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Full text of "L'Oeuvre de l'Exposition et Adoration nocturne du Très-Saint-Sacrement en France et à l'étranger"

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BIBLIOTHEQUE SAINTE - GENEVIEVE 




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L'ŒUVRE 



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TRES-SAINT-SACREMENT 




BIBLIOTHEQUE! 
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PARIS. - IMPRIMERIE DE L'ŒUVRE DE SAINT-PAUL 

SOUSSENS et C*> 
51, RUE DE LILLE, 51 



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L'OEUVRE 



ET ADORATION NOCTURNE 



TRÈS-SAINT-SACREMENT 



EN FRANCE ET A L ETRANGER 




PARIS 
LIBRAIRIE POUSSIELGUE FRÈRES 

15, RUE CASSETTE, 15 

1877 



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LETTRE DE S. G. MONSEIGNEUR F. DE LA ROUILLERIE 

Archevêque de Perga, coadjuteur de Bordeaux. 



Bordeaux, le 6 avril 1878. 

Cher Monsieur le Président, 

J'ai lu avec un bien vif intérêt lo pieux recueil que 
vous êtes sur le point de publier touchant la belle œuvre 
de l'Adoration nocturne. Vous y rappelez son histoire, 
celle de sa fondation et de ses développements, et celle, 
plus admirable encore, des fruits qu'elle a déjà portés. 
Je vous félicite de ce pieux travail. Mon nom se trouve 
écrit aux premières pages du livre! je voudrais qu'il y 
fût à toutes ; mais je ne puis du moins, sans un souve- 
nir attendri, me reporter vers ces premières nuits si 
douces que je passai à Notre-Dame des Victoires en 
compagnie dos saints jeunes gens qui commençaient 
l'Œuvre avec moi. Plusieurs déjà voient au ciel, face à face, 
Celui que nous adorions ensemble sous ses voiles Eucha- 
ristiques. L'adoration du Ciel a commencé pour l'Œuvre 
presque on même temps quo celle de la terre. Mais c'est 
précisément parce que, déjà, elle se fait au Ciel, qu'elle a 
si bien prospéré sur la terre. En peu do temps, elle est 
devenue pour Paris, on peut le dire, uno grande institu- 
tion catholique. Paris, qui a beaucoup péché, à coup sûr, 
est cependant aujourd'hui encore la villo par excellence 
de l'action ardente pour le bien ! Mais serait-il la ville 
de l'action qui accomplit tant de saintes œuvres, s'il 
n'était pas d'abord la ville de la contemplation aux pieds 



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y 

de l'autel Eucharistique ? Cet autel est le foyer où tous 
les cœurs s'allument ; et quand le cœur est brûlant, il 
met le fou à la vie entière. 

Je suis assez du commencement de l'Œuvre pour vous 
féliciter, cher Monsieur le Président, des progrès qu'elle 
a faits par vos bons soins et ceux de vos pieux associés. 
Si, quelques amis et moi, nous avons jeté la semence, 
c'est vous très-certainement qui l'avez arrosée, et je ne 
crains point ici de blesser votre modestie, parce que mes 
amis, vos associes, vous et moi, nous reconnaissons en- 
semble que c'est Dieu seul qui a donné l'accroissement 
ot la fécondité. 

Permettez-moi de me recommander très-spécialement 
ici aux prières des adorateurs, et de vous demander 
d'agréer, cher Monsieur le Président, l'expression de mes 
plus affectueux sentiments en Notre-Seigneur, 



f FRANÇOIS, 
Archevêque de Perga, coadjuteur de Bordeaux. 



LETTRE DU R, P. TESNIERE 

de la Congrégation des Prêtres du Très-Saint-Sacrement. 



Saint-Maurice, le 14 avril 1878, 
Dimanche des Rameaux. 

Bien cher Monsieur, 

Je viens d'achever la lecture de votre histoire de 
Y Œuvre de V Adoration nocturne ; l'impression que j'en 
ai retirée est qu'il faut vous hâter de donner ce travail 
au public. Vous ferez ainsi l'œuvre la plus juste, la plus 
utile et la plus édifiante. 

La plus juste: car vous devez à la bonté de Notre- 
Seigneur, de manifester les grâces toutes particulières, 
la protection vraiment merveilleuse dont il a entouré 
les commencements do cette Œuvre. Quels préjugés elle 
a eu à vaincre, quels obstacles à surmonter ! mais elle 
avait trop évidemment en vue la gloire du divin Maître, 
sa gloire directe et personnelle dans le Sacrement de sa 
présence, pour qu'il ne la fît pas triompher ; vous lui 
payez aujourd'hui, par votre livre, la dette de la recon- 
naissance, et c'est justice. 

L'utilité de cette publication n'apparaît pas moins 
clairement. En reproduisant intégralement le règlement 
de l'Adoration nocturne de Paris, avoc une explication 
qui en donne le sens ; en reproduisant même les types 
des divers imprimés en usage dans l'Œuvre-mère, vous 
rendez le plus éminent service. Avoc votre livre, tout 
laïque pieux et zélé, s' appuyant sur l'autorité ecclésias- 



■^^^■■1 



IV 

tique et s'inspirant do ses conseils, peut organiser une 
nuit, que dis-je? une œuvre d'Adoration; et ce guide 
précieux lui épargnera ces tâtonnements, ces erreurs qui 
découragent souvent les meilleures volontés. 

Enfin, comment redire l'édification que l'on respire 
à pleins poumons dans les pages que vous avez consa- 
crées aux membres défunts de l'Œuvre ? Dans ces dipty- 
ques de l'Adoration nocturne, les plus beaux noms 
sont mêlés aux plus ignorés, les hautes situations aux 
plus humbles professions. Ces notices, qui.font connaître 
des existences conduites â la lumière de la foi, sanctifiées 
par l'amour du sacrifice, laissent dans l'âme l'impression 
la plus salutaire. Peu d'oeuvres, sans doute, comptent en 
un si court espace do temps, un si grand nombre de 
héros ! 

Je souhaite donc, cher Monsieur, que votre livre soit 
beaucoup lu. Il sera l'apôtre de l'Adoration nocturne ; 
puisse-t-il en répandre la salutaire pratique dans toutes 
les villes de France ! 

Joie souhaite et j'ose dire que je l'espère en voyant, 
dans votro livre même, les magnifiques résultats déjà 
obtenus. Du reste, l'Adoration du Saint-Sacrement 
exposé est, pour la France, autant une dette de recon- 
naissance qu'un devoir de religion. Nous ne devrions 
jamais oublier — et vous avez bien fait de reproduire la 
Bulle qui lo constate — que ce fut pour tirer la France 
des horreurs où la jetaient les guerres de religion 
qu'en 1592, le Pape Clément VIII fonda, dans la Ville 
sainte, l'Adoration perpétuelle des Quarante-Heuros. 

Les dangers do l'heure actuelle sont plus terribles que 
ceux de la fin du XVI» siècle : multiplions donc les 
œuvres d'adoration ; employons-nous à ce que lo Saint- 



Sncrcment soit adoré le jour et la nuit dans tous les 
diocèses de notre pays; nous ferons ainsi l'œuvre du 
S:ilut par excellence ! 

Agréez, cher Monsieur, avec mes remerciements em- 
pressés, l'assurance de mon religieux dévouement en 
Jésus, Nôtre-Seigneur, au Très-Saint-Sacrement. 



A. TESNIERE, 

de la Congrégation du Très-Saint-Sacrement, 
Docteur en Théologie. 









LETTRE DE M. LE COMTE F. DE CHAMP AGNY 

Membre de l'Académie française. 



Paris, le 10 mars 1878. 

Monsieur et cher Confrère, 
J'ai millo fois à. vous remercier de l'excellent et si 
intéressant volume que vous avez bien voulu me remet- 
tre. Il a pour moi un prix infini ; il me rappelle plus 
d'un nom ami mentionné dans vos rapports et me 
retrace de bien chers quoique douloureux souvenirs. 
Mais surtout il me fait comprendre et admirer plus que 
jamais l'Œuvre à laquelle il se rattache. J'en ai été un 
bien tardif associé et j'en suis, plus que jamais aujour- 
d'hui, un bien indigne et infime coopérateur. Ma conso- 
lation est do voir auprès de moi des associés tout diffé- 
rents de moi et dont les mérites réjailliront, je l'espère, 
sur leur pauvre confrère. 

Je ne puis que désirer la publicité la plus étendue 
pour ce volume, si touchant par les vertus modestes 
qu'il nous fait connaître et si propre â en faire naître 
de pareilles, si propre à exciter la dévotion envers le 
Saint-Sacrement qui est le fondement de tout le chris- 
tianisme et, on peut le dire, de toute morale et de toute 
vertu. 

Recevez, je vous prie, avec mes remerciements, le 
respectueux hommage de ma bien sincère considération. 



CHAMPAGNY. 



PRÉFACE 



Ce livre s'adresse plus spécialement aux 
membres de l'œuvre de l'Exposition et Adora- 
tion nocturne du Très-Saint-Sacrement à Paris. 
Depuis longtemps, ils demandaient qu'on réunit 
en un volume les rapports dont ils avaient en- 
tendu la lecture dans leurs assemblées générales. 
Ce travail, plusieurs fois différé pour divers 
motifs, a pu être enfin entrepris et terminé. Il 
présente l'histoire de l'Œuvre, ses développe- 
ments successifs, son extension en province et 
même à l'étranger, son règlement, les rensei- 
gnements nécessaires pour l'établissement et le 
fonctionnement de l'Adoration nocturne, le ta- 
bleau des diocèses de France qui possèdent l'Ado- 
ration perpétuelle et d'utiles indications sur les 
principales œuvres Eucharistiques. C'est dire 

1 



VI PRÉFACE 

que les associés de l'Œuvre de Paris ne seront 
pas les seuls à pouvoir en tirer profit et que les 
personnes qui se dévouent au culte du Très- 
Saint- Sacrement pourront le consulter avec 
fruit. Il sera indispensable h quiconque s'occupe 
de l'Adoration nocturne, que le souffle divin 
étend de plus en plus en France à mesure que 
l'impiété y propage ses funestes doctrines. Il 
faut en effet que la prière, le sacrifice, la répa- 
ration grandissent en proportion des attaques 
dont Dieu et notre sainte religion sont l'objet, 
afin que la juste colère du Ciel ne s'appesantisse 
pas trop sur nous. 

Le conseil de l'œuvre de l'Adoration nocturne 
à Paris, par les soins duquel ce livre a été com- 
posé, serait heureux qu'il servit à développer 
l'amour et le culte du Très-Saint-Sacrement et 
qu'en aidant à les propager, il contribuât, avec la 
grâce de Nôtre-Seigneur à étendre le règne de 
Dieu dans les âmes et à procurer ainsi la gloire 
de son saint nom. 



INTRODUCTION 



Recherches historiques sur l'Adoration nocturne du 
Très-Saint-Sacrement. — Fête-Dieu. — Bulle Graves 
et Diutumœ instituant l'Adoration perpétuelle, 1592. — 
Congrégations vouées au culte Eucharistique. 

L'idée de glorifier Dieu et de lui offrir des 
réparations non interrompues par l'Adoration 
perpétuelle n'a pas attendu jusqu'à notre époque 
pour recevoir sa réalisation. 

On en trouve la trace dès les premiers siècles 
de l'Eglise. Il n'entre point dans notre pensée 
ni dans notre programme de faire l'histoire 
complète de ces touchantes manifestations de la 
piété ; nous nous bornerons à rapporter quelques 
faits. 

En Orient, saint Alexandre, qui mourut à 
Constantinople, vers 430, fonda l'ordre des 
Acémèles, c'est-à-dire qui ne se couchent pas. 



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Vin INTRODUCTION 

parce qu'ils chantaient les louanges de Dieu sans 
interruption. Les trois cents religieux de son 
monastère étaient répartis en six chœurs qui se 
succédaient pour accomplir ce pieux office. 

En Occident, lorsque saint Sigismond, roi 
des Burgundes (515), restaura le monastère 
• d'Agaune, aujourd'hui Saint-Maurice en Valais, 
il y institua le chant perpétuel des psaumes 
(Laus perennis). Jour et nuit, comme les chœurs 
célestes, les moines louaient le Seigneur par 
leurs saints cantiques. 

Saint Amé, Amatus, mort vers 625, établit, 
dans le monastère de femmes qu'il fonda à Remi- 
remont avec saint Romaric, les exercices qu'il 
avait vu pratiquer à Agaune où s'était écoulée 
sa jeunesse. Les religieuses étaient réparties en 
sept chœurs composés chacun de douze reli- 
gieuses qui se partageaient le chant des psau- 
mes. Dagobert, roi des Francs (628-638), voulut 
que les moines de Saint-Denis imitassent ceux 
d'Agaune. Clovis II, Thierry et Pépin (752-768), 
veillèrent au maintien de cette institution. Les 



INTRODUCTION IX 

moines de Saint-Martin de Tours suivirent le 
même exemple. 

Sainte Salaberge qui vivait au VIP siècle, 
établit dans un monastère de Laon la prière 
perpétuelle comme à Agaune et à Remiremont. 
Saint Angilbert (mort en 814) organisa avec 
le plus grand soin la psalmodie perpétuelle dans 
son monastère de Saint-Riquier. Il y occupait 
trois cents moines et cent enfants, répartis en 
trois chœurs qui se succédaient. Tous ensemble 
chantaient les heures canoniques, puis les deux 
tiers de chaque chœur se retiraient pour vaquer 
aux diverses occupations de l'intérieur et retour- 
naient ensuite dans le sanctuaire. 

La même institution se retrouve à Saint- 
Germain de Paris, à Saint-Pierre de Corbie, à 
Saint-Benigne de Dijon, à Saint-Médard de Sois- 
sons, à Saint-Marcel de Chàlons. 

Nous ne voulons point dire que ce fut l'Adora- 
tion perpétuelle, l'Adoration nocturne telle que 
nous la concevons aujourd'hui, ni un acte de 
réparation, un hommage spécial rendu au Très- 




x INTRODUCTION 

Saint-Sacrement ; nous laisserons même disserter 
les savants sur ce qu'était la Laus perennis, la 
jugis psalmodia. Il est du moins certain que 
c'était un hommage rendu au Seigneur autour 
du tabernacle où repose le corps divin de Dieu 
fait homme et à ce titre les membres de l'Adora- 
tion nocturne ont bien le droit de réclamer ces 
religieux comme leurs ancêtres. 

Il faut venir jusqu'au XIII e siècle pour être 
témoins d'une grande manifestation de l'Église 
catholique spécialement en faveur de la divine 
Eucharistie. C'est à cette époque qu'a été insti- 
tuée la fête du Saint-Sacrement, si bien appelée 
par la liturgie fête du corps de Notre- 
Seigneur, et par le peuple Fête-Dieu. 

Ce fut dans la ville de Liège, en Belgique, que 
cette fête prit naissance. Dieu la suscita comme 
une protestation contre les attaques dont la sainte 
Eucharistie était l'objet de la part des sectaires 
de Bérenger et comme un puissant moyen de 
combattre les erreurs que l'orgueil de l'homme 
inventait contre ce divin mystère. 



INTRODUCTION XI 

Dès le IX e siècle, Jean Scot, natif d'Irlande, 
avait essayé de nier le dogme sacré delà présence 
réelle. Cent cinquante ans plus tard, Berenger, 
archidiacre d'Angers, avait renouvelé les mêmes 
attaques et ne s'était rétracté qu'après avoir été 
condamné dans six conciles, dont le dernier 
s'était tenu à Rome sous l'immortel Grégoire VII. 
Après lui, Tanquelin se fit l'écho de ses coupables 
doctrines, jusqu'à sa mort arrivée en 1115. 

Dans toutes les luttes que ces erreurs nouvel- 
les provoquèrent, l'Église de Liège se distingua 
par le zèle qu'elle mit à défendre la vérité. Ses 
évoques et les membres les plus éminents de son 
clergé entrèrent dans la lice avec un dévouement 
et une science qui durent attirer sur elle des 
grâces particulières. Il semble que, par un des- 
sein tout providentiel, elle se préparait à faire 
éclore la grande fête qui devait célébrer le 
triomphe de Nôtre-Seigneur Jésus-Christ pré- 
sent au Saint-Sacrement. 

Une jeune fille des environs de Liège fut l'ins- 
trument que Dieu choisit pour cette grande 






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xu INTRODUCTION 

entreprise. Elle se nommait Julienne et était 
née en 1193. Elle n'avait que cinq ans lorsqu'elle 
perdit ses parents. Elle fut confiée aux soins des 
religieuses du Mont Cornillon, à Liège, qui for- 
maient une communauté très-importante. Elle 
y grandit dans la piété, et ses progrès furent si 
rapides qu'en 1207, à l'âge de quatorze ans, on 
lui donna l'habit. Son amour pour la sainte 
Eucharistie était tel qu'il lui arrivait souvent 
d'avoir des extases pendant la sainte Messe. 

A l'âge de seize ans, elle eut durant la nuit, 
comme tant d'autres âmes privilégiées, dont 
nous parlent l'histoire ecclésiastique et la vie 
des saints, une vision dont elle ne put alors 
connaître le mystère. Elle vit le globe de la lune 
rayonnant de lumière, partagé en deux parties 
égales par une ligne noire. Elle consulta ses 
sœurs les plus vertueuses, des personnes renom- 
mées par leur piété et leur savoir, qui toutes la 
dissuadèrent d'attacher de l'importance à cette 
vision, et l'engagèrent à en bannir la pensée de 
son esprit. Douée de la plus profonde humilité, 



INTRODUCTION XIII 

elle s'étudia à suivre ces avis ; mais ce fut en 

vain, la pensée de la vision revenait sans cesse. 

Enfin, au bout d'un an, une voix intérieure lui 

dit clairement que le globe de la lune figurait 

l'Eglise militante, et que la ligne noire qui 

l'obscurcissait signifiait qu'il manquait une fête, 

celle du très-saint et très-auguste Sacrement 

des autels ; que le Jeudi-Saint était bien désigné 

à cet effet, mais que la pensée et le souvenir du 

Très-Saint-Sacrement étaient dominés ce jour-là 

par les sentiments douloureux que fait naître la 

Passion de Nôtre-Seigneur, et qu'il fallait fixer 

un jour tout-à-fait spécial pour trois raisons : 

la première, pour que la foi aux saints mystères 

fût constamment ravivée ; la seconde, pour que 

les hommes qui aiment la vérité et la vertu 

trouvassent dans cette fête des forces et des 

lumières nouvelles ; la troisième enfin, pour que 

les irrévérences et les impiétés de chaque jour 

fussent réparées et expiées. 

Cette révélation causa à Julienne une joie 

inexprimable ; mais cette même voix intérieure 

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XIV INTRODUCTION 

lui ayant dit qu'elle était destinée à faire insti- 
tuer cette fête dans l'Église, elle fut troublée à 
la vue de cette mission dont elle pria pendant 
deux ans le Seigneur de la décharger. Au bout 
de ce temps elle se décida a consulter des théo- 
logiens distingués, qui tous tombèrent d'accord 
que la fêté devait être établie. Dès lors on s'oc- 
cupa de l'office spécial à cette fête, qui fut com- 
posé par un jeune clerc attaché au monastère de 
Julienne, et récité jusqu'au moment où saint 
Thomas d'Aquin composa l'admirable office du 
Saint-Sacrement que l'Église dit encore aujour- 
d'hui. 

Comme toutes les œuvres appelées à faire un 
grand bien, celle dont Julienne était l'instrument 
fut l'objet de violentes attaques. Séculiers, ecclé- 
siastiques, religieux mêmes ne voyaient dans ces 
révélations que des visions imaginaires qu'ils 
traitaient avec dédain. Mais leur opposition fut 
impuissante, et, sans parler des décisions de 
plusieurs papes, le saint Concile de Trente s'est 
chargé de venger Julienne et son œuvre, en pro- 



INTRODUCTION XV 

nonçant l'anathéme contre ceux qui oseraient 
contredire la légitimité et la nécessité de l'insti- 
tution de la Fête-Dieu. 

Ce fut en 1246 que Robert de Torote, évêque 
de Liège, établit cette fête mémorable. Dans .son 
mandement il dit que puisque les saints ont leur 
fête marquée à certains jours de l'année, il est 
juste que le Saint des saints ait une solennité 
qui lui soit particulière. Ce pieux évêque n'atten- 
dit pas longtemps la récompense de son zèle 
pour le Saint-Sacrement. Il tomba malade peu 
après l'institution de la fête, et mourut après 
avoir fait réciter dans sa chambre, comme un 
dernier hommage de son dévouement envers 
l'adorable Eucharistie, l'office nouvellement 
composé. 

Son successeur, Henri de Gueldre. plus guer- 
rier que religieux, fut loin de marcher sur ses 
traces. Il persécuta Julienne, qui, obligée de fuir 
de son monastère du Mont Cornillon, passa 
plus de dix ans en exil et mourut à Fosses, le 
ô avril 1258, en odeur de sainteté. Son exil et 



XVI INTRODUCTION 

sa mort firent d'abord craindre pour le sort de 
la nouvelle institution ; mais le cardinal Hugues 
de Saint-Cher, légat du Pape, qu'avait attiré à 
Liège l'état critique du diocèse, l'approuva et 
confirma par un mandement celui de Robert de 
Torote. Toutefois le zèle se ralentit et l'institu- 
tion tomba en désuétude, excepté néanmoins 
dans l'église de Saint-Martin où elle fut cons- 
tamment célébrée. 

Cependant les dispositions d'Henri de Gueldre 
se modifièrent. Il demanda au pape Urbain IV 
d'ordonner que la Fête-Dieu fût observée dans 
tout le diocèse de Liège. Le Pape déféra avec 
empressement à ce désir, qui fut réalisé en 1262. 
Urbain IV avait connu Julienne, il se souvint de 
lui avoir entendu dire que Dieu désirait l'exten- 
sion de cette fête à tout le monde catholique. Il 
communiqua ses pensées sur ce sujet à saint 
Thomas d'Aquin, aux cardinaux, aux principaux 
membres du clergé séculier. Il n'y eut qu'une 
voix sur le bien que produirait la réalisation de 
ce projet. Le Pape, heureux de trouver dans ces 



INTRODUCTION XVII 

avis un écho des désirs qu'entretenait son cœur, 
chargea saint Thomas d'Aquin et saint Bonaven- 
ture de composer séparément un nouvel office 
du Saint-Sacrement. La tradition nous apprend 
que saint Bonaventure ayant entendu saint Tho- 
mas d'Aquin lire son manuscrit détruisit son 
propre travail, jugeant qu'on ne pouvait rien 
écrire de mieux que ce qu'avait écrit l'Ange de 
l'École. La bulle du pape Urbain IV est de 1264, 
et, le 2 octobre de la même année, ce Pape si 
pieux alla recevoir dans le Ciel la couronne due 
à ses vertus, ayant en ce point une ressemblance 
frappante avec Robert de Torote, le premier fon- 
dateur de la Fête-Dieu. 

Les malheurs des temps, et, en Italie surtout, 
les guerres civiles empêchèrent cette sainte 
institution de prendre tout son développement. 
Ce ne fut qu'en 1318 qu'elle fut universellement 
observée, selon le Bref du pape Jean XXII, c'est- 
à-dire avec octave et processions extérieures 
dans lesquelles devait être portée la sainte Eu- 
charistie. Martin V, qui mit fin au grand schisme 






XVlll INTRODUCTION 

d'Occident, ordonna que la fête fût célébrée au 
son des cloches, à portes ouvertes et à haute voix, 
même dans les lieux soumis à l'interdit ecclésias- 
tique, et augmenta les indulgences accordées 
par son prédécesseur Urbain IV. 

Après lui, plusieurs papes, entre autres Eu- 
gène IV, Paul III, Grégoire XIII, Urbain VIII, 
témoignèrent de leur dévotion particulière envers 
la sainte Eucharistie en accordant de nouvelles 
faveurs soit à la célébration de la fête elle-même, 
soit aux confréries auxquelles elle avait donné 
naissance. La première de ces confréries se forma 
à Rome, le 30 novembre 1539, sous l'inspiration 
du pape Paul III, dans l'église Sainte-Marie de 
la Minerve. Dès cette époque un des buts de ces 
confréries était de contribuer à l'ornementation 
des églises pauvres, touchante dévotion qui a 
été rétablie de nos jours et qui vient ajouter à 
toutes les gloires catholiques de notre France 
contemporaine. 

L'institution de la fête du Saint-Sacrement 
avait été comme un rempart élevé contre les ra- 



INTRODUCTION XIX 

vages de l'hérésie de Bérenger et des Albigeois. 
L'hérésie plus redoutable de Luther et de Calvin 
suscite à son tour l'Adoration perpétuelle. 

Le P. Auger de la Compagnie de Jésos, ne 
crut pouvoir mieux combattre les efforts du cal- 
vinisme en France et spécialement à Paris, 
qu'en établissant l'Adoration perpétuelle dans 
cette grande ville dont l'exemple était déjà si 
puissant. 

Vers le même temps, en 1534, l'illustre arche- 
vêque de Milan, saint Charles Borromée institua 
les Quarante-Heures pendant les trois jours qui 
précédent le carême, jours consacrés par le 
monde aux plaisirs, aux fêtes et à la dissipation. 
Cette dévotion se propagea en Italie, et fut in- 
troduite en 1548 à Rome d'où elle se répandit 
dans le monde entier. Saint Philippe de Néri 
venait de former la confrérie de la Trinité des 
Pèlerins, il établit les Quarante-Heures dans son 
église, tous les premiers dimanches du mois. 
L'archiconfrérie de Sainte-Marie de l'Oraison 
l'établit le troisième dimanche de chaque mois. 









xx INTRODUCTION 

en 1551. Enfin Clément VIII institua, par la 
bulle Graves et diuturnœ, en 1592, l'Adoration 
perpétuelle du Saint-Sacrement, qui n'est autre 
chose, dans la pensée du Pape, que la dévotion 
des Quarante-Heures se succédant d'église en 
église le jour et la nuit sans interruption. 

Voici le texte de cette bulle, document trop 
important au double point de vue Eucharistique 
et français, pour ne pas trouver sa place ici : 

« Institutio Orationis quadraginta horarum, 
altemalim, etJugiter habendœ, in Ecclesiis 
et Piis loch Almœ Urbis, ad prœscriptam 
Ecclesiarum, et temporis distributionem, 
cum Indulgentiarum concessione. 

« Clemens Episcopus Servus, servorum Dei 
dilectis filiis, Clero et Populo Romano, 
salutem et Apostolicam benedictionem. 

« Graves et diuturnae Christianae Reipublicse 
calamitates, quae peccatis promerentibus, quoti- 
die magis ingravescunt, pastoralem sollicitudinem 



INTRODUCTION 



XXI 



nostram, quam universaeEcclesia; debemus, assi- 
due commovent, magno sane cum doloris sensu 
prsesentium malorum, et impendentium pericu- 
lorum raotu, sed pra?cipue cor nostrum, et pa- 
terna viscera nostra transfigit luctuosus status 
nobilissimi et olim florentissimi Gallise Regni, 
quod tôt jam annos summa rerum perturbatione, 
et omnium malorum acerbitate conflictatur, ser- 
punt in dies latius hseresum incendia, jamque 
pari furore inflammati Sancta? Ecclesias inimici 
hinc hseretici, inde Turcse cervicibus nostris 
proprius imminent, plane ut manifeste omnibus 
appareat, ad tam multa incommoda repellenda 
inanem esse omnem opérant hominum, inanes 
labores, et imbecilles vires, nisi cœlestis gratia^ 
auxilio roborentur, quod ut consequi possimus, 
confugiamus necesse est ad illam desideriorum 
nostrorum fidelem internuntiam, atque interpré- 
tera, et bonor'um omnium conciliatricem oratio- 
nein, quse ex corde bumili, et aniino contrito 
emissa cœlos pénétrât, iram Dei mitigat, plagas 
et flagella avertit, et divina? misericordise impe- 







■ 



XXII INTRODUCTION 

trat abundantiam : est emin, ut Sancti Patres 
illam vocant, clavis cœli, etcum ascendit oratio, 
descendit Dei miseratio, et quidem tanto facilius, 
et uberius descendit, quanto major fidelium, ac 
piorum multitudo in uno charitatis spiritu copu- 
lata continuatas adhibet preces. 

« § 1. Quare memores verbi Domini, quod est 
apud Sanctum Prophetam : « Invoca, inquit, me 
in die tribulationis, eruam te, et honorificabis 
me,» statuimus ad placandum Deum, ut averta- 
tur ira ejus a populo suo, et ad ejus opem his 
difflcillimis temporibus impetrandam, perpetuam 
sine intermissione orationem publiée in hac 
Aima Urbe sic instituere, ut in Ecclesiis 
Patriarchalibus, et insignibus collegiatis,necnon 
S. R. E. Cardinalium titulis, et Diaconiis, et 
Regularium atque etiam confraternitatum Eccle- 
siis, quse seorsim descriptse erunt, certisprseflnitis 
diebus, pia, et salutaris quadraginta horarum 
oratio celebretur, ea servata Ecclesiarum, et 
temporis distributione, ut die, noctuque, quavis 
hora, toto vertente anno, sine intermissione ora- 






INTRODUCTION XXIII 

tionis incensum in conspectu Domini dirigatur. 
« § 2. Quamobrem vos omnes, quos uti peculia- 
resfiliospra9cipuocomplectimuraffectu,vehemen- 
ter in Domino hortamur, ut in hoc saluberrimo, et 
pernecessario orandi studio, vos ipsi pie, et dili- 
genter exerceatis. Paupere.s omnes sumus, et 
Dei gratia indigemus ; bonorum omnium auctor 
et largitor est Deus ; nihil boni adipisci, nihil 
mali evitare sine eo possumus; petite ergo, et 
accipietis ; pulsate. et aperietur vobis. Orate pro 
EcclesiaSancta Catholica, utdissipatiserroribus, 
unius fldei veritas toto terrarum orbe propage- 
tur. Orate ut peccatores redeant ad cor, et ne 
scelerum fluctibus absorbeantur, sed per poeni- 
tentiae tabulam salventur. Orate pro Regum et 
Christianorum pace et unitate. Orate pro afflicto 
Regno Galliae ut qui dominatur cunctis Regnis, 
et cujus voluntati nihil resistit, Regno Christia- 
nissimo, et optime de Christiana Religione merito, 
veterem pietatem, et pristinam tranquillitatem 
restituât. Orate ut fîdei hostes teterrimi Turcaj, 
qui furore, et audacia incensi, Cbristianis omni- 



XXIV INTRODUCTION 

bus servitutem, et vastitatem minitari non ces- 
sant, ipsius Dei omnipotentis dextera conteran- 
tur. Orate deniqiie pro Nobis ipsis, ut Deus infir- 
raitatera nostram sublevet, ne tanto oneri succum- 
bamus, sed det Nobis in. populo suo, verbo, et 
exempte proficere, et opus ministerii nostri adim- 
plere, ut una cum grege Nobis, licet immeritis 
credito, ad vitam sempiternam perveniamus, 
per aspersionem sanguinis Agni immaculati, 
quem in altari offerimus, et Deo Patri reprœsen- 
tamus, ut respiciat in faciem Christi sui, et parcat 
Nobis peccatoribus, intercedente etiam advocata 
nostra Sanctissima Virgine Dei Génitrice Maria, 
Sanctisque omnibus cum Christo Domino regnan- 

tibus. 

« § 3. Hanc autem piam orationem Nos ipsi pri- 
mum in nostro Apostolico Palatio, prima Domi- 
nica sacri Adventus post missarum solemnia 
incboabismus, cum venerabilibus fratribus nos- 
tris S. R. E. Cardinalibus, et qui in Urbe adsunt 
Episcopis, et Praelatis, ut deinceps suo ordine in 
cseteris Urbis Rcclesiis ad prœscriptam formam 



XXV 



INTRODUCTION 

celebretur, et salutaris consuetudo sine intermis- 
sione orandi rite, ac dévote inducatur. 

« § 4. Cseterum, ut eo propensius in hoc pio 
instituto perseveretis, de Omnipotentis Dei mise- 
ricordia, et Beatorum Apostolorum Pétri, et 
Pauli auctoritate confiai omnibus, et singulis 
utriusque Sexus Christifidelibus vere pœnitenti- 
bus et confessis, ac Sanctissimo Eucharistie Sa- 
cramento refectis, qui in quacumque Ecclesia, 
ubi oratio hujusmodi indicta l'uerit, dévote orando 
unam saltem horam perseveraverint, plenariam 
peccatorum suorum indulgentiam concedimus, 
et elargiinur; iis vero, qui inibi pias ad Deum 
preces breviori temporis spatio effuderint, sep- 
tem annos, et totidem quadragenas de injunctis 
sibi, aut alias debitis pœnitentiis misericorditer 
in Domino relaxamus. 



« Datum Romae apud S. Petrum die vigesima 
quinta Novembris, millesimo quingentesimo no- 
nagesimo Secundo, Pontificatus Nostri Anno 1. » 



■I 



XXVI INTRODUCTION 

Voici la traduction de cet important document : 
« Clément Évêque, Serviteur des serviteurs de 

Dieu, à nos chers fils les Clercs et le Peuple 

Romain, salut et bénédiction apostolique. 

« Les tristes et longues calamités attirées sur 
le monde chrétien par nos péchés et qui vont 
chaque jour en s'aggravant ne cessent d'émou- 
voir Notre sollicitude pastorale qui doit s'étendre 
à toute l'Église. Nous ressentons, certes, une vive 
douleur à la vue des maux présents, et dans la 
perspective de ceux qui nous menacent. Mais, 
Notre cœur et Nos entrailles paternelles sont 
surtout transpercés par l'état affligeant du noble 
et autrefois si florissant Royaume de France, qui 
depuis tant d'années, est bouleversé de fond en 
comble et accablé des maux les plus cruels ; l'in- 
cendie allumé par l'hérésie s'étend de plus en 
plus; animés d'une égale fureur contre la sainte 
Église, les hérétiques d'un côté, les Turcs de 
l'autre nous menacent de plus près ; en sorte qu'il 
devient manifeste à tous que, pour conjurer tant 
de dangers le secours des hommes est vain, leurs 



INTRODUCTION XXVII 

efforts inutiles et leurs forces impuissantes, si la 
grâce céleste ne les fortifie. Afin que nous puis- 
sions l'obtenir nous devons recourir à cette fidèle 
messagère et interprète de nos vœux par qui 
tous les biens découlent sur nous, la prière, qui, 
partant d'un cœur humilié et d'un esprit contrit, 
pénètre jusqu'au ciel, apaise la colère de Dieu, 
détourne les plaies et les fléaux et obtient l'abon- 
dance des miséricordes divines. Elle est, selon 
l'expression des saints Pères, la clef du ciel. 
Lorsqu'elle monte, la miséricorde divine descend 
sur nous, d'autant plus prompte et plus abon- 
dante qu'un plus grand nombre de chrétiens et 
de pieux fidèles sont unis en esprit de charité 
pour prier sans interruption. 

« Aussi, Nous souvenant de la parole de Dieu 
qui se lit dans le saint Prophète : « Invoque moi, 
dit-il, au jour de la tribulation ; je te délivrerai 
et tu m'honoreras , » Nous avons résolu pour 
apaiser le Seigneur, pour détourner sa colère de 
dessus son peuple, et obtenir les secours dont 
nous avons besoin en ces temps difficiles, d'ins- 



r 



XXVIII INTRODUCTION 

tituer en cette Ville sainte des exercices publics 
de prières perpétuelles, en sorte que les églises 
patriarchales et les insignes collégiales comme 
aussi les églises au titre cardinalice, les diaconies 
et les églises des réguliers et des confréries, qui 
seront désignées nommément à cet effet, célèbrent 
à un jour fixé d'avance les pieux et salutaires 
exercices des prières des Quarante-Heures, en 
suivant l'ordre établi pour l'époque et pour le 
lieu, de manière que, le jour et la nuit, à quelque 
heure que ce soit et durant tout le cours de 
l'année, l'encens de la prière ne cesse de s'élever 
en la présence de Dieu. 

« C'est pourquoi Nous vous exhortons tous 
vivement dans le Seigneur, vous que Nous em- 
brassons dans un amour particulier, comme nos 
fidèles enfants, à vous adonner avec dévotion et 
zèle à cette œuvre si salutaire et si nécessaire 
de la prière. Nous sommes tous pauvres et nous 
avons tous besoin de la grâce de Dieu ; il est l'au- 
teur et le dispensateur de tout bien, on ne peut 
sans lui obtenir aucun bien, ni éviter aucun mal; 



INTRODUCTION XXIX 

demandez donc et vous recevrez ; frappez et l'on 
vous ouvrira. Priez pour la sainte Église catho- 
lique, afin que les erreurs se dissipent et que la 
vérité dans l'unité de la foi se propage par toute 
la terre. Priez pour que les pécheurs rentrent en 
eux-mêmes, qu'ils ne soient point engloutis par 
les flots de leurs iniquités et qu'ils se sauvent du 
naufrage par la planche de la pénitence. Priez 
pour la paix et l'union des rois et des chrétiens; 
priez pour le malheureux royaume de France. 
Que celui qui domine tous les royaumes et à la 
volonté de qui rien ne résiste, rende au royaume 
très-chrétien qui a si bien mérité de l'Église, son 
antique piété et sa tranquillité d'autrefois. Priez 
pour que les Turcs, ces terribles ennemis de la 
foi, qui, pleins de fureur et d'audace, portent 
partout la menace de la dévastation et de la servi- 
tude, soient broyés parla main du Tout-Puissant. 
Priez enfin pour Nous-méme afin que Dieu sou- 
tienne Notre infirmité, que Nous ne succombions 
pas sous le poids si lourd de Notre charge ; qu'il 
Nous donne de faire avancer Notre peuple dans 

1" 



XXI INTRODUCTION 

la perfection par la parole et par l'exemple et de 
Nous acquitter des charges de Notre ministère 
afin que Nous parvenions à la vie éternelle avec 
le troupeau qui Nous a été confié, malgré Notre 
indignité, par l'aspersion du sang de l'Agneau 
immaculé que Nous offrons sur l'autel et que 
Nous présentons à Dieu le Père pour qu'il re- 
garde la face de son Fils et qu'il nous traite avec 
miséricorde, Nous pécheurs par l'intercession de 
notre avocate la sainte Vierge Marie, Mère de 
Dieu et de tous les saints régnant avec le Chkist 
Nôtre-Seigneur. 

« Cette pieuse forme de supplication, Nous 
l'inaugurerons Nous-mème, dans Notre Palais 
Apostolique, le premier dimanche du saint temps 
de l'Avent, après la Messe solennelle, avec Nos 
vénérables frères les RR. EE. Cardinaux et les 
Évèques et les Prélats présents à Rome pour que 
désormais elle soit célébrée à tour de rôle dans 
les autres églises de la ville, suivant la forme 
prescrite et que la salutaire coutume de la prière 
perpétuelle s'établisse avec ordre et dévotion. 



INTRODUCTION 



XXXI 



« Au reste, pour vous engager à persévérer 
dans cette pieuse institution, confiant en la 
divine Miséricorde et en vertu de l'autorité des 
Bienheureux Apôtres Pierre et Paul, Nous accor- 
dons l'indulgence plénière de leurs péchés à tous 
les fidèles de l'un et de l'autre sexe, sincèrement 
pénitents qui, s' étant confessés et ayant participé 
au saint Sacrement de l'Eucharistie, auront pro- 
longé leur prière au moins pendant une heure, 
dans quelque église que ce soit où ces exercices 
auront lieu; à ceux qui, dans ces mêmes églises, 
auront prié dévotement pendant un temps plus 
court, Nous remettons miséricordieusement dans 
le Seigneur, sept années et autant de quarantai- 
nes ries peines qui leur sont imposées ou qu'ils 
doivent d'ailleurs. 

« Donné à Rome, en l'église de Saint-Pierre, 
le vingt-cinquième jour de novembre mil cinq 
cent quatre-vingt-douze, de notre pontificat la 
première année. » 



La voix du Souverain-Pontife fut entendue et 



XXXII INTRODUCTION 

la dévotion des Quarante-Heures ou Adoration 
perpétuelle fut bientôt établie, à l'imitation de 
Rome, clans beaucoup de -villes et de diocèses, 
même dans des villages ; mais en général pour le 
jour seulement; la pensée si féconde de Clé- 
ment VIII, ne devait recevoir une application 
plus complète et plus étendue qu'à notre époque. 
Un demi-siècle plus tard, dans les commence- 
ments si troublés du règne de Louis XIV, alors 
que la France se ressentait encore des terribles 
conséquences des guerres de religion et que le 
jansénisme commençait à l'envahir et à dessécher 
les sources de la piété, fut fondé le premier cou- 
vent de femmes pour l'Adoration perpétuelle. 

La régente Anne d'Autriche, frappée des dé- 
sordres qui désolaient le royaume, fit consulter 
un prêtre de la communauté de Saint-Sulpice 
sur l'œuvre qui lui paraîtrait la plus propre à 
fléchir la colère de Dieu. Ce prêtre, touché des 
continuelles profanations des églises, et surtout 
du Saint-Sacrement, occasionnées par les guer- 
res, proposa l'établissement d'une maison reli- 



INTRODUCTION XXXIII 

gieuse consacrée spécialement au culte de la 
sainte Eucharistie et à la réparation des outrages 
faits à ce divin mystère. Ce fut l'origine des 
Dames Bénédictines du Très-Saint-Sacrement 
instituées par la vénérable Catherine de Bar, en 
religion Mecthilde du Saint-Sacrement, dont la 
première maison date du 12 mars 1654. 

Mecthilde mourut à 83 ans, le 6 avril 1698, en 
odeur de sainteté, après avoir établi sept couvents 
de l'Adoration perpétuelle. Beaucoup de com- 
munautés religieuses imitèrent les Bénédictines 
et dans plusieurs villes se fondèrent des associa- 
tions pour adorer au moins le jour, sans inter- 
ruption NoTRE-SmGNEURdansle Saint-Sacrement. 
De la France cette Adoration perpétuelle s'éten- 
dit en Espagne, en Portugal, en Allemagne. En 
Bavière, elle fut établie en confrérie par le prince 
régnant en 1674 : l'adoration était faite le jour 
dans les paroisses, la nuit dans les communautés. 
Plus tard, tandis que la Révolution détruisait 
en Europe presque toutes les anciennes institu- 
ions religieuses, Dieu suscitait une pieuse fille 






^H s«* 






XXXIV INTRODUCTION 

pour établir un nouvel ordre d'Adoration perpé- 
tuelle. Catherine Sordini, en religion Sœur Marie- 
Madeleine de l'Incarnation, née en Toscane, 
en 1770, entra au couvent des Dames Francis- 
caines d'Ischia. Elle eut une vision où Dieu lui 
révéla son désir qu'elle fondât un ordre d'Ado- 
ration perpétuelle. Devenue Supérieure du cou- 
vent, en 1802, elle fit part de sa révélation à son 
confesseur.M. Jean-Antoine Baldeschi, qui plus 
tard devait écrire l'histoire de cette fondation, 

en 1839. 

Le projet de Sœur Marie-Madeleine fut sou- 
mis par ce saint prêtre à l'évêque ; celui-ci, après 
les épreuves ordinaires, en fit part au pape 
Pie VII qui lui donna toute son approbation : il 
vit là, une des institutions les plus nécessaires, et 
voulut quela première maison fut établie à Rome. 
Sœur Marie-Madeleine y vint donc avec ses 
religieuses dans le couvent de Sainte-Anne des 
Quatre-Fontaines. Dès qu'elles furent pourvues 
du nécessaire, elles commencèrent dans le si- 
lence du cloître l'Adoration perpétuelle. 



INTRODUCTION 



XXXV 



En 1807, elles reçurent de Pie VII la permis- 
sion de faire l'Adoration solennelle à partir du 
troisième dimanche de septembre, jour de la fête 
de Notre-Dame des Sept-Douleurs. 

L'occupation de Rome par les Français fit 
fermer le couvent de Sainte-Anne et dispersa les 
religieuses. Mais Sœur Marie-Madeieine et ses 
compagnes revinrent après la chute de Napoléon 
et leur maison fut la première rétablie. 

La France devait se signaler particulièrement 
dans cette restauration des institutions Eucha- 
ristiques, et, comme si chaque nouvel effort de la 
Révolution devait donner lieu à un nouveau 
témoignage des miséricordes divines, nous avons 
vu, dans les années qui ont suivi 1848, se fonder 
à Paris deux congrégations nouvelles: celle àéS 
Dames de l'Adoration réparatrice, due au zèle de 
Mlle Dubouché, en religion Sœur .Marie-Thé- 
rèse (l),et celle des Prêtres du Saint-Sacrement 
fondée par le R. P. Eymard. 



(1) Voirla via de Mère MariR-There.se, fondatrice de la 
congrégation de l'Adoration réparatrice, par M. l'abbé 



■n 



■■■■ 



XXXVI INTRODUCTION 

La congrégation des Dames réparatrices qui 
possède déjà plusieurs maisons en France, et qui 
est unie par les liens d'une ardente charité à 
l'œuvre de l'Adoration nocturne comme on le 
verra dans le cours de cet ouvrage, a eu en 
Belgique une imitation, mais avec de notables 
modifications, dans l'Institut de l'Adoration per- 
pétuelle établi à Bruxelles depuis le 4 avril 1852. 

La société des Prêtres du Saint-Sacrement est 
sortie de deux cœurs bien faits pour s'unir 
dans cette belle entreprise. Le R. P. Eymard, 
d'abord religieux Mariste (1), et l'abbé de Cuers, 
ancien officier de marine, un des premiers mem- 
bres de l'œuvre de l'Adoration nocturne, l'éta- 
blirent en 1856 sous la féconde bénédiction de 
Sa Sainteté Pie IX et avec les encouragements 
de Mgr Sibour, archevêque de Paris, de Mgr de 
Tripoli son auxiliaire, et deMgrdelaBouillerie, 



d'Hulst; Paris, librairie Poussielgue frères, 27, rue Cas- 
sette, 1872. 

(1) Voir Le Prêtre de l'Eucharistie ou le R.P.Evmard, 
fondateur de la société du Très-Saint-Sacrement ; Paris, 
chez Poussielgue frères, 1871. 



INTRODUCTION XXXVII 

évèque de Carcassonne. On peut dire que par la 
part qu'y prit M. de Cuers, elle avait des racines 
dans l'œuvre de l'Adoration nocturne, aussi la 
société des Prêtres du Saint-Sacrement et l'asso- 
ciation nocturne ont-elles toujours eu les rap- 
ports de la plus étroite union. 

A côté des Prêtres du Très-Saint-Sacrement 
le R. P. Eymard a fondé les Servantes du Très- 
Saint-Sacrement destinées à continuer aux pieds 
de la divine Eucharistie la vie de la très-sainte 
Vierge au Cénacle. Mgr l'évêque d'Angers est le 
protecteur de cette famille d'adoratrices qui 
grandit dans le silence et l'humilité. 

Mais ce qui fera la principale gloire de l'Église 
de France au XIX e siècle, c'est l'institution de 
l'Adoration perpétuelle avec exposition du Très- 
Saint-Sacrement, qui est devenue la fête vrai- 
ment populaire de notre époque. La grande voix 
des évêques dit qu'elle en est la plus belle créa- 
tion et qu'elle est le vrai mobile providentielle- 
ment appliqué à la régénération religieuse de 
notre temps, et les fidèles lui font écho par leur 






XXXVIII INTRODUCTION 

élan à célébrer cette solennité, qui a pris rang 
parmi les plus belles fêtes. 

Lorsqu'on songe qu'il y a vingt-cinq ans la 
dévotion Eucharistique était si peu développée 
dans notre pays qu'elle bornait ses manifesta- 
tions à quelques confréries paroissiales, à de rares 
expositions solennelles, et qu'aujourd'hui elle y 
est en si grand honneur, on ne peut qu'ouvrir son 
cœur aux plus douces et aux plus fermes espé- 
rances d'avenir, en même temps qu'à la plus vive 
reconnaissance pour les miséricordieuses bontés 
dont Nôtre-Seigneur Jésus-Christ daigne hono- 
rer la France. Depuis 1848 le travail impie qui 
mine notre société et la menace d'une destruction 
violente a été repris avec plus d'ardeur ; à côté 
du mal, Dieu a mis le remède, et aux efforts de la 
révolution il a opposé les progrés du culte Eucha- 
ristique, progrès consolants dont témoigne la va- 
riété des œuvres, si nombreuses, que l'on peut 
dire en toute assurance qu'il n'y a pas un autre 
pays du monde où le Très-Saint-Sacrement soit 
plus aimé, plus honoré qu'en France: Adoration 



INTRODUCTION XXXIX 

diurne à l'église, Adoration nocturne chez .soi, 
Adoration de nuit au tombeau les jeudis et ven- 
dredis-saints , œuvre des Tabernacles, œuvre 
des Lampes, œuvre du Saint-Viatique, œuvre 
de la Messe réparatrice, œuvre de la Communion 
réparatrice, association du mois et de l'année 
Eucharistique sont autant de fleurs du bouquet 
Eucharistique que la France présente chaque 
jour à Dieu, sans compter les œuvres de l'Ado- 
ration perpétuelle et de l'Adoration nocturne, 
objet principal de cet ouvrage. 

Il était réservé à notre siècle de donner le jour 
aux associations laïques pour l'Adoration noc- 
turne. La première de toutes est celle de Home, 
qui prit naissance en 1809 et à laquelle nous con- 
sacrerons un chapitre spécial. 

Toutefois, son exemple ne lut pas d'abord 
imite. Il convenait qu'une œuvre dont la foi était 
la base essentielle naquit à Rome, mais la pro- 
pagation en était réservée à la France. Il fallait 
pour qu'elle s'étendit qu'elle touchât ce sol pri- 
vilégié du prosélytisme d'où eUe devait porter 



XL INTRODUCTION 

ses conquêtes pacifiques sur notre vieille Europe 
et même au delà, laissant partout sur son pas 
sage, des gages de consolation et d'espérance. 
A ce sujet, nous nous plaisons à citer un auteur 
allemand, le P. Gaudentius, de l'Ordre de saint 
François, qui écrivait en 1869: 

« C'est à la France catholique que revient la 
« gloire d'avoir fondé l'Adoration perpétuelle du 
«Très-Saint-Sacrement, dit-il dans L'Ordre 
« de l'Adoration perpétuelle du Très-Saint- 
« Sacrement de l'Autel; son but et son his- 
« toire.— Insbruck,lSQ9.—En vérité.la France 
«joue un rôle merveilleux dans l'histoire de 
« l'Église. Il y a quelques années nous y vîmes 
« la révolution triomphante commettre les plus 
« grands excès, et aujourd'hui encore cette na- 
« tion prouve combien elle est déchristianisée. 
« Mais à côté de ces spectacles désolants, nous 
« sommes témoins du zèle avec lequel les hom- 
« mes de foi pratiquent le bien et accomplissent 
« des œuvres de charité aussi admirables que 



variée?. 



INTRODUCTION XLI 

« La France est le pays où la sainte Vierge, 
« sous le nom de Notre-Dame des Victoires, a 
« fait tant de prodiges dans les âmes et dans les 
« corps ; où, sur la montagne de la Salette, elle 
« daigna exhorter les hommes à revenir à Dieu 
« et à faire pénitence ; où, dans ces derniers 
« temps , Nôtre-Seigneur inspira aux enfants 
« de l'Eglise les œuvres de piété, telles que le 
« Scapulaire rouge des SS. Cœurs de Jésus et de 
« Marie, l'Apostolat de la prière, la Communion 
« réparatrice ; où enfin la charité chrétienne 
« célèbre ses plus beaux triomphes et féconde 
« du sang de ses martyrs les missions les plus 
« lointaines. A ces signes il faut véritablement 
« reconnaître que le Seigneur s'est réservé la 
« France d'une manière toute spéciale, il l'a faite 
« comme la fille préférée de son Église; la Franco 
« semble un quelque sorte dédiée à' la sainte 
« Vierge et placée sous sa spéciale protection. > 
Ce mouvement de propagande Eucharistique, 
parti de la France, reçoit un efficace appui de la 
revue des œuvres Eucharistiques, intitulée le 

2 






XLn INTRODUCTION 

Très-Saint-Sacrement et publiée par les Prê- 
tres de la congrégation du Saint-Sacrement. 
Cette revue, qui paraît deux fois par mois et qui 
embrasse toutes les œuvres qui ont pour objet 
JÉsus-Hostie, devient ainsi le centre, le foyer et 
le plus utile propagateur de l'action et des œu- 
vres Eucharistiques (1). 



(1) Le Très-Saint-Sacrement, études sur l'Eucharistie, 
revue des œuvres Eucharistiques sous la direction des 
Prêtres de la congrégation du Tres-Saint-Sacrenient 
Paris, avenue Friedland, 27. Paraissant le 1« et le 15 de 
chaque mois. Prix : 6 francs par an. S adresser a M. Pous- 
sielgue, libraire, rue Cassette, 27. 



CHAPITRE PREMIER 

Fondation de l'Œuvre. — Ses premières années. 
1848 à 1851. 

Le développement des œuvres Eucharistiques 
a toujours coïncidé avec des époques troublées, 
pour mieux manifester la miséricorde de Dieu. 
L'Adoration nocturne s'est établie en France 
dans un moment de crise sociale, en 1848. 

Monsieur Hermann, jeune artiste nouvelle- 
ment converti du judaïsme- à la foi catholique, 
visitait souvent les sanctuaires où le Saint- 
Sacrement était exposé ; un soir qu'il était en 
prière dans la chapelle des Carmélites de la 
rue d'Enfer, on vint lui dire de se retirer parce 
qu'on allait fermer les portes ; cependant l'expo- 
sition du Saint-Sacrement continuait ; quelques 
dames restaient, elles appartenaient au Tiers- 
Ordre fondé par Mlle Dubouché, qui est devenu 
plus tard la congrégation des Dames Réparatri- 
ces ; on lui apprit qu'elles* passaient la nuit. Son 



■■■I 



— 2 — 

cœur fut saisi d'un ardent désir d'imiter cet 
exemple; il en parla à M. l'abbé de la Bouil- 
lerie, alors vicaire général de Paris, aujourd'hui 
coadjuteur de Mgr le cardinal archevêque de 
Bordeaux, qui lui-même, de concert avec une 
personne bien connue par son dévouement à la 
sainte Eucharistie, avait établi antérieurement 
une petite association pour l'Adoration nocturne 
chez soi, dans laquelle les membres, hommes 
ou femmes, se levaient tour à tour la nuit, une 
fois par mois, à une heure fixée d'avance, pour 
adorer Noïre-Seigneuk. M. Hermann n'eut pas 
de peine à obtenir son adhésion et son appui. Ils 
se mirent tous deux à l'œuvre, et en peu de 
temps leurs actives démarches avaient groupé 
vingt-trois hommes de bonne volonté. Ils se 
réunirent pour la première fois le 22 novem- 
bre 1848, rue de l'Université, numéro 102(maison 
détruite aujourd'hui), dans une petite chambre oc- 
cupée par le jeune artiste qui préludait aux rudes 
travaux de la vie monastique par toutes sortes de 
bonnes œuvres. Dix-neuf membres seulement 
étaient présents, quatre adhérents ne s'étaient 
pas présentés. M. l'abbé de la Bouillerie prési- 
dait cette petite réunion dont les membres s'é- 
taient rapprochés, « dans l'intention, dit le 
« procès-verbal de cette première séance, de 



« fonder une association ayant pour but l'Expo- 
« sition et l'Adoration nocturne du Très-Saint- 
« Sacrement, la réparation des injures dont il 
« est l'objet, et pour attirer sur la France les 
« bénédictions de Dieu et détourner d'elle les 
« fléaux qui la menaçaient. » 

Quel programme pour un si petit nombre 
d'hommes presque tous de la plus humble con- 
dition ! A part le promoteur de cette réunion, 
connu par son talent musical et sa conversion 
éclatante; le président dont la position dans 
le monde et dans le diocèse donnait quelque 
relief à ce petit troupeau ; deux officiers de 
marine qui cachaient leur distinction sous les 
dehors les plus modestes et par amour pour Dieu 
se faisaient les plus petits, les associés n'étaient 
guère que des employés obscurs, des ouvriers 
et des domestiques. Voilà les instruments dont 
Dieu s'est servi pour établir l'œuvre de l'Adora- 
tion nocturne, qui est devenue une des plus 
importantes du diocèse de Paris et qui existe 
dans plus de cinquante autres diocèses, attirant 
partout les grâces les plus abondantes. 

La nouvelle que le Saint-Père venait de quit- 
ter Rome pour se réfugier à Gaète fit décider la 
première nuit d'Adoration, le 6 décembre 1848. 
Les deuxième et troisième nuits eurent lieu les 



— 4 — 

20 et 21 décembre suivant, a l'occasion des 
prières des Quarante-Heures ordonnées par Mon- 
seigneur l'archevêque de Paris pour le Souve- 
rain-Pontife. Cette fondation se rattache ainsi à 
l'une des phases les plus douloureuses de la 
papauté, à l'imitation de l'Œuvre de Rome, née 
en 1810, à l'occasion de la captivité du pape 
Pie VII. La première nuit du 6 décembre 1848, 
et les deux suivantes eurent lieu dans le sanc- 
tuaire vénéré de Notre-Dame des Victoires^ à 
l'autel privilégié de l'archiconfrérie du très- 
saint et immaculé Cœur de Marie. Cette coïn- 
cidence doit être remarquée, car tous les grands 
progrès de l'association sont partis de Notre- 
Dame des Victoires. M. des Genettes, dont on 
peut dire avec l'auteur de l'épitaphe gravée sur 
sa tombe : vir bonorum operum omnium fau- 
tor et particeps, avait proposé son église et 
M. Hermann l'avait acceptée avec empressement. 
Que dire de cette nuit de délices ? Ceux qui y 
ont participé pourraient seuls en dépeindre les 
douces impressions. Bien des larmes coulèrent; 
une sorte de sainte ivresse s'empara de tous les 
cœurs ; on sortit de l'église avec l'enthousiasme 
de la propagande, et bientôt le nombre des asso- 
ciés fut assez élevé pour qu'on put passer qua- 
tre ou cinq nuits par mois. Comme ces veilles 



— 5 — 



répétées pouvaient déranger le service paroissial 
de Notre-Dame des Victoires, on choisit pour 
lieu de réunion la chapelle des PP. Maristes, 
rue du Montparnasse. Toutefois, la nuit du mer- 
credi au premier jeudi de chaque mois fut réser- 
vée à Notre-Dame des Victoires. 

L'Œuvre se développait dansle calme et lajoie, 
lorsque arriva le moment des épreuves. Celles 
qu'elle eut à subir furent redoutables, et elle n'y 
aurait pas résisté si Dieu, qui avait ses desseins 
sur elle, ne l'avait secourue. Un an ne s'était pas 
écoulé, que les hommes qui semblaient le plus 
nécessaires à son existence lui manquèrent tout 
à coup. M. l'abbé de laBouillerie, son supérieur, 
tomba sérieusement malade; M. Hermann partit 
pour Rome, d'où il ne devait revenir que pour 
revêtir l'habit des Carmes ; d'autres furent 
appelés par leurs fonctions loin de Paris. L'Œu- 
vre resta sans direction, elle périclitait. 

M. l'abbé des Genettes, avec le coup d'œil par- 
ticulier qu'ont les saints pour les choses de Dieu 
avait mesuré l'importance de l'humble associa- 
tion ; il la soutenait seul, il encourageait les 
membres à la persévérance, il leur ouvrait les 
portes du sanctuaire béni toutes les fois qu'ils 
désiraient se réunir, ce qui avait lieu de temps en 
temps, mais sans aucune régularité. 



8 



L'autorité ecclésiastique, vigilante gardienne 
du troupeau de Jésus-Christ et dont la mission 
était de le garantir des effets d'un zèle imprudent 
aussi bien que des dangers de l'erreur, suivait 
la marche de l'association avec une certaine 
réserve. Le caractère de nouveauté qui frappait 
en olle et ses pratiques qui s'écartaient des usa- 
ges reçus, lui avaient attiré plus de défiance, que 
de faveur. Discréditée par ses tristes dehors qui 
semblaient attester un manque de vie et de fé- 
condité, elle fut condamnée à se dissoudre. Elle 
languit ainsi près de deux ans. 

« Quand votre Œuvre a commencé, disait 
« Mgr Buquet dans l'assemblée générale qu'il 
« présida le 23 juin 1867, je dois vous l'a- 
« vouer, je doutais. Je croyais qu'elle n'aurait 
« pas de durée. Aussi ne l'ai-je pas d'abord 
« favorisée autant que j'aurais dû le faire. 
« Mais aujourd'hui elle a fait ses preuves et je 
« viens réparer mon erreur. » 



— 7 — 






CHAPITRE II 

Réveil de l'Œuvre. — Elle entre dans une voie nouvelle, 
en complétant l'Adoration perpétuelle. 

1851 â 1852. 



Cependant un membre de l'œuvre de l'Adora- 
tion nocturne de Tours, un des premiers fruits 
de celle de Paris, M. d'Outremont, aujourd'hui 
évêque du Mans, dont la vocation sacerdotale a 
récompensé le zèle, vint à Paris, au mois d'octo- 
bre 1851. Il s'enquit de l'état de l'Œuvre, et vit 
quelques-uns des rares membres restés fidèles; 
il les trouva découragés, abattus, et ne croyant 
plus qu'il fut possible de la relever. Il chercha à 
ranimer leur confiance, leur rappela la parabole 
de l'intendant qui avait enfoui le talent de son 
maître au lieu de le faire fructifier, et joignant 
^action à la parole, il parcourut cette grande 
ville pour visiter les confrères épars. Ceux qui 
promirent leur concours pour une reprise des 
exercices furent peu nombreux, et lorsque, le 
22 novembre 1851, ils voulurent, après une assez 
longue interruption, célébrer l'anniversaire de 
la fondation de l'Œuvre en passant une nuit à 

2* 






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— 8 — 

Notre-Dame des Victoires, ils ne se trouvèrent 
que neuf adorateurs. Ils convinrent que toutes 
les prières, toutes les immolations de cette nuit, 
n'auraient qu'un but, le rétablissement de l'Ado- 
ration nocturne. Ils prièrent beaucoup ; ils du- 
rent faire violence au Cœur de Marie dépositaire 
des dons de Dieu, car, dès ce moment.les choses 
changèrent de face. Notre-Dame des Victoires 
avait reçu l'Œuvre à sa naissance, elle obtenait 
de Dieu sa résurrection. 

Aussi n'est-il pas surprenant que la recon- 
naissance attache l'Œuvre à ce sanctuaire. 
Il est son sanctuaire spécial, et en souvenir 
de toutes les grâces qu'elle a reçues sous le 
doux patronage de la Mère de Nôtre-Seigneur, 
elle y fait l'Adoration nocturne une fois par 

mois. 

Mais qu'allait faire l'Œuvre? Allait-elle re- 
prendre ses anciens usages, quelques nuits par 
mois dans le but de satisfaire à une dévotion 
individuelle et privée ? Dieu la destinait à une 
plus haute mission. 

A cette époque, il ramenait à Paris un des 
confrères des premiers jours éloigné depuis près 
de deux ans par ses fonctions de capitaine de 
frégate, M. de Cuers, qui se préparait à quitter 
le monde pour le sacerdoce. Il fut l'instrument 



9 



que Dieu employa pour montrer la route qu'il 
fallait suivre désormais. 

L'Adoration des Quarante-Heures pendant le 
jour était établie depuis un an. Réunir les deux 
œuvres ensemble, de manière à rendre l'Adora- 
tion réellement perpétuelle, voilà la pensée 
féconde que M. de Cuers apporta. Il la communi- 
qua à M. l'abbé de la Bouillerie qui l'accueillit 
avec joie. 

Nous ne craignons pas de trop dire en affir- 
mant que cette pensée venait de Dieu. Celui dont 
il s'est servi pour la faire connaître ne revenait 
à Paris que juste le temps nécessaire pour la 
proposer et, d'un autre côté, elle arrivait dans 
un moment où elle était, bumainement parlant, 
d'une réalisation impossible. Que pouvaient faire 
les neuf membres qui s'étaient retrouvés avec 
tant de peine? Dans une position modeste, sans 
relations, sans autorité, inconnus pour la plupart, 
rien en eux ne pouvait faire prévoir le succès. 
Comment cette nouvelle apparition de l'Œuvre 
serait-elle accueillie? Qui ouvrirait à cette asso- 
ciation si faible les portes des sanctuaires ? Où 
trouver un nombre suffisant d'hommes disposés 
à embrasser des pratiques si inusitées et si péni- 
bles et à se soumettre au rude labeur de les 
faire accepter dans une ville aussi insouciante 






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— 10 — 

et aussi frivole? M. de Cuers ne croyait pas 
qu'on pût passer les nuits dans plus de trois ou 
quatre paroisses, durant tout le cours de la 
première année. Il comptait sur M. des Genet- 
tes, avait la promesse de M. l'abbé Bourgoin, 
curé de Saint- Augustin, et espérait en deux 
autres. Mais Dieu était là. On commença le 
31 décembre 1851 à Notre-Dame des Victoires. 
On passa huit nuits dans le mois de janvier 1852, 
dix-sept dans le mois de février et, à la fin 
de l'année ecclésiastique, l'Adoration nocturne 
avait été faite dans quarante-quatre sanctuaires, 
dont vingt-cinq paroisses ; parmi ces dernières 
cinq appartenaient à la banlieue. 

Ce résultat inespéré, qui donnait la mesure 
des desseins de Dieu sur la petite association ne 
fut pas obtenu sans beaucoup de peines et de 
travaux. 

Elle n'avait pas encore acquis assez de force 
et de régularité pour être reconnue et appuyée 
par l'autorité ecclésiastique, en sorte qu'il fallait 
conquérir les sanctuaires un à un et quels 
étaient les moyens de conquête ? Les associés se 
présentaient sans autres titres que leur inébran- 
lable confiance en Dieu, à un curé que le plus 
souvent ils ne connaissaient pas et dont ils 
n'étaient pas connus. Ils lui demandaient de ne 



— Il — 

pas retirer le Saint-Sacrement après l'office du 
soir, alors que, jusque là, rien de semblable 
n'avait eu lieu et de confier son église pendant 
toute une nuit à quelques hommes ordinairement 
étrangers à sa paroisse. 

Ce n'était pas tout; il fallait se recruter pour 
faire face à l'entreprise nouvelle, et de ce côté 
n'était pas la moindre difficulté. Les esprits 
étaient si peu préparés à l'Adoration nocturne 
que les hommes les plus chrétiens ne la consi- 
déraient que comme une exagération de la piété. 
Il arriva, comme à Bethléem, que les bergers 
furent appelés les premiers. Les simples et les 
petits se présentèrent d'abord, les mages les 
suivirent bientôt. On se multiplia plus soucieux 
de la gloire de Dieu et de l'honneur de l'Œuvre 
que de son propre repos et, grâce à un zélé infa- 
tigable, il devint possible de suffire à tous les 
besoins. 

Les préventions de ces premiers temps se 
dissipèrent d'ailleurs assez vite et deux ans ne 
s'étaient pas écoulés que toutes les classes de 
la société concouraient à l'envie à ces homma- 
ges rendus au Roi des rois et qui sont d'autant 
plus chers à son Cœur qu'ils sont rehaussés par 
une. humilité qui n'a d'égale que la foi qui les 
inspire. Quel touchant spectacle présentent ces 



— 12 — 

nuits ignorées du monde, où le riche et le grand 
seigneur ne dédaignent pas de serrer la rude 
main de l'ouvrier, où le prêtre vient confondre 
son dévouement avec celui du guerrier et du ma- 
gistrat, où le haut fonctionnaire est sur le même 
rang que le modeste employé. On parle beaucoup 
de fraternité et d'égalité, on fait appel, en leur 
nom, aux doctrines les plus étranges, souvent 
les plus dangereuses; chaque jour voit éclore 
une théorie nouvelle, recherches vaines et vains 
efforts ; une seule doctrine a le secret de la vraie 
fraternité et de la véritable égalité, c'est la doc- 
trine catholique qui seule a aussi le pouvoir de 
les réaliser dans la pratique de la vie. 

L'Œuvre avait repris une nouvelle vigueur en 
se soudant à l'Adoration des Quarante-Heures, 
nouvellement établie à Paris ; ce puissant élé- 
ment de force lui venait de Rome, car c'est à 
Rome q:,e cette grande institution avait pris son 
modèle et que Mgr Sibour avait conçu la pre- 
mière pensée de sa fondation. Voici dans quelles 
circonstances : 

« C'était pendant le saint temps du Carême, 
« dit Mgr de Tripoli dans l'allocution qu'il 
« adressa aux membres de l'Œavre, le 26 juin 
« 1859, j'accompagnais à la Ville éternelle le 
« pieux prélat, qui n'était alors qu'un simple 






— 13 — 

« évèque des montagnes (évêque de Digne), et 
« qui ne soupçonnait pas que Dieu le placerait 
« un jour sur le siège éminent de Paris. Dans 
« une de nos pérégrinations quotidiennes où nous 
« aimions à suivre les routes indiquées par 
« l'église pour chercher les stations marquées 
« par elle dans ce saint temps, nous nous trou- 
« vions au milieu du Corso, dans cette voie large 
« et triomphale, qui est une des principales ar- 
« tères de Rome et où se concentre, en certains 
« moments, tout le mouvement, tout le bruit et 
«toute la vie de l'antique cité. En suivant les 
« flots d'une foule pieuse, dont même, au milieu 
« de ce tumulte, il était facile de démêler la phy- 
« sionomie grave et recueillie, nous pénétrâmes 
« dans une des plus belles églises qui, avec une 
«suite de nombreux palais, décorent le Corso ; 
« c'était, si je ne me trompe, l'église des Lom- 
« bards, dédiée à saint Charles Borromée, le 
« grand évèque de Milan; l'autel était resplen- 
« dissant de lumières ; de riches tapis couvraient 
« les parvis ; sous de magnifiques tentures, selon 
« l'usage de Rome, disparaissaient la pierre et le 
« marbre des colonnes et des nefs. On respirait 
« là, au milieu du plus grand silence, tous les 
« suaves parfums de la piété catholique; il s'en 
« exhalait une onction qui pénétrait les cœurs, 






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— 14 — 

« l'àme était comme doucement enivrée et trans- 
« portée. En sortant de ce sanctuaire magnifique, 
« de cet Eden où nous étions restés longtemps 
« recueillis dans de profondes méditations, le 
« saint prélat ne put plus tenir son âme, il me 
« rendit compte des impressions qu'il avait éprou- 
« vées, et que j'étais heureux de partager. Il me 
« dit que cette belle dévotion de l'Adoration per- 
« pétuelle, si touchante et si éminemment catholi- 
« que, était bien digne de Rome ; qu'en la consi- 
« dérant sous les deux aspects qu'elle présentait, 
« soit comme réparation pour les injures faites 
« à Dieu par les hommes, soit comme l'hommage 
« le plus direct rendu par l'homme à la Majesté 
« divine, ce devrait être la dévotion de notre 
« temps et de notre pays, qui a tant à réparer et 
« où se trouvent tant d'âmes fidèles et dévouées 
« à Dieu. En même temps, il' manifestait le désir 
« d'emprunter à Rome, s'il le pouvait un jour, 
« cette grande, suave et féconde dévotion du 
« Saint-Sacrement. 

« Ainsi naquit, sous mes yeux, la première 
« idée formée et manifestement bénie de Dieu, 
« qui devait produire, quelques années plus tard, 
« l'admirable institution qui a si bien pris à 
« Paris, et dont l'heureuse influence se fait sentir, 
« ce semble, dans la France entière. » 



— 15 






CHAPITRE III 

Nouvelle organisation de l'Œuvre. — Son affiliation à 

l'archiconfrérie de Rome. — Assemblées générales. 

Mgr de Tripoli, supérieur de l'Œuvre. 

1852 à 1855. 



Monsieur l'abbé de la Bouillerie, que le réta- 
blissement de sa santé avait rendu à ses fonctions, 
comprit que le moment était venu de donner à 
l'association une nouvelle organisation pour as- 
surer à tous ces éléments si promptement réunis 
la force et la durée. 

Il y avait à surmonter beaucoup de difficultés. 
Inconvénients du côté du petit nombre d'adora- 
teurs qu'il était nécessaire de ménager tout en 
cherchant à étendre l'Œuvre, inconvénients 
du côté des sanctuaires dont il fallait obtenir 
l'entrée sans exception , inconvénients du côté 
de la pratique matérielle de l'Œuvre pour l'adap- 
ter aux mœurs, aux usages et aux habitudes de 
la population de Paris. 

Avant tout, on devait se compter. Une assem- 
blée générale se tint à Notre-Dame des Victoires, 
le 3 novembre 1852. M. de la Bouillerie rappela 
















— 16 — 

le but de l'Œuvre, ses obligations et ses avanta- 
ges. Il signala l'ère nouvelle qui s'ouvrait et 
posa les principaux fondements de l'organisation 
actuelle. Un nouveau règlement fut adopté, ce 
fut un règlement de transition. Il y était dit que 
les associés avaient deux obligations : la pre- 
mière , de faire l'Adoration nocturne dans le 
sanctuaire spécial de l'Œuvre, qui était toujours 
Notre-Dame des Victoires ; la deuxième, de pro- 
pager l'Adoration nocturne dans les églises de 
Paris à l'époque des Quarante-Heures. L'Adora- 
tion au sanctuaire particulier, Notre-Dame des 
Victoires, était la pratique spéciale. La nuit men- 
suelle du mercredi au premier jeudi y était main- 
tenue. C'était là surtout qu'on devait se former 
à l'exacte observation de toutes les prescriptions 
du règlement. L'Adoration dans les paroisses 
était l'œuvre de zèle et le but définitif. 

Les conseils mensuels, qui ont été d'un si 
utile secours et qui étaient tombés en désuétude 
furent rétablis ; les membres qui devaient occu- 
per les charges nouvelles furent désignés. 

Dans cette nouvelle voie , l'association eut 
encore à lutter contre de nombreux obstacles ; 
jamais marche ne fut plus laborieuse. Mais l'as- 
sistance manifeste de Dieu, en se faisant sentir 
dans les plus petits détails, soutenait les coura- 



— 17 



ges et, à la fin de l'année 1853, plus de cent 
admissions de membres nouveaux avaient été 
prononcées et il n'y avait pas un sanctuaire 
qui n'eut adopté, ou au moins qui ne connût 
l'Œuvre. La sympathie remplaçait la défiance et 
l'Œuvre grandissait insensiblement sous la bé- 
nédiction et les encouragements de Sa Sainteté 
Pie IX qui, ayant appris dès 1850 son existence 
par Mlle de Mauroy, daigna l'agréger, par un 
rescrit du 12 septembre 1850, à celle qui existe 
à Rome dans le même but et qui est érigée en 
archiconfrérie de l'Adoration nocturne du Trés- 
Saint-Sacrement; cette agrégation lui assurait 
de nombreuses indulgences dont on trouvera plus 
loin la liste. Ce rescrit fut revêtu du visa de 
l'ordinaire le 12 octobre 1854. 

Cette même année, le R. P. Hermann, étant à 
Rome, avait entendu sortir de la bouche même 
de Sa Sainteté les paroles les plus encouragean- 
tes pour l'Adoration nocturne de Paris. Le Pape 
fit recommander à ses membres de travailler avec 
ardeur à l'entier accomplissement d'une Œuvre 
qu'il regardait comme la plus grande et la plus 
sainte. On sait qu'il porte un intérêt particulier 
à l'Œuvre de Rome dont il se fait souvent rendre 
compte. Plus tard Son Éminence le Cardinal 
Patrizzi, légat a lalere de Sa Sainteté, venu à 



18 — 






Paris en 185(3, daigna accorder deux audiences 
aux membres du conseil ; il témoigna le plus vif 
intérêt pour l'association qui lui rappelait l'archi- 
confrérie de Rome dont il avait été le directeur, 
et à deux reprises différentes, il voulut la bénir. 
Il voulut même ajouter une nouvelle faveur à 
celles qui lui avaient été accordées, en sollicitant 
pour elle l'autorisation de s'agréger avec les mê- 
mes avantages spirituels, les autres œuvres par- 
ticulières d'Adoration nocturne établies ou à 
établir dans le diocèse de Paris. Cette autorisa- 
tion fait l'objet d'un rescrit du 26 juillet 1856, 
visé par l'ordinaire, le 24 mars 1863. 

Jusqu'ici ces œuvres particulières sont au 
nombre de deux : l'une, établie clans la paroisse 
de Notre-Dame de la Croix à Ménilmontant, fut 
fondée en 1861, à la suite de la station de Carême 
prêchée par le R. P. Stanislas, des Frères Mi- 
neurs Capucins. La parole vive et pénétrante du 
saint religieux, aidée de la grâce, avait remué les 
cœurs et changé bien des volontés ; mais il fallait 
fixer le bien produit ; une association pieuse de- 
venait nécessaire. Le peuple a besoin de travailler 
pour vivre, il ne peut disposer de sa journée, 
mais sa nuit lui appartient. Quelques hommes 
d'élite obtinrent de M. le curé de la paroisse, 
l'inestimable, faveur de passer une nuit par mois 



— 19 



dans l'église pour adorer Notre-Seignedr. 

Depuis lors l'Œuvre de Ménilmontant a tou- 
jours rempli sa pieuse mission ; elle fut agrégée 
à l'Œuvre diocésaine au commencement de 1867. 

L'autre œuvre particulière d'Adoration noc- 
turne du diocèse de Paris est celle qui s'est for- 
mée en 1868 dans la chapelle du patronage de 
Notre-Dame de Grâce, rue de Lourmel, à Gre- 
nelle, où vingt à trente jeunes ouvriers passent 
chaque mois une nuit en adoration. 

Le diplôme d'agrégation de cette dernière Œu- 
vre à l'Œuvre diocésaine porte la date du 18 dé- 
cembre 1868. 

Ces Œuvres font le plus grand bien dans les 
deux paroisses où elles se pratiquent. Le clergé 
a remarqué que depuis leur fondation, l'église 
est plus fréquentée, les communions y sont plus 
nombreuses, il y a plus d'enfants qui se préparent 
à la première Communion et plus de malades 
qui reçoivent les derniers sacrements. 

L'archevêque de Paris, Mgr Sibour, avait 
aussi donné à l'Œuvre des preuves d'un intérêt 
particulier. Dans l'année 1853, il daigna recevoir 
deux fois en audience intime les membres du 
conseil auquel il adressa les paroles les plus 
bienveillantes. Il trouvait dans cette Œuvre le 
moyen de réaliser un de ses désirs les plus 



*■■■■■■ 









— 20 — 

chers : celui de rendre l'Adoration vraiment per- 
pétuelle, et s'il ne donna pas dès lors à l'asso- 
ciation un caractère officiel, c'est que, par un 
sentiment de sage prudence, il voulut qu'elle se 
développât et que les esprits s'habituassent à ces 
prières de nuit, dont l'affaiblissement de la foi 
avait fait perdre l'usage. Mais il ne laissa passer 
aucune occasion de la recommander à MM. les 
curés de Paris, notamment dans les assemblées 
générales du clergé. Lorsqu'en 1855, elle perdit 
son premier supérieur, nommé évêque de Car- 
cassonne dont elle avait reçu de si grandes 
preuves de dévouement et qui avait tant fait pour 
sa fondation et pour son organisation, il la confia 
à un autre lui-même, à Mgr l'évêque de Tripoli. 
En même temps il lui donnait M. l'abbé Rivié 
pour directeur ecclésiastique. Ses vénérables 
successeurs ont tous imité son exemple en don- 
nant à l'association les marques les plus cons- 
tantes de leur sympathie et de leur protection. 
C'est de cette époque que datent les assemblées 
générales périodiques des membres associés dans 
lesquelles il est d'usage de lire des rapports où 
le président expose la situation de l'Œuvre, les 
faits édifiants qui se sont produits, les résultats 
obtenus et donne les conseils propres à assurer 
la marche régulière de l'association, en même 



— 21 — 

temps que les ministres de Dieu y viennent dis- 
tribuer la parole de vérité et de vie pour encou- 
rager les efforts et pour réchauffer le zélé et la 
piété. La première se tint dans la chapelle des 
catéchismes de Saint-Roch pour recevoir les 
adieux de Mgr de la Bouillerie, nommé évêque 
de Carcassonne. 

Depuis, elles ont toujours eu lieu régulière- 
ment, et, à partir de la Fête-Dieu, en 1858, 
elles se sont toujours tenues dans l'église Saint- 
Thomas d'Aquin. 

Les nonces du Pape, les archevêques de 
Paris, ies évèques de province de passage à 
Paris, les évèques missionnaires, les prédicateurs 
illustres ont toujours mis le plus grand empres- 
sement à témoigner de leurs sentiments pour 
l'œuvre de l'Adoration nocturne en acceptant de 
présider ces réunions ou d'y prendre la parole. 

Le tableau suivant fait connaître ces différen- 
tes assemblées dans l'ordre de leur date, en indi- 
quant les noms des présidents et des prédicateurs 
qui y ont fait entendre la parole de Dieu. 



to 



N° d'ordre 
des 

réunions 



10" 
11* 
12* 
13* 
14. 

15» 

16* 



17* 



DATE DES 
RÉUNIONS 



22 janvier 18G0 
10 juin 1860 
30 décemb. 1860 
2 juin 1861 
29 décemb. 1861 
22 juin 1862 
28 décemb. 1862 



St-Thomas d'Aquin 



LIEUX DES RÉUNIONS 



PRÉSIDENTS 



7 juin 1863 



Mgr Amanton, évêque 
d'Acadiopolis 

Mgr Serra, évêque de 
l'Australie occident. 

Mgr do Charbonel, anc. 
évêque de Toronto 

M. l'abbé Le Rebours, 
vicaire-général 

Mgr Moulv, évêque de 
Pékin ' 

M. l'abbé Le Rebours, 
vicaire-général 

M. _ l'abbe Alix, (La 
séance devaitêtrepré- 
sidéo par S. Em. le 
Cardinal Morlot. lien 
fut empêché par la 
maladie à laquelle il 
succomba le lende- 
main.; 

Mgr Chigi, nonce apost. 



INSTRUCTIONS 
PAR 



Mgr Amanton 
M. l'abbé Alix 
Mgr de Charbonnel 
M. l'abbé Alix 
Mgr Mouly 
R. P. Eymard 
M. l'abbé Alix 






R. P. Hermann 



N" d'ordre 


DATE 






INSTRUCTIONS 


des 




LIEUX DES REUNIONS 


PRESIDENTS 




réunions 


DES REUNIONS 






PAR 


18" 


27 dôcemb. 1863 


St-Thomas d'Aquin 


Mgr de Ségur 


Mgr do Ségur 


19« 


29 mai 1864 


» 


M. l'abbé Le Rebours 


R. P. Le Royer 


20» 


15 janvier 1865 


» 


Mgr Darboy, archevê- 
que de Paris 


Mgr Darboy 


21» 


18 juin 1865 


» 


Mgr Massaïa, évoque de 
Cassia, vie. apostol. 
des Gallas 


Mgr Massaïa 


22» 


14 janvier 1866 


> 


Mgr Theurel, évêque 

d'Acanthe 
Mgr de Ségur 


Mgr Theurel 


23« 


3 juin 1866 


» 


Mgr de Ségur 


24« 


20 janvier 1867 


» 


MgrChigi, nonce apos. 


Mgr Chigi 


25» 


23 juin 1867 


» 


Mgr Buquet, évêque de 
Parium 


Mgr Buquet 


26» 


19 janvier 1868 


> 


Mgr Grandin, év. de Sa- 
tala, vie. apostol. de 
Makensie 


Mgr Grandin 


27« 


14 juin 1868 


» 


Mgr Bauër, protono- 
taire apos. anc. mem- 
bre actif de l'Œuvre 


Mgr Bauër 


28« 


24 janvier 1869 


» 


R. P. Hyacinthe, des 
Carmes déchaussés 


R. P. Hyacinthe 



I 



»iA,Sj , 



N° d'ordre 

des 
réunions 


DATE 
DES RÉUNIONS 

7 juin 1874 


LIEUX DES RÉUNIONS 


PRÉSIDENTS 


INSTRUCTIONS 
PAR 


37= 


St-Thomas d'Aquin 


MgrLo Courtier, arche- 


Mgr Le Courtier 


38" 


17 janvier 1875 


» 


vêque de Sébasto 
R. P. de Damas de la 
Compagnie de Jésus 


R. P. de Damas 


39' 


30 mai 1875 


» 


M. l'abbé Legrand,curé 
de St-Germ.-l'Aux '', 


R. P. Ratisbonne 


40" 


16 janvier 1876 


» 


vic.-général de Paris 
Mgr Richard, archevê- 
que de Larisse, coad. 
de S. Em. le Cardinal 


Mgr Richard 


41° 


18 juin 1876 


» 


archevêque de Paris 

Mgr Petitjean, vicaire 


R. P. Tesnière 


42° 


21 janvier 1877 


» 


apostolique du Japon 
R. P. Audibert,sup. des 
Prêtres du T. -S. -Sa- 
crement à Paris 


R. P. Audibert 


43° 


3 juin 1877 


» 


R.P. Honriot, prieur des 
Dominicains à Paris 


R. P. Henriot 



OS 



27 



CHAPITRE IV 

Matériel de l'Œuvre. — Son importance. 
1853. 

Le règlement mentionne deux fois, au para- 
graphe intitulé : Ordre des exercices et disci- 
pline, les lits de repos à l'usage des membres 
de l'Œuvre. Ces lits sont de simples matelas au 
nombre de quatorze, qui sont transportés aux 
frais de l'association de sanctuaire en sanctuaire 
et qui servent au repos des adorateurs lorsque 
ceux-ci ne sont pas en prière devant le Trés- 
Saint-Sacrement (1). L'organisation et l'usage 
de ce matériel ont exercé une sérieuse influence 
sur l'établissement même de l'Œuvre. Le con- 
frère qui en a le soin et que l'on désigne sous le 
nom d'Hôtelier a donc un des rôles les plus utiles 
à remplir dans l'association. Pour donner une 



(1) Il y a des hommes pieux qui, ne connaissant qu'im- 
parfaitement l'œuvre de l'Adoration nocturne et s'ima- 
ginant que les adorateurs sont obligés de passer toute 
la nuit en prière, refusent pour ce motif d'en faire partie. 
Chaque adorateur ne passe qu'une heure devant le Très- 
Saint-Sacrement, le règlement l'oblige à être, le reste du 
temps, couché sur son lit de repos. 

2"* 



— 28 — 




























idée exacte de l'importance de ses fonctions, 
nous citerons un passage, ayant trait au matériel, 
de la notice sur la vie et la mort de Jean-Antoine 
Ricoux, premier hôtelier de l'œuvre de l'Adora- 
tion nocturne du Très-Saint-Sacrement, publiée 
en 1867. 

En faisant connaître ce côté particulier de 
l'Œuvre, notre citation ne pourra manquer d'é- 
difier également nos lecteurs qui seront touchés 
du dévouement et du grand amour pour le Saint- 
Sacrement manifesté dans ce rôle modeste, par 
le pieux et regretté Ricoux. 

« En 1853, dit la notice, Ricoux accepta la 
« charge de gardien du matériel. A cette époque 
« d'organisation, il comprit bien vite que le 
« service de ce matériel exercerait une influence 
« notable sur le développement de l'Œuvre. Le 
« personnel des adorateurs nocturnes, composé 
« d'hommes appartenant à tous les rangs de la 
« société, et comprenant un grand nombre d'em- 
« ployés et d'ouvriers qui doivent leur existence 
« à leur travail de chaque jour, et pour lequel ils 
«doivent ménager leurs forces, avait absolu- 
« ment besoin de trouver dans ce service une 
«'régularité pour ainsi dire infaillible, et des 
« soins tout particuliers. Jusque-là le transport 
« des matelas s'était fait par un entrepreneur de 



- 29 — 

« déménagements ; c'était très-suffisant quand 
«l'Œuvre était bornée à un seul sanctuaire, 
« mais cela cessait de l'être avec l'accroissement 
« rapide que prenait l'Adoration nocturne. 

« Il y avait donc dans l'organisation de ce ser- 
« vice toute une mission particulière, on pourrait 
« dire presque providentielle, qu'il n'était pas 
« donné à tout le monde de comprendre. Dieu 
« seul pouvait inspirer ce qu'il fallait de patience, 

< de courage, d'humilité, de foi pour la remplir. 

< Ricoux entreprit avec autant de joie que de 
« résolution cette sainte mission qui devait être 
« pour lui la source de si grands mérites aux 
« yeux de Dieu et aux yeux des hommes. Il 
« commença sa pénible mais fructueuse carrière 
« le 30 janvier 1853, en portant les matelas de 
« l'Œuvre à Saint-Etienne du Mont. Depuis ce 
« jour, son courage et sa persévérance n'ont pas 
« failli un seul instant, jusqu'au moment où la 
« mort est venue mettre devant lui une barrière 
« qu'il n'est donné à nul homme d'écarter. Pen- 
« dant treize ans, les adorateurs ont régulière- 
« ment et exactement trouvé, chaque soir, au 
« lieu du pieux rendez-vous, les quatorze mate- 
« las de l'Œuvre, avec lesquels l'existence du bon 
« Ricoux paraissait identifiée. Ni le vent, ni la 
« pluie, ni la neige, ni le verglas, ni les ri- 



— 30 — 



« gueurs de l'hiver, ni les ardeurs de l'été, ni les 
« distances n'arrêtaient ce digne homme, que 
« les soldats, membres de l'Œuvre, appelaient, 
« dans leur langage énergique et pittoresque, 
« le saint cheval du bon Dieu. Mais dans ces 
« treize années que de fatigues, que de sueurs, 
« que de peines et de privations. Il racontait 
« naïvement que lorsque, par les grosses cha- 
« leurs, il passait, attelé à sa charette et harassé 
« de fatigue, devant un cabaret avec la tentation 
« de se désaltérer, il .s'arrêtait un instant, pre- 
« nait une pièce de monnaie dans sa poche droite, 
« la mettait dans sa poche gauche en disant: «A 
« votre santé, ô mon Dieu ! > et il reprenait sa 
« marche. Ces pièces, fruits de sa mortification, 
« formaient un petitpécule qu'il distribuait ensuite 
« aux pauvres. 

« Souvent, après une journée employée tout 
« entière au service de Dieu, dans les œuvres de 
« charité, le soir arrivant, il fallait malgré la 
« lassitude, traîner la charette de l'Œuvre à l'au- 
tre extrémité de Paris. Ricoux n'hésitait pas: 
« il élevait son cœur vers Dieu, faisait une petite 
« prière qui réconfortait son àme, et se mettait 
« en route. Le soleil ardent de juillet déclinait à 
« l'horizon, mais la chaleur qu'il laissait après 
« lui dans les rues de cette grande ville, accrue 



— 31 



« de toute celle qui jaillissait du sol brûlant, 
« rendait l'atmosphère horriblement lourde et 
« écrasante. Ricoux, à force de foi et de prières 
«poursuivait péniblement sa marche; Dieu,disait- 
« il, l'aidait dans ces moments-là; mais enfin, les 
« forces venant à manquer, il fallait s'arrêter. 
« La tentation de laisser là le fardeau se présen- 
« tait ; mais l'Œuvre pouvait souffrir de l'ab- 
« sence des matelas, les confrères pouvaient se 
« laisser décourager ; d'ailleurs, il fallait bien 
« endurer quelque chose pour Celui qui a tant 
« souffert pour nous. Ces pensées ranimaient son 
« courage, et se souvenant que notre divin Maî- 
« tre, portant sa lourde croix, avait accepté le 
« secours de Simon le Cyrénéen, il recourait à 
« la bonne volonté des passants et, d'étapes en 
« étapes, il arrivait enfin au sanctuaire, exténué, 
< mourant de chaleur et de soif, mais triomphant. 
« Combien de fois ne l'a-t-on pas vu, pendant 
« des pluies torrentielles, retardé par les diffi— 
« cultes de la route, arrivant mouillé et harrassé, 
« et, dans un complet oubli de lui-même, don- 
« nant immédiatement ses soins à l'Œuvre, sans 
« même prendre le temps de se reposer, afin que 
« la régularité de la nuit ne souffrit pas de son 
« retard. C'est que l'Adoration nocturne était la 
« passion de cette âme d'élite. Il y avait pour 



— 32 — 

« Ricoux, dans ces nuits, un attrait irrésistible, 
« qui lui faisait surmonter tous les obstacles ; il 
« est vrai que son concours y était si utile, qu'il 
« pouvait dire avec vérité : « Il faut bien que j'y 
« sois, sans quoi la nuit ne se passerait pas bien. » 
« C'est par cette volonté énergique, par ce vio- 
« lent amour de l'Eucharistie que Ricoux suffit 
« toujours à toutes les obligations que lui impo- 
« saientle développement de l'Œuvre, etladistri- 
« bution à domicile de toutes les lettres de con 
« vocation. Loin de regretter sapeine, il bénissait 
« Dieu de voir grandir le nombre des sanctuaires 
« acquis à l'Adoration nocturne, et sa joie ne 
« connut plus de bornes quand il apprit qu'il n'y 
« aurait plus d'interruption dans les saintes veil- 
« les. Par ses bons rapports avec le clergé et le 
< personnel des sacristies, il aplanissait toutes 
« les difficultés de détail; sa bonhomie, sa tendre 
« piété, son humilité profonde lui avait gagné 
« tous les cœurs; il n'y avait pas une église, pas 
c une communauté où il ne fut vénéré. Nul de 
« ceux qui l'ont connu ne saurait oublier cet 
« attendrissement avec lequel il parlait de Dieu 
« et des choses de Dieu. Ce n'étaient pas de longs 
« discours, mais un mot, une simple parole de foi : 
« le soir, au sanctuaire, on le voyait souvent, pre 
« nant dans ses mains rudes, mais riches de bon- 






— 33 — 

« nés œuvres, les mains de nos confrères, et le 

« regard humide de larmes, les remercier avec 

« émotion d'être venus rendre hommage au Dieu 

« de l'Eucharistie et se réjouir à la pensée du 

« bonheur de l'adorer ensemble. L'amour de Dieu 

« était le but unique de sa vie ; aussi rien ne lui 

« coûtait pour le faire naître dans les âmes : il 

« avait le don de l'inspirer à tous, riches et pau- 

« vres. En contact, dans les différentes œuvres 

« dont il faisait partie, et notamment dans l'œu- 

« vre de l'Adoration nocturne, avec des hommes 

« de la plus haute et de la plus élégante société, 

« l'ascendant de sa vertu était tel, qu'il se trou- 

« vait au milieu d'eux comme leur égal, et même 

« avec une certaine supériorité, si on en juge par 

« les témoignages d'affectueuse déférence dont 

« il était l'objet de leur part. » 

Ricoux a eu plusieurs successeurs qui se sont 
inspirés de son admirable dévouement pour l'Œu- 
vre. Le service du matériel n'a fait que grandir 
en importance et aujourd'hui, les progrés de 
l'association l'ont rendu plus nécessaire que 
jamais. 



34 — 



CHAPITRE V 



ï * 



m 






Nouveaux progrès de l'Œuvre. — Auxiliaires. 

Livres de l'office du Très-Saint-Sacrement. — Concours 

des Conférences de Saint-Vincent de Paul. 

M. l'abbé Le Rebours, supérieur de l'Œuvre. 

1855 à 1860. 



Mgr^de la Bouillerie laissait donc cette insti- 
tution qui lui était chère entre toutes dans une 
situation satisfaisante et établie sur des bases 
solides après plus de deux années d'essais, dans 
sa nouvelle voie. Cependant il restait encore 
beaucoup à faire. Un des premiers soins du 
nouveau Supérieur fut de modifier le règlement 
qui ne répondait plus aux développements de 
l'Œuvre. 

Tous les directeurs laïques furent consultés 
sur les changements qu'il était utile d'introduire, 
et c'est d'après leurs observations qu'il fut 
rédigé. Il porte avec la signature du digne 
évêque, |la date du 17 novembre 1855. Il suffit 
de le comparer>vec le précédent pour juger des 
progrès réalisés. Le nouveau but de l'associa- 
tion y est expressément] indiqué : « Il consiste 
* à procurer à Notre-Seigneur des adorateurs 



— 35 — 

« pendant la nuit dans toutes les églises et cha- 
« pelles du diocèse de Paris où a lieu l'exposi- 
« tion des Quarante-Heures. » Une nouvelle 
catégorie d'adorateurs, désignés sous le nom 
d'auxiliaires, y est mentionnée ; elle comprend 
les fidèles qui s'unissent aux membres actifs de 
l'Œuvre, pour faire l'Adoration nocturne dans 
leur paroisse aux époques de l'Adoration perpé- 
tuelle. Un article spécial énonce en faveur des 
associés défunts des dispositions particulières 
qui n'étaient d'ailleurs que la reproduction de 
celles qu'avait déjà adoptées M. de la Bouillerie. 
Une autre amélioration importante suivit de 
près: ce fut la réimpression de l'office du Très- 
Saint-Sacrement que l'on récite pendant les 
nuits d'Adoration. On se servait, depuis l'origine 
de l'Œuvre, de livres à l'usage de l'archiconfrérie 
de Rome, d'où on les avait apportés. Les expli- 
cations, les rubriques étaient en italien, et bon 
nombre de nos confrères ne les comprenaient 
pas. Il en résultait souvent des hésitations dans 
la récitation. L'Œuvre résolut d'avoir des livres 
à son usage. Plus spécialement destinés aux 
associations pour l'Adoration nocturne, ils furent 
disposés de manière à faciliter la récitation de 
l'office, même aux membres les plus étrangers 
à cette pratique. 

3 



- 36 — 



Une traduction française soigneusement faite 
par un des associés, M. Alexandre Guillemin, 
sous la surveillance de plusieurs directeurs de 
Saint-Sulpice, et approuvée par l'autorité diocé- 
saine, fut placée] en regard du texte, afin que le 
sens de ces belles prières put être saisi de tous. 

Il fut d'abord question de ne donner que les 
Matines et les Laudes, les seules parties de l'of- 
fice qui se récitent la nuit. Mais le Conseil se 
rangea à l'avis du directeur ecclésiastique, 
M. l'abbé Rivié, qui proposait de publier l'office 
entier, pensant qu'il était plus utile pour la 
dévotion au Saint-Sacrement de présenter l'of- 
fice complet aux personnes pieuses. Ces livres 
arriveraient ainsi en un plus grand nombre de 
mains et seraient un moyen de propager parmi 
les fidèles la louable habitude de réciter cet 
office. Le choix'de gros caractères très-lisibles, 
l'indication en français des rubriques, repro- 
duction fidèle des rubriques romaines, la tra- 
duction française du texte latin, donnaient à ce 
livre unjavantage incontestable sur ceux qu'on 
avait fait venir de Rome, aussi fut-il accueilli 
avec faveur. 

Il fut mis en usage pour la première fois le 
dimanche de la Fête-Dieu, 25 mai 1856. Une 
première édition grand format, sortie des presses 



- 37 — 

de la maison Adrien Le Clère fut tirée à trois 
cents exemplaires. Il fallut en tirer une seconde, 
en 1865, à mille exemplaires. En 18G3, il en 
avait été donné une édition portative de format 
in-18. Ces faits sont la meilleure justification de 
la mesure prise par le Conseil de publier l'office 
complet (1). 

Ces améliorations portèrent leurs fruits ; 
l'Œuvre avançait toujours, lentement mais d'un 
pas assuré. Elle était de plus en plus connue. 

Tous les ans, le conférencier de Notre-Dame 
la recommandait pendant la retraite des hommes 
au nombreux auditoire qui venait se nourrir de 
sa parole. Le Président général de la société de 
Saint-Vincent de Paul, essayait de la faire entrer 
dans les habitudes des conférences de Paris. 

Un appel fut adressé en sa faveur par le 
R. P. Manuel, de l'ordre des Frères-Prêcheurs, 
dans la retraite qu'il donna aux conférences, en 
1860, et depuis, cet appel a été souvent renou- 
velé avec succès. 

Du reste nous devons dire à la louange de la 
société de Saint-Vincent de Paul, que l'Œuvre y 



(1) Office du Saint-Sacrement,-! l'usage des œuvres de 
l'Adoration nocturne. — Edit. in-8", chez Poussielguo 
frères : rue Cassette, 27, à Paris.— La même édit. in-18, 



même Librairie. 



jm 



38 — 



trouve une source de plus en plus abondante de 
membres actifs, auxiliaires et bienfaiteurs, et un 
concours tous les ans plus effectif. 

La publicité que le Bulletin qu'elle fait paraî- 
tre tous les mois, a souvent donnée aux comptes- 
rendus de l'Œuvre a puissamment contribué à la 
faire connaître et à la propager en province et à 
l'étranger. Entre autres marques de sympathie 
qui lui sont venues à la suite de ces publications 
nous mentionnerons la proposition suivante faite 
par les membres de la conférence de Bagnères 
de Luchon après la lecture du rapport du 8 
décembre 1872, présenté à l'assemblée générale 
des conférences de Paris : 

« Le meilleur moyen de généraliser cette 
« Œuvre excellente et de l'étendre à toutes les 
« conférences de France, disent-ils, serait d'en- 
« gager chacune d'elles à y consacrer la nuit du 
« jour déjà choisi pour la célébration de la Messe 
« à l'intention de l'Église, du Saint-Père, de la 
« France et de notre Société. Ce nouveau témoi- 
« nage de foi et d'amour, ajouté aux mérites du 
« Saint-Sacrifice et se perpétuant dans toute 
« l'étendue de notre malheureux pays, ne pour- 
« rait manquer d'être agréé par le cœur de Dieu 
« et de le disposer à nous être favorable. » 

La messe à laquelle il est fait allusion est une 



— 39 



heureuse inspiration d'une conférence dans le 
but d'obtenir comme une continuelle oblation 
du Saint-Sacrifice aux quatre intentions indi- 
quées. Toutes les conférences font dire une 
Messe au jour de leur choix ; et, grâce à leur 
multiplicité et à leur zèle, il n'y a pas de jours 
où la Victime d'expiation ne soit offerte par 
leurs soins. 

De son côté,le clergé témoignait à l'Œuvre une 
sympathie de plus en plus marquée. Dans quel- 
ques paroisses , dont le nombre est devenu 
chaque année, plus considérable, un prêtre était 
désigné pour assister à tous les exercices de la 
nuit. La sainte fonction de l'Adoration nocturne 
est vraiment complète, alors ; d'un coté Dieu 
sur son trône de miséricorde, de l'autre l'ado- 
rateur suppliant, et au milieu le prêtre, ce trait 
d'union entre le Ciel et la terre, priant pour tous 
et augmentant par sa seule présence le mérite 
des adorations. Cette présence du prêtre aux 
exercices de l'Adoration nocturne est obligatoire 
à Rome; à Paris elle est facultative, mais les 
arcbevèques de Paris ont exprimé plusieurs fois 
le désir qu'elle put se généraliser. A l'imitation 
du clergé, les fidèles s'habituaient à témoigner 
de leur confiance dans l'Œuvre en lui recomman- 



dant leurs plus cher 




les œuvres de 



— 40 




charité et d'action, s'efforçant de conserver l'es- 
prit de foi et de dévouement qui avait présidé à 
leur fondation, s'unissaient à elle par le lien de 
la prière et chaque nuit plusieurs de ces oeuvres 
étaient l'objet de recommandations particulières. 
Cependant la santé de Mgr l'évèque de Tripoli, 
profondément altérée, l'obligeait à un repos 
absolu. Tout en continuant à porter à l'Œuvre le 
même intérêt, il dût en abandonner, en 1860, la 
direction à M. l'abbé Le Rebours, vicaire général 
du diocèse de Paris. 

L'Œuvre était bien agrandie mais non encore 
complète. Il était réservé à M. Le Rebours de 
faire un dernier effort pour arriver à son couron- 
nement. Il est permis et assurément très-doux 
pour un cœur catholique de considérer les der- 
niers résultats obtenus comme un des fruits de 
la bénédiction spéciale que le Saint-Père donna 
à l'Œuvre, en 1860 ; l'année n'était pas terminée 
que les effets de cette bénédiction se faisaient 
sentir ; l'Œuvre entrait dans la phase nouvelle 
qui devait la conduire à son entier complément. 



41 



CHAPITRE VI 



L'Adoration perpétuelle est complétée. — Adoration 
nocturne paroissiale. 

1860 — 1865—1872 



Jusqu'en 1860 il n'y avait eu que deux nuits 
d'Adoration dans chaque sanctuaire. Les exer- 
cices des Quarante-Heures commençaient dans 
les paroisses le matin du premier jour pour se 
terminer le soir du troisième jour, en sorte que 
la nuit qui séparait deux sanctuaires consécutifs 
était sans exposition, et par conséquent sans 
adoration. Cette lacune comblée, l'Adoration 
devenait exactement perpétuelle. M. l'abbé Le 
Rebours obtint de Son Em. le cardinal Morlot, 
pour ceux de MM. les curés qui le désireraient, 
l'autorisation de faire l'exposition du Très-Saint- 
Sacrement le soir de la veille du jour indiqué 
sur la liste, et de la faire suivre de l'Adoration 
nocturne. Cette heureuse innovation commença 
encore à Notre-Dame des Victoires, le 29 décem- 
bre 1860 ; elle se propagea rapidement et MM. les 
curés du diocèse, si zélés pour la gloire de Dieu, 
s'empressèrent de profiter de l'autorisation de 







— 42 



Son Eminence. Au bout d'un an, sur 120 sanc- 
tuaires qui avaient concouru à l'Adoration per- 
pétuelle, 94 avaient fait les trois nuits d'Ado- 
ration, et sur les 26 autres 13 avaient fait deux 
nuits. Nonobstant ces lacunes, la perpétuité de 
l'Adoration fut réalisée néanmoins, grâce à ce 
que l'église de Notre-Dame des Victoires était 
toujours ouverte aux membres de l'Œuvre, et 
grâce aussi au zélé pieux des Dames de l'Assom- 
ption qui avaient charitablement proposé de faire 
personnellement l'Adoration dans leur chapelle 
lorsque les membres de l'Œuvre ne pourraient 
pas se réunir à Notre-Dame des Victoires. En 
1862, 105 sanctuaires firent les trois nuits. De 
là à l'entier accomplissement de l'Œuvre il n'y 
avait qu'un pas, il fut franchi dans le courant de 
l'année 1863. 

Son Em. le cardinal Morlot prit une mesure 
générale qui assura le succès définitif. Il avait 
pensé que l'œuvre de l'Adoration nocturne s'éta- 
blirait d'autant plus solidement qu'elle serait 
plus librement acceptée, et il ne voulut faire 
intervenir son autorité que pour sanctionner ce 
que le temps et la piété du clergé de ce diocèse 
avaient si heureusement réalisé. La liste des 
sanctuaires où devait se faire l'Adoration perpé- 
tuelle dans l'année ecclésiastique 1862-1863 



— 43 — 

portait deux avis essentiels : le premier établis- 
sait que l'Adoration devait être perpétuelle et 
recommandait à MM. les curés et chapelains de 
la faire sans interruption la nuit comme le jour; 
il mettait l'Œuvre à leur disposition : le second 
prescrivait de faire l'exposition dès le soir de la 
veille du premier jour indiqué sur la liste offi- 
cielle ; et afin que ces prescriptions ne rencon- 
trassent plus d'impossibilités, la liste ne men- 
tionnait que des sanctuaires qui pouvaient les 
remplir. Cependant le couronnement complet du 
pieux édifice de l'exposition et Adoration per- 
pétuelle du Très-Saint-Sacrement, si laborieu- 
sement élevé, se fit attendre jusqu'en 1864. Les 
exercices des Quarante-IIeures commençaient à 
Notre-Dame avec l'année ecclésiastique, le pre- 
mier dimanche de l'Avent au matin. Mgr Darboy 
décida qu'à partir de l'année 1864-1865, ces 
exercices seraient précédés par l'Adoration noc- 
turne. Cette décision qui comblait les vœux de 
l'Œuvre, mit le sceau à la perpétuité de l'Adora- 
tion et de la prière par les fidèles dans le diocèse 
de Paris. 

Une nouvelle phase s'ouvrait pour l'Œuvre, 
sous l'épiscopat de Son Ém. le cardinal Guibert. 

Les épreuves par lesquelles Paris avait passé 
pendant la guerre et l'insurrection de la Com- 

3* 



— 44 






mune devaient la faire entrer dans une voie où 
sa transformation en Œuvre paroissiale réalisait 
un des désirs les plus ardents du Conseil, 
exprimé déjà en 1860. 

Ce désir n'avait reçu jusqu'alors qu'un bien 
faible commencement d'exécution ; ainsi Saint- 
Thomas d'Aquin, la chapelle Saint-Denis, Sainte- 
Marguerite, Saint-Jean-Baptiste de la Villette 
avaient fait leurs deux ou trois nuits par leurs 
seuls éléments paroissiaux. Mais cet exemple 
ne s'était pas étendu. Il fallait les terribles 
épreuves de 1870-1871 pour déterminer un mou- 
vement général. 

Au milieu des difficultés et souvent des res- 
ponsabilités que les événements venaient appor- 
ter à l'accomplissement de la mission de l'Œu- 
vre, en présence de la nécessité si bien comprise 
alors, sous le coup des châtiments, de l'expiation 
et de la réparation, on vit MM. les curés et les 
fidèles rivaliser de zèle pour satisfaire aux 
besoins de l'Adoration nocturne. Le succès de 
ce premier effort donna aux paroisses la mesure 
de ce qu'elles pouvaient faire pour concourir 
par elles-mêmes à cette pieuse pratique et les 
encourager à persévérer dans un mouvement 
auquel il était difficile de ne pas reconnaître un 
caractère providentiel de miséricorde, tant il 



— 45 — 



venait bien à point à un moment où l'Œuvre 
commençait à péricliter par suite des vides 
nombreux que les calamités publiques avaient 
faits dans les rangs de ses membres dont un 
grand nombre s'étaient éloignés de Paris défini- 
tivement et d'autres étaient morts. 

La crise passée, le besoin de miséricorde et 
de pardon demeurait toujours sinon aussi pres- 
sant du moins aussi réel, le sentiment de ce 
besoin gagnait de proche en proche et la parti- 
cipation des paroissiens à l'Adoration nocturne 
se continuait en s'étendant. C'est ainsi que 
l'élément paroissial qui, à vrai dire, est l'élément 
normal de l'Œuvre a pris dans l'Adoration noc- 
turne la place qui lui appartenait à si juste titre. 

L'Adoration perpétuelle n'est-elle pas une 
institution diocésaine à laquelle chaque paroisse 
doit contribuer pour sa part ? C'est une Œuvre 
qui doit se faire non-seulement dans le diocèse 
mais par le diocèse ; c'est à chaque paroisse de 
représenter à son tour, la nuit comme le jour, la 
grande famille chrétienne au pied du Très- 
Saint-Sacrement. L'association n'en conservera 
pas moins son rôle important ; seulement son 
action s'exercera d'une manière différente. Au 
lieu de fournir seule à toutes les nuits, elle ne 
leur fournira pour ainsi dire que les cadres, 



— 46 — 



mais elle sera toujours chargée de les préparer, 
d'en organiser les éléments, d'en surveiller les 
exercices et de maintenir par cette vigilante 
direction l'ordre, la régularité et par conséquent 
la vigueur dans l'Adoration nocturne. De plus elle 
viendra en aide aux paroisses et aux sanctuaires 
qui ne pourraient fournir un nombre suffisant 
d'adorateurs. Ce rôle exigera assez d'activité et 
de dévouement pour stimuler le zèle de ses 
membres, qu'ils auront de fréquentes occasions 
d'exercer soit parleur partic ; pation personnelle 
aux pieuses veilles, soit par le concours qu'ils 
seront appelés à donner à MM. les curés pour 
l'organisation des nuits paroissiales. 

« Quand viendra, disait dans un de ses rap- 
« ports le président de l'Œuvre, la solennité de 
« l'Adoration perpétuelle, recherchez les parois- 
« siens pieux que vous voyez ordinairement à 
« l'église ou que vous rencontrez dans vos 
« œuvres de zèle ou de charité, engagez-les à 
« prendre part à l'Adoration nocturne, organisez 
« ainsi, d'accord avec le clergé, une, deux et 
« mieux encore les trois nuits. Si vous voulez 
« entreprendre cette mission, vous aurez fait 
« pour l'Église et pour la France, plus que vous 
« ne pouvez le penser et vous aurez contribué à 
« asseoir l'Œuvre sur cette base paroissiale si 



-1/ — 






« normale, si solide, et à la mettre ainsi à l'abri 
« de bien des vicissitudes. La restauration morale 
« de notre société ne peut se faire que par le 
« concours et le développement des œuvres 
« catholiques. C'est un labeur difficile et qui 
« exige un dévouement absolu, voilà pourquoi 
« il ne peut être poursuivi que par des hommes 
« ayant au cœur la foi et l'amour de JÉsus- 
« Christ. » 

Du reste, les résultats obtenus dans cette voie 
nouvelle pendant ces dernières années montrent 
les progrès faits par l'Adoration nocturne parois- 
siale et permettent de prévoir ceux que réserve 
l'avenir et de penser que désormais, la forme 
paroissiale si désirable par les avantages de sta- 
bilité et de durée qu'elle présente, se générali- 
sera et finira par rester une des plus solides 
traditions des paroisses du diocèse de Paris. 
Rien ne peut donner une meilleure idée de ce 
mouvement qui entraine les paroissiens vers 
l'Adoration nocturne que les extraits suivants 
des rapports sur l'Œuvre pour les années 1873. 
1874, 1875 et 1876. 

« Le Très-Saint-Sacrement n'étant pas exposé 
« pendant les derniers j ours de la Semaine-Sainte . 
« dit le rapport pour 1873, l'Adoration perpé- 
« tuelle se fait, dans le diocèse de Paris, dans 



48 — 



« 120 sanctuaires, dont 20 environ appartiennent 
■i à la banlieue. 360 nuits sont ainsi passées dans 
■< la prière et l'expiation. Sur ces 360 nuits, 
* l'association n'a eu à faire seule que 201 nuits. 
i L'élément paroissial, sous ses formes variées 
t de conférences de Saint-Vincent de Paul, 
t d'oeuvres de patronage et de jeunesse, de con- 
■ fréries diverses a fourni à 80 nuits. Il n'est pas 
e sans intérêt de décomposer ce chiffre ; 3 nuits 
: ont été faites par le clergé seul des paroisses 
où avait lieu l'Adoration perpétuelle ; 41 nuits 
: ont été faites par les conférences de Saint- 
Vincent de Paul; 10 par des œuvres de patro- 
nage. C'est la première fois que ces œuvres 
qui préparent la régénération chrétienne de la 
classe ouvrière nous donnent un concours 
aussi marqué. Rien n'est plus touchant et 
n'inspire une plus forte espérance pour l'ave- 
nir, que la piété de ces jeunes apprentis et 
ouvriers, façonnés déjà à la lutte par les 
assauts de l'usine ou de l'atelier et qui viennent 
chercher dans ces nuits de nouvelles grâces 
pour de nouveaux combats. Les autres élé- 
ments paroissiaux ont fourni à 26 nuits. Il en 
est quelques-uns que nous devons désigner, 
les cercles de jeunesse, par exemple, et aussi 
la garnison de Vincennes. Non-seulement les 



— 49 — 

« officiers de cette garnison ont tenu à participer 
« à l'Adoration nocturne de leur paroisse, mais 
« leur zèle les a portés à aller ailleurs et, à Saint- 
« Mandé, une nuit a été faite exclusivement par 
« eux. Presque toutes les armes et tous les gra- 
« des y étaient représentés, infanterie de ligne, 
« chasseurs à pied, dragons, artillerie. Jamais, 
« depuis 25 ans que l'Œuvre existe, pareil spec- 
« tacle d'un groupe d'officiers français faisant 
« tout le service de l'Adoration pendant la nuit 
« entière, ne s'était vu. Le directeur laïque, que 
« ces messieurs avaient réclamé pour les guider 
« dans l'observation du règlement, aurait pu se 
« croire un petit souverain entouré d'un brillant 
« état-major. Eh bien, ce sont ces nuits de Vin- 
« cennes et de Saint-Mandé, ce sont ces nuits 
« passées par les patronages, par les œuvres de 
«jeunesse, etc., qui font naître dans nos cœurs 
« la confiance invincible que Dieu ne veut pas 
« condamner sans appel notre chère patrie et qui 
« doivent nous donner, à tous, le courage d'en- 
« treprendre et de poursuivre, coûte que coûte, 
« sa régénération et son salut. Pour compléter 
« cette énumération des précieux concours don- 
« nés à notre Œuvre, en 1873, nous devons ajou- 
« ter que les communautés religieuses ont par- 
« tagé avec nous l'insigne honneur de consoler, 



^Jl 



— 50 



« dans 79 nuits d'Adoration, le Cœur de Jésus, 
« des trahisons et des outrages dont le monde 
« ne cesse de l'abreuver. » 

Ce concours des communautés religieuses 
date de l'origine de l'Œuvre. Les convenances 
ne permettant pas que les adorateurs nocturnes 
remplissent leur pieuse mission dans leurs cha- 
pelles, tous les ans elles prennent elles-mêmes 
une large part à l'Adoration nocturne . Dans 
quelques paroisses, il est arrivé que les filles 
de Saint-Vincent de Paul, devançant l'heure de 
leurs 'charitables travaux, sont venues faire la 
dernière station de la sainte veille de 4 à 5 heures 
du matin. 

« En 1874, l'élément paroissial a fourni à 
« 103 nuits, c'est-à-dire à 23 nuits de plus que 
« l'année précédente. 

« Nonobstant cette diminution de veilles, les 
« merhbres actifs ont eu à faire, surtout dans 
« certains mois, des efforts de zèle très-louables, 
« mais leur ardeur n'en a pas éprouvé la moindre 
« atteinte, elle semblait au contraire grandir en 
« proportion du sacrifice, et un directeur laïque 
« pouvait écrire dans son rapport : « Notre nuit 
« a été de toute beauté. Je n'ai qu'à me féliciter 
« de me trouver réuni à des confrères aussi dé- 
« voués à l'Œuvre. Vraiment, ce n'est plus du 



— 51 — 

€ devoir, l'entrain est de tout cœur et c'est à qui 
« en fera le plus. » Combien Dieu doit regarder 
« avec complaisance ces nuits ferventes où, par 
« amour pour Lui, on se dispute les privations, 
« les mortifications, les souffrances corporelles 
c et où, comme on vient de le dire, c'est à qui 
« en fera le plus, c'est-à-dire à qui dormira le 
« moins, à qui priera plus longtemps, à qui pro- 
« longera le plus son adoration, en un mot, à qui 
« contrariera le plus la nature dans ses pen- 
« chants vers le repos et le bien-être. 

« En 1875, il y a eu 405 nuits d'adoration ; 
« 145 ont été faites exclusivement par l'élément 
« paroissial. Le clergé en a fait 9 et les confé- 
« rences 71. 

« Remarquons que ce sont les paroisses les 
« plus peuplées d'ouvriers qui donnent les plus 
« consolantes preuves de zèle; 14 d'entre elles 
c figurent parmi les 22 paroisses qui se sont suffi 
« à elles-mêmes pour les trois nuits. A Saint- 
« Bernard de la Chapelle, à Vaugirard, à Ménil- 
« montant, à Clamart, à Notre-Dame de la Gare, 
« à Passy, à Grenelle, les trois nuits ont groupé 
« autour de Nôtre-Seigneur de 50 à 70 hommes 
< par église. 

« Il y a des conférences de Saint-Vincent de 
« Paul qui ont montré pour l'Œuvre un dévoue- 






■■ 



— 52 - 

« ment digue d'être signalé ; celles d'Issy et de 

« Charenton ont fait les trois nuits de leur pa- 

« roisse ; celles de Saint-Sulpice, de Saint-Jean- 

« Saint-François, deNeuilly, de Fontenay-aux- 

« Roses, de Bercy, de Montmartre, de Saint-Eus- 

« tache, ont fait 2 nuits. A Levallois-Perret, la 

« conférence s'est distinguée par un acte de cha- 

« rite aussi touchant que délicat. La première 

« nuit avait été faite par les paroissiens ; elle fit 

« la deuxième, et, pour la troisième, elle réunit 

« les pauvres secourus par elle aux pieds du 

« divin pauvre de l'Eucharistie, et leur laissa 

« l'honneur de cette sainte veille, assistés des 

« deux vicaires de la paroisse. 

« En 1876, par suite de la simultanéité douze 
« fois répétée de l'adoration dans deux sanctuai- 
« res, elle a eu lieu dans 133 églises ou chapelles, 
« en sorte que le nombre de nuits passées en 
« prières devant le Saint-Sacrement exposé a 
« été de 398. Les paroisses ont fourni à 204 nuits, 
« les communautés religieuses à 83, et l'Œuvre 
«spéciale de l'Adoration nocturne à 111. Ce 
« simple exposé indique la prépondérance de 
« l'élément paroissial dans ce grand acte de 
« réparation et de prière publique. En 1876, les 
« paroisses ont passé avec leurs propres res- 
« sources 30 nuits de plus qu'en 1875. Les con- 



53 — 



« férences de Saint-Vincent de Paul qui, en 1875, 
« avaient fourni à 71 nuits en ont passé 75 ; les 
« patronages 16 au lieu de 14; les cercles d'ou- 
« vriers 12 au lieu de 4; les confréries du Saint- 
« Sacrement 10 au lieu de 5. Le progrés est 
« évident; et si, reportant nos regards à 4 an- 
« nées en arriére, nous comparons les résultats 
«de 1873 avec ceux de 1876, nous verrons 
« quelle accélération a eue cet heureux mouve- 
« ment qui contribuera, nous l'espérons, au salut 
« de cette cité et du pays dont elle est la tête. Il 
« y a quelques années, 7 à 800 hommes, au 
« plus, prenaient part à l'Adoration nocturne 
« dans le diocèse [de Paris. En 1875, il y en a 
« eu 2,500 et, en 1876, 3,000. Il eut suffi de 
« dix justes pour sauver Sodome, Dieu ne les y 
« trouva pas. Paris offre au Seigneur, même en 
« dehors des 83 nuits passées par les commu- 
« nautés religieuses, 3,000 adorateurs nocturnes 
« du Très-Saint-Sacrement exposé. Ce nombre 
« suffira-t-il pour fléchir sa justice et toucher 
« sa miséricorde, nous devons l'espérer. 

« Il est consolant de pouvoir dire que le mou- 
« vement de piété produit par les malheurs de la 
« France attire vers l'Œuvre tous ceux qui sen- 
« tent fortement le besoin de désarmer la juste 
« colère de Dieu et de toucher sa miséricorde. 



— 54 — 



« C'est ce double sentiment qui conduit aux nuits 
« d'adoration des personnages éminents par leur 
« situation dans le monde, des membres de nos 
« assemblées publiques, des magistrats, des sa- 
« vants, des militaires qui viennent chercher, 
« l'un, la lumière; l'autre, la force; tous, l'espé- 
« rance du salut. Ils y ont certainement trouvé 
« des consolations et cet attrait tout divin qui 
« saisit l'âme, la captive, et [qui fait que, lors- 
« qu'on a une fois goûté à ces nuits, on sent le 
« besoin irrésistible d'y retourner. Nous ne sau- 
« rions terminer ce rapport sans citer un fait 
« d'une saveur si chrétienne qu'il pourrait figu- 
« rer avec honneur dans les légendes du moyen- 
« âge. Un associé de l'Œuvre, jeune officier 
« d'infanterie, en garnison aux environs de 
« Paris, se sentant pressé de célébrer la fête 
« de la Nativité de la très-sainte Vierge dans 
« des sentiments particuliers de dévotion, s'était 
« rendu à pied le 7 septembre au soir, au cé- 
« lèbre sanctuaire de Longpont. Arrivé tard, il 
« alla frapper à la porte du presbytère où il reçut 
« le meilleur accueil ; une franche et douce inti- 
« mité s'établit bientôt entre le visiteur et son 
« hôte. On parla de sujets édifiants, de bonnes 
« œuvres et surtout de l'Adoration nocturne. 
« Le jeune officier annonça au vénérable curé 



— 00 



«que l'Adoration perpétuelle aurait lieu pro- 
« chainement dans sa paroisse et qu'il y aurait 
« Adoration nocturne. Ce dernier se promit de 
« profiter de cette occasion pour rendre sa visite 
« au pieux pèlerin. En effet, quelques semaines 
« après, le serviteur de Marie se rendait auprès 
« de l'adorateur de Jésus et tous les deux, 
« unis aux pieds de la grande Victime, mêlèrent 
« leurs prières pour l'Église et pour la France. 
« Il nous semble que les choses ne se seraient 
« pas passées autrement du temps de saint 

« Bernard. » 

Ces résultats consolants que nous venons de 
faire connaître ont valu à l'Adoration nocturne 
l'honneur d'être signalée par Son Éminence le 
cardinal archevêque de Paris, dans son mande- 
ment pour le Carême de 1876, comme un des 
témoignages les plus consolants du mouvement 
qui attire les âmes à la prière. « Les exercices 
« ordinaires de la piété chrétienne, dit-il, ne 
« suffisent plus à l'attrait qui les domine. Sous 
« cette mystérieuse influence, notre siècle voit 
« éclater les signes les plus admirables de cet 
« esprit de Dieu. Qu'il nous suffise de rappeler 
« l'œuvre de l'Adoration perpétuelle et plus spé- 
cialement encore celle de l'Adoration noc- 
« turne. Dans cette grande capitale, agitée par 



— 56 — 

« l'activité fiévreuse des affaires et des plaisirs, 
« il n'y a pas un seul jour, pas une seule nuit de 
« l'année, où des chrétiens agenouillés devant la 
« sainte Eucharistie n'invoquent avec ferveur la 
« divine Miséricorde. » 



— 57 



CHAPITRE VII 

Membres bienfaiteurs. 

Leur rôle. — Quêtes et ressources diverses. 

Messes de réparation. 

1853 à 1861 

Nous avons omis jusqu'à présent de mentionner 
une classe d'associés fort importante, celle des 
bienfaiteurs, comprenant quiconque ne peut pas 
faire personnellement l'Adoration nocturne, fem- 
mes, vieillards, enfants. Ce sera l'occasion de 
parler de la situation financière de l'Œuvre. 

Quoiqu'elle soit essentiellement une Œuvre de 
prière, l'œuvre de l'Adoration nocturne ne peut 
éviter certaines dépenses qu'exigent son organi- 
sation et sa pratique : Frais de correspondance ; 
achat, entretien et transport du matériel pour 
faire reposer les adorateurs durant la nuit ; ho- 
noraires d'un secrétaire; impression de lettres 
de convocation, de livres d'office, etc. 

Le budget des dépenses qui s'élevait d'abord â 
peine à 1,600 francs par an, atteint aujourd'hui 
le chiffre de 5,000 francs environ. Si modique 
que soit cette somme, elle n'a jamais pu être 
obtenue que très-laborieusement et si ce n'était 
la grande confiance de l'Œuvre en Dieu, ce serait 



58 — 






pour elle l'objet des plus sérieuses préoccupa- 
tions. Elle n'a jamais pu mettre à exécution cet 
article inséré dans les deux premiers règlements : 

« Si les fonds remis au trésorier excédent les 
« dépenses nécessitées par l'Adoration, le supé- 
« rieur général proposera quelques bonnes œu- 
« vres auxquelles cet excédant pourra être em- 
« ployé et qui seront faites au nom de l'associa- 
« tion. » 

Il n'est pas d'années où le conseil n'ait à consta- 
ter un déficit. C'est sans doute une bonne tradi- 
tion dans les œuvres que celle du déficit, mais à 
condition qu'il soit comblé. Heureusement que 
la Providence n'a jamais permis que cette condi- 
tion ne fut pas remplie dans l'œuvre de l'Adora- 
tion nocturne. 

Dès les débuts, le conseil a dû rechercher les 
moyens de se procurer les ressources nécessaires. 
On fit bien plusieurs essais, mais les résultats 
ne répondirent pas à l'attente. Le premier règle- 
ment portait que les personnes qui voudraient 
s'unir aux prières et avantages spirituels de 
l'Œuvre et qui ne pourraient prendre personnel- 
lement une part active et régulière aux adora- 
tions auraient la faculté, moyennant une aumône 
d'un franc par mois, d'être reçues comme asso- 
ciées, avec le titre de bienfaiteur ou bienfaitrice. 



59 



Cette disposition resta à peu prés lettre morte. 
En 1853 l'idée fut reprise. Un commencement 
d'organisation de membres bienfaiteurs eut lieu; 
mais il n'aboutit pas davantage. Heureusement 
que des dons généreux venaient toujours à point 
pour tirer l'Œuvre d'embarras. 

A côté de beaucoup de donateurs dont l'humi- 
lité se cachait sous l'anonyme et que par consé- 
quent nous ne pouvons pas citer, il en est un 
auquel nous devons un témoignage particulier 
de reconnaissance c'est l'Œuvre des Tabernacles 
et des églises pauvres. Elle avait obtenu en 1854, 
un sermon de charité du R. P. Hermann. La 
quête eut le succès que l'on espérait et la prési- 
dente de l'Œuvre, mû par un sentiment de cha- 
ritable générosité préleva pour l'Adoration noc- 
turne une somme bien supérieure à celle que l'on 
pouvait espérer, et qui suffit alors à calmer les 
inquiétudes du trésorier. En cette même année, 
1854, l'Œuvre eut le bonheur de posséder quelque 
temps le R. P. Hermann, son fondateur. A peine 
arrivé à Paris, il s'était fait instruire de sa situa- 
tion et son cœur comprit bien vite les besoins les 
plus urgents à satisfaire. Il fallait s'étendre et 
compléter l'organisation commencée et pour cela 
se procurer des membres actifs et des fonds. 

Le P. Hermann présida une assemblée des 

3*' 



— 60 — 

associés qui se tint à Notre-Dame des Victoires. 
Là, quarante zélateurs, choisis dans tous les 
quartiers de Paris, furent désignés avec la mis- 
sion de réunir les ressources d'hommes et d'ar- 
gent qui manquaient. L'avenir de l'Œuvre était 
entre leurs mains, et de leur dévouement allait 
pour ainsi dire, dépendre le succès. Dès le pre- 
mier moment, leur concours fut des plus actifs. 
On fit revivre le projet, déjà une fois abandonné, 
de former une nouvelle catégorie de membres, 
les membres bienfaiteurs, et à l'exemple de Rome, 
qui a toujours été pour l'Œuvre de Paris le mo- 
dèle à imiter, on fixa une cotisation mensuelle de 
50 centimes. Les résultats furent assez satisfai- 
sants et pour faciliter l'action des zélateurs, le 
Supérieur de l'Œuvre fit imprimer des billets 
d'agrégation qui devaient servir de titres à tous 
les membres tant actifs que bienfaiteurs. 

Mais la difficulté des recouvrements, le défaut 
de persévérance, la pensée qu'une œuvre d'Ado- 
ration n'a pas besoin de secours pécuniaires 
étaient autant d'obstacles à la stabilité de cette 
nouvelle combinaison. 

Cependant le conseil, pour élargir autant que 
possible le cercle des personnes qui pourraient 
participer aux avantages de l'Œuvre, avait réduit 
en 1857, la cotisation annuelle de 6 francs à 






— 61 — 

1 franc. Si bien qu'il n'est vraiment personne qui, 
avec cette modeste aumône, ne puisse aspirer au 
rôle si facile de bienfaiteur où l'on n'a qu'à lais- 
ser prier pour soi. De plus, M. l'abbé Rivié, 
directeur ecclésiastique, encouragé par la bien- 
veillance dont M. le curé de Saint-Thomas 
d'Aquin, entourait l'association nocturne, réunit 
dans cette église, le 21 Avril 1857, un certain 
nombre de dames dévouées au Très-Saint- 
Sacrement dansle but de leur faire connaître les 
avantages et les besoins de l'association. 

Le R. P. Pétetot, supérieur de l'Oratoire, leur 
adressa la parole et les invita à en devenir les bien- 
faitrices. La plus grande partie répondirent à cet 
appel, et dès ce moment tous les ans une réunion 
semblable a lieu dans la même église le mardi de 
la Semaine-Sainte. Cette réunion a puissamment 
aidé à faire connaître et apprécier l'Œuvre. 

Quelques faits édifiants se rattachant à ces 
réunions doivent trouver place ici. 

Une simple servante qui n'avait pas été convo- 
quée et qui se trouvait par hasard dans l'église 
pendant l'instruction du R. P. Pétetot fut si 
touchée de la beauté de l'Œuvre que, non-seule- 
ment elle se fit inscrire tout de suite, mais elle 
se livra à une propagande active et elle parvint 
à réunir un grand nombre de souscriptions. Quel- 



— 62 — 



ques années plus tard, une autre pauvre servante, 
bienfaitrice de l'Œuvre, n'ayant pu se rendre à 
la réunion parce qu'elle habitait un quartier 
éloigné, déposa chez M. le Directeur ecclésiasti- 
que sa cotisation avec une lettre des plus tou- 
chantes. 

Après avoir expliqué son absence, elle deman- 
dait instamment, « les prières de ces Messieurs, 
« pour obtenir du bon Jésus qu'ils adorent pen- 
« dant la nuit, le retour d'un pécheur qui avait 
« d'abord commencé sa conversion et qui a 
« ensuite regardé en arrière. Je ne sais ce qu'il 
« est devenu, ajoutait-elle, et je suis bien dans 
« la peine à cause de cela. » Eh bien ! ce pécheur 
était un domestique à qui cette charitable bien- 
faitrice avait prêté une somme d'argent dont il 
avait besoin et il était parti emportant les épar- 
gnes de la pauvre fille, qui avait des parents à 
secourir, et qui ne trouvait dans son cœur d'autre 
sentiment que la compassion et le pardon, et 
d'autre vengeance que de faire prier pour son 
coupable protégé. 

« Je me réjouis quelquefois jusque dans mes 
« chagrins, disait-elle, de penser que j'ai part 
« aux prières de ces bons catholiques, moi qui 
« prie si peu, si mal, et qui prie souvent en pre- 
« nant sur mon sommeil. » 



— 63 



Quelle foi, quelle charité et quelle humilité 
dans cette petite servante de l'Œuvre, comme 
elle se qualifiait elle-même, qui faisait si peu de 
cas de ses vertus et de ses prières, et qui par cela 
même, devait être si agréable aux yeux de Dieu. 

Voilà quels précieux avantages naissent de 
l'affiliation dus membres bienfaiteurs à notre 
association. Ils profitent de toutes les grâces que 
Dieu accorde à l'Œuvre, mais l'Œuvre bénéficie 
de leurs mérites. Il y a là un échange de charita- 
bles bienfaits, profitables pour tous et que l'on 
peut procurer si facilement que vraiment il y a 
conscience de négliger d'étendre, par ce moyen, 
le règne de Dieu dans les âmes. 

A côté de ces généreuses servantes, citons 
deux soldats de l'armée de Crimée, dont l'un 
était tambour dans un des régiments qui ont eu 
la gloire de prendre Sébastopol. Ils se trouvaient 
chez une pieuse dame, très-dévouée à l'Œuvre et 
qui leur fit connaître ses besoins. Aussitôt, par 
un de ces mouvements instantanés de foi et de 
générosité, si ordinaires chez le soldat français 
qui n'a pas oublié Dieu, ils prirent leur bourse et 
la vidèrent en entier dans les mains de cette 
dame. Il y avait en tout 1 franc 10 centimes. 

La somme était peu importante, mais ces bons 
soldats avaient donne tout ce qu'ils possédaient, 



— 64 — 



ils n'avaient pas cru trop faire, puisque c'était à 
Nôtre-Seigneur Jésus-Christ lui-même qu'ils 
donnaient. Jamais don ne causa tant de joie à 
l'Œuvre, car ces actes de charité et de dévoue- 
ment si éminemment chrétiens, sont de ceux qui 
attirent les grâces de Dieu sur les œuvres qui en 
sont l'objet. 

Malgré la régularité des réunions des bienfai- 
teurs à Saint-Thomas d'Aquin, l'élan donné en 
1857 ne se soutint pas et le nombre des bienfai- 
teurs ne prit pas l'extension qu'on avait espérée. 
Jamais les cotisations n'ont pu suffire à équilibrer 
le budget, nonobstant la large part que les con- 
férences de Saint-Vincent de Paul peuvent re- 
vendiquer dans le chiffre de ces cotisations dont 
elles procurent tous les ans la plus forte somme. 

« Dieu a voulu nous aider, lisons-nous dans 
« un rapport, mais il n'a pas voulu nous donner 
« la richesse. Ne la demandons jamais, et n'ou- 
« blions pas qu'une laborieuse pauvreté est le 
« seul état qui convienne aux adorateurs du Dieu 
« de l'Eucharistie. » 

L'Œuvre ne pouvait donc pas se borner à ce 
moyen pour se créer des ressources, elle eut 
aussi recours aux quêtes. Ici encore, Notre- 
Dame des Victoires vint généreusement à son 
aide, et deux fois par ans, le premier jeudi de 






— 65 — 

mai et un des jours de l'Adoration perpétuelle, 
les membres de l'Adoration nocturne tendent 
leurs bourses toute la journée aux nombreux 
pèlerins qu'attire cet admirable sanctuaire de 
Marie. 

D'autres quêtes se font aux réunions générales 
et quelques dons généreux et inattendus arrivant 
providentiellement, dans les moments de dé- 
tresse, l'on gagne la fin de l'année sans de trop 
grosses dettes. 

En 1862, un associé, M. Mallac, sur le point de 
quitter le monde pour entrer dans la compagnie 
de Jésus, demanda à être inscrit comme membre 
bienfaiteur à vie, en donnant une fois pour 
toutes le montant des cotisations qu'il aurait 
données chaque année; ce mode fut approuvé 
par le P. Herraann, adopté par le conseil de 
l'Œuvre, et depuis, plusieurs membres bienfai- 
teurs ont été admis dans ces conditions. 

Une pensée aussi pieuse que féconde, jetée par 
M. l'abbé Le Rebours dans une réunion de bien- 
faitrices, fut recueillie par une dame, zélée adora- 
trice du Très-Saint-Sacrement, et à qui Dieu avait 
fait la grâce de comprendre la nécessité de l'expia- 
tion. Une somme de 100 francs fut donnée par elle 
pour que chacune des nuits d'adoration se ter- 
minât par une Messe de réparation aux intentions 



^-•m 



— 66 — 

de l'Œuvre. Son exemple trouva des imitateurs. 
Des personnes pieuses, ayant eu connaissance 
de cette fondation, voulurent y participer et quel- 
ques aumônes furent faites dans ce but. Cette 
bonne œuvre commença le 1 er mai 1858, à Sainte- 
Marie des Batignolles, où fut dite la première 
Messe. Elle put se soutenir par ses propres res- 
sources jusqu'au mois de mai 1861. A cette épo- 
que, le conseil, ne voulant pas la laisser tomber, 
décida qu'elle serait continuée au moyen des 
fonds de l'association, ce qui eut lieu pendant 
quelques années encore. Malheureusement, des 
difficultés, et même, des impossibilités pratiques 
pour assurer la célébration régulière de cas 
Messes a dû faire renoncer à cette fondation. 
Mais l'œuvre conserve précieusement le souvenir 
des encouragements donnés par MM. les curés, 
dont plusieurs par reconnaissance envers l'Œu- 
vre pour le bien qu'elle fait dans leur paroisse, 
refusaient les honoraires offerts pour ces Messes, 
tandis que d'autres se faisaient inscrire comme 
bienfaiteurs de l'association. 



67 — 



CHAPITRE VIII 

Retraites. — Nuit du 31 décembre au 

1" janvier à Notre-Dame des Victoires. — Nuit 

du Jeudi au Vendredi saints. 

1859 à 1876 



Le nombre des membres actifs de l'Œuvre 
restait à peu près stationnaire. Il n'a, du reste, 
guère jamais dépassé trois cents, quelques efforts 
qui aient été faits pour l'augmenter. 

Il y avait là un dessein secret de Dieu, qui 
voulait tenir l'Œuvre dans une salutaire humilité 
et en continuelle haleine de zélé et de dévoue- 
ment. 

Mais, grâce au concours des conférences de 
Saint-Vincent de Paul, le nombre des auxiliaires 
s'accroissait et il parut utile de rapprocher ces 
divers éléments au moyen d'une retraite annuelle, 
qui devait d'ailleurs avoir l'avantage d'entretenir 
dans les cœurs l'amour de la sainte Eucharistie. 

La première eut lieu les 23, 24 et 25 juin 1859, 
dans la chapelle de catéchismes de Saint-Thomas 
d'Aquin. Elle fut prêchée par M. le Rebours et 
eut un vrai succès. Cette bonne pratique revient 



— 68 — 

périodiquement chaque année, du jeudi fête du 
Corpus Domini, au dimanche suivant. Elle se 
termine ce jour-là, le matin par une communion 
générale et le soir par la réunion générale des 
associés, dont nous avons déjà parlé. Le règle- 
ment de l'Œuvre, édition du 2 février 1863, 
approuvé par M. l'abbé le Rebours, vicaire géné- 
ral, mentionne pour la première fois les retrai- 
tes et en détermine les exercices. M. l'abbé Alix 
prêcha la retraite de 1860. Ses instructions 
furent reproduites et forment un très-bon livre, 
Y Apostolat dans le monde, qui s'adresse non- 
seulement aux adorateurs du Saint-Sacrement, 
mais à tous les chrétiens pieux. (1) 

Voici les noms des différents prédicateurs des 
retraites: 1859, M. l'abbé le Rebours; 1860, 
M. l'abbé Alix; 1861, M. l'abbé Ravaille; 1862, 
le R. P. Eymard, supérieur général des Prêtres 
du Saint-Sacrement; 1863, le R. P. Hermann; 
1864, le R. P. le Royer, Prêtre du Saint-Sacre- 
ment; 1865, le R. P. Eymard; 1866, M. l'abbé 
Guiot, vicaire général de Marseille; 1867, le 



(1) A côté de ce livre dédié aux membres de l'Œuvre, 
nous citerons les Méditations sur le Saint-Sacrement, 
de Mgr de la Bouillerie, publié également pour les 
membres de l'Adoration nocturne. 
_ L' 'Apostolat dans le monde, se trouve chez Borrani, 
libraire, rue des Saints-Pères, 9. 



— 69 — 

R. P. Eymard; 1868, M. l'abbé Vidal; 1869, 
Mgr de Ségur; 1870, M. l'abbé le Rebours. En 
1871, les événements ne permirent pas de réunir 
les membres de l'Œuvre pour la retraite. 1872, 
le P. Pétetot; 1873, le R. P. Dulong de Rosnay ; 
1874, Mgr de Ségur; 1875, le R. P. Ratisbonne, 
supérieur général de la Congrégation de Notre- 
Dame de Sion ; 1876, le R. P. Tesnière, Prêtre 
du Saint-Sacrement; 1877, le R. P. Henriot, 
prieur des Dominicains, à Paris. 

Le pieux usage de célébrer, avec une solen- 
inté particulière la nuit du 31 décembre au 
1" janvier à Notre-Dame des Victoires, date 
des premiers temps de l'Œuvre. 

Le 1 er janvier se trouve tous les ans un des 
trois jours consacrés à l'Adoration perpétuelle 
dans cette paroisse. On sait quelle affluence de 
pèlerins visite constamment ce sanctuaire béni. 
Une sage prévision a voulu qu'en ce jour du 
1 er de l'an, où chacun est si retenu par les obli- 
gations de la famille et du monde, le Saint- 
Sacrement fût exposé dans une église où il pût 
être suffisamment entouré. Il n'était pas possible 
d'en choisir une qui réalisât mieux cette condi- 
tion que celle de Notre-Dame des Victoires. 
L'Adoration nocturne du 31 décembre au 1 er jan- 
vier se fait donc toujours dans ce sanctuaire : 



70 — 



mais une particularité touchante vient s'ajouter 
aux exercices ordinaires. Vers onze heures et 
demie tous les adorateurs se réunissent aux pieds 
du Très-Saint-Sacrement : après un quart d'heure 
de recueillement, à minuit moins un quart, tous 
ensemble récitent le Te Deum et le Magnificat 
en action de grâces pour les bienfaits reçus pen- 
dant l'année qui va finir; le Miserere en expia- 
, tion de toutes les fautes commises, et le De 
profundis pour tous les confrères décédés. Au 
coup de minuit, tous se prosternent en adoration, 
et après quelques instants de silence, ils répètent 
par trois fois en l'honneur de la très-sainte 
Trinité, cette invocation : Sit nomen Domini 
benedictum, ex hoc nunc et usque in seculum. 
Puis le directeur de la nuit récite, au nom de 
tous, la prière suivante : 

« mon Dieu, une nouvelle année commence ! 
« Daignez nous bénir et remplir notre cœur de 
« votre saint amour et d'une vraie charité pour 
«. nos frères. Soyez toujours présent à notre 
«* esprit et à notre cœur, pour sanctifier toutes 
« nos actions. Accordez-nous tous les biens de 
« l'âme et du corps, dont nous avons besoin pour 
« arriver à la possession du céleste héritage. 
« Consolez les affligés, soulagez les malades, et 
« surtout, ô mon Dieu, convertissez les pécheurs. 



— 71 — 

« Comblez de vos riches bénédictions, notre 
« Saint-Pére le Pape, notre Évêque et tous ceux 
« qui sont engagés dans le saint ministère. Que 
« tous ceux qui se préparent au sacerdoce reçoi- 
« vent aussi la plénitude de vos dons. Conservez 
« et ranimez la foi de notre chère patrie, éclairez 
« et dirigez tous nos supérieurs temporels ; dé- 
« livrez les âmes du purgatoire. Nous vous de- 
« mandons toutes ces grâces par l'intercession 
« de Marie conçue sans péché et par les mérites 
« de votre divin Fils, qui a pris aujourd'hui le 
« nom de Jésus qui signifie Sauveur, et qui vit 
« et règne en l'unité du Saint-Esprit dans tous 
« les siècles des siècles. Ainsi soit— il. » 

Après cette belle prière, tous les adorateurs 
récitent le Veni Creator, afin d'attirer sur eux 
les grâces nécessaires pour bien passer l'année 
qui commence, et la prière si touchante qui 
porte le nom de l'héroïque et sainte princesse 
qui la composa, Mme Elisabeth : 

« Que m'arrivera-t-il, cette année, ô mon 
« Dieu? Je n'en sais rien. Tout ce que je sais, 
« c'est qu'il ne m'arrivera rien que vous n'ayez 
« prévu, réglé, voulu, ordonné de toute éter- 
« nité ; cela me suffit. J'adore vos desseins éter- 
« nels et impénétrables, je m'y soumets de tout 
« mon cœur pour l'amour de vous. Je veux tout, 

4 



— 72 






« j'accepte tout, je vous fais un sacrifice de tout, 
« et j'unis ce sacrifice à celui de mon divin 
« Sauveur. Je vous demande en son nom et par 
« ses mérites infinis, la patience dans mes peines 
< et la parfaite soumission pour tout ce que 
« vous voudrez ou permettrez. » 

On termine par le Sub tuum pour se mettre 
sous la protection de la très-sainte Vierge, et 
chacun va reprendre sa place dans la salle de 
repos, ne laissant en adoration que les membres 
désignés par l'ordre des exercices. 

Beaucoup de membres de l'Œuvre viennent de 
tous les quartiers de Paris se joindre aux adora- 
teurs convoqués, pour offrir à Jésus-Christ les 
prémices de l'année et en passer les premiers 
instants en adoration au pied de ses autels. 
Ils se retirent aussitôt après les prières et ren- 
trent chez eux pleins d'espérance et de consola- 
tions. Comment une année ainsi commencée ne 
serait-elle pas bénie de Dieu? 

En 1859, un ouvrier de la dernière heure, un 
vieillard de près de 101 ans, récemment con- 
verti par les soins d'un associé, assistait à ce 
touchant exercice. Il voulut passer la nuit en- 
tière, faire son heure d'Adoration et le matin il 
prit sa place à la table Eucharistique, heureux 
des joies saintes que lui avait réservées la pa- 



— 73 - 

tience d'un Dieu infiniment miséricordieux. 

Un autre pieux usage, qui remonte également 
aux origines de l'association et qui tend à se 
répandre de plus en plus, est celui de l'Adoration 
au Tombeau, pendant la nuit du jeudi au ven- 
dredi saints. 

Ces nuits sont l'objet d'une bénédiction parti- 
culière de Dieu. Il suffit pour s'en convaincre de 
citer le fait suivant : 

En 1858, deux membres de l'Œuvre devaient 
faire l'Adoration au Tombeau, à Sainte-Clotilde. 
Ils engagèrent un de leurs amis, qui, depuis très- 
longtemps, restait éloigné des sacrements, à se 
joindre à eux. Ce dernier, qu'ils avaient déjà 
entraîné comme malgré lui à la retraite de 
Notre-Dame, se défendit très-énergiqueinent et 
déclara qu'il ne les suivrait pas. Il nourrissait 
d'ailleurs, leur dit-il, contre une personne, un 
ressentiment profond qui l'empêchait de se rap- 
procher de Dieu. La charité de ses deux amis 
n'en fut que plus excitée; ils redoublèrent d'ins- 
tance, et il céda enfin, mais en affirmant qu'il ne 
se rendait à leurs désirs que pour leur être 
agréable, et nullement par un motif de piété; 
que, d'ailleurs, il ne voulait rien perdre de son 
sommeil et qu'il ne passerait pas toute la nuit. 
On lui donna donc une des premières beures. 



— 74 - 

C'était là que l'attendait le Dieu de paix et de 
miséricorde. Notre-Seigneur toucha ce cœur 
ulcéré de haine; à la fin de l'heure d'Adoration, 
il avait pardonné et il était converti. Les deux 
jours suivants furent consacrés à la confession 
et à la pénitence, et le saint jour de Pâques ce 
nouveau ressuscité allait à Notre-Dame recevoir 
l'Agneau pascal. 



75 — 



CHAPITRE IX 

Pie IX et l'œuvre de l'Adoration nocturne de Paris. 
Le Concile du Vatican. 

1860 à 18T7 



L'année 1860, si pleine de tristesses pour le 
Souverain-Pontife, fut, par contre-coup, une 
année d'épreuves pour les œuvres catholiques. 
L'association de l'Adoration nocturne en eut sa 
part et, dans son rapport du 22 janvier 1860, le 
président constatait un temps d'arrêt dans les 
progrès de l'Œuvre ; un peu plus tard, il signa- 
lait quelques défections, bien propres à exciter 
à la méfiance de soi-même et à une salutaire 
crainte des jugements de Dieu. « Notre asso- 
« dation a-t-elle eu , disait-il , sa part d'un 
« ralentissement général dont les œuvres catlio- 
« liques ont été frappées cette année, ou la 
« cause de ce temps d'arrêt est-elle dans de* 
« circonstances accidentelles qui lui sont parti- 
« culières? nous ne pouvons le dire. Quoiqu'il en 
« soit, les événements dont nous sommes té- 
« moins, les craintes des uns, les perplexités 
« des autres, les préoccupations de tous sont 



— 76 — 

« des raisons puissantes pour nous déterminer 
« à aller demander au Dieu de paix, de force 
« et de lumière les grâces nécessaires pour 
« traverser chrétiennement ces jours difficiles. 
< Le passé doit nous remplir de confiance ; 
« l'histoire nous montre les merveilleux effets 
« de la dévotion envers le Saint-Sacrement. 
« Jamais elle ne brilla d'un plus vif éclat, 
« jamais elle n'eut de plus heureuses consé- 
« quences que dans les moments d'épreuves 
« qu'il plût à Dieu d'envoyer à son Église. » 

Si l'année 1860 fut pour le Souverain-Pontife 
une année de grandes afflictions, elle lui procura 
aussi de grandes consolations. D'un côté la 
perte d'une partie des Etats de l'Église, malgré 
une héroïque défense, mais de l'autre le témoi- 
gnage universel de la fidélité et de l'amour 
de l'Eglise entière, exprimé par ces immor- 
telles adresses qui resteront comme un des 
plus beaux fleurons de la couronne du bien- 
aimé Pie IX. 

Plein de douleur à la vue des peines qui 
affligeaient ce saint Pontife, le conseil de 
l'Œuvre, voulant lui exprimer sa vive et 
respectueuse sympathie, lui envoya, au mois 
de mars 1860, au nom de tous les confrères, 
une lettre en latin, dont voici la traduction : 



— 77 — 



« Nous, soussignés, Supérieur, Directeur, 
Président laïque et Zélateurs de l'association 
de l'Adoration nocturne du Très-Saint-Sacre- 
ment, établie dans le diocèse de Paris, 
comme elle l'est' à Rome sous le nom de 
II sacro Uffizio, prosternés, dans le dévoue- 
ment de nos cœurs, aux pieds de Votre 
Sainteté, guidés par le sentiment d'un amour 
tout filial et d'un vif et ferme attachement 
à la chaire de Pierre, nous n'avons pas de 
désir plus cher et plus empressé que d'expri- 
mer devant Votre personne sacrée les senti- 
ments de tristesse et d'anxiété qui nous 
pénètrent jusqu'au fond de l'âme, à la vue 
des profondes douleurs qui déchirent Votre 
cœur paternel. 

« Dans ces sentiments, empressés de répondre 

au pieux et pressant désir de Votre Sainteté, 

nous offrons nuit et jour, dans des veilles non 

interrompues, des prières et des supplications 

: ferventes, au Dieu très-grand et très-bon, 

par l'intercession de la bienheureuse Vierge 

: Marie Immaculée et des saints apôtres Pierre 

: et Paul, afin qu'il daigne secourir de son bras 

: tout-puissant son Église militante et son 

: pasteur suprême, au milieu des tempêtes de ce 

■ monde, et qu'il daigne, dans sa miséricorde. 



— 78 — 

« éclairer tous les ennemis du Siège apostolique 
« et les ramener, par la force triomphante de 
« sa grâce, dans les voies de la vérité, de la 
« justice et du salut. » 

Notre Saint-Père daigna envoyer, en réponse, 
le Bref suivant qu'il adressait à tous les membres 
de l'association : 






« Dilectis Filiis A. Le Rebours , Vicario 
Generali Ecclesias Parisiensis, Superiori, Ze- 
latoribus et Confratribus universis sodalitatis 
Adorationis nocturnse, Lutetiam Parisiorum : 

« PIUS, PAPA, NONUS, 

« Dilecti filii, salutem et Apostolicam Bene- 
dictionem. 

« Quod animis vestris insidet alte defixum, 
pietatis, fidei, devotionis et observantia? studium 
ergà supremam dignitatem Nostram, id ipsum 
prae se ferunt litterae quas novissimè a vobis 
accepimus. Summam namque tristitiam ac 
mœrorem ipsae explicant, quo affecti vos estis, 
in ingenti hoc Italiae tumultu ac rebellione 
provinciarum temporalis Status Nostri, atque 
unà preces et vota significant, quas offerre sup- 
pliciter non intermittitis, Dilecti Filii, ad pacem 
et tranquillitatem a clementissimo Domino impe- 



— 79 — 

trandam. Nos vehementer pergrati, quod vel 
hoc obsequentissimi officii génère constantem 
fidem ac devotionem vestram Nobis ipsis Sanc- 
taeque huic Sedi probare studueritis, minime 
dubitamus quin magis orationibua et obsecratio- 
nibus apud Deum instetis. 

« Pignus autem singularis caritatis Nostrœ 
ad vos mittimus Apostolicam Benedictionem 
quam vobis, Dilecti Filii, effuso paterni cordis 
affectu peramanter impertimur. 

« Datum, Roms, apud Sanctum Petrum, die 
vigesimo quarto Martii, anno millesimo octin- 
gentesimo sexagesimo ; Pontificatus Nostri. 
Anno decimo quarto. 

« PIUS, PP. IX. > 

Voici la traduction : 

« A mes bien-aimés fils, A. Le Rebours, vicaire 
général du diocèse de Paris, Supérieur, aux 
Zélateurs et à tous les % Confrères de l'association 
de l'Adoration nocturne à Paris, 



«PIE IX, PAPE, 

« Bien-aimés fils, salut et bénédiction aposto- 
tolique : 

« La lettre que nous venons de recevoir de 
vous, Noua:' à Ml dérlnaître les sentiments de 

4* 



— 80 — 

piété, de foi, de dévotion, de zèle respectueux 
envers Notre suprême dignité, qui sont enraci- 
nés dans le plus intime de vos âmes. Elle Nous 
expose la profonde et amère tristesse que Vous, 
éprouvez à cause de ces grands soulèvements 
de l'Italie et de la rébellion des provinces qui 
forment une partie de Nos possessions tempo- 
relles. En même temps, bien-aimés fils, elle Nous 
assure que vous ne cessez pas d'adresser avec 
ferveur vos prières et vos vœux au Seigneur, 
afin d'obtenir de sa clémence la paix et la 
tranquillité. Nous sommes très-reconnaissant du 
soin que vous mettez à Nous prouver par ce 
devoir de soumission filiale, votre constante 
fidélité et votre dévouement à Nous-même et à 
ce Saint-Siège, et Nous ne doutons pas que 
vous ne redoubliez encore vos instances auprès 
de Dieu par vos prières et par vos supplications. 
« Comme gage de notre particulière affection, 
Nous vous envoyons Notre bénédiction aposto- 
lique, que Nous vous accordons avec amour et 
avec effusion de Notre cœur paternel. 

«Donné à Rome, au Vatican, le 24 mars, 
l'an 1860, de Notre Pontificat le quatorzième. 



>h BiciBmhaae. >•>[ M-uimiRIiE ESI, Papei/» ,aaov 



— 81 — 

Cette bénédiction porta bientôt ses fruits, car 
c'est de cette année que datent les trois nuits 
d'Adoration dans chaque sanctuaire comme on 
l'a vu plus haut. 

En 1867, le supérieur, M. l'abbé Le Rebours, 
qu'attiraient à Rome les belles solennités du 
centenaire de Saint-Pierre, eut la pensée de pré- 
senter au Saint-Père la liste des membres actifs 
de l'Œuvre ; une double copie en avait été faite 
par un des confrères: l'une, d'un petit format, 
reliée avec les différents rapports lus aux pré- 
cédentes assemblées générales, formait un joli 
volume in-12, recouvert de maroquin rouge 
aux armes de Pie IX ; l'autre était écrite sur 
une grande feuille présentant d'un coup d'œil 
les 310 noms des membres actifs composant 
l'Œuvre. 

Le volume fut remis à Sa Sainteté qui le 
garda. Les noms des membres de l'Œuvre sont 
ainsi conservés dans sa bibliothèque, comme un 
souvenir et aussi comme un témoignage de la 
foi catholique de Paris que le mal et le bien 
semblent avoir choisi pour le théâtre de leurs 
luttes et de leurs efforts, et où, grâce à Dieu, le 
bien occupe une si grande place. 

La seconde copie fut rendue à M. l'abbé Le 
Rebours, portant au bas de la page une pré- 



— 82 — 



cieuse bénédiction écrite de la main même du 
Souverain-Pontife , et dont voici les termes : 
« Die 9 Julii 1867. Benedicat vos Deus, et 

ADORATE EUM, DIE NOCTUQUE. PlUS P. P. IX. » 

— 9 juillet 1867. Que Dieu vous bénisse et 
adorez-le jour et nuit. Pie IX, Pape. — Cette 
bénédiction, adressée à tous les membres actifs, 
était un bien commun dont chacun d'eux devait 
avoir sa part. Le conseil de l'Œuvre crut ré- 
pondre à leurs sentiments en leur faisant dis- 
tribuer un diplôme sur lequel était exactement 
reproduit avec leur nom, l'autographe de la 
bénédiction du saint Pontife. Ce diplôme for- 
mait ainsi un titre honorable, digne d'être con- 
servé parmi les plus précieux, car il leur rappe- 
lait avec leur qualité d'adorateur, la faveur 
spéciale qu'elle leur avait valu de la part d'un 
Pape que distinguent particulièrement sa piété 
et son amour pour la divine Eucharistie. Pie IX 
ne se borne pas à être le père, il est le modèle 
des adorateurs. Sa foi n'a d'égale que la ferveur 
de ses adorations. Le Saint-Père a dans son 
palais une chapelle intérieure où il dit chaque 
jour la sainte Messe; mais comme cette chapelle 
est à une certaine distance de son cabinet de 
travail et qu'il ne pourrait pas s'y rendre aussi 
souvent qu'il le voudrait, il a dans une pièce 



— 83 — 

voisine un petit oratoire où le Très- Saint- 
Sacrement est constamment gardé et avec 
lequel il communique par un escalier secret. 
C'est dans cet oratoire caché que Pie IX passe 
presque tous les instants de liberté que lui 
laisse le courant des affaires; c'est là qu'abîmé 
devant son Dieu, il en reçoit les lumières néces- 
saires à la conduite de l'Église, là qu'il trouve 
le courage de supporter de si cruelles épreuves, 
là enfin qu'est la source intarissable de cette 
grandeur, de cette force morale qui étonne le 
monde, qui fera l'admiration des siècles futurs 
et qui assurera le triomphe de l'Église. 

En 1870, M. l'abbé Le Rebours ayant eu, le 
26 janvier, une audience du Saint-Père, il en 
obtint ppur chacun des membres qui compo- 
saient le conseil à cette époque, une faveur 
dont la bonne grâce avec laquelle elle a été 
accordée double encore le prix. Cette faveur 
consiste en une indulgence plénière annuelle et 
à vie pour les jours anniversaires du baptême, de 
la première communion et du mariage. Une 
image du Saint-Père, au bas de laquelle est 
relatée cette faveur exceptionnelle, fut remise, 
à titre de diplôme, à chacun des heureux privi- 
légiés. 

Le 3 juin 1877 amenait le cinquantième anni- 



— 84 — 

versaire de la consécration épiscopale de Pie IX. 
Unie à l'Eglise tout entière qui tenait, en ce 
jour, ses yeux et son cœur tournés vers Rome, 
l'œuvre de l'Adoration nocturne voulut mêler 
sa voix au concert de foi au Vicaire infaillible de 
Jésus-Christ, de charité pour le Père commun 
des fidèles, d'espérance dans le prochain triom- 
phe de l'Eglise, formé par les catholiques de 
l'univers. 

Une adresse en latin, rédigée par M. le Direc- 
teur ecclésiastique et signée par les membres du 
conseil au nom de tous les associés, fut envoyée 
au Saint-Pére, par l'entremise de Son Excel- 
lence Monseigneur Meglia, nonce apostolique à 
Paris. En voici la traduction : 



« Très-Saint Père, 

« Puisque Dieu, dans sa Providence spéciale 
t pour son Eglise, multiplie vos jours et vous 
; accorde la faveur d'atteindre la cinquantième 
: année de Votre épiscopat , les membres de 
: l'Adoration nocturne, réunis en association à 
Paris, et y remplissant leur pieux office, dési- 
rent, dans cette circonstance solennelle, s'unir 
à la joie, aux vœux et à l'espérance du monde 
entier. Se mettant donc aux pieds de Votre 
Sainteté, ils prennent la confiance d'exprimer 



— 85 — 



« ce que leur cœur ressent tout à la fois d'allé- 
« gresse et de tristesse. 

« Nous voulons, tout d'abord, rendre des ac- 
« tions de grâces très-ferventes à Dieu qui a 
« préservé et conservé Votre Sainteté au milieu 
« de tant d'attaques et d'entreprises sacrilèges. 
< Vos années prolongées par un insigne privilège 
« et dont vous supportez le poids sans faiblir, 
« semblent être la voix de Dieu le Père qui glo- 
« rifie son Pontife suprême durant les jours de 
« son humilité ; c'est aussi la voix du Fils, 
« Rédempteur du monde, qui prend en main la 
« cause et le triomphe de son Vicaire à qui est 
« donnée la charge de le représenter universel- 
« lement sur la terre. 

« Espérant donc que Dieu qui vous a fait sur- 
« monter tant de maux, vous en délivrera encore 
« dans l'avenir, nous ne cesserons pas de de- 
« mander dans nos prières devant le Trés-Saint- 
« Sacrement exposé qu'il ajoute une mesure pres- 
« sée et surabondante à la plénitude de vos jours. 
« Et si Dieu signale déjà sa protection en vous 
« prolongeant la vie, il nous inspire la confiance. 
« que, poursuivant son œuvre, il donnera au 
« Père et à l'Evèque de nos âmes, de voirie calme 
« se rétablir après une si horrible tempête ; il lui 
« conservera pendant l'épreuve la précieuse et 



— 86 — 



« très-nécessaire liberté de parler, d'avertir, et 
« de définir ; il lui fera recouvrer tous les droits 
« et toutes les possessions du Saint-Siège et 
« enfin, il lui accordera la joie d'accueillir des fils 
« prévaricateurs il est vrai, mais convertis et 
« repentants. 

« Que Dieu donne ce surcroît de faveur à 
« Votre Sainteté, afin que nous soyons consolés 
« sur vos maux qui sont aussi les nôtres, et que, 
« la paix étant rendue à l'Église et au monde, 
« nous vivions avec justice et piété dans les 
« jours de ce siècle. Que Votre Sainteté voie ce 
« changement opéré par la droite du Tout-Puis- 
« sant ; qu'Elle demeure sur la terre avec nous, 
« parce qu'il commence à se faire tard et qu'Elle 
« daigne accorder la bénédiction apostolique 
« aux plus humbles de ses fils. » 

C'est ici le cas de dire que l'Œuvre a eu le 
bonheur et la gloire de fournir quelques-uns de 
ses membres aux phalanges de héros qui ont 
vaillamment défendu le pouvoir temporel dans 
ces immortels combats où nos nouveaux Maccha- 
bées ont acquis une illustration que les efforts 
combinés des ennemis du catholicisme ne par- 
viendront pas à leur ravir. Deux d'entre eux 
ont même été blessés, l'un à Mentana, l'autre à 
Rome. 



— 87 — 



Eu 1870, un événement des plus considérables 
dans l'histoire de l'Église, se passait au sein de 
la capitale du monde chrétien. L'œuvre de 
l'Adoration nocturne est trop attachée à l'Église 
et au Pape pour rester indifférente à rien de ce 
qui les touche. La réunion du Concile œcuméni- 
que et la proclamation du dogme de l'infaillibi- 
lité furent donc une de ses plus constantes 
préoccupations pendant les saintes veilles aux 
pieds de Nôtre-Seigneur. C'était une des in- 
tentions générales recommandées chaque nuit. 
Aussi le président de l'Œuvre pouvait-il dire : 
« Comme catholiques et, en particulier, comme 
« membres de l'œuvre de l'Adoration nocturne, 
« saluons, mes chers confrères, avec respect et 
« amour ce décret du saint Concile si vivement 
« désiré ; faisons ensemble cet acte de foi qui 
« pourrait aisément prendre la forme d'une 
« action de grâce, car dés l'ouverture du Concile 
« nous n'avons cessé de prier pour le triomphe 
« de cette vérité, pour que rien de la part des 
«hommes ne put s'opposer à sa proclamation, 
« si elle était dans les desseins de Dieu. Les 
« obstacles n'ont pas manqué mais la prière a 
« été plus forte, et le 18 juillet 1870 est venu 
« donner raison à notre confiance, en marquant 
« une date qui ne peut plus s'effacer de nos 



1 



— 88 — 

« cœurs. Toutefois l'œuvre du Concile est loin 
« d'être finie, et si des actes de reconnaissance 
« doivent s'élever de nos âmes pour ce qu'il a 
« déjà fait, l'intercession pour ce qui lui reste à 
« achever ne doit pas être interrompue. C'est ce 
« qui vous explique le maintien, sur nos listes 
« d'intention, de cette mention: Le Concile 
« œcuménique. — Bien que les événements 
« aient obligé Notre Saint-Père le Pape d'en 
« ordonner la suspension, ce n'est, nous l'espé- 
« rons, qu'une trêve momentanée. » 

L'influence du Concile devait se faire sentir 
d'une façon plus immédiate sur l'Adoration noc- 
turne. 

Le conseil de l'Œuvre avait eu la pensée de 
profiter de la réunion des évêques du monde en- 
tier pour travailler à la diffusion de l'œuvre de 
l'Adoration perpétuelle et de l'Adoration noc- 
turne. Une note fut envoyée dans ce but au 
supérieur de l'association, M. l'abbé Le Rebours, 
appelé à Rome pour les travaux du Concile et à 
Mgr de la Bouillerie, évoque de Carcassonne, 
dont le nom, nous l'avons déjà dit, se rattache 
à la fondation de l'CEuvre. Quelques démarches 
furent faites, mais le moment d'agir efficacement 
n'était pas encore venu. Il est probable que 
plus tard, quand Dieu le permettra, le Concile 



— 89 — 

sera saisi d'un postulatum en faveur des œuvres 
principales qui font aujourd'hui l'ornement de 
l'Eglise et que celle de l'Adoration nocturne 
trouvera sa place dans cet acte officiel. D'ici là, 
la semence jetée fructifiera et, quand viendra le 
moment de la moisson, il se trouvera des ou- 
vriers pour la cueillir. Déjà M. l'abbé Le Rebours 
a fait connaître l'Œuvre à quelques évèques es- 
pagnols, qui, malgré leur réserve ordinaire à 
accepter ce qui vient des autres pays, at notam- 
ment de la France, se sont montrés touchés des 
circonstances qui ont accompagné son établisse- 
ment à Rome et à Paris, et des résultats qu'elle 
a produits dans ces deux villes. Mgr de Gibraltar 
a été plus loin : soumis à la loi anglaise, et dans 
des conditions de liberté plus favorables que ses 
confrères de la péninsule Ibérique, il a manifesté 
l'intention d'établir dans son diocèse l'Adora- 
tion perpétuelle, avec Adoration nocturne, un 
seul jour par semaine d'abord, sauf à étendre 
cette dernière pratique, si elle était goûtée par 
les fidèles. Des tentatives analogues faites au- 
près des évèques de Belgique et d'Italie donnent 
lieu également d'espérer qu'elles ne resteront 
pas sans effet. 



— 90 — 

CHAPITRE X 
L'Adoration nocturne pendant le siège de Pans. 

1870. 



La guerre qui a désolé notre patrie en 1870 
devait nécessairement créer de grands embar- 
ras à l'Œuvre. Dès les premiers jours le départ 
des bons militaires, membres de l'association, 
l'avait privée d'un certain nombre d'adora- 
teurs zélés et ponctuels, qu'aucune fatigue ne 
rebutait. Plus tard, la mobile enlevait les plus 
jeunes confrères et quand, après nos désastres, 
l'ennemi entourant Paris d'un cercle de fer, il 
fallut organiser la défense de cette grande ville 
et que le service de la garde nationale, soit à 
l'intérieur, soit aux remparts, eut réclamé le 
concours de tous les hommes valides, le service 
de l'Adoration nocturne rencontra des difficul- 
tés qui auraient pu être funestes à l'Œuvre. 
Mais Nôtre-Seigneur qui l'a établie dans des 
vues manifestes de miséricorde, l'a soutenue en 
mettant dans le cœur de chacun le courage et 
le dévouement que la grâce seule peut donner. 
Les détails qui vont suivre appartiennent à 



— 91 — 

l'histoire de l'Œuvre, et doivent être publiés 
comme une preuve consolante de la protection 
que Dieu étend sur elle. 

Sauf une interruption des trois nuits à Ville- 
juif, tout au commencement de l'investissement 
de Paris, l'Adoration perpétuelle s'est faite sans 
lacune, grâce au précieux concours de l'autorité 
ecclésiastique et de MM. les curés de Paris. 
Quelques sanctuaires ne pouvaient faire l'Ado- 
ration perpétuelle ni jour, ni nuit; d'autres, en 
plus grand nombre, étaient obligés de supprimer 
l'Adoration nocturne, bien qu'ayant eu l'Adora- 
tion de jour. Ils furent tous remplacés, soit pour 
l'Adoration totale, soit pour l'Adoration partielle, 
par des chapelles de communautés que M. l'abbé 
Lagarde, vicaire général du diocèse, avait eu 
soin de désigner. 

Les sanctuaires qui durent renoncer à l'Ado- 
ration perpétuelle jour et nuit furent: 

Au mois de septembre. — La chapelle des 
RR. PP. Capucins, à cause du petit nombre de 
religieux et de l'établissement d'une ambulance. 
Cette chapelle fut remplacée par celle des dames 
du Sacré-Cœur. 

Au mois d'octobre. — L'église de Vincennes, 
menacée par l'ennemi, fut remplacée par la 
chapelle des Carmélites de la rue de Messine. 



— 92 — 

L'église de Saint-Honoré, trop rapprochée des 
fortifications, fut remplacée par la chapelle des 
Dames de Saint-Maur. L'église de Saint-Pierre 
du Petit-Montrouge transformée en ambulance, 
le fut par la chapelle des Sœurs de Saint-Thomas 
de Villeneuve. La chapelle du séminaire du 
Saint-Esprit fut remplacée par celle des Dames 
Réparatrices, de la rue d'Ulm, parce que un 
détachement de gardes nationaux de la banlieue 
était caserne dans la maison. L'église de Saint- 
Germain de Charonne, menacée par l'ennemi, fut 
remplacée par la chapelle des Petites-Sœurs des 
Pauvres, de la rue de Notre-Dame des Champs. 

Au mois de novembre. — L'église de Sainte- 
Geneviève, transformée en dépôt de poudres, fut 
remplacée par la chapelle des Petites-Sœurs des 
Pauvres, de la [rue Saint-Jacques, et l'église de 
la Sorbonne, servant de dépôt d'armes, par la 
chapelle des Dames de Marie Réparatrice, rue de 
Calais, 21. 

Les sanctuaires qui ne purent faire l'Adoration 
nocturne, en tout ou en partie, bien qu'ayant 
fait l'Adoration de jour, étaient: 

Au mois de septembre. — La chapelle de 
Saint-Joseph des Allemands, où l'irritation bien 
naturelle des esprits contre l'ennemi ne permit 
de faire que deux nuits. Dans ?e moment, la 



93 



population trés-émue voyait des Prussiens par- 
tout. La moindre circonstance éveillait les sus- 
ceptibilités populaires. L'arrivée des adora- 
teurs, un par un, pendant deux jours de suite, 
à neuf heures du soir, dans un établissement 
consacré uniquement à la population allemande, 
avait donné de l'ombrage. La pieuse réunion fut 
signalée comme une réunion de Prussiens, ou 
proféra même quelques menaces, et il parut 
prudent de suspendre dans ce sanctuaire, pen- 
dant la troisième nuit, l'Adoration nocturne, qui 
fut faite à Notre-Dame des Victoires. 

Au mois d'octobre. — Les églises de Saint- 
Nicolas du Chardonnet et de Saint -Marcel, 
situées dans des quartiers éloignés, furent rem- 
placées pour l'Adoration nocturne, par la cba- 
pelle des Dames Réparatrices de la rue d'Llm. 

Aie mois de novembre. — Notre-Dame de 
Passy. Ici, ce n'était pas l'église qui manquait 
aux adorateurs, mais les adorateurs qui man- 
quaient à l'église. Malgré le vif désir du digne 
curé de cette paroisse, les confrères, retenus 
par le service de la garde nationale ou trop 
fatigués par les veilles précédentes, ne purent 
faire l'Adoration nocturne, qui eut lieu chez 
les Dames réparatrices de la rue d'Ulm. Toute- 
fois, quelques associés dont le zèle est au-dessus 



■ 



— 94 — 

de tous les obstacles, unis à quelques parois- 
siens, firent deux nuits sur trois dans cette 

église. 

A Notre-Dame de Paris, l'absence du gaz et 
l'isolement du sanctuaire empêchèrent l'Adora- 
tion nocturne, qui se fit par les Dames Répara- 
trices. 

Au mois de décembre. — Il en fut de même 
pour Saint-Denis du Saint-Sacrement. 

Dans ce même mois, l'église de Notre-Dame 
des Champs, privée du gaz, ne pouvant avoir 
l'Adoration nocturne, M. le curé y suppléa, en 
la faisant faire successivement par trois com- 
munautés différentes établies sur la paroisse. 
La première nuit eut lieu chez les Sœurs de 
Saint-Vincent de Paul, la deuxième chez les 
Sœurs du bon Pasteur, la troisième chez les 
Sœurs de Sainte-Marie, de la rue Carnot. 

M. le curé de Notre-Dame des Champs ouvrait 
ainsi une voie que plusieurs de ses vénérables 
confrères suivirent. Convaincus de l'impérieuse 
nécessité de la prière, dans ce moment dou- 
loureux, et appréciant les difficultés que ren- 
contrait l'Œuvre dans l'accomplissement de sa 
mission, un assez grand nombre d'entre MM. les 
curés de Paris, voulurent pourvoir eux-mêmes 
au service de l'Adoration nocturne, et assurer, 



95 — 



par différentes combinaisons, la perpétuité de 
la prière et de l'expiation. C'est ainsi qu'à Saint- 
Laurent, la première nuit d'Adoration fut faite 
par le clergé de la paroisse ; la deuxième nuit 
par les membres de la société de Saint-Vincent 
de Paul, et la troisième par les membres de 
l'Œuvre. A Saint-Sulpice, la première nuit fut 
faite par les jeunes séminaristes avec l'autori- 
sation de leur digne et vénérable directeur, 
les deux autres par les membres de l'Œuvre. 
A Saint-Thomas d'Aquin, les trois nuits furent 
faites par les Soeurs de charité, établies sur la 
paroisse. A Saint-Roch, M. le curé combina 
l'action du clergé paroissial avec celle des Frè- 
res des Ecoles chrétiennes et des hommes pieux 
du quartier. A Saint-Augustin, le clergé, les 
Frères, la société de Saint-Vincent de Paul, 
se partagèrent, pendant les trois veillées, le 
devoir de prier pour notre chère France. 

Grâce à ce concours admirable et édifiant 
de toutes les bonnes volontés, la prière publi- 
que, à laquelle les circonstances donnaient une 
si grande importance, fut incessante dans Paris. 
Des bras suppliants étaient sans cesse levés 
vers Dieu et c'est là, peut-être, ce qui explique 
comment cette ville surprise par l'ennemi dans 
un état de défense si imparfait, alors qu'elle 






— 96 — 

n'avait ni armes, ni soldats, tandis qu'elle rece- 
lait dans son sein des éléments redoutables de 
désordre, ait pu lutter cinq grands mois, oppo- 
sant aux assiégeants une constance que rien 
ne put ébranler et une ardeur qui ne se ral- 
lentit pas un instant, malgré des souffrances 
qu'aggravaient encore les rigueurs d'un hiver 
exceptionnel. 

« Nous ne croyons pas nous écarter de la 
« vérité, disait le président de l'Œuvre, à la 
« réunion générale du 15 janvier 1871, en pla- 
« çant toute notre espérance, pour la délivrance 
« et le salut de cette ville, dans l'Adoration 
« perpétuelle du Très-Saint-Sacrement, qui réa- 
« lise tout ce qui peut toucher le plus directe- 
« ment le cœur de Dieu : l'immolation ininter- 
« rompue de l'adorable Victime, l'adoration et 
« la supplication continuelles, la réparation et 
« le sacrifice. C'est, à coup sûr, une chose con- 
« solante, que de voir les efforts de la piété 
« parisienne, pour élever son dévouement à la 
« hauteur de l'épreuve. Toutefois, nous expri- 
« merons le regret que ces efforts soient le par- 
« tage, pour ainsi dire, exclusif, du petit nom- 
« bre et que la majeure partie de la population 
« ne semble pas comprendre qu'elle y devrait 
« participer. Nos ches confrères font preuve 



97 



« d*un courage que nous ne saurions trop 
« louer, mais combien leurs prières nocturnes 
« n'acquerraient-elles pas de force, si elles 
« étaient soutenues par celles d'un plus grand 
« nombre de fidèles. » 

On nous permettra de mentionner spéciale- 
ment les circonstances dans lesquelles eut lieu 
l'Adoration perpétuelle dans la paroisse de 
Saint-Sulpice. Cette solennité se fit littérale- 
ment sous le feu de l'ennemi, qui paraissait 
alors avoir pris plus particulièrement pour 
objectif de son tir, les édifices religieux de la 
rive gauche de la Seine. Dans la nuit du 8 au 
9 janvier, notamment, le quartier Saint-Sulpice 
recevait un obus toutes les deux minutes, trois 
tombèrent sur l'église. L'un d'eux s'arrêta dans 
les combles au-dessus du maître-autel où était 
exposé Notre-Seigneur, et n'éclata pas ; un 
autre vint se perdre entre les deux tours ; le 
troisième, pénétrant dans la chapelle de la sainte 
Vierge, y causa des dégâts dont tout Paris a pu 
être témoin. Quatre adorateurs étaient en ce 
moment en adoration devant le Trés-Saint- 
Sacrement à quelques pas du projectile qui 
aurait pu les atteindre et leur ôter la vie ; ils 
restèrent impassibles, continuant courageuse- 
ment leurs prières, comme si aucun danger ne 






98 



les avait menacés. Les autres, réveillés brusque- 
ment par ce visiteur importun, quittèrent leur lit 
de repos, s'empressèrent d'accourir auprès du 
Très-Saint-Sacrement et de leurs confrères, 
rendirent grâce au divin Maître de les avoir 
protégés ; puis, chacun reprit tranquillement sa 
place et la nuit continua comme à l'ordinaire. 
Pendant le jour, les fidèles montrèrent la même 
sérénité. L'amour de Jésus-Christ fut plus fort 
dans leur cœur que la crainte de la mort, et 
Notre-Seigneur put toujours voir à ses pieds 
un nombre considérable d'adorateurs qui ve- 
naient lui rendre leurs hommages et implorer sa 
miséricorde. Cet épisode ne sera pas un des 
moins touchants de ce long siège. « On sent 
* son âme s'élever, disait encore le président, 
« en voyant cette population chrétienne, si bru- 
« talement menacée par une inqualifiable barba- 
« rie, ne rien changer à sa vie ordinaire, ne 
« retranchant rien du culte public qu'elle doit à 
« Dieu, aussi assidue à l'église pendant ces trois 
« jours de solennité qu'au temps de prospérité 
« malgré l'imminence d'un danger qui ne cesse 
« ni jour, ni nuit. C'est>ne belle page de plus à 
« ajouter à celles qui composent l'édifiante his- 
« toire de la paroisse de Saint-Sulpice. » 

La nuit du 31 décembre au 1" janvier fut 



99 — 



cette année, comme de coutume, passée à Notre- 
Dame des Victoires. Très-goûtée des associés 
elle est généralement nombreuse. Cette fois on 
remarquait l'absence des confrères que les obli- 
gations de leur service militaire empêchaient 
d'y assister. L'un d'eux, qui s'est fait une douce 
habitude de cet exercice annuel, se trouvait, le 
31 décembre, avec la compagnie de guerre dont 
il faisait partie, à la Varenne Saint-Hilaire, sur 
les bords de la Marne, au poste français le plus 
avancé de ce côté de la défense. Sa pensée se 
portait vers Notre-Dame des Victoires, et s'il 
ne pouvait être présent de corps à cette nuit, il 
voulait au moins s'y unir d'intention. Il cher- 
chait le moyen de s'isoler de ses camarades pour 
être tout entier à Dieu, à l'heure solennelle de 
minuit. La chose n'était pas facile. Mais^lq bon 
Maître voyait son désir et il voulut! le satisfaire . 
Un garde qui devait êtré:;de MttÏQmûn^j&tkâte 
aux postes avanoéq, ide/;miimifli àiune hwWey M$t 
que ses afluvreé rappialaiti k-P^isvkihéschsMtlim 
rémfûâîçan* v : ' offrant j 'uae> Jargia; I toâtriîbn!i|tioii i- 1 -ÏUe 
-sër4ie&'éï!ii valfiiit^l'ft'peiiï'e', car il si agissait d'i*llâr 
: mtan4èT ;urvé' : faction- 'à ' '.quelques-' iffii êtres ndiujae 
batterie • 'prussienne .' "Personne . 'irai - adû&eataiti [â 
■ acceptW'ie'iiiâtiohé'.' Lee confrère i dei d'jAiqkaratita 
apprenant 1 eé' qui i&'paBsàîi, alla- ;trouvei*i lie aolli- 



100 — 



citeur et lui proposa de prendre sa place, poul- 
ie seul avantage de lui être utile. Vous devinez 
l'étonnement et la joie de ce dernier. Le confrère 
n'était pas moins content ; à minuit il se trouvait 
à sou poste, seul, l'arme au bras; à la main 
droite son chapelet qu'il récitait en union avec 
ses confrères réunis à Notre-Dame des Vic- 
toires, et afin que le règlement eût son entière 
application, à minuit et demi, il récita l'amende 
honorable qui se dit au milieu de chaque heure. 
L'assemblée générale se tint, le 15 janvier, 
dans l'église de Saint-Thomas d'Aquin, mais 
cette fois, au bruit du canon, presque sous les 
obus prussiens qui tombaient à quelques mètres 
de cette église. La dispersion d'un grand nombre 
de confrères, la menace de mort que lançaient 
les projectiles ennemis, l'inclémence d'un hiver 
exceptionnellement rigoureux n'étaient pas des 
circonstances favorables à une nombreuse as- 
semblée; mais il n'y avait pourtant pas impos- 
sibilité absolue de se réunir, et le conseil avait 
décidé qu'il fallait obéir quand même au règle- 
ment, nonobstant ces sérieuses difficultés. L'as- 
■ sietàneeiseiiressentitM^e .ces obstacles ; elle fut 
pèw i nombreuse, ■ iraiais-iil' fee. trouva i ienco,re.> prés 
1 <k) CMïq'ùahte 1 > membres qui eurent i le.' xtoiïwr^ge de 
-tiènat 'ërnvASiyilpoulr. affirme|r'l«uuif|dévouen)en|t|i:à 



101 



l'Œuvre et pour témoigner par leur présence 
que l'observation de la règle est le plus solide 
ressort d'une semblable association, et ce qui 
maintient le mieux l'esprit de sacrifice et de zélé. 
En effet, cet esprit ne s'est pas démenti un seul 
instant, au milieu de difficultés toujours gran- 
dissantes, jusqu'au moment douloureux où la 
violation et la fermeture de nos sanctuaires 
sont venues opposer une impossibilité absolue 
à la bonne volonté. 






L/.OlHfi-tii, .... . ..,.-,, un •.,, , 

ub <*- «1 .efnoamaim ah «jnôii no- -ni-' viicoiirn 
r!|1, '"' !, <' 'i ' i] if') <>h n(o->i T /T-.lnij H h ,-iioe 



— 102 — 



CHAPITRE XI 



L'Adoration nocturne pendant la Commune de Paris. 

1871. 



Les exercices de l'œuvre de l'Adoration noc- 
turne, déjà fort gênés par le siège des Prus- 
siens, ont été complètement suspendus depuis 
le 29 mars jusqu'au 10 juin 1871, sous l'horrible 
régime de la Commune. Pendant que la révolu- 
tion du 18 mars s'accomplissait, l'Adoration 
perpétuelle se faisait à Saint-Joseph, rue Cor- 
beau. Après la première nuit, celle du 17 au 18, 
passée par les confrères, le clergé crut, par 
mesure de prudence, devoir fermer l'église. 
Mais, le 20 au soir, l'Œuvre reprit sa mission à 
Saint-Séverin, où les trois jours et les trois nuits 
d'Adoration se firent sans difficulté. Il y eut une 
nouvelle interruption, pour la nuit seulement, à 
Saint-Denis de la Chapelle qui se trouvait au 
centre du mouvement insurrectionnel et qui fut 
remplacé par les Dames Réparatrices de la rue 
d'Ulm, et de nouveau, Notre-Seigneur put 
remonter sur son trône de miséricorde, le 26 au 
soir, à Saint-Nicolas des Champs, où l'Adoration 






— 103 — 

perpétuelle se termina régulièrement le 29 au 
soir. Depuis ce moment l'Œuvre fut condamnée 
à la plus complète abstention. Quelques paroisses 
eurent bien encore le courage de faire l'Adora- 
tion du jour, Saint-Louis en l'Ile, les 2, 3 et 
4 avril ; Sainte-Marie des Batignolles, les 
30 avril, 1 er et 2 mai; Saint-Gervais, les 15, 16 et 
17 mai, au plus fort de la tempête et dans le plus 
proche voisinage du foyer du mal. Mais l'Ado- 
ration nocturne dut se faire par les Réparatrices, 
qui eurent l'insigne honneur pendant ces deux 
grands mois de lugubre mémoire, de conserver 
nuit et jourNoTRE-SEiGNEUR exposé et de repré- 
senter devant sa face adorable si meurtrie par 
les excès de l'impiété contre ses temples et con- 
tre ses prêtres, l'œuvre diocésaine de l'Adora- 
tion perpétuelle et de rendre sous cette forme, 
le grand devoir de l'adoration et de l'expiation, 
alors que presque toutes les églises de Paris 
étaient pillées, dévastées ou fermées. Elles 
trouvèrent des imitatrices dans des patronages 
de jeunes filles dirigés par les Sœurs de Saint- 
Vincenu de Paul. Dans une petite chapelle cachée 
au fond d'un des faubourgs qui semblait le plus 
hostile aux pratiques religieuses, le Saint-Sacre- 
ment était exposé ; jamais il ne fut abandonné, 
une jeune fille du patronage voisin y priait à 









— 104 — 

toute heure en réparation des outrages faits à 
Dieu et à son Église. 

Déjà, comme nous l'avons dit, les religieuses 
de l'Adoration réparatrice avaient plusieurs fois 
suppléé l'Œuvre dans les moments où les cir- 
constances lui avaient rendu impossible l'ac- 
complissement de sa mission, appliquant à ses 
intentions générales leur Adoration de jour et de 
nuit. Mais pendant la Commune leur concours 
fut incessant et digne de leur admirable et géné- 
reuse vocation. Leur maison ne fut pas exempte 
des perquisitions des fédérés qui voulurent ins- 
pecter jusqu'au sanctuaire où Nôtre-Seigneur 
exposé recevait les hommages de ces âmes 
d'élite. Ils se présentèrent l'arme au bras, dans 
l'attitude de gens qui ne savent ce qu'ils font, et 
le bon Maître dut faire entendre encore à son 
Père céleste ces paroles de miséricorde, pro- 
noncées il y a près de 2,000 ans sur le Calvaire: 

« Mon Père, pardonnez leur » Quoi qu'il en 

soit, une vertu surnaturelle dut sortir de l'ado- 
rable Hostie. Le chef de la bande, décontenancé, 
se découvrit en signe de respect, balbutiant à la 
Sœur qui l'accompagnait qu'il était catholique, 
et quelques autres donnant des marques plus ou 
moins fugitives d'un reste de foi dans la divinité 
de Celui qui devait être un jour leur souverain 



— 105 — 

juge, la maison échappa aux brutalités et aux 
exactions qui marquèrent ailleurs ces sortes de 
visites. 

En souvenir du concours si dévoué donné à 
l'Adoration perpétuelle par cette communauté, 
le conseil de l'Œuvre lui offrit un volume riche- 
ment relié comprenant la grande édition de 
notre office du Très-Saint-Sacrement , et le 
rapport dans lequel les services rendus par elle 
étaient mentionnés. Comme dédicace, la pre- 
mière page portait ces mots : 

« L'œuvre de l'Adoration nocturne du Très- 
« Saint-Sacrement, à Paris, aux Sœurs de 
« l'Adoration réparatrice, souvenir de gratitude 
« pour l'année 1870-71 ; et union de prières et 
« d'adoration aux pieds de Notre-Seigxeur dans 
« l'Eucharistie. > 

Mme la Supérieure générale répondit au 
Président de l'Œuvre la lettre suivante : 



« Amour et sacrifice ! 
« Monsieur, 

« Je ne saurais vous exprimer combien nous 
« sommes touchées, mes Sœurs et moi, de l'atten- 
« tion si délicate que vous avez eue en nous 
« envoyant un souvenir précieux pour nous à 
« tant de titres. Nous nous sommes estimées bien 



— 106 






heureuses d'avoir pu, pendant de cruels jours, 
suppléer, bien indignement sans doute, mais 
de tout notre cœur, à vos pieuses réunions, 
malheureusement interrompues, et nous avons 
regardé comme une grande grâce, cette mis- 
sion confiée à notre œuvre d'Adoration répara- 
trice. Croyez, Monsieur, qu'elle a été pour 
nous, force et consolation et que nous y avons 
trouvé un aliment de vocation et de vie pour 
nos âmes. Nous y avons vu, comme une nou- 
velle preuve de notre raison d'être, cela nous 
a été comme une nouvelle sanction de la sainte 
Eglise, et nous avons plutôt besoin de vous 
exprimer notre gratitude que nous ne pouvions 
nous attendre à être remerciées. 
« Recevez donc à votre tour, Monsieur, toute 
l'expression de notre reconnaissance pour 
l'œuvre de l'Adoratien nocturne. Ce témoi- 
gnage de son bienveillant souvenir restera 
dans nos archives avec celui du bonheur que 
nous avons eu à prier pour elle et avec elle, et 
nous acceptons avec bonheur l'union perpé- 
tuelle de prière et d'adoration aux pieds de 
Notre-Seigneur exposé dans la divine Eucha- 
ristie. 

« Nous nous recommandons bien humblement 
à vos prières, Monsieur, ainsi que tous les 






— 107 — 

« besoins et tous les membres de notre Œuvre, 
« et nous vous prions d'agréer l'hommage du 
« profond respect avec lequel j'ai l'honneur d'être 

« Votre bien reconnaissante et dévouée ser- 
« vante en Jésus-Christ, 

« Sœur Agnès de Saint-Joseph, 

« Supérieuro générale. 



20 août 1872, rue d'Ulm, 36. » 



L'œuvre de l'Adoration nocturne, de concert 
avec la société de Saint- Vincent de Paul, voulut, 
après cbs jours malheureux, donner un témoi- 
gnage public de sa reconnaissance envers Notre- 
Dame des Victoires. Elle le fit par un ex voto 
sous forme de plaque de marbre placée au mois 
de juillet 1871, dans l'église de ce nom et qui 
porte l'inscription suivante : 






— 108 — 

A NOTRE-DAME DES VICTOIRES, NOTRE PROTECTRICE : 

HOMMAGE DE RECONNAISSANCE ET D'AMOUR 

DES CONFÉRENCES DE SAINT-VINCENT DE PAUL 

ET DE L'ŒUVRE DE L' ADORATION NOCTURNE 

DE PARIS 

31 mai 1871 

L'œuvre de l'Exposition et de l'Adoration nocturne 
du Très-Saint-Sacrement, à Paris, a pris naissance 
dans cette église, le 6 décembre 1848, par les soins du 
R. P. Hermann et de Mgr François de la Bouilleiie, 
évêque de Carcassonne, alors vicaire général du dio- 
cèse de Paris. 






Cet ex voto orne le pilastre de la chapelle de 
Saint-Augustin, qui est du côté de l'Évangile. Il 
constitue entre les deux Œuvres une union que 
chaque année resserre davantage pour le plus 
grand bien de l'une et de l'autre, ainsi que nous 
l'avons vu dans les chapitres précédents. 



— 109 



CHAPITRE XII 



L'œuvre de l'Adoration nocturne et les Pèlerinages. 
Rome et Jérusalem. — Pèlerinages Eucharistiques. 

1872 à 1877. 



Au milieu de tous les scandales et de tous les 
désordres enfantés par le déchaînement des 
passions et les débordements de l'impiété, après 
toutes les épreuves cruelles qui semblaient avoir 
été envoyées à notre chère France, comme pour 
l'arrêter sur la pente du mal, il s'est produit un 
grand mouvement de pèlerinages, saisissant et 
admirable acte de foi et d'expiation qui, depuis 
quelques années, entraîne les masses vers les 
sanctuaires où s'est plus particulièrement mani- 
festée la toute puissante bonté de Dieu. 

L'œuvre de l'Adoration nocturne ne pouvait 
s'isoler de ce mouvement. 

Elle fut représentée à Lourdes, dans le grand 
pèlerinage national du 6 octobre 1872, par deux 
de ses membres qu'elle avait spécialement dé- 
légués. Ce jour-là même, entre onze heures 
et minuit,' un certain nombre de pèlerins étaient 
réunis au nombre de deux cents environ devant 












— 110 — 

la grotte miraculeuse de Massabielle, une di- 
zaine du chapelet fut récitée à haute voix aux 
intentions de l'Œuvre et spécialement pour son 
recrutement. 

Presque tous les pèlerinages qui eurent lieu en 
1873, et notamment celui de Paray-le-Monial, 
comptèrent des membres de l'association noc- 
turne ayant reçu mission de la représenter dans 
ces imposantes manifestations catholiques; au 
pèlerinage de Paray-le-Monial plus de trente 
associés se trouvèrent réunis au supérieur et au 
directeur ecclésiastique de l'Œuvre. 

Elle eut aussi son délégué au pèlerinage de 
Rome, fixé au 5 mai 1873, jour de la fête de 
Sa Sainteté Pie IX. Le dimanche matin, 25 mai, 
le confrère, que nous désignerons par son pré- 
nom de Pierre, eut le bonheur d'être reçu en 
audience particulière -par le Souverain-Pontife. 
Nous ne pouvons résister à la satisfaction de 
raconter cette audience où l'on verra la manifes- 
tation de la délicate bonté de Dieu pour son 
fidèle adorateur et dans laquelle notre bien-aimé 
Pie IX a montré de quelle étonnante manière, 
sous la divine influence du catholicisme, la plus 
grande autorité du monde s'allie à la plus admi- 
rable simplicité. 

Pierre, honnête ouvrier, plus riche des dons 



111 — 



de la foi que de ceux de la fortune, mettant son 
unique confiance dans la Providence qui avait 
pourvu aux frais de son voyage, était parti seul 
pour Rome avec un immense désir de \-oir le 
Saint-Pére. Arrivé trop tard pour assister à la 
réception des pèlerins français, inconnu, sans 
protecteurs, il ne lui restait d'autre ressource 
que la prière. Il alla donc au tombeau des 
apôtres demander à saint Pierre, son patron, de 
lui procurer la faveur d'une audience du Pape. 
Saint Pierre, qui a quelque pouvoir à Rome, ne 
fit pas attendre sa réponse. Au moment où notre 
pèlerin terminait sa prière, un personnage qu'il 
ne connaissait pas passe près de lui, il l'accoste 
et lui demande quelle démarche il faut faire pour 
voir le Pape en particulier. Il ajoute qu'il en a 
le plus grand désir et qu'il vient de faire part de 
son désir à saint Pierre, son patron. — Ce que 
vous demandez-là est très-difficile, répond le 
personnage, mais, puisque vous avez la protec- 
tion de saint Pierre, je crois bien que vous 
réussirez. Donnez-moi votre adresse, retournez 
chez vous et attendez en paix. 

Deux jours après, Pierre recevait une lettre 
d'audience pour le dimanche, 25 mai, à dix heu- 
res du matin... Fidèle au rendez-vous, il atten- 
dait dans un salon plein de cardinaux, d'évê- 



112 — 



I 



ques, de grands seigneurs, s'effaçant le plus 
possible devant cette brillante assemblée, pen- 
sant bien être reçu le dernier de tous, lorsqu'à 
dix heures précises, une porte s'ouvre et il 
entend appeler son nom. Il était si troublé qu'il 
fallut l'appeler deux fois. Le voilà donc, lui, 
simple ouvrier charpentier, passant le premier, 
avant toutes ces sommités de la vertu, de la 
science et du monde et admis devant celui qui 
est, sur cette terre, l'auguste représentant du 
divin charpentier de Nazareth. 

Profondément ému, il se tenait à genoux à 
une certaine distance de Sa Sainteté. Le Pape, 
le regardant avec bonté lui dit : « Approchez- 
« vous de moi, mon enfant, vous êtes ici avec 
« votre père, » et le prenant par la main, il 
ajouta: « Que désirez-vous? » 

« Saint-Père, une bénédiction pour ma famille 
« et pour ceux qui me sont chers, et aussi une 
« bénédiction particulière pour l'œuvre de l'Ado- 
« ration nocturne, qui se développe beaucoup à 
« Paris et où nous prions toujours pour Votre 
« Sainteté. » 

« J'aime beaucoup l'œuvre de l'Adoration noc- 
« turne et ceux qui s'en occupent, dit le Pape. 
« L'adoration c'est le fondement du christia- 
« nisme ; et la communion, mon fils? » 



- 113 



« Saint-Père, notre règlement nous invite à 
« communier après chaque nuit aux intentions 
« du Souverain-Pontife. » 

« Ores mirabilis! mon fils, les œuvres de 
« Dieu sont admirables. Je sais que la France 
« prie beaucoup pour moi. Elle m'a toujours 
« montré un grand amour ; jusqu'aux dames qui 
«sont venues ces jours-ci, là, autour de moi. 
« Aussi, je prie beaucoup pour la France. Elle a 
« été très-humiliée, mais elle deviendra plus 
« glorieuse que jamais. Pour devenir grand, il 
« faut être humilié. Tant de pèlerinages que fait 
« la France, tant de bonnes œuvres, Dieu ne 
« les laissera pas sans récompense. La France 
« aura la paix. 

« Je bénis vous, vos intentions et vos œuvres ; 
« je bénis l'œuvre de l'Adoration nocturne et 
« chacun de ses membres en particulier. 

« Et vous, mon fils, qu'est-ce que vous faites 
« donc à Paris ? » 

« Saint-Père, je cherche la gloire de Dieu et 
«le salut des âmes et je m'occupe de l'Adora- 
« tion nocturne. » 

« Eh bien, puisque le bon Dieu veut que vous 
« soyez son serviteur, moi, je vous accorde une 
« indulgence plénière et je vous donnerai ma 
« médaille en souvenir du Saint-Père. 






— 114 — 

c Cher enfant, vous voyez, votre Pape est 
« vieux — il ne restera pas longtemps — et ce- 
« pendant bien des ennemis sont tombés à ma 
« droite et à ma gauche; avec l'aide de Dieu, 
« nous triompherons encore, car d'autres enne- 
« mis qui sont à ma porte tomberont aussi ; mais 
« le Pape restera toujours debout. 

« Adieu donc, mon fils,» (et élevant les bras et 
les yeux) « je vous donne rendez-vous au ciel. » 
Ce touchant épisode se passe de tout commen- 
taire, le saint y apparaît à travers la dignité du 
Pontife et la bonté du Père. — Oh! sainte 
Église, notre mère, vous si méconnue, si calom- 
niée, vous pouvez seule donner un tel spectacle 
et une telle leçon. — Que viennent-ils nous 
parler de dignité humaine et d'égalité, ces hom- 
mes qui se font vos détracteurs. Ce sont des 
biens qu'ils ne connaissent pas et dont le catho- 
licisme seul a le secret. Nous pourrions nous 
borner à ce fait qui suffit à les confondre, mais 
nous en ajouterons un second qui a aussi son 
utile signification. Notre bon Pierre, qui a pour 
son patron une dévotion justifiée par de nom- 
breuses grâces, voulait avoir une Messe au tom- 
beau du saint Apôtre. Après avoir prié quelque 
temps devant ce tombeau, il entre dans une sa- 
cristie voisine et, avec la simplicité chrétienne 



- 115 



des enfants de Dieu, il fait part de son désir. Un 
cardinal intervient, apprend de lui qu'il est 
pèlerin français, se montre très-touché de sa 
dévotion et lui dit : « Ce que vous demandez ne 
« s'accorde que très-rarement, mais votre foi 
« vous a sauvé ; vous aurez votre Messe au 
« tombeau des saints apôtres, et c'est moi-même 
« qui la dirai. » On ne sait vraiment trop qu'ad- 
mirer le plus ici, ou de la foi qui obtient de telles 
faveurs, ou de la charitable bonté qui s'en fait 
l'instrument. 

Trois ans plus tard, en 1876, le même adora- 
teur se retrouvait aux pieds du Souverain-Pon- 
tife. Voici le colloque qui s'établit entre eux : 

Pierre : « Saint-Père, je suis chargé de repré- 
« senter l'œuvre de l'Adoration nocturne du 
« Très -Saint -Sacrement à Paris, auprès de 
« Votre Sainteté, de lui dire que, pendant l'an- 
« née 1875, plus de deux mille cinq cents hom- 
« mes sont venus s'agenouiller la nuit au pied 
« du Saint-Sacrement, pour appeler la miséri- 
« corde de Dieu sur la sainte Eglise et pour 
« prier pour Votre Sainteté, et que les senti- 
« ments d'amour et de dévoùment pour Votre 
« auguste personne, qui animent tous les mem- 
« bres de cette Œuvre, sont tels que, si l'occasion 
« se présentait de défendre les droits de l'Église 

5* 



— 116 - 



« et ceux de Votre Sainteté, jusqu'au sacrifice 
« de la vie, ils feraient ce sacrifice et répan- 
« draient, pour une aussi sainte cause, jusqu'à 
« la dernière goutte de leur sang. » 

Le Pape : « Je n'en doute pas , mon fils ; 
« l'Adoration nocturne est un acte si agréable à 
« Dieu qu'il ne peut inspirer que de nobles 
« sentiments et de bonnes résolutions à ceux 
« qui la pratiquent. Engagez donc tous les mem- 
« bres de cette belle Œuvre, que j'aime parti- 
« culièrement, à lui rester bien dévoués. » 

Pierre : « Saint-Père, le président de l'Œuvre 
« m'a chargé de vous demander une grande 
« faveur, c'est celle de baiser vos pieds trois 
« fois ; une fois pour lui, une fois pour le conseil 
« de l'Œuvre, une fois pour l'Œuvre entière. » 
Le Pape : «Volontiers, mon fils ; » — et il donne 
son anneau à baiser; mais le confrère voulant 
remplir fidèlement sa mission, se jette à ses 
pieds et les baise trois fois ; en se relevant il 
prend la main de l'auguste vieillard, la porte à 
ses lèvres d'abord et puis sur son cœur où il la 
ient pressée quelques instants. Le Pape, le 
regardant avec une infinie bonté, lui dit : 

« Mon cher enfant, vous êtes venu consoler un 
« pauvre prisonnier, je vous en remercie. Vous 
« direz à votre président et à tous les membres 



— 117 — 



« de votre Œuvre qu'ils prient beaucoup et 
« de plus en plus. Nous sommes dans un moment 
« solennel, si grave qu'il faut redoubler de sup- 
« plications pour obtenir le triomphe de l'Église 
«méconnue et cruellement éprouvée; mais, 
« mon cher enfant, ayons confiance , comme 
« cela arrive toujours pour l'Église, le triomphe 
« suivra la persécution. De mon côté, je prierai 
« pour votre belle Œuvre, afin qu'elle s'étende 
« et se dilate, et je prierai aussi pour ses mem- 
« bres. — Je les bénis tous, ainsi que leurs 
« familles, leurs enfants et leurs petits enfants. 
« Je bénis l'Œuvre entière et son Conseil; » 
et le Vicaire de Jésus-Christ, levant la main, 
laissa tomber sur l'Œuvre, dans la personne 
de son délégué, cette précieuse bénédiction qui 
sera pour elle et pour chaque associé une source 
de grâces abondantes. 

Deux choses sont à remarquer dans les 
paroles du Saint-Père; d'abord la recomman- 
dation qu'il fait de prier avec plus d'ardeur 
pour la sainte Église dans les circonstances 
présentes. Que chacun se fasse donc un devoir 
de répondre avec zèle et fidélité à cet appel du 
Père commun. Dans les nuits d'Adoration, qu'il 
y ait un redoublement de ferveur et d'insistance 
pour demander à Dieu le prochain triomphe de 






— 118 — 

l'Église, et pour lui demander surtout qu'il 
s'opère par le salut de notre pays. En second 
lieu, le cas que fait le Saint-Père de la fonc- 
tion d'adorateur nocturne. Il ne se borne pas 
à bénir les membres eux-mêmes, il étend sa 
bénédiction jusqu'à la troisième génération, 
comme pour montrer, par une faveur d'un si 
grand prix, l'importance qu'il attache à cette 
pieuse fonction et à l'action de notre Œuvre 
pour le succès de la cause catholique. 

Pierre fut si heureux de l'accueil paternel 
de notre bien-aimé Pie IX, et des grâces reçues 
dans son premier pèlerinage à Rome, qu'en 
témoignage de reconnaissance, il fit, quelques 
mois après, le pèlerinage de Paris à Notre-Dame 
de la Salette a pied, portant encore le souvenir 
de l'Œuvre sur la montagne de l'apparition. 

L'année suivante, il entreprenait le pèleri- 
nage de la Terre-Sainte. Parti de Marseille le 
12 mars 1874, avec la caravane qui allait visiter 
les lieux saints, il était arrivé à Jérusalem 
juste à point pour passer en Adoration au saint 
Sépulcre, avec d'autres pèlerins français, la nuit 
du jeudi au vendredi-saint. Il n'avait entre- 
pris ce lointain voyage que pour obéir à l'ins- 
piration intime qu'il avait ressentie pendant 
plusieurs mois, dans ses nuits d'Adoration et 



119 — 



dans ses visites au Saint-Sacrement, de faire 
ainsi amende honorable à Dieu, pour les assas- 
sinats de ses ministres, commis à Paris, par 
les révolutionnaires de la Commune, et pour 
lui demander le triomphe de l'Église, la déli- 
vrance du Saint-Père et le salut de la France. 
Cette pensée fut agréée, sans doute, par la 
bonté divine, car Pierre a été, pendant tout 
son pèlerinage, l'objet de grâces particulières. 
Admis à une audience du patriarche de Jéru- 
salem, il lui parla de l'Œuvre et des prières 
qu'elle adresse toutes les nuits au ciel pour 
l'Eglise et pour notre Saint-Père le Pape. Il 
lui promit qu'à son retour en France il deman- 
derait au conseil de l'Œuvre d'inscrire son nom 
après celui du Saint-Père sur la liste des 
intentions recommandées aux confrères. Le 
Patriarche, touché de cette promesse, écrivit 
lui-même sur un registre spécial une formule 
d'union entre l'Association et toutes les œuvres 
et les pèlerinages qui se font à Jérusalem pour 
la plus grande gloire de Dieu et le salut des 
âmes, afin que chacun des associés puisse avoir 
sa part des avantages spirituels résultant de 
ces manifestations de la foi catholique. Le 
lendemain, il adressa à Pierre la lettre sui- 
vante ; 



— 120 



Patriarcat Latin de Jérusalem. 



« Jérusalem, le 10 avril 1874. 

« Monsieur, 

« Je suis extrêmement touché de la commu- 
« nication que vous avez bien voulu me faire. 
« Sous le poids de la charge qui m'est imposée 
« et de la sollicitude qui en découle, c'est pour 
« moi une consolation d'apprendre que votre 
« pieuse Association me fera l'honneur de join- 
« dre mon nom à celui du Saint-Père, dans les 
« prières qu'elle adresse au Seigneur, et je 
« m'empresse de vous en exprimer toute ma 
« gratitude. Quelle que soit notre petitesse à 
« côté du Père commun des fidèles, nous n'en 
« trouvons pas moins heureuse et naturelle la 
« pensée que vous avez eue de ne point séparer 
« Jérusalem de Rome et d'unir dans un même 
« sentiment d'amour les noms des pasteurs de 
« ces deux mémorables cités. 

« Nous ne voulons point comparer notre 
« charge à celle de l'immortel Pontife de Rome, 
« mais sans être aussi ardue, notre position n'en 
«. a pas moins ses difficultés et si nous nous 
« plaisons à reconnaître que, sans la grâce de 
« Dieu, il nous est impossible de nous acquitter 



- 121 - 

« dignement des devoirs qu'elle nous impose, 
« jugez si nous devons vous être reconnaissant 
« des efforts que fera votre confrérie pour nous 
« en obtenir la précieuse dispensation dans la 
« plus large mesure. Aussi est-ce de grand cœur 
« que nous prions le bon Dieu de bénir vos per- 
« sonnes, les efforts de votre zèle, et votre 
« pieuse confrérie. 

« C'est dans ces sentiments que je vous prie 
« d'agréer l'expression de mes sentiments affec- 
« tueux. 

« Benedicat vos Deus, Pater et Filius et 
« Spiritus sanctus. 

« f Vincent, 
« Patriarche de Jérusalem. » 



La promesse de l'adorateur a été fidèlement 
tenue, et chaque soir le Patriarche de Jérusalem 
est recommandé aux prières des associés, après 
notre Saint-Père le Pape. 

Ce qui précède nous amène à dire quelques 
mots des pèlerinages Eucharistiques. 

Le premier a été fait le lundi de Pâques 1874, 
à Avignon, par les habitants de la ville dans la 
chapelle des Pénitents-Gris, où le Très-Saint- 
Sacrement est continuellement exposé depuis 



— 122 — 

six siècles et demi et qui est devenue célèbre par 
le miracle de 1433, dont la mémoire se perpétue 
par un jubilé qui a lieu tous les vingt-cinq ans. 
Dans une inondation du Rhône, le Très-Saint- 
Sacrement fut respecté par les eaux qui avaient 
envahi le sanctuaire et qui se tinrent comme 
suspendues pendant trois jours le long des mu- 
railles. Près de quatre cent cinquante ans plus 
tard, le pieux archevêque qui gouvernait le 
diocèse rappelait dans son Mandement pour 
l'établissement de l'Adoration perpétuelle, ce 
caractère miraculeux de la chapelle privilégiée. 
Ce premier pèlerinage Eucharistique reçut les 
encouragements du Saint-Père que le cardinal 
Antonelli faisait connaître au comité catholique 
d'Avignon par la communication suivante : 

« Ayant porté à la connaissance du Saint-Père 
« cet élan de piété dont le but est de rendre 
« gloire à la présence réelle de Notre-Seigneur- 
« Jésus-Christ dans la sainte Eucharistie, il a 
« daigné bénir tous ceux qui prendront part à 
« cette manifestation religieuse. » 

L'année 1876 ramenait à Avignon la proces- 
sion jubilaire. Elle a eu lieu le dimanche 9 juil- 
let avec tous les caractères de la manifestation 
la plus imposante. Près de cent mille personnes 
y prirent part, donnant les témoignages les 



— 123 



moins équivoques d'une foi profonde. L'Œuvre 
s'y était fait représenter par trois de ses mem- 
bres (1) qui occupèrent dans le cortège une place 
d'honneur : munis chacun d'un flambeau, ils en- 
touraient le Très-Saint-Sacrement porté par 
Mgr l'archevêque d'Avignon sous un magnifique 
dais. La bénédiction fut donnée à trente-trois 
reposoirs, et la procession sortie à trois heures 
et demie ne rentra qu'à onze heures et demie du 
soir. Le lendemain il y eut Adoration nocturne 
dans la chapelle du miracle et Monseigneur d'Avi- 
gnon voulut y prendre part, donnant ainsi à ses 
diocésains un exemple qui ne pouvait que porter 
d'heureux fruits. En effet, depuis lors, le 9 de 
chaque mois, Mgr l'archevêque se rend fidèle- 
ment, le soir, à la même chapelle pour y faire 
son heure de veille entouré des Pénitents-Gris 
qui continuent l'Adoration jusqu'au matin. 

Après Avignon, mentionnons Paris, Douai et 
les Ulmes Saint-Florent. 

Paris a eu, en 1875, le deuxième dimanche de 
Carême, son premier pèlerinage Eucharistique à 
Saint-Jean-Saint-François, où sont conservées 
les traditions du fameux miracle des Billettes, 
arrivé en 1290. 



(1) MM. Daniel Collet, Charles de Parseval et Amor. 



— 124 — 

Un juif, ayant percé, à plusieurs reprises, une 
sainte Hostie, de laquelle le sang coula en abon- 
dance, la jeta dans une chaudière d'eau bouil- 
lante. L'eau devint rouge comme du sang, 
l'Hostie en sortit intacte et, au-dessus de la 
chaudière, apparut l'image du crucifix. 

Ce pèlerinage fut renouvelé en 1876, à la même 
date, en présence de Sa Grandeur Mgr l'arche- 
vêque de Larisse, coadjuteur de Son Éminence le 
cardinal archevêque de Paris. Un grand nombre 
d'hommes avaient répondu à l'appel qui leur 
avait été fait. 

Enfin le 26 novembre 1876, dernier dimanche 
de l'année ecclésiastique, les membres de l'œuvre 
de l'Adoration nocturne ont fait un pèlerinage 
à la chapelle du Vœu-National au Sacré-Cœur, à 
Montmartre, pour remercier Dieu des grâces 
accordées à l'Œuvre pendant l'année et pour en 
solliciter de nouvelles pendant l'année qui allait 
commencer. Quatre cents d'entre eux y ont pris 
part, et l'édification qu'ils ont donnée a été telle 
que le digne supérieur de la chapelle du Vœu- 
National a demandé que ce pèlerinage fut renou- 
velé, tous les ans, à la même époque. Ce désir 
sera accompli (1). 



(1) Il l'a déjà été en 1877. 



— 125 — 

Le 17 mai 1875, le pèlerinage Eucharistique 
de Douai fut célébré en l'église du Saint-Sacre- 
ment-de-Miracle de cette ville par une solennité 
et un concours de fidèles, dignes du Dieu qui 
s'était visiblement manifesté dans le Très-Saint- 
Sacrement, en 1254. Le divin Maître du monde se 
montra successivement dans une Hostie sous la 
triple forme de TEnfant-Dieu, du Died-Sauvedr 
étendu sur la Croix et du souverain Juge venant 
juger les hommes... Plus de cinquante mille 
personnes s'étaient donné rendez-vous à cette 
fête, de tous les points de la France et de la 
Belgique. 

La ville, magnifiquement ornée et pavoisée, 
témoignait de la foi de ses habitants et rendait 
hommage à la sainte Hostie par l'aspect de fête 
dont elle s'était revêtue. Son Éminence le car- 
dinal archevêque de Cambrai, entouré de plu- 
sieurs évêques, présidait la cérémonie. On y 
vit une nouveauté qui doit être signalée ici. 
Ce fut un congrès Eucharistique, tenu sous la 
présidence de cinq prélats, dans l'église de Notre- 
Dame et dans lequel les hommes seuls furent 
admis. Plus de deux mille d'entre eux se pres- 
saient dans l'enceinte bénie pour assister à ce 
congrès, le premier de ce genre et où, pendant 
deux heures, il ne fut question que de la sainte 



— îae — 

Eucharistie. Un grand nombre de membres de 
l'œuvre de l'Adoration nocturne de Paris étaient 
présents à cette solennité. 

Aux Ulmes de Saint-Florent, près Saumur, le 
miracle qu'a voulu honorer le pèlerinage du 
6 juillet 1876 avait eu lieu le 2 juin 1668, 
samedi de l'octave de la Fête-Dieu. Notre- 
Seigneur, pour confondre les négations des pro- 
testants très-nombreux dans cette région, avait 
apparu en sa forme humaine à la place de la 
sainte Hostie, au moment où le curé de la paroisse 
allait donner le Salut du Très-Saint-Sacrement. 
Le pèlerinage Angevin, organisé par les Pères de 
la Congrégation du Très-Saint-Sacrement de la 
résidence d'Angers, réussit à souhait et fut une 
éclatante réponse aux ennemis du Christ et de 
l'Église qui s'efforcent par leurs blasphèmes de 
supprimer Dieu lui-même dans l'esprit et le 
cœur des populations. 

La France est riche en sanctuaires où la misé- 
ricordieuse puissance de Dieu a confirmé, par des 
miracles authentiques, le dogme de la présence 
réelle de Notre-Seigneur Jésus-Christ dans 
l'Eucharistie. Ces miracles ont principalement 
eu lieu aux époques où ce dogme fondamental 
étant attaqué et nié, il fallait fortifier la foi des 
fidèles par ces manifestations extraordinaires. 



— 127 



Mgr de Ségur a eu la pieuse pensée de faire 
l'historique de ces sanctuaires, dans un de ses 
charmants petits livres si populaires , qu'il a 
intitulé : La France aux pieds du Saint- 
Sacrement, et qu'on trouve chez Haton, éditeur 
à Paris. 



— 128 — 



CHAPITRE XIII 

Les Prières publiques. — L'œuvre de l'Adoration 

nocturne et les Comités catholiques. 

Recommandations. 

Union de l'œuvre de l'Adoration nocturne avec les 

grandes Œuvres de prières. 

1863 à 1877. 



L'Adoration nocturne a joué un rôle impor- 
tant dans la grande neuvaine qui a précédé et 
préparé les prières publiques demandées par 
l'Assemblée nationale à l'occasion de sa ren- 
trée, au mois de novembre 1873. Le mouvement 
imprimé à cet acte de piété dans cette circons- 
tance a été considérable et s'est étendu dans 
toutes les contrées de la France. Voici les noms 
des villes qui, à notre connaissance, ont 
donné ce grand spectacle de généreux chrétiens, 
ajoutant à leur journée de travail et de prières 
une nuit de veille et de supplication pour at- 
tirer la miséricorde de Dieu sur la France: 
Amiens, Arras, Autun, Béthune, Bordeaux 
(dans plusieurs paroisses de la ville), Boulogne- 
sur-Mer, Calais, Carpentras, La-Roche-sur- 
Yon, Le Mans, Le Vigan, Lyon, Magny-en- 



— 129 — 

Vexin, Nancy, Nevers, Orléans, Paris, Poitiers, 
Rouen, Saint-Malô, Saint-Omer, Toulouse, Tou- 
lon (dans plusieurs sanctuaires), Tours, Troyes, 
Versailles. 

A Paris, l'Adoration nocturne, en union avec 
la neuvaine, a eu lieu à Notre-Dame des Vic- 
toires, centre spirituel de l'Œuvre; quatre- 
vingts hommes venant de tous les quartiers 
de cette grande ville, et représentant toutes 
les conditions sociales, y ont pris part pour 
la plus grande édification commune. 

Il était juste que l'œuvre de l'Adoration noc- 
turne eut sa place marquée parmi les grandes 
œuvres de notre temps et qu'elle fut, à ce titre, 
signalée à l'attention de la France chrétienne. 
Les Comités catholiques, en particulier, appré- 
ciant son importance, lui font une part dans leurs 
plus sérieuses préoccupations. Tous les ans, à 
leur assemblée générale, tenue à Paris, la Com- 
mission des œuvres de prières lui consacre un 
rapport spécial qui a toujours eu les honneurs 
de la lecture en séance générale. 

En 1875, le rapporteur émettait les vœux 
suivants qui n'étaient que le développement de 
ceux qu'avaient proclamés, au mois de novem- 
bre 1874, les Comités catholiques du Nord 
réunis à Lille. 



— 130 — 












1° Qu'à Paris, les hommes chrétiens partici- 
pent en plus grand nombre à l'Adoration noc- 
turne, surtout quand elle aura lieu dans leur 
paroisse et se mettent pour cela à la disposition 
du clergé ; 

Que les hommes d'œuvres, en particulier, se 
fassent, principalement par l'exemple, les apô- 
tres de cette pieuse pratique et s'efforcent, en 
s' entendant avec le clergé et l'association de 
l'Adoration nocturne, d'organiser les nuits d'a- 
doration avec l'élément paroissial ; 

2° Que les Comités catholiques de province 
établissent l'Adoration nocturne partout où ils 
pourront, dans les villes comme dans les parois- 
ses rurales ; — douze hommes de bonne volonté 
suffisent pour cela ; 

3° Que les Comités catholiques, établis dans les 
diocèses où n'existe pas encore l'Adoration per- 
pétuelle de jour, sollicitent de leurs èvèques la 
fondation de cette admirable institution ; 

4° Que les Comités qui' existent dans les dio- 
cèses où l'Adoration de jour est déjà établie, 
travaillent à compléter l'Adoration et à la rendre 
réellement perpétuelle par l'Adoration nocturne, 
même dans les campagnes ; 

5° Enfin que les hommes chrétiens se fassent 
un devoir d'assister aux processions du Très- 



— 131 — 

Saint-Sacrement toutes les fois qu'ils en auront 
l'occasion. 

Ces vœux, ratifiés à Lille et à Paris, ont été 
renouvelés presque dans les mêmes termes au 
Congrès Eucharistique de Douai le 17 mai 1875, 
et au Congrès catholique de Poitiers (18-22 août 
de la même année). 

Au Congrès des directeurs d' œuvres ouvrières, 
tenu à Reims (23-27 août 1875), dans un rap- 
port sur l'établissement des œuvres de prières 
dans les œuvres ouvrières, l'Adoration nocturne 
est signalée particulièrement à l'attention des 
directeurs de patronages et de cercles. Pour la 
recommander, le rapporteur s'est appuyé sur les 
heureux résultats obtenus à Paris par la partici- 
pation des ouvriers et des apprentis aux exercices 
de l'Adoration nocturne. 

La confiance qu'inspire l'œuvre de l'Adoration 
nocturne comme œuvre de prières se manifeste 
par le nombre considérable d'intentions qui sont 
recommandées à toutes les nuits et par son union 
avec les grandes œuvres de prières et de péni- 
tence de notre époque. 

Le nombre des recommandations va toujours 
croissant; chaque nuit six à huit mille sont 
signalées à la charité des adorateurs. Elles sont 
aussi variées que peuvent l'être les misères 

5" 






— 132 — 

morales et physiques de l'humanité. C'est au 
hout de l'année trois millions d'intentions par- 
ticulières de toutes natures, appliquées à toutes 
sortes de besoins spirituels et temporels pour 
lesquelles l'Œuvre a prié, sans compter les 
intentions générales: l'Église, Notre Saint-Père 
le Pape, la France, les grandes Œuvres, les 
Missions lointaines, etc. Quelles intentions fu- 
rent jamais plus dignes de toucher des cœurs 
vraiment chrétiens et Français? 

Le jeudi 6 août 1863, premier jeudi du mois, 
l'église de Notre-Dame des Victoires avait, 
selon l'usage, l'Adoration mensuelle du Très- 
Saint-Sacrement. Après le sermon de la réunion 
du soir, le R. P. Bonaventure annonça solennel- 
lement en chaire que l'œuvre de l'Adoration 
nocturne du Très-Saint-Sacrement était affiliée 
à l'Ordre des Capucins, et remit entre les mains 
de M. le curé le diplôme de cette affiliation, pour 
le transmettre à M. le président de l'Œuvre, en 
ce moment absent. Cette faveur exceptionnelle 
était déjà accordée depuis quelque temps par le 
R. P. général de l'Ordre des Capucins ; mais la 
publication solennelle devait s'en faire dans 
cette église, à un exercice d'Adoration men- 
suelle, et, par une circonstance particulière, les 
RR. PP. Capucins n'avaient pu prêcher depuis 



133 



plusieurs mois à cet exercice. — Il n'est pas 
besoin, du reste, de faire remarquer pourquoi 
Notre-Dame des Victoires a été choisie pour 
recevoir cette publication solennelle. Nous 
avons dit ailleurs que Notre-Dame des Vic- 
toires a servi de berceau à l'œuvre de l'Adora- 
tion nocturne et que, depuis, elle est demeurée 
le sanctuaire particulier de cette Œuvre. 

Voici la traduction de ce diplôme, que nous 
sommes heureux d'offrir à tous les zélés con- 
frères de l'Adoration nocturne et à toutes les 
personnes qui entourent cette pieuse institution 
de leurs justes sympathies : 

« Nous, Alphonse de Rumilly, procureur gé 
néral de tout l'Ordre des mineurs Capucins de 
Saint-François, aux frères de la Congrégation 
désignée sous le nom de l'Adoration nocturne de 
Paris. 

« Par suite de la faculté accordée à notre 
Ordre par le pape Urbain V, d'heureuse mé- 
moire, en vertu des présentes, nous les recevons 
comme fils spirituels de notre Ordre, et les 
rendons participants de toutes les Messes, priè- 
res, de tous les jeûnes, mortifications, actes 
d'obéissance, pèlerinages, silences, abstinences, 
prédications, veilles, disciplines, observances 
régulières, pénitences, actes de résignation, 



— 134 — 

exercices spirituels, œuvres pies, et de tout le 
bien que font nos Frères par la grâce de Diec, 
mais à la condition qu'ils s'en rendent dignes 
par l'exacte observation des préceptes divins, par 
une vive affection et une protection particulière 
pour notre habit. Et alors, participant aux 
biens précités, ils pourront dire avec le pro- 
phète : Particeps ego sum omnium timentium 
te et custodientium mandata tua. 

« En foi de quoi, nous avons délivré le présent 
diplôme signé de notre propre main, et scellé du 
grand sceau de notre Ordre. 

« Donné dans notre couvent de l'Immaculée- 
Conception de Rome. 

« Signe: F. Alphonse. » 

Le 8 septembre de la même année, le prési- 
dent de l'Œuvre recevait la lettre suivante du 
vénérable curé de Notre-Dame des Victoires. 






« A Monsieur le Président de l'œuvre de 
« l'Adoration nocturne. 

« Paris, ce 8 septembre 1863. 

« Monsieur le Président, 

« Des liens intimes unissent depuis longtemps 
« l'Archiconfrérie à l'œuvre de l'Adoration 



— 135 — 

«nocturne. C'est à Notre-Dame des Victoire?, 
« en effet, que cette Œuvre a pris naissance ; 
« c'est à Notre-Dame des Victoires qu'elle s'est 
« abritée dans ses jours d'épreuve ; Notre-Dame 
« des Victoires est son sanctuaire particulier, et 
« nous pouvons dire que ses membres doivent 
« être comptés parmi nos associés les plus fldé- 
« les et les plus dévoués. 

« Toutefois, nous désirons resserrer encore 
« ces liens déjà si étroits, et c'est par une union 
« plus intime de prières que nous voulons les 
« resserrer. Nous vous offrons de faire prier 
« chaque dimanche pour l'Œuvre de l'Adoration 
« nocturne; mais, en retour, nous vous deman- 
« dons que chaque soir, le souvenir de l'Archi- 
« confrérie soit rappelé à vos pieux confrères, 
« avant qu'ils commencent leur Adoration, et 
« que durant les longues heures qu'ils passent 
« au pied du Très-Saint-Sacrement, ils se pro- 
« posent de prier pour toutes les recommanda- 
« tions qui nous sont tous les jours adressées, et 
« plus spécialement pour les conversions qu'on 
« sollicite sans cesse auprès de Dieu au nom de 
« l'Archiconfrérie. 

* Lacs l'espérance d'une réponse qui comble 
« notre désir, agréez, Monsieur le Président, 



— 136 — 

« l'expression de mes sentiments les plus dé- 
« voués et les plus affectueux, 

« HlPPOLYTE CHANAL, 

« Curé de Notre-Dame des Victoires, 
« Directeur général de l'Archiconfrêrie. » 

Voici la réponse du président de l'Œuvre : 

c A M. l'abbé Chômai, curé de Notre-Dame 
« des Victoires, directeur de l'Archicon- 
« frërie. 

« Paris, 28 septembre 1863. 

« Monsieur le Curé, 

« J'ai communiqué au conseil de l'œuvre de 
« Y Exposition et Adoration nocturne du Très- 
« Saint-Sacrement, la lettre que vous m'avez 
« fait l'honneur de m'écrire le 8 septembre cou- 
« rant, pour demander que, chaque soir, les 
« recommandations qui vous sont adressées, 
« notamment celles qui ont pour objet la conver- 
> sion des pécheurs, soient rappelées aux mem- 
« bres de l'Adoration nocturne et comprises dans 
« les intentions pour lesquelles ils prient plus 
« spécialement pendant la nuit, au pied du Très- 
« Saint-Sacrement exposé. Vous voulez bien, 
« par réciprocité, faire prier chaque dimanche, 



— 137 — 

< aux réunions de l'Archiconfrérie de Notre- 
« Dame des Victoires pour l'œuvre de l'Exposi- 
« sition et Adoration nocturne et à ses intentions. 

« Le conseil a été extrêmement touché de 
« votre pieuse proposition, et, en me chargeant 
« de vous dire qu'il l'acceptait avec empresse- 
« ment, il a voulu que je vous exprime toute sa 
* reconnaissance. 

« L'union de prières est la force des œuvres 
« catholiques. La nôtre ne peut que gagner à 
« resserrer par ce moyen les liens qui l'attachent 
« à Notre-Dame des Victoires, où elle a pris 
« naissance et d'où lui sont venus ses dévelop- 
pa: pements successifs. 

« Jesuisparticuliérementheureux, Monsieur le 
« Curé, d'être, dans cette circonstance, l'inter- 
« prête du conseil de l'œuvre de l'Adoration 
« nocturne, et d'y trouver l'occasion de vous 
« renouveler l'hommage de mes sentiments res 
« pectueux et bien dévoués. 

« Le Président de l'œuvre de l'Exposition 

« et Adoration nocturne du Très-Saint- 

« Sacrement, 

« X. > 



Nous avons déjà dit dans quelles circonstan- 
ces s'était formée l'union de prières entre l'asso- 



— 1:38 — 

dation de l'Adoration nocturne et les oeuvres 
établies à Jérusalem par le Patriarche latin de 
cette ville. Une lettre du 11 décembre 1874, à 
Sa Grandeur Mgr Bracco, renfermait l'adhésion 
reconnaissante et empressée du conseil de l'œu- 
vre de l'Adoration nocturne à cette précieuse 
union qui ne pouvait qu'attirer de grandes béné- 
dictions 6ur la pieuse association. 

Le 16 avril 1875, l'œuvre de l'Apostolat de la 
prière demandait à l'œuvre de l'Adoration noc- 
turne d'être en union de prières avec elle, et le 
21 mai suivant, le conseil de l'Adoration nocturne 
acceptait cette union. Enfin, une semblable union 
s'est formée entre l'œuvre de l'Adoration noc- 
turne de Paris et les œuvres établies à la Salette 
et à Lourdes, avec l'œuvre du Vœu-National au 
Sacré-Cœur, dont le siège est à Montmartre, et 
avec la Communauté des Dames réparatrices, 
rue d'Ulm, 36, à Paris. 

La sainte Écriture nous dit que, pendant que 
l'armée des Hébreux combattait dans la plaine, 
Moïse priait sur la montagne et demandait la 
victoire pour son peuple. Quand ses bras, qu'il 
tenait élevés vers le ciel, retombaient fatigués 
vers la terre, l'ennemi reprenait l'avantage, et 
quand ils s'élevaient de nouveau, les Hébreux 
étaient vainqueurs. Aussi, Moïse, voulant leur 



— 139 — 



assurer le gain de la bataille, fit soutenir ses 
bras jusqu'à la fin de l'action; sa persévérance 
fut récompensée et Dieu donna la victoire aux 
Hébreux. Cet exemple renferme pour l'Associa- 
tion un grand enseignement. La bataille est 
engagée aujourd'hui entre le catholicisme et ses 
ennemis. Ces derniers sont nombreux; ils se 
nomment révolution, communisme, libre-pensée. 
radicalisme, internationale, etc.; leur haine est 
vive et leur organisation puissante. Ils ne visent 
à détruire le catholicisme que pour mieux dé- 
truire la société. Leurs audacieuses entreprises 
ont frappé d'épouvante tous les gouvernements 
de la terre qui restent presque muets et désar- 
més en présence de ces redoutables démolisseurs. 
Le catholicisme seul s'est levé et, regardant 
l'ennemi en face, lui a dit : « Tu n'iras pas plus 
loin ». Animé par la voix et par l'exemple du 
saint et vaillant Pontife qui gouverne l'Église et 
de jjceux des vénérables évêques que frappe la 
persécution, il est entré en campagne ; il a orga- 
nisé pour l'attaque et pour la défense ces œuvres 
nombreuses qui, depuis quelques années sont 
pour notre foi et pour notre pays un motif de 
douces et fortes espérances, les comités catholi- 
ques, les pèlerinages, les cercles d'ouvriers, les 
conférences aux ouvriers, les œuvres d'ensei- 






140 















gnement catholique et bien d'autres qui ont pris 
naissance sur notre sol toujours chrétien, en dépit 
des ravages de l'impiété et de la révolution, et 
qui sont le témoignage irrécusable du grand 
mouvement catholique appelé à sauver notre 
société, en l'arrachant des mains des barbares 
modernes. C'est un devoir de donner à ces œuvres 
un concours actif et dévoué, mais cela ne suffit 
pas. Au devoir de l'action, nous devons joindre 
celui d'une prière spéciale, continuelle, persévé- 
rante, pour le succès de toutes ces œuvres. Nous 
devons demander à Dieu qu'il donne, d'un côté, 
à ceux qui s'y consacrent particulièrement, 
prêtres ou laïques, la force qui surmonte les 
obstacles, le courage qu$ rien n'ébranle, la 
lumière qui éclaire, la charité qui touche, la 
prudence qui ménage, la simplicité qui attire et, 
de l'autre, à ceux qui sont l'objet de tant d'efforts, 
à ces ouvriers égarés, à ce pauvre peuple si 
facile à pervertir, parce qu'il n'y a plus entre lui 
et le mal la barrière de la foi, la bonne volonté. 
Comme Moïse, l'œuvre de l'Adoration nocturne 
doit tenir ses bras levés vers le ciel tant que 
l'ennemi ne sera pas défait. C'est par ce rôle 
de persistante intercession, de supplication con- 
fiante, qu'elle doit prendre part à la lutte engagée 
et qu'elle peut y avoir une influence considérable. 



— 141 — 

La prière est toute-puissante sur Dieu qui, dans 
sa miséricordieuse bonté, a voulu en faire entre 
les mains de l'homme une arme contre lui-même 
et contre sa justice. L'homme qui prie est maître 
de Dieu. Il n'y a pas de vérité sur laquelle 
Notre-Seigneur ait plus appuyé dans son saint 
Evangile : — « Quoi que vous demandiez à mon 
« Père, en mon nom, dit-il, je le ferai. — Si 
« vous me demandez quelque chose en mon nom, 
« je Je ferai, — oui, je vous le dis et je vous en 
« assure, si vous demandez quelque chose à mon 
« Père, en mon nom, il vous le donnera, — 
« demandez donc et vous recevrez afin que vôtre 
« joie soit parfaite. » Y a-t-il rien de plus formel, 
et s'il suffit de la parole d'un honnête homme 
pour donner la confiance à tout un pays, quelle 
ne doit pas être celle des enfants de Dieu en 
présence de ces déclarations de Notre-Seigneur 
Jésus-Christ? La grande cause de la foi catholi- 
que, qui est aussi celle de la France, est donc dans 
nos mains; il dépend de nous de la faire triom- 
pher et c'est à ce noble but que doivent concou- 
rir tous nos efforts. Une prière, à laquelle se 
mêle le Sauveur lui-même, ne peut pas être 
stérile. Si donc, toutes les nuits, nous deman- 
dons, au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ 
présent sur l'autel, le triomphe de l'Église, le 



I 

























— 142 — 

retour de la France à la foi catholique, le succès 
des œuvres créées dans le but de l'y ramener, 
l'extension du mouvement religieux qui se mani- 
feste sous nos yeux, n'en doutons pas, nous 
serons exaucés et nous verrons encore des jours 
de paix et de bénédiction. Que cette grande 
intention domine toutes les autres et, afin de lui 
imprimer une efficacité plus grande, attachons- 
nous individuellement à nous rendre de plus en 
plus agréables aux yeux de Dieu, en avançant 
chaque jour davantage dans la voie de la sainteté. 
Etre des saints, c'est, en définitive, notre 
unique et suprême vocation. Plus nous y ré- 
pondrons et plus nous nous rendrons Dieu favo- 
rable et nous assurerons le succès de nos prières. 
Aujourd'hui, bien des âmes ébranlées dans 
leur confiance ont, replié leurs ailes et se sont 
laissé aller au découragement et au doute. Leur 
prière a cessé, ou si elle a continué, ce n'est 
plus avec la même ardeur. Rappelons-nous que 
pour assurer l'efficacité de la prière , il faut 
deux choses essentielles : la première , c'est 
qu'elle soit confiante, la deuxième qu'elle soit 
persévérante. Si nous n'avons pas été exaucés 
comme nous désirions l'être, c'est que Dieu, dans 
sa sagesse infinie, a jugé qu'il valait mieux qu'il 
en fût ainsi. Mais cela ne veut pas dire qu'il a 



— 143 



été som'd à nos supplications. La prière n'est 
jamais mutile, et la preuve qu'elle a été entendue 
n'est pas toujours dans la réussite, au jour et à 
l'heure choisis par nous. Il nous semblait que 
nous allions voir le commencement du triomphe 
de l'Eglise et, humainement, il paraît plus éloi- 
gné que jamais. 

Mais est-ce donc une raison pour nous décou- 
rager et pour déposer les armes de la prière et 
de la pénitence ? Loin de là, nous devons redou- 
bler d'insistance auprès de Dieu, et frapper à la 
porte de son cœur, jusqu'à ce qu'il ouvre. C'est 
précisément parce que les espérances des catho- 
liques semblent se dissiper que nous devons 
redoubler de dévouement et de sacrifices, et 
reprendre notre laborieuse tâche de suppliants 
plus résolument que jamais. Le véritable chrétien 
a le droit d'espérer contre toute espérance, car 
il espère en Dieu, contre les espérances qu'il 
fondait sur les hommes. Ces sentiments d'éner- 
gique persistance conviennent surtout aux asso- 
ciés de l'Adoration nocturne qu'un des prédica- 
teurs des retraites de l'Œuvre comparait à Jacob 
luttant contre l'ange. 

Que se passe-t-il, en effet, dans les nuits 
d'Adoration? C'est la lutte entre Dieu et les 
adorateurs. Dieu veut châtier, il veut frapper ; 

6 



— 144 — 

ils retiennent son bras, ils lui disent : nous ne 
vous lâcherons pas, o mon Dieu, jusqu'à ce que 
vous nous ayez accordé ce que nous vous deman- 
dons, le triomphe de l'Église et le salut de la 
France. 

Obstinons-nous donc dans cette lutte, con- 
vions-y tous les hommes de foi et Dieu se laissera 
vaincre. Il nous appellera du nom d'Israël; il 
nous bénira nous et notre pays, et à cause de 
nos prières, il ménagera un triomphe éclatant à 
son Eglise. Alors nous pourrons lâcher prise, 
car le jour commencera à poindre, mais jusque-là 
gardons-nous de toute défaillance. 



— 14$ 



CHAPITRE XIV 



Fruits de l'œuvre de l'Adoration nocturne. 



On juge un arbre à ses fruits. C'est une règle 
qui doit servir à juger l'œuvre de l'Adoration 
nocturne; or, ses fruits sont nombreux. 

Nous mettons en première ligne les voca- 
tions religieuses sorties de ces saintes veilles 
passées dans une pieuse familiarité avec Notre- 
Seigneur. Il y en a eu quatre-vingt-cinq depuis 
le commencement de l'Œuvre (1848), jusqu'en 
1877. Nous plaçons ensuite la part qu'elle a 
eue dans la fondation de la Congrégation des 
prêtres du Trés-Saint-Sacrement, voués tout 
spécialement au culte de l'Eucharistie. M. de 
Cuers, le premier directeur laïque de l'Adora- 
tion nocturne, fut le premier compagnon du 
R. P. Eymard, à qui est due cette fondation, 
dont il partagea avec lui les travaux. Plus 
tard, d'autres membres de l'Œuvre, imitant son 
exemple, sont entrés dans la nouvelle Congré- 
gation. 

En récompense d'une nuit passée à la ban- 
lieue , Dieu inspira à l'un des membres dp 



146 — 









l'association d'établir Y Œuvre de la banlieue, 
dont les associés allaient, le dimanche, faire 
aux populations des environs de Paris l'admi- 
rable et touchante aumône de l'exemple, en se 
livrant simplement et généreusement à la pra- 
tique des plus saints devoirs de notre religion. 
Cette pensée a été reprise par les Touristes du 
Sacré-Cœur, à Marseille, qui profitent des 
solennités de l'Adoration perpétuelle pour aller 
dans les paroisses les plus délaissées réveiller 
par leur présence et leur piété, la foi trop sou- 
vent endormie des populations rurales. 

Les nombreuses actions de grâces qui sont 
demandées, chaque nuit, témoignent des faveurs 
obtenues par le canal de l'Œuvre, et les faci- 
lités accordées pour les recommandations d'in- 
tentions aussi nombreuses que variées, entre- 
tiennent la confiance dans l'efficacité des prières 
faites aux pieds de la sainte Victime exposée 
sur nos autels. 

L'œuvre de l'Adoration nocturne a surtout 
et puissamment contribué au mouvement Eucha- 
ristique qui se produit, non-seulement en 
France, mais encore à l'étranger comme on 
le verra plus loin. 

Enfin, nous ne pouvons passer sous silence 
les témoignages de reconnaissance du clergé 



— 147 — 






pour l'heureuse influence que ces nuits bénies 
exercent sur les paroisses, notamment sur celles 
de la banlieue où l'esprit de foi est malheu- 
reusement plus affaibli. Dans une de ces der- 
nières paroisses, il y a quinze ans à peine, 
alors que l'Adoration perpétuelle et l'Adoration 
nocturne n'y étaient pas encore pratiquées, il 
n'y avait que cinq communions par année; il 
y en a aujourd'hui plus de quatre mille. Ces 
divers témoignages peuvent se résumer dans 
ce que disait récemment un ecclésiastique d'une 
paroisse populeuse: « L'exemple donné par les 
adorateurs a vivement impressionné la paroisse ; 
en même temps qu'ils l'ont édifiée, il lui ont 
obtenu de Nôtre-Seigneur les plus abondantes 
bénédictions. » 

Mais il n'est rien peut-être qui puisse mieux 
faire apprécier l'œuvre de l'Adoration nocturne 
et son action sur les âmes, que de montrer 
la manière dont on y meurt, ce sera une occasion 
d'apprendre comment on y vit. Du reste, en 
rendant hommage à la mémoire de ceux des 
associés qui, après avoir édifié leurs confrères 
par leurs exemples dans ce monde, les ont pré- 
cédés dans un monde meilleur, où leur dévoue- 
ment à l'Œuvre aura été un de leurs plus sûrs 
mérites aux yeux de la Miséricorde divine, 



148 



nous faisons un acte de justice et de charité 
envers eux, en rappelant des souvenirs qui ne 
manqueront pas de provoquer des prières en 
leur faveur, et en même temps, nous trouvons 
pour nous-mêmes, dans ces existences si chré- 
tiennes, les plus utiles enseignements. 

Il nous est bon, en effet, d'y suivre la trace 
des vertus chrétiennes qu'y avaient imprimées 
l'amour de l'Œuvre et la pratique de ses saints 
exercices. Ce que nous trouvons principalement, 
dans ces âmes d'élite, c'est la triple force de 
la foi, de l'humilité et du dévouement qui suffît 
aux plus grandes choses, quand elle s'aban- 
donne à l'impulsion de celui qui a dit : « Sans 
« moi, vous ne pouvez rien, mais, avec moi, 
« vous pouvez tout. > 

L'histoire entière de l'Œuvre est la confir- 
mation de cette parole. Qui de nous pourrait 
penser que sans ce secours divin elle eût pu 
s'établir, s'étendre et se maintenir. Sans éclat, 
sans rien de ce qui attire les regards et les 
faveurs des hommes, presque inconnue de l'im- 
mense majorité de ceux sur lesquels elle répand 
ses bienfaits, la voilà cependant qui occupe, 
depuis près de trente ans, une place importante, 
quoique modeste, dans le beau diocèse de Paris, 
poursuivant sa grande mission de prière et de 



149 — 






réparation et appelant du ciel, par ses sup- 
plications et ses sacrifices, la miséricorde qui 
pardonne et qui sauve. 

Une Œuvre semblable demande de la part 
de ses membres un attrait particulier. Ah! 
bien heureux sont ceux à qui Dieu le donne, 
car il leur procure un des plus efficaces moyens 
de perfectionner leur vertu et de se rapprocher 
de l'adorable type que notre titre de chrétien 
nous fait, à tous, un devoir d'imiter. Il est 
impossible qu'un membre sérieux de l'œuvre 
de l'Adoration nocturne puisse rester immobile 
dans la voie de son salut. Il faut qu'il avance, 
qu'il progresse. S'il est fidèle à recueillir les 
fruits des communications fréquentes et silen- 
cieuses de son âme avec l'auguste Victime, sa 
foi grandira, son cœur s'épurera, il verra Dieu 
plus facilement, il montera de clartés en clartés, 
selon l'expression des saints Livres, et tout 
en vivant dans le monde, il réalisera en lui 
la perfection, de la sainteté. 

La chose n'est pas aisée, nous en convenons. 
Il en coûte d'entreprendre et de continuer 
sans relâche cette guerre intérieure contre soi- 
même; de faire triompher dans son cœur l'humi- 
lité sur l'amour-propre, l'abnégation sur le 
sentiment personnel, la soumission sur l'indé- 






150 



pendance, le zèle et le dévouement sur la 
mollesse et sur cette prudence mondaine qui 
a toujours une excuse au service de la lâcheté; 
mais quand on est entré résolument dans cette 
lutte de soi-même contre soi-même, les grâces 
abondent, la victoire devient facile et l'on est 
tout surpris de rencontrer autant de calme, 
de douceur et de joie, là où tout d'abord, les 
répugnances les plus vives, le trouble et l'agi- 
tation du cœur semblaient faire présager de 
véritables supplices ou un complet insuccès. 

Cette victoire, importante entre toutes, puis- 
qu'elle nous ouvre le ciel, les confrères regrettés 
dont nous allons parler, l'ont remportée. Mêlés 
comme nous, et quelques-uns même plus que 
nous, aux affaires de ce monde, soumis à ses 
exigences, occupés de soins divers, ils avaient 
fait, dans leur vie, une part pour l'Adoration 
nocturne. Les saints rendez-vous que leur don- 
nait le divin Maître avaient pour leur âme un 
charme inexprimable; ils s'y rendaient avec 
bonheur et, là, dans le silence de la nuit, seuls 
à seuls avec leur Dieu, ce Dieu si bon, dont la 
tendresse dépasse infiniment celle de la plus ten- 
dre des mères, ils lui ouvraient leurs cœurs, ils 
lui exposaient leurs besoins, et on pense bien, 
qu'ils ne s'en retournaient pas les mains vides. 



— 151 — 



CHAPITRE XV 

Nécrologie. 
Principaux Fondateurs de l'Œuvre. 



Nous placerons en tête de cette longue et édi- 
fiante liste, Mgr Sibour, évêque de Tripoli, 
ancien supérieur de l'Œuvre, mort à Antibes, 
le 18 novembre 1864, à la suite d'une cruelle 
et douloureuse maladie qui l'avait obligé de 
s'éloigner de Paris, déjà depuis quelque temps. 
Dans des moments très-difficiles, alors qu'il 
avait une part considérable dans la direction du 
diocèse de Paris, il avait soutenu la marche de 
l'Œuvre par la constance de son bienveillant 
intérêt et il avait encouragé ses efforts avec la 
plus grande sollicitude. Plus tard, il en a été 
l'édification par la patience toute chrétienne 
avec laquelle il a supporté ses souffrances. Bien 
des fois, malgré l'état de sa santé, il s'était 
fait porter aux réunions générales pour les pré- 
sider, parce qu'il savait combien sa présence 
était chère aux associés. Le meilleur hommage 
que nous puissions rendre à sa mémoire vénérée 
est de reproduire l'allocution qu'il adressa à la 
réunion du 26 juin 1859, en chargeant M. l'abbé 

G' 






— 152 — 

Rivié de lire ce qu'il avait écrit. Son âme sacer- 
dotale s'y montre tout entière et on ne lira pas 
sans émotion ces paroles empreintes de senti- 
ments si profondément chrétiens : 






« Messieurs et chers Confrères, 

« Permettez-moi d'user d'une pieuse industrie 
« pour vous adresser, en ce moment, quelques 
« paroles d'édification et pour essayer de com- 
« muniquer à vos âmes quelques-uns des sen- 
« timents qui remplissent la mienne, malgré les 
« chaînes qui me lient et dont les plus lourdes 
« pèsent encore sur ma langue et l'empêchent 
« d'être au milieu de vous l'organe des pensées 
« de mon esprit et des sentiments de mon cœur. 

« Quoique ma captivité vienne de Dieu, comme 
« tout ce qui arrive dans ce monde, il me semble 
« que sa miséricorde ne sera pas offensée si je 
« puis réussir à me soustraire, pour un moment, 
« à la dure loi qu'il m'a imposée, et que j'accepte 
« non-seulement avec résignation, mais avec joie 
« et reconnaissance, et si je mets sur des lèvres 
« sacerdotales, plus libres que les miennes, les 
« paroles qu'il fait naître en moi et que j'entends 
« très-clairement résonner dans mon âme, mais 
« que j'éprouve un pénible embarras à exprimer. 






- 153 — 

« Mais pourquoi songer davantage aux épreu- 
« ves qui m'ont été envoyées, et qui ont pour 
« moi une signification si clairement surnaturelle 
« et miséricordieuse ? Ne vaut-il pas mieux, dans 
« l'état où je suis, considérer tous les maux qui 
« auraient pu m'assaillir et dont la bonté divine 
« a daigné jusqu'ici me garantir, afin que mes 
« paroles répondent mieux aux sentiments qui 
« vous animent et montent vers le trône de Dieu 
« comme une hymne d'actions de grâces plutôt 
« que comme de creuses et inutiles lamentations. 

« Oui, mon Dieu, soyez béni ! car votre bonté 
« miséricordieuse éclate partout, même au milieu 
«des sévérités de votre justice! En frappant 
« mon corps, vous avez affranchi mon àme ; vous 
« l'avez délivrée de cette redoutable responsa- 
« bilité qui s'attache à tous ces ministères 
« ecclésiastiques qui m'auraient été probable- 
« ment imposés, si vous m'aviez laissé mes 
« forces! Soyez béni, car vous n'avez pas achevé 
« de rompre le roseau à demi brisé, et d'éteindre 
« la mèche qui fumait encore. Ce rayon lumineux 
« qui éclaire tout homme venant au monde, et 
« qui est le [trait le plus frappant de la divine 
« ressemblance que vous avez gravée sur notre 
« visage, il a toujours illuminé mon àme, et j'ai 
« pu visiter à ses lueurs les ruines de mon corps, 



154 — 



« et en comprendre le sens sublime. J'ai compris 
« que vous vouliez faire de moi une preuve 
« évidente, palpable de cette grande vérité qui 
« est le fondement de l'ordre naturel que vous 
« avez fondé en créant l'homme, vérité qui est la 
« transition pour aller à l'ordre surnaturel, à 
« savoir : que notre être est double, composé de 
« deux substances, l'une matérielle et l'autre 
< spirituelle, l'une visible et l'autre invisible, 
« l'une périssable et l'autre immortelle; que ces 
« deux substances constitutives de notre nature 
« vivent entre elles dans des rapports intimes, 
« nécessaires, réciproques, mais au fond dans 
« une véritable indépendance; que l'une ne peut 
« être ébranlée ou périr sans que l'autre ne s'en 
« ressente. La loi qui les unit les rend constam- 
« ment solidaires l'une de l'autre, mais cela 
« n'est vrai que pour les manifestations de l'âme 
« qui dépendent des organes ; au-dessus sont les 
« pensées pures, elles ont un langage pur qui n'a 
« rien de matériel, et qu'au sein des infirmités 
« les plus accablantes on peut entendre dans son 
« âme, et on peut recueillir facilement, comme 
* je le fais dans ce moment. J'ai compris aussi 
« qu'en renversant l'édifice grossier de mon 
« corps, Architecte divin, vous ne vouliez que 
« le restaurer et le rebâtir à votre guise sur un 



155 — 



« meilleur plan et dans un plus bel ordre d'archi- 
« tecture, comme dit Bossuet dans son grand 
« style, digne d'un prophète. Ainsi, en me faisant 
« voir de près les ravages de la mort, vous avez 
« voulu ranimer en moi les pensées d'immorta- 
« lité, et je puis dire comme Job, maintenant 
« plus que jamais: « Cette grande espérance 
« repose dans mon sein. » 

« Mon Dieu, soyez aussi béni de m'avoir per- 
« mis de paraître encore dans cette sainte 
« assemblée, parmi mes frères et mes enfants, 
« dans cette pieuse paroisse où j'ai passé les 
«jours les plus beaux et les plus pleins de ma 
« vie, où j'ai goûté de si douces et si abondantes 
« consolations et dont je ne me suis séparé que 
« forcé et pour obéir à la voix de Dieu. J'espé- 
« rais peu revoir cette chère enceinte, et ces 
« sacrés autels, à moins qu'écoutant le dernier 
« vœu de mon âme, on eût, après ma mort, 
« apporté mes restes ici, sous ces voûtes où j'en 
« ai, moi-même, accueilli tant d'autres, pour 
« recevoir les dernières prières et les dernières 
« bénédictions de l'Église et consoler mon âme 
« avec ces chants harmonieux, descendus du 
« ciel, par lesquels notre sainte mère l'Eglise 
« semble bercer celui qui dort du sommeil de la 
« tombe, comme la mère berce l'enfant qui dort 



— 156 



« sur son sein. Enfin, Dieu bon, soyez raille 
« fois béni, pour m'avoir accordé de revoir le 
«spectacle édifiant que j'ai sous les yeux; et 
« même de pouvoir adresser quelques bonnes pa- 
* rôles à la pieuse association qui est réunie aux 
« pieds des saints autels, afin de lui dire quelque 
« chose des sentiments de mon cœur pour elle 
« et lui faire comprendre, si je puis, l'estime 
« particulière que je fais de l'Œuvre si éminem- 
« ment catholique de l'Adoration nocturne. 

« Parmi toutes les œuvres de piété et de cha- 
« rite qui fleurissent dans cette grande cité, 
« comme sur une terre propice, l'Adoration noc- 
« turne, par sa nature et par son objet, tient 
« évidemment le premier rang. Elle a sa place 
« sur la montagne même où est la source de 
« toute vie, de toutes grâces et de tout bien; les 
« autres œuvres ne sont que des canaux plus 
« ou moins abondants, selon qu'ils se rappro- 
« chent de cette source et de ce foyer qui illumine 
« et échauffe tout dans le monde surnaturel 
« comme le soleil dans le monde de la nature. 
« Votre Œuvre est, de plus, l'appendice et 
« l'achèvement de cette grande et belle institu- 
« tion de l'Adoration perpétuelle qui a poussé de 
« si rapides et de si profondes racines dans le 
« diocèse de Paris, d'où découlent, chaque jour, 



— 157 — 

« dans les âmes, des flots si purs et si abondants 
« de piété, et qui sera un des principaux titres 
« de gloire du saint prélat qui la fonda et de son 
« pieux et éminent successeur, qui la soutient 
« avec tant de zélé. Laissez-moi vous dire en peu 
« de mots les origines de cette institution. J'ai 
« assisté aux premières émotions qui frappèrent 
« le cœur du pieux évêque et qui y demeuré- 
« rent comme une étincelle divine, jusqu'au jour 
« où le l'eu sacré qu'il portait dans son sein pût 
« se répandre en liberté sur ce vaste théâtre où 
« la bénédiction divine voulut que l'Adoration 
« brillât comme un foyer immense, pour éclairer 
« au loin et échauffer les générations contempo- 
« raines. » 



Ici, le pieux évoque raconte les circonstances 
dans lesquelles Mgr l'évèque de Digne conçut 
la pensée d'établir un jour l'Adoration perpé- 
tuelle et que nous avons reproduites au chapitre 
deuxième. 






< Mais le pieux prélat, en instituant l'Adora- 
« tion perpétuelle et en renfermant son Œuvre 
« dans certaines limites qui semblaient comman- 
« dées par la prudence dans le temps et le pays 



- 158 — 

« où nous sommes, ne prétendait pas mettre des 
« entraves à la libre expansion des sentiments 
« qu'il avait pour but de favoriser, et non de 
« comprimer. Il faisait tout ce qui lui paraissait 
« possible et opportun, non tout ce qui lui parais- 
« sait désirable ; aussi, il applaudit plus que tous, 
« aux premiers efforts de votre zèle, qui auraient 
« pu facilement paraître un peu téméraires avant 
« que Dieu les eût bénis, et eût montré par le 
« résultat qu'ils n'avaient rien d'imaginaire et 
« de chimérique. Il aurait trop craint, en ne 
« favorisant pas ce premier germe, de l'étouffer 
« et de s'opposer ainsi aux vues de Dieu. 

« Mais je ne veux pas insister plus longtemps 
« sur un sujet dont mon cœur est plein, et qui 
« aisément en déborde ; une certaine pudeur 
« m'impose silence et m'empêche, plus que per- 
« sonne, de louer comme il le mérite le saint 
« prélat auquel j'ai été si intimement uni ; qu'il 
« me soit permis seulement de dire cette parole 
« qui le résume tout entier : Sa vie, dévorée par 
« les ardeurs du zélé et de la charité, a été un 
« véritable holocauste, et sa mort un véritable 
< martyre. Depuis ce fatal événement, votre 
« Œuvre a reçu de merveilleux développements ; 
« ses progrés ont montré manifestement que 
« Dieu l'aimait et la favorisait. "Votre pieuse 



— 159 — 

< pensée, qui d'abord ralliait à peine quelques 

« âmes fidèles et dévouées, s'est propagée rapi- 

« dément ; elle a pu recevoir une organisation 

«forte et sage. L'Adoration nocturne compte 

« maintenant à Paris une nombreuse phalange 

« d'adorateurs zélés ; le Souverain-Pontife a 

« daigné tourner vers elle sa main paternelle, 

« il l'a distinguée et bénie, parmi toutes les 

« œuvres pieuses qui font la gloire de Paris. 

« Votre flamme s'est élevée et a franchi la vaste 

« enceinte de la capitale. Son influence s'est fait 

«sentir dans plusieurs villes de province, et 

«jusqu'à l'étranger. Elle suscite partout des 

« associations pieuses qui, comme elle, se vouent 

« aux saintes pratiques de l'Adoration nocturne. 

« Il y a encore, je le sais, des développements 

« que vous désirez. Mais sachez attendre ; la 

«croissance, pour être normale, dans l'ordre 

« surnaturel comme dans l'ordre naturel, a 

« besoin de n'être pas trop hâtée ; exprimez 

« humblement vos désirs au Saint-Siège et aux 

« autorités ecclésiastiques qui sont près de vous, 

« et qui vous sont si bienveillantes ; puis con- 

« tentez-vous de prier pour que les vues que 

«vous pouvez émettre, pour le bien, soient 

« adoptées et encouragées. Dieu ne vous demande 

« pas davantage ; mais il exige cela. Il veut que 



160 — 



« votre zèle soit toujours vif, mais qu'il reste 
« aussi toujours humble et soumis, et ses ardeurs, 
« pour être toujours pures, ont besoin d'être aussi 
« contenues par l'esprit catholique d'obéissance 
« et de soumission à l'Eglise. 

« Mes bien chers frères, souffrez ces épanche- 
« ments, ces conseils que m'inspire le tendre 
« intérêt que je porte et que j'ai toujours porté 
« à votre Œuvre. Songez que vous faites l'office 
« des anges, que vous formez une garde d'hon- 
« neur auprès de Dieu, que vous êtes à pro- 
« prement parler ses gardes du corps ; cet hon- 
« neur qui vous rapproche de sa personne et de 
« ses grâces doit enflammer votre zèle et élever 
« vos âmes : noblesse oblige. Qu'il n'y ait donc 
« plus rien en vous d'infime et de grossier ; de 
« la haute position où vous êtes agenouillés 
« sur les marches de l'autel, que vos âmes s'é- 
« lèvent vers le ciel et que vos cœurs soient 
* en haut largement ouverts à toutes les célestes 
« inspirations ; que votre vie soit la prière et 
« que votre prière soit avant tout catholique, 
«comme votre Œuvre; priez pour les pé- 
« cheurs, afin que Dieu les éclaire ; priez pour 
« l'Église et pour son chef, afin que les com- 
« motions et les périls qui l'environnent, loin 
« de l'ébranler, le fortifient ; priez pour la 



161 



« France, afin qu'une paix glorieuse lui soit 
« bientôt donnée. 

« Recevez ma fraternelle bénédiction en atten- 
« dant qu'une bénédiction plus puissante et plus 
« féconde descende sur vous du trône de Dieu 
« et comble le désir de vos âmes, 

« Alnsi-soit-il. » 






Après Mgr de Tripoli, nous devons, sans tenir 
compte des dates, mentionner le R. P. Hermann, 
fondateur et premier membre de l'Œuvre, mort 
de la petite vérole à la forteresse de Spandau, 
prés Berlin, le 20 janvier 1871, en soignant nos 
soldats prisonniers. 

Il faudrait un volume entier pour raconter 
cette vie si exceptionnelle, dont chaque acte, 
pendant vingt-cinq ans, porte l'empreinte d'une 
grâce extraordinaire de Dieu. Nous ne pou- 
vons entreprendre une pareille tâche, et nous 
nous bornerons à dire sommairement ce qui, 
dans cette vie, a plus particulièrement trait à 
l'œuvre de l'Adoration nocturne. 

Tout le monde connaît les circonstances de 
la conversion miraculeuse d'Hermann devenu, 
de juif et d'artiste mondain et dissipateur, un 
fervent catholique d'abord, et puis un austère 



— 162 — 

religieux, dont les saints travaux ont rempli 
l'Europe. Ce fut le Dieu de l'Eucharistie, ce 
Maître souverain des âmes, qui remporta direc- 
tement cette victoire, dans l'église de Sainte- 
Valère, à Paris, où Hermann s'était rendu un 
vendredi du mois de Marie 1847, pour diriger 
un chœur de musiciens, uniquement attiré par 
l'art musical dans lequel il excellait. Au moment 
de la bénédiction, son corps pliant comme sous 
un poids considérable, il fut forcé, malgré lui, 
de se courber vers la terre, en proie à un trou- 
ble indéfinissable. — Que se passa-t-il alors 
dans ce cœur généreux ? — Dieu seul le sait. — 
Toujours est-il qu'en se relevant, Hermann était 
catholique. L'Eucharistie l'avait vaincu, mais 
c'était pour lui inspirer un amour que désormais 
plus rien au monde ne devait affaiblir. Un des 
premiers fruits de cet amour fut la fondation 
de l'Adoration nocturne, en 1848 ; nous en avons 
rapporté plus haut les ciconstances. Bientôt il 
fut attiré vers une vie plus parfaite et il quitta 
le monde. 

Au mois de septembre 1849, il alla à Rome, d'où 
il ne devait revenir que pour revêtir l'habit de 
Carme. Son éloignement et celui des principaux 
appuis de l'Œuvre, fut, pour cette dernière, 
une épreuve, à laquelle elle n'aurait pas résisté 



— 163 






si Notre-Seignedr ne l'avait visiblement sou- 
tenue. Quoique absent, Hermann, connu désor- 
mais sous le nom de P. Augustin-Marie du Très- 
Saint-Sacrement, dont le choix était encore 
un témoignage d'amour et de reconnaissance 
envers la sainte Eucharistie, ne perdait pas de 
vue la petite association. Par des lettres fré- 
quentes, il l'encourageait à la persévérance, il 
la soutenait contre les défaillances du décou- 
ragement et ce ne fut pas sans une vive douleur 
qu'il apprit la suspension momentanée de ses 
pieuses réunions. Aussi, lorsqu'en 1852, par un 
de ces coups de la Providence, dont elle seule 
a le secret, l'Œuvre se releva sous la douce 
influence de Notre-Dame des Victoires, pour 
occuper une place si importante dans l'institu- 
tion diocésaine de l'Adoration perpétuelle, le 
P. Hermann tressaillit de joie et son cœur se 
remplit d'une sainte allégresse. L'intérêt qu'il 
lui avait jusque là témoigné sembla redou- 
bler. A chacun de ses voyages à Paris, il se 
mettait en rapport avec les membres de sa 
famille spirituelle et s'informait avidement de 
tout ce qui s'y faisait. Il assista plusieurs fois 
aux réunions générales, et, en 1863, il vint 
exprés de Londres, malgré le mauvais état de 
sa santé, pour prêcher la retraite annuelle. 






— 164 



A son retour à Londres, il écrivait: « Je suis 
« revenu de Paris tout embaumé de cette belle 
«journée du dimanche de la Fête-Dieu. Mais 
« le bon Jésus m'a fait payer les plaisirs que 
« j'y ai goûtés ; la traversée m'a rendu malade, 
« bien malade pour quinze jours, avec une fièvre 
« gastrique, etc.; cependant je n'ai pas perdu 
« la sainte Messe un seul jour. » 

L'ardeur de son zèle pour le Trés-Saint- 
Sacrement lui avait fait ajouter un vœu spécial, 
à ceux qui font la base ordinaire de la vie 
religieuse. Ce vœu était celui de travailler toute 
sa vie à propager la dévotion Eucharistique. 
Aussi il ne prêchait pas un sermon, il ne don- 
nait pas une retraite ou une station, sans que 
ce grand intérêt si cher à son cœur n'y eut sa 
place, et l'on peut dire que le P. Hermann est 
l'homme de notre temps qui a eu la plus grande 
part au mouvement Eucharistique qui sera une 
des gloires de l'Église du XIX e siècle. Son 
action a été toute-puissante en France où il a 
beaucoup aidé à la propagation de l'Adoration 
perpétuelle. Mais ce qui l'occupait le plus, 
c'était l'Adoration nocturne. Il avait formé, en 
1851 et 1852, un projet d'union et de centrali- 
sation de toutes les œuvres d'Adoration noc- 
turne de France, pour les faire concourir, par 



1G5 






une participation alternative, à une Adoration 
perpétuelle nationale. Il écrivait à ce sujet, le 
9 novembre 1852: «Nous sommes déjà depuis 
« un an occupé à réunir toutes les Adorations 
« nocturnes de France en un seul faisceau, 
« pour former une association une et indivisible, 
« dirigée par un comité central à Paris, afin 
« d'offrir au cher Jésus, au nom de toute la 
« France, une Adoration nocturne continuelle. » 
Ce plan si élevé ne pût être réalisé, et chaque 
localité continua isolément son œuvre. 

En 18b'3, le P. Hermann fut chargé, par Son 
Eminence le cardinal Wiseman, de ressusciter 
et de diriger dans la grande ville de Londres, 
l'association de l'Adoration nocturne, qui, fon- 
dée quelques années auparavant, avait déjà cessé 
de fonctionner. Le G août 1863, l'association 
nouvelle passa la première nuit dans la chapelle 
des Carmes. Une lettre du P. Hermann, datée de 
cejour même, annonçait ainsi ce fait important : 
«Heureuse nouvelle! l'Adoration nocturne est 
« commencée à Londres. Nous venons de passer 
« la nuit devant le Très-Saint-Sacrement exposé 
« dans notre chapelle de Kensington. Je suis dans 
« une grande joie, et je demande que l'Asso- 
« dation de Paris rende grâces à Jésus-Christ 
« pour la réussite de nos commencements » 









— 166 — 

Ne pouvant raconter ici toute la vie du 
fondateur de l'Œuvre, nous devons au moins 
faire connaître les circonstances de sa mort. 
Après nos désastres de Sedan et de Metz, le 
P. Hermann, alors en Suisse, fut, à la demande 
de Mgr Mermillod, évêque de Genève, envoyé 
à la forteresse de Spandau, près de Berlin, 
pour y organiser le service religieux des prison- 
niers français au nombre de 6,000. « L'Allema- 
« gne sera mon tombeau , » avait-il dit en 
partant. Mais ce pressentiment n'avait rien ôté 
à son entrain ordinaire. « Je me mets en route 
« au nom du Seigneur Jésus et pour le service 
« des pauvres âmes qui souffrent, priez pour 
« la réussite de cette sainte mission, » écrivait- 
il à une personne de Bordeaux qu'il honorait 
de son amitié. Le bien qu'il fit fut immense. 
Nos pauvres soldats venaient se confesser par 
centaines. La journée était très-remplie ; Messe 
et sermon chaque matin, visite aux hôpitaux, 
confession des malades, viatique, extrême-onc- 
tion, enterrements, distribution de vêtements, 
confession des soldats valides, correspondance, 
bréviaire et les mille commissions pour les 
soldats et leurs familles, il y aurait eu de quoi 
occuper plusieurs prêtres. C'est dans le plein 
exercice de cet admirable ministère, en donnant 



— 167 — 

I extrême-onction à des varioles, qu'il fut saisi 
lui-même par la maladie. Lorsqu'on lui annonça 
le danger, il bondit de joie et il pria Dieu de 
ne plus retarder le moment de la délivrance. 

II fit prier les assistants et les Sœurs, et dirigea 
lui-même les prières jusqu'à la fia. Il rendit 
sa belle âme le 20 janvier 1871, muni de tous 
les secours de notre sainte religion et entouré 
des tendres soins de la charité. Il fut enterré 
le 24, dans l'église Sainte-Edwige, à Berlin, 
ainsi qu'il en avait exprimé le désir au moment 
de mourir, avec une grande pompe et une 
religieuse émotion. L'œuvre de l'Adoration 
nocturne de Paris devait rendre un dernier 
hommage à sa chère mémoire. Un service 
solennel pour le repos de son âme fut célébré 
le jeudi 15 février 1872, dans l'église de Notre- 
Dame des Victoires, avec le bienveillant con- 
cours du clergé de cette paroisse. L'assistance 
dans laquelle on remarquait deux RR. PP. Car- 
mes de la maison de Paris, était nombreuse et 
émue, et pendant la sainte Messe, dite par 
M. l'abbé Le Rebours, supérieur de l'Associa- 
tion, de ferventes prières se sont élevées vers 
Dieu pour la conservation de l'Œuvre et pour 
le bonheur éternel du fondateur. 

Un des auxiliaires les plus actifs et les plus 



168 — 



I 



utiles du P. Hermann dans la fondation de 
l'Œuvre fut M. Raymond de Cuers, officier 
de marine, dont le nom et le souvenir appar- 
tiennent trop à l'association de l'Adoration 
nocturne pour que sa mort, qui devait suivre 
de prés celle du P. Hermann, ne fixe pas 
un instant notre attention. Ces deux âmes, 
embrasées d'un même amour pour la sainte 
Eucharistie, presque fondues ensemble pour 
l'établissement de l'Adoration nocturne, puis 
séparées par deux vocations distinctes, quoique 
analogues, allaient se retrouver dans la gloire 
à peu prés au même moment. M. de Cuers, 
mourait en effet, deuxième supérieur général 
de la Société des Prêtres du Très-Saint-Sacre- 
ment à l'établissement de laquelle il avait 
concouru, dans la maison du noviciat de cette 
Société nouvelle, à Saint-Maurice (Seine-et- 
Oise), le 21 juin 1871, c'est-à-dire six mois 
après le P. Hermann. 

Il fut le premier directeur laïque et, en cette 
qualité, il imprima aux exercices des nuits 
un ordre et une régularité qui se ressentaient 
de la discipline à laquelle il était habitué 
comme marin. Les anciens se souviennent 
encore de la précision toute militaire qu'il 
exigeait de ses confrères dans tous les détails 






- 169 — 

du règlement, et cette ponctualité n'a pas peu 
contribué à asseoir l'Œuvre sur une base de 
respect pour le saint lieu, de fidélité à la règle 
et d'ordre matériel indispensables dans une 
association de cette nature. Ce service n'est 
pas le seul que M. de Cuers ait rendu à l'Œu- 
vre. Il en est un autre d'une importance capi- 
tale, qui lui donne droit à la plus grande 
reconnaissance. C'est lui, en effet, comme nous 
l'avons déjà dit, qui reçut de Dieu l'inspira- 
tion d'unir l'Adoration nocturne, qui n'avait 
qu'une existence isolée, à l'Adoration perpé- 
tuelle des Quarante -Heures, afin de rendre 
la prière de l'Adoration réparatrice incessante. 
C'était, comme on l'a vu, tout l'avenir de 
l'Œuvre. 

Peu de temps après lui avoir ouvert cette 
voie nouvelle, M. de Cuers, qui était toujours 
capitaine de frégate, rappelé par son service, 
quitta Paris et par conséquent l'Association 
à laquelle, cependant, il resta toujours uni de 
cœur. Son âme, profondément contemplative et 
intérieure, se sentait attirée de plus en plus vers 
Dieu. Aj^ant rejeté loin de lui tous les hon- 
neurs de ce monde, et dévoré de la sainte passion 
de l'Adoration, il attendait que Dieu lui fit con- 
naître comment il pourrait la satisfaire, lors- 



— 170 






que la rencontre qu'il fit du R. P. Eymard 
l'attacha irrévocablement à la réalisation d'une 
pensée qui l'occupait depuis plusieurs années, 
la fondation d'une société d'hommes réunis 
sous une règle religieuse pour adorer Notre- 
Seigneur exposé, et se vouer aux œuvres 
Eucharistiques. C'est ainsi que naquit, en 1856, 
la Société des Prêtres du Très-Saint-Sacrement, 
dans laquelle l'Association a toujours trouvé le 
plus sympathique dévouement. Elle n'oubliera 
jamais les solides et substantielles instructions 
que le R. P. Eymard, premier supérieur général 
de cette Société, lui donna dans différentes 
retraites où il révéla tous les trésors de son cœur 
bien fait pour comprendre et aimer l'Eucharistie. 
Le R. P. de Cuers lui succéda, en 1868, comme 
supérieur général; il est mort dans l'exercice 
de cette charge, comme meurent les saints, 
plein de calme, de confiance et de joie. 

Une place d'honneur est aussi due à Jean- 
Antoine Ricoux (1), que, dans leur affectueuse 
vénération, plusieurs de ses confrères avaient 



(1) Voir Notice sur la vie et la mort de Jean-Antoine 
Ricoux, hôtelier de l'œuvre de l'Adoration nocturne 
du Très-Saint-Sacrement, 1867, — in-32, chez Adrien 
Le Clere et G'«, et au siège de la Société de Saint-Fran- 
çois de Sales, Passage Sainte-Marie, 11 bis. 



171 



coutume d'appeler le père Ricoux. Il entra 
tard dans l'Œuvre, après une existence fort 
éprouvée par le malheur et déjà embellie par 
les vertus les plus chrétiennes. 

Ce fut à l'Adoration nocturne de Saint-Ger- 
main-des-Prés , au mois de mars 1852, qu'il 
se présenta pour faire partie de l'Association, 
comme membre actif. Il avait alors une cinquan- 
taine d'années. Le Directeur de la nuit fut frappé 
de l'accent de foi qu'il remarqua chez lui et 
il proposa son admission au Conseil. En 1853, 
il avait accepté les fonctions d'hôtelier de 
l'Œuvre; nous avons dit ailleurs quelle en était 
l'importance. L'Association avait peu de res- 
sources. Ricoux eût voulu ne recevoir aucune 
rétribution, mais sa position ne le permettait 
pas, et bien que les émoluments qu'on l'avait 
forcé d'accepter fussent très-modiques, surtout 
dans le commencement, il tenait tellement à 
ses fonctions, pour l'amour du Saint-Sacrement, 
qu'il refusa constamment les emplois beaucoup 
plus lucratifs qu'on lui proposa. 

Depuis qu'il s'était retiré des affaires, il s'était 
exclusivement adonné aux pratiques de piété 
et de charité; n'apercevant pas, dans son humi- 
lité profonde, que sa vie avait toujours été 
exemplaire, il aimait à répéter : « J'ai long- 

6"* 






172 — 



« temps vécu et travaillé pour le monde, et 
« par conséquent fort inutilement; désormais 
« je ne veux plus vivre et travailler que pour 
« Dieu, et comme j'ai commencé tard, il faut 
« que je répare le temps perdu. » Il mit, en 
effet, à profit, avec une admirable ardeur, les 
dernières années que Dieu lui donna sur la 
terre. Il était de toutes les bonnes œuvres, 
et se faisait remarquer dans toutes, par sa 
foi vive et ferme, par sa piété expansive, par 
sa charité sans bornes, par son zélé infatiga- 
ble, que rien n'était capable de déconcerter. 

Frappé des tristes faiblesses de notre société 
et des dangers qui la menacent, il sentait que 
la prière et la pénitence peuvent seules, en 
réparant le mal, toucher la miséricorde de 
Dieu. Obéissant à cette sainte folie de la croix 
qui s'était emparée de son cœur, il parcourait 
les rues, et, comme un autre Jonas, arrêtait 
les passants et les engageait à faire pénitence. 
Lui-même se livra à de telles mortifications, 
que sa femme en conçut de sérieuses inquié- 
tudes pour sa santé, et qu'il ne fallut rien 
moins que l'autorité de son confesseur pour 
en modérer les rigueurs. 

Ricoux assistait à presque toutes les nuits 
d'Adoration, priant devant le Très-Saint-Sacre- 



173 






ment de dix heures à minuit, et le matin de 
quatre à six heures, heure de la prière pour 
les tertiaires de Saint-François, dont il faisait 
partie. 

Nous avons dit au chapitre quatrième l'admira- 
ble dévouement qu'il avait montré dans l'exercice 
de ses fonctions de gardien du matériel. 

Tant de mérites ne suffisaient pas à préparer 
la glorieuse couronne qui l'attendait. Il eut à 
supporter un genre d'épreuves particulièrement 
pénibles pour son cœur, c'est-à-dire, les fré- 
quentes et dangereuses maladies de sa femme, 
qu'une paralysie d'abord, et plus tard de graves 
chutes et de nombreux accidents conduisirent 
plusieurs fois aux portes du tombeau, jusqu'au 
moment où Dieu la rappela à lui, le 4 avril 1866. 
Ricoux ne résista pas à cette épreuve, il 
mourut huit jours après, le 12 avril, dans de 
tels sentiments de foi, d'espérance et d'amour, 
que, de l'avis de Mgr de la Bouillerie, qui était 
venu lui donner sa bénédiction, il était impos- 
sible de voir une plus sainte mort. L'œuvre 
de l'Adoration nocturne fit célébrer à son inten- 
tion, le 27 avril, à Saint-Thomas d'Aquin, une 
Messe de Requiem, qui fut dite par M. l'abbé 
Le Rebours, supérieur de l'Œuvre, et à laquelle 
assistèrent un grand nombre d'associés. 









— 174 — 

Le corps de Ricoux fut inhumé au cimetière 
du Montparnasse, dans un terrain, de conces- 
sion temporaire, acheté pour cinq ans, aux frais 
de l'Œuvre. Au bout des cinq ans, ces respecta- 
bles dépouilles devaient-elles être abandonnées 
et confondues avec d'autres, de façon à échapper 
à la fidélité des souvenirs qu'elles inspiraient ? 
Le bon Dieu n'a pas voulu qu'il en fut ainsi. Il 
a jeté un regard favorable sur ces humbles 
ossements et il a envoyé à une âme fervente la 
pensée de les soustraire à l'oubli. Il a voulu ainsi 
glorifier, dès ce monde, ce bon serviteur qui, 
pendant quatorze ans, avait consacré sa vie 
entière au service du Dieu de l'Eucharistie dans 
l'œuvre de l'Adoration nocturne, et nous faire 
voir par là quel pouvoir ont sur lui les vertus 
modestes, mais fortes, qui doivent distinguer 
l'adorateur nocturne. L'enchaînement des cir- 
constances est vraiment remarquable, et il est 
difficile de ne pas y voir l'action de la Provi- 
dence. 

En 1850, une veuve perdait son fils unique, 
âgé de vingt-trois ans, sa seule consolation et 
sa seule espérance dans ce monde. Un tombeau 
s'élevait au cimetière du Montparnasse pour 
recevoir ce fils si tendrement aimé. Il reposait 
là, attendant sa mère, lorsque celle-ci, attirée 



— 175 — 



par la grâce, quittait la vie du siècle et allait 
dans la retraite, consacrer à Dieu les dernières 
années de son existence, sous le nom de 
Sœur Elisabeth-Hyacinthe. En apprenant la 
mort de Ricoux, qu'elle avait connu et dont elle 
avait apprécié les hautes vertus, elle écri- 
vit au président de l'Œuvre : « Depuis hier, 
«je suis poursuivie par une pensée qui ne 
« m'a pas quittée , même pendant la sainte 
« Messe : Laisserons-nous ces saintes dépouilles 
« se confondre avec les autres et viendra-t-il 
« un temps où on ne saura pas où elles sont ? 
« J'ai voulu me rendre compte à l'avance de ce 
« que coûterait, quand je mourrai, le transport 
« de mon corps à côté de celui d'Ernest, dans 
« le caveau qui m'attend à Paris ; c'est énorme. 
« Il y a bien autre chose à faire, dans les ceu- 
« vres, que de dépenser tant d'argent pour ma 
« misérable enveloppe. Je serai donc enterrée 
« dans le cimetière de mon couvent et je don- 
« nerai mon caveau à notre digne frère Jean- 
« Antoine Ricoux. Ce me sera une grande joie 
« de placer ce corps vénérable près de celui de 
« mon Ernest. » Ce moyen de conserver les 
restes de Ricoux sortait manifestement des 
prévisions ordinaires. La réalisation s'en fit 
attendre assez longtemps ; enfin, le 18 avril 1870, 







pi 



— 176 - 

lundi de Pâques, lendemain de la solennité de 
la résurrection glorieuse du Sauveur, eut lieu 
pour Ricoux cette sorte de résurrection, glo- 
rieuse aussi, qui faisait triompher ses cendres 
de la dispersion à laquelle elles semblaient 
condamnées. Un avis avait été envoyé à tous les 
membres actifs de l'Œuvre. Cinquante d'entre 
eux, appartenant à tous les rangs de la société 
et venus de tous les quartiers de Paris, se ren- 
dirent à l'église de Notre-Dame des Champs, 
lieu de réunion, où une Messe pour le repos de 
l'âme de notre confrère fut dite, à sept heures 
et demie, par M. l'abbé Le Rebours, supérieur 
de l'Œuvre ; le plus grand nombre y fit la sainte 
Communion. Après la sainte Messe, tous les con- 
frères, ayant leur digne supérieur à leur tête, 
allèrent au cimetière. L'exhumation eut lieu en 
leur présence dans le plus grand recueillement. 
Tous les signes qui permettaient de constater 
l'identité de Ricoux furent reconnus. Son nom, 
le numéro de son cercueil, la robe de tertiaire 
de Saint François, le livre de la règle du tiers- 
ordre;... de lui?... il ne restait que des osse- 
ments détachés , — spectacle saisissant qui 
nous faisait voir dans la plus exacte réalité la 
vanité de ce monde et l'inanité de notre corps. 
M. l'abbé Le Rebours, revêtu du surplis et de 



— 177 



l'étole, récita les prières auxquelles l'assistance 
répondit. Il fit les aspersions d'usage, et les 
restes déposés dans un nouveau cerceuil furent 
transportés au tombeau qui devait les abriter 
à perpétuité. Ils y furent placés avec le cérémo- 
nial ordinaire, et, les prières terminées, avant 
de faire la dernière aspersion, le pieux célébrant 
prononça à haute voix la triple invocation : 
Adoremus in œternum. sanclissimum sacra- 
mentum, que cinquante voix répétèrent ensem- 
ble avec la même ferveur, le même saint élan. 
Puis chacun jeta l'eau bénite sur le cercueil 
et on se sépara, emportant de cette touchante 
cérémonie les plus douces impressions. C'est 
ainsi, se disait-on, que Dieu exalte les humbles. . . 
et exaltavit humiles.... Les ossements les plus 
délaissés tressailliront de joie.... et exultabunt 
ossa humiliata. La tombe où repose le corps 
est située: 13 D,C division, 3™ ligne nord; la 
pierre verticale surmontée de la croix portait 
déjà à sa partie supérieure l'inscription sui- 
vante : crux ave ! Ici repose Antoine-Ernest- 
Marie Laloubère, décédé le 31 juin 1851, à 
l'âge de vingt-trois ans, fds unique d'une 
veuve, priez pour lui. Au-dessous un ostensoir 
a été gravé, comme emblème de l'Adoration 
nocturne, et sur la pierre horizontale qui 
recouvre la tombe on lit: 




1 



— 178 — 

RICOUX 

JEAN-ANTOINE 

décédé à Paris, le 12 avril 1866. 



Pendant 14 ans, sa vie tout entière fut consacrée au service de 
V Adoration nocturne du Très-Saint-Sacrement. 



Ses restes ont été transférés dans ce caveau 

le lundi de Pâques, 18 avril 1870, 

en présence d'un grand nombre de ses confrères, 

réunis pour honorer sa pieuse et humble mémoire. 






— 179 — 



CHAPITRE XVI 

Nécrologie. 
Membres actifs. 

1848 à 1869. 



Si maintenant nous suivons l'ordre chronolo- 
gique, nous trouvons tout d'abord, en consul- 
tant la liste des membres actifs et les rapports 
présentés aux assemblées générales, M. Defoly. 
premier secrétaire de l'Œuvre, l'un des quatorze 
adorateurs qui assistèrent, le 6 décembre 1848, 
à la première nuit d'Adoration à Notre-Dame des 
Victoires. Il quitta l'Œuvre peu après sa fon- 
dation pour entrer à la Trappe de Mortagne, où 
il mourut saintement, le 15 août 1852. 

La même année, le ciel s'ouvrit pour recevoir 
un angélique jeune homme, M. Fage, employé 
au ministère de la guerre, inscrit le cinquième 
sur la liste des membres de l'Œuvre dont il peut 
être considéré comme un des fondateurs, tant 
il avait mis de zèle et de dévouement à assurer 
les premiers succès de l'association. Il mourut 
dans la paix et la joie de Dieu à l'hospice Necker, 

7 



— 180 — 









où l'avait conduit la maladie de poitrine à 
laquelle il succomba. 

L'année 1853 enleva à l'Œuvre M. Papillon, 
jeune peintre plein de piété et d'avenir. 

En 1854, elle perdit M. d'Albret, l'auteur des 
Harmonies catholiques. 

En 1855, M. Scazziga, négociant, admis le 
15 décembre 1848, c'est-à-dire dès l'origine, 
membre des plus zélés, est mort, le 20 février, 
des suites d'une chute qui l'enleva à la fleur de 
l'âge à la tendresse de sa famille et à l'estime 
de ses confrères. 

Au mois de mai suivant, M. Chevalier mourut 
pieusement dans la maison de santé Dubois, et, 
au mois d'août, M. Penant, jeune étudiant, 
rendait son âme chez les Frères Hospitaliers de 
Saint-Jean de Dieu, dans les sentiments de la 
plus parfaite résignation. 

MM. HugonRoyderpère, et Michel moururent 
en 1856. Le premier, ami de M. des Genettes, 
fidèle paroissien de Notre-Dame des Victoires, 
entreprit la reproduction de la statue qui orne 
l'autel de l'Archiconfrérie pour la conversion 
des pécheurs et contribua à la rendre plus popu- 
laire en la mettant dans le commerce à la portée 
de toutes les bourses. 

En 1857, l'Œuvre perdit MM. Sauvan, Pouey- 



181 






Saint-Sauveur et Coste qui étaient pour elle un 
sujet d'édification et dont la mort fut pleine de 
consolations. 

L'année 1858 s'ouvrit tristement pour l'Asso- 
ciation. Un de ses meilleurs membres, M. San- 
tigny, périt au mois de janvier, dans l'église de 
Saint-Sulpice, au moment où il entendait la 
sainte Messe, victime de l'explosion d'un calo- 
rifère qui chauffait l'édifice... Quelques mois 
après, M. Evrard, jeune ouvrier, remarquable 
par son aimable piété, et M. Gelilen quittaient ce 
monde, suivis bientôt de M. Thomassin, mort 
à la suite d'une opération des plus douloureuses, 
pendant laquelle il n'avait d'autre préoccupation 
que celle du salut de son âme, et de M. Fayeux, 
enlevé par une mort subite pendant qu'il réci- 
tait le sublime cantique de la sainte Vierge, le 
Magnificat. Un de ses confrères qui se présen- 
tait chez lui à ce moment, le voyant étendu et 
son livre encore ouvert, ne voulut pas que la 
prière commencée sur la terre se terminât 
seulement au ciel, il prit le livre et continua le 
saint cantique à ces paroles : Esurientes impie- 
vit bonis. 

Au mois de juin 1859, l'Œuvre perdit le géné- 
ral de Cotte, aide-de-camp de l'empereur Napo- 
léon III, mort de la rupture d'un anévrisme, au 



- 182 — 

quartier général de l'armée d'Italie. Il était 
impossible d'allier plus de simplicité à plus de 
zèle ; s'oubliant complètement lui-même il tenait 
à prendre sa part des soins matériels qu'exige 
l'installation des nuits. Il donnait une édification 
d'autant plus efficace qu'elle partait de plus 
haut. 

M. Hilsdorff mourut le 25 novembre suivant, 
emportant les regrets de tous ses confrères. 

M. Goldsmid, né juif, puis devenu protestant 
puséiste, s'était enfin converti au catholicisme. 
Depuis qu'il était entré dans le sein de la vérita- 
ble Eglise, sa vie était des plus édifiantes. Son 
amour pour la sainte Eucharistie était arrivé à 
ce point de perfection de pouvoir faire tous les 
jours la sainte Communion. Pendant les cinq 
mois et demi qu'a duré sa douloureuse et der- 
nière maladie, sa patience, nous pouvons même 
dire sa douce gaieté, ne se démentit pas un seul 
instant malgré des souffrances aiguës. Une seule 
pensée le dominait, celle d'aimer son Dieu et de 
faire sa sainte volonté. Malgré son vif désir de 
recevoir souvent sa visite, il supportait la priva- 
tion de sa Communion journalière sans exprimer 
de regrets. Sa fidélité ne se laissait ébranler 
par rien, et jusqu'à la veille de sa mort, il ne 
cessa de faire sa méditation, ses prières et ses 



183 



lectures de piété ordinaires. Quand on lui 
annonça que sa fin était prochaine, il répondit 
en souriant: « Fiat voluntas tua »; et cepen- 
dant il laissait après lui une famille qui lui était 
bien chère. 

Pendant tout le temps de son agonie, qui fut 
assez longue, il ne perdit rien de son calme. 
Pour augmenter sa confiance en Dieu, on lui 
parlait des motifs d'espérer que lui donnaient 
ses bonnes oeuvres. Sa conscience s'alarma de ce 
qu'il regardait comme une atteinte à l'humilité. 
Le digne ecclésiastique qui l'assistait dans ce 
moment suprême allait le quitter. Il le retint 
seul : « — Priez pour moi, lui dit-il, parce qu'on 
« a trop bonne opinion de moi ; on me fait des 
« compliments et cela m'expose à la vaine gloire.» 
— « Cher Monsieur, lui répondit l'ecclésiastique 
« avec la liberté des enfants de Dieu, on vous 
« fait des compliments parce qu'on a beaucoup 
« de charité ; mais, vous, qui vous connaissez, 
« comment pourriez-vous avoir de la vaine 
«gloire?» — «C'est vrai,» répondit-il, et il 
resta recueilli. Voici les paroles qu'il aimait 
le plus à répéter pendant sa longue agonie : 
« Oh ! qu'il est beau de mourir catholique ! Oh ! 
« qu'il est bon de souffrir ! Que mes souffrances 
« me sont chères ! Mon bon Jésus, je suis heureux 



184 — 



\> 



« de souffrir avec Vous. Vous n'aviez pas où re- 
« poser votre tête, et moi je suis si bien ; qu'ai- 
« je fait pour le mériter ? » Et quand, la mort 
s'approchant, il fut saisi d'une espèce d'assoupis- 
sement, il dit : « Je suis fatigué ; il me semble que 
« je pourrais dormir. Est-ce le sommeil? est-ce 
« la mort ? Je n'en sais rien ; mais ce sera tou- 
jours la sainte volonté de Dieu. » Et il s'en- 
dormit pour toujours dans le Seigneur (1860). 
M. Eyraud fut aussi longtemps malade. Il se 
préparait depuis plusieurs années à la mort et 
cherchait à sanctifier ses souffrances par une 
soumission parfaite à la volonté de Dieu et en 
renouvelant souvent le sacrifice de sa vie. Ses 
douleurs étaient si vives que, malgré tout son 
courage, elles causaient à tout son corps de 
terribles contractions, et cependant elles ne 
purent pas lui arracher un seul mot de plainte... 
« Comment me plaindrais-je, disait-il dans ces 
c moments de crise en regardant son crucifix, 
« quand Nôtre-Seigneur Jésus-Christ ne se 
« plaignait pas, Lui qui était innocent. » Il se 
prépara avec la foi la plus ardente à recevoir 
l'extême-onction et à faire sa dernière Commu- 
nion sur cette terre. Cette action solennelle 
causa à tous les assistants une émotion profonde. 
Ce vrai chrétien mourant, déjà tout absorbé en 



— 185 — 






Dieu , retournait dans sa véritable patrie ; 
chacun voulut lui donner le baiser d'adieu et 
le charger de commissions pour le Ciel. Resté 
seul avec son fils, le dernier avis qu'il lui donna 
fut ft aimer Dieu pour Lui-même. Après quoi 
il expira doucement (1 er septembre 1860). 

M. Le Blanc, ingénieur en chef, après avoir 
passé plus de quarante ans de sa vie au service 
de la science et y avoir acquis une supériorité 
qui lui avait valu l'amitié de nos plus grands 
savants, comprit que Dieu demandait autre 
chose de lui. Une grande catastrophe, la perte, 
sur le champ de bataille d'Inkermann, d'un fils, 
qui, jeune encore, portait les épaulettes de colo- 
nel, lui fit prendre la résolution de consacrer 
à la gloire de Dieu et au salut de son âme les 
années qu'il plairait à la Providence de lui 
laisser. Sa persévérance fut sans défaillance, 
et on peut dire que, depuis lors, M. Le Blanc 
n'eut d'autres pensées, d'autres sentiments que 
ceux de la charité. Il n'y avait pas une œu- 
vre dont il ne fit partie et à laquelle il 
n'apportât le concours d'un dévouement à toute 
épreuve. Il fut, dans l'œuvre de l'Adoration 
nocturne, un des plus fervents; ni son âge (il 
est mort à soixante-seize ans), ni les fatigues 
des nuits, ni les intempéries des saisons, rien ne 












— 186 — 

l'arrêtait. Il était toujours le premier au rendez- 
vous. Ses mortifications, les privations qu'il 
s'imposait étaient telles que son confesseur fut 
obligé d'interposer son autorité pour en adoucir 
la rigueur. Tant de zèle et tant d'amour de Dieu 
et du prochain devaient lui ménager une douce 
fin. Il s'est éteint avec le calme que donne la 
paix du Seigneur, laissant le digne curé de 
Monfort-l'Amaury, où sa santé l'avait forcé de 
se retirer, plein d'admiration devant cette mort 
qui lui faisait dire : « C'est la mort d'un saint » 
(3 septembre 1860). 

Dans une position plus modeste, M. Duris 
avait toujours édifié l'Œuvre depuis le jour de 
son admission (22 novembre 1848); il mourut 
à l'hospice Necker plein de confiance en Dieu. 

Le général espagnol, don Joseph Arroyo, mou- 
rut en 1861. Malgré son âge et les fatigues d'une 
vie bien éprouvée, il ne connaissait pas d'obs- 
tacles quand il était question d'aller adorer 
Nôtre-Seigneur et de prendre part aux nuits 
de l'Association dans lesquelles il était un 
sujet de profonde édification par sa foi et son 
humilité. 

La même année, M. Lavigne, aussi bon mem- 
bre de la Société de Saint-Vincent de Paul 
qu'il l'était de l'œuvre de l'Adoration nocturne, 



— 187 — 






alla recevoir au Ciel la récompense de ses vertus 
chrétiennes. 

M. Sigismond Gordazewsky, ancien officier 
polonais, attaché au ministère d'État, admis dans 
l'Œuvre le 16 décembre 1854, avait eu la pensée 
de former une série d'adorateurs entièrement 
composée de Polonais, qui auraient été convo- 
qués ensemble pour les mêmes nuits et qui, aux 
intentions ordinaires de l'Œuvre, auraient joint 
une intention toute spéciale pour la Pologne. Ce 
projet ne put pas se réaliser, mais il n'en reste 
pas moins comme le témoignage du zélé qui ani- 
mait M. Gordazewski. Il succomba, le 25 mars 
1862, à une courte maladie, et sa mort fut des 
plus chrétiennes. 

M. Dalibon, dont le dévouement à Notre- 
Seigneur ne se contentait pas des obligations 
qu'impose notre Association et l'avait poussé à 
faire partie de l'œuvre de l'Adoration nocturne 
établie à Notre-Dame de la Croix de Ménilmon- 
tant, spécialement pour cette paroisse, mourut 
la même année en véritable adorateur. 

MM. d'Infreville et Daniel Deray, après avoir 
apporté dans les exercices de l'Adoration noc- 
turne autant d'abnégation que de ferveur, mou- 
rurent en 1863; le premier, d'une chute de voi- 
ture; le second, subitement, mais l'un et l'autre 

7* 









— 188 — 






bien préparés et plein de mérites devant Dieu. 

M. Daniel Deray avait passé une nuit d'Ado- 
ration quelques jours avant de mourir. Il avait 
le pressentiment de sa fin prochaine ; il avait dit 
à un confrère qui lui demandait de faire une 
neuvaine avec lui : « Je la commencerai, mais 
« je ne la finirai pas. » En effet, il mourut le 
huitième jour. 

MM. Payrau et Fontaine étaient menuisiers. 
Des sept jours de la semaine, six appartenaient 
à leur travail, mais le dimanche était à eux 
et ils avaient choisi la nuit du samedi soir pour 
faire leur Adoration nocturne. Leur exactitude 
était irréprochable. Peu de temps avant de 
mourir, M. Fontaine disait à son confesseur qui 
l'exhortait au détachement d'un monde qui allait 
lui échapper : « Oh ! mon père, je ne regrette 
« qu'une chose, c'est l'Adoration nocturne. » 

M. Payrau mourut le 19 août 1865, et M. Fon- 
taine le 6 septembre suivant. 

M. Chaumont les suivit de près; il eut la 
consolation d'être préparé à la mort et d'être 
administré par son fils, jeune prêtre, qui trouva 
dans sa foi et dans l'espérance des récompenses 
réservées aux vertus de son père, le courage de 
lui rendre jusque dans la tombe les devoirs de 
son saint ministère. 



— 189 — 

M. Abel Brazier de Thuy, né d'une famille 
honorable, cruellement éprouvée par les mal- 
heurs de la Révolution, dut chercher dans le 
travail l'aisance que ne pouvait plus lui donner 
la fortune patrimoniale. Associé dans une charge 
d'agent de change, il apporta dans cette carrière, 
qui présente plus d'un écueil pour la piété, des 
habitudes et des sentiments si chrétiens qu'il y 
a laissé une mémoire tout à fait exceptionnelle. 
D'un caractère bon et facile, d'un esprit indul- 
gent, il savait rendre la religion aimable et 
attrayante. C'est surtout dans les heures bénies 
de l'Adoration nocturne qu'il venait puiser les 
grâces nécessaires à cette vie toute de travail, 
de bons exemples et de bonnes actions. Aussi, 
l'oeuvre de l'Adoration nocturne lui était extrê- 
mement chère, et quand la maladie vint arrêter 
l'activité de son dévouement, il n'eut plus qu'une 
pensée, celle de guérir pour pouvoir reprendre 
ses précieuses nuits devant le Saint-Sacrement, 
Cependant il ne faut pas croire que ce désir 
s'écartât de la soumission à la volonté de Dieu ; 
notre bon confrère savait trop bien que le chré- 
tien ne doit vouloir que ce que Dieu lui-même 
veut, et on peut dire que cette soumission était 
le caractère essentiel de sa belle âme. Il en 
donna des preuves constantes pendant la longue 



190 — 






et douloureuse maladie qui le conduisit au tom- 
beau. Pendant huit mois, il souffrit patiemment 
les plus grands maux, même la cécité, car il était 
devenu aveugle deux mois avant de mourir, sans 
proférer une plainte, offrant à Dieu chaque 
nouvelle douleur, et quand le dernier moment 
fut venu (19 février 1867), sa mort, embellie par 
une si parfaite préparation, fut une consolation 
en même temps qu'un grand exemple pour sa 
famille, pour ses domestiques, pour ses amis, 
qu'il ne voulut pas quitter sans leur rendre le 
dernier service de les engager à aimer Dieu, à 
veiller au salut de leur âme et aux grands intérêts 
de l'éternité. 

Dans une position plus modeste, M. Bonvalet 
a aussi laissé de bien touchants exemples de 
vertu. Membre actif de l'Œuvre depuis les pre- 
miers jours, il lui était attaché du plus profond 
de son cœur. Son zèle pour ses intérêts était des 
plus ardents, et nous avons vu un bon nombre 
de ses lettres, dans lesquelles il signalait avec 
une sainte liberté les irrégularités, inévitables 
dans les commencements, mais qu'il ne suppor- 
tait qu'avec une pieuse impatience. Sa charité 
pour les pauvres était admirable. 

Il était rempailleur de chaises de son métier ; 
par son travail, par sa bonne conduite, il était 



— 191 - 

parvenu à se créer une aisance qui aurait pu lui 
permettre de vivre tranquillement, en rentier. 
Mais, éclairé des lumières de la foi la plus vive, 
embrasé de ce feu de l'amour divin qui se com- 
munique si facilement par l'Adoration nocturne, 
il comprit que l'homme ne devait aspirer au 
repos qu'au Ciel, et, voyant autour de lui la 
misère étendre son douloureux empire, il conti- 
nua son métier de rempailleur avec la même 
ardeur que s'il avait à lui demander son pain de 
chaque jour, seulement il ne s'attribua plus le 
prix de ses journées; cet argent gagné à la sueur 
de son front appartint désormais aux malheu- 
reux. Lorsque la maladie qui devait l'emporter 
ht sentir ses premières atteintes, Bonvalet, de 
plus en plus détaché de ce monde, sans se préoc- 
cuper de l'avenir que pouvait prolonger une 
guérison toujours espérée, vendit tout ce qu'il 
possédait, en distribua le produit aux pauvres, 
et, ainsi dépouillé, s'en alla frapper àlapoi*te de 
l'hôpital Lariboissière, où il fut admis. C'est 
dans cet asile, dont il fut pendant plusieurs 
mois l'édification par ses paroles et ses exemples, 
qu'il mourut plein de mérites devant Dieu, à 
l'âge de soixante-douze ans, le 22 février 1867. 
M. Gastine, peintre d'un grand talent, était un 
artiste chrétien comprenant les grands devoirs 






— 192 — 

de sa profession. Sa perte (3 avril 1867) a été 
vivement sentie par tous ceux qui avaient l'avan- 
tage de le connaître, et en particulier par les 
membres de l'Association, qu'il édifiait surtout 
par sa modestie. Nous devons à un de ses con- 
frères de connaître quelques détails de cette 
vie vraiment méritante, qui s'est consumée dans 
l'austérité du devoir et dans les difficultés d'une 
lutte persévérante contre des obstacles sans 
cesse renaissants. Mais rien ne put le détourner 
de choisir le côté le plus élevé de la peinture 
et de s'adonner exclusivement à l'art chrétien 
dans ce qu'il y a de plus pur, c'est-à-dire de 
plus catholique. 

Il avait pris l'habitude de tracer,, jour par jour, 
sur un journal, qui est devenu ainsi le journal 
de son existence intime, tous les sentiments de 
son cœur. Ce fidèle témoin révèle chez lui des 
vertus d'autant plus précieuses qu'elles étaient 
plus cachées. Une vie entière passée dans l'amour 
du travail, dans la privation constante, dans la 
plus complète abnégation, dans la prière, dans 
les bonnes œuvres, et tout cela courageusement, 
simplement, sans bruit, sans éclat, uniquement 
pour Dieu, voilà le grand, le touchant spectacle 
que nous offre ce confident de ses épreuves, 
comme il le fat de ses joies et de ses consolations 



— 193 — 



célestes, fruit et récompense bien légitimes 
d'une vie aussi pure. 

M. Lacaille était membre de l'œuvre de l'Ado- 
ration nocturne et de la confrérie du Trés-Saint- 
Sacrement de Saint-Sulpice; sa vie, qui, dés la 
plus tendre enfance, avait toujours été exem- 
plaire, s'est terminée plus tôt que ne le compor- 
taient les prévisions humaines, le 22 avril 1867. 
Son âme tendre et dévouée ne put résister à la 
douleur profonde, quoique contenue et chré- 
tienne, que lui avait causée la mort presque 
instantanée de sa douce et pieuse compagne, 
arrivée au mois d'avril 1865. Mortellement 
frappé par ce coup terrible, il alla en déclinant 
chaque jour, sans que son calme, sa bonté, sa 
sérénité en fussent jamais troublés, malgré les 
graves préoccupations que lui causait l'existence 
de ses deux petits enfants. 

M. Lacaille priait depuis longtemps pour la 
conversion d'une personne qu'il affectionnait 
beaucoup. Déjà malade, il apprend que cette 
personne est elle-même en danger et qu'on 
éprouve la plus grande difficulté à faire admettre 
un prêtre. M. Lacaille se recueille un instant, et 
puis, d'une voix inspirée par la charité la plus 
admirable : « Mon Dieu ! dit-il, mes souffrances 
« sont bien grandes, mais je vous demande de ne 



— 194 — 

« pas les diminuer jusqu'à ce que cette conversion 
« soit obtenue! » Quelques jours après, il appre- 
nait que ses vœux étaient exaucés. Dieu avait ac- 
cepté son généreux sacrifice ; le malade avait de 
lui-même fait appeler un confesseur et avait com- 
munié dans les meilleures dispositions. Cette 
âme ainsi régénérée précéda de quelques heures 
seulement devant Dieu celle de son intercesseur, 
comme pour lui ouvrir les portes de l'éternité 
bienheureuse, et accomplir cette parole de 
l'Apôtre : « Celui qui convertira un pécheur, 
« sauvera son âme de la mort. » 

M. Henri Jury n'est resté dans l'Œuvre que le 
temps nécessaire pour se faire regretter. Admis 
le 23 février 1866 comme membre actif, il est 
mort le 27 juin 1867, à l'âge de 24 ans, après 
une maladie de six mois. Appartenant à une 
famille d'honorables négociants, dans laquelle la 
foi et la fidélité au service de Dieu sont regardées 
comme la première fortune, il avait, puisé dès 
sa plus tendre enfance, dans les exemples et les 
leçons de ses vénérables parents, la tendre piété 
qui l'avait porté vers l'œuvre de l'Adoration 
nocturne et par laquelle il s'y faisait remarquer. 
La maladie à laquelle il a succombé l'ayant 
atteint au mois de janvier 1867, il ne put parti- 
ciper longtemps aux saintes veilles; mais il 



— 195 



s'était si bien identifié à l'Association que ce qui 
ajoutait le plus à ses douleurs, était de ne 
pouvoir se joindre à ses confrères. Il se consolait 
en communiant souvent dans son lit, qu'il ne 
pouvait plus quitter. C'est à cette réception 
fréquente du pain des forts qu'il faut attribuer la 
patience vraiment angélique qu'il montra cons- 
tamment au milieu des plus grandes souffrances 
et par laquelle il édifia tous ceux qui l'appro- 
chaient. Sa dernière Communion eut lieu le 
dimanche '23 juin, jour de la Fête-Dieu; il la fit 
en union avec celle que faisaient les membres de 
l'Œuvre pour clôturer leur retraite. M. Jury 
mourut le 27 juin, jeudi dans l'octave du Très- 
Saint-Sacrement, quittant la vie sans regrets et 
heureux d'aller cueillir au Ciel la blanche cou- 
ronne réservée à l'innocence. 

M. Léon de Lillo, mort le 2 août 1867, avait 
été admis dans l'Œuvre comme membre actif, le 
17 mars 1865. Enfant de la catholique Espagne, 
il apportait dans les Adorations cette foi vive et 
solide qui est l'honneur, nous pourrions presque 
dire l'apanage de nos voisins de l'autre côté des 
Pyrénées. Mêlé, par sa profession de banquier, 
aux grandes entreprises financières de notre 
temps, il avait rendu d'importants services au 
gouvernement de son pays, et il en avait reçu 






196 



■ !■ 



d'honorables distinctions; mais, ni les tentations 
de la fortune, ni le prestige des honneurs, ni l'ac- 
tivité des affaires, ne purent entamer cette âme 
profondément chrétienne. Il avait fait deux parts 
du temps, l'une consacrée aux obligations de 
cette existence terrestre et passagère, l'autre au 
service de Dieu et au salut de son âme. Des diffé- 
rentes oeuvres qui remplissaient cette seconde 
part, celle qui lui était la plus chère, était 
l'Adoration nocturne. La convocation du secré- 
taire, à laquelle rien ne pouvait l'empêcher de se 
rendre, lui apportait toujours une nouvelle joie. 
Sa santé ne lui permettait pas de dépasser la 
limite des premières heures, et nous l'avons vu, 
pendant la saison de la campagne, revenir cou- 
rageusement à Paris pour faire son heure d'Ado- 
ration et se hâter ensuite d'aller reprendre le 
dernier train du chemin de fer qui devait le 
ramener à sa famille. Il est mort, dans le sein de 
son Dieu, à l'âge de cinquante-deux ans, alors 
qu'on pouvait espérer de le conserver encore 
longtemps à l'Association, pour laquelle il était 
un sujet d'édification. 

M. Stéphane Monneron, que Dieu a rappelé 
à lui au mois de mars 1868, était un des plus 
anciens membres de l'Œuvre. La première page 
des registres des procès-verbaux mentionne son 



197 



nom parmi ceux des confrères qui composaient 
la réunion du 22 novembre 1848, où la fondation 
de l'Association fut décidée. Il s'était élevé, par 
son intelligence et l'énergie de son travail, du 
rang de simple ouvrier à celui de rentier, pou- 
vant vivre dans une certaine aisance, fruit de 
son industrie et de ses économies. Mais son âme 
vigoureusement trempée, se dégageant des en- 
traves de ces biens périssables, n'avait en vue 
que l'éternité. Il ne connaissait que deux choses, 
la prière et le travail. Tous ceux qui l'ont vu en 
Adoration peuvent se faire une idée de la ferveur 
de sa prière ; quant à son travail, il était inces- 
sant et toujours appliqué à quelque question 
d'un intérêt général, comme pour témoigner que 
la charité en était la source. M. Monneron fut 
frappé d'une façon soudaine ; mais il ne fut pas 
surpris, car sa mort n'a été que le couronnement 
d'une vie toute consacrée au bien. 

M. Christophe John Cusack, mort le 11 jan- 
vier 1869, à l'âge de quatre-vingt-quatre ans, 
était entré dans l'Œuvre le 23 avril 1853. Son 
âme ardente et humble cachait les plus solides 
vertus. L'abnégation absolue était son principal 
caractère. Il s'était fait comme une loi de ne 
manquer à aucune convocation et il est resté 
fidèle à cet engagement tacite tant que ses forces 



— 198 






physiques le lui ont permis. Les missions diffi- 
ciles et pénibles de la banlieue étaient celles 
qu'il recherchait de préférence et, à une époque 
où l'Œuvre, encore trop rapprochée de son ori- 
gine, avait besoin de faire à ses membres des 
appels fréquents, le secrétaire était sûr de ren- 
contrer toujours l'adhésion de M. Cusack, qui 
avait sollicité comme une faveur d'être convo- 
qué, au moins deux fois par mois. Rien n'était 
plus touchant que de voir ce respectable vieil- 
lard, dont la seule préoccupation était de s'effacer 
sans cesse, accepter ce qu'on lui donnait sans 
jamais réclamer, ou choisir ce qui convenait le 
moins aux autres. Il a ainsi longtemps édifié ses 
confrères; ce ne fut que depuis 1867 que son 
grand âge l'obligea à renoncer aux nuits d'Ado- 
ration. Au mois de novembre 1866, il écrivait au 
secrétaire: « J'habite ]à présent Gagny (Seine-et- 
« Oise), sur la route de Meaux, et c'est probable- 
« ment ma dernière station (il avait alors quatre- 
« vingt-un ans). Cela n'empêche pas que je suis 
« toujours à votre disposition; mais je dois vous 
« avertir que je ne puis plus lire, ni réciter 
« l'office avec nos confrères. » 

Il fit encore une nuit d'Adoration au mois de 
janvier 1867. Ce fut le dernier effort de son zèle 
admirable. Mais il voulut qu'un lien le retînt 



— 199 



attaché à l'Œuvre, et il se lit inscrire comme 
bienfaiteur. Inutile d'ajouter que de telles vertus 
devaient être couronnées par une bonne mort. 

M. Louis Guitton, décédé le 16 janvier 1869, 
n'a fait que passer dans l'Œuvre. Son admission 
comme membre actif l'aura préparé au sacrifice 
que Dieu lui demandait. Il était dans la force de 
l'âge et il laissait une compagne aimée et de 
jeunes enfants dans la désolation. Il avait donc 
besoin d'une grâce plus grande pour se déta- 
cher de liens si doux. Elle ne lui fut pas refusée. 
Notre-Seigneur adoucit ses derniers moments. 
Sa mort a été celle d'un élu. 

Le 14 mars suivant, dimanche de la Passion, 
une foule émue et recueillie entourait, dans 
l'église de Sainte-Marguerite, le cercueil d'un 
jeune homme de vingt-cinq ans, dont la mort 
plongeait dans le deuil une honorable famille, 
recommandable surtout par sa foi et sa piété. 

M. Charles-Marie Carot, membre de l'associa- 
tion de l'Adoration nocturne et de la confrérie 
du Très-Saint-Sacrement de Sainte-Marguerite 
que son père présidait, venait de rendre sa belle 
âme à Dieu. Nature angélique, pure, douce, 
aimable, son passage si rapide dans ce monde 
a été signalé par une abondante moisson de 
bonnes œuvres et de mérites. 



— 200 — 









Employé dans le commerce assez fatiguant de 
la quincaillerie, demeurant chez ses patrons, il 
trouvait le moyen d'assister tous les jours, de 
grand matin, au saint sacrifice de la Messe et de 
satisfaire aux obligations de l'Œuvre sans qu'il 
y parût plus qu'il ne le fallait pour faire aimer 
la religion à ses jeunes camarades. Il eut le bon- 
heur d'en ramener plusieurs dans les voies de 
Dieu. 

Admis dans l'Association comme membre actif, 
en 1867, il s'y était attaché avec une sainte 
passion, et il s'y dévouait courageusement. La 
nuit qui est passée à Notre-Dame des Victoires, 
la veille du premier jeudi de chaque mois, l'atti- 
rait particulièrement ; il n'y manquait jamais, 
sans préjudice des nuits d'Adoration dans les 
autres sanctuaires où l'appellait le service de 
l'Œuvre. Cette ardeur si franche, si résolue, 
que tempérait à l'extérieur une aimable douceur, 
lui donnait un charme particulier. Sa piété, qui 
s'était accrue dans des proportions étonnantes 
par la pratique des exercices de l'Adoration, 
avait gardé toute sa naïveté, en prenant de la 
force. Elle devenait tous les jours plus commu- 
nicative et plus attachante et il était impossible 
de ne pas éprouver, à son contact, une salutaire 
impression. C'est dans ces admirables disposi- 






201 



tions que Dieu a arrêté sa course et l'a rappelé 
à lui. Sa mort éminemment chrétienne fut 
pleine de consolation. Son âme, qui tendait de 
toute sa puissance vers le ciel, prit son essor 
vers le séjour des bienheureux au dernier mot 
de l'Ave Maria qu'il récitait à haute voix avec 
la confiante ferveur que donnent la foi et la 
charité. 

M. Henri Giamboni est mort le 17 août 1869, 
âgé seulement de vingt-quatre à vingt-cinq ans. 
Bien qu'il entrât à peine dans la vie, l'épreuve 
a-* ait mûri son ame pour le Ciel. Ayant perdu 
son père alors qu'il n'avait que quinze ans, 
resté l'aîné de six enfants avec une mère décou- 
ragée et sans ressources, il comprit l'importance 
de la mission que Dieu lui réservait et il accepta 
résolument les obligations et les charges de 
chef de famille. Le jour, il travaillait, et la nuit, 
il soignait sa mère que la douleur et le dénù- 
ment avaient conduite aux portes du tombeau. 
Il put, par des efforts de dévouement inouïs et 
les plus rudes privations personnelles, rendre la 
santé à sa mère, chasser la pauvreté du foyer 
domestique et élever ses plus jeunes frères. Dieu 
seul pouvait lui donner la force de remplir ces 
austères devoirs. 

L'Adoration nocturne, voilà la source féconde 






— 202 — 







1 





































où il puisait surtout la force qui lui était néces- 
saire pour porter sa croix. Ses moments les plus 
heureux étaient ceux qu'il passait la nuit aux 
pieds du Très-Saint-Sacrement ; aussi mettait-il 
toujours le plus grand empressement à se rendre 
aux convocations du secrétaire trop rares pour 
son zèle, car il lui arrivait souvent de se pré- 
senter plusieurs fois, dans le même mois, comme 
volontaire. C'est qu'il trouvait là des grâces 
particulières, des consolations qu'il aurait vai- 
nement cherchées ailleurs et qui, fortifiant son 
âme, la conduisirent jusqu'à la montagne de 
Dieu, comme dit le Psalmiste. Le chemin en fut 
court. Son tempérament naturellement faible ne 
put résister aux sacrifices qu'il s'imposait pour 
suffire aux charges de sa famille et au travail 
souvent excessif qu'exigeait son emploi. La 
maladie en eut vite raison, et, après quelques 
jours de souffrances, il mourut en consolant sa 
pauvre mère qu'il laissait dans le désespoir. 

M. Charles Keller, receveur des douanes, 
mort le 17 septembre 1869, à l'âge de soixante- 
trois ans, faisait partie de l'Œuvre depuis le 
mois de janvier 1866. Ayant été toute sa vie un 
homme de devoir et de bonnes œuvres, il ne 
pouvait pas manquer d'être un membre exem- 
plaire de l'Association. Il se distinguait surtout 






203 — 



par sa scrupuleuse exactitude, et personne n'ob- 
servait le règlement avec une plus ponctuelle 
fidélité. Le premier au rendez-vous, silencieux 
dans la salle du repos, fervent et recueilli dans 
la prière, bon et serviable pour ses confrères, il 
pouvait être cité comme un modèle d'adorateur 
nocturne. Les souffrances que lui causait la 
maladie à laquelle il a fini par succomber, et qui 
datait de plusieurs années, ne l'empêchaient pas 
de prendre part aux exercices de la nuit. Quand 
le mal fut plus fort que sa bonne volonté, il alla 
se mettre entre les mains des Frères de Saint- 
Jean de Dieu. Ce qu'il endura de souffrances et 
ce qu'il montra de patience est impossible à dire. 
Quelque temps avant sa mort, un prêtre qui le 
connaissait disait à l'un des religieux hospita- 
liers : « Mon Frère, vous avez un saint dans votre 
« maison. » — « Ce ne peut être que M. Keller », 
lui répondit le Frère. Le calme et la sérénité 
de ses derniers moments ont beaucoup adouci la 
douleur de sa famille et de ses nombreux amis. 
Les plus inconsolables ont été les pauvres, qu'il 
secourait avec une grande libéralité. 



— 204 



CHAPITRE XVII 

Nécrologie. 
Membres actifs 

1870 à 1877. 



M. Léon de Blavette, mort le samedi 5 mars 
1870, à deux heures du matin, à l'âge de 
soixante-un ans, fut, dès sa plus tendre enfance, 
un modèle de piété. Les sentiments si chrétiens 
dont Dieu avait orné son àme, et sa fidélité à les 
conserver intacts, ont jeté sur toute sa vie ce re- 
flet de vénération et de respectueuse estime que 
la vertu seule peut donner et que l'on chercherait 
inutilement en dehors du catholicisme. Esprit 
distingué, ancien élève de l'École polytechni- 
que, les dons de sa belle nature furent constam- 
ment employés au bien. 

Dès son entrée dans l'œuvre de l'Adoration 
nocturne, il s'y distingua par les qualités qui 
font le véritable adorateur. Ame intérieure, 
attentif aux communications intimes de la grâce, 
il recherchait nos saintes veilles, comme le 
cerf soupire après l'eau des torrents. Aussi 
rien n'égalait son bonheur, quand il était ap- 



205 



pelé à ce glorieux service du Roi des rois. 
Vaillant, parmi les plus vaillants, il ne profitait 
pas du repos qu'accorde et même qu'impose le 
règlement. Il abandonnait son matelas à un 
autre; mais en même temps, homme de devoir 
et de discipline, il évitait de se rendre devant 
le Très-Saint-Sacrement en dehors du temps 
qui lui était destiné. Il invoquait humblement 
des raisons de santé pour avoir le droit de rester 
sur une chaise, dans un coin de la salle du 
repos, où il put, tout à son aise, se livrer à ses 
longues et profondes méditations. L'Eucharistie 
était la nourriture habituelle de cette âme d'é- 
lite. Elle s'en rapprochait par tous les moyens, 
par la sainte Messe, par la Communion, par de 
fréquentes visites au Saint-Sacrement. Un 
digne prêtre de la paroisse de Sainte-Clotilde, 
M. l'abbé Paullian, avait entrepris de donner à 
la prière du soir, une fois par semaine, une série 
d'instructions sur l'Eucharistie ; M. de Blavette 
y assistait régulièrement ; il quittait tout pour 
cela, et, quand, sentant la mort venir, il 
demanda les derniers sacrements, il voulut les 
recevoir de ce pieux ecclésiastique, bien qu'il 
ne fut pas son confesseur. Atteint d'une fluxion 
de poitrine dans les derniers jours de février 
1870, il envisagea la gravité de son mal avec 



— 206 



calme, mais sans illusion. Il voulut recevoir le 
saint Viatique et l'extrême-onction, et se dis- 
posa à paraître devant Dieu. Sa résignation, sa 
sérénité, son détachement de ce monde, sa 
confiance, sa ferveur frappaient tous ceux qui 
l'entouraient. Il disait qu'il ne croyait pas qu'il 
fut si doux de mourir. Sa prière était conti- 
nuelle ; il répétait sans cesse : « In manus tuas, 
Domine, commendo spiritum meum », et sur- 
tout le psaume Lœtatus sum, dont il récitait le 
premier verset avec un saint enthousiasme. 
M. l'abbé Paullian, qui le quittait peu dans les 
derniers jours, lisait son bréviaire près de son 
lit. M. de Blavette l'avait remarqué ; quelle 
grâce, disait-il, d'avoir près de soi un prêtre qui 
prie. Il conserva ses facultés et son amabilité 
jusqu'au dernier moment. « Ma Sœur, disait- 
« il à la garde-malade, vous me donnez-là un 
« excellent bouillon, mais j'en ai besoin car je 
« vais faire un bien grand voyage. » Plus tard, 
quelques heures avant de mourir, la Sœur lui 
ayant rafraîchi la bouche avec un peu d'eau, il 
lui dit : « Vous me faites trop de bien, laissez- 
« moi souffrir davantage. » Le samedi 5 mars, 
vers une heure et demie du matin, après avoir 
béni une dernière fois sa famille, sentant ses 
membres se refroidir et sa fin approcher, il 



207 — 



récita le Magnificat et l'hymne Adorote sup- 
pléas, jusqu'au bout ; arrivé à la dernière stro- 
phe : Jesu, quem velatum, nunc aspicio, il 
s'écria : « Oh ! maintenant le voile se déchire, je 
« vois clairement ce que je n'avais jamais com- 
« p r i S- » _ « Eh ! que voyez-vous »? lui demanda 
la Sœur de Bon-Secours. — « Je vois les anges... 
« Oh ! que le ciel est beau... » Et il expira quel- 
ques instants après, vers deux heures du matin. 
M. Victor Dehoust était entré dans l'Œuvre 
comme membre actif au mois de janvier 1861, 
mais auparavant il lui appartenait déjà comme 
membre bienfaiteur. Sous une frêle apparence, il 
cachait une âme ardente, dont l'humilité aug- 
mentait encore la vigueur. Enfant dévoué de la 
sainte Église, il souffrait beaucoup, surtout dans 
ces derniers temps, des entreprises que la ma- 
lice humaine dirige contre elle et contre son 
auguste chef. Aussi, de toutes les œuvres dont 
il faisait partie, celles qui l'attiraient le plus 
étaient l'œuvre de l'Adoration nocturne, qui 
procure à l'Église le secours spirituel d'une 
prière et d'une supplication incessantes, et 
l'œuvre du Denier de Saint-Pierre, qui pourvoit 
à ses besoins temporels. Il réussissait aussi à 
merveille à procurer des bienfaiteurs à l'Œuvre, 
la modestie de sa position n'était pas un obsta- 

rt-k** 






— 208 — 

cle au succès de ses démarches. Il savait les 
rendre fructueuses, à force de zèle, et l'on était 
surpris des résultats qu'il obtenait. Tout cela 
était fait sans bruit, sans autre préoccupation 
que celle de la gloire de Dieu. Il est mort pres- 
que subitement, le dimanche 13 mars 1870, à 
huit heures du soir. Toutefois, la mort ne l'a 
pas surpris. Il la sentait venir et il se préparait 
à la recevoir, comme un chrétien doit le faire, 
avec la plus entière confiance dans Celui qui 
l'a vaincue. 

M. Auguste Dabert est mort dans les premiers 
jours d'avril 1870. Membre actif de l'Œuvre 
depuis cinq ans, il s'y était toujours fait remar- 
quer par une grande ferveur. Jaloux de la 
gloire du Très-Saint-Sacrement, il se préoccu- 
pait souvent de l'ornementation des autels où 
avait lieu l'exposition perpétuelle, et depuis long- 
temps il nourrissait la pieuse pensée de faire un 
don suffisant pour que l'on put allumer plus de 
bougies, la nuit d'Adoration, dans les églises où 
les ressources ne permettent pas de dépasser le 
nombre réglementaire. Les souffrances de sa 
dernière maladie furent des plus douloureuses. 
Il les supporta sans se plaindre, les offrant à 
Dieu pour les besoins de l'Église et le salut de 
son âme. Il mourut après avoir reçu les sacre- 



— 209 — 



ments de la sainte Église, la bénédiction spé- 
ciale du Vicaire de Jésus-Christ et celle de 
Mgr Dabert, évèque de Périgueux, dont il était 
le frère. 

M. le comte Raoul de Belbœuf, maître des 
requêtes au conseil d'État, était deuxième vice- 
président de l'Œuvre. Il se faisait remarquer 
par la vivacité de sa foi, et par son zèle pour 
l'association de l'Adoration nocturne dont il 
était un ardent propagateur. Il serait difficile de 
rencontrer un homme qui aimât davantage 
Notre-Seigneur. Il est mort prématurément 
pendant le siège de Paris, ne pouvant supporter 
à la fois les malheurs de la patrie, l'éloignement 
des siens, sa carrière publique brisée; il veillait 
comme tout chrétien doit le faire ; on lui avait 
souvent entendu dire que sa fin serait précoce, 
et il s'y préparait. 

M. Paragot, simple ouvrier, avait été admis 
en 1865 dans l'Association, où il n'a cessé d'être 
un sujet d'édification par sa profonde humilité 
et son exactitude. Il est mort dans une grande 
paix, après de longues souffrances supportées 
avec une admirable résignation dont étaient 
émus tous ceux qui l'approchaient. « Le bon 
« Dieu me fait souffrir, disait-il, mais je suis bien 
« heureux, car je puis ainsi réparer le temps 






■ 

I 










— 210 — 

« perdu. » Aussi a-t-il pu, au moment de sa 
mort, dire cette parole consolante, garantie de 
son bonheur éternel : « Dieu ne me fait pas 
« peur... j'ai toute confiance en lui. » 

Le caporal Joly, du 1 er régiment des volti- 
geurs de la Garde, avait su, au milieu des camps, 
conserver, comme plusieurs de ses camarades 
qui faisaient partie de l'Œuvre, l'intégrité de sa 
foi. Ces braves soldats formaient un groupe 
d'adorateurs toujours prêts à répondre à l'appel, 
et apportant dans l'accomplissement de leurs 
devoirs, cette discipline, cette abnégation qui 
étaient devenues presque proverbiales parmi 
les associés. Joly était un des plus zélés et des 
plus pieux. Quand, à la suite de la déclaration 
de la guerre avec la Prusse, son régiment quitta 
Paris, quoique plein d'entrain, il évitait la 
société de ses plus proches camarades pour se 
'réunir à ceux qui partageaient ses sentiments 
religieux, afin de parler de Dieu et de chanter 
de pieux cantiques pendant les marches. Quand 
le régiment faisait séjour dans une ville, Joly 
employait tous ses moments de liberté à prier 
dans les églises ; et si l'on campait prés d'un 
village, il ne manquait jamais d'aller passer 
quelques instants devant le Très-Saint-Sacre- 
ment. Tous les matins, autant que les circons- 



— 211 — 



tances le permettaient, il assistait à la sainte 
Messe et il faisait la sainte Communion plusieurs 
fois par semaine. Il avait eu ce bonheur, le jour 
même où il fut blessé à mort. C'était le ven- 
dredi 7 octobre 1870, portant ainsi Nôtre-Sei- 
gneur dans son sein, il avait marché au combat, 
en chantant le cantique : « Tout heureux dans 
ton sanctuaire. » Mais, à peine arrivé en pré- 
sence de l'ennemi, une décharge d'artillerie 
prussienne lui enleva les deux pieds. Un de ses 
camarades, membre de l'Œuvre, s'approcha de 
lui, et lui prêta son crucifix qu'il baisa avec 
effusion en disant : « Je vais au ciel, prie pour 
« moi, je prierai pour toi. » Transporté à l'am- 
bulance, il y mourut deux jours après, des suites 
de l'amputation qu'il avait supportée avec le 
plus grand calme. 

Après le caporal Joly, voici le bon et regretté 
M. Blanchetière. 

En annonçant sa mort, le journal l'Univers 
disait: « C'est de ce sang que sont faits les 
« martyrs. Aussi de telles morts appellent bien 
« moins sur nos lèvres un De profundis qu'un 
« Magnificat, car ce sont ces vies généreuses, 
« sacrifiées au rachat de la France, qui plaident 
« éloquemment devant Dieu pour notre pauvre 
« patrie. » 






— 212 — 



Il était secrétaire de la Société de Saint-Vin- 
cent de Paul, quand éclata la funeste guerre 
de 1870. Il s'enrôla dans la septième ambulance, 
dite ambulance du Patronage, parce que les 
membres qui la composaient appartenaient à la 
communauté des Frères de Saint-Vincent de 
Paul et à l'œuvre des Patronages. En partant, 
M. Blanchetière trahit dans un élan de joie 
céleste les sentiments qui l'animaient. « Ah ! 
« que je serais heureux, s'écria-t-il, de pouvoir 
« mourir en soulageant mes frères. » Ce vœu 
entendu au Ciel y fut ratifié. A Beaugency, un 
obus prussien tombé sur l'ambulance, emporta 
les deux jambes de M. Blanchetière occupé alors 
à panser et à exhorter un blessé allemand. Le 
directeur de l'ambulance, chirurgien distingué, 
mais malheureusement libre-penseur, s'empres- 
sait pour lui prodiguer les secours de son art. 
M. Blanchetière, plus préoccupé de gagner des 
âmes à Dieu que de ses propres souffrances, l'ar- 
rêta tout d'abord pour lui dire : 

« Docteur, je sens bien que je ne survivrai pas 
c à ma blessure, mais avant de mourir, j'ai deux 
« grâces à vous demander, ne me les refusez pas : 
« la première, c'est que vous croyiez en Dieu; la 
« seconde, c'est que vous fassiez rapporter mon 
« corps à ma mère, comme je le lui ai promis. » 



— 213 — 

Il succomba, en effet, le lendemain, laissant 
dans l'âme du docteur une semence de catholi- 
cisme qui, nous l'espérons, germera un jour (1). 

Le 19 janvier 1871, au combat de Buzenval, 
tombait M. Jacques Pinon , charmant jeune 
homme, aussi distingué par son esprit que par 
la solidité de sa foi, et qui, quoique nouveau 
dans l'Œuvre, y avait conquis toutes les sym- 
pathies. Il fut frappé par une balle prussienne 
en allant porter un ordre de son général. 

Le 22 mars suivant, jour de néfaste souvenir, 
un autre jeune homme, plein de distinction aussi, 
et qui, pendant tout le temps du siège, avait 
vaillamment combattu pour la défense de Paris, 
comme lieutenant au 16 e bataillon des mobiles 
de la Seine, M. Paul Odelin, expirait près de la 
place Vendôme sous les balles de ces forcenés 
pour qui la manifestation pacifique du dévoue- 
ment à la patrie était un crime. Son ancien 
maître et son ami le R. P. Olivaint accourut 
en toute hâte, espérant encore le trouver en vie, 
mais l'âme de Paul Odelin était déjà retournée 



(1) Sa vie a été écrite par M. l'abbé Leroy. Jules Blan- 
chetière, chef du secrétariat centrai des conférences de 

Saint-Vincent de Paul, caporal infirmier, sa vie, ses 

lettres et sa mort. Paris, au secrétariat do la Société de 
Saiut-Viacent de Paul, 6, rue Furstenberg, iu-18 de 
222 pages (1872). 



— 214 — 

vers Dieu, où devait bientôt la rejoindre celle de 
la sainte victime de Belleville. Le P. Olivaint, 
en baisant ce front calme et pur, que la mort 
semblait respecter, avait pu dire mieux que per- 
sonne : Reposez en paix, car il savait que trois 
jours auparavant, le 19 mars, saint Joseph, 
patron de la bonne mort, avait ménagé au 
généreux jeune homme, dans une Communion 
fervente, les prémices du bonheur qui l'attendait 
au Ciel. Ce sang a promptement porté ses fruits, 
M. Henri Odelin, frère aîné de Paul, admis le 
même jour que lui dans l'Œuvre, entra quelques 
mois après au séminaire de Saint-Sulpice, attiré 
par la noble ambition de se consacrer à Dieu (1). 
Une autre victime de la Commune est M. An- 
toine Biehler, honnête ouvrier, dont la vie paci- 
fique et modeste était partagée tout entière 
entre le travail et les bonnes œuvres ; atteint, 
le 22 mai 1871, d'un coup de feu parti des rangs 
des fédérés, alors que, se rendant de son atelier 
à son domicile, il traversait sans arme la place 
de la Concorde, il reçut à la jambe une blessure 
grave qui rendait, quelques jours après, l'ampu- 
tation nécessaire. Il mourut le 12 juin, des suites 



(1) Voir : Paul Odelin, lieutenant de mobiles, tuê â 
la manifestation de la place Vendôme, le22 mars 1871. — 
Vie et Lettres. Paris, Albanel, 1875. 



— 215- 

de cette amputation, ayant communié la veille 
et fortifié par les actes de vertu, de patience et 
de résignation auxquels ses grandes souffrances 
avaient donné lieu. 

Deux noms fermeront cette douloureuse énu- 
mération pour 1871, celui de M. Jean Loiseau 
que signalait un zèle particulier pour l'Adoration 
nocturne, mort à Rouen, le 6 février 1871, de 
la façon la plus édifiante, après une très-courte 
maladie; et celui de M. Bernard Guillaume, 
un de ces braves ouvriers qui puisent dans la 
science de Dieu, une force et une dignité qui 
imposent le respect et l'estime ; il est mort le 
2 juillet, saint jour de la Visitation, en poussant 
ce cri de triomphe : « mon Jésus, faites que 
« j'aille avec vous. » 

La longue vie du vénérable M. Guillemin, 
toujours appliqué au bien, a été si remplie et a 
porté tant de fruits, au barreau, dans les lettres, 
dans les œuvres, que nous devons laisser à 
d'autres l'honneur de la raconter. Nous nous 
bornerons à indiquer ici ce qu'il fit pour l'Asso- 
ciation dont il était membre depuis 1852. Quoi- 
que à un âge où l'on sent généralement le be- 
soin du repos, il y entra avec ardeur, et il y 
montra, dès le premier jour, une fidélité et un 
zélé qui ne se sont jamais démentis. Son assi- 

8 



— 216 — 

duité au conseil dont il faisait partie depuis 
1855 était exemplaire. Il y était d'une grande 
utilité par son expérience, son esprit judicieux 
et sa sagesse. Lorsqu'en 1856, l'Œuvre qui 
s'était servi, jusque-là, pour la récitation de 
l'office du Très-Saint-Sacrement, de livres à 
l'usage de l'Archiconfrérie de Rome, voulut avoir 
des livres à son usage particulier avec des expli- 
cations et des rubriques en français, et qu'elle 
fit imprimer ceux dont elle se sert encore 
aujourd'hui, M. Guillemin fut chargé de faire la 
traduction qui devait être placée en regard du 
texte latin. Cette mission délicate ne pouvait 
être confiée à un plus habile traducteur. 
M. Guillemin, qui s'y trouvait préparé par ses 
travaux littéraires, notamment sur les livres 
saints, répondit merveilleusement à l'attente du 
conseil. Nous pouvons dire que sa traduction, 
approuvée par l'autorité diocésaine, est digne 
de cet admirable office. 

En 1863, il prépara pour le rapport qui devait 
être lu à l'assemblée générale de juin une notice 
historique sur l'institution de la fête et sur 
l'office du Très-Saint-Sacrement. Ce travail, 
très-intéressant, était précédé des lignes sui- 
vantes qui reflètent l'humilité chrétienne dont 
était remplie l'âme de M. Guillemin. « Avant de 



— 217 - 

« parler de la fête et de l'office du Saint-Sacre- 
« ment, la voix d'un simple laïque doit s'étonner 
« d'avoir reçu cette mission. Il a fallu faire acte 
« d'obéissance, malgré le souvenir d'une redou- 
« table interpellation : Pourquoi oses-tu racon- 
« ter mes justices et prononcer les paroles 
« de mon alliance (Ps. xlix. 17). 

« Jadis, aux premiers mots de ce texte, un 
« Docteur de l'Église y fit la plus éloquente 
« réponse, celle des larmes et du silence. Il a 
« pu donner ce touchant exemple dans l'assem- 
« blée des fidèles, et, à ma grande confusion, je 
« suis à peine libre de le suivre ! Je vais donc 
« aborder en tremblant la tâche qui m'est confiée. 
« Heureusement, il s'agit non pas d'enseigner, 
« mais d'admirer et de redire ce que nous 
« avons appris des maîtres de la science sacrée 
« et ce que nous leur soumettons encore. Et, 
« sans doute, il est permis de prendre part aux 
« louanges divines, à ceux-là même qui n'ont 
< aucun autre titre à l'attention d'un pieux 
« auditoire. » 

En envoyant sa notice, il écrivait : — « Offrons 
« le tout à Nôtre-Seigneur, je le remercie de 
« ce que j'ai ressenti dans ce travail, il est si 
« doux de se livrer à de pareilles méditations. > 

Ce ne fut pas sans un profond regret que 



- 218 



M. Guillemia, sentant ses forces faiblir, dut 
renoncer à la joie de participer aux exercices 
de l'Adoration. Mais son cœur y était tou- 
jours. Il priait pour l'Œuvre et, en unissant 
ses prières à des souffrances supportées avec 
une sérénité parfaite, il acquérait de nouveaux 
titres à sa reconnaissance. Il est mort dans la 
paix du Seigneur, le 3 mars 1872, étant entré 
dans la quatre-vingt-troisième année de son âge. 
M. Emmanuel Parent du Châtelet, conseiller 
référendaire à la Cour des Comptes, fut admis 
dans l'Œuvre le 21 juillet 1857. Il y apporta 
toutes les dispositions qui font le bon adorateur: 
esprit de foi, de mortification et de prière, dé- 
vouement absolu, zèle, exactitude, cordiale 
aménité. Appelé souvent à diriger les exercices 
comme directeur laïque, il le faisait avec une 
bonté, une charité qui lui gagnait les cœurs, sans 
toutefois rien sacrifier de l'ordre et de la régu- 
larité réglementaires. Ses vertus, profondément 
enracinées chez lui, étaient le fruit de toute 
une vie sincèrement chrétienne. Encore dans 
l'adolescence, il préludait par des mortifications 
aux sacrifices de bien-être matériel qu'exige 
notre Œuvre. Souvent dans sa jeunesse, on 
avait surpris le secret de nuits passées sur le 
carreau de sa chambre, nuits que son ange 



— 219 — 

gardien comptait d'avance avec celles qu'il 
devait passer plus tard devant le Très-Saint- 
Sacrement et dont il ne parlait qu'avec délices. 
C'est qu'en effet, son amour pour la sainte 
Eucharistie n'était pas ordinaire. C'était là qu'il 
puisait abondamment cette sève de foi et de 
charité qui, en montant toujours, devait le 
conduire au ciel. Il communiait souvent, et 
même tous les jours en bien des temps de 
l'année. Son recueillement après la Messe était 
tel que les personnes mêmes de son intimité 
osaient à peine lui parler, dans la crainte de 
troubler ce colloque intérieur entre son âme 
et Dieu. Aussi quand la mort est venue fondre 
sur lui, comme un voleur, selon la parole de 
l'Évangile, elle ne l'a pas surpris. Le matin 
même, il avait reçu, en santé, les sacrements 
de pénitence et d'Eucharistie, et le soir, frappé 
subitement, il retournait à Dieu. Il était mûr 
pour le ciel. 

Dans une position tout autre , M. Balmot 
nous a laissé l'exemple des vertus les plus soli- 
des. Son exactitude et sa ferveur ne connais- 
saient pas d'obstacles. Obligé de gagner sa vie 
à la sueur de son front, rien ne l'arrêtait dans 
le service de l'Œuvre, même lorsqu'il s'agis- 
sait d'aller chercher Nôtre-Seigneur dans les 



— 220 — 

sanctuaires éloignés de la banlieue. Les lettres 
de convocation du secrétaire étaient pour lui 
un ordre impérieux auquel il se serait cru cou- 
pable de manquer. Les derniers temps de sa 
vie avaient été attristés par la conduite blâmable 
d'un fils qui s'était éloigné de Died; mais ses 
prières pour la conversion de cette âme si chère 
étaient montées jusqu'au ciel. Toutefois, il mou- 
rut avant cette conversion si désirée, le 30 no- 
vembre 1872, à Bicêtre, où ses souffrances et 
sa pauvreté l'avaient conduit. Oh! sainte mort, 
sur cet autre Calvaire, vous avez forcé la 
Miséricorde divine dans ses derniers retran- 
chements, car, peu de mois après, le fils suivait 
son père sur la route du Ciel.... il mourait 
converti. 

M. Paul de la Forest, comte d'Armaillé, entra 
dans l'Œuvre le 28 mars 1856. Il s'y fit remar- 
quer par une piété franche et droite qu'accom- 
pagnait une grande exactitude pour l'accom- 
plissement de ses devoirs de membre de l'Ado- 
ration nocturne. Homme du monde, son exquise 
politesse avait ce cachet de bonté que la charité 
seule peut donner. Sa foi était vive, il l'avait 
rendue inébranlable par de longues et fortes 
études poursuivies avec autant de persévérance 
que de fruit. Esprit grave, aimant le travail par 



— 221 — 

goût et par devoir, il était entré, en 1829, dans 
la magistrature qui lui offrait les moyens d'uti- 
liser ses rares qualités et de les faire servir au 
bien. Un avenir brillant s'ouvrait devant lui, 
lorsque la révolution de juillet éclata. S'inspi- 
rant des sentiments d'honneur et de fidélité 
héréditaires dans sa famille, il sut généreuse- 
ment et sans hésitation faire le sacrifice de sa 
carrière et des avantages qu'elle lui offrait. Il 
rentra dans la vie privée où il n'eut plus qu'un 
but, l'exercice de la vertu et des bonnes œuvres. 
C'est en parcourant cette noble voie qu'il ren- 
contra l'association de l'Adoration nocturne. 
Elle convenait à sa nature méditative et dévouée 
et il s'y affilia pour ne plus s'en séparer. Sa 
mort, arrivée le 12 juillet 1873, fut le digne 
couronnement d'une aussi belle vie , ce fut celle 
d'un vrai chrétien. Dieu donna à cette âme 
fidèle, dans ce moment suprême, des consola- 
tions que nous pouvons regarder comme les 
prémices et les arrhes du bonheur qui l'attendait 
au Ciel. 

Dans une humble position, M. Antoine Ta- 
phanel nous a donné le touchant spectacle de 
ce que peut l'homme lorsqu'il a soumis son 
cœur aux inspirations de la foi. Né dans le 
diocèse de Saint-Flour, d'une famille de pauvres 



- 222 






cultivateurs, il fut élevé dans les sentiments 
de la plus solide piété. Il vint à Paris à 
l'âge où les tentations ont le plus de puissance 
sur l'âme, mais il sut se garantir du mal en 
pensant souvent à la recommandation que lui 
avait faite sa mère en partant : « Conserve tou- 
« jours, lui avait-elle dit, l'amour et la crainte 
« de Dieu. » Tout le temps qu'il ne donnait pas 
à son travail, il le consacrait aux bonnes œu- 
vres; il y montra un zèle infatigable et une 
générosité qui pouvait paraître imprudente à 
quelques-uns, mais qu'il expliquait et justifiait 
par ce mot si simple et si vrai : « Il faut bien 
« acheter le ciel. » Il apporta la même ardeur 
dans l'œuvre de l'Adoration nocturne où il se fit 
admettre en 1863. Il déployait une activité 
surprenante pour procurer des membres soit 
actifs soit bienfaiteurs. Les services qu'il rendit 
ainsi furent considérables. Encore dans la force 
de l'âge, il fut atteint d'une maladie aiguë qui 
brisa sa constitution et l'achemina lentement 
vers la mort. Il supporta ses grandes et longues 
souffrances avec une admirable résignation. Sa 
seule crainte était de quitter ce monde avant 
que son fils unique n'eût fait sa première Com- 
munion. Dieu lui laissa le temps d'être témoin 
de ce beau jour. Ce fut sa dernière halte : 



— 223 — 

n'ayant plus rien à demander en ce monde, 
il se fît transporter à l'ombre du clocher qui 
l'avait vu naître et il y rendit sa belle àme à 
Dieu (1873). 

M. Charles Watremetz, était membre de l'Œu- 
vre depuis 1863. Après avoir donné à ses con- 
frères pendant près de douze ans, l'exemple 
des vertus les plus fortes, il est, on peut le 
dire, tombé au champ d'honneur de l'Adoration 
nocturne. Quoique très-souffrant d'une maladie 
qui datait déjà de longtemps, il voulut assister, 
au mois d'octobre 1874, à la nuit qu'il devait 
diriger dans la paroisse de Saint-Marcel de 
l'Hôpital. Son malaise devint si grand pendant 
cette nuit qu'il ne put rester jusqu'au matin. 
Il remit le service à un de ses confrères et 
rentra chez lui d'où il se fît transporter à la 
Pitié. C'est là qu'il rendit son âme à Dieu, le 
9 novembre suivant. M. Watremetz avait eu 
l'insigne honneur de confesser sa foi. Pendant 
la Commune, il fut arrêté et conduit à la prison 
du secteur de l'avenue d'Italie, à peu près à 
l'endroit où les Pères Dominicains ont été fusil- 
lés. Le même sort l'attendait, et il ne l'ignorait 
pas. Dans les premiers instants, songeant sans 
doute à sa famille, le découragement faillit 
s'emparer de son âme, un moment il eut peur 

8* 






■ 



. 










- 224 — 

de mourir ; mais la défaillance n'alla pas loin ; 
un prêtre d'une paroisse voisine, son compagnon 
de captivité, sut, par quelques paroles inspirées 
de Dieu, lui rendre la paix et le courage et, la 
Providence faisant le reste, il échappa au sup- 
plice qui lui était réservé. 

L'adorateur nocturne était digne du coura- 
geux chrétien. « Je ne me fatiguerais jamais 
« d'aller à l'Adoration, disait-il; on est bien 
« obligé de faire quelques efforts pour surmonter 
« la lassitude d'une journée de travail, pénible 
« quelquefois, mais on est bien amplement 
« dédommagé par l'abondance des grâces spi- 
« rituelles qu'on reçoit dans ces nuits bénies. 
« Quant à moi, je me suis toujours trouvé, 
« même physiquement, plus fort après chaque 
« Adoration nocturne qu'avant. » La maladie 
à laquelle il a succombé lui causait parfois 
des souffrances aiguës qui troublaient l'unifor- 
mité de son caractère. « Je suis confus, disait-il, 
< de ces inégalités d'humeur, lorsque je consi- 
« dère que Nôtre-Seigneur est dans la sainte 
« Eucharistie, toujours le même, toujours bon, 
« toujours doux. Il faut que je vienne à bout 
« de ces imperfections, et un des meilleurs 
« moyens sera de ne plus me croire le droit 
« de trouver des défauts aux autres. » Belle 



225 



parole, digne d'un vrai chrétien, mettant la 
douceur sous la sauvegarde de l'humilité, afin 
de mieux ressembler à celui qui veut que nous 
apprenions de lui à être doux et humbles de 
cœur. 

M. Jean-Louis Villedieu est mort à l'âge de 
soixante-sept ans, le 5 décembre 1874. C'était 
un de ces ouvriers chrétiens comme la foi 
catholique seule peut en produire. Entré dans 
l'Œuvre en 1866, il y manifesta des qualités qui 
lui gagnèrent vite les cœurs. Son dévouement 
pour l'Œuvre était tel qu'il ne manqua jamais 
à une seule convocation. Il puisait dans les nuits 
d'Adoration une ardeur extrême pour le bien. 

La perte de son fils, mort pendant le siège de 
Paris, porta un si rude coup à sa santé déjà 
ébranlée, qu'il fut obligé de renoncer à l'Adora- 
tion nocturne, si ce n'est dans sa paroisse, quand 
Notre-Seigneur lui faisait sa grande visite 
annuelle. Depuis ce moment, il ne vécut que de 
douleurs et de sacrifices. L'assistance quoti- 
dienne à la Messe et la Communion très- 
fréquente, pour ne pas dire journalière, le 
soutenaient dans cette vie d'épreuves qui le 
préparait aux joies du ciel. Dans la dernière 
période, la maladie fut plus cruelle encore. 
M. Villedieu fut privé même d'entendre la 






— 226 — 

sainte Messe, tous les jours dans la semaine. 
Mais par une grâce particulière de Dieu, tous 
les dimanches, et les dimanches seulement, un 
mieux sensible se produisait dans son état et lui 
permettait de réaliser son plus vif désir, celui 
d'aller à l'église, recevoir son doux Jésus. 

Trois jours avant de mourir, il reçut le saint 
Viatique avec les sentiments d'une foi touchante. 
Quand arriva le divin Maître, l'intensité du mal 
qui était extrême depuis plusieurs jours et qui 
ne lui laissait pas un instant de répit, cessa tout 
à coup pour faire place à un grand calme. La 
joie et le bonheur de la présence de Nôtre- 
Seigneur Jésus-Christ donnèrent au fidèle 
adorateur un avant-goût des félicités du Ciel 
où son âme ne tarda pas à aller recevoir sa 
récompense dans le sein de Dieu. 

M. Murris, décédé à l'hospice provisoire de 
la rue de Sèvres, le 20 février 1875, était entré 
dans l'CEuvre en 1863. Il était alors commis- 
sionnaire et avait été ouvrier horloger. L'af- 
faiblissement de sa vue, fatiguée par le travail, 
l'avait obligé à quitter son premier état. Vers 
1868, il devint complètement aveugle et tomba, 
par suite, dans une grande misère. Cette rude 
épreuve n'ébranla ni sa piété, ni sa confiance 
en Dieu, ni sa sérénité ; son zèle pour les œu- 



227 



vres resta le même, et nous l'avons vu se faire 
conduire à nos Adorations et à nos assemblées, 
y prendre sa part et édifier ses confrères par 
son inébranlable soumission à la volonté divine. 
Sa grande détresse l'obligeait à faire sa nour- 
riture des restes que lui donnaient les Frères 
de Saint-Jean-Saint-François, sa paroisse; mais 
trouvant qu'il y avait des pauvres plus malheu- 
reux que lui, il se privait pour pouvoir partager 
avec eux. La maladie le conduisit à l'hospice 
où, sentant sa fin approcher, il demanda lui- 
même les derniers sacrements et où il mourut 
dans la paix des saints. 

M. Albert Knittol naquit à Clermont (Oise), 
le 31 mai 1853. Sa vie a été courte, mais si 
bien remplie pour l'éternité, qu'à sa mort, la 
voix publique en parlait comme d'un prédes- 
tiné. Aîné de quatorze enfants, il fut, dès sa 
naissance, consacré à la très-sainte Vierge qui 
lui témoigna une protection constante. Natu- 
rellement doux et pieux, sa première Commu- 
nion fut le point de départ d'une ferveur qui 
ne fit que s'accroître. Il entra, à l'exemple de son 
père, dans l'œuvre de l'Adoration nocturne, le 
17 juin 1871, à l'âge de 18 ans, et se montra 
plein de ferveur. C'est dans ces nuits bénies 
qu'il entretenait sa charité pour les pauvres 



— 228 



et pour les malades et son dévouement pour 
la grande cause de l'Église : « Si on recom- 
« mençait les enrôlements pour le service du 
« Pape, disait-il, je quitterais immédiatement 
« ma place et je partirais pour Rome. » Sa santé 
déjà éprouvée commença à donner de sérieuses 
inquiétudes au mois de janvier 1875. Il fut 
obligé de garder le lit où on lui portait fré- 
quemment la sainte Communion. Le mal empi- 
rant, il fit, le samedi 13 mars, sa Communion du 
jubilé, et le lendemain sa Communion pascale. 
Ce même jour, sentant sa fin approcher, il 
demanda à sa mère de lui lire l'hymne Acloro 
te supplex, qu'il aimait à réciter et puis, tour- 
nant ses yeux vers l'image du Sacré-Cœur placé 
près de son lit : « Seigneur, dit-il, ayez pitié 
« de moi !» et il expira. 

Le 19 mars, jour de saint Joseph, patron de 
la bonne mort, l'Œuvre perdait un autre membre 
qui l'avait longtemps édifiée par ses rares ver- 
tus, M. le comte de Damas d'Anlezy. Fils du 
baron de Damas, lieutenant-général, ministre 
de la Restauration, il naquit en 1820, à Mar- 
seille, où son père commandait la division mili- 
taire. Il reçut chez les Jésuites de Fribourg 
une éducation forte, continuation de celle qu'il 
recevait dans sa famille. Admis dans l'Associa- 



— 229 — 



tion le 20 avril 1858, il montra pour le service du 
divin Maître une fidélité qui n'avait d'égale 
que son zèle à propager l'Œuvre. Appelé à Nice, 
en 1874, par l'état de sa santé, il travailla à y 
fonder l'Adoration nocturne. Ce fut une des 
dernières preuves du dévouement qu'il lui por- 
tait. Une cruelle maladie de dix-huit mois, 
qu'il supporta avec une patience et une résigna- 
tion admirables, le tint forcément éloigné de 
ses confrères, mais le prépara efficacement à 
la sainte fin dont Dieu couronna sa sainte vie. 
Craignant d'être surpris malgré une préparation 
continuelle, il avait recommandé à un ami 
dévoué de l'avertir quand il en serait au dernier 
moment, et comme il voulait éviter d'accroître 
la tristesse de sa famille, ils étaient convenus 
que l'avertissement consisterait dans cette sim- 
ple parole: Ave Maria. Quand elle fut pro- 
noncée, il la reçut avec joie ; ne parlant plus, 
il demanda de quoi écrire , traça ces mots : 
Priez pour mon âme, et rendit l'esprit. 

M. Gérard Charles, ancien préposé des 
douanes, membre de la Conférence de Saint- 
Boniface des Allemands et du tiers-ordre de 
Saint-François, entra dans l'Œuvre le 15 sep- 
tembre 1855. Il venait y chercher et il y trouva 
en effet, la force et les consolations dont la 



— 230 — 

perte de sa femme et d'un de ses enfants lui 
faisait sentir le besoin. Sous l'influence de la 
grâce qui découle de la sainte Eucharistie, il 
fit des progrès rapides dans la piété et la vertu. 
Humble, intérieur, silencieux, entièrement déta- 
ché de ce monde, il pressentait sa fin prochaine 
à laquelle il se préparait avec soin. Il avait 
demandé à Dieu la grâce de beaucoup souffrir 
pour son amour, avant de mourir : il fut exaucé. 
Pendant un mois d'une très-grave maladie, il 
eut de cruelles souffrances, dont sa patience 
ne fut jamais troublée malgré sa vivacité natu- 
relle. Le mardi de la Passion, se sentant plus 
mal, il demanda son confesseur. Le lendemain, 
il reçut l'extrême-onction et le saint Viatique 
avec un bonheur inexprimable ; et le dimanche, 
11 avril, il s'éteignit doucement, consolé et for- 
tifié par une dernière absolution générale que 
lui donna le R. P. Apollinaire, comme tertiaire 
de Saint-François. 

Dans une position très-modeste, voisine de 
la pauvreté, M. Alphonse Carré, ouvrier en 
peignes, était un des membres les plus assidus 
et les plus exacts. Soumis à une vie dure et 
pénible, ses traits portaient l'empreinte des dif- 
ficultés que rencontrait son existence matérielle, 
mais sa figurf se transformait dès qu'il était 



231 — 



en présence du Très-Saint-Sacreraent. Là, il 
oubliait ses peines, il ouvrait son cœur à Dieu, 
il lui faisait part de ses besoins; aussi, comme il 
le disait lui-même, il ne trouvait de bonheur 
sur cette terre que dans l'Adoration nocturne 
et dans la sainte Communion; en sorte que, 
rien, pas même les plus fortes intempéries des 
saisons, ne l'arrêtait quand il s'agissait de 
répondre à l'appel du secrétaire de l'Œuvre. 
Entré à l'Hôtel-Dieu, le 16 avril 1875, il y mou- 
rut deux jours après, laissant une fille qui s'est 
consacrée à Dieu dans le monastère des Sœurs 
du saint nom de Jésus. 

Il faudrait les mérites d'un saint pour parler 
dignement des vertus, nous dirions volontiers 
de la sainteté de l'excellent abbé Gaétan Britz- 
ger dont la mémoire est restée en vénération 
parmi les associés de l'Adoration nocturne. Sa 
vie si pénitente, si remplie de bonnes œuvres, 
demanderait des développements que nous ne 
pouvons donner ici. Nous nous bornerons à 
indiquer en peu de mots les traits principaux 
de cette vie dans laquelle on ne savait qu'admi- 
rer le plus, ou de la vivacité de la foi, ou de 
l'héroïsme de la charité, ou de la rigueur de la 
mortification. Dans l'Œuvre, où il avait été 
admis en 1859, à une époque où il y avait 






— 232 — 

encore de grands efforts à faire pour établir 
l'Adoration nocturne, il était le secours provi- 
dentiel que Dieu envoyait aux nuits trop faibles 
ou trop incomplètes afin que le service ne souf- 
frît pas dans sa régularité. Que de nuits n'a-t-il 
pas aidées de la sorte ? L'Adoration était orga- 
nisée, mais l'absence de plusieurs confrères 
obligeait ceux qui étaient présents à doubler 
et à tripler leur heure. L'abbé Britzger arrivait, 
souvent même au milieu de la nuit, et se 
chargeait de combler bien des vides, car une 
fois en possession de son prie-DiEU, il ne le 
quittait plus jusqu'au matin. Les généreux con- 
frères qui avaient fait, d'avance, le sacrifice de 
leur repos, pouvaient ainsi, grâce à ce pieux 
et charitable auxiliaire, prendre quelques heu- 
res de sommeil avant de retourner à leur 
travaux journaliers. L'abbé Britzger n'attendait 
pas les convocations pour se rendre aux Ado- 
rations nocturnes ; son ardent amour pour 
l'Eucharistie l'y attirait si fréquemment que le 
Conseil de l'Œuvre dut s'en préoccuper. Mais 
le saint prêtre ne voulut pas entendre parler 
de restriction pour un zèle qui le dévorait. Ce 
n'était pas seulement des nuits, mais des jour- 
nées entières qu'il passait au pied du Très-Saint- 
Sacrement exposé, sans prendre même le temps 



— 233 — 

nécessaire aux repas, en sorte qu'on disait de 
lui qu'il ne vivait que de l'Eucharistie. 

Volontairement dénué de tout, sa mortifica- 
tion était extrême ; ses privations et ses jeûnes 
prolongés en faisaient un véritable anachorète 
au milieu du monde. Sa charité était sans bor- 
nes, et bien souvent il lui est arrivé de donner 
aux pauvres jusqu'au pain et aux aliments qui 
composaient son modeste repas et dont il se 
privait pour eux. Voué à la pauvreté, il n'accep- 
tait jamais d'honoraires pour les Messes qu'on 
le priait de dire : c le bon Dieu me fournit 
tout, » répondait-il avec un sourire angélique 
à ceux qui le pressaient d'accepter une offrande. 
Il ne faisait d'exception que lorsqu'il s'agissait 
de venir en aide aux malheureux. La somme 
qu'on lui remettait passait bien vite alors de 
ses mains dans celles des autres. Ce saint prêtre, 
d'une si profonde humilité que l'on ignorait 
jusqu'à son nom, et qui n'était connu que sous 
la désignation de 'prêtre allemand, mourut 
le 27 avril 1875, chez les Frères de Saint-Jean 
de Dieu, rempli de mérites pour le Ciel. 

Le même jour, l'Œuvre perdait aussi un 
fervent et bon confrère, M. Rey, admis dans 
l'Œuvre, le 18 juillet 1872, Il était garçon de 
bureau au chemin de fer de Paris à Lyon, et 



— 234 — 

membre de la Conférence de Saint-Antoine des 
Quinze-Vingts. Appréciant la dignité du rôle 
d'adorateur, il n'assistait jamais à une nuit sans 
s'y préparer par la confession et sans communier. 
La récitation de l'office avait pour lui un attrait 
particulier ; peu familiarisé avec le latin , il 
éprouvait, au commencement de son admission 
dans l'Œuvre, de grandes difficultés à cette 
récitation. Il était parvenu à les surmonter en 
s' exerçant à la lecture de l'office sur un des 
livres à l'usage de nos nuits, qu'il avait acheté 
spécialement dans ce but. Il est mort à l'hos- 
pice de la Pitié, presque subitement, mais à coup 
sûr bien préparé par sa vie chrétienne et par 
ses bonnes œuvres. 

Le 25 mai 1875, mourait M. Guerpillon, 
menuisier, qui édifiait l'Œuvre depuis dix ans. 
Cet homme de bien, grand imitateur de saint 
Joseph pour lequel il avait une tendre dévotion, 
était humble, bon et charitable pour tous. S'ef- 
façant le plus possible, il n'aimait en toute 
circonstance que la dernière place. Sa grande 
charité dépassait de beaucoup ses faibles res- 
sources ; pendant deux ans, il garda â sa charge 
un pauvre vieillard de soixante-dix ans, qu'il 
avait installé chez lui et qu'il nourrit et habilla 
jusqu'à sa mort, lui prodiguant le» soins les plus 



— 235 — 

assidus. Homme intérieur, il priait constam- 
ment; rien, pas même son travail, n'interrom- 
pait cette prière incessante qui fut sa dernière 
consolation à l'heure de l'agonie. Fidèle adora- 
teur, rien n'égalait son empressement à se rendre 
aux convocations du secrétaire et la joie qu'elles 
lui causaient; aussi sa mort fut celle du juste. 
Il expira dans les bras de son confesseur, lais- 
sant à sa paroisse le souvenir le plus précieux, 
celui de ses vertus chrétiennes. 

Pendant huit ans qu'il a été membre de l'Œu- 
vre, M. Auguste Meunier a donné une constante 
édification, par sa simplicité, son humilité, 
l'ardeur de son zèle et la ferveur de sa prière. 
Il était d'une exactitude exemplaire et, comme 
sa profession, qui l'obligeait à parcourir Paris 
et les environs, le retenait souvent hors de chez 
lui toute la journée et ne lui permettait de 
rentrer que fort tard, il recevait quelquefois ses 
convocations à l'heure même où il aurait dû se 
trouver au sanctuaire. Alors quelle que fût 
l'heure de son retour et quelle que fût sa fatigue, 
il n'hésitait pas à reprendre sa marche poul- 
ie rendre à son poste d'adorateur, si éloigné 
fût-il. Du reste, il avait une prédilection parti- 
culière pour les Adorations de la banlieue qu'il 
réclamait de préférence, parce qu'il y avait 



I 






— 236 — 

plus de bien à faire, et qu'elles étaient plus 
méritoires à cause de la longueur du trajet qu'il 
faisait toujours à pied et par tous les temps. Ce 
bon confrère est mort, le 16 juin 1875, à l'hos- 
pice de la Pitié, âgé de soixante-quatre ans. 

Nous ajouterons les noms de MM. Mithouard 
et Fallas, trés-assidus aux nuits tant que leur 
santé leur permettait d'y prendre part et morts 
l'un et l'autre au mois de novembre 1875, dans 
les sentiments de la plus parfaite piété. 

Le 23 avril 1876, l'Œuvre faisait une grande 
perte dans la personne de M. Henri Kolb, ins- 
pecteur général des ponts et chaussées, comman- 
deur de la Légion d'honneur, décédé à l'âge de 
soixante-huit ans, à Amélie-les-Bains, où l'avait 
conduit l'état de sa santé. Entré dans l'Asso- 
ciation le 19 février 1869, son éminente piété, 
ses hautes vertus, son dévouement à l'Œuvre, 
l'avaient vite désigné pour faire partie du Con- 
seil dont il fut un des membres les plus assidus 
et les plus actifs. Ce qui frappait le plus chez 
M. Kolb , c'était sa profonde humilité , son 
amour des petits et des pauvres, le soin qu'il 
mettait à s'effacer. Il aimait à répéter cette 
parole, dont un cœur chrétien peut seul 
comprendre la valeur : Beatus qui super 
egenum intelligit, bienheureux celui qui 



— 237 



comprend le pauvre. Quand il fut promu à la 
dignité de commandeur, un de ses confrères lui 
écrivit pour le féliciter de cette distinction si 
méritée. Il lui répondit : « Ce n'est pas sans une 
« très-grande confusion que je reçois ces témoi- 
« gnages que je n'accepte pas sans de très- 
« grandes réserves et dont un juste sentiment 
« de moi-même sait faire la part qui revient â 
« une bienveillance beaucoup trop indulgente 
« et trop prévenue en ma faveur. » Lorsque 
l'état de sa santé l'eut forcé à s'éloigner de 
Paris au mois de mars, il écrivait au Président : 
« Mon rétablissement, si toutefois Dieu le per- 
« met, exigera inévitablement un temps assez 
c long. Dans ces conditions vous jugerez sans 
« doute utile à l'intérêt de l'Œuvre, à laquelle 
< je suis attaché avec vous, de me faire rempla- 
« cer dans les fonctions que j'ai remplies. Vous 
« savez d'ailleurs qu'un juste sentiment de moi- 
« même me fait préférer infiniment les positions 
« qui m'effacent à celles qui me mettent en relief. 
« Vous donnerez satisfaction à ce sentiment en 
« prenant la mesure que j'ose vous indiquer. » 
Une âme aussi humble devait être ouverte à 
toutes les vertus. La charité y tenait la principale 
place et y produisit la soumission la plus entière 
aux volontés de Diec et un abandon tout à fait 



— 238 



filial entre ses mains paternelles. Que de fois 
il répétait cette prière qui résume toute sa vie 
chrétienne : Fiat voluntas tua. C'était le 
premier cri de son cœur dans la joie comme 
dans l'épreuve. Sa mort a été, comme sa vie, 
empreinte d'une résignation calme et sereine ; 
il s'est véi'itableinent endormi dans le Seigneur, 
et si doucement qu'il a été impossible de saisir 
le moment où ce fiât voluntas tua, qu'il répétait 
encore à sa dernière heure, avait cessé d'être 
un acte de résignation pour devenir un cantique 
d'actions de grâces. 

M. du Bosde Saint-Leu, commissaire général 
de la marine, secrétaire du conseil de l'ami- 
rauté, membre de l'Œuvre depuis le mois de 
février 1862, est mort le 26 mai 1876, après une 
longue maladie supportée avec une admirable 
patience. L'Adoration nocturne était une de ses 
pratiques de prédilection. Touché des outrages 
prodigués à Dieu dans le Sacrement de son 
amour, il ne se rendait jamais aux nuits d'Ado- 
ration que sous l'inspiration de la nécessité des 
réparations qu'exigeaient ces outrages. Aussi, 
s'il y avait une heure plus pénible à remplir, 
c'est celle-là qu'il réclamait, et si le nombre 
des confrères était restreint, il s'empressait de 
solliciter comme une faveur de faire plusieurs 



— 239 — 

heures. Quand, par ordre du médecin, il dut 
renoncer à ces saintes veilles, il en éprouva une 
peine trés-vive et, ne pouvant se résoudre à s'en 
séparer, il s'y faisait souvent représenter. Sa 
mort a été, comme sa vie, simple et exemplaire. 
Il laissait pourtant derrière lui des êtres bien 
chers à son cœur; mais ces liens si forts n'arrê- 
tèrent pas l'élan de son âme dans l'acte de 
résignation complète qu'il sut faire à la volonté 
de DrEu et qui fut le plus grand adoucissement 
de ses derniers moments. 

Le nom de M. Bournisien est un des plus 
connus dans les œuvres de Paris, tant il leur a 
rendu de services signalés. Aussi, comme le 
disait avec émotion, sur sa tombe, un de ses 
confrères, en rendant compte de sa vie si chré- 
tiennement remplie : < Dans le nombreux con- 
« cours d'amis et d'hommes dévoués comme lui 
« aux intérêts de la religion qui suivaient son 
« convoi, on n'entendait qu'une parole : quelle 
« perte pour les œuvres et qui pourra combler 
« un tel vide '! qui remplacera cet homme de 
c bien ? > C'est qu'en effet, son zèle infatigable, 
son dévouement sans borne, son caractère aima- 
ble, son inépuisable générosité auraient fait de 
lui un homme indispensable, si quelqu'un pou- 
vait être indispensable dans ce monde, où rien 

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— 240 — 

ne se fait que sous l'action providentielle de 
Dieu. Il avait apporté ces rares qualités dans 
l'Œuvre, où il avait été admis le 15 juin 1866. 
Il ne tarda pas à devenir un des meilleurs direc- 
teurs laïques, et les nuits dont il avait la garde 
et le soin se faisaient toujours remarquer par 
l'entrain joyeux qu'il savait inspirer à ses con- 
frères pour l'accomplissement de leur mission 
de réparation et de prière. La vie de M. Bourni- 
sien s'était vite usée à de tels travaux ; une 
maladie grave vint l'arrêter et le préparer, par 
des souffrances supportées avec une grande pa- 
tience, au suprême sacrifice. Toutefois, il con- 
tinuait courageusement celles de ces Œuvres 
qu'il pouvait servir de son lit de douleur, et 
quelques jours avant sa mort, il s'occupait 
encore des intérêts de ses chers clients, les 
pauvres. Une existence si complètement consa- 
crée au bien ne pouvait que finir dans la grâce 
de Dieu, et le 20 novembre 1876, ce vrai chré- 
tien, muni des sacrements de notre sainte mère 
l'Église, allait recevoir au Ciel la récompense de 

sa charité. 

Le 3 mars 1877, l'Œuvre perdait un autre 
membre qui lui était cher par les preuves de zèle 
qu'il lui avait données, par sa fidélité dans son 
service et aussi par les liens d'amitié particu- 



— 241 — 

lière qui l'unissaient au vénéré M. Dupont, le 
fondateur de l'Adoration nocturne à Tours. 
M. d'Avrain ville, né, comme M. Dupont, à la 
Martinique, avait puisé dans le sein de sa famille 
les sentiments de foi profonde qu'il professa à 
toutes les époques de sa vie. Admis dans l'Œuvre 
le 20 mars 1863, son empressement et son exac- 
titude dans l'accomplissement de ses obligations 
d'adorateur le désignèrent pour les fonctions de 
directeur laïque, dont il s'acquitta toujours avec 
un grand dévouement. Homme d'action en même 
temps qu'homme de prière, il saisissait toutes 
les occasions de faire connaître et aimer Notre- 
Seigneur. Ce chrétien, si généreusement voué 
au service de Dieu et du prochain, était mûr 
pour la vie éternelle ; après trois jours de souf- 
frances qui ne semblaient avoir aucune gravité, 
le samedi 3 mars, il s'endormit dans le Seigneur 
paisiblement, sans secousse, laissant après lui 
une mémoire estimée et de bons exemples à 
imiter. 

Presque en même temps, le 5 mars, mourait 
M. Louis Beaugendre, qui faisait partie de 
l'Œuvre depuis 1853. En voyant les modestes 
funérailles de ce simple ouvrier menuisier, nul 
ne se serait douté du grand nombre d'actes de 
vertus qu'il avait accomplis pendant les soixante- 



— 242 — 

onze ans qu'il avait vécu sur la terre. Il était 
de toutes les œuvres pieuses de sa paroisse et 
il s'y faisait remarquer par son zèle et son 
esprit de foi. Mais ce qui était surtout admirable 
en lui et ce que le monde ne sut jamais appré- 
cier, ce furent son dévouement à l'Eucharistie 
et les nuits sans nombre qu'il passa avec une 
ferveur exemplaire devant le Saint-Sacrement 
exposé, sans rien retrancher de son travail qu'il 
reprenait le lendemain, comme s'il avait parfai- 
tement reposé toute la nuit. La mort de ce bon 
adorateur a été une véritable perte pour l'œuvre 
de l'Adoration nocturne. Il était un des rares 
survivants qui, les premiers, avaient travaillé à 
l'établir à Paris. Au jour du jugement, cet 
humble ouvrier trouvera son souverain Maître 
les mains pleines des dons célestes, l'introdui- 
sant dans la gloire à la suite des fidèles adora- 
teurs de l'Agneau. 

M. Louis La Combe de Villers n'a fait qua 
passer dans l'Œuvre; admis le 19 novem- 
bre 1875, il est mort le 4 avril 1877; mais le 
zèle qu'il a montré pour l'Adoration nocturne, 
la tendre piété qu'il manifestait dans ses saintes 
veilles ont laissé parmi ses confrères le meilleur 
souvenir de son ardent amour pour le Très- 
Saint-Sacrement. Ce dévouement pour l'Eucha- 



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— 243 - 

ristie était une tradition de famille. Son père 
avait récemment fondé l'Œuvre à Saint-Malo 
et Dieu ne lui avait pas fait longtemps attendre 
sa récompense; il l'avait rappelé à lui, le 10 fé- 
vrier 1877. M. La Combe de Villers ne put 
surmonter la douleur que lui causait cette perte. 
Ses forces, déjà affaiblies parla maladie, allèrent 
en diminuant et, sept semaines après, il allait 
rejoindre au Ciel celui dont les exemples et les 
conseils l'avaient préparé à la mort des élus. 

Voilà des existences et des morts bien pro- 
pres à faire impression sur nos cœurs. Si nous 
savons les imiter, on pourra dire aussi un jour 
de nous, que nous avons aimé Dieu de tout 
notre cœur, de toute notre âme et de toutes 
nos forces. 



— 244 



CHAPITRE XVIII 



Nécrologie- 
Principaux protecteurs et bienfaiteurs. 



Tous les souvenirs que nous venons de rap- 
peler se rapportent à des membres actifs de 
l'Association. Nous devons aussi un témoignage 
de juste reconnaissance à quelques bienfaiteurs 
qui, soit par le bien qu'ils ont fait à l'Œuvre, 
soit par leurs vertus ou leur haute position 
sociale, méritent de trouver place dans cette 
nécrologie. 

Le premier nom qui doit être signalé est celui 
du vénérable curé de Notre-Dame des Victoi- 
res, M. l'abbé des Genettes, mort plein de méri- 
tes devant Dieu et devant les hommes, le 
25 avril 1860. Sa vie si édifiante, si remplie de 
bonnes œuvres a déjà été plusieurs fois écrite, 
et nous avons dit plus haut quelle part il a eue 
à la fondation de l'œuvre de l'Adoration noc- 
turne; c'est lui qui l'accueillit le premier. 
Homme de foi et de prière, son cœur éminem- 
ment sacerdotal avait tout de suite compris 
l'importance d'une pareille œuvre, et il lui 



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— 245 



ouvrit avec bonheur son église pour faire la 
première nuit d'Adoration, le 6 décembre 1848. 

C'est encore lui qui, seul après Dieu, la 
soutint lorsqu'elle passa par les rudes épreu- 
ves qui signalèrent ses débuts. 

Nous retrouvons plus tard sa fidèle protec- 
tion, lorsque l'Adoration nocturne devint le 
complément des exercices des Quarante-Heu- 
res. La première application de la fusion des 
deux œuvres se fit à Notre-Dame des Victoires 
le 30 décembre 1851. 

Enfin, lorsque, grâce aux développements de 
l'Œuvre, la nécessité d'une nuit mensuelle à 
Notre-Dame des Victoires fut devenue moins 
pressante, M. l'abbé des Genettes tint à con- 
server cette nuit du mercredi au premier jeudi 
de chaque mois. Elle se fait encore régulière- 
ment, spécialement à l'intention des membres 
bienfaiteurs, et elle est pour la paroisse une 
source de grâces abondantes. 

Le successeur de M. des Genettes, M. l'abbé 
Chanal, de pieuse mémoire, donna aussi à 
l'Œuvre des témoignages précieux de sa pro- 
tection. Il fut le premier qui, profitant de 
l'autorisation de Son Éminence le cardinal Mor- 
lot, fit, au mois de décembre 1860, les trois nuits 
d'Adoration pour la solennité de l'Adoration 



246 — 



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perpétuelle. Jusque-là chaque église n'avait eu 
que deux nuits. C'est aussi à M. l'abbé Chanal 
que l'Œuvre doit l'établissement à Notre-Dame 
des Victoires des deux quêtes annuelles faites 
en sa faveur, le premier jeudi du mois de Marie 
et l'un des trois jours de l'Adoration perpétuelle, 
dont nous avons déjà parlé. La première quête 
eut lieu au mois de mai 1865. 

M. l'abbé Bourgoing, curé de Saint-Augustin, 
mort le 23 novembre 1867, a aussi droit à la 
reconnaissance de l'œuvre de l'Adoration noc- 
turne. Lorsqu'à la fin de 1851, se relevant des 
sérieuses épreuves dont Dieu avait voulu entou- 
rer son berceau, elle voulut prendre la route 
que la Providence semblait lui tracer, et se 
fondre avec l'institution des Quarante-Heures 
pour rendre l'Adoration réellement perpétuelle' 
dans le diocèse de Paris, elle trouva cher 
M. l'abbé Bourgoing des encouragements et 
un concours qu'il est juste de rappeler, parce 
qu'ils eurent un effet considérable pour elle. 
Ainsi qu'il a été déjà dit , la pensée féconde 
de la réunion des deux œuvres avait été suggé- 
rée par M. de Cuers. Mais l'état de l'Association, 
si chancelante encore à cette époque, rendait 
la réalisation de ce projet à peu près impossible, 
humainement parlant. M. de Cuers en parla 



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— 247.— 

timidement à M. l'abbé Bourgoing, qui, loin de 
le dissuader, accueillit ses ouvertures avec ce 
zèle actif et résolu qu'il apportait dans le bien, 
et lui promit d'admettre les confrères de 
l'Œuvre, la nuit, dans son église, pendant les 
trois jours d'Adoration qui étaient cette année- 
là (1852), les 17, 18 et 19 janvier. M. de Cuers, 
qui pouvait compter aussi sur le saint et véné- 
rable curé de Notre-Dame des Victoires, M. des 
Genettes, entra avec confiance dans la nouvelle 
voie qui s'ouvrait sous de si heureux auspices. 
Si M. l'abbé Bourgoing eut accueilli plus froide- 
ment M. de Cuers, que serait-il advenu? Dieu 
seul le sait. Mais, à coup sûr, il est difficile de 
ne pas faire ressortir tout le bien qu'il a procuré 
à l'Œuvre en l'encourageant si efficacement 
dans ce moment décisif. 

M. l'abbé Serres, curé de Saint-Thomas d'A- 
quin, avait aussi compris l'opportunité de l'Œu- 
vre. Il offrit lui-même son église à l'Association 
pour ses réunions générales et ses retraites, en 
cherchant avec une bienveillance particulière 
à concilier les heures d'office de sa paroisse 
avec le programme de ces réunions. 

Son digne successeur, M. l'abbé Debeauvais, 
continua les mêmes traditions ; quand on l'en 
remerciait, il avait coutume de dire, avec cet 



^ 



— 248 — 



aimable entrain qui donnait tant de charme à 
ses relations : « L'œuvre de l'Adoration noc- 
« turne est chez elle dans l'église de Saint- 
« Thomas d'Aquin. » 

M. le vicomte Héricart-Ferrand aurait cer- 
tainement été un des plus fervents membres 
actifs, si son âge le lui eût permis. Il ne pouvait 
être que membre bienfaiteur, et il comptait 
parmi les plus anciens et les plus fidèles. Né 
le 21 avril 1779, il venait de commencer sa 
quatre-vingt-dixième année lorsqu'il rendit son 
âme à Dieu, le 3 mai 1868. Les circonstances 
de cette mort, qui rappelle celle d'un autre grand 
chrétien, plus grand encore par la vertu que 
par le nom illustre qu'il portait, Matthieu de 
Montmorency, sont trop édifiantes pour ne pas 
être rapportées. M. Héricart-Ferrand avait perdu 
sa digne compagne, le 7 février précédent, après 
48 ans delà plus parfaite union. Cette doulou- 
reuse séparation avait altéré sa santé déjà affai- 
blie par l'âge, et il éprouvait de temps à autre 
des défaillances qui lui faisaient dire que c'était 
ainsi qu'il finirait. Mais son moral le soutenait 
et il n'en continuait pas moins les visites qu'il 
était, depuis si longtemps, dans l'usage de faire 
avec sa pieuse compagne au Saint-Sacrement, 
dans les églises où il était exposé. Le dimanche, 



— 249 — 

3 mai, il alla à la Messe comme d'habitude, et 
dans l'après-midi, ne pouvant aller au Salut, 
parce que son domestique n'avait pu trouver 
une voiture, il voulut au moins aller faire quel- 
ques instants d'Adoration dans la chapelle des 
Dames Réparatrices, rue d'Ulm, dont il était 
voisin. Appuyé sur le bras de son serviteur, 
il se dirigea à pied vers la chapelle. Le trajet 
était un peu long pour lui, il le fit cependant 
sans s'arrêter, et il monta assez facilement les 
quelques marches qui conduisent à la chapelle. 
A peine arrivé, en présence de Notre-Seigneur, 
il éprouva un tremblement, signe précurseur de 
ses défaillances ; on le fit asseoir et au moment 
même il rendit son esprit à Dieu, aux pieds de 
la sainte Victime, dans ce vestibule du ciel, 
d'où son âme partit pour aller continuer là- 
haut l'Adoration qu'elle avait commencée sur 
la terre. Qui n'envierait une semblable mort ? 
car pour un adorateur aussi fidèle, c'était mou- 
rir au champ d'honneur. 

M. Amédée Thayer, sénateur, membre auxi- 
liaire et bienfaiteur, était un de ces grands 
chrétiens que Dieu présente au monde, comme 
un modèle à suivre dans les hautes régions 
de la fortune et des grandes positions politiques. 
Sa vie a été esquissée en quelques pages d'un 






I 



— 250 — 

volume (1) plein d'attachant intérêt où sont 
retracées les douces et aimables qualités de cet 
homme de bien, qu'une foi vive et une solide 
piété avaient conduit jusqu'à la perfection de 
la vie chrétienne. Nous ne redirons pas tout 
ce qui est à l'honneur de cette noble existence, 
voulant rester dans les bornes de notre sujet 
purement Eucharistique ; mais nous ne pouvons 
pas taire la fidélité avec laquelle, pendant de 
longues années, M. Thayer s'est livré aux pieu- 
ses pratiques qui distinguent les chrétiens 
accomplis : la Messe tous les matins, la Com- 
munion trois fois la semaine, la visite au Saint- 
Sacrement à la fin de la journée. Pendant plus 
de douze ans, il fit partie de l'œuvre de l'Ado- 
ration nocturne, qui lui plaisait par son côté 
humble et modeste. L'Adoration perpétuelle à 
Saint-Thomas d'Aquin, sa paroisse, ne se faisait 
jamais sans qu'il prit part à l'Adoration noc- 
turne. Son recueillement et sa modestie qui 
le portait à s'effacer en toutes choses étaient, à 
eux seuls, une leçon. Ses confrères se rappellent 
avec quelle aimable humilité il se glissait dans 
leurs rangs et refusait toute distinction et toute 



(1) Monsieur Amédèe Thayer, sénateur 
262 page» ; à Paris, chez Lothiellenx ; 18C9. 



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— 251 — 



place d'honneur lorsqu'il assistait aux assem- 
blées générales. Il connaissait la pauvreté de 
l'Association et chaque année, jusqu'à l'époque 
de sa mort, arrivée en 1869, sa généreuse 
offrande venait régulièrement augmenter ses 
faibles ressources. 

Nous ne pouvons mieux terminer cette édi- 
fiante nécrologie que par le trait suivant: 

Deux simples fllles natives de Toulouse, vivant 
du travail de leur main, étaient chargées à 
Vincennes, qu'elles habitaient depuis plusieurs 
années, du soin d'orner les autels de l'église, 
notamment pour la solennité de l'Adoration 
perpétuelle. Elles s'acquittaient de ces pieuses 
fonctions avec un zélé dont Dieu les récompen- 
sait par d'abondantes grâces spirituelles. L'une 
d'elles surtout prit en si sainte passion les fêtes 
de l'Adoration perpétuelle, qu'elle demanda à 
Notre-Seigneur la faveur de mourir un des trois 
jours où elles auraient lieu à Vincennes. Le 
bon Maître daigna l'exaucer et la sainte fille 
mourut le 3 octobre 1867, premier jour de 
l'Adoration perpétuelle dans sa paroisse, et fut 
enterrée le jour 'de la clôture, au milieu d'un 
grand concours de prêtres et de fidèles qu'a- 
vaient attirés la solennité de la fête et le renom 
de sa piété et de ses vertus. 

9 



— 252 — 

CHAPITRE XIX 

Las premiers règlements de l'Œuvre. 
1848 à 1867 



Dans toute société, la règle est le principal 
élément de la force, de la durée et de la fécon- 
dité ; car la règle est la garantie de l'ordre et il 
n'y a pas de société sans ordre. 

L'ordre est la condition de tout bien, et l'on 
peut même dire à certains égards qu'il est le 
bien même. Dieu l'a mis dans toutes ses œuvres, 
et c'est ce qui les distingue surtout des œuvres 
de Satan, dont le caractère particulier est le 
désordre. Aussi l'on comprend que saint Augus- 
tin ait placé la vertu dans l'ordre, en proclamant 
que la vertu n'est pas autre chose que l'ordre. 
L'Église, de son côté, nous offre une image 
vivante de l'ordre, en même temps qu'elle nous 
enseigne quel prix elle y attache. Comme tout 
est réglé dans sa hiérarchie, dans ses rites, dans 
sa liturgie! quelle harmonie dans ce corps 
immense qui embrasse la terre, malgré les élé- 
ments si opposés, dirait-on, qui le composent ! 
Mais aussi quelle sainte ardeur à faire respecter 



253 — 



ses prescriptions, ses règlements et sa forme ! Si 
quelqu'un y veut porter atteinte d'une manière 
grave, il se met par cela seul hors de l'Eglise, 
tant il est vrai qu'on ne peut rester dans l'Église, 
sans rester dans l'ordre. 

Dès les commencements, les premiers chré- 
tiens avaient senti la nécessité de déterminer 
avec précision, non-seulement la manière dont 
se feraient les cérémonies, mais encore les priè- 
res qui devaient être récitées dans les assem- 
blées des fidèles. Cette régularité, qui était l'ob- 
jet d'un grand respect, maintenait l'unité, pré- 
venait les abus et donnait une grande force au 
christianisme. Clovis, entrant dans le temple de 
Died avec l'évêque saint Rémi, un jour de fête, 
ne put retenir l'expression de sa surprise et de 
son admiration pour l'ensemble qui régnait dans 
les cérémonies: c'est que l'ordre subjugue et 
attire aussi bien qu'il conserve et qu'il perpé- 
tue, et c'est une des raisons pour lesquelles 
l'Église met un si grand intérêt à le protéger 
jusque dans les détails par des prescriptions 
rigoureuses en apparence, mais en réalité de la 
plus haute sagesse. 

Sans doute, il ne s'agit pas d'établir des com- 
paraisons entre le règlement d'une œuvre parti- 
culière et ceux que peut faire l'Église ; tout 



— 254 — 

ceci n'est que pour rappeler la nécessité d'être 
fidèle au règlement et faire apprécier le danger 
de s'en écarter. L'histoire de tous les ordres 
religieux nous montre invariablement, par une 
expérience de plusieurs siècles, que l'observa- 
tion exacte de la règle a toujours fait leur 
vitalité, et qu'ils n'ont commencé à faiblir que 
lorsqu'ils se sont écartés de cette précieuse 
sauvegarde. 

Le règlement d'une œuvre, c'est sa pensée 
rendue sensible, c'est sa pensée imposée à tous. 
Voilà pourquoi il est vrai de dire que plus une 
œuvre suit et garde exactement ses règles, plus 
elle a de vie, plus elle fait de progrès. Saint 
François de Sales revient plusieurs fois dans 
ses inimitables écrits sur l'importance, dans les 
œuvres pieuses, de la règle qu'il compare à 
l'échelle de Jacob par laquelle on monte à Dieu. 

Dans une association comme celle de l'Adora- 
tion nocturne, le règlement doit être placé sous 
la sauvegarde de deux vertus indispensables à 
tout chrétien, mais principalement à tout adora- 
teur, la charité et l'humilité. L'observation du 
règlement n'est pas autre chose que l'abnéga- 
tion de soi pratiquée sous l'austère mais bienfai- 
sante loi de l'obéissance. Il faut savoir faire le 
sacrifice de sesvues, de ses goûts, de ses attraits 



255 - 



personnels, à la règle commune, dans l'intérêt 
même de l'œuvre à laquelle on s'est voué ; on 
ne peut être un bon et utile membre qu'à cette 
condition. Or, cette abnégation, ce sacrifice ne 
sont possibles que lorsque la charité et l'humi- 
lité régnent dans le cœur, autrement on est 
facilement entraîné par les insinuations de 
l'amour-propre, si habile à nous tromper, à pen- 
ser qu'après tout, le règlement n'est pas d'une 
très-grande importance, que l'on peut être un 
bon adorateur sans s'astreindre à des détails qui 
sont souvent une entrave au zèle, et qu'il est 
bien préférable de laisser chacun suivre, comme 
il l'entend, les élans de son cœur. Dangereuses 
illusions, auxquelles il faut résister de tout 
son pouvoir. 

Il faut donc observer religieusement le règle- 
ment ; il est pour l'adorateur l'expression de la 
volonté divine ; s'il y est fidèle, il fait acte 
de soumission et d'obéissance à l'autorité de 
Dieu; en le violant, il met sa propre volonté 
à la place de celle de Dieu ; c'est l'égoïsme au 
lieu de l'humilité, de l'abnégation et de la charité. 

Remarquons qu'on peut, par la seule inten- 
tion, élever le plus insignifiant de ses actes 
à la hauteur d'un acte surnaturel. Il suffit qu'en 
le faisant on mette par une vue de foi, Dieu 



— 256 — 

à la place de soi-même. Prolonger son heure 
d'Adoration, rester aux pieds du Très-Saint- 
Sacrement bien avant dans la nuit, en dehors 
du temps désigné, peut paraître à quelques-uns 
préférable au repos sur la couche qui attend 
dans la salle de réunion, et cependant Dieu verra 
ce repos d'un œil plus favorable, si on le prend 
par respect pour l'ordre et par soumission au 
règlement, c'est-à-dire par amour pour Lui. 

Dans le principe, en 1848, le règlement de 
l'œuvre de l'Adoration nocturne, était celui 
d'une œuvre naissante ; alors il n'était pas encore 
question d'Adoration perpétuelle; l'Œuvre se 
bornait à faire l'Adoration nocturne un certain 
nombre de fois dans un sanctuaire déterminé; 
les prescriptions étaient des plus simples. 

« Une association, y lisait-on, est formée, 
« ayant pour but l'Adoration du Très-Saint- 
« Sacrement, exposé durant la nuit... 

« Les membres actifs se divisent en séries 
« de quatorze adorateurs chacune. Chaque série 
c consacre une nuit par mois à l'Adoration. 

« La première série se compose des quatorze 
« adorateurs ayant les premiers adhéré à l'Œu- 
« vre. A mesure que quatorze nouveaux adora- 
« teurs seront réunis, on pourra fonder une 
« nouvelle nuit d'Adoration. 



— 257 — 

« Chaque série sera présidée par un ecclé- 
« siastique. » 

En 1852, lorsque l'Œuvre se proposa de com- 
pléter l'Adoration perpétuelle dans le diocèse 
de Paris, en faisant l'Adoration nocturne dans 
les sanctuaires où avaient lieu les Quarante- 
Heures, le règlement fut modifié, et l'on y 
trouve la trace de l'esprit de sainte propa- 
gande qui poussait l'Association à étendre 
son concours à tous les sanctuaires du diocèse, 
tout en maintenant à l'Association son exis- 
tence propre. Il est dit', en effet, à l'article 
premier : « En entrant dans l'Association, les 
« membres prennent deux engagements : le pre- 
« mier, de faire l'Adoration, la nuit, dans le 
« sanctuaire qui sera spécialement attribué à 
«la Société; le deuxième, de propager autant 
« qu'il sera en eux et par tous les moyens dont 
« ils pourront disposer, l'œuvre de l'Adoration 
« nocturne, dans les paroisses et églises de 
« Paris, à l'époque des Quarante-Heures. 

« L'Adoration dans le sanctuaire est la pra- 
« tique spéciale de l'Association ; l'Adoration 
« dans les paroisses est son œuvre de zèle et 
« son but. » 

Plus tard, en 1855, l'Œuvre avait grandi, 
son but définitif était nettement dessiné, le 



I 



— 258 — 

règlement dut prendre alors le développement 
qu'il a conservé depuis, et qui forme l'ensemble 
des prescriptions qui régissent aujourd'hui l'As- 
sociation. 

Ce règlement était daté du 17 novembre 1855. 
Il portait l'approbation de Mgr l'évèque de Tri- 
poli. Depuis, il a subi diverses modifications 
qui ont pris place dans celui que donna à l'Œu- 
vre M. l'abbé Le Rebours, vicaire général, son 
supérieur, le 2 février 1863. La dernière 
édition fut approuvée par M. l'abbé Lagarde, 
vicaire général, le 12 juillet 1867. C'est celle 
qui est en usage en ce moment. 



— 259 



CHAPITRE XX 



Règlement actuellement en vigueur. 
Indulgences. 

1867 à 1877. 



Article premier. — But de l'Association. 
Sa composition. 

De toutes les œuvres produites par la foi et 
la charité, la plus grande et la plus auguste 
est celle qui a pour but l'Adoration du Très- 
Saint-Sacrement, puisque Dieu lui-même, rési- 
dant parmi les hommes, est son objet direct; 
elle est la plus sanctifiante, puisque c'est de 
Jésus-Christ que découlent sur nous toutes 
les grâces; elle est aussi la plus nécessaire, 
surtout à une époque si remplie de commotions 
sociales : car, dans la sainte Eucharistie, se 
trouve cet intermédiaire puissant entre Dieu 
et l'homme, qui réconcilie le Ciel avec la terre, 
et qui arrête les traits de la colère de Dieu 
aiguisés par nos péchés. 

Les pasteurs et les fidèles l'ont bien compris, 
et de toute part, en France, on voit des asso- 

9* 






260 - 






dations se former pour rendre un hommage 
particulier au divin Sacrement de nos autels. 

Paris, qu'encourageait l'exemple de Rome, 
a commencé, et, grâce au zèle et à la piété de 
son premier pasteur, le diocèse se trouve enrichi 
de la grande institution de l'Adoration perpé- 
tuelle. C'est pour compléter cette sainte insti- 
tution qu'a été établie, depuis 1848, l'œuvre 
de l'Exposition nocturne du Très-Saint-Sacre- 
ment. 

Le but de cette Œuvre est donc de procurer 
à Notre-Seigneur des adorateurs pendant la 
nuit, dans toutes les églises et chapelles du 
diocèse de Paris où a lieu l'Adoration perpétuelle. 

En outre, l'Association a un sanctuaire par- 
ticulier à Notre-Dame des Victoires, où l'Ado- 
ration de nuit se pratique la veille du premier 
jeudi de chaque mois, principalement à l'inten- 
tion des membres bienfaiteurs. Ce sanctuaire 
est le berceau de l'Œuvre. 

En entrant dans l'Association, les membres 
prennent l'engagement de faire l'Adoration dans 
les sanctuaires qui leur seront désignés. 

Dans tous les cas, chaque associé ne pourra 
pas être convoqué plus d'une fois par mois. 

Les associés adorateurs sont désignés sous 
le nom de membres actifs. 



— 261 — 

Ils pourront s'adjoindre, en qualité d'auxi- 
liaires, les fidèles qui, dans leurs paroisses, 
désireraient concourir à l'Adoration du Très- 
Saint-Sacrement. 

Les personnes de tout âge et de tout sexe 
qui, ne pouvant pas assister aux Adorations 
nocturnes, désirent cependant avoir part à tous 
les avantages de l'Œuvre, peuvent s'y associer 
au moyen d'une aumône de 1 franc par an au 
moins. * 

Ces personnes seront désignées sous le nom 
de membres bienfaiteurs. 



Art. II. 



Administration. 



L'Association est soumise à un supérieur 
ecclésiastique désigné par Monseigneur l'Arche- 
vêque de Paris. 

Elle a, en outre, un directeur ecclésiastique, 
un président, deux vice-présidents, un tréso- 
rier, un vice-trésorier, un secrétaire, un vice- 
secrétaire. 

Elle est administrée par un conseil qui se 
compose des membres en charge et des membres 
désignés par le supérieur. 

Le conseil se réunit tous les mois pour les 
intérêts de l'Œuvre. 



262 



Le supérieur ecclésiastique a la haute direc- 
tion de l'Œuvre. 

C'est lui qui compose le règlement et décide 
sur tous les points qui ne s'y trouveraient pas 
insérés ou prévus. 

Il change les articles que la pratique aurait 
montrés défectueux. 

Le supérieur règle toutes les prières vocales, 
offices, recommandations et exercices spirituels 
qui auront lieu pendant la nuit, et qui devront 
être observés d'une manière uniforme, confor- 
mément à l'ordre prescrit. 

Le directeur ecclésiastique remplace le supé- 
rieur et occupe après lui la première place dans 
l'Association. Il la dirige, en s'entendant avec 
le supérieur et conformément aux statuts. Il 
préside le conseil. 

Le président est chargé des détails de l'Œuvre. 

Il veille à la convocation du conseil, à ce que 

chaque sanctuaire ait ses nuits d'Adoration, etc. 

Il préside le conseil en l'absence du directeur 

ecclésiastique. 

Les vice-présidents remplacent le Président 
en cas d'absence ou de maladie. 

Le secrétaire tient un registre de tous les 
membres. Il est chargé de la correspondance 
générale. 



— 2M — 

Il avertit, par lettre a domicile, tous les ado- 
rateurs, de la date et du lieu de l'Adoration 
à laquelle ils devront prendre part. Cet avertis- 
sement devra être donné cinq jours au moins 
avant l'Adoration. Il s'assurera de l'exactitude 
des membres, et aura soin de compléter le nom- 
bre voulu pour chaque nuit. 

Il sera aidé, s'il y a lieu, par le vice-secrétaire. 

Le trésorier tiendra la caisse et les comptes 
de l'Association. Il veillera à ce que les sommes 
provenant des cotisations lui soient remises 
exactement. Il s'entendra, chaque mois, avec 
les membres du conseil pour les dépenses cou- 
rantes. 

Il sera aidé dans sa charge par le vice-trésorier. 



Art. III. — Admissions. 

Pour faire partie de l'Association comme 
membre actif, il faut être admis par le conseil 
sur la présentation de deux membres, et être 
inscrit sur le registre de l'Association. 

Pour être membre bienfaiteur, il suffit d'être 
présenté par un membre actif. Ce dernier doit 
faire connaître au président, au secrétaire ou 
au trésorier les nom et adresse du membre 
bienfaiteur proposé, le montant de la cotisation 






— 264 — 

et l'époque à partir de laquelle elle doit être 
perçue; il reste chargé lui-même de la percep- 
tion de cette cotisation, dont il fait tenir le 
produit au trésorier. 

Les membres actifs et les membres bienfai- 
teurs, admis par le conseil, reçoivent un diplôme 
d'agrégation qui indique leur qualité et la date 
de leur réception. 

Tout membre actif qui manquera trois fois 
de suite sans nécessité ou sans motifs graves, 
d'assister aux Adorations nocturnes, sur l'invi- 
tation qui lui en aura été faite, sera considéré 
comme désirant ne plus faire partie de l'Œuvre, 
et ne pourra plus, par conséquent, profiter des 
avantages auxquels il avait droit. 

Un retard de six mois pour le versement de 
la somme que le membre bienfaiteur se sera 
engagé à payer pour subvenir aux frais de 
l'Œuvre (et qui ne pourra être moindre de 1 franc 
par an) sera l'indice que ce membre désire se 
retirer de l'Association, et qu'il renonce aux 
avantages spirituels de l'Œuvre. 

Le conseil reconnaît comme auxiliaires tous 
les hommes qui, désirant s'unir aux associés 
pour adorer le Très-Saint-Sacrement, quand 
l'Adoration perpétuelle a lieu dans leur paroisse, 
prendront l'engagement de participer chaque 



— 265 — 

année aux exercices de l'Œuvre et d'en obser- 
ver le règlement. 

Les auxiliaires ont une part spéciale aux 
prières de l'Association, à laquelle ils sont seu- 
lement affiliés. Leurs noms sont inscrits sur les 
registres de l'Œuvre. 

Le supérieur ecclésiastique pourra toujours 
décider le renvoi des personnes admises. 



Art. IV. — § 1. Adoration dans les paroisses 
et dans les chapelles où se fait l'exposition 
pour V Adoration perpétuelle. 

Le conseil, à chacune de ses réunions men- 
suelles, lira attentivement la liste des sanctuai- 
res du diocèse où devra avoir lieu, dans le mois 
suivant, l'exposition pour l'Adoration perpétuelle 
et où l'Adoration nocturne pourra être faite par 
les associés. 

Il désignera, pour chacun de ces sanctuaires, 
un ou deux membres qui devront s'occuper de 
cette Adoration. 

Ces membres s'entendront d'avance avec 
MM. les curés ou aumôniers; ils mettront à 
leur disposition le nombre d'associés nécessaires 
pour l'Adoration nocturne, et ils s'informeront 
du nombre des paroissiens qui voudraient con- 









, ■ 



266 — 



■ 



courir, à titre à' auxiliaires, à cette Adoration, 
afin de le faire connaître au président ou au 
secrétaire de l'Œuvre au moins huit jours avant 
l'exposition. 

Pour les sanctuaires, comme ceux des com- 
munautés de femmes, où les associés ne pourront 
pas passer la nuit, les membres délégués par 
le conseil s'entendront avec les aumôniers ou 
les supérieurs pour que les personnes de la 
communauté fassent elles-mêmes l'Adoration 
nocturne. 

Les associés désignés pour faire l'Adoration 
dans un sanctuaire ne devront jamais s'y pré- 
senter que munis de leur lettre de convocation. 

Autant que possible, les auxiliaires devront 
aussi être porteurs d'une lettre de convocation. 

Les lettres de convocation désigneront tou- 
jours le nom du directeur laïque de la nuit. 

Les adorateurs devront se rendre très-exacte- 
ment au sanctuaire, à l'heure indiquée sur la 
lettre de convocation. 

En cas d'empêchement, ils devront en donner 
avis sans délai au secrétaire de l'Œuvre, pour 
qu'on puisse les remplacer. 

Le président désignera un directeur laïque 
pour chaque nuit d'Adoration. 

Le directeur laïque sera chargé de maintenir 



— 267 — 

l'ordre et la discipline et de faire observer le 
règlement pendant la nuit. Il devra arriver au 
sanctuaire désigné pour la nuit d'Adoration 
quelques instants avant l'heure indiquée pour 
la réunion, afin de prendre toutes les mesures 
nécessaires pour préparer convenablement l'Ado- 
ration de la nuit. 

Il ne devra admettre à passer la nuit que les 
confrères munis de leur lettre de convocation. 
Si, par exception, il se présentait quelque con- 
frère sans lettre, mais bien connu de lui ou de 
quelque membre présent, il pourrait l'autoriser 
à prendre part à l'Adoration. 

Il ne devra admettre comme auxiliaires que 
les paroissiens qui seront porteurs d'une lettre 
de convocation signée du secrétaire de l'Œuvre, 
ou bien qui seront présentés par MM. les Ecclé- 
siastiques de la paroisse où l'Adoration a lieu, 
ou au moins qui seront bien connus des employés 
de l'église. 

Quand tous les membres seront réunis, et 
avant de commencer les exercices de la nuit, 
il désignera un membre pour s'occuper des 
soins matériels, préparer les lits de repos, 
les enlever le matin, etc., etc., et un sacris- 
tain pour veiller, s'il en est besoin, à tout ce 
qui tient au service de l'autel, servir la Messe, 



- 268 — 

entretenir les cierges qui brûlent pendant l'Ado- 
ration, etc. 

Il dressera la liste des adorateurs, en désignant 
à chacun son heure d'Adoration et son numéro. 
Il donnera au sacristain le n° 7 ou 8, correspon- 
dant à l'heure où l'on doit renouveler les 
lumières. 

Toutes les fois que des auxiliaires prendront 
part aux exercices de la nuit, il devra mettre 
en Adoration un membre de l'Association et un 
auxiliaire, afin que l'Adoration soit faite con- 
formément au règlement de l'Œuvre. 

Il fera, sur une feuille spéciale que lui remet- 
tra le secrétaire, le relevé des intentions pour 
lesquelles on réclame les prières de la nuit, 
en se conformant exactement aux indications 
de cette feuille. 

Il lira à haute voix, à tous les adorateurs 
réunis, la partie du règlement concernant l'ordre 
des exercices pendant la nuit et la discipline, 
afin que tous les adorateurs s'y conforment 
ponctuellement. 

Il fera lui-même la prière du soir et celle 
du matin, et lira la liste des recommandations 
et l'amende honorable qui suivent la prière du 

soir. 

Cette lecture faite, il récitera cinq Pater, 



— 269 — 

cinq Ave et cinq Gloria Patri, pour toutes les 
intentions de l'Œuvre. 

La nuit terminée, il inscrira très-exactement 
au verso de la feuille des recommandations, qui 
doit être renvoyée au secrétaire, les noms des 
membres qui auront pris part à la nuit. 

Il y inscrira également les noms et adresses 
des auxiliaires qui auront concouru à l'Adora- 
tion. 

Les directeurs laïques se réuniront une fois 
. l'an dans la. sacristie de Notre-Dame des Vic- 
toires, sous la présidence du directeur ecclé- 
siastique, pour conférer des intérêts de l'Œuvre. 
Les membres du conseil assisteront à cette 
réunion. 

§ 2. Ordre des exercices et discipline. 

Les exercices de la nuit commenceront à dix 
heures moins un quart par la prière du soir faite 
en commun devant le Très-Saint-Sacrement, 
et suivie de la lecture des recommandations 
et d'une amende honorable. 

La prière finie, les numéros 1 et 2 resteront 
en Adoration, et les autres adorateurs se ren- 
dront dans la salle de réunion, où chacun prendra 
pour lit de repos le lit portant le numéro corres- 
pondant à son numéro de série. 






270 



II 









A onze heures, les numéros 3 et 4 viendront 
remplacer les numéro 1 et 2, et ainsi de suite 
jusqu'à cinq heures. 

Les adorateurs garderont un silence absolu 
devant le Très-Saint-Sacrement. 

Le même silence sera gardé dans la chambre 
du repos; on n'y parlera qu'à voix basse, et si 
la nécessité l'exige, et l'on évitera avec soin, 
en se rendant devant le Très-Saint-Sacrement 
et en revenant de l'Adoration, de troubler le 
sommeil des adorateurs. 

La chambre du repos restera toujours éclairée. 

Il y aura également, pendant la nuit, une 
lumière placée entre les deux adorateurs, de 
manière qu'ils puissent lire sans se fatiguer. 

Les adorateurs ne pourront, sous aucun pré- 
texte, se rendre devant le Très-Saint-Sacrement 
en dehors du temps qui leur sera destiné. Lors- 
qu'ils ne seront pas en Adoration, et à moins 
que leur office ne le demande, ils devront se 
tenir dans la chambre du repos. 

Les adorateurs devront, à tour de rôle, réci- 
ter pendant la nuit l'office du Saint-Sacrement. 

Cette récitation se fera de manière que les 
deux adorateurs qui terminent leur Adoration, 
avant de se retirer, récitent l'office avec ceux 
qui leur succèdent. Ainsi les numéros 1 et 2, 



271 



qui finiront à onze heures, réciteront l'office 
avec les numéros 3 et 4, qui commenceront leur 
Adoration à cette même heure. Toutefois, au 
commencement de la première heure, c'est-à-dire 
de dix heures à onze heures, un troisième mem- 
bre se joindra aux deux premiers et se placera 
à droite pour que l'ordre habituel de la récitation 
soit observé. 

L'office sera divisé de façon qu'il soit récité 
au moins une fois pendant la nuit. 

L'office sera psalmodié lentement, et en obser- 
vant les pauses indiquées par la rubrique. 

Chaque heure d'Adoration commencera par la 
récitation de l'office du Très-Saint-Sacrement ; 
et, à la demie, le premier adorateur de droite 
lira à haute voix l'amende honorable. Le reste 
du temps sera employé à méditer devant le 
Très-Saint-Sacrement. 

On ne pourra faire à haute voix d'autres 
prières que celles prescrites par le règlement. 
Toutefois, les adorateurs qui ne pourront pas 
dire l'office ont la faculté de le remplacer par 
cinq Pater et cinq Ave Maria récités à haute 
voix. Dans ce cas, ils devront en avertir le direc- 
teur laïque, afin qu'aucune partie de l'office ne 
soit omise. 

A cinq heures moins un quart du matin, le 






— 272 — 

directeur laïque donnera le signal du réveil 
et fera enlever les lits de repos ; après quoi 
tous les adorateurs se rendront devant le Très- 
Saint-Sacrement pour faire ensemble la prière 
du matin et la méditation. 

Avant de se retirer, les adorateurs assisteront 
à la Messe. Ils sont invités à y faire la sainte 
Communion et à l'offrir à Dieu, aux intentions 
et pour les fins que se propose l'Association. 
Lorsque la Messe n'aura pas lieu avant six 
heures du matin, on récitera Prime à cinq 
heures. Dans ce cas, le signal du réveil ne sera 
donné qu'après la récitation de Prime. 

Autant que possible, une Messe de réparation, 
aux intentions et aux frais de l'Œuvre, est dite 
après chaque nuit d'Adoration. 

Lorsqu'un ecclésiastique prend part à l'Ado- 
ration, il fait la prière du soir, il lit la liste des 
recommandations et l'amende honorable. Il fait 
de même la prière du matin et la méditation. 



Art. V. — Adoration au sanctuaire de 
l'Œuvre. 



Toutes les dispositions relatives à l'Adoration 
dans les paroisses s'appliquent à l'Adoration 



— 273 — 

dans le sanctuaire de l'Œuvre, à l'exception de 
ce qui suit : 

Les exercices de la nuit commenceront à 
neuf heures et demie précises par l'exposition, 
du Très-Saint-Sacrement. — Pendant l'exposi- 
tion les adorateurs chanteront le Tantum ergo, 
qui sera suivi de l'oraison Deus qui nobis sub 
Sacramento. 



I 



Art. VI. — Des Indulgences. 

Le Souverain-Pontife Pie IX a voulu seconder 
la pieuse pensée de cette Œuvre, et ayant, par 
un rescrit du 12 septembre 1850, signé par 
MgrPatrizi, cardinal-vicaire, et contresigné par 
M. l'abbé Bautain, pour Mgr l'archevêque de 
Paris, affilié l'Association pour l'Exposition noc- 
turne du Très-Saint-Sacrement de Paris à l'Ar- 
chiconfrérie établie à Rome dans le même but, 
lui a concédé les mêmes indulgences dont cette 
Archiconfrérie a été enrichie par rescrit du 
6 août 1814 de Pie VII. 

Ces indulgences qui s'appliquent à chacun des 
associés, soit membre actif, soit membre bien- 
faiteur, sont les suivantes : 

1° Indulgence plénière l'un des jours du mois 
de la réception de l'associé, pourvu que, con- 



274 — 









fessé et ayant reçu la sainte Communion, il prie 
aux intentions du Souverain-Pontife ; 

2° Indulgence pléniére, aux mêmes conditions, 
le jour de la Fête-Dieu ou un des jours de 
l'Octave ; 

3° Indulgence pléniére, également aux mêmes 
conditions, le premier jeudi de chaque mois ; 

4° Autre indulgence pléniére l'un des jours de 
chaque mois, au choix de chaque associé, tou- 
jours aux mêmes conditions; 

5° Indulgence pléniére à l'heure de la mort 
pour tout associé qui, ayant un vrai repentir, 
invoquera le nom de Jésus au moins de cœur, 
s'il ne le peut faire de bouche. 

6° Indulgence pléniére pour tout associé qui, 
s' étant confessé et ayant communié, visitera dans 
quelque église que ce soit le Très-Saint-Sacre- 
ment, même déposé dans le saint Ciboire, pourvu 
qu'il prie aux intentions du Souverain-Pontife, 
l'un des jours de fête qui suivent : 

L'Immaculée-Conception de la très-sainte 
Vierge, la Nativité, l'Annonciation, la Purifica- 
tion et l'Assomption, la Toussaint, la Commé- 
moration des morts, les fêtes de saint Joseph, 
de saint Pierre et saint Paul, de saint Jean- 
Baptiste et de saint Jean, apôtre et évangéliste; 

7° Indulgence de sept ans et sept quarantaines 



— 275 



pour tout associé qui, s'étant confessé et ayant 
communié, visitera le Très -Saint -Sacrement, 
ainsi qu'il est dit ci-dessus, aux autres fêtes de 
la très-sainte Vierge et à celles des autres apô- 
tres ; 

8° Les mêmes indulgences que celles mention- 
nées aux articles 6 et 7 à tout associé malade 
qui, s'étant confessé et ayant communié, rem- 
placera chacune des visites indiquées par la 
récitation de cinq Pater, cinq Ave et cinq Gloria 
Patri aux intentions du Souverain-Pontife ; 

9° Indulgence de soixante jours pour toute 
œuvre pie faite dévotement par les associés, 
n'importe le jour. 






Art. VII. — Dispositions particulières en 
faveur des associés défunts. 

Tout associé, soit membre actif, soit membre 
bienfaiteur, aura droit, après sa mort, à trois 
Messes, qui seront dites aux frais de l'Œuvre. 

Tous les autels où se célébreront les Messes 
que l'Œuvre fera dire pour les associés dé- 
funts seront privilégiés. (Rescrit de Sa Sainteté 
Pie VII, du 6 août 1814.) 

De plus, on prie chaque associé, s'il est 
prêtre, de célébrer une Messe ; s'il est laïque, 

9" 






— 276 — 

de faire deux communions par an pour les âmes 
des associés défunts. A chacune de ces Messes 
ou communions est attachée une indulgence 
plénière applicable à ces mêmes âmes. 






Art. VIII. — Retraites et réunions générales. 

Tous les ans une retraite spéciale est prêchée 
aux associés adorateurs pendant les trois jours 
qui précèdent le premier dimanche de la Fête- 
Dieu. 

Les exercices ont lieu à huit heures du soir 
dans l'ordre suivant : • 

Chant du Psaume Lauda Jérusalem. — Ins- 
truction. — Salut. 

Le premier dimanche de la Fête-Dieu, à sept 
heures du matin, Messe de Communion générale. 

Le soir, à huit heures, réunion générale, 
compte-rendu de l'état de l'Œuvre, courte exhor- 
tation suivie d'une quête. 

L'exercice se termine par le Salut. 

Une seconde assemblée générale des membres 
adorateurs a lieu un des dimanches du mois de 
janvier, à huit heures du soir. — Rapport sur 
la situation de l'Œuvre. 

Une instruction et une quête précéderont le 
Salut. 



il' 



— 277 — 

Le secrétaire convoquera tous les membres 
par lettres à domicile, et leur indiquera la date 
et le lieu des réunions. 

Les membres auxiliaires seront invités à y 
assister. 

Le supérieur réunit une fois par an les mem- 
bres bienfaiteurs en assemblée générale. 

Une lettre de convocation indique l'époque et 
le lieu de la réunion. 

L'instruction est suivie du Salut du Très- 
Saint-Sacrement, après lequel les membres bien- 
faiteurs remettent leurs cotisations. 

Vu et approuvé. 

Paris, le 12 juillet 1867. 

E. J. LAGARDE, 

Vie. Gin. 



I 



278 — 



CHAPITRE XXI 









Explication des articles du règlement. 

Nous devons maintenant appeler l'attention 
sur les points essentiels de ce règlement et leur 
donner des développements qui ne pouvaient 
entrer dans le texte même. Car, pour suivre un 
règlement avec fruit, il faut l'aimer, et pour 
l'aimer, il faut le connaître dans sa lettre et dans 
son esprit. 

Les articles I et III traitent du but, de la com- 
position de l'Œuvre et de l'admission de ses 
membres. Il y est dit que les associés se divisent 
en trois classes: les membres actifs, les membres 
auxiliaires et les membres bienfaiteurs. Les 
premiers sont ceux qui prennent personnelle- 
ment et régulièrement part aux exercices dans 
les différents sanctuaires où a lieu l'Adoration 
nocturne. La seconde classe comprend tous 
les hommes qui, désirant s'unir aux membres 
actifs pour adorer le Très-Saint-Sacrement 
quand l'exposition pour l'Adoration perpétuelle 
a lieu dans leur paroisse, participent aux exer- 
cices de l'Œuvre et en observent le règlement ; 



— 279 - 

enfin les bienfaiteurs sont les personnes de 
tout âge et de tout sexe, qui, ne pouvant pas 
assister aux Adorations nocturnes pour des 
causes diverses, veulent cependant avoir part à 
tous les avantages de l'Œuvre, et s'y associent 
au moyen d'une aumône annuelle qui sert à 
faire face aux dépenses de l'Association et dont 
le minimum est de 1 franc. 

Il est presque superflu de dire que la grande 
loi de charité doit être la principale règle des 
adorateurs dans les rapports qu'ils ont entre 
eux, et avec les divers associés de l'Œuvre. 
C'est la loi commune à tous les chrétiens ; mais 
l'adorateur nocturne est tenu, dans l'application 
de cette loi sublime, de faire plus qu'un chrétien 
ordinaire ; il doit pratiquer dans un certain 
degré de perfection les vertus qui découlent de 
la charité et qui, toutes, exigent l'abnégation de 
soi-même et le sacrifice de sa personnalité. Le 
grand apôtre saint Paul détermine ainsi les 
caractères de la charité : elle est patiente, douce 
et bienfaisante... elle ne cherche point ses 
propres intérêts... elle ne se pique ni ne 
s'aigrit... (Ep. ad Cor. I, xm, 4.) 

Ce texte convient parfaitement aux membres 
de l'Association; une douceur, une bienveillance 
qui me se démente jamais vis-à-vis des nuances 

9"* 









— 280 — 

si diverses de caractères, d'humeur, de volonté ; 
un oubli de soi assez complet pour amortir tous 
les mouvements de l'amour-propre, une patience 
donnant à notre extérieur une égalité et une 
paix que ne puissent troubler les inévitables 
contacts de conditions et d'éducations diffé- 
rentes, et par-dessus tout, un désir profond 
d'être bienfaisant pour tous, c'est-à-dire de 
rechercher tout ce qui peut convenir aux autres 
pour y satisfaire dans les limites du règlement : 
telles sont les qualités que doit avoir un bon 
membre de l'Adoration nocturne. 

A côté de la loi de charité envers les associés 
se place la loi de zèle envers l'Œuvre, qui doit 
porter les adorateurs à augmenter le nombre de 
ses membres, d'une part, pour lui donner une ex- 
tension de plus en plus grande, et pour propager 
ainsi l'amour et le culte de la très-sainte 
Eucharistie; et de l'autre, pour procurer à un 
plus grand nombre d'âmes les précieux avanta- 
ges d'une affiliation qui leur a été trop profitable 
à eux-mêmes pour qu'ils n'aient pas le désir 
d'étendre ce bienfait aux autres. 

Les devoirs de charité et de zèle ne sont pas 
les seuls qu'imposent les articles I et III du 
règlement; on doit y joindre une prudence et 
une circonspection nécessaires surtout pour le 



281 



choix des membres actifs. La participation active 
à l'Œuvre exige des conditions particulières qui 
sont essentielles : un degré de foi et de piété en 
rapport avec la vie d'Adoration à laquelle on se 
voue, un attrait spécial pour la divine Eucha- 
ristie; en un mot, un ensemble de vertus solides 
et éprouvées dont les reflets embellissent l'Œu- 
vre, et dont la pratique l'honore et la fortifie. A 
côté des qualités qu'il faut rechercher, il y a des 
défauts qu'il faut éviter : les natures excessives, 
manquant de tact, de retenue et de modération ; 
les esprits trop portés au merveilleux et plus 
disposés à suivre les écarts d'une imagination, 
pieuse sans doute, mais peu réglée, qu'à rester 
simplement dans les sentiers battus de l'humilité 
et de l'obéissance; les caractères chagrins, in- 
quiets, qui discutent plus qu'ils ne prient, et qui, 
ne songeant pas à se réformer eux-mêmes, veu- 
lent réformer toutes choses et les autres. 

Ces défauts sont d'autant plus à craindre 
qu'ils s'allient souvent avec d'excellentes inten- 
tions, et que ceux qui les ont peuvent faire 
beaucoup de mal, en croyant faire beaucoup de 
bien. Une très-grande réserve doit aussi être 
observée quand il s'agit de situations embarras- 
sées, besoigneuses, trop voisines de la pauvreté. 
Non pas que l'Œuvre ne soit accessible à tou 









282 — 



I 






les rangs de la société ; il n'en est pas, croyons- 
nous, où les rangs se confondent plus complète- 
ment et plus fraternellement, mais l'expérience 
a appris qu'il n'était pas sans inconvénient 
d'introduire des membres que leur position 
mettrait difficilement à l'abri de la tentation de 
tirer parti de la généreuse confraternité d'asso- 
ciés mieux doués de la fortune, ou de plus 
grands avantages sociaux. 

Ces précautions ne sont pas à prendre pour 
les membres bienfaiteurs. Ici il n'y a vraiment 
pas d'obstacles, et l'on peut donner toute car- 
rière à son zèle sans craindre les inconvénients 
que nous venons de signaler. 

L'article II, consacré à l'administration, ne 
demande que peu de développements et d'expli- 
cations. Nous insisterons seulement sur les 
fonctions du secrétaire à cause de leur grande 
importance dans l'Œuvre. 

C'est en partie de l'ordre et de l'exactitude 
qu'il met dans l'accomplissement de ses obliga- 
tions que dépend la régularité dans le service. 
Il tient 'un registre de tous les membres, conçu 
de telle façon qu'il puisse juger à première vue 
de l'époque et du nombre des nuits d'Adoration 
passées par chaque confrère. Il le met au cou- 
rant au moyen des renseignements que doivent 



— 283 — 

lui envoyer les directeurs laïques après s'être 
acquittés de leur mission. A la suite du nom de 
chaque membre il doit mentionner toutes les 
observations de détail qui concernent ce mem- 
bre : tel confrère, absorbé par son travail, ne 
peut disposer que de la nuit du samedi au di- 
manche ; tel autre, pour des raisons d'âge ou 
de santé, ne peut pas aller au-delà d'un certain 
rayon, ou bien ne peut passer que les pre- 
mières heures ; tel autre ne demande pas mieux 
que de veiller tous les quinze jours ou même 
tous les huit jours et se met à la disposition de 
l'Œuvre pour remplir les vides. C'est avec ce 
registre, toujours en ordre, qu'on évite les con- 
vocations inutiles, et les convocations trop 
fréquentes qui fatigueraient les membres et les 
éloigneraient. On évite aussi d'oublier des mem- 
bres qui se détacheraient de l'Œuvre . s'ils 
voyaient qu'on n'ait jamais recours à eux et on 
peut adresser un nouvel appel à la bonne volonté 
de ceux qui n'ont pas répondu à une première 
convocation. 

C'est le secrétaire qui concentre tous les 
renseignements intéressant l'Œuvre; on doit 
lui adresser les avis de décès des membres actifs 
ou bienfaiteurs afin qu'il puisse faire remplir 
les obligations de prières que l'Association a 



— 284 — 






prises vis-à-vis d'eux ; on doit aussi l'informer 
de la maladie des confrères tant au point de vue 
de la régularité du service que pour les faire 
participer au bénéfice des recommandations 
particulières qui leur vaudront des consolations 
spirituelles, l'adoucissement et peut-être la gué- 
rison de leurs maux. 

Mais le secrétaire a besoin que chacun l'aide 
à bien remplir sa tâche, en lui donnant, toutes 
les fois que l'occasion s'en présente, les avis et 
les indications qui peuvent exercer une certaine 
influence sur les détails de ce service si multiple. 
Ainsi il doit être averti sans délai, dans le cas 
d'empêchement de l'associé de se rendre à l'Ado- 
ration nocturne au jour désigné, car il faut 
qu'il remplace les absents, sous peine d'imposer 
une plus grande fatigue aux membres présents 
ou de compromettre le bon ordre de la nuit. Les 
changements de domicile, les départs pour la 
campagne, l'éloignement définitif de Paris, 
doivent aussi être signalés avec une scrupuleuse 
exactitude. 

Les fonctions du trésorier nous fournissent 
l'occasion de faire connaître la nature des 
dépenses habituelles de l'Œuvre, dont le chiffre 
paraîtrait exagéré surtout pour une œuvre de 
prière, si on ne s'en rendait pas un compte exact. 



— 285 



Indemnité au secrétaire ; 

Indemnité à l'hôtelier chargé de transporter 
le matériel ; 

Impression des lettres de convocation ; 

Frais de poste et du secrétariat ; 

Entretien du matériel ; 

Frais de transport des confrères dans la 
banlieue. 

L'Œuvre suit l'Adoration perpétuelle partout 
où elle se fait dans le diocèse de Paris, et elle y 
attache un prix particulier, surtout dans la 
banlieue, où elle exerce comme nous l'avons 
déjà dit, un véritable apostolat dont les résultats 
satisfaisants ont été souvent constatés. On aurait 
dû renoncer au concours de beaucoup de con- 
frères précieux pour cette laborieuse mission, 
si on eut mis à leur charge les frais de trans- 
port par omnibus et par chemin de fer. Pour 
ne froisser aucune susceptibilité et pour laisser 
à chacun la plus grande liberté, il a été décidé 
que les directeurs laïques seraient chargés de 
rembourser pour l'Œuvre, aux confrères qui 
le demanderaient, leurs frais de déplacement. 

L'article IV est relatif à l'Adoration dans les 
sanctuaires où se fait l'exposition pour l'Ado- 
ration perpétuelle, à l'ordre des exercices et 
à la discipline qui doit y présider. Il est, sans 



— 286 



contredit, le plus digne d'attention ; car la vie 
de l'Œuvre tient absolument à l'observation 
fidèle des prescriptions qu'il renferme. C'est 
aux Directeurs de nuits qu'il appartient de 
les faire observer. C'est leur fonction principale, 
qui les fait regarder, avec juste raison, comme 
les soutiens de l'Œuvre. Ils doivent donc d'a- 
bord donner l'exemple et puis savoir rappeler 
à la règle ceux qui s'en écarteraient, en 
employant toujours les termes de la plus 
affectueuse charité. La forme du reproche doit 
être bannie de ces assemblées si fraternelles 
qui ne se font qu'en vue du Dieu d'amour. Trois 
choses sont surtout à considérer dans cet arti- 
cle : l'exactitude à se rendre au sanctuaire à 
l'heure indiquée sur la lettre de convocation, 
ou à prévenir immédiatement le secrétaire de 
l'Œuvre en cas d'empêchement, afin qu'il 
puisse désigner un autre membre; l'observation 
rigoureuse des formes • déterminées pour les 
exercices, et, enfin, la sainte Communion par 
laquelle se termine cette nuit de grâces et de 
bénédictions. 

Deux motifs principaux doivent engager à 
être de la plus scrupuleuse exactitude pour 
arriver aux sanctuaires à l'heure fixée par la 
convocation : un motif de haute convenance 



— 287 — 

pour Notre-Seigneur qui attend les adorateurs, 
et un motif de déférence et même de charité 
pour les confrères, et en particulier pour le 
directeur de la nuit, que les arrivées trop tar- 
dives gênent et dérangent, à cause du trouble 
qui en résulte dans les exercices. Du reste, 
l'intérêt personnel doit porter à être exact ; 
car, en arrivant après l'heure, on s'expose à 
ne pouvoir faire inscrire ses recommandations 
et on se prive ainsi du précieux secours des 
prières de la nuit. 

Ce devoir d'exactitude est si essentiel qu'il 
a été souvent rappelé soit dans les rapports, 
soit dans des circulaires spéciales. 

Le premier règlement portait : 

« L'Adoration de la nuit commence à dix 
« heures du soir. 

« L'exposition du Trés-Saint-Sacrement aura 
« lieu à neuf heures et demie très-précises. 

« Les adorateurs devront se trouver réunis 
« à neuf heures. A neuf heures cinq minutes, les 
« membres arrivés devant l'autel commenceront 
« le petit office de la sainte Vierge et les autres 
« adorateurs, à mesure qu'ils arriveront, pren- 
« dront part à cette récitation. » 

Plus tard, les convocations furent faites pour 
neuf heures et demie; mais, en 1858, le conseil 

10 






— 288 






décida qu'elles seraient pour neuf heures et 
quart, afin qu'à neuf heures et demie précises, 
le directeur put s'occuper de dresser la liste 
des adorateurs, de répartir les heures de la nuit, 
d'écrire les recommandations et de faire la 
prière avant dix heures, qui est l'heure où doit 
commencer l'Adoration nocturne. 

Tout le monde doit se présenter muni d'une 
lettre de convocation signée par le secrétaire, 
afin que le directeur responsable de la nuit 
et chargé de maintenir l'ordre et la discipline, 
et qui ne connaît pas tous les membres de 
l'Œuvre, ait un moyen de contrôler la régula- 
rité de la présencef de toutes les personnes 
venues pour passer la nuit. Ce contrôle ne 
lui est possible qu'en confrontant les lettres 
de convocation remises par chaque adorateur 
avec la liste des personnes convoquées, que lui 
a transmise le secrétaire. 

Ces sages précautions doivent être prises plus 
rigoureusement, si c'est possible, vis-à-vis des 
membres auxiliaires qu'il est plus difficile de 
connaître à cause de leurs rapports moins fré- 
quents avec l'Œuvre. S'ils ne sont pas porteurs 
d'une lettre de convocation, il faut qu'ils soient 
présentés par MM. les ecclésiastiques de la 
paroisse, ou du moins bien connus des employés 



— 289 — 

de l'église. C'est au directeur de la nuit de 
s'assurer si toutes ces conditions sont remplies. 
Il doit le faire avec les plus grands égards, sans 
toutefois se laisser aller à une condescendance 
qui pourrait avoir des inconvénients pour l'Œu- 
vre. Quant aux personnes qui se présentent 
sans aucun titre, il n'est pas possible de les 
admettre. Cette Œuvre exige des précautions 
et une prudence exceptionnelles ; elle a besoin 
qu'une vigilance constante prévienne les abus 
et éloigne les dangers. Une église est ouverte 
le soir, des hommes se réunissent pour y passer 
la nuit : un malheureux, sans asile, où même, 
ce qui serait plus grave, un homme mal inten- 
tionné, peut avoir la pensée de profiter de cette 
occasion pour se glisser parmi les adorateurs. 
L'œil du directeur laïque doit le distinguer 
aussitôt et, avec tous les ménagements désira- 
bles, il doit être averti que le règlement de 
l'Œuvre s'oppose à sa participation aux exer- 
cices de la nuit. 



— 290 — 



CHAPITRE XXII 












Explication des articles du règlement. 

(Suite.) 

Une fois rendus au sanctuaire, les adorateurs 
se trouvent en présence d'autres obligations. 

La plus fraternelle obligeance doit présider 
à la distribution des heures. Des raisons de 
santé, de famille, d'affaires peuvent faire désirer 
à tel ou tel adorateur une des premières heures; 
d'autres au contraire, obéissant à un zèle qui 
n'est pas rare dans l'Œuvre, ont plus d'attrait 
pour les heures pénibles du milieu de la nuit. La 
mortification est plus grande, la réparation plus 
complète; la prière, portée sur les ailes du 
sacrifice, monte alors plus vite et plus sûrement 
vers Dieu. Il est bon que toutes ces convenances 
particulières trouvent leur satisfaction, et cela 
doucement, charitablement, sans contention, 
et même, s'il le faut, avec abnégation de ses 
préférences et de ses goûts personnels. Oh! 
que les réunions où règne cet esprit de charité, 
qui est le véritable esprit de Jésus-Christ, 
laissent une douce impression dans l'aine! 



— 291 — 

comme le cœur en est embaumé! Mais rien ne 
facilite plus l'exercice de ces aimables et douces 
vertus que le respect du règlement, l'observation 
de la discipline, la fidélité à l'ordre prescrit. 
Il est des cas, cependant, où l'application rigou- 
reuse du règlement n'est guère possible. Assez 
souvent la nuit est faite entièrement ou presque 
entièrement par des auxiliaires appartenant aux 
conférences de Saint-Vincent de Paul, ou à 
d'autres sociétés pieuses ou charitables. Ces 
auxiliaires, peu habitués aux exercices de l'Ado- 
ration, préfèrent ne pas s'astreindre à l'ordre 
indiqué par le règlement pour les membres 
actifs; il faut leur laisser une grande liberté, 
et ceux des associés qui se trouveraient à ces 
nuits feront sagement en se pliant à ces excep- 
tions , et en encourageant par leur cordiale 
sympathie le zèle et le dévouement de ces 
précieux auxiliaires sans le concours desquels 
il serait si difficile de réaliser l'Adoration 
nocturne toutes les nuits. 11 va sans dire que 
cette dérogation ne peut avoir lieu que lors- 
que les auxiliaires sont en assez grand nom- 
bre pour faire entre eux le service de la nuit 
entière ; car lorsqu'ils viennent isolément s'ad- 
joindre aux membres actifs, ils sont invités 
à observer le règlement. 






292 — 






Nous appellerons l'attention sur l'obligation 
du silence dans la salle de repos, et de la 
gravité dans le maintien, témoignages du respect 
que l'on doit au saint lieu, et fruits d'un recueil- 
lement indispensable pour bien remplir la fonc- 
tion d'adorateur. Toute conversation inutile, 
pouvant distraire l'âme du grand devoir de 
l'Adoration, doit être proscrite avec soin. La 
sacristie est un lieu de préparation où chacun 
doit exciter dans son cœur des sentiments dignes 
du Dieu qu'il vient adorer, et aussi un lieu de 
réciproque et fraternelle édification, où chacun 
donne et reçoit de bons exemples. Puisse cette 
pensée se présenter souvent à l'esprit des asso- 
ciés dans leurs pieuses réunions, et leur faire 
mieux comprendre le mérite qu'il y a à rester 
dans la salle du repos quand ils ne sont pas 
désignés pour l'Adoration. 

Le silence est aussi imposé par la charité. 
Si les membres de l'Adoration veillent la nuit, 
ce n'est pas pour se reposer le jour; beaucoup 
mènent une existence laborieuse qui ne leur 
permettrait pas ce repos. Aussi doit-on prendre 
toutes les précautions pour éviter de troubler 
les quelques instants de sommeil réparateur 
auquel ils se livrent dans l'intervalle des heures 
d'Adoration. 



— 293 — 



La récitation de l'office du Très-Saint-Sacre- 
ment est un des exercices les plus attachants 
des nuits, et mérite qu'on y donne un soin 
particulier. Ces belles prières liturgiques ont 
un charme qui saisit l'âme pieuse. Mais il con- 
vient qu'elles soient dites avec une précision 
et une dignité en l'apport avec l'excellence de 
la fonction d'adorateur. Les livres d'office que 
l'Œuvre a fait imprimer et dont on se sert, 
renferment des indications multipliées et corn' 
modes au moyen desquelles, avec un peu d'atten- 
tion, les personnes les moins familiarisées avec 
la récitation de ces prières peuvent y prendre 
part sans déranger l'ordre prescrit. Le règlement 
dit que l'office doit être psalmodié lentement, 
et en observant les pauses indiquées par la 
rubrique, et que la récitation doit en être faite 
de manière que les deux adorateurs qui termi- 
nent leur Adoration avant de se retirer, récitent 
l'office avec ceux qui leur succèdent. Comme 
il faut être quatre, ou au moins trois pour réciter 
l'office régulièrement, le règlement veut qu'on 
adjoigne aux deux premiers adorateurs qui 
commencent à dix heures, un membre qui revient 
ensuite à la salle du repos quand l'office est 
récité. Il est indispensable pour éviter les erreurs 
et les hésitations, que chaque adorateur prenne 






294 — 



connaissance de l'avis que l'on trouve à la 
page 20 des livres d'office, et qui indique la 
place et le rôle de chaque adorateur pour cette 
récitation. 

On ne peut réciter à haute voix d'autres 
prières que celles prescrites par le règlement : 
on a voulu, par là, prévenir un abus dont le 
moindre inconvénient serait de porter atteinte 
à l'uniformité des exercices ; une exception 
d'ailleurs en entraine. une autre, et toute régu- 
larité disparaîtrait si on ne s'attachait, sur ce 
point, à respecter très-scrupuleusement le règle- 
ment. Du reste, tout est fixé pour la pratique 
de ces saintes veilles, rien n'est laissé à l'arbi- 
traire, pas même la forme de la liste des inten- 
tions, qui est imprimée conformément aux 
décisions du conseil de l'Œuvre. 

Il faut apporter un soin tout spécial, nous 
dirons volontiers religieux, à la confection de 
ces listes. C'est à Dieu que nous nous adressons, 
à Dieu qui voit et connaît tout. It est peu res- 
pectueux de donner un chiffre rond qui ne 
répond à rien de positif dans l'esprit; il ne 
faudrait indiquer que les intentions auxquelles 
on a vraiment pensé. Un autre défaut à éviter, 
c'est de multiplier les chiffres outre mesure. 
Il faut agir en toute simplicité avec le divin 



295 — 



Maître, ainsi qu'il le recommande lui-même. 
La nuit est terminée, le directeur laïque a 
donné le signal du réveil, et tous les adorateurs 
se sont réunis devant le Très-Saint-Sacrement 
pour faire ensemble la prière du matin, la médi- 
tation et entendre la Messe. Le règlement invite 
les confrères à y faire la sainte Communion et 
à l'offrir à Dieu pour les fins que se propose 
l'Association. C'est là le couronnement de la 
nuit, le complément de toutes les prières faites 
pendant ces heures bénies, le moment des véri- 
tables effusions de la charité et des dons inappré- 
ciables de Dieu ; oh ! de quels avantages ne se 
privent-ils pas, ceux qui se bornent à ne 
faire que les premières heures d'Adoration 
et qui se retirent ensuite! Comme cette Com- 
munion finale doit manquer à leur bonheur! 
Nous ne parlons pas, bien entendu, des Con- 
frères qui ne peuvent pas absolument, pour 
des raisons de santé ou de famille, rester 
jusqu'au matin; mais de ceux qui, le pouvant, 
cèdent à un sentiment de crainte exagérée des 
fatigues de la nuit. 

Dans les premiers temps de l'Œuvre, et encore 
longtemps après, le pieux usage de réunir tous 
les adorateurs d'une même série autour de la 
même table Eucharistique était si goûté, que 

10* 






— 296 — 



lorsque, pour un motif très-grave, un adorateur 
était obligé de se séparer de ses confrères, avant 
la Messe, il revenait le matin, pour prendre part 
à cette Communion fraternelle. 

Quoi de plus doux pour des amis du divin 
Maître, qu'il a invités à venir lui rendre les 
mêmes hommages et à lui exposer les mêmes 
besoins, que de se trouver réunis autour de lui 
pour lui offrir les mêmes actions de grâces et 
les mêmes effusions de cœur. 

« Si vous vous abstenez de recevoir Notre- 
« Seigneur après la nuit où il est resté exposé 
« pour vous, disait le président dans un de ses 
« rapports, vous le privez delà seule satisfaction 
« qu'il recherche, celle de se donner à vous. 
« Voudriez-vous lui imposer une si sensible 
« privation, en vous abstenant d'une Communion 
« qui consacre le don mutuel que se font le 
« Créateur et la créature? » 

A propos des articles I et III du règlement, 
nous avons indiqué les devons que créent aux 
associés les relations qu'ils ont entre eux. 
Voyons maintenant à l'occasion de l'article IV, 
quelles règles ils doivent suivre dans leurs rap- 
ports avec les personnes étrangères cà l'Œuvre. 
La première personne que nous rencontrons 
est celle en qui réside l'autorité, le curé dans 



— 297 — 



les pai^oisses, le supérieur dans les chapelles 
des communautés ecclésiastiques. 

Le sentiment qui doit dominer dans le cœur 
de l'associé, en présence de ces personnes aussi 
vénérables par leurs vertus que par leur position, 
est une très-respectueuse déférence et une dis- 
position à se soumettre entièrement à leurs pres- 
criptions. Le curé, et ce qui est dit du curé 
l'est aussi du supérieur de communauté , est 
le maître, le seul maître, dans son église. C'est 
un point que l'associé de l'Adoration nocturne 
ne doit jamais perdre de vue. Recevant dans le 
sanctuaire une hospitalité qui mérite sa recon- 
naissance, l'adorateur ne doit avoir d'autre 
préoccupation que celle de bien remplir sa 
fonction spéciale. Il doit être étranger à tout 
le reste; ornementation de l'autel, luminaire, 
service intérieur de l'église, mesures de police 
ou de sûreté, tout cela doit rester en dehors 
même de ses appréciations. 

Cette première obligation de l'associé, tout 
extérieure, est bien facile à remplir, puisqu'il 
suffit de s'abstenir. Il en est une autre, inté- 
rieure, que la reconnaissance et la charité 
doivent rendre particulièrement chère à son 
cœur: c'est celle de prier spécialement pour le 
clergé de la paroisse. Cette intention est, du 



— 298 — 



reste, de celles que l'on recommande chaque 
nuit. 

Après le clergé, viennent les employés de 
l'église. Ils ont avec l'associé d'assez fréquents 
rapports d'où naissent pour celui-ci des devoirs 
sérieux. Il est d'autant plus opportun de les 
rappeler, qu'à cause de la modestie de la posi- 
tion, on pourrait plus facilement croire que 
l'obligation est moins rigoureuse. Mais détrom- 
pons-nous ; on doit aux employés de l'église 
les plus grands égards, et si, dans l'activité de 
leurs laborieuses fonctions, ou dans la lassitude 
qui en est la conséquence, ils semblent indiffé- 
rents aux adorateurs, à leurs convenances, à 
leurs exercices, que ceux-ci se gardent de s'en 
plaindre et de faire voir que leur patience et 
leur humilité sont en défaut. 

Il est aussi des devoirs envers les populations 
au milieu desquelles vont les adorateurs : de- 
voirs d'édification par la piété, les vertus, la 
dévotion pour la sainte Eucharistie. Les popu- 
lations de la banlieue, dont la foi est malheu- 
reusement si affaiblie, doivent être de préférence 
l'objet de cet apostolat du bon exemple. La 
présence des adorateurs dans les paroisses de 
la banlieue est une véritable prédication qui 
porîe fas fruits abondants. Les habitant* sont 



— 299 — 

étonné* de voir des hommes de toutes les con- 
ditions faire le sacrifice de leur repos pour 
passer une nuit devant le Saint-Sacrement, loin 
de chez eux et dans des localités qui leur sont 
tout à fait étrangères. Ils se disent qu'il faut bien 
qu'il y ait quelque chose de grand et de divin 
dans le Saint-Sacrement pour faire naître des 
actes de dévouement si désintéressés, et plu- 
sieurs d'entre eux qu'on ne voyait jamais à 
l'église s'y sont rendus, après une de ces nuits, 
pour apprendre à connaître et à aimer notre 
Sauveur. Ce service des banlieues exige, il 
est vrai, quelques sacrifices ; il est plus pénible 
que celui de Paris; mais quels motifs d'encoura- 
gement pour les associés, dans cette pensée 
qu'ils sont transformés en apôtres, et qu'ils se 
trouvent investis dans ces paroisses rurales 
d'une des plus belles missions que la grâce de 
Dieu puisse confier au cœur chrétien, la mission 
de régénérer les âmes et de les ramener à la 
vérité. 

L'article V, spécial à l'Adoration nocturne au 
sanctuaire de l'Œuvre, n'exige pas d'explica- 
tions. Nous avons déjà dit les raisons qui avaient 
déterminé l'Association à choisir Téglise de 
Notre-Dame des Victoires pour sanctuaire par- 
ticulier, nous n'y reviendrons pas. 













— 300 — 

L'article VI énumère les trésors d'indulgences 
dont l'Église a si libéralement enrichi l'œuvre 
de l'Adoration nocturne. C'est une source de 
grâces à laquelle on ne recourt peut-être pas 
assez. N'oublions pas cependant qu'il sera beau- 
coup demandé à qui il a été beaucoup donné. 

Les dispositions particulières aux membres 
défunts font l'objet de l'article VIL C'est un 
devoir pour ceux qui restent dans ce monde de 
prier pour les confrères qui les ont édifiés 
' pendant leur vie et qui ont apporté à l'Œuvre 
le concours de leur dévouement. Leurs âmes ne 
peuvent plus désormais acquérir . de mérites 
pour le Ciel, c'est aux vivants qu'il appartient 
de les aider en abrégeant leurs souffrances par 
leurs prières et leurs bonnes œuvres. 

C'est aussi pour ces derniers une consolation 
et un encouragement de penser qu'après leur 
mort, ils auront le secours des prières de 
l'Œuvre. Afin que ce secours ne manque à 
aucun des associés, par l'omission qui pourrait 
être faite de l'avis de son décès, le conseil a 
décidé que chaque année trois Messes seraient 
célébrées à l'intention spéciale des associés 
défunts dont la mort n'aurait pas été signalée. 

Enfin l'article VIII et dernier a pour l'objet 
les retraites et les réunions générales. Nous ne 



301 — 



dirons qu'un mot touchant les retraites et il 
sera de saint Vincent de Paul. « C'est dans la 
« retraite que l'on découvre la volonté de Dieu 
« et que l'ayant connue, on s'y engage généreu- 
« sèment à s'y soumettre, s'y conformer et s'y 
« unir pour arriver à sa propre perfection.... Ces 
« résolutions sont bonnes, mais elles me semble- 
« raient encore meilleures, si elles descendaient 
« un peu au particulier. Il est bon de s'exercer 
« à cela ; le reste n'est que production de 
« l'esprit, lequel ayant trouvé quelque facilité 
« et même quelque douceur en la considération 
« d'une vertu, se flatte en la pensée d'être bien 
« vertueux : néanmoins pour le devenir solide- 
« ment, il est expédient de faire de bonnes 
« résolutions de pratique sur les actes particu- 
« liers des vertus, et après, être fidèle à les 
« accomplir. Sans cela, on ne l'est souvent que 
« par imagination. » 

Nous avons insisté, dans ce chapitre, sur 
l'importance de l'exacte observation du règle- 
ment par les membres de l'œuvre de l'Adoration 
nocturne, un trait touchant fera apprécier les 
bons effets produits par cette fidélité à la règle. 

En 1863, un bon campagnard de la Bour- 
gogne, à l'âme droite et simple, vint à Paris à 
l'occasion d'une de nos fêtes nationales, en 






302 — 









profitant d'un train de plaisir. Il avait un fils 
marié sur la paroisse des Ternes. Notre bon 
campagnard entra dans l'église au moment où 
l'exercice du soir finissait. La foule s'était 
écoulée, mais il restait quelques hommes. En- 
couragé par leur exemple, il resta aussi, et 
il apprit bientôt qu'on allait passer la nuit en 
Adoration devant le Saint-Sacrement. Pressé 
un peu par la curiosité, un peu par la dévotion, 
il entra comme les autres dans la sacristie et 
se mit à examiner tout ce qui s'y faisait. Le 
directeur laïque était, ce soir là, un des plus 
ponctuels dans l'observation du règlement. 
Tout se passa avec un tel ordre , une telle 
édification, que notre brave homme, touché de 
tout ce qu'il voyait, demanda et obtint la faveur 
de se joindre aux adorateurs nocturnes. Dieu 
récompensa sa bonne volonté. Cette nuit fut 
si douce pour lui, qu'elle lui fit oublier Paris et 
ses merveilles, et quand le lendemain soir, il 
dût regagner sa chère Bourgogne, il n'avait vu 
de la capitale que l'Adoration perpétuelle, dont 
il ne cessait de parler avec le plus grand 
bonheur. 



I 



303 



CHAPITRE XXIII 

L'Adoration nocturne et les principales œuvres 
Eucharistiques en Province. 



Le plus beau résultat de l'œuvre de l'Adora- 
tion nocturne est, sans contredit, le mouvement 
Eucharistique qui s'est produit depuis sa fonda- 
tion. Autant nous offenserions la vérité en lui 
en attribuant tout le mérite, autant nous blesse- 
rions la justice en lui refusant sa participation à 
ce fait incontestable. Dieu saura discerner le 
mérite de chacun. Quant à nous, nous allons 
simplement essayer de retracer les progrés du 
culte du Trés-Saint-Sacrement depuis l'établis- 
sement de l'Œuvre, avec l'assurance de contri- 
buer autant à sa glorification qu'à l'édification 
de nos lecteurs. 

Où en étaient les œuvres Eucharistiques en 
France avant cette fondation ? Elles étaient bien 
peu développées. Des confréries paroissiales, des 
communautés vouées spécialement à l'Adoration, 
de rares expositions solennelles, et quelques 
pratiques, restes d'institutions anciennes en- 
glouties par le flot dévastateur de 93, conservées 
dans cinq ou six diocèses, voilà, en dehors des 






— 304 — 

fêtes de l'Église, les seules formes publiques de 
la dévotion envers le Très-Saint-Sacrement 
avant 1848. 

L'œuvre de l'Adoration nocturne instituée à 
Paris à cette époque, y a préparé l'établissement 
de l'Adoration dite des Quarante-Heures, admi- 
rable institution imitée de la Ville sainte, et qui 
suffirait à assurer la gloire du digne Pontife qui 
la fonda. Ce feu divin, allumé au cœur de la 
France, dans cette immense et belle cité qui a le 
privilège de régner sur le monde entier, ne 
devait plus s'éteindre. De Paris, l'Adoration 
avec exposition solennelle s'étendit en province, 
et, en 1864, sur quatre-vingt-six diocèses, qua- 
rante-neuf possédaient l'Adoration perpétuelle, 
à laquelle s'ajoutaient cinquante œuvres d'Ado- 
ration nocturne ; en 1877, sur quatre-vingt-sept 
diocèses, y compris ceux de l'Algérie, cinquante- 
neuf avaient l'Adoration perpétuelle telle qu'elle 
est généralement connue, c'est-à-dire avec 
exposition solennelle du Très-Saint-Sacrement, 
pendant un ou plusieurs jours, dans chaque 
paroisse à tour de rôle, et trois diocèses la pos- 
sédaient dans une forme différente ou moins 
complète, en tout soixante-deux diocèses ayant 
l'Adoration perpétuelle ; mais vingt-cinq dio- 
cèses en étaient encore privés. Toutefois, dans 



— 305 — 



plusieurs de ces derniers on nourrissait l'espé- 
rance de pouvoir bientôt réaliser cette admi- 
rable institution. 

L'Adoration nocturne se pratiquait, en 1877, 
dans quarante-huit diocèses, soit comme Œuvre 
spéciale, soit comme complément de l'Adoration 
perpétuelle. À ce dernier titre, elle assurait la 
continuité ininterrompue de l'Adoration toute 
l'année, jour et nuit, dans les diocèses de Paris, 
de Cahors, de Nancy, d'Angers et de Montpellier. 
Dans quinze autres diocèses, cette continuité 
n'était pas aussi absolue ; il y avait des inter- 
ruptions qui tenaient à diverses causes, mais on 
n'en pouvait pas moins compter vingt diocèses 
où l'Adoration nocturne complétait à des degrés 
différents l'Adoration perpétuelle tant dans les 
villes que dans les campagnes. Le nombre total 
des œuvres d'Adoration nocturne réparties dans 
ces quarante-huit diocèses était, à la même 
époque, de soixante-dix-huit au moins*, vingt- 
huit de plus qu'en 1864. 

Le besoin général de prière et de réparation 
est l'explication de la facilité avec laquelle se 
sont propagées ces solennités de l'Adoration 
perpétuelle, qui produisent partout les plus 
merveilleux effets. Il y a en elles un attrait 
puissant dont la cause est, sans doute, dans la 






— 306 — 

présence de Nôtre-Seigneur, cet aimant des 
âmes à qui rien ne saurait résister, mais qui 
s'explique aussi par le sentiment intime de nos 
populations encore chrétiennes, grâces au Ciel. 
Elles courent y chercher l'affermissement de 
leur foi contre les attaques journellement répé- 
tées d'une presse hostile au catholicisme, la 
grâce de l'observation fidèle des commandements 
de Dieu et de l'Église contre les entraînements 
de plus en plus redoutables du mauvais exemple, 
et aussi la consolation de participer à une répa- 
ration envers Dieu, que chaque jour rend plus 
nécessaire. 

Pour faire juger exactement de l'importance 
du mouvement Eucharistique en France, nous 
n'avons qu'à parcourir les documents qui ont 
été adressés sur sa demande, en plusieurs cir- 
constances, au président de l'Œuvre. Autant les 
détails varient, autant le fond est uniforme. 
C'est partout le même but, partout la crainte 
des mêmes dangers, le sentiment des mêmes 
besoins, la même confiance dans ce moyen de 
salut, les mêmes espérances pour l'avenir. Par- 
tout aussi, même concours du peuple, même 
ferveur, mêmes résultats vraiment admirables. 
Les cœurs sont remués, touchés, ramenés à 
Dieu et à la vérité. C'est bien la fête popu- 



— 307 — 

laire du XIX e siècle qui méritera d'être appelé 
le siècle de l'Eucharistie. Citons quelques mots 
de cette précieuse correspondance, venue de 
tous les points de la France, et qui porte les 
empreintes différentes des contrées dont elle 
parle : 

Ici, « l'Adoration perpétuelle produit les fruits 
les plus consolants » et « on remarque toujours 
api'ès ces fêtes quelque heureux changement 
dans les habitudes des populations; » là, « c'est 
une époque de redoublement de foi et de pratique 
des vertus chrétiennes où tous les fidèles se 
confessent et communient. » — « C'est incon- 
testablement la plus belle création de notre 
époque. » — « C'est le grand mobile providen- 
tiellement appliqué dans ces temps à la régéné- 
ration religieuse » et « dont les effets comblent 
de joie le cœur des évèques. » Les uns parlent 
du « saint enthousiasme » avec lequel cette 
dévotion est pratiquée, les autres des « prodiges » 
qu'elle réalise. Personne n'échappe à ces douces 
influences, et dans les paroisses mixtes, les pro- 
testants eux-mêmes la subissent. C'est surtout 
dans les campagnes que ces pieuses solennités 
sont touchantes. Le peuple qui les chôme à 
l'égal des plus grandes l'êtes, et qui y a été géné- 
ralement préparé par des retraites et des missions 






308 — 



de plusieurs jours, n'a qu'une pensée, celle de 
l'Adoration. Ce jour-là, tout travail cesse, même 
dans les moments les plus pressés de la moisson. 
C'est réellement le triomphe de Jésus-Christ 
sur les cœurs, de l'esprit sur la matière. 

Les exercices varient clans les diocèses où 
l'Adoration se fait jour et nuit. Ici, l'Adoration 
de jour est faite par les fidèles; celle de nuit, 
par les communautés. Là, le privilège de faire 
la sainte veille n'est pas restreint à quelques 
âmes pieuses seulement ; le peuple entoure en 
foule son divin Maître, et des centaines d'ado- 
rateurs se pressent autour de lui. Dans les 
diocèses de Paris, de Caliors, de Nancy, d'An- 
gers, de Montpellier, les hommes seuls font 
l'Adoration nocturne ; assez souvent les pre- 
mières heures sont réservées dans ce dernier 
diocèse aux autorités locales, maire, conseillers 
municipaux, juge de paix. Dans d'autres con- 
trées, l'Adoration nocturne, sans se faire aussi 
régulièrement, occupe cependant une assez 
grande place dans l'Adoration perpétuelle, et la 
latitude laissée par les évêques y conduit insen- 
siblement à l'Adoration sans interruption. 

Quant aux œuvres particulières d'Adoration 
nocturne se pratiquant dans un local déterminé, 
indépendamment de l'Adoration diocésaine, l'iii- 



— 309 



fluence s'en fait sentir sur tout ce qui se rattache 
au culte de la sainte Eucharistie, et en parti- 
culier sur l'Adoration perpétuelle, dont elles sont 
comme la préparation et le ferment. Elles ont 
toutes un double but : la réparation des ou- 
trages malheureusement si nombreux faits à la 
majesté divine, et la prière pour les nombreux 
besoins de l'Église et de la France. L'Évêque 
est en général le supérieur de l'Œuvre, et 
d'après le nombre des nuits à passer, les associés 
se divisent par séries, sections ou compagnies. 
Cette dernière dénomination est en usage à 
Angers, où l'ensemble des « compagnies » se 
nomme « légion ». Les associés des bords de la 
Loire ont un usage touchant que nous devons 
signaler. Les adorateurs, avant de se rendre 
devant le Très-Saint-Sacrement, s'arrêtent de- 
vant la statue de la très-sainte Vierge qu'ils 
appellent « Notre-Dame des bonnes Pensées », 
et s'y préparent à bien faire leur Adoration 
en récitant un Ave Maria. 

A Bordeaux, l'Œuvre porte le nom de : 
La grande famille du Très-Saint-Sacrement, 
et réunit plus de deux mille hommes. 

A Alençon, les jeunes gens à qui leur âge ne 
permet pas de passer la nuit, forment une série 
d'aspirants; ils assistent seulement le soir à 



— 310 — 

l'exposition du Très-Saint-Sacrement, et le 
matin à la Messe qui termine la nuit. En trem- 
pant ainsi ces jeunes âmes aux sources vives de 
la foi, les confrères d'Alençon préparent de 
solides et fervents chrétiens en même temps que 
de bons membres pour leur Association. 

Le nombre des nuits varie dans chaque diocèse 
et la diversité des dates fait qu'indépendamment 
des diocèses où l'Adoration a lieu jour et nuit 
sans interruption, et des communautés vouées 
à l'Adoration perpétuelle, il y a tous les ans un 
grand nombre de nuits passées en Adoration par 
les fidèles devant le Saint-Sacrement exposé. 
Ces saintes veilles sont une source de vocations 
ecclésiastiques et religieuses très-nombreuses 
et un sujet de grande édification pour les localités 
qui en sont favorisées. A ces œuvres d'Adoration 
nocturne s'en ajoutent souvent d'autres qu'ont 
fait naître l'amour de la sainte Eucharistie et le 
sentiment des réparations qui lui sont dues. 
Ainsi, dans le diocèse d'Aire, l'Œuvre de la 
Messe réparatrice, œuvre essentiellement sacer- 
dotale, dans laquelle chaque prêtre s'engage à 
célébrer le saint Sacrifice au jour qui lui est fixé, 
pour le triomphe de l'Église et le salut de la 
France. Dans le diocèse de la Rochelle, à 
Saintes, qui a vu mourir Marie Eustelle, l'ange 



— 311 — 

de l'Eucharistie, M. l'abbé Portier a fondé, avec 
l'approbation de Mgr l'Évèque , Y Œuvre du 
Saint- Viatique, dont le but est de préparer 
à Notre -Seigneur une réception convenable 
chez les malades indigents, et de les soustraire 
aux tentatives impies des solidaires et des libre- 
penseurs, dont les efforts toujours plus auda- 
cieux lui donnent un caractère particulier d'ac- 
tualité. Il faut en effet, opposer l'apostolat du 
zélé Eucharistique à l'apostolat de l'impiété pour 
arracher aux ennemis de notre foi les âmes 
que la mort va conduire au jugement de Dieu. 

Cette Œuvre est distincte de l'Association du 
même nom, existant dans plusieurs villes et dont 
les membres s'engagent, comme à Marseille, à 
accompagner, un cierge à la main, le saint Via- 
tique, quand on le porte aux malades. 

Dans le diocèse de Soissons, Y Archiconfrèrie 
de l'année Eucharistique établie à Vendeuil 
(Aisne), par M. l'abbé Delaigle, curé de cette 
paroisse, et dont le but est d'assurer des Com- 
munions pour chaque jour de l'année aux diffé- 
rentes fins de l'Œuvre, dont les principales sont 
la réparation des outrages commis envers le 
Saint-Sacrement et le triomphe de l'Église. 
A coté de cette Archiconfrèrie, et dans la même 
église de Vendeuil, existe Y Association du mois 

10** 












— 312 — 






Eucharistique, qui a pour but de consacrer le 
mois de juin à honorer Notre-Seigneur Jésus- 
Christ dans le Très-Saint-Sacrement et à répa- 
rer les outrages qui lui sont faits. Ces deux 
Œuvres, qui groupent un grand nombre d'as- 
sociés, ont été enrichies d'indulgences par Notre 
Saint-Père le Pape. 

Enfin, nous devons citer l'Œuvre de la Com- 
munion réparatrice, qui l'ait de très-grands 
progrès en France et procure journellement à 
Notre-Seigneur un nombre considérable de 
pieuses et ferventes Communions. 

Il y aurait, pour l'édification des âmes, de 
bien touchantes révélations à faire sur la vie 
intime de ces œuvres qui entretiennent dans les 
cœurs les sentiments les plus purs de la foi et 
de la charité. Ce sujet exigerait de trop grands 
développements et dépasserait les limites dans 
lesquelles nous sommes obligés de nous renfer- 
mer. Nous avons réuni dans le chapitre qui suit, 
le résumé des renseignements qui nous sont 
parvenus sur les œuvres Eucharistiques et prin- 
cipalement sur l'Adoration perpétuelle et l'Ado- 
ration nocturne dans les différents diocèses. On 
y trouvera des détails intéressants qui permet- 
tront d'apprécier la situation de ces œuvres en 
France, en 1877. 



313 



CHAPITRE XXIV 



Indication des principales Œuvres Eucharistiques, 

existast dans chaque diocèse. 

Adoration perpétuelle. — Adoration nocturne. 

Œuvres diverses. 



Les diocèses marqués d'un astérisque, n'ont pas encore 
l'Adoration perpétuelle. 



Aire. * — Association de la Messe réparatrice, 
florissante. 

Communion réparatrice . 

Expositions du Très-Saint-Sacrement en usage 
dans certaines églises principales. 

Adoration diurne sans exposition dans quel- 
ques paroisses. 

Aix. — Adoration perpétuelle depuis plu- 
sieurs années. 

Adoration nocturne dans quelques paroisses 
comme complément de l'Adoration perpétuelle . 

L'Adoration nocturne existe comme œuvre 
spéciale à Aix dans la chapelle des RR. PP Jé- 
suites, depuis 1852, quatre fois par mois, plus 
quelques nuits supplémentaires. 









— 314 — 

L'Adoration perpétuelle se fait avec beaucoup 
de solennité et avec fruit. 

Œuvre spéciale d'Adoration diurne dans tou- 
tes les paroisses des villes, très-prospère. 

Ajaccio. * — Adoration diurne à la cathédrale 
et au Grand-Séminaire. 

Alby. — Adoration perpétuelle depuis 1862. 
La ferveur pour l'Adoration perpétuelle s'est 
maintenue dans les paroisses rurales éloignées 
des villes. Elle s'est ralentie dans les villes et 
dans les paroisses voisines des villes. 

Alger. — Adoration perpétuelle depuis, 1871. 

Elle se fait dans les paroisses tous les diman- 
ches, et dans les communautés religieuses tous 
les jours de la semaine. Elle produit le plus grand 
bien 

Le dernier Concile provincial (1873) a émis 
le vœu que l'Adoration perpétuelle soit établie 
dans tous les diocèses de l'Algérie. 

Agen. — Adoration perpétuelle depuis 1858. 

L' Adoration nocturne complète l'Adoration 
perpétuelle dans un grand nombre de paroisses. 

L'Adoration perpétuelle est fêtée avec beau- 
coup de zèle et de piété. 

Les paroisses qui peuvent réunir un nombre 
d'hommes suffisant sont autorisées à faire l'A- 
doration nocturne. 



— 315 — 

Œuvre des Tabernacles florissante. 

Amiens. — Adoration perpétuelle depuis 

1861. 

V Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à Amiens depuis 1869 et à Abbe- 
ville (Une fois par mois). 

L'Œuvre de l'Adoration nocturne est floris- 
sante à Amiens. 

Angers. — Adoration perpétuelle depuis 

1854. 

L' Adoration nocturne complète l'Adoration 
perpétuelle toutes les nuits sans exception tant 
dans les villes que dans les campagnes. 

Elle existe depuis 1850 comme œuvre par- 
ticulière à Angers, dans la cliapelle des Prêtres 
du Très-Saint-Sacrement (une fois par semaine, 
du samedi au dimanche). 

Une maison des Religieux du Très-Saint- 
Sacrement, à Angers. 

Angoulême.* — Exposition de jour, le premier 
jeudi de chaque mois, à la cathédrale. 

Annecy. — Adoration perpétuelle qui pro- 
duit des fruits admirables. 

Confréries du Saint-Sacrement dans toutes 
les paroisses, bien suivies. 

Le troisième dimanche du mois, procession 

et bénédiction. 

10"* 









316 — 



Arras. — Adoration perpétuelle. 

L'Adoration nocturne complète l'Adoration 
perpétuelle dans plusieurs paroisses. 

Elle existe comme œuvre particulière à Ar- 
ras (chapelle des Prêtres du Saint-Sacrement). 

A Boulogne (à la cathédrale), à Saint-Omer, 
à Béthune. 

Nuits du jeudi-saint et des Quarante-Heures. 

Mouvement Eucharistique très-prononcé. 

Une maison des Religieux du Très-Saint- 
Sacrement à Arras. 

Auch. — Adoration perpétuelle depuis 1858. 

Elle est trés-goûtée. 

L' Adoration nocturne existe comme complé- 
ment de l'Adoration perpétuelle dans un grand 
nombre de paroisses. 

Autun. — Adorationperpètuelle depuis 1857. 

L' Adoration nocturne n'existe pas, mais on 
espère l'établir prochainement à Autun. 

Avignon. — Adoration perpétuelle depuis 
1863. 

Le mandement qui a établi l'Adoration per- 
pétuelle autorise l'Adoration nocturne partout 
où elle pourra se faire : un certain nombre de 
paroisses profitent de cette autorisation. 

L'Adoration nocturne existe aussi comme 
œuvre spéciale à Avignon dans la chapelle des 



— 317 — 

Pénitents gris, depuis 1876, et à Carpentras 
depuis plusieurs années. 

Bayeux. ■— Adoration perpétuelle très-goû- 

tée des populations. 

L'Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à Caen (une fois par mois), depuis 
1876. 

Bayonne. — Adoration perpétuelle depuis 
1864. Cette solennité est fêtée avec une pompe 
et un zèle des plus édifiants. Les Basques l'appel- 
lent la Grande-Fête. 

L'Adoration nocturne existait autrefois 
comme œuvre spéciale à Bayonne. Elle a cessé. 

Beauvais. * — Adoration diurne sans expo- 
sition dans les principales villes. 

Belley. * — Confréries du Saint-Sacrement 
dans la plupart des paroisses, avec privilège de 
la bénédiction les troisièmes dimanches du 
mois. 

L'Adoration nocturne chez soi est assez 
prospère à Bourg. 

Besançon. * — Exposition du Très-Saint- 
Sacrement, le dimanche seulement, dans chaque 
église de Besançon, à tour de rôle. 

Blois. — Adoration perpétuelle depuis 
i2 ans. 

L'Adoration nocturne existe comme œuvre 






— 318 — 

spéciale à Blois depuis 1852. Elle se pratique 
tous les deux mois, le premier mercredi. 

Œuvre des Tabernacles, très-florissante. 

L'Adoration perpétuelle donne lieu à un con- 
cours empressé des populations. 

Bordeaux. — Adoration perpétuelle depuis 
un grand nombre d'années. 

L' Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à Bordeaux, sous le nom de Grande 
famille du Très-Saint-Sacrement, depuis 1865. 

Processions très-suivies par les hommes, à 

Bordeaux. 

Bourges. — Adoration perpétuelle depuis 
1861. Elle est très-goûtée des populations et 
fait beaucoup de bien. 

Cahors. — Adoration perpétuelle depuis 
1849, complétée par V Adoration nocturne faite 
par les hommes seuls d'un bout de l'année à 
l'autre, tant dans les villes que dans les parois- 
ses rurales. 

Grand zèle et fruits abondants dans les deux 

œuvres. 

Cambrai. — Adoration perpétuelle depuis 
1857, complétée par l'Adoration nocturne dans 
plusieurs paroisses. 

L'Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à Lille (chapelle de Saint-Vincent 



■i 



— 319 — 

de Paul), depuis 1857; à Comines (à la paroisse); 
à Turcoing (au Cercle catholique); à Roubaix (à 
l'église Saint-Martin, et depuis 1874, chez les 
PP. Récollets; à Douai (à l'église Saint-Pierre.) 

Mouvement Eucharistique très-prononcé dans 
le diocèse. 

Nuit du jeudi au vendredi saint. 

Œuvre de zèle pour le développement du 
culte Eucharistique fondée récemment ; elle a 
son siège à la chapelle des RR. PP. Jésuites, à 
Lille. 

Carcassonne. — V Adoration perpétuelle 
existe. Elle fut établie par Mgr de la Bouillerie. 
Elle est fêtée avec beaucoup de pompe. 

L'Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à Fanjeaux depuis 15 ans, et à 
Montréal depuis 1873. 

Clermont-Ferrand. * — L'Adoration noc- 
turne existe, depuis 1876, comme œuvre parti- 
culière à Clermont (deux fois par mois, la nuit 
qui précède le premier et le troisième vendredi). 

Chalons-sur-Marne. — L'Adoration perpé- 
tuelle n'existe que d'une façon incomplète. 

L' Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à Chàlons (une fois par mois, du 
premier jeudi au premier vendredi, depuis 1875). 

Chambéry. * — Association de Dames pour 







320 — 



l'Adoration nocturne chez soi, et l'Adoration 
diurne à Notre-Dame, à Chambéry. 

Chartres*. — L'Adorationnocturne enista.it, 
il y a 20 ans, comme œuvre spéciale. Elle avait 
cessé ; elle a été rétablie en 1877 (juillet) dans 
la chapelle de Sainte-Foy, desservie par les 
PP. Maristes (une fois par mois, la nuit qui 
précède le premier vendredi). 

Confréries du Saint-Sacrement. 

Nuit du vendredi au samedi-saint. 

Processions suivies par les hommes, tant à 
l'intérieur qu'à l'extérieur. 

Constantine. — Adoration perpétuelle de- 
puis 1874. Elle ne se célèbre dans les paroisses 
que les dimanches et jours de fête. 

Coutances. — L' Adoration perpétuelle, qui 
existe depuis 1874, est complétée par Y Adora- 
tion nocturne dans un grand nombre de 
paroisses. 

Œuvres Eucharistiques nombreuses. 

Mois d'Adoration. 

Heure d'Adoration. 

Confréries du Très-Saint-Sacrement. 

Adoration nocturne chez soi. 

Digne. — Adoration perpétuelle , complétée 
par Y Adoration nocturne, dans quelques com- 
munautés religieuses. 



— 321 — 

A la cathédrale de Digne, œuvre spéciale 
d'Adoration perpétuelle, le jour seulement, le 
jeudi par les hommes, les autres jours par les 
femmes. 

Dijon. * — L'Adoration nocturne existe 
comme œuvre particulière à Dijon, clans la cha- 
pelle des RR. PP. Jésuites. 

Evreux. — Adoration perpétuelle. 

Fréjus. — Adoration perpétuelle . 

L' Adoration nocturne existe comme œuvre 
spéciale à Toulon, depuis 1849, dans la cha- 
pelle des RR. PP. Mariâtes (toutes les nuits de 
la semaine, dimanche et vendredi exceptés), et 
à Grasse, depuis 1874. 

Gap. — Adoration perpétuelle depuis 1865. 

Grenoble. — Adoration 'perpétuelle depuis 
1865, complétée par V Adoration nocturne dans 
quelques paroisses. 

V Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à La Salette, du samedi au diman- 
che, pendant le temps du pèlerinage, depuis 1861. 

Adoration perpétuelle nuit et jour à domicile. 

A Grenoble, chaque jeudi, adoration par les 
hommes jusqu'à minuit. 

Mgr l'Évêque recommande de compléter l'Ado- 
ration perpétuelle par l'Adoration nocturne. 

Langres. * 



■ 



- 322 - 






Laval. — Adoration perpétuelle depuis 
1858, complétée par l'Adoration nocturne dans 
un grand nombre de paroisses. 

L'Adoration nocturne existait, il y a 25 ans, 
à Laval comme œuvre particulière. Elle a cesse. 

Adoration diurne, sans exposition, dans plu- 
sieurs églises. 

L'Adoration perpétuelle produit des fruits 

bien consolants. 

Limoges. — Adoration perpétuelle depuis 

1863. 

Adoration nocturne comme œuvre particu- 
lière à Limoges, dans la chapelle des Oblats de 
Marie (veilles des grandes fêtes). 

Confréries du Saint-Sacrement et Adoration 
diurne sans exposition, dans plusieurs paroisses. 

Luçon. * — Adoration nocturne comme œuvre 
particulière à La Roche-sur-Yon depuis 1873. 

Lyon. — Adoration perpétuelle depuis 1862. 

L' Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à la paroisse Saint-Nizier, à Lyon 
(deux fois la semaine). Elle était déjà florissante 

en 1859. 
Le Mans. — Adoration perpétuelle depuis 

1863. 

Elle est une occasion de missions et de pré- 
dications extraordinaires. 



— 323 — 

L'Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière au Mans, dans la chapelle du Grand- 
Séminaire (deux fois par mois), depuis 1851. 

Marseille. — Adoration perpétuelle depuis 
1860. 

Dans plusieurs paroisses Y Adoration noc- 
turne complète l'Adoration perpétuelle. 

Elle existe aussi comme œuvre spéciale dans 
la chapelle des Pères du Saint-Sacrement (huit 
fois par mois, jeudis et samedis), depuis 1873. 

Œuvre spéciale d'Adoration diurne dans toutes 
les paroisses importantes. 

Association pour accompagner le saint Viati- 
que; chaque membre a sa semaine de service; 
très-prospère. 

Une maison des Religieux du Trés-Saint- 
Sacrement, à Marseille. 

Meaux. — Adoration perpétuelle depuis 
1873. Elle produit des résultats très-satisfaisants. 

Mende. — Adoration perpétuelle depuis 
1866. Elle se célèbre avec beaucoup de solen- 
nité. 

Adoration diurne tous les jours, dans les 
deux principales paroisses de Mende et de Mar- 
vejols. 

Montauban. — Adoration perpétuelle depuis 
1863. Fruits abondants. 

11 






324 — 






Nuit du jeudi au vendredi-saint à Montauban. 

Montpellier. — Adoration perpétuelle de- 
puis 1862. 

L' Adoration nocturne complète l'Adoration 
perpétuelle dans toutes les paroisses, tant des 
villes que'rurales. 

L'Adoration perpétuelle et l'Adoration noc- 
turne sont très en honneur dans le diocèse, et y 
produisent un grand bien. 

Moulins. — Adoration perpétuelle. 

N ANCY . _ Adoration perpétuelle depuis 

1847. 

V Adoration nocturne complète l'Adoration 
perpétuelle dans toutes les paroisses du diocèse 
(villes et campagnes). 

Elle existe aussi comme œuvre spéciale a 
Nancy (dans la cathédrale), depuis 1856. 

Institution très-populaire; Adoration de nuit 
très-édifiante. 

Nantes. — V Adoration perpétuelle existe 

dans une forme mixte : 

1° Dans la forme ordinaire de janvier à mai, 
pour la ville de Nantes, depuis 1851 ; 

2° Dans la forme ancienne du mois d'Adora- 
tion, pour les paroisses rurales. 

L' Adoration nocturne existe, depuis 1850, 
comme œuvre particulière, à Nantes, dans la 



— 325 — 

chapelle des missionnaires de l'Immaeulée-Con- 
ception (sept nuits par mois, premier et deuxième 
mardis, les quatre jeudis et le premier samedi). 

Adoration diurne complétée par l'Adoration 
nocturne chez soi (sans exposition); cette œuvre 
est prospèi'e. 

Nevers. — Adoration perpétuelle depuis 
1862. Elle est bien fêtée et produit de féconds 
résultats. 

V Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à Nevers, dans l'église Saint-Pierre. 

Elle complète l'Adoration perpétuelle dans 
quelques paroisses. 

A Saint-Pierre de Nevers, la Visite perpé- 
tuelle de six heures du matin à l'angelus du 
soir. 

Nice. * — L'Adoration nocturne existait en 
1875, comme œuvre spéciale, une fois le mois, 
à Notre-Dame, le jeudi. Elle a cessé depuis. 
Toutefois l'Adoration nocturne se fait dans quel- 
ques occasions solennelles. 

Nuit du jeudi au vendredi-saint. 

Nîmes. — Adoration perpétuelle depuis 1864, 
complétée par l'Adoration nocturne dans cer- 
taines paroisses, celles de Nîmes entre autres. 

\ï Adoration nocturne existe comme œuvre 
spéciale à Nîmes, au Vigan, à Beaucaire. 






326 



L'Adoration perpétuelle est fêtée avec solen- 
nité et porte de très-bons fruits. 

Adoration nocturne le jeudi-saint et pendant 
les Quarante-Heures, dans quelques paroisses. 

Oran. * — Difficultés pour l'établissement de 
l'Adoration perpétuelle. 

Orléans. — Adoration perpétuelle. 

h' Adoration nocturne existe depuis 1854, 
comme œuvre spéciale (une fois par mois), à 
Orléans, où elle est en progrès. 

Pamiers. — Adoration perpétuelle depuis 
1866. Elle est très-goùtée des populations. 

Paris. — Adoration perpétuelle depuis 1850. 

V Adoration nocturne complète l'Adoration 
perpétuelle toute l'année. 

Elle existe comme œuvre spéciale à Notre- 
Dame des Victoires depuis 1848; à Ménilmontant 
depuis 1861, et au Patronage de Notre-Dame de 
Grâce, rue de Lourmel, depuis 1868. 

Toutes les principales œuvres Eucharistiques, 
nées depuis trente ans, existent à Paris et y sont 
florissantes. 

Une maison des Religieux du Trés-Saint- 
Sacrement, 14, rue de Chateaubriand, et avenue 
Frieland, 27. 

Périgueux. — Adoration perpétuelle depuis 
1861, elle est célébrée avec solennité. 



327 — 



Adoration diurne, sans exposition, dans un 
grand nombre d'églises, même rurales. 

Perpignan. * 

Expositions isolées à certains jours, dans plu- 
sieurs paroisses, et pendant toute la journée. 

Poitiers. — L'Adoration perpétuelle existo 
avec l'ancienne organisation du mois d'Adora- 
tion, depuis le Concordat. 

L'Adoration nocturne existe comme œu- 
vre spéciale à Poitiers, dans la chapelle des 
RR. PP. Jésuites (une fois le mois), depuis 1856. 

Adoration diurne perpétuelle à la cathédrale. 

Le mois d'Adoration est suivi avec fidélité. 

Le Puy. * 

Quimper. — Adoration perpétuelle. Le 
Saint-Sacrement reste plusieurs jours exposé 
dans chaque paroisse. 

U Adoration nocturne existe depuis quelques 
années comme œuvre particulière à Brest, dans 
la chapelle de Notre-Dame de Bon-Secours (deux 
fois par mois, premier vendredi et deuxième sa- 
medi). 

Reims. — Adoration perpétuelle depuis 1876. 
: Rennes. — Adoration perpétuelle depuis 
1854. 

L' Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à Saint-Malo depuis 1876. 









— 328 — 

Le diocèse se distingue par sa dévotion au 
Très-Saint-Sacrement. 

La Rochelle. — Adoration perpétuelle de- 
puis 1865, complétée par Y Adoration nocturne 
dans quelques paroisses. \J Adoration nocturne 
existe comme oeuvre spéciale à La Rochelle 
(chapelle des Frères) depuis 1856 ; à Rochefort, 
à l'église Saint-Louis ; à Saintes, à l'église Saint- 
Pierre. 

Œuvre spéciale du Saint-Viatique, récemment 
fondée à Saintes, pour assurer une réception 
convenable à Notre-Seigneur chez les pauvres 
et mettre ces derniers à l'abri des tentatives des 
solidaires et des libres-penseurs. 

Rodez. — Adoration perpétuelle depuis 1852. 
Elle est très-solennelle. 

Le troisième dimanche de chaque mois toutes 
les paroisses du diocèse ont l'exposition du 
Très-Saint-Sacrement avec procession et Salut 
après les Vêpres. 

Rouen. — Adoration perpétuelle depuis 
1865. 

L'Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à Rouen depuis 1866 (deux fois 
par mois). 

Saint-Briecc. — L' Adoration perpétuelle 
existe depuis 1843, sous une forme particulière 



— 329 — 

appelée : Les Adorations. Elle est très-suivie. 

Œuvre des Tabernacles. 

Saint-Claude. — Adoration perpétuelle de- 
puis plusieurs années. 

Saint-Dik. * — L'Adoration perpétuelle est 
canoniquement établie, pour le jour seulement, 
dans plusieurs paroisses du diocèse. 

Saint-Flouk. — Adoration perpétuelle de- 
puis plusieurs années ; elle est très-suivie. 

Saint-Jean-de-Maorienne. * — V Adoration 
nocturne existe comme œuvre particulière au 
Petit-Séminaire de Saint-Jean-de-Maurienne 
depuis 1859 (une fois le mois, du troisième 
jeudi au troisième vendredi). Cette œuvre a 
produit un grand bien. 

Confréries du Saint-Sacrement dans presque 
toutes les paroisses. 

Séez. * — V Adoration, nocturne existe 
comme œuvre particulière à Alençon, dans 
l'église de Notre-Dame, depuis 1855; à Séez, au 
Petit-Séminaire, par les professeurs; à Saint- 
Léonard d' Alençon; à la Ferté-Macé, au Sémi 
naire (une fois par mois). 

Exposition du Très-Saint-Sacrement une fois 
par mois à la cathédrale et à Saint-Pierre de 
Séez, et à Tincliebray. 
Adoration diurne à la cathédrale de Séez et 






— 330 — 



à Notre-Dame d'Alençon. Cotte dernière, érigée 
en Archiconfrérie,a trois affiliations. 

Sens. — L'Adoration perpétuelle existe de- 
puis douze ans. 

Nuit du jeudi au vendredi-saint dans quel- 
ques paroisses. 

Soissons. — V Adoration perpétuelle avait 
été établie ; mais elle a été suspendue, faute 
d'adorateurs, sauf dans quelques églises. 

L' Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à Saint-Quentin, depuis 1876 (une 
fois par mois, du premier jeudi au premier 
vendredi). 

A Vendeuil, il existe : 1" une Archiconfrérie 
de l' Année-Eucharistique, dont le but est de 
provoquer des Communions tous les jours de 
l'année ; 2° une association du Mois-Eucharisti- 
que, qui a pour but de consacrer le mois de juin 
à honorer Nôtre-Seigneur dans la sainte Eu- 
charistie. 

Adoration nocturne à domicile. 

Tarbes. — Adoration perpétuelle depuis 
1864; elle porte de très-bons fruits. 

L'œuvre de la Communion réparatrice établie 
à Tarbes et dans quelques paroisses du diocèse, 
notamment dans la vallée d'Aure, est en progrès. 

Tarentaise. * 






— 331 — 

Toulouse. — Adoration •perpétuelle depuis 
1862. 

h' Adoration nocturne existe, depuis 1853, à 
Toulouse comme œuvre particulière (deux fois 
par mois). À Bagnères-de-Luchon, elle complète 
l'Adoration perpétuelle depuis peu d'années. 

Tous les troisièmes dimanches du mois, exposi- 
tion et bénédiction du Saint-Sacrement dans 
toutes les paroisses. 

Confréries nombreuses. 

Adoration perpétuelle très-goûtée. 

Tours. * — h' Adoration nocturne existe de- 
puis 1849 comme œuvre particulière à Tours, dans 
l'oratoire de la Sainte-Face (tous les mardis). 

Trois chapelles de la ville de Tours ont l'ex- 
position du Très-Saint-Sacrement, chacune un 
jour par semaine. 

Troyes. * — L' Adoration nocturne existe 
comme œuvre particulière à Troyes, dans la 
chapelle des RR. PP. Jésuites (tous les quinze 
jours), depuis 1872. Elle a beaucoup accru la 
piété et le zèle chez ses membres. 

Tulle. * 

Valence. — Adoration perpétuelle depuis 
1866. 

Vannes. — Adoration perpétuelle depuis 
1867. 

11* 









— 332 — 

L'Adoration nocturne existe comme œuvre 
particulière à Vannes, dans la chapelle de l'évè- 
ché ; à Lorient, dans l'église Saint-Louis, anté- 
rieurement à 1860 (une fois par mois). 

Communion du mois du Billet (pieux usage 
du XVII" siècle, et qui a survécu à la Révolution). 

Verdun. * 

Versailles. — L'Adoration perpétuelle 
existe depuis plus de vingt ans. 

L' Adoration nocturne se fait avec zèle dans 
les paroisses des grandes villes et dans quelques 
autres paroisses moins importantes, entre autres 
à Magny-en-Vexin. 

Une maison des prêtres du Trés-Saint-Sacre- 
ment avec Adoration perpétuelle existe à Saint- 
Maurice (arrondissement de Rambouillet). 

Viviers. — Adoration perpétuelle depuis 
1868. Elle fait un très-grand bien dans le diocèse. 

L'Adoration nocturne existe à Annonay 
depuis le premier samedi de septembre 1877. 

Les réunions ont lieu dans la chapelle du 
Cercle Saint-Denis. 



— 333 — 



CHAPITRE XXV 

Renseignements sur les œuvres d'Adoration nocturne 
en Province. 



Il ne sera pas sans intérêt de donner quelques 
détails sur les œuvres particulières d'Adoration 
nocturne en Province. Nous suivrons l'ordre 
des diocèses tel qu'il est indiqué dans le chapitre 
qui précède. 

A Aix, l'Œuvre a pris naissance le samedi 
9 janvier 1852. Mgr l'Archevêque en fit lui-même 
l'inauguration dans la chapelle des RR. PP. Jé- 
suites et fournit les premiers fonds nécessaires 
à son établissement. Les membres se divisent 
en membres actifs et en membres bienfaiteurs 
ou honoraires : ces derniers participent à l'Œu- 
vre par leurs aumônes et assistent aux réunions 
générales. L'organisation est à peu près la même 
que celle de l'Œuvre de Paris dont le règlement 
a été adopté, et l'Adoration se fait tous les 
samedis. Le choléra de 1854, qui avait dispersé 
presque tous les associés, obligea l'Œuvre à 
réduire le nombre des adorations. L'épidémie 
disparue, les confrères eurent la joie de se 
retrouver tous à la première réunion générale; 



— 334 



Dieu les avait épargnés. Le troisième samedi de 
chaque mois, le Père directeur fait une instruc- 
tion à laquelle tous les membres assistent, et le 
lendemain matin, après la Messe de Communion 
générale, a lieu la procession du Très-Saint- 
Sacrement. L'Œuvre d'Aix fait tous les ans un 
pèlerinage à Saint-Joseph, maison de campagne 
des RR. PP. Jésuites, à une lieue de la ville. 
On y entend la sainte Messe à laquelle la plus 
grande partie des associés communient. Un 
déjeuner frugal et plein de franche gaieté les 
réunit ensuite autour d'une table commune. 
Puis, on se livre à des jeux et à la promenade 
jusqu'à l'heure des Vêpres, chantées solennelle- 
ment dans l'église. Après le sermon et la Béné- 
diction a lieu le dîner et enfin le retour à Aix. 

Cette Œuvre, qui a produit un très-grand bien 
dans cette ville, y est trés-appréciée. 

A Amiens, l'Œuvre a été établie en 1809. La 
première nuit d'Adoration eut lieu le 4 août de 
cette année. Le règlement fut imité de celui de 
l'Œuvre de Paris. Cette branche de l'Adoration 
nocturne est pleine de sève; il n'y a encore 
qu'une nuit par mois, mais ces nuits sont régu- 
lières et ferventes. Elles ont lieu dans la cha- 
pelle du Patronage de la rue de Noyon. C'est à 
M. E. de L... qu'est due cette fondation. 11 s'en 



— 335 — 

était occupé dans l'espoir d'obtenir la guérison 
de la pieuse compagne de sa vie, malade depuis 
plusieurs années. Dieu l'a exaucé à sa manière: 
l'Œuvre marche et prospère et Mme de L... est 
allée au ciel. En annonçant cette nouvelle si 
douloureuse pour lui, ce fervent chrétien laissait 
échapper de son cœur ce cri de résignation : 
« Que la sainte volonté de Dieu soit bénie ! » 

A Angers, l'Adoration nocturne fut fondée en 
1850, sous l'ardente propagande du vénéré 
M. Dupont, de Tours. Elle se fit d'abord dans 
une chapelle de l'evêché, la nuit du mercredi au 
jeudi de chaque semaine. Depuis le 14 avril 1873, 
elle a lieu dans la chapelle des Prêtres du Saint- 
Sacrement, au cloître Saint-Martin, une fois par 
semaine, dans la nuit du samedi au dimanche, 
indépendamment de l'Adoration perpétuelle de 
nuit et de jour qui se fait dans tout le diocèse. 

En 1864, Geste et la Tessoualle, deux bourgs 
appartenant au diocèse d'Angers, possédaient des 
œuvres du môme genre, à période mensuelle; 
elles ont cessé depuis les événements de 1870. 

A Arras, c'est le jeudi soir, 12 décembre 1872, 
que Mgr Lequette a inauguré l'œuvre de l'Ado- 
ration nocturne dans la chapelle des Religieux 
du Saint-Sacrement, rue dos Louez-Dieu. Le 
règlement a été emprunté ;ï l'Œuvre de Paris. 






— 336 — 

Les réunions ont lieu une fois par mois, et 
chaque année, le dimanche de l'Epiphanie, tous 
les confrères sont convoqués à une assemblée 
générale qui est présidée par Mgr l'évêque d'Ar- 
ras et où le président laïque lit un rapport sur 
la situation de l'Œuvre. Il ressort de celui qui a 
été lu en 1877, que l'Œuvre d'Arras a imprimé 
à tout le diocèse un mouvement remarquable 
vers l'Adoration nocturne dont sont dotées, 
non-seulement les villes importantes comme 
Boulogne, Saint-Omer, Bethuno, mais de sim- 
ples paroisses rurales telles que Oye, Bapaume, 
Beugny, Lagnicourt, etc. Si ce mouvement se 
continue, l'Adoration perpétuelle, sans inter- 
ruption ni jour ni nuit, s'établira bientôt dans le 
diocèse d'Arras, comme elle est établie dans 
ceux de Paris, d'Angers, de Cahors, de Nancy, 
de Montpellier. 

A Avignon, l'Adoration nocturne a été fondée 
le 10 juillet 1876, dans la chapelle des Pénitents- 
Gris (chapelle du miracle), par Mgr Dubreuil, 
archevêque d'Avignon. Tous les mois, dans la 
nuit du 9 au 10, l'Adoration nocturne se fait 
dans cette chapelle. Cette date a été choisie 
en souvenir du grand pèlerinage Eucharistique 
du 9 juillet 1876, dont nous avons rendu compte. 

Dans le même diocèse, à Carpentras , l'Ado- 



— 337 — 

ration nocturne fonctionne régulièrement depuis 
1803, dans la chapelle des Dominicains, une fois 
par mois, pendant la nuit du samedi au troisième 
dimanche ; le règlement est une imitation de 
celui de Paris, et le hien que fait cette Œuvre, 
soit dans la ville, soit dans les environs est des 
plus sérieux. 

Dans le diocèse de Baveux, l'œuvre de l'Adora- 
tion nocturne existe à Caen, où elle a été fondée 
au mois de mars 1870, sur le modèle de l'Œuvre 
de Paris. Les exercices sont bien suivis, et les 
réunions ont lieu une fois par mois dans la 
chapelle de la Société de Saint-Vincent de Paul. 

A Blois, l'Œuvre existe depuis le 21 juil- 
let 18.52, où elle fut établie par Mgr Pallu du 
Parc. Les réunions se tiennent dans la chapelle 
des Frères des Écoles chrétiennes. Dans l'ori- 
gine, il y avait Adoration nocturne les premiers 
mercredis de chaque mois ; le nombre des adora- 
teurs s'étant accru, on avait pu arriver à faire 
ileux nuits par mois. Depuis, la mort, les départs 
ont fait de nombreux vides dans la pieuse pha- 
lange et en ce moment l'Adoration nocturne 
ne se fait que tous les deux mois. C'est un 
P. Jésuite qui a la direction de l'Œuvre. 

A Bordeaux, l'œuvre de l'Adoration nocturne, 
dont l'origine remonte, dans ce grand et beau 






— 338 — 

diocèse, à l'année 1865, porte le nom de « Grande 
famille du Très-Saint-Sacrement. » Dans toutes 
les églises de la ville où se fait l'exposition, 
des hommes en grand nombre passent la nuit 
en prières. A Sainte-Eulalie, une des paroisses 
des faubourgs, ils sont quelquefois jusqu'à cent 
vingt au commencement de la nuit, et soixante 
encore aux heures dernières, et tous font la 
sainte Communion. Les paroisses rurales imi- 
tent l'exemple du chef-lieu, et un conseil est 
organisé pour régulariser et diriger cette heu- 
reuse expansion de la dévotion Eucharistique 
dans le Bordelais. La « Grande famille du Très- 
Saint-Sacrement » comprend aujourd'hui deux 
mille hommes environ qui font profession de 
défendre et de soutenir les intérêts du catholi- 
cisme par les pratiques Eucharistiques : Adora- 
tion nocturne, Communions générales, assistance 
aux processions. C'est un apostolat de prière et 
d'édification. 

Le diocèse de Cambrai possède l'Adoration 
nocturne depuis bien des années. Elle a com- 
mencé en 1857 dans la principale ville de ce 
diocèse, à Lille, avec trois membres seulement. 
Elle établit son siège dans la chapelle du Patro- 
nage des jeunes ouvriers. Ses rangs sont devenus 
Lien vite assez nombreux pour qu'une nuit par 



Bfe 






— 339 — 

semaine, celle du samedi au dimanche, soit passée 
devant le Saint-Sacrement. De plus, les associés 
se sont partagés les jours de la semaine pour 
venir à tour de rôle faire une demi-heure d'ado- 
ration, de huit heures et demie à neuf heures du 
soir, afin .que, tous les joui's, Notre-Seigneur 
reçoive un hommage de l'Œuvre. « Le bon 
« Maître, écrivait l'un d'eux en 1859, veut que 
« nous restions petits, que notre existence ne 
« tienne à rien, sans doute pour que nous sen- 
« tions mieux que nous ne sommes soutenus que 
« par lui. Eh bien! nous acceptons cela, nous 
« en sommes heureux et nous nous trouvons plus 
« en assurance que si nous avions d'autres 
« appuis. » Cotte confiance n'a pas été trompée, 
l'Œuvre s'est développée et l'influence qu'elle 
exerce est très-marquée. L'Adoration nocturne, 
longtemps restreinte au sanctuaire spécial de 
l'Œuvre, s'est étendue non-seulement aux 
églises et chapelles de la ville de Lille, où elle 
a lieu lors de l'Exposition perpétuelle du ïrés- 
Saint-Sacrement, mais elle s'est établie dans 
d'autres localités importantes avec le plus grand 
succès. Du reste, il s'est fondé à Lille, sous 
l'impulsion des Rit. PP. Jésuites, et avec l'ap- 
probation de Mgr l'archevêque de Cambrai, un 
centre d'action pour le développement du culte 



— 340 






du Saint-Sacrement dans tout le diocèse. Cette 
association, toute de zèle, compte déjà un 
grand nombre de membres et on en espère 
dans quelque temps d'heureux résultats. 

Les autres localités qui, à l'imitation de Lille, 
ont adopté l'œuvre de l'Adoration nocturne sont : 

Comines, où l'Adoration nocturne se fait tous 
les mois à la paroisse, sous la direction de 
M. le curé-doyen; 

Roubaix, où elle se pratique régulièrement 
depuis le mois de mars 1874, dans l'église de 
Saint-Martin , pendant la nuit du samedi au 
dimanche qui suit le premier vendredi do chaque 
mois, et chez les RR. PP. Récollets, du samedi 
au dimanche qui suit le quinze de chaque mois. 

Tourcoing, où l'Œuvre est tellement en faveur 
qu'elle peut faire trois nuits d'Adoration par 
mois et que, selon toute probabilité, ce nombre 
sera bientôt accru. Elle se réunit dans la cha- 
pelle du Cercle catholique d'ouvriers ; 

Enfin Douai, où l'Adoration nocturne se fait 
depuis quelque temps une fois par mois à l'église 
Saint-Pierre. 

Au diocèse de Carcassonne, l'Adoration noc- 
turne se pratique mensuellement dans la ville 
de Fanjeaux depuis plus de quinze ans. L'orga- 
nisation de ces nuits se rapproche beaucoup de 



— 341 — 

celle de Rome. Les adorateurs, réveillés par le 
suisse ou le bedeau, ne se rendent à l'église 
qu'au moment de leur Adoration. A Montréal, 
dans le même diocèse, l'Adoration nocturne se 
fait deux fois par an, pour le jeudi-saint et pour 
l'Adoration perpétuelle, depuis 1857. 

A Clermont-Ferrand, l'Œuvre a été fondée le 
4 mai 1876 sur le modèle de celle de Paris. 
L'Adoration nocturne se fait avec un grand zèle 
deux fois par mois, du jeudi au premier et au 
troisième vendredis. Les membres profitent de 
ces nuits pour faire l'heure sainte recommandée 
par Notre-Seigneur à la bienheureuse Margue- 
rite-Marie. 

A Chàlons-sur-Marne, les membres de la 
Conférence de Saint-Vincent de Paul ont fondé 
l'Œuvre dans la nuit du 4 au 5 mars 1875. 
L'Adoration nocturne se fait une fois par mois, 
du jeudi au premier vendredi, d'après un règle- 
ment qui se rapproche de celui de Paris. 

A Chartres, l'Œuvre existait il y a vingt ans. 
Elle avait cessé depuis. Elle vient d'être rétablie 
(nuit du 5 au G juillet 1877) dans la cbapelle de 
Sainte-Foy, desservie par les RR. PP. Maristes. 
L'Adoration nocturne s'y fait une fois par mois, 
la veille du premier vendredi. Elle est très- 
goûtée. 



— 342 — 

A Dijon, c'est dans la chapelle des RR. PP. Jé- 
suites que l'œuvre de l'Adoration nocturne a 
établi son siège. Cette sainte Œuvre y est prati- 
quée avec un succès qui donne de l'espoir pour 
un plus grand développement. 

Dans le diocèse de Fréjus, l'Œuvre a été 
établie à Toulon, peu de temps après celle de 
Tours , par M. de Cuers , l'un des fondateurs 
de l'Œuvre de Paris. Grâce à son zèle, les pro- 
grès furent rapides. Les confrères furent divisés 
en dix. séries, dont trois composées uniquement 
d'ouvriers du port, et une de jeunes gens sous la 
direction des RR. PP. Maristes. Ils font régu- 
lièrement l'Adoration toutes les nuits de la 
semaine, le vendredi et le dimanche exceptés. Ils 
se réunissent dans la chapelle des PP. Maristes. 

Le caractère particulier de l'Œuvre à Toulon, 
c'est l'ordre et la précision. Les principaux 
dignitaires étant presque tous officiers de la 
marine ou du génie, tout se fait militairement 
et avec un ensemble qui ne contribue pas peu 
à donner une grande vigueur à l'Œuvre. Les 
recommandations sont inscrites sur un registre 
spécial qui reste ouvert toute la nuit au pied 
du saint Autel, pour avertir les adorateurs que 
leur charité doit aller sans cesse de Dieu aux 
hommes, et des hommes à Dieu. Les actions 



343 — 



de grâces sont nombreuses. Il est d'usage, pour 
exciter encore la ferveur, de lire le soir, avant 
de commencer l'Adoration, les lettres où ces 
actions de grâces sont demandées. 

De temps en temps, un pèlerinage s'organise 
pour visiter une chapelle de la sainte Vierge, 
ou quelque sanctuaire célèbre des environs. La 
joie la plus franche et la plus sincère cordialité 
régnent dans ces excursions pieuses où le temps 
se partage entre la prière, les entretiens utiles 
et d'innocents amusements. 

Le diocèse de Fréjus a un autre centre d'Ado- 
ration nocturne, à Grasse. Le règlement, dans 
cette ville, se rapproche beaucoup de celui de 
Paris et de celui de Toulon. L'article premier 
dit que le but de l'Association est de s'unir à 
l'Archiconfrérie de Rome, pour rendre hommage 
au divin Sacrement de l'autel, et pour obtenir 
miséricorde et pardon en ce moment surtout, 
où la foi tend à s'éteindre dans les âmes, où 
l'indifférence gagne les cœurs et où la religion 
attaquée de toutes parts par l'impiété semble sur 
le point d'être anéantie. 

L'Adoration nocturne a lieu à l'église parois- 
siale, pendant les nuits de l'Adoration perpé- 
tuelle, les nuits des Quarante-Heures et la nuit 
du jeudi au vendredi-saint. La récitation de 



— 344 — 



l'office n'a pas été adoptée. L'heure d'Adoration 
est occupée par des- prières spéciales et une 
méditation mentale. 

Au diocèse de Grenoble, l'œuvre de l'Adora- 
tion nocturne est établie dans la chapelle de 
Notre-Dame de la Salette. Elle consiste dans 
l'exposition du Très-Saint-Sacrement, chaque 
dimanche, depuis le premier dimanche de mai, 
jusqu'au dimanche du Rosaire. L'exposition a 
lieu le samedi soir à huit heures, et l'Adoration 
se continue jusqu'au lendemain après Vêpres. 
L'Adoration de la nuit, en particulier, offre le 
plus touchant sujet d'édification; les pèlerins, 
toujours nombreux dans ce sanctuaire, se font 
une joie d'y prendre part et en retirent les plus 
douces consolations. Plusieurs écrivains, qui 
ont traité de l'apparition de la très-sainte Vierge 
dans ce lieu béni, ont décrit cette Adoration 
dans les termes les plus touchants. Elle n'a lieu 
que pendant le temps du pèlerinage. 

A Limoges, le Très-Saint-Sacrement est 
exposé pendant la nuit qui précède les grandes 
fêtes, dans la chapelle des PP. Oblats de Marie. 
L'Adoration nocturne est faite par les membres 
des Conférences de Saint- Vincent de Paul. 

Dans le diocèse de Luçon, à la Roche-sur- 
Yon, l'Œuvre fonctionne avec régularité sous la 



— 345 — 

protection de Mgr l'Évêque, depuis 1873. Les 
associés avaient pris un avant-goùt des conso- 
lations qu'elle procure, en passant en prières 
la nuit du jeudi-saint, de cette même année. Dieu 
a béni ce premier effort et quelques semaines 
après, l'Adoration nocturne était inaugurée, le 
jeudi soir, veille de la fête du Sacré-Cœur. Cette 
fondation a été, dans cette ville, le signal du 
réveil de plusieurs œuvres qui languissaient ou 
qui avaient été abandonnées. L'initiative en est 
due à un ancien trésorier de l'Œuvre de Paris. 

A Lyon, les associés se divisaient, en 1859, 
en vingt-trois sections de douze à quinze mem- 
bres chacune. Le siège de l'Œuvre est l'église 
paroissiale de Saint-Nizier. ( )n remarque tou- 
jours une nombreuse assistance à la Messe qui 
termine chaque veillée et à laquelle les adora- 
teurs font la sainte Communion. Ils passent deux 
nuits par semaine, celle du mardi au mercredi 
et du jeudi au vendredi, sans compter les Ado- 
rations spéciales à certaines époques : aux trois 
jours du carnaval, au jeudi-saint, pendant l'oc- 
tave de la Fête-Dieu et à la fête de l'Assomption. 
L'influence de cette Couvre s'est fait sentir sur 
tout ce qui touche au culte Eucharistique, et , 
dans un bon nombre de paroisses des groupes 
d'hommes zélés se sont- organisés pour passer en 






— 346 






adoration la nuit entière du jeudi au vendredi- 
saint. 

Au Mans, l'œuvre de l'Adoration nocturne a 
été établie, le 14 août 1851, par Mgr Bouvier, 
dans la chapelle du Grand-Séminaire et suit un 
règlement qui se rapproche de celui de Paris. 
Elle se recrute dans tous les rangs de la société 
et elle a déjà fait éclore un grand nombre de 
vocations ecclésiastiques et religieuses. Les 
réunions ont lieu une ou deux fois par mois, 
toujours un samedi. 

A Marseille, l'Œuvre existe dans la chapelle 
des Religieux du Très-Saint-Sacrement, rue 
Nau, n" 7, depuis le mois d'octobre 1873. Elle 
comprend cent vingt membres environ, divisés 
en huit séries, dont chacune fait l'Adoration une 
fois par mois. De cette sorte, il y a Adoration 
nocturne par les hommes, tous les jeudis et tous 
les samedis. Le règlement s'est inspiré de celui 
de Paris, dont il reproduit plusieurs dispositions. 

Montpellier, sans parler de l'Adoration perpé- 
tuelle de nuit et de jour, établie dans tout le 
diocèse, possédait, depuis 1851, une œuvre spé- 
ciale d'Adoration nocturne qui dut s'arrêter en 
pleine prospérité, douze ans plus tard, pour des 
causes indépendantes de la volonté des membres. 
Depuis, elle ne s'est pas reconstituée. 



^H^^^H 



— 347 — 

A Nancy, bien que l'Adoration perpétuelle 
de 'nuit et de jour existe dans tout le diocèse, 
depuis le mois de décembre 1847, l'Adoration 
nocturne fut établie, comme œuvre spéciale, dans 
l'église cathédrale, le 19 juin 1856. Le règlement 
approuvé par Mgr Menjaud est le même que 
celui de l'Œuvre d'Orléans. Les nuits passées 
en Adoration sont les suivantes : Veilles des 
Quarante-Heures, du vendredi-saint, de l'Ascen- 
sion, de la Fête-Dieu, de l'Assomption, du pre- 
mier dimanche de l'Avent. Cette fondation est 
due à MM. les professeurs de la Faculté de 
Nancy. 

A Nantes, l'œuvre de l'Adoration nocturne est 
érigée canoniquement, depuis 1856, dans la 
chapelle des Missionnaires de l'Immaculée-Con- 
ception, 16, rue des Minimes. Elle comprend 
sept séries de douze adorateurs chacune, qui 
font à tour de rôle l'Adoration, sept nuits par 
mois, savoir : le premier et le deuxième mardi, 
le premier samedi et les quatre jeudis. L'organi- 
sation est basée sur celle de l'Œuvre de Paris, 
et deux fois par an les membres actifs et bienfai- 
teurs se réunissent en assemblée générale dans 
la chapelle de l'Immaculée-Conception. Depuis 
la guerre, il s'est formé une série d'anciens 
zouaves pontificaux, ayant à leur tête leur aumô- 

11** 






— 348 — 



nier, Mgr Daniel ; c'est celle qui passe la nuit 
du premier samedi de chaque mois. 

A Nevers, l'Adoration nocturne |se fait dans 
l'église de Saint-Pierre, où les Jésuites, avant la 
Révolution, avait mis en grand honneur la dévo- 
tion au Saint-Sacrement. 

A Nice, l'Œuvre fondée en 1S75, dans l'église 
Notre-Dame, a cessé bientôt après. La nuit 
mensuelle d'Adoration était celle du premier 
jeudi. Cependant l'Adoration nocturne se fait 
quelquefois, exceptionnellement, dans les cir- 
constances graves et solennelles, où la prière 
devient un devoir plus pressant. 

Dans le diocèse de Nîmes, l'œuvre de l'Adora- 
tion nocturne existe à Nîmes, au Vigan, à Beau- 
caire; l'institution est mensuelle et attachée à 
une chapelle de communauté. L'organisation 
matérielle et l'ordre des exercices, récitation de 
l'office du Saint-Sacrement, audition de la sainte 
Messe, Communion, sont les mêmes qu'à Paris; 
mais les adorateurs du Gard y ont ajouté la 
pratique de l'heure sainte, qu'ils font selon une 
méthode imprimée à leur usage et qui se vend 
à Nîmes. 

Le règlement de l'Œuvre d'Orléans, approuvé 
par Mgr Dupanloup, porte la date du 25 mars 1854. 
D'abord pratiquée dans la chapelle de l'évêché, 



— 349 — 

l'Adoration nocturne se t'ait maintenant dans 
celle des PP. de la Miséricorde, le premier 
samedi de chaque mois. Avant de se rendre 
devant le Très-Saint-Sacrement, les adorateurs 
d'Orléans s'arrêtent devant la statue de la sainte 
Vierge pour y réciter à voix basse un Ave 
Maria comme préparation. 

Nous avons indiqué, dans le cours de cet 
ouvrage, tout ce qui est relatif aux trois œuvres 
spéciales d'Adoration nocturne établies dans 
le diocèse de Paris, à l'église de Notre-Dame 
des Victoires, à Notre-Dame de Ménilmontant, 
et au patronage de Notre-Dame de Grâce, 
r«e de Lourmel; nous n'y reviendrons pas. 
A Poitiers, l'Œuvre a été établie dans la 
chapelle des RR. PP. Jésuites, le 31 juil- 
let 1H56. L'Adoration nocturne se fait une fois 
par mois, le premier vendredi. Les adorateurs 
se réunissent à huit heures du soir, on expose 
le Très-Saint-Sacrement et l'Adoration com- 
mence à neuf heures précises pour se continuer 
jusqu'à six heures du matin. A cette heure là, 
les femmes remplacent les hommes jusqu'à neuf 
heures du soir. L'Œuvi-e de Poitiers est afiîliée 
à l'Archiconfrérie de Rome. 

A Brest, dans le diocèse de Quimper, l'Ado- 
ration nocturne se fait deux fois par mois, le 



. 



— 350 — 

premier vendredi et le deuxième samedi, dans la 
chapelle de Notre-Dame de Bon-Secours, desser- 
vie par les PP. Jésuites. 

A Saint-Malo, diocèse de Rennes, l'Œuvre a 
été fondée en 1876. Elle compte un assez grand 
nombre de membres faisant l'Adoration nocturne 
à certaines époques de l'année. 

Depuis 1856, il existe à La Rochelle, dans 
la chapelle Sainte-Marguerite (école des Frères), 
une société d'Adoration nocturne fondée sur 
le modèle de celle de Tours, qui, jusqu'à la 
guerre de 1870, a fait chaque mois, régulière- 
ment, l'Adoration le premier samedi. A cette 
époque, la chapelle des Frères ayant été trans- 
formée en ambulance, la réunion se réduisit à 
une heure seulement, de neuf à dix heures du 
soir, et depuis elle s'est continuée de la sorte. 
La chapelle où elle se tient est la même qui, 
durant la période protestante, servit d'unique 
refuge au culte catholique persécuté, et où 
fut célébrée solennellement, par ordre de 
Louis XIII la première Messe d'actions de 
grâces qui suivit la reddition de la ville de La 
Rochelle. 

Dans le même diocèse, à Rochefort, l'Œuvre 
existe dans les mêmes conditions restreintes, 
à l'église Saint-Louis. A Saintes, l'Adoration 






— 351 — 

nocturne se fait une fois par mois, dans l'église 
Saint-Pierre. 

A Rouen, l'Adoration nocturne fut fondée 
par le R. P. Hermann, à la suite d'une retraite 
prêchée par lui, dans la nuit du samedi 2 au 
dimanche 3 juin 1866. Les réunions ont lieu 
dans la chapelle des Frères de la Doctrine 
chrétienne, régulièrement, le premier samedi de 
chaque mois, d'après un règlement qui se rap- 
proche de celui de Paris. 

Le 25 mars 1859, l'Adoration nocturne se 
fondait dans la chapelle du Petit-Séminaire de 
Saint-Jean de Maurienne, pour continuer, régu- 
lièrement une fois par mois, dans la nuit du 
troisième jeudi au troisième vendredi. Cette 
Œuvre a produit beaucoup de fruits. Aucun 
de ses membres n'a quitté ce monde sans être 
fortifié et consolé par les divins Sacrements. 
Elle a été érigée canoniquement et affiliée à 
celle de Rome. 

A Séez, ce sont les professeurs mêmes du Petit- 
Séminaire qui font l'Adoration nocturne dans 
leur chapelle, une fois par mois, et dans le même 
diosèse, à Alençon, l'Œuvre existe également 
dans l'église de Notre-Dame, sous la direction 
de M. l'archiprôtre , depuis 1855. Il n'y a 
aussi qu'une nuit par mois. Cette dernière 

11"* 






— 352 



association a été érigée en Archiconfrèrie 
pour le diocèse, le 2 mars 1856. En 1864, elle 
avait deux affiliations, l'une à Saint-Léonard 
d'Alençon, l'autre au Petit-Séminaire de la 
Ferté. 

En 1876, l'Œuvre a été établie à Saint-Quen- 
tin, diocèse de Soissons, dans la principale 
paroisse de la ville. La nuit choisie est celle 
qui précède le premier vendredi de chaque 
mois, spécialement consacré au Sacré-Cœur. 
Le règlement de Paris a été adopté. 

Toulouse possède aussi l'Adoration nocturne 
deux fois par mois, le premier et le troisième 
mardi, dans la chapelle des Pénitents-Gris. 

Cette Œuvre, qui date du 7 février 1853, avait 
été d'abord établie dans l'église paroissiale de 
Saint-Jérôme et dans celle de Saint-Nicolas; 
érigée canoniquement, elle a été agrégée à l' Ar- 
chiconfrèrie de Rome. Son règlement porte 
l'approbation de Mgr Mioland. Elle se continue 
avec régularité. 

Tours fut une des premières villes qui, après 
Paris et à son exemple, adoptèrent l'Adoration 
nocturne, à l'instigation du vénéré M. Dupont, 
mort depuis, dans cette ville, en odeur de sain- 
teté. Le règlement de cette Association porte la 



date du 10 février 1849 et la 



signature 



de 



353 



Mtrr Morlot. Le siège en fut établi dans la cha- 
pelle des Prêtres de la Mission (Lazaristes), où 
l'Adoration nocture s'est faite jusqu'à ces der- 
niers temps tous les mardis. Depuis la transfor- 
mation en oratoire de la chambre où le moderne 
thaumaturge de la Touraine a rendu si popu- 
laire le culte de la sainte Face de Notre-Sei- 
gneur, c'est dans cet oratoire que se fait l'Ado- 
ratiou nocturne. 

Le 11 février 1872, l'œuvre de l'Adoration 
nocturne fut établie à Troyes, dans la chapelle 
des PP. Jésuites, à l'imitation de celle qu'avait 
créée le P. Hermann à Paris, en 1848. Le senti- 
ment, du besoin de la prière et de la réparation 
après nos désastres publics avait inspiré cette 
fondation que Dieu semble avoir bénie et qui 
donne lieu tous les quinze jours à une fervenje 
nuit d'Adoration. Un de ses fruits les plus remar- 
quables, c'est l'augmentation de la piété et du 
zèle en tous les membres de l'Association. 

A Vannes, l'Œuvre a son siège dans la cha- 
pelle de l'évêché. Elle suit un règlement qui 
est calqué sur celui de Paris et fait une nuit 
par mois, celle du premier jeudi. A Lorient 
(même diocèse), l'Œuvre est établie dans l'église 
paroissiale Saint-Louis, sous la direction de 
M. le curé. Elle est affiliée à l'Archiconfrérie 



— 354 — 

romaine et possède de nombreuses indulgences. 
Elle passe une nuit par mois, celle du troisième 
mercredi. 

Dans le diocèse de Viviers, à Annonay, 
l'Œuvre a été récemment établie (premier 
samedi de septembre 1877) par un ancien 
membre de l'Œuvre de Paris. Les réunions 
ont lieu une fois par mois dans la chapelle 
du Cercle Saint-Denis. Le règlement de Paris 
a été adopté. L'autorité ecclésiastique et le 
clergé se montrent très-favorables à cette pieuse 
Association qui paraît devoir s'étendre dans le 
diocèse de Viviers. 



BhM 



— 355 — 



CHAPITRE XXVI 



Archiconfrérie de l'Adoration nocturne à Rome. 



Nous avons dit ailleurs que la première Asso- 
ciation laïque pour l'Adoration nocturne s'était 
formée à Rome. L'importance que lui donne son 
titre d' Archiconfrérie, centre de toutes lec 
associations semblables établies dans le monde 
entier, nous fait un devoir de lui consacrer un 
chapitre spécial. L'œuvre de l'Adoration noc- 
turne de Rome naquit en 1810, et fut inspirée 
par les épreuves cruelles que subissait l'Eglise. 
Le Vicaire de Jésus-Christ gémissait dans la 
captivité ; la Ville éternelle, privée de son Pon- 
tife, était dans la douleur. Dieu mit alors au 
cœur d'un saint prêtre la pensée de réunir quel- 
ques hommes pour aller, pendant la nuit, 
prolonger la prière dans les sanctuaires où se 
faisait l'exposition des Quarante-Heures. Cette 
pensée correspondait trop bien aux intentions 
qu'avait eues Sa Sainteté Clément VIII en ins- 
tituant les Quarante-Heures, — que le Saint- 
Sacrement exposé pendant cette solennité fut 
adoré nuit et jour, — pour qu'elle ne réveillât 



m^T' 



356 — 



pas le désir de les réaliser. En effet, en très-peu 
de temps, l'Adoration nocturne, gagnant de 
sanctuaire en sanctuaire, se généralisa dans 
toute la ville et prit la forme d'une Association 
spéciale destinée à procurer a Notre-Seigneur 
des adorateurs nocturnes dans les églises où 
avaient lieu les Quarante-Heures. 

Cette Association commença ses exercices au 
mois de novembre 1810, dans l'église de Sainte- 
Mario in Via Lata. Dieu bénit si bien cette 
sainte entreprise que, nonobstant la difficulté 
des temps, dont avaient particulièrement à souf- 
frir les ecclésiastiques et les pieux laïques, elle 
arriva promptement à son entier complément, 
et, lorsqu'en 1814, le Souverain-Pontife Pie VII 
fut rendu à la Ville éternelle, il trouva l'Œuvre 
achevée et en possession de toutes les nuits. 

Touché de son excellence et de son utilité, 
Sa Sainteté voulut l'encourager et lui accorda 
de nombreuses indulgences. Depuis lors, elle ne 
fit que se fortifier et prospérer, et, en 1824, le 
pape Léon XII l'érigea en Archiconfrérie et lui 
donna la faculté d'agréger toutes les autres 
confréries de même nature établies ou à établir 
dans tout l'univers. 

Son organisation et son règlement doivent 
être mentionnés avec quelques détails. 






— 357 — 

Dans cette ville de Rome qui a conservé, 
jusque dans ces dernières années, une partie 
des institutions que possédait autrefois la 
France, nous retrouvons des associations for- 
mées sur les bases des anciennes corporations 
qui n'admettaient dans leur sein que des per- 
sonnes d'une même classe ou appartenant à un 
même corps de métier ou d'état ; on se connais- 
sait mieux, il y avait plus d'union et par consé- 
quent plus de force. L'Association romaine de 
l'Adoration nocturne a suivi dans sa constitution 
le principe de ces corporations et, comme les 
obligations qu'elle imposait exigeaient certains 
sacrifices de temps et d'argent, elle n'a voulu 
admettre que les personnes pour lesquelles ces 
sacrifices ne seraient pas trop pénibles. Ceci 
explique comment elle se recrute exclusivement 
dans la classe aisée de la noblesse et de la bour- 
geoisie, tandis qu'à Paris l'Œuvre est accessible 
à toutes les conditions. 

L'Association comprend à Rome trois classes 
de membres : 1" ceux qui sont à la fois actifs et 
souscripteurs ; 2" ceux qui sont seulement actifs ; 
3" ceux qui sont simplement souscripteurs. 

Les souscripteurs doivent verser une cotisa- 
tion d'un franc par mois. Les associés actifs 
doivent s'engager à faire l'Adoration nocturne 



— 358 



dans les sanctuaires qui leur sont désignés. Les 
femmes ne peuvent prendre aucune participation 
active à l'Œuvre. Elles ne peuvent y être 
admises que comme souscripteurs. 

Les admissions sont entourées de toutes les 
précautions exigées par la plus sage prudence. 
Elles n'ont lieu qu'après un examen sérieux de 
la position, de la moralité, de l'âge du postulant. 

Ce dernier renseignement même est néces- 
saire, car on ne peut entrer dans l'Association 
avant vingt-un ans, à moins qu'on y soit pré- 
senté par son père, ou par un parent qui réponde 
de vous et qui consente à faire l'Adoration 
toutes les fois que vous la ferez vous-même, 
jusqu'à ce que vous ayez atteint vingt-un ans. 

Tout ceci fait l'objet du chapitre I er du règle- 
ment. 

Le chapitre II traite des ressources de l'Œu- 
vre. La législation romaine permettait aux 
œuvres pieuses de recevoir des legs et des dona- 
tions, et un décret du cardinal-vicaire, du 
19 janvier 1850, avait autorisé celle de l'Adora- 
tion nocturne à profiter de cette faculté. Il en 
résulte pour elle une situation prospère que 
l'Association de Paris n'a jamais connue. 

L'association de l'Adoration nocturne de 
Rome est administrée par un Conseil de sept 



— 359 — 

membres choisis parmi les associés et qui sont : 
un président, un trésorier, un contrôleur, un 
archiviste, un secrétaire et deux conseillers. Ce 
Conseil est renouvelé tous les deux ans au mois 
de novembre. Les formes et les conditions de 
ce renouvellement sont prévues et exactement 
déterminées par le règlement de l'Association, 
empreint dans tout son ensemble de cette 
sagesse romaine qu'on peut louer tout à l'aise, 
car elle est proverbiale d'un bout de l'univers à 
l'autre. On retrouvera dans les détails qui vont 
suivre, cette sage préoccupation de ne rien 
laisser à l'arbitraire et de sauvegarder par une 
prudente prévision et le plus grand respect de 
la liberté individuelle, la sécurité et la régula- 
rité de l'Œuvre, en même temps que la dignité 
de ses membres. Les nominations des membres 
du Conseil sont soumises à l'élection : elles ont 
lieu par scrutin secret, à la pluralité des voix. 
Le président change à chaque renouvellement; 
ce doit être, alternativement, un prêtre et un 
laïque. Les autres membres peuvent être choisis 
indifféremment parmi les prêtres ou parmi les 
laïques. Le président et le secrétaire sortants 
demeurent conseillers pendant la période bien- 
nale suivante, afin que la chaîne des traditions 
et des usages ne se trouve pas rompue, et aussi 

12 















— 360 — 

afin qu'il y ait toujours un ecclésiastique dans 
le Conseil. Les autres membres sortants sont 
rééligibles pourvu qu'ils n'aient pas déjà quatre 
ans d'exercice, auquel cas ils ne peuvent être 
renommés. 

Indépendamment des dignitaires que nous 
venons de désigner, il y a un sous-secrétaire, un 
collecteur, un bedeau (bidello) et un aide- 
bedeau. Le sous-secrétaire aide le secrétaire 
qu'il remplace dans les cas d'absence et de ma- 
ladie ; le collecteur est chargé de recueillir les 
cotisations des souscripteurs ; quant au bedeau 
et à T aide-bedeau, dont les fonctions ont quel- 
que analogie avec celles que remplit le confrère 
qui est chargé, à Paris, du matériel, nous en 
parlerons plus loin. 

Le Conseil se réunit une fois par mois ; mais 
le collecteur et le bedeau n'y assistent pas, ils 
restent dans une chambre voisine de celle du 
Conseil et ne s'y présentent que quand ils y sont 
appelés pour rendre compte de leur mission. 
Cette précaution envers deux dignitaires dont 
les actes peuvent être discutés est des plus pru- 
dentes. Elle laisse au Conseil toute sa liberté, et 
aux deux intéressés leur dignité entière. 

Tout ce qui est relatif à l'administration de 
l'Œuvre et aux fonctions des membres du Con- 



— 361 - 

seil est compris dans les chapitres III à XI. Nous 
ne ferons pas connaître le détail de chacun de 
ces chapitres. Toutefois nous devons expliquer 
la mission et le rôle de deux dignitaires : le 
contrôleur et l'archiviste. 

Le premier doit vérifier, deux fois par an, en 
décembre et en juin, les comptes du trésorier et 
ceux du collecteur; le second conserve en dépôt 
les archives, les titres, les quittances, les regis- 
tres et autres écrits hors d'usage, intéressant 
l'Œuvre et dont la communication ne peut être 
faite à qui que ce soit, sans l'autorisation du 
président lui-même. 

Le chapitre XII est consacré aux exercices 
de la nuit. Comme il y a plus d'églises que de 
jours clans l'année, l'Adoration n'a lieu que pen- 
dant vingt-quatre heures dans chaque sanc- 
tuaire. A midi, en même temps que la bénédiction 
finale se donne dans un sanctuaire, l'exposition 
du Trés-Saint-Sacrement a lieu dans le sanc- 
tuaire suivant. La nuit d'Adoration n'est pas 
partagée en sept parties égales, d'une heure 
chacune, comme à Paris; les adorateurs.de 
Rome, s'inspirant sans doute du souvenir de 
l'austère discipline des anciens camps Romains, 
où les gardes de nuit Vigilia étaient de trois 
ou quatre heures pour chaque soldat, ont divisé 









— 362 — 

les nuits d'Adoration en deux ou trois veilles 
d'inégale longueur, selon les époques de l'année, 
sans toutefois qu'aucune d'elles puisse être 
jamais de plus de quatre heures. La durée des 
exercices y varie donc, selon la longueur des 
nuits, et la durée de l'Adoration pour chaque 
adorateur est, selon les saisons, de trois heures 
ou de quatre heures. Il y a pour chaque veille 
un ecclésiastique et trois laïques. Le premier 
est revêtu du surplis et de l'étole, et fait les 
fonctions de directeur. 

Les adorateurs qui doivent prendre part à la 
même nuit ne se réunissent pas dans le sanc- 
tuaire pour y attendre leur tour de veille. Ils 
n'ont donc pas comme à Paris, la prière du soir 
et celle du matin faite en commun, et la Com- 
munion qui réunit à la même table Eucharisti- 
que les quatorze adorateurs de la nuit. Ils 
arrivent au sanctuaire à l'heure indiquée pour 
leur adoration et ils se retirent chez eux aussitôt 
qu'elle est terminée et qu'ils sont remplacés 
par d'autres adorateurs. Afin de faciliter le ser- 
vice, une voiture est mise à leur disposition, aux 
frais de l'Œuvre. Cette voiture marche toujours, 
soit l'hiver soit l'été, aux heures avancées de la 
nuit, tant pour aller chercher les adorateurs 
chez eux que pour les y ramener. Dans les mois 



■■■■■ 



— 363 — 



d'hiver, on s'en sert également pour la première 
et la dernière veille, mais en été on la supprime 
à ces deux moments à cause de la clarté du jour. 
Le soin de prévenir la voiture et d'aller cher- 
cher et reconduire les adorateurs est confié au 
bedeau ou à son aide. Le bedeau qui est aussi 
chargé de porter à domicile les lettres de convo- 
cation, les diplômes d'admission, etc., joue un 
rôle important dans l'association de l'Adoration 
nocturne de Rome. Chaque soir, avant la tombée 
du jour, il est tenu de se rendre au secrétariat 
de l'Œuvre pour recevoir les instructions con- 
cernant l'Adoration nocturne qui va se faire, et 
lorsqu'il y a lieu de commander la voiture, il se 
rend longtemps à l'avance auprès du cocher, 
afin qu'aucun retard ne soit apporté à l'arrivée 
des adorateurs au sanctuaire désigné. Il se place 
derrière la voiture avec une lanterne allumée 
et dirige le cocher vers les demeures respec- 
tives des associés qui, prévenus par la lettre 
de convocation, qu'ils ont reçue quelques jours 
auparavant, se tiennent prêts à le suivre. Le 
bedeau leur rend tous les services possibles, 
allant les chercher et les accompagnant avec sa 
lanterne jusque dans leurs appartements. Il a 
également le soin des livres d'office que l'on 
récite en entier, dans chaque veille, et celui des 



— 364 



cierges et bougies que fournit l'Œuvre pour 
faciliter la récitation de l'office ; car le lumi- 
naire à l'usage des confrères n'est pas à la 
charge des sanctuaires. Le règlement contient 
même cette touchante et délicate observation, 
que les églises pauvres trouveront dans l'obli- 
gation pour l'Œuvre de fournir quatre cierges 
par nuit, l'avantage d'une économie proportion- 
nelle dans la quantité de luminaire qu'elles 
doivent emploj^er pour l'exposition des Qua- 
rante-Heures. 

L'Œuvre de Rome fait dire six Messes pour 
chaque confrère décédé, qui était membre actif 
et membre souscripteur à la fois, et trois Messes 
pour ceux qui étaient seulement ou actifs ou 
souscripteurs. De plus, chaque associé est prié, 
s'il est prêtre, de célébrer une Messe, et s'il 
est laïque, de faire deux Communions par an 
pour les âmes des associés défunts. Les autels 
où se disent ces Messes sont privilégiés, et à 
chacune de ces Communions est attachée une 
indulgence plénière applicable à ces mêmes 
âmes. Une dernière pratique est ajoutée à cel- 
les-là: dans la nuit qui suit immédiatement la 
nouvelle certaine de la mort d'un confrère, les 
adorateurs récitent en entier l'office des morts 
pour le repos de son âme. 






— 365 — 

A Rome comme à Paris, l'œuvre de l'Ado- 
ration nocturne a produit les plus consolants 
résultats. Son action permanente et déjà an- 
cienne a agi doucement mais efficacement sur 
lésâmes qu'elle a fortifiées dans l'esprit de prière 
et de réparation. 

Aussi, ce qu'on rencontre d'âmes intérieures 
uniquement occupées de Dieu et des grands 
intérêts de la foi, dans ce centre de l'univers 
catholique, est impossible à dire. Cette fécondité 
de la piété est un des attraits les plus puissants 
de cette ville unique qui les renferme tous. 

Les deux Œuvres de Paris et de Rome ont 
toujours eu entre elles les rapports de la plus 
édifiante charité. 

Pendant le séjour que fit à Rome à l'époque 

du Concile du Vatican, M. l'abbé Le Rebours, 

supérieur de l'Œuvre de Paris, il prit part aux 

exercices de l'Adoration nocturne dans cette 

ville. Il trouva l'Archiconfrérie romaine animée 

des sentiments de la plus parfaite confraternité • 

pour l'Œuvre de Paris. Le duc Salviati, alors 

président laïque, eut la délicate attention de 

lui envoyer en souvenir un exemplaire du livre 

d'office et du livre de méditations et de lectures 

spirituelles en deux parties dont se servent les 

confrères de Rome. Ces volumes sont précieu- 



— 366 — 

sèment conservés dans les archives Je l'Œuvre 
de Paris, comme l'expression du lien de foi et 
de charité qui unit les deux Associations. 



Il 






— 367 — 
CHAPITRE XXVII 

Adoration nocturne à l'étranger. 



Les renseignements qui vont suivre sur les 
œuvres d'Adoration perpétuelle ou d'Adoration 
nocturne, à l'étranger, datent déjà, pour la plu- 
part, de quelques années (1869); mais nous ne 
pensons pas que de grands changements aient 
été apportés depuis, à la situation de ces œuvres, 
dans les pays que nous allons signaler et dont 
chacune d'elles présente l'empreinte particulière. 
.La piété de nos lecteurs sera satisfaite de cet 
ensemble d'hommages rendus au Dieu de l'Eu- 
charistie, leur patriotisme se réjouira de voir 
la France occuper un rang si honorable dans 
cette grande ligue de la prière et de la réparation 
et leurs cœurs, peut-être soucieux et inquiets 
en présence d'un avenir menaçant, s'ouvriront 
plus facilement à la confiance et à l'espoir. 

En dehors de Rome, l'Italie a, dans quelques- 
unes de ses principales villes au moins, des 
associations spéciales qui ont pour but l'Ado- 
ration du Très-Saint-Sacrement. Ces associa- 
tions varient de forme et de nom, mais aucune 
ne réalise une œuvre aussi complète que l'Ado- 

12* 



368 



ration perpétuelle de Rome ou de Paris. Il est 
vrai que les circonstances sont peu favorables 
aux pratiques de la piété dans ce pays si troublé 
par l'effervescence des idées révolutionnaires. 
C'est ainsi qu'à Naples, où l'Adoration publique 
du Saint-Sacrement exposé ne se fait qu'à cer- 
tains jours, du matin jusqu'au soir, il serait 
impossible de faire plus. L'Association est 
composée d'hommes et de femmes appartenant 
presque tous à la noblesse. La pression sous 
laquelle vivent nos confrères napolitains est 
telle, que l'ancien secrétaire de l'Œuvre, deux 
fois arrêté dans l'église, et jeté en prison, n'a 
recouvré sa liberté qu'après avoir donné sa 
démission, qu'on lui imposait dans l'espoir de 
porter ainsi un coup mortel à l'Association. Les 
impies en ont été pour leurs violences ; un autre 
secrétaire a bravement accepté la succession, 
et l'Œuvre a continué. 

Dans le nord de l'Italie, les conditions sont 
moins dures pour les âmes vouées au culte du 
Très-Saint-Sacrement . Gênes possède l'Adoration 
des Quarante-Heures de très-ancienne date, et 
l'exposition a lieu pendant deux jours, dans 
chaque sanctuaire, du lever au coucher du soleil. 
Mgr l'archevêque avait fait demander un règle- 
ment de l'Œuvre de Paris, pour établir l'Adora- 



369 



tion nocturne qui fonctionne depuis 1858. Toute- 
fois elle n'a lieu que deux fois par semaine, dans 
l'église de San-Torpete, du mercredi au jeudi et 
du samedi au dimanche. Les adorateurs sont, 
comme à Paris, au nombre de quatorze par nuit, 
mais le Saint-Sacrement n'est pas exposé. A neuf 
heures, ils se réunissent tous au pied de l'autel; 
le prêtre directeur ouvre le Tabernacle et fait 
les prières prescrites par le règlement; à dix 
heures, il ferme le Tabernacle, et les adorateurs 
se retirent, à l'exception de deux qui restent en 
Adoration, et qui sont successivement remplacés 
d'heure en heure. A quatre heures du matin, 
tous les adorateurs sont de nouveau réunis, 
le Tabernacle est ouvert, on récite certaines 
prières, et l'Adoration se termine par le saint 
Sacrifice et par la Communion des associés. Les 
associés génois avaient la louable ambition de 
pratiquer l'Adoration nocturne chaque nuit dans 
les sanctuaires ouverts aux Quarante-Heures ; 
nous ne pouvons que faire des vœux pour la 
réalisation de ce projet qui rendrait l'Adoration 
avec exposition réellement perpétuelle dans le 
diocèse de Gènes. Depuis 1805, l'Association est 
incorporée à l'œuvre de Saint-François de Sales, 
pour l'extension et la conservation de la foi. 
Turin, que l'on appelle la ville du Saint-Sacre- 



— 370 - 



ment, possède l'Adoration des Quarante-Heures. 
L'exposition dure trois jours dans chaque 
église, de neuf heures du matin à neuf heures 
du soir. Un ancien membre de l'Œuvre de Paris, 
revêtu depuis du sacerdoce, M. l'abbé Faa de 
Bruno, a établi récemment l'Adoration nocturne, 
comme complément des Quarante-Heures, dans 
l'église de Notre-Dame du Suffrage qu'il a fait 
construire et dont il est l'aumônier. Il y a lieu 
d'espérer que cette première tentative n'en res- 
tera pas là. L'octave de la Fête-Dieu est célébrée 
avec une grande solennité dans l'église métro- 
politaine, et la cour de Savoie contribuait tou- 
jours à l'ornementation du maître-autel, qui est 
éclairé avec magnificence. 

Milan et Venise ont, comme Turin, l'exposi- 
tion du Saint-Sacrement tous les jours et dans 
toutes les églises à tour de rôle, le jour seule- 
ment. Dans la première de ces villes, la sainte 
Eucharistie reste exposée dans chaque sanctuaire 
le temps nécessaire pour compléter quarante 
heures, ce qui prend un nombre de jours tantôt 
moindre et tantôt plus grand, suivant les saisons ; 
cet usage tient au rit ambroisien qui est suivi à 
Milan, et qui ne permet pas qu'une Messe soit 
dite pendant l'exposition. 

Bologne possède, depuis 1863, l'Adoration 



371 



nocturne, limitée à une nuit par semaine; celle 
du jeudi au vendredi en mémoire de la nuit 
où a été institutée l'Eucharistie. 

L'Œuvre est établie dans l'église pai'oissiale 
de Saint-Sigismond; où se vénèrent les reliques 
de la bienheureuse Smelda Lambertini, qui a été 
choisie pour être la patronne de l'Œuvre. Le 
nombre des membres est de cent environ. Le 
règlement, qui semble s'être inspiré de ceux de 
Rome et de Paris, dont il reflète les principales 
dispositions, est conçu dans un grand esprit de 
foi, de piété et de sagesse. Indépendamment 
de cette œuvre spéciale d'Adoration nocturne, 
Bologne possède l'exposition journalière du 
Très-Saint-Sacrement, depuis midi jusqu'à Y An- 
gélus du soir, dans toutes les églises et chapelles 
de la ville successivement, d'après un tableau 
dressé par l'autorité diocésaine. 

L'Espagne, si attachée à la foi catholique, ne 
possède pas encore la grande et salutaire insti- 
tution de l'Adoration perpétuelle. Un membre 
très-zélé de l'Association de Paris, qui, par sa 
naissance, tient à ce pays, vient d'y fonder 
l'Œuvre de l'Adoration nocturne, qui a déjà 
commencé ses pieuses pratiques à Madrid. De 
bonnes semences ont été jetées à Saragosse, à 
Cordoue, à Séville, à Grenade et à Malaga, elles 



— 372 — 

fructifieront en leur temps. Diverses tentatives 
avaient été faites antérieurement, notamment à 
Madrid en 1871 , où l'on avait commencé à 
faire l'Adoration une fois par semaine. Mais 
elles avaient toutes échoué par défaut d'organi- 
sation et de membres ; nous espérons que ce 
dernier essai réussira mieux. Il trouvera un 
appui dans l'Association pour l'Adoration per- 
pétuelle du Saint-Sacrement, fondée à Madrid 
en 1854, et qui s'efforce de propager le culte 
Eucharistique, au moyen d'un recueil périodique 
intitulé : La Lampara del Sanctuario (la 
Lampe du Sanctuaire). Le Supérieur de l'œuvre 
de l'Adoration nocturne de Paris, appelé à Rome 
pour les travaux du Concile, ayant profité de la 
réunion des évêques espagnols pour leur faire 
connaître l'Œuvre et les engager à l'introduire 
dans leur diocèse, le terrain se trouvera préparé. 
Il y a malheureusement à lutter dans ce pays, 
si cruellement éprouvé, contre des difficultés 
que nous ne connaissons pas en France. Mgr de 
Gibraltar qui s'était déjà mis au courant de 
l'Association de Paris, pendant un séjour qu'il 
fit dans cette ville, a témoigné l'intention d'éta- 
blir dans son diocèse, régi par la loi anglaise, 
l'Adoration perpétuelle avec l'Adoration noc- 
turne, un jour par semaine, et le curé d'une des 









— 373 — 



principales paroisses de cette colonie anglaise 
a fait demander tous les documents nécessaires 
à la fondation de cette belle Œuvre, qu'il voulait 
établir dans son église. Il y a donc dans ce pays 
un mouvement des esprits, vers l'Adoration 
nocturne, qui ne peut manquer de porter tôt 
ou tard des fruits abondants. 

Il existe à Madrid une association du saint 
Viatique, qui a été fondée en 1844, par D. Fran- 
cisco Rodriguez Vêla, dans la province de San- 
tiago et qui s'est bientôt répandue dans cette 
capitale. Elle a pour but de faire administrer 
le saint Viatique, avec la pompe convenable, 
à ses membres et aux pauvres de toutes les 
paroisses de Madrid. La souscription minimum 
est de cinq réaux par semestre. On prévient dans 
une église quand quelqu'un veut recevoir les 
Sacrements, et aussitôt l'œuvre prépare tout ce 
qui est nécessaire : autel portatif, cierges, torches 
et clochette. 

Les quelques renseignements qui nous sont 
parvenus du côté de l'Allemagne indiquent que 
le mouvement Eucharistique y est moins déve- 
loppé à mesure qu'on s'éloigne du Rhin. Ainsi 
l'Autriche paraît être complètement étrangère 
à l'Adoration nocturne, telle que nous la prati- 
quons ici; cependant, à Vienne, l'exposition du 



— 374 — 

Très-Saint-Sacrement a lieu tous les jours de 
l'année, dans, une ou plusieurs églises à tour de 
rôle, mais seulement du matin au soir. Il y a 
une société de l'Adoration perpétuelle, dont les 
membres se font inscrire pour une heure, à leur 
choix, pour un jour quelconque du mois. A ce 
jour et à cette heure, les membres de l'Œuvre, 
où sont admises les dames, font l'Adoration à 
l'église ou chez eux, et toujours chez eux, quand 
c'est la nuit, les églises étant fermées la nuit. Le 
7 de chaque mois, ou si ce jour est un dimanche, 
le 8, il y a dans l'église des PP. Jésuites une 
Messe avec bénédiction et sermon pour l'Asso- 
ciation. 

L'Adoration perpétuelle avait été fondée en 
Bavière dès 1674. Le jour, l'Adoration se faisait 
par les fidèles, et la nuit, par les communautés 
religieuses. La sécularisation de 1802, en suppri- 
mant les couvents, détruisit cette belle Adora- 
tion. Cependant quelques localités conservèrent 
leur journée, ou leur demi-journée d'Adoration; 
d'autres adoptèrent la forme des Quarante- 
Heures. Cette fidélité, quoique partielle, a eu sa 
récompense. Le pieux archevêque de Munich a 
rétabli l'Adoration perpétuelle telle qu'elle exis- 
tait avant l'année 1802, et l'Adoration nocturne 
a de nouveau été confiée aux monastères. Il n'y 



— 375 



a pas de doute que cet exemple donné par la 
capitale ne soit suivi. Le zèle des catholiques 
bavarois pour l'Adoration s'est rallumé, et nous 
nous tromperions beaucoup s'il ne se formait pas 
une association pour faire participer les laïques à 
l'Adoration de nuit. Dans le diocèse de Wurz- 
bourg, l'exposition a lieu dans toutes les églises 
à tour de rôle, le jour seulement. Dans ceux 
d'Augsbourg et de Ratisbonne, elle ne se fait 
qu'à certaines époques, sans continuité. Mais il 
y a là de très-précieux éléments pour une insti- 
tution plus complète. 

En nous rapprochant du Rhin, nous trouvons 
le diocèse de Cologne, où l'Adoration perpé- 
tuelle de jour et de nuit est des plus florissantes. 
De date assez récente, cette solennité a pris 
immédiatement des proportions très-consolantes, 
grâce à la foi vive des populations de ce diocèse, 
et au zèle de son admirable clergé. Chaque église 
a son jour d'Adoration, elle y commence à six 
heures du matin et dure vingt-quatre heures; 
c'est un jour de fête pour tous, et les travaux 
sont suspendus. 

L'Adoration nocturne est organisée dans 
chaque paroisse par le clergé, et il y a toujours 
au moins deux adorateurs devant le Saint- 
Sacrement. Les mœurs simples et douces du 



j 1 1 
■ Il 



— 376 — 

peuple allemand catholique, sa déférence envers 
ses supérieurs ecclésiastiques, rendent cette 
organisation très-facile; il suffit d'une invita- 
tion, d'un désir exprimé par le curé. Aussi tout 
cela se fait sans œuvre spéciale. Le zèle est si 
grand qu'il y a des églises et des chapelles dont 
les portes restent constamment ouvertes jour 
et nuit pendant les vingt-quatre heures et sans 
que la foule des fidèles diminue. 

Nous ne pouvons affirmer que les diocèses 
voisins d'Aix-la-Chapelle, de Trêves, etc., offrent 
la même édification ; les renseignements précis 
nous manquent ; mais nous avons quelques 
motifs de croire qu'il en est ainsi. 

En Belgique, l'Adoration perpétuelle de jour 
est établie dans tous les diocèses. Mais l'Adora- 
tion nocturne par les fidèles y est encore à l'état 
d'Œuvre naissante, et cependant la Belgique est 
par excellence la terre privilégiée du Très- 
Saint-Sacrement. C'est de la Belgique que nous 
vient la Fête-Dieu. C'est en Belgique qu'eut 
lieu le fameux miracle des saintes Hosties 
répandant du sang, en 1370, qui avait imprimé 
au culte de l'Adoration expiatoire dans ce pays 
un caractère pour ainsi dire national. Aujour- 
d'hui les temps son\, changés. Les révolutions 
°nt accumulé bien des ruines derrière elles, et, 



— 377 



comme le reste, la dévotion Eucharistique en a 
souffert de graves atteintes. Aussi, malgré les 
admirables efforts de l'épiscopat belge, cette 
dévotion a quelque peine à se ranimer. C'est là 
pourtant, là seulement qu'est le remède aux 
maux dont notre société est tourmentée et dont 
la Belgique souffre plus que tout autre pays. 

Les Prêtres du Saint-Sacrement ont à Bruxel- 
les une chapelle où a lieu l'Adoration perpétuelle, 
de cinq heures du matin à neuf heures du soir. 
Dans la chapelle expiatoire du Saint-Sacrement 
appartenant à l'Ordre de l'Adoration perpétuelle 
et desservie par les RR. PP. Cordeliers, le 
premier jour de chaque mois, l'exposition se 
prolonge jusqu'à minuit. Il y a Adoration noc- 
turne depuis neuf heures à minuit. Vers onze 
heures et demie, on fait une procession suivie 
par quarante ou cinquante hommes munis de 
cierges et mêlant leurs chants à ceux des reli- 
gieux ; à minuit, on donne la bénédiction après 
laquelle tous les assistants se retirent. Il n'y a 
donc qu'un pas à faire pour compléter l'Adora- 
tion nocturne au moins une fois le mois. Espé- 
rons que les catholiques de Bruxelles le feront ; 
l'effort qu'exige une lacune de cinq heures ne 
peut être au-dessus de leur dévouement et do 
leur piété. 



















— 378 — 

A Malines, le regrettable cardinal Sterckx 
avait, en 1863, organisé l'Adoration perpétuelle 
dans son diocèse: ses instructions sont toujours 
observées. Les églises paroissiales s'ouvrent à 
une heure très-matinale et se ferment à une 
heure très-avancée de la soirée. Des personnes 
pieuses s'engagent à faire chez elles les exercices 
de l'Adoration, durant les heures de nuit pendant 
lesquelles les églises sont fermées. Mais il n'y a 
pas de règlement spécial pour ces exercices. Il 
n'y a que les couvents, les séminaires et autres 
établissements religieux où l'Adoration nocturne 
se fasse à l'église, le Saint-Sacrement étant 
exposé. 

A Gand, l'Adoration nocturne est établie 
depuis le mois de septembre 1872. Elle a lieu 
deux fois par mois et pendant les trois nuits qui 
précèdent le Mercredi des Cendres. L'Œuvre est 
si goûtée, les progrès en sont si satisfaisants, que 
l'on travaille en ce moment à établir l'Adoration 
perpétuelle. « Comme nos demandes sont tou- 
« jours faites au nom du Sacré-Cœur, écrivait 
« un associé de Gand, en 1873, Monseigneur ne 
« peut presque rien nous refuser. Plusieurs cou- 
< vents ont déjà obtenu la même faveur que 
« nous et le mois de juin sera célébré en l'hon- 
« neur de ce magnanime Cœur, par une Adora- 



— 379 — 

« tion perpétuelle à tour de rôle dans les églises 
« et les chapelles de la ville, mais seulement 
« pendant le jour. Notre saint évêque n'ose pas 
« encore nous l'accorder pour toutes les nuits, 
« ni pour les autres mois ; nous l'avons bien 
« remercié, mais nous continuerons à prier et 
« à travailler beaucoup pour atteindre le but 
« désiré. » 

En 1874, on préparait la fondation de l'Œuvre 
ùNamur. M. le baron del Marmol, vice-président 
du conseil central de Saint-Vincent de Paul 
dans cette ville, a demandé le règlement de Paris. 
« Je crois, écrivait-il, vous annoncer une bonne 
« nouvelle en vous disant que l'Œuvre commence 
« à se répandre dans notre pays, et nous espé- 
« rons, avec la grâce de Dieu, la conduire ici à 
«bonne fin. » L'Adoration nocturne devait se 
faire dans la paroisse de Saint-Jean-Baptiste, 
sur laquelle la bienheureuse Julienne, fuyant la 
persécution, se retira en 1252. On sait que c'est 
à cette sainte que l'Église doit en grande partie 
l'institution de la Fête-Dieu. C'est en souvenir 
d'elle que cette paroisse a été choisie pour être 
le siège de l'Œuvre à Namur. 

Il y a quelques années, un des catholiques les 
plus distingués de l'Angleterre, M. Fullerton, 
dont le nom a reçu une double illustration par 






I 



— 380 — 

les ouvrages si pieux qu'a publiés Lady Geor- 
gina Fullerton, sa femme, avait entrepris, avec 
un zèle des plus louables, de fonder à Londres 
l'Œuvre de l'Exposition et Adoration nocturne 
du Très-Saint-Sacrement à l'exemple de ce qui 
se faisait à Paris à l'origine de l'Association. 
Les adorateurs se réunissaient dans l'église du 
R. P. Faber, à l'Oratoire, et dans celle des 
RR. PP. Jésuites. Mais différentes causes vinrent 
contrarier ce premier essai et les nuits d' Adora- 
ration furent abandonnées. Le cardinal Wise- 
man, qu'animait un ardent amour pour la 
très-sainte Eucharistie et qui comprenait toute 
l'importance de l'Adoration nocturne, ne voulut 
pas laisser tarir en Angleterre cette source si 
abondante de grâces et de bénédictions. 

Sachant que la propagation du culte Eucharis- 
tique et en particulier de l'Adoration nocturne, 
était le principal objet de l'apostolat duR. P. Her- 
mann, il l'appela à Londres pour y répandre 
cette auguste dévotion. A peine eut-il appris 
que le saint religieux, répondant à son appel, 
était arrivé, qu'il alla lui-même, en personne, 
lui demander de rétablir l'Adoration nocturne 
dont il attendait les plus heureux fruits. Le 
P. Hermann se mit à l'œuvre, et, le 6 août 1863, 
fête de la Transfiguration de Nôtre-Seigneur, 






— 381 



l'Association actuelle passa la première nuit 
dans la chapelle des RR. PP. Cannes. On se 
borna d'abord à une nuit par mois, mais le 
nombre des membres actifs augmentant , on 
institua deux nuits par mois. Maintenant l'Ado- 
ration se fait deux fois par mois, le mercredi 
soir. Plus tard, n'écoutant que leur zèle, les 
associés de Londres essayèrent de faire plus 
encore et de rétablir l'Adoration nocturne dans 
l'église des Pères de l'Oratoire, où de nouveaux 
membres s'étaient inscrits, et aussi dans une 
église paroissiale; mais après quelque temps, 
ils durent renoncer à cette double tentative et 
rentrer dans l'exercice habituel de deux nuits 
par mois, dans la chapelle des Carmes. Ils 
n'avaient ni un nombre suffisant d'adorateurs, 
ni les ressources nécessaires pour couvrir les 
frais qu'exigeait cette extension un peu préma- 
turée de l'Œuvre. 

L'Association de Londres comptait en 1865, 
quarante-quatre membres actifs et une trentaine 
de membres bienfaiteurs donnant en moyenne 
une cotisation de trois francs par an ; en 1869, 
il y avait soixante-quinze membres actifs et 
environ cinquante membres bienfaiteurs. Maigre 
le zèle déployé, l'Œuvre ne se développe que 
lentement. Elle rencontre des obstacles sérieux 











— 382 — 

dans le caractère, les habitudes de ce peuple 
essentiellement amateur du confortable, et chez 
lequel le respect des inégalités sociales rend 
très-difficile la fusion des différentes classes de 
la société; s'il faut à un anglais haut placé une 
vertu presque héroïque pour passer une partie 
de la nuit, sur un matelas bien dur, côte à côte 
avec un ouvrier ou un petit marchand, il n'en 
coûte pas moins à l'ouvrier ou au petit marchand 
de se trouver sur un pied de complète égalité 
avec le grand seigneur. 

Les dépenses de l'Œuvre se montent, pendant 
les mois d'hiver, à trente-trois francs par nuit 
et à vingt-sept francs cinquante pendant les 
mois d'été, car l'Œuvre de Londres supporte, 
indépendamment des dépenses ordinaires, les 
frais du luminaire de l'autel, de l'éclairage, du 
chauffage, etc. L'organisation et le règlement 
adoptés à Londres sont ceux de Paris. Les 
convocations se font de même au moyen de 
lettres imprimées ; le nombre des adorateurs 
est de quatorze par nuit, se relevant deux par 
deux toutes les heures ; les lits de repos sont 
en usage à Londres comme à Paris ; chaque 
heure d'Adoration commence par la récitation 
de l'office du Très-Saint-Sacrement et la nuit 
se termine toujours par une Messe à laquelle 



■M 



— 383 — 

les adorateurs font la sainte Communion et par 
un Salut. 

Le soir, après l'exposition, on fait une prière 
spéciale pour la conversion de l'Angleterre, et 
l'on chante des cantiques. Les religieux Carmes 
se joignent à l'Adoration et leur présence donne 
aux nuits une physionomie particulière. A mi- 
nuit, leur grand office de Matines et de Laudes, 
auquel s'associent plusieurs membres de l'Œu- 
vre, rehausse la solennité des exercices. De une 
heure et demie à cinq heures, il y a toujours 
deux Pères Carmes au pied de l'autel, et s'il y a 
quelque lacune dans le nombre des adorateurs, 
les religieux s'empressent de la remplir. Leur 
amour pour l'Œuvre est tel, que si jamais elle 
venait à péricliter à Londres, ce qu'à Dieu ne 
plaise, ils la soutiendraient à eux seuls en 
faisant l'Adoration pour leur compte. Comme 
parmi les membres actifs, plusieurs savent 
chanter et jouer de l'orgue, il y a durant la 
nuit, plusieurs fois, des chants de cantiques 
en l'honneur du Très-Saint-Sacremeut. Après 
la prière du matin, la méditation est toujours 
faite par un Carme. 

Ces nuits ferventes sont, comme en France, 
une source de vocations; on en comptait déjà 
quatre au bout de dix-huit mois. Le zèle des ado- 

12** 






— 384 — 












rateurs Anglais est à la hauteur de leur sainte 
mission. Plusieurs d'entre eux habitent des villes 
fort éloignées, et ils viennent exprès à Londres, 
parcourant jusqu'à vingt-cinq lieues, pour faire 
leur nuit d'Adoration. 

Quittons les adorateurs d'outre Manche, quels 
que soient l'attrait et l'édification que nous 
trouvions auprès d'eux, et transportons-nous 
dans un pays bien différent de climat, de mœurs, 
de civilisation, à Constantinople, dans la capi- 
tale du Grand Turc; nous y trouverons aussi 
l'Adoration nocturne. Sur cette vieille terre des 
saint Jean Chrysostôme, des saint Basile, des 
saint Grégoire de Naziance, refleurit la dévotion 
Eucharistique et l'on peut bien penser que ce 
n'est pas sans des vues de miséricorde de la part 
de Dieu. Dans cette ville soumise à la loi du 
Coran, les catholiques font ce qu'ils ne peuvent 
pas faire à Paris. Les processions sortent dans 
les rues escortées par les soldats du Sultan. La 
musique des troupes Turques exécute des 
symphonies et les postes militaires prennent et 
présentent les armes quand passe le Très-Saint- 
Sacrement. 

Grâce à la France, l'Adoration perpétuelle 
pendant le jour a pris possession de la vieille 
terre d'Afrique. Cette institution éminemment 



— 385 — 



régénératrice est, ainsi que nous l'avons déjà 
dit, établie dans les diocèses d'Alger et de Cons- 
tantine et à l'autre extrémité du continent, dans 
le diocèse de Saint-Denis, à l'île de la Réunion, 
l'Adoration solennelle du Trés-Saint-Sacrement 
a lieu pendant un certain nombre de jours 
chaque mois, dans les sanctuaires désignés par 
l'autorité diocésaine. Cette Adoration n'est pas 
encore perpétuelle; mais telle qu'elle est, elle 
marque un progrés sensible de la dévotion 
Eucharistique dans ces contrées lointaines où, 
il y a vingt ans environ, on suffisait à peine à 
procurer aux âmes les secours les plus urgents 
de la religion. L'Afrique se trouve ainsi entre 
deux foyers d'amour divin et de prières dont 
elle ressentira, nous en avons l'espoir, la douce 
et bienfaisante influence. 

La publicité donnée aux rapports sur l'Œuvre 
de Paris, par le Bulletin de la Société de 
Saint-Vincent de Paul, a porté la connaissance 
de l'Adoration nocturne dans le monde entier. 
En 1873, un fervent chrétien de l'Ile Maurice, 
animé du désir d'y fonder l'Œuvre, demanda 
le règlement de l'Association de Paris qui 
lui fut aussitôt envoyé. Il y avait d'assez 
grands obstacles à vaincre, mais cette fonda- 
tion paraissait être en de trop bonnes mains 



386 






pour que le résultat n'ait pas répondu à nos 
espérances. 

Nous avons peu de choses à dire du Nouveau- 
Monde. Nous n'en avons reçu que des rensei- 
gnements tout à fait insuffisants et incomplets. 
Tout ce que nous savons, c'est qu'au Mexique, 
l'œuvre de l'Adoration perpétuelle jour et nuit, 
préparée par un associé de Paris, paraît être 
fondée sur des bases sérieuses. « L'œuvre de 
« l'Adoration perpétuelle marche parfaitement, 
« les règlements sont déjà imprimés et mis en 
« circulation et très-prochainement, écrivait-on 
« de Mexico, à la date du 22 janvier 1869, ce 
« nouveau culte au Trés-Saint-Sacrement sera 
« inauguré dans le sanctuaire de Notre-Dame 
« de Guadalupe. Que le bon Dieu soit loué et 
« que sa divine Majesté daigne nous accorder, 
« par ce moyen, un remède efficace à tant de 
« maux dont chaque jour nous sommes de plus 
« en plus accablés. » Les persévérants efforts 
de ce fervent adorateur ont été couronnés de 
succès l'année suivante. Depuis, le temps n'a 
fait que consolider l'Œuvre et l'on peut nourrir 
l'espoir que ce pays si malheureux et si agité, 
trouvera par l'Adoration perpétuelle, un peu 
de repos et de tranquillité. 

Disons enfin, en terminant, que l'Adoration 



— 387 



perpétuelle n'est pas le privilège exclusif des 
peuples jouissant d'une civilisation développée. 
Elle existe aussi chez les sauvages. Elle se 
pratique à la Baie d'Hudson, dans le vaste 
diocèse de Satala ; seulement, comme les églises 
y sont très-rares et que les chrétiens en sont 
souvent très-éloignés, elle n'a pas lieu dans 
les sanctuaires comme en Europe. Les sauvages, 
au jour et à l'heure qui leur sont indiqués pour 
faire leur Adoration, se tournent vers l'église 
la plus rapprochée, souvent à des distances de 
quarante ou cinquante lieues et rendent, avec 
une fidélité et une piété exemplaires leurs 
hommages au Roi du Ciel et de la terre, qui 
ne dédaigne pas de venir habiter, pour le bien 
de leurs âmes, les pauvres demeures que lui 
bâtissent les missionnaires. 

Presque aux Antipodes, dans l'Océanie cen- 
trale, l'Adoration partielle se pratique à Samoa, 
à Tonga, à Wallis, et pendant la nuit du jeudi 
au vendredi-saint, toute la population chrétienne 
accourt en masse pour adorer Notre-Seigneur. 
Mgr Elloy, évêque mariste de Tipasa, momen- 
tanément en Europe, s'inspirant de l'édifiant 
spectacle que donne Paris par son Adoration 
perpétuelle du Trés-Saint-Sacrement exposé, a 
annoncé publiquement qu'à son retour dans 

12*** 



— 388 — 

son vicariat, il établirait cette belle solennité 
qui ne pourra manquer d'avoir un grand succès, 
tant est vif l'amour de ses bons sauvages pour 
le Dieu de l'Eucharistie. 






— 389 



CHAPITRE XXVIII 

Instruction pour l'établissement de l'œuvre de 
l'Adoration nocturne et pour l'organisation des nuits. 



Pour fonder l'œuvre de l'Adoration nocturne, 
il suffit de réunir environ vingt hommes pieux 
qui consentent à passer une nuit d'Adoration 
par mois. Quoique le nombre réglementaire des 
adorateurs soit de quartorze par nuit, il con- 
vient de ne pas s'y tenir strictement, afin d'avoir 
des membres supplémentaires qui puissent rem- 
placer ceux qui seraient absents pour cause 
légitime. On peut ainsi organiser autant de 
nuits d'Adoration qu'on a de séries de quatorze 
membres. Le personnel étant trouvé, il faut 
s'assurer d'un sanctuaire, chapelle ou église, 
où l'Adoration nocturne puisse avoir lieu aux 
jours qui seront déterminés et obtenir do 
l'autorité diocésaine l'autorisation d'y exposer 
le Trés-Saint-Sacrement ces jours-là, spéciale- 
ment pour les exercices de la nuit. Chaque 
association peut avoir son règlement particulier, 
mais il est désirable qu'une certaine harmonie 
règne dans l'organisation et la direction de ces 
œuvres sœurs, et il sera utile de s'inspirer pour 



— 390 — 

ces fondations du règlement de l'Œuvre de Paris, 
fruit d'une longue expérience, dont le texte fait 
l'objet du chapitre XX de cet ouvrage. Quoi 
qu'il en soit, on formera d'abord un conseil dans 
lequel il sera toujours sage d'avoir au moins un 
ecclésiastique ; ce conseil qui se composera 
d'un président, d'un secrétaire, d'un trésorier 
et de quelques conseillers, s'occupera de tous 
les détails que comportera l'établissement de 
l'Œuvre ; rédaction du règlement, achat du 
matériel (lits de repos, livres d'office), impres- 
sion des lettres de convocation, des listes de 
recommandations, etc. Il est prudent que ces 
préliminaires soient complets avant de commen- 
cer l'Adoration nocturne qui aura d'autant plus 
de force et de durée que ses premiers fondements 
seront mieux assis. 

Tout ce qui précède se rapporte à une œuvre 
d'Adoration nocturne isolée de l'Adoration 
perpétuelle et se pratiquant dans un sanctuaire 
déterminé, une ou plusieurs fois par mois, à 
dates fixes et périodiques. S'il s'agissait d'une 
œuvre se proposant, comme à Paris, de réaliser 
l'Adoration ininterrompue, par les fidèles, en 
procurant à Nôtre-Seigneur des adorateurs 
pendant la nuit, successivement dans les églises 
où a lieu l'exposition perpétuelle du Très-Saint- 






— 391 — 



Sacrement, nous ne pourrions mieux faire 
que de renvoyer au règlement de l'Œuvre de 
Paris, établie uniquement dans ce but. (Voir 
page 259.) 

Dans l'un et l'autre cas, si l'Œuvre nouvelle 
veut jouir des nombreuses indulgences accordées 
spécialement aux associations de même nature, 
elle doit se faire affilier à l'archiconfrérie de 
l'Adoration nocturne établie à Rome depuis 1810. 
La demande d'affiliation, à laquelle il faut 
joindre le règlement, doit être transmise à 
Rome par la voie de l'Ordinaire qui l'appuie 
d'un avi's favorable. 

Tous les préliminaires ayant été accomplis 
et l'Œuvre étant organisée, comment se passera 
cette sainte veille objet de si pieux désirs et 
de si douces espérances ? Le voici : 

Le directeur désigné pour la nuit doit 
arriver l'un des premiers au sanctuaire afin de 
s'assurer par lui-même que toutes les disposi- 
tions matérielles pour la nuit sont exactement 
prises; que la salle de repos est éclairée et, 
pendant l'hiver, que le combustible sera suffi- 
sant pour y entretenir une température modérée 
du coucher au lever ; que devant l'autel se trou- 
vent quatre prie-Dieu avec le luminaire néces- 
saire pour faciliter aux confrères la récitation 



— 392 — 









de l'office ; qu'il y a en provision des lumières 
pour remplacer pendant la nuit celles qui 
brûlent sur l'autel, en un mot, que toutes les 
mesures d'ordre, de convenance, de discipline 
propres à garantir la complète régularité de la 
nuit sont prévues. Lorsque l'heure fixée par la 
convocation sera venue , il procédera à l'appel 
nominal des adorateurs inscrits pour passer la 
nuit et se fera une loi de ne jamais admettre un 
inconnu. Il marquera sur sa lettre de direction 
les noms des manquants afin qu'ils puissent 
être convoqués de nouveau. 

Cela fait, il s'occupera de relever les diverses 
intentions particulières à recommander par les 
adorateurs aux prières de la nuit, conformément 
aux indications de la liste en usage à Paris et 
qui peut être adoptée ailleurs. (Voir ci-après la 
formule de cette liste.) 

S'il survenait des adorateurs un peu attardés, 
lorsque le relevé est à peu près terminé, il 
grouperait toutes leurs intentions en un seul 
chiffre qui serait ajouté aux recommandations 
inscrites sous le titre spécial de Grâces parti- 
culières. 

Il désignera alors les confrères qui devront 
passer la première heure, de dix à onze, et s'ils 
ne sont que deux, il chargera un troisième de se 



— 393 — 

joindre à eux pour la récitation de l'office ; le 
moment venu, ce dernier prendra la place du 
deuxième adorateur de droite, et se retirera 
aussitôt après que la récitation sera terminée. 

Le directeur ne s'attribuera pas à lui-même 
l'heure de dix à onze, parce qu'il doit aussitôt 
après la prière s'occuper de la répartition défi- 
nitive des heures de la nuit, et présider à l'ins- 
tallation des lits de repos et enfin au coucher. 

Il fera bien de lire ensuite aux adorateurs 
le £ '2, de l'art. IY du règlement, relatif à 
l'ordre des exercices et à la discipline, et que 
nous reproduisons ci-après. 

Ces préliminaires terminés, le directeur don- 
nera le signal pour se rendre devant l'autel. 
Les confrères marcheront deux à deux, avec 
ordre et recueillement. Si le Très-Saint-Saciv- 
ment n'est pas exposé, les exercices commence- 
ront par l'exposition en suivant les indications 
de l'art. V. (Page 273.) 

S'il y a un ecclésiastique présent, le directeur 
lui proposera de vouloir bien faire la prière du 
soir, laquelle doit être toujours suivie de la 
lecture de l'Amende honorable ; à défaut d'ecclé- 
siastique, c'est au directeur que revient l'honneur 
de faire ces prières. 

Le directeur lira ensuite la liste des intentions 



— 394 — 

générales recommandées à l'Œuvre, puis celle 
des intentions particulières. (Voir ci-aprés la 
formule de ces listes.) 

Ensuite, il récitera alternativement avec les 
adorateurs, cinq Pater, cinq Ave et cinq Gloria 
Patri à toutes ces intentions. 

Ces prières terminées, il donnera le signal du 
retour à la salle de repos, sauf pour ceux qui 
doivent rester en Adoration pendant la première 
heure et qui se placeront sur les prie-Dieu 
pour commencer immédiatement la récitation de 
l'office, laquelle doit toujours être précédée du 
signe de la croix et de l'invocation à haute 
voix : In nomine Patris et Filii et Spiritus 
Sancti, amen. Afin que cette récitation se fasse 
avec régularité et dignité, il est essentiel de 
suivre exactement : 1° l'avis pour la récitation 
de l'office pendant la nuit, placé en tête de 
l'office et reproduit ci-après ; 2° l'indication des 
rubriques spécialement à l'usage des adorateurs 
nocturnes. Nous avons déjà dit que les livres 
de l'office du Très-Saint-Sacrement, imprimés 
pour les œuvres d'Adoration nocturne et qui 
renferment ces renseignements , se trouvent 
chez Poussielgue frères, rue Cassette, 15, à 
Paris. Il est bon de faire remarquer que les 
adorateurs les plus exercés à la lecture du latin 



HHHH 






— 395 — 

doivent se placer à droite et que c'est le premier 
adorateur de droite qui a le rôle principal dans 
la récitation de l'office, c'est aussi à lui que 
revient l'honneur de lire à haute voix l'Amende 
honorable lorsque sonne la demie. 

Les confrères revenus dans la salle du repos, 
le directeur complétera la répartition des heures 
d'Adoration. S'ils sont moins de quatorze, il fera 
appel aux membres de bonne volonté pour com- 
bler les vides. Il désignera ensuite pour renou- 
veler les souches ou les bougies devant le 
Trés-Saint-Sacrement l'adorateur qui fera son 
heure au moment où ce renouvellement sera 
jugé nécessaire , d'après les indications qui 
auront été données par les employés de l'église. 
Enfin, il annoncera aux confrères l'heure de la 
Messe et chargera l'un des adorateurs de la 
dernière heure de venir le réveiller au moins 
une demi-heure auparavant, pour présider 
lui-même au réveil général et aux derniers 
exercices de la nuit. 

Cela fait, il fera installer les lits de repos et 
attribuera à chaque confrère le lit portant le 
numéro correspondant à son heure d'Adoration, 
afin qu'à chaque heure de la nuit le réveil des 
adorateurs puisse s'opérer, sans trouble ni erreur, 
dans l'ordre indiqué sur la feuille de service. 

13 



— 396 — 

Chaque lit se compose d'un matelas, d'un 
traversin sur lequel est étendue une serviette 
propre pour protéger la figure, et d'une couver- 
ture ; des croix rouges, cousues sur les matelas 
et les couvertures, indiquent la place de la 

tête. 

Le directeur veillera à ce que les adorateurs 
ne restent pas devant le Très-Saint-Sacrement 
en dehors des heures qui leur sont désignées. 
En général, les excès de zèle nuisent à la santé 
et sont suivis d'un regrettable découragement. 
Le directeur a pour devoir d'empêcher qu'ils 
se produisent. 

Cinq minutes au moins avant que la première 
heure d'Adoration ne soit terminée, le premier 
adorateur de droite ira chercher les n os 3 et 4, 
en les réveillant doucement, pour remplacer les 
n os 1 et 2. Toutefois, ces derniers ne regagneront 
la salle du repos qu'après avoir récité l'office 
avec ceux qui doivent leur succéder. Ils suivront 
pour le changement de prie-Dieu les prescrip- 
tions de l'avis pour la récitation de l'office 
pendant la nuit. Toutes ces prescriptions seront 
observées à chaque heure de la nuit. 

Les allées et les venues dans la salle du repos 
doivent se faire avec une très-grande précaution, 
pour ne pas troubler le sommeil des autres con- 



— 397 -- 



frères. Il va sans dire que le plus grand silence 
doit y être observé ; là, comme devant le Très- 
Saint-Sacrement, chaque confrère doit témoigner 
de son respect du lieu saint, de son amour 
sincère du prochain et de sa volonté d'obéir au 
règlement. 

Si la première Messe est à six heures, le lever 
se fait immédiatement après la récitation de 
l'office de Prime, c'est-à-dire vers cinq heures 
et quart. Si la Messe est à cinq heures, le lever 
a lieu après les Laudes, c'est-à-dire vers quatre 
heures et quart. 

Le signal du réveil général se donne par ces 
paroles du directeur : Benedicamus Domino, 
auxquelles tous les confrères répondent : Deo 
gratias. 

Le directeur fera aussitôt procéder à l'enlève- 
ment du matériel, avec le soin et les précautions 
convenables ; après quoi, tous les adorateurs 
se rendront devant le Très-Saint-Sacrement, 
avec le même ordre et le même recueillement 
qu'au commencement de la nuit. 

Le directeur fera la prière du matin qui sera 
suivie de la lecture de l'Amende honorable 
à moins qu'il n'y ait un ecclésiastique présent, 
auquel cas c'est à lui que revient le soin de dire 
ces prières. Puis commence la Messe à laquelle 



— 398 — 

il est d'usage que les adorateurs fassent la 
sainte Communion. 

Les adorateurs ne doivent se retirer que 
lorsque les fidèles sont venus les relever ou que 
le Saint-Sacrement est rentré dans le Taberna- 
cle ; alors ils peuvent retourner à leurs occupa- 
tions. Ils sont venus sans attirer les regards du 
monde, ils se retirent protégés par la même 
humilité ; mais combien de consolations n'empor- 
tent-ils pas de ces nuits bénies. Rien n'est doux 
comme le jour qui suit une nuit d'Adoration. 




FORMULES DIVERSES 

EN USAGE DANS L'ŒUVRE DE PARIS 



— 401 — m° i 

Formule d'invitation à assister à une nuit d'Adoration. 

■ I I J I L I 

PAROISSE 



DIOCESE 



de 



de 



ŒUVRE 
DE L'EXPOSITION ET ADORATION NOCTURNE 

DU TRÈS-SAINT-SACREMENT 



le 



187 



Monsieur et cher Confrère, 
Vous êtes invité à assister à la nuit d'Adoration 
qui aura lieu à 



le 



à neuf heures précises du soir. 

Dans le cas d'impossibilité, je vous prie de m'en 
prévenir sans retard. 

Veuillez agréer, Monsieur et cher Confrère, 
l'expression de mes sentiments très-dévoués on 
Notre-Seigneur. 

Le Secrétaire, 



Directeur pour la nuit, M. 
auquel vous voudrez bien présenter cette invitation. 
à M. membre actif 

T. S. V. P. 



IV» » 



402 



Formule de la liste des intentions particulières 
à recommander. 



Vous êtes prié de remplir, avant de vous rendre 
au sanctuaire, la liste qui suit, et de la présenter au 
Directeur. 



LISTE 

DES INTENTIONS PARTICULIERES A RECOMMANDER 

Hommes 

Femmes 

Jeunes gêna 

Jeunes personnes 

Paroisses et familles 

Conversions 

Vocations 

Malades 

Défunts 

Affligés 



Prêtres et Religieux 
Communautés et écoles . 
Premières communions _ 
Mariages 



Œuvres pieuses 

Grâces temporelles 

Grâces particulières (1)_ 
Actions de grâces 



Après 9 heures 1/2, on ne peut plus inscrire les recom- 
mandations. 

Nota. — Cette liste accompagne toujours la lettre de 
convocation. 

(1) Tontes les intentions spéciales qui ne sont pas indiquées 
sur cette feuille doivent être comprises soua la désignation de 
Grâces particulières. 



— 403 — w . a 

Formule d'invitation à diriger une nuit d'Adoration. 



DIOCESE 



PAROISSE 



de de 

ŒUVRE 
DE L'EXPOSITION ET ADORATION NOCTURNE 

DU TRÈS-SAINT-SACREMENT 



le . 



187 



Monsieur et cher Confrère, 

Vous êtes invité à diriger la nuit d'Adoration qui 
aura lieu à _•_ 



le 



à neuf heures précises du soir. 

Dans le cas d'impossibilité, je vous prie de m'en 
prévenir sans retard. 

Veuillez agréer, Monsieur et cher Confrère, 
l'expression de mes sentiments très-dévoués en 
Nôtre-Seigneur. 

Le Secrétaire , 



MM. les Directeurs sont instamment priés do renvoyer 
très-exactement, après la nuit d'Adoration, leur rapport 
à M. le Secrétaire de l'Œuvre. 



T. S. V. P. 



13* 




IV 4 



— 404 — 

Feuille adressée aux Directeurs. 



Nuit. (Désignation du Sanctuaire) 



Directeur : 



(Date de la nuit ) 18 



M. (Nom du Directeur) 



Noms des Membres convoqués: 



MM. 



MM. 



Demander s'il y a des changements d'adresses 
et les Indiquer. 

Noms et adresses des Auxiliaires, et rapport de la nuit. 



.. 



m 



^M 



— 405 — 



rV° » 



Formule de la liste des Intentions générales 
à recommander. 

(Cette liste ne peut être modifiée sans l'autorisation du Conseil.) 



INTENTIONS GENERALES 



Notre sainte Mère l'Eglise. 

Notre Saint-Père le Pape el 
ses intentions. 

Sa G. Mgr l'Archevêque ou 
l'EvÊquo. 

Le Diocèse de 

Mgr le Patriarche latin de Jé- 
rusalem et ses intentions. 

Le Clergé et les fidèles de la 
paroisse (ou se fait l'Ado- 
ration). 

Les Œuvres et les Intentions 
do M. le Curé. 

L'Oeuvre de l'Adoration noc- 
turne du Très-Saiat-Sacre- 
ment, a Paris. 

Le Supérieur et le Conseil 
de l'Œuvre. 

Les Œuvres de l'Adoration 
nocturne en Province et à 
l'Etranger , spécialement 

Celles d 

(noms des Œuvres d'Adora- 
tion nocturne à recomman- 
der particulièrement). 

Les Confrères malades ou 
défunts. 

Les Bienfaiteurs et Auxiliaires 
de l'Œuvre. 

Les Sœurs de l'Adoration Ré- 
paratrice et leurs intentions. 

Les Confréries du Saint-Sa- 
crement et celles du Sacré- 
Cœur. || 

La France et ses colonies. 

La Ville de Paris. 

L'Education chrétienne de la jeunesse française. 

Les Universités catholiques. 

Les Armées françaises do terre et de mer. 

Des Actions de grâces pour le succès do l'Œuvro. 

Nota. — Cette liste accompagne toujours la lettre 
adressée aux directeurs. 



Les agonisants el les âmes 
du purgatoire. 

La sanctification du diman- 
che. 

La cessation et la réparation 
des blasphèmes, îles sacri- 
lèges et de- scandales. 

Les Archiconfréries 'le Notre- 
Dame des Victoires, de 
Notre-Dame de Lourdes, 
et leurs intentions. 

Les Missions catholiques. 

Les Conférences 'le Saint- 
Vincent de Paul, et leurs 
œuvres, notamment la Con- 
férence de 
[nom de la Conférence). 

Les Œuvres suivantes, sa- 
voir: eelleS'lu Y. ru nat iimal 

au S \':iu.-( Iœub ; — de la 
Première Communion ; — 
du Saint- Viatique ; — des 
Tabernacles;— des Comités 
Catholiques; — de Saint- 
François de Sales; — îles 
Ecoles d'Orient; — du De- 
nier de Saint-Pierre; — 
des Cercles d'ouvriers et 
de jeunesse ; — des prières 
pour Paris. 



pv° a 



406 — 



EXTRAIT DU RÈGLEMENT 

k joindre à toutes les lettres da convocation et de direction. 
§ 2 de l'art. IV. — Ordre des exercices et discipline. 

Les exercices da la nuit commenceront, à neuf heures, 
par la prière du soir faite en commun, devant le Très- 
Saint-Sacrement, et suivie de la lecture des recomman- 
dations et d'une Amende honorable. 

La prière finie, les numéros 1 et 2 resteront pn 
Adoration, et les autres adorateurs se rendront dans la 
salle du repos, où chacun prendra pour lit de repos le 
lit portant le numéro correspondant à son numéro de 
série. 

A onze heures, les numéros 3 et 4 viendront remplacer 
les numéros 1 et 2, et ainsi de suite jusqu'à cinq heures. 

Les adorateurs garderont un silence absolu devant le 
Très-Saint-Sacrement. 

Le même silence sera gardé dans la chambre du repos ; 
on n'y parlera qu'à voix basse, si la nécessité l'exige, et 
l'on évitera avec soin, en se rendant devant le Saint- 
Sacrement ou en revenant de l'Adoration, de troubler le 
sommeil des adorateurs. 

La chambre du repos restera toujours éclairée. 

Il y aura également pondant la nuit une lumière 
placée entre les deux adorateurs, de manière à ce qu'ils 
puissent lire sans se fatiguer. 

Les adorateurs ne pourront, sous aucun prétexte, se 
rendre devant le Très-Saint-Sacrement en dehors du 
temps qui leur sera destiné. Lorsqu'ils ne seront pas en 
Adoration, et à moins que leur office ne le demande, ils 
devront se tenir dans la chambre du repos. 

Les adorateurs devront, à tour de rôle, réciter pendant 
la nuit l'office du Saint-Sacrement. 



— 407 



Cette récitation se fera de manière à eo que les deux 
adorateurs qui terminent leur adoration, avant de se 
retirer, récitent l'office avec ceux qui leur succèdent. 
Ainsi, les numéros 1 et 2, qui finiront à onze heures, 
réciteront l'office avec les numéros 3 et 4, qui commen- 
ceront leur Adoration à cette même heure. 

L'office sera divisé de façon â ce qu'il soit récité aii 
moins une fois pendant la nuit. 

L'office sera psalmodié lentement et en observant les 
pauses indiquées par la rubrique. 

Chaque heure d'Adoration commencera par la récitation 
de l'office du Très-Saint-Sacrement, et, à la demie, le 
premier adorateur de droite lira l'Amende honorable. 
Le reste du temps sera employé à méditer devant le 
Très-Saint-Saeremout. 

On ne pourra fairo à haute voix d'autres prières que 
celles prescrites par le règlement. Toutefois, les adora- 
tours qui ne pourront pas dire l'office ont la faculté de 
le remplacer par cinq Pater et cinq Ave Maria récités à 
haute voix. Dans ce cas, ils devront en avertir le 
Directeur laïque, afin qu'aucuno partie do l'office ne soit 
omise. 

A cinq heures moins un quart du matin, le Directour 
laïque donnera le signal du réveil et fera enlever les lits 
de repos ; après quoi, tous les adorateurs se rendront 
devant le Tros-Saint-Sacremont pour faire ensemble la 
prière du matin et la méditation. 

Avant de se retirer, les adorateurs assisteront à la 
Messe. — Ils seront invités à y faire la sainte Commu- 
nion, et à l'offrir à Dieu aux intentions et pour les fins 
que se propose l'Association. Lorsque la Messe n'aura 
pas lieu avant six heures, on récitera Prime à cinq heures. 
Dans ce cas, le signal du réveil ne sera donné qu'après 
la récitation de Prime. 



— 409 



IV» y 



Formule du tableau destiné à faire l'addition des 
intentions particulières des adorateurs. 

(à envoyer au directeur de chaque nuit.) 

ŒUVRE DE L'EXPOSITION ET ADORATION NOCTURNE 

nU TRÈS-SAINT-SACnEMENT 



Liste des intentions particulières à recommander. 



Hommes 


Femmes 


Jeunes gens 


Jeunes 

personnes 


Paroisses 

et famille» 


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et n-li(jk J Qï 


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et écoles 














Premières 

communions 


Mariages 


Œuvres 

pieuses 


Grâces 

temporelles 


Grâces 

particulières 


Actions 

de grâce s 















IV" 8 



— 410 



Formule pour la répartition dos heures d'adoration 
à envoyer au directeur de chaque nuit. 



RÉPARTITION DES HEURES 


N° 

DES LITS 


/M. 






\M 






De 10 heures à 11 h. ) 









(M. 


— 11 h. 12 h. ] 

(m. 


(M. 

— 12 h. 1 h. ] 

(M, 


' /M. 






— 1 h. 2 h. \ 

(M 






(M, 







— 2 h. 3 b. j 

'm. 


(M. 


— 3 h. 4 h. ] 

'm 







(M. 
— 4 h, au lever 5 

(m 





— 411 — 



i%r° o 



AVIS 



POLE LA RECITATION DE L OFFICE PENDANT LA NUIT. 



» 1 

Dcnxlème adorateur Premier adorateur 
de gauche de gaucho 



1 « 

Premier adorateur Deuxième adorateur 
de droite de droin- 



Les adorateurs, pour la récitation de l'office du Saint- 
Sacrement, se rangent en une seule ligne en face de 
l'autel où le Saint-Sacrement est exposé. Celui parmi 
eux qui est le plus au milieu du côté droit est désigné 
sous le nom de premier adorateur de droite, celui qui est 
à sa droite sous le nom de deuxième adorateur do droite. 
Do même, l'adorateur le plus au milieu du côté gauche 
est appelé premier adorateur do gaucho, et celui qui est 
à sa gauche, deuxième adorateur de gauche. 

Lorsque deux adorateurs arrivent devant l'autel, celui 
qui lit le plus facilement le latin so place comme premier 
adorateur de droite, l'autre, comme premier adorateur 
de gauche. 

L'heure terminée, ces deux membres deviennent 
deuxièmes adorateurs de droite et de gauche pour réciter 
l'office avec ceux qui leur succèdent. L'office récité, ils 
se retirent. 

Le premier adorateur de droite dirige la récitation do 
l'office. Lorsqu'un prêtre est présent, cotte place et cette 
fonction lui appartiennent de droit. 

Si à la première heure il ne se trouve pas de prêtre 
avec les deux adorateurs, le directeur de la nuit leur 
adjoint un troisième adorateur qui restera seulement 
pendant la récitation du premier nocturne; il sera pris 
parmi les confrères lisant facilement le latin, et remplira 
les fonctions do deuxième adorateur do droite. 



TABLE DES MATIERES 



Pages 

Lettre de S. G. Mgr de la Bouillerie, arehovêquo 
de Perga, coadjutour de Bordeaux i 

Lettro du R. P. Tesiiièro, dos Prêtres du Très- 
Saint-Sacrement iij 

Lettre do M. le comte F. do Champagny, membre 
de l'Académie française vj 

PRÉFACE v 

INTRODUCTION : Recherches historiques sur 
l'Adoration nocturne du Très-Saint-Sacremont. 

— Fête-Dieu. — Bulle Graves et Diuturnce ins- 
tituant l'Adoration perpétuelle. — Congrégation 
vouées au culte Eucharistique vti 

CHAPITRE PREMIER. — Fondation de l'Œuvre. 

— Ses premières années, 1848 à 1851 .... 
CHAPITRE II. — Réveil de l'Œuvre. — Elle 

entre dans une voie nouvelle en complétant 
l'Adoration perpétuelle, 1851 à 1852 .... 7 
CHAPITRE III. — Nouvelle organisation de l'Œu- 
vre. — Son affiliation à l'Archiconfrério de 






— 414 — 

Rome. — Assemblées générales. — Mgr de 
Tripoli, supérieur de l'Œuvre, 1852 à 1855 . . 15 

CHAPITRE IV. — Matériel de l'Œuvre. — Son 
importance 27 

CHAPITRE V. — Nouveaux progrès de l'Œuvre. 

— Auxiliaires. — Livres de l'office du Très- 
Saint-Sacrement. — Concours des Conférences 
de Saint- Vincent de Paul. — M. l'abbé Le Re- 
bours, supérieur de l'Œuvre, 1855 à 1860 . . 34 

CHAPITRE VI. — L'Adoration perpétuelle est 
complétée. — Adoration nocturne paroissiale, 
1860-1865-1872 41 

CHAPITRE VII. — Membres bienfaiteurs. — Leur 
rôle. — Quêtes et ressources, diverses. — Messes 
de réparation, 1853 à 1861 57 

CHAPITRE VIII. — Retraites. — Nuit du 31 dé- 
cembre au I e '- janvier à Notre-Dame des Victoi- 
res. — Nuit du jeudi au vendredi-saint, 1859 
â 1876 6 ~ 

CHAPITRE IX. — Pie IX et l'œuvre de l'Adora- 
tion nocturne de Paris. — Le Concile du Vati- 
can, 1860 à 1877 ÏS 

CHAPITRE X. — L'Adoration nocturne pendant 
le siège de Paris, 1870 90 

CHAPITRE XI. — L'Adoration nocturne pendant 
la Commune de Paris, 1871 102 

CHAPITRE XII. — L'œuvre de l'Adoration noc- 
turne et les pèlerinages. — Rome et Jérusalem. 

— Pèlerinages Eucharistiques, 1872 à 1877 . . 109 
CHAPITRE XIII. — Les prières publiques. — 

L'œuvre de l'Adoration nocturne et les Comités 
catholiques. — Recommandations. — Union de 



— 415 - 

l'œuvre do l'Adoration nocturne avoc les grandos 

œuvres de prières, 1863 à 1877 188 

CHAPITRE XIV. — Fruits do l'œuvre de l'Ado- 
ration nocturne 145 

CHAPITRE XV. — Nécrologie. — Principaux 

fondateurs de l'Œuvre loi 

CHAPITRE XVI. — Nécrologie. — Membres actifs, 

1848 à 1869 178 

CHAPITRE XVII. — Nécrologie. - Membres 

actifs, 1870 à 1877 204 

CHAPITRE XVIII. — Nécrologie. — Principaux 

protecteurs et bienfaiteurs 24 i 

CHAPITRE XIX. — Los premiers réglementa de 

l'Œuvre, 1848 à 18G7 862 

CHAPITRE XX. — Règlement en vigueur. — 

Indulgences 25'./ 

CHAPITRE XXI. — Explication des articles du 

règlement 278 

CHAPITRE XXII. — Explication des articles du 

règlement (suite) 2% 

CHAPITRE XXIII. — L'Adoration nocturne et les 

principales œuvres Eucharistiques en Province. 303 
CHAPITRE XXIV. — ■ Indication des principales 
œuvres Eucharistiques existant dans chaque 
diocèse. — Adoration perpétuelle. — Adoration 

nocturne. — Œuvres diverses 813 

CHAPITRE XXV. — Renseignements sur les 

œuvres d'Adoration nocturne en Province . . 333 
CHAPITRE XXVI. — Archiconfrério de l'Adora- 
tion nocturne à Rome . • 355 

CHAPITRE XXVII. — Adoration nocturne à 
l'étranger 367 



— 416 — 

CHAPITRE XXVIII. — Instruction pour l'établis- 
sement de l'œuvre do l'Adoration nocturne et 
pour l'organisation des nuits . . , 389 

Formules diverses en usage dans l'Œuvre de Paris 390 



FIN DE LA TABLE DES MATIERES 




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