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r
BCU - Lausanne
illinium
10947S480S
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HISTOIRE
L'EMPIRE OTTOMAN
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8K THOUVK iOALEMEKT
.'.■•' $
a Bruxelles,
chez P. Meline.
Frakcfort ,
Genes,
Jiigel.
Yves-Gravier.
Florence ,
LEIPZIG)
Piatti,
Brockhauss.
TlEHITE,
Varsovie ,
Moscou,
Bossange pere.
^ohrman et Schweigerd.
E. G^ucks^efg.
A. Semen.
V* Gautier et fils.
Ch. Urbain et C ie .
Odessa,
J. Sauron.
Constantinople,
J.-B. Dubois.
IMPRIMERIE DE HENRI DUPUY ,11, RUE BE LA MONNAIE.
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HISTOIRE
DB
L'EMPIRE OTTOMAN
DEPUIS SON ORIGINS JUSQu'a NOS JOURS
PAR J. DE HAMMER.
OUVBACB nui AVX SOVBCE1 Lit PLV1 AtTTBBJITIQUB* ST BBDIOB SVB Oil DOCVMBVS
IT DM MAMDaCBITI LA rLOPABT INCOITirPS Bit BVBOPB;
fcrabutt be r^lUmonb
PAR J.-J. HELLERT;
ACCOMFAGMB d'0H ATLA1 COHFABB DB l'bMPIBB OTTOMAN, COHTBXAlfT 31 CABTKS
BT l5 FLAM DB BATAILLE1 DBBIftBS VAB LB TBADVCTBVB.
TOME SIXIEME.
DtPUD LB PREMIER TRAIT* DB l'aUTBICHB AV1G 1A PORTE OTTOMANS,
jdsqo'a LA MORT DB tiLIM II.
1547 — 1574.
PARIS
BELLIZARD, BARTH&S, DUFOUR ET LOWELL.
I his, RUE DK VERHIDIL.
Cottbre*.
BOSSANGE, BARTHES £T LOWELL ,
i4 1 Great Marlborough Street.
5atnt-|lrter0bottt0.
Fd. BELLIZARD ET Cte, LIBRAIRES,
an Pont-de-Pol.ee.
M DCCG XXXVI
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HISTOIRE
I/EMPIRE OTTOMAN.
LIVRE XXXI.
Le grand-vizir Mohammed Sokolli, le moufti Ebousououd et le roouftl
Elkass Mirza. — Mort du grand-vizir Soulei'man-Pascha et de Khosrew-
Pascha. — Gampagne de Perse. — Prise de Becse, Becskerek, Csanad,
Illadia et Lippa. — Siege de Temeswar. — Assassinat de Martimitri. —
Attaque de Szegedin par les Hongrois et de Wesprim par les Turcs. —
Chute de Temeswar et d'autres chateaux hongrois. — Prise de Solnok et
siege d'Erlau. — Execution du prince Moustafa. — Fin de la guerre de
Perse. — Negotiations de Ferdinand conduites par Yerantins, Zaj et
Busbek. — Changement des princes de la Moldavie et de la Crimee. —
Revolte du faux Moustafa.
Dans le livre pr£c£dent , nous avons rapidement
esquiss£ les 6v6nemens qui se sont accomplis depuis
la paix avec Venise jusqu'k T^poque oii l'Ajutriche
signa 1'aveu de sa faiblesse, en s'obligeant envers la
Porte au paiement annuel d'une somme de trente mille
ducats. Ces 4v6nemens embrassent un laps de temps
de sept ans. D nous reste k donner l'histoire des sept
ann&s qui s'£couldrent entre oe traits si honteux pour
T. VI. I
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2 U1ST01RE
TAUemagne et celui que la Porte conclut plus lard
avec la Perse. La premiere de ces deux £poques con-
tient les campagnes en Hongrie et les negotiations de
cette puissance aupr& de Souleiman ; la seconde ren-
ferme les deux expeditions de Perse et celle de Tran-
sylvanie. Cette fois encore la mort tragique d'un prince
du sang vint jeter un voile de deuil sur la joie qu'on
ressentait des victoires des armes ottomanes. Vers le
m&ne temps, eurent lieu de nombreux mouvemens
administratifs, dont la frequence eut &6 en toute autre
circonstance alarmante pour Tordre et la stability de
1'Etat ; mais Tesprit du gouvernement resta le m£me,
parce qu'il £manait directement du monarque, et mal-
gr61es guerres continuelles avec F&ranger, auxquelles
se joignirent de funestes querelles a l'interieur, la puis-
sance ottomane fut consolid^e par de sages institutions.
L'empire, sous la main cr£atrice de Souleiman, vit
naitre tous les genres de m£rites : des savans, des ge-
nfraux et des hommes d'Etat distingu^s parurent tour
h tour sur la sc≠ et, a c6t£ de toutes ces gloires,
s'flev&ent des mosqu6es, des 6coles, des casernes
et des hdpitaux. Au commencement du r£gne de Sou-
leiman, nous avons donn£, avec le portrait du grand-
vizir Ibrahim , celui des trois autres vizirs , afin de
faire connaitre les instnmiens dont ce prince se ser-
yait pour ex&uter ses grands projets; c'est dans le
njt£me but que noua ajouterons ici quelques mots sur
les hommes les plug marqua'ns qui , depuis lors , eu-
rent pendant de longues ann£es une haute influence
sur h constitution et ('administration de l'empire.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 3
Nous avons beaucoup parte, dans le livre pr^c^-
dent, du grand-vizir Roustem-Pascha; quant aux trois
autreB vizirs, auxquels d'ailleurs nous reviendrons
dans la suite, ils ne sauraient fixer long-temps nos
regards. II n'en est pas de m&ne de deux hommes
qui, k dater de l'£poque dont nous allons retraeer les
6v£nemens, furent jusqu'& la fin du regne de Soulei-
man, et m&ne pendant celui de son fils S£Km, k la
t&e de la legislation et du gouvernement, et se mon-
tr&ent les plus fermes appuis de la puissance otto-
mane. Ces deux hommes d'Etat sont Mohammed
Sokolli et Ebousououd el-Amadi ; le premier fut par
la suite le vainqueur de Szigeth, et occupa la place de
grand- vizir sous le r£gne de trois sultans; le second,
en quality de moufti, fait autorit£ dans la legislation
turque, et son nom figure sur les fetwas qui garan-
tirent la l£galit£ des nouvelles institutions fgodales,
ainsi que sur one foule d'autres. Ebousououd et So-
kolli sont, de tous les hauts dignitaires qui se sont suo
ced£ dans Tempire depuis Osman, ceux qui ont con-
serve le plus long-temps leurs fonctions. Ebousououd
remplit pendant trente ans la charge de moufti ; Mo-
hammed-Sokolli sut pendant quinze ans se maintenir
dans le poste dangereux du grand- vizirat \ Aucun
4e ceux qui ont 6crit 1'histoire ottomane en languc
eurdp6enne n'a demontre suffisamment la cause qui
prolongea la prosperite de l'empire long-temps apres
» Sokolli, de l'annee de Thegire 97a (i564) a lannee 987 (1579); et
Ebousououd, de 95a (i545) a 98a (1574)* Tables chronologiques de
Hadji Khalfa.
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4 MISTOIRE
la mort de Souletman, sous k r&gne de son indigne
successeur S61im , bien que oette cause ftkt facile k
trouver. En effet, la permanence de cet &at flora-
sant s'explkpie par le maintien dans leurs fonotions
du grand- vizir Sokolli et du moufti Ebousououd,
qui continu£rent ^'impulsion donnfe par Souleimarife
Tempire.
Mohammed le Bosnien, n£ au chateau de Sokol,
-appel£ rud de faucon k cause de sa position sur un
rocher escarp£ , avait ete £lev£ parmi leg pages du
harem. Souleiman le nomma son tr&orier, et lui
donna, aussk6t apr& la mort de Khaireddin-Barbe-
rousse , le commandement de la flotte avec le titre
de grand-amiral. Quant aux phases ult&ieures de sa
carrfere politique et militaire, nous aurons souvent
occasion d'y revenir dans le cours de cette histpif e.
Ebousououd el- Amadi, fils du scheikh Mohammed. ■
se livra d'abord k l'etude des lois, et occupa sue-
cessivement les places de professeur et de juge. II
exergak depuis huk am la haute Fonction de juge
de l'arm6e de Roumilie , lorsque Souleiman l'£leva k
la plus haute charge legislative , celle de mouffi ou
scheikh de lislamisme. Auteur de plusieurs Irakis ,
Ebousououd a surtout obtenu une grande imputation,
comme legist e, par un commetrtaire sur le Koran, le
plus &endu que lion connaisse, et dans lequei il a
fondu les deux grands commcutaipes de Kari Beid-
hawi et le Keschaf de Samakhscfaari. Le Sultan, apr&s
avoir regu le premier volume de cet ouvrage et en
avoir pris connaissance . porta le traitement d'Ebou-
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DE L'EMPIKE OTTOMAN. 5
aououd d* trofc cents aspre* par jour (six ducats) , au-
quel il &ait 6x4, k, cinq cents asptes (>dix ducats), et 9
sur la pr&entation du second volume, il l'augmenla
encore de cent aspres; aia», grftce £ son savoir et k
ses travaux y le mouftt vit douhler ses reverts quoti-
diens '. Ebousououd el-Amadi et Mohammed SokollL
&aient Vun et l'autre d'une taille £lev£e, et maigres
comme Souleknan; tons deux swaient des palais sur
le bord de la mer k Sudludj£ % pott et faubourg de
Constantinople, dont le nom (le laiteux) rappeHe celui
de la source de lau (Galakrene) que dans 1'origme
ce port avait regu des Byzantins; tous les deux enfint
reposent en face de Siidludj4 k c6te Tun de r autre,
aupr&s de la mosqu£e d'Eyoub, lieu consacr^ k la
v£n6ration des Musulraans par la tombe du porte-
&endard du Proph&e; Ebousououd est enseveli au
milieu de ses enfans, SokolH sous un d6me construit
par l'architecte Sinan 3 .
Le moufti Ebousououd, le kapitan-pascha SokolH
et le grand-vizir Roustem &aient a cette £poque les
trois hommes les plus 6minens de l'empire, tant par
teur position que par leurs talens. (Test en appelant
de tels hommes aux charges les plus importantes que
' AH, dans la Lisle des Oulemas du regne de S£lim II, f. 374* Almos-
nino, p. 1 4a, dit, d'accord avec lui : Le sennalb seiscientos aspros de
solaria* Almosnino raconte, au sujet de la visite qu'il fit a Ebousououd, que
le savant moufti le re^ut avec la plus-grande distinction, et qu'flentra avec
Jui en conversation sur Aristote et Galene.
» Sudltidje. Voyez Constantinople et le Bosphore, II, p. 44.
3 Eyoab, Voyei (Constantinople et le Bosphore, II, p. a4.
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(i HISTOIRE
Souleiman montra de nouveau cette quality dun grand
souverain, qui consiste principalement a choisir des
ministres capables, et a les maintenir dans leurs em-
plois sans jalousie pour la superiority de leur esprit ou
de leur caractere. Souleiman avail nagu£re destitu£ un
de ses meilleufs g£n£raiix , Khbsrew -Pacha , ancien
gouverneur de Bosnie, ainsi que le vieux grand-vizir
Souleiman-Pascha ; mais cette destitution avait £t&
proyoqu^e par une dispute inconvenante des deux
vizirs daris le diwan. Tous deux ne surv£curent pas
long-temps a la perte de leurs charges et de leur in-
fluence; le dernier cependant, eunuque octog&iaire,
traina pendant trois ans encore une vie solitaire h
Malgara, tandis que Khosrew, trop foible pour sup-
porter une existence sans pou voir, y mit un terme en
se laissant mourir de faim. Lorsque pour la premifere
fois depuis sa disgr&ce il lui prit envie de monter a
cheval, et qu'en regardant autour de lui il ne vit ni
pages, ni gardes, ni bonnets, ni kaftans brod£s d'or,
il renonga h 1'instant a sa promenade et prit la vie en
d£goftt : « Mieux vaut rester au lit , s'£cria-t-il , que
d'etre h cheval ainsi. » En disant cela, il 6ta son pied
de r&rier, rentra chez lui et se coucha. Les m^decins
qui voulurent lui donner des m^dicamens furent ren-
voy6s. « Vous voulez me faire avaler du poison 1 . » leur
dit-il; et depuis il ne prit plus aucune nourriture; huit
jours apr6s, il avait cess6 d'exister. Le suicide, dont
on trouve de frequens exemples chez les Grecs et les
Romains, est un fait presque inoui dans Fhistoire des
Musulmans, que leur aveugle soumission a la volonte
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DE L'EMftRE OTTOMAN. 7
divine protege ordinairement contre le desespoir. Le
grand-vizir Loutfi-Pascha , que le m&ne sort avait
frapp£ naguere, se conduisit a cette occasion ateC
plus de sagesse : il employa ses loisirs a ecrire une
histoire del' empire, dans laquelle il raconte cet £ve-
nement avec toutes ses circonstances ! .
Ge fat dans l'ann& 1 547 (954), si remarquable par
le traits de pais conclu avec Ferdinand de Hongrie et
l'empereur Charles-Quint, qu'on vit arriver £ Con-
stantinople , en m£me temps que les ambassadeurs des
monarques chretiens, un envoye d'un sultan indien,
Alaeddin, charg£ d'implorer l'assistance de Soulei-
man contre les Portugais.
Lambassadeur d'Alaeddin oflrit au Sultan des ani-
maux fort rares, des perroquets de couleurs merveil-
leuses, des Apices et des parfums pr£cieux, des bau-
mes, des nggres, et des eunuques parmi lesquels il sen
trouvait un qui ne mangeait que de la chair humaine '.
Mais un spectacle bien plus imposant que celui du
cortege de lambassadeur indien fut donn6 au peuple
lors de l'arrivle k Constantinople du prince persan ,
Elkass Mirza, qui s'&ait revolte contre son fr£re, le
schah Tahmasp. Elkass, emporte par la crainte dune
juste punkion , se r£fugia en Europe , en passant par
le Deschtkipdjak et la Mer-Noire , et vint chercher
protection k la Porte. Le Sultan, voulant lui donner
le spectacle d'une entree solennelle dans 1'une de ses
» Loulfi, Hisioirc, a raim& 952 (1542), f. 98 et 99.
* AH, xLiv e r&it, f. a56. Petschewi, f. 88. Djelahad£,f.a65. Solafczade,
f. 114. Loutfi, f. 99. Abdoulaziz, f. 160. Lc Raouzaioul-ebrar, f. 56a,
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8 HISTOlliE
estates et ckJpJoyer k se* yeox fortes les magnifi-
cences de sa cour, retarda l'audieace da prince jns-
qu'3t son retour k Andrinople. Lorsqae les diflftrens
corps des armuriers, de l'artiUerie, des sipahis et des
silihdars d6fil£rent devant le prince, il se leva de son
stege, croyant que chaqne chef de corps &ait le Sul-
tan. H ne lui resta aucun doute lorsqu'il yitapparaltre
laga des janissaires entour£ de son brillant <$tat-major.
Son erreur se prolongea lorsque le grand-vizir, pri-
c£d6 des trois vizirs et suivi des gens de son pahis et
des hauts fonctionnaires de 1' empire, vint k passer. Le
prince fut tellement £puise par ses agitations conti-
nuelles et son admiration sans cesse renaissante k la
vue de tant de splendeur et de magnificence , que ,
lorsqu'& la fin Souleiman lui-m&ne arriva au milieu
de leclat des casques et des panaches, des bonnets
dor et d'une for^t de lances dorees, il demeura assis
presque sans connaissance. Le lendemain. avant 1'au-
dience, le Sultan lui fit offrir au diwan un repas splen-
dide, aprds lequel il lui envoya de nombreux pr£-
sens , auxquels &aient joints ceux du harem et des
vizirs. Les pr6sens du Sultan consistaient surtout en
bourses remplies d'or et d'argent, en chides et en &offes
pr£qieuses, en chevaux et mules, et en une nombreuse
troupe d'esclaves noirs et blancs. Par une condescen-
dance inouie, la sultane Khourrem, mere de S&iro, fit
remettre au prince des chemises et des tabliers de soie
coitus par elle-m6me. De pareilles richesses prodi-
gu&s au bonnet rouge (sobriquet que donnaient alors
les Turcs aux Persans, a cause de la pointe rouge de"
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DE L'EMMRE OTTOMAN. 9
toura turbans k deuie ph*) exeift&rent h& amttnures
des 8umm z&& qui fie voyaient dafls ie prince scfciite
qii'uft informant damn6 t peut-£tre m*me mi traftre.
Souleimaii, lorsqu on hi rapporta fcs brtiHs qui cou-
raient parmi le peuple , se contents de r£pondre :
« Nous avons fait ce que rhomieur et la dignity de
l'empire exigeaient. S'il y a trahison , nous en re-
mettans la pumtion entre les mains de Dieu , notre
seigneur! ' * La reception extraordinaire accord£e au
prince par le Sultan r^v&ait, par son appareil de
forces militaires, les dispositions hostUes de laTurquie
k F^gard de la Perse t et les pr&ens de la suttane in-
dftqu&rtint cuffisamment que la nouveHe guerre contre
ce royaume avait 616 r&olue sur les instigations du
harem.
La sidtane Khourrem (la joyetise), Russe de nais-
sance, que des historiens, frangais out pr&endu ap-
partenir a leur nation sous le neon de Roxelane, fut
d'abord la concubine fovdHte, et enstiite la femme
legitime de Souleiman. Dix ans avant l^poque dotat
nous parlons, elle avail <kj& min6 le credit du grand-
vizir Ibrahim, en le repr&sentant comme secr&etnent
devout aux Persans, et appuyant son accusation sur
ce qu'il avait refuse k ses troupes le pillage de Tebriz
et de Bagdad Ge fut done L'arriv£e du prince Elkass
qui fit 6clater une guerre m£dit£e depuis dix ans; le
traite recemment conchi avec rAUemagneenfevorisa
d'ailleurs l'explosion. L'£pouse bien-aim£e de Sou-
1 Petschewi, f. 88.
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io HJSTOIRE
leiman d&iraii depuis long-temps une occasion de
donner carri&re aux talens militaires de son gendre,
le grand- vizir Roustem-Pascka; elle souhaitait £gale-
ment l'absence du Sultan, afin jcpie l'ain^ de ses trois
fils , le prince S&im , flit appel£ k le repr&enter en
Europe. D&-lors, la gueire contrela Perse ^tant de-
cid£e, Elkass Mirza fut d'avance envoy6 k la fronti&re,
accompagn£ d'Oulama-Pascha, qui fut adjoint au ser-
vice du prince en quality de lala (pr&epteur), et
passa k cet effet du gouvterriement de Bosnie k celui
d'Erzeroum.
Au printemps suivant (1548); Souleiman, pour la
onzi&ne fois de sa vie, ouvrit en personne la cam-
pagne; il passa d'abord par Seid-e-Ghazi, Koniah et
Siwas[i]; de grands honneurs lui furent rendus dans
ces trois villes : k Seid-e-Ghazi , par son fils S61im ,
gouverneur de Magn£sie ; k Koniah , par le sultan
Bayezid, gouverneur de Karamanie; et enfin k Si was,
par le sultan Moustafa, gouverneur du pays de Roum,
tous les trois ayant quitt£ leurs capitales pour recevoir
le Sultan a son passage. Avant de partir de Seid-e-
Ghazi, il envoya en Europe le prince S£lim, avec
ordre de prendre en son absence les rfines du gouver-
nement \ D'Amassia, on se dirigea sur Erzeroum et
Aadildjouwaz , d'ou Piri-Pascha , beglerbeg de Ka-
ramanie, et Oulama-Pascha, beglerbeg d'Erzeroum,
furent detaches pour former le stege de Wan. Dans sa
i AH, xl\c r&ut. Petsthewi, f. 89. Solakzade. DjeJalzad6, f. 268. Abdoul-
aziz, f. 122.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 1 1
marche d'Erzeroum k Aadildjouwaz, Souleiman admit
en sa presence Ali-Sultan, fils de Khalil, ancieti sou-
verain legitime de Schirwan , qu'il avail fait appeler
pr& de lui pour le confirmer dans son heritage pa-
ter nel. Khalil-Sultan avait epous£ la fille du schah
Ismail; roais, apres la mort de ce dernier, le schah
Tahmasp , maitre de Schamakhi qu'il avait assiegfe
pendant sept mois, avait chass6 Ali encore mineiir, et
donne k son propre frfere Elkass Mirza le gouverne-
ment de Schirwan. Lors de Famvee d'Elkass Mirza
a Constantinople, le Sultan renvoya (fans ses Etats le
jeune Ali, r^fugie k Constantinople depuis son expul-
sion, et le r&ablit dans tous ses droits \Sur la de-
mande d'Elkass Mirza , Souleiman , arriv£ pr6s des
fronti£res de la Perse, au lieu de marcher sur Wan,
se dirigea vers Tebriz, dont le prince persan avait
naguere voulu usurper la possession sur son frere.
Le Sultan repoussa noblement les conseils vindicates
d'Elkass Mirza , qui ne tendaient a rien moins qu'a
faire un massacre g£n£ral des habitans, ou a les ame-
ner comme colons dans les Etats ottomans. Apr&s
avoir conquis tout le territoire situe au sud-ouest de
l'Araxe et une partie du Kurdistan persan, Souleiman
mit le siege devant Tebriz , dont les habitans se ren-
direht sans coup-ferir. II ne s'y arr6ta que cinq jours,
pendant lesquels il fit observer k ses troupes la dis-
cipline la plus s£v&re; puis il revint sur ses pas et
marcha sur Wan a .
■ Ali, Petschewi, Solakzade, Djelalzad£, Abdoulaziz.
2 Ali, PeUchewi, Solalzadl, Djelalzade, Abdoulaziz. Ali dit que la
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ra B1STOIRE
Vera fe milieu «ki mm d'aodt (10 redfeb —
16 aoftt 1548), Farm^e Ottoman* ouvrit te stege de
Wan; cette place fut bombard£e pendant hurt jours
par la grosse artfllerie arriv^e d'Erzeroum, et prise le
■eavifrne par suite de Intelligence qui s'&ait &abKe
entfe Elka* Mirza et les assHsgA*. Sonleiman cotifia la
garde de cette forteresse, la plus knportante de ceftes
des frontteres persanes, au tschetkesse Iskender-Pa-
scba r ancien defterdar d'Anatolie, et prit ses qdartiers
d'hiver, lasaison avanc^e le for^ant k ajourner foute
operation uk^rieure '. Mais k peine le Sultan eut-it
quitt£ lescontr^es voianes.de la Perse, que Schah Tab-
masp s'avan^a, d&vasta less environs d'Aadildjouvm,
de Mousch et d'Akhlath, et dispersa le detacheroetot
ottoman charg6 de reprendre le fort de Karss* Pour
arr&er les effete desastreux de cette petite guerre, Sou-
leiman envoya d'Amid le second vizir Ahmed-Pascha.
Ahmed donna le commandement de son avant-garde
au brave tscherkesse Osman-Pascha , qui, pr& de
Koumakh, dtefit tes Persans, k laide d'un stratag&me
asses extraordinaire ; Osman-Pascha fit rasserabler
une troupe de chevaux et attacher a lew queue des
corbeaux et des corneilles , pins on les poussa pendant
la nuit dans le camp des Persans ; ceux-ci , croyant
dej& les- ennemis au milieu d'eux . se jet^rent les uns
sur les autres et s'entr'6gorg6rent mutuellement. En
discipline fut si rigoureuse « qu'aucune poule n'eirt dfoeuf cass£, el qu'aucim
coq ue put se plaiodre. »
i Petschewi, f. 90. Solakzade, f. 11 5. Ali, xlv* 5 evenement, f. 357.
Djelalzade\ f> * 7 4.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i3
recompense (Tune mse qui avail » Wen r&wsi, Qsman-
Pascha fat nomm£ gouyerneur de Halob '.
Elkass Mira, qui d& l'origine n'&ait pas tr&-bien
vu dans Farm^e, obtint la permission de battre le ter-
ritoire de Kascfran, Koura et Isfahan. Cette incursion
aurait pu 6tre fatale pour Tahmasp, car Elkass avait
dans qe pays de nombreux partisans ; mais on ne
lui acqorda que quelques sommes d'argent, et, au lieu
de troupes reguli^res, il n'eut pour escorte que des
Kurdes et autres a ven tuners, rebut de Fannie. Apr&s
le depart du prince persan et la f&te du Beiram qu'on
c&ebra a Tscholek, Souleiman se dirigea sur Haleb,
ou il arriva vers la 6n de novembre (25 schewal —
26 novembre 1 548) 2 ; pendant son s£jour dans cette
ville, il manda prte de lui son fils Sultan-Bayezid,
gouverneur de Kararaanie. Elkass Mirza, qui avail
pouss£ sou incursion jusqu'a Isfahan, fit part au Sul-
tan des succ^s qu'il avail remport£s sur son fr&re, et lui
envoya <les pr&eos considerables, fruit de seg rapines;
parmi les objets offerts par le prince persan k Sou-
Jeanan , on remarquait surtout des exeraplaires du
Koran, de la tradition et du Schahnam£, divers ou-
vrages de poetes, richement relics en or, des armes
de toutes esp&ces incras&es de diamans et autre*
pwres pr^cjenses, de gros morceaux d'ambre et de
muse , des balles d'aloes , des sacs remplis de tur-
quoises de Nischabour et de rubis de Bedakhschan,
des mousselineg de l'lnde, des ch&les de Cachemire,
» Petschewi, Solakzade, Ali, Djelalzade.
* Petschewi, f. 93. Solakzade, f. n5. Djelalsade, f. 377. AJ*.
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1 4 HISTOIHE
des draps de Perse, des tapis du Khorassan et diverses
&offes de prix '.
A la tn6me £poque , le beglerbeg Aouz Iskender-
Pascha fit savoir au Sultan qu'il avait d&ait le traitre
Hadji Denboulli, khan de Khoi; dun autre c6t£, le
vizir Mohammed-Pascha l'informa qu'il avait r6duit
les rebelles de l'Albanie , qui avaient assailli et tu£
Mousa, beglerbeg d'Erzeroum, et qu'il leur avait pris
sept chateaux 2 .
De retour dune grande chasse dans les environs
de Haleb, Souleiman quitta cette place le 5 juin 1 549
(1 djemazioul-ewwel) ; cinq jours plus tar<T, il con-
g&lia son fils Bayezid avec l'ordre de retourner k son
poste. Le 3 juillet, le Sultan passa l'Euphrate, et vint
camper avec son arm£e a Almalu, ou Elkass Mirza
avait aussi &6 invito k se rendre; mais instruit des
intentions de Souleiman k son egard, et voulant £viter
Igalement le Sultan et le troisteme vizir Mohammed-
Pascha qui marchait sur Bagdad, il s'enfuit en toute
hate dans le Kurdistan. Attaqu£ par la fi&vre, il s'ar-
r6ta k Tschinar, oii il fut sur pris par son fWre Sohrab
et livr£ aux mains du schah Tahmasp; celui-ci, jus-
tement irrit6 de ses trahisons, le retint prisonnjer le
reste de sa vie dans un chateau -fort 3 .
Souleiman arriva le 10 septembre (17 sch&ban) k
i Djelalzade, f. 276. Petschewi, f. 9S. Ali, f. a58.
a Djelaltade, f. 279. Petschewi, f. 92. Ali, f. *58. Ces ch&reaux sont
reuz de Bcrakan, Niak (dans Pelscbewi, Bedak), Koiki, Bernak, Kout-
schouk, Samaghan et Akha.
3 Petschewi, f. 93.
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Dfc V EMPIRE OTTOMAN. i5
Erzeroum, d'oii it envoya en Gforgie son second
vizir Ahmed-Pascha. Ahmed soumit en moins de six
semaines vingt cMteaux. dont les plus remarquables
sont Tortoum, Nedjah, Mirakhor, Akdjekalaa, Ben-
gfaerd et Istertoud '. De retour de cette excursion,
Ahmed eut l'honneur d'etre admis k baiser la main du
Sultan, k Tscholek (94 octobre — 2 schewal), et fiit,
en recompense de ses brillans succ£s, revdtu dun
kaftan richement brod6d'or. Quinze jours apres, l'ar-
m6e commenga k operer sa retraite, et Souleiman
rentra heureusement k Constantinople le 21 d£cembre
1 549 (1 ^ silhidj6 956).
Dans une lettre de victoire envoy^e a Ferdinand ,
Souleiman lui annonce en termes pompeux la con-
qufte de trente-une villes, la destruction de quatorze
autres, et la fortification de vingt-huit places jus-
qu'alors sans defense a . Des bulletins semblables fu-
rent envoy& au doge de Venise et au roi de Pologne 3 .
La lettre adress^e k Ferdinand fut portee par Finter-
i Fetschewi, f. 94. Djelalzade, f. 284. Ali, xlvic recit, f. a5fr. Solak-
zade, f. 116.
» II n'existe de cette lettre qu'une traduction la tine parmi les pieces
d'Etat des archives I. R. d'Aulriche; cette traduction d£figure les noms des
villes persanes et les change en ceux de Cosaignan, Tetmas, Nasar, Sakas,
Cineuri, Re van, etc.
3 On trouve, dans la Bibliotheque du prince Czartorisky a Pulawy,
une Lettre du mob de rebioul-ewwel g56 (avril 1549) > traduite en polonais ;
une autre du mois de ramazan (octobre i54g) et datee de Kara-Aroid
(Diarbekr), annonce au roi les victoires remportees par le Sultan en Perse,
et reclame contre les incursions des Cosaques dans le territoire d'Okzakov.
Une troisieme lettre du mois de saTer 957 (mars i55o) est relative a cette
meme incursion.
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16 HISTOIKE
pr&e Ahmed, renegat allemand dont les parens habi-
taient Vieiine ; Souleiman avait fait choix de ce meg-
sager dans l'espoir que, n£ sujet autrichien, il lui
serait pips facile de s'instruire des intentions du ^oi k
regard, de la Transylvanie : on savait que ce dernier
n^goriait k la fois, avec le moine Gr^goire, Fihcor-
poration de cette province k la Hongrie et r&oigne-
ment de la reine Isabelle '.
Le premier paiement des trente mille ducats, regard^
comme present volontaire par Ferdinand, et par Sou-
leiman comme tribut impost, ayait &6 vers6 Tann£e
pr6c£dente , au trdisor du Sultan , par les secretaires
autrichiens Singkmoser et Justi de Argento a . En m&ne
temps, Deseuffy avait et6 envoy 6 pour la troisi&me
fois a Ofen, avec un present en argent pour le nou-
veau gouverneur Kasim-Pascfra, successeur de Yahya-
Paschaoghli , mort depuis peu 3 . Neanmoins le traits
de paix fut mal observe ; le Persan Welidjan, beg de
Stuhlweissenboyrg » d^vasta avec quatre mille hora-
mes tout le pays entre Raab et Papa. Paul Ratkai et
Emeric Teleki , commandant de Papa et de Wess-
prim , aprfes avoir tire quelques renforts de la forte-
■ Pauli Bornemissce epistola ad Thorn. Nadasd, Vienna^ a 3 M. 17 So >
ap. Pray ep. prog., t. II, p. 195.
9 Ferd, ad Mailat, Prag., i3 mart. i549 : Per eum (Jurti) et secreta-
rium Singkmoser misimus pecuniar annuas ut munus ad numus Ibrahim
Bastce tradat, item Junisbego Rustembass* et aliis Batsis, Dans tat archives
L R. dAutriche. %
3 Ferd, ad Bastam budensem , 3 nov. i548 : Ea qua* nahii per kominan
vestrum Huzsepk (Yousouf) etfidelem auiicum nostrum Joanmem Deteuffy
nuntiastis, Archives de la maison I. R. d'Autriche.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. t-
tfesse de Raab, march£rent au-devant des Turcs; ils
les rencontrferent k Tentr^e de la for& de Bakon, et,
les attaquant aussit6t, ils leur reprirent leurs prison-
niers, en firent sur eux six cents, et leur enlev&rent
treize &endards. Welidjan lui-m6me fut bless£ et ne
s'6chappa qu'avec peine '.
Ce fut en vain que le gouverneur du roi en Hon-
grie d£puta Sigismond Posgay et Andr6 Tarnockzy k
Ofen, pour engager le gouverneur ottoman a mettre
un terme k ces continuelles infractions au traits a ; leurs
remontrances ne furent point ecoutees. Toutefois des
d£l£gu£s des deux nations se r£unirent dans le bourg
deGyoengyces; c'&aient, du cdt£ desHongrois, Andr6
Tarnoczy , Etienne Nisquei et Antoine Nagvath ; et, du
c6t£ des Turcs, le derwisch Tschelebi, Mohammed,
juge deGran, et Ali, secretaire du diwan; mais Ten-
trevue se termina par des querelles, et peu s'en fallut
qu'elle n'amen&t de nouvelles violences ; Tespritcon-
ciliant du derwisch ne parvint qu'avec peine a com-
primer la fureur de ses collogues, et les Hongrois re-
partirent sans avoir rien obtenu 3 . Un mot imprudent
i Istuanfi, 1. XVI.
» Relatio Sigismuridi Posgay a Bass a Budensi ad legalionem Domini to-
cumtenentis et capitani generaUs , mense februario i549, d* D8 Kovachich,
Script, nan,, I, p. 81 ; — - et Summa relationis Andrea Tarnoczy a Bass a
Budensi ad primam legationem R. M. a. 1 549 die 1 S sept. Posonii expo -
siim, dans Kovachich, I, p. 89. Ensuite, les instructions des deux envoyes
am archives I. R. : 10 Instructio pro Andrea Tarnoczy capitaneo Nassa-
distarum, Pragtt, dd. i5 aug. x549J **Instruttio data Sigismundo Posgay \
1 3 mart. i549«
3 Istuanfi, XVI, eel. de Cologne, p. 291.
T. VI. 2
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itf HISTOIRE
£chapp£ k l'empereur devant le ren^gat Mahmoud f
envoy 6 de la Porte, vint encore r£veiller la defiance da
Sultan, et confirmer tous ses soupgons k regard des
affaires de la Transylvanie '. Leg intrigues du moine
George ne cessaient d'inspirer de justes craintes k
Isabelle, qui se vit dans la n£cessit£ de r£clamer pour
son fils 1' assistance du Sultan. Celui-ci ordonna k
Mahmoud-Tschaousch de se rendre sans d£lai en
Transylvanie, et de communiquer aux trois nations
(les Hongrois, Szekliens et Saxons) un ferman par
lequel il leur enjoignait eti termes mena$ans d Eloi-
gner le moine du gouvernement, die le livrer pieds et
poings li£s k la Porte, et de ne reconnaitre d£sormais
d'autre autorit6 que celle de la reine ou de son fid&le
conseUler Petrovich [n].
En m&ne temps Axslanbeg, safidjak de Hatwan et
de Colocza, fils du d£funt gouverneur d'Ofen, Yahya-
paschaoghli Mohammed, re^ut du Sultan un arc, des
filches, im sabre et un turban, avec l'ordre de se por-
ter aussitdt sur Erku a . Kaskn-Pascha, qui &ait alors
gouverneur d'Ofen a , dut se tenir pr6t k se rendre
en Transylvanie pour aller au secours de la reine
Isabelle et de son fils, que George obs£dait sans cesse
en les pressant de c6der la couronne k Ferdinand.
* Ad reginam Ahmatus (Mahmoud), cui wale quadam nuper a rege
nosiro credit* sunt. (Epistola Ferantii, 4 octob. i55o , dans Catona, XXI ,
p. 1098.)
» Ferantii Ep. ad Thomam Nadasd, i5 mai i5So. Il ecril, sui?ant la
prononciation hongroise, Orozlan pour Arslan. Catona, XXI, p. 1072.
3 Dans Istuanfi, Cassonus; dans Fessler, VII, p. 699, Kaszsum.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 19
Souleiman, dans une lettre £crite a* forme de ferman,
exigea la demolition du chateau de Szohrok corame
ay ant &e construit sur le territoire ottoman l . Pendant
que ces &v6nemens se passaient en Hongrie, l'envoy*
polonais, Nicolas Bohoucz, apporta k Constantinople
une lettre de Sigismond-Auguste de Pologne, dans
laquelle ce monarque renouvelait an Sultan ses assu-
rances d'amkte, et lui donnait des explications satisfai-
santes sur les irruptions de Lazcsky dans les environs
d'Oczakov '. Ainsi s'£coula l'annee 1550, pendant la-
quelle Souleiman, accompagn£ du grand-vizir et du
moufti 3 , posa en presence de toute sa cour les fbn-
demens de la grande mosqule de Constantinople. Ge
chef-d'oeuvre de ^architecture ottomane porte au
plus haut point, dans la grandeur de son style et la
richesse de ses details , le caraet&re de l'6poque la
plus florissante de l'empire; la Souretmaniye, &ev£e
sur une des sept collines de la ville, appelle de loin les
regards du yoyageur , tandis que de pr6s elle frappe
d admiration par la d&icatesse de son travail.
1 La lettre de Souleiman en forme de ferman, et datee de silhidje' 957
(decembre i55o), est deposee dans les archives de la maison I. R. d'Au-
triche.
» Ou trouve, dan* la BibKolheque da prince Ciartori&ky a Pulawy, fort
riche en documens historiques, lea lettres qui suivent traduites en polonais
et relatives, 10 aux incursions de Lasczky, i55o; ao au paiement des dettes
(fun ambassadeur polonais, i55o; 3© au remboursement d'une somme
d'argent prise par Luborairsky a un juif ; 40 a la confirmation du sauf-
cenduit de l'ambassadeur polonais, et a la prometse de restituer au Polonais
Mathias Mioulsky 1'argent que des brigands lui avaient enleve (achewal
968 — r octobre i55i).
3 Ewlia. Hadji Khalfa, Tables chronohgiques.
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*o HISTOIKE
L'ann& suivante (1551), le moine George contf-
nua k tromper la vigilance de Souleiinan. en lui adres-
sant de faux rapports sur les affaires deTransylvanie.
Ainsi, dans le moment m6me oii il negociait avec
Ferdinand L'abaudon de la Transylvanie et du Banat,
il mandait effront&nent k Constantinople que tous les
bruits r£pandus sur l'entree des Allemands dans les
Etats de Sigismond Zapolya &aient d£nu£s de tout
fondement.
Au mois de juillet . la reine , apr£s avoir remis la
couronne de Hongrie entre les mains de Dobo de
Ruszka , d'Andr£ Bathory et de Laurent Ny£ri, ^tait
sur le point de livrer tout le pays aux commissaires
de Ferdinand pour se retirer k Kaschau, lorsque Sou-
leiman 6crivit aux Transylvaniens : « Que nesachant,
dans l'incertitude oii le laissaient les rapports contra-
dictoires du moine et du pascha d'Ofen, si les Alle-
mands ne s'&aient pas encore mis en marche , ainsi
que le pr&endait le premier, ou s'ils &aient d£j& au
coeur du pays, ainsi que le disait le second, il avait
ordonn£ au beglerbeg de Roumilie et k Roustem,
pascha de Semendra, de prendre les armes; k Mal-
kodjoghli, sandjak de Widin, de se mettre k la t6te des
Valaques, et k Mohammedbeg, sandjak deNikopolis,
de prendre le commandement des Moldaves et des
Tatares de la Dobroudja l . » Cependant le khan de la
Cringe s'&ait mis k la t6te de ses Tatares, et le grand-
vizir Roustem avait rejoint les corps des janissaires et
» Ce sonl les Tatares Dereuilev de Feeler.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. it
ides sipabis ■• Mohammed Sokolli , fils (Fun pr6tre
bosnien, qui cinq ans auparavant avait c&16 la dignity
de kapitan-pascha ii Sinan, fr6re du grand- vizir Reus-
tem [hi], venait d'etre nomm£ beglerbeg de Rou-
railie. Charg6 d'ouvrir la campagne , Mohammedbeg
avait £tabli son camp k Slankamen en attendant qu'Ou-
lama-Pascha, qui de retour de Perse avait repris son
ancien gouvernement de Bosnie, eftt op6r6 sa joncr-
tion avec lui. A ces forces ddji imposantes devaient
encore se r&inir le corps d'armte d' Alibeg , les cou-
reurs de Mikhaloghli et les troupes deKasim-Pascha,
gouverneur d'Ofen a , qui venait d'etre destitu£ et rem-
plac6 par Ali-Pascha pour n'avoir pas emp6che a
temps les Hongrois de fortifier Szolnok.
Lorsque Souleiman eut acquis la certitude de la
'Irahison du moine, de la cession de la Transylvanie
a Ferdinand et de l'entree des troupes d'Autriche
dans le royaume , il fit appejer au diwan Malvezzi ,
ambassadeur de Ferdinand. Malvezzi gagea sa t&e
qu'il n'y avait rien, de vrai dans tout cela; mais,
comme il ne pouvait donner des explications satis-
faisantes et qu'il se rejetait sur l'insuffisance de ses
instructions, il fut enfermi dans la tour noire du fori
d'Anatolie 3 , sur les bords du Bospbore. Ce chateau*
dont la destination 6tait semblable k celle du chdteau
> Solimani liuera ad TrantylvoHos die I jul. 1 5 5 1 , dans Pray, t. II>p. 1 1 9.
» Istuanfi, XVII, ed. de Cologne, p. 3oo.
3 Et non pas dans les Sept-Tours (comme l'assurent Istuanfi, et, d'apres
lui, Fessler, vol. VU, p. 719) ou perirent a cette epoque Valentin Tcsrcek
et Mailath.
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32 HISTOIRE
de I'oubti ctes ancient rois de Perse, et kcelle Anpuits
de sang deg Sept-Toura , ftrt pendant long -temps la
terreur des Hongrois et des Allemands. L'empereur
6crivit aussitdt au Sultan pour se plaindre de cette
violation du droit des gens; mais Souleiman, dans sa
r£ponse en forme de ferman , £tablit cette maxime
Strange et contraire m6me aux pr^ceptes de Fisla-
misme , « que les ambassadeurs r£pondaient de la
parole donate par leurs maftres, et qu'en leur qualite
dotages, ils devaient en expier la violation '. » En
attendant, soixante mille Turcs s'&aient rassembles a
Slankamen sous les ordres de Mohammed Sokolli;
mais le g&i£ral ottoman etait aussi abuse par les lettres
trompeuses da fr&re George, qui, gr&ce a Interces-
sion de Ferdinand aupres du Pape, echangea peu de
temps apr&s son froc contre le chapeau de cardinal/
Le beglerbeg ayartt t&noign6 k Martinuzzi son &on-
nement du retard qu'il mettait a lui reiidre hommage
par Tenvoi d'un depute et du tribtit arri6r£ a , l'as-
tucieux moine ltii repondit qu'il ne cessait d'etre le
fiddle sujet du Sultan, et qu'il s'engageait k payer d£-
sormais le tribut avec exactitude; il n'envoya cepen-
dant qu'une partie de la somme due. La faute n'en
&ah p*s k lui, disait-il, mais a Isabelle et a Petrovich,
qui avaieat ^puis^ le pays par les troubles quite y
avaient foments. On ne devait pas non plus lui faire
un C£pne de l'occupation de Lippa et de Solymos par
i Lettre de Souleiman, datee du mois de schewal g5B (septembre i55 1);
4m» les Archives de it maison I. R. d'Autriche.
» Mehmet epuiolm ad Martinuzzi, dans Pray, Ep. procerum, t. II, p. 282*
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. a3
les troupes de Bathory. Du reste, H n'avait difl£r&
d'accr&Uter un nouvel agent que parce que Ie san-
djakbeg de Belgrade retenait encore en captivity celui
qu'il avait envoy6 l'annee pr£c6dente \
Enfin le 7 septembre 1551 (6 ramazan 958), Mo-
hammed, avec son armee d'environ quatre- vingt mille
hommes et cinquante canons a , passa le Danube k
Peterwardein , et la Theiss pr& de Titel ; le \B sep-
tembre, il prit le chateau de Becs£, dont la garnison,
forte de deux cents bommes, fut pass6e au fit de 1'6-
p^e 3 ; celle de Becskerek , aussi l&che que son com-
mandant, n'£chappa que par la futte k un sort pareil
(21 septembre) 4 . De Becskerek! i l'arm£e se dirigea
vers la ville Episcopate de Gsanad sur la Marosch ,
situ£e presqu'a Egale distance de Wardein et de Sze-
gedin; c'^st dans cette ville que le roi Aba fit jadis
exporter cinquante r£volt6s qu'il avait attires dans le
chateau par ruse; c'est aussi dans ses murs que fut
entered le roi Vtadislas IV, assassin^ par les Kumanes.
Les Rasciens, k qui &ait confiee la defense de cette
place , pass&rent du c6t£ des Tyres apres avoir en-
voy^ d'avance dans le camp ennemi leurs femmes et
leurs enfans, comme gages dune fid£lit£ £galement
suspecte k leurs adversaires et k leurs allies. Les clefs
■ Uartinuui epUt. ad beglcrbegum Alba Julia to «*/?'., dans Pray, I,
* Commentarii delle guerre di Transylvania del Signor Ascanio Cento rio
degli Hortensii. Vinegia, i565,p. 10a. Ounay, contemporain tres-esthne.
3 Istuanfi, 1. XVII. Pefechewi, f. 94. Djelaiaade, f. 287. Ali, xlvi*«
«v«o«ment, f. 259. — k Las niemes.
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a{ HISTOIRR
de la ville ftirent rendues par Frangois Ugod ' . IUadia 2
et une douzamede chateaux, abandonnes de la m£me
mantere par les Rasciens, tomb^rent aussi au pouvoir
desTurcs 3 .
Le margrave George de Brandenbourg, apr&s son
manage avec Beatrix, veuve de Jean Corvin, avail
fait entourer de remparts lappa, sur la Marosch;
c'est la premiere ville oii entra la reine douairtere
Isabelle lorsqu'elle eut quitt£ Ofen. A Vepoque dont
nous par Ions, le fWsre George et le general Castaldo
en avaient confie le commandement a Johann Pethoe.
Lorsque Mohammedbeg sen approcha, les habitans
menactaent le commandant de la forteresse dune mort
violeate s'ii ne les protegeait par quelque capitulation ;
celui-ci, voyant l'impossibilite de se d£fendre au mi-
lieu de Teflfervescence des habitans, fit crever les ca-
nons, sauter le magasin a poudre, et s'enfuit. Gnq
millesipahis et deux cents janisjsaires, sous les ordres
du Persan Oulama, furent mis en garnison a Lippa 4 ,
et Ahmed Mikhaloghli, avec cent hommes d'infanterie
et deux cents beschlus 5 , fut envoy£ k Challia.
» Les memes; et Forgacz, Commentarii rerum Hungaricarum , Posonii,
1788. — 2 Forgacz.
3 Voyez leurs noms dans Istuaufi et Forgacz : Galad, Aracia, Besdnico,
Nagy Fellak, Egres, Chiallia, Palelesse, Bodorlak, Zadorlaka, Eperieske,
Horogszeg, Charkissomlio ; Petschewi ajoute encore ceux d'Arad et Paracan.
4 Istuanfi, 1. XVII. Petschewi, Djelalzade, Solakzade, Ali.
5 Les beschlus sont sans doute connus du lecteur par les dernieres nego-
tiations echangees entre la Porte et la Russie , et qui avaient pour objet de
ramener a leur nombre primitif les gardes-du-corps des princes de la Mol-
davie et de la Valachie. Istuanfi les appelle des cavaliers : Qui unico eyuo
siipcndla me rent.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. a/>
»
Apr£s avoir pris possession de Lappa, Oulama vi-
sita l'£glise 6Iev£e par le roi Charles I er a la memoire
de son oncle Tevfique Louis. En apercevant les or-
gues, il commanda de les faire jouer devant lui. et
parut entendre avec un vif plaisir les sons melodieux
de 1'instrument; mais sa f£rocit£ ne se d£chaina pas
moins contre le savant inoine, diacre de cette £glise,
auquel il fit arracher cinq dents sous pr&exte qu'il
s'obstinait a refuser de d£couvrir des tr£sors caches
dans l'£difice f . De Lappa, Mohammedbeg se rendit
sous les murs de Temeswar : le commandant de cette
[dace, Etienne Losonczy, vaillamment seconde par les
braves capitaines espagnol et italien Alphonse Perez
et Bernardin Aldana, soutint un si6ge de quinze jours
sans laisser prendre aucun avantage aux Turcs. Au
bout de ce temps, la saisoft trop avanc6e et l'approche
de l'arm6e de Ferdinand, sous les ordres de Castaldo
et du moineGr6goire, contraignirent le beglerbeg de
se retirer a Belgrade [iv]. Losonczy se mit a la pour-
suite de l'ennemi, et rencontrant sur son chemin Kai-
tas, commandant de Nagylak, il l'attaqua avec impe-
tuosity et le mit en d6rpute. Kaitas voulut rentrer dans
Nagylak ; mais le pont-levis n'ayant pas &6 lev6 a
temps , Losonczy p£n£tra aussi dans le ch&teau qu'il
livra aux flammes, apr6s en avoir emmene Kaitas
comme prisonnier a .
Pendant le stege de Temeswar, deux cents cava-
liers turcs de Nagylak avaient essay 6 de s'emparer par
Isluaufi. — » Ibid. , I. XVII.
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26 H1STOIHE
♦
surprise da fort de Mako; mais trouvant la garnison
trop nombreuse, leur commandant x donna l'ordre a
un juge du pays d'aller demander des secours a Sze*
gedin; ce juge, au lieu des renforts attendus, araena
des heiduques qui , arborant des bannieres blanches
semblables k celles des Turcs, parvinrent a les from*
per, puis tomb&rent sur eux sans 6tre reconnus, et
les poussfcrent dans la Marosch. Le chef ottoman ,
d6jk blesse, ne parvint qu'avec peine k se sauver, lui
sixieme, dans une barque \ Frangois Horvath , aur-
nomm£ le grand (k cause de sa faille), surprit £gale~
meat, avec six cents cavaliers, au sortir d'un banquet
nocturne, le commandant turc de Challia [v], qui fat
lu£ par une balle, malgr6 les efforts g&iereux du ca-
pHaine hongrois, qui l'avait pris dans ses bras pour le
sauver 3 . Lorsque Mohammedbeg se fut enfui sur l'au~
Ire rive du Danube, l'arm^e imperiale, forte de cent
mille hommes, s'avanga sur Iippa et en fit le si^ge.
Avant sa retraite sur Belgrade, lebeglerbeg Moham-
med avait adresse plusieurs fermans aux trois nations
habitant la Transylvanie (les Saxons, les Szekliens et
les Hongrois), aim qu'aux magistrats de Kronstadt,
Hermanstadt et Szasz-Sebes, pour les ^shorter k gar-
der fid£lit£ au Sukan. Mais ces exhortations venaieni
trop tardi <»r dfyk long-temps auparavant le moine
avait soulev6 tout le pays; par ses ordres et d'apr^s
« Istuanfi le nomine Canter) puis sur la fertile auivaate, il ecrii Caularcs.
Son vrai nom est Kaitas, nom que lui donne aussi Pelschewi.
> Istuanfi, p. 3o, ed. de Cologne.
3 Ltraeme, I. XVII, p. 3oa.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. % 1
un wage fort aaoien, un cavatier , raoirtrant au people
un sabre et une lance ensanglant£s, avait paroouru la
eampagne et les villes accompagn£ dun homme a
pied, qui criait : «Lennemi de la patrie approche, que
chaque maison envoie sob homme pour nous sauver
du danger common ! ' » Une autre proclamation, qui
fut adress6e k l'arm£e r&ioie sous les murs de lippa,
promettait au premier qui escaladerait les remparts
deux cents ducats de rente et deux cents maisons de
paysans, s'il £tait noble ; s'il etait roturier, un titre de
noblesse, cent &us et cent maisons.
Depuk le tf novembre, la ville de lippa 6tait cern£e
de trob c&6s; quatre pieces de gros calibre, deux
mortiers et deux autres canons , en tout huit pieces
composaient l'artillerie des assiegeans \ Le 7 novem-
bre, les Espagnols se pr&iptt&rent a 1'assaut sans at-
tendre les ordres de leurs chefs. Castaldo et le moine,
devenu cardinal depuis quelques jours, se trouvment
a table lorsque Tattaque commenga : mais au premier
bruit, ils accourterent sur le lieu du combat et se pla-
ctoent a la t&e de leurs troupes. Les Hongrois &aient
commandos par Nadasdy, les -Italiens par Pallavi-
ciai *, et les Allemands par Arco. Jean Toeroek, fits
de Valentin, qui avait si mis^rablement p£ri dans les
Sept-Tours, et Simon Forgacz, firent des prodiges de
valeur ; le premier terrassa un Turc d un grade £lev6
qui I' avait bless£ sept fois; Tautre, reconnu a son
sabre dor6, fut retire de dessous un monceau de ca-
i Istuanfi, 1. XVII, p. 3o4. Ascanio Ontario » p. 1x9.
> Ascanio Ccntario, p. 131. — ? Istuanfi, 1. XVII, p. 3o6.
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28 HISTOIRE
davres, et rendu k la vie malgr6 une grande perte de
sang occasionee par onze blessures '. Enfin, la ville fut
prise et livr6e au pillage. On comihenga sur l'heure
le siege da la citadelle, dans laquelle Oulama s'etait
retire avec les quinze cents hommes qui lui restaieht.
Le neuvi&ne jour de ce stege (16 novembre), qui
est aussi celui ou le beglerbeg de Roumilie aban-
donna Temekwar, Oulama proposa de rendre Lippa et
Csanad, a condition que Castaldo lui accorderait une
tr6ve de vingt jours, une libre retraite au bout de ce
terme, et un sauf-conduit jusqu'k la fronttere. II n'y
avait aucune raison d'accepter ces conditions, car les
assi6g£s, manquant de vivres, £taient ddja r&luits k
manger des chevaux et des chats : mais Favis de Mar-
tinuzzi l'emporta sur celui de Castaldo et des g£n£raux
hongrois qui ne voulaient qu'une reddition pure.et
simple ; ce moine ambitieux , non content d'avoir
£chang£ son froc contre le chapeau de cardinal, con-
voitait encore la principaute de Transylvanie. D6j&
une lettre du pascha Haider, dans laquelle celui-ci se
disait son cousin, lui avait fait esp^rer sa reconciliation
avec la Porte, et le retour des bonnes graces du Sul-
tan a ; la promesse plus positive que lui en donnait Ou-
lama dans sa position critique, s'il consentait a sauver
la garnison du fort , lui assurait bien mieux encore la
realisation de ses d6sirs. H est probable que la demande
singuliere d'un armistice de vingt jours n'avait &&
« Francisci Forgacsii Commenlarii, p. 27.
a Heydar Pascha epistolas ad Hariinuzzi in castris ad civitatem lippam,
feria 4 post Fest. Franc. i55i , daas Pray, I, p. 3o8.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. <tg
faite que sur les insinuations deMartinuzzi, itt£ress£
a gagner le temps n^cessaire pour recevofr de Con-
stantinople la confirmation de sa rentr£e en gr&ce.
S'il n'en est pas ainsi , il est impossible d'imaginer la
raison pour laquelle Oulama, r£duit a l'extr&niti,
ne demanda sa retraite que pour une epoque aussi
eloign^e. Ce fut le vendredi 5 d&embre 155f , veille
de la Saint-Nicolas , et k la faveur d'un beau clair
de lune , qu'Oukma sortit de la citadelle avec treize
cents hommes abondtfmment fournis de vivres par le
cardinal; k son depart, Oulama lui envoya, en te-
moignage de sa reconnaissance, une lampe dor, deux
cierges dor&, un ch&le de Perse richement brode,
quatre chevaux de bataille et un poignard garni de
pierres pr£cieuses '. Une troupe de Rasciens I'accom-
pagna j usque sur les bords de la Temes, au-de& de
Temeswar. D£ja les Turcs se croyaient en stiret£;
mais de Tautre c6t£-de la riviere, Francois Horvath
et Melchior Balassa se tenaient en embuscade, cher-
chant Toccasion de se venger d'une retraite que Mar-
tinuzzi avait su menager aux Ottomans malgr£ leur
opposition. Oulama , averti par le cardinal , marcha
en rangs serres pour 6tre toujours pr& k combattre.,
Mais k peine les Rasciens Teurent-ils quitt6, qu'Hor-
vath et Balassa, renforc^s par Michel Dombay a et
Ambroise de Nagylak 3 , fondirent sur lui. Le combat
fut des plus acharn6s ; Ambroise y fut tu6, et Balassa
i Istuanfi, p. 3 1 8. Forgacz, p. 39.
a Forgacz 1'appelle Michel Dobay ; Istuanfi , Dombay*
3 Istuanfi £crit Naglac, et Forgacz, Naghy.
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5o UlSTOIRE
gr&vement bless£; Oulama, bless^ lui-m&ne, n'at-
teignit Belgrade [vi] quavec trots cents hommes, seals
resftes des treize cents qu'il avait emmen£s de lappa.
Pendant Farmistiee de vingt jours accord^ au com-
mandant tore de Lippa, el tandis que Martinuzzi n£-
gociait sa reconciliation avec la Porte, par Tentremise
d* Oulama, Castaldo avait averti Ferdinand de la perte
inevitable de la Transylvanie, si elle ^tait laiss^e plus
long-temps sous la domination du cardinal; it re§ut
en r£ponse k cet avis Fordre de veiller k la stirete de
Tarm^e et de prendre les mesures que les eircon-
stances exigeraient pour mettre un terme aux intrigues
du moine.
Castaldo, instruit que Martinuzzi correspondait se-
cr&ement par des tschaouschs [vn] avec les Turcs, se
rendit au ch&teau d'Alvincz, ancien couvent domini-
cain ou le cardinal venait d'6tablir sa residence. Ac-
compagn^ dune troupe d&ermhi£e d'Espagnols et
dltaliens, Castaldo p^netra dans la demeure du moine
pendant qu'Andr6 Losonczy occupait les tours avec
vingt-quatreEspagnols; SforziaPallavioini arrivaapr&
lui. Le 18 d^cembre, de grand matin, le secretaire de
Castaldo, Antonio Ferraio d' Alessandria, entra dans
le cabinet du cardinal , pour lui remettre quelques
papiers; Martinuzzi, v&u seulement dune chemise et
dune robe de chambre fourr^e, ^tait debout devant
une table sur laquelle se trouvaient un br6viaire [vm] ,
une ecritoire, une pendule et un livre contenant ses
m£moires. Au moment ou il s'inclinait pour signer
les ecrits que lui pr^sentait le secretaire, celui-ci lui
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 5i
porta deux coups, Tun dans la poitrine et lautre dans
la gorge. « Sainte Marie ! » s'&ria Martinuzzi , et d'uo
bras vigoureux il jeta le secretaire sous la table. En
entendant ce cri, Pallavicini qui &ait rest£ denize la
porte, un valet de chambre lui ayant dlfendu l'entr&,
se pr&ipita dans le cabinet le sabre a la main, et fen-
dit la t6te au cardinal. Lopez accourut aussi avec les
Espagnols, et ceux-ci d£charg£rent leurs fusils sur le
vieillard qui se tenait encore debout. « Que faites-
vous, mes fr6res? » demanda-t-il en latin aux assas-
sins; au m£me instant, il tomba couvert de soixante-
tyoia Messures, en poussant le cri de : « Jesus Marie ! »
Son corps resta abandonn£ pendant soixante-quinze
jours sur le th&tre meme du crime , et obtint enfin
une sepulture & Weissenbourg et une tombe avec cette
£pitaphe : Omnibus moriendum est. Ainsi finit, dans
sa soixante-quinzteme ann&, ce moine orgueilleux
qui plus dune fois trahit successivement Ferdinand,
Souleiman et Isabelle,
Pas un deb sept complices de cet assassinat n f e-
chappa k la vengeance du ciel. Pallavicini, fait pri-
sonnier arvant la fin de l'ann£e, expira sous les cruels
traitemeos des Turcs. Le secretaire Antoine Ferraio ,
qui se servait avec une £gale habilet^ du poignard
et de la plume, fat pendu dans sa ville natale, en
P&mont, sur un jugement rendu contre lui comme
assassin ; Monino fut d£capit£ a Saint-Germain ; Sea-
ramuzza mis en pieces & Narbonne ; Campegio , se
trouvant pen de temps apr£s k la chasse dans les en-
virons de Vienne, fut d6chir£ par un sanglier sous
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3i HISTOIHE
les yeux m£mes de Ferdinand; et Mercada, qui avait
apporte k Vienne ' Foreille velue du cardinal comme
preuve de l'ex£cution des ordres du roi, perdit dans
une rixe, a Augsbourg, la main droite avec laquelleil
avait coup£ cette oreille *.
Ainsi, la Transylvanie oflfrit au Sultan, pour la se-
conde fois, le sanglant spectacle de l'assassinat de Tun
de ses amis les plus devours ; trahissant tour k tour
Tint£r6t des chr&iens et des Turcs pour agir cons-
tamment dans le sien , Martinuzzi avait esp^re , aussi
vainement que Gritti, &ablir, sous la protection des
armes ottomanes, sa domination sur la Hongrie et la
Trapsylvanie [ix].
L'annee suivante , Castaldo reprit de bonne heure
les hostility contre les Ottomans, mais avec peu de
succ&s. Michel Toth tenta , avec cinq mille heidu-
ques, de surprendre Szegedin. Les capitaines italien
et espagnol Aldana et Perez, le Silesien Opperndorf,
les Hongrois Pierre Bakics, Nicolas Doczy, Nicolas
Dersfy et Frangois Horvath, commandaient les trou-
pes dans l'assaut que Toth donna inopin&nent a Sze-
gedin dans la nuk du S3 au §4 f&vrier 1 552 ; le
sandjakbeg Mikhaloghli Khizrbeg [x] se sauva pres-
que nu dans la citadelle, et la ville fut prise et liv*6e
au pillage. Les heiduques travaillaient dejk a la des-
truction du rempart ext£rieur du fort, lorsque Khizr-
• Aurem dexiram ducissam per postas ad Ferdinandum tulit, ac vesper-
tine* preces solenni quodam die audienti pnesentavit. Forgacz.
» Istuanfi, Forgacz, Ascanio Centorio; et, d'apres les deux premiers,
Wolfgang Beth I en.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 33
beg fit une sortie et les repoussa. Tandis que les Es-
pagnols, les Hongrois et les Allemands oubliaient dans
les caves de la ville la discipline militaire et le fort qui
restait a prendre, Khizrbeg envoya des pigeons mes-
sagers au pascha d'Ofen pour Tavertir de la position
dans laquelle il se trouvait; aussit6t Ali-Pascha acCou-
rut k marches forc&s avec ses troupes et celles de
Roustembeg ', gouverneur de Semendra. D6s qu'il
fut en vue de Szegedin, il rangea son armee en trois
corps sur la m&ne ligne ; il pla$a la cavalerie a droite
et a gauche, et il se mit lui-m&ne au centre avec
rinfanterie, flanquee de chaque c6t6 par six^pteces de
campagne. Emportes par leur ardeur, les heiduques.
sans attendre les ordres de leurs chefs, s'&ancerent
p&e-m&e au-devant des Ottomans ; mais ils pli&rent
presque aussit6t et se disperserent dans toutes les di-
rections. Michel Toth se sauva avec peine dans le fort
Saint-George, sur laTheiss, qu'il passa a la nage,
accompagne seulement de vingt hommes; Aldana,
Perez et Opperndorf gagn&rent Lippa k toute bride.
Cinq mille nez coupes * et quarante bannieres furent
envoy£s a Constantinople comme une preuve du sue-
ces des armes ottomanes. Une autre troupe de quatre
cents chevaux , qui &;ait commands par Valentin
Naghy et Pierre Toeroek, et qui venait de repousser
Kasimbeg prfes de Becskerek, arriva en ce moment k
Szegedin, sans savoir ce qui s'y passait, et fut an6an-
tie; Valentin parvint seul k se sauyer avec une ving-
• Pelschewi. — » Istuaofi, I. XVII, p. 319,
T. vi. 3
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54 fllSTOlRE
taine d'hommes ep se jetant dans la Theiss qu'il tra-
versa heureusement k la page.
De \enr c6t6, les Turcs ouvrirent la campagne
d£? le mois d!avril , sous les ordres du second vizir
Ahmed-Pascha , nomm£ pour cette ann£e g6n£ral en
chef jie l'arm^e d'exp^dition de Hongrie en repla-
cement de Mqhammed Sokolli. A son arriv^e ^ ^n-
drinople, Ahmed-Pascha envoya le tschaousch Madjar
AH pour coropliraenter le pascha d'Ofen sur la victoire
brillante qu'il venait de remporter devant Szegedin,
et ljii remettre en t^moignage de la satisfaction du Sul-
tan uo sabre d'or et dps v&emens d'honneur '. J\ lui
annongait en m6me temps sa prochaine arriv^e devant
femeswar.
Cette lettre du vizir et la captivity dq brave Hamza 2 ,
sandjak de Stuhlwfissenbourg, engagirent le pascha
d'Ofen k tenter une attaque contre Wessprim , dont
la garnison avail fait prisonnier Hamza , au moment
ou il allait avec deux cents cavaliers prendre posses-
sion de son gouvernement. La ville de Wessprim ou
Weissbrunn (source blanche) est ainsi nomm£e a
cause des sources £cumantes qui jaillissent des ro-
chers dans ses rues et ses faubourgs. Situ6e sur une
cplline oblongue, Wessprim n'&ait entour£e, a Te-
poque de l'invasion de? Turcs , que d'un mur en
ruines. Les maisons qui formaient le faubourg se trou-
i Pet$chewi.
* II ne faut pas confondre le sandjakbeg Hamza avec le precedent, Sai'in,
qui, d'apres Petochewi, &ait un excellent hafiz, c'est-a-dire qu'il savait le
Coran par coeur.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 35
vaient dfes&nin&s sur la hauteur el dans la vallee.
Le c£l£bre prince slave Swatopluk avail fait de Wess-
prim sa residence avant que les Hongrois, dans leur
s&onde irruption , lui eussent enlev6 le trOne et la
vie f 9 gr&ce k la ruse qu'ils employment en obtenant
de lui la promesse de leur donner de la terre et de
Tpau. lie 1 w avril, Ali-Pascba parut avec ses troupes
devant lea murs de cette ville ; mais chasse par le feu
des assies de la hauteur ou il s'&ait etabli. il alia
camper dans la belle valine de 1'Abbesse. Pendant dix
jours cons£cuti&, son artillerie, plac£e sur depx ter-
rasses qu'il avait fait Clever au nord et a l'ouest de la
ville , foudroya la forteresse. Une partie de la gar-
rison passa dans le camp turc; mais Ali, pour venger
sur les transfuges la mort des d&enseurs de Lippa t
les fit tous massacrer dans la valine de 1'Abbesse, ou
Ion voyait encore du temps d'lstuanfi leurs ossemens
disperses sur le sol. Tandis que le commandant de
Wessprim, Michel , dit de Fer (Vas) , traitait de la
capitulation , les janissaires p£n&r&rent dans la ville ;
la garrison, qui se disposait & partir, fut pass£e par
les armes ou d£pouill& de tous ses effels d^quipe-
menft ; k la veritd Ali-Pascha fit donner des coups de
b4ton au* coupables ; mais, apr& avoir confte le com-
mandement de Wessprim h l'aga Djtfer% il emmena
en captivite Michel , a qui la liberty ne fut jamais
rendqe.
Le 23 avril. le second vizir, Ahmed- Pacha, quitta
• Istuanfi, L XVII, p. 3aa. — » Ibid., p. 3a3.
5*
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36 HISTOIRE
Andrinople avec le gros de Tarm^e, et arriva , apres
vingt-cinq jours de marche, a Belgrade, oii il fut re-
joint par les troupes du beglerbeg de Roumilie, Mo-
hammed Sokolli (1 5 mai). Un mois plus tard, il parut
devant Temeswar, que Losonczy, k la t&e de deux
mille deux cents hommes. etait d&ermin£ k defendre
jusqiA la derntere extr£mit& La veille de la f&e de
Saint-Pierre et Saint-Paul, le feu commenga sur toute
la ligne; outre un assez grand nombre de faucons et
de fauconneaux, Ahmed-Pascha avait mis en batterie
trente-six gros canons de si£ge; il avait aussi fait con -
struire des redoutes Avec les decombres des maisons
incendi&s dans les environs et dans Tile. L'artillerie
ne tarda pas a ouvrir une br^che; mais, dans leur
ardeur, les troupes monterent k 1'assaut sans attendre
Tordre du serasker et avant que la br&che fflt pra-
ticable. Gette tentative fut funeste aux Turcs, qui laiss&-
rent au pied des murs deux mille hommes, avec le san-
djakbeg de Nicopolis Moustafa Tenbel l ; de leur c6te.
les assi£g& eurent h regretter la perte du brave colonel
espagnol Castelluvio. Sur ces entrefaites, Hasan, beg-
lerbeg d'Anatolie, amena au camp des Turcs un ren-
voi de munitions dont le besoin commengait h se faire
sentir; mais ce ne fut pas sans perils , car lui et son
escorte furent attaqu6s et mis en fuite par la garnison
de Karansebes. Michel Toth , en voulant introduire
des vivres dans la forteresse, fut moins heureux dans
son enlreprise que le general ottoman ; abandonn£ par
« C'est-a-dire Mouslafa-le-Paresseux. Istuanfi ecrit Debel (le Gros) an
lieu de Tenbel (le Paresseux) : Debelius hoc est crassus et pinguis.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 37
la plus grande partie de ses troupes siir les bords de la
Marosch, le petit nombre qui lui resta fidele ne put r£-
sister au choc de l'ennemi, et lui-m&ne, tout couvert
de Measures, ne parvint qu'avec peine k se sauver '.
Gependant les asstegeans borabardaient la Tour de
I'Eau sans discontinues lorsqu'elle ne pr£senta plus
qu'un amas de ruines , Ahmed commanda un assaut
general pour le jour de SaiM- Jacques (25juillet). Le
kiaya des tschaouschs, qui se trouvait parmi les pre-
miers assaillans , cria au Hongrois Blaise Pattantyus
qui combattait avec une valeur surhumaine au milieu
des ruines de la tour : « Je m'appelle Koubad !> et en
m£me temps il lui porta un coup vigoureux sur la t6te.
Celui-ci, s'&ant eouvert de son bouclier, repondit :
« Et moi je m'appelle Bias! »> et il lui perga la gorge.
L'assaut dura cinq heures avec une £gale fureur de
part et d'autre; enfin les Turcs ext£nu£s de fatigue
se retir^rent avec une perte de trois mille hommes ,
tandis que les assi6g£s n'eurent que cent treize morts.
Le lendemain l'assaut recommenga; le vizir Ahmed,
les beglerbegs de Roumilie et d'Anatolie, le sandjak-
beg Kasim et les autres chefs ne se bornaient pas k
exciter de la parole le courage des assaillans , et ils
assommaient avec de grosses massues garnies de fer
tous ceux qui reculaient. Enfin la Tour de I'Eau fat
prise, et la chute de ce rempart principal, le manque
devivres et de munitions, et surtout l'indiscipline des
Allemands et des Espagnols qui menayaient de capi-
1 Pelschewi, f. 97, en fait mention ca ces teruies : Denude me defense de
Miclutl Totli, cap Maine de Stegedin
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38 HISTOIRE
tuler malgr£ leur general , forcirent Losonczy de se
rendre sous la condition d'une libre retraite.
Au moment oA il sortit de la ville, le beglerbeg de
Roumilie et Kasiin-Pascha le prirent au milieu deux
pour le prot£ger par leur presence contre les insultes
des soldats et honorer sa valeur. Mais bient6t les ja-
nissaires saisirent les jeunes gens de sa suite, dont la
beauts avaitr^veilte leurs tn&mes ctesirs; lorsque Lo-
sonczy eut vu jeter a bas de chevdl son jeune page,
Andr6 Tomofry , qui portait son casque et sa cuirasse
d'or *, il ne put se contenir davantage : « Voilk done
la foi des Turcs! cria-t-il. Reprenons nos armes et
ne succombons pas du moins sans vengeance. » Au
m£me instant , il fendit le cr&ne du kiaya du begler-
beg qui s'&ait avancd avec Kasim pour appaiser le
tumulte. Aprgs avoir long-temps combattu en h£ros,
il tomba atteint d'une blessure k la ttte et perci au cdte
d'un coup de lance. Perez, aprta avoir tu6 beaucoup
d'ennemis dans cette m&£e, se confiau la vkesse de son
cheval pour se sauver k Lappa; mais il disparut dans
les flots de la Koeroes qu'il avak voulu traverser. For-
gacz eut le nez mutil£ et tomba entre les mains des
Turcs. Losonczy, conduit devant le vizir, lui re-
procha en termes violens sa perfidie. Ahmed lui ayant
repondu que ce n'6tait Ik quune juste repr&aitte de
la trahison exerc^e contre Oulama lors de sa retraite
deLippa, et Losonczy continuant k exhaler son indi-
gnation par des injures, le g&i&af ottoman acc£l£ra
* Petschewi , f. 96 , fait du jeune page un inBigne favori de Losonciy .
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DE L'EMPlftE OTTOMAN. 5g
la fin du brave Horigrois en hti fateant trancher la
t&e, <ju'il envoya k SolileTman, rfemplie d'herbes el
de colon. Le sandjakbeg Kasim firt charg£ dn tbm-
mandement de Tenieswar et de la reconstruction des
mars de la forteresae » ; la chute de cette ville prec&Ia
celle cfe Lappa, de Solymos et autres ch&teadx- forts du
Banat \
Aussit6t qu'Ahmed eut apprfe que 1'Espagnol Ber-
nard Aldana, k qui Castaldo avait confix la defense de
Lappa, avait fait sauter les fortifications , Crever les
canons et incendier la ville , fl d&aicha Kafcimbeg avec
cinq raille homines, pour Steindre le feu et sauver
le reste de I'artillerie. Une commission militaire con-
damna Aldana k la peine de mort ; mais Marie, fille
de Charles-Quint et femme de Maximrlien, obtint sa
grftce. G'est ainsi que le Banat tomba sous la domi-
nation des Ottomans; 1'eriipereur en confia i'admmis-
tration k Kasim-Pascha avec le titre de begterheg 3 .
Pendarit qu'Ahmed-Pascha ouvrait le stege de Tfc-
meswar, 1'eunuque Ali quittait Ofen dans le dessein
de s'emparer du chateau de Dr^gely. Ce fort, con
struit sur la cime d'un rocher escarp^, sert pour ainsi
» Istuanfi. Forgacz. Ascanio Centorio, p. 190.
* Istuanfi, 1. XVItf , p. 3*9, ne nomine que Karansebes et Lagos. Dje-
lalzade, f. 995, ci(e Lippa, Solymos, Beniak, Eoresch, Kia, Paqcota,
Moreschtor, Mardjena, Kadjid, grand el petit Sadsch, et le Chateau-Royal.
Petschewi , f. 97 , nomroe encore Tschalippo, Naplak, Kanlak, Schikowa.
3 Djenabi, ainsi que son oopiste Hezarfenn , s'expriment ainsi : Timisch-
wari karih bir BeghrbegUi yer feth oloundl we Kdsimpaschayi anda beg-
Urbeghi nassb eiledi. Manuscrit de la Bibliolheque I. R. d'Aulrichr, no 469,
p. 43*>
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4o HISTOIRE
dire de boulevard aux villes situ£es dans les morrta-
gnes de Borsem. L'entreprise fut moins remarquable
par le succfes des Ottomans que par la resistance des
braves dtfenseurs de Dregely, parmi lesquels 1'his-
toire cite surtout le commandant Zondy. Lorsqu'Ali-
Pascha cWputa & Zondy le pr&re Martin d'Orosz-
falva pour le sommer de se rendre, celui-ci fit venir
deux jeimes gargons tares, sesprisonniers, leshabilla
de pourpre et les renvoya h Ali, en le priant d'ache-
ver leur Education militaire, parce quil ne pour-
rait plus le faire hri-m&ne, &ant d£cid6 a s'ensevelir
sous les ruines du chateau. Aussit6t il fit rassembler
dans la cour du fort ses armes, son argenterie, ses
meubles les plus pr£cieux , et y mit le feu ; puis , se
rendant dans ses ecuries, il tua ses chevaux de bataille.
Cependant, malgre la resistance des assies, ies Turcs
forcdrent les portes; Zondy tomba frapp6 d'une balle ;
mais se trainant a genoux, il combattit encore jusqu'a
ce que, crible de bless ures, il rendit le dernier soupir.
Ali-Pascha fit enterrer son corps et la t&e qu on en
avait separ^e en face du chateau , et ordonna de
planter sur son tombeau une lance et un drapeau ,
rendant ainsi un noble hommage a la valeur d'un
ennemi vaincu '.
Ce brillant exemple de courage fut loin d'&re imk6
par la garnison du chateau de Szecseny : a Tapproche
d'AH-Pascha , elle s'enfuit Vehement 2 ; mais les feu-
i Istuanfi, I. XVIII, p. 53o, £d. de Cologne. Forgacz, 58. Ascauio
Centorio, p. ?o3.
a Istuanfi. Forgacz, 5a. Commentarii d' Ascauio Cenlorio, 195-10,7.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. ' 4r
dataires du comte Balassa , k qui 6tait confine la. de-
fense de la tour de Buza, Michel Terchy, Etieone
Souchay, Andr£ Nagy, resisl^rent, avec une poign£e
de braves, k plus de deux mille hommes commandos
par Arslan, fils d'Yahya-Paschaoghli, et soutenuspar
le feu de deux pieces d'artillerie ; Fa ganrisop, forc£e
d'abandonner les ruines de la tour, se retira dans la
valine, ou Arslan lui oflFrit une libre retraite '. Le cha-
teau de Salgo etit aussi resist^ plus long-temps si son
commandant n'avait pas &6 trompe par une ruse des
assi£geans. Arslan, profitant d'un £pais brouillard, fit
amener a grand bruit devant le fort un tronc d'arbre
immense que les assieg£s prirent pour un canon-
monstre du genre de ceux qui avaient servi au si^ge
de Constantinople. Arslan prit avec la m£me facility
les chateaux d'Hollokoe % Buyak, Sagh et Ghyar-
niath 3 ; enfin , de concert ayec Ali , il d£fit a Fulek
(1 1 aoAt) le corps d'arm^e de Ferdinand , compose
de sept mille hommes et command^ par FAutrichien
Erasme Teufel , baron de Gundersdorf . Un coup de
feu qui fit sauter les caissons k poudre appartenant
aux Hongrois d^cida de cette bataille; Fev^que de
Waizen et beaucoup de braves y perdirent la vie. Pal-
lavicini et Teufel furent faits prisonniers, et orn&ent
le triomphe de l'eumique, qui fit son entree k Ofen
pr£c£d6 de quatre mille captifs hongrois; Erasme
Teufel marchait en t&e a cheval, mais sans casque et
sans cuirasse ; il 6tait suivi de toute la musique de l'ar-
> Istuanfi, 1. XVIU.
* Caslellam Com. Istuanfi, 1. XVIII, p. 33a.'— 3 J bid.
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4* HISTOIRE
m£e. Afin d'humilier davantage les chefs des trouper
impeliales , on vendit les prisonniers k l'encan pour
uti prix de beaucoup inf&iecfr k celui qui juscfu alors
avait servi de base k ces sortes de ventes. Les soldats
allemands furent les plus d£pr£ci&; chaque homme
ne cotktait au plus k l'acqu&eur qu'un boisseau de
farine ou d'avoine, un tonneau de miel ou de beurre ;
mais la rangon des officiers fut en revanche port^e k
des sommes 6normes. Pallavicini , apr£s avoir expte
dans un cachot k Ofen 1st part qu'il avait prise k I'as-
stosinat de Martinuzzi, nobtint sa Hbert6 qu'au prix
de dix-huit mille ducats. Teufel fut envoys k Sou-
leiman avec quarante drapeaux pris stir renneriii;
mais ayant voulu renier son nom et son rang pour
payer une rangon moios forte, le Sultan fut si cour-
rouc6 de cette supercherie, qu'il le fit coudre dans un
sac de cuir et jeter k la mer * .
Les conquttes nombreuses de cette campagne de-
vqjtent 6tre couroim£es par la prise des forteresses de
Szolnok et d'Erlau. Szolnok, situee au confluent de la
Theiss et de la Zagyva, avait 6t6 r6par6e peu d'ann&s
auparavant par le comte Nicolas de Salm, et affectait,
d'apr£s les r&gles de fortification nouvellement adop-
tees , la forme d'un triangle rectangle ; ses mors
etaieM si elev&, que les toits des maisons Itaient k
peine visibles du dehors; du cdtd du midi, Facets en
6tait defendu par un large fosse fempfi d'eau. L'llite
de la garnison consistadt en onze cents homines d'ih-
i Istuanfi, I. XVIII, p. 335. D'apres Centorio , p. ao5, il cut la tele
tranch£c.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 43
fanterie et trdis cents housards; vingt-quatre pi&ces
de gros calibre , trois mille motjsquets et hoit milie
qtrintaux de poudre offraient les £l£mens dune longue
resistance; les vivres n'y etaient pas moins conside-
rables : mais de si nombreux moyens de defense de-
vinrent inutiles entre les mains du l&che commandant
Laurent Nyary, qui deVait sph rang de godverneui* et
de haut palatin de Hont non k son m&xte, mate aux
plus basses intrigues. Profotid&nent tn6pris6 de ses
troupes, Nyary ne put maintenir la discipline parmi
dies. Bientdt les Allemands, Boh6mes, Hongrois et
Esfiagnols, divis^s entre eux, d^serterent en masse;
leur chef voulait les suivre , mais au moment ou il
sortait dn chateau, il fut saisi et amen6 devant Ahmed-
Pascha (4 septembre) ; il n'eut pas honte de racheter
sa liberty en livrant sa propre fille & Tun de ses gar-
diens. Traduit plus tard devant un conseil de guerre,
il obtint par corruption son acquittetnent de ses juges,
le chancelier Olahus et rarchevAqple de Grain [xi].
Quant aux troupes allemandes et boh£mes 6chappees
de Szolnok, elles furent poursuivies par les Turcs, et
pour la phipart taill&s en pieces r .
A cette heureuse entreprise succlda le s&ge d'Er-
lau , aussi calibre dans les annates de 1'Autriche que
celud de Vienne et de Guns, dont les garnisons avaient
si glorieusement repouss£ les armees triomphantes de
Souleiman. Les noms d'Etienne Metskei et d'Etienne
Dobo, ses vaillans defenseurs. brilleront dans I'his-
■ Istuanfi, 1. XVIII. Forgacz, p. 67. CommenUtrii d'Ascanio Cenlario,
p. ao6.
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44 HISTOIHE
toire aupr£s de ceux de George Zondy et d'Etienne
Losonczy, bien que la bravoure de ces derniers n'ait
pas &6 couronnee du m&ne succ6s que celle des
premiers.
La ville d'Agria ou Eger fut fondle par saint
Etienne , et b&tie a l'entl^e des monts Matra , dans
une charmante valine entour£e de c6teaux plants de
vignes; elle tire peut-6tre son nom allemand (Erlau)
de 1'arbre appete Erie (aune) ou de l'ancien peuple
des Tagroges qui habitaient les bords des rivieres
d'Erlau et de la Theiss [xii]. Le 9 septembre 1552,
le vizir Ahmed-Pascha fit annoncer au commandant
de la place, Dobo de Rouszka, qu'il paraitrait devant
la ville avec deux corps d'arm£e, dont Tun, sous ses
ordres, avait r&tuit les forteresses de Temeswar et
de Szolnok, et Tautre, sous ceux d'Ali-Pascha, avait
pris Wesspiim , Dr^gely et Fiilek ; il le somma en
m£me temps de se rendre. Dobo de Rouszka fit met*
tre en prison le porteur de la lettre de sommation, et
en reponse, il fit exposer sur le mur, a la vue de Fen--
nemi , un grand cercueil entre deux lances ' , pour
indiquer que ce cercueil &ait pr6t k recevoir ou l'as-
stegeant ou l'assi£g6 a . Ali-Pascha arriva le premier a
la t&e de vingt-cinq mille hommes; il avait sous ses
ordres Arslan , beg de Stuhlweissenbourg , qui com-
ment par dresser, dans le faubourg pr£s de leglise
Sainte-Marie, quatre canons avec lesquels il ouvrit le
» Fessler, qui ne connaissait pas les Commtntaires de Cenlorto, dit qu'il
laissa la proposition sans reponse.
» Cenlorio, p. 222.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 45
feu contre le chateau (10 septembre); quelques jours
apres, ces troupes furent jointes par celles des vizirs
Ahmed-Pascha et Mohammed Sokolli. Les janissairfes
etablirent leur camp devant la porte de Mallar, situ£e
au nord de la ville, sur la rive gauche de l'Eger , entre
F£n£met et le Koenigsstuh] , colline oii , d'apr£s une
tegende, saint Etienne avait fht£ sa demeure pendant
la construction du ch&teau et de la cath&lrale, afin
d'encourager par sa presence l'ardeur des ouvriers.
Ahmed et Mohammed planterent leurs tentes dans la
vallee d'Erlau, sur le versant du mont AEgidius, tandis
qu'Ali porta les siennes plus a Test. Trois canons mis
en batterie sur la hauteur la plus rapprochee de la
forteresse, et langant des boulets de cinquante livres ,
donn&rent le signal du commencement du stege. Le
1 1 septembre , Ahmed £leva des redoutes sur la col-
line du Koenigsstuhr, dou il bombarda Tun des clo-
chers de la cath£drale; mais de 1'autre de ces clochers
les assteges riposterent avec une telle habilet£, qu'ils
d&nont&rent les canons de I'ennemi, et le forc&rent a
quitter sa position. Le 14, Ahmed-Pascha mit en bat-
terie, prfes du cimetiere, ses trois plus grandes pieces,
flanqu£es de onze plus petites, dont le feu continue!
eut bient6t &>ranI6 la grande £glise et les murs du
ch&teau ; le canon d'Arslan . qui tirait du c6t6 de F£-
glise Sainte-Marie, fit Igalement de terribles ravages.
Pour pr&venir leg effets des boulets rouges des Otto-
mans, les assi£g£s couvrirent de peaux et de couver-
tures mouill£es leurs magasins de bUs et de four rages,
et ne cessment de boucher les br&ches avec des
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46 HISTOIHE
fonneaux remplis de sable et de gazon. Enfin le jour
dp Saint-Michel (29 septembre), les Ottomans tent&~
rent un premier assaut; trois fois ils recommenc6rent
Vattgque, et trois fois ils furent repousses avec des
pertes enormes et obliges d'abandonner le bastion
qu'ils avaierit occupe un instant; huit mille des leurs
resterent ensavelis dans les fosses '. Parmi les assi£-
g&, Jean Posgay, qui jadis avait &6 d£put£ trois fois
au pascha d'Ofen, par le gouverneur-general de Hon-
grie, afin de preyenir une rupture, fut une des pre-
mitres victimes de cet assaut.
Ce n^me jour un Hongrois, envoy6 par Arslanbeg,
apporta dans la citadelle une nouvelle sommation. Les
assies dechirerent la ptece en morceaux , en brfl-
16rent la moitie, et contraignirent le porteur d'avaler
le regie. C'est de la bouche de ce m£me Hongrois
qu'ils apprirent plus tard quelle &aient ees propo-
sitions qu'ils n'avaient pas voulu entendre : Arslanbeg
leur promettait une libre retraite; et, pour leur 6ter
toute crainte dun sort pareil a celui de Losonczy.
Ahmed et AU devaient se retirer avec l'arm£e a trois
milles de la forteresse, et laisser Arslan corame 6tage
entre leurs mains. Dans la nirit du 4 octobre, le feu
prit am provisions de poudre deposes dans une
voijte souterraine de la cathedrale; 1 Edifice sauta, et
lea cteu* moulins de la ville furent detruits de fond
en comble; il ne resta pour toute munition que vingt-
quatre barils de, poudre. Dobo et Metskei mont&rent
i Centorio, p. 222.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 4 7
aussit6t a cheval , parcourant les divers postes et en-
courageant par leur presence les troupes k continuer
la defense. Les Turcs, dans 1'espoir que ce d£sastre
renclrait la garnison plus accessible k leurs proposi-
tions, lui oflfrirent de nouveau une libre retraite avec
armes et bagages si elle voulait se rendre ; mais leurs
cris furent gtoufEgs par le bruit des tambours et des
trompettes des assieg^s. Dobo, dont la prevoyance
avai); rassembl6 dans la place une immense quantity
de salp£tre e\ de soufre , fit fabriquer de la poudre
pour repiplacer cejle qui avait brftle, et avec les ruines
des deux moplins on en construisit un nouveau qui
put suffire aux necessites les plus pressantes.
Ahmed- Pasoha, voyant l'impossibilit6 de deter-
miner la garnison a une capitulation, eut recours k la
tactique alors en usage chez les Ottomans; i\ fit com-
bler le foss6 avec $es pacs remplis de sable, et Clever
en fyce de la forteresse une plate-forme e% bois* dont
la hauteur egalait celle des murs. Mais Gr^goire Bor-
nemissa, rArchim^de d'Erlau, que les historiens hon-
grois appellent (Jr6goire-le-Savant, d£joua les presets
de Vennemi; il fit remplir des seaux k incendie de
poix, <Je soufre, de goudron et de lard, m£l& de
eppeaux et de paUle trempes dans du suif , et les gar-
nit au dehors de pistolets charges jusqu'k la guenle;
quand 1^ nuit fut venue , les ass&ges y mirent le feu
ej les jet£r$nt dans le fosse. Les poutres et les fagots
s'&ant enflamm^s , les Turcs arriv^rent pour arr&er
l'incen$e ; {pais les pistolets eclatant dans toutes les
directions, les forcferent a reculer, et a abandonner
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48 HISTOIRE
leur ouvrage qui fut r^duit en cendres. Bornemissa
se servit encore d'un autre moyen de defense avec
non moins de succ&s; il ordonna de placer dans les
meurtrteres des lances et des javelots, dont les extre-
mes rougies au feu brulaient les mains de ceux qui
voulaient les saisir pour monter k r escalade. Si Alexis
Comn&ne avait jadis fait rouler sur les Bulgares, du
haut de la montagne de Tzurulum, des roues garnies
de faux, Bornemissa effraya les Turcs en langant con-
tre les assaillans une grande roue, aux rayons de la-
quelle £taient fixees des planches enduites de matieres
combustibles, et des pistolets charges. Cette machine
infernale exerga d'afireux ravages dans les rangs otto*
mans.
Le 10 octobre, six jours apr^s 1'incendie du ma-
gasin a poudre, les Ottomans dirig&rent contre trois
c6t£s de la r ville une attaque qui dura depuis le lever
du soleil jusqua la nuit tombante; mais tous leurs
efforts furent infructueux. Enfin deux jours plus tard,
Ahmed tenta un assaut g£n£ral , qui devait &re le
dernier , quel qu'en fttt le r£sultat. D6s le point du
jour, les tschaouschs rassembl6rent les divers corps
de rarnaee : les janissaires ou infanterie r^gultere, les
azabs et les martoloses ou infanterie irreguliere, la ca-
valerie r£guli&re des sipahis, et la cavalerie irr£guli6re
des beschliis et des akindjis, les djebedjis ou forge-
rons , les topdjis ou artilleurs, et les toparabedjis ou
soldats du train, furent appeles a leurs postes, et les
retardataires menaces de massues de fer. Le vizir
Ahmed prit position sur la redoute la plus voisine des
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 49
remparts ; Ali-Pascha , beglerbeg d'Ofen , Oulama-
Pascha, sandjak de Bosnie, et Arslanbeg, sandjak de
Stuhlweissenbourg, rang&rent Tarm^e stir trois co-
tonnes, et la conduisirent a l'assaut. Sous leurs ordres
servaient Derwischbeg, fWre d'Arslanbeg, et san-
djak de Funflkirchen, Welibeg de Hatwan, Hasanbeg
de Semendra , Moustafabeg de Szegedin , Weldischan ,
Mohammed, et les autres transfuges venus avec Ou-
lama de la Perse [xni]. La musique militaire des assic-
geans se m&ait aux cris mille fois r£p&& $ Allah!
Allah/ auxquels la garnison r6pondait par ceux de
Jims et de Marie. Les troupes d'Ali attaquerent le
bastion du c6t£ de la prison, ctefendu par Dobo. Bless6
k la main et au pied, Dobo , loin de reculer, soutint
le courage des soldats en leur parlant de patrie et
d'hotmeur, de gloire et d'immortalit£. Les assies
de tout &ge et de tout sexe, c£dant a un entratnement
nnanime , se r^unirent pour dtfendre leurs foyers et
leur religion ; les femmes elles-mfrnes, aussi coura-
geuses que les filles de Sparte, se presserent sur les
remparts , non comme celles des Musulmans pour y
apporter de Teau fraiche, afin de d£salt£rer les com -
hattans, mais pour verser sur la t6te des ennemis de
leur firi des seaux d'eau ou d'huile bouillantes. Au
milieu d'une lutte acharn£e, on vit une m&re, sa fille
et son gendre combattre ensemble sur le m£me bas-
tion; lhomme ayant &6 tu6 , la m£re pria sa fille de
rendre les derniers devoirs h son mari : « Non pas
avant de l'avoir veng6, » r£pondit la jeune femme; et,
ant le sabre et le bouclier du mort, elle immola
T. VI. 4
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So HISTOIKE
a ses mines trois soldats tares; pais elle prit le ca-
davre dans ses bras, et l'emporta k l'^glise pour lui
obtenir les fun&railles chr&iennes. Uae autre fern me,
portent sur sa tfite de grosses pierres, tomba frapp£e
d'une balle pr&s de sa fille; celle-ci, dans le transport
d'une rage fr&i&que, prit le fardeau eneanglanli, le
jeta par-dassus le mur et en £crasa deux assaillans.
Andanbeg, apr£s 6tre parvenu jusque sur le rempart,
se vit repouss6 par Borneniissa , Zoltay et Figedy,
au moment ou de sa main bless£e 9 agitait son dra-
peau rouge ^tincelant de broderies d'or, pour annon-
oerle succ£s dune tentative qui avak d^ja co6t£ la
vie a huit mille homines de ses troupes. Ailleurs frois
miUe beschhis, akindjis et janissaires, commandos
par fcur aga , Mohammed, avaient p£ri dans une at*
taque dirigie contre le bastion situ6 pr& Fancienne
porte du chateau, que Metskei dtfendait contre eux
wvec cinq cents arqucbusiers. En vain les tschaouschs
excit^rent les janissaires a renouveler l'assaut en leur
rappelant leurs vktoires ant&ieures et la prise de
Teme^war; ils r^pondirent qu'aucun pouvoir humain
ne «aurait les determiner a combattre contre Dieu
le tout - puissant , qui apparemment s'&ait declare
pour les Hongrois. Pendant six jours encore, Ahmed-
Fascha ^changea avec la garnison des coups de canon
et des feux de mousqueterie ; il y eut quelques filches
lunches de part et d'autre; mais enfin le 16 octobre
1 551 , la neige et les pluies fournirent au g£n£ral ot-
toman un pr&exte plausible dordonn^r la retrace.
« V«us vous £tes defendus en braves, er&rent quel-
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DE L' EMPIRE OTTOMAN. * 5i
ques Turcs k la garnison au moment de partir; re-
posez-vora, car nous allons quitter vos murs ; m$is
l'anq& proehaine nous reviendrons avee plus de for-
ces prendre notre revanche. » Le vizir Ahmed fit
d'amers refproches k leunuque AM, pour l'avoir en-
train6 k ce stege et aesocie k la honte de cette cotre-
prise : « Cette enceinte, lui dit-il, ne rerfermak, selon
vous, que des enfans ; je sab maintenani que penser
de lasile d'enfons de eette sorte. » Dans la unit du
septi&ne jour, l'arm& ottomane leva ses tentes, cfaaiv
gea lartUlerie sur les chariots, et le lendemoin elle
&ait fen pleine retraite. Dans la forteresse on ramassa
douze mijle boulets qui y avaient &6 lances pendant
les trente-huit jours qu'avait dure le si6ge; Dobo de
Ruszfea sen servit pour Clever sur la place du chfttseau
un tropb£e en souvenir de sa victoire. Trois drapeaux;
parmi lesquels eeux d'Arslanbeg et d'Ali-Pascha, fir*-
rent envoy^s a Vienne avec un rapport d&aill£ de
cette glorieu$e defense [xiv]> L ennuque Ali, qui, dans
lespoir de reunir Erlau k son gouvernement d'Ofen,
avait represent^ la prise de cette forteresse comme
une chose des plus faciles. dut peu de temps apres
resilier ses fonctions entre les mains de Touighoun-
Pasdia; mais, avant sa disgrace, il eut occasion de se
venger de Bornemissa, qu'il fit prisonnier au village
de Keresztes , k deux milles au~dessot)s d'Erlau. Le
malheureux savant fat envoy6 k Constantinople, oii il
p£rit mis^rablement dans la prison des Sept-Tourp.
La viile d'Erkra partage avec Make et Vienne la gloire
d'avoir arrtt6 les armes victorieuses de Souleiman,
4*
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fo HISTOIRE
gloire que ne lui refusent pas m6me les histories
lures.
Tandis que Souleiman reculait en Europe les fron-
tfcres de l'empire aux d6pens de la Hongrie, en Asie,
au contraire, le schah de Perse faisait de fr£quentes in-
vasions dans TArm^nie et le Kurdistan, dans le but de
reconqu6rir les places fortes d'Ardjisch, d'Aadildjou-
waz et d'Akhlath. Le courage de l'&mr kurde Ibra-
him forga Tahmasp k lever le stege de cette premiere
ville; mais par suite des intelligences secretes des Per-
sains avec les habitans, Ibrahim fut tu£, et le ch&teau
rasi. L'£mir Moustafa, fils de Sinan-Pascha, defendit
Aadildjouwaz avec succ&s, et repoussa les enne-
mis. Les habitans d'Akhlath furent moins heureux :
tromp£s par de fausses assurances qui leur projnet-
taient une libre retraite, ils se d6cid£rent k quitter la
ville; mais k peine avaient-ils pass£ les portes, qu'ils
furent tous massacres avec leurs femmes et leurs en-
fans. D'Akhlath, Ismail-Mirza, fils du schah, se di-
rigea sur Erzeroum avec quelques milliers d'hommes ;
il attira le commandant de cette forteresse, Iskender-
Pascha, dans une embuscade, et le battit complete-
ment. Les begs de Trabezoun, Malaria, Bo»uk et
Karahissar rest£rent sur la (dace; le sandjakbeg Mah-
moud, avec les agas de l'aile gauche et de l'aile droite
de la ca valerie, furent faits prisonniers. A la nou-
velle de cet £chec , Souleiman n'ooblia pas la valeur
qu'Igkender-Pascha avait <teploy£e en cette occasion
comme en tant d'autres. Tout en d£plorant le malheur
qui venait de le frapper, il lui envoya un habit d'hon*
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 53
neur, un sabre et une masse, a vec une lettre dans la-
quelle il louait la courageuse resistance qu'il avait
oppose k un ennemi sup&ieur en nombre.
L'initiative prise par les Persans ne laissait plus
aucun doute sur la n6cessit6 de porter la guerre dans
les Etats du schah ; il restait seulement k savoir si Sou-
leiinan ouvrirait la campagne en personne, ou s'il en
chargerait un de ses vizirs, comme il venait de le faire
pour la derntere expedition de Hongrie, dans laquelle
son arm£e, habitude sous ses ordres k combattre et k
vaincre, avait, k l'exception du stege d'Erlau, obtenu
de si brillans succ£s en r^duisant Temeswar , Szol-
nok, Iippa, et plus de vingt-cinq chateaux hongrois.
Mais Souleiman comptait alors pr6s de soixante ans,
et les fatigues de onze campagnes qu'il avait faites en
personne l'avaient sinon bris6 , du moins beaucoup
affaibli. H ne put se le dissimuler k lui-m&ne, et r6-
solut de confier k ses vizirs le commandement de
l'arm^e destin^e contre la Perse. Le grand- vizir Hous-
ton fut nomm£ g6n£ral en chef ; Ahmed-Pascha f ut
charg^ de surveiller la fronttere de Hongrie, et Mo-
hammed-Sokolli, beglerbeg de Roumilie, regutlor-
dre de se rendre k Tokat pour entrer en campagne
d& les premiers jours du print emps. Si ces disposi-
tions furent changtes par la suite, si Souleiman parut
lui-m&ne sur le th&tre de la guerre, ce n'est point
qu'il dout&t du succ&s ou du talent des vizirs ; il faut
attribuer les nouvelles mesures qu'il adopta k un tout
autre motif. Schemsi [xv] , aga des sipahis , homme
que ses nombreuses connaissances et son talent po6-
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54 HISTOIRE
tique avaient rendu cher & son mattre ', arriva inopi-
n£ment k Constantinople des quartiers d'hiver d'Ak-
serai; il venait informer Souleiman, de la part da
grand-vizir Roustem , que les janissaires montraient
des dispositions dangereuses en faveor du prince Mous-
tafa ; qu'on enlendait les soldats dire ouvertement :
a Que le Sultan devenu trop vieux ne pouvait mar-
cher en personne contre Fennemi; qull n'y avait
plus que le grand-vizir qui s'opposdt k I'dtevation du
prince; qu'il serait facile de couper la t&e k Roustem,
et d'envoyer le vieux Padischah se repbder dans le
s&ai de Demitoka. » Le grand-virir ajontait qtie le
prince Moustafa pr&ak Toreille k ces pfopos s&ii-
tieux, et il suppliait Sa Majesty de prendre elle-mdme
le commandement de ses troupes. « A Dieu ne plaise,
s^cria Sbuleiman, que Moustafa montre de mon vi-
vant une pareille impudence, je saurai bien Ten pu-
nir \ » Aussitdt it donna cong6 pour tout l'hiver aux
janissaires et k quelques autres corps suspects, rap-
pda par une lettre 6crite de sa main , le grand-vizir k
Constantinople, et fit annoncer aux gouverneurs de
toutes les provinces de l'empire, qu'au commence-
ment du printemps il ouvrirait la campagne en per-
sonne.
Lorsque cette resolution devint publique, schab
Tahmasp d6puta au Suited deqx de ses agas , et le
< Tl acquit dans la snite une grand* o£l£brfr6 sous le nom de Schemsi-
Pa*cha.
» Scherasi-Pascha a raconte cet evenement dans un poeme fait » cette
occasion. Voyez Petschcwi , Ali , SolakzadeV
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 55
sandjak Mohammedbeg qui avait 6t£ fait prisonnier
date le combat prfe d'Erzeroum^ poor conjurer, s'il
etait possible , Forage qui se preparait k fondre sur
Id. Maislaraisonm&ne qui avail d£eid£ Souteiman &
prendre le commandement de l'armde lemp^cha d'en-
trer pour le moment eo negotiations avec la Perse;
il se borna k envoyer une r£pome ditatoire par im
seid ou descendant du Proph&e , et les pourpar-
lers furent cfcflteres jusqu'i lepoque de son arrivfe k
Haleb[xvi].
U4A& de 1553 itafc cUsjk fort avanc£, lorsque Sou-
leiman partit de Constantinople el se rendft k Scutari
pour se mettre k la t&e de l'annfe (38 aott 1553).
D' Yenischehr , il envoya k Andrinople le prince Baye-
sid, qui &ait venu hii offirir ses hoimnages, ayec ordre
de prendre les rtnes du gouvernement pendant toute
la dnrie de la campagne de Perse. A son arriv^e k
Kutabia, Souleiman vegol en audience l'envoy^ polo-
nak Yazlowieki, et le cong&Ba en l'assuraiit de ses
dispositions bienveillantes k regard de son souyerain.
Aucune puissance de l'Europe n'accr&fitait alors au-
tant d'ambassadeurs auprta de la Porte que la Po-
logne. A Nicolas Bohousz, dont nous avons parte
plus haut, avaient succ&fc en 1549, 1550, 1551 et
1 559, Andr& Bourzki , Stanislas Tenezynski . Andr6
Bzicki, Yazlowieki, et l'aim& suivante, Jean-Pierre
Pelecki et Nicolas Brzozowski; le but de leurs nego-
tiations &ait de faire cesser les irruptions des Turcs
en Pologne , d'obtenir l'indemnite stipulle pour la
reine Isabelle, la mise en liberte des prisonniers et le
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56 HISTOIRE
renouvellement de l'ancien traitd de paix [xyii]. Le
baile v^nitien Navagiero, qui s'etah rendu k Constan-
tinople charge d'une mission sp£ciale, retourna cette
m&ne ann£e k Venise pour rendre compte au s£nat
du r&ultat de ses negotiations [xvm].
Pendant l'£quinoxe d'automne, le prince S&im f
gouverneur du Sharoukhan, vint baiser la main du
Sultan k Boulawadin et regut la permission de l'ac-
compagner dans son expedition (1 2 schewal — 21 sep-
tembre). Lorsque Farmee eut atteint les environs de
la ville d'Eregli, le prince Moustafa, ne se doutant
pas du sort qui l'attendait, arriva dans le camp et y
fit &ablir sa tente k cdte de celles de son p6re. Le len-
demain, les vizirs bais£rent la main au fib du Sultan,
et en regurent des pr&ens magnifiques; apr&s cette
c^remonie, Moustafa monta sur un cheval ricbement
enharnachl, et fut conduit k l'audience par les vizirs
et les janissaires qui , se pressant sur son passage, le
saluaient de leurs acclamations. Mais quelle fut sa ter-
reur, lorsqu'en entrant sous la tente, il apergut, au
lieu du Sultan et de sa cour, sept muets charges de
le mettre k mort! Ces muets &aient les m&nes qui
avaient £trangl6 le grand-vizir Ibrahim-Pascha pen-
dant son sommeil; ils se jet&ent sur Moustafa, qui
appelait en vain sou p&re, assistant derrtere un rideau
de soie k cette horrible sc6ne. Dans le moment m&ne
ou le prince expirait dans l'interieur de la tente, on
tranchait au-dehors la t&e k son 6cuyer et k Tun de
ses agas '.
' D'apres Ascanio Centorio, p. 260, cet aga etait un reo£gat veniUen-:
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 57
Quand le bruit de cette execution transpira dans
rarmfe, les janissaires, toujours pr&s k la r6volte,
demandtaent k grands cris la punition du grand-vizir,
aux intrigues duquel on imputait la fin tragique du
prince. Les vizirs assembles an cfiwan &aient fort em-
barrasses sur les mesores qu'ils avaient k prendre,
lorsque le grand-tresorier entra et demanda k Rous-
tern, au nom du Sultan, le sceau d'or, insigne du
grand-vizirat; ensuite s'adressant au troisfeme vizir
Haider -Pascha, il lui dit : « Retournez dans votre
tente, » lui annongant ainsi sa destitution. Roustem
et Haider se retir&rent; les autres membres du diwan
restferent assembles; quelques instans apr&, le grand-
tresorier reparut avec le sceau d'or et le mit entre
les mains du second vizir Ahmed-Pascha, vainqueur
de Temeswar, qui fut ainsi rev&u de la plus haute
charge de l'einpire.
Le defterdar du tr&or imperial se rendit aussitdt
k la tente du prince pour saisir sa succession au nom
du fisC ; cependant tous ceux qui &aient attaches k son
service regurent, en recompense de leur'fid&ite, les
uns des timars, les autres des siamets. Les oul&nas
d'Eregli furent invites k faire les pri&res fun£bres pr6s
du corps, que le Sultan fit ensuite transporter k Brousa
et enterrer pr6s du tombeau de Mourad II [xix]. Tous
les historiens ottomans et chr&iens s'accordent k desi-
gner Roustem comme ayant provoqu£ cet assassinat
sur les instigations de la sultane Khasseki Khourrem :
« Fece prepdere il Bascia dell' Amasia (P6cuyer) e un Vencliano di casa
« Mkhele, gia da fanciullo preso nella contrada della Prevesa. *
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58 HISTOIRE
seulement les derniers parlent encore de lettres inven-
tus, dune tentative d'empoisonnement et de beau-
coup d'autres circonstances qui rendraient ce crime
encore plus odieux. Depuis Thuan jusqu'& Robert-
son, ks htstoriens europ&ns les plus accr£dit& re-
produisent [xx] , en y ajoutant des details plus ou
raoins path&iques, le rapport de l'ambassadeur im-
perial Busbek ; mais cet ambassadeur, Men qn'il nous
ait laisse de precieux docuraens sur les £v£nemens de
son £poque t nous semble si mal inform^ touchant
quelques circonstances principals de cet £v£nement,
que nous craindrions d'ajouter une foi compl&eft son
r&at. Comme Busbek n'avait pu 6tre t&noin oeulaire
de kt mort du prince, qui avait eu lieu un an avant son
arrivte k Constantinople, et comme il transporte la
seine de lei^cution d'Eregli en Karamanie k Amassia,
oA Souleiman n'est point alte dans cette expedition ,
il nous sera permis de r^voquer endoute quekjues-unes
des assertions qui nous paraissent faasarddes, et qu'ont
r^petees d'apris hri Knolles et Robertson. Mais il est
un fait rapport^ par Busbek, qui nous paratt plus
digne de confiance, quoique les htstoriens ottomans
n'en fassent point mention : e'est l'assassmat du jeune
enfant de Moustafa par l'eunuque Ibrahim qui l'enleva
par ruse des bras de sa mire et l'&rangla.
Laffliction produite par la mort violente du prince
fut g6n£rale dans l'armfe et mfime dans Tempire ;
bon, juste, et protecteur 6clair£ des sciences et de la
po&sie, il s'&ait acquis I'affection du peuple, des sol-
dats et des savans; verse lui-m&ne dans la litterature,
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 5$
Moustafa a laiss6 quelques poemes sews le nom sup-
pose de Moukhlissi (le sincere) [xxi]. D honora de sa
faveur Sourouri, un des plus c£l£bres philologues ot-
tomans, auteur d'un dictionqaire peisan tr£s-estim6,
dun ouvrage but Tart po&ique l et d'excellens com-
mentaires sur les chefs-d'oeuvre de la po^sie per-
sane ', entre autres sur le GuUstan et Boston (jardin
de roses et des ornemens) de Saadi , le Beharistan
(le bosquet du printetnps) de Djami, le Schebistani
Khicd (le boudoir de Imagination) de Fettahi , le
Mesnewi de Djelaleddin Roumi, et le Diwan de Hafiz
Moustafa lui-m6me est auteur de trois diwans de
Ghaz&les 3 .Parmi les poetes c£l&bres qui pleurirent
sa fin tragkjue, aucun ne le fit avec plus de ohaleur et
de courage qu'Yahya; d£j&, pendant le grand-vizirat
d'Ibrahim, il avait fait entendre des plaintes ton-
chantes sur la mort du defterdar Iskender TscheJebi,
injustement sacrifio par ce puissant favori de Souleif-
man*. La nouvelle &£gie de Yahya passa de main en
main et fut bientdt dans toutes les bouches, corame
le rapporte l'historien Ali [xxii] ; Tauteur chercha d'au-
tant moins k garder l'anonyme, que Roustem, Ten-
nemi de tous les poetes, Aait destitu6. Mais deux ans
t Medjmaoul-fars, ou Diciionnmre de la langue persane, «il£ conmie uoe
des meilleurs sources dans Bourhani Katii, vol. I, f. 2.
» Bahroul-Maar if (V Ocean de la Connaissance).
3 II est encore l'auteur d'un Commenttire sor les traditions de Bou-
fcharji, d'une fir^#e,du Koran deKhasikbaiLet des ouvrages grarmnatiraux>
portant le titre de Missbah et Mirah, du Telwih et du Miwah , enfin d'utt>
traite sur les Enigmes d'Aliker et de Mir-Housein.
4 Voyez 1. XXYm.
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60 HISTOIRE
apr&s , Roustem &ant revenu au pouvoir , repr&enta
souvent au Sultan l'avantage qu'il y aurait, pour
le maintien de Fordre, k punir un homme aussi t6-
m6raire qu'Yahya, car n'osait pas le faire ex£cuter
de son propre mouvement, comme le grand-vizir
Ibrahim l'avait fait k regard du poete Fighani. Rous-
tem etait devenu plus prudent depuis qu'il avait couru
lui-m6me un grand danger, et vu sa propre t&e
demand£e par les janissaires. Cependant SouleTman
qui avait c£d£ lorsqu'il s'&ait agi de la vie de son fils
Moustafa, refusa de sacrifier celle du poete qui se plai-
sait k c£16brer la memoire du malheureux prince. Le
grand-vizir, furieux de la resistance qu'il avait ren-
contr^e, manda le poete chezlui, esp&anttrouver dans
une reponse imprudente un pr&exte pour le faire conr
damner comme coupable de l&se-majest£. « Comment
oses-tu censurer les actions du Padischah, lui demanda-
t-il , et les livrer k la connaissance de la populace ? »
Par une heureuse inspiration, Yahya r£pondit : « En
apprenant la sentence de mort prononc£e par le Pa-
dischah, nous avons aussi condamne le prince a mort,
mais nous avons pleur6 avec ceux qui Font pleur6. »
Roustem ne pouvant le livrer aux bourreaux, se ven-
gea en lui retirant la place lucrative d'administrateur
des &ablissemens de bienfaisance [xxin].
La mort du prince Djihanghir prouve mieux encore
que les elegies et quelques chroniques r£dig£es avec
hardiesse x combien Moustafa etait aim^ et regret^,
i JV6 had koutiU schehiden : « il perit comme uu martyr; » et une
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 61
Defigur£ par une double bosse , Djihanghir etait dou£
d'ailleurs d'excellentes quality et avail la plus tendre
affection pour son frtre. Le coup qui avait frapp£
Moustafa fit une si forte impression sur son esprit que
sa gaiet£ naturelle se changea subitement en une pro-
fonde m&ancolie, et, malgr£ tous les secours qui lui
furent prodigu£s, il mourut peu de temps apr&s [xxiv].
Souleiman , qui aimait l'esprit f&ond en saillies de
Djihanghir, fut vivement affiig£ de cette perte; il le
fit enterrer k c6t6 de son frere Mohammed, dans la
mosqu£e b&tie en honneur de ce dernier, et qui de-
puis ne fat plus appelee la mosqu6e du Prince, mais
des Princes, denomination quelle conserve encore
aujourd'hui. Le Sultan, pour rendre un nouvel hom-
mage k la m£moire de Djihanghir, fit construire une
autre mosquee sur la colline qui domine le faubourg
de Topkhanl. Cette mosquee s'616ve majestueusement
au-dessusdesb&timensqui l'entourent, semblable par
sa situation k celle qui fut £rig£e k Scutari en hon-
neur de la sultane Mirmah, fill e de Souleiman.
L'hiver que le Sultan passa k Haleb fut consacr£ a
plusieurs rtformes dans l'administration des finances,
particuli&rement k la repression de quelques abus et
innovations qui s'^taient glisses dans la perception des
dimes fiscales et autres imp6ts.
D6s les premiers jours du mois d'avril, l'arm£e se
remit en marche, et l'eunuque Ibrahim-Pascha quilta
autre : Sitem Rousiem : « injustice de Roustem. » Voyez Petschewi,
f. i5o. Ali.
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Ch HISTOIRE
le camp pour se rendre comme kaimakam k Con-
stantinople. Trois jours apr£s larriv^e des troupes a
Amid, Souleiman convoqua un diwan general. Con-
trairement k Tusage , on y vk figurer, non seulement
les vizirs, mais encore les kadiaskers, leg defterdars et
les nischandjis, les officiers des janissanres, tels que les
agas, les kiayas, les serdars , les colonels, les capi-
taines, les intendans et les gardes-du-corps ou solaks.
A mesure qu'ils entraient dans la tente imp£riale, le
Sultan les saluait , leur demandait de leurs nouvelles,
puis leur parlait de la n£cessit6 de porter les amies
dans le royaume de Perse, dont les babitans &'&aient
constitu£s depuis des stecles les ennemis implacables
de l'empire et de la vraie foi. Tous r6pondirent avec
enthousiasme et les larpies aux yeux : * Nous sommes
pr6ts k suivre le Padischah, non seulement dans Tlnde
et le Sind, mais jusqu'k la montagne de Kaf » (les
Orientaux font de cette montagne les bornes de la
terre). L'arm£e, apr& avoir passi par Erzeroum, Tja*
bakdjour, et traverse le bras principal de l'Euphrate
(le Mouradjai), s arr6ta k Kargfaabazari (marche aux
comeittes), ou des munitions lui furent distributes;
lorsqu'elle f ut arriv^e dans le Toptjairi (prairie des ca-
nons), les Kurdes lui amen&rent quelques prisonniers,
et a Souschehri elle fut passee en revue. Le grand-
virir Ahmed et le second vizir, l'eunuque Ali-Pascha ,
rivaliserent a cette occasion de luxe et de magnifi-
cence; mais les troupes de Roumilie, commandoes par
Mohammed Sokolli. &ant venues rejoindre Tarm^e,
elles effac£rent tout par leur costume et la richesse de
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. 65
leurs arnaes. Les ^paules des soldats de Sokolli &aient
couvertes de peaux de ltopards; k leurs casques
etaient suspendues des queues de renard , et d^nor-
raes boudiers, des £perons et des brassards d'acier,
des gantelets de fay completaiertt lew equipement.
Leurs drapeaux &aient rouges et blancs, et leurs
chevaux teints des m6mes .couleurs. Six jours plus
tard, le prince S£lim passa en revue 1'armee d'Ana~
totie, commands par Ahmed-Pascha, les troupes de
Karamaaie , de Soulkadr , et celles des begs turco
mans qui Etaient sous les ordres de Haider-Pascha.
Les troupes de Soidkadr et Siwas formaient l'arrtere-
garde; les beglerbegs d'Erzeroum, de Diarbekr et de
Damas, les paschas Ayas, Iskender et Mohammed
etaient places k 1'avant-garde; le prince S&im com-
mandait k 1'aile droite les corps d'Anatolie et de Ka-
ramanie ; et les troupes de Roumilie occupaient Taile
gauche. C'est dans cet ordre que l'arm£e se dirigea sur
Karss, place foonti6re d'oii le Sultan envoya sa decla-
ration de guerre au schah Tahmasp. C'&ait une pro-
vocation redig^e dans un style pareil k celui qu'avait
employ^ S£lim avec le schah Ismail. Souleiman an-
nongait qu'il marchait conform£ment aux fetwas con-
tre les m£ci*£ans pour les an&ntir; que, selon la loi
du Proph&e, il sommait Tahmasp d'embrasser llsla-
mismeavant que de l'y forcer par le glaive. II ajoutait
que , si son offre tfetait point accept£e , il esp&ait
que le schah ne serait pas assez l&che pour se cacher
devant lui ; qu'il tirerait son glaive du fourreau , d'a-
pres les paroles du Koran : JSous avons envoy e le/er
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64 HISTOIRE
pour manifester notre colere l . » Aux menaces de Sou-
leiman succeda la devastation des beaux et fertiles pays
de Nakhdjiwan, Eriwan et Karabagh; les bourgs de
Schoureghil, Scherabkan£ et Nilfirak furent d&ruits;
k Eriwan, les palais du schah et de ses fils furent d6-
molis, et le magnifique jardin de Sultanieh enticement
saccag<5 (1 7 sch&ban 961 — 1 8 juillet 1 554). Six jours
plus tard, Souleiman arriva k Arpa Tschairi (champ
d'orge), ou il exerga les m&nes ravages; mais le len-
demain les troupes de Karamanie tomb£rent dans une
embuscade et durent s'enfuir en laissant un grand
nombre des leurs sur le champ de bataille. Le beau
pays de Karabagh fut livr£ au pillage , et les soldats
brAl&rent ce qji'ils ne pureiit emporter. Nakhdji-
wan fut detruit de fond en comble, ainsi que ses
environs. Sur la nouvelle apport£e par des espions et
des d&erteurs que le schah s'&ait retrench^ dans les
montagnes de Lor, Souleiman, craignant d'ailleurs
la disette au milieu d'un pays qui n'ofirait plus que
des mines, ordonna la retraite. Le schah envoy a sa r£-
ponse au Sultan par un prisonnier sipahi ; cette lettre,
qui n'&ait pas plus mod£r£e que la declaration de
guerre, disait que le schah vengerait la devastation de
ses domaines , que le courage des Ottomans ne con-
sistait point k se battre au sabre ou k la lance, mais de
loin avec des fusils et des canons, et qu'il se manifes-
tait par le pillage et l'incendie. Gependant le schah ,
■ Ali, Petschewi, et le Journal de Souleiman, no xxxvnr, reproduisent
cette tettre avec quelques legeres differences.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. f>>
en fitttssant , protestait de ses intentions pacifiques -\
On apprit en m&ne temps que Hamza-Sultan, un des
prindpatix begs du Kurdistan , avail dispani , et que
le beg d'Aitiassia, qui avait fait pendant quel que temps
une guerre d'esearmouches daw Its environs de Mer-
agha et deSehed , « occupe TakhttSouteiman (tr6ne de
Salomon), capitate du Kurdistan, s'&ait laiss£ battre.
Aprte cet ^change de lettres injurieuses que les deux
partis lie trouvaient pas convenable d'appuyer par
les artnes , les relations entre le schah et le Sultan
deyinrent htm pas amicales, mais moins hostiles. et
les vizirs des deux armies poursuivirent leur que-
rdle par 6erit *. Le grand- vizir r^pondit aux repro-
ches adress£s a son maltre dans la dern&re kttre
du scbah, en disant qu'on savait bien lequel des
deux partis avait eu peur ; que depuis que le Sul-
tan s&ait retire de Nakhdjrvvan, le chacal reparaissait
courageoseiaent pour parcourir la for6t 3 ; que la Perse
etait encore obscurcie par l'ombre ties drapeaux du
Padischah , et que si les Persans voulaient accepter
une batattle en rase campagne , les Ottomans etaient
prfits & les combattre sans fusils et sans canons, et
sauraient les vaincre au sabre et k la lance. Le grand-
vizir, dans une seconde r£ponse qu'il envoya an schah
eomme la pr£c6dente par un prisonnier persan, re-
1 Ali, f. *65, et Petschewi, f. io5, doniient le eontenu de cette lettre.
» Les lettres des vizirs ottomans se trouvent dans Ali et Petschewi,
f. io5, mais avec plus d'exactitude dansle Journal de Souleiman, no xxxix.
3 Schaghal ende rayed be blsche delir. Vers qui a passe en proverbe die/.
les Persans.
r vt. 5
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66 HISTOIKE
futa article par article tine lettre que tes vizirs persans
avaient adress^e au gouverneur d'Erzeroum Ayas-
Pascha, et dans laquelle ils se montraient surtout irri-
t6s contre le fetwa du moufti , et parlaient de la pais
coinme si les Ottomans l'avaient demand£e les pre-
miers [xxv]. II commengait par protester contre Pin-
sinuation des Persans, qui tendait k faire croire que les
Turcs avaient ouvert les negotiations de paix, et d&-
clarait du reste qu'il ne voulait pas les repousser, Puis
venant au fetwa du moufti, Ahmed-Pascha disait que
les Persans ne pouvaient attaquer l'autorit£ de cette
sentence en s'appuyant sur ces paroles du Koran :
Cehu qui tuera un croyani aura Verier en portage,
parce qu'elles ne s'appliquaient quaux fidfeles; et
quels ^taient done les m£cr6ans, si ce n'etaient ceux
qui, tels que les Persans, maudissaient du haut de la
chaire les compagnons d'armes du Proph&e (les trois
premiers khalifes)? II ne suffisait pas, ajoutait-il, de se
dire musulman pour avoir droit k ce nom. Les Per-
sans pouvaient envoyer leurs savans ouvrir des con-
ferences avec ceux de la Porte, afin que leur h£r£sie
fiit vaincue par la verity la veritable doctrine maho-
m&ane existait depuis huit cent soixante-un ans, tandis
que le schisme des Persans en comptait k peine cirt-
quante. Les Persans avaient parte du jugement der-
nier et des vicissitudes du pouvoir en ce monde,
mais grftce k Dieu le Padischah y pensait toujours et
n'avait pas besoin de leurs exhortations; ce n'&ait pas
les habitans du pays de Roum qui &aient hypocrites ,
mais bien les Persans eux-m6mes, auxquels d'ailleurs
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DE L'EMPWE OTTOMAN. 67
le Proph&e avait pr&lit leur chute, et qui depots n'a-
vaient essuye que des revers. Quant k la paix k con-
dure, la Sublime-Porte &ait ouverte k ses amis comme
k ses ennemis; mais si les Persans d&iraient sinc&re-
ment voir cesser les hostility , ils devaient envoyer
un ambas&adeur en titre et non pas tin miserable
agent de basse extraction ; sinon on passerait l'hiver
sur la fronti&re , et alors les malheurs des sujets re-
tomberaient sur les comes des gouvernans. Le Sultan
ne leur refusait pas son pardon et sa gr&ce : c'&ait
done k eux k connaitre leur position, et k agir en con-
sequence; leur salut &ajt k ce prix [xxvi].
Ayas-Pascha, gouverneur d'Erzeroum , sexprimait
k peu prte de la m6me manure en r£ponse k une
d£p6che de$ g£n£raux persans : ils s'etaient enfuis,
disait-il , comme des chacals devant k§ armies du
Padischah , et ils ne pourraient empteher l'incendie
qui menagait Tebriz et Erdebil; les habitans de ees
villes etant h£r£tiques , les Ottomans qui en feraient
le stege n'avaient pas k craindre les menaces d'AK
contre ceux qui faisaient la guerre aux vrais croyans :
l'imam des Mahometans ne pouvait avoir aucun rap-
port avec des hypocrites. Enfin on n'enverrait per-
sonne au chateau de Ghouk pour n£gocier la paix,
puisqpe le Sultan etait decide a passer l'hiver sur la
fronttere , pour venir T&6 suivant renverser Tebriz
et Erdebil '. Cependant Ferhadbeg, sandjakbeg de
Kirkilise, et Tourakhanoghli, remportdrent quelques
* Petechewi, f. 108. Tedjaalnaha aaliha etafitihm. Journal de Souleiman,
»• xl. DjeUlzade* f. 3a8.
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(S * UISTOIKE
avantages sur lennemi, Fun p*& des rives de l'Arag*
1'autre fc Konloudja. L'arni£e ayant traverse le pont
de Tschoban, se tfcrigea sur Hasankalaa. Les begler-
begft de Diarbekr et de Wan, ainsi que lee begs kur-
des, reguretit la permission de retotirner dans leurs
foyers, aprta avoir &i admb au baise-maift et avoi*
regu les pr&ens ordioaires. A tette occasion les WStes
eavoyfes de Takhti^Souleiman par le beg d'Amassia ,
Sultan Houaeln, furent promen&s sur des piques
par tout le camp, au son de la mnsique de Tarm^e.
Sur la nouvelle que le schah s'&ait empar£ de plu-
sieurs chateaux eti G&rgie, fe grand-vizir regut Tor-
dre de quitter Sazlik , et d'aller & sa poursuite avec
quatre mille janissaires et routes les troupes de Rou~
mitie, d'Anatolie et de Karamanie ; maid, 4 son arriv^e
a Olti, il apprft te retraite du schah, et se d&ida k re-
venir sur ses pas* Cependant, les forces qui occu-
paient Bagdad et le Lorfetan avaient r^duit sous leur
domination tea districts de Schehrzol et de Belkass x ,
et pria K>us les chateaux et forts qu'ils renfermafent.
Ces succ& amen^rent la souftiissioii des autres begs
du Kunfetan ». Enfin, le 26 septembre 1554, on vit
anivtr a Erteroum, pendant le s6jour de rempereur
dans cette ville , on ambassadeur persan . porteur
, i t>etschewi, f. 109. Ali, xlvih« > cveucment, f. a65. Djelalxad^, f. 332.
Ce dernier et fcetschewi nomment les chateaux tie flfiwera , Noukoud ,
Eask6, Sehemneti, Fareodtje. <
» Les begs Oghourloubeg , Mir Siakbeg, Mir Mohammed, Seifbeg de
Bana, Ymisonfbeg de Destare, Bom dak beg de Bouroudj, Ourkhanbeg,
Djihausabeg.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 69
dutte lettre concue en femes dignes des deux sou-?
veraros, Coofonr^ment au d&ir du Sultan, Sdbah
Tahmasp avqft choisi cette fhis, pour 1© repr&enter,
ua des tents dignitatis du royaume, le kouroudji
katochar, on chef des gardeg-du^corps, nomm£ Schah-
kouli; dans one audience aotennelle, l'envoye.du
schah demanda un armistice qui fitf accords pour tout
le temps que tea Persans Vobserverwent em-ra^mes ' .
Le 3 sUkide 961 (30 septembre 4554), le Sultan qiiitta
Erzeroum et toHhra k Siwas au bout devingt jours de
marcbe; il en mit encore douse poiir se rendre k
Amassia*, d'ou il renvoya les troupes dans leura quar-
tiers d'bhw. L© tft mai de lann^e 4S55, le grand-
maitre des clr&nohies du schah, lischifcaga Ferroukh-
zadbeg, apporta de la part de son maitre de nouvdles
propositions de pais, des pr&eaa maguifiquest et une
lettre ansa proKxe quobligeante, qui commencait par
rendre gkrire k Dieu , au Proph&e et & Ali * * oon-
tenaot force sentences en langus arabe, des assu-
rances d'amitte, et enfin la demande qu'ii fAt' p&reus
am p&erins persana de visiter les Heme sakrta de lif-
lamisme [xxyii}. Ferroukhsadbeg fut comble dhoo-
news et de prfoens, et regut a son depart une lettre
de Souktman en r6ponse & celle du schah. Dtes cette
• 1 Djelalzade, f. 33i. Petschewi, f. 109. Ce dernier, pas plis que le
Journal de Souleimaa , ne fail ooooaitre la repoaee du Sultan,
* DjeWw^, f. 333. PelscVewi, f. 1**. Fine*** Maji <few»« QrHor
persiems, Busbek , «p. I.
3 Le Prophete dit d'Ali : tina me dine to I ouloumi w« Mi babiha : « Je
Miis la cite dc la science; Ali eo est ka porte. •
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7 o lUSTOlRE
lettre, le Sultan rendait hommage au Seigneur de la
saintetS, cettepreuve iterneUe de la puissance miraeu-
leuse de tislamisme, a Ali; mais il faisait observer en
m&ne temps qu'il n'&ait pas necessaire pour cela d'in-
jurier les autres amis du Proph&e, car celui-ci avait
dit: « Meg amis sont comme les Voiles; quel que soft
celui d'entre eux qoe vous suiviez , il vous guidera
dans la voie da salut \ » La paix, poursuivait Sou-
leiman, serait maintenue avec laide de Dieu, tant
que les Persanfc ne la violeraient pas. Les comman-
dans des frontteres 6viteraient tout sujet de discorde,
et prot^geraient de tout leur pouvoir les pterins se
rendant h la Mecque ou h M6dine. Cette lettre est le
premier document connu dun trait£ de paix entre la
Porte et la Perse : car depuis un demi-stecle, c'est-a-
dire depuis la fondation de la dynastie des Safis par
Schah Ismail, il y avait Wen eu entre les deux puis-
sances des suspensions d'armes, mais aucune conven-
tion ^crite n'avait £t& pass£e entre elles. Aucontraire,
les deux nations toujours sous les armes n'attendaient
qu'un pt&exte ou une occasion favorable pour re-
tremper dans le sang cette vieille haine qui divisaft les
sunnis et les schiites. Le 29 mai 1 555 (8 redjeb 962),
jour oA cent deux ans auparavant Mohamined-le-
Conquerant avait fixe la domination ottomane en Eli-
rope par la prise de Constantinople , son descendant
Souleiinan l'affermit en Asie par ce premier traits de
paix conclu avec les Persans 4 Amassia [xxvm].
i Jishabi ken noudjoum hicyihtm ihiedeiawi ihtcdeiium.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 71
Une ambassade du roi Ferdinand, composee d'An-
loine Wranczy, ev£que de Funfkirkhen, savant dis-
tingu6 et habile politique , de Francois Zay , capitaine-
g6n6ral des nassades (flotte du Danube), et enfin
du Beige Busbek 9 vint k la radme £poque n^gocier la
paix k Amassia; mais ce fat sans succte. Afin de ne
point laisser de lacune dans Fexposi des relations
diplomatiques de la Porte avec TAutriche, et de
faire mieux connaitre la position de ces deux puis-
sances k regard de la Transylvanie, il est n6cessaire
de reprendre le fil de notre histoire et de remonter
jusqu'au stege d'Erlau. Avant la prise de Temeswar,
Ferdinand avait 6crit de Linz au grand-vizir Rous-
tern , sous la date du 24. avril , en lui demandant la
mise en liberty de Malvezzi et un sauf-conduit pour
deux envoy& qui devaient apporter des pr^sens k
Constantinople, et ouvrir des negotiations pour une
paix definitive. Dijk quelque temps auparavant Mai-
vezzi avait &6 transfer^ de la Tour-Noire (prison sur
les bords de la Mer-Noire) k celle appetee les Sept-
Tours, et la somme affect£e k son entretien avait &£
port& de quinze aspres k trente par jour z ; mais sa
d&ivrance fat refuse aux instances de Fempereur.
Quant au reproche fiut k Souleiman d'avoir viote le
droit des gens dans la personne de l'ambassadeur
d'Autriche, le grand-vizir r£pondit que Malvezzi n'a-
vait 6t6 retenu que comme 6tage et garant des senti-
mens pacifiques de Ferdinand [xxix]. Au printemps
• Relatione di Angefo Rohain (secretaire de Malvezzi)
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7* HISTQIRE
qui suivit le s&ge d'Erlau, lernpereur nomma pour
le repr&enser k la Porte Francois Zay et Verant»B l .
II enYoya ce f dernier, avec Paul Palyna, au paseba
d'Ofen pour conctare un armistice de quekpies mofe y
pendant lequel on n^gocierait la pais 4 Constanti-
nople \ L'eunuque Ali, sur le point de eeder sa place
a Touighoon, leur fit d'abord un acoueft pen favo-
rable; roais bient6t, radouei par un cadcau de mille
ducats, H promit de feire agr^er tear demand* a . La
Porte n ayant accorde qu un armistice de six mois,
Zay et Yerantius re^urent Tordre de parti? poor Con-
stantinople* et de se coneerter avee Malvezzi sur le*
conditions auxquelles on pouvait acheter la paii. Iky
arriverent le 25 aoAt , pen de jours avanfc le depart de
Souleiman pour Haleb. Le lendemain, ib se presen-
tment chez le grand- vizir Roustem 9 le snriendemain
ehez las trois aufres vizirs, Ahmed, Ibrahim et Haider,
et le trotsitate jour Us furent admig a Taudience du
Sultan , qui daigna prendre la parole et demanda hn*
n»&ne au grand-vizir a quelles conditions la pais pou-
vait &re accordee 4 . Les ambassadeurs de Ferdinand
offrirent un tribut annuel de cent cinqnante mille du-
eats pour la cession de la Hongrie proprement dite ,
«• Verantins ou nrieux Wrauczy.
a Instruct io pro Antonio Verando et Paulo Lillerato de Palinia, da tee du.
x3 mars, aGraetz, par consequent seize jours avant le premier document
cite dans I'onvrage de, Miller : Epistolce Imparatorum et Return Mungaritt
Ferdin^ndi I et Maxirniliani //. On ft'jt trouve ni riaatructian dent il
s'agit ici, ni les suivantes, qui sont d'une grande importance.
3 lielatio Verantii et Pauli Litterati.
4- Instructio pro Pcrantio, Zay et Mah'c&zio. Vienpe, iS juin i553.
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. • 7 3
et un autre de quarante mille ducats pour fa Haute-
Hoagrie et JaTransylvanie f ; hubs apr& de longues dis-
eussiona, les vizirs arr&Srent qu'il ne serait pas iir6me
perrais & Ferdinand de revendiquer la Transylvanie,
el qa'k eette condition seuJe cm pourrait traiter de
la paix. Cette audience ne leur avait 6t^ accord6e si
prompteront qu'& cause du depart du Sultan, qui
s'embarqua en eflet le lendemain pour Scutari. Mal-
vern fut remis en liberie, et dut se rendre a Vienne
pour prendre lea ordres du roi relativement k 1' aban-
don de la Tjransylvanie k Zapolya; les deux autres
enyoy&reet&ent k Constantinople. Le lendemain du
depart de Souletman, le grand-vizir et les ambassa-
deurs arrtfefereut les bases du traite dans un jardin du
faubourg de Scutari. La paix fut renouvel4e pour cinq
ans; le present annuel de trente mille ducats fut re-
duit k la moit&t k cause des pertes que le roi avait
£prauv£es dans la demure campagne en Hongrie; it
fut convenu en outre que les paysans appartenant au*
vilks de Saolnok et d'Erlau ne seraient pas plus im-
poses qu'ils ne l&aient ayparavant. La conclusion
definitive de cette affaire ftot remise au reteur die Mal-
vezzi; en attendant on convint de la prolongation de
rarmistice jusqu & cette 6poque \ Quelques paroles
» Actio Antonii Verantii, Ftanc. Zayi et Joannis Maria Makezzii Or a-
iorum S. /. H* Uaptiads apud principem Tttrcarum a. 1 55), mensc Augusta
habit*, en 10 feu Hies, awTles signatures et scelies des irois arabassadenrs r
dans les Archives I. R.
* Les Articles de ce traite se trouvent ajoutes au Rappdn de Fambassadi :-
*»Articuli pacis qitinque annorum quae inler magnitudincm inipcralori**
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74 HISTCHRE
de Roustem rappeterent aux ambassadeurs l'orgueil
avec lequel jadis le grand-vizir Ibrahim avait parte a
Laczky. Ainsi il leur reprocha la violation du droit
des gens par les Hongrois , qui avaient coup6 le nez
et les oreil!es*& Tambassadeur qne Souleiman leur
avait envoys k son av£nement au tr6ne l . Les Autri-
chiens r£pondirent qu'en effet ils avaient bien entendu
parler de cette circonstance, mais quelle avait eu lieu
du temps du roi Louis et non pas sous le r£gne de
Ferdinand. « C'est pour cela, continua Roustem en se
tournant vers Zay, que vous autres Hongrois, vous
perdites alors Belgrade, votre roi et le royaume; der-
ni&rement encore , qu'avez-vous gagn£ h violer Tar-
mistice qui avait &£ conclu pour cinq ans, et h envahir
Ik Transylvanie ? Le del nous a rendu Temeswar,
Szolnok, Lappa et Becs£ mfime , oii il y avait d6jk une
mosquee. » Enfin, Roustem s'informa encore si c'&ait
au nom de l'empereur Charles-Quint qu'ils deman-
daient la paix. Ils r^pondirent qu'ils &aient venus au
nom du roi Ferdinand, mais qu'il n'y avait aucun
doute que l'empereur, pour Tamour de son fr£re,
n'aceept&t£galement le traits \
» Turcarum, Zulthanum Zuliman ac Asia? Graecia* principis et Serenissi-
» mum Koih. Huog. Bohem. Begem Ferdioandum renovatse. »
■ « Nonne primum quum dos pacem et araicitiam vobiscum facere voleba-
»» mus, vos dedita opera uni Oratori nostro nasum et aures praectdistis, et sic
» delurbatum in contemptum Imperatoris noslri el nostrum omnium remisis*
» lis; quam injuriam quum nos vindicare vellemus nonne pro uno homine
*»afHicto et Belgradum amisistis etRegem etRegnum.* Rapport des trois
ambassadeurs, dans les Archives 1. R.
a liappon des ambassadeurs, dans les Archives I. R. Les hapports de
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DE LEMP1RE OTTOMAN. 7 5
Matvesui 6tok k Vienne depnis neof mois; une ma+
ladie occasion^ par son long emprisonnement fut le
pr&exte ou peut-6tre la veritable cause de ce retard.
A la reception d'une lettre dat^e de Haleb, fin fS-
vrier * , el qui n'arriva k Vienne qu'au commence-
ment du mois de mai, Malvezzi regut enfin l'ordre de
retourner k son poste, muni de nouvelles instructions,
dans lesquelles leg litres de l'Autriche k la possession
de la Transylvanie &aient longuement d&nontr£s ,
et qui contenaient aussi une refutation du droit du sa~
bre ^tabli dans la lettre de Souleiman \ Pendant le
voyage de Malvezzi et la grave maladie qui le forga
d interrompre sa route , les Ottomans viol&rent fW-
quemment 1' armistice. DejJt, avant la mission de Ve-
rantius et Zay, Oulama, gouverneur de Bosnie, ac-
Zay et Vtrantius, qui manquent chez Miller, se trouvent dans Catona,
XXII, p. 453-493.
« « Date namqiie ilia? sunt littera Aleppi, ultima Februarii nobisque un-
it decima primum hujus mensis (maji). » Insiruclio pro Maheszio, dans let
Archives de la maison I. R. d'Autriche. On y trouve anssi la lettre origi-
nale de Soulennan, qui contient le bulletin de ses victoires de Perse : elle
est ecrite avec de l'encre blanche et en beaux caracleres. Gette lettre fut
portee par le tschaousch Yousouf, qui est appele Junszuph dans le Rapport
des ambassadeurs. Catona, XXII, p. 564.
a Instructio pro Malvelsio, Ferantio et Zay, en 7 feuille*, Viennae,
a» may. Archives I. R. : « Quando quidam vero ex postremis litteris, quas
» Serenissimus Frinceps Turcarnm ad nos ex Alepo dedit, cognovimus mag-
*» nitudinera ejus ob id maxime graviler ferre, nos Transylvaniam possidere,
» quod ipse provinciam illam jure belli gladto scilicet a se occupatam quon-
* dam Regi Joanni tradiderit, et eo defunclo ipsius quoque illustrissimo filio
» concesserh , et putet nunc honori famat et repulalioni magnitudinis sua*
» aliquid detrahi idcirco, quod nos ipsam ad manus nostras acceperimus. »
Voye* V Instruction s us due aux Archives I. R.
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76 HISTOIRE
coropagn£ de Mound, b£g de Klia, et de Malkodj ,
beg de PHeraegoviae, avait d£vast6 par le for et le
feu les environs deWarasdin; raais il fatatt*qu6et
battu, pr& deKris, par un d&achemenft hongroisque
coaduisait Nicolas, comte de Zriny, et no autre cteta-
cheroent styrien sous lea ordres de David Ungnad.
Djfifer, fita du pascha, p^rk dans cette rencontre
de la main de Jean Marbez. Oulama, pour venger la
mort de son 61s r se jela sur kg chateaux de Chasma,
Verceca6 et Dombra. En revanche , Pierre Erdcedy
et George Zhmy desoendirent la Save dans trente
bateaux (tschaiks ou nassades), et Mare Tomasovich
surprit et pilla les ch&teaux de Gradiska et Velika.
I/ann£e suivante, les Turcs firent une conqu&e plus
importante que celle de oes cb&teaux d'Esclavonie et
deCroatie: Hamza, le brave sandjakbeg de Szecseny,
qui avait 6t6 rendu a la liberty sans aucune rangon ,
s'empara de Fulek , gr&ce h la trahisoji d'uh prison-
nier turc '. Les fortifications de Fulek, construites par
Francois Bebek, consistaient en deux forts, dont Tun
commandait l'autre; dans le fort infgrieur se trou-
vaient trpis cavernes spacieuses, dont Fune servait de
citerne, Tautre de magasin a poudre, et.la troisifrne
de prison. Bebek, Balassa et Pereny y amenteent des
troupes, mais avec trop de lenteur : le fort inftrieur
r£sista pendant quinze jours k Tartillerie du fort su-
p^rieur, qui avait &6 occup& par les assi£geans ; mais,
« « loanuea Paxius alium quoque capturum uns cum Hansabegho ad pe-
h liiioaem tuae Majeatatis raaimmistL » Verantm? et Zcy a t'empereur, 16 ji»a
1 55 3. Catona, Xfl, p. i6o.
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DE L'EMPIKE OTTOMAN, 77
a Tarriv^e de Touighoun- Pascha. il tomba 6gale-
ment au pouvoir des Tunes *. Hamza , dans cette cir-
constance Comnae en beauooup d'autres, se montra
par 968 foils d'arme* digne du gratKl notti qu il por-
lait, nomd&jfc rendu c£l£bre par 1'oncle da Prophete,
un des plus grandft h6ros de risl&mistne, et plus tard
par u« des chefe les plus fomeux des Assassins de
Syrie, commahdant de soilante-dix ch&teaufc, dont les
garnisofis suivaient aveugl&ment ses ordres[xxx]. La
valeur de 1'Arabe Hamza et les stratagfemes de Hamza
le Syrien cint fourni, avec les exploits d'Antar, le
pere des cavaliers, le sujet dune foule de romans che-
valeresques, oonnus sous le nora de Hamtanamt (cm
]$ livre 4e Hamza).
Sur les pkrintes £lev£es par Ferdinand contre ces
hostility sans cesse renaissantes , le pascha d*Ofen
r^plfcpia que la prise de Fiilek &ait une repr&aille
de lattaque de Hollokoe; cependant il reavoya les
deputes du roi, en assurant qu'il avait confix la paci-
fication du pays k Arslan, sandjakbeg de StuHiweis-
senbourg, et & Weli, sandjakbeg de Hatwan *.
Pendant que. ces choses se passaient en Hongrie,
la Porte n'oubliaft pas ses iat£r6ts en Transylvanie ;
Souleiman, qui ne perdait pas un instant de vue ce
royaume, ne n£gligea rien pour augmenter le mecon-
tentement de la nation en ltd representant Ferdinand
comme Tauteur principal de tous les maux dont elle
1 Istuanfi, 1. XIX, et'Forgacz, 1. IV,, aver quelqugs changemens* meik-
tionnes par Catona, XXII, p. 5 40.
> Lettre de Touighoun, pascha d'Ofen, a Ferdinand.
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78 HISTOIRE
&ait accablee. Deux ans auparavant, un tschaousch
avait, au nom du vizir Ahmed , r^pandu par toutes
les villes des fermans menagans [xxxi], afin de con-
tenir les populations; depute ce temps-Ik les procla-
mations n'avaient pas discontinue , et le Siiltan en en-
voy ait m&ne de Haleb x . D'uri autre c6t6, Verantitis
et Zay ne se lassaient pas de miner le credit des en-
voyes de la reine Isabelle et de Petrovich *; mais leurs
efforts n'obtinrent aucun succ£s. Guides par le drog-
man Mahmoud, ren£gat allemand , les repr&entans
d'Isabelle recommand&rent le fils de Zapolya k la pro-
tection de Souleiman, et r^clam^rent la restitution de
Lippa, Solymos, Csanad, Csailyath, Fenlak, Naghylak
et Szolnok. Les pr&ens en sole et autres &offes qu'ils
apporterent n'exc£daient pas la valeur de huit cents
ducats [xxxn].
L' Allemand Mahmoud et le Hongrois Ferhad , les
deux drogmans de la Porte, acrompagn&s du tscha-
ousch Ouroudj, partirent de Constantinople avec Tor-
dye d'installer, avec le secours de Petrovich et des
beglerbegs d'Ofen et de Temeswar. le fils de la reine
Isabelle comme souverain de la Transylvanie.
Toutes ces intrigues et les victoires de Souleiman
en Perse necessitaient de la part de l'Autriche 1'envoi
i A Kendi, Dobo et atitres. Elles etaient datees de Haleb, 7 avril i554.
" On y lit : « Ideo mandamus vobis omnibus, quod Regi Stepbano obediatis
» et ubicumque intromittatis, eum bonorabjliter pro Rege vestro obedieoter
» accipialis. • Traduxlt Mahmoud secretarius el interpret.
» Les £reuves se trouvent dans leurs nombreux Rapports. Catona, XXII,
p. 545-6a6 , domic des ex traits fort interessans de cinquante-trois de ces
rapports.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 79
si long -temps d&ir6 d'une nouvelle ambassade a
Constantinople. Le Beige Auger Busbek fut nommg
a la place de Malvezzi; qui &ait toujours malade et qui
mourut peu de temps apr£s k Komorn. Busbek, ac-
compagn£ de deux coll&gues, partit avee une lettte
dans laquelle Ferdinand entraitdansles plus grands de-
tails pour £tablir ses droits sur la Transylvanie , et fai-
sait m&ne un appel k la g£nerosit£ de Souleiman z . Ces
diplomates arriv^rent k Constantinople le SO Janvier;
mais le vizir Ibrahim, qui avait remplacg Roustem ,
les renvoya k Amassia, oii le Sultan avait pris ses quar-
ters d'hiver. Leur voyage est remarquable par le r£cit
de Busbek *, et par la d£couverte qu'ife firent du
c£l&bre monument d'Ancyra, qui date du r£gne d'Au-
guste 3 . lis apportaient k Souleiman dix mille ducats
et des coupes d'argent richement dorees. Ahmed leur
ayant demand^ si c'&ait un present ou un tribut quite
venaient offrir , ils rtpondirent que les coupes &aient
envoyees & titre de present, et que les dix mille ducats
repr&entaient le tribut pour la Transylvanie ; ils se
plaignirent alors de ce que l'armistice avait &6 viote,
et cit&ent la prise de Fulek par Hamza; l'incendie dfe
Palota , par Arslan ; la devastation de Poti et Somlya,
1 Exemplum instructionis ad Principem Turcarum, J, D. i55b die
2 3 novembris, dans les Archives I, R. « Atque idcirco nos Magnitudinem
» ejus rogare, ne causa Transylvania in tractatione ipsius pacis sese difficilem
» praebeat, sed nobis petentibus pro liberalitate sua benevole concedat, quod
»pro summa animi sui aequitate non petenti concessura esse!. »
* Augerii Gislenii Busbequli legationis turcica epifitolm quoiuor.
3 jinuquitates asiaticm, accedii monumentum ancfranum per B+ ThishtilL
Londini, 1728, p. x65.
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Ho HIST01RE
par le sandjakbeg de Wessprim; les invasions faites
par le sandjak xle Goeroesgal , dans les districts de
Szigeth et Paczod; les entreprises du sandjakbeg de
Hatwan contre Foroszlo et Erlau; enfin les expedi-
tions dir%£essur Cs6bancz, Tihany «t Olohvar. Mal-
gre toutes ces reclamations , ma]gr£ la promesse de
payer quatre-vingt mifle ducats au Saltan, vmgt mille
a son £cuyer, et des sommes de quatorze, dix et qu&-
tre miHe ducats aux trois vizirs, ils ne parent obtenir
qu'ane suspension d'armes pour six mois, et une lettre
de Souleiman k Ferdinand, avec laquelle Busbek de-
vait r&ournfcr a Vienne, pour y chercher de nou-
velles instructions. A son audience de conge , Busbek
exprima Tespoir qu'il aVait de revenir avec une r£-
ponse favorable. « Nous Tesp^rons aussi, » fut tout ce
que repondit Souleiman. Les ambassadeurs de Ferdi-
nand tet- du Schah avaient offert leurs pr^sens le m6me
Jour, et dans un but commun , c'est-a-dire la con-
clusion d'un traits de paix, mais les derniers seuls
avaient r^ussi compl&ement dans leur d-marche. Ve-
rantius, Zay et Busbek, quitt^rent Amassia en m£me
temps que J'envoy^ de la Perse ; les deux premiers
rest^rent k Constantinople, tandis que Busbek $e ren-
diti Vienne pour remettre la lettre de Souleiman
h Ferdinand [xxxni] r . Des ambassadeurs v£nitiens ,
■ "Btebfki Rapport dn 14 aout i555. Voyez son eptlre : Eodem die,
quo nos dicessimus, orator quoque Persian Jmasiam reUqutt, Ce fill le
a juin; par consequent Souleiman ne pouvait pas, comme le pretend JMou-
radjea d'Ohsson, avoir conclu le traite avec la Perse, le 29 mai, a Constan-
tinople.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 8r
francos et polonais , avaient aussi apporte les felici-
tations de leurs gouvememens k roccasion de la cam-
pagne si heureusement terminee J .
Trois semaines apr&s la signature du traits de paix
conclu avec les Persans, Souleiman partit d'Amassia
oii il avait distribu£ des recompenses a tous ceux qui
s'&aient distingu£s dans cette campagne. Les posses-
seurs des grands fiefs (siamet) et ceux des petits fiefe
(timar) regurent une augmentation sur leurs revenus,
les premiers de deux cents, les seconds de cent aspres
par an. Mohammed Sokolli, beglerbeg de Roumilie,
futnomm£ vizir; Pertew, aga des janissaires, lui suc-
ceda dans sa charge, et fat lui-m6me bientdt remplac£
par Iskender-Aga. Quelques changemens eurent ega-
lement lieu dans le gouvernement des pays yassaux
de la Porte. Mirtsch£, voKvode de Valachie, fut des-
titu6 dans la huiti&ne annee de ses fonctions, proba-
blement parce qu'on le soupgonnait d'etre trop bien
dispose pour Ferdinand. Petraschko, fits de Radoul,
prit sa place a . L'ann£e suivante, Alexandre, prince
de Moldavie , fut aussi depos6 , sous pretexte qu'il
6tait airiv6 au pouvoir par l'influence de la Pologne ;
mand£ k Constantinople pour se justifier, il fut assez
heureux pour obtenir sa reinstallation 5 . Un change-
* Djelalzade, f. 338, appelle 1'ambassadeur francais M on Denis; Catona,
XXII, p. 582, donne a son predecesseur le nom de Codognaius.
a Epistola Veramtii ad Ferdinandum, Constanlinopoli , t mart* i554,
dans CatODa, XXII, p. 760.
3 Epistola Verandi ad Ferdinandum , Constantinopoli, a 3 oclob. i555,
dansCatona, XXII, p. 760.
T. vi. 6
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«i HISTOIRE
ment plus important, et dont nous avons d£j& parle,
avait eu lieu en Crimfe deux ans auparavant. Sahib-
Ghirai avait propose son neveu pour le khanat d' As-
trakhan, et avait era, en l'£loignant ainsi de Constan-
tinople, se d^livrer dun rival redoutable; mais un
complot tram6 contre lui par Dewlet-Ghirai l'em-
p£cha de recueillir le fruit de sa prudence [xxxiv] :
il tomba frapp6 de dix-sept coups de poignard, et
ses trois fils mineurs p^rirent avec lui (1555). Dew-
let-Ghirai nomma Ahmed- Ghirai kalgha k la place
d'Emin-Ghirai l , et gouverna pendant vingt-cinq ans.
Ennemi redoutable des Russes , Sahib-Ghirai fut le
dernier khan du Kipdjak , de la famille de Djen-
ghiz. Ce fut a cette £poque qu Ivan Vassili, conque-
rant de Kazan et d' Astrakhan , prit le titre de czar,
adopts dans les ftges anterieurs par plusieurs souve-
rains d'Asie [xxxv].
Le 1* aoAt (1 3 ramazan), le Sultan entra dans son
nouveau palais, et envoya son troisi&me vizir, Mo-
hammed Sokolli, avec trois mille janissaires et quatre
mille cavaliers, dans les environs de Salonik et d'Ye-
nischehr, ou un aventurier, qui pr&endait 6tre le
prince Moustafa ^chappe au supplice , avait souleve
pr6s de dix mille hommes. D£j& , avant le retour de
Souleunan d'Amassia, le prince gouverneur d'Andri-
nople avait ordonn£ k un de ses agas et k Mohammed-
Khan de la famille de Soulkadr, sandjakbeg de Niko-
polis, de dissiper ces rebelles. Le pr&endu Moustafa
< Dans let sept Planetes, f. 68 , ils sont nommes Hadji-Ghirai et Djafer-
Ghirai.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 83
avait nomm6 un marchand de volailles son vizir, et
deux &udians, kadiaskers. Le marchand de volailles
trahit son sultan aupr£s du sandjakbeg de Nikopolis,
et celui-ci le livra au vizir Sokolli , qui Tenvoya a
Souleiman. La trahison du marchand de volailles fat
r6compens£e par le don dun beau fief, et le Pseudo-
Moustafa fut pendu.
Get aventurier, a limitation des deux autres Mous-
tafa qui, sous le r£gne de Mohammed I CT , avaient sou-
lev6 les derwischs, esp6rait fonder un nouvel empire
sur les debris de Fancien ; sa mort &oufia la guerre
civile , mais elle ne put chasser ce fantdme dun fils
assassin^, que le remords repr£sentait sans cesse k
lesprit vieillissant de Souleiman '.
* « JEtate jam est ingravescente, ulcus immedicabile sive gangraenam in
»crure esse in vulgus creditum est. » Busbek, Epistola I, et dans son Hay-
port j)u 14 aout 1 555. Archives I. R.
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LIVRE XXXII.
Mort do grand •vizir Ahmed- Pascba, et reintegration de Rouste*). —
Achevement de la mosquee Souleimaniye. — Mort de Eoxelane. ■—
Relatious amicales entre les Ouzbegs et les Ottomans. — Guerre de
Hongrie. — Siege de Szigetb. — Destruction de Babocsa. — Prise de
Tata. — Envoy es de' Ferdinand et d'Isabeile. — Arrivee des agens.du
roi d'Espagne et, du due de Ferrare a Constautinople. — Causes de la
guerre civile. — Defaite de Bayezid , sa fuite en Perse ; negotiations a
ee sujet, suivies de son execution et de celle de ses fits.
Nous avons signale les deux defauts dominans de
Souleiman, sa faiblesse pour les femmes, et la froide
cruaut£ qui formait la base de sa conduite lorsque les
int£r6ts de sa puissance lui paraissaient en p£ril : nous
Favons vu se laisser entratner a une indigne con-
descendance pour une Spouse trop aim£e , et porter
au contraire la s6v6rit6 paternelle jusqu'a commettre
un odieux assassinat envers un fils dont Influence
sur rarmee , et en particulier sur les janissaires , lui
donnait de l'ombrage. Nous verrons ces d&auts, pre-
nant une nouvelle force avec F&ge , obscurcir en-
ti&rement l'£clat des brillantes quality du prince.
C'est une v£rit6 sanctionnee par Texp^rience, qu'en
toutes choses le premier pas seul est difficile k fran-
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HISTOIRE DE I/EMPIRE OTTOMAN. 85
chir, etcet aii6me est encore phis applicable au mal
qu'au bien. En outre , l'horame dou6 dun earact&re
ferme, lorsqu'il est entr6 dans la voie da mal, laisse
souvent lorgueil pervertir son jugement, et sent le
besoin de pers6v&er dans sa conduite, ne fftt-ce que
pour 6tre consequent avec lui-m&ne. Nul doute que
Souleiman n'ait eu k soutenir une lutte longue et pe-
nible centre ses affections et sa conscience, lorcque
vingt ans auparavant fit £trangler Ibrahim , le com-
pagnon de sa jeunesse , rami de son ftge mAr et le
fidele appui de sa grandeur, malgr6 la promesse qn'il
lui avait faite de ne jamais r Eloigner de sa personne.
II ne parvint alors k appaiser ses remords qu'eq s'au-
torisant de cette sentence dun l^giste : « Le sommeil
est rimage de la mort; un homme qui dort ne diflfere
pas dun homme mort '. » Le supplice d' Ahmed,
avec qui il avait eu des relations moins amicales, de-
vait 6tre un poids moins lourd pour sa conscience;
Ahmed fut done supplicie, bien qu'il n'eftt consenti k
succ£der k Roustem dans la place dangereuse de
grand-vizir que sur leserment fait par Souleiman de
ne jamais le destituer. « Dans la r6alit£, dit k ce sujet
Hadji Khalfa dans ses Tables chronologiques de I' His-
wire ottomane , il ne fut pas destitu£ , mais il fut mis a
mort [i]. » Le malheureux Ahmed fut arr&£ dans
Texercice de ses fonctions, au moment ou il se ren-
dait a l'audience du Sultan un jour de diwan ; sa t&e
i Che gl'lnsinub, che se il sonno non e morte effeetiva e almeno per il
tempo che si dot me un imagine o una copia iraita da quel originate, Sa-
gredo, I. IV, p. aai, Venezia 1688.
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86 HISTOIRE
fut tpnch^e dans la salle m&ne de l'audience (19 siP
kid<* 962 — 28 septembre 1555) «. Pour motiver
cette execution , on accnsa Ahmed d'ayoir calomnte
le vizir Ali-Pascha, gouverneur d'Egypte, dans la vue
de lui aligner la favenr du Sultan, et de lui faire per-
dre Ma fois sa place et la vie. On rapportait k ce sujet
les details suivans. En arrivant au pOu voir supreme,
Ahmed avait envoys au Caire son parent Doukha-
ghin Mohammed-Pascha, pour remplacer, en quality
de gouverneur, Ali-Pascha, homme dune corpu-
lence telle que peu de chevaux &aient de force a
supporter le poids de son corps. Ahmed enjoignit a
son parent de faire monter aussi haut qu'il pourrait
la quotit£ des revenus annuels de TEgypte; car il ne
voyait que ce moyen de lutter contre son pr£d6ces-
seur Rous tern, qui n'avait n£glig6 aucune occasion de
grossir le tr&or du Sultan a . Pendant son administra-
tion , Ali , surnomm£ le gras [ii] k cause de son ob£-
sit6, s'6tait born6 k percevoir le tribut ordinaire. Mais
Doukhaghin Mohammed l'ayant augment^ de cent cin-
quante mille ducats d& la premiere annle , Souleiman
demanda compte k Ali d'une aussi 6norme difference;
celui-ci rgpondit qu'il avait mieux aim6 administrer
i Petschewi, f. n5. On wit par la que Busbek merite peu de foi,
loraqu'il rapporte (Ep, II, dans Catona, XXII, p. 75g) qu'Ahmed avait
demande au bourreau qu'avant de lui serrer entierement la gorge il lui per-
mit de respirer encore one fois pour faire connaissance, pour ainsi dire, avec
ce genre de mort.
» Busbek, Ep. I, parle avec detail de ('administration financiere de
Roustem : Camera est in regia particular is cum hoc titulo : Pecuniar Rous-
lemi diUgentia acquisitm.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 87
le pays d'apr&s les anciennes coutumes . que de le
ruiner par de nouvelles exactions. Souleiman ordonna
u£anmoins, pendant son s£jour k Amassia, d^claircir
cette affaire par une enqu&e, qui sans doute aurait
perdu Ali , si celui-ci n!etit pas intercept^ une lettre
dans laquelle Ahmed recommandait au nouveau gou-
verneur d'augmenter encore ses versemens au tr£sor,
pour assurer ainsi la perte de son rival. Verslem6me
temps, on remit au Sultan, un jour qu'il se rendait k la
mosquee, une petition dans laquelle on portait plainte
contre les exactions d' Ali. Mais il fut prouv6 que le
p6titionnaire avait &6 gagne k porter cette accusation
par • uh tschaousch , qui n'avait agi lui-m6me que
d'aprfcs les ordres du grand-vizir. Telles &aient les
causes officielles du supplice d* Ahmed; toutefois elles
n'abus&rent personne , et les historiens contemporains
s'accordent tous k presenter la chute d' Ahmed comme
ayant son origine dans le d£sir qu'avait la sultane fa-
vorite de voir son gendre Roustem rentrer dans Texer-
cice de ses anciennes fonctions. II est vrai que celui-ci
n'ayant 6i6 sacrifte qu*k la necessity passaggre d'ap-
paiser les murmures des janissaires , irrites de l'exi-
cution de Moustafa , il devenait facile aux intrigues
du harem de preparer la chute d'un successeur con-
sid6r6 comme intrus. Malgr6 le pr&exte allegu£ , la
veritable raison qui fit verser le sang d'Ahmed &ait si
bien connue de tout le monde , que dans la suite ,
lorsque Hasan Pascha se renditen Perse comme en-
voy6 de la Porte, le schah Tahmasp lui signala cette
execution et celle dii prince Moustafa comme deux
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88 H1ST01HE
taches ineffagables imprim£es au r^gne de Souleiman l .
Ainsi le conqu&aat de Temeswar et le vainqueur des
Persans fut vaincu par les femmes du harem *-, et
Roustem dut a la mort d'Ali d'etre pour la seconde
fois elev£ k la dignitede grand- vizir. Gependant la fin
sanglante d' Ahmed ne fit pas oublier son m&ite 5 ; il
avait fonde, pres de la Porte du Canon, une mosqu£e
qui porte encore son nom, et il se surv£cut k lui-m&ne
dans les hommes d'Etat qu'il avait formes, et qui
jouerent plus tard un r61e brillant dans l'histoire ot-
tomane. Parmi ceux qui se sont le plus distingues,
nous nommerons Moustafa-Aga, fir&re de Khosrew-
Pa$cha, qui de l'emploi de pr£cepteur des princes fut
elev£, sous Selim II, au rang de serasker, et s'illus-
tra plus tarc^par la conqu&e de File de Chypre et du
Schirwan ; le defterdar Lalefar Mohammed Tschelebi,
et le maitre des requ&es d* Ahmed, Memi Tschelebi,
appel6 par la suite a la dignite de reis-efendi [in].
L'6t£ suivant, Souleiman eut la satisfaction de voir
achever la mosqu£e Souleimaniye, dont la construc-
tion avait 6t6 cpmmencee six ans auparavant, et qui,
au milieu du mois d'ao&t (8 schewal 963 — 16 aotit
1556), fut livr& k r admiration des fiddles. Get Edi-
fice, qui a cotit£ plus de sept cent mille ducats k , est le
» Ali, dans les
* Mckri zenan \
* Djelalzade, f.
lire le Koran, qu'il
sieurs fondations d
la marine
4 SelonEwlia,
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DE LEMPIRE OTTOMAN. 89
plus magnifique monument de la residence impfriale.
Sous le rapport de la richesse des oraemeos d'archi-
tecture et de lexquise delicatesse du travail , la mos-
quee de Souleiman peut se montrer avec avantage h
c6t6 de son module 1' Ay a -Sofia, qui lui est sup&ieure
par la hardiesse de la coupole, la magnificence des
colonnes, et par un carac&re dantiquit£ venerable.
Le temple se compose de trois caries contigus les uns
aux autre*; k Tune des extremity est le vestibule, a
l'autre le lieu de sepulture, et au milieu le sanctuaire.
Le vestibule porte, dans le langage theologique de
l'islamisme, le nom de harem, c'est-&~dire lenclos
saint, que rien ne doit profaner; la sepulture est ap-
pelee jardin comme celle du Proph&e & M6dine ; c'est
la que reposent les plantes kumaines jusqu'k ce qu'au
jour du jugement elles se Invent dans toute leur frai-
cheur, pour croitre et se d6velopper dans le grand
jardin de la creation. Au milieu, entre le harem et le
jardin, se trouve la mesdjid, ou l'endroit de 1 'ado-
ration , nom que les Espagnols ont rendu par celui
de mezquua, et dont on a fait mosqu£e. lie vestibule
est muni dun banc de marbre, qui invite les croyans
au repos, et dune fontaine superbe consacree aux
ablutions. Le jardin renferme le tombeau du fon-
dateur; trois cdtes du vestibule sont entour6s de co-
lonnades, le quatri&me est form£ par la facade de la
mosqu£e. Au-dessus de la porte principale sont ins-
crits le nom de Souleiman et Fannie de la construe-
et non pas 89,383 ducats, comme on le lit dans Constantinople et le Eos ..
phor* $ par une errcur de calcah
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go HISTOIRE
tion. La porte du vestibule, en face de l'entr£e prin-
cipale de la mosqu£e , est un chef-d'oeuvre d'archi-
tecture sarrazine ; elle est surtout remarquable par ses
campanes sculptees, qui ressemblent aux capricieuses
concretions des stalactites. Aux quatre angles du harem
s'^tevent les quatre minarets , ou phares, ainsi nom-
m£s parce qu'ils sont £clair£s pendant les nuits saintes
du mois de ramazan. Les deux minarets a Fentree du
vestibule sont couronnes de deux galeries; ceux de
la fagade de la mosqu£e en ont trois, du haut des-
quelles les crieurs appellent cinq fois par jour les
croyans h la pri&re. Le sommet de ces tours, ainsi que
cehii de la coupole et de toutes les mosquees , est sur-
mont6 d'un croissant, insignes de l'empire ottoman
et de l'ancienne Byzance. La coupole est modelee sur
celle d' Aya-Sofia. Le ddme principal pr&ente en avant
et en arrtere deux demi-coupoles , autour desquelles
se groupent de chaque c6t6, a droite et k gauche, cinq
petites coupoles entires ; il est support^ par quatre
colonnes en granit rouge , les plus hautes et les plus
fortes de Constantinople. Au-dessus de Tune de ccs
colonnes, on voyait autrefois la statue de Justinien-
le-Grand, et sur une autre celle de Venus, qui avaient
&& amends d'Egypte [iv]. Les chapiteaux sont d'un
marbre d'une blancheur resplendissante. Une galerie
double r6gne sur les c6t6s et renferme des cabinets
(khoudjr£) dans lesquels les Musulmans d£posent
leurs bijoux et leur or quand ils veulent faire un
voyage, ou mettre leur fortune a l'abri de la rapacite
du despotisme. II est en effet inoui que le gouverne-
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- DE L'EMPIKE OlTOMAN. 91
merit ait os£ toucher aux d£p6ts (amanet) des mos-
qu£es, ou k ceux des fondations pieuses (wakf). Au-
dessous des galerics existent des marches en forme
de terrasses soutenues par des troncs de oolonnes, ou
les lecteurs du Koran attaches k la mosqu£e viennent
Tun apr£s l'autre reciter la parole du Proph&e. Le
tabernacle (mihrab) oA est d6pos£ un exemplaire du
Koran, est en marbre blanc , richement orne de
sculptures ; il en est de m£me de la chaire (koursi) ,
du haut de laquelle le pr£dicateur (waif) fait entendre
les v^rites de la religion et de la morale; de la galerie
(minber), ou l'orateur de la prtere du vendredi (kha-
tib) proclame les droits r£galiens de l'islamisme ; de
la plate- forme 61ev£e (masstab£), sur laquelle les
crieurs rep^tent 1'appel k la pri&re au moment ou elle
va commencer, et de la tribune (makssour£), ou le
Sultan assiste k la prtere du yendredi. On voit, a
c6t6 du maitre-autel, deux cand£labres gigantesques
en bronze dor$, supportant des-cierges £normes qui
sont allumls dans les sept nuits saintes et suppl£ent,
avec les lustres , k la lumi&re qui p£n&re durant le
jour au travers des vitraux. Ces vitraux , orn£s pour
la plupart de fleurs peintes ou des lettres qui com-
posent le nom de Dieu, sont Fouvrage du cetebre
vitrier Serkhosch Ibrahim (Ibrahim Tivrogne). La
beauts des inscriptions n'est pas moins remarquable;
elles sont dues k la main-habile de Karahissari, l'auteur
de l'inscription qu'on lit au-dessus des deux portes [v].
Autour de la mosqu£e s'£16vent plusieurs &abJisse-
mens, une icole primaire (mekseb)Zquatre academies
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9* HISTOIRE
(mSdrese) , un auditoire pour la tradition du Proph&te
(darouHiadias) , un autre pour la lecture du Koran
(daroul-khirayet), une 6cole de medecine (medresei-
tibb), une h6pita] (darouschschifa), une cuisine pour
les pauvres (imaret), une auberge gratuite (karawan-
serai), une biblioth£que (kitabkhan^), un reservoir
qui sert a alimenter les fontaines voisines (sebilkhane),
un hdpital pour les Strangers (tawkhan^) et des bains
(hamam) [vi]. Au milieu de ces douze etablissemens
de devotion et de bienfaisance , le d6me de Soulei-
maniye surgit et &incelle comme celui du ciel parsem£
des douze constellations. Du temps des empereurs ,
Constantinople s'enorgueillissait de l'£glise de Sainte-
Sophie , en face de laquelle &ait plac£e la statue en
bronze de Salomon, qui paraissait pour ainsi dire con-
fus et interdit d'admiration devant une magnificence
surpassant celle de son propre temple. Le jour de son
inauguration, Justinien s'&ait ^crie : « Salomon, je t'ai
vaincu. » Aujourd'hiii encore la mosqti^e de Soulei-
man s'61&ve avec orgueil aupr£s de l'ancienne Sainte-
Sophie, et semble vouloir lui ravir la prominence
que celle-ci disputait jadis au temple de Salomon.
Souleimaniy^ est la seule des mosqu£es fondles par
Sotdeiman k laquelle il ait donne son nom ; les six
a litres, qu'il fit construire avec les deniers de 1'Etat,
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DE L'EMMHE OTTOMAN. 9 5
temps cfue ces deux dernteres, pr& du marcbe des
femmes, la mosqu£e de la Khasseki, ou sultane Khour-
rem (Roxelane) [vii] , et les deux autres qui portent
le nom de sa fille Khanum- Sultane, appetee plus
gta&atement Mihrmah (lune du soleil) , spouse de
Roustem. L'une de ces derni&res mosqu£es est situ6e
a la porte d'Andrinople, et l'autre a Scutari, pr6s du
port. La mosqu^e de la Khasseki, dune architecture
simple, est orn£e seulement dune coupole et dun
minaret, mais elle est dot£e d'une £coie, d'une aca-
d£mie, d'une cuisine pour les pauvres et d'un h6pital
pour les fous; celle de la porte d'Andrinople a une
acad&nie, des bains et un marche. La troisi£me s'e-
teve avec une majestueuse hardiesse sur une colline au
pied de laquelle sent disposes des gradins ; elle s'offre
a decouvert au port de Scutari, et forme un des points
de Yue les plus pittoresques du panorama de Constan-
tinople.
L'ach&vement de Souleimaniy6 et la reintegration
de Roustem dans les fonctions de grand-vizir furent
regards comme des 6v£nemens d'une si grande im-
portance, que le schah de Perse crut devoir envoyer
& Constantinople un ambassadeur extraordinaire pour
en ftliciter le Sultan. Cet ambassadeur etait porteur
de deux lettres du schah adress&s, Tune a Souleiman,
et lautre k Roustem; d'une lettre du prince Moham-
med, fib deTahmasp, a Roustem, et d'une quatrieme
de la premiere Spouse du schah (qui en Perse porte
le titre de femme du harem), k la sultane Khasseki.
Ces lettres etaient d'une politesse aussi outree que le&
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9 4 HISTOIRE
notes £chang&s pendant la guerre avaient et£ inju-
rieuses. Apj6s de longues felicitations en prose et en
vers , le schah & adresse au Sultan en ces termes :
« O toi, qui es favorise de la gr&ce divine, qui as &£
combl£ des dons du Tout-Puissant, et impr£gn£ de la
ros£e vivifiante du cr&teur, Sultan des deux parties
du globe, khakan des deux mers ; toi qui es nomm£ le
Proph&te de deux especes de creatures * , des hommes
et des demons; toi, T6gal des Salomons a , le centre
de deux horizons 3 , le ministre des deux villes saintes
(la Mecque et M^dine) ; toi qui reunis en ta persbnne
le pouvoir, la gloire, la magnificence, la puissance.,
le khalifat, la grandeur, 'la majesty, la justice, les
honneurs, la fortune et l'£quit£; Sultan Souleiman-
Khan, que tes drapeaux flottent k jamais au-dessus des
cieux, et que les titres de ton regne soient graves
sur des tables eternelles ! » Ensuite il le felicite sur
Tach^vement de l'incomparable mosquee Souleima-
niy£ 4 , et sur la pleine et enttere liberty d£sormais
assume aux pterins de la Mecque; il remarque qu il
a aussi sa part du m&ite de cette oeuvre de pi&e;
« car, en donnant l'occasion de faire le bien, on n'est
pas moins louable qu'en le faisant soi-m£me 5 . » La
r£ponse de Souleiman fut bien moins longue; elle
commengait ainsi : « Seigneur de la Majesty , ferme
et solide comme le ciel , brillant comme le soleil , en-
tour6 de la splendeur de Djemdjid, dou6 d'un aspect
i NebiessikUin. — \ Les sobtante-dix Salomons avant Adam.
3 Kehtfoul-khafiktin. — 4 Lrnn youkhlak mislihafil bilad. — 5 Eddal
alelkhair he fdilihi.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 9 5
imposant , de 1 'intelligence de Dara , de l'habilet£ de
Khosroes , de la felicite de Jupiter, de la couronne de
Keikobad, du trdne de Feridoun, schah du tr6ne de
la magnificence, lune du ciel de la puissance ! toi qui
portes l'&endard de la gloire et de la fortune, et
d£ploies le tapis de la moderation et de l'habilete !
toi, TOrient des Voiles des bonnes qualit£s, la source
et l'asile des vertus , qui r£unis en ta personne l'ex-
cellence des bonnes moeurs , qui brilles du lustre de
toutes les nobles qualites , qui te fglicites des regards
du protecteur supreme, qui poss&des les faveurs de
celui qui dans sa gr&ce r£pand la felicity , qui es de-
sir6 comme Djem! 6 toi, l'asile du bonheur, Tah-
masp-Schah, sois toujours arros& de 1 Emanation de
la grice divine, et dirig6 par l'influence des lumi&res
celestes! »
Si Ton compare ces lettres avec celles qu'Agathias
nous a conserves dans une £pitre de Khosroes Perwiz
k Tempereur grec , on verra que le style des cours
orientates n'avait rien perdu de son caract&re hyper-
bolique , et qu'il &ait settlement devenu plus conve-
nable en ce que Tauteur n'appliquait plus k lui-m&ne,
mais a la personne a laquelle il £crivait, les images em-
prunt£es au soleil et k la lune. U est k regretter qu'au-
cune correspondance entre une imp&ratrice grecque
et une sultane persane ne soit parvenue jusqu'& nous ,
pour completer nos observations en nous offrant un
terme de comparaison avec les lettres suivantes. La
femme favorite du schah Tahmasp commence ainsi son
ejrttre en langue persane : « Que des joyaux brillans
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96 HISTOIRE
de louanges pareilles k celles qui s'61£vent des choeurs
du ciel et des bouches des anges occupes k chanter le
Seigneur jour et nuit; que les plus ferventes prteres,
auxquelles Dieu pr6te Foreille , quand elles sortent
de la bouche de ceux qui croient et font de bonnes
oeuvres, que toutes les gloires des sidcles, c'est-k-dire
ce que le precieux a de plus precieux , soient offerts k
la Sublime, a celle qui est douee de la majesty de Ju-
piter, entour^e de la splendeur de l'&oile du matin,
superbe comme Ferenghis z , puissante comme Bal-
kis a , noble comme Souleikha 3 , sans reproche comme
Marie, la gloire des femmes par sa force, la douceur
du soleil, et l'image des anges : k la Kaidaza 4 des so-
cles, laNousohab£ a laquelle les jours sont consacr£s,
k la sultane Khasseki. » Ensuite elle la f&icite sur l'a-
chfrvement de la mosqu^e ; « car le Koran b&iit ceux
qui invent des temples au Seigneur, et se reposent sur
lui. » Enfin, elle lui fait hommage de quelques exem-
plaires du Koran, et t&noigne Tespoir qu'ils seront
agr&s et deposes dans la mosquee pour y servir aux
usages de pi&& La Khasseki r6pondit quelle avait
regu avec bienveillance , et comme un don du pa-
radis , les perles des pri&res les plus pures du rosaire
des anges, et les coraux parfum^s des meilleurs voeux
que les fiddles prononcent dans les mosqu&s, puis-
qu'ils &aient offerts par celle qui, dou6e de la jeu-
nesse des houris, de la vertu de Souleikha, des qua-
lity sublimes et du pouvoir de Darius, &ait la mat-
i L'epouse de Siawousch , fille d'Efrasiab. — a La reine de Saba.
3 La ferame de Pulifar — 4 La Kandakc des Grecs.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 97
tresse qui gouvernait les conseillers du monde, la
Marie, inspir^e comme J£sus, l'astre brillant de la
majesty, la perle magnifique de la couronne de chas-
tete couverte du voile de la puret£, et l'image incom-
parable de la femme d&ob£e aux yeux des profanes! »
Le prince Mohammed f&icitait le grand-vizir Roustem
de son rappel en termes non moins pompeusement
^exag6r£s. La fortune, disak-il, avait accompli sa pro-
messe, et il en remerciait Dieu 1 ; l'astre de la victoire,
apr&s s^tre couchg, avait reparu dans tout son £clat,
et dtait parvenu k son apogee \ Ces lettres furent
remises avec des pr&ens par Tubetaga, homme vieillj
dans les emplois de la cour persane 3 .
La mosqule terming, Souleiman rechercha des sa-
vans distingu&, pour les attacher aux quatre acade-
mies, dont deux sont b&ties h Test et deux h l'ouest
du temple 4 . Moins nombreuses de moitte que celles
fondles par Mohammed II pr£s de Mohammediy6,
ces academies furent plus richement dot£es , et les
places de leurs professeurs sont encore aujourd'hui
les plus honorables et les plus lucratives de toutes. Le
1 Fe bouschra fekad indjerrel ikbalou ma waada
We kewkeboun-natsr fi oufoukil-aala saada.
» We Ul nedjmi min baadir-roudjoui istikametoun
We HI sehemsin min T>aadil-ghouroubi touloun,
3 Ces lettres se trouvent toutes dans l'appendice du Journal de Soulei-
man : la lettre de Tahmasp a Souleiman , no L ; la reponse, no LI; la letlre
de la femme du schah, no L1I ; la reponse de la sultane, no LIII; la lettre du
schah a Roustem, no LTV; celle du prince persan Mohammed, no LV;
reponse de Roustem, no LVI.
4 AbdoulazizEfendi; RaousatouMrar, Tan 965(1657).
T. VI. 7
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9 8 HISTOIRE
choix du Sultan tomba sur quatre savans, qui s'£-
taient acquis, par un m&ite sup&ienr, la protection
du savant moufti Ebousououd ou celle du grand- vizir
Roustem. Les deux premiers avaient &6 professeurs
aux acad&naes fondles par Roustem h Kutahia ; le troi-
steme* Mohammed Ben Kourrem, descendait de Dje-
laleddin Roumi , le plus c616bre des poetes mystiques
de la Perse; les gloses de ce dernier sur le Tedjrid
(grand ouvrage m&aphysique de Nasireddin de Tous)
sont conserves en manuscrit k la bibliothique de
Souleimaniy6, cortime une ceuvre bibliographique des
plus pr6cieuses f . Mohammed re$ut la direction de
Tune des academies sitti£es & l'ouest de la mosqufe;
celle de l'autre fat donn6e au savant Ali Khinali-
zad6 [vm] , dont la famille comptait plusieurs hom-
ines de lettres distfriguls , tous cit& comme poetes
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 99
encore son nom \ La sultane Khasseki Khourrem, la
Russe, ne surv^cut pas long-temps k Inauguration de
Souletmaniy^, aux felicitations flatteuses de 1'ambas-
sade persane, k la rentrSe an pouvoir de son gendre
Roustem (djemazioul-akhir 965 — avril 1558), et
a la satisfaction de voir la succession an trdne assume
k Tun de ses fils, par la mort de Th^ritkr presomptif.
Son corps fut d£pos£ dans un mausol£e orn6 dun
d6me, prts de Souleimaniy£. Apr6s s'6tre £lev£e par
ses seductions et ses talens du rang d'une simple esclave
a celui d'6pouse du Sultan, elle sut encore conserver
son ascendant k l'Age 01k les charmes de la beaute
s'effacent et perdent leur pouvoir; et, gr&ce a sa su-
periority d'esprit et de caractere, elle contmua de r6-
gner sur Souleiman dune mantere aussi absolue que
celui-ci sur Fempire. L'histoire doit jeter un bldme
s^v^re sur Tabus qu'elle fit de sa puissance, en pr£-
parant par ses intrigues l'ex&atkm de deux grands-
vizirs (Ibrahim [ix] et Ahmed), l'assassinat de Mous-
tafa, et les discordes qui amendrent dans la suite une
guerre funeste entre deux fils du Sultan, et donn6rent
naissance k l'usage d'enfermer les princes dans le ha-
rem. Cette mesure contribua beaucoup a la decadence
de Tempire, car T&lucation eff£min£e du harem ne
pouvait donner a la nation que des souverains sans
energie et incapables de r6gner. Le tombeau de la sul-
tane Khourrem , a c6t6 de celui de Souleiman , au
1 La Biographie de Kazizade, dans Attayi, CCLXXIX. II a ecril un
Commcntairemt la Jledayet, et des notes au Commentaire de Miftah, Tedjrid,
Mewakif, Telwih.
f
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ioo HISTOIRE
milieu de Constantinople , sur la troisteme des sept
col lines, semble un presage plus significatif des futures
destinies de eette ville, qufe la statue £questre de Bel-
l&ophon qu'on voyait d6s les premiers temps dans
l'hippodrdme de l'ancienne Byzance, et dont I'inscrip-
tion pr6disait d^ja alors la conqu&e de cette capitale
par les Russes f . La m&ne annee qui vit mourir Roxe-
lane et Isabelle de Pologne, deux princesses qui ont
exerc6 une influence £galement funeste, Tune sur les
affaires de la Turquie, et l'autre sur celles de la Hon-
grie, enleva la reioe Marie a l'Angleterre, et son beau-
pire Charles-Quint a l'Allemagne.
Vers le m&ne temps ou arriva Tambassade per-
sane, Souleiman regut des lettres du khan des Ouz-
begs, souverain des nations au-dela de l'Oxus, prince
de Samarkand et Boukhara. L'histoire de cette dy-
nastie est rest6e si long-temps envelopp£e de t6n6bres,
et, malgr£ des recherches r£cemment faites k ce sujet,
die est encore tellement confuse [x], qu'il importe-
rait, pour cette seule raison, de chercher h l'&laircir a
l'aide des sources a et des pieces diplomatiques incon-
nues jusqu'a present. Mais pour ceux qui veulent &u-
dier l'histoire ottomane, il est indispensable de mieux
i BeUerophonds slatua : Basis lapidea habet insculpuu historias rerum
novissimatwn, qua urbi accident cum a Russis expugnabitur. "Voyez CocH-
nus, de Origine urbis.
» Principalement les grands ouvrages historiques de Djenabi et le Nokh-
betet-tewarikh, qui apparemmeat sont puises a des sources differentes,
puisque des fails rapportes par Tun manquent chez l'autre, et qu'ils dif-
ferent parfois dans leurs dates. Hesarfenn et Abdoulaziz, I'auteur du Raou-
zatoul-ebrar, n'ont donn£ que des extraits de Djenabi.
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DE L' EMPIRE OTTOMAN. 101
connattre ce peiiple, qui par son origine, sa langue, sa
position g&>graphique et sa religion, devait 6tre l'allte
naturel de la Porte contre la Perse. Ce dernier Etat
confine k celui des Ottomans du cdt£ de l'ouest* et h
celui des Ouzbegs du c6t6 de Test; sans tenir compte
de l'int£r& qu'avaient ainsi les deux peuples k s'unir
contre une nation voisine dont la position au milieu
deux les tenait s£par&, ils professaient encore Tun et
l'autre la doctrine religieuse des Sunnis, tandis que les
Persans &aient attaches h la secte des Schiis.
A l'£poque bu la dynastie turque des Scheibanis
occupait le tr6ne des Ouzbegs au-delk de l'Oxus, celle
des Saffis r6gnait dans le pays en-de$& de ce fleuve.
L'Ouzbeg Schahibeg et Schah- Ismail , fondateur de
la dynastie des Saffis , ainsi que nous l'avons rap-
port£ plus haut, se virent bientdt entrain& dans une
guerre acharn£e qui se tenpina par la fameuse bataille
de Merw. Schahibeg y fut tu£, et Ismail d^pouilla son
crftne, selon Fusage bari)are des c'onqu£rans de ces
socles, le fit garnir dor et de pierres pr£cieuses, et
s 9 en servit comme d'une coupe. Schahibeg &ait fils de
Sschah-Boudak et petit-fils d'Eboulkair Schabakht.
ou Scheibeg, khan du Kipdjak, lequel aprts avoir
conquis Samarkand et tu6 le souverain du pays, Ab-
doulaziz-Mirza , avail £pous6 sa veuve , la soeur d'Ou-
lougbeg; il en avait eu deux fib, Koudjkoundji (ou
Koudjoum) et Soundjouk; une autre Spouse lui avait
donn6 trois autres fils , Schahboudak , Khodschkoum
et Sandjar [xi]. Lorsque Ebousaid . arriere-petit-fils
deTimour, avail 6t£ dtfait et tu6 par Ouzoun-Hasan,
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102 HISTOIRE
son fits, Sultan- Ahmed, led avait succ£d£ dans le gou-
vernement (873 — 1460). Aprfes la mort de celui-ci,
Ousta-Ali, fits de Mahmoiid, fat asstege dans Samar-
kand, par Schahibeg , qui le d&ermina par de per-
fides prome&ses k sortir de la place et lui donna la
mort (91 — 1 504). Schahibeg, d£s-lors maltre absolu
des pays au-deMi de 1'Oxus , en fut chass£ d'abord
par Baber, petit-fils d'Ebousaid, souverain de Ka-
boul; mais trois ans plus tard, ayant r6ussi & ex-
pulser Baber au-de& des froiitidres, il rentra dans
ses Etats, qu il gouverna sans interruption jusqu'& la
malheureuse bataifle de Merw(916 — 1510). Apr6s
cette bataille. Baber Mirza tenta une nouvelle inva-
sion , mais il fut repouss£ par Koudjkoundji , oncle
de Schahibeg [xn]. Koudjkoundji r^gna vingt-trois
ans , pendant lefequels il eut avec les schahs persans
Ismail et Tahmasp de fWquens d£m6tes qui, pour la
pi u part, se termin£rent k son avantage. II d6fit notam-
ment k Ghidjdewan le grand-vizir d'Ismail , l'&nir
Nedjm sani, et dispersa son armfe forte de soixante
mille hommes. Intimid^ par ces succte et redoutant
le sort de Nedjm sani , qui avait pay 6 de sa vie son
invasion, Mirza Baber, qui avait de nouveau pass£ la
fronttere, se retira en toute Mte vers les frontteres de
Kaboul et ne revint phis dans la Transoxane. Ebou
Said , fib et suceesseur de Koudjkoundji , r£gna six
ans, et mourut en Tannee 946 — 1 539 *. Dans le cours
» Djenabi, Nokhbeiet~tewarikh. D'apres le manuscrit de Senkowsky,
Obe'idoullah succ£da immediatement a Schahibeg et mourut des rannecg37 ;
mais dans le fait il ue parvint au 1r6ne que Tan q46.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. ,o3
de son r£gne, il asgi^gea le prince Behram, fife de
Tahmasp, k H&rat; mais, k l'approche du sehah, il
s'enfiiit au-del& de I'Qm*. Son successor Obetdoul*
lab, petit-fife dq Scbah-Boudak, neveu de Scheibani,
se distingua par sa valew et de nombreu$es victoires
dans Beg guerres cqntre le^ Persans. Dan* une de pes
batailles, apr& avoir d^fait l'argiee enn^mie et \w
avoir tu6 environ qqatre milje homines, il extermina
les troupes de Khalifg RoumH, goqverneur de H6rat t
et sound* tout le paya, h 1'euieption de Nischabour.
Vers£ dan* la jurisprudence, les be)les~lettpes et la
po&ie turque, il aimait et protijgeait de tout son pqu-
voir les poetes et le* savans.
Avant le rigne d'Obeidoullah, rbistQire ottoman*
n'ofire aucun example de relations amicales entre Con-
stantinople et les pay* de l'Q*u* ; jnais la dew&re
campagne de Soqleiman en Perie dut naturellem?nt
opfrer un rapprochement entre le Sultan et Qbeid-
ouUah contre leur ennemi cojnroun [*m]« Obejidoullah
&endi|t la puissance de la dynastie teheihani en-deca
de 1'Qxus jusque dans le Khorassan, o^ U poss&teit
d$k les villes de Bestara et Pamagban. Apr^s sa.
mort, Abdoullah, fils de Kouctykoundji, monta sur le
tr6ne (950 r-n 1543); il ne r^gna que si* mois, et ei*
pour successor son fr&re Abdoullatif on Abdonta&e.
Celui-ci gouverna pendant dooze ana avec aagwse et
moderation, et s'attira & un haut degr<& rawitte de
Souleiman, qui ne se borna pas it de at4rilas protes-
tations de bienveillance (961 — 1554), et lui envoya
un secours de trois cents janissaires et un train d'ar-
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io4 UISTOIRE
tillerie [nv]. Abdonlaziz &ant mart au moment de l'ar-
tiv&e de oel envoi, Newrouz Ahmed Behadir, sur-
nommd Borrak-Khan, fils de Soundjouk et petit-fils
d'Aboulkhair, s'empara du pouvoir. II fit partaSou-
leiman de son av&nement au lr6ne en ces termes :
a Depuis qu'Abdoulaziz-Khan est parti pour le pa-
fadis, le khalifat et la domination de l'univers sont
&hus en partage k moi, et k mes fibres qui demeurent
chez le khan de Samarkand; les autres sultans, pos-
sesseurs des chateaux-forts de Dabousi, Koufin, Ker-
min^ , Kesch , Karschi et Khazar, se confiant en la
solidity de leurs retraites, nous ont r6sist£ et mis dans
la n£cessit£ de leur faire la guerre durant ces der-
n&res ann£es. » C'est de cette manfere laconique qu'il
cherchait k excuser le retard apporte k l'exp&lition
des secours promis au Sultan en ^change de ceux
fournis par la Porte h son pr£d£cesseur. D ltd annon-
Sait, en poursuivant, qu'il &ait alors maltre de Sa-
markand, que Pir Mohammed-Sultan et ses fteres
avaient &6 mis en fuite, que toutes leurs places fortes,
a rexception de Boukhara, &aient tomb&s en son pou-
voir, et qu'imm&ttatement apr&s la prise de cette der-
n&re , il effectuerait son entree dans le Khorassan.
Deux mois apr6s (rebioul-akhir 963 — f6vrier 1 556),
Nisameddin Ahmed Tschaouschbeg, ambassadeur de
Borrak-Khan, vint annoncer au Sultan le succes des
armes de son maitre et la prise de Boukhara. Enfin
le scheikh Moussliheddin Moustafa ', qui se rendit a
» Appendice du Journal de Souleiman, no XLVI. Ses parens etaient
les savans Mewlana Alaeddin , Ati-Tschelebi et Yahya-Tschelebi.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i o5
Constantinople pour visiter un de ses parens, fat por-
teur d'une troisieme lettre de Borrak-Khan k Sou-
leiman. Le Sultan fit deux r6ponses au souverain des
pays de l'Oxus [xv] ; dans la premiere, il assurait qu'il
ne n£gligerait rien pour rendre agitable au scheikh
son sejour k Constantinople; dans la seconde, il rap-
pelait la lettre que lui avait remise Koutlouk Fou-
ladi , et dans laquelle le khan annongait son avfene-
ment au tr6ne; il se montrait dispose k renouer les
relations amicales qui avaient existe entre lui et Abd-
oullah et Abdoullatif , mais il d£clarait que les circon-
stances ne permettaient pas d'echanger entre eux des
envois de secours, la paix venant d'etre conclue avec
la Perse 1 .
Dii c6t6 de la Hongrie, la suspension d'armes ob-
tenue h Amassia par les envoySs de Ferdinand n'avait
pu mettre un terme aux hostility provoqu£es sans
rel&che par l'acharnement des deux nations ; les com-
bats singuliers et les irruptions sur les deux frontteres
ne disoontinuaient pas. C'est ainsi que le banneret de
Croatie demanda k combattre le pascha de Bosnie , et
que, sur Tordre de l'empereur, le baron d'Ungnad ,
general en chef de Tarmle styrienne et commandant
de la front&re , lui permit de se rendre h cet effet
t Dans l'appendice du Journal de Souleiman, on Irouve la reponse a la
lettre de recominandation, sous le up XLVII, datee d'Andrinople du i red-
jeb 964 (mai i557); la seconde, sous len© XLVUI, sans date; et une
troisieme reponse de Souleiman au vixir Hadjim Sultan Ben Agahi, sous le
no XLIX, datee de djemazioul-akhir 963 (avril *556), oe qui est a peu
pres la meme epoque a laquelle arriva la seconde lettre de Borrak-Khan.
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io6 HISTOIRE
de Pessau a Saint-George, sous la condition que cha-
que parti n'aurait pas plus de cinq cents chevaux.
Cependant Ungnad ayant repr&ente qu'une pareille
rencontre pourrait amener une rupture ouverte de l'ar-
mistice , cette permission fut retiree par la suite [xvi].
Le pascha d'Ofen, Touighoun, se plaignit, dans une
lettre k Sforza Pallavicini , de l'incendie des villages
de Baya , Paks et Goeroesgal , des sorties de Wolf
Dersffy, commandant de Szigeth, de celles d'Etienne -
Dersffy de Kaposvar, des excursions des garrisons de
Papa et de Palota, et enfin de la fortification de Pa*
lanka par Thur [xvn]. Ce fut en vain que , par ordre
de Ferdinand, Marc Stansics sivit avec une cruelle
rigueur contre les heiduques, qui exergaient sur les
habitans des campagnes toutes sortes d'exactions et de
cruaut£s; ce fut en vain qu'il leur infligea les ch4ti-
mens les plus affreux, en lei^ faisant creyer les yeux
ou en mutilant leurs membres ap moyen d explosions
de poudre h canon \ Touighoun lui-n)6me chercha
a les chasser de leurs principaux repaires, tels que
Korothna, Kaposvar et Babocsa. II convoqua pour
cctte expedition Arslanbeg de Stuhlweissenbourg, fils
de Mohammed-Pascha et petit-fils dTahya-Pascba ,
Admedbeg de Gran, Souleimanbeg de Novigr&d, Si-
nanbeg de Sexard, Ahmedeg de Goeroesgal , Moham-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 107
conlre Korothna, Kaposvar et Baboosa ; leg deux pre-
miers, Vehement abandonn£s par leurs commandans,
se rendirent a discretion; Babocsa capitula et sa gar-
rison obtint de se retirer avec armes et bagages; dans
cette circonstanoe, trois transfuges turcs, qui &aient
devenus chefs des heiduques, se sauv£rent en se ea-
chant dans un chariot charg£ de lard et de peaux de
cochons, objets en horreur aux Turcs. Touighoun
temoigna d'abord rintention d'assi6ger Szigeth , mais
la saison se trouvant trop avanc£e, il dut se retirer a
Funfkirchen. D6s que Touighoun se fut 61oign6, Ke-
recsenyi essaya de s'emparer du chateau de Goeroes-
gal, d&endu par cent quatorze Turcs, mais il £choua
dans cette tentative , bien qu'il fat superieur en nom-
bre aux assi£geans. Cet 6v£nement , que les historiens
hongrois passent sous silence, a &£ c6Wbr6 en vers '
par le juge de Goeroesgdl, le Tinodi des Turcs.
Le siege de Szigeth n'avait &6 que retarde; Sou-
leiman en confia la direction a l'eunuque Ali , qu'il
avait retabli dans sa charge de gouverneur d'Ofen.
Trapu et replet, comme le sont ordinairement les eu-
nuques, ayant la voix rauque, le teint oliv&tre, la t&e
pour ainsi dire cach£e entre les deux £paules, et la
bouche d£figur£e de deux dents en saillie comme dea
defenses de sanglier, Ali cachait sous ces dehors re-
poussans un grand courage et une rare habilet6 mi~
litaire. D d£clara aux envoy^s de Ferdinand que ce
n'&ait plus avec le sabre et le fusil , mais avec le b&-
■ Petschewi en a ex trait cent distiques; il fixe la date de Te>enement ai*
xo stlhidje (a6 octobre). II nomme le Hongrois Kerecsenyi Karauchin*
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io8 U1STOIKE
ton et la massue quil voulait subjuguer les Hongrois ;
ceux-ci r^pondirent qu'il &ait libre de procider
corame il l'entendait, mais qu'il aurait affaire k des
gens de coeur, qui sauraient opposer des balles et des
lances aux b&tons et aux massues. Le 21 mai 1556,
Ali-Pascha, suivi de Dervisch, beg de Fuqfkirchen,
d' Ahmed, beg de Babocsa, de Nassouh, begde Kop-
pany et d'autres chefs ottomans, alia camper au cha-
teau de Saint -Laurent, a une distance d'un mille de
Szigeth. Trois jours apr&s , il commenga le stege de
cette forteresse, sur lequel nous ne nous &endrons
pas, nous r&ervant d'en dterire plus longuement un
autre, qui dix ans plus lard rendit a jamais memora-
ble le nom de Szigeth. Ce ne fut qu'au bout d'un
mois de si£ge, apr£s avoir combl£ les fosses avec
vingt-cinq mUle chariots de fascines et s'6tre rendu
maitre de la ville, qu' Ali-Pascha donna k la forte-
resse le premier assaut , dont Tissue fut pour lui des
plus funestes. Les Ottomans eurent k regretter la
perte d'Alaibeg et de Nassouh, neveu de Kasim-Pa-
scha, du beg de Koppany et de plus de sept cents
hommes; Ahmed et Mahmoud, begs de Babocsa et
Szolnok, furent blesses, W&i, aga des janissaires, fait
prisonnier, et les fascines des fosses brtilees; mais ce
dernier succis fut fatal aux vainqueurs, car les flam-
mes se propagerent et consum^rent une partie de la
ville ' (21 juin). Cependant le palatin Thomas Na-
» Isluanfi, Uistoria obsidionis et oppugnationis arcis Zigeth in Hun-
garia a Marco Horvatli loci illius Capitaneo ad Regim MajestatU manda-
tor* desert (j la ct transmissa a 3 die Augusti i556. Witenbergi , I55;. De
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 109
dasdy avait entrepris le stege de Babocsa avec une
arm£e compos£e d'Autrichiens, deStyriens, de Bava-
rois et de Hongrois. Les deux Polweiler, Henri de
Puchheim et Jean Rauber, commandaient les tirail-
leurs autrichiens , surnomm6s les diables noirs; le
vieux Lenkovitz avait sous ses ordres trois estate
hussards; Andr6 Rindscheid, six cents chevaux de
grosse cavalerie, et Siegesdorfer, six cents fantassins ;
ces trois corps formaient le contingent de la Styrie.
George de Thanhausen avait amen6 l'artillerie de
Gratz par Radkersbourg k Kanisa. Cette arm£e avait
encore &6 renforc^e par les Hongrois Francois Tahi,
Jean Fethoe , les deux Banfy, Nicolas Zriny, et enfin
par une foule de brigands infestant les fronti&res et
connus sous les noms de heiduques, martoloses, us-
koks et morlaques. A la premiere nouvelle de ce siege,
Ali-Pascha, laissant une partie de ses troupes devant
Szigeth , vola au secours de Babocsa avec vingt mille
cavaliers , dix mille janissaires et autant de martoloses
rasciens et serviens (21 juillet). L'arm£e hongroise ren-
contra Ali-Pascha sur les bords de la riviere Rinya,
et le d£fit complement ; la place de Babocsa, aban-
donn£e par son commandant Ahmedbeg, tomba entre
les mains des vainqueurs, qui la livr&rent aux flammes
et firent sauter le fort. Du c6t6 de Ferdinand, cette
obsidione Zigethi auiore Sambucco, dans Syndromus, p. 11a. Wolfgang i
Laccii'Regii Historici et Medici rei contra Turcas gestm a. i556* brevis
dsscriptio, dans Schwandtnar; et Basilii Joannis Herold' return contra
Turcas a. i556. in intramnensi Pannonia gestarum His tot tola; cgalement
dans Schwandtner.
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no HISTOIRE
bataille cotita la vie k Jacques Nadasdy , beau-fr&re da
palatin, a Jean Csobor, k Theobald Ziegler, k Chris-
tophe Siegesdorfer et k deux cent soixante-dix soldats
(25 juillet). Malgr£ cette d&aite, l'eunuque AH remit
le stege devant Szigeth; mais, trop aflaibli pour pou-
voir le conduire avec vigueur, il dut se retirer vers
la fin de juillet. Pallavicini, Polweiler, Lenkowitz et
Zriny march£rent avec leurs troupes victorieuses sur
Korothna, qu'ils prirent d'assaut; k leur approche,
les garnisons turques de Saint-Martin, Saint-Laurent,
Selly£ etGoeroesgdl s'enfuirent, sans chercher k se
dtfendre. Kasim-Pascha avec six mille hommes s'ef-
for$a vainement de s'emparer de Csourgo et de Musa ;
le kiaya du beglerbeg n'eut pas plus de succds dans
son excursion qu'il poussa jusque sous les murs de
Szigeth : le premier fut oblig£ de battre en retraite, et
le dernier fut fait prisonnier. Ali-Pascha, dans ces
divers combats, avait perdu plus de dix mille hom-
mes. Cette campagne fut des plus glorieuses pour les
Hongrois et les Allemands ; c'est k cette £poque que
ces derniers adoptfrent par une aveugle cr£dulft£ Tu-
sage barbare de vider les cadavres des ennemis pour
chercher Tor qu'ils supposaient y 6tre cach£ «.
D£j2i, avant le stege de Szigeth , Ali-Malkodj , san-
djak de Bosnie , avait tent6 d'emporter d'assaut la
forteresse de Krouppa, et celle de Kostainicza, qui
est entour£e de trois c6t& par les eaux de l'Unna;
t Illud haud prcBtermittendurn videtur, hoc primum hello Gtrmanos miH-
tes gregarios foedum ilium excoriandorum cadnvcrum usurpasse, quod hostes
aiaum degludvisse dicerent. Istuarifi, I. XIX.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. iti
mais bientdt r&luit & la defensive par la belliqueuse
activity de Zriny , il s'&ait born6 k fortifier Bunich et
Perussich \ Apr&s avoir quitt£ Szigeth, les Turcs d6-
vasterent le pays entre 1'Unna et la Knlpa, et s'empa-
rtoent de Kostainicza (1 6 juillet 1 556). Le sandjak de
Bosnie ayant adress£ un cartel au brave Zriny, celui-ci
se rendit an champ de Kaproncza, indiqu^ comme lieu
du combat; mais, en le voyant k la t£te dune armle
de dix mille homines, son adversaire n'osa pas vider
la querelle. Peu de temps apr£s, le sandjak fut rem-
plac6 par Ferhad, qui, avec quelques milliers dliom-
mes, partft de Poschega pour. la fronttere; mais au
passage de Ferhad dans le d£fil6 de Rakonigh et de
Sainte-H6i&ne, le vieux g£n£ral Lenkovitz, qui s'y
tenait en ambuscade avec trois cents hommes de
grosse cavalerie allemande, cent hommes de cavalerie
l£g£re croate, et cent arquebusiers italiens, tomba sur
lui k Timproviste et le chargea avec une impetuosity
irresistible; deux mille Turcs rest&rent sur le champ
de bataiMe, et quelques centaines furent faits pri-
sonniers \
Deux ans apr£s , un corps ottoman, fort de quinze
h seize mille hommes, marcha sur Moettling dans la
Carniole , se dirigea de \k sur Gotschee et Reifhiz ,
passa ensuke par Adelsberg, Zirkniz , Karst, Breg et
Klan, et se retira sur Grobnik et la valine de Wed-
* Istua&fi, 1. XIX, p. 3i8, etlit de Cologne, dit Malchus pour Mal-
khodj, et VeranftNM {dans Catena, XXIII, p» 80) le nonme Makhocs.
» Valvasor,IV, p. 4<>5; et Julius Caesar, VII, p. 78, qui evalue la perte
a quatre mille hontmes.
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in HISTOIRE
niz , emmenant avec lui des prisonniers et du b&ail.
Pendant Fannie qui pr£c£da la dern&re de ces irrup-
tions dans la Carniole, les Ottomans s'&aient empa-
r£$ de la forteresse de Tata (mai 1 558), succ&s qu'ils
durent autant a la negligence du commandant qu'& la
ruse et k l'activit£ de Hamza , sandjakbeg de Stuhl-
weissenbourg, qui, lorsqu'il &ait encore sandjakbeg
de Sz£cs6ny , avait si heureusement ex6cut£ un coup de
main sur Fulek. Le fort de Dotis ou Tata , situ6 dans
le palatinat de Komorn, sur une hauteur, k deux lieues
et demie de la rive droite du Danube, domine les en-
virons k une assez grande distance. Mathias Gorvin, en
ajoutant k cefort des jardins et des bains, I'avait cbang6
en residence royale. Hamzabeg ayant appris que Jean
Naghy , le commandant, s'&ait rendu a Komorn pour
affaires particuli£res , et que la garnison avait profit^
de son depart pour se gorger de vin, s'approcha dans
la nuit, escalada le rempart, et massacra les gardes
dans leur sommeil. Le fort de Hegyesd, situ£ sur
un roc pr£s du lac Balaton, fut 6galement surpris
par les martoloses de Hamza. Aprfes la conqu&e de
Tata , Roustem envoya d'Ofen le Persan Welidjan ,
sandjak de Fulek, contre le comitat de Zips. Weli-
djan leva sur les garnisons de Tata, Gran, Wessprim,
Waizen, Hatwan, Sz£cs6ny, Pesth et Ofen, un corps
de trois mille hommes , avec lequel il s'empara de
Szikszo et la livra aux flammes. Mais, ftdeles a Fer-
dinand, les capitaines transylvaniens George Bebek,
Jean Pethce et Emeric Telekessy, alterent h la ren-
contre de ce corps, et le defirent pr6s du village de
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DE L'EMPIRE OTTOMAN.
1 1 y
Kafa , sur le bord de la riviere de Sajjo; mais un des
agas des goennulliis ' et un autre des beschliis leur
reprirent deux mille prisonniers, parroi lesquels trois
cents Turcs, et leur enlev&ent quatre drapeaux \
Apr&s ce r6cit abr^ge des fWquentes violations de
larmistice, reportons nos regards sur l'ambassade
de Ferdinand, qui pendant ce temps-la faisait de vains
efforts pour conclure la paix sur la base de la cession
de la Transylvanie k l'Autriche. Dans Fannie mdme
ou il avait quitte le Sultan k Amassia, Busbek revint
a Constantinople , ou il trouva , entre autres change-
mens importans , Roustem r6int£gr6 dans ses fonc-
tions de grand-vizir. Souleiman chargea un envoys
extraordinaire de sa r^ponse k la note remise par
Busbek (juin 1 556) 3 . Dun autre cdt£, Bebek, le re-
presentant de la reine Isabel le, excitait k la guerre, et
cherchait a neutraliser tous les efforts des ambassa-
deursallemands, qui r&lamaient le maintien de l'etat
« Telekessy l'appelle Gemli-Aga, et Istuanfi change Goenniillu en
Giumliae.
» Catona, XXIII, p. 97, a rectifie, d'apres le Rapport officiel de Tele-
kessy, le recit exagere d'lstuanfi, qui parle de cinq mille morts et de treize
drapeaux. On trouve daus les Archives I. R. , Scritture iurchesche, des
documens venitiens, annees i557, i558 et i56o, trois lettres du Sultan
au doge : la premiere relative a la destruction de la tour de Papali a Spala-
tro et au paiement des creanciers du defunt Priouli ; la deuxieme est rela-
tive aux esclaves des galeres qui avaient pille a Tile de Chypre Je tresor egyp-
tien; la troisieme est une lettre de recreance delivree au baile Marin de
Cavelli et datee du mois de silhidje 967 (septembre i56o).
3 Postquam hinc dimisimus Ciasum, qui prceteriio mense Junio cum La -
dislao Siabo et Turcarum principis liucris ad nos venit. Voyes Miller,
tpist. 1 49*
T. VI. 8
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ti4 HISTOIllE
de choses actuel. Plus lard, trois envoyes d'Isabelle
vinrent successivement demander la cession de Lippa
et de Temeswar; mais les uns et les autres essuy£rent
des reftis. Verantius et Zay retournfrent k Vienne
avec, une note du Sultan , dans laquelle il exigeait la
remise entre ses mains de Szigeth * ; Busbek resta seul
k Constantinople [xvhi]. L'eunuque Ali * &ant mort
peu de temps apr&s son £chec devant Szigeth, Ka-
sim h£rita de sa place de gouverneur d'Ofen , qui
passa un an plus tard k l'ancien beglerbeg TOuighoun
(acNiU 1557) d , lequel devait l'ann£e suivante la c£der
a son tour k Roustem-Pascha. Busbek , d'apr6s ses
instructions nouvellement arriv&s de Vienne, repr6-
senta au Sultan que son maitre ne pouvait sans d£s-
honneur cMer Szigeth , qu'il etait en droit de refuser
le paiement d'un tribut triple de celui qui avait &6
stipule, mais qu'il &ait prtt toutefois k c&ler sur ce
point, k condition que la ville de Tata lui serait ren-
due. Le drogman Mourad fit entendre de nouveau
k l'ambassadeur qu'il n'y <
sans la cession prealable d<
bek Gonclut k Andrinople u
mois, dont on recommands
i La lettre du mois de schewal 964 (avril 1557), dans les Archives de
la maison I. R. d'Autrkhe.
* At Haliy pauh post Budam se r
vi tarn invisam cum morte eommutavit. (
3 Tuighun prefeetus Budam moden
fectus, comme raeonte Busbek dans s
du 19 ooveinbre i558j dans les Archie
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 1 1 5L
commandant des ch&teaux-forts de Hongrie [xix].
Des dissensions survenues entre les princes ses fils,
et que nous ferons bientdt connaitre, d&ermin&rent
le Sultan a cette concession.
Ce ne ftit qu'au commencement de 1559, que les
negotiations entre rAutriche et la Porte ftirent ter-
minus, apr& s'fitre prolong£es pendant six ann£es
consecutivee. Dans les deux derni&es conferences,
Busbek avait reit&e sa demande eh restitution de
Tata, ainsi que ses plaintes au sujet des irruptions des
martoloses , et Roustem avait reclame de nouveau
l'abandon de Szigeth, et oppose aux griefs de Tarn-
bassadeur les devastations des heiduques; ni Tun ni
l'autre n'avait voulu c&ler sur ses pretentions fon-
damentales. Cependant Busbek manda k Ferdinand
qu'il pourrait conclure un armistice de huit ans sur
la base du statu quo actuel , mais qu'il n'avait au-
cun espoir d\>btenir Tata. A la lecture de ce rapport,
Ferdinand envoya quatre projets de traits difftrens,
dat^s d'Augsbourg du 29 avril. Le premier, r£dig£
dans Finteret de TAutridie, stipulate la restitution
de Tata et de Fulek, et la punition de Hamzabeg;
mais ces clauses etaient omises dans le quatrteme* qui
etait k peu pr&s conforme a l'ultimatum de Roustem.
Albert de Wyss apporta ces divers projets au camp
de Scutari, que Souleiman occupait pour &re plus
a port^e d'intervenir dans les querelles de ses fils.
Busbek avait suivi le Sultan; pendant les trois mois
qu'il s£journa au camp des Ottomaps , il s'occupa a
eludier leur art militaire , sur lequel il publia par la
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n6 HISTOIRE
suite un m&noire qui est encore estim£ aujourd hui ' ;
Albert de Wyss etait charge d'offirir au Sultan une
coupe en vermeil et une pendule qui repr&entait un
elephant portant une tour. Busbek remit au Sultan
le quatri&ne des projets envoy&, le seul qui, par ses
clauses peu favorables a Tempereur, lui parut offrir
des chances d'acceptation , mais qui fat n^anmoins
repousse. Ne conservant plus d'espoir de r^ussir dans
sa mission, il demanda son conge, mais sans pouvoir
Tobtenir. Le 7 juin , deux jours apr& Tarriv^e de
Souleiman k Scutari, il fut admis k une audience so-
lennelle, dans laquelle il se borna k demander la ra-
tification de la paix , laissant toute latitude pour les
termes de sa redaction et donnant 1 'assurance que
l'enqpereur observerait avec une stricte fid^lite un
traits dfyk rev6tu de sa signature. II repr&enta qu'il
avait toujours tenu le m&ne langage par rapport aux
places contest^es sur les frontteres de la Traosylvanie.
que Tempereur traiterait k cet egard avec IsabeUe et
que d& ce moment il renongait a toute pretention sur
celles de la Transylvanie. II fit observer que pour sa
part il avait tenu sa parole d'ambassadeur, en pr&en-
tant un acte conforme dans sa redaction aux points
d£j& arr£t£s. Mais ces representations restSrent sans
effet; le traits n'existait pas, pu, s'il y en avait un, il
n'£tait obligatoire que pour Ferdinand, qui seul avait
engag£ sa parole; Souleiman n'avait rien acoept^ et
n'avait aucunement renonc6 k ses pretentions sur Szi-
i Aug. Busbeauit exclamalio sive de re militari contra Turcam insti-
tuenda consilium.
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DE L' EMPIRE OTTOMAN. 117
geth. Ainsi il fut impossible k Busbek de terminer la
negotiation, et Souleiman, k son retour a Constanti-
nople, le fit renfermer dans le khan des ambassa-
deurs a la Colonne-Brfille. Pendant cette esp£ce de
captivity Busbek s'occupa k faire des collections d'a-
nimaux, de plantes, de manuscrits, et k recevoir ses
amis qui venaient le voir de Raguse, de Florence, de
Venise et de la Grfece. Les loisirs du savant ne furent
pas sans utility pour Tempereur et pour la science;
il enrichit la menagerie imp&riale l , et naturalisa dans
le jardin botanique de Vienne le syringa persan et la
tulipe, dont le nom deriv^ de dulbend (turban) atteste
assez l'origine orientale [xx]; enfin il envoya d'ex-
cellens manuscrits grecs, dont le plus remarquable,
celui de Dioscoride , est encore aujoiird'hui Tun des
plus pr£cieux tr&ors de la biblioth&que imp£riale de
Vienne*.
Cependant les envoy& dlsabelle furent cong6di&
et charges de remettre au pascha de Temeswar une
lettre qoi lui enjoignait de terminer les diff&rends re-
latifs k la fixation des frontteres de la Transylvame.
Avant le depart de ces derniers, le prince de Min-
gr£lie, ou, comme l'appelle Busbek, le Dadian de,
Col chide, &ait venu k Constantinople se prosterner
1 EpisL III : Quod eum (leonem) cam ichneumone Ccosari dono destina-
veram.
• Sunt credo libri hand multo infra a 40, quos manu transmisi Venetlas,
id inde Viennam deportentur, nam Cmsareaf bibliothec* eos destinavi, unum
reliqui Conttantinopoli Dioscoridem, centum ducalis indienbalur summa £<*--
tarei non mei marsupii. (Epist. IV.)
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u8 HISTOIRE
au pied du trdne du Sultan et lui offrir eft signe de
soumission un rubis d'une rare beaut6. C'est a cette
epoque que Souleiman 6crivit & l'autocrate des Rosses
une lettre dans laquelle il lui donnait pour la premiere
fois le titre de Tzar, lui rappelait les relations amicales
qui avaient exists autrefois entre la Porte et la Rus-
sie, et lui recommandait les itiarchands ottomans qui
allaient h Moscou faire des achats de pelleteries. Dans
le m£me temps, arriv&rent a Constantinople des en-
voy^ de Venise , de France et d'Espagne. Franchi
de Khios, le chdrg6 d'affaires du roi d'Espagne Phi-
lippe II, demanda la paix pour son maitre; mais il ne
l'obtint pas plus que le baile de G4nes *. Par suite
d'une correspondance &ablie entre Roustem et le due
de Ferrare , ce dernier manda au grand- vizir que ,
eonforiti&nent a sa demande, il accordait au frere du
juif,. Zuan Miguez, la permission de quitter avec sa
famille le duche de Ferrare a . Zuan Miguez est ce juif
portugais, qui par la suite, et sous le nom de Don
Joseph, captiva tellement la confiance et la faveur du
i // Ballo genovese parti (4 novembre r558) aveva do manda to la pace
per II He di Spagna. Rapport de l'ambassadeur de Venise, aux Archives
I. R. ; et Rapport d' Albert Wyss du a a decetnbre i56*4«
» Lettera portata ad Rostem dal Duca di Ferrara (6 Marzo i558) per
licentia, die si contenlava di dare al ffebreo fraullo di Zuan Michez di par-
tire colla famiglia da Ferrara* Un fermao en faveur de don Joseph, adresse
au doge de Venise (voyez Scritture iurcheschc des actes venitiens, dans les
Archives I. R.) , muni du sceau du grand-vizir Sinan, contient ce passage :
Eidwet erbabil wakar frenk begi Yasif Nasi zidei iiaatouhom, e'est-a-dire :
« Le model* des personnes.de quality le beg franc Yasif Nasi, que son obeis-
sance s'accroisse! »•
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DE L'EMPIRB OTTOMAN. 119
sultan S£lim» que, durant le rigne de ce dernier, il
exerga une haute influence stir toutts leg affaires, de-
cida quelquefois des questions de pais et de guerre,
et fut enfin 61ev4 au rang de diic de Naxos. Busbek
se montra mews ohligeant que le due de Ferrare efn-
vers le refi£gat hongrois Ferhad-Pascha , qui l'avait
pri6 de faire yenir ses parens : sachant que le p6re et
le fr&re de Ferhad avaient d£j& subi la circoncision ,
il lui r£pondit que rien ne Berait plus facile, si la
religion ne s'y opposait pas '. Ferhad avait gagn£ les
bonnes gr&ces du Sultan par la discipline s6v&re qu'il
avait introduite dans le corps des janissaires, au point
que celui-ci lui donna en manage sa petite-fille , la
sultane Houmai, fille de son fils eWri Mohammed, et
I'&eva au rang de vizir, en augmentant pour lui le
nombre de ces dignitairea. Ferhad avail une belle
Venture, et s'occupait k copier des Korans, qti'il ven-
* Ferhad-Pascha, qui neptem Souleimani habet, quinto loco Fesiri adcp~
tus peiebat matri sum. et sorori ad se veniendi potestatem; nilfuturum foci-
liui si pet rekgionem Uceret; sciebam, dit Busbek, patrem et f rat rem
illuu Hon multo a tempore circumcises, Dans le Rapport, dat£ do to sep-
tembre i56i , d'un agent secret de Ferdinand, bomme bien instruit qui se
trouvait k Constantinople en meme temps que Busbek, on lit ce qui suit :
QuestoJga & di nazionetlngaro, d'eta d'anni 35, fu schiavo di queW lbraim
Basia amasaato da Sr. Suleiman* A cote de Ferhad, Ahmed- Pastha, qui
avait epouse* la petite-fille de Souleiman, fille de Mihrmah, jouissait parti-
culierement de la faveur du Sultan. Busbek , dans son Rapport du 3 no-
vembre 16*61, dit k son egard : is cut desponsa fuit Rostemi filia , creams
est begUrbegus Gratelm, ipse vero beglerbegus Vezirorum numero adjunc-
ts . Is principem arclo consanguiniiatis adtingit grad» t utpote ex iliius
amita Selimi sorore natus est, ob id magna apud principem auioritaie et
gratia. Ahmed n'clait pas lc fils de la sceur dc Selim I , mais de la fille de
celled. Archives I. R.
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i2o HISTOIRE
dait ensuite au prix de cent ducats l'exemplaire, desti-
pant l'argent qu'il en retirait aux frais de son convoi
fun&bre. Les historiens ni les archives ne nous ont
transmis le nom ou la patrie de ce ren£gat, qui devint
gendre du Sultan, et en faveur duquel fut cr&e la
charge de cinquteme vizir, inconnue jusque-la dans
Fempire ottoman.
. Le r£cit des hostility en Hongrie et des pr&imi-
naires de paix nous a conduit avec Busbek au camp de
Scutari , ad Souleiman s'&ait rendu pour mettre fin
aux d£bats de ses fils, et prfrvenir la guerre civile dont
leur rivali&menagait Tempire. Avant de suivre les n£~
gociations entre 1'Autriche et la Porte jusqu'k leur
conclusion definitive, il est n£cessaire de remonter a
1'origine de celte querelle funeste et de rechercher les
causes de son denouement tragique. Les auteurs qui
en rendent compte ont emprunte les f aits aux rapports
de Busbek. Gette source est assur&nent digne de con-
fiance, mais insuffisante. Nous nous £clairerons d'un
document plus authentique, du r^cit de F Ottoman
AH, qui, en sa quality de secretaire du pr^cepteur des
princes, Lala Moustafa-Pascha , a non seulement &6
a m£me de voir la correspondence entre Souleiman
et son fils Bayezid , mais a m&ne redig^ quelques-
unes des lettres de Moustafa; par la suite, il traita ce
sujet dans un ouvrage special [xxi]. Moustafa devait
son elevation k la protection du grand-vizir Ahmed-
Pascha, circonstance qui lui assurait lahaine du suc-
cesseur de celui-ci, le grand- vizir Roustem. Aussi,
apres sa reintegration dans ses hautes fonctions, Rous-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 121
tern destitua-t-il Moustafa , qui &ait alors second
4cuyer, pour lui donner la place bien irif&ieure de
grand -6cuyer tranchant; plus tard, il l'envoya eti
qualite de sandjak k Safed. Enfin, connaissant l'atta-
chement de Moustafa pour le prince Bayezid, il pensa
ne pouvoir mieux assurer sa pertequ'en le nommant
gouverneur de la maison du prince S£lim; mais il
manqua tout-&-fait son but. Dou6 dun rare g6nie d'iri-
trigue , Moustafa sut exploiter sa nouvelle position
au profit de son ambition ; il forma le projet de trahir
son ancien maitre, le prince Bayezid , et de se servir
de ses relations avec lui pour le perdre entitlement.
En assurant ainsi le tr6ne k S61im , il acquSrait des
titres k sa confiahce et k sa reconnaissance, et comp-'
tait sous son r£gne futur parvenir a la supr&ne di-
gnity de grand-vizir (1 556).
Dans ces vues ambitieuses , il fit observer a S£lim
quen sa quality de fits aine du Sultan, il itait certain
de parvenir au tr6ne si Roustem n'y mettait obstacle,
mais que celui-ci ne manquait aucune occasion de le
repr&enter k son p£re comme un libertin adonne aux
plaisirs et incapable de gouverner , afin d'assurer Tem-
pire a Bayezid; il ajouta que si lui, Moustafa, avait
les mains libres , les choses changeraient bientdt de
face. S61im lui donna plein pouvoir d'agir k son gr£,
el lui montra en perspective la place de grand-vizir,
comme la recompense du succ&s de ses efforts. Alors
Moustafa, se mettant a l'oeuvre, fit une premiere lettre
a Bayezid, dans laquelle il lui disait, en prenant le
masque de son ancien d£vouement, que le d£bauche
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i*2 HISTOIRE
S£lim ^taitle seul obstacle k son avdnement au tr6ne,
et que cet obstacle &ait facile k lever. Apres avoir
communique cette lettre a S&im , il l'envoya par un
homme stir, Bayezid donna dans le ptege et aCcepta
les offres perfides de Moustafa par une r£pdnse que
celui-ci remit cachet^e a S61im. Pour Mter le succ6s
de ses intrigues, Moustafa &rivit a Bayezid de pro-
voquer son fr6re en l'acoablant d'injtired sanglantes.
Bayezid suivit ce conseil, et adressa k S61im une let-
tre insultante* a laquelle il joignit un jupon, un bonnet
et une quenouille. S&ifti envoya ces divers objets a
Souleunan, qui, indign£ de cette conduite pen respec-
tueuse de Bayezid enters son fr&re ain£, adressa au
coupable des remontrances siv&res. Moustafa fit tuer
les messagers et briler les lettres, incident que Selim
se h&ta d'annoncer k son p£re, en le mettant sur le
compte de Bayezid. Souleimati, irrit6 du mepris de
ses ordres* et jugeant dangereux de laisser plus long-
temps Bayezid investi du gouvernement de Karama-
nie [xxn] , qui &ait la clef de la route de Syrie et
d'l^gypte, resolut de l'envoyer dans une autre pro-
vince , et afin qu'on ne pAt accuser ses decisions de
partiality, il 6tendit cette mesure k 5£lim. Ge dernier
fut envoys de Saroukhan, capitale du gouvernement
de Magn&ie, k Kotitahia en Anatolie, et Ton assigna a
Bayezid le gouvernement du pays de Bourn avec la
residence d'Amassia, en echange de son ancien gou-
vernement de Karamanie '.
i Ali. Petschewi. Solakzad6. Busbek, Ep. Ill : « Nam iu ceteris curis,
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. ii3
Aprte avoir regu communication de ces ordres ,
S&im partit pour Brousa , mais Bayezid resta h Koniah.
Souleiman deputa a ce derflier le quatrteme vizir, Per-
tew-Pascha, pour lerappeler k soto devoir; voulant
pr6venir tout scandale et faire consid&er cette mission
comrae un simple temoignage d'affection paternelfe, il
enjoignit en m6me temps au troisteme vizir Moham-
med-Pascha Sokolli de se rendre aupres de S£lim.
Mais, loin de se soumettre, Bayezid rassembla a la hite
une armee d'environ vingt milte Kurdes, Turcomans
et Syriens. A cette nouvelle, Souleiman ordonna aux
paschas d'Anatolie et de Karamanie, Djp nabi et Solak
Ferhad, 1'ancien gouverneur de S£lim, ainsi qu'k
Ghiloun Ali-Pascha, beglerbeg du Soulkadr et k Piri-
Pascha d'Adana, de l'ancienne dynastie des Ratna-
zans* de se rendre avec leurs troupes dans la plaine de
Koniah, pour s'opposer k toute entreprise armee de
Bayezid. Mohammed Sokolli regut Tordre de les re-
joindre avec mille janigsaires, un corps de sipahis, de
silihdars, d'armuriers, d'artilleurs et quarante pieces,
de canon (30 redjeb 966 — 8 mai 1 559). Le 99 mai ,
jour anniversaire de la prise de Constantinople, les
deux partis en vinrent aux mains; Faction fut vive et
la victdire long-temps douteuse; mais le lendemain
(21 sch&ban 966 — 30 mai 1559), Bayezid fut com-
plement defait et se r&ugia avec son fils Ourkhan
a Amassia. De Ik il ecrivit a son pere une lettre dans
laquelle il protestait de son repentir sincere, et de-
-quibu* angebatur animus Souleimani, non erat postrema, ne Bajazetes,.
» intercepto Iconio in Syriam se dimittens, inde in Mgy^Vam irrumpereU -
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i»4 HISTOIRE
mandait gr&ce pour hii et ses quatre fils. Mais cette
lettre, intercept^ par les agens secrets de Moustafa-
Pascha, ne parvint pas h Souleiman *, qui, en appre-
nant Tissue de la bataille, se rendit sept jours apr£s,
99 scMban (6 juin), au camp de Scutari, pour 6tre
plus pr&s du th&tre de la guerre [xxin]. Malgr6 sa
dtfaite, Bayezid parvint k rassembler autour de lui
pr£s de douze mille hommes; car il 6tait servi par la
sympathie du peuple qui pr£f$rait la vie retiree de
ce prince aux debauches de son fr&re", et retrouvait
avec plaisir en lui les traits de Souleiman, tan dis que
Selim avait la figure rubiconde et bouffie de sa mire \
Bayezid se confia avec ses quatre fils a la garde de
ses troupes, et abandonnant, non sans verser d'abon-
dantes larmes , son harem et ses fid&les serviteurs , il
se dirigea avec elles vers la frontifere de Perse (1 * r sehe-
vVal — 7 juillet). II emprunta au pascha de Siwas
treqte mille ducats, et, frappant le pays de contribu-
tions, il sen procura dix-huit mille autres, ainsi que
trente-un chameaux, soixante chevaux et vingt mu-
lets. En apprenant cette retraite, Souleiman d&acha
■ Lata Mouslafa-Pascha didikleri Khinziri mouhialuti rehzenlerini rast
ghcloub, khaber on eserleri zdhir olmadi, comme dit Petschewi, f. 127, ce
qui veut dire : « Ces messagers tomberent entrc les mains des agens secrets
de Lala-Moustafa, ce cochon ruse, et ne reparurent plus. »
» « Cum in Selimo nulla oris ejus (Suleimani) similitudo appareret, ma-
» ternae quidem faciei et habitus express® notae, sed mulieris in vulgus dum
-viveret odiosae, multo gravis abdomine incedebat, ioflatis buccis, facie
» uimia rubedine indecora, ul militari facetia pollenta saginalus diceretur. »
{Bush, episu IV). «Eidem milites Bajaietum Soffi vocare soliti, hoc est
» quieti et litterarum studio deditum. » Au meme endroit.
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DE L'EMPIKE OTTOMAN. laS
du camp de Scutari le troisi&ne vizir. Mohammed
Sokolli, et Kizil Ahmedli Moustafa, beglerbeg de Rou-
milie, avec ordre de joindre S61im et de poursuivre
avec lui Fannie fugitive de Bayezid. S£lim atteudil
a Siwas Tarriv^e du vizir; mais en m£me temps, il
envoy a Moustafa, beg de Malatia, Khosrew, beg
d'Alntab, et Temerrud Ali-Pascha, beg de Siwas, k
la poursuite de son fr£re. Us 1'atteignirent non loin de
la fronti&re de Parse , k Saat tschoukouri , et l'atta-
qu£rent avec vigueur; apres un combat opin&tre, les
troupes de Bayezid, sefiant plus k la rapidity de leurs
chevaux qak la puissance de leurs armes, reprirent
leur marche «. Le beglerbeg d'Erzeroum, Ayas-Pa-
scha, dont le fr&re, Sinan-Pascha, conquit dans la suite
TY^men, la Goletta et Raab, vint a la rencontre du
malheureux prince, et led envoya m&ne quelques che-
vaux charges de clous et autres ferremens pour facilifter
sa fuite. Par suite de ces ev^nemens, Souleiman or-
donna au vizir Sokolli et au gouverneur d'Adana, Ra-
mazanoghli Piri-Pascha, de passer Thiver k Haleb,
afin de surveiller les entreprises ulterieures du rebelle.
Ayas-Pascha paya de sa vie les services rendus a JBaye-
zid, et sa place fut donn& au beg de Malatia qui s'etait
distingu£ dans la poursuite du prince ; Khosrewbeg
fut nomm£ au sandjak de Pasin. Le grand-vizir Rous-
tern, qui commengait k p&i&rer les intrigues de Lala
Moustafa, parvint k l'iloigner en le representant au
Sultan comme la seule cause de ces malheurs. Mous-
•
« Kouschkoune kouwel kamtschiye her eke t deyertk, e'est-a-dire en appe-
lant la sangle force, e! le fouet salut.
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!*S HISTOIRE
Ufa disgracie fut envoy£ comme sandjak a Poschega,
et remplace aupres du prince S41im par Toutounsif
Housein; mais, grice a ^intercession de Sllim, il ne
tarda pas k 6tre appete k Temesw&r, et fut ensuite
nomm6 gouverpeuf de Wan snr une nouvelle de-
mande du prince, dans laquelle il persuada k son p&re
que la presence dun homme aussi habile serait utile
sur les frontieres de Perse. Soulei'man «t Selim ecri-
virerit aussttdt au schah pour le pr£venir de la r^volte
de Bayezid et l'engager k ne point troubler la pais
qui existait entre les deux puissances en*accueillant le
fraitre 1 .
Cependant le gouverneur d'Erfrwan, Schahkouli,
retenait le prince en son pouvoir, en attendant les ins-
tructions du schah, occup6 alors h une expedition
dans le district d'Astrabad. Tahmasp , auquel rarri-
ir£e de Bayezid rappelait la fuite de son fr&re Elkass
Mirza, ordonna k un mihmandar , le Khan Nizamed-
din Schahkouli Oustadjlu, et a Gayass Atallah, vizir
de l'Azerbeidjan, de se rendre a Nakhdjivan k la ren-
contre du prince. II manda * en m&ne temps k celui -ci
qu'il se disposait k le recevoir a Tabriz avec tous les
honneurs dus a son rang; qu'il avast diverses confi-
dences a lui faire, afin qu'il les communiqu&t k son
i Cette lettre de Soulei'man se trouve dam VJppendice de son Journal,
sous le no tx; celle de Selim, dans Ylnscha du defterdar Ibrahim. Archives
I. R., no ccoqxxiy, f. a5 et 26.
a Jppendice du Journal des campagnes de Souleiman , no lix ; et dans
la collection des Leilres diplomatique* du rels-efendi Ssari Abdoullah,
no xliii.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 127
ptae quand il serait rentr6 en gr&ce, et qu'il serait
heureux de le trailer comrae son propre fils. Le schah
se rendit aussitftt k Tebriz et accueillit son h6te avec la
pompe uBit6e chez les rois de Perse (23 s&fer 967 —
24 novembre 1 559). Trente vases remplis d'or et d'ar-
gent, de perles et de pierres fines, furent versus sur
la t6te <Je Bayesrid, et neuf chevaux richement enhar-
nachta ltd furent donnas en present. Bayezid de son
c6t6 trait* le schah avec une magnificence digne d'un
prince ottoman. II fit &endre sur son passage du satin,
du velours de Damas et d'autres etoffes pr£cieuses, et
lui offrit en retour de ses presens cinquante chevaux
turcomans converts de housses brodees d'or et douze
harnais d'argent. Ses cavaliers &onn6rent les Per-
sans par leurs Evolutions brillantes; mais aucun ne
fut plus admir6 que Ferhad Kodoz; sa force et son
adresse fix6rent tous tes regards f . Ferhad, excite par
le sentiment de la superiority ottomane , proposa au
prince de changer le combat simul£, qui etait donn£
en spectacle au peuple, en un combat r£el, dont Tis-
sue peu douteuse placerait sur sa t&e la couronne de
Perse. Bayezid blftma sevirement ces paroles et de-
fendit a ses confidens, sous peine de mort [xxiv], de
les repiter. Mais soit que cet incident etit &e Ebruite
malgr£ les ordres de Bayezid, soit que le schah n'etit
voulu prendre qu'une mesure ordinaire de prudence,
» Busbek, qui avait appris quelque chose de cette affaire sans en con-
naitre tous les details, appelle Ferhad Kodoz Chiuntwn, et place la scene
du tournoi daus le camp de Bayezid a Koniah : « IHi , quo die in Castra
» ad earn venerunt, equestrts ptigm* simulacrum ediderunt. »
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^-^
128 HISTOIRE
les troupes du prince furent r^parties parmi les khans
et les sultans, sous pr&exte de lui £pargner la charge
de leur entretien , de telle fagon que sa suite peu
nombreuse ne pftt inspirer d&ormais aucun sujet de
crainte.
Les soupQons et les craintes que la presence de
Bayezid inspirait au schah , et les avantages qu'il es-
perait en retirer en le livrant k son p&re, furent d&~
, lors les seuls mpbiles de sa politique. La correspon-
dance de Souleiraan et de S£lim avec Tahmasp nous
montre les premiers acharn£s k la mort d'un fils et
d'unji^jp? et le second vendant bassement la vie de
> * * " *" son h6te. Les annales de la Porte ottomane n'offrent
aucun autre exemple d'un £ch?nge de messagers et de
d4p6ches aussi frequent , et Thistoire des autres na-
tions ne nous pr&ente nulle part des negotiations
aussi formellement et solenneltement conduites, pour
obtenir la violation des droits de lhospitalit^ et Fas-
sassinat d'un parent. Qu'il nous soit done permis de
nous arr&er sur ce tragique &v£nement et d'en de-
tainer les circonstances.
Les deux premieres lettres de Souleiraan et de Tah-
masp paraissent s'6tre crois£es en route. Dans sa let-
tre, le Sultan exposait au monarque persan la rebellion
de Bayezid, et lui rendait compte de la bataille de
Koniah; dans la sienne, qu'il envoya par un desoffi-
ciers de la cour, Ali-Aga , le schah interc6dait en fa-
veur du prince '. Souleiman d£p6cha k Tebriz Sinan-
» Cette lettre est la dix-huitieme de la collection dont M. de Lutzow a
fait cadeau a l'auteur. PeUchewi la donne* traduite en langue turque.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i a 9
beg, avec une seconde lettre dans laquelle il retragait
le crime de l£se-majest£ commis parBayezid, et ter-
minait par une oflre de pardon, en priant toutefois le
schah de faire d£capiter les instigateurs de la rebellion
du prince, Toursoun Abdoulschanoghli , Ferroukh
et Seifeddm Absal, de retenir les autres coupables et
de renvoyer le prince sous escorte dans le gouverne-
ment d'Amassia. oi un beglerbeg se trouverait pr& k
le recevoir *. S£lim envoya egalement a la cour de
Perse son £cuyer et confident, Tourak-Aga, avec une
lettre remplie d'injures et d'invectives contre son fr&re
Bayezid ; il le traitait de rebelle, de Satan orgueilleux,
qui, ayant si souvent pilte des caravanes, etait indigne
de la protection du schah et ne m£ritait que son m£-
pris, d'apr^s cette sentence du Koran : « L'amour
emane de Dieu, la colore £mane de Dieu, » et ce vers
de Saadi : « Faire du bien aux medians , c'est faire
du mal aux honn6tes gens. » Au depart du messager
ottoman, le schah envoya une lettre au Sultan par son
vieux capitaine Tubetaga, et une au prince S61im par
Seifeddin Ourouschtii- Aga [xxv] , natif du Soulkadr
et sujet de Souleiman. Dans sa r^ponse a Souleiman,
le schah exprimait d'abord un bl&me sur la lettre de
celui-ci et la voie par laquelle elle lui etait arriv^e ,
mais il le d£guisait avec toute Tadresse diplomatique,
en paraissant douter que le message vint r^ellement de
Souleiman, parce qu'il lui avait &6 remis par deux of-
ficiers subalternes du gouverneur d'Erzeroum. Quant
i Dans YJppendice du Journal des campagnes de Souleiman, no lxi,
sous la date du i schaban 967 (27 avril i56o).
T. vx. 9
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i So HISTOIRE
a Fex&ution de Bayezid et de ses fils, demandle ver-
balement par les deux messagers sous pr&exte que la
mort leur ^tait plus salutaire que la vie, il insinuait
que le Sultan, en acceptant de lui ce service, con-
tractait envers lui une obligation dans ce monde et
dans l'autre ; du reste , il se montrait pr6t a souscrire
aux voeux du Sultan , et n'attendait que le signal -de
celui qui est l'ombre de Dieu sur la terre (Souleiman)
et dont les ordres sont empreints d'avance du sceau
du destin *. La lettre qui fut remise par Ourouschtii-
Aga k S£lim &ait conforme k celle adress£e k Sou-
leiman. Apr6s avoir cit6 la sentence du Koran : « Tuez
lesidol&tres et les rebel les, » il se disait convaincu, par
les explications verbales des envoyes, de la justesse et
de ropportunit^ des mesures proposes pour l'extra-
dition ou l'assassinat de Bayezid a . Le criminel em-
pressement de Tahmasp n'a pas m6me l'excuse de la
crainte que lui inspirait le malheureux prince, et les
conditions qu'il fit par son envoy6 montrent bien que
ce meurtre ne fut pour lui qu'une speculation 3 . Lors
de sa seconde mission k Constantinople, le vieux Tu-
bet demanda dans le diwan qu'en recompense de Fas-
sassinat promis, le schah fttt investi du gouvernement
i Jppendice du Journal de Souleiman, no lxih : Baza ma aahedna ilei-
kum vel ahd Jld-darein aJe'ina we ale'ikum.
* Collection da reis-efendi Sari Abdoullah, no lxxxx. Souleiman de-
manda l'extradition de Bayezid et de ses quatre fils. Voyez XAppendice du
Journal de Souleiman, no lxiix, 9 rebioul-ewwel 968 (27 novembre i56o).
3 D'apres le temoigoage des deux contemporains precites. Petschewi,
f. 1S1.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i3i
de Bagdad , qui deviendrait vacant par la mort de
Bayezid. Maisle grand-vizir Roustem lui dit, en l'in-
terrompant brusquement : « C'est k moi de r£pondre
k ceci, sortons. » Quand ils furent hors de la salle de
l'audience, il lui reprocha s&virement l'audace de ses
pretentions , ajoutant que le rebelle , l'indigne Baye-
zid, n'avait rassembie que quelques milliers de mi-
s6rables , qui n'auraient pu devenir dangereux pour
1'empire; que, si le schah continuait k refuser son
ch&timent, les bonnes relations entre les deux puis-
sances se changeraient en hostility, et que dans ce cas
une arm£e ottomane trouvendt peu d'obstacles pour
arracher le criminel k sa retraite; mais que dans le
cas contraire les liens d'amitte seraient resserr£s et le
service du schah de Parse g£n£reusement recompense.
En voyant Tahmasp prendre l'initiative de la pro-
position d'assassinat , Souleiman s'empressa de lui
adresser une r£ponse, k laquelle il joignit des presens
pour ses ministres. II envoya en Perse Meraasch, gou-
verneur du Soulkadr, Soft Ali-Pascha, ancien gou-
verneur de la maison de Seiim, et le kapidjibaschi
(chambellan) Hasan ; de son c6t6, Seiim fit partir pour
la m£me destination Kara Mahmoud-Aga. Ces agens
rapporterent deux lettres du schah ', dont Tune &ait
adress£e k Souleiman , et l'autre k S£lim. A la suite
de quelques centaines de lignes consacrfos k des com-
plimens fastueux, Tahmasp pr£tendait, par une inter-
pretation sophistique de la parole qu'il avait donn&,
> Le Rapport de Busbek da a5 aout i56i , dans les Archives I. R.,
annonce le retcur du pascha de Meraasch.
9*
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i5a HISTOIRE
pouvoir trahir son h6te, sans cependant commettre
un parjure; il avait jur£, disait-il, au prince Bayezid
de ne pas le livrer aux ambassadeurs envoy^s par son
pere k cet effet , mais il ne lui avait pas promis de
refuser son extradition k des &nissaires de son fr&re;
il &ait done important que S&im lui envoy&t des
hommes entre les mains desquels il pourrait remettre
le prince sans se parjurer. La lettre qui &ait destinee
a Selim et qui lui fat remise par soachambellah Kara
Mahmoud , £tait congue dans le m£me sens* Apr£s
une telle preuve de d£vouement, Tahmasp esperant
Jrouver Souleiman plus dispose k accorder la de-
mande qui avait <He si brusquement refus^e au vieux
Tubet, la pr&senta de nouveau dans un m£moire qui
fut remis au Sultan par Beschretaga. Dans ce m£-
moire, le schah exprimait le desir de placer deux
fonctionnaires aux tpmbeaux d'Ali et de Housein (k
Kerbela et Meschhed), Fun comme inspecteur, l'au-
tre comme secretaire attaches k des fondations per-
sanes de bienfaisance ; il demandait en outre qu'un
ou deux de ses fils fussent nomm£s gouverneurs de
sandjaks et installs avec le c&£monial de l'investi-
ture ordinaire (il avait apparemment en vue Bagdad
et un autre gouvernement sur la fronttere) ; enfin il
terminait en sollicitant la permission de recommander
a la Porte des personnes qui lui rendraient des ser-
vices, pour qu'on leur donn&t de l'avancement et une
augmentation de traitement. Souleiman r£pondit sur
ces trois points par un refus provisoire; toutefois il
promit dapporter la plus favorable attention a leur
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tot L'EMPIRE OTTOMAN. i33
eiamen, quand Bayezid et ses fils se trouveraient
entre ses mains '.
Si Souleiinan prodiguait dans ses lettres au schab
les protestations d'amitte et de d^vouement, il se r6-
pandait contre lui en invectives dans sa correspon-
dance avec d'autres princes de TOrient. C'est aiosi
qu'il remit au derwisch Mohammed de Bedakhschan,
qui &ait venu en Turquie comme p&erin, une lettre
pour Pir-Mohammed [ixvi], souverain desOuzbegs,
le second successeur de Borrak khan, dans laquelle se
trouvait ce passage : « Cet orgueilleux Persan cou-
ronn6, ce schab inseng£, apr£s avoir subi des humi-
liations r&t£r£es , m'a envoys une ambassade pour
demander humblement la paix % que je lui ai aceor-
dee momentan&nent comme une gr&ce; mais depuis
il a viote cetle paix avec cette bassesse qu'on voit em-
preinte sur son front, en recevant chez lui mon fils
coupable, Bayezid; j'ai r&olu en consequence de ne
plus ajouter foi k ses paroles, et de recommencer mes
efforts pour l'an&ntir. Ouzbegkhan en bon musul-
man voudra bien me seconder dans cette entreprise. »
C'est dans le m£me sens, et seulement avee quelques
variations dans les injures, qu'etaient congues les
autres lettres que le m£me derwisch fut charg£ da
■ Iiucha , no cLzxz. Les lettres de cette correspondence se trouvent das-
sees sans aucun ordre dans Ylnscha comme dans la Collection de Feridoun ;
c'est pourquoi deux lettres de SeJim an schah, n°* uxxit et mmv, n'ont pu
tore placees exaetement dans leur ordre chronologique ; car le porteur n'est
pas nomm£, et le texte, qui ne renferme que des compltmens fastueux, no
donne aucun renseignement.
a Tadsckdari maghrour, Scliahi giimrah.
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1 54 HISTOIRE
remettre k AH, khan des Turkomans , et k Ibrahim,
khan des Alans. En mdme temps le prince de G£or-
gie ■ qui avait d£put£ a la Porte son defterdar Abdoul-
Aallam, pour porter plainte contre le schah, et pro-
poser de soustraire la Georgie a la domination de la
Perse et de la soumettre k la protection ottomane, re-
fut de la Porte cette r£ponse : « Bien que le schah ,
apr&s une guerre de onze ans, ait obtenu la paix, n£an-
moins le schehinschah est pr& k venir k ton secours
et k changer ta peine en joie. »
Open da nt, la position de Bayezid k Kazwin s'ag-
gravait de jour en jour. Le schah lui avait demand^ le
secours de ses troupes, dijk r£duites au nombre de
trois mi lie, pour une expedition contre Astrabad; le
prince avait pu d'autant moins s'y refuser, que la plu-
part de ses soldats &aient dejk gagn^s par Tor et les
flatteries des Persans ; n£anmoins il continua k 6tre
invito aux festins du schah. Dans Tune de ces occa-
sions , le schah et le prince etant assis avec une ap-
■ Ces lettres, dans le Journal de Souleiman, s'accordent parfaitement
a*ec ce que 1' agent secret de Ferdinand ecrit de Constantinople a la fin de
1 56 1 ; «Scrisse (Solimano) alii Signori Georgiani, qnali sono Christiani,
» che dovessero esser in lega contra il Persiano e de piu alhora scrisse al
» Tartaro , che dovesse prometter premio a tntti quelli Tartari contro il
» Persiano. » Dans les Archives L R. Le meme agent ecrit a la fin d'aoAt :
« La Georgia consiste in tre parti : la maggior confederate col Persiano , la
» seconda confederate col Gran Signor, la teraa menoma in obbediensa del
» Gran Turco. AUi ai Agosto il Turco mando suo Ambassadore a dette due
» parti con presenti di Teste d'oro e scimitare fornite d'oro ; — letlere
» scritte al Tartaro Preoopiense , che si debba parechiarsi alia guerra col
• Persiano, AUi aa Agosto mando a Selim iao,ooo ducati et una scimitara
» gioellata. »
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i55
parente familiarity Fun k c6l6 de l'autre, un perfide
chambellan de ce dernier, nomm£ Mohammed Arab,
s'approcha du schah et lui dit bas k loreille : « Tenez-
vous en garde contre le fils qui a trahi son p6re, il
est capable de vous envoyer deux balles dans la t6te. »
Le schah, effray6 de cet avis, se retira pr£cipitamment
sous le pr£texte d'une douleur subite dans les en-
trailles. Le ministre M&ssoum et Hasanbeg excusirent
leur maitre , et reconduisirent le prince chez lui. En
rent rant, Tun des confidens de Bayezid jeta son bon-
net, et se roula lui-m6me par terre, en signe de dou-
leur pour les grands malheurs qu'il prevoyait ; il rap-
porta ensuite k Bayezid les paroles de Mohammed Arab
au schah, et, sur sa denonciation, le coupable eut im-
m6diatement la t&e tranch^e. Deux des complices de
Mohammed Arab, Aksak Seifeddin et Mir Alai Mes-
tan6 , craignant un sort pareil, se r&ugterent aupr£s
du 'schah, et lui dirent qu'ils avaient regu Tordre
d'ex&roter un attentat contre sa vie avec Mohammed
Arab. Le peuple s'attroupa et assi£gea en poussant des
cris de fureur le palais du prince; Lala Kodoz ras-
sembla le peu de serviteurs fideles qui lui restaient
pour en dtfendre Tentr^e; Bayezid, qui croyait sa
derntere heure venue, fit amener ses enfans, voulant
leg tuer de sa propre main plut6t que de les laisser
p£rir sous les coups des Strangers. Dans ce moment
se pr&ent&rent deux ministres persans que le schah
avait k charg6 de calmer Finqutetude du prince, de lui
presenter des excuses au sujet de l'£meute, et de lui
offrir des habits d'honneur et des sucreries. On feignit
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i5(i HISTOIRE
de s6vir contre les auteurs des troubles; mais d& ce
moment la resolution de s'emparer du prince et de ses
fils fut d£finitivement arr6t£e (15 djemazioul-ewwel
967—1 2 f&vrier 1 560). Quelques jours apr&, Bayezid
se rendit k un banquet sur l'invitation du schah ; mais
tout-a-coup les soldats d'un corps-de-garde, dfevant
lequel il passait, fondirent sur lui, tu&rent ses servi-
teurs qui cherchaient k le defendre, et s'empar&rent
de sa personne et de celle de ses fils. Le mdme jour,
plus de mille des gardes et soldats de Bayezid, qui
avaient montr£ par leurs paroles ou leurs actions le
d&ir de secourir leur maitre , furent ex£cut£s. N6an-
moins le schah continuait k faire presenter des ex-
cuses au prince, et alleguait la n£cessit6 de ces mea-
sures pour le mettre k l'abri des 6meutes et des injures
du peuple.
Peu de temps apr£s, arrivirent les envoy6s de Sou-
leiman et de S&im, avec des lettres et des pr6sens
pour le schah. L'extradition &ait parfaitement r£solue,
mais il fallait s'entendre au sujet des formes k ob-
server pour d£giriser la violation du serment que Tah-
masp avait fait au prince a son arrivee. La diplomatic
tortueuse des Persans ne fut pas long-temps a la re-
cherche d'un expedient : le schah convint de livrer le
prince, non aux ambassadeurs de Souleiman, mais a
des personnes que son fils Selim chargerait sp£ciale-
ment de cette mission. Tahmasp , en commettant ce
parjure qu'il cherchait a pallier par toutes sortes de
subterfuges, avait pour but de s'assurer d'avance
l'amitie du prince Selim , successeur pr&ompif du
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i3 7
\ieux Souleiman. La seconde ambassade du Sultan
quitta done Kazwin pour rapporter k son maitre cette
nouvelle proposition. Le gouverneur du Soulkadr
retourna k Meraasch , tandis que Hasan continua sa
route vers Constantinople l , accompagne de Beschret-
aga , Tenvoyi du schah k Selim ; il arriva k Kou-
tahia k l'instant oii Ton y recevait de Constantinople
la nouvelle que Souleiman avait nomm£ son petit-fib
Mourad, fils de Selim et &g6 de quinze ans , gouver-
neur de Magnesie (1 eT redjeb 968 — 18 mars 1561).
Beschretaga &ait accompagn£ de Dj&fer-Sultan, por-
teur des lettres des trois ministres per sans, le grand-
vizir Mftssoum-Khan Safewi, le g£n£ral en chef des
armies persanes Soundik-bei a et le grand-chancelier s
Schahkouli -Khalif£, pour les cinq vizirs de Soulei-
man, Roustem, Ali, Mohammed, Pertew et Ferhad 4 .
Ces lettres contenaient des remeigjemens pour les
pr£sens apportes par la derntere ambassade, et pro-
mettaient la prompte execution des ordres relalifs a
1 « Redierunt oratores, quos hie princeps ad Persam misit, Passa quidem
» Meraasensis ad suum Sangiacum diverlit, Hasanaga accelerare jussus
»magnis itineribus hue venit. » Rapport de Busbek du a5 aout i56i 9
Archives I. R. Deux jours apres (le 27 aout) , Busbek demauda son rappel
apres uo sejour de sept ans en Turquie.
» Kouroudji baschi. — 3 Itimadeddewlet.
4 Appendlct du Journal de Souleiman , no lxxii. Dans Ylnscha du def-
terdar Ibrahim, a la Bibliotheque I. R. d'Autriche, se trouve, sous le
no ccccxxrv, f. 3r, une autre lettre de Massoum-Mirza et d'Attallah,
chancelier, pour le vizir Mohammed Sokolli en particulier, avec la demande
d'interceder en faveur de Bayezid. La lettre de Selim au schah , contenant
la reponse a celle remise par Beschretaga, se trouve dans Ylnscha du reis-
efendi Sari Abdoullah, no 83.
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i3B HISTOIRE
Bayezid. Cependant les ministres du schah saisirent
cette occasion pour rappeler aux vizirs, en termes
mesur£s et polis, que, pendant vingt-neuf ans de
guerre , l'inimitte du Sultan avait fait £prouver k la
Perse de dures calamity ; que, dans le cours des six
derni&res annles de paix, quatre ambassadeurs avaient
&6 envoy£s k la Perse, sans qu'aucun deux eAt &6
distingu£ par un don quelconque , pas m6me par un
habit d'honneur ; que l'homme &ait Tesclave de la
bienfaisance ' ; que des paroles douces et aimables
&aient pr£f£rables aux paroles dures et rudes; qu'un
£l£phant se laissait mener par un cheveu * ; que l'af-
faire de Bayezid pouvait toe consid£r£e comme ter-
ming, et qu'il n'&ait pas nlcessaire de mettre des
troupes en mouvement, ce qui pourrait troubler la
tranquillity du pays , parce que, lorsque les monta-
gnes s'£branlent, les hommes s'enfuient. Dans leur
r£ponse, les vizirs s'6tendaient longuement sur le
crime de Bayezid, et pr&entaient cette r£volte d'un fils
contre son p&re comme le plus grand des forfaits; ils
rejetaient les moyens proposes pour pallier le parjure,
comme contraires k la promesse faite de l'extradition,
et terminaient en disant qu'apr&s raccomplissement
de cette mesure, le service serait r£compens6; que
les monarques donnaient bien des r£compeuses apris
un service rendu, mais non pas avant; que d'ailleurs
le Sultan avait prouv£ son amiti£ pour le schah, en
lui d£putant des ambassadeurs d'un rang plus 6lev6
■ Mt-ituan obeidoul-ihsan.
a Towwami ki jUi htmouji keschi.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN, tig
qu'il n'en avait encore accr£dit£ aupr£s d'aucune autre
puissance.
Munie de cette lettre, la troisteme ambassade de Sou-
leiman, compose du gouverneur de Wan, Khosrew-
Pascha, et du chambellan Sinan-Aga, prit le chemin
de Tebriz ; de son c6t6, S£lim envoya son tschaousch-
baschi, Aliaga f , avec la double quality d'atnbassa-
deur et de bourreau. A Tarriv^e des agens ottomans,
le schah ayant demand^ k Tun d'eux, Sinan-Aga, s'il
connaissait Bayezid, celui-ci r£pondit qu'il l'avait
connu dans sa jeunesse, qu'il ne l'avait pas vu depuis, '
mais qu'il esp£rait le reconnaitre h ses sourcils et h
ses yeux. Cette r^ponse fut le pr&exte d'un indigne
traitement pour le malheureux prince; ayant de le
livrer , le schah lui fit raser la barbe et les cheveux.
V6tu d'une veste et d'un surtout us6s, et le corps en-
tour6 d'une corde au lieu de ceinture , Bayezid fut
livr6 h Tenvoyd de S£lim, qui s'acquitta de sa cruelle
mission sur lui et ses quatre fils, dans la semaine-
sainte des Persans (1 5 moharrem 969 — 25 septembre
1561), pendant laquelle les schiis d^plorent la mort
de Housein par des chants lugubres et des repre-
sentations tragiques relatives a cet 6v£nement [xxvn].
i Dans la Collection du reis-efendi Sari Abdoullah, il est nomme Giilab
c'est-a-dire eau de rose. La lettre de Souleiman dont il &ait porteur, et qui
»e trouve dans cette Collection, no lxxxi, renferme deux cent cinquante
lignes rempties de vaines declamations. Le billet (uzkeri) de dix-sept lignes
(Collection de Sari Abdoullah, no lxxxii) , dans lequel Selim recommande
l'execution du prince (a laquelle, disait-il, rien ne s'opposait plus depuis
la mort de Koustem) a la complaisance du schah, merite d'autant plus d'etre
remarque.
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140 HISTOIRE
Cette fois la fin malheureuse des cinq princes otto-
mans fit oublier en Perse le spectacle donne k la na-
tion en souvenir de la bataille de Kerbela, et au lieu
des imprecations que le peuple a coutume d'adresser
dans ces jours k r assassin de Housein, des maledic-
tions s'£lev&rent au ciel contre les assassins des inno-
cens petit-fils de Soulelman '. Ainsi se termina la car-
rtere de Bayezid, auquel l'amitte de Roustem et
l'amour du peuple semblaient assurer la succession
au tr6ne. Cet infortun6 prince connaissait le prix des
sciences et cultiva la po£sie avec quelque talent [xxviii].
Son corps et ceux de ses fils furent envoy ^s k Siwas,
oii se trouve encore leur tombeau, k c6t6 de la route,
pr6s de la porte du nord.
Imm£diatement apr£s l'assassinat, le schah fit partir
pour Constantinople deux officiers de sa garde, Sinan-
Aga et Housein- Aga, avec une lettre pour Souleiman,
dans laquelle il lui annongait la mort de son fils et de
ses quatre petits-fils, et le f&licitait de cet 6v£nement
« qui fermerait la bouche k la m£disance , rendrait
aveugles les envieux , et r£jouirait tous ses amis. » II
lui mandait encore qu'au depart de Khosrew-Pascha
pour Constantinople, il lui enverrait Mohammed-Aga
Kourtschi Oustadjlu, et qu'il chargerait 6galement
Firouz et Tubetaga d'une mission pour S£lim. Dans
les lettres que ces derniers apporterent k Selim , ]e
schah s'&endait en longues felicitations, et employait
■ 11 n'y a?ait, dit PeUchewi, f. i33, que plaintes et pteurs a Kaiwin;
le peuple proferait mille injures contre les ambassadeurs et mille impreca-
tions contre le schah.
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DE L'liMPIRE OTTOMAN. 141
toutes les figures de la langue persane pour presenter
son double crime sous des couleurs favorables; il ter-
minal en exprimant Tespoir d'une reciprocity de ser-
vices. Oustadjlu arriva k Constantinople au commen-
cement du mois de novembre, et remit les lettres de
Tahmasp dans une audience solennelle. Quelques jours
apr£s, Souleiman passa a cheval, entour6 d'urie bril-
lante escorte , devant la demeure de l'ambassadeur
persan pour lui donner une opinion favorable de sa
sant£ '; ehfin, en recompense du meurtre des princes
du sang, le quatri&me vizir, Pertew-Pascha, apporta
k Kazabad trois cent mille pieces dor de la part de
Souleiman, et cent mille de la part de S£lim * ; de Ka-
zabad cette somme fat transferee k Kazwin par Elias-
beg, sandjak de Karahissar, et par Mahmoud-Aga,
chambellan de S£lim. Un cinquteme fils de Bayezid,
■ Busbek, dans son Rapport date des ties des Princes, 4 novembre 1S61
(Archives I. R.), dit : «Heri tandem venit expectatus orator Persae, quem
- valde honorific* exceperunt — prope aedes in quibus divertit orator tran-
» siturus, ut se Persia in equo ostendat, ut ea ratione si quam habent de ejus
» imbeciliiate opinionem deponant; etenim videtur ipsi quidquid tergiver-
»satur Persa, quidquid ei refragatur M. V. C. ex hoc fonte manare, quod
» per morbum et aetatem invalidus et rebus gerendis inutilis aestimaretur. »
> L'agent secret de Ferdinand ecrit du a 5 novembre i56i : « L'ambas-
» sador persiano ha affirmato a Alibassa, che se il Turco mandera al Persiano
» a5o some d'aspri (a5 millions) quali fanno scudi 5oo,ooo (par consequent
» 5o aspres 1 scudo). » D'apres ce Rapport, Fambassadeur n'a done de-
mand^ que 100,000 ducats de plus que Souleiman n'a envoyc. L'agent est
parfaitement d'accord avec les historiens ottomans a Tegard des excuses du
parjnre : «Soggionse 1' Ambassador, che avendo giurato il Persiano a Soltan
- Bayezit e alii suoi figliuoli , che non li dara mai al Gran Turco , saria
» bene che Soltan Selim mandasse un suo personnaggio, al quale il Persiauo
» consegnaria soltan Bayezit e li suoi figliuoli. »
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ifa HISTOIRE DE L EMPIRE OTTOMAN.
&g£ seulement de trois ans, qui se trouvait h Brousa,
avait &6 &rangl£ par ordre de Souleiman avant ses
fibres *. Les exemples des grands monarques qui ont
sacrifi£ leurs sentimens paternels k des vues politiques
sont malheureusement moins rares dans l'histoire des
empires de TOrient et m£me de l'Occident, qu'on n6
le d£sirerait dans Tinterft de l'humanit6. Chez les Par-
thes, le parricide, le fratricide et 1'infanticide &aient
un usage consacr£ par l'exemple des rois. Chez les
Romains, l'amour paternel laissait tomber la hache
r6publicaine de Brutus, et prononcer la sentence san-
guinaire de Manlius. Mithridate fit ex&uter plusieurs
de ses fils, et Philippe de Mac6doine empoisonna le
sien. Le schah Abbas-le-Grand fut egalement l'assassin
de son fils. La mort violente des fils de Constantin,
de Philippe II et autres, doit souiller k jamais les an-
nates de ces monarques. Dans la dynastie ottomane,
ce fut Mourad I er qui legua ce triste exemple k ses sue-
cesseurs , en immolant son fils Sawedji ; mais il fut
d^passe de beaucoup par Souleiman, qui ordonna
r execution des princes Moustafa et Bayezid avec leurs
enfans, et plongea deux fois sa main barbare dans le
sang de ses fils et petits-fils.
i « II Signor mandd strangolare il piccolo figlio di Bayezit di 3 anni in
» Brnssa. » Yoyez le Rapport de l'ambasiadeur venitien da 18 aoat x56a ,
dans les Archires I. R.
i
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LIVRE XXXIII.
Mort du grand-visir Roustem. — Son successeur Ali conclut la paix avec
l'ambassadeur autrichien Busbck. — L'aventurier Basilicus , prince de
MoWavie. — Ambassade de Ferdinand. — Negotiations avec le roi d'Es-
pagne el la republique deGene3. — Traits de commerce avec Florence. —
Manage des filles'de Selim. — Iuondations, aqueducs, construction de
plusieurs ponts. — Fails d'armes des marins ottomans Torghoud et Piale,
Piri-Reis et Sidi-Ali , dans la MeMiterranee et dans la mer de Plnde. —
Siege de Mehdiye par les Espagnols. — Conqiiete de Boudja, Oran, Be-
nesert et devastation de Mayorque. — La place de Djerbe conquise par
les Espagnols et reprise par Torghoud. — Entree triomphale de Tor-
ghoud a Constantinople. — Prise de Pinon de Velez par les Espagnols.
— Siege de Make. — Negotiations avec l'Empereur pour la ratification
de la paix. — Campagne de Szigeth. — Execution d'Arslan-Pascha. —
Mort de Zriny et de Souleiman.
Peu de temps avant la fin tragique de Bayezid , le
grand-vizir Roustem -Pascha, gendre de Soyleiman,
&ait mort d'une hydropisie * ; il avait vainement em-
ploy6 Tinfluence du pouvoir qu'il avait su conserver
m6me apr£s la mort de Roxelane , k dtfendre contre
les intrigues de S£lim rinfortune Bayezid que ne pu-
rent sauver les studies sympathies du peuple. Apr£s
Ibrahim, Roustem est celui des grands- vizirs du r&gne
■ Busbek, ep. IV : Jqu* extinctus imtcrcutea.
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144 HISTOIRE
de Souleiman qui m6rite le plus de fixer notre atten-
tion , car Mohammed Sokolli appartient moins k ce
rfegne qak ceux de Selim II et Mourad III \ L'admi-
nistration de Roustem embrasse un espace de quinze
ans, et ne fut interrompue que deux annees, lorsqu'a
la mort du prince Moustafa les murmures des janis-
saires rendirent n£cessaire son £loignement momen-
tane. II s'appliqua, pendant cette longue gestion des
affaires , a enrichir le tr&or du Sultan et le sien , ce
qu'il fit au grand detriment de I'll tat, en introduisant
le premier la venalit£ des charges, et en ouvrant ainsi
la porte a la corruption dans toutes les branches de
l'administration. Cependant son systeme financier et
administrate etait preferable k celui de ses successeurs,
soit k cause de la stability relative des fonctionnaires
dans leurs emplois, soit en raison du taux auquel on
confera ces emplois, lequel paraitra fort modique,
comparativement k celui que 1 'exigence croissante des
grands-vizirs imposa dans la suite. Ainsi il n'avait tax6 '
le gouvernement d'Egypte qu'& dix mille ducats, et
avait adopts pour les autres un tarif en rapport avec
leurs reyenus, quil connaissait parfaitement. Le beg-
lerbeg d'Erzeroum avait voulu reconnattre, par le don
dun cheval de race et de cinq mille ducats, sa nomi-
nation k ce gouvernement, Tun des moins lucratifs de
l'empire; mais Roustem n'accepta que le cheval et
i Roustem fut nomm6 grand-vizir en i544> destitae en i553, reprit tes
functions en i555, et les conserva josqu'a sa mort en i56i. C'est a tort
<ju'Ali a fixe* la date de sa premiere nomination a 947 (1^40), et celle de
ul mort a 966 (i558). Voyez Solakiade et Hadji Khalfa.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. ip
Irois mille ducats, et renvoya au beglerbeg le surplus
dela somme. C'est dans cet esprit d'avarice et d'£quite
qu'il demanda k Busbek des sommes d'argent en re-
tour de son entremise officieuse pour lui obtenir une
paix favorable, et qu'il les lui rendit ensuite parce qu'il
n'y eut pas de traits conclu. Le caract&e de Roustem
etait naturellement sombre et s£v£re, et la rudesse af-
fect^e de ses mani&es &ait en parfaite harmonie avec
les dispositions de son esprit f . Ghaque parole qui sor-
tait de sa bouche &ait un ordre; des poetes lui ont
mime reproch£ de navoir jamais ri. Roustem remplit
non settlement les caisses publiques, mais encore le
tresor particulier du Sultan, ceux du harem et des
domaines, et crea le fonds de reserve depose dans les
Sept-Tours. H y avait aux finances une chambre qui
portait cette inscription : Tresor amasse par les soins
<k Roustem. W laissa lui-m6me a sa mort une fortune
immense ; nul grand- vizir n'avait avant lui entasse au-
tant de richesses. Sa succession consistait en huit cent
quinze fermes dans la Roumilie et l'Anatolie. quatre
cent soixante-seize moulin? a eau, dix-sept cents es-
claves, deux mille neuf cents chevaux de bataille, onze
cent six chameaux a , cinq mille kaftans et habits d'hon-
neur richement brod£s, huit mille turbans 3 , onze
i Busbek, ep. IV : « Ruslenus semper a varus, semper sordid us, et qui
» primum utilitatis et pecuniae ratiooem duceret. — Rustenus semper Iristis,
»• semper atrox sua dicta pro ediclis habere volebat. »
» Ali compte mille cent six chameaux , qui formaient plus de cent quatrc-
vingt-trois rangs*
* Dies, qui en compte qualre-viogt mille, a mis un zero de irop, aiu*i
qu'a I'occasion des huit mille Korans. Vojcz ses Menwircs sur I'Asic.
T. VI. io
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146 HISTOIRE
cents bonnets en drap dor, deux mille neuf cents
cottes de-mailles ' , deux mille cuirasses, six cents
selles garnies d'argent , cinq cents autres incrustees
d'or et de pierres pr£cieuses , quinze cents casques
plaques d'argent, cent trente paires d'&riers en or a ,
sept cent soixante sabres orn£s de pierres pr£cieuses,
mille lances garnies d'argent *, huit cents korans, dont
cent trente enrichis de diamans, cinq mille volumes
de difl&rens ouvrages, soixante- dix -huit mille du-
cats , trente-deux pierres fines repr&entant une va-
leur de cent douze charges de mulet (c'est-i-dire onze
millions deux cent mille aspres) ; l'argent comptant
qu'on trouva chez lui fut estim£ k mille charges (cent
millions d'aspres, ou deux millions de ducats). Cepen-
dant Roustem avait employ^ une grande partie de sa
fortune en constructions d 'utility publique, et avait
fond£ une mosqu£e, une acad£mie et une cuisine pour
les pauvres k Constantinople, k Rousdjouk et k Hama.
Le second vizir, Ali, qui succeda k Roustem dans
la dignit6 de grand-vizir, avait un caract&re enttere-
ment oppos6 ; fl &ait affable , populaire et plein de
g£n£rosit£ 4 ; fils d'un Dalmate de Brazza, il avait fait
partie, avant la conversion de son p£re k l'islamisme,
de la lev£e forc6e de chr&iens qui se faisait annuelle-
• Sirh, coUes-de-mailles.
* Non pas cent *ingt etriers, comme le dit Diex, ce qui ne ferait que
soixante paires.
3 Des lances, et non pas des sabres, comme Ta traduit Diet.
4 « Dtoersi Bassaram Hally et Rusteni mores, dispar ingenium, *ita illi
• sine sordium suspicione, non metus, nee ejus comitas et facilitas apud
» principem reprehensionem baberet. » Busbek, ep. IV, p. 994.
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DE L'EMPIRE OTTOMAW. i{ 7
raent pour recruter les janissaires. Par la protection de
son parent, Khasta-Ali, kiays* du grand-vizir Ibrahim-
Pascha, il entra au serai, d'oii il sortit pour 6tre &ev6
au rang d'aga des janissaires; il fut ensuite investi
du gouvernement d'^gypte, avec le titre de vizir ou
pascha a trois queues. Son embonpoint l'avait fait sur-
nommer le Gras ou le Gros; mais la l£g6ret£ et l'ac-
tivit6 de son esprit contrastait siftgulterement avec son
ext^rieur. L'histoire des vfcirs rapporte plusieurs de
ses saillies, et entre autres celle qu'il adressa au molla
Hilali de Karaman. Celiii-ci &ait infatu£ de ses con-
naissances, et avait 1'habitude de dire que les autres
oul&nas ne savaient que les douze sciences [i] ensei-
gnees dans le cours deludes de l'acad&nie, tandis
qu'il en poss6dait pour sa part six fois autant; il pr£-
tendait m£me que les livres qu'il avait Merits pouvaient
remplir le monde entier. Cette outrecuidance fit dire
a Ali qu'il serait assez difficile au molla Hilali de rem-
plir l'univers c|e ses Merits ; mais que tout ce fatras [n]
"suffirait peut-6tre pour combler le canal de Galata,
de sorte qu'on pourrait le passer h pied sec; apr6s ce
bain de mer, ajouta-t-il, la science du molla, devenue
plus nette, pourrait 6tre profitable k la ville et a l'Etat. '
Par son affabilite et son habilete naturelle, qu'avaient
encore d£velopp£es l'&ge et l'exp£rience , Ali facilita
beaucoup les negotiations de l'ambassadeur Busbek l .
U se montra avec lui aussi pr£venant et aussi accom-
• « A quo tempore magna mihi intercessit cam eo Bassa (Ali) familiarilas
» perpetuaque de pace actio. » Ep. IV.
10*
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1 43 HISTOIRE
modant que Roustem avait &6 rude et opini&tre ! , an
point que souvent les Turcs se plaignaient d'6tre obli-
ges d'attendre dans l'antichambre la fin de ses confe-
rences avec l'ambassadeur. « Je sais bien, dit un jour
AH k Busbek qui le pressait de conclure la paix, que
mon vieux maitre a besoin de repos, mais le repos
n'est pas moins n^cessaire a l'empereur. Quand on
desire le salut et le bonheur des peuples, H ne faut
pas rappeler au combat le lion endormi. Les ames
des princes sont comme des miroirs : si ceux-ci r&16-
chissent les objets qu'on leur pr&ente, les ames des
princes refl&ent, pour ainsi dire, les insinuations de
leurs conseillers. De bons ministres doivent chercher k
conciKer tous les int&r&s, de mdme que les bons cui-
siniers cherchent k appr6ter des mets qui conviennent
a tous , et non pas seulement k tel ou tel convive. »
Ces dispositions amicales ne furent point changees par
la nouvelle d'une invasion de troupes' allemandes en
Moldavie, et la premiere annee des fonctions d'Ali
vit se terminer heureusement les negotiations par une
paix de huit ans. Le drogman de la Ported Ibrahimbeg,
qui, sous Roustem, avait perdu sa place sur les insti-
gations de Tenvoy6 frangais, Lavigne, et l'avait re-
couvr^e par 1' inter cession de Busbek, se rendit tres-
utile a l'ambassadeur en cette occasion. Busbek de-
manda son cong6 et Tenvoi du drogman Ibrahim k
Vienne pour soumettre les propositions de la Porte
1 « Quae Rustenus eolloquia mecum brevissima habere solilus erat Haly
» da bat operaro , tit in plures horas exteuderet et multa humanitate con-
» drret. » Ep. IV.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 149
k I'approbation de Fempereur ; avant son depart de'
Constantinople, il ne fut pas invito k un dtner de cere-
monie au diwan, parce que le traits n'avait pas encore
re$u la sanction de 1'empereur, mai&le grand-vizir lui
envoya un habit d'honneur,.un cheval arabe, de la
th^riaque d'Alexandrie et du baume de la Mecque
(17aoAt1562).
La ratification des conventions pass£es entre Busbek
et le grand- vizir Ali fut signee par 1'empereur, k Pra-
gue, le 1 w juin de la m£me ann£e ' . D'apr6s les clauses
du traits, Ferdinand consentait de nouveau au paie-
ment dun tribut annuel de trente mille ducats, et
renongait a toutes les places de Transylvanie; il pro-
mettait en outre de s'entendre avec le fils de la reine
Isabelle a regard des places hongroises. Melchior Ba-
lassa, Nicolas Bathory et les autres vassaux qui etaienl
rentr& ou qui rentreraient par la suite dans leur de-
voir envers Ferdinand, &aient compris dans la paix ,
dont Tobservation serait enjointe aux sandjaks, voi6-
vodes, begs et autres chefs pr£pos£s k la garde des
frontteres. Toute transgression du traits serait s£v6-
rement r£prim£e; ceux qui s'empareraient d'une place
k force arm£e seraient punis de mort , et la place en
outre imm&liatement rendue. Chacune des deux puis-
sances £tait libre de fortifier les places situ£es sur son
territoire, mais non pas celles appartenant k l'autre.
Contrairement k r£quit£, la place de Tata ne fut pas
» Declaraiio et confirmatio condkionum pads turn Turchis. Prague,
i juin 1 56a. Archives I. R.
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i5o HISTOIRE
rendue; mais du moins il fat express&nent stipule que
les Turcs ne profiteraient pas de cette position pour
inquirer les eh&teaux et les paysa&s de l'autre c6t6 du
Danube. Ceux qui avaient pay6 jusque-I& des imp6ts
aux deux parties devaient continuer k les payer, mais
sans que de part ni d'autre on ptit leur imposer une
augmentation. Des commissaires devaient 6tre nom-
m6s pour r£gler les diffSrends qui pourraient nattre
relativement k la demarcation des frontteres; les bri-
gands devaient 6tre living k la justice, les duels d£-
fendus, et 1'agresseur puni sur la d&ionciation de l'ad-
versaire. Enfin les ambassadeurs, charges d'affaires et
dengues de l'empereur, auraient le droit d'entretenir
autant d'interpr&es que bon leur semblerait. C'est a
ces conditions que la paix fut renouvel^e pour huit
ans [in]. Le drogman de la Porte, Ibrahim (le ren£gat
polonais Strazzeni), qui s'attribuait le titre de premier
interpr&te de l'empereur ', se rendit avec Busbek k
Francfort, ou il remit k Ferdinand, avec ses lettres
de cr&mce, la ratification du Sultan , et lui offrit
quatre chameaux , un cheval , une botte de baume ,
un tapis, une paire d'&riers plaques d'argent et deux
coupes d'agate \ L'acte ottoman diff£rait en plu-
sieurs points tr&-essentiels de Facte r£dig£ en latin. Le
■ Summut interpret.
» Istuanfi, 1. XII, dit : «Relatio sive sermo legati pacifici, Ebraimi Stro-
» tscbenii, Poloni, a Solimano Turcarum imperatore ex Constantinopoli ad
» Cbristianorum Cesarean Ferdinandum ejus nominis primum destinati,
» apud Franeofortum Masni coiam statibus Imperii ibidem pnesentibus lm-
» gua Slavonica recitatus, anno i56a die a 7 novembris. •» Jppendice du
Rapport de Busbek.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i5i
Sultan n'avait compris dans le tndt6 que Balassa, Ba-
thory , ceux des barons qui &aient d^jk rentals sous
la domination de Ferdinand , et non ceux qui y ren-
treraient par la suite; il avait aussi stipute l'extradi-
tion des r£fugi&, tandis que dans Facte imperial il
n'&ait question que des rebelles et des brigands, et
avait egalement &endu le traits aux vo&vodes de Mol-
davie et de Valachie , dont Ferdinand n'avait fait au-
cune mention. Enfin il n'y prenait pas, comme l'a-
vait fait l'empereur, ToUigation de cesser les travaux
de fortification. L'article concemant les paysans 6tait
coogu en des termes qui laissaieut supposer que les
propri&aires de Szigeth ne pouvaient rien exiger de
leurs paysans k Tolna et Mohacz. Le drogman pr6-
senta ensuite un m£moire dans lequel on demandait
quatre-vingt-dix mille ducats comme repr&entant
rarri£r6 de trois ann^es de tribut, et la restitution de
quelques prisoimiers turcs, d£sign£s par la veuve de
Roustem, en ^change de l'Espagnol don Alvaro,
qu on avait mis en liberty k Constantinople '. L'em-
pereur &uda ces diverses demandes en disant qu'il
enverrait sa r£ponse au Sultan par un ambassadeur ;
qu on ferait des recherches k regard des prisonniers ,
mais que les erreurs commises dans Facte turc de-
vaient avant tout &re rectifies. L'article des quatre-
vingt-dix mille ducats, pour lequel Busbek s'&ait k
i « Ibrahimui orator Torcicus exhibet Casaree Majestati binat littaras
» Prindpis sui, una credentiales, altera confirmatorwe pacts, que collate
» cam his, qua* majestas CsMarea misit, discrepant. » Act* originml, dans
let Archives I. R.
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i*2 HISTOIRE
peu pr£s engag£, fut pass£ sous silence '. Le sejour
d'Ibrahim k Francfort dura treize jours, pendant les-
quels il fut regu deux fois par 1'empereur; k sa se-
conde audience, il regut la promesse dun present sem-
blable k celui qu'on avait donn£ a son pr6d£cesseur
Younizbeg. Les riponses k ses lettres de creance et
a ses notes lui furenl exp^diees de Spire a .
A l'£poque de cette mission du ren£gat Ibrahim ,
arriva k Constantinople une ambassade persane en-
voy6e par le schah , en retour de celle que le Sultan
avait chargee de lui apporter les quatre cent mille du-
cats , salaire de l'assassinat du prince Bayezid. Cette
ambassade n'offrit que de modiques pr^sens , savoir :
sept tapis de peu de valeur, un exemplairc du Ko-
ran , cinq grands plats de porcelaine et une boite de
b£zoard 3 . Les presens que le grand-vizir fit en son
propre nom k l'ambassadeur furent bien plus bril-
lans; il lui donna deux habits de drap dor, six vases
et six plats d'argent, deux beaux chevaux, qui k eux
seuls dlpassaient d£j& la valeur totale des presens of-
ferts par celui-ci , et rev&it vingt-cinq personnes de
» Responsum Ferdinandl ad Ihrahimum ddo. i3 decemBer i562, et
Summartum relationis Busbequii, aux Archives I. R.
» Ferdinandus ad Alb er turn de Wyss, le i3 decembre i56«, dale de
Spire, aux Archives I. R. Ferdinand remercie la Porte de la mise en liberie
de don Alvaro, et se plaint de ce qu'on exige pour la d&ivrance de Bebek
la cession de quelques-uns de ses chateaux a Zapolya. IJExemptum res-
ponse pro Ibrahimo serenissimi principis Turtarum Summo interprele se
trottve aux Archives I. R.
3 « Una scatola di lacrime di cervo. » Rapport de I'agent secret de Fer-
dinand a Constantinople , aux Archives I. R.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i53
sa suite de kaftans broctes d or f . Le Sultan admit l'en-
voy£ du scfaah k une audience solennelle et lui fit re-
mettre un nombre 6gal de v&emens d'honneur, de
vases d'argent et de chevaux , en y ajoutant la somme
de cent cinquante mille aspres '. Les instructions dp
Tambassadeur lui prescrivaient de demander : 1 ° des
secours contre les Turkomans et. les Ouzbegs; 2° le
libre passage des pterins persans qui se rendraient a
la Mecque, par le territoire turc; 3° la permission
pour le p&re de 1'ambassadeur , qui faisait partie de
sa suite , de passer le reste de ses jours k Jerusalem;
4° 1'extradition des cinq fils du khan de Bidlis, qui
s'etaient soustraits au pouvoir du schah, en se r^fu-
giant k Bagdad. La premiere de ces demandes fut re-
fus£e, par la raison que la religion ne permettait pas
d'assister les Persans, qui etaient des Schiis (hereti-
ques), contre les Ouzbegs (Sunnis, comme les Otto-
mans)^ & la seconde, on objecta que les pterins per-
sans pouvaient 6tre piltes par les Arabes, circonstance
qui pourrait amener une nouvelle rupture de la pah ;
la troisi&me £choua encore comme- con traire aux usa-
ges; on accorda seulement la quatri&ne, parce que
ni la religion ni les usages ne s'y opposaient, et que
1'extradition du prince Bayezid avait donne droit de
pr&endre a une sorte de reciprocity.
Peu de temps avant Tarriv^e de Fambassadeur
■ m a5 gentiluomini tuoi , una veate d'oro per cadono et al detto ambas-
- sador uo baril et un Oramin d'argento , e 6 vasi e 6 piatti d'argento. »
Voyex Archives I. R.
a « i5o,ooo aspri, che fanno (re mille scudi. » Yoyea le meme Rapport.
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i54 HISTOIRE
persan, on avait c616br6 k Constantinople le mariage de
trois princesses, petites-filles de Souleiman : les deux
premieres, &g£es de seize ans , &aient filles de S£lim,
el la troisi&me, du prince Moustafa; celle-ci £pousa
Abdoulkerim, aga des janissaires; Fune des filles de
S£lim , appel£e Esmakhan, fut marine au second vizir ,
Mohammed Sokolli, l'autre au kapitan-pascha Pial6.
C'est k l'occasion de ces deux derniers manages qu'on
se dispensa d'offiir k Busbek le diner de c£r£monie
usit6 au depart d'un ambassadeur ; on pr&exta que
la fille de Souleiman, veuve de Roustem, occup£e du
manage de ses nieces, ne permettait k aucun membre
de la famille de s'£loigner l . Cette princesse av ait com-
battu autant que Roustem son £poux les pretentions de
S6Km& la succession; mais, en appretiant l'ex^cution
de Bayezid , elle demanda k son p&re la permission
de se retirer k l'ancien serai, et die se ^concilia avec
l'h&itier pr£somptif a . Me engagea ensuite le grand*
vizir Ali k une grande expedition maritime contre
Malte, et promit d'armer k ses frais quatre cents ga-
lires ; mais Souleiman et S61im s'oppos6rent k ce pro-
jet pour ne pas priver la jeune mariee de la presence
de son £poux 3 . Le grand-vizir n'aimait pas le kapitan-
■ « Praodlum excusantes, quod Rustemi uxor apparandis nuptiis neplium
» e fratre Selimo muliebri more sit iutenta, nullum cognatorum avocari pa-
» teretur. » Rapport de Busbek du 17 aout i56a, aux Archives I. R.
• « La moglie di Rustem ha ricercato il Bassa di far, che il signor suo
» padre la rieeri net Seragho e di reconcikarla col Selimo. » Rapport de
l'ambassadeur veuitien, aux Archives 1. R.
3 « S. Selim per sodisfar la figliuola mariUla col capitano del mar pensa
» col Sr. non mandar fuor rarmata , e il Bassa per Fodio portato ad etso
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i55
pascha, k qui il voulaft enlever sa place pour la dormer
k Faga des janissaires ; mais Pial6 etait trop bien dabli
dans la faveur du Sultan pour concevoir des craintes
s&ieuses k cet £gard. Souleiman, d&jk profond&nent
affiig6 de la re volte, de la fuite et de l'ex£cution de
Bayezid, ne l&ait pas moins des debauches de S&im;
il lui ^crivit une lettre dans laqilelle il 1'exhortait k
changer de conduite, k s'abstenir de vin , et enfin k
mieux observer les pr£ceptes du Koran. S61im , au
lieu de suivre ce conseil , destitua Tenvoy^ de son pire,
pour le punir du message dont il avait &6 porteur '.
Souleiman, irrite de la resistance de son fils, fit mettre
k mort Mourad-Tschelebi , qui passait pour le com-
pagnon des debauches du prince; il chargea deux
kapidji-baschis (cbambellans) de faire part k S£lim de
cette execution, et de transmettre k Mourad, fils de
S£lim, l'ordre de partir sans d^lai pour son sandjak.
S61im d6vora sa colore, et feignit une soumission par-
faite k la volont£ de son p&re \- Mourad demanda k son
beau-fr&re, le kapitan-pascha, une galore, k l'effet de
se rendre dans son gouvernement ; mais Souleiman ne
permit d'envoyer qu une galiote.
» captano dice, eke consigliera al Sr. far capitano l'aga dei Janiceri. -
Rapport de l'ambassadeur venitien, aux Archives L R.
* « Il Sgr. mando a esortar S. Selimo di non bever vino, e Selimo ha
- private di grado quello, che li ha fatto l'Ambassata. » Rapport de l'ambas-
sadeur venitien du 14 novembre i56a, aux Archives I. R.
• « Mando il Sgr. due Capigi informar Seiim haver fctto tagliar la testa a
» Murad Celebi, e Selimo dissimulo il dispiacer che ne presse — professa
» per li Capigi obediensa al padre. » Rapport de l'ambassadeur venitien du
mois de decembre i56a.
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i56 HISTOIKE
Le 30 novembre 1569, Ibrahim, ambassadeur de
la Porte a Francfort , assista au couronnement de
Maximilien, roi des Romains. Dans la premiere moi-
tte de cette ann£e, pendant les negotiations de Busbek
k Constantinople, et m£me apr&s le depart de ce der-
nier, les hostilites avaient continue entre plusieurs
commandans des frontieres, hongrois et ottomans.
Roustem, beglerbeg d'Ofen, et le sandjak de Temes-
war, avaient attaqu6 avec leurs forces r^unies les
villes de Szathmar et Nem&hi , separ^es par la ri-
viere Szamos ; mais forces de se retirer devant leurs
vaillans dtfenseurs Melchior Balassa et Zay, ils s'6-
taient born£s k les incendier. Jean Balassa , voulant
op^rer une diversion dans les forces de l'ennemi en
faveur de son fr6re enferm£ k Szathmar, marcha avec
quatre mille fantassins et mille cavaliers sur Sz£c-
seny , dont Mahmoud avait remis le commandement
k Saswar, afin de se rendre )ui-m£me au siege de
Szathmar. Saswar envoya en toute hftte le capitaine
Beschir (odabaschi) k Fulek , avec la mission de de-
mander des secours k Hasan Prodovich. Celui-ci ac-
courut avec la promptitude de ]'6clair a la t&e de
huit cent dix cavaliers, et battit Balassa, auquel il fit
6prouver une perte de prfes de huit cents hommes.
Jean Grusich, commandant de Garpon, Thomas Palfy
et d'autres officiers , furent faits prisonniers et en-
voy& au Sultan [iv] (14 juillet 1562). Cette dtfaite
des Hongrois fut compens£e par la reprise du chftteau
d'Hegyesd dans le palatinat de Szalad sur le lac Ba-
laton , et par la victoire de Zriny sur Arslanbeg de-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i5 7
vant Szigeth. Le palatin Nadasdy et Ekhard, comte de
Salm, commandant de Raab et fils de l'immortel de-
fenseur de Vienne, firent prisonniers les quatre-vingts
hommes composant la garnison du chateau d'He-
gyesd, et en detruisirent de fond en comble les ou-
vrages. Nicolas Zriny passa la Drave entre Babocsa
et Temes avec mille cavaliers et deux mille fantassins,
pour an£antir les travaux de fortification commences
k Monoslo, de l'autre c6t6 de la Drave, par Arslan-
beg, fils de Yahya-Pascha et fr6re du beg de Szec-
seny. Les Ottomans , quoique superieurs en nombre,
furent saisis d'une terreur panique a Tarriv^e de
Zriny, et s'enfturent; Arslan lui-m6me, apr£s avoir
crev£ un cheval , ne parvint qu'avec peine k se sau-
ver, et fat oblige de laisser a l'ennemi ses harnais
en or, ses chiens de chasse, quatre faucons et deux
canons de gros calibre. Le stege de Szathmar avait
&6 abandonn6 faute de vivres. Le vieux Malkodsch
mourut peu de temps apr6s, et son corps envelopp£
d'une serpilli&re fat transport^ par ses soldats k Her-
zegovine, ou il fat depose dans le tombeau de ses
peres. Vers le m&ne temps, le gouverneur d'Ofen
mourut de la peste dans cette ville, et fat remplac£
par Arslan-Pascha, sandjak de Poschega. Une affaire
funeste pour les Hongrois fat celle du brave Bebek .
qui donna dans un piege que lui avait tendu Hasan
Prodovich, sandjak de Fulek. Un ren£gat, qui de
mahom&an s etait fait chr&ien, avait ensuite repris le
turban, et qui, dans cette circonstance, pr&endit vou-
loir embrasser de nouveau la foi chr&ienne, fat Tins-
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1 58 HISTOIKE
trument doot se serrtt Hasan pour atttrer le chef hon-
grois dans son embuscade. Ce fiit sur les conseils de
ce ren£gat que Bebek, Sarkoezy et Magdczy, accom-
pagn& de Rakoczy, Hangony, Bokry et Peikesch f
s'engag£rent dans la for6t du chateau de Balogh si-
tu6 non loin de la riviere Rima; tout d*un coup ils
se virent entour£s de troupes turques et obliges de se
rendre k discretion. Sarkoezy, qui avait arr&£ , au m£-
pris du droit des gens, Mohammed-le-Long, capitaine
des cavaliers de Pesth, ainsi que le tschaousch He-
dayet , ren£gat saxon de Transylvanie, et qui les avait
vendus k Bebek en ^change dli ch&teau de Boldogh,
fut mal traits par Hasan lui-m6me k coups de massue,
et expira dans les plus aflreux tourmens; Magocsy
fut mis en liberty moyennant une rangon de quatorze
mille ducats, dont lejuge de Debreczin garantit le
paiement; Rakoczy et Hangony furent rel&ches pour
la modique somme de deux mille £cus. Mais Bebek
fut emmen£ prisonnier a Constantinople, bien qu'il
eftt fait donner la liberty k Mohammed-le-Long'et au
tschaousch Hedayet. Hasan ne reconnut cet acte de
gen£rosit£, qu'en lui accordant la d£livrance de Bo-
kry, et en lui permettant de charger ce dernier d'un
message pour sa femme et ses enfans; il rendit le
jeune Peikesch k Magocsy pour un casque d'or. Be-
bek arriva k Constantinople un mois avant le depart
de Busbek ; on ltd assigna d'abord pour domicile la
maison du troisi&me drogman , nomm£ Ferhad , qui
avait &£ m£l£ k toutes les affaires de Transylvanie ,
et qui prenait le titre de tr&s-humble drogman, plus
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i5q
modeste k coup-sOr que celui de drogman supreme '.
Ce fut en vain que Gaspar Baches , ambassadeur de
Transylvanie, ipterc&la pour Bebek; lui-ro&ne rejeta
la condition qu'on lui imposait de changer de religion.
II fut done enferro£ k la Tour-Noire du chateau d'Asie
(1 3 octobre 1 562) \ Hasan, sandjak de Fiilek, essay a,
mais sans succ£s, de s'einparer du comte Nicolas
Zriny. La fortification de Monoslo fut continu^e; les
martoloses pousserent leurs incursions jusqu'en Sty-
rie, et emmenerent prisonniers des habitans de Lue-
tenberg 3 .
Pendant ces d£m61& sur les fronti&res de Hongrie,
des 6v£nemens d'une plus grande importance se pas-
saient en Moldavia. Le prince regnant de ce pays,
Alexandre, en fut expulse par un aventurier, qui,
d'abord soutenu secr&ement par Ferdinand , fioit par
&re publiquement recpnnu par la Porte. Jean Basi-
licus, M k Candie dun capitaine de navire, fut adopts
par Jacques Heraclides, qui s'&ait arrog6 le titre de
despote de Samos, Paros et autres ties de la mer Eg£e.
i H until bmus interpret, par opposition a summus interpret.
* m 1 3 oct. finito Divano meridiauo fere tempore Georgius Bebecus ad
» casteilom maris oigri deductns ; TransyWanas litteratus (Ferens Diack) nil
» intentatam reliquit, ut kominem liberaret et ad Transylvani fidem cum
» omnibus castellis traduceret. » Rapport d'Albert de Wyss du 27 octobre
1562. Le charge d'affaires de Transylvanie voulut persuader a la Porte que,
si Bebek etait grade, Pereny, Gabriel et d'autres barons bongrois abandon-
neraient le parti de I'empereur.
3 Rapport d'Albert de Wyss, de Constantinople, avec la note adressee a
Ali-Pascha le 17 septenibre i56a, aux Archives privees I. R. : 18 jun'ri
Mtriolossi captivos a Luetenberg abduxere.
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160 HISTOIKE
En vertu de cette adoption, l'empereur Charles-Quint
non settlement reconnut Basilicus comme despote de
Samos et Paros (possessions cependant sur lesquelles
lui-mgme n'avait aucun droit) , mais il le fit encore
palatin et lui confera le pouvoir de nommer des doc-
teurs, des protonotaires et des poetes couronnes. Ba-
silicus entretenait une correspondance avec Melanch-
thon ; il publia k Wittemberg un ouyrage historique
en latin, et 61eva, avec le consentement de rempe-
reur, quelques poetes au rang de poetes couronnes.
II se rendit ensuite, par la Pologne, en Moldavie,
ou il se fit passer d'abord pour un parent de la prin-
cesseRoxandra, Spouse du prince regnant, puis pour
un descendant des Hteraclides, anciemie dynastie de
princes moldaves , en produisant , k l'appui de cette
pretention, un arbre genealogique qu'il avait lui-
mdme fabriqu£. Cependant, forc6 de s'enfuir, il se
refugia en Pologne chez Albert Lasczky, palatin de
Siradie, qui lui avanga dix mille ducats pour lever des
troupes. II £choua dans sa premiere tentative contre
le trdne de Moldavie, mais il r£ussit dans la seconde,
qui fut soutenue secr&ement par Ferdinand (1 no-
vembre 1 562) '. Accompagni de seize cents cavaliers,
il parvint, apr&s quelques escarmouches , k expulser
le votevode Alexandre. Le grand -vizir Ali-Pascha
reprocha cette invasion a Busbek , et le Sultan sen
plaignit par une lettre autographe, que le tschaousch
Mohammed porta k Prague , et k laquelle Ferdinand
i « Litterae Caesaris ad Jacobum Basilicum Heraclidem , despotam Sami,
Faros ct Moldavia; voivodam. Pragae, 3 februarii, h aux Archives I. R.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 161
r^pondit par d'autres recriminations. Alexandre s'&aft
r£fugi6 k Constantinople; mais il y etait veriu les mains
vides, tandis que les envoy & de son adversaire s'6-
taient trouves en mesure d'offrir k la Porte quarante
mille ducats au lieu du tribut ordinaire de trente
mille ; gr&ce k cette augmentation , Basilicus fut re-
connu votevode de la Moldavie, et investi par un
tschaousch ottoman du drapeau et du glaive, de la
massue et du kouka. Bientdt apr6s, un autre tscha-
ousch lui apporta l'ordre de cong^dier une partie des
troupes &rang£res, et de les r&luire k trois cents lan-
ders hongrois et k trois cents gardes-du-corps. Le
voievode se soumit de si bonne gr&ce k cet ordre ,
qu'il fut soupgonn^ de Tavoir lui-m&ne provoqu£.
Mais cette mesure ne contribua pas a le rendre popu-
laire , non plus que les exactions sans nombre qu'il
commit pour remplir son tr6sor, et les innovations
avec lesquelles il bouleversa les anciennes coutumes
du pays; c'est ainsi qu'il prit un grand cand&abre
d argent k un couvent pour en faire de la monnaie ,
qu'il imposa aux habitans une contribution d'un ducat
par t&e, qu'il apporta des restrictions k l'usageg6-
neralement regu du divorce et punit la bigamie de
mort; d'un autre cdt£, il appela les Allemands Som-
mer et Gaspard Peucer, gendre de Melanchthon ,
pour organiser une foole, et fonda une biblioth&que.
II fit r^pandre le bruit par ses affides qu'au matin
du jour de Noel , trois anges portant trois couronnes
d'or lui etaient apparus, comrae presage de sa do-
mination future sur trois royaumes (la Moldavie, la
T. VI. II
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ifo HISTOIRE
Valachie et la Transylvanie) ; lui-m6me se mit sur
la t6te une couronne d'or et changea son nom de
Jacques contre celui d'lvan , plus populaire en Mol-
davia Cependant les boyards, revenus de leur effroi,
complotferent 1'assassinat des soldats hongrois et des
colons allemands, appetes malgr6 eux dans leur pays,
lis reussirerit k foire partir les premiers pour la fron-
tifere, en r£pandant la fausse nouvelle d'une invasion
des Tatares; les seconds, pour la plupart ouvriers
tir& du fond de I'Allemagne , furent simultanement
assassin£s par tout le pays. La fille naturelle du des-
pote fut tu6e dans son berceau, sa m&re re!6gu£e dans
un couvent; les femmes des partisans divan, qui
s'&aient enferm£es avec lui a Suczawa, furent toutes
massacrees ; des Arm6niennes , coupables seulement
d'avoir prte pour son salut, furent poursuivies avec
un acharnement implacable. Les trois chefs princi-
paux des conjures , Bernowsky, Moczog et Stroitza,
conf6r6rent la couronne a un certain Tomza , ancien
inspecteur des magasins du despote. Celui-ci, crai-
gnantlarivalit£ deD£m&riusWischnjewetzki, hetman
des cosaques , l'attira dans le pays , le fit prisonnier
aihsi que son lieutenant Piasek , et les envoya tous
deux k Constantinople, oft ils p£rirent sur le gibet. Au
troisteme mois du stege de Suczawa, un sandjak turc
arriva avec cinq cents hommes, et somma le despote
de se rendre, en lui off rant un sauf-conduit. Bien qu'il
se mlfi&t de cette proposition, Ivan se vit contraint de
Taccepter par lea demonstrations menagantes de la
garnison de la place. Apres avoir en peu de mots
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DE L' EMPIRE OTTOMAN. iG5
reproch^ & ses troupes leur Iftche parjure, il monta a
cheval et sortit de la vflle. Conduit devant Tomza ,
celui-ci le tua d'un coup de massue ( 9 novembre
1563). Tomza parut d'abord vouloir faire gr&ce k
Demetrius, fils de l'usurpateur; il l'admit a sa table,
et lui ofirit le pain coup£ en forme de croix , ce qui
passait pour un gage d'amiti£ chez les Valaques. Tou-
tefois , le lendemain , il lui fit £chancrer la narine
droite par le bourreau, en disant que c'&ait I'usage
du pays a 1'egard dfcs parens des princes d&r6n£s,
pour leur dter tout espoir k leur succession. Cepen-
dant Tomza ne put obtenir d'etre confirm^ par la
Porte dans la principaut£ de Valachie , et l'ancien
voi£vode , Alexandre, recouvra son tr6ne et la pro-
tection du Sultan \
Un an s'etait £coul£ depuis la conclusion du traits
de paix entre Ferdinand et la Porte; mais les incur-
sions des Turcs sur la fronttere n'avaient pas cessi ,
et les difficult^, relatives aux differences de redaction
entre les deux actes turc et latin, n'avaient encore eu
aucune solution. Herbard d'Auersberg, qui trois ans
auparavant avait r£pondu a une irruption des Turcs
en Carniole par une invasion sur le territoire ennemi,
dans laquelle il avait tu6 les chefs ottomans Deli Mo-
hammed et Hasan , et enlev£ deux mille moutons ,
s'avanga alors jusqu'k Costenoviz k la poursuite d'un
corps d&ach6 de Turcs, qui se retira avec une perte
» Gratiani et Sigler, et tfapres eux Engel, ffistoire de la MoldavU,
p. »i 1 ; mais Engel se trorope en disant que Tomza avait demand** sa con-
firmation a Rouslem , qui etait mort un an auparavant.
11*
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i64 HISTOIKE
de quelques centaines d'hommes. Ferdinand dbargea
le secretaire d'ambassade Albert de Wyss f reste k
Constantinople apr& le depart de Busbek, de faire
des representations relativement k ces violations de
la paix et aux changemens introduits dans le texte du
traits turc. Souleiman, de son cdt6, ne voyait pas
sans colore que la somme promise sous le titre de pre-
sent n'eftt pas encore &6 envoyie; mais eDe fut enfin
apport£e par Tinternonce , Paul Palyna f , et Albert
de Wyss fut accredit^ aupr&s de la Porte en qualite
d'ambassadeur resident. Un mois apr6s son arriv^e
(12 octobre 1563), Palyna remit une partie du pre-
sent en un diwan solennel , et fut cong£di£ dans les
premiers jours du mois suivant (8 novembre 1 563),
apres avoir regu du grand- vizir un acte amende, qu'il
n'accepta toutefois que sous la reserve de le soumettre
& l'examen de Tempereur. II y avait entre les deux
souverains de nombreuses contestations sur l'£galit£
de leurs droits de corvee en Hongrie , et sur la mise
en liberty des prisonniers. Le grand* vizir exigeait que
Tempereur £mp6ch&t dorenavant les devastations des
heiduques de Szigeth, Erlau & Gyula; quant aux pri-
sonniers hongrois Bebek, Thomas Paly et Crusich,
il refusait d'aborder la question de leur mise en li-
berty, avantqu'on etit rempli les conditions stipul&s
t « Credentiales pro Alberto de Wyss (Prague, 17 juillet i563) ut munus
- honorarium deferat, dein munere oratoris ibi fungatur, — qui tempore
» Bosbequi in ilia legatkrae desudavit; quare omissa in prasens cura alium
- mittendi hoc onus obeundae legationis illi imposuimus, partem vero mu-
» neris Pal) nee ferendum dedimtis* »» Archives I. R.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i65
pour la rangon des Espagnols Alvaro et Sanchio, et
qu'on eAt acquitte le solde de la somme promise dans
le traits. Albert de Wyss fut charg6 en m&ne temps
de nlgocier une paix de huit k dix ans poor Philippe II
d'Espagne, car les ouvertores ant&ieures de Franchi,
de Khios et de Vargas &aient demeur^es sans r&ultat.
Ali-Pascha consentit k cette nouvelle demande, sous
la condition que le reste de la somme con venue serait
d'abord vers& Un colonel frangais , Corse de nais-
sance , apporta des lettres du roi de France et de la
reine, et demanda l'assistance d'une flotte ottomane
pour soumettre llle de Corse et la rendre tributaire
de la Porte J ; mais il ne r6ussit pas dans sa mission ,
non plus qu'un agent genois qui vint proposer un
traits avec la r£publique de Ggnes; le diwan d£clara
evasivement k ce dernier que la r£publique devait k
cet effet accr£diter un ptenipotentiaire. L'envoyi de
Florence eut plus de &ucc£s dans ses q^gociations ,
qui amen&rent le r£nouvellement de la capitulation
di]k conclue avec Bayezid II et S£lim I er . D'apr£s
les clauses de ce traits , Florence jouissait dans tous
les Etats du Sultan des m£mes droits que Venise ;
elle avait le privilege du commerce des soies avec
Brousa a ; ses n£gocians dans les Etats ottomans ne
> « Pietro Corso colondlo del re di Francia e stalo da Hali Bassa, e gli
»> ha dato una lettera di credenza del re di Francia et l'altra di quella Sereu.
- Regina — domanda l'armata del Gran Turco per haver Corsica, promette
•• delto Corso di pagar tributo al Gran Turco. »
» L'acte entier se troova dans I'appandice du Journal de Soulelman,
no Lin.
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166 U1STOIKE
dependaient que de la juridiction de consuls nommes
par elle, et la libre navigation de la Mer-Noire &ait
accord^e k son pavilion. A cette £poque, les atnbas-
sades polonaises ^laient tres-f r^quentes ; apr&s celle
de Brzozowski \ le Sultan avait regu dans son camp
d'Amassia celle de Simon , staroste de Lemberg ;
I'annee suivante, Yazlowiecky se pr£senta aussi en
quality d'ambassadeur, pour entamer des negotiations
par rapport aux affaires de Valachie et aux droits de
p&turage. La mission de Nicolas Brzeski, qui eut lieu
deux aris plus tard, avait le m&ne but, ainsi que celle
de Nicolas Sieniawski; ce dernier et Hasanbeg furent
enfin charges de r£gler les questions en litige [v]. Le
tschaousch Ali fut envdye k Venise pour terminer
quelques differends entre le Sultan et la rlpublique \
Les rapports avec les cours de 1'Asie n'etaient pas
moios fr&piens : nous mentionnerons notamment l'am-
bassade du roi indien d'Assi, qui demanda des secoure
d'artillerie contre les Portugais 3 . Enfin, tandis qu une
deputation des principaux habitans d' Alger sollicitait
le rappel du gouverneur ', une autre deputation de
i L'an ]554«
* Dans les Scriuure turehesche, parmt les Aetes vdnitiens aux Archives I.
R n on troute trois lettres de Souleiman an doge; la premiere i Lamenti det
Signor contra il Console di Lepanto et altri ; la seconde : Comniandamento
m Ali Ciaus per la ricuperazion detii uomini tolti da CortogU; la troisieme
eat un recu de vmgt-cinq mille ducats, que Barbarigo avait stipules pour 1»
galere prise a Valona, date du i silkide 97 1 (ifi63).
3 « Giunto dair Indie ambassadore del Re d'Assi domanda artigleria per
» difendersi dai Portogesi. » Rapport de I'ambassadeur wnitien du la juiu
4 « Li Turchi d'Algir banno maudato a Constantinopoli quel Re come
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 167
Tunis implorait des secours poor conqufrir la Go-
letta*.
Pendant l'^quinoxe d'automne de la m6me ann£e
(SO septembre 1 563), les environs de Constantinople
furent submerges par la plus terrible inondation dont
l'histoire ottoroane fasse mention ; on ne peut la com-
parer qua celle qui faillit aneantir, quatre socles au-
par a van t, l'arm^e des Crois£s, commands par le roi
Conrad. Le jour de cet ev&iement, Souleiman s'&ait
rendu de bonne heure k une chasse dans la valine de
Khalkalidlr^ ; il se trouvait pr£cisement sur les bords
de la Propontide , non loin du jardin du defterdar
Iskender-Tschelebi, pendu sur le march£ de Bagdad,
quand &lata un orage affreux qui se d£chafna pendant
vingt-quatre heures avec une £gale fureur. Dans eel
espace de temps, soiiante-quatorze maisons ou edifices
publics furent frapp£s de la foudre. Les eaux du M&as
et de TAthyras, deux petites rivieres qui se jettent prds
de Tschekme^je dans la baie du mdme bom, s'&e-
v&rent k une hauteur prodigieuse et inond£rent tous
les environs. Les flots se precipitant de la valine de
Khalkalid£r£ avec la rapidity d une fl&che , et bientdt
le palais d'Iskender-Tschelebi, ou Souleiraan s'etait
r£fugi£, se trouva entitlement cern6 et isote, comme
- pruaoniere. » Rapport de l'ambassadeur venitien, juin i56i . « Ritorna hi
m Algir il Re col fratello Seriff , che ando domandar ajuto al Sgr. per sciac-
» ciar il fratello. • Rapport de l'arabassadeur venitien du 18 aout i56a.
> « L*amba»sadore di Tunis per nome del Be domanda l'armata per tar
» fimpresa della Golelta. » Rapport da l'ambassadeur venitien du mois de
juin i56i, tux Archive* 1. R.
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1 68 ■ , HiSTOIRE
line lie, ail milieu dun fleuve furieux. T)6jk leseaux
pen&raient de toutes parts, et le prince allait in fail-
liblement p£rir, lorsqu'il fut heureusement secouru
par un homme aux formes at hi Cliques, qui le porta
sur ses Spaules dans la soupente sup^rieure d'un ap-
partement [vi] , oii il resta captif jusqu'& la fin de
l'inondation. Le terrible Element, que les obstacles
ne faisaient qu'irriter, renversa tout dans sa course
effren£e : min£s dans leur base, les aqueducs, con-
struits naguere par Souleiman, furent menaces d'une
ruine prochaine; celui de Maglawa s^croula m&ne
entitlement. Dans la belle valine des Eaux-Douces, k
Kiaghadkhan^, les platanes deracines furent emport£s
comme de lagers roseaux; tout en un mot fut balaye,
fermes, jardins et maisons de plaisance. Les Eaux-
Douces (deux petites riviferes, appetees dans l'antiquit6
Cydaris et Barbyses), entraln^rent vers le faubourg
d'Eyoub lesruines qu'elles amoncelaient sur leur pas-
sage; elles couvrirent momentan&nent le tombeau du
porte-£tendard du Proph&e , et p&ietr&rent jusque
dans linterieur de la mosqu£e qui lui est consacr^e ,
et que sa position sur une petite colline semblait mettre
k Tabri d'un semblable accident. Ni le port de Con-
stantinople, ni les rives du Bosphore, ne purent dr-
reter les flots qui s y pr^cipitaient de toutes parts, et
qui envahirent bient6t le rivage dans toute son eten-
due; les Edifices les plus solidement construits furent
les seuls qui resist^rent k leur choc impetueux. Les
ponts du grand et du petit Tschekmedj£ , ceux de
Haramider£ et de Silivri furent d&ruits. Enfin, pen-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 169
dant une semaine enttere, les eaux de la mer restferent
troubles et sans saveur saline [vii]. Afin de rem&lier,
autant qu'tt etait en son pouvoir, aux suites de cette
inondation , Souleiman assigna un demi-million de
ducats pour relever ou Sparer les aqueducs min£s ou
d&ruits, et pour construire k Tschekmedje un pont de
pierre capable de roister k Tavenir k un semblable
d£sastre.
Du temps de S&im I er , des constructions analogues
avaient &£ entreprises sous la direction de Sofi-Ali, qui
du grade de g£n£ral des armuriers avail &6 promu k
l'emploi de grand- chambellan, et ensuite k celui de
grand-maitre de la cour de Selim. Au moyen de cent
dix tuyaux en plomb (bute) de trois pouces de diam&~
tre, Sofi avait amene une grande quantity deau k Con-
stantinople; il avait ete r£compens£ de ce travail, qui
devait avoir de si heureux resultats pour le bien-£tre
public, par le gouvernement de Mer&sch. Mais k der-
ntere inondation ayant d&ruit ces utiles &ablissemens,
Souleiman sentit la n£cessit6 d'en fonder de nou-
veaux, et, dans. cette vue, il fit ex&mter au-dedans et
au-dehors de Constantinople des ouvrages qui sont
encore aujourd'htii Tun des plus beaux ornemens de
cette ville. Les deux grands aqueducs, Aleves par
Adrien et Constan tin. puis restaures par Justinien et
- Valens, sont encore de nos jours d&sign£s,*par les
voyageurs europ^ens, sous les noms de ces deux der-
niers empereurs. L'aqueduc de Justinien puise ses
eaux dans quatre vastes bassins , situes au village de
Belgrade dans la vallee d'Ewhadeddin, et entrelenus
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170 UISTOIRE
par la petite rividre d'Hydralis qui descend de Bel-
grade ; celui de Valens est alimente par les bassins
des villages de Khawasskoei et de Khalkali. Andro-
nicus le Comn£ne avait r^uni les eaux n^cessaires au
premier de ces aqueducs, en faisant construire des
reservoirs et une tour (aujourd'hui Pyrgas et Burgas).
Les reservoirs de Faqueduc de Valens, k Khawasskoei
et Khalkali, avaient &6 construits par Mohammed II.
Par les soins de Souleiman , ces deux reservoirs fu-
rent restaurs, et regurent en outre les eaux de la
ferme de Touroundjkoei, conduites sur des arches qui
se succ&dent d'une colline a F autre jusque dans Fin-
terieur de la ville. Le bassin fonde par Andronicus
fut aussi r6pare, ainsi que les deux aqueducs qui por-
tent les noms d'Ouzoun kemer (l'aqueduc long) et de
Guseldje kemer (le bel aqueduc) , et qui d£chargent
dans le bassin d'Andronicus les eaux du reservoir
d'Ewhadeddin ou Eiwad, en passant par le village
de Pelikhori. Justinien avait eieve un pont de pierre
sur le Meias et FAthyras, prds de leur embouchure
dans la mer; mais dans la trente-deuxidme ann£e de
son r&gne, ce pont fut renverse par un tremblement
de terre , qui detruisit presqu'entterement Regium ,
aujourd'hui Tschekmedj6. L'empereur Basile de Ma-
cedome avait egalement b&ti un aqueduc en bois, qui
fut r&luit en cendres par Krumos le Bulgare , sous
L6on FArmenien, avec tons les edifices sitae* entre le
Pont-d'Or et Regium. Souleiman ordonna h Farchi-
tecte Sinan de r&ablir le pont de Tschekmedje si
important pour Fapprovisionnement et les communi-
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DE L'EMPIHE OTTOMAN. 171
cations de la capital e, et lui recommanda de le faire
aussi solide que beau, et k l'lpreuve des causes qui
l'avaient ant£rieurement d&ruit , le feu , leau et les
tremblemens de tore. Sinan se mit k Toeuvre, et com-
menga la construction d'un pont, cintr£ en dosd'^ne,
qui ne fut termini que sous le r&gne de S£lim II ,
mais qui depuis lors a resist^ aux inondations et aux
temples de la mer voisine.
Les historiens ottomans d&rivent, immediatement
apris l'inondation dont nous venous de parler, le
stege de Malte, qui n'eut lieu que deux ans plus tard,
mais dont les preparatifs commencdrent des cette
epoque dans les arsenaux et dans le port de Constan-
tinople. Avant de les suivre dans ce r£cit , nous met-
trons sous les yeux du lecteur les principales expedi-
tions maritimes qui pr£c£d&rent le siege de Malte , et
les noms des amiraux qui s'y sign&l£rent depuis la
mort de Khaireddin-Barberousse.
Apres la mort du kapitan-pascha Sinan, qui suivit
de pr& la destitution de son frere, le grand -vizir
Roustem-Pascha, le commandement des flottes otto-
manes fut conf&r£ au Croate Pial6. Sorti du harem
imperial, ou il avait occup£ la place de chambellan,
Piate ne regut d'abord, avec le rang d'amiral, que le
titre de sandjakbeg; ce fut seulement quatre ans plus
tard qu'il obtint celui de beglerbeg. Aprte la conqu&e
de Djerb6 et d'autres faits d'armes que nous rappor-
terons plus loin, Piate se crut en droit de demander
la dignity de vizir k trois queues, mais Souleiman la
lui refusa dans la crainte de porter, par un avance-
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i7* H1ST01RE
ment qui lui semblait trop rapide, un coup fatal & I'au-
torit£ et au respect dont il voulait entourer la haute
dignite du vizirat D^sireux toutefois delui t&noigner
son auguste faveur, il lui donna pour epouse sa pe-
tite-fille, la sultane Genher, fille du prince S61im, pr6-
ferant r£compenser son m6rite par la main dune prin-
cesse du sang imperial , plutdt que d'dter au vizirat
son prestige par des promotions trop faciles et trop
repetees * . Ce ne fut que cinq ans plus tard que Piale
fut &ev6 au rang de Pascfaa a trois queues. A la mort
du kapitan-pascha , l'ordre hifrarchique appelait au
commandement sup&ieur des forces maritimes le
beglerbeg d 7 Alger ; c'est ainsi que Hasan avait eu la
survivance du titre de son p6re Khaireddin-Barbe-
rousse; mais il dut bientdt le ceder k Salih-Reis, cor-
saire dont nous avons cit^ le nom ayec honneur &
l'occasion de la conqu&e de Tunis. N6 au pied du,
mont Ida, dans un village de la plaine de Troie, Salih-
Reis avait pu dans sa jeunesse entendre raconter les
illustres combats des Grecs et des Troyens, et puiser
au sein de cette terre classique de la valeur cette ar-
deur des combats qui le plaga dans la suite au rang
des plus intrepides corsaires. Comme lui, Torghoud,
que les historiens europeens nomment generalement
Dragut, etait fils dun chr&ien, sujet de la Porte, ha-
bitant un village du district Seroulout , dans le san-
< Hadji Khalfa, Hisioire des guerres maritimes, f. 36, dit ace aujet avec
autant de franchise que de verite : « De nos jours on prodigue telleinent les
~»digniles, qu'un vizir ne jouit pas meme de Tautorite qu'un saudjakbe^
>• possedait autrefois, *
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i 7 3
djak de Mentesch£. Fort jeune encore, Torghoud se
fit remarquer par sa force k la lutte et son habilete
a tirer de Tare; il prit du service sur un navire cor-
saire, et f at bientdt nomm£ capitaine d'une com-
pagnie de soldats marins. Plus tard il tenta avec treize
navires une entreprise contre 1'fle de Corse; mais
battu et fait prisonnier par Doria , il se vit enchain^
comme esclave k la galere du vainqueur. D dut sa
liberty a Tarriv^e devant Genes de Barberousse, qui
mena$ait de d^vaster tout le littoral de la r£publi-
que; k peine libre, et second^ par Khaireddin, Tor-
ghoud reparut sur mer avec une escadre de vingt-
cinq navires , jetant l^pouvante sur les c6tes et sur
les b&timens des puissances chr&iennes. II fit une des-
cente dans le golfe de Naples . surprit Castellamare,
et enleva de ce fort et des villages envirpnnans un
immense butin {1 548). Peu de temps apr£s , il s'fem-
para d'une galore des chevaliers de Malte, qui portait
a Tripoli une somme de soixante-dix mille ducats.
Dans une rencontre avec le kapitan Sinan-Pascha ,
Torghoud s'attira lestime de 1'amiral ottoman par la
superiority avec laquelle son escadre dirigea un feu
des mieux nourris. Aussi , consid£rant les importans
services que le Sultan pourrait tirer de l'habilet£ de
Torghoud, le kapitan l'engagea k se rendre k Con-
stantinople, pour y faire, comme Khaireddin Barbe-
rousse, acte de soumission k la Porte. Torghoud suivit
ce conseil, et vint avec huit gal&res jeter Tancre dans
le port de la capitate. Souleiman lui fit un gracieux
accueil , et rinvestit du sandjak de Karli-Hi. Les ca-
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i 7 4 H1STOIKE
pitaines des sept autres galeres, tous corsaires re-
nomm£s ' , regurent chacun une solde journalise de
soixante-dix a quatre-vingts aspres, et le commande-
ment d'un vaisseau de guerre avec le privilege d'61e-
ver un fanal fcur la poupe.
A peine d£livr6 de sa captivity k G6nes, Torghoud
songea a conqu£rir des possessions permanentes sur
les c6tes d'Afrique. II chassa les Espagnols de Monas-
tir et Souza , villes autrefois comprises dans le terri-
toire de Tunis, et s'empara par trahison de la forte-
resse de Mehdiye, situ& sur une langue de terre entre
Tunis et Tripoli. Les historiens europ£ens ont con-
fondu celte place tant6t avec Afrikiya, tant6t avec
Aphrodisium : les orientalistes eux-m6mes Tont prise
pour Mohadia a .
Mehdiy6, qui domine pat* sa position une vaste
Vendue du Kttoral d'Afrique, joue un si grand r61e
dans les r&ats des annalistes d'Orient et d'Occident,
que nous croyons devoir donner ici une esquisse sue-
cincte de son histoire ant£rieure et de celle de son
fondateur. Cette ville fut construite vers Tann^e 304
de Th^gire (916) par le Syrien Obeidollah Hasan
el-Mehdi , novateur et usurpateur doublement dan-
gereux par son audace et son imposture. Obeidollah
i Hadji Rhalfa , 1. c. , f. 3 1 , les nomme Ghazi Moustafa , Ouloudj AH
(Ochiale, renegat calabrois), Hasan Kelli, Mohammed Reis, Sandjakdar
Reis, Deli Djafer et Kara Kasi.
» Le savant numismate et orientaliste, le comte Ottavio Castiglioni, dans
son Memoire geograpkique et numUmatique sur la partie oriental* de la
Barbaric, Milan, i8a6, a suffisamment prouye qu'Afrikiya, Aphrodisium
et Mehdiye (qu'il appelle Mahdia) sont trois villes difterentes.
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. i 7 5
fiit d'abord emprisonn6 k Sedjelmesa par ordre du
khalife Moktadir pour avoir usurp^ le litre de des-
cendant de la maison d'AIi ; mais &ant parvenu k
tromper la vigilance des agens de Moktadir et k re-
couvrer sa liberty, il s'arrogea, sous le nom de Mehdi,
douzi&ne imam [vin] , qui n'est attendu qu'k la fin
du monde, le titre de khalife, opposant ses preten-
tions aux droits des khalifes des maisons d'Abbas et
d'Ommia. Par cette heureuse usurpation , el-Mehdi
se fit le chef d'une troisieme famille de khalifes . les
Fatimites : nouvelle dynastie qui , Pendant sa puis-
sance sur les c6tes nord de TAfrique, devint bien-
tdt menagante pour les khalifes de Bagdad et d'Es-
pagne, et jeta la terreur parmi les princes musulmans,
en accordant sa protection aux successeurs de Hasan
Ben Sabah, le fondateur de l'ordre si redoutable des
Assassins. Mehdiy£ fut la capitale du nouvel em-
pire et la residence de l'usurpateur el-Mehdi. Cent
soixante-dix ans aprfes sa fondation, elle fut prise,
ainsi que la ville voisine d'Afrikiya , par les G£nois
et les troupes de Pise (481 — 1088); Temim, prince
de la famille Sein Sanhadja , les racheta a prix dor
(553 — 1158). Conquise de nouveau par le Nor-
mand Guillaume Roger, roi de Sicile, Mehdiy6 fut
reprise deux ans apres par Abdol-Moumin AH el-
Koufi, second prince de la dynastie des Mowahi-
touns (unitaires) ; cette dynastie r£gnait dans l'Anda-
lusi et le Moghreb, et son fondateur Tomrout avait,
Si l'exemple du chef des Fatimites , adopts le nom
de Mehdi, et b&ti dans l'Afrique occidentale une
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176 UISTOIRE
ville qu'il appela Mehdiy6 '. Abdol-Moumin II, fils
d'Abdol-Moumin I er , restitua k Guillanme II de Sicile
(576 — 1180) Mehdiy6 dans le voisinage de Tunis,
conquise par son pfere Guillaume I er . Vingt-un ans
plus tard, Nassir- Mohammed, second successeur
d'Abdol-Moumin II, l'unitaire a , expulsa de la m&ne
ville le prince arabe de Mayorque , de la famille des
Moulesimins (les envebppis) , appel£s aussi Morabi-
thins 3 , c'est-&-dire les Robothins dans la guerre
sainte; trois ans apr6s, cette ville tomba avec Tunis
sous la domination de la famille des Beni-Hafss , qui
devint de jour en jour plus puissante (605 — 1206).
Apr&s avoir soumis Tile de Djerb6 et lui avoir impose
untribut, Alphonsed'Aragon, roide Naples, sepr£-
senta devant les murs de Mehdiy6; mais voyant la
force de sa position et la solidity de ses fortifications,
il renonga k son projet de conqu&e 4 et se retira. Le
stege tent£ par 1'Espagnol Pedro Navarra, amiral de
Ferdinand-le-Catholique, n'eut pas plus de succes
(925 — 1 51 9). Enfin, sous le r£gne de Moulei-Hasan,
Mehdiye, occup^e d abord par Ouroudj, fr6re ain6 de
t Nokhbetet-tewarikh. La Synonymique dTakouti n'admet que ces deux
Mebdiy£, Tune a l'est et l'autre a l'ouest de l'Afrique. Les Tables chronolo-
giques de Hadji Khalfa placent la fondalion de la troisieme ville de ce nom
en l'annee 593 (1196).
* Soq aTeul s'appelait, d'apres le NohJibeiet-iewarikh, Yakoub Ibn (fils)
Yousouf, et son pere Yousouf Ibn Abdol-Moumin, et non pas Yousouf
Aboti (pere) Yakoub.
3 Ce nom a £te lransforme par les historiens europeens en Moravides.
4 La tentative de ce siege se trouve confirmee dans le comment a ire de
Stella, de Jphrodisio expugnato.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i 77
Khaireddin-Barberousse , tomba ensuite au pouvoir
du capitaine corsaire Torghoud.
D6s qu'il fut en possession de ce refuge, Torghoud
reparut en mer avec une escadre de quarante-sept
vaisseaux, et menaga de ses devastations les c6tes d'Es-
pagne, de Sicily et de Naples. L'empereur Charles-
Quint resolut de chasser de son repaire l'intrepide
pirale : a cet efFet, il envoya sur les c6tes d'Afrique
une flotte commandee par Andrea Doria , et montee
par des troupes espagnoles sous les ordres du ge-
neral Toledo. Ces forces se portferent d'abord devant
Monastir, dont la garnison, vivement pressee par
terre et par mer, se rendit a discretion (mai 1530) :
douze cents prisonniers et d'abondantes munitions de
guerre et de bouche furent la proie des vainqueurs.
Cependant Torghoud s'&ait dirig6 vers l'Espagne ; il
ravagea les c6tes d' Alicante et de Valence, et se ren-
dit ensuite dans les iles Baleares ; mais ayant 6t6 re-
pousse avec perte par les habitans de Polentia, il
repartit pour TAfrique, et trouvant k son retour Meh-
diy6 investie par terre et par mer, il se retira dans
File de Djerb6. Vers la fin du mois de juin 1 530, Tar-
m£e de Charles-Quint fut renforc^e par larrivee de
Vega, vice-roi de Sicile, qui vint prendre part au
stege de Mehdiy6 : elle trouva un autre secours non
moins important dans une heureuse alliance avec le
prince Sidi-Aarif , chef de quinze mille Arabes, qui
s'etait affranchi, dans son district de Kairewan, de la
suzerainete du prince de Tunis. Vega avait parmi les
personnes de sa suite l'ancien prince de Tunis, Moulei-
T. VI. 12
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i 7 8 HISTOIRE
Hasan, r&abli aur son tr6ne par Charles-Quint, et
d£tr6n£ par son fils Hamida, qui avait pouss£ la bar-
barie jusqu'b priver son p&re de la vue ; Hamida avait
fait subir le m6me traitement k un sch&if , que le vice-
roi de Sidle avait aussi amene avec lui de la Goletta.
Ce fut par leur entremise que Vega ouvrit avec Sidi-
Aarif des negotiations qui furent conduites avec tant
d'habilet£, que, d&s le huiti&ne jour apr^s l'arrivfe
de la flotte imp£riale , deux mille cinq cents Arabes
se rendirent au camp Chretien avec une quantite de
hestiaux suffisante pour la nourriture de Tarm^e. Le
malheureuxMouIei'-Hasan, vingt-deuxieme souverain
de la dynastie des Beni-Hafss , mourut peu de temps
apres : sur la demande de Sidi-Aarif , il fut enterr6 k
Kairewan. Depuis un mois, le si£ge de Mehdiy6 se
poursuivait avec autant d'ardeur dans Tattaque que
d'opini&trete dans la defense; les deux murs de la
place , d'une hauteur de douze toises et separes par
un intervalle de vingt-cinq pieds , avaient r^siste au
feu le mieux nourri. Ce fut alors que Torghoud es-
saya de jeter un secours dans la ville. A la tete de
huit cents chasseurs , deux cents cavaliers et cinq mille
Maures , il parut soudainement dans une for&t d'oli-
viers voisine de la ville , ou les asstegeans s'approvi-
sionnaient de bois, et attaqua a Timproviste le vice-roi
de Sicile, le commandant des chevaliers de Rhodes,
Sanglo, et le commandant de la Goletta, Louis Vargas,
qui p£rit dans le combat avec plusieurs des siens. Nean-
moins les Arabes furent repousses sur tous les points;
Us se retirfrent dans la for6t et retourn&rent de la dans
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DE L'EMPniE OTTOMAN. i 7f)
File de DjerW. Ce fut un &hec fatal a l'autorit6 du
corsaire sur les tribus arabes de la c6te : elles se de-
tachment de lui chaque jour da vantage, et plus que
jamais dies pourvurent le camp des Chretiens d'une
grande abondance de vivres. Vers le m£me temps ,
Doria amena de la Sicile des approvisionnemens con-
siderables en munitions de guerre et de bouche. L'at-
taque recomraenga d£s-lors avec une nouvelle vigueur.
Le 28 ao&t, on mit en batterie, a une distance de deux
cents pas, vingt-deux pieces de gros calibre, qui, sur
les sept mille boulets jet£s dans la place pendant la*
dcur£e du stege, en lancerent a elles seules quatre mille
huit cents contre les deux tours les mieux fortifies.
Le 10 septenibre, de larges brfeches se trouvant ou-
Tertes, les Espstgnols mont£rent k l'assaut : les deux
tours furent emport&s apr&s un combat vif , mais de
eourte durle, et la ville se rendit k discretion. Sept
mille prisonniers furent distribu^s entre les Yatn-
queurs k titre de bntin : le vice-roi de Sicile accorda
soixante-cKx blesses au capitaine genois Cicala pour la
rangon de son fils rctenu dans les fers par Torghoud.
Quincce jours plus tard, la flotte cinglak vers TEurope,
*pr& avoir laiss6 une garnison suffisante dans la place
conquise. Un court espace de temps s'&ait k peine
4coul6, que Doria vint relancer le corsaire dans sa
dera&re retraite, Hie de Djerb6, et jeter Tancre pr&s
de rembouchure d'un canal appele Alkantarat, c'est-
i-dire le Pont; mais Torghoud profita de la nuit pour
dresser des batteries dont le feu obligea l'amiral $
s'eloigner et a se mettre hors de la port^e du canon.
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180 HISTOIRE
Doria attendait des renforts de Sicile avec lesquels il
se proposait d'attaqqer Tile sur tous les points a la fois.
Torghoud penetra ce prqjet ; et dans sa situation cri-
tique, il eut recours k un expedient souvent employ^
dans Fantiquit£ par les Grecs et d'autres peuples , et
dont nous avons vu les Turcs se servir avec bonheur
an si£ge de Constantinople sous Mohammed II [ix]. A'
l'aide des Equipages et des esclaves de ses gateres, il fit
construire une route en planches £paisses et enduites
<Tune mati&re grasse; sur laquelle les vaisseaux furent
4rain£s, aumoyen de roulettes, depuis le port jusqu'a
l'extr&nite oppos^e de Tile, tandis qu'un feu conti-
nuel des batteries trompait la vigilance de Tescadre
espagnole stationnee devant le port d'Alkantarat. Doria
ne fut instruit du succ6s de cette manoeuvre que par
la capture, effectu£e presque sous ses yeux, du grand
vaisseau envoy 6 de Sicile pour renforcer son es-
cadre *. ' >
Malgr6 la paix qui existait entre la Porte et Venise,
Torghoud ay ant captur6,*coul6 bas ou incendte plu-
sieurs vaisseaux venitiens, se vit mande a Constanti-
nople pour y rendre compte de cette violation du
traile. Roustem-Pascha n'aurait pas manque de saisir
cette occasion de nuire au corsaire, qui, dejJi £Iev£au
rang de sandjak de Karli-Hi , lui paraissait un dan-
gereux rival pour son frfere le kapitan-pascha Sinan.
Mais Torghoud previt le sort qui l'attendait, s'il obeis-
« Vertot, 11. XI, et Hadji Kkalfa, His to ire des guerres maritime*. Au
lieu de Doria, cet auteur uomme par erreur Cicala, auquel il donne le titre
tj'amiral venitkn.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 181
sait; et, pour s'y soustraire, il s'enfuit avec ses gal&res
a Maroc, ou il passa plusieurs annees dans cet etat de
rebellion a l'autorit£ du Sultan. Souleiman, qui avait
besoin de son aide contre les chevaliers de Malte, lui
pardonna cependant le passe ; il lui promit m£me de
l'investir du gouvernement de Tripoli s'il faisait la
conqu&e de cette ville, et lui envoya un sabre incrust£
dor et un Koran, pour lui garantir sa parole. Lenom
de Tripoli , affect^ par les Romains et les Byzantins
au territoire sku£ sur la c6te nord de 1' Afrique, entre
la grande et la petite Syrte, fut donne plus tard par
les Arabes a la ville fondle sur les ruines de Tan-
cienne Geraffa. Tripoli devint la capitale des princes
de la dynastie Aghleb, lorsque le chef de cette famille,
Ibrahim Ben Aghleb, nomm£ par Haroun al-Raschid
gouverneur d'Afrikiya (184 — 800), «e d£clara ind6-
pendant etfondala domination de sa maison; ellefut
ensuite successivement la residence de la famille Seir
et celle des khalifes fatemites de 1'Egypte. Quand les
Normands eurent purg6 les cdtes de l'ltalie de la pre-
sence des Arabes, ils portfirent leurs armes victo-
rieuses jusqu'en Afrique (541 — 1146), ou ils sou-
mirent toute la c6te , depuis Tripoli jusqu'k Tunis ;
maisils ne conservferent pas long-temps leur con-
qu&e , et Tripoli tomba , ainsi que Mehdiy6 , entre les
mains des XJnitaires , sous le regne de Guillaume I eT .
Au d^clin de la puissance des XJnitaires , Tripoli de-
vint une possession des princes de Tunis de la famille
des Beni-Hafes, jusqu'k T^poque ou Eboubekr Abou-
Yaya Ammar fonda dans cette ville la dynastie des
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18a HISTOIRE
Beni-Ammar(724 — 1323), qui cotnpta sept princes
dans une duree de soixante-dix-sept ans [x]. Pendant
leur rfegne , les Genois s'empardrent de la ville par
surprise; mais elle retomba bient6t sous la domination
des Beni-Ammars , qui la possederent jusqu'au mo-
ment oii le dernier prince de cette dynastie, Abdoul-
Wahid ', en fut chasse par le seizteme prince de la
famille des Beni-Hafss, Abou-Faris \ Dans la se-
conde moiti£ du quinzieme si&cle , elle fut conquise
par les Espagnols sous le r&gne de Ferdinand-le-Ca-
tholique, et son successeur, Charles-Quint, en oonfia
4a garde aux chevaliers de Saint- Jean. Cest a ces der-
niers que Torghoud 3 Tenleva avec le secours de Sinan-
Pascha. Ainsi, apres avoir ob&, depuis sa fondation,
k cinq dynasties musulmanes (Beni-Aghled, Sei'r,
Fatemin , Ammar et Hafss) , et a quatre dominateurs
francs (les Normands, les Genois, les Espagnols et
les chevaliers de Saint-Jean), la ville de Tripoli, en
Afrique, fut rang^e sous la domination des Ottomans
par le sandjakbeg Torghoud. Malgr6 la promesse
formelle du Suitan , le gouvernement de cette ville,
dont Tinvestiture devait 6tre donn£e au corsaire pour
> Le nom entier de ee prince comprend en mdme temps les quatre noms
de sea predecesseurs, savoir : Abdoulwahid Ben Eboubekr, Ben Mohammed,
Ben Sabet, Ben Kasi, Amadeddin. Le Nokhbetei-tewarikli.
.* D'apres le Nokhbeiet-tewankli, le nom entier de ce prince est Abou-
Fariz, Abdoulaziz Ibni Eboui Abbas Ahmed.
B Voyez les details dans Vertot, I. XI. Flassan, 1. 1, p. 4o3, justifie, par
le temoignage du graud-mailre Jean Otaeada, l'ambassadeur francais Ara-
mont, accuse par les historiens contetnporains de n'avoir pas contribue a la
reddilion de Tripoli.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i85
prix de sa conqu&e , fut confcr& , par te kaphan Si-
nan, k l'eunuque Mourad-Aga. Furieux de celte per-
fidie, Torghoud faisait deja hisser les voiles pour di-
riger sa course vers l'ouest, entrainant k sa suite la
plupart desautres na vires, lorsque Sman-Pascha par*
vint k le retenir par d'habiles promesses. II se ren-
dit a Constantinople , et en sortit l'ann£e suivante ,
avec une escadre de quarante-cinq galeres, pour
ravager les cdtes de Naples et de Sicile. Descendu
eu Corse , il mit le siege devant Bastia , capitate de
Tile , battit en rase campagne quatre mille cavaliers et
trois mille fantassins accourus au secours des assieges
(7 ramazan 961 — 17 aoAt 1553), et fit accepter par
les habitans une capitulation qui leur assurait la libre
retraite. Mais cette capitulation ne fut pas observe ;
sur toute ia population, quarante-sept hommes seu-
lement conservfrent leur liberte, les sept mille autre*
lurent emmenes en esclavage. En revenant a Con-
stantinople, Torghoud descendit sur les c6tes d'Al-
banie pour r^duire le chef rebelle des Khimariotes ,
Ahmedbeg; apres cette courte expedition, il se rem-
barqua et arriva dans la capitale avec un riche butin.
Souleiman, qui trouvait dans le corsaire Torghoud un
digne successeur de son brave kapitan-pascha Khair-
eddin Barberousse , ^tait dispose a le nommer gou-
verneur de Tripoli , ainsi qu il lui en avait donn6 sa
parole; mais sur les instances de Roustem-Pascha,
qui lui representa que Torghoud ne pourrait s'as-
sujettir a un service constant aupres de la Porte , il
se borna a le confirmer dans son titre de sandjak de
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184 HISTOIRE
Karli-Ili, province dont Ie gouvernement comprenait
une partie des fles, c'est-k-dire des fiefs maritimes.
Mais un jour que le Sultan sortait a cheval du serai",
Torghoud saisit cette occasion de lui presenter ses
hom mages, et de lui demander, en embrassant Tetrier
imperial , le gouvernement qui lui avait et6 promis.
Fidele enfin a sa parole , Souleiman acc£da a cette
demande, et lui confera le titre de beglerbeg de Tri-
poli [xi]. Peu de temps apres, mourut le kapitan-
pascha Sinan [xn].
Tandis qu'a la grande terreur du commerce euro-
peen, Pial6, Torghoud et Salih r£gnaient dans la mer
Eg£e et sillonnaient en tous sens la Mediterran^e, les
kapitans Piri-Reis, Mourad et Sidi-Ali promenaient le
pavilion ottoman dans les golfes d'Arabie et de Perse
et dans la mer de llnde. Se errant m£me d'autres li-
tres a la celebrite , ils augmentaient les connaissances
de leur nation par des ouvrages geographiques et nau-
tiques, les seuls de ce genre et de la main d'hommes
du metier, que poss£de la literature ottomane. Piri-
Reis, neveu du c616bre Kemal-Reis, corsaire qui ren-
dit son nom formidable sous Bayezid II , s'embarqua
a Suez, comme kapitan de T^gypte (959 — 1551) ,
et traversant le golfe d'Arabie , il entra dans le golfe
Persique avec son vaisseau amiral et trente navires ,
galiotes ou galions '. La saison etant fort avancee, il
perdit quelques Mtimens sur la cdte arabe de Schahar ;
puis il se rendit sur la cdte d'Omman , ou il s'em-
» Kadrigha (galere), kalliotta (galiote), kalioun (galion), baschtarda
(vaisseau amiral).
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i85
para du port de Maskat, dont il r£duisit les habitans
en esclavage. II parut ensuite dans Tile d'Hormouz ,
et mit le si£ge devant la ville du m&ne nom, dont
la possession est si importante pour la navigation du
golfe Persique ; mais gagn6 par des pr^sens , il leva
le siege et se retira a Bassra. La il fut inform^ qu'une
flotte portugaise s'avangait h sa rencontre pour lui
fermer le passage du golfe Persique; alarm£ par cette
nouvelle, il s'enfirit en toute h&te, n'emmenant avec
lui que trois galores, sur lesquelles &aient charges
ses tresors; Tune d'elles ayant fait naufrage pres de
Bahrein , il rentra avec Ies deux autres dans le port
de Suez , d'ou il se rendit au Caire. Le gouverneur
d'Egypte le retint pres de lui, et adressa a la Porte un
rapport sur cette expedition et sur les causes qui en
avaient amen£ la funeste issue. La reponse du Sultan
fut un ordre de mort contre le malheureux amiral
Piri-Reis; il fut decapite au Caire, et ses tresors, parmi
lesquels on remarquait de grands vases de porce-
laine remplis d'or, furent envoy^s h Constantinople.
Apr&s sa mort, une deputation des habitans d'Hor-
mouz arriva & Constantinople pour reclamer les tre-
sors donnas par eux a Piri ; mais ce fut en vain. La
partie la plus precieuse de l'h&itage de Piri-Reis ne
pouvait6tre revendiquee par le fisc; elle consistait en
deux ouvrages intitules : Bahriye, c'est-k-dire atlas
maritimes, Tun de la mer Eg6e, l'autre de la M£-
diterranee , deux mers dont il avait visite toutes les
cdtes, seul ou de conserve avec son oncle Kemal.
Ces ouvrages indiquent avec soin tous les courans,
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186 HISTOIRE
bas-fonds, lieux de debarquetnfcnt, anses, golfes, de-
troits et ports [xiii]. La place de kapitan d'Egypte,
devenue vacante par la mort de Piri, fttt conferee k
Mourad, corsaire renomme et ancien sandjak de Ka-
tif , qui regut en m&ne temps Fordre de rester en sta-
tion a Bassra avec deux grands vaisseaux, cinq gal&res
et une galiote. Bient6t il quitta son poste dans Tespoir
de pouvoir sans obstacle ramener Tescadre en Egypte.
Mais arrive en face de Tile d'Hormouz , il fut attaqu6
par la flotte portugaise et perdit , dans un combat
acharn£ , deux de ses meilleurs capitaines , Selman-
Reis, Redjeb-Rets, et un vaisseau qui echoua sur la
c6te de Lar. II se r£fugia, avec le reste de sa flotte,
dans le Tigre et revint a Bassra , d'oA il manda a
Constantinople la malheureuse issue de son expedi-
tion; le Sultan lui fit grftce de la vie, en consideration
du d^sinteressement qu'il avait montre. Deux ans plus
tard , Sidi-Ali , c616bre comme poete sous le nom de
Katibi Roumi, regut k Haleb 1'ordre de se rendre a
Bassra, pour y prendre le commandement en chef
de Tescadre en station dans le golfe Persique. Sorti
du port de Bassra , il livra bataille a deux divisions
de la flotte portugaise, Tune de vingt-cinq voiles,
Faulre de trente-quatre, et perdit six galores dans la
seconde action. Des temp6tes vinrent assaUlir son es-
tadre et la dispers&rent k Diou , Goudjourat et Sou-
rat , en lui faisant £prouver des pertes considerables.
Ainsi ballotte sur une mer orageuse, avec des navires
etidommages et depourvus d'artillerie, Katibi Roumi
sentit l'impos$ibttft£ de tenir la mer plus long-temps,
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 1&7
et surtout de faire t&e mix flottes portugaises. II de-
posa & Demen , sous la garde du gouverneur du sul-
tan de Goudjourat , Ie reste de son artillerie et les
manoeuvres de ses vaisseaux degrees, et laissant a ses
equipages la liberty de prendre du service sous le
sultan de Goudjourat , il commenga un voyage dans
Tinterieur des terres avec cinquante compagnons, les
seuls qui voulurent le suivre. II traversa successive-
ment le Sind , le Hind , le Saboulistan , le Bedakh-
schan, la Transoxane, le Khowaresm, le Khorassan
et la Perse , et n'arriva en Turquie qu'au bout de
trois anises. Admis a Andrinople au baise-main du
Sultan, il lui remit des lettres de plusieurs radjas in-
diens et sultans ouzbegs. Plus tard il presenta a Sou-
leiman une description de son voyage, moitie prose,
moitie vers , sous le titre de Miroir des pays. Le
Sultan, favorablement dispose par Tint^r^t des aven-
tures et le m6rite de l'auteur, lui donna une place de
mouteferrika, avec un revenu de quatre-vingts aspres
par jour, et fit compter k ses compagnons de voyage
Tarrter^ de solde des trois ann^es qu'avait dur£ le
voyage, et de plus une gratification [xiv]. Sidi-Ali est
auteur d'une traduction de la geographie {Fethiye)
d'Alikouschdji; il a ecrit en outre un traite mathema-
tique et nautique intitule Miroir des Etres , un autre
sur l'astrolabe et les propri&es des sinus ; enfin il a
laiss£, sous le titre de Movhit (l'Ocean), une des-
cription des mers de 1'Inde aussi rare que precieuse ,
car elle est puisne aux meilleures sources arabes et
persanes [xv].
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188 HISTOIRE
De rOcean-Indien reportons maintenant nos re-
gards sur la M£diterranee, ou Torghoud, r£uni au
nouveau kapitan-pascha Piale, successeur de Sinan-
Pascha, menagait sans cesse les c6tes de Naples.
Cette expedition, comme jadis la descente de Loutfi-
Pascha sur la c6te d'Otrante, et plus tard le stege de
Nice par la flotte alliee de France et de Turquie , avait
ete entreprise sur les instigations d' Aramont , ambas-
sadeur du roi de France Henri II. Cet ambassadeur,
qui d£ja avait ete accr£dit£ aupr£s de la Porte, s'&ait
rendu a Amassia , pour feliciter Souleiman de l'heu-
reuse issue de sa campagne contre la Perse. Ce fut
en effet de cette ville que le Sultan envoya h Tor-
ghoud [xvi] et a Pial6-Pascha l'ordre d'envahir et de
d&vaster les c6tes d'ltalie. Les deux amiraux assi6-
gferent et prirent d'assaut la ville de Reggio [xvn] ,
dont les habitans furent emmen^s en esclavage. En
Afrique, le chef arabe Mohammed, alli6 des Espa-
gnols , ayant assieg£ le fort du Penon de Velez , le
beglerbeg d' Alger, Salih, le punit en lui enlevant la
ville de Boudjia (962 — 1555). Piale lui-m&ne,
aprfes avoir vainement tent6 de s'emparer de Piom-
bino et d'Elbe, fit la conqu6te d'Oran, du port de
Telmesan, et ramena sa flotte victorieuse k Constan-
tinople (963— 1556). L'ann^e suivante, il se remit
en mer avec soixante navires , et se rendit maitre du
port de Benezert, pr6s de Tunis. Un an plus tard,
il conduisit ses gateres contre les iles de Mayorque et
Sorrento, et leur enleva un grand nombre d'habitans
et un butin considerable. C'est ainsi que ces quatre
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D£ L'EMPIKE OtTOMAN. 189
demises annees furent signalees par la conqufite de
Boudjia, Osan et Benezert, et par la devastation de
Mayorque. Aucune action d'eclat ne marqua l'annee
1559. Piale-Pascha, sorti des Dardanelles avec une
flotte de quatre-vingts vaisseaux , auxquels s'en joi-
gnirent bient6t dix autres, se borna a se tenir en ob-
servation dans les eaux de Valona, et a surveiller
les flottes ennemies qui pr^paraient une expedition
contre Tripoli et Tile Djerb6. Mais Pial6 etant rentr6
k Constantinople pendant les mois orageux d'automne
et d'hiver, les flottes chretiennes profitferent de son
absence pour mettre leur projet k execution. Deux
cents vaisseaux arm£s parl'Espagne, le pape, G&nes,
Florence, Malte , la Sicile , Naples , et le prince de
Monaco, firent voile pour Tripoli , sous le comman-
dement en chef de l'amiral Andrea Doria, et sous les
ordres du commandeur des chevaliers de Saint- Jean
k Malte, Guimaran, des commodores espagnols Don
Sancio de Levia et Don Berenger de Requeenes, du
capitaine g^nois Cicala, et du commandant des troupes
de d^barquement, le general espagnol Don Alvaro de
Sandi 1 .
La flotte chretienne se rassembla d'abord dans le
port de Messine , puis dans celui de Make , d'oii elle se
dirigea sur Djerb& Cette He, appelee anciennement
M£ning£, est situee dans la petite Syrte, a louest de
1 La Historia delP impresa di Tripoli di Barbaria. Venezia, i566.
Successi delta armala della Maesta Catolica destinata all' impresa di Tripoli
di Barb aria, della preset delle Gerbe e progressi deW armala turca scriui
per Ant. Franc. Cirni Corso, Venezia, i56o.
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igo HISTOIRE
Tripoli et a Test de Tunis, dont les differens princes
Tont alternativement poss&tee. Djerb6 est plus c&6-
bre pour avoir el6 lancienne patrie des Lotopbages ,
que pour avoir donn6 le jour aux deux empereurs
africains Vibius Gallus et Volusianus x . D^ja, dans le
douzieme stecle, les Francs Favaient arrach^e a la
domination ottomane * et Tavaient gard^e quelque
temps en leur possession ; dans le commencement du
seizieme stecle, Ferdinand-le-Catholique avait envoy£,
pour en faire la conqu&e , une flotte de deux cents
voiles, mont^e par vingt mille Espagnols, sous le
coromandement de Petro Navarra et de Garcia de
Toledo (1510). Mais cette derni&re entreprise avait
£chou£; la flotte avait &e contrainte de se retirer
apres une perte de huit mille hommes. Charles-Quint t
avait eu plus de succes dans Texp^dition qu'il avail
fait tenter contre cette m&me tie par le vice-roi de
Sicile Don Hugo di Moncada. Celui-ci la reduisit et
Tassujettit a un tribut annuel de cinq mille doublons;
la capitulation faite a cette occasion fut signee par
Charles -Quint pendant son s^jour en Allemagne.
Djerbe fut alors divis^e en trois districts , administres.
chacun par un scheikh. Le beglerbeg de Tripoli Tor-
ghoud avait profit^ d'unequerellesurvenueentreeux
pour s'emparer de Tile, quil £pwsa par ses exac-
i « Vibius Gallus cum Volusiano filio imperaverunt annos duos — creati
>» in insula Meninge, quse nunc Cicba dicitor* » Se»L Aurel. Victor, ,
cap. 29.
a Istital Frenk ber djesire'i J)jzrbi K c'esl-a-dire « usurpation de 1'Ue de
Djerbe" par les Francs. »
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 191
tions. Exasperes par la tyrannic do begterbeg, fesha-
bitaus se souleverent et lui livrerent bataille pr6s du
pont qtn joint Tile au continent; Torghoud aurait
sans doute decide la victoire en sa faveur, sans Far-
riv£e de la flotte espagnole qui le forga k retourner &
Tripoli.
Le sol de Djerbe, maigre et aride, produit peu
d'orge et encore moins de bte ; mais File rapportait
autrefois au fisc, comme entrepdt de merchandises,
un impdt de quatre-vingt mille 6cus. Torghoud s'&ait
£chappe sur deux galores commandoes par Oulou-
djali. Ouloudjali , apr&s avoir debarqu^ Torghoud
dans son gouvernement, fit voile pour Constantinople
avec ses galores chafes de pr6sens et de sommes
d argent, et apporta au Sultan la nouvelle de l'arrivee
de la flotte chretienne. Le 2 mass 1 560, les Espagnols
jeterent Tancre h Test de la forteresse, pr&s du pro-
montoire Val Guernera, et le 7, toutes les troupes
op£r£rent leur debarquement. Aprfes quelque resis-
tance, la garnison ouvrit des negotiations et capitula
le huitieme jour ; aussitdt on jeta les fondemens dun
nouveau fort pour assurer la defense de Tile. Le
prince de Kairewan vint visiter le general espagnol ;
et, le quinzi&me jour apr&s la descente, le scheikh de
Ffle jura sur le Koran la fiddle execution de la capi-
tulation, et s'engagea & payer exactement le tribut
annuel qui lui avait &6 impose (\i mars 1560). Ce
tribut se composait dune somme de six mille £cus,
de quatre autruches, quatre gazelles, quatre etalons
et wi chameau. Le scheikh, en signe de soumigsion.
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i 9 2 HIST0I11E
foula aux pieds F&endard par lequel Torghoud Favait
investi de ses fonctions, et fit flotter trois fois dans
les airs le drapeau imperial; enfin le jour de la signa-
ture du traits , des distributions d'argent furent faites
au peuple.
Pendant que le vice-roi de Naples laissait 6chap-
per a Djerb6 Foccasion de faire la conqu&e de Tri-
poli, Pial6-Pascha &ait sorti des Dardanelles avec
une flotte de cent vingt galores, et avait rel&che h
Modon ou il avait &6 joint par Fescadre de Kurd-
oghli-Ahmedbeg, gouverneur de Rhodes, et celles du
sandjak de Mitytene, Moustafabeg (8 redjeb 967 —
& avril 1 560). Apr&s ayoir radoube ses vaisseaux dans
le port de Modon , il leva Fancre et parut le 7 mai
a la hauteur de Tile de Malte. Sur Favis de Tor-
ghoud, que la flotte chretienne stationnait encore dans
les eaux de Djerb6 , Piale-Pascha fit voile vers cette
lie, et, apres un trajet de quarante-huit heures, il
vint y jeter Tancre a une distance de douze milles. Le
jour suivant, 12 sch&ban (14 mai), fut signal 6 par
Fenttere dtfaite de la flotte chretienne : vingt gateres
et vingt-sept vaisseaux de transport furent coutes bas,
brfil£s ou £choues sur le rivage*; sept autres galores se
sauverent dans le canal de Djerbe ; le reste de la flotte
s'enfuit vers FItalie avec la galere mont£e par le vice-
roi de Naples [xvni]. Piale-Pascha informa de sa vic-
toire le beglerbeg de Tripoli , qui , huit jours aprte ,
vint prendre part k son triomphe et au si£ge de Djerbe,
Ainsi renforc£ par les troupes de Torghoud , et de
plus par celles de Kairewan et de Sfax, Piale-Pascha
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. i 9 5
commenga k la fin de mai le stege en r6gle du fort
nouvellement construit k Djerb6; laissant le com-
mandement de la flotte au sandjak de Mitytene, il
se rendit lui-m&ne au camp ou se trouvaient r£unis
quatorze mille hommes. Le siege dura quatre-vingts
jours ; dans le cours du premier mois seulement, on
langa contre la place plus de douze mille boulets et
de quarante mille filches. Les galores qui s'&aient
retirees dans le canal avaient ete brtilees , les asste-
geans Itaient parvenus jusqu'au pied des murs, le de-
couragement s'emparaitVle la garnison, et le nombre
des transfuges augmentait de jour en jour, lorsque,
le 31 juillet (7 silkid6), Alvaro fut fait prisonnier
au moment ou il tentait de s'enfuir sur une barque
en Sicile; cet 6v£nement vint decider la chute de la
place [xix].
Avant de quitter Djerb6 , Piale-Pascha donna des
ordres pour le retablissement des murs renverses par
le canon ; il se rendit ensuite avec Torghoud h Tri-
poli , de la a Prevesa , et le 27 septembre (6 mo-
harrem 968) , il fit son entree triomphale a Constan-
tinople. La premiere nouvelle du succ6s des armes
ottomanes devant Djerbe avait 6t6 apport£e par uqe
galore qui trainait apr&s elle , dans les flots de la Me-
diterran£e, le grand &endard de Tarm^e espagnole ,
representant le Christ en croix. Le jour de Tarriv^e
de Pial£, Souleiman se rendit au koeschk du serai stir
le bord de la mer pour honorer de sa presence le
triomphe du kapitan. Sur le gaillard d'arriere du vais-
seau amiral &aient places Don Alvaro de Sandi, le
T. VI. l3
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ig4 HISTOIRE
g£n£ral Don Sancio de Levia, le commandant de les-
cadre de Sicile et celui de l'escadre de Naples, Don
Berenger de Requeenes. Les galores conquises &aient
trainees k la remorque, depouill£es de leurs m&ts et de
leurs gouvernails. Souleiman assista k ce spectacle sans
dementir son caract&re grave et s&ieui;; l'arrogance
que donne la victoire, ni 1'ivresse du triomphe ne
purent dander son front , tenement ses peines de fa-
milleavaient ferm£ son coeur aux joies de la fortune ,
en m6me temps qu'elles l'avaient arm6 de courage
contre les coups du sort x . Don Alvaro fut conduit au
bagne de l'arsenal avec les autres prisonniers ; en y
entrant, sa t6te ayant heurte contre la porte trop basse,
il fit dire au kapitan-pascha qu'une telle demeure
etait indigne d'iin homme de haute noblesse; et, sur
cette representation, Piate lui assigna un autre se-
jour. Trois jours aprte, les prisonniers enchatads trois
k trois furent promen£s dans les rues de Constanti-
nople, ayant en tfite le kiaya de l'arsenal, puis Us
comparurent devant le diwan ; les vizirs offrirent k
Don Alvaro le commandement en chef d'une armee
contre la Perse, s'il voulait abjurer sa foi et renon-
cer au service de l'empereur a . Mais sa fermet£ fat
aussi in^branlable que le courage qu'il avait montr£
sur les murs de DjerW. Les prisonniers, en se reti-
i « Eadem erat frontis severitas et tristitia, ac si nihil ad Mm h«e victoria
» pertineret, nihil novum aut inexspectatum contigbset Tarn cape* in iUo
» sene quanta) vis fortonae pectus , tarn confident animus, aat tantam gratu-
•> lationem velut immotus acciperet. »
» Ulloa. Busbek ne fail pas mention de cette circonstance.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. i 9 5
rant, pass&rent aupr6s de la fen&re grille, derriere
laquelle le Sultan assistait au conseil. Dfes qu'ils forent
sortis , soixante-dix-sept janissaires vinrent dlposer
aux pieds de Souteiman , de la part du grand-amiral
Pial6 , sept pieces d'&offe de soie et sept pitees de
drap de couleur. Par une gr&ce sp&iale de Piate ,
Don Alvaro obtint la permission de recevoir des
Strangers et ses compagnons de captivity ». Le sort
des prisomaiers fut adouci par rentremise bienveillante
de Busbek et le caract&e doux et humain du nouveau
grand-vizir Ali-Pascha. Busbek leur fournit des vfi-
temens, pourvut k leur nourriture, et mSme garantit
leurs rangons pour des sommes considerables. Enfin
il parvint a fatre mettre en liberty Don Alvaro de Sandi
et Sancio de Levia , qui dinaient chez lui k des tables
s£par£es, leur haine ne leur permettant pas un rappro-
chement m^me au sein d'une captivity commune \ Au
nombre des prisonniers se trouvaient DonGiovan de
Cordona, gendre de Berenger, et Gaston, fils du tfuc
de Medine : le premier avait trouve moyen de se ra-
cheter en arrivant k Khios 3 ; Piate s'&ait r&erv6 le
second , et l'avait cach6 avec soin k tous les yeux,
pour ne pas 6tre oblig6 d'en faire hommage au Sultan ;
mais il fiit pour ce fait denonc6 par Roustem , et Fin-
■ L'eloge fait par JJUoa du courage inetoanlabla de Don Alvaro dMere
de celui de Busbek ; « Alias mtrepidum aliquanto eommotiovem redisse
» verenfem, jae mutate sententia ad neoem tetcaaveretur. • fyist. IV*
» « Odio plus quamireUroo dissidebanU » EpisL TV,
3 Busbek dit expressement que Cordona s'etait rachete a Khios; UMoa
se trompe done en le faisant figurer au triomphe de Constantinople.
i3*
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ig6 HISTOIRE
fortune Gaston disparut, soit qu'il fitt mort de la
peste, soit que Piate 1'eAt sacrifi^ a sa sftret6 f . Alvaro,
Sancio et Berenger accompagn&rent Busbek , ambas-
sadeur de Ferdinand, Jors de son retour en Autriche.
Le fils du G£nois Cicala, &g£ de dix-huit ans, ent le
bonheur de plaire au Sultan, et aprfes avoir abjur£ sa
religion, il fut admis en qualite de page dans la pre-
miere chambre, faveur qui ouvre une voie directe aux
premieres dignit^s de l'Etat ; aussi parvint-il plus tard
aux dignit^s de kapitan-pascha , de grand- vizir et de
serasker a .
Le depart de Busbek et l'affranchissement des pri-
sonniers de Djerb6 se rapportent k Fepoque ou le
traits avec TAutriche suspendit a la fois les hostility
sur terre et sur mer* Mais comme la prise de Djerb6
entraina peu de temps apr& la conqufite de la forte-
resse de Pinon de Velez, qui elle-m&ne donna bien-
t6t lieu au stege de Malte, il convient d'anticiper de
i « Credibile est Pihalium (Piale) , quo propria saluli coiisuleret, Gasto-
» nis vita non peperci'sse. » Busbek, Epitt. IV.
* Rapport de I'envoye de Ferdinand du 3o septembre i56i , dans les
Archives de la maison I. R. d' Autriche. Trois jours auparavant (37 septem-
bre), Giulay Michal etait arrive a Constantinople en qualite d'ambassadeur
de Transylvanie, charge de remettre le tribut et d'elever des phrintes contre
Behek et Pereny ; il se rencontra avec le renegat transylvanien Bornemissa
Lassk). Ce Rapport s'exprime ainsi au sujet du fils de Cicala : « II figliuolo
» del Cicala subito fetto Turco e posto nella camera del Gran Turco,' dal
» qual luogo tutti vengono gran maestri, al Cicale, che e nelli 7 torri, x3
» aspri per giorno. » Dans le Rapport de rambassadeur venitien du a aout
1573, il est dit : « TJsci o dal Seraglio con gran favore il figlio di Cigala e
» e fatto Capigi con 200 aspri , » au lieu de cent cinquante ordinairement
ailoues.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 197
trois ann&s sur l'histoire des temps qui suivirent la
conclusion de la paix, pour reunir dans notre r£cit
des 6v6nemens qui furent la consequence les uns des
autres. .
Regrettant vivement la perte de DjerW, Fun des
points les plus importans de ses possessions en Afrique,
le roi d'Espagne ne songeait qa f k y trouver un d£dom-
magement dans la conqu&e d'une autre place forte
sur la m£me cdte. Yis-i-vis l'Espagne, et k une dis-
tance de quarante lieues k peine , existe sur la cdte
d* Afrique la ville de Gomfcre de Velez, et en avant
d'elle s'£16ve dans une ile f ou plutdt sur un rocher
isote au milieu des flots , le fort qui a regu le nom de
Pinon de Velez, k cause de la ressemblance du ro-
cher avec une pomme de pin. Un sentier creus£ dans,
le roc conduit au ch&teau, et un canal etroit, qui peut
k peine contenir dix ou douze navires, le s£pare du
continent et lui sert en m^me temps de port. Le vice-
roi de Catalogne , Garcia de Toledo , fit voile de Ma-
laga vers la c6te d' Afrique (10 aotit 1564). II s'em-
para sans peine de GomSre de Velez , ville non for-
tiftee, situ6e entre deux montagnes, et ce premier
succ& deterraina la garnison du Pinon de Velez k
abandonner le fort \ qui fut aussitdt occupy par les
Espagnols. La nouvelle de cette prise, et plus encore
celle de la capture d'un vaisseau charg£ de marchan-
1 Terra parte dclie Historic (d' Alfonso Ulloa) , che coniien la liberation,
di Don Alvaro, fespugnatione del Pignon di Vellez, delta Gome r a et il sue-
cesso delta, potentissima armata mandaia del Tureo sopra Visola dl Malta*
I'anno i565; tt Vertot, I. XII.
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198 HfSTOIRE
dises pour le harem dont sept galores de Malte s'&aient
empar&s entre les iles de Zante et de C&phalonie ,
caus£rent une vive irritation k Souleiman , qui dtyk
m£ditait depuis long-temps la conqu&e de Malte.
Dun autre cdt6, les instances des vizirs, qui lui firent
observer que, par la Goletta et le Pinon de Velez,
l'Espagne &ait mattresse des cdtes de Turns et d'Al-
ger, les plaintes r&t6r6es du bostandji-baschi [xx]
et des femmes du harem auxquelles appartenait la
charge du vaisseau capture, ne contribu&rent pas peu
k sa determination. En outre , sa fille , la pieuse Mihr-
mah, ne cessait, aiusi que nous l'avons d£j& dit, de
lui repr&enter la conqu&e de Malte comme l'une des
plus belles et des plus saintes entreprises contre les
infid&es.
Le 1 er avril 1565 , la flotte destin^e k cette expe-
dition sortit done du port de Constantinople sous les
ordres du kapitan-pascha Piale. Le cinquteme vizir,
Moustafa-Pascha, 4g6 de soixante-quinzfe ans, regut
en quality de serasker le commandement en chef de
1'armee de si£ge embarqu£e sur les navires. Moustafa
&ait un descendant de Tancienne dynastie des Kizil-
Ahmedlii , qui faisait remonter son origine k Khalid
Ben Welid, le porte-drapeau du Proph&e, et qui,
sous le nom dlsfendiaroghli , avait r6gn6 dans FAsie-
Mineure, sur les cdtes de la Mer-Noire. Le grand-vi-
zir, le jovial Ali, dont l'esprit &ait fecond en saillies,
se prit k dire en accompagnant le g£n£ral et l'amiral'
vers les navires : m Yoilk deux hommes de belle hu-
meur, et toujours pr&s k savourer le cafe et l'opium ,
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DE L'EMPlRE OTTOMAN. 199
qui vont entreprendre un voyage de plaisir dans les
iles : je pane que toute la charge de la flotte est en
feves d' Arable et en extrait de jasqiriame. » Celte plai-
saoterie devspt trouver place ici, moins sans doute
pour le plus ou moins d'esprit qui l'assaisonne qu'i
cause de la man&re dont elle a &6 jug£e par les prin-
cipaux historiens ottomans. lis la bl&ment comme
peu digne de la gravity dun grand-vizir, et comme
&ant dun mauvais augure pour Fexp&lition qui
eut en effet one malheuteuse issue. Ce jugement,
port&sur une saillie sans importance et bonne tout au
plutf k fournir un trait du caract£re du grand-vizir,
accuse toute la gravity et toute la superstition otto-
manes. Ces historiens remarquent en outre qu'Ali n'£-
tait pas en rapport d'intimit£ avec les personnages aux
depens desquels il s'amusait, et ils ajoutent que ces
derniers vivaient eux~m£mes en mauvaise intelligence,
et qu'ils &aient jaloux tous deux de Torghoud, dont
ils auraient d\X attendre Tarriv^e avant de commencer
le s&ge de Malte. Ces circonstances , et la defense
h£roique des chevaliers, expliquent sans doute, bien
mieux que la plaisanterie du grand-vizir, les revers
de cette campagne [xxi].
Le serasker passa la revue de ses troupes k Modon.
Elles se composaient de sept mille sipahis de l'Asie-
Mineure, commandos par un sandjak et deux alaibegs,
de cinq cents sipahis de Karamanie et de cinq cents
autres de Mityl&ie, de quatre mille cinq cents janis-
saires, de treize mille hommes de troupes irr£guli£res,
et de douze cents sipahis et trois mille cinq cents
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2oo HISTOIRE
hommes de troupes irr^gulteres de la Roumilie, sous
les ordres de deux sandjaks et d'un alaibeg. La flotte
etait forte de cent quatre-vingt-une voiles, savoir :
cent trente galores, huit mahones, trois kara-mour-
sals, onze grands vaisseaux, dont Tun avait a bord six
cents sipahis, six mille barils de poudre, treize mille
boulets , et perit corps et biens k Modon * ; dix ga-
leres, sous les ordres du septuagenaire Ali-Portouk,
commandant de la station de Rhodes; deux galeres
de Mityl&ne, conduites parSalih, fils du dernier beg-
lerbeg d'Alger, et dix-sept galdres de moindre gran-
deur appetees fustes [xxn]. Le 19 mai 1565, la flotte
parut devant Marsa Scirocco [xxra], port situ£ au sud-
eat dgrile; et le lendemain, contre Topinion de Piate,
qui voulait attendre Tarriv^e deTorghoud, le seras-
ker fit d£barquer vingt mille hommes avec cinq pieces
de campagne. On ouvrit aussit6t la tranch^e , et Ton
pointa des canons contre le fort St.-Elme; ce fort est
situ6 en face de celui de S.-Angelo, sur une langue de
terre qui se projette entre le grand port et celui de
Marsa-Muset, auxquels il sert de defense. Cinq jours
apres, Ouloudjali arriva d'Alexandrie avec six ga-
lores; et le 2 juin,. Torghoud parut enfin avec treize
gal&res monies chacune par cent hommes, et dix
galiotes portant huit cent dix combattans. D desap-
i Selaniki donne l'etat guivant de l'artillerie que la flotte ameoa avec
elle : vingt pieces du calibre de 5o, cent vingt faucons, fauconneaux et cou-
leuvrines, cinq mortiers (hawayi top), vingt mille quintaux de poudre,
quarante mille boulets, dix mille pelles et pioches, et cinquante chdoupes
eanonnieres.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 201
prouva l'attaque du fortSt-Elme, qui, disait-il, serait
plus tard tomb£ de lui-m6me x ; mais il d£clara qu'a-
pr&s Favour entreprise, il serait honteux d'y renon-
cer : et pour en activer le succ&s, il dressa une nou-
velle batterie avec les canons de ses gal&res , et fou-
droya le ravelin de la pointe du port Muset, laquelle
a depuis lors regu son nom. Les ouvrages du fort
furent k la fois battus en br&che, du c6t£ de la mer
par rartUlerie de laflotte, et du c6t£ de la terre par
trente-six canons. Apr£s plusieurs tentatives infruc-
tueuses, Torghoud ordonna un assaut g6n£ral, qui
devait lui cotiter la vie. Un boulet, lanc6 du fort
S.-Angelo, porta contre une pierre, dont les Eclats
rejaillirent sur la tdte du beglerbeg de Tripoli : frappe
k mort, il tomba en perdant des flots de sang par le
nez et les oreilles (16 juin 1565). Moustafa fit jeter
un drap sur son corps, et prit sa place avec le plus
grand sang-froid, continuant de s'entretenir avec l'in-
g&rieur sur. r&ablissement d'une nouvelle batterie.
Les restes de Torghoud furent transporter k Tripoli.
Sept jours apr& , la chute de St.-Elme vengea la mort
du beglerbeg; ses d£fenseurs, au nombre de treize
cents, parmi lesquels cent trente chevaliers, mouru-
rent en h6ros. En voyant combien ce fort, qui avait
> « VUI, Cal. Aug. Mustafa S. St. Elmi castellum a*nte omnia accipien-
» dum proponit, — poslridie ascensionis paulo ante lucem murum egressus,
- eo ipso die post solis ezortum 80 triremes aquatum abeuntes castellum ex
» alto petebant. Habet castellum St. Elmi propuguaculum in ea parte, qua
» portum monetae (le port Muset) excepit, ad fossae vere caput agger fenes-
- tratus uni tormenti capax et militaris portula (aux sorties). » Rapport dc
Gryphius, a la Bibliotbeque imperiale de Vienne, maDuscrit ucxxit.
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aoa HJSTOIRE
coAt6 tant de pertes, avait peu d'&endue, Moustafa-
Pascha ne put s'empgcher de dire , en pressentant les
sacrifices qu'exigerait la conqu&e de la place : « Si le
fits nous a co&t6 si cher, par quels sacrifices faudra-
t-il acheter le p£re? » Pour assoovir sa colore contre
les prisonniers, il fit £carteler leurs cadavres, et clouer
leurs membres mutites en forme de croix sur des plan-
ches, qu'il fit conduire par mer au pied des murs de
la ville et du fort S.-Angelo. Le grand -maitre des
chevaliers de St. -Jean, l'h&oique Lavalette, oubliant
l'humanit£ chr&ienne a la vue dun tel spectacle, or-
donna en repr&ailles de massacre? les prisonniers et
de lancer leurs t&es en guise de boulets dans le camp
des Ottomans. C'est alors que Moustafa fit sommer le
grand-maitre de rendre la forteresse, par un esclave
chr^tien dgg de soixante-dix ans, qui depuis trente
ans servait sur une gal&re turque. Lavalette conduisit
Tesclave sur les remparts, et, lui montrant les fosses
larges et profonds, il le renvoya avec cette r£ponse :
« Void le seul terrain que je puisse abandonner k ton
maitre, pour qu'il vienne le remplir de cadavres de
janissaires. » Apr£s cet inutile pourparler , Tattaque
reprit avec une nouvelle ardeur , et les assi£geans diri-
gerent tous leurs efforts contre les forts S.-Angelo et
St.-Michel. Ce dernier , appete aussi presqu'ile de la
Sangle, est b&ti comme le premier sur une langue de
terre qui s'avance dans le grand port, et tous deux en-
clavent et protegent le port des gal£res. Sur ces entre-
faites, le beglerbeg d'Alger, Hasan , arriva k Malte avec
vingt-sept voiles et deux mille cinq cents hommes;
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. *o3
c'&ait un renfort dont les asstegeans commen$aient k
sentir toute r utility. Fils de Khaireddin-Barberousse
et gendre de Torghoud, Hasan demanda, pour sou-
tenir 1'honneur de ces noms illustres, a dinger lui-
m&ne l'assaut du fort St.-Michel; Moustafa lui ayant
donn£ six mille hommes, il marcha h leur t£te contre
le fort, apr& avoir remis le commandement de son
escadre h Candelissa, ren£gat grec blanchi dans la vie
perilleuse decorsaire. Candelissa s'avanga dun autre
c6t6, avec quatre mille Algfriens, contre la chaine
qui fermait le port des Gal&res, au bruit des tambours
et aux fanfares des trompettes, pr6c&16 dune cha-
loupe mont£e par des imams et des marabouts qui
lisaient le Koran et m£laient h leurs pri&res des impre-
cations contre lea chr&iens. La lutte fut longue et
meurtri&re : h peine cinq cents hommes des assaillans
revinrent-ils sains et saufs de ce combat, ou des deux
c6tes on ne fit aucun quartier ; de toutes parts les che-
valiers de Malte sem&rent la mort et le carnage, qu'ils
appelaient la monnaie des massacres de St.-Elme ,
par allusion aux cruaut£s commises sur lgs braves
d&enseurs de ce fort. Les assies eurent k d£plo-
rer la mort de Garcia de Toledo , fils du vice-roi de
Sicile, et Cellfe du neveu du grand-maitre. Les chefs
ottomans tinrent un conseil , ou ils decid^rent que
Piate continuerait avec les soldats de la flotte le stege
de la ville et du fort S.-Angelo, tandis que le beg-
lerbeg d' Alger et les corsaires pousseraient vivement
l'attaque du fort St. -Michel. Le stege se prolongea
encore deux mois en tiers, pendant lesquels dix as-
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*<4 HISTOIRE
sauts, tenths contre le fort St. -Michel, furent con-
duits et repousses avec une £gale bravoure. Dans
le dernier, Turcs et Chretiens pr&endirent avoir vu
sur les remparts une femme et deux hommes incon-
nus de tous; les seconds crurent reconnaitre en eux
la sainte Vierge, accompagn£e de saint Paul et de
saint Jean-Baptiste, le patron de TOrdre [xxiv], ]La
croyance g£n£rale k cette vision poussa les chr&iens
k faire des prodiges de valeur, et devint une sorte
d'excuse pour les Ottomans, dont le courage com-
mengait h faiblir. Enfin la veille'de la nativity de la
Vierge, les secours du roi de Sicile si souvent annon-
c&, et toujours retardes jusqu alors, ayant heureuse-
ment d£barqu£, Moustafa et Pial6 lev^rent le si£ge,
qui avait cotit6 prfes de cinq mille hommes aux assi£-
ges, et plus du quadruple aux assiegeans (1 1 septem-
bre1565).
Apr^s avoir suivi Piate dans ses excursions sur les
c6tes de la M£diterran£e , Piri-Pascha et Sidi Ghasi
dans leurs expeditions sur les golfes Arabique et Per-
sique, apj£s avoir d^crit les conqu&es de Tripoli,
Djerb£, Boudjia, Benezert, Oran et Bastia, la parte
de Mehdiy^ et de Pinon de Velez, les expeditions sur
Piombino, Elbe et Sorrento, et enfin le siege infruc-
tueux de Make, nous devons remonter le cours de
cette p&iode de seize ans si f&conde en £v£nemens
maritimes, et reprendre le r£cit des affaires politiques,
que nous avons interrompu k Tipoque du traits de
paix avec TAutriche. Ferdinand &ait mort dans la
seconde ann£e qui suivit cc traite, conclu par Busbek,
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. ao5
et qui stipulait une paix de huit anuses entre la Porte
et l'Autriche (25 juillet 1564). A la nouyelle de la
mort de Ferdinand, le grand- vizir r&lama aiipr& de
l'ambassadeur Albert de Wyss, r&idant k Constanti-
nople, 1'envoi du present annuel, stipule par le traits,
et dont le versement avait 6t6 retard^ depuis deux
ans; il demanda en outre un renouvellement de la
capitulation pour les six ann6es qui restaient k coiirir*
Le present de ces deux ann£es avait &6 remis a
des internonces, charges de loffrir au Sultan; mais
ceux-ci avaient &6 retenus k Ofen par la garnison r6-
voltfe, qui s'&ait opposle k leur passage. Dans une
telle circonstance, Maximilien avait jug£ k propos de
differer un second envoi jusqu'au renouvellement du
traite conclu par son p6re. Souleiman, en ltd d£putant
le tschaousch Ali pour le f&liciter de son avenement,
lui fit demander en m&ne temps s'il pensait k main-
tenir l'ancienne capitulation. Sur ces entrefaites, le
fils de Zapolya s'£tant empar£ de Szathmar, Fem-
pereur envoya a Constantinople 1'internonce Michel
Czernowicz , ancien drogman de Venise , pour faire
des representations k ce sujet. Lorsque Czernowicz
arriva k Komorn, Arslan-Pascha, qui avait succed6
k Roustem dans le gouvernement d'Ofen, lui signifia
que Hasan de Gran ne le laisserait passer qu'au cas
oii il serait charg6 du paiement des sommes dues k la
Forte; en m&ne temps il fit informer Fempereur par
le tschaousch Hedayet, ren£gat transylvanien, dont le
nom de famille &ait Saint-Marc Scherer, qu'il avait
l'ordre positif de refuser le passage k toute ambassade
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2o6 HISTOIRE
qui n'apporterait pas le montant du tribut des deux
ann&s qui s'£levait& soixante mille ducats, non com-
pris trente mille ducats promis personnellement aux
vizirs par Busbek; mais l'empereur craignait que
tous ces sacrifices ne fassent en pure perte et n'ame-
nassent la paix. N£anmoins les deux tschaouschs, Bali
et Hedayet , furent cong6di£s avec la promesse du
prochain envoi des sommes convenues et une lettre
dans laquelle l'empereurinsistaitde nouveau sur la res-
titution de Szathmar (15 novembre 1 564 ). Les trois
nonces Michel Czernowicz, George Albany et Achaz
Gsabi, arrivferent k Constantinople k la fin de cette
ann£e (92 d&embre) [xxv]/ George Albany mourut
au commencement de Janvier; ses deux collogues,
avant d'etre regus en audience par le Sultan, remi-
rent, le 4 fGvrier 1565, dans un diwan solennel, les
soixante mille ducats dus par 1'Autriche, et de plus
les trente mille ducats promis aux vizirs [xxvi]. En
retour le grand- vizir leur accorda le renouvellement
de la paix pour un nouvel espace de huit ann£es, et
stipula que le Sultan conserverait toutes ses posses-
sions en Transyl vanie , situ£es au-del& de la Theiss,
a r exception de Banya ou Neustadt, appel£e aussi
Frauenbach , pour avoir fait partie de la dot de la
reine de Hongrie. Comme les nonces et l'ambassadeur
n'&aient point autoris& k trailer sur cette base, Czer-
nowicz retourna k Vienne, accompagn£ du tschaousch
Hedayet; Achaz Csabi resta k Constantinople; en
m&ne temps un autre tschaousch fut exp&U6 en Tran-
syl vanie, pour reoommander mix Etats le mamtien
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. ao 7
de la tranquillity. Dans l'intervalle , George Bebek
avait &6 rendu k la liberty sur intercession de l'am-
bassadeur transylvanien Bekessy, et gr&ce k l'amiti6
du Sultan pour Jean Sigismond. A peine arriv6 k
Tschorlii, Czernowicz se vit arr6t6 et ramen6 k Con-
stantinople par deux tschaouschs envoy& k sa pour-
suite; cettemesure avait pour cause la nouvelletrans-
mise par le pascha d'Ofen , d'une tentative de Tem-
pereur sur Tokay, et dun grand rassemblement de
troupes, ordonn£ par ce souverain. La prise de Tokay
par Maximilien , au moment m£me oii il demandait
a 6tre remis eh possession de Szathmar, irrita vive-
ment Souleiman [xxvii].
Apres avoir t£moign£ k Czernowicz tout le m£con-
tentement du Sultan, les vizirs lui permirent de re-
partir pour Vienne avec Hedayet. Les instructions
de ce dernier lui prescrivaient d'articuler de vives
plaintes , au nom de Souleiman , sur la conduite de
Tempereur, qui sans attendre de reponse k sa demande
relativement k Szathmar, s'&ait empar6 si arbitrai-
rementde Tokay et de Serenes. Lorsqu'il fat admis k
presenter It Maximilien ses lettres de cr£ance, il rem-
plit fid&Iement sa mission, et d£clara que le Sultan
avait donn£ ordre aux paschas d'Ofeft et de Temes-
war de se porter avec sept sandjaks au secpurs du fils
de Zapolya. En eflet, k la reception de cet ordre ,
Arslan, pascha d'Ofen, avait feat partir six mille hom-
imes pour ia Trapsylvanie; le gouverneur de Temes-
war, Hasan-Prodovich, s'&ait emparg de Pankotta.
Par suite de ces hostility, Czernowicz fut de nou-
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ao8 HISTOIllE
veau d£put£ h Constantinople et, jusqu'& son retour,
le tschaouch Hedayet fnt retenu en 6tage. Suivant ses
instructions, Czernowicz devait demander que Pan-
kotta fftt restitute a l'empereur, et qu'il flit enjoint au
fils de Zapolya d'etre fiddle au trait£ de Szathmar.
Mais le lendemain de son arrivfe, Czernovicz perdit
par la mort du grand- vizir AH-Pascha son plus ferine
appui dans ses negotiations pour la paix aupr&s de la
Porte; le second vizir, le Bosniaque Mohammed So-
kollovich, qui succ£da a Ali/etait connu pour ses dis-
positions guerrferes. Dans sa premiere entrevue , il
declara a Czernowicz que Fempereur devait restituer
Tokay et Serenes, que le traits de Szathmar n'&ait pas
valable, parce qu'il avait &6 conclu sans l'assentiment
du Sultan, que toutes negotiations seraient suspendues
jusqu'au versement du tribut, et qu'alors seulement on
pourrait reprendre la question du renouvdlement de
la paix. L'ambassadeur Albert de Wyss et le nonce
Czernovicz n'avaient point pouvoir pour accepter de
telles propositions; ce dernier se disposait k retour-
ner a Vienne pour communiquer h l'empereur la r£-
ponse du Sultan, lorsqu'arriv&rent k Constantinople
des messagers de Transylvanie, qui annonc&rent que
cette province allait 6tre enti&rement conquise , si le
Sultan ne se h&tait de la secourir (7 juillet 1 565). Par
suite de ce rapport, Czernovicz fut momentanement
retenu en captivite; et ce ne fut qua la reception de
la nouvelle de la prise d'Erdoed par Hasan , begler-
beg de Temeswar, apr6s un stege de quarante-quatre
jours et deux grands assauts (14 juillet), que le grand-
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DE L'EMPtRE OTTOMAN. log
vfrrir fit appeler le nonce ( 7 aoftt) et lui remit pour
son maitre une lettre dans laquelle Souleiman d£cla-
rait nul le traite de Szathmar, r£clataait en outre la
restitution de Nagy-Banya et de Tokay en faveur de
Zapolya, la retraite des troupes imperiales de la Tran-
sylvanie, et la mise en liberty du tschaousch Hedayet.
Muni de cette lettre , Gzernovicz se rendit en quinze
jours ' de Constantinople a Vienne; Achaz Gsabi le
suivait kpetites journ^es [xxvm]. Vers ce m£me temps,
Moustafa Sokollovich, neveu du grand-vizir Moham-
med Sokollovich et gouverneur de Bosnie, envahit
la Croatie jK)ur faire de ce c6t6 une diversion utile
aux affaires de Transylvanie. Moustafa et son oncle
devaient leur nom au lieu de leur naissance , Sokol
(nid de faucon). Mohammed Sokol li, qui s'etait suc-
cessivement 61ev6 dans le harem imperial aux emplois
de grand-fauconnier et de porte-armes du Sultan,
avait &6 promu en sortant du serai a la dignity de
kapitan-pascha, et peu de temps apres h celle de beg-
lerbeg de Roumilie. Favoris£ par la haute position de
son oncle , Moustafa Sokolli etait pass£ de la place
d'&uyer-tranchant a celle de defterdar de Temeswar,
qu'il avait quittee presque aussitdt pour le gouverne-
ment de Fiilek. Depuis, appete au sandjak de Klis,
Moustafa avait reduit le chateau de Korian, conqu&e
qui lui valut sa. nomination au gouvernement de Sze-
gedin et par la suite a celui de Hersek [xxix]; c'est
dans ce dernier poste qu'il entreprit son expedition
> Et non pas onze jours, comme 1'afGrme Isluanfi, I. XXII; car Ocr-
oowicz quitta Constantinople le 8 aoftt et arriva a Vienne le aa.
T. VI. l4
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no H1ST0ULE
en CrOatie et le stege de Kruppa, place qui avait ap-
partenu aux chevaliers de Saint -Jean et &ait alors
au pouvoir de Zriny. Arriv£ devant Kruppa, Mous-
tafa somma le commandant, Mathias Baltics, de se
rendre; mais celui-ci refusa d'une maniere digne
du nom qu'il portait, et fit demander de prompts
secours au capitaine-g£n£ral de la Carniole Herbart
Auersberg, k Zriny, Sluni et Erdoedy. Moustafa, apr£s
avoir aasi6g£ Kruppa pendant seize jours contre son
attente, sans obtenir de r£sultat d^cisif, et lpuis£ tous
ses boulets, se vit forc6 de faire venir de nouvelles mu-
nitions de Banyalouka et de Verbozen ; mais cet ap-
provisionnement &ant insuffisant, il fut oblige de se
servir de caillous recouverts de plomb par des Boh6-
miens. Dans ces conjonctures, Auersberg arriva avec
sept mille hommes sur la rive oppos£e de l'Unna. Se-
par£s seulement par une riviere de peu de largeur, les
soldats des deux camps ne cessment d'6changer des
coups de fusils en les aecompagnant d 'injures et de pro-
vocations. Sluni et Farasicz offKrent de tenter le pas-
sage de la rivtere, mais Auersberg leur refusa les mille
hommes qu'ils demandaient pour effectuer ce projet;
et ce ne fut pas sans raison que cet excds de prudence
fut tax6 de l£ch6ft£ par les Hongrois, car Auersberg
laissa prendre Kruppa sous ses yeux le vingti&me jour
du stege , sans faire aucune tentative pour s'y opposer.
En presence des deux camps la place fut livr& aux
flammes, et ses braves d&enseurs massacres avec leurs
femmes et leurs enfans sur ses ruines fumantes ; Novi
subit le m£me sort. Excit£ par ces succes, Moustafa
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. an
fit une pointe avec dix-sept cents hommes jusqu'k
Obreslo, non loin de Cris. Mais \k, Erdoedy attaqua
ce d&achement k l'improviste avec quinze cents ca-
valiers et trois mille fantassins, lui fit cent vingt-huit
prisonniers et liri enleva un riche butin , notamment
douze chevaux de somme, appartenant k Moustafe
lui-m6me , et charges dune grande quantity de bou-
cliers, javelots et autres armes de guerre. Vers le m&ne
temps, Souleiman adressa une lettre au doge de Ve-
nise, pour se plaindre des excursions des Uskoks de
Segna sur le territoire ottoman ■.
Pendant que ces ^venemens se passaient en Hon-
grie, on regut a Constantinople la nouvelle de la lev£e
du siege de Malte. Les uns imput&rent ces revers au
kapitan-pascha Pial6, les autres au serasker Moustafa-
Pascha. Pour ne pas donner au peuple le triste spec-
tacle des gal&res vaincues et portant encore les cica-
trices du combat, il fat ordonn£ a Pial6 de faire de
nuit son entree dans le port. Dans le diwan k cheval
qui se tint peu de temps apr£s, Souleiman n'adressa la
parole qu'aux premier et second vizirs Mohammed
Sokolli et Pertew-Pascha , et n'interpella aucun des
autres, afin d'adoucir en quelque sorte la disgrace du
cinqu&me vizir, le serasker de Malte, auquel il ne
■ Celte lettre , la derniere de celles de Souleiman qui se trouvent dans
les huit volumes des Scritiure turchesche, dans les Jctcs veniiiens de la mai-
son I. R. d'Autricbe, est datee du mob de scbaban 973. Souleiman se
plaint dans cette lettre des relations que les Uskoks entretenaient avec les
habitans de Zara, de Sebenico et de Spalatro, de leur sortie de Tile de
Brazza avec deux brigantins, et du pillage qu'ils avaient fait sur une cara-
vane non loin de Macarsea.
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2i2 HISTOIRE
parla pas. Ahmed-Pascha, beglerbeg de Roumilie. &ait
en raarche pour Sofia, lorsqu'il apprit les revers de
son fr6re , le serasker Moustafa. Parmi les personnes
de la suite d'Ahmed se trouvait l'historien Selaniki ,
en quality de lecteur du Koran ; Selaniki parvint plus
tard au rang de maitre des ceremonies, puis a celui de
president de la chambre des comptes de la Mecque,
de M^dine et d'Anatolie. C est sur l'autorite de cet
ecrivain, t£moin oculaire digne de foi, que nous ba-
serons noire histoire pendant les trente-six ann£es
qui sui vent cette epoque.
Tout en se pr6parant s^rieusement k la guerre f
Maximilien ne laissa pas de tenter une nouvelle d--
marche pour ramener la paix; dans ce but, il d£puta
a Souleifman, au commencement de l'annee suivante
(31 Janvier 1566), leHongroisHossutoti, en le char-
geant de r^clamer la restitution de Pankotta et de
Kruppa [xxx]. Hossutoti arriva avec des pr^sens
pour les vizirs et vingt prisonniers affranchis; de ce
nombre &ait le vieux tschaousch Kasim, fait prison-
nier quelques annees auparavant par les soldats du
palatin Thomas Nadasdy, et dont la veuve de Rous-
tem avail express£ment demand^ la mise en liberty.
Mais comme Hossutoti n'apportait point le tribut ar-
rter6 et 6vitait toute explication relative k Tokay, Sou-
leiman le fit ^nfermer et garder a vue dans la meme
maison qu'Albert de Wyss. Aussit6t la guerre contre
la Hongrie fut r^solue et proclam£e.
Peu de temps avant Touverture de la campagne de
Hongrie, Mahmoud, ricemment destitu£ de son gou-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. ai5
vernement dans TYemen, arriva par terre k Constan-
tinople, oA il eut immediatement une entrevue avec
Selim (sch&ban 973 — f&vrier 1 566); il gagna si bien la
faveur de ce prince et celle de Souleiman par l'offre
d'immenses presens , qu'il fut promu au gouverne-
ment d'l^gypte * k la place de Sofi Kiloun Ali-Pascha.
.Ce dernier, le mdme qui , dans la bataille livr£e a
Koniah entre les princes Selim et Bayezid , avait ete
en sa quality de beglerbeg du Soulkadr d'un si grand
secours pour le premier de ces princes, avait depuis
successivement occupy les gouvernemens de Bagdad;
Haleb, Damas, et enfin celui d'Egypte. Les Arabes le
nommaient Kiloun , et les Turcs Sofi, c'est-k-dire le
philosophe contemplatif. La pompe et Ja magnificence
de Mahmoud firent un contraste frappant avec la sim-
plicity de moeurs et de costume de son pre Jecesseur.
C'est de l'administration d'Ali-Pascha que date la pre*
miere alteration de la monnaie egyptienne ; il avail
amen£ de Haleb au Caire des monnayeurs, auxquels
il fit frapper des dirhems d'une valeur reelle de trente
pour cent au-dessous de leur valeur nominale. Son sue-
cesseur, Mahmoud-Pascha, ne gouverna qu'une ann£e,
et s'efforga d'assouvir sa soif insatiable d'or et de sang
par de nombreux proc&s et de sanglantes executions.
II s'appropria les triors de l'emir de la Haute-Egypte,
Mohammed Ben Omer, et ceux du defterdar Ibrahim,
chez lequel on trouva plus de cent mille pieces d'or*
» Selaaiki, p. a4. Le Raouzutoul-ebrar dit que ce fut au mois deredjeb*
Le berat (diplome) de Mahmoud cotnme gouverneur d'Egypte, date de-
l'annee y*\ (i565), se trouve daus la Collection des leUres de TadjudeV
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3i4 HISTOIRE
Mahmoud mourut frapp£ d'une balle, en se rendant
h cheval k Boulak, au moment ou il passait devant
le palais dit des JBddoiuns '. Ses restes furent deposes
dans la mosquee de Romeila, fondle par lui.
Plusieurs raisons d£termin£rent Souleiman a se met-
tre lui-m&ne h la tfite de l'arm6e d expedition contre
la Hongrie. II voulait dans le cours de cette cam-
pagne soumettre Erlau et Szigeth, qui avaient jus
qu'alors brav6 tous les efforts de ses armes , et effa-
cer par la conqu&e de ces deux forteresses la tache
du malheureux si£ge de Make; il pensait que la for-
tune ne le trahirait pas sur la fin de sa glorieuse car-
rfere, et qu'aprfes l'avoir commencee par le siege de
Belgrade sur les frontieres mfridionales de la Hon-
grie, il la terminerait avec le mdme eclat par la prise
des forteresses de Raab et de Kotnorn, sur la fron-
ttere septentrionale du m£me royaume. D'un autre
c6t6, les representations de sa fille Mihrmah et du
scheikh Noureddin vinrent le confirmed dans cette
resolution; celui-ci lui reprochait d'avoir trop long-
temps n£glig£ les devoirs d'un bon Musulman, en
s'abstenant de conduire en personne les guerres saintes
contre les infiddles* Enfin le nouveau gouverneur
d'Ofen, surnomm£ Arslan (le lion), fils de Moham-
med-Pascha et petit-fils d'Yahyaoghli , ne cessait de
lui representor dans ses lettres et ses messages que
la Hongrie 6tait d£garnie de troupes , et que sur tous
les points cette province &ait ouverte a la conqu&e*
* Kasar Bcdewi.
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DE L'EMPME OTTOMAN. 21 5
Arslan, habitu6 k exciter encore par l'ophim et le Tin
le courage de lion dont la nature l'avait dou£, ne put
se r&igner k attendre la presence du Sultan, et dans
le dessein de lui frayer par un premier succes le che-
min de la victoire, il se porta, sans avoir regu aucun
ordre, devant Palota, et en commenga le si£ge avec huit
mille hommes et quatre pieces de canon (9 juin 1 566).
Depuis dix jours il foudroyait la place , et avait enfin
ouvert plusieurs bitches, lorsqu'il se vit contraint
de lever le siege par Farriv^e des troupes imp&iales,
que le commandant Thury avait appel&s k son se-
cours, et qui furent signages par le beschlu-aga Deli-
Lou tfi, dans une reconnaissance qull fit dans la for6t
de Bakon. Ne trouvant plus l'ennemi qu'il venait com-
battre, le comte Eck de Salm s'empara par surprise
de Wessprim et de Tata; telfut dans cette circon-
stance l'acharnement des soldats allemands, qu'ils
n'£pargn£rent ni amis ni ennemis, et £gorg6rent indis-
tinctement les Turcs et les Hongrois qui voulaient
sauver quelques-uns des vaincus, ce qui amena quel-
ques f&cheuses repr£sailles des Hongrois contre leurs
allies. Le superbe monument de Wessprim , l'£glise
fondle par Etienne roi de Hongrie, qui jusqu'alors
avait surv&u m£me aux occupations des Ottomans ,
fut reduite en cendres. Soixante Turcs faits prison-
niers k Tata furent envoy& k Raab avec le capitaine
des janissaires Kurd, dependant Farmee &ait sortie
de Constantinople, divis£e en deux corps principaux
ayant chacun une destination diff^rente. Le premier,
fort de vingt-cinq mille hommes de cavalerie et d'in-
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i.G HISTOIKE
fanterie , et de deux mille janissaires , sous les ordres
du second vizir, Pertew-Pascha , ancien aga des ja-
nissaires , se dirigea vers les frontteres de Transyl-
vanie, oft il devait faire le si£ge de Gyula, apr&s s'6tre
renforci des troupes des gouverneurs de Temeswar
et de Belgrade \ Le prince de Transylvanie, Sigis-
mond Zapolya, et le khan deCriro^e, Dewlet-Ghirai,
avaient regu ordre de reprendre Szathmar et Tokay,
dont la perte avait si vivement irrite le Sultan. Enfin,
le 1 er mai (11 schewal 973) [xxxij, Souleiman lui-
mdme se mit en marche avec un appareil plus impo-
sant que dans aucune campagne prec^dente. Cetait la
treizi&ne fois que le Sultan pr£sidait en personne aux
operations de ses armies : pendant son long r£gne
de quarante-cinq ans, il avait commande successive-
ment les expeditions de Belgrade, Rhodes, Mohacz,
Vienne, Guns, Bagdad, Corfou, Suczawa, Ofen,
Gran, Tebriz et Nakhdjiwan a . II &ait accompagn6
dans cette campagne par le grand- vizir, en qualite de
serasker, et par les troisi&ne, quatrteme et cinqui&ma
vizirs, Ferhad, Ahmed et Moustafa. Le second vizir,
Pertew-Pascha, &ait, ainsi que nous Tavons dit, parti
deux mois auparavant pour Gyula. A la suite du Sultan
se trouvaient encore lea deux juges d'arm^e, Hamid
1 D'apres Pelschewi , Pertew ne quitta Constantinople que le 7 schewal
(27 avril); mais suivant Selaniki, il ctait parti a la fin du mois de sch&ban
(mi-mars).
t La premiere fois, en i5?ij; la deuxieme, i5aa; la troisieme, i5a6;
la qtiatrieme, 1539; la cinquieme, i53a ; la sixieme, x533 j la septieme,
i536; la huitieme, i538; la neuvieme, 1541; ladixieme, i543j la oi\>
lieme, ?548; la douzieme, i55a; la treizieme, i566.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. ar 7
et Perwiz-Efendi , l'aga des janissaires Ali, le premier
defterdar Mourad-Tschelebi, le nischandji Egri Abdi-
zad6 Mohammed Tschelebi, qui avait &t6 nomrne k la
place del'historien Djelalzade. Ce dernier avait en effet
suivi le Sultan avec le titre de nischandji dans ses cam-
pagnes prec^dentes, dont il avait &rit l'histoire comme
t£moin oculaire. Le gouvernement de la capitale fut
confix k Iskender-Pascha, en qualite de kaimakam, et
aux second et troisieme defterdars ; la direction du
port et de 1' arsenal furremise au kapitan-pascha Piate
et au bostandji-baschi Daoud. Le moufti Ebousououd,
le kaimakam Iskender-Pascha et le juge de Constan-
tinople, Kazizad£ Ahmed-Efendi, accompagn&ent le
Sultan lors de son depart, le premier jusqu'a la mos-
quee d'Ali-Pascha, et les deux autres jusqu'a la porte
de la ville appelee la porte d'Andrinople. Hors des
murs, le Sultan fit halte dans la prairie de Roustem-
Tschelebi, et les poetes Abdoul Baki, Newayi, Fouri
etKaziObeidi-Tschelebi, lui pr&enterent des poesies,
ou ils chantaient d'avance les futurs succ&s de la glo-
rieuse expedition du Padischah.
Le premier camp fut &abli dans les environs de
Constantinople, pres des aqueducs, dont Souleiman
contempt avec orgueil et ravissement Tentier ach6-
vement Affaibli par F&ge et souffrant de la goutte , le
Sultan ne put faire le trajet a cheval comme aupa-
ravant, mais dans une voiture, qu'il ne quittait pas
m£me pour les conferences avec les vizirs. Sur toute la
route, le grand-vizir devangait le Sultan dune station,
afin de faire aplanir les chemins pour le passage do
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3i8 HISTOIKE
la voiture imp£riale. Ce ne fut qu'au bout d'un mois
(13 silkid6 — 1 er juin) qu'on arriva dans la plaine
riante de Tatarbazari , ou Ton dressa les tentes. Le
Sultan y regut par un chambellan une lettre, qui ltd
annongait la naissance dun fils de Mourad, gou-
verneur de Magn&ie et fils de S£lim ; il donna k cet
arrtere-petit-fils, suivant la demande qui lui en &ait
faite , le nom de Mohammed, et reprit sa marche k
travers le Balkan. Des pluies abondantes rendirent
tr&s-difficile le passage du d£fil6 de Kapouluderbend;
on s'arr&a un jour k Sofia , deux a Nissa et trois k
Belgrade , oii Souleiman arriva quarante-neuf jours
apr£s son depart de Constantinople. Sur la route,
l'armee eut k soufFrir de l'audace et des rapines des
brigands; Souleiman ordonna de les poursuivre dans
leurs repaires et de les lui livrer morts ou vivans.
L'aga des janissaires et les yasakdjis, esp6ce de gens
d'armeg qu'il avait sous ses ordres, redoubterqnt de
vigilance; par leurs soins, ainsi que par ceux du beg
de Milgara, Orenbeg, on saisit dans leurs cavernes
un grand nombre de ces brigands , et chaque sta-
tion de ]'arm£e fut marquee par quelques executions.
Orenbeg fut recompense de la security qu'il avait pro-
cure a l'arm6e par l'emploi de tschaousch-baschi, et
quatre janissaires, qui s'etaient particulterement distin-
gues dans la recherche des brigands , passerent dans
les rangs des sipahis avec une solde de treize aspres
par jour, A l'arriv£e du Sultan k Belgrade, les eaux du
Danube se trouverent tellement grossies par les der-
ni&res pluies , qu'il fut impossible d'&ablir de suite
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DE L'EMPIKE OTTOMAN. *i 9
un pont k Sabacs ; Souleiman ordonna en consequence
aux agas des janissaires et aux defterdars, k Farmee
de Roumilie, d'Anatolie et de Karamatiie, de passer
le fleuve sur des barques, et de se rendre par Semlin
dans les plaines de la Syrmie, ou il ne tarderait pas
k les rejoindre. Les chemins de Belgrade k Sabacs
&aient defences par les pluies; un grand nombre de
chameaux p£rirent; la tente imp£riale mdme fut per-
due, et le Sultan dut se servir de celle du grand- vizir.
Ce trajet si court n'avait pas demande moins de quatre
journ&s? pendant lesquelles Beirambeg , sandjak de
Semen dra, &ait parvenu k achever le pont de Sabacs ;
Souleiman le passa acheval, au milieu de son arm£e
dispos£e sur deux lignes, et fit son entree solennelle
a Semlin. Les beglerbegs de Roumilie , d'Anatolie et
de Karamanie, Schems- Ahmed , Sal-Mahmoud et le
Tscherkesse Souleiman, le regurent k la t6te de leurs
troupes en lui souhaitant, suivant lec6r&nonial d'u-
sage, mille prosp^rites. II fit aussit6t publier lordre de
c616brer k Semlin le petit Beiram. La veille de cette
ftte (9 silhic^ — 27 juin), il envoya sa propre bar-
que k Sigismond Zapolya, pour l'amener k l'entrevue
k laquelle il l'avait fait inviter par un tschaolisch quel-
que temps avant son depart de Constantinople. Sigis-
mond se rendit aux desirs du Sultan, accompagne de
quatre cents nobles de sa cour, et fut conduit paries
sandjaks et les tschaouschs jusqu a la tente imp^riale,
etablie sur une hauteur ou s^levait jadis le ch&teau
d'Hunyade. A son arriv^e au camp, il fut salu6 par
une salve generate de l'artillerie ottomane, et sa tente
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z*o HISTOIRE
fut dress£e dans le voisinage de celles des paschas. Le
jour suivant, apr&s la celebration du petit Beiram, qui
eut lieu avec une grande solennite , Souleiman distri-
bua des presens considerables a Tarm^e et k ses chefs.
Les beglerbegs regurent chacun un don de cinquante
mille asp res, les sandjaks de trente mille, J es sipahis de
mille, et les janissaires de cinq cents \ Ce ne fut que
le lendemain (1 1 silhidj6 — 29 juin) que Sigismond
fut admis en audience solennelle dans la tente du
Sultan. Le cortege du jeune prince &ait form£ de
cinquante tschaouschs qui le prec^daient , et de cin-
quante autres qui le suivaient; imm^diatement au-
devant de lui marchaient a cheval l'aga des janissaires,
le grand-chambellan et le grand-mar&hal de la cour,
avec leurs baguettes Orn6es de chaines d'argent, trois
maitres de ceremonies et quatre vizirs ; il avait k ses
c6t& les coureurs du serai en costume persan , dont
quatre, enticement v&us d'or, tenaient les ^triers de
son cheval. Arriv6 devant la tente imperiale , Sigis-
mond mit pied k terre, et attendit que cent janissaires
eussent offert au Sultan ses magnifiques presens, parmi
lesquels on distinguait douze coupes de vermeil riche-
ment travail lees, et un rubis d'une valeur de cinquante
mille ducats. Puis, accompagne de neuf grands de sa
suite, il parut devant le tr6ne d'or du Sultan, autour
v « Profectionis Ser. Principis Joannis II, elecli Regis Hung, ad Suleima-
*> num Iroperatorem Turcarum modus et series anno Chr. i566 facta et ce-
» lebratae, - tire d'un vieux manuscrit par Samuel Thorday. Voyez Catona,
t. XXIV, p. 007 et Istuanfi, t. XXIII; et, pour la reception de Sigismond,
Petschwi, f. 1 35, Ali, f. a8i, Solakiadc, f. 1*7, Salaniki, f. 3a.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. Mt
duquel &aient assis les quatre vizirs, qui en repr£sen-
tent les colonnes. Le pretendant k la couronne de Hon-
grie flechit trois fois le genou, et trois fois le Padischah
l'invita k se relever, en lui presentant sa main k baiser
et en le nommant son fils bien-aim£; le grand-vizir
lui-mfrne le conduisit k un stege orn£ de perles et de
pierreries. S'adressant alors a l'interpr&te Ibrahim,
Sigismond lui dit que, trouble par tant de magnifi-
cence, il ne pouvait que rappeler au Sultan qu'il &ait
le fils d'un de ses vieux serviteurs; Souleiman r£pon-
dit au prince qu'il ne deposerait pas les armes avant
de l'avoir plac£ sur le tr6ne de Hongrie. Quartmte
ans s'&aient 6coul£s depuis que la plaine de Mohacz
avait vu tomber le roi legitime de Hongrie Louis, dont
la mort avait &6 suivie a trois ans de distance de la
soumission de ce royaume k la Porte dans la personne
du pretendant Zapolya ; il y avait vingt-cinq ans que
le fils de Zapolya avait &e chasse d'Ofen avec sa
mere, Isabelle de Pologne, en recevant la promesse
de recouvrer un jour la couronne de son p£re. Sou-
leiman renouvela alors solennellement cette promesse,
sur la demande que Sigismond lui en avait presentee 4
par 6crit, ajoutant qu'il &ait toujours pr£t k assister
les veuves et les orphelins. II le congedia gracieu-
sement, et lui envoya le lendemain, par vingt-deux
tschaouschs, des pr^sens magnifiques, parmi lesquels
on remarquait un poignard et un sabre richement
orn& de pierreries , et quatre chevaux superbes con-
duits par le grand-ecuyer. Souleiman voulait encore
honorer Sigismond d'une invitation a un festin, maisr
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ro HISTOIRE
le grand-vizir Ten dissuada en lui repr&entant que
le [mnce, d'une faible complexion , pourrait 6tre in-
commode par les mets turcs auxquels il n'£tait pas ha-
bitu6 , et que son indisposition pourrait &re attribute
par les Hongrois k un empoisonnement. Ce n'&ait
\k qu'un pr&exte sous lequel Mohammed-Sokolli ca-
chait le veritable motif qui le portait k vouloir pri-
ver le prince de l'honneur d'&re traits par le Sultan.
Sokolli avait invito Sigismond k venir lui rendre visite
dans sa tente; mais celui-ci c£dant aux conseils de
Bekessi, qui lui repr&entait qu'il n'&ait pas de sa
dignity de faire un tel honneur k tin esclave. avait r£-
pondu dune manure Evasive k l'invitation du grand-
vizir, en temoignant le d^sir que leur entrevue se fit a
cheval et en pleine campagne; telle fut Torigine de la
haine de Mohammed-Sokolli contre le prince. Deux
jours apr&s (1 3 silhidj'6 — 1 cr juillet) , Sigismond eut son
audience de cong£, dans laquelle le Sultan lui adressa
ces paroles : « Prends spin de te pourvoir de soldats,
de poudre, de plomb et d'argent, et si tu £prouves
quelques besoins, fais-nous les connaltre, afin que
nous puissions les satisfaire. » Souleiman se leva deux
fois pour l'embrasser. Dans sa demande £crite, Si-
gismond ne r£clamait que le territoire compris entre
la Theiss et la fronttere de Transylvanie, £vitant d'in-
sister sur la restitution de Temeswar et de Lappa, ou
se trouvaient dejk des mosquees , ainsi que sur celle
de Debrezin et de Szolnok , deux villes frontHares.
En faisant droit k sa modeste demande, le Sultan mit
en liberty trois cents prisonniers qui relevaient de son
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DE L'EMPlRfi OTTOMAN. a*3
gouvernement. Le jour de la derntere audience du fits
de Zapolya , Souleiman regut aussi l'ambassadeur du
roi de France, Guillaume d'Aube , qui s'&ait rendu
au camp ottoman pour presenter au Sultan les feli-
citations de son souverain au sujet de la campagne
qui allait s'ouvrir en Hongrie. Dans cette occasion ,
l'ambassadeur du roi tr£s-chr&ien fglicita Sigismond
Zapolya d'avoir abjur6 la foi catholique, pour em-
brasser la doctrine de Luther.
De Semlin, le beglerbeg de Karamanie, Souleiman-
Pascha, re$ut ordre de se dinger sur Ofen ; le Sultan
lui-m6me devait passer le pont de Peterwardein pour
marcher sur Erlau. Mais on apprit que le comte
Nicolas Zriny avail surpris a Siklos Mohammed, san-
djak de Tirhala, ancien grand -£cuyer tranchant de
Souleiman, l'avait tu6, ainsi que son fils , avait pilte
son camp et emporte un butin considerable, com-
prenant , en argent seulement , une somme de dix-
sept mille ducats. Furieux de cette nouvelle, Soulei-
man changea son plan de campagne, et r£solut de
punir avant tout Zriny par la conqu&e de Szigeth. H
fit jeter sur le Danube, pr& de Vukovar, un pont
sur lequel passa Tarm^e d6s qu'il fut acheve. Cette
premiere marche, conduite par le kapidji-baschi Ali-
Aga , en sa quality de quartier-maitre g£n£ral , fut
tellement raptde, que le trajet de deux journees se
fit en une seule ; le Sultan , en proie aux irritations
dune yieillesse val&udinaire, fut choqu6 de cet exc£s
de diligence , et voulut punir le zfele mal entendu du
kapidji-baschi en ordonnant de lui trancher la t£te.
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**4 HIStOIRE
Mais le grand-vizir parvint k lui sauver la vie , en
repr&entant k Souleiman que cette infraction k ses
ordres aurait cependant un heureux r£sultat, et jette-
rait la terreur parmi ses ennemis, en leur montrant
que , malgre le poids des annees , Sa Majesty pou-
vait encore doubler les marches comme dans sa jeu-
nesse. Une nouvelle crue du Danube emporta le pont
de Vukovar [xxxii] ; et dans l'impatience que lui causa
cet accident, Souleiman ordonna d'en etablir un autre
sur la Drave , pr6s d'Essek. En moins de dix-sept
jours, ce pont, compost de cent dix-huit pontons
d'une longueur totale de quatre mille huit cents au-
nes, fut prft pour le passage de l'arm£e '. Le Sultan
vint le visiter au bruit du canon, sur un yacht res-
plendissant d or, dont le gouvernail Aait conduit par
Ali Portouk , le vieux beg de Rhodes. Charg6 du com-
mandement de la flottille du Danube, Ali Portouk
avait amen4 ce yacht et trois galores des eaux du
Bosphore dans celles du Danube et de la Drave. En
descendant k terre , Souleiman entra dans la tente de
l'aga des janissaires, et r£compensa g6n£reusement son
z&e et celui du commandant de la flottille; il ordonna
aux beglerbegs de faire sans d£lai passer le Danube k
l'arm£e, qu'il suivit lui-m&ne vingt-quatre heures
apr&s, le 1 er moharrem 974 (19 juillet 1566). Quoi-
qu'il eAt et6 s£v6rement dtfendu de piller et d'in-
cendier le pays , plusieurs villages furent livr£s aux
» Selaniki, p. 35, et Almosino, d'accord avec lui, p. 4i : Paente de 4,800
pasos de largo y 14 de ancho acabada en 16 dias; settlement il s'agit ici de
pas et non pas d'auoes.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 2*5
flammes; Souleiman, irrit^ de celte indiscipline, or-
donna au grand-chambellan Goulabi-Aga et k cent ka-
pidjis , de pendre tous les auteurs du pillage et de
l'incendie sur le th&tre m£me de leurs exces ; il en-
joignit egalement au grand-vizir de veiller, conjoin-
tement avec les tschaouschs, k la prompte execution
des coupables. Le commandant de rartillerie de stege
regut ordre de faire trainer, pardesbuffles, les pieces
de campagne a Szigeth , et notamment le gros canon
de Katzianer, qui avait ete depos6 comme troph^e a
Arad, par Khosrew et Ferhadbeg. Pendant cette mar-
che, Tarmac campa k Harsany, entre Funfkirchen et
Siklos, village fameux par Texcellence des vins de son
terroir, et tristement c^lfebre dans Tliistoire ottomane
par l'execution d'un des plus braves gen^raux de la
Turquie.
Le gouverneur d'Ofen, Mohammedbeg , dit le Lion
(Arslan), dont la tentative premature sur Palota avait
indispose le Sultan, s'&ait attir6 toute sa colore en
laissant prendre Wessprim et Tata; il avait en outre
excite contre lui le ressentiment du grand-vizir, par
des leitres insultantes que Souleiman avait com-
muniques k ce dernier \ En arrivant k Siklos, le
Sultan ordonna au tschaousch-baschi Bourounsiz de
* On lit dans le Rapport de l'ambassadeur venitien sur la mort de Mo-
hammedbeg : « II Sgr. haveva fatto tajar la testa (il fiit Strangle) al Bassa di
» Buda per sospetto , che havesse intelligenza coir Imperatore, e che il
» primo Vesir non era in gran confidenza. » Archives de la maison I. R.
d'Autriche. Les lettres d'Arslan-Pascha a cet ambassadeur prouvent tout-a-
fait le contraire.
T. YI. t5
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art HISTOIRE
se rendre avec qirinze tschaouschs k Of en , et de lui
f rapporter la t&e du gouverneur de cette place, Are-
lan-Pascha. Au moment oA il signtit cet ordre, un
&mssaire du gouverneur liri annonga que celui-ci avait
quitt<§ sob armfe depuis Iroig jours pour se rendre au
camp ottoman. Sur cet avis , Souleiman substitua i
son premier ordre celui de le decapiter, au moment
o& il entrerait dans la tente du grand-vizir. Le len-
demain matin, lorsque l'arm£e s'arr&a k Harsany, et
pendant que les vizirs etaient assembles au divvan,
Arslan-Pascha arriva vers la fin du conseil , accom-
pagn6 de cavaliers couverts de lourdes armures; il se
pr&enta a la tente du grand-vizir et prit place sur le
stege qui lui avait £t£ prepaid. Sa faardiesse confondit
tout le monde : les tschaouschs se demandaient ce
qu'il venait faire au camp, et chacun le jugeait fou
d'avoir ainsi abandonn£ les troupes qu'il commandait
sans un ordre du Sultan. Le grand-vizir, s'avangant
vers lui, Vinterpella ainsi : « Que pr&ends-tu faire ici?
A qui done as-tu confie le soin de ton gouvernement ?
Le Padischah t'avait nomme beglerbeg, et tu as livr6
ses forteresses aux infideles. Malheur k toi , misera-
ble! ta sentence de mort est prononcee. » Et se tour-
nant vers le tschaousch-baschi, il lui dit : «Fais dis-
paraitre cet homme de la terre. » Arslan tira de son
sein deux rapports qu il voiilait soumettre k Tempe-
reur; le grand-vizir les prit, et au m&me instant le
tschaousch - baschi s'empara de sa victime. En l'ab-
sence du bourreau, son aide fut charge de l'ex£cution.
Lorsqu' Arslan sortit de la tente, Ayas-Pascha lui
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DE L'EMPtRE OTTOMAN. ±dj
dit : *Le* choses de ce monde n'ont pas de dur£e ;
repens-toi et tourne tes regards vers le ciel. » Sans
r^pondre k cette exhortation, Arslan s'adressant au
bourreau : « Moll cher malt re, lui dit-il , sois prompt ,
el prends soiti de bien appliquer ton ponce. » Atissi-
tdt celui-ci l'&rangla. Le gouvernement d'Ofen fut
donn4 au neveu du gratid- vizir Moustafa-Sokolli. Tons
leg biens d'Arslan-Pascha furent confisqu£s an profit
de l'Etat. On veilla pendant la nuit pr&s de son corps,
et le lendemain matin on le transporta an tombeau de
la farbille Yahyaoghli, oA il fut d£pos<5 prfes des restes
de son p&re, qui, dit -on, Tavait autrefois maudit dans
sa colore, et lui avait pr6dit sa fin tragique '. L'in-
fortune Mohamrtiedbeg, surnomm£ le Lion pour
sa valeur £prouv£e , dtait petit -fils de Balibeg , fils
d'Yahya-Pascha, gouverneur de Bosnie, Tun des plus
braves g6n4raux de Mohammed II. Son aleul Hamza
Balibeg s'&ait distingue d£s l'ftge de quatorze ans dans
une lutte h£roique , et s'£tait fait remarquer au si£ge
de Vienne, dans son poste sur le Wienerberg. Yahya-
Pascha, gendre de Bayezid, avait eu quatre fils, tons
c^tebres comme hommes de guerre; Yvai d'eux, Bali-
beg, avait eu trois fils et un petit -fils gouverneurs en
Hongrie, savoir ; Ahmed k Stuhlweissenbourg, Der-
wisch h Szegedin et plus tard k Funfkirchen, Mo-
hammed et Arslan k Ofen.
Le lendemain de r execution d'Arslan-Pascha, le
Sultan faisait son entree solennelle k Funfkirchen,
precede par les fils du grand- vizir, Kurdbeg et Ha-
i Selaniki, temoia oeulaire de ceite execution, p. 38.
i5»
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aa8 HISTOIRE
sanbeg (4 aoAt 1 566). Pendant la marche, le general
des ouloufedjis, Ferhadbeg, lechef des mouteferrikas
et cinq lecteurs du Koran, r&itaient la sourre de la
victoire et de la cortquite. Le Sultan, qui saluait de sa
voiture l'armde rang£e en ligne sur son passage, &ait
escort^ h gauche par les vizirs Ahmed -Pascha et
Ferhad-Pascha, k droite par le ftere de ce dernier,
Moustafa - Pacha , cinqui&ne vizir, et par Kiloun
Sofi Ali - Pascha , sixi&ne vizir r£cemment rappele
d'Egypte \ Trois jours auparavant, le beglerbeg de
Roumilie &ait venu camper, avec quatre-vingt-dix
mille hommes et un pare d'artillerie de trois cents ca-
nons, sur la colline de Semilihov, au nord de Szigeth.
Le 5 aoAt, Souleiman arriva lui-m&me devant Szigeth 3 ,
et donna Tordre d'en commencer le siege. Cette place
a deux milles de Fiinfkirchen, appetee aussi Szigeth-
war, e'est-k-dire la ville des iles, est entour£e de tons
les c6t£s par la riviere d' Almas, et divis£e en trois par-
ties que reunissent entre elles des ponts, le chateau,
l'ancienne et la nouvelle ville. Le chateau pr&ente
cinq bastions construits en terre et en fascines, et en-
tour& d'un triple foss£; la tour ronde, qui sert de
magasin aux poudres , les clochers et les corps-de-
garde, sont seuls b&tis en brique. A l'approche des Ot-
tomans, Zriny, commandant de Szigeth, fit Clever
i Cest a cette epoque qu*on voit apparaitrt un siiieme vixir, et non sous
le regne de Selim II, comme l'afiirme Mouradjea d'Ohsson, Tableau da
V Empire ottoman, t. VII, p. aia.
* Et non le i«* tout, comme le dit Istuanfi. Tous les historiens otto*
mans sont d'accord avec Budina, qui donne la date du 5 aout.
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. aa 9
line croix au milieu de la forteresse; il ordonna en
m£me temps Fex^cution d'un soldat qui avait tir£ son
sabre contre un de ses chefs; mais k ce ch&timent
conforme k la discipline militaire, Zriny joignit une
cruaute inutile, en faisant trancher la t&e k un aga turc
qu'il avait fait prisonnier. Pour r^pondre a la pompe
que deployait Souleiman et montrer qu'il &ait pr6t k
le recevoir dignement , Zriny fit tendre les remparts
de draperies rouges et recouvrir la tour k l'ext&ieur
de plaques detain qui &incelaient comme de Targent;
enfin, des que le Sultan parut sur la colline de Semi-
lihov, il lui souhaita la bien-venue en le saluant par la
d£charge d'un gros canon. L'attaque commenga aussi-
t6t de trois c6t£s k la fois. L'aile droite des Ottomans
&ait commanftee par le troisi&me vizir Ferhad-Pascha
et le beglerbeg d'Anatolie Schems-Ahmed ; Taile gau-
che, par le cinquifeme vizir Moustafa-Pascha et le beg-
lerbeg de Roumilie Sal-Mahmoud. L'aga des janissaires
et Ali-Portouk, beg de Kodja-Ili, occupaient le centre ,
et avaient sous leurs ordres les begs des frontieres ;
parmi ceux-ci Nassouh , beg de Poschega, fut charge
de foudroyer la vieille ville avec cinq gros canons ,
notamment avec celui de Katzianer qui , par l'ordre
expr£s de Souleiman, avait et£ d^parti aux janissaires.
Gonvaincu de Impossibility de d£fendre la nouvelle
ville, Zriny la fit livrer aux flammes. Les Turcs
se log&rent sur les d£combres et y dresserent des bat-
teries ; ils comblferent ensuite au moyen de sacs de
terre les mar^cages qui s£parent l'ancienne ville de la
citadelle, et se trac&rent ainsi vers cette derntere un
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33o HISTOIKE
cbemin solide. Le quinzieme jour apr& 1'arrivee du
Sultan, les asstegeans &aient maitres de touted las
fortifications ext^rieures; la citadelle seule continuant
d'opposer a leurs efforts une resistance desesper^e
(1 9 aoAt 1 566). Ce fut en vain que Souleiman tenia de
fl&hir rWroisme pers^verant de Zriny, en offrant de
lui ceder )a possession exclave de toute la Croat^e.
Les Ottomans avaient pris le porte-drapeau et le tronv
pette du fils ain6 de Zriny , qui se trouvait dans Tarm^e
envoy ee par Ma^imilien au secours de Szigelh; Sou-
leiroan, dans la vue d'alarmer Zriny sur le sort <te
son fils, ordonna que ces prisonnjers fussent conduits
devant les murs de la citadeUe , et qw le premier y
deploy&t son drapeau, tandis que le second sonnerait
l'air de la victoire l . En ui&pe temps il fit jeter (Jans la
place, en lesattachant a des filches, de$ lettres Writes en
langues allemande, hongroise et create, et tendant a
semer la division parpii les troupes, ou k ebranler leqr
fidelite par de belles promesses. Ces lettres avaient ete
composes par l'interprete Ibrahjmbeg , le kiaya Lal^
Moustafa-Pascha et le secretaire intime Feridoun, qui
avait et£ recemment promu k la place lucrative de
nischandji a , pour avoir fait quitter au grapd- vizir un
» « Forgacsii Zigethi Hungarian claustri pra$tantissimi vera descriptio %t
» obsidionis epitome. » Forgacz ne fait mention que du trompette, tandis
que Selauiki parte aussi du porte-drapeau.
> Selauiki remarque a ce mjet que les mauteferrikas (les dissembles,
qu'en francais on pourraU traduire par les ofljeiers du service extraordi-
naire) n'^taient qu'au nombre de cinquante, et qua cette epoque leurs places
6taient aussi bonorables que lucratives : dix avaient des fiefs et quarante un
traitement fixe.
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. *3i
paste dangereux, oA qudqucs tartans plus lard we
bombe avait tu6 plusieurs aoldats.
Dans le premier assaut donn£ k la citadelle, lea as-
siegeans repousses perdirent deux drapeaux, et eurent
a regretter la mort de l'anciengouverneur d'Egypte,
Soft Ali-Pascha x , accouru du Caire pour assiater a cette
campagne (9 sftfer — 96 ao&t). Le second assaut, livr£
Irois jours apr&s , le jour m^rne de l'anniversaire de
la bataille de Mohacz, de la prise dQfen et de Bet*
grade, fut plus acharn6 encore et plus terrible [xxxhi];
quatre jours plus tard, on en tenta un trois&me ; mais
les janissaires se retir£rent bientdt , et attendirent IV
chfevement de la mine pratiqule sous le grand bastion.
Dans la matinee du 5 septembre, cette mine fit ex-
plosion avec un vif 6clat de lumiere, qui semblait &re
comme la torche funeraire de Souleiman ; car ce grand
souverain mourut dans la nuit du 5 au 6 septembre
(20 s&fer), soit de decrepitude, sent des atteintes dune
dyssenterie, soit enfin dune attaque dapopkxie. Le
grand-vizir eut soin de cacher cet £venement, et, s'il
faut en croire certains historiens, pour mieux assurer
le secret , il fit etrangler le medecin du Sultan. Ainsi
Souleunan expira , sans emporter avec lui la conso-
lation de la prise de Szigeth , et avant d avoir regu la
nouvelle de la reddition de Gyula. Cette derni&re place,
asstegee depuis le 5 juillet par Pertew-Pascha k la t6te
de vingt-cinq mille hommes, venait d'etre rendue par
Keretsenyi, Dans I'impatience et l'irrttation que lui
r Budin* 1'appeHe Miserski , e'eat-ardire cefoi do Caire.
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<*3* IUSTOIRE
causail la resistance de Szigeth , Souleiman avait ecrit
au grand- vizir quelques faeures avant sa mort : « Cette
chemin^e n'a done pas cess6 de brtiler, et le gros
tambour de la conqu&e ne se fait done pas encore
entendre. » De pr&endues lettres autographes du
Sultan , congues dans le mdme sens , furent apres sa
mort pubises dans le camp, sous la forme dordres
du jour, et communiques aux vizirs qui n'&aient pas
initios au secret. L'auteur de ces lettres &ait Dj&feraga,
premier porteur d'armes du Sultan ; lui et le secre-
taire intime Feridoun &aient les seuls k qui le grand-
vizir eftt d£voil£ la mort du Sultan ; Tun et l'autre
continu£rent plus tard , sous le regne de S£lim II ou
plutdt de Sokolli, son grand- vizir, Ji justifier la con-
fiance qu'ils inspiraient, le premier comme gendre de
Sokolli et aga des janissaires, et le second comme reis-
efendi. Le 8 septembre (22 s&fer), tous les ouvrages
ext^rieurs £taient d&ruits , et, parmi les fortifications
int^rieures , la tour seule &ait intacte , avec son ma-
gasin aux poudres. Voyant que le moment etait venu
de se rendre ou de p£rir, Zriny choisit ce dernier parti
avec une dignity ferme et une admirable tranquillite
d'esprit ; d£cid£ & mourir en h£ros , il pr^para avec
un froid courage son heure derntere. II se fit donner,
par son chambellan Frangois Cserenkoe, un surtout
en soie, passa sa chaine d'or autour de son cou, se
couvrit la t&e d'un chapeau noir, brod6 d'or, et sur-
mont£ d un panache en plumes de h£ron, sous lequel
elincelait un diamant de prix ; puis il fit mettre dans
sa poche cent ducats de Hongrie , rejetant avec soin
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. a33
ceux qui portaient le litre de la monnaie torque, afin,
disait-il , que celui qui s'emparerait de ses depouilles
ne pftt se plaindre de n'avoir rien trouv6 sur lui. Se
faisant ensuite apporter les clefs de la forteresse, il les
mit dans la poche qui contenait les ducats , et dit a
ceux qui 1'entouraient : « Aussi long-temps que ce bras
pourra se mouvoir, nul ne m'arrachera ces clefs ni
cet or; apr£s ma mort, s'en emparera qui voudra!
Mais j'ai jure que dans le camp turc personne ne
pourrait me montrer au doigt. » Parmi quatre sabres
d'honneur incrust£s d'or, qu'il avait regus pour des
actions d'£clat dans le cours de sa carrifire militaire,
il choisit le plus ancien : « C'est avec cette arme, dit-il,
que j'ai acquis mes premiers honneurs etma premiere
gloire, et c'est encore avec elle que je veux paraitre
devant le tr6ne de FEternel , pour y entendre mon
jugement. » Pr£c£de de son porte-drapeau et suivi du
page qui portait son bouclier , il descendit dans la
cour sans casque ni cuirasse, et se presentant aux six
cents braves determines k mourir avec lui, il stimula
leur courage par une courte allocution, qu'il termina
en invoquant trois fois le nom de Jesus. Deja le feu
envahissait sur tous les points le ch&teau interieur, et
Ton ne pouvait plus diff&rer d'un instant le signal de la
sortie. Prfes de la grande porte, se trouvait un mortier
charg^ de mitraille; Zriny ordonna de le demasquer
et d y mettre le feu; plus de six cents des assaillans
qui se pressaient sur le pont furent renvers£s. A
travers la fum£e causae par r explosion du mor-
tier, Zriny s'elanga sur les Turcs, comme la foudre
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234 HLSTOIHE
qui pence hi nue. Arec Laurent Juranitsch, son fidile
porte-drapeau , il se pr&ipka an milieu des rangs les
plus series, et tomba frappe k la fob de deux balles
dans to pdtrine et d'une fteche k la ttte l . A cette
vue, les Ottomans pouss&ent k trois reprises les oris
de Allah/ Les janissaires s'empartrent du brave de-
fenseur de Szigeth , et le porterent sur leurs Ipaules
devant l'aga; puis le deposant encore vivant sur laflftit
du canon de Katzianer, la face tourn£e contre la terre,
Us lui tranch&rent la t&e [xxiv]. Ainsi mourut sur le
canon m6ine du trakre Katzianer, celui qui l'avait fait
assassiner dans son propre chftteau , expiant par cette
fin la violation de l'hospitalit£ et l'ex£cution injuste
et cruelie dun aga turc, son prisonnier.
D£s ce moment, le raeurtre et l'incendie se dechai-
n£rent avec une fureur sauvage (tons la citadelle ; le
chemin qui y conduisait £tait jonch£ de cadavres; les
femmes et les enfans, entrain£s hors de leurs foyers ,
etaient souveet massacres irapitoyableroent par les ja-
nissaires qui se disputaient leur proie. Le chambellan,
le tresorier et l'£chanson de Zriny etant tombes an
pouvoir de l'ennemi, eurent la barbe coupee et briilee.
Le grand- viair leur fit demander, par l'interm&tiaire
de Imterpr&e Ibrahim, quels etaient les tr£sors de
Zriny, et ce qu'ils etaient devenus. L'lehanson, jeune
Hongrois dun noble orgueil a , r^pondit avee assu-
• PetscUewi, d'apres Sehuulu, dit atteint pax una balle du poids de cinq
drachmes.
■» Selaniki, p. 4g, donnc ces details, qu'on ne trouve pas dans Istuanfi ,
Budina^ Fergaci at Sarakucc**.
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DE L'EMPHIE OTTOMAN. a55
ranee : « Zriny poas^dait cent mille ducats hoBgrob f
ce«t miHe <Seus, mille coupes d'or de toutes dimen-
sion et une riche vaisselle; il a tout detrait, e'est a
peine g'il a laiss6 une valeur de cinquante mille ducats
en olpjets de prix, deposes dans une caisse; mais ses
provisions de poudre n'en sent que plus considera-
bles; elles vont faire explosion au moment m£me ou
gous parloas, et le feu, qui seul vous a Hvr6 la for-
teresse, deviendra aussi la cause fie la mine de voire
armee. * Ces paroles menagantes furent confirmees
par les deux autres prisonniers. Le grand-virir alarme
ordonna au tschaousch-baschi de monter k cheval
avec tons ses gens, et de prendre les mesures neces-
saires pour prevenir un tel malheur. Les tschaouschs
eurent h peine le temps d'avertir les chefs de se retirer
et de donner I'ordre de la retraite; la tour sauta avec
un horrible fracas, ensevelissant plus de trois mille
hommes sons ses ruines. Le m6me jour [xxxv] , le
grand-vizir envoya, par 1'entremise du grand cham-
ballan Goulabt-Aga , la t&e de Zriny , avec son cha-
peau et sa chaine d'or, k Moha aimed- Sokdlovich, son
neveu, gouverneur d'Ofen , en lui enjoignant de h
iwe porter aussit6t au camp de l'empereur. Confbr-
Bftement k cet ordre , Sokollovich adressa ces tristes
ctepouiJies m comte Eck de Salm. Plus tard, la tdte
fat port6e par Balthazar Bacsanyi k Tschakathurn, om
elte fut d^posee dans le couvent de Sainte Hel^ne, a
c6t6 du lombeau de l'epouse de Zriny, n6e Frangipan.
lie hiiitjeoxe jour aprfe inoccupation de Szigeth, Sokolli
convoqua un grand drwan, dans lequei le moutefer-
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a36 HISTOIRE
rika Djelalzade, le refe-efendi Mohamtned-Tschelebi,
et le secr&aire-d'Etat Feridoun ecrivirent des lettres
de vietoire, qui furent exp£diees, au nom de Soulei-
man, comme s'il etit encore v£cu, k tous les gouver-
neurs de 1'empire, au khan de Crim£e, au sch£rif de la
Mecque, au schah de Perse, et autres souverains allies
de la Porte. On distribua des recompenses et on ac-
corda des augmentations de solde ; puis on publia tine
pr&endue lettre de Souleiman, dans laquelle son
Venture avait &6 contrefaite par son premier £cuyer f
Dj&fer ; cette lettre ordonnait qu'une partie de Tar-
mee partirait aussitdt pour le stege de Babocsa, et que
l'autre serait employee k reconstruire les fortifications
de Szigeth. En m£me temps on r£pandit le bruit que
le Sultan, ne pouvant k cause dune attaque de goutte
paraitre en public, &ait dans l'intention de se rendre
a la mosqu£e de Szigeth, dfes que la construction en
serait achevee, pour y faire sa prifere du vendredi et y
rendre grftce de sa brillante vietoire. On fit diverses
promotions a des emplois devenus vacans par la mort
de leurs titulaires [xxxvi]; a cette occasion, Djelalzade
rentra dans sa place de nischandji. En occupant les
troupes aux fortifications de Szigeth et k r expedition
de Babocsa , la prudence de Sokolli sut cacher le se-
cret de la mort de Souleiman pendant trois semaines,
et donner ainsi k rh^ritier pr&omptif le temps d'ar-
river de Kutahia a Constantinople. Une semblable me-
sure avait ete employee avec un egal succfes a la mort
de Mohammed I er , Mohammed II et S&im I cr . Mo-
hammed Sokolli, le conquerant de Szigeth, saisit
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. ^7
d'une main si ferine les rfines du gouvernement, que,
non seulement durant ces trois premieres semaines ,
mais encore pendant les treize ann£es qui s'ecou-
lerent jusqu'a sa mort , il fit observer Addlement les
institutions de Souleiman , et maintint la prosp£rit£ et
la puissance de lempire au point d'&evation ou ce
grand souverain les avait port&s.
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LIVRE XXXIV.
Monumens et hommes distingues da regne de Souleiman I. — Secretaires
d'etat, poetes, jurisconsultes. — Reorganisation du corps des oulemas
et de 1'armee. — Systeme feoda), impots, lois penales et reglemens de
police. — Causes de la decadence de l'empire ottoman, a dater de la
mort de Souleiman.
Les lois et statuts de Souleiman sont consideres
comme les 61£mens les plus importans de sa gran-
deur par les Ottomans , qui donnent h ce prince le
surnom de Kanouni (le tegislateur), tandis que les his-
toriens europ^ens le designent sous le titre de Grand
ou de Magnifique. En faisaht remuneration des mo-
numens de son r&gne, nous devrons signaler non seu-
lement ceux de la literature et des arts, mais encore
ceux qui ont rapport k la legislation. Nous donne-
rons d'abord un apergu des constructions et des ou-
vrages scientifiques qui ont illustre son Ipoque, et
nous ferons connaitre ensuite les institutions que l'em-
pire ottoman dut a son genie organisateur. Bien qu'en
rapportant les &venemens politiques et militaires, et les
noms des g6n£raux et des hommes d'Etat qui y prirent
part, nous ayons parle sommairement des ceuvres
[
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HISTOIRE DE I/EMPIRE OTTOMAN. *3g
d'art et de literature, ainsi que de leurs auteurs, nou*
croyons cependant devoir nous appesantir davantage
sur un sujet aussi important, ne pensant pas que ce
soit nuire k l'unite de l'histoire que d'en £clairer dun
jour £gal toutes lea parties, au lieu de produire les
unes k la lumi&re , et de rellguer les autres dans l'om-
bre. Aucune autre 6poque de r empire ne fut aussi
feconde en productions litt^raires et scientifiquea, que
le regne de Souleiman, qui dura quarante-sht ans, et
que celui de son fils S61im II, qui ne fut % que de huit
ann£es.
Ainsi que nous l'avons d£j& remarqu£ , les histo-
riens ottomans attachent une tr&s-haute importance
k ce que le nombre dice ait preside au r&gne de Sou-
leiman. Qu'il nous soit done permis, avant de porter
un jugement d^finitif sur la grandeur veritable ou
supposee de Souleiman , de donner quelques details
et ^claircissemens sur ce nombre dix , appliqu£ par
les Orientaux k sa personne et k son r6gne. D'apr&s
eux , l'influence de ce nombre s'&ait manifesto par
la volont£ divine, de la manure suivante : N6 dans
la premifere ann£e du dixi&ne stecle de Th^gire ',
Souleiman , le dixteme Sultan des Ottomans ', le
dixieme grand souverain de son epoque 3 , et p&re de
i Annee 900 de l'hegire (1494)* •
« 10 Osman, 20 Ourkban, 3o Mourad I, 4« Bayexid I, 5o Mohammed I
60 Moarad II, 70 Mohammed II, 80 Bayeiid U, 90 S61im I, 10° Soulei-
man I.
3 10 Charles-Quint, ao L&m X, 3o Henri VIII, 40 Francois I, 5o Iwan
Vassiliewitsch , 60 Schah-Ismall, 70 Scbah-Ekber, 80 Anlrea Gritti, 90 Si-
gisraoud I, 100 Souleiman.
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!*4o HISTOIRE
dix enfans v , offrait en sa personne les dix grandes qua*
lit6s des souverains [i]; sous son regne, on compta
dix grands-vizirs a et dix secr&aires-d'Etat 3 d'un m6-
rite distingu£ , dix l£gistes * profonds et dix grands
poetes 5 ; enfin le Sultan s'illustra dix fois par la con*
qu6te de dix villes et forteresses [n].
Aprds avoir consacr6 les neuf livres prec^dens au
ricit des £v£nemens politiques du rfegne de Soulei-
man, nous ne parlerons dans ce dixi&me livre que
des monumens de Tart et de la literature, et des ins-
i 10 Sultan Mohammed, a« Mahmoud, 3o Abdoullah, 40 Djihanghir,
5o Moustafa, 60 Bayezid, 70 Selim, 80 Mihrmah, l'epouse de Roustem,
90 et io° deux princesses dont le nom est inconnu , et dont fait mention le
Rapport de l'ambassadeur veoitien.
a loPiri-Pascha, 20 Ibrahim-Pascha, 3o Ayas-Pascba, 40 Loutfi-Pascha,
5o Souleiman-Pascba, 60 Roustem-Pascha, 70 Abmed-Pascha, 80 Roustem-
Pascba pour la seeonde fob, 90 Semiz Ali-Pascha, to Mohammed Sokolli.
Voyez aussi le savant rabbin Almosnino : Que tuviesse diet Oliricires, que
son la parte principal del Reino; il parle encore de dix agas des janissaires :
Dies Agas de Genicaros, la mayor fortaleza y vigor de su exercito. ( Hadji
Khalfa, Tables chronologiques , p. a 36.) II se trompe cependant au sujet
des dix campagnes qu'il pretend avoir 6te condiiites par Souleiman en per-
sonne : Las guerras que dio personalmente Jueron dies, p. 84 ; car il con-
fond en une seule les deux campagnes de Mohacz et de Vienne , omet celle
de Hongrie en i54i 9 et n'en fait qu'one des deux dernieres guerres contre
le schah de Perse.
3 10 Iskender-Tschelebi, ao Moostafa Djelalsade 1 , 3o Mohammed Rama-
lanzade, 40 Khalilbeg, 5o Eboulfazl, 60 Mohammed -Tscbelebi , 70 Nak-
kasch-Ali, 80 Newbeharzade', 90 Ibrahim, io° Feridoun,
4 10 Kemalpaschazade, ao Ebouzououd, 3© Ibrahim de Haleb, 4*Tasch-
koeprisadl, 5o Salih Djclalxade, 60 Hafiz-Adjem, 70 Lari, 80 Birgheli,
90 Khaireddin, io° Sourouri.
5 10 Baki, ao Khiali, 3o Sati, 40 Ghazali, So Yabyabeg, 6« Souzouli,
70 Djelali, 80 Fikri, 90 Rewani, io° Lamii,
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DE L'EMl'lllE OTTOMAN. 24 1
Htutions qui signal&rent cette p&iode de 1'histoire ot-
tomane. Nous traiterons successivement des construe-
tions et des fondations qui y furent annexees, des
secr&aires-d'Etat , des tegistes et des poetes, de la
nouvelle organisation du corps enseignant, de l'antt£e
et du tr&or, des lois sur les fiefs, des lois finales
et des r£glemens de police et d'administration inte-
rieure.
Nous avons parte plus haut de la mosquee Soulei-
maniy£ et de six autres, savoir : la mosque Selimiyi,
elev^e sur le tombeau de $£lim I er ; celles des princes,
sur le tombeau des fils de Souleiman, Mohammed et
Djihanghir, k Galata ; les deux mosqu£es de la sultane
Mihrmah, a Scutari et k la porte d'Andrinople; celle
de la sultane Khasseki, c'est-&-dire de Roxelane, sur
le marche aux femmes, que le Sultan construisit toutes
aux frais de son tresor, quoiqu'elles ne portassent
pas son nom. Aprfes Souleimaniy6, le monument dont
Souleiman s'enorgueillissait le plus &ait l'aqueduc
dont nous avons d£jk fait mention, et qu'on d£signait
sous le nom des Quarante-Arches ou des Quarante-
Fontaines , parce qui] alimentait quarante fontaines
publiques. Par la construction de Souleimaniye , de
l'aqueduc des Quarante-Arches et du pont de Tschek-
medje . Souleiman rivalisa de magnificence et d'eta-
blissemens utiles avec Justinien, a qui Ton doit l'eglise
d'Aya-Sofia , les aqueducs de l'smcienne Byzance et
un pont en pierres sur la m£me riviere. Si on en ex-
cepte Constantin , fondateur de Constantinople , et
Mohammed qui conquit et restaura celte capitale, les
T. VI. l6
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242 HISTOIRE
deux souverains a qui celte ville doit le plus grand
nombre d'embelli&emens sont Justinien-le-Grand et
Souleiman. Une description d£taill£e de tous les Edi-
fices construits par le [Mince ottoman fournirait ma-
ture & un ouvrage aussi &endu que celui de Procope,
qui a d£crit en six chapitres les monumens Aleves par
Justinien ; comme Procope, Tauteur de cet ouvrage
pourrait s^puiser en louanges k l'aspect des mosqu£es
de la capitale et des provinces , des aqueducs , des
ponts, des fortifications et des nombreuses fondations
pieuses , dont Souleiman dota Tempire. A l'exemple
de son p£re S£lim , qui arracha h Toubli le tombeau
du grand-scheikh mystique Mouhiyeddin al-Arabi,
et le rendit aux pelerinages des fiddles en elevant un
dfcne sur son enceinte, Souleiman fit relever a Bagdad
le tombeau du grand-imam Ebou-Hanif£, qui avait
&6 d&ruit par les her&iques persans, et fonda sur ce
tombeau une mosqu£e et une cuisine pour les pau-
vres. Darts la m&ne ville, il restaura la mosqu£e du
tombeau du scheikh Abdoulkadir Ghilani , fondateur
de Tordre c616bre des derwischs Kadris. La m&noire
du grand poete mystique Mewlana Djelaleddin Roumi
et celle de Sid-Battal, c'est-k-dire le seigneur, le cham-
pion » te juge de l'islamisme , furent honor6es des
m£mes faveurs par la volont£ du Sultan. II fonda a
Koniah , sur le tombeau du premier, une mosqule
avec deux minarets , une salle destine aux walses
sacr£es des derwischs * , des cellules pour leur habita-
tion H one cuisine pour les pauvres. II fit MHr sur le
i Simaakhane. Petschewi, Ali, Djelalzad£.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN* 243
tombeau du second , k Seid-e-Ghazi , un grand cou-
vent, une mosquee, une m£dres£, et des cuisines pour
les pauvres et les Strangers; tons ces Edifices farent
recouverts en plomb; le couvent fut concede k l'or-
dre des derwischs Begtaschis. Ces constructions en
Thonneur des trois grands -scheikhs, Abdoulkadir,
Djelaleddin Roumi et Sid-Battal, avaient acquis k Sou-
leiman les' benedictions des trois ordres de derwischs,
des Kadris, des Mewlewis et des Begtaschis* si nom-
breux et si influens dans 1'empire ottoman. A Kaffa, k
Nic6e et k Damas, il r^para les mosquees tomb^es en
ruines; pr6s du pont de Moustafa-Pascha sur la Ma-
rizza, il restaura le caravanserai', la mosquee et la cui-
sine pour les pauvres, fond£s par cet homme d'Etat.
Non content d'elever ou d'embellir tant de mos-
quees , Souleiman transforma les egKses chr&iennes
des vilks conquises en lieux de prteres pour les mu-
sulmans. Depuis Rhodes et Koron jusqu'aTemeswar
et Of en, les cloches cess&rent de convoquer les chre- 1
tiens k la pri&re, et, au lieu du chant des psaumes et
des accords des orgues, on n'entendit plus que les cris
des mouezzins au haut des tours : Allah et Moham-
med! Dans toutes les villes soumises par les armes
ot toman es, a Rhodes, Koron, Sabacz, Belgrade, Te-
meswar et Ofen, les £glises furent chang^es en mos^
qu£es, pendant qu'on reconstruisait les remparts ou
qu'on £levait de nouvelles fortifications. La forte-
resse de Belgrade, qui avait et£ r£par£e au commen-
cement du r£gne de Souleiman, le fut encore k la fin,
apr£s avoir 6t6 renversee par une explosion des pou-
16*
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?. {4 HISTOIRE
dres causae par la foudre. Souleiman releva aussi les
murs de Jerusalem, et fut le premier des sultans qui,
a l'exemple des khalifes, embellirent la sainte maison
de la Kaaba. II se fit autoriser a ces embellissemens
par un fetwa du moufli Ebousououd, et ordonna
que les travaux n'eussent lieu qu'en presence des 1£-
gtstes de la Mecque et des quatre imams des quatre
rites orthodoxesr, Hanizi, Maleki, Hanbeli et Schafii. II
fonda & la Mecque pour ces quatre rites quatre col-
leges (m6dres£s) sur le module des colleges turcs,
a chacun desquels etaient attaches quinze &udians
(thalebs) et un r^petiteur (mouid) : le traitement du
professeur (mouderris) &ait de cinquante aspres par
jour ; celui du r£p£titeur de quatre aspres , et celui
de chaque etudiant de deux aspres [in]. La maison
de Khadidje , la premi&re Spouse du Proph&e , avait
&e depuis long-temps transformee en mosqu£e, mais
elle ftait tombee en ruines; Souleiman la fit reb&tir,
et attacha h son service des derwischs qui devaient y
fake entendre, les mardis et vendredis, les cris de
Allah et de Hou! Pour supplier au manque d'eau ,
Tun des fleaux de la Mecque, Sobeid6, l^pouse du
khalife Haroun al-Rasdiid, avait fait construire un
aqueduc qui avait co<tt£ des sommes enorraes , et avait
ete depuis plus dune fois repar£. Dans la douzteme
annee du r^gne de Souleiman (939 — 1532) , la p£-
nurie d'eau fut si complete a la Mecque, que 1'outre
s'y vendit au prix £norme d'un ducat, et que les pte-
rins, que leur pi&£ avait amends dans la ville sainte,
furent sur le point de perir de soif ; mais une pluie
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 245
bienfaisante vint heureusement les sauver. Pour pre^-
venir le retour d'un tel fl£au, Souleiman ordonna la
reconstruction des aqueducs de Bedr Honein et du
mont Aarafat ; le premier aboutissait k un large bassin
de marbre contenant quarante-cinq pipes d'eau et re-
convert d'un d6me. La sultane Mihrmah, fille de Sou-
leiman, fit construire un autre aqueduc, qui amena
les eaux de la source du mont Aarafat dans un bas-
sin pres du sanctuaire. On ^leva une fontaine sur le
versant du mont Merw6, et on £largit les deux bassin &
qui se trouvent entre Safa et les tombeaux des scherifs ;
Tun d'eux servaitaux caravanes de pelerins venant de
la Syrie, Tautre k celles qui viennent d'Egypte; de Ik
leurs denominations de bassin syrien et de bassin
egyptien. Le sultan egyptien Koulaoun avait fonde
deux villages, dont les revenus &aient affects a l'achat
annuel de la couverture destin^e a v£tir la Kaaba du*
rant les jours du Beiram. Cette couverture se com-
pose de deux pans d'&offe dor, dont le premier de
mille soixante aunes se nomme le voile, et l'autre de
cinquante aunes , la ceinture. A ces deux villages ,
Souleiman en ajouta 4'autres; de plus, il augmenta
la somme portee dans les pelerinages annuels aux
pauvres de la Mecque , et fit pr^lever cette augmen-
tation, sous le nom de djewali, sur la capitation des
rayas.
Dans la hierarchie ottomane, les vizirs et les beg-
lerbegs occupent le premier rang ; apr£s eux viennent
les defterdars, les nischandjis et les reis-efendis, c'est-
&-dire les pr^sidens de la ehancellerie et les secrd-
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246 HISTOIRE
taires-d'Etat , qui sont , k proprement parler, les ve-
ritables ministres. Les utiles et modestes services qu'ils
rendent dans le silence du cabinet sont obscurcis par
les actions plus brillantes des hommes de guerre,
et ne se voient pas toujours appr£ci& avec justice. II
est rare que ces dignitaires arri vent k la gloire; quel-
ques-uns cependant font exception k cette r6gle,
comme Iskender-Tschelebi , par exemple, dont la
chute retentit dans tout Tempire , et ceux qui se sont
fait les historiens de leur £poque , tels que le grand
et le petit nischandji Moustafa Djelalzad^ et Moham-
med Ramazanzade. Parmi les defterdars qui succ6-
dbrent k Iskender-Tschelebi, le malheureux yahya du
grand -vizir Ibrahim , nous devons surtout remar-
quer le defterdar d'Ofen , Khalilbeg , qui dressa un
nouveau registre pour les imp6ts de Hongrie , et le
defterdar de Syrie, Ehoulfazl, fils du c£16bre histo-
rien Idris. Avant Khalil, on ne comptait dans Fempire
ottoman que tirois defterdars, ceux de Roumilie et
d'Anatolie et celui de Syrie et d'^gypte. La conqu&e
de Hongrie rendit n£cessaire la creation d'un quatri&ne
defterdar, et Khalilbeg fut charge de l'administration
financtere de cette nouvelle province. Eboulfazl ajouta
lhistoire du r£gne du neuvi&me sultan S£Km II k
1'ouvrage de son p£re , intitule les Huit Pamdis, qui
retrace en langue persane l'histoire de Tempire otto-
man depuis sa fondation jusqu'au huit&me sultan. Mo
hammed-Tschelebi, plus gen^ralement connu sous le
nom d'Egri Abdi Oghli , c'est-fc-dire fils d'Abdi-le-
Boiteux , se distingua par un remarquable talent d'e-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN- *4 7
crivain, et fut appete deux fois aux fonctions de def-
terdar et de nischandji. C'est k lui et au grand-ni-
schandji Moustafa qu on doit la redaction deplusieurs
lois nouvelles, et la reunion en un seul code de celleg
qu on avait promulgates jusqu'alors : le premier pu-
blia le Kanounnam£ de Mohammed n, le second le
Kanounnam£ sur les finances, qui parut sous le r6-
gne de Selim II. Deux autres defterdars eurent une
grande part aux affaires de l'empire : ce furent Nak-
kasch-Ali, c'est-k-dire le peintre Ali, qui contribua
par ses calomnies a la chute d'lskender-Tschelebi, et
Newbeharzad£ , le pro&g6 du nischandji Djelalzad£~
Moustafa. Parvenu au rang de defterdar, Newbe-
harzad£ refusa de prendre place avant le nischandji,
comme il en avait le droit d'apr£s l'usage etabli, et d£-
clara qu'il se demettrait plut6t de ses fonctions que
de s'arruger la pr^seance sur son bienfaiteur. Soulei-
man approuva ce noble mouvement de gratitude , et
en prit occasion de d£cr&er qu'i Tavenir les rangs
des. defterdars et des nischandjis seraient r£gl& par
l'anciennet£ des services. Le defterdar d'£gypte,
Ibrahimbeg , est auteur dune collection tr6s-estim£e
de pieces dEtat en langue turque ; mais elle ne peut
toutefois 6tre comparee a la plus complete de toutes,
celle du rels-efendi Feridoun, inlitutee: Mounschiati
houmayoun, dont nous parlerons plus tard sous le
rigne de Mourad III. Au nombre des ecrits les plus
remarquables , dus a la plume de ces secretaires-
d'Etat, nous devons citer les Lettres de victoire sur la
bataille de Mohacz et sur les conqu&es de Belgrade,
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948 HISTOIRE
Rhodes, Tebriz, Bagdad, Ofen et Szigeth, la corres-
pondance de Soulei'man avecleschah Ismail, le schah
Tahmasp, et leurs vizirs, au sujet de 1 'extradition de
son fils Bayezid , et enfin les dipldmes de Soulei'man
pour le sch&if de la Mecque et le grand-vizir Ibra-
him-Pascha [iv].
II est sans doute moins &onnant de rencontrer des
historiens et des £crivains parmi les defterdars et les
nischandjis, que des poetes parmi les sultans et les
vizirs; or, Soulei'man, dont le pfere S61im I er et l'oncle
Korkoud sont mis avec raison au nombre des poetes,
est lui-m£me honor£ de ce titre dans les biographies
ottomanes , ainsi que ses quatre fils S61im , Moustafa ,
Bayezid et Djihanghir ; mais cette distinction fut ac-
cord^e plutdt a l'elevation de leur rang qu'au me-
rite de leurs productions lijtt^raires [v]. Le plus grand
poete lyrique de 1'empire ottoman est Abdoul Baki,
ou simplement Baki (rimmortel) , que les Turcs ap-
pellent le sultan, le khan et le khakan de la po£sie ly-
rique; il est plac£ sur la mdme ligne que Motenebbi
et Hafiz, dans les langues persane et arabe. N6 sous
le r&gne de Souleiman , Baki atteignit pendant la vie
de ce souverain son plus haut point de c£l£brit6 , et
s'y maintint pendant le r&gne de S£lim II. Les ceu-
vres de Souleiman ne sont pas empreintes du g£nie
po&ique, mais on ne peut leur refuser le m^rite d'une
gravity imposante et d'une moralite pure; les senti-
mens d'humanit£ qui percent dans chaque ligne jus-
tifient le nom de Mouhibbi, c'est-k-dire qui aime avec
amifte, que le Sultan avait pris pour signer ses vers.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. *49
Si Souleiman ne peut entrer en lice avec les grands
poetes de son epoque , on doit le Iouer d'avoir su .
dans un &ge avanc£ oii il est si difficile de briser d'an -
ciennes idoles et de reconnaitre de nouvelles superiori-
ty, distinguer le m£rite Eminent de Baki , quand celui-ci
vint lui oflfrir son premier ouvrage, et de l'avoir
honore dte Iors comme le plus bel ornement de son
empire, si riche en grands hommes. II ne se borna
pas a le r£compenser comme sultan; ma is, poete lui-
mdme, il lui adressa un poeme dans lequel il l'appe-
lait le premier poete des Ottomans, et lui pr£disait
avec raison la dur£e de sa gloire [vi]. P£n&r6 de
reconnaissance, Baki d£plora la mort du Sultan dans
une £l£gie, consider^ comme le diamant le plus pr6-
cieux de la po£sie ottomane. Une autre etegie , qui
peut rivaliser avec celle de Baki , fut compose par
le savant moufti Ebousououd , qui , gr&ce a quelques
gbazeles, est cite comme poete par les biographes
ottomans, ainsi que son predesseur le moufti Kemal-
paschazad£ et Sadi-Efendi. A lexemple du Sultan et
de ses fils, plusieurs vizirs et paschas ne jugerent pas
au-dessous de leur dignity de chanter des gbazeles ;
)'infortun£ beglerbeg d'Ofen Arslan-Pascha, les vizirs
Djemali et Schems Ahmed-Pascha, et le grand-vizir
Piri-Pascha, sont mis par les biographies au nombre
des poetes ; mais aucun ne peut pr&endre au m6me
rang que Baki, et m&ne que les neuf poetes contem-
porains dont nous allons parler.
Khiali, c'est-k-direle riche en imagination, merita
ce surnom par la richesse de ses images et son brillant
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*5o HISTOIRE
colorls ; ces quality lui attirerent si bien les faveurs du
Sultan et du grand- vizir, que chacune de ses poesies
fut recompense avec une magnificence imp£riale, et
qu il regut enfin un fief du revenu annuel de cent
cinquante mille aspres '. Khiali &ait dans ses opi-
nions litt^rairos I'antagoniste de Sati, dont nous avons
parle sous le rigne de S£lim II , et cependant il l'a
sou vent imite. Nous avons egalement cite, en racon-
tant les ivenemens oii ils figurent, Ghazali, I f Ar£tin
des Ottomans, surnomm£ Deli Burader (le fr£re fou),
ainsi qu'Yahyabeg, auteur des ouvrages intitules: le
Chat et le Mendiant, et la Rdvolle de la ville de Con-
stantinople. Fouzouli cbanta les plaisirs de l'opium et
des boissons enivrantes , et les amours de Leila et
Medjnoun; il traduisit encore, sous le titre de J or din
des Bienheureux , l'ouvrage persan le Paradis des
Martyrs. Djelili et Fikri illustr&rent leurs noms par
la composition de poemes romantiques : le premier
s'inspira du poeme persan Khosrew et Schirin et du
poeme turc Leila et Medjnoun; il traduisit en outre
le Schahnami. Fikri puisa ses inspirations dans la
contemplation des astres , du Soleil et de I'Etoile du
matin % , de Mars et de T^inus 3 ; il £crivit encore
deux ouvrages rimes , le Parterre des Fleurs * et les
J^ierges des Pensies 5 . Rewani, qjri mourut dans la
i Latifi, Biographie des pontes turcs, traduction de Chabert, p. 149.
Voyez aussi Aschik-Tschelebi et Kinaliiade, qui font mention de deux
autres Khiali.
* Mihr ou Jnahid*— 1 Behram oil Souhre. — 4 Sehoukoufuar. —
5 Ebkari-efltar.
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. a5i
premiere aim^e da r6gne de Souleiman, s'est plac6,
par son ouvrage descriptif intitule le Livre des Plaz-
sirs l au rang des premiers pontes ottomans, ainsi que
Lamii , qui figure d'ailleurs en premiere Jigne parmi
les prosateurs, bien que la traduction par Ali-Wasi
des fables de Bidpai soit consid£ree gen^ralement
comme le chef-d'oeuvre de la prose turque. Lamii ri-
valisa de talent avec Sati, en 6crivant comme celui-ci
un poeme romantique intitule la Lumiire et le Pa-
pMon, et avec Ahi, en traduisant en langue turque le
roman allegorique de Fettahi a la Beauti et le Cceur.
II traduiait, par ordre de Souleiman, les plus anciens
poemes romantiques persans, tels que PVeisou et Ra-
nim par Nizami, Absal et Setman par Djami, Wairdk
et Azra par Anssari, les Sept Figures 3 par Nizami, et
le Ballot et le Maittet par Aarifi. Lamii chanta encore
les souffrances de Ferhad 4 et le marty re de Housein 5 ,
traduisit les apologues arabes sur la Noblesse de
V Homme 6 , la Biogaphie des Mystiques par Djamii 7 ,
les Qualites du Prophite par le m&ne 8 ; il publia en
outre une collection de fac&ies 9 et un commentaire
sur le Gidistan de Saadi; enfin il chanta une Revolte
de la riUe de Brousa ,0 . Outre ces dix principaux
• Ischretname. Latifi, dans Chabert, p. 159, et manuscrit de Diez, a la
Bibliotheque de Berlin.
a Fettahi et Don pas Nitadschi, comme l'ecrit Chabert.
5 Heft peiker, — 4 Ferhadname. — 5 Mahali Housein.
6 Seheraoul insan, en arabe, imprime a Calcutta.
7 Get ouvrage a pour litre Nefhatol-Ins , c'est-a-dire les Souffles de
VHumanue.
* Schewahidoun-noubouwwet. — 9 Lataifnan.e. — 10 Schehrengiz.
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a5* HISTOIRE
poetes l du r&gne de Souleiman, les anthologies et les
biographies en signalent encore cent sous le m6me
r6gne et cinquante sous celui de S£lim II, qui pour la
plupart furent des poetes lyriques. Cependant plu-
sieurs prirent pour sujets de leurs poemes des 6v6-
nemens militaires ou un regne de Sultan, et m£me
Thistoire g£n£rale des Ottomans. C'est ainsi que Soudi
rima les hauts-faits de Mikhaloghi; Merakhi et Agehi,
le stege de Szigeth; Schoukri et Derouni, le r£gne de
Selim I cr a ; Hayati et Mahremi , le rfigne de Sou-
leiman I", et que Hadidi (le forgeron), Schemsi,
Aarif 3 et Hazarparapara , chanterent les exploits de
tous les sultans ottomans. Les quatre derniers sont
designs sous le nom de Schehnamedjis , c'est-k-dire
auteurs de livres royaux , parce que leurs ouvrages
embrassent toute l'histoire ottomane, comme le Schah-
namS embrasse toute l'histoire persane. Sehi d'Andri-
nople, qui, k Texemple, dldris donna le titre de Huit
Paradis* h son recueil des meilleures poesies, appa-
rait a la fois comme historien et comme poete; il fut
imite par Ahdi Ben Schemsi de Bagdad , d'origine
persane, qui dans son ouvrage intitule : Parterre de
Roses des Poetes 5 meutionne deux cents auteurs
> Baki, Khiali, Sati, Qjftzali, Yabyabeg, Fouioiili, Djelili, Fikri,
. _ p
Rewani, Lamn.
* Selimname; les prosateurs Soudjoudi et Iihak Tschelebi, auteurs de
Xllistoire de Selim /, et Oussouli, auteur de VUUtoire de Sitim II.
3 Fetballah le Penan viot avec le prince Elkass a la cour de Souleiman I,
ou il fut nomine* schehnaraedji.
4 Hesclu-bihischt. Sehi mourut en I'annee $45 (i548).
5 Guhcheni schouara. Ahdi mourut en I'annee 971 (i563).
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. a55
contemporains , auxquels il d^cerne lib£ralement le
litre de poetes. Latifi ' se montre aussi g£n£reux en-
vers les habitans de Kastemouni , et compte jusqu'a
trois cents poetes parmi eux. Enfin , sur les quatre
cents poetes dont Aaschik Tschelebi a a fait les bio-
graphies et £numer£ les ouvrages, un quart appartient
au rfegne de Souleiman -le-Grand, auquel cet auteur
ne surv&ut que de six ann£es [vn],
Parmi les grands jurisconsultes de l'£poque de
Souleiman , nous avons dijk fait connaltre les deux
mouftis Kemalpaschazad£ et Ebousououd, le grand
philologue Sourouri , et le molla Ibrahim de Haleb ,
auteur d'un code musulman encore en vigueur dans
I' empire ottoman, sous le titre de : la Reunion des deux
mers [viii]. Nous devons aussi une mention honora-
ble a Taschkoeprizad£ , qui dans son Encyclopedia
traite de trois cent soixante-dix sciences diff&rentes ,
et cite les principaux auteurs qui ont &rit sur chacune
d'elles; il fut le premier qui re unit, dans son ouvrage
intitule les Parcelles danimones 1 , les biographies des
jurisconsultes depuis le regne d'Osman jusqu'& la
moitte de celui de Souleiman I er [ix]. Hafiz Adjem [x]
a compose egalement deux trails encyclop&liques,
■ Latifi mourut en I'annee 990 (i58a).
» Tezkeretoul schouara we meschair out zourefa fi kawaiM edab ilkoutlab
win cl-fouzela, c'est-a-dire Regis ire des Poetes et Module Ses Poetes d'aprfo
" les rSgles des usages des meiUeurs auteurs, par Seid Mohammed- Ali Aschik-
Tschelebi, mort en I'annee 979 (1 571), a la Bibliotbeque I. R. et dans ma
collection.
3 Schakaikoun-naamanijret, contcnant la biographie do cinquanlc scheikh*
et de cinq cent vingt-ncuf legisles.
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a54 HISTOIRE
sous les titres de Regisire des Sciences l et de Kitte
des Sciences a . Salih Djelalzade se montra ]e digue
emule de son fr&re Moustafa, secr&aire-d'Etat pour
le chiffre du Sultan, qui avait traduit par ordre de
Bayezid II l'ouvrage du grand narrateur de conies
persans 3 , et avail 6crit Fhistoire de Selim I 61 . Le Per-
san Lari, qui avait pass£ du service du prince incHen
Houmayounschah k celui du Sultan des Ottomans,
6crivit une histoire universelle intitulee : TMRroir des
Atones et Route des connazssances *, et sacquit par
\k une gloire 6gale a celle des deux Djelalzade ; on Iui
doit aussi des gloses marginales sur plusieurs ouvrages
fondamentaux de jurisprudence [xi]. Birgeli, le Caai-
sius et le Donat des Ottomans, dont on a recemment
r&mprim6 leg oeuvres a Constantinople, 6tait 6gale-
ment vers6 dans la grammaire et la dogmatique 5 .
Nous avons d^jk parle, a r occasion des f&es de la
i FihrUtouLouloum, a la Bibliotheque royale de Paris.
* Medinetoal-ouloum , ouvrage trait ant de huit sciences.
3 Djamieioul-hikayat, par Djemaleddin Mohammed el-Aonfi. Cet outrage
avait e"te* traduit avant lui par Arabschah et Nedjati.
4 MlretouUedwar we merkaioul-aKhbar.
6 II ecrivit des gloses marginales auz ttedayet et Sadrescheriat, deux Trai-
tSt fondamentaux du droit musulman (voyez Constitution et administration
de Y Empire ottoman, 1. 1, p. 7 et 8), un Commentaire sur le Kafiyt (synlaxe),
tin Traite metaphysique et un autre sur les prieres. Ses ouvrages les plus
eelebres, r&mprimes a Constantinople, sont le Tarikai Mohammediyt {Doc-
trine mahomStane) f appele plus generalement Risalei Biregli ou Birgewi,
et son commentaire intitule Jwamil (Syntaxe des Particules).VL composa en
outre un Emsilet, c'est-a-dire une Table des conjugaisons , et un Kifayetoul-
moubtedi, c'est-a-dire un Traite' eUmcntaire. Il mourut en l'annee 980
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. a55
circondskm des princes , da khodja de Souleiman II,
Khaireddin, qui prenait toujows place a cdt6 du Sul-
tan, dans les contro verses publiques entre les profes-
seurs. Les grands- vizirs eux-m&nes &ablirent souvent
de pareiHes conferences, pour donner de l'&nulation
aux sayans : c'est ainsi qu'Ayas-Pascha appela en sa
presence les huit recteurs des huh colleges de Mo-
hammed II. Aucun des six m&lecins qui faisaient par-
tie du corps* des oul&nas, sous le r£gne de Souleiman,
ne se dislingua par des ouvrages scientifiques. Si Mo-
hammed Alkafesouni se rendit c&ibre , ce ne fut pas
en gu&rissant le Sultan lors de sa derntere maladie,
mais seulement en aidant le grand-vizir Mohammed
Sokolli k tenir sa mort secrete [xn]. Quelques-uns
seulement des trente scheikhs attachment leurs noms
aux conqu6tes de Souleiman , par l'enthousiasme que
leurs paroles inspirferent aux troupes; tels se mon-
tr&rent le scheikh Alaeddin lors de la prise de Bagdad,
et le scheikh Noureddin dans la campagne de Szigeth.
Enfin , sur les deux cents tegistes dont Taschkoepri-
zad6 et son continuateur Attayi nous ont transmis la
biographie, on n'en compte que cinquante qui se soient
signals par des ouvrages de quelque importance.
A ce rapide apergu de la literature ottomane sous
le r&gne de Soulefrnan, il convient d'ajouter quelques
details sur les innovations par lesquelles ce souverain
rforganisa le corps enseignant, et compl&a les sages
institutions de Mohammed II. C'est gr&ces k sa solli-
citude que le corps des oulemas , qui sont k la fois
les theologiens et les legistes de Tempire ottoman,
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a5G U1STOIUE
est parvenu a ce haut degre de perfeetionnement f
oii il s'est maintenu jusqu'a nos jours, malgr£ tant de
causes de dissolution. Les ameliorations dues k Sou-
leiman consistaient surtout en une division mieux en-
tendue des grades successifs que les mouderris, ou
recteurs de college, avaient a parcourir , et qui avaient
eie fix£s a cinq par Mohammed II (les vingt, les trente,
les quarante, les cinquante et les soixante); ce m£me
prince avait encore distingue les mouderris en irai-
rieurs et extirieurs. On avait assigne aux trois pre-
mieres classes les medreses de la capitate et des pro-
vinces, a 1' exception des huit medreses de la mosqu£e
de Mohammed II, designees sous le nom des Huit,
dont les mouderris recevaient chacun un traitement
de cinquante aspres par jour. Aux mosqu£es d'Aya-
Sofia et d'Eyoub etaient attaches seulement deux mou-
derris ay ant soixante aspres par jour. Souleiiman donna
un rang sup&ieur aux mouderris des quatre me-
dreses de la mosqu£e Souleimaniy£ , en leur assi-
gnant un traitement de soixante-dix aspres par jour,
et £chelonna, dapr&s le nombre dix en honneur chez
les Ottomans, les divers degres de la hterarchie du
corps enseignant , qui comprenait : 1° les mouderris
exterieurs, 2° les mouderris* exterieurs proposes pour
1'avancement, 3° les mouderris int£rieurs, 4° les mou-
derris interieurs proposes pour l'avancement , 5° les
candidats au rang des mouderris , dits les huit (ceux
de la mosquee de Mohammed U); 6° les huit, ay ant
un traitement de cinquante aspres par jour ; 7° les
soixante, ceux des mosqu^es d'AyaTSofiaet d'Eyoub;
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. DE L'EMPIRE OTTOMAN. ^7
8° cTautres soixante, ayant le m£me traitement que
les prec&dens, mais un rang sup^rieur; 9° leg can-
didate aux m6dres& de Souleimaniy^ ; 10° les rec-
teurs de cette dern&re mosqu£e '. Ceux des candidate
qui ont passe par tous ces grades, sans en omettre
aucun, ont seals droit k la premiere des cinq classes,
parmi les membresde laquelle on choisit le plus haut
dignitaire de la loi. Ceux qui n'ont pas le courage ou
le temps de parcourir la s6rie entire des degr^s ne
peuvent £tre incorpores que dans les dix classes du
second ordre ou les cinq du troisi^me ordre. Mais
tous les oul&nas , les premiers comme les derniers
en rangs, partagent deux privileges, I'affrarichisse-
ment des imp6te et la transmission assume de leurs
biens h leurs heritiers, le tresor ne pouvant en au-
cun cas les confisquer a son, profit. Cest ainsi que
la seule aristocratie des Ottomans , celle des jcorps
enseignant et judiciaire , se trouve affermie par les
fortunes accumul^es de generations en generations
dans les grandes families des ouiemas ; mais la loi
qui regie I'avancement ne peut 6tre transgressee en
aucun cas , si Ton excepte celui ou le fits d'un grand
est inscrit d& son bas ftge sur la liste des mouderris,
de sorte qu'en entrant dans l'&ge viril il se trouve
dej& place dans un grade plus ou moins eieve de la
legislature.
Quoique dou£ d'un caract£re naturellement g6n£-
' 10 Kharidj, *o Hereket Kharidj, So Dakhil, 40 Hercket Dakhil,
5o Moussilei • sahn , 60 Sahn , 70 Altmischlu , 80 . Ikindji Allmischlu ,
90 Moussilei Souleimaniy e , io° Souleimaniye.
T. vi, 17
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358 HISTOIRE
reux et liberal, Souleiman n'en regardait pas moins
largent comme le nerf de la guerre, et comme la
source la plus &conde de prosp6rit6 pendant la pais.
Dte les premieres annees de son r&gne , les campa-
gnes de Belgrade et de Rhodes l'oblig&ent de re-
courir& une mesure financi&e exceptionnelle; et im-
m^diatement avant la troisteme expedition contre la
Hongrie, fameuse par la bataille de Mohacz, il se vit
contraint de frapper une contribution de quinze as-
pres parttte dans tout l'empire, sans distinction de
religion ni de fortune l . Ce furentlk les seuls impdts
extraordinaire du r£gne de Souleiman; mais ils suf-
firent pour exciter les murmures de la nation; du
reste cette mesure, h laqudle on n'eut recours que
dans les commencemens du r&gne de Souleiman, et
qu'il eftt &£ dangereux de renouveler, devint inutile
par la suite , par si les premieres campagnes du Sul-
tan co&t&ent des sommes &iormes , les suivantes of-
frirent un ample d&lommagement dans le pillage des
pays conquis et dans les tributs qui furent imposes a
leurs souwrains. La Hongrie, si souvent devastee, fut,
d& Touverturede la guerre, assujettie h un imp6t an-
nuel de m&ne que la Transylvanie, et les r^glemens
financiers du defterdar Khalil epuiserent jusqu'aux
demises ressources du premier de ces royaumes, qui
paya du plus pur de son sang les magnificences du
i *I1 signor porto uno taio di aspri i5 per testa, cussi a zentilomini
» come villaai in tutto il suo Domino, commeazado dalla Persia, Egitto c
»Soria. » Pietro Bragadino, Rapport du *$ d&embre i5a5, et Mariui
Sauuto.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. *5q
conqu£rant. Non seulement Raguse, la Moldavieet
la Valachie , farent soumises k des tributs annuels
envers la Porte , mais encode Venise et FAutriche, la
premiere poor leg lies de Chypre et de C6phalonie,
la seconde pour ses possessions dans la Hongrie su-
p£rieure. Gr&cesau z&le financier de ses gouverneurs,
TEgypte, qui navait d'abord &6 impos6e que de huit
cent mille ducats, en rapporta bientdt douze cent
mille ; cependant cet exc£dant de quatre cent mille
ducats n'entra pas dans les caisses de I'Etat; Soulei-
man l'employa k la construction d'aqueducs et autres
monumens. Aux revenus ordinaires de 1 empire vin-
rent se joindre des revenus extraordinaires, tels que
les tresors deposes a la Mecque par le souverain in-
dien de Goudjourat, et les Wens des vizirs et des gou-
verneurs executes, lesquels, ^coules du fisc par les
canaux de la faveur, finissaient d f ordinaire par y &re
ramenes. C'est ainsi que les finances de l'empire he-
rit^rent des richesses amoncetees par le defterdar Is*
kender-Tschelebi, par le grand- vizir Ibrahim -Pascha,
et des vases emplis de Tor d'Arabie et d'Egypte de
l'amiral Piri T Reis. Le soin avec Jequel le grand-vizir
Rouslem-Pascha accumulait d'immenses triors etait
son plus grand m^rke aux yeux de Souleiman; bien
que le Sultan ne se dissimul&t pas que Roustem &ait
peu d&icat sur le choix des moyens, et qu'il faisait
m&me un trafic des emplois, il le laissait agir en toute
Hberte, dans la pens£e que la crainte qu'il Iui inspi-
rait lui ferait restreindre dans de certaines limites ses
nombreuses exactions. Ce fut sous 1'administration de
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*6o UISTOIRE
Roustem que js etablit r usage d'exiger, en outre des
sommes destinees au Sultan dans leg trails de paix
avec I'Autriche, une retribution moins forte pour le
grand- vizir et les autres vizirs; les documens turcs
donnent a ces sommes le nom de tribut, tandis qu elles
figurent dans les documens de FAutriche sous le nom
de pr^sens honorifiques. Roustem fut le premier
grand-vizir qui soumit les gouverneurs k des taxes
proportionn^es aux revenus de leurs provinces , et
qui &eva a trois mille ducats la somme de cinq cents
ducats, fix£e par Mohammed II pour la nomination
du patrtarche grec '. Si Ton en excepte ces taxes irre-
gulteres , les imp6ts ordinaires &aient trSs-mocterfe ;
l'impdt foncier &ait de quarante a cinquante aspres
(environ un ducat) par maison, et l'impdt extraordi-
naire (awariz) pouvait 6tre evalue a la m&ne somme.
Tout sujet turc ne payait qu'un aspre pour deux mou-
tons, et trois a cinq aspres pour le commissaire. k titre
de ghoulamiye, c'est-Ji-dire redevance du gargon. Les
biens de la couronne rapportaient a cette epoque la
somme enorme de quatre mille deux cent quarante-
une charges d'aspres [xm], ce qui fait pr6s de cinq
millions de ducats. Les revenus ordinaires. de l'Etat
sont £valu£s, dans les Rapports des ambassadeurs de
Venise, a la sOmme annuelle de sept k huit millions
de ducats [xiv].
Bien que les places de gouverneurs eussent &6 sou-
mises k un regime v&ial par Roustem -Pascha, les
« «Fuerat n«<yxt<Jiov (Bakhschisch , c'est-a-dire present) initio aurei 5oo
» time vero ad 3ooo perduxerat. » Grusii Turco-Grmcia, p. 167.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN.
*6i*
divers grades de Fannie n'avaient pas encore &t& mis
a prix. A eel £gard Souleiman apportait un soin scru-
puleux a conserver dans toute Ieur puret6 les prin-
cipes de son p6re Selim. Un negotiant, qui avait pr&e
a $£lim une somme de soixante mille ducats , ayant
demandepour son fils une place de djebedji (armu-
rier), avecia solde de deux aspres par jour, S£lim
^crivit ces mots en marge de la supplique pr&ent£e
et appuy£e par le grand- vizir : « Je vous ferais tous
executer, je le jure par mes aieux, sans la crainte de
faire dire k la malveillance que j'ai voulu ainsi m'ap-
proprier l'argent que cet homme iq'a'prttl; qu'on le
lui compte aussitdt, ef gardez-vous bien dem'adresser
a Favour de pareilles demandes \ » Les principles
modifications introduites par Souleiman dans l'orga-
nisation militaire consistent dans la suppression des
corps des yourouks ou fantassins irreguliers de la
Rouqiilie, et dans la rtforme et 1' augmentation de
nombre des ortas des janissaires. Jusqu'a lui le chiffre
le plus 61eve de ces troupes avait 6t6 de douze mille ;
il le porta a vingt mille; la solde de chaque janissaire
£tait auparavant d un aspre par jour, et a la fin d une
campagne , ceux qui s'y etaient distingues recevaient
une augmentation de deux ou trois aspres. Soulei-
man institua trois classes avec des soldes diflfcrentes :
la premiere (kcetscheh) &ait form^e des eschkindjis
(ceux qui sont en activity de service) , dont la solde
> Khodschibeg, p. a 3, dit que pour soixante mille ducats on ne pouvait
a cette epoque obtenir une seule place de djebedji , tandis qu'aujourd'hu*
(sous le regne de Mourad IV) on en achetait six pour soixante ducats.
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*6* HISTOIKE
variak de trois & sept aspres par jour; la seconde se
composait des amelmandes ou v&6rans, qui recevaient
de neuf k vingt aspres par jour, et dont quarante occu-
paient les casernes de la capitale sous Ie nom de kou-
roudjis; la troisi&me classe comprenait les invalides
(otourais), soldats et officiers, ayant une solde de
trente k cent vingt aspres par jour. Les admissions
dans cette derniere classe &aient rares et difficiles; on
ne les accordait qu'a des guerriers blanchis sous les ar-
mes , que leurs blessures rendaient incapables de nou-
veaux services. Le nombre des kouroudjis n etait que
de quarante; les tschaouschs et les moumdjis &aient
dans la m£me proportion parmi les varans. Le corps
entier des janissaires ne comptait que trois tschaouschs
et douze moumdjis ; mais les tschaouschs et les kiayas
n'&aient pas changes aussi fr£quemment qu'ils le fu-
rent par la suite, et ils restaient en place jusqu'k sept
ou dix ans \ Les enfans faits prisonniers et devenus
esclaves formaient encore , comme dans les premiers
temps de restitution des janissaires, la principale p£-
pintere de ce corps : confines dans l'Asie-Mineure et
v&us d'un uniforme rouge , ils apprenaient la langue
et le service militaire pendant quatre ou cinq ann6es,
jusqu'au moment de leur incorporation dans cette
milice. Souleiman construisit pour les janissaires de
nouvelles casernes, et, la premiere fois qu'il les visita,
il regut la solde d'un veteran (quarante aspres) des
* Kodschibeg , p. 1 1 , a la Bibliotheque royale de Berlin , dit : Aujour-
dhui on ponrrait diviser Taimee en trois classe* , kouroudjis (veterans ,
otonraks (invalides) et alils (incapables de service).
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. *63
mains du lieutenant-general (koulkiaya). Depuis lors,
Souleiman et apr£s lui sea successeurs se rendirent
habituellement devant les casernes , sous un costume
emprunte, le jour de la distribution de la solde; le
premier valet de chambre (baschtschokadar) rece-
vait, des mains du colonel du premier regiment, la
paie destin£e au Sultan; il y ajoutait une poign^e de
ducats, et distribuait le tout aux soldats de garde. En
m&noire de cette distinction, ce regiment &igea un
tr6ne dans une chambre de la caserne, que Ton tint
constamment ferm£e. D6]k quelques ann£es avant la
construction des nouvelles casernes , Souleiman avait
donn£ aux janissaires une preuve Iclatante de sa hien-
veillance, en acceptant du colonel du soixante-unteme
regiment (djemaat) une coupe k sorbet que celui-ci
lui avait offerte k son passage , et en ordonnant que
cette offre lui fftt renouvel^e toutes les fois qu'il se
rendrait devant les casernes; le regiment auquel avait
&6 fait cet honneur en consacra le souvenir par la
construction d une salle du trftne. Le Sultan appro-
chait la coupe de ses l&vres, et la donnait k son porte-
glaive qui la rendait aux troupes pleine dor ; un offi-
cier des janissaires prfgentait aussi une coupe au
chef des eunuques, qui accompagnait le Sultan \ Le
m&ne usage se r£p&ait dans les fdtes du couronne-
ment, le jour oh le nouveau Sultan ceignait le sabre;
en passant devant les vieilles casernes , il recevait la
coupe des mains de l'aga des janissaires, et la lui ren-
» Le grand-vizir, en passaut devant les casernes, recevait le nieme hon-
ncur que le Sultan.
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264 HISTOIRE
dait en disant : « Nous nous reverrons a la Pomme
Rouge '; » c'est ainsi que les Ottomans nommeht la
ville de Rome. Pendant la campagne de Szigeth,
alors que la puissance de Souleiman avait atteint son
plus haut point de grandeur, l'effectif des troupes re-
guli&res &ait de quarante-huit mille trois cent seize
hommes , et leur solde se montait a deux millions
six cent quarante mille neuf cents aspres (cinquante-
deux mille huit cent dix-huit ducats) ; ce nombre
£"tait le double de celui que Farmee pr&entait k le-
poque de I'av&nement de Souleiman '. Le chtfFre des
troupes irr£guli&res, joint a celui des corps r^guliers
dans les campagnes ordinafres, s'61evait k deux cent
cinquante mille hommes. L'artillerie au complet comp-
tait trois cents canons, et la flotte trois cents voiles.
Souleiman apporta le mfime soin k la reorganisa-
tion des fiefs de la cavalerie, des timars et des siamets,
dont les ppssesseurs, nommls sipahis, ne doivent pas
6tre confondus avec les sipahis soldes, qui forment
le premier des quatre r£gimens de la cavalerie r6gu-
ltere. D'apr&s les reglemens de Mourad I", a qui est
due aussi rorganisation des janissaires, les fiefs se per-
p&uaient de mile en mftle, et ne revenaient k l'Etat
> %izil elmade gatruschurue.
> Le Rapport de l'ambassadeur venitien , dans Marini Sanulo , t. LV,
porte l'effectif de Farmee a doujee mille janissaires, quafre mille hommes de
cavalerie reguliere (sipahis, sihhdars, ouloufedjis et ghourebas), dix mille
adjemoghlans , soixante mille mousellims; done en tout quatre-vingt-six
mille hommes, sans compter les akindjis (cavalerie irreguli?re), et les azabs
et martoloses (tnfanterie trreguliere).
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DE L'EMHRE OTTOMAN. *65
qu'apr£s 1'extinction des families. Un crime commis
par un feudataire pouvait lui enlever la jouissance de
son fief, mats cette sorte de confiscation ne pouvait
jamais s'etendre a ses enfaqs. Plusieors timars (petite
fiefs) r^unis sur une seule t6te pouvaient 6tre con-
vertis en un siamet (grand fief), mais il n'etait jamais
peVrais de diviser un siamel en pkisieurs timars. Au-
cun siamet ne devait avoir une valeur au-dessous de
vingt mille aspres. Les vizirs et les gouverneurs des
provinces avaient seuls le droit de conftrer ces fiefs.
Dans la dhri&me ann£e de son regne, Souleiman
d&ct&a. qa'h l'avenir les gouverneurs ne pourraient
conceder sans l'autorisation de la Porte que de petits
fiefs; de & leur, denomination de tezkeresiz, c'est-fc-
dire sans certificat. Dans le principe, les grands fiefs
etaient provisoirement octroy^s par un ferman d'in-
vestiture (tewdjih fermani). Ces fermans adresses aux
gduverneurs des provinces , dans lesquelles etaient
situ^s les fiefs , leur enjoignaient de s'enquerir si le
demandeur etait reellement le fils dun sipahi (les fiefs
n'&ant d&volus qu'k des sipahis), et quels etaient les
revenus de son pire lors de sa moft. Si les rensei-
gnemens etaient conformes k sa declaration, le de-
mandeur recevait du pascha un certificat (tezkere) ,
et c'etait sur la presentation de ce certificat & la Porte
qu'on lui deiivrait le dipl6rae d'investiture (b^rat).
En opposition aux pr^c^dens, ces fiefs etaient appeles
tezkgrelus, c'est-k-dire deiivres sur certificat. Lorsque
le possesseur (fun siamet de vingt h cinquante mille
aspres mourait h la guerre en laissant trois fils, la loi
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266 HISTOIRE
permettait de conc^der k chacira d'eux on timar de
quatre k six mille aspres ; mais lorsqu'il mourait dans
sa famille, deux de ses fils ne pouvaient pr&endre
collectivement qu'k un timar de cinq mille aspres, et
Tim d'eux seulement k un timar de quatre mille. Au
contraire, si les fils, pendant la vie de leur p£re, se
troavaient deja investis de timars , ils recevaient k sa
mort une augmentation de deux cents k deux mille
aspres^ suivant une proportion bas£e sur la valeur
de leurs fiefs l . Les g6uverneurs avaient pris Vhabi-
tude d'61uder les fermans, en d&ivrant, aussitdt apr£s
leur reception , une lettre designation (tahwil kia-
gadi) au lieu du simple certificat (tefeker£) aux sipahis
investis dun grand fief, en sorte que ceux-ci en-
traient de suite en possession , sans se faire exp£dier
le dipldme de la Porte (b^rat). Pour d&ruire ces
abus, Souleiman d&endit au beglerbeg de Roumilie,
Loutfi-Pascha , plus tard grand- vizir, de d^livrer k
Tavenir aucune lettre d'assignation , et il lui enjoi-
gnit d envoyer les candidats, quel que fftt leur rang,
sandjakbegs, kiayas, defterdars des timars, soubaschis
(officiers) ou simples sipahis, pour ^changer k la
Porte dans un delai de six mois leurs certificats con-
tre des dipltones. Un fief pouvait bien 6tre divis^ en
plusieurs portions (hissa), r^parties entre divers pos-
sesseurs, mais celles-ci ne cessaient pas d'etre con si -
> Mouradjea d'Ohssoa, VII, p. 371, et avec phis de details , dans ki
Constitution et administration de I' Empire ottoman , t. I, p. 349, ou Ton
trouve le ferman qui renferoie ces nouvelles dispositions; il est dale du
i"redjeb 937 (i53o).
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 267
dfr&s comme appartenant h un seul fief, et lout mor-
cellement nan autoris£ par la Porte &ait s£v£rement
d£fendu. La plupart des ordonnances relatives aux
fiefs, rendues sous le rfegne de Souleiman, sont fon-
dles sur les fetwas da moufti Ebousououd. Dans
rannee de la mort du Sultan, et imm£diatement apr£s
ravenement de Selim II , le defterdar Mohammed-
Tschelebi , rassembla tous ces fetwas et fermans en
un seul livre, appele le Kanounname. Dans cet ou-
vrage, Mohammed-Tschelebi emet la m£me opinion
que le moufti Ebousououd , qui ne reconnaissait que
trois classes de propri&es territoriales dans tous les
Etats de l'islamisme. La premiere se compose des biens
soumis k la dime f ; ce sont ceux qui ayant &e assignes
aux musulmans, lors de leurs conqudtes, etaient de-
venus leur veritable propria (miilk) , et pour les-
quels ils payaient la dime (aschr) , mais aucun impdt
foncier (kharadj). La seconde classe comprend les
biens territoriaux assujettis au kharadj '; ce sont ceux
qui au moment de la conqu^te furent laiss£s h leurs
possesseurs non musulmans, k la condition de payer
non seulement l'impdt de capitation , mais encore
un impdt foncier 3 et un autre sur les produits 4 ; ces
biens appartiennent comme les pr£c6dens en pleine
propri&6 h leurs possesseurs, et n'en different que
par les charges plus lourdes dont ils sont greves. La
troisi&me classe, enfin, renferme les terres de la cou-
ronne 5 , e'est-i-dire celles dont FEtat se reserve la
* Erzi aaschriye. — * Erzi kharadjiye. — 3 Kharadj i mouwazaf. —
k Kharadj i moukaseme. — 5 Erzi memlekel.
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268 HISTOIRE
propria el abandonne la possession viag&re contre
la redevance du service militaire en temps de guerre ;
les sujets ou les paysans (raya) qui les exploitent
paient k leiirs possesseurs, les feudataires, le fermage
(tapou), l'impdt fonder * , et une taxe nommee dime,
quoiqu'elle excede le plus souvent la dixi&ne partie
des produits, et en forme ordinairement la neiivi&ne
ou la huiti&ne, quelquefois m£me la moitie.
Le syst£me des fermes &abli en £gypte pour les
biens territoriaux de 1'Etat diff&re essentiellement de
celui des fiefs du reste de Tempire tel que nous venons
de le d^velopper ; mais cette difference reside moins
dans le principe de propri&e que dans le mode de
perception des impdts. D'apres le Koran, la terre en-
tire appartient k Dieu qui la tegue k qui lui plait ; en
sorte que toute propria relevant originairement de
Dieu appartient k l'imam (souverain), qui est son om-
bre sur la terre. Mais apr&s la conqu6te d'un pays,
rimam aliene son droit de: propri&e en faveur des
musulmans k la charge de payer la dime, ou bien des
lion musulmans, k la charge d'etre soumis k un imp6t
foncier 6t k un imp6t sur les produits : les nouveaux
possesseurs acquterent ainsi sur ces biens un veritable
droit de propri&6 transmissible de p£re en fils, avec
la faculty de les vendre, de les partager ou de les con-
sacrer k des fondations. Le prince a de semblables
droits sur ses biens de famille et sur ses biens doma-
niaux (kass), dont il lui arrive souvent d'assigner les
i Resmi tscheft resmi dcenum, la censive.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. *6g
revenus k titre de traitement a de hauts fonctionnaires.
Les domaines du pays, c£d£s comme fiefs en recom-
pense tie services militaires , ne jouissent pas de ces
a vantages ; leurs possesseurs n'ont pas sur eux ce droit
de propria illimit£ , et ne peuvenl les aligner , les
partager ou en instituer des fondations. Les domaines
se perpetuent k la v^rit^ dans la ligne male des feuda-
taires ; mais, comme l'Etat seul en a la propri&e, il est
n£cessaire qu'& la mort de chaque feudataire, ses fils
regoivent du prince un nouveau dipldmg d'investiture.
En Egypte, on donne le nom de ♦fermes aux m&nes
biens qui, dans l'Anatolie et la Roumilie, sont appeles
fiefs, c est-a-dire ceux qui sont conc£d£s en recom-
pense de services militaires; mais il y a une grande
difference entre le feudataire et le fermier £gyptien.
Ce dernier n'a ni les m&nes obligations ni les m6mes
avantages que le premier; car,tandis que le feu-
dataire propri&aire viager, ne^paie aucun impdt a
l'Etat et regoit de son paysan ou raya tous les revenus,
le fermier au contraire paie k l'I£tat un droit de fer-
mage et partage avec le paysan le surplus des produits.
II r£sulte de 1& que , dans les provinces ottomanes
de FAsie et de l'Europe , les feudataires (siams ou
timarlus) et les paysans (rayas) sont dans une posi-
tion bien plus avantageuse que les fermiers 6gyptiens
(moultezims) et leurs paysans (fellahs) [xv]. A F6po-
que de la conqu&te d'Egypte, Selim I" y trouva eta-
blie cette institution des fermes; elle avait &6 fondle
par le sultan des Mamlouks Bahariles. Nassir Ben
Koulaoun, mais depuis sa mort elle 6tait tomb^e en
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270 HISTOIRE
desuetude. Contrairement & leur destination qui les
affectait exclusivement aux militaires, ces biens, £chus
a des bourgeois ou des artisans , avaient 4t6- trans-
formes en fondations pieuses (wakf), ou grev£s d'hy-
poth&ques au profit des pensionnaires de l'Etat '. En-
viron quarante ans avant la conqufite des Ottomans,
le sultan Kaitbai avait cherch6 par un M\l a d&ruire
ces abus ; mais ils se renouvelerent sous le r6gne de
ravant-deroier sultan mamlouk Kansou Ghawri, et
furent pouss& a un point extreme sous ladministration
du premier gouverneur ottoman Kh air beg. La r6volte
de Khain Ahmed-Pascha, gouyerneur d'Egypte, at-
tira sur cette province r attention de Souleiman d&
les cojumencemens de son r⪈ quand la rebellion
d'Ahmed eut &6 r6prim6e, le Sultan envoya au Caire
son grand-vizir Ibrahim- Pa scha pour pr&ider k la
reorganisation du pays. Cependant le veritable Ka-
nounname de l'Egypte ne date pas du voyage dlbra-
him-Pascha , mais du gouvernement de l'eunuque
Souleiman -Pascha, ^apitan dans les mers de TArabie
et des Indes, et deptds grand-vizir [xvi]. Ce Kanoun-
name determine les droits et les devoirs des kaschifs
pu officiers des Mamlouks, des scheikhs des villes et
des villages, des inspecteurs des finances et de la capi-
tate, du pascha gouverneur d'Egypte, des fermiers et
des ecrivains, des commissaires et des inspecteurs des
granges , des geom&res et des paysans ; il embrasse
les fondations pieuses, la douane, la monnaie, lefisc,
i Voyez le troisieme Memoire de Sihestre de Sacy, dans le Vile volume
des Hemoiret de I'Insutut, p. 109.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 271
et prend pour base, dans plusieurs de ses disposi-
tions, lesanciennes institutions du sultan Kaitbai qu'on
avait surtout en vue de maintenir. Le besoin de ce
nouveau code et d'un nouveau cadastre etait d'autant
plus urgent, que tous les anciens registres des imp6ts
avaient &£ consumes dans un incendie. Les troupes
soJd£es des Ottomans en Egypte furent divis^es en
sept classes: les janissaires, les azabs, les tschaouschs,
les mouteferrikas, les djebedjis, les tufendkschis et les
gcennullus [xvn].
A cet expose des lois relatives aux feudataires et
aux fermiers, il convient d'ajouter celui des lois qui
concernent les rayas ou sujets, musulmans ou non
musulmans , payant aux feudataires un imp6t et d'au-
tres redeyances. Le kanoum ray a, ou code des sujets,
promulgu£ par Souleiman II , confirm^ et comply
par Ahmed I er , ^num^re les redevances du sujet en-
vers son feudataire, ainsi quil suit : l'impdt foncier,
la taxe des ceiibataires, le droit de fian$ailles r le droit
sur les moutons et les p&turages , le droit d'hiver-
nage , le droit sur les abeilles et les moulins , le droit
sur 1 usage du tabac a fumer, les Apices et le droit
sur les esclaves '. Tous les imp6ts, dans les pays mu-
sulmans , sont divises en deux categories : les im-
p6ts l£gaux % qui sont determines par le Koran et les
■ Resmi lachift; rdt&i dcenum, moudjerred ; resmi aarous; resmi aghnam ;
resmi otlak; resmi kischjak; resmi kowan; resmi deghirmeo; resmi dou-
klum; resmi esiran; resmi kaxa.
* Houkouki ou rousoumi scheriye. Le mot houhouk repond entieremeut
au mot droits , et le mot rousoum au mot impoi.
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i 7 a HISTOlRE
lois fondamentales de l'lslamisme, et les imp6ts ar-
bitraire^ x , qui ne sont institu&s que par des ordon-
nances administratives (kanoun) , et qui pour cette
raison sont aussi nomm6s imp6ts du Diwan. Les im-
p6ts non determines par le Koran ou le kanoun sont
designs sous le nom arabe de Award (exaction) , mot
qui a pass£ en gardant sa signification dOrient en
Occident (avanies). Les imp6ts l£gaux sont la capi-
tation, la dime, Timpdt foncier et Timp6t sur les
produits; tous portent le nom g£n£rique de Kha-
radj a . Les imp6ts arbitrages comprennent les taxes,
les amendes , les douanes et les droits proprement
dits 3 . Les taxes se divisent en taxes sur les per-
sonnes ou sur les choses : les premieres sont la taxe
des c£libataires, celle des fiangailles dont le taux varie
suivant la condition de l^pouse, jeune fille ou veuve,
et la taxe des hommes martes; les secondes, les droits
de justice et les Apices. Les amendes sont imposes
pour de graves d61its de police (d]4rim£), ou Wen
.pour de 16g6res contraventions aux r^glemens de po-
lice ; on les nomme bad ou hawa, e'est-a-dire amendes
du vent et de Voir. Les droits de douane, pr&ev£s
sur les marchandises, se divisent en droits d'impor-
tation ou d'exportation , en droits de transit et de
i Tekalifi Ottrfiye.
» La capitation Vappelle djiziet ou kharadj, la dime aasehr, l'impot fan-
cier kharadj i mowwataf, l'impot sur les produits kharadj i moukasemd.
3 Awarizi cftwaniye; msssdariye ; reft; badji; derbendiye; kassabie;
bagh; kapan; mouvazehe; temgha; koudamiye; yasak-kouli; moubasche-
riye; dellaliye.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. a 7 3
p£age, et en taxes sur les vivres qui comprennent
celles auxquelles sont assujettis les viandes et les vins.
Les droits proprement dits sont des droits d'emma-
gasinage, de balances, de timbre, de commission et
de courtage ; d'autres se pergoivent sur les domes-
tiques et sur les gardes ; quantity d'autres enfin ont
regu la denomination vague et trfes-&endue d'inno-
yations *. Tous ces imp6ts arbitraires varient suivant
les paschaliks, qui ont chacun un kanounnam£ parti-
culier. Le defterdar Mohammed Efendi-Abdi a le pre-
mier rassemble ces divers kanounnam£s en un seul
code, sous le regne de S&im II; et ce code fut 6dit6
de nouveau par le defterdar Ami , sous le r&gne
d'Ahraed I cr . Ainsi, par exemple, dans la Syrie, les
biens territoriaux ne sont pas, comme dans TAnatolie
et dans la Roumilie, tax6s d'apr£s la cense et le mi-
nage {tschift et dcenurn) , mais d'apr&s la superficie
qu'une paire de boeufs peut labourer depuis le matin
jusqu'& midi (feddan) , ou d'apres Tespace que par-
eourt en vingt-quatre heures Teau qui s'6coule d'un
&ang par une saignee. Lie produit d'un bien afferm£,
qu'il soit pay£ en argent ou en nature, s'appelle
dimos a . Les oliviers sont divis&s, suivant la croyance
de leurs possesseurs, en infid&les et en musulmans,
distinction qui en entraine une dans leurs imp6ts. Dans
les ports de mer, outre les droits dont nous venons
de parler, il en existe d'autres , tels que taxe d'arri-
vage, taxe sur les dipldmes, taxe d'6change, taxe sur
t Bldaat, — » Atjoio^.
T. VI, i8
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*74 . H1STOIRE
leg gargong, sur leg preens, aw le§ doraestiques, sur
le balayage, sur tes distributions, »ur leg fftes, sur les
y&emeng d'honneur, etc. D'autres tmp6U sont ^tablia
gur 1 'irrigation des champs de pis, gur leg gteppeg ou
paissent leg troupeaux, gur leg four rages, sur leg pro-
duits des prairies; enfin, les campagnes sont soumises
a de* corv^es , a des fournitureg en nature pour le
passage des armees, et k des contributions de guerre.
Non settlement Soulejman apporta (teg modifica-
tions aux differens codes des janissaires, des fiefs de
Roumilie et d'Anatolie, des fermes d'Egypte, et a ceux
des sujets musulmans et non musulmans; mais encore
il fit une nouvelle division du territoire ottoman en
vingt-un gouvernemeng, comprenant ensemble deux
cent cinquante gandjaks [xvm]. Le journal de sep cam-
pagnes fait egalemcnt mention de plusieurs innova-
tions operees dans le Kanounnam£ des usages (ay in)
et ceremonies de l'empire (tehschrifat). Enfin, il ap-
porta un soin particulier h la revision des rlglemens
de police, et deg cinq chapitres du Kanounname, qui
traitent des lois peqales et sont la base de la jurispru-
dence criminelle de l'empire ottoman. Le premier
chapitre, de la/ormccuion, condamne les d&inquans
& une amende qui varie de mille & trente aspres, sui-
vant lew fortune. L'entevement d'un jeune gargon
ou d'uue jeune fille est puni par la perte de la viri-
lity. Quiconque £pie et embrasse la femme ou la fille
d'un autre, est passible d'une forte reprimande et
d'une amende d'un aspre pour chaque mot et chaque
baiser; si la femme est une esclave, l'amende est moips
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. 2 7 5
forte de moitie. L'accusation pure e£ simple ne suffit
pas pour faire instruire le jugement, et si Faccus6
attests par serment son innocence, la partie plaignante
regoit une r^priraande et supporte une amende d'un
aspre. Le pire qui couche avec Tesclave de son fils
nest pas soumis k l'amende ; mais celui qui commet le
crime de bestiality encourt une severe r£primande et
une amende d'un aspre ppur chaque cas. Le second
chapitre traite des pekies et amendes inflig6es pour
dee injures, des coups, des barbes arrach^es, des souf-
flets, et de teg^res blessures h la t&e. Une dent cass£e
on un oeil erev6 sont punis de la peine du talion.
Cependant , avec le consentement du plaignant , le
coupable peut racheter cette peine par une amende
de deux cents aspres, s*il est riehe, et de trente aspres
s'fl est pauvre. Si le plaignant est un esclaye , IV
mende est r6duite pour son maitre h h moitie de cetle
somme. Pour s'ttre battues entre elles , les femmes
de la classe des voitees, ou honorables , regoivent du
juge une r£primande avec menaces et une amende de
vingt aspres; la peine du m&ne d£lit, pour les femmes
non voil&s, c'est-k-dire non honorables, est une
amende de deux aspres par coup et la simple repri-
manded Le troisi£me chapitre traite des peines port^es
centre 1'usage du vm, contre le vol , le pillage et le
brigandage. Pour chaque verre de vin , le contrete-
nant paie mi aspre d'amende ; le vol d'une piece de
volaille est puni de la m&ne pane ; mais le voleur
d'un cheval, d'un mulet, d'un ftne ou d'un buffle, est
condamn<§ h avoir la main coup£e, chatiment qu'il peut
18*
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z 7 6 HISTOIRE
racheter par une amende de deux cents aspres. De
proches parens, habitant la m6me maison, ne regoi-
vent qu'une reprimande pour s'etre voles entre eux.
Celai qui, dans un mouvement de colore, arrache le
turban d'un Musulman, est condamne au paiement
d'un aspre et k une reprimande. Les vol^urs, qui eji-
tevent des esclaves, penetrant avec effraction dans
les boutiques , ou qui ont d£ja subi plusieurs eondam-
nations pour de petits vols, sont pendus. Si un vol est
commis dans le voisinage d'un village, les habitans en
sont solidairement responsables, et doiyent indemni-
ser celui qui a et6 vole. Si un feudataire se rend cou-
pable de vol, il peut 6tre aussit6t arr6t^; mais, avant
de le punir, on doit soumettre k la Porte un rapport
sur FafFaire. Les faux t£moins, les faussaires et les
faux monnayeurs sont condamnes a avoir la main cou-
ple. Deux omissions cons^cutives de la pri&re pres-
crite cinq fois par jour, et Inobservance du jetine,
sont sujettes k une amende d'un aspre. Ceux qui par
des calomnies ou des medisances ont porte preju-
dice k des families, sont tenus envers elles k une en-
ti^re reparation du dommage cause. Enfin, des peines
diverses sont poriees contre ceux qui prfitentleur ar-
gent k plus de onze pour cent. Le quatri&me chapitre
contient les reglemens sur les marches , et le cin-
qui&me ceux qui concernent les diverses professions.
Dans le quatrieme chapitre, on remarque, comme un
trait caracteristique des usages et de la police des Otto-
mans, la recommandation faite aux habitans de ma-
nager les betes de somme. Le cinqui&me renferme
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DE I/EMPIRE OTTOMAN- * 77
d'autres dispositions de moindre importance : ainsi il
est enjoint aux boulangers d'observer avec soin la
proportion convenable de beurre et de farine dans
la composition de leurs g&teaux , et aux gargotiers de
surveiller attentivement Tetamage de leurs ustensiles
de cuivre. Le prix de Thalwa, c'est-&-dire des sucre-
ries et patisseries, est base sur le prix courant du miel
et des amandes. Les marchands de raisins et de fruits
sees doivent se contenter d'un b£n£fice de dix pour
cent. Les prix des diverses espfeces de souliers, bottes
et pantoufles, ainsi que ceux des selles, mors et
autres harnais, sont soumis k un tarif invariable. Le
salaire des ouvriers magons, charpentiers et menui-
siers, est fix6 a dix aspres par jour avec leur nourri-
ture en sus; Le prix du bois est r6gle sur sa lon-
gueur, et celle-Ci se determine d'apr^s le mode de
transport du bois , suivant qu il est fait a dos d'&ne,
de mulet ou de chameau. Les propri&aires d'&a-
blissemens de bains sont ten us de chauffer conve-
nablement leurs chambres, d avoir d'habiles frot-
teurs, masseurs et barbiers, et d'entretenir en bon
&at leurs divers ustensiles. U leur est enjoint d'avoir
des peignoirs particuliers et marques distinctement
pour les infid^les, et de recommander & leurs bar-
biers de ne pas se servir du m&ne linge et des mdmes
rasoirs pour les Musulmans et les Giaours. II est per-
mis aux mendians de mendier les jours de march e,
except^ dans les mosqu^es, et il est d6fendu aux 16-
preux de se montrer dans les rues. Aucune mar-
chandise ne peut etre vendue que sur Un reglement
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a 7 8 HKTOGRB
itabli par le juge de la vitte et te pr£pto6 dft march*.
On voit, par eel eitrait des peides flxees pa* Semitic
man, que leg lois relatives h la morale et h*s rtgte*
mens de police devaient 6tre agr&tbtes an people; caf
ee§ derniers aasurent avee 9oin le bon march6 et la
bonne quality des choses les plus n&essaifes & la vfci,
tels que la nourriture et les t&etnens, et lea premieres
sont si peu rigoureifces eontre les d&ita de la sensua*
lite, qu'elles sont pltfs propres k les eneourager qu'k
les contenir . Si, sous ee rapport , lfc code de Soulelman
ne peut 6chapper au b&me d'irae censure, 11 eat digrie
n&nmoins de 1'approbation des philanthropes et des
horames d'Ewt, en cequ'il rendtt plus rare rappfito*
tion des deux peines principales fix^es contf e le vol et
Tadult^re par la legislation de I'lsfctarisitfe, le Koran ; il
permit en effet de racheter par tine amende ces peines,
qui ne sont autfes que la lapidation et la mutilation
du bras. Le m£me esprit dhumartite et d'indulgence,
quia port6 Souleirrtan k adoucir dans soh code l'aus-*
tere s<W£rit£ des lois primitives de ririaitiisfne, se re-
trouve dans la tolerance qu'il accorda k 1'usage des
vaisselles d'or et d'argent, qui arait &£ feterdit atfx
Musulmatis par les Pferes de l'Eglise corame contraire
k Fefeprit telamke. Sotdeiman excita m£me un grand
in&ontentement parmi les testes et le people, tors-
qu un jour, dans tin festm public offert h des ambas-
sadeurs per sans, il fit servir les mets dans des vaisselles
d'or et d'argefit, luxe dont il n'y a plus eu deiempte
depuis; car djourdhui m&nfe la vaisselle de la coor
est en poreekune de Ghinfe d une couleur verte. Sou-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 279
feflmn ne defend* pas I'usagfc du caf6 nouvellement
introduit dans son empire, quoiqu il fot fort douteux
qu§ le Proph&e l'etit atitofidd, et on pent condtire de
ldrdonnance rnfrne rebdtie v@rs la fift de son r$gnd
coiitre la vente publique du via, qti'il Tavaft tdterte
jusqu alors. Dans sa jeunesse, lofsqu'il vivait dims la
compagnie de aoti confident le ren^gat grec Ibrahim,
il n avait pas les mgmeg flcfupules all stijet du via?
raais quand led douleurs de la goatte et lfes infirmity
de la vieillease lui eurart ftit une n6ee»Mf6 de cette
abstinence, il voulut r&endre h tout son peupte. Ufte
lettrjB qu'il ierivit srcette fyoque au sch&h Tahmdsp l
montre qu'il se faisait gloire de cet aete de bon Musul-
man'; il lui annonyait en efffet que, conformement aux
lois de I'lslanrisme, il avait fait d^fendre Tusage du Tin
dans tous ses Etats, et il se repandait en invectives coh*
tre cette boisson , que le PrOph&e appelle la mire dei
vices \ Dans une de ses plus belles ghazeles, Hafiz dit
du vin: « Cette tn&te des vices nous est plus douce
que le baiser d'une jeune fille. » On volt pafr cette
parole, en opposition si difecte avec la sentence du
Prophete, que Hafiz &ait loih d'etre un mystique pur;
aussi excita-t-elle le tele des orthodoxes, qui s'en au-
toris^rent pout demander aiu moufti s'il ne serait pas
convenable de defendre* en m&ne temps que le vin,
un ouvrage qui en faisait un si pompeux eloge. Aussi
prudent que savant, le ftioufti Ebousououd, qui n'au-
» Cetle lellre est la derniere de YsJppendice du Jourrml de Sotileiftwtfl ,
sous le no lxiv. Hadji Khalfa, Tables chronologiques, a l'annee 967 (i5Go).
3 Oummoulkhabals , litleraleuiciH la fit&re des bassesses.
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a8o UISTOIRE
rait pu en aucun cas refuser son fetwa centre l'usage
du vin, repondit k cette demande par une sentence
pleinede moderation ; il d&larait qua la v6rit6 quel-
ques passages du poeme de Hafiz pouvaient blesser les ,
sentimens de certaines personnes, maisqu'au fond ils
devaient &re interprets et jug£s d'une maniere plus
favorable. Ebousououd refusa egalement un fetwa
contre les cafes, don t le premier avajt &6 etabli &
Constantinople en 4554, par un habitant de Haleb,
nomme Schems, qui, apr&s trois ans de sejour dans la
capitale, retourna dans sa patrie avec un benefice de
cinq mille ducats. Pris de trois sifecles s'&aient 6cou-
16s depuis que le scheikh arabe Schaedeli avait de-
couvert les propriety de la f6ve du easier, en remar-
quant que ses chameaux &aient plus dispos que de
coutume aprifes avoir broute les feuilles de cet arbris-
seau; suivant une autre opinion, cette d^couverte au-
rait &e fortuitement faite par son disciple Omar,
pendant son exil au mont Ossak pr6s de Sebid. Malgre
la conqu&e de 1'Egypte et les nombreuses caravanes
qui vont en pelerinage a la Mtecque, l'usage du cafe
etait reste jusqu'alors restraint k TArabie, a 1'Egypte
et a laSyrie, et on ne le connaissait a Constantinople
que par sa renommee et le rapport des pelerins ; mais,
a cette epoque, il devint general dans la capitale;
on vit de toutes parts s'ouvrir des cafes oii se ras-
semblaient les beaux-esprits de toutes les professions,
et surtout les derwischs et les oisifs, adohn^s a la vie
contemplative, pour y goftter les douceurs de la nou-
velle boisson. On la d&igna par l'un des noms donhes
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. *>8i
au vin, kahwek, mot arabe qui signifie ce qui 6te Tap-
petit ; un poete arabe l'appela un nigre ermenu du
sommeil et de la copulation. Les caf6s sont d£sign&
en langue turque sous la denomination diUcoks des
connaissances l .
Les apergus prec^dens nous ont montr6 les droits
que Souleiman s'est acquis au titre de l^gislateur, en
reorganisarit le diwan, les finances, le corps des ou-
lemas, Farmee, le syst&ne des imp6ts, eel ui des fiefs,
des fermes , le cadastre des provinces, le code des
ceremonies et ceux des lois ciyiles et p6nales. II nous
reste maintenant a examiner en premier lieu par quelles
causes sa politique , malgre la sagesse tant vantee de
sa legislation, donna naissance a des vices qui se d£-
velopperent plus tard, et comment, au sein de la plus
grande prosperite de l'empire ottoman, il introduisit
les germes de sa decadence future. Nous devons ex-
pliquer, en second lieu, comment, malgr£ ses defauts
et ses faiblesses, Souleiman a merits le titre de Grand,
qui lui est donne par tous les historiens europeens.
, Les causes de la decadence de 1'empire ottoman
ont et6 souvent exposes avec verity par les auteurs
occidentaux; mais aucun d'eux n'a traitdcette ques-
tion avec autant de sagacile, et avec une plus parfaite
connaissance des choses que Khotschibeg, qui \ivait
du temps de Mourad IV. Son ouvrage sur la deca-
dence de Fempire ottoman lui a m^rite le titre de
Montesquieu turc, de m&ne que les Prolegomdjies
* Mckinhi- irfan ; et mm pas ecvles des swam.
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fc& aistoiRfi
hisiQiiqktt otrt valu k leaf atitettr Ibn Khaldoun le
Wrflom de Montesquieu flfabe. Les 6crivafins anglais,
frangais, italiens et altemaftds, qui se sont ocdupes de
la redberehe des causes de la decadence de Fempirc
ottoman, &aient non seulement peu favorablement
places pour p&i&rer profond&nent dans la connais-
sance du systerae politique et administralif des Turcs,
mats encore ila n'ont commence leurs investigations
qu'fc dater de$ successeurs, de Souleiman , tandis que
Khotschibeg fait remonter les siennes ati r>te m^me
de ee sultan, et signale d& cette 6poque les cinq causes
ttrivantes de dissolution, que nous allotis ctevelopper
d'apreslui.
Aprds avOi* assist* r£guli£rement a(u diwan dans
le commencement de son r^gne, Souleiman fcessa de
paraflre aux seances, contrairement a Texemple de
ses pr&&cessetirs, et se borna h les suivre derrtere la
fenftre voitee. Le diwan continua k s'assembler dans
le serai quatte fois par semaine; mais, k dater de cette
epoque, Souleiman fce prit une part personnelle au
cooseil que dans des occasions eitraorditfaires, comme
celle de la controverse religieuse au strjet de VhetG-
tkjue Kabk, ou bien lorsqu'il tenait un diwan k che-
tal sar un prcjet d$ guerre ou strt* les pr£pa*atifs
d'une campagne. En se retirant artnsi du conseil et en
s'y faisant representor par son grand- vizir, Souleiman
avait en vue de rendre plus hnposante la majesty im-
p&iale. Ce f ut un coup funeste port* Si la prosp£rit6
de l'empire, que la resurrection de cette ancienne
coutume asiatique, qni ne permettait pa& au prince de
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DE L'EMPIKE OTTOMAN. a85
traker directettient les affaires de son foylauffie, et qm
m&ne d£robiit sa persottne i tons les yeux pout Ven-
viromief d'un prestige *acr&
Jufcqu'<eahim^Pascha , les grands-vizirs n'&atent
parvenus k tear dignity qu'aprds avoir pass£ par les
divers etnplois de lEtat et de l'armge; dans le prin-
eipe on les choisissah parmi le6 jages de l'arpi4e gainst
fes grands-vizirs de la fanriBe des Djendereli avaieftt
m&gk comme juges; plds tard , on les prtt parmi les
gouverneurs des provinces. En noramant grand-vizir
son grand-fauconnier Ibrahim, Souleftnan donna Ie
premier 1* pertricieux exempte de la promotion des
comtisans aux emplois de l'Etat, et ouvrit atnsi k
l'intrigue et k l'mcarie des favoris nne carrfere qui
demande tine experience mtkrie par de longs services.
Vers la fin de son rdgfte, il airna mieux r6compenser
son amirfd Piale de ses importantes victoiros, en lui
accordant la main de h ftlle du prince S61im, qu'en
F&evaiit k la dignity de vizir; mais il n en a pas moms
eommts tme grande finite politique, en augmentant les
boimeufs et Finfluence de son beau-frere Ibrahim et
de son gendre Ronstem dans leurs fonctions de
grands-vizirs. G'est airafl que, rejetant l'osage observe
par son p6re Selitn, de n'accorder a ses gendres que
des functions de satidjftks, et de ne pas les laisser
s'imitnscer dans left affaires importantes de l'Etaft, il
ouvrit utie large porte k lambition des grands. Sous
radmmistratkm de Koustem, commenga k se mahi-
fester la funeste influence du harem stfip les affaires
pubHques, grftce au credit de sa belle-inere, la sultane
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*84 HISTOIRE
Roxelane, dont les charmes conserverent jusqn'k sa
mort toute leur puissance sur Souleiman. Quoique cette
influence, alors favorable a Rouslem, sembl&t affer-
mir le grajid-vizirat , elle Taffaiblit en r^alite en le su-
bordonnant a la volont6 du harem; car, apr&s cette
premiere preuve de sa puissance, le harem ne se
borna pas dans la suite a soutenir le pouvoir des
grands-vizirs, mais il employa souvent son credit ale
renverser, et plus tard t ce ne furent pas seulement les
femmes, mais encore leurs gardiens, les eunuques ,
qui eurent part au gouvernement.
La troisteme cause signatee par Khotschibeg consiste
dans la venalite et la corruption introduites par Rous-
lem. II vendit les emplois de gouverneurs h des prix
fixes et determines, et afferma, moyennant des sommes
considerables, les biens de l'Etat a des juifs et a des
gens sans consideration, qui, pour refaire leur for-
tune, y commirent toutes sortes de d£g&ts.
Souleiman depassa les bornes d'une sage dcono-
mie, en accordant d'immenses revenus k son grand-
vizir Roiistem, et il iait le comble a ses prodigality,
en lui permettant de transformer ses biens en wtekfs,
c'est-jt-dire en biens inaltenables, dont sa famille con-
seryerait a jamais la propri&e. Ces faveurs port&rent
dans la suite la fortune de cette famille a un revenu
de dix millions d'aspres (deux cent mille ducats).
Les grands-vizirs imiterent la prodigality fastueuse
du Sultan; ils rivalisaient entre eux pour le nombre
des esclaves etla richesse des ameiiblemens, ainsi que
nous l'avons dit a Toccaaon de l'exefcution d'Isken-
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DE L'EMPIilE OTTOMAN. ofl5
der-Tschelebi el de la succession de Roustem-Pascha.
Le laxe des grands-vizirs entrafna celui des autres
vizirs; ainsi Ahmed-Pbscha, gendrede^Roustem, qua-
tri&me virir lors du si<5ge de Szigeth et depiiis grand-
vizir, introduisit le premier Tusage de trois epp&ces
de v&enaens enti&rement composes de raagriifiques
foumntes : le premier se portait dans Tint&rieur de,
la maison , le second dans les c£r£monies ordiriaires,
et le troisi&ne dans les reunions du diwan. Ahmed-
Pascha n'avait pas moins de cinq cents esclaves , et
entretenait cent chameaux et cent mulets dans chacnne
de ses fermes. C'est ainsi qu'en se retirant du diwan,
en repandant avec profusion ses faveurs sur ses gen~
dres et d'autres grands de Tempire, et en fermant les
yeux sur leur luxe, leur avidite et leur corruption,
Souleiman mdlait a ses bonnes institutions des germes
nuisibles qui prirent dans la suite de funestes develop-
pemens. Mais les historiens europeens lui adressent
un reproche mal fond£ en l'accusarit d'avoir £loign6
les princes des gouveraerijens et de les avoir rel^gues
dans le harem; car, a Texception de deux de ses fils
morts en bas-&ge, tous les autres administraient des
paschaliks, et, peu de temps m&ne avant sa mort, il
avait nomm6 son petit-fils Mourad, fils de Selim, au
gouvernement de Magn&ie. En outre > parmi toutes $es
lois, on n'en trouve aucune qui interdise la nomination
des princes comme gouverneurs, et d'ailleurs nous
verrons des gouvernemens occup^s par le prince Mou-
rad , sous le regne de Selim II, et sous celui de Mou-
rad III, par sou fils Mohammed,
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m WSTOIRE
En exmmnt jwqU'* quel point Sfttsletmaa ami*
rite le titre de legislates, de conqu&aj|t, <te puissant
et de magprfique, 1 'historian impartial ne doit pas
chercher k rabafeser les diverse* gloiras de son r£gne,
en raison de la part que prirent k la revision des an-
ciennes lois , h la confection des nouvelles , et aux vie-
toii-es de ses campagnes, Jes grand*- vizirs Ibrahim et
Roustem , les mouftis Ebousououd et Kemal-Pascha-
zade , et lei secr^taires^d'Etat Djelalzadg et Moham-
med -Egri-Abdi; car des instrumens habiles sont b£-
cessaires pour r execution des grands projets ; et e'est
deja un grand talent que de savoir choisir de bom
ministres et de bobs g£n&aux. Mais rhistorien doit
rechercher si Souleiman n'a pas abandon^ trop de
pouvoir h ses vizirs , laise£ prendre trop d 'influence
au harem, et montr£ tant6t use indulgence qui ddg&-
ngrait en faiblesse , tantdt une s£v&it£ qui s exag^rait
jugqu a la cruaut6. Or, il se laissa dominer, plus qu'il
ne convient a nh grand caract&e, par son favori
Ibrahim et par sa femme de predilection, Roxelane
la Russe; plus tard, il fit expier croellement k son
ami Ibrahim sa trop grande condescendance en vers
lui; et, apres la mort de Roxelane , il ne craignit pas
de tremper ses mains paternelles dans le sang da
prince Bayerid et de ses 43*. Si la plupart des nom-
breuses executions qui eurent lieu sous son r*gne
peuvent &re <^M&&& comme das mesures de s£-
v6rite n^cessaires au mamtien de Fordre, la mort
perfide dlbrahim et d' Ahmed Pascha restera comme
une tache ind^Kbile dans son Wtfoire. A rejection
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DE L'EMPIttE OTTOMAN, $87
des nischancfyis , tous les emplois superieurs de 1'El^
et de larmee fournirent, pendant le long r^gue de
Souleiman, leu? contingent au bourr^au, Ainsi i'dn
comply, parnri ceia que frapp&rent leg ordree sanguis
naires de ce souverajn, un grand-vizir, un kapitan-
pascha , plusieurs agas des janissaires et des sipahis ,
le deflerdar Iskender-Tschelebi, leg Feis-efendis Piri
et Haider , l'amiral Piri , le legiste Kabi? , le scheikh
Hamza , plusieurg gouverneurs de families dt&tin-
gu£es, tels que Balibeg & Scutari, Arslan-Pascha &
Ofen , Ferhad-Pascba , beglerbeg de Roumilie et gen 7
dre du Sultan , enfin leiils et le peUt-fils de sop grand*
oncle Djem , puis seg propres filsetpetite-fils, Mous-
tafa et son fife mineur, Bayezid et ges ciuq fils, en tout,
djx princes du sang. Mais leg fautes de Soutefman
ne doi vent pas nous faire oublier leg grendeg qua-
lity qu'on ne saurait lui contest er; rappelons-nous
see hauts-faits et ges oeuvres diverseg, son esprit 61eve
et entreprenant, son courage Wroique, ga stride ob-
servance des lois de llslamisme quil sut unir k tant
dq tolerance, job esprit d'ordre et d'foonomie qui
s'alliait h tant de magnificence et de grandeur, son
amour £clair£ des sciences et la protection qu'il ac-
corda liberalement aux sa vans. Rappelons- nous lea
treize campagnes qu'il conduisit en personne, gas nom-
breuses bataUJes et seg conqueteg : Rhodes et Belgrade,
ces deu? boulevards de l'empire #ir tore et sur mer,
conquis d£s le commencement de son r⪈ Ofen
et Bagdad, goumises dans 1'espace de sept ans; Gyula
et Sxigeth, r^duites dans les derni® heures de sa
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a88 mSTOIHE
Tie, et les drapeatnt ottomans plants devant les mars
de Vienne et de Diou. II recula les fronti£res de son
empire, a Test, jusqu'i la forteresse de Wan, et a
Fouest, jusqu'k celle de Gran; au midi il £tendit sa
domination sur Alger, Tunis, Tripoli, et jusqu'aux
frontferes de la Nubie. Depuis les cimes escarpdes de
F Ararat et les plaines de Nakhdjiwan jusqu'au pied
da mont Semmering et des montagnes de la Styrie,
les akindjis sem£rent la terreur sar leur passage, ne
laissant apr£s eux que ruines, devastations et villages
incendtes. Sar la M6diterran£e, les flottes, conduit es
par Khaireddin-Barberousse et Torghoud, portSrent
leurs conqu&es et leors devastations dans FArchipel,
dans la Pouille et la Calabre, la Sicile et la Corse,
firent trembler Rome et s'avancerent jusqu'i Fembou-
chureduRhdne ou elles assi£g£rent Marseille, tandis
que sur les mers d' Arabic et dans le golfe Persique,
une seconde flotte, remontant le Tigre, s'emparait de
la ville de Bassra. Consid£rons enfin les constructions
de Soul ei man, ces chefs-d'oeuvre de Farchitectureot-
tomane, la mosqu£e Souleimaniy6 et les douze autres
de la capitale et des provinces, Faqueduc de Justinien
restaure et embelli , les aqueducs de F^pouse de Ha-
roun al-Raschid i la Mecque r£par£s , les remparts de
Jerusalem relev^s , la construction du pont de Tschek-
medje venant faciliter les approvisionnemens de la oa-
pitale; considerbns aus$i toutes ses dispositions legis-
latives , enfibrassant les divfcrses branches de Fadmi-
nistration civile et politique, et funis serons conduits
& formuler ainsi notre jugement sur ce prince : si sa
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DE L'EMPIllE OTTOMAN. a8g
condescendance pour sa femme et sa s£v£rit£ inhu-
maine envers ses fils et ses petits-fils sont une tache
dans sa vie, le titre de grand souverain lui est acquis
incontestablement.
T. VI. JQ
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LIVRE XXXV.
Arrivee de Selim a Constantinople et a Belgrade. — R6volte des janissaires
apres l'aononee officielle de la mort de Souleiman. — Expedition de
Piale" dans Tile de Kbios. — Chute de fiabocsa et d'Yenoe. — Incur-
sion dans la Carniole. — Negotiations et traite definitif avec l'empereur
Maximilien. — Ambassade persane. — ^venemens a Andrinoplc, a
Bassra , dans i'Arabie et la Moldavie. — Renouvellement de la paix avec .
la Pologne. — Depart d'un ambassadeur ottoman pour la France. —
Construction de la mosquee Selimiy6 a Andrinople. — Essai d'une
jonction du Don et du Volga. — Position topographique de l'Ajabie,.
sa nature physique et ses dernieres destinees. — Conquete de l'Yemen.
Imm£diatement apr6s la prise de Szigeth , le tscha-
ousch Hasan fut envoye par Mohammed-Sokolli au
sultan Selim, gouverneur de Kutahia ', avec une lettre
par laquelle Feridoun, secretaire intime du grand-
vizir , F instruisait de la mort de son p£re. Hasan &ait
egalement charge de repandre sur son passage le bruit
que le padischah Souleiman ne quitterait les environs
de Szigeth, qu'apres avoir enticement retabli les for-
tifications de cette place. Hasan mit dans sa mission
une telle c^lerite, qu'il arriva a Kutahia le huiti&me
jour apres son depart de Szigeth. Le nouveau Sultan ne
i D'apres Almosnino , Selim II se Uouvait alors dans la plaiue-de Ka-
rahissar : En las lianas Carahifar (que llaman Sijan Ojbagi), p. 3g.
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HISTOIRE DE L'EMPIRE OTTOMAN. 291
tarda pas k se rendre k l'appel du grand- vizir, et, te
troisi&ne jour apr&s la reception de sa lettre, il arriva
a Kazikoei (Chalc£doine), en face de Constantinople ,
accompagn£ de son pr&epteur le khodja Atallah , de
son grand-maitre de la cour Housein-Pascha, de son
favori Djelal Tschelebi et de son ecuyer Khosrew-
Aga [1] (9 rebioul-ewwel 974 — 24septembre 1 566).
De Kazikoei, Selim envoya le tschaousch Ali au gou-
verneur de Constantinople, Iskender-Pascha, pour lui
exprimer son etonnement de n avoir encore trouv6
aucuns pr£paratifs pour sa r6ceptk)i*. La r£ponse du
gouverneur, qui ignorait ce qui se passait , marquait
autant d'etonnement que d'embarras. Le tschaousch
Ali fut renvoy6 avec une nouvelle lettre par laquelle
le Sultan enjoignait au kaimakam de relire avec atten-
tion les avis qu'il avait regus du camp, et de les com-
parer av^fc ceux qui avaient&6 adresses au bostandji-
baschi; S£lim lui faisait observer en outre que des se-
crets d'Etat aussi importans que la mort de son p£re
nedevaient pas 6tre ex primes d'une mani&reouverte,
raais dans un langage figure , et que c'etait k lui k en
saisir le sens. En efFet, le bostandji-baschi avait regu
ordre de pr^parer'avec Faga du serai les appartemens
pour la reception de son nouveau maitre. Le bostandji
miren mer la galfere imperial e, et se rendit k Scutari
au palais de la sultane Mihrmah. S£lim ordonna k son
grand-6cuyer d'aller Tattendre a la descente du serai ;
lui-m&ne monta sur la galore imperiale, et d6s qu il
eut quitte le rivage, les canons de la tour de L&ndre,
qui s'61feve sur un rocher isole dans la mer pr£s de
'9*
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2 9 2 H1STOIRE
Scutari, annonc£rent a la capitale &onn£e la mort de
Souteiman et Tav^nement de Selim II. Lorsque le Sul-
tan mit pied k terre, le bostandji le saisit sous les bras
pour Taider a monter a cheval, suivant l'&iquette ob-
serve dans le serai; le grand-£cuyer voulut s'y oppo-
ser, mais le Sultan mit finice debat, en disant dun
ton affable au bostandji : «Ne recoute pas, aga, il n'a
pas &6 61eve dans le serai, et n'en connatt pas le&
usages; mais prends les deyans et montre-nous le
chemin *. » Arriv6 a la porte du serai, le kapou-aga
(grand maitre de la cour) l'aida k descendre de cheval.
La premiere visite que regut le Sultan fut celle de sa
&oeur Mihrmah, qui Tembrassa en versant des larmes,
et lui pfrHa une somme de cinquante mille ducats pour
subvenir a ses premieres depenses. Le moufti Ebou-
sououd , le kaimakam Iskender-Pascha , le juge de
Constantinople Kazizade Ahmed-Efendi, les defter-
dars Hasan -Tschelebi et Belalzad£ Ali-Tschelebi,
avec tous les mouderris, vinrent baiser la main de leur
nouveau maitre et lui pr&er le serment de fid&ite.
Apr6sCette solennit^, le Sultan visita, d'apres les an -
ciens usages, le tombeau d'Eyoub, compagnoii d'ar-* .
mes du Proph&e, ceux de Mohammed-Ie-Conqu6'
rant, de Bayezid II et de son grand-p^re S61im I er ,
laissant a chacun de ces tombeaux un don de tr&ite
mille aspres (six cents ducats) destine aux pauvres
(24 septembre 1566). Deux jours plus tard, S61im
quitta Constantinople, et se porta avec la plus grande
#
» Selaniki, p. 60, teoait cette circonstance du grand-ecuyer lui-ra≠ et
d'apres lui, Solakzad'e, f. ia8.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. a 9 3
diligence vers les frontteres. Les ambassadeurs de
France et de Venise l'attendaient hors des portes de
la capitale pour lui baiser les mains, et il reconnut
leur empressement en leur faisant l'accueil le plus
gracieux. A son arrivee a Sofia (6 oetobre), il envoy a
plusieurs tschaouschs aux republiques de Venise et
de Raguse, au roi de France et au schah de Perse,
pour annoncer k ces diverses puissances la mort de
Souleiinan, et son av£nement au trdne d'Osman. Dtx
jours apr£s son depart de Constantinople, S61im ar-
riva a Belgrade, d'oii il se rendit sans retard a Vu-
covar. II y trouva une lettre du grand-vizir , qui lui
conseillait de ne pas continuer son voyage, et de re*
tourner a Belgrade, plutdt que de se rendre au camp
ou les troupes, k r occasion de son avenement, ne
manqueraient pas d'exiger, suivant r usage, un present
auquel le tr£sor ne pouvait subvenir en ce moment.
Ecoutant ce conseil prudent, il revint sur ses.pas et at-
tendit a Belgrade , dans la maison du gouverneur Bai-
rambeg, Tarriv^e du grand- vizir.
Gependant l'armee avait jusqu'alors ignore la mort
de Souleiman, quoiqu'elle efitappris rarrivee de Se-
lim a Constantinople. D6s les premiers jours du qua-
trteme mois de Fannie (3 rebioul-akhir 974 — 1 8 oe-
tobre 1 566) , elle regut la solde qui lui avait &6 alloode
pour cette campagne. En m£me temps les beglerbegs
de Roumilie et d'Anatolie eurent ordre de ne point
cong£dier leurs troupes avant le jour de Kasim (St.-De-
m&rius). Le SI oetobre, le grand-vizir fit plier 9a
tente, et onjeva celle du Sultan aux cris r£pet6s des
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a 9 4 HISTOIRE
tschaouschs et aux applaudissemens tumultueux de
1'arm^e. Le corps de Souleiman fat plac£ dans une li-
ttere voil£e, comme s'il etit encore et6 plein de vie:
imm£diatement apr&s sa mort, ses entrailles avaient
ile inhum£es d'apr&s les ordres de Sokolli, par les
personnes init&es au secret, au lieu m£me ou &ait
dress£e sa tente, et sur lequel on £leva dans la suite
une chapelle fun£raire. A quatre stations de Belgrade.
Sokolli convoqua les lecteurs du Koran attaches k l'ar-
m£e, et leur ordonna de se r&tnir autour de la littere
imp6riale, pour lire le Koran et les prteres des morts.
vers la quatri&me heure avant Taurore, la m£me ou
quarante-huit jours auparavant le Sultan avait expire.
L'arm£e &ait cample sur la lisiere d'une for£t , lors-
qu'au milieu de la nuit on entendit tout-k-coup re-
lentir le fatih£ ou premiere soura , oraison f un£bre
qu'une inscription plac£e Sur tous les tombeaux invite
le passant k reciter. Tandis qu'a droite on chantait le
chceur : Toute domination pirit, la derniSre heure at-
tend tous les humains, et que Ton r£pondait a gauche:
Le temps nila mort nepeuvent atteindre I'Eternel [n],
les soldats, rompant leurs rangs, eclaterent en plaintes
et en cris douloureux. A la vue de ce d&ordre, les
paschas, se rassemblant autour du grand-vizir, t£moi-
gn&rent leurs regrets de ce que la nouvelle officielle
de cette mort etit &£ aussi intempestivement annonc£e,
bien quelle fit dejk secretement r£pandue dans Tar-
m£e. Quand le jour commenga k poindre, le grand-
vizir, parcourant les groupes des soldats, leur adressa
ces paroles : « Mes compagnons d'arm^ . pourquoi
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. ag5
refusez-vous de continuer votre marche? Ne devons-
nous pas plut6t entonner des chants d'altegresse , et
f&iciter ainsi le Padischah d'&re appel6 au sein de
Dieu l'unique? II a fait de la Hongrie la maison de 11s-
lamisme et combte chacun de nous de ses bienfaits ;
est-ce la la reconnaissance que nous lui t&noignons?
Ne devons-nous pas plutdt charger sur nos t6tes ses
restes prfoieux, et les porter au-devant de son fils et
successeur S£Hm-Khan, qui vous attend a. Belgrade,
pour ex^cuter les dernferes volontes de son p&re, en
vous accordant des presens et une augmentation de
solde? Reprenez courage, laissez dire leurs prteres aux
lecteurs du Koran , et mettez-vous en marche. » En
trois journ^es, l'arm^e arriva k Mitrovicz. De Ik les
vizirs envoy ^rent k Selim II une deputation, pour le
prier de recevoir le serment de fid&ite des troupes sur
le tr6ne d'or que Souleiman avait amen6 k sasuite dans
cette campagne, et de leur accorder, suivant Tusage,
le present d'av£nement. S61im communiqua cette invi-
tation k son pr^cepteur le khodja Atallah, et lui de-
manda son opinion. Celui-ci r^pondit : « Ta Majesty est
d£j& mont£e sur le tr6ne k Constantinople; il est done
superflu de renouveler ici cette cer^monie solennelle. »
Peu satisfait de cette r^ponse, le Sultan demanda lavis
de son grand-maitre de la cour Lala-Housei'n, qui lui
dit avec vivacity : « Qu aurait done fait Tarmee, si
nous nations venus de Constantinople k Belgrade?
et k quoi bon cette nouvelle c£r&nonie ? » Le con-
fident Djelalbeg , prenant a son tour la parole , s'ex-
prima ainsi : «Dans les premiers temps de Tempire, on
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*c>6 H1STOME
avait coutume de dire que les Sultans ne pouvaient ar-
river au souverain pouvoir, sans passer sous les sabres
de leurs soldats, et cela &ait vrai alors ; mais aujour-
d'hui que I'av&iement au tr6ne derive du droit de
succession , on ne doit plus invoquer de tels souve-
nirs. » Cependant, la tente de Souleiman avait &6 dres-
see sur une hauteur voisine de Belgrade, nommfe la
colline imp&iale; S&im, la trouvant ainsi pr£par£e,
s'y rendit accompagn6 de sa cour, sans attendre de
communication ult£rieure de Sokolli. En apprenant
cette d-marche, le grand-vizir dit k son confident Feri-
doun : « Ainsi vont les choses, quand le grand- vizir,
fid&le k son devoir, rend compte de ce qui se passe,
et que le Padischah ne prend conseil que de ceux qui
ne sont point initios aux secrets d'Etat. Les soldats,
tu le sais, veulent a toute force recevoir de la bouche
du Padischah 1 'assurance que le present usit6 leur sera
octroy^ ; quel sera done le r£sultat des flagorneries
du £rand-maftre de la cour ! » Feridoun , qui sem-
blait avoir pr£vu cette circonstance, avail prepare de
nouvdles observations k presenter au Sultan; mais
Sokolli, ay ant fait de mtires reflexions, lui dit: «Non,
cette nouvelle d-marche ne peut se feire; sais-je si je
suis encore grand - vizir, et le Sultan n'est-il pas le
maitre de nommer k ma place qui il lui plait? »
D£s 1'aube du jour suivant , toute rarmee prit le
deuil; les ministres et les grands entourdrent leurs
t&es de bandeaux noirs; les solaks 6t6rent leurs pa-
naches , et se ceignirent de tabliers de couleur bleue.
Ties tschaouschs, les £cuyers-tranchans et tous les agas
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 297
se rev&irent dliabits grassier*. Les habitans de Bel-
grade les imiterent; puis, passant le pont du Danube,
ils se rendiretit en foule k la rencontre du char fu-
nibre tratnant le cercueil sur lequel &ait pos6 le tur-
ban d'Etat de Souleiman. Une quantity innombrable
de torches brtilaient au-devant de la tente ou s'&ait
retir£ S£lim en habits de deuil '. L'arm£e en pleurs
attendait sa sortie , rang£e en ordre de bataille. Aux
premiers rayons du soleil a , S&im, vfetu dun habit de
satin noir, et coiffe d'un bonnet en drap de mfime
couleur garni d'un crfipe, sortit de sa tente et s'avanga
vers le char fun&bre , en Levant les mains au del en
signe de prtere. Le precepteur et Lala-Housein le
prirent sous les bras; les vizirs se rangirent h sa
droite, les autres grands h sa gauche, et les mouez-
zins entonn6rent l'oraison fun&bre. La prtere termi-
ng, le Sultan leva de nouveau les mains au ciel , fit
un salut a droite et k gauche , et se retira dans sa
tente. Ce fut alors seulement que se manifest&rent des
murmures , qui 6clat6rent bientdt en cris et en blas-
phemes confus. «L'usage, disait-on de tous c6t£s, n'a
pas 6t6 observe ; il n'a &6 question en aucune manure
du present qui nous est dft; pourquoi, vizirs, en avez-
vous agi de la sorte? Les coupables ne sauraient nous
^chapper; et toi, Sultan, nous te trouverons pris du
1 « Se puso el Rei una toca mui pequeiia en la cabeca , visliendosc de
» honestos vestidos , eon una capa 6 albornoz de paflo negro. »
* Les mots turcs loulouou eder kibi presenteut un double sens , et pen vent
sigaifier a la fois au moment ou le soleil se leva, ou bien au moment ou
Sdlim sortit de sa tente pared au soleil.
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298 HISTOIRE
chariot defoin, k la porte d'Andrinople ou k celle du
serai. » Pr£voyant une r^volte imminente , les vizirs
se h&t&rent de faire transporter k Constantinople les
restes de Souleiman. Le vizir Ahmed-Pascha, Seferli
Ali-Pascha , r£cemment arrive d'Egypte, le grand-
£cuyer Ferhad et le scheikh Noureddin furent char-
ges de conduire ces precieuses d£pouilles au tombeau
des aieux de Souleiman. Cependant le grand-vizir
assembla le diwan , et les grands de Fempire, intro-
duits par le precepteur et le grand-maitre de la cour,
furent admis k la c£r£monie du baise-main. A Tissue
du diwan, le grand- vizir et Djelalbeg, ancien defter-
dar des fiefs de rarm6e r rest&rent long-temps en-
fermes seuls avec le Sultan. Cependant le tumulte
grandissait , les soldats menagaient et insultaient ceux
qui avaient accompagn£ Selim, et proferaient des im-
precations contre les restes du Sultan defunt. Dans
la vue de pr^venir la profanation du cercueil imp6*-
rial , Lala-Housein ordonna aux tschaouschs de le
conduire secr&ement k Constantinople. Pour mettre
enfin un terme k ces demonstrations menaganles,
Selim admit en sa presence , pendant trois jours con-
s£cutifs, les officiers de l'arm£e, puis il fit distribuer de
Targent aux troupes. Chaque homme des boulouks,
c'est-a-dire des six escadrons de cavalerie r6guli£re ,
regut mille aspres (vingt ducats) , et chaque janis-
saire, le double (quarante ducats). Mais ces derniers
murmur&rent ; et comme ils reclamaient trois mille
aspres, et alleguaient leurs droits k une recompense
pour la campagne pr6c6denle , le vizir leur r^pondit
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. 299
que le tr£sor ne pouvait en ce moment satisfaire a
leur demande, mais qu'on y aurait £gard en temps et
lieu. L'augmentation de solde des douze mille janis-
saires fut r6gl£e de la mani&re suivante : on alloua
cinq aspres k ceux qui en recevaient trois, huit k ceux
qui en recevaient cinq, et neuf k ceux qui en rece-
vaient huit. Dans le corps des cinq mille huit cent
cinquante-huit cavaliers r^guliers , une augmentation
de cinq aspres de revenu fut accord£e aux sipahis et
aux silihdards, une de quatre aux ouloufedjis de l'aile
droite et de l'aile gauche. Les employes des cuisines
, et des ^curies, les armuriers et les arlificiers, eurent
leur paie augmentee d'un aspre , et les recrues d'un
demi-aspre ; le salaire des artisans fut porte k un aspre
de plus par jour, et cinq cents aspres furent distribues
entre les apprentis k titre <ie gratification. Enfin , au
bout de cinq jours , Tarm^e reprit sa marche vers
Constantinople. Dans la plaine de Semendra , les beg-
lerbegs de Roumilie et d'Anatolie , Mewlana Hamed
et Mewlana Perwiz Efendi , se trouvant k c6t6 du
Sultan, qui, k leur insu, avait un gotit prononc6 pour
les boissons enivrantes [m] , crurent l'occasion favo-
rable pour lui demander avec instance le maintien de
Tordonnance rendue contre le vin par Souleiman. A
Fentr^e de S£lim k Semendra, les deux juges de Far-
mie furent destitu£s; et le corps des oulemas subit
d'autres changemens, qu'on attribua a l'influencedu
precepteur du Sultan , le khodja Atallah. Apr&s avoir
visits les bains de Sofia et de Philippopolis, S£lim s'em-
pressa de se rendre a Andrinople, ou il regut la nou-
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3oo HISTOIRE
Telle que le corps de Souleiman &ait arriv£ h Constan-
tinople et avait &S port6 au tombeau de ses afeux [ivj.
Dans le voisinage de Constantinople ef en attendant
la fin des,pr£paratifs ordonn£s pour l'entr£e solennelle
fix^e au jour strivant, le Sultan descendit au palais im-
perial du village d'Halkalu, et le grand-vizir dans une
ferme qui lui appartenait. Mais, pendant la nuit, les ja-
nissaires s'ameut&rent k la lueur des torches, et tinrent
des conciliabules autour de tonneaux de vin. Les his-
toriens Selaniki et Ali rencontrirent une troupe de
ces janissaires dans le village de Litrova, et en don-
n&rent avis au reis-efendi Mohammed et au secr&aire-
intime Feridoun, qui s*empress£rent d'en instruire le
grand- vizir; mais, dans cette nuit d'angoisses, per-
sonne ne put trouver un moyen pour prevenir la re-
voke qui se pr£parait. Le 5 d^cembre 1 566 , au jour
naissant, le kaimakam Iskender-Pascha , le kapitan-
pascha Piate et le moufti Ebousououd , ainsi que le
corps des oul£mas, sortirent de la ville pour se rendre
au baise-main du Sultan. S61im leur (it Faecueil le
plus gracieux, et honora le moufti d'une distinction
particuliere en posant les mains sur son turban et en
l'embrassant avec effusion. Les alai-tschaouschs, ou
tschaouschs employes dans les occasions solennelles ,
donn&rent le signal du depart, aux cris mille fois r6-
p&6s de vive Vempereur! La foule &ait immense : on
se heurtait, on se pressait de tous c6t£s; les janissaires
se mirent en mouvement, les rangs &roitement series,
refoulant tous ceux qui les voulaient devancer. Par-,
venus aux anciennes casernes , vers la mosquee des
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. 5oi
Princes, la t£te de la colonne s'arr&a, forgant ceux
qui la suivaient den faire autant, et obligeant le Sul-
tan de rester pendant plus dune heure a la place ou il
se trouvait, non loin de la porte d'Andrinople. «Qu'y
a-t-il done? » demanderent les vizirs. On leur repon-
dit : « Un chariot de foin embarrasse le chemm et in-
tercepte la marcfae *. » Cette locution est chez les
soldats un indice de mecontentement et de mutinerie,
de mtoe que leur refus de toucher le riz qui leur est
servi. Pertew-Pascha, le second vizir, savangant vers
les janissaires, leur dk : « Mes braves, votre conduite
est inconvenante. — Crois-tu done 6tre a Oyula? »
crterent-ils tous a la fois, et Tun d'eux plus hardi, le
frappant de sa hallebarde, le jeta k bas de son cheval
et fit rouler k terre son turban d'Etat Le kapitan-
pascha s'approcha k son tour, et s'&ria: « Soldats! cela
n'est-il pas inf&me? — Qu'as-tu a nous dire, pauvre
raarinier? » r^pondirent les r6voltts, puis ils le frap-
p£rent et le renverstaent. L'iatervention de Ferhad-
Pascha n'eut pas plus de succ&$ : lui et son cheval fu-
rent assaillis k coups de crosse. A la vue du danger
toujours croissant , le vizir Ahmed et le grand- vizir
Sokolli jet£rent les ducats a pleines mains au milieu
i « Estando entretenidos en esto, y el Rei parado, sin saber la causa r
» de que estava algo confuse , por no darle a entender la desccrdesia de los
» Geuicaros, fingieron las cabecas era por echar del camioo algunos carros
» qte venian al encuentro, y que hasta encaminarlos a otra parte no podiait
»pasar, con que entoetuvieron al Ret una hora. >• Aknosnmo, p. 70 r
comme teraoin oculaire de l'entree du Sultan. Cet auteur est dans l'erreur r
quand it dit, p. 63, que le norobre des chevatix de main de Selina II £tait
le memc que cehii de ses prcclecesseurs.
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5o2 HISTOIRE
des masses effervescentes, et, par ces largesses et des
paroles conciliantes, ils achetferent la possibility dune
retraite honteuse vers les portes du palais imperial.
L'aga des janissaires noua son mouchoir autour de son
cou , signe par lequel il semblait dire aux rebelles :
« Je suis en votre pouvoir, vous pouvez serrer ce lien,
si telle est votre volont6 ; mais auparavant ecoutez-
moi. » Puis il s'^cria: « Soyez boils, soyez g&iereux,
mes fibres. — Quoi! repondirent les rebelles, tu veux
nous donner du biscuit sucre, au lieu d'eau ; mais tu
te trompes, si tu crois sauver ainsi les triors du Sul-
tan et du grand -vizir; tu ne saurais toi-meme nous
£chapper, et nous te ferons voir-le chariot defoin ren-
verse. » En m6me temps ils s'avancerent en tumulte,
et penetrerent dans la premiere cour du serai, dont ils
ferm^rent les portes. Puis enlevant les vizirs de leurs
selles, et les saisissant par leurs sabres et leurs v6te-
mens, ils les conduisirent aupres de Tempereur, qui
s'etait avance jusqu'au* bains de la sultane Khasseki.
aux cris mille fois r6pet6s de : «€6de a Tancien usage ! »
Enfin, Selim, sur les instances de son grand-vizir, pro-
nonga ces paroles : « Le present et l'augmentation de
solde sont accordes, conformement h Fusage qui m'a
6t& transmis par mes anc&res. » Ensuite les vizirs re-
monterent k cheval , et se rendirent au serai. « Dieu
soit lou6! s^crierent-ils , tout est fini, Tempereur a
consenti aux demandes des troupes, ouvrez les portes,
nous vous en supplions. » Mais les gens du serai , qui
craignaient que les troubles ne fussent pas terminus,
furent long-temps sourds h leurs instances; les mouez-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 5o3
zins appelaient les fiddles h la pri&re de l'apr&s-midi
du haut des minarets de 1'Aya- Sofia , et l'empereur
etait encore aux portes du serai; enfin il parvint h y
entrer, et cette fois la ville £chappa au pillage des ja-
nissaires 1 .
Le jour suivant, vendredi 10 d&embre, le peuple
attendit en vain la visite qu'en pareille circonstance
les sultans ont coutume de faire k la mosqu£e. Le len-
demain, le diwan fut convoqul pour le paiement des
troupes : les janissaires conservferent leur attitude me-
nagante jusqu a ce qu on leur etit compt£ , en outre
des deux mille aspres qu'ils avaient dejk regus , les
mille qui avaient &6 accordes a leur rebellion , ce qui
faisait pour chaque homme un total de soixante ducats.
S£lim fut le premier sultan qui fit au corps des ou-
l£mas un present d'av&nement , afin sans doute de
complaire au moufti Ebousououd. Les deux kadias-
kers alors en fonctions regurent chacun une gratifi-
cation de trente mille aspres (six cents ducats) et un
kaftan en &offe d'or : les deux kadiaskers r6cemment
d£pos£s eurent chacun la moitie de cette somme et
un kaftan en camelot (sofi). U fut donn£ dix mille
aspres et un kaftan de m£me £toffe au juge de Con-
stantinople, neuf mille aspres a ceux qui avaient an-
terieurement occup6 cette dignite, huit mille aspres
et un kaftan a ceux qui portaient le titre de juges de
Bagdad ; sept mille aspres furent egalement accordes
aux mouderris ayant dix aspres de revenu quotidien ;
i Selaniki, com me temoin oculaire, et le Rapport d' Albert deWyss, dale
de Constantinople du la decembre i566.
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5o4 HISTOIRE
six mille aux mouderris des huit m6dres£s de Mo-
hammed II, cinq mille aux intfrieurs, et trois mille aux
extirieurs; chacun d'eux regut en outre one pi&ce
d'&offe de camelot. Tous ces dons, tant volontaires
que forces, ayant 6puis£ le tr&or, il devenait impos-
sible de satisfaire aux demandes du reste de Tarm^e,
en lui accordant egalement un present pour l'av&ne-
ment du Sultan. Alors les sipahis et les ouloufedjis ne
craignirent point d'attendre le passage des vizirs qui
se rendaient au diwan, de se r£pandre en blasphemes
contre eux et de leur jeter des pierres ; mais le grand-
vizir mit fin a ce nouveau desordre, en destituant lairs
agas Ferhad et Omar, en en faisant d&apiter quel-
ques-uns, et pendre trois lutteurs qui s'&aient mis h
la tfite des mutins [v].
Le vide cause dans le tr&or par de teJles largesses
se comhlatt dun autre cdt6 par les pr&ens que firent
au Sultan, k l'occasion de l'av&iement, les nombreux
gouverneurs des provinces et les ambassadeurs des
puissances &rang6res. L'un des pr£sens les plus con-
siderables fut offert par le kapitan-pascha Piale, qui,
peu de jours avant Tentr^e de Setim k Constantinople,
&ait revenu de son expedition contre Tile de Khios
et sur lescdtes de la Pouille. II l'avak entreprise dans
le printemps de la mgme annee, avant que larmee
eiit quitte Constantinople pour se rendre au si6ge de
Szigeth.
Piate avait paru devant (Chios, le 14 avril 1566, a
la't&e d'une flotte de soixante gal&res. Apr&s avoir
regu un riche present des Genois, il invita les douze
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 3*5
primate qui gouvernaient Tile k venir k bord; et &
peine ceux-ti furent-ils arrives, qu'il les fit jeter dans
les fers et transporter k Kaffia : ces malheureux n'ob-
tinregt lour liberte qu'au bout de quatre annees, gr&ce
k ^intervention du pape Pie V et de l'ambassadeur
fran$ais. Apres s'&re empar£ de File et de sa capi-
tate, Rate se rendit sur les edtes de la Pouille ; il les
d^vasta dans toute leur Vendue, et revint avec d'im-
menses richesses qu'il d£posa au pied du tr6ne de
Selim K A l'exemple de Piate. Pertew-Paseha, con-
querant de Gyula, fit hommage au Sultan du riche
butin qu'il avait fait en Transylvanie. S61im reoonnut
les services de Piale , qui , fils dun cordonnier croate,
etait devenu son gendre , en relevant k la dignity de
vizir de la coupole : ce titre, auquel ^tait attach^ un
traiiement de quarante mille aspres , &ait donn£ k
ceux qui avaient le droit de s'asseoir dans le diwan ,
sous la coupole, ii c6le du grand- vizir. L'aga des ja-
nissaires, Ali-Aga Mouezinzade, fils dn crieur de la
prfere ptiblique, succeda a Piale dans sa place de
grand-amiral. S£lkn nomma vizir le beglerbeg d'Ana-
tolie Mahmoud-Pascha , surnomm£ Sal , du nora du
h&os persan oS&bre par sa force a la lutte : il avait
merits d'etre appele ainsi, lorsqu'a 1'epoque de rep-
etition du fils de Souleiman, Moustafa, il saisit et
etrangla le malheureux prince qui se d^battait contre
ses bourreaux pour leur echapper et se r^fugier au-
i Hadji Khalfa, Hisioire des guerres maritime*, L 37 et 38 ; et Knolles,
J, p. 553 et 554. Ce dernier se trompe de date , car le diraancbe de Piques
de I'annee i56f> torabait le 14 et non le i5 avriL
t. vi. 20
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5o6 HISTOIKE
pr£s de son p&re. Le grand -vizir, dans rintention
d Eloigner le grand-maitre de la cour Lala-Housein
de la personne du Sultan , le fit nommer beglerbeg
d'Anatolie k la place de Mahmoud. Abdoul Ghaffour
Efendi ful promu a la dignity de quatri&ne defterdar ;
le pr&epteur du Sultan, Mewlana-Atallah, dont le
traitement &ait de deux cents aspres par jour, obtint
une gratification de soixante-dix mille aspres d tare
d argent d'orge. Le moufti Ebousououd, qui avait
regu de riches habits d'honneur et autres pr£sens , vit
son traitement augment^ de cent aspres par jour, et
eut un revenu journalier de sept cents aspres (qua-
torze ducats) (1" sch&ban 974 — 11 tevrier 1567) ".
Selim r6unit au fief de cent dir mille aspres que pos-
sedait son confident Djelalbeg celui du poete Kialibeg,
qui rapportait cent cinquante mille aspres. Plusieurs of-
ficiers duSultan furent nomm£s aux emplois d'^cuyers-
tranchans et de mouteferrikas *, faveurs qui exci-
terent un nouveau m£contentement parmi les janis-
saires. On les apaisa en augmentant encore leur solde ,
ainsi que le nombre des koproudjis, de sorte que le
tr£sor eut, de plus que sous le r£gne prudent, un
surcroit de paiement de dix-sept mille cinq cent trente
aspres par jour. Dans les premiers jours du Ramazan,
les officiers des janissaires furent invites par les vizirs
« Selaniki, p. 80, se trompe en portant ce cbiftre a six cents aspres,
que le moufti possedait auterieurement.
» Le kapidji-bascbi Ferbad deviut grand-£euyer, le grand*ecuyer Khos-
rew gouverneur de Malatia , et le premier valet-de-chambre Moustafo-Aga
grand-ecuyer trancbant. Selaniki, p. 81.
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DE L'EMVIRE OTTOMAN. 5o 7 -
k de somptucui festins , conform&nent k l'ancien
usage; ils furent d'abord traites par le g?and-Vizir,
et successivement par les vizirs et le kapitan-pascha.
Au milieu de cette reconciliation apparente, on eut soin
de faire disparaitre les personnes les plus turbulentes
et les chefs connus ou supposes de la derniere re-
voke. A la fin du Ramazan, le grand Bairam fut c6-
lebr6 avec les solennites ordinaires. Aux cris rep&£s
des tschaouschs, le Sultan monta sur un tr6ne 6\£\6
dans la cour da serai, et y regut successivement les
hommages des vizirs , des agas , des oulemas et des
defterdars (17 schewal — 27 avril). Dans cette occa-
sion, se presentment deux fils du khan des Tatars,
qui excit^rent Tattention par leurs kalpaks orn£s de
fourrures noires. Quand le moufti s'approcha, le Sul-
tan , pour le distinguer entre tous , se leva et l'em-
brassa. Le troisi&ne jour du Bairam, le Sultan fit pu-
blier une lettre autographe, dans laquelle il rappelait
r usage de c&^brer les victoires de l'arm£e par des
fetes et une illumination generate de la ville, ajoutant
qu'il fall ait se conformer k cette coutume, non seu-
lement pour se r£jouir des succ^s de la derniere cam-
pagne, mais encore pour garder un brillant souvenir
de son heureux av&iement. Mohammed-Sokolli, dont
le caract&re &ait grave et s£v£re, craignait que ces
fetes ne fussent l'occasion de nouveaux d£sordres. II
chargea son secretaire Feridoun de preparer des re-
presentations k ce sujet pour les soumettre au Sultan ;
mais celui-ci lui fit observer que le peuple pouvait
s'indisposer de la s6v6rit6 de ses gouvernans, et quil
•20*
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5o8 HISTOJKE
&ait souvent dune politique habile de donner lessor
a sa joie, en le laissant s'y livrer en pleine liberty. II
ajouta qu'H ne lui conseillait pas de coptredirele Sul-
tan; car, disait-il, lavolonte du schah &nanedeDieu.
Du reste, continua-t-il, il sera facile deprevenir tons
las troubles, en donnant des ordres s^veres aux g6-
n£raux des diverges amies.
Les fetes eurent lieu. A cette occasion , Baki , le
plus grand poete ly rique des Ottomans , fit hommage
k Selim dun poeme sur son avfenement; malgr£ son
raerite, cet ouvrage ne pent £tre compart a l&egie si
c6tebre que lui inspira la mort de Souleiman. Le poete
Fouri et plusieurs autres offrirent des chronogrammes
dans lesquels les caract&res de la dern&re Jigne for-
maient la date de l'av&iement de Selim IL Le vizir
Kizil-Ahmedlii Moustaf a-Pascha , auquel ses revers
devant Malte avaient donne une ftcheuse cel^brite,
jugea Toccasion favorable pour demander la pension
de retratoe de deux cent mille aspres, ordinairement
allonge aux vizirs; sa demandefut accueillie avec beau-
coup de bienveillance, et il obtint sur les domaines
Unperiaux (khass) un revenu double de celui dont il
avait joiri jusqu'alors; ainsi il lui fut accord^ sur ces
domaines une rente de cent cinquante mille aspres, et
une autre de pareiUe somme sur la douane. De plus,
dans une lettre autographe , le Sultaa lui permit de
quitter la capitale pour faire le p£lerinage de la Mec-
que , en se recommandant a ses pr&res. Apr& avoir
partag£ une partie de ses hiens-fonds entre ses trois
fils, Kizil-Ahmedlu vendit la maison qu'il habitait a
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 3cg
Constantinople et toofes ses ptapfrtetts mobflieres; il
en retira douze milk ducats, dont tt destitia une partie
aux pauvres de la Mecque , et I'autre k l^rectkm de
son tombeau k Jerusalem *. Pendant son royage, ft
visita, en passant k Boli, plusienrs fondatiotti pieuses
qail avait institutes; il mourat peu de temps; api*te en
revenant de la Mecque.
Sur ces entrefcates, Ie grand- vizir Mohammed-So-
kolli vit augmenter corard^rablement son ttfloence
par locution du grand-treaorier Yousouf-Aga; en-
nemi d£clar6 do grand-TOir et da grand-maltve du
serai Mahmoud, Yousouf cberchait constamment k les
perdre dans L'esprit du Sultan, k Tissue du eonaeil .
ou S61im signa Farrfit de mort d' Yoasoof-Aga , le.
grand-vizir s'empara de sa yictime, et la remit eatre
les mains du grand-chambellan Gonlabt-Aga, qui la
livra aussit6t an bourreau (31 mai 1567).
Le r&rif de ces £v6nemens nous a conduit bien
avant dam la premiere ann£e dn regne de S&ta* ; if
est temps maintenant de revenir sur le tfa&tre dd la
guerre, que nous avons abandonnd a l'lpoque du si^ge
de Szigeth, et de rendre compte des negotiations qui
suivirent la campagne. La veitte de fa mort de Scmlei-
man, et trois jours avant la prise de Szigeth . George
Tury fit prisonnier le beg de Stuhlweissenbourg Mah-
moud, qui s'&ait aventar£ jusqu'aupris dn camp im-
i Selaniki, p. 86. Albert de Wyss fait mention de cette circonstance en
ces termes : « Pridie calendas Junii neeati duo ex prineipalibiiB familiaribus
- Prinripis atttore* rebtUionk priore hebdomade contra Mebaaiad Banam
» susaitata. »
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5 to HISTOIRE
perial; cette capture fut suivie de la prise deBabocsa
el de plusieurs cb&teaux-forts situ£s dans le palatinat
de Sumegh et de Szalad, et qui avaient et^ abandon-
nes par leurs garnisons '. Quinze mille Tatars, incor-
por^s comme auxiliaires dans Tarm^e de Jean Sigis-
mond, eprouv£rent, il est vrai, un 6chec dans les
environs de Debreczin et de Kaschau, mais en repre-
sailles toute la contree sur la Theiss et la Maros fut
livr^e'aui plus terribles devastations. Partout villes,
bourgs et villages furent reduits en cendres, et plus
de quatre-vingt-dix mille habitans furent emmen& en
esclavage. En Transylvanie, Pertew-Pascha, apres la
chide de Gyula, s'&ait empar6 successivement de Jenoe
et de Vilagosvar. Herbart d'Auersberg, le vaillant d&-
fenseur de la Carniole, et Jobst, baron de Thurn,
avaient fait une invasion subite en Croatie, brUU deux
villes , et s'etaient avanc& en passant l'Unna jusqu'a
Novigrad (26 septembre 1566). Non loin de cette
forteresse sur les rives de la Sarna, ils se trouv&rent
en face du pascha de Khelouna , qui marchait k leur
rencontre, le battirent complement, le firent prison-
nier ainsi que les quatre sandjakbegs qui comman-
daient sous lui, et le menerent a l'archiduc Charles
qui donna Tordre de le conduire k I'empereur; de
leur cdtS, les Turcs firent prisonnier Christophe Ap-
falterer et l'envoyirent a Constantinople. Cependant
les deux deputes de I'empereur, le nonce extraor-
i Francis ci Forgacsu re rum Hungaricarum commenlarii , p. 4 38. Get
ouvrage donnc les noma de ces chateaux : Berientze, Choergce, Zapanyt,
Laak, Vizvar, Belevar, Szckesd.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 3i r
dinaire Hossutoti et l'ambassadeur Albert de Wyss\
<Haient gardes a Constantinople depuis le SO avril
dans une detention s£v&re, et ce ne fiit que le 10 no-
vembre que Hossutoti fut envoys au-devant du Sultan
Selim , qui revenait de Belgrade dans la capitale. A
Kiali , k deux journ£es de marche de Philippopolis ,
Hossutoti rencontra le cercueil de Souleiman , tratne
sur un char bulgare par des chevaux de dHf&entes
couleurs , et escort^ de quatre cents cavaliers seule-
ment : triste exemple de l'instabilile des grandeurs hu-
maines! A son depart de Constantinople, Hossutoti
avait et£ charg£ de declarer h son souverain qu' Albert
de Wyss et lui n'avaient 4t6 arr&es que parce que
lempereur avait demand^ la restitution de Hust et de
Munkacs , et qu il avait refuse de rendre Szigeth et
Gyula; il devait ajouter quil n'avait et6 61argi qu'a
la prtere du grand- vizir, et que, si Tempereur voulait
obtenir la paix, il eiit 4 envoyer un ambassadeur avec
les pr&ens arrteres , et a faire raser les forts de Tata
et de Wessprim. Arslan, avait dit en terminant le
vizir , avait pay 6 de sa tfite l'audace qu'il avait eue
d'entreprendre sans ordre le siege de Palota, et lui-
m6me avait ordonne de raser plusieurs ref aires de
brigands, tels que Bercencze et Choergoe. Iskender et
Mohammed-Pascha parterent dans le m£me sens aux
ambassadeurs , et Ibrahim, ambassadeur de la Porte
aupr&s de la republique de Yenise, adressa a l'empe-
reur une lettre ou il faisait des representations sem-
blables; aussit6t le grand-maitre de la courTrautson
donna l'ordre au secretaire de l'ambassadeur imperial,
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3ia UISTOIRE
r&etttfnaat more a Venise, d'entrer mpotirparkft
avec Ibrahim ' ; <tesonc6t£, MoustafaSokolli, gouver-
neur d'Ofen , 6crivit plusieufs lettres dans le m&ne
sens a Tempereuretau general en chef EckdeSalm, en
tongues hongroise, latine et allemande. Moustafa avait
comment cette correspondence immediatement apres
la [arise de Szigeth, lorsque, conform^ment k l'ordre
de son o&ck, il avait envoys la t6te de Zriuy a Eck de
Salm pour qu il lui fit rendreles honneurs fun&bres,
en y joignant une lettre ou il disait quil serait dom-
mage que la t&e dun homme aussi brave f At d^voree
par le& oiseaux de proie , mais quelle avail dft Com-
ber en represailles de ceUe de Mahmoud, que Zriny
avast fait p&ir» apr&s en avoir regu une rangon de
trois mitte ducats \
Vers le printemps de 1'annee suivante, S£lim r$~
pondii aux deux lettres que lui avait adress£es Maxi-
mflien , la premiere pour le f&iciter de son av&iement .
la seconde pour demander un sauf-conduit pour son
ambassadeur 3 . Dans cette r£ponse, Stiimdisait qu'il
avait reconnu dans la lettre de l'empereur son d^sir
d'envoyer un ambassadeur pour ouvrir des negotia-
tions de paix, et que de sa part il avait donn6 ordre k
son gouverneur k Temeswar de stispendre les hostili-
ty sur toute la fronttere *. Dans les lettres dont il ac-
i Archives de la maison I. R. d'Autriche. Ibrahim signa toujours : Sum-
mits Interpret Moutferrika et Magnus Subdschi,
» I/original de cette lettre se trouve dans lea Archive* de to rndton. I. R*
d'Autriche.
5 Cette lettre est date* du mois de Janvier 1567.
4 Let deux lettres de Selim, I'uue du mois de ramazan 974 (mars i5T66),
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DE L'EMWRE OTTOMAN. 3i3
Compagna cetles de S61im, le grand-vizir t&noignait
des m&nes dispositions, el se fakait en outre un m£rite
davoir serieusement contribu6 au r&abtissement de la
paix ; en arr&ant par un contre-ordre la marche de
quarante mille Tatars '. Le pascha d'Ofen adressa a
lempereur ml d&£gu6, nomin£Kurd, pourlui offirir
des prfeens, et le prier de remplacer )es garnisons
liongroises des fronti^res par des garnisons allernan-
des; MaximiMen ltd r^pondit que la composition des
garnisons ^tait une question peu importante, et que
hongroises ou allemandes, il saurait bien lew faire
observer l'armistice \ Nonobstant ces protestations
mntuelles, Schwendi s'etait empar£ de Munkacs et de
Ssathmar 3 , et Hasan- Pascha de Putnok et de Koe-
wark en Transylvanie *. L'empereur, dans la crainte
d'une rupture, signifia & Albert de Wyss d'excuser la
prise de ces premieres places , comme appartenant £
la Transylvanie et non k la Porte, et de faire observer
au grand-vizir qu'aux premieres communications du
pascha d'Ofen, on s'&ait empress^ de lever le stege
l'autre du mois de schewal 974 (avril i566), se trouvent en original duns
les Archives de la maison I. R. d'Autriche.
• Gette lettre est datee du mois de mai 1567.
* « Site Germauicis, site HuQgaricts prosidiis loca nostra iaitima fue-
» riot firmata, sedulo curaturi ut induciae observentur. » Reponse de Maxi-
milieu, dans les Archives de la maison I. R. d'Autriche.
3 Fofgacz, p. 477, nomine Hasan-Pascha , Hazon-Bassa , dans Catonn,
XXIV, p. 343.
4 Les lettres da Sultan et du grand-vizir trouverent l'empereur a Prague ;
Maximilien repondit qu'a son retour a Vienne il enverrait a Constantinople
mi nouvet ambassadeur.
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5i4 HISTOIRE
de Hust. N£anmoins S£lim el le grand-vizir firent
des reclamations dans plusieurs lettres k l'empereur,
en disant que Munkacs n'appartenait pas k Zapolya ,
qui n'&ait qu'un sandjak , mais bien au Sultan lui-
m6me.
Le 1 er mai 1 567 , Maximilien regut de Constantino-
ple les sauf-conduits demands pour son arobassade,
et vers la fin du mois de juin, il envoya de Pressbourg
ses instructions k ses trois ambassadeurs, l'6v6que
d'Erlau, Antoine Verantius , Dalmate d'origine, qui
se recommandait par ses hautes connaissances et des
services £minens, le Styrien Christophe Teufenbach ,
et le Beige Albert de Wyss, retenu encore alors k
Constantinople. Quatre mille ducats, quatre coupes
d'argent et une montre, composaient les pr&ens des-
tines au grand-vizir pour en obtenir un bon aocueil.
En outre et conformement aux stipulations du der-
nier traite, le grand-vizir devait recevoir deux mille
ducats par an, et le Grand-Seigneur, le present ho-
norifique de trente mille ducats , avec vingt coupes
dories et deux ou trois montres. Les ambassadeurs
etaient encore charges d'offrir a Pertew-Pascha, le se-
cond vizir, deux mille ducats, deux coupes dorees et
une montre, au troisi&ne vizir Ferhad-Pascha, mille
ducats et deux coupes d'argent, et k chacun des trois
autres vizirs, les mille ducats annuels. Le drogman de
la Porte , Ibrahim-Pascba , ren£gat polonais, devait
recevoir cinq cents ducats, et le second drogman
Mahmoud , renegat allemand , seulement trois cents ;
en outre , les ambassadeurs devaient faire un present
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 3i5
de deux mille ducats au juif Jean Miquez. <jui s'&ait
&e\& jusqu'au rang de due de Naxos, et qui exergait
une grande influence sur les affaires politiques. ainsi
qu'i d'autres puissans ministres. Suivant leurs ins-
tructions, ils devajent repr&enter que l'empereur ne
consentirait jamais k la demolition des fortifications
de Tokay et de Wessprim, et chercher au contraire
a obtenir que le Sultan fit raser les forts de Babocsa
et de Berencse. Us devaient demander la restitution
de Koewar et de Nagybauya , qui avaient &6 prises
par les Transylvaniens, et laisser entrevoir que Tem-
pereur ne serait pas £loign6 d'offrir en retour la place
de Hust. Us devaient surtout insister pour obtenir
une prompte repression des desordres commis par les
heiduques et les martoloses . une delimitation precise
des frontteres , des garanties de siiret6 et de liberte
pour les commergans et les drogmans , et s'efforcer
en dernier lieu de rabaisser aupres du Sultan le credit
et l'influence des Transylvaniens. Enfin , ils etaient
autoris£s a laisser comprendre dans le traite Melchior
Balassa et Nicolas Bathory ; mais ils devaient s'opposer
de tout leur pouvoir a ce que ce traits fttt &endu a la
France et k la r£publique de Venise '.
Le 1 er septembre, les trois ambassadeurs furent
admis a I'audience solennelle du Sultan. Lorsqu'ils
eurent expos£ l'objet de leiir mission, S£lim leur r£-
pondit qu'il les avait parfaitement coraprjs, et quit
i L'inst ruction envoyce a Albert de Wyss ,' et qui $e trouve dans les Ar-
chives de la maison I. R. d'Autriche , est eotierement eonfortae a cetles ck
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3i6 HISTOIHE
ferait ce qu'exigeait le soin de sa dignity. Les qua-
torze [vi] conferences qu'ils eurent dans Tespace de
sept mois, avec le grand-vizir, faillfrent £chouer con-
tre trois difficultes principales : la demande faite par les
Turcs de la destruction de Tata et de Wessprim, celle
de l'empereur relative mi d&nant&lement de Babocsa
et de Berencse , et en dernier lieu la delimitation des
frontieres et le partage des paysans. Le grand-vizir
insistait pour qu'a partir de la montagne d'Erlau, et
en descendant de Ik successivement k Szolnok , Het-
wan, Fiilek, Wygles, Levrencz, Gran, Csokakoe,
jusqu'a la rivi&re de Rigna , tous les babitans fussent
afiranchis de payer imp6t k Tempereur, et devinssent
uniquement tributaires du Sultan. Enfin , le M fS-
vrier 1 568 , on signa , pour huit annees , un trait6 de
paix en vingt-cinq articles , renfermant les conditions
suivantes : Tempereur Maximilien , et ses fibres Fer-_
dinand et Charles , conservaierit leurs possessions en
Hongrie , Dalmatie , Croatie , Esclavonie , et s'enga-
geaient en retour k respecter les territoires des vote-
vodes de Transylvanie , de Moldavia et de Valachie;
les deux souverains convenaient de faire de rautuels
efforts pour enlever aux votevodes tous motifs de
troubler la paix ; ils s'engageaient k exercer une active
surveillance sur les heiduques , les azabs , les mar-
toloses, les lewends et les haramiy£s ou brigands.
Tous larcins commis aux depens des villages ou des
personnes devaient 6tre restifttes, leurs auteurs punis,
et les transfuges livres. Les combats singuliers , qui
avaient si souvent trouble le repos des frontieres ,
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. 3i 7
etaientexpress&nent d&endus. Les d&n61£s qui pour*
raient survenir entre les deux peuples voisins de-
vaierit &re port& devant les gouverneurs d'Ofen et
de Hongrie , ou soumis k Varbitrage de commissaires
nomm£s de part et d'autre. Les ambassadeurs , leg
charges d'affaires ou mandataires de I'empereur , et les
gens de leur suite , seraient inviolables, comme les
agens des autres puissances; ils pourraient recevoir
dans leurs maisons des drogmans et des courriers ,
et fixer leur s^jour, selon leur bon plaisir, indifferem-
ment k Constantinople ou k Galata; dans le cas d'urie
rupture de la paix, ils devaient &re cong£di£s et non
emprisonnes. La question non r£solue du partagedes
paysans et de la delimitation des frontieres, devait £tre
soumise a Texamen et k la decision d'une commission
nomm^e a cet effet. L'empereur s'engageait k en-
voyer annuellement a son all&, le sultan Selim , une
ambassade chafg£e de lui offrir un present de trente
mille ducats hongrois *.
Trois jours apr& que les hases du traits eurent 6t6
arr&ees, le grand-vizir presenta a l'ambassade trois
demandes subsidiaires : la premiere, que la France,
Venise et la Pologne fussent comprises dans le traits ;
la seconde, qu'il ftkt d£clar6, par une clause speciale,
que Maxiinilien &ait Kami des amis de Selim et Ten-
nemi de ses ennemis ; la troisi£me enfin , que le par-
tage des paysans qui relevaient des deux puissances
i «Nqs eundem Sereniasimum Imperatorem Turcarum confoederatum
>» nostrum quolannis munere honorprio triginta million dneatorum tingart-
>» corura per speciales homines nostros invisemus. » ■ ■
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3i8 HISTOlttE
fftt r6gl6 d'apr&s le registre des imp6ts dress£ par le
defterdar Khalil. Les ambassadeurs repouss&rent avec
force la premiere demande, qui avait &6 presentee
sur les instances de l'ambassadeur frangais Gran Cam-
pagnes, et de son secretaire Gran Rie '; ils rejeterent
la seconde comme une innovation inusitee, et firent
observer, relativement a la troisi&me, qu'on 6tait con-
venu de renvoyer l'examen de l'affaire en litige a une
commission speciale. Le grand-vizir ceda sur ces trois
points ; mais il refusa aux ambassadeurs le rappel du
drogman Zeffy, exiU k Kaffa, ainsiqu'une girafe qu'ils
avaient demands pour la menagerie de Tempereur ;
il dit, ice sujet, qu'on n'en poss£dait qu'une, et
qu'on en avait besoin pour accoutumer les chevaux k
la vue de cette espfece d'animaux, et pr^venir Feffiroi
qu'ils leurcausaient. Les envoy^s transylvaniens, Ni-
colas Orbay et FrangoisBalogh, arriv&rent trop tard,
avec leurs presens, pour emp£cher la conclusion de la
paix, que les mandataires de Maximilien avaient aGhe-
t£e par des presens et des sommes &valu£s k quarante
mille ducats \ D fut notify a Orbay et k Balogh , en
presence des ambassadeurs de l'empereur, que Jean
SigismoUd edit k se soumettre en tous points au traits
i Femntii epist. , dans Catona, 1. c. Le Rapport d' Albert de Wyss,
date" du 27 novembre i568, nomrae cet ambassadeur M. de Gran Campagnes,
et dit qu'il etait huguenot.
* « Specificatio honorariorum (dans Miller, p. 333); » et « consignatio
*» munerum honorariorum in quantum se extendant jam Constantinouolim ad
» Imperatorem Turcarum et Bassas (Ibid., p. 386-396 ); » et « ratiocinium
» oratorum Gsesareorum super dispensatione pecuniarum et munerum hono-
• rariorum Conslantinopoli (lbid. t p. 4012-408). »
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 3i 9
qui venait d'etre conclu ; que cependant il pour rait,
avec l'agr&nent du Sultan , ouvrir des negotiations
avec la Hongrie pour des echanges de territoires ,
villes ou villages; et que, s'il mourait sans enfans, ses
sujets auraient la liberty de designer eux-m&nes son
successeur. Un mois apr&s la signature du traits ' , les
ambassadeurs Verantius et Teufenbach partirent pour
Vienne, accompagn£s du drogman de la Porte, Ibra-
him, qui &ait dfyk venu presenter k l'empereur, k
Francfort, les dernteres ratifications. Outre le journal
de l'£v6que d'Erlau et son rapport k Maximilien , il
existe un troisi&me document litt^raire sur cette am-
bassade memorable : c'est la description du voyage
des ambassadeurs par le secretaire de Verantius, l'lta-
lien Marco Antonio Pigafetta * ; mais, par malheur,
eel ouvrage pr£cieux est devenu tr£s-rare.
Le sejour de l'ambassade d'Autriche avait coincide
k Andrinople avec celui d'une ambassade persane,
qui &ait venue fSIiciter Selim sur son av&nement au
tr6ne. Douze ans auparavant, les ambassadeurs des
deux puissances limitrophes de la Porte a Test et a
1'ouest s'etaient rencontres pour la premiere fois a
Amassia; et dans ces deux circonstances, ce fttrent les
« Le ao mars, suivant le Diarium, dans Kovachich, t. I, p. i53; et
Pigafetta, p. 119 : «Noi alii ao di marzo partimmo d'Andrinopoli. » Fe-
thlen, 1. V, p. 1 76, commet done une erreur, en disant : « Legati Viennam
» redeunt pridie calendas Junii anni sequentis, videlicet i56ft. »
» 1 finer ario di Marco Antonio Pigafetta gentiluom Vicemino all* Hlmo.
Sgr, Eduardo Seymer come d 'Hertford. Londra appresso Giovani Wolf*
Jnghilese i585, 141 pages. Cet ouvrage est si rare qti'it ne s'en trouve
qu'une copie dans la Bibliolheque si riche de Gaettingue.
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5qo HISTOIRE
ra&nes personnages , l'&v£que Verantius el le khan
Schahkouli-Sultan, gouverneur d'Eriwan. A la pre-
miere nouvelle de Tarriv^e de Schahkouli sur les fron-
ti£res, le gouverneur d'Erzeroum avait rassembl6 les
troupes et les feudataires de son gouvernement , et
s'&ait avanc£ k sa rencontre a la t6te de huit roille
hommes, parmi lesquels deux mille se faisaient remar-
quer par leurs armes incrust£es dor et d'argent ; cette
splendeur avait caus6 un grand &onnement k l'ambas-
sadeur, qui avait esp^re produire lui-m&ne beaucoup
d'effet par la magnificence de son cortege l . Schahkouli
&ait arriv6 k Erzeroum vers la fin de Fannee prece-
dente (1 er d&embre 1 566) ; et un tschaousch avait &4
envoy£ au-devant de lui pour le compliment er et lui ser-
ver de guide jusqu'& la capitale. La suite de Schahkouli
se composait de cent vingt nobles persans, coiffes de
turbans brodes d or, de deux cents cavaliers couverts
d etoffes d'or et de quatre cents commergans, en tout
sept cents personnes 9 et de mille sept cents b&es de
somme, chevaux, mulets et chameaux. Sa musique de
chapelle comptait cinq grosses caisses , port^es cha-
cune par un chameau, cinq longues trompettes et
trois petit es, cinq flittes, un fifre, un tambour et plu-
sieurs autres instrumens , deux chanteurs des versets
du Koran, un joueur d'orgue, un joueur de luth, et
quatre esclaves attaches comme chanteuses k la suite
i Leitera script* mlli re*irs,Mn* Pigafetta, p. na. Celte lettre n'est
•aire que le rapport da tschaousch envoye au-devant de l'ambassadeur ,
qui a ete iraduit en laogue ttaliente par le drogman de l'anibassade im-
periale.
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- DE L'EMPIRE OTTOMAN- 3ai
de l'ambassade. Les prlsens du schah consistaient en
deux tentes, dont le dais &ait en or et dont les c6t&
offraient de magnifiques &offes brod&s avec art , en
deux ouvrages richement relics, le Koran et le Schah-
name, en deux perles £noi*mes, pesant ensemble dix
miskal&s (quarante dragmes), en un rubis de Bedakh-
schan du volume et de la forme dune petite poire, et
en etoffes de soie et de laine , d'une valeur de dix
millions deux cent mille a^pres (cent soixante-quatre
mille ducats) . L'ambassadeur persan deyait encore faire
don au Sultan de quarante faucons royaux dresses k la
chasse ; enfin il devait lui remettre les armes et les
chameaux de l'infortun^ Bayezid; si cette offre n'&ait
pas aussi magnifique que les pr£c£dentes, si elle ne
fut pas publiquement expos^e aux regards, elle ne dut
pas en 6tre moins appr£ci£e par le sultan S£lim. Les
commergans de la suite de Schahkouli s'arr&erent k
Constantinople ; et la veille de la conclusion du traits
avec rAutriche , l'ambassadeur fit son entree solen-
nelle k Andrinople (16 f&vrier 1567). A son passage
k Constantinople, il avait et£ re$u avec le plus grand
faste ; Piale-Pascha l'avait comble d'honneurs et de
distinctions; mais, k Andrinople, on d£ploya pour lui
toute la magnificence de la cour imp£riale, dont l'&lat
&ait alors rehauss£ par la presence des ambassadeurs
de Tempereur d'Allemagne, des rois de France et de
Pologne et de la r^publique de Raguse; tous, sur l'in-
vitation du Sultan, s'&aient rendus, avec leurs suites,
dans les rues oft devait passer le cortege He l'ambas-
sadeur persan. S61im lui avait d&ign6 pour introduce
T. VI. 21
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3*1 H1STOIRE
ton* son confident Schemsi-Pascha, non pas en raison
de llnfluence que liri donnait cette position, mais en
consideration de la culture de son esprit et de son ta-
lent de poete, Schahkouli ayant lui-m&ne une reputa-
tion bien mfritle d'homme spirituel et instruit. Le Sul-
tan tenait surtout & ce que son mattre des ceremonies
ne se montr&t pas inferienr en sagacity et en talent &
1'ambassadeur. En voyant, & son entree dans la ville,
les troupes chamarries d'or, d'argent et bigarrtes de
tootes couleurs, Schahkouli dit & Schemsi-Pascha :
« Voiei de viritaMes paranymphes. — En efftet , r£-
pondlt Sehemsi, ce sont les m£mes qui ont && cher-
eher leurs fiancees h Tschaldiran. » Comme en passant
devairt les ambassadeurs europ6ens, ceux-ci 6taient
kurs ehapeaux ou leurs autres coiffures, Schahkouli
demanda ce que cela signifiait, et Sehemsi lui rd-
pondk qulls indiquaient ainsi symboliquement qu'ils
4toient prtts h deposer leurs t£tes aux pieds du Sultan.
Deux jours aprds, un fanatique attenta a la Tie de
Fmnbassadeur, au moment ou il se rendait & Fau-
dtonce du grand- vizir; il dirigea sur lui une arme k
feu , mais il le manqua, et.blessa une personne h ses
etAfa. Par ordre du grand- vizir, le coupable fut aussi-
tdt saki et attache & la queue d'un cheval , poor £tre
tratn£ jusqu'k ce que mort s'en suivit dans les rues oft
devait passer le cortege de l'ambassade. Irrite de cette
violation du droit des gens, Schahkouli vouhit aussitft
Mkmrner sur ses pas; mais les instances du grand-
viiir le d£terinin£rent k continuer son chemin et k
s'aequitter de son devoir. Grftce h $ft presence d'esprit
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. 3a5
et a son usage du monde, Sehahkouli, malgr6 ce &-
cheux 6v6neinent, combla de politegses le grand-vizir,
lui adressa des felicitations au sujet de la coriqudte de
Szigeth, dont il lui attribua toute la gloire, et le loua
d'avoir su maintenir la discipline dans 1'armle aprds
la mort de Souleiman, et d'ayoir assurd par ses sages
mesures la possession de rempire k S£lim. Un si grand
vizir, disait-il , m^ritait sons tous les rapports l'hon-
nenr de voir graver son nom snr le frontispice de tous
les ouvrages des savans du pays de Roum; et cl&ait
avec raison que les savans de la Perse avaient eux-
mdmes consacrS leurs oeuvres au r£cit de ses belles
actions. Mohammed-SokoUi r£pondit avec antant de
modestie que de dignity, que la dur£e de la domina-
tion de la dynastie d'Osman avait &6 fix£e de toute
&erpk6, et que pour lui, il navait que le m£rite
d'avoir re$u du ciel la grftce de vouer sa personne
au service de deux membres de cette auguste famille.
Conform^ment k J'antique usage, l'ambassadeur offrit
au grand-vizir et aux autres vizirs un choix des pro-
ductions naturelles et industrielles de son pays : des
tapis de soie de Hamadan et de Derghezin, des bon-
nets de Ghadjan, du savon d'Ardjan, des taWiers*de
Mebrouyan, des tapis de Darabdjerd, des housses de
Djehrem, de la momie de Nirin , des Aoflfes 16geres
de soie d'Yezt, d'autres plus fortes de Koum, des
vttemens de Besa, et des lames de sabre de Schiraz.
Trois jours apr&s, l'ambassadeur se rendit k Taudience
du Sultan, accompagn£ d'un magnifique cortege. En
tfite marchaient les sipahis, les tschaouschs et les mou-.
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3*4 HISTOIRE
teferrikas, tout converts de riches v&emens en satin,
damas, velours et &offes d'or; k ceux-ci succ&laient
trois cents Persans dont la plupart avaient des habits
d'honneur de diverses couleurs et orri£s de broderies
figurant divers animaux, et dont quelques-uns, mais
en petit nombre, &aieht simplement v6tus de drap;
ils £taient suivis des domestiques k pied de 1'ambas-
sadeur, conduisant ses chevaux de main, et par6s de
leurs uniformes de c£r&nonie; venaient.ensuite deux
cents janissaires, puis l'ambassadeur lui-m&ne, un
turban d'or sur la t&e, rev&u d'&arlate, et mont£ sur
un cheval dont les harnais &incelaientd'or, d'argent,
de turquoises et de grenats; le cortege £taitferm6 par
cent quarante cavaliers persans. Malgr6 tant de splen-
deur, les Persans figuraient avec moins d'iclat que les
Turcs, favoris^s par la nature d'une constitution plus
robuste et d'un teint moins rembruni [vn]; d'ailleurs
leurs etoffes de Venise &aient sup&rieures par la viva-
cite des couleurs a celles des Persans. Les pr£sens
du Schah &aient portls par quarante-trois chameaux,
et ceux de Fambassadeur par dix. Les plus pr&ieux
etaient un exemplaire du Koran, que Ton pr&endait
6crk par Ali lui-m&ne, et le S^hahnam^ (livre royal)
de Firdewesi, tous deux garnis d'une reliure en &offe
d'or et ornes de pierreries, une cassette de bijouterie
qui renfermait le rubis de Bedakhschan l , deux perles
et huit tasses de porcelaine bleue % qui passaient pour
i Bakuso ou Balascio est la traduction alteree du mot Bedakhsclu.
a Firwari au lieu de firouze, c'est-a-dire turquoises avec lesquelles Piga-
(etta confond la porcelaine.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 5a5
devoir se briser au contact du poison; enfin, deux
tentes orn&s de paysages magnifiques, et plus belles
que celles de Syrie, que Motenebbi, le premier poete
lyrique des Arabes, a chanties dans soil poeme *. On
remarquait, parmi les presens de l'ambassadeur, vingt
grands tapis de soie, et plusieurs autres d'une moin-
dre dimension, sur lesquels des broderies d'or repr&-
sentaient des fleurs, des oiseaux et divers animaux;
neuf rideaux destines & garnir le devant des tentes ,
neuf tapis en poils 4e chameaux , neuf selles enri-
chies (Tor et d'argent et incrust£es de pierreries, sept
baguettes d'argent , antique symbole de domination
comme les baguettes d'ivoire chez les anciens Perses
et dans la suite chez les Romains, sept sabres avec
leurs fourreaux recouverts en velours cramoisi, sept
arcs et sept carquois orn^s d'or et de pierreries; en-
fin des tapis de Perse dune laine eitrdmement fine
et d'une grandeur telle, que six hommes suffisaient h
peine & en porter un seul. Si la magnificence de Tam-
bassade persane surpassait tout ce qu'on avait vu jus-
qu'alors, la lettre de enhance de Schahkouli se dis-
tinguait aussi par son style pompeusement outr£ et par
sa longueur demesur£e; elle figure k ces titres comme
un monument unique dans les pieces diplomatiques
des cours orientales \ Lorsque l'ambassadeur fut in-
> Daiis le titre de la lxxvh* Kasside, p. 108.
a Cette lettre de crcance se trouve dans la Collection du reis-efendi Sari-
Abdoullak, ou elle reinplit quaraute-neuf feuilles in-40. Dans mon exem-
plaire, elle a treule feuilles in-40 chacune de cinquante lignes; et dans la
Ctliection du comle de Rzewuski, elle forme a elle seule un livre de^ouantq-
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3a<5 HISTOIRE
troduit dans la salle d'audience, le Saltan lui dit d'un
ton familier : « Comment te portes-tu? » Mais Schab-
kouli, qui say ait combien les liberty des diplomates
et des courtisans sont restreintes dans les oours orien-
tal es, garda un silence prudent, et sembla interdit et
priv6 de toute reflexion en presence des regards et de
la majesty du Sultan. II lui offrit en son propre nom un
Koran, une tente, des sabres, des arcs et des Arches,
des tapis en soie et en poils de chameaux. On observa
k sa sortie du serai le m&ne ceremonial qu'a son in-
troduction. Selim assigna a rambassadear cinq cents
ducats par jour sur son tr&or pour subvenir a ses
d£penses, et renouvela ayec lui le traits de paix sur
les bases du precedent.
Peu de jours avant Tarriv^e de l'ambassade persane,
le diwan avait prononc6 la peine de mort contre le
beg kurde Abdal et trente-deux personnes de sa suite,
convaincus d'avoir tu6 le tschaousch-baschi, au mo-
ment ou celui-ci venait arr&er le beg dans la mo^-
qu£e par l'ordre du grand-vizir. Abdal fut d4capit£,
et les trente-deux Kurdes furent ranges syivant les
trente-deux directions du vent , et livr& a diverses
tortures. Quelques jours apr£s la presentation des am-
bassadeurs de Perse et d'Autriche, un incendie 6clata
& Andrinople et consume cinquante maisons. Vers le
meme temps, on apprit qu'Oulianoghli et Mouttaher-
leng avaient leve letendard de la revoke dans les dis-
tricts de Bassra et de V Y&nen. L'insurrection de Mout-
dix feuilles ia-folio* V«y«t Eichhom, Histoid d* la L i tU n imr* s it o m mt,
9. ttfa
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DE L'EMPIRE OTTOMAN, 5a?
taherleng, qui menagait l'empire de la perte da 1'A*-
rabie, et qui foqrnit aux Ottomans i'occasion d'&endre
leyrs conqu&es dans ce pays , appellera bientdt notr?
attention; celle d'Oulianoghli n'eAt pas &4 moins dao-
gereuse , s'il eut obtenu des Peraans les secpur* qu'U
attendait; mais, trompe dans son espoir, U fat an^anti
par les beglerbegs de Bassra et de Schehrzor, qui
etaient acpourus a la t£te de quelques mille janissaires.
Le 26 avril 1568, Selim II se rendit d'Andrinople fe
Constantinople; et le 1" mai, le plenipotentiaire d*
roi de Pologne Sohorowsky fit son entree dans ©€tte
derniire ville avec une suite de trois Gents personnes.
II apportait des pr^sens magnifiques x , et venait re-
nouveler le traite de paix, et exprimer des plaintes an
siyet des incursions des Moldaves et des Tatars dur
le territolre polonais. U &ait charg£ en outre de de-
mander la radiation de trois articles de l'ancienne ca-
pitulation, qui stipulaient Textradition des transfuges
ottomans; l'obligation de payer un tribut annuel aux
Tatars, et la liberie accordee a la Moldavia de nom-
mer ses voievodes, sans le oonsentement du roi de
Pologne. En pr&entant cette demande relative k la
nomination du voievode , Sigismond se pr^valait de
i « L'ambassador di Polonia a bacciato la man al Sgr. (zo mai), a fatto li
» presenti di X mazzi di zibellini, X coppe dorate, IV orologi, e III grossi
» cani di caccia. » Rapport de l'ambassadeur Soranzo , dans les Archives de
la maison I. R. d'Aulricbe. Ibid. Lettera del sultan Selim al Re di Potygna ,
du 1 4 juin i568. Cette lettre, envoyee par Ahmed-Tschaouscb, renfermu
aussi des plaintes sur les ezces commis par les Cosaques a Akkermann. La
reponse du roi de Pologne contenait des excuses a ce sujet et des plaint* sur
4ea incursions des Tatars.
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3*8 HISTOIRE
l'alliance par lui secr&ement contractee avec Bog-
dan, que Siawusch venait d'installer dans la dignite
occup^e par son p£re Alexandre; cette alliance fut
resserrie encore Fannie suivante par la conclusion
dun trait£ d'apr&s lequel Bogdan se reconnut vassal
de la Pologne, et s'engagea & la secourir en personne
dans toutes ses guerres , except^ dans celles qu'elle
pourrait avoir avec le Sultan. La paix fut renouvetee
avec la Pologne, k la condition que l'ambassadeur
tatar, retenu en captivite depuis trois ans, serait rendu
a la liberty f .
Cependant le Sultan avait ordonn£ au voi^vode de
Transylvanie , Jean Sigismond , de restituer au voi'6-
vode de Moldavie les forts de Csicso et de Kukiillo-
var; sur les plaintes des habitans de la Valachie, leur
voievode Pierre Myrtsch6, &g6 de trente-trois ans ,
avait 6t6 conduit charg6 de fers k Constantinople.
Mais Myrtsche s'etait arrange de fagon h ce que son
arriv^e ftkt prec£d6e d un envoi de quatre millions
d'aspres (quatre-vingt mille ducats) , somme dont la
moitie representait le tribut auquel il s'etait soumis
envers la Porte, et dont Tautre moitie devait &re of-
ferte a titre de present par lui ou plut6t par sa mere,
femme aussi intrigante que dissolue dans ses moeurs 2 ,
i « Cautum , ut rex Polonise legatum Tatarum jam 3 auitos detentum
diuaiMat. » Rapport de Wyss, 1. c. Voyez aussi Soranzo, dans les Actes
vdniliens.
a « In Petri locum Alexander ex Aleppo redux, — mater, salax scortum,
»a Sultano et soiore (vidua Kusleuii) oblimiit vilaai. » Rapport de l'anibas-
sadeur Albert de Wyss, dans les Archives de la maison I. R. d'Aulrickei *
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. 3119
qui esp&rait obtenir par ce sacrifice la gi&ce de son
fils. En outre, sur les instigations de la mfere de Myrt-
sch6 , un des membres du conseil du prince r6v£la
au Sultan le lieu ou &ait d£pos£ un tr&or de cent
trente mille ducats, qui revint encore k la Porte '.
N^anmoins S61im refusa de rendre au votevodesa di-
gnity, et lui donna pour successeur son frfere Alexan-
dre, qui avait £te exite k Haleb; Myrtsch6 eut seule-
ment la vie sauve, et fiit, ainsi que sa mire, envoys
en exil k Koniah, 011 il mourut peu de temps aprte.
Vers la fin de l'annee, le Sultan renvoya en Tran-
sylvanie Michel Gyulay, ambassadeur de Sigismond,
avec les m&nes ordres dont avaient deja &6 charges
1'annee prec^dente S6bastien Erdel et Francois Bal-
ogh, et qui enjoignaient &u voi&vode de respecter les
frontteres et de ne pas troubler l'empereur dans la
paisible possession d'Erdoed, Nagybanya et Zechwar.
Depuis long-temps la possession de ces trois villes
et le partage des sujets , qui avaient jusqu'alors pay.6
impdt au Sultan et k l'empereur, &aient un objet de
discussion entre les deux puissances , et depuis peu
ils avaient donne lieu k un ^change de lettres et de
courriers entre le gouverneur de Hongrie, Moustafa*
Pascha a , # et le grand -chambel Ian de Tempereur,
le prince- Trautson. Suivant le rapport de Moustafa,
« Ces derails, puises dans le Rapport d* Albert de Wyss du mois de mai
i568, ne se trouvent dans auctme histoire de la Moldavie.
» Dans ses lettres, Moustafa-Pascha s'iulitule : Nos Mustafa-Basta div'um
Procidentia et C as are a dementia, illustrates Budas et partium regni Hun*
garive Gubernator Consiliariuti
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33* H1STOIRB
adresse k la Porte, l'ambassadeur tare, Ibrahim (Stro*-
zeni), avait d£clar£, k son passage a Of en, que lem-
pereur avait renonce k son droit sur les villages qui
jusque-la avaient pay£ imp6t k l'yne et I'autre puis-
sance; Achaz Csabi, qui s'&ait rendu k Ofen pour en-
tamer des negotiations k ce sujet, n'eut pas plus de
succ& que le tschaousch envoy^ par Moustafa a*
prince Trautson '. Les plaintes qu'Ibrahim adressa
dans plusieurs lettres k 1'empereur sur F enlevement
de deux enclaves, et le logement peu conv enable qu'on
Jui avait assign^ sur sa route dans one maison de-
pourvue de vitres, faillirent amener de nouveaux con-
flits; toutefois les explications que Maximilien donna
au Sultan dans sa lettre de r&r&oce conjurirent
1'orage, et les choses en restirent Ik. L'ambassadeur
polonais retourna dans sa patrie peu satisfait de sa
mission, acccompagne par Hasan-T&cbaousch, charg£
de presenter la nouvelle capitulation au roi de Po-
logne. Ce fut k cette £poque que le baile Soranzo fut
remplac£ par Barbaro.
Au commencement de l'ann£e suivante (8 janyier
1569), Selim eut une de ces rares vell^ites d'ind£-
pendance qu'on signale k de longs intervalles dans
le r&gne de ce prince. Sans avoir pris l'avis de son
grand- vizir Sokolli, qui 6tait en r&lite le veritable
souverain, il nomma dernier vizir de la coupole son
ancien grand-maitre de la cour Lala- Moustafa, qui
avait &6 disgrace. Telle &ak la crainte que S^lim
i II eut son audience de Trautooa k 7 feptenbre. Csabi o arriva a Ota
que le 5 aouu
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DE L'ENHRE OTTOMAN. SJi
avait da grand-virir, qu'iln'os* pas d'abord llnitraire
de oette nomination ; redoutant de s'entretenir seal
avecSokolli, il convoqua, au retour dune chasse, ub
diwan & cheval, dans lequel il parla k tons lea virii*
successivement , et par consequent aussi k Lala<-
Moustafo et au grand-vieir, avec lequel il fit ainsi une
esp&ce de reconciliation tacke. Le frfre de Modstafo-
Pascha, serasker de l'arm£e destin& k agir contre
Tile de Malte, fut d&nis de ses fonctions de vizir,
avec la pension U6it£e de deux cent mille aspres, aug^
ment^e dun quart '. Vera ce m&ne temps, S&hn
syouta vingt aspres par jour k la pension du ills de
Myrtsch£, nagu&re prince de Valacbie, en recom-
pense des cent trente mille ducats livris par sa m6re ;
celie-ci ne regut en retour de sa revelation que difc
mille ducats. Mohammed, fils du beglerbeg d' Alger,
Salih , qui avait 6te jet£ en prison et menac^ de perdre
tous ses biens , racheta sa liberte par l'abandon d'une
partie de ses immenses propri&6s territoriales.
A cette Ipoque, de graves int6r&s politiques vinrcnt
diriger l'attention du Sultan sur les pays d'oatge-mer
et sur la Mor^e. La mutinerie de la garnison de Tri-
poli, qui, mlcontente de son gouverneur, l'avait tue
d'un coup de feu a , de m6me que l'insurrection des
Mainotes en Mor^e, appelait une prompte repression.
Apr6s avoir implore la protection des mftnes du grand
i « a5o,ooo aipri, cjie fouo seadi 5,ooo. »
a « U BasMidi Tripoli anaazato cod una archibuggiata da queati Barbe-
• raschi per aula sadiifacMBe dal wo governo. » Hafiport de Barbara du
a a nan 1669,
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33a HISTOIRE
marin Khaireddin-Barberousse, en sacrifiant des moth
tons sur son tombeau *, le kapitan-pascha partit de
Constantinople k la t6te de quinze galores mont£es par
cinq cents janissaires et un eunuque nomme aux fonc-
tions de pasch^ de Tripoli. Dix autres galores furent
dingoes contre la Maina, avec ordre d'y Clever un
castel destine a tenir en bride les descendans des Spar-
tiates a . A Alexandrie , l'embargo fut mis sur plu-
sieursna vires frangais; le juif Jean Miquez, devemisi
influent k la Porte, avait provoque cette mesure dans
le but de se creer une garantie pour des sommes que
lui devait la France; l'ambassadeur de ce pays re-
claim, mais inutilement 3 .
Au printemps de l'annee suivante (28 mars 1570),
les deux nonces, Gaspard de Minkwiz et Edouard
Frovisionali, apporterent k Constantinople le present
honorifique de trente mille ducats, stipule dans le der-
nier traits, pour le Sultan, et les sommes destinies au
grand-vizir et aux autres vizirs. Admis k l'audience
solennelle de S£lim, ils demand&rent quil flit ex-
presagment dtfendu aux Transylvaniens de tenter de
s'emparer de Zechwar, d'Erdoed et de Nagybanya,
et qui! ne ftkt accorde aucun secours k ties rebelles
i Rapport de l'ambassadeur Soranzo du ao mai 1569 : « Avendo fetto
• secondo il solito sacrifizio alia sepoltura di Barbarossa. »
» • Al brazzo di Maina per fabricar il caslello , per tener in freno quella
» gente inquietissima, » Rapport de Barbaro du 24 mai 1569.
3 Barbaro, qui avail e*te auparavaut ambassadeur, a Paris, dit : « Giovanni
» Miches, creditor del Christianissinio Re per il deposito del gran partito
» del lioue di circa i5o,ooo scudi, a falto piu duna voila preteusione per i
♦* suoi Ciausi mandali in* Francia; »
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 353
tels que Francois Forgacs, Ladislas Julaffy et Blaise
Gomathy. Mohammed-Sokolli &nit Topinion qu'on
pouvait bien abandonner aux Transylvaniens Ie petit
fort d'Erdoed , dont la prise avait fait couler tant de
sang musulman , et qui depuis lors &ait presqu'en
ruines ; mais, sur resistance des nonces et de l'am-
bassadeur, il se desista de sa pretention. Toutefois il
se montra d f une composition moins facile sur d'autres
points , et exigea que les villages qui avoisinaient
Palota, Wessprim et Stuhlweissenbourg ne payassent
d'imptts qu'au Sultan , et que ceux qui &aient dans
les venvirons de Tata et de Papa , jusqu'alors tribu-
taires de la Porte, continuassent de lui envoyer leurs
imp6ts par Tentremise de leurs juges. II offrit aux
nonces deux arcs artistement travailtes, et demanda
qu'en retour on lui envoy&t de Vienne une bonne cui-
rasse. Les mandataires deTransylvanie, Michel Gyu-
lay et Gaspard Gebees vinrent rfit&fer leur demande
au sujet des trois places ci-dessus d£sign£es, et re-
partirent sans avoir rien obtenu. Quatre mois apr£s,
un nouyel envoys transylvanien, Frangois Balogh, se
pr£senta k la Porte, accompagn6 du drogmanFerhad,
afin de se plaindre des devastations du beglerbeg de
Temeswar et du sandjakbeg de Szolnok. II regut un
gracieux accueil du grand-vizir Mohammed-Pascha ,
qui avait pris en grande affection Gaspard Bekesch ,
pour l'influence salutaire qu'il exergait sur le faible
Sigismond Zapolya et sa bonne administration de la
Transylvanie.
Le grand-vizir envoya au roi de France Tinter-
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334 HISTOIKE
prtte Mahmoudbeg, charge de lui demander hi :
de la princesse Marguerite pour Sigismond de Trail-*
sylvanie, auquel il voulait par ce moyen aplanir les
voies au tr6ne de Pologne I . C'ftait dans le cows de
cette ann£e la seconde ambassade de la Porte au roi
de France. Au retour dune mission infructueuse au-
pr6s da roi de Pologne, Ibrahimbeg fut envoys k Pa-
ris pour presenter & Charles IX la nouvelle capitula-
tion * (27 septembre 1569) [vni]. Dans cette mfene
annle, les annales de l'empire ottoman signalent Tun
des plus grands incendies dont l'histoire de Constan-
tinople fasse mention; d'aprts le rapport das arobas-
sadeurs d'Europe , il consuma trente-sk raille mai-
sons, nombre qui, r£duit dun a£ro, parattrait encore
fort considerable, Le feu 6clata dans le quarter des
jutfs [ix] , et rlsista h toutei les tentatives faites pour
I'&eindre. Le grand- vizir Mohammed-Sokolfi , qui
s^tait empress^ de se rendre sur le theatre de Tin-
cendie, pour chercher k en arr&er lea progrte, eourat
i Albert de Wyw, et Vexlrak do Mmpport de Vambasstdeor Tcadtiea, date
lea Archive! de la maison %. R. d'Autriche : « Mabnud mandate in Francia
» per persuader il Re di sposar la sua sorella Margerita al Transilvano coo
» promessa di ferfo Re di Potonia dopo la morte del Re, » a oct. iSSg; et
17 avril de la aieme ansae : « Mamut porta tre lettere da qttet Signer*. »
« - Si ata qui in aspettaaione del ritoroo d'Ibrahimbeg di Poloaia di
» Cubat Ciaus di Trausilvania. » Rapport du baile Barbaro du 10 juin
1569, dans les Archives de la ma i son I. R. d'Autriche. Un autre Rapport
du mime <Kt : « ftcbiesto il Re di Monia per Ibraime a mover contra il
» Moscovila, ripose nou peter roaaper la tregue, nand tm a no, cite trarvarebbe
» modo a compiacer a sua maesta quando la volesse attendere alia promeast
• fallali prima cbe morisse sultano Soleimano suo padre, che era di volar
» subtle entrato aelt' impero metier un signer Pohco lit Moldavia. »
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DE L'EMPIHE OTTOMAN. 535
lea phe grands dangers, et ftilHt p£rir lictime de son
zile. Bien Join de secoqrir tog mateons des jtiifs , led
janisaaires en fti£rent lea habitans; ils erucifterent
m6me un jeune chr&ieft ». L'aga Dj&fer, retenu par
une raaladie, n'avait pu quitter son lit et contenh* lea
d&ordres de ses soldats ; il fat destitii6 et remplac£
par le gramMcuyer Siawonsch , Hongrois on Create
d'origine ; Femploi de ee dernier fut donn£ au premier
porte- glaive Kattas-Aga [x]. Le grand incendie de
Constantinople fat suivi de plusieurs autres dans ks
provinces. Brousa, Selanik et Tana (Azof) fnrent
presque entiirement r^dmtes en cendres; dans cette
derntere vifle , mille soldats p£rirent dans Feiplosion
dun magasin de pottdrt k canon. Pour r&ablir Fan-
cienne discipline des jmissairei, qu'on accusa d'avoir
mis de la negligence h combattre I'incen&e, et m*me
de l'avoir allom4 , oh incorpora dans cette milice
un grand nombre de ren^gats juifs et Chretiens qui
avaient probablement &4 pous*£s & abfurer la foi
de leurs ptees par les cruaut^s r&emment exerc^es
contre leurs co-Yeligionnaires. L'ambassadeuir knp£-*
rial Albert de Wys* mOurut dors h Constantinople;
il fut enterr6 dans 1'^glise de Saint -Benoit & Pera,
Tun des faubourgs de la ville [xi]; a cette occasion, le
Sultan et le grand-vizir adressSrent h Tempereur des
lettres qui sont un t&noignage de l'activite de cet am-
> Selaaiki, p. toe; el RmppoH d' Albert deWjrss du 97 aeptembre.
• Keetn ingent iAceacfium, in quo Mohaamedp. perltiitatas lapsis, in He-
» bfttorum adibus flamma trupit, aliquot Hebnei ibidem oomrenti a Jarita*
» fans interfaeti et jwab Cferutftanua etttififtaa. »
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336 HISTOIRE
bassadeur, et des titres qu'il s'est acquis k la recon-
naissance de sa patrie [in]. Apres avoir pris les con-
seils de Busbek, pr£d£cesseur de Wyss, le Beige
Charles Bym d'Estbeck, son successeur, entra en ne-
gotiation avec le grand-vizir, k Teffet de renouveler
le dernier traite de paix conclu pour huit annees,
dont quatre &aient alors £coul£es. Mohammed fut in-
flexible k regard de la cession des villages en litige;
il signala, cotnme une faute du grand-vizir Ali-Pa-
scha, la paix de 1562; trop favorable k l'empereur,
et dit que c'etait a lui de reparer, sous le r&gne de S£-
lim, la faute qu'avait faite Ali sous celui de jSouleiman.
II ajouta que , si Ton refusait plus long-temps de se
rendre k sa juste demande, il partirait d'Ofen k la
t&e d'une arm£e, envahirait le territoire de Tempire
k la profondeur de quelques journ£es de marche,
saccagerait tout le pays et en ferait un vaste desert ,
pour assurer ainsi la tranquillity des frontteres Jim].
Vers la fin de ces negotiations, on regut la nouvelle de
la mort du schah de Perse f , et Ton se h&ta de pour-
voir les places frontteres de Wan erd'Erzeroum de
canons et de cinq millions de cartouches \
i « Questa settimana gionti Ciausi di Esdron (Erzeroum), che confirmauo
»la morte del vecchio Sofi. » Rapport du baile Barbaro du a 5 juia i56g,
dans les Archives de la maison I. R. d'Autriche.
* Le Rapport de 1'ambassadeur ▼e'nitien Barbaro donne le contenu de
huit fennans differens qui furent rendus yen le meme temps : i° Comman-
damento per far 12 maone a Nicomedia; 20 Al Cadi di GalUpoli per far
provisione di tela perivle per 200 galee; 3o Al Cadi di Mitilcne et Morea
per far provisione difregatle; 40 Al Cadi di Sanlum per far provisione di
sartiame; 5<> In mar maggior, perche le balandariefabbricate siano man*
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 53 7
L'id£e de convertir un pays voisin en d&ert " jus-
qu'it une distance de deux journ&s de marche, pour
assurer la tranquillity des frontieres, est digne sans
doute des temps de barbarie; mais toutefois c'est une
conception qui offre quelque grandeur et qui ne man-
que pas de justesse. Le caract&re de faste et de ma-
gnificence que pr6sente k un si haut degre tout le r£-
gne de Souleiman, se voit encore empreint dans la
plupart des entreprises de S£lim II; le m&ite cepen-
dant en doit moins 6tre attribu£ au Sultan qu'i son
grand-vizir Mohammed-Sokolli. Au nombre de ces
entreprises, I'histoire doit inscrire en premiere ligne
Fach^vement de la mosqu£e d'Andrinople, et la tenta-
tive, toute infructueuse qu'elle soit rest£e, de la reunion
par un canal du Wolga et du Don. D£s la premiere
annfe du r£gne de Selim, on jeta k Andrinople les
fondemens de la mosqule S6)imiy6, dont la coupole
est dun diam&re plus grand de deux aunes que celui
de la coupole d'Aya-Sofia. L'architecte Sinan, dont
le nom se rattache k la plus belle £poque de l'architec-
ture ottomane , d£ploya toutes les ressources de son
art dans cette construction; il disait lui-m6me, en par-
lant de ses divers travaux, que la mosqu£e des princes
k Constantinople &ait l'oeuvre dun apprenti, que
date in Consiantinopoli ; 60 Alii confini di Persia, che la mela del ardUeria
/abb ri cat a Vanno passato sia mandata a Van e Vallra mela a Esdron; 70 Al
Beglerbeg di Van^ che facet gettar ire millioni balle di schioppo; 80 Al Beg-
lerbeg di Esdron, che nefmcci gettar due millioni.
1 m Hoc amplius toterare bob potuisse, et aisi legatus (Wyss) obtisset,
»Budse hibernare voluisse, at aliquot dierum solitudinem faciat pro fini-
• bui. • Rapport de Rym , dans les Archives de la maison I. R. d'Autriche.
T. VI. 22
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f>58 U1STOIHE
Souleimaniye &ait celle d'un ouvrier, mais que S£-
Hmiy6 seule &ait une oeuvre de maitre. Les huit pi~
liers qui supportent la coupole sont retires dans le
mur, de fa$on a produirQ le moins de saillie possi-
ble , et agrandissent par cette habile disposition l*int£-
rieur de la mosqu£e. Les quatre minarets s'&ancent
dans les airs, sveltes et l£gers, et sont couronn£s par
irois galeries pour les mouezzins; dans Tun de ces
minarets, comme dans celui dela c£l£bre mosqule de
Mourad II, on arrive au sommet par trois escaliers en
Jimagon, superposes Tun a 1' autre, de fagon que trois
personnes qui partent au m£me instant du pied de
chacun deux, marchent, pour ainsi dire, surla t6te
June de r autre, et peuvent se parler et s'entendre sans
se voir. Le directeur de l'acad&nie attache comme
fondation a cette mosqu£e porte le titre de Reisoul-
jnouderrissin, c'est-i-dire chef des recteurs. La con-
struction dura sept ans ; elle avait commence la pre-
miere ann£e du regne de Selim II, et ne fut terming
que dans l'ann£e de sa mort; c'est un monument
digne d 'admiration et qui aurait dft transmettre k la
post&ite le nom de Tarehitecte plut6t que celui du
fondateur.
Lentreprise de la reunion du Don et du Wolga
echoua complement; le defterdar tscherkesse Ka-
simbeg, qui avait &6 investi du sandjak deKafla, eut
le premier Tid^e de ce gigantesque travail, et en regut
la direction. Trois mille janissaires et vingt mille cava-
Jiers furent k cet effet envoy£s k Astrakhan, tandis que
quinze galores transport&rent k Azov cinq mille janis~
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 5!v)
saires et trois mille ouvriers ' (4 aotit 1569). II fut
ordonne en outre a trente mille Tatars de se joindre
aux janissaires pour former le siege d' Astrakhan , et
d'aider les fantassins a creuser le canal. Mais quinze
mille Russes, sous le commandement du prince S&£-
bianow , fondirent sur les travailleurs et les disper-
serent a ; de son cdt£, la garnison d' Astrakhan fit une
sortie vigoureuse, et repoussa les asstegeans avec une
perte considerable. L'arm^e des Tatars, dernier es-
poir des Turcs, fut presque enti&rement an£antie par
les Russes , et ceux qui £chapp6rent h la mort furent
faits prisonniers. D'autres Tatars, pris pour guides par
les Turcs, les £gar&rent par malveillance dans des ma-
rais et des steppes ; et les suggestions perfides du khan
de Crim^e Dewlet-Ghirai , qui ne voyait dans l'heu-
reux succes de cette entreprise qu'un surcroit de su-
ction pour lui , vinrent encore ajouter a la demora-
lisation des troupes ottomanes, d&)k d£courag£es par
leurs revers et leurs pertes. Les £missaires de Dew-
let-Ghirai repr&ent&rent aux soldats turcs que dans
ces contr£es septentrionales l'hiver durait neuf mois,
qu'en &6 la nuit n'&ait que de trois heures , et qu'ils
seraient ainsi dans la n£cessit£ de se priver de repos
ou de negligjer les devoirs de leur religion , qui leur
i Karamsim, p. i56, dit quinze mille sipahis et deux mille janissaires.
a C'est dans cette occasion que les Russes conquirent sur les Turcs leurs
premiers trophees; car ceux qu'ils avaient remportes sur les rives de l'Oka
(en 1 541), et dont ^>arle Karamsin : « C'est alors que nous rimes pour la
premiere fois des trophees ottomans entre nos mains, » avaient ete conquis
sur le khan des Tatars Sahib-Ghirai, qui etait un Djeoghizide et non un
Ottoman. ,
•22?
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540 HISTOIKE
prescrivait de faire la prtere du soir deux hetires apr&s
le coucher du soldi , et celle du matin d£s l'aube du
jour. Ces insinuations obtinrent un plein succ&s : leg
troupes pass&rent du m£cohtentement k une revoke
ouverte; Kasim fut forc6 de renoncer k ses projets et
de les ramener k Azov ou il se rembarqua; en pleine
mer, une violente temp6te assaillit la flotte, la dis-
persa et fit sombrer quelques nay ires, en sorte que
de toute l'arm£e ottomane, sept mille hommes seule-
ment rentrirent au port de Constantinople. Pour r6-
tablif la paix tnomentan&nent rompue par cet 6v£ne-
ment, un officier russe, nomm6 Novossiltof , se rendit
de la part de Jean-le-Terrible k Constantinople d£ale
printemps de l'ann£e suivante (1 570). Aucun ^change
d'ambassade n avait eu lieu entre la Russie et la Porte,
depuis la lettre que, treize ans auparavant, Soulei-
man avait adress£e au grand-prince, et dans laquelle
il le traitait de puissant Tzar, de sage dominateur, et
lui recommandait les marchands qu'il envoyait ache-
ter des pelleteries k Moscou.
Novossiltof pr&ehta au Sultan une lettre de son
souverain, dans laquelle eelui-ci lui rappelait, en
termes affectueux, les anciennes relations d'amitte de
la Russie et de la Turquie, t&noignait.son &onne-
ment de l'invasion inattendue de Varm^e ottomane
dans les Etats russes, et lui offrait paix, alliance et
amitte. « Mon maitre , disait Novossiltof aux vizirs,
nest pas l'ennemi de la religion de Mahomet. Plu-
sieurs de ses vassaux professent hautement le culte du
Proph&te et Tadorent dans leurs mosquees : tels sont le
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DE L'EMPIHE OTTOMAN. 34 1
tzar Sahim-Boulat, a KassimofF; le tzar&vitch Kai-
boula , h Yourieff ; Ibak , a Sourogik ; les princes
Nogais , h Romanof ; car en Russie , tout Stranger vit
en liberty dans sa croyance; k Kadom , dans la pro-
vince de Metschera , plusieurs fonctionnaireg publics
du tzar suivent la foi musulmane. II est vrai que Si-
meon, ctefunt tzar de Kasan, et le tzar&vitch Mour-
toza ont embrass£ le christianisme; mais ce sont eux
qui ont demand^ le bapt&ne. » Novossiltof eut lieu
d'etre satisfait du gracieux accueil du Sultan; il re-
marqua seulement que ce prince affectait de ne pas
s'informer de la santi de l'autocrate, et que, contre
1' usage, il ne fut pas invito avant son audience au diner
que la Porte a l'habitude d'offrir aux ambassadeurs.
Cependant, la yaine tentative de la reunion du Don
et du Wolga ne changea rien aux vastes projets congus
par le grand-vizir Mohammed-Sokolli , relativement
aux provinces du midi de I'empire. L'un de ses projets
favoris 6tait de percer l'isthme de Suez, aussit6t qu'on
aurait &ouff$ la r^volte qui bouleversait alors toute
l'Arabie, et d'&ablir entre la Mer-Rouge et la Midi-
terran£e une communication qui permit aux flottes
ottomanes de passer directement de Tune k l'autre
mer \ En attendant , les armemens maritimes se fai~
< Rapport de l'ambassadeur Rym, dans les Archives de la maison I. B.
d' Autriche : « Capudan Bassa cum 65 triremibus solvit in faraa augusta a
»» Venetis humanissime exceptus, sepjtembre i565. » A lenr passage, les
Ottomans pillerenl les couvens du mont Athos : « Monasterium in monte
»Athos a classe crudeliter direptum, cum omnes Imperatores Ottomani
« illud qua tributariuni hueusque intactum reliquissent. » Rapport de Wyss
du mois de juin i568, dans les Archives de la maison I. R. d' Autriche
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5 fa UISTOIRE
saient avec une grande activity et excitaient leffroi des
Venitiens; et ce n'&ait pas Sokolli, mais S£lim lui-
m£me, qui m£ditait de conduire en personne l'exp&li-
tion de Tile de Chypre, devant laquelle les vaisseaux
ottomans croisaient depuis quelque temps.
La r6volte d'Arabie et les efforts que n£cessita sa
repression appellent maintenant notre attention. Les
g£ographes orientaux represented KArabie comme
une ile , limine de trois c6t£s par des mers (les golfes
d'Arabie et de Perse et la mer de Tlnde) , au nord
par l'Euphrate , et ne touchant au continent que par
des deserts qu'ils comparent h des mers, celui de Sute,
qui la joint a l'Afrique , et celui qui &ablit ses com-
munications avec la Syrie et l'Euphrate. Le premier
est le desert des enfans d'Israel et du mont Sinai , le
second le grand desert arabe. II ne faut pas moins de
quatre-vingt-dix-sept journ6es de marche pour faire
le tour de cette ile. Les Grecs divisferent le pays , d'a-
pr6s la nature du sol, en trois parties, qui sont, du
nord aumidi, Y Arabie-D6serte , Y Arabie-P&ree , l'A-
rabie-Heureuse ou fertile. Cette ancienne division est
encore admise en partie par les Arabes de nos jours,
sous les noms de TY&nen et de THedjaz , dont le
premier d&igne l'Arabie-Heureuse, et le second 1'A-
rabie-P&r6e. Les contr^es montagneuses sont appe-
l£es par eux Nedjd , et ils nomment T6hama le pays
qui descend par une pente; douce sur les rivages de la
mer. lis divisent toute Tile en quatorze districts : 1° le
desert des enfans d'Israel ; 2° le grand desert arabe ,
espfece de mer separant, au nord, TArabie de la terre-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 5/ f 5
ferme; 3° le Hedjaz , avant-mur, ainsi d&ign£ parce
que ce district forme pour ainsi dire le boulevard des
provinces de Nedjd et Tehama , qui renferment les
deux villes saintes , la Mecque, oi est n£ le Proph&e,
et Medine, ou sont d£pos£s ses restes; &° le Hadjr.
sur le golfe Arabique; 5° le Bahrein, l'ancien siege
des Karmates , sur le golfe Persique ; 6° entre les
districts de Bahrein et du Hedjaz, le pays pierreux,
Aariz , dont la capitale , D£ray£ , est habitue par les
Wehhabis; 7° l'Y&nama, dont les contr6es fertiles
sont arrosees par trois petites rivieres, et dont les
btes, les dattes et l'eau jouissent d'une renommee pro-
verbiale x . La partie de l'Arabie, au sud-est, borate
d'un cdt6 par le golfe Persique, et de l'autre par
la mer de llnde , comprend le huiti&me district , le
plus fertile, mais en m&ne temps le plus malsain de
Tile * , celui d'Omman , et les neuvi&ne et dixi&ne,
l'Ahkaf et le Schahar, enticement st£riles. La partie
du sud-ouest, baignee par le golfe Arabique et la
mer de llnde, forme FArabie-Heureuse proprement
dite, et comprend les onzi&ne, douzi&me, treizi&me
et quatorzi&me districts, Nedjd, Tehama, Hazramout
et Y£men 3 . Six ports spacieux et neuf villes desti-
« Leise atyab taamen min kintahil-Yemamei, we la eseheddoun halawetoim
min temeriha, ensuite Erakk min mail Yemamet. (Djihannuma, p. 5 a 8.)
» La fertilite de l'Omina est celebree dans ce passage de la tradition du
Prophete : Men teghadderS alSihi er-ritkoufe aUihi bl Omman, « que ceux
qui ont a se plaindre de ne pouvoir subvenir a leurs besoins se rendent dans
rOmman. » Djihannuma, p. 495.
3 Le Djihannuma, p. 484, designe comme quatrieme partie de F Arabic
FAhkaf, et divise 1'Yfrnen proprement dil en Yemen et Hazramout.
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344 HISTOIRE
n6es k servir d'entrep&s pour les foires, entretiennent
et favorisent le commerce de FArabie avec les pays
d'Orient et d'Occident, la Perse et l'Egypte. Ces ports
sont, dans le golfe Persique, Ghafr, port de la ville
d'Ahsa, Fancienne capitale des Karmates, renomme
par la pgche des perles, qui y attira en foule les com*
mergans de la Perse , et Maskat , ville non moins fr6-
quentee a cause de son commerce &endu avec l'lnde.
Sur la c6le sud-ouest se trouvent , k l'entr£e du golfe
Persique, le port d'Aaden, l'Eden des Arabes, et celui
de Mokha, l'Eden des amateurs de cafg ; dans le golfe
m&ne est le port de Djidde, ou d£barquent toutes les
caravanes de commergans et de pterins qui viennent
d'Afrique. Les neuf villes qui servent d'entrep6ts
aux marchandises exposes dans les foires , annuel-
lement et a des jours determines , sont Doumetol-
Djendel, non moins cel^bre dans f histoire d'Arabie
par la victoire qu'y remporta le Proph&e, que par la
defaite que le petit-fils de celui-ci, Housein, essuya
gr&ce h la trahison du del£gu£ de son adversaire Moa-
wia[uv]; puis Meschkar, ou les marchandises sont
soumises k une visite, pour pr&venir les fraudes ' ; les
marches de Sahar a , deSchahar \ d'Olan *, deR6bia,
et dans le district de Hazramout, celui d'Yemama 5 ,
destin^ uniquement aux yentes de pierres et de nattes;
le marche de Sanaa 6 , capitale de l'Arabie-Heureuse, et
t Djeaaaiioul-ewweL Cette visite de douane s'appelle mes (foire).
* La foire a lieu le 10 redjeb. — 3 Le i5 schaban.
4 Dans le oourant du mois de ramasan. — 5 Du i er au i5 moharrem.
6 .5 silkide.
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DE L'EMPffiE OTTOMAN. 345
enfin celui d'Okkaz ', qui est encore aujourd'hui le
plus c^lebre de tous, et qu'ont ennobli ses luttes po6-
tiques , dont la voix populaire distribue les palmes.
Cest dans ces marches que se font les ^changes des
produits de 1'Arabie, tels que les dattes et farines
d'Yemama, la carniole et 1'onyx de FY&nen, le muse
et l'ambre d'Omman , le cafe de Mokha , le baume
de la Mecque, enfin l'encens et 1' aloes, les perles et
Tor du pays, centre les &offes, les £piceries et les
autres marchandises de 1'Inde, de la Perse et de
1' Europe.
Si r Arabie par sa position et la vari&6 de ses pro-
duits m£rite 1 'attention du gtegraphe et de l'agronome,
elle n'est pas moins digne par sa population de fixer
les regards de l'ethnographe et de l'historien. Les
noms des anciens habitans de ce pays, tels qu'ils nous
ont &£ transmis par les Grecs et les Romains, offirent
plusieurs rapports de similitude avec les noms actuels.
Les Domadce et Thamudcei ne sont autres que les
Tasm et les Th&noud, dont parlent les anciennes
traditions arabes et m&ne le Koran, et dont il ne
reste aucune trace dans les histoires modernes ; sous
les noms de Beni Himyar et de Nabat, il est facile de
reconnaitre les anciens Hbmeritce et Nabcu&i. Les
Omani, Minari, Sabcei, Atramitce et Zamarem, sur-
vivent dans les noms des districts et des villes de Otn-
man, Mina, Saba, Hazramout et Dhamar. La rupture
* 1 5 silkide. L'un de ces oeuf marches, probabtement celui d'Okkaz, est
saus coatredit l'Acra de Pline : « Acre, oppidum in quo omnia negotiatia
w convenit. »
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546 HISTOIRE
de la digue de Mareb a &ernis£ dans l'histoire musul-
mane le nom de l'ancienne Mcaiabe, et Ton recon-
natt rancienne Petrcea dans la ville de Hadjr (Pierre),
Les Sarrasms, que les historiens appellent tant6t Sar-
rasins de Test ' , tant6t voleurs * ou palefreniers 3 , de-
nominations qui n'existent pas dans la langue arabe,
ne sont probablement que les habitans du district de
Schahar, ou des steppes (sahra) *. Les Sc&rites , No-
mades ou Bedouins sont encore de nos jours, comme
il y a mille ans, les fils d'Ismail, tels que la Bible les a
d£peints avec tant de v6rite : « levant leurs bras con-
tre tous, et voyant les bras de tons lev£s contre eux. »
Dans ces deserts, il n'y a d'autre institution que celle
de la famille; c'est le p£re qui r&gne. L f enfant du de-
sert, conqu&rant et nomade , a plants ses drapeaux
& 1 aide d'une lance dans les trois parties du monde;
mais nulle part il n'a pu fonder un empire de longue
dur£e. Les trois principals qualites de 1' Arabe sont
une g^nereuse hospitality , une valeur indomptable,
une elocution facile et brillante. Celui-la seul est re-
pute noble d6s sa naissance , dont la bouche est aussi
^loquente que la main est liberate, dont la parole toipbe
juste comme la fl&che de son arc, et dont le bras frappe
fort comme son glaive. Les auteurs , dont les po&ies
sont suspendues dans la Kaaba, doivent, pour con-
server leur prominence sur leurs rivaux , les vain-
cre aussi en combats singuliers; et s'ils ne remportent
• Scherkioun. — » Sarikin. — 3 Serradjin.
4 Les nomades s'appellent encore ches les Persans et les Turcs Sahrm*
nischin, e'est-a-dire ceux qui soot ass is dans les steppes.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN, 347
pas en m&ne temps les palmes dfeern&s k la valeur,
ils perdent leur titre honorifique de poete. Parmi les
poetes arabes avant Mohammed, Antar , Tun des plus
illustres , joignit k sa gloire litt^raire le merite de s'6tre
acquis le titre de PSre des Cavaliers et de Modile
ideal de la Chevalerie, telle qu'elle existait dans ces
deserts. Les ouvrages retragant les hauts fails d' Antar
ont regu l'approbation du Proph&e , qui , quoiqu'il
r^prouv&t les contes et les oeuvres des poetes per-
sans, n'eut aucun scrupule de consigner dans son
Koran les vieilles tegendes de son peuple. La plupart
de ces tegendes ont pour theatre TArabie ; ce qui fait
que le nombre des villes de Tile est presque aussi
grand que celui des lieux v£n£r6s par les Musul-
mans. D'aprte les traditions arabes, Adam et feve pa-
rurent sur les montagnes de Merwe et d' Arafat, pr6s
de la Mecque, lorsqu'ils descendirent du Paradis
pour habiter la terre; Abraham construisit la Kaaba,
pr& de laquelle on voit encore" ta trace de ses pieds;
l'archange protlgeant les enfans d'Ismail indiqua a
Hagar les eaux de la fontaine de Semzem. En pas-
sant pr&s de Hadjr, les caravanes des pelerins pous-
serit des cris , pour apaiser la voix plaintive du cha-
meau du proph&e Salih , qui , emprisonn^ dans les
rochers, temoigne encore de nos jours, par ses ge-
missemens, de Th£r6sie de la tribu Themoud, et rap-
pelle la lapidation dont on punit ses meurtriers. Dans
l'Hazramout , la fontaine dessdchSe l atteste la ca-
1 Biri-mouailal. (Djihannurna, p. 491.)
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348 HISTOIRE
lomnie des Idol&tres qui accus6rent le proph&e Han-
thala d imposture; le palais fortifig * et le tombeau
du proph&e Houd conservent la m&noire de Sche-
dad, de la tribu Aad, qui dans son paradis ferrestre
crut pouvoir braver le vengeur £ternel , prompt a
poursuivre I arrogance \ Le nom du proph&e Moise
a rev&u -d'un caract&re sacr6 la Mer-Rouge, le mont
Sinai et les douze sources pres de Suez, et celui de
son beau-p£re Schoaib (Jethro) a £galement consacr£
comme sainte la ville de Midian , sur la Mer-Rouge,
oii il fixa sa demeure. Saba fat fondle par la reine
Saba Balkis, qui d£fiait par des £nigmes la sagacity
du plus sage des rois d'Israel , et dans les champs
de Nedjan se trouvent les fosses d'ou s'£lanc$rent les
flammes qui d6vor£rent le tyran juif Sou-Nouwas,
en punition de sa cruaut£ contre les victimes qu'il
vouait au bticher pour leur faire embrasser la religion
de son peuple. Abraha £leva le palais de Ghomdan,
ainsi que l'£glise de Sanaa qu'il voulait opposer comme
lieu de p&erinage k la Kaaba; mais il se vit arrfite dans
l'ex£cution de ce projet par une £pid£mie de petite
v&ole, qui le fit p^rir avec une pariie de son arm£e
au moment oii il marchait contre la Mecque pour la
d&ruire. A Samara v&nirent, peu de temps avant le
Proph&e, ces deux devins au corps incomplet, Sa-
tih , qui &ait priv6 de jambes , et Schakk , qui n'avait
qu'une seule jambe, un seul bras, une preille et un
ceil, et qui Tun et l'autre, v&itables sibylles de TIs-
« Kastrimomchcyed. (Djikannama, 1. c.) — * Erem catol-amat.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 349
lamisme, annonc6rent la prochaine venue du Pro-
ph&e.
Dans les temps ant&rieurs k l'lslamisme, l'histoire
de l'Arabie ne pr6sente que des combats isol& entre
les diverges tribus, que Ton peut comparer aux points
qui dirigent le voyageur dans ces deserts , et quelques
noms de grands hommes, aussi rares que les sources
qui circulent sous ces sables brtilans. Les auteurs ara-
bes, en remontant k l'origine de leur histoire. repri-
sentent ces temps primitifs comme une £poque ou les
pierres molles et flexibles comme le limon n'avaient
pas encore revfiju une forme durable ! . Les 6v£nemens
lqs plus importans qu'ils signalent k des £poques plus
rapproch&s stmt la construction de la Kaaba, le deluge
d'Aarem et I'ann^e des £lephans, pendant laquelle le
roi d' Abyssinie fut arr&6 , dans sa marche contre la
Kaaba, par la pluie de pierres que les oiseaux, suivant
l'expression du Koran, jet&ent sur ses troupes, e'est-
&-dire, probablement par une £pid£mie de petite \6-
role. Au nombre de leurs guerres les plus c£16bres,
ils placent la guerre d'extermination entre les tribus
d'abord allies de Tasm et de Ghadis, qui fut com-
mence par cette derntere pour repousser les pr&en r
tions du prince de Tasm aux pr&nices de virginity des
jeunes filles a marier, et terming par l'interyention
« Specimen pracipuorum Arahvm regnorum rerumque ab lis gestarum
ante lllamismum , coUegit , evettil Rasmussen Haunim 18x9, d'apres
Haroza d'lsfahan et Mowairi. Silveslre de Sacy, H&moire sur divers <W-
nemens de V Histoire arabe, t. XLVIII des Udmoires de V Academic des
Inscriptions et Selles*Lettres, Pocoke, Specimen Histories Arabum.
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o^o
HISTOIRE
des Beni-Himyars; ils employment dans cette circon-
stance la ruse d'une forfit ambulante , qu'on retrouve
• plus tard dans Thistoire d'Angleterre au stege de
Birmingham ; la guerre acharn^e des tribus d'Abs et
Dhobian, qui se manifesta au sujet des courses de la
jument Ghabra et de Fetalon Dahis, et la guerre des
tribus Bekr et Taghleb , qui survint k F occasion de
Serab, femelle du chameau de Besus, femme d'un &ge
avanc£ ; ces deux tioms devinrent par \k d'un usage
proverbial pour designer les plus grands malheurs.
Aucune des cinquante grandes batailles racont£es par
les historiens arabes n'eut lieu dans des guerres ext6-
rieures; toutes se rapportent k des' guerres de tribus.
€es historiens paraissent ignorer entterement les succ^s
des armies romaines, qui s'avanc£rent jusqu'a Petra
dans l'Arabie-P&ree, et ils ne font aucune mention de
1'empereur Adrien, que la jactance romaine nommait
I'Arabe. lis ne connaksent pas davantage Philippe, n6
cependant en Arabie, qui parut qnelque temps sur le
. trdne de Tempire romain d'Orient.
Pendant que ces guerres divisaient les tribus de
l'Hedjaz, on vit surgir dans I'Y&nen la tribu des
Beni-Himyars ou Homairs, c'est-k-dire les Rouged-
tres, ainsi nommfe k cause de la couleur de leurs v6-
temens. Cette couleur favorite des Arabes se retrouve
a une £poque post£rieure dans le palais rouge des rois
de Grenade. (Al-Hamra). Les Beni-Himyars faisaient
remonter leur origine k Kahtan et Aadnan , les p£res
des tribus arabes; ils excellaient dans deux sciences,
la genealogie des families de leur nation , et la science
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DE L'EMPIttE OTTOMAN. 35i
des astres. Us consignaient avec soin , dans des ta-
bleaux gen^alogiques f , la noble descendance de leurs
chevaux et de leurs families , et se dirigeant dans ces
deserts, par leurs connaissances des astres et des
sources cach&ssous la terre, ils savaient &happer
au supplice de la soif. Parmi les cinquante rois des
Beni-Himyars, connus sous le nom g£n£rique de To-
baa, il en est quatre auxquels on attribue des con-
quotes en Asie et en Afrique : Abdesch-Schems (le
serviteur du soleil), qui conquit Baby lone; Soul-
karnein , surnomm£ le roi aux deux comes, qui con-
struisit le mur de Derbend; Schemer, qui porta ses
armes victorieuses jusqu'au-dela de l'Oxus, et donna
son nom a la ville de Samarkand , et Soul-ezhar, le
possesseur des fleurs, qui vainquit dans les deserts
d' Afrique un peuple de spectres ', dont le visage £tait
tourne vers le dos. Au nombre des autres rois des
Beni-Himyars, on remarque le fondateur du paradis
de Tlnde, dont le nom est plus connu parmi les peu-
ples de Fouest que celui de Her had, p£re de Balkis,
la c61&bre reine de Saba ; Soulminar, ou le construe-
tewr de tours, le premier chef arabe qui £leva des
tours dans le desert, pour diriger la route des cara-
vanes; Sou-schenatir, ou le possesseur des curedents,
qui livrait a la mort les victimes sur lesquelles il venait
> Les sept sous-divisions de la parent^ , telles que les doooe le DjiJian-
murna, et pour lesquelles aucune langue d'Europe n'a depressions equiva-
lentes, sont : i° sch&b, a<> kabiU, 3° amari, 4° batn (le ventre) , 5° fakht
(la cuisse), 6° fassile (la cheville), 7 hai (la claie).
a Nisnas, Djihannuma, p. 546.
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35* HISTOIRE
(Tassouvir une inftme passion, et qui avait coutume de
se montrer ensuite a one fen&re, occup£ a se curer les
dents; Sou-nouwas, ou le roi des trembleurs l , juif de
naissance, qui pers£cutait les chr&iens et les livrait au
bticher pour les conyertir a la religion juive ; Abraha,
ou le maitre des dUphans, qui couvrit l'Arabie de
nombreuses hordes de n&gres, amen£es de l'Abys-
sinie; enfin les trois Tobaas : Hares le Grand , ainsi
appete de sa taille 61ev£e, le p&re de Soul-Karnein;
Aboukerb, de taille moyenne, juif de naissance, qui
recouvrit le premier la Kaaba d'un voile ; et Tobaa
Ben Hasan, le petit Tobaa, dont le fils, Amrou Ben
Maadi Kerb (renomm6 par sa dext£rit6 k manier la
lance), v£cut plus de cent ans et assista k la naissance
du Proph&e [xv]. Le dernier des princes de la tribu
des Beni-Himyars , Seif Si yezen , fut tu£ dans un
festin qu'il donna k l'ambassadeur du roi de Perse
Khosrew, et dfes-lors tout l'Y&nen embrassa la reli-
gion du Proph&te.
Depuis cette 6poque , toute r Arabic suivit Texem-
pie de l'Y6men, et se soumit aux lois de l'lslamisme.
Mais ce ne fut que dans le Hedjaz et dans l'Y6men ,
c'est-&-dire dans TArabie-P^tr^e et l'Arabie -Heu-
reuse, que r£gn£rent des dynasties, dont Tune s'est
maintenue jusqu'& nos jours m&ne sous les Ottomans.
Quatre de ces dynasties occup&rent le Hedjaz, et qua-
tre l'Y&nen. Dans le Hedjaz r£gn£rent d'abord pen-
dant un stecle quatre princes de la famille Okhaizar *;
* De l'habitude qu'ils avaient de balancer conslamment le corps.
» Beni-Okhaizar, depuis Fannee a5i de l'hegire (855) jusqu'a Fannee
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 555
a ceux-ci succed&rent les sch&rifs de la Mecque de la
femille Haschim, appetes les fils Mousa, dont la domi-
nation eut une dur£e de deux siecles et demi '; apr&s
eux , le pouvoir souverain passa aux sch&ifs de Me-
dine, de la m£me famille de Haschim *, et le rtgne de
ces derniers coincida avec celui des Beni-Kotad& k la
Mecque 3 , dont un descendant, Ebou-Nemi, fils de
Berekat, apporta au Caire k S61im I" les clefs de la
Kaaba ; depuis et jusqu a nos jours, les Beni-Kotad£s
ont conserve corarae sch&ifs une ombre de pou-
voir sous la dynastie ottomane. La Mecque et Medine
furent long-temps sous la dependance de rEgypte et
de ses souverains , tant k cause de la proximity de
ce dernier pays, que par la n£cessit£ ou elles etaient
de supplier k Finsuffisance de leurs r&oltes de ce-
reales; elles subirent ensuite le joug des sultans otto-
mans comme elles avaient subi celui des Tscherkesses.
L'Y&nen au contraire, gr&ce k son eloignement de
l'Egypte , k la richesse de ses produits et a la prospe-
rity de son commerce, fut toujours difficile a subju-
guer et k maintenir dans la soumission, et brava an-
35o (961). Ooze princes, pendant un regne de quatre-vingt-seize ans.
Hadji Khalfa, Tables chronologiques> et le Nokhbetei-tewarikh, f. 3i5.
> Beni-Mousa, de l'annee 35o (961) a l'annee 598 (xaor). D'apres
Hadji-Khalfa, cette dynastie n'eut que six princes qui regnerent pendant
deux cent quarante ans. Les Beni-Haschim , dans le Nokhbetei-iewarikh ,
f. 3 16, sent nommes Ewlad-Mousa.
> Beni-Hawaschim, de l'annee 599 (iao»).a l'annee 855 (t45i), deux
cent quarante-neuf annees. Hadji Khalfa, Tables chronologiques, f. 166, et
le Nokhbetet-t&war'Mi y f. 3 17*
3 Beni- Kotadc, de l'annee 598 (taoi) jusqu'a nos jours. Les memes, 1. c.
T. TI. 23
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554 HISTOIRE
ciennement la puissance 6gyptienne comme il a brave
par la suite celle des Ottomans. Depuis Introduction
de 1'Ialamisme, l'Arabie-Heureuse avait &6 successi-
\ ement gouvernfe par huit dynasties diff&entes. La
premiere fut celle des Beni-Siyads; son fondateur,
Mohammed Ben Obeidoullah , envoys comme gou-
verneur dans l'Y&nen par le khalife Mahmoun, avait
subjugu£ les tribus arabes, et £lev£ la place-forte de
Sebid pour les maintenir dans lobeiseance \ Deux
si&les apr&, la famille Nedjah a expulsa les Beni-Siyads
du tr6ne, qu'elle souilla de sang pendant un si£cle.
Les Beni-Salihs se maintinrent pendant soixante-
deux ans & Sanaa dans l'Y&nen proprement dit 3 .
L'heureux aventurier , que lhistoire arabe dlsigne sous
le nom de Mehdi et qui s'annonga comme le dou-
zi&me imam de ce nom , non content du, titre qu'il
s'&ait arrogl, revendiqua le pouvoir, et mit fin k la
domination des Beni-Nedjahs 4 . Son petit-fils Ab-
doun-Nebi (serviteur des proph£tes) 61eva un d6me
i Beni-Sijad, depuis 1'ajmee »o3 (818) jusqn'a fannee 408 (1017),
cent quatre-vingt-dix-neuf ans; cinq princes. Hadji Khalfa, f. 162; et
Djenabi, a la Bibliotheque de la maison I. R. d'Autriche, f. 378.
3 Beni-Nedjah, depuis l'annee 4ta (ioa 1) jusqu'a 553 (11 58), cent
trente-sept ans et sept princes. Hadji Khalfa, l.c,,i i63; et Djenabi,
p. 379.
i Beni*Salih, de l'annee 4*0 (1009) a l'anne* 484 (1091), soixanle-
deiix ans, I. c.
4 Obeidoullah Mehdi, fondateur des Fatunites , en Tannee 997 (909),
Mehdi, fits de Tomrout, fondateur des Mowahides, en l'lnnee 5 1 4 (* 1 *«) ;
dans le Moghrebet l'Andalonsie; Scheikh Mohammed-Mehdi, fondateur des
schcrifc de Fez, en l'annee 9^0 (i5i4). Hadji Khalfa, 1. c, et le Nokh-
bmeHewarikh, f. 327.
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DE L'EMPIHE OTTOMAN. 555
(silkhalasa) sur le tombeau de son grand-p&re, et
voulut en faire un lieu de p£lerinage en defendant
aux pelerins de se rendre & la Kaaba. Quinze ans s'6-
taient k pane £coul£s, que le fWre afne de Salahed-
din , Schemseddewlet-Touranschah , chassa les Beni-
Mehdis et s'empara du pouvoir ; dfes lors cinq princes
de la famille dTyoub ' fbrm&rent pendant un demi-
stecle une grande dynastic, qui, divis£e en sepf bran-
ches. r£gna k la fois au Caire, k Haleb, Damas,
Himss, Hama, Khalat et dans l'Yimen. Aux Eyou-
bides succ&terent les Beni-Resouls (fils des en-
voy es), dont trois princes se sont acquis une gloire
immortelle dans Fhistoire litt&raire des Arabes par la
protection 6clair£e qu'ils accord&rent aux savans. Me-
lek Moeyid Daoud Mtit k Taaz une acad&nie qui
porte son nom et qui renferme son tombeau; grand
amateur de livres, il laissa k sa mort une biblioth&jue
de cent mille volumes a . Melek Moudjahid et Melek
Efdhal fond&ent k la Mecque et k Taaz deux acade-
mies qui portent leurs noms, la Moudjahidiy£ et l'Ef-
dhaliy£. Aussi savant que brave, Melek Efdhal ^crivit
un ouvrage historique intitule YAgrdment des yeux.
Son fils Melekoid-Eschref fonda a Taaz l'acad&nie
d'Eschrefiyi, et appela a sa cour les plus grands sa-
vans de son £poque; il manda d'Egypte I'hbtorien
Ibn-Hadjr, natif d'Askalon, et de Perse, Mohammed
de Firouzabad, auteur du diciionnaire arabe le plus
* Beoi-Eyoab Yemen , de l'annee 56g (117 3 ) a Tamiee 6a6 (1228),
cinquante-cinq ans; six princes.
> Noutlieioulouyoun, dans le NcMUteielrUiwartkh, f. 323.
25*
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356 HISTOIKE
volumineux, le plus estim6, et portant a juste titre le
nom de Kamous (Oc£an). Apr£s un rdgne de trente-
deux ans, les Beni-Resouls eurent pour suocesseurs
quatre princes de la famille Tahir \ qui succom-
b&rent sous la puissance des Ottomans; cependant la
famille des Seidiy£s sut d&endre contre ces derniers
son inctependance , quelle a conserv£e jusqu'& nos
jours dans une partie de l'Y&nen \ La famille Ta-
hir, qui s'eteignit sous le r&gne de S£lim I", et la dy-
nastie des imams Seidiy^s , qui surgit sous celui de
Souleiman-le-Grand , nous ram&nent naturellement
au cours de notre histoire.
Le dernier prince des Beni-Tahirs, Aamir, fils
d'Abdoul-Wehhab, r£gnait depuis vingt-huit ans,
prot£geant les sciences et les savans, lorsqu un refus
inconsid£r6 fait k l'amiral du sultan Ghawri amena
sa perte. L'avant-dernier sultan tscherkesse Ghawri
avait envoy 6 au secours du prince de Goudjourat,
Mouzafferschah, alors en guerre avec les Portugais ,
I'&nir kurd Housein , amiral de sa flotte. A son ar-
riv£e sur les c6tes d'Arabie, Housein adressa une am-
bassade chargfe de pr£sens au prince de la famille
Tahir, pour lui demander des vivres pour sa flotte,
qui etait& l'ancre dans la rade de Kam&an. Craignant
qu'en acc£dant k cette demande, sa condescendance
ne fftt consid6r£e comme un acte de soumission ,
Aamir r£pondft par un refus, qui inspira k l'&nir la
i Detainee 858 (i453) a l'annee 923 (i5i7), soixante-quatre ans;
guatre princes.
a Seidiy&, de 953 (1546) jusqu'a nos jours.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 55 7
resolution de se venger en l'expulsant de ses Etats.
Renforc6 par le secours des ennemis d'Aamir, c'est-
a-dire par les tribus montagnardes des Seidiy^s et les
chefs de Djazan ' et de Lohaya a , Housein s'empara
d'abord de Sebid. Apr6s avoir laiss£ dans cette ville
une garnison sous le commandement de l'&nir Ber-
sebai , il se dirigea sur Aaden qui se defendit avec
courage, malgr£ la terreur inspir& aux Arabes par
les canons, qui leur avaient &6 inconnus jusqu'alors*
Ne pouvant vaincre cette resistance , Housein se re-
tira avec quelques navires pris dans le port et revint
k Djidda, oii par ses ordres on pendit une partie des
prisonniers , on arracha les entrailles k d'autres et on
fit subir k tous mille tortures; sa cruaut£ ne tarda pas
k 6tre punie. Le sch&tf Eboul-Berekat, qui avait
fait sa soumission k la Porte, en envoy ant, comma
on se le rappelle, son fils Ebou-Nemi au Caire, pour
presenter au Sultan les clefs de la Kaaba , regut or-
dre de faire jeter Housein k la mer. Cependant Ber-
sebai', que l'&nir Housein avait laisse a Sebid, s'&ait
mis en marche contre l'arm£e d'Aamir, avait pris la
ville de Taaz. et livr£ une bataille en rase campagne,
qui avait coAt^ la vie au prince Aamir et a son fr£re,
et mis fin k la domination des Beni-Tahirs. Plusieure
poetes d£plor6rent la mort du noble et malheureux
prince par de touchantes 61£gies [xvi] (23 rebioul-
akhir 923—15 mai 1517). Lorsqu'il eut livr£ Sanaa
au pillage, Ber sebai revint avec huit mille chameaux
» Le scherif Azeddio, fils d' Ahmed.
» Le fakih Eboubekr*
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558 HISTOIRE
charges du butin; mais, sur la route de Nedjran, il
fut surpris p&r des Arabes, qui lui enlev&rent ses
tresors avec la vie. Le tscherkesse Iskender succ£da
a Bersebai dans le commandement de Sebid , et peu
de temps apr&s il fut investi par Selim du gouverne-
ment de l'Y&nen, dont il fut le premier pascha otto-
man. Mais Iskender ne conserva pas long-temps son
pouvoir : il fut tu6 par un officier des janissaires,
nommi Kemal , qui s'empara de Sebid et l'embellit
dune mosqu£e qui porte son nom, la Kemaliye. Ke-
mal succomba a son tour sous le poignard d'Iskender
leKaramanien, qui lui succeda. Housein, sandjakbeg
de Djidda, et Selman, Tun des capitaines de la flotte
turque ; re^urent ordre de joindre leurs forces h celles
du sch^rif de Dja2an , pour mettre uH terme h oette
succession d'usurpations fondles sur le meurtre. Is-
kender le Karamanien ^prouva le sort de son pr&te-
cesseur Iskender le Tscherkesse; Selman se retira
poursuivi par les maledictions des habitans de Sebid,
a cause de ses cruaut£s; Housein, reste seul maitre de
la ville , &endit sa domination sur Taaz ; mais il mou-
rut peu de temps apres, et eut pour successeur Mous-
tafa-Alroumi. Sur ces entrefaites, Ibrahim-Pascha ,
alors en Egypte, envoy a k lamiral Selman-Reis qua-
tre mille hommes sous les ordres de Khaireddin-
Hamza, avec injonction d'installer ce dernier dans le
gouvernement de Sebid, et de soumettre avec son se-
coursl' Yemen kla puissance ottomane. Moustafe-Al-
roumi ayant refuse de se d^mettre du gouvernement
de Sebid, Selman le battit a Al-salif, entra triom-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 35g
phant a Sebid et k Taaz, et abandonna au pillage Tab
et Djebla. Alroumi fut livre au bourreau; Seiman ne
tarda pas a &re victime de la jalousie de Khaireddin-
Hamza, et ce dernier fut a son tour d£capit6 par le
neveu de Seiman, Moustafa, qui vengea ainsi la mort
de son oncle. Ne se croyant plus en stiret6 dans Se-
bid, Moustafa et son compagnon d'armes Safer se r6-
fugterent a Goudjourat, oii ils regurent du Sultan le
titre de khans; en outre, le premier fut nomme au
commandement du port de Diou, et le second au
gouvernement du Sourat. Sebid se trouvant ainsi sans
gouverneur, Temir Iskender-Mouz s'en empara et
administra le pays au nom de Souleiman; il se fit aimer
des savans et des soldats par sa justice et sa lib£ralit£,
et fonda a Sebid une superbe mosqu£e, qui porte le
nom d'Iskenderiy£. II mourut dans la septi&me ann£e
de son administration, en laissant le pouvoir k son
fils, sous la tutelle dun vizir, le pilote Ahmed.
Ge fut k cette epoque qu'apparut dans les monta-
gnes de l'Y&nen la nouvelle dynastie des Seidiy£s, qui
s'y est maintenue jusqu'a nos jours. Son fondateur,
.Schemseddin, fils d' Ahmed, s'attribua a la fois la sou-
verainete et le titre d'imam , en faisant remonter son
origine jusqu'au Proph&e. Cette secte des Sei'diy^s a
regu son nom de Seid , frere de Mohammed-Alba-
kir, fils du troisi£me imam Seinoul-Aabidin , fils de
House! n, fils d'Ali. Ce dernier s'&ant r£volt£ contre
Hischam, troisieme khalife de la famille d'Ommia, fut
battu et p&it les armes k la main ; son corps, qui avait
ete d£pos£ dans un tombeau sous le lit dun ruisseau,
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5(Jo HISTOIRE
fut exhume et suspendu k une potence, et, cinq ans
aprfes, jet6 dans les flammes par ordre du khalife We-
lid, successeur de Hischam [xvii]. Les Sunnis, bien
qu'ils bl&ment Seid d'avoir professe quelques opinions
erron&s, et, entre autres, d'avoir soutenu l'inutilit£
de la pri&re faite en un lieu livr£ au pillage ou sous
un v6tement pris a l'ennemi , ne lui attribuent pas le
schisme des Seidiy& , et en consid&rent son pr&ep-
teur, Wassil Ben Atta, comme Tauteur. Wassil Ben
Atta &ait disciple de Hasan-Bassri, Fun des p&res de
rislamisme. qui le fit mettre k mort, en lui disant : Tu
as fait schisme; depuis lors les Seidiy^s furent appeles
schismatiques (motazetes) par les Sunnis. Leur doc-
trine diff&re de celle des Musulmans orthodoxes re-
lativement au dogme de la predestination, et sur d'au-
tres points encore; ainsi les Seidiy^s admettent, outre
le paradis et Tenfer, un troisi&me s£jour des ames, et
professent, en opposition avec les principes philoso-
phiques de l'lslamisme, des opinions qui ont £te de-
velopp£es dans deux ouvrages differens par 1 imam
Schemseddin, fils d' Ahmed [xviii].
Scherifeddin , imam des Seidiy^s, ordonna a ses
deux fils Moutahher et Schemseddin-Ali , d'attaquer
le pilote Ahmed, alors gouverneur par interim de
Sebid ; mais ils furent battus et forces de se retirer
avec leurs troupes. A cette £poque, l'eunuque Sou-
leiman - Pascha , gouverneur d'Egypte et plus tard
grand-vizir, revint de son expedition h Goudjourat;
il avait ete determine h cette retraite par une ruse de
guerre imaging par Khodja-Safer, que Mahmoud>
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 56*
sultan de Goudjourat, avait honors do titre de khou-
dawendkiar. Lors de son passage sur les c6tes d'Ara-
bie, Souleiman-Pascha avait enlev6 au dernier re-
jeton des Tahirs, Aamir Ben Daoud, le reste de se»
possessions en s'emparant de la ville d'Aaden. A son
retour d' Asie , il aborda k Mokha et invita le pilote
Ahmed k se rendre k son bord avec le fils mineur
d'Iskender-Mouz. Ahmed tomba dans ce ptege ; a
peine fut-il k bord, qu'il fat tue avec les deux jeunes
princes qui l'accompagnaient ; le gouvernement de
Sebid fat donn6, au nom du Sultan , au sandjak de
Ghaza, Moustafa. Souleiman se rendit par Djidda et
la Mecque k Constantinople, emmenant avec lui Sid-
Ahmed, fils du sch&if de la Mecque Ebpu-Nemi
(8 schewal 945 — 27 fevrier 1 539). Apris une vaine
tentative pour semparer de Taaz, le sandjak Mous-
tafa fat remplac£ par Moustafa En-neschschar (le
scieur), ainsi nomm£ parce qu'il faisait scier en deux
les brigands et les ennemis qui tombaient en son
pouvoir. Le premier de tous les gouverneurs de l'Y6-
men, il obtint le titre de beglerbeg. Son successeur
Oweis, esclave de S&im I er , profita habilement des
discordes survenues entre les deux fils de Scherifed-
din, l'imam des Seidiy£s, pour agrandir son territoire.
II s'empara de la ville de Taaz, en accordant son se-
cours au fils aine de Scherifeddin, Moutahher, contre
son jeurte fWre Schemseddin , design^ par leur p&re
comme son successeur (1 er silhidj6 951 — 13 tevrier
1545). Mais il s'attira, par la discipline s£v£re qu'il
imposait aux troupes, la haine des lewendis. dont
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36a HISTOIKE
le chef Hasan Pehliwan le poignarda. Le glaive du
tscherkesse Ouzdemir vengea bient6t le meurtre d'O-
weis, et ce nouveau chef, fid&e aux Ottomans, con-
quit au nom de S£lim la ville de Sanaa. A la nouvelle
du meurtre d'Oweis, le Sultan nomma a son gouver-
nement le beglerbeg Ferhad. Celui-ci ramena k To-
beissance la ville d'Aaden, qui s'&ait revolts, et par
une victoire remport£e k Abou-Aarisch dans le dis-
trict de Djazan sur les troupes allies de plusieurs
scherifs arabes, il parvint k r&ablir la tranquillity dans
le Djebal et le Tehama, c'est-i-dire, dans les monta-
gnes et le pays plat. Rappel£ a Constantinople, Ferhad
ceda le gouvernement a Ouzdemir. Aussi brave qu'6-
rudit , ce dernier resolut d'aneantir la puissance de
Moutahher et de sa secte. Dans ce but, il demanda k
la Porte les secours n£cessaires. et Daoud, alors gou-
verneur d'Egypte , lui envoya par ordre du Sultan
trois mille fantassins et mille cavaliers sous le com*
mandement de Moustafa-le-Scieur, nagu£re destitu£
de son gouvernement. Ouzdemir et Moustafa entre-
prirent ensemble le siege de Thela, ou Moutahher
s etait renferm£ ; mais, par suite d'un diffSrend sur-
venu entre les deux chefs , Moustafa usa des pleins
pouvoirg qu'il avait regus, et delivra k Moutahher un
dipldme r du Sultan qui lui conferait le titre de sandjak
et lui assurait la jouissance tranquille de son gou-
■ Ce dipldme dat£ du 10 schewal 957, et la reponse de Moutahher du
mois de moharrem $58 , se trouvent dans mon exemplaire de Koutbeddiu,
f. 43, et dans Vlnscha du defterdar d'Egypte, Ibrahim, f. 87 et 88, a la
Bibliotheque I. B.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 363
vernement. Ouzdemir, aprta avoir, pendant sept ans
d'administration , agrandi son territoire par la prise
de sept chateaux l , c&la son gouvernement k Mous-
tafa-le-Scieur, et retourna par Sewakin k Constanti-
nople, ou il soumit an Sultan le projet de la conqu&e
de Nubie. Souleiman , toujours dispose k executer de
grandes entreprises, approuva ce projet. Ouzdemir
partit de la Haute -Egypte k la t&e de trente mille
homines pour la Nubie, construisit plusieurs forteres-
ses k Ibrim et sur d'autres points du littoral du Nil, et
mourut a Dewarowa , premier gouverneur ottoman de
Nubie; il fut enterr6 a Massoura, ou son filsOsman-
Pascha eleva sur son tombeau un ddme magnifique.
Son successeur dans le gouvernement de l'Y&nenj
Moustafa-]e-Scieur, eut le m£rite d'organiser les cara-
vanes de pelerins dans cette nouvelle province et de
leur donner un chef, Emirol-hadj (prince des pele-
rins), a I'instar des caravanes qui viennent de Damas
et du Caire (967-1560). Moustafa-le-Scieur laissa son
gouvernement k Moostafa-Kara-Schahin (le faucon
noir), ainsi nomme pour la vivacite de ses yeux et sa
couleur de mul&tre. Ce dernier, promu un an apr£s au
gouvernement d'Egypte, eut pour successeur Mah-
moud-Pascha , qui plus tard fut £galement gouver-
neur d' Egypte, et qui , ayant &6 assassine par suite
de sa tyrannie, regut aprfes sa mort le surnom de
> Koutbeddin ne fait mention que de la reprise de la ville de Sebid ,
occupee par Haider (Notices et Extraits de la Bibliotheque du Roi, t. IV,
p. 449); mais le Djihannuma, p. 55o, donne les noms des six autres places
fortes; savoir : Khelan, Habesch, Sewakin, Atra, Makblak et Khaniar.
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364 HISTOIRE
Maktoul (le tue). Un des premiers actes de Fad-
ministration de Mahmoud, fut V execution do direc-
teur des monnaies, quil accusa d'etre le seul auteur
dune alteration de monnaie , distant deji sous son
pr£d£cesseur [xix] ; plus tard, cependant, ce mtoie
Mahmoud altera Iui-m£me les monnaies pendant son
gouvernement d'Egypte, ainsi que l'avait fait Ali. II
fixa sa residence k Taaz, et mit le siege devant Habb ,
qui etait exclusivement possedee depuis trois gene-
rations par la famille Nezari. U attira par de perfides
negotiations le chef des Nezaris dans son camp, ou il
le fit ex£cuter; ce meurtre, qui le rendit maitre de la
ville, inspira une telle horreur aux Arabes, quils ap-
pel&rent des lore les actions perfides et honteuses des
makmoudiyds ' , c'est-&-dire, des actions de Mahmoud,
ou, d'apr&s l'autre sens ironique du mot, des actions
louables.
En recompense de cette perfidie qui avait accru les
possessions ottomanes, Mahmoud fut promu au gou-
vernement d'£gypte, et eut p&ur successeur, dans
T Yemen, Ridhwan, fils du precedent gouverneur
Kara-Schahin, qui s'empressa d'adresser h la Porte
un rapport detailie sur Tadministration de son pr^-
decesseur (rebjeb 972 — fevrier 1565). Dans le des-
sein de se venger de cette delation, Mahmoud repre-
senta h la Porte que TYemen avait une trop grande
etendue pour etre bien administre par un seul gou-
i « IU donnerent meme a ces ruses infames le nom de Mahmoud , et les
appellerent mahmoudia. » C'est encore ainsi que l'on appelle aujourd'hui
les pieces d'or (rappees a Constantinople.
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DE L'EMPIRt OTTOMAN. 365
verneur, et qu'il serait tres-utile den instituer deux.
En consequence liftmen fut divise en deux gouver-
nemens : liftmen sup£rieur et liftmen inf&ieur ;
le premier, qui resta a Ridhwan, comprenait les pays
montagneux, et avait pour capitale la ville de Sanaa ;
le second, dont le stege etait a Sebid, fut donne k
Mourad-Pascha le borgne. LorsqueMourad d£barqua
k Sebid, Ridhwan &ait en guerre avec les Ismaelis,
qu'il avait pouss£s par ses demandes exag£r£es k se
r^volter et m&ne k contracter une alliance avec les
Seidiyes, leurs ennemis naturels. Ridhwan demanda
des secours k Mourad, et celui-ci les promit; mais la
discorde sftleva bient6t entre eux, lorsque Mourad
pr&enta k son coltegue le registre des villes et vil-
lages de son gouvernement , sur lequel se trouvaient
portes les villages de Djebte, Alkander et Soulsofate,
quoiqu'ils eussent appartenu jusqu'alors au gouver-
nement de Sanaa. Peu de temps aprSs , Ridhwan fut
destitu£, et sa place donn£e k Hasan-Pascha, Russe
d'origine. Le depart de Ridhwan fut le signal d'une
insurrection g£n£rale. Moutahher, qui avait jusqu'a-
lors tromp£ Mourad-Pascha par des protestations
d'amitie et de divouement, leva le masque et mit le
stege devant Sanaa. Les Arabes de Boudan , Sche-
wafi, Taaker, Sahian et Gharmin x , se ligu&rent et
chass&rent la garnison turque de Habb \ Mourad, en
> Dans les Notices et Exiraits, t. IV, p. 46a , Al-Arabnn.
* On lit, dans les Notices et Exiraits, Ah au lieu de Habb, ce qui pour*
rait induire en erreur, parce quil existe dans ITemen un autre village du
now de Ab.
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566 HISTOIRE
se retirant par la route de Taaz, fut surpris par les
Arabes, battu et tue, el cette dtfaite amena la soumis-
sion de Sanaa. Moutahher fit son entree dans cette
ville, pr£ced£ par la garnison turque, forte de qua-
torze cents hommes, et commands par dix-sept san-
djakbegs et quatre agas. Mais a peine se vit-il mattre de
Sanaa, que violant la capitulation faite, il mit la ville
au pillage, fit la garnison prisomri&re, et en jeta une
partie dans les citernes de la ville, et l'autre dans les
chateaux desmontagnes (3 safer 975 — 9 aoAt 1567).
Le premier vendredi qui suivit la prise de la (dace, la
priere publique fut c^lebree au nom de Moutahher :
lorsqu'il eut invoqu6 les benedictions du ciel sur le
Proph6te, sur son gendre Ali et sa femme Fatima,
le pr£dicateur (khatib) appela les graces dn Tris-
Hautsur le p£re de Moutahher, Scherifeddin, l'imam
des Seidiyes, et apr^s lui settlement sur les trois kha-
Kfes Eboubekr, Omar et Osman, puis sur Hamza, le
h£ros de Tlslamisme, sur Abbas, le fondateur du kha-
lifat, sur les dix compagnons darmes du Proph&e, sur
toutes les femmes orthodoxes et les autres disciples de
Mohammed. II proclaim ensuite Moutahher khalife et
Emirol-mouminin , pria pour lui et les Musulmans ,
les pterins et les combattans de la guerre sainte ,
les yoyageurs et les compagnons de ses vktoires '. A
rarriv^e a Sebid de Hasan-Pascha , nomm£ gouver-
neur de Djebal & la place de Ridhwan, les Seidiyes
mirent le siege devant Taaz ; le commandant ayant
i Cette priere heretique si importante n'est indiquee que dans une note
des Notices et Extraiu, p. 463.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 36 7
vainement demand^ des renforts au nouveau gou-
vetfneur , la ville fut emportfe d'assaut , ainsi que le
chateau -fort de Kdhiriy£ (3 rebioul - akhir — 7 oc-
tobre ). Peu de temps apres , le Tehama fut adjoint
au gouvernement de Hasan , qui dut seul regir tout
l'Y£men, en attendant Tarriv^e des forces envoy£es
par le Sultan pour r6duire les rebelles k lobeissance.
Cest ainsi que cessa ce partage en deux gouverner
mens , op6r6 au detriment de la puissance ottomane,
sur la perfide proposition de Mahmoud-Pascha. La
chute d'Aaden ne tarda pas a suivre celle de Taaz.
D'un autre c6t£, Habb tomba au pouvoir d'Ali, apr£s
un stege de peu de dur^e. Fr&re de Moutahher, Ali
avait 6t6 d6sign£ par son pere pour lui succeder; mais
k la mort de Scherifeddin , il avait abjur6 la doctrine
des Seidiy^s, et avait r6signe la dignite d'imam en fa-
veur de son fr6re Moutahher. Un autre chef des Sei-
diy£s, Ali Ben Schoweyi, le m£me qui avait soumis
Taaz et Aaden, se rendit maitre de Mewsei; il mar-
cha ensuite sur Mokha , et de Ik sur Sebid , d'ou il
fut repouss£ par une sortie vigoureuse de la garnison.
Par suite de ces conqu&es, tout lYemen, a l'exception
de Sebid , se trouva sous la domination des Seidiy^s,
et l'imam Moutahher ne craignit plus de prendre le
titre de khalife. Ces envahissemens appelaient une re-
pression prompte et efficace. Mohammed-Sokolli, qui
avait saisi d une main puissante les rfines du gouver-
nement, mais qui desirait tenir eloign^s de la cour tous
ceux dont Tinfluence sur Tesprit du Sultan pouvait
nuire a la sienne, expedia a l'ancien grand -maitre de
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568 HISTOIKE
la cour de S£lim, Lala -Moustafa, Tordre de partir en
quality de serasker pour foire la conqu&e de YY&-
men. Du reste, celte mission ne fut pas confine sans
raison a Moustafa ' , car il avait k venger sur les Ara-
bes la mort de Mourad-Pascha, Tun de ses plus pro-
ches parens. Le Sultan nomma beglerbeg de l'Y&nen
Osman, fils d'Ouzdemir, et confera le gouvernement
d'Egypte a Sinan-Pascha, Albanais ignorant, egoiste
et ent£t£ a , ftere d'Ayas-Pascha, execute sous Soulei-
man pour avoir favoris£ la fuite du prince Bayezid ; a
dater de cette execution , Sinan &ait devenu l'ennemi
declare de Lala-Moustafa.
En donnant a Moustafa le commandement supe-
rieur de l'arm6e d'Arabie, Sokolli, au lieu de lui
adjbindre, comme on le faisait d ordinaire pour les
serasker s, quelques milliers de janissaires et trente ou
quarante tschaouschs, lui ordonna de ramasser en
Syrie tous les gens sans aveu pour les enrdler sow le
nom de janissaires 6gyptiens , et de choisir dix ou
douze de ses cavaliers feudataires (saims) pour les
convertiren tschaouschs. Les representations de Mous-
tafa sur un commandement en chef aussi contraire aux
usages rest£rent infructueuses. Une autre humiliation
rattendait au Caire : le gouverneur Sinan-Pascha lui
■ AU, qui a cette epoque etait secretaire de Moustafa, s'etend avec detail
sur les causes de sa nomination, ainsi que sur cclles qui firent echouer son
expedition.
» DjahUanoud we kitsch bir ferdd khoulouss ou mouhabciii yok birtemi-
moul-woudjoud Arnaoud. Le paoegyrisle de Sinan, Koutbeddin, ne signale
poiut les defauts de son caractere, que Ton trouve consignes dans la Bio-
graphic des Vizirs et dans tous les historieus ottomans.
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DE L'EMPIHE OTTOiMAN. 5G 9
temoigna tout son ressentiment, en luiassignant pour
logement une roaison particuli&re au lieu de le rece-
voir dans son palais. Dans un diwan solennel, qui
se tint an Caire, et auquel assisterent le serasker
Moustafa, le gouverneur d'JEgypte Sinan-Pascha , le
beglerbeg de FY&nen Osman Ouzdenjir-Pascha , le
moufti du Caire, le scheikh Mohammed -Efendi, le
defterdar Tschiwizad£ Mahmoud - Efendi , l'amifal
egyptien Kourd-Oghli Kizrbeg, et tous les autres*begs
et agas du pays, l'historien Ali donna lecture de tous
les fermans rendus par la Porte relativement k l'exp6-
dition d'Arabie. Douze de oes fermans avaient &6 ap~
portes par Moustafa* onze par Sinan-Pascha et sept
par Osman-Pascha. Ces difl&rens fermans, conformes
aux intentions de'ceux qui les avaient sollicit£s, pf£-
sentaient entre eux de telles contradictions , qu'il flit
impossible de s'entendre a cet egard. Dans Tun des
fermans du serasker, on remarquait ce passage : « Tu
dois pourvoir k tous les besoins de ]'arm£e, et ne te
rendre coupable d'aucun retard dans 1 Wcution des
ordres qui font &6 donnes, sous pr&exte de deman-
der avant d'agir des instructions h la Sublime-Porte. »
Mais on lisait aussi dans un ferman du gouverneur
d^gypte : « Tu feras en sorte de fournir en quan-
tity suffisante les choses n^cessaires au serasker, en
evitant toutefois d'^puiser le pays. »' Ces deux fer-
mans recelaient implicitement des contradictions, qui
determinant des dissentimens entre le serasker ef le
gouverneur : ainsi le premier demanda quatre mille
soldats , et le second lui en fournit a peine quatre
T. V!. 24
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5 7 ? H1STOIRE
cents. Les amis de Moustafa, son reis-efendi Der-
wisch Tschelebi , traducteur du Mesnewi, son kiaya
Mouferrih Moustafabeg, les begs £gyptiens Moustafa
et Mohammed, le mouteferrika Adjem-Molla, qui
remplissait aupres de lui les fonctions d'intendant
(nouzl - 6mini ) , et le sandjakbeg d'Yenischehr Beg-
lizade Mohammed , ne cesserent de lui representer,
k J' occasion de ces d£m6tes, qu il ne parviendrait sous
aucun rapport a r£ussir dans son expedition , sll tie
commengait d'abord par joindre k sa dignite de se-
rasker celle de gouverneur d'Egypte. Ce fut en effet
dans ce sens que Lala-Moustafa ecrivit a la Porte;
mais, de son c6t6, Sinan-Pascha manda au Sultan qu'il
avait pourvu aux besoins de Tarm6e, et que le serasker
ne retardait sa campagne.que sous de futiles pretextes
et dans la seule vue de cumuler le gouvernement
m£me de TEgypte avec ses fonctions de serasker. II
avanga entre autres calomnies que Moustafa nour-
rissait le projet de (aire proclamer sultan d'Egypte le
fils qu'il avait eu dune parente du sultan Ghawri, et
que lui Sinan avait failli perdre la vie dans un festin
ou le serasker lui avait fait servir une coupe de sorbet
empoisonn£. Le grancj-vizir mit a profit ces perfides
insinuations pour perdre le serasker 1 : sur son or-
dre, le tschaousch-baschi, suivi de sept tschaouschs et
connu sous le nom de Bourounsiz (sans nez), vint au
Caire porter a Lala-Moustafa sa destitution , et Tin-
jonctioji de partir pour Constantinople, afin d'y ren-
dre compte de sa conduite ; en m£me temps, Sinan-
Pascha fut ibvesti du commandement en chef de Far-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 5?i
m& contre 1' Yemen. Dans le cas oii les insinuations
de Lala-Moustafa auraient emp£che Osman-Ouzdemir
de se rendre k son poste, le tschaousch-baschi &tait
charge de faire decapiter ce dernier,; et de fairepen-
dre en outre les begs mamlouks Moustafa et Moham-
med. Moustafa se pr£para a son depart; mais, pre-
voyant le sort qui Tattendait k Constantinople , il ecri-
vit auparavant au Sultan une lettre pleine d'humilite.
dans laquelle il lui rendait un compte exact de ce qui
s^tait passe , et prouvait victorieusement son inno-
cence [xx]. Cependant les deux begs mamlouks fu-
rentpendus; Adjem-Molla, dont l'ex£cution n'avait
pas &6 ordonn^e au tschaousch , fut soumis a tnille
tortures, et se -9it plusieurs fois conduit sur le lieu du
supplice. Ouzdemir-Pascha &ait parti pour TY&nen
sept jours avant l'arriv^e du tscBaousch-baschi; ainsr
peu s'en fallut que ce futur grand-vizir, conqufrant
de l'Y&nen- et des pays du Caucase, ne p&it par le
glaive du bourreau. •
Avant l'arrivie de Sinan-Pascha en Arabie, Os-
man-Pascha avait ouvert la campagne par la prise de
Taaz , Tune des places les plus importantes des con-
tr^es montagneuses de I'Y&nen, et aujourd'hui la ca-
pitate de Timam de ce pays. Bitie par TEyoubide
Teftekin, Taaz devait surtout sa prosp6rit£ aux princes
de la dynastie Beni-Resoul ; parmi eux, Omar Ben
Manssour y avait fonde deux academies, Melek-
Moudjahid et Melek-Efdhal , les deux academies de
Moudjahidiyi et Efdhaliyi. Les nombreuses richesses
de Taaz, consistant surtout en marchandises de llnde
*4*
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572 HISTOIRE
et de l'Europe, furent abandonn&s k la rapacity de
Tarmfe ottomane. La citadelle de la ville de Kahiriy^
r&istait encore, lorsque Yarriy&e de Sinan vint ram-
mer le courage des ass&geans. II avait quitlele Caire le
5 Janvier 1569 (17 redjeb976>, ets'&ait rendu it Taaz
par Yenbou, la Mecque et Djazan. Son arm£e cbassa
les troupes des Seidiyds du mont Alaghbar, et peu de
temps aprta Kahiriy6 capitula et rentra sous la domi-
nation ottomane. D& lorn, Sinan songea £ la oonqu&e
d'Aaden et de Sanaa. II avait d£j& envoy4 conire la
premiere de ces villes la flotte de la Mer«Rouge, com-
mandta par Mohammed Kourdoghli ; alms il fit mar-
ched contre elle une division de son arm^e sous les
ordres du beg Mimayi, c61ebre pour avoir chanfaS
cette campagne en vers turcs ! . Avant d'etitreprendre
le si£ge de Sanaa , Sinan convoqua un oonseH de tous
les chefs de farmta, auquel il fit £gafemdnt inviler
par deux tschaottechs le beglerbeg Osman Ouzderair.
Dans la crainte d'un'e trahison de la part du seraker,
Osman augmenta ses forces d'tin grand nombre d'Ara-
bes et de transfuges du camp du vizir, qui vinrent
de tous c6t& se rallier sous ses drapeaux. Sinan, qui
se trouvait muni de pleins pouvoirs et de fermans en
bbnc-seing , destitua le beglerbeg et donna sa place au
Russe Hasan-Pascha ; mais ce dernier, s'&ani rendu
odieux par ses exactions , il ne Jui laissa que le titre
• « Ali, f. 35o, nomine les trois antetir* qui out celebre cette campagne; ce
furent Roumouzi , Mimayi et Schehabi : leurs ouvrages portent le titre de
Foutouhati Yemen , e'est-a-dire la ConquSte de VY&nen. Un quatrieme ou-
vrage du meme titre se trotive a la Bibliotheque I. R. de Vienne, n° 479*
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DE L'EMPIRE OTTOMA1N. 3^d
de la dignity et ltd en retira tous les pouvbirs [xxi].
Dans la vue de se soustraire aux poursuites dirigees
contreliB par Sinan, Ostnan-Pascha se hasarda k tra-#
verser seul les montagnes jusqu'ii la Mecque , afin
d obtenir l'appui des soheijkhs arabes, toujours floHant
irrdsotas entre les deux chefs rivaux ; il leur 6crivit
qu'il avait && mandd k la Porte comme parliculier,
et non pas en quality de beglerbeg. Cest ainsi qu'il
parvint a echapper k la hache du bourreau tt aux
laaoesdes Arabes, et qu'il arrrva sans accident k Con-
stantinople, on le grand-vizir, pr6venu par les lettres
de Ski an, travaillait, tnais en vain, asa ruine, comrae
il avait travailte nagbtoe a celle de Lala-Moustafa; ce
dernier avait k la v&4t6 &6 arr&e k son arrivfe dans
la capitale; mais S&im, qui ne devait le trine qu'a ses
intrigues, s'&ait empresse de le faire 61argir. Sokolli
fit jouer tous les ressorte de l'ihtrigue, afin de perdre
le fils d'Ouzdemir [xxn]. Sous pr&exte que sa pre-
sence pourrait porter quelque atteinte k la tranquillity
de la ville, il lui enjoigftit de sti loger sous, de$ tentes
en dehors des portes de Constantinople. Risign6 k
tout supporter pour obtenir justice, Osman fit dresser
ses tentes devant la porte d'Andrinople, au milieu des
pluies et des neiges d'un hiver rigoureux, et malgre
les ravages de la peste qui s&vit sur les siens et Ten-
toura de leurs toinbeaux* JjorsqueS&rai* k son retour
d'Andrirfople dans la capitale , passa prte des tentes
d'Osfcnan sans faire d'observation ni proferer une pa*
role, Lala-Mou&tafa qui venait de rentrer en faveur ,
croyant cette occasion favorable pour obtenir la gr&ce
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5 7 4 HISTOIRE
de son ami, lui dit : « Votre Majest6 ne daigtiera-t-elle
pas demander k son esclave, qui est celui qui de-
meure sous ces terites? — En effet, repondit le Sultan,
en jetant un regard de ce cdt£, qui done demeure Ik?
— G'est, repliqua Moustafa , votre esclave Osman-
Pascha, fils d'Ouzdemir, qui sous le rtgne de feu
le Sultan Souleiman agrandit l'empire de deux pro-
vinces, l'Y&nen et la Nubie. Aprfes avoir march6
dans FYemen sur les traces de son pere , Osman se
voit ici priv6 de tout emploi et expose aux pluies et
aux neiges de cette saison rigoureuse. » Des le jour
suivant, un khatti-sch£rif investit Osman du gouver-
nement de Bassra. Sokolli ayant fait quelques objec-
tions a cette nomination , le Sultan lui dit dun ton
menagant : « Garde-toi de le destituer. » N6anmoins
Sokolli sut £luder cet ordre, et au lieu du gouverne-
ment de Bassra, il conftra a Osman celui d'Ahsa au
nord-est de r Arabic qui forme aujourd'hui le siege
des Wehhabites.
Apr£s le depart d'Osman-Pascha, Sinah avait eta-
bli son camp dans le voisinage de Taaz a Alkaida.
U y regut Fheureuse nouvelle de la prise d'Aaden
par le commandant de-la flotte, Khaireddin-Kourd
(29 silkide 976 — 15 mai 1569). 11 nomma sandjak
de cette ville son neveu Housein , et se porta incon-
tinent sur Sanaa. Trois routes conduisaient de Taaz
k Sanaa : la premiere par les montagnes de Nakil-al-
ahmar, la seconde par la valine de Sahban , la troi-
si&ne par Meisem; celle-ci qui &ait la plus longue,
mais la plus sAre et la moins difficile, fat celle que prit
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 5;5
Sinan. II campa v chemin faisant, entre Djobla et Ta-
ker, s'empara de cette derni£re ville, et chassa avec
le secours d'un £mir <Jes Ismailis , qui ltd &ait d£-
voue , les Seidiyes de leurs positions sur le mont Hou-
taisch. Puis il soumit Ab, situ6 au pied de la monta- «
gne de Boudan. Pour stimuler Tardeur de ses soldats,
il distribua aux uns des recompenses et accorda aux
autres une augmentation de solde. Voulant assurer
sa retraite et ne laisser sur ses derrteres aucun en-
nemi, il envoya un d&achement pour faire le si6ge du
chateau de Habb , pr&s de la place de Dhamar, la-
quelle s'etait empress£e de faire -sa soumission. Dha-
mar, entour^e de murs et de beaux jar dins, a donne
le jour a un grand nombre de savans ; les Seidiyes y
ont une acad&nie, qui est fr£quent£e par cinq cents
eleves et forme la principale p£pini£re de leurs savans.
Apr&s avoir traverse le defile de Dhiraaol-kelb (pau-
vre comme un chien), l'arm£e arriva a Sanaa, capitale
de l'Y&nen, situ£e sur une petite rivtere qui descend
vers Dhamar (11 safer 977 — 26 juillet 1569). Le
climat de Sanaa est le plus salubre de toute l'Arabie ;
l'atmosph6re en est si pure. et si depourvue d'humi-
dit6, que la \iande peut s'y garder huit jours sans
subir d alteration ; aussi les malades affluent-ils de
tous c6t£s dans cette ville, pour retablir leur sante, et
envoie-t-on dans ses prairies les chevaui et les cha-
meaux dont les forces sont epuisees. Les maladies y
sont aussi rares que les insectes; il n'y pleut que dans
les mois dq juillet. d'aoAt et de septembre, et jamais
avant le coucher du soleil; un jour pluvieux, pendant
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5 : G H1ST0IRE
• lequel leg affaires sentient interrompues, y serait con-
sid£re comme un ph&iom&ie. Le jubeb est le plus re-
nomm6 des fruits qui croissent sur le sol fertile de
Sanaa, et 9 parmi ses produits industries, les plus c£-
•tebres sont des turbans, des tissus rayes dune brillante
couleur, le maroquin et la peau de qhagrin l . On y voit
les ruines du palais de Ghomdan, aussi renomm£ dans
rtristoire arabe que ceux de S&fir et de Khawrnak ;
les quatre facades de ce palais &aient peintes d'une
couleur difl£rente, Tune rouge, l'autre blanche, la
troisi£me jaune et la quatrteme yerte; au centre s'£-
levait un koeschk d'une hauteur de sept Stages; la
plate-forme offrait une terrasse, d'oft la vue s'&en-
dait a trois milles de distance. Le khalife Osman d6-
truisit ce palais, nonobstant une pft>ph&ie qui pr£-
disait une mort viol en te au. destructeur; et, en effet,
Osman succomba sous le poignard dun assassin. A
c6t£ des belles ruines du palais de Ghomdan, on ad-
mirait encore k Sanaa l'6g}ise chr£tienne fondle par
le roi d'Ethiopie Abraha; ce temple avait 4t£ dot6
d'immenses richesses en or et en argent, et destine k
d&ouraer les pterins de- la Mecque pour les attirer
a Sanaa. Apr£s Tentr^e de Sinan dans cette vtlle, Me-
mibeg s'empara du ch&teau-fort de Khaoulan, appar-
tenant£ Kaftan a , Tun des plus puissans chefs de Far-
mee de Moutahher. Ce chateau fut ras6, amsi que la
» Djihannuma> p. 486. Les deux mots hires sakhlian et sigkri ant passe
dans les tongues europeennes : safian (maroqnin) et chagrin.
* Katran Pech , d'ou 1c mot italien Cu Irani e et le mot francos Goudion.
Ali>f. 35a.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 3 7 ^
ville de Schibam, situ£e a quelque distance du fort
le plus important de FY&nen, celin de Kewkeban
(4 refiionl-ewwel —17 aotit 1569); dont le stege fut
aussitdt commence. Le beglerbeg Hasan -Pascha et
Mahmoud- Pascha, conjointement avec Fetnir Abdoul-
lah-Alhamadani, re^urent ordre de se porter sur les
derrteres de ce fort, tandis que Sinan-P&scha Fatta-
querah de front avec le gros de Farm^e. Renferm^s
dans la ville voisine de Seli, Moutahher et ses deux
fils Alhadi et Loutfalah firent contre le carrip des
Ottomans de fr£quentes sorties, dans Tune desquelles
Alhadi fut tu£. •
Le si^e de Kewkeban ne fut pousse avec vigueur
que lorsque Hasan et Abdoullah Alhamadani eurent
r^dtiit plusieurs chateaux des montagnes , et que Sinan
se fut empar6 , apr&s en avoir d'abord &6 rep6usse ,
du fort de Beftoul-Iz (maison de lTionneur). Le vizir
confia les operations du si^ge an beglerbeg , et lui*
envoya , de son camp , de la grosse artiflerie. Kew-
kebaa &ant Mti sur des rochers tr&s-escarp£&, ce
ne fut qu f k force de bras et au moyen de machines
qu'on parvint h mettre les canons en batterie. Les
fosses profondset mar£cagetnt du ch&teau comtfm-
niquaient avec Fintdrieur par un chemin souterrain ,
au moyen duquel les assi£g6s enlevaient les pierres et
les mat^riaux dont Fennerai cherchait h les cqmbler.
Le commandant du fort, Mohammed, fils de Scftems-
eddin, pr£voyant qu'il ne pourrait r&sister long-
temps, quoique resolu a se defendre jusqu'k la der-
hi&re extr£mit£ t renvoya aux Turcs sept begs* qw'il
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3 7 8 HISTOIRE
retenait en captivity '. De son c6t£ , Moutahher fit
allumer des feux sur la montagne en signe de vie-
toire ; ce stratag£me lui r£ussit ; il attira les> Arabes
dans son camp, en les invitant a venir partager le bu-
tin qu'iLpr&endait avoir fait sur l'ennemi. ITr&init
ainsi mille cavaliers et huit mille fantassins, avecles-
quels il attaqaa les* troupes du vizir, a peine fortes de
douze mille hommes; mais tpute l'imp&uosit£ des
Arabes ne put ebranler les phalanges ottomanes ; Mou-
tahher -flit battu et force de chercher son salut dans
la fuite. Cet echec ne le d£couragea pas , et, pour se
faire de nouveaux partisans, il eut recours k d'autres
ruses : il fit semer adroitement parmi les Arabes le
bruit dune apparition du Proph&e, et profita d'une
Eclipse de lune pour la presenter comme une marque
de la protection que le ciel accordait k sa cause. Seid
Nassir, Tun des plus fideles partisans de Moutahher,
l'avait abandonn£ ; mais Katran, surnomm6 Almedj-
ndun (le farieux), et Ali Ben Tahir, soulev£rent tout
le pays en sa faveur, et intercept&rent presque entte-
rement les communications entre Sanaa et Tarm&
Ottomans. Sanaa tomba au pouvoir des Arabes par la
trahison du beg turc Mimai (26 ramazan 977 — A mars
1570), et le corps que Sinan avait laiss6 k Habb
pour en faire le stege fut surpris et battu. Ces succ&s
et ces attaques, sur tant de points diflferens, rendirent
n£c6steire un envoi de troupes fraiches pour appuyer
» Ali, f. 354, les oomme i« scheikh Alibeg, *<> le frere de Nesimi
Tschaoosch, 3° Kizilbasch Mohammedbeg, 4° Mohammedbeg, Tancien deP-
lerdar de rY&nen, 5° Hasanbeg, 6° Karagoez, 7* Kaikbeg.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 3 7 q
les Ottomans. Karagoez, Perwiz et le sonbaschi Ah-
medbeg, regurent ordre de chasser les Seidiy6s du
mont Soumar. Abdi , sandjakbeg de .Dhamar , et le
gouverneur de Rodaa les expuls6rent d'Y&im , en
sorte qu'ils ne conserv&rent que le district de Boudan
et le chateau-fort de Habb [xxiil]. Cependant les ope-
rations du si£ge de Kewkeban marchaient avec beau-
coup de lenteur et de difficulte. Un pont, muni d'une
balustrade en fer, qu on aVait fait venir de Sanaa pour
' le jeter sur le fosse et ouvrir ainsi aux assi£geans Fac-
ets du chateau, se rompit par son propre poids. D'iin
autre cdte, les rochers qui le d£fendaient firent£chouer
toutes tentatives de mines. On eleva line tfite de pont
pour prot£ger les travailleurs occup£s k construire
un nouveau pont. Mais lorsque celui-ci fut acheye
et que le fort fut ainsi sur le point d'&re emporte
d'assaut, les deux partis se trouv&rent las d'un stege
qui durait depuis neuf mois ,' et Mohammed , fils de
Schemseddin , accueillit avec empressement les pro-
positions de paix qui lui furent faites par l'imam , le
juge et Djemaleddin , secretaire intime du vizir. Des
Stages furent livres de part et d'autre en garantie de la
capitulation, d'apres laquelle Mohammed devait ton-
server le sandjak de -Kewkeban, avec un traitement
de six cent mille aspres (12 silhidje 977 — .18 mai
1 570). La chute de Kewkeban forga aussi Moutahher.
a conclure la paix aux conditions suivantes : les deux
droits r£galiens de l'lslamisme furent cotfferes au
Sultan dans tout l'Y&nen; la Porte rentra dans les
possessions qui lui avaient appartenuanterieurement,
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58o HISTOIRE
et Moutahher s'engagea k ne fournir aucun seoours
aux rebelles de Habb.
Sur ces entrefaiteg, le nouveau beglerbeg de lift-
men, Behfam-Pascha, frfere de Ridhwart et fils de
Kara-Schahin, ftait arri^S k Sebid. II s'&ait rendu de
cette ville, par Taaz, k Albeda, ef sous les murs de
Habb, dont la prise lui fat facility par l'explosiori
done poudri&re et I'empoisonnement d'AK, frfere de
Moutahher. La conqu&e de I'Y&nen se trouva com-
pl&4a. par la soumission de cette place , et par celle
de plusieurs autres chateaux qui farent r6duits par
Behram , pendant son gouvernement de sept ans
ctynt^ par le poete Nihali en rimes turques. Apr6s
avoir donni des instructions sur l'administraUon du
pays a Behram-Pascha, Sinan s'embarqua k Mokha le
printemps suivant (4 schewal 978 — 1 er mars 1571),
prit terre k Djidda, et se rendit en p£]erinage k la Mec-
que. Le sch^rif envoya k sa rencontre l'itispecteur du
sanctuaire et le chef des oul&nas , pour le compli-
menter et led servir de guides. Les principalis, begs de
la suite de Sinan &aaent Moustafa, fils d'Ayas-Pascha,
son neveu Ibrahimbeg, Emir Hamad, le scheikh arabe
Beni-Khaibar, le scheikh de Djizl, Solak Ahmedbeg,
Alibeg et quelques autres. Sinan-Pascha Xut convte k
de magnifiques festms ; il donna audience aux seids
dans Tacademie de Melek Eschref Kaitbai, et regut la
visite du sch&tf Ebou N&ni. Puis il inspecta les tra-
vaux de ta source d' Arafat, et visita, sur la montagne
de Thor (Taurn) , la grotte a Tentr^e de laquelle les
pigeons avaient etabli leurs nids, et les araign£es ourdi
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 38i
leurs toHes, pour d£rober le Proph&te aux poursuites
de ses pers&mteurs. II passa un mois entier k visiter
leg toipbepux et les lieux v£n£r6jB des Musul roans, en
attendant leg jour? specialement eonsacres aux p#e-
linages, qui tombent dans la derni&re lune de 1'annle,
appelee pour cette raison la lune dupdermage.
Lorsque les trois caravanes de p&erins, celle$ de
Syrie, d'Egypte et de l'Y&nen, sefurent r£unies,sous
la conduite de leurs 6mirs, Sinan alia le hukieme jour
k Mina pour y passer la nuit, confSprm&nent aiix pre-
ceptes de llslamisme; le jour suivant, il se tendit
k yjted k la mosqu£e d' Abraham, sur le mont Arafat;
ou il assista k la pri£re en 1'honneur du Sultan des sul-
tans, du dominatcur de deux mers et de deux con-
tinens , du serviteur des deux villes saintes de l'lsla-
misme, la Mecque et M£dine, le sultan S&imkhan ,
fils du sultan Souleimankhan [xxiv]. Les croyans pas-
sirent la nuit k MouzdelifS, et le lendemain ils con-
tinuerent leur p£lerinage jusqu'b Mina et la Mecque.
Ils firent sept fois le trajet entre Safa et Merw6;
chaque pelerin jeta sept pierres contre Djemrei Akba,
le Satan, le maudit, Tin&me,. le pers&uteur, et fif sejrt
fois le tour de la maison sainte en pr£sentant ses of-
frandes, ainsi que cela se pratiquait dfyk au temps
d'Abraham. Apr&s le coucher du soleil , chacun langa
de nouveau trois fois sept pierres k Satan. Le len-
demain, ces trois dernferes c£r&nonies se renouvele-
rent. Pour immortaliser dans la ville sainte le souve-
nir de son s£jour, Sinan y fit Clever une fontaine, et
institua trente lecteurs du Koran; chacun de ceux-ci
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382 HISTQIRE DE I/EMPIRE OTTOMAN.
devait reciter journellement la trenti&ne partie du
Hvre sacr6 f qui de cette fa$on devait 6tre lu en- entier
tous les jours. Mais il trouva un moyen plus efffcace
de perp&uer son nom; a l'occasion de ce pelerinage,
il d&ermina par sa munificence Mohammed Ben Mo-
hammed de la Mecque k £crire l'histoire de sa oam-
pagne en Arabie; il prit soin lui-m&ne de lui en com-
muoiquer les faits, et lui en indiqua une autre source
dans Touvrage du poete Roumouzi , qui a chante la
conqb&te de l'Y&nen. C'est k cet encouragement, que
Sinan doit les settles louanges que Jes historiens otto-
mans lui aient accord£es , et<jue la literature e&tjre-
devable de Fomyage historique x qui offre le plus de
details sur la campagne de l'Y&nen, et qui a &6 notre
guide principal dans ce recit.
i El-berkol yemani Ji fethil-vsmani (la Foudre de 1' Yemen sur les po's,~
sessions oltomanes).
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LIVRE XXXVI.
Rupture de la paix avec Venbe. — Guerre de Chypre. — Siege et cou-
qu&e de Famagosta. — Bragadino est ecorche vif. — Evenemens mi-
litaires en Dalmatic — Bataille de Lepanto. — Conclusion de la paix
avec Venise. — Conquete de Tunis.*— Expedition contre IVan de
Moldavie. — Renouvellement de la paix avec l'Autriche. — Renegats.
— Mort de Selim. — Monumens et caractere de son regne*.
La conquete de TArabie, dont tes armes ottomanes
avaient triomphe pour la seconde fois, permit de s'oc-
cuper de l'exp&lition de Chypre, Fqp des projets que
S£lim nourrissait avec predilection depuis l^poque
ou il n'&ait "encore que prince her^ditaire, et qui
se r£alisa enfin dans la cinquteme annee de son r£gne.
Le principal auteur de cette entreprise f ut un juif , qui
eut, sous le r&gne de Selipi II, -plus de pouyoir et din-
fluence que plusieurs vizirs, et qu^ par le r61e impor-
tant qu'il joua, m&ite plus qu'eux d'etre connu de
nous. Joseph Nassy, ne en Portugal ou il pbrtait le
nom de Don Miguez, et Fun de ces juifs appel£s Mo-
ranas, auxquels la force avait impose une conversion
apparente au christianisme , s'&ait rendu avec son
fr6re a Constantinople a l'£poque ou Souleiman r6-
gnait encore. La, son amour pour une juive aussi
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384 HISTOIKE
riche que belle le fit bientdt rentrer dans la foi de ses
p£res, et par la suite il sut par ses presens en perles
et en pierreries, par ses pr6ts d'argent, et surtout
par ses vids erquis , se rendre si agr&ble k S61im,
alors gouverneur de Kutahia, qu'il devint un de ses
plus intimes favoris. Cette faveur singultere ddnna
m&n^ naissance au bruit pop ul aire, que S&im. n'6tait
pas le fits de Souleiman, mais celui d'une juive, in-
troduit furtivement dans le barem dans son bas dge.
D& cette epoque, Joseph Nassy ne cessa, en flattant
les penchans du prince et en lui prodiguant les du-
cats de Venise et le vjn de Chypre, de lui repr&enter
combien il lui serait facile de se procurer en abon-
danee cet or et cette pr£cieuse liqueur par la conqu&e
de 1'fle qui produisait 1'un et 1 autre. Dans Ventrat-
nement d'une copieuse libation de vin de Chypre ,
Selim embrassa ayec effusion son favori, qui avait
echang£ son nom de Miguez contre celui de Joseph
Nassy depuis son retour h la foi juiye, et lui dit : « En
verite, si mes d£sirs s'accomplisseift, tu deviendras
roi de Chypre. » Cette promesse donn£e au sein de,
Tivresse remplit le juif d'esperances si ambitieuses,
qu'il fit suspendre dans sa maigon les armes de Chy-
pre, avec cette inscription: Joseph, roi de Chypre [i].»
Les honneurs et les fiefs qu'il regut de la liberality de
Selim, lors de l'av£nement de ce prince au trdne, le
confirm&rent encore dans cette fcsperance. En effet,
Miguez etant venu se jeter aux genoux du Sultan, lors
de son retour de Belgrade, celui-ci le releya et Tern-
brassa en lui donnant le titre de due de Naxos et des
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 585
douze principals Cyclades. Sur ses immenses posses-
sions, Joseph Nassy ne fut tenu de verser dans le tr6-
sor qu'une somme de quatorze mille ducats, et il n'eut
a payer que deux mille ducats sur la dime des vins qui
seule lui rapportait quinze mille couronnes. En vain,
le deftcrdar ne cessait-il d'adresser a Selim des re-
presentations sur des faveurs aussi excessives ; celui-ci
lui imposait silence, en lui disant qu'il ne faisait que
se conformer aux demises volontes de son p6re. Le
due de Naxos d'alors fut appel£ a Constantinople et
d£pos£ de sa dignity '; e'est ainsi que s'&eignit la su-
pr&natie des Venitiens dans l'Archipel , en faveur
d'un juif, 61eve au rang de due de Naxos, de Paros,
d'Andros et des autres Cyclades. D£s la premiere
ann£e du r£gne de Selim , l'ambassadeur v£nitien
commenga a conceyoir de justes craintes sur les pro-
jets du Sultan contre Tile de Chypre [11]. A la v£rit6
ces projets &aient combattus par le grand- vizir , et
le Sultan comprenait qu'il ne pouvait 6tre question
d'une guerre avec Venise, avant que la paix avec Tem-
pereur etit &6 conclue, et que la r&volte en Arabie
etit &e comprim^e. Mais k peine la tranquillity fut-
elle retablie en Hongrie et dans l'Y&nen, que Don
Joseph excita de nouveau les passions de S&im et fit
jouer tous les ressorts de Tintrigue, pour se mettre
en possession du royaume qui lui avait &6 promis.
i « 11 povero duca di Naxos arrivato a Costantinopoli (nov. i566) per
» dir le sue ragioni contra quel Ebreo Giovanni Miches, quondam Giuseppe
» Nassy, per esser stato datoli solemnamente Naxos et Andros. » Rapport
de l'ambassadeur venitien, dans les Archives de la maison I. R. d'Autricue.
t. vi. a5
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386 HISTOIRE
L'incendie de 1'arsenal de Venise , aUum£ probable-
ment par leg 4missaires de Nassy, Vint alors jeter
autant de decouragement dans la republique, que
d'ardcur dang le parti qui a Constantinople d&irait
la guerre avec cette puissance. Au milieu de la nuit
du 13 septembre 1569, une explosion £pouvantable
ge fit entendre k Venise. Dans les premiers momens
de d&ordre , les nobles couraient aux armes , et la
population ^perdue errait ya et \h, lorsque la lueur
d'un incendie vint reveler la cause et l'&endue du
d^sastre. L'arsenal &ait en feu , et un magasin de
poudre avait saut& A Constantinople, les partisans
de la guerre avaient a leur t&e, outre Jean Miguez,
leg deux vizirs Pial6, Fancier* kapitan-pascha et Fan-
cien pr£cepteur de Selim , Lala-Moustafa , qui tous
brtilaient de regagner par de nouveaux exploits sur
terre et sur mer la faveur que des revers anterieurs
leur avaient fait perdre '. Le grand-vizir, ennemi jur6
de Nassy ', penchait vers la paix, mais il perdit le
i Uistoire de I'Jrchipel, p. 3o3. « J. Michel chrktianus allicitus he-
» braico virgiuis conjugio, olira Josephus de Nassis, gulosus, apud Selimum
» dum adbuc Magnesias ageret gratus, dux Nassise creatus. » Rapport d' Al-
bert de Wyss date* de l'annce 1567, dans les Archives de la raaison I. R.
d'Autriche. Dans ce passage, le nom anterieur du juif paratt avoir e^e con-
fondu avec son nom ulterieur ; car, dans une leKre qu'il adressa an doge de
Venise au sujet d'une demande ( dans les Scriuure turchesche des actes ve-
nitiens, deposes dails les Archives de la maison I. R. d'Autriche) , il s'inti-
tule YousoufNasi, et c'est encore ainsi que le nomme le rabbin Almosnino :
« Don Jose Nassi, Judio de nation, gentil-bombre de sn casa (que Ilaman
» Mutfarraca) , p. 77. » Voyex aussi le Tagehueh de Gerlach, p. 426.
* « Der hat zwar den Mehmet Bassa (Mohammed Sokolli) zum aergsten
» Feind, ist aber bey dem Kaiser in desto grcesserea Gnaden, also er auch
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DE L'EMPIIIE OTTOMAN. 38 7
plus ferme appui de son opinion par la defection du
moufti Ebousououd; celui-ci repr6senta au Sultan
que, suivant Vesprit de llslamisme, les sommes n6-
cessaires pour la construction de la mosqu^e qu'on
&evait alors k Andrinople , devaient 6tre pr£ley£es
Bur les infid&les et non sur les Musulmans. En m&ne
temps il rendit un fetwa, dont la teneur rappelait les
doctrines emises par le l£gat du pape Cesarini, lors-
qu'k Fepoque de la bataille de Warna il justifia la
rupture de la paix avec la Porte, en pr&endant qu*on
n'etait nullement K4 par la foi jur£e aux infid&les.
C'est ainsi que le moufti foulait aux pieds les pre-
miers principes du droit des gens, et erigeait en oeu-
vre pieuse et m6ritoire toute violation des traites qui
amenait une conqu£te. Comme ce memorable docu-
ment du droit de paix et de guerre chez les Turcs
porte le sceau d'une insigne perfidie, et que les his-
foriens ottomans ne craignent point de Fins6rer dans
leurs annales , nous croyons deyoir le citer ici dans
toute son Vendue.
« Question. — Lorsque , dans un pays autrefois
compris dans le territoire de llslamisme et qui en a &6
distrait par la force, les infid£les changent les mos-
qu£es en £glises, oppriment les croyans et remplisserit
le monde d'infamie, si le prince musulman, pouss6
pat un z&le pur et ardent pour la vraie foi , veut
arracher ce pays aux infideles , afin de le reunir de
nouveau au territoire de llslamisme, quoiquil existe
» nichts esse, als wass dieser Jud surkhtet oder ihm sehickt. » Journal de
Gerlacb, p. 5$.
*5*
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389 HISTOI11E
avec les autres Etats infiddles des trait& de paix, qui
comprennent ce pays, la loi pr£sente-t-el!e dans ce
cas quelque obstacle k la rupture de la paix? » Re-
ponse. « On ne peut supposer aucun obstacle dans la
loi. Le prince de l'lslamisme ne peut llgitimement
conclure la paix avec les infideles; que lorsqu'il en
resulte avantage et profit pour la g£n£ralit6 des Mu-
sulmans ; si ce but nest pas atteint, la paix ne sau-
rait 6tre sanctionnee par la loi. II devient m£me n^ces-
saire de la rompre en temps utile, lorsque cette me-
sure peut amener quelque avantage durable, ou seu-
lement passager. Le Proph&e (que le salut de Dieu
soit sur lui ! ) avait signe , dans la sixi&ne annee de
1'h^gire , un trait6 de paix avec les infid£les , traits
qui devait durer jusqu'k la dixi&me ann£e , et dont
le texte avait ete 6crit par AU (que sa face soit k
jamais resplendissante!) II jugea cependant utile de
rompre cette paix des la septifeme annee de l'hegire,
pour attaquer les infid&es et conqu^rir la Mecque.
Votre Majesty, khalife de Dieu sur la terre, a toujours
daigne, dans sa sublime volont6 imperiale, imiter la
noble sunna (actions) du Proph&te. — Ecrit par le pau-
vre Ebousououd. » En vertu de ce fetwa , le pretendu
droit de Selim a la possession de Chypre avait pour
fondement Tancienne suprematie exerc^e sur cette ile
par les Arabes sous le regne d'Omar, et aprfes eux
par les sultans d'J^gypte. De plus, les revenus de File
ayant &6 autrefois affects par les sultans egyptiens
h l'entretien de la Mecque et de M£dine, on consid£-
rait comme un devoir de religion de faire rentrer les
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 38g
deux villes saintes dans la jouissance de leurs anciens
revenus. S61im envoya d'abord k Venise l'interpr&e
Mahmoud 1 pour adresser des plaintes au doge, et
ensuite le tschaousch Koubad pour r&lamer la ces-
sion de Chypre, comme le prix de la continuation de
la paix. La lettre du Sultan, presentee au doge en
plein college, par le tschaousch Koubad , commengait
par Enumeration des griefs de la Porte contre la re-
publique, Ces griefs se rapportaient k la violation des
fronti&res du c6t£ de la Dalmatie, au supplice de quel-
ques corsaires musulmans, et surtout h l'asile donn6
dans Tile de Chypre aux pirates qui infestaient la mer
de Syrie, et qui troublaient les sujets de Sa Hau-
tesse dans leur commerce et les pterins de la Mecque
dans leurs voyages. Le Sultan disait , • en terminant,
que son honneur &ait int£ress£ a ne pas souffrir plus
long-temps un tel &at de choses, et que, si la repu-
blique voulait conserves son ami tie, elle devait faire
disparattre toutes ces causes de discorde \ Une alter-
native aussi imp£rieusement posee ne permettait pas
de deliberation au s£nat; sa reponse fut negative. Le
peuple montrait une telle exasperation, qu'on fut
oblig^ de faire sortir le tschaousch du palais par une
porte de derrtere, pour ne pas exposer sa vie. Le
■ « Mahumet secundus interpres Veneliis abseus. - Rapport de Rym, dam
les Archives de la maison I. R. d'Autriche.
a Foglietla, Paruta, p. 38 a 4», Sagredo, Caraniolo, sont tous d'accord et
dans la verite. Graliani est eu contradiction avec eux et dans Femur,
lorsque, p. 68, il pretend que le drogman de la Porte, Ibrahim Strozzeni,
▼int alors pour la seconde fois a Venise.
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3go HISTOIRE
grand-vizir essaya encore une ibis de conjurer Forage
qui menagait la r£publique, et de donner une autre
destination aux armemens qui se poursuivaient avec
la plus grande activite. II appuya de tout son pouvoir
l'ambassade des Maures expulses d'Espagne, qui ve-
nait implorer le secours de la Porte. Mais toutes ses
instances furent vaines *. La passion de Selim pour leg
ducats de Venise et le vin de Chypre l'emporta sur
la religion qui faisait un devoir de secourir des mu-
sulmans, et l'expedition fut definitivement r^solue.
Lile de Kypros, qui doit oe nom k une flan*, a la
fille de Kyruras, ou h la deesse de r amour, Cypris,
est ausai designee sous les noms de ses villes celebres,
Amathusia, Paphia et Sakunima. On l'appelak en-
core Kriptas, Qphiusa, Kerastia et Sphekia. C'est
dans cette ile que la fable place l'origine des cen-
taures a . Son nom le plus ancien est celui de Chetkn,
qui hri fut donne par une colonie ph£nicienne [in]. En
raison de sa fertilite, et comroe s£jour favori de la
deesse Aphrodite, les historiens et les poetes led ont
prodigue les 6pitb&es de fertile, riche , fiorissante ,
agreable, aimanle, vokiptueuse, sacrde et divine; Stra-
i Les memes et Gratiani. All, v« recit, f. 358. Petschewi, f. 157. So-
kolli etait personnellement oppose a la guerre avec Venise; mais en sa qua-
lite" de grand- vizir il dut se conformer a la volonte du Sultan, et la presenter
oomme juste au baile veuitien, ainsi qu'il le fit dans une longue conference,
le 3 1 Janvier 1570 : * Che altre volte questa isola era stata delli Soldani di
» Cairo, non la possedendo vostra Signoria (Rapport de Barbaro au doge)
» che da cento anni in qua, e che essendo il Signor subentrato in quelle ra-
» gioni ed essendovi state in esse diverse moschee di Musulmani. »
» Hv itoG/anr axc^Ta yovi^v eWtipi* apovpv)?. Dyonisius, 1. V,
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DE L'EMMRE OTTOMAN. 5gi
bon l'appelle la troi9i6me des sept lies principales de
la Mediterran^e, et elle m£rite en effet ce rang, car
sa largeur est de soixantesix milles, sa longueur de
cent trente-deux , et sa circonftrence de six cent cin-
quante. Situ£e h l'extr&nite orientale de la M^diter-
ran£e, non loin des cAtes de la Cilicie et de la Syrie,
elle presente au nord-est le promontoire de S.-
Andrea (autrefois Denaretum), en face du large golfe
d'Alexandrie, et an nord-ouest le promontoire d'Epi-
fania (autrefois Akamos), vis-k-vis le golfe de Satalia.
Entre ces deux promontoires s'&eve le cap Korna-
chetti, l'ancien Crommyon ; c'est le point le plus rap-
proch£ du promontoire d'Anemouri, en Cilicie, sur le
continent asiatique. Cette He a &6 comparee par les
anciens, h cause de sa forme, tant6t a une toison et
tant6t h un bouclier oil a un dauphin. Du mont Crom-
myon partent deux chaines de montagnes peu 61ev6es,
dont Tune se dirige vers Test jusqu'k Textr^mit6 de
Tile, et l'autre s'&end, en forme de cercle, h Fouest
et au midi. Au centre s'^teve TOlympe, qui domine
toutes ces montagnes; ses riantes hauteurs, sur les-
quelles Euripide a plac6 le s6jour de V6aus aphrodite
et des muses , ont vu plus tard s'elever une chapeile
consacr^e par les chr&iens h l'archange Michel ; la
croix du Christ a &6 £galement plant^e sur une colline
pr6s des Salines, au lieu ou existait autrefois un tem-
ple de Jupiter. Suivant la tradition mythologique,
c'est h Aphrodision, dans le temple de Ph^bus d'Ery-
three, que Venus eplorde retrouva Adonis apr£s une
cruelte separation. Les viHes de Hyte et de Tenebros
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30» H1ST0IRE
furent calibres par le culte d'Apollon, qui y &ait v£-
n£r6 sous le nom d'Hylates. A Curium, quiconque
portait une main sacrilege sur les autels de ce dieu
&ait pr&ipite dans la mer. Le culte de Venus s'6tait
transmis d'Ascalon en Ph&iicie dans File de Chypre,
ainsi que celui d'Adonis, que les Syriens appelaient
T£mouz, nom par lequel ils designent encore aujour-
d'hui le mois de juillet. La fete d'Adonis etait annuel-
lement c^lebree k Amathus dans le deuil et les larmes,
et celle d' Aphrodite h Paphos, dans des voluptes et
des plaisirs infames qu'on d^corait du nom de my$-
tires. Les dieux £gyptiens, Isis et Sera pis, avaient des
autels h Soli. Ce fut h Chypre, d apr6s le rapport des
Peres de l'Eglise, qu on offrit aux dieux les premiers
holocaustes ; et c'est aussi dans cette He, suivant d'au-
tres sources, que s'elev&rent les premiers autels de
V£nus aphrodite, honoree sous le nom de la misSri-
cordieuse. Chypre doit sa c61£brit£ mythique aux dons
pr£cieux que lui a prodigues la nature. Elle est re-
nomm£e, depuis un temps immemorial, pour ses bles
et ses vins, son huile et son miel, son encens et son
styrax, ses mines d'alun, de sel, et surtout celles de
cuivre, dont lenom, tel qu'il est passe dans la plupart
des langues europeennes, derive de celui de Tile ou
de la d£esse, a laquelle ce m&al etait consacr£. Son
terroir n'est pas moins fertile en produits veg&aux ,
tels que le cypres et la garance, le myrthe consacr6 k
Villus, Fache et la laitue. la colocasie et le kali, la co-
loquinte et le t£r£binthe, la rhubarbe et le laudanum.
On y trouve plusieurs pierres estimdes, le jaspe, llid-
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 5g5
liotrope, la pierre d'aigle, l'amiante, divers cristaux «
et des opales. Parmi ses oiseaux, on remarque les co-
lombes vou&s & Venus, et surtout les becfigues, dont
un seul vaisseau exportaiit souvent en Italie plusieurs
milliers a la fois. Jadis ses boeufs avaient une re-
nomm^e proverbiale en Grtce, et ses pores, nourris
de figues, servaient aux c6r£monies de la divination.
Si Tile de Chypre est c^tebre par ses produits na-
turels et ses traditions fabuleuses, sonhistoire politique
ne pr6sente, depuis la plus haute antiquity , qu'une
deplorable uniformity de tyrannie et d'esclavage, de
mollesse et de volupt£ , de conqu&e et de pillage.
Dans les temps les plus anciens, Tile fut dominie par
neuf tyrans qui r&id&rent dans les villes suivantes :
la nouvelle et l'ancienne Paphos; Amathus (pr£s de
Limasol), qui hotiorait V6nus la Barbue, Osiris et
Adonis, et sacrifiait les Strangers en l'honneur de
Jupiter HospiiaUer ; Citium (pr&s de Larnaca), dont
Torigine est encore r6v£16e par des inscriptions ph6-
niciennes; Chitri, renommee pour son miel; Lapa-
thus , cetebre par ses arsenaux ; Curium , voisine de
cet autel d'Apollon , si fatal h ceux qui osaient le
toucher ; Soli , et enfin Salamis , nomm£e plus tard
Constantia, qui fut assi£gee par les Grecs sous G-
mon, d£vast£e par les Juifs sous Trajan, et renver-
s£e par un tremblement de terre sous Constantin-le-
Grand. Les tyrans de ces neuf villes, £nerv£s par la
volupte, s'entouraient d'espions et d'inquisiteurs. Les
premiers se mfilaient au peuple et rendaient compte h
leurs maitres de ce qu'ils avaient oui dire; et les se-
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3g4 HISTOIRE
conds &aient charges d'instruire les procis sup ces
rapports. Les Spouses de ces tyrans avaient aussi un
double entourage de dames d'honneur : les unes ,
appeltes/latteuses, amollissaient le coeur de leurs mat-
tresses par la flatterie; les autres etaient obligees de
s'agenouiller et de leur servir de marche-pieds quand
elles montaient en voiture. Les premiers rois de Chy-
pre appartiennent moins h Thistoire qu'k la fable; c'est
ceHe-ci qui nous a transmis les noms d'Aous, fils
de C6phale et del'Aurore; de Kyniras, fondateur de
Smyrne et de Paphos, c&ebre par sa malheureuse lutte
musicale avec Phebus , et surtout par 1'amour infor-
tun£ de sa fille , metamorphos^e en myrthe ; et de
Pygmalion, qui vit la statue qu'il avait cre6e s'animer
au gr6 de son ardente passion. Parmi les rois dont
les noms sont historiques , on compte Diphilos qui
abolit les sacrifices humains; Evagoras, qui subjugua
File avec le secours du general athenien Chabrias ;
Nikokl&s, roi de Paphos, dont T^pouse Axiothea,
fiddle a l'exemple de son £poux et de ses fibres,
n'h£sita pas h se donner la mort ainsi qu'k ses enfans,
plutdt que de se rendre aux Egyptiens ; Nitokren ,
qui avait regu de Ptol&n£e le titre de gouverneur
6gyptien en Chypre, et qui se rendit h jamais exe-
crable par la cruelle execution du philosophe Anaxar-
chos; Philokypos, qui, surleconseil de Solon, trans-
planta les habilans de la ville d'Eg^e, pour leur faire
coloniser une autre ville qu'il appela Soli du nom
de ce sage legislateur ; enfin Pymatos , qui donna k
Alexan<fre-le-Grand le glaive avec le quel il conquit
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DE L'EMHRE OTTOMAN. 5g5
la Perse. Tous ces rois reconnaissaient la suzerainete
de TEgypte, de la Perse ou de la Gr&ce. L'ile fut sou-
mise h la domination £gyptienne sous Aprils et Ama-
sis; elle oWit h la Perse sous Cyrus et Cambyse, fut
assujettie a la Grece par Cimon et Charts, et se rendk
ensuite a Alexandre. Caton confisqua ses triors au
profit de Rome. Jules-Cesar et Marc-Antoine firent
don successivement de Chypre k Arsinoe et k Clfo-
p&tre. Elle fut devast^e par les Juifs sous Trajan, et
par les Arabes, pendant la domination des Byzantins,
sous Moawia, Yezid et Haroun al-Raschid * ; Moawia
y porta deux fois le pillage et la desolation. Sept ans
apnis la descente d'Yezid, Tile &ait presque enttere-
ment ctepeuptee, la plupart de ses habitans ayant &6
disperses en Syrie; maisle khalife les renvoya dans
leur patrie, sur l'ordre de Tempereur Justinien, dont
Flpouse &ait n6e en Chypre. Mamoun fit venir de cette
ile les ouvrages des philosophes grecs a . Baudouin, roi
de Jerusalem , et Richard , roi d' Anglelerre , succ6-
d£rent k la domination des Arabes, dont ils suivirent
les traces en devastant Tile. Richard c£da Chypre aux
Templiers en gage dun emprunt de vingt-cinq mille
marcs d'argent; les habitans s'&ant soulev£s contre
leurs nouveaux oppresseurs , il la ?endk k Guy de
i Soyouli, Histoire des Khalifes, a I'annee 26 de l'hegirt (648), puis
a I'annee 90 (608).
a Soyouti, Histoire des Khali fes, a la fin du regne de Mamoun, dans mon
exeroplaire, f. 195. Voyex aussi Lusignan el Reiahard; mats ce dernier n'a
pas compris Lusignan, car il parle de vingt-quatre incursions des Arabes,
tandis que Lusignan dit seulement que Chypre a subi en general vingt-qualre
devastations.
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, 3q6 HISTOIRE
Lusignan an prix de dix mille pikes d'or. Apr&s les
massacres de Pierre-le-Petit , Nikosie et Famagosta
furent c£d£es aux Genois. Le roi Janus fut eminent
prisonnier par les troupes du sultan £gyptienBersebai,
et depuis lors Tile de Chypre fut consid6r6e par les
sultans £gyptiens comme pays conquis et tributaire. Au
Caire, le roi Jacques pr6ta serment de fid61it£ au sultan
Tahir, apr£s avoir vu ses Etats d£vast£s pendant trois
ans par les Mamlouks qui &aient venus le secourir
contre Aloyse de Savoie, £poux de la reine Charlotte
de Lusignan. D&s le commencement du quatorzteme
si&cle, les V^nitiens eurent des etablissemens dans
les principales villes de Chypre, Iimasol, Nikosie,
Famagosta et Paphos; ils y fond&rent des £glises, des
halles, une maison pour le baile, et y poss&terent des
rues non fermfos et plusieurs autres privileges [iv].
Catherine Cornara, noble v£nitienne , epousa le roi
Jacques; apres la mort de ce prince et de son fils,
empoisonnes, comme on le soupgonna, paries V£ni-
tiens, Cornara, dfolaree fille de la republique, c£da
son royaume k sa patrie. Le s£nat pallia la violence
faite a Cornara en lui prodiguant toutes sortes d'hon-
neurs; la reine dechue fut conduite solennellement k
St.-Marc sur le Bucentaure, et, apr£s sa mort, on lui
£rigea dans Teglise de S.-Salvator un magnifique tom-
beau, sculpt^ par le ciseau de Contino \
Durant cette succession si diverse et si confuse de
rois et de tyrans, qui, pendant tant de si&cles, cou-
* Le Titien a aussi laiss6 un portrait de Cornara, qui se trouve dans U
patais de Manfrin.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. S97
vrirent d'un voile sombre l'histoire de Chypre, il ap-
parait h peine quelques noms , comme ceux de So-
lon et de Zenon , qui brillent dune veritable gran-
deur. Mais p!ong£e dans une mollesse si contraire h
la morale de Zenon , et soumise h des tyrans qui re-
pudi&rent si hautement les lois de Solon et expul-
ggrent de leur patrie ces deux philosophes, Chypre
ne saurait m£me s'enorgueillir de leur avoir donn£ le
jour , et se faire une gloire d'un titre vain et sterile.
Cest en appr£ciant ses grands hommes et en ecoutant
leur voix qu'un pays acquiert des droits & revendi-
quer leur naissance comme un titre honorable; s'il
les a meconnus, il ne retire de Ih que honte et d£s-
honneur , et le nom de m&re - patrie doit 6tre d6-
cern6 au pays hospitalier qui a su accueillir le m6rite
Stranger et lui rendre une eclatante justice. Outre
Solon et les deux Zenon, Tile de Chypre a vu'naitre
le naturaUste Ktesias, le m&lecin Apollonius, les
historiographes Xenophon et D£m6trius, et plusieurs
saints, entre autres les saints Hilarion, Barnabas et
Epaphras, deux des soixante-douze disciples du Christ,
morts martyrs dans leur patrie , et saint Spiridion ,
dont le nom est surtout honors dans la ville de Cor-
fou, qui renferme son tombeau. Pendant la longue
domination des Lusignans et de Venise, on ne voit
surgir aucun nom plus illustre que ceux que nous
venons de titer, si ce n'est celui de Bragadino, qui
mourut lors de Texpulsion des V6nitiens de Tile de
Chypre.
Apris cet expos£ succinct de l'ancienne histoire de
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398 HISTOIRE
Chypre, nous devons reprendre notre r£cit et mon-
trer comment , apres l'occupation de Nikosie , de Fa-
magosta et de TiJe enti&re, les Turcs march£rent sur
les traces de ses premiers tyrans , et surpasserent par
leur barbarie les cruaut^s fabuleuses des Centaures
et des Ophiog&nes , et celles plus r^elles des Tem-
pliers et des Sarrasins.
S£lim donna le commandement de l'exp£dition de
Chypre a ceux qui Tavaient conseill^e; Lala-Mous-
tafa fut nomme serasker des troupes de d^barqne-
ment, et Piate-Pascha , commandant en chef de la
flotte. L'ancien kapitan Mou^zin Alizad£ servait sous
Piate. Le serasker avait sous ses ordres Iskender-Pa-
scha , beglerbeg d'AnatoKe , Hasan -Pascha et Beh-
ram-Pascha, gouverneurs de Karamanie et deSiwas,
Mouslafabeg, gouverneur du Soulkadr, Derwisch-
Pascha. sandjak deHaleb, Moustafer-Pascha, r£cem-
ment d6mis du gouvernement de Schehrzol , et parmi
les begs de Roumilie, ceux de Tirhala, Yanina, II-
bessan, Perserin et de la Mor£e. La flotte &ait di-
vis6e en trois escadres , qui partirent successivement
dans l'espace de trois mois : en mars , Mourad-Re'is
fit voile pour Rhodes avec vingt-cinq galeres; en
avril , Piate le suivit avec soixante - cinq gateres et
trente galiotes *; enfin, en mai, Alizad£ se mit en mer
1 Le baile Barbaro £crit sous la date* du 20 avril iS^o : «piale parti
» delle sette lorri con 75 galee. » II ignorait encore si l'expediliou etait
dirigee contre File de Chypre ou contre celle de Candie : « Mustafa avendo
» eletto per sua galea quella dell' altro Mustafa disgraziato a Malta (par la
n levee du siege) e essendone stato averlilo la muto. »
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 399
avec trente-six gatered, douze fustes, huit mahones 1 ,
quarante vaisseaux de transport pour les chevaui
et quarante karamoursales ou vaisseaux de transport
pour les troupes, les provisions de bouche et i'artil-
lerie. Ces trois escadres comprenaient en tout trois
cent soixante voiles a .
Apr&s avoir renouvete ses provisions dans Tile
d'Eub&, Piate-Pascha debarqua k Tine, dans Fes-
poir de s'emparer par surprise de cette lie, et peut-
6tre dans la vue d'en ajouter la possession au duch£
de Jean Miguez, le juif favori de Seliro. Huit milte
homines saccag£rent Tile dun bout a l'autre, mais
pour cette fois encore le courage invincible du gou-
verneur, J&6me Paruta , sauva la forteresse et pre-
serva Tine de la domination ottomane. Pial6 embar-
qua ses troupes et fit voile vers le golfe de Fenika
(l'ancien Phoinicos), ou neuf stecles auparavant la
flotte arabe de Moawia avait battu celle de l'empereur
Constance, et l'avait forc^e de se retirer pr^cipitam-
ment sur Byzance ?. Sept ans apr&s la premiere con-
qu&e de Chypre par les Arabes, la reunion de cette He
au territoire de llslamisrae avait fait du golfe de Fe-
nika un lieu de rassemblement des plus importans en-
> Les palandarie repondent aux hippagogis, et les mahones aus one-
rarice des Remains.
a Contarini, f. 5 et 9, Venet. i5$5. Le total donne par Coatarini est
dedeux cent qnarante-huit voiles, nombre qui, comme on le voit, diflere
peu de celui de trois cent soixante donn6 par Hadji Khalfa, Histoiredes
guerres mar i times, f. 40.
3 $otvix<x, dans Theophanes, a la treizieme annee du regne de Constance,
en 654,
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4oo HISTOIRE
tre les divers peuples musulmans, et d£s cette Ipoque
les flottes ottomanes ne pouvaient sillonner les eaux da
golfe sans d&irer d'&endre leur domination sur Tile.
Le premier aotit 1 570, la flotte turque jeta l'ancre dans
la rade de Limasol (autrefois le stege des Templiers),
pr6s de Tancienne Amathus, et opera son debarque-
ment sans obstacle, gr&ce k l'incurie et k Uncapacity
du provediteur Nicolo Dandolo, qui d£fendit k Astor
Baglioni, commandant des troupes, de s'opposer k
cette descente. Malgr6 les dangers qu'on redoutait,
telle etait limprevoyance du provediteur, qu'il avait
tout r£cemment permis aux paysans enr616s dans les
corps proposes a la garde des c6tes, de retourner
dans leurs foyers [v]. Pour surcrott de malheur, a
1'ignorance du provediteur se joignaient celle du comte
de Rocas , qui avait succ£d£ a Baglioni , et celle du
g6n£ral d'artillerie Jacques de Mores, comte de Tripoli,
qui jusqu'alors avait k peine vu une ptece de canon.
La milice de Tile etait commandite par les fibres Sin-
glitico, la cavalerie reguliere (stradiotes) par Andr6
Cortese, la cavalerie irreguli£re (guastadori) par
Scipion Caraffa; enfin, Pietro Roncadi avait le com-
mandement en chef des Albanais. Le fort de Leftari,
dans le voisinage de Limasol, s'&ait rendu k la pre-
miere sommation, et le serasker Moustafa avait £par-
gn6 la vie et les biens des habitans, pour engager par
cette feinte moderation les autres villes a faire une
prompte soumission. Mais les Venitiens pr^vinrent
la contagion de l'exemple en tirant une vengeance
6clatante de la trahison de Leftari; ils surprirent la
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 401
(dace pendant la nuit, massacrfrrent la plupart des
habitans, et entrain&fent les femmes et les enfans dans
les montagnes. Pendant ces premiers £v£riemens,
quatre-vingts galores avaient &£ detach^es de la flotte,
et envoy£es vers les c6tes de Karamanie, pour y pren-
dre des renforls [vi]. Parmi les personnes chargees
de cette derniere mission, et celles qui presid^rent au
d£barquement des troupes sur les c6tes de Chypre,
nous citerons le tschaousch Sch&ban, ren£gat styrien,
connu anterieurement sous le nom de Hanaker, et
Dal Mohammed , ancien secretaire du diwan et plus
tard beglerbeg de Kaffa. Ce dernier, traducteur du
Mesnewi, ensuite mattredes requites d'Osman-Pascha,
le fils d'Ouzdemir, avait &6 fait prisonnier dans la
campagne de Schirwan, et avait passe plusieurs ann£es
en captivity dans le fort d'Alamout, un des anciens
repaires de Tordre des Assassins; delivr^ enfin lors
de la prise de Tebriz, il composa un ouvrage en prose
et en vers sur la conqu&e du Schirwan. Dal Moham-
med &ait Tami de Fhistorien Ali, qui suivit aussi Fex-
p£dition de Chypre, en quality de secretaire, intime de
Lala-Moustafa.
Vers le milieu du mois d'aoftt, la grosse artillerie
se trouvant d£barqu£e, le serasker convoqua un con-
seil de guerre, dans lequel le si£ge de Nikosie fut
r£solu conformlment k Favis de Lala-Moustafa;
Piale-Pascha au contraire avait £mis Favis de com-
mencer les operations par celui de Famagosta.
Nikosie, appel£e autrefois Kali- Nik osia et plus an-
ciennement Limosia , nom grec que rappelle le mot
T. VI. 26
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4oi HISTOIRE
turc actuel de Lefkosche, &ait la capitale de Tile, au
centre de laquelle elle Aait situee. Sa position sur une
colline en faisait une [dace forte; mais sa circonfe-
rence , bien quelle eftt &6 r6duite de neuf k trois
milles, en rendait la defense fort difficile. U y avait k
Nikosie presque autant d'eglises que de jours dans
l'ann£e. Dans la premiere ann£e du rigne de S6Km ,
les V&iitiens avaient ras6 l'ancienne citadelle, et con-
verti toute la ville en une forteresse r£gul&re, avec
onze bastions et trois portes , en en r&hrisant Fen-
ceinte k une Vendue de huit mille cent quatre-vingts
aunes (trois milles) [vii]. On avait alors d£moli quatre-
vingts £glises, et le grand monast&re qui renfermait les
divers tombeaux des rois de Jerusalem , des Lusi-
gnans, des princes et princesses de Galilee et d'Antio-
che, des s£n£chaux, amiraux, constables et chambel-
tans des rois de Jerusalem et de Chypre, des comtes,
barons et autres nobles de Tib&iade, Thoron, Sidon,
B6rythe, C6sar£e, Jopp6 et Nicopolis, enfin les tom-
beaux de seize £v6ques, archevfiques ou pAtriarches.
Ce monast£re, desservi par quatre-vingts moines, con-
tenait des apparlemens r6serv& pour le roi et la reine
qui le visitaient de temps k autre. Les Edifices pieux
et les anciens murs, £lev& sous les etnpereurs grecs
et notamment sous Constantin-le -Grand, furent ainsi
sacrifi£s a la n£cessit£ d'&ablir des fortifications nou-
velles, dont les approches &aient d£f endues par deux
cent cinquante pieces d'artillerie. Ghaque bastion of-
frait sur les deux c6t£s une longueur de trente pas,
et pouvait ailment contenir deux mille hommes et
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t>E L'EMPIRE OTTOMAN. 4o5
quatre canons. La garnison &ait forte de dix mille
hommes, savoir : quinze cents soldats italiens , trois
mille Venitiens de terre ferme (cernede), deux mille
cinq cent miliciens libres (francomati), deux cent cin-
quante Albanais, et mille nobles de Nikosie.
Le SQ jmllet, Moustafo-Pascha, d£j£ maitre de toot
leplat pays, parut devant les murs de Nikosie et en
ouvrit aussit6t le siege. A son arriv£e, il passa en re-
vue deux mille cinq cents cavaliers, dnquante mille
homines d'infanterie r£guliere, parmi lesquels on
comptait six. mille janissaires; mais, en y comprenant
les akindjis, son armee pouvait £tre £valu£e k un total
de cent mille hommes. Moustafa divisa Iinfanterie
reguliere en sept corps d'environ sept mille hommes
chacun, et leur fit prendre position en face des sept
bastions de la place. II distribua les commandemens
ehtre les divers chefs : il s'&ablit lui-m&ne h l'ouest
du bastion de Costanza , dont la porte donne an sud
sur les salines , et plaga Iskender-Pascha devant le
bastion de Podocataro, situ£ a gauche de la porte des
salines ! ; le bastion de Davila, sur la droite du se-
rasker, devait &re attaqu£ par Mousaffer-Pascha , et
celui de Tripoli par Derwisch-Pascha, beglerbeg
de Haleb; en face des autres bastions furent r^partis
les agas et kiayas des janissaires , les beglerbegs de
Karamanie et du Soulkadr, Hasan et Moustafa-Pascha.
Chaque corps avait une batterie de sept canons [vin].
Pendant les sept semaines que dura le stege, Piale
• Foglietta, Partita, Gratiani fout de cet Iskender-Pascha le gouvernetir
d'Alexandrie; its nomment encore Derwisch Drevis. Foglietta, p. 87.
26 ¥
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4<4 HISTOIKE
se tint en croistere avec la flotte dans les eaui de
Rhodes. Ce fat k cette 6poque que le beglerbeg d' Al-
ger, le ren6gat calabrois Ochiali, nommi par les
Turcs Ouloudj-Ali, puis Kilidj-Ali, annonga k la Porte
qu'il avait chass£ de Tunis le prince des Beni-Hafss,
et enlev6 cette ville k la domination espagnole ; il
mandait en outre que, sorti du port avec une esca-
dre de corsair es, il avait rencontr^ quatre galores de
Make, les avait prises et &ait rentr6 avec elles k Tu-
nis pour radouber ses vaisseaux. Les pavilions enlev£s
par Ochiali furent envoy^s a l'arm£e de Chypre, et
Moustafa fit arborer ces trophies sous les murs de
Nikosie. Cette vue vint ajouter au encouragement des
assies; lis avaient a la v£rit6 repouss£ deux attaques
avec bravoure ; mais , dans un troisi&ne assaut livr6
le jour de l'Assomption de la Vierge, ils avaient perdu
plusieurs de leurs meilleurs officiers. Lorsque Pial6
revint de sa croisi&re dans les eaux de Rhodes, le se-
rasker lui enjoignit, ainsi qu'au second kapitan-pascha,
de ctebarquer cent hommes de chaque galere, afin de
livrer avec ce renfort un dernier assaut g£n£ral. En
execution de cet ordre, Ali amena vingt mille matelots
et soldats marins au camp du serasker ; l'attaque fut
fix£e au jour suivant (9 scptembre 1 570). Les bastions
de Podocataro, Costanza et Tripoli, furent emport£s
avant l'aube du jour; leurs garnisons se retir£rent en
d&ordre dans 1'int^rieur de la place; les habitans
de la ville se jetArent en vain aux pieds des vainqueurs
pour implorer la vie, ils furent impitoyablement mas-
sacres. Cependant le prov&iiteur, l'archev6que et les
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 4*5
autres magistrals de la ville occupaient encore le palais
du gouverneur ; Derwisch-Pascha le fit battre en br6-
che avec six pieces de canon, et le serasker envoy a
aux assi£g& un moine pom* les sommer de se rend re,
en leur promettant la vie sauve. D6jk ils avaient mis
bas les armes, lorsqu'au retour du moine les Turcs
furieux p£n£tr£rent dans le palais, r^pandant le car-
nage et la devastation sur leur passage ; personne ne
fut £pargn£, et le prov£diteur p£rit lui-m£me victime
de son ignorance et de son incurie. D6s ce moment,
commencerent les horreurs qui ont lieu d ordinaire
dans les villes prises d'assaut par les Barbares ; pour
^chapper k la honte dont elles &aient menaces, plu-
sieurs femmes se pr£cipit£rent du haut des toits ou
assassin&rent leurs filles de leurs propres mains ; Tune
d elles poignarda son fils en s'£criant : « Non, tu n'as-
souviras pas comme esclave les infomes passions des
Turcs! » Puis elle se frappa elle-m6me. Vingt mille
hommes furent immotes a la fureur sanguinaire du
vainqueur , et deux mille jeunes gens de Fun et de
l'autre sexe furent emmen£s en esclavage. Pendant
huit jours, le meurtre et le pillage se d&hain&rent sur
la malheureuse ville; mais Taction h£roique d'une
femme, V^nitienne ou Grecqtfe, vint priver le vain-
queur du principal fruit de sa conqufite. Mue par Je
desir d'une noble vengeance, elle mit le feu aux galiotes
du grand- vizir Mohammed-Pascha et k deux autres
navires qui, charges du butin le plus pr£cieux en or,
argent, canons, et jeunes filles des premieres fa-
milies, &aient dans le port pr£ts k mettre k la voile;
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4cj6 HISTOIHE
r explosion des poudres fit sauter le vaisseau du grand-
vizir, et le feu consuma les deux autres ; mille jeunes
esclaves p&irent dans les flammes, quelqoes matelote
settlement parvinrent a se sauver k la nage x . La chute
de Nikosie entraina celle de Paphos et de Liraasol
(Amathus) [ix] , ces deux sanctuaires de la d£esse de
CythAre; les Turcs s'emparSrent £galement de Touzia
(Larnaca), situ& pr&s des ruines de Gtium, an-
cienne capitale de Tile qu'a rendue c&febre la mort du
general ath£nien Cimon. Larnaca est un lieu r£n£re
des Musulmans par son voisinage du tombeau de la
cousine du Proph&e, Omm-Haram [x]. Cercine (au-
trefois Karkynia), c^tebre dans 1'histoire ancienne de
Chypre corame residence de Tun de ses neuf tyraus,
et dans son histoire moderne par la defense opinifttre
de Charlotte de Lusignaii, succomba aussi sous les
armes des Ottomans. Le beglerbeg de Mer&sch fut
envoys k Famagosta, pour sommer le gouverneur de
se rendre en lui pr^sentant , au lieu dune lettre de
Moustafa, la tfite de Dandolo. Le serasker lui-mdme
ayant assist^ le 1 5 septembre 1 570 k la pri&re du ven
dredi (tons l^glise de Sainte-Sophie , se rendit trois
jours aprds devant les murs de Famagosta, en laissant
k Nikosie Mousaffer-Pascha avec un corps de deux
mille hommes.
D&s son arrivee a Famagosta, Moustafa fit construire
une redoute, d'oii rartillerie commenga le feu contre
la vflle et le port. Ces travaux indiquaient suffisam-
i V Histoire des guerres maritimes, f. 41, parle de huit cents jeunes fitles
qui perirent par cette explosion.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 407
ment que, malgr6 la saison avanc£e, le g&>£ral otto-
man etait r&olu a poursuivre le si6ge sans interrup-
tion. Gependant les kapitans Piale et Ali ayant ramen£
la flotte k Constantinople , en ne laissant k Chypre
que quarante galores n£cessaires ?ui service de Far-
m& , sous les ordres de Hamzabeg, gouverneur de
Rhodes , cette circonstance et la riggeur de l'hiver
fbrc&rent les assi£geans de ralentir leurs efforts. Mous-
tafe se borna a cerner ^troitement la place et k lui
couper toutes communications , en attendant le prin-
temps et l'arriv^e des renforts. Malgr6 sa vigilance,
douze gateres v^nitiennes, commandoes pair Marc-
Antoine Qiririni, parvinrent & jetejr dans Famagosta un
secours de seize cents hommes et des approvisionne-
meos (23 Janvier); ces ra&nes galores couterent bas
pluneurs vaisseaux hires, et s'erapar6rent de celui qui
avait apport£ de Constantinople la solde des troupes
Le Sultan fit expier ces malheurs au beg de Khios
et a celui de Rhodes qui avaient &6 Jaisses en station
devant Tile; le premier eut la t&e tranche, le second
fut prive de son fanal, insigne distinctif des begs
de mer. En ra&ne temps, le gouverneur de N6gre-
pont regut 1'ordre de r6unir a Khios tous les navires
en station dans FArchipel et d'y attendre Farriv^e
du kapitan Ali-Pascha. Celui-ci quitta le port de Con*
stantinople avec quarante galeres . et opera sa jonc-
tion avec les quarante b&timens du gouverneur de
N£grepont ; puis ils <d£barqu£rent tous deux dans l'ile
de Chypre au mois d'avril 1571. Pendant ce temps,
Moustafa avait etabli un service actif de karamour-
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4o8 EISTOIKE
sales et de mahones pour transporter du continent
d'Asie en Chypre des troupes et des munitions.
Le 16 avril, Moustafa passa une revue generate de
son arm£e. Les travaux de stege furent pouss£s avec
une activity surprenante : vers le milieu de mai, les
ti$nch£es, auxquelles&aient employes quarante mille
akindjis, furent enticement terminees, sans qu'ilefit
4ii possible aux assieg£s d'y mettre obstacle. Dans une
etendue de plus de trois milles, Moustafa avait fait
pratiquer, en ayant dfi souvent percer le roc, un chfe-
min large et si profond, qu'un homme a cheval pou~
vait le parcourir sans 6tre apergu ; en arri&re de ce foss£ ,
on avait construit dix forts, k Tabri desquels les tirail-
leurs tenaient la garnison dans de contumelies inquie-
tudes. Les murs, les tours et les bastions &aient fou-
droy£s par cinq batteries formees de soixante-quatorze
canons, parmi lesquels on en remarquait quatre dun
calibre extraordinaire, tels que ceux que nous avons
dejk vus figurer aux sieges de Constantinople, Scutari,
Belgrade et Rhodes, et que les historiens europ&ns
appellent tant6t hetepoles, tant6t basilics. Du c6t£
des assies, le feu &ait dirig£ par le g£n£ral d'artillerie
Martinengo, qui promettait de soutenir en cette cir-
constaQce l'honneur dun nom d£ja illustr6 au si£ge de
Rhodes. Marco-Antonio Bragadino commandait en
chef la ville et la forteresse ; il avait sous ses ordres son
fr&re Giovanni Andrea. Hector Baglioni &ait capitaine-
general, et Giovanni- Antonio Quirini, charg£ comme
intendant de la comptabilite de la garnison. Pour se
d&arrasser des bouches in utiles, aussi nuisibles dan$
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 409
une place assi£g& par leurs paroles de d£couragemeiU
que par leur consommation onereuse, Bragadino fit
sortir huit mille habitans, que les Ottomans, plus hu-
mains que de coutume, laiss£rent passer et se r£pandre
dans les villages de l'tle. II ne resta dans la place que
sept mille hommes, moitie Italiens, moiti£ Grecs, ca-
pables de porter les armes. Famagosta n etait defendue
que par un petit nombre de fortifications en mauvais
etat, mais elle avait pour commandant un homme d'un
caract&re ferme et d'un esprit f&cond en ressources :
Bragadino fit Sparer les murailles, organisa une fon-
derie, couvrit les rempartsde canons, et sut par son
exemple inspirer k tous une telle ardeur, que lesoffi-
ciers alterent s'&ablir sur le terre-plein des fortifica-
tions et ne voulurent plus avoir d'autre logement.
Par une matinee de mai , on entendit tout-k-coup
uri grand bruit dans le camp des Ottomans ; au m6me
instant, prot£g6s par un feu terrible de leur artillerie,
les asstegeans p6netr&rent dans les fosses , jusqu'au
pied des murs d£ja fort endommag£s ; ce fut en vain
qu'ils tenterent de les escalader; mais ils parVinrent k
se loger dans les fosses, et tous les efforts des assi£g£s
ne purent les en chasser. Cependant les travaux sou-
terrains se poursuivaient avec activity de part et d'au-
tre; du haut des tours et des remparts, les assi£g£s
pouvaient suivre les mouvemens des mineurs otto-
mans qui allaient, venaient et s'occupaient du trans-
port des poudres ; on soupgonnait bien le point sous
lequel ^tait dirig£e la mine, mais on n'avait pu l'i-
venter, et ceux qu'elle menagait s'attendaient a sau-
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4io HJSTOIRE
ter dun instant k l'autre. Enfin elle fit explosion ,
£branlant toute la ville, et renversant une partie des
murailles ; aussitdt les asstegeans s'£lanc6rent sur les
d£combres, dans l'espoir d'emporter la pkce ; mais
eel assaut n'eut pas plus de succ£s que le precedent.
Loin de ralentir le feu de son artillerie et les travaux
des mineurs, Moustafa eut recours k un nouveau
raoyen de destruction. Pendant plusieurs jours, la
{dace se vit menac£e par les bombes d'un incendie
g£n&al, mais le courage de Bragadino et celui de la
garnison restirent in£branlables. D£jk le stege avait
dur6 deux mois et demi avec un egal acharnemeiit de
part et d'autre, et les Turcs avaient £prouv£ daiis plu-
sieurs assauts des pertes considerables , lor$qu'& la
vue des br^ches ouvertes, le g£n£ral ottoman r^-
solut de livrer un assaut g4n£ral et de le dinger en
personne. La lutte fut des plus terribles; les assi£g£s
repouss&rent l'ennemi sur tous les points, hors un
seul, oii il conserva l'avantage en se rendant maitre
d'une demi-lune qui couvrait une des portes. Cet ou-
vrage &ait min£, et, apres de vains efforts pour chas-
ser les assaillans, on mit le feu k la mine, et Turcs
et chr&iens saut&ent k la fois dans les airs. Retires
derrtere les retranchemens en terre que Bragadino
avait fait elever au-dedans des murailles, les assteg&
se montraient encore d&ermih£s k attendre Tennemi
de pied ferine. Les Turcs f urent obliges cje livrer mi
nouvel assaut contre la porte, dont la mine avait fait
sauter la demi-lune. Debout sur la br£che, Bragadino
combattit l'ennemi de si pres qu'il reprit de ses mains
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 4n
un drapeau v£nkien enlev£ a Nikosie. Tous les efforts
des Ottomans furent infructueux ; mais la garnison eat
k lutter avec un riouvel ennemi, contre lequel toute
bravoure &ait impuissante , la famine : depuis un an
que durait le siege , les approvisionnemens se trouvaient
tellement £puis£s , quil ne restait que sept tonneaux
de poudre, et que les habitans etaient reduits a se
nourrir de chevaux, d'&nes et de chiens; la garnison,
menacfe dun septi&me assaut l , dut se r^signer a une
capitulation devenue necessaire. Le 1 er aotit, le dra-
peau blanc fut arbor£ sur la forteresse ; le kiaya du
serasker et celui de 1'aga des janissaires se pr6sent£-
rent dans la ville en quality d'otages, et les assieges
envoyirent en ^change deux nobles venitiens dans le
camp du serasker; ces derniers furent regus par le
fils de Moustafa avec de grands honneurs , revfitus
d'habits d'&offe dor et trait£s dans la tente de l'aga
des janissaires.
Le mdme jour, la capitulation fut sjgn^e sous les
conditions suivantes : la garnison devait sortir avec
ses armes, ses bagages, cinq pieces de canon, les trois
chevaux de ses principaux chefs , et 6tre transportee
imm^diatement a Candie; les habitans etaient libres
de quitter la ville et d'emporter tout ce qui leur ap-
partenait; ceux qui y resteraient ne devaient 6tre mo-
lestes ni dans leurs biens, ni dans leurs personnes.
Quatorze vaisseaux tares,, destines au transport de la
garnison, entr&rent aussit6t dans le port; les Turcs se
' Foglietta et Contarini donneut les details des six assauts Xistte le ai et le
1 9 juin, le 9, le 14, le 20 et le 3o juillet.
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4ia ^HISTOIRE
retirArent k une distance de trois milles, et t£moigne-
rent toute leur admiration pour la g£n£reuse defense
des assieg^s , en recevant , avec d'amicales demons-
trations, ceux d'entre eux que la curiosite attirait dans
leur camp. Au bout de trois jours la place fut evacuee
et toute la garnison embarqule, k l'exception des
principaux chefs. Le 5 aofit , Bragadino envoya au
camp ottoman Henri Martinengo, neveu du general
d'artillerie de ce nom, pour pr^venir le serasker qu'il
aurait Thonneur de lui presenter le soir m&ne les
clefs de la ville. Moustafa repondit k ce message avec
toutes les apparences de la courtoisie, et fit dire a
Bragadino qu'il ^prouverait une vive satisfaction a
faire connaissance avec les braves d&enseurs de Fa-
magosta. Trois heures avant le coucher du soleil, Bra-
gadino se rendit au camp ottoman avec Baglioni , Louis
Martinengo, Antoine Quirini, plusieurs autres officiers
et une escorte de quarante hommes, U marchait k che-
val, k la t£te du cortege, dans son costume de magis-
trat v&iitien, c'est-&-dire vttu de la robe de pourpre,
et faisant porter sur sa tfite un parasol rouge, qui £tait
une des marques de sa dignity. H fut re$u avec force
civilit£s; le pascha s'entretint quelques instans avec lui
et les personnes de sa suite des frvenemens du stege.
Mais ces trompeuses demonstrations cessment pres-
qu'aussit6t : le serasker leur demanda quelles stiret£s
ils pouvaient donner pour garantir le libre retour des
vaisseaux charges de transporter la garnison a Candie;
et sur la r£ponse de Bragadino que la capitulation n'a-
\ait rien stipule a cet £gard, il exigea qu on lui laiss&t
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 4i3
en 6tage le jeune Antoine Quirini. Bragadino se t6-
cria vivement et avec plus dindignation que lie lui en
permettait sa position; dedaignant alors de dissimuler,
le serasker se r£pandit en imprecations contre le com-
mandant et tous les Venitiens, etles accusa d'avoir fait
£gorger cinquante pelerins musulmans , malgre leur
inviolability , garantie par la capitulation. Bragadino ,
qui dut chercher k justifier ou k nier ce meurtre, n'en
continua pas moins k refuser avec courage, et en pa-
roles peu mesurees, les 6tages demandes. Moustafa
passa des injures aux faits, fit garrotter Baglioni, Mar-
tinengo, Quirini et Bragadino, et ordonna de les trai-
ner ainsi hors de sa tente; les trois premiers furent a
l'instant massacres. Bragadino, temoin de leur mort,
&ait r£serv6 a de plus longs tourmens; on se contents
pour ce moment de lui couper le nez et les oreilles.
Ge ne fut que dix jours apr£s, un vendredi, que fut
consomme son affreux supplice: plac6 sur un stege,
une couronne k ses pieds , il fut hiss£ sur la vergue
de la gal&re du beg de Rhodes , puis plong£ dans
l'eau, parce que, d'apres Thistorien ottoman, il aurait
traits de la sorte des prisoriniers turcs ; on lui suspen-
ds ensuite au cou deux paniers pleins de terre, qu'it dut
porter sur les deux bastions pour aider a leur recon-
struction ; chaque fois qu'il passait devant le serasker,
il ^tait forc6 de se prosterner. Enfin , conduit sur la
place, devant le palais de la Signoria, il fut attach^ au
poteau sur lequel les prisonniers turcs subissaient
d'ordinaire la peine de la flagellation, puis couche a
terre et £corch6 vif, « attendu, dit le g6n6ral ottoman,
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4i4 filSTOIRE
que celui qui a fait couler le sang musulman doit vei 4 -
ser le sien. » Le serasker el le bourreau , s'adressant
a l'h&oique patient, lui criaient k la fois : « Ou done
est ton Christ? que ne vient-il k ton secours? » Sans
laisser £chapper aucune plainte , Bragadino r&ita le
Miserere au milieu de ses afireuses tortures ; et en
pronongant le dernier verset, accordez-moi, Seigneur,
un dceur pur, sa grande ame exhala son dernier soupir.
Trois cents Chretiens, qui se trouvaient darns le camp,
furent £galement massacres. Les 6tages envoy& as
camp avant la signature de la capitulation auraient sans
doute 6prouv£ le m6me sort, si, par commiseration, ou
dans le but de les r£server aux mutilations du harem,
Feunuque du serasker ne les eflt d£rob£s aux premiers
acc&s de sa fureur. En effet, Henri Martinengo n*6-
chappa au fer homicide des Ottomans que pour &re
mutite par l'op&rateur du harem , et se voir k jamais
condamn6 a l'esclavage et k l'impuissance. Ench&is-
sant sur sa perfidie , Moustafa fit retirer des navires
tous ceux qui y &aient dfyh embarqu&, et les emmena
en esclavage. Non content du supplice ignominieux et
horrible quil avait fait subtr k Bragadino, il ordonna,
dans sa sauvage f£rocit6, que le corps du h&os fttt
ecartel^, ses quatre membres exposes sur les quatre
grandes batleries, et que sa peau fflt remplie de foin,
pour 6tre promen£e d£risoirement , sur une vache,
dans le camp et dans la ville. Cette noble d^pouille fut
ensuite pendue a la vergue dune gatere, et d£pos£e
dans une caisse. avec les quatre t&tes de Bragadino,
Baglioni, Martinengo et Quirini. pour £tre envoy^es
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DE I/EMPIRE OTTOMAN. 4i5
au Sultan. A Constantinople , la peau de Bragadino
fat expos£e dans le bagne, k la vue des esclaves chr6-
tiens [xi]. Plus tard, elle fut rendue k Venise, et d£po~
s£e dans une urne du pantheon de l'£glise de S. Gi&»
vanm e Pooh; les ossemens de Bragadino, recueillis
avec un soin religienx, furent inhumes dans l^gMse
de S. Gregorio.
On ne saurait admettre les raisons allegu£es par les
historiens ottomans pour justifier la conduite f&roce
de Moustafa ; car si des paroles dune fermete intern-
pestiye allum&rent la fureur du serasker, rien ne
peut excuser la violation de la clause qui garantissait
k la garnison la vie sauve et une libre retraite. D'ail-
leurs , s'il faut r&llement imputer la colore de Mous-
tafa aux r£ponses de Bragadino, ce dernier en aurait
dft 6tre \$ premiere et la seule vietime. Mais les faits
d£mentent ces suppositions : ce ne fut qu'apr6s douze
jours de tourmens que se consomma le suppHce atroce
de Bragadino, et la capitulation fut indignement vio-
l£e sur tous les points. Ainsi cette conduite infeme
n'&ait pas la suite d'une fureur momentan£e , mais
elle avait && longuement prem^dit^e. Du reste, elle
&ait digne de l'homme qui avait excite une guerre
funeste entre deux fr&res, et pousse Souleiman a
se souitler du meurtre de son fils Bayezid. Cet acte
de perfidie &ait d'ailleurs conforme au fetwa qui
avait conseille cette campagne, en declarant qu'on
pouvaft s'afiranchir de la parole engag£e aux infi-
d&es, lorsqu'il y avait quelque avantage k en re-
cueillir* Toutefois on ne saurait s'&onner de pareilles
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4i6 HISTOIRE
cruautls, quand on consid&re non seulement la barba-
rie sanguinaire de l'homme qui 1' or donna, mais encore
I' esprit general de cette £poque : Selira II &ait con-
temporain de Charles IX et dlwan-le-Terrible. Une
ann£e s'&ait k peine £cou!6e que les massacres de la
Saint-Barth£lemy jeterent la terreur parmi les peuples
de l'Europe, et avant m&ne qu'une nouvelle ann&
firt r&voiue, on vit, a la prise de la forteresse de
Witten stein, la garnison entire massacre et le com-
mandant perc£ d'une lance pour 6tre r6ti au feu [xii].
Si de pareils actes de cruaut6 se passaient en France
et dans la Finlande, quelle barbarie ne pouvait-on pas
attendre des Turcs? De quel acte d'ailleurs n'&ait pas
capable l'homme dont l'&ftye ne craignait pas d'en-
freindre publiquement les plus saintes lois de llsla-
misme, en se livrant sans frein aux vices les plus hon-
teul? On reconnut facilement 1'influence de la passion
dominante de S&im et de son p^cepteur dans les pro-
motions de juges qui eur^nt lieu immediatement apr£s
la prise de Nikosie. Le juge Rouhi et le moufti Ekmel,
renomm^s comme esprits forts, et adonn^s a la fois
au vin et k d'infemes debauches, ouvrirent et tinrent
eux-m£mes des cabarets : il &ait d'usage entre eux
que le juge s'enivr&t le matin chez le moufti, et
celui-ci le soir chez le juge. Gr&ce k de tels exemples,
1 habitude de Fivresse devint g&i6rale dans Tarm^e,
et Ton vit souyent les soldats debattre entre eux la
question de savoir chez lequel des deux juges se trou-
vait le meilleur vin. De Ik il arriva qu'& la prise de
Famagosta, les soldats turcs ne se conduisirent pas
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 417
autrement que ceux des autres nations : ils bris^rent
les portes des caves et s'enivrferent k Tenvi de vin de
Chypre. De son c6t£, le general profana la cath£drale
de.St. -Nicolas; il fit ouvrir les tombeaux et disperser
les cendres qu'ils renfermaient , lac^ra les images des
saints et souilla le sanctuaire par des horreurs inouies.
Par un raffinement de fanatisme, il avait youlu que
la seine hideuse de l'ex&mtion de Bragadino fftt r&-
serv^e pour un vendredi, jour choisi pour c616brer la
solennelle inauguration de Tiglise convertie en mos-
qu£e (17 aoftt 1571). Ce jour, consacri dans Fanti-
quit6 au cuke de V6nus, et institue comme jour de
repos par Mohammed , vit se renouveler le tableau
des horreurs monstrueuses qui marquerent jadis la
celebration des ffites et des mystferes de V^nus et les
c£r£monies des sacrifices humains en l'honneur des
dieux. Quelques jours apris avoir donn£ ce triste spec-
tacle, Moustafa quitta File (15 septembre 1571), et
quelques semaines plus tard il fit son entree triom-
phale k Constantinople, bien que sa conqu&e lui eftt
cotit£ prfis de cinquante mille hommes l . Qn affecta k
Fentretien du grand- vizir les revenus de File, dont
la destination , attribute par les Sultans tscherkesses
aux deux villes saintes, avait fourni le pr&exte de la
1 Paruta, p. 198. Contarini, f. i3i, donne l'etat suivant de la force nu-
merique de l'armee devant Famagosta : quatre-vingt mille hommes soldes,
quatorse mille janissaires, soixante mille hommes de iroijpes irregulleres.
Dans la Liste des Paschas, Contarini ecrit leurs noms avec assez d'exacti-
tude poor les faire reconnaitre, a l'exception des paschas de Schesiiwar et
de Merasch qu'il nomme il Bass* dl Scivisari et Marasco, et du sandjak da
Diwrighi qu'il appelle il Famburian di Diverie.
T. VI. 17
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418 UISTOIRE
guerre, et dont le juif don Miquez ayait eepiri la
possession a titre de roi de Ghypre. Dans la suite, la
plus grande partie.de ces revenus fut comprise dans
l'apanage de la m6re du souverain regnant (walicte).
Ainsi Tile de V&ius Aphrodite, offerte comme £pin-
gles par les empereurs remains aux reines d'Egypte,
Arsino£ et Cl£op&tre, fut donnee au m£me titre aux
femmes du harem imperial [xiu].
Pendant le stege de Famagosta, les escadres otto-
manes n'avaient cesse d'inqui&er les cdtes de Dal-
matic Iromediatement apres la declaration de guerre,
et avant m£me que les Turcs eussent oper^ leur des-
cente en Chypre, l'amiral v<5nitien Vemero avait sur-
pris Sopoto en Albanie; par represailles, le kapitan-
pascha Ali et le ren£gat calabrois Ouloudj-Ali rava-
gferent les lies de Gandie, de Cterigo ', et Tancienne
Cythfere vou^e au culte de V6nus Aphrodite, dont les
deux sanctuaires furent ainsi profanes par les Turcs.
De Navarin, le kapitan-pascha jeta ses hordes d£vas-
tatrices sur les cdtes des iles de Zante, de Cepha-
lonie et de Butrinto; il envoya quarante gateres con-
tre Sopoto. De son c6t6, Ouloudj-Ali s'empara, k la
hauteur de Corfou, des galeres de Michel Barbarigo
et de Piero Bertolazzi , ainsi que des navires de Leza
' Parula doiiue la force uumerique de la flotte otlomane, ainsi qu'if suit :
Pertew-Pascha avec cent galeres a Castel-Rosso, Ali-Pascha avec cinqiiaute-
cinq, Ouloudjali avec \ingt; Hasan, fils de Barberousse, avec vingt; Ahmed
igalement avec vingt galeres, dix mahones, et cinq navires devant Chypre;
en tout, deux cent cinquante voiles. Cet etat est entierement conforme a celut
qui est donne par Hadji Khalfa, Hisioirc des guerrcs maritime*, p. 55.
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DE i; EMPIRE OTTOMAN 419
et de Moceniga. Ali ctebarqua k Sopoto quinze cents
janissaires et sipahis; mais, trahi par la fortuiie dans
une attaque contre cette ville, il perdit un tiers de
ses troupes et se retira en toute hate. La place de
Dulcigno, vivement pressee sur terre et sur mer par
Ali et Ouloudj-Ali, fit sa soumission; la l&chete de
l'ambassadeur Alessandro Donato mit Antivari dans
la n&essite de se rendre; Budna fut r^duite & la
m£me extremity par l'incurie de son podestat Agos-
tin Pasqualigo. Le kapitan-pascha se mit en croi-
siere avec vingt gateres devant Castel-Nuovo, tandis
qu'Ouloudj-Ali et Caracosa (Karagoez) d&vasterent
les environs de Lesina et de Curzola. Vers le milieu
du mois d'aoftt, les deux corsaires ren£gats rel&ch£rent
a Valona, avec le riche butin qu'ils avaient fait k Le-
sina ; parmi ces d^pouilles, ils montraient surtout avec
fierte le fanal du prov^diteur , qu'ils avaient etilev6
de l'£glise de la Madone k Lesina. De Valona, le
kapitan-pascha Ali, apr&s avoir d£tach6 deux galtoes
vers les c6tes de Sicile, se rendit a Saseno, dans la
resolution ne point quitter ce port avant d'avoir regu
(Jes nouvelles positives soit de Constantinople, soit des
flottes combin&es des puissances chretiennes f .
Apris la chute de Nikosie, le grand- vizir Mo-
hammed Sokolli, craignant que r alliance des puis-
sances chretiennes ne f at fatale au pavilion ottoman .
ou jaloux des brillans succ£s de son rival Moustafa
' Contariiii, f. 33. Hadji Khalfa, Histoire des guerres maritime*, f. 3a.
Dulcigno est appele en laogue turque Oulgoum, Antivari Bar, Sopoto Sobot,
Valona Awlona.
>7"
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4*o HLSTOIKE
dans leip^dition de Chypre, laissa echapper quelques
paroles de paix dans ses conferences avec le baile de
Venise, r£sidant k Constantinople, et manifesta le de»
sir de voir arriver un n^gociateur v^nitien ; de plus,
il engagea le baile k envoyer son chancelier k Venise
pour sonder les dispositions du s£nat. Sous l'influence
des preoccupations qui le dominaient, Mohammed
Sokolli renvoya de Constantinople k Paris par Venise
le pl&iipotentiaire frangais Grascinan, avec des leltres
de lui et du Sultan, qui exprimaient le d^sir de voir
la paix se retablir entre la Porte et la r£publique par
l'entremise du roi de France. En consequence, Venise
^nvoya Jacques Ragazzoni k Constantinople, et mon-
tra pendant quelque temps un refroidissement de zeie
pour la ligue dont le pape poursuivait avec ardeur la
formation. C est ainsi que, conduites dans un but op-
pose, les negotiations de Ragazzoni k Constantinople,
et celles de Colonna, legat du pape k Venise, se neu-
tralis£rent r^ciproquement , et arr&erent la conclu-
sion de la paix en m£me temps qu'elles suspendirent
la formation definitive de la ligue sainte. Mais bient6t
les devastations de Tile de Candie par les flottes otto-
manes et la reprise du siege de Famagosta vinrent
mettre un terme k l'indecision du s£nat; et, le 25 mai
1571 , le pape, le roi d'Espagne et la r^publique si-
gn£rent une ligue offensive et defensive, dont lobjet
etait d'abaisser la puissance de ]' empire ottoman, cet
eternel ennemi du nom chretien. Les forces combines
de cette confederation devaient consister en deux cents
gal£res, cent vaisseaux, cinquante mille hommes de
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 4a i
pied et quatre miUe cinq cents chevaux. Le contingent
des d^penses &ait ainsi fix6 : le roi en supportait la
moitie, le pape un sixieme et les Veniliens un tiers.
L'armle devait 6tre pr&e au mois de mai, et se r£unir
a Messine. Comme le pape ne poss6dait presque aucun
vaisseau de guerre , les V£nitiens s'obligeaient k lui
fournir douze galores compl&ement pourvues de leur
artillerie et de leurs agres. Le commandement en chef
devait 6tre d£f£r£ au g£n£ralissime espagnol. Le traits
entreles puissances conftder^es fut public le 22juillet,
aprts la celebration d'une messe solennelle, par lam-
bassadeur espagnol, dans l^glise de Saint-Marc [xiv].
Ce fut en vain qu'en passant a Venise pour se rendre
k Constantinople , l'ambassadeur frangais chercha k
6branler la resolution du s£nat '. Depuis la fondation
de l'empire ottoman, c'&ait la treizi^me ligueformee
par les puissances europ&nnes contre l'ennemi jur6
du Christianisme, et toutes avaient ei| pour principaux
moteurs le pape et la rlpublique de Venise*. Un stecle
entier s'etait ^coule depuis que le cardinal Caraffa
avait form£ la cetebre ligue , qui rapporta en trophto
la chaine de Satalia qu'on voit encore dans la sacristie
* Paruta , p. i63 , designe ainsi cet ambassadeur : i7 Vescovo di Jot.
* i° Croisade sous Urbain V, prise de Smyrne, i344; »° Urbain V,
croisade contre Mourad I"; 3o Gregoire XI, bataille de Nicopolis, 1396;
40 Eugene IV, bataille de Warna, i544 ; So Calixte III, Belgrade secourut
|iar les troupes chretiennes, i455; 60 Pie II, 1464 ; 70 Sixte IV, conquett
de Smyrne et de Satalia, 1 4 72 ; 80 Innocent VIII, croisade contre Bajrezid II ;
90 Alexandre VI, croisade contre le meme sultan, i5oi ; io° Leon X, croi-
sade contre Souleiman I", x5ao; no Adrien VI, peu de temps tvant la
bataille dt Mohacz, i5a6; 120 Paul UI, 1539.
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4*2 HISTOIKE
de la cath£drale de Saint-Pierre ; et trente-quatre ans
s'&aient passes depuis la derntere ligue oonclue entre
les m&nes puissances, le pape, le roi d'Espagne et la
r£publique de Venise.
Don Juan d'Autriche, fils naturel de Charles-Quint,
dont l'esprit £leve , la valeur et la ressemblance avec
son p&re, faisaient d£jk concevoir de hautes esp£-
rances, appareilla de Messine le 25 septembre 1571 ,
avec soixante-dix galores d'Espagne, .six de Malte
et trois de la Savoie. A cette flotte se joignirent douze
galores du pape , sous les ordres de Marco* Antonio
Colonpa, due de Paliano et de Taliacozzo , cent huit
galeres et six gal£asses ou mahones d'une dimension
6norme , sous le commandement de l'amiral v£ni-
tien S^bastien Veniero. Dans un conseil convoqu£ sur
le vaisseau-amiral, on discuta s'il convenait de faire
voile pour Valona , Castel-Nuovo ou Santa-Maura;
mais Veniero et Don Juan, g£n£ralissime de la flotte,
opin&rent pour qu'on se dirigeat dans les eaux de
TArehipel , et leur avis prevalut. La flotte se rendit k
Gumenizze (appelee par les Turcs Houloumidj), port
de Cyrus, vis-k-vis de Corfou; mais instruits du voi-
sinage de la flotte ottomane , ils partirent pour Ales-
sandria (l'ancienne Samos), dans l'fle de C^phalonie.
Une division de huit galores £clairait la march e, sous
le commandement de Jean Cordona. amiral de Si-
cile. Venait ensuite Tavant-garde, forte de cinquante-
quatre galferes, sous les ordres de Jean Andrea Doria*
Un demi-mille en avant du corps de bataille etaient
les six galeasses des V^nitiens, que conduisait Duodo*
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t>E L'EMPIRE OTTOMAN. 4*3
La premi&re ligne de bataille etait compos£e de soixante
et une gal&res f et au milieu d'elles flottaient les pa-
vilions du due de Paliano, du gen^ralissime et de la
republique; elle s'appuyait sup une seconde ligne de
cinquante gal&res , commandoes par le prov&liteur
Barbarigo. Enfin, Alvaro de Bazzano, marquis de
Santa-Groce, amiral de Naples, fermait la marche
avec trente gateres. D'apr£s le plan arrfitO a Tavance,
l'avant-garde et l'arrtere-garde devaient se mettre en
ligne sur les ailes.
La flotte ottomane, forte de deux cent quarante
galeres r quarante galiotes, vingt petits briks, en tout
trois cents voiles, &ait stalionnee dans le golfe de
Lepanto, sous le commandement en chef du kapitan-
pascha Mouezinzade-Ali, qui avait sous ses ordres
Ouloudj-Ali, beglerbeg d'Alger, Dj&fer-Pascha, beg-
lerbeg de Tripoli, Hasan-Pascha, fils de Khaireddin-
Barberousse, et quinze autres sandjaks, ayant droit
comme princes de la mer a porter des fanaux sur
les poupes de leurs galores [xv}. Les troupes de-terre
embarqu£es sur les navires &aient commandoes par
Pertew-Pascha. Pertew et Ouloudj-Pascha reprOsen-
t&rent inutilement que les Equipages Otaient trop in-
complets pour tenter la fortune; le z61e irrOflOchi du
kapitan-pascha l'emporta sur leur prudence, et en-
traina la perte totale de la flotte soumise k ses ordres.
Dans la nuit du 6 au 7 octobre 1 57 1 , la flolt&chrO-
tienne leva l'ancre, et le jour suivant, un samedi, a
une heure et demie apr£s midi, elle parut a la hauteur
de cinq petites ties, appelees par les Grecs EchRw,
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4*4 HISTOIRE
c'est-k-dire les sangsues, sent parce que ces vers four -
millent sup les rochers qui en ferment les c6tes, soit
parce que le devin Echinas y vit le jour. Ces lies, si-
tu£es vis-a-vis r embouchure de l'Ach£Ious (aujour-
d'hui Aspropotamos), sur les c6tes d'Albanie, sotit
connues sous le nom de Curzolari. Lorsque la fri-
gate, envoy ee corarae £claireur dans la direction de
Lepanto, vint annoncer Tapproche de l'ennemi, Don
Juan fit hisscr sur son m&t d'artimon un pavilion vert
de forme carr£e, et donna ainsi l'ordre de retablir la
ligne de bataille. Jean Andr6 Doria, k la tfite de cin-
quante-quatre gal&res formant l'aile droite, avait a
peine d£pass6 deux ecueils des Curzolari, qu'il d6-
couvrit la flotte ottomane. Celle-ci tromp^e sur la
veritable force de la flotte chretienne, dont l'aile gau-
che &ait d^robee a sa vue par les ties de Curzolari,
se rangea en ordre de bataille, paraltelement a la c6te
de Mor^e. Le prov6diteur Barbarigo , k la t&e de
l'aile gauche des chr&iens, compose de cinquante-
trois galores, se porta dans la direction de r embou-
chure de l'Acheloiis, et longea Tile de Petalia ou
ViUa-di-Marroo , en face du promontoire de Villa-
di-Marmo, appel£ depuis ce jour la Mauvaise-Pointe
(Mai Cantone) paries Chretiens, et la Pomte-San-
glante {kanlu bourouri) par les Ottomans. Au centre,
se dlployait la principale ligne de l'arm£e navale,
dispos£e en forme de croissant. Cette ligne &ait sous
les ordres du prince de Parme, amiral de Savoie,
du due d'Urbain, amiral de G6nes, de 1'amiral de
Naples et du commandeur de Castille. L'une de oes
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 4*5
galeres 6tait commands par Caraccioli , comte de
Biccari l , qui d6crivit plus tard les exploits de Don
Juan d'Autriche, auxquels il avait pris lui-m6me une
glorieuse part. Don Alvaro, marquis de Santa-Croce,
conduisait Farrtere-garde. En t&e de la principale
ligne de bataille, s'avangaient les trois vaisseaux ami-
raux; au milieu celui de Don Juan, a droite celui de
Marco- Antonio Golonna, amiral du pape, et k gauche,
celui de Sebastien Veniero , amiral v&iitien. La capi-
tape g£noise, commands par Hector Spinola, et sur la
quelle se trouvait Alessandro Farnese, due de Parme,
Itait placee k l'aile droite et suivait immediatement
Colonna ; k gauche et tout pr&s de Veniero, marchait
la capitane de Savoie, commandee par le seigneur de
Leyni, et mont£e par le prince d'Urbain. Au centre,
immediatement apr£s Don Juan, venait le vaisseau du
vice-amiral d'Espagne (Paerona), sous les ordres du
grand-commandeur de Castille. A Textr^mit^ de l'aile
droite se trouvait le vaisseau-amiral de Malte , mont£
par le grand-prieur de Messine ; la capitane de Lome-
lini se trouvait k Textr^mit^ de l'aile gauche. Du c6te
des Turcs, le commandement de l'aile droite avait &6
confix k Ouloudj-Ali, beglerbeg d'Alger, et celui de
Faile gauche, aMohammed-Schaoulak, beg de N£gre-
pont. En avant de la ligne du centre et vis-i-vis les
trois amiraux chr&iens, etait le vaisseau-amiral du
kapitan-pascha Mouezinzade Ali, ay ant a sa droite
> «* Ferrante Caraccioli conte di Biccari scrittor di questa istoria, il qual
» con la sua galea andava a destra di quella del Quiriuo. - / Commentary
delle guerre fatte eon Turchi, p. 34.
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i'i(> HISTOIRE
la galore du vizir et serasker Pertew et h sa gauche
celle du tr&orier de l'armee.
Les deux armees navales se consid£r£rent quel-
que temps avec une mutuelle admiration : la flotte
des chr^tiens etait forte de plus de deux cents voiles,
et celle des Turcs, de trois cents. Le soleil brillait dans
tout son £clat; tandis que les Turcs &aient 6blouis
par le reflet des casques , des cuirasses et des bou-
cliers en acier poli des conf<§d£r£s, ceux-ci admiraient
les couleurs vives et varices des vaisseaux et des
Equipages turcs, leurs fanaux dor, leurs drapeaux
de pourpre avec des inscriptions en lettres d'or et
d'argent , les pavilions des vaisseaux-amiraux turcs ,
representant le glaive a double tranchant d'Ali, la lune,
les Voiles et le chiffre entrelac£ du Sultan '. Le silence
f ut interrompu par un coup de canon charge a pou-
dre, que lira le vaisseau-amiral ottoman, en signe de
salut et comme invitation a l'amira} chretien de se
faire reconnaitre de la m^rae fagon. Le sifflement d'un
boulet de gros calibre fut la r£ponse de Don Juan.
L'action s'engagea vers Taile gauche des Chretiens,
et il y eut bient6t sur toute la ligne une m£lee de cinq
cents vaisseaux. Vers quatre heures et demie de l'aprta-
midi a , pendant que Mohammed-Schaoulak et Giaour-
i Les Doms itaiieos de Capitana , Pairona et Reale sont Bussi cenx des
premier, second et troisieme vaisseaux-amiraux turcs qui roarchent imnicdia-
tement apres celui du kapitan-pascha, Jequel pprte le nom de Baschtarda.
Voyez, sur les divers pavilions de la marine otto ma ne, Constitution et admi-
nistration de V Empire ottoman, t. II, p. 29.
2 Diedo, f. 19. Coutarint dit a sept heures, an coucher du soleil.
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DE ^EMPIRE OTTOMAN. 417
Ali manoeuvraient pour touriier_Taile gauche des con-
f6d£res, et que Barbarigo envelopp£ de toutes parts
tombait sous une nv6e de fl&ches , blesse a inert, le
kapitan-pascha, Mouezinzadd, marcha droit a la galore
de Don Juan , pour se mesurer avec lui vaisseau k
vaisseau et homme k homme. Mais presque aussitdt il
se vit assailli a la fois par les deux vaisseaux de Don
Juan et de Veniero; Pertew-Pascha s'attacha k la
galore de Colonna. Les trois cents janissaires et les
cent arquebusiers du vaisseau-»amiral ottoman com-
battirent avec la plus grande valeur contre les quatre
cents arquebusiers de Sardaigne, places a bord du
vaisseau de Don Juan. La lutte dura plus dune heure ;
plusieurs fois d^jk les allies avaient occupe la moitte
du pont de la capitane ottomane, et its en avaient &6
repousses, lorsque Mouezinzade tomba frapp£ mor-
tellement par une balle : profitant du premier moment
d'hesitation des Turcs , les Espagnols saut£rent de
nouveau k l'abordage, s'emparerent de la galore et
en arracherent le pavilion turc. Un soldat espagnol
trancha la t£te au kapitan qui respirait encore , et in-
vitait les assaiilans k descendre dans I'interieur du
vaisseau, ou, disait-il, ils trouveraient de Targent; le
soldat porta la t£te a Don Juan , qui , le repoussant
avec horreur , ordonna qu on la jet&t dans la mer ;
n£anmoins elle fut plantee sur une lance et hissee sur
le grand mftt. Karagoez, capitaine de Valona, et Mah-
moud, sandjak de Mitytene, suivis de quatre autres
navires portant fanaux , vinrent au secours de Ieur
vaisseau-amiral, et commencirent une lutte des plus
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4*8 UISTOIKC
acharn&s; le marquis de Santa-Croce, voyant le dan-
ger qui menagait les trois chefs de la flotte alliee, ac-
courut, avec l'arri&re-garde, au secours de Don Juan.
Deux capitaines v^nitiens , Loredano et Malipieri, se
jet&rent au milieu des ennemis, et atlirant sur eux plu-
sieurs de leurs galores, ils moururent avec la gloire
d'avoir gauvg leur g£n£ral et decide du combat. Les
gal&res de Karagoez et de Pertew furent prises k l'a-
bordage; le premier fut tu£; le second, s'&ant jeti a
la mer, parvint k se sauver dans une cbaloupe.
La fortune avait &6 moins favorable k Faile droite
des allies; Ouloqdj-Ali, qui n'avait commence k com-
battreque tardivement, £tait parvenu, k force de ma-
noeuvres, & tourner la division de Doria, et Favait
obligee k s Eloigner du corps de bataille. La marche
inhale des b&timens chr&iens les avait s6par£s les
uns des autres f! et avait amen£ entre eux de grands
intervalles. Ouloudj-Ali, voyant quinze galores espa-
gnoles, v&ritiennes et maltaises groupies k une assez
grande distance , se porta sur elles avec toutes ses
forces; envelopp6es par un ennemi si sup£rieur en
nombre, elles n'en firent pas moins une vigoureuse
resistance. Ouloudj-Ali s'empara de la capitane de For-
dre de Make, et trancha de sa propre main la tftte du
commandeur de Messine; mais voyant que le centre
de la flotte turque &ait en d&oute, il d£ploya toutes
ses voiles et passa au milieu des chr&iens avec qua-
rante galores, les seules qui £chapp£rent au d&astre de
cette sanglante bataille. Les Turcs perdirent deux cent
vingt-quatre vaisseaux, dont quatre-vingt-quatorze se
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DE L'EMPlRE OTTOMAN. 4*9
bris£rent sur les c6tes ou furent br&I&; les autres fu-
rent partages entre les allies, ainsi que cent dix-sept
canons de gros calibre, deux cent cinquante-six dun
calibre inftrieur, . et trois mille quatre cent soixante-
huit prisonniers. Quinze mille esclaves chr&iens, qui
se trouvaient k bord de la flotte ottomane, furent
d61ivr&. Trente mille Turcs avaient p£ri dans cette
bataille naval e, la plus grande qui se fut livr^e depuis
celle qui. seize siecles auparavant et au m&ne lieu,
avait decide entre Auguste et Antoine de lempire
du monde. Les allies perdirent quinze galores et buit
mille soldats ou matelots : de ce nombre furent Bar-
barigo, qui mourut de ses blessures le troisi£me jour
apr£s la bataille, et vingt-neuf nobles des premieres
families de Venise , tels que Trissino , Cornaro , Ve-
niero, Pasqualigo, Contarini, Loredano, Quirini, le
prieur de Malte et le grand-commandeur d'Allema-
gne. Le nombre des blesses etait bien plus conside-
rable; parmi eux, nous citerons Cervantes, l'auteur
immortel de Don Quichotte, qui eut le bras gauche
emport£. Au nombre des prisonniers se trouvait le
Florentin Bongiani Gianfigliazzi, qui fut nomm£, en
sortant d'esclavage, au poste d'ambassadeur de Flo-
rence auprfes du sultan Mourad III. Outre le kapitan-
pascba Ali, les Turcs comptaient parmi leurs morts
les sandjakbegs de Tschoroum, Karahissar, Angora,
Nicopolis, Lepanto, Khios, Mitylfene, Sougadjic, Bi-
gba, Alexandrie, le kiaya , inspecteur de l'arsenal [xvi] .
et plusieurs autres de leurs principaux chefs. Parmi
les prisonniers tomb£s au pouvoir des chr&iens, se
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■41o HISTOIRE
trouvaient Mohammed, petit-fils du beglerbeg d'Al^-
ger, Salih-Reis, les sandjakbegs Giaour- AH et Dj&fer,
les deux fils du kapitan-pascha AH et plusieurs au-
tres agas ' . Les fanaux d'or^les pavilions de pourpre,
ornes d'etoiles, de croissans et descriptions en lettres
d'or, les queues de chevaux du serasker, furent la
proie des vainqueurs. Le succ6s de cette bataille si
memorable doit 6tre attribu6 a la bravoiire de Farm^e
chr&ienne, et surtout k la superiority avec laquelle les
galeasses venitiennes dirig^rent le feu de leur artille-
rie : places en avant comme six redoutes, elles je-
tferent le d&ordre parmi les Ottomans , et les forci-
rent k rompre leurs lignes, pour parvenir jusqu'&
celles des Chretiens. Marco-Antonio Colonna fit une
entree triomphale a Rome, monta au Capitol e etd£-
posa en offrande , sur l'autel de la Vierge (Ara in
Caelis), une colonne d'argent sur laquelle il avail fait
graver, par allusion a son nom , cette inscription
tir^e d'Horace : Prcesens superbos vertere funeribus
triumphos : injurioso ne pede proruas stantem colum-
nam. Le stoat lui fit &iger une statue, et en memoire
de sa glorieuse victoire, l'£glise Ara in Caelis fut ein-
bellie, aux frais du peuple, dun plafond richement
dor6 et orn6 de peintures, qui sont encore aujour-
d'hui consid6r6es comme des chefs-d'oeuvre. Ghis-
lieri, qui regnait sous le nom de Pie V et qui avait &6
Tame de la sainte ligue, accorda a son amiral, dejk ho-
i Mahantut pour Mohammed, Cauiall pour Giaour- All, Carahiugh pour
Karabatak. Cependanl ce dermer u'etait pas, comme le dit Diedo, sandjak
de Khios; ceMe place ctait occupee par Firdews.
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DE 1/ EMPIRE OTTOMAN. ft i
nore du triomphe, une recompense de soixante mille
ducats, et rendit hommage au brillant courage du g£-
neralissime Don Juan d* Autriche , en lui appliquant
avec bonheur ces paroles de TEvangile : « C'etait un
homme envoy 6 de Dieu, du nom de Jean [xvn]. »
En commemoration de la sainte ligue et de la bataille
de Lepanto, Venise consacra, dans l^glise de S. Gio-
vanni et Paolo, une chapelle embellie a la fois par le
ciseau de Vittoria et par le pinceau de Tintoretto, et
qui forme encore Je plus beau monument du pantheon
v&iitien. La facade de l'arsenal fut ornee de sculp-
tures representant une entree triomphale, et sur le
faite de cet Edifice on pla^a la statue de sainte Jus-
line, dont la fete coincidait avec le jour ou fut livr^e
la bataille de Lepanto. Ce jour (le 7 octobre) fut dels-
lors institu6 comme ffete nationale et religieuse. Enfin,
aPadoue, on 61eva une eglise d'une architecture clas-
*ique et simple sous revocation de sainte Justine.
Aprte avoir admir£ le tableau de Vicentino dans le
palais des Doges de Venise, les sculptures des £16ves
de Sansovino dans Tarsenal, les statues en bronze de
Veniero et de Barbarigo [xvm] k l'acad£mie, les ta-
bleaux de Tintoretto et les bas-reliefs de Vittoria dans
la chapelle du Rosaire, les trophies suspendus dans
Teglise de Ste. Justine a Padoue, la statue de Colonna
au Capitole et la coupole dor^e de l'lglise Ara in
Ccelis a Rome, 1'historien ne peut songer sans un
profond sentiment de tristesse k la nullity des resul-
tats de cette bataille, tels qu'ils nous ont et6 transmis
par la plupart des £crivains. En effet, par suite de la
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43a tylSTOIRE
m&intelligence et de la negligence des chefs allies,
cette victoire, si glorieuse pour les armes chr&iennes,
ne fut suivie d'aucun avantage important. Dun autre
c6t£, la defaite si desastreuse des Ottomans ne fit que
mettre en evidence Fetal de prosp£ritc ou se mainte-
nait Tempire, m6me sous le r&gne dun prince ivro-
gne, gr&ce a la pers£v£rante activity du grand -vizir
Mohammed Sokolli et du moufti Ebousououd ; les
pertes 6prouv6es par les Ottomans a Lepanto furent
bient6t r£par6es, et, au bout de quelques mois, on vit
sortir des Dardanelles une flotte presque aussi nom-
breuse que la pr6c6dente. Piale avait ramen£ du theatre
de la bataille cent vingt galores, et treize b&timens de
transport ', et, vers la fin de d£cembre, Ouloudj-Ali
&ait rentr£ au port de Constantinople, avec quatre-
vingt-sept vaisseaux; mais dans ce nombre etaient
compris les galeres qu'il avait sauv£es du d£sastre ,
et les navires qu'il avait emmenes des divers ports de
l'Archipel, afin de dissimuler ainsi aux yeux des habi-
tans de la capitale toute 1 etendue des pertes dprouvees
par les armes ottomanes a . En recompense du zele qu'il
avait montrd , S£lim promut Oloudj-Ali k la dignil6
de kapitan-pascha, et voulut qu'k l'avenir son surnom
d'Oloudj f tit change en celui de Kilidj, c'est-a-dire
> « Gionto Piale passa con 120 galere et 1 3 maone. In que? arsenal erano
-282 galere, tra qaeste x5 innavigabili , ti aomentera l'armata fin a 3oo
» galere e 3o maone. » Rapport de l'ambassadeur reuitien du 29 novembre
1572.
» « Uluzali gionto col resto dell* armata al numero di 87 galere, rimasU
» fuori i2 della gaardia di Rodi, e Carazali con altre tre e fuste. •
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 455
le glaive. Le nouveau kapitan unit ses efforts k ceux
du grand-vizir, pour r&ablir la flotte surun pied for-
midable. Les Turcs ne s'occupferent pas , comme les
V&ritiens, a orner de sculptures leur arsenal, mais k
en agrandir les chantiers, en prenant sur le jardin
imperial Tespace n&essaire k r&ablissement de huit
cales votit^es; c'est la que furent con^truites, pendant
l'hiver qui suivit la bataille de Lepanto, cent cinquante
galores et huit gal&sses ou grandes mahones, c'est-i-
dire plus de vaisseaux que n'en comptait la flotte con-
f&ieree. Dans Tun de ses entretiens avec le grand-
vizir, Kilidj-Ali lui fit observer que Ton pourrait bien
achever cent cinquante vaisseaux dans l'espace dun
hiver, mais qu'il serait peut-6tre impossible, en un
temps aussi court, de se procurer cinq cents ancres,
ks agrfe-et tous les objets d^quipement n<§cessaires :
« Seigneur Pascha, lui nSpondit le grand-vizir, la ri-
chesse et la puissance de Tempire sont telles, que
s'il y avait n£cessit6, on ferait des ancres d'argent, des
manoeuvres de soie et des voiles de satin; du reste
s'il manque quelque chose a vos navires, venez me le
demander. » A ces paroles, Kilidj-Ali, s'inclinant de
manure k toucher la terre du revers des mains, s'&ria
avec enthousiasme : « Je savais bien que vous parvien-
driez k r&ablir la flotte dans son &at primitif ! »
Le baile v<5nitien Barbaro, qui 6tait rest6 k son poste
k Constantinople malgr6 la conqu6te de Chypre et la
dtfaite de Lepanto, s'&ant pr6sent<§ chez le grand-
vizir pour sonder ses dispositions et savoir s'il incli-
nait k la paix ou k la guerre, celui-ci lui adressa ces
T - VI - 28
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434 HISTOIRE
paroles : « Tu viens voir sans doute ou en est notre
courage, aprtete dernier accident qui nous est arrive;
mais iiy a une grande difference entre votre perte et
la n6tre. En vous arrachant un royaume, c'est un bras
que nous vousavons coup6 ; et vous, en battant notre
flotte, vous n'avez fait que nous raser la barbe. Un
bras coupi ne saurait croitre de nouveau, tandis que
la barbe ras^e se reproduit avec plus de force qu'au-
paravant. » Loin d'etre une vaine fanfaronnade, cette
r^ponse &ait exactement vraie [xix] ; car, d6s le com-
mencement de juin, une flotte turque de deux cent
tinquante voiles se remit en mer. La flotte des Chre-
tiens, qui s'etait enfin ralltee apr£s de longs retards
apport£s par le roi d'Espagne, &ait plus nombreuse
que odle des Turcs ; mais la negligence et \A m&-
intelligence des chefs remp6ch&rent de retirer aucun
avantage de sa superiority num6rique et de l'habilete
de ses Equipages. Les ennemis se rencontr£rent deux
ibis, devant €6rigo et pr£s du promontoire de Ma-
tapan, sails engager d'action decisive. La flotte turque
*e retira k Modem et h Navarin ; celle des chr&iens
resta en station devant C£rigo , pour empficher la
reunion des diverses escadres bttomanes ; n^anmoins
cette reunion s'op&ra , et le due de Parrae n'entre-
prit point le siege <te Modon, ainsi qu'il en avak &6
charge. Kilidj-Ali ramena sa flotte k Constantinople,
api& avoir perdu settlement quelquos galores. En
Dalmatie, Soranzo detruisit le fort construit par le$
Ottomans devant Cattaro. Convaincue qu'elle ne pou-
yait compter »ur une active wop^ration de la part
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 435
de TEspagne, Venise se vit forcee de faire a la Porte
de nouvelles ouvertures de paix. L'ambassadeur v£-
nitien fut charge par le conseil des Dix de conclure un
trait6 m£me k des conditions on^reuses; mais il trouva
d'autant moins d obstacles a surmonter, que les Turcs
eux-memes commengaient k concevoir des inquie-
tudes, et quil fut vivement appuye par l'ambassadeur
frangais de Noailles, 6v£que d'Aix x , qui avait et6 en-
voy^ pour la seconde fois a Constantinople. Le drog-
man Oram et le juif Salomon , medecin du grand-
virir, furent les plenipotentiaires de la Porte dans cette
negotiation [xx]. Bien qu'k la suite de plusieurs con-
ferences les clauses eussent &e arr&ees de part et
d'autre , le secretaire d'Etat Feridoun changea de sa
propre autorit£ les dispositions du document v&iitien,
et, pour ne pas repartir sans un resultat , l'ambassa-
deur fut oblig£ de signer cet acte ainsi modifte. En-
fin, le 7 mars 1573, les plenipotentiaires Antonio
Barbara , procurateur et baile de Venise , et Aloisio
Mocenigo , signirent un traits de paix comprenant
les sept articles suivans : 1° Venise devait acquitter
dans l'espace de trois ans les frais de l'exp^dition de
Chypre, 6valu£s a trois cent mille ducats, somme £gale
k celle qu'elle avait pay^e k Soulelman apr6s la guerre
terming par le traite de Corfou ; §° la place de Sopoto
devait &re restitute avec toute son artillerie ; 3° le
tribut de cinq cents ducats, impost pour la possession
t « Monsignor d'Aox, il quale ritoraato pur cUauzi da Conatantinopotf,
»havendo avulo novo online del suo Re di trasferirsi di nuovo a quelle
» Porta, » Earuta, 1. Ill, p. 3ia« Hassan, t, U ? p, 32.
' i
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436 HISTOIRE
de rile de Zante , &ait port£ k la somme de quinze
cents ducats; 4° le sultan Selim s'engageait k ob-
server avec une stricte fidelity la capitulation signee
par Souleiman et renouvetee par lui; 5° Venise &ait
affranchie du tribut annuel de huit mille ducats qu'elle
payait pour Tile de Chypre; 6° les limites des posses-
sions v£nitiennes et ottomanes en Albanie et en Dal-
matie etaient r&ablies sur l'ancien pied ; 5° les n£go-
cians des deux puissances contractantes devaient 6tre
indemnis£s pour les marchandises et les b&timens con-
fisques a leur prejudice dans le cours de la guerre [xxi].
Barbaro se rendit lui-m&ne en Dal ma tie, pour r£gler
la delimitation des frontteres; Andrea Baduer lui suc-
c£da dans sa mission d'ambassadeur extraordinaire
aupres de la Porte, et Antonio Tripoli fut accr6dit6
comme baile resident k Constantinople. En reflechis-
sant aux conditions de ce traite, « il semblerait que les
Turcs eussent gagne la bataille de Lepanto. »
Apr&s la conclusion de la paix entre Venise et la
Porte , Don Juan d'Autriche r^solut la conqufite de
Tunis. Cette entreprise etait d'autant plus facile, que
la ville seule avait 6t6 prise par Ouloudj-AIi, a l'£po-
que du si£ge de Nikosie , et que la citadelle appelee
Halkolwad (la Goleta) etait restee au pouvoir des Es-
pagnols. Le 7 octobre 1 572, jour anniversaire de la
bataille de Lepanto, Don Juan mit k la voile k Favi-
gnana en Sicile, et se rendit avec quatre-vingt-dix
galeres sur la c6te d'Afrique. A la nouvelle de son
approche, les Turcs abandonnerent la ville, qui tomba
avec trente-trois canons au pouvoir des EspaguoK
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DE L'EMPHIE OTTOMAN. 437
Le fits d£natur£ de Moulei-Hasan, Hamid, qui avait
arrach£ la vue k son p£re, et n'avait r£pondu que par
l'ingratitude h la protection de I'empereur, accourut a
Tunis dans Fespoir d'etre r&abli sur son tr6ne par les
Espagnols; mais toutes ses instances resterent infruc-
tueuses; il fut transports a Naples sur deux galeres
avec ses femmes et ses enfans. Le marquis de Santa-
Croce prit possession de la ville et du fort (Al-kassar),
et confera au frere d 'Hamid le titre d'infant et de
vice-roi de Tunis *. Don Juan fit flever entre la ville
et le lac un nouveau fort avec six bastions *, et en
confia le commandement a Gabrio Zerbelloni, auquel
il laissa une garnison de quatre mille Italiens sous les
ordres de Pagano Doria, de quatre mille Espagnols
conduits par Salazar, et de cent chevaux commandos
par le capitaine Don Lopez Hurtado di Mendoza.
La conqufite et les nouvelles fortifications de Tunis
causfirent un vif ressentiment au Sultan, au grand-
vizir et surtout au kapitan Kilidj-Ali, qui avait deja
> Relatione di Tunisi et Siserle con le osservazioni delta qualita e cos-
tumi degli habitants fatta Yanno dopo delta impresa di esse per il serenis-
simo Signor Don Giovanni d* Austria t i573. Manuscrits de Rangon, a
la Bibliotheque I. R., no IX, f. i48-i54. Le manuscrit italien donne les
details suivans : « Le jour de sa conquete, i er octobre 1.57a, Don Juan
enleva la plus belle des deux cents colonnes qui ornent la grande mosquee.
Le fils du roi de Tunis parut devant lui le a a septembre, et, le a6, les
Matires de Biserta lui offrirent en present un troupeau de moutons. Cent
sept galeres et trow vaisseaux, portant treize mille Italiens, neuf mille Espa-
gnols et cinq mille Allemands, en tout, vingt-sept mille fantassins et trois
mille hommes de cavalerie legere, furent employes a cette expedition. «•
* Caraccioli donne leurs noms : Zerbelloni, Doria, S. Giacobo, S. Gio-
vanni, Salazaro, Gabrio.
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458 HISTOIRE
une fois enlev£ cette place au pouvoir ides Espagnob.
Aussi , dix-huit mois apris , le 23 moharrem 982
(15 mai 1574), une flotte forte de deux cent soixante-
huit gal&res et galiotes, de qoinze mahones et quinze
galions, sous le commandement de Kilidj-AK, sorlR
des Dardanelles et fit voile vers la c6te d'Afrique. Sept
mille janissaires, sept mille sipahis et nn corps irr£-
gulier de six mille soldats de Syrie, en tout quarante
mille hommes, commandes par le coinju^rant de FY6-
men, Sinan-Pascha, op£r6rent leur debarquement
sur la plage de Tunis. La ville facilement prise fut
livr£e pendant trois jours au pillage; puisle serasker
Sinan chargea les beglerbegs de Tunis et de Tripoli,
Haider ct Moustafa-Pascha, d'ouvrir le si£ge dela
Goleta (2rebioui-akhir — 22 juillet). Ce fort fut em-
port6 d'assaut apres une vaillante defense de trente-
trois jours : deux cents canons et trente-trois drapeaux
tomb&rent au pouvoir des vainqueurs. Le comman-
dant Don Pietro et le vice-roi de Tunis, Mohammed,
furent faits prisonniers avec deux mille hommes;
cinq mille avaient p£ri pendant le si£ge (6 djema-
zioul-ewwel — 24 aotit). Les Turcs compterent parmi
leurs morts deux kiayas des janissaires. Sinan fit sau-
ter les fortifications de la Goleta, pour 6ter tout es-
poir aux Espagnols de s'y etablir de nouveau, et
il commenga aussitot le siege du nouveau fort, que
Hadji-Khalfa d&igne sous le nom du bastion de Tu-
nis. Pagano Doria et Giovanni Sinoghera , quoique
blesses Tun et l'autre, se d^fendirent avec un courage
heroique. Trois assauts furieux donnas k la place sur
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 43©
tow les points a k fob f urent vietorwusement repou&*
s& (5, 8, 1 \ septembre); mats un quatriftrae triorapfea
de la resistance de la garnison. Le commandant Ga*-
brio fut conduit devant Stnan, et celui-ci, le prenant
injurieusement par la bar be, lui demanda comment il
avait &e assez t&n&aire pour continue la defense da
fort aprte la prise de la Goleta. II ne restait plus au
pouvoir des Espagnols que la tour ileyie dans Tune
des lies du lac , ou s'&aient retires Pagano Doria et
Sinoghera. Le kapitan-pascha et le serasker rendirent
hommage a leur valeur, en leur adressant une som-
mation £crite et signee par eux, dans laquelle ils s'en-
gagerent a accorder a la garnison la vie sauve et une
libre retraite. Plus confiant en la parole des indigenes
qu'en celle des Turcs , Pagano se init entre les mains
de quatre Maures, auxquels il avait promis mille ecus
s'ils le sauvaient; mais ceux-ci lui tranch£rent la t6te
et la port^rent au serasker. Pour £viter un sort pareil,
Sinoghera fit sa soumission , et dans l'espoir de pre-
venir la violation de la foi jur^e par les Turcs, il of-
frit au serasker quinze mille ducats qu'il avait pris
dans la caisse royale; mais Sinan declara qu'il n'ac-
cordait une libre retraite qu'k ceux qui occupaient la
tour avant la chute du fort, et que ceux qui s'y 6taient
r^fugtes depuis n'avaient pas droit a cette feveur.
Sur Tinsistance de Sinoghera pour obtenir la Ubertd
de toute la garnison, le serasker, lui montrantla ttte
de Pagano , le menaga du sort de son compagnon
d'armes, et Sinoghera fut oblige de signer une capitu-
lation, d'apr&s laquelle il ne lui &ait permis de sauver
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44<> mSTOIRE
de l'esclavage que cinquante hommes sur toute la gar-
nison. C'esl ainsi qu'apr&s la chute de ses trois forts,
Tunis retomba au pouvoir desTures, et devint comme
Alger et Tripoli un gouvernement ottoman. Ces trois
villes ont && depuis les principalis repaires de cette
piraterie, qui prit un si grand d^veloppement sous
les ren£gats grec, hongrois et calabrois, Barberousse,
Piale et Kilidj-Ali, infe* rx pendant des siicles la M6-
diterran£e , et porta chaque ann£e le pillage et la de-
vastation sur les plus belles cdtes dltalie.
Apr£s avoir retract les hauts-faits de Don Juan
d'Autriche, ce hlros chevaleresque de la chr&ient6,
il nous reste a parler de Taventurier moldave Jean
Iwonia. Nous avons d£ja signal^ Tactive surveillance
que la Porte exergait sur les relations que Bogdan ,
prince de Valachie, entretenait avec la Pologne. Iwo-
nia, qui se donnait comme un fils naturel du voitevode
Etienne, bien que, suivant une opinion alors fort ac-
creditee, il filt originaire de la Mazovie dans la grande
Pologne, profita de la mefiance de la Porte, pour
sollicker aupr£s d'elle, k l'instigation de quelques
boyards , son investiture comme prince de Valachie,
ainsi qu'un secours de vingt mille hommes ' . Instruit de
cette d-marche, le roi de Pologne s'employa en faveur
de son protege Bogdan par Tentremise de son ambas-
sadeur Taranowsky, mais ce fut sans succte. Quel-
ques magnats polonais pr^terent k Bogdan un secours
plus efficace, en lui envoyanl plusieurs milliers d'hom-
« Gorecki dit mille, Lasicki deux mille.
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DE L'EMMRE OTTOMAN. 44i
mes sons les ordres de Mielecki. Cependant Iwonia
avait re$u les troupes ottomanes qu'il avait deman-
d£es, et &ait entr6 en campagne. Stanislas Lancko-
ronsky et autres nobles poloriais repouss£rent dans
une escarmouche lavant-garde des Tares ; mais ils
se retir&rent ensuite a Chocin, la seule place forte qui
rest&t encore au pouvoir de Bogdan '. Bogdan d&-
puta le jeune Radetzki aupres de l'usurpateur, pour
le determiner k renoncer k ses pretentions ; mais Iwo-
nia envoya le parlementaire k Constantinople , ou il
fut enchain^ k une galere. L'ambassadeur polonais et
son interpr&e Dziersky intercurrent vainement en sa
faveur aupr&s du grand- vizir, qui n'ob&t dans cette
circonstance qu'k la volont6 expresse du Sultan, vive*
ment irrit6 de linvasion des Polonais en Mbldavie.
Sur ces entrefaites, le roi de Pologne Sigismond Au-
guste &ait mort, et avec lui s'&ait eteinte la race des
Piastes (7 juillet 1572). Afin de d&ourner de la Po-
logne une irruption turque ou tat are, Iasloviecky se
vit forc£ de c£der Chocin k Iwonia, qui jura en retour
de vivre en paix avec la Pologne. Mais Iwonia fut k
peine maitre de Chocin, qu'il demanda en outre Tex-
tradition de Bogdan et de son frfere Pierre ; le premier
ne pouvait &re livr6 , car Iwan-le-S£v6re , 1'ayant
soup?onn6 de vouloir embrasser le prbtestanisme ,
l'avait fait jeter k leau dans un sac ; le second fut remis
entre les mains des Ottomans, et mourut, k ce qu on
presuma , empoisonn6 a Constantinople. Maitre de la
> Joannis Lasicii historla de ingressu Polo no rum in Falachiam cum Bvg-
dano Voivoda a iS*j* y ad adeem Gorecii, p. i38.
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4Ja HISTOIRE
Moldavie, Iwonia d&ola le pays parr sa tyrannic ct
ses cruautls : il fit enterrer vifs des 6v6ques et des
moines, pour les forcer par ces tortures k decouvrir
de prltendus tr&ors caches. II adressa aux Etats de
Pologne une lettre £crite en langue turque, dans la*-,
quelle il leur conseillait au nom du Sultan d^vitcr
d'elire pour roi un prince de la maison d'Autriche ou
de Russie ; maia en m£me temps son ambassadeur
conjurait les magnats de n'acorder aucune confiance
aux infideles ; car Iwonia pressentait d£jk Forage que
les intrigues du voievode de la Valachie a la Porte
amoncelaient sur sa t&e. Quelque sincere que fift l'a-
vertissement donn£ aux magnats, il dut leur paraitre
d'autant plus suspect, qu'Iwonia «vait autrefois abjur6
le christianisme pour embrasser l'islamisrae, et quil
n'&ait revenu que depuis peu a la foi chretienne *.
Les pressentimens dlwonia ne tard£rent pas k se
r&iliser. Le %\ ftvrier 1574, un tschaousch se pr£-
senta au diwan d'Yassy avec un ferman dans lequel
S61im demandait un tribut annuel de cent vingt mille
ducats, au lieu des soixante mille qui ayaient ete paves
jusqu'alors. Sur cette demande, Iwonia appefa les
boyards k une insurrection generate , et tous jur6renl
de vivre ou de mourir avec lui. Trop faible toutefois
pour lutter avec ses seules forces contre un ennemi
aussi puissant, il demanda des secours k l'hetman des
Cosaques Swierzewsky et au roi de Pologne nou-
vellement 61u , Henri de Valois ; mais le senat , pr£-
» Go recti deteriptio belli Joannis voivodm Valachia, quod anno 1574
cum Selimo 11 Turcarum Imp era tors gessiu Frtncofcirli, 1578.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 443
voymt une mrnvdlelutte avec la Russte, ks hii refusa.
Renforc6 par l'hetman Swierzewsky, Iwonia battit
les Turcs dans trois rencontres ; puis il se porta &
Kronstadt, et de Ik a Braila, a la recherche de Pierre,
son.competiteur. II demanda son extradition au com-
mandant turc de Braila; et celui-ci lui ayant fait por-
ter pour toute reponse dix boulets et deux filches par
quatre envoyes, Iwonia donna l'ordre de couper le
nez , les oreilles et les l&vres a ces malheureux , et
de les pendre par les pieds devant les murs de la
place. Braila fut prise d'assaut et livrie au carnage
pendant quatre jours : Tehin ouBendr et Bielogrod
ou Akkerman subirent le mtoe sort. Cependant les
Turcs avaient r£uni au-dela du Danube des forces
considerables avec un pare d'artiDerie de cent vingt
canons, et avaient achet£, au moyen de trente mille
ducats, la defection du commandant moldave de Cho-
cin. Le 9 juin 4574, l'armee moldave, forte de trente
mille hommes d'infanterie , pour la plupart paysans
indisciplines et mal armes, de treize mille cavaliers,
commandes par Tscharnjetzky , et de quatre-vingts
canons , se trouva en presence de l'arm£e turque a
Obloutsch en Bulgarie. Malgre la trabison de Tscharn-
jetzky, qui d£s le commencement de Taction or-
donna a ses cavaliers de baisser lews drapeaux, din-
cliner leurs t&es et d'£lever leurs casques sur leurs
lances , la bataille se prolongea avec une fortune di-
verse pendant trois journ^es. Les Turcs offrirent alors
une capitulation que les Cosaques voulaient rejeter;
mais les Moldaves, soufFrans de la soif, en exig£rent
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444 HISTOIRE
1'acceptation. Les parlementaires ecrrent sept entre-
vues , dans chacune desquelles les Turcs garantirent
par serment la libre retraite pour les Cosaques, Tarn-
nistie pour les Moldaves et une enttere stirete pour le
voi&vode; en consequence, Iwonia se reridit au kapi-
dji-baschi. Cet officier s'entretint durant quatre heures
avec son prisonnier; puis s'emportant tout-a-coup sur
une parole d^Iwonia, il lui porta deux coups de sabre,
Tun a la face et Tautre dans le ventre. Au mfime ins-
tant, les janissaires s'61anc6rent sur lui, lui tranch£rent
la tete qu'ils ticherent sur une pique , firent 6carteler
son corps par deux chameaux, rougirent leurs sabres
de son sang et se partagerent ses membres comme
des trophies. Les Cosaques tent£rent de se frayer un
passage les armes a la main a travers Tarmee turque,
mais tous p£rirent, k l'exception de seize settlement,
parmi lesquels Swierzewsky. Selim nomma votevode
de la Moldavie Pierre, fils du prince de Valachie , et
le fit installer par le kapidji-baschi Djigalazad£ , fils
de Cicala, qui avait &£ fait prisonnier k la bataille de,
Djerbe. La t&e dlwonia fut clouee k la porte de son
palais k Yassy, pour servir d'exemple de la vengeance
du Sultan contre ses vassaux revolts '.
Ces derniers ^venemens militaires et la conclusion
de la paix avec Venise nous conduisent k Texpos6 des
relations diplomatiques que la Porte entretenait alors
avec les autres puissances europeennes, telles que la
Pologne, la Russie, la France et TAutriche. A son
i St ryikowsky la vit encore en l'annee 157 5. Engel, HUtoirt de Hot*
davie, p. 726.
f
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 445
arriv£e dans la Daluiatie v&iitienne , ou il avait &6
envoy6 pour la fixation des frontteres, Aloisio Gri-
mani apprit que les Turcs s'etaient approprte les ter-
ritoires des villes de Zara , Sebenico et Spalatro , et
qu'ils refusaient de les restituer. Sur sa demande, le
baile Soranzo et Ferhad, pascha de Bosnie, s'&aient
rendu s, par ordre du Sultan, en quality de commis-
saires, dans la m&ne province. Ce ne fut qu'apr&s de
longues discussions au sujet des villages dependans de
Zara, Sebenico et Zemonic, que les V^nitiens parvin-
rent a obtenir la restitution de quarante villages du
territoire de Zara , de trente autres de celui de Sebe-
nico, ainsi que du contado de Possidaria. Le Polonais
Taranowsky fut charg£ vers cette epoque de deux
missions aupres de la Porte , ayant pour objet : la
premiere, le renouvellement de la capitulation ; la se-
conde, la presentation des excuses du roi de Pologne
pour la protection qu'il avait accord^e au voi6vode
de la Moldavie, Bogdan '. Les deux ambassades con-
i « Gionto un amdassador di Polonia , che gia due anni era stalo alia
» Porta, per far querela contra i Tartari. » Rapport de l'ambassadeur de
Venise du 10 avril xS'jZ. Taranowsky eut sa premiere audience le i3 mai
1570. Rapport de Rym. Le Rapport venitien du 3 juillet 157 3 dit : «Gionse
» qui il Giaus ritornato da Polonia e porto la confirmazione della. elezione
» di Mr. d'Angiu figlio del Re Chrisiianissimo in Re di quel regno , arrivo
» in carapo che gia era fatta l'elezione. » Cependant la Porte s'attribua vis*
a-vis de la France le merite de cette election , et rambassadeur fraucais
laissa passer cette pretention sans mot dire. Quatre mois auparavant, un
tschaousch 6tait revenu de Pologne; car, dans le Rapport du baile venitien
du 10 mars 1671 , on lit ces mots : « £ ritornato il Ciaus, che fu mandato
n al mese di novembre al Re di Polonia, e dolesi della no vita, che quel Re
» fecc contra i Tartari. »
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Si
446 HISTOIRE
s&utives de l'iv£qne d'Aix furent relatives a l'inter-
venlion de la France dans la negotiation du traits de
Venise et a Installation de Henri de Valois comme
roi de Pologne \ L'ambassadeur fran$ais n'avait ap-
porte aucun present de son souverain , et le grand-
vizir, blesse de cet oubli, voulait d'abord lui refuser
1'audience du Sultan; mais r^v&jue ayant repondu
que le roi de France ne s'&ait abstenu d'envoyer des
pr£sens que parce qu'ils etaient considers comme mi
tribut par les Turcs, et nullement par un motif d'ava-
rioe, le grand- vizir n'insista pas davantage, et Fam~
bassadeur obtint non seulement son audience, mais
encore un ferman, dans lequel le Sultan accordait aide
et protection aux Frangais qui se rendraient en p&e*
linage a Jerusalem \
Jean-le-Terrible envoya un ambassadeur a la Porte
pour elever des plain tes sur Tinvasion des Tatars, qui
s'&aient avanc^s jusque sous les murs de Mosoou ;
mais celui-cirepartit de Constantinople fort mecon-
tent de n'avoir pu obtenir du Sultan renvoi d'une am-
bassade ottomane en retour de la sienne (1 5 septembre
1571) [xxi]. Un an auparavant, un autre ambassadeur
i Flassrfn, t. II, p. 33. Rapport de Rym et d'TJngnad du mois de de-
cern bre i573, daas les Archives I. R. L'extrait du Rapport de l'ambassa-
deur venhien de l'annee 1572 dit : «Gionta di Persaolt ambassadore di
» S. M. Christiana. »
a Le temoignage de Flassan, t. II, p. 33, est plus digne de foi que celui
de Petis de La Croix , qui pretend a tort que M. de Noailles s'arracha des
bras du kapidji-baschi, lorsque celui-ci voulut, suivant r^tiquette & le COH3
duire devant le trone l et qu'U s'jr rCndit tout seul^
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DE L'EMPffiE OTTOMAN. #7
russe, porteur dune lettre du grand-prince 1 , s'&ait vu
contraint k assister debout a 1'audience du Sultan. De
toutes les relations diplomatiques de la Porte , oelles
quelle avait avec l'Allemagne &aient les plus fr6-
quentes et les plus intimes : en effet, les querelles con-
tinuelles sur les frontteres, renvoi des pr£sens annuels
et les negotiations de paix sans cesse renaissantes , ne
laissaient pas languir un instant les rapports entre les
deux puissances. Des l'£poque de la mission de Rym,
Tempereur avait envoy6 au Sultan, par son secretaire
Haniwald, une lettre qui contenait des plaintes et des
representations sur divers sujets. Les Turcs avaient
fiat phisieurs incursions pour s'emparer du district
situe entre la Theiss et la Samos, et le pascha d'Ofen
ne cessak d'exciter les habitans du palatinat de Laps
k se ranger sous la domination ottomane. Isa, sandjak
de Neograd , avait tente de soumettre par la force
G>rpona et Bakabanya, deux villes dont le Sultan lui
avait assignees revenus. Dun autre c6t£, Nassouf,
voievode de Szegedin, exigeait la cession en sa faveur
des villages voisins du siege de son gouvernement ,
qooiqu'ils appartinssent k 1'empereur. En outre , sur
la fronttere de la Croatie, les Turcs se disposaient k
reconstruire ks chateaux de Marczaly , Szent-Gyoergy,
1 Dans son Rapport dale de Constantinople, du 14 juillet 1570, l'agent
venitien Edouard Provisional! dit que le.Tzar, dans sa lettre au Sultan,
f 'intitulak : Imperatore di Russia , di Allemagna , e di tatta la Moscovia,
Cane di Casan e d'Astracan, Le porteur de cette lettre eut son audience le
3 juillet. Petschewi, f. 162, Djeriabi, p. 43 1, qui font mention de liova-.
sion des Tatars jusqu'a Jdoaow; et, d'apree eux, Caatemir, Rhpw de
Stlm U, $ % %
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448 HlSTOiRfi
Zakany et Csurgo ; d^ja m^me ils avaient elev6 un nou-
yeau fort, celui d&Segesd, d'oii ils ravageaient toute
la contree; enfin, dans la Carniole, ils avaient mis au
pillage plusieurs districts situ£s sur les lives de la
Poigk.
L'annee suivante (1571), Ali-Firouz, sandjak de
Kanisa , d&acha Tun de ses officiers , Malkodj , afin
d'attirer par une fuite simulee le brave George Thury
hors du chateau de Rajk. Celui -ci donna dans le
piege; il sortit du fort avec cent cavaliers et deux cents
fantassins ; cern6 de toutes parts, il soutint une lutte
glorieuse contre les Ottomans, mais il finit par sue-
comber sous la superiority du nombre. Le pascha
d'Ofen surprit, par suite d une trahison, le ch&teau de
Gede, pr6s de Fulek, et le fit raser (1 juin).
Depuis son arrivee a Constantinople, l'ambassadeiir
Rym avait neglige de venir saluer Tempereur lors-
qu'il passait les vendredis devant 1'hdtel de l'ambassade
pour se rendre a la mosqu^e; Albert de Wyss avait
adopts cet usage depuis la conqu&e de Szigeth. En
l'ann£e 1572, Tinternonce deMinkwiz se rendit pour
la seconde fois en qualite d'internonce a Constanti-
nople, porteur du present honorifique de Tempereur '.
Le 9 juin de la m£me ann£e, mourut le ren£gat po-
lonais Strozzeni , drogman de la Porte, qui avait et6
envoys successivement en quality d'ambassadeur k
Francfort, a Vienne, Venise , Paris et Varsovie*Le
jour suivant , Ali-Firouz offrit au diwan les trophies
i « Redit Miokuiz (2 juillet 157 1) Consiliarius, qui cum a duobut anus
» (1569) hue legatus primum venisset acceptissimus fuit. » Rapport de Rym.
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 44g
de sa victoire, savoir : les t&es de Thury et de neuf au-
tres chefs, quatorze prisonniers. trois drapeaux et deux
tambours. Le grand-vizir, voulant honorer Th^rofeme
de Thury, ordonna qu'on rendit les derniers devoirs
a sa t&e, tandis que celles des autres seraient exposees
a la vue du peuple. Outre sa lettre de cr&nce pour le
grand- vizir, Minkwiz etaitporteur dune autre lettre
de l'empereur adress£e au juif Jean Miquez, le puis-
sant favori du Sultan. En apprenant cette circon-
stance , le grand-vizir ne put s'empGcher d'exprimer
son £tonnement de ce que l'empereur 6crivait h un
juif. qui, disait-il. n'&ait pas maitre de Naxos, mais
seulement fernaier de la dime des vins de cette ile, et
qui n'avait acquis quelque influence qu'en s'immisgant
dans les affaires des V^nitiens, peuple de pgcheurs et
de juifs.
Le Sultan ayant eu vent des negotiations que Jean
Zapolya avait ouvertes aupres de la cour d'Autriche
au comencement de l'annee 1 570, ordonna au ren6gat
hongrois Perwane de demander h Zapolya les motifs
du long s£jour de ses ambassadeurs a Prague. Sigis-
mond repondit au tschaousch que son ambassade n'a-
vait d'autre but que d'obtenir une plus stride obser-
vation de l'ariqistice; cepeodant il conclut a la suite
de ces negociations une alliance offensive et defensive
avec l'empereur contre les Ottomans, sur la promesse
que Jui donna Maximilien de lui faire epouser une de
ses nieces. Mais ce traits fut nul dans ses r&ultats;
car Zapolya mourut dans la nuit du 1 3 au 1 4 mars de
lannee suivante. Les Etats de Transvlvanie £lurent
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45o HISTOIRE
pour lui succ^der Bathory di Somlyo, qui s'empressa
de faire parvenir le tribut au Sultan par Michel Gyu-
lay et deux autres envoy& ; satisfait de 1'exactitude du
nouveau prince, S&im confirm* son Election en lui
faisant remettre par le tschaousch Ahmed, avec le di-
pldme d'investiture, le drapeau et la massue. Lecom-
missaire ottoman revint & Constantinople, corabte des
pr&ens de Bathory et accompagn6 de son envoys Se-
besi. Ge dernier fut remplac^ 1-ann^e suivante par
Kendi, qui recommanda de nouveau le pays et le
prince k la protection du Sultan. Dans le cours de
cette annde, l'empereur chargea Edouard Provisional i
et Ungnad d'apporter a la Porte le present d'usage,
et il profita de cette circonstance pour exprimer des
plaintes sur le pillage du march£ de Simand. En 1 579,
Ungnad revint une seconde fois k Constantinople pour
remplacer Rym et preparer, a l'occasion de la remise
des pr&ens, le renouvellement du trait6 de paix qui
expirait dans deux anuses. Mais toute son habited
parut d'abord devoir 4chouer devant le resseqtiment
du grand-vizir, qui se plaignait vivement de l'incen-
die de Graniza, de la captivity des Turcs Ibrahim et
Hemin , et de la construction d'un nouveau fort k
Hegyfalu. Cependant, apr^s sept semaines de nego-
tiations , Sokolli annonga aux ambassadeurs que le
Sultan &ait prtt k signer le renouvellement de la ca-
pitulation arr6t£e en 1568, k la settle exception des
articles relattfs k Zapolya (3 octobre 1573). Les am-
bassadeurs demand&rent que le traits conelu pour huit
annees flit obligatotre pour les h&itiers et successeurs
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 45 1
des deux parties; mai& cette demande fat refuge ,
attendn, dit SokoUi, qo'il netait pas d'usage chex
les Ottomans que le p&re trait&t au nom do fils; il
qouta qu'il etait loisible k I'empereur de coropreadre
leg archiducs dans le trait&, si tel ^tait sou d&dr. Quant
aux villages qui payaient imp6t aux deux Etats, Sokolli
leur fit declarer par le tscfaaouach Mohammed qu'il
n entendait pas qu'il fitt rien chang£ aux anciennes
dispositions. L'ann& suivante, le grand-vizir retira
la promesae qu'il avait faite a Ungnad de lui ceder un
jardin et lui d&endit m&ne de sortir a cheval, parce
que le tribut n'avait pas et6 paye k l'6poque voulue.
Le present cependant ne tarda pas k toe apporte par
Philippe de Bruxelles, qui arriva k Constantinople
avec Ibrahim-Pascha ; celui-ci avait &6 mis en liberty
sur une lettre dans laquelle le Sultan demandaii k
I'empereur la delivrance d'Ibrahim , et se plaignait
de Tinvasion de Graniza et du rasement de Kallo. Le
grand-vizir et les six autres vizirs Pertew, Piate,
Ahmed, Mohammed, Moustafa et Sinan, regurent
comrae leur souverain les pr^sens stipules en leur fa-
veur. Apr£s quelques discussions, fut conclu un traits
qui renouvelait la paix pour huit ann£es; le grand-
vizir y avait introduit quelques modifications , mais
Ungnad obtint leur radiation; il se disposa k partir
pour Vienne , accompagn£ du drogman de la Porte,
Mohammed [xxn].
Pendant ces negotiations entre la Porte et l'Au-
triche, le Valaque B&kes intriguait k Constantinople
et k Vienne pour obtenir en sa favour rinvestiturerde
29*
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4j* histoire
la principaute de Transylvanie. Le tschaousch Moos-
tafa et le grec Scarlate, envoy^s k Vienne par Sokolli
k la recherche de Bogdan de Moldavie , se rencon-
tr^rent dans cette ville avec B&kes , au moment ou
celui-ci, neglig£ par Fempereur, avait r£solu de tour-
ner tous ses efforts du c6te de la Porte. Le prfitre
Adam Neisser et Marc Benkner . tous deux ren£gats
transylvaniens, furent charges par B^kes de n£gocier
aupr&s de la Porte sa nomination a la principaute de
Transylvanie : dans ce but, ils promirent a Sokolli une
sommede quarante mille ducats, et un anneau dune
valeur de dix mille ducats, et prirent l'engagement de
payer au Sultan le double du tribut stipule si B&kes
&ait nomme prince de Transylvanie. Mais Pierre
Egrud, envoys de Bathory, fit £chouer ces n^gocia-
tions par une offre de presens considerables. Vers ce
m£me temps, l'Arm£nien Christophe apporta k Con-
stantinople une lettre du roi de Pologne, pleine des
protestations les plus amicales. Dun autre c6t£. le
Sultan ecrivit, quelque temps avant sa mort (1574),
au roi de France Charles IX. ainsi que Sinan, qui se
preparait alors k sortir des Dardanelles. L'ambassa-
deur frangais accr£dit£ k Constantinople &ait M. de
Noailles, fr6re de l'6v6que d'Aix.
Nous ferons remarquer, a l'occasion de ce rapide
apergu des relations diplomatiques , que deja toutes
les affaires ext^rieures &aient traitees par l'entremise
des drogmans, et que ceux-ci pour la plupart &aient
des renegats. comme les meilleurs g£n£raux et les
plus grands hommes d'&at qui , sous les r&gnes de
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DE L'EMPIRE OTTOMAN . 453
Spuleiman et de S61im, £lev£rent lempire au plus
haut point de sa prosp£rit£. Sur dix grands-vizirs de
cette 6poque, huit &aient ren£gats. Ibrahim et l'eu-
nuque Souleiman &aient Grecs , Ayas Loutfi et Ah-
med, Albanais; Ali, dit le gros, &ait originaire de
l'Herzegovine, ainsi que Pertew-Pascha, Hersekoghli
et Doukaghinoghli. Roustem et son fr6re Sinan , les
vizirs Ferhad et Ahmed le traitre, Daoud et le conqu^-
rant de l'Y&nea, Sinan-Pascha, &aient tous d'origine
croate ou albanaise. La Bosnie avail vu naitre le
grand- vizir Mohammed Sokolli, le vizir Moustafa-
Paqpha, Khosrew-Pascha, la famille des Yahyaoghlis,
Yailak Moustafa-Pascha, Sal Mohammed -Pascha, le
conqu£rant de Ghypre Lala Moustafa-Pascha, le gou-
verheur d'Egypte Maktoul Mahmoud-Pascha , Bal-
taschi Ahmed-Pascha , Djenabi Ahmed-Pascha , Te-
merriid Ali- Pascha et Sofi Ali-Pascha, gouverneur
d'Egypte, mort devant Szigeth. Hasan-Pascha, gou-
verneur de I'Y&nen, et l'eunuque Dj&fer - Pascha
6taient n£s en Russie. Enfin , parmi les corsaires et
amiraux ottomans, Salih-Pascha &ait d'origine grec-
que et n6 dans un village de la plaine de Troie ,
Pial£-Pascha &ait Hongrois ou Croate, Kilidj-Ali,
Calabrais , et Barberousse, originaire de la Gr£ce. Si
done la puissance ottamane foula aux pieds tant de
nations, ce r£sultat ne doit pas fitre attribu£ au ca-
ract&re indolent et grossier des Ottomans, mais k l'es-.
prit de ruse et de finesse qui distingue les peuples
grecs et slaves, k la t&nerite et k la perfidie des Alba-
nais et des Dal males, k la perseverance et a Topini4^
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454 HISTOIRE
trrtl des Bosaieiis et des Croates, enfin k la valeur et
aax taleos des ren£gats des pays oonqtris.
Avant de terminer cfctte pfriode, la plus memorable
de rfatgtoire cfttomaue, par le rfcit de la more de S6-
lim, feqaelle eat Keu quinzfe jours apris fa signature
du Wat6 atec I'Autriche, nous croyons devoir.men-
tiotiner ici qoekjues Ivlnemens que les historiem ot-
tomans out coosid6r& comme des presages de oette
mort, et qui ne faisstaent pas de ftrire one profotide
impression sur 1'esprit superstitieux du Sultan. L'ap-
parition d'une com&e, un trembtement de terre qui
renversa quatre cents maisons & Constantinople, pne
inondatkrti k la Meoque qui fit trembler les habitans
pour la sflonte mafeon de la Kaaba , oaus&rent mains
d'effroi h Sdim que le feu qui Aetata daite les cuisines
du serai; car un incendie dans le palais d'Andrinople
avait ^gakment pr&6d6 la mort de son meal Sllim I*
Get accident et fa mort du grand-moufti Ebousououd
le plong&rent dans une profonde tristesse (septembre
1574). II avait moins regrett£, deux ans auparavant,
la perte du second deses fill qu'U ne d6plora Mors le
tr^pas du grand-scheikh de llslamisme, le plus puis-
sant soulien de la legislation ottomane pendant trente
annfes; M lavait cooibted'honneurs d£s les premiers
jours de son r£gne , et lui avait sacrifi£ son confident
intkne Djelalbeg, elite un an auparavant k Moaastir
pour avoir profit contre le moufti quelques paroles
inconsid£r&s. Un prince adonn£ au vin comme S^Km
deyait voir dans l'mcendie des cuisines «n presage
d'autant plus funeste que le feu avait d&ruit les offices
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 455
el les caves. Afin de sparer leg pertes de se* provi-
sions, U envoya en Egypte son sommellier Mesihaga.
Quelque temps apr£s, la nouvelle salle de bain (kous-
sour hamam) &ant terming, S£lim la visits avant que
left murs eussent perdu leur humidity, et, par pre-
caution bygtenique , il vida d'un seul trait uue bou-
teille de vin de Chypre; mais les fum&s de ce vin
rendapt *a roarche cbancelante, il glissa et tomba sur
les dalles de marbre mouill&s par les vapeurs du bain.
On le porta dans son lit, ou il fut saisi par unefi&vre
ardente qui l'emporta onze jours apris (27 sch&ban
982 _ i% d&embre 1 574) [xxhj]. Telle fut la fin de
ce prince intemp&ant , Tun des sultans qui ont le
plus souilte le tr6ne d'Osman par de honteuses d& ■
bauches [xxiv].
S£lim laissa six fils, les princes Mourad, Moham-
med, Souleunan, Moustafa, Djihanghir et Abdoullah.
II avait eu un septi&ne fils, Osman, dont la mort avail
pr&6d£ la sienne de deux ann£es. Ses trois fillesf urent
marines h des vizirs : Esma-Sultane &aft devenue la
femme du grand-vizir Sokolli ; Gewher $ultane avait
6pous6 , du vivant de Souleiman , le kapitan Pial6-Pa-
scha, k l'£poque m&ne ou la mice de S&im, Schah
Sultane, avait &6 donate a Hasan, aga des janissaires;
enfin, Fatima Sultane fat dans la suite mariee, par son
frAre le sultan Mourad m, h Siawousch Pascha avec
une dot de deux cent mille ducats.
Outre la Selimiy^ dont sous avon* d^ja parte, Sa-
ltan fonda une mosqufe k Andrinople dans le quar-
tier de Kanbounar ; il releva les murs de cette ville,
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416 HISTOIKE
et fit construire un ch&teau qui dominait le port de
Navarin. A la Mecque, il restaura les aqueducs qui
menagaient ruine, et ordonna que le. vestibule et
le harem de la Kaaba fussent orn£s de trois cent
soixante coupoles. Enfin, peu de temps avant sa mort,
il avait fait commencer la construction de deux nou-
velles academies dont il voulait doter Aya-Sofia , de
deux minarets, et de deux piliers destines k conso-
lider cette >mosqu£e 6branl£e par le dernier trem-
blement de terre; mais malheureusement ces piliers
furent places de maniere k d£figurer le monument.
S£lim dut abandonner a son successeur I'ach&vement
de ces travaux , de m6me qu'en mourant Souleiman
lui avait laisse le soin de terminer le grand pont de
Tschekmedje, pour la construction duquel il avait
remis quatre cent mille ducats au defterdar Hasan-
Tschelebi et au contr61eur de la Roumilie Khosrew-
beg. Si Tachivement du pont de Tschekmedje , le
Kanounnam£ d'Ebousououd et du nischandji Moham-
med sur la reorganisation du syst&me feodal, les con-
qu&es d'Arabie , de File de Chypre , et d'autres ex-
peditions glorieuses sur terre et sur mer, peuvent
6tre consideres comme le couronnement des grandes
oeuvres du r£gne de Souleiman , on ne doit pas en
conclure que les qualites £lev£es de ce souverain se
fussent transmises a son fils , prince indigne dun tel
pere; mais on doit en attribuer tout le merite au
grand-vizir Sokolli , que Souleiman avait 61ev6 dans
les derniers temps de son regne au premier poste de
Tempire, et avait 16gu6 k son successeur. Ainsi tout
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DE L'EMPIRE OTTOMAN. 45 7
Teclat dont nous voyons briller le rigne de Selim
n'est que le reflet de celui de son pr6d£cesseur, et les
peuples ne continu£rent d'etre maintenus dans l'obtis-
sance que par la terreur que r£pandait encore le nom
de Souleiman , le plus grand et le plus puissant des
successeurs d'Osman.
FIN DU TOMB SIX.IUME.
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NOTES
ET ECLAIRCISSEMENS.
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TVfOTES ET tiCLAIRCISSEMENS
DU SIXliME VOLUME.
LIVRE XXXI.
I. — Page io.
Ainsi que nous l'avons fait pour les campagnes de Belgrade,
Rhodes, Mohacz, Vienne, Guns , la premiere contre la Perse,
et celles de Corfou et de la Moldavia , nous eussions extrait
du Journal, de Souleiman ce qui a rapport a la seconde cam-
pagne contre la Perse, si cette partie eiistait dans leseul
exemplaire de ce precieux ouvrage qui soit jusqu'ici connu en
Europe. Heureusement il est possible de combler en quelque
sorte cette lacune en consultant YHistoire de la Turquie, par
Lewenklau, t. Ill; l'auteur y donne le Journal exact des mar-
ches et des stations de Farmee pendant la campagne de I'annee
i54 7 .
Mois d'avril (safer).
La campagne de Perse fut resolue le 22 sAfer q55 (3 avril
i548); le meme jour, le sandjakbeg de Bosnie, Oulama, fut
nomme gouverneur d'Erzeroum. Le a5 avril, Elkass Mirza,
frere du schah , se mit en marclie avec deux escadrons de
ghourebas. 26, depart de l'aga des janissaires. 28, Souleiman
dresse son camp a Scutari; l'arobassadeur franca is recoit l'ordre
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462 NOTES
de suivre le Sultan ; le fils dTahya-Pascha, Mohammedbeg,
ancien gouverneur d'Ofen , part en quality de sandjak pour
Semendra. La seconde station de Souleiman eut lieu a Mai-
depe\ 3, Tekfour tschairi, com me dans la premiere campagne
de Perse (dans Lewenklau, Kischon tzupri). 4 » DiL 5 , Tschi-
narli (dans Lewenklau, Ginarii), le chiteau et la riviere
d'Hereke (dans Lewenklau , Heregie). 6, Sitare Kceprisi, pres
de Nicomedie. 7, Rasiklu. 8, Dikillutasch. 9, Panboukkoei.
10, Yeniscbebr. 11, Akbiik. 12 , Kourtaran. i3, Bozouyouk
ou Bozoeni. i4, Ermeni derbend. i5, Sultanoeni. 16, Eski-
schebr. 17, Akoeren. 18, Seid-e-Ghazi. Les deux villages
suivans cites par Lewenklau ne se trouvent ni sur les cartes
ni dans d'autres sources connues; ce stnt : 18, Lulapa Giair
(tscbair, prairie), et 19, Baiatto. 20, Boulawadin. 21, la
fontaine Selam Aleik, citee dans Lewenklau comme formant
la frontiere entre la Karamanie et le Kermian. 22 , Tatarkoei.
*3 , Akscbebr. 24, Arkitscbalri. 25, Ilghoun. 26, Karazengi,
probablement la petite riviere de Sengissou , qui coule le long
d'une route (Meuasik, p. 33). 27, le Kilepegi de Lew. est
probablement Kelmikb. 28, Koniab. 29, Kirkhinar. 3o, Kara,
oinar. 3i, Akdjeschebr. 32, Adabeg; on passa a cdte* du lac
Douden. 33, Adalu, vis-a-vis d'Akdepe*, non loin d'Erekli.
34, prairie Nakarezen tschairi. 55, Nikde\ 36, Bugiet (?) (de
Lewenklau). 37, Devrelu Rarahissar. 38, les bords de la riviere
Indje Karassou. 39, Ralssariye\ 4o , les rives du lac d'lndjir-
goeli. 4i 9 plaine de Palas (?). $2 9 Djouboukowa. 43, Kedu-
kowa, sur les bords -du Sarimsaklu sou. 44 > Rhan Ouskok-
tschi. 45, Latifekban. /{6 Siwas* pres du ppnt du Kizil Jrmak
(Halys). 47» Rabat il ; le mot rahat signifie jour de repos; il est
done probable que Parmee se reposa ce jour-la , d'autant plus
que, suivant le Journal de Souleiman, l'arroee, dans la cam-
pagne de Perse, en i534, s'arreta. 489 Kotsch bissar, comme
etant la station la plus voisine. 49 9 Yapakkcei tschairi. 5o,
Papas yaHasi, dans le voisinage du rocber Ozkidji kalasi.
5 1 , Kouyoulou bissar. 52, Akschehr. 53 , Souschebri. 54 ,
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ET ECLAIRCJSSEMENS. 4^3
Akdepe yailasi. 55, Yazidjunun yailasi. 56, le village de Gir-
mane (?). 57, Erzendjan. 58, Djoubouk owa. 59, sur une mon-
tagne (yaila) dont le nom n'est pas cite\ 60, Karkinkhan (?).
61 , Kalaai Kbobnar. 6a, Peik yailaai. 63, le village de Sen-
sif. 64 9 dans les ehamps d'Erzeroum, non loin dea bains
cbauds (Ilidj6 , Elegia) , devant les partes d'Erzeroum. 66 ,
plaine de Pasinowa. 67, devant le chateau de Hasan (dans
Lewenklau El-ezkel) (?). 68, Tscboban koeprisi. 69, a Pentree
du d£fil£ Alagoez Derbend. 70, Iman kayasi. 71* au denou-
che* d*un defile* , dans Lewenklau Derbend agir , pour agiz
(d£boucn4). 72, frontiere de Perse ; on campe dans la vallee
d'llescbgherd. 73, Siretowasi. 74, Baschsif. 75,cbdteau de
Karadje\ 76, village de Tscbakerbeg. 77, village d'Agehi.
78, sons les mure d'Ardjiseh. 79, village de Bendmabi, dans
la valine de Karad6r4. 80, Hami Alem(?). 81, a l'entree da
de'file' Karaderbend deresi. 82, pres du village de Soagmenada*
83 , au-delk de Soegmenada , dans une foret. 84 » non loin de
Kbcel. 85 , Guldepe*. 86 , pres du Pont-Rouge (dans Lewen-
klau, Girdemiz4) (?). 87; an pied d'une montagne (Tagh dibi).
88, YanyedighL 89, Sofian. 90, Senam kazan, c'est-a-dire le
mausolee de Ghatankhan, devant Tebriz. 91 , Tebriz.
Dipatt de Tebriz.
92, Saruan Cullo (?). 93, Schebester, celebre par la nais-
sance de plusieur* pontes et savans, entre autres de Mahmoud
Schcbesteri , auteur du Gulscheni raz (parterre de roses des
mysteres). 94, le bourg de Tesoudj : on passe paries vil-
lages d'Almalu, Scberwan et Topaki. 95, Saztscbinar. 96,
bourg de Selmas, 97, Khanezor. 98, Alabagb. 99, au pied
d'une montagne (Tagb dibbi). 100, en-deca du cbdteau Mah-
moudiy£. 101 , au-dela dc ce chateau. 102, plaine de Kirkbi*
nar. io3, dans la plaine du fort d'Aounik (Kirtp** *©C "Afoxov),
Petis dc La Croix confond eette station avec celle de la ville
de Wan. 104, Wan. io5, Maldud giagi (?). 106, Bendmahi,
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464 NOTES
107* Ardjisch. 108, Tschoban tekiye\ 109, pres d'Aadil-
jouwaz, sur le lac de Wan. 1 1 o, pres du lac. 1 1 1 , Kazan yiiki,
pres de Boulanik goel ou lac trouble. 112, Melazkerd. 11 3,
Kalaai zernidj ; on etablit le camp sur les bords de la riviere
de Goeksou. 1 14 > Karakcepri (pres du Pont-Noir). 1 15 , Ka-
riye'i ak ghelin. 116, Outsch Boudak, les trois bras, ainsi
appele* parce que trois rivieres se reunissent en cet endroit:
le Mourad (Omiras) venant de la plaine de Melazker^, le
Goeksou , qui descend de celle de Sernidj, et le Wartou (?) ,
venant de celle de Terdjan. 117, Sekawikoei (?), sur les ri-
ves du Mourad. 118, Mousch. 1191 Kalai Serghit, pres de
Mouscb (suivant Lewenklau). 120, Aourmag (?). 121, Kariel
kouschlu ; on passa a cdt£ de Bidlis. 122, l'arraee passa a c6te
de la ville de Kefendcr et campa dans le village Kenek (?). 123,
passage des ponts de Konakdar. 1 24, Tarmee tra versa la riviere
de Bidlis , et campa pres de Do u khan Kceprisi. 125 , le couvent
Dewedjiler kiran: 126, pres de la ville d'Erzen. 127, sur les
bords de la riviere Bezeri (?), probab lenient Beschra ou Al-
tounsou. 128, surlesbords.de la riviere Panboukdji. 129, le
karavanserai d'Abarban (?), Kara Amid ou Diarbekr.
De Diarbekr, Sou lei man marcba sur Kbarpout et revint en
faisant les stations suivantes : 1, Dewe" getscbid. 2, Argbani,
au-dessous du village de Maaden (les mines). 3, Kouschliidje.
4, pres d'un lac. 5, sur la riviere de Sarii kamisch. 6, Kiriei
Seidler. (village des Se'ids ou descendansde Mohammed); Far-
med passe le Mourad. 7, Pesneg (?). 8 , Kbarpout. 9, Paski (?),
sur les bords d'un lac. 10, Kouschludje\ 11, Arghin. 12 , De-
wegedjid. i3, Diarbekr.
Marche de Diarbekr a Haleb.*
i , Les bords de la riviere de Kagred (?). 2 , Kizil depe.
3, Almalu koei. 4» Kariei kodja. 5, Abid binar ou Aabidoun.
6, Khaziue' bioar. 7, Roha ou Orfa (Edessa). 8, village de
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ET ECLAIRCISSEMENS. 465
Sche'ikh Mosllm. 9, Beschdepe. 10, aa-dela de la ville de
Biredjik. 11, Kariei Nizib. 12, riviere de Segiur (Akssou?).
i3, Bab (Dabik?). 14, Haieb.
II. — Page i8.
Istuanfi, 1. XVI, appelle Fenvoj^ de Souleiman Mobam-
med-Tscbaouscb ; Forgacs le nomme Mabmoud; d'apres le
projet de repoose de Ferdinand a Souleiman , qui se trouve
dans les Arcbives d'Autricbe, Mabmoad serait le veritable
nom de cet envoye" : « Nuntium M agnitudinis Vestrae egregium
• verum Mabmutb libenter visimus et audivimus turn propter
♦» Majestatem Vestram, a qua missus erat, turn quod ipsi cum
» eo lingua nostra loqui potuimus. » 19 mart. i55o.
III. — Page 21.
Hadji Khalfa, Tables chronologiques; Osman Efendi, Biogra-
phies des Vizirs. Dans ce dernier ouvrage , on lit que Sokolli
s'&ait marte en l'annee 969 (i56i) avec la petite-fille du Sul-
tan, la princ esse Esmakban (n£e en g5i — 1 544)> tandis que les
bistoriens bongroia placent ce mariage a l'epoque dont nous
parlons. Voyez Fessler, t. VII, p. 718.
IV. — Page 25.
Istuanfi confond les deux Ipoques fixees pour la fin des
campagnes des Turcs, savoir, dans l'equinoxe d'automne le
jour de Kasim (qu'il appelle Cassonginum) pour l'armee de
terre, et le jour de saint Demetrius (10 nov.) pour la flotte.
Les actes venitiens deposes aux arcbives de la maison I. R.
d'Autricbe contiennent un ferman au doge , datt du mois de
ramazan 937 (mars i55i), qui enjoint aux Venitiens de ne
point inquieter la navigation des caiques que le Sultan avait
fait construire a Obrowatz.
V. — Page 26.
Istuanfi I'appelle Mikbalogbli ; mais Mikbalogli-Kbizrbeg
t. vi. 3o
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M'S NOTES
ttait alors commandant de Siegedin; Istuanfi designe plus
tard ce commandant sous le nom de Heder.
VI. — Page 3o.
Istuanfi , Forgacs. Ascanio Cento rio. Pctschewi , f. 92 , se
trompe en disant qu'Oulama pent lui-m6me dans cette affaire.
Les autres historiens ottomans p assent cette defaite sous si-
lence.
VII. — Page 3d.
Forgac?. Ascanio Centorio, qui merite plus fie foi, dit a ce
mi jet : « Stava appoggiato soyra una tavola ove haveva on'
> orologio, un breyiario alia Romana. »
VIII. — Page 3o.
Js^uaqft djt : n Pugjone ejus jqguluro, » et Ascanjo : <t ftli
» 4ette M^a tprita s.opra del petto e nelfo gqla^ » et non pas
dans la iwque , cpmme leisure Fessler, t. VIII , p. 139.
IX. — Page 32.
On trouve une relation detainee de Ja trahison de Martin uzzi,
?t rexpose" des motifs qui ont determin6 Gastaldo a le faire perir
dans : Instrucka earum rerum y quas R. Gregorius episcopus Za-
graUensis nee non noh&s Don Didacus Lasso de Castiglia nostri
4tonsiUarii oratores et eomjnissaru devoti fideles nobis diked apud
beatissimum m Christo patrem et Dominum D. Julium J II dwina
Procidentia Sacrosanct* Romana ac universalis Eeclesue sum-
mum Bontifieem Dominum nostrum rvdm. nomine nostra reve-
renter proponere, agere, trad are ei expedire detent. Pragas, 2 ja-
nuarii i5$2. Le but de cette mission n'etait autre que de (aire
revoquer I'anatheme lance par le pape contre les meurtriers
da cardinal. On remarque ce passage dans les instructions des
envoyes : « Si tamen intelligent (Gastaldo) rem aliter transigi
» non posse, quam quod aut manum sibi inferri pateretur,
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ET ECLAIKCISSEMENS. 467
» aut ipsi ffatri Georgio tain nefaria molienii mannm inferret,
» tunc points ipse cum praeveniret ; atque hoc (Juidem nos-
» irum ma n datum die tus nfelHcus Locumtenens secutus, » et
apres avoir de>eloppe le projet da cardinal de livrerla Tran-
syWaate aux Turn , la lettre continue en ces termes : * Si-
» mukpie supradictntn man da turn in memoriatn reVocans tan-
» clem dictum fratrem Georgium prout gravissima ejus de-
» merita requirebant intcrfici curaverit et praedictos duos tur-
» cicos Chiaussios, qui recenter ad eundem fratrem Georgium
» vetlerunt in custodiam receperit, adeoque coram Deb et Sane-
» titate Sua et universo mundo non solum nulla $ poenas cen-
» surae incurrerimus, sed potius laudem et premium comme-
« ruerimus, utpote qui vim nostris militibus per interfectum
n monachum inferendam sine aliorum caede et sanguine vi re-
» pulerimus. » Les lettres apportees par les deux tschaouschs
se trouvent dans les archives d'Autriche parmi les actes hon-
grois ; elles prouveut jusqu'a l'evidence que si le general turc
comptait sur les bons services et le denouement de Martinuzzi,
il craignait cependant que les tschaouschs ne fussatt livr^s a
Ferdinand. II est fort curieux dVntendre un pascha turc parler
de Giceron et rappeler a un cardinal les preceptes de l'fteriture.
« Imperator noster semper Augustus de eensu benigne aecepto
o nobis mandavit, ut a regno Transylvania? feliejssimum erige-
» remus exercitum et arma total iter deponeremus, quaf>roptcr
» expugnationem castri Themisvar dereliquimus et castrum
» Ghianadcssteraque castra deserulmus felietssimoque exercitui
» licentiam dedimus ac (nes) ad castrum Peeiai contulimus,
" dominatio quoque vestra cum gladiis, fustibus et lanternis ad
» debellationem civitatis Lippa venit com mHtatus cater ?a Pha-
» risaeorum atque latronum et aliquantulo Turearum cuniculo
» fugam arripiendo interfecto ad praefatas civitatis castri eapu-
» gaationeifi, ubi Holamabeg cum aliquibus Gaesareis militibus
)» inclusus est debeUare studet, quo intellecto ad Illustrissimum
»> Halipassa Budun Beglerbegi cum to to felicisskno exercitu
• sibi comisso venit. Nos autem cum nil innovare aGaesareper-
3o*
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4<>B NOTES
» misssum sit, liceniiam dedimus cum tale committere ultra
» totius orbis terrarum leges sit ; nam, ut Cicero inquit, fides
» hostibus servanda est, et qua? in praetcritis lilteris nobis D; V.
» nuntiavit, cognovimus ea fide carere. Verumtamen finis om-
» nium rerum et potentia magni Imperatoris semper August!
» ac ejus ferocitas consideranda est , bisque perspectis operari
» sagajcissimum est; quamobrem D. V. nobis Mahamet Ciau-
» sium et Dervis famulum nostrum cum responso universali
» mittere dignetur. Nam eorum retentia quid ut prodest, quod
m D. V* utile sit et ne quidem taedium bis meis praestem finem
m do. Dat. in castro Peciai die vere primo mensis Decembris
» i55i. » *-
Deuxieme lettre:
« Principum laus et gloria in manibus eorum ministrorura
» consistit, c conversoque zizania discordia et sedilio in eorum
» malignitate constat ; Hoc ideo ne aliquid innovetur scanda-
» lum cum tua erga Caesarem fidelitas animique sinceritas e
» commissis manifesto fuerit talique,modo Holama dimittendo
» et regium exercitum placando, cujus causa fidesque versus
» Dm. Vm. inter tales et tantos principes est praevaricari
• debeatur, Imperatorque noster semper Augustus bellum fa-
» cere teneat, quod si .firm iter ac pacifice permanebit non offi>
m ceret, nam D. V. nobis missis litteris nuntiavit, quod cas-
» trum Pecia et Beckerek et ci vita tern Lippa , neque alia cas-
» tra usque ad rivum Ghiris non esse in possessione sua, neque
» suae con venire jurisdictioni ; nos autem omnia, quae a D. V.
» exposita fuerunt , Invictissimo Imp era tori certificabimus*
» Haec ideo causa prestata et retardatio census, qui si ante mis-
» sus fuisset, non talia succederent, nee bujus discordiae bel-
» lique causa fuisset; nunc vero D. V. Holama Pascise ordi-
» navit, ut ex parte D. V, a nobis castra Pecia et Becscberecb
» peteret , nobisque clarum et manifestum est , nullam ex eis
9 main Gsm. M em . utilitatem et commodum habere, nam non
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ET tiCLAIRCISSEMENS. • 469
» nostrum est castra accipere ac tribuere, id praeter Caesari
» (neminem) decet, nos autem praedicta castra mandato Caesa-
» reo accepimus Deo dante conservabimus, sed, si voluntas
• D. V. fuerit haec, habere castra, nuntio litterisque a Celso
• Summoque Imperatore petat, tuncque cognita fidelitate et
» voluotate non denegabit, benigne etgratiose concedet, nos
n igitur pront posse erit nostra ad principes pacificandos
>» laborabimus, D. qnoque Vestra castro Pecia, Becscherech
• et Cbaragh derelicto Domino, qui Malchoych (Malkodj)
» Begi nnncupatur ex consanguineis Morat Begi bene se ha-
• bere dignetur. Cum itaqne commissio Caesarea itlic per-
■ mansit, nos autem bucusque' nihil combussimus atque de-
» vastavimus, qupd si voluissemus hicce cum inedictato (?)
» Romanise exercitu regnum istud Transylvania? devastasse-
» mus; ideo fin em omnium rerum considerare debet secun-
» dumsuara prudentiam atque doctrinam religionemque, cui mi-
» nime decet meos non mittere homines , itaque talis est nostra
n spes, ut his visis mittere dignetur. Nos in castro Belgrado
» invernari praeceptum fuit; felicissimos exercitus instruere et
» exstruere; facundissimis litteris nos participes reddere digne-
» rit, ipsosque fideles mittere bene potest, ut in dies nostra bene
» convalescat amicitia, et amor, qui omnibus totius orbis'ter-
» rarum hominibus palam sit, et semper amoris vinculis pulil-
• lamina , amicitiaeque accrescere nitemur. D. quoque Vestra
» Rev ma. Illma. felix et prospere valeat. Dat in Bellogrado
m Die VIII. mensis Decembris i55i. » Voici le titre : IUmo.
Bevmo. Do. Fratri Georgia Archiepiscopo Varadensi nee non
Regni Transylvania Thesaurario Casareoque Locumtenenti
GeneraU Dignissimo. Outre les deux lettrcs precitees et les
instructions donnecs aux ambassadeurs dans le but d'obtenir
la revocation de l'anatheme (les documens les plus importans
qui existent sur I'assassinat de Martin uzzi), les Archives d'Au-
triche rcn ferment parmi les manuscrits historiques, sous le
n*9o8, un man use rit portant le titre de MortediFrate Giorgio
con alcune alt re cose di Transylvania et Ungaria success* negli
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4;o NOTES
anni i55i 4 i55a. Ony N lit, f. 4^ : * Avvisida Costaotinopoli
» come il del to frate anchor che seeo fingessc dldar eianck al
» Turco per tenqrlo pacifico nandiineno m effetto ftascosta-
» mente pratticava di tiaccordarsi seco , offcrendogli maggior
» tributo del sollto de promettendo i mandate in pertizione i
» Spagooli e Todesthi , con eh* U costfirmasie suo Vattada e
» lo laseiasse governar pacifie&mente di eh* sua Maesta, per
h eanibiA babea avvertko il Casta] do, eomrnetftendogii eapres-
n saracnte, che quajjdo si acoorgesst, «W il Frate fosse per
» venir a tali effetto lo prevenisae. » L'aufteur met entaerement
la responsabUite^ de ce crime sur le coalite des deax secre-
taires Italians Francesco degU Strepofci &h Aftilano et Alassan-
drino Marco Antonio Ferrari, qui, aaivaoA lui, Vaumient
coinmisavec $forza et PallavicLni. On pretend que Martiiwzzi,
au moment on il recent le coup de poignard, s'ecria : O Do-
mine, queue hoc mihi? Les tsohaouachs farent arises dans ie
chateau d'Alvinz t et les lettres d« moine taowvees sur eni en-
voy ees k Vienne.
X. — Page 3^.
Isluaau, 1. XVII , p. 3 1 9, appalle Khizr, Heder. Fapgacxii
Commentarii , p. 4^« Ascano Centorio , f; i5G, change le nom
de Tob Michel en Ottemiale, et eelui d'Obcrnstorf en Ourestoljo.
Voy, auasi Wol%. Bethlen, Fesslerj Engel, Djelakadd, Solak-
zadej Ali, XLVU* recit, Abdoalazie et Petschewi. Le dernier
denne les details comme les tenant de la bonche de Hamza-
Aga , tscbaottschbaschi du gouwerneur dWeiK
XI. — Page 4^»
Parmi les vases d'or qui jfurent trbuves en Fan nee 1 790 dans le
palatinat de Saroscb,etqui sont conserves dansle mnsee impe-
rial des antiquites, se trouve nne coupe avec cette inscription :
BOYTAOYA ZQAIIATS. TArPIHTH. HTZITH. TAI2H. LeTagrogeset
les Jazygeses se trouvent deja cites dans Dio Cassias, 1. XXI,
de Xipbilinus, ou ils portent les noms de Idffvyc? et Aaxpeyot.
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ET ECLAlRCISSEMENSi 47*
Xtl. — Page 44.
Si cette Iettre de sdmniatioh est eidctfcinent reproduce dans
son contetru (SAfflbucciiS, de Jgnd tbsMitihe), le prtAfflbule
Ego Natulai Bass a ne I'est pas; e'est pVobabfement un'& faute
da traducteur , qui aurait du lire -Si inayetouUah , e'est-a-dire,
nous, par la gr&ce de Dieu, Pascha, elc.
XHI Page fo,
Ces noms sont Merits assez correctement dans Sambuccus
(Syndromus, p. 89), et Istuanfi, 1. XVIII. Catona, XXII,
p. 35q, les appelle Ambates (Ahmed), Ula manes Dertisi us,
Veligianes, Arslanes, Hazan ; le Persan Canber et Deriel sont
difficiles a reconnaitrc.
XIV. — Page 5i.
ktuatffi, 1. XVftl, SAmbucctis, I. c.; Fbrgacs, Comirttntarii,
p. ^o-ofc ; Asc&nioCeritorio, Corhnierttttrii delta gtierrddi Tran-
sylvania, p. 22 1-22 5, et principalement Seliastien Tinodi, qui
a decrit dans tine chronique rimee toutes les batailles el sieges
de|Juis la mort de Zapoljra jusqu'A celle die MaVtiuutei ; datas
Catona, XiXII, p. n3iV£3c). Les hlstorieris dttdrotftis, frlVtfcep-
tiort de PetscntSWi , f. 97, ne parfent <)uc fres^succinctenient
du siege d'Erteu.
XV. — Pagb 53.
Scnemsi-*Pascha, qui pretend descendre de Khaled, fils de
Welid> un des geiieraux du Prophete, fut successivement beg-
lerbeg de Syrie, d'Anatolie et de Roumilie. Tres-devouc au
prince Selim, il passa plus tard au service personnel du Sultan,
qui Fhonora de toute sa confiance et raffectionna a cause de
son talent poetique. Voy. les Biographies des pcetes } par Ahdi,
Latifi, Ascbik- Hasan zade et Kinalizadl.
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47* ' NOTES
XVI. — Page 55.
Petschewi. Solakzade dit : « Parce que l'empereur a jugd n^-
» cessaire dc faire mourir le prince, la demande de la paix ne
» fut point accueillie. »
XVII. — Page 56.
Les archives du prince Czartorisky a Pulawy contiennent sitr *
ces sept ambassades on missions les docnmens suivans : i° Une
lettre da tee de Constantinople du mois de join i55i, dans la-
quelle Souleiman promet de deTendre les droits d"Etienne a la
couronne de Hongrie; a une autre du i5 septembre i55i ,
dans laquelle Souleiman demande la punition de Demetrius
Wisznowiecky ; 3° une lettre datee d'Andrinople de I'annee
959-i552 9 remplie d'assurances d'amiti6 ; 4° une r6ponseala
lettre de Sigismond Auguste ,. relative auz affaires de sa soeur
Elisabeth et aux ravages exerces par lesTurcs en Pologne ; 5° une
lettre dat^e de Constantinople du 3 aout i553, apportee par
Fenvoye' Stanislas Tenizynski ; 6° une autre du mois de scbdban
960 (i555) sur les affaires de Transylvanie ; 7 une lettre da tee
de Kutahia de la meme annee apportee par Yazlowiecki, et con-
tenant des protestations d'amitie ; 8° au mois d'aout 1 554, m * s "
sion de Nicolas Brzozowski ; 9 moharrem 962 (novembre i554)>
mission de Pierre Pilecki; io° une lettre datee de Haleb (avrii
1 555), relative aux droits de pAturage entre le Dniester et le
Dnieper; n° une lettre datee de Constantinople du mois de
silkid^ 964 (septembre i556) relative au pillage de Bialogrod;
dans cette mime lettre, Souleiman exige de nouveau la puni-
tion de Demetrius Wisznowiecky; 12a une lettre datee d'An-
drinople du mois de mai i557, contenant de nouvelles plaintes
contre Demetrius et des menaces de faire marcher le khan de
Criinee. Outre ces do cum ens, dont je do is la % communication
au prince Adam Czarto risky, le comte Stanislas Rzewuski m'a
communique* sur des ambassades polonaises anteneures les no-
tions suivantes : i° Sous Casimir le Jagellon , Jean Rzeszowsk^
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ET ECLAIRCISSEMENS. 4 7 5
plus tard cheque de Cracovie, et Suchadolski se rendirent en
l'annee i444 a Constantinople afin de s'informer du sort du
roi Ladislas y 20 en 14789 un ambassadeur turc vint a Brzesc
en Lithuanie, et le roi promit d'envoyer en ^change nne am-
bassade en Turquie; 3* en 14899 Nicolas Firley conclot le
premier traits avec la Pologne; 4° en ! 49 2 j Albert le Jagellon
recut en audience un ambassadeur turc, charge* de renouveler
la treve eiistante ; elle fut, en effet, signee des l'annee suivante
pour trois ans; 5o le a5 Janvier i5oo, un ambassadeur turc
vint dans le meme but et ftit conge'die le 9 Janvier i5oi de la
diete de Petrikau. Pendant son si jour en Pologne, arriva Schah-
Ahmed comme ambassadeur du khan des Tatars; le dernier
revint en i5oa sous le regne d' Alexandre Jagellon.
XVIH. — Page 56.
Voy. le Rapport du baile Navagiero de Pannee i55s, a la
bibl. I. R. d'Autriche , Cod. DXXVII. Dans ce rapport, Na-
vagiero , s'exprime ainsi sur la person ne du Sultan : a Sul-
» tano Solimano Imperatpre d'anni 62 (il n'avait alors que
» cinquante-huit'ans) longo della persona , eccede la statura
» mediocre, magro, di color fosco, ha in faccia una mira-
» bile grandezza unita con dolcezza , sobrio nel mangiar, raro
» e poca carne e di capreto solo che habbia la pelle rossa' ,
» non beve vino , ma acque molto delicate. * (Dependant on
lui reprocha de s'dtre livre souvent a la boisson avec son fa-
vori Ibrahim; il souffrait d'une paralysie et paraissait menace
d*hydropisie. « Servatore della sua legge fa professione di
» non mancar mai alia sua fede. » Navagiero raconte une
.anecdote d'apres laquelle Roxelane aurait captive" les faveurs
de Souleimau en raison des mauvais traitemens qu'elle es-
snyait de la part de sa rivafe , une Circassienne , mere de
Moustafa. La Circassienne, dans sa colere, appelait Roxelane
de la chair vendue (carne vendutd), et lui dlchirait la figure
avec les ongles. Lorsqu'un jour Soule'iman la manda pres de
lui en lui envoyant le kizlaraga, Roxelane s'excusa en disant
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474 NOTES i.
qu'elk etait indigne de paraitre en presence de son mattre,
n'6taat que de la ebair vendue et ayant toute sa figure de-
cbiree. Puis l'auteur trace line peinture fidele du caractcre
de* fib du Sultan. Ensuite il donae quelqtca notions statis -
tiques* et dit que, d'apres lea livres du tresor* \ti raven** de
l'emptre moataient a cette e'poque a senf million* vingt mile
ducats f savoir : capita ti cm, un. ducat par t^te et un aspre et
demi pour cbaque piece de b&ailj un million einq cents mille
ducats; taxes pour des paten tes< privileges * brevets (berat)
et Germans, cent roille ducat* ; fortunes latissees au use a de*
fatri dfoeritiers legitimes* trois cent milk dueot*; retentisde
l'Egypte et de 1* Arabia, un million huit cent milk ducats ; la
moitic de cette summe restait dans les provinces en question,
afin de couvrir les frais d'administration et d'occupation ; reve-
nus de la Syrie , six cent mille ducats ; la moitic de cette
somme etait absorbee par les frais d'administratiott ; reve-
nue de la Mesopotatnie , deu» cent milk ducats, dont cin-
qaante mille pestaient dans le pays; les mines rsfpportaient
un million cinq cent mille ducats; la dime sur le bie, buit cent
mille ducats ; le tribut de la Moldavie , aeiye mille ducats ;
ceux de la Valacbie , douze mille ; de la Transylvanie , douze
mille; de Raguse> dix mille ; de Chypre, buit mille* L'auteur
nc nous dit pais comment £taieat prekv& les trois millions de
ducats qui manquent pour completer les neul millions sus-
diis. 11 &ze ainsi les depenses : la solde de l'armee a six mil-
lions de ducats, et les epargnes annueHesa trois riuliidhs, ce
qui , sans aueun dbuteyestuneerrenr. En Asie^ qua tone begler-
begs et quatre-vingt mille cavaliers ; en Europe , quarante
raiHe ; les sandjaks jouissaienti d'utt revenu de deux mille a
quatrC mille ducats; les possesseurs de timacs de quatre aaiUe a
quarante mille aspre*, ces derniers etant obliges dafournir en
retonr pdur ehaque quatre mille aspres un cavalier feieo equipe*
< t arme. Les soixante~dix sandjaks en Europe fbnrBissaient une
armee de quarante mille bommes; ka cent ciaquante saudjaks
en Ask. unc armee de qua*re>vingl milk a 1 cent milk borames.
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ET ECLAIHCISSEMENS. 4 7 5
k Nod possooo per tl testament o che fece in kwo profeta tener
» per schiavi neGreci,ne Jndci. » Lesquatre chef* des euriu-
ques du serai sent le kapou-aga* le kizlar-aga, le khazriedar et
le kilardji-kasebi. Les gardes a eheval dn Saltan, en temps de
guerre, ferment six eseadron* (boelftuk), composed desipafris,
siKhdara, o«lou£ed)is de 1'aile gaucfee et de; FaHe droite, et
ghouvebas de I'aile gauche et dfe Faik drorte. La flotte comp-
tait trois cents reis out caphaines, doat4&aean entail maitre de
sou aavire; chaque galere portail uh eamm avec einqnarrtfe a
quatre-vingte bootets et quatre fusils avec vittgt balks pour
chacun. Les ma&ones etaieut das MtUnens de transport potir
les munitions. Les chefs des galeres que Iftavagiero appelle
scapoli recevaient un traitement de neuf cents asp res et cent
qua ran te drachmcs dc biscuit; les padroni dix a quatorze as-
pres, et les officiers subalternes qua ire a huit aspres par jour.
XIX. — Page 5j.
Djclalzad£, f. 3o6; Solakzadc , f. 118; Petschewi, f. 109;
AH, XLVIII e recit, f. 262; le rhe'teur de Brousa, f. 22 ; Kina-
lizade' et Ahdi , dans la Biographie des poetes , sous Sultan-
Moustafa. Le Raouzatoul-ebrar } Hadji Rhalfa , Table* chro-
nologiques.
XX. — Page $& ■
Tbuan, XII;, Memotrej de ftibier, II, 44*7 » Mawrtesni his-
toria, 1. VII; Ascanio et KnoUes font de Mouata&le gower-
neur d'Amassia, et Robertson I'appelle ra&me gonverneur de
Diarbekr. Ce dernier ae trompe encore lorsqo'il dit quele grand-
vizir Ahmed n'avait gard£ sa place que pendant qnelques mois ;
la verite est qu'ii Foccupa pendant oVux an** Istuanfi coram? t
la m&Ute erreur. En fin, Robertson cite a tort, com mc source,
la qpatrieme lettre de Busbek au lieu de la premiere. La source
prineipale des. historians poste'rieurs &ait l'ou/vrege intkule :
Soltani Selimani harrendum /acinus in proprium fiUutn natu
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4?<5 NOTES
maximum Soltanum Mustaphamparricidio a. D. 1 553 patratum
autore Nicolao a Moffan Bur gun do. L'auteur pretend que
Souleiman, pousse par Ic repentir, ayait offert des sacrifices a
Jerusalem ! — Le voyageur allemand Dernschwamb ou Tburn-
schwam , qui se trouvait mele a la suite de Verantius et Zay
lors de leur voyage a Amassia , donne egalement quelques de-
tails sur la mort des princes Moustafa et Djihanghir. Cet ou-
vrage, jusqu'alors inconnu, se trouve au Muse* national a
Prague. La bibliotheque I. R. d'Autricfce possede , sous le
n° CCCCXG. Hist, prof., un rapport manuscrit en langue ita-
lienne jsur la guerre de Perse en i553, dont le eontenu s'ac-
corde avec le XI* livre de Bizari.
XXL — Page 5q^
Ahdi, Biographies de Kinalizade; Solakzade, Ali et Pe-
tschewi.
XXII. — Page 59.
Ali, f. 262, cite de cette elegie trois vers dont voici la tra-
duction : « Roustem nous a faitle chagrin de voir encore Sou-
» leiman assis sur le trone; le scheitan (satan) est-il destine a
» vivre encore long-temps? »
XXIII. — Page 60.
Yahyabeg eta it d'origine albanaise, et avait ete enleve dans
sa jeunesse pour etre enr6le dans le corps des janissaires. II
fut suecessivement administrateur des mosquees de Mourad
et d'Ourkhan a Brousa, et de eelle de Bayezid II a Constanti-
nople. A la mort de Roustem, il re cut a titre de pension un fief #
du revehu de vingt-sept mille aspres. Outre deux poemes ro-
manttques, le Schah et le mendiant et Yousovf et Souleika ,
Yahyabeg a compose! un Oussoubiami ou livre de morale. Dans
son ouvrage intitule Schehrengiz (rivolte de ville); il decrit Jcs
beautes de Constantinople. Voy. Const, et le Bosph., I j p. 6.
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Gdogle
ET ECLAIRCISSEMENS. 4 77
XXIV. — Page 6i.
Les historiens ottomans racontent sans deguisement l'ex^cu-
tion de Moustafa ; ils n'avaient.donc aucun motif de cacher le
suicide de Djihanghir, s'il £tait vrai, comme l'afErment les his-
toriens europeens, que celui-ci se fut poignarde en presence de
son pere, apres lui avoir energiquement reproche le meurtre de
son frere. Les historiens ottomans disent unanimement qu'il
e"tait tombe malade , et que tons les soins de la m^decine n'a-
vaient pu le sauyer.
XXV. —Page 66.
Ces lettres se trouvent dans Petschewi, f. 106 et 107, et dans
le Journal deSouleiman, n° XXXIX. Aucun historien ottoman
n'a donne les lettres des Persans. Gendulerun namesi netidjesi
boundan maaloum olour, c'est-a-dire, « le contenu de leurs let-
tres est corinu par cela (par la reponse). »
XXVI. — Page 67.
La formule la plus usitee des fermans du Sultan ; ScholU
bUesiz (vous devez l'entendre ainsi), et l'autre, empruntee aux
Arabes et employee envers les princes infideles ou hlrltiques :
Es-selam ala men ittebaa eUhouda (benediction sur celoi qui suit
la veritable direction), ont subi, dans cette circonstance , une
legere modification. La premiere, Ahwatiuwzi siz bilursiz; la
seconde, Es-selam ala men ittebaa eLkelam* Keldm (la parole)
signifie le plus generalement le Koran. '
• XXVII. — Page 69.
Cette lettre se trouvedans Petschewi, f. no- 11 2, etdans le
Journal de Soulefman, n° XLH. Ge dernier contient en outre,
n° XLI, une sommation adressee aux begs persans Massoum-
Khan Safewi, Schabkouli Khali fe, Bedrkhan etSoundik-Kou-
roudji-Baschi , de rendre le fort d'Altoun ; dans cette lettre ,
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4 7 8 NOTES
t>n leur promel non-sculeraent slcurite poor leurs biens et
leurs personnes, ma is aussi des pensions.
XXVIII. — PlGE 70.
Mouradjea d'Ohsson, t. VII, p. 482, donne la traduction des
litres du schah et du Saltan. Les mots ratification de la paix
signet a Constantinople le ?.g mai i555 conttennent nne er-
reur, en ce que le traits fut sign^ a Amassia et non a Constan-
tinople ou le Sultan n'arriva qu'au moisdejoin. Mouradjea
est tomb£ ici dans la meme erreur que Flassan, en pr&endant
que le premier traits de la France avec Souleiman en I'annee
1 535 avait £te" signe 1 a Constantinople.
XXIX. — Page 71.
« Dice (Roustem) che il Sgr. non ha mai mokstato Orator
» 4» alcuno i roper o, quello che S. Altetza ha fatto hora a me,
» che l'ha fatto non come Oratore ma come fidejussore della
» Maesta Vostfa. » Rapport de Malvezzi, dans les Archives I. R.,
date du 14 octobre i55i. La lettre du Sultan, qui n'existe que
traduite en latin par le drogman Ibrahim, successeur d'You-
ntsbeg, est signe> par ce dernier : « Ibrabimbei intcrpres major
n Majestatis suae invictissimae Imperatoris Turcarum. »
XXX. — Page 77.
Le Djihannuma , p. 590, remarque : Ce ch&teau (Sahiun)
rtait la place d'armes principale des Fedawies (Assassins), si re-
doutes pour leur valeur du temps du sultan egyptien Tahir Bi-
bar. Chacun d'eux avait un chateau , et le plus grand nombre
de ces ch&teaux £tait situ£ entre Tripoli et Saide* , Haleb et la
M^diterrance. Le chef de tous ces chdteaux e*tait alors Ben-
Hamza, eonnu parmi eux sous le nom de Scheikh (le vieux). Les
contes que plusieurs auteurs ont ecrits sur ses stratagemes n'ont
aucun fondement; mais comme ces Assassins etaient un pen pie
d'un grand courage, ees mensonges ont &t& rassemblls dans un
ouvrage qui parte le titre de Hamzmnami ou le livre de Hamza.
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£T ECLAIRCISSEMENS. 479
XXXI. — Page 78.
Castaldo, dans son rapport a Ferdinand date da 9 mai i552,
dit de ces fermans, qui se trouvent an nombre de plus de vingt
dans les Archives I. R., tous revdtus du sceau et du chiffre
du vizir Ahmed : « Unde autem emanent bae litters Turcales
» et Valaebae jam prius cow per turn haheo, aut en im est ilia -
» rum Ciaus ille, qui penes Transalpinum Voivodam manet. »
Comp. Pray, an. V, p. 48i» etCatqna, XXII, p. 189.
XSXJI. ^- J>AG* 78.
Des ducats hongrois, dont la va}eur etait a cette epoque cellc
d'un ecu desiz liyres. Comp. Busbek, ep. I, et Verantius, dans
Catona, XXII, p. 557.
XXXIII. — Page 80.
La traduction latine signee par Ibrahim j l'orjginal 4«te 4m
raois de redjeb, 962 (i555) s , e$en4 longuemen,t stjr la cession 4c
la Tranaylvqnie a, Sigis^moncl £apolya.
XXXIV. — Pagb 82.
Hadji Khalfa et le Raouzatoul-ebrar placent sa mort en Tan-
nee 960 ( 1 553] 1 et nop pas, en i55i» couvne. I« font Deguignes
el 1'auteur de I'Hist. du royaume de fa Chersonffe tqurique.
Pctersbourg, 1824, p. 371, Jl.es mots Veafperew S&itn envoy a
son grand-vizir fc depas&der (i$5i) contiennent une double
erreur, d'abord parce que e'e'tait Spulejraan et non. Selim qui
rcgnait ; ensuite parce que Je grand-vi?ir etajt alors en Hon-
gric et noo pas dans la Crimee.
XXXV. — Page 8a.
Le titre de czar ou tzar est generakment considere com me
derivant de Casar; mais cWun titre bien ancien des s^u ve-
ra ins asiatiques. On en trouve la preuye dans le titre le Sekar>
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48o NOTES
souverain de (xurdjistan (Vojr. Mines d Orient y L, p. 326, et
Siebienmeer, III, p. 200) et dans celui de la tzarine (Zaptwi) des
Scythes.
UVRE xxxn.
I. — Page 85.
ATin bacuU azl etmem deju jemin etmischler fil waki kail
etdiler. Hadji Khalfa, Tables chronologiques, dans la liste
des grands- vizirs , p. 176. II faut remarquer a ce sujet qu'on
trouve dans ces tables la date de 972 au lieu de 962 , et que
s'il est dit dans la li'gne pr^cedente : « Lorsque la place de
Roustem fut offerte a son frere Ahmed, » ce mot de frere ne
de*signe pas la parent^ du sang, mais simplemeut la qualite
de collegue dans les fonctions du vizi rat, car Ahmed n'&ait
pas frere de Roustem , le premier £tant Albanais d'origine ,
Pautre' Croate. Osman-Efendi , Biographies des grands-vizirs,
et Ali. -
II. — Page 86.
L'Histoire de tancienne et de la nouvelle ftgypte, par Souheili,
imprimee a Constantinople, tome I, p. 55, confond les trois
Ali qui se succ£derent dans le gouvernement de TEgypte, sa-
voir : Semiz Ali ou Ali le gros; Sofi Ali ou Ali le sage, et
Rbadim-Ali ou AH Veunuqw. Lorsque Souleiman-Pascha fut
envoys pour commander en chef Tarmee d'exp&Iition de
Plnde en mai i538, Daoud-Pascha lui succeed a, et mourut au
mois d'avril 1 549 » *1 ^ ut reroplace^ par Ali-le-Gros, qui mourut,
selon Souheili, en 960 (i553); mais e'est a cette, epoque et
apres la chute de Roustem qu'il se rendit a Constantinople.
II n'administra l'Egypte que quatre ans, et non pas onze y
com me l'assure Verantius (Catona , XII , p. 755). II eut pour
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ET ECLAIRCISSEMENS. 481
successeur Doukaghin-Mohammed (AH, Hadji Khalfa, I. c. ,
et dans la liste des gouverneurs d'Egypte, p. 219), et non pas,
ainsi que le pretend Souheili, Sofi-Ali, qui ne vint que plus
tard ; Souheili se trompe done en faisant mourir Ali-le-Gros
en 960 et en placant Sofi-Ali entre Ali-le-Gros et Doukaghin.
Hadji Khalfa et VAlmanah er-rahmaniyet donnent la liste exacte
de ces gouverneurs.
III. — Page 88.
Ali , dans la Biographic d" Ahmed, et Resmi Ahmed-Efendi,
dans les Biographies des reis-efendis. Lorsque Lalesar Moham-
med &ait premier defterdar , Sunbul Me mi, second defterdar,
Memi Tschelebi, remplissait les fonctions de reis-efendi.
IV. — Page go.
Djelalzade, f. 3 16. D'apres Almosnino , p. i46, ces quatre
statues avaient £te" apportees du Gaire ; elles £taient de granit
que cet autcur appelle Marmot fino del Cairo.
V. — Page 91.
Ces inscriptions consistent dans le 36 e verset de la XXTV*
soura : « Dieu est la lumiere du ciel et de la terre. Sa lumiere
est comme la fenetre ouverte dans le mur, ou brille une lampe
recouverte de verre. Le verre brille comme l'etoile ; la lampe
est allumee avec de l'huile d'un arbre beni 5 ce n'est pas de
Fhuile qui vient de Test ou de l'ouest; elle ne J>rule que pour
qui elle veut. » On lit au-dessus du rmhrab : « Aussi souvent
que Zacharie monta les degrcs du mattre-autel. » Vis-a-vis
du mihrab, et au-dessus de la porte de la Kibla : « J'ai tourne
ma face vers celui qui a cree le ciel et la terre. » Au-dessus
de la fehdtre pratiquee a. droite du minber : « Les lieux re-
serve's a la priere appartiennent a Dieu : que nul n'ose s'j
mesurer avec lui. » Sur les deux portes laterales : « Salut a
vous qui avez £t£ patiens, car plus tard le royaume des cieux
t. ti. 3i
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48a NOTES
s'ouvrira po«r vous; talut a voua, eatra-jr poor j rester tout*
l'4ternit£. »
VI. — Page 92.
Djelalzadl, dont la pr4cieuse bistoire fc termine par la des-
cription de la Souleiraaniye' , donne encore celle du Harem ,
de la Mesdjid, de l'Ecole et de l'Acad6mie, des salles ou se fai-
saient les cours sur la tradition et le Koran, de la cuisine des
pauvres, de Fhdpital et des bains (f. 266 a 371). L'exemplaire
de son ou?rage, ou noos avons puise ces notions, fut ecrit a
Siolnok en l'annle 993 (1675), par Ibrahim, fib d'Ali, viogt
ans par consequent apres l'epoque ou s'arr&e l'kistoire de
Djelalzade*.
VII. — Page 93.
La mere de Selim et non pas de M oostafa, com me je l*ai dit
par erreur dans mon ouvrage Constantinople et le Bosphore.
On lit dans Mouradjea d'Ohsson,t. II, p. 4^2 : «£leveeparla
valide* Khourrem-Sultane, mere de Selim; » mais il £crit S$-
lim I er au lieu de Selim II.
VIII. — Page 98.
Ali Kinaluade* est l'auteur d'un des ouvragef d'elhique les
plus estimls; il porte le titre YAklaki Alayi, e'est-a-dire la
morale a" Alayi, dans lequel sont fond as YAklaki Djelali de
Djelaleddin Mohammed Eddewani et YAklaki Nassiri de Nas-
s*reddin Tousi. On doit aussi a Ali Kinalizade des g loses mar-
gin a les au Teltvih, au Tedjr\d, au Mewaki/^et a YHedajet; il a
pub lie, en outre, deu* trails en arabe sur la plume et sur le
glaive (Kalemiyi et Selfiy**)* Hasan Kinaluade, biograpbe
des poetes, donne, outre l'histoire de son pere Ali, celles de son
afieul paternel Miri , et de son aieol maternel Kadiri , de aes
oncles paternels Kerami, Moslimi, Nihali, et de ses one les ma-
ternel* Maleii, lnayetoullab et Kadri; de se$ freres Febmi et
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ET ECLAIRCISSEMENS. 495
Fein, de son cousin Waffi, de son fiU Keranai f de sod aevea
Abdi, fib de Feizi. L'historien Ali raille Hasan Kiaalizade dV
voir (ait de tous ses parens autant de pontes.
IX. — Page 99.
L'anecdote suivante , rapporte'e j>ar 1'ambassadeur ve*nitiea
Bragadino (Marini Sanuto, XLI), est un exemple curieui de la
jalousie de Roxelane. « Al Sgr. fo dona doe donzelle di Rossia
» beilissime, una alia madre del esso Sgr. e la altraa lui y t
» zonte in Seraio, la seconda moier qua! tiene alpresente,
» haveva gravissimo dolor, e si butt 5 col viso in terra pian-
» gen do si, che la madre la qual havea dona la soa al Sgr. si
» accorse e la ritolse, e la mando a uno Sangiaco per moier, e
>r il Sgr. contenne etiam lui mandar la sua a un altro San-
» gtaco, percbe soa moier saria morta da dolor, se queste don-
» telle o pur una di quelle fosse resta nel Seraio. » D'apres
Niger, Waliich et Wagner, Roxelane serait fille de Nani Mar-
sigli de Sienne, et aurait et£ enlevee en i5^5 a Castello Colle-
chio par des pirates; mais, des l'annee i5^4> Roxelane etait mere
de Selinu
X. — Page tbo.
Le profcsseur Senkowsky, dans ton ouvrage d'aitleurs fort
eattm^ Supplement a Vkistoire genirule des Tures et des Mogols,
a fcneare aja»t£ a cette confusion , en ce qu'il a domid aux de-
tails eontenus dans le rapport de l'ambassadeur ruste enyoje
it Bokhara, details qu'il avait tires de l'histoire de Boukhara,
par le Persan Mohammed Yousouf de Kaswin * et qui sonl
aussi incomplete qu'infideles , la preference sur les notions que
donnent Herbelot et Deguignes, d'apres le Loubboul-iewarikh.
XI. — Page ioi.
Dans sa Table gintalogiqu*) Senkowsky ne donne que deux
it*
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484 NOTES
fils a Eboul-Khair, Koutschkoundji et Schahboudak ; mais il
en avait eu trois autres. II ne sait pas non plus que ces en fans
descendaient de deux meres , dont Fune etait arriere-petite-
fille de Tiraour.
XII. — Page ioa.
Senkowsky dit qu'immediatement apres la bataille de Merw,
Obeidoullah monta sur le trdne , parce que llustoire dont il
s'est servi ne fait point mention de Koutschkoundji et de son
fils Ebouseid*
XIII. — Page io3.
Dans la reponse de Souleiman a Borrakhan, on lit ces mots :
« Vous aver envoy e\ de votre cour Koutlouk Fouladi; nous
etions de tous temps avec vos anc£tres Obeidoullah et Abdoul-
aziz, actuelleinent au paradis, dans le plus parfait accord. »
XIV. — Page 104.
On lit dans la lettre de Borrakhan a Souleiman (Journal,
n° 4^) * « Et a la meme occasion, lorsque les ambassadeurs ar-
riverent, et que les trois cents janissaires amenerent de grands
et de petits canons. » On peut induire de ce passage combien
elait mal instruit Fhistorien persan qui a servi de source a.
Senkowsky, quand il place sous le regne de Mourad III la
premiere ambassade des sultans aux Ouzbegs : « L'ambassade
venue du temps de Soub Chan-quoli fut, selon lui, la premiere
que la cour de Constantinople ait envoyee dans la Boukharie,
p. u4.
XV. — Page io5.
Cest le titre de ce prince, appele Bourhan dans le manns-
crit de Senkowsky. Ce merae manuscrit place par erreur en
l'annee 950 (i543) l'avenement de Borrakhan, tandis qu'Ab*
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ET ECLAIRCISSEMENS. 485
doullatif ne mourut qu'en 961 (i 554) > P eu de temps apres Par-
rivee des janissaires de Sou lei man. En outre, Borrakban ne
mourut pas en 972, mais en 967 ; il ne regna done que cinq
ans, et non pas quatorze. Enfin il eut pour successeurs iinmeV
diats, d'abord Timour- Khan , qui rlgna un an; ensuite Pir
Mohammed-Khan, fits de Djanibeg, qui regna dix ans, et non
pas son frere Iskender; celui-la ne mohta sur le trone qu'apres
lea deux autres.
XVI. — Pige 106.
Les lettres qui se rapportent h cette circonstance se trouvent
dans les Archives imp. roy. d'Autriche. Les representations
d'Ungnad a Pempereur, datees de Pettau du 5 a out i554, ont
pour objet le manque d'hommes et d'argent. « Denn icb an
» Pferden nur 826, an Fussvolk bieNiemanden bab — also dass
» icb vom bemelten landt Steyer so das meiste Geld reicbt ,
n kbeinen Kriegsrat babe. » David Ungnad, baron de Sonegg,
signa ses rapports : « Lansbaubtmdnn in Steyer, Haubtmann
» und Vizedom zu Zilli, Oberster Spann der Grafschaft Wa-*
» rasdin, Obrister Feldbaubtman der dreyen Landt Steyer,
» Cberndt, und Krein aucb Crobaten und des windiscb Lands
» Grenizen. •
XVII. — Page 106.
Le sceau de Tbouigboun contient cette devise : Nakschi
muhuri Thouighoun bendei Schahi roubi meskoun. Ceat une imi-
tation du sceau du grand- vizir Ibrahim.
XVIII. — Page 114.
« Fuit discessus collegarum meorum sub finera Augusti anno
» supra millesimum quinquagesimum septimo. »
XIX. — Page ii5.
Dans les archives de la maison imp. roy* d'Autricbe : « Lit*
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486 NOTES -
» ter* de induciis observandis dd. 1 4* Febr. i5S8 expeditae per
» Maximilian urn nomine Caes. Ferdinandi ad arces Agria, Ziget,
» Giulai, Palota , Gomorn, Tata, Cbeznek , Tijban , Leva,
» Olabwyna, Swran, Chorgo, Berzencbe, Mwran, Zentbgyor-
» gia, Segbed , Wyzwsir, Papa , Korjona , Dewcber. » Oatre
cette liste des places frontieres de Hongrie, voici cclle des
cbAteaux-forts qui farent pris par les Tares pendant la duree
de 1'armistice : « Gyarraatb , Zeiben 9 Dregbel, Saagb , Cbyc-
» war, Zentgyergo , Waiz , Tata, Sambo, Kretbe, Wessprim,
» Vilanic, Bberleo, Zeksard , Hegyzentmartbo , Zentbjacob ,
» Qabecbe, Korotbna, Kaposwyawar, Vardan, Petek, Hoi-
» loJtoe, Fylek 5 en Croatie : Costaniza, Npvigrad; en Escjav*-
» pie s Tbasma, Wiercupe. »
XX. — Page 117.
£0 ambe le mot taHe aignifie It tuUpier.
XXJ. — Page 120,
Nadiretoul-MaKarib , e'est-a-dire la phis rare des bataifles,
en prose et en vers. Ali a reprodnit cet ouvrage presque en en-
tier dans son bistoire. Petschewi, f. i65, dit qu'Ali, secre-
taire de M6ustafa, pendant que ce dernier fut grand-mattre de
la cour, et plus tard maitre des requites de Seltm If, Tit toutes
les lettres £cbang£es en ire Bayezid et Selim.
XXIL — Page 125.
On voit par le rapport de 1'ambassadeur veiiitien du 7 no-
vembre i558, que Bayezid desirait le gouvernement de Syrie.
« Bajczid, doppo la morte della madre avendo perduto la spe-
m hbm dt otscnet la Soria, ep*m di eonsegoire ana. intenzione
» colle arme% »
XXIII. — Page 124.
Butbek, EpisL III ; « Vidi Constantinople i excedente
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ET ECLAIRCISSEMENS. 487
» anno L1X die quinto junii. • Petscbewi donne la date du
28 scbdban. Ce n'ltait pas le cavalier Chuirt us, que Busbek
dit avoir eu toute la con fiance de Bajezid, qui e"tait d'origine
kurde; mais bien Kodos Ferbad, dont parle Petscbewi', f. 27,
et qu'il ne faut pas confondre avec Ferbad, cinquieme, vizir,
ni avec Ferbad Solak, qui, dans la bataille de Kojuah, perdit
la main draile en combattant aux cot& de Selim.
XXIV. — Page 127.
C'est tout ce que les bistoriens ottomans rapportent sur le des-
sein qu*aurait forme Bajezid de s'emparer du trdne de Perse.
Solakzade* regarde cette supposition comme n 'ay ant aucun
fon dement. « II est Evident pour to us les bommes dou£s de
quelque jugement, que cette pens^e n'avait pu venir a Bayezid,
car tons les Persans ennemis n£s des Sunnis se seraient souleves
de toutes parts, et pas un des Ottomans n'eut £chappe\ » Ce que
raconte Busbek des bruits qui couraient alors ne mlrite pas
grande confiance, non plus que ce qu'il dit stir les causes du
ressehtiment du Sultan contre son fils Bajezid. Selon cet ara-
bassadeur, Bajezid aurait introduit sur la scene le Pseudo-
Moustafa, et son intrigue une fois decouverte, ce prince n' au-
rait du la vie qu'a I'intercession de sa mere aupres de Sou-
leiman. Les bistoriens ottomans qui raeontent la revolte du
Pseudo-Moustafa ne font pas mention de ces circonstances.
XXV. — Page 129.
Petscbewi donne sur cette mission des derails qu'il pretend
tenir de deux temoins oculaires, Sinan-Aga, possesseur d'un
fief en Syrmie , et qui avait e" to" eleve" au service de Tourak-
Tscbelebi, et de KaraPiri-Efeodi, confident de Mobammed-
Pascba , fils de Sinan-Pascba, et qui, dans la guerre de Perse
sous Mourad III, devint sous-secretaire (kialib-schagirdi) du
kiaja de l'aga des janissaires. II peut j avoir quelque cbose de
vrai dans ce que Petscbewi raconte, sur la foi de ces aqteurs ,
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488 NOTES
de la demande faite par l'ambassadeur Tubet , mais la lettre
qu'il attribue au scbab Tahinasp nous paralt apocryphe; car
clie est ecrite en tare et non en persan.
XXVI. — Page i33.
Le manuscrit de Senkowsky ne fait pas mention de ce Pir-
Mohammed, souverain des Ouzbegs au-dela dc l'Oxus, ni de
son prldlcesseur Timour, qui regna pendant un an , apres la
mort de Borrnkhan.
XXVII. — Page i3 9 .
Solakzade, f. 125 et 126 : Abdallarun zakhmnak we sine-
tschak oldoughi ha/la eyamindb idi. « C'etait dans la semaine
oii les Abdals (santons) se meurtrissent et se dechirent la poi-
trine. » Gette fete commence le i er moharrem f et se prolonge
pendant dix jours. Voy. Morier, Second journey through Pers.,
p. 1^5.
XXVIII. — Page 140.
Solakzade^ dans son ouvrage, cite deux ghazeles du prince
Bayezid, ecrites en langues turque et persane.
LIVRE XXXffl.
I. — Page 147.
Ces douze sciences ne sont cities qu'a cause du nombre pair
deux foissix; car le norabre reel des sciences professes dans
les academies n'est que de dix, ainsi que nous 1'avons vu plus
haut*
II. — Page 147*
Le mot galimatias derive du mot arabc ghalalaij e'est-i-dire
confusion, falras.
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ET fiCLAIROSSEMENS. 48»
III. — Page i5o.
L'original tare de ce traite" ne se trouve pas dans les archives
de la maison d'Autriche; mais Istuanfi, et d'apres lui Catona,
t. XXIII, p. 599, et Betblen, liv. V, p. 26, en donnent la tra-
duction litterale , due a l'interprete de la cour, Gaultier Spie-
gel. L'appendice au Journal de Souleiman contient la capitu-
lation de i547> avec cette remarqne, que ladite capitulation fat
renouvele'e en l'ann^e i56i. Busbek dorine la traduction de ce
traite* en latin : Exempla sive copia lilterarum creditoriarum <&-
dem Legato in causa induciarum octennalium ad Romanum Im-
perium a Turcoman Imperatore da t arum. Dans les archives de
S. M. Imp. Roy. d'Autriche se trouvent : Littera Casaris ad
Sultanum ddo. 8. Dec. i56a responsoria item ad Ali Pasckam,
par I'ambassadeur d'Ibrahim.
IV. — Pagb 1 56.
Istuanfi, lib. XXI, etForgacs, lib. XII ; Siglerus et Veran-
tins, dans Catona XXIII, p. 567 et 618. La lettre de Verantius
du 26 septembre 1562, dat£e d'Ofcn, est adressee a Roustem-
Pascha. Istuanfi se trompe done, lorsqu'il fait mourir de la
peste le sandjak d'Ofen Ibrahim, immediatement apresla le-
vee du siege de Ssathmar. On trouve dans la maison imp. roy.
d'Autriche , sur la captivity de Bebek : Littere captworum Be-
beki. Voy. au'ssi les rapports de 1'agent de Ferdinand, et de son
ambassadeur Albert de Wyss, du 14 juillet i56a. (Arch, de la
maison imp. roy. d'Autriche).
V. — Page 160.
La bibliotheque du prince Czartorisky a Pulawy contient
sur les ambassades polonaises de cette epoque les documens
suivans, traduitsdu turc en polonais : i° lettre de Souleiman
datee d'Andrinople du mois de mai i557, ou ^ se plaint de
Demetrius; 2 une autre lettre datee d'Ainassia du mois de
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490 NOTES
mobarrem 969 (septembre i56i) conienant des protestations
d'amiti£ , et portee par le staroste de Lemberg a Sigismond ;
3o uae lettre date* de 1'annee 971 (i563) relative a l'extradition
d'Etienne, moievofle de la Valacbie; 4« une *utre lettre datee
du mois de ailkide 971 (juillet i563) sup let brigandages exer-
#ea dans le paysde Bielogfod ; 5o une lettre sup le mime sujet,
datee du moisde rebioulrakbir 971 (uovembre i563); 60 u»e
autre lettre du moia de juin i563> conteaant la demande d'un
aeuf-conduit pour un negotiant qui devait se rendre a Moseou;
f ua document du moia de safer 97a (teptembre i564) conte-
aant la relation de la mission de Yaslowieckj, qui avait pour
abjet lea affiures de la Valachie et le reglement des ojroita de
pAtuvage ; 8° une lettre datee du mois de rebioul-ewwel 972
(ectobre i564)> dans laquelle le Sultan invite le roi a seeourir
Alexandre, hospodar'de laValaebie; 90 rapport du mois de
moharrem 973 (aout i565) sur la mission de Nicolas Brzesky.
VI. — Page 168.
Selaniki : Idjoghlanlerindtn bit Korbauzi arkasirui aloub mas-
sqndrqya tsehikarmak iU khalass eledi. Le mot korbouz est
syponjme de towvqna, c'est-a-direybrf ou trapu ; il Went peut-
etre du mot latin corpus; massandra est la aoupente pratiquee
daps (a pi u part des maisons des Turcs, et a laquelle on arrive
par un escalier etroit, ou par une echelle. Cest la que cou-
cbeut les damestiques et les enfant, et que les femmes vont se
placer pour regardcr les ombres cbinoises, les dwwes et au-
tres divertissemens.
VIL — Page 169.
HUtoirc de Selaniki, f. i3. L'ltinerario di itf. Antonio Pi-
gmfUim, Loadra i563, p. io3 : « i5o somuie (Juk) cTaspri
» cbe vengono ad esser 3oo,ooo ducati Soltanini. • D'apres
Abnosaino, p. 160, les frais de cetfct construction se seraient
djeveaa cinq cent cin«uan*e/uA/, somsaa qui equivaut, d'apres
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ET &CLAI1M2SSEMENS. fa
le«onrs dc k monnaie k cette epoque, k un million cent tnilte
ducats.
VIII. — Page ij5.
Mouradjea d'Ohsson ecrit eorrectentent le nora de Mebdi 5
il donne , p. 268 de son Tableau de V Empire ottoman, d'apres
quelques ouvrages persans , le portrait de ce person n age, at-
tendu an jour du dernier jugement.
IX. — Page 180.
Comparez outre lea passages dej& cites k l'occasion du siege
4e Constantinople, DioCassius,l. L. Hanovia? 1606, p. 4^6.
X. — Page 182.
Castiglioni place la fondation de cette dynaatie en i'an-
nee 724 > d'aprei Hadji Kb a 1 fa » mais il parait qu'ii na eon-
sulte" que la traduction faite de sea ouvrages par Carli, et dans
la quelle ce dernier e*crit Omar au lieu d'Ammar. Dans la
Liste des Dynasties, p. 167, Hadji Khalfa fixe en Panned 724
I'&ablissement de la dynastie des Beni-Ammar, et son ex-
tinction en rannee-8o2. Elle se compose de seize sou vera ins,
qui regnerent pendant soixante-dix-huit ann£es lunaires. Am-
mar design e Thomme police^ qui sait vivre, et derive du root
Amara, qui signifie il a veeu, il a cultwt. Les Arabes attacbent
a cette expression l'ide*e d'un bomme qui rem p lit fidelement
teus ses devoirs religieux, se montre tou jours affable avec les
autres, a de l'aptitude pour les affaires et aime k respirer Fea-
cens.
XL — Pace 184.
Hadji Khalfa, Hisloire des guerres maritimes, f. 32; dans
Pouvrage intitule Appendix Chronici Turcici Drechtleri^ par
Rosinus, Dragut (Torghoud) figure des Fannee i55i, irarae-
diatement a p res la conqu£te de Tripoli, comirie gouverneur de
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49* NOTES
cette province. Voy. en outre le discours public par Rosini r
Agricola (de hello adversus Turcum), el Rosarii : De victoria
Christiana ad Echinadas; enGn deux epftres de Sturm. Lipsiae,
1594.
XII. — Page 184.
Hadji Khalfa, dans son Histoire des guerres maritime*, f. 3o»
donne son Ipitaphe par le poete Sahari (vent du matin) i le
dernier vers de Inscription turque reproduit la date de sa
mort/en 961 (i554).
XIII. — Pace 186.
Cel ouvrage prlcieux se trouve a la bibliotbeque rojale de
Berlin. Diez en a donne* le somraaire dans ses Me* moires sur
FAsie, t. I, p. 33. II en existe des exemplaires dans la biblio-
tbeque rojale de Dresde, dans celle du Vatican et dans celle de
Bologne. J'en posse de moi-raeme un exemplaire.
XIV. — Page 187.
Miretoul Memalik , trad u it en partie par Diez dans le
vol. II de ses Memoires sur VAsie. On en trouve encore un ex-
trait dans le premier vol. des Transactions of the Asiatic so-
ciety of Bombay. Katibi est YOlearius turc
XV. — Page 187.
Le Mouhit est t res-rare ; je ne l'ai trouve" dans aucune des
bibliotheques de Constantinople , et en Europe , je n'en ai vu
qu'tin seul exemplaire au musee Borbonico a Naples.
XVI. — Page 188.
U Histoire des guerres maritimes d'Hadji Khalfa contient un
ordre apocryphe de Souleiman a Piale* et Torghoud; on ne
pent pas com prendre qu'un compilateur aussi Iclaire qu'Hadji
Kbalfa ait donnl place a cc document; il est date* du camp de
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ET ECLAIRCISSEMENS. 4 9 5
Terdjan, mais Souleiman n'y e"tait pas revenu depuis sa cam-
pagne de i535. Ibrahim-Pascha , mort depuis 1'annee i536,
j est d£sign£ comme grand- vizir. Du restc, il n*6tait pas
encore question , a l'lpoque dont nous parlons, de Piale* ni
de Torghoud.
XVII. — Page 188.
On peat encore reconnaftre dans le mot turc Ridji le nom
de'figure' de la ville de Reggio ; mais il serait plus difficile de
deviner quels ch&teaux Petschewi a voulu designer (f. 117)
sous les noma de Sandaldjiko , PaouliS, Kharoul; il en est de
mime des ch&teaux situls aux alentours de Naples, Casata,
Kit, Elina, CastelUa (peut-6tre Castellamare?) et Kitta. Pet-
•chewi rapporte que Pial6 avait donne Kilia au roi de France
au nom et de la part du Sultan. Je ne saurais pas davantage
reconnaftre le veritable nom des villes et forteresses . qu'A-
ramont dans un rapport au Sultan , lors de son sejour a
Amassia, aurait dit avoir 6tc conquises par le roi de France
snr Charles-Quint. Djelalzadl, Ali, et d'apres eux Petschewi,
f. n5, les appellent Molca, Marinas, Sepes, Maranour et
Sentil, et ils designent I'ambassadeur lui-meme sous le nom
de Monies.
XVIII. — Page 192.
Les bistoriens ottomans et europcens sont a peu pres d'ac-
cord sur revaluation des perles eprouvees par l'ennemi. Ulloa
compte dix-neuf galeres ; Hadji Khalfa vingt ; Rosin us, dans
la continuation de la Chronique de Drechsler, dit : « Triremes
» amissae 27, naves onerariae 14 • (peut-^tre pour vingt-quatre);
car Hadji Khalfa, dans son Histoire des guerres maritime*,
porte a vingt-six le nombre des barques.
XIX. — Page 193.
On trouve a la bibliotheque I. R. d'Autriche, parmi les
mauMscritSy Hiftoire prof t) u° DCCCCLXXXI V, un document
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4g4 NOTES
qui presente de nouveaux detail* sur la conqugte de D}trbe.
L'auteur de ce rapport, Thomas Holzbaimer de Barkluten
Franconie, faisait partie de la garnison aUemande de Djerbe
qu'il appelle Scbelues, et il tomba entre lea mains des Turca
apres la reddition de la place. Ge rapport est accompagne d'un
dessin representant le fort de Djerbl , et les divers bastions
que les Espagnols construisirent sous les doms de Serda, Gon-
zaga, San Zuan et Andrea Doria. II contient la liste des e#-
lonels et des capitaines des regimens et compagnies d'Espa-
gnols, Italiens, Maltais et AUemands ; la garnison se compo-
sait de dix-huit bannieres espagnoles representant ensemble
deaxe cents homines; de nenf bannieres italiennes, avec ua
effeetif de buit cents homines; et d'une banniere alWmande,
c'est-a-dire deux eents homines. Ce rapport donne aussi la
liste d&aillee des divers navires de la flotte et des capitaines
qui les eoramandaient. La flotte se coraposait de trente-six
vaisseaux , de quaraute-sept galeres et quatre galiotcs ; onte
vaisseaux 9 vingt-huit galeres et une galiote coulerent bat;
'dix-*neuf galores et une, galiote furent* prises et dirigees vers
Constantinople. Ennu^ on trouve dans ce rapport, reste jas-
qu'a present inconnu, une description de Tile de Djerb6; La
Hertha en contient une qui se rapporte a une £poque plus
recente. Les Espagnols avaient construit les bastions avec
des troncs d'oliviers et de dattiers; ils avaient des vivres en
abondauee, et Ton distr ibuait chaquc jour a la garnison sept
milte rations; mats ils manquaient d'eau potable, llsforcerent,
dans le priocipe , les habitans a boire Teau des sources sal&s,
et lorsque celles-ci furcnt taries ou infectees par les cadavres
d'animaux que les Tares y jeterent, les babitans passercnt tous
du e4te de l'enaemi. Les janissaires se servaieot d'arqueboaes
dont le canon avait sept palmes de longueur) et qui lan$aient
des balles pesant plusieurs onces.
XX. — Page 198.
Btlaniki, p. i6j ce n'etait done pas lekizlaraga, ctmi
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ET ECLAWCJ86EMENS. ft&
VjWM**t Vertot et anfci*. Mai* est twnw^Htl'^Biiwr^^w
gMtrres maritime* d'Hadji KbaMa, une faute plur gtttesjAre
qu'il fa*t aaos doute atferibuer an eopiste ott a l'lmpi-Smear* et
de laqnelle il resulteratt que le siege de Malte aarait eu He©
e& Va»nee 968 (iS6a) au lieu de 972 (i 565).
XXI. *- Pace 199/
Ali, LiVt* recit. Il ajoute que, pendant ce siege, Moustafa-
Pascha ordonna un jour aux canonniers de cesser le feu, afin
de pouvoir dormir.
XXII. «*»*- Pake loo.
Hadji Khalfa, Histoire des guerres mari times ^ en fixe te nom-
bre a trois cents. II faut ajouter plus de hi an i awrages df a
bistoriens europeens qui traltent de ceatege, eavoir ; i° Comitis
Secundi Curionis de hello MeUtensL Franco furti ; Tfi Hieronymi
Comitis Alexandrini Commentarii de acerfimo hello in insulam
Melitam gesto. Venei. 1 566 \ 3° Alfonso Ulloa terza parte delle
storie, il successo della potentissima armata metadata dal Tarco
sopraFisola di Malta tanno i565. Venez. i566; ^0 Impress a
di Malta diPier Gentile diVandotno dans Sansorino, I, p. 4i8 ;
5°£osius; 6° Vertot; *]* Commenlaire du comte Je>6me, tra-
dait en allemand par Je>6me Coeber de Scbeuberg. Outre
ces ouvrages imprimis, ton trouve a la bibliotbeque I. R.
d'Aiitricbe un manuscfit intitule : Antoriii Gryphii de expe-
dittone Turcica classis et Melitce ohsidione commentarius. L'au-
teur Inumere ainsi les forces de Tannee turque : sept mille
sipabis; quinze mille bommes de Raramanie; deux mille deux
cents du Peloponese; cinq cents de Tile de Lesbos; deux
mille trois cents jauissa ires ; treize mille. bommes d'autres
troupes soldees; trois mille cinq cents volontaires. Pour la
flotte, sortie du port de Modon, il compte cent quarantega*
leres, buit mabonas (baUimens de transport) , once vaisseaux
de guerre, doitt up mootl par deux cents sipajus portaUA
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496 NOTES
bord quatre mille tonneaux de poudre. Suivant le memo tu-
teur, le fils du beglerbeg d* Alger avait amene* douze galeres
avec un Equipage de quinze cents hommes; Torghoud treize
galeres avec seize cents hommes. II y avait encore six galeres et
six cents hommes envoyeY d'Alexandrie ; seize galeres et huit
cents hommes de Tripoli ; six triremes, vingt-deux biremes et
deux mille deux cents hommes d* Alger ; deux biremes et cent
quatre-vingts hommes de Pinon de Velez; en tout, deux cent
trente-six batimens et trente-six mille hommes.
XXIII. — Page 200.
Marsa Scirocco est nomm£, dans YHistoire des gucrres mari-
time*, Marsa Schoulok , et l'auteur n v a point reconnu dans le
mot Marsa la racine arabe Mersi (port), d'ou vient aussi le
nom de Marseille. Ant. Gryphius, manuscrit dela bibliotheque
I. R. d'Autriche, appelle ce port Haloque.
XXIV. — Page 204.
Alfonso Ulloa dit a ce sujet : « Pium est credere et che sieno
» stati S. Gio. Battista e S. Paolo. » Ulloa parle encore de l'ap-
parition d'un pigeon qui vint se percher'sur le clocher de l'e^-
glise de Sainte-Marie a Liebeinsiedel , et rapproche cette ap-
parition de celle de l'ap6tre Jacques , qui apparut aux Chre-
tiens, monte sur un cheval blanc, pendant la bataille livr£e
par Alphonse IX en 1212 a Miramolin (Mohammed-le-Mo-
wahide), et de celle de cc m£me apotre et de la madone, qui
decida en l'annee 1619 la victoire remportee par les chretiens,
sous les ordres de Fernand Cortez, sur les Am£ricains de Potosi.
XXV. — Page 206.
II existe a la bibliotheque I. R. d'Autriche une relation de
cette ambassade par Jacques de Betzeck, intitule : Verzaichniss
etl'icher meiner und der vurnembsten Re is en so ich zu beyderk. A.
ap. M. F ordinandi und Maximiliani II Dims ten ausser und
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ET ECLAIRCISSEMENS. 4 97
inner dem rcemisschen Reich mit Schickungen zum afftern Mahl
in Tyrggey, in Dennermarkh und Schweden audi sonst im
rccmischen Reich hin und wieder mitt all Geschicklichkeit meines
Leibs und Lebens hab unterthenigst Vhiss gebrauchen lassen.
Les journaux que Betzeck a laisses sur les voyages qu'il Gt en
quality de courrier sont au norabre de dix. Parmi les man use -
rits bistoriques de la bibliotbeque I. R. d'Autricbe, se trotive
une lettrc apocrypbe de Soule'iman a Maximilien II. Lestitres
qu'il s'y donnc de grand appui des dieux > de prince dont la
domination s'etend de VArbre sec au mont Achaya, et la date
singuiiere qui figure en t6te de cette lettre, premiere annee
de noire regne, vingt-deuxieme de notre dge, suffisent pour d<&-
montrer clairement qu'elle ne doit pas &tre attribute a Sou-
leiman , car l'annee i564 £tait la quarante-quatrierae de son
regne et la so ix ante-dixie me de sa vie.
XXVI. — Page 106.
Et non pas quatre-vingt-dix mille pour les trois anne*es ,
com me Paffirme Istuanfi. Selaniki dit que les vingt-cinq mille
piastres stipulees n'avaient pas e*te payees l'annle pre*cedente.
Ces vingt-cinq mille piastres , qui representaient la valeur de
trente mille ducats, indiquent le cours du ducat a cette £poque;
il equivalait a une piastre un sixieme. Selaniki est le premier
des auteurs ottomans qui ait parle de piastres ; mais il se trompe
certainement lorsqu'il donne a une piastre la valeur de cent
vingt aspres; car, suivant le cours de la monnaie a cette Ipoque,
cinquante aspres faisaient un ducat ; par consequent, une pias-
tre aurait presque valu deux ducats et demi, d'apres revalua-
tion de Selaniki.
XXVII. — Page 207.
Voy. rapports d' Albert de Wyss et des internonces , et leurs
instructions da tees du 27 octobre i564* La ratification dutraile
de paix par I'empereur porte la ro^me date. Voy. encore les
T. VI. 3s
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4<j8 NOTES
lettre* de Maximilien et la reponse de Sou lei man datee da
mois de rebioul-ewwcl 972 (octobre i564) dans laquelte ce
dernier temoigqe de ses bonnes dispositions a renouveler le
traite de paix; une autre lettre de Maximilien, ajant pour ob-
jet l'elargissement des deux nobles genois Cicala, pcre et fils;
en fin, la lettre de conge delivree aux trois internonces, datee
du 4 fevrier i565 (redjeb 972).
XXVIII.— Page 209.
D'apr£s le rapport a dressed a Tempcrcar Maximilien par la
conference, sur 1'opportunitd de la paix ou de la guerre. La
majority des suffrages etait pour la guerre; l'archiduc Charles,
gouverneur de la Slyrie, l'archiduc Ferdinand, gouverneur de
l'Autriche, les Etats de Silesie ct l'electeur de Baviere, avaient
opine! pour la paix. Les avis des archiducs furent mis sous les
yeux d'une commission dont les mem b res apparlenaient tous
aux Etats de Boheme, de Silesie, d'Autricbe, de Slyrie et de
Hongrie.
XXIX. — Page 209.
Bidgraphie de Moostafa Sokolli, ecrite par un auonyme , et
dediee au- juge d'Ofen, Abmid, en 1'annce i566, a lYpoque
eu Moustafa succeda a Arslan dans le gouvernement d'Ofen.
Cet ouvragfe, dans lequel Tauteur exalte en vers et eti prose les
hautes qualites de Moustafa , est intituled s Gendjinet Akhlak,
e'est-a-dire Trisor des qualiUs*
XXX. — Page 209.
Selaniki perdit son pcre pendant que 1'armee etait en mar-
che vers Sofia; il aurait du retourner alors a Selaniki, sa ville
natalc, mais il ne put se separer de la soci^te de beaux esprits
qui aeeompagnaient le bcglerbeg. Selaniki appelle le defter-
dar des timars Kaitaszade Ahmed Efendi ; celui des saims,
Omarbeg, fils de Khialibeg ; le juge, Isehreti Efendi } et le se-
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ET ECLAIRCISSEMENS. 499
cre'taire, Khouday'i Efendi. La biographic da beglerbeg Ah-
med-Pascha Soulkadroghli se trouve dans les Biographies des
PoeteSy et notamment dans celle qu'a laissee Kinalizade. Admis
a la cour de Selim II et de Mourad III , gr&ce a sa joyeuse
humeur, il ne jouissait pas , comme le fait remarquer Ali dans
sa notice sur les vizirs de Souleiman , d'une grande conside-
ration. II mourut en 987 (iSjS); son nora de po€te etait
Schemsi.
XXXI. — Page 216.
Selaniki. d'apres Ali et Petschewi, ce fat le 9; roais Ali se
trompe quant au jour de la semaine et meme quant a l'annee.
Le 9 schewal , c'est-a-dire le 29 avril de Fannee i566 , corres-
pondait a un lundi et non pas a un jeudi; et le depart du Sul-
tan eut lieu en 973, et non pas en 963 de 1'hegire. Istuanfi se
trompe egalement Iorsqu'il fait parlir Souleiman au com-
mencement du mois de juin.
XXXII. — Page 224.
Les historicns hongrois ignorent la construction du pont
de "Vukovar, et les historiens ottomans ne font pas mention de
l'envoi que, suivant Istuanfi et Budina, Souleiman aurait fait
a Hamzabeg d'un drap noir, 1'avertissant ainsi qu'il serait mis a
mort dans le cas ou le pont d'Essek ne s'acheverait pas dans le
delai prescrit. La ve>it£ est qu' Hamzabeg n'etait pas cbarge de
la construction de ce pont
XXXni. — Page 23 1.
Le passage de Phis to ire de Bizari , relatif a cet assaut, et que
presque tous les bistoriens poste>ieurs ont copi£, a donne* lieu
a cette erreur genera le men t accreditee, que la prise de Rhodes,
la bataille de Tschaldiran et de Haleb , ainsi que celle de Mo-
bacz seraient tombees le memo jour, 29 aout; mais Rhodes fut
conquise le 23 decembre 9 la bataille de Tschaldiran iivree le
22 aout, et celle de Haleb le 24 aout.
32*
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5oo NOTES
XXXIV. — Page 234.
Cette circonstance , inconnue aux historiens hongrois , ou
qu'ils out passee sous silence , de la mort de Zriny, est attestee
par Selaniki , temoin oculaire. Kodjian topi Kondaghi uze-
rind yiizi koyoun kibi koyoub, c'est-a-dire « platan t sa t£te sur
i'affut du canon de Ratzianer corame un mouton (qu'on tue). *
XXXV. — Page 235.
D'apres Bizari et Budina, le 9 septembre. Les historiens
^ottomans d&ignent, les uns le 7, les autres le 8; Selaniki et
Pctschewi se trompent sur la date de la mort de Sou lei man
(samcdi 6 septembre, 20 s&fer); ils commettent une double
erreur, tant par rapport a la date du mois que par rapport au
jour de la semaine. Outre Alf. Ulloa, qui a e"crit une relation
suf la campagne de Hongrie de i566, il e&iste encore une re-
lation i tali e nne sur le siege de Szigeth : Tmpresa di Zigethfatta
da Solimano (dans Sansovino, vol. I, p. 4^0 da incerto autore.
'Celtc relation est extra ite de Budina. Voyez aussi manus-
crit CVI, List. prof, de la Bibliotheque I. R. d'Autriche,
feuille soixante-seize a quatre-vingt : Relation und extrait von
Aussagen und besundteren Kundtschaften der Tiirggen erobe-
rung von Zigeth erfolgt aufden 7 September i566.
XXXVI. — Page 236.
De ce nombre £laient le tr£sorier Sinan, a Szigeth; le def-
terdar Mohammed beg de Funfkirchen ; le beglerbeg de Bassra,
Derwisch Ali-Pascha (Selaniki, p. 5i); le kapou-agaYakoub.
Outre les sources de'ja mentionnees, on peut encore consulter,
sur le siege de Szigeth , Ali, Petschewi, Selaniki , Solakzade\
le Raouzatoid-ebrar, le Dfamwul-tewarikh, le Nokhbetet-tewa-
rikky Djenabi, Hezarfenn, Tabiizad£, Aziz Tschelebi , dans
son histoke de Souleiraan , Hadji Khalfa , et le poeme rime de
Merakhi.
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ET ftXAIRCISSEMENS. 5or
UVRE XXXIV.
I. — : Page 240.
Idris parie egalement de ces dix qualites a Foccasion de
Bayezid II. Cond£, dans son Histoire des Maures y t. I, p. 33g,
les applique, avcc quelque cbangeraent cependant, a Said Ben-*
Soulefman Ben Djoudi : i° droiture; *x° courage; 3° sentimens
cbe valeresques ; 4° gr&ce; 5° talent poe'tique ; 6° eloquence;
70 force ; 8° habilet^ a manier la lance; 9 babilet6 a manier le
sabre; to babilete* a manier Tare. Idris au contraire cite les
dix qualites suivantes : i° prudence; 2° valeur; 3° sobrie'te;
4° force; 5° douceur; 6° fermete" ; 7 dignity ; 8° esprit entre-
prenant; 9 pudeur ; io° libe'ralite.
II. — Page 240.
Aliy f. 224, donne la liste deces eonqu£tes, savoir : en Van-
ned i5ao, Sabacs, Semlin, Slankamen, Kulpenic , Knin,
Perklas,Baridscb, Srebernik, Sokol, Belgrade; en Fanned i522;
Stance, Bodroun (Halicarnassus), Leros, Piscopia, Nisari*
Syme, Telos, Limonia, Kalyinn6, Khodos; en Fannie i526:
Peterwardein, Illok, Essek, Rataba, Gregurovecz^ Berkaszova,
Mitro viz, Tokay, Soilan, Mobacz, Pest, Szegedin, Bacs,Becse\
Tittel, Parka n, Tschewek, Erdoed, Kippacb (?), Ofen; en
Fannie i53a : Egerszeg, Nescbwar, Babocsa, Berzencze, Be-
lovar, Kapolna, Kapornak, Koermandvar , Poscbega, Guns;
en I'annle i533: Aadildjouwaz, Ardjiscb, Akhlatb, Woustan>
Awnik, Ikbtiraan, Aboul,Teng, Bikar, Bagdad, Dann, Schebr-
ban , Harouniye* , Artouk, Kcrkouk , Scbebrdjil r Sedjade" , le
Loristan, le Kbouzistan, Discbim, Koron; en Fannie i54« :
Valpo, Stublweissenbourg, Gran, Tata, Funf kircben , Siklos,
Temcswar, et en Asie Wasit, Wan, Bassra; en Fan nee i549,
dans la campagne de Perse : Tortum, Aktscbe-Kalaa, Ben~
gerd, Bcrakan , Niak, Ko'iki-, Koutscbouk, Samgban, Akbou^
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5o* NOTES
Nakbdjiwan ; en 1'annee j55j, dans la campagne de Hongrie:
Galad, Nagy Felnek, Eperies, Bodoiiak, Zadorlak, Arad,
Csanid, Illadia, Dewa , Lippa. Mais AH omet ici tous let
cb&teaux-forts conquis en Dalmatie et en Groatie dans l'ann£e
1 5^7, ainsi que les ties de PArchipel, qui tombereut an pou-
voirdu Sultan en 1'annee 153^.
III. — Page 244.
Djihannumo, p. 5 16 ; la depense journaliere d'une medrete*
^ tait done de quatre-vingt-quatre asp ret ou de trois cent trente-
six pour let qoatre.
IV. — Page 248.
Dans VInscha d* Ibrahim, n° 224 de la bibl. I. R., se trou-
vent les docuroens suivans : la reponse a la lettre de felicitation
de Schah Ismail (f. 12 et 14); dipl6me d'un vizir (f. 16); di-
plome pour le gouverneur de Diarbekr (P. 17); nn autre pour
le grand-vizir Ibrahim-Pascha (f. 18). UHistoirede Djelahadi
contient le diplome d'investiture du gouvernement d'Egypte
en faveur de Souleiman-Pascba, avec 4° millions d'aspres de
revenu (f. 22) , date" de 1'annee 943 (1 536) ; une lettre de Soulei-
man a Kbairbeg, de Tannic 926 (i52o) (f. 24); lettre a Scbab-
Tabmasp, relative a Bayezid (f. 25, 26, 27 et 3i); voyez
encore le journal de Souleiman. Ensuite les lettres du prince
Selim et du grand-maitre de sa cour au moufti de la Mecque
(f. 59) ; dipltime de Souleiman au scblrif de la Mecque de Fan-
nie 957 (i55i), et plusieurs lettres de felicitations au grand*
vizir Roustem , aux vizirs Ali , Abmed et autres vizirs; lettre
de condoleance a Roustem sur la mort de sa belle-mere ; en-
fin plusieurs rapports de juges , de sandjaks et autret digni-
taires. Ulnscha persan, que je tiens du corate de Lutzow,
contient la lettre de Souleiman a Scbabkouli , n° XV, et la
reponse par Ferroukhzad , n° XVI, la reponse de Souleiman
a la lettre president*; la lettre de Tabmasp, n° XVII, par la-
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ET ECLAIRCISSEMENS. 5o5
quelle il intercede en faveur de Bayezid, manque dans le jour-
nal de Souleiman; n° XVIII, reponse du Sultan (dans le
journal n Q LX).
V. — Page 248.
Les biographies etles anthologies ne donnent que quelques
distiqucs des quatre fils de Souleiman; aucun d'eux n'a laiss*
un diwan entier.-Fouri donne un extrait du diwan de Sou-
leiman sous le titre Akhlaki Souleimani> e'est-a-dire , les
qualites de Souleiman ; cet ouvrage fut terrain^ six ans avant
la mort du Sultan , en 979 (i56o).
VI. — Page 249.
Tout ce passage, tir£ de X Akhlaki Souleimani par Fouri,
se trouve traduit dans la preface de la traduction allemandt
deBaki,p.XLV.
VII. — Page 253.
Sousleregnede Souleiman I er moururent les poetes suivans:
I, Edayi, un des proteges du prince Moustafa et du grand-
vizir Sokolli; 2, Ishak Tscbelebi, auteur da Selimname (His-
toire de S£lim I er , en prose); 3, Iflatoun-Scbirwani, secretaire
intime du prince Elkass-Mirza ; 4> Hhami, Derwiscn Naksch-
bendi; 5, Erari-Tschelebi ; 6, Oumidi; 7, Amasi; 8, Enweri;
9, Belighi; 10, Bihischti; it,Bidari; i2,Beyani; i3,Soubouti;
i4, Senagi; i5, Djami, auteur du Seadet-name {Iwre de lafili-
citi) et de VHistoire des Martyrs deKerbela; 16, Djeiili, auteur
des ouvrages intitules : Khosrew et Schirin, Leila Medjnoun,
et GuUSadbcrg) e'est-a-dire, la rose eentifeuiUe; 17, Djenabi-
Pascba; 18, Djewberi; 19, Haleti; 20, Habsi, le prisonnier,
ainsi appele pour avoir e^e* retenu en prison pendant dix ans
par le grand-vizir Ibrahim; 21, Haireti, protege des families
Yayapaschaoghli, Tourakhati et Mikbaloghli; 22, Sinetschak-
Mewlewi, freane du precedent; 25, Ghawri ; 24, Kboudayi;
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5o4 NOTES
25,Khialibeg; 26, DaniscLi; 27, Sati; 28, Rabmi; 29, Rahiki?
3o, Rizayi ; 3i, Remzi (Piri-Pascba portait egalement ce
Lorn); 32, Rijazi; 33, un autre Rijazi; 34, Seined; 35, Si-
regi, auteur du Mirou Mah (le soleilet la lunej; 36, Sagbiri;
37, Saki; 38, Sahati, iraducteur de Pouvrage intitule : Ki-
midi Seadet (alchymie de la felicitd) de Ghazali; 39, Sabari;
4o, un autre Sabari; 4*, Sourouri; 4 2 > Sifali, surnom d'Ars-
lan-Pascba; 43, Siliki ; 44> Scbani; 4^» Scbabidi commenta
le Mesnewi et lc Goulscheni tewhid; 46, Scboukri, auteur d'un
Selimnami; 47 , Scbemsi ; 48, Sabiri ; 49 , Sani ; 5o , Saifi ;' 5 1 ,
Aarif, secretaire d'Elkass-Mirza , auteur d'un S chahnamd sur
Souleiman, directeur d'une academie de peinture et de belles-
lettres; 52, Aarifi; 53,Abdi, 54, un autre Abdi; 55, Askeri; 56,
Iscbki, Derwiscb-Begtascbi; 57, Ali Tscbelebi Kinalizade, au-
teur de YAkhlaki Atayi, ouvrage d'^thique tres-estime, et tra-
ducteur de Touvrage intitule : Lamiyet de Toghrayi; 58,
Ghoubari, derwiscb Nakscbbendi; 59, Ghazali ou Deliburader;
60, Ferdi , probablement l'bistorien; 62, Fazrileng; 63, Fou-
zouii ; 64, Figbani; 65, Fikri; 66, Feizi; 67, Faiki; 68,
Koudsi ; 69, Kandi ; 70, Kiasi ; 7 1 , Katibi, c'est-a-dire le capi-
ta ine Se'id-Ali ; 72, un autre Katibi ; 73, Kescbfi ; 74, Gounahi ;
75, Laraii; 76, Monla Lai hi; 77, Lati£, le biograpbe et poete;
78, Laali; 79, Lemii, fils de Lamii; 80, Liwayi; 81, Meali ; 82,
Mahremi; 83, Mahwi; 84, Mumi; 85, Merdudami; 86, Miiti ;
87 Moslimi; 88, Mescbrebi; 89, Moustafa-Tscbelebi , auteur
du Mihr ou Wefa (amour et fidilit£)\ 90, Mouidi, auteur du
Wamik et Azra; 9 c, Mourn in, auteur du Sqfername'; 92,
Meili; 93, Nesari; 94, Niscbani, le grand-nischandji, auteur
de YHistoire de Souleiman, Tabakatoul-Memalik et du Me-
wahiboul'AkhXak (prdsens des mceurs) ; 95, Nazmi; 96, Nimeti ,
auteur de Yousoufet Soulelkha} 97, Naimi ; 98, un autre
Naimi; 99, Nikabi; 100, Nakscbi; 101, Nigahi, 102, Nouhi ;
io3, Nouri; io4, Nibari; io5, Nibani; 106, Wabidij 107,
Wissali; 108, Hidjri; 109, Hedayi ; no, Helaki; in, Ile-
laki; 112, Yahya , auteur de Yousoufet Soulelkha et d'urv
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ET ECLAIRCISSEMENS. 5o5
Ousoulnamd (rivoke de viUeJ. Sous Selim II, mourarent les
poetes suivans : ij3, Agebi ; 1 i4 , Alchi ; 1 15, Araani-Tscbe-
lebi; 116, Beyani; 117, Traschi; 118, Sani; 119, Hadjbeg;
1 20, Djelali , confident de Selim II, celebre pour sa beautl;
121, Djemali; 122, Djinni; 123, Houkmi; i24,Kbatemi ; 123,
Kbosrew; 126, Derouni; 127, Derwiscb-Tscbelebi; 128, Ray i;
129, un autre Rayi; i3o, Refiileng; i5i, Roubi; i32, Sirri;
1 33, un autre Sirri; i34> Schani; i35, un autre Scbani ;
1 36, Sadik; 157, Sadii; i38 ; Monla-Aascbik, le biograpbe et
poete; i39, Ayari; i4o, Obei'di; i4i, Azari; 142,, Ischreti;
i43, Ilini; i44> Alewi ; i45, Ahdi ; i46, Tazli, auteur du GUI
ou Bulbel (la rose et le rossignol); i^j, Founouni; 148, Fouri,
auteur del' Akhlaki Souleimani , c'est»a-dire choix caractiris-
tique du diivan de S. Souleiman ; i49, Medjdi, traducteur des
Biographies de Taschkceprizade', de l'arabe en turc, de Qua~
rante Traditions et du Schemsiyi; i5o, Mabi; i5i, un autre
Mabi, i52, Moukbtari; i53, Merdoumi; i54, Mescbami; i55 9
Maali; i56 , un autre Maali ; 157, Nigari; i58, Nibani ; 159,
Woussouli; 160, Yetim. — Dans l'une et l'autre de ces listcs
manquent les deux grands poetes Abdoulbaki , mort sous 1c
regne de Mourad III , et Rewani , mort au commencement du
regne de Souleiman I er . AH les nomme dans sa liste des poetes
du regne de Selim I« r .
Vin. — Page 253.
Le grand-nischandji Djelalzade* , le defterdar Eboulfaiz , les
poetes Gbazali, Baki, Fouri, Fetballab, Aarif, Ramazanzade
et Isbak-Tscbelebi, etaient egalement verses dans la jurispru-
dence.
IX. — Page 253.
Ses a litres ouvrages sont : des gloses margin a les au Kou-
schafet au Tedjrid; des commentaires sur le Miftab, le Fewai-
doul inayet fi Urn il maani (rhetorique) , sur le D/ezeri/et
(explication du Koran) et sur VAwamil (syntaze). II traduisit
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5o6 NOTES
en outre lea biographies d'Ibn-Khallikan ; le Tarikh Shahabi
(His to ire des Corapagnons du Propnete); tHistoire des Phih-
sophes, et plusiears traites dont Attaji donne les litres.
X. — Page 253.
II ecrivit encore un commentaire sur la metaphjsique de
Nassireddin-Tousi {Tedjrid) sous le titre : El-mouhakemat et
tedjridiyet; un traite intitule : Maarikoul-Kouttab (les echelles
des ecrivains), et enfin Pouvrage Es sabaat es-seyaret (les
sept planetes). II mourut en 957 (i55o). Attaji et All, f. 3oo.
XL — Page 254.
11 laissa un commentaire sur les quarante traditions, un
autre sur le Feraiz de Seradjeddin, sur le Mottawely le Kafiyet,
le Tehziboul-mantik, le Tezkeret fi Um il heyet, des gloses
margin a les aux ouvrages suivans : le Meatakif, le Tefsir de
Kasikhan, le Schemall, biographic du Propnete, le TaalikeU
rtleHedayet. II mourut en 997 (1571). Attayi.
XII. — Page 255.
Dans Ali : Hekim, Sinan, Isa, Osman, Ishak, Ahmed-Tsche-
lebi et Mohammed Alkaissoum. Le fait de Vexistcnce de ce
dernier, sous le regne de Selira, refute suffisamment cette as-
sertion emisc par Istuanfi, Bizari, Budina et Forgacs, que pour
assurer le secret le medecin du Sultan avait ete empoisonne.
XII bis «. — Page 255.
1, Akhteri, mort en 968(1560), est Tauteur du Dictionnaire
persan-lurc, imp rime a Constantinople en 1827; 2, Scbebes-
teri, auteur d'une kasside persane sur le regne de Souleiman ,
de gloses marginales au Tedjrid et au commentaire de Djor-
* * Catte note a et£ omise par erreur; etle se rapporfe aux mots de quetqu*
importance (p. a£5, 1. 8).
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ET ECLAIRCISSEMENS. 5o 7
djani, le Tatvalii; Schakaik, f. i36; 3, Schireddin d'Erdebil,
traducteur des Biographies d'Ibn Khallikan, assassin 6 avec son
protecteur Kha'in Ahmed-Pascha/ Ali, f. 3oo; 4? Djemalizade"
mort en 968 (i56o), auteur d'une histoire ottoroane que Gau-
tier Spiegel a traduite en allemand par ordre de l'empereur
Ferdinand. Cet ouvrage se trouve a la bibliotheque rojale de
Berlin, parmi les manuserits de Diez, n° 32. Ali, Attayi et Aziz
Karatschelebizade, f. 179; 5, Abdoulkerim Sulfnigar, mort en
964 (i556), auteur de gloses marginales au Tedjrid a XHedayel
sur l'affranchisseroent, et d'un commentaire stir le Miftah,
Attayi, f. 7; 6, Abdoulewwel de Kazwin, mort en 966 (i558),
auteur d'un commentaire a l'EtVaywyrj, de gloses marginales au
Partage de Se'id Djordjani; il traduisit en outre en turc VHis-
toire de Hanbalizade. Attayi , f . 8 ; 7, Gharik Arabzadc, connu
aussi sous le nora dc poete Koudsi ; il se noya dans son trajet
de Rhodes a Alexandrie en 969 (i56c), auteur de gloses mar-
ginales a l'exegese du Koran de Bei'dhawi, a YHedayet,YInayet,
le Sadresch-scheriat , le Miftah. Attayi , f . 1759, Mimarzadi
(Moustafa Ben Mohammed), auteur de gloses marginales au
Dourrer on Ghourrer, a YHedayet, le Mewakif, le Miftah, etau
commentaire de Djami sur le Kafiye', mort en 985 (1^77);
10, Assam Ahmed Tschelebi, mort en 971 (i563); il ^crivit le
Latifnami (livre des agrdmens); n, Hanbalizade de Haleb,
mort en 929 (i563), auteur d'un commentaire sur l'ouvrage
mystique d'Atallah d'Alexandrie , d'une Histoire de Haleb
(Eszubd wez-zareb), d'une Histoire de la LilUrature (DurrouU
djebb), d'un TraiU sur les Enigmes, de gloses marginales au
Sadresch-scheriat, au Feralz de Seid Djordjani, d'un commen-
taire sur le Minar sous le titre : Ernvaroul-mulk, c'est-adire lu-
mieres del' empire, d'un Traitd d* A rithmitique, intitule IddetouL
hasib we oumdetoul mouhasib; 12, Fikari, le calligraphe, ecrivit
des gloses marginales au Kouschafet a l'exegese de Beidhawi, un
commentaire sur le Tedjrid,et composa plusieurs poesies arabes
et persanes; i3 , Sai laissa un Inscha, ou collection de lettres
en languesarabe, persane et turquej 1 4> Mohammed Al-Mogoschi
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5o8 NOTES
ecrivit des commentaires sur le Tacoalii d'Isfabani, le Mewakif
d'AUdji, le Mat alii de Razi ct le Moukhtassar du juge d'Ad-
hadeddin; i5, Schah Kasim, ie Persan, conduit a Constanti-
nople lors de la prise deTebriz;ii mourut en 948 (*54i),
avant d'avoir terra in e son Histoire de ^empire ottoman; 16,
Mohammed Al-Karamani laissa des gloses marginales au Kou-
schafy a Yexdgese de Beidhawi, au Telwih de Teftazani,et
ecrivit un commentaire sur Ylsbatoul-wadjib de Dewani; des
gloses marginales au commentaire du JVikayet, Sadresch-
scheriat, enfin un ouvrage intitule : Dj alibous- sour our [( at-
traits de la joie) ; 17, OBeidoullah 6. Al-Fenari, laissa le
meilleur commentaire sur la Barda, et une bibliotheque de
10,000 volumes; 18 Mohammed B. Scheikh Mahmoud Al-
maghlota'i , mort en 940 (t 533) ; il ecrivit un commentaire sur
leKqflye', des gloses au commentaire de Y Hidayetoul-hikmet
de Mewlanazade, qu'il ne faut pas confondre avec YHedayet
de Bourhaneddin de Maragha; il Ecrivit en outre des notes
auz gloses de Djordjani sur le Tedjrid et un commentaire sur la
quatre-vingt-treizieroe soura du Koran; 19, Moubiyeddin Ab-
doul-ewwel laissa une collection d'ecrits turcs, arabes et per-
sans, et autres petits traites ; 20, Hosameddin Housein Taliscb,
mort en 964(1 556), laissa un commentaire sur la Borda et un
Traiti de morale (Ebad) ; 22, Baldurzad6, auteur d'une biogra-
phie des savans dc Brousa ; 23 , Molla Satschlou Enweri de
Tebriz, auteur d'un Inscha a l'instar de ceux de Sai, Fikari et
Abdoul-ewwel ; 24, Yousouf Bali, fils de Scbemseddin Fenari,
ecrivit des gloses a YHedayet et un commentaire au Miftah,
mort en 954 (i547); 2 ^> Kara Tscbelcbi, auteur de notices sur
plusieurs oulemas turcs. Wakiati Kara Tscbelebi, dans Thistoire
de son fils, f. 570; 26, Kinalizade (Ali), pere du celebre au-
teur des Biographies despoetes turcs, et auteur d'un Kalemiye 9
d'un Seifiye* et de YAkhlaki Alayi {morale a^Alayi); 27,
Sirekzade, mort en 175 (i566), auteur de gloses marginales
a YHedayet et au Miftah) fils du precepteur de Souleiman ,
Sirek Moubiyeddin; 28, Mohammed d'Ibn en-nedjar, mort en
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ET ECLAIRCISSEMENS. 5og
977; il ecrivit des gloses au Commentaire du Koran d'Ebou-
sououd, et des notes aux gloses d'Hasan-Tscbelebi sur le Telwih
dc Teftazani j et au Dourrer ou Ghourrer de Monla-Khosrew ;
29, Moustafa Bostan , mort en 977 (1^69), il a e*crit des gloses
margin ales au commentaire de Sei'd Djordjani sur le Miftah y et
a une Histoire arabe des Seldjoukides ; il est encore auteur des
deux poemes : le Schah et le mendiant, et Khosrew et Schirin;
30, Fouri, mort en 978 (1670), auteur de gloses marginales au
Dourrer ou Ghourrer et de YAkhiaki Souleimani; 3 1, Molla
Atallah de Birgbe dans la province d'A'idin, auteur de gloses
marginales a Tex^gese du Koran et au Miftah; 32, Bihitscbi
ecrivit des gloses marginales au commentaire de YAkaid
(dogmes) par Khiali, au commentaire de YEdabi bahs , par
Mesoud Efendi, au Miftah et a la syntaxe de Djami; 33, Oumm
Welidzad£, mort en 980 (1672), auteur de plusieurs trails
sur le Kalemiy4 9 le Seifiye et le Schemiyd; 34, Akhizade You-
souf Tscbelebi, qu'il ne faut pas confondre avec le celebre m£-
decin de Selim l ep , commenta quelques passages du Miftah;
35, Scheikb Gharseddin B. Ibrahim, mort en 961 (i553), ecri-
vit un traits d'aritnm^tique, un autre sur le partage, un com-
mentaire sur le Mewakif, des gloses au Felekiat (astrologie), au
Moudjiz (medecine), au commentaire de Djami sur le Kafiyet^
un ouvrage cabalistique, et une explication de la kassidc Mi-
miyi d'Ebousououd; 56, Pirizad^ Djemali, soupconne d'avoir
empoisonneson pere le grand-vizirj 37 a 4o, les mouftis Saadi-
Ef'endi, Tschiwizade, Kadiri-Efendi, Moubiyeddin Alfenari,
ont deja et^ cites dans le cours de cette bistoire; 4* a 5o, les
dix grands legistes cites dans le texte , savoir : Kemalpascba-
zad£ , Ebousououd , Ibrabim de Haleb , Sourouri , Tascbkce-
prizade, Hafiz Adjem , Isalib Djelalzad£, Lari, Birgbeli, Molla
Khaireddin.
XIII. — Page 260.
Hezarfenn ; voy. Administration et constitution de l f Empire
ottoman j II , p. 182. D'apres Chalcondjle, les rev en us de Mo-
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5io NOTES
hammed II s*6Ievaient a quatre cents myriades de pieces d'or
( quatre millions de ducats) ; d'apres Mouradjea d'Ohsso* , les
revenus de Tempi re s'elevaient sous Mohammed a dix millions
de piastres , douze cenf millions d'aspres ou vingt-quatre mil-
lions de ducats; et sous Souic'iman , a vingt-six millions de
piastres, trois mi lie cent vingt millions d'aspres ou soizante-
deux millions quatre cent mi He ducats. Le rapport de Pietr©
Bragadino (Mar. Sanuto XL1) s'accorde a cet £gard avec les
sourcps otlomanes : « L'entrada di 12 millioni ducati. II Gonto
» delle Intrade per i Defterdari spesa fatta nel anno 800 mille
» ducati; item ha il Sgr. del Cairo a l'anno ducati 200 mille e
» da 11a Soria Ducati 200 mille. » Mais le tribut de l'Egyptt
montait a lui seul a huit cent mille ducats.
XIV. — Page 260.
D'apres le Rapport du baile Barbaro (Cod. n° 746 des ma*
nuscrits de Schwandtncr, f. 395), la cavalerie feudataire Itaift
forte de cent t rente mille chevaux, dont quatre-vingt mille en
Europe et cinquante mille en Asie : « Questi Timari sono com-
» partiti in tal maniera, che a quello, ch'e obbligato comparire
» con un sol cavallo, li vienne assignato un luogo estimato
» 3ooo aspri — 60 ducati d'oro, ma quelli che li suoi Ti-
» mari ascendono a maggior somma sono obligati da 5ooo
» aspri in su, condurre tanti cavalli, quanti 5ooo aspri hanno
» di rendita. »ll javait, en outre, quinze mille sipahisreguliers
avec une solde de douze a quinze asp res par jour (la gratifica-
tion en temps de guefre e*tait de vingt ducats par t£te); et douze
mille janissaires avec une solde de quatre a ncuf aspres. L'ar-
senal contenait trois cents galeres, parmi lesquelles quatorze ma-
hones, et un nombre determine de vaisseaux de transport pour
les chevaux ( palanderies ). La construction d'une gal ere ne
coutait que mille ducats ; chaque galere etait mont£e par vingt
azabs « li quali servono per timonier , maestranza, padroni,
» comiti. La com une oppinione, che quel Signore habbia
• 8 millioni d'oro d'intrata, e che 6 solamente si spendino, e
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ET ECLAIRCISSEMENS. 5u
» cbe duoi ne vadin sera pre avanzando. >» Barbara doute de ce
dernier fait; il calcule ainsi : « carazzi (kbaradj) 2 million i,
» dazzi 1 '/finillione, miniere '/ a millione, dei scritti '/a m ^"
»» Hone, di beni caducbi 100,000, tribuii di principi 170,0001
» in tntto raillioni 7 ed 670,000 (Bl. 4<>5). »
XV. — Page 269.
Comp. Constitution et administration de V Empire ottoman ,
t. I ; et t. VII I, p. 60 des Mimoires de VAcadimie des inscrip-
tions et belles-lettres, sous le titre : Troisieme et dernier mimoir*
sur la nature et les rivohitions du droit de proprieti territorial^
en Egypte, par M. S. de Sacy. II existe parmi les man user its de
Rangon, n° X, p. 209, un ouvrage intitule : Relazione delSgr.
F Hippo Pigafetta nobite Vicentino intorno al viaggzo del Eg it to,
deW AraUe, e del Mar Rosso e del Sinai, qui renfermc ce passage
curieuz : « Non e persona alcuna in iutto Egitto, cbc babbia
» per dir cosi un palroo di terreno, cbe sia proprio suo, e ben
m pocbi ed quelli piccoli poderi possedono, ma il tutto e dell'
» Ottomano , il quale da ad affitto li terreni de tutto r Egitto,
» facendosi pagare tanto fro men to e tanti denari , come, per
» esempio, della contrada detta Faium, cbe nella Bibla si dice
» Gossen, il Gran Signor cava, come si e detlo, 10,000 ribebe
» (probablement Erdeb) di fro men to, ed piu 40,000 Sultanini,
• e cusi delle altre. Questi aflittuarii si cbiamono Cbcssif (Kas-
» chif) Feddan si dice la misura del terreno, cioe una campa-
» gna si coropartira in tanti Feddan , come sul Bologncse in
** tornadure e in questri nostri paesi in campi; un pajo de buoi
» eoltivano 24 Feddan 5 in cbe e da notare, mo!te usanze delle
» Antiche esser rimaste in Egitto £n di quelle dei Faraoni,
» come questa di non baversi da nessuno privatamente terreno,
• cbe sia suo proprio , et quest' altro del pagare del terreno
n aflittato il quinto d'ogni cosa, le quale due leggi, come si
• vede nell' Esodo, furono institute da Giosef Ebreo. » Le pas-
sage suivant (f. 25) donne des details sur la valeur de la mon-
naie egyptienne d'alors : « Valendo il Sultanino , quanto il
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5ii NOTES
» ducato zeccbino Veneziano, cioe 4 1 Maedini, et il Maedino
»> il grosso, cioe soldi 4> la borsa vale 621 Soltanini. » II y
avait vingt-quatre sandjaks. Pigafelta, en parlaiit de Faque-
due du Caire, dit : • II Soldano nominato Campsone Gauro
» (Kansou Ghawri), il quale fu amazzato da Selim, edifico di
» pictra un aquedotto alto e bello con assai vole per condurre
» Tacqua del Nilo nel castello, lungo forse 3 miglic pigliando
» la piu corta linea dal'nume al castello. • En fin ildonnela
traduction de trois vers arabes, qu'il pretend avoir 6t6 inscrits
sur le Spbinx :
Passb quel tempo et quella genie,
E'vcnuto questo tempo con lascure,
Et ognuno cite dice il vero , gli vien rotto il capo.
XVI. — Page 270.
Ce Kanounname date de l'annee 939 (i532).
XVII. — Page 271.
Digeon , t. I, p. 86, altere au point de les rendre me'eon-
naissables les noras de ces sept milices, et coramet une grave
erreur en disant qu'Ebousououd sVtait refuse a composer une
elegie sur la mort de Soulei'man. Elle se trouve en entier dans
X Almanah er-rdhmaniyet. II est facile de rectifier Terreur de
Digeon relativement aux gouverneurs turcs en Egypte; Hadji
Khalfa, dans ses Tables chronologiques y p. 219, les place dans
cet ordre : Kbosrew, l'eunuque Souleiman (pour la seconde
fois), Daoud, Ali l'eunuque, Ali Lala Scbahin Moustafa, Ali
Sofi, Mabmoud.
XXIII. — Page 271.
i° Roumilie; 2° l'Archipcl; 3 P Alger; 4° Tripoli dans la
Barbarie ; 5° Ofen ; 6° Temeswar ; 70 Anatolie ; 8° Karamanie ;
90 Roum ou Siwas et Amassia ; io<> Soulkadr ; 1 1° Trabezoun ;
12° DiarHekr; i3° Wan; i4°Haleb; i5*Damas; 1601'Egypte;
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ET ECLAIRCISSEMENS. 5i5
1 7* la Mecque et Me* dine (l'Arabie P£tr4e) ; 1 8* 1' Y^men et Aden
(FArabie heureuse) ; 19* Bagdad; 20° Mossoul ; 21° Bassra.
Voy. Constitution et administration de I } Empire ottoman, 17,
p. 437-457-
UVRE XXXV.
I. — Page 290.
II est incroyable combien il regne de confusion, me'me cbez
les meilleurs historiens ottomans , par rapport a la date de la
mort de Souleiman. Ainsi que nous l'avons deja note" a la fin du
livre president, Ali seul a donne la date exacte de la prise de
Szigetfi (le 22 sdfer — 8 septembre), tandis que Petscbewi s'est
tromp6 sur la date de la mort du Sultan (22), et sur le jour de
la seraaine (jeudi), et Selaniki sur le jour de la semaine (sa-
medi au lieu de vendredi) ; il donne cependant la date veri-
table de la mort du Sultan (20 sdfer — 6 septembre). La lettre
en.voy£e a Selim est dat£e du 7 septembre , veillc de la prise
de Szigeth. Le tscbaouscb qui, huit jours apres, la remit au
prince a Kutahia, ne put arriver dans cette ville un vendredi,
comme le disent Selaniki et Solakzad6 , p'arce qu'il ne partit
qu'apres l'occupation de Szigetb. Le i4 rebioul-ewwel (29 sep-
tembre) que ces deux auteurs fixent comme le jour de I'entre'e
de Selim II a Constantinople n'est pas une date plus exacte ,
car le 14 rebioul-ewwel n'etait pas un lundi, mais un diman-
cbe; en outre, Selim repartit de Constantinople des le 26 sep-
tembre, comme le prouvent les rapports des ambassadeurs de
Venisc et d'Autriche.
II. — Page 294.
Selaniki , au contraire , cite ces paroles : Ya malikoul-me-
malik nedjana min el mehaUk inti el ebedi eU-baki we kulloun
sche'iyoun halik, c'est-a-dire : possesseur des Empires! sauvc-
t. ti. 33
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5i4 NOTES
nous de la perdition; tu es VEternel^ cetui a qui Hen ne resiste,
tandis que toute chose chit pdrir, et celles-ci : Ya iUhi weya
samedi min andek mededi o»* alellU tnoutemedi^ e'est~a-dire :
Dieu! 6 Eternel! c'est aupres de ioi que je me r&fugie, cest
toi qui es mon unique appui.
III. — Page 299.
Selaniki, p. 71 ; Solakzad^, le RaouzaiouUebrar, f. 3oi, et,
d'accord avec ce dernier ouvrage, les rapports d'Albert de
Wyss. L'ivrogoerie de Selim £tait une des principals causes
de la disgrace que ce prince eprouva dans les dernicrs temps
du regne de Souleiman. Les historiens ottomans lui donnent
glneralement le surnom de Mest (ivrogne); Ali, secretaire in-
time de La la-Mo ustafa* s'exprime avec franchise a cet 4gard.
Plus de vingt poetes et beaux esprits admis dans 1'jn.timite
de Selim, tela que Fazli, Schani, Alewi v Rayi, Kisimi,
Firaki, Makali, Merdumi, Nigari, le preset de son palais Bali-
Tscbelebi, et son compagnon intime Djelalbeg, partagerent
ses plaisirs. Un jour Selim demanda a ce dernier : « Que £it
le monde de moi? » Djelalbeg lui rlpondit : « L'armle veut top
frere Moustafa pour successeur ; ton frere Sultan- Bay ezid est
aime de son pere et de sa mere, mais on ne parle nullement de
toi, parce qu'on ne voit cbec toi aucune aptitude? » S41im lui
repliqua : « Que l'armee desire corame empereur Moustafa,
que mon pere ct ma mere comblentde leur affection Payeaid,
l'empire restera a Selim, si le seigneur des mendians }e veut
ainsi. » ,
IV. — Page 3oo.
La pompe funebre de Souleiraan-le-Grand fut, corarae
c«lle de Louis XIV, peu digne de la gloire dont il avait rem-
pli le monde : E stato Soliman sepelito miserabilmenle , fe~
vato solamente per i A$a. Rapport d' Albert de Wyss date* de
Constantinople fin decembre. Com p. Almosnino, p. 5i-5J.
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ET ECLAIRCISSEMENS. Si 5
V. — Page 3o4-
Selaniki, p. 79. Cet historien rapporte (f. 58), comme un
maavais presage qui par la suite aurait e'te" justified que Se"-
lira , imm£diatement apres la nouvelle de la mort de son pere,
avait mis en pieces une supplique des o aiders de sa cour, rela-
tive a leur avancement, en disant que le temps de s*en occu-
per n'&aitpas encore arrive* , et que cette laceration, telle que
lui, Selaniki , l'avait vue de scs propres yeux, avait retrancb6
les noms de Ferbad et (FOmeraga. Ce fait se passa pendant
le voyage de ce prince de Kutahia a Constantinople ; Selim ,
en se rendant a Belgrade , decbira egalement les suppliques
que les habitans lui presentment , a son passage , contre les
exactions des vizirs, en leur disant que, pour y faire droit, il
fallait que la partie adverse fut presente.
VI. — Page 3i6.
Fessler dit en treize interrogatdires (v. t. vn, p. 91). Hais il
se trompe, car d'apres le journal de Wranczy, dans Kovacbicb
Script rer. ung. min. I, p. i49> ils eurent quatorze audiences,
dont deux cnez le sultan.
VII. — Page 3a4. ,
Voy. sur ce traits le rapport dat£* d'Andrinople, du 20
mars i568, parmi les 119 pieces diplomatiques qui se trou-
vent rassembl&s dans la bibliotheque du primat de Hongrie ;
ces rapports ont M re'diges par les ambassadeurs impenaux
Verantius , Zay, Teufenbach> Busbek et de Wyss.
VIII. — Page 334-
Albert de Wyss et l'extrait des rapports des ambassadeurs
vlniJaens* On i*e trouye aucune trace de ces cjeux missions
dans Flassan , qui iguorait egalement la capitulation francaise
renouvelee par Selim II, et la mission de l'ambassadeur fran-
35*
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5i6 NOTES
c,ais Campagnes, que Verantius (dans Catena, XXV, p. 18),
appelle Gran Campio, et son secretaire Guillaume de Gran Rie.
IX. — Page 334-
Ali , f. 556 , X" rtcit, dit que c^tait l'incendie Ie plus £pou-
vantable qu'il eut jamais vu , ma is il com met un anachro-
nism e en faisant colncider cet 4v£nement avec le retour de Si-
nan de l'Ye^nen ; car celui-ci n'arriva a Constantinople qu'en
) 'an nee 1 5 7 1 . Ali, f. 367, donne la description de cet incen-
die dans une lettre adressee a Kinatizad£, et qui peut servir de
modele du style ottoman.
X. — Pace 335.
Selaniki , p. 100 , et Albert de Wyss : Supremus stabuh ma-
gister nations Ungarus Sultano carissimus , ita ut Mi filiam
dare et in Veziratum exaltare cogitet. D'apres Asmanzade
Efiendi, Biographies des Vizirs, il 6tait Croate ainsi que Piale.
XI. — Page 335.
Les secretaires Anselme Stceckl et George Saurer, et les in-
terprets Mathia de Faro et Theodoric de Berricb, rapportent
ce qui suit au sujet de la mort de cet ambassadenr : « Corpus
• ex Constantinopoli ad Poro tenses transtulimus in fano S. Be-
» nedicti ad Franciscanos — vir 'a Turcis turn propter vitae
» sanctimoniam , morum suavitatem et actionum probitatem
» valde a mat us, turn ob prudentiam solertiamque etiam nunc
w laudatus, cujus obitum viri bujus Porta; spectabiles, Mufti,
» Passae, Veziri condolent, imprimis Mohammetes. »» Voici
son Ipitaphe : « Hie iacet Illustrissimus Dominus Albertus
• de Wyss, Sacratissimorum Principum ac Dominorum Diui
» primum Ferdinandi Augusta* Memorise, ac defnde D. Maxi-
» miliani Secundi Romanorum Imperatorum etc. dum uiueret
» Consiliarius, et in Curia Ottomanica complures Annus Ora-
» tor, Qui obijt XXI. octobris Anno Domini M. D. LXFX. %
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ET ^CLAIRCISSEMENS. 5i 7
XII. — Pace 336.
La lettre du grand-vizir , qui contient a cGte 1 des louanges
accordles a de Wyss, l'improbation des actes d'hostilite' corn-
mis par le sandjak de Bosnie contre le banneret de Stain,
est da tec du i er nov. 1669. Cclle dans laquelle le Sultan de-
mande a l'empereur la mise en liberty de Hamzabeg est datee
de djemaxioul-akhir 977 (3o nov. 1669). Dans la reponse de
Maiimilien A cette lettre du Sultan , on remarque ce passage :
« Quantum enim nos tarn rari viri ac fidissimi ministri, qui
• nobis adeo longo tempore -in arduis maximique moment!
» rebus post positis quibuscumque difficultatibus atque peri*
» culis eximia fide integritatc et constantia praeclare admodum
• inservivit , quin et totius Christians Reipublicae insignia ac
» imprimis utilia praestitit officia , jacturam fecerimus , id sane
« nemo rectius quam nos aestimare poteriU
XIII. — Page 336.
Rapport de Rjm dans les archives Imp. Roy. Peu de temps
apres son arrivce a Constantinople y Rjm insistait dans un
rapport sur la nlcessite 1 de choisir des jeunes gens indigenes
pour les instruire et les former au service d'interpretes :
- Posthac Majestatis Vestrae turcicis negotiis tractandia maxime
>» successu temporis proderit si Ycnetorum more cum singu-
» lis novis oratoribus certo termino avocandis et aliis sub-
• stituendis duos aut tres bona indolis et ingenuosae doci-
» litatis juvenes, unum Germanum et alteram Croatam, ex
• duabus quippe nationibus 6 deli o rib us et sinecrioribus geni-
• tos, mittat, quos oratores novi in Turcarum lingua institui
• curent, ut ubi banc illi calluerint M. Va. his intcrpretibus
» Utatur, nee opus habeat, ut Principis Turcharum Vasallos
» aut alterius territorii homines huic opcri adhibeat, unde
• multa incommoda et difficultates nascuntuf , quae quaies sint
» indc colligi potest, quod nequaquam tutum sit exteriorum
• ministerio uti imprimis co rum , qui referundant hos r apud
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5i8 NOTES
» quos res gerendae sunt? tamquam inbditi, aut cogitent ali-
» quo modo gratificari illis, quorum in ditione nati sunt,
» semper homines aliorum, sui sanguinis hominum rebus a d-
*• juvandis sunt fidiores et studios! ores, et quisque erga suiiro
» Principem et nationem sincerius aflectus est et consultius ilfi
» vu!t. *
XIV, — Page 944
La campagoe de Doumetol-DJendel eut lieu en l'annee 5
de i'hegire (6$6), et le congres de Doumetol-Pjendel, en Tan-
nee 37 de l'heg, (657), r , . .
XV. — Pack 35*.
Suroomml Samssam; kj glaives Djihmniwam, p. 546* 1*
poele arabe Libid a laitfse s«r lui ce vers fenaeua : Lam* wrti
hoiytn moudrikoul-fclahi edrekovhou mouicubour-remmahi ,
c'est-a-dire « si le monde ^tait de*signe pour sejour aux hom-
ines ies plus dignes, le JQueur i\e lance j serait rest£. *
XVI, r- Page 35 7 ,
KbUtbeddrti , dans le BarhoPYlmani, ch. IV,' nomine parmi
lei sa Vans' proteges du S. Aamflr, Alhfeddin Mohammed
Wifcsehbendi, iut<5u^ <Ffch buvr&g* se? Mntferpr&atrea des
soiiges ; Fastronome Ali Kooseldji et kf schelkh Abdourrah-
man Beii Mebii, qui 6crivit I'fcistoire speciale de Sebid, dMe-
Vtd fittarikki Sebtd*
XVII, — Pagb 36o.
KoutbetWLia racante una anecdote de Mesoudi , relative*
men* a k dcistrueticm det tombeaui des Ommiades : «. A mette
oeioasMtt, Mesoudi l'historien aedom^agtta AbdoullafeB* AIL Ila
fouillerent lea taonbeaus de Hoscham et de Souleiman Abdauk
melek a Dabik et Kanesrin , celui de Welld Ben Abdoulmelek
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ET ECLAIRCISSEMENS. 5ig
ct de son p£re Yextd B. Moaitia'&Dainas, brfe&rent ieurs os et
les livrerent aux flammes. » Koutbeddin ajbute : '* Ce*t ainsi
que fat venge ie crime cotritnis pflr Hiscbam et Welid sttr le
cadavre de Vimfam Sefd* » Enfin il remarque que Scnab Ismail
s'etait rendu coupable du rapine crime en fouillant les torn-
beaux d'un grand n ombre d'bomraes savans et pieux.
XVIII. — Page 36o.
Le baron Silv. de Sacy dit, p. 44 1 d es Notices et extraits des
manuscrits de laBibliotheque duRoi f t. IV: « L'Historien entre
ici dans un grand detail sur l'origine des sectes beretiques. Ges
details concernent non seulement Th^resie des Seidiyes , mais
toutes les heresies en general. » Voyez sur les sept raisons qu'I-
blis (Lucifer) fit valoir pour determiner les an ges a desobeir a
Dieu , les extraits d'un commentaire arabe sur l'Evangile et le
Pentateuque, par le baron S. de Sacy, 1. c. Si lord Byron, qui
portait sur lui une amulette turque contre les seductions de Sa-
tan , avait connu ces sept raisons, il en aura it sans doute tire
profit dans son poeme de Cain ou dans une autre de ses produc-
tions. La description decette amulette, que possede rtairitenant
le prince -de Metternicb , se trouve dans faf Gaiette gen£rale
d'Aiigsbourg de ift»5 et dans le Bulletin universe! de Van ne'e
4827. Le Djihannuma qui parle, p. 533, de la secte se'fdiyl ,
remarque qu'tsn grand nombre de statu ts de rislatoisme avaient
&e* observes par les aneiens Arabes, et que le Propbete ft'avait
fak que ks confirmer; de ce nombre etaknt les statute sur les
ablutions, la circoneision , la lailte des ongles> la coiffure
avec le turban , etc. Le Djihannuma dofine ensuite Penutne'nr-
tion des dix idoles des anciens Arabes , et les noms des tribus
qui les vene>aient : 10 Assaf , sur le mont Safa. 20 Naile , sur le
mont Merw6 pres de la Mecque. 3° Dek6 a Doumetol-djendel,.
adore par les Beni-Koleib. 4° Siwaa, adore par les Beni-Hou-
deil. 5& Yagous, ad we par lesBetri-Modledj. 6° Nesdu, par
les Beni Elkilaa* 7 Yagouk , adore par les Beni-Hamadan.
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52o NOTES
80 Lat, adore par les Beni-Nazif. 9 Gbafri , adore par let
Beni-Kenan£. 100 Hobal, adore* par les Beni-Aoufet Gba-
fredj. Les deux ouvrages de l'imam Scberefeddin sur sa secte
portent le titre : El-bahrol zakhar fi tnezhebes-seidiyet , c'est-
a-dire la mer bouillonnante sur la secte seidiyet, et El-Ahkam
fi oussoulez-seidiyet 9 c'est-a-dire les bases fondamen tales des
dogmes des Seldis. Le Djihannuma ne fait de ces deux ouv rages
qu'un seal.
XIX. — Page 364-
Koutbeddin dit quele ducat du Sultan (du poidsd'un dirbem
et deux carats), et qui vaut, dans la Roumilie, soixante asp res,
dans l'Egypte quatre-vingts, avait dans l'Yemen une valeur de
trois cents jusqu'a deux mille aspres de mauvais alliage , et il
ajoute que ceux qui recevaient par mois un traitement de trois
millc aspres, n'avaient dans le fait qu'un ducat et demi,
somrae k peine suffisante pour acbeter leur cafe.
XX. — Page 371.
Cette lettre se trouve dans l'bistoire d'Ali ; son temoignage
est d'autant moins suspect, qu'il depose contre son ancien
maltre, Lala-Moustafa , des faits relatifs a la guerre civile
entre Bayezid et Selim , et qui demontrent clairement la faus-
sete de l'accusation de Sinan-Pascba ; AH , qui assistait a cette
fete dans le palais du sultan Gbavri , assure que cet empoi-
sonnement n'est qu'une pure invention, et que Sinan seul fei-
gnit d'y ajouter foi en cracbant le sorbet dont il avait goute.
II ajoute que Lala-Moustafa prit dc sa main la tasse que celui-
ci avait mise de cdte et qu'il la vida en sa presence.
XXI. — Page 373.
Koutbeddin , dans les Notices et extraits des manuscrits de la
Bibliotheque du Roiy t. IV, p. 4^7- L'auteur, comme pane-
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ET fiCLAIRCISSEMENS. 5a i
gyrate de Sinan , justifie la destitution d'Osman-Pascha en di-
sant que les querelles de ces deux chefs auraient pu amener
d'aussi f&cheux resultats que la mesintelligence entre Moustafa-
Pascba et Pial6 en avait amen£ au siege de Malte.
XXU — Pagr 3 7 3.
Ali, f. 35o, parle avec une egale impartiality des grands-vi-
zirs Sokolli et Sinan-Pascha. II est dit du premier : « Les infi-
dcles et les Musulmans rendaient pleine justice a la moderation
d'Osman-Pascha; tons bl£maient au contraire la haine du
stupide grand-vizir, et s'&onnaient de la negligence du Padi-
schah, dont ils eprouvaient cependant une joie malign e. •
Quant a Sinan, ils'exprime ainsi (f. 35a) : « Sinan-Pascha, un
de ces Albanais ententes, qui ne reviennent jamais de leur opi-
ni&tret£, 6tait ennemi de tous les horames eprouves dans les
affaires, des poetes et des savans, ct poussait son inimitie a
l'extreme, en se livrant contre eux a toutes sortes d'injures :
sa baine £tait clairement ecrite dans les sombres rides de son
front. »
XXIII — Page 3 7 g.
Koutbeddin, dans les Notices et extraits des manuscrits de la
Bibliotheque du Roi y t. IV, p. 4g6 ; Ali, f. 354- La Bibliothe-
que des M^dicis, a Florence , n° CXXVIII, posse de l'ouvrage
intitule : D elites saUk fi khairil-mesalik (£chelle du voyageur
sur la meilleure des routes), par Kait-El-Davidi ; l'auteur, qui
avait fait vingt-deux fois le voyage de la Mecque , donne
toutes les stations. Schemseddin-Mobammed, B. Mohammed,
B. Ahmed, auteur d'une relation ecrite en 941 (i534) sur ce
m£me sujet, se trouvait au service des gouverneurs egyptiens,
Daoud-Pascha et Souleiman, et conduisait la troupe que
Daoud envoya au-devant des pelerins ; il fit aussi a la suite de
Sinan-Pascha la campagne d'Arabie (976—1569), et cite dans
l'appendice de son ouvrage les stations suivantcs : Melkan ,
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5*2 NOTES
manque if eatr; Idara, eati tres-bonne ; Saadiyet ; Al-hadhab ;
El-leis ; Sewkan ,' manque d'eau ; Er-roubath , de l'eau a quel-
que distance de ce lieu ; Sewke , beaucoup d'eau ; Alahsa, de
nieme; Kanfada; et de la a la Mecque, ou Ton s'arr£ta pendant
onze jours du mois de ramazan ; Yeba ; Halli , beaucoup
d'eau; Schifkat, point d'eau; Elberek idem; Set ban, sources
abondantes; Hamdha, puits profond; El-maghair, beaucoup
d'eau; Gbadir-silaa , source abosdante; Esehschakik; Atoud ,
puits profond; Biscb, sans eau; Sabia, idem; camp dans une
vallee pres d'Abou-Aarisch ; Abou-Aariscb , sans eau, fete du
Bairam ; El-aaliyet, puits d'une profondeur de quatre-vingts
brasses ; El-khadhaira , puits profond de soixante-dix brasses;
Hairan, peu d'eau; Katbiet idem; Mour idem; Beitol-Fakib
(lamaison du legiste, endroit fort connu); Ed-dhaha, puits;
El-ghanemiyet, puits d'une profondeur de cinquante brasses ;
Wadii-remi; nous arrivames dans cet endroit le i5 schewal
et le 16 a Sebid; 22 Teriyetol-halifi ; Hobais ( HoubaJisch? ),
endroit fort connu j Ha'itsemar le 24 schewal ; Teriyet beni Se-
bid et Elkeden, endroits connus ; Mewzaa (Maousaa) 26 sche-
wal; Mokhale28; le 3 silkide nous arrivimes a El-Aakama.
El-Kaschibet; Reesol-hassb j Wilayedol-hadjriyet ; Hobab
pres de Schedret-Yakout ; Taaz le 8 silkide" ; de la nous par-
times le-a? pesur Kboban. % EKkaIdet le 28; Wadi^l^atnid;
^Nedjd seda, Kaaol-djjerbe ; Wadii litany Kaaol-Medjkf/sftue
dans une plainer Si Sou wad Wadi Helnera (Heltem) St hadad;
NedjdoUaizeri prer de Djebla? EV-schebeket prfcsd'Ab; ville
<PAb? Nassuret , appete antsi Souhotil y Eb-mahfid; has Nakil
Semaret, baut Nakil Seinaret; Al-hakal; Berim; SJ-djezb;
Damar; Be^az-damar; Mahdjar Da mar; Hedjfr Menkada ; Si-
ladje^Siraol-keM, fondrifcre softterraitie ; Ef^zeftet; SeVyaret;
Rtmet; Senhan; Sanaa; Yemensj Silaa; Mahkab le 7 rebfoul-
fewwel? ie ^Scbibam ; Ed-daaret, ettcre Schibam etTola,
vnont Kewkeban le aft ? <ljema*idul- ewwel; Abob Aariscb ,
puils profond deseirante brasses? Beltoi-Fakih, putts de
soixante-diz brasses; Ez'-zeidiyet, puits de soisante brasses.
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ET ECLAIRGISSEMENS. 5a3
L'ouvrage de Sebemteddin- Mohammed eat divise en quatre
chapitres; dans le premier, l'auteur decrit la route dxi Caire k
Akba ; dans le second , celle d'Akba a Islam ; dans le troi-
sieme, celle d'Islam a Yeubouou ; et dans le quatrieme, celle de
Yeubouou k Mekke. On compte, du Caire k la Mecque ? cent
quarante-un bur ids; le biirid a quatre parasanges, done cinq
cent soixante-quatre parasanges^ la parasange a trois mi lies;
le mille a mi lie toises (koladj);,la toise a trois pas; la me-
sure geomltrique de cbaque mille est calculee a quatre mille
aunes ; l'aune a 24 pouces ; le pouce a la longueur de six grains
de Me" , et chaque grain de bU repreeente la longueur de six
grains de poivre. D'apres ce calcul, le voyage a la Mecque est
de qirttVeeentcinquaiile^tFbislkue^ld r^lour, dCcln^ eent
vih^ -sept' KeuesVet le voyage entier demande sotxante-slx
journees de marche.
XXIV. — Page 3Si.
Koutbeddin , f. 20$, cite a cette occasion les vers de la
Borda. Voyez Constantinople et le Bosphore, t. I, p. 65.
LIVRE XXXVI.
I, — Page 384-
IsiariadiM. U&etta Foghetta. ddllm seusrm lepi eontea Se^im e
diahune akre imprese H suoitempii Geaova i5gS; p. 5 k Anton;
Marco Gratiani de hello Ojrpriojuxta exemplar Roma impress
sumL. L p. 2%. Historia^dellecose success* dab prineipie delta
guerra massa da Selim Ottomww ai Venetiani, da M. Gio;
Pietro Goatarini. Veneaia 1614, p. 2; Etienne Gerkch l'a!ne %
Tagebuch von B. David UngnacTs Gesandtschafi. Franc fart >
1674, S. 5<), 279, 3o3, 4^6. {Journal de Eqmbassade dx Da*
t'id Ungnad). Extrait dm Rapport de Vambassadeur venite*
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5*4 NOTES
dans les archives I. R. date des mois d'octobre , novembre ct
decembre i566.
II. — Page 385.
Piale" avait £te* destitue" de ses fonctions d'amiral , surtout
pour avoir employe a son profit le butin remporte* de Tile de
Khios. Rapport d' Albert de Wyss du mois de mai i568. Les
disc ours que Foglietta met dans la bouche du grand-vizir et
des deux vizirs Piale" et Mo us ta fa sont de pure invention.
III. — Page 3go.
Com p. sur VHistoirc de Tile de Chypre, l'excellent traite de
Meursius, la Ckronographia et breve historia universale del?
isola di Cipro du dominicain Etienne Lusignan ; Dapper, Des-
cription exacte des ties de VArchipel} Jauna , Histoire de Chy-
pre f et cellede Reinhard, publiee a Erlangen en 1766*
IV. — Page 3g6.
Le II 6 vol. du Lib. deipatti, f. 97, contient le premier acte
qui con fere aux Ve'nitiens des privileges dans Hie de Chypre; il
est date" du 3 juin 1 3o6 : Actum in insula Cypri in Cifitate Ni-
cosia: in palatio infrascripti Domini Gubernatoris, et le traite 1 si-
gne par Hugo IV le 4 scptembre 1 3ao : « Pactum inter Sercnissi-
» mum Principem Dominum Hugonem Dei Gratia Jerusalem
» et Cypri Regem illustrem et tractatores per eundem Regem
» deputatos — et Joannem Yenerio Syndieum et procoratorem
» inclyti et magnifici Domini Joannis Superantio Dacis Vene-
» tiarum, etc. » Le doge deraanda : « Petit franchisiam per
» totum regnum et insulam Gypri : nullus Venetus ullam da-
» tionem (taxe) vel tholooium dirictum (droits) padagrium
» vel commercium (peage) emendo , vendendo , ponderando ,
» mensurando sol vat aliquo modo intrando , ezeundo, mo-
» rando ; petit , quod habere debeant in Nicosia , Limesso y
h Famagosta, Bafo ecclesiam , domum pro Bailo el platcam
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ET ECLAJRCISSEMENS. 5i5
» convenientem non claasam suis ubi morari possit Bailus
» sive officiales communis Venetiarum et alii Veneti possint
u emere domos salvo quod si de dictis locis babitationum
» deberet solvi sensiva vel affictus (lojer) Regi quod prop-
» terea Bajulus et Veneti non teneantur aliquid solvere.— Item
» quod dicti Yeneti sive eorum officiales possint habere bas-
» tonem et p or tare per totum regnum et facere poni pan nam
» seu gridam (appel et convocation de l'arriere-ban) in omni-
» bus terris regni. » De son cot£, le doge s'oblige : « Dux o£-
u fert amicitiam — item quod Veneti non babeant societatera
9 contra prefatum Regem Cypri; — item quod omnes Veneti
» erunt pro defensione locorum in quibus se reperuerint —
• Rex possit extrabere de civitate Venetian equos et arma —
n Bajulus nullum affrancabit pro Veneto nisi Venetum — item
» offert Domino Regi finem remissionem et pactum de non pe-
» tendo nee ulterius inquietando de omnibus et singulis juris-
» dictionibus et possessionibus, quas Veneti et commune Ve-
• netorum solebant et ascerebant habere in insula Cvpri. » Ge
traite fut renouvcte le 16 aout i36o, entre Pierre, roi de Cby-
pre, et le doge Jean Delfin (t. Ill, Lib. deipatti) : « Confirma-
» tio pactorum inter Sere nissim urn Principem Dominum Pe-
• trum Dei gratia Jerusalem et Cypri Regem et inclytum Domi-
» num Ducem Delphyn, eadem gratia Ducem Venetiarum, etc.,
» ex tractatu egregiorum virorum Dominorum Joannis Dan-
» dulo et Pantaleonis, Barbo Ambaxatorum et Syndicorum
» dicti Domini Ducis Venetiarum. » On y trouve encore, f. 60,
sous la date du 10 aout i36o, une convention avec la France
sur l'exercice de la juridiction penale et maritime; en fin, f. 62,
la lettre de recreance pour les ambassadeurs , porteurs de ces
documens, et datee de Nikosie, 20 septembre i36o.
V. — Page 4°o.
Gratiani de bello cyprioj 1. II, p. 1 17 : « Militihus ex liber-
» tino genere ; >» ces Ubertini sont les Jrancomati de Lusignan
et de Galepio; peut-eHre aussi c'&aient des fils naturels de /«-
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5<2($ NOTES
bertins , com me lcs quatre mille bfttards nes du commerce des
soldats roroains avec des femmes espagnoles, et que lc stoat .
envoy a en colonie a Carteia {Tite-Live, XLIII, 3). A cesi*-
beriini et franeomati correspondent dans i'armee turque les
gboorrebas et les monteferrikas, comme ies cernede (les elus)
des Italiens correspondent auz janissaires* les stradiotes au* si-
pahis et les guastadori aui akindjis.
VI. — Page 4oi.
« Discordia Hector is Boleonis et Collateralis Comitis Bo-
» canii, qui n alius alteri cedere volebat, est factum, ut class!
» non occuretur, itaque copiis ad Tusla ( Larnaca ) ezpositis
» recte Nicosiam ductore Mustafapassa contendere, quo 25 Ju-
* Hi pervenere — Sum ma rerum erat apud Gomitem Jacobum
» de Tripoli praefectum tormentorum, qui viz unquam antea
» tormenta viderat; Comes Rocani Magister arabiorum rei mi-
» Htaris valde ignarus. Golonellus Boncbon Gubernatorem ci-
» vit , inter quos male conventum fuit. — i Praefecto Fa ma-
» gostse provisoris Nicosia? Danduli caput abscissum missum. »
Rapport de Rym da mois de juillet 1570.
VII — Page 402.
Foglietta, p. 81. Paruta, p. 79. Lusignan. p. 16. Les noms
de ces onzc bastions etaient : Podocataro , Costanza , Davila ,
Tripoli, Roccas , Mula , Querino , Barbaro, Loredano, Abra,
Caraffa. L'bistbrien turc Sirek (f. 1 1), au lieu de ces onze bas-
tions, en compte douze.
VIII. — Pace 4o3.
Ali, f. 359, joue ici avec les mots sebaa (sept) et sibaa (b£te,
farouche) , et compare les commandans de ces sept bastions
k des lions furieuz.
IX. — Page 4°6.
L'auteur dc cette Histoire a eu lc bonheur de retrouver 1&
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ET ECLA1RCISSEMENS. * 5*7
mines du temple de Pap ho s et d'Araatbus. Voy. Topogra-
phische Ansichten oaf einer Rtise in die Leuante, et Peirejtini
Papiri greco-egizj, p. jo.
X. — Page 4°6.
Ouram Haram Bintol-maban qui y raourut iors de Pexpe*-
ditjon 4ft Moawia en l'annee de Yh&gite ay (647). Son totnbeau
est engpre, de noa jaura un lieu de promenade bors desmurs
de Larnaia. he Maouxatoul*ebrar dit, f. 3o4* que Tile de
Chypre ayait rapport^ auz Mamloukg une sonrme annuelle de
six mille ducats* . , . .-
XL — Page 41 5.
Le dominicain Calipio, emprisonne* dans le bagne com me
espion du pape , essaya en vain de voler cette peau. Voy. Lu-
signan , f. 1 3o.
XII. — Page 416.
Histoire de la Riusie, par Cn. Levesque. Paris, 1812, t. II,
p. 89, d'apres Puffendorf. L'abbe* Mascbini , a Venise, posse de
un manuscrit latin du siege de Famagosta, par un professear
de Padoue, Antonio Riccoboni, Cicogna iscrizioni venete, fas-
cicolo HI, p. 262.
XIII. — Page 4 18.
Gonsultez encore sur la guerre de C hyp re, outre lcs ouvra-
ges dont nous avons deja fait mention : io Paruta, 20 Foglietta,
3o Gratiani, 4° Contarini , 5° Calepio , 6° Lusignan , 7 Bizari
Petri , Cyprium helium inter Fenetos et Selimum; 80 Anton ii
Guarneri de hello cyprio libri tres; 90 Cristofqro Silycatrani
vita efatti del Capitano Bagliani con la guerrq di Cipro^
Verona 1691. 10° Gas. Gianotti Parere, sopra il ristreilo
delle rivoluzioni di Cipro. Fraacof. i633. i\° Impresp di
Selim del regno d} Cipro d'incerto autore (dans Sansovino).
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5*8 * NOTES
120 Brcvis ac vere narratio belli cyprii inter Veneios et Tur-
casgestL a. \5y oet ifyi. i3° Arrighi de bello Cyprio. Pata-
vii 1764* 1 4° Cond le istorie dei suoi tempi, tradotte da
Gian Carlo Saraceni sopra Voriginale latino accresciuto
doll' autore prima della morte. Venez. i58g. 77. i5° L'as-
sedio et presa di Famagosta, dope s'intende minutissima-
mente tutte le scaramuccie et batterie, mine ed assalti dad '
ad essa fortezza et ancora i nomi dei capitani, et numero
delle genii , morte, cosi de Chrisdani, come de Turcki, et
medesimamente di quelli che sono restad pregionieru Ve~
nezia 157a. Belazione di lotto ilsuccesso di Famagosta, da
Mardnengo. Venez. 1672. und Brescia 1572. 18 Narra-
zione della guerra di Nicosia fatta nel regno di Cipro da
Turchi Vanno 1570. Bologna 1571. 190 Ilragguaglio della
perdita di Nicosia da Giovanni Sosemeno 1570. 2o # Rap-
port precit£ de Martinengo , imprim6 a Bologne , Brescia et
Venise, et traduit en allemand sous le titre : Wahrhaftige
Relation und Bericht was massen die gewaltige Stadt und
Befesdgung Famagusta in Cipro so von mcenniklich fur
ganz ungewunnlich gehalten, von den Turken im August
des 1571. Jars mil unerharten Gewalt erobert und einge-
nommen worden. Beschrieben durch den wohlgebornen Gra-
ven und Herrn Nestor Martinengo , so mil seinen unterge-
benen Knechten selbst inne der Besatzung vom Anfang
bis zum End j bey alien Dingen mil und dabejr gewesen;
maniklichen zu einer Gecvarnung durch ein gutherziger aus
welscher sprach in teutsch transferirt in guter Vollendung
in Druck geben. 24° Wahrhaftige und umstendliche Bes-
chreibung wie die Turken anfenglich das treffliche Kanig-
reich und Insel Cypern mit grosser Macht uberfallen, und
darinnen die Hauptstadt Nikosia mit Gewalt erobert, ouch
folgent solches ausser der eynigen stall und Port Fama-
gusta unter ihren Gewalt gebracht; Erstlicht beschrieben in
italienischer Sprach durch Philippum Nembre grossen Toll-
metsch in turkischer und arabischer Sprach zu Nikosia und
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ET ECLAJRCISSEMENS. Sag
jetzt in Teutsch verfertigt- sambt einer kurzen Vored und
sumarische Beschreibung der Insel Cypern sehr nutzUch zu
lesen 1571. a5° enfin Y opuscule imprint a Vienne : Newe
Zeitung, wie der Turk die Stadt Nicosiam in Cypern dieses
verlaufene iSy i Jar eingenommen , auch wie viel tausent
Christen er gefangen, etliche tausent gesebelt % was von ge-
meinem Kriegsvolk gewesen ist 9 was aber Junker und an-
sehnliche Leute waren, hat er gen Constantinopel und
Alexandria geschicht, etliche Tausent haben sich und JVeib
und Kindt , doss sie den Turken nit in die Hande kamsn
femmerlich erstochen und umbbracht 1571. 2&> Petri Conta-
rini, De bello super Fenetiis a Selimo II Turcarum Imper. il-
lata. Basileae 15^3. 27oAli.28<>Petscnewi. sgoSelaniki. 3o° Ha-
sanbegzade. 3i° Tarikhifethi Kibris (Histoire de la conqufte de
Chypre), par Sirek, mort en i$74* 3i° Un autre ouvrage sous
le meme titre, par Ahmed, mort en 1746) et 33° Hadji Khalfa,
Histoire des guerre* maritime*.
XIV. — Page 4a 1.
Paruta, f. 162. Cette alliance se trouve dans Foglictta,
f. ai5. ^
XV, — Page 4^3.
Hadji Khalfa, f. 4^, compte dix galeres de Florence, quatre
de la Calabre, douze de Sicile, quatre du Portugal; en tout,
deux cent douze navires chr&iens, tandis qu'il ne fixe qu'a
centqualre-vingts voiles les forces ottomanes. Contarini, f. 44 »
donne la liste complete des navires des deux flottes, mais il
paralt se tromper en evaluant le nombre des galeres turques
portent fanaux a quarante au lieu de vingt.
XVI. — Page 429.
Hadji Khalfa, Histoire des guerres maritime* , f. 43, donne
leurs noms; il est done facile de rectifier les erreurs de Diedo ,
t. vi. 34
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£3o NOTES
p. 27 et dc Contarihi , f. 44* 47 9 ou H ^ aut ^ re Schoulak att
lieu de Siroco; &z/i'A au lieu de Sala ; Khizr au lieu de Saider;
Scbaban au lieu de Sieban.
XVII. — Page 43i.
Sur aucuu evenement du seizieme siccle il n'existe autant
de rapports que sur la bataille de Lepanto. Consulted, outre
les sources deja citees, Paruta, Foglietta, Contarini et Gra-
tia ni : i° Commentarii delle guerre fatte coi Turchi da D. Gio-
vanni & Austria doppo che venne in Italia, scritti da Ferrante
Caraccioh Conte di Biccari. Fiorenza i58i. a© Lettera del
Clarissimo S. Girolamo Diedo nobile fenetiano all* Illmo.
Sgr. Marc. Antonio Barbaro } Venesia i588. 3° Giornata na-
vale de 9 Venetiani col Turca (dans Sansoyino). 4° Relacion
dela guerra de Cipre y successo de la batalla de Lepanto por
Fernando de Herrera^ Sevilla 1572. 5© TVahrhafuge Bes-
chreibung des glucklichem Jreidenreichen wassersigs , so die
Christ enheit erlangt hat an den tier kis che n Erbfeind 27. Oct
1 57 1 Augsbourg. 6° Zeytung und Bericht, von der ganz herr-
lichen und ser gecoaltigen Obsigung und Viktoria der ChristU-
chen wider die turkische Armade dergleichen hiervor nicmahls
vorgangen ist , Beschechen 4<> coelscher Meil oberhalb Lepanto
Sonntags den 7. Tag Oktobris dieses 1671 Jars 'ged. Augs-
burg. 7 VoUkommene wahrhafte und grundlliche Beschreibung
der christ lichen Armada aussjart erlangten herr lichen viklorie
wider den Erbfeind christ lichen Nammens alles das nceclist vers-
chinenen 7 1 Jars verlqffen . in welcher kiirzlick zu finden alle
particulariteten und mas zu vollkommener historischer wahrhaften
Beschreibung zu wissen , dergleichen hievon niemals in Drue k
ausgangen. Alles von ansehnlichen Befehlsleuten, die selbsten
mit und dabejr gewest, beschriehen und aus italienischer in
ieutsche Spracken veadollmetscht , mit R. K. M. FreyheiU DiV-
Ungen 1672. 8° Ordentliche und mehr dann hier undzuvornoch
niemals aasgegangene eigtndiehe Beschreibung s mit was (von
Gott dem Allmachugen verliehenen) grossen Sieg und wunder-
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ET ECLAIRCISSEMENS. 53 1
barUcken Gluek etliche der Ckristeinheit hohe Potentaten und
Bundesverwandte dess allgemeinen turkischen Erbfeindes gantze
Armade erohert und auff dem Mer geschlagen auch bis miffs
Haupt erlegt haben. JVie solches nit allein der fiLrnemhstcn
Haubtleut ob der chrisllichen Armade gethane schri/UUhe Urkun*
den , sondern auch etlicher nahmahfien und gen Venedig ge-
braehter gefangener Turken selbs eigene Aussag erweissen y
sambt angelienkter hernacher gejblgter Confirmation und Bested*
gung aus iialieniseher sprach in unsere hoch deutsche Gebraehi
1571.
XVIII. — Page 43 1.
A 1' Academic de* Beaux- Arts, a Venue.
XIX. — Pace 434-
L'entretien qui eat lieu one ann£e auparavant entre Barbaro
et Koubad est un digne pendant de celui que le premier eat
avec Sokolli; le rapport du bailc v£nit., dat6 du 12 novem-
bre 1670, dit : « Vcnuto ieri Cubat mi disse : ti riferisco quel
* tanto chc mi ha ordinato it Bassa che li dica e communi-
• chi : Tu dicesti giu che come pcscatori cbe siete , sapeste
» coglier il pesce nella rete; ora sua magnificenza ti addi-
» manda ci6, cbe bavcte fatto e dove e la vostra armata; il
» vostro capitano e andato in Gandia e poi si e fuggito, il Dona
b si e partito in dispiacer col vostro Generate, percbe poteste
» conoscer, che niuna amicizia e miglior di quella di questo
» Signore. » Gonsultez sur cette paiz les deux manuscrits sui-
vans : Difesa dei Signori Veneziani per V imputations datagli
ja, tempo delta guerra e pace fatta col Turco, fol. 406*467,
et Riposte alle giustificationi della Serenissima Signoria di Ve-
neziaper la pace fatta col Turco, fol. 469*492. {Manuscrit de
Rangon, no XVII, a la Biblotheque I. R.)
XX. — Page 435.
Laugier et Daru fizent la date au i5 mars; Flatsan an
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53* NOTES
j 3 avrfl; Caraccioli seul indique le 7 mars. Le rapport de
l'ambassadeur venitien du 25 mars s'exprime ainsi : « Gin il
» nome dell* Omnipotente Iddio man do la capitulazione delta
» pace , che 10 conclusi tra Lei e questo Sermo. Signor, et nel
» forma r detta capitulazione ho atteso a due cose principal i ,
» Funa che la sia formata con parole onorevoli, et l'altra ch'ella
» comprendi solamente queili capi, che mi ha commesso , fug-
» gendo di entrar in trattazione dei altri , sopra i quali po-
* teva nascer qualche difficolta, Be sono formate due con le
h medesime conditioni , Tuna nella solita forma di capitula-
» zioni altre volte fattevi, e l'altra e come scrittura fatta da
» me per la conclusione delle cose traltate tra noi con la mia
» sottoscrizione. — Ho fatto far I'interpretazion da Orembeg
» Dragomano grande , Msgr. d'Aoz mi ha detto ch'aspetta qui
» Mr. de Montagnac suo nipote. »
XXI. — Page 436.
Rapport de Barharo : « Per osservazione delle quale tutte
» cose S. M. I m peri ale ne dara suo nobil commendamento
» con il suo giuramento e promissione per la confirmazione di
» detti capitoli. » Caraccioli, III, p. io4> donne plus de de-
tails; d'apres lui, Selim conserve les villes conquises en Dal-
matie, telles que Dulcigno , Antivari et Budua ; les Vlnitiens
restituent Sopoto , Margarito et Marino > et r^parent a leurs
frais les d£gdts commis dans ce dernier port. Les Ve'nitiens
s'obligent a n'entretenir sur mer que soizante gale res. On
trouve dans les Scritlure turchesche les recus du tribut pour
Vile de Zante , des annles i49°> i5oa, 1^19, i525, i536,
i538, i54o, i542, i544> ! 547> i55o, i55a, i555, i557,~
i559, i56a» i566, 1667, i5?3 9 l $71i ^79 et i583.
XXI bis. — Page 446.
II arriva le i5 septembre, car Barbaro rapporte sous la date
du 18 : « Gionse il terzo giorno un ambassador moscovita.
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ET ECLAIRCISSEMENS. 533
m L'ambassador moscovita non aveva portato altro chc querele
>» contro i Tartafi. » Rapport de l'ambassadeur venit., du 9 oc-
tobre 157 1. L'envoy6 russe, portenr d'une Jettre de son sou-
verain, qui &ait arrive* a Constantinople le 12 mai 1570, eut
son audience le 16, trois jours avant celle de l'ambassadeur po-
lonais. Rapport de Rym.
XXII. — Page ifii.
C'est le meme Mohammed qui avant la guerre avait £t£ eu-
voye a Venise, et qui pendant tpute sa durle avait tok retenu a
Ve>one.
XXIII. — Page 455.
Ali se trompe en fixant sa mort au lundi 18 schftban , au
lieu du 27, dans la nuit du dimanche au lundi.
XXIV. — Page 455.
Les rapports des ambassadeurs tlmoignent de l'ivrognerie
habituelle de S^lim. Nous ne citerons qu'un seul passage :
« Quod tertius indigne ferens, cum Cicada?, nobilis istius Py-
» rata Siculi hie in carcere mortui , filio , summa apud Sell-
» mum in gratia constitute), altercari et sibi praetendere coepit;
» altercans irato ictu ilium pugione petit in praesentia duorum
» Eunuchorum (le khaznedar et le khassodabaschi) Selimus illi
» femur sagitta trajecit, dein foras elato cervicem per carnifi-
» cem praecidi jussit; dein poenitentia motus exstincto juveni
» magnificum monumentum erigi jussit. Selimum vino aes-
» tuasse, juvenem concubitui ultimas noctis fretum contra
» suam preerogativam sesc opposuisse. » Rapport de Stoeckel
de Fannie 1570 : « Selimus bellua vitiis monstruosa, gulae,
» crapulae, venerique (proh scelus I) masculae indulget. Ibid. »
FIN DES MOTES DU TOME SIXIEME.
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ERRATA
DU TOME SIXI&ME.
Page 67, ligne 11, lisez le fermanfinissait par eet mou : salut et protection
k ceiui qui suit la parole, an lieu de Uur salut elait a cc prix.
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TABLE DES MATURES
GOJTMUTOES
DANS LE TOME SIXlfeME.
UVRE XXXI.
Le grand-vizir Mohammed Sokolli , le moufti Ebousououd et le
moufti Elkass-Mirza. — Mort du grand-vizir Souleiman-Pascha
et de Khosrew-Pascha. — Campagne de Perse. — ' Prise de
Becse, Becskerek, Csanad, Illadia et Lippa. — Siege de Te-
meswar. — Assassinat de Martinuzzi. — Attaque de Szegedm
par les Hoagrois et de Wessprim par les Turcs. — Chute de
Temeswar et d'autres chateaux hougrois. — Prise de Solnok
et siege d'Erlau. — Execution du prince Moustafa. — Fin de
la guerre de Perse. — Negotiations de Ferdinand conduites
par Teran tius, Zay et Busbek. — Changement des princes de
la Moldavie et de la Crimee. — Revolte du faux Moustafa. i-83
LIVRE XXXII.
Mort du grand-vizir Ahmed-Pascba, et reintegration de Roustem.
— Achevement de la mosquee Soule'imaniye* — Mort de
Roxelane. — Relations amicales entre les Ouzbegs et les Otto*
mans. — Guerre de Hongrie. — Siege de Szigeib. — Des-
truction de Babocsa. — Prise de Tata. — - Envoyes de Fer*
dinand et d'lsabelle. — Arrivee des agens du roi d'Espagne et
du due de Ferrare a Constantinople. — Causes de la guerre
civile. — DcTaite de Bayezid, sa fuite en Perse; negotiations
a ce sujet, suivies de son execution et de celle de ses fils. 84-142
LIVRE XXXIII.
Mort du grand-vizir Roustem. — Son successeur Ali conclut la
paix avec l'ambassadeur autrichien Busbek. — L'aventurier
Basiltcus, prince de Moldavie. — Ambassade de Ferdinand. —
Negotiations avec le roi d'Espagne et la republique de Genes.
— Traite de commerce avec Florence. — Manage des Giles de
Selim. — Iuondations, aqueducs, construction de plusieurs
ponts. — Faits d'armes des marins ottomans Torgboud et Piale,
Piri-Rets et Sidi-Ali, dans la M&literranee et dans la mer de
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556 TABLE DES MATIERES.
Page*.
llnde. — Siege de Mehdiye par les EspagnoLs. — Conqu6te
de Boudja, Oran, Benezert et devastation de Mayorque. —
La place de Djerbe conquise par les Espaguols et reprise par
Torghoud. — Entree triomphale de Torghoud a Constanti-
nople. — Prise de Pinon de Yelez par les Espagnols. — Siege
de Malte. — Negociations avec l'Empereur pour la ratification
de la pais* — Campagne de Szigeth. — Execution d'Arslan-
Pascha. — Mort de Zriny et de Souleiman. i£3-a37
LIVRE XXXIV.
M onumens et hommes distingue* du regne de Souleiman I. —
Secretaires d'£tat, poetes, jurisconsultes. — Reorganisation du
corps des oulemas et de Farmee. — Systeme feoda), impots,
lob penales et reglemens de police. — Causes de la decadence
de l'empire ottoman , a dater de la mort de Souleiman. 238-289
LIVRE XXXV.
Arrivee de Seiim a Constantinople et a Belgrade. — Revoke des
janissaires apres l'annonce officielle de la mort de Souleiman.
— Expedition de Piaie dans Tile de Khios. — Chute de Ba-
bocsa et d'Yenoe. — Incursion dans la Carniole. — Negocia-
tions et traite definitif avec l'empereur Maximilien. — Am-
bassade persane. — £v6nemens a Andrinople, a Bassra, dans
l'Arabie et la Moldavie. — Renouvellement de la paix avec la
Pologne. — Depart d'un ambassadeur ottoman pour la France.
— Construction de la mosquee Selimiye a Andrinople. —
Essai d'une jonction du Don et du Volga. — Position topo-
grapbique de l'Arabie , sa nature physique et ses dernieres
destinees. — Conquete de V Yemen. 290-382
LIVRE XXXVI.
Rupture de la paix avec Venise. — Guerre de Cbypre. — Siege
et conqu£te de Famagosta. — Bragadino est ecorche vif. —
ftrenemens militaires en Dalmatic — Bataille de Lepanto. —
Conclusion de la paix avec Venise. — Conquete de Tunis.
— Expedition centre Iwaii de Moldavie. — Renouvellement
de la paix avec l'Autriche. — Renegats. — Mort de Seiim.
— Monumens et caractere de son regne. 383-457
FIN Dl LA TABLE DU SIXIBME VOLUME.
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r; ^y'r?.^j*T-rm . ' '" ' nm !W***mmmmmiii
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