateysine et Yizille — Uriage, le Pont-de- CJaix — rOisans — en Graisivaudan — le pays du gratin — Tournon, Tain et l'Ermitage — le Valentinois — Grest et la Drôme — le chemin de fer du col de Cabres — les premiers oliviers — Dieulefit et la forêt de Saou — le Vercors — le Royannais — les Ouatre-Montagnes — 357 pages avec 23 cartes.
10« Série: LES ALPES DU LÉMAN A LA OURANCE. — Les chasseurs alpins — en Tarentaise — en Maurienne — dans les Bauges — le Genevois — le Léman français — du Faucigny en Ghablais — des Dranses au mont Blanc — les alpages de Roselend — le poste des Ghapieux — la redoute ruinée du petit Saint-Bernard — au mont Iseran
— au pied du mont Genis — une caravane militaire — le Briançonnais
— du mont Genèwe au val de Névache — en Yallouise — le Queyras
— les Barcelonnettes au Mexique — les défenses de l'Ubaye — Embrun et Gap — du Ghampsaur en Valgodemard — en Dévoluy — du Trièves en Valbonnais. — 374 pages avec 25 cartes.
— 13 —
ne Série: FOREZ, VIVARAIS, TRICASTIN ET COMTAT-VENAISSIN. — La vallée du Gier — lacets et cuirasses — les armuriers de Saiiit-Élienne
— rubaniers et cyclopes — le pays des serruriers — la vallée de rOndaiue — Annonay et ]a Déôme — le Meygal — la Genève du Viva- rais — du Rhôae aux Boutières — sous les mûriers de l'rivas — de Viviers à Vais — le Pradel et le Teil — en Tricastin — l'enclave de Valréas et les Barounies — les dentelles de Gigondas — le Pont-Saint- Esprit — la principauté d'Orange — Carpentras — au mont Ventoux
— en Avignon — la fontaine de Vaucluse — les melons de Cavaillon.
— 362 pages avec 25 cartes.
12« SÉRIE : ALPES DE PROVENCE ET ALPES MARITIMES. — Au pays de Tartarin — la foire de Beaucaire — Uzès et le pont du Gard — les huiles de Salon — iN'oël chez Mistral — le félibrige et Saint-Uemy-de- Provence — des Âlpilles en Arles — d'Arles en Cruu — au pied du Luberon — les pénitents des Mées — la vallée du Buech — de Gap à Digne — les brignoles de Barrême — les amandiers de Valensole
— les faïences de Moustiers — le Plateau du Var — Aix-en-Provence
— les champs de Pourrières — du Carami à l'Argens — de Draguignan à Grasse — les parfums de Grasse — de Menton aux Mille-! ourdies
— la Vésubie — la Tinée — les gorges du Var — du Var à l'Ubaye.
— 382 pages, 30 cartes, dont celle des Alpes hors texte.
13« SÉRIE : LA PROVENCE MARITIME. — La petite mer de Berre — les Bourdigues de Garonte — de Roquefavour au Pilon-du-Roi — les mines de Fuveau — les cài)riers de Roquevaire — à travers Marseille — les ports de Marseille — du vieux Marseille aux cabanons — de la Ciotat aux calanques — Toulon — la rade de Toulon — la batterie des Hommes sans peur — l'archipel des Embiez, les gorges d'Ollioules — les cerisaies de SoUiès-Pont — Hyères et les Maurettes — les Lies d'Or : Giens et Porquerolles, Bagaud, Port-Gros et le Levant — des Maures à Saint-Tropez — traversée nocturne des Maures — au pied de l'Estérel
— Cannes et Antibes — les îles de Lérins — Nice — Nice-Cosmopolis
— Nice, camp retranché — de Nice à Monaco — Menton et la frontière.
— 405 pages avec 28 cartes.
U« SÉRIE : LA CORSE. — La Balagne — Calvi et la Balagne déserte
— la Tartagine et Gortè — de Tavignano à Pentica — la Gravone et Ajaccio — autour d'Ajaccio — la Cinarca — une colonie grecque — les cédratiers des calanches — une vallée travailleuse (Porto) — dans la forêt corse — le Niolo — les gorges du Golo — Mariana et la Casinca
— la Castagniccia — autour de Bastia — le cap Corse — de Marseille à Sartène — les bouches de Bonifacio — une vendetta (Porto-Vecchio)
— le Fiumorbo — un essai de grande culture — l'immigration luc- quoise — la vallée du Tavignano — l'avenir de la Corse. — 320 pages avec 27 cartes ou croquis, 7 vues et une planche hors texte.
15« SÉRIE : LES CHARENTES ET LA PLAINE POITEVINE.— Le pays d'Àn- goumois — les papiers d'Angoulêrae — au pays des colporteurs — les
— 14 —
merveilles de la Braconne — les sources de la Touvre — une usine nationale : Ruelle — de la Charente au Né — la Champagne de Cognac — le vignoble de Cognac — la fabrication du cognac — les Pays- Bas de Jarnac —dans les Fins-Bois — le Confolentais — de la Tardoire à la Dronne — la double Saintongeaise — Ja Charente maritime (de Saintes à Rochefort) — La Rochelle — les vignes et les laiteries de l'Àunis — les bouchots à moules — Niort et la plaine ])oitevine — l'école militaire de Saint-Maixent — les protestants da Poitou — les mulets de Melle. — 385 pages avec 26 cartes.
16« SÉRIE : DE VENDÉE EN BEAUCE. — La vallée de la Yonne à Sanxay
— de Lusignan à Poitiers — les armes blanches de Châtellerault — en Mirebalais — Oiron et Thouars — la Vendée historique — les Alpes vendéennes — le Bocage vendéen — la forêt de Vouvant — les marais de la Sèvre Niortaise — le Marais vendéen — Luçon et son marais — l'estuare du Lay — la Vendée moderne — le pays d'Olonne ^ — de la Loire à la Vie — de Bressuire en Gâtine — le Thouet el l'École de Saumur — au pays de Rabelais — de Tours au pays de Ronsard — la Beauce dunoise et Blois — les champs de bataille de la Beauce — la Beauce chartraine — Perche-Gouët, Thimerais et Drouais. — 388 pages avec 30 cartes.
17« SÉRIE : LITTORAL DU PAYS DE CAUX, VEXIN, BASSE-PICARDIE. — Les falaises de Caux — Dieppe et la vallée de la Scie — de valleuse en valleuse — l'Aliermont — le pays de Bray — en Vexin — les table- tiers de Méru — les éventaillistes au village — le pays de Thelle — Beauvais — les opticiens du Thérain — la vallée dorée — de la Brèche à la Noyé — l«s tourbières de Picardie — Amiens — dans les hortil- lonnages — les bonnetiers du Santerre — pendant les manœuvres — l'Amiénois et la vallée de la Bresle — les dernières falaises — les ser- ruriers de Vimeu — d'Escarbotin à la baie de Somme. — 398 pages avec 24 cartes.
18« SÉRIE : FLANDRE ET LITTORAL DU NORD. — Roubaix — la forte- resse du collectivisme — Tourcoing et le Ferrain — le Val de Lys — le vieux Lille — le nouveau Lille — mœurs lilloises — la Flandre guerrière — l'agriculture dans le Nord — les villes industrielles de la Lys — la Flandre flamingante — les monts de Flandres — les Moëres
— Dunkerque et son port — la pèche à Islande — Fort-Mardyck et Gravelines — dans les Wateringues — en Morinie — Langle, Bredenarde et Pays reconquis — la fabrication des tulles — en Boulonnais — Bou- logne et ses plumes métalliques — la côte boulonnaise — de la Canche à l'Authie — le Marquenterre et le Ponthieu — le cheval boulonnais.
— 456 pages avec 30 cartes.
19« SÉRIE : ARTOIS, CAMBRÈSIS ET HAINAUT. — Les sources de la Somme — le champ de bataille de Saint-Quentin — la vallée de l'Omi- gnon — de la Somme à l'Ancre — le pays des phosphates — la Nièvre picarde — le pays d'Arras — Âzincourt, Enguinegatte et Thérouanne
— le pays noir de Béthune — l'armée au pays noir — Alleu, Weppes et Escrebieux — Bapaume et la source de l'Escaut — En Gambrésis
— Caudry et le canton de Glary — Cambrai — la plus grande sucrerie du monde — en Ostrevent — de la Scarpe à l'Escaut — le pays noir d'Anzin — Valenciennes et le Hainaut — la vallée de la Sambre — la vallée de la Solre — Fourmies — la trouée de l'Oise. — 398 pages avec 28 cartes.
20" SÉRIE : HAUTE-PICARDIE, CHAMPAGNE RÉMOISE ET ARDENNES. — En Noyonnais — en Soissonnais — en Laonnais — les vanniers de la Thié- rache — le familistère de Guise — la vallée de l'Oise et Saint-Gobain
— Coucy et le Tardenois — Reims — Épernay et le vignoble d'Ay — la montagne de Reims et ses vins — le camp de Ghàlons — les Champs catalauniques — le Rethelois et le Porcien — entrée dans l'Ardenne — le royaume de la quincaillerie — la principauté de Ghâ- teau-Regnault — les Dames de Meuse — les Givets — Rocroi et le cheval ardennais — le champ de bataille de Sedan — Sedan industriel et ses annexes — De l'Argonne en Champagne pouilleuse — la héron- nière du Grand-Écury — Vertus et le mont Aimé. — 40 1 pages, 22 cartes.
21« SÉRIE : HAUTE-CHAMPAGNE, BASSE-LORRAINE. — La Brie champe- noise — la Champagne pouilleuse — le Perthois et le Der — le val de l'Aube — le pays de Morvois — les Bonnetiers de Troyes — le pays d'Othe — de Troyes à Glairvaux — en Bassigny — les couteliers de Nogent-le-Roi — la montagne d'Auberive — le plateau de Langres
— du Bassigny en Ornois — le Vallage — la métallurgie en Cham- pagne — en Barrois — le Blois, la Voide et le Pays des Vaux — les opticiens de Ligny — Vaimy et le Dormois — les défilés de l'Argonne
— Varennes, le Clermontois et les Islettes — le Verdunois — Dom- remy et Vaucouleurs — les côtes de Meuse. — 419 pages avec 27 cartes.
22« SÉRIE : PLATEAU LORRAIN ET VOSGES. — Le Luxembourg fran- çais — le pays du fer — le Jarnisy et Briey — la Woëvre — le pays de Haye — l'Ecole forestière de Nancy — Nancy — le Vermois et le Saulnois — le Xaintois — Luthiers et Dentellières — dans les Fau- cilles — la Vôge — un pèlerinage à Roville — Épinal et l'industrie des Vosges — les images d'Épinal — de la Mortas:ne à la Vezouse — la Vologue — les lacs Vosgiens — la principauté de Salm-Salm et Saint-Dié — le Val-d'Ajol et Plombières — la Haute-Moselle — les Vosges militaires — la Moselotte — le Ballon de Servance — au Ballon d'Alsace. — 427 pages avec 27 cartes.
23" SÉRIE : PLAINE COMTOISE ET JURA. — Les vanniers de Fayl-Billot
— le bailliage d'Âmont — la Saône franc-comtoise — la vallée de rOgnon — les Vosges comtoises — Besançon et ses horlogers — le couloir du Doubs — le pays de Mnntbéliard — Belfort et le Sundgau — Beaucourt et ses satellites — le Lomont — les fruitières jurassiennes
— les sources de la Loue — le lac de Chaillexon — le Saugeais et le Baroichage — le lac de Saint-Point — de Champaguole au Val de Mièges
— IG —
— l'Ecosse du Jura — Morez — la vallée des Dappes et la Faucille — le pays de Gcx — les Lapidaires de Septmoncel et de Saint-Claude — GJairvanx et le Graudvaux — la Moyenne Montagne. — 423 pages avec 25 cartes.
24« SÉRIE : HAUTE-BOURGOGNE. — Dijon — dans les hnublonnières
— les Pays bas de Bourgogne — le vignoble de la Gôte-d'Or — la côte dijonnaise — la côte de iNuits et Giteaux — Beaune et sa côte — le finage et Dôle — la forêt de Ghaux et le Yal d'Amour — le Boa Pays — Chalon-sur-Saône et la Bresse chalonnaise — Bresse bressane et Rever- mont — la Bresse louhanaise — la côte mâconnaise — au long de la Saône — de royaume en empire — au pays de Lamartine — la côte chalonnaise et Cluny — des Grosnes au Sornin — en Brionnais — Charollais et Combrailles — la Loire bourguignonne. — 399 pages avec 30 cartes.
2b« SÉRIE : BASSE-BOURGOGNE ET SÉNONAIS. — Le seuil de Longpendu
— la vallée de la céramique — le Creusot — Bibracte et Autun — le pays de l'huile — le Morvan bourguignon — en Auxois — autour d'Alésia — le vignoble des Riceys et l'Ource — Châtillonnais et Dues- mois — aux sources de la Seine — l'Avallonnais — la Cure et l'Yonne
— en Auxerrois — le Tonnerrois — en Sénonais — la Puisaye — le Gàtinais français — le Gàtinais Orléanais — entre Sologne et Gâtinais.
— 373 pages avec 24 cartes.
26« SÉRIE : BERRY ET POITOU ORIENTAL. — Le Sancerrois et la Forêt
— les Forêtins — les arsenaux de Bourges — le camp d'Avord et la Septaine — le canal du Berry — du Cher à l'Arnon — une colonie d'aliéués — porcelainiers et forgerons du Berry — Issoudun et Chà- teauroux — la Champagne berrichonne — la vallée du iNahon — les moutons du Berry — la basse vallée de l'Indre — en Brenne — de la Glaise à la Creuse — de Touraine en Acadie — les carrières du Poi- tou — la Beauce montmurillonnaise — entrée en Boischaut — les 1 ingères d'Argenton — le pays de George Sand — la Creuse et la Gar- gilesse. — 365 pages avec 25 cartes.
27« Série : BOURBONNAIS ET HAUTE-MARCHE. — Nevers et le bec d'Allier — Moulins et Souvigny — Sologne bourbonnaise — la vallée de la Besbre — monts de la Madeleine — Limagne bourbonnaise — le berceau des liourbons — des côtes Matras à la Sioule — de la Sioule à la BouMe — houillères de Commentry — la forêt de Tronçais et Montluçon — un tour en Berry — entrée dans la Marche — les maçons de la Creuse — la tapisserie d'Aubusson — au long de la Creuse — les Trois-Gornes et la Sedelle — aux sources de la Gartempe — du Taurion à la Maulde — le plateau de Gentioux. — 3j2 pages avec 27 cartes.
28^ SÉRIE : LIMOUSIN. — La basse Marche — les montagnes de Blond — les monts d'Ambazac — Limoges — émaux et porcelaines
— 17 —
— aalour de Limoges — Saint-Juaien et ses gantiers — aux conCms du Périgord — la Chine du Limousin — la haute vallée de la Vienne
— Treignac et les Monédières — Meymac et Ussel — le plateau de Millevaches — la Corrèze et Tulle — le cbàtjau d'Lîzerche — ardoises et primeurs — Ségur et l'Àuvézùre — de Pompadour à la Vézère — Brive-la-Gail larde — iXoailles et Turenne — la Dordogne limousine
— entre Argeniat et Tulle. — 350 pages avec 24 cartes.
29^ SÉRIE : BORDELAIS ET PÉRIGORD. — Le Libournais — les vins de IJordeaux — bordeaux — l'activité bordelaise — navigation sur la Gi- ronde — le Mcdoc des grands vins — les landes du Medoc — la pointe de Grave — la Gironde saintongeais.e — Biayais et Bourgeais — le Saint-Émilionnais — l'Entre Deux-mers — en Bazadais — la Dor- dogne en Périgord — la Double — de la Dronne à la Nizoune — Péri- gueux et ITsIe — le pays du père Bugeaud — le Nontronnais — chez nos aïeux préhistoriques — les truiïes du Sarladais. — 411 pages avec 31 cartes.
30*» SÉRIE : GASCOGNE. — Le Bazadais — la conquête des Landes — les landes de Bordeaux — autour du bassin d'Arcachon — Arcachon et les dunes — le Captalat de Buch — le pays d'Albret — le iMarsan et le Gabardan — de la Midouze à la Leyre — le pays de Born — les lièges de .Marantin — de Dax au Vieux-Boucau — Cap-Breton et la Ma- remne — la Chalosse — la Rivière-Basse et le Tursan — le plateau de Lanneme/an — le Pardiac et l'Astarac — l'Armagnac. — 340 pages avec 26 cartes,
31« SÉRIE : AGENAIS, LOWIAGNE ET BAS-QUERCY. — La plaine de la Ga- ronne — la va lec du Drot — les landes de Lot-et-Garonne — la capi- tale du Béarnais — les bouchonniers de Mézin — Lomagne, Gaure et Fezenzaguet — le Fezensac et l'Eauzan — le Condomois — le pays des prunes — les petits pois de Villeneuve — le tiaut-Agenais — Agen et ses campagnes — le Bas-Quercy — Lomagne et Rivière -Verdun
— la rivière m intilbanaise — les chapeaux de paille du Quercy — les gorges de l'Aveyron — les cingles du Lot — le causse de Limôgne
— le Lot entre Rouergue et Quercy. — Avec 22 cartes.
32« série : HAUT-QUERCY ET HAUTE-AUVERGNE. — Le Côlé et la Brauuhie
— Gourdon et la Bouriane — le causse de Martel — de César à Gan- robert — le causse de Gramat — de Gapdenac au Segala — les gorges de la Gère et Auriilac — la Châtaigneraie — Gampnac et Viadéne — dans l'Aubrac — en Carladès — Saint-Flour et la Planèze — Luguet et Cézallier — le Féniers et l'Artense — du sommet du puy Mary — les bœufs de Salers. — Avec 21 cartes.
33« série: BASSE-AUVERGNE. — Combrailles et Franc-Alleu — les houillères de la Combrailles — la Limagne — le puy de la Poix — Clermont-Ferrand — au puy de Dôme — le reboisement dans le Puy- de-Dôme — le mont Dore — le camp de Bourg-Lastic — les orgues
— 18 —
de Bort — le puy de Sancy et les lacs d'Auvergne — du mont Dore à l'Ailier — du Velay à la Margeride — de Brioude à Issoire — Ger- govie — de l'Allier à la Dore — en Llvradois — du Livradois en Forez — de la Loire aux Boutières. — Avec 23 cartes.
Sous presse:
34« série : VELAY, VIVARAIS MÉRIDIONAL, GÉVAUDAN. — Le Lignon- Yellave — le pays d'Emblavés et le Puy — la dentelle du Puy — Po- lignac et le volcan de Bar — le mont Mézenc — à la source de la Loire — le lac d'Issarlés — le lac du Bouchet — entrée en pays cé- vennol — de la Gère à l'Ardèche — au long de l'Ardèche — ascension du mont Lozère — Mende et le Gévaudan — le plateau de la Marge- ride — le palais du roi — le causse de Sauveterre — les gorges du Tarn — autour du causse Méjean — entre causses et Gévennes — Bramabiau et l'Aigoual.
35« série : ROUERGUE ET ALBIGEOIS. — La basse Marche du Rouergue
— le bassin de Decazeville — la montagne qui brûle — Rodez et le causse du Gomtal — Espalion et le causse de Bozouls — le causse de Séverac — Millau — les brebis du Larzac — à travers le Larzac — les caves de Roquefort — le rougier de Gamarés — à travers le Ségala — entrée en Albigeois — le pays de Gocagne — Garmaux et ses mines — entre Tarn et Dadou — les vins de Gaillac — Castres et son causse — une page d'histoire industrielle — Mazamet, la Mon- tagne-JNoire et le Thorè.
36« série : CÉVENNES MÉRIDIONALES. — La Gardonnenque — le bassin d'Alais — le Guidon dn Bouquet — entre Uzès et Anduze — la Salen- drenque — le Gardon de Mialet — la Vallée française — Bramabiau et l'Aigoual — la haute vallée de l'Hérault — la vallée de la Dourbie
— de l'Hérault au Vidourle — Sommiéres et le Salavès — les gorges de Saint-Gui Ihem — la vallée de la Lergue — Villeneuvette et Béda- rieux — l'Escandorgue et l'Espinouze — la Vernazobres et la Cesse
— en Minervois.
37" série : GOLFE DU LION. — Mmes — le JNemauzès — les mazets des Garrigues — aux bords du petit Rhône — Aiguesmortes — le vignoble des Sables — la Vannage et la Vidourlenque — Montpellier
— la cité morte de Maguelonne — Cette — Agde et l'étang de Thau
— le fleuve Hérault — Béziers et le Bitterrois — Narbonne — le lac Rubrensis — La Nouvelle et Leucate — Rivesaltes et la Salanque — les jardins de Perpignan — au pied des Albéres — Port-Vendres et Banyuls.
38e série : LE HAUT-LANGUEDOC — Le Sidobre et Lacaune — les monts de Lacaune et l'Espinouze — du Suumail en Cabardès — de Saint-
— 19 —
Paponl à Sorèze — les rigoles du canal du Midi — en Lauragais — Garcassonne et le Carcasses — dans les Corbières — le Fenouillèdes
— les défllés de Pierre-Lis — le Razès — le Kercorbis — le Mirepoix
— de l'Ariège à la Garonne — Toulouse — le pays toulousain — en Bas- Gomminges et Néboazan.
En préparation :
39» série : PYRÉNÉES (PARTIE ORIENTALE). — Le Vallespir — le Gon- flent — la Gerdagne — le Capcir — au col de Perthus — au pied du Canigou — la vallée de la Têt — le pays de Sault — autour de Foix
— le Donézan — la haute Ariège — la mine aux mineurs de Raucié
— le pays de Sérou — la grotte du Mas-d'Azil — le Gouserans — les ours d'Ustou — la vallée de Luchon — le val d'Âran — le haut Gom- minges.
40° série : PYRÉNÉES (PARTIE OCCIDENTALE). — La barre de l'Àdour — le pays de Labourd — en pays basque — de l'Adour au Gave — la basse Navarre — la Soûle — entrée en Béarn — vallée d'Aspe — de la vallée d'Aspe à la vallée d'Ossau — la vallée d'Ossau — Oloron ù Sauveterre — le gave^ d'Orthez à Pau — autour de Pau — entrée en Bigorre — le Lavedan — Gavarnie et Cauterets — la plaine de Tarbes
— le haut Adour — le pic du Midi.
41" et 42» séries : PARIS ET L'ILE DE FRANCE.
Nous ferons connaître dans une prochaine notice le plan de ces vo- lumes par lesquels se terminera le Voyage en France.
Juillet 1903. Les Éditeurs,
BERGER-LEVRAULT & C**.
VIENT DE PARAITRE
Affiche illustrée du VOYAGE EN FRANCE. Magnifique planche en cliromotypographie, 113 X 78 cm, paysiige des Alpes du Dauphiné,
par H. Ganier-Tanconville. Prix 1 fr. 25 c.
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Je, soussigné, prie la librairie Berger-Levrault et C'^, 5, rm des Beaux-Arts, à Paris, de m' expédier franco Q) les volume, ci-après du Voyage en France, au prix de 3 fr. 50 c. bro chés, ou 4 fr. reliés.
"G
l'C SERIK.
2e SÉRIE .
3e SÉRIE .
4^ SÉRIE .
5e SÉRIE .
6» SÉRIE .
7"^ SÉRIE .
8e SÉRIE .
9e SÉRIE . lOe SÉRIE . ne SÉRIE . 12e SÉRIE . l3e SÉRIE . 14e SÉRIE .
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CD
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d'eiem- plaires.
Ije SERIE
l6e SÉRIE
17e SÉRIE
l8e SÉRIE
I9« SÉRIE
20e SÉRIE
2I« SÉRIE
22^ SÉRIE ,
23e SÉRIE
24e SÉRIE
2')C SÉRIE ,
aGe SÉRIE ,
27^ SÉRIE
28e SÉRIE ,
TOTAL des volumes
NOMBRE d'eiem-
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Des Alpes mancelles à la Loire maritime.
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SOUS PRESSE : Velay, Vivarais méridional, Gévaudan. Rouergue et Albigeois
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Cévennes méridionale Golfe du Lion. Haut-Languedoc.
EN PRÉPARATION : Pyrénées (Partie orientale). — (Départemente des Pyrénées-Orientales^Aude, Ariôgc Pyréni'es (l'.arîie occidentale).
Ji. PiU'is (^; 1 : ^ ■■ ; .■ ■ .-.
(Uéparlements des Hautes et Basses-Pyrénées )
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