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Full text of "Lord Palmerston"

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LES FONDATEURS DE LA MONARCHIE BELGE 



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LORD PALMERSTON 



THÉODORE JUSTE 






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BRUXELLES 



C. MUQUARDT 

HE3XTR.-X - 3VIHIÏZBA.CÏÎ, SUCCESSEUR 
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LORD PALMERSTON. 









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LES FONDATEURS DE LA MONARCHIE BELGE 



LORD PALMERSTON 



THÉODORE JUSTE 




BRUXELLES 



C. MUQUARDT 

HENRY MBBZBACH, SUCCESSEUR 
MÊME MAISON A GAND ET A LEIPZIG 

1873 



FR. GOBBAERTS, IMP. DU ROI, SUCCESSEUR DEM. DEVROYE, 
Bruxelles, 40, rue de Louvain. 



TABLE. 



Avant-propos i 

I. (1784-1830). — Reconnaissance que les Belges doivent à lord 
Palmerston. — Ses premières années. — Ses débuts dans la vie 
politique. — Il devient un des lords de l'amirauté,! puis secrétaire 
de la guerre. — Il devient membre du Parlement. — 11 refuse le 
gouvernement de la Jamaïque et le gouvernement général de 
l'Inde. — En 1828, il se retire du ministère présidé par le duc de 
Wellington. — Ses voyages à Paris; lettres curieuses sur l'esprit 
public des Français et leurs projets au sujet de la Belgique et des 
provinces rbénanes. — Le prince de Polignac. — Révolution de 
juillet 1830. — Lord Palmerston devient ministre des affaires 
étrangères pp. 1-13 

il. (1830-1831). — Révolution belge de 1830. — Palmerston et le 
prince de Talleyrand. — La France convoite le Luxembourg. — 
Palmerston s'oppose à tout empiétement de la part de la France. — 
Il n'a point été le promoteur de la candidature du prince Léopold 
de Saxe-Cobourg. — Mais il a été l'adversaire inflexible de la 
candidature du duc de Nemours. — Intrigues du cabinet du 



I 



I 



v j TABLE. 

Palais-Royal. - Le duc de Nemours est élu roi des Belges. - Le 
cabinet britannique ne recule pas devant la guerre pour s'opposer 
à cette élévation. - Désistement du roi Louis-Philippe. - Lord 
Palmerston ruine les projets annexionistes du cabinet présidé par 
Laffitte. - Il est satisfait de l'avènement de Casimir Périer, comme 
premier ministre; mais il continue à se délier du général Sébas- 
tiani, chargé du département des affaires étrangères. - Sages 
conseils de lord Palmerston au régent de la Belgique. - Vues de 
l'Angleterre. - Le maréchal Soult fait proposer à l'Angleterre de lui 
remettre Anvers et Ostende, pourvu que la France puisse s'emparer 
des autres parties du territoire belge. - Lord Palmerston repousse 
dédaigneusement cette insinuation. - La question des forteresses 
belges. - Lord Palmerston approuve la conduite tenue par le 
prince Léopold avant son élection. - Le cabinet de lord Grey et la 
politique française. - L'élection du prince Léopold et les dix-huit 
artjcIes . _ Agression inattendue des Hollandais. - Intervention 
d'une armée française en Belgique. -Après la retraite des troupes 
hollandaises, lord Palmerston ne cesse d'insister pour que les 
Français évacuent au plus tôt la Belgique. - Le prince de Talley- 
rand propose de partager la Belgique; lord Palmerston insiste 
alors pour que l'évacuation des provinces belges se fasse immédia- 
tement. - incidents remarquables. - Les Français évacuent la 
Belgique. - Conduite odieuse du prince de Talleyrand. - Son 
humiliation rr 

III. (1831-1841). - Opposition des Belges au traité des Vingt-Quatre 
articles. — Lord Palmerston recommande la résignation. — Sa 
correspondance avec le roi Léopold et avec sir Robert Adair. - 
Relations de lord Palmerston avec M. Van de Weyer et avec le 
général Goblet. - La ratification russe ; lord Palmerston approuve 
la conduite de M. Van de Weyer. - Le Thème de lord Palmerston. 
- Le siège de la citadelle d'Anvers. - La convention du 
21 mai 1833. - Lord Palmerston quitte le Foreign-Office le 
15 novembre 1834 pour y revenir le 18 avril 1835. - Avènement 
de la reine Victoria ; recommandation du roi Léopold. — Lord 
Palmerston n'était point défavorable aux Belges dans la crise 



I 



TABLE. 



vij 



i 



de 1838-1839. — Le traité du 15 juillet 1840. — Politique et 
langage menaçants de M. Thiers. — Correspondance de lord 
Palmerston avec s^r H. Bulwer, alors chargé d'affaires à Paris. — 
Désaccord entre le roi Louis-Philippe et M. Thiers. — Avènement 
de M. Guizot; ministère du 29 octobre 1840. — Aucune concession 
ne lui est faite par le gouvernement anglais. — Opinion de lord 
Palmerston sur les Français. — Dissolution du ministère de lord 
Melbourne. — Lord Palmerston n'a rien perdu de sa popularité. — * 
Son œuvre de prédilection pp. 59-78. 

IV. (1841-1865). — Lord Palmerston rentre au gouvernement avec 
lord John Russell. — Les mariages espagnols. — Irritation en 
Angleterre. — Rupture de Y entente cordiale, — Antagonisme per- 
sonnel du roi Louis-Philippe et de lord Palmerston. — Révolution 
du 24 février 1848. — Entretien de lord Palmerston avec M. Van 
de Weyer au sujet de la Belgique. — Lettre du roi Léopold sur le 
rapprochement des Belges et des Hollandais. — Le coup d'État du 
2 décembre 1851. — Désaccord entre lord John Russell et lord 
Palmerston. — Ce dernier, dans la prévision d'une alliance 
immédiate de la France avec la Russie et l'Autriche, approuve 
Louis-Napoléon. — La conduite de lord Palmerston n'est pas 
comprise; sa retraite forcée du ministère (22 décembre 1851). — 
Le ministère de coalition. — La guerre de Crimée. — Lord Pal- 
merston devient premier ministre. — La guerre d'Italie. — 
Appréhensions en Allemagne et en Belgique. — Lettre remar- 
quable du roi Léopold. — Lord Palmerston n'est point disposé à 
sacrifier la Belgique au dominateur de la France. — Mort de lord 
Palmerston. — Il reçoit les honneurs de l'abbaye de Westminster. 
— Conclusion pp. 79-88. 



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I 
I 



1 



à 



Il n'y a pas longtemps que l'Angleterre perdait un 
de ses plus éminents diplomates, Henry Lytton Bulwer, 
né en 180-4, mort à Londres le 27 mai 1872. A peine 
onze mois s'étaient-ils écoulés depuis que, pour recon- 
naître ses grands services, la reine Victoria l'avait appelé 
à la Chambre des pairs sous le titre de lord Dalling. 

Élevé au collège de Harrow, d'où il passa à l'univer- 
sité de Cambridge, sir Henry Bulwer était d'abord 
destiné à suivre la profession de son père, un des 
meilleurs généraux de l'armée britannique, et il servit 
pendant quelque temps comme officier dans les gardes 
à cheval; mais il abandonna vite cette carrière pour 
entrer dans la diplomatie où il devait exceller. D'abord 
attaché à la légation anglaise de la Haye, il fut en 1830 
chargé d'une mission secrète à Bruxelles. Membre de 



la Chambre des communes, il soutint chaleureusement 
la politique suivie par lord Palmerston à l'égard de la 
Belgique. Après avoir été premier secrétaire des léga- 
tions britanniques à Bruxelles, à Constantinople et à 
Paris, il fut nommé, en 1843, ministre plénipoten- 
tiaire à Madrid et s'exposa aux hostilités du gouverne- 
ment français, aux rancunes de la reine douairière 
Christine et au ressentiment du général Narvaez à cause 
de sa vigoureuse opposition aux mariages espagnols 
imaginés par Louis-Philippe et par M. Guizot. L'ani- 
mosité contre sir H. Bulwer fut poussée à tel point 
que le gouvernement espagnol lui donna son congé 
en 1848. Cet acte insolite fut considéré comme un 
affront pour l'Angleterre et lord Palmerston prit éner- 
giquement la défense du diplomate qui avait coura- 
geusement soutenu sa politique. Pendant deux ans 
l'Angleterre resta sans représentant à Madrid, et aucun 
successeur ne fut donné à sir H. Bulwer jusqu'à ce que 
le gouvernement espagnol eût fait en quelque sorte 
amende honorable. 

De Madrid l'actif et fidèle auxiliaire de lord Palmer- 
ston avait été envoyé à Washington où il conclut le 
célèbre traité Bulwcr-Claylon ; puis, après un court 
séjour à Florence, il fut nommé ambassadeur à 
Constantinople où, pendant sept années, il occupa avec 
la plus haute distinction le plus important des postes 
diplomatiques de l'Angleterre. 

A son retour, sir H. Bulwer rentra au Parlement, 
après un intervalle de vingt années, comme un des 



x.i 



représentants de Tamworth. Il prit une part très- 
importante aux de'bats qui signalèrent les débuts de la 
guerre franco-allemande. Quelque temps après, il était, 
comme nous l'avons dit , élevé à la dignité de pair 
d'Angleterre. 

A la Chambre haute, lord Dalling siégeait à côté de 
son frère cadet lord Lytton, le célèbre romancier. 
Mais lui aussi avait eu de bonne heure le goût des 
lettres. En 1822, il publiait un volume de poésies; 
en 1826, il dédiait à son jeune frère un autre ouvrage 
ayant pour titre : Un automne en Grèce. En 1834, 
il mettait au jour : La France sociale et littéraire, 
qui fut suivie de La monarchie des classes moyennes. 
Puis sir H. Bulwer se tut pendant trente années. 
En 18G7, il reparait enfin avec éclat dans la carrière 
qu'il semblait avoir délaissée; il publie ses Caractères 
historiques, comprenant des essais très-remarquables 
sur William Cobbett, George Canning, sir James 
Mackintosh et le prince de Talleyrand. Cet ouvrage 
eut les honneurs de quatre éditions et fut traduil en 
plusieurs langues (')• 

Mais l'ouvrage capital de sir H. Bulwer est sans 
contredit la Vie de lord Palmerston , qui parut 
en 1870 ( 2 ). La carrière suivie par l'illustre homme 




(') Pour plus de détails, voir les articles consacrés à lord Dalling 
par le Daily Telegraph du 28 mai 1872; la Suturduy Revient du 
I e » juin ; VAlhcnaeum, etc. 

The life of Henry John Temple, viscount Palmerston : wilh 
sélections from liis diaries and correspond ence , by tlie right lion, sir 







d'État jusqu'en 1840 y est tracée de main de maître. 
Des documents politiques d'un prix inestimable rehaus- 
sent encore la valeur de ce livre. On y trouve, entre 
autres, des particularités d'un intérêt toujours vivace 
sur les commencements de la monarchie belge, sur les 
efforts de lord Palmerston pour soutenir envers et 
contre tous l'édifice encore chancelant de notre natio- 
nalité. 

Ces documents attirèrent immédiatement la sérieuse 
attention d'un grand nombre de publicistes (')• Nous- 
même nous y avons cherché les principaux éléments 
d'un essai biographique sur lord Palmerston , nous 
efforçant, au surplus, de compléter, par d'autres 
communications, les notions historiques dont nous 
sommes redevables à sir H. Bulwer. 
Bruxelles, l"rnai 1873. 

Henry Lvtton Bulw BR , G. (J. B.. M. P. (I-ondon, Mc*BHl Bentley ,1870, 

2 vol. grand in 8"). 

(|) H faut citer, entre autres : Lord Palmerston (en allemand), par 
le D' Theodor Bernhardt (Berlin, 1870, 39 pages in-8 ) ; Lord 
Palmerston et la Belgique, par F. Van Meenen, dans la D<.eu.ri<m 
(mars-avril 1871) ; Lord Palmerston, la France et la Belgique, par 
L Hymans dans VÉcho du Parlement (février 1871); Lord Pal- 
merston, par le comte de Jarnac, dans la Revue des Deux-Mondes, 
1er avril 1873. 






LORD PALMERSTON. 



Un des plus illustres hommes d'État de la 
Grande-Bretagne, le comte Russell, a dit : « La 
Belgique, sous les auspices de lord Grey et de 
lord Palmerston, devint un pays libre et neu- 
tre ('). » Le même hommage a été rendu à ce der- 
nier par le chef du parti conservateur, l'honora- 
ble M. d'Israëli : l'idée de l'indépendance belge 
est, selon lui, inséparable de la mémoire de lord 
Palmerston. C'est ce que reconnaissait encore 
un des principaux organes de la presse anglaise 



(') The foreign Policy ofEngland, p. 



77. 



r 







LORD PALMKRSTON. 



qui s'exprimait en ces termes : « Aidé par 
l'énergie, la sagacité et le tact diplomatique de 
M. Van de Weyer, lord Palmerston conduisit à 
une conclusion satisfaisante l'œuvre entière de 
l'émancipation de la Belgique. » Écoutons enfin 
M. Gladstone : « Je crois, a-t-il dit, que, dans 
l'avenir, le souvenir de lord Palmerston sera 
principalement conservé en raison de la persé- 
vérance, de l'énergie, de la sagacité extraordi- 
naire avec laquelle il a dirigé la politique de 
l'Angleterre, et exercé une si puissante influence 
sur la politique de l'Europe, depuis la fonda- 
tion en 1830 du royaume de Belgique jusqu'à 
sa consolidation en 1839. Quoique certaines 
personnes pensent que la politique d'interven- 
tion de lord Palmerston peut, sur certains 
points, prêter à des objections, je ne puis 
oublier ce fait que, dans les affaires belges, il 
fut le grand instrument d'une politique paci- 
fique, qui épargna à l'Europe une guerre géné- 
rale et sanglante. » 

Au sein du Parlement belge, ceux-là mêmes 
qui prirent la plus grande part à la création de 
notre État, Joseph Lebeau, le général Goblet, 
le baron Nothomb, etc., ont noblement payé à 
lord Palmerston le tribut de leur reconnais- 
sance. Ils ont vu en lui un protecteur, un ami; 



LORD PALMERSTON. 3 

ils l'ont signalé à leurs concitoyens comme le 
persévérant promoteur et l'inébranlable sou- 
tien de l'indépendance belge. « La Belgique, 
disait le général Goblet, a toujours trouvé en 
lui le défenseur le plus dévoué ; et si la recon- 
naissance doit égaler les services rendus, la nôtre 
doit être sans bornes envers l'homme qui, à 
juste titre, regardait le nouveau royaume comme 
l'une de ses créations. » 

Lord Palmerston a donc sa place marquée 
dans cette galerie des fondateurs de la monar- 
chie nationale. L'en exclure, ce serait montrer 
plus que de l'ingratitude. 

Je n'ai point cependant l'ambition de suivre 
lord Palmerston dans toutes les phases de sa 
longue et glorieuse carrière : mon but sera 
atteint si je réussis à rappeler clairement et 
fidèlement les services considérables rendus 
à la Belgique de 1830 par l'énergique et pré- 
voyant coopérateur de lord Grcy. 

Henry Temple, vicomte Palmerston, naquit 
le 20 octobre \ 784, à Broadlands (Southampton). 
Il comptait parmi ses ascendants le célèbre 
diplomate qui conclut le traité de la Triple- 
Alliance de 1667, et devint ensuite l'ami de 
Guillaume III. Le vicomte Palmerston, père 
du futur premier ministre, à la suite d'une 



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4, LORD PALMEBSTON. 

chute de cheval dans une rue de Dublin, avait 
été transporté et soigné chez un respectable 
marchand dont il épousa ensuite la fille, miss 
Mee, sœur d'un directeur de la banque d'Angle- 
terre. 

Après avoir passé une partie de son enfance 
en Italie, Henry Temple étudia le grec et le 
latin au collège de Harrow, d'où il se rendit à 
l'université d'Edimbourg. Un de ses principaux 
professeurs, réminent Dugald Slewart, écrivait 
de lui en 1801 : « Ses aptitudes sont remar- 
quablement bonnes et il fait tout son possible 
pour les justifier par son application et son 
assiduité. Pour le caractère et la conduite, il 
est tout ce que ses amis peuvent désirer. En 
effet, je puis dire que je n'ai jamais vu de jeune 
homme de son âge d'une conduite plus irré- 
prochable ni possédant de plus aimables incli- 
nations. >» En 1803, nous le retrouvons au 
collège Saint-Jean, dépendance de l'université 
de Cambridge; ce fut là qu'il obtint, au commen- 
cement de 1806, le grade de maître ès-arts. 
A la mort de son père (1802), Henry Temple 
lui avait succédé dans sa pairie irlandaise et 
était devenu lord Palmerston. 11 était encore à 
l'Université lorsqu'il essaya d'entrer dans la 
carrière publique. Le grand Pitt avait laissé 



LORD PALMERSTON. 5 

vacant le siège de membre du Parlement pour 
l'université de Cambridge. Lord Palmerston eut 
l'ambition de lui succéder, mais il échoua ('). 
Quelques mois après il posait sa candidature à 
Horsham et échouait de nouveau. Ces deux 
échecs toutefois n'influèrent en rien sur son 
avenir. Un diplomate célèbre, lord Malmesbury, 
qui avait été son tuteur, continuait de le diriger, 
et ce fut sur sa recommandation que le duc de 
Portland, nommé premier lord de la tréso- 
rerie en 1807, désigna, le 3 août, Palmerston 
pour remplir les fonctions de junior lord de 
l'amirauté. Deux ans après, le 28 octobre 1809, 
il était nommé secrétaire d'État de la guerre 
{secretary at war), poste qu'il devait occuper 
jusqu'au 28 mai 1828 f). 

(') Lord Palmerston avait obtenu cent vingt-huit voix ; 
lord Althorp, depuis lord Spencer, en obtint cent quarante- 
cinq et lord H. Petty, depuis marquis de Lansdowne, trois 
cent trente et une. 

(*) Il y avait deux secrétaires : l'un présidait aux opéra- 
tions actives, l'autre était chargé de la comptabilité et de 
tous les rapports du département avec la Chambre des 
communes. Ce furent les attributions de lord Palmerston. 
Le commandant en chef, le duc d'York, était chargé de tout 
ce qui tenait au personnel et à la discipline de l'armée. 
Cf. la notice de M. le comte de Jarnac. 









¥V 






LORD PALMERSTON. 



Pendant une période de plus de dix-huit ans, 
lord Palmerston fit donc sans interruption partie 
du gouvernement britannique. Les portes du 
Parlement s'étaient ouvertes pour lui en 1807. 
11 fut d'abord membre de la Chambre des 
communes pour Newtown, bourg de l'île de 
Whigt, puis, deux ans après, il devint le repré- 
sentant de Cambridge. 

Renfermé dans ses fonctions de secrétaire de 
la guerre, n'aspirant à aucune prépondérance, 
laborieux, patient, tenace, Palmerston s'associe 
successivement à la fortune ministérielle du 
duc de Portland, de Perceval, de lord Liver- 
pool, de Canning, de lord Goderich, et enfin du 
duc de Wellington, jusqu'à la retraite des can- 
ningites, c'est-à-dire des anciens adhérents de 
Georges Canning ('). 

Lorsqu'il était premier ministre, Canning 
avait offert à Palmerston les fonctions de chan- 
celier de l'Échiquier, et cette proposition n'avait 



(') Lord Palmerston demanda sa démission par une 
lettre du 25 mai 1828. La démission fut acceptée et le duc 
de Wellington en informa Palmerston, le lendemain, en 
exprimant le regret d'être privé de son assistance. Voir Des- 
patches, Correspondent and memoranda of field marshal 
Arthur duke of Wellington. (Londres, 1874, t. IV, p. 336 
et suiv.) 



LORD PALMERSTON. f 

pas été déclinée ; mais Georges IV refusa son 
acquiescement. Il n'aimait point Palmerston 
dont l'esprit indépendant et caustique l'offus- 
quait sans doute; il aurait voulu l'écarter du 
gouvernement, même l'éloigner de l'Angleterre. 
Palmerston, pressentant le grand rôle qui lui 
était réservé dans son pays, refusa non-seule- 
ment le gouvernement de la Jamaïque, mais 
encore le gouvernement général de l'Inde ('). 

Au lieu d'aller à Calcutta, c'est à Paris qu'il 
se rend, après être sorti du cabinet du duc de 
Wellington. En étudiant l'esprit public des 
Français, Palmerston se prépare comme d'in- 
stinct à son futur rôle de ministre des affaires 

(') M. de Jarnac remarque que la Chambre des com- 
munes ne pouvait que savoir gré à Palmerston d'avoir refusé 
deux fois, pour demeurer dans ses rangs, les grandes fonc- 
tions de gouverneur de l'Inde. Ses compatriotes, ajoute-t-il, 
appréciaient aussi son dévouement sincère à leurs occupa- 
tions et à leurs passe-temps. « Toujours très-répandu dans le 
monde, il ne se refusait à aucun des plaisirs de la fashion, 
dont il étaiti'idole. Sans beaucoup parier lui-même, il ne ces- 
sait d'élever et de faire courir des chevaux, et d'apparaître 
devant le public avec tout le prestige d'un des patrons du 
turf; jeune, excellant dans tous les exercices du corps, il se 
distinguait dans toutes les chasses, dans toutes les branches 
du sport. « 



* 







8 



LORD PALMEKSTON. 



l 



étrangères. On trouve des appréciations émi- 
nemment intéressantes dans le journal qu'il 
tint pendant son séjour dans la capitale de la 
France, et dans les lettres qu'il adressait à son 
frère, sir William Temple, alors secrétaire de 
la légation britannique à Saint-Pétersbourg ('). 

« 10 janvier 1829. 

„ J'arrivai à Paris le 10, et vis M™ de 
Flahault, Pozzo di Borgo et autres ..... Le 
ministère actuel est très-russe; mais il y a chez 
les hommes publics un sentiment français 
qui va croissant; et ce sentiment est dirigé 
avant tout vers le recouvrement des provinces 
situées entre la frontière du Nord et le Rhin, 
c'est-à-dire de la Belgique et d'une partie du 
territoire prussien. Les ultra-libéraux disent 
qu'ils soutiendraient tout ministère décidé à 
recouvrer ce territoire pour la France; et je 
suis informé que Pozzo di Borgo a donné secrè- 
tement l'assurance que si la France, dans le cas 
d'une guerre générale en Europe, veut se ranger 
du côté de la Russie, celle-ci l'assistera pour 
qu'elle obtienne l'objet de ses vœux. Le Journal 






(«) Voir The life of lord Palmerston, t. 1", p. 313 et 
suivant. 



LORD PALMERSTON. 



des Débats, l'autre jour, déniait toute intention 
d'envoyer des troupes à Alger ou en Egypte. 
« La France, disait-il, a en vue des intérêts 
plus immédiats pour lesquels il lui faut réserver 
ses ressources. » Si Chateaubriand et son parti 
entraient au pouvoir, le gouvernement songerait 
probablement à la possibilité d'une extension 
de territoire au Nord aussi bien qu'au Sud ('). 
Pozzo di Borgo, avec lequel j'ai eu un long 
entrelien, dit que l'avènement de Chateaubriand 
serait un grand malheur; que c'est un homme 
auquel de fréquentes variations d'opinion ont 
enlevé toute considération comme politique et 
dont l'extravagance ne laisse pas que d'être 



dangereuse 



23 janvier. 

«... Je dînai hier chez Flahault et j'y ren- 
contrai Sébastiani et Talleyrand. Celui-ci semble 
affaissé et cassé : il parle peu; le premier est un 
personnage plein de suffisance, un fat. 11 a sou- 
tenue haute voix, et dans un style déclamatoire, 

(') On peut lire dans les Mémoires d' outre-tombe, t. IV, 
le mémoire que Chateaubriand, alors ambassadeur à Rome, 
adressa, en 1828, à M. de la Ferronnays et où il recomman- 
dait l'alliance russe , afin de « reprendre les anciens 
départements situés sur la rive gaucho du Rhin. » 



I 



* 



10 



LORD PÀLMERSTON. 



I 



qu'il est d'une extrême importance pour un 
pays d'avoir une grande capitale, parce que 
cela sert à créer une opinion publique et à 
avancer la liberté politique d'un État; que Paris 
n'est pas assez grand . . . Après le dîner, il m'a 
fait l'honneur de me dire, avec franchise, que 
cela fait mille fois pitié de voir en Angleterre 
tous les partis et le gouvernement se méprendre 
si complètement sur le principe qui devrait 
nous guider dans nos relations avec la France. 
11 est indispensable et essentiel à la France de 
reprendre le Rhin pour frontière; Landau et 
Sarrelouislui sont particulièrement nécessaires. 
Aussi longtemps que la politique de l'Angle- 
terre sera opposée à cette réunion, toute entente 
cordiale entre l'Angleterre et la France sera 
impossible; et la France, dont l'intérêt réel 
repose pourtant sur l'union avec l'Angleterre, 
sera amenée à chercher plutôt à s'unir avec la 
Russie et la Prusse, ou avec toute autre puis- 
sance qui l'aidera à réaliser ce plan. La Prusse, 
quoique intéressée à première vue à empêcher 
les reprises de la France, pourrait y acquiescer 
en se laissant allécher par des morceaux arra- 
chés à l'Autriche ou à la Saxe, ou par le Hanovre. 
Je lui ai témoigné que je doutais fort qu'on 
trouvât en Angleterre un parti quelconque suf- 



■ 



LORD PALMERSTON. 



11 



fisamment éclairé pour envisager la question à 
ce point de vue, et que je pensais qu'il serait 
bien difficile de persuader le peuple anglais 
d'approuver pareille combinaison .... J 'étais à 
Paris dans un moment intéressant, quand la 
Ferronnays était malade et qu'on intriguait pour 
son remplacement ('). Pasquier me semblait 
désiré par les ultra-royalistes, Chateaubriand 
par les libéraux et Polignac par le duc de Wel- 
lington . . . Les libéraux, y compris Sébastiani, 
Royer-Collard et de Broglie, tous veulent Cha- 
teaubriand. S'il arrive au pouvoir, il fera un 
éclat; il est violent sur la vieille question des 
frontières et il jettera la France dans les bras 
de n'importe qui voudra aider celle-ci sur les 
bords du Rhin .... » 

Le 1 er juin, lord Palmerston, de retour en 
Angleterre, prononça sur les affaires étrangères 
un discours qui fit sensation : il s'y était révélé 
comme un orateur déjà puissant; en général, 
on le plaçait même au-dessus de Robert Peel. 
S'il n'égala jamais les Fox, les Pitt, les Burke, il 
parvint néanmoins, par un long exercice de la 
parole, par un langage toujours fier et patrio- 



1 



I 



(') Portalis, ministre de la justice, prit la direction inté- 
rimaire du ministère des affaires étrangères. 







H 



12 



LORD PALMEIISTON. 



F 



tique, à exercer une puissante influence sur la 
Chambre des communes. 

Au commencement de décembre, Palmerston 
était de nouveau à Paris. Le prince de Polignac, 
qu'il dépeignait naguère comme le type de 
l'ultraïsme, nommé ministre des affaires étran- 
gères, le 8 août, venait d'être élevé (17 novem- 
bre) à la dignité de président du conseil. Poli- 
gnac poursuivait deux buts : relever l'autorité 
royale par un coup d'État et rétablir ce qu'il 
appelait le prestige de la France par un rema- 
niement de la carte d'Europe qui eût permis 
l'absorption de la Belgique ('). La correspon- 
dance de Palmerston avec son frère contenait 
une vivante peinture de ce ministère qui con- 
duisait la France aux abîmes. Palmerston entre- 
voyait, prédisait une catastrophe prochaine : la 
chute de Charles X. 

En face de grandes difficultés intérieures et 
extérieures, le duc de Wellington, vers la fin 
de septembre 4830, offrit à lord Palmerston 



(') Il s'agissait d'annexer la Belgique à la France, de 
donner la Moldavie et la Valachie à la Russie, la Hollande à 
la Prusse et de placer le roi des Pays-Bas sur le trône d'un 
empire chrétien dans l'Orient. Ce plan était le rêve violent 
d'un cerveau malade. 



LORD PÀLMERSTON. 



13 



de rentrer dans le cabinet. Mais ce dernier, qui 
s'était déjà prononcé pour la réforme électo- 
rale, déclina la proposition qui lui était faite. 
Quelque temps après, le duc de Wellington 
cédait le pouvoir à lord Grey qui, à son tour, 
fit un appel au dévouement de lord Palmerston. 
Celui-ci y répondit sans hésiter, et, le 16 novem- 
bre, il prenait possession du ministère des 
affaires étrangères. 



;t 




II 



Deux jours après que lord Palmerston eut 
pris la direction des affaires étrangères, le 
Congrès national, qui venait de se réunir à 
Bruxelles, proclamait l'indépendance du peuple 
belge et, le 24, il votait l'exclusion de la famille 
d'Orange-Nassau de tout pouvoir dans le nouvel 
État. Ce vote contrariait et devait contrarier 
lord Palmerston. S'il regardait comme défini- 
tive la destruction du royaume des Pays-Bas, 
créé en 1815, s'il admettait l'irrévocable sépa- 
ration des provinces du Midi et du Nord, il eût 
désiré toutefois que le prince d'Orange fût libre- 
ment élu par l'assemblée de Bruxelles comme 
chef des Belges émancipés. Ce vœu, auquel 






- -.3» 




16 



LORD PALMERSTON. 



s'associait lord Grey, ne put être accompli. Au 
surplus, le véritable but du ministère whig 
n'était pas d'imposer à la Belgique l'héritier 
des Nassau, mais bien de favoriser toute com- 
binaison qui aurait pour résultat d'empêcher 
la France d'étendre sa domination depuis Quié- 
vrain jusqu'à Anvers. 

Les sentiments réels de lord Palmerston au 
sujet de la question belge étaient habilement et 
énergiquement exprimés dans une lettre du 
7 janvier 1831, qu'il adressait au vicomte Gran- 
ville, ambassadeur d'Angleterre à Paris. Il y 
retraçait de curieux entretiens avec le prince 
de Talleyrand, qui jouait au sein de la confé- 
rence de Londres le rôle de tentateur. 

« Dans une conversation que j'ai eue il y a 
peu de jours avec Talleyrand au sujet des 
affaires de Belgique, je lui ai fait part d'une idée 
qui m'est venue, comme d'une combinaison de 
nature à aplanir quelques-unes de nos difficul- 
tés. Le roi des Pays-Bas voudrait voir son fils 
porter la couronne de Belgique, et les Belges 
désirent vivement avoir le Luxembourg. Le roi 
ne pourrait-il pas abandonner le Luxembourg 
à son fils, à condition qu'il fût élu roi des Belges? 
et les Belges ne pourraient-ils pas choisir le 
prince d'Orange à condition qu'il apportât le 






LORD PALMERSTON. 17 

Luxembourg avec lui? Talleyrand prit un air 
très-sérieux et me dit qu'il pensait que son 
gouvernement n'aimerait pas à voir le Luxem- 
bourg réuni à la Belgique. Je lui demandai 
pourquoi; cette union avait eu lieu jusque-là, 
et il n'y aurait pas plus d'inconvénient pour la 
France à voir le Luxembourg réuni à la Bel- 
gique seule que réuni à la Belgique et à la 
Hollande ensemble. Il me dit que, en fait, la fron- 
tière française de ce côté était très-faible et 
très-exposée, et que le Luxembourg s'avançait 
dans une partie de la France qui n'est pas bien 
défendue. 11 ajouta : N'y aurait-il pas moyen de 
faire une combinaison par laquelle le Luxem- 
bourg pourrait être abandonné à la France? Je 
fus, je l'avoue, extrêmement surpris d'une pro- 
position si en désaccord avec le langage et les 
déclarations que lui et son gouvernement 
avaient tenus jusque-là. Je lui répondis que 
semblable combinaison me semblait impossible 
et que personne n'y consentirait. J'ajoutai que 
l'Angleterre n'avait pas de vues intéressées 
dans l'arrangement des affaires de Belgique, 
mais que nous voulions que ce pays fût réelle- 
ment et solidement indépendant; que nous 
désirions vivre en bons termes avec la France, 
mais que toute acquisition territoriale de la 

2 



I 
I 



- 










18 



LORD PALMERSTON. 



part de la France, semblable à celle qu'il indi- 
quait, altérerait les relations des deux pays et 
nous rendrait impossible de continuer à vivre 
en bons termes avec elle. Je découvris depuis 
cette conversation qu'il avait fait à la Prusse 
des propositions analogues au sujet des pro- 
vinces rhénanes, dans le cas où il serait possible 
de transférer le roi de Saxe sur le trône de 
Belgique et de donner la Saxe à la Prusse. 
Aujourd'hui il m'a proposé de remettre à la 
France Philippeville et Marienbourg, en consi- 
dération de l'influence qu'elle exercerait en 
faveur de l'élection du prince Léopold. Je n'aime 
point tout cela. 11 semble que la France soit 
invariable dans son système d'empiétement, et 
cela diminue la confiance dans sa sincérité et sa 
bonne foi. Bien que nous désirions vivre avec 
la France dans la meilleure intelligence et dans 
les termes de la plus cordiale amitié, ce ne 
peut être que tant qu'elle se contentera de pos- 
séder le plus beau territoire de l'Europe, et ne 
cherchera pas à ouvrir une nouvelle série d'em- 
piétements et de conquêtes. Il sera utile que 
vous insistiez là-dessus toutes les fois que vous 
en trouverez l'occasion. » 

Ce n'est point lord Palmerston qui le premier 
avait mis en avant le nom du prince Léopold 






LORD PALMEESTON. 



19 



de Saxe-Cobourg. La candidature du gendre de 
George IV était née au sein du comité diplo- 
matique de Bruxelles. Lorsque M. Van de Weyer 
l'indiqua à lord Palmerston, au mois de décem- 
bre 1830, ce dernier écrivit à lord Ponsonby, 
commissaire de la conférence à Bruxelles, qu'il 
doutait de l'acquiescement du prince, et que sa 
qualité de protestant pouvait être d'ailleurs un 
obstacle. Mais quelques jours après (20 décem- 
bre), il se montrait plus confiant : « J'incline à 
croire, disait-il à Ponsonby, que, après tout, le 
meilleur choix serait Léopold marié à une prin- 
cesse française, et je soupçonne que ce sera le 
dénoûment. . . . Mais il convient que vous n'in- 
diquiez aucune préférence de la part de l'Angle- 
terre, pour n'importe quelle combinaison; faites 
seulement entendre que nous nous opposerons 
à tous les plans qui auraient un aspect ou trop 
français ou bonapartiste. » C'était indiquer l'ex- 
clusion simultanée du duc de Nemours et 
d'Auguste de Beauharnais,ducde Leuchtenberg. 
Talleyrand, cependant, persistait dans ses 
vues d'agrandissement. Saisissant le moment 
où la conférence délibérait sur le protocole qui 
fixait les limites de la Belgique ('), il avait insisté 



(') Le protocole du 20 janvier 1831 . 



■ 



- y 



I *ta 




20 



LORD PALMERSTON. 



avec la plus grande vivacité pour que la neu- 
tralité du nouvel État fût étendue au grand 
duché de Luxembourg, ou sinon pour que la 
France obtînt Philippeville et Marienbourg. 
« Nous n'avons pas le pouvoir, lui répondit 
Palmerston, de céder ce qui appartient à la 
Belgique et non à nous, et puis nous ne pou- 
vons pas, sous prétexte de régler le différend 
entre la Hollande et la Belgique, nous mettre 
à dépouiller une des parties en cause, et cela au 
prolit d'un des médiateurs. Si la France entre 
dans cette voie, les autres puissances pourront 
avoir le droit de suivre son exemple. » Talley- 
rand céda ou feignit de céder. « S'il se plaint, 
écrivit Palmerston à lord Granville, que notre 
confiance en lui semble diminuée, vous pouvez 
dire que cela provient naturellement de ce que 
nous avons constaté qu'il voulait obtenir pour la 
France des acquisitions territoriales, au moment 
même où la France proclame la non-interven- 
tion et la paix .... » 

Déjà, le 4 janvier 1831, lord Palmerston, dans 
une entrevue avec M. Van de Weyer ('), avait 
déclaré que jamais les alliés ne reconnaîtraient 



Lv 



(M Voir Les Fondateurs de la monarchie belge. S. Van 
de Weyer, t. 1", p. 130. 






■ 



LORD PALMBRSTON. 



21 



le duc de Nemours, s'il était élu roi des Belges- 
L'Angleterre engagerait la France à refuser son 
consentement, et, si elle prenait un autre parti, 
une guerre avec le reste de l'Europe pourrait 
s'ensuivre. Mais le cabinet du Palais-Royal parut 
se soumettre à cette interdiction. M. de Sébas- 
tiani, ministre des affaires étrangères, réitéra 
même la déclaration que le gouvernement de 
Louis-Philippe refuserait, le cas échéant, la 
réunion de la Belgique à la France et n'accep- 
terait pas davantage la couronne des Belges, si 
elle était offerte au duc de Nemours. Le gou- 
vernement français, à défaut de celui-ci, mettait 
en avant le prince Charles de Capoue, neveu de 
la reine Marie-Amélie. Quant aux Belges, ils 
repoussaieut le candidat napolitain : les uns 
soutenaient le duc de Leuchtenberg, les autres 
se ralliaient au duc de Nemours, tandis que le 
parti orangiste, comptant sur l'appui de lord 
Ponsonby, ne désespérait pas encore de voir 
triompher le descendant des Nassau. Mais Pal- 
merston écrivit à lord Ponsonby (22 jan- 
vier 1831) : « Nous ne voulons pas que vous 
preniez une part active et ouverte dans les 
mesures pour le soutenir. Bornez-vous à expri- 
mer notre préférence pour lui et notre désir de 
le voir élu, mais quant à opprimer le gouver- 



I 



JBL 



- .^ 



22 



LORD PALMERSTON. 



nement et commencer la guerre civile, ni vous 
ni nous ne pouvons être parties dans de pareilles 
tentatives, ni directement ni indirectement. 
Nous ne pourrions pas le faire si nous voulons 
rester conséquents avec nos principes et loyaux 
à l'égard de nos alliés. » 

Circonvenue par les intrigues du Palais-Royal, 
lequel redoutait par-dessus tout l'avènement 
d'un prince allié aux Bonaparte, la majorité du 
Congrès finit par porter ses suffrages sur le 
duc de Nemours. 11 fut élu le 3 février. 

Mais lord Palmerston veillait, bien résolu à 
déjouer les intrigues françaises. Le 1 er février, 
Talleyrand était venu le pressentir sur l'élection 
éventuelle du duc de Nemours : il répondit qu'il 
la regarderait comme l'union de la Belgique à 
la France et que celle-ci aurait dès lors à consi- 
dérer toutes les conséquences auxquelles l'ex- 
poserait nécessairement une telle violation de 
ses engagements. Il ajouta : « Les trois autres 
puissances (l'Autriche, la Prusse et la Russie) 
sont unanimes sur la question, et je dois vous 
déclarer que si le choix tombe sur Nemours et 
si le roi des Français accepte, ce sera la preuve 
que la politique de la France ressemble à ces 
miasmes qui adhèrent aux murs et qui exercent 
leur pernicieuse influence sur tous les occu- 






vm 



LORD PALMERSTON. 23 

pants. » En outre, le gouvernement français 
fut informé par le comte de Flahault, chargé 
d'une mission extraordinaire à Londres, que le 
cabinet de Saint-James ne reculerait pas devant 
la guerre pour s'opposer à l'élévation du duc 
de Nemours au trône de Belgique. 

Cette ferme déclaration amena un change- 
ment complet dans les résolutions et l'attitude 
du gouvernement de Louis-Philippe. Il faut 
entendre lord Granville raconter ce coup de 
théâtre à Palmerston : « . . . Jamais changement 
de ton, d'humeur et de langage n'a été si subit 
que celui de Sébastiani aujourd'hui (4 février). 
A une heure, il était ardent, belliqueux, monté 
sur son plus grand cheval; à cinq heures et 
demie, il vient chez moi pour m'apporter la 
communication télégraphique de l'élection du 
duc de Nemours, et d'un ton fort soumis, mais 
très-amical, il m'assure du refus positif du 
roi 11 a exprimé le dessein d'agir sincère- 
ment avec les autres puissances de la confé- 
rence ; mais ce qu'il a exprimé avec le plus 
d'insistance, c'est son désir d'une confiance 
illimitée entre nous. Dites à lord Palmerston 
(ce sont ses paroles) que nous ne lui cacherons 
aucune de nos pensées et que je compte qu'il 
se comportera avec la même franchise à notre 



1 



^^ 



LORD PALMERSTON. 



égard. » Palmerston ne dissimula point sa satis- 
faction; il fit dire à Paris : « Tant que la France 
se tiendra tranquille et ne fera pas revivre le 
système bonapartiste d'agression et d'agrandis- 
sement, il sera dans les vœux et dans l'intérêt 
de l'Angleterre d'entretenir avec elle l'amitié et 
l'alliance la plus étroite. » 

Non-seulement lord Palmerston avait rendu 
inefficace l'élection du duc de Nemours, mais il 
ne voulait même pas admettre la candidature 
de Charles de Capoue si celle-ci devait masquer 
l'échec subi par le fds puîné de Louis-Philippe. 
Le 15 février, il se plaignait avec amertume des 
procédés du gouvernement de juillet. « J'ai 
convoqué le cabinet, mandait-il à Granville, 
pour prendre en considération une communi- 
cation officielle à faire au gouvernement fran- 
çais au sujet de ses armements menaçants. 
J'aime de moins en moins sa manière d'agir. Les 
assurances de paix et d'amitié des Français 
sont incessantes et uniformes, mais ils se pré- 
parent à la guerre quand personne ne les 
menace, et chaque jour dévoile de plus en plus 
leurs desseins sur la Belgique et leurs intrigues 
au sujet de ce pays. Chaque jour trahit en eux 
une disposition évidente à susciter une querelle 
et à nous traiter d'une façon que nous ne pou- 



LORD PALMEUSTON. 



25 



vons supporter. Ayez soin, dans toutes vos 
conversations, de faire comprendre au général 
Sébastiani que notre désir de conserver la paix 
n'ira jamais jusqu'à supporter un affront, qu'il 
se traduise par des paroles ou par des actes. 
S'ils sont droits dans leurs intentions, pourquoi 
ne peuvent-ils pas l'être dans leurs procédés? 
Pourquoi ces intrigues et ces menées sans fin, 
pourquoi ces changements de plan tendant 
tous vers le même but, l'établissement en Bel- 
gique de cette influence à laquelle ils ont renoncé 
dans le protocole du 20 janvier? Si le prince 
napolitain est élu librement par la Belgique et 
de son propre consentement, c'est bien; mais 
s'il doit être placé là par une intrigue française 
et si, en étant déjà le neveu de Louis-Philippe, 
il doit encore devenir son gendre, il n'y aura 
guère de différence entre cette combinaison et 
celle du duc de Nemours. » 

Le 17 février, c'est-à-dire le jour même où 
Louis-Philippe refusait officiellement la cou- 
ronne de Belgique pour le duc de Nemours, lord 
Palmerston envoyait une nouvelle lettre à Gran- 
ville par l'intermédiaire même de l'ambassade 
française, pour qu'elle y fût décachetée et lue. On 
y trouvait de dures vérités : « . . . J'ai personnel- 
lement une grande considération pour Sébas- 






26 



LOKD PALMEESTON. 



tiani, et je crois qu'il a des dispositions amicales 
pour l'Angleterre; mais quelle confiance peut-on 
avoir dans un gouvernement qui se jette dans de 
misérables intrigues comme celles que le cabi- 
net français poursuit à l'égard de la Belgique ; 
disant une chose ici et la désavouant ailleurs; 
promettant l'acceptation (du duc de Nemours) 
par Bresson et la refusant par Talleyrand; 
changeant ses opinions, ses déclarations et ses 
principes chaque fois qu'il entrevoit l'apparence 
d'un avantage temporaire? » Le chef du Foreign- 
Office disait quelques jours après : « Aussi long- 
temps que la France se maintiendra réellement 
et bona fide dans ses limites, elle n'aura pas 
besoin de souhaiter d'avoir des amis plus fidèles 
et plus chauds que ceux qu'elle a actuellement 
dans Downingstreet. » Mais, le 9 mars, Palmer- 
ston manifeste de nouveau sa grande et légitime 
méfiance. « Je souhaite, écrit-il à lord Granville, 
que le gouvernement français veuille se résoudre 
à agir de bonne foi à l'égard de la Belgique : 
nous aurions alors terminé cette affaire en trois 
semaines; mais les hommes au pouvoir ne peu- 
vent se déterminer à se montrer honnêtes avec 
fermeté ou à jouer avec assurance le rôle de 
fourbes . . . J'ai découvert par Talleyrand que 
leur protestation à l'égard de Bouillon cache la 



LORD PALMERSTON. 



27 



secrète intention de s'en emparer pour eux- 
mêmes ('). Cela nous dégoûte vraiment de voir 
le gouvernement d'un grand pays, dans une 
grande crise politique, quand de si grands inté- 
rêts sont en jeu, tâcher d'attraper quelque chose 
et intriguer pour d'aussi pitoyables objets que 
le château en ruines de Bouillon et le petit 
territoire qui l'environne ( 2 ). » 

En résumé, lord Palmerston avait contre- 
carré et ruiné les projets annexionistes du 
cabinet présidé par Laffitte. Lorsque Casimir 
Périer prit le pouvoir (13 mars), le ministre 
anglais se réjouit de son avènement, parce qu'il 
se persuadait que le cabinet du Palais- Royal 
allait maintenant renoncer à des desseins à la 
fois perfides, turbulents et dangereux pour la 
paix du monde. Il écrit à Granville (15 mars) : 
« Nous sommes contents de l'avènement de 
Casimir Périer et nous espérons que c'est le 
moyen de procurer la paix à la France et hors 
delà France. Je vous prie de le cultiver, et faites- 

(') C'est ce que Talleyrand, comme l'écrivait Palmerston 
à Ponsonby, laissa échapper dans une conversation qui eut 
lieu le 9 mars. 

(*) C'est là , disait Palmerston à Ponsonby, une étrange 
besogne et qui ôte toute confiance dans ceux qu l'entre- 
prennent. 









28 



LORD PALMERSTON. 



lui comprendre que le gouvernement anglais 
place une grande confiance en lui et considère 
son élévation comme la meilleure garantie pour 
la paix. Peut-être est-il bon d'avoir Sébastiani, 
lui aussi bien qu'un autre et, vraisemblable- 
ment, avec Périer, il naviguera plus droit qu'il 
n'a fait jusqu'à présent. Talleyrand m'a dit 
aujourd'hui : Quand vous écrivez à lord Gran- 
ville, dites-lui, je vous prie, de ne pas traiter la 
question belge comme une grande chose; en 
maintenant que ce n'est qu'une petite chose, elle 
pourra bientôt et facilement s'arranger. Cela 
peut être très-bon à dire pour la France, mais 
nous, nous ne pourrons jamais envisager la ques- 
tion belge comme une bagatelle; au contraire, 
c'est une question de la plus grande importance 
pour l'Angleterre. Périer doit comprendre que 
la France ne peut avoir la Belgique sans une 
guerre avec les quatre puissances, et qu'elle 
puisse l'obtenir par une guerre avec les quatre 
puissances, c'est une autre affaire. » Le 18 mars, 
il insiste encore sur la nécessité de s'entendre 
avec Casimir Périer au sujet de la Belgique: 
mais il faut que le nouveau président du conseil 
suive la ligne droite, agisse d'accord avec les 
quatre puissances et ne prête pas les mains aux 
mesquines intrigues du Palais-Royal. « Jamais 



LORD PALMERSTON. 



29 



l'Europe, poursuil-il, ne consentira, à moins d'y 
être forcée par une guerre désastreuse, à l'union 
directe ou indirecte de la Belgique à la France. 
La majeure partie de nos difficultés provient de 
la duplicité diplomatique, de la duplicité de 
conduite, de l'indécision et du défaut de prin- 
cipes du gouvernement français. Que la faute en 
retombe sur Sébastiani, sur Soult, sur Laffitte, 
ou sur le roi, ou sur ses conseillers secrets, 
mâles et femelles, je n'en sais rien ...» 

Lord Palmerston ne se bornait point à éclairer 
le Palais-Royal sur les dispositions immuables 
de l'Angleterre, il faisait aussi donner, par l'in- 
termédiaire de lord Ponsonby, de sages con- 
seils au régent de la Belgique. Se méfiant des 
tendances trop françaises de Surlet de Chokier, 
il voulut lui montrer ce que la Belgique pouvait 
attendre de la France, et ce qu'elle devait 
espérer de l'Angleterre. 11 chargea lord Pon- 
sonby de faire connaître au gouvernement du 
régent que les dispositions de l'Angleterre à 
l'égard de la Belgique étaient aussi amicales que 
celles de la France, avec cette différence que 
l'intérêt de l'Angleterre est que la Belgique 
demeure indépendante, et conséquemment 
prospère, tandis que la France voudrait que la 
Belgique tombât en son pouvoir, et conséquem- 



- t .y 



30 



LORD PALMERSTON. 



ment qu'elle se dégoûtât de son indépendance. 
Les intérêts de l'Angleterre exigeaient donc que 
la Belgique ne fût ni unie à la France ni placée 
sous sa dépendance; les intérêts de la Russie, 
de la Prusse et de l'Autriche étaient les mêmes 
à cet égard, et il y avait une détermination 
commune de la part de ces quatre puissances, 
pour ne permettre ni une pareille union ni une 
pareille dépendance. Si la France avançait un 
doigt pour opprimer la Belgique, ce serait une 
guerregénérale. LordPalmerston ne dissimulait 
pas qu'une réconciliation entre la Belgique et la 
Hollande sourirait le plus au cabinet de Saint- 
James, parce que, nonobstant leurs querelles et 
la différence de langage, de religion et d'habi- 
tudes, leurs intérêts commerciaux et essentiels 
avaient une connexion naturelle. C'est pourquoi, 
ajoutait-il, quelque agréable que puisse nous 
être, à ce que l'on suppose, l'élection du prince 
Léopold, nous préférerions réellement un arran- 
gement qui tendrait à unir la Belgique à la 
Hollande. « Mais si ce projet ne peut être réa- 
lisé, le gouvernement britannique préférera le 
choix du prince Léopold à tout autre arrange- 
ment, parce que ce prince, non pas à cause de 
son alliance avec la maison royale d'Angleterre, 
mais à cause de son caractère personnel et de 



LORD PALMERSTON. 



31 



sa capacité, est le plus propre à rendre la 
Belgique heureuse et prospère ('). » 

Après que l'Autriche eut comprimé le mou- 
vement révolutionnaire de l'Italie, le gouverne- 
ment français, craignant chez lui l'opposition 
du parti belliqueux, aurait voulu lui offrir un 
dédommagement. 11 le cherche encore une fois 
en Belgique, et de nouvelles instances sont 
faites pour obtenir Bouillon. On faisait même 
entendre que Louis-Philippe, sous le coup d'un 
échec, pourrait être débordé et entraîné malgré 
lui dans une guerre. L'ardeur belliqueuse des 
Français était du reste parvenue à un haut 
degré depuis que le général Skrzynecki avait, à 
la fin de mars, remporté une victoire sur les 
Busses. Dans ces conjonctures, le maréchal 
Soult, à l'insu toutefois de Casimir Périer, fit 
proposer de remettre Anvers et Ostende à l'An- 
gleterre, si celle-ci voulait se détacher des 
autres puissances et permettre à la France de 
s'emparer de la Belgique. Bepoussant dédaigneu- 

Voir Sylvain Van de Weyer, t. 1", p. 157. La longue 
et très-intéressante lettre de lord Palmerston portait la date 
du 16 mars. Dans une autre, datée de Brighton, le 8 avril, 
il chargeait lord Ponsonby de donner à M. Lebeau des indica- 
tions analogues sur la sincérité de l'appui assuré à la Belgique 
par l'Angleterre. 






32 



LORD PALMERSTON. 



sèment cette insinuation, Palmerston écrit le 
13 avril à lord Granville : « Les Français nous 
tiennent continuellement ce langage : Consi- 
dérez seulement les difficultés qui nous entou- 
rent et combien nous sommes pressés par les 
circonstances ; consentez donc à faire quelque 
petite chose injuste, déraisonnable, déshonnêle, 
contraire aux traités et aux principes, pour qu'il 
soit dit que nous l'avons emporté au moins sur 
un point. Je leur réponds : Choisissez un point 
qui s'accorde avec les traités, avec les engage- 
ments, avec la justice, et probablement vous 
pourrez le gagner. Nous vous donnerons tout 
l'appui <jue nous pouvons honnêtement vous don- 
ner, mais ce que vous demandez est impossible. 
Pourquoi vous aiderions-nous à vous maintenir, 
si ce n'est afin que vous puissiez tenir vos enga- 
gements? Mais si l'aide que nous vous donnons 
ne sert qu'à vous faire violer vos engagements, 
nous sacrifions la fin pour les moyens... » 

Cette leçon était en quelque sorte le commen- 
taire des paroles suivantes que l'on trouve dans 
la correspondance de Palmerston : « l'Angleterre 
ne cédera à la France ni un potager ni une 
vigne ('). » 



(') Dans sa notice sur lord Palmerston, M. le comte de 



1 



LORD FALMERSTON. 



33 



Le 18 avril, lord Palmerston charge le vicomte 
Granville de communiquer conOdentiellement 
à Casimir Périer le protocole de la veille dans 
lequel les représentants des puissances, à l'ex- 
clusion du plénipotentiaire français, ont décidé 
que, par suite de la neutralité reconnue de la 
Belgique, il y avait lieu de raser plusieurs des 
forteresses de ce pays. « Il ne peut être ques- 
tion, disait Palmerston, d'accueillir la prétention 
que la France élèverait d'intervenir dans la 
discussion de savoir quelles forteresses il faut 
démanteler et quelles conserver. Ces forteresses 
ont été érigées avec l'argent des alliés, argent 
qu'ils auraient pu dépenser d'une autre manière 
s'ils l'avaient jugé bon, quoiqu'il provînt en 



1 



Jarnac reproche au ministre anglais d'avoir poussé parfois 
jusqu'à l'aberration la méfiance et la susceptibilité. « On 
croit rêver, dit-il, quand on voit le roi Louis-Philippe et ses 
principaux ministres de cette époque accusés chaque jour 
de vouloir, par leur ambition effrénée ou leurs menées sou- 
terraines, mettre en péril la paix européenne. . . » Mais, pour 
justifier la méfiance de lord Palmerston, il suffit de feuilleter 
l'ouvrage de sir H. Bulwer dont M. de Jarnac signale lui- 
même l'importance et l'extrême intérêt. Quoi qu'en disent 
certains publicistes français, les lettres de Palmerston, 
exhumées par sir H. Bulwer, ont fait partout une profonde 
et durable impression. 



1 






T 




34 



LOK.D îALMEltSTON. 



partie des contributions imposées à la France. 
Celle-ci n'a pas été consultée pour leur construc- 
tion, et cela pour la meilleure de toutes les 
raisons possibles, c'est qu'elles étaient destinées 
à servir de barrière contre toute attaque venant 
d'elle. » Il ajoutait : « Ce serait un procédé 
étrange et bizarre que d'inviter l'envahisseur 
présumé à assister aux délibérations sur les 
meilleurs moyens de pourvoir à une défense 
contre son agression. Pour la même raison que 
ces forteresses ont été érigées, non pas, comme 
le dit Talleyrand, en haine de la France, mais 
bien par crainte de la France, il serait ridicule 
de discuter avec elle quelles sont les forte- 
resses à démanteler. Les véritables motifs qui 
doivent déterminer le choix sont un sujet qui 
ne peut être traité en la présence d'un ministre 
français sans l'offenser, ou sans hasarder le 
résultat de la délibération. Comment, par 
exemple, la France pourrait-elle concourir sin- 
cèrenent avec les autres puissances au déman- 
tèlement des forteresses qui peuvent arrêter son 
armée, mais qui pourraient aussi tomber les 
premières en son pouvoir en cas de guerre?... Il 
y a ici une inconséquence flagrante... Si Casimir 
Périer venait à prétendre qu'il faut les déman- 
teler toutes, vous pourriez lui faire comprendre, 



LORD PALMERSTON. 



35 



en termes polis et amicaux, ce que je viens d'ex- 
poser; ajoutez, en outre, que le principe d'après 
lequel on envisagera ces forteresses ne sera pas 
et ne peut pas être queja Belgique soit privée 
de toute défense, ni que la Hollande et la Prusse 
restent conséquemment ouvertes à la France; 
mais qu'on veut réduire le nombre de ces places 
de telle sorte qu'elles soient en rapport avec les 
moyens de défense présumés de la Belgique, 
secourue, au besoin, par les autres puissances 
européennes. Je ne vois aucun inconvénient à 
faire entrer cette idée, d'une façon claire et pré- 
cise, dans la tète de Périer; comme c'est là un 
principe dont nous ne pouvons nous départir, 
plus tôt et plus clairement les Français le com- 
prendront, mieux cela vaudra. » 

Le cabinet du Palais-Boyal persista dans une 
politique que l'on pourrait appeler sentimen- 
tale, à défaut d'une autre expression : n'osant 
aller jusqu'à la menace, il soutint néanmoins que 
la nation française supporterait impatiemment 
un gouvernement qui paraîtrait n'exercer au- 
cune influence dans les conseils de l'Europe. 
« ... Qu'entend-il par influence dans les conseils 
des autres nations? » répond Palmerston ('). « Si 



(') Palmerston à Granville, 22 avril 1831. 






S6 LORD PALMERSTON. 

c'est le pouvoir d'amener ces nations à coopérer 
ou à se soumettre aux idées françaises d'empié- 
tement et d'agrandissement, c'est le vieux pied 
fourchu qui reparaît sous un nouveau déguise- 
ment, c'est le même détestable esprit d'agression 
qui renaît sous une forme différente. Ce que la 
France désire obtenir ou voir réalisé est ou 
juste ou non, est bon ou mauvais. Si c'est juste 
et bien, c'est un motif pour que cela se fasse ; si 
c'est injuste et mal, c'est un motif pour que cela 
ne se fasse pas; et je ne pourrai jamais admettre 
qu'il soit sage de céder aux injustes prétentions 
de la France, pour permettre au gouvernement, 
qu'il se nomme Périer ou Sébastiani, de gagner 
l'appui d'un parti violent ou même du parti 
modéré enclin aux empiétements. Aucun avan- 
tage ne peut résulter de semblables conces- 
sions. Elles ne feraient qu'exciter l'appétit, au 
lieu de le satisfaire. Nous trahirions notre fai- 
blesse, et nous encouragerions de nouvelles 
exigences. » Ulcéré contre les traditions de l'em- 
pire français, Palmerston poursuivait avec 
véhémence : « Périer est honnête, mais la nature 
humaine est ainsi faite qu'il peut être parfois 
entraîné par la malhonnêteté de Sébastiani ('), 



(') Sir H. Bulwer fait remarquer que Palmerston enten- 



4 



LORD PALMEKSTON. 



37 



et je crains d'être obligé d'ajouter par le manque 
de principes arrêtés chez le Roi. Faites-lui com- 
prendre combien il est déraisonnable de la part 
d'un gouvernement de demander à d'autres 
gouvernements de sacrifier des principes et des 
intérêts permanents et généraux, pour plaire, 
non pas même à des ministres français, mais 
aux partis violents dont ils ont peur. » 

Des commissaires du régent de la Belgique 
étant venus, sur ces entrefaites, pressentir les 
dispositions du prince Léopold, pour le cas où 
le Congrès national l'appellerait au trône, Pal- 
merston approuva sans restriction la conduite 
prudente et droite du gendre de George IV. 11 
l'approuva de ne vouloir prendre aucune réso- 
lution avant que l'assemblée de Bruxelles eût 
adhéré à l'acte de séparation imposé parla con- 
férence de Londres aux deux peuples qui for- 
maient naguère le royaumes des Pays-Bas. 
« Léopold, a raison, écrivit-il ('), de ne pas 
accepter ce qu'on lui offre, tant qu'il ne sait pas 
en quoi cela consiste... La conférence ne peut pas 
revenir sur ce qu'elle a déclaré quant aux limites 
de la Hollande, bien que le Luxembourg puisse 

dait que les vues d'agrandissement de Sébastiani, dérivant 
de son ancien maître Napoléon I er , étaient déshonnétes. 
(') 13 mai. 



] 



1 









CJ> 



■■■■■■■■ 



38 



LOKD PALMERSTON. 



devenir l'objet de négociations ultérieures. » Il 
venait d'avoir sur ce sujet avec un des ministres 
belges un entretien où il s'était exprimé avec 
sa franchise et sa vivacité habituelles. Aux objec- 
tions développées par M. Devaux ('), il avait 
répondu : « Vous dites que vous ne pouvez pas 
accéder à nos bases de séparation, parce que, 
en le faisant, vous abandonneriez Maestricht, 
que vous avez déclaré faire partie de votre 
territoire. Je réponds que, jusqu'à présent, vous 
n'avez pas de territoire en vertu d'aucun droit, 
si ce n'est celui de la conquête et de l'occupa- 
tion militaire; or, ce dernier droit est imparfait, 
s'il n'est confirmé par la cession formelle du 
souverain à qui le pays ainsi conquis et occupé 
appartenait antérieurement. Vous avez conquis 
votre propre pays, la Belgique, et vous en avez 
expulsé les troupes du roi de Hollande; c'est 
votre pays de fait, et il deviendra vôtre de jure, 
du jour où le roi de Hollande conclura un traité 
et cédera son droit de souveraineté. Mais Maes- 
tricht est encore dans ses mains, et cette place, 
par conséquent, n'est vôtre ni de fait ni de 



(') M. P. Devaux, chargé d'une mission spéciale à 
Londres, faisait partie, comme ministre d'État, sans porte- 
feuille, du deuxième cabinet du Régent. 



LORD PALMERSTON. 



39 



jure; et il est tout aussi absurde de dire qu'elle 
est devenue votre propriété uniquement parce 
que le Congrès l'a décrété ainsi qu'il le serait de 
déclarer les Belges possesseurs et propriétaires 
d'Aix-la-Chapelle ou de Lille par des motifs 
analogues. » 

En ces circonstances, Casimir Périer fit un 
pas de plus vers l'Angleterre; il dit à lord Gran- 
ville qu'il voulait établir une sincère entente 
avec le cabinet de Saint-James. Palmerston 
répondit (') que, de même que ses collègues, il 
sentait vivement combien une bonne et cordiale 
entente entre l'Angleterre et la France devait 
contribuer à assurer la paix du monde, à con- 
firmer les libertés et à avancer le bonheur des 
nations; mais qu'une amitié véritable ne pou- 
vait exister sans une parfaite confiance des deux 
côtés. Chacune des parties devait être convain- 
cue, ajoutait-il, que l'autre n'avait pas de vues 
secrètes, pas de projets égoïstes à poursuivre, le 
soupçon et la défiance étant choses fatales pour 
la confiance et l'amitié. Palmerston jetait ensuite 
un coup d'œil rétrospectif sur ses rapports avec 
le gouvernement français depuis qu'il était entré 
dans le ministère de lord Grey. 11 déclarait que, 

(') 31 mai. 



=1 






40 



LORD l'ALMERSTON. 



m 

Ht 



d'accord en cela avec tous ses collègues, il avait 
le plus vif désir de vivre en bonne intelligence 
avec la France; l'Angleterre n'avait pas de vues 
égoïstes, de projets menaçants pour les droits 
des autres nations ou de nature à exciter leur 
jalousie. On avait supposé que la France était 
dans les mêmes dispositions; que, conformé- 
ment à ses déclarations réitérées, elle était guérie 
de la maladie des conquêtes ; que, jouissant d'in- 
stitutions libres, elle voulait respecter l'indépen- 
dance de ses voisins. Mais bientôt se firent jour 
des symptômes de dispositions toutes diffé- 
rentes : l'esprit d'agression et la soif d'agrandis- 
sement se trahirent de nouveau; des intrigues, 
une diplomatie double prouvèrent que ceux qui 
recherchaient l'alliance anglaise songeaient à 
l'exploiter au profit de leur ambition. « Prenant 
pour modèle le chef de la vieille école, Bonaparte, 
on voulait, disait Palmerston, nous éloigner de 
ceux qu'on projetait d'attaquer et se servir de 
nous comme d'un outil pour nous traiter après 
selon les circonstances. » Ainsi naquirent des 
sentiments de méfiance qui s'accrurent jusqu'à 
la lin de l'administration de Laffitte et qui firent 
penser à l'Angleterre que, dans son intérêt et 
dans celui de l'Europe, mieux valait se rappro- 
cher des trois autres grandes puissances. Mais, 



^^B 



LORD FALMERSTON. 



41 



disait encore le chef de Foreign-Office, la con- 
fiance est revenue avec Casimir Périer, et si le 
vieil esprit reparaît parfois chez ceux qui tra- 
vaillent sous ses ordres, lui, comme premier 
ministre, saura sans doute y mettre bon ordre. 
Grâce à lenergie de lord Palmerston , les 
obstacles qui s'opposaient à l'acceptation du 
trône de Belgique par le prince Léopold dispa- 
rurent successivement. Le chef du Foreign- 
Office sut déjouer les ruses de Talleyrand aussi 
bien que les projets belliqueux du maréchal 
Soult; il inspira au Congrès de Bruxelles une 
sage modération ; il fut sinon l'auteur, au moins 
l'actif patron du fameux traité des dix-huit 
articles, véritable transaction entre l'Europe 
d'une part, les Belges et le prince Léopold de 

l'autre. 

Le 4 juin, Léopold avait été appelé au trône; 
le 9 juillet, le Congrès adoptait les dix-huit 
articles malgré le parti français, et le 21 le pre- 
mier roi des Belges prêtait à Bruxelles le ser- 
ment constitutionnel. 

Le cabinet du Palais-Royal n'avait accepté la 
candidature du prince de Saxe-Cobourg que 
pour détruire les dernières espérances du prince 
d'Orange. Mais cette = çandidature n'avait été 
soutenue à ParK^S^ '^^empressement, ni 




1 






42 



LORD PALMERSTON. 






avec chaleur ('). Le général Pellet traduisait les 
vrais sentiments de la majorité de ses compa- 
triotes, et même, pourrait-on affirmer, d'une 
partie du conseil, lorsque, pour encourager en 
Belgique l'opposition aux dix-huit articles, il 
écrivait à un ami qui habitait Lille : « Si les 
Belges amis de la France veulent faire un pas 
vers elle, nous avancerons de trois pas à leur 
rencontre, la baïonnette au bout du fusil. » 
Après l'intronisation de Léopold, lord Granville 
ayant dit à Sébastiani que le nouveau souverain 
n'avait pas été un candidat spécialement anglais, 
Parmerston l'approuva pleinement. « C'est par- 
faitement vrai, lui écrivit-il; l'idée de cette 
candidature vient des Belges et non pas de 
nous. » Le parti belliqueux et annexioniste con- 
tinua néanmoins ses attaques contre l'élu de la 
nation belge : il ne voulait voir en lui qu'un 



( J ) Dans son Estai tur Talleyrand, sir H. Bulwer avait 
déjà dit : "... 11 est inutile de taire le fait qu'il y a toujours 
eu, qu'il y a, et qu'il y aura toujours en France un parti 
considérable désireux d'étendre la frontière française, et de 
comprendre Anvers dans le royaume de France. Mais 
l'Angleterre n'était pas disposée alors, et ne le sera jamais 
probablement, tant qu'elle aura à sa tête des hommes d'État 
se souciant de sa prospérité , à accepter cet arrange- 
ment.... " 







. 






LORD PALMERSTON. 



43 



• 



préfet anglais à Bruxelles. De son côté, le gou- 
vernement de Louis-Philippe, dissimulant ses 
vrais sentiments, feignit de considérer l'avéne- 
ment de Léopold i er comme un triomphe dû 
exclusivement à la France. Dans son discours 
d'ouverture des Chambres françaises, Louis- 
Philippe déclara que son gouvernement avait 
été le premier appui de. l'indépendance belge. 
Il disait davantage : « L'Europe est aujourd'hui 
« convaincue de la loyauté de nos intentions et 
« de la sincérité de nos vœux pour le maintien 
« de la paix, mais elle l'est aussi de notre force, 
« et elle sait comment nous soutiendrions la 
« guerre, si nous y étions contraints par d'in- 
« justes agressions. » Palmerston n'ayant pas 
dissimulé à Talleyrand qu'il trouvait ce discours 
arrogant, plein de jactance, et de nature à 
offenser l'Europe, l'ancien ministre de Napo- 
léon répondit qu'un pareil langage était néces- 
saire pour conserver l'ascendant du gouverne- 
ment sur la France, et que la meilleure chose 
que l'on pût faire était de plaire beaucoup aux 
Français, sans trop déplaire aux autres na- 
tions ('). 

Ce n'était encore que de la jactance ; mais, 

(') Palmerston à Granville, 25 juillet. 



I 









44 



LORD PALMERSTON. 



dans d'autres conjonctures, la conduite du 
prince de Talleyrand fut réellement odieuse. On 
va voir comment il se comporta à l'égard des 
Belges, lorsque, dans les premiers jours du 
mois d'août, ils furent brusquement assaillis 
par les troupes hollandaises réunies entre 
l'Escaut et la Meuse. 

Cette agression inattendue avait indigné lord 
Palmerston, et telle était sa méfiance à l'égard 
du gouvernement français qu'il vit dans l'at- 
taque soudaine des troupes hollandaises le ré- 
sultat d'une entente entre la cour de la Haye et le 
cabinet du Palais-Royal. Il écrivait le 5 août : 
« Bagot (') a toujours pensé qu'il y avait des intel- 
ligences secrètes entre la France et le gouver- 
nement hollandais. Talleyrand, si vous vous en 
souvenez,m'a proposé, il y a quelquetemps, d'ex- 
citer les Hollandais à rompre l'armistice, pour 
crier alors haro sur eux, voler au secours des 
Belges, couvrir la Belgique de troupes et puis 
régler tout comme nous l'entendrions. Serait-ce 
la réalisation du premier point de ce plan? La 
France a été furieuse à propos des forteresses. 
S'est-elle imaginé qu'en poussant les Hollan- 
dais à la guerre, elle aurait un bon prétexte 






(') Ministre d'Angleterre à la Haye. 






LORD PALMERSTON. 



45 



d'entrer en Belgique comme alliée, puis de se 
jeter dans ces forteresses et de les garder ou de 
les démolir à son choix?... » S'il est difhcile de 
démontrer les intelligences secrètes signalées 
par Palmerston, on peut affirmer toutefois qu'il 
était positivement dans la réalité lorsqu'il soup- 
çonnait la France de n'attendre qu'une occasion 
pour envoyer une armée en Belgique. Cette amée, 
commandée par le maréchal Gérard, franchit 
effectivement la frontière, mais sur l'appel du 
roi Léopold. Les Français arrivèrent en quelque 
sorte au pas de course, refoulèrent les Hollan- 
dais et sauvèrent ainsi la royauté belge. Us lui 
rendirent incontestablement un grand service; 
mais en empêchant une restauration, ils ser- 
vaient tout autant les intérêts de la France. 

Cependant Palmerston, d'accord avec le roi 
Guillaume IV, et avec lord Grey, n'avait plus 
qu'une préoccupation : abréger autant que pos- 
sible la durée de l'occupation française. Lorsque 
les troupes hollandaises furent rentrées dans le 
Brabant septentrional, Palmerston rappela les 
engagements pris par le gouvernement de 
Louis-Philippe et exprima énergiquement le 
désir que les Français rentrassent aussi dans 
leur pays. « Telle a été, disait-il le 11 août, l'as- 
surance donnée verbalement par les ministres 



% 












46 



LORD PALMERSTON. 



de Louis-Philippe ; et c'est sur la foi de cette assu- 
rance que la conférence a accepté la marche des 
Français comme une mesure prise en com- 
mun... » Ce qui justifiait ou du moins ce qui 
expliquait son impatience, c'était une note où 
Sébastiani déclarait officiellement que la pré- 
sence des troupes françaises en Belgique avait 
non-seulement pour but de maintenir l'indépen- 
dance et la neutralité du nouveau royaume, mais 
aussi de hâter l'instant où des arrangements, 
concertés entre les puissances et acceptés par le 
roi de Hollande et le roi des Belges, assureraient 
aux deux pays une paix durable. Or, Palmerston 
voyait des arrière-pensées dans cette dernière 
clause. Il s'exprimait là-dessus avec beaucoup 
de vivacité : 

« Le Gouvernement français dit sans cesse 
qu'il est obligé de faire ou de ne pas faire cer- 
taines choses, pour satisfaire l'opinion publique 
en France; mais il faut qu'il sache qu'il y a 
une opinion publique en Angleterre comme en 
France; et que si, comme en France elle ne 
s'excite pas pour de petites causes, il y a des 
points (et la question belge en est un) sur les- 
quels elle est profondément susceptible et ne 
s'apaise pas facilement lorsqu'elle est excitée. » 

Le chef du Foreign-Office n'avait pas tort de 






LOKD PALMERSTON. 



47 



sonder les arrière-pensées de certains hommes 
d'État de la France. Talleyrand allait fournir la 
preuve qu'il faisait bon marché de l'indépen- 
dance belge et que son vif et vrai désir était 
d'enrichir la France de nos plus belles pro- 
vinces. Le 12 août, arrivé le premier à la 
conférence, Talleyrand prit à part le baron 
Bùlow, plénipotentiaire de la Prusse, et après 
lui avoir parlé avec un profond dédain des 
Belges et de leur roi, lui dit que si les troupes 
françaises se retiraient, c'était la fin du minis- 
tère Périer, et que si elles ne se retiraient pas, 
le ministère anglais devait tomber. — 11 n'y a, 
poursuivit-il, qu'une solution à ces difficultés : 
le partage de la Belgique entre la France, la 
Prusse et la Hollande, sauf à transformer Anvers 
en port franc, pour contenter l'Angleterre. — 
Bùlow eut la loyauté de faire connaître le jour 
même ces déloyales insinuations à lord Pal- 

merston ('). 

Dès lors celui-ci redouble ses instances pour 
que l'évacuation de la Belgique se fasse sans 
aucun retard. Le 13 août, il adresse à lord 



(') Palmerston au vicomte Granville, 12 août 1831. — 
Le même à sir Robert Adair, ministre d'Angleterre à 
Bruxelles, 1 3 août. 






48 



LORD PALMERSTON. 



Granville celte espèce de sommation : « Le 
gouvernement français est-il prêt à retirer ses 
troupes, comme il a promis de le faire, aussitôt 
après l'évacuation de la Belgique par les Hol- 
landais? Je vous prie de lui faire-comprendre 
que tout dépend de sa, décision. Grey vous 
écrit aujourd'hui ('). Il est très-péremptoire, et 
lors même que le cabinet aurait le moindre 
désir de céder — ce qui n'est pas — l'opinion 
publique en Angleterre l'en empêcherait. C'est 
donc une question de paix ou de guerre. Mardi, 
Yyvyan ( 2 j renouvelle sa motion sur la Belgique, 
Ce jour-là, je devrai répondre catégoriquement 
à cette question : Oui ou non, les troupes fran- 
çaises vont-elles évacuer la Belgique ? Veuillez, 
je vous prie, me mettre à même de donner la 
réponse au jour que je vous indique, et faites 
bien comprendre au gouvernement français 
toute l'importance de cette réponse. Le oui ou 
le non que j'aurai à prononcer entraînera les 
conséquences les plus importantes pour les deux 
pays et pour toute l'Europe. » 11 n'était pas 
moins explicite dans ses communications à sir 



(') Cf. Correspondence of the laie earl Grey , etc. , 
passim. 
( 8 ) Membre de la Chambre des communes. 



4 



LOED PAI/MEESTON. 



49 



Robert Adair. « Le refus de la France, disait-il, 
pourrait être fatal à notre gouvernement et à la 
paix de l'Europe : nous serons forcés ou de 
nous retirer ou de faire la guerre et, d'après les 
dispositions du cabinet, je ne doute point qu'il 
n'adopte le dernier parti. » 

Le gouvernement de Louis-Philippe rappelle 
alors 20,000 hommes des troupes envoyées en 
Belgique et fait rétrograder le reste de l'armée 
sur Nivelles; mais Sébastiani subordonne l'éva- 
cuation entière au règlement de la question des 
forteresses. Palmerston déclare immédiatement 
que l'on ne délibérera pas sur cette question, 
aussi longtemps qu'il restera des soldats fran- 
çais en Belgique. « Nous ne souffrirons jamais, 
dit-il, que la France nous dicte quoi que ce soit 
là-dessus à la pointe de la baïonnette. » Le 
cabinet du Palais-Boyal ayant persisté dans la 
prétention d'occuper la Belgique jusqu'à la 
conclusion d'un arrangement au sujet des for- 
teresses, Palmerston s'adresse à lord Granville 
en ces termes (17 août) : «... 11 y a une chose 
certaine, ou les Français doivent sortir de la 
Belgique, ou nous avons une guerre générale, 
et une guerre dans un nombre déterminé de 
jours. Mais, disent les Français, nous songeons 
à nous en aller, seulement nous devons choisir 

4 






» 



-i-r-c.J» 



H 



50 



LORD I'ALMERSTON. 



I 



le moment et les conditions qui nous convien- 
nent. Ce moment, et ils y ont consenti, c'est à 
la conférence de le désigner. Ils sont entrés sur 
l'invitation d'un souverain allié, dont ils sont 
convenus de garantir la neutralité et l'indépen- 
dance, et ils ont marché en avant pour accom- 
plir ce que les cinq puissances voulaient toutes. 
Quelles sont donc les conditions qu'ils sont en 
droit de mettre à leur retraite? Aucune. Quant 
aux forteresses, faites-leur comprendre que leurs 
prétentions sont tout à fait inadmissibles. 
Démanteler ces forteresses pendant que les 
Français les auraient en leur possession, ce 
serait déshonorant pour les cinq puissances; 
quant à l'intervention de la France comme 
partie au traité pour leur démolition, c'est 
impossible. Rien, jamais, ne m'amènera à 
apposer mon nom au bas d'un semblable traité, 
et je suis positivement sûr que le cabinet 
anglais ne voudrait jamais le sanctionner... » 
L'attitude résolue et le fier langage de lord 
Palmerslon empêchèrent la guerre au lieu de 
la provoquer. L'illustre chef du Foreign-Office, 
veillant sur la Belgique avec une vigilance 
jalouse, la préserva à la fois des horreurs de 
la guerre et des humiliations d'un partage. 
« Détrompez le roi Léopold, écrit-il à sir Robert 



■1 m 



i 



V 



LORD PALMERSTON. 51 

Adair, s'il croit que nous voulons l'aban- 
donner pour les Hollandais. Qu'il ait confiance 
en nous : nous sommes engagés par l'honneur 
et l'intérêt à le seconder et à soutenir son 
trône. » 

Le 23 août, Palmerston écrivait à lord Gran- 
ville : « Les Français veulent rester en Belgique ; 
les Prussiens ne savent pas trop ce qu'ils pen- 
sent à ce sujet, parce qu'ils nourrissent toujours 
en secret l'idée que si les Français restent et si 
la guerre s'ensuit, le partage doit arriver et 
qu'ils y interviendront pour leur part. L'Autriche 
est la plus rapprochée de nous dans ses senti- 
ments, et elle n'a pas d'intérêt particulier à 
poursuivre dans l'occurrence. La Russie qui, je 
le soupçonne, savait plus de l'invasion du roi 
de Hollande qu'elle n'aimait à l'avouer, est 
toujours disposée à tenir des discours raides et 
un langage hautain avec tout le monde, mais 
elle ne serait pas fâchée de nous voir nous 
quereller les uns avec les autres. Les Hollan- 
dais, ici du moins, affectent de souhaiter que 
les Français restent ; ils prétendent que le désir 
de se débarrasser d'eux rendra les Belges plus 
accommodants pour traiter. Les Belges disent 
qu'ils ont besoin de la protection des Français 
aussi longtmps que l'armée nationale ne sera 



52 



LOKD PALMEIÎSTON. 



pas sur un bon pied et que la Hollande n'a pas 
consenti à une trêve. » 

La veille, Palmerston avait eu un long entre- 
tien avec Talleyrand. Celui-ci lui dit, en débu- 
tant, qu'il venait lui demander un léger service, 
un petit acte d'amitié, qui ne lui coûterait rien : 
il s'agissait de nouveau des forteresses. « Ce 
que vous voulez faire, disait Talleyrand, faites-le 
immédiatement, et alors immédiatement aussi 
les Français s'en iront. » Palmerston répondit 
qu'il serait charmé de venir en aide aux Fran- 
çais, mais qu'il y avait des choses que le minis- 
tère ne pouvait pas faire; que, s'il comprenait 
bien, les Français voulaient rattacher leur 
retraite à une nouvelle condition, et précisé- 
ment à une condition touchant de près à l'or- 
gueil et aux intérêts de l'Angleterre, c'est-à-dire 
à la démolition des forteresses-barrières; or, 
l'Angleterre, ne pouvant se soumettre à pareille 
condition, parce qu'elle serait hnmiliante, il ne 
restait qu'à réclamer l'accomplissement des 
engagements pris par la France. « D'ailleurs, 
ajouta-t-il, à quoi cela peut-il vous servir? 
Voulez-vous garder notre résolution secrète, ou 
bien voulez-vous la rendre publique? Si vous 
la tenez secrète, à quoi peut-elle vous servir en 
France ? Si vous voulez en faire un autre coup 



LOED PALMERSTON. 



53 



de théâtre, et vous vanter que l'armée française 
ne s'est pas retirée de Belgique tant que les 
grandes puissances de l'Europe n'ont pas dési- 
gné les forteresses à démolir, cela peut être très- 
utile pour le ministère de Casimir Périer et 
extrêmement réconfortant pour le bon peuple 
de Paris, mais cela se ferait aux dépens du 
ministère de lord Grey et du légitime orgueil de 
la nation anglaise, pour ne rien dire des trois 
autres puissances... » 

Le même jour, le cabinet de Saint-James 
décida qu'une négociation ou discussion aurait 
lieu entre les quatre puissances et le roi Léo- 
pold, afin de faire choix des forteresses à 
démanteler; — qu'il n'était pas possible d'ad- 
mettre la France comme parti en cause; — et 
que la retraite des troupes qui occupaient la 
Belgique était tout à fait indépendante de la 
question des forteresses. 

Palmerston avait attribué à la Prusse des 
arrière-pensées; avait-il tort ou raison? Toujours 
est-il que le gouvernement de Frédéric-Guil- 
laume III réclamait également l'évacuation 
immédiate de la Belgique par les Français, et, 
si ceux-ci ne se retiraient pas, il voulait mettre 
les troupes prussiennes en mouvement dans 
les provinces rhénanes. L'ordre d'évacuation 







54 



I.ORD PALMERSTON. 



est enfin donné à Paris ; il ne restera plus en 
Belgique qu'une division française d'infanterie 
avec un peu de cavalerie et d'artillerie, jusqu'à 
ce que l'armée nationale ait été réorganisée. 
C'est à la demande même du roi Léopold, 
adressée à la conférence, que ces auxiliaires 
prolongeront leur séjour en Belgique. Pal- 
merston trouve naturelle la demande du roi 
Léopold : mais du moment où les Hollandais 
auront accepté l'armistice et dès que l'armée 
belge sera un peu réorganisée, il faut, selon lui, 
que les derniers Français sortent du pays, et le 
plus tôt sera le mieux. « Si Léopold, dit-il, songe 
à rester à Bruxelles, il doit avoir son propre 
peuple autour de lui et personne d'autre. » Dans 
sa correspondance avec sir Bobert Adair, Pal- 
merston avait dit que, avec les Français en 
Belgique, le roi Léopold ressemblerait au pape 
au milieu des Autrichiens qui occupaient la 
Bomagne. Un peu plus tard, il faisait engager le 
roi Léopold à ne pas requérir plus longtemps la 
présence de troupes françaises. Leur présence, 
disait-il, diminuait la considération du roi et for- 
tifiait le seul parti qu'il eût réellement à craindre, 
c'est-à-dire celui qui avait en vue l'annexion de 
la Belgique. Palmerston se repentait donc de la 
concession qu'il avait faite naguère. En effet, i 



LORD PALMERSTON. 



55 



écrivit à lord Gran ville, le 3 septembre : « Nous 
n'en finirons pas avec les Belges tant que les 
Français ne seront pas hors de Belgique. 11 n'y 
a pas de fin aux intrigues que leur présence 
suscite. Je ne crois pas un mot du danger auquel 
Léopold est exposé, par ce qu'on appelle anar- 
chie; c'est un prétexte imaginé entre Bruxelles 
et Paris. Depuis que les Hollandais sont partis 
et qu'ils ne peuvent plus revenir, l'armée de 
Léopold et la garde civique doivent certaine- 
ment être à même de maintenir l'ordre ; et s'ils 
ne veulent pas le faire, ni soutenir leur roi, je 
ne vois pas de quel droit nous nous mêlerions 
de tout cela. Mais c'est un prétexte : les Français 
veulent travailler à leurs propres intérêts... » 
Quelle conduite que celle de Talleyrand! La 
princesse de Lieven aurait-elle eu raison, lors- 
qu'elle disait: la probité de M. de Talleyrand 
me rappelle l'esprit de M. de Polignac! Quoi! 
le représentant du roi des Français, du souve- 
rain qui se vantait d'être le premier appui de 
l'indépendance belge, complotait ouvertement 
la destruction du royaume de Belgique! Jour et 
nuit, il cherchait à circonvenir l'ambassadeur 
de Prusse ('); il poussait même l'impudence au 



I 



( l ) C'est ce qui résulte d'une note du baron de Stockmar. 










1 



56 



LORD PALMEliSTON. 



point d'exciter un membre du Parlement à sou- 
tenir, dans la Chambre des communes même, la 
thèse du partage de la Belgique, sauf à indem- 
niser le roi Léopold en le transférant dans le 
grand-duché de Luxembourg. « Pareil langage 
tenu ici par l'ambassadeur français en face des 
engagements connus de la France, est calculé, 
disait justement Palmerston, pour exciter les 
soupçons de l'opinion publique à l'égard de la 
politique de Louis-Philippe. » Lord Palmerston 
croyait, d'ailleurs, que la Prusse convoitait pour 
elle-même la forteresse de Luxembourg, avec 
un petit territoire environnant, disposée, si elle 
l'obtenait, à consentir à la cession de Philippe- 
ville et de Marienbourg à la France. Toutes ces 
convoitises l'exaspéraient : « Il faut, s'écriait-il, 
écarter tous ces rongeurs ; si une fois ces grandes 
puissances commencent à goûter de la chair 
saignante, elles ne se contenteront pas d'une 
bouchée, mais elles dévoreront bien vite leur 
victime. » 

Le 1S septembre, Talleyrand (quel devait être 
son trouble intérieur !) vint enfin déclarer à la 
conférence que le gouvernement de Louis-Phi- 
lippe, de son propre mouvement, avait ordonné 
l'évacuation de la Belgique par la dernière 
' division de l'armée française qui y était restée. 






LORD PAI.MEKSTON. 57 

Cette évacuation devait commencer le 23 sep- 
tembre et être terminée le 30. Les plénipoten- 
tiaires des quatre puissances, dit le protocole 
officiel, reçurent avec une vive satisfaction la 
déclaration du représentant du roi des Fran- 
çais. 



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I 



1 



III 

La Belgique dut payer la rançon des vaincus. 
Les désastres de la campagne du mois d'août 
suivis de la chute de Varsovie changèrent les 
dispositions des puissances qui naguère avaient 
proposé au Congrès de Bruxelles et au prince 
Léopold le traité des dix-huit articles. Celui-ci 
disparut dans la tourmente. Le 15 octobre 1831, 
la conférence imposa à la Belgique et à la Hol- 
lande un nouveau traité dit des vingt-quatre 
articles. Ces résolutions finales et irrévocables, 
comme on les appelait, étaient dures et oné- 
reuses pour les Belges; aussi rencontrèrent-elles 
dans nos provinces une résistance générale. 



I 



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60 



LORD PALMERSTON. 



Palmerston fut néanmoins d'avis que les 

Belges devaient se résigner et, pour acquérir 

définitivement leur indépendance, s'imposer 

les sacrifices exigés par l'Europe. Il engagea 

vivement M. Van de Weyer à se rendre à 

Bruxelles pour empêcher des déterminations 

qui auraient pu livrer à de redoutables périls 

le sort du nouvel État. «... Vous ne manquerez 

pas, je l'espère, lui écrivit-il, d'attirer l'attention 

de votre gouvernement sur tout ce que le traité 

contient d'avantageux pour les intérêts de la 

Belgique et de lui faire remarquer que si, sous 

quelques rapports, nous n'obtenons pas pour 

vous tout ce que nous aurions pu' souhaiter, 

cependant je doute qu'il y ait dans l'histoire 

l'exemple d'une autre nation, qui, en si peu de 

temps et avec si peu de sacrifices, a obtenu 

une indépendance reconnue et garantie par 

toutes les puissances dont elle se trouvait 

entouré » 

Le roi Léopold cependant paraissait inébran- 
lable. « Je n'ai été amené à accepter le trône de 
Belgique, écrivit-il lui-même à lord Palmerston, 
qu'à certaines conditions que les alliés m'avaient 
solennellement garanties. Le roi de Hollande 
brave les alliés et m'attaque à cause de ces 
mêmes conditions, et maintenant c'est moi qui 



• 



LORD PALMERSTON. 



61 



suis obligé d'accepter des choses que j'aurais 
refusées, si elles m'avaient été imposées dès 
l'origine. » Déjà le baron de Stockmar, le confi- 
dent du roi, s'était aussi élevé avec une extrême 
énergie contre les conditions que la conférence 
prétendait imposer à la Belgique, conditions en 
désaccord avec les articles sous la foi desquels 
le prince de Saxe-Cobourg avait accep;é la cou- 
ronne. 11 aimerait mieux y renoncer, ajoutait 
Stockmar, que de courber la tête sous un arrêt 
inique et déloyal. Palmerston, un peu troublé, 
écrivit trois lettres en quatre jours au roi des 
Belges pour le persuader que la décision des 
puissances était équitable. 11 chargea en outre 
sir Robert Adair de faire savoir nettement aux 
ministres belges que l'arrangement conclu par 
l'Europe devait sortir ses effets. « Si la Belgique 
refuse son assentiment, poursuivait-il, le premier 
acte de la France et de l'Angleterre sera sans 
doute la rupture des relations diplomatiques, 
puis viendra l'occupation des districts, que la 
Belgique doit céder à la Hollande. » Palmerston 
ne doutait point, au surplus, que le roi Léopold 
finirait par reconnaître que les vingt-quatre 
articles étaient réellement combinés pour assu- 
rer à la Belgique une existence indépendante 
et prospère ; et s'il allait renoncer à la couronne 



I 





62 



LORD PALMERSTON. 



par caprice et sans avoir une raison suffisante, 
il serait pour jamais, d'après lui, un homme 
perdu dans l'opinion de l'Europe. Palmerston 
disait encore que l'Angleterre avait basé sa réso- 
lution sur des considérations qui ne concernaient 
pas seulement les deux parties en litige, mais 
qui embrassaient les intérêts de toutes les puis- 
sances. En participant à la séparation du nord 
et du midi des Pays-Bas, le gouvernement 
britannique avait pour devoir, déclarait-il, de 
constituer la Hollande de manière qu'elle fût 
une seconde ligne de défense si la neutralité 
belge était un jour violée par la France. 
Sir Robert Adair ne devait pas laisser ignorer 
que, si la Belgique résistait, elle serait inévita- 
blement partagée. « Je ne parle pas légèrement, 
disait Palmerston, en m'exprimant ainsi; et le 
roi ne peut réfléchir trop sérieusement à 
ceci ('). » 

Les conseils du chef du Foreign-Office furent 
suivis : les Chambres belges se résignèrent, et 
le roi Léopold, surmontant une légitime irrita- 
tion, donna sa sanction à la loi qui l'autorisait 



(') Lord Palmerston à sir Robert Adair, Foreign-Office, 
18 octobre <831. Cette lettre, de la main de Palmerston, 
avait seize pages in-4°. 



1 



LORD PALMERSTON. 



63 



à accepter les vingt-quatre articles ('). Ainsi fut 
atteint le but que lord Palmerston avait tou- 
jours eu en vue : faire reconnaître et garantir 
d'une manière irrévocable l'indépendance de la 
Belgique par les cinq puissances. Ce fut l'objet 
du traité signé le -15 novembre, entre les repré- 
sentants des cinq cours et le plénipotentiaire du 
roi Léopold : la Belgique et son souverain pre- 
naient immédiatement place clans le cercle des 
gouvernements reconnus. 

On a reproché à lord Palmerston non sans 
raison, ce semble, d'avoir montré beaucoup de 
raideur dans ses rapports avec le prince de 
Talleyrand et d'avoir fait attendre plus d'une 
fois dans son antichambre l'ambassadeur de 
Louis-Philippe. Toutes autres étaient les relations 
du chef du Foreign-Office avec le représentant 
du roi Léopold : il ne cessa de témoigner à 
M. Van de Weyer une sorte de familiarité 
empreinte de la plus noble franchise. Ce fut aussi 
lord Palmerston qui encouragea le début diplo- 
matique d'un autre représentant du roi des 

(') Le 4 novembre, lord Palmerston, ayant appris le vote 
approbatif donné le 1" par la majorité de la Chambre des 
représentants, écrivit à sir Robert Adair : « Nous sommes 
ravis du vote des députés et nous attendons avec impa- 
tience celui du Sénat ainsi que le retour de M . Van de Weyer. > 



] 
1 







64, 



LORD l'AI.MKRSTON. 



Belges, le général Goblet, envoyé à Londres, 
pour se concerter avec les quatre puissances au 
sujet des forteresses qui seraient démolies en 
vertu du protocole du 17 avril 1831. Par ses sé- 
rieuses qualités, le général Goblet conquit immé- 
diatement la confiance de lord Palmerston, et 
celui-ci le signala comme un homme intelligent 
et qui entendait les affaires. De son côté, le 
général Goblet sut rendre à l'illustre chef du 
Foreign-OHice la justice qui lui était due : il 
déclara hautement que sa bienveillance pour la 
Belgique était inépuisable. Cette déclaration est 
consignée dans le remarquable ouvrage où, plus 
de trente années après l'avènement du roi 
Léopold I er , le général Goblet retraça les négo- 
ciations auxquelles il avait participé et qui abou- 
tirent à la convention du 14 décembre 1831 ('). 
Le roi Léopold ne rendait que justice aussi à 
lord Palmerston lorsqu'il lui écrivait (2 jan- 
vier 1 832) : « C'est avec la satisfaction la plus sin- 
cère que je me trouve à môme de vous remercier 
très-chaleureusement de la ligne de politique 
honnête et vigoureuse que vous avezsuiviedans 






(') Des cinq grandes Puissances de l'Europe dans leurs 
rapports politiques et militaires avec la Belgique. Une mis- 
sion à Londres en 1851 , par le lieutenant général comte 
Goblet d'Alviella (1863, \ vol. in-8°). 



I 



LOKD PALMERSTON. 



65 



la situation actuelle et compliquée des affaires 
européennes. » 

De son côté, Palmerston mettait parfois un 
peu de rudesse dans les conseils qu'il faisait 
donner au roi; c'est ainsi que, le 3 avril 1832, il 
écrivait à sir Robert Adair : « Recommandez 
au roi de la modération et de la patience, pour 
ne pas dire du sens commun. S'il veut faire la 
guerre à la Hollande, il aura nécessairement les 
cinq puissances contre lui et il sera à Gare- 
mont dans la quinzaine. » 

Mais il importe de constater que le roi Léopold 
n'avait point à se louer des puissances du Nord. 
Toujours dans l'espoir de favoriser les intérêts 
de la maison d'Orange, elles ne s'étaient nulle- 
ment empressées de ratifier le traité du 15 no- 
vembre 1831. Lorsque l'Autriche et la Prusse 
remplirent enfin l'engagement qu'elles avaient 
contracté, elles firent encore des réserves quant 
aux droits de la Confédération germanique. La 
ratification conditionnelle, donnée le 4 mai 1832, 
au nom de la Russie, remettait même en ques- 
tion les engagements pris envers la Belgique. 
En présence d'une crise ministérielle qui pou- 
vait emporter les plus zélés défenseurs de la 
cause belge en Angleterre, M. Van de Weyer 
n'hésita point. D'accord avec lord Palmerston, 

5 






■ 






66 



LORD PALMERSTON. 



I 



il accepta la ratification russe. Accusé dans les 
Chambres belges d'avoir outrepassé ses pou- 
voirs, violemment attaqué dans la presse, 
M. Van de Weyer trouva en lord Palmerston un 
énergique défenseur. Le chef du Foreign-Office 
déclara que le ministre belge aurait été inexcu- 
sable, s'il n'avait point accepté la ratification 
russe : quoique incomplète, elle liait la Russie 
aux puissances qui avaient reconnu l'indépen- 
dance et la neutralité de la Belgique. 

Le roi Guillaume refusant obstinément son 
adhésion, la Belgique se trouvait dans l'alter- 
native ou de recommencer la guerre avec la 
Hollande ou d'obtenir de la conférence l'exécu- 
tion des conditions que celle-ci avait garanties. 
Le chef du Foreign-Office conseillait, avant 
tout, de tenter encore une négociation directe 
avec la Hollande; de concert avec MM. Van de 
Weyer et Goblet, il rédigea un projet de con- 
vention qui fut appelé le Thème de lord Pal- 
merston. Ce document contenait des proposi- 
tions au delà desquelles le cabinet de Bruxelles 
ne pourrait pas être entraîné. Mis en demeure 
par la conférence, le plénipotentiaire hollandais 
dut avouer qu'il n'avait jamais été muni des 
pouvoirs nécessaires pour négocier directement 
avec le plénipotentaire belge; il fut constaté, 









' 



LORD PALMEIÏSTON. QJ 

en outre, que le cabinet de la Haye refusait 
d'accepter les vingt-quatre articles dans leur- 
ensemble. Le 1er octobre> la conférence) fei _ 

sant droit aux justes réclamations des Belges 
reconnut que des mesures coercitives étaient 
devenues nécessaires pour obtenir l'assentiment 
de la Hollande à l'exécution du traité du 15 no- 
vembre. Mais tandis que les plénipotentiaires 
du Nord opinaient pour de simples mesures 
pécuniaires, les représentants de l'Angleterre et 
de la France déclaraient celles-ci insuffisantes et 
réservaient tous les droits de leurs gouverne- 
ments. L'accord des cabinets des Tuileries et de 
Saint-James aboutit au siège de la citadelle 
d Anvers par une armée française. 

Toutefois cette intervention étrangère avait 
froissé bon nombre de Belges; de plus, on révo- 
quait en doute que la prise du château d'Anvers 
amenât la soumission du roi Guillaume. Comme 
ce monarque, renommé pour son obstination 
continua, en effet, de braver les puissances' 
1 opinion publique était en Belgique surexcitée 
par des idées belliqueuses. Le général Goblet 
ministre des affaires étrangères, écrivait à 
M. Van de Weyer, le 22 janvier 1833 : « Les 
têtes sont de nouveau ici en fermentation et 
mes chers collègues eux-mêmes ne peuvent pas 






* 



68 



LORD PALMERSTON. 



se défendre de velléités guerrières. Hier dans le 
conseil l'on a agité la question de la conquête 
de la Flandre zélandaise en représailles de la 
fermeture de l'Escaut, et je vous avoue que je 
n'aurai peut-être pas longtemps la force de 
résister à de telles idées ...» Informé de cette 
disposition des esprits en Belgique, lord Pal- 
merston la blâma vivement et en montra les 
dangers; le gouvernement, disait-il, ne doit pas 
faire une chose qui serait en violation de ses 
engagements formels et qui forcerait l'Angle- 
terre à l'abandonner. « Si les Belges, ajoutait-il, 
attaquaient la Flandre hollandaise, les Hollandais 
auraient le droit de marcher sur Bruxelles. » 

Une trêve fut enfin conclue le 21 mai 1833, 
et lord Palmerston prit encore une part notable 
à cette convention, qui stipulait un armistice 
indéfini entre la Belgique et la Hollande. Quel- 
que avantageuse qu'elle fût pour la Belgique, le 
chef du Foreign-Office eût préféré cependant un 
traité définitif. Il écrivit à ce sujet des lettres 
pressantes au roi l.éopold et à sir Bobert Adair ; 
ce fut aussi, d'après son désir, que MM. Van de 
Weyer et Goblet reçurent de Bruxelles les pou- 
voirs qui leur étaient nécessaires pour conclure 
ce traité définitif. Mais bientôt il fut démontré 
de nouveau que le roi Guillaume ne renonçait 



LORD PALMERSTON. 



69 



pas encore à ses prétentions sur la Belgique ('). 
Sir Robert Peel ayant pris le pouvoir, le 
15 novembre 4834, lord Palmerston quitta le 
ministère des affaires étrangères ( 2 ). Mais ce ne 
fut pas pour longtemps. Le 18 avril 1835, il 
revenait à son ancien poste dans le second 
cabinet formé par le vicomte Melbourne, son 
beau-frère ( 3 ). Cette position dominante, Pal- 
merston devait l'occuper jusqu'au 31 août 1841, 
On rapporte que des intrigues furent tentées 

(') N'ayant point le dessein de refaire l'histoire des rela- 
tions extérieures de la Belgique, nous croyons pouvoir 
renvoyer le lecteur aux ouvrages dans lesquels nous avons 
essayé de retracer la carrière de Sylvain Van de Weyer et 
celle du général Goblet. On y trouvera de nombreuses par- 
ticularités que nous avons dû omettre ici pour ne pas dépas- 
ser le cadre que nous nous étions prescrit. Les Mémoires 
historiques du général Goblet seront également consultés 
avec le plus grand fruit. Nul n'était mieux placé pour 
constater les services éminents que lord Palmerston rendit 
aux Belges pendant les négociations se rattachant à la 
première atteinte portée aux traités de 1 81 5. 

( ! ) Le roi Guillaume IV écrivit lui-même l'historique de 
ce changement ministériel. Ce mémorandum est inséré 
dans les Denkwùrdigkeiten aus den papieren des freiherm 
C. F. von Slockmar, p. 275 et suiv. 

( 3 ) Lord Palmerston avait épousé lady Cowper, sœur du 
vicomte Melbourne. 



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70 



. LORD PALMEESTON. 



pour l'éloigner du Foreign-Office, mais qu'elles 
furent déjouées par lord Melbourne. 

De grands événements s'accomplirent durant 
la seconde administration de cet homme d'État. 
Ils ébranlèrent, puis raffermirent et consoli- 
dèrent l'indépendance de la Belgique. L'avéne- 
ment de la reine Victoria, le 20 juin 1837, 
exerça aussi une heureuse influence sur les des- 
tinées de notre pays. Le roi Léopold ne cessait 
de recommander l'union de la France et de 
l'Angleterre parce que de cette union, disait-il, 
dépendait la paix du monde. Oncle de la reine 
d'Angleterre, gendre du roi des Français, il 
consacra tous ses efforts à maintenir la con- 
corde entre les deux grandes puissances occiden- 
tales. Ces efforts ne restèrent pas impuissants, 
quoique l'entente cordiale, dont on a tant parlé, 
n'eût jamais eu une grande solidité. La France 
et l'Angleterre s'observaient d'un œil jaloux, et 
plus d'une fois la méfiance faillit engendrer une 
lutte ouverte. 

Au mois de mars 1838, le roi Guillaume, sous 
la pression des états-généraux, avait brusque- 
ment adhéré au traité du 15 novembre 1831. 
Mais la Belgique, qui s'était résignée en 1831, 
ne voulait plus, après sept années d'une vie 
commune avec le Limbourg et le Luxembourg, 




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LORD PALMEPSTON. 71 

délaisser les populations qu'on prétendait lui 
arracher. Nous n'avons pas à raconter ici toutes 
les péripéties qui signalèrent la résistance des 
Belges ni à rappeler les débats et les négo- 
ciations qui aboutirent au traité définitif du 
13 avril 1839. Disons seulement que lord Pal- 
merston montra dans cette crise tout à la fois 
un grand dévouement à notre pays et un grand 
esprit de modération. S'il avait lutté énergi- 
quement contre l'influence française en Espagne, 
il lâchait maintenant, dans l'intérêt des Belges, 
de marcher d'accord avec le cabinet des Tuile- 
ries ('). Au surplus, le rôle de lord Palmerslon 

0) La lettre inédite, dont nous donnons ci-dessous le 
texte, prouve que Palmerston cherchait à conserver de bons 
rapports avec l'ambassadeur de Louis-Philippe, le général 
comte Sébastiani, successeur de Talleyrand : 



* 



« ... 31 juillet (1838). 



Mon cher Comte, 



« Personne ne peut avoir l'idée de mettre la France de 
côté dans la négociation hollando-belge, et certes ce n'est 
pas l'Angleterre qui se prêterait à un pareil arrangement, 
et cela pour bien des raisons. 

La France n'a pas été en dehors jusqu'à présent plus 
que ne l'ont été l'Autriche et la Russie, car tandis que d'un 
côté Bulow a parlé confidentiellement avec Eslerhazy, 
Pozzo et Dedel, j'ai fait la même chose avec vous et Van de 






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72 



LORD PALMERSTON. 



a été nettement caractérisé par M. Van de 
Weyer : « Lord Palmerston a hâte d'en finir; 
mais son empressement n'est ni de la tiédeur 
ni de l'hostilité envers la Belgique. 11 prend 
vivement ses intérêts à cœur, et il voudrait qu'il 
lui fût permis de seconder ses vœux pour 
l'intégrité du territoire; mais il me reste peu 
ou point d'espoir à cet égard.... » 

Dans les commencements si difficiles de la. 
monarchie belge, lord Palmerston n'avait cessé 
de surveiller et de déjouer les perlides desseins 



, 



Weyer. Le fait est que jusqu'à présent il n'y a pas eu de 
négociation qui puisse lier aucune des parties. Nous nous 
sommes bornés à tâcher de nous entendre par des conver- 
sations particulières, afin de connaître, si cela se peut 
d'avance, quels sont les points sur lesquels il nous serait 
possible d'arriver à un arrangement en conférence. Mais 
plus on multiplie les allocuteurs dans une conversation de 
cette espèce, plus on y donne un caractère officiel, et c'est 
uniquement pour cette raison et avec l'intention d'aplanir 
les difficultés que Bulow est venu seul me trouver au 
bureau. 

Cependant, si vous croyez une autre marche plus propre 
à nous conduire à bonne fin, je la lui proposerai. 

Tout à vous, 
(Signé) Palmerston. 

(Collection dautographes de M. L. Veydt.) 



4 



LOKD l'ALMERSTON. 



73 



du prince de Talleyrand sur lequel le roi Léopold 
écrivait encore en 1834 : « Le prince de Tal- 
leyrand nous offrirait tout bonnement en holo- 
causte. » Lord Palmerston n'avait cessé en toute 
occasion de témoigner pour les Belges une 
sollicitude incontestable. En 1838, il conservait 
cette prédilection pour notre pays ; mais ses 
collègues, redoutant de compromettre le sort 
du cabinet, l'obligèrent de se soumettre aux 
décisions de la conférence. 

En 1840, la question orientale succéda à la 
question belge et réveilla l'ancienne rivalité de 
la France et de l'Angleterre, celle-là soutenant 
le pacha d'Egypte dans sa révolte contre le 
sultan, celle-ci voulant maintenir l'intégrité de 
l'empire turc. Pour la France il s'agissait réel- 
lement de rétablir sa suprématie, mais ce 
projet fut déjoué par le traité du 15 juillet 
conclu, sans son intervention, entre les quatre 
grandes puissances et la Porte Ottomane. 
M. Thiers était alors chef du cabinet français; 
il ressentit comme un affront personnel le 
traité du 15 juillet et se prépara à la guerre. 
Lord Palmerston avait la conviction qu'elle se 
ferait si M. Thiers conservait le pouvoir. 11 faut 
lire dans la correspondance du chef du Foreign- 
Office avec sir H. Bulwer, alors chargé d'affaires 






74 



LORD PALMERSTON. 



à Paris, avec quelle habileté et en même temps 
avec quelle énergie il luttait contre l'esprit à la 
fois si souple et si hardi de M. Thiers. Celui-ci, 
dans un entretien à Auteuil avec sir H. Bulwer, 
avait fait entendre quelques paroles assez mena- 
çantes. Palmerston, en ayant eu connaissance, 
écrivit à Bulwer (22 septembre) : « Si Thiers 
vous tient encore le langage de la menace, 
quelque vague et détourné qu'il soit, veuillez 1© 
lui rétorquer dans les mêmes termes; dites-lui, 
avec cette habileté d'expression dont je vous 
sais capable, de la façon la plus amicale et la 
plus inoffensive, que, si la France jette le gant, 
nous le ramasserons. Ajoutez que, si la France 
commence la guerre, elle perdra sûrement sa 
flotte, ses colonies, son commerce, avant d'en 
voir la fin; que son armée d'Afrique ne lui 
donnera plus de souci, et que Méhémet-Ali sera 
jeté dans le Nil. C'est ainsi que je parle invaria- 
blement à Guizot et à Bourqueney quand ils 
commencent à faire les fanfarons, et je remar- 
que que cela les calme instantanément On 

conjecture que Thiers aurait l'intention d'atta- 
quer l'Autriche et de laisser là les autres puis- 
sances. Veuillez le détromper et faites-lui com- 
prendre que l'Angleterre n'a point l'habitude 
d'abandonner ses alliés : si la France attaque 



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4 



LORD PALMERSTON. 



75 



l'Autriche au sujet du traité, elle aura affaire 
avec l'Angleterre aussi bien qu'avec l'Autriche, 
et je ne doute pas qu'elle ne trouve aussi devant 
elle la Prusse et la Russie... » 

Lord Palmerston finit par triompher de 
M. Thiers. En effet, celui-ci quitta le pouvoir 
après avoir acquis la certitude que Louis-Phi- 
lippe ne s'associerait point à ses projets belli- 
queux ('). Au reste, la dissolution du cabinet du 
i er mars ne modifia point l'attitude de lord 
Palmerston. Louis-Philippe après avoir, le 
29 octobre, remis le ministère des affaires 
étrangères à M. Guizot, laissait assez clairement 
entendre que le gouvernement anglais, afin 
d'aider le roi des Français à maintenir la paix et 
à contenir le parti de la guerre, devait accorder 
aux prières du monarque ce qu'il avait refusé 
aux menaces de M. Thiers. Tel n'était point l'avis 
de Palmerston. « Nous avons résisté, disait-il, 
aux menaces de M. Thiers parce que ce qu'il 
demandait ne pouvait être accordé sans léser 
gravement les intérêts de l'Europe, et nous ne 

(') Louis-Philippe disait à sir H. Bulwer : « M. Thiers 
est furieux contre moi, parce que je n'ai pas voulu faire la 
guerre. Il me dit que j'ai parlé défaire la guerre; mais 
parler de faire la guerre et faire la guerre, M. Bulwer, sont 
deux choses bien différentes. » 






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76 



LORD l'ALMEKSTON. 



pouvons exposer ces intérêts par complaisance 
pour Louis-Philippe et pour Guizot pas plus 
que par crainte de Thiers ('). » Il ajoutait dans 
une fort intéressante lettre au comte Granville 
(29 octobre) : « Mon opinion est que nous n'au- 
rons pas actuellement la guerre avec la France, 
mais il faut nous attendre à l'avoir un jour ou 
l'autre. Tous les Français rêvent plus ou moins 
l'extension de leurs possessions territoriales aux 
dépens des nations voisines, et ils sentent tous 
ce qu'a dit une fois le National, qu'une alliance 
avec l'Angleterre est une barrière contre de tels 
projets. Je ne serais point surpris que les doc- 
trinaires qui se trouvaient dans le gouverne- 
ment de Thiers en fussent les membres les plus 
belliqueux. Je puis même ajouter que je m'y 
attendais. Je ne blâme pas les Français de ne 
pas nous aimer. Leur vanité leur persuade qu'ils 
sont le premier peuple du monde, et pourtant, 
à chaque occasion, ils peuvent voir que nous 
sommes leurs égaux. C'est un malheur que 
le caractère d'une grande et puissante na- 



(') Sir H. Bulwer dit très-clairement dans la préface de 
la Vie de lord Palmerston que cet homme d'État en voulait 
moins aux ministres français qu'au roi des Français lui- 
même. Dès lors se manifestait cet antagonisme qui eut de 
si graves conséquences. 



LORD PALMERSTON. 



77 



tion, placée au centre de l'Europe, soil ce qu'il 
est; mais c'est l'affaire des autres nations 
d'ouvrir les yeux et de ne pas négliger les 
précautions commandées par la prudence.... » 

Lorsque le ministère présidé par lord Mel- 
bourne dut enfin se dissoudre, à cause de sa 
faiblesse générale, lord Palmerston n'avait rien 
perdu de son prestige et de sa popularité. Sa 
politique triomphait partout. La Russie n'avait 
plus le protectorat exclusif de l'empire turc et 
l'Egypte ne pouvait plus devenir une dépen- 
dance de la France. En môme temps, les Anglais 
étaient victorieux en Chine et dans l'Afghanis- 
tan. Mais l'œuvre de prédilection de Palmerston, 
celle qu'il avait achevée avec le plus d'ardeur 
et d'amour, était sans contredit la création 
d'une Belgique indépendante et neutre. 

En participant avec une si vaillante persévé- 
rence à la fondation du royaume de Belgique, 
lord Palmerston eut constamment les yeux fixés 
sur le résultat général. Selon la remarque de son 
éminent biographe, il prit pour guide le désir 
de placer le nord et le midi des anciens Pays- 
Bas dans une position telle qu'ils voudraient, 
lorsque auraient disparu les générations qui 
avaient combattu les unes contre les autres, 
réunir leurs descendants par des intérêts com- 



1 



1 
I 



■i 




78 



LORD PALMEItSTON. 



muns. La sagesse de cette politique, ajoute sir 
H. Bulwer, peut maintenant être attestée quand 
nous nous demandons, à quarante années de 
distance, si, dans le cas où la Hollande et la 
Belgique seraient assaillies demain par une 
armée envahissante, elles ne seraient pas plus 
disposées, quoique États séparés, à se liguer 
pour leur défense commune, qu'à l'époque où 
leurs noms étaient unis et leurs cœurs divisés 
sous le royaume des Pays-Bas. 



• 



I 



IV 



4 



. 



Lord* Palmerston avait associé sa fortune 
politique à celle de lord Melbourne : il se retira 
avec lui du ministère le 31 août 1841. Mais il 
devait bientôt ressaisir de nouveau le pouvoir. 
Le 3 juillet 1846, il rentre au gouvernement 
avec lord John Russell et reprend, jusqu'au 
22 décembre 1851, la direction du ministère des 
affaires étrangères. 

On a encore présente à la mémoire l'énergie 
qu'il déploya dans l'affaire des mariages espa- 
gnols. Par des prétentions qui rappelaient trop 
l'orgueilleuse ambition de Louis XIV, par sa 
politique équivoque, le roi des Français avait 
suscité non-seulement la résistance, mais on 



*jtm*L* 






♦ 



80 



LORD PALMERSTON. 



peut dire l'antagonisme personnel de lord Pal- 
merston. Ce qu'on appelait l'entente cordiale 
fit place dès lors à une grande méfiance; depuis 
la reine jusqu'au dernier artisan, toute la nation 
anglaise se sentit froissée par les procédés du 
gouvernement français. Que fit Louis-Philippe? 
Dans son anxiété, il désira ardemment de se 
réconcilier avec la reine Victoria et crut de 
bonne guerre de rejeter sur l'esprit brouillon 
de lord Palmerston la responsabilité d'une 
rupture dont il redoutait les conséquences. Dans 
une lettre écrite à la reine des Belges, mais 
réellement destinée à la reine Victoria, Louis- 
Philippe s'exprimait en ces termes : « La reine 
ne voit maintenant les choses que par la lunette 
de lord Palmerston, et cette lunette les fausse 
et les dénature trop souvent. C'est tout simple. 
La grande différence entre la lunette de cet 
excellent Aberdeen et celle de lord Palmerston 
provient de la différence de leur nature : lord 
Aberdeen aimait à être bien avec ses amis ; lord 
Palmerston, je le crains, aime à se quereller 
avec eux. C'est là ce qui causait mes alarmes 
sur le maintien de notre entente cordiale, 
lorsque lord Palmerston a repris la direction 
du Foreign-Office. » 
Quelques mois après le trône élevé en juil- 



r 



t 



t 



LORD PALMBBSTON. 



81 



let 4830 s'écroulait, et Louis-Philippe cherchait 
un asile en Angleterre. 

A la première nouvelle de la révolution de 
février 1848, lord Palmerston fit appeler 
M. Van de Weyer et l'interrogea avec une sorte 
d'anxiété sur la situation intérieure de la Bel- 
gique. Le représentant du roi Léopold répondit 
qu'il était sans inquiétude; que la population 
de Bruxelles ne partageait aucune des passions 
du peuple de Paris ; que le pouvoir, en Belgique, 
avait pris l'initiative de toutes les réformes, 
que le bien était toujours venu d'en haut, et 
que la nation, profondément attachée à son 
indépendance, repousserait toutes les tentatives 
du dehors. « Rien à craindre, ajouta-t-il, de 
l'intérieur. Tout de l'extérieur. L'intérieur, nous 
en répondons. L'extérieur est votre affaire 
autant que la nôtre. » Ainsi s'exprimait l'un des 
plus illustres fondateurs de l'État belge. Les 
événements ne démentirent point la confiance 
qu'il avait dans le patriotisme de ses conci- 
toyens. Quant à l'Angleterre, elle était intéressée 
non-seulement à défendre l'indépendance de 
la Belgique, mais encore à soutenir les institu- 
tions constitutionnelles qui étaient les fonde- 
ments de cette indépendance, ou, pour employer 
de nobles paroles de la reine Victoria, le palla- 

6 



H -< 



t 



82 



LORD PALMERSTON. 



dium et l'abri d'un peuple libre et heureux. 
Ce fut aussi au milieu de la grande crise 
provoquée par la révolution de février 1848, 
que s'accomplit entre la Belgique et la Hollande 
le rapprochement désiré et prévu par lord 
Palmerston dès 1832. « La Hollande et la Bel- 
gique unies pour leur défense commune et en 
bonne amitié, disait à ce sujet le roi Léopold, 
offrent ensemble avec l'Angleterre une force 
assez respectable, et je considère cet ordre de 
choses comme étant le plus important que 
l'Angleterre ait à protéger et à conserver sur le 
continent de l'Europe. » 

En 1851, un profond désaccord se manifesta 
entre lord John Bussell et lord Palmerston. 
Après le coup d'Etat accompli par Louis-Napo- 
léon, la reine d'Angleterre exprima la volonté 
formelle que son ambassadeur à Paris ne fît 
rien qui pût être considéré comme une inter- 
vention quelconque dans les affaires intérieures 
de la France. Mais le chef du Foreign-Oflice ne 
garda point la prudente réserve adoptée par les 
autres membres du cabinet. L'ambassadeur 
britannique à Paris ayant fait entrevoir la pos- 
sibilité d'une alliance intime et immédiate de la 
France avec la Russie et l'Autriche, Palmerston 
n'hésita point. Dans un entretien avec le comte 



t 






LOUD PALMERSTON. 



83 



Walewski,et dont celui-ci s'empressa de rendre 
compte à Paris, le chef du Foreign-Office donna 
son approbation entière au coup d'État et 
exprima l'opinion que le président de la Répu- 
blique française n'aurait pu agir autrement. La 
conduite prévoyante de Palmerston ne fut pas 
comprise d'abord, et elle amena sa retraite for- 
cée (22 décembre 1851) : il fut remplacé par 
lordGranville('). 

Le gouvernement passa ensuite au comte 
Derby jusqu'au moment où se forma, à la fin 
de 1852, le ministère de coalition qui réunit le 
comte Aberdeen, lord Russell et Palmerston 
lui-même. Pendant trois ans ce dernier en fait 
partie comme ministre de l'intérieur. La guerre 
de Crimée le porte ensuite au premier rang, 
car l'opinion publique veut à la tête du gouver- 
nement un homme d'État dont l'énergie et la 

(') Denkwûrdigkeiten aus den papieren des freihernn 
C. F. V. Stockmar, p. 64 et suiv. — « Pour être juste, 
ajoute- t-il, je dois convenir que Palmerston a vu à ce 
moment plus clair dans l'avenir que nous tous, qui n'envi- 
sagions le coup d'État qu'à travers le sentiment de notre 
réprobation morale. Les projets insensés de la Russie impo- 
saient comme une nécessité politique l'alliance franco- 
anglaise, et Palmerston peut dire à bon droit qu'il a reconnu 
cette nécessité avant nous. 11 nous a réellement surpassés. » 



^|t<l\V> 






84 



LORD PALMERSTON. 



■a 



popularité soient au niveau de la situation. 
C'est lord Palmerston qu'elle désigne. 11 avait 
alors soixante et onze ans. Nommé premier 
ministre le 20 février 1855, il conserva cette 
position éminente jusqu'au 20 février 1858. 

Le comte Derby exerça le pouvoir du 21 fé- 
vrier 1858 au 13 juin 1859 et le céda de nouveau à 
lord Palmerston qui le conserva jusqu'à sa mort. 

La guerre faite par Napoléon 111 au delà des 
Alpes répandit l'inquiétude non-seulement en 
Allemagne mais aussi en Belgique. Le roi Léo- 
pold écrivait de Bruxelles : « ... Si la France 
retourne à la position de la paix de Lunéville, 
il n'est guère possible qu'elle tolère aux portes 
de Paris un pays fort désagréable comme celui- 
ci. La Prusse et l'Allemagne tiennent encore 
avec un peu de courage le sort de l'Europe 
dans leurs mains; mais si elles se conduisent 
lâchement, nous sommes à la merci de la 
France. » Le roi Léopold comptait aussi sur 
l'énergie et la vigilance de lord Palmerston. 
Si celui-ci avait donné son approbation au coup 
d'État, il n'avait nullement le dessein cependant 
de sacrifier la Belgique, son œuvre de prédilec- 
tion, au dominateur de la France : à cet égard 
il montrait l'inflexibilité d'un Pitt et d'un Castle- 
reagh. Pour ne laisser aucun doute sur ses im- 






LORD PALMEUSTON. 



85 



muables sympathies, il saisissait toutes les 
occasions de signaler publiquement le noble 
emploi que les Belges faisaient de leurs libertés 
et de vanter cette prospérité dont ils jouissaient 
et qu'il était donné, disait-il, à peu de nations 
sur le continent de voir régner chez elles. 

Lord Palmerston demeura jusqu'à son der- 
nier jour un ami inébranlable, un défenseur 
constant et énergique de notre patrie. La veille 
de sa mort (17 octobre 4865), il se rappelait 
encore avec satisfaction qu'il avait prêté son 
actif concours à la fondation de l'État belge. 
« Pendant un assoupissement on l'entendit 
murmurer : « Le traité avec la Belgique!... Oui... 
lisez-moi de nouveau la sixième clause. » 
M. Ashley, son petit-fils, lui lut effectivement 
l'article qui consacrait l'indépendance et la 
neutralité de la Belgique. La lecture achevée, 
lord Palmerston, se transportant en esprit à 
cette fameuse conférence de Londres qui avait 
posé les fondements du nouveau royaume, dit 
ces mots : « France acknowledge.. Puis sa 
pensée s'arrêta et les paroles qu'il murmurait 
encore devinrent inintelligibles ('). » Le lende- 

( 4 ) Voir Le'opold I", roi des Belges, d'après des documents 
inédits, t. II, p. 222. 



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*MV 



86 



LORD PALMERSTON. 



main le puissant ministre, dont le nom était 
connu jusqu'aux extrémités du monde, s'étei- 
gnait paisiblement. 

La Grande-Bretagne reconnaissante s'em- 
pressa de décerner à lord Palmerston les hon- 
neurs de l'abbaye de Westminster ; c'est là qu'il 
repose à côté des grands hommes qui ont fondé 
et consolidé la puissance britannique. Mais il a 
des droits aussi à la gratitude des Belges : 
comment donc sa glorieuse image ne figure-t- 
elle pas sur l'une de nos places publiques?... 
Serait-il vrai que les Belges, trop longtemps 
sous l'empire de préjugés funestes et de pré- 
ventions absurdes, n'ont pas encore assez appris 
ce qu'ils doivent à l'Angleterre? 

Sir H. Bulwer a dit de lord Palmerston qu'un 
de ses plus grands mérites fut de s'être en 
quelque sorte identifié avec l'esprit de son 
temps ; d'avoir marché avec ses contemporains, 
ne les devançant pas, mais ne restant pas non 
plus en arrière. Il s'éleva graduellement jus- 
qu'au premier rang par un labeur persévérant, 
par une capacité réelle, jamais par l'intrigue ('). 

(') Lord Palmerston, qui ne resta jamais inférieur à 
aucune position officielle, savait remplir sa tâche avec une 
facilité et une force singulière. Voici ce que rapporte M. de 
Jarnac qui avait eu avec lui de longues relations : « - C'est 



■ 



r 









LORD PALMEKSTON. 



87 



Il était ambitieux sans doute, mais dépourvu de 
vanité; il représentait le pouvoir avec simpli- 
cité, parfois avec une sorte d'enjouement. Une 
des phrases favorites de lord Palmerston était 
celle-ci : « Attendons, voyons venir. » Il lais- 
sait venir, puis, avec une énergie extraordinaire, 
il poursuivait le but jusqu'à ce qu'il l'eût atteint. 
Ce grand homme d'État avait, comme on l'a dit 
encore, une force à lui. C'était le type de la 
nation anglaise, la personnification de la fierté 



incontestablement le maître le plus accompli du langage 
diplomatique qu'il nous ait été donné de rencontrer, soit 
qu'il voulût semer les mille embûches que recouvre l'idiome 
international, soit qu'il s'agit de les mettre au jour. Il se 
faisait un jeu de rédiger lui-môme, séance tenante, au 
Foreign Office, ces pièces importantes qui sont habituelle- 
ment livrées à l'élaboration professionnelle des bureaux. 
« Vous êtes à peu près infatigable, m'écriai-je un soir, 
témoin de la rapidité avec laquelle il avait accompli, par 
pur délassement, un de ces véritables exploits littéraires. 
— Ce que je fais me fatigue rarement, répliqua-t-il en sou- 
riant; c'est ce que je n'ai pas encore pu faire, » parole 
étrange qui témoigne de toute l'ardeur qui se combinait 
dans son tempérament avec une persévérance peu com- 
mune. — Quand il vit le terme de sa longue carrière appro- 
cher sensiblement, il dit à ceux qui l'entouraient : « Je crois 
être aujourd'hui l'homme politique de l'Europe qui a le 
plus travaillé. » 






m ■ - 



88 



[.ORD PALMKRSTON. 



britannique. 11 ne voyait rien au-dessus de la 
Grande-Bretagne, et s'attachait principalement 
à faire respecter, jusqu'aux extrémités du 
monde, le plus humble de ses concitoyens. 
Aussi jouissait-il parmi ses compatriotes d'une 
popularité sans égale ; mais au dehors il était 
craint et même détesté. Par jalousie, par ran- 
cune, l'étranger lui attribuait tous les défauts, 
tous les travers, sans même lui accorder une 
qualité. Belges, ne nous associons pas à ces pré- 
ventions. Lord Palmerston, grâce à « la fermeté 
du caractère, jointe à la clairvoyance de l'esprit 
et à la rectitude du jugement, » nous a, à travers 
des écueils sans nombre, dirigés habilement 
vers le port où nous avons trouvé enfin, après 
tant de vicissitudes, la sécurjtC^-te"bonheur. 




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• ' 






EXTRAIT DU CATALOGUE DE LA LIBRAIRIE EUROPÉENNE 
DE C. IHUQUflROT, HENRY IÏIERZBACH, SUCCESSEUR 
(Bruxelles, Gand et Leipzig.) 

LES FONDATEURS DE LA MONARCHIE RELGE 
PAn Théodore Juste 

Léopold I", roi des Belges, d'après des documents inédits: 
Première partie (1790-1852), 1 vol. in-8°. 
Deuxième partie (1832-1865), 1 vol. in-8° (<). 

Surlet de Chokier, régent de la Belgique, d'après ses papiers 
et d'autres documents inédits (1769-1859), 1 vol. in-8°. 

Le baron de Gerlache, ancien président du Congrès natio- 
nal, etc., 1 vol. in-8°. 

Joseph Lebeau, ministre d'État, d'après des documents 
inédits (1794-1865), 1 vol. in-8°. 

Sylvain Van de Weyer , ancien membre du gouvernement 
provisoire , ancien ministre plénipotentiaire de Belgique 
à Londres, etc., d'après des documents inédits, 2 v. in-8°. 

le comte Le lion, ministre d'État, ancien ministre plénipo- 
tenUaire de Belgique à Paris, etc., d'après ses correspon- 
dances diplomatiques et d'autres documents inédits (1792- 
1856), 1 vol. in-8°. 

Le lieutenant général comte Goblet d'Alviella, ministre 
d'Etat, d'après des documents inédits (1790-1869) 1 vol 
in-8\ " 

Le comte de Muelenaerc, ministre d'État, d'après des docu- 
ments inédits (1794-1862), 1 vol. in-8°. 

Charles de Brouckere, bourgmestre de Bruxelles etc 
(1796-1860), 1 vol. in-8\ 

Notes historiques et biographiques sur les fondateurs de 
l Etat belge (1830-1870), d'après des documents inédits, 
1 vol. in-8°. 

Le comte Félix de Mèrode, membre du gouvernement 
(') Traductions anglaise, allemande et flamande. 



• 



provisoire, ministre d'État, représentant, etc., d'après 
des documents inédits, 1 vol. in-8°. 

CHAQUE OUVRAGE SE VEND SÉPARÉMENT. 






OUVRAGES DD MÊME AUTEUR : 

Histoire de Belgique, depuis les temps primitifs jusqu'à la 

fin du règne de Léopold I er . 4 e édition, 5 vol. gr. in-8°. 

Histoire du Congrès national de Belgique ou de la Fo?u 

dation de la monarchie belge, 2' édition, 2 vol. ('). 
Les Frontières de la Belgique, 1 vol. in-12. 
Histoire des états généraux des Pays-Bas (1465-1790), 

2 vol. in-8°. 
Histoire du règne de l'empereur Joseph II et de la Révolution 

belge de 1790, 5 vol. in-12. (Épuisé.) 
Souvenirs diplomatiques du XVIII e siècle. Le comte de 

Mercij-Argenteau (1722-1794), 1 vol. in-12. 
Le Soulèvement de la Hollande en 1813 et la fondation du 
royaume des Pays-Bas, précédés d'une introduction sur 
le règne de Louis Bonaparte (180G-1817), 1 vol. in-8°. 
La Révolution belge de 1830 (1817-1830), 2 vol. in-8°. 

XVI SIÈCLE. 

Les Pays-Bas sous Philippe II (1 555-1 572), 2 vol. grand 
in-8°. {Épuisé.) 

Histoire du soulèvement des Pays-Bas contre la domination 
espagnole (1572-1576), 2 vol. grand in-8°. 

Charles-Quint et Marguerite d'Autriche. Élude sur la mino- 
rité, l'émancipation et l'avènement de Charles-Quint à 
l'empire (1477-1521), 1 vol. in-8°. 



(') Traduction allemande (Leipzig et Bruxelles, 1850, 1 vol.; 






M 



Les Pays-Bas sous Charles-Quint. Vie de Marie de Honarie 

(1505-1 538), 2° édition, 1 vol. in-12 («). 
Z,e Comte d'Egmont et le comte de Homes (1322-1568], 
d'après des documents authentiques et inédits, 1 vol. in-8°.' 
Fm de Marnixde Sainte- Aldegonde (1538-1598), tirée des 
papiers d'État et d'autres documents inédits, 1 vol. in-8°. 
Christine de Lalaing, princesse d'Èpinoy, 1 vol. in-12. 
Charles de Lannoy, vice-roi de IVaples, in-8°. 
Conspiration de la noblesse belge contre l'Espagne en 1632, 

d'après les papiers d'Etat, 1 vol. in-8°. 
Guillaume le Taciturne, 1 vol. in-8". 



■ 



(') Traduction hongroise (Pestli, 1866, 1 vol. in-12). 



« 

A 









LES FONDATEURS DE LA MONARCHIE BELGE 



APPRÉCIATIONS DIVERSES 



JOSEPH I t IH \l 

1 vol. in-8 - . 

« En appliquant son talent bien connu d'historien à rap- 
peler les titres de Lebeau à notre reconnaissance, l'auteur 
n'a pas fait seulement un bon livre, il a fait aussi, ce qui 
n'est pas moins méritoire à nos yeux, acte de bon citoyen. » 
— La Meuse. 

« En se renfermant dans le cadre d'une stricte biogra- 
phie, l'auteur n'a diminué en rien l'importance historique 
de son livre; les papiers manuscrits de M. Lebeau, d'autres 
documents inédits encore, lui ont permis de jeter du jour 
sur bon nombre de faits incomplètement connus jusqu'ici, 
de signaler même plusieurs incidents entièrement nou- 
veaux... » — Écho du Parlement. 

« M. Th. Juste a fait incontestablement une œuvre utile 



/ 






*Ht* Wl *« 



en écrivant la vie de Joseph Lebcau , l'un des principaux 
fondateurs de la monarchie belge... Son livre renferme une 
foule de révélations intéressantes sur les hommes et les 
choses de la révolution et des premières années de la mo- 
narchie constitutionnelle. » — Journal de Bruxelles. 



&::-m 



« Lebeau avait droit à quelque chose de plus qu'une 
simple notice : sa vie résume un chapitre entier de l'his- 
toire d'un peuple, et ce chapitre, on eût pu jusqu'ici diffici- 
lement l'écrire. C'est pour avoir comblé cette lacune que le 
livre de M. Juste a droit à une mention toute particulière et 
qu'il doit prendre place dans toutes nus bibliothèques. « — 
Journal de Liège. 

« En écrivant la biographie de M. Joseph Lebeau, en 
faisant la lumière autour de cette figure obscurcie par la 
passion des uns, oubliée par l'indifférence des autres, 
M. Th. Juste a rempli un pieux devoir ; il a fait une œuvre 
de bon citoyen,.. Grâce aux nombreux documents inédits 
•mis à sa disposition, il a en même temps éclairé d'un jour 
tout nouveau certains événements de notre histoire contem- 
poraine... » — L'Impartial de Bruges. 

« Quand on songe que c'est sous son ministère que fut 
conclu le traité des dix-huit articles, si avantageux pour la 
Belgique, si la fortune de la guerre ne lui en eût ravi les 
fruits ; que c'est grâce à ses éloquentes sollicitations que le 
Congrès élut Léopold de Saxe-Cobourg..., on reconnaît que 
ce sage et intègre homme d'État mérite d'occuper la place 
que M. Juste lui a donnée au premier rang des fondateurs 
de la monarchie belge. — Ce livre se distingue par la 



<«1 ..-.. 1 



sobriété et la simplicité ; et les documents inédits qu'il met 
au jour ajoutent beaucoup à son utilité et à son intérêt. » 
— Journal de Gand. 

>' On se rappelait à peine parmi nous les noms des 
hommes qui fondèrent un État et préservèrent l'Europe 
d'une guerre générale. Il faut donc savoir gré à M. Th. Juste 
d'avoir consacré ce livre à Joseph Lebeau. Un pareil homme 
était digne d'un travail complet, et cette tâche a été rem- 
plie avec succès par l'auteur. L'ouvrage est d'un haut intérêt 
pour l'histoire contemporaine : c'est à la fois la biographie 
d'un homme et le récit des luttes et du triomphe d'une 
nation. » — The Athenœum. 



■ 



« M. Th. Juste pouvait mieux que personne donner une 
biographie fidèle de Joseph Lebeau, par suite des relations 
qu'il avait eues avec cet homme d'État, et de l'étude parti- 
culière qu'il avait faite du drame de 1830-1831 dans son 
Histoire du Congrès national de Belgique. << — AUgemeine 
Zeitung (d'Augsbourg). 

« Il importe de ne pas oublier les hommes d'État qui, 
avec le roi Léopold, travaillèrent à la fondation et à l'affer- 
missement de l'État belge. Avec raison M. Juste a placé à 
la tête de ceux-ci Joseph Lebeau. » — Europa (de Leipzig). 



« En se servant des souvenirs de M. Lebeau, le bio- 
graphe a donné plus d'importance encore à son œuvre et 
doté l'histoire belge d'un livre d'une haute valeur. » — Lite- 
rarisches Centralblatt. 



PS 



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m 



MVRLET DE CHOKIER. 

1 vol. in-8*. 

« M. Th. Juste, grâce aux documents inédits qui ont été 
mis à sa disposition, a pu retracer avec une grande exacti- 
tude tous les actes du Régent et les mobiles qui les avaient 
dictés. Son livre présente, sur beaucoup de points, l'intérêt 
qu'auraient les mémoires mêmes du personnage dont il 
retrace la vie. » — Journal de Liège. 

« M. Th. Juste a écrit l'histoire du Régent et nul mieux 
que lui n'était en position de remplir ce devoir pieux, puis- 
qu'un concours de circonstances l'avaient rendu possesseur 
des papiers de Surlet et notamment de sa correspondance 
intime. » — Précurseur. 



« Le volume que nous annonçons, consacré modestement, 
en apparence, au récit d'une seule vie, contient en réalité 
le tableau de toute une période de la révolution qui nous a 
affranchis. De plus, il révèle des faits importants jusqu'ici 
inconnus ou mal appréciés ; il offre, dans tous les sens du 
mot, l'attrait piquant de la nouveauté. » — La Meuse. 

« Tous les Belges qui aiment véritablement leur pays 
liront avec plaisir le livre de M. Th. Juste et seront recon- 
naissants envers l'auteur. » — Écho de Liège. 

« M. Juste a eu le talent de faire aimer le caractère et de 
mettre en évidence les incontestables services de l'un des 
fondateurs de la monarchie nationale. » — Journal de 
Bruxelles. 






1 



9 

« Le nom de Surlet de Chokier, régent de la Belgique 
en 1 83 1 , est presque oublié de notre génération ; néanmoins 
le livre de M. Th. Juste, écrit avec conscience, sympathie 
et autorité, est fait pour être lu ailleurs qu'en Belgique. » 
— Bibliothèque universelle et Revue suisse. 

« C'est une attrayante peinture de ce personnage si 
remarquable et si intéressant. «—HeidelbergherJahrbÙcher 
(1er Literatur. 

« Cette biographie éclaircit bien des points qui étaient 
restés obscurs dans l'histoire de la fondation du nouveau 
royaume de Belgique, et doit être considérée comme un 
document précieux. » — Hamburgischcn Correspomlenten. 

« Un historien belge, connu par de beaux travaux sur 
l'histoire nationale, M. Théodore Juste, publie depui s 
quelque temps sous ce titre : Les Fondateurs de la monar- 
chie belge, une intéressante série de portraits politiques. 
Deux de ces portraits, ceux du régent de Belgique et du 
comte Le lion, méritent plus particulièrement l'attention 
des lecteurs français. » — L'Avenir national. 

LE COMTE LE IlON. 

i vol. in-8". 

« Ministre du Régent et de Léopold I" près la cour des 
Tuileries, le comte Le Hon fut activement mêlé à toutes les 
négociations diplomatiques qui précédèrent l'élection du 
Roi, l'intervention française de 1831 et de 1832, la recon- 
naissance de la monarchie belge par l'Europe, et, enfin, le 
célèbre traité du 19 avril 1839. C'est là la partie vraiment 
historique du livre de M. Juste, et, nous devons le dire, 



«•^•r t»m%* 






10 

cette partie présente un intérêt soutenu et jette un jour 
nouveau sur plusieurs épisodes de notre histoire contempo- 
raine. Outre un grand nombre de dépêches confidentielles 
et jusqu'ici inédites , nous y avons rencontré toute une 
collection de lettres autographes du roi Léopold 1 er . >» — 
Journal de Bruxelles. 

« Au point de vue des révélations historiques, le nouveau 
livre de M. Juste est appelé à un grand et légitime succès. » 
— Étoile belge. 

.. L'ouvrage consacré au comte Le Hon n'a pas seule- 
ment une haute valeur pour la Belgique, mais il intéresse 
l'Europe entière par les données qu'il fournit sur l'établis- 
sement de la monarchie belge. » - Historische Zeitschrifl. 

« C'est une histoire diplomatique, précieuse par les révé- 
lations et les documents inédits qu'elle contient. » — The 
Chronicle. 

CII.IIILES DE MIOUCKERE. 

1 vol. in-8\ 

.. C'est un portrait fidèle, quoique rapidement esquissé. 
Nous connaissons peu de biographies d'une lecture plus 
attrayante; mais aussi nous connaissons peu d'existences 
plus laborieuses, plus noblement employées que celle de 
Charles de Brouckere, peu de caractères plus sympathiques, 
malgré ses brusqueries et ses caprices, légers défauts qu 
faisaient d'autant mieux ressortir ses grandes qualités. » — 
Indépendance belge. 

« Peu de carrières ont été aussi remplies que celle de 
Charles de Brouckere... La vie d'un tel homme est un 



*ss*. 



31 

exemple et une leçon ; la notice que nous venons de lire 
nous paraît destinée à devenir un livre populaire. « — 
Journal de Liège. 

i Le livre consacré à Charles de Brouckere vaut bien que 
l'on étudie la carrière de cet homme remarquable qui mon- 
tra un talent également éminent dans les positions si diverses 
qu'il occupa successivement. -> — Schlesische Zeitung (de 
Breslau). 

LE COMTE DE MllELENAERE. 

1 vol. in-8°. 

« M. Th. Juste vient de publier le septième volume de 
ses études sur les Fondateurs de la monarchie belge. C'est 
la biographie du comte de Muelenaere, rédigée d'après des 
documents inédits. Ce volume présente, comme les précé- 
dents, un vif intérêt pour tous ceux qui s'occupent de notre 
histoire contemporaine. » — Écho du Parlement. 

« M. Juste a très-habilement tiré parti des papiers inédits 
qui lui ont été communiqués par la famille de M. de Muele- 
naere. Les projets d'union douanière dont il a été question 
entre la France et la Belgique sous la monarchie de juillet, 
et dont l'ancien ministre des affaires étrangères fut l'un des 
plus persévérants adversaires, tiennent une place impor- 
tante dans ce nouvel écrit, » — Indépendance belge. 

« Cette nouvelle page d'histoire est une œuvre utile et 
nationale. Elle jette une précieuse clarté sur les événements 
qyi ont entouré la naissance et le développement de notre 
nationalité. Nous devons remercier M. Th. Juste d'avoir 
mis en lumière, avec l'autorité de son talent, tous les 






-S. '-1*.- ^t%\» 



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12 

détails de la belle et utile carrière du comte de Muelenaere.» 
— Journal de Bruxelles. 

« M. Th. Juste vient de publier, dans sa galerie des 
Fondateurs de la monarchie belge, la biographie de M. le 
comte de Muelenaere, ministre d'État, ancien ministre, l'un 
des hommes politiques éminents du parti catholique, dont 
on a pu dire avec vérité que son nom vivrait dans la 
mémoire de ses contemporains et passerait à nos descen- 
dants, car ce nom a été mêlé a tous les grands événements 
qui ont consacré notre existence politique, et il figure avec 
éclat dans les plus belles pages de l'histoire de notre régéné- 
ration. » — Étoile belge. 






le uiinvni <.l M It 1 1 COUTE «.OUI 11 lt Al. VII 1 I, % 

1 vol. iii-8". 

« M. Théodore Juste, le consciencieux biographe des 
Fondateurs de la monarchie belge, vient de consacrer une 
intéressante notice à la carrière militaire, politique et diplo- 
matique de M. le lieutenant général Goblet, comte d'Ahiella, 
ministre d'État. L'auteur a tiré parti d'un grand nombre 
de documents inédits. » — Indépendance belge. 

« ... Ce volume renferme une assez longue série de 
documents inédits, qui jettent un jour nouveau sur les 
nombreuses et graves péripéties qui ont longtemps tenu en 
échec la constitution définitive de la Belgique. ...» — Journal 
de Bruxelles. 

h ... La vie du général Goblet nous présente aussi des 






; 









13 

luttes, des contrastes, des vicissitudes. Soldat fidèle et 
loyal, il semble d'abord hésiter entre un gouvernement qui 
a méconnu ses services, mais qui a reçu son serment, et 
son pays qui fait appel à son dévouement et à son activité; 
rallié comme malgré lui au nouvel ordre de choses, lui- 
même se révèle un homme nouveau. Cet ingénieur, que la 
révolution a trouvé occupé à construire des fortifications, 
se trouve être un habile diplomate, et il va à Londres 
chargé de la mission difficile de contrecarrer Talleyrand et 
de persuader Palmerston. 

« Ces biographies sont écrites du style clair, simple, 
net, qui convient au genre. L'auteur est sobre de réflexions; 
il laisse parler les faits et les personnages eux-mêmes : il 
cite beaucoup. Grâce aux nombreux documents mis à sa 
disposition, lettres et papiers de famille, il a pu mettre dans 
tout son jour le rôle joué par chacun des hommes dont il 
retrace la vie. Bien des faits restés jusqu'à ce jour dans une 
certaine obscurité se trouvent ainsi éclaircis.... » — Écho 
du Luxembourg. 



. 



« M. Th. Juste vient d'ajouter à la galerie des Fondateurs 
de la monarchie belge un nouveau portrait qui a droit d'y 
figurer : c'est celui du lieutenant général comte Goblet. 

« L'auteur rappelle la belle défense de Saint-Sébastien, 
qui fut pour le lieutenant du génie Goblet un beau titre de 
gloire et qui lui fit obtenir, à 23 ans, la croix de la Légion 
d'honneur; il rappelle la difficile et délicate négociation 
relative aux forteresses, confiée aux soins du général 
Goblet, par le roi Léopold I er et si habilement menée et 
terminée; il expose avec concision, mais avec clarté, les 
motifs de la détermination hardie par laquelle, devenu 






14 

ministre des affaires étrangères, le général mit en demeure 
devant la conférence le cabinet de la Haye de s'expliquer 
sur ses intentions réelles à l'égard du traité du 1 5 novembre, 
et il parcourt les phases successives de la carrière bien 
remplie de l'homme d'État dont il raconte la vie et les actes 
politiques. 

« M. Juste a pu enrichir sa relation de correspondances 
et autres papiers inédits qui jettent un jour nouveau sur 
les grandes affaires auxquelles M. Goblet a pris part, et 
joignent leur témoignage à celui des pièces authentiques 
sur les services qu'il a rendus au pays. » — Moniteur belge. 

«... Ambassadeur à Londres et à Lisbonne dans les 
moments les plus difficiles, ministre des affaires étrangères, 
chargé à plusieurs reprises de missions d'une extrême 
délicatesse, M. Goblet s'est montré en toutes circonstances 
homme de caractère, esprit élevé, digne et loyal agent du 
grand diplomate couronné dont il avait la confiance.... » 
— Journal de Liège. 



IIIIIMIIII I", ROI DES BELGES. 

2 vol. in-8* (>\. 

« Cette biographie du roi Léopold I er n'est pas un de ces 
panégyriques où l'on célèbre toutes les vertus et tous les 

(') Leopold I, kirtg of the Belgians, autliorized translation, by Robert 
Black, M. A. London, Sampson Low et O, 2 vol. in-8°. 

leopold 1, Kùning der Belgier, nach ungedruekten quellen, etc., 
deutsch von D'J.-J. Balmer-Rinck, (Gotha, F.-A. Perthes), in-8». 

Leven van Leopold 1, eersle koning der Belgen, naer hel fransch 
van Th. Juste. (Gent, W. Rogghé), in-8°. 



* 



' 



15 

mérites d'un monarque défunt. M. Th. Juste a voulu faire 
œuvre d'historien. Il a rassemblé les documents inédits, il 
est remonté aux sources pour ne rien ignorer de la carrière 
si longue et si remplie du roi Léopold I er , et il nous a donné 
un récit riche en faits, où les jugements sont impartiaux, 
où les détails sont intéressants. » — Indépendance belge. 

« 11 eût été difficile de mieux exposer la carrière si bril- 
lante que Léopold a parcourue comme soldat, comme prince 
et comme roi... M. Th. Juste s'est montré, dans son livre, 
historien impartial et calme... C'est l'œuvre austère d'un 
patriote qui comprend sa mission et qui la remplit avec 
conscience, équité et modération. » — Journal de Bruxelles . 

« Personne ne pourra écrire l'histoire de la Belgique 
indépendante, pendant le premier règne, sans puiser large- 
ment dans le livre de M. Th. Juste. » — Journal de Gand. 

« La biographie de Léopold I er présente un résumé com- 
plet, clair et bien divisé, de cette première et glorieuse 
partie de notre histoire nationale. » — Précurseur. 

« Les biographies des Fondateurs seront dans l'avenir le 
commentaire perpétuel le plus fidèle et le plus instructif 
de notre histoire pragmatique... Les meilleures qualités 
de l'historien brillent dans la biographie du fondateur 
de notre dynastie nationale, et quoiqu'il se soit attaché à 
peindre un homme plutôt qu'une époque, son récit et ses 
appréciations se distinguent ici par une ampleur et une 
portée peu communes. » — Journal de Liège. 

« Récemment un historien belge, dont l'impartialité n'est 



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16 

contestée par personne, vient de publier, d'après des docu- 
ments inédits, une très-intéressante biographie du roi Léo- 
pold, qui nous permet de saisir l'ensemble de sa carrière...» 
— Revue des Deux Mondes. 

« Nous avons sous les yeux la deuxième partie de l'inté- 
ressant travail de M. Th. Juste sur le roi Léopold I" r . Ce 
travail se distingue par les qualités qui ont rendu le nom de 
M. Th. Juste populaire en Belgique : sincérité, clarté, sim- 
plicité. La dextérité du prince à ménager et à s'attacher 
les puissances voisines, la prudence proverbiale dont il fit 
preuve dans les circonstances critiques où il se trouva en- 
gagé à l'intérieur et à l'extérieur, la bienveillante protection 
dont il couvrit toujours ses proches, sa fidélité inaltérable 
dans ses affections, tous ces principaux traits qui consti- 
tuent la figure imposante de Léopold I", surnommé le Nes- 
tor de l'Europe, ont été reproduits par M. Juste avec une 
vérité et aussi avec une expression dévouée dont le lecteur 
belgelui saura gré. Un grand nombre de lettres authentiques, 
de dépêches, de pièces diplomatiques, etc., etc., qui ont 
été communiquées à H. Juste et qu'il a reproduites à la fin 
de son volume, donnent une plus-value à son étude. » — 
Le Nord. 



« Sans tomber dans le ton du panégyrique, l'auteur a su, 
avec un chaleureux patriotisme, faire une peinture vivante 
du roi Léopold I"; se rendant l'interprète de la gratitude de 
son pays, il a rendu un légitime hommage au prince qui 
sut réaliser ces belles paroles : Tant que je vivrai, je servi- 
rai de bouclier à la Belgique. • — Historische Zeitschrift. 

« Quoique l'auteur eût traité plus d'une fois avec succès 







17 

le développement récent de son pays, sa tâche n'était pas 
facile cette fois-ci. D'un côté, il ne devait pas blesser une 
nation qui pleurait encore un prince éminent ; de l'autre, 
l'historien avait une trop haute idée de sa mission pour 
accorder des louanges faciles et banales. Les deux extrêmes 
sont évités avec le même tact. Ce qui donne en outre une 
valeur durable à cet ouvrage, c'est l'emploi judicieux et la 
communication de documents restés inconnus. » — Litera- 
risches Centralblatt. 

« L'auteur de tant d'ouvrages remarquables nous donne 
ici, d'après des sources authentiques, un exposé fidèle de la 
vie et des œuvres de Léopold I er , le célèbre fondateur de la 
dynastie et de la liberté belges. » — Osterreichische mili- 
t'àrische Zeitschrift. 



Extraits des journaux anglais. 

« A readable biography of the wise and good King 
Leopold is certain toberead inEngland. Theinterestof his 
life, unlike that of so many sovereigns, is not merely.histo- 
rical. He acted a greatpart on a noble stage, and his name 
is in a measure associated with ail the stirring events of 
this century. The introduction to this biography of Leopold 
is the most interesting portion of the book. It describes 
the King in his study and in his home, the simplicity of his 
tastes, the energy of his character, his capacity for hard 
work, his love of science and gênerai literature, which 
included a spécial inclination for novel reading, his delighl 
in fine scenery , and his passion for exercise. » — Daily 
News. 



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18 

« However frequently the late King of the Belgians was 
designated in his lifetime by the honourable title of the 
« Nestor of modem politics, » it wat never made so clearly 
apparent why he merited that title until this biography was 
written. It is indeed delightful to follow M. Juste as he 
traces the eventful career of this eminent personage from 
the time of his being a cadet of the noble family of Saxe- 
Coburg, through his earlier days, when he took a prominent 
part in that eventful war, of the miseries of which the 
présent génération hâve very little cognizance or thought, 
during which he saw and conversed with Napoléon I, and 
Alexander of Russia, and attached himself to the one, whilst 
he repudiated the offer of promotion from the other ; and 
how afterwards he became the husband of the Princess 
Charlotte, to find, after a few months of happiness not often 
enjoyed by mortal man, ail his prospects blasted by her 
cruel and sudden death ; for we seem to pass through those 
eventful circumstances as in some measure participating in 
them. But it is when M. Juste cornes to record the causes 
of Leopold. I, accepting the Crown of Belgium, and of the 
manner in which he raised that little kingdom to a pitch of 
unexpected prospecity and prominence which it never could 
hâve anticipated, thaï the real value of this biography is 
perceived. Having had the advantage of reading M. Juste's 
biography in the original French, no less than by means of 
Mr. Black's remarkably well-made translation, we are able 
to say that a more important contribution to historical 
literature has not for a long while been furnished, or one 
that will more positively demand and receive the claim of 
présent and future standard réputation. » — Bell's Weekly 
Messenger. 






MMft 



19 

« The author has shown considérable industry in the 
collection of correspondence, and has accomplished his task 
in an enthusiastic spirit. He, moreover, writes agreeably, 
and sometimes even eloquently ; and he is so far impartial 
that he does not hesitate to record opinions adverse to his 
hero. M. Juste's book offers a suffîciently pleasant means 
of refreshing the memory, and of studying the character and 
career of a remarkable prince , who knew how to reap 
the full advantage of living in remarkable times. » — Pall 
Mail Gazette. 



" This translation of the complète memoirs, by Mr. Black 
is executed, so far as a comparison of various correspond- 
ing passages in the two texts enables us to judge, with 
correctness, yet not without a graceful ease. This end is 
not often attained in translations so nearly verbal as this is : 
the book itself deserves tobecomepopular in England. The 
subject is of interest, and the story is narrated without 
excessofeitherenthusiasm or dépréciation. » —Alhenœum. 

« The interesting memoir of M. Juste gives us fresh 
détails of the various complications and conflicting circum- 
stances which affected the life of this popular sovereign. 
M. Juste is altogether a charming guide and companion. 
Much of the matter which M. Théodore Juste has collected 
is a new to us ; and in giving us a Ihoroughly rcadable and 
interesting book, he has increased our admiration for a man 
whose name and famé must last, and whose glory will 
increase, as Belgium each year becomes (he nearer and 
dearer friend of England. » — The Examiner. 

« Circumscribed as are the limits of Belgium , its royal 



S'jtffC s 






20 

founder, Leopo^d I, will ever occupy a foremost place 
among the distinguished worthies of his âge. The rise of 
his fortunes and the development of his plans are the subjects 
of thèse volumes, for which the author has obtained his 
materials from original documents, or from crédible and 
compétent informants. The whole narrative is so perfectly 
in accord with our own observations and the universal tes- 
timony of Europe, that we read it with confidence and 
trust in it with satisfaction » . — Morning Post. 



SYLVAIN YAN DE WEYER. 



2 vol. in-8* 



.. A mesure que l'on s'éloigne du mouvement d'idées qui 
a donné naissance à la nationalité et à la constitution belges, 
il devient plus intéressant et plus utile d'étudier les hommes 
de cette époque à qui notre pays doit une période de pros- 
périté et de développement régulier, presque sans exemple 
sur le continent européen.... Il faut donc savoir gré à 
M. Théodore Juste de continuer sa galerie des fondateurs 
de notre nationalité, en nous faisant encore connaître l'un des 
plus éminents d'entre eux.... Après Léopold I", c'est à lui 
que la Belgique a dû cette inaltérable amitié de l'Angleterre, 
qui a toujours été notre principale sauvegarde. — M. Juste 
nous (ait clairement voir l'œuvre diplomatique accomplie 
par M. Yai; de Weyer. Il publie à l'appui un grand nombre 
de lettres inédites du roi Léopold, de lord Palmerston et 
d'autres hommes d'État anglais. C'est plus qu'une simple 
biographie, ce sont des matériaux pour l'histoire générale. 
— M. Juste nous peint aussi dans l'éminent diplomate belge 
le bibliophile érudit, le spirituel écrivain, le fameux M. Du 



■ * 






21 

Fan, le publiciste clairvoyant et le penseur qui sait donner 
à des réflexions pleines de sens la forme la plus fine, la plus 
juste et parfois la plus piquante. — Un seul fait suffira pour 
faire comprendre l'autorité dont l'envoyé belge jouissait à 
Londres. En 1840, il fut désigné par l'Angleterre et par le 
Portugal pour régler, par une décision arbitrale, les diffé- 
rends qui s'étaient élevés entre les deux pays, marque 
inouïe de confiance qu'on n'a jamais accordée qu'à des 
souverains. — On lira avec un réel intérêt, et non sans un 
certain orgueil patriotique, l'étude que M. Juste a consacrée 
au diplomate, à l'homme d'esprit dont la Belgique n'oubliera 
pas le dévouement et les services. » — E.-L. (Journal de 
Liège.) 

« M. Théodore Juste vient de consacrer deux volumes 
in-8° à la biographie de M. Sylvain Van de Weyer. Les 
documents inédits qu'il lui a été permis de consulter 
donnent un vif intérêt à cette étude politique, une des 
plus importantes de celles que l'auteur a consacrées aux 
« fondateurs de la monarchie belge. » » — Indépendance 
belge. 

«... Avec une carrière aussi remplie sous tant de rapports 
que celle de M. Van de Weyer, M. Juste ne pouvait 
manquer de nous offrir une très-intéressante biographie. 
Ajoutons qu'il a su grouper les faits avec habileté et talent 
et qu'il les a retracés dans un style simple et clair. Ce qui 
donne en outre de la valeur au livre, ce sont les nombreuses 
citations et pièces inédites qu'on rencontre soit dans le 
texte, soit dans les appendices... >• — Revue de Belgique. 

a Nous n'analyserons pas les deux volumes de cette Galerie 






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22 

qui viennent de paraître. Chacun sait que l'homme auquel 
ils sont consacrés, et qui, pour le dire en passant, n'a point 
dû demeurer des siècles sous terre pour être apprécié, 
est un des types politiques les plus élevés et les plus 
remarquables qu'ait produits notre Belgique moderne. Polé- 
miste, orateur du barreau, orateur politique, bibliophile, 
homme de salon, diplomate, landlord, M. Van deWeyera 
su toujours et partout mériter de monter au premier rang, 
et s'y maintenir. A vingt-trois ans, l'opinion publique l'avait 
déjà remarqué ; à trente ans, il était un des hommes les 
plus influents de la révolution, et l'un des plus forts par son 
énergique modération. A trente et un ans, il devenait 
envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de 
Léopold I" à Londres. — Libéral, M. Van de Weyer eut la 
gloire et la force de rester, un des derniers, fidèle à ce grand 
parti de l'union, que les catholiques belges n'ont pas été les 
premiers à répudier, et qui, dans nos sociétés de transi- 
tion, avait si bien vu que gouverner, c'est transiger, non 
avec les principes, mais avec les hommes et les faits. — 
Représentant à Londres de la pensée du pays et de la pensée 
de Léopold I", qui, depuis 1840 jusqu'à sa mort, fut un des 
plus vaillants et des plus influents champions de la paix 
européenne, M. Van de Weyer attacha son nom avec éclat 
à la naissance de notre jeune nationalité. A ce propos, nous 
ne pouvons nous empêcher de dire que le livre de M. Juste 
contient des faits extrêmement curieux sur nos premiers 
rapports avec les puissances étrangères. Ces faits surpren- 
dront bien des personnes; mais qu'y faire? Décidément, la 
statue du général Belliard, en tant qu'elle symbolise l'inter- 
vention désintéressée de Louis-Philippe en notre faveur 
en \ 830, chancelle fort sur son piédestal. Le gouvernement 



23 

de Juillet, tout en ayant l'air de nous défendre, avait une 
envie assez marquée de nous prendre et, sans le vélo 
énergique de l'Angleterre, il se fût peut-être passé cette 
fantaisie. — Ajoutons, en terminant, que les éléments 
principaux de la biographie de M. Van de Weyer sont 
empruntés aux archives particulières de cet homme d'État, 
archives qui, jusqu'à ce jour, étaient restées fermées à tout 
le monde, et qui sont particulièrement riches en documents 
émanés de la plume de toutes les sommités de l'Europe 
contemporaine. C'est là un fait qui donne aux volumes dont 
nous parlons une importance qui n'échappera à personne. » 
— E. P. {Revue catholique, 15 juillet 1871.) 

e . . . Enough for us that this Life of Sylvain Van de Weyer 
abounds in interesting matter — litcrary, social, and 
political ; doing ample crédit to M. Juste's discrimination, 
literary ability, and research... Rarely, very rarely, does 
it corne to pass that the entire career of so eminent and 
active a man can be laid bare before the world in his 
lifetime — safely, fearlessly, and thruthfully — without 
réticence and without offence. » — The Times. 




" Under the title of « The Founders of the Belgian 
monarchy • M. Théodore Juste has written one interesting 
séries of biographies of the principal statesmen and diplo- 
matists who cooperated in an enterprise which was more 
difficult and more perilous than, after forty years of 
success and prosperity, the présent génération would 
readily suppose... Of thèse men, the one who forms the 
subject of the ninth of M. Juste's biographies has especial 
claims upon the regard of Englishmen ; indeed , by long 



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24 

























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residence among us, by family alliance, and by a peculiar 
and quite exceptional position as the représentative of the 
Court most nearly allied to our own , and the most 
intimate and confidential adviser of his Sovereign , 
M. Van de Weyer has, for the best portion of a public life 
concerned withthe highest cares and responsibilities, made 
England something more than h^fécQijta <country. 
— The Saturday Review. 

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Bruxelles. — Fr. Gobbakbts, imp. du Roi, rue de Louvaio, 40 



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LES FONDATEURS DE LA MONARCHIE BELGE, 
Par Théodore Juste. 

Léopold I er , roi des Belges , d'après des documents inédits : 

Première partie (1790-1852), 1 vol. in-8°. 

Deuxième partie (1852-1865), 1 vol. in-8°. 
Surlet de Chokier, régent de la Belgique, d'après ses papiers et 
d'autres documents inédits (1769-1859), 1 vol. in-8°. 

Le baron de Gerlacbe, ancien président du Congrès natio- 
nal, etc., I vol. in-8°. 

Joseph Lebeau, ministre d'Étal, d'après des documents inédits, 
(1794-1865), 1 vol. in-8°. 

Sylvain Van de Weyer, ancien membre du gouvernement provi- 
soire, ancien ministre plénipotentiaire de Belgique à Londres, etc., 
d'après des documents inédits, 2 vol. in-8°. 

Le comte Le Hou, ministre d'État, ancien ministre plénipoten- 
tiaire de Belgique à Paris, etc., d'après ses correspondances diplo- 
matiques et d'autres documents inédits (1792-1856), 1 vol. in-8». 

Le lieutenant général comte Goblet d'Alvlella, ministre 
d'État, etc., d'après des documents inédits, 1 vol..in-8 Q . 

Le comte de Mnelenaere , ministre d'État, etc., d'après des 
documents inédits (1794-1862), 1 vol. in-8°. 

Charles de Bronckere, bourgmestre de Bruxelles, etc. (1796-' 
1860), 1 vol. in-8°. 

Notes historiques et biographiques sur les fonda- 
teurs de l'État belge (1850-1870), d'après des documents 
inédits, 1 vol. in-8°. 

Le comte Félix de Mérode, membre du gouvernement pro- 
visoire, minisire d'État, représentant, etc., d'après des documents 
inédits,' 1 vol. in-8". 



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FR. GOBBAKRTS, 1MP. DU ROI, SUCC. D'KM. DEVROYE. 






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